1 1933, Le Semeur, articles (1933–1949). Humanisme et christianisme (mars 1933)
1 et bien de savoir quel sens l’homme veut donner à sa vie, comment il doit vivre pour mieux vivre. Mais alors, en quoi les
2 nt l’homme s’aimerait-il lui-même mieux que Dieu, son créateur, ne l’aime ? Car Dieu seul connaît l’homme dans son origine
3 r, ne l’aime ? Car Dieu seul connaît l’homme dans son origine et dans sa fin. L’homme étant « séparé » de Dieu sa source, —
4 ieu seul connaît l’homme dans son origine et dans sa fin. L’homme étant « séparé » de Dieu sa source, — et c’est en quoi c
5 et dans sa fin. L’homme étant « séparé » de Dieu sa source, — et c’est en quoi consiste le péché « originel » — il en rés
6 e entièrement lui-même. Il ne peut plus connaître son bien. Il pose les questions les plus absurdes et les plus insolubles,
7 ’avoir perdu la clef de ce qui lui apparaît, dans ses heures de lucidité, comme une effroyable tragi-comédie. Au fond, ce q
8 lus importantes du monde : l’origine et la fin de son existence terrestre. Dès lors, ceux qui croient détenir le pouvoir de
9 comme un homme qui refuse d’accepter, dans toute sa violence, la question que lui pose sans cesse la crise perpétuelle du
10 qui lui permettra d’assurer ce bien absolu qu’est sa vie. Le chrétien va chercher à obéir aux ordres de sa foi, fût-ce mêm
11 ie. Le chrétien va chercher à obéir aux ordres de sa foi, fût-ce même au mépris de sa vie : tel est le fondement de l’atti
12 ir aux ordres de sa foi, fût-ce même au mépris de sa vie : tel est le fondement de l’attitude de service et de sacrifice q
13 d’assurance-vie. L’humaniste pourra répondre qu’à ses yeux, le christianisme n’est qu’une assurance-paradis. Mais le reproc
14 s cet acte ; il agit en humaniste. Il témoigne de sa défiance à l’endroit de la Providence. Ce mot peut nous fournir un au
15 s. Ce n’est pas à dire que l’humanisme n’ait pas ses doctrines, et même une expression politique cohérente. On a cité dans
16 essants et précis que soit l’un dans le détail de sa dialectique critique, et si généreux que se veuille le second dans se
17 que, et si généreux que se veuille le second dans ses attaques contre un christianisme confondu d’ailleurs avec une certain
18 nt consciente et avouée pour soustraire l’homme à son créateur, pour rebâtir un monde à la mesure de l’homme considéré comm
19 sera-t-il encore humain ? Que fera-t-il, une fois son triomphe assuré par sa victoire sur les difficultés naturelles, sur c
20 ? Que fera-t-il, une fois son triomphe assuré par sa victoire sur les difficultés naturelles, sur ce conflit qui constitue
21 nge et bête. Dans ce conflit perpétuel, il trouve sa joie et sa souffrance — peu importe le nom qu’il leur donne ; — il y
22 . Dans ce conflit perpétuel, il trouve sa joie et sa souffrance — peu importe le nom qu’il leur donne ; — il y trouve sa r
23 u importe le nom qu’il leur donne ; — il y trouve sa raison de vivre, c’est-à-dire de lutter pour devenir une personne dev
24 nelle de vivre ? Le succès de l’homme abandonné à ses calculs serait-il, en définitive, un suicide supérieurement organisé,
2 1934, Le Semeur, articles (1933–1949). Sur la méthode de M. Goguel (novembre 1934)
25 autes études, est déjà fort importante et fait de son auteur le maître incontesté de nos critiques du Nouveau Testament. C’
26 us ? C’est ainsi que M. Goguel définit l’objet de sa recherche, en insistant sur le fait que la description qu’il va donne
27 ? M. Goguel incline vers l’effet. Suivons-le dans sa déduction. Dans une première partie qui décrit d’une façon remarquabl
28 re une évolution constante dans le sens prévu par son hypothèse, une concrétisation toujours plus rigoureuse du fait de la
29 Jésus est vivant au ciel, et la preuve, c’est que sa tombe s’est trouvée vide ». Et l’on a spontanément imaginé les condit
30 s qu’il soit nécessaire ou légitime de supposer à son origine une fraude qui, pour être pieuse, n’en serait pas moins une f
31 paraît pas s’être beaucoup préoccupé de justifier sa méthode. Il n’est pas trop aisé de la définir. Elle recourt avant tou
32 la valeur sont très variables. Il semble qu’un de ses principes soit l’élimination de tout ce qui, dans le texte biblique,
33 e des Actes. La méfiance règne en permanence dans son esprit : mais c’est une attitude « scientifique » nullement sceptique
34 olorer. Et l’on se demande ce qui subsisterait de ses conclusions si on leur appliquait les critères dont il use envers l’É
35 ble d’avance l’avoir minimisé, en réduisant toute son œuvre aux proportions d’une génétique descriptive, et en se bornant à
36 bénéfice du vrai. Mais il faudrait alors déclarer ses critères. La vérité psychologique, telle que la conçoivent les histor
37 e sent parfois gêné par l’anachronisme évident de ses jugements psychologiques. Il y a là un procédé tout inconscient mais
38 foi véritable est celle qui croit sans avoir vu. Sa position nous paraît sur ce point tout à fait orthodoxe et courageuse
3 1935, Le Semeur, articles (1933–1949). La cité (avril-mai 1935)
39 s’ordonnent à l’homme, et que l’homme s’ordonne à son Dieu. Tel était donc mon rêve, mon imagination de l’homme chrétien da
40 tolère en souriant. On ira même jusqu’à respecter ses vertus, à condition toutefois qu’elles se confondent avec celles de l
41 nne ne l’écoute plus, qu’on le laisse parler dans ses temples justement parce qu’on ne le craint plus ? Et dès lors, à quoi
42 as le cas, ne ferait-il pas mieux de se limiter à son domaine, d’ailleurs de plus en plus restreint ? À la question de sa v
43 eurs de plus en plus restreint ? À la question de sa vocation dans la cité, ne devra-t-on pas opposer une question préalab
44 servation objective du monde ramène le clerc dans sa chambrette, et le chrétien dans sa paroisse. Elle conclut au sceptici
45 le clerc dans sa chambrette, et le chrétien dans sa paroisse. Elle conclut au scepticisme, et au pessimisme intégral. — «
46 n’appartenons pas à la forme du monde mais bien à sa transformation. Forme et transformation, ce sont là les deux termes q
47 Il est vivant ! Par lui, la forme de ce monde, et sa puissance dernière, la mort, sont absolument dominées. C’en est fait 
48 vons autrement que d’espérer de toutes nos forces son retour ! Nous protestons contre ce monde au nom d’une justice triomph
49 ue le peintre Gauguin avait choisie pour titre de son fameux triptyque : D’où venons-nous ? Où en sommes-nous ? Où allons-n
50 igneur vient ! — et nous allons à la rencontre de son règne, vers la transformation radicale de toutes choses. Et je vous d
51 s alors, justement, qu’il s’évade ? Qu’il sort de sa réalité ? Qu’il doute de la justice de Dieu ? Et qu’il trahit sa voca
52 ’il doute de la justice de Dieu ? Et qu’il trahit sa vocation première ? Je pense que beaucoup d’entre vous ont, dès longt
53 n contre la forme de ce siècle, annonce active de sa transformation. Ici se posent deux grands problèmes pratiques : est-i
54 Si nous considérons l’histoire, si nous écoutons ses leçons, il me paraît qu’aucun doute n’est permis. De Constantin, prem
55 sant les Saxons pour leur prouver la puissance de son glaive, et tout accessoirement celle de l’Esprit ; des chevaliers par
56 Soleil, prince très chrétien, à Guillaume II et à son Gott mit uns ! ; des Espagnols massacrant les Incas au nom d’un autre
57 enaçantes ! Voici l’Église liée bon gré mal gré à son succès ; voici l’Église puissante et séduisant par sa puissance ; voi
58 uccès ; voici l’Église puissante et séduisant par sa puissance ; voici le message de la transformation qui se change en me
59 la forme actuelle du monde, prédication active de sa transformation, — si telle est bien la vocation civique du chrétien,
60 ain. Le grand danger du socialisme n’est pas dans son matérialisme, mais dans sa fausse spiritualité ; dans ce qu’il a de m
61 alisme n’est pas dans son matérialisme, mais dans sa fausse spiritualité ; dans ce qu’il a de meilleur, non dans ce qu’il
62 asses, le partisan, c’est l’homme qui fuit devant sa vocation. C’est l’homme qui accepte un mensonge parce que les intérêt
63 est l’homme qui délègue à la majorité le souci de ses décisions. Et dans ce sens précis, il faut bien dire que les partis s
64 ien tant qu’il n’aura pas fait tout ce qui est en son pouvoir pour réduire le scandale social. Aucun parti n’existe encore
65 scandale social. Aucun parti n’existe encore dans son pays, qui se consacre à la défense des intérêts de la classe opprimée
66 de la classe opprimée. Que faire, sinon payer de sa personne ? Kagawa n’hésite pas. Il va vivre dans les bas-fonds. Avec
67 lle de Kobé, et se met à prêcher l’Évangile. Mais son activité ne se borne pas là : prêcher, certes, c’est son premier devo
68 ivité ne se borne pas là : prêcher, certes, c’est son premier devoir, mais ce devoir en appelle d’autres. Kagawa recueille
69 devoir en appelle d’autres. Kagawa recueille dans sa case, des malades, des chômeurs, des vieillards, des enfants abandonn
70 ue faire. Il faut lire l’effarante description de sa vie telle qu’il l’a racontée dans une espèce d’autobiographie romancé
71 qu’il a choisis pour voisins, pour prochains ! Et son action apparemment désespérée s’étend mystérieusement sur ces quartie
72 nom d’un parti que Jérémie accusait publiquement son roi et l’obligeait à réparer ses crimes ; ce n’est pas au nom d’un pa
73 ait publiquement son roi et l’obligeait à réparer ses crimes ; ce n’est pas au nom d’un parti que Paul ébranle l’Empire rom
74 lus large du terme. Les buts de l’intellectuel et son langage ne sont plus ceux de l’ouvrier ni du petit-bourgeois provinci
75 mme qui a reçu une vocation et qui lui obéit dans ses actes. Voici ce que disent les personnalistes : l’État et les institu
76 assurer à chacun le libre et le plein exercice de sa vocation personnelle. Et c’est dans cet esprit qu’il s’agit de rebâti
77 aration des devoirs de l’homme envers lui-même et son prochain. Mais d’abord il s’agit, pour les groupes personnalistes, de
78 tions dans la cité : dénoncer le capitalisme avec son principe immoral de la spéculation et du commerce de l’argent ; comba
79 t ; combattre la misère, car un homme qui n’a pas son pain ne peut pas être une personne ni exercer sa vocation ; combattre
80 son pain ne peut pas être une personne ni exercer sa vocation ; combattre aussi l’État totalitaire, qui opprime toute voca
81 itaire, qui opprime toute vocation non conforme à ses cadres simplistes ; — dénoncer la mystique des partis, cette tyrannie
82 ou cyniques. Et le triomphe d’une telle morale, à son tour, ne sera possible, que si l’on peut déduire de cette morale un s
83 cité. Or, c’est à bâtir ce système, à développer ses conséquences sociales, à imposer enfin à ses adeptes un style de vie
84 pper ses conséquences sociales, à imposer enfin à ses adeptes un style de vie communautaire, que travaillent depuis trois a
85 en fait, c’est le seul mouvement qui réponde, dès son principe, aux exigences de notre vocation. Ce n’est pas une politique
86 ne, voilà le mot d’ordre du personnalisme ; voilà son but, à la fois politique, économique et culturel. Ici, la vérité est
87 et bien faire, ce que l’homme fait mal. Telle est sa liberté dans l’action, dans l’échec, dans l’espérance et la protestat
88 n connais pas d’autres pour mon compte. Discerner sa vocation, ce n’est pas toujours entendre une voix intérieure. Il y a
89 u siècle, de protester contre elle, et d’annoncer sa foi dans la transformation promise de toutes choses. « Ne vous confor
4 1936, Le Semeur, articles (1933–1949). Notre foi, par Emil Brunner (janvier 1936)
90 u, et nous ne pouvons rien savoir de Dieu que par Sa révélation dans cette Parole. Le Saint-Esprit ouvre nos cœurs à cette
5 1945, Le Semeur, articles (1933–1949). La responsabilité culturelle de l’Église (mars 1945)
91 la culture de la génération précédente, celle de ses parents d’avoir amené la catastrophe. Beaucoup des chefs, même de la
92 peut adopter des idéologies créées par d’autres. Sa parole n’aura de poids que si elle parle au nom de sa propre théologi
93 arole n’aura de poids que si elle parle au nom de sa propre théologie, et en rattachant ce qu’elle dit de la façon la plus
94 mple, pouvait croire aux doctrines officielles de sa confession et en même temps admirer Wagner, Whitman, ou Renoir, sans
95 ulement se demander si cela était compatible avec sa foi. Car en fait la théologie avait cessé d’être vivante, précise et
96 era appauvrie et désorientée. Elle sera coupée de ses racines. Car toute la culture occidentale est née de la théologie et
97 ées d’une controverse manifestement théologique à ses origines.) Et, en second, lieu, si la culture perd contact avec l’Égl
98 u, si la culture perd contact avec l’Église, avec sa doctrine et son culte, l’Église perd ses moyens les plus efficaces d’
99 e perd contact avec l’Église, avec sa doctrine et son culte, l’Église perd ses moyens les plus efficaces d’agir sur le sièc
100 ise, avec sa doctrine et son culte, l’Église perd ses moyens les plus efficaces d’agir sur le siècle, de transformer ses cr
101 us efficaces d’agir sur le siècle, de transformer ses croyances en action créatrice. Les forces de création lui échappent.
102 ne vocation, un appel spécial qui le distingue de son genre et qui lui confère une dignité inaliénable dans la mesure où il
103 ation morbide du sens de la vocation car elle nie ses conséquences sociales et communautaires. La principale critique que l
104 ial qui dépouille l’homme de la liberté d’obéir à sa vocation sont incompatibles avec le christianisme. Par exemple, toute
105 xent pas les droits d’un capitaine mais seulement ses devoirs et ses fonctions. Il va sans dire que l’organisation de l’arm
106 oits d’un capitaine mais seulement ses devoirs et ses fonctions. Il va sans dire que l’organisation de l’armée est telle qu
107 un capitaine aura toujours les moyens d’accomplir son devoir : c’est là sa liberté, il n’en a pas d’autres. Or l’Ecclesia m
108 ours les moyens d’accomplir son devoir : c’est là sa liberté, il n’en a pas d’autres. Or l’Ecclesia militans ressemble à u
109 roits de l’individu indépendamment des devoirs de sa charge. 2) Une doctrine chrétienne qui prend au sérieux le fait de la
110 iberté légale et les moyens matériels d’accomplir sa vocation. Elles le feront au nom de leur doctrine, et avec une grande
111 la possibilité matérielle pour chacun de réaliser sa vocation, etc.) Alors, et alors seulement, les Églises retrouveront u
112 ans un ensemble beaucoup plus large — le corps et ses membres ; ne jamais chercher l’union en neutralisant les différences
6 1946, Le Semeur, articles (1933–1949). Chances d’action du christianisme (juin-juillet 1946)
113 cette période qu’à la question : « Si le sel perd sa saveur, avec quoi la lui rendra-t-on ? », les catholiques modernes ré
114 oir tolérer ; qu’il a été abattu finalement, dans ses formes déclarées et spectaculaires tout au moins ; et que son élévati
115 éclarées et spectaculaires tout au moins ; et que son élévation brutale puis sa chute ont été pour toutes les Églises une é
116 tout au moins ; et que son élévation brutale puis sa chute ont été pour toutes les Églises une épreuve de forces, un défi,
117 nde moderne vers un paradis sans Dieu, a démontré son impuissance réelle devant l’assaut de dictatures barbares : elle s’es
118 contre la Genèse, la Création du monde par Dieu, sa Fin, l’existence de l’esprit, etc., paraît bien close, et pour longte
119 e et de la morale, l’État se voit forcé d’étendre ses pouvoirs, à coups de décrets si généraux que chaque vocation personne
120 ïque se tenant dans l’Église, et voyant au-dehors ses chances d’action, et la misère du temps qui appelle, j’attends ceci :
121 sombres, avant la floraison du Moyen âge, qui fut son œuvre. Il s’agit de restaurer le sens de la communauté vivante, que l
122 resque tué, laissant le champ libre à l’État et à ses réglementations, souvent utiles, mais qui ne sont jamais règles de vi
123 une avant-garde intellectuelle, au lieu de garder sa position méfiante et arriérée — académique — dans les arts sacrés com
124 st bien sortie ! Il est temps que nous sortions à sa recherche, pour la ramener ! 3. Que l’Église cesse de défendre la tri
125 e, dans le domaine politique, la Transcendance de son chef, contre tous les absolutismes nationaux, étatiques, partisans. S
7 1949, Le Semeur, articles (1933–1949). « Les protestants et l’esthétisme » (février-mars 1949)
126 qu’un artiste attend (souvent inconsciemment) de son Église : les repères, les obstacles, les interdictions, les certitude
127 tout ce système de gênes où l’élan créateur prend son appui. Voilà sans doute pourquoi les premières générations du xxe si
128 aard, qui représente l’extrémisme protestant dans sa pureté, dépasse notoirement l’antinomie du moralisme et de l’esthétiq
129 ique : ce dépassement constitue même l’essence de son œuvre. N’est-ce point de cet exemple pur qu’il conviendrait de partir
130 artir pour poser le problème qui vous occupe dans ses termes les plus actuels ? k. Rougemont Denis de, « [Réponse à une
131 s l’esthétique peut-elle et doit-elle amener dans sa vie ? Vous voyez notre thème central, assez précis, et notre but : co