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us avertissent aujourd’hui du caractère religieux
de
notre Histoire. Le fascisme est une religion, le communisme une antir
2
munisme une antireligion. Croix gammée, faisceaux
de
licteur, faucille et marteau : trois-cents-millions de nos contempora
3
cteur, faucille et marteau : trois-cents-millions
de
nos contemporains, s’ils ne portent pas sur eux cette Marque, se voie
4
rtent pas sur eux cette Marque, se voient rejetés
de
la cité. Alors les amateurs de clés de l’Apocalypse disent aux chréti
5
se voient rejetés de la cité. Alors les amateurs
de
clés de l’Apocalypse disent aux chrétiens : Voici la Bête ! Et la gue
6
nt rejetés de la cité. Alors les amateurs de clés
de
l’Apocalypse disent aux chrétiens : Voici la Bête ! Et la guerre que
7
ois fois déjà, depuis vingt ans, on nous a sommés
de
choisir entre le Mal et le Bien incarnés. « Au nom du Christ ; nous d
8
en avant contre les Soviets ! Haro sur les rouges
d’
Espagne ! Déclarez la guerre à Hitler ! Ils persécutent les Églises ch
9
simple, ni si tranché, se voit aussitôt suspecté
de
connivence avec les « méchants ». Il fait leur jeu, dit-on, même s’il
10
om du Christ, mon seul salut, j’ai même le devoir
d’
y regarder à deux fois avant de donner mon adhésion. Que voulez-vous,
11
t sur l’Évangile ? Quand on me dit que les rouges
d’
Espagne brûlent les églises, je ne dis pas non : ils s’en vantent eux-
12
ent eux-mêmes. Mais je me demande si les soutiens
de
M. Franco, qui sont le Duce et le Führer, ne le soutiennent vraiment
13
hristianisme ! — je ne dis pas non, je les ai vus
de
près. Mais je me demande si le maintien de l’empire anglais et de l’h
14
ai vus de près. Mais je me demande si le maintien
de
l’empire anglais et de l’hégémonie française est une part indiscutabl
15
me demande si le maintien de l’empire anglais et
de
l’hégémonie française est une part indiscutable et révélée du plan de
16
aise est une part indiscutable et révélée du plan
de
Dieu pour notre époque ? Je me demande si la campagne en faveur du «
17
eur du « réarmement » résulte vraiment et d’abord
d’
un sursaut de la conscience chrétienne ? Où peut aller cette « croisad
18
mement » résulte vraiment et d’abord d’un sursaut
de
la conscience chrétienne ? Où peut aller cette « croisade » qui réjou
19
n me dit : Vous parlez politique, quand il s’agit
de
sauver l’Église. À quoi je réponds : Croyez-vous, chers amis, que vou
20
simplisme, voilà ce que le diable juge assez bon,
de
nos jours, pour attraper les enfants de la Lumière ! J’aimerais beauc
21
ssez bon, de nos jours, pour attraper les enfants
de
la Lumière ! J’aimerais beaucoup qu’on ne déduise pas de ces propos q
22
umière ! J’aimerais beaucoup qu’on ne déduise pas
de
ces propos qu’à mon avis les chrétiens doivent se taire, se retirer d
23
nergiquement parti après une enquête loyale. Mais
de
grâce, qu’on ne mêle pas tout sous prétexte de christianisme ! Qu’on
24
rre sainte » des entreprises qui, du point de vue
de
l’Évangile, resteront toujours profondément impures. Surtout, que l’o
25
chrétiens, le privilège de plus en plus dangereux
de
reconnaître les péchés du parti que nous adoptons. Car je vois que to
26
ue tous les partis sont, dans le fait, au service
de
grandes religions adversaires de la foi chrétienne : Prolétariat, Emp
27
fait, au service de grandes religions adversaires
de
la foi chrétienne : Prolétariat, Empire, Race, Droits de l’homme, Arg
28
ace, Droits de l’homme, Argent. Donc il n’y a pas
de
causes justes, même s’il y en a de moins injustes, relativement. Donc
29
c il n’y a pas de causes justes, même s’il y en a
de
moins injustes, relativement. Donc il ne peut y avoir de guerres sain
30
s injustes, relativement. Donc il ne peut y avoir
de
guerres saintes. Et notre dernier mot, comme chrétiens, ne peut pas ê
31
gilance. Dans cette nuit universelle où la Colère
de
Dieu sévit par les mains de quelques tyrans, on demande au chrétien c
32
verselle où la Colère de Dieu sévit par les mains
de
quelques tyrans, on demande au chrétien comme jadis au Prophète : « S
33
omme jadis au Prophète : « Sentinelle, que dis-tu
de
la nuit ? — La sentinelle a répondu : le matin vient et la nuit aussi
34
incre une religion païenne. a. Rougemont Denis
de
, « Le temps des fanatiques », La Vie protestante, Genève, 25 novembre
35
25 novembre 1938, p. 1. b. Le texte est précédé
de
la note suivante de la rédaction : « Nous sommes heureux de compter,
36
. 1. b. Le texte est précédé de la note suivante
de
la rédaction : « Nous sommes heureux de compter, parmi les amis et co
37
suivante de la rédaction : « Nous sommes heureux
de
compter, parmi les amis et collaborateurs de la Vie protestante, M. D
38
reux de compter, parmi les amis et collaborateurs
de
la Vie protestante, M. Denis de Rougemont, le jeune auteur romand don
39
vaincus que nos lecteurs, même s’ils sont étonnés
de
certaines de ses expressions, sauront comprendre le point de vue chré
40
os lecteurs, même s’ils sont étonnés de certaines
de
ses expressions, sauront comprendre le point de vue chrétien auquel i
41
9)c Tout ce que le Suisse romand moyen connaît
de
Nicolas de Flue, c’est que ce pieux ermite vint à la Diète de Stans p
42
e Flue, c’est que ce pieux ermite vint à la Diète
de
Stans pour apaiser les deux partis confédérés, à la veille d’une guer
43
r apaiser les deux partis confédérés, à la veille
d’
une guerre civile. Quant au reste de la vie de Nicolas, on l’ignore tr
44
, à la veille d’une guerre civile. Quant au reste
de
la vie de Nicolas, on l’ignore très généralement. Il n’en va pas de m
45
lle d’une guerre civile. Quant au reste de la vie
de
Nicolas, on l’ignore très généralement. Il n’en va pas de même chez n
46
s. Et c’est pourquoi les catholiques n’ont pas eu
de
peine à s’annexer le « frère Claus », cependant que les protestants l
47
cle, Nicolas fut revendiqué par tous les réformés
de
Suisse comme l’un de leurs plus grands précurseurs. Il m’a paru que l
48
ndiqué par tous les réformés de Suisse comme l’un
de
leurs plus grands précurseurs. Il m’a paru que la question méritait b
49
rseurs. Il m’a paru que la question méritait bien
d’
être reprise, du point de vue d’un réformé du xxe siècle. D’où la pre
50
ion méritait bien d’être reprise, du point de vue
d’
un réformé du xxe siècle. D’où la première étude d’ensemble que vienn
51
ise, du point de vue d’un réformé du xxe siècle.
D’
où la première étude d’ensemble que viennent de publier Les Cahiers pr
52
un réformé du xxe siècle. D’où la première étude
d’
ensemble que viennent de publier Les Cahiers protestants . Je suis heu
53
publier Les Cahiers protestants . Je suis heureux
de
l’occasion qui m’est offerte de préciser ici les résultats de mon enq
54
. Je suis heureux de l’occasion qui m’est offerte
de
préciser ici les résultats de mon enquête. Une solitude active R
55
n qui m’est offerte de préciser ici les résultats
de
mon enquête. Une solitude active Rappelons d’abord quelques fait
56
sa cinquantième année. Né au début du xve siècle
d’
une famille paysanne de l’Obwald, il avait été capitaine, puis juge de
57
Né au début du xve siècle d’une famille paysanne
de
l’Obwald, il avait été capitaine, puis juge de paix, puis simple agri
58
e de paix, puis simple agriculteur, marié et père
de
dix enfants, lorsqu’il crut devoir obéir à l’appel de la solitude. C’
59
ix enfants, lorsqu’il crut devoir obéir à l’appel
de
la solitude. C’est donc au terme d’une féconde carrière qu’il parvint
60
éir à l’appel de la solitude. C’est donc au terme
d’
une féconde carrière qu’il parvint à cette décision, non sans avoir mû
61
sommes pas en présence d’un pauvre illuminé, mais
d’
un solide confédéré qui a fait ses preuves dans la vie quotidienne. No
62
rme, au Ranft. Il y mènera jusqu’à sa mort la vie
d’
un pieux laïque et non d’un moine, parfois même suspecté par l’Église
63
a jusqu’à sa mort la vie d’un pieux laïque et non
d’
un moine, parfois même suspecté par l’Église qui se méfie de cet « irr
64
, parfois même suspecté par l’Église qui se méfie
de
cet « irrégulier ». Ne dit-on pas que, durant les vingt ans de sa ret
65
gulier ». Ne dit-on pas que, durant les vingt ans
de
sa retraite, il n’a pris d’autre nourriture que l’hostie, une fois pa
66
durant les vingt ans de sa retraite, il n’a pris
d’
autre nourriture que l’hostie, une fois par semaine ? L’évêque et les
67
emaine ? L’évêque et les autorités ont bien tenté
de
l’espionner : jamais on ne l’a trouvé en faute. Entouré du respect de
68
ais on ne l’a trouvé en faute. Entouré du respect
de
ses concitoyens, il reçoit chaque jour des visites, donne des conseil
69
eçoit chaque jour des visites, donne des conseils
d’
une grande sagesse pratique et participe si bien à la vie de son peupl
70
de sagesse pratique et participe si bien à la vie
de
son peuple que le simple message qu’il transmettra aux députés, lors
71
transmettra aux députés, lors de la fameuse Diète
de
Stans, sauvera la situation in extremis. Il n’aura pas besoin de para
72
ra la situation in extremis. Il n’aura pas besoin
de
paraître en personne ; son conseil suffira, et son autorité, pour cal
73
nc devenu la principale force morale et politique
de
toute la Confédération. Deux faits surtout méritent de nous retenir,
74
ute la Confédération. Deux faits surtout méritent
de
nous retenir, dans ce bref memento biographique. 1° Malgré l’extrême
75
memento biographique. 1° Malgré l’extrême rigueur
de
ses « pratiques », Nicolas n’a pas pu trouver la paix de son âme dans
76
« pratiques », Nicolas n’a pas pu trouver la paix
de
son âme dans le monde. Il a dû se retirer et vivre en marge des condi
77
retirer et vivre en marge des conditions normales
de
l’existence. Signe du désarroi intime où la piété de l’Église non réf
78
l’existence. Signe du désarroi intime où la piété
de
l’Église non réformée laissait les âmes, les plus exigeantes, privées
79
e laissait les âmes, les plus exigeantes, privées
de
tout contact direct avec la Bible. 2° Dans son ermitage du Ranft, Nic
80
as ne s’est pas abandonné aux « saintes délices »
de
la contemplation. Il ne s’est libéré de certaines servitudes que pour
81
délices » de la contemplation. Il ne s’est libéré
de
certaines servitudes que pour mieux servir le Seigneur dans la person
82
ue pour mieux servir le Seigneur dans la personne
de
son prochain. Il n’a renoncé à ses travaux de paysan que pour mieux t
83
nne de son prochain. Il n’a renoncé à ses travaux
de
paysan que pour mieux travailler au bien de tous. En fin de compte, s
84
avaux de paysan que pour mieux travailler au bien
de
tous. En fin de compte, sa retraite hors du monde n’a pas anéanti, ma
85
l. Car, après tout, si Nicolas est l’un des Pères
de
notre Confédération, c’est à son action qu’il le doit. S’il n’avait é
86
vait été qu’un ascète, nous ne saurions plus rien
de
lui. C’est pourquoi les réformateurs insistèrent à bon droit sur son
87
les catholiques préféraient s’en tenir à l’éloge
de
son jeûne et de ses visions. Nicolas et les réformés Mort en 14
88
préféraient s’en tenir à l’éloge de son jeûne et
de
ses visions. Nicolas et les réformés Mort en 1487, c’est-à-dire
89
protestants suisses. Mais dès les premiers jours
de
la Réforme, la question se posa de savoir auquel des deux camps en pr
90
premiers jours de la Réforme, la question se posa
de
savoir auquel des deux camps en présence son souvenir servirait de pa
91
des deux camps en présence son souvenir servirait
de
patronage. Si nous lisons les recueils de sources sur Bruder Klaus pu
92
rvirait de patronage. Si nous lisons les recueils
de
sources sur Bruder Klaus publiés par Dürrer en 1921, nous constatons
93
éformés gardaient avec reconnaissance le souvenir
de
l’action politique de Nicolas, Pacificateur des cantons et adversaire
94
reconnaissance le souvenir de l’action politique
de
Nicolas, Pacificateur des cantons et adversaire du régime des pension
95
religieux du frère Claus, considéré comme témoin
de
l’ancienne foi, héraut de l’Eucharistie et prophète des malheurs dus
96
considéré comme témoin de l’ancienne foi, héraut
de
l’Eucharistie et prophète des malheurs dus à la Réforme. Pour des fin
97
stes jésuites, pour la plupart étrangers, tentent
d’
éluder l’action politique du frère Claus. Ils ne signalent pas l’événe
98
du frère Claus. Ils ne signalent pas l’événement
de
la Diète de Stans, ni le patriotisme confédéral de Nicolas, qui incom
99
aus. Ils ne signalent pas l’événement de la Diète
de
Stans, ni le patriotisme confédéral de Nicolas, qui incommodaient au
100
e la Diète de Stans, ni le patriotisme confédéral
de
Nicolas, qui incommodaient au suprême degré ces hommes d’État enrichi
101
. (R. Dürrer : Bruder Klaus, t. II, p. 851.) Rien
d’
étonnant, dès lors, si les premières biographies sérieuses de Nicolas
102
dès lors, si les premières biographies sérieuses
de
Nicolas sont dues à la plume de disciples ou d’amis des réformateurs
103
raphies sérieuses de Nicolas sont dues à la plume
de
disciples ou d’amis des réformateurs : Myconius, de Zurich ; Ritter,
104
s de Nicolas sont dues à la plume de disciples ou
d’
amis des réformateurs : Myconius, de Zurich ; Ritter, de Saint-Gall ;
105
disciples ou d’amis des réformateurs : Myconius,
de
Zurich ; Ritter, de Saint-Gall ; Valerius Anshelm, de Berne (dès 1529
106
des réformateurs : Myconius, de Zurich ; Ritter,
de
Saint-Gall ; Valerius Anshelm, de Berne (dès 1529) ; Stumpf, pasteur
107
urich ; Ritter, de Saint-Gall ; Valerius Anshelm,
de
Berne (dès 1529) ; Stumpf, pasteur à Stein, et, finalement, Bullinger
108
lement, Bullinger lui-même, le célèbre successeur
de
Zwingli. Tous ces auteurs admettent et louent le miracle du jeûne pro
109
admettent et louent le miracle du jeûne prolongé
de
Nicolas. Seul le mystique luthérien Sébastien Franck dit à la fin de
110
mystique luthérien Sébastien Franck dit à la fin
de
sa chronique : « Qu’il n’ait rien mangé, je ne puis le croire : les S
111
», il se bornait à dire : « Dieu le sait… » Rien
d’
étonnant non plus si, en 1522, un pamphlet catholique anonyme se plain
112
en 1522, un pamphlet catholique anonyme se plaint
de
ce que les réformés invoquent sans cesse les conseils de l’ermite dès
113
ue les réformés invoquent sans cesse les conseils
de
l’ermite dès qu’il s’agit des affaires publiques. Après tout, dit l’a
114
e en 1526 : Pieux confédérés, Faber adjure Zurich
de
conserver l’ancienne foi des cantons : mais vous savez très bien que
115
s savez très bien que Zurich seule garde le souci
de
la vieille foi, celle des saints apôtres et de nos ancêtres ! Car c’e
116
ci de la vieille foi, celle des saints apôtres et
de
nos ancêtres ! Car c’est par la seule force de Dieu que nos ancêtres
117
et de nos ancêtres ! Car c’est par la seule force
de
Dieu que nos ancêtres se sont libérés des maîtres que Faber sert aujo
118
es conseils du frère Claus, nous serions délivrés
de
ces valets qui, sous prétexte de foi, trafiquent et jettent la discor
119
Claus von Unterwalden ». Les autres réformateurs
de
la Suisse allemande en font autant. Joachim von Watt, ou Vadian, le s
120
on Watt, ou Vadian, le savant humaniste fondateur
de
l’Église de Saint-Gall, décrit la vie de Nicolas dans un ouvrage sur
121
Vadian, le savant humaniste fondateur de l’Église
de
Saint-Gall, décrit la vie de Nicolas dans un ouvrage sur la Vie monac
122
ondateur de l’Église de Saint-Gall, décrit la vie
de
Nicolas dans un ouvrage sur la Vie monacale. Il insiste sur le fait q
123
s avec sa paroisse, mais, au contraire, n’a cessé
de
visiter les malades et de venir en aide aux affligés ; « de plus, ajo
124
au contraire, n’a cessé de visiter les malades et
de
venir en aide aux affligés ; « de plus, ajoute-t-il, il n’a pas établ
125
du monde, mais au contraire près des habitations
de
sa famille et de sa parenté. » En 1556, Matthias Flacius l’Illyrique,
126
u contraire près des habitations de sa famille et
de
sa parenté. » En 1556, Matthias Flacius l’Illyrique, le père de l’his
127
» En 1556, Matthias Flacius l’Illyrique, le père
de
l’histoire de l’Église chez les protestants, fait l’éloge de Nicolas
128
tthias Flacius l’Illyrique, le père de l’histoire
de
l’Église chez les protestants, fait l’éloge de Nicolas dans un ouvrag
129
re de l’Église chez les protestants, fait l’éloge
de
Nicolas dans un ouvrage au titre significatif : « Catalogue des témoi
130
e au titre significatif : « Catalogue des témoins
de
la foi qui se sont dressés, avant Martin Luther, contre le pape et se
131
e pape et ses erreurs ». Enfin, s’il était besoin
d’
une attestation plus décisive encore, voici celle de Luther en personn
132
une attestation plus décisive encore, voici celle
de
Luther en personne. Il écrit dans une lettre à Speratus : « Joignez l
133
héâtre protestant L’une des meilleures preuves
de
l’adoption spontanée de Nicolas non seulement par les docteurs réform
134
ne des meilleures preuves de l’adoption spontanée
de
Nicolas non seulement par les docteurs réformés, mais par les populat
135
ations protestantes, je la trouve dans le théâtre
de
l’époque. Voici tout d’abord deux satires dialoguées, datées de 1526
136
oici tout d’abord deux satires dialoguées, datées
de
1526 et de 1538 ; elles font intervenir l’ermite du côté des réformés
137
’abord deux satires dialoguées, datées de 1526 et
de
1538 ; elles font intervenir l’ermite du côté des réformés, ennemis d
138
més, ennemis du régime des pensions. Il s’agit là
de
pièces d’actualité, d’intentions nettement polémiques. Beaucoup plus
139
is du régime des pensions. Il s’agit là de pièces
d’
actualité, d’intentions nettement polémiques. Beaucoup plus vaste est
140
des pensions. Il s’agit là de pièces d’actualité,
d’
intentions nettement polémiques. Beaucoup plus vaste est la portée d’u
141
ent polémiques. Beaucoup plus vaste est la portée
d’
un mystère intitulé Le Miroir du Monde, qui fut joué à Bâle en 1550. C
142
Ce premier drame sur Nicolas de Flue est l’œuvre
d’
un protestant, l’Alsacien Valentin Boltz. Il ne comptait pas moins de
143
Alsacien Valentin Boltz. Il ne comptait pas moins
de
149 rôles parlés, et sa représentation demanda deux jours pleins, nou
144
colas y personnifie l’idée confédérale, créatrice
de
la Suisse. Autour de lui, gravitent des figures symboliques ou histor
145
, des apôtres, des prophètes et des représentants
de
la hiérarchie catholique. Au premier acte, on voit les évêques et les
146
r acte, on voit les évêques et les moines chassés
de
la scène à coups de fouet par le prophète Elie. Puis les cantons pers
147
évêques et les moines chassés de la scène à coups
de
fouet par le prophète Elie. Puis les cantons personnifiés viennent di
148
personnifiés viennent discuter le renouvellement
de
l’ancienne alliance confédérale. Nicolas invoque Moïse, qui lui répon
149
lui répond longuement en décrivant la corruption
d’
Israël et la nécessité d’une piété purifiée et « sérieuse ». Au dernie
150
décrivant la corruption d’Israël et la nécessité
d’
une piété purifiée et « sérieuse ». Au dernier acte, après que la Mort
151
s catholiques reconnaissent qu’il avait eu raison
de
les mettre en garde contre les vaines richesses, les prières des lèvr
152
cantons protestants, pour leur part, se repentent
de
leur orgueil. Et Nicolas, une dernière fois, les adjure de garder le
153
rgueil. Et Nicolas, une dernière fois, les adjure
de
garder le Pacte dans l’amour fraternel et la vigilance. Puis il salue
154
r fraternel et la vigilance. Puis il salue l’ange
de
Dieu qu’il voit venir à sa rencontre. Les satires zwingliennes et le
155
rencontre. Les satires zwingliennes et le mystère
de
Valentin Boltz devaient être à l’origine d’une riche tradition dramat
156
stère de Valentin Boltz devaient être à l’origine
d’
une riche tradition dramatique. Mais à partir de la fin du xvie siècl
157
is à partir de la fin du xvie siècle, les pièces
d’
inspiration catholique deviendront de beaucoup les plus nombreuses. (L
158
, les pièces d’inspiration catholique deviendront
de
beaucoup les plus nombreuses. (La première en date, celle du jésuite
159
r, fut jouée à Lucerne en 1586. Le rôle politique
de
Nicolas n’y est même pas mentionné !) N’y a-t-il pas là une grande an
160
lie ? Car, enfin, l’élément le plus spectaculaire
de
la vie de Nicolas réside dans son intervention politique. Or c’est pr
161
enfin, l’élément le plus spectaculaire de la vie
de
Nicolas réside dans son intervention politique. Or c’est précisément
162
igné. Ne conviendrait-il pas que les protestants,
de
nos jours, s’avisent de renouer leur tradition de Nicolas, et précisé
163
pas que les protestants, de nos jours, s’avisent
de
renouer leur tradition de Nicolas, et précisément au théâtre ? C’est
164
de nos jours, s’avisent de renouer leur tradition
de
Nicolas, et précisément au théâtre ? C’est dans cette idée que j’ai c
165
e qui sera joué — Dieu voulant ! — à l’Exposition
de
Zurich. J’ai tenté de réintégrer Nicolas dans l’actualité la plus brû
166
voulant ! — à l’Exposition de Zurich. J’ai tenté
de
réintégrer Nicolas dans l’actualité la plus brûlante de notre siècle
167
ntégrer Nicolas dans l’actualité la plus brûlante
de
notre siècle : il n’était que de mettre en relief les traits de cette
168
la plus brûlante de notre siècle : il n’était que
de
mettre en relief les traits de cette figure qui frappèrent particuliè
169
e : il n’était que de mettre en relief les traits
de
cette figure qui frappèrent particulièrement nos ancêtres réformés. T
170
e est donc centrée sur la vocation exceptionnelle
de
l’ermite, c’est-à-dire sur le rôle civique que sa retraite lui permit
171
re sur le rôle civique que sa retraite lui permit
de
jouer. Nicolas ne pouvait pas lire la Bible, mais il aimait à en cite
172
ler le plus possible en style biblique, conscient
de
me ranger ainsi dans la vraie tradition du théâtre protestant, telle
173
que l’illustre, par exemple, l’Abraham sacrifiant
de
Théodore de Bèze. Nicolas de Flue, me dira-t-on, n’est pas un « sujet
174
pides, je le sens. Je les termine dans l’angoisse
d’
une crise qui recrée, à l’échelle mondiale, le drame de la Diète de St
175
crise qui recrée, à l’échelle mondiale, le drame
de
la Diète de Stans. Notre Europe trouvera-t-elle son pacificateur ? Le
176
ecrée, à l’échelle mondiale, le drame de la Diète
de
Stans. Notre Europe trouvera-t-elle son pacificateur ? Le mérite-t-el
177
ra-t-elle l’écouter ? Puisse du moins le souvenir
de
Nicolas de Flue nous faire comprendre que le paix n’est jamais le rés
178
e comprendre que le paix n’est jamais le résultat
de
nos calculs, mais le miracle de Dieu seul, et la victoire de Sa misér
179
amais le résultat de nos calculs, mais le miracle
de
Dieu seul, et la victoire de Sa miséricorde. c. Rougemont Denis d
180
uls, mais le miracle de Dieu seul, et la victoire
de
Sa miséricorde. c. Rougemont Denis de, « Nicolas de Flue et la tr
181
ictoire de Sa miséricorde. c. Rougemont Denis
de
, « Nicolas de Flue et la tradition réformée », La Vie protestante, Ge
182
De
Luther à Hitler (15 mars 1940)d Nous n’avons plus le droit de nous
183
ler (15 mars 1940)d Nous n’avons plus le droit
de
nous tromper dans nos jugements sur les choses allemandes. Toute erre
184
te appréciation erronée des origines, des fins et
de
la pratique hitlériennes, non seulement affaiblissent la résistance a
185
ines totalitaires, mais compromettent les chances
d’
une solution prochaine, équitable pour tous, et englobant les pays ger
186
Or l’erreur qui consiste à placer Luther au début
d’
une évolution dont Hitler serait le terme, ce n’est pas une erreur min
187
n’est pas une erreur minime. Elle résulte tantôt
d’
une mauvaise foi consciente, et qui se voudrait « machiavélique », tan
188
nte, et qui se voudrait « machiavélique », tantôt
d’
une ignorance inqualifiable des faits les plus notoires et les plus im
189
es faits les plus notoires et les plus importants
de
notre histoire occidentale. J’estime qu’elle a suffisamment duré. Je
190
bord contre la Réforme : l’assimilation grossière
de
Luther à Hitler n’est évidemment pas destinée à diminuer le prestige
191
ommun » contre la religion totalitaire ? L’auteur
d’
un livre récent sur l’Allemagne écrit que la nation éduquée par Luther
192
’Allemagne moderne ? Comment sa doctrine centrale
de
la justification par la foi pourrait-elle avoir engendré la doctrine
193
e avoir engendré la doctrine hitlérienne centrale
de
l’action pure, du mouvement pur, privé de toutes fins transcendantes,
194
entrale de l’action pure, du mouvement pur, privé
de
toutes fins transcendantes, telle que j’ai pu la voir à l’œuvre et te
195
ir à l’œuvre et telle que je l’ai décrite en plus
d’
un livre ? Certes, on pourra toujours faire jouer la balançoire dialec
196
lanc conduit au noir, le bien au mal, la foi pure
de
Luther à l’action pure d’Hitler. Mais c’est une douteuse méthode entr
197
ien au mal, la foi pure de Luther à l’action pure
d’
Hitler. Mais c’est une douteuse méthode entre les mains des défenseurs
198
e douteuse méthode entre les mains des défenseurs
de
la « Raison » et de la « claire latinité » que veulent être M. de Rey
199
ntre les mains des défenseurs de la « Raison » et
de
la « claire latinité » que veulent être M. de Reynold, M. Massis, M.
200
assis, M. Maurras. J’y vois tout au plus un moyen
d’
esquiver des questions plus directes. Ces questions, je les repose ici
201
questions, je les repose ici. On pourra différer
d’
avis sur les conséquences des réponses. Mais il faut répondre d’abord.
202
u centre catholique ? Oui ou non, l’intronisation
d’
Hitler est-elle le fait de von Papen, catholique ? Oui ou non, l’Allem
203
ou non, l’intronisation d’Hitler est-elle le fait
de
von Papen, catholique ? Oui ou non, l’Allemagne comptait-elle, depuis
204
Allemagne comptait-elle, depuis des siècles, 38 %
de
catholiques (aujourd’hui, 50 %) ? Oui ou non, le « germanisme éternel
205
héranisme porte en soi les germes indestructibles
de
la tyrannie politique (malgré la « résistance » qu’auraient représent
206
qu’en Allemagne, soient aujourd’hui les parangons
de
la liberté démocratique ? Je veux parler des États scandinaves, et du
207
entre eux, la Finlande. Si l’on me fait l’honneur
de
répondre franchement, je m’engage à reconnaître que Luther est coupab
208
je m’engage à reconnaître que Luther est coupable
de
n’avoir pas su, dans l’espace d’une vingtaine d’années, dominer les f
209
her est coupable de n’avoir pas su, dans l’espace
d’
une vingtaine d’années, dominer les fatalités germaniques que six sièc
210
de n’avoir pas su, dans l’espace d’une vingtaine
d’
années, dominer les fatalités germaniques que six siècles de catholici
211
dominer les fatalités germaniques que six siècles
de
catholicisme lui léguaient parfaitement intactes. d. Rougemont Den
212
ient parfaitement intactes. d. Rougemont Denis
de
, « De Luther à Hitler », La Vie protestante, Genève, 15 mars 1940, p.
213
arfaitement intactes. d. Rougemont Denis de, «
De
Luther à Hitler », La Vie protestante, Genève, 15 mars 1940, p. 1.
214
6 avril 1940)e On a beaucoup dit que le secret
de
la résistance finlandaise était la foi profonde de ce peuple. En défe
215
e la résistance finlandaise était la foi profonde
de
ce peuple. En défendant leur terre, les soldats finnois avaient consc
216
eur terre, les soldats finnois avaient conscience
de
défendre aussi leur Église. Mais il existe d’autres pays où la foi d’
217
ur Église. Mais il existe d’autres pays où la foi
d’
un soldat chrétien pourrait avoir des effets exactement contraires. El
218
traires. Elle pourrait amener ce soldat à refuser
de
défendre l’État qui persécute son Église. Dis-moi pour qui tu accepte
219
ersécute son Église. Dis-moi pour qui tu acceptes
de
mourir, je te dirai en qui tu crois vraiment… Ces deux exemples contr
220
ntradictoires posent la question la plus brûlante
de
l’époque : celle de l’attitude du chrétien en face de ses devoirs civ
221
la question la plus brûlante de l’époque : celle
de
l’attitude du chrétien en face de ses devoirs civiques et militaires.
222
quelques remarques à propos de la Suisse. Je suis
de
ceux qui pensent que la foi n’est pas « une affaire privée », ainsi q
223
i que le prétendait Marx. Le chrétien a le devoir
d’
agir au nom de sa foi, d’agir dans le monde et pour le monde, dans la
224
Le chrétien a le devoir d’agir au nom de sa foi,
d’
agir dans le monde et pour le monde, dans la cité où il est né et pour
225
ù il est né et pour son bien. Il n’a pas le droit
de
s’en désintéresser et de laisser les autres s’égarer, quitte à les dé
226
ien. Il n’a pas le droit de s’en désintéresser et
de
laisser les autres s’égarer, quitte à les dénoncer ensuite pathétique
227
tte à les dénoncer ensuite pathétiquement du haut
de
la chaire ! Or l’action d’un chrétien placé par sa naissance dans la
228
pathétiquement du haut de la chaire ! Or l’action
d’
un chrétien placé par sa naissance dans la communauté des Suisses doit
229
ses doit naturellement s’insérer dans les données
de
fait qui sont celles du pays, et qui se trouvent être communes à tous
230
La mission spéciale du citoyen chrétien, ce sera
de
dégager de ces données communes un sens spirituel, une vocation posit
231
spéciale du citoyen chrétien, ce sera de dégager
de
ces données communes un sens spirituel, une vocation positive. Car le
232
ar le chrétien est, si j’ose dire, un spécialiste
de
la vocation. Cette action particulière du citoyen chrétien sera dans
233
ticulière du citoyen chrétien sera dans l’intérêt
de
la Suisse, certes. Mais elle sera d’abord obéissance à la foi. J’insi
234
iellement un pays chrétien. Mais nous devons être
de
bons Suisses parce que nous sommes chrétiens d’abord. Or, je constate
235
abord. Or, je constate qu’on entretient chez nous
d’
assez graves équivoques sur ce point. Il ne manque pas de gens pour di
236
graves équivoques sur ce point. Il ne manque pas
de
gens pour dire, écrire, ou simplement laisser entendre, qu’un bon cit
237
er entendre, qu’un bon citoyen suisse a le devoir
d’
être chrétien, comme si ce devoir était la conséquence obligatoire d’u
238
mme si ce devoir était la conséquence obligatoire
d’
un très ardent patriotisme. Si certains n’hésitent pas, dans leurs dis
239
nt pas, dans leurs discours, à invoquer « le Dieu
de
nos pères », il semble parfois que ce soit moins parce qu’ils croient
240
i, que parce qu’ils le croient utile au bon moral
de
la nation, voire à la discipline des troupes. Ces personnes-là, vous
241
à ces quelques traits : elles ont une conception
de
la « religion » plutôt déiste qu’évangélique ; elles prônent un moral
242
ôt bourgeois que charitable ; elles ont une façon
d’
exalter la croix blanche de notre drapeau qui rappelle davantage le Go
243
; elles ont une façon d’exalter la croix blanche
de
notre drapeau qui rappelle davantage le Gott mit uns de Guillaume II
244
re drapeau qui rappelle davantage le Gott mit uns
de
Guillaume II que le Dieu premier servi de Jeanne d’Arc. Bref, l’intér
245
mit uns de Guillaume II que le Dieu premier servi
de
Jeanne d’Arc. Bref, l’intérêt qu’elles portent à la religion paraît s
246
rdonné à celui qu’elles portent à la conservation
de
notre État. Or nous devons croire exactement le contraire, je le répè
247
ent le contraire, je le répète : nous devons être
de
bons Suisses parce que nous sommes chrétiens d’abord. Gardons-nous du
248
parler, j’opposerai cette déclaration prophétique
d’
un homme dont la pensée me paraît plus actuelle que jamais, Alexandre
249
eulement pour tout le monde, faites-nous la grâce
de
n’en point vouloir », car « la société qui veut m’ôter ma religion m’
250
résisté, qu’ils résistent. e. Rougemont Denis
de
, « “Dieu premier servi” », La Vie protestante, Genève, 26 avril 1940,
251
)f M. Denis de Rougemont a eu l’aimable pensée
de
nous communiquer le « billet » ci-dessous qui paraîtra prochainement
252
t dans un volume intitulé : Mission ou démission
de
la Suisse . Pendant tout l’hiver, nous avons pu lire dans les journau
253
érature maximum : 18° ». Il s’agissait sans doute
d’
inciter le public à des économies de charbon. On nous recommandait la
254
it sans doute d’inciter le public à des économies
de
charbon. On nous recommandait la tiédeur… Mais voici nos voisins bell
255
voir ce qui vaut le mieux. Il ne faut pas parler
de
neutralité en général, dans l’absolu et dans l’abstrait. Car tout dép
256
dans l’absolu et dans l’abstrait. Car tout dépend
de
ceci : vis-à-vis de quoi, ou de Qui, est-on tiède, est-on neutre ? Si
257
. Car tout dépend de ceci : vis-à-vis de quoi, ou
de
Qui, est-on tiède, est-on neutre ? Si c’est vis-à-vis du Christ, la p
258
entraîne notre expulsion violente hors du Royaume
de
Dieu. « Je vous vomirai », dit le Christ. Si c’est vis-à-vis de la gu
259
dans la mesure où elle nous exclut, précisément,
d’
un conflit que nous jugeons mauvais. Reste à savoir si le conflit actu
260
uis, si notre tiédeur suffira pour que le monstre
de
la guerre nous vomisse… Mais ceci est une autre histoire que je n’ai
261
us avons d’ailleurs, à mon avis, d’autres raisons
de
rester neutres que celles qu’on peut tirer de considérations opportun
262
ons de rester neutres que celles qu’on peut tirer
de
considérations opportunistes. Je voulais simplement rappeler ceci : c
263
implement rappeler ceci : c’est qu’on ferait bien
de
ne pas utiliser comme des proverbes généraux certaines paroles du Chr
264
es généraux certaines paroles du Christ qui n’ont
de
sens que par rapport à sa Personne, à son Royaume, à son Éternité. Ré
265
les tièdes seront vomis, en détournant ce verset
de
son sens spirituel, c’est toujours un blasphème, et c’est souvent une
266
souvent une grosse sottise. f. Rougemont Denis
de
, « Neutralité », La Vie protestante, Genève, 3 mai 1940, p. 1.
267
Perspectives
d’
avenir du protestantisme (2 janvier 1942)g Le texte que nous publio
268
g Le texte que nous publions est la conclusion
d’
une conférence que M. Denis de Rougemont a donnée en septembre à Rio d
269
en septembre à Rio de la Plata, sous les auspices
de
l’Église évangélique de langue française. Je vois de grandes perspect
270
Plata, sous les auspices de l’Église évangélique
de
langue française. Je vois de grandes perspectives d’avenir devant le
271
l’Église évangélique de langue française. Je vois
de
grandes perspectives d’avenir devant le protestantisme. J’en désigner
272
langue française. Je vois de grandes perspectives
d’
avenir devant le protestantisme. J’en désignerai trois en guise de con
273
appelée à figurer dans notre siècle le type même
de
la sûre doctrine de résistance au paganisme totalitaire. La foi de la
274
ans notre siècle le type même de la sûre doctrine
de
résistance au paganisme totalitaire. La foi de la Réforme, telle que
275
ne de résistance au paganisme totalitaire. La foi
de
la Réforme, telle que j’ai tenté de la situer dans l’évolution de l’E
276
taire. La foi de la Réforme, telle que j’ai tenté
de
la situer dans l’évolution de l’Europe, représente en effet le centre
277
elle que j’ai tenté de la situer dans l’évolution
de
l’Europe, représente en effet le centre et l’axe même de la notion ch
278
rope, représente en effet le centre et l’axe même
de
la notion chrétienne de personne, à la fois libre et engagée. Par l’o
279
t le centre et l’axe même de la notion chrétienne
de
personne, à la fois libre et engagée. Par l’organisation même de ses
280
la fois libre et engagée. Par l’organisation même
de
ses Églises et de ses paroisses, elle offre le type d’une communauté
281
ngagée. Par l’organisation même de ses Églises et
de
ses paroisses, elle offre le type d’une communauté libre et pourtant
282
s Églises et de ses paroisses, elle offre le type
d’
une communauté libre et pourtant bien liée, fondée sur l’espérance de
283
bre et pourtant bien liée, fondée sur l’espérance
de
l’Esprit et non pas sur les fatalités du passé, ouverte à la volonté
284
sur les fatalités du passé, ouverte à la volonté
d’
un Dieu transcendant et non pas fermée sur les intérêts d’un groupe. P
285
u transcendant et non pas fermée sur les intérêts
d’
un groupe. Par là, elle s’oppose radicalement à toute religion totalit
286
s choses vieilles sont passées », selon la parole
de
l’apôtre. Elle n’admet pas la conversion et le pardon, à partir desqu
287
nde « Quels sont tes morts ? ». Religion du sang,
de
la terre et des morts, religion sanglante et mortelle, religion des c
288
e voit qu’une telle religion hait mortellement et
de
toute sa nature la foi chrétienne, tournée vers le pardon, le futur é
289
s le pardon, le futur éternel, le rachat du péché
d’
origine ?… Mais résister ne suffit pas, on ne se défend bien qu’en att
290
ctive qui s’offre aux Églises protestantes, c’est
de
préparer le terrain pour la reconstruction fédéraliste du monde de de
291
rrain pour la reconstruction fédéraliste du monde
de
demain. Si les totalitaires sont vaincus, ce seront les nations prote
292
e seront les nations protestantes et fédéralistes
d’
esprit qui auront obtenu la victoire. Elles ne sauront la rendre fécon
293
force : la tradition personnaliste et fédéraliste
de
la Réforme. Enfin, la troisième perspective qui s’ouvre au protestant
294
mouvement œcuménique. Vous savez que l’initiateur
de
ce vaste effort, qui tend à réunir toutes les Églises chrétiennes, fu
295
-à-dire toutes les Églises chrétiennes sauf celle
de
Rome qui se tient, par malheur, à l’écart. Or, dans cette œuvre à laq
296
tiens du monde entier, nous voyons la réalisation
d’
un des grands idéaux calvinistes : la fédération organique des Églises
297
n spirituelle dans la diversité admise des formes
de
culte et d’organisation. Ce n’est point par hasard que les calviniste
298
e dans la diversité admise des formes de culte et
d’
organisation. Ce n’est point par hasard que les calvinistes, bien qu’i
299
, bien qu’ils soient une minorité, jouent un rôle
de
premier plan dans les travaux du Conseil œcuménique. Toute leur tradi
300
nique. Toute leur tradition les prépare à ce rôle
de
fédérateurs religieux, comme elle les prépare au rôle de fédérateurs
301
rateurs religieux, comme elle les prépare au rôle
de
fédérateurs politiques. J’aime évoquer, en terminant, cette espérance
302
es. J’aime évoquer, en terminant, cette espérance
d’
une réunion de toutes les confessions chrétiennes. Car en nous faisant
303
quer, en terminant, cette espérance d’une réunion
de
toutes les confessions chrétiennes. Car en nous faisant entrevoir la
304
nes. Car en nous faisant entrevoir la possibilité
d’
une catholicité nouvelle, elle nous délivre de l’espèce d’étroitesse,
305
ité d’une catholicité nouvelle, elle nous délivre
de
l’espèce d’étroitesse, de « nationalisme protestant », auquel nous so
306
tholicité nouvelle, elle nous délivre de l’espèce
d’
étroitesse, de « nationalisme protestant », auquel nous sommes tentés
307
elle, elle nous délivre de l’espèce d’étroitesse,
de
« nationalisme protestant », auquel nous sommes tentés de céder parfo
308
ionalisme protestant », auquel nous sommes tentés
de
céder parfois, sous l’effet de la polémique ou par un attachement exc
309
nous sommes tentés de céder parfois, sous l’effet
de
la polémique ou par un attachement excessif à certaines de nos tradit
310
émique ou par un attachement excessif à certaines
de
nos traditions secondaires. Le but de nos Églises n’est pas d’imposer
311
à certaines de nos traditions secondaires. Le but
de
nos Églises n’est pas d’imposer le protestantisme au monde, mais d’an
312
ions secondaires. Le but de nos Églises n’est pas
d’
imposer le protestantisme au monde, mais d’annoncer l’Évangile, la bon
313
st pas d’imposer le protestantisme au monde, mais
d’
annoncer l’Évangile, la bonne nouvelle du « salut de grâce et bonté pu
314
annoncer l’Évangile, la bonne nouvelle du « salut
de
grâce et bonté pure » comme on disait au xvie siècle. Et c’est notre
315
lité même à la Réforme qui nous fait nous réjouir
d’
une perspective où nos « ismes » disparaîtraient pour se fondre dans u
316
ent celle qui ne se donne pas pour la seule forme
d’
Église possible ; elle est l’Église qui accepte d’être constamment réf
317
d’Église possible ; elle est l’Église qui accepte
d’
être constamment réformée et jugée par la Vérité même qu’elle annonce
318
t elle doit se sentir responsable devant le monde
d’
aujourd’hui et pour demain. g. Rougemont Denis de, « Perspectives d
319
aujourd’hui et pour demain. g. Rougemont Denis
de
, « Perspectives d’avenir du protestantisme », La Vie protestante, Gen
320
demain. g. Rougemont Denis de, « Perspectives
d’
avenir du protestantisme », La Vie protestante, Genève, 2 janvier 1942
321
1943)h i C’est dans les Petits poèmes en prose
de
Baudelaire que l’on peut lire la phrase la plus profonde écrite par u
322
ne sur Satan : « La plus belle ruse du diable est
de
nous persuader qu’il n’existe pas. » Reconnaissons que ce tour n’a ja
323
si peu au diable que l’on m’accusera certainement
d’
obscurantisme, ou simplement de manque de sérieux, si je persiste en m
324
usera certainement d’obscurantisme, ou simplement
de
manque de sérieux, si je persiste en mon projet de lui consacrer de n
325
ainement d’obscurantisme, ou simplement de manque
de
sérieux, si je persiste en mon projet de lui consacrer de nombreuses
326
e manque de sérieux, si je persiste en mon projet
de
lui consacrer de nombreuses pages. Le premier tour du diable est son
327
ux, si je persiste en mon projet de lui consacrer
de
nombreuses pages. Le premier tour du diable est son incognito. Dieu d
328
is celui qui suis. Mais le diable, qui a la manie
de
vouloir imiter la vérité en la retournant, le diable nous dit comme U
329
it comme Ulysse au Cyclope : Je ne suis personne.
De
quoi aurais-tu peur ? Vas-tu trembler devant l’inexistant ? Une remar
330
arque en passant, mais nécessaire. C’est au sujet
d’
un camouflage très élémentaire, mais fort bien adapté à la myopie spir
331
depuis deux ou trois siècles, il a plu au diable
de
revêtir une apparence moyenâgeuse qui le rend inoffensif aux yeux de
332
nu des mystères médiévaux, ou le faune à barbiche
de
chèvre et à longue queue des légendes populaires, il est vraiment tro
333
légendes populaires, il est vraiment trop facile
d’
y croire : qui s’en donnerait encore la peine ? De fait, j’ai connu be
334
d’y croire : qui s’en donnerait encore la peine ?
De
fait, j’ai connu beaucoup d’hommes qui voulaient bien admettre en sou
335
it encore la peine ? De fait, j’ai connu beaucoup
d’
hommes qui voulaient bien admettre en souriant un diable de ce genre,
336
qui voulaient bien admettre en souriant un diable
de
ce genre, mais non pas croire en Dieu ; ce qui revient à ne pas croir
337
Comment peut-on perdre son temps à ces balivernes
d’
un autre âge ? », disent-ils. Or ce sont eux qui s’y laissent prendre
338
s les anges, mais bien la candeur et la crédulité
de
ces « sceptiques », et l’impardonnable sophisme dont ils se montrent
339
u’il demandait. Et ceux qui en restent aux contes
de
bonnes femmes, ce sont ceux qui refusent de croire au diable à cause
340
ontes de bonnes femmes, ce sont ceux qui refusent
de
croire au diable à cause de l’image qu’ils s’en font, et qui est tiré
341
age qu’ils s’en font, et qui est tirée des contes
de
bonnes femmes. Cependant la Bible dénonce l’existence du diable à cha
342
ible dénonce l’existence du diable à chaque page,
de
la première où il apparaît sous la forme du serpent, jusqu’à l’avant-
343
oyé par le feu du ciel et précipité dans un étang
de
flammes et de souffre avec ses faux prophètes, pour y être tourmenté
344
du ciel et précipité dans un étang de flammes et
de
souffre avec ses faux prophètes, pour y être tourmenté nuit et jour,
345
les textes originaux). Si l’on croit à la vérité
de
la Bible, il est impossible de douter un seul instant de la réalité o
346
croit à la vérité de la Bible, il est impossible
de
douter un seul instant de la réalité objective du diable. h. Rouge
347
ible, il est impossible de douter un seul instant
de
la réalité objective du diable. h. Rougemont Denis de, « Les tours
348
éalité objective du diable. h. Rougemont Denis
de
, « Les tours du diable I : “Je ne suis personne” », La Vie protestant
349
, 15 octobre 1943, p. 1. i. Le texte est précédé
de
la note suivante de la rédaction : « Nous avons eu l’occasion de lire
350
. 1. i. Le texte est précédé de la note suivante
de
la rédaction : « Nous avons eu l’occasion de lire les réflexions d’un
351
ante de la rédaction : « Nous avons eu l’occasion
de
lire les réflexions d’une perspicacité peu ordinaire sur l’existence
352
« Nous avons eu l’occasion de lire les réflexions
d’
une perspicacité peu ordinaire sur l’existence personnelle du diable,
353
l’existence personnelle du diable, due à la plume
de
Denis de Rougemont. Nous n’avons pas à présenter l’écrivain neuchâtel
354
à présenter l’écrivain neuchâtelois aux lecteurs
de
la Vie protestante. La qualité de sa pensée et l’autorité de son juge
355
is aux lecteurs de la Vie protestante. La qualité
de
sa pensée et l’autorité de son jugement sont reconnues bien au-delà d
356
rotestante. La qualité de sa pensée et l’autorité
de
son jugement sont reconnues bien au-delà de nos frontières. Nous diri
357
orité de son jugement sont reconnues bien au-delà
de
nos frontières. Nous dirions volontiers qu’il est aujourd’hui un des
358
aujourd’hui un des meilleurs interprètes laïques
d’
une théologie protestante constructive. Sous le titre “Les tours du di
359
titre “Les tours du diable”, nous sommes heureux
de
pouvoir donner ici une première étude de l’auteur. Nous nous proposon
360
heureux de pouvoir donner ici une première étude
de
l’auteur. Nous nous proposons d’apporter encore, dans nos prochains n
361
e première étude de l’auteur. Nous nous proposons
d’
apporter encore, dans nos prochains numéros, quelques-unes des pages r
362
ixa la graine, les animaux muets sont prisonniers
de
l’ordre intarissablement prodigue et infaillible de l’instinct. Mais
363
l’ordre intarissablement prodigue et infaillible
de
l’instinct. Mais l’homme a reçu le pouvoir de parler, de créer et de
364
ble de l’instinct. Mais l’homme a reçu le pouvoir
de
parler, de créer et de dénaturer. Par la grâce du langage, il peut di
365
stinct. Mais l’homme a reçu le pouvoir de parler,
de
créer et de dénaturer. Par la grâce du langage, il peut dire vrai ; p
366
l’homme a reçu le pouvoir de parler, de créer et
de
dénaturer. Par la grâce du langage, il peut dire vrai ; par la faute
367
peut créer dans le prolongement des perspectives
de
la Création, il peut aussi créer à tort et à travers. Il peut être un
368
t et à travers. Il peut être un agent responsable
de
la nature naturante, mais il peut aussi faire la grève, se révolter,
369
riquer l’anti-nature ou dénature. Cette duplicité
de
nos pouvoirs constitue notre liberté. Elle en est à la fois le signe
370
e gloire équivoque. C’est par la liberté, à cause
d’
elle, et dans elle, que nous avons le pouvoir de pécher. Car pécher c’
371
e d’elle, et dans elle, que nous avons le pouvoir
de
pécher. Car pécher c’est tricher avec l’ordre, opposer à la loi divin
372
à la loi divine nos dérogations égoïstes, fautes
de
calcul et courtes vues intéressées. Pécher c’est fausser quelque chos
373
agit dans le monde, et c’est en provoquant l’abus
de
notre liberté qu’il agit en nous et nous lie. Si Ève n’avait pas été
374
en nous et nous lie. Si Ève n’avait pas été libre
de
manger cette pomme interdite, Ève n’aurait pu pécher, ni Adam après e
375
it pu pécher, ni Adam après elle. Ainsi la gloire
de
l’homme étant sa liberté, il est clair que c’est en ce point que le M
376
lair que la grande ambition satanique devait être
de
s’emparer de la parole dans notre bouche, pour altérer le témoignage
377
rande ambition satanique devait être de s’emparer
de
la parole dans notre bouche, pour altérer le témoignage dans sa sourc
378
ue dans notre langue ». Mais il est deux manières
de
mentir, comme il est deux manières de tromper un client. Si la balanc
379
ux manières de mentir, comme il est deux manières
de
tromper un client. Si la balance marque 980 grammes, vous pouvez dire
380
ntrôle, il peut voir qu’on le vole, et vous savez
de
combien vous le volez : une vérité reste juge entre vous. Mais le dém
381
e critère du vrai qui est dénaturé, il n’y a plus
de
contrôle possible. Et peu à peu vous oublierez que vous trichez. Pari
382
es pincées « pour le bon poids », pour le sourire
de
l’acheteur et la satisfaction de votre vertu. C’est là le mensonge pu
383
pour le sourire de l’acheteur et la satisfaction
de
votre vertu. C’est là le mensonge pur, l’œuvre propre du diable. À pa
384
artir de l’instant où vous faussez la mesure même
de
la vérité, toutes vos « vertus » sont au service du mal et sont compl
385
vertus » sont au service du mal et sont complices
de
l’œuvre du Malin. « Le diable est menteur et le Père du mensonge », d
386
e du mensonge », dit l’Évangile tel qu’on le cite
d’
ordinaire. Ceci concerne le premier mensonge, celui qui se borne à tai
387
ui se borne à taire la vérité (tout en ne cessant
de
la connaître) ou à la nier (tout en sachant que, pour si peu, elle ne
388
ut en sachant que, pour si peu, elle ne cesse pas
d’
exister). Mais le texte original de ce passage est infiniment plus étr
389
e ne cesse pas d’exister). Mais le texte original
de
ce passage est infiniment plus étrange. « Le diable est menteur, nous
390
iable est menteur, nous dit-il, et il est le père
de
son propre mensonge. » Par ici nous entrons au mystère du mal. Le pèr
391
» Par ici nous entrons au mystère du mal. Le père
de
son mensonge est celui qui l’engendre, le conçoit par ses propres œuv
392
re, le conçoit par ses propres œuvres, en abusant
d’
une vérité qu’il rejette aussitôt qu’avilie et qui mourra du monstre m
393
nsonge, par essence, n’est pas ! C’est une espèce
de
décréation. C’est le trompe-l’œil et le sonne-creux de l’invention bâ
394
création. C’est le trompe-l’œil et le sonne-creux
de
l’invention bâtarde et de l’art inauthentique. Le diable est le père
395
l’œil et le sonne-creux de l’invention bâtarde et
de
l’art inauthentique. Le diable est le père du faux art, de toutes ces
396
inauthentique. Le diable est le père du faux art,
de
toutes ces œuvres qui ne sont « ni bien ni mal », parce que l’acte do
397
supprime les mesures mêmes du beau. Il n’y a plus
de
fautes de goût possible là où n’existe plus de goût comme il n’y a pl
398
es mesures mêmes du beau. Il n’y a plus de fautes
de
goût possible là où n’existe plus de goût comme il n’y a plus de crim
399
us de fautes de goût possible là où n’existe plus
de
goût comme il n’y a plus de crime possible la où n’existe plus de Loi
400
e là où n’existe plus de goût comme il n’y a plus
de
crime possible la où n’existe plus de Loi. Peut-être ici découvrons-n
401
n’y a plus de crime possible la où n’existe plus
de
Loi. Peut-être ici découvrons-nous la raison dernière du mensonge : c
402
on dernière du mensonge : c’est toujours le désir
d’
innocence utopique. Le mensonge ordinaire n’était que l’omission ou la
403
inaire n’était que l’omission ou la contradiction
d’
une vérité, qui subsistait ailleurs et nous jugeait encore. Mais le me
404
e mensonge diabolique tue le juge. Il ne part que
de
soi, et ne prolifère qu’en autarcie, comme une monade cancéreuse, int
405
ncéreuse, introduisant dans l’univers ce sophisme
de
pure angoisse : le mensonge d’aucune vérité. j. Rougemont Denis de
406
nivers ce sophisme de pure angoisse : le mensonge
d’
aucune vérité. j. Rougemont Denis de, « Les tours du diable II : Le
407
e mensonge d’aucune vérité. j. Rougemont Denis
de
, « Les tours du diable II : Le menteur », La Vie protestante, Genève,
408
e réside dans la sexualité. L’illusion s’aperçoit
d’
une manière assez simple : la sexualité est le domaine des tentations
409
es plus sensibles et les plus communes. Assez peu
d’
hommes sont réellement tentés de voler le portefeuille du voisin, mais
410
mmunes. Assez peu d’hommes sont réellement tentés
de
voler le portefeuille du voisin, mais presque tout homme s’est vu ten
411
u voisin, mais presque tout homme s’est vu tenter
de
prendre la femme du voisin, soit en recourant aux raisons pathétiques
412
tal ! » —, soit en se persuadant que « ça n’a pas
d’
importance » ; ou les deux ensemble. En vérité, la sexualité en soi n’
413
originel fut l’acte sexuel, dont la consommation
de
la pomme serait le symbole, c’est parce qu’ils assimilent le péché en
414
e que l’on croit, notez que ce n’est pas le geste
de
manger une pomme qui était mauvais aux yeux de l’Éternel, ni la pomme
415
en soi (au contraire), mais seulement la révolte
d’
Ève et son désir de se diviniser à sa façon. Si la sexualité pouvait r
416
re), mais seulement la révolte d’Ève et son désir
de
se diviniser à sa façon. Si la sexualité pouvait rester pure, c’est-à
417
elle va se pervertir et devenir à son tour source
de
perversion. La paillardise joyeuse est certainement l’une des formes
418
s diaboliques du péché. Je n’en dirais pas autant
de
certaines amours pseudo-mystiques, nœuds de sophismes spirituels où l
419
utant de certaines amours pseudo-mystiques, nœuds
de
sophismes spirituels où le serpent se love avec délices. La sexualité
420
autres fonctions naturelles par un certain manque
de
nécessité. Il est nécessaire de manger et de respirer, et il est néce
421
un certain manque de nécessité. Il est nécessaire
de
manger et de respirer, et il est nécessaire que le sang circule, mais
422
nque de nécessité. Il est nécessaire de manger et
de
respirer, et il est nécessaire que le sang circule, mais on peut vivr
423
nscient. D’autre part, il est lié à la créativité
de
l’homme, il en est l’aspect corporel, le symbole ou le signe physique
424
est libre, c’est-à-dire parce qu’il peut choisir
de
créer selon l’ordre divin, ou au contraire selon ses propres utopies.
425
res utopies. C’est donc en tant qu’elle participe
de
notre libre créativité, comme le langage et les activités de l’esprit
426
bre créativité, comme le langage et les activités
de
l’esprit, que la sexualité donne prise au diable. Et certes il ne s’y
427
i rend un culte obsédé. L’idéalisation romantique
de
l’amour dans l’époque moderne, entraînant une pruderie morbide du lan
428
tout expliquer » par les censures et refoulements
de
la morale en vigueur dans son milieu, et de son temps. D’où l’on devr
429
ments de la morale en vigueur dans son milieu, et
de
son temps. D’où l’on devrait déduire que le meilleur moyen de préveni
430
rale en vigueur dans son milieu, et de son temps.
D’
où l’on devrait déduire que le meilleur moyen de prévenir les états de
431
. D’où l’on devrait déduire que le meilleur moyen
de
prévenir les états de possession satanique et les névroses nées de tr
432
duire que le meilleur moyen de prévenir les états
de
possession satanique et les névroses nées de troubles sexuels, serait
433
tats de possession satanique et les névroses nées
de
troubles sexuels, serait simplement la franchise, non pas « scientifi
434
e en proposant une licence absolue. Or, l’absence
de
contraintes choisies rend la sexualité insignifiante, et déprime secr
435
insignifiante, et déprime secrètement l’humanité
de
l’homme. Le sexe n’est pas plus divin qu’il n’est honteux, mais il es
436
st lié intimement aux fonctions les plus humaines
de
l’homme, à ses pouvoirs de création dans tous les ordres, à ses jugem
437
ions les plus humaines de l’homme, à ses pouvoirs
de
création dans tous les ordres, à ses jugements esthétiques ou moraux,
438
, à tout ce qui qualifie l’individu et lui permet
de
se posséder en tant que personne responsable. L’indifférence croissan
439
nterdits qui prêtaient à l’acte sexuel la gravité
d’
un engagement, cette espèce d’insouciance morale se traduit moins par
440
e sexuel la gravité d’un engagement, cette espèce
d’
insouciance morale se traduit moins par une libération que par une fla
441
présence de cet affadissement, l’on serait tenté
de
regretter le temps où Satan proposait des combats plus féconds… k.
442
t des combats plus féconds… k. Rougemont Denis
de
, « Les tours du diable III : diable et sexe », La Vie protestante, Ge
443
st peut-être au monde qu’une seule chose pire que
de
douter du bien et du réel, et c’est de douter du pardon, une fois qu’
444
e pire que de douter du bien et du réel, et c’est
de
douter du pardon, une fois qu’on a trahi le bien et le réel. Car dout
445
esser le mal qu’on a commis ; pour oser qualifier
de
faute sa propre faute ; et pour que puisse renaître la confiance qui
446
enaître la confiance qui donnera seule le courage
de
rebâtir. Celui qui doute du pardon ne peut pas confesser son crime, e
447
ble est cet Accusateur qui veut nous faire douter
de
notre pardon pour nous forcer à fuir dans les remèdes du pire. L’Apoc
448
ire. L’Apocalypse le désigne comme « l’Accusateur
de
nos frères, celui qui les accuse devant Dieu jour et nuit ». C’est lu
449
u jour et nuit ». C’est lui qui demandait la tête
de
Job devant le tribunal céleste. Non content de nous prendre à ses piè
450
ris il est le premier à nous dénoncer devant Dieu
de
la manière la plus impitoyable. Non par amour de la justice, mais par
451
de la manière la plus impitoyable. Non par amour
de
la justice, mais par amour de notre châtiment, par haine froide. Pour
452
able. Non par amour de la justice, mais par amour
de
notre châtiment, par haine froide. Pour le stérile plaisir d’avoir ra
453
timent, par haine froide. Pour le stérile plaisir
d’
avoir raison. Aussi, partout où l’on condamne sans pitié son prochain
454
simple faute de logique, la grâce pour une erreur
de
calcul statistique. La duplicité infernale, c’est de nous faire croir
455
calcul statistique. La duplicité infernale, c’est
de
nous faire croire qu’il n’y a pas de juge, ni d’ordre divin du réel,
456
rnale, c’est de nous faire croire qu’il n’y a pas
de
juge, ni d’ordre divin du réel, et aussitôt que nous l’avons cru, de
457
de nous faire croire qu’il n’y a pas de juge, ni
d’
ordre divin du réel, et aussitôt que nous l’avons cru, de nous accuser
458
divin du réel, et aussitôt que nous l’avons cru,
de
nous accuser de contravention devant le Juge. Ainsi la morale laïque,
459
et aussitôt que nous l’avons cru, de nous accuser
de
contravention devant le Juge. Ainsi la morale laïque, morale du devoi
460
ersonnel, nous accuse et nous prive en même temps
de
tout recours à Celui qui pardonne. Elle ne laisse aux meilleures de s
461
Celui qui pardonne. Elle ne laisse aux meilleures
de
ses victimes que l’héroïsme autosadique de la révolte. l. Rougemon
462
leures de ses victimes que l’héroïsme autosadique
de
la révolte. l. Rougemont Denis de, « Les tours du diable IV : L’ac
463
autosadique de la révolte. l. Rougemont Denis
de
, « Les tours du diable IV : L’accusateur », La Vie protestante, Genèv
464
vembre 1943)m « Le serpent était le plus rusé
de
tous les animaux des champs que l’Éternel Dieu avait faits. Il dit à
465
Dieu a-t-il réellement dit : vous ne mangerez pas
de
tous les arbres du jardin ? La femme répondit au serpent : nous mange
466
u fruit des arbres du jardin. Mais quant au fruit
de
l’arbre qui est au milieu du jardin, Dieu a dit : vous n’en mangerez
467
n’en mangerez point et vous n’y toucherez point,
de
peur que vous n’en mouriez. Alors le serpent dit à la femme : vous ne
468
y a le doute ! Le premier procédé du démon, c’est
de
jeter un doute sur la réalité de la loi divine, et donc sur la réalit
469
du démon, c’est de jeter un doute sur la réalité
de
la loi divine, et donc sur la réalité elle-même et ses structures. «
470
itude est insinuée dans un esprit, la possibilité
d’
une tentation s’entrouvre. Car il n’y a pas de tentation là où n’exist
471
ité d’une tentation s’entrouvre. Car il n’y a pas
de
tentation là où n’existe aucune possibilité d’imaginer quelque autre
472
as de tentation là où n’existe aucune possibilité
d’
imaginer quelque autre chose que l’état de fait. On dit bien : l’occas
473
ibilité d’imaginer quelque autre chose que l’état
de
fait. On dit bien : l’occasion fait le larron. Vous n’êtes pas tenté
474
l’occasion fait le larron. Vous n’êtes pas tenté
d’
aller dans la lune, parce que vous savez que c’est absolument impossib
475
t impossible. Mais vous seriez probablement tenté
d’
y aller, si l’on vous suggérait quelque moyen de le faire. Ève ne pens
476
é d’y aller, si l’on vous suggérait quelque moyen
de
le faire. Ève ne pensait même pas à manger cette pomme avant que le s
477
vant que le serpent n’ait mis en doute la réalité
de
l’ordonnance de Dieu. À l’origine de toute tentation, il y a l’occasi
478
ent n’ait mis en doute la réalité de l’ordonnance
de
Dieu. À l’origine de toute tentation, il y a l’occasion entrevue d’al
479
e la réalité de l’ordonnance de Dieu. À l’origine
de
toute tentation, il y a l’occasion entrevue d’aller à la divinité par
480
ne de toute tentation, il y a l’occasion entrevue
d’
aller à la divinité par un plus court chemin que celui du réel ; par u
481
e, en dépit des interdictions que posent les lois
de
la Création, l’ordre divin et la nature de l’homme. Et voici le deuxi
482
s lois de la Création, l’ordre divin et la nature
de
l’homme. Et voici le deuxième temps de la tentation : « La femme vit
483
la nature de l’homme. Et voici le deuxième temps
de
la tentation : « La femme vit que l’arbre était bon à manger et agré
484
t précieux pour ouvrir l’intelligence : elle prit
de
son fruit et en mangea. » (Gen. 3:6) Voyez : ce n’est pas le mal en s
485
our l’esprit. Elle ne fut pas tentée par le désir
de
nuire, mais l’idée de se diviniser, ce qui paraît en somme une excell
486
fut pas tentée par le désir de nuire, mais l’idée
de
se diviniser, ce qui paraît en somme une excellente idée. Par malheur
487
le, Dieu n’aimait pas cette idée-là et l’excluait
de
sa réalité. Manger cette pomme et se diviniser de cette manière convo
488
de sa réalité. Manger cette pomme et se diviniser
de
cette manière convoiteuse, il se trouvait qu’aux yeux de Dieu c’était
489
ie — si l’utopie est l’imagination, puis le désir
d’
un bien que le réel condamne et que le plan divin ne prévoit pas. Sata
490
e Christ, lui propose trois utopies, trois moyens
de
gagner le monde par un plus court chemin que le sentier de Golgotha.
491
le monde par un plus court chemin que le sentier
de
Golgotha. À l’origine, le « méchant » n’est pas celui qui agit par mé
492
’est plus tard, c’est après plusieurs générations
de
pécheurs dans l’histoire, ou de péchés dans une vie, que le mal finir
493
ieurs générations de pécheurs dans l’histoire, ou
de
péchés dans une vie, que le mal finira par exister en soi, apparence
494
elaire peut écrire : « L’homme et la femme savent
de
naissance que dans le mal se trouve la volupté… La volupté unique et
495
a volupté unique et suprême gît dans la certitude
de
faire le mal. » Mais ici se sont déclenchés les mécanismes compliqués
496
ici se sont déclenchés les mécanismes compliqués
de
la perversion, de l’autopunition d’une conscience déchirée, et du dés
497
nchés les mécanismes compliqués de la perversion,
de
l’autopunition d’une conscience déchirée, et du désir enfin de se dét
498
es compliqués de la perversion, de l’autopunition
d’
une conscience déchirée, et du désir enfin de se détruire. Se détruire
499
tion d’une conscience déchirée, et du désir enfin
de
se détruire. Se détruire pour s’innocenter ! Pour échapper, à sa mani
500
éparer. C’est le mystère du suicide et la logique
de
Judas, la suprême utopie. m. Rougemont Denis de, « Les tours du di
501
e Judas, la suprême utopie. m. Rougemont Denis
de
, « Les tours du diable V : Le tentateur », La Vie protestante, Genève
502
, l’auteur, et l’homme qui réussit, cette galerie
de
victimes est classique au point d’en être presque démodée. Car Satan
503
cette galerie de victimes est classique au point
d’
en être presque démodée. Car Satan marche avec son temps, et paraît se
504
Satan marche avec son temps, et paraît se soucier
de
moins en moins de persuader l’individu, dans une époque où celui-ci n
505
son temps, et paraît se soucier de moins en moins
de
persuader l’individu, dans une époque où celui-ci n’existe guère. Son
506
eilleure interprétation des phénomènes collectifs
d’
aujourd’hui fut donnée vers 1848 par l’écrivain danois Kierkegaard, le
507
l’écrivain danois Kierkegaard, le penseur capital
de
notre ère. Voici ce que l’on peut lire dans son journal intime : En o
508
e et des époques qui discutaient sans fin les cas
de
possession, c’est-à-dire d’individus particuliers se livrant au mal,
509
ient sans fin les cas de possession, c’est-à-dire
d’
individus particuliers se livrant au mal, je voudrais écrire un livre
510
ontrer comment l’humanité qui se donne au diable,
de
nos jours, le fait en masse. C’est pour cela que les gens se rassembl
511
pour que l’hystérie naturelle et animale s’empare
d’
eux, pour qu’ils se sentent stimulés, enflammés et hors d’eux-mêmes. L
512
our qu’ils se sentent stimulés, enflammés et hors
d’
eux-mêmes. Les scènes du Blocksberg sont le pendant exact de ces plais
513
s. Les scènes du Blocksberg sont le pendant exact
de
ces plaisirs démoniaques, qui consistent à se perdre soi-même, à se l
514
ne sait plus ce que l’on est en train de faire ou
de
dire, on ne sait plus ce qui parle à travers vous, tandis que le sang
515
ue et avant tous, le principe diabolique créateur
de
la masse : fuir sa propre personne, n’être plus responsable, donc plu
516
lus coupable, et devenir du même coup participant
de
la puissance divinisée de l’Anonyme. Or l’Anonyme a bien des chances
517
u même coup participant de la puissance divinisée
de
l’Anonyme. Or l’Anonyme a bien des chances d’être celui qui aime à di
518
sée de l’Anonyme. Or l’Anonyme a bien des chances
d’
être celui qui aime à dire : Je ne suis Personne… La foule, c’est le l
519
re : Je ne suis Personne… La foule, c’est le lieu
de
rendez-vous des hommes qui se fuient, eux et leur vocation. Elle n’es
520
eux et leur vocation. Elle n’est personne et tire
de
là son assurance dans le crime. « Il ne s’est pas trouvé un seul sold
521
ité. Mais trois ou quatre femmes, dans l’illusion
d’
être une foule, et que personne peut-être ne saurait dire qui l’avait
522
!… Car une foule est une abstraction qui n’a pas
de
mains, mais chaque homme isolé a, dans la règle, deux mains, et lorsq
523
nt ses mains, non celles du voisin, et non celles
de
la foule qui n’a pas de mains » (Kierkegaard). Reconnaissons ici la v
524
du voisin, et non celles de la foule qui n’a pas
de
mains » (Kierkegaard). Reconnaissons ici la vieille tactique, la semp
525
ci la vieille tactique, la sempiternelle tactique
de
Satan. Dès la première tentation en Eden, il a recours au même et uni
526
omme qu’il n’est pas responsable, qu’il n’y a pas
de
Juge, que la Loi est douteuse, qu’on ne saura pas, et que d’ailleurs,
527
e coup réussi, on sera Dieu soi-même, donc maître
de
fixer le bien et le mal à sa guise. « Alors ils entendirent la voix
528
mal à sa guise. « Alors ils entendirent la voix
de
l’Éternel Dieu, qui parcourait le jardin vers le soir, et l’homme et
529
l’homme et sa femme se cachèrent loin de la face
de
l’Éternel Dieu, au milieu des arbres du jardin. Mais l’Éternel Dieu a
530
t’a appris que tu es nu ? Est-ce que tu as mangé
de
l’arbre dont je t’avais défendu de manger ? L’homme répondit : La fem
531
ue tu as mangé de l’arbre dont je t’avais défendu
de
manger ? L’homme répondit : La femme que tu as mise auprès de moi m’a
532
: La femme que tu as mise auprès de moi m’a donné
de
l’arbre, et j’en ai mangé. Et l’Éternel Dieu dit à la femme : Pourquo
533
ils disent que c’était l’autre. Ainsi les hommes
de
notre temps, poussés par leurs « complexes de culpabilité » et fuyant
534
mes de notre temps, poussés par leurs « complexes
de
culpabilité » et fuyant devant l’aveu de leurs fautes, vont se cacher
535
omplexes de culpabilité » et fuyant devant l’aveu
de
leurs fautes, vont se cacher dans les arbres, dans la foule. C’est-à-
536
ù l’on est, à coup sûr, le plus « loin de la face
de
l’Éternel ». Pour qu’il n’y ait plus de responsabilité, il faut qu’il
537
e la face de l’Éternel ». Pour qu’il n’y ait plus
de
responsabilité, il faut qu’il n’y ait plus personne. Or si j’appelle
538
plus personne. Or si j’appelle et qu’il n’y a pas
de
réponse, je dis qu’il n’y a personne. La personne est en nous ce qui
539
a personne. La personne est en nous ce qui répond
de
nos actes, ce qui est « capable de réponse » ou responsable ; dans un
540
ce qui répond de nos actes, ce qui est « capable
de
réponse » ou responsable ; dans une foule, il n’y a plus de réponse i
541
» ou responsable ; dans une foule, il n’y a plus
de
réponse individuelle ; pour qu’il n’y ait plus de responsable, il suf
542
de réponse individuelle ; pour qu’il n’y ait plus
de
responsable, il suffit qu’il y ait une masse. Satan va donc créer les
543
donc créer les masses. Nous tenons ici le secret
de
sa grande stratégie : produire le péché en série et rationaliser la c
544
l’évolution générale du temps, favorisent ce plan
de
mille manières. Tout concourt, dans le cadre de nos vies, à nous priv
545
n de mille manières. Tout concourt, dans le cadre
de
nos vies, à nous priver du sentiment d’être une personne responsable.
546
le cadre de nos vies, à nous priver du sentiment
d’
être une personne responsable. Nous vivons tous, de plus en plus, dans
547
Nous vivons tous, de plus en plus, dans un monde
de
transe collective. Nous participons tous, de plus en plus, à des form
548
s participons tous, de plus en plus, à des formes
de
vie étrangères à notre sort particulier et à nos aptitudes normales.
549
par leurs chefs. Tout cela contribue à l’arracher
de
sa vie propre, où il ne se passerait jamais rien de semblable. Quant
550
sa vie propre, où il ne se passerait jamais rien
de
semblable. Quant aux inconvénients et à l’ennui de cette vie propre,
551
e semblable. Quant aux inconvénients et à l’ennui
de
cette vie propre, autrefois jugés normaux, ils apparaissent de plus e
552
acceptables à mesure que se répandent les notions
de
progrès indéfini, de confort à tout prix, de succès rapide, et à mesu
553
que se répandent les notions de progrès indéfini,
de
confort à tout prix, de succès rapide, et à mesure que s’efface la cr
554
ions de progrès indéfini, de confort à tout prix,
de
succès rapide, et à mesure que s’efface la croyance dans un au-delà.
555
Elles poussent l’homme à rechercher les occasions
d’
être dépossédé de soi. Elles font de chacun de nous un sujet prédispos
556
homme à rechercher les occasions d’être dépossédé
de
soi. Elles font de chacun de nous un sujet prédisposé à l’hypnose col
557
les occasions d’être dépossédé de soi. Elles font
de
chacun de nous un sujet prédisposé à l’hypnose collective, une victim
558
ons d’être dépossédé de soi. Elles font de chacun
de
nous un sujet prédisposé à l’hypnose collective, une victime virtuell
559
se collective, une victime virtuelle des passions
de
masse. Certes, il n’y aurait pas de masses possibles, au sens précis
560
des passions de masse. Certes, il n’y aurait pas
de
masses possibles, au sens précis de concentration d’hommes, sans la r
561
’y aurait pas de masses possibles, au sens précis
de
concentration d’hommes, sans la radio, les haut-parleurs, la presse e
562
masses possibles, au sens précis de concentration
d’
hommes, sans la radio, les haut-parleurs, la presse et les transports
563
rue seulement. Elle est dans la pensée des hommes
de
ce temps, elle a ses sources au plus intime des existences individuel
564
ent qu’on peut la dénoncer. n. Rougemont Denis
de
, « Les tours du diable VI : Le mal du siècle : la dépersonnalisation
565
me colonne (26 novembre 1943)o J’ai dit du mal
de
tout le monde — des autres, de nous, et donc de moi aussi. Mais si le
566
J’ai dit du mal de tout le monde — des autres,
de
nous, et donc de moi aussi. Mais si le diable est partout, sa figure
567
l de tout le monde — des autres, de nous, et donc
de
moi aussi. Mais si le diable est partout, sa figure se brouille. Et l
568
nner une image nette et facilement reconnaissable
de
la personne de Satan ? C’est que le diable est justement celui qui n’
569
nette et facilement reconnaissable de la personne
de
Satan ? C’est que le diable est justement celui qui n’est jamais clai
570
pour être à la fois juge et partie dans le procès
de
sa définition. Un être paradoxal pas essence. Il est, oui, mais il es
571
néant, ce qui souhaite secrètement la destruction
de
l’existence, — celle des autres ou la sienne propre. Sa qualité de n’
572
celle des autres ou la sienne propre. Sa qualité
de
n’être pas ceci ou cela de positif lui donne une liberté indéfinie d’
573
nne propre. Sa qualité de n’être pas ceci ou cela
de
positif lui donne une liberté indéfinie d’action, d’incognito et d’al
574
u cela de positif lui donne une liberté indéfinie
d’
action, d’incognito et d’alibis à perte de vue. Vulgaire et séduisant,
575
positif lui donne une liberté indéfinie d’action,
d’
incognito et d’alibis à perte de vue. Vulgaire et séduisant, pharisien
576
ne une liberté indéfinie d’action, d’incognito et
d’
alibis à perte de vue. Vulgaire et séduisant, pharisien et voyou, hypo
577
ure la plus poétique du monde, au sens romantique
de
ce terme. Il est beau aux yeux des naïfs qui croient que le mal doit
578
qui croient que le mal doit être laid ; et il est
d’
une laideur irrésistiblement attirante aux yeux des désabusés et des r
579
notre raison. On sait assez que le procédé favori
de
la Cinquième Colonne consiste à semer la confusion dans le camp de l’
580
olonne consiste à semer la confusion dans le camp
de
l’adversaire en y répandant alternativement de vraies et de fausses n
581
mp de l’adversaire en y répandant alternativement
de
vraies et de fausses nouvelles. Voilà le diable à l’œuvre dans nos vi
582
saire en y répandant alternativement de vraies et
de
fausses nouvelles. Voilà le diable à l’œuvre dans nos vies ! Il est l
583
e à l’œuvre dans nos vies ! Il est l’essence même
de
la Cinquième Colonne au siècle des siècles. Enfin — et ceci doit me r
584
re qui, lorsqu’une dénonciation le fait déguerpir
de
sa cachette, va se loger de préférence chez celui qui l’a dénoncé, et
585
ion le fait déguerpir de sa cachette, va se loger
de
préférence chez celui qui l’a dénoncé, et qui se tient pour assuré da
586
auteuil où vous êtes assis. o. Rougemont Denis
de
, « Les tours du diable VII : La cinquième colonne », La Vie protestan
587
rogrès automatique. Devant les résultats présents
de
cette croyance quasi universelle dans les masses et l’élite, l’on est
588
e fataliste et réconfortante que tout s’arrangera
de
soi-même, dans l’ensemble et à la longue, alors le Progrès devient le
589
soporifiques, une véritable drogue du démon, l’un
de
ses nouveaux noms. Nous avons cru à la bonté foncière de l’homme. Par
590
nouveaux noms. Nous avons cru à la bonté foncière
de
l’homme. Par gentillesse pour les autres, évidemment… Mais c’est touj
591
tres, évidemment… Mais c’est toujours une manière
de
croire aussi à sa propre bonté. Et donc de s’aveugler sur le mal que
592
anière de croire aussi à sa propre bonté. Et donc
de
s’aveugler sur le mal que l’on porte en soi. Et donc de ne pas se sou
593
veugler sur le mal que l’on porte en soi. Et donc
de
ne pas se soucier de la présence active du démon. Et donc enfin de lu
594
e l’on porte en soi. Et donc de ne pas se soucier
de
la présence active du démon. Et donc enfin de lui laisser le champ li
595
ier de la présence active du démon. Et donc enfin
de
lui laisser le champ libre pour nous duper. Nous avons cru que le mal
596
mal était relatif dans le monde, qu’il provenait
d’
une mauvaise répartition des biens, d’une éducation mal comprise, de l
597
l provenait d’une mauvaise répartition des biens,
d’
une éducation mal comprise, de lois inadéquates, ou de refoulements et
598
artition des biens, d’une éducation mal comprise,
de
lois inadéquates, ou de refoulements et d’injustices qui pouvaient êt
599
e éducation mal comprise, de lois inadéquates, ou
de
refoulements et d’injustices qui pouvaient être éliminés par des mesu
600
prise, de lois inadéquates, ou de refoulements et
d’
injustices qui pouvaient être éliminés par des mesures adroites. Toute
601
rtie superstitieuses, ont eu pour principal effet
de
nous aveugler sur la réalité de l’homme, c’est-à-dire sur la réalité
602
r principal effet de nous aveugler sur la réalité
de
l’homme, c’est-à-dire sur la réalité essentielle du mal enraciné dans
603
mières, dans la nature et dans la définition même
de
l’homme en tant qu’il est humain. Nous avons été optimistes par princ
604
savoir-vivre, dirait-on, malgré tous les démentis
de
la réalité. Cet optimisme n’est pas la confiance naïve de l’enfant, m
605
alité. Cet optimisme n’est pas la confiance naïve
de
l’enfant, mais une espèce de mensonge. Exactement : une fuite devant
606
s la confiance naïve de l’enfant, mais une espèce
de
mensonge. Exactement : une fuite devant le réel. Car dans le réel, no
607
s scandalise et nous effraye. Alors nous essayons
de
conjurer le mal en le niant : c’est encore la mentalité magique. Nous
608
Nous croyons qu’en avouant le mal, nous le créons
d’
une certaine manière. Nous préférons ne pas insister. Nous « refoulons
609
ce mensonge inconscients, nous rendent incapables
de
comprendre ce qui se passe dans le monde, et nous livrent aux ruses l
610
ses les plus simples du Malin. Nous avons éliminé
de
notre existence bourgeoise le sens du tragique, pour nous tourner exc
611
la nous gênait. Nous l’écartions irrésistiblement
de
nos pensées… Car si ce « trop affreux » eût été vraiment vrai, il eût
612
ffreux » eût été vraiment vrai, il eût fallu agir
d’
urgence et sans réserve ; et si nous nous étions mis à agir sans réser
613
mal avait des racines dans nos vies aussi, et que
d’
une certaine manière, nous l’aimions ! Voilà le grand secret. Le diabl
614
plus que des armées. Elle oppose des conceptions
de
la vie. C’est une espèce de guerre civile mondiale. Elle sera perdue
615
ppose des conceptions de la vie. C’est une espèce
de
guerre civile mondiale. Elle sera perdue si nous perdons d’abord le s
616
Elle sera perdue si nous perdons d’abord le sens
de
la réalité morale. ⁂ L’une des leçons claires qui se dégagent des évé
617
itain tenté et qui se fait une caricature du vice
d’
autrui pour éviter de le reconnaître en lui-même. … C’est pourquoi nou
618
fait une caricature du vice d’autrui pour éviter
de
le reconnaître en lui-même. … C’est pourquoi nous dirons aujourd’hui
619
— Regardez le diable qui est parmi nous ! Cessez
de
croire qu’il ne peut ressembler qu’à vos ennemis, car c’est à vous-mê
620
r le fait. Et alors seulement, vous serez en état
de
la dépister chez autrui, et de l’y combattre avec succès. Car alors s
621
vous serez en état de la dépister chez autrui, et
de
l’y combattre avec succès. Car alors seulement, vous serez guéris de
622
ec succès. Car alors seulement, vous serez guéris
de
votre naïveté invraisemblable devant le danger totalitaire. Vous pour
623
urrez échapper à l’hypnose. p. Rougemont Denis
de
, « Les tours du diable VIII : Le diable démocrate », La Vie protestan
624
embre 1943)q Chacun sait que les « primitifs »
de
la Mélanésie, victimes des plus célèbres études sociologiques du sièc
625
èbres études sociologiques du siècle, ont coutume
de
personnifier les forces mauvaises qui les menacent, les causes des cr
626
s menacent, les causes des crimes, des accidents,
de
la stérilité ou de la mort. Que ce soit un sorcier, un profanateur du
627
ses des crimes, des accidents, de la stérilité ou
de
la mort. Que ce soit un sorcier, un profanateur du sacré, un animal,
628
rofanateur du sacré, un animal, un nuage, un bout
de
bois colorié, toujours la cause du mal dont souffrent ces sauvages es
629
mal dont souffrent ces sauvages est indépendante
d’
eux-mêmes. À l’inverse, le christianisme s’est efforcé depuis des sièc
630
le christianisme s’est efforcé depuis des siècles
de
nous faire comprendre que le Royaume de Dieu est en nous, que le Mal
631
s siècles de nous faire comprendre que le Royaume
de
Dieu est en nous, que le Mal aussi est en nous, et que le champ de le
632
us, que le Mal aussi est en nous, et que le champ
de
leur bataille n’est pas ailleurs que dans nos cœurs. Cette éducation
633
ans notre primitivisme. Nous rendons responsables
de
nos maux les gens d’en face, toujours, ou la force des choses. Si nou
634
e. Nous rendons responsables de nos maux les gens
d’
en face, toujours, ou la force des choses. Si nous sommes révolutionna
635
ires, nous croyons qu’en changeant la disposition
de
certains objets — en déplaçant les richesses, par exemple — nous supp
636
mêmes objets, nous sauverons tout. Si nous sommes
de
braves démocrates, inquiets ou optimistes, nous croyons qu’en rôtissa
637
sommes encore en pleine mentalité magique. Comme
de
petits enfants en colère, nous battons la table à laquelle nous nous
638
eurtés. Ou comme Xerxès, nous flagellons les eaux
de
l’Hellespont, à grands coups de discours sur les ondes courtes. Nous
639
agellons les eaux de l’Hellespont, à grands coups
de
discours sur les ondes courtes. Nous oublions ce fait fondamental : c
640
nos adversaires ne diffèrent pas essentiellement
de
nous. Car tout homme porte dans son corps (et dans son âme) les micro
641
rte dans son corps (et dans son âme) les microbes
de
toutes les maladies connues, et de bien d’autres. Anéantir les signes
642
) les microbes de toutes les maladies connues, et
de
bien d’autres. Anéantir les signes extérieurs de la menace ne serait
643
de bien d’autres. Anéantir les signes extérieurs
de
la menace ne serait nullement suffisant pour nous en délivrer. Ces si
644
ourraient bien se développer un jour, à la faveur
de
la misère ou de la fatigue, ou de quelque déséquilibre temporaire. L’
645
e développer un jour, à la faveur de la misère ou
de
la fatigue, ou de quelque déséquilibre temporaire. L’adversaire est t
646
ur, à la faveur de la misère ou de la fatigue, ou
de
quelque déséquilibre temporaire. L’adversaire est toujours en nous. E
647
chrétien véritable serait cet homme qui n’aurait
d’
autre ennemi à craindre que celui qu’il loge en lui-même. Mais voici u
648
r mauvaise volonté. Nous sommes tous des « hommes
de
bonne volonté ». Pourtant voyez ce qui se passe dans le monde, et dit
649
par nos mains et nos pensées. C’est ici le moment
de
nous rappeler notre slogan démocratique : Tous les hommes se valent !
650
tention des remarques précédentes n’est nullement
de
justifier « les autres », que l’on avait d’abord accusés de tout le m
651
er « les autres », que l’on avait d’abord accusés
de
tout le mal ; ni de nous fourrer tous dans le même sac, sans distinct
652
ue l’on avait d’abord accusés de tout le mal ; ni
de
nous fourrer tous dans le même sac, sans distinctions… Je veux dire c
653
lle du démon dans nos passions, dans notre besoin
de
sensation, dans notre crainte des responsabilités, dans notre inertie
654
ue, dans notre lâcheté vis-à-vis du grand nombre,
de
ses modes et de ses slogans, dans notre ignorance du prochain, dans n
655
âcheté vis-à-vis du grand nombre, de ses modes et
de
ses slogans, dans notre ignorance du prochain, dans notre refus enfin
656
tre ignorance du prochain, dans notre refus enfin
de
tout Absolu qui transcende et qui juge nos intérêts « vitaux » (comme
657
dirai pas que je vais laisser courir le criminel
d’
en face, pour mieux me livrer d’abord à ma réforme intérieure ! Je dir
658
me réformer et la lutte pour empêcher le criminel
de
poursuivre ses méfaits, sont une seule et même lutte. Que servirait d
659
aits, sont une seule et même lutte. Que servirait
de
gagner cette lutte en moi seulement, puisque le criminel risquerait d
660
en moi seulement, puisque le criminel risquerait
de
me supprimer ? Que servirait de la gagner hors de moi seulement, puis
661
iminel risquerait de me supprimer ? Que servirait
de
la gagner hors de moi seulement, puisque je risquerais de devenir à m
662
gner hors de moi seulement, puisque je risquerais
de
devenir à mon tour un autre criminel ? Il n’y a qu’un crime, en moi e
663
disent-ils, donc nous n’avons pas le droit moral
de
nous battre contre celui que nous tenons pour un coupable. » — Nous s
664
e des pompiers et des gendarmes. Cela ne fait pas
de
nous des saints. Cela n’implique même pas que nous soyons « meilleurs
665
e faisons pas notre métier. q. Rougemont Denis
de
, « Les tours du diable IX : “Nous sommes tous coupables” », La Vie pr
666
très bien ? Entre les gens du monde et le Prince
de
ce monde, les mots suggèrent, dans presque toutes les langues, certai
667
ré peut-être par les traditionnels avertissements
de
la chaire chrétienne, a toujours vu dans la « mondanité » quelque cho
668
a toujours vu dans la « mondanité » quelque chose
de
vaguement satanique. Il imaginerait volontiers un diable en cravate b
669
que l’on peut penser aussi des gens du monde, et
de
la sagesse mondaine en général. Elle a son charme et son utilité ; ma
670
t vieille, elle est trop avertie, elle offre trop
de
recettes éprouvées : elle finit par ne plus croire au bien, ni au sér
671
te insondable ruse des cœurs purs qui leur permet
de
passer au travers des cercles vicieux de la raison et de l’égoïsme «
672
r permet de passer au travers des cercles vicieux
de
la raison et de l’égoïsme « bien compris ». La fonction normale de la
673
er au travers des cercles vicieux de la raison et
de
l’égoïsme « bien compris ». La fonction normale de la vie mondaine se
674
e l’égoïsme « bien compris ». La fonction normale
de
la vie mondaine serait de maintenir et d’illustrer un certain nombre
675
». La fonction normale de la vie mondaine serait
de
maintenir et d’illustrer un certain nombre de devises d’élégance mora
676
normale de la vie mondaine serait de maintenir et
d’
illustrer un certain nombre de devises d’élégance morale et de sagesse
677
ait de maintenir et d’illustrer un certain nombre
de
devises d’élégance morale et de sagesse pratique. Il n’y a rien là de
678
tenir et d’illustrer un certain nombre de devises
d’
élégance morale et de sagesse pratique. Il n’y a rien là de diabolique
679
un certain nombre de devises d’élégance morale et
de
sagesse pratique. Il n’y a rien là de diabolique, tout au contraire.
680
e morale et de sagesse pratique. Il n’y a rien là
de
diabolique, tout au contraire. Le jeu mondain, s’il est bien joué, mé
681
Le jeu mondain, s’il est bien joué, ménage autant
de
liberté qu’il ne suppose, dit-on, d’hypocrisie. Il a le charme reposa
682
énage autant de liberté qu’il ne suppose, dit-on,
d’
hypocrisie. Il a le charme reposant des formes fixes. Mais le mondain
683
s le mondain qui n’est que cela inspire une sorte
d’
effroi furtif, révélateur d’une présence perverse au sein même de l’in
684
ela inspire une sorte d’effroi furtif, révélateur
d’
une présence perverse au sein même de l’insignifiance. L’exactitude im
685
, révélateur d’une présence perverse au sein même
de
l’insignifiance. L’exactitude impitoyable de ses jugements, qui ne po
686
même de l’insignifiance. L’exactitude impitoyable
de
ses jugements, qui ne portent d’ailleurs que sur des apparences ; sa
687
t d’ailleurs que sur des apparences ; sa capacité
d’
éliminer froidement ce qui n’est pas conforme aux goûts appris ; sa pr
688
ris ; sa propension presque maniaque à n’attacher
de
l’importance qu’à un détail fortuit dans un être ou une œuvre ; tous
689
tous ces traits qui pourraient dénoter l’exigence
d’
un artiste véritable, prennent soudain quelque chose de satanique lors
690
artiste véritable, prennent soudain quelque chose
de
satanique lorsque l’on s’aperçoit de la stérilité du personnage, et d
691
uelque chose de satanique lorsque l’on s’aperçoit
de
la stérilité du personnage, et des effets stérilisants qu’entraîne sa
692
ation. Ce n’est pas le goût ni même le pédantisme
de
la forme qui est satanique, c’est le goût de la forme imitée. Le mili
693
isme de la forme qui est satanique, c’est le goût
de
la forme imitée. Le milieu mondain le plus suavement correct et moral
694
re préféré par le diable à ces milieux bohèmes et
de
mœurs relâchées qui se croiraient volontiers damnés. C’est, je crois,
695
lus qu’ailleurs improbable. r. Rougemont Denis
de
, « Les tours du diable X : Le diable homme du monde », La Vie protest
696
nos dieux (24 décembre 1943)s Nous avons parlé
de
l’incognito du diable. Mais il existe aussi un incognito divin, et c’
697
ulement surent reconnaître le Christ dans le fils
de
Joseph, charpentier de village. Mais l’incognito et l’alibi du diable
698
tre le Christ dans le fils de Joseph, charpentier
de
village. Mais l’incognito et l’alibi du diable sont exactement invers
699
ble sont exactement inverses : c’est dans l’image
de
nos dieux qu’il va se dissimuler, au cœur même de nos idéaux et de no
700
de nos dieux qu’il va se dissimuler, au cœur même
de
nos idéaux et de nos vérités trop humaines, dans les religions que no
701
l va se dissimuler, au cœur même de nos idéaux et
de
nos vérités trop humaines, dans les religions que nous confabulons en
702
dehors de la foi révélée. Le diable nous empêche
de
reconnaître Dieu dans Jésus-Christ, mais à l’inverse, il nous empêche
703
s-Christ, mais à l’inverse, il nous empêche aussi
de
nous reconnaître dans nos idoles. Voici comment les hommes s’enchaîne
704
Dieu » qui était le moi conscient ou inconscient
de
ses croyants. Une image de leur impérialisme, ou une compensation rêv
705
nscient ou inconscient de ses croyants. Une image
de
leur impérialisme, ou une compensation rêvée de leurs défauts. Et ce
706
e de leur impérialisme, ou une compensation rêvée
de
leurs défauts. Et ce fut le Dieu de la raison pour les tempéraments r
707
nsation rêvée de leurs défauts. Et ce fut le Dieu
de
la raison pour les tempéraments rationalistes, le Dieu de l’instinct
708
ison pour les tempéraments rationalistes, le Dieu
de
l’instinct et de la passion pour les hypercivilisés, le Dieu du succè
709
péraments rationalistes, le Dieu de l’instinct et
de
la passion pour les hypercivilisés, le Dieu du succès pour les robust
710
pocrites que leurs prédécesseurs, n’ont pas parlé
de
« Dieu ». Mais ils ont dit Nation, ou Race, ou Classe. Dans ces trois
711
uisé qu’en un nous. Et ces trois entités ont ceci
de
commun : elles ne sont responsables de rien devant personne, s’étant
712
s ont ceci de commun : elles ne sont responsables
de
rien devant personne, s’étant faites elles-mêmes les critères de tout
713
personne, s’étant faites elles-mêmes les critères
de
toute vérité purement humaine, et décrétant qu’il n’est plus d’autre
714
é purement humaine, et décrétant qu’il n’est plus
d’
autre vérité. Or, aux yeux de ceux qui les servent, l’homme n’existe q
715
obéissons, nous ne sommes donc plus responsables
de
nos actes, mais elles le sont à notre place. Et comme elles-mêmes n’o
716
devant aucune instance supérieure, il n’y a plus
de
responsabilité nulle part. Mais s’il apparaît, à l’inverse, que nous
717
s avec l’entité divinisée — parce que nous sommes
d’
une autre race, d’une autre classe, ou d’une autre génération physique
718
vinisée — parce que nous sommes d’une autre race,
d’
une autre classe, ou d’une autre génération physique et mentale que ce
719
s sommes d’une autre race, d’une autre classe, ou
d’
une autre génération physique et mentale que celle qui détient le pouv
720
de la rue. Il avait la tête et les poches pleines
de
projets philanthropiques, propres à réformer l’humanité au-delà de to
721
thropiques, propres à réformer l’humanité au-delà
de
tout ce que je désirerais même imaginer. Il venait d’allumer un bon c
722
out ce que je désirerais même imaginer. Il venait
d’
allumer un bon cigare dont la fumée montait comme un encens et devait
723
s mètres derrière lui suivaient le diable et l’un
de
ses compères. Ils observaient le Philanthrope, d’un œil critique. Un
724
de ses compères. Ils observaient le Philanthrope,
d’
un œil critique. Un pauvre homme l’arrêta pour lui demander une cigare
725
pour lui demander une cigarette, dans une langue
de
réfugié. Le Philanthrope sans hésiter lui remit une pièce, et poursui
726
plendissait comme un sou neuf. « Tu n’as pas peur
de
lui ? dit le compère au diable. Il m’a l’air terriblement bon ! Et se
727
pondit rien ; il souriait, tout en lisant un bout
de
papier qu’il venait de ramasser sur le trottoir. Après quelques insta
728
oi, je vais l’organiser ! » s. Rougemont Denis
de
, « Les tours du diable XI : Le diable dans nos dieux », La Vie protes
729
Printemps
de
l’Europe (29 avril 1949)t On nous avait promis un très bel œuf de
730
il 1949)t On nous avait promis un très bel œuf
de
Pâques pour cette année. On nous avait laissés entendre que les statu
731
e. On nous avait laissés entendre que les statuts
de
l’Assemblée européenne seraient terminés ces jours-ci, à Londres. Il
732
nés ces jours-ci, à Londres. Il eût été bien beau
de
faire coïncider cette annonce du renouveau européen avec la fête de l
733
cette annonce du renouveau européen avec la fête
de
la Résurrection. Mais rien n’est venu jusqu’ici. Eh ! bien, si ce n’e
734
aire. La seule question qui se pose encore, c’est
de
savoir comment elle se fera. Peut-être n’est-il pas mauvais que la co
735
ueil aux propositions détaillées que les délégués
de
notre Mouvement européen lui soumettaient. Nous savons qu’elle les ét
736
e. Puisse-t-elle se laisser inspirer par ce temps
de
Pâques et les vacances, et puisse-t-elle prendre non seulement son te
737
hier, dans mon jardin, tout en cherchant des œufs
de
Pâques avec mes enfants, et je me disais : tout dépend d’une seule ch
738
s avec mes enfants, et je me disais : tout dépend
d’
une seule chose, l’avenir de ces enfants et celui de nos pays, tout dé
739
disais : tout dépend d’une seule chose, l’avenir
de
ces enfants et celui de nos pays, tout dépend d’une seule chose, qui
740
une seule chose, l’avenir de ces enfants et celui
de
nos pays, tout dépend d’une seule chose, qui est celle-ci : les homme
741
de ces enfants et celui de nos pays, tout dépend
d’
une seule chose, qui est celle-ci : les hommes d’État chargés de faire
742
ose, qui est celle-ci : les hommes d’État chargés
de
faire l’Europe auront-ils la vision nécessaire ? Les grandes vision
743
e souci des intérêts immédiats et surtout la peur
de
la guerre nous empêchent trop souvent de voir loin, de voir grand, d’
744
la peur de la guerre nous empêchent trop souvent
de
voir loin, de voir grand, d’imaginer vraiment la paix, la paix vivant
745
guerre nous empêchent trop souvent de voir loin,
de
voir grand, d’imaginer vraiment la paix, la paix vivante et passionna
746
pêchent trop souvent de voir loin, de voir grand,
d’
imaginer vraiment la paix, la paix vivante et passionnante qui reste e
747
ionnante qui reste encore possible, et qui dépend
de
nous. Il y a très peu de grandes visions. J’en connais trois. Il y a
748
Il se promène ces jours-ci dans les rues et cafés
de
Paris, avec un gros livre sous le bras, quêtant la signature des amis
749
livre sous le bras, quêtant la signature des amis
de
la paix. Il a déchiré son passeport, et quelques écrivains lui ont do
750
port, et quelques écrivains lui ont donné l’appui
de
leurs noms célèbres, mais sans rien déchirer du tout. Il est sympathi
751
du tout. Il est sympathique et très pur. Il rêve
d’
une Assemblée mondiale et d’un gouvernement unique pour toute la terre
752
et très pur. Il rêve d’une Assemblée mondiale et
d’
un gouvernement unique pour toute la terre. Mais les Russes ont aussi
753
Mais les Russes ont aussi leur vision, leur idée
de
l’unité du monde sous les auspices du Kominform et de l’épuration per
754
’unité du monde sous les auspices du Kominform et
de
l’épuration permanente, — et ceci tue cela, ce n’est pas notre faute,
755
y Davis… Il y a enfin une troisième vision, celle
de
l’Europe fédérée. Elle est moins vaste, en vérité, que celle du jeune
756
d’hui la vision du beau temps européen, la vision
d’
un printemps de l’Europe où les frontières et les barrières entre nos
757
du beau temps européen, la vision d’un printemps
de
l’Europe où les frontières et les barrières entre nos peuples fondrai
758
nos peuples fondraient comme neige sous le soleil
d’
avril. Imaginez ce grand jardin de l’Europe où vous pourriez circuler
759
sous le soleil d’avril. Imaginez ce grand jardin
de
l’Europe où vous pourriez circuler librement, sans passeports ni visa
760
ment, sans passeports ni visas, sans restrictions
de
devises, sans anxiétés mesquines, avec seulement votre curiosité pour
761
et si proches, — comme vous circulez aujourd’hui
d’
un canton à l’autre de la Suisse. Imaginez cette Europe grande ouverte
762
à ne faire la guerre à personne, mais à défendre
d’
un seul cœur son indépendance reconquise. Cette Europe inventant la pa
763
aix, l’imposant au besoin par la force tranquille
de
sa masse, de ses 300 millions d’habitants rassemblés, rendus par leur
764
nt au besoin par la force tranquille de sa masse,
de
ses 300 millions d’habitants rassemblés, rendus par leur union à une
765
force tranquille de sa masse, de ses 300 millions
d’
habitants rassemblés, rendus par leur union à une prospérité qui, selo
766
stes, pourrait multiplier par trois les standards
de
la vie matérielle. Terre promise Paix, liberté, prospérité, tel
767
berté, prospérité, tels ont été les grands motifs
de
toutes les confédérations qui ont vu le jour au cours des siècles, et
768
ans. Si l’on a bien vu cet enjeu, la possibilité
de
le gagner, et la nécessité de le gagner d’urgence, non seulement pour
769
jeu, la possibilité de le gagner, et la nécessité
de
le gagner d’urgence, non seulement pour nous en Europe, mais pour la
770
bilité de le gagner, et la nécessité de le gagner
d’
urgence, non seulement pour nous en Europe, mais pour la paix du monde
771
s chicanes techniques et les experts. Tout dépend
de
la vision qu’ils auront. Il n’est point d’ordre politique qui serve l
772
dépend de la vision qu’ils auront. Il n’est point
d’
ordre politique qui serve l’homme, s’il n’est orienté dès le départ pa
773
fascinante. L’Europe se fera, parce qu’une équipe
de
véritables résistants — ceux qui résistent à la fatalité — l’auront v
774
. Contre vents et marées, contre tous les experts
de
son époque, il se mit en route pour la joindre, et c’est ainsi qu’il
775
out simplement l’Europe, redécouverte à la faveur
de
son union ? Une Europe rajeunie, qui deviendrait soudain, pour nos ye
776
ise !2 1. On sait que les dix pays fondateurs
de
l’union européenne préparent une Assemblée consultative de l’Europe,
777
n européenne préparent une Assemblée consultative
de
l’Europe, qui doit se tenir en septembre, et dont les députés seront
778
arlements. 2. (Réd. — Nous devons à l’obligeance
de
M. Denis de Rougemont de pouvoir publier ce texte radiodiffusé.) t.
779
us devons à l’obligeance de M. Denis de Rougemont
de
pouvoir publier ce texte radiodiffusé.) t. Rougemont Denis de, « Pr
780
lier ce texte radiodiffusé.) t. Rougemont Denis
de
, « Printemps de l’Europe », La Vie protestante, Genève, 29 avril 1949
781
diodiffusé.) t. Rougemont Denis de, « Printemps
de
l’Europe », La Vie protestante, Genève, 29 avril 1949, p. 1.
782
Bilan simple (29 décembre 1961)w Le bilan
de
l’année qui s’écoule me paraît simple à établir dans ses grandes lign
783
à établir dans ses grandes lignes et à l’échelle
de
la planète : l’une après l’autre, toutes les puissances ont perdu la
784
rope. L’URSS a perdu la face en tant que champion
de
la paix et du désarmement, en faisant éclater trente bombes atomiques
785
Goa, l’Inde a perdu la face, en tant que champion
de
la non-violence. À Cuba, les États-Unis ont perdu la face en tant que
786
tats-Unis ont perdu la face en tant que champions
de
la non-intervention. Au Katanga, l’ONU a perdu la face en tant que ch
787
tanga, l’ONU a perdu la face en tant que champion
de
l’arbitrage pacifique et du droit des petits États. Quant à l’Allemag
788
u’elle a fait perdre la face, en bâtissant le mur
de
Berlin non pour se protéger contre une attaque, mais pour empêcher to
789
re une attaque, mais pour empêcher tout un peuple
de
fuir en masse le régime « populaire » ! Et tandis que les grands Mora
790
it un redressement spectaculaire. Aux États-Unis,
d’
où je reviens, il n’est question que du « miracle européen ». C’est un
791
st opérée dans le temps même où l’Europe achevait
de
libérer ses colonies — dont on prétendait qu’elle vivait ! A-t-on rem
792
marqué le parallélisme, si frappant, entre la fin
de
la domination mondiale par nos nations, et les débuts de leur union ?
793
omination mondiale par nos nations, et les débuts
de
leur union ? Tandis que le tiers-monde, copiant ses anciens maîtres,
794
sion à ce Marché commun qu’elle affecta longtemps
de
traiter d’utopie, la Grande-Bretagne a démontré que l’Europe unie éta
795
arché commun qu’elle affecta longtemps de traiter
d’
utopie, la Grande-Bretagne a démontré que l’Europe unie était d’ores e
796
it d’ores et déjà bien autre chose qu’une rêverie
d’
intellectuels. Tel est sans doute le fait majeur qui marquera l’année
797
yeux de l’histoire. En offrant au monde l’exemple
d’
une fédération pacifique — que la Suisse a toutes les raisons de ne pl
798
on pacifique — que la Suisse a toutes les raisons
de
ne plus bouder — les Européens reprendront la tête du progrès humain.
799
rielle, mais ils indiqueront aux peuples nouveaux
de
l’Afrique et de l’Asie les voies de leur propre avenir. Une fois unie
800
indiqueront aux peuples nouveaux de l’Afrique et
de
l’Asie les voies de leur propre avenir. Une fois unie politiquement,
801
ples nouveaux de l’Afrique et de l’Asie les voies
de
leur propre avenir. Une fois unie politiquement, l’Europe exercerait
802
e. Et le Grand Occident reconstitué serait garant
de
la paix mondiale. N’est-il pas admirable que l’année de l’Europe ait
803
paix mondiale. N’est-il pas admirable que l’année
de
l’Europe ait coïncidé par hasard avec l’année d’une grande étape œcum
804
de l’Europe ait coïncidé par hasard avec l’année
d’
une grande étape œcuménique, la Nouvelle Delhi ? L’Église de Rome joue
805
de étape œcuménique, la Nouvelle Delhi ? L’Église
de
Rome jouera sa part l’année prochaine. Nous sommes au seuil de l’ère
806
a sa part l’année prochaine. Nous sommes au seuil
de
l’ère des convergences, au-delà des nations souveraines et des église
807
pouvons adresser nos vœux. w. Rougemont Denis
de
, « Bilan simple », La Vie protestante, Genève, 29 décembre 1961, p. 1
808
Votre question m’atteint tandis que je m’efforce
d’
ordonner un chaos de notes d’âges très divers en vue d’un livre sur le
809
teint tandis que je m’efforce d’ordonner un chaos
de
notes d’âges très divers en vue d’un livre sur le protestantisme, pro
810
dis que je m’efforce d’ordonner un chaos de notes
d’
âges très divers en vue d’un livre sur le protestantisme, promis depui
811
onner un chaos de notes d’âges très divers en vue
d’
un livre sur le protestantisme, promis depuis longtemps à l’éditeur, e
812
et Calvin n’ont pas été les premiers réformateurs
de
l’Église, et ne seront pas les derniers. Défendre l’héritage de la Ré
813
t ne seront pas les derniers. Défendre l’héritage
de
la Réformation, ce n’est pas répéter ce que disaient ses auteurs, mai
814
à réformer. Seuls peuvent être fidèles à l’esprit
de
Luther et de Calvin un luthéranisme et un calvinisme continuellement
815
euls peuvent être fidèles à l’esprit de Luther et
de
Calvin un luthéranisme et un calvinisme continuellement repris à leur
816
on usage réel et quotidien, avec tous les risques
d’
hérésie (hardiment assumés) que cela comporte, et en même temps reliés
817
t en même temps reliés sans relâche à l’espérance
de
l’Église universelle, à l’avenir catholique, et orthodoxe, à la Pente
818
i qu’en décide finalement son chef. Qu’avons-nous
de
pareil ? Et je ne dis pas seulement : quelle autorité efficace dont l
819
ité efficace dont les décrets traduisent les vœux
d’
une imposante majorité, mais tout simplement quelle tribune ? Je const
820
elle tribune ? Je constate que l’Église romaine a
de
meilleurs instruments d’autocritique, de remise en question et de ren
821
e que l’Église romaine a de meilleurs instruments
d’
autocritique, de remise en question et de renouvellement que les Églis
822
omaine a de meilleurs instruments d’autocritique,
de
remise en question et de renouvellement que les Églises issues de la
823
truments d’autocritique, de remise en question et
de
renouvellement que les Églises issues de la Réformation… Se pourrait-
824
stion et de renouvellement que les Églises issues
de
la Réformation… Se pourrait-il qu’elle ait bientôt plus de réformateu
825
ormation… Se pourrait-il qu’elle ait bientôt plus
de
réformateurs vivants et d’avenir que nous n’en vénérons dans notre hi
826
’elle ait bientôt plus de réformateurs vivants et
d’
avenir que nous n’en vénérons dans notre histoire ? Bon sujet de réfle
827
ous n’en vénérons dans notre histoire ? Bon sujet
de
réflexion, en cet anniversaire. u. Rougemont Denis de, « [Réponse
828
exion, en cet anniversaire. u. Rougemont Denis
de
, « [Réponse à une enquête] Que signifie pour vous la formule célèbre
829
allons chercher l’actualité qui sera notre sujet
de
réflexion, mais sur la Lune. Il m’est venu une question, Denis de Rou
830
u une question, Denis de Rougemont, et j’ai envie
de
la poser au philosophe que vous êtes : est-ce que nous savons pourquo
831
nous y allons ? Ce qui me frappe dans l’aventure
d’
« Apollo », c’est qu’elle est l’entreprise qui a coûté le plus cher da
832
se qui a coûté le plus cher dans toute l’histoire
de
l’humanité — on la chiffre à peu près à 100 milliards de francs — mai
833
manité — on la chiffre à peu près à 100 milliards
de
francs — mais cette opération, la plus chère du monde, est aussi la m
834
’autres motivations, tout de même. Une motivation
de
curiosité, naturellement, et de record technique — battre les Russes
835
e. Une motivation de curiosité, naturellement, et
de
record technique — battre les Russes sur ce plan — et finalement, en
836
e plan — et finalement, en dernier lieu, un motif
de
connaissance pure, scientifique. Tout cela ramène toujours au même mo
837
i, on aurait pu consacrer ne fût-ce qu’une partie
de
ces 100 milliards de francs suisses à augmenter la beauté de notre Te
838
crer ne fût-ce qu’une partie de ces 100 milliards
de
francs suisses à augmenter la beauté de notre Terre, à diminuer la fa
839
milliards de francs suisses à augmenter la beauté
de
notre Terre, à diminuer la famine, à lutter contre la pauvreté ou pou
840
ui nous occupe ? Je pense qu’il y a là une espèce
de
fuite devant les problèmes du monde, un phénomène psychologique assez
841
au ciel, à effectuer un transfert dans les nuées
de
cet affrontement trop dangereux sur la Terre. Au fond, c’est dans ce
842
maine seul qu’ils ont réussi à trouver les moyens
d’
une espèce non pas de coopération — c’est encore trop tôt — mais de co
843
réussi à trouver les moyens d’une espèce non pas
de
coopération — c’est encore trop tôt — mais de coexistence. C’était au
844
pas de coopération — c’est encore trop tôt — mais
de
coexistence. C’était aussi l’opinion. Si vous voulez le fond de ma pe
845
. C’était aussi l’opinion. Si vous voulez le fond
de
ma pensée sur l’aventure d’« Apollo », je vous ferai remarquer ceci :
846
i vous voulez le fond de ma pensée sur l’aventure
d’
« Apollo », je vous ferai remarquer ceci : on dit que c’est une aventu
847
Et ils font cela en service commandé : au service
de
l’armée américaine. Et généralement, quand ils reviennent après une e
848
nt pas les « bons » (les vrais) que l’on décidera
d’
adopter officiellement, dans les livres d’histoire par exemple. Je pen
849
écidera d’adopter officiellement, dans les livres
d’
histoire par exemple. Je pense que si on découvre un jour dans l’espac
850
ajet des nuages ou des maladies — je ne sais quoi
d’
inattendu aujourd’hui, qu’on ne cherche donc pas consciemment, on dira
851
he Colomb, mais en sens inverse : dans les livres
d’
histoire d’aujourd’hui, vous lisez très couramment que si Christophe C
852
mais en sens inverse : dans les livres d’histoire
d’
aujourd’hui, vous lisez très couramment que si Christophe Colomb est p
853
es caravelles, c’est parce qu’il était au service
d’
un roi d’Espagne rapace, cupide, qui voulait de l’or et des esclaves,
854
ce d’un roi d’Espagne rapace, cupide, qui voulait
de
l’or et des esclaves, et qui l’a envoyé découvrir l’Amérique pour cel
855
l’Amérique pour cela. Or les motivations réelles
de
Christophe Colomb étaient d’un tout autre ordre — on peut le vérifier
856
motivations réelles de Christophe Colomb étaient
d’
un tout autre ordre — on peut le vérifier dans son journal : c’était d
857
— on peut le vérifier dans son journal : c’était
de
financer une dernière croisade pour délivrer Jérusalem — motif mystiq
858
i avait dit qu’aux Indes les cités étaient pavées
d’
or et les palais recouverts de tuiles d’or. Or Christophe Colomb a tro
859
ités étaient pavées d’or et les palais recouverts
de
tuiles d’or. Or Christophe Colomb a trouvé l’Amérique, qu’il ne cherc
860
nt pavées d’or et les palais recouverts de tuiles
d’
or. Or Christophe Colomb a trouvé l’Amérique, qu’il ne cherchait pas.
861
e cherchait pas. Et bien après lui, on y a trouvé
de
l’or. Et un peu après lui, on y a recruté des esclaves. Mais la motiv
862
a recruté des esclaves. Mais la motivation était
d’
un ordre complètement différent. Je voudrais vous poser une autre ques
863
s déçu, finalement, ou est-ce que vous avez envie
d’
aller dans la Lune ? Je suis profondément déçu. Je suis dans un sentim
864
suis profondément déçu. Je suis dans un sentiment
de
désenchantement. J’ai l’impression que les rêves de l’humanité depuis
865
désenchantement. J’ai l’impression que les rêves
de
l’humanité depuis des siècles — les rêves de poètes, les rêves de fan
866
êves de l’humanité depuis des siècles — les rêves
de
poètes, les rêves de fantaisistes comme Cyrano de Bergerac, les rêves
867
puis des siècles — les rêves de poètes, les rêves
de
fantaisistes comme Cyrano de Bergerac, les rêves de Jules Verne — dép
868
fantaisistes comme Cyrano de Bergerac, les rêves
de
Jules Verne — dépassaient de beaucoup ce que nous sommes en train de
869
Bergerac, les rêves de Jules Verne — dépassaient
de
beaucoup ce que nous sommes en train de faire. Le rêve dévalorise l’a
870
rain de faire. Le rêve dévalorise l’actualisation
de
la découverte de la Lune. Cyrano de Bergerac, par exemple, dans le fa
871
rêve dévalorise l’actualisation de la découverte
de
la Lune. Cyrano de Bergerac, par exemple, dans le fameux récit de son
872
no de Bergerac, par exemple, dans le fameux récit
de
son Voyage dans les empires de la Lune et du Soleil, décrit la Lune c
873
ns le fameux récit de son Voyage dans les empires
de
la Lune et du Soleil, décrit la Lune comme quelque chose d’absolument
874
et du Soleil, décrit la Lune comme quelque chose
d’
absolument idyllique, c’est le paradis terrestre transporté, il y renc
875
tre des hommes très bien, il y rencontre le génie
de
Socrate, tout se passe merveilleusement. Eh bien ! au fur et à mesure
876
au fur et à mesure qu’on avance vers la substance
de
la chose, quand on est prêt à la toucher, on s’aperçoit que la Lune e
877
Lune est une malheureuse, vilaine chose, couverte
de
tuf volcanique, de lave pulvérulente. En somme, c’est une sorte de ba
878
reuse, vilaine chose, couverte de tuf volcanique,
de
lave pulvérulente. En somme, c’est une sorte de banlieue poussiéreuse
879
, de lave pulvérulente. En somme, c’est une sorte
de
banlieue poussiéreuse de la Terre. … et inhabitée ! Car l’essentiel d
880
n somme, c’est une sorte de banlieue poussiéreuse
de
la Terre. … et inhabitée ! Car l’essentiel des rêves des poètes ou de
881
habitée ! Car l’essentiel des rêves des poètes ou
de
Cyrano de Bergerac, c’était d’imaginer une race d’hommes supérieurs,
882
êves des poètes ou de Cyrano de Bergerac, c’était
d’
imaginer une race d’hommes supérieurs, intelligents, meilleurs que nou
883
e Cyrano de Bergerac, c’était d’imaginer une race
d’
hommes supérieurs, intelligents, meilleurs que nous, qui habitaient la
884
yait le premier obus sur la Lune : c’est un texte
de
Werner von Braun, qui est un des pères du voyage dans la Lune, et qui
885
as. Il nous dit que nous aurons là-bas des hôtels
de
grand luxe, avec des paysages extraordinaires. Alors on arrive à se d
886
0 milliards — 100 milliards n’étant qu’une partie
de
la dépense totale — pour avoir un Moon-Hilton ? … devant des paysages
887
! Je dois dire que quand je pense à l’éventualité
d’
un exil sur la Lune, il me prend un amour passionné de la Terre, de la
888
exil sur la Lune, il me prend un amour passionné
de
la Terre, de la surface terrestre, des arbres, de l’herbe… Ce sont de
889
Lune, il me prend un amour passionné de la Terre,
de
la surface terrestre, des arbres, de l’herbe… Ce sont des réactions s
890
de la Terre, de la surface terrestre, des arbres,
de
l’herbe… Ce sont des réactions subjectives que nous exprimons. Mais o
891
je voulais vous rappeler une déclaration célèbre
de
Lénine. H. G. Wells, le célèbre romancier anglais, qui est l’un des p
892
célèbre romancier anglais, qui est l’un des pères
de
l’anticipation, était allé l’interviewer. « Je dis à Lénine, raconte
893
dis à Lénine, raconte Wells, que le développement
de
la technique humaine pourrait un jour changer la situation mondiale :
894
: la conception marxiste elle-même n’aurait plus
de
sens. » Et à la grande stupéfaction de Wells, « Lénine, dit-il, me re
895
urait plus de sens. » Et à la grande stupéfaction
de
Wells, « Lénine, dit-il, me regarda et me répondit : Vous avez raison
896
iel technique, devenu illimité, imposerait la fin
de
la violence comme moyen et comme méthode de progrès ». Dans la bouche
897
a fin de la violence comme moyen et comme méthode
de
progrès ». Dans la bouche de Lénine, c’est une prophétie assez extrao
898
yen et comme méthode de progrès ». Dans la bouche
de
Lénine, c’est une prophétie assez extraordinaire : est-ce qu’elle est
899
, mais d’autre part elle suppose certaines formes
de
coopération discrète et en tout cas de coexistence. Lénine dit aussi
900
nes formes de coopération discrète et en tout cas
de
coexistence. Lénine dit aussi : « Il faudra changer nos conceptions p
901
st le marxisme, qui est une doctrine des rapports
de
productions, il est évident qu’elle ne vaut plus rien si on va sur la
902
plus rien si on va sur la Lune — où les rapports
de
productions ne sont en rien comparables à ce qu’ils étaient au xixe
903
ècle, quand Marx a écrit sa théorie. Il n’y a pas
de
prolétariat sur la Lune, pour l’instant. Justement, et on ne va pas e
904
vront être révisées dans ces nouvelles dimensions
de
l’espace. Car si vous prenez une doctrine comme le christianisme, don
905
ivent sur la Lune. Ils auront les mêmes problèmes
de
s’aimer activement, de s’entraider, qu’ils auraient sur la Terre ou s
906
auront les mêmes problèmes de s’aimer activement,
de
s’entraider, qu’ils auraient sur la Terre ou sur Mars. D’ailleurs, ce
907
la Terre ou sur Mars. D’ailleurs, cette question
de
dimensions, qui va changer quand nous aurons l’espace et pas seulemen
908
espace et pas seulement la Terre et le petit coin
de
ciel que nous voyons, permet de tirer des conclusions très ambiguës.
909
et le petit coin de ciel que nous voyons, permet
de
tirer des conclusions très ambiguës. Moi, j’ai une impression de frus
910
nclusions très ambiguës. Moi, j’ai une impression
de
frustration, à me dire : la Lune, ce n’est pas aussi beau, ce n’est p
911
entées dans l’espace. Et cela me ramène à l’amour
de
la Terre. Plus encore, cela me ramène à cette idée que la véritable a
912
able aventure humaine est à l’intérieur de chacun
de
nous, non pas à l’extérieur, dans l’espace, le cosmos physique. Je cr
913
osmos physique. Je crois que même du point de vue
de
la technique, les plus grands achèvements humains sont les plus simpl
914
ont les plus simples, ceux qui demandent le moins
d’
argent et qui finissent par se faire en un clin d’œil, à la vitesse de
915
ssent par se faire en un clin d’œil, à la vitesse
de
la pensée. Eh bien ! l’aventure intérieure, elle ne demande rien, ell
916
rieure, elle ne demande rien, elle ne demande pas
de
crédits spéciaux. Pour entrer dans le fond de soi-même, pour y découv
917
pas de crédits spéciaux. Pour entrer dans le fond
de
soi-même, pour y découvrir des choses complètement nouvelles, et réel
918
. En quoi je pense qu’elle est vraiment le sommet
de
l’aventure humaine. Relisant au lendemain du retour des cosmonautes
919
demain du retour des cosmonautes la transcription
de
cet entretien télévisé, je ne vois rien à modifier à ce que je disais
920
difier à ce que je disais un mois avant le départ
d’
Apollo 11. Il y avait là comme un écho anticipé de ce que tant d’autre
921
d’Apollo 11. Il y avait là comme un écho anticipé
de
ce que tant d’autres ont dit depuis, parmi lesquels, une bonne moitié
922
e moitié des citoyens américains, et quelques-uns
de
nos meilleurs esprits européens : « Quel merveilleux exploit techniqu
923
rtée sur la Terre une part ou moins des centaines
de
milliards qu’on destinait à se perdre au ciel vide. Quant à ma conclu
924
ais cela se pratique comment ? Voilà le type même
de
la question qui peut ouvrir, obscurément, la voie, mais à laquelle pe
925
non, où serait l’aventure ? x. Rougemont Denis
de
, « [Entretien] La lune, ce n’est pas le paradis », La Vie protestante
926
mande, Denis de Rougemont répondait aux questions
de
Pierre Desgraupes sur Apollo 11. Cet entretien avait fait impression.
927
t, en quelques lignes, ce qu’il pense aujourd’hui
de
l’événement qu’il avait commenté à l’avance. »
928
se que nous sommes responsables, nous les hommes,
de
toutes les crises de l’humanité et de leur développement. Dans le mon
929
sponsables, nous les hommes, de toutes les crises
de
l’humanité et de leur développement. Dans le monde où nous existons,
930
les hommes, de toutes les crises de l’humanité et
de
leur développement. Dans le monde où nous existons, même la nature es
931
me la nature est faite par l’homme, il n’y a plus
de
nature sauvage. Il faut bien que l’homme moderne en prenne conscience
932
st probablement la dernière chance que nous avons
de
sortir de la crise dans laquelle nous nous sommes plongés. Pour la pr
933
ement la dernière chance que nous avons de sortir
de
la crise dans laquelle nous nous sommes plongés. Pour la première foi
934
e nous nous sommes plongés. Pour la première fois
de
l’histoire, l’homme se voit contraint de choisir librement son avenir
935
ère fois de l’histoire, l’homme se voit contraint
de
choisir librement son avenir. Ce n’est donc pas dans une visée promét
936
s un défi. Simplement, nous n’avons plus le droit
de
nous cacher, même derrière Dieu. Quand on voit que les choses tournen
937
On en revient toujours à l’histoire du chapitre 3
de
la Genèse. Vous en appelez à la responsabilité ; c’est bien parce que
938
plutôt chevillé au corps. C’est peut-être l’envie
de
vivre, une curiosité (savoir ce qui va se passer après), et c’est peu
939
pirituel — dans un sens simplement physiologique,
de
manière que l’histoire dure encore. Je sais bien, si on s’en rapporte
940
calypse » veut dire « révélation », et révélation
de
la Nouvelle Jérusalem, d’une cité nouvelle qui sera vraiment humaine
941
lation », et révélation de la Nouvelle Jérusalem,
d’
une cité nouvelle qui sera vraiment humaine et en même temps vraiment
942
aine et en même temps vraiment divine (« à mesure
d’
homme, qui est mesure d’ange » : Apoc. ch. 21, v. 17). Il est question
943
aiment divine (« à mesure d’homme, qui est mesure
d’
ange » : Apoc. ch. 21, v. 17). Il est question là d’un développement d
944
ange » : Apoc. ch. 21, v. 17). Il est question là
d’
un développement de la vie de l’humanité vers la plénitude, qui est u
945
21, v. 17). Il est question là d’un développement
de
la vie de l’humanité vers la plénitude, qui est une divinisation de
946
. Il est question là d’un développement de la vie
de
l’humanité vers la plénitude, qui est une divinisation de l’homme. S
947
nité vers la plénitude, qui est une divinisation
de
l’homme. S’il y a dans votre livre des passages très pessimistes où v
948
ous semblez provoquer la peur du lecteur, le fond
de
tout est pourtant un courant d’optimisme et d’espérance ? Oui ! Si j’
949
lecteur, le fond de tout est pourtant un courant
d’
optimisme et d’espérance ? Oui ! Si j’étais totalement pessimiste, si
950
nd de tout est pourtant un courant d’optimisme et
d’
espérance ? Oui ! Si j’étais totalement pessimiste, si je pensais qu’i
951
je prends tout à fait au sérieux l’avertissement
d’
Isaïe (ch. 21, v. 12) : « Sentinelle, que dis-tu de la nuit ? — Le mat
952
’Isaïe (ch. 21, v. 12) : « Sentinelle, que dis-tu
de
la nuit ? — Le matin vient, et la nuit aussi ». Il y a donc toujours
953
bof ») et une certaine révolte ? C’est un manque
d’
information qui fait dire « bof » à des jeunes gens. Si on vient leur
954
bof » à des jeunes gens. Si on vient leur parler
de
menaces sur la vie physique de l’humanité, ça les embête, ça leur fai
955
vient leur parler de menaces sur la vie physique
de
l’humanité, ça les embête, ça leur fait peur — comme à tout le monde,
956
utre chose que « Foutez-moi la paix ! je m’occupe
de
mes petites affaires, celles de mon âge, mettons ! » Mais les jeunes
957
aix ! je m’occupe de mes petites affaires, celles
de
mon âge, mettons ! » Mais les jeunes que je connais ne partagent pas
958
pas du tout cette attitude : quand on leur parle
de
pollution de la terre, des airs, des forêts, des océans et des désert
959
cette attitude : quand on leur parle de pollution
de
la terre, des airs, des forêts, des océans et des déserts, du danger
960
, des océans et des déserts, du danger nucléaire,
de
la guerre atomique qui risque d’éclater n’importe quand, ils ne disen
961
anger nucléaire, de la guerre atomique qui risque
d’
éclater n’importe quand, ils ne disent pas « bof ». Ceux que je connai
962
f ». Ceux que je connais. Je pense qu’il est faux
de
dire que la génération actuelle est la « bof-génération » : ce sont d
963
pour faire monter le tirage… Par quel cheminement
de
votre existence en êtes-vous arrivé au thème de ce livre ? J’ai comme
964
t de votre existence en êtes-vous arrivé au thème
de
ce livre ? J’ai commencé assez jeune à m’occuper des affaires publiqu
965
à m’occuper des affaires publiques, des affaires
de
la civilisation au xxe siècle. En 1928 j’ai écrit un article sur les
966
e. En 1928 j’ai écrit un article sur les mémoires
de
Henry Ford, Ma Vie, publiés en français. L’article était intitulé « L
967
etite revue qui ne comptait que quelques milliers
de
lecteurs ( Foi et Vie ), cela n’a eu aucun effet, sauf sur moi. Le fa
968
avant le club de Rome ! J’ai repris la discussion
de
ces idées anticroissance avec les premiers personnalistes que j’ai re
969
lesquelles vous trouverez facilement les amorces
de
toutes les idées de mon dernier livre. Nous étions une génération — q
970
uverez facilement les amorces de toutes les idées
de
mon dernier livre. Nous étions une génération — qui ne disait pas « b
971
France). Toutes les idées fédéralistes, les idées
d’
autogestion, de région, de modération de la croissance, d’équilibre à
972
les idées fédéralistes, les idées d’autogestion,
de
région, de modération de la croissance, d’équilibre à rétablir entre
973
fédéralistes, les idées d’autogestion, de région,
de
modération de la croissance, d’équilibre à rétablir entre l’homme et
974
les idées d’autogestion, de région, de modération
de
la croissance, d’équilibre à rétablir entre l’homme et la nature : to
975
stion, de région, de modération de la croissance,
d’
équilibre à rétablir entre l’homme et la nature : tout cela était déjà
976
roire au monde entier que ce qu’il fallait copier
de
nous, c’étaient nos machines, nos armes, et jamais nos valeurs puisqu
977
compte nous-mêmes. La cause européenne, la lutte
de
ces dernières années ont épanoui nos recherches des années 1930. La g
978
hélas, nous ne le cherchions pas. Les prophètes,
d’
une manière générale, n’ont pas du tout envie d’avoir raison ; ils vou
979
, d’une manière générale, n’ont pas du tout envie
d’
avoir raison ; ils vous adjurent de changer pour éviter les désastres,
980
du tout envie d’avoir raison ; ils vous adjurent
de
changer pour éviter les désastres, et de leur donner tort en changean
981
adjurent de changer pour éviter les désastres, et
de
leur donner tort en changeant de cap. Votre critique de l’État-nation
982
es désastres, et de leur donner tort en changeant
de
cap. Votre critique de l’État-nation porte-t-elle aussi sur la Suisse
983
r donner tort en changeant de cap. Votre critique
de
l’État-nation porte-t-elle aussi sur la Suisse ? C’est une question à
984
e ? C’est une question à laquelle je suis heureux
de
pouvoir répondre de manière très nette. L’exemple que nous avions sou
985
on à laquelle je suis heureux de pouvoir répondre
de
manière très nette. L’exemple que nous avions sous les yeux en 1931-1
986
-1932 était l’État centralisé français, le modèle
de
tous les États-nations. Nous entendions par État-nation la mainmise d
987
ions. Nous entendions par État-nation la mainmise
d’
un appareil étatique sur l’ensemble d’une nation, l’État imposant les
988
la mainmise d’un appareil étatique sur l’ensemble
d’
une nation, l’État imposant les mêmes frontières, le même territoire,
989
mais j’avais, je pense, derrière la tête, l’idée
de
leur opposer l’État fédératif, le modèle suisse. J’avoue qu’à ce mome
990
mal ce modèle, je ne m’étais pas beaucoup occupé
de
politique pendant mes études en Suisse, et je me considérais, étant à
991
rt les trésors du fédéralisme. Nous parlions déjà
de
fédéralisme, même d’un type de défense village par village, en hériss
992
éralisme. Nous parlions déjà de fédéralisme, même
d’
un type de défense village par village, en hérisson, à appliquer à l’E
993
Nous parlions déjà de fédéralisme, même d’un type
de
défense village par village, en hérisson, à appliquer à l’Europe pour
994
ique suisse, que l’on m’avait enseignée à l’école
d’
officiers en 1928 ! Une défense avec l’esprit autant qu’avec les armes
995
e par tous les moyens, sur place, défense d’abord
de
sa maison, de sa petite patrie locale, de son mode de vie : une forme
996
moyens, sur place, défense d’abord de sa maison,
de
sa petite patrie locale, de son mode de vie : une forme de guerre pur
997
d’abord de sa maison, de sa petite patrie locale,
de
son mode de vie : une forme de guerre purement défensive. C’est en Am
998
ite patrie locale, de son mode de vie : une forme
de
guerre purement défensive. C’est en Amérique (de 1940 à 1946) que j’a
999
de guerre purement défensive. C’est en Amérique (
de
1940 à 1946) que j’ai découvert l’Europe ! et la Suisse notamment ! I
1000
ope ! et la Suisse notamment ! Il faut s’éloigner
de
quelque chose pour savoir ce que c’est. En Amérique, il n’y avait rie
1001
alors j’ai écrit un petit livre intitulé Le Cœur
de
l’Europe et cela m’a permis de découvrir le fonctionnement du fédéra
1002
intitulé Le Cœur de l’Europe et cela m’a permis
de
découvrir le fonctionnement du fédéralisme. La critique de l’État-nat
1003
rir le fonctionnement du fédéralisme. La critique
de
l’État-nation ne s’adresse donc pas à la Suisse, elle indique simplem
1004
ation » peuvent se révéler dans certains secteurs
de
la vie du pays : le nucléaire ? Le nucléaire ! Il y a pour la Suisse,
1005
n danger certain : voilà un État fédéral, entouré
d’
États-nations et qui, vis-à-vis d’eux, ses voisins, se présente finale
1006
édéral, entouré d’États-nations et qui, vis-à-vis
d’
eux, ses voisins, se présente finalement lui-même comme un État-nation
1007
lée à un certain centralisme dès qu’elle s’occupe
d’
objets trop grands. Le nucléaire en est un excellent exemple. Le nuclé
1008
emple. Le nucléaire n’est absolument pas le moyen
d’
assurer l’indépendance énergétique d’un pays, à preuve qu’en France le
1009
pas le moyen d’assurer l’indépendance énergétique
d’
un pays, à preuve qu’en France le nucléaire est appliqué d’après une l
1010
ence américaine, son combustible vient des USA et
de
Russie (remplaçant la dépendance des Arabes pour le pétrole), et les
1011
aux viennent de partout. Des Arabes, de nouveau ?
De
partout, de l’Iran, pour 40 % dans la société qui contrôle la constru
1012
de partout. Des Arabes, de nouveau ? De partout,
de
l’Iran, pour 40 % dans la société qui contrôle la construction de Sup
1013
40 % dans la société qui contrôle la construction
de
Superphénix (voir le rapport de la Commission des finances du Parleme
1014
e la construction de Superphénix (voir le rapport
de
la Commission des finances du Parlement français). Pour la Suisse, il
1015
ce pour la démocratie. Vous êtes membre du Groupe
de
Bellerive : que fait-il ? C’est un groupe de personnalités internatio
1016
oupe de Bellerive : que fait-il ? C’est un groupe
de
personnalités internationales habitant Genève, qui s’est réuni pour m
1017
ucléaire en général, mais contre le surgénérateur
de
Creys-Malville, Superphénix, et contre les atteintes aux droits de l’
1018
e l’homme qu’entraîne fatalement une construction
de
cette dimension. Le nucléaire, l’hitlérisme, la folie de l’auto ; que
1019
e dimension. Le nucléaire, l’hitlérisme, la folie
de
l’auto ; quel est au fond leur lien ? Ils gouvernent tous, de manière
1020
quel est au fond leur lien ? Ils gouvernent tous,
de
manière systématique et synthétique (chacun commandant tous les autre
1021
ndant tous les autres), vers la réalité écrasante
de
l’État-nation, qui résume à peu près tout ce que je dénonce : la dépe
1022
que je dénonce : la dépersonnalisation, la perte
de
responsabilité (donc de liberté), la centralisation, l’avantage donné
1023
ersonnalisation, la perte de responsabilité (donc
de
liberté), la centralisation, l’avantage donné à ce qui est toujours p
1024
urs plus cher, plus dangereux, et permet à l’État
de
mieux contrôler les investissements, les mouvements de fonds, et l’in
1025
eux contrôler les investissements, les mouvements
de
fonds, et l’intervention croissante dans la vie de tous les jours de
1026
e fonds, et l’intervention croissante dans la vie
de
tous les jours de la police. Finalement, toute cette évolution pointe
1027
rvention croissante dans la vie de tous les jours
de
la police. Finalement, toute cette évolution pointe irrésistiblement
1028
guerre nucléaire ; ce n’est pas vrai. Les usines
de
retraitement des déchets de centrales nucléaires fournissent le pluto
1029
pas vrai. Les usines de retraitement des déchets
de
centrales nucléaires fournissent le plutonium qui permet de faire des
1030
es nucléaires fournissent le plutonium qui permet
de
faire des bombes. Tout cela donc fait l’unité de mon livre : mon souc
1031
de faire des bombes. Tout cela donc fait l’unité
de
mon livre : mon souci dernier est d’éviter la guerre nucléaire, vers
1032
fait l’unité de mon livre : mon souci dernier est
d’
éviter la guerre nucléaire, vers laquelle tout nous pousse aujourd’hui
1033
our les régions, pour les petites unités qui sont
de
vraies communautés. « Small is beautiful ». Quelle est la tâche des c
1034
nt toutes les solutions qu’on leur propose, c’est
de
s’efforcer d’être chrétiens. Cela veut dire d’abord : ne pas donner d
1035
solutions qu’on leur propose, c’est de s’efforcer
d’
être chrétiens. Cela veut dire d’abord : ne pas donner dans cette foll
1036
puissance, la richesse, et être chrétien. L’idée
de
la croissance illimitée comme bien suprême de l’humanité est une idée
1037
dée de la croissance illimitée comme bien suprême
de
l’humanité est une idée fondamentalement antichrétienne. Refuser la p
1038
Refuser la puissance ne veut pas dire se retirer
de
tout, laisser aller les choses ? Les chrétiens doivent vouloir et pré
1039
rer une société où chacun puisse être le prochain
de
l’autre, donc une société formée de petites communautés fédérées entr
1040
e le prochain de l’autre, donc une société formée
de
petites communautés fédérées entre elles. Là, chacun peut être libre
1041
sa vocation, devenir une personne. Dans une ville
de
13 millions d’habitants, il n’y a plus ni communauté, ni responsabili
1042
venir une personne. Dans une ville de 13 millions
d’
habitants, il n’y a plus ni communauté, ni responsabilité, ni liberté.
1043
promiscuité des solitudes. z. Rougemont Denis
de
, « [Entretien] Bof ! disent les jeunes, pourquoi ? », La Vie protesta