1 1937, Journal d’un intellectuel en chômage. Préambule
1 Préambule Une vague vient se jeter sur la bâche qui couvre l’avant du bateau, et de l’eau gicle sur nos visages
2 Une vague vient se jeter sur la bâche qui couvre l’ avant du bateau, et de l’eau gicle sur nos visages glacés. « Tire le g
3 ter sur la bâche qui couvre l’avant du bateau, et de l’eau gicle sur nos visages glacés. « Tire le gramophone entre tes ja
4 sur la bâche qui couvre l’avant du bateau, et de l’ eau gicle sur nos visages glacés. « Tire le gramophone entre tes jambe
5 et de l’eau gicle sur nos visages glacés. « Tire le gramophone entre tes jambes, là, sous ton imperméable, que le cuir ne
6 e entre tes jambes, là, sous ton imperméable, que le cuir ne soit pas mouillé. » (C’est qu’on nous l’a prêté, il faut le s
7 le cuir ne soit pas mouillé. » (C’est qu’on nous l’ a prêté, il faut le soigner…) Nous sortons du port, et tout de suite l
8 s mouillé. » (C’est qu’on nous l’a prêté, il faut le soigner…) Nous sortons du port, et tout de suite la mer est forte. Un
9 soigner…) Nous sortons du port, et tout de suite la mer est forte. Un éclair sur l’eau verte, un gros coup de vent : voil
10 et tout de suite la mer est forte. Un éclair sur l’ eau verte, un gros coup de vent : voilà nos compagnons de voyage, le m
11 erte, un gros coup de vent : voilà nos compagnons de voyage, le médecin de l’île et trois représentants de commerce, qui s
12 os coup de vent : voilà nos compagnons de voyage, le médecin de l’île et trois représentants de commerce, qui se précipite
13 vent : voilà nos compagnons de voyage, le médecin de l’île et trois représentants de commerce, qui se précipitent dans la
14 t : voilà nos compagnons de voyage, le médecin de l’ île et trois représentants de commerce, qui se précipitent dans la cab
15 oyage, le médecin de l’île et trois représentants de commerce, qui se précipitent dans la cabine de la cale par une espèce
16 eprésentants de commerce, qui se précipitent dans la cabine de la cale par une espèce de trappe. Nous restons seuls sur le
17 ts de commerce, qui se précipitent dans la cabine de la cale par une espèce de trappe. Nous restons seuls sur le pont, ma
18 de commerce, qui se précipitent dans la cabine de la cale par une espèce de trappe. Nous restons seuls sur le pont, ma fem
19 cipitent dans la cabine de la cale par une espèce de trappe. Nous restons seuls sur le pont, ma femme et moi, à entasser n
20 par une espèce de trappe. Nous restons seuls sur le pont, ma femme et moi, à entasser nos valises tant bien que mal à l’a
21 t moi, à entasser nos valises tant bien que mal à l’ abri. Un autre éclair siffle et claque tout près. La tempête est venue
22 abri. Un autre éclair siffle et claque tout près. La tempête est venue brusquement avec l’aube. Depuis une heure nous batt
23 tout près. La tempête est venue brusquement avec l’ aube. Depuis une heure nous battions la semelle sur les quais déserts
24 ement avec l’aube. Depuis une heure nous battions la semelle sur les quais déserts de ce port fantomatique, sans ville der
25 be. Depuis une heure nous battions la semelle sur les quais déserts de ce port fantomatique, sans ville derrière lui, vague
26 re nous battions la semelle sur les quais déserts de ce port fantomatique, sans ville derrière lui, vaguement américain et
27 américain et militaire, sous un ciel bas couleur d’ acier où rien ne bougeait, et voilà tout d’un coup cet orage de novemb
28 ouleur d’acier où rien ne bougeait, et voilà tout d’ un coup cet orage de novembre qui crible et bat les flots durant la co
29 en ne bougeait, et voilà tout d’un coup cet orage de novembre qui crible et bat les flots durant la courte traversée, puis
30 d’un coup cet orage de novembre qui crible et bat les flots durant la courte traversée, puis s’apaise non moins subitement
31 ge de novembre qui crible et bat les flots durant la courte traversée, puis s’apaise non moins subitement à l’instant où n
32 non moins subitement à l’instant où nous touchons l’ île. La colère du détroit nous a salués ! J’accepte cet augure à doubl
33 ns subitement à l’instant où nous touchons l’île. La colère du détroit nous a salués ! J’accepte cet augure à double sens,
34  ! J’accepte cet augure à double sens, certifiant la présence d’un destin. Voici l’île : une plage basse, quelques pins, d
35 cet augure à double sens, certifiant la présence d’ un destin. Voici l’île : une plage basse, quelques pins, deux ou trois
36 e sens, certifiant la présence d’un destin. Voici l’ île : une plage basse, quelques pins, deux ou trois baraques. Nous tra
37 deux ou trois baraques. Nous traînons nos valises le long d’un appontement interminable jusqu’à l’autocar où notre petit g
38 trois baraques. Nous traînons nos valises le long d’ un appontement interminable jusqu’à l’autocar où notre petit groupe de
39 ses le long d’un appontement interminable jusqu’à l’ autocar où notre petit groupe de voyageurs transis s’installe rapideme
40 erminable jusqu’à l’autocar où notre petit groupe de voyageurs transis s’installe rapidement. Après quoi l’on attend penda
41 yageurs transis s’installe rapidement. Après quoi l’ on attend pendant une bonne demi-heure : le chauffeur et les gars de l
42 s quoi l’on attend pendant une bonne demi-heure : le chauffeur et les gars de la buvette ont bien des choses à se raconter
43 nd pendant une bonne demi-heure : le chauffeur et les gars de la buvette ont bien des choses à se raconter. Dès le démarrag
44 t une bonne demi-heure : le chauffeur et les gars de la buvette ont bien des choses à se raconter. Dès le démarrage, la vo
45 ne bonne demi-heure : le chauffeur et les gars de la buvette ont bien des choses à se raconter. Dès le démarrage, la voitu
46 la buvette ont bien des choses à se raconter. Dès le démarrage, la voiture craque et crisse de partout. Un incroyable cliq
47 bien des choses à se raconter. Dès le démarrage, la voiture craque et crisse de partout. Un incroyable cliquetis de vitre
48 er. Dès le démarrage, la voiture craque et crisse de partout. Un incroyable cliquetis de vitres va nous accompagner pendan
49 que et crisse de partout. Un incroyable cliquetis de vitres va nous accompagner pendant deux heures et demie, — car l’hora
50 s accompagner pendant deux heures et demie, — car l’ horaire n’en prévoit pas moins pour parcourir les trente-huit kilomètr
51 r l’horaire n’en prévoit pas moins pour parcourir les trente-huit kilomètres de l’île dans sa longueur. Nous traversons de
52 s moins pour parcourir les trente-huit kilomètres de l’île dans sa longueur. Nous traversons de longs villages blancs et b
53 oins pour parcourir les trente-huit kilomètres de l’ île dans sa longueur. Nous traversons de longs villages blancs et bleu
54 mètres de l’île dans sa longueur. Nous traversons de longs villages blancs et bleus aux maisons basses, des champs pauvres
55 maisons basses, des champs pauvres, des landes où le soleil qui reparaît fait briller des pyramides de sel. Au loin, parmi
56 le soleil qui reparaît fait briller des pyramides de sel. Au loin, parmi les lagunes et les marais, pointent de grands clo
57 fait briller des pyramides de sel. Au loin, parmi les lagunes et les marais, pointent de grands clochers peints de blanc ju
58 s pyramides de sel. Au loin, parmi les lagunes et les marais, pointent de grands clochers peints de blanc jusqu’à mi-hauteu
59 u loin, parmi les lagunes et les marais, pointent de grands clochers peints de blanc jusqu’à mi-hauteur, et de noir au-des
60 et les marais, pointent de grands clochers peints de blanc jusqu’à mi-hauteur, et de noir au-dessus, repères pour les navi
61 s clochers peints de blanc jusqu’à mi-hauteur, et de noir au-dessus, repères pour les navigateurs. L’autocar sent la marée
62 ’à mi-hauteur, et de noir au-dessus, repères pour les navigateurs. L’autocar sent la marée fraîche. Des paysannes en coiffe
63 de noir au-dessus, repères pour les navigateurs. L’ autocar sent la marée fraîche. Des paysannes en coiffe, assises au fon
64 sus, repères pour les navigateurs. L’autocar sent la marée fraîche. Des paysannes en coiffe, assises au fond, jacassent da
65 mi un moment. Nous approchons du dernier village. L’ île devient très étroite. Par endroits, ce n’est plus qu’une bande de
66 étroite. Par endroits, ce n’est plus qu’une bande de terre aride, portant la route, un mur qui fait digue, une haie de tam
67 e n’est plus qu’une bande de terre aride, portant la route, un mur qui fait digue, une haie de tamaris. À gauche, l’océan
68 portant la route, un mur qui fait digue, une haie de tamaris. À gauche, l’océan invisible derrière le mur ; à droite, des
69 ur qui fait digue, une haie de tamaris. À gauche, l’ océan invisible derrière le mur ; à droite, des marais salants avec le
70 de tamaris. À gauche, l’océan invisible derrière le mur ; à droite, des marais salants avec leurs cloisons délicates cont
71 urs cloisons délicates contre lesquelles s’amasse l’ écume rousse. Une grande lumière humide baigne ce paysage horizontal.
72 ent à peine, en demi-cercle devant nous, marquant la fin des terres vers l’ouest. Sur la dernière lande, la dernière maiso
73 rcle devant nous, marquant la fin des terres vers l’ ouest. Sur la dernière lande, la dernière maison luit doucement. Nous
74 e, la dernière maison luit doucement. Nous voyons de loin sa façade blanchie, où les volets d’un bleu pâle semblent peints
75 ement. Nous voyons de loin sa façade blanchie, où les volets d’un bleu pâle semblent peints à l’aquarelle. C’est une maison
76 voyons de loin sa façade blanchie, où les volets d’ un bleu pâle semblent peints à l’aquarelle. C’est une maison simplette
77 e, où les volets d’un bleu pâle semblent peints à l’ aquarelle. C’est une maison simplette, telle qu’en dessinent les enfan
78 C’est une maison simplette, telle qu’en dessinent les enfants, joli rectangle clair posé sur l’horizon, un peu au-delà des
79 sinent les enfants, joli rectangle clair posé sur l’ horizon, un peu au-delà des limites européennes, dans une espèce de te
80 au-delà des limites européennes, dans une espèce de terrain vague de la civilisation de l’Occident, pays dénué et purifié
81 tes européennes, dans une espèce de terrain vague de la civilisation de l’Occident, pays dénué et purifié, ramené à la nud
82 européennes, dans une espèce de terrain vague de la civilisation de l’Occident, pays dénué et purifié, ramené à la nudité
83 ns une espèce de terrain vague de la civilisation de l’Occident, pays dénué et purifié, ramené à la nudité des quatre élém
84 une espèce de terrain vague de la civilisation de l’ Occident, pays dénué et purifié, ramené à la nudité des quatre élément
85 on de l’Occident, pays dénué et purifié, ramené à la nudité des quatre éléments primordiaux : la terre, la mer, le ciel, e
86 ené à la nudité des quatre éléments primordiaux : la terre, la mer, le ciel, et le feu de la lumière. Nous vivrons bien !
87 udité des quatre éléments primordiaux : la terre, la mer, le ciel, et le feu de la lumière. Nous vivrons bien ! ⁂ Je revoi
88 s quatre éléments primordiaux : la terre, la mer, le ciel, et le feu de la lumière. Nous vivrons bien ! ⁂ Je revois, je re
89 ments primordiaux : la terre, la mer, le ciel, et le feu de la lumière. Nous vivrons bien ! ⁂ Je revois, je revis si bien
90 rimordiaux : la terre, la mer, le ciel, et le feu de la lumière. Nous vivrons bien ! ⁂ Je revois, je revis si bien cette t
91 ordiaux : la terre, la mer, le ciel, et le feu de la lumière. Nous vivrons bien ! ⁂ Je revois, je revis si bien cette trav
92 trange coupure qu’elle a faite dans ma vie, entre les derniers jours passés à Paris non sans fièvre et cette arrivée au sol
93 expliquer pourquoi nous venions dans cette île à la saison où il convient plutôt de la quitter quand on le peut. Si, par
94 dans cette île à la saison où il convient plutôt de la quitter quand on le peut. Si, par cette aube de novembre, sur les
95 ns cette île à la saison où il convient plutôt de la quitter quand on le peut. Si, par cette aube de novembre, sur les gra
96 ison où il convient plutôt de la quitter quand on le peut. Si, par cette aube de novembre, sur les grands quais de ce port
97 e la quitter quand on le peut. Si, par cette aube de novembre, sur les grands quais de ce port atlantique, j’en étais à co
98 d on le peut. Si, par cette aube de novembre, sur les grands quais de ce port atlantique, j’en étais à considérer d’un œil
99 par cette aube de novembre, sur les grands quais de ce port atlantique, j’en étais à considérer d’un œil brûlé par l’inso
100 is de ce port atlantique, j’en étais à considérer d’ un œil brûlé par l’insomnie les flots de l’océan maussade et les pauvr
101 tique, j’en étais à considérer d’un œil brûlé par l’ insomnie les flots de l’océan maussade et les pauvres rivages du détro
102 étais à considérer d’un œil brûlé par l’insomnie les flots de l’océan maussade et les pauvres rivages du détroit, c’est fo
103 onsidérer d’un œil brûlé par l’insomnie les flots de l’océan maussade et les pauvres rivages du détroit, c’est fort appare
104 idérer d’un œil brûlé par l’insomnie les flots de l’ océan maussade et les pauvres rivages du détroit, c’est fort apparemme
105 é par l’insomnie les flots de l’océan maussade et les pauvres rivages du détroit, c’est fort apparemment que je n’avais rie
106 troit, c’est fort apparemment que je n’avais rien de mieux à faire. J’étais chômeur depuis trois mois. On m’offrait un abr
107 ait un abri quelque part, une maison vide pendant l’ hiver, une occasion de solitude désirée en secret dès longtemps. Je vo
108 rt, une maison vide pendant l’hiver, une occasion de solitude désirée en secret dès longtemps. Je voudrais bien n’avoir pa
109 ecret dès longtemps. Je voudrais bien n’avoir pas l’ air trop romantique : mes dernières années de Paris m’avaient appris q
110 pas l’air trop romantique : mes dernières années de Paris m’avaient appris que cette ville, au moins pour la jeunesse san
111 s m’avaient appris que cette ville, au moins pour la jeunesse sans argent, est la ville des gérants ignobles et des concie
112 ville, au moins pour la jeunesse sans argent, est la ville des gérants ignobles et des concierges, des Lieux-sombres-et-po
113 des Lieux-sombres-et-populeux où il faut pénétrer l’ âme basse et la petite enveloppe à la main. Tant d’autres disent : All
114 es-et-populeux où il faut pénétrer l’âme basse et la petite enveloppe à la main. Tant d’autres disent : Allons-nous-en, et
115 aut pénétrer l’âme basse et la petite enveloppe à la main. Tant d’autres disent : Allons-nous-en, et restent faute d’imagi
116 ’autres disent : Allons-nous-en, et restent faute d’ imagination. Et pourtant il suffit de bien peu pour partir : la France
117 estent faute d’imagination. Et pourtant il suffit de bien peu pour partir : la France a des milliers de maisons vides. Dit
118 . Et pourtant il suffit de bien peu pour partir : la France a des milliers de maisons vides. Dites autour de vous que vous
119 e bien peu pour partir : la France a des milliers de maisons vides. Dites autour de vous que vous en cherchez une, et vous
120 re par ce livre. Peut-être mon récit n’a-t-il pas d’ autre but que de décrire un précédent, d’affirmer que cela peut se fai
121 Peut-être mon récit n’a-t-il pas d’autre but que de décrire un précédent, d’affirmer que cela peut se faire, que cela s’e
122 t-il pas d’autre but que de décrire un précédent, d’ affirmer que cela peut se faire, que cela s’est fait, qu’il y a là un
2 1937, Journal d’un intellectuel en chômage. Première partie. N’habitez pas les villes !
123 Première partieN’habitez pas les villes ! Début de novembre 1933 Je commencerai par l’inventair
124 emière partieN’habitez pas les villes ! Début de novembre 1933 Je commencerai par l’inventaire de mon domaine. Je n
125 Début de novembre 1933 Je commencerai par l’ inventaire de mon domaine. Je ne suis pas propriétaire, c’est entendu.
126 novembre 1933 Je commencerai par l’inventaire de mon domaine. Je ne suis pas propriétaire, c’est entendu. Je ne possèd
127 ntendu. Je ne possède légalement que des valises, de quoi me vêtir, et quelques livres. Mais aussi, je ne puis vivre nulle
128 e sais mettre en œuvre à ma façon, et peu capable de comprendre que l’on veuille « avoir » autrement. Posséder, ce n’est p
129 uvre à ma façon, et peu capable de comprendre que l’ on veuille « avoir » autrement. Posséder, ce n’est pas avoir. Ce n’est
130 éder, ce n’est pas avoir. Ce n’est pas même avoir l’ usage éventuel de quelque chose. Mais c’est user en fait de cette chos
131 s avoir. Ce n’est pas même avoir l’usage éventuel de quelque chose. Mais c’est user en fait de cette chose-là. C’est donc
132 ventuel de quelque chose. Mais c’est user en fait de cette chose-là. C’est donc un acte, et pas du tout un droit. Et ce n’
133 nette, ce jardin et cette île, seront miens selon la puissance avec laquelle j’en saurai faire usage, pour une fin qui leu
134 fin qui leur est étrangère, et qui me commandera de les quitter le jour qu’ils y mettront obstacle. (Pour les bourgeois,
135 n qui leur est étrangère, et qui me commandera de les quitter le jour qu’ils y mettront obstacle. (Pour les bourgeois, l’id
136 st étrangère, et qui me commandera de les quitter le jour qu’ils y mettront obstacle. (Pour les bourgeois, l’idée de propr
137 quitter le jour qu’ils y mettront obstacle. (Pour les bourgeois, l’idée de propriété est liée à l’idée d’héritage. Par quel
138 qu’ils y mettront obstacle. (Pour les bourgeois, l’ idée de propriété est liée à l’idée d’héritage. Par quelle folie pense
139 y mettront obstacle. (Pour les bourgeois, l’idée de propriété est liée à l’idée d’héritage. Par quelle folie pensent-ils
140 our les bourgeois, l’idée de propriété est liée à l’ idée d’héritage. Par quelle folie pensent-ils pouvoir « hériter » des
141 bourgeois, l’idée de propriété est liée à l’idée d’ héritage. Par quelle folie pensent-ils pouvoir « hériter » des biens d
142 e folie pensent-ils pouvoir « hériter » des biens de leurs pères ? Il faut tout ignorer de la vraie possession ! Une chose
143 » des biens de leurs pères ? Il faut tout ignorer de la vraie possession ! Une chose n’est mienne que pour un temps, et si
144 es biens de leurs pères ? Il faut tout ignorer de la vraie possession ! Une chose n’est mienne que pour un temps, et si je
145 e, elle me devient impropre. Je n’hérite pas même de moi ! Ou alors, l’héritage est cela dont on ne peut pas se délivrer à
146 impropre. Je n’hérite pas même de moi ! Ou alors, l’ héritage est cela dont on ne peut pas se délivrer à temps, et devrait
147 est incommode ou impropre, et dont il faut tâcher de se délivrer coûte que coûte.) Mon domaine, c’est ce que j’ai sous la
148 e que coûte.) Mon domaine, c’est ce que j’ai sous la main. Voici d’abord la table que je me suis fabriquée : j’ai trouvé d
149 ne, c’est ce que j’ai sous la main. Voici d’abord la table que je me suis fabriquée : j’ai trouvé dans le chai deux trétea
150 table que je me suis fabriquée : j’ai trouvé dans le chai deux tréteaux et deux planches bien rabotées ; j’ai dressé cela
151 planches bien rabotées ; j’ai dressé cela devant la fenêtre ouverte sur les verdures encore vivaces du jardin. Quand je l
152  ; j’ai dressé cela devant la fenêtre ouverte sur les verdures encore vivaces du jardin. Quand je lève le nez, je vois la c
153 verdures encore vivaces du jardin. Quand je lève le nez, je vois la cour de terre battue à l’ombre de ses deux tilleuls,
154 vivaces du jardin. Quand je lève le nez, je vois la cour de terre battue à l’ombre de ses deux tilleuls, la margelle du p
155 du jardin. Quand je lève le nez, je vois la cour de terre battue à l’ombre de ses deux tilleuls, la margelle du puits à g
156 r de terre battue à l’ombre de ses deux tilleuls, la margelle du puits à gauche, où repose une vieille chatte, le chai à d
157 du puits à gauche, où repose une vieille chatte, le chai à droite. Au-delà de la cour, les planches incultes du potager,
158 ose une vieille chatte, le chai à droite. Au-delà de la cour, les planches incultes du potager, de chaque côté d’une allée
159 une vieille chatte, le chai à droite. Au-delà de la cour, les planches incultes du potager, de chaque côté d’une allée bo
160 lle chatte, le chai à droite. Au-delà de la cour, les planches incultes du potager, de chaque côté d’une allée bordée de ro
161 elà de la cour, les planches incultes du potager, de chaque côté d’une allée bordée de rosiers. L’allée aboutit à une port
162 les planches incultes du potager, de chaque côté d’ une allée bordée de rosiers. L’allée aboutit à une porte de bois à deu
163 tes du potager, de chaque côté d’une allée bordée de rosiers. L’allée aboutit à une porte de bois à deux battants, à demi
164 er, de chaque côté d’une allée bordée de rosiers. L’ allée aboutit à une porte de bois à deux battants, à demi cachée par d
165 ée bordée de rosiers. L’allée aboutit à une porte de bois à deux battants, à demi cachée par des lauriers épais. De hauts
166 x battants, à demi cachée par des lauriers épais. De hauts murs blancs enclosent de tous côtés ce jardin de curé qui a jus
167 es lauriers épais. De hauts murs blancs enclosent de tous côtés ce jardin de curé qui a juste la largeur de la maison. On
168 uts murs blancs enclosent de tous côtés ce jardin de curé qui a juste la largeur de la maison. On ne voit rien que le ciel
169 osent de tous côtés ce jardin de curé qui a juste la largeur de la maison. On ne voit rien que le ciel au-delà, un ciel la
170 us côtés ce jardin de curé qui a juste la largeur de la maison. On ne voit rien que le ciel au-delà, un ciel lavé, tissé d
171 côtés ce jardin de curé qui a juste la largeur de la maison. On ne voit rien que le ciel au-delà, un ciel lavé, tissé d’oi
172 uste la largeur de la maison. On ne voit rien que le ciel au-delà, un ciel lavé, tissé d’oiseaux, et parfois traversé par
173 oit rien que le ciel au-delà, un ciel lavé, tissé d’ oiseaux, et parfois traversé par un nuage rapide. En me retournant à d
174 t à droite, je vois par une autre fenêtre un coin de lande, et des petites dunes broussailleuses qui ferment l’horizon bas
175 et des petites dunes broussailleuses qui ferment l’ horizon bas. Peu de terre et beaucoup de ciel, et partout cette humide
176 met des ombres si légères, vertes et bleues, sur les murailles rosées. La maison compte deux chambres au rez-de-chaussée,
177 ères, vertes et bleues, sur les murailles rosées. La maison compte deux chambres au rez-de-chaussée, séparées de la cuisin
178 compte deux chambres au rez-de-chaussée, séparées de la cuisine par un couloir dallé. À l’étage, où l’on parvient par un p
179 pte deux chambres au rez-de-chaussée, séparées de la cuisine par un couloir dallé. À l’étage, où l’on parvient par un peti
180 e, séparées de la cuisine par un couloir dallé. À l’ étage, où l’on parvient par un petit escalier qui prend au fond de la
181 de la cuisine par un couloir dallé. À l’étage, où l’ on parvient par un petit escalier qui prend au fond de la cuisine, deu
182 parvient par un petit escalier qui prend au fond de la cuisine, deux autres chambres assez vastes et presque vides, auxqu
183 rvient par un petit escalier qui prend au fond de la cuisine, deux autres chambres assez vastes et presque vides, auxquell
184 hambres assez vastes et presque vides, auxquelles le toit sert de plafond. Très peu de meubles, comme j’aime. Des murs bla
185 vastes et presque vides, auxquelles le toit sert de plafond. Très peu de meubles, comme j’aime. Des murs blanchis ou tein
186 ubles, comme j’aime. Des murs blanchis ou teintés de bleu clair, des planchers rudes. Décor candide et gai, oui vraiment p
187 et gai, oui vraiment plus gai qu’ascétique. Dans le chai, à la porte un peu trop basse, règne une pénétrante odeur de lau
188 i vraiment plus gai qu’ascétique. Dans le chai, à la porte un peu trop basse, règne une pénétrante odeur de laurier. On di
189 rte un peu trop basse, règne une pénétrante odeur de laurier. On distingue dans l’ombre des amas de branchages, des outils
190 ne pénétrante odeur de laurier. On distingue dans l’ ombre des amas de branchages, des outils et des treilles pour la pêche
191 ur de laurier. On distingue dans l’ombre des amas de branchages, des outils et des treilles pour la pêche aux crevettes. J
192 as de branchages, des outils et des treilles pour la pêche aux crevettes. Je me suis procuré un petit tonneau de vin blanc
193 ux crevettes. Je me suis procuré un petit tonneau de vin blanc de l’île. C’est un clairet assez acide, qui laisse peut-êtr
194 Je me suis procuré un petit tonneau de vin blanc de l’île. C’est un clairet assez acide, qui laisse peut-être un léger go
195 me suis procuré un petit tonneau de vin blanc de l’ île. C’est un clairet assez acide, qui laisse peut-être un léger goût
196 qui laisse peut-être un léger goût iodé, au moins l’ on est tenté de l’imaginer : la vigne croît ici au ras d’un sol sablon
197 -être un léger goût iodé, au moins l’on est tenté de l’imaginer : la vigne croît ici au ras d’un sol sablonneux que l’on f
198 re un léger goût iodé, au moins l’on est tenté de l’ imaginer : la vigne croît ici au ras d’un sol sablonneux que l’on fume
199 oût iodé, au moins l’on est tenté de l’imaginer : la vigne croît ici au ras d’un sol sablonneux que l’on fume avec du vare
200 t tenté de l’imaginer : la vigne croît ici au ras d’ un sol sablonneux que l’on fume avec du varech. De l’île, du village,
201 la vigne croît ici au ras d’un sol sablonneux que l’ on fume avec du varech. De l’île, du village, de la mer, je ne veux ri
202 d’un sol sablonneux que l’on fume avec du varech. De l’île, du village, de la mer, je ne veux rien dire encore : je laisse
203 n sol sablonneux que l’on fume avec du varech. De l’ île, du village, de la mer, je ne veux rien dire encore : je laisse to
204 e l’on fume avec du varech. De l’île, du village, de la mer, je ne veux rien dire encore : je laisse tout cela se mêler à
205 ’on fume avec du varech. De l’île, du village, de la mer, je ne veux rien dire encore : je laisse tout cela se mêler à ma
206 ore : je laisse tout cela se mêler à ma vie, dans l’ heureux étourdissement de la lumière maritime. Pour mes pensées, je le
207 se mêler à ma vie, dans l’heureux étourdissement de la lumière maritime. Pour mes pensées, je les occupe en attendant à d
208 mêler à ma vie, dans l’heureux étourdissement de la lumière maritime. Pour mes pensées, je les occupe en attendant à de p
209 ment de la lumière maritime. Pour mes pensées, je les occupe en attendant à de petits exercices formels, sans nul rapport a
210 e. Pour mes pensées, je les occupe en attendant à de petits exercices formels, sans nul rapport avec ce beau vertige de li
211 es formels, sans nul rapport avec ce beau vertige de liberté. Depuis six jours que nous sommes arrivés, je n’ai lu que les
212 six jours que nous sommes arrivés, je n’ai lu que les Règles de Descartes, comme on ferait un mot croisé, pour tuer le temp
213 ue nous sommes arrivés, je n’ai lu que les Règles de Descartes, comme on ferait un mot croisé, pour tuer le temps avant un
214 scartes, comme on ferait un mot croisé, pour tuer le temps avant un rendez-vous. 10 novembre 1933 Ce journal n’aura
215 us. 10 novembre 1933 Ce journal n’aura rien d’ intime. J’ai à gagner ma vie, non pas à la regarder. Toutefois, noter
216 ra rien d’intime. J’ai à gagner ma vie, non pas à la regarder. Toutefois, noter les faits précis qui me paraîtront frappan
217 r ma vie, non pas à la regarder. Toutefois, noter les faits précis qui me paraîtront frappants ici ou là, c’est une sorte d
218 e paraîtront frappants ici ou là, c’est une sorte de contrôle amusant et utile — pour plus tard — et c’est une bonne disci
219 — pour plus tard — et c’est une bonne discipline de l’esprit que la description objective. Me voici engagé dans une expér
220 pour plus tard — et c’est une bonne discipline de l’ esprit que la description objective. Me voici engagé dans une expérien
221 d — et c’est une bonne discipline de l’esprit que la description objective. Me voici engagé dans une expérience forcée de
222 ctive. Me voici engagé dans une expérience forcée de vie pauvre, libre et solitaire — trois grands mots ! et pourtant c’es
223 nt c’est bien cela — tout au bout d’un pays dénué de ressources, pratiquement analogue, j’imagine, à un poste colonial aux
224 aux limites du désert. Curiosité, comme au début d’ un film. La situation est d’ailleurs excellente pour l’instant. Il nou
225 s du désert. Curiosité, comme au début d’un film. La situation est d’ailleurs excellente pour l’instant. Il nous reste enc
226 film. La situation est d’ailleurs excellente pour l’ instant. Il nous reste encore de quoi vivre pendant six semaines envir
227 s excellente pour l’instant. Il nous reste encore de quoi vivre pendant six semaines environ, si du moins nos calculs sont
228 calculs sont justes : 900 francs, un bon toit, et le temps de voir venir. Ceci posé, il s’agit de vérifier et de noter ici
229 ont justes : 900 francs, un bon toit, et le temps de voir venir. Ceci posé, il s’agit de vérifier et de noter ici au jour
230 , et le temps de voir venir. Ceci posé, il s’agit de vérifier et de noter ici au jour le jour : 1 — (problème matériel) —
231 e voir venir. Ceci posé, il s’agit de vérifier et de noter ici au jour le jour : 1 — (problème matériel) — si l’on peut vi
232 sé, il s’agit de vérifier et de noter ici au jour le jour : 1 — (problème matériel) — si l’on peut vivre loin des villes s
233 ci au jour le jour : 1 — (problème matériel) — si l’ on peut vivre loin des villes sans emploi ni gain assuré, et se procur
234 mploi ni gain assuré, et se procurer tout de même le strict nécessaire par des articles, traductions, etc. (qu’il me reste
235 chologique) — si ce régime est favorable ou non à la maturation d’une œuvre ; — s’il est moins démoralisant que le régime
236 si ce régime est favorable ou non à la maturation d’ une œuvre ; — s’il est moins démoralisant que le régime parisien ; — s
237 n d’une œuvre ; — s’il est moins démoralisant que le régime parisien ; — s’il endort ou s’il excite l’esprit ; — enfin s’i
238 le régime parisien ; — s’il endort ou s’il excite l’ esprit ; — enfin s’il rend neurasthénique, ou furieux, ou content, etc
239 ux, ou content, etc. ; 3 — (problème social) — si les contacts inévitables et quotidiens entre un « intellectuel » de ma so
240 évitables et quotidiens entre un « intellectuel » de ma sorte et les habitants du pays, se révèlent bons, mauvais, ou simp
241 otidiens entre un « intellectuel » de ma sorte et les habitants du pays, se révèlent bons, mauvais, ou simplement indiffére
242 evues, hebdomadaires et journaux. Grande facilité de travail dans ce silence à peu près absolu. Mais aussi j’ai l’impressi
243 ans ce silence à peu près absolu. Mais aussi j’ai l’ impression nette d’utiliser la fin de l’élan intellectuel qui me soute
244 u près absolu. Mais aussi j’ai l’impression nette d’ utiliser la fin de l’élan intellectuel qui me soutenait à Paris. Ces d
245 lu. Mais aussi j’ai l’impression nette d’utiliser la fin de l’élan intellectuel qui me soutenait à Paris. Ces deux dernier
246 s aussi j’ai l’impression nette d’utiliser la fin de l’élan intellectuel qui me soutenait à Paris. Ces deux derniers jours
247 ussi j’ai l’impression nette d’utiliser la fin de l’ élan intellectuel qui me soutenait à Paris. Ces deux derniers jours dé
248 s jours déjà, j’arrivais mal à prendre au sérieux l’ actualité de ce que j’écrivais. Il faut avouer qu’il s’agissait, dans
249 , j’arrivais mal à prendre au sérieux l’actualité de ce que j’écrivais. Il faut avouer qu’il s’agissait, dans ces articles
250 faut avouer qu’il s’agissait, dans ces articles, de ce que les gens croient être actuel, ou sont censés croire actuel, da
251 er qu’il s’agissait, dans ces articles, de ce que les gens croient être actuel, ou sont censés croire actuel, dans la litté
252 t être actuel, ou sont censés croire actuel, dans la littérature ou les idées. C’est cela qui paye, et qui m’ennuie. J’ai
253 sont censés croire actuel, dans la littérature ou les idées. C’est cela qui paye, et qui m’ennuie. J’ai gardé pour la fin —
254 t cela qui paye, et qui m’ennuie. J’ai gardé pour la fin — ce sera demain — la rédaction de deux articles destinés à des r
255 ennuie. J’ai gardé pour la fin — ce sera demain — la rédaction de deux articles destinés à des revues de jeunes (non payan
256 gardé pour la fin — ce sera demain — la rédaction de deux articles destinés à des revues de jeunes (non payantes bien ente
257 rédaction de deux articles destinés à des revues de jeunes (non payantes bien entendu), et que je vais sans doute écrire
258 s bien entendu), et que je vais sans doute écrire d’ un trait, parce que j’y parlerai de notre affaire, avec nos mots, dans
259 s doute écrire d’un trait, parce que j’y parlerai de notre affaire, avec nos mots, dans notre liberté. Après quoi, je pour
260 ès quoi, je pourrai travailler. Aujourd’hui c’est le jour du repos. J’ai trouvé au fond d’une armoire, derrière une pile d
261 d’hui c’est le jour du repos. J’ai trouvé au fond d’ une armoire, derrière une pile d’assiettes, deux volumes sur l’histoir
262 i trouvé au fond d’une armoire, derrière une pile d’ assiettes, deux volumes sur l’histoire de l’île, ses coutumes et son d
263 , derrière une pile d’assiettes, deux volumes sur l’ histoire de l’île, ses coutumes et son dialecte. L’un est l’œuvre d’un
264 une pile d’assiettes, deux volumes sur l’histoire de l’île, ses coutumes et son dialecte. L’un est l’œuvre d’un archiviste
265 pile d’assiettes, deux volumes sur l’histoire de l’ île, ses coutumes et son dialecte. L’un est l’œuvre d’un archiviste du
266 de l’île, ses coutumes et son dialecte. L’un est l’ œuvre d’un archiviste du continent. Il affecte une douce ironie sorbon
267 e, ses coutumes et son dialecte. L’un est l’œuvre d’ un archiviste du continent. Il affecte une douce ironie sorbonnarde po
268 ent. Il affecte une douce ironie sorbonnarde pour les petits événements qui se déroulèrent dans ce coin de pays, et surtout
269 petits événements qui se déroulèrent dans ce coin de pays, et surtout pour les légendes locales, qui ont fortement exagéré
270 déroulèrent dans ce coin de pays, et surtout pour les légendes locales, qui ont fortement exagéré et embelli tout cela… La
271 , qui ont fortement exagéré et embelli tout cela… La science réclame de petits faits vrais. Elle tend aussi, il faut l’avo
272 exagéré et embelli tout cela… La science réclame de petits faits vrais. Elle tend aussi, il faut l’avouer, à ne tenir pou
273 e de petits faits vrais. Elle tend aussi, il faut l’ avouer, à ne tenir pour vrai que ce qui est petit. Laissons donc de cô
274 nir pour vrai que ce qui est petit. Laissons donc de côté ce petit travail qui a dû valoir les palmes à son auteur. Le sec
275 ons donc de côté ce petit travail qui a dû valoir les palmes à son auteur. Le second bouquin, c’est l’œuvre d’un vieux méde
276 les palmes à son auteur. Le second bouquin, c’est l’ œuvre d’un vieux médecin tout plein de verve et de gaillarde érudition
277 es à son auteur. Le second bouquin, c’est l’œuvre d’ un vieux médecin tout plein de verve et de gaillarde érudition, comme
278 quin, c’est l’œuvre d’un vieux médecin tout plein de verve et de gaillarde érudition, comme il s’en trouve un peu partout
279 l’œuvre d’un vieux médecin tout plein de verve et de gaillarde érudition, comme il s’en trouve un peu partout pour sauver
280 comme il s’en trouve un peu partout pour sauver «  l’ esprit » d’un pays. J’ai passé tout l’après-midi dessus. Cela commence
281 en trouve un peu partout pour sauver « l’esprit » d’ un pays. J’ai passé tout l’après-midi dessus. Cela commence par une ch
282 ur sauver « l’esprit » d’un pays. J’ai passé tout l’ après-midi dessus. Cela commence par une chronique historique, dont l’
283 Cela commence par une chronique historique, dont l’ essentiel est naturellement l’énumération des débarquements qui ont ho
284 ue historique, dont l’essentiel est naturellement l’ énumération des débarquements qui ont honoré l’île, des premières galè
285 nt l’énumération des débarquements qui ont honoré l’ île, des premières galères romaines jusqu’au bateau à vapeur de Sadi C
286 emières galères romaines jusqu’au bateau à vapeur de Sadi Carnot — monument au point où il toucha terre en 1892 —, en pass
287 oint où il toucha terre en 1892 —, en passant par les drakkars norvégiens, les flottes anglaises des guerres de religion et
288 n 1892 —, en passant par les drakkars norvégiens, les flottes anglaises des guerres de religion et les expéditions de saumo
289 ars norvégiens, les flottes anglaises des guerres de religion et les expéditions de saumoniers. Une période héroïque sous
290 les flottes anglaises des guerres de religion et les expéditions de saumoniers. Une période héroïque sous Richelieu. Depui
291 laises des guerres de religion et les expéditions de saumoniers. Une période héroïque sous Richelieu. Depuis lors, semble-
292 éroïque sous Richelieu. Depuis lors, semble-t-il, les villages se dépeuplent, les traditions se perdent et les champs tombe
293 is lors, semble-t-il, les villages se dépeuplent, les traditions se perdent et les champs tombent en friche. La Révolution
294 lages se dépeuplent, les traditions se perdent et les champs tombent en friche. La Révolution seule a ranimé l’ardeur des h
295 tions se perdent et les champs tombent en friche. La Révolution seule a ranimé l’ardeur des habitants, pour la plupart jac
296 s tombent en friche. La Révolution seule a ranimé l’ ardeur des habitants, pour la plupart jacobins. Plusieurs des discours
297 pour la plupart jacobins. Plusieurs des discours de leurs chefs ont été consignés par miracle : ils ne le cèdent en rien,
298 eurs chefs ont été consignés par miracle : ils ne le cèdent en rien, pour l’ampleur de leurs vues sur le monde, à l’éloque
299 gnés par miracle : ils ne le cèdent en rien, pour l’ ampleur de leurs vues sur le monde, à l’éloquence des conventionnels…
300 iracle : ils ne le cèdent en rien, pour l’ampleur de leurs vues sur le monde, à l’éloquence des conventionnels… On trouve
301 cèdent en rien, pour l’ampleur de leurs vues sur le monde, à l’éloquence des conventionnels… On trouve encore dans ce liv
302 ien, pour l’ampleur de leurs vues sur le monde, à l’ éloquence des conventionnels… On trouve encore dans ce livre des anecd
303 , rédigées dans un patois un peu trop exemplaire. D’ intéressantes précisions budgétaires sur les institutions de bienfaisa
304 laire. D’intéressantes précisions budgétaires sur les institutions de bienfaisance fondées par le docteur lui-même, ou tout
305 antes précisions budgétaires sur les institutions de bienfaisance fondées par le docteur lui-même, ou tout au moins à son
306 sur les institutions de bienfaisance fondées par le docteur lui-même, ou tout au moins à son instigation. Enfin, et cela
307 sera des plus utiles, une minutieuse description de la faune et de la flore de l’île, du régime des marées, des courants
308 ra des plus utiles, une minutieuse description de la faune et de la flore de l’île, du régime des marées, des courants et
309 utiles, une minutieuse description de la faune et de la flore de l’île, du régime des marées, des courants et des vents. M
310 les, une minutieuse description de la faune et de la flore de l’île, du régime des marées, des courants et des vents. Merv
311 minutieuse description de la faune et de la flore de l’île, du régime des marées, des courants et des vents. Merveilleux l
312 utieuse description de la faune et de la flore de l’ île, du régime des marées, des courants et des vents. Merveilleux livr
313 ts et des vents. Merveilleux livre en vérité ! Et la merveilleuse bibliothèque que celle qui rassemblerait tous les ouvrag
314 use bibliothèque que celle qui rassemblerait tous les ouvrages analogues que, dans chaque sous-préfecture, un vieux docteur
315 e, un vieux docteur au fichu caractère a composés de sa longue expérience, de ses rancunes, de son amour caché, et de sa s
316 chu caractère a composés de sa longue expérience, de ses rancunes, de son amour caché, et de sa science hétéroclite de pra
317 omposés de sa longue expérience, de ses rancunes, de son amour caché, et de sa science hétéroclite de praticien et de coll
318 périence, de ses rancunes, de son amour caché, et de sa science hétéroclite de praticien et de collectionneur. L’esprit fo
319 de son amour caché, et de sa science hétéroclite de praticien et de collectionneur. L’esprit fort et l’esprit de clocher
320 ché, et de sa science hétéroclite de praticien et de collectionneur. L’esprit fort et l’esprit de clocher se font une guer
321 ce hétéroclite de praticien et de collectionneur. L’ esprit fort et l’esprit de clocher se font une guerre acharnée dans ce
322 praticien et de collectionneur. L’esprit fort et l’ esprit de clocher se font une guerre acharnée dans ces pages, et ils l
323 n et de collectionneur. L’esprit fort et l’esprit de clocher se font une guerre acharnée dans ces pages, et ils l’emporten
324 e font une guerre acharnée dans ces pages, et ils l’ emportent tour à tour, jusqu’à la synthèse finale d’une envolée tout à
325 es pages, et ils l’emportent tour à tour, jusqu’à la synthèse finale d’une envolée tout à la fois patriotique, républicain
326 emportent tour à tour, jusqu’à la synthèse finale d’ une envolée tout à la fois patriotique, républicaine, et tolérante. La
327 la fois patriotique, républicaine, et tolérante. La droite, la gauche, et une certaine espèce d’intelligence, ou d’ironie
328 triotique, républicaine, et tolérante. La droite, la gauche, et une certaine espèce d’intelligence, ou d’ironie… Pour de t
329 nte. La droite, la gauche, et une certaine espèce d’ intelligence, ou d’ironie… Pour de tels hommes, certes il n’y a pas de
330 gauche, et une certaine espèce d’intelligence, ou d’ ironie… Pour de tels hommes, certes il n’y a pas deux France ! Ou plut
331 certaine espèce d’intelligence, ou d’ironie… Pour de tels hommes, certes il n’y a pas deux France ! Ou plutôt elles se mêl
332 dans un combat indivisible et nécessaire au cœur de chacun d’eux. Voilà l’espèce d’hommes français que je voudrais croire
333 ombat indivisible et nécessaire au cœur de chacun d’ eux. Voilà l’espèce d’hommes français que je voudrais croire la plus a
334 ible et nécessaire au cœur de chacun d’eux. Voilà l’ espèce d’hommes français que je voudrais croire la plus authentique, e
335 écessaire au cœur de chacun d’eux. Voilà l’espèce d’ hommes français que je voudrais croire la plus authentique, et la plus
336 l’espèce d’hommes français que je voudrais croire la plus authentique, et la plus digne d’incarner le concept de Français
337 is que je voudrais croire la plus authentique, et la plus digne d’incarner le concept de Français moyen. « Français-moyen 
338 rais croire la plus authentique, et la plus digne d’ incarner le concept de Français moyen. « Français-moyen » aux yeux des
339 la plus authentique, et la plus digne d’incarner le concept de Français moyen. « Français-moyen » aux yeux des journalist
340 thentique, et la plus digne d’incarner le concept de Français moyen. « Français-moyen » aux yeux des journalistes, c’est u
341 j’appelle un Français aplati, un parfait lecteur de journaux, un minimum de Français, et non pas du tout une moyenne. Que
342 plati, un parfait lecteur de journaux, un minimum de Français, et non pas du tout une moyenne. Que ne réserve-t-on l’expre
343 non pas du tout une moyenne. Que ne réserve-t-on l’ expression pour les hommes qui résument en eux les tendances contradic
344 ne moyenne. Que ne réserve-t-on l’expression pour les hommes qui résument en eux les tendances contradictoires dont le conc
345 l’expression pour les hommes qui résument en eux les tendances contradictoires dont le concours fait l’esprit national ? C
346 ésument en eux les tendances contradictoires dont le concours fait l’esprit national ? C’est qu’on préfère sans doute appe
347 s tendances contradictoires dont le concours fait l’ esprit national ? C’est qu’on préfère sans doute appeler moyen ce qui
348 s… 19 novembre 1933 Premiers contacts avec les gens. — Le village se termine au bout de notre jardin. Passé la porte
349 embre 1933 Premiers contacts avec les gens. —  Le village se termine au bout de notre jardin. Passé la porte, on enfile
350 village se termine au bout de notre jardin. Passé la porte, on enfile une petite rue toute blanche qui contourne la panse
351 enfile une petite rue toute blanche qui contourne la panse de l’église, et aboutit à la place principale. Au milieu de cet
352 e petite rue toute blanche qui contourne la panse de l’église, et aboutit à la place principale. Au milieu de cette place,
353 etite rue toute blanche qui contourne la panse de l’ église, et aboutit à la place principale. Au milieu de cette place, qu
354 qui contourne la panse de l’église, et aboutit à la place principale. Au milieu de cette place, qui est un vaste rectangl
355 milieu de cette place, qui est un vaste rectangle de terre jaune, les habitants plantèrent à la Révolution un arbre de la
356 place, qui est un vaste rectangle de terre jaune, les habitants plantèrent à la Révolution un arbre de la Liberté. Cet orme
357 tangle de terre jaune, les habitants plantèrent à la Révolution un arbre de la Liberté. Cet orme est devenu gigantesque, m
358 les habitants plantèrent à la Révolution un arbre de la Liberté. Cet orme est devenu gigantesque, majestueux, exemplaire d
359 habitants plantèrent à la Révolution un arbre de la Liberté. Cet orme est devenu gigantesque, majestueux, exemplaire dans
360 dans sa symétrie architecturale. Il domine toutes les maisons et le clocher. Il est seul au-dessus du pays. Je voudrais le
361 e architecturale. Il domine toutes les maisons et le clocher. Il est seul au-dessus du pays. Je voudrais le dessiner dans
362 ocher. Il est seul au-dessus du pays. Je voudrais le dessiner dans le style romantique, avec tous ses détails et toute son
363 l au-dessus du pays. Je voudrais le dessiner dans le style romantique, avec tous ses détails et toute son opulence, frisé
364 ulence, frisé comme une perruque du grand siècle. De trois côtés de la place généralement vide, les maisons s’alignent en
365 omme une perruque du grand siècle. De trois côtés de la place généralement vide, les maisons s’alignent en ordre modeste,
366 e une perruque du grand siècle. De trois côtés de la place généralement vide, les maisons s’alignent en ordre modeste, pei
367 le. De trois côtés de la place généralement vide, les maisons s’alignent en ordre modeste, peintes en tons clairs et simple
368 en tons clairs et simples, blanc, jaune ou vert. La couleur des volets s’harmonise avec chaque façade d’une manière subti
369 couleur des volets s’harmonise avec chaque façade d’ une manière subtile et précise qui en dit long sur l’âme de ce peuple
370 ne manière subtile et précise qui en dit long sur l’ âme de ce peuple discret. C’est l’impression que je veux retenir pour
371 ière subtile et précise qui en dit long sur l’âme de ce peuple discret. C’est l’impression que je veux retenir pour le mom
372 en dit long sur l’âme de ce peuple discret. C’est l’ impression que je veux retenir pour le moment des gens d’ici. Elle cor
373 cret. C’est l’impression que je veux retenir pour le moment des gens d’ici. Elle corrige la mauvaise humeur que m’a donnée
374 tenir pour le moment des gens d’ici. Elle corrige la mauvaise humeur que m’a donnée notre épicière. Car il faut bien, héla
375 épicière. Car il faut bien, hélas, commencer par l’ épicière, quand on aborde le village où l’on va vivre. Celle-ci est én
376 hélas, commencer par l’épicière, quand on aborde le village où l’on va vivre. Celle-ci est énorme et goutteuse. Elle a de
377 cer par l’épicière, quand on aborde le village où l’ on va vivre. Celle-ci est énorme et goutteuse. Elle a des douleurs dan
378 est énorme et goutteuse. Elle a des douleurs dans les jambes, et m’en parle d’abord, pour me mettre en confiance. Je sens b
379 bien qu’elle veut me faire causer avant de fixer le prix du chou-fleur, des enveloppes jaunes, du peloton de ficelle et d
380 du chou-fleur, des enveloppes jaunes, du peloton de ficelle et du kilo de riz. Mes vêtements, citadins mais râpés, ne la
381 veloppes jaunes, du peloton de ficelle et du kilo de riz. Mes vêtements, citadins mais râpés, ne la renseignent pas claire
382 lo de riz. Mes vêtements, citadins mais râpés, ne la renseignent pas clairement. Et que penser d’un « Parisien » qui manif
383 , ne la renseignent pas clairement. Et que penser d’ un « Parisien » qui manifeste l’intention de rester ici tout l’hiver ?
384 nt. Et que penser d’un « Parisien » qui manifeste l’ intention de rester ici tout l’hiver ? C’est plutôt en été qu’on vient
385 enser d’un « Parisien » qui manifeste l’intention de rester ici tout l’hiver ? C’est plutôt en été qu’on vient chez nous,
386 en » qui manifeste l’intention de rester ici tout l’ hiver ? C’est plutôt en été qu’on vient chez nous, me fait-elle prudem
387 hez nous, me fait-elle prudemment observer. — Je le sais bien, Madame Aujard, mais je ne viens pas pour mes vacances ! J’
388 mes vacances ! J’ai du travail chez moi, des tas de choses à écrire… Elle n’ose pas m’en demander davantage. Et moi, je r
389 m’en demander davantage. Et moi, je recule devant l’ entreprise de lui expliquer la nature de mon travail. « Écrire », qu’e
390 davantage. Et moi, je recule devant l’entreprise de lui expliquer la nature de mon travail. « Écrire », qu’est-ce que cel
391 i, je recule devant l’entreprise de lui expliquer la nature de mon travail. « Écrire », qu’est-ce que cela signifie ? Écri
392 le devant l’entreprise de lui expliquer la nature de mon travail. « Écrire », qu’est-ce que cela signifie ? Écrire pour le
393 rire », qu’est-ce que cela signifie ? Écrire pour les journaux, sans doute, mais il n’y en a pas tant à raconter sur ce pay
394 s il n’y en a pas tant à raconter sur ce pays… Je l’ ai laissée en plein mystère. Elle a dû en parler longuement avec les c
395 lein mystère. Elle a dû en parler longuement avec les clients qui attendaient en silence, le nez sur leurs sabots, que je s
396 ment avec les clients qui attendaient en silence, le nez sur leurs sabots, que je sois sorti. La mère Aujard n’a pas toujo
397 ence, le nez sur leurs sabots, que je sois sorti. La mère Aujard n’a pas toujours ce qu’on voudrait. En hiver elle fait pe
398 u’on voudrait. En hiver elle fait peu de réserves de produits alimentaires, les habitants n’achetant guère autre chose que
399 le fait peu de réserves de produits alimentaires, les habitants n’achetant guère autre chose que de la mercerie, des lainag
400 s, les habitants n’achetant guère autre chose que de la mercerie, des lainages et des épices. Alors il faut aller de l’aut
401 les habitants n’achetant guère autre chose que de la mercerie, des lainages et des épices. Alors il faut aller de l’autre
402 , des lainages et des épices. Alors il faut aller de l’autre côté de la place, chez Mélie. Ce n’est pas simple d’éviter d’
403 t des épices. Alors il faut aller de l’autre côté de la place, chez Mélie. Ce n’est pas simple d’éviter d’être vu par l’un
404 es épices. Alors il faut aller de l’autre côté de la place, chez Mélie. Ce n’est pas simple d’éviter d’être vu par l’une,
405 côté de la place, chez Mélie. Ce n’est pas simple d’ éviter d’être vu par l’une, entrant chez l’autre. Mais c’est prudent,
406 a place, chez Mélie. Ce n’est pas simple d’éviter d’ être vu par l’une, entrant chez l’autre. Mais c’est prudent, on me l’a
407 , entrant chez l’autre. Mais c’est prudent, on me l’ a dit. Car elles ne baisseront pas leurs prix pour garder un client, e
408 eront pas leurs prix pour garder un client, elles les augmenteront bien plutôt pour le punir d’avoir été en face. Sans comp
409 n client, elles les augmenteront bien plutôt pour le punir d’avoir été en face. Sans compter qu’on n’aime pas être accueil
410 elles les augmenteront bien plutôt pour le punir d’ avoir été en face. Sans compter qu’on n’aime pas être accueilli par la
411 Sans compter qu’on n’aime pas être accueilli par la réprobation sournoise d’une épicière. Ennui de traverser le village,
412 e pas être accueilli par la réprobation sournoise d’ une épicière. Ennui de traverser le village, quand on se sent observé
413 ar la réprobation sournoise d’une épicière. Ennui de traverser le village, quand on se sent observé derrière les fenêtres.
414 tion sournoise d’une épicière. Ennui de traverser le village, quand on se sent observé derrière les fenêtres. Ô liberté de
415 ser le village, quand on se sent observé derrière les fenêtres. Ô liberté des villes ! Mais ne point oublier qu’à Paris, c’
416 ne point oublier qu’à Paris, c’est chez soi, dans les petits deux-pièces, que l’on souffre de l’inquisition des voisins. Ic
417 c’est chez soi, dans les petits deux-pièces, que l’ on souffre de l’inquisition des voisins. Ici c’est dans la rue seuleme
418 oi, dans les petits deux-pièces, que l’on souffre de l’inquisition des voisins. Ici c’est dans la rue seulement, et c’est
419 dans les petits deux-pièces, que l’on souffre de l’ inquisition des voisins. Ici c’est dans la rue seulement, et c’est en
420 ffre de l’inquisition des voisins. Ici c’est dans la rue seulement, et c’est en somme moins énervant, en tous cas plus nor
421 as plus normal. 20 novembre 1933 C’est chez le voisin de la mère Aujard dite Ugénie que j’ai acheté mon tonneau de v
422 rmal. 20 novembre 1933 C’est chez le voisin de la mère Aujard dite Ugénie que j’ai acheté mon tonneau de vin. Ce voi
423 l. 20 novembre 1933 C’est chez le voisin de la mère Aujard dite Ugénie que j’ai acheté mon tonneau de vin. Ce voisin
424 re Aujard dite Ugénie que j’ai acheté mon tonneau de vin. Ce voisin s’appelle Renaud, comme la majorité des habitants, Ren
425 tonneau de vin. Ce voisin s’appelle Renaud, comme la majorité des habitants, Renaud-Mellouin. Il loge au fond d’une de ces
426 é des habitants, Renaud-Mellouin. Il loge au fond d’ une de ces courettes charmantes qui sont la secrète beauté des habitat
427 habitants, Renaud-Mellouin. Il loge au fond d’une de ces courettes charmantes qui sont la secrète beauté des habitations d
428 u fond d’une de ces courettes charmantes qui sont la secrète beauté des habitations de l’île : toutes claires et propres,
429 mantes qui sont la secrète beauté des habitations de l’île : toutes claires et propres, tapissées de glycines et de roses
430 tes qui sont la secrète beauté des habitations de l’ île : toutes claires et propres, tapissées de glycines et de roses tré
431 s de l’île : toutes claires et propres, tapissées de glycines et de roses trémières, et parfois recouvertes de treilles à
432 utes claires et propres, tapissées de glycines et de roses trémières, et parfois recouvertes de treilles à l’italienne. Co
433 nes et de roses trémières, et parfois recouvertes de treilles à l’italienne. Comme on voudrait y vivre ! y passer des soir
434 s trémières, et parfois recouvertes de treilles à l’ italienne. Comme on voudrait y vivre ! y passer des soirées attablé de
435 re ! y passer des soirées attablé devant un verre de petit vin, à regarder le carré de ciel pâlir et les murs qui devienne
436 attablé devant un verre de petit vin, à regarder le carré de ciel pâlir et les murs qui deviennent roses. 21 novembre
437 devant un verre de petit vin, à regarder le carré de ciel pâlir et les murs qui deviennent roses. 21 novembre 1933
438 e petit vin, à regarder le carré de ciel pâlir et les murs qui deviennent roses. 21 novembre 1933 Le bureau de poste
439 urs qui deviennent roses. 21 novembre 1933 Le bureau de poste. — Trois mètres sur trois, et une grille épaisse au m
440 viennent roses. 21 novembre 1933 Le bureau de poste. — Trois mètres sur trois, et une grille épaisse au milieu. Der
441 trois, et une grille épaisse au milieu. Derrière la grille, le long visage de Pédenaud. J’ai l’impression que je lui gâte
442 une grille épaisse au milieu. Derrière la grille, le long visage de Pédenaud. J’ai l’impression que je lui gâte la vie. Tr
443 sse au milieu. Derrière la grille, le long visage de Pédenaud. J’ai l’impression que je lui gâte la vie. Trois fois la sem
444 rière la grille, le long visage de Pédenaud. J’ai l’ impression que je lui gâte la vie. Trois fois la semaine au moins, il
445 ge de Pédenaud. J’ai l’impression que je lui gâte la vie. Trois fois la semaine au moins, il me voit venir avec une grande
446 i l’impression que je lui gâte la vie. Trois fois la semaine au moins, il me voit venir avec une grande enveloppe contenan
447 — Non. — Est-ce un imprimé ? — Non. C’est tapé à la machine. — Est-ce qu’il n’y a rien d’écrit à la main ? — Si, il y a d
448 ’est tapé à la machine. — Est-ce qu’il n’y a rien d’ écrit à la main ? — Si, il y a des corrections écrites à la main. Péde
449 à la machine. — Est-ce qu’il n’y a rien d’écrit à la main ? — Si, il y a des corrections écrites à la main. Pédenaud relit
450 la main ? — Si, il y a des corrections écrites à la main. Pédenaud relit pour la énième fois son tarif, fait son calcul s
451 orrections écrites à la main. Pédenaud relit pour la énième fois son tarif, fait son calcul sur un bout de papier, et conc
452 nième fois son tarif, fait son calcul sur un bout de papier, et conclut que j’ai à payer 72 francs, pour un envoi, ce jour
453 ’ai à payer 72 francs, pour un envoi, ce jour-là, d’ une centaine de feuillets. Il en paraît lui-même consterné. J’affirme
454 francs, pour un envoi, ce jour-là, d’une centaine de feuillets. Il en paraît lui-même consterné. J’affirme avec vivacité q
455 t pas aller. Il faut tout recommencer. Finalement l’ on décide d’envoyer le manuscrit comme échantillon sans valeur. Port :
456 Il faut tout recommencer. Finalement l’on décide d’ envoyer le manuscrit comme échantillon sans valeur. Port : quatre fran
457 out recommencer. Finalement l’on décide d’envoyer le manuscrit comme échantillon sans valeur. Port : quatre francs soixant
458 aleur. Port : quatre francs soixante-quinze. Dans l’ après-midi, tandis que j’écris à ma table, j’entends grincer la porte
459 tandis que j’écris à ma table, j’entends grincer la porte du jardin. C’est la femme de Pédenaud qui brandit un papier. J’
460 able, j’entends grincer la porte du jardin. C’est la femme de Pédenaud qui brandit un papier. J’accours : elle me tend une
461 ntends grincer la porte du jardin. C’est la femme de Pédenaud qui brandit un papier. J’accours : elle me tend une formule
462 t un papier. J’accours : elle me tend une formule de télégramme, mais ce n’est pas un télégramme, c’est une notification o
463 un télégramme, c’est une notification officielle d’ avoir à verser sans délai la somme de 67 fr. 25 restant due sur l’envo
464 tification officielle d’avoir à verser sans délai la somme de 67 fr. 25 restant due sur l’envoi de ce matin. En effet, Péd
465 n officielle d’avoir à verser sans délai la somme de 67 fr. 25 restant due sur l’envoi de ce matin. En effet, Pédenaud qui
466 sans délai la somme de 67 fr. 25 restant due sur l’ envoi de ce matin. En effet, Pédenaud qui a voulu en avoir le cœur net
467 lai la somme de 67 fr. 25 restant due sur l’envoi de ce matin. En effet, Pédenaud qui a voulu en avoir le cœur net, a pris
468 ce matin. En effet, Pédenaud qui a voulu en avoir le cœur net, a pris des instructions par téléphone au chef-lieu. Son sup
469 ue je m’exécute, sinon c’est lui qui sera forcé «  d’ y aller de sa poche ». Me voilà courant à l’autobus pour arrêter le co
470 écute, sinon c’est lui qui sera forcé « d’y aller de sa poche ». Me voilà courant à l’autobus pour arrêter le courrier. L’
471 rcé « d’y aller de sa poche ». Me voilà courant à l’ autobus pour arrêter le courrier. L’autobus vient de partir. Il faut t
472 oche ». Me voilà courant à l’autobus pour arrêter le courrier. L’autobus vient de partir. Il faut téléphoner au chef-lieu,
473 ilà courant à l’autobus pour arrêter le courrier. L’ autobus vient de partir. Il faut téléphoner au chef-lieu, faire rouvri
474 téléphoner au chef-lieu, faire rouvrir au passage le sac postal, discuter passionnément, trouver une formule d’apaisement
475 stal, discuter passionnément, trouver une formule d’ apaisement qui ménage toutes les susceptibilités, et finalement ne rie
476 rouver une formule d’apaisement qui ménage toutes les susceptibilités, et finalement ne rien payer de plus. Je note ceci pa
477 ne assez typique du malentendu qui apparaît entre les gens d’ici et moi dès qu’il s’agit de mon travail et de ses condition
478 raît entre les gens d’ici et moi dès qu’il s’agit de mon travail et de ses conditions pratiques. Petits ennuis sans gravit
479 s d’ici et moi dès qu’il s’agit de mon travail et de ses conditions pratiques. Petits ennuis sans gravité, bien sûr. Mais
480 nuis sans gravité, bien sûr. Mais quel drame dans la vie d’un buraliste de recette auxiliaire ! Depuis lors, il rougit et
481 ns gravité, bien sûr. Mais quel drame dans la vie d’ un buraliste de recette auxiliaire ! Depuis lors, il rougit et transpi
482 n sûr. Mais quel drame dans la vie d’un buraliste de recette auxiliaire ! Depuis lors, il rougit et transpire rien qu’à me
483 peu, pour me faire pardonner. Pédenaud est mutilé de guerre. Il boite. On lui a donné cette recette auxiliaire à titre de
484 des lessives. En été ils pêchent des palourdes et les vendent aux baigneurs. Bien entendu, je n’arrive pas à savoir combien
485 agère, même pour un riche. Je me sens rejeté dans la catégorie bourgeoise. Ma bonne conscience de pauvre n’aura pas duré b
486 dans la catégorie bourgeoise. Ma bonne conscience de pauvre n’aura pas duré bien longtemps. 26 novembre 1933 Aucune
487 longtemps. 26 novembre 1933 Aucune réponse de Paris à mes envois. Si mes articles ne paraissent qu’en décembre, je
488 semaines, si toutefois je restreins mes dépenses de tabac. Difficulté de travailler sans fumer. Le meilleur moyen, c’est
489 is je restreins mes dépenses de tabac. Difficulté de travailler sans fumer. Le meilleur moyen, c’est d’aller réfléchir le
490 es de tabac. Difficulté de travailler sans fumer. Le meilleur moyen, c’est d’aller réfléchir le long des plages. — Quand n
491 e travailler sans fumer. Le meilleur moyen, c’est d’ aller réfléchir le long des plages. — Quand nous sortons de notre encl
492 éfléchir le long des plages. — Quand nous sortons de notre enclos, nous avons trois promenades au choix : elles conduisent
493 ois promenades au choix : elles conduisent toutes les trois, en dix minutes, à une plage. Notre village est en effet situé
494 village est en effet situé sur une pointe avancée de l’île, et la quatrième direction possible est celle des marais, à peu
495 lage est en effet situé sur une pointe avancée de l’ île, et la quatrième direction possible est celle des marais, à peu pr
496 en cette saison. Nous suivons des sentiers bordés de tamaris jusqu’aux dunes. Elles ne sont pas bien hautes, ces dunes, di
497 t assez pour embrasser du regard une bonne partie de l’île, notre village, les marais et deux ou trois clochers lointains,
498 ssez pour embrasser du regard une bonne partie de l’ île, notre village, les marais et deux ou trois clochers lointains, no
499 regard une bonne partie de l’île, notre village, les marais et deux ou trois clochers lointains, noirs et blancs. La lumiè
500 eux ou trois clochers lointains, noirs et blancs. La lumière n’a plus cette intensité blanche et bleue qui nous avait comm
501 blanche et bleue qui nous avait comme étourdis à l’ arrivée. Des faisceaux de rayons divisés par les nuages lourds et rapi
502 s avait comme étourdis à l’arrivée. Des faisceaux de rayons divisés par les nuages lourds et rapides rasent les terres bru
503 à l’arrivée. Des faisceaux de rayons divisés par les nuages lourds et rapides rasent les terres brunies, font luire là-bas
504 s divisés par les nuages lourds et rapides rasent les terres brunies, font luire là-bas une dernière prairie verte, étincel
505 e, étinceler un tas de sel, puis se perdent parmi les vapeurs des marais. Le ciel change avec une incroyable rapidité, il a
506 el, puis se perdent parmi les vapeurs des marais. Le ciel change avec une incroyable rapidité, il arrive qu’il se couvre e
507 ve qu’il se couvre et se nettoie tout entier dans l’ espace d’une demi-heure. Les côtes, elles aussi, se transforment. Une
508 se couvre et se nettoie tout entier dans l’espace d’ une demi-heure. Les côtes, elles aussi, se transforment. Une nuit de v
509 ttoie tout entier dans l’espace d’une demi-heure. Les côtes, elles aussi, se transforment. Une nuit de vent bouleverse leur
510 Les côtes, elles aussi, se transforment. Une nuit de vent bouleverse leur dessin et leurs couleurs, apporte un banc de var
511 se leur dessin et leurs couleurs, apporte un banc de varech pourpré ou dénude des roches noires, la veille encore recouver
512 nc de varech pourpré ou dénude des roches noires, la veille encore recouvertes de sable. Peu d’hommes aux champs, petits h
513 e des roches noires, la veille encore recouvertes de sable. Peu d’hommes aux champs, petits hommes noirs courbés. Et le vi
514 oires, la veille encore recouvertes de sable. Peu d’ hommes aux champs, petits hommes noirs courbés. Et le village vu des d
515 ommes aux champs, petits hommes noirs courbés. Et le village vu des dunes tantôt ressemble à un dessin d’enfant, ou à l’es
516 village vu des dunes tantôt ressemble à un dessin d’ enfant, ou à l’esquisse d’un peintre cubiste, tantôt sous une averse m
517 dunes tantôt ressemble à un dessin d’enfant, ou à l’ esquisse d’un peintre cubiste, tantôt sous une averse mêlée de rayons,
518 t ressemble à un dessin d’enfant, ou à l’esquisse d’ un peintre cubiste, tantôt sous une averse mêlée de rayons, à quelque
519 ’un peintre cubiste, tantôt sous une averse mêlée de rayons, à quelque illustration du xviiie allemand. 28 novembre 19
520 ation du xviiie allemand. 28 novembre 1933 L’ océan met un grand sous-entendu solennel à toutes les pensées. Il donn
521 océan met un grand sous-entendu solennel à toutes les pensées. Il donne de la force aux plus fortes, leur prêtant un cadre
522 s-entendu solennel à toutes les pensées. Il donne de la force aux plus fortes, leur prêtant un cadre et un fond, et rejett
523 ntendu solennel à toutes les pensées. Il donne de la force aux plus fortes, leur prêtant un cadre et un fond, et rejette l
524 tes, leur prêtant un cadre et un fond, et rejette l’ écume des autres. Toutefois, je ne le contemple pas sans une espèce de
525 , et rejette l’écume des autres. Toutefois, je ne le contemple pas sans une espèce de méfiance profonde : il est surtout u
526 Toutefois, je ne le contemple pas sans une espèce de méfiance profonde : il est surtout une tentation de se dissoudre dans
527 méfiance profonde : il est surtout une tentation de se dissoudre dans on ne sait quelle sublimité stérile. Plutôt que de
528 s on ne sait quelle sublimité stérile. Plutôt que de poser un regard vague et passionné sur l’infini néant des eaux, je co
529 tôt que de poser un regard vague et passionné sur l’ infini néant des eaux, je considère à mes pieds les dessins du sable q
530 l’infini néant des eaux, je considère à mes pieds les dessins du sable qui s’écoule à chaque retrait des vagues, et l’usure
531 able qui s’écoule à chaque retrait des vagues, et l’ usure de mes souliers dont l’eau salée durcit et fendille le cuir…
532 s’écoule à chaque retrait des vagues, et l’usure de mes souliers dont l’eau salée durcit et fendille le cuir… 1er déce
533 trait des vagues, et l’usure de mes souliers dont l’ eau salée durcit et fendille le cuir… 1er décembre 1933 Dépense
534 mes souliers dont l’eau salée durcit et fendille le cuir… 1er décembre 1933 Dépenses du premier mois dans l’île :
535 r décembre 1933 Dépenses du premier mois dans l’ île : Ménage, manger et boire, 480 francs ; (en général tout est plus
536 général tout est plus cher qu’à Paris). Un stère de bois, 50 francs ; (il y a très peu d’arbres sur l’île, on fait venir
537 ). Un stère de bois, 50 francs ; (il y a très peu d’ arbres sur l’île, on fait venir le bois de chauffage du continent). Éc
538 e bois, 50 francs ; (il y a très peu d’arbres sur l’ île, on fait venir le bois de chauffage du continent). Éclairage au pé
539 il y a très peu d’arbres sur l’île, on fait venir le bois de chauffage du continent). Éclairage au pétrole, 30 francs. Bon
540 rès peu d’arbres sur l’île, on fait venir le bois de chauffage du continent). Éclairage au pétrole, 30 francs. Bons de la
541 continent). Éclairage au pétrole, 30 francs. Bons de la « Société coopérative de panification », 40 francs. Réparation de
542 tinent). Éclairage au pétrole, 30 francs. Bons de la « Société coopérative de panification », 40 francs. Réparation de la
543 role, 30 francs. Bons de la « Société coopérative de panification », 40 francs. Réparation de la pompe du puits, 25 francs
544 pérative de panification », 40 francs. Réparation de la pompe du puits, 25 francs ; (elle ne marche pas mieux depuis, il f
545 ative de panification », 40 francs. Réparation de la pompe du puits, 25 francs ; (elle ne marche pas mieux depuis, il faut
546 ; (elle ne marche pas mieux depuis, il faut tirer l’ eau avec un seau, au bout d’une corde). Timbres, papier, enveloppes, 4
547 iées dans une revue. Reste : environ 200 francs. Le sentiment de dépendre entièrement de bonnes ou de mauvaises volontés
548 revue. Reste : environ 200 francs. Le sentiment de dépendre entièrement de bonnes ou de mauvaises volontés lointaines, e
549 200 francs. Le sentiment de dépendre entièrement de bonnes ou de mauvaises volontés lointaines, et du hasard, éveille par
550 Le sentiment de dépendre entièrement de bonnes ou de mauvaises volontés lointaines, et du hasard, éveille par résonance un
551 et du hasard, éveille par résonance un sentiment de liberté, de gratuité aventureuse. Mon sort ne dépend plus de ce que j
552 d, éveille par résonance un sentiment de liberté, de gratuité aventureuse. Mon sort ne dépend plus de ce que je puis faire
553 de gratuité aventureuse. Mon sort ne dépend plus de ce que je puis faire ou imaginer : libération. Il faut qu’il arrive q
554 chose. Et s’il n’arrive rien ? « On ne meurt pas de faim dans nos pays », dit-on, et je crois bien que je l’ai dit quelqu
555 dans nos pays », dit-on, et je crois bien que je l’ ai dit quelquefois. Mais il y a aussi des exceptions, des cas sans pré
556 ans précédent, et des raisons toutes personnelles de ne pas appeler au secours. Pourtant je suis bien tranquille, je ne l’
557 secours. Pourtant je suis bien tranquille, je ne l’ ai même jamais été aussi absolument. C’est peut-être à cause du bonheu
558 si absolument. C’est peut-être à cause du bonheur de notre vie. Trouver son rythme naturel, et les moyens de s’y réduire,
559 heur de notre vie. Trouver son rythme naturel, et les moyens de s’y réduire, voilà le but de toute morale : car le « bien p
560 re vie. Trouver son rythme naturel, et les moyens de s’y réduire, voilà le but de toute morale : car le « bien penser » en
561 thme naturel, et les moyens de s’y réduire, voilà le but de toute morale : car le « bien penser » en dépend. 2 décembre
562 turel, et les moyens de s’y réduire, voilà le but de toute morale : car le « bien penser » en dépend. 2 décembre 1933
563 e s’y réduire, voilà le but de toute morale : car le « bien penser » en dépend. 2 décembre 1933 Questions. — Est-ce
564 1933 Questions. — Est-ce donc si « naturel » de vivre sur une île ? Est-ce que l’insularité (géographique et morale)
565 si « naturel » de vivre sur une île ? Est-ce que l’ insularité (géographique et morale) n’est pas une espèce de vice ? Est
566 ité (géographique et morale) n’est pas une espèce de vice ? Est-ce que ce n’est pas la racine de tout l’idéalisme dont les
567 pas une espèce de vice ? Est-ce que ce n’est pas la racine de tout l’idéalisme dont les modernes doivent se guérir, s’ils
568 spèce de vice ? Est-ce que ce n’est pas la racine de tout l’idéalisme dont les modernes doivent se guérir, s’ils veulent e
569 vice ? Est-ce que ce n’est pas la racine de tout l’ idéalisme dont les modernes doivent se guérir, s’ils veulent enfin dev
570 e ce n’est pas la racine de tout l’idéalisme dont les modernes doivent se guérir, s’ils veulent enfin devenir « actuels » ?
571 venir « actuels » ? Est-ce que ce n’est pas aussi la racine de cet esprit d’abstraction égoïste dont nous souffrons tous ?
572 tuels » ? Est-ce que ce n’est pas aussi la racine de cet esprit d’abstraction égoïste dont nous souffrons tous ? Enfin, n’
573 ce que ce n’est pas aussi la racine de cet esprit d’ abstraction égoïste dont nous souffrons tous ? Enfin, n’est-il point t
574 ouffrons tous ? Enfin, n’est-il point trop facile de trouver son rythme de vie dans les conditions somme toute artificiell
575 n’est-il point trop facile de trouver son rythme de vie dans les conditions somme toute artificielles où mon chômage m’a
576 int trop facile de trouver son rythme de vie dans les conditions somme toute artificielles où mon chômage m’a placé, m’obli
577 rficielles, par rapport à mon œuvre concrète, que les raisons économiques ? Pourquoi les hommes vivent-ils sur des îles ? Q
578 concrète, que les raisons économiques ? Pourquoi les hommes vivent-ils sur des îles ? Quand nous sortons pour une promenad
579 ons pour une promenade et que nous mesurons toute l’ étroitesse de notre domaine, la mer partout à dix minutes et ces maréc
580 promenade et que nous mesurons toute l’étroitesse de notre domaine, la mer partout à dix minutes et ces marécages hostiles
581 ous mesurons toute l’étroitesse de notre domaine, la mer partout à dix minutes et ces marécages hostiles, nous souffrons d
582 minutes et ces marécages hostiles, nous souffrons de ne pouvoir prolonger en pensée notre marche jusqu’au pays voisin. Cet
583 sulaire est une liberté négative. Elle nous met à l’ abri du monde et nous ramène tout physiquement à nos limites. Mais l’h
584 nous ramène tout physiquement à nos limites. Mais l’ homme est ainsi fait qu’il désire sans cesse se risquer au-delà de ce
585 i fait qu’il désire sans cesse se risquer au-delà de ce qu’il peut, et franchir au moins en pensée les bornes de ses posse
586 de ce qu’il peut, et franchir au moins en pensée les bornes de ses possessions pour aller se mêler aux « autres », à l’étr
587 l peut, et franchir au moins en pensée les bornes de ses possessions pour aller se mêler aux « autres », à l’étranger… Tou
588 possessions pour aller se mêler aux « autres », à l’ étranger… Tout ici me ramène à moi seul. J’ai beau faire, je ne parvie
589 ai beau faire, je ne parviens pas à partager avec les hommes de ce village ce qui est essentiel et solide dans ma vie. Le s
590 re, je ne parviens pas à partager avec les hommes de ce village ce qui est essentiel et solide dans ma vie. Le simple fait
591 llage ce qui est essentiel et solide dans ma vie. Le simple fait que je ne puis pas les persuader que je travaille vraimen
592 de dans ma vie. Le simple fait que je ne puis pas les persuader que je travaille vraiment en écrivant, cela met entre nous
593 gêne constamment sensible. Et je n’ai nulle envie d’ en prendre mon parti. Dans ce qu’ils ont pu entrevoir de mon activité,
594 rendre mon parti. Dans ce qu’ils ont pu entrevoir de mon activité, une seule chose les a frappés : ma machine à écrire. La
595 ont pu entrevoir de mon activité, une seule chose les a frappés : ma machine à écrire. La mère Renaud (Renaud-de-la-Cure),
596 seule chose les a frappés : ma machine à écrire. La mère Renaud (Renaud-de-la-Cure), qui est une vieille amie des proprié
597 Cure), qui est une vieille amie des propriétaires de notre maison, est venue plusieurs fois nous voir. Hier, elle m’a dema
598 s voir. Hier, elle m’a demandé avec toutes sortes de précautions oratoires embrouillées si son fils pourrait venir aussi v
599 mbrouillées si son fils pourrait venir aussi voir la machine. Je crois bien que sans cette machine, je n’arriverais jamais
600 fais réellement quelque chose. Quand je vais chez les Renaud, c’est tout le contraire. Ils m’expliquent en détail ce qu’ils
601 chose. Quand je vais chez les Renaud, c’est tout le contraire. Ils m’expliquent en détail ce qu’ils font, et je puis le c
602 m’expliquent en détail ce qu’ils font, et je puis le comprendre et l’admirer. Ils ont ainsi sur moi une sorte de supériori
603 étail ce qu’ils font, et je puis le comprendre et l’ admirer. Ils ont ainsi sur moi une sorte de supériorité concrète dont
604 dre et l’admirer. Ils ont ainsi sur moi une sorte de supériorité concrète dont je ne souffre pas dans ma vanité, c’est ent
605 a vanité, c’est entendu, mais bien dans mon désir de sympathie humaine, d’échange direct sur pied d’égalité. Le père Rena
606 u, mais bien dans mon désir de sympathie humaine, d’ échange direct sur pied d’égalité. Le père Renaud est un ancien marin
607 r de sympathie humaine, d’échange direct sur pied d’ égalité. Le père Renaud est un ancien marin, barbu, jovial, déjà touc
608 ie humaine, d’échange direct sur pied d’égalité. Le père Renaud est un ancien marin, barbu, jovial, déjà touché par le gâ
609 t un ancien marin, barbu, jovial, déjà touché par le gâtisme, mais agréablement, si je puis dire. Cela met un peu de fanta
610 6… ») Il s’occupe maintenant à fabriquer un filet de quatre-vingt-dix mètres, bel ouvrage dont le détail m’intéresse. Le f
611 ilet de quatre-vingt-dix mètres, bel ouvrage dont le détail m’intéresse. Le fils compose des cartes postales illustrées av
612 x mètres, bel ouvrage dont le détail m’intéresse. Le fils compose des cartes postales illustrées avec des bouts de timbres
613 ose des cartes postales illustrées avec des bouts de timbres-poste découpés. Je m’attarde à causer dans leur cuisine, qui
614 plaisant que cet intérieur. Des chaises au siège de bois poli, une lourde table au centre, une autre plus petite vers la
615 ourde table au centre, une autre plus petite vers la fenêtre, sur laquelle travaille le père Renaud. Le sol est de la terr
616 us petite vers la fenêtre, sur laquelle travaille le père Renaud. Le sol est de la terre battue recouverte d’une fine couc
617 a fenêtre, sur laquelle travaille le père Renaud. Le sol est de la terre battue recouverte d’une fine couche de sable. Sur
618 sur laquelle travaille le père Renaud. Le sol est de la terre battue recouverte d’une fine couche de sable. Sur les murs b
619 laquelle travaille le père Renaud. Le sol est de la terre battue recouverte d’une fine couche de sable. Sur les murs blan
620 Renaud. Le sol est de la terre battue recouverte d’ une fine couche de sable. Sur les murs blanchis, quelques petites grav
621 t de la terre battue recouverte d’une fine couche de sable. Sur les murs blanchis, quelques petites gravures anciennes, en
622 battue recouverte d’une fine couche de sable. Sur les murs blanchis, quelques petites gravures anciennes, encadrées de noir
623 s, quelques petites gravures anciennes, encadrées de noir, et joliment disposées, une photo de bateau, et un vieil arbre g
624 cadrées de noir, et joliment disposées, une photo de bateau, et un vieil arbre généalogique aux couleurs pâlies. Cet ordre
625 tte propreté rigoureuse qui règnent ici avec tant d’ aisance, ai-je le droit de les considérer comme les symboles visibles
626 ureuse qui règnent ici avec tant d’aisance, ai-je le droit de les considérer comme les symboles visibles de l’univers inté
627 i règnent ici avec tant d’aisance, ai-je le droit de les considérer comme les symboles visibles de l’univers intérieur de
628 ègnent ici avec tant d’aisance, ai-je le droit de les considérer comme les symboles visibles de l’univers intérieur de ces
629 d’aisance, ai-je le droit de les considérer comme les symboles visibles de l’univers intérieur de ces gens ? Je me dis parf
630 oit de les considérer comme les symboles visibles de l’univers intérieur de ces gens ? Je me dis parfois : Le monde modern
631 de les considérer comme les symboles visibles de l’ univers intérieur de ces gens ? Je me dis parfois : Le monde moderne n
632 omme les symboles visibles de l’univers intérieur de ces gens ? Je me dis parfois : Le monde moderne n’a rien en eux. Ils
633 ivers intérieur de ces gens ? Je me dis parfois : Le monde moderne n’a rien en eux. Ils sont indemnes de nos fièvres. Ils
634 monde moderne n’a rien en eux. Ils sont indemnes de nos fièvres. Ils ne connaîtront pas nos douloureuses confusions, nos
635 sirs discordants. Ils se sont fait un entourage à la mesure de leur être habituel, et s’en contentent. Pourquoi voudrais-j
636 rdants. Ils se sont fait un entourage à la mesure de leur être habituel, et s’en contentent. Pourquoi voudrais-je qu’ils d
637 oudrais-je qu’ils désirent autre chose ? Et quand la mère Renaud me dit qu’elle n’est jamais sortie de l’île, depuis soixa
638 la mère Renaud me dit qu’elle n’est jamais sortie de l’île, depuis soixante ans qu’elle y est née, pourquoi ne puis-je m’e
639 mère Renaud me dit qu’elle n’est jamais sortie de l’ île, depuis soixante ans qu’elle y est née, pourquoi ne puis-je m’empê
640 qu’elle y est née, pourquoi ne puis-je m’empêcher d’ éprouver un sentiment de regret pour elle, de resserrement ? 4 déce
641 uoi ne puis-je m’empêcher d’éprouver un sentiment de regret pour elle, de resserrement ? 4 décembre 1933 Ma gêne qua
642 cher d’éprouver un sentiment de regret pour elle, de resserrement ? 4 décembre 1933 Ma gêne quand l’épicière voulait
643 esserrement ? 4 décembre 1933 Ma gêne quand l’ épicière voulait savoir ce que je fais, et dans vingt occasions pareil
644 ingt occasions pareilles : voilà qui me pose tout le problème de la culture. Cela paraîtrait absurde à la plupart des inte
645 ns pareilles : voilà qui me pose tout le problème de la culture. Cela paraîtrait absurde à la plupart des intellectuels qu
646 pareilles : voilà qui me pose tout le problème de la culture. Cela paraîtrait absurde à la plupart des intellectuels que j
647 art des intellectuels que je connais. Pourtant si l’ on refuse de poser ce problème dans le détail concret des relations hu
648 llectuels que je connais. Pourtant si l’on refuse de poser ce problème dans le détail concret des relations humaines quelc
649 Pourtant si l’on refuse de poser ce problème dans le détail concret des relations humaines quelconques, il se peut que l’o
650 es relations humaines quelconques, il se peut que l’ on refuse aussi le vrai sérieux, la vraie difficulté de la question. L
651 nes quelconques, il se peut que l’on refuse aussi le vrai sérieux, la vraie difficulté de la question. Le bénéfice le plus
652 il se peut que l’on refuse aussi le vrai sérieux, la vraie difficulté de la question. Le bénéfice le plus certain de mon é
653 refuse aussi le vrai sérieux, la vraie difficulté de la question. Le bénéfice le plus certain de mon état, c’est que je me
654 use aussi le vrai sérieux, la vraie difficulté de la question. Le bénéfice le plus certain de mon état, c’est que je me vo
655 vrai sérieux, la vraie difficulté de la question. Le bénéfice le plus certain de mon état, c’est que je me vois contraint
656 , la vraie difficulté de la question. Le bénéfice le plus certain de mon état, c’est que je me vois contraint de toucher t
657 culté de la question. Le bénéfice le plus certain de mon état, c’est que je me vois contraint de toucher tous les jours le
658 rtain de mon état, c’est que je me vois contraint de toucher tous les jours les limites du domaine culturel : et là seulem
659 t, c’est que je me vois contraint de toucher tous les jours les limites du domaine culturel : et là seulement paraissent le
660 ue je me vois contraint de toucher tous les jours les limites du domaine culturel : et là seulement paraissent les absurdit
661 du domaine culturel : et là seulement paraissent les absurdités sur lesquelles nous vivons depuis des siècles, dans un acc
662 ssivement tacite. Je voudrais exprimer un maximum d’ humanité lorsque j’écris, et c’est précisément parce que j’écris que j
663 écisément parce que j’écris que je me vois séparé de beaucoup d’hommes, du plus grand nombre. Et d’abord de ceux qui m’ent
664 rce que j’écris que je me vois séparé de beaucoup d’ hommes, du plus grand nombre. Et d’abord de ceux qui m’entourent, et q
665 aucoup d’hommes, du plus grand nombre. Et d’abord de ceux qui m’entourent, et qui sont aujourd’hui mes prochains. Ils me p
666 ui sont aujourd’hui mes prochains. Ils me parlent de ce qui les intéresse, et je m’y intéresse avec eux. Mais je ne puis o
667 jourd’hui mes prochains. Ils me parlent de ce qui les intéresse, et je m’y intéresse avec eux. Mais je ne puis ou ne sais p
668 Mais je ne puis ou ne sais pas encore leur parler de ce qui, moi, m’intéresse : je sens trop bien qu’ils n’en sont pas cur
669 je sens trop bien qu’ils n’en sont pas curieux. De quoi donc me parlent-ils ? Du temps, et j’aime cela comme tout le mon
670  ? Du temps, et j’aime cela comme tout le monde ; de leur travail aux champs ou à la côte, et je les écoute avec toute l’a
671 e tout le monde ; de leur travail aux champs ou à la côte, et je les écoute avec toute l’attention d’un apprenti ; de leur
672  ; de leur travail aux champs ou à la côte, et je les écoute avec toute l’attention d’un apprenti ; de leurs souvenirs, par
673 champs ou à la côte, et je les écoute avec toute l’ attention d’un apprenti ; de leurs souvenirs, parfois touchants, parfo
674 la côte, et je les écoute avec toute l’attention d’ un apprenti ; de leurs souvenirs, parfois touchants, parfois comiques,
675 les écoute avec toute l’attention d’un apprenti ; de leurs souvenirs, parfois touchants, parfois comiques, toujours révéla
676 , parfois comiques, toujours révélateurs pour moi d’ un monde non pas absolument nouveau, mais nouvellement intéressant. Et
677 t. Et quand nous sommes en confiance, si j’essaie d’ amener l’entretien sur leurs lectures, les journaux qu’ils achètent, l
678 nd nous sommes en confiance, si j’essaie d’amener l’ entretien sur leurs lectures, les journaux qu’ils achètent, la politiq
679 j’essaie d’amener l’entretien sur leurs lectures, les journaux qu’ils achètent, la politique, ou la religion qu’ils suivent
680 sur leurs lectures, les journaux qu’ils achètent, la politique, ou la religion qu’ils suivent, ils se taisent bien vite, o
681 s, les journaux qu’ils achètent, la politique, ou la religion qu’ils suivent, ils se taisent bien vite, ou se remettent à
682 nt sans intérêt. Je ne sens pas qu’ils se méfient de moi. Simplement, ils n’ont jamais formé de phrases, dans leur tête, à
683 éfient de moi. Simplement, ils n’ont jamais formé de phrases, dans leur tête, à propos de ces choses-là. Non seulement je
684 à. Non seulement je ne sens pas qu’ils se méfient de moi en tant qu’intellectuel ou « spécialiste », mais encore je devine
685 que je puisse avoir une opinion plus avertie que la leur sur les sujets que je viens de nommer. Ils ne se doutent pas que
686 se avoir une opinion plus avertie que la leur sur les sujets que je viens de nommer. Ils ne se doutent pas que c’est de cel
687 viens de nommer. Ils ne se doutent pas que c’est de cela précisément qu’un écrivain peut faire sa « spécialité ». Et rien
688 écrivain peut faire sa « spécialité ». Et rien ne les étonnerait davantage que d’apprendre un beau jour que je m’intéresse
689 ialité ». Et rien ne les étonnerait davantage que d’ apprendre un beau jour que je m’intéresse à leurs « idées », à leur si
690 on, à leurs problèmes, — et que j’en fais parfois la matière même de mon travail… J’ai quelque peine à exprimer ceci, — qu
691 lèmes, — et que j’en fais parfois la matière même de mon travail… J’ai quelque peine à exprimer ceci, — qui n’est précisém
692 mer ceci, — qui n’est précisément qu’un sentiment de gêne en moi. Sentiment qu’il y a là quelque absurdité, et si énorme q
693 e absurdité, et si énorme que personne ne pense à la dire… Peut-être, dans un siècle ou deux, se demandera-t-on comment no
694 Ou bien est-ce ma gêne qui est absurde ? Essayer de confronter la culture et la réalité, c’est peut-être prouver qu’on ig
695 e ma gêne qui est absurde ? Essayer de confronter la culture et la réalité, c’est peut-être prouver qu’on ignore l’une et
696 est absurde ? Essayer de confronter la culture et la réalité, c’est peut-être prouver qu’on ignore l’une et l’autre ? Ou t
697 uver qu’on ignore l’une et l’autre ? Ou témoigner d’ une naïveté impardonnable ? — Pourtant, je ne suis pas prêt à me donne
698 er tort, c’est-à-dire à donner raison au bon sens de l’époque présente. Il a trop souvent fait ses preuves. 5 décembre
699 tort, c’est-à-dire à donner raison au bon sens de l’ époque présente. Il a trop souvent fait ses preuves. 5 décembre 193
700 uvent fait ses preuves. 5 décembre 1933 Une de nos joies, c’est de pouvoir enfin mettre au gramophone, et avec l’aig
701 es. 5 décembre 1933 Une de nos joies, c’est de pouvoir enfin mettre au gramophone, et avec l’aiguille forte, des chœ
702 st de pouvoir enfin mettre au gramophone, et avec l’ aiguille forte, des chœurs à grand fracas ou simplement de la musique
703 le forte, des chœurs à grand fracas ou simplement de la musique moderne, — sans voisins pour taper à la paroi ou pour nous
704 forte, des chœurs à grand fracas ou simplement de la musique moderne, — sans voisins pour taper à la paroi ou pour nous fa
705 e la musique moderne, — sans voisins pour taper à la paroi ou pour nous faire des scènes, conventionnelles mais épuisantes
706 des scènes, conventionnelles mais épuisantes, sur le palier. Nous n’avons qu’une dizaine de disques : Bach, Mozart, Stravi
707 antes, sur le palier. Nous n’avons qu’une dizaine de disques : Bach, Mozart, Stravinsky, Honegger. De Milhaud, l’ouverture
708 de disques : Bach, Mozart, Stravinsky, Honegger. De Milhaud, l’ouverture des Euménides, emportée de Paris sans avoir pu l
709 : Bach, Mozart, Stravinsky, Honegger. De Milhaud, l’ ouverture des Euménides, emportée de Paris sans avoir pu la jouer aill
710 . De Milhaud, l’ouverture des Euménides, emportée de Paris sans avoir pu la jouer ailleurs que chez le marchand. C’est l’é
711 re des Euménides, emportée de Paris sans avoir pu la jouer ailleurs que chez le marchand. C’est l’événement de notre solit
712 de Paris sans avoir pu la jouer ailleurs que chez le marchand. C’est l’événement de notre solitude. Et certainement c’étai
713 pu la jouer ailleurs que chez le marchand. C’est l’ événement de notre solitude. Et certainement c’était ici, dans ce dése
714 ailleurs que chez le marchand. C’est l’événement de notre solitude. Et certainement c’était ici, dans ce désert, qu’il co
715 ment c’était ici, dans ce désert, qu’il convenait d’ entendre une telle musique et de la laisser se déployer dans toute sa
716 , qu’il convenait d’entendre une telle musique et de la laisser se déployer dans toute sa démesure. Indescriptible majesté
717 u’il convenait d’entendre une telle musique et de la laisser se déployer dans toute sa démesure. Indescriptible majesté de
718 er dans toute sa démesure. Indescriptible majesté de ce lent paroxysme vocal, rythmé comme par l’avance d’une foule en mar
719 esté de ce lent paroxysme vocal, rythmé comme par l’ avance d’une foule en marche, catastrophe ou triomphe solennel d’on ne
720 e lent paroxysme vocal, rythmé comme par l’avance d’ une foule en marche, catastrophe ou triomphe solennel d’on ne sait que
721 foule en marche, catastrophe ou triomphe solennel d’ on ne sait quelle révolution future… Dictateur, prophète des masses, j
722 phète des masses, je ferais chanter cet hymne par les troupes déferlantes, et ce serait le chant du destin d’un siècle aveu
723 t hymne par les troupes déferlantes, et ce serait le chant du destin d’un siècle aveugle en sa révolte… Étrange accord de
724 upes déferlantes, et ce serait le chant du destin d’ un siècle aveugle en sa révolte… Étrange accord de cette musique de f
725 ’un siècle aveugle en sa révolte… Étrange accord de cette musique de foule et de la lande désolée autour de nous ! Proxim
726 e en sa révolte… Étrange accord de cette musique de foule et de la lande désolée autour de nous ! Proximité de l’océan. C
727 lte… Étrange accord de cette musique de foule et de la lande désolée autour de nous ! Proximité de l’océan. Clameur des m
728 … Étrange accord de cette musique de foule et de la lande désolée autour de nous ! Proximité de l’océan. Clameur des mass
729 et de la lande désolée autour de nous ! Proximité de l’océan. Clameur des masses contre le ciel fatal, et l’homme se tait
730 de la lande désolée autour de nous ! Proximité de l’ océan. Clameur des masses contre le ciel fatal, et l’homme se tait là-
731 ! Proximité de l’océan. Clameur des masses contre le ciel fatal, et l’homme se tait là-bas, « ne s’entend plus », dans la
732 céan. Clameur des masses contre le ciel fatal, et l’ homme se tait là-bas, « ne s’entend plus », dans la multitude en tumul
733 ’homme se tait là-bas, « ne s’entend plus », dans la multitude en tumulte, tandis qu’ici, dans le silence, se prolonge une
734 dans la multitude en tumulte, tandis qu’ici, dans le silence, se prolonge une rumeur de foule invisible. 6 décembre 193
735 s qu’ici, dans le silence, se prolonge une rumeur de foule invisible. 6 décembre 1933 Il fait très froid depuis quel
736 depuis quelques jours. Nous n’avons pour chauffer la grande chambre du rez-de-chaussée qu’un petit Mirus installé devant l
737 rez-de-chaussée qu’un petit Mirus installé devant la cheminée. Le vent continuel le fait ronfler furieusement, mais les fe
738 ée qu’un petit Mirus installé devant la cheminée. Le vent continuel le fait ronfler furieusement, mais les fenêtres fermen
739 us installé devant la cheminée. Le vent continuel le fait ronfler furieusement, mais les fenêtres ferment très mal — comme
740 vent continuel le fait ronfler furieusement, mais les fenêtres ferment très mal — comme partout — et nous sentons l’air fro
741 erment très mal — comme partout — et nous sentons l’ air froid qui souffle jusqu’au milieu de la chambre. Chaque matin, au
742 entons l’air froid qui souffle jusqu’au milieu de la chambre. Chaque matin, au saut du lit, je vais scier et fendre une gr
743 it, je vais scier et fendre une grande bûche dans le chai, c’est encore cela qui me réchauffe le mieux. Une des plaques de
744 dans le chai, c’est encore cela qui me réchauffe le mieux. Une des plaques de mica du Mirus est crevée, et toute la chamb
745 e cela qui me réchauffe le mieux. Une des plaques de mica du Mirus est crevée, et toute la chambre est imprégnée d’une ode
746 des plaques de mica du Mirus est crevée, et toute la chambre est imprégnée d’une odeur de laurier et de fumée. Ce matin dé
747 rus est crevée, et toute la chambre est imprégnée d’ une odeur de laurier et de fumée. Ce matin déjà il a fallu casser une
748 ée, et toute la chambre est imprégnée d’une odeur de laurier et de fumée. Ce matin déjà il a fallu casser une couche de gl
749 a chambre est imprégnée d’une odeur de laurier et de fumée. Ce matin déjà il a fallu casser une couche de glace sur l’eau
750 fumée. Ce matin déjà il a fallu casser une couche de glace sur l’eau du puits. J’ai les doigts engourdis par le contact de
751 in déjà il a fallu casser une couche de glace sur l’ eau du puits. J’ai les doigts engourdis par le contact de la corde gel
752 sser une couche de glace sur l’eau du puits. J’ai les doigts engourdis par le contact de la corde gelée, et tremblants d’av
753 sur l’eau du puits. J’ai les doigts engourdis par le contact de la corde gelée, et tremblants d’avoir scié et cassé des br
754 u puits. J’ai les doigts engourdis par le contact de la corde gelée, et tremblants d’avoir scié et cassé des branches. Cel
755 uits. J’ai les doigts engourdis par le contact de la corde gelée, et tremblants d’avoir scié et cassé des branches. Cela m
756 s par le contact de la corde gelée, et tremblants d’ avoir scié et cassé des branches. Cela m’oblige à écrire lentement ; i
757 di lui aussi. 10 décembre 1933 Un discours de l’instituteur. — Hier soir, séance de Pathé-Baby organisée par l’inst
758 lui aussi. 10 décembre 1933 Un discours de l’ instituteur. — Hier soir, séance de Pathé-Baby organisée par l’institu
759 Un discours de l’instituteur. — Hier soir, séance de Pathé-Baby organisée par l’instituteur dans la salle de l’école des g
760 . — Hier soir, séance de Pathé-Baby organisée par l’ instituteur dans la salle de l’école des garçons. Il me tardait de voi
761 ce de Pathé-Baby organisée par l’instituteur dans la salle de l’école des garçons. Il me tardait de voir une fois les habi
762 hé-Baby organisée par l’instituteur dans la salle de l’école des garçons. Il me tardait de voir une fois les habitants du
763 Baby organisée par l’instituteur dans la salle de l’ école des garçons. Il me tardait de voir une fois les habitants du vil
764 ns la salle de l’école des garçons. Il me tardait de voir une fois les habitants du village réunis, leur façon d’être ense
765 école des garçons. Il me tardait de voir une fois les habitants du village réunis, leur façon d’être ensemble, et surtout l
766 fois les habitants du village réunis, leur façon d’ être ensemble, et surtout la jeunesse, d’ordinaire invisible, au point
767 ge réunis, leur façon d’être ensemble, et surtout la jeunesse, d’ordinaire invisible, au point que je doutais même qu’elle
768 ur façon d’être ensemble, et surtout la jeunesse, d’ ordinaire invisible, au point que je doutais même qu’elle existât. Ell
769 ême qu’elle existât. Elle était là. Elle occupait les longs bancs rangés en chevrons derrière le petit appareil de projecti
770 upait les longs bancs rangés en chevrons derrière le petit appareil de projection placé à trois ou quatre mètres de l’écra
771 ncs rangés en chevrons derrière le petit appareil de projection placé à trois ou quatre mètres de l’écran. (Un drap de lit
772 reil de projection placé à trois ou quatre mètres de l’écran. (Un drap de lit sur le tableau noir.) Une quarantaine de fil
773 l de projection placé à trois ou quatre mètres de l’ écran. (Un drap de lit sur le tableau noir.) Une quarantaine de filles
774 acé à trois ou quatre mètres de l’écran. (Un drap de lit sur le tableau noir.) Une quarantaine de filles et de gars peu br
775 ou quatre mètres de l’écran. (Un drap de lit sur le tableau noir.) Une quarantaine de filles et de gars peu bruyants, pre
776 drap de lit sur le tableau noir.) Une quarantaine de filles et de gars peu bruyants, presque tous laids de visage et très
777 ur le tableau noir.) Une quarantaine de filles et de gars peu bruyants, presque tous laids de visage et très épais de corp
778 illes et de gars peu bruyants, presque tous laids de visage et très épais de corps. Nous étions assis derrière eux. Au fon
779 yants, presque tous laids de visage et très épais de corps. Nous étions assis derrière eux. Au fond, sur deux armoires bas
780 sur deux armoires basses, siégeaient une dizaine d’ hommes. Deux ou trois coiffes de paysannes seulement. Et des enfants a
781 aient une dizaine d’hommes. Deux ou trois coiffes de paysannes seulement. Et des enfants autour du trépied de l’appareil,
782 annes seulement. Et des enfants autour du trépied de l’appareil, empressés à tendre les bobines de film à l’instituteur. I
783 es seulement. Et des enfants autour du trépied de l’ appareil, empressés à tendre les bobines de film à l’instituteur. Ilfa
784 tour du trépied de l’appareil, empressés à tendre les bobines de film à l’instituteur. Ilfallut un certain temps pour mettr
785 ied de l’appareil, empressés à tendre les bobines de film à l’instituteur. Ilfallut un certain temps pour mettre au point
786 ppareil, empressés à tendre les bobines de film à l’ instituteur. Ilfallut un certain temps pour mettre au point la project
787 r. Ilfallut un certain temps pour mettre au point la projection. Les jeunes gens étouffaient des rires, chatouillaient les
788 certain temps pour mettre au point la projection. Les jeunes gens étouffaient des rires, chatouillaient les filles. Devant
789 jeunes gens étouffaient des rires, chatouillaient les filles. Devant moi une grosse luronne s’agitait sur son banc. Je voya
790 que grasse. Un des garçons s’en aperçoit, attrape la puce en pinçant la fille, et les rires redoublent. L’instituteur récl
791 garçons s’en aperçoit, attrape la puce en pinçant la fille, et les rires redoublent. L’instituteur réclame le silence, et
792 aperçoit, attrape la puce en pinçant la fille, et les rires redoublent. L’instituteur réclame le silence, et la projection
793 uce en pinçant la fille, et les rires redoublent. L’ instituteur réclame le silence, et la projection commence. C’est un fi
794 e, et les rires redoublent. L’instituteur réclame le silence, et la projection commence. C’est un film d’avant-guerre, la
795 redoublent. L’instituteur réclame le silence, et la projection commence. C’est un film d’avant-guerre, la Course au Flamb
796 silence, et la projection commence. C’est un film d’ avant-guerre, la Course au Flambeau, tiré de la pièce de Paul Hervieu.
797 rojection commence. C’est un film d’avant-guerre, la Course au Flambeau, tiré de la pièce de Paul Hervieu. Entre chaque ép
798 film d’avant-guerre, la Course au Flambeau, tiré de la pièce de Paul Hervieu. Entre chaque épisode reparaissent les mêmes
799 lm d’avant-guerre, la Course au Flambeau, tiré de la pièce de Paul Hervieu. Entre chaque épisode reparaissent les mêmes ép
800 t-guerre, la Course au Flambeau, tiré de la pièce de Paul Hervieu. Entre chaque épisode reparaissent les mêmes éphèbes gre
801 e Paul Hervieu. Entre chaque épisode reparaissent les mêmes éphèbes grecs, porteurs de torches qu’ils se passent avec des g
802 de reparaissent les mêmes éphèbes grecs, porteurs de torches qu’ils se passent avec des gestes lents, hallucinants, à gran
803 es lents, hallucinants, à grands sauts ralentis —  le courant électrique n’étant sans doute pas assez fort pour faire tourn
804 tant sans doute pas assez fort pour faire tourner l’ appareil au rythme normal. Tout le monde a l’air très content, bien qu
805 mal. Tout le monde a l’air très content, bien que le film m’apparaisse à peu près incompréhensible. La course au flambeau
806 le film m’apparaisse à peu près incompréhensible. La course au flambeau terminée, on rallume. L’instituteur monte à sa cha
807 ible. La course au flambeau terminée, on rallume. L’ instituteur monte à sa chaire et annonce qu’il va prononcer, comme cha
808 iscours. « Je serai bref ! » C’est un jeune homme d’ allure énergique et de visage intelligent, la chevelure noire en batai
809 ef ! » C’est un jeune homme d’allure énergique et de visage intelligent, la chevelure noire en bataille qu’il saisit à ple
810 omme d’allure énergique et de visage intelligent, la chevelure noire en bataille qu’il saisit à pleines mains dans les mom
811 ire en bataille qu’il saisit à pleines mains dans les moments pathétiques. Il annonce le sujet de ce soir : Qu’est-ce qu’êt
812 es mains dans les moments pathétiques. Il annonce le sujet de ce soir : Qu’est-ce qu’être laïque ? — « Messieurs, chers am
813 dans les moments pathétiques. Il annonce le sujet de ce soir : Qu’est-ce qu’être laïque ? — « Messieurs, chers amis ! Je v
814 rs, chers amis ! Je vous rappellerai tout d’abord les circonstances qui m’ont fait choisir ce sujet. Il y a… tout près d’ic
815 y a… tout près d’ici… quelqu’un — je ne veux pas le nommer, je n’attaquerai personne, moi ! — il y a, dis-je, quelqu’un q
816 consciences ! » Récit détaillé des calomnies que le curé répand sur son compte, dans les foyers et jusque dans la presse1
817 calomnies que le curé répand sur son compte, dans les foyers et jusque dans la presse1 ! « Je n’ai pas cherché la guerre, m
818 nd sur son compte, dans les foyers et jusque dans la presse1 ! « Je n’ai pas cherché la guerre, moi ! Eh bien ! je saurai
819 et jusque dans la presse1 ! « Je n’ai pas cherché la guerre, moi ! Eh bien ! je saurai me défendre ! Et malgré les persécu
820 moi ! Eh bien ! je saurai me défendre ! Et malgré les persécutions de ceux qui ont intérêt à étouffer la vérité, etc. » La
821 e saurai me défendre ! Et malgré les persécutions de ceux qui ont intérêt à étouffer la vérité, etc. » La chevelure s’agit
822 s persécutions de ceux qui ont intérêt à étouffer la vérité, etc. » La chevelure s’agite, les bras s’agitent, la voix s’en
823 ceux qui ont intérêt à étouffer la vérité, etc. » La chevelure s’agite, les bras s’agitent, la voix s’enfle. « J’étais au
824 étouffer la vérité, etc. » La chevelure s’agite, les bras s’agitent, la voix s’enfle. « J’étais au dernier congrès des ins
825 etc. » La chevelure s’agite, les bras s’agitent, la voix s’enfle. « J’étais au dernier congrès des instituteurs qui s’est
826 oyens ! lors de ce congrès, il a été stipulé qu’à l’ avenir… » La fin de la phrase étant particulièrement sonore, des appla
827 de ce congrès, il a été stipulé qu’à l’avenir… » La fin de la phrase étant particulièrement sonore, des applaudissements
828 congrès, il a été stipulé qu’à l’avenir… » La fin de la phrase étant particulièrement sonore, des applaudissements éclaten
829 grès, il a été stipulé qu’à l’avenir… » La fin de la phrase étant particulièrement sonore, des applaudissements éclatent a
830 ent sonore, des applaudissements éclatent au fond de la salle. Le jeune orateur électrisé se lance dans une définition vib
831 sonore, des applaudissements éclatent au fond de la salle. Le jeune orateur électrisé se lance dans une définition vibran
832 es applaudissements éclatent au fond de la salle. Le jeune orateur électrisé se lance dans une définition vibrante de la l
833 r électrisé se lance dans une définition vibrante de la laïcité. « Être laïque, c’est vouloir la Justice et l’Égalité pour
834 lectrisé se lance dans une définition vibrante de la laïcité. « Être laïque, c’est vouloir la Justice et l’Égalité pour to
835 rante de la laïcité. « Être laïque, c’est vouloir la Justice et l’Égalité pour tous ! Être laïque, c’est vouloir l’instruc
836 ïcité. « Être laïque, c’est vouloir la Justice et l’ Égalité pour tous ! Être laïque, c’est vouloir l’instruction libre et
837 l’Égalité pour tous ! Être laïque, c’est vouloir l’ instruction libre et gratuite pour tous, sans distinction de fortune o
838 ion libre et gratuite pour tous, sans distinction de fortune ou de religion ! Être laïque… » Ah ! surtout être laïque, ce
839 ratuite pour tous, sans distinction de fortune ou de religion ! Être laïque… » Ah ! surtout être laïque, ce n’est pas comb
840 Ah ! surtout être laïque, ce n’est pas combattre les religions, comme le prétend le voisin, « car je les respecte toutes,
841 ïque, ce n’est pas combattre les religions, comme le prétend le voisin, « car je les respecte toutes, les religions, sauf
842 est pas combattre les religions, comme le prétend le voisin, « car je les respecte toutes, les religions, sauf quand elles
843 s religions, comme le prétend le voisin, « car je les respecte toutes, les religions, sauf quand elles viennent m’attaquer
844 prétend le voisin, « car je les respecte toutes, les religions, sauf quand elles viennent m’attaquer dans mon activité pro
845 , c’est être religieux au vrai sens du mot, selon les paroles de Gambetta, d’Ernest Lavisse et de quelques autres. Être laï
846 religieux au vrai sens du mot, selon les paroles de Gambetta, d’Ernest Lavisse et de quelques autres. Être laïque, c’est
847 vrai sens du mot, selon les paroles de Gambetta, d’ Ernest Lavisse et de quelques autres. Être laïque, c’est finalement « 
848 elon les paroles de Gambetta, d’Ernest Lavisse et de quelques autres. Être laïque, c’est finalement « aimer son prochain »
849 r son prochain » ! Je n’ai pas plus tôt soufflé à l’ oreille de ma femme « C’est un sermon ! » que l’orateur, au comble de
850 hain » ! Je n’ai pas plus tôt soufflé à l’oreille de ma femme « C’est un sermon ! » que l’orateur, au comble de son éloque
851 à l’oreille de ma femme « C’est un sermon ! » que l’ orateur, au comble de son éloquence, s’écrie : « Et, mes frères ! si l
852 me « C’est un sermon ! » que l’orateur, au comble de son éloquence, s’écrie : « Et, mes frères ! si l’on vient encore vous
853 de son éloquence, s’écrie : « Et, mes frères ! si l’ on vient encore vous dire que je suis un empoisonneur des consciences,
854 aurez maintenant me défendre ! etc. » C’est fini. L’ instituteur s’éponge. Les hommes du fond ont applaudi brièvement. Mell
855 ndre ! etc. » C’est fini. L’instituteur s’éponge. Les hommes du fond ont applaudi brièvement. Mellouin a même crié : Très b
856 di brièvement. Mellouin a même crié : Très bien ! Les jeunes trouvent qu’« il cause bien ». Pour terminer la soirée, on pas
857 unes trouvent qu’« il cause bien ». Pour terminer la soirée, on passe un dessin animé, le Petit Poucet, qui remporte un gr
858 our terminer la soirée, on passe un dessin animé, le Petit Poucet, qui remporte un gros succès. En sortant, nous passons d
859 e un gros succès. En sortant, nous passons devant la salle du curé, qui donne aussi ce soir une séance de cinéma. On enten
860 salle du curé, qui donne aussi ce soir une séance de cinéma. On entend rire des enfants. J’ai rencontré le curé ce matin,
861 inéma. On entend rire des enfants. J’ai rencontré le curé ce matin, suivi comme d’habitude d’une bande de petits garçons.
862 nts. J’ai rencontré le curé ce matin, suivi comme d’ habitude d’une bande de petits garçons. Il n’a pas répondu à mon salut
863 encontré le curé ce matin, suivi comme d’habitude d’ une bande de petits garçons. Il n’a pas répondu à mon salut. 11 déc
864 curé ce matin, suivi comme d’habitude d’une bande de petits garçons. Il n’a pas répondu à mon salut. 11 décembre 1933
865 as répondu à mon salut. 11 décembre 1933 À la cuisine. — Les jours où il n’est plus possible de se chauffer dans la
866 on salut. 11 décembre 1933 À la cuisine. —  Les jours où il n’est plus possible de se chauffer dans la grande pièce,
867 la cuisine. — Les jours où il n’est plus possible de se chauffer dans la grande pièce, je vais travailler à la cuisine, pe
868 urs où il n’est plus possible de se chauffer dans la grande pièce, je vais travailler à la cuisine, pendant que ma femme p
869 auffer dans la grande pièce, je vais travailler à la cuisine, pendant que ma femme prépare les repas. On est très bien, da
870 ailler à la cuisine, pendant que ma femme prépare les repas. On est très bien, dans les cuisines, pour travailler. Je ne co
871 a femme prépare les repas. On est très bien, dans les cuisines, pour travailler. Je ne conçois, en somme, que trois types d
872 vailler. Je ne conçois, en somme, que trois types de pièces habitables, pour un homme qui attache de l’importance à ce qui
873 s de pièces habitables, pour un homme qui attache de l’importance à ce qui l’entoure : appartements et grandes salles de c
874 e pièces habitables, pour un homme qui attache de l’ importance à ce qui l’entoure : appartements et grandes salles de chât
875 our un homme qui attache de l’importance à ce qui l’ entoure : appartements et grandes salles de châteaux ; chambre encombr
876 ce qui l’entoure : appartements et grandes salles de châteaux ; chambre encombrée de livres et de papiers ; cuisines paysa
877 et grandes salles de châteaux ; chambre encombrée de livres et de papiers ; cuisines paysannes, confortables et richement
878 lles de châteaux ; chambre encombrée de livres et de papiers ; cuisines paysannes, confortables et richement odorantes. Le
879 s paysannes, confortables et richement odorantes. Le confort de celle-ci est plus moral que matériel, d’ailleurs. Ma femme
880 , confortables et richement odorantes. Le confort de celle-ci est plus moral que matériel, d’ailleurs. Ma femme ne dispose
881 que matériel, d’ailleurs. Ma femme ne dispose que d’ un vieux fourneau difficile à allumer et à entretenir, et d’un réchaud
882 fourneau difficile à allumer et à entretenir, et d’ un réchaud à gaz de pétrole sujet à des pannes mystérieuses, qui nous
883 à allumer et à entretenir, et d’un réchaud à gaz de pétrole sujet à des pannes mystérieuses, qui nous menace sans cesse d
884 s pannes mystérieuses, qui nous menace sans cesse d’ explosion. (Deux petites pompes, à droite et à gauche de l’appareil, a
885 osion. (Deux petites pompes, à droite et à gauche de l’appareil, assurent en principe la pression du gaz. On risque toujou
886 on. (Deux petites pompes, à droite et à gauche de l’ appareil, assurent en principe la pression du gaz. On risque toujours
887 e et à gauche de l’appareil, assurent en principe la pression du gaz. On risque toujours de pomper un peu trop fort et de
888 n principe la pression du gaz. On risque toujours de pomper un peu trop fort et de tout faire sauter.) Pas d’évier, ni d’e
889 On risque toujours de pomper un peu trop fort et de tout faire sauter.) Pas d’évier, ni d’eau courante, bien entendu. Il
890 er un peu trop fort et de tout faire sauter.) Pas d’ évier, ni d’eau courante, bien entendu. Il faut aller au puits ; filtr
891 op fort et de tout faire sauter.) Pas d’évier, ni d’ eau courante, bien entendu. Il faut aller au puits ; filtrer l’eau tan
892 e, bien entendu. Il faut aller au puits ; filtrer l’ eau tant bien que mal : se geler les doigts déjà gercés… 12 décembr
893 uits ; filtrer l’eau tant bien que mal : se geler les doigts déjà gercés… 12 décembre 1933 Tout à l’heure, en déchira
894 doigts déjà gercés… 12 décembre 1933 Tout à l’ heure, en déchirant le journal de l’île pour allumer le feu, j’ai vu l
895 12 décembre 1933 Tout à l’heure, en déchirant le journal de l’île pour allumer le feu, j’ai vu l’annonce d’une confére
896 e 1933 Tout à l’heure, en déchirant le journal de l’île pour allumer le feu, j’ai vu l’annonce d’une conférence contrad
897 933 Tout à l’heure, en déchirant le journal de l’ île pour allumer le feu, j’ai vu l’annonce d’une conférence contradict
898 re, en déchirant le journal de l’île pour allumer le feu, j’ai vu l’annonce d’une conférence contradictoire à A… : « La Bi
899 le journal de l’île pour allumer le feu, j’ai vu l’ annonce d’une conférence contradictoire à A… : « La Bible et les trava
900 l de l’île pour allumer le feu, j’ai vu l’annonce d’ une conférence contradictoire à A… : « La Bible et les travailleurs ».
901 ’annonce d’une conférence contradictoire à A… : «  La Bible et les travailleurs ». C’est sans doute une réponse à la confér
902 ne conférence contradictoire à A… : « La Bible et les travailleurs ». C’est sans doute une réponse à la conférence donnée a
903 es travailleurs ». C’est sans doute une réponse à la conférence donnée au même endroit, il y a quinze jours, sous les ausp
904 donnée au même endroit, il y a quinze jours, sous les auspices d’une ligue « antifasciste », et qui avait pour sujet : « L’
905 e endroit, il y a quinze jours, sous les auspices d’ une ligue « antifasciste », et qui avait pour sujet : « L’Église contr
906 gue « antifasciste », et qui avait pour sujet : «  L’ Église contre les travailleurs ». Je comptais me rendre à la première
907 te », et qui avait pour sujet : « L’Église contre les travailleurs ». Je comptais me rendre à la première conférence. Mais
908 comptais me rendre à la première conférence. Mais le village d’A. est à 8 kilomètres et la tempête m’avait empêché d’y all
909 rendre à la première conférence. Mais le village d’ A. est à 8 kilomètres et la tempête m’avait empêché d’y aller à bicycl
910 rence. Mais le village d’A. est à 8 kilomètres et la tempête m’avait empêché d’y aller à bicyclette. J’essaierai d’aller d
911 est à 8 kilomètres et la tempête m’avait empêché d’ y aller à bicyclette. J’essaierai d’aller demain soir entendre la répo
912 avait empêché d’y aller à bicyclette. J’essaierai d’ aller demain soir entendre la réponse. La mère Renaud vient de m’appre
913 yclette. J’essaierai d’aller demain soir entendre la réponse. La mère Renaud vient de m’apprendre que l’orateur est le pas
914 ssaierai d’aller demain soir entendre la réponse. La mère Renaud vient de m’apprendre que l’orateur est le pasteur du chef
915 réponse. La mère Renaud vient de m’apprendre que l’ orateur est le pasteur du chef-lieu. Il paraît qu’il cause très bien —
916 ère Renaud vient de m’apprendre que l’orateur est le pasteur du chef-lieu. Il paraît qu’il cause très bien — lui aussi — m
917 qu’il cause très bien — lui aussi — mais elle ne l’ a jamais entendu. Elle est catholique, en effet, comme d’ailleurs tout
918 comme d’ailleurs tout le monde au village, à part la petite minorité de mauvaises têtes qui suit les prêches laïques de l’
919 ut le monde au village, à part la petite minorité de mauvaises têtes qui suit les prêches laïques de l’instituteur. Le seu
920 rt la petite minorité de mauvaises têtes qui suit les prêches laïques de l’instituteur. Le seul protestant est mort l’été d
921 é de mauvaises têtes qui suit les prêches laïques de l’instituteur. Le seul protestant est mort l’été dernier, âgé de 93 a
922 e mauvaises têtes qui suit les prêches laïques de l’ instituteur. Le seul protestant est mort l’été dernier, âgé de 93 ans.
923 es qui suit les prêches laïques de l’instituteur. Le seul protestant est mort l’été dernier, âgé de 93 ans. Il s’était con
924 ues de l’instituteur. Le seul protestant est mort l’ été dernier, âgé de 93 ans. Il s’était converti à 70 ans « et il avait
925 r. Le seul protestant est mort l’été dernier, âgé de 93 ans. Il s’était converti à 70 ans « et il avait toujours tenu ! »
926 stant, — tous ces mots prennent ici quelque chose de joliment absurde. Les paysans du village ne sont pas même tous capabl
927 s prennent ici quelque chose de joliment absurde. Les paysans du village ne sont pas même tous capables de lire le journal,
928 paysans du village ne sont pas même tous capables de lire le journal, et j’ai remarqué qu’ils achètent absolument au hasar
929 du village ne sont pas même tous capables de lire le journal, et j’ai remarqué qu’ils achètent absolument au hasard ceux q
930 ment au hasard ceux qu’ils trouvent en dépôt chez la mère Renaud : l’Ami du Peuple ou la France de Bordeaux, la feuille lo
931 ux qu’ils trouvent en dépôt chez la mère Renaud : l’ Ami du Peuple ou la France de Bordeaux, la feuille locale des curés ou
932 en dépôt chez la mère Renaud : l’Ami du Peuple ou la France de Bordeaux, la feuille locale des curés ou celle des républic
933 enaud : l’Ami du Peuple ou la France de Bordeaux, la feuille locale des curés ou celle des républicains. Il est à peu près
934 le des républicains. Il est à peu près impossible de savoir s’ils font une distinction quelconque entre les opinions, pour
935 avoir s’ils font une distinction quelconque entre les opinions, pourtant bien tranchées, que ces journaux leur servent. Je
936 crois qu’ils n’y pensent même pas. Peut-être que la discussion annoncée après la conférence d’A. me fera modifier ce juge
937 e pas. Peut-être que la discussion annoncée après la conférence d’A. me fera modifier ce jugement. J’en suis bien curieux.
938 re que la discussion annoncée après la conférence d’ A. me fera modifier ce jugement. J’en suis bien curieux. 13 décembr
939 Un ami auquel j’avais prêté quelques centaines de francs il y a un an, m’en renvoie 100 par le courrier de ce matin. « 
940 ines de francs il y a un an, m’en renvoie 100 par le courrier de ce matin. « Vous devez être bien content, me dit la factr
941 cs il y a un an, m’en renvoie 100 par le courrier de ce matin. « Vous devez être bien content, me dit la factrice pendant
942 ce matin. « Vous devez être bien content, me dit la factrice pendant que je signe le mandat, c’est l’argent que vous atte
943 content, me dit la factrice pendant que je signe le mandat, c’est l’argent que vous attendiez ? » — Celui-là ou un autre…
944 la factrice pendant que je signe le mandat, c’est l’ argent que vous attendiez ? » — Celui-là ou un autre… Je ne lui dis pa
945 t et pour tout 2 francs 50 : on ne me ferait plus de crédit chez les épicières, et j’en aurai sans doute besoin un de ces
946 2 francs 50 : on ne me ferait plus de crédit chez les épicières, et j’en aurai sans doute besoin un de ces jours… 15 déc
947 les épicières, et j’en aurai sans doute besoin un de ces jours… 15 décembre 1933 Je relève les notes prises l’autre
948 un de ces jours… 15 décembre 1933 Je relève les notes prises l’autre soir sur la conférence à A. — Grande salle de la
949 33 Je relève les notes prises l’autre soir sur la conférence à A. — Grande salle de la Mairie, voûtée, peinte en bleu c
950 ’autre soir sur la conférence à A. — Grande salle de la Mairie, voûtée, peinte en bleu clair. Une table et trois chaises s
951 tre soir sur la conférence à A. — Grande salle de la Mairie, voûtée, peinte en bleu clair. Une table et trois chaises sur
952 nte en bleu clair. Une table et trois chaises sur la scène surélevée. Environ une centaine d’auditeurs : paysans et pêcheu
953 ises sur la scène surélevée. Environ une centaine d’ auditeurs : paysans et pêcheurs, cela se voit. Au premier rang, deux «
954 rang, deux « dames », l’une très vieille. Ce sont les seules femmes. Mauvais éclairage. L’orateur se hisse sur la scène : c
955 le. Ce sont les seules femmes. Mauvais éclairage. L’ orateur se hisse sur la scène : c’est un homme jeune encore, un peu le
956 femmes. Mauvais éclairage. L’orateur se hisse sur la scène : c’est un homme jeune encore, un peu lent d’allure, à la physi
957 scène : c’est un homme jeune encore, un peu lent d’ allure, à la physionomie ouverte et sérieuse. « Eh bien, Messieurs et
958 st un homme jeune encore, un peu lent d’allure, à la physionomie ouverte et sérieuse. « Eh bien, Messieurs et chers amis,
959 mis, nous allons procéder, selon votre coutume, à l’ élection du bureau, puisque, comme vous le savez, la conférence est co
960 tume, à l’élection du bureau, puisque, comme vous le savez, la conférence est contradictoire. Je vous demanderai donc de b
961 élection du bureau, puisque, comme vous le savez, la conférence est contradictoire. Je vous demanderai donc de bien vouloi
962 rence est contradictoire. Je vous demanderai donc de bien vouloir proposer des noms ». Silence. Chuchotements. « Vas-y ! —
963 leurs voisins, trois hommes se lèvent en haussant les épaules pour s’excuser de se mettre en avant. Ils gravissent la scène
964 se lèvent en haussant les épaules pour s’excuser de se mettre en avant. Ils gravissent la scène, enlèvent leur casquette
965 r s’excuser de se mettre en avant. Ils gravissent la scène, enlèvent leur casquette à visière cirée, et s’installent sur l
966 ur casquette à visière cirée, et s’installent sur les trois chaises, un tout à droite, un tout à gauche, le troisième, qui
967 à droite, un tout à gauche, le troisième, qui est le président, derrière la table. Embarrassés de leurs mains, de leurs pi
968 che, le troisième, qui est le président, derrière la table. Embarrassés de leurs mains, de leurs pieds, de leur casquette.
969 est le président, derrière la table. Embarrassés de leurs mains, de leurs pieds, de leur casquette. Coups d’œil malicieux
970 t, derrière la table. Embarrassés de leurs mains, de leurs pieds, de leur casquette. Coups d’œil malicieux aux copains de
971 able. Embarrassés de leurs mains, de leurs pieds, de leur casquette. Coups d’œil malicieux aux copains de la salle. Le pré
972 s mains, de leurs pieds, de leur casquette. Coups d’ œil malicieux aux copains de la salle. Le président se lève : « Messie
973 leur casquette. Coups d’œil malicieux aux copains de la salle. Le président se lève : « Messieurs et dames, vous m’excuser
974 r casquette. Coups d’œil malicieux aux copains de la salle. Le président se lève : « Messieurs et dames, vous m’excuserez
975 e. Coups d’œil malicieux aux copains de la salle. Le président se lève : « Messieurs et dames, vous m’excuserez de ne pas
976 se lève : « Messieurs et dames, vous m’excuserez de ne pas vous présenter l’orateur qui va vous faire un intéressant disc
977 dames, vous m’excuserez de ne pas vous présenter l’ orateur qui va vous faire un intéressant discours sur le sujet… Je ne
978 eur qui va vous faire un intéressant discours sur le sujet… Je ne connais pas beaucoup M. Palut, n’est-ce pas, c’est la pr
979 inement qu’il va nous intéresser, et je lui donne la parole. » M. Palut sourit cordialement, et parle : — On a dit ici mêm
980 cordialement, et parle : — On a dit ici même que l’ Église est contre les travailleurs. Est-ce vrai ? Il y a plusieurs égl
981 rle : — On a dit ici même que l’Église est contre les travailleurs. Est-ce vrai ? Il y a plusieurs églises, et malheureusem
982 alheureusement elles ne s’entendent pas toujours. La primitive église était constituée par des esclaves et des gens pauvre
983 s gens pauvres. Depuis lors il y a eu des églises de riches. Elles ont trahi l’Évangile. « Un philosophe français, M. Juli
984 il y a eu des églises de riches. Elles ont trahi l’ Évangile. « Un philosophe français, M. Julien Benda, a dit que les cle
985 n philosophe français, M. Julien Benda, a dit que les clercs ont trahi. Les clercs, n’est-ce pas, ce sont les intellectuels
986 M. Julien Benda, a dit que les clercs ont trahi. Les clercs, n’est-ce pas, ce sont les intellectuels, les écrivains, les p
987 ercs ont trahi. Les clercs, n’est-ce pas, ce sont les intellectuels, les écrivains, les professeurs, des hommes distingués
988 clercs, n’est-ce pas, ce sont les intellectuels, les écrivains, les professeurs, des hommes distingués et très instruits.
989 ce pas, ce sont les intellectuels, les écrivains, les professeurs, des hommes distingués et très instruits. Eh bien, il y a
990  » Capitalisme, bourgeoisie égoïste, guerre. Mais le vrai chrétien est avec les petits. Résumé de ce que la Bible dit des
991 e égoïste, guerre. Mais le vrai chrétien est avec les petits. Résumé de ce que la Bible dit des travailleurs : Jérémie exig
992 Mais le vrai chrétien est avec les petits. Résumé de ce que la Bible dit des travailleurs : Jérémie exigeait que le roi pa
993 ai chrétien est avec les petits. Résumé de ce que la Bible dit des travailleurs : Jérémie exigeait que le roi payât les ou
994 Bible dit des travailleurs : Jérémie exigeait que le roi payât les ouvriers. L’Ancien Testament nous montre que le système
995 travailleurs : Jérémie exigeait que le roi payât les ouvriers. L’Ancien Testament nous montre que le système de propriété
996 : Jérémie exigeait que le roi payât les ouvriers. L’ Ancien Testament nous montre que le système de propriété chez les Juif
997 les ouvriers. L’Ancien Testament nous montre que le système de propriété chez les Juifs est presque communiste ! Jésus es
998 rs. L’Ancien Testament nous montre que le système de propriété chez les Juifs est presque communiste ! Jésus est l’ami des
999 ment nous montre que le système de propriété chez les Juifs est presque communiste ! Jésus est l’ami des pauvres, des péage
1000 chez les Juifs est presque communiste ! Jésus est l’ ami des pauvres, des péagers. Malheureusement il y a le cléricalisme.
1001 des pauvres, des péagers. Malheureusement il y a le cléricalisme. C’est lui qui est mauvais, non pas la Bible. Être chrét
1002 cléricalisme. C’est lui qui est mauvais, non pas la Bible. Être chrétien, c’est aimer son prochain comme Jésus nous aime.
1003 aimer son prochain comme Jésus nous aime. Si tous les hommes étaient chrétiens, il n’y aurait plus d’exploitation ni de gue
1004 les hommes étaient chrétiens, il n’y aurait plus d’ exploitation ni de guerre !… La péroraison a été éloquente, un peu tro
1005 t chrétiens, il n’y aurait plus d’exploitation ni de guerre !… La péroraison a été éloquente, un peu trop à mon goût. On a
1006 il n’y aurait plus d’exploitation ni de guerre !… La péroraison a été éloquente, un peu trop à mon goût. On applaudit. Le
1007 éloquente, un peu trop à mon goût. On applaudit. Le président demande s’il y a des questions à poser. Long silence embarr
1008 silence embarrassé. Enfin un type se lève au fond de la salle et demande « s’il n’y a pas des contradictions dans la Bible
1009 ence embarrassé. Enfin un type se lève au fond de la salle et demande « s’il n’y a pas des contradictions dans la Bible ».
1010 demande « s’il n’y a pas des contradictions dans la Bible ». Suit une petite discussion tout à fait confuse et sans aucun
1011 on tout à fait confuse et sans aucun rapport avec le sujet. Il n’y a pas d’autre question. Le président fait alors un bref
1012 et sans aucun rapport avec le sujet. Il n’y a pas d’ autre question. Le président fait alors un bref remerciement à l’orate
1013 ort avec le sujet. Il n’y a pas d’autre question. Le président fait alors un bref remerciement à l’orateur. Il s’excuse en
1014 n. Le président fait alors un bref remerciement à l’ orateur. Il s’excuse encore de ne pas s’y connaître assez en religion,
1015 bref remerciement à l’orateur. Il s’excuse encore de ne pas s’y connaître assez en religion, mais assure qu’il a été bien
1016 assure qu’il a été bien intéressé. On se lève, et les langues se délient. « Il a bien parlé, hein ? », me dit mon voisin pe
1017 est un petit maigre en casquette, environ 35 ans, l’ air intelligent. Je l’approuve et m’étonne que la discussion n’ait pas
1018 casquette, environ 35 ans, l’air intelligent. Je l’ approuve et m’étonne que la discussion n’ait pas été plus longue : il
1019 l’air intelligent. Je l’approuve et m’étonne que la discussion n’ait pas été plus longue : il y avait pourtant bien des a
1020 e d’accord ? — Ben quoi, fait-il convaincu, c’est la vérité ce qu’il a dit ! Comment donc ? Ai-je affaire à un chrétien ou
1021 à un chrétien ou même à un protestant ? J’essaie de le faire parler. Je lui dis : Oui, c’est la vérité pour les chrétiens
1022 un chrétien ou même à un protestant ? J’essaie de le faire parler. Je lui dis : Oui, c’est la vérité pour les chrétiens, m
1023 ssaie de le faire parler. Je lui dis : Oui, c’est la vérité pour les chrétiens, mais tout le monde ne pense pas comme ça i
1024 re parler. Je lui dis : Oui, c’est la vérité pour les chrétiens, mais tout le monde ne pense pas comme ça ici ? — Il me reg
1025 affaire. C’est bien comme ça que c’est écrit dans la Bible, il n’a pas dit de mensonges, quoi ! Mais ici ils ne savent pas
1026 ça que c’est écrit dans la Bible, il n’a pas dit de mensonges, quoi ! Mais ici ils ne savent pas discuter. Si vous alliez
1027 …2, alors ! c’est autre chose. Là ça barde, après les réunions ! Mais ici, qu’est-ce que vous voulez. Ils sont comme ça… »
1028 er au conférencier et nous sortons ensemble. Dans la rue noire, un homme nous rejoint : c’est celui qui a présidé la réuni
1029 un homme nous rejoint : c’est celui qui a présidé la réunion. Il veut encore remercier M. Palut. Enfin il veut lui demande
1030 nfin il veut lui demander « si ce serait possible de se procurer une Bible pour étudier un peu tout ça. On sent bien que c
1031 un peu tout ça. On sent bien que c’est important de s’y connaître dans ces questions. » Il s’exprime avant tant de pruden
1032 s je ne saisis pas bien si ce curé lui a interdit la lecture de la Bible, ou si au contraire il pourrait lui en prêter une
1033 sis pas bien si ce curé lui a interdit la lecture de la Bible, ou si au contraire il pourrait lui en prêter une. Quoi qu’i
1034 pas bien si ce curé lui a interdit la lecture de la Bible, ou si au contraire il pourrait lui en prêter une. Quoi qu’il e
1035 l pourrait lui en prêter une. Quoi qu’il en soit, le pasteur note le nom du « président » et promet de lui envoyer un Nouv
1036 n prêter une. Quoi qu’il en soit, le pasteur note le nom du « président » et promet de lui envoyer un Nouveau Testament.
1037 le pasteur note le nom du « président » et promet de lui envoyer un Nouveau Testament. Nous faisons les cent pas sur la p
1038 e lui envoyer un Nouveau Testament. Nous faisons les cent pas sur la place. M. Palut sait que je suis écrivain, il a lu un
1039 Nouveau Testament. Nous faisons les cent pas sur la place. M. Palut sait que je suis écrivain, il a lu un de mes articles
1040 e. M. Palut sait que je suis écrivain, il a lu un de mes articles. Je le sens inquiet de mon opinion « d’intellectuel » su
1041 je suis écrivain, il a lu un de mes articles. Je le sens inquiet de mon opinion « d’intellectuel » sur son discours. « C’
1042 n, il a lu un de mes articles. Je le sens inquiet de mon opinion « d’intellectuel » sur son discours. « C’était sûrement b
1043 mes articles. Je le sens inquiet de mon opinion «  d’ intellectuel » sur son discours. « C’était sûrement beaucoup trop simp
1044 ai dit ce soir, j’ai dû vous ennuyer, hein ? » Je le rassure vivement. Ce n’est pas moi qui lui reprocherai jamais d’être
1045 ment. Ce n’est pas moi qui lui reprocherai jamais d’ être trop simple. On ne l’est jamais assez ! — « Oh, vous savez, dit-i
1046 lui reprocherai jamais d’être trop simple. On ne l’ est jamais assez ! — « Oh, vous savez, dit-il, je n’y mets pas d’amour
1047 sez ! — « Oh, vous savez, dit-il, je n’y mets pas d’ amour-propre, vous pouvez me dire franchement ce que vous pensez de ce
1048 ous pouvez me dire franchement ce que vous pensez de cette soirée »… Je le regarde. C’est un homme simple et solide, on pe
1049 nchement ce que vous pensez de cette soirée »… Je le regarde. C’est un homme simple et solide, on peut lui parler en camar
1050 mble qu’on pourrait leur parler plus directement, les interpeller, enfin quoi, les secouer un peu ! Ils sont là à vous écou
1051 er plus directement, les interpeller, enfin quoi, les secouer un peu ! Ils sont là à vous écouter sans bouger, comme ils on
1052 à vous écouter sans bouger, comme ils ont écouté les autres qui disaient le contraire, et pas moyen de savoir avec qui ils
1053 ger, comme ils ont écouté les autres qui disaient le contraire, et pas moyen de savoir avec qui ils sont d’accord. Il ne f
1054 es autres qui disaient le contraire, et pas moyen de savoir avec qui ils sont d’accord. Il ne faut pas oublier que nous vi
1055 ne faut pas oublier que nous vivons à une époque de propagande forcenée, et je vous assure qu’un communiste, par exemple,
1056 et je vous assure qu’un communiste, par exemple, les aurait attaqués plus brutalement, sans aucune précaution oratoire. Po
1057 n oratoire. Pourquoi ne pas saisir cette occasion de leur prêcher l’Évangile, là, tout droit, dans leur langage de tous le
1058 quoi ne pas saisir cette occasion de leur prêcher l’ Évangile, là, tout droit, dans leur langage de tous les jours, comme l
1059 her l’Évangile, là, tout droit, dans leur langage de tous les jours, comme le faisaient les réformateurs, — les forcer à p
1060 angile, là, tout droit, dans leur langage de tous les jours, comme le faisaient les réformateurs, — les forcer à prendre pa
1061 droit, dans leur langage de tous les jours, comme le faisaient les réformateurs, — les forcer à prendre parti, je ne sais
1062 eur langage de tous les jours, comme le faisaient les réformateurs, — les forcer à prendre parti, je ne sais pas, moi, les
1063 les jours, comme le faisaient les réformateurs, —  les forcer à prendre parti, je ne sais pas, moi, les engueuler ! Je vous
1064  les forcer à prendre parti, je ne sais pas, moi, les engueuler ! Je vous dis ma première impression, puisque vous me la de
1065 vous dis ma première impression, puisque vous me la demandez. Je sais bien que vous les connaissez beaucoup mieux que moi
1066 uisque vous me la demandez. Je sais bien que vous les connaissez beaucoup mieux que moi… — Le pasteur sourit : — Vous me f
1067 que vous les connaissez beaucoup mieux que moi… —  Le pasteur sourit : — Vous me faites plaisir, tenez ! Bien sûr, vous av
1068 t déjà un énorme succès. Pensez donc, il y a plus de six ans que je suis dans l’île, et je n’avais jamais pu parler à A. à
1069 sez donc, il y a plus de six ans que je suis dans l’ île, et je n’avais jamais pu parler à A. à cause du curé qui s’y oppos
1070 er à A. à cause du curé qui s’y opposait par tous les moyens. Ils sont difficiles à prendre, ici. Surtout il ne faut pas le
1071 difficiles à prendre, ici. Surtout il ne faut pas les brusquer ! Ce soir, il s’agissait de gagner leur confiance, et ensuit
1072 ne faut pas les brusquer ! Ce soir, il s’agissait de gagner leur confiance, et ensuite on verra si on peut aller plus loin
1073 ce en leur parlant plus familièrement, sans faire d’ éloquence ? Cela trancherait au moins sur la propagande électorale. — 
1074 faire d’éloquence ? Cela trancherait au moins sur la propagande électorale. — Oui, oui, mais… je les connais. Ils aiment q
1075 ur la propagande électorale. — Oui, oui, mais… je les connais. Ils aiment qu’on leur fasse un beau discours. Ah ! c’est ter
1076 rement. Mais qu’est-ce qu’ils comprennent ? allez le savoir, avec eux. On prêche pendant six ans la même chose, ils vous r
1077 ez le savoir, avec eux. On prêche pendant six ans la même chose, ils vous remercient, on croit qu’ils ont compris, et puis
1078 urtant il faut bien continuer, même si on a envie de tout plaquer, certains jours… Il faudra reparler de tout cela. M. Pal
1079 tout plaquer, certains jours… Il faudra reparler de tout cela. M. Palut n’a jamais l’occasion de discuter, il se sent ter
1080 faudra reparler de tout cela. M. Palut n’a jamais l’ occasion de discuter, il se sent terriblement isolé au milieu de cette
1081 rler de tout cela. M. Palut n’a jamais l’occasion de discuter, il se sent terriblement isolé au milieu de cette population
1082 é à bicyclette, sans lumière, distinguant à peine la route asphaltée. Je roulais comme en rêve, le long des dunes qui me c
1083 comme en rêve, le long des dunes qui me cachaient la mer bruyante, à ma gauche. Un brouillard vague flottait sur les marai
1084 te, à ma gauche. Un brouillard vague flottait sur les marais. « Le Peuple », me disais-je en pédalant, ce qu’ils appellent
1085 e. Un brouillard vague flottait sur les marais. «  Le Peuple », me disais-je en pédalant, ce qu’ils appellent le Peuple !…
1086  », me disais-je en pédalant, ce qu’ils appellent le Peuple !… je revoyais cette centaine d’hommes dans la salle nue. Leur
1087 appellent le Peuple !… je revoyais cette centaine d’ hommes dans la salle nue. Leur méfiance ou leur timidité, ou aussi leu
1088 euple !… je revoyais cette centaine d’hommes dans la salle nue. Leur méfiance ou leur timidité, ou aussi leur fatigue aprè
1089 é, ou aussi leur fatigue après une longue journée de travail. Mais beaucoup ne font plus rien en hiver ? Ils sont venus po
1090 ont plus rien en hiver ? Ils sont venus pour tuer le temps, au lieu d’aller au café. Cette inertie, dès qu’il ne s’agit pl
1091 au café. Cette inertie, dès qu’il ne s’agit plus d’ argent. À moins que ce ne soit le langage, la difficulté de s’exprimer
1092 l ne s’agit plus d’argent. À moins que ce ne soit le langage, la difficulté de s’exprimer ? Tout est mystère en eux, et po
1093 plus d’argent. À moins que ce ne soit le langage, la difficulté de s’exprimer ? Tout est mystère en eux, et pour eux-mêmes
1094 À moins que ce ne soit le langage, la difficulté de s’exprimer ? Tout est mystère en eux, et pour eux-mêmes sans doute. E
1095 e en eux, et pour eux-mêmes sans doute. Et on dit le Peuple, la volonté du Peuple, — comme si on ne les avait jamais vus !
1096 t pour eux-mêmes sans doute. Et on dit le Peuple, la volonté du Peuple, — comme si on ne les avait jamais vus ! ou jamais
1097 le Peuple, la volonté du Peuple, — comme si on ne les avait jamais vus ! ou jamais aimés. Là-dessus, quantité de pensées et
1098 jamais vus ! ou jamais aimés. Là-dessus, quantité de pensées et de conclusions qui m’ont paru évidentes et importantes. On
1099 u jamais aimés. Là-dessus, quantité de pensées et de conclusions qui m’ont paru évidentes et importantes. On se sent réflé
1100 avec une énergie particulière en pédalant contre le vent dans l’obscurité. Mais le lendemain il n’en reste rien qu’un peu
1101 rgie particulière en pédalant contre le vent dans l’ obscurité. Mais le lendemain il n’en reste rien qu’un peu de courbatur
1102 en pédalant contre le vent dans l’obscurité. Mais le lendemain il n’en reste rien qu’un peu de courbature dans les jambes.
1103 n il n’en reste rien qu’un peu de courbature dans les jambes. 16 décembre 1933 Derrière la même pile d’assiettes où j
1104 dans les jambes. 16 décembre 1933 Derrière la même pile d’assiettes où je crois avoir déjà dit que j’avais trouvé d
1105 bes. 16 décembre 1933 Derrière la même pile d’ assiettes où je crois avoir déjà dit que j’avais trouvé deux ouvrages
1106 éjà dit que j’avais trouvé deux ouvrages traitant de mon île, j’ai déniché ce matin une édition populaire de La Naissance
1107 île, j’ai déniché ce matin une édition populaire de La Naissance du jour, de Colette. Je n’avais pas encore lu ce livre.
1108 e, j’ai déniché ce matin une édition populaire de La Naissance du jour, de Colette. Je n’avais pas encore lu ce livre. Il
1109 in une édition populaire de La Naissance du jour, de Colette. Je n’avais pas encore lu ce livre. Il est exactement de l’es
1110 n’avais pas encore lu ce livre. Il est exactement de l’espèce que j’aime, et l’un des plus charmants dans cette espèce, ma
1111 vais pas encore lu ce livre. Il est exactement de l’ espèce que j’aime, et l’un des plus charmants dans cette espèce, mais
1112 e raison très précise et qui n’a rien à voir avec la critique littéraire. À la page 43 de l’édition que j’ai sous les yeux
1113 ui n’a rien à voir avec la critique littéraire. À la page 43 de l’édition que j’ai sous les yeux, je lis ceci : « … ils dé
1114 à voir avec la critique littéraire. À la page 43 de l’édition que j’ai sous les yeux, je lis ceci : « … ils déménagent… c
1115 voir avec la critique littéraire. À la page 43 de l’ édition que j’ai sous les yeux, je lis ceci : « … ils déménagent… comm
1116 ttéraire. À la page 43 de l’édition que j’ai sous les yeux, je lis ceci : « … ils déménagent… comme les puces d’un hérisson
1117 les yeux, je lis ceci : « … ils déménagent… comme les puces d’un hérisson mort. » Cette phrase a fait dans mon esprit ce qu
1118 je lis ceci : « … ils déménagent… comme les puces d’ un hérisson mort. » Cette phrase a fait dans mon esprit ce qu’on appel
1119 a fait dans mon esprit ce qu’on appelle un trait de lumière. Lundi dernier, au petit matin, nous nous sommes réveillés co
1120 petit matin, nous nous sommes réveillés couverts de puces. J’exagère à peine : pour mon compte, j’en ai pris sept sur mon
1121 mon compte, j’en ai pris sept sur mon pyjama dans l’ espace de deux minutes, ce qui doit constituer une sorte de record. D’
1122 e, j’en ai pris sept sur mon pyjama dans l’espace de deux minutes, ce qui doit constituer une sorte de record. D’autres sa
1123 de deux minutes, ce qui doit constituer une sorte de record. D’autres sautaient sur le couvre-pied. D’autres sur le planch
1124 ituer une sorte de record. D’autres sautaient sur le couvre-pied. D’autres sur le plancher. Je n’en menais pas large. Comm
1125 autres sautaient sur le couvre-pied. D’autres sur le plancher. Je n’en menais pas large. Comme la mère Renaud était venue
1126 sur le plancher. Je n’en menais pas large. Comme la mère Renaud était venue nous voir la veille, nous ne cherchâmes pas p
1127 large. Comme la mère Renaud était venue nous voir la veille, nous ne cherchâmes pas plus loin la cause du phénomène. Il es
1128 voir la veille, nous ne cherchâmes pas plus loin la cause du phénomène. Il est vrai qu’on a beau porter un nombre excessi
1129 l est vrai qu’on a beau porter un nombre excessif de jupons, cela ne devrait pas suffire à rendre vraisemblable une hypoth
1130 oint injurieuse. Pourtant nous n’en trouvions pas d’ autre. Or, peu de jours auparavant, un petit hérisson était venu se me
1131 petit hérisson était venu se mettre en boule dans la plate-bande qui borde la maison, sous ma fenêtre. Il soufflait très v
1132 se mettre en boule dans la plate-bande qui borde la maison, sous ma fenêtre. Il soufflait très vite, il avait l’air malad
1133 e. Il soufflait très vite, il avait l’air malade. Le lendemain nous le trouvions mort. Et je l’avais oublié là, sans sépul
1134 ès vite, il avait l’air malade. Le lendemain nous le trouvions mort. Et je l’avais oublié là, sans sépulture, caché sous d
1135 alade. Le lendemain nous le trouvions mort. Et je l’ avais oublié là, sans sépulture, caché sous des feuillages brunis. Si
1136 caché sous des feuillages brunis. Si j’ajoute que la porte d’entrée joint mal le seuil, tout s’explique sans peine désorma
1137 unis. Si j’ajoute que la porte d’entrée joint mal le seuil, tout s’explique sans peine désormais, grâce à la phrase de Col
1138 il, tout s’explique sans peine désormais, grâce à la phrase de Colette. Je rapporte cette anecdote parce qu’elle comporte
1139 ’explique sans peine désormais, grâce à la phrase de Colette. Je rapporte cette anecdote parce qu’elle comporte une conclu
1140 necdote parce qu’elle comporte une conclusion qui la dépasse d’ailleurs notablement et qui me paraît assez frappante. Voic
1141 : pour la première fois depuis je ne sais combien d’ années, je viens de trouver dans un ouvrage littéraire la solution d’u
1142 s, je viens de trouver dans un ouvrage littéraire la solution d’une question précise. Grâce à Colette, je sais maintenant
1143 de trouver dans un ouvrage littéraire la solution d’ une question précise. Grâce à Colette, je sais maintenant pourquoi not
1144 is maintenant pourquoi notre chambre était pleine de puces. Cela n’a l’air de rien, mais je vois là comme un symbole. Les
1145 tre chambre était pleine de puces. Cela n’a l’air de rien, mais je vois là comme un symbole. Les livres devraient être uti
1146 l’air de rien, mais je vois là comme un symbole. Les livres devraient être utiles. On devrait y trouver des renseignements
1147 exactes, des explications vérifiables, des modes d’ emploi, des descriptions objectives et utilisables ; et ceci à tous le
1148 ptions objectives et utilisables ; et ceci à tous les degrés de la réalité, dans les grandes choses comme dans les choses d
1149 ctives et utilisables ; et ceci à tous les degrés de la réalité, dans les grandes choses comme dans les choses de rien. Au
1150 ves et utilisables ; et ceci à tous les degrés de la réalité, dans les grandes choses comme dans les choses de rien. Au li
1151 s ; et ceci à tous les degrés de la réalité, dans les grandes choses comme dans les choses de rien. Au lieu de cela, les mo
1152 de la réalité, dans les grandes choses comme dans les choses de rien. Au lieu de cela, les modernes nous servent des états
1153 té, dans les grandes choses comme dans les choses de rien. Au lieu de cela, les modernes nous servent des états d’âme impr
1154 s comme dans les choses de rien. Au lieu de cela, les modernes nous servent des états d’âme improbables ou excessifs, des i
1155 lieu de cela, les modernes nous servent des états d’ âme improbables ou excessifs, des inquiétudes dont ils n’ont même pas
1156 xcessifs, des inquiétudes dont ils n’ont même pas l’ air d’être vraiment inquiets, des indiscrétions gênantes et dont on ne
1157 fs, des inquiétudes dont ils n’ont même pas l’air d’ être vraiment inquiets, des indiscrétions gênantes et dont on ne sait
1158 op que faire, ou des doctrines dont ils négligent de nous dire s’ils les ont essayées sur le vif, dans le détail de la vie
1159 s doctrines dont ils négligent de nous dire s’ils les ont essayées sur le vif, dans le détail de la vie quotidienne. Ils no
1160 négligent de nous dire s’ils les ont essayées sur le vif, dans le détail de la vie quotidienne. Ils nous donnent très rare
1161 nous dire s’ils les ont essayées sur le vif, dans le détail de la vie quotidienne. Ils nous donnent très rarement des répo
1162 s’ils les ont essayées sur le vif, dans le détail de la vie quotidienne. Ils nous donnent très rarement des réponses, ou a
1163 ls les ont essayées sur le vif, dans le détail de la vie quotidienne. Ils nous donnent très rarement des réponses, ou alor
1164 nt des réponses à des questions qu’on n’avait pas l’ idée de se poser ; et c’est là qu’ils croient voir leur astuce. Astuce
1165 réponses à des questions qu’on n’avait pas l’idée de se poser ; et c’est là qu’ils croient voir leur astuce. Astuces, peti
1166 ns, toute cette littérature est sans doute pleine de talent, elle est même littéralement sensationnelle, mais que veulent-
1167 ls qu’on en fasse ? — Nous avons tout à apprendre de Goethe. Non seulement des révélations du second Faust, mais aussi de
1168 ement des révélations du second Faust, mais aussi de ces pages du Journal de voyage en Italie où, par exemple, il rapporte
1169 second Faust, mais aussi de ces pages du Journal de voyage en Italie où, par exemple, il rapporte à Mme de Stein comment
1170 , par exemple, il rapporte à Mme de Stein comment les habitants de Ferrare utilisent les vieilles tuiles concassées pour re
1171 il rapporte à Mme de Stein comment les habitants de Ferrare utilisent les vieilles tuiles concassées pour recouvrir les r
1172 Stein comment les habitants de Ferrare utilisent les vieilles tuiles concassées pour recouvrir les routes et les allées de
1173 ent les vieilles tuiles concassées pour recouvrir les routes et les allées de leurs jardins. Et il ajoute : « Dès mon retou
1174 es tuiles concassées pour recouvrir les routes et les allées de leurs jardins. Et il ajoute : « Dès mon retour à la maison,
1175 oncassées pour recouvrir les routes et les allées de leurs jardins. Et il ajoute : « Dès mon retour à la maison, j’essaier
1176 leurs jardins. Et il ajoute : « Dès mon retour à la maison, j’essaierai cela. La Toscane me paraît bien gouvernée, tout y
1177 : « Dès mon retour à la maison, j’essaierai cela. La Toscane me paraît bien gouvernée, tout y présente un aspect complet,
1178 semble destiné à un noble usage… » — Commentons : La noblesse est dans l’usage. Pas de noblesse sans usage, sans applicati
1179 oble usage… » — Commentons : La noblesse est dans l’ usage. Pas de noblesse sans usage, sans application précise aux choses
1180 — Commentons : La noblesse est dans l’usage. Pas de noblesse sans usage, sans application précise aux choses, etc. Ne mon
1181 s plus au ciel du second Faust que par ces allées de Ferrare ! 18 décembre 1933 Je ne cesse de repenser à la confére
1182 s de Ferrare ! 18 décembre 1933 Je ne cesse de repenser à la conférence d’avant-hier, à A. Il me semble qu’elle m’ap
1183 18 décembre 1933 Je ne cesse de repenser à la conférence d’avant-hier, à A. Il me semble qu’elle m’apprend sur « le
1184 e 1933 Je ne cesse de repenser à la conférence d’ avant-hier, à A. Il me semble qu’elle m’apprend sur « le peuple » dava
1185 t-hier, à A. Il me semble qu’elle m’apprend sur «  le peuple » davantage que toutes mes expériences précédentes. Il me semb
1186 dentes. Il me semble même qu’elle m’a fait voir «  le peuple » pour la première fois de ma vie. Première constatation : l’a
1187 m’a fait voir « le peuple » pour la première fois de ma vie. Première constatation : l’apathie générale, aussi bien à A. q
1188 première fois de ma vie. Première constatation : l’ apathie générale, aussi bien à A. qu’à la séance de cinéma. Il n’y aur
1189 tation : l’apathie générale, aussi bien à A. qu’à la séance de cinéma. Il n’y aurait là rien d’étonnant si l’on ne nous re
1190 ’apathie générale, aussi bien à A. qu’à la séance de cinéma. Il n’y aurait là rien d’étonnant si l’on ne nous rebattait le
1191 . qu’à la séance de cinéma. Il n’y aurait là rien d’ étonnant si l’on ne nous rebattait les oreilles de phrases sur la volo
1192 ce de cinéma. Il n’y aurait là rien d’étonnant si l’ on ne nous rebattait les oreilles de phrases sur la volonté et la miss
1193 rait là rien d’étonnant si l’on ne nous rebattait les oreilles de phrases sur la volonté et la mission du peuple. On a beau
1194 d’étonnant si l’on ne nous rebattait les oreilles de phrases sur la volonté et la mission du peuple. On a beau se méfier d
1195 ’on ne nous rebattait les oreilles de phrases sur la volonté et la mission du peuple. On a beau se méfier des phrases, il
1196 battait les oreilles de phrases sur la volonté et la mission du peuple. On a beau se méfier des phrases, il faut se trouve
1197 phrases, il faut se trouver placé soudain devant les êtres en chair et en os dont elles parlent, pour comprendre à quel po
1198 si pour quoi elles mentent, et quel immense désir de réveiller le peuple elles traduisent chez certains qui les prononcent
1199 elles mentent, et quel immense désir de réveiller le peuple elles traduisent chez certains qui les prononcent de bonne foi
1200 ller le peuple elles traduisent chez certains qui les prononcent de bonne foi. Elles le trahissent d’ailleurs, ce désir, en
1201 elles traduisent chez certains qui les prononcent de bonne foi. Elles le trahissent d’ailleurs, ce désir, en essayant de l
1202 z certains qui les prononcent de bonne foi. Elles le trahissent d’ailleurs, ce désir, en essayant de le faire passer d’ore
1203 s le trahissent d’ailleurs, ce désir, en essayant de le faire passer d’ores et déjà pour une réalité. Deuxième constatati
1204 e trahissent d’ailleurs, ce désir, en essayant de le faire passer d’ores et déjà pour une réalité. Deuxième constatation 
1205 é. Deuxième constatation : il est très difficile d’ aimer des hommes qui ne nous sont rien, qui ne nous demandent rien, qu
1206 andent rien, qui peut-être ne voudraient pas même de notre aide (nous égale les intellectuels bourgeois). Il est très diff
1207 ne voudraient pas même de notre aide (nous égale les intellectuels bourgeois). Il est très difficile d’aimer ces hommes, e
1208 s intellectuels bourgeois). Il est très difficile d’ aimer ces hommes, et cependant ils sont la réalité vivante et présente
1209 fficile d’aimer ces hommes, et cependant ils sont la réalité vivante et présente du « peuple ». Par contre, il est très fa
1210 nte du « peuple ». Par contre, il est très facile de haïr et de condamner un certain ordre de choses qui nous vexe et dont
1211 uple ». Par contre, il est très facile de haïr et de condamner un certain ordre de choses qui nous vexe et dont nous souff
1212 s facile de haïr et de condamner un certain ordre de choses qui nous vexe et dont nous souffrons. Et il est très tentant d
1213 xe et dont nous souffrons. Et il est très tentant d’ appeler cette haine amour du peuple… Troisième constatation : la plupa
1214 isième constatation : la plupart des discours que l’ on tient au peuple lui sont incompréhensibles ; mais ceux qui les écou
1215 peuple lui sont incompréhensibles ; mais ceux qui les écoutent ont l’air de trouver cela tout naturel. Je fus certainement
1216 éhensibles ; mais ceux qui les écoutent ont l’air de trouver cela tout naturel. Je fus certainement le seul ici à m’étonne
1217 de trouver cela tout naturel. Je fus certainement le seul ici à m’étonner que l’instituteur citât Ernest Lavisse ; ou le p
1218 . Je fus certainement le seul ici à m’étonner que l’ instituteur citât Ernest Lavisse ; ou le pasteur, M. Benda. Il est gén
1219 onner que l’instituteur citât Ernest Lavisse ; ou le pasteur, M. Benda. Il est généralement admis en France qu’un orateur
1220 e des noms qu’on ne connaît pas. Cela fait partie de l’éloquence. Et l’éloquence est le but du discours, dont le sujet n’e
1221 es noms qu’on ne connaît pas. Cela fait partie de l’ éloquence. Et l’éloquence est le but du discours, dont le sujet n’est
1222 connaît pas. Cela fait partie de l’éloquence. Et l’ éloquence est le but du discours, dont le sujet n’est que le prétexte.
1223 la fait partie de l’éloquence. Et l’éloquence est le but du discours, dont le sujet n’est que le prétexte. Je constate. Je
1224 ence. Et l’éloquence est le but du discours, dont le sujet n’est que le prétexte. Je constate. Je conclus que les intellec
1225 e est le but du discours, dont le sujet n’est que le prétexte. Je constate. Je conclus que les intellectuels sont en mauva
1226 ’est que le prétexte. Je constate. Je conclus que les intellectuels sont en mauvaise posture pour agir sur le peuple. Qu’il
1227 ellectuels sont en mauvaise posture pour agir sur le peuple. Qu’ils disent des vérités ou des mensonges, on n’applaudira g
1228 rités ou des mensonges, on n’applaudira guère que le son de leur voix, ou le parti qui les délègue. Il resterait à expliqu
1229 u des mensonges, on n’applaudira guère que le son de leur voix, ou le parti qui les délègue. Il resterait à expliquer cet
1230 on n’applaudira guère que le son de leur voix, ou le parti qui les délègue. Il resterait à expliquer cet état de choses, q
1231 ra guère que le son de leur voix, ou le parti qui les délègue. Il resterait à expliquer cet état de choses, qui voue les « 
1232 esterait à expliquer cet état de choses, qui voue les « clercs » à s’agiter dans le vide — ce qui est malsain — et le peupl
1233 e choses, qui voue les « clercs » à s’agiter dans le vide — ce qui est malsain — et le peuple à ne pouvoir se libérer des
1234 à s’agiter dans le vide — ce qui est malsain — et le peuple à ne pouvoir se libérer des charlataneries politiques autremen
1235 nt il ne sera pas le dernier à pâtir. Impuissance de l’« esprit », bêtise de l’action : ces deux misères n’auraient-elles
1236 il ne sera pas le dernier à pâtir. Impuissance de l’ « esprit », bêtise de l’action : ces deux misères n’auraient-elles pas
1237 nier à pâtir. Impuissance de l’« esprit », bêtise de l’action : ces deux misères n’auraient-elles pas une origine commune 
1238 r à pâtir. Impuissance de l’« esprit », bêtise de l’ action : ces deux misères n’auraient-elles pas une origine commune ? I
1239 l m’a semblé que j’entrevoyais cette origine dans les propos de mon voisin au sortir de la conférence. Cet homme trouvait q
1240 é que j’entrevoyais cette origine dans les propos de mon voisin au sortir de la conférence. Cet homme trouvait qu’il n’y a
1241 rigine dans les propos de mon voisin au sortir de la conférence. Cet homme trouvait qu’il n’y avait rien à « discuter » da
1242 trouvait qu’il n’y avait rien à « discuter » dans les paroles de l’orateur, parce que c’était « la vérité ». Autrement dit,
1243 il n’y avait rien à « discuter » dans les paroles de l’orateur, parce que c’était « la vérité ». Autrement dit, parce que
1244 n’y avait rien à « discuter » dans les paroles de l’ orateur, parce que c’était « la vérité ». Autrement dit, parce que c’é
1245 ans les paroles de l’orateur, parce que c’était «  la vérité ». Autrement dit, parce que c’était correct, parce que ça se t
1246 urplus c’était bien dit. Il ne lui est pas venu à l’ esprit que la vérité est quelque chose qui peut être réalisé. Et qu’il
1247 t bien dit. Il ne lui est pas venu à l’esprit que la vérité est quelque chose qui peut être réalisé. Et qu’il s’agit de pr
1248 lque chose qui peut être réalisé. Et qu’il s’agit de prendre position effectivement. S’il s’était senti interpellé personn
1249 terpellé personnellement, invité à choisir, sommé d’ approuver ou de refuser en fait ce que venait de dire le conférencier,
1250 nellement, invité à choisir, sommé d’approuver ou de refuser en fait ce que venait de dire le conférencier, alors ! alors
1251 ouver ou de refuser en fait ce que venait de dire le conférencier, alors ! alors il y aurait eu à discuter ! Mais je n’ai
1252 n’ai pas remarqué qu’aucun des auditeurs ait pris la chose de cette manière. Je sais bien qu’il y a la difficulté de s’exp
1253 remarqué qu’aucun des auditeurs ait pris la chose de cette manière. Je sais bien qu’il y a la difficulté de s’exprimer, la
1254 la chose de cette manière. Je sais bien qu’il y a la difficulté de s’exprimer, la timidité, la fatigue, et que tout cela p
1255 tte manière. Je sais bien qu’il y a la difficulté de s’exprimer, la timidité, la fatigue, et que tout cela peut bien suffi
1256 sais bien qu’il y a la difficulté de s’exprimer, la timidité, la fatigue, et que tout cela peut bien suffire à expliquer
1257 ’il y a la difficulté de s’exprimer, la timidité, la fatigue, et que tout cela peut bien suffire à expliquer le silence de
1258 e, et que tout cela peut bien suffire à expliquer le silence de ces cultivateurs. Mais le type qui m’a parlé avait la lang
1259 out cela peut bien suffire à expliquer le silence de ces cultivateurs. Mais le type qui m’a parlé avait la langue bien pen
1260 à expliquer le silence de ces cultivateurs. Mais le type qui m’a parlé avait la langue bien pendue. Mais surtout je m’avi
1261 es cultivateurs. Mais le type qui m’a parlé avait la langue bien pendue. Mais surtout je m’avise que la majorité des « int
1262 a langue bien pendue. Mais surtout je m’avise que la majorité des « intellectuels » d’aujourd’hui ne pense pas très différ
1263 je m’avise que la majorité des « intellectuels » d’ aujourd’hui ne pense pas très différemment. Peuple ou « clercs », ils
1264 Peuple ou « clercs », ils estiment également que la « vérité » n’engage à rien. Ils bornent le rôle de l’esprit à la cons
1265 nt que la « vérité » n’engage à rien. Ils bornent le rôle de l’esprit à la constatation de l’exactitude objective et forme
1266 a « vérité » n’engage à rien. Ils bornent le rôle de l’esprit à la constatation de l’exactitude objective et formelle des
1267  vérité » n’engage à rien. Ils bornent le rôle de l’ esprit à la constatation de l’exactitude objective et formelle des fai
1268 ’engage à rien. Ils bornent le rôle de l’esprit à la constatation de l’exactitude objective et formelle des faits ou des r
1269 Ils bornent le rôle de l’esprit à la constatation de l’exactitude objective et formelle des faits ou des raisonnements que
1270 bornent le rôle de l’esprit à la constatation de l’ exactitude objective et formelle des faits ou des raisonnements que l’
1271 ve et formelle des faits ou des raisonnements que l’ on allègue. « Il a raison » ne signifie pas pour eux : « Donc je dois
1272 ses préjugés, sa déduction est correcte ». Ainsi l’ intelligence devient irresponsable. Les clercs s’y résignent et même s
1273 e ». Ainsi l’intelligence devient irresponsable. Les clercs s’y résignent et même s’en vantent : c’est plus commode ainsi.
1274 t sont des égoïstes, des orgueilleux, des espèces d’ aristos qui ne vont qu’avec les riches. Il y en a certes qui font prog
1275 illeux, des espèces d’aristos qui ne vont qu’avec les riches. Il y en a certes qui font progresser la Science, et cela c’es
1276 les riches. Il y en a certes qui font progresser la Science, et cela c’est bien. On va les écouter avec plaisir quand ils
1277 progresser la Science, et cela c’est bien. On va les écouter avec plaisir quand ils viennent faire une conférence instruct
1278 nce instructive avec projections lumineuses. Mais les philosophes3, par exemple, à quoi cela sert-il ? D’ailleurs on n’en a
1279 sert-il ? D’ailleurs on n’en a jamais vu. Quant à la politique, c’est tout à fait autre chose. C’est un certain nombre de
1280 tout à fait autre chose. C’est un certain nombre de phrases qu’on lit dans les journaux et qu’on entend dans les assemblé
1281 C’est un certain nombre de phrases qu’on lit dans les journaux et qu’on entend dans les assemblées, et grâce auxquelles on
1282 qu’on lit dans les journaux et qu’on entend dans les assemblées, et grâce auxquelles on reconnaît tout de suite si un type
1283 es on reconnaît tout de suite si un type est avec les petits ou avec les gros. D’autre part, c’est une question de travail,
1284 t de suite si un type est avec les petits ou avec les gros. D’autre part, c’est une question de travail, de salaires, de pr
1285 u avec les gros. D’autre part, c’est une question de travail, de salaires, de prix de la vie, et là les intellectuels ne s
1286 ros. D’autre part, c’est une question de travail, de salaires, de prix de la vie, et là les intellectuels ne servent à rie
1287 part, c’est une question de travail, de salaires, de prix de la vie, et là les intellectuels ne servent à rien. Enfin, les
1288 est une question de travail, de salaires, de prix de la vie, et là les intellectuels ne servent à rien. Enfin, les questio
1289 une question de travail, de salaires, de prix de la vie, et là les intellectuels ne servent à rien. Enfin, les questions
1290 de travail, de salaires, de prix de la vie, et là les intellectuels ne servent à rien. Enfin, les questions de personnes jo
1291 et là les intellectuels ne servent à rien. Enfin, les questions de personnes jouent un rôle : on aime avoir un député instr
1292 llectuels ne servent à rien. Enfin, les questions de personnes jouent un rôle : on aime avoir un député instruit. Mais ce
1293 s. C’est surtout parce qu’un homme instruit jouit d’ une certaine considération sociale, sait se débrouiller à Paris et peu
1294 ociale, sait se débrouiller à Paris et peut faire de beaux discours. Dans ces conditions, qu’un intellectuel aille parler
1295 ns, qu’un intellectuel aille parler au peuple, on l’ écoutera bien patiemment, s’il a su se rendre sympathique et surtout s
1296 t s’il a l’air « sincère », mais on n’aura jamais l’ idée de mettre en pratique ce qu’il dit. Il reste dans son rôle en s’a
1297 a l’air « sincère », mais on n’aura jamais l’idée de mettre en pratique ce qu’il dit. Il reste dans son rôle en s’agitant
1298 u’il dit. Il reste dans son rôle en s’agitant sur l’ estrade et en lançant des appels éloquents, et moi je reste dans mon r
1299 homme du peuple ne s’est jamais dit cela comme je le dis ici. Mais il me paraît clair que la plupart font comme s’ils le p
1300 l me paraît clair que la plupart font comme s’ils le pensaient. D’autre part, il est trop certain que les intellectuels pr
1301 pensaient. D’autre part, il est trop certain que les intellectuels professent depuis longtemps en toute conscience une doc
1302 nscience une doctrine analogue. Il est normal que les hommes sans culture se trompent sur la nature et sur le rôle de la cu
1303 ormal que les hommes sans culture se trompent sur la nature et sur le rôle de la culture. Mais il est inquiétant que les h
1304 mes sans culture se trompent sur la nature et sur le rôle de la culture. Mais il est inquiétant que les hommes cultivés, a
1305 culture se trompent sur la nature et sur le rôle de la culture. Mais il est inquiétant que les hommes cultivés, au lieu d
1306 lture se trompent sur la nature et sur le rôle de la culture. Mais il est inquiétant que les hommes cultivés, au lieu de s
1307 le rôle de la culture. Mais il est inquiétant que les hommes cultivés, au lieu de s’efforcer, comme ils devraient, de comba
1308 ivés, au lieu de s’efforcer, comme ils devraient, de combattre activement cette erreur, en tirent au contraire leur confor
1309 ontraire leur confort. Au lieu de faire respecter la vérité, en montrant par l’exemple qu’elle implique des actes, ils la
1310 ieu de faire respecter la vérité, en montrant par l’ exemple qu’elle implique des actes, ils la disqualifient et ils s’en m
1311 ant par l’exemple qu’elle implique des actes, ils la disqualifient et ils s’en moquent agréablement, ils la réduisent à un
1312 squalifient et ils s’en moquent agréablement, ils la réduisent à un ensemble de phrases correctes, quelquefois ingénieuses
1313 uent agréablement, ils la réduisent à un ensemble de phrases correctes, quelquefois ingénieuses, et par définition ineffic
1314 efois ingénieuses, et par définition inefficaces. L’ opinion de mon voisin après la conférence, j’ai pu croire que c’était
1315 nieuses, et par définition inefficaces. L’opinion de mon voisin après la conférence, j’ai pu croire que c’était l’opinion
1316 nition inefficaces. L’opinion de mon voisin après la conférence, j’ai pu croire que c’était l’opinion d’un nigaud ; mais n
1317 n après la conférence, j’ai pu croire que c’était l’ opinion d’un nigaud ; mais non, c’est celle d’un clerc parfait. Je n’a
1318 conférence, j’ai pu croire que c’était l’opinion d’ un nigaud ; mais non, c’est celle d’un clerc parfait. Je n’ai pas fini
1319 ait l’opinion d’un nigaud ; mais non, c’est celle d’ un clerc parfait. Je n’ai pas fini de m’étonner de cette rencontre.
1320 c’est celle d’un clerc parfait. Je n’ai pas fini de m’étonner de cette rencontre. 20 décembre 1933 « Si l’on veut
1321 d’un clerc parfait. Je n’ai pas fini de m’étonner de cette rencontre. 20 décembre 1933 « Si l’on veut réellement co
1322 de cette rencontre. 20 décembre 1933 « Si l’ on veut réellement conduire un homme à un but défini, il faut avant to
1323 à un but défini, il faut avant tout se préoccuper de le prendre là où il est, et commencer là. Voilà le secret de tout sec
1324 n but défini, il faut avant tout se préoccuper de le prendre là où il est, et commencer là. Voilà le secret de tout secour
1325 e le prendre là où il est, et commencer là. Voilà le secret de tout secours… Pour aider réellement un homme, il faut que j
1326 re là où il est, et commencer là. Voilà le secret de tout secours… Pour aider réellement un homme, il faut que j’en sache
1327 l sait. Sinon mon savoir supérieur ne lui servira de rien. Si je persiste cependant à faire valoir ma science, ce n’est pl
1328 par orgueil, de sorte qu’au fond, au lieu d’aider l’ homme, je cherche à me faire admirer de lui. » Cette remarque de Kier
1329 eu d’aider l’homme, je cherche à me faire admirer de lui. » Cette remarque de Kierkegaard me frappe aujourd’hui comme si
1330 rche à me faire admirer de lui. » Cette remarque de Kierkegaard me frappe aujourd’hui comme si elle avait été écrite expr
1331 ceux qui m’entourent, ce « peuple » qu’il s’agit d’ aider, et que je vois encore si mal. (Ce qui ne m’a pas empêché jusqu’
1332 core si mal. (Ce qui ne m’a pas empêché jusqu’ici de m’occuper de politique par exemple… Mais déjà je me sens moins assuré
1333 (Ce qui ne m’a pas empêché jusqu’ici de m’occuper de politique par exemple… Mais déjà je me sens moins assuré dans ma bonn
1334 je me sens moins assuré dans ma bonne conscience de « doctrinaire », à cet égard.) D’autre part, elle m’aide à distinguer
1335 elle m’aide à distinguer l’un des motifs au moins de ma gêne, quand je constate qu’ils ne comprennent pas de quoi je m’occ
1336 gêne, quand je constate qu’ils ne comprennent pas de quoi je m’occupe. C’est peut-être un secret désir, un inconscient dés
1337 re un secret désir, un inconscient désir que j’ai d’ être reconnu par eux à ma juste valeur. Exactement ce que Kierkegaard
1338 n chacun, mon amour-propre, je ne puis m’empêcher de le juger assez justifié dans l’occurrence. On n’aime pas être tenu po
1339 hacun, mon amour-propre, je ne puis m’empêcher de le juger assez justifié dans l’occurrence. On n’aime pas être tenu pour
1340 e puis m’empêcher de le juger assez justifié dans l’ occurrence. On n’aime pas être tenu pour un feignant ou un rentier, qu
1341 lement, et je ne prévois aucune « rentrée » avant la fin de janvier. J’attends encore le courrier de demain matin pour pre
1342 et je ne prévois aucune « rentrée » avant la fin de janvier. J’attends encore le courrier de demain matin pour prendre un
1343 ntrée » avant la fin de janvier. J’attends encore le courrier de demain matin pour prendre une décision. 23 décembre 1
1344 t la fin de janvier. J’attends encore le courrier de demain matin pour prendre une décision. 23 décembre 1933 J’écr
1345 23 décembre 1933 J’écris ceci sur une table de café. À travers la vitrine, je vois le vieux port de cette vieille vi
1346 J’écris ceci sur une table de café. À travers la vitrine, je vois le vieux port de cette vieille ville, la plus proche
1347 une table de café. À travers la vitrine, je vois le vieux port de cette vieille ville, la plus proche de notre île, et où
1348 café. À travers la vitrine, je vois le vieux port de cette vieille ville, la plus proche de notre île, et où nous devons e
1349 ne, je vois le vieux port de cette vieille ville, la plus proche de notre île, et où nous devons encore passer deux heures
1350 ous devons encore passer deux heures en attendant le départ de l’autobus pour Taillefer. Nous sommes attablés ici depuis u
1351 encore passer deux heures en attendant le départ de l’autobus pour Taillefer. Nous sommes attablés ici depuis un bon mome
1352 core passer deux heures en attendant le départ de l’ autobus pour Taillefer. Nous sommes attablés ici depuis un bon moment
1353 blés ici depuis un bon moment déjà, tout contents de revoir le va-et-vient d’un lieu public, de lire des journaux de Paris
1354 epuis un bon moment déjà, tout contents de revoir le va-et-vient d’un lieu public, de lire des journaux de Paris et de fum
1355 ment déjà, tout contents de revoir le va-et-vient d’ un lieu public, de lire des journaux de Paris et de fumer des cigarett
1356 ntents de revoir le va-et-vient d’un lieu public, de lire des journaux de Paris et de fumer des cigarettes américaines au
1357 a-et-vient d’un lieu public, de lire des journaux de Paris et de fumer des cigarettes américaines au goût de miel, introuv
1358 ’un lieu public, de lire des journaux de Paris et de fumer des cigarettes américaines au goût de miel, introuvables dans l
1359 is et de fumer des cigarettes américaines au goût de miel, introuvables dans l’île. Pendant que ma femme lit des hebdomada
1360 es américaines au goût de miel, introuvables dans l’ île. Pendant que ma femme lit des hebdomadaires, je vais renouer le fi
1361 e ma femme lit des hebdomadaires, je vais renouer le fil de ce journal. Tout d’abord, j’ai à constater l’échec de notre pr
1362 mme lit des hebdomadaires, je vais renouer le fil de ce journal. Tout d’abord, j’ai à constater l’échec de notre première
1363 fil de ce journal. Tout d’abord, j’ai à constater l’ échec de notre première tentative d’autonomie. Je ne suis pas arrivé à
1364 e journal. Tout d’abord, j’ai à constater l’échec de notre première tentative d’autonomie. Je ne suis pas arrivé à gagner
1365 i à constater l’échec de notre première tentative d’ autonomie. Je ne suis pas arrivé à gagner assez vite ce qu’il nous fal
1366 z vite ce qu’il nous fallait pour subsister après l’ épuisement de notre réserve. J’ai travaillé beaucoup, mais je ne serai
1367 il nous fallait pour subsister après l’épuisement de notre réserve. J’ai travaillé beaucoup, mais je ne serai pas payé ava
1368 uand on n’a plus rien. Pour celui qui vit au jour le jour, il s’agit essentiellement d’éviter les lacunes de cette sorte.
1369 ui vit au jour le jour, il s’agit essentiellement d’ éviter les lacunes de cette sorte. (Ce que l’on nomme « difficultés de
1370 jour le jour, il s’agit essentiellement d’éviter les lacunes de cette sorte. (Ce que l’on nomme « difficultés de trésoreri
1371 r, il s’agit essentiellement d’éviter les lacunes de cette sorte. (Ce que l’on nomme « difficultés de trésorerie » dans le
1372 ment d’éviter les lacunes de cette sorte. (Ce que l’ on nomme « difficultés de trésorerie » dans les affaires, devient ici,
1373 de cette sorte. (Ce que l’on nomme « difficultés de trésorerie » dans les affaires, devient ici, évidemment, un obstacle
1374 que l’on nomme « difficultés de trésorerie » dans les affaires, devient ici, évidemment, un obstacle absolu.) Assuré au moi
1375 évidemment, un obstacle absolu.) Assuré au moins de quelque argent à venir, j’ai accepté l’invitation d’un ami qui nous o
1376 au moins de quelque argent à venir, j’ai accepté l’ invitation d’un ami qui nous offre de passer trois semaines chez lui.
1377 quelque argent à venir, j’ai accepté l’invitation d’ un ami qui nous offre de passer trois semaines chez lui. Il habite à u
1378 j’ai accepté l’invitation d’un ami qui nous offre de passer trois semaines chez lui. Il habite à une petite journée de voy
1379 semaines chez lui. Il habite à une petite journée de voyage de notre île. La leçon pratique de cette première expérience d
1380 hez lui. Il habite à une petite journée de voyage de notre île. La leçon pratique de cette première expérience de deux moi
1381 bite à une petite journée de voyage de notre île. La leçon pratique de cette première expérience de deux mois, c’est que l
1382 journée de voyage de notre île. La leçon pratique de cette première expérience de deux mois, c’est que la liberté ne s’imp
1383 e. La leçon pratique de cette première expérience de deux mois, c’est que la liberté ne s’improvise pas. Qu’il faut la con
1384 cette première expérience de deux mois, c’est que la liberté ne s’improvise pas. Qu’il faut la conquérir avec méthode, et
1385 est que la liberté ne s’improvise pas. Qu’il faut la conquérir avec méthode, et organiser à l’avance un plan d’attaque, pr
1386 il faut la conquérir avec méthode, et organiser à l’ avance un plan d’attaque, prévoyant à un jour près la date d’arrivée d
1387 rir avec méthode, et organiser à l’avance un plan d’ attaque, prévoyant à un jour près la date d’arrivée des renforts. Je n
1388 vance un plan d’attaque, prévoyant à un jour près la date d’arrivée des renforts. Je ne suis pas trop fier de ma retraite
1389 plan d’attaque, prévoyant à un jour près la date d’ arrivée des renforts. Je ne suis pas trop fier de ma retraite stratégi
1390 d’arrivée des renforts. Je ne suis pas trop fier de ma retraite stratégique, mais tout de même bien décidé à renouveler m
1391 mois. Nous sommes partis ce matin à 5 heures, par l’ autobus, ou « hustubuse » comme l’appellent les vieux du village. Il f
1392 à 5 heures, par l’autobus, ou « hustubuse » comme l’ appellent les vieux du village. Il faisait nuit noire, et un de ces ma
1393 par l’autobus, ou « hustubuse » comme l’appellent les vieux du village. Il faisait nuit noire, et un de ces mauvais froids
1394 es vieux du village. Il faisait nuit noire, et un de ces mauvais froids humides. Rien de plus lugubre que l’île avant l’au
1395 mauvais froids humides. Rien de plus lugubre que l’ île avant l’aube. On n’a pas l’impression qu’elle dort, mais qu’elle e
1396 ids humides. Rien de plus lugubre que l’île avant l’ aube. On n’a pas l’impression qu’elle dort, mais qu’elle est morte. L’
1397 e plus lugubre que l’île avant l’aube. On n’a pas l’ impression qu’elle dort, mais qu’elle est morte. L’autobus brinquebala
1398 ’impression qu’elle dort, mais qu’elle est morte. L’ autobus brinquebalant, où nous étions seuls au départ, rappelait les p
1399 balant, où nous étions seuls au départ, rappelait les plus inconfortables légendes : où allait nous conduire ce personnage
1400 it nous conduire ce personnage muet, enfermé dans la cabine du petit tracteur qui nous remorquait ? Non, le voyage des con
1401 bine du petit tracteur qui nous remorquait ? Non, le voyage des contes et des rêves où l’on passe toutes les gares sans s’
1402 quait ? Non, le voyage des contes et des rêves où l’ on passe toutes les gares sans s’arrêter, dans une course angoissante
1403 yage des contes et des rêves où l’on passe toutes les gares sans s’arrêter, dans une course angoissante et agréablement dia
1404 abolique, ce n’était pas encore pour aujourd’hui. L’ hustubuse ne tarda guère à stopper pour embarquer deux paysannes encom
1405 stopper pour embarquer deux paysannes encombrées de paniers, puis d’autres paysannes, puis des gars endimanchés qui allai
1406 s qui allaient s’amuser au chef-lieu, si bien que d’ arrêt en arrêt, il fallut près de deux heures pour arriver au dit chef
1407 s pour arriver au dit chef-lieu. — Déjeuné, après le culte, chez M. Palut. Il n’est pas pasteur en titre, mais seulement «
1408 titre, mais seulement « évangéliste » au service d’ une œuvre missionnaire. Les évangélistes étant moins bien payés que le
1409 vangéliste » au service d’une œuvre missionnaire. Les évangélistes étant moins bien payés que les pasteurs (dont le traitem
1410 aire. Les évangélistes étant moins bien payés que les pasteurs (dont le traitement de base est de 10 000 francs), Mme Palut
1411 tes étant moins bien payés que les pasteurs (dont le traitement de base est de 10 000 francs), Mme Palut est obligée de fa
1412 s bien payés que les pasteurs (dont le traitement de base est de 10 000 francs), Mme Palut est obligée de faire, quand cel
1413 que les pasteurs (dont le traitement de base est de 10 000 francs), Mme Palut est obligée de faire, quand cela se trouve,
1414 base est de 10 000 francs), Mme Palut est obligée de faire, quand cela se trouve, des remplacements d’institutrices. Ils o
1415 de faire, quand cela se trouve, des remplacements d’ institutrices. Ils ont déjà deux garçons, et ils ont trouvé le moyen d
1416 ces. Ils ont déjà deux garçons, et ils ont trouvé le moyen de recueillir encore une vieille Bretonne sans ressources, qui
1417 ont déjà deux garçons, et ils ont trouvé le moyen de recueillir encore une vieille Bretonne sans ressources, qui aide un p
1418 eille Bretonne sans ressources, qui aide un peu à la cuisine et casse beaucoup d’assiettes. Dans cette île, qui fut presqu
1419 s, qui aide un peu à la cuisine et casse beaucoup d’ assiettes. Dans cette île, qui fut presque entièrement protestante au
1420 le, M. Palut n’a plus aujourd’hui qu’une centaine de paroissiens disséminés. Il en vient une dizaine au culte. Les autres
1421 ens disséminés. Il en vient une dizaine au culte. Les autres habitent trop loin, ou sont indifférents. Il me raconte les ef
1422 nt trop loin, ou sont indifférents. Il me raconte les efforts qu’il a faits, pendant six ans, pour entrer en contact avec l
1423 its, pendant six ans, pour entrer en contact avec la population. Conférences, visites, colportage de bibles de porte en po
1424 c la population. Conférences, visites, colportage de bibles de porte en porte. On ne peut pas dire que tout ce travail épu
1425 ation. Conférences, visites, colportage de bibles de porte en porte. On ne peut pas dire que tout ce travail épuisant dans
1426 e peut pas dire que tout ce travail épuisant dans l’ inertie soit resté absolument vain : il y a eu quelques conversions. M
1427 ions. Mais c’est tout juste si elles ont compensé les abandons ou les départs. (Les protestants qui sont souvent l’élément
1428 tout juste si elles ont compensé les abandons ou les départs. (Les protestants qui sont souvent l’élément le plus actif de
1429 elles ont compensé les abandons ou les départs. ( Les protestants qui sont souvent l’élément le plus actif de la population
1430 ou les départs. (Les protestants qui sont souvent l’ élément le plus actif de la population s’expatrient volontiers, ou von
1431 arts. (Les protestants qui sont souvent l’élément le plus actif de la population s’expatrient volontiers, ou vont habiter
1432 testants qui sont souvent l’élément le plus actif de la population s’expatrient volontiers, ou vont habiter les villes.) E
1433 tants qui sont souvent l’élément le plus actif de la population s’expatrient volontiers, ou vont habiter les villes.) En é
1434 pulation s’expatrient volontiers, ou vont habiter les villes.) En été, la petite ville se remplit de baigneurs, et l’audito
1435 volontiers, ou vont habiter les villes.) En été, la petite ville se remplit de baigneurs, et l’auditoire du temple est dé
1436 r les villes.) En été, la petite ville se remplit de baigneurs, et l’auditoire du temple est décuplé : cela suffit pour qu
1437 été, la petite ville se remplit de baigneurs, et l’ auditoire du temple est décuplé : cela suffit pour qu’on maintienne le
1438 e est décuplé : cela suffit pour qu’on maintienne le poste… J’essaie de me représenter l’existence quotidienne de cet homm
1439 a suffit pour qu’on maintienne le poste… J’essaie de me représenter l’existence quotidienne de cet homme aux prises avec l
1440 n maintienne le poste… J’essaie de me représenter l’ existence quotidienne de cet homme aux prises avec la solitude la plus
1441 ’essaie de me représenter l’existence quotidienne de cet homme aux prises avec la solitude la plus désespérante, celle que
1442 xistence quotidienne de cet homme aux prises avec la solitude la plus désespérante, celle que lui crée l’indifférence tran
1443 tidienne de cet homme aux prises avec la solitude la plus désespérante, celle que lui crée l’indifférence tranquille et ob
1444 solitude la plus désespérante, celle que lui crée l’ indifférence tranquille et obstinée de ceux auprès desquels il devrait
1445 ue lui crée l’indifférence tranquille et obstinée de ceux auprès desquels il devrait exercer sa mission. Ils ne veulent pa
1446 vrait exercer sa mission. Ils ne veulent pas même l’ écouter, et toute sa raison d’être est cependant de leur parler. Il n’
1447 ne veulent pas même l’écouter, et toute sa raison d’ être est cependant de leur parler. Il n’a rien d’autre à faire, et il
1448 ’écouter, et toute sa raison d’être est cependant de leur parler. Il n’a rien d’autre à faire, et il ne peut pas le faire.
1449 d’être est cependant de leur parler. Il n’a rien d’ autre à faire, et il ne peut pas le faire. Et de plus, il est seul à
1450 r. Il n’a rien d’autre à faire, et il ne peut pas le faire. Et de plus, il est seul à croire qu’il doit le faire. J’imagi
1451 ire. Et de plus, il est seul à croire qu’il doit le faire. J’imagine qu’il doit apparaître, aux yeux des habitants de cet
1452 ine qu’il doit apparaître, aux yeux des habitants de cette petite ville comme une espèce de fou, d’ailleurs inoffensif. Ou
1453 habitants de cette petite ville comme une espèce de fou, d’ailleurs inoffensif. Ou peut-être encore, ce qui est pis, comm
1454 , ce qui est pis, comme un hypocrite qui a trouvé le moyen de vivre sans travailler. Il m’a décrit son existence sans amer
1455 est pis, comme un hypocrite qui a trouvé le moyen de vivre sans travailler. Il m’a décrit son existence sans amertume. Il
1456 son existence sans amertume. Il ne se plaint que de son isolement intellectuel. Il trouve normal de vivre une vie humaine
1457 e de son isolement intellectuel. Il trouve normal de vivre une vie humainement absurde. Non qu’il n’en distingue pas l’abs
1458 humainement absurde. Non qu’il n’en distingue pas l’ absurdité, mais simplement il sait pourquoi il la subit. Fils d’un pet
1459 l’absurdité, mais simplement il sait pourquoi il la subit. Fils d’un petit hôtelier breton d’origine catholique, il s’est
1460 ais simplement il sait pourquoi il la subit. Fils d’ un petit hôtelier breton d’origine catholique, il s’est converti à vin
1461 quoi il la subit. Fils d’un petit hôtelier breton d’ origine catholique, il s’est converti à vingt ans, et depuis lors il n
1462 ais songé qu’il pût faire autre chose qu’annoncer l’ Évangile. Qu’importe qu’il n’y ait « à vues humaines » aucun espoir de
1463 te qu’il n’y ait « à vues humaines » aucun espoir de se faire entendre, si le seul espoir vrai réside dans la foi, qui ord
1464 humaines » aucun espoir de se faire entendre, si le seul espoir vrai réside dans la foi, qui ordonne de parler quand même
1465 aire entendre, si le seul espoir vrai réside dans la foi, qui ordonne de parler quand même ? On ne persécute plus le chris
1466 seul espoir vrai réside dans la foi, qui ordonne de parler quand même ? On ne persécute plus le christianisme en France :
1467 donne de parler quand même ? On ne persécute plus le christianisme en France : c’est sans doute un signe de surdité spirit
1468 ristianisme en France : c’est sans doute un signe de surdité spirituelle totale. Seule la politique est encore capable de
1469 ute un signe de surdité spirituelle totale. Seule la politique est encore capable de pousser les hommes à des violences. L
1470 lle totale. Seule la politique est encore capable de pousser les hommes à des violences. L’héroïsme vrai aujourd’hui n’est
1471 Seule la politique est encore capable de pousser les hommes à des violences. L’héroïsme vrai aujourd’hui n’est plus specta
1472 re capable de pousser les hommes à des violences. L’ héroïsme vrai aujourd’hui n’est plus spectaculaire, il ne fait plus de
1473 urd’hui n’est plus spectaculaire, il ne fait plus de grands gestes symboliques et passionnés. Il ne tranche pas sur la pla
1474 symboliques et passionnés. Il ne tranche pas sur la platitude générale. Il est à peu près idéalement méconnu. Peut-être a
1475 croit… Je viens de regarder pendant un bon moment les consommateurs attablés autour de moi. Que les hommes sont laids ! Cha
1476 ent les consommateurs attablés autour de moi. Que les hommes sont laids ! Chacun d’eux me frappe par une difformité particu
1477 autour de moi. Que les hommes sont laids ! Chacun d’ eux me frappe par une difformité particulière, pitoyable ou irritante.
1478 r la première fois. Depuis deux mois j’ai vu tous les jours les mêmes têtes de paysans et de pêcheurs, ni belles ni laides
1479 ère fois. Depuis deux mois j’ai vu tous les jours les mêmes têtes de paysans et de pêcheurs, ni belles ni laides comme les
1480 deux mois j’ai vu tous les jours les mêmes têtes de paysans et de pêcheurs, ni belles ni laides comme les têtes que l’on
1481 i vu tous les jours les mêmes têtes de paysans et de pêcheurs, ni belles ni laides comme les têtes que l’on connaît bien e
1482 paysans et de pêcheurs, ni belles ni laides comme les têtes que l’on connaît bien et qui vous parlent. J’ai sans doute perd
1483 pêcheurs, ni belles ni laides comme les têtes que l’ on connaît bien et qui vous parlent. J’ai sans doute perdu l’habitude
1484 t bien et qui vous parlent. J’ai sans doute perdu l’ habitude citadine de ne pas voir ceux qui m’entourent. Je pose un rega
1485 arlent. J’ai sans doute perdu l’habitude citadine de ne pas voir ceux qui m’entourent. Je pose un regard trop précis, qui
1486 u « vraisemblable » même ; car enfin il n’y a pas de raison pour que les habitants de cette ville soient sensiblement plus
1487 même ; car enfin il n’y a pas de raison pour que les habitants de cette ville soient sensiblement plus laids que ceux du r
1488 fin il n’y a pas de raison pour que les habitants de cette ville soient sensiblement plus laids que ceux du reste de la Fr
1489 soient sensiblement plus laids que ceux du reste de la France. Peut-on aimer les hommes qu’on voit ? — Ou bien, au contra
1490 ient sensiblement plus laids que ceux du reste de la France. Peut-on aimer les hommes qu’on voit ? — Ou bien, au contraire
1491 ids que ceux du reste de la France. Peut-on aimer les hommes qu’on voit ? — Ou bien, au contraire, cette laideur disparaîtr
1492 e, cette laideur disparaîtrait-elle si je pouvais les connaître mieux, un à un ? — Il sera bientôt temps de se diriger vers
1493 onnaître mieux, un à un ? — Il sera bientôt temps de se diriger vers cet autobus rouge qui vient d’apparaître sur le quai.
1494 ps de se diriger vers cet autobus rouge qui vient d’ apparaître sur le quai. Je me réjouis de ce petit voyage. Il me semble
1495 vers cet autobus rouge qui vient d’apparaître sur le quai. Je me réjouis de ce petit voyage. Il me semble que je vais déco
1496 qui vient d’apparaître sur le quai. Je me réjouis de ce petit voyage. Il me semble que je vais découvrir un pays cent fois
1497 ent fois traversé que je n’avais jamais su voir : la province et la vie quotidienne, une foule de réalités sociales passio
1498 sé que je n’avais jamais su voir : la province et la vie quotidienne, une foule de réalités sociales passionnantes avec le
1499 ir : la province et la vie quotidienne, une foule de réalités sociales passionnantes avec lesquelles j’ai hâte de confront
1500 sociales passionnantes avec lesquelles j’ai hâte de confronter les hypothèses que je déduis, depuis deux mois, de mes pet
1501 ionnantes avec lesquelles j’ai hâte de confronter les hypothèses que je déduis, depuis deux mois, de mes petites observatio
1502 r les hypothèses que je déduis, depuis deux mois, de mes petites observations sur l’île. La solitude rajeunit. Me voici da
1503 depuis deux mois, de mes petites observations sur l’ île. La solitude rajeunit. Me voici dans l’humeur de mes vingt ans, cu
1504 deux mois, de mes petites observations sur l’île. La solitude rajeunit. Me voici dans l’humeur de mes vingt ans, curieux d
1505 ns sur l’île. La solitude rajeunit. Me voici dans l’ humeur de mes vingt ans, curieux des moindres aventures, et tout mon l
1506 île. La solitude rajeunit. Me voici dans l’humeur de mes vingt ans, curieux des moindres aventures, et tout mon lyrisme au
1507 ai interrompu mes notes depuis quinze jours. Pour la raison très simple que le souci du lendemain provisoirement écarté, j
1508 puis quinze jours. Pour la raison très simple que le souci du lendemain provisoirement écarté, je serais tombé dans le jou
1509 emain provisoirement écarté, je serais tombé dans le journal intime, la culture des impressions ou le pittoresque. Ce séjo
1510 t écarté, je serais tombé dans le journal intime, la culture des impressions ou le pittoresque. Ce séjour, par ailleurs pl
1511 le journal intime, la culture des impressions ou le pittoresque. Ce séjour, par ailleurs plein d’agrément, ne m’a permis
1512 ou le pittoresque. Ce séjour, par ailleurs plein d’ agrément, ne m’a permis de faire jusqu’ici qu’une seule expérience pré
1513 our, par ailleurs plein d’agrément, ne m’a permis de faire jusqu’ici qu’une seule expérience précise et utile relativement
1514 périence précise et utile relativement au dessein de ce journal : celle du loisir. Je m’aperçois que je ne savais plus, ou
1515 re » une soirée, depuis six mois que je n’ai plus de travail fixe. Quand je m’arrêtais d’écrire, par fatigue, je ne me sen
1516 je n’ai plus de travail fixe. Quand je m’arrêtais d’ écrire, par fatigue, je ne me sentais pas la bonne conscience de l’emp
1517 êtais d’écrire, par fatigue, je ne me sentais pas la bonne conscience de l’employé qui a fait sa journée et qui pense main
1518 fatigue, je ne me sentais pas la bonne conscience de l’employé qui a fait sa journée et qui pense maintenant à autre chose
1519 igue, je ne me sentais pas la bonne conscience de l’ employé qui a fait sa journée et qui pense maintenant à autre chose. U
1520 et qui pense maintenant à autre chose. Une sorte d’ impatience me tarabustait encore, me ramenait sans cesse aux mêmes pré
1521 s préoccupations. Ce n’était pas cette vacance où les idées et sentiments changent de climat. Le loisir n’est pas simplemen
1522 cette vacance où les idées et sentiments changent de climat. Le loisir n’est pas simplement la cessation du travail pour u
1523 ce où les idées et sentiments changent de climat. Le loisir n’est pas simplement la cessation du travail pour un repos néc
1524 hangent de climat. Le loisir n’est pas simplement la cessation du travail pour un repos nécessaire. Il se définit psycholo
1525 nt non par rapport au travail, mais par rapport à la sécurité matérielle qu’assurent soit le travail, soit la fortune, soi
1526 rapport à la sécurité matérielle qu’assurent soit le travail, soit la fortune, soit, dans mon cas particulier, l’amitié. U
1527 rité matérielle qu’assurent soit le travail, soit la fortune, soit, dans mon cas particulier, l’amitié. Un chômeur intelle
1528 soit la fortune, soit, dans mon cas particulier, l’ amitié. Un chômeur intellectuel peut encore travailler — et c’est cela
1529 ectuel peut encore travailler — et c’est cela qui le différencie profondément d’un chômeur industriel, par exemple —, mais
1530 r — et c’est cela qui le différencie profondément d’ un chômeur industriel, par exemple —, mais il ne connaît plus de vrais
1531 ndustriel, par exemple —, mais il ne connaît plus de vrais loisirs. ⁂ Je saisis l’occasion de ce répit pour essayer de dém
1532 il ne connaît plus de vrais loisirs. ⁂ Je saisis l’ occasion de ce répit pour essayer de démêler un peu la signification c
1533 aît plus de vrais loisirs. ⁂ Je saisis l’occasion de ce répit pour essayer de démêler un peu la signification complexe du
1534 . ⁂ Je saisis l’occasion de ce répit pour essayer de démêler un peu la signification complexe du chômage intellectuel. Nos
1535 casion de ce répit pour essayer de démêler un peu la signification complexe du chômage intellectuel. Nos conversations de
1536 mplexe du chômage intellectuel. Nos conversations de ces jours derniers avec nos amis, et les précisions que j’ai dû fourn
1537 ersations de ces jours derniers avec nos amis, et les précisions que j’ai dû fournir à des personnes curieuses de mon état,
1538 ons que j’ai dû fournir à des personnes curieuses de mon état, m’ont amené à me poser un certain nombre de questions et m’
1539 on état, m’ont amené à me poser un certain nombre de questions et m’ont rendu attentif à quelques faits que je veux consig
1540 veux consigner brièvement, pour mémoire, quitte à les analyser plus concrètement dans la suite. 1 — Le chômage est devenu a
1541 ire, quitte à les analyser plus concrètement dans la suite. 1 — Le chômage est devenu aujourd’hui un état d’âme, une « con
1542 les analyser plus concrètement dans la suite. 1 —  Le chômage est devenu aujourd’hui un état d’âme, une « condition », un m
1543 tat d’âme, une « condition », un mode particulier d’ existence. Il n’est plus seulement un accident, une privation provisoi
1544 s seulement un accident, une privation provisoire de travail rémunérateur. Il ne relève plus seulement de la statistique é
1545 travail rémunérateur. Il ne relève plus seulement de la statistique économique, mais de la psychologie. 2 — Ce fait « exis
1546 vail rémunérateur. Il ne relève plus seulement de la statistique économique, mais de la psychologie. 2 — Ce fait « existen
1547 plus seulement de la statistique économique, mais de la psychologie. 2 — Ce fait « existentiel » absolument nouveau dans l
1548 s seulement de la statistique économique, mais de la psychologie. 2 — Ce fait « existentiel » absolument nouveau dans l’hi
1549 — Ce fait « existentiel » absolument nouveau dans l’ histoire n’a pas encore été étudié, ni de l’intérieur, ni de l’extérie
1550 eau dans l’histoire n’a pas encore été étudié, ni de l’intérieur, ni de l’extérieur, en tant que fait psychologique. 3 — C
1551 dans l’histoire n’a pas encore été étudié, ni de l’ intérieur, ni de l’extérieur, en tant que fait psychologique. 3 — Cepe
1552 n’a pas encore été étudié, ni de l’intérieur, ni de l’extérieur, en tant que fait psychologique. 3 — Cependant, il est di
1553 a pas encore été étudié, ni de l’intérieur, ni de l’ extérieur, en tant que fait psychologique. 3 — Cependant, il est diffi
1554 cela dure, croît et embellit depuis vingt ans —,  de se refuser systématiquement à envisager le sort d’environ 30 millions
1555 ans —, de se refuser systématiquement à envisager le sort d’environ 30 millions de contemporains. D’autant plus que des pa
1556 e se refuser systématiquement à envisager le sort d’ environ 30 millions de contemporains. D’autant plus que des partis pol
1557 quement à envisager le sort d’environ 30 millions de contemporains. D’autant plus que des partis politiques « dangereux »
1558 r le sort d’environ 30 millions de contemporains. D’ autant plus que des partis politiques « dangereux » prennent soin de v
1559 des partis politiques « dangereux » prennent soin de vous le rappeler avec une insistance impitoyable. Alors on se rabat s
1560 is politiques « dangereux » prennent soin de vous le rappeler avec une insistance impitoyable. Alors on se rabat sur des d
1561 n se rabat sur des discussions politiques, ou sur la philanthropie. On parle du péril social créé par le chômage, dont on
1562 philanthropie. On parle du péril social créé par le chômage, dont on admet généralement qu’il est démoralisant. (Pour bea
1563 il est démoralisant. (Pour beaucoup de bourgeois, le chômeur est un être mystérieux et un peu effrayant, il joue le rôle d
1564 t un être mystérieux et un peu effrayant, il joue le rôle d’un croquemitaine pour grandes personnes.) On discute avec pass
1565 e mystérieux et un peu effrayant, il joue le rôle d’ un croquemitaine pour grandes personnes.) On discute avec passion des
1566 e avec passion des mesures à prendre pour occuper les sans-travail, ou tout au moins pour leur donner de la soupe ; on fait
1567 s sans-travail, ou tout au moins pour leur donner de la soupe ; on fait des hypothèses sociologiques, etc. Tout cela reste
1568 ans-travail, ou tout au moins pour leur donner de la soupe ; on fait des hypothèses sociologiques, etc. Tout cela reste fo
1569 iques, etc. Tout cela reste forcément extérieur à la réalité humaine et présente du chômage. 4 — Qui donc pourrait étudier
1570 résente du chômage. 4 — Qui donc pourrait étudier la réalité humaine et présente du chômage ? Les chômeurs eux-mêmes ? On
1571 udier la réalité humaine et présente du chômage ? Les chômeurs eux-mêmes ? On n’étudie pas la misère, quand il ne s’agit pl
1572 hômage ? Les chômeurs eux-mêmes ? On n’étudie pas la misère, quand il ne s’agit plus de rien que de trouver le pain du len
1573 n n’étudie pas la misère, quand il ne s’agit plus de rien que de trouver le pain du lendemain, et c’est le cas du très gra
1574 as la misère, quand il ne s’agit plus de rien que de trouver le pain du lendemain, et c’est le cas du très grand nombre. D
1575 e, quand il ne s’agit plus de rien que de trouver le pain du lendemain, et c’est le cas du très grand nombre. D’autre part
1576 ien que de trouver le pain du lendemain, et c’est le cas du très grand nombre. D’autre part, ceux qui « jouissent » d’un m
1577 rand nombre. D’autre part, ceux qui « jouissent » d’ un mode d’existence assuré se soucient peu de connaître la mentalité d
1578 e. D’autre part, ceux qui « jouissent » d’un mode d’ existence assuré se soucient peu de connaître la mentalité du chômeur,
1579 e d’existence assuré se soucient peu de connaître la mentalité du chômeur, soit que, bourgeois, ils refusent de croire à l
1580 ité du chômeur, soit que, bourgeois, ils refusent de croire à la nécessité organique et permanente de sa condition dans l’
1581 ur, soit que, bourgeois, ils refusent de croire à la nécessité organique et permanente de sa condition dans l’ordre capita
1582 de croire à la nécessité organique et permanente de sa condition dans l’ordre capitaliste, soit que, socialistes, ils se
1583 sité organique et permanente de sa condition dans l’ ordre capitaliste, soit que, socialistes, ils se bornent à utiliser l’
1584 soit que, socialistes, ils se bornent à utiliser l’ argument politique du chômage, soit enfin qu’une gêne assez compréhens
1585 mage, soit enfin qu’une gêne assez compréhensible les retienne de se mêler du malheur d’autrui, d’un malheur en l’espèce do
1586 fin qu’une gêne assez compréhensible les retienne de se mêler du malheur d’autrui, d’un malheur en l’espèce dont ils se se
1587 ompréhensible les retienne de se mêler du malheur d’ autrui, d’un malheur en l’espèce dont ils se sentent peut-être, obscur
1588 ble les retienne de se mêler du malheur d’autrui, d’ un malheur en l’espèce dont ils se sentent peut-être, obscurément, res
1589 de se mêler du malheur d’autrui, d’un malheur en l’ espèce dont ils se sentent peut-être, obscurément, responsables de par
1590 r prospérité même. (Double « censure » opérée par les passions politiques et par les croyances morales.) Voici donc le dile
1591 nsure » opérée par les passions politiques et par les croyances morales.) Voici donc le dilemme : ou bien l’on est dans le
1592 itiques et par les croyances morales.) Voici donc le dilemme : ou bien l’on est dans le chômage, et l’on n’a pas les moyen
1593 oyances morales.) Voici donc le dilemme : ou bien l’ on est dans le chômage, et l’on n’a pas les moyens de s’analyser, de s
1594 s.) Voici donc le dilemme : ou bien l’on est dans le chômage, et l’on n’a pas les moyens de s’analyser, de s’exprimer. Ou
1595 le dilemme : ou bien l’on est dans le chômage, et l’ on n’a pas les moyens de s’analyser, de s’exprimer. Ou bien l’on est h
1596 ou bien l’on est dans le chômage, et l’on n’a pas les moyens de s’analyser, de s’exprimer. Ou bien l’on est hors du chômage
1597 n est dans le chômage, et l’on n’a pas les moyens de s’analyser, de s’exprimer. Ou bien l’on est hors du chômage, et l’on
1598 hômage, et l’on n’a pas les moyens de s’analyser, de s’exprimer. Ou bien l’on est hors du chômage, et l’on a toutes les ra
1599 les moyens de s’analyser, de s’exprimer. Ou bien l’ on est hors du chômage, et l’on a toutes les raisons de ne pas trop s’
1600 s’exprimer. Ou bien l’on est hors du chômage, et l’ on a toutes les raisons de ne pas trop s’en approcher. 5 — Reste le ca
1601 u bien l’on est hors du chômage, et l’on a toutes les raisons de ne pas trop s’en approcher. 5 — Reste le cas tout à fait p
1602 est hors du chômage, et l’on a toutes les raisons de ne pas trop s’en approcher. 5 — Reste le cas tout à fait particulier
1603 raisons de ne pas trop s’en approcher. 5 — Reste le cas tout à fait particulier de l’intellectuel chômeur. Il semble que
1604 procher. 5 — Reste le cas tout à fait particulier de l’intellectuel chômeur. Il semble que cet homme-là soit à peu près le
1605 cher. 5 — Reste le cas tout à fait particulier de l’ intellectuel chômeur. Il semble que cet homme-là soit à peu près le se
1606 ômeur. Il semble que cet homme-là soit à peu près le seul qui ait à la fois le droit et les moyens d’étudier de l’intérieu
1607 omme-là soit à peu près le seul qui ait à la fois le droit et les moyens d’étudier de l’intérieur le « fait du chômage ».
1608 à peu près le seul qui ait à la fois le droit et les moyens d’étudier de l’intérieur le « fait du chômage ». Mais cela n’e
1609 le seul qui ait à la fois le droit et les moyens d’ étudier de l’intérieur le « fait du chômage ». Mais cela n’est pas si
1610 ui ait à la fois le droit et les moyens d’étudier de l’intérieur le « fait du chômage ». Mais cela n’est pas si simple en
1611 ait à la fois le droit et les moyens d’étudier de l’ intérieur le « fait du chômage ». Mais cela n’est pas si simple en réa
1612 s le droit et les moyens d’étudier de l’intérieur le « fait du chômage ». Mais cela n’est pas si simple en réalité. J’ai o
1613 emple à plusieurs reprises un petit fait amusant. Les bourgeois de gauche ou de droite parlent volontiers de la nécessité d
1614 urs reprises un petit fait amusant. Les bourgeois de gauche ou de droite parlent volontiers de la nécessité de « sauver le
1615 un petit fait amusant. Les bourgeois de gauche ou de droite parlent volontiers de la nécessité de « sauver les élites », e
1616 urgeois de gauche ou de droite parlent volontiers de la nécessité de « sauver les élites », et de secourir les chômeurs in
1617 eois de gauche ou de droite parlent volontiers de la nécessité de « sauver les élites », et de secourir les chômeurs intel
1618 e ou de droite parlent volontiers de la nécessité de « sauver les élites », et de secourir les chômeurs intellectuels dont
1619 te parlent volontiers de la nécessité de « sauver les élites », et de secourir les chômeurs intellectuels dont on dirait pa
1620 iers de la nécessité de « sauver les élites », et de secourir les chômeurs intellectuels dont on dirait parfois qu’ils par
1621 écessité de « sauver les élites », et de secourir les chômeurs intellectuels dont on dirait parfois qu’ils paraissent plus
1622 issent plus spécialement touchants… Mais quand un de ces excellents bourgeois vient à me rencontrer, et que je me donne po
1623 : « Chômeur ? Allons donc, cela s’appelait bohème de mon temps ! Et puis vous êtes un bourgeois, un bourgeois ne peut pas
1624 u fait et au prendre, qu’est-ce que cela signifie d’ être chômeur quand on a pour métier de penser ? Peut-on s’arrêter de p
1625 la signifie d’être chômeur quand on a pour métier de penser ? Peut-on s’arrêter de penser ? Ha ha ! Un intellectuel en chô
1626 nd on a pour métier de penser ? Peut-on s’arrêter de penser ? Ha ha ! Un intellectuel en chômage, ce serait en somme un mo
1627 e qui renforce cette impression chez quelques-uns de ceux auxquels j’ai eu affaire, c’est que j’ai l’air assez satisfait d
1628 eu affaire, c’est que j’ai l’air assez satisfait de mon état, le plaisir de vivre à ma guise dans une simplicité très fav
1629 c’est que j’ai l’air assez satisfait de mon état, le plaisir de vivre à ma guise dans une simplicité très favorable à mon
1630 ’ai l’air assez satisfait de mon état, le plaisir de vivre à ma guise dans une simplicité très favorable à mon travail, su
1631 vail, surpassant finalement mes ennuis matériels. De là à croire que je ne suis qu’un amateur, ou que je pose au prolétair
1632 lectuel chômeur n’est pas un homme démoralisé par la privation de travail. Au contraire, il peut travailler davantage. Il
1633 ur n’est pas un homme démoralisé par la privation de travail. Au contraire, il peut travailler davantage. Il ne se disting
1634 eut travailler davantage. Il ne se distingue donc d’ un intellectuel rentier que par le manque de revenu assuré. Mais le se
1635 distingue donc d’un intellectuel rentier que par le manque de revenu assuré. Mais le seul fait que la « matérielle » est
1636 donc d’un intellectuel rentier que par le manque de revenu assuré. Mais le seul fait que la « matérielle » est déficiente
1637 rentier que par le manque de revenu assuré. Mais le seul fait que la « matérielle » est déficiente change sa conscience d
1638 le manque de revenu assuré. Mais le seul fait que la « matérielle » est déficiente change sa conscience d’intellectuel, et
1639  matérielle » est déficiente change sa conscience d’ intellectuel, et l’oblige à se poser des questions toutes nouvelles. U
1640 éficiente change sa conscience d’intellectuel, et l’ oblige à se poser des questions toutes nouvelles. Un intellectuel chôm
1641 scrit au chômage » et ne bénéficie pas du minimum de sécurité financière accordé par l’État au chômeur industriel. Autre d
1642 pas du minimum de sécurité financière accordé par l’ État au chômeur industriel. Autre désavantage : il ne peut pas accepte
1643 rovisoire sans renoncer en même temps à sa raison d’ être, — ce qui n’est pas le cas de l’ouvrier, surtout non qualifié. Il
1644 même temps à sa raison d’être, — ce qui n’est pas le cas de l’ouvrier, surtout non qualifié. Il se pourrait que l’intellec
1645 mps à sa raison d’être, — ce qui n’est pas le cas de l’ouvrier, surtout non qualifié. Il se pourrait que l’intellectuel pu
1646 à sa raison d’être, — ce qui n’est pas le cas de l’ ouvrier, surtout non qualifié. Il se pourrait que l’intellectuel puiss
1647 ouvrier, surtout non qualifié. Il se pourrait que l’ intellectuel puisse connaître une forme très particulière de chômage p
1648 tuel puisse connaître une forme très particulière de chômage pur : certaines circonstances extérieures sont capables de tu
1649 certaines circonstances extérieures sont capables de tuer en certains hommes jusqu’à l’activité de la pensée : mon état d’
1650 sont capables de tuer en certains hommes jusqu’à l’ activité de la pensée : mon état d’esprit, quand je suis dans une vill
1651 les de tuer en certains hommes jusqu’à l’activité de la pensée : mon état d’esprit, quand je suis dans une ville étrangère
1652 de tuer en certains hommes jusqu’à l’activité de la pensée : mon état d’esprit, quand je suis dans une ville étrangère, o
1653 erdre jusqu’à mes attaches avec moi-même, à force d’ inaction, de gratuité. Plus j’essaie de préciser ma condition, plus el
1654 à mes attaches avec moi-même, à force d’inaction, de gratuité. Plus j’essaie de préciser ma condition, plus elle m’apparaî
1655 e, à force d’inaction, de gratuité. Plus j’essaie de préciser ma condition, plus elle m’apparaît paradoxale, tantôt meille
1656 t voisine. À défaut de conclusion nette, essayons de résumer les faits : 1 — L’intellectuel chômeur est celui qui ne peut
1657 À défaut de conclusion nette, essayons de résumer les faits : 1 — L’intellectuel chômeur est celui qui ne peut plus vivre d
1658 lusion nette, essayons de résumer les faits : 1 —  L’ intellectuel chômeur est celui qui ne peut plus vivre de son travail,
1659 llectuel chômeur est celui qui ne peut plus vivre de son travail, soit qu’il ait perdu l’emploi régulier qui assurait son
1660 t plus vivre de son travail, soit qu’il ait perdu l’ emploi régulier qui assurait son budget, soit que la nature même de se
1661 emploi régulier qui assurait son budget, soit que la nature même de ses travaux l’empêche d’en tirer de quoi vivre. (Combi
1662 qui assurait son budget, soit que la nature même de ses travaux l’empêche d’en tirer de quoi vivre. (Combien y a-t-il en
1663 on budget, soit que la nature même de ses travaux l’ empêche d’en tirer de quoi vivre. (Combien y a-t-il en France d’écriva
1664 soit que la nature même de ses travaux l’empêche d’ en tirer de quoi vivre. (Combien y a-t-il en France d’écrivains qui vi
1665 a nature même de ses travaux l’empêche d’en tirer de quoi vivre. (Combien y a-t-il en France d’écrivains qui vivent de leu
1666 tirer de quoi vivre. (Combien y a-t-il en France d’ écrivains qui vivent de leurs écrits ? Peut-être deux sur cent — et ce
1667 Combien y a-t-il en France d’écrivains qui vivent de leurs écrits ? Peut-être deux sur cent — et ces deux-là auront probab
1668 eux sur cent — et ces deux-là auront probablement de 40 à 70 ans…) 2 — Le chômage tel qu’il est vécu aujourd’hui par une t
1669 deux-là auront probablement de 40 à 70 ans…) 2 —  Le chômage tel qu’il est vécu aujourd’hui par une trentaine de millions
1670 tel qu’il est vécu aujourd’hui par une trentaine de millions d’hommes ne peut pas être vécu de la même façon par l’intell
1671 st vécu aujourd’hui par une trentaine de millions d’ hommes ne peut pas être vécu de la même façon par l’intellectuel. Il a
1672 ntaine de millions d’hommes ne peut pas être vécu de la même façon par l’intellectuel. Il atteint les travailleurs manuels
1673 ine de millions d’hommes ne peut pas être vécu de la même façon par l’intellectuel. Il atteint les travailleurs manuels, l
1674 hommes ne peut pas être vécu de la même façon par l’ intellectuel. Il atteint les travailleurs manuels, les employés, ingén
1675 u de la même façon par l’intellectuel. Il atteint les travailleurs manuels, les employés, ingénieurs, médecins, etc., qui n
1676 ntellectuel. Il atteint les travailleurs manuels, les employés, ingénieurs, médecins, etc., qui ne peuvent plus exercer leu
1677 qui ne peuvent plus exercer leur profession quand les instruments ou le champ d’action nécessaires leur font défaut. Mais l
1678 exercer leur profession quand les instruments ou le champ d’action nécessaires leur font défaut. Mais l’intellectuel n’a
1679 leur profession quand les instruments ou le champ d’ action nécessaires leur font défaut. Mais l’intellectuel n’a besoin, l
1680 champ d’action nécessaires leur font défaut. Mais l’ intellectuel n’a besoin, la plupart du temps, que de papier et d’encre
1681 intellectuel n’a besoin, la plupart du temps, que de papier et d’encre. Il ne sera donc jamais un chômeur absolu, pensant
1682 n’a besoin, la plupart du temps, que de papier et d’ encre. Il ne sera donc jamais un chômeur absolu, pensant toujours, ce
1683 d’autres, par vocation, souffrira-t-il davantage de son état, tout au moins le comprendra-t-il plus profondément, plus in
1684 uffrira-t-il davantage de son état, tout au moins le comprendra-t-il plus profondément, plus insupportablement donc… Un po
1685 plus insupportablement donc… Un point à étudier : le chômage déclasse l’intellectuel. Il le met sur un pied d’égalité para
1686 nt donc… Un point à étudier : le chômage déclasse l’ intellectuel. Il le met sur un pied d’égalité paradoxal avec les homme
1687 étudier : le chômage déclasse l’intellectuel. Il le met sur un pied d’égalité paradoxal avec les hommes qui l’entourent.
1688 ge déclasse l’intellectuel. Il le met sur un pied d’ égalité paradoxal avec les hommes qui l’entourent. Il le dépouille des
1689 l. Il le met sur un pied d’égalité paradoxal avec les hommes qui l’entourent. Il le dépouille des signes extérieurs de son
1690 r un pied d’égalité paradoxal avec les hommes qui l’ entourent. Il le dépouille des signes extérieurs de son état, de cet h
1691 ité paradoxal avec les hommes qui l’entourent. Il le dépouille des signes extérieurs de son état, de cet habitus bourgeois
1692 ’entourent. Il le dépouille des signes extérieurs de son état, de cet habitus bourgeois qui, hélas, est encore chez nous l
1693 l le dépouille des signes extérieurs de son état, de cet habitus bourgeois qui, hélas, est encore chez nous la marque de l
1694 abitus bourgeois qui, hélas, est encore chez nous la marque de l’intellectuel. Par là même, l’intellectuel chômeur risque
1695 rgeois qui, hélas, est encore chez nous la marque de l’intellectuel. Par là même, l’intellectuel chômeur risque d’apparaît
1696 ois qui, hélas, est encore chez nous la marque de l’ intellectuel. Par là même, l’intellectuel chômeur risque d’apparaître
1697 ez nous la marque de l’intellectuel. Par là même, l’ intellectuel chômeur risque d’apparaître inférieur aux yeux des gens d
1698 ctuel. Par là même, l’intellectuel chômeur risque d’ apparaître inférieur aux yeux des gens de métier parmi lesquels il vit
1699 r risque d’apparaître inférieur aux yeux des gens de métier parmi lesquels il vit. Pour le moment, ce qui domine en moi, c
1700 ux des gens de métier parmi lesquels il vit. Pour le moment, ce qui domine en moi, c’est le plaisir du dépaysement en prof
1701 vit. Pour le moment, ce qui domine en moi, c’est le plaisir du dépaysement en profondeur — et non plus en surface —, soci
1702 t non plus géographique… 21 janvier 1934 (dans l’ île) Nous sommes rentrés hier soir dans cette maison glaciale et hu
1703 ette maison glaciale et humide. Il n’y avait plus de pétrole, et il était trop tard pour aller en acheter. Silence, froid,
1704 nce, froid, solitude, et ce vent qui ne cesse pas de siffler autour de la maison. Nous avons trouvé des noix et bu un verr
1705 et ce vent qui ne cesse pas de siffler autour de la maison. Nous avons trouvé des noix et bu un verre de vin, à la lueur
1706 maison. Nous avons trouvé des noix et bu un verre de vin, à la lueur d’une bougie. Heureux de nous retrouver chez nous, da
1707 us avons trouvé des noix et bu un verre de vin, à la lueur d’une bougie. Heureux de nous retrouver chez nous, dans notre c
1708 trouvé des noix et bu un verre de vin, à la lueur d’ une bougie. Heureux de nous retrouver chez nous, dans notre campement
1709 un verre de vin, à la lueur d’une bougie. Heureux de nous retrouver chez nous, dans notre campement au bout du monde. Conf
1710 inconfort matériel. Je viens de relire mes notes de Taillefer. Il me semble déjà que l’ambiance où j’étais en les écrivan
1711 ire mes notes de Taillefer. Il me semble déjà que l’ ambiance où j’étais en les écrivant m’a fait exagérer l’importance de
1712 r. Il me semble déjà que l’ambiance où j’étais en les écrivant m’a fait exagérer l’importance de l’élément d’insécurité dan
1713 ance où j’étais en les écrivant m’a fait exagérer l’ importance de l’élément d’insécurité dans ma vie actuelle. Certes, j’a
1714 is en les écrivant m’a fait exagérer l’importance de l’élément d’insécurité dans ma vie actuelle. Certes, j’ai toujours le
1715 en les écrivant m’a fait exagérer l’importance de l’ élément d’insécurité dans ma vie actuelle. Certes, j’ai toujours les m
1716 ivant m’a fait exagérer l’importance de l’élément d’ insécurité dans ma vie actuelle. Certes, j’ai toujours les mêmes raiso
1717 urité dans ma vie actuelle. Certes, j’ai toujours les mêmes raisons matérielles de m’inquiéter. Mais je ne les sens pas si
1718 rtes, j’ai toujours les mêmes raisons matérielles de m’inquiéter. Mais je ne les sens pas si obsédantes. Et même, en y réf
1719 es raisons matérielles de m’inquiéter. Mais je ne les sens pas si obsédantes. Et même, en y réfléchissant, je m’étonne soud
1720 ns. Cela me rappelle d’autres moments pareils : à l’ annonce d’accidents imprévus qui donnaient brusquement à ma vie un cou
1721 e rappelle d’autres moments pareils : à l’annonce d’ accidents imprévus qui donnaient brusquement à ma vie un cours nouveau
1722 ux reprises au moins, je me souviens parfaitement d’ avoir prononcé à mi-voix : « Ainsi, c’est cela. » — avec ce même calme
1723 faisais que reconnaître et vérifier quelque chose de déjà entendu, au double sens du mot. Comme si j’étais moi-même mon de
1724 ement et ma vie. (Fausse reconnaissance, diraient les psychologues. Mais une étiquette n’est pas une explication.) Pourquoi
1725 cation.) Pourquoi ce calme, quand j’aurais toutes les raisons de m’inquiéter, de réclamer, de calculer plus ou moins fiévre
1726 rquoi ce calme, quand j’aurais toutes les raisons de m’inquiéter, de réclamer, de calculer plus ou moins fiévreusement d’a
1727 quand j’aurais toutes les raisons de m’inquiéter, de réclamer, de calculer plus ou moins fiévreusement d’autres projets…?
1728 s toutes les raisons de m’inquiéter, de réclamer, de calculer plus ou moins fiévreusement d’autres projets…? D’où vient ce
1729 er plus ou moins fiévreusement d’autres projets…? D’ où vient cette persuasion que tout est bien, si profonde que je me l’a
1730 rsuasion que tout est bien, si profonde que je me l’ avoue pour la première fois aujourd’hui, et que je n’arrive à la préci
1731 a première fois aujourd’hui, et que je n’arrive à la préciser que par l’effort d’écrire ici des mots qui la traduisent et
1732 urd’hui, et que je n’arrive à la préciser que par l’ effort d’écrire ici des mots qui la traduisent et la trahissent ? D’où
1733 et que je n’arrive à la préciser que par l’effort d’ écrire ici des mots qui la traduisent et la trahissent ? D’où vient ce
1734 éciser que par l’effort d’écrire ici des mots qui la traduisent et la trahissent ? D’où vient cette espèce d’optimisme que
1735 effort d’écrire ici des mots qui la traduisent et la trahissent ? D’où vient cette espèce d’optimisme que rien ne paraît m
1736 ici des mots qui la traduisent et la trahissent ? D’ où vient cette espèce d’optimisme que rien ne paraît motiver aux yeux
1737 uisent et la trahissent ? D’où vient cette espèce d’ optimisme que rien ne paraît motiver aux yeux d’autrui ou aux yeux de
1738 e d’optimisme que rien ne paraît motiver aux yeux d’ autrui ou aux yeux de ma raison ? Et si je n’avais pas une croyance se
1739 n’avais pas une croyance secrète et puissante en l’ ordre significatif du monde (quoi qu’il m’advienne), ne serais-je pas
1740 u’il m’advienne), ne serais-je pas désespéré, fou de possibles manqués et de grandeurs inatteintes ? Serait-ce donc que je
1741 ais-je pas désespéré, fou de possibles manqués et de grandeurs inatteintes ? Serait-ce donc que je crois réellement à la P
1742 eintes ? Serait-ce donc que je crois réellement à la Providence ? Beaucoup de philosophes contemporains disent que la Prov
1743 Beaucoup de philosophes contemporains disent que la Providence est un opium ; que l’homme s’endort à imaginer un ordre du
1744 rains disent que la Providence est un opium ; que l’ homme s’endort à imaginer un ordre du monde où sa place serait réservé
1745 il s’agirait au contraire de créer cet ordre dans l’ arbitraire insensé du monde, et parmi des déterminations qui ne tienne
1746 i des déterminations qui ne tiennent aucun compte de moi : voilà la croyance des hommes forts, disent-ils. Savoir quelle a
1747 tions qui ne tiennent aucun compte de moi : voilà la croyance des hommes forts, disent-ils. Savoir quelle angoisse d’infér
1748 hommes forts, disent-ils. Savoir quelle angoisse d’ infériorité se cache sous cette volonté de puissance ! La force est ca
1749 ngoisse d’infériorité se cache sous cette volonté de puissance ! La force est calme. Et il me plaît de croire qu’elle s’ig
1750 iorité se cache sous cette volonté de puissance ! La force est calme. Et il me plaît de croire qu’elle s’ignore. Je distin
1751 de puissance ! La force est calme. Et il me plaît de croire qu’elle s’ignore. Je distingue clairement ceci : il y a une im
1752 i : il y a une immense libération intérieure dans la certitude que la seule force qui compte est celle de la Providence (o
1753 mense libération intérieure dans la certitude que la seule force qui compte est celle de la Providence (ou du destin). C’e
1754 certitude que la seule force qui compte est celle de la Providence (ou du destin). C’est cela seul qui dispense l’homme de
1755 titude que la seule force qui compte est celle de la Providence (ou du destin). C’est cela seul qui dispense l’homme de jo
1756 ence (ou du destin). C’est cela seul qui dispense l’ homme de jouer la comédie de la force pour s’imposer aux autres, ou s’
1757 du destin). C’est cela seul qui dispense l’homme de jouer la comédie de la force pour s’imposer aux autres, ou s’en impos
1758 n). C’est cela seul qui dispense l’homme de jouer la comédie de la force pour s’imposer aux autres, ou s’en imposer à soi-
1759 ela seul qui dispense l’homme de jouer la comédie de la force pour s’imposer aux autres, ou s’en imposer à soi-même. Ceux
1760 seul qui dispense l’homme de jouer la comédie de la force pour s’imposer aux autres, ou s’en imposer à soi-même. Ceux qui
1761 ’en imposer à soi-même. Ceux qui font des mentons d’ imperator, ceux qui frappent du poing sur la table, ceux qui s’égosill
1762 ntons d’imperator, ceux qui frappent du poing sur la table, ceux qui s’égosillent, ceux qui publient à son de trompe leurs
1763 e, ceux qui s’égosillent, ceux qui publient à son de trompe leurs défis ou leurs succès — prouvent qu’ils n’y croient pas
1764 On comprend qu’ils s’acharnent à répéter que rien de grand ne se fait que par la collectivité : s’ils étaient seuls, ils a
1765 nt à répéter que rien de grand ne se fait que par la collectivité : s’ils étaient seuls, ils auraient peur de n’être rien.
1766 ectivité : s’ils étaient seuls, ils auraient peur de n’être rien. 23 janvier 1934 (écrit sur la dune) Il ne faut pas
1767 eur de n’être rien. 23 janvier 1934 (écrit sur la dune) Il ne faut pas se mettre en colère au mois de janvier. C’est
1768 ne) Il ne faut pas se mettre en colère au mois de janvier. C’est une saison abstraite, on n’atteint presque rien. Le so
1769 une saison abstraite, on n’atteint presque rien. Le soleil froid à travers une brume lointaine agrandit les regards sans
1770 leil froid à travers une brume lointaine agrandit les regards sans nourrir la vision. Pas de mouches dans la lumière au ras
1771 brume lointaine agrandit les regards sans nourrir la vision. Pas de mouches dans la lumière au ras des landes. Lucidité st
1772 agrandit les regards sans nourrir la vision. Pas de mouches dans la lumière au ras des landes. Lucidité stérile du bel hi
1773 gards sans nourrir la vision. Pas de mouches dans la lumière au ras des landes. Lucidité stérile du bel hiver. La colère y
1774 au ras des landes. Lucidité stérile du bel hiver. La colère y jaillit sans rencontrer personne. J’ai à craindre qu’elle ne
1775 craindre qu’elle ne m’attaque par désir famélique de créer du nouveau. Car c’est une consolation aussi que d’avoir à faire
1776 r du nouveau. Car c’est une consolation aussi que d’ avoir à faire face à quelque catastrophe intime. Certains jours on don
1777 jours on donnerait beaucoup pour une bonne raison de désespérer, pour une bonne et impérieuse raison d’abandonner cette pa
1778 e désespérer, pour une bonne et impérieuse raison d’ abandonner cette partie mal engagée, ma vie, et de se retrouver neuf,
1779 d’abandonner cette partie mal engagée, ma vie, et de se retrouver neuf, enfantin, ou tout simplement jeune devant un prése
1780 ou tout simplement jeune devant un présent ouvert de tous côtés… Une seule vertu peut alors nous sauver de cette tentation
1781 ous côtés… Une seule vertu peut alors nous sauver de cette tentation du désespoir et c’est l’humilité. Si je ne suis pas i
1782 s sauver de cette tentation du désespoir et c’est l’ humilité. Si je ne suis pas important, le monde s’agrandit. Je puis en
1783 et c’est l’humilité. Si je ne suis pas important, le monde s’agrandit. Je puis encore aimer des paysages qui ne sont pas m
1784 mon « état d’âme », mais une parole à déchiffrer. L’ humilité m’apporte des nouvelles du monde. Ainsi je me renouvelle lent
1785 Ainsi je me renouvelle lentement. C’est un moyen de sortir de l’impasse : non pas en changeant ses données, mais soi-même
1786 me renouvelle lentement. C’est un moyen de sortir de l’impasse : non pas en changeant ses données, mais soi-même. Fin d
1787 renouvelle lentement. C’est un moyen de sortir de l’ impasse : non pas en changeant ses données, mais soi-même. Fin de j
1788 s en changeant ses données, mais soi-même. Fin de janvier 1934 Je lis dans le Journal de Kierkegaard : « La lande do
1789 s soi-même. Fin de janvier 1934 Je lis dans le Journal de Kierkegaard : « La lande doit favoriser le développement d
1790 Fin de janvier 1934 Je lis dans le Journal de Kierkegaard : « La lande doit favoriser le développement de pensées p
1791 1934 Je lis dans le Journal de Kierkegaard : «  La lande doit favoriser le développement de pensées puissantes. Ici tout
1792 ournal de Kierkegaard : « La lande doit favoriser le développement de pensées puissantes. Ici tout est sans voile, dans sa
1793 aard : « La lande doit favoriser le développement de pensées puissantes. Ici tout est sans voile, dans sa nudité devant Di
1794 sans voile, dans sa nudité devant Dieu. Ici plus de dérangements domestiques, plus aucun de ces subterfuges grâce auxquel
1795 Ici plus de dérangements domestiques, plus aucun de ces subterfuges grâce auxquels la conscience peut se dissimuler, et q
1796 ues, plus aucun de ces subterfuges grâce auxquels la conscience peut se dissimuler, et qui l’empêchent d’atteindre rien de
1797 auxquels la conscience peut se dissimuler, et qui l’ empêchent d’atteindre rien de sérieux dans le désordre. “Où fuirai-je
1798 conscience peut se dissimuler, et qui l’empêchent d’ atteindre rien de sérieux dans le désordre. “Où fuirai-je devant ta fa
1799 e dissimuler, et qui l’empêchent d’atteindre rien de sérieux dans le désordre. “Où fuirai-je devant ta face ?” Cette parol
1800 qui l’empêchent d’atteindre rien de sérieux dans le désordre. “Où fuirai-je devant ta face ?” Cette parole peut être dite
1801 ” Cette parole peut être dite en vérité, ici, sur la lande. » Oui, c’est cela, mais Kierkegaard ne faisait que se promener
1802 , mais Kierkegaard ne faisait que se promener sur la lande danoise, loin de tout « dérangement domestique ». Il avait un t
1803 artement à Copenhague. Deux mots me frappent dans l’ édition allemande où je poursuis la lecture de ce journal : Einsamkeit
1804 frappent dans l’édition allemande où je poursuis la lecture de ce journal : Einsamkeit (solitude), et Gottgemeinsamkeit (
1805 ans l’édition allemande où je poursuis la lecture de ce journal : Einsamkeit (solitude), et Gottgemeinsamkeit (communion a
1806 (communion avec Dieu). Leur rapprochement exprime le sens profond de la lande, son sens ésotérique si l’on veut. Il est cu
1807 Dieu). Leur rapprochement exprime le sens profond de la lande, son sens ésotérique si l’on veut. Il est curieux de noter q
1808 u). Leur rapprochement exprime le sens profond de la lande, son sens ésotérique si l’on veut. Il est curieux de noter qu’e
1809 sens profond de la lande, son sens ésotérique si l’ on veut. Il est curieux de noter qu’en français communion contient et
1810 son sens ésotérique si l’on veut. Il est curieux de noter qu’en français communion contient et évoque union, alors qu’en
1811 on contient et évoque union, alors qu’en allemand le même mot contient et évoque solitude. Je ne pense pas qu’il y ait là
1812 e. Je ne pense pas qu’il y ait là contradiction : les deux couples de mots désignent deux aspects d’un même mouvement de l’
1813 s qu’il y ait là contradiction : les deux couples de mots désignent deux aspects d’un même mouvement de l’être. Celui qui
1814 : les deux couples de mots désignent deux aspects d’ un même mouvement de l’être. Celui qui « se tient devant Dieu » est se
1815 e mots désignent deux aspects d’un même mouvement de l’être. Celui qui « se tient devant Dieu » est seul. Il se trouve pla
1816 ots désignent deux aspects d’un même mouvement de l’ être. Celui qui « se tient devant Dieu » est seul. Il se trouve placé
1817 Dieu, il se voit uni à ses semblables par un lien de responsabilité. Séparé du monde et remis au monde d’une manière toute
1818 responsabilité. Séparé du monde et remis au monde d’ une manière toute nouvelle, non plus pour le subir mais pour collabore
1819 monde d’une manière toute nouvelle, non plus pour le subir mais pour collaborer à sa transformation. Ainsi de mon île : c’
1820 r mais pour collaborer à sa transformation. Ainsi de mon île : c’est d’abord un désert, et ensuite il m’apparaît que ce dé
1821 raît que ce désert est habité par des hommes dont la présence m’est plus concrète qu’ailleurs. Ou par une analogie moins p
1822 urs. Ou par une analogie moins profonde : d’abord la lande est une exaltation, un dépaysement romantique, et ensuite il m’
1823 ar des hommes réels, leur imposant des conditions de vie précises et qu’il s’agit de regarder d’un œil actif. Février 1
1824 nt des conditions de vie précises et qu’il s’agit de regarder d’un œil actif. Février 1934 Les gens. — Du haut des
1825 tions de vie précises et qu’il s’agit de regarder d’ un œil actif. Février 1934 Les gens. — Du haut des dunes, je vo
1826 t de regarder d’un œil actif. Février 1934 Les gens. — Du haut des dunes, je vois les terres divisées en parcelles m
1827 r 1934 Les gens. — Du haut des dunes, je vois les terres divisées en parcelles minuscules. Sur ces parcelles des hommes
1828 s parcelles des hommes et des femmes travaillent, le buste parallèle au sol. Ces deux observations physiques très simples
1829 ommentaire. Elles résument en deux images exactes les conditions morales et économiques des habitants de l’île. 1. Division
1830 s conditions morales et économiques des habitants de l’île. 1. Division des terres. — J’ai pu vérifier à plusieurs reprise
1831 onditions morales et économiques des habitants de l’ île. 1. Division des terres. — J’ai pu vérifier à plusieurs reprises l
1832 s terres. — J’ai pu vérifier à plusieurs reprises l’ extraordinaire complication du cadastre en lisant affichées sur les mu
1833 complication du cadastre en lisant affichées sur les murs de l’église les annonces de ventes immobilières. Les propriétés
1834 tion du cadastre en lisant affichées sur les murs de l’église les annonces de ventes immobilières. Les propriétés se compo
1835 n du cadastre en lisant affichées sur les murs de l’ église les annonces de ventes immobilières. Les propriétés se composen
1836 stre en lisant affichées sur les murs de l’église les annonces de ventes immobilières. Les propriétés se composent générale
1837 t affichées sur les murs de l’église les annonces de ventes immobilières. Les propriétés se composent généralement d’une v
1838 de l’église les annonces de ventes immobilières. Les propriétés se composent généralement d’une vingtaine ou d’une trentai
1839 ilières. Les propriétés se composent généralement d’ une vingtaine ou d’une trentaine de parcelles, dont beaucoup n’ont que
1840 étés se composent généralement d’une vingtaine ou d’ une trentaine de parcelles, dont beaucoup n’ont que quelques centiares
1841 t généralement d’une vingtaine ou d’une trentaine de parcelles, dont beaucoup n’ont que quelques centiares, les plus grand
1842 lles, dont beaucoup n’ont que quelques centiares, les plus grandes un à deux ares. Je connais déjà la géographie locale ass
1843 les plus grandes un à deux ares. Je connais déjà la géographie locale assez pour me rendre compte de la dispersion ridicu
1844 la géographie locale assez pour me rendre compte de la dispersion ridicule des parcelles tout autour du village : l’homme
1845 géographie locale assez pour me rendre compte de la dispersion ridicule des parcelles tout autour du village : l’homme qu
1846 n ridicule des parcelles tout autour du village : l’ homme qui travaille ces bouts de champ grands comme ma chambre doit pa
1847 tour du village : l’homme qui travaille ces bouts de champ grands comme ma chambre doit passer une partie de la journée à
1848 mp grands comme ma chambre doit passer une partie de la journée à marcher de l’un à l’autre. Disposition encore plus gênan
1849 grands comme ma chambre doit passer une partie de la journée à marcher de l’un à l’autre. Disposition encore plus gênante
1850 re doit passer une partie de la journée à marcher de l’un à l’autre. Disposition encore plus gênante au moment de la récol
1851 tre. Disposition encore plus gênante au moment de la récolte. Et bien entendu, cela exclut l’usage des machines agricoles.
1852 oment de la récolte. Et bien entendu, cela exclut l’ usage des machines agricoles. Pourquoi ne s’entendent-ils pas entre eu
1853 nseigné. Il paraît bien qu’un maire avait proposé la réforme, avant la guerre. Mais cela n’a pas marché. La tradition de l
1854 bien qu’un maire avait proposé la réforme, avant la guerre. Mais cela n’a pas marché. La tradition de l’île veut que chaq
1855 forme, avant la guerre. Mais cela n’a pas marché. La tradition de l’île veut que chaque champ soit partagé à la mort du pr
1856 la guerre. Mais cela n’a pas marché. La tradition de l’île veut que chaque champ soit partagé à la mort du propriétaire en
1857 guerre. Mais cela n’a pas marché. La tradition de l’ île veut que chaque champ soit partagé à la mort du propriétaire en au
1858 ion de l’île veut que chaque champ soit partagé à la mort du propriétaire en autant de parcelles qu’il y a d’héritiers. Ce
1859 soit partagé à la mort du propriétaire en autant de parcelles qu’il y a d’héritiers. Ceci pour éviter que l’un hérite d’u
1860 du propriétaire en autant de parcelles qu’il y a d’ héritiers. Ceci pour éviter que l’un hérite d’un champ un peu meilleur
1861 y a d’héritiers. Ceci pour éviter que l’un hérite d’ un champ un peu meilleur que les autres. Égalité contre solidarité. Le
1862 er que l’un hérite d’un champ un peu meilleur que les autres. Égalité contre solidarité. Le résultat évident de cette tradi
1863 illeur que les autres. Égalité contre solidarité. Le résultat évident de cette tradition sacro-sainte, c’est que les paysa
1864 s. Égalité contre solidarité. Le résultat évident de cette tradition sacro-sainte, c’est que les paysans travaillent beauc
1865 vident de cette tradition sacro-sainte, c’est que les paysans travaillent beaucoup plus qu’il ne serait nécessaire à leur s
1866 qu’il ne serait nécessaire à leur subsistance si la répartition des terres était conçue non point selon les principes éga
1867 partition des terres était conçue non point selon les principes égalitaires, mais selon le bon sens pratique. Comment espér
1868 point selon les principes égalitaires, mais selon le bon sens pratique. Comment espérer un développement « culturel » de c
1869 ue. Comment espérer un développement « culturel » de cette population abrutie de fatigue ? Il faudrait d’abord réformer le
1870 oppement « culturel » de cette population abrutie de fatigue ? Il faudrait d’abord réformer leurs conditions matérielles.
1871 ielles. Mais précisément ce qui s’y oppose, c’est l’ idéologie rudimentaire qu’on leur a inculquée, et qui n’a que trop bie
1872 mme ici pourrait influencer leur mentalité, c’est l’ instituteur. S’il leur donnait une éducation non plus égalitaire, mais
1873 être changées. Mais si personne ne fait rien par le moyen normal de l’éducation, il n’y a plus d’autre solution que la co
1874 Mais si personne ne fait rien par le moyen normal de l’éducation, il n’y a plus d’autre solution que la contrainte. La dic
1875 s si personne ne fait rien par le moyen normal de l’ éducation, il n’y a plus d’autre solution que la contrainte. La dictat
1876 par le moyen normal de l’éducation, il n’y a plus d’ autre solution que la contrainte. La dictature est un moyen grossier,
1877 e l’éducation, il n’y a plus d’autre solution que la contrainte. La dictature est un moyen grossier, souvent barbare et to
1878 il n’y a plus d’autre solution que la contrainte. La dictature est un moyen grossier, souvent barbare et toujours déshonor
1879 ent barbare et toujours déshonorant pour ceux qui la subissent, mais c’est le seul moyen de transformer et d’animer un peu
1880 éshonorant pour ceux qui la subissent, mais c’est le seul moyen de transformer et d’animer un peuple auquel on n’a pas su
1881 r ceux qui la subissent, mais c’est le seul moyen de transformer et d’animer un peuple auquel on n’a pas su donner le sens
1882 ssent, mais c’est le seul moyen de transformer et d’ animer un peuple auquel on n’a pas su donner le sens civique, le sens
1883 et d’animer un peuple auquel on n’a pas su donner le sens civique, le sens de la communauté. Qui est-ce qui se préoccupe e
1884 uple auquel on n’a pas su donner le sens civique, le sens de la communauté. Qui est-ce qui se préoccupe en France de donne
1885 uel on n’a pas su donner le sens civique, le sens de la communauté. Qui est-ce qui se préoccupe en France de donner au peu
1886 on n’a pas su donner le sens civique, le sens de la communauté. Qui est-ce qui se préoccupe en France de donner au peuple
1887 communauté. Qui est-ce qui se préoccupe en France de donner au peuple une éducation solidariste ? On cherche à enrôler ces
1888 anti-quelque chose, qui n’empêcheront rien, c’est l’ évidence, parce qu’elles n’exigent rien de positif, ne construisent ri
1889 , c’est l’évidence, parce qu’elles n’exigent rien de positif, ne construisent rien, n’animent rien, s’épuisent en excitati
1890 citations verbales. Dictature ou éducation, voilà le dilemme. 2. Mauvais outils. — Revenons au sens précis, limité et terr
1891 u sens précis, limité et terre à terre des usages de l’île. Dès la quarantaine déjà, les hommes et les femmes ont tous le
1892 ens précis, limité et terre à terre des usages de l’ île. Dès la quarantaine déjà, les hommes et les femmes ont tous le cor
1893 limité et terre à terre des usages de l’île. Dès la quarantaine déjà, les hommes et les femmes ont tous le corps plus ou
1894 rre des usages de l’île. Dès la quarantaine déjà, les hommes et les femmes ont tous le corps plus ou moins déjeté. Cela pro
1895 de l’île. Dès la quarantaine déjà, les hommes et les femmes ont tous le corps plus ou moins déjeté. Cela provient évidemme
1896 arantaine déjà, les hommes et les femmes ont tous le corps plus ou moins déjeté. Cela provient évidemment de leur position
1897 ps plus ou moins déjeté. Cela provient évidemment de leur position quand ils travaillent aux champs. Et cette position pro
1898 ravaillent aux champs. Et cette position provient de la forme de leurs outils. Ils n’utilisent guère que des « bouelles »
1899 aillent aux champs. Et cette position provient de la forme de leurs outils. Ils n’utilisent guère que des « bouelles » au
1900 ux champs. Et cette position provient de la forme de leurs outils. Ils n’utilisent guère que des « bouelles » au manche tr
1901 des « bouelles » au manche très court, recourbé à l’ extrémité, de telle sorte que la lame fait avec le manche un angle d’e
1902 s » au manche très court, recourbé à l’extrémité, de telle sorte que la lame fait avec le manche un angle d’environ 45°. C
1903 court, recourbé à l’extrémité, de telle sorte que la lame fait avec le manche un angle d’environ 45°. Cet instrument, d’un
1904 l’extrémité, de telle sorte que la lame fait avec le manche un angle d’environ 45°. Cet instrument, d’une part, les oblige
1905 le sorte que la lame fait avec le manche un angle d’ environ 45°. Cet instrument, d’une part, les oblige à baisser le buste
1906 angle d’environ 45°. Cet instrument, d’une part, les oblige à baisser le buste au maximum, jambes écartées, pour gratter l
1907 Cet instrument, d’une part, les oblige à baisser le buste au maximum, jambes écartées, pour gratter la terre sablonneuse,
1908 e buste au maximum, jambes écartées, pour gratter la terre sablonneuse, d’autre part, les empêche de labourer cette terre
1909 pour gratter la terre sablonneuse, d’autre part, les empêche de labourer cette terre à plus de dix ou quinze centimètres d
1910 r la terre sablonneuse, d’autre part, les empêche de labourer cette terre à plus de dix ou quinze centimètres de profondeu
1911 part, les empêche de labourer cette terre à plus de dix ou quinze centimètres de profondeur. Trente centimètres de rallon
1912 r cette terre à plus de dix ou quinze centimètres de profondeur. Trente centimètres de rallonge au manche, un angle plus g
1913 nze centimètres de profondeur. Trente centimètres de rallonge au manche, un angle plus grand avec la lame, cela suffirait
1914 s de rallonge au manche, un angle plus grand avec la lame, cela suffirait à redresser leur corps et augmenterait le rendem
1915 suffirait à redresser leur corps et augmenterait le rendement de leurs champs. Intrigué dès les premiers jours par l’allu
1916 redresser leur corps et augmenterait le rendement de leurs champs. Intrigué dès les premiers jours par l’allure et les faç
1917 leurs champs. Intrigué dès les premiers jours par l’ allure et les façons de travailler si spéciales des gens d’ici, j’ai h
1918 . Intrigué dès les premiers jours par l’allure et les façons de travailler si spéciales des gens d’ici, j’ai hésité longtem
1919 dès les premiers jours par l’allure et les façons de travailler si spéciales des gens d’ici, j’ai hésité longtemps à croir
1920 es gens d’ici, j’ai hésité longtemps à croire que la raison en était réellement aussi simple. Je connais tout de même asse
1921 ement aussi simple. Je connais tout de même assez la terre pour savoir que les mêmes outils ne sont pas bons en tous pays,
1922 nnais tout de même assez la terre pour savoir que les mêmes outils ne sont pas bons en tous pays, et je cherchais quelle pa
1923 je cherchais quelle particularité locale motivait l’ usage exclusif de cette bouelle. Je les ai questionnés : ils ont eu l’
1924 le particularité locale motivait l’usage exclusif de cette bouelle. Je les ai questionnés : ils ont eu l’air plutôt surpri
1925 le motivait l’usage exclusif de cette bouelle. Je les ai questionnés : ils ont eu l’air plutôt surpris. « On a toujours fai
1926 urpris. « On a toujours fait comme ça. » Un jour, le père Renaud étant venu retourner une planche d’oignons, je lui ai off
1927 , le père Renaud étant venu retourner une planche d’ oignons, je lui ai offert les outils à long manche qui sont dans le ch
1928 retourner une planche d’oignons, je lui ai offert les outils à long manche qui sont dans le chai, et il a refusé. « On n’a
1929 ai offert les outils à long manche qui sont dans le chai, et il a refusé. « On n’a pas l’habitude. » Contre-épreuve : un
1930 i sont dans le chai, et il a refusé. « On n’a pas l’ habitude. » Contre-épreuve : un petit propriétaire venu du continent i
1931 t de suite obtenu des résultats supérieurs à ceux de ses voisins, et à moindre fatigue. Il y a peut-être d’innombrables pe
1932 s voisins, et à moindre fatigue. Il y a peut-être d’ innombrables petits faits de ce genre en France. Il y aurait peut-être
1933 gue. Il y a peut-être d’innombrables petits faits de ce genre en France. Il y aurait peut-être d’innombrables réformes aus
1934 aits de ce genre en France. Il y aurait peut-être d’ innombrables réformes aussi simples à opérer. Je n’en sais rien4. Je m
1935 e n’en sais rien4. Je me borne à constater qu’ici les paysans travaillent trop, se plaignent du mauvais rendement de la ter
1936 availlent trop, se plaignent du mauvais rendement de la terre, et refusent cependant de rien changer à des habitudes dont
1937 illent trop, se plaignent du mauvais rendement de la terre, et refusent cependant de rien changer à des habitudes dont les
1938 vais rendement de la terre, et refusent cependant de rien changer à des habitudes dont les défauts sautent aux yeux du pre
1939 nt cependant de rien changer à des habitudes dont les défauts sautent aux yeux du premier venu. 13 février 1934 La p
1940 aux yeux du premier venu. 13 février 1934 La presse. — Je note à l’usage d’un futur historien des mœurs que la pre
1941 nu. 13 février 1934 La presse. — Je note à l’ usage d’un futur historien des mœurs que la presse « de droite » reflè
1942 3 février 1934 La presse. — Je note à l’usage d’ un futur historien des mœurs que la presse « de droite » reflète assez
1943 note à l’usage d’un futur historien des mœurs que la presse « de droite » reflète assez exactement la mentalité et les con
1944 ge d’un futur historien des mœurs que la presse «  de droite » reflète assez exactement la mentalité et les conversations d
1945 la presse « de droite » reflète assez exactement la mentalité et les conversations de la bourgeoisie conservatrice, alors
1946 droite » reflète assez exactement la mentalité et les conversations de la bourgeoisie conservatrice, alors que la presse de
1947 ssez exactement la mentalité et les conversations de la bourgeoisie conservatrice, alors que la presse de gauche ne reflèt
1948 z exactement la mentalité et les conversations de la bourgeoisie conservatrice, alors que la presse de gauche ne reflète n
1949 ations de la bourgeoisie conservatrice, alors que la presse de gauche ne reflète nullement la mentalité ni les conversatio
1950 la bourgeoisie conservatrice, alors que la presse de gauche ne reflète nullement la mentalité ni les conversations populai
1951 lors que la presse de gauche ne reflète nullement la mentalité ni les conversations populaires. C’est que les journaux soc
1952 se de gauche ne reflète nullement la mentalité ni les conversations populaires. C’est que les journaux socialistes et commu
1953 talité ni les conversations populaires. C’est que les journaux socialistes et communistes sont rédigés par des bourgeois, o
1954 rédigés par des bourgeois, ou par des candidats à la bourgeoisie, en tout cas par des gens qui recherchent la « considérat
1955 geoisie, en tout cas par des gens qui recherchent la « considération du peuple ». D’où le ton haineux, typiquement petit-b
1956 s qui recherchent la « considération du peuple ». D’ où le ton haineux, typiquement petit-bourgeois, de certaines de ces fe
1957 recherchent la « considération du peuple ». D’où le ton haineux, typiquement petit-bourgeois, de certaines de ces feuille
1958 D’où le ton haineux, typiquement petit-bourgeois, de certaines de ces feuilles. Je n’ai jamais retrouvé ce ton dans le peu
1959 aineux, typiquement petit-bourgeois, de certaines de ces feuilles. Je n’ai jamais retrouvé ce ton dans le peuple. S’il en
1960 ces feuilles. Je n’ai jamais retrouvé ce ton dans le peuple. S’il en paraît parfois, par accident, quelques traces ici ou
1961 ar accident, quelques traces ici ou là, c’est que le peuple de France lit trop de journaux, ne lit que cela, et finit par
1962 t, quelques traces ici ou là, c’est que le peuple de France lit trop de journaux, ne lit que cela, et finit par se croire
1963 ici ou là, c’est que le peuple de France lit trop de journaux, ne lit que cela, et finit par se croire « le Peuple » tel q
1964 urnaux, ne lit que cela, et finit par se croire «  le Peuple » tel que l’imaginent les bourgeois et leurs journalistes. Ce
1965 ela, et finit par se croire « le Peuple » tel que l’ imaginent les bourgeois et leurs journalistes. Ce n’est pas dans notre
1966 t par se croire « le Peuple » tel que l’imaginent les bourgeois et leurs journalistes. Ce n’est pas dans notre île, d’aille
1967 ailleurs, que j’ai pu constater cette contagion ! Les deux journaux locaux gardent un ton à la fois naïf et grandiloquent,
1968 is naïf et grandiloquent, avec des maladresses et de grosses astuces, qui n’est pas exactement celui des « discussions » q
1969 elui des « discussions » qu’on peut entendre dans les cafés du port, au chef-lieu, mais qui correspond bien à ce que les pê
1970 , au chef-lieu, mais qui correspond bien à ce que les pêcheurs ou les paysans aiment à se faire dire, me semble-t-il. D’ail
1971 mais qui correspond bien à ce que les pêcheurs ou les paysans aiment à se faire dire, me semble-t-il. D’ailleurs, il y a pe
1972 a peu de nouvelles du monde dans leurs colonnes. Les correspondances villageoises (accidents de bicyclette, arrivée d’un b
1973 nnes. Les correspondances villageoises (accidents de bicyclette, arrivée d’un bateau, prix du sel, causeries du curé ou de
1974 es villageoises (accidents de bicyclette, arrivée d’ un bateau, prix du sel, causeries du curé ou de l’instituteur, mariage
1975 ée d’un bateau, prix du sel, causeries du curé ou de l’instituteur, mariages, décès et naissances) tiennent presque toute
1976 d’un bateau, prix du sel, causeries du curé ou de l’ instituteur, mariages, décès et naissances) tiennent presque toute la
1977 ages, décès et naissances) tiennent presque toute la place. Abîme entre la politique des amis du peuple, et la réalité du
1978 ces) tiennent presque toute la place. Abîme entre la politique des amis du peuple, et la réalité du peuple : rien ne le re
1979 . Abîme entre la politique des amis du peuple, et la réalité du peuple : rien ne le rend plus sensible que cette différenc
1980 amis du peuple, et la réalité du peuple : rien ne le rend plus sensible que cette différence de ton entre tel organe socia
1981 ien ne le rend plus sensible que cette différence de ton entre tel organe socialiste ou communiste de Paris, et l’un de ce
1982 de ton entre tel organe socialiste ou communiste de Paris, et l’un de ces petits journaux de campagne. 15 février 1934
1983 organe socialiste ou communiste de Paris, et l’un de ces petits journaux de campagne. 15 février 1934 Les gens. — S
1984 mmuniste de Paris, et l’un de ces petits journaux de campagne. 15 février 1934 Les gens. — Si j’avais une âme de ph
1985 tits journaux de campagne. 15 février 1934 Les gens. — Si j’avais une âme de philanthrope, je chercherais à répandre
1986 5 février 1934 Les gens. — Si j’avais une âme de philanthrope, je chercherais à répandre mes idées dans la population 
1987 nthrope, je chercherais à répandre mes idées dans la population : je convoquerais par exemple un meeting pour exposer mes
1988 s consignées, et mettre en discussion mes projets de réforme. Je sais bien ce qui m’arrêterait dès les premiers pas. Ces h
1989 s pas. Ces hommes n’ont pas ou n’ont plus coutume de se réunir, d’être ensemble pour causer. Le dimanche, ils « font la pa
1990 mes n’ont pas ou n’ont plus coutume de se réunir, d’ être ensemble pour causer. Le dimanche, ils « font la partie » chez l’
1991 outume de se réunir, d’être ensemble pour causer. Le dimanche, ils « font la partie » chez l’un ou l’autre, à quatre ou ci
1992 tre ensemble pour causer. Le dimanche, ils « font la partie » chez l’un ou l’autre, à quatre ou cinq. On boit et on tape l
1993 ou l’autre, à quatre ou cinq. On boit et on tape le carton sans beaucoup de paroles. C’est à cela que se réduit la vie co
1994 s beaucoup de paroles. C’est à cela que se réduit la vie commune. Quelques-uns le déplorent parmi les vieux. Mais personne
1995 à cela que se réduit la vie commune. Quelques-uns le déplorent parmi les vieux. Mais personne n’a l’idée de rien entrepren
1996 t la vie commune. Quelques-uns le déplorent parmi les vieux. Mais personne n’a l’idée de rien entreprendre. Le village comp
1997 s le déplorent parmi les vieux. Mais personne n’a l’ idée de rien entreprendre. Le village comptait autrefois, paraît-il, c
1998 plorent parmi les vieux. Mais personne n’a l’idée de rien entreprendre. Le village comptait autrefois, paraît-il, cinq ou
1999 x. Mais personne n’a l’idée de rien entreprendre. Le village comptait autrefois, paraît-il, cinq ou six sociétés de caract
2000 mptait autrefois, paraît-il, cinq ou six sociétés de caractère utilitaire ou récréatif. La plus fameuse était la Clique de
2001 ix sociétés de caractère utilitaire ou récréatif. La plus fameuse était la Clique des retraités de la Marine, qui animait
2002 re utilitaire ou récréatif. La plus fameuse était la Clique des retraités de la Marine, qui animait de ses concerts de nom
2003 if. La plus fameuse était la Clique des retraités de la Marine, qui animait de ses concerts de nombreuses fêtes villageois
2004 La plus fameuse était la Clique des retraités de la Marine, qui animait de ses concerts de nombreuses fêtes villageoises.
2005 la Clique des retraités de la Marine, qui animait de ses concerts de nombreuses fêtes villageoises. Tout cela s’est dissou
2006 traités de la Marine, qui animait de ses concerts de nombreuses fêtes villageoises. Tout cela s’est dissous quand les homm
2007 fêtes villageoises. Tout cela s’est dissous quand les hommes sont partis pour la guerre, et rien ne s’est refait depuis. Qu
2008 a s’est dissous quand les hommes sont partis pour la guerre, et rien ne s’est refait depuis. Quand on veut danser on fait
2009 refait depuis. Quand on veut danser on fait venir l’ orchestre-jazz du chef-lieu : il arrive dans un somptueux car d’excurs
2010 zz du chef-lieu : il arrive dans un somptueux car d’ excursion capitonné de velours violet horriblement moderne. Cependant
2011 rrive dans un somptueux car d’excursion capitonné de velours violet horriblement moderne. Cependant deux associations se s
2012 ux associations se survivent encore. L’une, c’est la Mutuelle, dont l’activité principale se manifeste lors des enterremen
2013 survivent encore. L’une, c’est la Mutuelle, dont l’ activité principale se manifeste lors des enterrements : elle assure à
2014 este lors des enterrements : elle assure à chacun de ses membres une nombreuse suite pour leur « dernier voyage ». L’autre
2015 uite pour leur « dernier voyage ». L’autre, c’est la Société coopérative de panification, réunissant dans une sorte de cor
2016 r voyage ». L’autre, c’est la Société coopérative de panification, réunissant dans une sorte de corporation boulanger, min
2017 rative de panification, réunissant dans une sorte de corporation boulanger, minotier et consommateurs. Le pain, la tombe.
2018 corporation boulanger, minotier et consommateurs. Le pain, la tombe. Deux réalités fondamentales. Voilà qui est bien dans
2019 on boulanger, minotier et consommateurs. Le pain, la tombe. Deux réalités fondamentales. Voilà qui est bien dans l’harmoni
2020 x réalités fondamentales. Voilà qui est bien dans l’ harmonie de cette lande où l’homme et ses maisons mettent les seules v
2021 fondamentales. Voilà qui est bien dans l’harmonie de cette lande où l’homme et ses maisons mettent les seules verticales.
2022 là qui est bien dans l’harmonie de cette lande où l’ homme et ses maisons mettent les seules verticales. Existence ramenée
2023 de cette lande où l’homme et ses maisons mettent les seules verticales. Existence ramenée à ses deux dimensions premières.
2024 nce ramenée à ses deux dimensions premières. Pour la vie, l’homme debout et actif, il faut le pain. Pour la mort, l’homme
2025 née à ses deux dimensions premières. Pour la vie, l’ homme debout et actif, il faut le pain. Pour la mort, l’homme qui se r
2026 es. Pour la vie, l’homme debout et actif, il faut le pain. Pour la mort, l’homme qui se recouche, il faut la tombe. Il y a
2027 e, l’homme debout et actif, il faut le pain. Pour la mort, l’homme qui se recouche, il faut la tombe. Il y a toujours quel
2028 e debout et actif, il faut le pain. Pour la mort, l’ homme qui se recouche, il faut la tombe. Il y a toujours quelque grand
2029 n. Pour la mort, l’homme qui se recouche, il faut la tombe. Il y a toujours quelque grandeur dans les choses simples, rudi
2030 t la tombe. Il y a toujours quelque grandeur dans les choses simples, rudimentaires. Mais quand je vois ces hommes et ces f
2031 u’ils grattent lentement pour en tirer tout juste de quoi vivre, j’hésite à reconnaître dans leur existence le beau mythe
2032 vivre, j’hésite à reconnaître dans leur existence le beau mythe du peuple primitif aux prises avec les éléments hostiles.
2033 le beau mythe du peuple primitif aux prises avec les éléments hostiles. En vérité, ils vivent à peine. Ils subsistent. À l
2034 À la fois aux limites du continent et aux limites de l’humanité. Ils n’attaquent plus, ils se cramponnent. Ce ne sont pas
2035 a fois aux limites du continent et aux limites de l’ humanité. Ils n’attaquent plus, ils se cramponnent. Ce ne sont pas des
2036 Ce ne sont pas des colons, des défricheurs, mais de petits propriétaires qui se défendent avec la seule obstination de l’
2037 ais de petits propriétaires qui se défendent avec la seule obstination de l’instinct, au niveau le plus bas où l’homme pui
2038 taires qui se défendent avec la seule obstination de l’instinct, au niveau le plus bas où l’homme puisse vivre sans misère
2039 res qui se défendent avec la seule obstination de l’ instinct, au niveau le plus bas où l’homme puisse vivre sans misère, s
2040 vec la seule obstination de l’instinct, au niveau le plus bas où l’homme puisse vivre sans misère, sans ambitions, sans rê
2041 stination de l’instinct, au niveau le plus bas où l’ homme puisse vivre sans misère, sans ambitions, sans rêves, sans trist
2042 , sans tristesse. Chacun pour soi sur sa parcelle de terre ingrate, ou dans sa courette pleine de fleurs. Qu’ils n’aient p
2043 elle de terre ingrate, ou dans sa courette pleine de fleurs. Qu’ils n’aient pas de vie communautaire, cela ne signifie pas
2044 sa courette pleine de fleurs. Qu’ils n’aient pas de vie communautaire, cela ne signifie pas nécessairement qu’ils aient p
2045 ne signifie pas nécessairement qu’ils aient perdu le sentiment de leur commune condition. Ils sont peut-être trop pareils
2046 as nécessairement qu’ils aient perdu le sentiment de leur commune condition. Ils sont peut-être trop pareils pour éprouver
2047 on. Ils sont peut-être trop pareils pour éprouver le besoin de s’unir. Ils n’ont pas à faire face à des menaces extérieure
2048 nt peut-être trop pareils pour éprouver le besoin de s’unir. Ils n’ont pas à faire face à des menaces extérieures. Et surt
2049 ces extérieures. Et surtout ils n’ont nulle envie d’ entreprendre une conquête quelconque, matérielle ou spirituelle. Or c’
2050 seul, menace ou entreprise commune, qui rassemble les peuples et les pousse à créer des signes visibles de leur union : ass
2051 entreprise commune, qui rassemble les peuples et les pousse à créer des signes visibles de leur union : assemblées, fêtes,
2052 peuples et les pousse à créer des signes visibles de leur union : assemblées, fêtes, cortèges, uniformes, ou chefs, — kolk
2053 mes, ou chefs, — kolkhozes, corporations ou camps de travail. Mais ici, que feraient-ils de tout cela ? Ils ont la liberté
2054 s ou camps de travail. Mais ici, que feraient-ils de tout cela ? Ils ont la liberté, et cela leur suffit, depuis cent-cinq
2055 Mais ici, que feraient-ils de tout cela ? Ils ont la liberté, et cela leur suffit, depuis cent-cinquante ans. Ils ne songe
2056 cent-cinquante ans. Ils ne songent pas à en tirer le moindre profit positif. Ils se nourrissent mal (légumes, soupes, frui
2057 . Ils se nourrissent mal (légumes, soupes, fruits de mer, seiches et poisson, je crois que c’est à peu près tout), mais po
2058 sont morts ou vont mourir couchés sur une fortune de 100 000 ou de 200 000 francs, que leurs fils iront perdre à la ville 
2059 vont mourir couchés sur une fortune de 100 000 ou de 200 000 francs, que leurs fils iront perdre à la ville : je crois cep
2060 de 200 000 francs, que leurs fils iront perdre à la ville : je crois cependant que la proportion des fous est moindre ici
2061 iront perdre à la ville : je crois cependant que la proportion des fous est moindre ici que sur le continent. Et l’on meu
2062 ue la proportion des fous est moindre ici que sur le continent. Et l’on meurt vieux5, et les médecins ne font pas fortune.
2063 des fous est moindre ici que sur le continent. Et l’ on meurt vieux5, et les médecins ne font pas fortune. Quelle conclusio
2064 ci que sur le continent. Et l’on meurt vieux5, et les médecins ne font pas fortune. Quelle conclusion tirer de tout cela ?
2065 cins ne font pas fortune. Quelle conclusion tirer de tout cela ? Quand on voit les choses et les êtres de trop près, on pe
2066 lle conclusion tirer de tout cela ? Quand on voit les choses et les êtres de trop près, on perd le peu de foi que l’on pouv
2067 tirer de tout cela ? Quand on voit les choses et les êtres de trop près, on perd le peu de foi que l’on pouvait accorder a
2068 tout cela ? Quand on voit les choses et les êtres de trop près, on perd le peu de foi que l’on pouvait accorder aux idéolo
2069 oit les choses et les êtres de trop près, on perd le peu de foi que l’on pouvait accorder aux idéologies et aux politicien
2070 les êtres de trop près, on perd le peu de foi que l’ on pouvait accorder aux idéologies et aux politiciens. Il faut vivre à
2071 e. Réveillez ce peuple, il sera peut-être capable de grandes choses — c’est son mystère — mais ne dites pas que vous le fa
2072 — c’est son mystère — mais ne dites pas que vous le faites pour son bonheur, car il est plus « heureux » que vous. Il fau
2073 uement à une vérité absolue, qui vaille mieux que la paix et le bonheur, pour oser bouleverser la petite vie de notre île.
2074 e vérité absolue, qui vaille mieux que la paix et le bonheur, pour oser bouleverser la petite vie de notre île. À noter et
2075 que la paix et le bonheur, pour oser bouleverser la petite vie de notre île. À noter et à souligner : Seules les guerres
2076 t le bonheur, pour oser bouleverser la petite vie de notre île. À noter et à souligner : Seules les guerres de religion on
2077 vie de notre île. À noter et à souligner : Seules les guerres de religion ont tiré de l’héroïsme de ce peuple. Mais combien
2078 île. À noter et à souligner : Seules les guerres de religion ont tiré de l’héroïsme de ce peuple. Mais combien se feraien
2079 uligner : Seules les guerres de religion ont tiré de l’héroïsme de ce peuple. Mais combien se feraient tuer aujourd’hui po
2080 gner : Seules les guerres de religion ont tiré de l’ héroïsme de ce peuple. Mais combien se feraient tuer aujourd’hui pour
2081 es les guerres de religion ont tiré de l’héroïsme de ce peuple. Mais combien se feraient tuer aujourd’hui pour sauver leur
2082 sauver leurs pratiques ? On en vient à penser que le régime qui convient le mieux à cette vie obscure, j’entends celui qui
2083 ? On en vient à penser que le régime qui convient le mieux à cette vie obscure, j’entends celui qui la contente le mieux,
2084 le mieux à cette vie obscure, j’entends celui qui la contente le mieux, à défaut de la développer, c’est encore la Troisiè
2085 ette vie obscure, j’entends celui qui la contente le mieux, à défaut de la développer, c’est encore la Troisième Républiqu
2086 tends celui qui la contente le mieux, à défaut de la développer, c’est encore la Troisième République : un État faible, do
2087 re la Troisième République : un État faible, dont le centre est lointain, qui ne croit à rien, et qui par suite ne peut ri
2088 roit à rien, et qui par suite ne peut rien exiger de sérieux… — Mais il y a d’autres aspects de la question. Le sel ne se
2089 exiger de sérieux… — Mais il y a d’autres aspects de la question. Le sel ne se vend plus depuis un an, et c’était la resso
2090 ger de sérieux… — Mais il y a d’autres aspects de la question. Le sel ne se vend plus depuis un an, et c’était la ressourc
2091 x… — Mais il y a d’autres aspects de la question. Le sel ne se vend plus depuis un an, et c’était la ressource principale
2092 . Le sel ne se vend plus depuis un an, et c’était la ressource principale des villages. Le chef-lieu est en train de deven
2093 et c’était la ressource principale des villages. Le chef-lieu est en train de devenir la proie des politiciens de Paris.
2094 es villages. Le chef-lieu est en train de devenir la proie des politiciens de Paris. Un dimanche ce sont les enfants commu
2095 est en train de devenir la proie des politiciens de Paris. Un dimanche ce sont les enfants communistes de la colonie de v
2096 oie des politiciens de Paris. Un dimanche ce sont les enfants communistes de la colonie de vacances qui défilent en maillot
2097 aris. Un dimanche ce sont les enfants communistes de la colonie de vacances qui défilent en maillots rouges et l’on pousse
2098 s. Un dimanche ce sont les enfants communistes de la colonie de vacances qui défilent en maillots rouges et l’on pousse de
2099 che ce sont les enfants communistes de la colonie de vacances qui défilent en maillots rouges et l’on pousse des « cris sé
2100 ie de vacances qui défilent en maillots rouges et l’ on pousse des « cris séditieux » ; le dimanche suivant, ce sont les en
2101 ts rouges et l’on pousse des « cris séditieux » ; le dimanche suivant, ce sont les enfants de la fondation « de droite » e
2102 « cris séditieux » ; le dimanche suivant, ce sont les enfants de la fondation « de droite » et on les applaudit : la fondat
2103 ieux » ; le dimanche suivant, ce sont les enfants de la fondation « de droite » et on les applaudit : la fondation fait vi
2104 x » ; le dimanche suivant, ce sont les enfants de la fondation « de droite » et on les applaudit : la fondation fait vivre
2105 he suivant, ce sont les enfants de la fondation «  de droite » et on les applaudit : la fondation fait vivre beaucoup de pe
2106 t les enfants de la fondation « de droite » et on les applaudit : la fondation fait vivre beaucoup de personnes de l’île. L
2107 la fondation « de droite » et on les applaudit : la fondation fait vivre beaucoup de personnes de l’île. La moitié des ma
2108 t : la fondation fait vivre beaucoup de personnes de l’île. La moitié des maisons sont vides, et quelques-unes déjà tomben
2109 la fondation fait vivre beaucoup de personnes de l’ île. La moitié des maisons sont vides, et quelques-unes déjà tombent e
2110 dation fait vivre beaucoup de personnes de l’île. La moitié des maisons sont vides, et quelques-unes déjà tombent en ruine
2111 unes déjà tombent en ruines. Et surtout ce régime d’ inertie laisse trop de forces grandir contre lui : et alors, qui va ve
2112 uines. Et surtout ce régime d’inertie laisse trop de forces grandir contre lui : et alors, qui va venir un beau jour, de P
2113 contre lui : et alors, qui va venir un beau jour, de Paris, faire la loi dans notre village ? 19 février 1934 Les g
2114 alors, qui va venir un beau jour, de Paris, faire la loi dans notre village ? 19 février 1934 Les gens : récit d’un
2115 a loi dans notre village ? 19 février 1934 Les gens : récit d’une journée paysanne. — En revenant de la côte, je me
2116 village ? 19 février 1934 Les gens : récit d’ une journée paysanne. — En revenant de la côte, je me suis arrêté au M
2117 ens : récit d’une journée paysanne. — En revenant de la côte, je me suis arrêté au Moulin de la Purée, pour jouer avec les
2118  : récit d’une journée paysanne. — En revenant de la côte, je me suis arrêté au Moulin de la Purée, pour jouer avec les ch
2119 revenant de la côte, je me suis arrêté au Moulin de la Purée, pour jouer avec les chatons qui pullulent dans la cour. La
2120 venant de la côte, je me suis arrêté au Moulin de la Purée, pour jouer avec les chatons qui pullulent dans la cour. La mèr
2121 uis arrêté au Moulin de la Purée, pour jouer avec les chatons qui pullulent dans la cour. La mère Renaud-de-la-Purée sort d
2122 e, pour jouer avec les chatons qui pullulent dans la cour. La mère Renaud-de-la-Purée sort de sa porte, appuyée sur un cou
2123 ouer avec les chatons qui pullulent dans la cour. La mère Renaud-de-la-Purée sort de sa porte, appuyée sur un court bâton.
2124 ent dans la cour. La mère Renaud-de-la-Purée sort de sa porte, appuyée sur un court bâton. C’est donc la jambe qui ne va p
2125 sa porte, appuyée sur un court bâton. C’est donc la jambe qui ne va plus. D’où cela vient-il ? — C’est depuis qu’ils m’on
2126 court bâton. C’est donc la jambe qui ne va plus. D’ où cela vient-il ? — C’est depuis qu’ils m’ont pris la chèvre. Ça m’a
2127 cela vient-il ? — C’est depuis qu’ils m’ont pris la chèvre. Ça m’a fait comme une gifle, et maintenant, ça ne va plus. Il
2128 me raconte cela. Elle vient donc s’appuyer contre la barrière de la cour, cale son bâton, et commence d’une voix posée, mo
2129 ela. Elle vient donc s’appuyer contre la barrière de la cour, cale son bâton, et commence d’une voix posée, monotone et ba
2130 . Elle vient donc s’appuyer contre la barrière de la cour, cale son bâton, et commence d’une voix posée, monotone et basse
2131 barrière de la cour, cale son bâton, et commence d’ une voix posée, monotone et basse : — C’était le 26 de juillet, l’anni
2132 e d’une voix posée, monotone et basse : — C’était le 26 de juillet, l’anniversaire de ma défunte mère. Le matin, je me dis
2133 e voix posée, monotone et basse : — C’était le 26 de juillet, l’anniversaire de ma défunte mère. Le matin, je me dis : qu’
2134 , monotone et basse : — C’était le 26 de juillet, l’ anniversaire de ma défunte mère. Le matin, je me dis : qu’est-ce qu’on
2135 asse : — C’était le 26 de juillet, l’anniversaire de ma défunte mère. Le matin, je me dis : qu’est-ce qu’on va manger ce j
2136 26 de juillet, l’anniversaire de ma défunte mère. Le matin, je me dis : qu’est-ce qu’on va manger ce jour ? Je n’avais pas
2137 n va manger ce jour ? Je n’avais pas grand-chose. Le père et les deux fils disent : on est plus jeunes que toi, on va alle
2138 ce jour ? Je n’avais pas grand-chose. Le père et les deux fils disent : on est plus jeunes que toi, on va aller au travail
2139 que toi, on va aller au travail, et toi tu iras à la pêche. Ils partent pour le marais, vont tirer le sel, font ce qu’ils
2140 vail, et toi tu iras à la pêche. Ils partent pour le marais, vont tirer le sel, font ce qu’ils avaient à faire. Moi je vai
2141 la pêche. Ils partent pour le marais, vont tirer le sel, font ce qu’ils avaient à faire. Moi je vais à l’écluse, je ramas
2142 el, font ce qu’ils avaient à faire. Moi je vais à l’ écluse, je ramasse des anguilles, quelques crabes, deux ou trois jambe
2143 on. C’est ce qu’il faut pour manger. Ils rentrent d’ avoir tiré le sel et mangent la pêche. J’avais ajouté deux ou trois ja
2144 qu’il faut pour manger. Ils rentrent d’avoir tiré le sel et mangent la pêche. J’avais ajouté deux ou trois jambes, donc, m
2145 nger. Ils rentrent d’avoir tiré le sel et mangent la pêche. J’avais ajouté deux ou trois jambes, donc, mais moi je n’en ma
2146 ge, moi je reste ici. Ils rentrent vers 6 heures, les jeunes d’abord, parce qu’ils ont des bicyclettes, ils vont plus vite 
2147 qu’ils ont des bicyclettes, ils vont plus vite ; le père rentre un peu plus tard. Le plus vieux dit : j’ai bien faim. Le
2148 vont plus vite ; le père rentre un peu plus tard. Le plus vieux dit : j’ai bien faim. Le plus jeune, il a toujours faim, a
2149 eu plus tard. Le plus vieux dit : j’ai bien faim. Le plus jeune, il a toujours faim, alors c’est pareil. Je dis : Oh ! vou
2150 —, une belle soupe aux pommes de terre ! Oh ! dit le plus vieux, s’il y a une soupe aux pommes de terre, je vais en manger
2151 coucher ! Ils mangent et on va se coucher. C’est le lendemain matin que j’ai vu qu’ils avaient pris la chèvre. Des hommes
2152 e lendemain matin que j’ai vu qu’ils avaient pris la chèvre. Des hommes mariés de 30 et 35 ans, voyez comme ils sont aujou
2153 qu’ils avaient pris la chèvre. Des hommes mariés de 30 et 35 ans, voyez comme ils sont aujourd’hui ! Ils sont venus penda
2154 mme ils sont aujourd’hui ! Ils sont venus pendant la nuit, on a su qui c’était par la suite. Ils ont pris la chèvre, l’ont
2155 nt venus pendant la nuit, on a su qui c’était par la suite. Ils ont pris la chèvre, l’ont passée par-dessus le mur, et voi
2156 t, on a su qui c’était par la suite. Ils ont pris la chèvre, l’ont passée par-dessus le mur, et voilà ! Et pourquoi ? Pour
2157 qui c’était par la suite. Ils ont pris la chèvre, l’ ont passée par-dessus le mur, et voilà ! Et pourquoi ? Pour plaisanter
2158 . Ils ont pris la chèvre, l’ont passée par-dessus le mur, et voilà ! Et pourquoi ? Pour plaisanter ! Quand j’ai été nourri
2159 isanter ! Quand j’ai été nourrir ma chèvre, je ne l’ ai pas vue. J’entre : je ne vois rien. Je me dis : elle est peut-être
2160 ne vois rien. Je me dis : elle est peut-être dans le coin derrière. J’y vais, je regarde : rien. Ils l’avaient volée. Ça m
2161 e coin derrière. J’y vais, je regarde : rien. Ils l’ avaient volée. Ça m’a fait comme une gifle ! J’en ai été malade comme
2162 ai été malade comme un chien. Et après, eh bien, les malheurs sont venus de partout. On a retrouvé la chèvre. Mais elle es
2163 les malheurs sont venus de partout. On a retrouvé la chèvre. Mais elle est toute changée. « Je l’ai fait couvrir deux fois
2164 ouvé la chèvre. Mais elle est toute changée. « Je l’ ai fait couvrir deux fois : c’était comme si l’on n’avait rien fait. M
2165 Je l’ai fait couvrir deux fois : c’était comme si l’ on n’avait rien fait. Mais je n’en veux pas d’autre. Je suis sûre qu’a
2166 si l’on n’avait rien fait. Mais je n’en veux pas d’ autre. Je suis sûre qu’avec une autre bête, même une bête chevaline, c
2167 pareil, maintenant… » Fin février 1934 Sur la pauvreté. — Elle n’est un problème social si grave que parce qu’elle
2168 le est d’abord un problème moral non résolu. Pour la majorité des modernes, la menace de pauvreté ne signifie pas d’abord 
2169 moral non résolu. Pour la majorité des modernes, la menace de pauvreté ne signifie pas d’abord : faim et fatigue, comme p
2170 résolu. Pour la majorité des modernes, la menace de pauvreté ne signifie pas d’abord : faim et fatigue, comme pour les pa
2171 ignifie pas d’abord : faim et fatigue, comme pour les paysans, mais d’abord humiliation. « Devenir pauvre », « être ruiné »
2172 . « Devenir pauvre », « être ruiné », c’est selon les cas perdre vingt millions sur quarante, ou sur vingt et un ; ou cent-
2173 e francs sur deux cent-mille, ou perdre une place de quatre-vingt-mille pour en retrouver une de vingt-quatre-mille ; ou p
2174 place de quatre-vingt-mille pour en retrouver une de vingt-quatre-mille ; ou perdre intégralement le peu que l’on avait. D
2175 e de vingt-quatre-mille ; ou perdre intégralement le peu que l’on avait. Dans tous ces cas, le problème que pose la pauvre
2176 quatre-mille ; ou perdre intégralement le peu que l’ on avait. Dans tous ces cas, le problème que pose la pauvreté est avan
2177 alement le peu que l’on avait. Dans tous ces cas, le problème que pose la pauvreté est avant tout moral : ce qu’on craint
2178 on avait. Dans tous ces cas, le problème que pose la pauvreté est avant tout moral : ce qu’on craint le plus, et en premie
2179 a pauvreté est avant tout moral : ce qu’on craint le plus, et en premier lieu, sentimentalement, c’est de perdre son rang
2180 plus, et en premier lieu, sentimentalement, c’est de perdre son rang et la considération qui s’y attache, c’est de ne plus
2181 eu, sentimentalement, c’est de perdre son rang et la considération qui s’y attache, c’est de ne plus pouvoir « représenter
2182 n rang et la considération qui s’y attache, c’est de ne plus pouvoir « représenter », séduire, voyager, rouler auto, aller
2183 re, garder un appartement, etc. Toutes choses que l’ on aime surtout parce qu’on croit qu’il faut les aimer, ou parce qu’on
2184 ue l’on aime surtout parce qu’on croit qu’il faut les aimer, ou parce qu’on n’a pas d’autres goûts que ceux qu’inspire la p
2185 qu’on n’a pas d’autres goûts que ceux qu’inspire la publicité. En somme, tout cela n’est effrayant que parce que l’on n’a
2186 En somme, tout cela n’est effrayant que parce que l’ on n’a pas l’esprit de pauvreté qu’on aime entendre louer à l’église o
2187 t cela n’est effrayant que parce que l’on n’a pas l’ esprit de pauvreté qu’on aime entendre louer à l’église ou dans les li
2188 est effrayant que parce que l’on n’a pas l’esprit de pauvreté qu’on aime entendre louer à l’église ou dans les livres. On
2189 l’esprit de pauvreté qu’on aime entendre louer à l’ église ou dans les livres. On croit que pauvreté est vice, et c’est mê
2190 reté qu’on aime entendre louer à l’église ou dans les livres. On croit que pauvreté est vice, et c’est même justement parce
2191 eté est vice, et c’est même justement parce qu’on le croit qu’on répète le proverbe qui dit le contraire. Je pense que la
2192 même justement parce qu’on le croit qu’on répète le proverbe qui dit le contraire. Je pense que la vraie solution, la sol
2193 e qu’on le croit qu’on répète le proverbe qui dit le contraire. Je pense que la vraie solution, la solution pratique de la
2194 te le proverbe qui dit le contraire. Je pense que la vraie solution, la solution pratique de la psychose de crise qui éner
2195 dit le contraire. Je pense que la vraie solution, la solution pratique de la psychose de crise qui énerve la bourgeoisie n
2196 pense que la vraie solution, la solution pratique de la psychose de crise qui énerve la bourgeoisie n’est pas ailleurs que
2197 se que la vraie solution, la solution pratique de la psychose de crise qui énerve la bourgeoisie n’est pas ailleurs que da
2198 aie solution, la solution pratique de la psychose de crise qui énerve la bourgeoisie n’est pas ailleurs que dans l’« espri
2199 ution pratique de la psychose de crise qui énerve la bourgeoisie n’est pas ailleurs que dans l’« esprit de pauvreté ». Et
2200 énerve la bourgeoisie n’est pas ailleurs que dans l’ « esprit de pauvreté ». Et j’ajoute aussitôt que la solution pratique
2201 ourgeoisie n’est pas ailleurs que dans l’« esprit de pauvreté ». Et j’ajoute aussitôt que la solution pratique de la misèr
2202 ’« esprit de pauvreté ». Et j’ajoute aussitôt que la solution pratique de la misère réelle, celle qui est vécue depuis lon
2203  ». Et j’ajoute aussitôt que la solution pratique de la misère réelle, celle qui est vécue depuis longtemps ou depuis touj
2204 Et j’ajoute aussitôt que la solution pratique de la misère réelle, celle qui est vécue depuis longtemps ou depuis toujour
2205 s par une partie du peuple, est au contraire dans la révolution matérielle. Mais cette révolution ne sera durable et vraim
2206 le et vraiment novatrice que si elle s’accompagne d’ une révolution morale chez les bourgeois : car on ne peut pas anéantir
2207 si elle s’accompagne d’une révolution morale chez les bourgeois : car on ne peut pas anéantir physiquement toute la bourgeo
2208  : car on ne peut pas anéantir physiquement toute la bourgeoisie (nous ne sommes pas en Russie). Et tant qu’il y aura des
2209 ois, il y aura des gens qui craindront avant tout de descendre d’un échelon, c’est-à-dire de devenir pauvres. À moins qu’i
2210 a des gens qui craindront avant tout de descendre d’ un échelon, c’est-à-dire de devenir pauvres. À moins qu’ils ne compren
2211 vant tout de descendre d’un échelon, c’est-à-dire de devenir pauvres. À moins qu’ils ne comprennent un peu mieux ce qu’est
2212 oins qu’ils ne comprennent un peu mieux ce qu’est l’ esprit de pauvreté. Mais qui le comprend aujourd’hui ? Pour peu qu’on
2213 ls ne comprennent un peu mieux ce qu’est l’esprit de pauvreté. Mais qui le comprend aujourd’hui ? Pour peu qu’on se vante
2214 eu mieux ce qu’est l’esprit de pauvreté. Mais qui le comprend aujourd’hui ? Pour peu qu’on se vante de l’avoir, on ne l’a
2215 le comprend aujourd’hui ? Pour peu qu’on se vante de l’avoir, on ne l’a plus. Et quand on l’a vraiment, il est probable qu
2216 comprend aujourd’hui ? Pour peu qu’on se vante de l’ avoir, on ne l’a plus. Et quand on l’a vraiment, il est probable qu’on
2217 d’hui ? Pour peu qu’on se vante de l’avoir, on ne l’ a plus. Et quand on l’a vraiment, il est probable qu’on l’ignore. (Ne
2218 se vante de l’avoir, on ne l’a plus. Et quand on l’ a vraiment, il est probable qu’on l’ignore. (Ne disons rien des hypocr
2219 . Et quand on l’a vraiment, il est probable qu’on l’ ignore. (Ne disons rien des hypocrites et des naïfs qui croient que lo
2220 s hypocrites et des naïfs qui croient que louer «  l’ esprit de pauvreté » dispense de supprimer les facteurs matériels de l
2221 tes et des naïfs qui croient que louer « l’esprit de pauvreté » dispense de supprimer les facteurs matériels de la misère,
2222 oient que louer « l’esprit de pauvreté » dispense de supprimer les facteurs matériels de la misère, capitalisme, centres u
2223 er « l’esprit de pauvreté » dispense de supprimer les facteurs matériels de la misère, capitalisme, centres urbains, etc.)
2224 té » dispense de supprimer les facteurs matériels de la misère, capitalisme, centres urbains, etc.) Sans doute l’esprit de
2225 » dispense de supprimer les facteurs matériels de la misère, capitalisme, centres urbains, etc.) Sans doute l’esprit de pa
2226 e, capitalisme, centres urbains, etc.) Sans doute l’ esprit de pauvreté n’est-il donné qu’à ceux qui croient à autre chose
2227 lisme, centres urbains, etc.) Sans doute l’esprit de pauvreté n’est-il donné qu’à ceux qui croient à autre chose qu’à leur
2228 peu : quelques grands chefs, quelques fanatiques d’ une cause, quelques saints. Mais peut-être aussi un grand nombre d’obs
2229 ques saints. Mais peut-être aussi un grand nombre d’ obscurs croyants. Ceux par qui l’humanité vaut quelque chose, sans le
2230 un grand nombre d’obscurs croyants. Ceux par qui l’ humanité vaut quelque chose, sans le savoir. 28 février 1934 Ge
2231 Ceux par qui l’humanité vaut quelque chose, sans le savoir. 28 février 1934 Gens. — Il est très impressionnant de
2232 vrier 1934 Gens. — Il est très impressionnant de se demander en face de ces hommes, à quelques mètres d’eux, quand ils
2233 demander en face de ces hommes, à quelques mètres d’ eux, quand ils travaillent sur leur parcelle, ce que signifient les mé
2234 travaillent sur leur parcelle, ce que signifient les méthodes productivistes et la démesure collective d’un plan quinquenn
2235 ce que signifient les méthodes productivistes et la démesure collective d’un plan quinquennal. Le silence de la lande et
2236 méthodes productivistes et la démesure collective d’ un plan quinquennal. Le silence de la lande et des marais, la rumeur d
2237 et la démesure collective d’un plan quinquennal. Le silence de la lande et des marais, la rumeur de la côte, les petits c
2238 sure collective d’un plan quinquennal. Le silence de la lande et des marais, la rumeur de la côte, les petits chocs irrégu
2239 e collective d’un plan quinquennal. Le silence de la lande et des marais, la rumeur de la côte, les petits chocs irrégulie
2240 uinquennal. Le silence de la lande et des marais, la rumeur de la côte, les petits chocs irréguliers des pioches et des bo
2241 . Le silence de la lande et des marais, la rumeur de la côte, les petits chocs irréguliers des pioches et des bouelles, to
2242 e silence de la lande et des marais, la rumeur de la côte, les petits chocs irréguliers des pioches et des bouelles, tout
2243 de la lande et des marais, la rumeur de la côte, les petits chocs irréguliers des pioches et des bouelles, tout ce qu’il y
2244 rs des pioches et des bouelles, tout ce qu’il y a de paisible, de grand, de mesquin, de millénaire dans cette faible activ
2245 s et des bouelles, tout ce qu’il y a de paisible, de grand, de mesquin, de millénaire dans cette faible activité humaine a
2246 ouelles, tout ce qu’il y a de paisible, de grand, de mesquin, de millénaire dans cette faible activité humaine au ras du s
2247 t ce qu’il y a de paisible, de grand, de mesquin, de millénaire dans cette faible activité humaine au ras du sol, sous ce
2248 vérité » brutaliser et bouleverser à grand fracas de moteurs et de règlements de fer les rythmes de cette île et de ces vi
2249 liser et bouleverser à grand fracas de moteurs et de règlements de fer les rythmes de cette île et de ces vies ? 1er ma
2250 verser à grand fracas de moteurs et de règlements de fer les rythmes de cette île et de ces vies ? 1er mars 1934 Mi
2251 à grand fracas de moteurs et de règlements de fer les rythmes de cette île et de ces vies ? 1er mars 1934 Minimum vi
2252 as de moteurs et de règlements de fer les rythmes de cette île et de ces vies ? 1er mars 1934 Minimum vital. — Il n
2253 de règlements de fer les rythmes de cette île et de ces vies ? 1er mars 1934 Minimum vital. — Il ne faut être ni r
2254 ital. — Il ne faut être ni riche ni pauvre, selon les mesures sociales qui ne valent jamais que pour « les autres ». Il fau
2255 mesures sociales qui ne valent jamais que pour «  les autres ». Il faut simplement être libre selon la mesure de sa vocatio
2256 les autres ». Il faut simplement être libre selon la mesure de sa vocation. C’est par rapport à sa seule vocation qu’un ho
2257  ». Il faut simplement être libre selon la mesure de sa vocation. C’est par rapport à sa seule vocation qu’un homme peut a
2258 qu’un homme peut arriver à savoir avec certitude de quoi et de combien il a besoin pour vivre. S’il a plus ou s’il a moin
2259 e peut arriver à savoir avec certitude de quoi et de combien il a besoin pour vivre. S’il a plus ou s’il a moins, s’il est
2260 ne n’est pas totalement engagée, parce qu’elle ne les a pas créés. Le but concret de la révolution économique que je crois
2261 lement engagée, parce qu’elle ne les a pas créés. Le but concret de la révolution économique que je crois moralement néces
2262 parce qu’elle ne les a pas créés. Le but concret de la révolution économique que je crois moralement nécessaire, et d’ail
2263 rce qu’elle ne les a pas créés. Le but concret de la révolution économique que je crois moralement nécessaire, et d’ailleu
2264 aire, et d’ailleurs techniquement possible, c’est d’ accorder à tout homme, quel qu’il soit, le « minimum vital » qui lui p
2265 , c’est d’accorder à tout homme, quel qu’il soit, le « minimum vital » qui lui permette d’obéir à sa vocation. Toute la di
2266 qu’il soit, le « minimum vital » qui lui permette d’ obéir à sa vocation. Toute la difficulté repose évidemment sur le fait
2267 l » qui lui permette d’obéir à sa vocation. Toute la difficulté repose évidemment sur le fait que ce minimum ne saurait êt
2268 cation. Toute la difficulté repose évidemment sur le fait que ce minimum ne saurait être fixé au plus juste qu’en fonction
2269 uste qu’en fonction de chaque « personne ». C’est l’ État qui devrait donner à chacun de ses membres le minimum qu’il mérit
2270 sonne ». C’est l’État qui devrait donner à chacun de ses membres le minimum qu’il mérite. Mais comment exiger de l’État qu
2271 l’État qui devrait donner à chacun de ses membres le minimum qu’il mérite. Mais comment exiger de l’État qu’il tienne comp
2272 bres le minimum qu’il mérite. Mais comment exiger de l’État qu’il tienne compte des vocations particulières ? Elles sont s
2273 s le minimum qu’il mérite. Mais comment exiger de l’ État qu’il tienne compte des vocations particulières ? Elles sont souv
2274 des vocations particulières ? Elles sont souvent d’ une lecture très douteuse pour ceux mêmes qui devraient les exercer !
2275 cture très douteuse pour ceux mêmes qui devraient les exercer ! Il faudrait donc, dans la pratique, se contenter d’approxim
2276 ui devraient les exercer ! Il faudrait donc, dans la pratique, se contenter d’approximations toujours très contestables. L
2277 Il faudrait donc, dans la pratique, se contenter d’ approximations toujours très contestables. Le problème se ramènerait à
2278 nter d’approximations toujours très contestables. Le problème se ramènerait à trouver des signes extérieurs aisément vérif
2279 extérieurs aisément vérifiables qui permettraient de répartir les hommes grosso modo, selon leurs vocations. Et le minimum
2280 isément vérifiables qui permettraient de répartir les hommes grosso modo, selon leurs vocations. Et le minimum qui leur ser
2281 les hommes grosso modo, selon leurs vocations. Et le minimum qui leur serait accordé varierait d’une catégorie à l’autre.
2282 . Et le minimum qui leur serait accordé varierait d’ une catégorie à l’autre. (Cela touche à l’absurde, on le voit — mais j
2283 rierait d’une catégorie à l’autre. (Cela touche à l’ absurde, on le voit — mais justement parce qu’on le voit, et que c’est
2284 catégorie à l’autre. (Cela touche à l’absurde, on le voit — mais justement parce qu’on le voit, et que c’est tout de même
2285 ’absurde, on le voit — mais justement parce qu’on le voit, et que c’est tout de même ce que l’on peut imaginer de moins dé
2286 e qu’on le voit, et que c’est tout de même ce que l’ on peut imaginer de moins déraisonnable, cela peut nous donner une bon
2287 que c’est tout de même ce que l’on peut imaginer de moins déraisonnable, cela peut nous donner une bonne idée du maximum
2288 , cela peut nous donner une bonne idée du maximum d’ absurdité que représente l’anarchie actuelle.) Si l’on me chargeait de
2289 bonne idée du maximum d’absurdité que représente l’ anarchie actuelle.) Si l’on me chargeait de redistribuer toutes les ri
2290 absurdité que représente l’anarchie actuelle.) Si l’ on me chargeait de redistribuer toutes les richesses, selon mon expéri
2291 ésente l’anarchie actuelle.) Si l’on me chargeait de redistribuer toutes les richesses, selon mon expérience et mes petite
2292 lle.) Si l’on me chargeait de redistribuer toutes les richesses, selon mon expérience et mes petites observations, j’aurais
2293 tout prêt dans ses grandes lignes : je donnerais le plus possible à ceux qui demandent beaucoup, et qui se rangent ainsi
2294 t je donnerais aux autres selon leur profession : d’ autant plus qu’elle serait plus monotone par exemple, ou qu’elle suppo
2295 onotone par exemple, ou qu’elle supposerait moins d’ énergie créatrice… Et pour ma part — s’il faut un exemple précis, c’es
2296 pour ma part — s’il faut un exemple précis, c’est le seul que j’ose donner —, je m’accorderais chaque année onze fois la s
2297 donner —, je m’accorderais chaque année onze fois la somme dont j’ai besoin pour vivre ici pendant un mois ; le nom du moi
2298 dont j’ai besoin pour vivre ici pendant un mois ; le nom du mois où je ne recevrai rien restant indéterminé, et dépendant
2299 restant indéterminé, et dépendant du seul caprice d’ un employé que je ne connaîtrais pas. 15 mars 1934 Je rentre de
2300 ne connaîtrais pas. 15 mars 1934 Je rentre de Vendée. On m’avait demandé d’y aller faire quelques causeries. J’en r
2301 s 1934 Je rentre de Vendée. On m’avait demandé d’ y aller faire quelques causeries. J’en rapporte deux séries d’observat
2302 ire quelques causeries. J’en rapporte deux séries d’ observations nouvelles sur la Province, et je crois d’autant plus util
2303 rapporte deux séries d’observations nouvelles sur la Province, et je crois d’autant plus utile de les consigner qu’elles m
2304 servations nouvelles sur la Province, et je crois d’ autant plus utile de les consigner qu’elles modifient sensiblement cer
2305 sur la Province, et je crois d’autant plus utile de les consigner qu’elles modifient sensiblement certains jugements auxq
2306 r la Province, et je crois d’autant plus utile de les consigner qu’elles modifient sensiblement certains jugements auxquels
2307 blement certains jugements auxquels m’avait amené la considération de mon île.   Il faut parler d’abord des autocars. Je n
2308 jugements auxquels m’avait amené la considération de mon île.   Il faut parler d’abord des autocars. Je ne sais si l’on se
2309 l faut parler d’abord des autocars. Je ne sais si l’ on se doute à Paris de l’importance des autocars et des transformation
2310 des autocars. Je ne sais si l’on se doute à Paris de l’importance des autocars et des transformations qu’ils sont en train
2311 autocars. Je ne sais si l’on se doute à Paris de l’ importance des autocars et des transformations qu’ils sont en train de
2312 ansformations qu’ils sont en train de causer dans la vie provinciale. Je n’ai pas compté le nombre de lignes actuellement
2313 auser dans la vie provinciale. Je n’ai pas compté le nombre de lignes actuellement exploitées. Mais j’ai pu constater dans
2314 la vie provinciale. Je n’ai pas compté le nombre de lignes actuellement exploitées. Mais j’ai pu constater dans plusieurs
2315 ais j’ai pu constater dans plusieurs départements de l’Ouest qu’il n’est plus guère de « pays » qui ne soit desservi par u
2316 j’ai pu constater dans plusieurs départements de l’ Ouest qu’il n’est plus guère de « pays » qui ne soit desservi par une
2317 rs départements de l’Ouest qu’il n’est plus guère de « pays » qui ne soit desservi par une ou deux ou même trois compagnie
2318 desservi par une ou deux ou même trois compagnies de transports locaux. Depuis que j’ai quitté Paris, j’ai bien utilisé un
2319 ’ai quitté Paris, j’ai bien utilisé une vingtaine de ces lignes. Je commence à connaître leurs coutumes : rien ne pouvait
2320 ait modifier plus rapidement et plus profondément la coutume de la France rurale. Mais ce n’est pas encore assez dire : l’
2321 r plus rapidement et plus profondément la coutume de la France rurale. Mais ce n’est pas encore assez dire : l’autocar mod
2322 lus rapidement et plus profondément la coutume de la France rurale. Mais ce n’est pas encore assez dire : l’autocar modifi
2323 nce rurale. Mais ce n’est pas encore assez dire : l’ autocar modifie complètement le mode de contact entre le voyageur et l
2324 ncore assez dire : l’autocar modifie complètement le mode de contact entre le voyageur et la province. Naguère encore, qua
2325 sez dire : l’autocar modifie complètement le mode de contact entre le voyageur et la province. Naguère encore, quand on n’
2326 car modifie complètement le mode de contact entre le voyageur et la province. Naguère encore, quand on n’avait que les che
2327 plètement le mode de contact entre le voyageur et la province. Naguère encore, quand on n’avait que les chemins de fer, to
2328 la province. Naguère encore, quand on n’avait que les chemins de fer, tout convergeait vers Paris, non seulement du fait d’
2329 out convergeait vers Paris, non seulement du fait d’ une organisation ferroviaire centralisée, mais encore sentimentalement
2330 viaire centralisée, mais encore sentimentalement. Le confort relatif des grandes lignes indiquait qu’on allait à Paris ou
2331 ait qu’on allait à Paris ou qu’on en venait. Tout le reste n’était que tortillards cahotants, jamais à l’heure, où l’on se
2332 reste n’était que tortillards cahotants, jamais à l’ heure, où l’on se sentait relégué à l’écart de la « vraie » circulatio
2333 t que tortillards cahotants, jamais à l’heure, où l’ on se sentait relégué à l’écart de la « vraie » circulation. Et l’on n
2334 s, jamais à l’heure, où l’on se sentait relégué à l’ écart de la « vraie » circulation. Et l’on ne voyait guère que des gar
2335 s à l’heure, où l’on se sentait relégué à l’écart de la « vraie » circulation. Et l’on ne voyait guère que des gares, ce q
2336 l’heure, où l’on se sentait relégué à l’écart de la « vraie » circulation. Et l’on ne voyait guère que des gares, ce qu’i
2337 relégué à l’écart de la « vraie » circulation. Et l’ on ne voyait guère que des gares, ce qu’il y a de plus attristant dans
2338 plus attristant dans chaque village. Aujourd’hui, les stations d’autocars sont sur la place principale. C’est de là qu’on p
2339 nt dans chaque village. Aujourd’hui, les stations d’ autocars sont sur la place principale. C’est de là qu’on part au milie
2340 ge. Aujourd’hui, les stations d’autocars sont sur la place principale. C’est de là qu’on part au milieu d’une grande afflu
2341 ns d’autocars sont sur la place principale. C’est de là qu’on part au milieu d’une grande affluence de badauds, c’est là q
2342 de là qu’on part au milieu d’une grande affluence de badauds, c’est là qu’on arrive à grand son de trompe, c’est enfin ce
2343 nce de badauds, c’est là qu’on arrive à grand son de trompe, c’est enfin ce que l’on voit le mieux de chaque pays. La voie
2344 arrive à grand son de trompe, c’est enfin ce que l’ on voit le mieux de chaque pays. La voie ferrée était une sorte d’insu
2345 grand son de trompe, c’est enfin ce que l’on voit le mieux de chaque pays. La voie ferrée était une sorte d’insulte à la v
2346 de trompe, c’est enfin ce que l’on voit le mieux de chaque pays. La voie ferrée était une sorte d’insulte à la vie locale
2347 t enfin ce que l’on voit le mieux de chaque pays. La voie ferrée était une sorte d’insulte à la vie locale : elle la trave
2348 ux de chaque pays. La voie ferrée était une sorte d’ insulte à la vie locale : elle la traversait abstraitement, sans la vo
2349 pays. La voie ferrée était une sorte d’insulte à la vie locale : elle la traversait abstraitement, sans la voir, sans ten
2350 était une sorte d’insulte à la vie locale : elle la traversait abstraitement, sans la voir, sans tenir compte de ses circ
2351 e locale : elle la traversait abstraitement, sans la voir, sans tenir compte de ses circonstances. Sur ses bords ne vivait
2352 it abstraitement, sans la voir, sans tenir compte de ses circonstances. Sur ses bords ne vivait qu’une population nomade,
2353 s ne vivait qu’une population nomade, qui portait l’ uniforme de l’État, partout la même. Vous pouviez parcourir vingt fois
2354 qu’une population nomade, qui portait l’uniforme de l’État, partout la même. Vous pouviez parcourir vingt fois la France
2355 ’une population nomade, qui portait l’uniforme de l’ État, partout la même. Vous pouviez parcourir vingt fois la France de
2356 nomade, qui portait l’uniforme de l’État, partout la même. Vous pouviez parcourir vingt fois la France de part en part san
2357 artout la même. Vous pouviez parcourir vingt fois la France de part en part sans remarquer que les gens qui l’habitent ne
2358 même. Vous pouviez parcourir vingt fois la France de part en part sans remarquer que les gens qui l’habitent ne sont pas t
2359 fois la France de part en part sans remarquer que les gens qui l’habitent ne sont pas tous de la même sorte, et que d’une p
2360 e de part en part sans remarquer que les gens qui l’ habitent ne sont pas tous de la même sorte, et que d’une province à un
2361 quer que les gens qui l’habitent ne sont pas tous de la même sorte, et que d’une province à une autre, ce n’est pas seulem
2362 r que les gens qui l’habitent ne sont pas tous de la même sorte, et que d’une province à une autre, ce n’est pas seulement
2363 abitent ne sont pas tous de la même sorte, et que d’ une province à une autre, ce n’est pas seulement le paysage qui change
2364 ’une province à une autre, ce n’est pas seulement le paysage qui change. N’était-ce pas là l’une des raisons qui faisait s
2365 l’une des raisons qui faisait si facilement nier la subsistance des « petites patries » dans la nation abstraitement unif
2366 nier la subsistance des « petites patries » dans la nation abstraitement unifiée ? La ligne d’autocar fait partie du pays
2367 patries » dans la nation abstraitement unifiée ? La ligne d’autocar fait partie du pays. Elle en épouse la géographie phy
2368 » dans la nation abstraitement unifiée ? La ligne d’ autocar fait partie du pays. Elle en épouse la géographie physique mai
2369 gne d’autocar fait partie du pays. Elle en épouse la géographie physique mais aussi humaine. Elle quitte à tout propos la
2370 que mais aussi humaine. Elle quitte à tout propos la route nationale pour des chemins secondaires ou des ruelles à peine p
2371 econdaires ou des ruelles à peine plus larges que la voiture. Mais aussi elle tient compte des rythmes de la vie locale, d
2372 voiture. Mais aussi elle tient compte des rythmes de la vie locale, du calendrier des marées, de l’heure matinale des foir
2373 ture. Mais aussi elle tient compte des rythmes de la vie locale, du calendrier des marées, de l’heure matinale des foires,
2374 thmes de la vie locale, du calendrier des marées, de l’heure matinale des foires, dans les districts ruraux, et ailleurs d
2375 es de la vie locale, du calendrier des marées, de l’ heure matinale des foires, dans les districts ruraux, et ailleurs de l
2376 des marées, de l’heure matinale des foires, dans les districts ruraux, et ailleurs de l’entrée et de la sortie des usines
2377 es foires, dans les districts ruraux, et ailleurs de l’entrée et de la sortie des usines ou des écoles. La simple intentio
2378 foires, dans les districts ruraux, et ailleurs de l’ entrée et de la sortie des usines ou des écoles. La simple intention d
2379 les districts ruraux, et ailleurs de l’entrée et de la sortie des usines ou des écoles. La simple intention d’utiliser ce
2380 s districts ruraux, et ailleurs de l’entrée et de la sortie des usines ou des écoles. La simple intention d’utiliser ce mo
2381 ’entrée et de la sortie des usines ou des écoles. La simple intention d’utiliser ce moyen de transport vous met en contact
2382 tie des usines ou des écoles. La simple intention d’ utiliser ce moyen de transport vous met en contact avec toutes sortes
2383 s écoles. La simple intention d’utiliser ce moyen de transport vous met en contact avec toutes sortes d’habitudes locales.
2384 transport vous met en contact avec toutes sortes d’ habitudes locales. D’abord il faut aller dans deux ou trois cafés pour
2385 dans deux ou trois cafés pour obtenir un minimum de précisions concernant l’heure du prochain départ et la destination de
2386 pour obtenir un minimum de précisions concernant l’ heure du prochain départ et la destination des diverses voitures qui s
2387 écisions concernant l’heure du prochain départ et la destination des diverses voitures qui stationnent sur la place. C’est
2388 ination des diverses voitures qui stationnent sur la place. C’est que chaque ligne a sa tête de ligne chez un bistrot diff
2389 nt sur la place. C’est que chaque ligne a sa tête de ligne chez un bistrot différent, et il est rare qu’on puisse trouver
2390 ot différent, et il est rare qu’on puisse trouver l’ horaire ailleurs. Parfois le bistrot vend aussi les billets ; et c’est
2391 qu’on puisse trouver l’horaire ailleurs. Parfois le bistrot vend aussi les billets ; et c’est chez lui qu’on attend le dé
2392 l’horaire ailleurs. Parfois le bistrot vend aussi les billets ; et c’est chez lui qu’on attend le départ. Pour peu que l’on
2393 ussi les billets ; et c’est chez lui qu’on attend le départ. Pour peu que l’on manifeste la moindre curiosité on ne tarde
2394 est chez lui qu’on attend le départ. Pour peu que l’ on manifeste la moindre curiosité on ne tarde pas à y apprendre pas ma
2395 ’on attend le départ. Pour peu que l’on manifeste la moindre curiosité on ne tarde pas à y apprendre pas mal d’histoires,
2396 e curiosité on ne tarde pas à y apprendre pas mal d’ histoires, dont j’indiquerai ici l’enchaînement à peu près immuable. C
2397 rendre pas mal d’histoires, dont j’indiquerai ici l’ enchaînement à peu près immuable. Cela commence par quelques anecdotes
2398 mmuable. Cela commence par quelques anecdotes sur l’ installation de la ligne et sur la concurrence qui a fait baisser les
2399 ommence par quelques anecdotes sur l’installation de la ligne et sur la concurrence qui a fait baisser les prix. Car il es
2400 ence par quelques anecdotes sur l’installation de la ligne et sur la concurrence qui a fait baisser les prix. Car il est d
2401 s anecdotes sur l’installation de la ligne et sur la concurrence qui a fait baisser les prix. Car il est de règle qu’au dé
2402 la ligne et sur la concurrence qui a fait baisser les prix. Car il est de règle qu’au début deux Compagnies se disputent le
2403 ncurrence qui a fait baisser les prix. Car il est de règle qu’au début deux Compagnies se disputent le parcours, jusqu’à c
2404 de règle qu’au début deux Compagnies se disputent le parcours, jusqu’à ce que l’une des deux fasse faillite, ou réussisse
2405  » sa renonciation, quitte à recommencer aussitôt le petit jeu un peu plus loin, sur un autre parcours6. De là à des potin
2406 tit jeu un peu plus loin, sur un autre parcours6. De là à des potins sur les personnalités de l’endroit, sur le rôle qu’on
2407 n, sur un autre parcours6. De là à des potins sur les personnalités de l’endroit, sur le rôle qu’ont joué dans l’affaire le
2408 rcours6. De là à des potins sur les personnalités de l’endroit, sur le rôle qu’ont joué dans l’affaire le sous-préfet, ou
2409 urs6. De là à des potins sur les personnalités de l’ endroit, sur le rôle qu’ont joué dans l’affaire le sous-préfet, ou le
2410 es potins sur les personnalités de l’endroit, sur le rôle qu’ont joué dans l’affaire le sous-préfet, ou le député, ou dive
2411 alités de l’endroit, sur le rôle qu’ont joué dans l’ affaire le sous-préfet, ou le député, ou divers margoulins, topazes, e
2412 l’endroit, sur le rôle qu’ont joué dans l’affaire le sous-préfet, ou le député, ou divers margoulins, topazes, etc. Si l’o
2413 ôle qu’ont joué dans l’affaire le sous-préfet, ou le député, ou divers margoulins, topazes, etc. Si l’on a le temps, il n’
2414 le député, ou divers margoulins, topazes, etc. Si l’ on a le temps, il n’est pas impossible de pousser la « discussion » su
2415 té, ou divers margoulins, topazes, etc. Si l’on a le temps, il n’est pas impossible de pousser la « discussion » sur un pl
2416 etc. Si l’on a le temps, il n’est pas impossible de pousser la « discussion » sur un plan supérieur, d’aborder par exempl
2417 on a le temps, il n’est pas impossible de pousser la « discussion » sur un plan supérieur, d’aborder par exemple la questi
2418 pousser la « discussion » sur un plan supérieur, d’ aborder par exemple la question du capitalisme en général et des moyen
2419 on » sur un plan supérieur, d’aborder par exemple la question du capitalisme en général et des moyens d’arrêter ses méfait
2420 question du capitalisme en général et des moyens d’ arrêter ses méfaits. Bref, lorsque vous montez dans l’autocar, vous êt
2421 rêter ses méfaits. Bref, lorsque vous montez dans l’ autocar, vous êtes renseigné, vaille que vaille, sur les facteurs écon
2422 ocar, vous êtes renseigné, vaille que vaille, sur les facteurs économiques du pays, sur les noms des notables et sur le jeu
2423 vaille, sur les facteurs économiques du pays, sur les noms des notables et sur le jeu des partis politiques. Et que dire ma
2424 omiques du pays, sur les noms des notables et sur le jeu des partis politiques. Et que dire maintenant du voyage lui-même 
2425 enant du voyage lui-même ? C’est une résurrection de ce que Vigny pleurait, la poésie des diligences, mais aérée. C’est fa
2426 C’est une résurrection de ce que Vigny pleurait, la poésie des diligences, mais aérée. C’est fait d’une foule d’incidents
2427 la poésie des diligences, mais aérée. C’est fait d’ une foule d’incidents entrevus, que tout dispose à romancer ; de conve
2428 es diligences, mais aérée. C’est fait d’une foule d’ incidents entrevus, que tout dispose à romancer ; de conversations abs
2429 incidents entrevus, que tout dispose à romancer ; de conversations absurdes et rapidement intimes, avec ce personnage enfo
2430 ge enfoui à côté de vous dans un luxueux fauteuil de cuir rouge ou bleu vif, et qui change de tête plusieurs fois pendant
2431 fauteuil de cuir rouge ou bleu vif, et qui change de tête plusieurs fois pendant le trajet, de coups de main aux voyageurs
2432 vif, et qui change de tête plusieurs fois pendant le trajet, de coups de main aux voyageurs chargés de paquets ou d’un jeu
2433 change de tête plusieurs fois pendant le trajet, de coups de main aux voyageurs chargés de paquets ou d’un jeune veau, ou
2434 le trajet, de coups de main aux voyageurs chargés de paquets ou d’un jeune veau, ou d’un enfant hurlant et admiré, d’arrêt
2435 coups de main aux voyageurs chargés de paquets ou d’ un jeune veau, ou d’un enfant hurlant et admiré, d’arrêts et de détour
2436 yageurs chargés de paquets ou d’un jeune veau, ou d’ un enfant hurlant et admiré, d’arrêts et de détours imprévus — car les
2437 ’un jeune veau, ou d’un enfant hurlant et admiré, d’ arrêts et de détours imprévus — car les chauffeurs acceptent volontier
2438 au, ou d’un enfant hurlant et admiré, d’arrêts et de détours imprévus — car les chauffeurs acceptent volontiers toutes sor
2439 et admiré, d’arrêts et de détours imprévus — car les chauffeurs acceptent volontiers toutes sortes de petites commissions
2440 les chauffeurs acceptent volontiers toutes sortes de petites commissions que de vieilles dames leur confient au départ ave
2441 lontiers toutes sortes de petites commissions que de vieilles dames leur confient au départ avec force recommandations ; e
2442 nt rares, ceux qui n’ont pas deux mots à dire par la portière entrouverte un instant à la fille de l’auberge écartée qui a
2443 s à dire par la portière entrouverte un instant à la fille de l’auberge écartée qui attend le passage du car, les cheveux
2444 par la portière entrouverte un instant à la fille de l’auberge écartée qui attend le passage du car, les cheveux au vent s
2445 la portière entrouverte un instant à la fille de l’ auberge écartée qui attend le passage du car, les cheveux au vent sur
2446 nstant à la fille de l’auberge écartée qui attend le passage du car, les cheveux au vent sur le bord de la route. Rien n’e
2447 e l’auberge écartée qui attend le passage du car, les cheveux au vent sur le bord de la route. Rien n’est plus sympathique
2448 attend le passage du car, les cheveux au vent sur le bord de la route. Rien n’est plus sympathique qu’un conducteur de car
2449 e passage du car, les cheveux au vent sur le bord de la route. Rien n’est plus sympathique qu’un conducteur de car. Cela t
2450 assage du car, les cheveux au vent sur le bord de la route. Rien n’est plus sympathique qu’un conducteur de car. Cela tien
2451 ute. Rien n’est plus sympathique qu’un conducteur de car. Cela tient évidemment à leur métier. Ce sont en général de jeune
2452 ient évidemment à leur métier. Ce sont en général de jeunes gaillards solides et gais, et qui ont toutes les raisons d’aim
2453 unes gaillards solides et gais, et qui ont toutes les raisons d’aimer le travail et de le faire bien : c’est moderne, c’est
2454 ds solides et gais, et qui ont toutes les raisons d’ aimer le travail et de le faire bien : c’est moderne, c’est sportif, c
2455 es et gais, et qui ont toutes les raisons d’aimer le travail et de le faire bien : c’est moderne, c’est sportif, cela vous
2456 qui ont toutes les raisons d’aimer le travail et de le faire bien : c’est moderne, c’est sportif, cela vous pose dans l’e
2457 i ont toutes les raisons d’aimer le travail et de le faire bien : c’est moderne, c’est sportif, cela vous pose dans l’espr
2458 c’est moderne, c’est sportif, cela vous pose dans l’ esprit des populations, on se sent maître à bord de sa puissante machi
2459 se sent maître à bord de sa puissante machine, et l’ on bénéficie de ces petites faveurs que les femmes ont toujours accord
2460 à bord de sa puissante machine, et l’on bénéficie de ces petites faveurs que les femmes ont toujours accordées à ceux qui
2461 ine, et l’on bénéficie de ces petites faveurs que les femmes ont toujours accordées à ceux qui commandent et disposent, ne
2462 ndent et disposent, ne fût-ce que pour une heure, de leur vie. Oui, voilà bien les hommes avec lesquels je rêverais d’entr
2463 que pour une heure, de leur vie. Oui, voilà bien les hommes avec lesquels je rêverais d’entreprendre une belle révolution,
2464 , voilà bien les hommes avec lesquels je rêverais d’ entreprendre une belle révolution, qui rajeunisse la France : ils ont
2465 entreprendre une belle révolution, qui rajeunisse la France : ils ont la bonne humeur, le dynamisme, le sens pratique et l
2466 le révolution, qui rajeunisse la France : ils ont la bonne humeur, le dynamisme, le sens pratique et la rapidité d’esprit
2467 i rajeunisse la France : ils ont la bonne humeur, le dynamisme, le sens pratique et la rapidité d’esprit que les bourgeois
2468 a France : ils ont la bonne humeur, le dynamisme, le sens pratique et la rapidité d’esprit que les bourgeois, qui en sont
2469 a bonne humeur, le dynamisme, le sens pratique et la rapidité d’esprit que les bourgeois, qui en sont dépourvus, attribuen
2470 ur, le dynamisme, le sens pratique et la rapidité d’ esprit que les bourgeois, qui en sont dépourvus, attribuent par erreur
2471 sme, le sens pratique et la rapidité d’esprit que les bourgeois, qui en sont dépourvus, attribuent par erreur au « peuple »
2472 par erreur au « peuple » en général. Sans compter les moyens techniques dont ils disposent et qui seraient décisifs lors d’
2473 dont ils disposent et qui seraient décisifs lors d’ une action rapide. Mais loin de moi ces ambitions : ceux qui les ont n
2474 rapide. Mais loin de moi ces ambitions : ceux qui les ont n’en parlent pas, dit-on. Et je ne suis qu’un écrivain. Ceci me r
2475 ne suis qu’un écrivain. Ceci me rappelle un bout de conversation que j’aurais dû noter plus tôt. Le monsieur rencontré da
2476 t de conversation que j’aurais dû noter plus tôt. Le monsieur rencontré dans l’autocar de Taillefer voulait savoir quel ét
2477 ais dû noter plus tôt. Le monsieur rencontré dans l’ autocar de Taillefer voulait savoir quel était mon métier. Et quand j’
2478 er plus tôt. Le monsieur rencontré dans l’autocar de Taillefer voulait savoir quel était mon métier. Et quand j’eus dit qu
2479 je n’étais qu’un écrivain, et chômeur par-dessus le marché, il s’écria : « Ah cher Monsieur, je vous envie ! Vous avez un
2480 envie ! Vous avez un rôle magnifique à jouer dans la société. Vous avez le temps de réfléchir et de nous faire part de vos
2481 ôle magnifique à jouer dans la société. Vous avez le temps de réfléchir et de nous faire part de vos lumières, et sans vou
2482 fique à jouer dans la société. Vous avez le temps de réfléchir et de nous faire part de vos lumières, et sans vous, où iri
2483 ns la société. Vous avez le temps de réfléchir et de nous faire part de vos lumières, et sans vous, où irions-nous donc, n
2484 avez le temps de réfléchir et de nous faire part de vos lumières, et sans vous, où irions-nous donc, nous qui ne croyons
2485 lui dis-je, qu’un écrivain a bien deux fois plus de peine à vivre qu’un homme normal, mettons qu’un fonctionnaire (c’étai
2486 normal, mettons qu’un fonctionnaire (c’était pour le flatter), et cela tient aux circonstances mêmes qui l’ont mis dans le
2487 atter), et cela tient aux circonstances mêmes qui l’ ont mis dans le cas d’écrire. Car ou bien l’on écrit ce que l’on ne pe
2488 tient aux circonstances mêmes qui l’ont mis dans le cas d’écrire. Car ou bien l’on écrit ce que l’on ne peut pas faire, e
2489 aux circonstances mêmes qui l’ont mis dans le cas d’ écrire. Car ou bien l’on écrit ce que l’on ne peut pas faire, et c’est
2490 s qui l’ont mis dans le cas d’écrire. Car ou bien l’ on écrit ce que l’on ne peut pas faire, et c’est l’aveu d’une faibless
2491 ns le cas d’écrire. Car ou bien l’on écrit ce que l’ on ne peut pas faire, et c’est l’aveu d’une faiblesse ou d’une ambitio
2492 ’on écrit ce que l’on ne peut pas faire, et c’est l’ aveu d’une faiblesse ou d’une ambition excessive, deux choses qui comp
2493 it ce que l’on ne peut pas faire, et c’est l’aveu d’ une faiblesse ou d’une ambition excessive, deux choses qui compliquent
2494 eut pas faire, et c’est l’aveu d’une faiblesse ou d’ une ambition excessive, deux choses qui compliquent fort la vie, je cr
2495 ition excessive, deux choses qui compliquent fort la vie, je crois ; ou bien l’on écrit des choses intelligentes, et c’est
2496 s qui compliquent fort la vie, je crois ; ou bien l’ on écrit des choses intelligentes, et c’est encore l’aveu d’une inadap
2497 n écrit des choses intelligentes, et c’est encore l’ aveu d’une inadaptation cruelle aux mœurs et coutumes de ce temps ; ou
2498 des choses intelligentes, et c’est encore l’aveu d’ une inadaptation cruelle aux mœurs et coutumes de ce temps ; ou bien l
2499 d’une inadaptation cruelle aux mœurs et coutumes de ce temps ; ou bien l’on écrit simplement pour gagner sa chienne de vi
2500 uelle aux mœurs et coutumes de ce temps ; ou bien l’ on écrit simplement pour gagner sa chienne de vie, et c’est le bon moy
2501 bien l’on écrit simplement pour gagner sa chienne de vie, et c’est le bon moyen de traîner la misère la plus honteuse qui
2502 implement pour gagner sa chienne de vie, et c’est le bon moyen de traîner la misère la plus honteuse qui se puisse imagine
2503 r gagner sa chienne de vie, et c’est le bon moyen de traîner la misère la plus honteuse qui se puisse imaginer, dans les a
2504 chienne de vie, et c’est le bon moyen de traîner la misère la plus honteuse qui se puisse imaginer, dans les antres rédac
2505 e vie, et c’est le bon moyen de traîner la misère la plus honteuse qui se puisse imaginer, dans les antres rédactionnels.
2506 ère la plus honteuse qui se puisse imaginer, dans les antres rédactionnels. Je dis les antres. De toute façon, un écrivain
2507 e imaginer, dans les antres rédactionnels. Je dis les antres. De toute façon, un écrivain est par nature un empêtré. Et voi
2508 dans les antres rédactionnels. Je dis les antres. De toute façon, un écrivain est par nature un empêtré. Et voilà le parad
2509 , un écrivain est par nature un empêtré. Et voilà le paradoxe et l’injustice : c’est qu’on attend, qu’on exige même de ces
2510 st par nature un empêtré. Et voilà le paradoxe et l’ injustice : c’est qu’on attend, qu’on exige même de ces gens-là des ve
2511 ’injustice : c’est qu’on attend, qu’on exige même de ces gens-là des vertus au-dessus du commun, la révélation de secrets
2512 me de ces gens-là des vertus au-dessus du commun, la révélation de secrets qui suffiraient à rendre heureux les plus indig
2513 -là des vertus au-dessus du commun, la révélation de secrets qui suffiraient à rendre heureux les plus indignes, et ingéni
2514 ation de secrets qui suffiraient à rendre heureux les plus indignes, et ingénieux les plus balourds, enfin je ne sais quell
2515 à rendre heureux les plus indignes, et ingénieux les plus balourds, enfin je ne sais quelle supériorité humaine, quel luxe
2516 je ne sais quelle supériorité humaine, quel luxe d’ énergie ou d’invention qui, s’ils les possédaient vraiment, feraient d
2517 uelle supériorité humaine, quel luxe d’énergie ou d’ invention qui, s’ils les possédaient vraiment, feraient de leurs déten
2518 ne, quel luxe d’énergie ou d’invention qui, s’ils les possédaient vraiment, feraient de leurs détenteurs non point des écri
2519 ion qui, s’ils les possédaient vraiment, feraient de leurs détenteurs non point des écrivains mais des Don Juan, des dicta
2520 quand vous aurez compris cela, vous cesserez, je le crains, d’envier ma condition… » 16 mars 1934 D’un autre « peup
2521 aurez compris cela, vous cesserez, je le crains, d’ envier ma condition… » 16 mars 1934 D’un autre « peuple ». — Il
2522 ains, d’envier ma condition… » 16 mars 1934 D’ un autre « peuple ». — Il faut encore que je revienne sur mon séjour v
2523 donner trois « causeries » devant des auditoires de jeunes cultivateurs. Eux-mêmes avaient fixé la liste des sujets qu’il
2524 es de jeunes cultivateurs. Eux-mêmes avaient fixé la liste des sujets qu’ils désiraient étudier au cours de l’hiver avec l
2525 des sujets qu’ils désiraient étudier au cours de l’ hiver avec l’aide de plusieurs orateurs bénévoles, pasteurs, institute
2526 u’ils désiraient étudier au cours de l’hiver avec l’ aide de plusieurs orateurs bénévoles, pasteurs, instituteurs ou autres
2527 ésiraient étudier au cours de l’hiver avec l’aide de plusieurs orateurs bénévoles, pasteurs, instituteurs ou autres « pers
2528 , instituteurs ou autres « personnes instruites » de la région. On m’avait prié de parler des révolutions russes de 1905 e
2529 nstituteurs ou autres « personnes instruites » de la région. On m’avait prié de parler des révolutions russes de 1905 et d
2530 sonnes instruites » de la région. On m’avait prié de parler des révolutions russes de 1905 et de 1917, et de l’état actuel
2531 On m’avait prié de parler des révolutions russes de 1905 et de 1917, et de l’état actuel de l’URSS. Ils étaient venus par
2532 prié de parler des révolutions russes de 1905 et de 1917, et de l’état actuel de l’URSS. Ils étaient venus par groupes, à
2533 ler des révolutions russes de 1905 et de 1917, et de l’état actuel de l’URSS. Ils étaient venus par groupes, à bicyclette
2534 des révolutions russes de 1905 et de 1917, et de l’ état actuel de l’URSS. Ils étaient venus par groupes, à bicyclette ou
2535 ns russes de 1905 et de 1917, et de l’état actuel de l’URSS. Ils étaient venus par groupes, à bicyclette ou en charrettes,
2536 russes de 1905 et de 1917, et de l’état actuel de l’ URSS. Ils étaient venus par groupes, à bicyclette ou en charrettes, de
2537 venus par groupes, à bicyclette ou en charrettes, de tous les villages voisins. Du haut de la colline où nous étions tous
2538 r groupes, à bicyclette ou en charrettes, de tous les villages voisins. Du haut de la colline où nous étions tous réunis po
2539 charrettes, de tous les villages voisins. Du haut de la colline où nous étions tous réunis pour déjeuner, on dominait tout
2540 rrettes, de tous les villages voisins. Du haut de la colline où nous étions tous réunis pour déjeuner, on dominait tout un
2541 réunis pour déjeuner, on dominait tout un canton de marécages mélancoliques ; et parfois l’on voyait scintiller dans un l
2542 un canton de marécages mélancoliques ; et parfois l’ on voyait scintiller dans un lointain nuageux et sous une trouée d’or,
2543 iller dans un lointain nuageux et sous une trouée d’ or, la mer. La petite salle des cours ruraux peut contenir une centain
2544 dans un lointain nuageux et sous une trouée d’or, la mer. La petite salle des cours ruraux peut contenir une centaine d’au
2545 lointain nuageux et sous une trouée d’or, la mer. La petite salle des cours ruraux peut contenir une centaine d’auditeurs.
2546 salle des cours ruraux peut contenir une centaine d’ auditeurs. L’orateur doit se tenir debout au milieu d’eux, de manière
2547 rs ruraux peut contenir une centaine d’auditeurs. L’ orateur doit se tenir debout au milieu d’eux, de manière à pouvoir, to
2548 pouvoir, tout en parlant, passer des clichés dans la lanterne à projection. Pour assurer le fameux « contact avec le publi
2549 ichés dans la lanterne à projection. Pour assurer le fameux « contact avec le public », rien ne vaut cette proximité physi
2550 projection. Pour assurer le fameux « contact avec le public », rien ne vaut cette proximité physique. Je leur parlai penda
2551 mité physique. Je leur parlai pendant deux heures d’ un pays d’énormes plaines, sans barrières ni haies, sans chemins creux
2552 que. Je leur parlai pendant deux heures d’un pays d’ énormes plaines, sans barrières ni haies, sans chemins creux et sans s
2553 ni haies, sans chemins creux et sans secrets, où les hommes vivent sans calcul ni prudence, dans la misère et dans la comm
2554 ù les hommes vivent sans calcul ni prudence, dans la misère et dans la communion, superstitieux, poètes, bons et fous. Je
2555 t sans calcul ni prudence, dans la misère et dans la communion, superstitieux, poètes, bons et fous. Je décrivis les révol
2556 superstitieux, poètes, bons et fous. Je décrivis les révoltes obscures de ces masses opprimées et naïves, conduites par de
2557 , bons et fous. Je décrivis les révoltes obscures de ces masses opprimées et naïves, conduites par des équipes d’hommes du
2558 es opprimées et naïves, conduites par des équipes d’ hommes durs, intellectuels bannis ou petits nobles déclassés ; le trio
2559 intellectuels bannis ou petits nobles déclassés ; le triomphe implacable de Lénine ; l’enthousiasme du plan de cinq ans. E
2560 petits nobles déclassés ; le triomphe implacable de Lénine ; l’enthousiasme du plan de cinq ans. Et je m’étonnais tout en
2561 es déclassés ; le triomphe implacable de Lénine ; l’ enthousiasme du plan de cinq ans. Et je m’étonnais tout en parlant de
2562 phe implacable de Lénine ; l’enthousiasme du plan de cinq ans. Et je m’étonnais tout en parlant de raconter une épopée con
2563 lan de cinq ans. Et je m’étonnais tout en parlant de raconter une épopée contemporaine : tout cela se dégageait ici de la
2564 épopée contemporaine : tout cela se dégageait ici de la mesquinerie hargneuse des polémiques et des partis pris, devenait
2565 pée contemporaine : tout cela se dégageait ici de la mesquinerie hargneuse des polémiques et des partis pris, devenait lég
2566 is pris, devenait légendaire et généreux, prenait le rythme et les couleurs grandioses et irréelles de la page d’histoire.
2567 nait légendaire et généreux, prenait le rythme et les couleurs grandioses et irréelles de la page d’histoire. Mensonge de l
2568 le rythme et les couleurs grandioses et irréelles de la page d’histoire. Mensonge de la distance et de la simplification ;
2569 rythme et les couleurs grandioses et irréelles de la page d’histoire. Mensonge de la distance et de la simplification ; vé
2570 t les couleurs grandioses et irréelles de la page d’ histoire. Mensonge de la distance et de la simplification ; vérité de
2571 oses et irréelles de la page d’histoire. Mensonge de la distance et de la simplification ; vérité de la fable qui donne un
2572 s et irréelles de la page d’histoire. Mensonge de la distance et de la simplification ; vérité de la fable qui donne une f
2573 de la page d’histoire. Mensonge de la distance et de la simplification ; vérité de la fable qui donne une forme grande à n
2574 la page d’histoire. Mensonge de la distance et de la simplification ; vérité de la fable qui donne une forme grande à nos
2575 e de la distance et de la simplification ; vérité de la fable qui donne une forme grande à nos obscurs et grands désirs in
2576 e la distance et de la simplification ; vérité de la fable qui donne une forme grande à nos obscurs et grands désirs infor
2577 rs informulés. En finissant je craignis un moment de les avoir trompés, de les avoir rendus jaloux d’une espèce d’imagerie
2578 informulés. En finissant je craignis un moment de les avoir trompés, de les avoir rendus jaloux d’une espèce d’imagerie d’É
2579 ssant je craignis un moment de les avoir trompés, de les avoir rendus jaloux d’une espèce d’imagerie d’Épinal, malgré moi
2580 nt je craignis un moment de les avoir trompés, de les avoir rendus jaloux d’une espèce d’imagerie d’Épinal, malgré moi trop
2581 de les avoir trompés, de les avoir rendus jaloux d’ une espèce d’imagerie d’Épinal, malgré moi trop pareille aux innocente
2582 trompés, de les avoir rendus jaloux d’une espèce d’ imagerie d’Épinal, malgré moi trop pareille aux innocentes peintures d
2583 e les avoir rendus jaloux d’une espèce d’imagerie d’ Épinal, malgré moi trop pareille aux innocentes peintures de paradis m
2584 malgré moi trop pareille aux innocentes peintures de paradis modernisé que vulgarise la propagande communiste. Mais leurs
2585 ntes peintures de paradis modernisé que vulgarise la propagande communiste. Mais leurs questions ne tardèrent pas à me ras
2586 archait vraiment là-bas aussi bien que j’avais pu le laisser croire ; si ce n’était pas encore un de ces régimes de dictat
2587 u le laisser croire ; si ce n’était pas encore un de ces régimes de dictature ; si les paysans avaient plus de liberté qu’
2588 oire ; si ce n’était pas encore un de ces régimes de dictature ; si les paysans avaient plus de liberté qu’auparavant, etc
2589 it pas encore un de ces régimes de dictature ; si les paysans avaient plus de liberté qu’auparavant, etc. Mais ce qui me su
2590 égimes de dictature ; si les paysans avaient plus de liberté qu’auparavant, etc. Mais ce qui me surprit davantage, ce fut
2591 nt, etc. Mais ce qui me surprit davantage, ce fut la question franche d’un garçon de vingt ans, costaud, l’air intelligent
2592 me surprit davantage, ce fut la question franche d’ un garçon de vingt ans, costaud, l’air intelligent et ouvert : « Pense
2593 davantage, ce fut la question franche d’un garçon de vingt ans, costaud, l’air intelligent et ouvert : « Pensez-vous qu’on
2594 estion franche d’un garçon de vingt ans, costaud, l’ air intelligent et ouvert : « Pensez-vous qu’on pourrait faire la même
2595 nt et ouvert : « Pensez-vous qu’on pourrait faire la même chose ici ? » Pour sa part, il était sceptique. Il pensait qu’en
2596 part, il était sceptique. Il pensait qu’en Vendée les choses ne seraient pas si simples, que la situation matérielle était
2597 Vendée les choses ne seraient pas si simples, que la situation matérielle était meilleure et demandait un développement to
2598 r ici, garder sa liberté et se gouverner comme on l’ entendait. Et je me disais, en l’écoutant : en voilà un que l’on pourr
2599 uverner comme on l’entendait. Et je me disais, en l’ écoutant : en voilà un que l’on pourrait sans honte présenter aux jeun
2600 Et je me disais, en l’écoutant : en voilà un que l’ on pourrait sans honte présenter aux jeunes Russes, aux jeunes Alleman
2601 eunes Russes, aux jeunes Allemands, comme un type de jeune Français. Je retiens de cette journée deux impressions (je n’os
2602 ands, comme un type de jeune Français. Je retiens de cette journée deux impressions (je n’ose pas en dire davantage : tout
2603 davantage : tout cela est encore moins clair dans la réalité que dans ce résumé). Quand j’ai projeté sur la paroi blanche
2604 alité que dans ce résumé). Quand j’ai projeté sur la paroi blanche de la salle la photo de Kalinine, président de l’URSS,
2605 résumé). Quand j’ai projeté sur la paroi blanche de la salle la photo de Kalinine, président de l’URSS, debout dans un ch
2606 sumé). Quand j’ai projeté sur la paroi blanche de la salle la photo de Kalinine, président de l’URSS, debout dans un champ
2607 and j’ai projeté sur la paroi blanche de la salle la photo de Kalinine, président de l’URSS, debout dans un champ en costu
2608 projeté sur la paroi blanche de la salle la photo de Kalinine, président de l’URSS, debout dans un champ en costume de mou
2609 anche de la salle la photo de Kalinine, président de l’URSS, debout dans un champ en costume de moujik, il y a eu un profo
2610 he de la salle la photo de Kalinine, président de l’ URSS, debout dans un champ en costume de moujik, il y a eu un profond
2611 sident de l’URSS, debout dans un champ en costume de moujik, il y a eu un profond silence au lieu des rires que je craigna
2612 peut donc gouverner sans être un monsieur en haut de forme ? Il a l’air d’un brave type comme nous autres. Rêverie des jeu
2613 ns être un monsieur en haut de forme ? Il a l’air d’ un brave type comme nous autres. Rêverie des jeunes cultivateurs.) Et
2614 eurs.) Et quand j’ai terminé ma causerie, évitant de prononcer mon jugement sur les faits que je venais d’exposer, afin de
2615 a causerie, évitant de prononcer mon jugement sur les faits que je venais d’exposer, afin de voir si mes auditeurs étaient
2616 rononcer mon jugement sur les faits que je venais d’ exposer, afin de voir si mes auditeurs étaient de la même espèce que c
2617 d’exposer, afin de voir si mes auditeurs étaient de la même espèce que ceux de l’île : cette série de questions précises,
2618 exposer, afin de voir si mes auditeurs étaient de la même espèce que ceux de l’île : cette série de questions précises, et
2619 mes auditeurs étaient de la même espèce que ceux de l’île : cette série de questions précises, et ce désir de rapporter c
2620 s auditeurs étaient de la même espèce que ceux de l’ île : cette série de questions précises, et ce désir de rapporter ce q
2621 de la même espèce que ceux de l’île : cette série de questions précises, et ce désir de rapporter ce que j’avais dit à leu
2622  : cette série de questions précises, et ce désir de rapporter ce que j’avais dit à leur situation concrète. Esprit critiq
2623 ue, méfiance intelligente des paysans, conscience de leur autonomie… Je ne bifferai pas les conclusions que j’avais tirées
2624 conscience de leur autonomie… Je ne bifferai pas les conclusions que j’avais tirées de la conférence à A. Elles sont égale
2625 e bifferai pas les conclusions que j’avais tirées de la conférence à A. Elles sont également vraies. Ce qui est faux, c’es
2626 ifferai pas les conclusions que j’avais tirées de la conférence à A. Elles sont également vraies. Ce qui est faux, c’est d
2627 les sont également vraies. Ce qui est faux, c’est de parler du peuple en général. — « On le savait depuis longtemps. » — O
2628 aux, c’est de parler du peuple en général. — « On le savait depuis longtemps. » — On sait tant de choses que l’on n’a jama
2629 depuis longtemps. » — On sait tant de choses que l’ on n’a jamais pris la peine de connaître, chez les « intellectuels ».
2630 — On sait tant de choses que l’on n’a jamais pris la peine de connaître, chez les « intellectuels ». 17 mars 1934 L’
2631 tant de choses que l’on n’a jamais pris la peine de connaître, chez les « intellectuels ». 17 mars 1934 L’institute
2632 l’on n’a jamais pris la peine de connaître, chez les « intellectuels ». 17 mars 1934 L’instituteur vendéen. — Nous é
2633 e, chez les « intellectuels ». 17 mars 1934 L’ instituteur vendéen. — Nous étions assis dans sa cuisine avec sa femme
2634 avec sa femme et ses deux enfants. C’est un homme de quarante ans, aux traits réguliers et sérieux, un peu lent de geste e
2635 ans, aux traits réguliers et sérieux, un peu lent de geste et de parole ; prudent. Il se plaint de son isolement. « On nou
2636 its réguliers et sérieux, un peu lent de geste et de parole ; prudent. Il se plaint de son isolement. « On nous laisse seu
2637 ent de geste et de parole ; prudent. Il se plaint de son isolement. « On nous laisse seuls, sans direction. Nous ne savons
2638 uls, sans direction. Nous ne savons pas que lire. Le travail est dur, ici. Il faut lutter contre les parents, contre la co
2639 e. Le travail est dur, ici. Il faut lutter contre les parents, contre la concurrence de l’école libre qui nous a pris les d
2640 r, ici. Il faut lutter contre les parents, contre la concurrence de l’école libre qui nous a pris les deux tiers de nos él
2641 lutter contre les parents, contre la concurrence de l’école libre qui nous a pris les deux tiers de nos élèves. On aurait
2642 tter contre les parents, contre la concurrence de l’ école libre qui nous a pris les deux tiers de nos élèves. On aurait be
2643 e la concurrence de l’école libre qui nous a pris les deux tiers de nos élèves. On aurait besoin de nourriture intellectuel
2644 e de l’école libre qui nous a pris les deux tiers de nos élèves. On aurait besoin de nourriture intellectuelle pour se sou
2645 is les deux tiers de nos élèves. On aurait besoin de nourriture intellectuelle pour se soutenir. Quelquefois on nous envoi
2646 efois on nous envoie des journaux ou des revues à l’ essai, mais c’est toujours de la politique. Quand j’étais jeune, j’ai
2647 naux ou des revues à l’essai, mais c’est toujours de la politique. Quand j’étais jeune, j’ai beaucoup lu Anatole France, c
2648 x ou des revues à l’essai, mais c’est toujours de la politique. Quand j’étais jeune, j’ai beaucoup lu Anatole France, c’es
2649 atole France, c’est à cause de lui que j’ai perdu la foi. J’aimais beaucoup Romain Rolland. Est-ce qu’il est mort ? Vous n
2650  ? Vous ne pourriez pas me dire ce qu’il y aurait d’ intéressant à lire ? — Vous ne lisez pas de journaux politiques ? — Ce
2651 aurait d’intéressant à lire ? — Vous ne lisez pas de journaux politiques ? — Ce n’est pas ce qu’on cherche. Il faudrait en
2652 . Il faudrait en lire deux au moins pour corriger les mensonges. Ce qu’ils peuvent tous mentir ! On ne peut plus avoir conf
2653 ous mentir ! On ne peut plus avoir confiance dans les partis. C’est aussi à cause de cette centralisation : qu’est-ce qu’il
2654 de cette centralisation : qu’est-ce qu’ils savent de notre situation à Paris ? Est-ce qu’il n’y aurait pas moyen de faire
2655 ation à Paris ? Est-ce qu’il n’y aurait pas moyen de faire un mouvement politique en dehors des partis et de voir une fois
2656 re un mouvement politique en dehors des partis et de voir une fois ce qu’il y aurait à changer pratiquement dans chaque pr
2657 on peut, tout seuls dans ce coin ?… » J’ai essayé de faire une liste de livres à lire pour l’instituteur de M. Je ne trouv
2658 dans ce coin ?… » J’ai essayé de faire une liste de livres à lire pour l’instituteur de M. Je ne trouve à lui recommander
2659 i essayé de faire une liste de livres à lire pour l’ instituteur de M. Je ne trouve à lui recommander que des traductions.
2660 ire une liste de livres à lire pour l’instituteur de M. Je ne trouve à lui recommander que des traductions. La littérature
2661 ne trouve à lui recommander que des traductions. La littérature moderne en France n’a guère à donner à ceux qui ont faim
2662 en France n’a guère à donner à ceux qui ont faim de nourriture solide, élémentaire. Elle manque de naïveté, de force et d
2663 im de nourriture solide, élémentaire. Elle manque de naïveté, de force et de conviction. Tout son effort est de s’écarter
2664 ture solide, élémentaire. Elle manque de naïveté, de force et de conviction. Tout son effort est de s’écarter le plus poss
2665 élémentaire. Elle manque de naïveté, de force et de conviction. Tout son effort est de s’écarter le plus possible de ce q
2666 é, de force et de conviction. Tout son effort est de s’écarter le plus possible de ce qui est simplement vrai. Elle est bi
2667 t de conviction. Tout son effort est de s’écarter le plus possible de ce qui est simplement vrai. Elle est bizarre, affect
2668 Tout son effort est de s’écarter le plus possible de ce qui est simplement vrai. Elle est bizarre, affectée et maigrelette
2669 t bizarre, affectée et maigrelette, toute guindée de petites astuces, d’airs entendus dès qu’il s’agit de passions. Trop d
2670 et maigrelette, toute guindée de petites astuces, d’ airs entendus dès qu’il s’agit de passions. Trop difficile quand elle
2671 petites astuces, d’airs entendus dès qu’il s’agit de passions. Trop difficile quand elle est belle (Claudel ne peut pas de
2672 t bourgeoise et fausse, quand elle est facile. Et les ouvrages « d’avant-garde » donnent dans l’ensemble une impression de
2673 fausse, quand elle est facile. Et les ouvrages «  d’ avant-garde » donnent dans l’ensemble une impression de crampe, de min
2674 e. Et les ouvrages « d’avant-garde » donnent dans l’ ensemble une impression de crampe, de minutie maniaque, de méchanceté
2675 nt-garde » donnent dans l’ensemble une impression de crampe, de minutie maniaque, de méchanceté d’impuissants qui se tortu
2676 donnent dans l’ensemble une impression de crampe, de minutie maniaque, de méchanceté d’impuissants qui se torturent à plai
2677 le une impression de crampe, de minutie maniaque, de méchanceté d’impuissants qui se torturent à plaisir pour provoquer un
2678 ion de crampe, de minutie maniaque, de méchanceté d’ impuissants qui se torturent à plaisir pour provoquer un petit grincem
2679 laisir pour provoquer un petit grincement nouveau de la sensibilité. Je comprends très bien qu’un certain nombre d’écrivai
2680 sir pour provoquer un petit grincement nouveau de la sensibilité. Je comprends très bien qu’un certain nombre d’écrivains
2681 lité. Je comprends très bien qu’un certain nombre d’ écrivains français aient passé au communisme : il leur fallait cela sa
2682 utile et humaine… Auparavant, ils croyaient comme les autres que c’était plutôt ridicule. Mais il paraît que ça va se porte
2683 ît que ça va se porter de plus en plus. Telle est la pauvre chance des écrivains français : il a fallu un nouveau conformi
2684 français : il a fallu un nouveau conformisme pour les libérer de l’ancien ; et l’alibi d’une action politique à laquelle il
2685 l a fallu un nouveau conformisme pour les libérer de l’ancien ; et l’alibi d’une action politique à laquelle ils n’entende
2686 fallu un nouveau conformisme pour les libérer de l’ ancien ; et l’alibi d’une action politique à laquelle ils n’entendent
2687 eau conformisme pour les libérer de l’ancien ; et l’ alibi d’une action politique à laquelle ils n’entendent goutte. Je ne
2688 ormisme pour les libérer de l’ancien ; et l’alibi d’ une action politique à laquelle ils n’entendent goutte. Je ne sais plu
2689 nt goutte. Je ne sais plus quel poète a écrit : «  L’ art est une question de virgules. » Voilà qui donne exactement la mesu
2690 lus quel poète a écrit : « L’art est une question de virgules. » Voilà qui donne exactement la mesure de leurs ambitions.
2691 uestion de virgules. » Voilà qui donne exactement la mesure de leurs ambitions. Même si cette innocente remarque est juste
2692 virgules. » Voilà qui donne exactement la mesure de leurs ambitions. Même si cette innocente remarque est juste du strict
2693 nocente remarque est juste du strict point de vue d’ un artisan précieux de la langue française telle qu’on l’écrit à Paris
2694 uste du strict point de vue d’un artisan précieux de la langue française telle qu’on l’écrit à Paris de nos jours (car c’e
2695 e du strict point de vue d’un artisan précieux de la langue française telle qu’on l’écrit à Paris de nos jours (car c’est
2696 tisan précieux de la langue française telle qu’on l’ écrit à Paris de nos jours (car c’est faux sous tout autre rapport, po
2697 e la langue française telle qu’on l’écrit à Paris de nos jours (car c’est faux sous tout autre rapport, pour tout autre pa
2698 rt, pour tout autre pays, pour toute autre époque de nos lettres) je pense que ce n’est pas par hasard que tous les grands
2699 es) je pense que ce n’est pas par hasard que tous les grands artistes ont jugé bon de parler d’autre chose, et de s’attache
2700 hasard que tous les grands artistes ont jugé bon de parler d’autre chose, et de s’attacher plutôt à ce qu’il y a entre le
2701 e tous les grands artistes ont jugé bon de parler d’ autre chose, et de s’attacher plutôt à ce qu’il y a entre les virgules
2702 artistes ont jugé bon de parler d’autre chose, et de s’attacher plutôt à ce qu’il y a entre les virgules. Fin mars 1934
2703 ose, et de s’attacher plutôt à ce qu’il y a entre les virgules. Fin mars 1934 Le vent souffle en tempête de la mer ve
2704 qu’il y a entre les virgules. Fin mars 1934 Le vent souffle en tempête de la mer vers le continent, depuis sept jour
2705 s. Fin mars 1934 Le vent souffle en tempête de la mer vers le continent, depuis sept jours déjà, sans une seule heur
2706 Fin mars 1934 Le vent souffle en tempête de la mer vers le continent, depuis sept jours déjà, sans une seule heure d
2707 1934 Le vent souffle en tempête de la mer vers le continent, depuis sept jours déjà, sans une seule heure d’interruptio
2708 ent, depuis sept jours déjà, sans une seule heure d’ interruption. Et cela doit durer deux jours encore, puisqu’une nouvell
2709 er deux jours encore, puisqu’une nouvelle période de trois jours est entamée. Toute la germination est comme crispée dans
2710 ouvelle période de trois jours est entamée. Toute la germination est comme crispée dans son essor depuis le début de la te
2711 rmination est comme crispée dans son essor depuis le début de la tempête ; elle s’est mise sur la défensive. Et moi aussi,
2712 est comme crispée dans son essor depuis le début de la tempête ; elle s’est mise sur la défensive. Et moi aussi, je ne pa
2713 t comme crispée dans son essor depuis le début de la tempête ; elle s’est mise sur la défensive. Et moi aussi, je ne parvi
2714 puis le début de la tempête ; elle s’est mise sur la défensive. Et moi aussi, je ne parviens plus à avancer dans mon trava
2715 Obsession du sifflement furieusement modulé dans les cheminées et à travers le toit fragile, jour et nuit. Quand nous sort
2716 rieusement modulé dans les cheminées et à travers le toit fragile, jour et nuit. Quand nous sortons pour aller voir la côt
2717 jour et nuit. Quand nous sortons pour aller voir la côte bouleversée, il nous faut marcher pliés en avant, et nous rentro
2718 t nous rentrons étourdis. Depuis plusieurs jours, le bateau n’a pas pu aborder l’île. Plus de courrier. On parle d’acciden
2719 uis plusieurs jours, le bateau n’a pas pu aborder l’ île. Plus de courrier. On parle d’accidents. Pourvu que le manuscrit d
2720 s jours, le bateau n’a pas pu aborder l’île. Plus de courrier. On parle d’accidents. Pourvu que le manuscrit d’une traduct
2721 pas pu aborder l’île. Plus de courrier. On parle d’ accidents. Pourvu que le manuscrit d’une traduction « alimentaire » qu
2722 lus de courrier. On parle d’accidents. Pourvu que le manuscrit d’une traduction « alimentaire » que j’ai expédié il y a qu
2723 er. On parle d’accidents. Pourvu que le manuscrit d’ une traduction « alimentaire » que j’ai expédié il y a quatre jours, n
2724 s, ne revienne pas, feuille à feuille, déshonorer les rivages de l’île ! S’il fallait encore le revoir ! (C’est sur le prix
2725 ne pas, feuille à feuille, déshonorer les rivages de l’île ! S’il fallait encore le revoir ! (C’est sur le prix de ce trav
2726 pas, feuille à feuille, déshonorer les rivages de l’ île ! S’il fallait encore le revoir ! (C’est sur le prix de ce travail
2727 onorer les rivages de l’île ! S’il fallait encore le revoir ! (C’est sur le prix de ce travail, payé d’avance, que nous av
2728 ’île ! S’il fallait encore le revoir ! (C’est sur le prix de ce travail, payé d’avance, que nous avons vécu depuis janvier
2729 ’il fallait encore le revoir ! (C’est sur le prix de ce travail, payé d’avance, que nous avons vécu depuis janvier, je cro
2730 e revoir ! (C’est sur le prix de ce travail, payé d’ avance, que nous avons vécu depuis janvier, je crois que j’avais omis
2731 ns vécu depuis janvier, je crois que j’avais omis de le noter jusqu’ici.) 2 avril 1934 Voici l’île purifiée et rajeu
2732 vécu depuis janvier, je crois que j’avais omis de le noter jusqu’ici.) 2 avril 1934 Voici l’île purifiée et rajeunie
2733 de le noter jusqu’ici.) 2 avril 1934 Voici l’ île purifiée et rajeunie, des fleurs partout, la grande lumière sur no
2734 i l’île purifiée et rajeunie, des fleurs partout, la grande lumière sur nos murs blanchis. J’ai travaillé au jardin, tous
2735 s jours. Labouré et dessiné des planches, arraché de vieilles souches, dégagé les plates-bandes couvertes de feuilles mort
2736 des planches, arraché de vieilles souches, dégagé les plates-bandes couvertes de feuilles mortes. Il me semble souvent que
2737 illes souches, dégagé les plates-bandes couvertes de feuilles mortes. Il me semble souvent que plus je travaille de mes ma
2738 ortes. Il me semble souvent que plus je travaille de mes mains, plus il me vient d’idées fermes et utilisables. Est-ce que
2739 plus je travaille de mes mains, plus il me vient d’ idées fermes et utilisables. Est-ce que les vraies idées viendraient d
2740 e vient d’idées fermes et utilisables. Est-ce que les vraies idées viendraient du seul contact des choses, par les mains ?
2741 idées viendraient du seul contact des choses, par les mains ? On le croirait à voir l’amaigrissement de la pensée des clerc
2742 nt du seul contact des choses, par les mains ? On le croirait à voir l’amaigrissement de la pensée des clercs aux mains dé
2743 des choses, par les mains ? On le croirait à voir l’ amaigrissement de la pensée des clercs aux mains débiles qui ratiocine
2744 es mains ? On le croirait à voir l’amaigrissement de la pensée des clercs aux mains débiles qui ratiocinent dans les revue
2745 mains ? On le croirait à voir l’amaigrissement de la pensée des clercs aux mains débiles qui ratiocinent dans les revues s
2746 des clercs aux mains débiles qui ratiocinent dans les revues sur ce que d’autres ont créé. 3 avril 1934 La solitude e
2747 sur ce que d’autres ont créé. 3 avril 1934 La solitude est une jeunesse. Elle nous apprend cette chose nouvelle que
2748 d nous étions adolescents, chose nouvelle au goût de souvenir, que trop de téléphones, à la ville, de tout à l’heure, d’he
2749 nts, chose nouvelle au goût de souvenir, que trop de téléphones, à la ville, de tout à l’heure, d’heures de bureau, d’impi
2750 le au goût de souvenir, que trop de téléphones, à la ville, de tout à l’heure, d’heures de bureau, d’impitoyables rendez-v
2751 de souvenir, que trop de téléphones, à la ville, de tout à l’heure, d’heures de bureau, d’impitoyables rendez-vous d’indi
2752 ir, que trop de téléphones, à la ville, de tout à l’ heure, d’heures de bureau, d’impitoyables rendez-vous d’indifférence a
2753 rop de téléphones, à la ville, de tout à l’heure, d’ heures de bureau, d’impitoyables rendez-vous d’indifférence avaient re
2754 léphones, à la ville, de tout à l’heure, d’heures de bureau, d’impitoyables rendez-vous d’indifférence avaient repoussée d
2755 la ville, de tout à l’heure, d’heures de bureau, d’ impitoyables rendez-vous d’indifférence avaient repoussée dans nos lom
2756 e, d’heures de bureau, d’impitoyables rendez-vous d’ indifférence avaient repoussée dans nos lombes ; cette chose toujours
2757 s ; cette chose toujours neuve et nouvelle qu’est l’ attente d’on ne sait quoi. Condition véritable de l’homme : il est ce
2758 chose toujours neuve et nouvelle qu’est l’attente d’ on ne sait quoi. Condition véritable de l’homme : il est celui qui ag
2759 l’attente d’on ne sait quoi. Condition véritable de l’homme : il est celui qui agit dans l’attente. Il attend des révélat
2760 ttente d’on ne sait quoi. Condition véritable de l’ homme : il est celui qui agit dans l’attente. Il attend des révélation
2761 véritable de l’homme : il est celui qui agit dans l’ attente. Il attend des révélations. C’est évident ! Ses actions les pl
2762 tend des révélations. C’est évident ! Ses actions les plus pures sont des appels et des incantations ; leur sens est toujou
2763 es, invites angoissées ou séductions tentées dans l’ inconnu. Autrement, comment supporter leur petitesse ? Si je gratte pe
2764  ? Si je gratte pendant des heures ce coin réduit de terre caillouteuse, c’est pour un printemps qui viendra. C’est pour g
2765 ison borgne ; c’est aussi pour gagner ma mort, je le sais bien. Toute notre attente imagine l’avenir, et l’imagine nécessa
2766 ort, je le sais bien. Toute notre attente imagine l’ avenir, et l’imagine nécessairement sur fond de mort. (La jeunesse qui
2767 is bien. Toute notre attente imagine l’avenir, et l’ imagine nécessairement sur fond de mort. (La jeunesse qui est l’âge de
2768 ne l’avenir, et l’imagine nécessairement sur fond de mort. (La jeunesse qui est l’âge de l’attente la plus ardente de la v
2769 r, et l’imagine nécessairement sur fond de mort. ( La jeunesse qui est l’âge de l’attente la plus ardente de la vie est aus
2770 ssairement sur fond de mort. (La jeunesse qui est l’ âge de l’attente la plus ardente de la vie est aussi l’âge le plus fam
2771 ment sur fond de mort. (La jeunesse qui est l’âge de l’attente la plus ardente de la vie est aussi l’âge le plus familier
2772 t sur fond de mort. (La jeunesse qui est l’âge de l’ attente la plus ardente de la vie est aussi l’âge le plus familier ave
2773 de mort. (La jeunesse qui est l’âge de l’attente la plus ardente de la vie est aussi l’âge le plus familier avec la mort.
2774 unesse qui est l’âge de l’attente la plus ardente de la vie est aussi l’âge le plus familier avec la mort.) Ainsi nos gest
2775 sse qui est l’âge de l’attente la plus ardente de la vie est aussi l’âge le plus familier avec la mort.) Ainsi nos gestes
2776 de l’attente la plus ardente de la vie est aussi l’ âge le plus familier avec la mort.) Ainsi nos gestes se prolongent, et
2777 attente la plus ardente de la vie est aussi l’âge le plus familier avec la mort.) Ainsi nos gestes se prolongent, et leur
2778 e de la vie est aussi l’âge le plus familier avec la mort.) Ainsi nos gestes se prolongent, et leur grandeur est dans l’at
2779 s gestes se prolongent, et leur grandeur est dans l’ attente qu’ils trahissent. Si le travail moderne est dégradant, c’est
2780 grandeur est dans l’attente qu’ils trahissent. Si le travail moderne est dégradant, c’est qu’on a limité ses gestes à l’im
2781 est dégradant, c’est qu’on a limité ses gestes à l’ immédiat, et borné son attente au salaire. Or toute vie est absurde et
2782 t violemment inacceptable, qui ne s’ouvre pas sur l’ attente d’une révélation à venir, et d’une « consolation » finale. (Co
2783 nt inacceptable, qui ne s’ouvre pas sur l’attente d’ une révélation à venir, et d’une « consolation » finale. (Consolation
2784 re pas sur l’attente d’une révélation à venir, et d’ une « consolation » finale. (Consolation signifiant selon l’étymologie
2785 nsolation » finale. (Consolation signifiant selon l’ étymologie : unification, harmonisation, c’est-à-dire résolution des d
2786 attente…) 7 avril 1934 Recette pour vivre de peu. La première condition c’est de gagner peu. (J’ai écrit cela, je
2787 te pour vivre de peu. La première condition c’est de gagner peu. (J’ai écrit cela, je me le rappelle, peu de temps après n
2788 tion c’est de gagner peu. (J’ai écrit cela, je me le rappelle, peu de temps après notre arrivée, en haut d’une page que je
2789 ppelle, peu de temps après notre arrivée, en haut d’ une page que je retrouve dans une pile de notes. La page est restée bl
2790 en haut d’une page que je retrouve dans une pile de notes. La page est restée blanche. Et, toute réflexion faite, c’est b
2791 ’une page que je retrouve dans une pile de notes. La page est restée blanche. Et, toute réflexion faite, c’est bien ainsi,
2792 lacune dans ces notes : je n’ai pas encore parlé de la poule, la triste et digne poule noire qui habite seule au bout du
2793 cune dans ces notes : je n’ai pas encore parlé de la poule, la triste et digne poule noire qui habite seule au bout du jar
2794 ces notes : je n’ai pas encore parlé de la poule, la triste et digne poule noire qui habite seule au bout du jardin. Elle
2795 puis notre arrivée, héritée du propriétaire. Nous l’ avons nourrie sans espoir pendant des mois, la croyant trop vieille po
2796 ous l’avons nourrie sans espoir pendant des mois, la croyant trop vieille pour être mangée, sinon pour faire encore quelqu
2797 là qu’hier, elle a pondu. Et ce matin de nouveau. De très gros œufs, me semble-t-il. (Où va se loger la vanité !) — Le pèr
2798 e très gros œufs, me semble-t-il. (Où va se loger la vanité !) — Le père Renaud était là tout à l’heure pour me donner un
2799 s, me semble-t-il. (Où va se loger la vanité !) — Le père Renaud était là tout à l’heure pour me donner un coup de main au
2800 ger la vanité !) — Le père Renaud était là tout à l’ heure pour me donner un coup de main au jardin (Je rapprends avec plai
2801 coup de main au jardin (Je rapprends avec plaisir les petits trucs de plantage que je savais dans mon enfance campagnarde).
2802 ardin (Je rapprends avec plaisir les petits trucs de plantage que je savais dans mon enfance campagnarde). Comme je lui of
2803 me je lui offrais une cigarette il s’est redressé d’ un air de défi : « Non, non. J’ai cessé de fumer depuis longtemps ! — 
2804 offrais une cigarette il s’est redressé d’un air de défi : « Non, non. J’ai cessé de fumer depuis longtemps ! — Ça vous f
2805 edressé d’un air de défi : « Non, non. J’ai cessé de fumer depuis longtemps ! — Ça vous faisait mal à la gorge ? — Non, j’
2806 fumer depuis longtemps ! — Ça vous faisait mal à la gorge ? — Non, j’ai cessé d’acheter des cigarettes, je fumais des jau
2807 a vous faisait mal à la gorge ? — Non, j’ai cessé d’ acheter des cigarettes, je fumais des jaunes comme celles-là, le jour
2808 cigarettes, je fumais des jaunes comme celles-là, le jour où l’État les a augmentées de deux sous parce qu’il avait pris l
2809 je fumais des jaunes comme celles-là, le jour où l’ État les a augmentées de deux sous parce qu’il avait pris le monopole.
2810 ais des jaunes comme celles-là, le jour où l’État les a augmentées de deux sous parce qu’il avait pris le monopole. Ça n’es
2811 mme celles-là, le jour où l’État les a augmentées de deux sous parce qu’il avait pris le monopole. Ça n’est pas les deux s
2812 a augmentées de deux sous parce qu’il avait pris le monopole. Ça n’est pas les deux sous, mais il faut se défendre ! »
2813 parce qu’il avait pris le monopole. Ça n’est pas les deux sous, mais il faut se défendre ! » 15 avril 1934 La cultu
2814 mais il faut se défendre ! » 15 avril 1934 La culture et les gens. — Souvent, quand je me tire du livre que j’écris
2815 e défendre ! » 15 avril 1934 La culture et les gens. — Souvent, quand je me tire du livre que j’écris — sur la crise
2816 vent, quand je me tire du livre que j’écris — sur la crise de la culture — pour causer avec la laitière ou la factrice, ou
2817 nd je me tire du livre que j’écris — sur la crise de la culture — pour causer avec la laitière ou la factrice, ou le posti
2818 je me tire du livre que j’écris — sur la crise de la culture — pour causer avec la laitière ou la factrice, ou le postier,
2819 s — sur la crise de la culture — pour causer avec la laitière ou la factrice, ou le postier, ou un Renaud, j’éprouve une b
2820 e de la culture — pour causer avec la laitière ou la factrice, ou le postier, ou un Renaud, j’éprouve une brève angoisse :
2821 — pour causer avec la laitière ou la factrice, ou le postier, ou un Renaud, j’éprouve une brève angoisse : quel rapport en
2822 : quel rapport entre cet homme à qui je parle, et le mot « homme » dans ce que j’écris ? Non seulement ceux d’ici ne compr
2823 ce que je fais, et ce serait assez normal, il y a l’ obstacle du vocabulaire, d’une certaine technique des idées, etc., mai
2824 t assez normal, il y a l’obstacle du vocabulaire, d’ une certaine technique des idées, etc., mais encore ils ne comprendrai
2825 etc., mais encore ils ne comprendraient pas même de quoi il s’agit quand je parle d’eux, précisément, et des problèmes qu
2826 draient pas même de quoi il s’agit quand je parle d’ eux, précisément, et des problèmes qui intéressent leur existence. J’a
2827 liquer chaque terme. Ils n’y reconnaîtraient rien de ce qui les « soucie », amuse, occupe, ou intéresse. Vraiment non, ce
2828 que terme. Ils n’y reconnaîtraient rien de ce qui les « soucie », amuse, occupe, ou intéresse. Vraiment non, ce chapitre su
2829 pe, ou intéresse. Vraiment non, ce chapitre sur «  l’ origine rationaliste de la scission entre la culture et le peuple » ce
2830 ent non, ce chapitre sur « l’origine rationaliste de la scission entre la culture et le peuple » cela ne peut accrocher à
2831 non, ce chapitre sur « l’origine rationaliste de la scission entre la culture et le peuple » cela ne peut accrocher à rie
2832 sur « l’origine rationaliste de la scission entre la culture et le peuple » cela ne peut accrocher à rien dans cet être qu
2833 e rationaliste de la scission entre la culture et le peuple » cela ne peut accrocher à rien dans cet être que j’ai devant
2834 arbe et sa casquette, et qui continue à me parler de la pêche, de son filet qui a été emporté hier, etc. Quel sens concret
2835 e et sa casquette, et qui continue à me parler de la pêche, de son filet qui a été emporté hier, etc. Quel sens concret ce
2836 squette, et qui continue à me parler de la pêche, de son filet qui a été emporté hier, etc. Quel sens concret cela peut-il
2837 é hier, etc. Quel sens concret cela peut-il avoir de parler de la « scission » entre cet homme et la culture ? N’y a-t-il
2838 c. Quel sens concret cela peut-il avoir de parler de la « scission » entre cet homme et la culture ? N’y a-t-il pas là deu
2839 Quel sens concret cela peut-il avoir de parler de la « scission » entre cet homme et la culture ? N’y a-t-il pas là deux m
2840 r de parler de la « scission » entre cet homme et la culture ? N’y a-t-il pas là deux mondes qui n’ont jamais eu de contac
2841 N’y a-t-il pas là deux mondes qui n’ont jamais eu de contact, ni jamais de commune mesure ? Mais je suis homme aussi bien
2842 mondes qui n’ont jamais eu de contact, ni jamais de commune mesure ? Mais je suis homme aussi bien qu’eux. Et ce que j’éc
2843 sse tout entier, en tant qu’homme. Donc j’ai bien le droit de parler aussi de leurs problèmes. Mais encore je le fais d’un
2844 entier, en tant qu’homme. Donc j’ai bien le droit de parler aussi de leurs problèmes. Mais encore je le fais d’une manière
2845 qu’homme. Donc j’ai bien le droit de parler aussi de leurs problèmes. Mais encore je le fais d’une manière qui leur paraît
2846 e parler aussi de leurs problèmes. Mais encore je le fais d’une manière qui leur paraîtra sans doute beaucoup plus absurde
2847 aussi de leurs problèmes. Mais encore je le fais d’ une manière qui leur paraîtra sans doute beaucoup plus absurde que les
2848 eur paraîtra sans doute beaucoup plus absurde que les simagrées d’un sorcier à un nègre. J’essaie de résoudre un problème q
2849 ans doute beaucoup plus absurde que les simagrées d’ un sorcier à un nègre. J’essaie de résoudre un problème que je dis les
2850 e les simagrées d’un sorcier à un nègre. J’essaie de résoudre un problème que je dis les concerner, et dont aucun d’entre
2851 ègre. J’essaie de résoudre un problème que je dis les concerner, et dont aucun d’entre eux n’a jamais eu la moindre idée. S
2852 oncerner, et dont aucun d’entre eux n’a jamais eu la moindre idée. Si je remplaçais le mot « peuple » dans mon livre, par
2853 x n’a jamais eu la moindre idée. Si je remplaçais le mot « peuple » dans mon livre, par une série de noms propres d’hommes
2854 s le mot « peuple » dans mon livre, par une série de noms propres d’hommes du peuple que j’ai connus, est-ce que mes raiso
2855 e » dans mon livre, par une série de noms propres d’ hommes du peuple que j’ai connus, est-ce que mes raisonnements ne para
2856 loufoques ? Je reviens à mes pages, bien décidé à les refaire de fond en comble, à simplifier, à concrétiser, à essayer de
2857 Je reviens à mes pages, bien décidé à les refaire de fond en comble, à simplifier, à concrétiser, à essayer de les rendre
2858 en comble, à simplifier, à concrétiser, à essayer de les rendre telles qu’elles puissent, je ne dis pas : être comprises,
2859 comble, à simplifier, à concrétiser, à essayer de les rendre telles qu’elles puissent, je ne dis pas : être comprises, mais
2860 sée, confrontées sans un ridicule angoissant avec la réalité des choses et des êtres dont elles utilisent le concept… Eh b
2861 lité des choses et des êtres dont elles utilisent le concept… Eh bien, voilà le résultat : après une demi-heure de relectu
2862 s dont elles utilisent le concept… Eh bien, voilà le résultat : après une demi-heure de relecture attentive, j’ai rajouté
2863 Eh bien, voilà le résultat : après une demi-heure de relecture attentive, j’ai rajouté quelques virgules, précisé quelques
2864 gues, barré cinq lignes et mis une note au bas de la page. Il me semble vraiment que cela se tient. Il me semble aussi que
2865 est concret. Je me dis que cette impression-là et l’ inquiétude de tout à l’heure s’excluent en fait. Mais je n’arrive plus
2866 Je me dis que cette impression-là et l’inquiétude de tout à l’heure s’excluent en fait. Mais je n’arrive plus du tout à re
2867 que cette impression-là et l’inquiétude de tout à l’ heure s’excluent en fait. Mais je n’arrive plus du tout à retrouver ce
2868 je n’arrive plus du tout à retrouver ce sentiment d’ absurdité que provoquait en moi précisément, la présence physique d’un
2869 nt d’absurdité que provoquait en moi précisément, la présence physique d’un homme, confrontée avec les idées que j’avais e
2870 ovoquait en moi précisément, la présence physique d’ un homme, confrontée avec les idées que j’avais en tête. Il y a probab
2871 la présence physique d’un homme, confrontée avec les idées que j’avais en tête. Il y a probablement une fatalité interne d
2872 ime elle-même. Elle a ses lois, qui se suffisent. Les concepts alors se combinent selon des affinités ou répulsions que les
2873 e combinent selon des affinités ou répulsions que les faits ou les êtres qu’ils sont censés représenter n’ont pas dans la r
2874 elon des affinités ou répulsions que les faits ou les êtres qu’ils sont censés représenter n’ont pas dans la réalité. À la
2875 res qu’ils sont censés représenter n’ont pas dans la réalité. À la fin on obtient l’absurdité que j’éprouvais, mais aussi
2876 t censés représenter n’ont pas dans la réalité. À la fin on obtient l’absurdité que j’éprouvais, mais aussi l’impossibilit
2877 er n’ont pas dans la réalité. À la fin on obtient l’ absurdité que j’éprouvais, mais aussi l’impossibilité de la « sentir »
2878 n obtient l’absurdité que j’éprouvais, mais aussi l’ impossibilité de la « sentir » avec quelque vivacité, sauf par éclairs
2879 rdité que j’éprouvais, mais aussi l’impossibilité de la « sentir » avec quelque vivacité, sauf par éclairs, dans la rue pa
2880 té que j’éprouvais, mais aussi l’impossibilité de la « sentir » avec quelque vivacité, sauf par éclairs, dans la rue par e
2881 r » avec quelque vivacité, sauf par éclairs, dans la rue par exemple. Déjà je ne puis en retrouver le souvenir autrement q
2882 la rue par exemple. Déjà je ne puis en retrouver le souvenir autrement que par un effort de réflexion qui me laisse assez
2883 retrouver le souvenir autrement que par un effort de réflexion qui me laisse assez froid. La culture m’a repris. Je suis d
2884 un effort de réflexion qui me laisse assez froid. La culture m’a repris. Je suis dans le faux et tout y est correct : je d
2885 assez froid. La culture m’a repris. Je suis dans le faux et tout y est correct : je dis que la thèse que je défends est v
2886 s dans le faux et tout y est correct : je dis que la thèse que je défends est vraie !… Il y aurait de quoi s’arrêter de pe
2887 la thèse que je défends est vraie !… Il y aurait de quoi s’arrêter de penser, si l’on pouvait. C’est pourquoi Descartes n
2888 éfends est vraie !… Il y aurait de quoi s’arrêter de penser, si l’on pouvait. C’est pourquoi Descartes ne voyait rien ni p
2889 ie !… Il y aurait de quoi s’arrêter de penser, si l’ on pouvait. C’est pourquoi Descartes ne voyait rien ni personne quand
2890 quand il se promenait. « Je vais me promener tous les jours parmi la confusion d’un grand peuple, avec autant de liberté et
2891 enait. « Je vais me promener tous les jours parmi la confusion d’un grand peuple, avec autant de liberté et de repos que v
2892 ais me promener tous les jours parmi la confusion d’ un grand peuple, avec autant de liberté et de repos que vous sauriez f
2893 parmi la confusion d’un grand peuple, avec autant de liberté et de repos que vous sauriez faire dans vos allées ; et je n’
2894 sion d’un grand peuple, avec autant de liberté et de repos que vous sauriez faire dans vos allées ; et je n’y considère pa
2895 ns vos allées ; et je n’y considère pas autrement les hommes que j’y vois que j’y ferais des arbres qui se rencontrent dans
2896 des arbres qui se rencontrent dans vos forêts ou les animaux qui y paissent » (Lettre à Guez de Balzac, 13 mai 1631). Ce n
2897 ût écrit ce Journal ! Mais nous, nous chercherons le salut de la pensée ailleurs que dans la fuite devant ce qui la met en
2898 ce Journal ! Mais nous, nous chercherons le salut de la pensée ailleurs que dans la fuite devant ce qui la met en question
2899 Journal ! Mais nous, nous chercherons le salut de la pensée ailleurs que dans la fuite devant ce qui la met en question.
2900 ercherons le salut de la pensée ailleurs que dans la fuite devant ce qui la met en question. Programme : Ne plus rien écr
2901 a pensée ailleurs que dans la fuite devant ce qui la met en question. Programme : Ne plus rien écrire sans tenir compte d
2902 Programme : Ne plus rien écrire sans tenir compte de l’existence du père Renaud, de l’épicière, de M. Palut, de l’institut
2903 gramme : Ne plus rien écrire sans tenir compte de l’ existence du père Renaud, de l’épicière, de M. Palut, de l’instituteur
2904 sans tenir compte de l’existence du père Renaud, de l’épicière, de M. Palut, de l’instituteur de Vendée, etc., etc. Au mo
2905 ns tenir compte de l’existence du père Renaud, de l’ épicière, de M. Palut, de l’instituteur de Vendée, etc., etc. Au moins
2906 pte de l’existence du père Renaud, de l’épicière, de M. Palut, de l’instituteur de Vendée, etc., etc. Au moins autant que
2907 tence du père Renaud, de l’épicière, de M. Palut, de l’instituteur de Vendée, etc., etc. Au moins autant que de celle de K
2908 ce du père Renaud, de l’épicière, de M. Palut, de l’ instituteur de Vendée, etc., etc. Au moins autant que de celle de Kant
2909 aud, de l’épicière, de M. Palut, de l’instituteur de Vendée, etc., etc. Au moins autant que de celle de Kant, de Guillaume
2910 ituteur de Vendée, etc., etc. Au moins autant que de celle de Kant, de Guillaume Apollinaire, de Marx, ou de l’inimitable
2911 e Vendée, etc., etc. Au moins autant que de celle de Kant, de Guillaume Apollinaire, de Marx, ou de l’inimitable Laurence
2912 etc., etc. Au moins autant que de celle de Kant, de Guillaume Apollinaire, de Marx, ou de l’inimitable Laurence Sterne. L
2913 t que de celle de Kant, de Guillaume Apollinaire, de Marx, ou de l’inimitable Laurence Sterne. Le principe de toute cultur
2914 le de Kant, de Guillaume Apollinaire, de Marx, ou de l’inimitable Laurence Sterne. Le principe de toute culture véritable
2915 de Kant, de Guillaume Apollinaire, de Marx, ou de l’ inimitable Laurence Sterne. Le principe de toute culture véritable n’e
2916 ire, de Marx, ou de l’inimitable Laurence Sterne. Le principe de toute culture véritable n’est-il pas cette commune mesure
2917 , ou de l’inimitable Laurence Sterne. Le principe de toute culture véritable n’est-il pas cette commune mesure, sinon de r
2918 éritable n’est-il pas cette commune mesure, sinon de raisons formulables, du moins… d’angoisse, ou de vision finale, qu’il
2919 e mesure, sinon de raisons formulables, du moins… d’ angoisse, ou de vision finale, qu’il s’agit de maintenir par un consta
2920 de raisons formulables, du moins… d’angoisse, ou de vision finale, qu’il s’agit de maintenir par un constant effort entre
2921 ns… d’angoisse, ou de vision finale, qu’il s’agit de maintenir par un constant effort entre nos belles séries de pensées e
2922 ir par un constant effort entre nos belles séries de pensées et la diversité désordonnée des êtres et des choses, où nous
2923 tant effort entre nos belles séries de pensées et la diversité désordonnée des êtres et des choses, où nous vivons ? « Je
2924 rité, que si je me sens et me connais participant de ce monde « mal compassé ». (Je puis le connaître par le moyen de ma r
2925 articipant de ce monde « mal compassé ». (Je puis le connaître par le moyen de ma révolte, sans pour autant cesser d’y êtr
2926 monde « mal compassé ». (Je puis le connaître par le moyen de ma révolte, sans pour autant cesser d’y être pris). Descarte
2927 al compassé ». (Je puis le connaître par le moyen de ma révolte, sans pour autant cesser d’y être pris). Descartes prétend
2928 r le moyen de ma révolte, sans pour autant cesser d’ y être pris). Descartes prétendait le fuir par ce biais de ne le point
2929 utant cesser d’y être pris). Descartes prétendait le fuir par ce biais de ne le point regarder. La vue d’un homme de chair
2930 pris). Descartes prétendait le fuir par ce biais de ne le point regarder. La vue d’un homme de chair et d’os eût porté la
2931 . Descartes prétendait le fuir par ce biais de ne le point regarder. La vue d’un homme de chair et d’os eût porté la dérou
2932 ait le fuir par ce biais de ne le point regarder. La vue d’un homme de chair et d’os eût porté la déroute en son système.
2933 fuir par ce biais de ne le point regarder. La vue d’ un homme de chair et d’os eût porté la déroute en son système. Mais no
2934 biais de ne le point regarder. La vue d’un homme de chair et d’os eût porté la déroute en son système. Mais nous, serons-
2935 le point regarder. La vue d’un homme de chair et d’ os eût porté la déroute en son système. Mais nous, serons-nous assez f
2936 der. La vue d’un homme de chair et d’os eût porté la déroute en son système. Mais nous, serons-nous assez forts pour pense
2937 e. Mais nous, serons-nous assez forts pour penser les yeux bien ouverts ? 16 avril 1934 J’ai retrouvé dans Montaigne
2938 ais bien me souvenir qu’il allait à peu près dans le sens de ce que j’ai noté hier ici. « Les sciences traictent les chose
2939 me souvenir qu’il allait à peu près dans le sens de ce que j’ai noté hier ici. « Les sciences traictent les choses trop f
2940 près dans le sens de ce que j’ai noté hier ici. «  Les sciences traictent les choses trop finement, d’une mode artificielle,
2941 que j’ai noté hier ici. « Les sciences traictent les choses trop finement, d’une mode artificielle, et différente à la com
2942  Les sciences traictent les choses trop finement, d’ une mode artificielle, et différente à la commune et naturelle. Mon pa
2943 inement, d’une mode artificielle, et différente à la commune et naturelle. Mon page faict l’amour, et l’entend : lisez-lui
2944 férente à la commune et naturelle. Mon page faict l’ amour, et l’entend : lisez-lui Léon Hebreu et Ficin ; on parle de luy,
2945 commune et naturelle. Mon page faict l’amour, et l’ entend : lisez-lui Léon Hebreu et Ficin ; on parle de luy, de ses pens
2946 ntend : lisez-lui Léon Hebreu et Ficin ; on parle de luy, de ses pensées et de ses actions, et si n’y entend rien. Ie ne r
2947 lisez-lui Léon Hebreu et Ficin ; on parle de luy, de ses pensées et de ses actions, et si n’y entend rien. Ie ne recognoy
2948 reu et Ficin ; on parle de luy, de ses pensées et de ses actions, et si n’y entend rien. Ie ne recognoy pas chez Aristote
2949 stote la plupart de mes mouvements ordinaires, on les a couverts et revestus d’une aultre robe, pour l’usage de l’eschole :
2950 vements ordinaires, on les a couverts et revestus d’ une aultre robe, pour l’usage de l’eschole : Dieu leur doint bien fair
2951 es a couverts et revestus d’une aultre robe, pour l’ usage de l’eschole : Dieu leur doint bien faire ! Si i’estoy du mestie
2952 verts et revestus d’une aultre robe, pour l’usage de l’eschole : Dieu leur doint bien faire ! Si i’estoy du mestier, ie na
2953 ts et revestus d’une aultre robe, pour l’usage de l’ eschole : Dieu leur doint bien faire ! Si i’estoy du mestier, ie natur
2954 n faire ! Si i’estoy du mestier, ie naturalizeroy l’ art, autant comme ils artializent la nature. » Mais le malheur du jour
2955 naturalizeroy l’art, autant comme ils artializent la nature. » Mais le malheur du jour d’aujourd’hui, c’est que le peuple
2956 t, autant comme ils artializent la nature. » Mais le malheur du jour d’aujourd’hui, c’est que le peuple qui lit les journa
2957 artializent la nature. » Mais le malheur du jour d’ aujourd’hui, c’est que le peuple qui lit les journaux a l’esprit plus
2958 Mais le malheur du jour d’aujourd’hui, c’est que le peuple qui lit les journaux a l’esprit plus « artializé » encore que
2959 u jour d’aujourd’hui, c’est que le peuple qui lit les journaux a l’esprit plus « artializé » encore que les écrivains. Et q
2960 d’hui, c’est que le peuple qui lit les journaux a l’ esprit plus « artializé » encore que les écrivains. Et quand ceux-ci «
2961 journaux a l’esprit plus « artializé » encore que les écrivains. Et quand ceux-ci « naturalizent », on les accuse d’artific
2962 écrivains. Et quand ceux-ci « naturalizent », on les accuse d’artifice. Pourquoi s’obstineraient-ils à parler peuple à un
2963 Et quand ceux-ci « naturalizent », on les accuse d’ artifice. Pourquoi s’obstineraient-ils à parler peuple à un peuple hab
2964 aient-ils à parler peuple à un peuple habitué dès l’ école à ne plus se reconnaître dans l’écrit ? 17 avril 1934 La p
2965 habitué dès l’école à ne plus se reconnaître dans l’ écrit ? 17 avril 1934 La poule noire couve depuis hier ses treiz
2966 se reconnaître dans l’écrit ? 17 avril 1934 La poule noire couve depuis hier ses treize œufs. J’ai semé des salades,
2967 , planté des choux, enfoncé une à une des graines de haricots dans un sillon tiré à la ficelle. Plaisir d’avoir les doigts
2968 une des graines de haricots dans un sillon tiré à la ficelle. Plaisir d’avoir les doigts et les ongles terreux ; toujours
2969 aricots dans un sillon tiré à la ficelle. Plaisir d’ avoir les doigts et les ongles terreux ; toujours ce goût d’enfance…
2970 dans un sillon tiré à la ficelle. Plaisir d’avoir les doigts et les ongles terreux ; toujours ce goût d’enfance… Je ne me
2971 tiré à la ficelle. Plaisir d’avoir les doigts et les ongles terreux ; toujours ce goût d’enfance… Je ne me sens plus « él
2972 s doigts et les ongles terreux ; toujours ce goût d’ enfance… Je ne me sens plus « éloigné de Paris », mais au centre de m
2973 ce goût d’enfance… Je ne me sens plus « éloigné de Paris », mais au centre de mon domaine, et c’est Paris qui est loin m
2974 me sens plus « éloigné de Paris », mais au centre de mon domaine, et c’est Paris qui est loin maintenant, peu vraisemblabl
2975 il, le long des murs du chai. Nous déjeunons sous les tilleuls. Il y a un grand bonheur dans la lumière qui baigne le jardi
2976 s sous les tilleuls. Il y a un grand bonheur dans la lumière qui baigne le jardin fleuri, éclate sur la façade de la maiso
2977 l y a un grand bonheur dans la lumière qui baigne le jardin fleuri, éclate sur la façade de la maison plus claire que le c
2978 a lumière qui baigne le jardin fleuri, éclate sur la façade de la maison plus claire que le ciel vide, et illumine la gout
2979 qui baigne le jardin fleuri, éclate sur la façade de la maison plus claire que le ciel vide, et illumine la goutte rose d’
2980 baigne le jardin fleuri, éclate sur la façade de la maison plus claire que le ciel vide, et illumine la goutte rose d’une
2981 éclate sur la façade de la maison plus claire que le ciel vide, et illumine la goutte rose d’une fourmi ailée qui danse au
2982 maison plus claire que le ciel vide, et illumine la goutte rose d’une fourmi ailée qui danse au-dessus de mon verre de vi
2983 aire que le ciel vide, et illumine la goutte rose d’ une fourmi ailée qui danse au-dessus de mon verre de vin blanc. Mai
2984 outte rose d’une fourmi ailée qui danse au-dessus de mon verre de vin blanc. Mai 1934 La mer est d’un vert-bleu cray
2985 une fourmi ailée qui danse au-dessus de mon verre de vin blanc. Mai 1934 La mer est d’un vert-bleu crayeux, très fro
2986 -dessus de mon verre de vin blanc. Mai 1934 La mer est d’un vert-bleu crayeux, très froide encore. On ne peut guère
2987 mon verre de vin blanc. Mai 1934 La mer est d’ un vert-bleu crayeux, très froide encore. On ne peut guère que se trem
2988 mper quelques secondes, et se coucher ensuite sur la dune, au vent doux. Villages blancs au-delà des lagunes transfigurés
2989 lancs au-delà des lagunes transfigurés en mirages de Venise. Une odeur forte de varech séché vient des champs et des vigne
2990 ransfigurés en mirages de Venise. Une odeur forte de varech séché vient des champs et des vignes sablonneuses. 14-16 ma
2991 s vignes sablonneuses. 14-16 mai 1934 Idée d’ une littérature à venir. — Je lis le Goethe de Gundolf avec une sorte
2992 1934 Idée d’une littérature à venir. — Je lis le Goethe de Gundolf avec une sorte de passion jalouse pour l’homme, ave
2993 nir. — Je lis le Goethe de Gundolf avec une sorte de passion jalouse pour l’homme, avec ce même « intérêt personnel » que
2994 de Gundolf avec une sorte de passion jalouse pour l’ homme, avec ce même « intérêt personnel » que j’ai senti entrer en cau
2995 senti entrer en cause au moment où je découvrais les Affinités électives. Goethe apparaît au seuil de l’ère moderne comme
2996 les Affinités électives. Goethe apparaît au seuil de l’ère moderne comme le seul homme qui ait su être utile avec grandeur
2997 Affinités électives. Goethe apparaît au seuil de l’ ère moderne comme le seul homme qui ait su être utile avec grandeur, d
2998 . Goethe apparaît au seuil de l’ère moderne comme le seul homme qui ait su être utile avec grandeur, dans toutes ses pensé
2999 ou par un paradoxe assez étrange, utile en soi7, le « beau travail » du vivre goethéen n’ayant de fin que dans l’individu
3000 i7, le « beau travail » du vivre goethéen n’ayant de fin que dans l’individu le plus parfait de son espèce, dont le sépare
3001 avail » du vivre goethéen n’ayant de fin que dans l’ individu le plus parfait de son espèce, dont le sépare enfin cette per
3002 vivre goethéen n’ayant de fin que dans l’individu le plus parfait de son espèce, dont le sépare enfin cette perfection… Te
3003 ’ayant de fin que dans l’individu le plus parfait de son espèce, dont le sépare enfin cette perfection… Telle est la formu
3004 ns l’individu le plus parfait de son espèce, dont le sépare enfin cette perfection… Telle est la formule à la fois de la m
3005 dont le sépare enfin cette perfection… Telle est la formule à la fois de la mission et des limites de Goethe. Et c’est là
3006 cette perfection… Telle est la formule à la fois de la mission et des limites de Goethe. Et c’est là qu’il nous faut repr
3007 tte perfection… Telle est la formule à la fois de la mission et des limites de Goethe. Et c’est là qu’il nous faut reprend
3008 la formule à la fois de la mission et des limites de Goethe. Et c’est là qu’il nous faut reprendre, avec une patience obst
3009 ience obstinée malgré tant de grossières menaces, l’ éducation de ce petit coin de conscience humaine qui nous est accessib
3010 ée malgré tant de grossières menaces, l’éducation de ce petit coin de conscience humaine qui nous est accessible en Occide
3011 grossières menaces, l’éducation de ce petit coin de conscience humaine qui nous est accessible en Occident. Le romantisme
3012 ence humaine qui nous est accessible en Occident. Le romantisme s’évapore de nos vies. L’esprit pur a cessé de nous séduir
3013 t accessible en Occident. Le romantisme s’évapore de nos vies. L’esprit pur a cessé de nous séduire : nous posons nos rega
3014 en Occident. Le romantisme s’évapore de nos vies. L’ esprit pur a cessé de nous séduire : nous posons nos regards à hauteur
3015 tisme s’évapore de nos vies. L’esprit pur a cessé de nous séduire : nous posons nos regards à hauteur d’homme. Et nous voy
3016 nous séduire : nous posons nos regards à hauteur d’ homme. Et nous voyons un monde neuf où la pensée avait perdu, depuis u
3017 hauteur d’homme. Et nous voyons un monde neuf où la pensée avait perdu, depuis un siècle, la coutume de chercher ses rési
3018 neuf où la pensée avait perdu, depuis un siècle, la coutume de chercher ses résistances. Or ce monde nous apparaît démesu
3019 pensée avait perdu, depuis un siècle, la coutume de chercher ses résistances. Or ce monde nous apparaît démesurément agra
3020 lourds et naïfs, incertains et souvent absurdes, les matériaux informes et bruts pour nos mains déshabituées. Notre langag
3021 meut plus ces objets, qui n’en renvoient pas même l’ écho. Nous sommes là, petits individus, devant ce qu’on nomme les « ma
3022 ommes là, petits individus, devant ce qu’on nomme les « masses », exprimant par cette métaphore notre impuissance à former
3023 , notre perfectionnement nous ont si bien séparés de cela qu’il nous semble parfois qu’il n’est plus qu’une alternative de
3024 emble parfois qu’il n’est plus qu’une alternative de manœuvre : nous laisser prendre par la foule, dont le torrent arrondi
3025 lternative de manœuvre : nous laisser prendre par la foule, dont le torrent arrondira nos angles, nous simplifier dans le
3026 anœuvre : nous laisser prendre par la foule, dont le torrent arrondira nos angles, nous simplifier dans le cadre grossier
3027 orrent arrondira nos angles, nous simplifier dans le cadre grossier des disciplines partisanes, ou bien fuir à l’écart, es
3028 ossier des disciplines partisanes, ou bien fuir à l’ écart, essayer de prolonger encore les anciens jeux, de subtiliser un
3029 lines partisanes, ou bien fuir à l’écart, essayer de prolonger encore les anciens jeux, de subtiliser un peu plus, de raff
3030 bien fuir à l’écart, essayer de prolonger encore les anciens jeux, de subtiliser un peu plus, de raffiner cet examen que l
3031 rt, essayer de prolonger encore les anciens jeux, de subtiliser un peu plus, de raffiner cet examen que la pensée « libre 
3032 core les anciens jeux, de subtiliser un peu plus, de raffiner cet examen que la pensée « libre » fait d’elle-même, cette c
3033 ubtiliser un peu plus, de raffiner cet examen que la pensée « libre » fait d’elle-même, cette connaissance de l’homme qui
3034 raffiner cet examen que la pensée « libre » fait d’ elle-même, cette connaissance de l’homme qui ne « connaît » pas en act
3035 ée « libre » fait d’elle-même, cette connaissance de l’homme qui ne « connaît » pas en acte, qui se souvient seulement d’a
3036 « libre » fait d’elle-même, cette connaissance de l’ homme qui ne « connaît » pas en acte, qui se souvient seulement d’avoi
3037  connaît » pas en acte, qui se souvient seulement d’ avoir connu… Dans les deux cas, il ne s’agit au fond que de refuges, d
3038 te, qui se souvient seulement d’avoir connu… Dans les deux cas, il ne s’agit au fond que de refuges, de facilité. C’est ref
3039 onnu… Dans les deux cas, il ne s’agit au fond que de refuges, de facilité. C’est refuser le conflit, non le résoudre. Car
3040 es deux cas, il ne s’agit au fond que de refuges, de facilité. C’est refuser le conflit, non le résoudre. Car la question,
3041 u fond que de refuges, de facilité. C’est refuser le conflit, non le résoudre. Car la question, la permanente et vraie que
3042 fuges, de facilité. C’est refuser le conflit, non le résoudre. Car la question, la permanente et vraie question est celle
3043 é. C’est refuser le conflit, non le résoudre. Car la question, la permanente et vraie question est celle des relations néc
3044 ser le conflit, non le résoudre. Car la question, la permanente et vraie question est celle des relations nécessaires entr
3045 uestion est celle des relations nécessaires entre l’ esprit individuel, et l’espèce, maîtresse du corps. L’alternative que
3046 lations nécessaires entre l’esprit individuel, et l’ espèce, maîtresse du corps. L’alternative que je viens d’indiquer — en
3047 prit individuel, et l’espèce, maîtresse du corps. L’ alternative que je viens d’indiquer — engagement dans la masse, ou ref
3048 e, maîtresse du corps. L’alternative que je viens d’ indiquer — engagement dans la masse, ou refuge dans l’esprit pur — ne
3049 rnative que je viens d’indiquer — engagement dans la masse, ou refuge dans l’esprit pur — ne joue qu’entre deux abandons,
3050 diquer — engagement dans la masse, ou refuge dans l’ esprit pur — ne joue qu’entre deux abandons, entre deux fuites : devan
3051 ns, entre deux fuites : devant soi-même ou devant le monde. Il serait temps d’envisager maintenant comment l’homme peut êt
3052 vant soi-même ou devant le monde. Il serait temps d’ envisager maintenant comment l’homme peut être présent au monde et à s
3053 e. Il serait temps d’envisager maintenant comment l’ homme peut être présent au monde et à soi-même conjointement. Problème
3054 des siècles qui viennent. C’est Goethe encore qui l’ a vu le premier. Et c’est pourquoi je pense qu’il nous est bon de repr
3055 er. Et c’est pourquoi je pense qu’il nous est bon de reprendre aujourd’hui son problème, là où il l’a porté, et dans ses t
3056 n de reprendre aujourd’hui son problème, là où il l’ a porté, et dans ses termes. ⁂ La pensée doit conduire l’action ; mais
3057 oblème, là où il l’a porté, et dans ses termes. ⁂ La pensée doit conduire l’action ; mais sans agir, elle n’est pas vraie
3058 té, et dans ses termes. ⁂ La pensée doit conduire l’ action ; mais sans agir, elle n’est pas vraie pensée. L’individu ne sa
3059 on ; mais sans agir, elle n’est pas vraie pensée. L’ individu ne saurait s’accomplir qu’en relation avec l’espèce, mais l’e
3060 dividu ne saurait s’accomplir qu’en relation avec l’ espèce, mais l’espèce ne peut avancer que sur la trace des grands indi
3061 it s’accomplir qu’en relation avec l’espèce, mais l’ espèce ne peut avancer que sur la trace des grands individus. La défin
3062 c l’espèce, mais l’espèce ne peut avancer que sur la trace des grands individus. La définition même de l’homme, ce qu’il a
3063 ut avancer que sur la trace des grands individus. La définition même de l’homme, ce qu’il a proprement d’humain, c’est cet
3064 la trace des grands individus. La définition même de l’homme, ce qu’il a proprement d’humain, c’est cette tension entre le
3065 trace des grands individus. La définition même de l’ homme, ce qu’il a proprement d’humain, c’est cette tension entre les a
3066 définition même de l’homme, ce qu’il a proprement d’ humain, c’est cette tension entre les autres et lui, et le problème es
3067 a proprement d’humain, c’est cette tension entre les autres et lui, et le problème est de trouver, tout en marchant, un éq
3068 , c’est cette tension entre les autres et lui, et le problème est de trouver, tout en marchant, un équilibre entre ces for
3069 nsion entre les autres et lui, et le problème est de trouver, tout en marchant, un équilibre entre ces forces antagonistes
3070 hant, un équilibre entre ces forces antagonistes, de telle façon que loin de se nier ou de s’exclure, elles s’éduquent et
3071 tagonistes, de telle façon que loin de se nier ou de s’exclure, elles s’éduquent et se forment l’une par l’autre. Mais l’i
3072 s’éduquent et se forment l’une par l’autre. Mais l’ importance respective des deux pôles, société et individu, a varié dep
3073 pôles, société et individu, a varié depuis Goethe d’ une manière appréciable. Les suites et les retentissements d’une varia
3074 a varié depuis Goethe d’une manière appréciable. Les suites et les retentissements d’une variation de cette nature font vo
3075 s Goethe d’une manière appréciable. Les suites et les retentissements d’une variation de cette nature font voir qu’elle est
3076 re appréciable. Les suites et les retentissements d’ une variation de cette nature font voir qu’elle est le vrai ressort de
3077 Les suites et les retentissements d’une variation de cette nature font voir qu’elle est le vrai ressort de toute l’Histoir
3078 e variation de cette nature font voir qu’elle est le vrai ressort de toute l’Histoire. ⁂ Goethe vivait dans un ordre socia
3079 ette nature font voir qu’elle est le vrai ressort de toute l’Histoire. ⁂ Goethe vivait dans un ordre social dont les signe
3080 re font voir qu’elle est le vrai ressort de toute l’ Histoire. ⁂ Goethe vivait dans un ordre social dont les signes visible
3081 stoire. ⁂ Goethe vivait dans un ordre social dont les signes visibles et tangibles paraissaient solidement organisés. Le dé
3082 s et tangibles paraissaient solidement organisés. Le désordre en revanche régnait comme un vertige fascinant à l’intérieur
3083 it se saisir en soi : ainsi Werther se jette dans le suicide à cause de sa rupture avec le monde. Qu’est-ce à dire ? c’est
3084 jette dans le suicide à cause de sa rupture avec le monde. Qu’est-ce à dire ? c’est qu’il tombe en soi. Il n’y trouve pas
3085 ire ? c’est qu’il tombe en soi. Il n’y trouve pas de quoi durer, ni rien de ferme où poser le pied. Il se donne tort, et n
3086 en soi. Il n’y trouve pas de quoi durer, ni rien de ferme où poser le pied. Il se donne tort, et non au monde. Tout le pr
3087 ouve pas de quoi durer, ni rien de ferme où poser le pied. Il se donne tort, et non au monde. Tout le problème de l’équili
3088 le pied. Il se donne tort, et non au monde. Tout le problème de l’équilibre goethéen se pose à partir de Werther, contre
3089 se donne tort, et non au monde. Tout le problème de l’équilibre goethéen se pose à partir de Werther, contre lui, ou plut
3090 donne tort, et non au monde. Tout le problème de l’ équilibre goethéen se pose à partir de Werther, contre lui, ou plutôt
3091 de Werther, contre lui, ou plutôt contre sa mort. Le moyen de vivre — de survivre à Werther — et de supporter la condition
3092 r, contre lui, ou plutôt contre sa mort. Le moyen de vivre — de survivre à Werther — et de supporter la condition sociale,
3093 ui, ou plutôt contre sa mort. Le moyen de vivre —  de survivre à Werther — et de supporter la condition sociale, ce sera po
3094 t. Le moyen de vivre — de survivre à Werther — et de supporter la condition sociale, ce sera pour Goethe, désormais, de se
3095 e vivre — de survivre à Werther — et de supporter la condition sociale, ce sera pour Goethe, désormais, de se construire u
3096 ondition sociale, ce sera pour Goethe, désormais, de se construire un ordre individuel aussi solide et organique que celui
3097 uel aussi solide et organique que celui qui régit l’ extérieur. Voilà le sens qu’il va donner à ses relations avec le monde
3098 organique que celui qui régit l’extérieur. Voilà le sens qu’il va donner à ses relations avec le monde : le commerce de l
3099 oilà le sens qu’il va donner à ses relations avec le monde : le commerce de la société, l’action et le service d’autrui lu
3100 s qu’il va donner à ses relations avec le monde : le commerce de la société, l’action et le service d’autrui lui demeurent
3101 onner à ses relations avec le monde : le commerce de la société, l’action et le service d’autrui lui demeurent indispensab
3102 er à ses relations avec le monde : le commerce de la société, l’action et le service d’autrui lui demeurent indispensables
3103 ations avec le monde : le commerce de la société, l’ action et le service d’autrui lui demeurent indispensables, non point
3104 le monde : le commerce de la société, l’action et le service d’autrui lui demeurent indispensables, non point qu’il voie e
3105 le commerce de la société, l’action et le service d’ autrui lui demeurent indispensables, non point qu’il voie en eux sa fi
3106 x sa fin, mais parce que seuls ils lui permettent de se réaliser, de se construire, de maîtriser l’anarchie intérieure de
3107 arce que seuls ils lui permettent de se réaliser, de se construire, de maîtriser l’anarchie intérieure de sa jeunesse inoc
3108 lui permettent de se réaliser, de se construire, de maîtriser l’anarchie intérieure de sa jeunesse inoccupée, enfin de do
3109 nt de se réaliser, de se construire, de maîtriser l’ anarchie intérieure de sa jeunesse inoccupée, enfin de dominer dans l’
3110 se construire, de maîtriser l’anarchie intérieure de sa jeunesse inoccupée, enfin de dominer dans l’espace d’une seule vie
3111 archie intérieure de sa jeunesse inoccupée, enfin de dominer dans l’espace d’une seule vie ce romantisme où trois générati
3112 e de sa jeunesse inoccupée, enfin de dominer dans l’ espace d’une seule vie ce romantisme où trois générations vont se déba
3113 eunesse inoccupée, enfin de dominer dans l’espace d’ une seule vie ce romantisme où trois générations vont se débattre et s
3114 ations vont se débattre et s’épuiser. Goethe sera l’ homme en relation avec le monde, la société, et la nature ; mais de ce
3115 t s’épuiser. Goethe sera l’homme en relation avec le monde, la société, et la nature ; mais de cette relation, de cette te
3116 r. Goethe sera l’homme en relation avec le monde, la société, et la nature ; mais de cette relation, de cette tension, la
3117 l’homme en relation avec le monde, la société, et la nature ; mais de cette relation, de cette tension, la résultante sera
3118 on avec le monde, la société, et la nature ; mais de cette relation, de cette tension, la résultante sera constamment diri
3119 a société, et la nature ; mais de cette relation, de cette tension, la résultante sera constamment dirigée vers lui-même,
3120 ature ; mais de cette relation, de cette tension, la résultante sera constamment dirigée vers lui-même, je veux dire vers
3121 e vers lui-même, je veux dire vers son moi idéal, le plus hautement organisé et autonome. L’admirable objectivité de son r
3122 oi idéal, le plus hautement organisé et autonome. L’ admirable objectivité de son regard n’est en fin de compte qu’une disc
3123 ent organisé et autonome. L’admirable objectivité de son regard n’est en fin de compte qu’une discipline éducative dont il
3124 it). Rien n’est plus significatif à cet égard que les notes sur Venise du Journal italien. Tout au début je trouve ces deux
3125 x phrases splendides : « J’ai considéré tout cela d’ un regard tranquille et subtil, et je me suis réjoui de cette grande e
3126 regard tranquille et subtil, et je me suis réjoui de cette grande existence. » « Je me suis hâté d’aller voir la place Sai
3127 ui de cette grande existence. » « Je me suis hâté d’ aller voir la place Saint-Marc, et mon esprit maintenant est enrichi e
3128 rande existence. » « Je me suis hâté d’aller voir la place Saint-Marc, et mon esprit maintenant est enrichi et agrandi de
3129 , et mon esprit maintenant est enrichi et agrandi de cette image. » Le regard qu’il porte sur le monde est l’un des plus p
3130 intenant est enrichi et agrandi de cette image. » Le regard qu’il porte sur le monde est l’un des plus précis qui furent j
3131 randi de cette image. » Le regard qu’il porte sur le monde est l’un des plus précis qui furent jamais portés, mais c’est e
3132 st en lui, dans son esprit, qu’il veut en mesurer la force : bien voir, c’est accorder son âme aux dimensions des choses v
3133 nsions des choses vues. Parfois il semblerait que l’ équilibre entre sa vision et le monde soit presque absolument atteint.
3134 il semblerait que l’équilibre entre sa vision et le monde soit presque absolument atteint. Et pourtant comment ne point s
3135 ment atteint. Et pourtant comment ne point sentir le précepte individuel, la leçon de sagesse intérieure qui se dégage de
3136 t comment ne point sentir le précepte individuel, la leçon de sagesse intérieure qui se dégage de ses descriptions et les
3137 ne point sentir le précepte individuel, la leçon de sagesse intérieure qui se dégage de ses descriptions et les affecte e
3138 uel, la leçon de sagesse intérieure qui se dégage de ses descriptions et les affecte encore d’un sens certain : « À part l
3139 e intérieure qui se dégage de ses descriptions et les affecte encore d’un sens certain : « À part l’église Saint-Marc, je n
3140 dégage de ses descriptions et les affecte encore d’ un sens certain : « À part l’église Saint-Marc, je n’ai visité aucun b
3141 t les affecte encore d’un sens certain : « À part l’ église Saint-Marc, je n’ai visité aucun bâtiment. Il y a bien assez à
3142 un bâtiment. Il y a bien assez à faire dehors, et le peuple m’intéresse infiniment. Hier, je suis resté longtemps au march
3143 orte donc que peu de choses, comme cela me vient. L’ idée maîtresse qui de nouveau s’impose à moi, ici, c’est celle du peup
3144 de masse ! Et une existence nécessaire, dépourvue d’ arbitraire. Cette peuplade ne s’est pas réfugiée sur ces îles pour son
3145 caprice… » « Une existence nécessaire, dépourvue d’ arbitraire », voilà la leçon qu’il se répète pour lui-même, l’idéal qu
3146 tence nécessaire, dépourvue d’arbitraire », voilà la leçon qu’il se répète pour lui-même, l’idéal qu’il a su opposer au St
3147  », voilà la leçon qu’il se répète pour lui-même, l’ idéal qu’il a su opposer au Sturm und Drang de sa jeunesse. Mais encor
3148 me, l’idéal qu’il a su opposer au Sturm und Drang de sa jeunesse. Mais encore une fois il s’agit pour lui d’une nécessité
3149 jeunesse. Mais encore une fois il s’agit pour lui d’ une nécessité tout intérieure, d’une loi comparable à celles qu’il a s
3150 s’agit pour lui d’une nécessité tout intérieure, d’ une loi comparable à celles qu’il a su découvrir dans les plantes : lo
3151 loi comparable à celles qu’il a su découvrir dans les plantes : loi de la forme organisatrice de l’individu autonome. ⁂ Inv
3152 elles qu’il a su découvrir dans les plantes : loi de la forme organisatrice de l’individu autonome. ⁂ Inverser les données
3153 es qu’il a su découvrir dans les plantes : loi de la forme organisatrice de l’individu autonome. ⁂ Inverser les données du
3154 dans les plantes : loi de la forme organisatrice de l’individu autonome. ⁂ Inverser les données du problème goethéen, tou
3155 ns les plantes : loi de la forme organisatrice de l’ individu autonome. ⁂ Inverser les données du problème goethéen, tout e
3156 organisatrice de l’individu autonome. ⁂ Inverser les données du problème goethéen, tout en se maintenant dans leur plan, c
3157 lème actuel. Notre pensée nous donne des modèles d’ ordre que la société toute défaite qui est la nôtre ne paraît plus cap
3158 Notre pensée nous donne des modèles d’ordre que la société toute défaite qui est la nôtre ne paraît plus capable de subi
3159 èles d’ordre que la société toute défaite qui est la nôtre ne paraît plus capable de subir. Il y a, ou tout au moins il pe
3160 e défaite qui est la nôtre ne paraît plus capable de subir. Il y a, ou tout au moins il peut y avoir beaucoup plus d’ordre
3161 a, ou tout au moins il peut y avoir beaucoup plus d’ ordre en nous que dans le monde. Le vertige est à l’extérieur. Et lors
3162 ut y avoir beaucoup plus d’ordre en nous que dans le monde. Le vertige est à l’extérieur. Et lorsque éclate le conflit ent
3163 beaucoup plus d’ordre en nous que dans le monde. Le vertige est à l’extérieur. Et lorsque éclate le conflit entre notre m
3164 ordre en nous que dans le monde. Le vertige est à l’ extérieur. Et lorsque éclate le conflit entre notre moi et le monde c’
3165 . Le vertige est à l’extérieur. Et lorsque éclate le conflit entre notre moi et le monde c’est au monde que nous donnons t
3166 . Et lorsque éclate le conflit entre notre moi et le monde c’est au monde que nous donnons tort. Nous le mettons en questi
3167 monde c’est au monde que nous donnons tort. Nous le mettons en question, nous démasquons son arbitraire, nous refusons le
3168 on, nous démasquons son arbitraire, nous refusons les règles de son jeu, et la plupart de ses établissements ne sont pour n
3169 masquons son arbitraire, nous refusons les règles de son jeu, et la plupart de ses établissements ne sont pour nous que si
3170 e signes du désordre. C’est à son anarchie, non à la nôtre, que nous déclarons cette guerre que l’on appelle révolution. A
3171 n à la nôtre, que nous déclarons cette guerre que l’ on appelle révolution. Ainsi notre révolte même assure nos relations a
3172 insi notre révolte même assure nos relations avec le monde. La tension se produit de nouveau entre les pôles individu et s
3173 révolte même assure nos relations avec le monde. La tension se produit de nouveau entre les pôles individu et société. Ma
3174 le monde. La tension se produit de nouveau entre les pôles individu et société. Mais sa résultante change de signe : elle
3175 es individu et société. Mais sa résultante change de signe : elle pointe sa flèche contre la société8. Nous ne pouvons nou
3176 te change de signe : elle pointe sa flèche contre la société8. Nous ne pouvons nous réaliser que dans le corps à corps ave
3177 société8. Nous ne pouvons nous réaliser que dans le corps à corps avec le monde et c’est toujours le conflit goethéen ; m
3178 vons nous réaliser que dans le corps à corps avec le monde et c’est toujours le conflit goethéen ; mais aujourd’hui tout s
3179 le corps à corps avec le monde et c’est toujours le conflit goethéen ; mais aujourd’hui tout se passe comme si le but fin
3180 oethéen ; mais aujourd’hui tout se passe comme si le but final était bien moins de nous réaliser que d’informer un monde n
3181 t se passe comme si le but final était bien moins de nous réaliser que d’informer un monde neuf, qui enfin nous paraisse a
3182 e but final était bien moins de nous réaliser que d’ informer un monde neuf, qui enfin nous paraisse acceptable. Les « leço
3183 n monde neuf, qui enfin nous paraisse acceptable. Les « leçons » que nous tirons aujourd’hui du spectacle des gens, de l’ex
3184 ue nous tirons aujourd’hui du spectacle des gens, de l’examen de leurs coutumes, ou de celui de leurs raisons, ces leçons
3185 nous tirons aujourd’hui du spectacle des gens, de l’ examen de leurs coutumes, ou de celui de leurs raisons, ces leçons ne
3186 ns aujourd’hui du spectacle des gens, de l’examen de leurs coutumes, ou de celui de leurs raisons, ces leçons ne sont plus
3187 tacle des gens, de l’examen de leurs coutumes, ou de celui de leurs raisons, ces leçons ne sont plus destinées à notre seu
3188 gens, de l’examen de leurs coutumes, ou de celui de leurs raisons, ces leçons ne sont plus destinées à notre seul usage i
3189 inées à notre seul usage interne : elles prennent l’ allure de revendications contre le désordre établi. De ce simple chang
3190 otre seul usage interne : elles prennent l’allure de revendications contre le désordre établi. De ce simple changement de
3191 elles prennent l’allure de revendications contre le désordre établi. De ce simple changement de signe dont l’importance n
3192 lure de revendications contre le désordre établi. De ce simple changement de signe dont l’importance nous est encore incal
3193 ontre le désordre établi. De ce simple changement de signe dont l’importance nous est encore incalculable, je voudrais ind
3194 dre établi. De ce simple changement de signe dont l’ importance nous est encore incalculable, je voudrais indiquer maintena
3195 s premiers effets sensibles : son contrecoup dans la littérature. L’effort de Goethe contre lui-même vise à la création d’
3196 s sensibles : son contrecoup dans la littérature. L’ effort de Goethe contre lui-même vise à la création d’un ordre interne
3197 es : son contrecoup dans la littérature. L’effort de Goethe contre lui-même vise à la création d’un ordre interne, d’une o
3198 rature. L’effort de Goethe contre lui-même vise à la création d’un ordre interne, d’une objectivité intime. Les témoignage
3199 fort de Goethe contre lui-même vise à la création d’ un ordre interne, d’une objectivité intime. Les témoignages les plus c
3200 e lui-même vise à la création d’un ordre interne, d’ une objectivité intime. Les témoignages les plus convaincants de cet o
3201 ion d’un ordre interne, d’une objectivité intime. Les témoignages les plus convaincants de cet ordre, et qui le confirment
3202 nterne, d’une objectivité intime. Les témoignages les plus convaincants de cet ordre, et qui le confirment le mieux, ce son
3203 ité intime. Les témoignages les plus convaincants de cet ordre, et qui le confirment le mieux, ce sont les œuvres. Une œuv
3204 gnages les plus convaincants de cet ordre, et qui le confirment le mieux, ce sont les œuvres. Une œuvre littéraire, pour G
3205 s convaincants de cet ordre, et qui le confirment le mieux, ce sont les œuvres. Une œuvre littéraire, pour Goethe, joue le
3206 cet ordre, et qui le confirment le mieux, ce sont les œuvres. Une œuvre littéraire, pour Goethe, joue le rôle d’un objet ex
3207 s œuvres. Une œuvre littéraire, pour Goethe, joue le rôle d’un objet exemplaire : c’est un modèle de composition disciplin
3208 . Une œuvre littéraire, pour Goethe, joue le rôle d’ un objet exemplaire : c’est un modèle de composition disciplinée et or
3209 e le rôle d’un objet exemplaire : c’est un modèle de composition disciplinée et organique. Iphigénie ou Les affinités élec
3210 omposition disciplinée et organique. Iphigénie ou Les affinités électives sont à la fois des preuves d’une maîtrise de soi-
3211 es affinités électives sont à la fois des preuves d’ une maîtrise de soi-même déjà conquise, et des moyens de la parfaire e
3212 ectives sont à la fois des preuves d’une maîtrise de soi-même déjà conquise, et des moyens de la parfaire en l’enseignant.
3213 maîtrise de soi-même déjà conquise, et des moyens de la parfaire en l’enseignant. Ce que Goethe doit au monde, c’est de de
3214 trise de soi-même déjà conquise, et des moyens de la parfaire en l’enseignant. Ce que Goethe doit au monde, c’est de deven
3215 me déjà conquise, et des moyens de la parfaire en l’ enseignant. Ce que Goethe doit au monde, c’est de devenir Goethe. Il d
3216 l’enseignant. Ce que Goethe doit au monde, c’est de devenir Goethe. Il doit montrer l’exemple d’un individu qui a su tire
3217 u monde, c’est de devenir Goethe. Il doit montrer l’ exemple d’un individu qui a su tirer du monde où il est né les nourrit
3218 ’est de devenir Goethe. Il doit montrer l’exemple d’ un individu qui a su tirer du monde où il est né les nourritures les p
3219 ’un individu qui a su tirer du monde où il est né les nourritures les plus richement assimilables. Il choisit, il compose,
3220 a su tirer du monde où il est né les nourritures les plus richement assimilables. Il choisit, il compose, il n’accepte que
3221 tériaux purs et nobles. Il s’accomplit enfin dans l’ œuvre d’art, se comportant vis-à-vis de lui-même comme il fait vis-à-v
3222 ant vis-à-vis de lui-même comme il fait vis-à-vis d’ un « sujet ». Mais, tout inverse, notre effort contre le monde vise à
3223  sujet ». Mais, tout inverse, notre effort contre le monde vise à l’affirmation d’un ordre externe, d’une communauté vivan
3224 tout inverse, notre effort contre le monde vise à l’ affirmation d’un ordre externe, d’une communauté vivante. Les témoigna
3225 notre effort contre le monde vise à l’affirmation d’ un ordre externe, d’une communauté vivante. Les témoignages que nous d
3226 le monde vise à l’affirmation d’un ordre externe, d’ une communauté vivante. Les témoignages que nous devons porter en fave
3227 ion d’un ordre externe, d’une communauté vivante. Les témoignages que nous devons porter en faveur de cet ordre à créer ne
3228 eur de cet ordre à créer ne pourront plus revêtir la forme d’œuvres closes, suffisantes en soi, objectives : car prétendan
3229 t ordre à créer ne pourront plus revêtir la forme d’ œuvres closes, suffisantes en soi, objectives : car prétendant à servi
3230 ntes en soi, objectives : car prétendant à servir de modèles, de telles œuvres auraient d’autant moins de puissance exempl
3231 objectives : car prétendant à servir de modèles, de telles œuvres auraient d’autant moins de puissance exemplaire et d’ef
3232 nt à servir de modèles, de telles œuvres auraient d’ autant moins de puissance exemplaire et d’efficace qu’elles seraient p
3233 modèles, de telles œuvres auraient d’autant moins de puissance exemplaire et d’efficace qu’elles seraient plus parfaites,
3234 uraient d’autant moins de puissance exemplaire et d’ efficace qu’elles seraient plus parfaites, c’est-à-dire détachées de n
3235 s seraient plus parfaites, c’est-à-dire détachées de nos contingences présentes. Faites pour durer, elles resteraient des
3236 es pour durer, elles resteraient des « utopies ». Les seuls modèles que nous puissions prétendre offrir, ce sont les preuve
3237 èles que nous puissions prétendre offrir, ce sont les preuves de notre engagement dans la réalité vulgaire du monde actuel.
3238 s puissions prétendre offrir, ce sont les preuves de notre engagement dans la réalité vulgaire du monde actuel. Si nous de
3239 rir, ce sont les preuves de notre engagement dans la réalité vulgaire du monde actuel. Si nous devons quelque chose à ce m
3240 ons quelque chose à ce monde, c’est notre volonté de le changer, de le connaître afin de le changer, de le connaître en ta
3241 quelque chose à ce monde, c’est notre volonté de le changer, de le connaître afin de le changer, de le connaître en tant
3242 se à ce monde, c’est notre volonté de le changer, de le connaître afin de le changer, de le connaître en tant que notre ac
3243 à ce monde, c’est notre volonté de le changer, de le connaître afin de le changer, de le connaître en tant que notre actio
3244 re volonté de le changer, de le connaître afin de le changer, de le connaître en tant que notre action peut modifier le so
3245 e le changer, de le connaître afin de le changer, de le connaître en tant que notre action peut modifier le sort de ses vi
3246 e changer, de le connaître afin de le changer, de le connaître en tant que notre action peut modifier le sort de ses victi
3247 connaître en tant que notre action peut modifier le sort de ses victimes, dont nous sommes. Je vois alors une littérature
3248 re en tant que notre action peut modifier le sort de ses victimes, dont nous sommes. Je vois alors une littérature de tran
3249 , dont nous sommes. Je vois alors une littérature de transition dont l’ambition ne sera plus de faire des œuvres (au sens
3250 Je vois alors une littérature de transition dont l’ ambition ne sera plus de faire des œuvres (au sens ancien) mais d’être
3251 rature de transition dont l’ambition ne sera plus de faire des œuvres (au sens ancien) mais d’être à tout moment à l’œuvre
3252 ra plus de faire des œuvres (au sens ancien) mais d’ être à tout moment à l’œuvre toujours ouverte vers le monde, trop près
3253 vres (au sens ancien) mais d’être à tout moment à l’ œuvre toujours ouverte vers le monde, trop près de lui pour n’en pas r
3254 tre à tout moment à l’œuvre toujours ouverte vers le monde, trop près de lui pour n’en pas reproduire certains désordres o
3255 iscontinuités, par là très infidèle aux préceptes de « l’Art », mais découvrant peut-être au-delà, dans les conditions mêm
3256 tinuités, par là très infidèle aux préceptes de «  l’ Art », mais découvrant peut-être au-delà, dans les conditions mêmes de
3257  l’Art », mais découvrant peut-être au-delà, dans les conditions mêmes de son action, un nouveau style, plus efficace et pl
3258 rant peut-être au-delà, dans les conditions mêmes de son action, un nouveau style, plus efficace et plus intime. Je ne voi
3259 e ne vois pas cette littérature bannissant toutes les formes anciennes. Mais ces formes étaient exclusives, elles souffriro
3260 ces formes étaient exclusives, elles souffriront de cette nouveauté, c’est à prévoir. Un écrivain qui se rend compte du p
3261 eut plus s’adonner sans scrupules à certains jeux d’ un art hautain, fermé sur soi. Je ne dis pas qu’il en soit incapable,
3262 en soit incapable, qu’il n’aime plus cela, qu’il le condamne dans l’absolu. Je dis seulement que sa bonne conscience — et
3263 e, qu’il n’aime plus cela, qu’il le condamne dans l’ absolu. Je dis seulement que sa bonne conscience — et je ne sais quell
3264 ience — et je ne sais quelle sourde curiosité ! —  le pousse ailleurs, lui indique d’autres buts, l’invite à s’abaisser à u
3265 — le pousse ailleurs, lui indique d’autres buts, l’ invite à s’abaisser à un niveau où l’art ancien perd ses prestiges, où
3266 autres buts, l’invite à s’abaisser à un niveau où l’ art ancien perd ses prestiges, où l’esprit se découvre d’autres tâches
3267 un niveau où l’art ancien perd ses prestiges, où l’ esprit se découvre d’autres tâches. Goethe encore doit choisir ses suj
3268 tâches. Goethe encore doit choisir ses sujets et le cadre de ses pensées dans un certain ordre « élevé » où certaines har
3269 Goethe encore doit choisir ses sujets et le cadre de ses pensées dans un certain ordre « élevé » où certaines harmonies so
3270 ce élaborées : antiquité, société policée, objets d’ art, paysages célèbres, tout ce qui met une certaine distance entre le
3271 bres, tout ce qui met une certaine distance entre le lecteur et l’« artiste », mais aussi tout ce qui peut agrandir et cla
3272 qui met une certaine distance entre le lecteur et l’ « artiste », mais aussi tout ce qui peut agrandir et clarifier l’unive
3273 mais aussi tout ce qui peut agrandir et clarifier l’ univers intérieur. Nous, c’est le monde informe, impersonnel, hétérocl
3274 dir et clarifier l’univers intérieur. Nous, c’est le monde informe, impersonnel, hétéroclite et quotidien qu’il nous faudr
3275 nous faudrait clarifier et « reprendre ». Mais où le prendre sinon au plus près, et tout d’abord dans nos contacts humains
3276 s près, et tout d’abord dans nos contacts humains les plus banals ! Nous serons d’autant plus assurés de le toucher utileme
3277 os contacts humains les plus banals ! Nous serons d’ autant plus assurés de le toucher utilement que nous aurons moins calc
3278 s plus banals ! Nous serons d’autant plus assurés de le toucher utilement que nous aurons moins calculé le mode et le lieu
3279 lus banals ! Nous serons d’autant plus assurés de le toucher utilement que nous aurons moins calculé le mode et le lieu de
3280 e toucher utilement que nous aurons moins calculé le mode et le lieu des contacts. D’où je vois naître une littérature de
3281 tilement que nous aurons moins calculé le mode et le lieu des contacts. D’où je vois naître une littérature de circonstanc
3282 ns moins calculé le mode et le lieu des contacts. D’ où je vois naître une littérature de circonstances, et de circonstance
3283 des contacts. D’où je vois naître une littérature de circonstances, et de circonstances non choisies, de rencontres, une s
3284 vois naître une littérature de circonstances, et de circonstances non choisies, de rencontres, une sorte de perpétuel jou
3285 circonstances, et de circonstances non choisies, de rencontres, une sorte de perpétuel journal de nos relations avec le m
3286 constances non choisies, de rencontres, une sorte de perpétuel journal de nos relations avec le monde, empruntant toutes l
3287 es, de rencontres, une sorte de perpétuel journal de nos relations avec le monde, empruntant toutes les formes qu’on voudr
3288 sorte de perpétuel journal de nos relations avec le monde, empruntant toutes les formes qu’on voudra, roman, essai, comme
3289 de nos relations avec le monde, empruntant toutes les formes qu’on voudra, roman, essai, commentaires ou poèmes, la fiction
3290 ’on voudra, roman, essai, commentaires ou poèmes, la fiction n’étant plus qu’un alibi, ou peut-être une dernière pudeur… I
3291 bi, ou peut-être une dernière pudeur… Il faut que l’ esprit descende quelques degrés. Qu’il s’humilie — littéralement — pou
3292 par eux. Mais aussi rien n’est plus excitant pour la pensée, rien ne saurait mieux la provoquer à l’invention de prises no
3293 us excitant pour la pensée, rien ne saurait mieux la provoquer à l’invention de prises nouvelles ou de vérités plus toucha
3294 r la pensée, rien ne saurait mieux la provoquer à l’ invention de prises nouvelles ou de vérités plus touchantes que cette
3295 rien ne saurait mieux la provoquer à l’invention de prises nouvelles ou de vérités plus touchantes que cette découverte d
3296 la provoquer à l’invention de prises nouvelles ou de vérités plus touchantes que cette découverte du monde à un niveau où
3297 lle n’est pas connue, où elle n’a pas encore posé de repères, de relais, de miroirs, de faux-semblants. Cette descente de
3298 s connue, où elle n’a pas encore posé de repères, de relais, de miroirs, de faux-semblants. Cette descente de l’esprit dan
3299 ù elle n’a pas encore posé de repères, de relais, de miroirs, de faux-semblants. Cette descente de l’esprit dans le monde
3300 as encore posé de repères, de relais, de miroirs, de faux-semblants. Cette descente de l’esprit dans le monde quotidien, c
3301 is, de miroirs, de faux-semblants. Cette descente de l’esprit dans le monde quotidien, c’est le vrai progrès de l’esprit,
3302 de miroirs, de faux-semblants. Cette descente de l’ esprit dans le monde quotidien, c’est le vrai progrès de l’esprit, c’e
3303 e faux-semblants. Cette descente de l’esprit dans le monde quotidien, c’est le vrai progrès de l’esprit, c’est l’ouverture
3304 scente de l’esprit dans le monde quotidien, c’est le vrai progrès de l’esprit, c’est l’ouverture de notre vie aux « influx
3305 it dans le monde quotidien, c’est le vrai progrès de l’esprit, c’est l’ouverture de notre vie aux « influx de vigueur et d
3306 dans le monde quotidien, c’est le vrai progrès de l’ esprit, c’est l’ouverture de notre vie aux « influx de vigueur et de t
3307 otidien, c’est le vrai progrès de l’esprit, c’est l’ ouverture de notre vie aux « influx de vigueur et de tendresse réelle 
3308 st le vrai progrès de l’esprit, c’est l’ouverture de notre vie aux « influx de vigueur et de tendresse réelle », notre rép
3309 prit, c’est l’ouverture de notre vie aux « influx de vigueur et de tendresse réelle », notre réponse d’homme à toute la cr
3310 ouverture de notre vie aux « influx de vigueur et de tendresse réelle », notre réponse d’homme à toute la création, longte
3311 e vigueur et de tendresse réelle », notre réponse d’ homme à toute la création, longtemps trompée dans son « attente ardent
3312 tendresse réelle », notre réponse d’homme à toute la création, longtemps trompée dans son « attente ardente » ! 21 mai
3313 21 mai 1934 Pêche aux crevettes. — Pendant les jours de grande marée, entre deux flux, d’immenses plateaux rocheux,
3314 1934 Pêche aux crevettes. — Pendant les jours de grande marée, entre deux flux, d’immenses plateaux rocheux, pourpres,
3315 ndant les jours de grande marée, entre deux flux, d’ immenses plateaux rocheux, pourpres, jaunes et noirs se révèlent au-de
3316 ux, pourpres, jaunes et noirs se révèlent au-delà de la plage, nouveau pays tout grouillant de merveilles, d’eaux ruissela
3317 pourpres, jaunes et noirs se révèlent au-delà de la plage, nouveau pays tout grouillant de merveilles, d’eaux ruisselante
3318 au-delà de la plage, nouveau pays tout grouillant de merveilles, d’eaux ruisselantes et de vies monstrueuses, soudain port
3319 lage, nouveau pays tout grouillant de merveilles, d’ eaux ruisselantes et de vies monstrueuses, soudain porté à la lumière
3320 grouillant de merveilles, d’eaux ruisselantes et de vies monstrueuses, soudain porté à la lumière de midi, comme un secre
3321 omme un secret tragique et passionné s’étale sous le grand rire des dieux ! Armés de treilles à long manche, les jambes nu
3322 onné s’étale sous le grand rire des dieux ! Armés de treilles à long manche, les jambes nues, nous courons sur les roches
3323 rire des dieux ! Armés de treilles à long manche, les jambes nues, nous courons sur les roches tapissées d’algues sombres d
3324 à long manche, les jambes nues, nous courons sur les roches tapissées d’algues sombres dont le crépitement sous nos pas fa
3325 ambes nues, nous courons sur les roches tapissées d’ algues sombres dont le crépitement sous nos pas fait fuir et choir de
3326 ns sur les roches tapissées d’algues sombres dont le crépitement sous nos pas fait fuir et choir de tous côtés de petits c
3327 nt le crépitement sous nos pas fait fuir et choir de tous côtés de petits crabes. Des ruisseaux, des rivières impétueuses
3328 ent sous nos pas fait fuir et choir de tous côtés de petits crabes. Des ruisseaux, des rivières impétueuses parcourent ce
3329 étueuses parcourent ce territoire compliqué. Nous les suivons, dans l’eau jusqu’aux genoux, les jambes caressées de courant
3330 t ce territoire compliqué. Nous les suivons, dans l’ eau jusqu’aux genoux, les jambes caressées de courants froids, de cour
3331 é. Nous les suivons, dans l’eau jusqu’aux genoux, les jambes caressées de courants froids, de courants tièdes, de poissons,
3332 dans l’eau jusqu’aux genoux, les jambes caressées de courants froids, de courants tièdes, de poissons, de crabiots et de «
3333 genoux, les jambes caressées de courants froids, de courants tièdes, de poissons, de crabiots et de « laines ». À quelque
3334 caressées de courants froids, de courants tièdes, de poissons, de crabiots et de « laines ». À quelques mètres de la mer q
3335 courants froids, de courants tièdes, de poissons, de crabiots et de « laines ». À quelques mètres de la mer qui affleure l
3336 , de courants tièdes, de poissons, de crabiots et de « laines ». À quelques mètres de la mer qui affleure le tranchant du
3337 , de crabiots et de « laines ». À quelques mètres de la mer qui affleure le tranchant du plateau, la rivière s’élargit en
3338 e crabiots et de « laines ». À quelques mètres de la mer qui affleure le tranchant du plateau, la rivière s’élargit en bas
3339 aines ». À quelques mètres de la mer qui affleure le tranchant du plateau, la rivière s’élargit en bassins clairs aux prof
3340 s de la mer qui affleure le tranchant du plateau, la rivière s’élargit en bassins clairs aux profondeurs rougeâtres et dou
3341 doucement mouvantes. C’est là que nous commençons la pêche. Il faut se planter au centre du bassin, et fouiller et racler
3342 r au centre du bassin, et fouiller et racler sous les bords, entre le sable et les algues flottantes, avec le cercle rigide
3343 ssin, et fouiller et racler sous les bords, entre le sable et les algues flottantes, avec le cercle rigide du filet, puis
3344 iller et racler sous les bords, entre le sable et les algues flottantes, avec le cercle rigide du filet, puis retirer vivem
3345 ds, entre le sable et les algues flottantes, avec le cercle rigide du filet, puis retirer vivement la treille et l’égoutte
3346 le cercle rigide du filet, puis retirer vivement la treille et l’égoutter. On ramène un paquet de varech, un ou deux crab
3347 ide du filet, puis retirer vivement la treille et l’ égoutter. On ramène un paquet de varech, un ou deux crabes tout terreu
3348 ent la treille et l’égoutter. On ramène un paquet de varech, un ou deux crabes tout terreux, et parfois en se penchant sur
3349 rabes tout terreux, et parfois en se penchant sur la treille, on voit bondir d’un bord à l’autre quelque chose de transpar
3350 ois en se penchant sur la treille, on voit bondir d’ un bord à l’autre quelque chose de transparent ou de rosé ou de verdât
3351 on voit bondir d’un bord à l’autre quelque chose de transparent ou de rosé ou de verdâtre qu’il faut attraper comme une m
3352 un bord à l’autre quelque chose de transparent ou de rosé ou de verdâtre qu’il faut attraper comme une mouche et qui vous
3353 ’autre quelque chose de transparent ou de rosé ou de verdâtre qu’il faut attraper comme une mouche et qui vous saute dans
3354 attraper comme une mouche et qui vous saute dans la main et vous gratte la paume de ses antennes, de ses écailles et de s
3355 che et qui vous saute dans la main et vous gratte la paume de ses antennes, de ses écailles et de ses pattes. On fourre ce
3356 i vous saute dans la main et vous gratte la paume de ses antennes, de ses écailles et de ses pattes. On fourre cela dans l
3357 la main et vous gratte la paume de ses antennes, de ses écailles et de ses pattes. On fourre cela dans le sachet que l’on
3358 atte la paume de ses antennes, de ses écailles et de ses pattes. On fourre cela dans le sachet que l’on porte attaché à la
3359 es écailles et de ses pattes. On fourre cela dans le sachet que l’on porte attaché à la ceinture et qui se remplit de tres
3360 de ses pattes. On fourre cela dans le sachet que l’ on porte attaché à la ceinture et qui se remplit de tressaillements. N
3361 urre cela dans le sachet que l’on porte attaché à la ceinture et qui se remplit de tressaillements. Nous ne gardons que le
3362 ’on porte attaché à la ceinture et qui se remplit de tressaillements. Nous ne gardons que les plus belles crevettes, dites
3363 e remplit de tressaillements. Nous ne gardons que les plus belles crevettes, dites « bouquets », grosses comme le doigt, d’
3364 lles crevettes, dites « bouquets », grosses comme le doigt, d’un rose sombre, aux longues antennes grenat. Un jour nous av
3365 ttes, dites « bouquets », grosses comme le doigt, d’ un rose sombre, aux longues antennes grenat. Un jour nous avons pris u
3366 renat. Un jour nous avons pris une seiche énorme, de celles que les gens de l’île mangent (ils les coupent dans la longueu
3367 nous avons pris une seiche énorme, de celles que les gens de l’île mangent (ils les coupent dans la longueur et les conser
3368 ns pris une seiche énorme, de celles que les gens de l’île mangent (ils les coupent dans la longueur et les conservent pou
3369 pris une seiche énorme, de celles que les gens de l’ île mangent (ils les coupent dans la longueur et les conservent pour l
3370 rme, de celles que les gens de l’île mangent (ils les coupent dans la longueur et les conservent pour l’hiver). Vilaine bêt
3371 e les gens de l’île mangent (ils les coupent dans la longueur et les conservent pour l’hiver). Vilaine bête à peine ébauch
3372 ’île mangent (ils les coupent dans la longueur et les conservent pour l’hiver). Vilaine bête à peine ébauchée : un seul os
3373 s coupent dans la longueur et les conservent pour l’ hiver). Vilaine bête à peine ébauchée : un seul os aplati au milieu d’
3374 bauchée : un seul os aplati au milieu d’un paquet de chair dense et fade, et une tête aux gros yeux étalés, qui s’emboîte
3375 une tête aux gros yeux étalés, qui s’emboîte sur le reste on ne sait comment. C’est l’emblème de la rage imbécile : quand
3376 s’emboîte sur le reste on ne sait comment. C’est l’ emblème de la rage imbécile : quand on la replonge dans l’eau elle vou
3377 sur le reste on ne sait comment. C’est l’emblème de la rage imbécile : quand on la replonge dans l’eau elle vous éternue
3378 r le reste on ne sait comment. C’est l’emblème de la rage imbécile : quand on la replonge dans l’eau elle vous éternue son
3379 t. C’est l’emblème de la rage imbécile : quand on la replonge dans l’eau elle vous éternue son jet noir cinq ou six fois,
3380 e de la rage imbécile : quand on la replonge dans l’ eau elle vous éternue son jet noir cinq ou six fois, jusqu’à épuisemen
3381 sement, avant de se retirer dans son trou. Quand la marée remonte et nous chasse peu à peu vers la plage, nous nous attar
3382 nd la marée remonte et nous chasse peu à peu vers la plage, nous nous attardons encore à chercher dans les flaques d’eau t
3383 plage, nous nous attardons encore à chercher dans les flaques d’eau tiédie ou sous les pierres, des palourdes qu’on reconna
3384 nous attardons encore à chercher dans les flaques d’ eau tiédie ou sous les pierres, des palourdes qu’on reconnaît aux deux
3385 à chercher dans les flaques d’eau tiédie ou sous les pierres, des palourdes qu’on reconnaît aux deux petites cheminées rap
3386 ites cheminées rapprochées qu’elles ménagent dans le sable au-dessus d’elles — ou des coutelets qui font un trou en forme
3387 rochées qu’elles ménagent dans le sable au-dessus d’ elles — ou des coutelets qui font un trou en forme de serrure — ou des
3388 un trou en forme de serrure — ou des huîtres sur les murs des écluses à poisson. Il nous a fallu trois belles heures pour
3389 l nous a fallu trois belles heures pour rapporter de quoi déjeuner, des coups de soleil, et ces visions éclatantes de la c
3390 heures pour rapporter de quoi déjeuner, des coups de soleil, et ces visions éclatantes de la côte, ce flamboiement de l’im
3391 r, des coups de soleil, et ces visions éclatantes de la côte, ce flamboiement de l’imagination… ⁂ On cuit les crevettes to
3392 des coups de soleil, et ces visions éclatantes de la côte, ce flamboiement de l’imagination… ⁂ On cuit les crevettes toute
3393 es visions éclatantes de la côte, ce flamboiement de l’imagination… ⁂ On cuit les crevettes toutes vivantes, en les jetant
3394 visions éclatantes de la côte, ce flamboiement de l’ imagination… ⁂ On cuit les crevettes toutes vivantes, en les jetant da
3395 côte, ce flamboiement de l’imagination… ⁂ On cuit les crevettes toutes vivantes, en les jetant dans de l’eau qui bout. Aprè
3396 tion… ⁂ On cuit les crevettes toutes vivantes, en les jetant dans de l’eau qui bout. Après des soubresauts terribles — une
3397 les crevettes toutes vivantes, en les jetant dans de l’eau qui bout. Après des soubresauts terribles — une ou deux sautent
3398 crevettes toutes vivantes, en les jetant dans de l’ eau qui bout. Après des soubresauts terribles — une ou deux sautent ho
3399 ubresauts terribles — une ou deux sautent hors de la casserole —, elles se recroquevillent, rougissent, se durcissent… Je
3400 t, mais qu’est-ce que cela veut dire ? Je parlais de « l’attente ardente » des créatures, songeant au passage où l’Apôtre
3401 is qu’est-ce que cela veut dire ? Je parlais de «  l’ attente ardente » des créatures, songeant au passage où l’Apôtre nous
3402 e ardente » des créatures, songeant au passage où l’ Apôtre nous fait entendre ce soupir de toute la création vers la révél
3403 passage où l’Apôtre nous fait entendre ce soupir de toute la création vers la révélation des « enfants de lumière », et l
3404 où l’Apôtre nous fait entendre ce soupir de toute la création vers la révélation des « enfants de lumière », et la restaur
3405 fait entendre ce soupir de toute la création vers la révélation des « enfants de lumière », et la restauration de l’ordre
3406 oute la création vers la révélation des « enfants de lumière », et la restauration de l’ordre originel. Et voilà pratiquem
3407 vers la révélation des « enfants de lumière », et la restauration de l’ordre originel. Et voilà pratiquement la réponse de
3408 on des « enfants de lumière », et la restauration de l’ordre originel. Et voilà pratiquement la réponse de l’homme : pilla
3409 des « enfants de lumière », et la restauration de l’ ordre originel. Et voilà pratiquement la réponse de l’homme : pillage,
3410 ration de l’ordre originel. Et voilà pratiquement la réponse de l’homme : pillage, ruses, destruction, dévoration, le tout
3411 ’ordre originel. Et voilà pratiquement la réponse de l’homme : pillage, ruses, destruction, dévoration, le tout accompagné
3412 dre originel. Et voilà pratiquement la réponse de l’ homme : pillage, ruses, destruction, dévoration, le tout accompagné de
3413 ’homme : pillage, ruses, destruction, dévoration, le tout accompagné de sentiments « humains », admiration, répulsion, pit
3414 uses, destruction, dévoration, le tout accompagné de sentiments « humains », admiration, répulsion, pitié, etc. En somme,
3415 à une certaine « sympathie » (souffrir avec) que l’ homme éprouve pour ses victimes : « Je regrette vraiment beaucoup, mai
3416 mange. Dure nécessité, et croyez que cela me fend le cœur ! » Voilà la dernière trace de la conscience cosmique en nous, d
3417 cela me fend le cœur ! » Voilà la dernière trace de la conscience cosmique en nous, de la conscience de notre royauté néc
3418 la me fend le cœur ! » Voilà la dernière trace de la conscience cosmique en nous, de la conscience de notre royauté nécess
3419 dernière trace de la conscience cosmique en nous, de la conscience de notre royauté nécessaire et réparatrice. Il est prob
3420 nière trace de la conscience cosmique en nous, de la conscience de notre royauté nécessaire et réparatrice. Il est probabl
3421 la conscience cosmique en nous, de la conscience de notre royauté nécessaire et réparatrice. Il est probable que le tigre
3422 té nécessaire et réparatrice. Il est probable que le tigre en train de déchiqueter une jeune gazelle ne fait pas tant d’hi
3423 de déchiqueter une jeune gazelle ne fait pas tant d’ histoires, ne fait pas de sentiment. Et pourtant, ma sensiblerie n’est
3424 gazelle ne fait pas tant d’histoires, ne fait pas de sentiment. Et pourtant, ma sensiblerie n’est hypocrite que parce qu’e
3425 insuffisante. Elle est plus juste, et plus digne de l’homme que ces vertus de carnassiers que nous partageons, d’ailleurs
3426 suffisante. Elle est plus juste, et plus digne de l’ homme que ces vertus de carnassiers que nous partageons, d’ailleurs ma
3427 us juste, et plus digne de l’homme que ces vertus de carnassiers que nous partageons, d’ailleurs maladroitement, avec le t
3428 nous partageons, d’ailleurs maladroitement, avec le tigre et le requin. J’allais conclure : nos rapports avec la nature n
3429 eons, d’ailleurs maladroitement, avec le tigre et le requin. J’allais conclure : nos rapports avec la nature ne sont guère
3430 le requin. J’allais conclure : nos rapports avec la nature ne sont guère plus satisfaisants que nos rapports avec les hom
3431 nt guère plus satisfaisants que nos rapports avec les hommes. Mais attention : Si l’homme n’est que nature, il reste dans l
3432 nos rapports avec les hommes. Mais attention : Si l’ homme n’est que nature, il reste dans l’ordre naturel en tuant pour as
3433 tion : Si l’homme n’est que nature, il reste dans l’ ordre naturel en tuant pour assurer sa subsistance, en détruisant à so
3434 out ce qu’il trouve de plus faible que lui, comme le font tous les autres animaux. Si l’homme n’est que nature, mon scrupu
3435 trouve de plus faible que lui, comme le font tous les autres animaux. Si l’homme n’est que nature, mon scrupule est contre
3436 ue lui, comme le font tous les autres animaux. Si l’ homme n’est que nature, mon scrupule est contre nature. Et toute espèc
3437 , mon scrupule est contre nature. Et toute espèce de pacifisme ou d’humanitarisme, au bout du compte. C’est uniquement s’i
3438 st contre nature. Et toute espèce de pacifisme ou d’ humanitarisme, au bout du compte. C’est uniquement s’il y a dans l’hom
3439 au bout du compte. C’est uniquement s’il y a dans l’ homme une vocation surnaturelle, la mission de restaurer l’harmonie pr
3440 s’il y a dans l’homme une vocation surnaturelle, la mission de restaurer l’harmonie primitive, que ce scrupule se justifi
3441 ans l’homme une vocation surnaturelle, la mission de restaurer l’harmonie primitive, que ce scrupule se justifie : il appa
3442 ne vocation surnaturelle, la mission de restaurer l’ harmonie primitive, que ce scrupule se justifie : il apparaît alors co
3443 er écho, le dernier reproche, la dernière plainte de la justice cosmique blessée. Comme une prière muette en moi, toute ma
3444 écho, le dernier reproche, la dernière plainte de la justice cosmique blessée. Comme une prière muette en moi, toute machi
3445 s, ces idées-là : végétariens, théosophes et tout le ba-ta-clan. » Bien ridicules en effet les végétariens : un peu comme
3446 et tout le ba-ta-clan. » Bien ridicules en effet les végétariens : un peu comme les eunuques. Alors ? La question est tran
3447 ridicules en effet les végétariens : un peu comme les eunuques. Alors ? La question est tranchée ? Ou plutôt, il n’y a pas
3448 végétariens : un peu comme les eunuques. Alors ? La question est tranchée ? Ou plutôt, il n’y a pas de question ? Et ceux
3449 a question est tranchée ? Ou plutôt, il n’y a pas de question ? Et ceux qui se la posent — sans même parvenir à la résoudr
3450 plutôt, il n’y a pas de question ? Et ceux qui se la posent — sans même parvenir à la résoudre — sont simplement de pauvre
3451 ? Et ceux qui se la posent — sans même parvenir à la résoudre — sont simplement de pauvres types ? « Parlez-moi des avions
3452 ans même parvenir à la résoudre — sont simplement de pauvres types ? « Parlez-moi des avions de bombardement, de la sécuri
3453 lement de pauvres types ? « Parlez-moi des avions de bombardement, de la sécurité système si vis pacem, et du bifteck. Il
3454 types ? « Parlez-moi des avions de bombardement, de la sécurité système si vis pacem, et du bifteck. Il n’y a que ça de s
3455 pes ? « Parlez-moi des avions de bombardement, de la sécurité système si vis pacem, et du bifteck. Il n’y a que ça de séri
3456 tème si vis pacem, et du bifteck. Il n’y a que ça de sérieux. » L’homme est un animal raisonnable. C’est de plus en plus é
3457 cem, et du bifteck. Il n’y a que ça de sérieux. » L’ homme est un animal raisonnable. C’est de plus en plus évident. 22
3458 22 mai 1934 « C’est en notre vie seule que la nature vit. » (Coleridge). « Car nous sommes là pour deviner les cho
3459 » (Coleridge). « Car nous sommes là pour deviner les choses dans leurs natures particulières, alors elles nous en sont rec
3460 nous en sont reconnaissantes. » (C. F. Ramuz). «  D’ autant plus nous connaissons les choses particulières, d’autant plus n
3461 (C. F. Ramuz). « D’autant plus nous connaissons les choses particulières, d’autant plus nous connaissons Dieu » (Spinoza)
3462 t plus nous connaissons les choses particulières, d’ autant plus nous connaissons Dieu » (Spinoza). « Tout l’univers s’adr
3463 t plus nous connaissons Dieu » (Spinoza). « Tout l’ univers s’adresse à l’homme dans un langage ineffable qui se fait ente
3464 s Dieu » (Spinoza). « Tout l’univers s’adresse à l’ homme dans un langage ineffable qui se fait entendre dans l’intérieur
3465 ns un langage ineffable qui se fait entendre dans l’ intérieur de son âme, dans une partie de son être inconnue à lui-même.
3466 e ineffable qui se fait entendre dans l’intérieur de son âme, dans une partie de son être inconnue à lui-même. Quoi de plu
3467 ndre dans l’intérieur de son âme, dans une partie de son être inconnue à lui-même. Quoi de plus simple que d’imaginer que
3468 être inconnue à lui-même. Quoi de plus simple que d’ imaginer que cet effort de la nature pour pénétrer en nous n’est pas s
3469 Quoi de plus simple que d’imaginer que cet effort de la nature pour pénétrer en nous n’est pas sans une mystérieuse signif
3470 i de plus simple que d’imaginer que cet effort de la nature pour pénétrer en nous n’est pas sans une mystérieuse significa
3471 se signification ? » (Benjamin Constant). « Car la création a été soumise à la vanité — non de son gré mais à cause de c
3472 in Constant). « Car la création a été soumise à la vanité — non de son gré mais à cause de celui qui l’y a soumise — ave
3473 « Car la création a été soumise à la vanité — non de son gré mais à cause de celui qui l’y a soumise — avec l’espérance qu
3474 vanité — non de son gré mais à cause de celui qui l’ y a soumise — avec l’espérance qu’elle aussi sera affranchie de la ser
3475 ré mais à cause de celui qui l’y a soumise — avec l’ espérance qu’elle aussi sera affranchie de la servitude de la corrupti
3476  — avec l’espérance qu’elle aussi sera affranchie de la servitude de la corruption pour avoir part à la liberté de la gloi
3477 avec l’espérance qu’elle aussi sera affranchie de la servitude de la corruption pour avoir part à la liberté de la gloire
3478 nce qu’elle aussi sera affranchie de la servitude de la corruption pour avoir part à la liberté de la gloire des enfants d
3479 qu’elle aussi sera affranchie de la servitude de la corruption pour avoir part à la liberté de la gloire des enfants de D
3480 e la servitude de la corruption pour avoir part à la liberté de la gloire des enfants de Dieu. Or nous savons que jusqu’à
3481 ude de la corruption pour avoir part à la liberté de la gloire des enfants de Dieu. Or nous savons que jusqu’à ce jour, la
3482 de la corruption pour avoir part à la liberté de la gloire des enfants de Dieu. Or nous savons que jusqu’à ce jour, la cr
3483 avoir part à la liberté de la gloire des enfants de Dieu. Or nous savons que jusqu’à ce jour, la création tout entière so
3484 ants de Dieu. Or nous savons que jusqu’à ce jour, la création tout entière soupire et souffre des douleurs de l’enfantemen
3485 tion tout entière soupire et souffre des douleurs de l’enfantement… Car c’est en espérance que nous sommes sauvés. » (Roma
3486 n tout entière soupire et souffre des douleurs de l’ enfantement… Car c’est en espérance que nous sommes sauvés. » (Romains
3487 omains 8, 20-24). 24 mai 1934 On dirait que l’ homme n’est pas fait pour durer : la vie étale nous ennuie, c’est ce q
3488 On dirait que l’homme n’est pas fait pour durer : la vie étale nous ennuie, c’est ce qui naît et ce qui meurt qui nous éme
3489 et ce qui meurt qui nous émeut. Cette nuit, avant d’ aller me coucher, j’ai été voir encore au poulailler. (Nous attendions
3490 au poulailler. (Nous attendions depuis deux jours l’ éclosion des œufs.) Il me semble qu’il se passe des choses au fond du
3491 ’il se passe des choses au fond du réduit obscur. La poule grogne furieusement quand je passe la tête. Je vais chercher un
3492 scur. La poule grogne furieusement quand je passe la tête. Je vais chercher une bougie, je réveille ma femme. Nous essayon
3493 r une bougie, je réveille ma femme. Nous essayons de soulever par les ailes la poule, qui fait un caquet déchirant : elle
3494 réveille ma femme. Nous essayons de soulever par les ailes la poule, qui fait un caquet déchirant : elle serre entre ses p
3495 ma femme. Nous essayons de soulever par les ailes la poule, qui fait un caquet déchirant : elle serre entre ses pattes un
3496 elle serre entre ses pattes un œuf à demi-ouvert, d’ où sort un long cou maigre, tout humide. Un poulet gris, déjà séché, p
3497 ché, palpite au milieu des autres œufs. On entend le toc-toc des becs à l’intérieur. Je repose la lourde poule avec précau
3498 des autres œufs. On entend le toc-toc des becs à l’ intérieur. Je repose la lourde poule avec précaution, craignant qu’ell
3499 tend le toc-toc des becs à l’intérieur. Je repose la lourde poule avec précaution, craignant qu’elle n’écrase ses petits :
3500 son aile, fait sortir une coque vide, et reprend, l’ œil fixe, son travail invisible de mère. C’est beau. C’est fascinant.
3501 de, et reprend, l’œil fixe, son travail invisible de mère. C’est beau. C’est fascinant. C’est grave et mystérieux, pacifia
3502 inant. C’est grave et mystérieux, pacifiant comme la démonstration d’une absolue sagesse à l’œuvre dans cette vie. Il y a
3503 e et mystérieux, pacifiant comme la démonstration d’ une absolue sagesse à l’œuvre dans cette vie. Il y a sur toute la terr
3504 nt comme la démonstration d’une absolue sagesse à l’ œuvre dans cette vie. Il y a sur toute la terre de ces moments de pure
3505 agesse à l’œuvre dans cette vie. Il y a sur toute la terre de ces moments de pureté. Il faut penser à eux quand on juge « 
3506 l’œuvre dans cette vie. Il y a sur toute la terre de ces moments de pureté. Il faut penser à eux quand on juge « le monde 
3507 tte vie. Il y a sur toute la terre de ces moments de pureté. Il faut penser à eux quand on juge « le monde »… Nous mangeon
3508 s de pureté. Il faut penser à eux quand on juge «  le monde »… Nous mangeons les premiers légumes du jardin : salades et ra
3509 emiers légumes du jardin : salades et radis. Pour les carottes, il faut encore attendre, et les choux n’ont que quelques fe
3510 s. Pour les carottes, il faut encore attendre, et les choux n’ont que quelques feuilles. Mais avec le produit de nos pêches
3511 les choux n’ont que quelques feuilles. Mais avec le produit de nos pêches, les bons de pain, le reste du tonneau de vin b
3512 n’ont que quelques feuilles. Mais avec le produit de nos pêches, les bons de pain, le reste du tonneau de vin blanc, nous
3513 ues feuilles. Mais avec le produit de nos pêches, les bons de pain, le reste du tonneau de vin blanc, nous pourrions subsis
3514 les. Mais avec le produit de nos pêches, les bons de pain, le reste du tonneau de vin blanc, nous pourrions subsister sans
3515 avec le produit de nos pêches, les bons de pain, le reste du tonneau de vin blanc, nous pourrions subsister sans argent p
3516 nos pêches, les bons de pain, le reste du tonneau de vin blanc, nous pourrions subsister sans argent pendant quelques sema
3517 eau, plus rien à espérer avant longtemps, en fait de « rentrées ». Le produit d’une traduction et de la correction d’un ma
3518 espérer avant longtemps, en fait de « rentrées ». Le produit d’une traduction et de la correction d’un manuscrit nous a fa
3519 nt longtemps, en fait de « rentrées ». Le produit d’ une traduction et de la correction d’un manuscrit nous a fait vivre ju
3520 t de « rentrées ». Le produit d’une traduction et de la correction d’un manuscrit nous a fait vivre jusqu’en avril. Pendan
3521 e « rentrées ». Le produit d’une traduction et de la correction d’un manuscrit nous a fait vivre jusqu’en avril. Pendant c
3522 . Le produit d’une traduction et de la correction d’ un manuscrit nous a fait vivre jusqu’en avril. Pendant ce temps, j’ai
3523 que insurmontable à me faire à ce certain ton que les revues ou les journaux exigent, et qu’il faut vivre assez longtemps l
3524 ble à me faire à ce certain ton que les revues ou les journaux exigent, et qu’il faut vivre assez longtemps loin de Paris,
3525 river à distinguer : eux ne s’en doutent pas, ils l’ ont naturellement, et ne croiraient même pas qu’ils l’exigent… Mais po
3526 t naturellement, et ne croiraient même pas qu’ils l’ exigent… Mais pour peu qu’on s’en soit aperçu, il n’est plus guère pos
3527 on s’en soit aperçu, il n’est plus guère possible de le feindre, fût-ce pour tâcher de gagner un peu d’argent. Tout cela m
3528 s’en soit aperçu, il n’est plus guère possible de le feindre, fût-ce pour tâcher de gagner un peu d’argent. Tout cela me r
3529 guère possible de le feindre, fût-ce pour tâcher de gagner un peu d’argent. Tout cela me rend plutôt irritable, intellect
3530 e le feindre, fût-ce pour tâcher de gagner un peu d’ argent. Tout cela me rend plutôt irritable, intellectuellement. Mauvai
3531 exte. Elle ne se précise guère que lorsque je lis les imprimés qui m’arrivent au courrier, ou les journaux. C’est lassant,
3532 e lis les imprimés qui m’arrivent au courrier, ou les journaux. C’est lassant, le manque d’argent, à la longue. Et l’on voi
3533 vent au courrier, ou les journaux. C’est lassant, le manque d’argent, à la longue. Et l’on voit trop de raisons de tous le
3534 urrier, ou les journaux. C’est lassant, le manque d’ argent, à la longue. Et l’on voit trop de raisons de tous les ordres q
3535 ’est lassant, le manque d’argent, à la longue. Et l’ on voit trop de raisons de tous les ordres qui expliquent cette situat
3536 e manque d’argent, à la longue. Et l’on voit trop de raisons de tous les ordres qui expliquent cette situation, et pourquo
3537 argent, à la longue. Et l’on voit trop de raisons de tous les ordres qui expliquent cette situation, et pourquoi elle ne c
3538 à la longue. Et l’on voit trop de raisons de tous les ordres qui expliquent cette situation, et pourquoi elle ne changera g
3539 , et pourquoi elle ne changera guère… Mais il y a le travail au jardin : enfin, une chose qui rassure du seul fait qu’elle
3540 exemple, cela réussit ou rate, cela ne dépend pas de l’opinion. Ni de la bêtise plus ou moins spirituelle de, etc. Parlons
3541 mple, cela réussit ou rate, cela ne dépend pas de l’ opinion. Ni de la bêtise plus ou moins spirituelle de, etc. Parlons pl
3542 ssit ou rate, cela ne dépend pas de l’opinion. Ni de la bêtise plus ou moins spirituelle de, etc. Parlons plutôt de nos ba
3543 t ou rate, cela ne dépend pas de l’opinion. Ni de la bêtise plus ou moins spirituelle de, etc. Parlons plutôt de nos bains
3544 pinion. Ni de la bêtise plus ou moins spirituelle de , etc. Parlons plutôt de nos bains, les premiers vrais bains de la sai
3545 plus ou moins spirituelle de, etc. Parlons plutôt de nos bains, les premiers vrais bains de la saison, à la Grande-Conche.
3546 ons plutôt de nos bains, les premiers vrais bains de la saison, à la Grande-Conche. Une plage immense, en arc de cercle, a
3547 plutôt de nos bains, les premiers vrais bains de la saison, à la Grande-Conche. Une plage immense, en arc de cercle, au p
3548 s bains, les premiers vrais bains de la saison, à la Grande-Conche. Une plage immense, en arc de cercle, au pied des dunes
3549 on, à la Grande-Conche. Une plage immense, en arc de cercle, au pied des dunes, très doucement inclinée, et sans une pierr
3550 inclinée, et sans une pierre. Merveilleuse piste de bicyclette. Nous nous sommes procuré deux vieux clous tout rouillés.
3551 eux clous tout rouillés. Ils supportent très bien de rouler dans les minces nappes d’eau que poussent devant elles les gro
3552 rouillés. Ils supportent très bien de rouler dans les minces nappes d’eau que poussent devant elles les grosses vagues. Ent
3553 ortent très bien de rouler dans les minces nappes d’ eau que poussent devant elles les grosses vagues. Entre la terre et l’
3554 les minces nappes d’eau que poussent devant elles les grosses vagues. Entre la terre et l’eau mouvante, quand on ne sait pl
3555 e poussent devant elles les grosses vagues. Entre la terre et l’eau mouvante, quand on ne sait plus ce qui bouge et ce qui
3556 evant elles les grosses vagues. Entre la terre et l’ eau mouvante, quand on ne sait plus ce qui bouge et ce qui est fixe, à
3557 ui est fixe, à grande vitesse ! 5 juin 1934 Le jardin à 7 heures du matin. Chaque jour, nous le découvrons ! Touffu,
3558 Le jardin à 7 heures du matin. Chaque jour, nous le découvrons ! Touffu, feuillu et odorant, plein de giroflées multicolo
3559 le découvrons ! Touffu, feuillu et odorant, plein de giroflées multicolores, de capucines, de pois de senteur, d’œillets,
3560 illu et odorant, plein de giroflées multicolores, de capucines, de pois de senteur, d’œillets, de pois d’Espagne, de glyci
3561 t, plein de giroflées multicolores, de capucines, de pois de senteur, d’œillets, de pois d’Espagne, de glycines, de fleurs
3562 de giroflées multicolores, de capucines, de pois de senteur, d’œillets, de pois d’Espagne, de glycines, de fleurs orangée
3563 s multicolores, de capucines, de pois de senteur, d’ œillets, de pois d’Espagne, de glycines, de fleurs orangées et grenat,
3564 res, de capucines, de pois de senteur, d’œillets, de pois d’Espagne, de glycines, de fleurs orangées et grenat, dont je ne
3565 capucines, de pois de senteur, d’œillets, de pois d’ Espagne, de glycines, de fleurs orangées et grenat, dont je ne sais pa
3566 de pois de senteur, d’œillets, de pois d’Espagne, de glycines, de fleurs orangées et grenat, dont je ne sais pas les noms,
3567 nteur, d’œillets, de pois d’Espagne, de glycines, de fleurs orangées et grenat, dont je ne sais pas les noms, et de roses,
3568 de fleurs orangées et grenat, dont je ne sais pas les noms, et de roses, et de roses trémières qui grandissent d’un pouce a
3569 ngées et grenat, dont je ne sais pas les noms, et de roses, et de roses trémières qui grandissent d’un pouce au moins pend
3570 at, dont je ne sais pas les noms, et de roses, et de roses trémières qui grandissent d’un pouce au moins pendant la nuit.
3571 t de roses, et de roses trémières qui grandissent d’ un pouce au moins pendant la nuit. Nous allumons une première cigarett
3572 ières qui grandissent d’un pouce au moins pendant la nuit. Nous allumons une première cigarette pour enfumer les pucerons
3573 Nous allumons une première cigarette pour enfumer les pucerons des rosiers. Ensuite, il faut nourrir les poulets. J’ai pass
3574 es pucerons des rosiers. Ensuite, il faut nourrir les poulets. J’ai passé bien des heures déjà à les regarder. Ils ont chac
3575 ir les poulets. J’ai passé bien des heures déjà à les regarder. Ils ont chacun leur nom, et leur petite allure particulière
3576 nom, et leur petite allure particulière. Je passe la matinée à lire et à écrire sous les tilleuls, en maillot de bain. Bea
3577 ière. Je passe la matinée à lire et à écrire sous les tilleuls, en maillot de bain. Beaucoup de moustiques et de fourmis ai
3578 à lire et à écrire sous les tilleuls, en maillot de bain. Beaucoup de moustiques et de fourmis ailées que j’essaie de tue
3579 ls, en maillot de bain. Beaucoup de moustiques et de fourmis ailées que j’essaie de tuer au fly-tox. Une araignée parfois
3580 p de moustiques et de fourmis ailées que j’essaie de tuer au fly-tox. Une araignée parfois descend au-dessus de ma page, p
3581 u fly-tox. Une araignée parfois descend au-dessus de ma page, pédale de toutes ses pattes dans le vide, remonte, retombe,
3582 gnée parfois descend au-dessus de ma page, pédale de toutes ses pattes dans le vide, remonte, retombe, et court sur la tab
3583 ssus de ma page, pédale de toutes ses pattes dans le vide, remonte, retombe, et court sur la table verte. L’après-midi, la
3584 ttes dans le vide, remonte, retombe, et court sur la table verte. L’après-midi, la chaleur est trop forte. Je travaille da
3585 e, remonte, retombe, et court sur la table verte. L’ après-midi, la chaleur est trop forte. Je travaille dans la grande piè
3586 tombe, et court sur la table verte. L’après-midi, la chaleur est trop forte. Je travaille dans la grande pièce de l’étage,
3587 idi, la chaleur est trop forte. Je travaille dans la grande pièce de l’étage, où j’ai transporté ma table à tréteaux. Un d
3588 est trop forte. Je travaille dans la grande pièce de l’étage, où j’ai transporté ma table à tréteaux. Un de mes rêves s’es
3589 trop forte. Je travaille dans la grande pièce de l’ étage, où j’ai transporté ma table à tréteaux. Un de mes rêves s’est a
3590 étage, où j’ai transporté ma table à tréteaux. Un de mes rêves s’est ainsi réalisé : écrire sur une table en sapin, dans u
3591 aux murs nus et aux fenêtres ouvertes, où passent le vent, une hirondelle, les bruits des champs. 10 juin 1934 Depui
3592 res ouvertes, où passent le vent, une hirondelle, les bruits des champs. 10 juin 1934 Depuis que nous parcourons cett
3593 n 1934 Depuis que nous parcourons cette pointe de l’île à bicyclette, de la Grande-Conche, à l’ouest, jusqu’au bois de
3594 934 Depuis que nous parcourons cette pointe de l’ île à bicyclette, de la Grande-Conche, à l’ouest, jusqu’au bois de pin
3595 us parcourons cette pointe de l’île à bicyclette, de la Grande-Conche, à l’ouest, jusqu’au bois de pins à l’est et au Fier
3596 parcourons cette pointe de l’île à bicyclette, de la Grande-Conche, à l’ouest, jusqu’au bois de pins à l’est et au Fier, q
3597 nte de l’île à bicyclette, de la Grande-Conche, à l’ ouest, jusqu’au bois de pins à l’est et au Fier, qui termine les marai
3598 te, de la Grande-Conche, à l’ouest, jusqu’au bois de pins à l’est et au Fier, qui termine les marais, nous découvrons que
3599 Grande-Conche, à l’ouest, jusqu’au bois de pins à l’ est et au Fier, qui termine les marais, nous découvrons que notre doma
3600 u’au bois de pins à l’est et au Fier, qui termine les marais, nous découvrons que notre domaine est bien étroit… Cela n’a p
3601 que notre domaine est bien étroit… Cela n’a plus la grandeur romantique de la désolation d’hiver. Et partout les cultivat
3602 bien étroit… Cela n’a plus la grandeur romantique de la désolation d’hiver. Et partout les cultivateurs, au travail sur le
3603 n étroit… Cela n’a plus la grandeur romantique de la désolation d’hiver. Et partout les cultivateurs, au travail sur leurs
3604 n’a plus la grandeur romantique de la désolation d’ hiver. Et partout les cultivateurs, au travail sur leurs petits champs
3605 r romantique de la désolation d’hiver. Et partout les cultivateurs, au travail sur leurs petits champs, nous crient quand n
3606 ntent. Hier soir, j’avais fait une dernière revue de nos possibilités de subsister pendant les semaines qui viennent. Arti
3607 avais fait une dernière revue de nos possibilités de subsister pendant les semaines qui viennent. Articles, zéro. Traducti
3608 re revue de nos possibilités de subsister pendant les semaines qui viennent. Articles, zéro. Traductions, zéro. Les chapitr
3609 qui viennent. Articles, zéro. Traductions, zéro. Les chapitres du livre en train, non détachables. Un essai philosophique
3610 rain, non détachables. Un essai philosophique sur la personne : destiné à une revue non payante. Autres ressources : néant
3611 : néant. Reste : 90 francs. Une remarque ironique de ma femme sur mes petits comptes, avait amené la première explosion de
3612 petits comptes, avait amené la première explosion de mauvaise humeur contre « le sort » depuis sept à huit mois que nous s
3613 la première explosion de mauvaise humeur contre «  le sort » depuis sept à huit mois que nous sommes dans l’île. Je n’étais
3614 rt » depuis sept à huit mois que nous sommes dans l’ île. Je n’étais pas fier. Ce matin, nous avons décidé de réagir. Quand
3615 Je n’étais pas fier. Ce matin, nous avons décidé de réagir. Quand une auto risque de rater le tournant, emportée par la f
3616 ous avons décidé de réagir. Quand une auto risque de rater le tournant, emportée par la force centrifuge, il ne faut pas f
3617 décidé de réagir. Quand une auto risque de rater le tournant, emportée par la force centrifuge, il ne faut pas freiner, m
3618 ne auto risque de rater le tournant, emportée par la force centrifuge, il ne faut pas freiner, mais peser à fond sur l’acc
3619 ge, il ne faut pas freiner, mais peser à fond sur l’ accélérateur. Je suis allé à A. acheter des cigarettes. J’ai demandé à
3620 . acheter des cigarettes. J’ai demandé à Mellouin d’ apporter un nouveau tonnelet. Et nous allions nous mettre à table pour
3621 . Et nous allions nous mettre à table pour manger le canard des grandes occasions, quand la chose est arrivée. Apportée pa
3622 our manger le canard des grandes occasions, quand la chose est arrivée. Apportée par la factrice. Une grosse enveloppe cac
3623 casions, quand la chose est arrivée. Apportée par la factrice. Une grosse enveloppe cachetée, venant de l’étranger. En-têt
3624 a factrice. Une grosse enveloppe cachetée, venant de l’étranger. En-tête d’une fondation littéraire. Il faut d’abord signe
3625 actrice. Une grosse enveloppe cachetée, venant de l’ étranger. En-tête d’une fondation littéraire. Il faut d’abord signer,
3626 enveloppe cachetée, venant de l’étranger. En-tête d’ une fondation littéraire. Il faut d’abord signer, c’est recommandé. En
3627 t un prix. Un prix dont je connaissais tout juste le nom. Que je n’aurais jamais eu l’idée de solliciter. Et qui m’est oct
3628 sais tout juste le nom. Que je n’aurais jamais eu l’ idée de solliciter. Et qui m’est octroyé pour un petit livre paru sans
3629 ut juste le nom. Que je n’aurais jamais eu l’idée de solliciter. Et qui m’est octroyé pour un petit livre paru sans bruit
3630 é pour un petit livre paru sans bruit il y a plus de dix-huit mois. Les hommes sont bons ! Du moins certains d’entre eux.
3631 vre paru sans bruit il y a plus de dix-huit mois. Les hommes sont bons ! Du moins certains d’entre eux. Sur le moment, ce q
3632 es sont bons ! Du moins certains d’entre eux. Sur le moment, ce qui m’a le plus frappé, c’est que je m’étais fâché, hier s
3633 s certains d’entre eux. Sur le moment, ce qui m’a le plus frappé, c’est que je m’étais fâché, hier soir, et que la Provide
3634 pé, c’est que je m’étais fâché, hier soir, et que la Providence, évidemment, se payait ma tête. Ensuite, j’ai calculé que
3635 e. Ensuite, j’ai calculé que cela nous permettait de passer l’été ici, sans inquiétude. Ou encore, de le passer ailleurs s
3636 , j’ai calculé que cela nous permettait de passer l’ été ici, sans inquiétude. Ou encore, de le passer ailleurs sans ennui.
3637 de passer l’été ici, sans inquiétude. Ou encore, de le passer ailleurs sans ennui. 15 juin 1934 Bon vent du destin
3638 passer l’été ici, sans inquiétude. Ou encore, de le passer ailleurs sans ennui. 15 juin 1934 Bon vent du destin sou
3639 Bon vent du destin souffle encore : au courrier de midi, l’offre par une amie, d’une maison pour l’hiver prochain, dans
3640 t du destin souffle encore : au courrier de midi, l’ offre par une amie, d’une maison pour l’hiver prochain, dans le Gard.
3641 core : au courrier de midi, l’offre par une amie, d’ une maison pour l’hiver prochain, dans le Gard. Autre lettre : une inv
3642 de midi, l’offre par une amie, d’une maison pour l’ hiver prochain, dans le Gard. Autre lettre : une invitation à passer q
3643 ne amie, d’une maison pour l’hiver prochain, dans le Gard. Autre lettre : une invitation à passer quinze jours dans un cam
3644 patte, et n’écrivais plus à personne. Je crois à la valeur d’appel de l’absence, ou plutôt du retrait. (Il ne faut pas qu
3645 n’écrivais plus à personne. Je crois à la valeur d’ appel de l’absence, ou plutôt du retrait. (Il ne faut pas que ce soit
3646 ais plus à personne. Je crois à la valeur d’appel de l’absence, ou plutôt du retrait. (Il ne faut pas que ce soit une fein
3647 plus à personne. Je crois à la valeur d’appel de l’ absence, ou plutôt du retrait. (Il ne faut pas que ce soit une feinte,
3648 l faut un véritable non-espoir.) Équivalent, pour la façon de traiter la vie, de la médecine des homéopathes. 16 juin 1
3649 véritable non-espoir.) Équivalent, pour la façon de traiter la vie, de la médecine des homéopathes. 16 juin 1934 La
3650 non-espoir.) Équivalent, pour la façon de traiter la vie, de la médecine des homéopathes. 16 juin 1934 La banque d’A
3651 ir.) Équivalent, pour la façon de traiter la vie, de la médecine des homéopathes. 16 juin 1934 La banque d’A. n’est
3652 ) Équivalent, pour la façon de traiter la vie, de la médecine des homéopathes. 16 juin 1934 La banque d’A. n’est ouv
3653 e la médecine des homéopathes. 16 juin 1934 La banque d’A. n’est ouverte qu’un jour par semaine. Ce n’est qu’aujourd
3654 ine des homéopathes. 16 juin 1934 La banque d’ A. n’est ouverte qu’un jour par semaine. Ce n’est qu’aujourd’hui que j
3655 i pu aller y négocier mon chèque. J’arrive devant la porte où il est écrit : caisse. Je frappe et entre. Un homme penché v
3656 caisse. Je frappe et entre. Un homme penché vers le guichet parle au gérant. Le gérant me fait un signe, et comme je ne c
3657 Un homme penché vers le guichet parle au gérant. Le gérant me fait un signe, et comme je ne comprends pas, il passe sa po
3658 passe sa portette et vient me prier à voix basse d’ aller attendre dans la pièce voisine. J’attends je ne sais combien de
3659 vient me prier à voix basse d’aller attendre dans la pièce voisine. J’attends je ne sais combien de temps, je n’ai pas de
3660 ns la pièce voisine. J’attends je ne sais combien de temps, je n’ai pas de montre, mais c’est très long. Aucun bruit de vo
3661 ’attends je ne sais combien de temps, je n’ai pas de montre, mais c’est très long. Aucun bruit de voix dans la salle de la
3662 pas de montre, mais c’est très long. Aucun bruit de voix dans la salle de la caisse. Le client est-il sorti ? Quel peut b
3663 e, mais c’est très long. Aucun bruit de voix dans la salle de la caisse. Le client est-il sorti ? Quel peut bien être le m
3664 ’est très long. Aucun bruit de voix dans la salle de la caisse. Le client est-il sorti ? Quel peut bien être le motif de c
3665 t très long. Aucun bruit de voix dans la salle de la caisse. Le client est-il sorti ? Quel peut bien être le motif de cett
3666 . Aucun bruit de voix dans la salle de la caisse. Le client est-il sorti ? Quel peut bien être le motif de cette audience
3667 sse. Le client est-il sorti ? Quel peut bien être le motif de cette audience privée ? Enfin, j’entends qu’on sort, et le g
3668 lient est-il sorti ? Quel peut bien être le motif de cette audience privée ? Enfin, j’entends qu’on sort, et le gérant vie
3669 audience privée ? Enfin, j’entends qu’on sort, et le gérant vient me chercher. Notre affaire réglée, il croit devoir s’exc
3670 . Notre affaire réglée, il croit devoir s’excuser de m’avoir fait passer à côté tout à l’heure. « Vous savez, c’est la cou
3671 ir s’excuser de m’avoir fait passer à côté tout à l’ heure. « Vous savez, c’est la coutume, ici : ils n’aiment pas qu’il y
3672 passer à côté tout à l’heure. « Vous savez, c’est la coutume, ici : ils n’aiment pas qu’il y ait d’autres personnes dans l
3673 n’aiment pas qu’il y ait d’autres personnes dans la salle quand ils payent ou quand ils touchent de l’argent. C’est qu’il
3674 s la salle quand ils payent ou quand ils touchent de l’argent. C’est qu’ils sont très spéciaux, les gens d’ici ! Moi je n’
3675 a salle quand ils payent ou quand ils touchent de l’ argent. C’est qu’ils sont très spéciaux, les gens d’ici ! Moi je n’y v
3676 ent de l’argent. C’est qu’ils sont très spéciaux, les gens d’ici ! Moi je n’y viens qu’une fois par semaine, mais je commen
3677 viens qu’une fois par semaine, mais je commence à les connaître. Je pourrais vous en dire. C’est partout différent, pour l’
3678 rrais vous en dire. C’est partout différent, pour l’ argent. Si vous prenez N., par exemple (la ville prochaine sur le cont
3679 t, pour l’argent. Si vous prenez N., par exemple ( la ville prochaine sur le continent), ils n’auraient pas idée de ça, au
3680 us prenez N., par exemple (la ville prochaine sur le continent), ils n’auraient pas idée de ça, au contraire, ils sont tou
3681 chaine sur le continent), ils n’auraient pas idée de ça, au contraire, ils sont tout fiers de venir à la banque. Ici, on a
3682 pas idée de ça, au contraire, ils sont tout fiers de venir à la banque. Ici, on a dû faire cette salle d’attente… » Autant
3683 ça, au contraire, ils sont tout fiers de venir à la banque. Ici, on a dû faire cette salle d’attente… » Autant que j’en p
3684 venir à la banque. Ici, on a dû faire cette salle d’ attente… » Autant que j’en puis juger d’après les propos du gérant, ce
3685 e d’attente… » Autant que j’en puis juger d’après les propos du gérant, ce n’est pas seulement la crainte, après tout légit
3686 près les propos du gérant, ce n’est pas seulement la crainte, après tout légitime, qu’on sache combien ils ont « mis de cô
3687 tout légitime, qu’on sache combien ils ont « mis de côté », qui peut expliquer le comportement des gens d’ici. Il faut ad
3688 mbien ils ont « mis de côté », qui peut expliquer le comportement des gens d’ici. Il faut admettre que pour eux, une pudeu
3689 te tout à fait particulière s’attache au commerce de l’argent. 20 juin 1934 Les gens. — Je feuillette ce journal :
3690 tout à fait particulière s’attache au commerce de l’ argent. 20 juin 1934 Les gens. — Je feuillette ce journal : voi
3691 ache au commerce de l’argent. 20 juin 1934 Les gens. — Je feuillette ce journal : voici des semaines qu’il n’y est à
3692 plus guère à leurs affaires. J’ai pris mon parti de cet équilibre indifférent et cordial qui a fini par s’établir entre n
3693 ini par s’établir entre nous ; et il ne reste que l’ ennui de nos conversations toujours pareilles. Grande différence entre
3694 s’établir entre nous ; et il ne reste que l’ennui de nos conversations toujours pareilles. Grande différence entre eux et
3695 t adaptés à leur conduite et à leur milieu, comme les animaux. Ils ne se posent pas de questions gênantes. Or, c’est mon mé
3696 r milieu, comme les animaux. Ils ne se posent pas de questions gênantes. Or, c’est mon métier d’en poser… Seule la maladie
3697 t pas de questions gênantes. Or, c’est mon métier d’ en poser… Seule la maladie les pousse à réfléchir un moment sur « ce q
3698 gênantes. Or, c’est mon métier d’en poser… Seule la maladie les pousse à réfléchir un moment sur « ce que c’est que de no
3699 Or, c’est mon métier d’en poser… Seule la maladie les pousse à réfléchir un moment sur « ce que c’est que de nous » ; la mè
3700 usse à réfléchir un moment sur « ce que c’est que de nous » ; la mère Renaud, par exemple, qui s’est fait opérer en mai, d
3701 chir un moment sur « ce que c’est que de nous » ; la mère Renaud, par exemple, qui s’est fait opérer en mai, d’un cancer a
3702 enaud, par exemple, qui s’est fait opérer en mai, d’ un cancer au sein, vient parfois s’installer sur une chaise du jardin,
3703 ller sur une chaise du jardin, et parle un peu de l’ au-delà, et d’un sermon du curé, mais cela s’égare vite dans des génér
3704 haise du jardin, et parle un peu de l’au-delà, et d’ un sermon du curé, mais cela s’égare vite dans des généralités proverb
3705 e vite dans des généralités proverbiales, ou bien l’ on retombe dans des histoires de fils ingrat, de nièce coureuse, etc.
3706 erbiales, ou bien l’on retombe dans des histoires de fils ingrat, de nièce coureuse, etc. Les hommes sont ennuyeux les uns
3707 n l’on retombe dans des histoires de fils ingrat, de nièce coureuse, etc. Les hommes sont ennuyeux les uns pour les autres
3708 histoires de fils ingrat, de nièce coureuse, etc. Les hommes sont ennuyeux les uns pour les autres, dès qu’ils ont cessé de
3709 de nièce coureuse, etc. Les hommes sont ennuyeux les uns pour les autres, dès qu’ils ont cessé de s’étonner les uns des au
3710 reuse, etc. Les hommes sont ennuyeux les uns pour les autres, dès qu’ils ont cessé de s’étonner les uns des autres, et qu’i
3711 eux les uns pour les autres, dès qu’ils ont cessé de s’étonner les uns des autres, et qu’ils n’ont pas le même genre de mé
3712 our les autres, dès qu’ils ont cessé de s’étonner les uns des autres, et qu’ils n’ont pas le même genre de métier. Ce n’est
3713 s’étonner les uns des autres, et qu’ils n’ont pas le même genre de métier. Ce n’est pas la « classe » qui nous sépare ici,
3714 uns des autres, et qu’ils n’ont pas le même genre de métier. Ce n’est pas la « classe » qui nous sépare ici, mais la profe
3715 s n’ont pas le même genre de métier. Ce n’est pas la « classe » qui nous sépare ici, mais la profession, les préoccupation
3716 n’est pas la « classe » qui nous sépare ici, mais la profession, les préoccupations professionnelles, et le défaut de buts
3717 classe » qui nous sépare ici, mais la profession, les préoccupations professionnelles, et le défaut de buts communs surtout
3718 ofession, les préoccupations professionnelles, et le défaut de buts communs surtout, je pense… Il vaut mieux partir quand
3719 les préoccupations professionnelles, et le défaut de buts communs surtout, je pense… Il vaut mieux partir quand on en est
3720 uand on en est là. Quand on en est à ne plus voir le voisin, la situation n’est plus humaine, elle ne pose plus de questio
3721 est là. Quand on en est à ne plus voir le voisin, la situation n’est plus humaine, elle ne pose plus de questions utiles.
3722 a situation n’est plus humaine, elle ne pose plus de questions utiles. 2 juillet 1934 La sécheresse a été la plus fo
3723 se plus de questions utiles. 2 juillet 1934 La sécheresse a été la plus forte : malgré nos arrosages, les salades et
3724 utiles. 2 juillet 1934 La sécheresse a été la plus forte : malgré nos arrosages, les salades et les choux sont brûl
3725 resse a été la plus forte : malgré nos arrosages, les salades et les choux sont brûlés, la terre se craquelle, ou devient p
3726 plus forte : malgré nos arrosages, les salades et les choux sont brûlés, la terre se craquelle, ou devient poussiéreuse. Il
3727 arrosages, les salades et les choux sont brûlés, la terre se craquelle, ou devient poussiéreuse. Il n’y a plus que quelqu
3728 aux pétales fatigués. Et nous, nous n’avons plus la même patience, depuis qu’il y a de l’argent dans un tiroir. Cela sign
3729 s n’avons plus la même patience, depuis qu’il y a de l’argent dans un tiroir. Cela signifie que j’ai cessé d’être chômeur.
3730 ’avons plus la même patience, depuis qu’il y a de l’ argent dans un tiroir. Cela signifie que j’ai cessé d’être chômeur. Le
3731 gent dans un tiroir. Cela signifie que j’ai cessé d’ être chômeur. Le départ est fixé au 10. Il va falloir vendre la poule
3732 oir. Cela signifie que j’ai cessé d’être chômeur. Le départ est fixé au 10. Il va falloir vendre la poule noire et les pou
3733 r. Le départ est fixé au 10. Il va falloir vendre la poule noire et les poulets encore trop jeunes pour être mangés. Régle
3734 ixé au 10. Il va falloir vendre la poule noire et les poulets encore trop jeunes pour être mangés. Régler vingt petites cho
3735 nes pour être mangés. Régler vingt petites choses de cette espèce. Petites choses pour la première fois mesquines… 10 j
3736 t bouclé, ficelé, cloué, transporté en brouette à la station de l’« hustubuse ». Il me reste à peu près deux heures, avant
3737 icelé, cloué, transporté en brouette à la station de l’« hustubuse ». Il me reste à peu près deux heures, avant le départ,
3738 lé, cloué, transporté en brouette à la station de l’ « hustubuse ». Il me reste à peu près deux heures, avant le départ, po
3739 buse ». Il me reste à peu près deux heures, avant le départ, pour faire un peu de sentiment sur l’île, et le bilan de l’an
3740 ant le départ, pour faire un peu de sentiment sur l’ île, et le bilan de l’année écoulée. Bilan. — S’installer dans la pau
3741 art, pour faire un peu de sentiment sur l’île, et le bilan de l’année écoulée. Bilan. — S’installer dans la pauvreté comm
3742 faire un peu de sentiment sur l’île, et le bilan de l’année écoulée. Bilan. — S’installer dans la pauvreté comme dans un
3743 ire un peu de sentiment sur l’île, et le bilan de l’ année écoulée. Bilan. — S’installer dans la pauvreté comme dans un ch
3744 an de l’année écoulée. Bilan. — S’installer dans la pauvreté comme dans un champ d’activité nouveau, avec l’ardeur et les
3745  S’installer dans la pauvreté comme dans un champ d’ activité nouveau, avec l’ardeur et les curiosités naïves du débutant,
3746 reté comme dans un champ d’activité nouveau, avec l’ ardeur et les curiosités naïves du débutant, cela suppose beaucoup moi
3747 ans un champ d’activité nouveau, avec l’ardeur et les curiosités naïves du débutant, cela suppose beaucoup moins de courage
3748 s naïves du débutant, cela suppose beaucoup moins de courage que bien des jeunes bourgeois ne l’imaginent : ceux qui voudr
3749 moins de courage que bien des jeunes bourgeois ne l’ imaginent : ceux qui voudraient « partir », se « libérer » et qui recu
3750 », se « libérer » et qui reculent pourtant devant le saut. Peut-être leur suffirait-il, pour oser, d’une vision précise de
3751 le saut. Peut-être leur suffirait-il, pour oser, d’ une vision précise de cet état qu’ils rêvent et craignent. Il me sembl
3752 eur suffirait-il, pour oser, d’une vision précise de cet état qu’ils rêvent et craignent. Il me semble que Proust dit à pe
3753 ust dit à peu près cela (dans un autre ordre). Si l’ on trouve le courage de se mettre en route, c’est bien souvent à cause
3754 u près cela (dans un autre ordre). Si l’on trouve le courage de se mettre en route, c’est bien souvent à cause d’une seule
3755 (dans un autre ordre). Si l’on trouve le courage de se mettre en route, c’est bien souvent à cause d’une seule image qui
3756 de se mettre en route, c’est bien souvent à cause d’ une seule image qui vous revient, l’image d’une action pratique que l’
3757 uvent à cause d’une seule image qui vous revient, l’ image d’une action pratique que l’on a déjà su accomplir au cours d’un
3758 cause d’une seule image qui vous revient, l’image d’ une action pratique que l’on a déjà su accomplir au cours d’un précéde
3759 i vous revient, l’image d’une action pratique que l’ on a déjà su accomplir au cours d’un précédent voyage, et qui rassure…
3760 on pratique que l’on a déjà su accomplir au cours d’ un précédent voyage, et qui rassure… J’ai pensé plus d’une fois qu’il
3761 précédent voyage, et qui rassure… J’ai pensé plus d’ une fois qu’il pourrait être utile de décrire ma petite expérience d’i
3762 i pensé plus d’une fois qu’il pourrait être utile de décrire ma petite expérience d’intellectuel en chômage ; qu’il pourra
3763 urrait être utile de décrire ma petite expérience d’ intellectuel en chômage ; qu’il pourrait être utile de montrer qu’on p
3764 tellectuel en chômage ; qu’il pourrait être utile de montrer qu’on peut sortir des villes où se font les « carrières » san
3765 e montrer qu’on peut sortir des villes où se font les « carrières » sans sortir de la vie véritable ; et qu’on peut vivre d
3766 s villes où se font les « carrières » sans sortir de la vie véritable ; et qu’on peut vivre de très peu sans cesser de viv
3767 illes où se font les « carrières » sans sortir de la vie véritable ; et qu’on peut vivre de très peu sans cesser de vivre
3768 sortir de la vie véritable ; et qu’on peut vivre de très peu sans cesser de vivre son plein. Voici un an bientôt que j’ai
3769 ble ; et qu’on peut vivre de très peu sans cesser de vivre son plein. Voici un an bientôt que j’ai quitté Paris pour notre
3770 ravaille sans fièvre et que je flâne sans vague à l’ âme. C’est quelque chose. Je ne dis pas que c’est le bonheur, je n’ai
3771 âme. C’est quelque chose. Je ne dis pas que c’est le bonheur, je n’ai jamais très bien compris ce mot, que tant de gens in
3772 nt triste. Je suis devenu tout doucement amoureux de ma vie, et je crois bien que c’est un penchant qu’elle agrée. Non poi
3773 u’elle agrée. Non point qu’elle me paye en retour de surprises multipliées : peu d’aventures dans l’existence d’un homme q
3774 me paye en retour de surprises multipliées : peu d’ aventures dans l’existence d’un homme qui cherche à se posséder, plutô
3775 r de surprises multipliées : peu d’aventures dans l’ existence d’un homme qui cherche à se posséder, plutôt qu’à se fuir da
3776 es multipliées : peu d’aventures dans l’existence d’ un homme qui cherche à se posséder, plutôt qu’à se fuir dans les hasar
3777 i cherche à se posséder, plutôt qu’à se fuir dans les hasards. C’est sans doute un effet de la trentaine qui approche : je
3778 fuir dans les hasards. C’est sans doute un effet de la trentaine qui approche : je n’espère plus, comme à vingt ans, renc
3779 ir dans les hasards. C’est sans doute un effet de la trentaine qui approche : je n’espère plus, comme à vingt ans, rencont
3780 : je n’espère plus, comme à vingt ans, rencontrer le « réel » ou la « vraie vie » dans je ne sais quelle embuscade du dest
3781 lus, comme à vingt ans, rencontrer le « réel » ou la « vraie vie » dans je ne sais quelle embuscade du destin, comme qui d
3782 lle embuscade du destin, comme qui dirait au coin d’ un bois. Je crois que le réel est à portée de la main, et n’est que là
3783 comme qui dirait au coin d’un bois. Je crois que le réel est à portée de la main, et n’est que là. Alors il s’agit seulem
3784 coin d’un bois. Je crois que le réel est à portée de la main, et n’est que là. Alors il s’agit seulement d’assurer la pris
3785 n d’un bois. Je crois que le réel est à portée de la main, et n’est que là. Alors il s’agit seulement d’assurer la prise d
3786 main, et n’est que là. Alors il s’agit seulement d’ assurer la prise de cette main. C’est l’affaire d’une patience, ou d’u
3787 n’est que là. Alors il s’agit seulement d’assurer la prise de cette main. C’est l’affaire d’une patience, ou d’une impatie
3788 là. Alors il s’agit seulement d’assurer la prise de cette main. C’est l’affaire d’une patience, ou d’une impatience domin
3789 seulement d’assurer la prise de cette main. C’est l’ affaire d’une patience, ou d’une impatience dominée, — et sans doute q
3790 d’assurer la prise de cette main. C’est l’affaire d’ une patience, ou d’une impatience dominée, — et sans doute qu’une cert
3791 de cette main. C’est l’affaire d’une patience, ou d’ une impatience dominée, — et sans doute qu’une certaine pauvreté pouva
3792 le m’y forcer utilement. Ce n’est pas que je fuie les risques. Je crois avoir fait bon ménage avec celui qui m’attendait ic
3793 t bon ménage avec celui qui m’attendait ici. Mais le risque authentique et fécond est celui qu’on ne cherche pas comme une
3794 ne réponse à son ennui — faut-il dire à sa peur — de vivre. Cette manière romantique, et somme toute vaniteuse, de tenter
3795 tte manière romantique, et somme toute vaniteuse, de tenter le destin « pour voir », qui est la manière des amateurs de vi
3796 e romantique, et somme toute vaniteuse, de tenter le destin « pour voir », qui est la manière des amateurs de vie intense,
3797 teuse, de tenter le destin « pour voir », qui est la manière des amateurs de vie intense, trahit je crois d’assez banales
3798 in « pour voir », qui est la manière des amateurs de vie intense, trahit je crois d’assez banales complaisances. Et le des
3799 ière des amateurs de vie intense, trahit je crois d’ assez banales complaisances. Et le destin répond à ces défis, fussent-
3800 trahit je crois d’assez banales complaisances. Et le destin répond à ces défis, fussent-ils géniaux, par des énigmes ironi
3801 ien aux femmes, Napoléon meurt en se trompant sur le sens de son épopée. Voilà peut-être le grand renversement qui marque
3802 femmes, Napoléon meurt en se trompant sur le sens de son épopée. Voilà peut-être le grand renversement qui marque le seuil
3803 ompant sur le sens de son épopée. Voilà peut-être le grand renversement qui marque le seuil de la maturité : c’est le mome
3804 Voilà peut-être le grand renversement qui marque le seuil de la maturité : c’est le moment où l’on découvre que le monde
3805 ut-être le grand renversement qui marque le seuil de la maturité : c’est le moment où l’on découvre que le monde ne compor
3806 être le grand renversement qui marque le seuil de la maturité : c’est le moment où l’on découvre que le monde ne comporte
3807 sement qui marque le seuil de la maturité : c’est le moment où l’on découvre que le monde ne comporte pas d’autres réponse
3808 rque le seuil de la maturité : c’est le moment où l’ on découvre que le monde ne comporte pas d’autres réponses que celles
3809 a maturité : c’est le moment où l’on découvre que le monde ne comporte pas d’autres réponses que celles qu’on a le courage
3810 comporte pas d’autres réponses que celles qu’on a le courage de lui donner. Qu’il n’y a rien à en attendre, sinon ce qu’on
3811 s d’autres réponses que celles qu’on a le courage de lui donner. Qu’il n’y a rien à en attendre, sinon ce qu’on peut y app
3812 ttendre, sinon ce qu’on peut y apporter. Qu’enfin les seules questions réelles sont celles que l’existence nous pose, et no
3813 nfin les seules questions réelles sont celles que l’ existence nous pose, et non point celles que nous posions pour éviter
3814 et non point celles que nous posions pour éviter de répondre au présent. À lire les romans d’aujourd’hui, disons « le ro
3815 sions pour éviter de répondre au présent. À lire les romans d’aujourd’hui, disons « le roman » bourgeois pour simplifier,
3816 éviter de répondre au présent. À lire les romans d’ aujourd’hui, disons « le roman » bourgeois pour simplifier, on croirai
3817 ésent. À lire les romans d’aujourd’hui, disons «  le roman » bourgeois pour simplifier, on croirait que les hommes ne peuv
3818 oman » bourgeois pour simplifier, on croirait que les hommes ne peuvent plus arriver à se connaître, tels qu’ils sont, qu’à
3819 us arriver à se connaître, tels qu’ils sont, qu’à la faveur d’une coucherie compliquée, d’un crime ou d’une révolution. Do
3820 à se connaître, tels qu’ils sont, qu’à la faveur d’ une coucherie compliquée, d’un crime ou d’une révolution. Donc à la fa
3821 sont, qu’à la faveur d’une coucherie compliquée, d’ un crime ou d’une révolution. Donc à la faveur d’une fiction, et non p
3822 faveur d’une coucherie compliquée, d’un crime ou d’ une révolution. Donc à la faveur d’une fiction, et non pas d’un regard
3823 ompliquée, d’un crime ou d’une révolution. Donc à la faveur d’une fiction, et non pas d’un regard exact. Si jamais je publ
3824 d’un crime ou d’une révolution. Donc à la faveur d’ une fiction, et non pas d’un regard exact. Si jamais je publiais ce ca
3825 ution. Donc à la faveur d’une fiction, et non pas d’ un regard exact. Si jamais je publiais ce cahier, ce ne serait pas pou
3826 mais je publiais ce cahier, ce ne serait pas pour l’ ébahissement de ceux qui rêvent d’autres vies que la leur ! Mais plutô
3827 s ce cahier, ce ne serait pas pour l’ébahissement de ceux qui rêvent d’autres vies que la leur ! Mais plutôt je voudrais a
3828 ébahissement de ceux qui rêvent d’autres vies que la leur ! Mais plutôt je voudrais afficher la prétention assez modeste d
3829 es que la leur ! Mais plutôt je voudrais afficher la prétention assez modeste de renseigner quelques personnes sur les moy
3830 je voudrais afficher la prétention assez modeste de renseigner quelques personnes sur les moyens de vivre en liberté, à p
3831 ssez modeste de renseigner quelques personnes sur les moyens de vivre en liberté, à peu de frais. Je dis quelques personnes
3832 e de renseigner quelques personnes sur les moyens de vivre en liberté, à peu de frais. Je dis quelques personnes : sont-el
3833 personnes : sont-elles si rares à désirer ce dont les romanciers ne parlent pas, et qui est pour moi la seule chose nécessa
3834 es romanciers ne parlent pas, et qui est pour moi la seule chose nécessaire ?   Je viens d’interrompre cette page pour fai
3835 t pour moi la seule chose nécessaire ?   Je viens d’ interrompre cette page pour faire mes adieux au jardin. Pauvre terre e
3836 u jardin. Pauvre terre en désordre et dépouillée. Les salades ont monté, le carré de pommes de terre est dévasté ! J’ai ent
3837 en désordre et dépouillée. Les salades ont monté, le carré de pommes de terre est dévasté ! J’ai entrouvert la porte du po
3838 re et dépouillée. Les salades ont monté, le carré de pommes de terre est dévasté ! J’ai entrouvert la porte du poulailler
3839 de pommes de terre est dévasté ! J’ai entrouvert la porte du poulailler et les poulets se sont précipités dehors l’un apr
3840 vasté ! J’ai entrouvert la porte du poulailler et les poulets se sont précipités dehors l’un après l’autre avec une espèce
3841 cipités dehors l’un après l’autre avec une espèce d’ affolement. Il n’a pas fallu deux minutes pour qu’ils arrivent de tous
3842 l n’a pas fallu deux minutes pour qu’ils arrivent de tous côtés, comme par hasard, à la fameuse planche de radis fraîcheme
3843 u’ils arrivent de tous côtés, comme par hasard, à la fameuse planche de radis fraîchement semée, d’où si souvent je les av
3844 ous côtés, comme par hasard, à la fameuse planche de radis fraîchement semée, d’où si souvent je les avais chassés dans un
3845 à la fameuse planche de radis fraîchement semée, d’ où si souvent je les avais chassés dans un grand tourbillon d’indignat
3846 he de radis fraîchement semée, d’où si souvent je les avais chassés dans un grand tourbillon d’indignation. Aujourd’hui je
3847 ent je les avais chassés dans un grand tourbillon d’ indignation. Aujourd’hui je leur abandonne le terrain. Quelle ardeur à
3848 llon d’indignation. Aujourd’hui je leur abandonne le terrain. Quelle ardeur à gratter de leurs pattes, le bec en l’air, sa
3849 eur abandonne le terrain. Quelle ardeur à gratter de leurs pattes, le bec en l’air, sans regarder où ils creusent ! Quel g
3850 terrain. Quelle ardeur à gratter de leurs pattes, le bec en l’air, sans regarder où ils creusent ! Quel gaspillage dans le
3851 uelle ardeur à gratter de leurs pattes, le bec en l’ air, sans regarder où ils creusent ! Quel gaspillage dans les gestes i
3852 s regarder où ils creusent ! Quel gaspillage dans les gestes instinctifs, — car ils oublient souvent de piquer ce qu’ils vi
3853 es gestes instinctifs, — car ils oublient souvent de piquer ce qu’ils viennent de déterrer si furieusement. Comme ces bav
3854 me ces bavards qui soulèvent vingt problèmes et à la fin ne savent plus pourquoi… De temps en temps la poule trouvait un v
3855 la fin ne savent plus pourquoi… De temps en temps la poule trouvait un ver au fond du trou énorme qu’elle creusait, et les
3856 n ver au fond du trou énorme qu’elle creusait, et les petits se précipitaient à son caquet. Je suis resté un bon moment à c
3857 uis resté un bon moment à contempler cette espèce d’ orgie, consommant la ruine de mon œuvre. Innocents petits corps mal em
3858 ent à contempler cette espèce d’orgie, consommant la ruine de mon œuvre. Innocents petits corps mal emplumés, vous arrachi
3859 templer cette espèce d’orgie, consommant la ruine de mon œuvre. Innocents petits corps mal emplumés, vous arrachiez les de
3860 nocents petits corps mal emplumés, vous arrachiez les dernières radicelles qui m’attachaient à cette terre ingrate ! Tout a
3861 r ce spectacle — je ne sais pas comment expliquer l’ intérêt presque indéfini que je prends à regarder de près une bestiole
3862 intérêt presque indéfini que je prends à regarder de près une bestiole à son ouvrage, ou simplement le grain de la terre —
3863 de près une bestiole à son ouvrage, ou simplement le grain de la terre —, j’ai repensé à mon journal. Je voudrais n’y avoi
3864 ne bestiole à son ouvrage, ou simplement le grain de la terre —, j’ai repensé à mon journal. Je voudrais n’y avoir parlé q
3865 bestiole à son ouvrage, ou simplement le grain de la terre —, j’ai repensé à mon journal. Je voudrais n’y avoir parlé que
3866 sé à mon journal. Je voudrais n’y avoir parlé que de ces moments élémentaires, de ces plaisirs d’une fascinante pauvreté,
3867 n’y avoir parlé que de ces moments élémentaires, de ces plaisirs d’une fascinante pauvreté, qui sont peut-être aussi les
3868 que de ces moments élémentaires, de ces plaisirs d’ une fascinante pauvreté, qui sont peut-être aussi les plus communs à t
3869 une fascinante pauvreté, qui sont peut-être aussi les plus communs à tous les hommes, — comment le savoir, on n’en parle ja
3870 qui sont peut-être aussi les plus communs à tous les hommes, — comment le savoir, on n’en parle jamais. Le grain de la ter
3871 ssi les plus communs à tous les hommes, — comment le savoir, on n’en parle jamais. Le grain de la terre ; et aussi le grai
3872 ommes, — comment le savoir, on n’en parle jamais. Le grain de la terre ; et aussi le grain de nos idées, de notre vie, plu
3873 comment le savoir, on n’en parle jamais. Le grain de la terre ; et aussi le grain de nos idées, de notre vie, plus facile
3874 ment le savoir, on n’en parle jamais. Le grain de la terre ; et aussi le grain de nos idées, de notre vie, plus facile à d
3875 ’en parle jamais. Le grain de la terre ; et aussi le grain de nos idées, de notre vie, plus facile à décrire avec les mots
3876 jamais. Le grain de la terre ; et aussi le grain de nos idées, de notre vie, plus facile à décrire avec les mots de notre
3877 ain de la terre ; et aussi le grain de nos idées, de notre vie, plus facile à décrire avec les mots de notre langue. Il ne
3878 s idées, de notre vie, plus facile à décrire avec les mots de notre langue. Il ne se passe pas grand-chose dans ces pages,
3879 de notre vie, plus facile à décrire avec les mots de notre langue. Il ne se passe pas grand-chose dans ces pages, mais ce
3880 suffi pendant des mois, et qui sait si plusieurs de mes semblables ne seraient pas contents de l’apprendre ? Ce n’est pas
3881 sieurs de mes semblables ne seraient pas contents de l’apprendre ? Ce n’est pas une nouvelle bouleversante, c’est même plu
3882 urs de mes semblables ne seraient pas contents de l’ apprendre ? Ce n’est pas une nouvelle bouleversante, c’est même plutôt
3883 uvelle bouleversante, c’est même plutôt une sorte de secret que je donnerais là, une « recette pour vivre de peu »… Qui sa
3884 ret que je donnerais là, une « recette pour vivre de peu »… Qui sait si beaucoup n’aimeraient pas qu’un homme parle devant
3885 oup n’aimeraient pas qu’un homme parle devant eux de ce qu’ils aiment ou voudraient aimer ? de cette vie attentive et sans
3886 ant eux de ce qu’ils aiment ou voudraient aimer ? de cette vie attentive et sans intrigue, de cette « lenteur des choses »
3887 aimer ? de cette vie attentive et sans intrigue, de cette « lenteur des choses » dont la moitié des hommes tire tout ce q
3888 ns intrigue, de cette « lenteur des choses » dont la moitié des hommes tire tout ce qu’elle a de contentement ? Je songe à
3889 dont la moitié des hommes tire tout ce qu’elle a de contentement ? Je songe à ceux qui voudraient fuir les villes, et qui
3890 ontentement ? Je songe à ceux qui voudraient fuir les villes, et qui peut-être en me lisant, se diraient un instant que c’e
3891 sible… 1. Deux petits journaux paraissent dans l’ île. L’un est aux mains de M. T…, député de droite, et des « curés ».
3892 ournaux paraissent dans l’île. L’un est aux mains de M. T…, député de droite, et des « curés ». L’autre est « républicain
3893 t dans l’île. L’un est aux mains de M. T…, député de droite, et des « curés ». L’autre est « républicain et antifasciste »
3894 t antifasciste ». 2. Village à l’autre extrémité de l’île. 3. Combien d’ailleurs savent que ce mot peut désigner autre c
3895 ntifasciste ». 2. Village à l’autre extrémité de l’ île. 3. Combien d’ailleurs savent que ce mot peut désigner autre chos
3896 utre chose qu’un « Je m’en fichiste » ? 4. (Note de 1937). — J’avais raison de marquer ce doute. Un agriculteur auquel je
3897 fichiste » ? 4. (Note de 1937). — J’avais raison de marquer ce doute. Un agriculteur auquel je viens de raconter ce petit
3898 long, surtout dans un terrain sablonneux ». Reste la question de savoir s’il est normal de se déformer le corps pour gagne
3899 t dans un terrain sablonneux ». Reste la question de savoir s’il est normal de se déformer le corps pour gagner un peu plu
3900 ux ». Reste la question de savoir s’il est normal de se déformer le corps pour gagner un peu plus. Or ils y sont, pour la
3901 question de savoir s’il est normal de se déformer le corps pour gagner un peu plus. Or ils y sont, pour la plupart, contra
3902 . Or ils y sont, pour la plupart, contraints. 5. Le fils de la mère Renaud s’occupe à faire la statistique du village : 4
3903 y sont, pour la plupart, contraints. 5. Le fils de la mère Renaud s’occupe à faire la statistique du village : 45 person
3904 sont, pour la plupart, contraints. 5. Le fils de la mère Renaud s’occupe à faire la statistique du village : 45 personnes
3905 s. 5. Le fils de la mère Renaud s’occupe à faire la statistique du village : 45 personnes sont âgées de 80 à 90 ans, sur
3906 statistique du village : 45 personnes sont âgées de 80 à 90 ans, sur une population de 450 âmes. 6. On voit que ce n’est
3907 nes sont âgées de 80 à 90 ans, sur une population de 450 âmes. 6. On voit que ce n’est pas seulement le « grand capitalis
3908 450 âmes. 6. On voit que ce n’est pas seulement le « grand capitalisme » qui cultive le chantage légal. J’ai appris depu
3909 as seulement le « grand capitalisme » qui cultive le chantage légal. J’ai appris depuis que dans certaines régions du Midi
3910 appris depuis que dans certaines régions du Midi, de véritables « écumeurs de lignes » exploitent systématiquement ce filo
3911 rtaines régions du Midi, de véritables « écumeurs de lignes » exploitent systématiquement ce filon. Ils arrivent à se fair
3912 ystématiquement ce filon. Ils arrivent à se faire de grosses fortunes en très peu de temps, parfois sans dépenser un seul
3913 peu de temps, parfois sans dépenser un seul bidon d’ essence. Simplement, ils vendent la menace d’utiliser le parcours d’un
3914 un seul bidon d’essence. Simplement, ils vendent la menace d’utiliser le parcours d’une compagnie en exercice. 7. Idolât
3915 idon d’essence. Simplement, ils vendent la menace d’ utiliser le parcours d’une compagnie en exercice. 7. Idolâtrie de Goe
3916 nce. Simplement, ils vendent la menace d’utiliser le parcours d’une compagnie en exercice. 7. Idolâtrie de Goethe : ce go
3917 ent, ils vendent la menace d’utiliser le parcours d’ une compagnie en exercice. 7. Idolâtrie de Goethe : ce goût de l’util
3918 rcours d’une compagnie en exercice. 7. Idolâtrie de Goethe : ce goût de l’utilité pure, de la « qualité d’être utile » pr
3919 ie en exercice. 7. Idolâtrie de Goethe : ce goût de l’utilité pure, de la « qualité d’être utile » prise en soi, qui rejo
3920 en exercice. 7. Idolâtrie de Goethe : ce goût de l’ utilité pure, de la « qualité d’être utile » prise en soi, qui rejoind
3921 Idolâtrie de Goethe : ce goût de l’utilité pure, de la « qualité d’être utile » prise en soi, qui rejoindrait la gratuité
3922 olâtrie de Goethe : ce goût de l’utilité pure, de la « qualité d’être utile » prise en soi, qui rejoindrait la gratuité pa
3923 ethe : ce goût de l’utilité pure, de la « qualité d’ être utile » prise en soi, qui rejoindrait la gratuité par un détour q
3924 lité d’être utile » prise en soi, qui rejoindrait la gratuité par un détour que maints esprits modernes ne manqueront pas
3925 our que maints esprits modernes ne manqueront pas de juger sublime ! 8. Le Werther de Goethe succombe parce qu’il s’est l
3926 modernes ne manqueront pas de juger sublime ! 8. Le Werther de Goethe succombe parce qu’il s’est livré à son vertige indi
3927 ’est livré à son vertige individuel, rompant avec l’ ordre social. Un Werther d’aujourd’hui, ce serait l’homme qui céderait
3928 dividuel, rompant avec l’ordre social. Un Werther d’ aujourd’hui, ce serait l’homme qui céderait au vertige du social démes
3929 ordre social. Un Werther d’aujourd’hui, ce serait l’ homme qui céderait au vertige du social démesuré, rompant avec son ord
3930 cial démesuré, rompant avec son ordre individuel. Le suicide de Maïakovski ou d’Essénine après une tentative sincère et pa
3931 ré, rompant avec son ordre individuel. Le suicide de Maïakovski ou d’Essénine après une tentative sincère et passionnée de
3932 son ordre individuel. Le suicide de Maïakovski ou d’ Essénine après une tentative sincère et passionnée de servir la cause
3933 ssénine après une tentative sincère et passionnée de servir la cause soviétique, c’est la réplique moderne et inversée du
3934 rès une tentative sincère et passionnée de servir la cause soviétique, c’est la réplique moderne et inversée du geste de W
3935 t passionnée de servir la cause soviétique, c’est la réplique moderne et inversée du geste de Werther.
3936 e, c’est la réplique moderne et inversée du geste de Werther.
3 1937, Journal d’un intellectuel en chômage. Deuxième partie. Pauvre province
3937 plus ce que j’attendais, ni ce que j’ai pu rêver de ce pays. Il est très pauvre, sec et lumineux. Toutes les nuances du g
3938 pays. Il est très pauvre, sec et lumineux. Toutes les nuances du gris, herbes, pierres, oliviers, et quelques touches de ve
3939 s, herbes, pierres, oliviers, et quelques touches de vert humide au fond des vallons, de vert sombre sur les premières pen
3940 lques touches de vert humide au fond des vallons, de vert sombre sur les premières pentes des Cévennes, où commencent les
3941 les premières pentes des Cévennes, où commencent les châtaigneraies. Au sud, on voit un coin de plaine entre des collines
3942 ncent les châtaigneraies. Au sud, on voit un coin de plaine entre des collines longues aux olivettes étagées, quelques cyp
3943 vettes étagées, quelques cyprès en silhouette sur les crêtes, et des toits de ce rose émouvant des tuiles romaines sous un
3944 cyprès en silhouette sur les crêtes, et des toits de ce rose émouvant des tuiles romaines sous un ciel doux. Au nord, derr
3945 ciel doux. Au nord, derrière notre maison, c’est le rocher, la montagne brûlée. La maison : une ancienne magnanerie, très
3946 Au nord, derrière notre maison, c’est le rocher, la montagne brûlée. La maison : une ancienne magnanerie, très haute, aux
3947 otre maison, c’est le rocher, la montagne brûlée. La maison : une ancienne magnanerie, très haute, aux murs de gros moello
3948 n : une ancienne magnanerie, très haute, aux murs de gros moellons rougeâtres et gris non revêtus. Il y a trois pièces au
3949 revêtus. Il y a trois pièces au premier étage, où l’ on entre de plain-pied par-derrière. Au-dessous, c’est une grande remi
3950 y a trois pièces au premier étage, où l’on entre de plain-pied par-derrière. Au-dessous, c’est une grande remise. Au seco
3951 rande remise. Au second, quatre petites chambres. Le tout encombré de fauteuils, de chaises de velours, tables rondes et o
3952 second, quatre petites chambres. Le tout encombré de fauteuils, de chaises de velours, tables rondes et ovaloïdes, guérido
3953 petites chambres. Le tout encombré de fauteuils, de chaises de velours, tables rondes et ovaloïdes, guéridons à photos, m
3954 ambres. Le tout encombré de fauteuils, de chaises de velours, tables rondes et ovaloïdes, guéridons à photos, meubles à mu
3955 as, rideaux à franges, tabourets brodés et objets d’ art. Aux murs, plusieurs douzaines d’aquarelles, sous-bois et marines.
3956 és et objets d’art. Aux murs, plusieurs douzaines d’ aquarelles, sous-bois et marines. Quelques tapis sur du carreau rouge.
3957 uge. La plupart des fenêtres donnent au midi dans le branchage bleu d’un tilleul. Au bord de la terrasse, une fontaine abo
3958 s fenêtres donnent au midi dans le branchage bleu d’ un tilleul. Au bord de la terrasse, une fontaine abondante coule dans
3959 i dans le branchage bleu d’un tilleul. Au bord de la terrasse, une fontaine abondante coule dans un fort grand bassin rect
3960 fort grand bassin rectangulaire aux eaux sombres. La maison du jardinier ferme la cour sur la droite, derrière des palmier
3961 re aux eaux sombres. La maison du jardinier ferme la cour sur la droite, derrière des palmiers et des lauriers. Très haute
3962 sombres. La maison du jardinier ferme la cour sur la droite, derrière des palmiers et des lauriers. Très haute aussi, blan
3963 anchie, presque sans fenêtres. Un voile vert clôt la porte d’entrée, où l’on accède par quelques marches et un balcon de p
3964 enêtres. Un voile vert clôt la porte d’entrée, où l’ on accède par quelques marches et un balcon de pierre. L’on descend pa
3965 où l’on accède par quelques marches et un balcon de pierre. L’on descend par d’étroits escaliers aux quatre autres terras
3966 cède par quelques marches et un balcon de pierre. L’ on descend par d’étroits escaliers aux quatre autres terrasses du jard
3967 marches et un balcon de pierre. L’on descend par d’ étroits escaliers aux quatre autres terrasses du jardin, étagées sur l
3968 ux quatre autres terrasses du jardin, étagées sur le versant nord d’un vallon qui vient mourir à notre hauteur sur la droi
3969 terrasses du jardin, étagées sur le versant nord d’ un vallon qui vient mourir à notre hauteur sur la droite, tandis que l
3970 d’un vallon qui vient mourir à notre hauteur sur la droite, tandis que le versant sud, avec ses restanques touffues d’oli
3971 mourir à notre hauteur sur la droite, tandis que le versant sud, avec ses restanques touffues d’oliviers, ferme l’horizon
3972 que le versant sud, avec ses restanques touffues d’ oliviers, ferme l’horizon immédiat. Au sud-est, nous avons une échappé
3973 d, avec ses restanques touffues d’oliviers, ferme l’ horizon immédiat. Au sud-est, nous avons une échappée sur la fin de la
3974 immédiat. Au sud-est, nous avons une échappée sur la fin de la vallée, la rivière et la plaine. La petite ville reste invi
3975 t. Au sud-est, nous avons une échappée sur la fin de la vallée, la rivière et la plaine. La petite ville reste invisible,
3976 Au sud-est, nous avons une échappée sur la fin de la vallée, la rivière et la plaine. La petite ville reste invisible, mas
3977 nous avons une échappée sur la fin de la vallée, la rivière et la plaine. La petite ville reste invisible, massée au pied
3978 e échappée sur la fin de la vallée, la rivière et la plaine. La petite ville reste invisible, massée au pied des rochers,
3979 sur la fin de la vallée, la rivière et la plaine. La petite ville reste invisible, massée au pied des rochers, en retrait
3980 uche. À peine s’il nous en vient quelques rumeurs de gare, un coup de trompe d’auto, des cris de coq. L’odeur du raisin fo
3981 l nous en vient quelques rumeurs de gare, un coup de trompe d’auto, des cris de coq. L’odeur du raisin foulé monte de la c
3982 vient quelques rumeurs de gare, un coup de trompe d’ auto, des cris de coq. L’odeur du raisin foulé monte de la cour, et re
3983 meurs de gare, un coup de trompe d’auto, des cris de coq. L’odeur du raisin foulé monte de la cour, et remplit l’ombre ble
3984 gare, un coup de trompe d’auto, des cris de coq. L’ odeur du raisin foulé monte de la cour, et remplit l’ombre bleue sous
3985 o, des cris de coq. L’odeur du raisin foulé monte de la cour, et remplit l’ombre bleue sous le tilleul immense et les laur
3986 des cris de coq. L’odeur du raisin foulé monte de la cour, et remplit l’ombre bleue sous le tilleul immense et les laurier
3987 deur du raisin foulé monte de la cour, et remplit l’ ombre bleue sous le tilleul immense et les lauriers. Un grand vase jau
3988 é monte de la cour, et remplit l’ombre bleue sous le tilleul immense et les lauriers. Un grand vase jaune brille au bord d
3989 remplit l’ombre bleue sous le tilleul immense et les lauriers. Un grand vase jaune brille au bord du bassin. Le reflet de
3990 rs. Un grand vase jaune brille au bord du bassin. Le reflet de l’eau tremble au plafond et sur les murs verdâtres de la ch
3991 nd vase jaune brille au bord du bassin. Le reflet de l’eau tremble au plafond et sur les murs verdâtres de la chambre où j
3992 vase jaune brille au bord du bassin. Le reflet de l’ eau tremble au plafond et sur les murs verdâtres de la chambre où j’éc
3993 sin. Le reflet de l’eau tremble au plafond et sur les murs verdâtres de la chambre où j’écris. Et voilà mon petit exercice
3994 ’eau tremble au plafond et sur les murs verdâtres de la chambre où j’écris. Et voilà mon petit exercice de rentrée terminé
3995 u tremble au plafond et sur les murs verdâtres de la chambre où j’écris. Et voilà mon petit exercice de rentrée terminé :
3996 a chambre où j’écris. Et voilà mon petit exercice de rentrée terminé : « Décrivez la maison de vos vacances… » Ajoutons qu
3997 on petit exercice de rentrée terminé : « Décrivez la maison de vos vacances… » Ajoutons que le jardinier s’appelle Simard,
3998 xercice de rentrée terminé : « Décrivez la maison de vos vacances… » Ajoutons que le jardinier s’appelle Simard, « Fernane
3999 écrivez la maison de vos vacances… » Ajoutons que le jardinier s’appelle Simard, « Fernane », sa femme Marguerite, son chi
4000 Et qu’il va falloir modifier cette maison pleine de guéridons et d’aquarelles, de telle sorte qu’on puisse y travailler.
4001 loir modifier cette maison pleine de guéridons et d’ aquarelles, de telle sorte qu’on puisse y travailler. Nous faisons l’i
4002 cette maison pleine de guéridons et d’aquarelles, de telle sorte qu’on puisse y travailler. Nous faisons l’inventaire minu
4003 lle sorte qu’on puisse y travailler. Nous faisons l’ inventaire minutieux et le plan d’arrangement actuel de chacune des pi
4004 ravailler. Nous faisons l’inventaire minutieux et le plan d’arrangement actuel de chacune des pièces du premier, avant de
4005 r. Nous faisons l’inventaire minutieux et le plan d’ arrangement actuel de chacune des pièces du premier, avant de les vide
4006 entaire minutieux et le plan d’arrangement actuel de chacune des pièces du premier, avant de les vider et de transporter l
4007 actuel de chacune des pièces du premier, avant de les vider et de transporter leur contenu à l’étage supérieur. 23 septe
4008 cune des pièces du premier, avant de les vider et de transporter leur contenu à l’étage supérieur. 23 septembre 1934
4009 ant de les vider et de transporter leur contenu à l’ étage supérieur. 23 septembre 1934 Maintenant les murs sont nus 
4010 age supérieur. 23 septembre 1934 Maintenant les murs sont nus : d’un joli vert bleu très clair. Le carreau rouge a ét
4011 septembre 1934 Maintenant les murs sont nus : d’ un joli vert bleu très clair. Le carreau rouge a été débarrassé du tap
4012 s murs sont nus : d’un joli vert bleu très clair. Le carreau rouge a été débarrassé du tapis. J’ai dressé ma table sur des
4013 sur des tréteaux. Il ne reste qu’un grand canapé de velours ponceau et des chaises de paille trouvées dans un coin de la
4014 un grand canapé de velours ponceau et des chaises de paille trouvées dans un coin de la remise, où les chaises brodées, le
4015 au et des chaises de paille trouvées dans un coin de la remise, où les chaises brodées, les guéridons et le dessus de chem
4016 et des chaises de paille trouvées dans un coin de la remise, où les chaises brodées, les guéridons et le dessus de cheminé
4017 de paille trouvées dans un coin de la remise, où les chaises brodées, les guéridons et le dessus de cheminée — vingt-deux
4018 ans un coin de la remise, où les chaises brodées, les guéridons et le dessus de cheminée — vingt-deux pièces dûment recensé
4019 remise, où les chaises brodées, les guéridons et le dessus de cheminée — vingt-deux pièces dûment recensées — sont allés
4020 ù les chaises brodées, les guéridons et le dessus de cheminée — vingt-deux pièces dûment recensées — sont allés les rempla
4021 — vingt-deux pièces dûment recensées — sont allés les remplacer. Seul vestige des splendeurs bourgeoises de ce salon : un l
4022 emplacer. Seul vestige des splendeurs bourgeoises de ce salon : un lustre formé d’une écaille de tortue polie, agrémenté d
4023 endeurs bourgeoises de ce salon : un lustre formé d’ une écaille de tortue polie, agrémenté de porte-bougies inutiles et de
4024 oises de ce salon : un lustre formé d’une écaille de tortue polie, agrémenté de porte-bougies inutiles et de pendeloques d
4025 re formé d’une écaille de tortue polie, agrémenté de porte-bougies inutiles et de pendeloques de verre taillé. Fascinant,
4026 tue polie, agrémenté de porte-bougies inutiles et de pendeloques de verre taillé. Fascinant, ce lustre. Nous sommes éreint
4027 menté de porte-bougies inutiles et de pendeloques de verre taillé. Fascinant, ce lustre. Nous sommes éreintés et couverts
4028 nant, ce lustre. Nous sommes éreintés et couverts de poussière. Mais on va pouvoir respirer. 25 septembre 1934 La tr
4029 s on va pouvoir respirer. 25 septembre 1934 La traduction d’un considérable ouvrage allemand nous permettra de passe
4030 r respirer. 25 septembre 1934 La traduction d’ un considérable ouvrage allemand nous permettra de passer trois mois o
4031 d’un considérable ouvrage allemand nous permettra de passer trois mois ou quatre sans trop de soucis matériels. La vie par
4032 ermettra de passer trois mois ou quatre sans trop de soucis matériels. La vie paraît un peu moins chère dans ce pays-ci qu
4033 ois mois ou quatre sans trop de soucis matériels. La vie paraît un peu moins chère dans ce pays-ci que dans notre île. Mai
4034 ns chère dans ce pays-ci que dans notre île. Mais les gens sont encore plus pauvres, si possible. Les petites entreprises q
4035 s les gens sont encore plus pauvres, si possible. Les petites entreprises qui leur donnaient du travail font faillite l’une
4036 l’autre. Il y a 400 chômeurs pour une population de 2 300 habitants. Ceux qui travaillent encore gagnent à peine de quoi
4037 r : nos voisins n’ont sur leur table, quand on va les voir à midi, que des châtaignes, des olives, des radis, et quelques l
4038 ignes, des olives, des radis, et quelques légumes de leurs cultures, qu’ils n’ont pas pu vendre au marché. Cependant, ils
4039 considèrent comme des privilégiés, cela se sent à la manière dont ils nous parlent de quelques familles des environs qui n
4040 , cela se sent à la manière dont ils nous parlent de quelques familles des environs qui n’ont pas la ressource d’un jardin
4041 t de quelques familles des environs qui n’ont pas la ressource d’un jardin, ou qui ne « savent pas y faire ». (Légère nuan
4042 familles des environs qui n’ont pas la ressource d’ un jardin, ou qui ne « savent pas y faire ». (Légère nuance de supério
4043 ou qui ne « savent pas y faire ». (Légère nuance de supériorité sociale chez Simard.) Nos hôtes nous avaient signalé la f
4044 iale chez Simard.) Nos hôtes nous avaient signalé la famille d’un mineur retraité, dont la femme fait des journées. Consid
4045 imard.) Nos hôtes nous avaient signalé la famille d’ un mineur retraité, dont la femme fait des journées. Considérant que r
4046 ent signalé la famille d’un mineur retraité, dont la femme fait des journées. Considérant que richesse oblige — car je gag
4047 peu près 1000 francs par mois — nous avons engagé la mère Calixte pour donner un coup de main le matin et faire les lessiv
4048 ngagé la mère Calixte pour donner un coup de main le matin et faire les lessives. C’est une toute petite vieille noueuse,
4049 xte pour donner un coup de main le matin et faire les lessives. C’est une toute petite vieille noueuse, à la sagesse senten
4050 ssives. C’est une toute petite vieille noueuse, à la sagesse sentencieuse et imagée. Étonnamment active. Bonne protestante
4051 nnamment active. Bonne protestante et qui tient à le dire. Sa cordialité demeure digne, trait notable à partir des Cévenne
4052 ait notable à partir des Cévennes. Mais bavarde ! De gré ou de force, c’est certain, nous saurons tout sur les gens de la
4053 e à partir des Cévennes. Mais bavarde ! De gré ou de force, c’est certain, nous saurons tout sur les gens de la ville…
4054 ou de force, c’est certain, nous saurons tout sur les gens de la ville… 5 octobre 1934 Petite cité tassée à la base d
4055 ce, c’est certain, nous saurons tout sur les gens de la ville… 5 octobre 1934 Petite cité tassée à la base d’une par
4056 c’est certain, nous saurons tout sur les gens de la ville… 5 octobre 1934 Petite cité tassée à la base d’une paroi
4057 ville… 5 octobre 1934 Petite cité tassée à la base d’une paroi de rocher et le long d’une rivière rapide qui débouc
4058 5 octobre 1934 Petite cité tassée à la base d’ une paroi de rocher et le long d’une rivière rapide qui débouche d’une
4059 1934 Petite cité tassée à la base d’une paroi de rocher et le long d’une rivière rapide qui débouche d’une gorge étroi
4060 te cité tassée à la base d’une paroi de rocher et le long d’une rivière rapide qui débouche d’une gorge étroite, cité coul
4061 tassée à la base d’une paroi de rocher et le long d’ une rivière rapide qui débouche d’une gorge étroite, cité couleur de r
4062 cher et le long d’une rivière rapide qui débouche d’ une gorge étroite, cité couleur de rocher, de rivière et de vieilles t
4063 de qui débouche d’une gorge étroite, cité couleur de rocher, de rivière et de vieilles tuiles romaines, A… qui de loin par
4064 uche d’une gorge étroite, cité couleur de rocher, de rivière et de vieilles tuiles romaines, A… qui de loin paraît en ruin
4065 ge étroite, cité couleur de rocher, de rivière et de vieilles tuiles romaines, A… qui de loin paraît en ruine, prouve sa v
4066 de rivière et de vieilles tuiles romaines, A… qui de loin paraît en ruine, prouve sa vie par ses odeurs et la saleté de se
4067 paraît en ruine, prouve sa vie par ses odeurs et la saleté de ses ruelles. Un ruisseau coule au milieu du pavé, charriant
4068 ruine, prouve sa vie par ses odeurs et la saleté de ses ruelles. Un ruisseau coule au milieu du pavé, charriant des ordur
4069 arriant des ordures, des papiers, du sang près de la boucherie, du lait verdi. C’est à peine si l’on peut marcher à pied s
4070 de la boucherie, du lait verdi. C’est à peine si l’ on peut marcher à pied sec dans les passages étroits. Sur les seuils,
4071 ’est à peine si l’on peut marcher à pied sec dans les passages étroits. Sur les seuils, des groupes de femmes en noir jacas
4072 marcher à pied sec dans les passages étroits. Sur les seuils, des groupes de femmes en noir jacassent pendant des heures. D
4073 les passages étroits. Sur les seuils, des groupes de femmes en noir jacassent pendant des heures. Des enfants en sarraus n
4074 enfants en sarraus noirs jouent au football dans le ruisseau avec un torchon de papier d’emballage. Pas un de ces petits
4075 uent au football dans le ruisseau avec un torchon de papier d’emballage. Pas un de ces petits visages qui ne soit beau et
4076 otball dans le ruisseau avec un torchon de papier d’ emballage. Pas un de ces petits visages qui ne soit beau et fin, mais
4077 eau avec un torchon de papier d’emballage. Pas un de ces petits visages qui ne soit beau et fin, mais incroyablement crass
4078 t beau et fin, mais incroyablement crasseux. Vers la gare, il y a bien un parc municipal, le jardin d’un couvent désaffect
4079 eux. Vers la gare, il y a bien un parc municipal, le jardin d’un couvent désaffecté, mais je n’y vois jamais que des vieil
4080 la gare, il y a bien un parc municipal, le jardin d’ un couvent désaffecté, mais je n’y vois jamais que des vieillards en p
4081 s jamais que des vieillards en pantoufles. Devant le parc, un mail couvert d’une épaisse couche de poussière : là, de nouv
4082 ds en pantoufles. Devant le parc, un mail couvert d’ une épaisse couche de poussière : là, de nouveau, des bandes de joueur
4083 ant le parc, un mail couvert d’une épaisse couche de poussière : là, de nouveau, des bandes de joueurs de balle, dans un n
4084 couche de poussière : là, de nouveau, des bandes de joueurs de balle, dans un nuage… Cela tend à confirmer un soupçon qui
4085 poussière : là, de nouveau, des bandes de joueurs de balle, dans un nuage… Cela tend à confirmer un soupçon qui m’est venu
4086 soupçon qui m’est venu en maintes autres régions de la France : les provinciaux ignorent obstinément, peut-être même haïs
4087 upçon qui m’est venu en maintes autres régions de la France : les provinciaux ignorent obstinément, peut-être même haïssen
4088 est venu en maintes autres régions de la France : les provinciaux ignorent obstinément, peut-être même haïssent la couleur
4089 aux ignorent obstinément, peut-être même haïssent la couleur verte, le soleil, la nature, la propreté. Ils aiment le noir.
4090 nément, peut-être même haïssent la couleur verte, le soleil, la nature, la propreté. Ils aiment le noir. Avec fanatisme. J
4091 t-être même haïssent la couleur verte, le soleil, la nature, la propreté. Ils aiment le noir. Avec fanatisme. J’observe au
4092 haïssent la couleur verte, le soleil, la nature, la propreté. Ils aiment le noir. Avec fanatisme. J’observe aussi qu’ils
4093 te, le soleil, la nature, la propreté. Ils aiment le noir. Avec fanatisme. J’observe aussi qu’ils s’arrangent pour vivre p
4094 aussi qu’ils s’arrangent pour vivre plus mal que la population des faubourgs des grandes villes. Le goût de « la vie sain
4095 e la population des faubourgs des grandes villes. Le goût de « la vie saine » et du grand air, vous ne le trouverez que da
4096 ulation des faubourgs des grandes villes. Le goût de « la vie saine » et du grand air, vous ne le trouverez que dans la « 
4097 on des faubourgs des grandes villes. Le goût de «  la vie saine » et du grand air, vous ne le trouverez que dans la « banli
4098 goût de « la vie saine » et du grand air, vous ne le trouverez que dans la « banlieue rouge » de Paris, d’ailleurs importé
4099  » et du grand air, vous ne le trouverez que dans la « banlieue rouge » de Paris, d’ailleurs importé d’URSS, et récemment.
4100 us ne le trouverez que dans la « banlieue rouge » de Paris, d’ailleurs importé d’URSS, et récemment. On me dit qu’ici troi
4101 a « banlieue rouge » de Paris, d’ailleurs importé d’ URSS, et récemment. On me dit qu’ici trois maisons seulement, sur deux
4102 ’ici trois maisons seulement, sur deux-cents, ont l’ eau courante. Les femmes vont avec des cruches à la fontaine qui coule
4103 ns seulement, sur deux-cents, ont l’eau courante. Les femmes vont avec des cruches à la fontaine qui coule son filet sur la
4104 ’eau courante. Les femmes vont avec des cruches à la fontaine qui coule son filet sur la grande place, juste à côté de la
4105 des cruches à la fontaine qui coule son filet sur la grande place, juste à côté de la pissotière et de l’arrêt des autocar
4106 le son filet sur la grande place, juste à côté de la pissotière et de l’arrêt des autocars. Pittoresque, on peut le dire…
4107 la grande place, juste à côté de la pissotière et de l’arrêt des autocars. Pittoresque, on peut le dire… 8 octobre 1934
4108 grande place, juste à côté de la pissotière et de l’ arrêt des autocars. Pittoresque, on peut le dire… 8 octobre 1934
4109 et de l’arrêt des autocars. Pittoresque, on peut le dire… 8 octobre 1934 Du rôle pratique de la raison. — Je vois
4110 t le dire… 8 octobre 1934 Du rôle pratique de la raison. — Je vois la misère qui règne dans tous ces foyers, et qui
4111 e dire… 8 octobre 1934 Du rôle pratique de la raison. — Je vois la misère qui règne dans tous ces foyers, et qui le
4112 1934 Du rôle pratique de la raison. — Je vois la misère qui règne dans tous ces foyers, et qui les détruit. Je vois ce
4113 la misère qui règne dans tous ces foyers, et qui les détruit. Je vois ces enfants sales abandonnés par leurs parents aux h
4114 ts sales abandonnés par leurs parents aux hasards de la rue, qui valent bien ceux de la famille, mais aussi aux hasards de
4115 sales abandonnés par leurs parents aux hasards de la rue, qui valent bien ceux de la famille, mais aussi aux hasards de l’
4116 rents aux hasards de la rue, qui valent bien ceux de la famille, mais aussi aux hasards de l’éducation primaire, bienfaisa
4117 ts aux hasards de la rue, qui valent bien ceux de la famille, mais aussi aux hasards de l’éducation primaire, bienfaisante
4118 t bien ceux de la famille, mais aussi aux hasards de l’éducation primaire, bienfaisante en principe il est vrai, mais tris
4119 ien ceux de la famille, mais aussi aux hasards de l’ éducation primaire, bienfaisante en principe il est vrai, mais tristem
4120 te, étroite, appauvrissante en fait. Je vois tous les espoirs et toutes les « assurances » de cette population balayés péri
4121 sante en fait. Je vois tous les espoirs et toutes les « assurances » de cette population balayés périodiquement par la fail
4122 ois tous les espoirs et toutes les « assurances » de cette population balayés périodiquement par la faillite des entrepris
4123  » de cette population balayés périodiquement par la faillite des entreprises où elle travaille, ou par quelque décret d’É
4124 reprises où elle travaille, ou par quelque décret d’ État. Je vois le chômage s’étendre et s’installer, comme se sont insta
4125 travaille, ou par quelque décret d’État. Je vois le chômage s’étendre et s’installer, comme se sont installés dans ces vi
4126 tallés dans ces villages malsains et mal soignés, la tuberculose, l’alcoolisme et la misère héréditaire. Mais je vois d’au
4127 villages malsains et mal soignés, la tuberculose, l’ alcoolisme et la misère héréditaire. Mais je vois d’autre part, en par
4128 s et mal soignés, la tuberculose, l’alcoolisme et la misère héréditaire. Mais je vois d’autre part, en parcourant la feuil
4129 ditaire. Mais je vois d’autre part, en parcourant la feuille locale, qu’il naît encore pas mal d’enfants dans ces foyers q
4130 rant la feuille locale, qu’il naît encore pas mal d’ enfants dans ces foyers que tout menace. Faisons la part des « acciden
4131 ’enfants dans ces foyers que tout menace. Faisons la part des « accidents », des « imprudences ». Il reste encore une marg
4132 dences ». Il reste encore une marge assez notable d’ imprévoyance naïve, d’acceptation des risques, de confiance obscurémen
4133 ore une marge assez notable d’imprévoyance naïve, d’ acceptation des risques, de confiance obscurément accordée à l’instinc
4134 d’imprévoyance naïve, d’acceptation des risques, de confiance obscurément accordée à l’instinct ou à « la Vie », ou à la
4135 des risques, de confiance obscurément accordée à l’ instinct ou à « la Vie », ou à la solidarité de l’espèce humaine, malg
4136 onfiance obscurément accordée à l’instinct ou à «  la Vie », ou à la solidarité de l’espèce humaine, malgré tout. Pourtant
4137 ément accordée à l’instinct ou à « la Vie », ou à la solidarité de l’espèce humaine, malgré tout. Pourtant c’est bien ici
4138 à l’instinct ou à « la Vie », ou à la solidarité de l’espèce humaine, malgré tout. Pourtant c’est bien ici le peuple « ra
4139 l’instinct ou à « la Vie », ou à la solidarité de l’ espèce humaine, malgré tout. Pourtant c’est bien ici le peuple « raiso
4140 èce humaine, malgré tout. Pourtant c’est bien ici le peuple « raisonnable » qu’on donne en exemple aux barbares de l’Europ
4141 raisonnable » qu’on donne en exemple aux barbares de l’Europe centrale. Le peuple qui sait calculer, faire son budget, bou
4142 sonnable » qu’on donne en exemple aux barbares de l’ Europe centrale. Le peuple qui sait calculer, faire son budget, bourre
4143 nne en exemple aux barbares de l’Europe centrale. Le peuple qui sait calculer, faire son budget, bourrer le bas de laine e
4144 uple qui sait calculer, faire son budget, bourrer le bas de laine et nourrir la bouteille aux pièces de dix sous. Une chos
4145 i sait calculer, faire son budget, bourrer le bas de laine et nourrir la bouteille aux pièces de dix sous. Une chose est c
4146 re son budget, bourrer le bas de laine et nourrir la bouteille aux pièces de dix sous. Une chose est claire : faire des en
4147 e bas de laine et nourrir la bouteille aux pièces de dix sous. Une chose est claire : faire des enfants, dans les conditio
4148 s. Une chose est claire : faire des enfants, dans les conditions actuelles, c’est défier le bon sens et la raison pratique.
4149 ants, dans les conditions actuelles, c’est défier le bon sens et la raison pratique. C’est s’en remettre à quelque espoir
4150 conditions actuelles, c’est défier le bon sens et la raison pratique. C’est s’en remettre à quelque espoir vague et profon
4151 quelque espoir vague et profond. Or, tout ce que l’ État nous apprend, par le moyen de l’école primaire entre autres, ridi
4152 profond. Or, tout ce que l’État nous apprend, par le moyen de l’école primaire entre autres, ridiculise et ruine ce genre
4153 Or, tout ce que l’État nous apprend, par le moyen de l’école primaire entre autres, ridiculise et ruine ce genre d’espoirs
4154 tout ce que l’État nous apprend, par le moyen de l’ école primaire entre autres, ridiculise et ruine ce genre d’espoirs. Q
4155 imaire entre autres, ridiculise et ruine ce genre d’ espoirs. Qui voudrait condamner l’usage pratique de la raison ? Simple
4156 ruine ce genre d’espoirs. Qui voudrait condamner l’ usage pratique de la raison ? Simplement je constate qu’en fait, et da
4157 ’espoirs. Qui voudrait condamner l’usage pratique de la raison ? Simplement je constate qu’en fait, et dans ce pays tel qu
4158 poirs. Qui voudrait condamner l’usage pratique de la raison ? Simplement je constate qu’en fait, et dans ce pays tel qu’il
4159 nstate qu’en fait, et dans ce pays tel qu’il est, la morale rationnelle et les mesures qu’elle propose, ce n’est guère que
4160 s ce pays tel qu’il est, la morale rationnelle et les mesures qu’elle propose, ce n’est guère que le rêve de vieux célibata
4161 t les mesures qu’elle propose, ce n’est guère que le rêve de vieux célibataires assez fortunés, ou ascètes. Ceux qui n’ont
4162 sures qu’elle propose, ce n’est guère que le rêve de vieux célibataires assez fortunés, ou ascètes. Ceux qui n’ont plus be
4163 fortunés, ou ascètes. Ceux qui n’ont plus besoin de calculer, ceux-là calculent. Et les autres acceptent leurs risques, c
4164 nt plus besoin de calculer, ceux-là calculent. Et les autres acceptent leurs risques, c’est-à-dire acceptent de vivre, malg
4165 s acceptent leurs risques, c’est-à-dire acceptent de vivre, malgré l’État laïque qui leur conseille plutôt l’épargne. 9
4166 risques, c’est-à-dire acceptent de vivre, malgré l’ État laïque qui leur conseille plutôt l’épargne. 9 octobre 1934
4167 e, malgré l’État laïque qui leur conseille plutôt l’ épargne. 9 octobre 1934 (Suite du précédent.) — Du rationalisme
4168 du précédent.) — Du rationalisme considéré comme la philosophie des célibataires9 — des États malthusiens — et de la clas
4169 ie des célibataires9 — des États malthusiens — et de la classe des retraités et assurés. Rationalistes : les immobiles, le
4170 des célibataires9 — des États malthusiens — et de la classe des retraités et assurés. Rationalistes : les immobiles, les m
4171 classe des retraités et assurés. Rationalistes : les immobiles, les misanthropes, ceux qui ne veulent pas avoir de prochai
4172 raités et assurés. Rationalistes : les immobiles, les misanthropes, ceux qui ne veulent pas avoir de prochains, ceux qui re
4173 , les misanthropes, ceux qui ne veulent pas avoir de prochains, ceux qui refusent de connaître par le risque, c’est-à-dire
4174 veulent pas avoir de prochains, ceux qui refusent de connaître par le risque, c’est-à-dire par la souffrance. Les clercs «
4175 de prochains, ceux qui refusent de connaître par le risque, c’est-à-dire par la souffrance. Les clercs « parfaits ». « Je
4176 sent de connaître par le risque, c’est-à-dire par la souffrance. Les clercs « parfaits ». « Je me fais servir au lit, on y
4177 re par le risque, c’est-à-dire par la souffrance. Les clercs « parfaits ». « Je me fais servir au lit, on y est mieux pour
4178 t, on y est mieux pour penser », me confiait l’un de ces esprits « sereins », qui d’ailleurs cesse de l’être dès qu’il se
4179 de ces esprits « sereins », qui d’ailleurs cesse de l’être dès qu’il se met sur ses deux pattes au milieu de ses frères v
4180 ces esprits « sereins », qui d’ailleurs cesse de l’ être dès qu’il se met sur ses deux pattes au milieu de ses frères vert
4181 es deux pattes au milieu de ses frères verticaux. Le rationaliste idéal, c’est l’homme couché ; tout au plus, l’homme assi
4182 es frères verticaux. Le rationaliste idéal, c’est l’ homme couché ; tout au plus, l’homme assis. Celui qui se fait servir.
4183 liste idéal, c’est l’homme couché ; tout au plus, l’ homme assis. Celui qui se fait servir. Mais quoi, je suis injuste pour
4184 i se fait servir. Mais quoi, je suis injuste pour les célibataires. Il en est au moins deux qui furent des « hommes debout 
4185 bout », des hommes en marche. Nietzsche au-dessus de Gênes et sur les bords des lacs de l’Engadine, Kierkegaard bavardant
4186 es en marche. Nietzsche au-dessus de Gênes et sur les bords des lacs de l’Engadine, Kierkegaard bavardant sur l’Ostergade à
4187 sche au-dessus de Gênes et sur les bords des lacs de l’Engadine, Kierkegaard bavardant sur l’Ostergade à midi, ou arpentan
4188 e au-dessus de Gênes et sur les bords des lacs de l’ Engadine, Kierkegaard bavardant sur l’Ostergade à midi, ou arpentant l
4189 des lacs de l’Engadine, Kierkegaard bavardant sur l’ Ostergade à midi, ou arpentant les pièces illuminées de son appartemen
4190 rd bavardant sur l’Ostergade à midi, ou arpentant les pièces illuminées de son appartement de Copenhague, pendant ses nuits
4191 ergade à midi, ou arpentant les pièces illuminées de son appartement de Copenhague, pendant ses nuits géniales pleines de
4192 rpentant les pièces illuminées de son appartement de Copenhague, pendant ses nuits géniales pleines de ricanements et de p
4193 de Copenhague, pendant ses nuits géniales pleines de ricanements et de prières. Ils pensaient en marchant, et c’est pourqu
4194 dant ses nuits géniales pleines de ricanements et de prières. Ils pensaient en marchant, et c’est pourquoi leurs pensées g
4195 re marche. Et c’est Kierkegaard qui a écrit : « … la marche verticale, signe de notre verticalité infinie ou du sublime de
4196 aard qui a écrit : « … la marche verticale, signe de notre verticalité infinie ou du sublime de notre spiritualité ». 1
4197 signe de notre verticalité infinie ou du sublime de notre spiritualité ». 10 octobre 1934 (Suite et fin.) — Deux cl
4198 10 octobre 1934 (Suite et fin.) — Deux classes d’ esprits : ceux dont le but suprême est d’« avoir la paix à tout prix »
4199 ite et fin.) — Deux classes d’esprits : ceux dont le but suprême est d’« avoir la paix à tout prix » (rationalistes), et c
4200 classes d’esprits : ceux dont le but suprême est d’ « avoir la paix à tout prix » (rationalistes), et ceux qui pensent que
4201 ’esprits : ceux dont le but suprême est d’« avoir la paix à tout prix » (rationalistes), et ceux qui pensent que leur rais
4202 tionalistes), et ceux qui pensent que leur raison d’ être est de créer (les philosophes en marche). Si les premiers triomph
4203 ), et ceux qui pensent que leur raison d’être est de créer (les philosophes en marche). Si les premiers triomphent (grâce
4204 qui pensent que leur raison d’être est de créer ( les philosophes en marche). Si les premiers triomphent (grâce à l’École e
4205 s en marche). Si les premiers triomphent (grâce à l’ École et à l’appât des Assurances), la France est perdue. Elle sera co
4206 Si les premiers triomphent (grâce à l’École et à l’ appât des Assurances), la France est perdue. Elle sera colonisée. Mais
4207 nt (grâce à l’École et à l’appât des Assurances), la France est perdue. Elle sera colonisée. Mais si l’état d’esprit des s
4208 a France est perdue. Elle sera colonisée. Mais si l’ état d’esprit des seconds domine, la France fera de nouveau des enfant
4209 isée. Mais si l’état d’esprit des seconds domine, la France fera de nouveau des enfants, par suite du rationalisme, par su
4210 des enfants, par suite du rationalisme, par suite la guerre. Cette alternative est inévitable dans le régime présent. Elle
4211 la guerre. Cette alternative est inévitable dans le régime présent. Elle met en question tout un monde qui ne nous laisse
4212 en question tout un monde qui ne nous laisse plus de choix qu’entre un rationalisme « libéral » et stérilisant, et un nati
4213 sme dynamique et assassin. Je pense toutefois que les partisans du risque créateur ont raison. Et que la santé spirituelle
4214 s partisans du risque créateur ont raison. Et que la santé spirituelle d’un peuple n’est pas totalement compromise quand i
4215 créateur ont raison. Et que la santé spirituelle d’ un peuple n’est pas totalement compromise quand il fait encore des enf
4216 s en dépit de toute raison. Mais alors il importe de trouver des moyens politiques qui empêchent cette santé, ce goût du r
4217 ues qui empêchent cette santé, ce goût du risque, de se transformer mécaniquement en guerre. C’est tout le problème de la
4218 e transformer mécaniquement en guerre. C’est tout le problème de la révolution européenne. 15 octobre 1934 Pendant t
4219 r mécaniquement en guerre. C’est tout le problème de la révolution européenne. 15 octobre 1934 Pendant tout ce qui p
4220 écaniquement en guerre. C’est tout le problème de la révolution européenne. 15 octobre 1934 Pendant tout ce qui préc
4221 1934 Pendant tout ce qui précède, on a terminé les vendanges, et la récolte des figues d’été. (Les figues d’hiver appara
4222 ut ce qui précède, on a terminé les vendanges, et la récolte des figues d’été. (Les figues d’hiver apparaissent déjà, plus
4223 a terminé les vendanges, et la récolte des figues d’ été. (Les figues d’hiver apparaissent déjà, plus petites et toujours v
4224 é les vendanges, et la récolte des figues d’été. ( Les figues d’hiver apparaissent déjà, plus petites et toujours vertes ; o
4225 nges, et la récolte des figues d’été. (Les figues d’ hiver apparaissent déjà, plus petites et toujours vertes ; on ne les m
4226 ent déjà, plus petites et toujours vertes ; on ne les mange pas.) Simard nous a indiqué une ferme, de l’autre côté de la co
4227 les mange pas.) Simard nous a indiqué une ferme, de l’autre côté de la colline du sud, où nous pourrons acheter une provi
4228 Simard nous a indiqué une ferme, de l’autre côté de la colline du sud, où nous pourrons acheter une provision d’« œillade
4229 mard nous a indiqué une ferme, de l’autre côté de la colline du sud, où nous pourrons acheter une provision d’« œillades »
4230 ne du sud, où nous pourrons acheter une provision d’ « œillades ». C’est leur gros raisin bleu. Nous y sommes allés hier au
4231 ommes allés hier au soir. Des hauteurs, on voyait la plaine rose et violacée entre des monticules pointus tout frisés d’ol
4232 violacée entre des monticules pointus tout frisés d’ oliviers, un paysage de primitifs italiens. Le mas au flanc de la coll
4233 icules pointus tout frisés d’oliviers, un paysage de primitifs italiens. Le mas au flanc de la colline, déjà dans l’ombre,
4234 sés d’oliviers, un paysage de primitifs italiens. Le mas au flanc de la colline, déjà dans l’ombre, paraissait désert. Nou
4235 un paysage de primitifs italiens. Le mas au flanc de la colline, déjà dans l’ombre, paraissait désert. Nous nous sommes as
4236 paysage de primitifs italiens. Le mas au flanc de la colline, déjà dans l’ombre, paraissait désert. Nous nous sommes assis
4237 taliens. Le mas au flanc de la colline, déjà dans l’ ombre, paraissait désert. Nous nous sommes assis sur la terrasse, au p
4238 re, paraissait désert. Nous nous sommes assis sur la terrasse, au pied d’un grand micocoulier. Bientôt un chien furieux su
4239 . Nous nous sommes assis sur la terrasse, au pied d’ un grand micocoulier. Bientôt un chien furieux surgit de la maison, su
4240 rand micocoulier. Bientôt un chien furieux surgit de la maison, suivi d’une grande femme en noir. C’est la propriétaire, M
4241 d micocoulier. Bientôt un chien furieux surgit de la maison, suivi d’une grande femme en noir. C’est la propriétaire, Mme
4242 entôt un chien furieux surgit de la maison, suivi d’ une grande femme en noir. C’est la propriétaire, Mme Turc. Elle nous f
4243 a maison, suivi d’une grande femme en noir. C’est la propriétaire, Mme Turc. Elle nous fait entrer. Pour la vente du raisi
4244 opriétaire, Mme Turc. Elle nous fait entrer. Pour la vente du raisin, il faut attendre sa fille qui va rentrer des champs,
4245 va rentrer des champs, où elle travaille jusqu’à la nuit tombée. Nous sommes dans une cuisine de ferme, mais la fermière
4246 qu’à la nuit tombée. Nous sommes dans une cuisine de ferme, mais la fermière nous reçoit comme une « dame », ou plutôt un
4247 mbée. Nous sommes dans une cuisine de ferme, mais la fermière nous reçoit comme une « dame », ou plutôt un peu mieux, avec
4248 ou plutôt un peu mieux, avec une politesse pleine de réserve et d’attentions. On parle du domaine. Les deux femmes le diri
4249 eu mieux, avec une politesse pleine de réserve et d’ attentions. On parle du domaine. Les deux femmes le dirigent seules de
4250 de réserve et d’attentions. On parle du domaine. Les deux femmes le dirigent seules depuis la mort de M. Turc. Elles ont u
4251 ’attentions. On parle du domaine. Les deux femmes le dirigent seules depuis la mort de M. Turc. Elles ont un peu de peine
4252 omaine. Les deux femmes le dirigent seules depuis la mort de M. Turc. Elles ont un peu de peine avec les ouvriers. Il para
4253 Les deux femmes le dirigent seules depuis la mort de M. Turc. Elles ont un peu de peine avec les ouvriers. Il paraît qu’on
4254 a mort de M. Turc. Elles ont un peu de peine avec les ouvriers. Il paraît qu’on en trouve de moins en moins. — Mais alors,
4255 eine avec les ouvriers. Il paraît qu’on en trouve de moins en moins. — Mais alors, et les chômeurs ? On m’a dit qu’il y en
4256 ’on en trouve de moins en moins. — Mais alors, et les chômeurs ? On m’a dit qu’il y en a quatre-cents à A… ?… La mère, vive
4257 rs ? On m’a dit qu’il y en a quatre-cents à A… ?… La mère, vivement : — Jamais je n’ai engagé de chômeurs, monsieur, c’est
4258 A… ?… La mère, vivement : — Jamais je n’ai engagé de chômeurs, monsieur, c’est un principe. Nous ne voulons que des ouvrie
4259 ômeur moi-même, madame… — Elle sourit à son tour, l’ air de dire : Oh ! vous, ce n’est pas la même chose. Elle a sans doute
4260 moi-même, madame… — Elle sourit à son tour, l’air de dire : Oh ! vous, ce n’est pas la même chose. Elle a sans doute enten
4261 son tour, l’air de dire : Oh ! vous, ce n’est pas la même chose. Elle a sans doute entendu parler de nous. Rien à faire :
4262 s la même chose. Elle a sans doute entendu parler de nous. Rien à faire : je suis un « monsieur ». La fille rentre : une f
4263 de nous. Rien à faire : je suis un « monsieur ». La fille rentre : une forte femme, environ 35 ans, un peu masculine. Ell
4264 ron 35 ans, un peu masculine. Elle nous conduit à la chambre de conserve des raisins. Pendant qu’elle fait la pesée : — C’
4265 un peu masculine. Elle nous conduit à la chambre de conserve des raisins. Pendant qu’elle fait la pesée : — C’est pour qu
4266 bre de conserve des raisins. Pendant qu’elle fait la pesée : — C’est pour qui, monsieur, sans indiscrétion ? Je dis mon no
4267 vous qui écrivez des articles ? J’en ai lu signés de ce nom-là. Et elle me cite une revue protestante et une revue littéra
4268 re auxquelles je collabore, en effet. — Vous avez le temps de lire beaucoup ? — Oh ! on le prend. Comme nous ne voyons jam
4269 lles je collabore, en effet. — Vous avez le temps de lire beaucoup ? — Oh ! on le prend. Comme nous ne voyons jamais perso
4270 — Vous avez le temps de lire beaucoup ? — Oh ! on le prend. Comme nous ne voyons jamais personne… (En France, cela étonne.
4271 Je résume mes renseignements : famille paysanne, de tout temps. Vie laborieuse, peu ou point de gains depuis des années.
4272 anne, de tout temps. Vie laborieuse, peu ou point de gains depuis des années. Pas de relations. Un niveau de culture fort
4273 use, peu ou point de gains depuis des années. Pas de relations. Un niveau de culture fort au-dessus de la moyenne. Ce ne s
4274 ns depuis des années. Pas de relations. Un niveau de culture fort au-dessus de la moyenne. Ce ne sont pas des bourgeoises,
4275 de relations. Un niveau de culture fort au-dessus de la moyenne. Ce ne sont pas des bourgeoises, certes, et pourtant elles
4276 relations. Un niveau de culture fort au-dessus de la moyenne. Ce ne sont pas des bourgeoises, certes, et pourtant elles en
4277 en sont encore à estimer que chômeur est synonyme de vagabond dangereux. Elles font partie des « travailleurs », et pourta
4278 iétaires. Je vois en elles un type très classique de Françaises : leur politesse mesurée, leur raison, leur énergie sérieu
4279 , leur raison, leur énergie sérieuse, cette façon de ne pas se plaindre de son sort… Pourtant, il en est peu de cette espè
4280 ergie sérieuse, cette façon de ne pas se plaindre de son sort… Pourtant, il en est peu de cette espèce, semble-t-il. On n’
4281 nt pas du tout se considérer comme un type social d’ exception. Combien y a-t-il de classes entre la bourgeoisie des villes
4282 omme un type social d’exception. Combien y a-t-il de classes entre la bourgeoisie des villes et le prolétariat ? L’opposit
4283 al d’exception. Combien y a-t-il de classes entre la bourgeoisie des villes et le prolétariat ? L’opposition que veulent v
4284 -il de classes entre la bourgeoisie des villes et le prolétariat ? L’opposition que veulent voir les marxistes entre bourg
4285 tre la bourgeoisie des villes et le prolétariat ? L’ opposition que veulent voir les marxistes entre bourgeois, ou maîtres,
4286 et le prolétariat ? L’opposition que veulent voir les marxistes entre bourgeois, ou maîtres, et prolétaires ou serviteurs,
4287 ois, ou maîtres, et prolétaires ou serviteurs, je la trouve fausse dans tous les cas concrets, dès que je sors des très gr
4288 ires ou serviteurs, je la trouve fausse dans tous les cas concrets, dès que je sors des très grandes villes et de leur cari
4289 crets, dès que je sors des très grandes villes et de leur caricature de société. — Simard, le jardinier, est à demi métaye
4290 ors des très grandes villes et de leur caricature de société. — Simard, le jardinier, est à demi métayer. Est-ce un prolét
4291 illes et de leur caricature de société. — Simard, le jardinier, est à demi métayer. Est-ce un prolétaire ? Il serait vexé
4292 ayer. Est-ce un prolétaire ? Il serait vexé qu’on le lui dise. Il s’estime fort au-dessus d’un mineur retraité, par exempl
4293 exé qu’on le lui dise. Il s’estime fort au-dessus d’ un mineur retraité, par exemple. Les instituteurs d’A… ? Ils sont du p
4294 fort au-dessus d’un mineur retraité, par exemple. Les instituteurs d’A… ? Ils sont du peuple. Oui, mais bourgeois par leur
4295 un mineur retraité, par exemple. Les instituteurs d’ A… ? Ils sont du peuple. Oui, mais bourgeois par leur profession. Et l
4296 uple. Oui, mais bourgeois par leur profession. Et les Calixte ? Prolétaires sans doute, mais d’une tout autre espèce, on di
4297 on. Et les Calixte ? Prolétaires sans doute, mais d’ une tout autre espèce, on dirait même d’une autre race que les métayer
4298 ute, mais d’une tout autre espèce, on dirait même d’ une autre race que les métayers catholiques de la montagne qu’on voit
4299 autre espèce, on dirait même d’une autre race que les métayers catholiques de la montagne qu’on voit venir à A… pour le mar
4300 ême d’une autre race que les métayers catholiques de la montagne qu’on voit venir à A… pour le marché. Et très conscients
4301 d’une autre race que les métayers catholiques de la montagne qu’on voit venir à A… pour le marché. Et très conscients d’u
4302 oliques de la montagne qu’on voit venir à A… pour le marché. Et très conscients d’une supériorité qu’ils ne peuvent attrib
4303 oit venir à A… pour le marché. Et très conscients d’ une supériorité qu’ils ne peuvent attribuer au rang social ni au salai
4304 ion. En vérité, ce qui compte dans ce pays, c’est la religion — celle des ancêtres, tout au moins ! — l’éducation et le mé
4305 religion — celle des ancêtres, tout au moins ! —  l’ éducation et le métier. C’est cela qui crée des groupes, des couches,
4306 le des ancêtres, tout au moins ! — l’éducation et le métier. C’est cela qui crée des groupes, des couches, des différences
4307 différences et des affinités, au moins autant que les conditions économiques. On ne comprend rien à la réalité sociale de c
4308 les conditions économiques. On ne comprend rien à la réalité sociale de ce canton si l’on fait abstraction de tout cela do
4309 omiques. On ne comprend rien à la réalité sociale de ce canton si l’on fait abstraction de tout cela dont le marxisme, jus
4310 omprend rien à la réalité sociale de ce canton si l’ on fait abstraction de tout cela dont le marxisme, justement, se doit
4311 ité sociale de ce canton si l’on fait abstraction de tout cela dont le marxisme, justement, se doit de ne pas tenir compte
4312 canton si l’on fait abstraction de tout cela dont le marxisme, justement, se doit de ne pas tenir compte. Un communiste tr
4313 de tout cela dont le marxisme, justement, se doit de ne pas tenir compte. Un communiste traitera les dames Turc de « koula
4314 it de ne pas tenir compte. Un communiste traitera les dames Turc de « koulaks » et tout sera dit. Le marxisme part de stati
4315 nir compte. Un communiste traitera les dames Turc de « koulaks » et tout sera dit. Le marxisme part de statistiques et de
4316 a les dames Turc de « koulaks » et tout sera dit. Le marxisme part de statistiques et de relations numériques (salaires, p
4317 de « koulaks » et tout sera dit. Le marxisme part de statistiques et de relations numériques (salaires, plus-value, profit
4318 out sera dit. Le marxisme part de statistiques et de relations numériques (salaires, plus-value, profits). Il s’estime don
4319 s). Il s’estime donc scientifique. Il ne part pas de ce que les hommes veulent être, ni de la conscience globale qu’ils on
4320 stime donc scientifique. Il ne part pas de ce que les hommes veulent être, ni de la conscience globale qu’ils ont de leur é
4321 ne part pas de ce que les hommes veulent être, ni de la conscience globale qu’ils ont de leur état (et c’est pourtant le p
4322 part pas de ce que les hommes veulent être, ni de la conscience globale qu’ils ont de leur état (et c’est pourtant le prin
4323 lent être, ni de la conscience globale qu’ils ont de leur état (et c’est pourtant le principal, pratiquement et moralement
4324 lobale qu’ils ont de leur état (et c’est pourtant le principal, pratiquement et moralement, c’est ce qui règle le jeu des
4325 l, pratiquement et moralement, c’est ce qui règle le jeu des relations humaines et les opinions politiques). Le marxisme t
4326 est ce qui règle le jeu des relations humaines et les opinions politiques). Le marxisme traite tout cela de nuances vaines,
4327 s relations humaines et les opinions politiques). Le marxisme traite tout cela de nuances vaines, d’illusions, voire de « 
4328 pinions politiques). Le marxisme traite tout cela de nuances vaines, d’illusions, voire de « mystification ». Il part de c
4329 . Le marxisme traite tout cela de nuances vaines, d’ illusions, voire de « mystification ». Il part de ce que les hommes so
4330 e tout cela de nuances vaines, d’illusions, voire de « mystification ». Il part de ce que les hommes sont malgré eux, du p
4331 d’illusions, voire de « mystification ». Il part de ce que les hommes sont malgré eux, du point de vue abstrait et inhuma
4332 ns, voire de « mystification ». Il part de ce que les hommes sont malgré eux, du point de vue abstrait et inhumain de la St
4333 malgré eux, du point de vue abstrait et inhumain de la Statistique. Et il prétend fonder là-dessus non seulement des mesu
4334 lgré eux, du point de vue abstrait et inhumain de la Statistique. Et il prétend fonder là-dessus non seulement des mesures
4335 une morale, un art et une métaphysique ! Problème de la politique actuelle : sera-t-elle l’affaire du meilleur statisticie
4336 morale, un art et une métaphysique ! Problème de la politique actuelle : sera-t-elle l’affaire du meilleur statisticien,
4337 ! Problème de la politique actuelle : sera-t-elle l’ affaire du meilleur statisticien, ou, au contraire, de l’homme le plus
4338 faire du meilleur statisticien, ou, au contraire, de l’homme le plus humain ? Sera-t-elle fondée sur la réalité telle qu’e
4339 re du meilleur statisticien, ou, au contraire, de l’ homme le plus humain ? Sera-t-elle fondée sur la réalité telle qu’elle
4340 illeur statisticien, ou, au contraire, de l’homme le plus humain ? Sera-t-elle fondée sur la réalité telle qu’elle est véc
4341 e l’homme le plus humain ? Sera-t-elle fondée sur la réalité telle qu’elle est vécue et voulue par les hommes réels et con
4342 la réalité telle qu’elle est vécue et voulue par les hommes réels et concrets, ou bien sur la réalité telle qu’elle paraît
4343 lue par les hommes réels et concrets, ou bien sur la réalité telle qu’elle paraît chiffrable, inévitable, impersonnelle ?
4344 e, inévitable, impersonnelle ?   Petite parabole de Saint-Lazare. — Il est certain que le nombre de voyageurs qui prennen
4345 te parabole de Saint-Lazare. — Il est certain que le nombre de voyageurs qui prennent le train à la gare Saint-Lazare un s
4346 e de Saint-Lazare. — Il est certain que le nombre de voyageurs qui prennent le train à la gare Saint-Lazare un samedi soir
4347 t certain que le nombre de voyageurs qui prennent le train à la gare Saint-Lazare un samedi soir de beau temps, en plein é
4348 ue le nombre de voyageurs qui prennent le train à la gare Saint-Lazare un samedi soir de beau temps, en plein été, est ass
4349 nt le train à la gare Saint-Lazare un samedi soir de beau temps, en plein été, est assez exactement prévu par les statisti
4350 mps, en plein été, est assez exactement prévu par les statistiques. Ce chiffre est fort utile à l’administration des Chemin
4351 par les statistiques. Ce chiffre est fort utile à l’ administration des Chemins de fer. Toutefois, il est non moins certain
4352 fre est fort utile à l’administration des Chemins de fer. Toutefois, il est non moins certain que chacun de ces voyageurs
4353 r. Toutefois, il est non moins certain que chacun de ces voyageurs a le sentiment de s’en aller librement. Il se croit lib
4354 t non moins certain que chacun de ces voyageurs a le sentiment de s’en aller librement. Il se croit libre, et concrètement
4355 ertain que chacun de ces voyageurs a le sentiment de s’en aller librement. Il se croit libre, et concrètement, il l’est. B
4356 librement. Il se croit libre, et concrètement, il l’ est. Bien que la statistique permette de supposer qu’il est assez rigo
4357 croit libre, et concrètement, il l’est. Bien que la statistique permette de supposer qu’il est assez rigoureusement déter
4358 ement, il l’est. Bien que la statistique permette de supposer qu’il est assez rigoureusement déterminé. L’État marxiste — 
4359 upposer qu’il est assez rigoureusement déterminé. L’ État marxiste — ou fasciste d’ailleurs — qui réglementerait les week-e
4360 ste — ou fasciste d’ailleurs — qui réglementerait les week-ends, qui les « rationaliserait » sur la base des chiffres const
4361 ’ailleurs — qui réglementerait les week-ends, qui les « rationaliserait » sur la base des chiffres constants observés depui
4362 it les week-ends, qui les « rationaliserait » sur la base des chiffres constants observés depuis des années, respecterait
4363 servés depuis des années, respecterait absolument la réalité statistique. Mais il donnerait à chacun des voyageurs « autor
4364 voyageurs « autorisés » à se déplacer, tel soir, l’ impression de n’avoir plus sa liberté. Ce qui change tout, bien entend
4365 autorisés » à se déplacer, tel soir, l’impression de n’avoir plus sa liberté. Ce qui change tout, bien entendu, et suffit
4366 iculier à transformer une joyeuse virée en devoir d’ hygiène hebdomadaire. Ce ne serait plus s’échapper, mais encore obéir,
4367 encore obéir, et à quoi ? À force de négliger et de déprécier les diversités humaines données ou créées, spirituelles ou
4368 , et à quoi ? À force de négliger et de déprécier les diversités humaines données ou créées, spirituelles ou sentimentales,
4369 spirituelles ou sentimentales, non mesurables et d’ autant plus « concrètes », l’État qu’ils veulent soumettrait le tout d
4370 s, non mesurables et d’autant plus « concrètes », l’ État qu’ils veulent soumettrait le tout de l’homme à la part de servit
4371 « concrètes », l’État qu’ils veulent soumettrait le tout de l’homme à la part de servitude matérielle que comporte sa con
4372 ètes », l’État qu’ils veulent soumettrait le tout de l’homme à la part de servitude matérielle que comporte sa condition.
4373 s », l’État qu’ils veulent soumettrait le tout de l’ homme à la part de servitude matérielle que comporte sa condition. San
4374 t qu’ils veulent soumettrait le tout de l’homme à la part de servitude matérielle que comporte sa condition. Sans même all
4375 veulent soumettrait le tout de l’homme à la part de servitude matérielle que comporte sa condition. Sans même aller jusqu
4376 ue comporte sa condition. Sans même aller jusqu’à la limite de cette perversion, il aurait en tout cas pour effet de nous
4377 e sa condition. Sans même aller jusqu’à la limite de cette perversion, il aurait en tout cas pour effet de nous rendre con
4378 ette perversion, il aurait en tout cas pour effet de nous rendre conscientes et sensibles nos servitudes inévitables, éten
4379 ral, qui n’a pas su organiser à temps ce qui doit l’ être. D’où suit que l’État nouveau se croit tout permis.) 30 octobr
4380 n’a pas su organiser à temps ce qui doit l’être. D’ où suit que l’État nouveau se croit tout permis.) 30 octobre 1934
4381 ganiser à temps ce qui doit l’être. D’où suit que l’ État nouveau se croit tout permis.) 30 octobre 1934 Trop penser
4382 ) 30 octobre 1934 Trop penser nuit. — Trop d’ idées dans ces pages, trop de raisonnements ! me soufflait depuis quel
4383 penser nuit. — Trop d’idées dans ces pages, trop de raisonnements ! me soufflait depuis quelques jours certain démon inti
4384 quelques vulgarités peu défendables : pour garder le contact avec le siècle. — Vaine habileté, je le sais bien pourtant… J
4385 tés peu défendables : pour garder le contact avec le siècle. — Vaine habileté, je le sais bien pourtant… J’en étais là, et
4386 r le contact avec le siècle. — Vaine habileté, je le sais bien pourtant… J’en étais là, et n’écrivais plus rien, tout abso
4387 ’écrivais plus rien, tout absorbé par mon travail de traduction, et n’en sortant que pour les bricolages habituels dans la
4388 n travail de traduction, et n’en sortant que pour les bricolages habituels dans la maison. Ce matin quelqu’un sonne. Un gra
4389 en sortant que pour les bricolages habituels dans la maison. Ce matin quelqu’un sonne. Un grand jeune homme crépu se prése
4390 ux garçon : j’en suis encore à me demander ce qui l’ amenait. Pendant tout l’entretien — littérature et politique — il avai
4391 core à me demander ce qui l’amenait. Pendant tout l’ entretien — littérature et politique — il avait l’air furieux, cet air
4392 ois très facilement vers 18 ans, — furieux contre le monde, contre soi-même… Et pourtant il a dû sentir que j’avais de l’a
4393 soi-même… Et pourtant il a dû sentir que j’avais de l’amitié pour lui. Il me parlait de ses lectures, avec violence mais
4394 i-même… Et pourtant il a dû sentir que j’avais de l’ amitié pour lui. Il me parlait de ses lectures, avec violence mais san
4395 r que j’avais de l’amitié pour lui. Il me parlait de ses lectures, avec violence mais sans niaiserie. Et tout à coup, à pr
4396 il éclate : « Surtout, je ne veux pas tomber dans l’ intellectualisme ! » Je le regarde : c’est un solide gaillard. Il aime
4397 ne veux pas tomber dans l’intellectualisme ! » Je le regarde : c’est un solide gaillard. Il aime le sport ; très bien, qu’
4398 Je le regarde : c’est un solide gaillard. Il aime le sport ; très bien, qu’il continue. À son âge, j’étais gardien de but
4399 bien, qu’il continue. À son âge, j’étais gardien de but dans une équipe de football. Mais où diable a-t-il ramassé cette
4400 À son âge, j’étais gardien de but dans une équipe de football. Mais où diable a-t-il ramassé cette platitude du mépris de
4401 ù diable a-t-il ramassé cette platitude du mépris de l’intellectualisme ? (terme propre à vous dégoûter de toute espèce d’
4402 iable a-t-il ramassé cette platitude du mépris de l’ intellectualisme ? (terme propre à vous dégoûter de toute espèce d’int
4403 ’intellectualisme ? (terme propre à vous dégoûter de toute espèce d’intelligence). Ce n’est pas un garçon de sa trempe qui
4404 e ? (terme propre à vous dégoûter de toute espèce d’ intelligence). Ce n’est pas un garçon de sa trempe qui inventa le slog
4405 te espèce d’intelligence). Ce n’est pas un garçon de sa trempe qui inventa le slogan défaitiste : moins d’idées ! Mais plu
4406 . Ce n’est pas un garçon de sa trempe qui inventa le slogan défaitiste : moins d’idées ! Mais plus probablement, l’un de c
4407 a trempe qui inventa le slogan défaitiste : moins d’ idées ! Mais plus probablement, l’un de ces esthètes fortunés qui, dit
4408 te : moins d’idées ! Mais plus probablement, l’un de ces esthètes fortunés qui, dit-on, encombraient notre littérature aux
4409 t-on, encombraient notre littérature aux environs de 1900. Et puis, faut-il chercher si loin ? Cette sorte de mauvaise con
4410 . Et puis, faut-il chercher si loin ? Cette sorte de mauvaise conscience qui m’arrêtait depuis quinze jours… Reprenons cel
4411 tait depuis quinze jours… Reprenons cela. « Moins d’ idées ! Méfions-nous de l’intellectualisme ! » Est-ce qu’il y a vraime
4412 s… Reprenons cela. « Moins d’idées ! Méfions-nous de l’intellectualisme ! » Est-ce qu’il y a vraiment lieu de se plaindre
4413 Reprenons cela. « Moins d’idées ! Méfions-nous de l’ intellectualisme ! » Est-ce qu’il y a vraiment lieu de se plaindre de
4414 tellectualisme ! » Est-ce qu’il y a vraiment lieu de se plaindre de ce que les hommes modernes aient trop d’idées ? Se pla
4415 ! » Est-ce qu’il y a vraiment lieu de se plaindre de ce que les hommes modernes aient trop d’idées ? Se plaint-on qu’ils a
4416 qu’il y a vraiment lieu de se plaindre de ce que les hommes modernes aient trop d’idées ? Se plaint-on qu’ils aient trop d
4417 plaindre de ce que les hommes modernes aient trop d’ idées ? Se plaint-on qu’ils aient trop de sensations ? On proteste con
4418 ent trop d’idées ? Se plaint-on qu’ils aient trop de sensations ? On proteste contre le fait de penser, au lieu de protest
4419 ils aient trop de sensations ? On proteste contre le fait de penser, au lieu de protester contre la bêtise ou la fausseté
4420 t trop de sensations ? On proteste contre le fait de penser, au lieu de protester contre la bêtise ou la fausseté de certa
4421 re le fait de penser, au lieu de protester contre la bêtise ou la fausseté de certaines idées. Derrière l’abus, c’est l’us
4422 penser, au lieu de protester contre la bêtise ou la fausseté de certaines idées. Derrière l’abus, c’est l’usage normal qu
4423 lieu de protester contre la bêtise ou la fausseté de certaines idées. Derrière l’abus, c’est l’usage normal qu’on attaque.
4424 êtise ou la fausseté de certaines idées. Derrière l’ abus, c’est l’usage normal qu’on attaque. Voilà le signe très certain
4425 usseté de certaines idées. Derrière l’abus, c’est l’ usage normal qu’on attaque. Voilà le signe très certain de la décadenc
4426 l’abus, c’est l’usage normal qu’on attaque. Voilà le signe très certain de la décadence d’une élite. Plutôt que de reconna
4427 normal qu’on attaque. Voilà le signe très certain de la décadence d’une élite. Plutôt que de reconnaître qu’on pense mal,
4428 mal qu’on attaque. Voilà le signe très certain de la décadence d’une élite. Plutôt que de reconnaître qu’on pense mal, on
4429 aque. Voilà le signe très certain de la décadence d’ une élite. Plutôt que de reconnaître qu’on pense mal, on attaque la pe
4430 s certain de la décadence d’une élite. Plutôt que de reconnaître qu’on pense mal, on attaque la pensée en général. Plutôt
4431 ôt que de reconnaître qu’on pense mal, on attaque la pensée en général. Plutôt que d’avouer que trop d’idées sont sans sub
4432 mal, on attaque la pensée en général. Plutôt que d’ avouer que trop d’idées sont sans substance, sans pesée, sans danger,
4433 a pensée en général. Plutôt que d’avouer que trop d’ idées sont sans substance, sans pesée, sans danger, par suite sans nul
4434 s nulle utilité ni vérité, on préconise une sorte de malthusianisme cérébral. D’autres demandent une trêve des inventeurs.
4435 ’autres demandent une trêve des inventeurs. C’est la même démission du cogito. La même castration, dirait Freud. Allons, a
4436 es inventeurs. C’est la même démission du cogito. La même castration, dirait Freud. Allons, allons, reprenons-nous ! Pour
4437 moi, je suis bien décidé, dorénavant, à maintenir le droit imprescriptible de tout homme à sécréter le plus d’idées possib
4438 dorénavant, à maintenir le droit imprescriptible de tout homme à sécréter le plus d’idées possibles. Surtout si l’on se t
4439 le droit imprescriptible de tout homme à sécréter le plus d’idées possibles. Surtout si l’on se trouve être par vocation c
4440 imprescriptible de tout homme à sécréter le plus d’ idées possibles. Surtout si l’on se trouve être par vocation ce qu’on
4441 à sécréter le plus d’idées possibles. Surtout si l’ on se trouve être par vocation ce qu’on nomme un intellectuel. Je ne m
4442 tuel. Je ne m’en tiendrai pas là. Je souhaite que les hommes aient tous des masses d’idées, et par-dessus le marché qu’elle
4443 Je souhaite que les hommes aient tous des masses d’ idées, et par-dessus le marché qu’elles soient justes, et même gênante
4444 mmes aient tous des masses d’idées, et par-dessus le marché qu’elles soient justes, et même gênantes pour ceux qui les con
4445 les soient justes, et même gênantes pour ceux qui les conçoivent, c’est-à-dire utiles. Qualité et quantité, voilà ce que j’
4446 i j’ajoute qu’à mon sens, cela n’exclut nullement la nécessité d’avoir beaucoup de sensations, des plus grossières jusqu’a
4447 ’à mon sens, cela n’exclut nullement la nécessité d’ avoir beaucoup de sensations, des plus grossières jusqu’aux plus raffi
4448 des plus grossières jusqu’aux plus raffinées, ni la nécessité d’agir partout où on le peut, mon cas devient très clair :
4449 ssières jusqu’aux plus raffinées, ni la nécessité d’ agir partout où on le peut, mon cas devient très clair : je ne suis qu
4450 s raffinées, ni la nécessité d’agir partout où on le peut, mon cas devient très clair : je ne suis qu’un barbare, incapabl
4451 très clair : je ne suis qu’un barbare, incapable de comprendre les « conditions psychologiques » de l’homme moderne et le
4452 je ne suis qu’un barbare, incapable de comprendre les « conditions psychologiques » de l’homme moderne et leur problématiqu
4453 e de comprendre les « conditions psychologiques » de l’homme moderne et leur problématique inépuisable et délicate. Car el
4454 e comprendre les « conditions psychologiques » de l’ homme moderne et leur problématique inépuisable et délicate. Car elles
4455 ent du dosage des facultés humaines : un peu plus d’ action, un peu moins de sensations, beaucoup moins d’idées, — voilà l’
4456 tés humaines : un peu plus d’action, un peu moins de sensations, beaucoup moins d’idées, — voilà l’ordonnance prescrite pa
4457 ction, un peu moins de sensations, beaucoup moins d’ idées, — voilà l’ordonnance prescrite par nos plus savants spécialiste
4458 ns de sensations, beaucoup moins d’idées, — voilà l’ ordonnance prescrite par nos plus savants spécialistes. C’est à ce pri
4459 spécialistes. C’est à ce prix que nous sortirons de notre crise spirituelle, etc. Question. — Comment fait-on pour s’arr
4460 etc. Question. — Comment fait-on pour s’arrêter de penser ? Je n’ai jamais trouvé de réponse franche à ce problème, même
4461 pour s’arrêter de penser ? Je n’ai jamais trouvé de réponse franche à ce problème, même dans les œuvres de D. H. Lawrence
4462 rouvé de réponse franche à ce problème, même dans les œuvres de D. H. Lawrence, l’un des représentants les plus fiévreux de
4463 ponse franche à ce problème, même dans les œuvres de D. H. Lawrence, l’un des représentants les plus fiévreux de l’anti-in
4464 œuvres de D. H. Lawrence, l’un des représentants les plus fiévreux de l’anti-intellectualisme moderne. Il me semble au con
4465 awrence, l’un des représentants les plus fiévreux de l’anti-intellectualisme moderne. Il me semble au contraire, plus je l
4466 ence, l’un des représentants les plus fiévreux de l’ anti-intellectualisme moderne. Il me semble au contraire, plus je le l
4467 lisme moderne. Il me semble au contraire, plus je le lis, que son mépris de la pensée n’est pour lui qu’une naïve et désar
4468 mble au contraire, plus je le lis, que son mépris de la pensée n’est pour lui qu’une naïve et désarmante excuse à penser m
4469 e au contraire, plus je le lis, que son mépris de la pensée n’est pour lui qu’une naïve et désarmante excuse à penser mal,
4470 peu résisteraient à une pesée patiente et ferme. Les adorateurs de la Vie m’ont souvent donné l’impression d’une sensualit
4471 ent à une pesée patiente et ferme. Les adorateurs de la Vie m’ont souvent donné l’impression d’une sensualité défaillante,
4472 à une pesée patiente et ferme. Les adorateurs de la Vie m’ont souvent donné l’impression d’une sensualité défaillante, qu
4473 ateurs de la Vie m’ont souvent donné l’impression d’ une sensualité défaillante, qui soutiendrait mal la critique d’un inte
4474 ’une sensualité défaillante, qui soutiendrait mal la critique d’un intellect intact et offensif. Peu capables de dominer l
4475 ité défaillante, qui soutiendrait mal la critique d’ un intellect intact et offensif. Peu capables de dominer le conflit no
4476 e d’un intellect intact et offensif. Peu capables de dominer le conflit normal et fécond des créations de la raison et des
4477 llect intact et offensif. Peu capables de dominer le conflit normal et fécond des créations de la raison et des impulsions
4478 dominer le conflit normal et fécond des créations de la raison et des impulsions de « la Vie », ils sacrifient les premièr
4479 iner le conflit normal et fécond des créations de la raison et des impulsions de « la Vie », ils sacrifient les premières
4480 cond des créations de la raison et des impulsions de « la Vie », ils sacrifient les premières aux secondes, ce qui revient
4481 des créations de la raison et des impulsions de «  la Vie », ils sacrifient les premières aux secondes, ce qui revient en f
4482 ondes, ce qui revient en fait à biffer simplement le critère de la vérité, et à ne respecter plus que les indications très
4483 ui revient en fait à biffer simplement le critère de la vérité, et à ne respecter plus que les indications très équivoques
4484 revient en fait à biffer simplement le critère de la vérité, et à ne respecter plus que les indications très équivoques de
4485 critère de la vérité, et à ne respecter plus que les indications très équivoques de l’instinct. Est-ce bien cela qu’exigen
4486 especter plus que les indications très équivoques de l’instinct. Est-ce bien cela qu’exigent les « anti-intellectualistes 
4487 ecter plus que les indications très équivoques de l’ instinct. Est-ce bien cela qu’exigent les « anti-intellectualistes » ?
4488 voques de l’instinct. Est-ce bien cela qu’exigent les « anti-intellectualistes » ? Que l’on supprime la préoccupation de la
4489 a qu’exigent les « anti-intellectualistes » ? Que l’ on supprime la préoccupation de la vérité ? Mais alors on aimerait qu’
4490 es « anti-intellectualistes » ? Que l’on supprime la préoccupation de la vérité ? Mais alors on aimerait qu’ils le sachent
4491 ctualistes » ? Que l’on supprime la préoccupation de la vérité ? Mais alors on aimerait qu’ils le sachent, et le disent, c
4492 alistes » ? Que l’on supprime la préoccupation de la vérité ? Mais alors on aimerait qu’ils le sachent, et le disent, comm
4493 tion de la vérité ? Mais alors on aimerait qu’ils le sachent, et le disent, comme un Staline et un Hitler l’ont dit ou l’o
4494 té ? Mais alors on aimerait qu’ils le sachent, et le disent, comme un Staline et un Hitler l’ont dit ou l’ont fait dire so
4495 hent, et le disent, comme un Staline et un Hitler l’ ont dit ou l’ont fait dire souvent. Ce serait là, semble-t-il, le seul
4496 isent, comme un Staline et un Hitler l’ont dit ou l’ ont fait dire souvent. Ce serait là, semble-t-il, le seul moyen de lim
4497 ont fait dire souvent. Ce serait là, semble-t-il, le seul moyen de limiter le jaillissement des idées. Car les idées naiss
4498 souvent. Ce serait là, semble-t-il, le seul moyen de limiter le jaillissement des idées. Car les idées naissent simplement
4499 serait là, semble-t-il, le seul moyen de limiter le jaillissement des idées. Car les idées naissent simplement d’une volo
4500 moyen de limiter le jaillissement des idées. Car les idées naissent simplement d’une volonté qui est en l’homme de cherche
4501 ment des idées. Car les idées naissent simplement d’ une volonté qui est en l’homme de chercher en toutes choses le vrai. S
4502 dées naissent simplement d’une volonté qui est en l’ homme de chercher en toutes choses le vrai. Si l’on décrète qu’il n’y
4503 ssent simplement d’une volonté qui est en l’homme de chercher en toutes choses le vrai. Si l’on décrète qu’il n’y a plus d
4504 é qui est en l’homme de chercher en toutes choses le vrai. Si l’on décrète qu’il n’y a plus de vérité, on prive en effet l
4505 l’homme de chercher en toutes choses le vrai. Si l’ on décrète qu’il n’y a plus de vérité, on prive en effet la pensée de
4506 choses le vrai. Si l’on décrète qu’il n’y a plus de vérité, on prive en effet la pensée de son aiguillon créateur… 1er
4507 ète qu’il n’y a plus de vérité, on prive en effet la pensée de son aiguillon créateur… 1er novembre 1934 « Je vis en
4508 n’y a plus de vérité, on prive en effet la pensée de son aiguillon créateur… 1er novembre 1934 « Je vis encore, je p
4509 ore que je pense. Sum, ergo cogito… » (Nietzsche, Le Gai Savoir, Pensée pour la nouvelle année.) 3 novembre 1934 Min
4510 cogito… » (Nietzsche, Le Gai Savoir, Pensée pour la nouvelle année.) 3 novembre 1934 Minuit. J’ai terminé la tâche
4511 nnée.) 3 novembre 1934 Minuit. J’ai terminé la tâche de la journée. Ma femme dort, dans la chambre dont je vois la p
4512 3 novembre 1934 Minuit. J’ai terminé la tâche de la journée. Ma femme dort, dans la chambre dont je vois la porte entr
4513 novembre 1934 Minuit. J’ai terminé la tâche de la journée. Ma femme dort, dans la chambre dont je vois la porte entrebâ
4514 rminé la tâche de la journée. Ma femme dort, dans la chambre dont je vois la porte entrebâillée. Une dernière bûche fume,
4515 rnée. Ma femme dort, dans la chambre dont je vois la porte entrebâillée. Une dernière bûche fume, il fait presque froid. D
4516 fume, il fait presque froid. Dans ce silence vide de la nuit campagnarde, me voici seul encore éveillé, les yeux bien ouve
4517 e, il fait presque froid. Dans ce silence vide de la nuit campagnarde, me voici seul encore éveillé, les yeux bien ouverts
4518 a nuit campagnarde, me voici seul encore éveillé, les yeux bien ouverts, l’esprit clair. Clarté d’un minuit solitaire, veil
4519 voici seul encore éveillé, les yeux bien ouverts, l’ esprit clair. Clarté d’un minuit solitaire, veillée trop lucide peut-ê
4520 lé, les yeux bien ouverts, l’esprit clair. Clarté d’ un minuit solitaire, veillée trop lucide peut-être, puisque le monde n
4521 solitaire, veillée trop lucide peut-être, puisque le monde n’y porte plus d’ombres. Je me souviens de ces nuits de Paris,
4522 lucide peut-être, puisque le monde n’y porte plus d’ ombres. Je me souviens de ces nuits de Paris, pleines d’appels fugitif
4523 le monde n’y porte plus d’ombres. Je me souviens de ces nuits de Paris, pleines d’appels fugitifs, assourdis ; de ces vei
4524 porte plus d’ombres. Je me souviens de ces nuits de Paris, pleines d’appels fugitifs, assourdis ; de ces veillées fiévreu
4525 es. Je me souviens de ces nuits de Paris, pleines d’ appels fugitifs, assourdis ; de ces veillées fiévreuses, assiégées. Es
4526 de Paris, pleines d’appels fugitifs, assourdis ; de ces veillées fiévreuses, assiégées. Est-ce que je les regrette ? Est-
4527 ces veillées fiévreuses, assiégées. Est-ce que je les regrette ? Est-ce que l’heure de la nuit où l’on ne dort pas n’est pa
4528 ssiégées. Est-ce que je les regrette ? Est-ce que l’ heure de la nuit où l’on ne dort pas n’est pas toujours l’heure des ma
4529 . Est-ce que je les regrette ? Est-ce que l’heure de la nuit où l’on ne dort pas n’est pas toujours l’heure des mauvaises
4530 st-ce que je les regrette ? Est-ce que l’heure de la nuit où l’on ne dort pas n’est pas toujours l’heure des mauvaises nos
4531 e les regrette ? Est-ce que l’heure de la nuit où l’ on ne dort pas n’est pas toujours l’heure des mauvaises nostalgies ? Q
4532 de la nuit où l’on ne dort pas n’est pas toujours l’ heure des mauvaises nostalgies ? Qui pourrait nous écrire une histoire
4533 pourrait nous écrire une histoire des inventions de l’insomnie ? Ne serait-ce pas tout simplement l’histoire de la naissa
4534 urrait nous écrire une histoire des inventions de l’ insomnie ? Ne serait-ce pas tout simplement l’histoire de la naissance
4535 de l’insomnie ? Ne serait-ce pas tout simplement l’ histoire de la naissance de nos démons ? La nuit ne pose pas de questi
4536 nie ? Ne serait-ce pas tout simplement l’histoire de la naissance de nos démons ? La nuit ne pose pas de questions immédia
4537  ? Ne serait-ce pas tout simplement l’histoire de la naissance de nos démons ? La nuit ne pose pas de questions immédiates
4538 ce pas tout simplement l’histoire de la naissance de nos démons ? La nuit ne pose pas de questions immédiates. C’est pourq
4539 lement l’histoire de la naissance de nos démons ? La nuit ne pose pas de questions immédiates. C’est pourquoi, dans cette
4540 la naissance de nos démons ? La nuit ne pose pas de questions immédiates. C’est pourquoi, dans cette heure suspendue, il
4541 dans cette heure suspendue, il vaut mieux cesser de penser. Que penserais-je, ici, d’humain, d’actif ? Ici où je suis san
4542 ut mieux cesser de penser. Que penserais-je, ici, d’ humain, d’actif ? Ici où je suis sans prochain à cette heure où mes fr
4543 esser de penser. Que penserais-je, ici, d’humain, d’ actif ? Ici où je suis sans prochain à cette heure où mes frères (?) l
4544 uis sans prochain à cette heure où mes frères (?) les hommes sont plus éloignés que jamais ? « La nuit est faite pour dormi
4545 (?) les hommes sont plus éloignés que jamais ? «  La nuit est faite pour dormir », me disait un gardien de l’ordre qui m’a
4546 uit est faite pour dormir », me disait un gardien de l’ordre qui m’avait surpris sur les quais de la Seine, au plus profon
4547 est faite pour dormir », me disait un gardien de l’ ordre qui m’avait surpris sur les quais de la Seine, au plus profond d
4548 ait un gardien de l’ordre qui m’avait surpris sur les quais de la Seine, au plus profond d’une contemplation des eaux noctu
4549 dien de l’ordre qui m’avait surpris sur les quais de la Seine, au plus profond d’une contemplation des eaux nocturnes. Ma
4550 n de l’ordre qui m’avait surpris sur les quais de la Seine, au plus profond d’une contemplation des eaux nocturnes. Ma pol
4551 urpris sur les quais de la Seine, au plus profond d’ une contemplation des eaux nocturnes. Ma police personnelle m’envoie a
4552 e opposerais-je, quelle arrière-pensée rôde ici ? La mauvaise habitude de penser « librement » ? Le goût des chimères préc
4553 le arrière-pensée rôde ici ? La mauvaise habitude de penser « librement » ? Le goût des chimères précises ? 4 novembre
4554  ? La mauvaise habitude de penser « librement » ? Le goût des chimères précises ? 4 novembre 1934 Cette note de la n
4555 mères précises ? 4 novembre 1934 Cette note de la nuit dernière peut corriger ce que je disais de l’anti-intellectua
4556 es précises ? 4 novembre 1934 Cette note de la nuit dernière peut corriger ce que je disais de l’anti-intellectualis
4557 e la nuit dernière peut corriger ce que je disais de l’anti-intellectualisme : elle indique, je crois, la part de vérité q
4558 a nuit dernière peut corriger ce que je disais de l’ anti-intellectualisme : elle indique, je crois, la part de vérité qu’i
4559 l’anti-intellectualisme : elle indique, je crois, la part de vérité qu’il peut y avoir dans cette réaction déplorable. Mai
4560 ntellectualisme : elle indique, je crois, la part de vérité qu’il peut y avoir dans cette réaction déplorable. Mais ce qu’
4561 s ce qu’elle met en question, d’autre part, c’est la légitimité d’une pensée isolée, d’un monologue intellectuel, du journ
4562 et en question, d’autre part, c’est la légitimité d’ une pensée isolée, d’un monologue intellectuel, du journal intime par
4563 re part, c’est la légitimité d’une pensée isolée, d’ un monologue intellectuel, du journal intime par exemple. Aucun écriva
4564 time par exemple. Aucun écrivain ne se donne plus de chances de mentir que celui qui écrit un journal intime, une prétendu
4565 emple. Aucun écrivain ne se donne plus de chances de mentir que celui qui écrit un journal intime, une prétendue « relatio
4566 rit un journal intime, une prétendue « relation » de ses pensées et sentiments. C’est d’abord que cet auteur, s’il a l’int
4567 sentiments. C’est d’abord que cet auteur, s’il a l’ intention d’écrire un journal, pense et sent en vue du journal, donc a
4568 C’est d’abord que cet auteur, s’il a l’intention d’ écrire un journal, pense et sent en vue du journal, donc autrement qu’
4569 mblant à sa vertu (ou à son vice) qu’il n’oserait l’ affirmer devant autrui. Le monologue du journal intime est un artific
4570 vice) qu’il n’oserait l’affirmer devant autrui. Le monologue du journal intime est un artifice qui veut se faire prendre
4571 me est un artifice qui veut se faire prendre pour la sincérité, alors qu’il n’est au vrai que la manière la plus facile de
4572 pour la sincérité, alors qu’il n’est au vrai que la manière la plus facile de jouer la comédie : sans spectateurs. Jouer
4573 ncérité, alors qu’il n’est au vrai que la manière la plus facile de jouer la comédie : sans spectateurs. Jouer la comédie
4574 qu’il n’est au vrai que la manière la plus facile de jouer la comédie : sans spectateurs. Jouer la comédie devant des être
4575 st au vrai que la manière la plus facile de jouer la comédie : sans spectateurs. Jouer la comédie devant des êtres réels e
4576 ile de jouer la comédie : sans spectateurs. Jouer la comédie devant des êtres réels est bien plus significatif. D’une cert
4577 evant des êtres réels est bien plus significatif. D’ une certaine manière, c’est plus « sincère »… (Mais le sens de ce mot
4578 e certaine manière, c’est plus « sincère »… (Mais le sens de ce mot s’évade dès qu’on veut le serrer de près.) La vérité d
4579 ne manière, c’est plus « sincère »… (Mais le sens de ce mot s’évade dès qu’on veut le serrer de près.) La vérité de l’homm
4580 »… (Mais le sens de ce mot s’évade dès qu’on veut le serrer de près.) La vérité de l’homme est dans le dialogue. Dans son
4581 e sens de ce mot s’évade dès qu’on veut le serrer de près.) La vérité de l’homme est dans le dialogue. Dans son affirmatio
4582 ce mot s’évade dès qu’on veut le serrer de près.) La vérité de l’homme est dans le dialogue. Dans son affirmation, dans se
4583 vade dès qu’on veut le serrer de près.) La vérité de l’homme est dans le dialogue. Dans son affirmation, dans ses question
4584 e dès qu’on veut le serrer de près.) La vérité de l’ homme est dans le dialogue. Dans son affirmation, dans ses questions o
4585 le serrer de près.) La vérité de l’homme est dans le dialogue. Dans son affirmation, dans ses questions ou ses réponses à
4586 ons ou ses réponses à d’autres hommes bien réels. Le monologue n’est qu’une suppression artificielle des conditions concrè
4587 crètes, sociales ou spirituelles, qui sont celles de chaque homme existant. (Ne pas confondre dialogue avec perplexité com
4588 ux autres qui m’entourent ? Qu’est-ce que je sais d’ eux, objectivement ? 10 novembre 1934 Observations nouvelles su
4589 10 novembre 1934 Observations nouvelles sur les gens. — Je vais chez les Calixte. On nous a dit que la mère est malad
4590 servations nouvelles sur les gens. — Je vais chez les Calixte. On nous a dit que la mère est malade. Je trouve à la cuisine
4591 ns. — Je vais chez les Calixte. On nous a dit que la mère est malade. Je trouve à la cuisine sa fille et une voisine. Elle
4592 On nous a dit que la mère est malade. Je trouve à la cuisine sa fille et une voisine. Elles se plaignent du froid. Le four
4593 ille et une voisine. Elles se plaignent du froid. Le fourneau est rouge, mais la porte donne au nord-ouest, d’où vient le
4594 e plaignent du froid. Le fourneau est rouge, mais la porte donne au nord-ouest, d’où vient le vent le plus glacial, depuis
4595 eau est rouge, mais la porte donne au nord-ouest, d’ où vient le vent le plus glacial, depuis des siècles, et en tout cas d
4596 ge, mais la porte donne au nord-ouest, d’où vient le vent le plus glacial, depuis des siècles, et en tout cas depuis longt
4597 la porte donne au nord-ouest, d’où vient le vent le plus glacial, depuis des siècles, et en tout cas depuis longtemps ava
4598 es siècles, et en tout cas depuis longtemps avant la construction de cette maison… Je passe au fond dans une chambre obscu
4599 n tout cas depuis longtemps avant la construction de cette maison… Je passe au fond dans une chambre obscure mais qui me p
4600 ambre obscure mais qui me paraît propre et sobre. La mère Calixte est au lit, un gros édredon ramassé sur le ventre, les p
4601 e Calixte est au lit, un gros édredon ramassé sur le ventre, les pieds découverts, un foulard noir sur les épaules, et je
4602 st au lit, un gros édredon ramassé sur le ventre, les pieds découverts, un foulard noir sur les épaules, et je crois bien s
4603 ventre, les pieds découverts, un foulard noir sur les épaules, et je crois bien sa blouse noire aussi. Elle me dit qu’elle
4604 assez mal. On devait lui retirer son linge toutes les deux heures. Quand elle sortait sa main du lit, cela fumait. — « Vous
4605 ait sa main du lit, cela fumait. — « Vous avez eu de la fièvre ! » — Elle ne sait pas. Elle ne veut pas de médecin. Sa fil
4606 sa main du lit, cela fumait. — « Vous avez eu de la fièvre ! » — Elle ne sait pas. Elle ne veut pas de médecin. Sa fille
4607 a fièvre ! » — Elle ne sait pas. Elle ne veut pas de médecin. Sa fille dit : « Elle ne voulait même plus toucher à la vian
4608 fille dit : « Elle ne voulait même plus toucher à la viande, pensez ! Il ne faut pas croire que la viande soit un si bon r
4609 r à la viande, pensez ! Il ne faut pas croire que la viande soit un si bon remède comme on le dit. Je lui ai fait du poule
4610 oire que la viande soit un si bon remède comme on le dit. Je lui ai fait du poulet, elle n’y avait pas goût. Alors j’ai pe
4611 pas goût. Alors j’ai pensé lui faire du bouillon de poulet, ça lui a fait de l’avantage. Voyez ! ce n’est pas vrai que la
4612 sé lui faire du bouillon de poulet, ça lui a fait de l’avantage. Voyez ! ce n’est pas vrai que la viande est si bonne pour
4613 lui faire du bouillon de poulet, ça lui a fait de l’ avantage. Voyez ! ce n’est pas vrai que la viande est si bonne pour le
4614 fait de l’avantage. Voyez ! ce n’est pas vrai que la viande est si bonne pour les malades. » Elle accepte de venir faire u
4615 ce n’est pas vrai que la viande est si bonne pour les malades. » Elle accepte de venir faire une lessive à la maison pour r
4616 nde est si bonne pour les malades. » Elle accepte de venir faire une lessive à la maison pour remplacer sa mère. Nous manq
4617 ades. » Elle accepte de venir faire une lessive à la maison pour remplacer sa mère. Nous manquons de corde pour étendre le
4618 à la maison pour remplacer sa mère. Nous manquons de corde pour étendre le linge ; elle imagine de le mettre à sécher sur
4619 acer sa mère. Nous manquons de corde pour étendre le linge ; elle imagine de le mettre à sécher sur des buissons de ronce.
4620 ons de corde pour étendre le linge ; elle imagine de le mettre à sécher sur des buissons de ronce. Tous les mouchoirs sont
4621 de corde pour étendre le linge ; elle imagine de le mettre à sécher sur des buissons de ronce. Tous les mouchoirs sont pl
4622 le imagine de le mettre à sécher sur des buissons de ronce. Tous les mouchoirs sont plus ou moins déchirés quand on va les
4623 e mettre à sécher sur des buissons de ronce. Tous les mouchoirs sont plus ou moins déchirés quand on va les récolter. « Voy
4624 mouchoirs sont plus ou moins déchirés quand on va les récolter. « Voyez-vous ! c’est qu’il a fait un vent cette nuit ! »
4625 ait un vent cette nuit ! » 11 novembre 1934 D’ une manière générale, ils ne sont pas conscients de porter la responsa
4626 ’une manière générale, ils ne sont pas conscients de porter la responsabilité des accidents qui leur arrivent. Cela peut a
4627 re générale, ils ne sont pas conscients de porter la responsabilité des accidents qui leur arrivent. Cela peut agacer dans
4628 ccidents qui leur arrivent. Cela peut agacer dans le détail. C’est assez sage dans l’ensemble. Ils seraient moins pauvres
4629 eut agacer dans le détail. C’est assez sage dans l’ ensemble. Ils seraient moins pauvres, moins malades, etc., s’ils étaie
4630 ’ils étaient plus « pratiques » comme on dit dans la bourgeoisie — où l’on s’imagine bien à tort que les gens du peuple so
4631 pratiques » comme on dit dans la bourgeoisie — où l’ on s’imagine bien à tort que les gens du peuple sont spécialement adro
4632 a bourgeoisie — où l’on s’imagine bien à tort que les gens du peuple sont spécialement adroits de leurs mains, débrouillard
4633 que les gens du peuple sont spécialement adroits de leurs mains, débrouillards et pleins de ressources mystérieuses. Mais
4634 t adroits de leurs mains, débrouillards et pleins de ressources mystérieuses. Mais ils seraient moins dignes aussi. Leur d
4635 ils seraient moins dignes aussi. Leur dignité est de subir sans se tourmenter. Ils ne se mettront jamais dans des états pa
4636 des états parce qu’ils ont cassé deux assiettes. La mère Calixte qui casse tout ce que l’on veut, a coutume de dire en co
4637 assiettes. La mère Calixte qui casse tout ce que l’ on veut, a coutume de dire en constatant le mal : « Voyez-vous ! je cr
4638 alixte qui casse tout ce que l’on veut, a coutume de dire en constatant le mal : « Voyez-vous ! je croyais la tenir cette
4639 ce que l’on veut, a coutume de dire en constatant le mal : « Voyez-vous ! je croyais la tenir cette assiette ! » De telle
4640 en constatant le mal : « Voyez-vous ! je croyais la tenir cette assiette ! » De telle manière qu’on entend bien que c’est
4641 yez-vous ! je croyais la tenir cette assiette ! » De telle manière qu’on entend bien que c’est ainsi dans tout, et qu’on a
4642 c’est ainsi dans tout, et qu’on aurait grand tort de croire que rien au monde dépend de nous. Ceci vaut pour les femmes, q
4643 ait grand tort de croire que rien au monde dépend de nous. Ceci vaut pour les femmes, qui sont la part la plus civilisée d
4644 que rien au monde dépend de nous. Ceci vaut pour les femmes, qui sont la part la plus civilisée de la population. Ce sont
4645 pend de nous. Ceci vaut pour les femmes, qui sont la part la plus civilisée de la population. Ce sont elles qui gagnent ce
4646 nous. Ceci vaut pour les femmes, qui sont la part la plus civilisée de la population. Ce sont elles qui gagnent ce qu’il f
4647 ur les femmes, qui sont la part la plus civilisée de la population. Ce sont elles qui gagnent ce qu’il faut, elles qui tra
4648 les femmes, qui sont la part la plus civilisée de la population. Ce sont elles qui gagnent ce qu’il faut, elles qui travai
4649 travaillent, elles qui décident, elles qui vont à l’ église ou au temple, ou n’y vont pas, elles qui savent. Pour les homme
4650 u temple, ou n’y vont pas, elles qui savent. Pour les hommes, c’est tout autre chose. Ils sont éloquents et naïfs, revendic
4651 icaces. La plupart ne font rien, ou « travaillent le mazet », ce qui n’est rien. Les femmes vont à la filature — une sur d
4652 , ou « travaillent le mazet », ce qui n’est rien. Les femmes vont à la filature — une sur dix-huit marche encore — et gagne
4653 le mazet », ce qui n’est rien. Les femmes vont à la filature — une sur dix-huit marche encore — et gagnent leurs sept fra
4654 ent leurs sept francs par jour. Pendant ce temps, les hommes sont sur la place et protestent contre le gouvernement. Ce son
4655 s par jour. Pendant ce temps, les hommes sont sur la place et protestent contre le gouvernement. Ce sont les radicaux et l
4656 les hommes sont sur la place et protestent contre le gouvernement. Ce sont les radicaux et les socialistes. Les commerçant
4657 ace et protestent contre le gouvernement. Ce sont les radicaux et les socialistes. Les commerçants sont souvent réactionnai
4658 t contre le gouvernement. Ce sont les radicaux et les socialistes. Les commerçants sont souvent réactionnaires et se mêlent
4659 rnement. Ce sont les radicaux et les socialistes. Les commerçants sont souvent réactionnaires et se mêlent peu à ceux de la
4660 nt souvent réactionnaires et se mêlent peu à ceux de la place. Enfin ceux qui sont occupés par l’imprimerie du journal loc
4661 souvent réactionnaires et se mêlent peu à ceux de la place. Enfin ceux qui sont occupés par l’imprimerie du journal local,
4662 ceux de la place. Enfin ceux qui sont occupés par l’ imprimerie du journal local, par les garages ou à la mairie, sont comm
4663 nt occupés par l’imprimerie du journal local, par les garages ou à la mairie, sont communistes et mènent les affaires du pa
4664 imprimerie du journal local, par les garages ou à la mairie, sont communistes et mènent les affaires du pays. Ils vont à t
4665 arages ou à la mairie, sont communistes et mènent les affaires du pays. Ils vont à toutes les conférences, prennent la paro
4666 et mènent les affaires du pays. Ils vont à toutes les conférences, prennent la parole au Cercle d’hommes, citent des livres
4667 pays. Ils vont à toutes les conférences, prennent la parole au Cercle d’hommes, citent des livres sur la politique… 12
4668 tes les conférences, prennent la parole au Cercle d’ hommes, citent des livres sur la politique… 12 novembre 1934 J’a
4669 parole au Cercle d’hommes, citent des livres sur la politique… 12 novembre 1934 J’ai relevé quelques chiffres dans
4670 evé quelques chiffres dans un ouvrage sur A… dû à la plume d’un de ses pasteurs à la retraite10. En 1570, le mûrier, impor
4671 ues chiffres dans un ouvrage sur A… dû à la plume d’ un de ses pasteurs à la retraite10. En 1570, le mûrier, importé de Chi
4672 hiffres dans un ouvrage sur A… dû à la plume d’un de ses pasteurs à la retraite10. En 1570, le mûrier, importé de Chine fa
4673 vrage sur A… dû à la plume d’un de ses pasteurs à la retraite10. En 1570, le mûrier, importé de Chine fait son apparition
4674 me d’un de ses pasteurs à la retraite10. En 1570, le mûrier, importé de Chine fait son apparition dans le Midi. État du pa
4675 eurs à la retraite10. En 1570, le mûrier, importé de Chine fait son apparition dans le Midi. État du pays en 1820 : douze
4676 mûrier, importé de Chine fait son apparition dans le Midi. État du pays en 1820 : douze filatures, deux fabriques de chape
4677 du pays en 1820 : douze filatures, deux fabriques de chapeaux, 5000 habitants, un commerce important de produits soyeux ma
4678 e chapeaux, 5000 habitants, un commerce important de produits soyeux manufacturés. Lors de la dédicace du nouveau temple,
4679 mportant de produits soyeux manufacturés. Lors de la dédicace du nouveau temple, en 1822, quinze mille protestants accoure
4680 mple, en 1822, quinze mille protestants accourent de toute la contrée pour suivre des cérémonies dont leurs descendants pa
4681 1822, quinze mille protestants accourent de toute la contrée pour suivre des cérémonies dont leurs descendants parlent enc
4682 temple chaque dimanche. Je complète : Vers 1900, la soie artificielle fait son apparition dans la vallée du Rhône. Fondat
4683 00, la soie artificielle fait son apparition dans la vallée du Rhône. Fondation des grandes usines de la région lyonnaise.
4684 la vallée du Rhône. Fondation des grandes usines de la région lyonnaise. Apparition du grand capital. État du pays en 193
4685 vallée du Rhône. Fondation des grandes usines de la région lyonnaise. Apparition du grand capital. État du pays en 1935 :
4686 du travail cinq jours par semaine à une centaine d’ ouvrières, dont le salaire moyen est de neuf francs par jour. Faillit
4687 ours par semaine à une centaine d’ouvrières, dont le salaire moyen est de neuf francs par jour. Faillite de la dernière b
4688 e centaine d’ouvrières, dont le salaire moyen est de neuf francs par jour. Faillite de la dernière bonneterie, ces dernie
4689 aire moyen est de neuf francs par jour. Faillite de la dernière bonneterie, ces derniers jours. Le tiers des maisons est
4690 te de la dernière bonneterie, ces derniers jours. Le tiers des maisons est en ruines, — tout le centre. On croirait une vi
4691 jours. Le tiers des maisons est en ruines, — tout le centre. On croirait une ville bombardée. 2300 habitants. Cent personn
4692 ée. 2300 habitants. Cent personnes au culte. Dans la campagne environnante, une maison sur dix habitée. Dès 1934, la soie
4693 vironnante, une maison sur dix habitée. Dès 1934, la soie japonaise a fait son apparition sur le marché lyonnais. Faillite
4694 1934, la soie japonaise a fait son apparition sur le marché lyonnais. Faillite de plusieurs des grosses entreprises de soi
4695 t son apparition sur le marché lyonnais. Faillite de plusieurs des grosses entreprises de soie artificielle. Le cycle norm
4696 is. Faillite de plusieurs des grosses entreprises de soie artificielle. Le cycle normal du progrès capitaliste est clos. L
4697 urs des grosses entreprises de soie artificielle. Le cycle normal du progrès capitaliste est clos. Lyon a drainé toute la
4698 progrès capitaliste est clos. Lyon a drainé toute la richesse indigène de ce département. Et cette richesse à son tour va
4699 st clos. Lyon a drainé toute la richesse indigène de ce département. Et cette richesse à son tour va reprendre le chemin d
4700 tement. Et cette richesse à son tour va reprendre le chemin de l’Orient, d’où vint autrefois le mûrier. Question : que res
4701 cette richesse à son tour va reprendre le chemin de l’Orient, d’où vint autrefois le mûrier. Question : que reste-t-il po
4702 tte richesse à son tour va reprendre le chemin de l’ Orient, d’où vint autrefois le mûrier. Question : que reste-t-il pour
4703 se à son tour va reprendre le chemin de l’Orient, d’ où vint autrefois le mûrier. Question : que reste-t-il pour entreprend
4704 rendre le chemin de l’Orient, d’où vint autrefois le mûrier. Question : que reste-t-il pour entreprendre ici une révolutio
4705 5 novembre 1934 Installé une salamandre devant la cheminée de ma chambre de travail. Je ne sais si c’est à cause des ef
4706 934 Installé une salamandre devant la cheminée de ma chambre de travail. Je ne sais si c’est à cause des efforts prodig
4707 é une salamandre devant la cheminée de ma chambre de travail. Je ne sais si c’est à cause des efforts prodigieux qu’il a f
4708 des efforts prodigieux qu’il a fallu fournir pour la hisser de la remise jusqu’ici, mais je sens que je la prends en gripp
4709 s prodigieux qu’il a fallu fournir pour la hisser de la remise jusqu’ici, mais je sens que je la prends en grippe. Elle es
4710 rodigieux qu’il a fallu fournir pour la hisser de la remise jusqu’ici, mais je sens que je la prends en grippe. Elle est r
4711 isser de la remise jusqu’ici, mais je sens que je la prends en grippe. Elle est réellement affreuse : elle est « ornée ».
4712 lle est réellement affreuse : elle est « ornée ». Le fabricant a voulu faire bourgeois. Une salamandre, n’est-ce pas, c’es
4713 is. Une salamandre, n’est-ce pas, c’est un meuble de salon, il faut la décorer convenablement et surtout éviter que cela r
4714 , n’est-ce pas, c’est un meuble de salon, il faut la décorer convenablement et surtout éviter que cela ressemble à ce que
4715 la ressemble à ce que c’est, un instrument utile. D’ où ces feuilles de vigne en relief, et toutes ces rainures, volutes, c
4716 que c’est, un instrument utile. D’où ces feuilles de vigne en relief, et toutes ces rainures, volutes, corniches et fiorit
4717 fioritures en fonte émaillée, qui ont pour effet de retenir la poussière et les cendres, et de rendre tout nettoyage à pe
4718 en fonte émaillée, qui ont pour effet de retenir la poussière et les cendres, et de rendre tout nettoyage à peu près impo
4719 ée, qui ont pour effet de retenir la poussière et les cendres, et de rendre tout nettoyage à peu près impossible. Le camouf
4720 effet de retenir la poussière et les cendres, et de rendre tout nettoyage à peu près impossible. Le camouflage de l’honnê
4721 t de rendre tout nettoyage à peu près impossible. Le camouflage de l’honnête appareil a dû coûter fort cher, mais au moins
4722 ut nettoyage à peu près impossible. Le camouflage de l’honnête appareil a dû coûter fort cher, mais au moins on a de la la
4723 nettoyage à peu près impossible. Le camouflage de l’ honnête appareil a dû coûter fort cher, mais au moins on a de la laide
4724 ppareil a dû coûter fort cher, mais au moins on a de la laideur pour son argent. Même remarque pour les poignées de fenêtr
4725 reil a dû coûter fort cher, mais au moins on a de la laideur pour son argent. Même remarque pour les poignées de fenêtres
4726 de la laideur pour son argent. Même remarque pour les poignées de fenêtres et de serrures. Cette laideur et cette incommodi
4727 pour son argent. Même remarque pour les poignées de fenêtres et de serrures. Cette laideur et cette incommodité ne seraie
4728 t. Même remarque pour les poignées de fenêtres et de serrures. Cette laideur et cette incommodité ne seraient rien d’aille
4729 en d’ailleurs, si elles ne rappelaient sans cesse l’ intention d’honorabilité dont elles procèdent… 21 novembre 1934
4730 s, si elles ne rappelaient sans cesse l’intention d’ honorabilité dont elles procèdent… 21 novembre 1934 Leur langag
4731 procèdent… 21 novembre 1934 Leur langage. La mère Calixte devait faire notre lessive la semaine prochaine. Elle vi
4732 ngage. La mère Calixte devait faire notre lessive la semaine prochaine. Elle vient s’excuser : — « Qui sait, Madame, j’aim
4733 ient s’excuser : — « Qui sait, Madame, j’aimerais d’ aller à Alès, quelle jour ça vous préférerait ? » (En prononçant tous
4734 jour ça vous préférerait ? » (En prononçant tous les e muets.) Simard, à propos de la récente baisse des salaires à la fil
4735 prononçant tous les e muets.) Simard, à propos de la récente baisse des salaires à la filature : — « Je vous dis, c’est mi
4736 ard, à propos de la récente baisse des salaires à la filature : — « Je vous dis, c’est miraculeux ce qu’on leur donne ! Se
4737 après tout. Tradition laïque.) L’autre jour, dans l’ autocar, une femme dont j’ai cru comprendre qu’elle tient un petit hôt
4738 jamais fait ce rapprochement ? Ce petit fait, si l’ on y réfléchit, résume un drame. Ce drame est celui du langage dans no
4739 notre société présente. Et c’est encore une fois le drame de la culture. Qu’on ne croie pas que j’exagère. Je ne tire de
4740 ciété présente. Et c’est encore une fois le drame de la culture. Qu’on ne croie pas que j’exagère. Je ne tire de ce fait,
4741 té présente. Et c’est encore une fois le drame de la culture. Qu’on ne croie pas que j’exagère. Je ne tire de ce fait, à v
4742 ure. Qu’on ne croie pas que j’exagère. Je ne tire de ce fait, à vrai dire minuscule, qu’une évidence. Les mots que nous di
4743 ce fait, à vrai dire minuscule, qu’une évidence. Les mots que nous disons ou que nous écrivons, nous autres intellectuels,
4744 rivons, nous autres intellectuels, éveillent dans l’ esprit populaire des harmoniques que nous ne savons plus prévoir. Litt
4745 s que nous ne savons plus prévoir. Littéralement, les mots n’ont plus le même sens pour le peuple et pour ceux qui voudraie
4746 plus prévoir. Littéralement, les mots n’ont plus le même sens pour le peuple et pour ceux qui voudraient lui parler. Le p
4747 téralement, les mots n’ont plus le même sens pour le peuple et pour ceux qui voudraient lui parler. Le petit exemple que j
4748 le peuple et pour ceux qui voudraient lui parler. Le petit exemple que je viens de citer, c’est une espèce de calembour qu
4749 t exemple que je viens de citer, c’est une espèce de calembour qui ne joue que sur des sons. Mais il est clair que le sens
4750 i ne joue que sur des sons. Mais il est clair que le sens des termes dont nous usons doit subir des métamorphoses non moin
4751 es vocables dont nous pensions qu’ils exprimaient les lieux communs, sur quoi repose, tacitement, la vie sociale, sont aujo
4752 t les lieux communs, sur quoi repose, tacitement, la vie sociale, sont aujourd’hui vidés de leur signification à la fois s
4753 acitement, la vie sociale, sont aujourd’hui vidés de leur signification à la fois symbolique et précise. Ils n’éveillent p
4754 symbolique et précise. Ils n’éveillent plus chez l’ homme du peuple les mêmes espoirs, les mêmes dégoûts que chez nous. Le
4755 cise. Ils n’éveillent plus chez l’homme du peuple les mêmes espoirs, les mêmes dégoûts que chez nous. Leur résonance sentim
4756 nt plus chez l’homme du peuple les mêmes espoirs, les mêmes dégoûts que chez nous. Leur résonance sentimentale est différen
4757 rquoi leur sens est différent, en dépit de ce que l’ on pourrait déduire, dans le fait, d’une discussion raisonnable, c’est
4758 t, en dépit de ce que l’on pourrait déduire, dans le fait, d’une discussion raisonnable, c’est-à-dire truquée, avec tel ou
4759 it de ce que l’on pourrait déduire, dans le fait, d’ une discussion raisonnable, c’est-à-dire truquée, avec tel ou tel ouvr
4760 truquée, avec tel ou tel ouvrier. On pensera que de tout temps la traduction du langage surveillé des écrivains dans le l
4761 tel ou tel ouvrier. On pensera que de tout temps la traduction du langage surveillé des écrivains dans le langage parlé d
4762 raduction du langage surveillé des écrivains dans le langage parlé du peuple fut affectée de malentendus de ce genre. Voir
4763 ains dans le langage parlé du peuple fut affectée de malentendus de ce genre. Voire. Le peuple ne lisait pas, avant l’écol
4764 ngage parlé du peuple fut affectée de malentendus de ce genre. Voire. Le peuple ne lisait pas, avant l’école de Guizot. Le
4765 e fut affectée de malentendus de ce genre. Voire. Le peuple ne lisait pas, avant l’école de Guizot. Le « public », c’était
4766 e ce genre. Voire. Le peuple ne lisait pas, avant l’ école de Guizot. Le « public », c’était la noblesse, et les bourgeois
4767 re. Voire. Le peuple ne lisait pas, avant l’école de Guizot. Le « public », c’était la noblesse, et les bourgeois imitant
4768 Le peuple ne lisait pas, avant l’école de Guizot. Le « public », c’était la noblesse, et les bourgeois imitant la noblesse
4769 , avant l’école de Guizot. Le « public », c’était la noblesse, et les bourgeois imitant la noblesse. Le vrai peuple les co
4770 de Guizot. Le « public », c’était la noblesse, et les bourgeois imitant la noblesse. Le vrai peuple les comprenait dans la
4771  », c’était la noblesse, et les bourgeois imitant la noblesse. Le vrai peuple les comprenait dans la seule mesure de l’uti
4772 a noblesse, et les bourgeois imitant la noblesse. Le vrai peuple les comprenait dans la seule mesure de l’utile. L’Église
4773 les bourgeois imitant la noblesse. Le vrai peuple les comprenait dans la seule mesure de l’utile. L’Église faisait le trait
4774 t la noblesse. Le vrai peuple les comprenait dans la seule mesure de l’utile. L’Église faisait le trait d’union, l’Église
4775 e vrai peuple les comprenait dans la seule mesure de l’utile. L’Église faisait le trait d’union, l’Église gardienne du sen
4776 rai peuple les comprenait dans la seule mesure de l’ utile. L’Église faisait le trait d’union, l’Église gardienne du sens c
4777 e les comprenait dans la seule mesure de l’utile. L’ Église faisait le trait d’union, l’Église gardienne du sens concret de
4778 dans la seule mesure de l’utile. L’Église faisait le trait d’union, l’Église gardienne du sens concret des lieux communs.
4779 eule mesure de l’utile. L’Église faisait le trait d’ union, l’Église gardienne du sens concret des lieux communs. Aujourd’h
4780 re de l’utile. L’Église faisait le trait d’union, l’ Église gardienne du sens concret des lieux communs. Aujourd’hui ces do
4781 mmuns. Aujourd’hui ces données sont bouleversées. L’ instruction publique et la Presse répandent sinon le goût, du moins la
4782 nées sont bouleversées. L’instruction publique et la Presse répandent sinon le goût, du moins la pratique quotidienne de l
4783 instruction publique et la Presse répandent sinon le goût, du moins la pratique quotidienne de la lecture. Le public s’éte
4784 ue et la Presse répandent sinon le goût, du moins la pratique quotidienne de la lecture. Le public s’étend au hasard. Il n
4785 t sinon le goût, du moins la pratique quotidienne de la lecture. Le public s’étend au hasard. Il ne constitue plus un corp
4786 inon le goût, du moins la pratique quotidienne de la lecture. Le public s’étend au hasard. Il ne constitue plus un corps l
4787 , du moins la pratique quotidienne de la lecture. Le public s’étend au hasard. Il ne constitue plus un corps limité, éduqu
4788 . Un chacun peut en être, et juger comme il veut. Le droit de se tromper, et de tromper grâce au langage, est un des droit
4789 un peut en être, et juger comme il veut. Le droit de se tromper, et de tromper grâce au langage, est un des droits impresc
4790 t juger comme il veut. Le droit de se tromper, et de tromper grâce au langage, est un des droits imprescriptibles que se t
4791 oits imprescriptibles que se trouve avoir décrété la Convention. Bref, il n’est plus de mesure commune : ni l’Église, ni l
4792 avoir décrété la Convention. Bref, il n’est plus de mesure commune : ni l’Église, ni la Culture, ni l’École qui prétend l
4793 ntion. Bref, il n’est plus de mesure commune : ni l’ Église, ni la Culture, ni l’École qui prétend les remplacer, n’ont plu
4794 il n’est plus de mesure commune : ni l’Église, ni la Culture, ni l’École qui prétend les remplacer, n’ont plus d’autorité
4795 e mesure commune : ni l’Église, ni la Culture, ni l’ École qui prétend les remplacer, n’ont plus d’autorité sur l’esprit de
4796 i l’Église, ni la Culture, ni l’École qui prétend les remplacer, n’ont plus d’autorité sur l’esprit de la lettre. Aussi bie
4797 ni l’École qui prétend les remplacer, n’ont plus d’ autorité sur l’esprit de la lettre. Aussi bien nous parlons au hasard,
4798 prétend les remplacer, n’ont plus d’autorité sur l’ esprit de la lettre. Aussi bien nous parlons au hasard, pour ne pas di
4799 les remplacer, n’ont plus d’autorité sur l’esprit de la lettre. Aussi bien nous parlons au hasard, pour ne pas dire dans l
4800 remplacer, n’ont plus d’autorité sur l’esprit de la lettre. Aussi bien nous parlons au hasard, pour ne pas dire dans le v
4801 ien nous parlons au hasard, pour ne pas dire dans le vide (il vaudrait mieux que ce soit le vide, dans bien des cas), quel
4802 dire dans le vide (il vaudrait mieux que ce soit le vide, dans bien des cas), quels que soient nos efforts vers la rigueu
4803 bien des cas), quels que soient nos efforts vers la rigueur et vers l’adaptation de notre style à notre action. On serait
4804 ls que soient nos efforts vers la rigueur et vers l’ adaptation de notre style à notre action. On serait même tenté d’estim
4805 nos efforts vers la rigueur et vers l’adaptation de notre style à notre action. On serait même tenté d’estimer que la plu
4806 notre style à notre action. On serait même tenté d’ estimer que la plus grande rigueur entraîne la moindre efficacité ; et
4807 notre action. On serait même tenté d’estimer que la plus grande rigueur entraîne la moindre efficacité ; et l’inverse. Pa
4808 nté d’estimer que la plus grande rigueur entraîne la moindre efficacité ; et l’inverse. Par où l’on voit que le contraire
4809 rande rigueur entraîne la moindre efficacité ; et l’ inverse. Par où l’on voit que le contraire de la « vie spirituelle »,
4810 aîne la moindre efficacité ; et l’inverse. Par où l’ on voit que le contraire de la « vie spirituelle », c’est « le public 
4811 e efficacité ; et l’inverse. Par où l’on voit que le contraire de la « vie spirituelle », c’est « le public ». Cette vie s
4812 ; et l’inverse. Par où l’on voit que le contraire de la « vie spirituelle », c’est « le public ». Cette vie spirituelle et
4813 t l’inverse. Par où l’on voit que le contraire de la « vie spirituelle », c’est « le public ». Cette vie spirituelle et ce
4814 e le contraire de la « vie spirituelle », c’est «  le public ». Cette vie spirituelle et ce public nous posent des exigence
4815 lles soient aussi exactement contradictoires. Or, de ces deux antagonistes, c’est l’esprit qui sera vaincu. Non point qu’i
4816 tradictoires. Or, de ces deux antagonistes, c’est l’ esprit qui sera vaincu. Non point qu’il s’avilisse partout ni qu’il se
4817 partout ni qu’il se laisse toujours persuader par la tentation du succès. Mais simplement on ne l’entend plus, il n’agit p
4818 par la tentation du succès. Mais simplement on ne l’ entend plus, il n’agit plus. Ce qu’on « entend », c’est l’absence de l
4819 plus, il n’agit plus. Ce qu’on « entend », c’est l’ absence de l’esprit, c’est l’appel aux instincts, aux intérêts urgents
4820 n’agit plus. Ce qu’on « entend », c’est l’absence de l’esprit, c’est l’appel aux instincts, aux intérêts urgents, presque
4821 git plus. Ce qu’on « entend », c’est l’absence de l’ esprit, c’est l’appel aux instincts, aux intérêts urgents, presque tou
4822 on « entend », c’est l’absence de l’esprit, c’est l’ appel aux instincts, aux intérêts urgents, presque toujours contraires
4823 x intérêts réels… 25 novembre 1934 Culture de la bourgeoisie ? Vous montrez à une dame de cette classe des reproduc
4824 ntérêts réels… 25 novembre 1934 Culture de la bourgeoisie ? Vous montrez à une dame de cette classe des reproductio
4825 lture de la bourgeoisie ? Vous montrez à une dame de cette classe des reproductions de Rembrandt, elle dira : « Ah ! oui,
4826 trez à une dame de cette classe des reproductions de Rembrandt, elle dira : « Ah ! oui, ces clairs-obscurs sont magnifique
4827 gens sont laids, ridés, bossus, et n’ont-ils pas la figure trop large » ? (jugement spontané). Vous lui montrez des repro
4828 é). Vous lui montrez des reproductions du plafond de la Sixtine, elle trouve cela « joli » ; et « — Tiens, cette femme res
4829 Vous lui montrez des reproductions du plafond de la Sixtine, elle trouve cela « joli » ; et « — Tiens, cette femme ressem
4830 fait, c’est frappant ! Qu’est-ce que c’est ? » —  La Sybille de Cumes … Cinq minutes après, cette dame s’indignera de la b
4831 umes … Cinq minutes après, cette dame s’indignera de la barbarie des bolchéviques et des nazis, opposés comme on sait à to
4832 s … Cinq minutes après, cette dame s’indignera de la barbarie des bolchéviques et des nazis, opposés comme on sait à toute
4833 t des nazis, opposés comme on sait à toute espèce de culture raffinée. (D’après nature : la dame sort d’ici. Les reproduct
4834 ute espèce de culture raffinée. (D’après nature : la dame sort d’ici. Les reproductions de la Sixtine sont épinglées au-de
4835 e raffinée. (D’après nature : la dame sort d’ici. Les reproductions de la Sixtine sont épinglées au-dessus de ma table de t
4836 ès nature : la dame sort d’ici. Les reproductions de la Sixtine sont épinglées au-dessus de ma table de travail.) 28 no
4837 nature : la dame sort d’ici. Les reproductions de la Sixtine sont épinglées au-dessus de ma table de travail.) 28 novem
4838 roductions de la Sixtine sont épinglées au-dessus de ma table de travail.) 28 novembre 1934 « Aidez-moi ! », dit à J
4839 e la Sixtine sont épinglées au-dessus de ma table de travail.) 28 novembre 1934 « Aidez-moi ! », dit à Jean Giono l’
4840 ovembre 1934 « Aidez-moi ! », dit à Jean Giono l’ héroïne d’une de ses nouvelles : elle se plaint de ce que les auteurs
4841 34 « Aidez-moi ! », dit à Jean Giono l’héroïne d’ une de ses nouvelles : elle se plaint de ce que les auteurs des romans
4842 « Aidez-moi ! », dit à Jean Giono l’héroïne d’une de ses nouvelles : elle se plaint de ce que les auteurs des romans qu’on
4843 l’héroïne d’une de ses nouvelles : elle se plaint de ce que les auteurs des romans qu’on lui donne à lire « passent à côté
4844 d’une de ses nouvelles : elle se plaint de ce que les auteurs des romans qu’on lui donne à lire « passent à côté d’elle san
4845 es romans qu’on lui donne à lire « passent à côté d’ elle sans rien dire, sans même la voir, sans la soupçonner », et la la
4846 « passent à côté d’elle sans rien dire, sans même la voir, sans la soupçonner », et la laissent enfin sans secours devant
4847 té d’elle sans rien dire, sans même la voir, sans la soupçonner », et la laissent enfin sans secours devant l’énigme de sa
4848 dire, sans même la voir, sans la soupçonner », et la laissent enfin sans secours devant l’énigme de sa vie. C’est émouvant
4849 onner », et la laissent enfin sans secours devant l’ énigme de sa vie. C’est émouvant… Mais la plupart de nos contemporains
4850 et la laissent enfin sans secours devant l’énigme de sa vie. C’est émouvant… Mais la plupart de nos contemporains, est-ce
4851 est-ce qu’ils ne disent pas plutôt : « Fichez-moi la paix ! Faites-moi rigoler, donnez-moi des sensations, mais surtout ne
4852 des sensations, mais surtout ne vous occupez pas de cela en moi dont je ne veux pas m’occuper ! » À 10 kilomètres d’ici,
4853 r ! » À 10 kilomètres d’ici, hier au soir, pressé de rentrer, je hèle une auto. Le conducteur est seul. Il me prend volont
4854 ier au soir, pressé de rentrer, je hèle une auto. Le conducteur est seul. Il me prend volontiers. Nous causons. C’est un c
4855 end volontiers. Nous causons. C’est un commerçant de Lyon, la cinquantaine, assez bavard. À certaines allusions, je devine
4856 tiers. Nous causons. C’est un commerçant de Lyon, la cinquantaine, assez bavard. À certaines allusions, je devine qu’il es
4857 taines allusions, je devine qu’il est « seul dans la vie ». Pourtant, il porte une alliance. Pauvre gaieté de la vie de ga
4858 ». Pourtant, il porte une alliance. Pauvre gaieté de la vie de garçon, reprise par nécessité… Nous arrivons sur la place d
4859 Pourtant, il porte une alliance. Pauvre gaieté de la vie de garçon, reprise par nécessité… Nous arrivons sur la place de m
4860 t, il porte une alliance. Pauvre gaieté de la vie de garçon, reprise par nécessité… Nous arrivons sur la place de mon vill
4861 garçon, reprise par nécessité… Nous arrivons sur la place de mon village. « Je vous dépose ici ? Où voulez-vous ? Tenez,
4862 reprise par nécessité… Nous arrivons sur la place de mon village. « Je vous dépose ici ? Où voulez-vous ? Tenez, on va s’a
4863  ? Où voulez-vous ? Tenez, on va s’arrêter devant la pissotière, ha ! ha ! ha ! Ça me rappelle une bien bonne histoire, vo
4864 ça, Clochemerle que ça s’appelle, je ne sais plus le nom du type qui a écrit le bouquin. Ah ça alors ! Tenez, c’est l’hist
4865 pelle, je ne sais plus le nom du type qui a écrit le bouquin. Ah ça alors ! Tenez, c’est l’histoire d’une municipalité qui
4866 ui a écrit le bouquin. Ah ça alors ! Tenez, c’est l’ histoire d’une municipalité qui fait construire un de ces trucs-là jus
4867 le bouquin. Ah ça alors ! Tenez, c’est l’histoire d’ une municipalité qui fait construire un de ces trucs-là juste en face
4868 istoire d’une municipalité qui fait construire un de ces trucs-là juste en face [de] l’église du village, vous voyez d’ici
4869 construire un de ces trucs-là juste en face [de] l’ église du village, vous voyez d’ici ! Et toutes les combines que ça am
4870 l’église du village, vous voyez d’ici ! Et toutes les combines que ça amène, ah ! mais alors, vous savez, tout y est, c’est
4871 ais alors, vous savez, tout y est, c’est attrapé, le curé, la politique et tout !… »11 Les éditeurs s’efforcent de répond
4872 , vous savez, tout y est, c’est attrapé, le curé, la politique et tout !… »11 Les éditeurs s’efforcent de répondre à la d
4873 st attrapé, le curé, la politique et tout !… »11 Les éditeurs s’efforcent de répondre à la demande du public. Il faut des
4874 olitique et tout !… »11 Les éditeurs s’efforcent de répondre à la demande du public. Il faut des livres faciles, des livr
4875 ut !… »11 Les éditeurs s’efforcent de répondre à la demande du public. Il faut des livres faciles, des livres gais, etc.
4876 , des livres gais, etc. C’est, disent-ils, ce que l’ on demande. — Hé ! oui, parbleu, c’est ce que « les gens » demandent.
4877 l’on demande. — Hé ! oui, parbleu, c’est ce que «  les gens » demandent. Mais savent-ils bien ce qu’ils demandent, et pourqu
4878 ent-ils bien ce qu’ils demandent, et pourquoi ils le demandent ? Est-ce que le rôle des éditeurs, mais surtout et d’abord
4879 andent, et pourquoi ils le demandent ? Est-ce que le rôle des éditeurs, mais surtout et d’abord des écrivains, ne serait p
4880 et d’abord des écrivains, ne serait pas justement de savoir un peu mieux que « les gens » de quoi ils ont besoin et ce qu’
4881 serait pas justement de savoir un peu mieux que «  les gens » de quoi ils ont besoin et ce qu’ils demandent réellement ? Car
4882 justement de savoir un peu mieux que « les gens » de quoi ils ont besoin et ce qu’ils demandent réellement ? Car les gens
4883 nt besoin et ce qu’ils demandent réellement ? Car les gens ne demandent pas ce qu’ils ont l’air de demander, et ce qu’on se
4884 Car les gens ne demandent pas ce qu’ils ont l’air de demander, et ce qu’on se montre si pressé de leur donner à bon marché
4885 ’air de demander, et ce qu’on se montre si pressé de leur donner à bon marché. Ils s’expriment mal, ils trahissent leur pe
4886 leurs désirs, ils n’osent pas dire, ils n’ont pas de formules pour avouer leur peine, pour demander les « remèdes » qu’il
4887 de formules pour avouer leur peine, pour demander les « remèdes » qu’il faudrait. On ne le leur a pas appris. On a préféré
4888 ur demander les « remèdes » qu’il faudrait. On ne le leur a pas appris. On a préféré se payer leur tête. On les a pris pou
4889 a pas appris. On a préféré se payer leur tête. On les a pris pour ce qu’ils ont l’air d’être, ou mieux pour ce qu’ils croie
4890 leur tête. On les a pris pour ce qu’ils ont l’air d’ être, ou mieux pour ce qu’ils croient devoir se donner l’air d’être ou
4891 ou mieux pour ce qu’ils croient devoir se donner l’ air d’être ou de n’être pas. Comme si le fin du fin, c’était de prendr
4892 eux pour ce qu’ils croient devoir se donner l’air d’ être ou de n’être pas. Comme si le fin du fin, c’était de prendre au m
4893 e qu’ils croient devoir se donner l’air d’être ou de n’être pas. Comme si le fin du fin, c’était de prendre au mot les pau
4894 se donner l’air d’être ou de n’être pas. Comme si le fin du fin, c’était de prendre au mot les pauvres hommes préalablemen
4895 ou de n’être pas. Comme si le fin du fin, c’était de prendre au mot les pauvres hommes préalablement abêtis par l’école, p
4896 Comme si le fin du fin, c’était de prendre au mot les pauvres hommes préalablement abêtis par l’école, par la presse, par l
4897 u mot les pauvres hommes préalablement abêtis par l’ école, par la presse, par les partis et par le cinéma. Mais croyez-vou
4898 vres hommes préalablement abêtis par l’école, par la presse, par les partis et par le cinéma. Mais croyez-vous vraiment qu
4899 alablement abêtis par l’école, par la presse, par les partis et par le cinéma. Mais croyez-vous vraiment que mon bagnolard,
4900 par l’école, par la presse, par les partis et par le cinéma. Mais croyez-vous vraiment que mon bagnolard, mon lecteur enth
4901 iment que mon bagnolard, mon lecteur enthousiaste de Clochemerle, grand roman de la pissotière, croyez-vous que cet homme
4902 lecteur enthousiaste de Clochemerle, grand roman de la pissotière, croyez-vous que cet homme tout de même ne disait pas l
4903 cteur enthousiaste de Clochemerle, grand roman de la pissotière, croyez-vous que cet homme tout de même ne disait pas lui
4904 e insupportable, et fallait-il être bien fin pour le comprendre ? 1er décembre 1934 Le pasteur m’a convoqué aux entr
4905 fin pour le comprendre ? 1er décembre 1934 Le pasteur m’a convoqué aux entretiens qu’il organise le samedi soir, da
4906 asteur m’a convoqué aux entretiens qu’il organise le samedi soir, dans une salle attenante au temple, pour les hommes de s
4907 di soir, dans une salle attenante au temple, pour les hommes de sa paroisse. « C’est le seul moyen de les avoir, me dit-il
4908 ns une salle attenante au temple, pour les hommes de sa paroisse. « C’est le seul moyen de les avoir, me dit-il. Comme vo
4909 temple, pour les hommes de sa paroisse. « C’est le seul moyen de les avoir, me dit-il. Comme vous l’aurez remarqué, il n
4910 les hommes de sa paroisse. « C’est le seul moyen de les avoir, me dit-il. Comme vous l’aurez remarqué, il n’en vient qu’u
4911 hommes de sa paroisse. « C’est le seul moyen de les avoir, me dit-il. Comme vous l’aurez remarqué, il n’en vient qu’une d
4912 le seul moyen de les avoir, me dit-il. Comme vous l’ aurez remarqué, il n’en vient qu’une dizaine au culte. C’est trop comp
4913 sur un sujet neutre, nous en avons toujours dans les 40 à 50. Et une fois qu’ils sont là, on peut parler de tout… J’irai d
4914 à 50. Et une fois qu’ils sont là, on peut parler de tout… J’irai d’autant plus volontiers que, devant parler moi-même, da
4915 is qu’ils sont là, on peut parler de tout… J’irai d’ autant plus volontiers que, devant parler moi-même, dans quelques jour
4916 t parler moi-même, dans quelques jours, au cercle d’ hommes de Saint-J., j’ai besoin de prendre contact. 3 décembre 1934
4917 moi-même, dans quelques jours, au cercle d’hommes de Saint-J., j’ai besoin de prendre contact. 3 décembre 1934 Soir
4918 ours, au cercle d’hommes de Saint-J., j’ai besoin de prendre contact. 3 décembre 1934 Soirée au « Cercle d’hommes »
4919 ontact. 3 décembre 1934 Soirée au « Cercle d’ hommes ». — Ils étaient en effet une quarantaine hier soir. Je suis en
4920 ine hier soir. Je suis entré comme ils achevaient de boire leur tasse de café au fond de la salle, dans un coin arrangé en
4921 is entré comme ils achevaient de boire leur tasse de café au fond de la salle, dans un coin arrangé en cabinet de lecture.
4922 ls achevaient de boire leur tasse de café au fond de la salle, dans un coin arrangé en cabinet de lecture. Journaux et ill
4923 achevaient de boire leur tasse de café au fond de la salle, dans un coin arrangé en cabinet de lecture. Journaux et illust
4924 fond de la salle, dans un coin arrangé en cabinet de lecture. Journaux et illustrés, quelques livres sur la table. Puis on
4925 cture. Journaux et illustrés, quelques livres sur la table. Puis on s’est assis sur des chaises alignées, pour entendre le
4926 est assis sur des chaises alignées, pour entendre le « conférencier »12. J’ai reconnu deux facteurs, le libraire, le quinc
4927 e « conférencier »12. J’ai reconnu deux facteurs, le libraire, le quincaillier, un adjoint de la mairie, quelques retraité
4928 ier »12. J’ai reconnu deux facteurs, le libraire, le quincaillier, un adjoint de la mairie, quelques retraités qui « trava
4929 acteurs, le libraire, le quincaillier, un adjoint de la mairie, quelques retraités qui « travaillent le mazet » dans nos p
4930 eurs, le libraire, le quincaillier, un adjoint de la mairie, quelques retraités qui « travaillent le mazet » dans nos para
4931 e la mairie, quelques retraités qui « travaillent le mazet » dans nos parages, un ou deux cultivateurs, les trois institut
4932 azet » dans nos parages, un ou deux cultivateurs, les trois instituteurs. Le pasteur a lu quelques passages de l’Écriture.
4933 un ou deux cultivateurs, les trois instituteurs. Le pasteur a lu quelques passages de l’Écriture. Après quoi le sujet a é
4934 s instituteurs. Le pasteur a lu quelques passages de l’Écriture. Après quoi le sujet a été introduit par l’un des institut
4935 nstituteurs. Le pasteur a lu quelques passages de l’ Écriture. Après quoi le sujet a été introduit par l’un des instituteur
4936 a lu quelques passages de l’Écriture. Après quoi le sujet a été introduit par l’un des instituteurs. Il s’agissait de « l
4937 ntroduit par l’un des instituteurs. Il s’agissait de « l’histoire de notre département ». La discussion n’a vraiment démar
4938 uit par l’un des instituteurs. Il s’agissait de «  l’ histoire de notre département ». La discussion n’a vraiment démarré qu
4939 n des instituteurs. Il s’agissait de « l’histoire de notre département ». La discussion n’a vraiment démarré que lorsqu’on
4940 ’agissait de « l’histoire de notre département ». La discussion n’a vraiment démarré que lorsqu’on s’est mis à parler d’au
4941 vraiment démarré que lorsqu’on s’est mis à parler d’ autre chose que du sujet, c’est-à-dire d’un peu tout : de l’enseigneme
4942 à parler d’autre chose que du sujet, c’est-à-dire d’ un peu tout : de l’enseignement, des journaux, de traditions et anecdo
4943 chose que du sujet, c’est-à-dire d’un peu tout : de l’enseignement, des journaux, de traditions et anecdotes locales. Dis
4944 ose que du sujet, c’est-à-dire d’un peu tout : de l’ enseignement, des journaux, de traditions et anecdotes locales. Discus
4945 d’un peu tout : de l’enseignement, des journaux, de traditions et anecdotes locales. Discussion n’est d’ailleurs pas le m
4946 necdotes locales. Discussion n’est d’ailleurs pas le mot : c’étaient surtout des questions, des affirmations de parti pris
4947 c’étaient surtout des questions, des affirmations de parti pris ou des récits entremêlés d’allusions à des célébrités loca
4948 firmations de parti pris ou des récits entremêlés d’ allusions à des célébrités locales, provoquant chaque fois de gros rir
4949 à des célébrités locales, provoquant chaque fois de gros rires. L’homme du peuple — et je pense qu’il en va de même du bo
4950 és locales, provoquant chaque fois de gros rires. L’ homme du peuple — et je pense qu’il en va de même du bourgeois peu cul
4951 va de même du bourgeois peu cultivé et sans doute de tout ce qui n’est pas « intellectuel » — ne « discute » pas à proprem
4952 ssées. Or, cette lenteur et ces répétitions n’ont d’ autre but que de laisser à l’esprit le temps de se « figurer » ce qui
4953 lenteur et ces répétitions n’ont d’autre but que de laisser à l’esprit le temps de se « figurer » ce qui est dit. (C’est
4954 es répétitions n’ont d’autre but que de laisser à l’ esprit le temps de se « figurer » ce qui est dit. (C’est seulement de
4955 tions n’ont d’autre but que de laisser à l’esprit le temps de se « figurer » ce qui est dit. (C’est seulement de la langue
4956 nt d’autre but que de laisser à l’esprit le temps de se « figurer » ce qui est dit. (C’est seulement de la langue des écri
4957 e se « figurer » ce qui est dit. (C’est seulement de la langue des écrivains français qu’il est exact de dire, avec tous l
4958 e « figurer » ce qui est dit. (C’est seulement de la langue des écrivains français qu’il est exact de dire, avec tous les
4959 la langue des écrivains français qu’il est exact de dire, avec tous les manuels, qu’elle est une langue de discussion, pa
4960 vains français qu’il est exact de dire, avec tous les manuels, qu’elle est une langue de discussion, parce que toujours ell
4961 re, avec tous les manuels, qu’elle est une langue de discussion, parce que toujours elle vise à la formule décisive, et ne
4962 gue de discussion, parce que toujours elle vise à la formule décisive, et ne s’accorde le droit de dire chaque chose qu’un
4963 elle vise à la formule décisive, et ne s’accorde le droit de dire chaque chose qu’une seule fois, de la façon la plus éco
4964 e à la formule décisive, et ne s’accorde le droit de dire chaque chose qu’une seule fois, de la façon la plus économique e
4965 le droit de dire chaque chose qu’une seule fois, de la façon la plus économique et la plus claire13. Or, cette langue d’é
4966 droit de dire chaque chose qu’une seule fois, de la façon la plus économique et la plus claire13. Or, cette langue d’écha
4967 dire chaque chose qu’une seule fois, de la façon la plus économique et la plus claire13. Or, cette langue d’échanges dial
4968 une seule fois, de la façon la plus économique et la plus claire13. Or, cette langue d’échanges dialectiques rapides se tr
4969 économique et la plus claire13. Or, cette langue d’ échanges dialectiques rapides se trouve par là même inefficace sur le
4970 ques rapides se trouve par là même inefficace sur le « peuple ». Elle manque de durée. Évitant méticuleusement les reprise
4971 là même inefficace sur le « peuple ». Elle manque de durée. Évitant méticuleusement les reprises, les retours, elle s’acco
4972  ». Elle manque de durée. Évitant méticuleusement les reprises, les retours, elle s’accorde très mal au rythme de la réflex
4973 e de durée. Évitant méticuleusement les reprises, les retours, elle s’accorde très mal au rythme de la réflexion spontanée,
4974 s, les retours, elle s’accorde très mal au rythme de la réflexion spontanée, qui est « péguyste » et non « classique ». Éc
4975 les retours, elle s’accorde très mal au rythme de la réflexion spontanée, qui est « péguyste » et non « classique ». Écriv
4976 t non « classique ». Écrivains inutilisables dans la mesure où ils veulent être de bons écrivains français.) — Que de bon
4977 inutilisables dans la mesure où ils veulent être de bons écrivains français.) — Que de bonne volonté chez les hommes de
4978 veulent être de bons écrivains français.) — Que de bonne volonté chez les hommes de ce Cercle ! Comme ils s’appliquent à
4979 écrivains français.) — Que de bonne volonté chez les hommes de ce Cercle ! Comme ils s’appliquent à comprendre, comme ils
4980 rançais.) — Que de bonne volonté chez les hommes de ce Cercle ! Comme ils s’appliquent à comprendre, comme ils sont vifs
4981 dit une bêtise ou bafouille — et comme on a envie de leur expliquer des choses, amicalement ; de partager avec eux ce que
4982 envie de leur expliquer des choses, amicalement ; de partager avec eux ce que l’on sait ! Je pense aux auditoires bourgeoi
4983 choses, amicalement ; de partager avec eux ce que l’ on sait ! Je pense aux auditoires bourgeois, à leurs airs entendus, à
4984 t cela met entre celui qui parle et son public ! ( Le « conférencier » en tournée se présente comme un séducteur, c’est la
4985 en tournée se présente comme un séducteur, c’est la loi du genre, et cela rend les échanges bien pauvres…) Quand nous nou
4986 un séducteur, c’est la loi du genre, et cela rend les échanges bien pauvres…) Quand nous nous sommes levés pour sortir, le
4987 uvres…) Quand nous nous sommes levés pour sortir, le facteur ronflait, le front sur un dossier de chaise. Il s’est relevé,
4988 us sommes levés pour sortir, le facteur ronflait, le front sur un dossier de chaise. Il s’est relevé, s’est frotté les yeu
4989 tir, le facteur ronflait, le front sur un dossier de chaise. Il s’est relevé, s’est frotté les yeux, est sorti tout tranqu
4990 dossier de chaise. Il s’est relevé, s’est frotté les yeux, est sorti tout tranquillement. J’ai parlé avec plusieurs jeunes
4991 es opinions politiques, dans ce cercle ? — Il y a de tout. Le quincaillier est royaliste, un des instituteurs est objecteu
4992 ns politiques, dans ce cercle ? — Il y a de tout. Le quincaillier est royaliste, un des instituteurs est objecteur de cons
4993 est royaliste, un des instituteurs est objecteur de conscience, la plupart sont radicaux ou socialistes. Il vient aussi d
4994 x ou socialistes. Il vient aussi des communistes, de temps à autre. Il paraît que ça chauffe certains soirs. Mais le paste
4995 re. Il paraît que ça chauffe certains soirs. Mais le pasteur préside et on le respecte : 40 ans ; genre ancien combattant 
4996 ffe certains soirs. Mais le pasteur préside et on le respecte : 40 ans ; genre ancien combattant ; « très large », dit-on.
4997 semaines, j’ai donné quelques « causeries » dans la région. Auditoires variés : cercles d’hommes, fraternités réunissant
4998 ies » dans la région. Auditoires variés : cercles d’ hommes, fraternités réunissant bourgeois et travailleurs, réunions ami
4999 sant bourgeois et travailleurs, réunions amicales de pasteurs. Je me suis initié à la géographie politique et même spiritu
5000 éunions amicales de pasteurs. Je me suis initié à la géographie politique et même spirituelle du département. J’ai vu plus
5001 ent. J’ai vu plusieurs presbytères. J’ai retrouvé la coutume des autocars, toujours révélatrice des rythmes du pays. Pauvr
5002 oujours révélatrice des rythmes du pays. Pauvreté de tous ces villages ! Et sur les routes, quelles autos incroyables, vie
5003 s du pays. Pauvreté de tous ces villages ! Et sur les routes, quelles autos incroyables, vieux tas de ferrailles menés à de
5004 les routes, quelles autos incroyables, vieux tas de ferrailles menés à de folles allures ! De tout cela je rapporte un pa
5005 utos incroyables, vieux tas de ferrailles menés à de folles allures ! De tout cela je rapporte un paquet de notes qu’il fa
5006 eux tas de ferrailles menés à de folles allures ! De tout cela je rapporte un paquet de notes qu’il faudra rédiger un jour
5007 lles allures ! De tout cela je rapporte un paquet de notes qu’il faudra rédiger un jour. Pour l’instant, je me bornerai à
5008 aquet de notes qu’il faudra rédiger un jour. Pour l’ instant, je me bornerai à consigner un entretien qui m’a instruit.   À
5009 à consigner un entretien qui m’a instruit.   À N… la mairie est tout entière communiste. Ceux des habitants qui ne le sont
5010 out entière communiste. Ceux des habitants qui ne le sont pas ne savent pas trop ce qu’ils sont, à part les châtelains. Il
5011 ont pas ne savent pas trop ce qu’ils sont, à part les châtelains. Ils votent radical ou socialiste, et se font battre à pla
5012 ures, régulièrement. Mais faut-il donc penser que les communistes, eux, savent pourquoi ils le sont, et connaissent le marx
5013 ser que les communistes, eux, savent pourquoi ils le sont, et connaissent le marxisme ? On m’avait dit : ce n’est pas cela
5014 eux, savent pourquoi ils le sont, et connaissent le marxisme ? On m’avait dit : ce n’est pas cela du tout, vous verrez. Ê
5015 ans ce pays, c’est tout simplement être à gauche, le plus à gauche qu’il est possible. S’il en est bien ainsi, me dis-je,
5016 peut redouter que ces hommes ne sachent pas faire la distinction entre le marxisme et l’anarchie. D’autre part, sauront-il
5017 hommes ne sachent pas faire la distinction entre le marxisme et l’anarchie. D’autre part, sauront-ils s’opposer au dictat
5018 ent pas faire la distinction entre le marxisme et l’ anarchie. D’autre part, sauront-ils s’opposer au dictateur qui se prés
5019 tateur qui se présentera un jour ou l’autre comme l’ homme de gauche à poigne ? J’ai questionné à ce sujet quelqu’un qui co
5020 ui se présentera un jour ou l’autre comme l’homme de gauche à poigne ? J’ai questionné à ce sujet quelqu’un qui connaît bi
5021 à ce sujet quelqu’un qui connaît bien son monde. La vie même de cet homme consiste, en effet, à connaître intimement le p
5022 quelqu’un qui connaît bien son monde. La vie même de cet homme consiste, en effet, à connaître intimement le plus grand no
5023 homme consiste, en effet, à connaître intimement le plus grand nombre de familles de N., leurs circonstances matérielles,
5024 ffet, à connaître intimement le plus grand nombre de familles de N., leurs circonstances matérielles, leurs difficultés mo
5025 aître intimement le plus grand nombre de familles de N., leurs circonstances matérielles, leurs difficultés morales, leurs
5026 eurs traditions et leurs rancunes — c’est souvent la même chose — leurs idées sur la vie, sur la mort, sur le mariage. Et
5027 s — c’est souvent la même chose — leurs idées sur la vie, sur la mort, sur le mariage. Et quand je dis que sa vie consiste
5028 uvent la même chose — leurs idées sur la vie, sur la mort, sur le mariage. Et quand je dis que sa vie consiste à connaître
5029 chose — leurs idées sur la vie, sur la mort, sur le mariage. Et quand je dis que sa vie consiste à connaître ces choses,
5030 consiste à connaître ces choses, il faut prendre le mot dans le sens le plus actif : car l’homme dont je parle n’est pas
5031 connaître ces choses, il faut prendre le mot dans le sens le plus actif : car l’homme dont je parle n’est pas un enquêteur
5032 e ces choses, il faut prendre le mot dans le sens le plus actif : car l’homme dont je parle n’est pas un enquêteur, simple
5033 t prendre le mot dans le sens le plus actif : car l’ homme dont je parle n’est pas un enquêteur, simple curieux ou spectate
5034 teur. C’est bien plutôt un conseiller, un donneur d’ aide morale et parfois matérielle, quelqu’un qui est responsable de co
5035 parfois matérielle, quelqu’un qui est responsable de connaître ces gens mieux qu’ils ne se connaissent eux-mêmes, quelqu’u
5036 nnaissent eux-mêmes, quelqu’un qui a pour mission de leur enseigner le sens dernier des circonstances de leur vie. C’est l
5037 s, quelqu’un qui a pour mission de leur enseigner le sens dernier des circonstances de leur vie. C’est le pasteur. Sa paro
5038 leur enseigner le sens dernier des circonstances de leur vie. C’est le pasteur. Sa paroisse comprend les villages de N. e
5039 sens dernier des circonstances de leur vie. C’est le pasteur. Sa paroisse comprend les villages de N. et de V. où il habit
5040 leur vie. C’est le pasteur. Sa paroisse comprend les villages de N. et de V. où il habite. V., c’est un vieux nid d’aigle,
5041 est le pasteur. Sa paroisse comprend les villages de N. et de V. où il habite. V., c’est un vieux nid d’aigle, une pierrai
5042 steur. Sa paroisse comprend les villages de N. et de V. où il habite. V., c’est un vieux nid d’aigle, une pierraille couro
5043 N. et de V. où il habite. V., c’est un vieux nid d’ aigle, une pierraille couronnant des hauteurs ventées. Les rues sont é
5044 , une pierraille couronnant des hauteurs ventées. Les rues sont étroites et caillouteuses, pleines d’odeurs dès que le vent
5045 Les rues sont étroites et caillouteuses, pleines d’ odeurs dès que le vent cesse de les balayer. Nous sommes installés au
5046 roites et caillouteuses, pleines d’odeurs dès que le vent cesse de les balayer. Nous sommes installés au presbytère sur un
5047 louteuses, pleines d’odeurs dès que le vent cesse de les balayer. Nous sommes installés au presbytère sur une galerie d’où
5048 teuses, pleines d’odeurs dès que le vent cesse de les balayer. Nous sommes installés au presbytère sur une galerie d’où l’o
5049 us sommes installés au presbytère sur une galerie d’ où l’on domine un ample paysage horizontal. La plaine est à nos pieds,
5050 mmes installés au presbytère sur une galerie d’où l’ on domine un ample paysage horizontal. La plaine est à nos pieds, des
5051 rie d’où l’on domine un ample paysage horizontal. La plaine est à nos pieds, des Cévennes grises au nord jusqu’à l’horizon
5052 à nos pieds, des Cévennes grises au nord jusqu’à l’ horizon des collines vers Uzès, où quelques ruines de castels et quelq
5053 orizon des collines vers Uzès, où quelques ruines de castels et quelques cheminées d’usines grattent le bas d’un grand cie
5054 quelques ruines de castels et quelques cheminées d’ usines grattent le bas d’un grand ciel jaune. On distingue à peine le
5055 e castels et quelques cheminées d’usines grattent le bas d’un grand ciel jaune. On distingue à peine le village de N. parm
5056 ls et quelques cheminées d’usines grattent le bas d’ un grand ciel jaune. On distingue à peine le village de N. parmi les r
5057 e bas d’un grand ciel jaune. On distingue à peine le village de N. parmi les rangées de peupliers : il faut suivre des yeu
5058 grand ciel jaune. On distingue à peine le village de N. parmi les rangées de peupliers : il faut suivre des yeux la route
5059 aune. On distingue à peine le village de N. parmi les rangées de peupliers : il faut suivre des yeux la route noire pour dé
5060 tingue à peine le village de N. parmi les rangées de peupliers : il faut suivre des yeux la route noire pour découvrir enf
5061 es rangées de peupliers : il faut suivre des yeux la route noire pour découvrir enfin l’amas brunâtre des maisons au-desso
5062 ivre des yeux la route noire pour découvrir enfin l’ amas brunâtre des maisons au-dessous d’une tache blanche dans un pré,
5063 vrir enfin l’amas brunâtre des maisons au-dessous d’ une tache blanche dans un pré, qui est le château. Joie de voir un pay
5064 -dessous d’une tache blanche dans un pré, qui est le château. Joie de voir un pays dans son ensemble, dans son unité natur
5065 che blanche dans un pré, qui est le château. Joie de voir un pays dans son ensemble, dans son unité naturelle et ancienne.
5066 son unité naturelle et ancienne. Une même patine de crépuscule roussit les champs, les arbres, les maisons. Dans ces mais
5067 t ancienne. Une même patine de crépuscule roussit les champs, les arbres, les maisons. Dans ces maisons, il y a donc des co
5068 Une même patine de crépuscule roussit les champs, les arbres, les maisons. Dans ces maisons, il y a donc des communistes. J
5069 ine de crépuscule roussit les champs, les arbres, les maisons. Dans ces maisons, il y a donc des communistes. Je demande au
5070 c’est que ces communistes. — Voilà. Que vous dire de gens que je connais si bien ? C’est difficile de les classer et je n’
5071 de gens que je connais si bien ? C’est difficile de les classer et je n’aime pas beaucoup ça… Il y en a de toutes sortes,
5072 gens que je connais si bien ? C’est difficile de les classer et je n’aime pas beaucoup ça… Il y en a de toutes sortes, bie
5073 s classer et je n’aime pas beaucoup ça… Il y en a de toutes sortes, bien sûr, et plus on les voit de près… — Je comprends
5074 Il y en a de toutes sortes, bien sûr, et plus on les voit de près… — Je comprends qu’il soit difficile de parler en généra
5075 a de toutes sortes, bien sûr, et plus on les voit de près… — Je comprends qu’il soit difficile de parler en général de ses
5076 voit de près… — Je comprends qu’il soit difficile de parler en général de ses paroissiens. Mais s’ils sont communistes, il
5077 mprends qu’il soit difficile de parler en général de ses paroissiens. Mais s’ils sont communistes, ils ne doivent tout de
5078 tes, ils ne doivent tout de même pas faire partie de votre église, pratiquement ? — C’est-à-dire, oui et non. — Enfin, vie
5079 dire, oui et non. — Enfin, viennent-ils au temple le dimanche ? — Ça non. D’ailleurs, communistes ou pas, les hommes d’ici
5080 anche ? — Ça non. D’ailleurs, communistes ou pas, les hommes d’ici ne viennent guère au culte. Ce n’est pas l’envie qui man
5081 es d’ici ne viennent guère au culte. Ce n’est pas l’ envie qui manque, mais ils ont peur. C’est toujours la question de la
5082 vie qui manque, mais ils ont peur. C’est toujours la question de la place à traverser. — ? — Oui, vous savez que nos templ
5083 ue, mais ils ont peur. C’est toujours la question de la place à traverser. — ? — Oui, vous savez que nos temples du Midi s
5084 mais ils ont peur. C’est toujours la question de la place à traverser. — ? — Oui, vous savez que nos temples du Midi sont
5085 os temples du Midi sont construits en général sur la place du village. En face ou à côté, il y a les cafés, les terrasses
5086 ur la place du village. En face ou à côté, il y a les cafés, les terrasses sous les platanes, et le dimanche matin, les hom
5087 du village. En face ou à côté, il y a les cafés, les terrasses sous les platanes, et le dimanche matin, les hommes y vont
5088 e ou à côté, il y a les cafés, les terrasses sous les platanes, et le dimanche matin, les hommes y vont boire leur pastis.
5089 a les cafés, les terrasses sous les platanes, et le dimanche matin, les hommes y vont boire leur pastis. Si l’on va au cu
5090 errasses sous les platanes, et le dimanche matin, les hommes y vont boire leur pastis. Si l’on va au culte, il faut défiler
5091 he matin, les hommes y vont boire leur pastis. Si l’ on va au culte, il faut défiler devant les terrasses, c’est gênant. Un
5092 stis. Si l’on va au culte, il faut défiler devant les terrasses, c’est gênant. Un homme me disait l’autre jour : Ah, monsie
5093 t. Un homme me disait l’autre jour : Ah, monsieur le pasteur, si on pouvait entrer par-derrière, par la porte de la sacris
5094 e pasteur, si on pouvait entrer par-derrière, par la porte de la sacristie, on viendrait bien ! Mais on est lâches ! — Et
5095 , si on pouvait entrer par-derrière, par la porte de la sacristie, on viendrait bien ! Mais on est lâches ! — Et chez eux,
5096 i on pouvait entrer par-derrière, par la porte de la sacristie, on viendrait bien ! Mais on est lâches ! — Et chez eux, le
5097 ndrait bien ! Mais on est lâches ! — Et chez eux, les voyez-vous ? Pouvez-vous discuter avec eux ? — Guère. Là encore, ce
5098 r avec eux ? — Guère. Là encore, ce sont surtout les femmes qu’on voit. Eux sont au travail, ou au café. — Pourquoi n’irie
5099 fficile ! Moi, ça ne me gênerait pas. Mais eux on les étonnerait, et surtout ils y sont entre eux. Je n’ai aucune envie d’a
5100 urtout ils y sont entre eux. Je n’ai aucune envie d’ aller faire l’intrus ou le bon apôtre. Si c’était possible, ce serait
5101 ont entre eux. Je n’ai aucune envie d’aller faire l’ intrus ou le bon apôtre. Si c’était possible, ce serait épatant, je ne
5102 x. Je n’ai aucune envie d’aller faire l’intrus ou le bon apôtre. Si c’était possible, ce serait épatant, je ne dis pas. Ma
5103 atiquement, je vous assure, c’est difficile. — Et les salutistes ? — Ils ont un uniforme. C’est classé. On les connaît… — A
5104 utistes ? — Ils ont un uniforme. C’est classé. On les connaît… — Alors, quand les voyez-vous ? — Surtout à l’occasion des c
5105 rme. C’est classé. On les connaît… — Alors, quand les voyez-vous ? — Surtout à l’occasion des conférences que j’organise. V
5106 naît… — Alors, quand les voyez-vous ? — Surtout à l’ occasion des conférences que j’organise. Vous avez déjà parlé dans des
5107 j’organise. Vous avez déjà parlé dans des cercles d’ hommes, vous voyez le genre. — Et les communistes y viennent ? — Bien
5108 déjà parlé dans des cercles d’hommes, vous voyez le genre. — Et les communistes y viennent ? — Bien sûr, le maire en tête
5109 s des cercles d’hommes, vous voyez le genre. — Et les communistes y viennent ? — Bien sûr, le maire en tête. Et ils discute
5110 re. — Et les communistes y viennent ? — Bien sûr, le maire en tête. Et ils discutent, et même très bien. Je me rappelle pa
5111 en. Je me rappelle par exemple une discussion sur l’ incroyance. L’orateur avait dit que la différence entre les chrétiens
5112 elle par exemple une discussion sur l’incroyance. L’ orateur avait dit que la différence entre les chrétiens et les incroya
5113 cussion sur l’incroyance. L’orateur avait dit que la différence entre les chrétiens et les incroyants, ce n’est pas que le
5114 ance. L’orateur avait dit que la différence entre les chrétiens et les incroyants, ce n’est pas que les chrétiens se condui
5115 vait dit que la différence entre les chrétiens et les incroyants, ce n’est pas que les chrétiens se conduisent mieux que le
5116 les chrétiens et les incroyants, ce n’est pas que les chrétiens se conduisent mieux que les autres, mais c’est qu’ils se co
5117 est pas que les chrétiens se conduisent mieux que les autres, mais c’est qu’ils se confient en Dieu, et qu’ils n’attendent
5118 ent en Dieu, et qu’ils n’attendent des ordres que de lui. À la fin, un des communistes se lève et résume le débat : En som
5119 u, et qu’ils n’attendent des ordres que de lui. À la fin, un des communistes se lève et résume le débat : En somme, dit-il
5120 i. À la fin, un des communistes se lève et résume le débat : En somme, dit-il, si nous ne croyons pas en Dieu, nous autres
5121 s trop orgueilleux ? En général, on peut dire que les communistes sont les plus intelligents du village. Ce sont eux et eux
5122 En général, on peut dire que les communistes sont les plus intelligents du village. Ce sont eux et eux seuls qui proposent
5123 réformes pratiques, qui demandent qu’on installe l’ eau et l’électricité dans les maisons, etc. C’est l’élément réveillé e
5124 pratiques, qui demandent qu’on installe l’eau et l’ électricité dans les maisons, etc. C’est l’élément réveillé et entrepr
5125 andent qu’on installe l’eau et l’électricité dans les maisons, etc. C’est l’élément réveillé et entreprenant de la populati
5126 eau et l’électricité dans les maisons, etc. C’est l’ élément réveillé et entreprenant de la population. — Mais savent-ils c
5127 ns, etc. C’est l’élément réveillé et entreprenant de la population. — Mais savent-ils ce que c’est, le marxisme ? — Ils es
5128 etc. C’est l’élément réveillé et entreprenant de la population. — Mais savent-ils ce que c’est, le marxisme ? — Ils essai
5129 de la population. — Mais savent-ils ce que c’est, le marxisme ? — Ils essaient ; peut-être plus qu’on ne croirait. J’en co
5130 . J’en connais plusieurs qui lisent des brochures de vulgarisation de la doctrine. Ils me posent quelquefois des questions
5131 usieurs qui lisent des brochures de vulgarisation de la doctrine. Ils me posent quelquefois des questions. Mais ce n’est p
5132 eurs qui lisent des brochures de vulgarisation de la doctrine. Ils me posent quelquefois des questions. Mais ce n’est pas
5133 quelquefois des questions. Mais ce n’est pas par la lecture qu’ils viennent au parti. L’affaire, pour eux, c’est d’abord
5134 ’est pas par la lecture qu’ils viennent au parti. L’ affaire, pour eux, c’est d’abord de se grouper afin d’entreprendre que
5135 nent au parti. L’affaire, pour eux, c’est d’abord de se grouper afin d’entreprendre quelque chose, de résister aux gros pr
5136 de se grouper afin d’entreprendre quelque chose, de résister aux gros propriétaires qui tiennent la région, et de leur im
5137 , de résister aux gros propriétaires qui tiennent la région, et de leur imposer des mesures de progrès, de bon sens… — Au
5138 aux gros propriétaires qui tiennent la région, et de leur imposer des mesures de progrès, de bon sens… — Au point de vue d
5139 iennent la région, et de leur imposer des mesures de progrès, de bon sens… — Au point de vue des classes, d’où viennent-il
5140 égion, et de leur imposer des mesures de progrès, de bon sens… — Au point de vue des classes, d’où viennent-ils ? — Pour l
5141 grès, de bon sens… — Au point de vue des classes, d’ où viennent-ils ? — Pour la plupart — tous les chefs en tout cas —, ce
5142 ses, d’où viennent-ils ? — Pour la plupart — tous les chefs en tout cas —, ce sont de petits propriétaires ou des ouvriers
5143 a plupart — tous les chefs en tout cas —, ce sont de petits propriétaires ou des ouvriers travaillant à leur compte. — En
5144 entendez bien avec eux ? — Ils savent que je suis de leur côté, en gros, dans les questions locales où il faut prendre pos
5145 ls savent que je suis de leur côté, en gros, dans les questions locales où il faut prendre position. Quant à la doctrine, c
5146 ions locales où il faut prendre position. Quant à la doctrine, c’est difficile de discuter, d’abord parce qu’ils la connai
5147 re position. Quant à la doctrine, c’est difficile de discuter, d’abord parce qu’ils la connaissent mal, ensuite et surtout
5148 c’est difficile de discuter, d’abord parce qu’ils la connaissent mal, ensuite et surtout parce qu’elle ne joue pratiquemen
5149 riteraient mieux que ce qu’on leur donne, en fait de doctrine. En réalité, ils ne sont pas plus marxistes que moi. Ils veu
5150 er raisonnablement. Mais rien ne se présente pour les soutenir. Ils vont au parti communiste parce qu’il n’y a rien d’autre
5151 s vont au parti communiste parce qu’il n’y a rien d’ autre et personne d’autre… Ce seraient souvent les meilleures têtes du
5152 uniste parce qu’il n’y a rien d’autre et personne d’ autre… Ce seraient souvent les meilleures têtes du pays, et on les lai
5153 d’autre et personne d’autre… Ce seraient souvent les meilleures têtes du pays, et on les laisse devenir les « mauvaises tê
5154 aient souvent les meilleures têtes du pays, et on les laisse devenir les « mauvaises têtes »… 17 décembre 1934 Le gra
5155 eilleures têtes du pays, et on les laisse devenir les « mauvaises têtes »… 17 décembre 1934 Le grand tort des chrétie
5156 r les « mauvaises têtes »… 17 décembre 1934 Le grand tort des chrétiens, c’est qu’ils prennent au sérieux l’incroyan
5157 t des chrétiens, c’est qu’ils prennent au sérieux l’ incroyance de leurs contemporains. Au fond, ils en ont peur. Or, ils d
5158 ns, c’est qu’ils prennent au sérieux l’incroyance de leurs contemporains. Au fond, ils en ont peur. Or, ils devraient n’av
5159 s en ont peur. Or, ils devraient n’avoir peur que de Dieu, et des vocations bouleversantes qu’il arrive que Dieu nous adre
5160 déprimant que celui du chrétien honteux, honteux d’ une foi qu’il n’a pas ! Car s’il l’avait, il n’aurait plus de honte à
5161 nteux, honteux d’une foi qu’il n’a pas ! Car s’il l’ avait, il n’aurait plus de honte à la confesser devant les hommes ; et
5162 u’il n’a pas ! Car s’il l’avait, il n’aurait plus de honte à la confesser devant les hommes ; et s’il a honte, c’est qu’il
5163 s ! Car s’il l’avait, il n’aurait plus de honte à la confesser devant les hommes ; et s’il a honte, c’est qu’il ne craint
5164 , il n’aurait plus de honte à la confesser devant les hommes ; et s’il a honte, c’est qu’il ne craint pas Dieu, mais qu’il
5165 qu’il n’est pas un des leurs… Je voudrais définir le croyant véritable : celui qui sait qu’il ne croit pas aux dieux du mo
5166 ait qu’il ne croit pas aux dieux du monde, et qui le prouve. Comment le prouve-t-il ? Tout simplement en témoignant, en an
5167 pas aux dieux du monde, et qui le prouve. Comment le prouve-t-il ? Tout simplement en témoignant, en annonçant aux hommes
5168 simplement en témoignant, en annonçant aux hommes la vérité et le chemin. Point n’est besoin d’actions extraordinaires, su
5169 témoignant, en annonçant aux hommes la vérité et le chemin. Point n’est besoin d’actions extraordinaires, surhumaines : s
5170 hommes la vérité et le chemin. Point n’est besoin d’ actions extraordinaires, surhumaines : se rire des dieux du monde est
5171 héroïque aux yeux du monde, pour qu’il soit vain de chercher mieux. 20 décembre 1934 « Ô pays sans musique ! ô peup
5172 , où est ton chant ? » À peine un aigre sifflotis d’ « air de Paname » dans un garage. Pays sans harmonie, sans lien profon
5173 ton chant ? » À peine un aigre sifflotis d’« air de Paname » dans un garage. Pays sans harmonie, sans lien profond et san
5174 leurs savates, quand j’écoute ce qui se dit chez la marchande de journaux, quand je m’informe des raisons de tel parti, d
5175 s, quand j’écoute ce qui se dit chez la marchande de journaux, quand je m’informe des raisons de tel parti, de l’idéal de
5176 hande de journaux, quand je m’informe des raisons de tel parti, de l’idéal de tel individu, et que je trouve partout la co
5177 aux, quand je m’informe des raisons de tel parti, de l’idéal de tel individu, et que je trouve partout la confusion, la di
5178 , quand je m’informe des raisons de tel parti, de l’ idéal de tel individu, et que je trouve partout la confusion, la dispe
5179 je m’informe des raisons de tel parti, de l’idéal de tel individu, et que je trouve partout la confusion, la dispersion, l
5180 l’idéal de tel individu, et que je trouve partout la confusion, la dispersion, l’indifférence, une veulerie vaniteuse, ou
5181 individu, et que je trouve partout la confusion, la dispersion, l’indifférence, une veulerie vaniteuse, ou des bonnes vol
5182 ue je trouve partout la confusion, la dispersion, l’ indifférence, une veulerie vaniteuse, ou des bonnes volontés exploitée
5183 vaniteuse, ou des bonnes volontés exploitées par le plus bavard, je suis tenté d’écrire quelque chose de méchant : que ce
5184 ntés exploitées par le plus bavard, je suis tenté d’ écrire quelque chose de méchant : que ce pays est à l’image des quelqu
5185 plus bavard, je suis tenté d’écrire quelque chose de méchant : que ce pays est à l’image des quelques journaux qu’on y lit
5186 rire quelque chose de méchant : que ce pays est à l’ image des quelques journaux qu’on y lit. Une autre impression que j’ai
5187 autre impression que j’ai eue cet après-midi sur la place : celle d’être devant un film dont la musique vient de se taire
5188 que j’ai eue cet après-midi sur la place : celle d’ être devant un film dont la musique vient de se taire. Une vie sans ac
5189 i sur la place : celle d’être devant un film dont la musique vient de se taire. Une vie sans accompagnement profond. Dès q
5190 u ce silence où plus rien ne palpite et n’attend, le pittoresque du décor devient un désordre sordide, les singularités cu
5191 pittoresque du décor devient un désordre sordide, les singularités curieuses des hommes et des choses, autant de manies et
5192 arités curieuses des hommes et des choses, autant de manies et d’irritants témoignages de laisser-aller. Le courant est co
5193 ses des hommes et des choses, autant de manies et d’ irritants témoignages de laisser-aller. Le courant est coupé, le grand
5194 oses, autant de manies et d’irritants témoignages de laisser-aller. Le courant est coupé, le grand courant lyrique de l’ép
5195 nies et d’irritants témoignages de laisser-aller. Le courant est coupé, le grand courant lyrique de l’époque qui donnait u
5196 moignages de laisser-aller. Le courant est coupé, le grand courant lyrique de l’époque qui donnait un sens à nos gestes et
5197 r. Le courant est coupé, le grand courant lyrique de l’époque qui donnait un sens à nos gestes et comme une apparence de b
5198 Le courant est coupé, le grand courant lyrique de l’ époque qui donnait un sens à nos gestes et comme une apparence de but
5199 nnait un sens à nos gestes et comme une apparence de but aux nostalgies élémentaires. Tout mystère dissipé, nié, raillé, i
5200 é, raillé, il reste des routines et ces querelles d’ argent. — Et puis, au moment même où je touche le fond, voici que je m
5201 d’argent. — Et puis, au moment même où je touche le fond, voici que je me dis : cela est bon. Il est bon de toucher le gr
5202 d, voici que je me dis : cela est bon. Il est bon de toucher le grain rugueux de cette vie sans horizon, sans dimensions,
5203 e je me dis : cela est bon. Il est bon de toucher le grain rugueux de cette vie sans horizon, sans dimensions, qui est la
5204 a est bon. Il est bon de toucher le grain rugueux de cette vie sans horizon, sans dimensions, qui est la vie du très grand
5205 cette vie sans horizon, sans dimensions, qui est la vie du très grand nombre. Il faut partir d’ici, du niveau le plus bas
5206 rès grand nombre. Il faut partir d’ici, du niveau le plus bas, du canevas brut et plein de trous de l’existence dépouillée
5207 , du niveau le plus bas, du canevas brut et plein de trous de l’existence dépouillée… …Dépouillée, mais de quoi au juste ?
5208 au le plus bas, du canevas brut et plein de trous de l’existence dépouillée… …Dépouillée, mais de quoi au juste ? Peut-êtr
5209 le plus bas, du canevas brut et plein de trous de l’ existence dépouillée… …Dépouillée, mais de quoi au juste ? Peut-être d
5210 rous de l’existence dépouillée… …Dépouillée, mais de quoi au juste ? Peut-être de tout art. Ou encore, et c’est identique,
5211 e… …Dépouillée, mais de quoi au juste ? Peut-être de tout art. Ou encore, et c’est identique, de tout lien spirituel, et d
5212 -être de tout art. Ou encore, et c’est identique, de tout lien spirituel, et de ces illusions lentement composées par la c
5213 e, et c’est identique, de tout lien spirituel, et de ces illusions lentement composées par la culture, qui voilent et colo
5214 tuel, et de ces illusions lentement composées par la culture, qui voilent et colorent, et rassemblent, et qui font vivre u
5215 t qui font vivre un peu au-dessus, un peu au-delà de ce que l’on touche et voit. Je sais bien que le seul fait de décrire
5216 vivre un peu au-dessus, un peu au-delà de ce que l’ on touche et voit. Je sais bien que le seul fait de décrire et de form
5217 à de ce que l’on touche et voit. Je sais bien que le seul fait de décrire et de formuler cette pauvreté ou cette anarchie
5218 ’on touche et voit. Je sais bien que le seul fait de décrire et de formuler cette pauvreté ou cette anarchie relâchée, si
5219 voit. Je sais bien que le seul fait de décrire et de formuler cette pauvreté ou cette anarchie relâchée, si gauche que soi
5220 uffit tout de même à recréer une maigre apparence de forme, qui trompe encore. Tout est, en réalité, encore plus disjoint
5221 ans ce que j’en dis — parce que j’essaie au moins de le dire ; mais eux… 22 décembre 1934 Nous ne sortons plus guère
5222 ce que j’en dis — parce que j’essaie au moins de le dire ; mais eux… 22 décembre 1934 Nous ne sortons plus guère qu
5223 décembre 1934 Nous ne sortons plus guère qu’à la tombée de la nuit, pour la descente quotidienne au village. Emmitoufl
5224 1934 Nous ne sortons plus guère qu’à la tombée de la nuit, pour la descente quotidienne au village. Emmitouflés et sile
5225 4 Nous ne sortons plus guère qu’à la tombée de la nuit, pour la descente quotidienne au village. Emmitouflés et silenci
5226 ortons plus guère qu’à la tombée de la nuit, pour la descente quotidienne au village. Emmitouflés et silencieux, nous devo
5227 ncieux, nous devons ressembler à cette « chouette de Minerve » — la conscience — dont Hegel dit magnifiquement qu’elle ne
5228 vons ressembler à cette « chouette de Minerve » —  la conscience — dont Hegel dit magnifiquement qu’elle ne se met à voler
5229 voler qu’au crépuscule. Et peut-être sommes-nous la seule conscience de cette bourgade léthargique, si vraiment la consci
5230 ule. Et peut-être sommes-nous la seule conscience de cette bourgade léthargique, si vraiment la conscience naît de la mort
5231 cience de cette bourgade léthargique, si vraiment la conscience naît de la mort de son objet, ou tout au moins de quelque
5232 rgade léthargique, si vraiment la conscience naît de la mort de son objet, ou tout au moins de quelque obscur désir, de qu
5233 de léthargique, si vraiment la conscience naît de la mort de son objet, ou tout au moins de quelque obscur désir, de quelq
5234 rgique, si vraiment la conscience naît de la mort de son objet, ou tout au moins de quelque obscur désir, de quelque obscu
5235 ce naît de la mort de son objet, ou tout au moins de quelque obscur désir, de quelque obscure crainte — c’est identique —
5236 objet, ou tout au moins de quelque obscur désir, de quelque obscure crainte — c’est identique — de sa mort. Noël 1934
5237 r, de quelque obscure crainte — c’est identique — de sa mort. Noël 1934 C’est dans la pauvreté totale que Dieu est
5238 entique — de sa mort. Noël 1934 C’est dans la pauvreté totale que Dieu est né. Il n’y avait donc plus d’autre espoi
5239 té totale que Dieu est né. Il n’y avait donc plus d’ autre espoir. Voilà la limite impensable. Quand on en vient à désespér
5240 né. Il n’y avait donc plus d’autre espoir. Voilà la limite impensable. Quand on en vient à désespérer d’un peuple, d’un r
5241 limite impensable. Quand on en vient à désespérer d’ un peuple, d’un régime, ou de soi-même, quand on prêche et proclame d’
5242 able. Quand on en vient à désespérer d’un peuple, d’ un régime, ou de soi-même, quand on prêche et proclame d’une voix path
5243 n vient à désespérer d’un peuple, d’un régime, ou de soi-même, quand on prêche et proclame d’une voix pathétique : tout es
5244 gime, ou de soi-même, quand on prêche et proclame d’ une voix pathétique : tout est perdu ! il est bon de se souvenir que t
5245 une voix pathétique : tout est perdu ! il est bon de se souvenir que tout est infiniment plus perdu que nous ne pouvons l’
5246 out est infiniment plus perdu que nous ne pouvons l’ imaginer dans nos instants de lucidité extrême ; que rien n’a de sens
5247 que nous ne pouvons l’imaginer dans nos instants de lucidité extrême ; que rien n’a de sens en soi, dans le monde, ni le
5248 s nos instants de lucidité extrême ; que rien n’a de sens en soi, dans le monde, ni le monde même, lancé vers le néant, et
5249 idité extrême ; que rien n’a de sens en soi, dans le monde, ni le monde même, lancé vers le néant, et que c’est à cause de
5250  ; que rien n’a de sens en soi, dans le monde, ni le monde même, lancé vers le néant, et que c’est à cause de cela, et non
5251 soi, dans le monde, ni le monde même, lancé vers le néant, et que c’est à cause de cela, et non pour nous masquer ce dése
5252 r nous masquer ce désespoir total, mais pour nous le révéler en nous montrant sa fin, que Dieu est né, mort, ressuscité.
5253 ts, des professeurs. Beaucoup de discussions dans de petits groupes. Très curieuse, cette reprise de contact avec le monde
5254 s de petits groupes. Très curieuse, cette reprise de contact avec le monde de la « culture ». Il m’apparaît que c’est le m
5255 pes. Très curieuse, cette reprise de contact avec le monde de la « culture ». Il m’apparaît que c’est le monde où les prob
5256 curieuse, cette reprise de contact avec le monde de la « culture ». Il m’apparaît que c’est le monde où les problèmes dép
5257 rieuse, cette reprise de contact avec le monde de la « culture ». Il m’apparaît que c’est le monde où les problèmes dépend
5258 monde de la « culture ». Il m’apparaît que c’est le monde où les problèmes dépendent surtout des termes dans lesquels on
5259 « culture ». Il m’apparaît que c’est le monde où les problèmes dépendent surtout des termes dans lesquels on les pose. Ou
5260 mes dépendent surtout des termes dans lesquels on les pose. Ou encore : le monde des problèmes communicables. On se les rep
5261 des termes dans lesquels on les pose. Ou encore : le monde des problèmes communicables. On se les repasse de l’un à l’autr
5262 ore : le monde des problèmes communicables. On se les repasse de l’un à l’autre, perfectionnés et enrichis. Il s’agit plutô
5263 de des problèmes communicables. On se les repasse de l’un à l’autre, perfectionnés et enrichis. Il s’agit plutôt de les éc
5264 utre, perfectionnés et enrichis. Il s’agit plutôt de les échanger que de s’efforcer contre eux, pour son compte, dans des
5265 e, perfectionnés et enrichis. Il s’agit plutôt de les échanger que de s’efforcer contre eux, pour son compte, dans des cond
5266 et enrichis. Il s’agit plutôt de les échanger que de s’efforcer contre eux, pour son compte, dans des conditions données e
5267 ment singulières, — comme c’est pourtant toujours le cas dans la vraie vie… Je suis assis dans un grand restaurant désert
5268 ères, — comme c’est pourtant toujours le cas dans la vraie vie… Je suis assis dans un grand restaurant désert, près d’une
5269 suis assis dans un grand restaurant désert, près d’ une baie qui donne sur « les flots », en plein soleil. Un peu étourdi.
5270 estaurant désert, près d’une baie qui donne sur «  les flots », en plein soleil. Un peu étourdi. Souvenirs d’une plage de la
5271 ots », en plein soleil. Un peu étourdi. Souvenirs d’ une plage de la Baltique ; d’un bar des quais de Costanza ; de station
5272 ein soleil. Un peu étourdi. Souvenirs d’une plage de la Baltique ; d’un bar des quais de Costanza ; de stations vides au c
5273 soleil. Un peu étourdi. Souvenirs d’une plage de la Baltique ; d’un bar des quais de Costanza ; de stations vides au cour
5274 u étourdi. Souvenirs d’une plage de la Baltique ; d’ un bar des quais de Costanza ; de stations vides au cours de voyages f
5275 s d’une plage de la Baltique ; d’un bar des quais de Costanza ; de stations vides au cours de voyages fatigants. L’idée de
5276 de la Baltique ; d’un bar des quais de Costanza ; de stations vides au cours de voyages fatigants. L’idée de continuer au
5277 de stations vides au cours de voyages fatigants. L’ idée de continuer au hasard vers le sud, de « tout lâcher » comme nous
5278 tions vides au cours de voyages fatigants. L’idée de continuer au hasard vers le sud, de « tout lâcher » comme nous dision
5279 ges fatigants. L’idée de continuer au hasard vers le sud, de « tout lâcher » comme nous disions à 18 ans, me paraît soudai
5280 gants. L’idée de continuer au hasard vers le sud, de « tout lâcher » comme nous disions à 18 ans, me paraît soudain tellem
5281 , au regard de ma vie à A. Allons, remontons vers la « réalité rugueuse ». 8 janvier 1935 Accueil de la maison : le
5282  réalité rugueuse ». 8 janvier 1935 Accueil de la maison : le courrier passé sous la porte nageait dans une flaque d
5283 alité rugueuse ». 8 janvier 1935 Accueil de la maison : le courrier passé sous la porte nageait dans une flaque d’ea
5284 se ». 8 janvier 1935 Accueil de la maison : le courrier passé sous la porte nageait dans une flaque d’eau de pluie,
5285 Accueil de la maison : le courrier passé sous la porte nageait dans une flaque d’eau de pluie, plusieurs lettres à pei
5286 rrier passé sous la porte nageait dans une flaque d’ eau de pluie, plusieurs lettres à peine lisibles. Un froid terrible ;
5287 passé sous la porte nageait dans une flaque d’eau de pluie, plusieurs lettres à peine lisibles. Un froid terrible ; la sal
5288 urs lettres à peine lisibles. Un froid terrible ; la salamandre à vider et à rallumer. Le gaz butane épuisé à la cuisine.
5289 d terrible ; la salamandre à vider et à rallumer. Le gaz butane épuisé à la cuisine. Les bûches humides. Plaisir de retrou
5290 dre à vider et à rallumer. Le gaz butane épuisé à la cuisine. Les bûches humides. Plaisir de retrouver les choses qui vous
5291 et à rallumer. Le gaz butane épuisé à la cuisine. Les bûches humides. Plaisir de retrouver les choses qui vous résistent. (
5292 épuisé à la cuisine. Les bûches humides. Plaisir de retrouver les choses qui vous résistent. (Je crois que Ramuz en a par
5293 cuisine. Les bûches humides. Plaisir de retrouver les choses qui vous résistent. (Je crois que Ramuz en a parlé, et de son
5294 ous résistent. (Je crois que Ramuz en a parlé, et de son amour pour les feux qui prennent mal, les maisons trop grandes…)
5295 crois que Ramuz en a parlé, et de son amour pour les feux qui prennent mal, les maisons trop grandes…) 12 janvier 1935
5296 , et de son amour pour les feux qui prennent mal, les maisons trop grandes…) 12 janvier 1935 Ces cochons-là ! — Sima
5297 12 janvier 1935 Ces cochons-là ! — Simard le jardinier s’est fait une forte entaille au doigt en travaillant. Ce g
5298 e au doigt en travaillant. Ce gros homme, violacé d’ ordinaire, en est tout pâle. Je vais discuter le coup avec lui pour le
5299 é d’ordinaire, en est tout pâle. Je vais discuter le coup avec lui pour le ravigoter. C’est un de ces Méridionaux qui ne c
5300 tout pâle. Je vais discuter le coup avec lui pour le ravigoter. C’est un de ces Méridionaux qui ne connaît pas de meilleur
5301 uter le coup avec lui pour le ravigoter. C’est un de ces Méridionaux qui ne connaît pas de meilleur remède que la parlote.
5302 r. C’est un de ces Méridionaux qui ne connaît pas de meilleur remède que la parlote. Tout de suite, c’est la question des
5303 dionaux qui ne connaît pas de meilleur remède que la parlote. Tout de suite, c’est la question des assurances qu’il aborde
5304 lleur remède que la parlote. Tout de suite, c’est la question des assurances qu’il aborde avec autorité tout en tenant son
5305 autorité tout en tenant son doigt blessé droit en l’ air, dans une attitude doctorale. La question des assurances est une q
5306 essé droit en l’air, dans une attitude doctorale. La question des assurances est une question complexe, comme toutes les q
5307 ssurances est une question complexe, comme toutes les questions capitales. Les gens d’ici ne gagnent presque rien. (Lui, pa
5308 n complexe, comme toutes les questions capitales. Les gens d’ici ne gagnent presque rien. (Lui, par exemple, si je l’en cro
5309 ne gagnent presque rien. (Lui, par exemple, si je l’ en crois, n’a guère vendu depuis un mois que pour 50 francs de légumes
5310 n’a guère vendu depuis un mois que pour 50 francs de légumes. Or, la vente des produits de son jardin est son seul moyen d
5311 depuis un mois que pour 50 francs de légumes. Or, la vente des produits de son jardin est son seul moyen de gagner.) Carré
5312 r 50 francs de légumes. Or, la vente des produits de son jardin est son seul moyen de gagner.) Carré sur son tabouret de c
5313 nte des produits de son jardin est son seul moyen de gagner.) Carré sur son tabouret de cuisine, le doigt en l’air, il pas
5314 son seul moyen de gagner.) Carré sur son tabouret de cuisine, le doigt en l’air, il passe en revue les compagnies d’assura
5315 en de gagner.) Carré sur son tabouret de cuisine, le doigt en l’air, il passe en revue les compagnies d’assurances — et an
5316 .) Carré sur son tabouret de cuisine, le doigt en l’ air, il passe en revue les compagnies d’assurances — et analogues — av
5317 de cuisine, le doigt en l’air, il passe en revue les compagnies d’assurances — et analogues — avec lesquelles il est en co
5318 doigt en l’air, il passe en revue les compagnies d’ assurances — et analogues — avec lesquelles il est en comptes. Je dis
5319 c lesquelles il est en comptes. Je dis compagnies d’ assurances, mais lui les nomme plus couramment « ces cochons-là ». Ces
5320 comptes. Je dis compagnies d’assurances, mais lui les nomme plus couramment « ces cochons-là ». Ces cochons-là sont donc au
5321 cochons-là ». Ces cochons-là sont donc au nombre de sept ou huit. Il en totalise sept pour son compte, et sa dame fait le
5322 en totalise sept pour son compte, et sa dame fait le petit appoint. Elle s’est « coupé » la jambe, cela fait bien cinq ans
5323 dame fait le petit appoint. Elle s’est « coupé » la jambe, cela fait bien cinq ans déjà, et « touche » pour cette jambe c
5324 claré que tout allait bien, c’est-à-dire qu’ils «  l’ ont diminuée à 17 sous par jour ». Pour se venger, il leur a retiré so
5325 venger, il leur a retiré son assurance à lui, et l’ a passée à d’autres. Il reste par bonheur : les assurances sociales, v
5326 et l’a passée à d’autres. Il reste par bonheur : les assurances sociales, vie, décès, « avec doublage », vieillesse, accid
5327 ravail, incendie, et une histoire très compliquée de capitalisation-loterie, qui l’excite particulièrement. Tout cela rend
5328 re très compliquée de capitalisation-loterie, qui l’ excite particulièrement. Tout cela rend plus ou moins. Dans certains c
5329 . Dans certains cas, bien entendu, il s’agit même d’ y aller de sa poche. Enfin, on obtient tout de même quelque chose, mai
5330 tains cas, bien entendu, il s’agit même d’y aller de sa poche. Enfin, on obtient tout de même quelque chose, mais bou Diou
5331 — au ministre du Travail — pour avoir une pension de 5000 francs pour son beau-frère. « Ce cochon-là » n’a pas répondu, et
5332 re. « Ce cochon-là » n’a pas répondu, et pourtant la lettre était recommandée. Alors il a été voir « une personne encore p
5333 ue lui, Simard, et cette personne lui a conseillé d’ écrire une nouvelle lettre recommandée « à la charge du destinataire »
5334 illé d’écrire une nouvelle lettre recommandée « à la charge du destinataire ». Eh bien, qu’est-ce que vous croyez ? Répons
5335 Eh bien, qu’est-ce que vous croyez ? Réponse dans les quatre jours ! ah, ils sont comme ça ! Mais voilà que la personne com
5336 re jours ! ah, ils sont comme ça ! Mais voilà que la personne compétente lui dit : « Ce cochon-là t’a refait de 299 francs
5337 ne compétente lui dit : « Ce cochon-là t’a refait de 299 francs, consulte voir les barèmes ! » Il a fallu récrire deux foi
5338 cochon-là t’a refait de 299 francs, consulte voir les barèmes ! » Il a fallu récrire deux fois pour obtenir gain de cause.
5339  » Il a fallu récrire deux fois pour obtenir gain de cause. Et tout ça lui a bien coûté 50 francs. Autrement, vous savez c
5340 50 francs. Autrement, vous savez ce qui se passe, les employés là-bas, au ministère, ils mettent l’argent dans leur poche…
5341 e, les employés là-bas, au ministère, ils mettent l’ argent dans leur poche… — Tous les mas et mazets des environs sont hab
5342 ère, ils mettent l’argent dans leur poche… — Tous les mas et mazets des environs sont habités par des retraités, des pensio
5343 ités, des pensionnés, des assurés qui vivent dans la rouspétance contre ces « cochons-là » et dans la crainte de la vieill
5344 e contre ces « cochons-là » et dans la crainte de la vieillesse. On travaille pour ne rien gagner, à cause de la mévente c
5345 sse. On travaille pour ne rien gagner, à cause de la mévente croissante, on vit sur le dos de l’État, on suit des enterrem
5346 ner, à cause de la mévente croissante, on vit sur le dos de l’État, on suit des enterrements, on se brouille avec ses enfa
5347 cause de la mévente croissante, on vit sur le dos de l’État, on suit des enterrements, on se brouille avec ses enfants pou
5348 se de la mévente croissante, on vit sur le dos de l’ État, on suit des enterrements, on se brouille avec ses enfants pour d
5349 n se brouille avec ses enfants pour des questions d’ argent, on ne croit plus ni à Dieu ni à diable et à peine à la politiq
5350 ne croit plus ni à Dieu ni à diable et à peine à la politique, l’hiver est « pourri », la « pulmonie » fait des ravages,
5351 ni à Dieu ni à diable et à peine à la politique, l’ hiver est « pourri », la « pulmonie » fait des ravages, et ces cochons
5352 t à peine à la politique, l’hiver est « pourri », la « pulmonie » fait des ravages, et ces cochons-là vous diminuent. Sima
5353 s-là vous diminuent. Simard m’explique encore que les gens s’en vont d’ici pour travailler à la ville. C’est comme partout.
5354 re que les gens s’en vont d’ici pour travailler à la ville. C’est comme partout. Bon. Alors les catholiques descendent de
5355 iller à la ville. C’est comme partout. Bon. Alors les catholiques descendent de la montagne et viennent prendre la place. «
5356 me partout. Bon. Alors les catholiques descendent de la montagne et viennent prendre la place. « On les appelle ici les il
5357 partout. Bon. Alors les catholiques descendent de la montagne et viennent prendre la place. « On les appelle ici les illet
5358 ues descendent de la montagne et viennent prendre la place. « On les appelle ici les illettrés. Ça veut dire que c’est des
5359 de la montagne et viennent prendre la place. « On les appelle ici les illettrés. Ça veut dire que c’est des gens arriérés,
5360 t viennent prendre la place. « On les appelle ici les illettrés. Ça veut dire que c’est des gens arriérés, quoi. Ils n’ont
5361 que c’est des gens arriérés, quoi. Ils n’ont pas l’ instruction comme nous autres. » Arriérés, illettrés. Je n’en suis pl
5362 s plus au temps où j’approuvais certains « Éloges de l’ignorance » plus sentimentaux d’ailleurs que machiavéliques. Je sai
5363 lus au temps où j’approuvais certains « Éloges de l’ ignorance » plus sentimentaux d’ailleurs que machiavéliques. Je sais q
5364 entaux d’ailleurs que machiavéliques. Je sais que l’ ignorance — oui, au sens de l’école primaire — est un mal qu’il faudra
5365 avéliques. Je sais que l’ignorance — oui, au sens de l’école primaire — est un mal qu’il faudrait guérir. Mais je ne puis
5366 liques. Je sais que l’ignorance — oui, au sens de l’ école primaire — est un mal qu’il faudrait guérir. Mais je ne puis m’e
5367 qu’il faudrait guérir. Mais je ne puis m’empêcher de penser que ces « illettrés » sont peut-être moins bas que ces « assur
5368 t-être moins bas que ces « assurés ». Ce peuple à la retraite qui meurt en rouspétant contre les bureaucrates ne sait plus
5369 uple à la retraite qui meurt en rouspétant contre les bureaucrates ne sait plus bien ce qu’il craint davantage : de la vie
5370 tes ne sait plus bien ce qu’il craint davantage : de la vie qui ne rapporte plus, ou de la mort qui rapporte « en doublage
5371 ne sait plus bien ce qu’il craint davantage : de la vie qui ne rapporte plus, ou de la mort qui rapporte « en doublage »…
5372 nt davantage : de la vie qui ne rapporte plus, ou de la mort qui rapporte « en doublage »… 15 janvier 1935 Avoir la
5373 davantage : de la vie qui ne rapporte plus, ou de la mort qui rapporte « en doublage »… 15 janvier 1935 Avoir la ve
5374 rte « en doublage »… 15 janvier 1935 Avoir la veine. — « J’avais pris un billet de la Loterie nationale. Naturellem
5375 35 Avoir la veine. — « J’avais pris un billet de la Loterie nationale. Naturellement j’ai perdu ! Moi vous savez… Ce n
5376 Avoir la veine. — « J’avais pris un billet de la Loterie nationale. Naturellement j’ai perdu ! Moi vous savez… Ce n’es
5377 … Ce n’est pas comme Céline, ah celle-là ! Elle a la veine que voulez-vous ! À la loterie, dans les tombolas des sociétés,
5378 ah celle-là ! Elle a la veine que voulez-vous ! À la loterie, dans les tombolas des sociétés, n’importe où, elle est sûre
5379 e a la veine que voulez-vous ! À la loterie, dans les tombolas des sociétés, n’importe où, elle est sûre de gagner quelque
5380 ombolas des sociétés, n’importe où, elle est sûre de gagner quelque chose à tous les coups. » Voilà ce qu’on peut entendre
5381 où, elle est sûre de gagner quelque chose à tous les coups. » Voilà ce qu’on peut entendre dans toutes les épiceries de pr
5382 coups. » Voilà ce qu’on peut entendre dans toutes les épiceries de province où se rencontrent les femmes de la nation la pl
5383 ce qu’on peut entendre dans toutes les épiceries de province où se rencontrent les femmes de la nation la plus raisonnabl
5384 outes les épiceries de province où se rencontrent les femmes de la nation la plus raisonnable du monde. Le mari est un vieu
5385 piceries de province où se rencontrent les femmes de la nation la plus raisonnable du monde. Le mari est un vieux laïcard,
5386 eries de province où se rencontrent les femmes de la nation la plus raisonnable du monde. Le mari est un vieux laïcard, il
5387 rovince où se rencontrent les femmes de la nation la plus raisonnable du monde. Le mari est un vieux laïcard, il accuse le
5388 femmes de la nation la plus raisonnable du monde. Le mari est un vieux laïcard, il accuse les curés d’obscurantisme, il ne
5389 du monde. Le mari est un vieux laïcard, il accuse les curés d’obscurantisme, il ne veut pas d’ennemis à gauche parce que la
5390 Le mari est un vieux laïcard, il accuse les curés d’ obscurantisme, il ne veut pas d’ennemis à gauche parce que la gauche,
5391 accuse les curés d’obscurantisme, il ne veut pas d’ ennemis à gauche parce que la gauche, c’est le parti de la Raison et d
5392 isme, il ne veut pas d’ennemis à gauche parce que la gauche, c’est le parti de la Raison et du Progrès, qui naît de la Sci
5393 pas d’ennemis à gauche parce que la gauche, c’est le parti de la Raison et du Progrès, qui naît de la Science. C’est ce ma
5394 emis à gauche parce que la gauche, c’est le parti de la Raison et du Progrès, qui naît de la Science. C’est ce mari-là qui
5395 s à gauche parce que la gauche, c’est le parti de la Raison et du Progrès, qui naît de la Science. C’est ce mari-là qui au
5396 est le parti de la Raison et du Progrès, qui naît de la Science. C’est ce mari-là qui aura payé le billet, histoire de voi
5397 le parti de la Raison et du Progrès, qui naît de la Science. C’est ce mari-là qui aura payé le billet, histoire de voir s
5398 aît de la Science. C’est ce mari-là qui aura payé le billet, histoire de voir s’il a la chance. Seulement, avoir la chance
5399 ’est ce mari-là qui aura payé le billet, histoire de voir s’il a la chance. Seulement, avoir la chance, avoir la veine, c’
5400 qui aura payé le billet, histoire de voir s’il a la chance. Seulement, avoir la chance, avoir la veine, c’est démentir le
5401 stoire de voir s’il a la chance. Seulement, avoir la chance, avoir la veine, c’est démentir les lois les plus fondamentale
5402 il a la chance. Seulement, avoir la chance, avoir la veine, c’est démentir les lois les plus fondamentales de notre scienc
5403 , avoir la chance, avoir la veine, c’est démentir les lois les plus fondamentales de notre science la plus élémentaire et l
5404 a chance, avoir la veine, c’est démentir les lois les plus fondamentales de notre science la plus élémentaire et la plus sû
5405 e, c’est démentir les lois les plus fondamentales de notre science la plus élémentaire et la plus sûre, l’arithmétique. Ma
5406 les lois les plus fondamentales de notre science la plus élémentaire et la plus sûre, l’arithmétique. Mais qui s’avise d’
5407 amentales de notre science la plus élémentaire et la plus sûre, l’arithmétique. Mais qui s’avise d’une telle contradiction
5408 otre science la plus élémentaire et la plus sûre, l’ arithmétique. Mais qui s’avise d’une telle contradiction ? Le gouverne
5409 et la plus sûre, l’arithmétique. Mais qui s’avise d’ une telle contradiction ? Le gouvernement de la Troisième République,
5410 que. Mais qui s’avise d’une telle contradiction ? Le gouvernement de la Troisième République, ce défenseur légal de la rai
5411 avise d’une telle contradiction ? Le gouvernement de la Troisième République, ce défenseur légal de la raison contre les e
5412 nt de la Troisième République, ce défenseur légal de la raison contre les entreprises rétrogrades de l’Église, n’hésite pa
5413 de la Troisième République, ce défenseur légal de la raison contre les entreprises rétrogrades de l’Église, n’hésite pas à
5414 épublique, ce défenseur légal de la raison contre les entreprises rétrogrades de l’Église, n’hésite pas à tirer bénéfice de
5415 l de la raison contre les entreprises rétrogrades de l’Église, n’hésite pas à tirer bénéfice de la culture de cette supers
5416 e la raison contre les entreprises rétrogrades de l’ Église, n’hésite pas à tirer bénéfice de la culture de cette superstit
5417 grades de l’Église, n’hésite pas à tirer bénéfice de la culture de cette superstition. S’il est vrai que certains individu
5418 des de l’Église, n’hésite pas à tirer bénéfice de la culture de cette superstition. S’il est vrai que certains individus «
5419 lise, n’hésite pas à tirer bénéfice de la culture de cette superstition. S’il est vrai que certains individus « ont la vei
5420 ition. S’il est vrai que certains individus « ont la veine » dans ces loteries, notre image scientifique (physico-mathémat
5421 u monde, est fausse. Il est totalement impossible de concevoir la vérité simultanée de notre science et de la « veine » in
5422 fausse. Il est totalement impossible de concevoir la vérité simultanée de notre science et de la « veine » individuelle. C
5423 ment impossible de concevoir la vérité simultanée de notre science et de la « veine » individuelle. C’est l’un ou l’autre 
5424 oncevoir la vérité simultanée de notre science et de la « veine » individuelle. C’est l’un ou l’autre ; ou mieux, l’un con
5425 evoir la vérité simultanée de notre science et de la « veine » individuelle. C’est l’un ou l’autre ; ou mieux, l’un contre
5426 l’un ou l’autre ; ou mieux, l’un contre l’autre. La religion la plus naïve, le fanatisme religieux le plus obtus s’oppose
5427 utre ; ou mieux, l’un contre l’autre. La religion la plus naïve, le fanatisme religieux le plus obtus s’opposent infinimen
5428 , l’un contre l’autre. La religion la plus naïve, le fanatisme religieux le plus obtus s’opposent infiniment moins à notre
5429 La religion la plus naïve, le fanatisme religieux le plus obtus s’opposent infiniment moins à notre image scientifique du
5430 monde que cette petite phrase si courante : il a la veine. Mais notre jacobin ne croit à la Raison et à la Science, mère
5431 te : il a la veine. Mais notre jacobin ne croit à la Raison et à la Science, mère du Progrès, que dans la mesure où cela l
5432 ine. Mais notre jacobin ne croit à la Raison et à la Science, mère du Progrès, que dans la mesure où cela lui permet de ne
5433 Raison et à la Science, mère du Progrès, que dans la mesure où cela lui permet de ne pas aller à l’église. Pour le reste,
5434 du Progrès, que dans la mesure où cela lui permet de ne pas aller à l’église. Pour le reste, il demeure la proie du charla
5435 ns la mesure où cela lui permet de ne pas aller à l’ église. Pour le reste, il demeure la proie du charlatanisme éternel. M
5436 cela lui permet de ne pas aller à l’église. Pour le reste, il demeure la proie du charlatanisme éternel. Mesure de la rai
5437 e pas aller à l’église. Pour le reste, il demeure la proie du charlatanisme éternel. Mesure de la raison humaine : ils ref
5438 demeure la proie du charlatanisme éternel. Mesure de la raison humaine : ils refusent la Trinité au nom de l’arithmétique
5439 eure la proie du charlatanisme éternel. Mesure de la raison humaine : ils refusent la Trinité au nom de l’arithmétique élé
5440 ernel. Mesure de la raison humaine : ils refusent la Trinité au nom de l’arithmétique élémentaire14 puis s’en vont prendre
5441 aison humaine : ils refusent la Trinité au nom de l’ arithmétique élémentaire14 puis s’en vont prendre 1/10e de billet.
5442 étique élémentaire14 puis s’en vont prendre 1/10e de billet. 20 janvier 1935 Superstition. — C’est de Casanova que
5443 let. 20 janvier 1935 Superstition. — C’est de Casanova que Ligne écrit : « Il ne croit à rien excepté ce qui est le
5444 e écrit : « Il ne croit à rien excepté ce qui est le moins croyable, étant superstitieux sur tout plein d’objets ». Malcha
5445 oins croyable, étant superstitieux sur tout plein d’ objets ». Malchance affreuse du peuple français : il n’échappe aux jés
5446  : il n’échappe aux jésuites que pour tomber dans le fétichisme : le franc sacré, les idées à majuscules, toucher du bois,
5447 aux jésuites que pour tomber dans le fétichisme : le franc sacré, les idées à majuscules, toucher du bois, la bouteille de
5448 pour tomber dans le fétichisme : le franc sacré, les idées à majuscules, toucher du bois, la bouteille de champagne brisée
5449 c sacré, les idées à majuscules, toucher du bois, la bouteille de champagne brisée contre la coque des bateaux neufs, etc.
5450 idées à majuscules, toucher du bois, la bouteille de champagne brisée contre la coque des bateaux neufs, etc. Un geste rés
5451 du bois, la bouteille de champagne brisée contre la coque des bateaux neufs, etc. Un geste résume toute la situation : c’
5452 que des bateaux neufs, etc. Un geste résume toute la situation : c’est celui du coiffeur fameux, premier gagnant de la Lot
5453 : c’est celui du coiffeur fameux, premier gagnant de la Loterie nationale, s’inclinant sur la tombe du Soldat inconnu. Jus
5454 ’est celui du coiffeur fameux, premier gagnant de la Loterie nationale, s’inclinant sur la tombe du Soldat inconnu. Juste
5455 gagnant de la Loterie nationale, s’inclinant sur la tombe du Soldat inconnu. Juste hommage au collègue, au gagnant d’une
5456 at inconnu. Juste hommage au collègue, au gagnant d’ une autre loterie ! Toute la grande presse en a parlé. Personne ne rit
5457 collègue, au gagnant d’une autre loterie ! Toute la grande presse en a parlé. Personne ne rit. Léon Bloy rugit dans sa to
5458 ugit dans sa tombe. 28 janvier 1935 Matinée d’ hiver au Midi. Et voici par la grâce du soleil de janvier qu’un mot de
5459 ier 1935 Matinée d’hiver au Midi. Et voici par la grâce du soleil de janvier qu’un mot devient le plus beau de la langu
5460 d’hiver au Midi. Et voici par la grâce du soleil de janvier qu’un mot devient le plus beau de la langue : matinée. Tout c
5461 r la grâce du soleil de janvier qu’un mot devient le plus beau de la langue : matinée. Tout ce qu’il y a de clarté, d’écla
5462 soleil de janvier qu’un mot devient le plus beau de la langue : matinée. Tout ce qu’il y a de clarté, d’éclat doux, d’aba
5463 leil de janvier qu’un mot devient le plus beau de la langue : matinée. Tout ce qu’il y a de clarté, d’éclat doux, d’abando
5464 us beau de la langue : matinée. Tout ce qu’il y a de clarté, d’éclat doux, d’abandon à la force sereine de l’air, tout cel
5465 la langue : matinée. Tout ce qu’il y a de clarté, d’ éclat doux, d’abandon à la force sereine de l’air, tout cela dit par l
5466 tinée. Tout ce qu’il y a de clarté, d’éclat doux, d’ abandon à la force sereine de l’air, tout cela dit par les trois sylla
5467 ce qu’il y a de clarté, d’éclat doux, d’abandon à la force sereine de l’air, tout cela dit par les trois syllabes de ce mo
5468 larté, d’éclat doux, d’abandon à la force sereine de l’air, tout cela dit par les trois syllabes de ce mot qui décrit et e
5469 té, d’éclat doux, d’abandon à la force sereine de l’ air, tout cela dit par les trois syllabes de ce mot qui décrit et embr
5470 on à la force sereine de l’air, tout cela dit par les trois syllabes de ce mot qui décrit et embrasse les trois dimensions
5471 ne de l’air, tout cela dit par les trois syllabes de ce mot qui décrit et embrasse les trois dimensions de la joie, est di
5472 s trois syllabes de ce mot qui décrit et embrasse les trois dimensions de la joie, est dit aussi par le vallon des oliviers
5473 e mot qui décrit et embrasse les trois dimensions de la joie, est dit aussi par le vallon des oliviers et par sa jeune nud
5474 ot qui décrit et embrasse les trois dimensions de la joie, est dit aussi par le vallon des oliviers et par sa jeune nudité
5475 es trois dimensions de la joie, est dit aussi par le vallon des oliviers et par sa jeune nudité. Pas une vapeur ne s’élève
5476 et par sa jeune nudité. Pas une vapeur ne s’élève de l’herbe pauvre des terrasses, ni de ces arbres moirés et allègres. To
5477 par sa jeune nudité. Pas une vapeur ne s’élève de l’ herbe pauvre des terrasses, ni de ces arbres moirés et allègres. Tout
5478 ur ne s’élève de l’herbe pauvre des terrasses, ni de ces arbres moirés et allègres. Tout est vu du premier regard, douceme
5479 vues, un langage innocent et raisonnable : voilà le monde à son contentement ; à la mesure de l’amitié humaine. J’entends
5480 isonnable : voilà le monde à son contentement ; à la mesure de l’amitié humaine. J’entends un bruit de bêche sur une terra
5481 : voilà le monde à son contentement ; à la mesure de l’amitié humaine. J’entends un bruit de bêche sur une terrasse invisi
5482 oilà le monde à son contentement ; à la mesure de l’ amitié humaine. J’entends un bruit de bêche sur une terrasse invisible
5483 la mesure de l’amitié humaine. J’entends un bruit de bêche sur une terrasse invisible, au-dessous. Je vois un chien qui se
5484 ible, au-dessous. Je vois un chien qui se promène de son petit pas élastique sur les restanques étroites, passant de l’une
5485 ien qui se promène de son petit pas élastique sur les restanques étroites, passant de l’une à l’autre par ces petits escali
5486 as élastique sur les restanques étroites, passant de l’une à l’autre par ces petits escaliers tout simplets, suivant une p
5487 caliers tout simplets, suivant une piste par jeu. Le ciel est d’un bleu sec et pur, tranché au sommet du vallon par un cyp
5488 simplets, suivant une piste par jeu. Le ciel est d’ un bleu sec et pur, tranché au sommet du vallon par un cyprès grandilo
5489 un cyprès grandiloquent. Et cette maison couleur de terre et festonnée de tuiles roses, elle est bien à la ressemblance d
5490 nt. Et cette maison couleur de terre et festonnée de tuiles roses, elle est bien à la ressemblance des vieilles paysannes
5491 rre et festonnée de tuiles roses, elle est bien à la ressemblance des vieilles paysannes de par ici, recuite et mordue par
5492 illes paysannes de par ici, recuite et mordue par le temps, sobre et gaie, pauvre et spirituelle… 2 février 1935 Je
5493 le… 2 février 1935 Je m’en doutais bien, et la mère Calixte me le confirme : Simard me tient pour un minus, un incap
5494 35 Je m’en doutais bien, et la mère Calixte me le confirme : Simard me tient pour un minus, un incapable, peut-être mêm
5495 nus, un incapable, peut-être même pour une espèce de malade qu’on a relégué dans cette maison perdue, faute de savoir comm
5496 dans cette maison perdue, faute de savoir comment le soigner. Un bourgeois sans fortune et sans situation, à l’âge que j’a
5497 r. Un bourgeois sans fortune et sans situation, à l’ âge que j’ai, c’est une pitié ! Il est clair que je ne fiche rien. Mai
5498 N’empêche que je me sens atteint dans ma dignité d’ homme et de travailleur. Je lui ai bien dit, dès le début, que mon tra
5499 que je me sens atteint dans ma dignité d’homme et de travailleur. Je lui ai bien dit, dès le début, que mon travail c’étai
5500 ’homme et de travailleur. Je lui ai bien dit, dès le début, que mon travail c’était d’écrire des livres. Il a dû trouver l
5501 i bien dit, dès le début, que mon travail c’était d’ écrire des livres. Il a dû trouver l’excuse assez faible. Je n’ai pas
5502 vail c’était d’écrire des livres. Il a dû trouver l’ excuse assez faible. Je n’ai pas la tête d’un écrivain, et d’ailleurs
5503 l a dû trouver l’excuse assez faible. Je n’ai pas la tête d’un écrivain, et d’ailleurs un écrivain, est-ce qu’on en a jama
5504 rouver l’excuse assez faible. Je n’ai pas la tête d’ un écrivain, et d’ailleurs un écrivain, est-ce qu’on en a jamais vu ?
5505 oit habiter Paris. Il faudra que je lui glisse un de ces jours que j’écris « pour les journaux ». 3 février 1935 Dé
5506 je lui glisse un de ces jours que j’écris « pour les journaux ». 3 février 1935 Déclassé. — L’intellectuel l’est to
5507 les journaux ». 3 février 1935 Déclassé. —  L’ intellectuel l’est toujours. C’est qu’il est d’une classe particulière
5508 3 février 1935 Déclassé. — L’intellectuel l’ est toujours. C’est qu’il est d’une classe particulière, dispersée com
5509 — L’intellectuel l’est toujours. C’est qu’il est d’ une classe particulière, dispersée comme les Juifs le sont chez les Ge
5510 il est d’une classe particulière, dispersée comme les Juifs le sont chez les Gentils. Pourquoi ne l’ai-je compris vraiment
5511 ne classe particulière, dispersée comme les Juifs le sont chez les Gentils. Pourquoi ne l’ai-je compris vraiment qu’à la f
5512 ticulière, dispersée comme les Juifs le sont chez les Gentils. Pourquoi ne l’ai-je compris vraiment qu’à la faveur de ce ch
5513 e les Juifs le sont chez les Gentils. Pourquoi ne l’ ai-je compris vraiment qu’à la faveur de ce chômage ? C’est qu’il m’a
5514 entils. Pourquoi ne l’ai-je compris vraiment qu’à la faveur de ce chômage ? C’est qu’il m’a fallu m’éloigner de cette ambi
5515 urquoi ne l’ai-je compris vraiment qu’à la faveur de ce chômage ? C’est qu’il m’a fallu m’éloigner de cette ambiance bourg
5516 de ce chômage ? C’est qu’il m’a fallu m’éloigner de cette ambiance bourgeoise où l’on a convenu de cacher cela — de cache
5517 fallu m’éloigner de cette ambiance bourgeoise où l’ on a convenu de cacher cela — de cacher ce fait que l’intellectuel en
5518 er de cette ambiance bourgeoise où l’on a convenu de cacher cela — de cacher ce fait que l’intellectuel en tant que tel es
5519 nce bourgeoise où l’on a convenu de cacher cela —  de cacher ce fait que l’intellectuel en tant que tel est un hors-classe,
5520 a convenu de cacher cela — de cacher ce fait que l’ intellectuel en tant que tel est un hors-classe, un être à part, auque
5521 -classe, un être à part, auquel on ne croit pas. ( D’ où sans doute l’angoisse qui pousse tant d’écrivains à gagner de l’arg
5522 à part, auquel on ne croit pas. (D’où sans doute l’ angoisse qui pousse tant d’écrivains à gagner de l’argent, à entrer à
5523 pas. (D’où sans doute l’angoisse qui pousse tant d’ écrivains à gagner de l’argent, à entrer à l’Académie, voire à jouer u
5524 e l’angoisse qui pousse tant d’écrivains à gagner de l’argent, à entrer à l’Académie, voire à jouer un rôle politique : po
5525 ’angoisse qui pousse tant d’écrivains à gagner de l’ argent, à entrer à l’Académie, voire à jouer un rôle politique : pour
5526 tant d’écrivains à gagner de l’argent, à entrer à l’ Académie, voire à jouer un rôle politique : pour faire figure, pour ac
5527 re, pour acquérir une situation bien définie dans le corps social.) Nous sommes méprisés dans la mesure où nous sommes int
5528 dans le corps social.) Nous sommes méprisés dans la mesure où nous sommes intellectuels, et acceptés — ou utilisés — dans
5529 s intellectuels, et acceptés — ou utilisés — dans la mesure où nous réussissons à nous faire passer pour des bourgeois ou
5530 défenseurs du prolétariat. 25 février 1935 Le « problème des gens ». — Kangourou de Lawrence, ce journal à peine ro
5531 er 1935 Le « problème des gens ». — Kangourou de Lawrence, ce journal à peine romancé d’un intellectuel livré à des pr
5532 Kangourou de Lawrence, ce journal à peine romancé d’ un intellectuel livré à des proximités inévitables, — voilà le seul do
5533 ctuel livré à des proximités inévitables, — voilà le seul document que je connaisse sur l’espèce de mauvaise humeur singul
5534 es, — voilà le seul document que je connaisse sur l’ espèce de mauvaise humeur singulière dont nous souffrons ici, ma femme
5535 là le seul document que je connaisse sur l’espèce de mauvaise humeur singulière dont nous souffrons ici, ma femme et moi,
5536 ma femme et moi, et qui déjà nous a fait quitter l’ île. Problème des gens : le plus commun et le plus encombrant. Voici c
5537 jà nous a fait quitter l’île. Problème des gens : le plus commun et le plus encombrant. Voici comment il me paraît se pose
5538 tter l’île. Problème des gens : le plus commun et le plus encombrant. Voici comment il me paraît se poser. Nous serions pa
5539 raît se poser. Nous serions parfaitement contents de notre sort, loin des villes, pour tout ce qui est de notre vie privée
5540 notre sort, loin des villes, pour tout ce qui est de notre vie privée, de nos travaux et de notre confort. Mais du seul fa
5541 villes, pour tout ce qui est de notre vie privée, de nos travaux et de notre confort. Mais du seul fait que ma condition n
5542 ce qui est de notre vie privée, de nos travaux et de notre confort. Mais du seul fait que ma condition n’est pas socialeme
5543 t que ma condition n’est pas socialement classée, la « distance » normale entre les gens et nous se trouve tantôt supprimé
5544 ocialement classée, la « distance » normale entre les gens et nous se trouve tantôt supprimée, tantôt exagérée. Nous ne bén
5545 primée, tantôt exagérée. Nous ne bénéficions plus de la protection des conventions. Tantôt mêlés de trop près à des indiff
5546 mée, tantôt exagérée. Nous ne bénéficions plus de la protection des conventions. Tantôt mêlés de trop près à des indiffére
5547 us de la protection des conventions. Tantôt mêlés de trop près à des indifférents et des indiscrets, tantôt moralement exc
5548 rents et des indiscrets, tantôt moralement exclus de la communauté locale, nous assistons non sans une gêne croissante, au
5549 ts et des indiscrets, tantôt moralement exclus de la communauté locale, nous assistons non sans une gêne croissante, au dé
5550 ans une gêne croissante, au développement furieux de notre esprit critique. Il y a des jours où tout, oui vraiment tout, l
5551 que. Il y a des jours où tout, oui vraiment tout, les rues, les gens, les PTT, les magasins et les journaux, nous irrite ou
5552 a des jours où tout, oui vraiment tout, les rues, les gens, les PTT, les magasins et les journaux, nous irrite ou excite no
5553 s où tout, oui vraiment tout, les rues, les gens, les PTT, les magasins et les journaux, nous irrite ou excite notre ironie
5554 , oui vraiment tout, les rues, les gens, les PTT, les magasins et les journaux, nous irrite ou excite notre ironie. Si l’on
5555 out, les rues, les gens, les PTT, les magasins et les journaux, nous irrite ou excite notre ironie. Si l’on nous écoutait,
5556 journaux, nous irrite ou excite notre ironie. Si l’ on nous écoutait, il faudrait refaire ce petit monde de fond en comble
5557 nous écoutait, il faudrait refaire ce petit monde de fond en comble ! La lecture de Lawrence m’a fait prendre une conscien
5558 udrait refaire ce petit monde de fond en comble ! La lecture de Lawrence m’a fait prendre une conscience aiguë de cet état
5559 ire ce petit monde de fond en comble ! La lecture de Lawrence m’a fait prendre une conscience aiguë de cet état. Je retrou
5560 de Lawrence m’a fait prendre une conscience aiguë de cet état. Je retrouve toutes mes réactions dans son roman. Et de les
5561 retrouve toutes mes réactions dans son roman. Et de les voir aussi crûment avouées, m’oblige enfin à les considérer sans
5562 trouve toutes mes réactions dans son roman. Et de les voir aussi crûment avouées, m’oblige enfin à les considérer sans faux
5563 les voir aussi crûment avouées, m’oblige enfin à les considérer sans faux-fuyants sentimentaux. Là-dessus, deux remarques
5564 x. Là-dessus, deux remarques : 1. — On a coutume d’ attendre d’autrui beaucoup plus que l’on n’est disposé à lui donner. E
5565 us, deux remarques : 1. — On a coutume d’attendre d’ autrui beaucoup plus que l’on n’est disposé à lui donner. Et d’attendr
5566 n a coutume d’attendre d’autrui beaucoup plus que l’ on n’est disposé à lui donner. Et d’attendre « des gens » en général,
5567 coup plus que l’on n’est disposé à lui donner. Et d’ attendre « des gens » en général, une dose de pittoresque, de caractèr
5568 . Et d’attendre « des gens » en général, une dose de pittoresque, de caractère et de gentillesse que les conditions de leu
5569 « des gens » en général, une dose de pittoresque, de caractère et de gentillesse que les conditions de leur existence n’ad
5570 général, une dose de pittoresque, de caractère et de gentillesse que les conditions de leur existence n’admettent guère. 2
5571 e pittoresque, de caractère et de gentillesse que les conditions de leur existence n’admettent guère. 2. — Nous ne sommes i
5572 de caractère et de gentillesse que les conditions de leur existence n’admettent guère. 2. — Nous ne sommes ici que de pass
5573 ce n’admettent guère. 2. — Nous ne sommes ici que de passage. Au fond, nous n’avons rien à faire à A…, ni rien à faire pou
5574 r présence, leur proximité matérielle n’exige pas de nous des actes ou des échanges réels, ou même les refuse. Alors ils n
5575 de nous des actes ou des échanges réels, ou même les refuse. Alors ils ne sont plus pour nous que des « voisins inévitable
5576 pour nous que des « voisins inévitables », selon le mot de Keyserling, et non pas du tout des prochains. Car le prochain,
5577 ous que des « voisins inévitables », selon le mot de Keyserling, et non pas du tout des prochains. Car le prochain, dans s
5578 Keyserling, et non pas du tout des prochains. Car le prochain, dans sa définition évangélique, c’est justement celui qui e
5579 tion évangélique, c’est justement celui qui exige de l’aide et auquel je puis venir en aide. « Les gens » avec lesquels on
5580 n évangélique, c’est justement celui qui exige de l’ aide et auquel je puis venir en aide. « Les gens » avec lesquels on se
5581 xige de l’aide et auquel je puis venir en aide. «  Les gens » avec lesquels on se voit contraint de vivre par suite d’un acc
5582 . « Les gens » avec lesquels on se voit contraint de vivre par suite d’un accident du sort, ont toutes les chances d’appar
5583 lesquels on se voit contraint de vivre par suite d’ un accident du sort, ont toutes les chances d’apparaître deux fois ins
5584 vivre par suite d’un accident du sort, ont toutes les chances d’apparaître deux fois insupportables : comme voisins toujour
5585 ite d’un accident du sort, ont toutes les chances d’ apparaître deux fois insupportables : comme voisins toujours insuffisa
5586 nsuffisants d’abord, et comme rappels constants à l’ isolement, à la méfiance ou à l’indifférence auxquels sont condamnés l
5587 bord, et comme rappels constants à l’isolement, à la méfiance ou à l’indifférence auxquels sont condamnés la plupart d’ent
5588 ppels constants à l’isolement, à la méfiance ou à l’ indifférence auxquels sont condamnés la plupart d’entre nous. Le secre
5589 auxquels sont condamnés la plupart d’entre nous. Le secret de ma mauvaise humeur, c’est qu’il n’y a plus de communauté. C
5590 sont condamnés la plupart d’entre nous. Le secret de ma mauvaise humeur, c’est qu’il n’y a plus de communauté. Car s’il es
5591 ret de ma mauvaise humeur, c’est qu’il n’y a plus de communauté. Car s’il est vrai que tous les hommes sont frères de par
5592 a plus de communauté. Car s’il est vrai que tous les hommes sont frères de par leur commune origine, cela nous conduit tou
5593 cela nous conduit tout au plus à élargir à toute la terre le champ des querelles de famille. La seule fraternité réelle,
5594 s conduit tout au plus à élargir à toute la terre le champ des querelles de famille. La seule fraternité réelle, la seule
5595 à élargir à toute la terre le champ des querelles de famille. La seule fraternité réelle, la seule créatrice et durable, c
5596 toute la terre le champ des querelles de famille. La seule fraternité réelle, la seule créatrice et durable, c’est celle q
5597 querelles de famille. La seule fraternité réelle, la seule créatrice et durable, c’est celle que pourrait rétablir une fin
5598 ions. C’est ce qui leur donne raison bien au-delà d’ elles-mêmes, tout autrement que nous l’imaginions. L’irritation chroni
5599 en au-delà d’elles-mêmes, tout autrement que nous l’ imaginions. L’irritation chronique que je ressens au contact des « gen
5600 lles-mêmes, tout autrement que nous l’imaginions. L’ irritation chronique que je ressens au contact des « gens » qui m’ento
5601 ’entourent, c’est une obscure protestation contre la vie défaite que nous vivons. Or, il ne s’agit pas d’étouffer cette pr
5602 vie défaite que nous vivons. Or, il ne s’agit pas d’ étouffer cette protestation, mais au contraire de la faire aboutir. Il
5603 étouffer cette protestation, mais au contraire de la faire aboutir. Il faut la prendre tellement au sérieux, la nourrir d’
5604 n, mais au contraire de la faire aboutir. Il faut la prendre tellement au sérieux, la nourrir d’une telle exigence, d’un t
5605 aboutir. Il faut la prendre tellement au sérieux, la nourrir d’une telle exigence, d’un tel inflexible sens critique, qu’e
5606 faut la prendre tellement au sérieux, la nourrir d’ une telle exigence, d’un tel inflexible sens critique, qu’elle en devi
5607 ment au sérieux, la nourrir d’une telle exigence, d’ un tel inflexible sens critique, qu’elle en devienne vraiment insuppor
5608 raiment insupportable, et que rien ne puisse plus l’ apaiser — pas même les nécessaires révolutions — hors de la fin derniè
5609 , et que rien ne puisse plus l’apaiser — pas même les nécessaires révolutions — hors de la fin dernière qu’elle nous désign
5610 — pas même les nécessaires révolutions — hors de la fin dernière qu’elle nous désigne et qu’elle appelle. Toutes les nost
5611 e qu’elle nous désigne et qu’elle appelle. Toutes les nostalgies de l’Europe, tous les faux apaisements qu’elle leur donne
5612 désigne et qu’elle appelle. Toutes les nostalgies de l’Europe, tous les faux apaisements qu’elle leur donne et dont elle s
5613 igne et qu’elle appelle. Toutes les nostalgies de l’ Europe, tous les faux apaisements qu’elle leur donne et dont elle se p
5614 appelle. Toutes les nostalgies de l’Europe, tous les faux apaisements qu’elle leur donne et dont elle se plaint aussitôt,
5615 leur donne et dont elle se plaint aussitôt, toute la misère des millions d’isolés qui font nos foules et qui saluent les d
5616 se plaint aussitôt, toute la misère des millions d’ isolés qui font nos foules et qui saluent les dictateurs, tout cela en
5617 lions d’isolés qui font nos foules et qui saluent les dictateurs, tout cela en vérité n’est qu’une prière obscure : vienne
5618 la en vérité n’est qu’une prière obscure : vienne l’ Église universelle, — la révélation du Prochain. 17 février 1935
5619 e prière obscure : vienne l’Église universelle, —  la révélation du Prochain. 17 février 1935 Cercle d’hommes. — Hie
5620 lation du Prochain. 17 février 1935 Cercle d’ hommes. — Hier soir, le sujet de l’entretien était le problème de l’au
5621 17 février 1935 Cercle d’hommes. — Hier soir, le sujet de l’entretien était le problème de l’autorité. La discussion d
5622 r 1935 Cercle d’hommes. — Hier soir, le sujet de l’entretien était le problème de l’autorité. La discussion dévia bien
5623 935 Cercle d’hommes. — Hier soir, le sujet de l’ entretien était le problème de l’autorité. La discussion dévia bientôt
5624 ommes. — Hier soir, le sujet de l’entretien était le problème de l’autorité. La discussion dévia bientôt vers le fascisme.
5625 r soir, le sujet de l’entretien était le problème de l’autorité. La discussion dévia bientôt vers le fascisme. Un beau cha
5626 oir, le sujet de l’entretien était le problème de l’ autorité. La discussion dévia bientôt vers le fascisme. Un beau chaos
5627 t de l’entretien était le problème de l’autorité. La discussion dévia bientôt vers le fascisme. Un beau chaos de partis pr
5628 e de l’autorité. La discussion dévia bientôt vers le fascisme. Un beau chaos de partis pris, d’erreurs de faits et de form
5629 ion dévia bientôt vers le fascisme. Un beau chaos de partis pris, d’erreurs de faits et de formules électorales ! Je deman
5630 t vers le fascisme. Un beau chaos de partis pris, d’ erreurs de faits et de formules électorales ! Je demandai la parole po
5631 fascisme. Un beau chaos de partis pris, d’erreurs de faits et de formules électorales ! Je demandai la parole pour expliqu
5632 beau chaos de partis pris, d’erreurs de faits et de formules électorales ! Je demandai la parole pour expliquer, le plus
5633 de faits et de formules électorales ! Je demandai la parole pour expliquer, le plus simplement que je pus, que le problème
5634 ectorales ! Je demandai la parole pour expliquer, le plus simplement que je pus, que le problème fasciste est un problème
5635 our expliquer, le plus simplement que je pus, que le problème fasciste est un problème avant tout national ; qu’il s’est p
5636 e pays, et qu’en tout cas il ne peut pas se poser de la même façon en France. Je conclus que la seule manière de prévenir
5637 ays, et qu’en tout cas il ne peut pas se poser de la même façon en France. Je conclus que la seule manière de prévenir uti
5638 poser de la même façon en France. Je conclus que la seule manière de prévenir utilement un fascisme, ce n’était pas de co
5639 façon en France. Je conclus que la seule manière de prévenir utilement un fascisme, ce n’était pas de condamner les Itali
5640 de prévenir utilement un fascisme, ce n’était pas de condamner les Italiens et leurs admirateurs français, position négati
5641 tilement un fascisme, ce n’était pas de condamner les Italiens et leurs admirateurs français, position négative, paresseuse
5642 sition négative, paresseuse, et donc faible, mais d’ essayer de résoudre « à la française » le problème de l’autorité, tel
5643 ative, paresseuse, et donc faible, mais d’essayer de résoudre « à la française » le problème de l’autorité, tel que le pos
5644 e, et donc faible, mais d’essayer de résoudre « à la française » le problème de l’autorité, tel que le posent cinquante an
5645 le, mais d’essayer de résoudre « à la française » le problème de l’autorité, tel que le posent cinquante années de démocra
5646 ssayer de résoudre « à la française » le problème de l’autorité, tel que le posent cinquante années de démocratie parlemen
5647 yer de résoudre « à la française » le problème de l’ autorité, tel que le posent cinquante années de démocratie parlementai
5648 la française » le problème de l’autorité, tel que le posent cinquante années de démocratie parlementaire, et toute une tra
5649 de l’autorité, tel que le posent cinquante années de démocratie parlementaire, et toute une tradition de libertés. Bref, u
5650 démocratie parlementaire, et toute une tradition de libertés. Bref, un petit sermon élémentaire sur le thème « liberté ob
5651 e libertés. Bref, un petit sermon élémentaire sur le thème « liberté oblige ». Au sortir de la réunion, je surprends cette
5652 ire sur le thème « liberté oblige ». Au sortir de la réunion, je surprends cette phrase d’un homme, dans la cour, tandis q
5653 u sortir de la réunion, je surprends cette phrase d’ un homme, dans la cour, tandis qu’il donne du feu à son copain : « Pou
5654 union, je surprends cette phrase d’un homme, dans la cour, tandis qu’il donne du feu à son copain : « Pour moi, c’est un f
5655 lles raisons il prend ou ne prend pas parti. Mais l’ électeur veut qu’on soit pour ou contre, et il se méfie par principe d
5656 soit pour ou contre, et il se méfie par principe de celui qui distingue et nuance. On ne tiendra jamais assez compte de c
5657 ngue et nuance. On ne tiendra jamais assez compte de cette opposition fondamentale. Peut-être ferais-je bien, à l’avenir,
5658 osition fondamentale. Peut-être ferais-je bien, à l’ avenir, si j’écris quelque chose sur le fascisme ou sur les soviets, d
5659 je bien, à l’avenir, si j’écris quelque chose sur le fascisme ou sur les soviets, de mettre en épigraphe à mon article : J
5660 , si j’écris quelque chose sur le fascisme ou sur les soviets, de mettre en épigraphe à mon article : Je suis contre. Sinon
5661 quelque chose sur le fascisme ou sur les soviets, de mettre en épigraphe à mon article : Je suis contre. Sinon, pour peu q
5662 mon article : Je suis contre. Sinon, pour peu que l’ article expose le pour et le contre, quelle que soit d’ailleurs ma con
5663 suis contre. Sinon, pour peu que l’article expose le pour et le contre, quelle que soit d’ailleurs ma conclusion, on me cl
5664 . Sinon, pour peu que l’article expose le pour et le contre, quelle que soit d’ailleurs ma conclusion, on me classera fasc
5665 me classera fasciste ou communiste. Et pourtant, la mission de l’écrivain n’est-elle pas justement d’éduquer le lecteur,
5666 a fasciste ou communiste. Et pourtant, la mission de l’écrivain n’est-elle pas justement d’éduquer le lecteur, j’entends d
5667 asciste ou communiste. Et pourtant, la mission de l’ écrivain n’est-elle pas justement d’éduquer le lecteur, j’entends de l
5668 la mission de l’écrivain n’est-elle pas justement d’ éduquer le lecteur, j’entends de l’amener à réfléchir sur les raisons
5669 de l’écrivain n’est-elle pas justement d’éduquer le lecteur, j’entends de l’amener à réfléchir sur les raisons de ses par
5670 lle pas justement d’éduquer le lecteur, j’entends de l’amener à réfléchir sur les raisons de ses partis pris ? 21 févri
5671 pas justement d’éduquer le lecteur, j’entends de l’ amener à réfléchir sur les raisons de ses partis pris ? 21 février
5672 le lecteur, j’entends de l’amener à réfléchir sur les raisons de ses partis pris ? 21 février 1935 Un fort vent doux
5673 j’entends de l’amener à réfléchir sur les raisons de ses partis pris ? 21 février 1935 Un fort vent doux passe de gr
5674 s ? 21 février 1935 Un fort vent doux passe de grandes caresses sur le pelage d’oliviers de la colline toute proche.
5675 Un fort vent doux passe de grandes caresses sur le pelage d’oliviers de la colline toute proche. Dans l’ouverture de la
5676 vent doux passe de grandes caresses sur le pelage d’ oliviers de la colline toute proche. Dans l’ouverture de la vallée, ce
5677 asse de grandes caresses sur le pelage d’oliviers de la colline toute proche. Dans l’ouverture de la vallée, ce triangle d
5678 e de grandes caresses sur le pelage d’oliviers de la colline toute proche. Dans l’ouverture de la vallée, ce triangle de p
5679 elage d’oliviers de la colline toute proche. Dans l’ ouverture de la vallée, ce triangle de plaine bleu rosé piqué de cyprè
5680 iers de la colline toute proche. Dans l’ouverture de la vallée, ce triangle de plaine bleu rosé piqué de cyprès, c’est la
5681 s de la colline toute proche. Dans l’ouverture de la vallée, ce triangle de plaine bleu rosé piqué de cyprès, c’est la seu
5682 roche. Dans l’ouverture de la vallée, ce triangle de plaine bleu rosé piqué de cyprès, c’est la seule couleur vive du pays
5683 la vallée, ce triangle de plaine bleu rosé piqué de cyprès, c’est la seule couleur vive du paysage desséché. Ciel gris mo
5684 iangle de plaine bleu rosé piqué de cyprès, c’est la seule couleur vive du paysage desséché. Ciel gris mouvant, une barre
5685 ge desséché. Ciel gris mouvant, une barre jaune à l’ horizon. Et sur le petit toit au-dessous de moi, tout près, soudain je
5686 gris mouvant, une barre jaune à l’horizon. Et sur le petit toit au-dessous de moi, tout près, soudain je vois un pigeon vi
5687 près, soudain je vois un pigeon violet immobile. Les plumes du cou sont un peu hérissées par le vent. Voici trois jours qu
5688 bile. Les plumes du cou sont un peu hérissées par le vent. Voici trois jours que je le vois chaque matin. Quand je l’appel
5689 u hérissées par le vent. Voici trois jours que je le vois chaque matin. Quand je l’appelle, il donne quelques coups de têt
5690 trois jours que je le vois chaque matin. Quand je l’ appelle, il donne quelques coups de tête furtifs, et se détourne. D’où
5691 atin. Quand je l’appelle, il donne quelques coups de tête furtifs, et se détourne. D’où vient-il ? On m’a dit qu’il n’y a
5692 e quelques coups de tête furtifs, et se détourne. D’ où vient-il ? On m’a dit qu’il n’y a pas de pigeons par ici. Que vient
5693 ourne. D’où vient-il ? On m’a dit qu’il n’y a pas de pigeons par ici. Que vient-il attendre ? Pourquoi feint-il de ne pas
5694 ar ici. Que vient-il attendre ? Pourquoi feint-il de ne pas me voir ? Il se tient là des heures, sans bouger, et s’envole
5695 se tient là des heures, sans bouger, et s’envole d’ un coup vers le soir. Le lendemain, il est là, de nouveau, posé sur un
5696 s heures, sans bouger, et s’envole d’un coup vers le soir. Le lendemain, il est là, de nouveau, posé sur une tuile ronde.
5697 sans bouger, et s’envole d’un coup vers le soir. Le lendemain, il est là, de nouveau, posé sur une tuile ronde. Il y a qu
5698 rier 1935 Au moment où ma femme allait secouer les miettes de la nappe par la fenêtre, au-dessus du poulailler, elle a v
5699 Au moment où ma femme allait secouer les miettes de la nappe par la fenêtre, au-dessus du poulailler, elle a vu le pigeon
5700 moment où ma femme allait secouer les miettes de la nappe par la fenêtre, au-dessus du poulailler, elle a vu le pigeon et
5701 femme allait secouer les miettes de la nappe par la fenêtre, au-dessus du poulailler, elle a vu le pigeon et m’a appelé.
5702 ar la fenêtre, au-dessus du poulailler, elle a vu le pigeon et m’a appelé. — Il a vraiment l’air de vouloir dire quelque c
5703 lle a vu le pigeon et m’a appelé. — Il a vraiment l’ air de vouloir dire quelque chose ! Il est tourné du côté de la plaine
5704 vu le pigeon et m’a appelé. — Il a vraiment l’air de vouloir dire quelque chose ! Il est tourné du côté de la plaine. Sign
5705 oir dire quelque chose ! Il est tourné du côté de la plaine. Signe qu’il va nous arriver quelque chose par là ? Du côté de
5706 côté de Marseille… Et soudain je me suis souvenu de la conférence que je dois donner à Marseille dans quinze jours. Je ne
5707 té de Marseille… Et soudain je me suis souvenu de la conférence que je dois donner à Marseille dans quinze jours. Je ne vo
5708 à Marseille dans quinze jours. Je ne voulais pas la préparer avant le dernier jour. Est-ce que cela signifie qu’elle est
5709 tante que je ne croyais ? Qu’il y a quelque chose de sérieux à faire là-bas ? Je vais m’y mettre. 28 février 1935 Te
5710 y mettre. 28 février 1935 Terminé hier soir la rédaction de ma conférence. Ce matin le pigeon n’est pas revenu. C’es
5711 28 février 1935 Terminé hier soir la rédaction de ma conférence. Ce matin le pigeon n’est pas revenu. C’est évidemment
5712 hier soir la rédaction de ma conférence. Ce matin le pigeon n’est pas revenu. C’est évidemment absurde, cette histoire. Je
5713 enu. C’est évidemment absurde, cette histoire. Je le vois bien. Et en même temps, je vois que je mentirais si j’écrivais q
5714 que je n’y crois pas. Superstition ! Je m’étonne de ce que ce « reproche », que je me formule en vertu d’une habitude sco
5715 ue je me formule en vertu d’une habitude scolaire de critique, me touche si peu, ne trouble pas du tout ma bonne conscienc
5716 nne conscience. Au fond, je me sens assez heureux de cette découverte en moi d’une superstition réelle, capable de me fair
5717 me sens assez heureux de cette découverte en moi d’ une superstition réelle, capable de me faire agir ; ou plus exactement
5718 ouverte en moi d’une superstition réelle, capable de me faire agir ; ou plus exactement, je suis heureux de l’aveu que je
5719 faire agir ; ou plus exactement, je suis heureux de l’aveu que je viens de m’en faire. Comment ne l’ai-je pas fait plus t
5720 ire agir ; ou plus exactement, je suis heureux de l’ aveu que je viens de m’en faire. Comment ne l’ai-je pas fait plus tôt 
5721 de l’aveu que je viens de m’en faire. Comment ne l’ ai-je pas fait plus tôt ? Pour peu que je rappelle mes souvenirs, je r
5722 s précisément « superstitieuses ». En y regardant de près, il me semble que toute la trame de mes petites décisions quotid
5723 ». En y regardant de près, il me semble que toute la trame de mes petites décisions quotidiennes est faite de croyances sp
5724 egardant de près, il me semble que toute la trame de mes petites décisions quotidiennes est faite de croyances spontanées
5725 e de mes petites décisions quotidiennes est faite de croyances spontanées et absolues en des « raisons » qui n’en sont pas
5726 onvaincu beaucoup plus vite et beaucoup mieux que les autres. Tout ce que j’ai fait à cause d’un chiffre, à cause de la coï
5727 eux que les autres. Tout ce que j’ai fait à cause d’ un chiffre, à cause de la coïncidence d’un sentiment ou d’un pressenti
5728 ce que j’ai fait à cause d’un chiffre, à cause de la coïncidence d’un sentiment ou d’un pressentiment et d’un hasard tout
5729 t à cause d’un chiffre, à cause de la coïncidence d’ un sentiment ou d’un pressentiment et d’un hasard tout extérieur, à ca
5730 ffre, à cause de la coïncidence d’un sentiment ou d’ un pressentiment et d’un hasard tout extérieur, à cause d’un certain j
5731 ïncidence d’un sentiment ou d’un pressentiment et d’ un hasard tout extérieur, à cause d’un certain jeu que je poursuis, sa
5732 ssentiment et d’un hasard tout extérieur, à cause d’ un certain jeu que je poursuis, sans trop le savoir, avec bien plus de
5733 cause d’un certain jeu que je poursuis, sans trop le savoir, avec bien plus de vigilance que je n’en apporte à la défense
5734 je poursuis, sans trop le savoir, avec bien plus de vigilance que je n’en apporte à la défense de mes intérêts « objectif
5735 avec bien plus de vigilance que je n’en apporte à la défense de mes intérêts « objectifs »… Et ce jeu-là, je suis tellemen
5736 ts « objectifs »… Et ce jeu-là, je suis tellement le seul à en connaître les règles et les interdictions que je n’imagine
5737 jeu-là, je suis tellement le seul à en connaître les règles et les interdictions que je n’imagine pas pouvoir jamais m’en
5738 is tellement le seul à en connaître les règles et les interdictions que je n’imagine pas pouvoir jamais m’en « rendre compt
5739 , et surtout en français. On admet facilement que les Césars jettent les dés avant leurs grandes décisions, mais n’est-ce p
5740 nçais. On admet facilement que les Césars jettent les dés avant leurs grandes décisions, mais n’est-ce pas une étrangeté pl
5741 tidienne aux « signes », cette activité créatrice de Rubicons imaginaires ? Comme toujours, c’est une étrangeté, une singu
5742 ible qui m’introduit au général : je découvre, en la découvrant, les liens profonds qui m’unissent à ce peuple de paysans
5743 oduit au général : je découvre, en la découvrant, les liens profonds qui m’unissent à ce peuple de paysans et d’ouvriers, s
5744 nt, les liens profonds qui m’unissent à ce peuple de paysans et d’ouvriers, si délibérément superstitieux dans leur condui
5745 profonds qui m’unissent à ce peuple de paysans et d’ ouvriers, si délibérément superstitieux dans leur conduite et dans leu
5746 ur conduite et dans leurs opinions. On dit bien : l’ exception confirme la règle. Oui, mais il faut entendre le proverbe d’
5747 eurs opinions. On dit bien : l’exception confirme la règle. Oui, mais il faut entendre le proverbe d’une manière tout à fa
5748 ion confirme la règle. Oui, mais il faut entendre le proverbe d’une manière tout à fait précise : l’exception vécue, recon
5749 la règle. Oui, mais il faut entendre le proverbe d’ une manière tout à fait précise : l’exception vécue, reconnue, c’est c
5750 e le proverbe d’une manière tout à fait précise : l’ exception vécue, reconnue, c’est cela même qui nous fait découvrir not
5751 découvrir notre commune condition. Car, en effet, la condition commune, c’est de se sentir une exception, un type spécial,
5752 ition. Car, en effet, la condition commune, c’est de se sentir une exception, un type spécial, différent de tous les autre
5753 sentir une exception, un type spécial, différent de tous les autres… Et ce n’est guère qu’à l’instant où l’on découvre qu
5754 une exception, un type spécial, différent de tous les autres… Et ce n’est guère qu’à l’instant où l’on découvre que tous le
5755 s les autres… Et ce n’est guère qu’à l’instant où l’ on découvre que tous les autres en croient autant, que ces autres cess
5756 st guère qu’à l’instant où l’on découvre que tous les autres en croient autant, que ces autres cessent d’être une menace, u
5757 autres en croient autant, que ces autres cessent d’ être une menace, une masse abstraite, intimidante ou méprisable. Pour
5758 risable. Pour ne prendre qu’un seul exemple : que de tourments et de secrets désespoirs chez les adolescents troublés par
5759 prendre qu’un seul exemple : que de tourments et de secrets désespoirs chez les adolescents troublés par le désir, s’apai
5760  : que de tourments et de secrets désespoirs chez les adolescents troublés par le désir, s’apaisent tout d’un coup le jour
5761 rets désespoirs chez les adolescents troublés par le désir, s’apaisent tout d’un coup le jour où ils découvrent que leur é
5762 dolescents troublés par le désir, s’apaisent tout d’ un coup le jour où ils découvrent que leur état jugé par eux « excepti
5763 troublés par le désir, s’apaisent tout d’un coup le jour où ils découvrent que leur état jugé par eux « exceptionnel » — 
5764 leur état jugé par eux « exceptionnel » — et dont la honte alors les opprimait — est justement l’état de l’homme vraiment
5765 par eux « exceptionnel » — et dont la honte alors les opprimait — est justement l’état de l’homme vraiment homme, et le sig
5766 dont la honte alors les opprimait — est justement l’ état de l’homme vraiment homme, et le signe d’une accession à la condi
5767 honte alors les opprimait — est justement l’état de l’homme vraiment homme, et le signe d’une accession à la condition gé
5768 nte alors les opprimait — est justement l’état de l’ homme vraiment homme, et le signe d’une accession à la condition génér
5769 st justement l’état de l’homme vraiment homme, et le signe d’une accession à la condition générale ! Avouer ses superstiti
5770 ent l’état de l’homme vraiment homme, et le signe d’ une accession à la condition générale ! Avouer ses superstitions, ce s
5771 mme vraiment homme, et le signe d’une accession à la condition générale ! Avouer ses superstitions, ce serait avouer ce qu
5772 duel, de plus irréductible au général. Mais voilà l’ étonnant de l’aveu : c’est qu’il peut faire comprendre à d’autres, en
5773 us irréductible au général. Mais voilà l’étonnant de l’aveu : c’est qu’il peut faire comprendre à d’autres, en un éclair,
5774 irréductible au général. Mais voilà l’étonnant de l’ aveu : c’est qu’il peut faire comprendre à d’autres, en un éclair, que
5775 ible, et que chaque homme a ses aveux à faire. Et l’ on comprend ainsi, soudain, que l’on est un homme « comme les autres »
5776 eux à faire. Et l’on comprend ainsi, soudain, que l’ on est un homme « comme les autres » par cela même que l’on s’éprouve
5777 end ainsi, soudain, que l’on est un homme « comme les autres » par cela même que l’on s’éprouve absolument distinct de tous
5778 t un homme « comme les autres » par cela même que l’ on s’éprouve absolument distinct de tous les autres. 1er mars 1935
5779 cela même que l’on s’éprouve absolument distinct de tous les autres. 1er mars 1935 Si l’on craint d’ordinaire d’avo
5780 me que l’on s’éprouve absolument distinct de tous les autres. 1er mars 1935 Si l’on craint d’ordinaire d’avouer sa ré
5781 stinct de tous les autres. 1er mars 1935 Si l’ on craint d’ordinaire d’avouer sa réalité individuelle et ses supersti
5782 us les autres. 1er mars 1935 Si l’on craint d’ ordinaire d’avouer sa réalité individuelle et ses superstitions, c’est
5783 s. 1er mars 1935 Si l’on craint d’ordinaire d’ avouer sa réalité individuelle et ses superstitions, c’est sans doute
5784 c’est sans doute en vertu d’une prudence qui est le fondement même de toute « politique ». Et si j’avoue et légitime la r
5785 en vertu d’une prudence qui est le fondement même de toute « politique ». Et si j’avoue et légitime la réalité de mes supe
5786 de toute « politique ». Et si j’avoue et légitime la réalité de mes superstitions, il faut tout de suite que j’oppose à ce
5787 politique ». Et si j’avoue et légitime la réalité de mes superstitions, il faut tout de suite que j’oppose à cet aveu une
5788 repartie raisonnable. Il faut que je montre aussi les droits du général. Qu’est-ce que la politique, sinon le général en t
5789 ontre aussi les droits du général. Qu’est-ce que la politique, sinon le général en tant qu’il s’oppose au réel, lequel es
5790 ts du général. Qu’est-ce que la politique, sinon le général en tant qu’il s’oppose au réel, lequel est fait de nos monade
5791 l en tant qu’il s’oppose au réel, lequel est fait de nos monades superstitieuses ? Accorder libre cours à nos superstition
5792 logique sont notre vraie réalité, ce serait jeter la société dans l’anarchie la plus sanglante. La politique ne doit jamai
5793 re vraie réalité, ce serait jeter la société dans l’ anarchie la plus sanglante. La politique ne doit jamais partir de la r
5794 alité, ce serait jeter la société dans l’anarchie la plus sanglante. La politique ne doit jamais partir de la réalité irra
5795 ter la société dans l’anarchie la plus sanglante. La politique ne doit jamais partir de la réalité irrationnelle de l’homm
5796 lus sanglante. La politique ne doit jamais partir de la réalité irrationnelle de l’homme : d’ailleurs elle ne le pourrait
5797 sanglante. La politique ne doit jamais partir de la réalité irrationnelle de l’homme : d’ailleurs elle ne le pourrait pas
5798 ne doit jamais partir de la réalité irrationnelle de l’homme : d’ailleurs elle ne le pourrait pas. Ma loi vaut tout juste
5799 doit jamais partir de la réalité irrationnelle de l’ homme : d’ailleurs elle ne le pourrait pas. Ma loi vaut tout juste pou
5800 ité irrationnelle de l’homme : d’ailleurs elle ne le pourrait pas. Ma loi vaut tout juste pour moi. (Et s’il fallait tenir
5801 out juste pour moi. (Et s’il fallait tenir compte de toutes les bizarreries auxquelles les hommes s’attachent comme à leur
5802 pour moi. (Et s’il fallait tenir compte de toutes les bizarreries auxquelles les hommes s’attachent comme à leur bien le pl
5803 tenir compte de toutes les bizarreries auxquelles les hommes s’attachent comme à leur bien le plus précieux !) Au contraire
5804 xquelles les hommes s’attachent comme à leur bien le plus précieux !) Au contraire, la politique doit aller à l’encontre d
5805 mme à leur bien le plus précieux !) Au contraire, la politique doit aller à l’encontre de la réalité individuelle, et c’es
5806 u contraire, la politique doit aller à l’encontre de la réalité individuelle, et c’est pour elle la seule manière d’être e
5807 ontraire, la politique doit aller à l’encontre de la réalité individuelle, et c’est pour elle la seule manière d’être en v
5808 re de la réalité individuelle, et c’est pour elle la seule manière d’être en vérité « réaliste ». Je crains d’avoir créé c
5809 individuelle, et c’est pour elle la seule manière d’ être en vérité « réaliste ». Je crains d’avoir créé certain malentendu
5810 manière d’être en vérité « réaliste ». Je crains d’ avoir créé certain malentendu en soutenant à plusieurs reprises que la
5811 malentendu en soutenant à plusieurs reprises que la politique idéale devrait partir de la personne. Elle doit tenir compt
5812 s reprises que la politique idéale devrait partir de la personne. Elle doit tenir compte de la personne, et finalement fav
5813 eprises que la politique idéale devrait partir de la personne. Elle doit tenir compte de la personne, et finalement favori
5814 ait partir de la personne. Elle doit tenir compte de la personne, et finalement favoriser son développement, mais d’une ma
5815 partir de la personne. Elle doit tenir compte de la personne, et finalement favoriser son développement, mais d’une maniè
5816 , et finalement favoriser son développement, mais d’ une manière négative, dialectique, ou mieux encore : pédagogique. Il e
5817 ialectique, ou mieux encore : pédagogique. Il est de l’essence de toute saine politique de s’opposer à la personne, de lim
5818 ectique, ou mieux encore : pédagogique. Il est de l’ essence de toute saine politique de s’opposer à la personne, de limite
5819 u mieux encore : pédagogique. Il est de l’essence de toute saine politique de s’opposer à la personne, de limiter son expa
5820 que. Il est de l’essence de toute saine politique de s’opposer à la personne, de limiter son expansion, de combattre en dé
5821 l’essence de toute saine politique de s’opposer à la personne, de limiter son expansion, de combattre en définitive le rée
5822 toute saine politique de s’opposer à la personne, de limiter son expansion, de combattre en définitive le réel que nous in
5823 ’opposer à la personne, de limiter son expansion, de combattre en définitive le réel que nous incarnons. Toute politique e
5824 limiter son expansion, de combattre en définitive le réel que nous incarnons. Toute politique est normative, mais seulemen
5825 ns. Toute politique est normative, mais seulement de l’extérieur. Une politique saine ne saurait donc partir de la personn
5826 Toute politique est normative, mais seulement de l’ extérieur. Une politique saine ne saurait donc partir de la personne,
5827 rieur. Une politique saine ne saurait donc partir de la personne, mais au contraire de l’impersonnel, pour se diriger cont
5828 ur. Une politique saine ne saurait donc partir de la personne, mais au contraire de l’impersonnel, pour se diriger contre
5829 donc partir de la personne, mais au contraire de l’ impersonnel, pour se diriger contre la personne. C’est à ce prix qu’el
5830 ontraire de l’impersonnel, pour se diriger contre la personne. C’est à ce prix qu’elle assurera quelque équilibre et c’est
5831 emarques que je viens de formuler. Premier fait : l’ équilibre social doit être quelque chose de mouvant. Tout équilibre st
5832 fait : l’équilibre social doit être quelque chose de mouvant. Tout équilibre stable et sclérosé produirait immédiatement d
5833 mbre. Une telle stabilité prouverait en effet que les deux puissances contraires qu’il s’agissait de maîtriser — le singuli
5834 e les deux puissances contraires qu’il s’agissait de maîtriser — le singulier et le général — ont perdu l’une et l’autre l
5835 sances contraires qu’il s’agissait de maîtriser —  le singulier et le général — ont perdu l’une et l’autre leur dynamisme p
5836 s qu’il s’agissait de maîtriser — le singulier et le général — ont perdu l’une et l’autre leur dynamisme propre. Si l’État
5837 perdu l’une et l’autre leur dynamisme propre. Si l’ État ne freinait plus, si la personne ne cherchait plus à triompher de
5838 dynamisme propre. Si l’État ne freinait plus, si la personne ne cherchait plus à triompher de tout ce qui n’est pas elle,
5839 lus, si la personne ne cherchait plus à triompher de tout ce qui n’est pas elle, le simulacre d’équilibre que l’on constat
5840 t plus à triompher de tout ce qui n’est pas elle, le simulacre d’équilibre que l’on constaterait alors ne serait en fait q
5841 mpher de tout ce qui n’est pas elle, le simulacre d’ équilibre que l’on constaterait alors ne serait en fait que la limite
5842 qui n’est pas elle, le simulacre d’équilibre que l’ on constaterait alors ne serait en fait que la limite du pire désordre
5843 que l’on constaterait alors ne serait en fait que la limite du pire désordre, et c’est la mort. Cas purement idéal bien en
5844 en fait que la limite du pire désordre, et c’est la mort. Cas purement idéal bien entendu puisque l’histoire ne connaît p
5845 la mort. Cas purement idéal bien entendu puisque l’ histoire ne connaît pas d’arrêt. En réalité, sous le couvert d’un équi
5846 al bien entendu puisque l’histoire ne connaît pas d’ arrêt. En réalité, sous le couvert d’un équilibre apparemment stabilis
5847 histoire ne connaît pas d’arrêt. En réalité, sous le couvert d’un équilibre apparemment stabilisé, le désordre est toujour
5848 connaît pas d’arrêt. En réalité, sous le couvert d’ un équilibre apparemment stabilisé, le désordre est toujours à sens un
5849 le couvert d’un équilibre apparemment stabilisé, le désordre est toujours à sens unique : c’est la personne qui cesse de
5850 é, le désordre est toujours à sens unique : c’est la personne qui cesse de se défendre, c’est l’anarchie qui renonce à ses
5851 jours à sens unique : c’est la personne qui cesse de se défendre, c’est l’anarchie qui renonce à ses droits. Et si le cadr
5852 c’est la personne qui cesse de se défendre, c’est l’ anarchie qui renonce à ses droits. Et si le cadre de l’État paraît dem
5853 c’est l’anarchie qui renonce à ses droits. Et si le cadre de l’État paraît demeurer identique, la démoralisation grandiss
5854 anarchie qui renonce à ses droits. Et si le cadre de l’État paraît demeurer identique, la démoralisation grandissante révè
5855 rchie qui renonce à ses droits. Et si le cadre de l’ État paraît demeurer identique, la démoralisation grandissante révèle
5856 si le cadre de l’État paraît demeurer identique, la démoralisation grandissante révèle pourtant l’empiètement excessif du
5857 e, la démoralisation grandissante révèle pourtant l’ empiètement excessif du général dans la vie réelle. Telle est notre si
5858 e pourtant l’empiètement excessif du général dans la vie réelle. Telle est notre situation — celle du monde bourgeois capi
5859 ois capitaliste, mais aussi celle des dictatures, d’ une manière encore plus frappante. Certes, nos institutions n’ont guèr
5860 guère changé depuis un siècle, et c’est pourquoi l’ on s’imagine que l’équilibre s’est stabilisé. Au vrai, chacun peut voi
5861 s un siècle, et c’est pourquoi l’on s’imagine que l’ équilibre s’est stabilisé. Au vrai, chacun peut voir que l’homme d’auj
5862 re s’est stabilisé. Au vrai, chacun peut voir que l’ homme d’aujourd’hui se déshumanise rapidement parce qu’il cesse de se
5863 stabilisé. Au vrai, chacun peut voir que l’homme d’ aujourd’hui se déshumanise rapidement parce qu’il cesse de se croire d
5864 d’hui se déshumanise rapidement parce qu’il cesse de se croire des droits « irrationnels » et immédiats contre l’État. Le
5865 e des droits « irrationnels » et immédiats contre l’ État. Le sens de la révolte se perd. Il se sublime, ô ironie, en rousp
5866 oits « irrationnels » et immédiats contre l’État. Le sens de la révolte se perd. Il se sublime, ô ironie, en rouspétance,
5867 rrationnels » et immédiats contre l’État. Le sens de la révolte se perd. Il se sublime, ô ironie, en rouspétance, en criai
5868 tionnels » et immédiats contre l’État. Le sens de la révolte se perd. Il se sublime, ô ironie, en rouspétance, en criaille
5869 humeur. C’est cela que je nomme démoralisation à l’ abri d’un faux équilibre, — d’un équilibre sans tension. Ici intervien
5870 . C’est cela que je nomme démoralisation à l’abri d’ un faux équilibre, — d’un équilibre sans tension. Ici interviendra le
5871 me démoralisation à l’abri d’un faux équilibre, —  d’ un équilibre sans tension. Ici interviendra le second fait : l’équilib
5872 e sans tension. Ici interviendra le second fait : l’ équilibre social, pour rester sain, mouvant, tendu, doit être orienté
5873 doit être orienté constamment par un léger excès de la composante « personnelle ». Il doit en permanence se déplacer au p
5874 it être orienté constamment par un léger excès de la composante « personnelle ». Il doit en permanence se déplacer au prof
5875 des personnes. (Au profit des irréductibles, dans le sens du jeu le plus libre des superstitions que j’ai dites, et dont l
5876 (Au profit des irréductibles, dans le sens du jeu le plus libre des superstitions que j’ai dites, et dont l’éducation se f
5877 s libre des superstitions que j’ai dites, et dont l’ éducation se fait très lentement sous l’influence des résistances assi
5878 , et dont l’éducation se fait très lentement sous l’ influence des résistances assimilées, créatrices de disciplines.) Ains
5879 ’influence des résistances assimilées, créatrices de disciplines.) Ainsi le but final, le télos de toute politique, c’est
5880 ces assimilées, créatrices de disciplines.) Ainsi le but final, le télos de toute politique, c’est la suppression de l’Éta
5881 , créatrices de disciplines.) Ainsi le but final, le télos de toute politique, c’est la suppression de l’État, la libérati
5882 ces de disciplines.) Ainsi le but final, le télos de toute politique, c’est la suppression de l’État, la libération des pe
5883 le but final, le télos de toute politique, c’est la suppression de l’État, la libération des personnes au moment où leurs
5884 le télos de toute politique, c’est la suppression de l’État, la libération des personnes au moment où leurs disciplines se
5885 télos de toute politique, c’est la suppression de l’ État, la libération des personnes au moment où leurs disciplines se se
5886 toute politique, c’est la suppression de l’État, la libération des personnes au moment où leurs disciplines se seront enf
5887 mps que j’accorde d’ailleurs aussi lointain qu’on le voudra.) Ces deux faits définis, revenons à la superstition du peuple
5888 on le voudra.) Ces deux faits définis, revenons à la superstition du peuple. Je l’approuve et je la partage en fait le plu
5889 définis, revenons à la superstition du peuple. Je l’ approuve et je la partage en fait le plus souvent, quand elle exprime
5890 à la superstition du peuple. Je l’approuve et je la partage en fait le plus souvent, quand elle exprime une réalité senti
5891 du peuple. Je l’approuve et je la partage en fait le plus souvent, quand elle exprime une réalité sentimentale, mystique o
5892 saurait se traduire en termes de raison. Mais je la tiens pour néfaste quand elle sort du domaine personnel et déborde da
5893 nd elle sort du domaine personnel et déborde dans la politique. On devine peut-être pourquoi. C’est qu’elle forme la compo
5894 On devine peut-être pourquoi. C’est qu’elle forme la composante proprement antipolitique de tout équilibre tendu, mouvant,
5895 elle forme la composante proprement antipolitique de tout équilibre tendu, mouvant, réellement progressif. Si, par l’effet
5896 re tendu, mouvant, réellement progressif. Si, par l’ effet d’une perversion, elle se met à jouer au profit de la politique
5897 , mouvant, réellement progressif. Si, par l’effet d’ une perversion, elle se met à jouer au profit de la politique et des d
5898 t d’une perversion, elle se met à jouer au profit de la politique et des doctrines d’État qui doivent justement la combatt
5899 ’une perversion, elle se met à jouer au profit de la politique et des doctrines d’État qui doivent justement la combattre,
5900 jouer au profit de la politique et des doctrines d’ État qui doivent justement la combattre, le désordre s’installe et gra
5901 que et des doctrines d’État qui doivent justement la combattre, le désordre s’installe et grandit. Dans notre cas, l’État
5902 trines d’État qui doivent justement la combattre, le désordre s’installe et grandit. Dans notre cas, l’État devient totali
5903 e désordre s’installe et grandit. Dans notre cas, l’ État devient totalitaire. « Là où l’homme veut être total, l’État ne s
5904 ns notre cas, l’État devient totalitaire. « Là où l’ homme veut être total, l’État ne sera jamais totalitaire. » Or l’État,
5905 ent totalitaire. « Là où l’homme veut être total, l’ État ne sera jamais totalitaire. » Or l’État, c’est un fait patent, de
5906 re total, l’État ne sera jamais totalitaire. » Or l’ État, c’est un fait patent, devient partout de plus en plus totalitair
5907 rtout de plus en plus totalitaire. C’est donc que l’ homme se défend de moins en moins. Ses « superstitions » personnelles
5908 lus totalitaire. C’est donc que l’homme se défend de moins en moins. Ses « superstitions » personnelles (son quant-à-soi)
5909 stitions » personnelles (son quant-à-soi) cessent d’ agir et de s’efforcer contre les lois qui les limitaient normalement.
5910 personnelles (son quant-à-soi) cessent d’agir et de s’efforcer contre les lois qui les limitaient normalement. L’homme ce
5911 ant-à-soi) cessent d’agir et de s’efforcer contre les lois qui les limitaient normalement. L’homme cessant de croire à sa l
5912 ssent d’agir et de s’efforcer contre les lois qui les limitaient normalement. L’homme cessant de croire à sa loi — à ses su
5913 r contre les lois qui les limitaient normalement. L’ homme cessant de croire à sa loi — à ses superstitions incomparables —
5914 s qui les limitaient normalement. L’homme cessant de croire à sa loi — à ses superstitions incomparables — se met à croire
5915 ses superstitions incomparables — se met à croire de la même manière aux lois et aux pouvoirs qu’il aurait dû combattre. (
5916 superstitions incomparables — se met à croire de la même manière aux lois et aux pouvoirs qu’il aurait dû combattre. (Vol
5917 voir des masses, fatalités économiques, évolution de l’Histoire, mythes de la gauche et de la droite, divinité du Führer,
5918 r des masses, fatalités économiques, évolution de l’ Histoire, mythes de la gauche et de la droite, divinité du Führer, omn
5919 ités économiques, évolution de l’Histoire, mythes de la gauche et de la droite, divinité du Führer, omniscience du Duce, e
5920 s économiques, évolution de l’Histoire, mythes de la gauche et de la droite, divinité du Führer, omniscience du Duce, etc.
5921 , évolution de l’Histoire, mythes de la gauche et de la droite, divinité du Führer, omniscience du Duce, etc.) Toutes ces
5922 volution de l’Histoire, mythes de la gauche et de la droite, divinité du Führer, omniscience du Duce, etc.) Toutes ces pui
5923 etc.) Toutes ces puissances mythiques deviennent l’ objet anormal de ses croyances spontanées et immédiates. D’où l’empire
5924 s puissances mythiques deviennent l’objet anormal de ses croyances spontanées et immédiates. D’où l’empire monstrueux qu’e
5925 normal de ses croyances spontanées et immédiates. D’ où l’empire monstrueux qu’elles prennent sur les esprits, et la réalit
5926 l de ses croyances spontanées et immédiates. D’où l’ empire monstrueux qu’elles prennent sur les esprits, et la réalité de
5927 s. D’où l’empire monstrueux qu’elles prennent sur les esprits, et la réalité de cauchemar qu’elles affectent, — dont les af
5928 monstrueux qu’elles prennent sur les esprits, et la réalité de cauchemar qu’elles affectent, — dont les affecte notre dém
5929 qu’elles prennent sur les esprits, et la réalité de cauchemar qu’elles affectent, — dont les affecte notre démission. Et
5930 a réalité de cauchemar qu’elles affectent, — dont les affecte notre démission. Et c’est ainsi d’un refoulement, puis d’un t
5931  dont les affecte notre démission. Et c’est ainsi d’ un refoulement, puis d’un transfert fatal de nos superstitions les plu
5932 démission. Et c’est ainsi d’un refoulement, puis d’ un transfert fatal de nos superstitions les plus valables, que naissen
5933 ainsi d’un refoulement, puis d’un transfert fatal de nos superstitions les plus valables, que naissent par exemple la mena
5934 t, puis d’un transfert fatal de nos superstitions les plus valables, que naissent par exemple la menace fasciste et l’entho
5935 tions les plus valables, que naissent par exemple la menace fasciste et l’enthousiasme communiste. La plupart des fameuses
5936 s, que naissent par exemple la menace fasciste et l’ enthousiasme communiste. La plupart des fameuses « lois » économiques
5937 uvertes » ne sont, au sens freudien du terme, que les phantasmes de notre peur de vivre. On les ramènerait aisément à ce « 
5938 nt, au sens freudien du terme, que les phantasmes de notre peur de vivre. On les ramènerait aisément à ce « complexe de ca
5939 eudien du terme, que les phantasmes de notre peur de vivre. On les ramènerait aisément à ce « complexe de castration » qui
5940 me, que les phantasmes de notre peur de vivre. On les ramènerait aisément à ce « complexe de castration » qui se noue au mo
5941 vivre. On les ramènerait aisément à ce « complexe de castration » qui se noue au moment précis où l’agressivité normale de
5942 e de castration » qui se noue au moment précis où l’ agressivité normale de la personne se retourne contre elle, au profit
5943 se noue au moment précis où l’agressivité normale de la personne se retourne contre elle, au profit des tyrannies imperson
5944 noue au moment précis où l’agressivité normale de la personne se retourne contre elle, au profit des tyrannies impersonnel
5945 le, au profit des tyrannies impersonnelles. C’est l’ instant où l’homme dit : « Que voulez-vous que j’y fasse ? » ou encore
5946 des tyrannies impersonnelles. C’est l’instant où l’ homme dit : « Que voulez-vous que j’y fasse ? » ou encore : « Ils sont
5947 lez-vous que j’y fasse ? » ou encore : « Ils sont les plus forts. » Tel est le « moment » de l’angoisse de ce temps. L’homm
5948 ou encore : « Ils sont les plus forts. » Tel est le « moment » de l’angoisse de ce temps. L’homme sain dit : « Voilà ce q
5949  Ils sont les plus forts. » Tel est le « moment » de l’angoisse de ce temps. L’homme sain dit : « Voilà ce que je ferai pa
5950 s sont les plus forts. » Tel est le « moment » de l’ angoisse de ce temps. L’homme sain dit : « Voilà ce que je ferai parce
5951 plus forts. » Tel est le « moment » de l’angoisse de ce temps. L’homme sain dit : « Voilà ce que je ferai parce qu’il le f
5952 Tel est le « moment » de l’angoisse de ce temps. L’ homme sain dit : « Voilà ce que je ferai parce qu’il le faut. Et que v
5953 me sain dit : « Voilà ce que je ferai parce qu’il le faut. Et que voulez-vous qu’ils y fassent ? » Mars 1935 (à Marseil
5954 ? » Mars 1935 (à Marseille) J’ai parlé à R… de mon projet de publier sous le titre de Journal d’un intellectuel en
5955 35 (à Marseille) J’ai parlé à R… de mon projet de publier sous le titre de Journal d’un intellectuel en chômage les p
5956 J’ai parlé à R… de mon projet de publier sous le titre de Journal d’un intellectuel en chômage les pages que je suis
5957 parlé à R… de mon projet de publier sous le titre de Journal d’un intellectuel en chômage les pages que je suis en train
5958 e mon projet de publier sous le titre de Journal d’ un intellectuel en chômage les pages que je suis en train de rédiger
5959 e titre de Journal d’un intellectuel en chômage les pages que je suis en train de rédiger à temps perdu. Il est assez sce
5960 rédiger à temps perdu. Il est assez sceptique sur le résultat de cette entreprise. Pour des raisons que je devine plus sen
5961 mps perdu. Il est assez sceptique sur le résultat de cette entreprise. Pour des raisons que je devine plus sentimentales q
5962 des raisons que je devine plus sentimentales que les arguments qu’il m’oppose… — Tout ce que le lecteur demande, c’est qu’
5963 s que les arguments qu’il m’oppose… — Tout ce que le lecteur demande, c’est qu’on lui raconte une histoire, me dit R. — Ma
5964 , me dit R. — Mais si je raconte mon histoire ? —  Le lecteur veut des histoires inventées. — Mais si je lui dis que j’inve
5965 vous met en question, cela vous invite à comparer les situations… À cause de la solidarité humaine, probablement… — (Voilà
5966 vous invite à comparer les situations… À cause de la solidarité humaine, probablement… — (Voilà pourquoi l’on trouvera san
5967 lidarité humaine, probablement… — (Voilà pourquoi l’ on trouvera sans doute indiscret, de ma part, ce journal. Un tel jugem
5968 oilà pourquoi l’on trouvera sans doute indiscret, de ma part, ce journal. Un tel jugement ne serait pas très franc, d’aill
5969 el jugement ne serait pas très franc, d’ailleurs. L’ indiscrétion, en soi, ne gêne pas beaucoup de gens, au contraire. Ce q
5970 de gens, au contraire. Ce qui gêne, c’est plutôt la vérité telle quelle, surtout la vérité sur une situation matérielle.
5971 êne, c’est plutôt la vérité telle quelle, surtout la vérité sur une situation matérielle. Il est entendu qu’on ne doit pas
5972 térielle. Il est entendu qu’on ne doit pas parler de « questions matérielles » dans une société distinguée. Vous me direz
5973 istinguée. Vous me direz qu’on ne parle guère que de cela. Oui, mais d’une façon générale, non pas personnelle. Seulement,
5974 direz qu’on ne parle guère que de cela. Oui, mais d’ une façon générale, non pas personnelle. Seulement, il se trouve que m
5975 nt, il se trouve que mon propos, précisément, est de montrer, entre autres, la décadence de ce tabou. Je trouve moins indi
5976 ropos, précisément, est de montrer, entre autres, la décadence de ce tabou. Je trouve moins indiscret de parler en public
5977 ément, est de montrer, entre autres, la décadence de ce tabou. Je trouve moins indiscret de parler en public de ma pauvret
5978 décadence de ce tabou. Je trouve moins indiscret de parler en public de ma pauvreté — qui ne me gêne pas moralement — moi
5979 ou. Je trouve moins indiscret de parler en public de ma pauvreté — qui ne me gêne pas moralement — moins indiscret de parl
5980 — qui ne me gêne pas moralement — moins indiscret de parler d’argent que de parler, comme tant d’autres, de mes amours, en
5981 e gêne pas moralement — moins indiscret de parler d’ argent que de parler, comme tant d’autres, de mes amours, en donnant t
5982 ralement — moins indiscret de parler d’argent que de parler, comme tant d’autres, de mes amours, en donnant toutes les pré
5983 rler d’argent que de parler, comme tant d’autres, de mes amours, en donnant toutes les précisions qu’un collégien puisse d
5984 e tant d’autres, de mes amours, en donnant toutes les précisions qu’un collégien puisse désirer.) R. me disait aussi : En s
5985 ous n’êtes pas un vrai chômeur, puisque vous avez la possibilité de travailler. — Je me suis fait moi-même cette objection
5986 un vrai chômeur, puisque vous avez la possibilité de travailler. — Je me suis fait moi-même cette objection15. Il est clai
5987 15. Il est clair qu’un intellectuel aura toujours la possibilité de travailler, pour autant que son vrai travail est de pe
5988 r qu’un intellectuel aura toujours la possibilité de travailler, pour autant que son vrai travail est de penser. Mais je l
5989 travailler, pour autant que son vrai travail est de penser. Mais je l’appelle chômeur, faute d’autre terme, s’il n’a plus
5990 utant que son vrai travail est de penser. Mais je l’ appelle chômeur, faute d’autre terme, s’il n’a plus la possibilité de
5991 l est de penser. Mais je l’appelle chômeur, faute d’ autre terme, s’il n’a plus la possibilité de s’assurer un gagne-pain r
5992 pelle chômeur, faute d’autre terme, s’il n’a plus la possibilité de s’assurer un gagne-pain régulier par son travail, s’il
5993 faute d’autre terme, s’il n’a plus la possibilité de s’assurer un gagne-pain régulier par son travail, s’il n’a plus d’emp
5994 agne-pain régulier par son travail, s’il n’a plus d’ emploi, et ne sait plus de quoi sera fait le lendemain. — Admettez que
5995 travail, s’il n’a plus d’emploi, et ne sait plus de quoi sera fait le lendemain. — Admettez que cela ne vous empêche pas
5996 plus d’emploi, et ne sait plus de quoi sera fait le lendemain. — Admettez que cela ne vous empêche pas de vivre assez bie
5997 endemain. — Admettez que cela ne vous empêche pas de vivre assez bien, à votre idée. Vous avez l’air très satisfait de vot
5998 ien, à votre idée. Vous avez l’air très satisfait de votre situation. Ce n’est fichtre pas le cas des vrais chômeurs ! — A
5999 atisfait de votre situation. Ce n’est fichtre pas le cas des vrais chômeurs ! — Ah ! c’est vrai, je suis bien content, mal
6000 s pas du tout à être un « vrai chômeur », je vous l’ assure ! D’ailleurs j’ai déjà dit que cela me serait pratiquement impo
6001 e sans ressources ? Mais d’autre part, est-ce que le fait que je suis heureux suffit à me nourrir et à me vêtir ? Vous n’a
6002 nourrir et à me vêtir ? Vous n’avez qu’à regarder la frange de mon pantalon. Ce n’est pas avec ça que je pourrais faire un
6003 à me vêtir ? Vous n’avez qu’à regarder la frange de mon pantalon. Ce n’est pas avec ça que je pourrais faire une carrière
6004 s avec ça que je pourrais faire une carrière dans le monde, à supposer que l’envie m’en prenne. Tout ce que je compte dire
6005 faire une carrière dans le monde, à supposer que l’ envie m’en prenne. Tout ce que je compte dire dans mon journal, c’est
6006 s mon journal, c’est qu’on peut être très content d’ un sort matériel très médiocre. Ce n’est pas nouveau. Et il faut bien
6007 ssi romantique et excitant que mon titre pourrait le faire croire. L’intéressant, à mon point de vue, c’est de montrer une
6008 excitant que mon titre pourrait le faire croire. L’ intéressant, à mon point de vue, c’est de montrer une fois que c’est v
6009 croire. L’intéressant, à mon point de vue, c’est de montrer une fois que c’est vrai, et de montrer comment c’est vrai, da
6010 vue, c’est de montrer une fois que c’est vrai, et de montrer comment c’est vrai, dans le détail… ⁂ Cette conversation avec
6011 ’est vrai, et de montrer comment c’est vrai, dans le détail… ⁂ Cette conversation avec R. m’a rendu attentif à un fait qui
6012 n fait qui m’apparaît soudain fondamental : c’est l’ affectivité quasi insupportable qui s’attache aujourd’hui à l’argent,
6013 é quasi insupportable qui s’attache aujourd’hui à l’ argent, et qui se mêle en particulier à tout échange d’idées sur la ri
6014 ent, et qui se mêle en particulier à tout échange d’ idées sur la richesse, la pauvreté ou le chômage. Mélange extraordinai
6015 se mêle en particulier à tout échange d’idées sur la richesse, la pauvreté ou le chômage. Mélange extraordinairement irrit
6016 rticulier à tout échange d’idées sur la richesse, la pauvreté ou le chômage. Mélange extraordinairement irritable de mauva
6017 t échange d’idées sur la richesse, la pauvreté ou le chômage. Mélange extraordinairement irritable de mauvaise conscience,
6018 le chômage. Mélange extraordinairement irritable de mauvaise conscience, de désir, de peur, de préjugés, de revendication
6019 raordinairement irritable de mauvaise conscience, de désir, de peur, de préjugés, de revendications secrètes, de jalousie,
6020 ement irritable de mauvaise conscience, de désir, de peur, de préjugés, de revendications secrètes, de jalousie, de snobis
6021 itable de mauvaise conscience, de désir, de peur, de préjugés, de revendications secrètes, de jalousie, de snobisme antibo
6022 vaise conscience, de désir, de peur, de préjugés, de revendications secrètes, de jalousie, de snobisme antibourgeois ou pr
6023 de peur, de préjugés, de revendications secrètes, de jalousie, de snobisme antibourgeois ou prolétarien, de méfiances poli
6024 réjugés, de revendications secrètes, de jalousie, de snobisme antibourgeois ou prolétarien, de méfiances politiques, d’arr
6025 lousie, de snobisme antibourgeois ou prolétarien, de méfiances politiques, d’arrière-sentiments religieux, de rancunes, de
6026 ourgeois ou prolétarien, de méfiances politiques, d’ arrière-sentiments religieux, de rancunes, de souvenirs… On ne peut gu
6027 ances politiques, d’arrière-sentiments religieux, de rancunes, de souvenirs… On ne peut guère imaginer d’imbroglio passion
6028 ues, d’arrière-sentiments religieux, de rancunes, de souvenirs… On ne peut guère imaginer d’imbroglio passionnel plus idéa
6029 rancunes, de souvenirs… On ne peut guère imaginer d’ imbroglio passionnel plus idéalement favorable à l’apparition de délir
6030 ’imbroglio passionnel plus idéalement favorable à l’ apparition de délires subits de la pensée ou des sentiments. Aigreur e
6031 ssionnel plus idéalement favorable à l’apparition de délires subits de la pensée ou des sentiments. Aigreur et nervosité q
6032 lement favorable à l’apparition de délires subits de la pensée ou des sentiments. Aigreur et nervosité qui révèlent surtou
6033 ent favorable à l’apparition de délires subits de la pensée ou des sentiments. Aigreur et nervosité qui révèlent surtout u
6034 ité qui révèlent surtout un refoulement séculaire de ces questions. Plusieurs générations de bourgeoisie, et la crise de c
6035 séculaire de ces questions. Plusieurs générations de bourgeoisie, et la crise de cette bourgeoisie, ont accouché d’un des
6036 estions. Plusieurs générations de bourgeoisie, et la crise de cette bourgeoisie, ont accouché d’un des plus beaux complexe
6037 Plusieurs générations de bourgeoisie, et la crise de cette bourgeoisie, ont accouché d’un des plus beaux complexes que le
6038 e, et la crise de cette bourgeoisie, ont accouché d’ un des plus beaux complexes que le diable ait jamais pu concevoir pour
6039 e, ont accouché d’un des plus beaux complexes que le diable ait jamais pu concevoir pour dresser les humains les uns contr
6040 ue le diable ait jamais pu concevoir pour dresser les humains les uns contre les autres. Et qui ou quoi pourrait nous en gu
6041 ait jamais pu concevoir pour dresser les humains les uns contre les autres. Et qui ou quoi pourrait nous en guérir ? — Com
6042 concevoir pour dresser les humains les uns contre les autres. Et qui ou quoi pourrait nous en guérir ? — Commençons par nou
6043 uer. Passons outre à nos vieilles pudeurs : c’est le début de la cure. Ensuite il faudra essayer de réviser nos préjugés e
6044 ons outre à nos vieilles pudeurs : c’est le début de la cure. Ensuite il faudra essayer de réviser nos préjugés en fonctio
6045 outre à nos vieilles pudeurs : c’est le début de la cure. Ensuite il faudra essayer de réviser nos préjugés en fonction d
6046 st le début de la cure. Ensuite il faudra essayer de réviser nos préjugés en fonction du vrai but de notre vie, de nous re
6047 r de réviser nos préjugés en fonction du vrai but de notre vie, de nous refaire une hiérarchie éthique, et de rendre ainsi
6048 os préjugés en fonction du vrai but de notre vie, de nous refaire une hiérarchie éthique, et de rendre ainsi à l’argent so
6049 e vie, de nous refaire une hiérarchie éthique, et de rendre ainsi à l’argent son rôle mineur de moyen, d’impur et simple m
6050 aire une hiérarchie éthique, et de rendre ainsi à l’ argent son rôle mineur de moyen, d’impur et simple moyen… 3-4 mars
6051 ue, et de rendre ainsi à l’argent son rôle mineur de moyen, d’impur et simple moyen… 3-4 mars 1935 Deux jours au sol
6052 rendre ainsi à l’argent son rôle mineur de moyen, d’ impur et simple moyen… 3-4 mars 1935 Deux jours au soleil, à Cas
6053 3-4 mars 1935 Deux jours au soleil, à Cassis. Le village vit tout doucement, d’une vie enfantine. Point de touristes d
6054 soleil, à Cassis. Le village vit tout doucement, d’ une vie enfantine. Point de touristes dans les ruelles jaunes, ni d’au
6055 ge vit tout doucement, d’une vie enfantine. Point de touristes dans les ruelles jaunes, ni d’autos sur le quai. Il y a prè
6056 ent, d’une vie enfantine. Point de touristes dans les ruelles jaunes, ni d’autos sur le quai. Il y a près de Cassis une pet
6057 e. Point de touristes dans les ruelles jaunes, ni d’ autos sur le quai. Il y a près de Cassis une petite anse qui est pour
6058 touristes dans les ruelles jaunes, ni d’autos sur le quai. Il y a près de Cassis une petite anse qui est pour moi le lieu
6059 a près de Cassis une petite anse qui est pour moi le lieu du monde le plus pur. Une transparence vert bleu sur des caillou
6060 une petite anse qui est pour moi le lieu du monde le plus pur. Une transparence vert bleu sur des cailloux ronds où le pie
6061 transparence vert bleu sur des cailloux ronds où le pied enfonce, entre deux rochers et le ciel. J’y reviens chaque année
6062 x ronds où le pied enfonce, entre deux rochers et le ciel. J’y reviens chaque année. Comme par hasard… 8 mars 1935 (de
6063 s chaque année. Comme par hasard… 8 mars 1935 ( de retour à A…) Contact avec le public. — Dans le courrier qui est a
6064 8 mars 1935 (de retour à A…) Contact avec le public. — Dans le courrier qui est arrivé en mon absence, deux nouvel
6065 e retour à A…) Contact avec le public. — Dans le courrier qui est arrivé en mon absence, deux nouvelles demandes de « 
6066 st arrivé en mon absence, deux nouvelles demandes de « causeries » : l’une à un Congrès d’instituteurs, l’autre à un cercl
6067 es demandes de « causeries » : l’une à un Congrès d’ instituteurs, l’autre à un cercle d’études sociales. Les instituteurs
6068 à un Congrès d’instituteurs, l’autre à un cercle d’ études sociales. Les instituteurs voudraient que je leur parle de l’éd
6069 tituteurs, l’autre à un cercle d’études sociales. Les instituteurs voudraient que je leur parle de l’éducation de la person
6070 es. Les instituteurs voudraient que je leur parle de l’éducation de la personnalité ; le cercle social, du mouvement perso
6071 Les instituteurs voudraient que je leur parle de l’ éducation de la personnalité ; le cercle social, du mouvement personna
6072 teurs voudraient que je leur parle de l’éducation de la personnalité ; le cercle social, du mouvement personnaliste. J’ira
6073 rs voudraient que je leur parle de l’éducation de la personnalité ; le cercle social, du mouvement personnaliste. J’irai.
6074 je leur parle de l’éducation de la personnalité ; le cercle social, du mouvement personnaliste. J’irai. Je me fais une règ
6075 ement personnaliste. J’irai. Je me fais une règle d’ accepter toutes ces invitations. Depuis deux ans, j’ai parlé devant le
6076 s invitations. Depuis deux ans, j’ai parlé devant les auditoires les plus hétéroclites : congrès d’étudiants, cours ruraux,
6077 Depuis deux ans, j’ai parlé devant les auditoires les plus hétéroclites : congrès d’étudiants, cours ruraux, « journées soc
6078 nt les auditoires les plus hétéroclites : congrès d’ étudiants, cours ruraux, « journées sociales », amateurs de littératur
6079 ts, cours ruraux, « journées sociales », amateurs de littérature, philosophes, paysans, cercles d’hommes, groupant des ouv
6080 urs de littérature, philosophes, paysans, cercles d’ hommes, groupant des ouvriers et des bourgeois… J’ai parlé en plein ai
6081 s et des bourgeois… J’ai parlé en plein air, dans de grandes salles publiques, dans une cuisine de paysans, dans un temple
6082 ans de grandes salles publiques, dans une cuisine de paysans, dans un temple, dans un café, dans une salle d’Université…
6083 ans, dans un temple, dans un café, dans une salle d’ Université… Cui bono ? À qui le bénéfice ? À moi d’abord, très certai
6084 é, dans une salle d’Université… Cui bono ? À qui le bénéfice ? À moi d’abord, très certainement. C’est une joie qui vaut
6085 , très certainement. C’est une joie qui vaut bien les ennuis du voyage, le temps perdu et les fatigues, bien qu’elles parai
6086 ’est une joie qui vaut bien les ennuis du voyage, le temps perdu et les fatigues, bien qu’elles paraissent souvent vaines,
6087 vaut bien les ennuis du voyage, le temps perdu et les fatigues, bien qu’elles paraissent souvent vaines, que la joie de voi
6088 ues, bien qu’elles paraissent souvent vaines, que la joie de voir son public, de s’entretenir avec ces hommes et ces femme
6089 n qu’elles paraissent souvent vaines, que la joie de voir son public, de s’entretenir avec ces hommes et ces femmes pour q
6090 t souvent vaines, que la joie de voir son public, de s’entretenir avec ces hommes et ces femmes pour qui l’on écrivait san
6091 entretenir avec ces hommes et ces femmes pour qui l’ on écrivait sans le savoir. Découverte des diversités merveilleuses qu
6092 hommes et ces femmes pour qui l’on écrivait sans le savoir. Découverte des diversités merveilleuses que proposent ces vis
6093 n amicale et directe. Je vois cette abstraction : le Public, s’évanouir et renaître, incarnée à chaque fois dans une seule
6094 e figure précise, qui porte un nom, des vêtements d’ une certaine sorte, etc. Peu à peu, je découvre que le public, c’est u
6095 e certaine sorte, etc. Peu à peu, je découvre que le public, c’est une série d’hommes et de femmes isolés, qui ont chacun
6096 à peu, je découvre que le public, c’est une série d’ hommes et de femmes isolés, qui ont chacun leurs raisons très concrète
6097 couvre que le public, c’est une série d’hommes et de femmes isolés, qui ont chacun leurs raisons très concrètes et singuli
6098 hacun leurs raisons très concrètes et singulières de lire ce qu’un autre a écrit, d’écouter ce qu’un autre leur dit. Quand
6099 es et singulières de lire ce qu’un autre a écrit, d’ écouter ce qu’un autre leur dit. Quand un lecteur vous écrit, il s’exp
6100 ur dit. Quand un lecteur vous écrit, il s’exprime le plus souvent dans un langage conventionnel qu’il croit de mise, s’adr
6101 souvent dans un langage conventionnel qu’il croit de mise, s’adressant à un écrivain. Ou bien il se répand en confidences
6102 vous pose des questions, celui qui vous attend à la sortie, et ne sait trop comment vous aborder, celui qui vous entraîne
6103 sa chambre ou au café, celui-là peut vous révéler la vraie raison d’une communion entre deux hommes : c’est toujours une r
6104 café, celui-là peut vous révéler la vraie raison d’ une communion entre deux hommes : c’est toujours une raison unique, qu
6105 sens que dans cette rencontre effective. Ce sont de telles rencontres que je cherche, quand je vais parler dans ces cercl
6106 herche, quand je vais parler dans ces cercles, où l’ on se trouve soi-même à portée de l’auditeur, où l’on se voit naturell
6107 ces cercles, où l’on se trouve soi-même à portée de l’auditeur, où l’on se voit naturellement contraint, ne fût-ce que pa
6108 s cercles, où l’on se trouve soi-même à portée de l’ auditeur, où l’on se voit naturellement contraint, ne fût-ce que par l
6109 ’on se trouve soi-même à portée de l’auditeur, où l’ on se voit naturellement contraint, ne fût-ce que par la proximité mat
6110 e voit naturellement contraint, ne fût-ce que par la proximité matérielle16 de se mettre moralement à la portée de ces esp
6111 aint, ne fût-ce que par la proximité matérielle16 de se mettre moralement à la portée de ces esprits, visibles et lisibles
6112 proximité matérielle16 de se mettre moralement à la portée de ces esprits, visibles et lisibles sur ces visages. Presque
6113 matérielle16 de se mettre moralement à la portée de ces esprits, visibles et lisibles sur ces visages. Presque nécessaire
6114 lisibles sur ces visages. Presque nécessairement l’ entretien institué dans la salle se prolonge en conversations pendant
6115 Presque nécessairement l’entretien institué dans la salle se prolonge en conversations pendant qu’on remet son pardessus
6116 met son pardessus ou qu’on rassemble ses papiers. L’ auditeur a eu le temps de se familiariser avec l’orateur, dont il conn
6117 s ou qu’on rassemble ses papiers. L’auditeur a eu le temps de se familiariser avec l’orateur, dont il connaissait peut-êtr
6118 n rassemble ses papiers. L’auditeur a eu le temps de se familiariser avec l’orateur, dont il connaissait peut-être déjà la
6119 L’auditeur a eu le temps de se familiariser avec l’ orateur, dont il connaissait peut-être déjà la pensée et qu’il vient d
6120 vec l’orateur, dont il connaissait peut-être déjà la pensée et qu’il vient de voir de près une heure durant. Il a pu corri
6121 t peut-être déjà la pensée et qu’il vient de voir de près une heure durant. Il a pu corriger ses préjugés. Et la première
6122 iger ses préjugés. Et la première rencontre, sous l’ auvent du local que l’on quitte, est en réalité la suite de quelque ch
6123 la première rencontre, sous l’auvent du local que l’ on quitte, est en réalité la suite de quelque chose ; le contact s’éta
6124 l’auvent du local que l’on quitte, est en réalité la suite de quelque chose ; le contact s’établit normalement, sans surpr
6125 du local que l’on quitte, est en réalité la suite de quelque chose ; le contact s’établit normalement, sans surprises et s
6126 uitte, est en réalité la suite de quelque chose ; le contact s’établit normalement, sans surprises et sans illusion. Ce n’
6127 re homme dans sa situation concrète et ses habits de tous les jours, sa maladresse et son étrangeté. Alors seulement quelq
6128 dans sa situation concrète et ses habits de tous les jours, sa maladresse et son étrangeté. Alors seulement quelque chose
6129 rité. Alors seulement, ma pensée trouve son point d’ attache, découvre sa mesure, sa force ou sa faiblesse, touche à son te
6130 sa force ou sa faiblesse, touche à son terme dans le cœur d’un homme. Je dois à ces rencontres d’avoir pressenti quelquefo
6131 ou sa faiblesse, touche à son terme dans le cœur d’ un homme. Je dois à ces rencontres d’avoir pressenti quelquefois — ass
6132 dans le cœur d’un homme. Je dois à ces rencontres d’ avoir pressenti quelquefois — assez pour en garder une inquiétude cons
6133 en garder une inquiétude constante — ce qu’il y a d’ inhumain dans la plupart de nos habiletés littéraires, et au contraire
6134 biletés littéraires, et au contraire ce qu’il y a d’ humain dans certaines imprudences naïves — ce qu’il y a d’inutile dans
6135 dans certaines imprudences naïves — ce qu’il y a d’ inutile dans la plupart de nos précautions oratoires, logiques ou mond
6136 giques ou mondaines, et ce qu’il y a au contraire d’ efficace dans l’affirmation pure et simple de thèses qui paraîtraient
6137 nes, et ce qu’il y a au contraire d’efficace dans l’ affirmation pure et simple de thèses qui paraîtraient très difficiles
6138 aire d’efficace dans l’affirmation pure et simple de thèses qui paraîtraient très difficiles au jugement du clerc en chamb
6139 très difficiles au jugement du clerc en chambre. Le lecteur réel, l’auditeur réel, est toujours autrement intelligent qu’
6140 au jugement du clerc en chambre. Le lecteur réel, l’ auditeur réel, est toujours autrement intelligent qu’on ne l’imagine q
6141 réel, est toujours autrement intelligent qu’on ne l’ imagine quand on écrit sans l’avoir jamais vu. Il n’est pas arrêté par
6142 ntelligent qu’on ne l’imagine quand on écrit sans l’ avoir jamais vu. Il n’est pas arrêté par nos tabous critiques. Il va t
6143 r nos tabous critiques. Il va tout droit à ce qui le concerne, et c’était justement, parfois, cette idée qu’on avait timid
6144 on avait timidement glissée, sans conviction — on la jugeait trop simple ou trop subtile pour le public qu’on allait affro
6145 — on la jugeait trop simple ou trop subtile pour le public qu’on allait affronter. Tout ce travail de mise au point, d’ad
6146 le public qu’on allait affronter. Tout ce travail de mise au point, d’adaptation à l’homme réel, m’a conduit à une conclus
6147 lait affronter. Tout ce travail de mise au point, d’ adaptation à l’homme réel, m’a conduit à une conclusion dont j’attends
6148 Tout ce travail de mise au point, d’adaptation à l’ homme réel, m’a conduit à une conclusion dont j’attends avec impatienc
6149 t à une conclusion dont j’attends avec impatience la vérification in concreto à l’occasion de mes prochains écrits. Cette
6150 nds avec impatience la vérification in concreto à l’ occasion de mes prochains écrits. Cette conclusion est la suivante : l
6151 patience la vérification in concreto à l’occasion de mes prochains écrits. Cette conclusion est la suivante : le lecteur e
6152 ion de mes prochains écrits. Cette conclusion est la suivante : le lecteur en son particulier — précisons : le lecteur sér
6153 chains écrits. Cette conclusion est la suivante : le lecteur en son particulier — précisons : le lecteur sérieux, personne
6154 nte : le lecteur en son particulier — précisons : le lecteur sérieux, personnellement intéressé à un problème — juge à peu
6155 é à un problème — juge à peu près régulièrement à l’ inverse du critique parisien. Il trouve concret ce que le critique aur
6156 se du critique parisien. Il trouve concret ce que le critique aura jugé paradoxal et gratuit, il néglige au contraire cert
6157 lités mineures et curieuses ou certains ornements de la pensée que le critique, blasé par des lectures trop rapides, et pl
6158 és mineures et curieuses ou certains ornements de la pensée que le critique, blasé par des lectures trop rapides, et plus
6159 curieuses ou certains ornements de la pensée que le critique, blasé par des lectures trop rapides, et plus sensible aux t
6160 ures trop rapides, et plus sensible aux tics qu’à la pensée fondamentale, n’aura pas manqué de signaler comme caractéristi
6161 cs qu’à la pensée fondamentale, n’aura pas manqué de signaler comme caractéristiques de l’ouvrage. Enfin, je commence à co
6162 ura pas manqué de signaler comme caractéristiques de l’ouvrage. Enfin, je commence à comprendre au vif l’urgence, pour l’é
6163 pas manqué de signaler comme caractéristiques de l’ ouvrage. Enfin, je commence à comprendre au vif l’urgence, pour l’écri
6164 l’ouvrage. Enfin, je commence à comprendre au vif l’ urgence, pour l’écrivain, de retrouver une commune mesure de langage e
6165 , je commence à comprendre au vif l’urgence, pour l’ écrivain, de retrouver une commune mesure de langage et de sensibilité
6166 e à comprendre au vif l’urgence, pour l’écrivain, de retrouver une commune mesure de langage et de sensibilité avec des ho
6167 pour l’écrivain, de retrouver une commune mesure de langage et de sensibilité avec des hommes de toutes les classes et de
6168 in, de retrouver une commune mesure de langage et de sensibilité avec des hommes de toutes les classes et de tous les méti
6169 sure de langage et de sensibilité avec des hommes de toutes les classes et de tous les métiers. Certes, ce n’est jamais qu
6170 ngage et de sensibilité avec des hommes de toutes les classes et de tous les métiers. Certes, ce n’est jamais qu’avec des ê
6171 sibilité avec des hommes de toutes les classes et de tous les métiers. Certes, ce n’est jamais qu’avec des êtres singulier
6172 avec des hommes de toutes les classes et de tous les métiers. Certes, ce n’est jamais qu’avec des êtres singuliers, par le
6173 ce n’est jamais qu’avec des êtres singuliers, par le biais de leur singularité même, qu’on entre vraiment en contact. Ce p
6174 jamais qu’avec des êtres singuliers, par le biais de leur singularité même, qu’on entre vraiment en contact. Ce public-là
6175 ivement restreint. Mais d’autre part il constitue l’ élément créateur, spirituellement actif du pays. Il ne saurait être qu
6176 lement actif du pays. Il ne saurait être question de ce cliché importé d’URSS ou d’Allemagne hitlérienne : « Retrouver le
6177 Il ne saurait être question de ce cliché importé d’ URSS ou d’Allemagne hitlérienne : « Retrouver le contact avec les mass
6178 rait être question de ce cliché importé d’URSS ou d’ Allemagne hitlérienne : « Retrouver le contact avec les masses. » Les
6179 é d’URSS ou d’Allemagne hitlérienne : « Retrouver le contact avec les masses. » Les masses, comme telles, n’ont jamais eu
6180 lemagne hitlérienne : « Retrouver le contact avec les masses. » Les masses, comme telles, n’ont jamais eu de contact avec l
6181 ienne : « Retrouver le contact avec les masses. » Les masses, comme telles, n’ont jamais eu de contact avec les écrivains,
6182 sses. » Les masses, comme telles, n’ont jamais eu de contact avec les écrivains, comme tels, en aucun temps. Ce ne sont pa
6183 es, comme telles, n’ont jamais eu de contact avec les écrivains, comme tels, en aucun temps. Ce ne sont pas des abstraction
6184 actions qui achètent nos livres. Ce qu’il s’agit de retrouver, c’est le contact avec l’homme qui réfléchit et qui fait la
6185 nos livres. Ce qu’il s’agit de retrouver, c’est le contact avec l’homme qui réfléchit et qui fait la critique des idées
6186 qu’il s’agit de retrouver, c’est le contact avec l’ homme qui réfléchit et qui fait la critique des idées non point à l’ai
6187 le contact avec l’homme qui réfléchit et qui fait la critique des idées non point à l’aide des opinions de son journal, ma
6188 hit et qui fait la critique des idées non point à l’ aide des opinions de son journal, mais à l’aide de sa vie concrète. Ce
6189 ritique des idées non point à l’aide des opinions de son journal, mais à l’aide de sa vie concrète. Celui-là seul peut fai
6190 a vie concrète. Celui-là seul peut faire sentir à l’ écrivain ce qui est solide et ce qui est artificiel dans ce qu’il écri
6191 recte, informulée, parfois dramatique, c’est bien la seule qui puisse nous rendre peu à peu le sens de la responsabilité d
6192 st bien la seule qui puisse nous rendre peu à peu le sens de la responsabilité de l’écrivain. Pour l’avoir négligée dans n
6193 la seule qui puisse nous rendre peu à peu le sens de la responsabilité de l’écrivain. Pour l’avoir négligée dans nos ville
6194 seule qui puisse nous rendre peu à peu le sens de la responsabilité de l’écrivain. Pour l’avoir négligée dans nos villes,
6195 ous rendre peu à peu le sens de la responsabilité de l’écrivain. Pour l’avoir négligée dans nos villes, au milieu des feui
6196 rendre peu à peu le sens de la responsabilité de l’ écrivain. Pour l’avoir négligée dans nos villes, au milieu des feuille
6197 le sens de la responsabilité de l’écrivain. Pour l’ avoir négligée dans nos villes, au milieu des feuilletonistes et des s
6198 t des snobs, nous en sommes arrivés à parler dans le vide, à ne parler qu’à ces lecteurs qui achètent les livres pour remp
6199 vide, à ne parler qu’à ces lecteurs qui achètent les livres pour remplir les rayons d’un studio-divan. Nous sommes des ing
6200 ces lecteurs qui achètent les livres pour remplir les rayons d’un studio-divan. Nous sommes des ingénieux, des amuseurs, de
6201 s qui achètent les livres pour remplir les rayons d’ un studio-divan. Nous sommes des ingénieux, des amuseurs, des spéciali
6202 eux, des amuseurs, des spécialistes, des éléments de publicité, des académiciens, des journalistes. Nous ne sommes plus de
6203 s. Nous ne sommes plus des hommes normaux chargés d’ une vocation d’expression et de réflexion. Nous sommes des hommes spéc
6204 es plus des hommes normaux chargés d’une vocation d’ expression et de réflexion. Nous sommes des hommes spéciaux exploitant
6205 es normaux chargés d’une vocation d’expression et de réflexion. Nous sommes des hommes spéciaux exploitant leur spécialité
6206 tant leur spécialité pour arriver à un succès sur le marché. Combien de nos romanciers devraient être classés dans la caté
6207 é pour arriver à un succès sur le marché. Combien de nos romanciers devraient être classés dans la catégorie des femmes à
6208 ien de nos romanciers devraient être classés dans la catégorie des femmes à barbe et des veaux à deux têtes qu’on montre a
6209 on montre aux foires. On dit que nous avons trahi l’ esprit : mais l’esprit n’a pas besoin de nous. Il vit sans nous. Nous
6210 ires. On dit que nous avons trahi l’esprit : mais l’ esprit n’a pas besoin de nous. Il vit sans nous. Nous le retrouverons
6211 ons trahi l’esprit : mais l’esprit n’a pas besoin de nous. Il vit sans nous. Nous le retrouverons intact. C’est le lecteur
6212 it n’a pas besoin de nous. Il vit sans nous. Nous le retrouverons intact. C’est le lecteur que nous avons trahi, c’est ave
6213 vit sans nous. Nous le retrouverons intact. C’est le lecteur que nous avons trahi, c’est avec lui que nous devons retrouve
6214 ntact qui nous renverra, plus sûrement que toutes les diatribes, au respect des valeurs spirituelles. 10 mars 1935 Q
6215 tuelles. 10 mars 1935 Question à Messieurs les Sociologues. — De Man écrit dans l’idée socialiste, p. 394 : « Un log
6216 à Messieurs les Sociologues. — De Man écrit dans l’ idée socialiste, p. 394 : « Un logement plus spacieux, plus clair et p
6217 ure et plus variée, des occasions plus fréquentes de respirer l’air libre, des vêtements et une lingerie plus propres, du
6218 variée, des occasions plus fréquentes de respirer l’ air libre, des vêtements et une lingerie plus propres, du savon pour l
6219 ments et une lingerie plus propres, du savon pour la toilette, le moyen de se libérer d’un travail domestique pénible et m
6220 lingerie plus propres, du savon pour la toilette, le moyen de se libérer d’un travail domestique pénible et monotone (eau
6221 plus propres, du savon pour la toilette, le moyen de se libérer d’un travail domestique pénible et monotone (eau courante
6222 du savon pour la toilette, le moyen de se libérer d’ un travail domestique pénible et monotone (eau courante au lieu de pom
6223 ésentent une valeur culturelle aussi générale que la santé elle-même ou que l’application du principe économique du moindr
6224 elle aussi générale que la santé elle-même ou que l’ application du principe économique du moindre effort. » C’est la fin d
6225 du principe économique du moindre effort. » C’est la fin de la phrase qui m’a étonné. La santé n’étant pas une valeur « cu
6226 cipe économique du moindre effort. » C’est la fin de la phrase qui m’a étonné. La santé n’étant pas une valeur « culturell
6227 e économique du moindre effort. » C’est la fin de la phrase qui m’a étonné. La santé n’étant pas une valeur « culturelle »
6228 fort. » C’est la fin de la phrase qui m’a étonné. La santé n’étant pas une valeur « culturelle » ni même une valeur de cul
6229 pas une valeur « culturelle » ni même une valeur de culture « générale », je crains que la comparaison qu’introduisent le
6230 une valeur de culture « générale », je crains que la comparaison qu’introduisent les mots « aussi générale » ne ridiculise
6231 e », je crains que la comparaison qu’introduisent les mots « aussi générale » ne ridiculise la thèse qu’elle désire illustr
6232 duisent les mots « aussi générale » ne ridiculise la thèse qu’elle désire illustrer, l’auteur se démentant lui-même. Inuti
6233 ne ridiculise la thèse qu’elle désire illustrer, l’ auteur se démentant lui-même. Inutile de rappeler que le spectacle de
6234 llustrer, l’auteur se démentant lui-même. Inutile de rappeler que le spectacle de pays tels que la Suisse, la Hollande et
6235 ur se démentant lui-même. Inutile de rappeler que le spectacle de pays tels que la Suisse, la Hollande et l’Amérique du No
6236 nt lui-même. Inutile de rappeler que le spectacle de pays tels que la Suisse, la Hollande et l’Amérique du Nord y suffirai
6237 ile de rappeler que le spectacle de pays tels que la Suisse, la Hollande et l’Amérique du Nord y suffirait peut-être ! Pou
6238 eler que le spectacle de pays tels que la Suisse, la Hollande et l’Amérique du Nord y suffirait peut-être ! Pour ne rien d
6239 ctacle de pays tels que la Suisse, la Hollande et l’ Amérique du Nord y suffirait peut-être ! Pour ne rien dire de ma furti
6240 du Nord y suffirait peut-être ! Pour ne rien dire de ma furtive expérience personnelle, qui proteste de toute sa petite fo
6241 e ma furtive expérience personnelle, qui proteste de toute sa petite force contre l’affirmation que l’ampoule électrique a
6242 lle, qui proteste de toute sa petite force contre l’ affirmation que l’ampoule électrique a plus de « valeur culturelle » q
6243 de toute sa petite force contre l’affirmation que l’ ampoule électrique a plus de « valeur culturelle » que la lampe à pétr
6244 tre l’affirmation que l’ampoule électrique a plus de « valeur culturelle » que la lampe à pétrole ; et l’eau courante que
6245 le électrique a plus de « valeur culturelle » que la lampe à pétrole ; et l’eau courante que la pompe ; — et Babbitt que D
6246 « valeur culturelle » que la lampe à pétrole ; et l’ eau courante que la pompe ; — et Babbitt que D. H. Lawrence. Tout ce q
6247  » que la lampe à pétrole ; et l’eau courante que la pompe ; — et Babbitt que D. H. Lawrence. Tout ce qui n’est pas d’orig
6248 Babbitt que D. H. Lawrence. Tout ce qui n’est pas d’ origine chrétienne, dans le socialisme, se fonde sur cette superstitio
6249 Tout ce qui n’est pas d’origine chrétienne, dans le socialisme, se fonde sur cette superstition bourgeoise : que le bonhe
6250 se fonde sur cette superstition bourgeoise : que le bonheur dépend mathématiquement (statistiquement) des « améliorations
6251 (statistiquement) des « améliorations » du train de ménage. Après, l’on oublie d’expliquer pourquoi ces conditions étant
6252 des « améliorations » du train de ménage. Après, l’ on oublie d’expliquer pourquoi ces conditions étant remplies, les bour
6253 orations » du train de ménage. Après, l’on oublie d’ expliquer pourquoi ces conditions étant remplies, les bourgeois ne son
6254 expliquer pourquoi ces conditions étant remplies, les bourgeois ne sont pas plus heureux que les ouvriers. Et pourquoi je s
6255 plies, les bourgeois ne sont pas plus heureux que les ouvriers. Et pourquoi je suis beaucoup plus heureux qu’un bourgeois,
6256 — Je lis dans un journal socialiste du Midi sous la rubrique « La vie régionale » qui chaque jour m’apporte d’inénarrable
6257 un journal socialiste du Midi sous la rubrique «  La vie régionale » qui chaque jour m’apporte d’inénarrables sujets de mé
6258 ue « La vie régionale » qui chaque jour m’apporte d’ inénarrables sujets de méditation, le petit communiqué que voici : B
6259 » qui chaque jour m’apporte d’inénarrables sujets de méditation, le petit communiqué que voici : Bouillargues. — Les « e
6260 ur m’apporte d’inénarrables sujets de méditation, le petit communiqué que voici : Bouillargues. — Les « exclus » vieux t
6261 le petit communiqué que voici : Bouillargues. —  Les « exclus » vieux travailleurs. Demain dimanche, à 10 heures, sera don
6262 rence au profit des vieux, hommes et femmes, âgés de soixante ans au mois de juillet 193017. Tous ceux qui ne bénéficient
6263 x, hommes et femmes, âgés de soixante ans au mois de juillet 193017. Tous ceux qui ne bénéficient pas de la loi des assura
6264 juillet 193017. Tous ceux qui ne bénéficient pas de la loi des assurances sociales ont intérêt à assister à la conférence
6265 illet 193017. Tous ceux qui ne bénéficient pas de la loi des assurances sociales ont intérêt à assister à la conférence. L
6266 des assurances sociales ont intérêt à assister à la conférence. L’organisation lutte afin de faire accorder une retraite
6267 sociales ont intérêt à assister à la conférence. L’ organisation lutte afin de faire accorder une retraite aux vieux. Unis
6268 der une retraite aux vieux. Unissez-vous, activez la propagande afin que satisfaction soit donnée aux légitimes revendicat
6269 donnée aux légitimes revendications des vieux. «  L’ organisation lutte… Unissez-vous ! Activez la propagande ! » Ô merveil
6270 . « L’organisation lutte… Unissez-vous ! Activez la propagande ! » Ô merveille du pathos révolutionnaire ! Ô gloire de la
6271 Ô merveille du pathos révolutionnaire ! Ô gloire de la phraséologie électorale ! Ô triomphe des mots d’ordre sur l’inerti
6272 merveille du pathos révolutionnaire ! Ô gloire de la phraséologie électorale ! Ô triomphe des mots d’ordre sur l’inertie d
6273 ogie électorale ! Ô triomphe des mots d’ordre sur l’ inertie des masses, l’égoïsme des petits bourgeois, l’obscurantisme cl
6274 iomphe des mots d’ordre sur l’inertie des masses, l’ égoïsme des petits bourgeois, l’obscurantisme clérical — la conférence
6275 ertie des masses, l’égoïsme des petits bourgeois, l’ obscurantisme clérical — la conférence est à 10 heures, dimanche matin
6276 des petits bourgeois, l’obscurantisme clérical —  la conférence est à 10 heures, dimanche matin… — et les oligarchies réac
6277 conférence est à 10 heures, dimanche matin… — et les oligarchies réactionnaires ! Ô Liberté, Égalité, Fraternité, Déclarat
6278 des droits de l’homme ! Il est venu, il est venu le jour que la Volonté populaire appelait de tous ses espoirs ! Mais que
6279 de l’homme ! Il est venu, il est venu le jour que la Volonté populaire appelait de tous ses espoirs ! Mais que dis-je le j
6280 st venu le jour que la Volonté populaire appelait de tous ses espoirs ! Mais que dis-je le jour ! C’est l’heure même qui v
6281 re appelait de tous ses espoirs ! Mais que dis-je le jour ! C’est l’heure même qui va sonner : demain dimanche, sur le cou
6282 ous ses espoirs ! Mais que dis-je le jour ! C’est l’ heure même qui va sonner : demain dimanche, sur le coup de dix heures,
6283 l’heure même qui va sonner : demain dimanche, sur le coup de dix heures, le grand mot qui résume cent années d’efforts, de
6284 même qui va sonner : demain dimanche, sur le coup de dix heures, le grand mot qui résume cent années d’efforts, de luttes,
6285 ner : demain dimanche, sur le coup de dix heures, le grand mot qui résume cent années d’efforts, de luttes, de sacrifices
6286 e dix heures, le grand mot qui résume cent années d’ efforts, de luttes, de sacrifices et d’éloquence, de pensée libre, de
6287 s, le grand mot qui résume cent années d’efforts, de luttes, de sacrifices et d’éloquence, de pensée libre, de raison cart
6288 mot qui résume cent années d’efforts, de luttes, de sacrifices et d’éloquence, de pensée libre, de raison cartésienne, de
6289 ent années d’efforts, de luttes, de sacrifices et d’ éloquence, de pensée libre, de raison cartésienne, de soif de Justice
6290 efforts, de luttes, de sacrifices et d’éloquence, de pensée libre, de raison cartésienne, de soif de Justice et de passion
6291 s, de sacrifices et d’éloquence, de pensée libre, de raison cartésienne, de soif de Justice et de passion libertaire, ce g
6292 loquence, de pensée libre, de raison cartésienne, de soif de Justice et de passion libertaire, ce grand mot sera prononcé,
6293 , de pensée libre, de raison cartésienne, de soif de Justice et de passion libertaire, ce grand mot sera prononcé, proclam
6294 bre, de raison cartésienne, de soif de Justice et de passion libertaire, ce grand mot sera prononcé, proclamé, acclamé par
6295 ce grand mot sera prononcé, proclamé, acclamé par les travailleurs de Bouillargues, prouvant à la face du monde que nos mil
6296 prononcé, proclamé, acclamé par les travailleurs de Bouillargues, prouvant à la face du monde que nos militants héroïques
6297 par les travailleurs de Bouillargues, prouvant à la face du monde que nos militants héroïques n’ont pas perdu leur peine
6298 olique mot d’ordre sera donné comme un soufflet à la Réaction insolente : « Place aux Vieux ! » On se demande s’il est au
6299 se demande s’il est au monde un seul pays, hormis la France, où cette phrase soit possible. Où les partis qui se disent « 
6300 rmis la France, où cette phrase soit possible. Où les partis qui se disent « avancés » osent le proposer comme objectif de
6301 le. Où les partis qui se disent « avancés » osent le proposer comme objectif de « lutte ». Où la publication d’un communiq
6302 sent « avancés » osent le proposer comme objectif de « lutte ». Où la publication d’un communiqué de ce genre ne soit pas
6303 osent le proposer comme objectif de « lutte ». Où la publication d’un communiqué de ce genre ne soit pas accueillie par un
6304 er comme objectif de « lutte ». Où la publication d’ un communiqué de ce genre ne soit pas accueillie par une traînée de ri
6305 f de « lutte ». Où la publication d’un communiqué de ce genre ne soit pas accueillie par une traînée de rigolade irrépress
6306 e ce genre ne soit pas accueillie par une traînée de rigolade irrépressible dans toutes les couches de la population, « la
6307 une traînée de rigolade irrépressible dans toutes les couches de la population, « laborieuse » ou « réactionnaire ». À la p
6308 de rigolade irrépressible dans toutes les couches de la population, « laborieuse » ou « réactionnaire ». À la prochaine en
6309 rigolade irrépressible dans toutes les couches de la population, « laborieuse » ou « réactionnaire ». À la prochaine enquê
6310 opulation, « laborieuse » ou « réactionnaire ». À la prochaine enquête sur l’état politique de la France, je me promets de
6311 ou « réactionnaire ». À la prochaine enquête sur l’ état politique de la France, je me promets de répondre par cette simpl
6312 re ». À la prochaine enquête sur l’état politique de la France, je me promets de répondre par cette simple déclaration : «
6313 ». À la prochaine enquête sur l’état politique de la France, je me promets de répondre par cette simple déclaration : « La
6314 sur l’état politique de la France, je me promets de répondre par cette simple déclaration : « La France est un pays combl
6315 mets de répondre par cette simple déclaration : «  La France est un pays comblé, qui a résolu tous les problèmes économique
6316 « La France est un pays comblé, qui a résolu tous les problèmes économiques urgents. La preuve en est fournie par ces phras
6317 a résolu tous les problèmes économiques urgents. La preuve en est fournie par ces phrases cueillies dans un journal révol
6318 ses cueillies dans un journal révolutionnaire : «  L’ organisation lutte afin de faire accorder une retraite aux vieux. Unis
6319 der une retraite aux vieux. Unissez-vous, activez la propagande, afin que satisfaction soit donnée aux légitimes revendica
6320 ations des vieux ! » Quand on en est à cela, dans les partis d’extrême gauche, c’est que l’état social est à peu près parad
6321 vieux ! » Quand on en est à cela, dans les partis d’ extrême gauche, c’est que l’état social est à peu près paradisiaque. »
6322 cela, dans les partis d’extrême gauche, c’est que l’ état social est à peu près paradisiaque. » J’ajouterais peut-être ceci
6323 e dévouer ses enthousiasmes aux soins que réclame la vieillesse. Notre opinion publique, à en croire les journaux, est act
6324 a vieillesse. Notre opinion publique, à en croire les journaux, est actuellement dominée par le souci des élections académi
6325 croire les journaux, est actuellement dominée par le souci des élections académiques et des retraites aux sexagénaires. Eh
6326 surant. Il est encore un peuple au monde pour qui le souci de se montrer humain prime cette volonté de puissance et ce cul
6327 l est encore un peuple au monde pour qui le souci de se montrer humain prime cette volonté de puissance et ce culte du jeu
6328 le souci de se montrer humain prime cette volonté de puissance et ce culte du jeune guerrier à quoi certains de nos voisin
6329 nce et ce culte du jeune guerrier à quoi certains de nos voisins sacrifient davantage que leur vie : leur dignité de perso
6330 sacrifient davantage que leur vie : leur dignité de personnes, — et celle des autres… » 31 mars 1935 Relevé des « c
6331 1935 Relevé des « convocations » communiquées le 30 mars 1935 par un journal de la région : — les « ayants-droit » à l
6332 ons » communiquées le 30 mars 1935 par un journal de la région : — les « ayants-droit » à la carte d’ancien combattant ; —
6333  » communiquées le 30 mars 1935 par un journal de la région : — les « ayants-droit » à la carte d’ancien combattant ; — le
6334 s le 30 mars 1935 par un journal de la région : — les « ayants-droit » à la carte d’ancien combattant ; — les Survivants de
6335 n journal de la région : — les « ayants-droit » à la carte d’ancien combattant ; — les Survivants de l’Alsacienne (66e div
6336 de la région : — les « ayants-droit » à la carte d’ ancien combattant ; — les Survivants de l’Alsacienne (66e division) ;
6337 ayants-droit » à la carte d’ancien combattant ; — les Survivants de l’Alsacienne (66e division) ; — les « exclus » vieux t
6338 à la carte d’ancien combattant ; — les Survivants de l’Alsacienne (66e division) ; — les « exclus » vieux travailleurs ;
6339 a carte d’ancien combattant ; — les Survivants de l’ Alsacienne (66e division) ; — les « exclus » vieux travailleurs ; — l
6340 es Survivants de l’Alsacienne (66e division) ; —  les « exclus » vieux travailleurs ; — les Mutilés et Invalides du Travail
6341 ision) ; — les « exclus » vieux travailleurs ; — les Mutilés et Invalides du Travail ; — l’Amicale des Anciens Musiciens d
6342 leurs ; — les Mutilés et Invalides du Travail ; — l’ Amicale des Anciens Musiciens du 7e Génie ; — les Blessés du Poumon ;
6343 — l’Amicale des Anciens Musiciens du 7e Génie ; — les Blessés du Poumon ; — la Fédération des Familles nombreuses. Cette de
6344 siciens du 7e Génie ; — les Blessés du Poumon ; — la Fédération des Familles nombreuses. Cette dernière amicale d’« accide
6345 n des Familles nombreuses. Cette dernière amicale d’ « accidentés » est sans doute la plus à plaindre : elle témoigne en ef
6346 dernière amicale d’« accidentés » est sans doute la plus à plaindre : elle témoigne en effet, malgré elle, d’une certaine
6347 à plaindre : elle témoigne en effet, malgré elle, d’ une certaine vitalité qui doit paraître un peu suspecte à cette popula
6348 doit paraître un peu suspecte à cette population de retraités, d’« exclus », de mutilés, d’anciens de tout ce qu’on veut,
6349 un peu suspecte à cette population de retraités, d’ « exclus », de mutilés, d’anciens de tout ce qu’on veut, de « survivan
6350 te à cette population de retraités, d’« exclus », de mutilés, d’anciens de tout ce qu’on veut, de « survivants »… Faut-il
6351 opulation de retraités, d’« exclus », de mutilés, d’ anciens de tout ce qu’on veut, de « survivants »… Faut-il penser que l
6352 de retraités, d’« exclus », de mutilés, d’anciens de tout ce qu’on veut, de « survivants »… Faut-il penser que le malheur
6353 s », de mutilés, d’anciens de tout ce qu’on veut, de « survivants »… Faut-il penser que le malheur seul peut encore rassem
6354 qu’on veut, de « survivants »… Faut-il penser que le malheur seul peut encore rassembler les hommes en communautés pacifiq
6355 penser que le malheur seul peut encore rassembler les hommes en communautés pacifiques ? Vendredi saint (avril 1935)
6356 s ? Vendredi saint (avril 1935) Pour vivre de peu. — (Avoir peu.) Atteindre cet état que l’on dit avoir été celui d
6357 vre de peu. — (Avoir peu.) Atteindre cet état que l’ on dit avoir été celui des âges d’or : l’état de simplicité envers l’a
6358 re cet état que l’on dit avoir été celui des âges d’ or : l’état de simplicité envers l’argent. C’est parce que nous avons
6359 état que l’on dit avoir été celui des âges d’or : l’ état de simplicité envers l’argent. C’est parce que nous avons perdu c
6360 e l’on dit avoir été celui des âges d’or : l’état de simplicité envers l’argent. C’est parce que nous avons perdu cette si
6361 celui des âges d’or : l’état de simplicité envers l’ argent. C’est parce que nous avons perdu cette simplicité envers l’arg
6362 arce que nous avons perdu cette simplicité envers l’ argent, parce que nous en avons fait une valeur sentimentale, que nous
6363 nos calculs. Il faut apprendre cette simplicité : l’ imprévoyance, l’acceptation d’une misère, mais aussi l’acceptation d’u
6364 faut apprendre cette simplicité : l’imprévoyance, l’ acceptation d’une misère, mais aussi l’acceptation d’un don immérité,
6365 cette simplicité : l’imprévoyance, l’acceptation d’ une misère, mais aussi l’acceptation d’un don immérité, la prodigalité
6366 révoyance, l’acceptation d’une misère, mais aussi l’ acceptation d’un don immérité, la prodigalité mais aussi la tempérance
6367 cceptation d’une misère, mais aussi l’acceptation d’ un don immérité, la prodigalité mais aussi la tempérance ; ce qu’il y
6368 sère, mais aussi l’acceptation d’un don immérité, la prodigalité mais aussi la tempérance ; ce qu’il y a de folie dans une
6369 tion d’un don immérité, la prodigalité mais aussi la tempérance ; ce qu’il y a de folie dans une vraie sagesse, et de vrai
6370 odigalité mais aussi la tempérance ; ce qu’il y a de folie dans une vraie sagesse, et de vraie sagesse dans le refus de to
6371 ce qu’il y a de folie dans une vraie sagesse, et de vraie sagesse dans le refus de toute sagesse qui calcule. Le riche ne
6372 dans une vraie sagesse, et de vraie sagesse dans le refus de toute sagesse qui calcule. Le riche ne vaut pas moins que le
6373 vraie sagesse, et de vraie sagesse dans le refus de toute sagesse qui calcule. Le riche ne vaut pas moins que le pauvre,
6374 gesse dans le refus de toute sagesse qui calcule. Le riche ne vaut pas moins que le pauvre, ni le pauvre moins que le rich
6375 gesse qui calcule. Le riche ne vaut pas moins que le pauvre, ni le pauvre moins que le riche, mais l’un et l’autre ne vale
6376 ule. Le riche ne vaut pas moins que le pauvre, ni le pauvre moins que le riche, mais l’un et l’autre ne valent que par la
6377 t pas moins que le pauvre, ni le pauvre moins que le riche, mais l’un et l’autre ne valent que par la joie, et la joie ne
6378 le riche, mais l’un et l’autre ne valent que par la joie, et la joie ne vaut rien dans nos calculs. Il faut beaucoup d’ar
6379 ais l’un et l’autre ne valent que par la joie, et la joie ne vaut rien dans nos calculs. Il faut beaucoup d’argent (jamais
6380 e ne vaut rien dans nos calculs. Il faut beaucoup d’ argent (jamais assez) à celui qui n’a pas accepté la joie, qui n’a pas
6381 argent (jamais assez) à celui qui n’a pas accepté la joie, qui n’a pas de « valeur ». Il faut beaucoup de temps (jamais as
6382 à celui qui n’a pas accepté la joie, qui n’a pas de « valeur ». Il faut beaucoup de temps (jamais assez !) à celui qui n’
6383 emps (jamais assez !) à celui qui n’a pas accepté l’ éternité, qui n’a pas de durée.   Apprentissage de la pauvreté : devan
6384 celui qui n’a pas accepté l’éternité, qui n’a pas de durée.   Apprentissage de la pauvreté : devant la table sainte, où to
6385 l’éternité, qui n’a pas de durée.   Apprentissage de la pauvreté : devant la table sainte, où tout ce qui te faisait riche
6386 ternité, qui n’a pas de durée.   Apprentissage de la pauvreté : devant la table sainte, où tout ce qui te faisait riche t’
6387 de durée.   Apprentissage de la pauvreté : devant la table sainte, où tout ce qui te faisait riche t’empêche de recevoir l
6388 sainte, où tout ce qui te faisait riche t’empêche de recevoir les signes certains de la joie. Voilà le modèle de toute sim
6389 out ce qui te faisait riche t’empêche de recevoir les signes certains de la joie. Voilà le modèle de toute simplicité, de t
6390 t riche t’empêche de recevoir les signes certains de la joie. Voilà le modèle de toute simplicité, de toute richesse reçue
6391 iche t’empêche de recevoir les signes certains de la joie. Voilà le modèle de toute simplicité, de toute richesse reçue da
6392 de recevoir les signes certains de la joie. Voilà le modèle de toute simplicité, de toute richesse reçue dans la pauvreté,
6393 r les signes certains de la joie. Voilà le modèle de toute simplicité, de toute richesse reçue dans la pauvreté, mais auss
6394 de la joie. Voilà le modèle de toute simplicité, de toute richesse reçue dans la pauvreté, mais aussi de toute pauvreté p
6395 de toute simplicité, de toute richesse reçue dans la pauvreté, mais aussi de toute pauvreté préservée dans la richesse. (J
6396 toute richesse reçue dans la pauvreté, mais aussi de toute pauvreté préservée dans la richesse. (Je ne cède pas à la tenta
6397 reté, mais aussi de toute pauvreté préservée dans la richesse. (Je ne cède pas à la tentation des parallèles verbaux ou de
6398 eté préservée dans la richesse. (Je ne cède pas à la tentation des parallèles verbaux ou des fausses symétries : chacun de
6399 allèles verbaux ou des fausses symétries : chacun de ces mots est essentiel à l’expression d’un seul et même événement.) S
6400 es symétries : chacun de ces mots est essentiel à l’ expression d’un seul et même événement.) Si je crois à la Résurrection
6401 : chacun de ces mots est essentiel à l’expression d’ un seul et même événement.) Si je crois à la Résurrection et au don ac
6402 ssion d’un seul et même événement.) Si je crois à la Résurrection et au don actuel du Christ dans la foi, certifié et scel
6403 à la Résurrection et au don actuel du Christ dans la foi, certifié et scellé par les signes visibles du pain et du vin, je
6404 uel du Christ dans la foi, certifié et scellé par les signes visibles du pain et du vin, je dois croire identiquement que c
6405 du vin, je dois croire identiquement que c’est là le centre vivant de toute réalité réelle sur la terre. Je dois croire qu
6406 roire identiquement que c’est là le centre vivant de toute réalité réelle sur la terre. Je dois croire qu’à cet événement
6407 t là le centre vivant de toute réalité réelle sur la terre. Je dois croire qu’à cet événement central doivent se rapporter
6408 thique, une idée qui ne peuvent être rapportées à la situation de l’homme prenant la Cène sont en dernier recours vaines e
6409 dée qui ne peuvent être rapportées à la situation de l’homme prenant la Cène sont en dernier recours vaines et illusoires.
6410 qui ne peuvent être rapportées à la situation de l’ homme prenant la Cène sont en dernier recours vaines et illusoires.
6411 être rapportées à la situation de l’homme prenant la Cène sont en dernier recours vaines et illusoires. Nuit de Pâques
6412 en dernier recours vaines et illusoires. Nuit de Pâques 1935 Clair de lune, à minuit, après l’orage. Vocabulaire in
6413 de Pâques 1935 Clair de lune, à minuit, après l’ orage. Vocabulaire insuffisant pour décrire la joie naturelle. Souvent
6414 rès l’orage. Vocabulaire insuffisant pour décrire la joie naturelle. Souvent éprouvé. Les grands soulèvements de l’instinc
6415 pour décrire la joie naturelle. Souvent éprouvé. Les grands soulèvements de l’instinct vers la clarté, notre raison les re
6416 turelle. Souvent éprouvé. Les grands soulèvements de l’instinct vers la clarté, notre raison les repousse au lieu de les t
6417 elle. Souvent éprouvé. Les grands soulèvements de l’ instinct vers la clarté, notre raison les repousse au lieu de les tran
6418 rouvé. Les grands soulèvements de l’instinct vers la clarté, notre raison les repousse au lieu de les transfigurer. En pré
6419 ements de l’instinct vers la clarté, notre raison les repousse au lieu de les transfigurer. En présence de tout ce qui surg
6420 s la clarté, notre raison les repousse au lieu de les transfigurer. En présence de tout ce qui surgit formidablement à l’ap
6421 n présence de tout ce qui surgit formidablement à l’ approche de la joie, elle se sent gênée, pauvre et maladroite, pareill
6422 de tout ce qui surgit formidablement à l’approche de la joie, elle se sent gênée, pauvre et maladroite, pareille à cette c
6423 tout ce qui surgit formidablement à l’approche de la joie, elle se sent gênée, pauvre et maladroite, pareille à cette clar
6424 droite, pareille à cette clarté lunaire incapable d’ exalter ce qu’elle découvre sur la face immense de la terre. — Clartés
6425 naire incapable d’exalter ce qu’elle découvre sur la face immense de la terre. — Clartés rationnelles : empruntées à l’Ast
6426 d’exalter ce qu’elle découvre sur la face immense de la terre. — Clartés rationnelles : empruntées à l’Astre invisible.
6427 xalter ce qu’elle découvre sur la face immense de la terre. — Clartés rationnelles : empruntées à l’Astre invisible. Ma
6428 e la terre. — Clartés rationnelles : empruntées à l’ Astre invisible. Matinée du lundi de Pâques, 7 heures Tout est t
6429 pruntées à l’Astre invisible. Matinée du lundi de Pâques, 7 heures Tout est trempé et ruisselant de lumière bleue, l
6430 Pâques, 7 heures Tout est trempé et ruisselant de lumière bleue, les feuillages encore translucides au-dessus du bassin
6431 Tout est trempé et ruisselant de lumière bleue, les feuillages encore translucides au-dessus du bassin bleu de ciel où na
6432 ages encore translucides au-dessus du bassin bleu de ciel où nagent d’énormes bottes de radis rouges. Tout a son éclat neu
6433 ucides au-dessus du bassin bleu de ciel où nagent d’ énormes bottes de radis rouges. Tout a son éclat neuf, sa densité, sa
6434 du bassin bleu de ciel où nagent d’énormes bottes de radis rouges. Tout a son éclat neuf, sa densité, sa légèreté originel
6435 éclat neuf, sa densité, sa légèreté originelles. Les oliviers sont plus soyeux et plus moirés sur le vert plus violent des
6436 Les oliviers sont plus soyeux et plus moirés sur le vert plus violent des terrasses, la colline plus riche d’ombres et de
6437 us moirés sur le vert plus violent des terrasses, la colline plus riche d’ombres et de lueurs doucement étagées. Et les lo
6438 plus violent des terrasses, la colline plus riche d’ ombres et de lueurs doucement étagées. Et les lointains de plaine évoq
6439 des terrasses, la colline plus riche d’ombres et de lueurs doucement étagées. Et les lointains de plaine évoquent l’insta
6440 riche d’ombres et de lueurs doucement étagées. Et les lointains de plaine évoquent l’instant de la séparation des eaux et d
6441 et de lueurs doucement étagées. Et les lointains de plaine évoquent l’instant de la séparation des eaux et de la terre, d
6442 ment étagées. Et les lointains de plaine évoquent l’ instant de la séparation des eaux et de la terre, dans un chaos brilla
6443 es. Et les lointains de plaine évoquent l’instant de la séparation des eaux et de la terre, dans un chaos brillant d’où mo
6444 Et les lointains de plaine évoquent l’instant de la séparation des eaux et de la terre, dans un chaos brillant d’où monte
6445 e évoquent l’instant de la séparation des eaux et de la terre, dans un chaos brillant d’où montent des vapeurs d’aube d’ét
6446 voquent l’instant de la séparation des eaux et de la terre, dans un chaos brillant d’où montent des vapeurs d’aube d’été.
6447 n des eaux et de la terre, dans un chaos brillant d’ où montent des vapeurs d’aube d’été. « Un vrai temps de Pâques ! », me
6448 , dans un chaos brillant d’où montent des vapeurs d’ aube d’été. « Un vrai temps de Pâques ! », me crie Simard. ⁂ Hier il p
6449 un chaos brillant d’où montent des vapeurs d’aube d’ été. « Un vrai temps de Pâques ! », me crie Simard. ⁂ Hier il pleuvait
6450 montent des vapeurs d’aube d’été. « Un vrai temps de Pâques ! », me crie Simard. ⁂ Hier il pleuvait. Vendredi, c’était gra
6451 r il pleuvait. Vendredi, c’était grand soleil. Et les bonnes femmes disaient, au seuil du temple : « Voyez-vous ça, comme t
6452 emple : « Voyez-vous ça, comme tout est dérangé ! Les autres années, il pleut toujours le Vendredi-Saint, et il fait beau l
6453 st dérangé ! Les autres années, il pleut toujours le Vendredi-Saint, et il fait beau le jour de Pâques. » Je leur réponds 
6454 pleut toujours le Vendredi-Saint, et il fait beau le jour de Pâques. » Je leur réponds : « Que voulez-vous, les saisons ne
6455 ujours le Vendredi-Saint, et il fait beau le jour de Pâques. » Je leur réponds : « Que voulez-vous, les saisons ne sont pl
6456 de Pâques. » Je leur réponds : « Que voulez-vous, les saisons ne sont plus ce qu’elles étaient », — pour montrer que je sai
6457 e des paysans et des bourgeois, c’est une manière de s’exprimer qui en dit plus long qu’on ne croirait. « J’ai mes brouill
6458 ans de moi », note Pascal. En sorte que s’étonner d’ une pluie « intempestive », c’est une manière de dire : « Je m’attenda
6459 r d’une pluie « intempestive », c’est une manière de dire : « Je m’attendais à autre chose, mon calendrier moral, mes conv
6460 conventions, etc., prévoyaient autre chose. » Et l’ on décrit les croyances de son groupe en « parlant de la pluie et du b
6461 , etc., prévoyaient autre chose. » Et l’on décrit les croyances de son groupe en « parlant de la pluie et du beau temps ».
6462 aient autre chose. » Et l’on décrit les croyances de son groupe en « parlant de la pluie et du beau temps ». (Je dis bien
6463 n décrit les croyances de son groupe en « parlant de la pluie et du beau temps ». (Je dis bien groupe, car il y a peu de «
6464 écrit les croyances de son groupe en « parlant de la pluie et du beau temps ». (Je dis bien groupe, car il y a peu de « pe
6465 l y a peu de « personnes ».) 15 avril 1935 La sieste de la Marquise. — Nous espérions pouvoir dormir de nouveau, ap
6466 de « personnes ».) 15 avril 1935 La sieste de la Marquise. — Nous espérions pouvoir dormir de nouveau, après la gra
6467 « personnes ».) 15 avril 1935 La sieste de la Marquise. — Nous espérions pouvoir dormir de nouveau, après la grande
6468 — Nous espérions pouvoir dormir de nouveau, après la grande semaine des chats, qui avaient fait retentir le vallon de leur
6469 ande semaine des chats, qui avaient fait retentir le vallon de leurs déchirements wagnériens. Et voilà que cela prend les
6470 ne des chats, qui avaient fait retentir le vallon de leurs déchirements wagnériens. Et voilà que cela prend les chiens. To
6471 déchirements wagnériens. Et voilà que cela prend les chiens. Toute la nuit, ils se sont battus dans la remise qui est just
6472 ériens. Et voilà que cela prend les chiens. Toute la nuit, ils se sont battus dans la remise qui est juste au-dessous de n
6473 es chiens. Toute la nuit, ils se sont battus dans la remise qui est juste au-dessous de notre chambre, et dans la cour, et
6474 ui est juste au-dessous de notre chambre, et dans la cour, et sur toutes les terrasses. Avec des cris et des râles presque
6475 de notre chambre, et dans la cour, et sur toutes les terrasses. Avec des cris et des râles presque humains. Ce matin, j’ai
6476 presque humains. Ce matin, j’ai trouvé des traces de sang sur le seuil de la remise. Un beau soleil luit sur ce lendemain
6477 ins. Ce matin, j’ai trouvé des traces de sang sur le seuil de la remise. Un beau soleil luit sur ce lendemain de bataille.
6478 atin, j’ai trouvé des traces de sang sur le seuil de la remise. Un beau soleil luit sur ce lendemain de bataille. Pendant
6479 n, j’ai trouvé des traces de sang sur le seuil de la remise. Un beau soleil luit sur ce lendemain de bataille. Pendant des
6480 e la remise. Un beau soleil luit sur ce lendemain de bataille. Pendant des heures, la petite chienne Marquise — c’est la m
6481 sur ce lendemain de bataille. Pendant des heures, la petite chienne Marquise — c’est la mère du basset Pernod — a trottiné
6482 nt des heures, la petite chienne Marquise — c’est la mère du basset Pernod — a trottiné tout gentiment sur les restanques,
6483 du basset Pernod — a trottiné tout gentiment sur les restanques, en faisant tinter son grelot, respectueusement talonnée p
6484 , respectueusement talonnée par un grand flandrin de métis aux oreilles pendantes. De temps en temps il la rejoignait. Ens
6485 étis aux oreilles pendantes. De temps en temps il la rejoignait. Ensuite une sorte d’épagneul impur a pris sa place. Deux
6486 emps en temps il la rejoignait. Ensuite une sorte d’ épagneul impur a pris sa place. Deux ou trois autres mâles faméliques
6487 Deux ou trois autres mâles faméliques reniflaient la trace de la chienne à tous les étages du vallon. Ils grimpaient les e
6488 rois autres mâles faméliques reniflaient la trace de la chienne à tous les étages du vallon. Ils grimpaient les escaliers,
6489 s autres mâles faméliques reniflaient la trace de la chienne à tous les étages du vallon. Ils grimpaient les escaliers, re
6490 éliques reniflaient la trace de la chienne à tous les étages du vallon. Ils grimpaient les escaliers, redescendaient, parco
6491 ienne à tous les étages du vallon. Ils grimpaient les escaliers, redescendaient, parcouraient la prairie et les cultures à
6492 aient les escaliers, redescendaient, parcouraient la prairie et les cultures à longues foulées, le nez au sol. Soudain, l’
6493 liers, redescendaient, parcouraient la prairie et les cultures à longues foulées, le nez au sol. Soudain, l’un relevait la
6494 ent la prairie et les cultures à longues foulées, le nez au sol. Soudain, l’un relevait la tête, et s’en allait. Un nouvea
6495 es foulées, le nez au sol. Soudain, l’un relevait la tête, et s’en allait. Un nouveau faisait son apparition au haut de la
6496 allait. Un nouveau faisait son apparition au haut de la colline. Simard et moi leur avons lancé quelques pierres, pour voi
6497 ait. Un nouveau faisait son apparition au haut de la colline. Simard et moi leur avons lancé quelques pierres, pour voir.
6498 nant à chaque saut, et puis cela revenait bientôt de tous côtés. Haletants, craintifs, et obstinés. Après le déjeuner, flâ
6499 s côtés. Haletants, craintifs, et obstinés. Après le déjeuner, flânant au jardin, je me penche par hasard au bord de la te
6500 ant au jardin, je me penche par hasard au bord de la terrasse, et voilà que je découvre au-dessous de moi un spectacle étr
6501 oi un spectacle étrange et presque « atterrant ». La petite chienne est couchée, sur le flanc, haletant doucement, l’arriè
6502 « atterrant ». La petite chienne est couchée, sur le flanc, haletant doucement, l’arrière-train tuméfié. Autour d’elle, ép
6503 ne est couchée, sur le flanc, haletant doucement, l’ arrière-train tuméfié. Autour d’elle, éparpillés sur une aire de quelq
6504 letant doucement, l’arrière-train tuméfié. Autour d’ elle, éparpillés sur une aire de quelques mètres, reposent les mâles r
6505 n tuméfié. Autour d’elle, éparpillés sur une aire de quelques mètres, reposent les mâles repus, pesamment allongés au sole
6506 rpillés sur une aire de quelques mètres, reposent les mâles repus, pesamment allongés au soleil. J’en compte huit, de toute
6507 , pesamment allongés au soleil. J’en compte huit, de toutes tailles et pelages. La plupart sont beaucoup plus grands que l
6508 près un certain temps, je jette quelques poignées de terre sur tous ces ventres. Ils vont se coucher un peu plus loin. Un
6509 n. Un ou deux se défilent en silence. « J’ai pris la nature sur le fait. » Vertige de l’animalité. 17 avril 1935 Ça
6510 se défilent en silence. « J’ai pris la nature sur le fait. » Vertige de l’animalité. 17 avril 1935 Ça n’a pas encore
6511 nce. « J’ai pris la nature sur le fait. » Vertige de l’animalité. 17 avril 1935 Ça n’a pas encore cessé chez les chi
6512 . « J’ai pris la nature sur le fait. » Vertige de l’ animalité. 17 avril 1935 Ça n’a pas encore cessé chez les chiens
6513 17 avril 1935 Ça n’a pas encore cessé chez les chiens. Cette nuit, les crapauds s’y sont mis. Un vieux mâle coasse d
6514 n’a pas encore cessé chez les chiens. Cette nuit, les crapauds s’y sont mis. Un vieux mâle coasse des notes basses, et le c
6515 nt mis. Un vieux mâle coasse des notes basses, et le chœur lui répond, deux octaves au-dessus. Toujours ces luttes dans la
6516 deux octaves au-dessus. Toujours ces luttes dans la remise. La chienne se traîne. La chatte est déjà grosse. Une puissanc
6517 es au-dessus. Toujours ces luttes dans la remise. La chienne se traîne. La chatte est déjà grosse. Une puissance inexorabl
6518 ces luttes dans la remise. La chienne se traîne. La chatte est déjà grosse. Une puissance inexorable s’est emparée de l’e
6519 jà grosse. Une puissance inexorable s’est emparée de l’espèce, tourmente les bêtes, les essouffle et les esquinte, les ren
6520 grosse. Une puissance inexorable s’est emparée de l’ espèce, tourmente les bêtes, les essouffle et les esquinte, les rend c
6521 e inexorable s’est emparée de l’espèce, tourmente les bêtes, les essouffle et les esquinte, les rend craintives et méchante
6522 e s’est emparée de l’espèce, tourmente les bêtes, les essouffle et les esquinte, les rend craintives et méchantes, lourdes,
6523 e l’espèce, tourmente les bêtes, les essouffle et les esquinte, les rend craintives et méchantes, lourdes, baveuses et diff
6524 urmente les bêtes, les essouffle et les esquinte, les rend craintives et méchantes, lourdes, baveuses et difformes. Il faut
6525 tes, lourdes, baveuses et difformes. Il faut voir les yeux pitoyables de ces grands chiens qui tremblent sous la pluie, gro
6526 es et difformes. Il faut voir les yeux pitoyables de ces grands chiens qui tremblent sous la pluie, groupés au maigre abri
6527 itoyables de ces grands chiens qui tremblent sous la pluie, groupés au maigre abri des buissons de lauriers. Ah ! les beau
6528 ous la pluie, groupés au maigre abri des buissons de lauriers. Ah ! les beaux « instincts primitifs » ! Le bonheur idylliq
6529 pés au maigre abri des buissons de lauriers. Ah ! les beaux « instincts primitifs » ! Le bonheur idyllique de la nature ! L
6530 auriers. Ah ! les beaux « instincts primitifs » ! Le bonheur idyllique de la nature ! Littérateurs, allez-y voir de près !
6531 ux « instincts primitifs » ! Le bonheur idyllique de la nature ! Littérateurs, allez-y voir de près ! « Nous savons, en ef
6532 « instincts primitifs » ! Le bonheur idyllique de la nature ! Littérateurs, allez-y voir de près ! « Nous savons, en effet
6533 yllique de la nature ! Littérateurs, allez-y voir de près ! « Nous savons, en effet, que jusqu’à ce jour, la création tout
6534 s ! « Nous savons, en effet, que jusqu’à ce jour, la création tout entière gémit dans les angoisses de l’enfantement. Et c
6535 qu’à ce jour, la création tout entière gémit dans les angoisses de l’enfantement. Et ce n’est pas elle seulement, mais nous
6536 la création tout entière gémit dans les angoisses de l’enfantement. Et ce n’est pas elle seulement, mais nous aussi, qui a
6537 création tout entière gémit dans les angoisses de l’ enfantement. Et ce n’est pas elle seulement, mais nous aussi, qui avon
6538 st pas elle seulement, mais nous aussi, qui avons les prémices de l’Esprit ; nous aussi nous soupirons en nous-mêmes, en at
6539 eulement, mais nous aussi, qui avons les prémices de l’Esprit ; nous aussi nous soupirons en nous-mêmes, en attendant l’ad
6540 ement, mais nous aussi, qui avons les prémices de l’ Esprit ; nous aussi nous soupirons en nous-mêmes, en attendant l’adopt
6541 aussi nous soupirons en nous-mêmes, en attendant l’ adoption, la rédemption de notre corps. Car c’est en espérance que nou
6542 soupirons en nous-mêmes, en attendant l’adoption, la rédemption de notre corps. Car c’est en espérance que nous sommes sau
6543 ous-mêmes, en attendant l’adoption, la rédemption de notre corps. Car c’est en espérance que nous sommes sauvés. » (Romain
6544 nous sommes sauvés. » (Romains 8, 22-24.) Parler de la Nature comme le firent tant de romantiques, en termes d’extase rel
6545 us sommes sauvés. » (Romains 8, 22-24.) Parler de la Nature comme le firent tant de romantiques, en termes d’extase religi
6546 . » (Romains 8, 22-24.) Parler de la Nature comme le firent tant de romantiques, en termes d’extase religieuse, c’est se m
6547 réatures, ou plutôt c’est avouer qu’on n’a pas su les voir. Aller demander à la Nature la révélation d’une vie saine et dél
6548 vouer qu’on n’a pas su les voir. Aller demander à la Nature la révélation d’une vie saine et délivrée de toute contrainte
6549 n n’a pas su les voir. Aller demander à la Nature la révélation d’une vie saine et délivrée de toute contrainte mauvaise,
6550 es voir. Aller demander à la Nature la révélation d’ une vie saine et délivrée de toute contrainte mauvaise, c’est trahir c
6551 Nature la révélation d’une vie saine et délivrée de toute contrainte mauvaise, c’est trahir cette « attente ardente », ce
6552 e question angoissée des bêtes et des plantes que l’ apôtre a su percevoir. C’est la nature qui cherche en nous ce que notr
6553 et des plantes que l’apôtre a su percevoir. C’est la nature qui cherche en nous ce que notre délire allait lui demander :
6554 en nous ce que notre délire allait lui demander : les prémices d’une nouvelle création, et la « révélation des enfants de l
6555 e notre délire allait lui demander : les prémices d’ une nouvelle création, et la « révélation des enfants de lumière » !
6556 mander : les prémices d’une nouvelle création, et la « révélation des enfants de lumière » ! 21 avril 1935 Voici les
6557 nouvelle création, et la « révélation des enfants de lumière » ! 21 avril 1935 Voici les affiches des partis, pour l
6558 enfants de lumière » ! 21 avril 1935 Voici les affiches des partis, pour la campagne d’élections municipales. Quelle
6559 avril 1935 Voici les affiches des partis, pour la campagne d’élections municipales. Quelle bouillabaisse de termes abst
6560 Voici les affiches des partis, pour la campagne d’ élections municipales. Quelle bouillabaisse de termes abstraits — sans
6561 gne d’élections municipales. Quelle bouillabaisse de termes abstraits — sans nul rapport à rien de ce qu’exige la situatio
6562 sse de termes abstraits — sans nul rapport à rien de ce qu’exige la situation locale, bien entendu. Les mêmes termes, d’ai
6563 bstraits — sans nul rapport à rien de ce qu’exige la situation locale, bien entendu. Les mêmes termes, d’ailleurs, à peu d
6564 de ce qu’exige la situation locale, bien entendu. Les mêmes termes, d’ailleurs, à peu de chose près, sur les affiches du « 
6565 êmes termes, d’ailleurs, à peu de chose près, sur les affiches du « centre » et sur celles de la gauche. (Car la droite n’o
6566 rès, sur les affiches du « centre » et sur celles de la gauche. (Car la droite n’ose pas dire son nom dans ce canton.) Les
6567 , sur les affiches du « centre » et sur celles de la gauche. (Car la droite n’ose pas dire son nom dans ce canton.) Les pa
6568 es du « centre » et sur celles de la gauche. (Car la droite n’ose pas dire son nom dans ce canton.) Les partis de gauche o
6569 la droite n’ose pas dire son nom dans ce canton.) Les partis de gauche ont fait liste commune : cela s’appelle le front ant
6570 ’ose pas dire son nom dans ce canton.) Les partis de gauche ont fait liste commune : cela s’appelle le front antifasciste.
6571 de gauche ont fait liste commune : cela s’appelle le front antifasciste. Je recopie cette phrase merveilleuse qu’ils ont f
6572 ous sommes antifascistes ! » Après quoi viennent les revendications pratiques : aide aux chômeurs, pose de deux nouvelles
6573 evendications pratiques : aide aux chômeurs, pose de deux nouvelles boîtes aux lettres ; ouverture d’un chalet de nécessit
6574 de deux nouvelles boîtes aux lettres ; ouverture d’ un chalet de nécessité pour hommes et dames sur la place principale. S
6575 velles boîtes aux lettres ; ouverture d’un chalet de nécessité pour hommes et dames sur la place principale. Si c’est cela
6576 d’un chalet de nécessité pour hommes et dames sur la place principale. Si c’est cela l’antifascisme, les fascistes doivent
6577 s et dames sur la place principale. Si c’est cela l’ antifascisme, les fascistes doivent être de drôles de gens. 25 avri
6578 a place principale. Si c’est cela l’antifascisme, les fascistes doivent être de drôles de gens. 25 avril 1935 Commun
6579 t cela l’antifascisme, les fascistes doivent être de drôles de gens. 25 avril 1935 Communisme. — Dans la petite lib
6580 ntifascisme, les fascistes doivent être de drôles de gens. 25 avril 1935 Communisme. — Dans la petite librairie gra
6581 de gens. 25 avril 1935 Communisme. — Dans la petite librairie grande ouverte sur la rue principale, je parcours co
6582 me. — Dans la petite librairie grande ouverte sur la rue principale, je parcours comme chaque jour, la plupart des journau
6583 bonhomme au nez violacé traîne ses pantoufles par la boutique et grogne sans arrêt. Il interpelle assez grossièrement la p
6584 gne sans arrêt. Il interpelle assez grossièrement la patronne qui ne répond pas. C’est un habitué, il est comme ça. Il fau
6585 d pas. C’est un habitué, il est comme ça. Il faut le laisser frapper le sol de sa canne et redresser sa casquette pour pon
6586 itué, il est comme ça. Il faut le laisser frapper le sol de sa canne et redresser sa casquette pour ponctuer ses raisonnem
6587 l est comme ça. Il faut le laisser frapper le sol de sa canne et redresser sa casquette pour ponctuer ses raisonnements d’
6588 sser sa casquette pour ponctuer ses raisonnements d’ alcoolique. Entre un homme maigre, casquette et veste de toile bleue p
6589 olique. Entre un homme maigre, casquette et veste de toile bleue proprette, visage nerveux et intelligent. — Vous avez mon
6590 ntelligent. — Vous avez mon Huma ? — Bou die ! je les ai toutes vendues, Monsieur Dumas ! — (C’est jour de foire.) — Allons
6591 ai toutes vendues, Monsieur Dumas ! — (C’est jour de foire.) — Allons, tant mieux, fait l’homme. Et si des fois on vous en
6592 (C’est jour de foire.) — Allons, tant mieux, fait l’ homme. Et si des fois on vous en demande de trop, vous n’avez qu’à don
6593 , fait l’homme. Et si des fois on vous en demande de trop, vous n’avez qu’à donner la mienne, vous savez. Plus on la lit…
6594 n’avez qu’à donner la mienne, vous savez. Plus on la lit… Ce généreux apôtre de la cause va sortir, lorsque le vieux gâteu
6595 e, vous savez. Plus on la lit… Ce généreux apôtre de la cause va sortir, lorsque le vieux gâteux l’arrête sur le seuil. — 
6596 vous savez. Plus on la lit… Ce généreux apôtre de la cause va sortir, lorsque le vieux gâteux l’arrête sur le seuil. — Et
6597 Ce généreux apôtre de la cause va sortir, lorsque le vieux gâteux l’arrête sur le seuil. — Et alors, mon bon, c’est toi qu
6598 re de la cause va sortir, lorsque le vieux gâteux l’ arrête sur le seuil. — Et alors, mon bon, c’est toi qu’on va mettre à
6599 e va sortir, lorsque le vieux gâteux l’arrête sur le seuil. — Et alors, mon bon, c’est toi qu’on va mettre à la mairie ? —
6600 — Et alors, mon bon, c’est toi qu’on va mettre à la mairie ? — L’homme au visage maigre fait un geste réticent. Le vieux
6601 on bon, c’est toi qu’on va mettre à la mairie ? —  L’ homme au visage maigre fait un geste réticent. Le vieux le tient par l
6602  L’homme au visage maigre fait un geste réticent. Le vieux le tient par la manche et lui martèle de sa canne le bout des s
6603 au visage maigre fait un geste réticent. Le vieux le tient par la manche et lui martèle de sa canne le bout des souliers :
6604 gre fait un geste réticent. Le vieux le tient par la manche et lui martèle de sa canne le bout des souliers : — Tu m’enten
6605 t. Le vieux le tient par la manche et lui martèle de sa canne le bout des souliers : — Tu m’entends ? Nous ôtres, nous all
6606 le tient par la manche et lui martèle de sa canne le bout des souliers : — Tu m’entends ? Nous ôtres, nous allons vous pas
6607 s ôtres, nous allons vous passer à tabaque, toute la bande ! — Oh ! dit l’homme, si vous y arrivez, c’est bien votre droit
6608 ous passer à tabaque, toute la bande ! — Oh ! dit l’ homme, si vous y arrivez, c’est bien votre droit ! — Notre droit ? Peu
6609 roit ? Peuchère, c’est notre devoir ! (Il glousse d’ un air malin.) — On sait bien, dit le communiste, que vous avez toujou
6610 (Il glousse d’un air malin.) — On sait bien, dit le communiste, que vous avez toujours soutenu les gros qui pressent les
6611 dit le communiste, que vous avez toujours soutenu les gros qui pressent les petits ! — Les gros ! mon bon. Mais c’est donc
6612 vous avez toujours soutenu les gros qui pressent les petits ! — Les gros ! mon bon. Mais c’est donc vous, qui nous pressez
6613 ours soutenu les gros qui pressent les petits ! —  Les gros ! mon bon. Mais c’est donc vous, qui nous pressez toute notre ar
6614 ez toute notre argent, depuis quatre ans que vous l’ avez, le pouvoir ! — L’autre se dégage et s’en va, un peu triste, ou p
6615 notre argent, depuis quatre ans que vous l’avez, le pouvoir ! — L’autre se dégage et s’en va, un peu triste, ou peut-être
6616 e ces deux hommes, je n’hésite pas : je vote pour le communiste. C’est un Méridional du type sérieux, un de ces hommes qui
6617 mmuniste. C’est un Méridional du type sérieux, un de ces hommes qui pourraient sauver sa région de la totale décrépitude o
6618 un de ces hommes qui pourraient sauver sa région de la totale décrépitude où l’ont laissée les radicaux et les créatures
6619 de ces hommes qui pourraient sauver sa région de la totale décrépitude où l’ont laissée les radicaux et les créatures de
6620 ient sauver sa région de la totale décrépitude où l’ ont laissée les radicaux et les créatures de Bouisson, dont mon alcool
6621 région de la totale décrépitude où l’ont laissée les radicaux et les créatures de Bouisson, dont mon alcoolique fait parti
6622 tale décrépitude où l’ont laissée les radicaux et les créatures de Bouisson, dont mon alcoolique fait partie. Voilà l’aspec
6623 de où l’ont laissée les radicaux et les créatures de Bouisson, dont mon alcoolique fait partie. Voilà l’aspect local et pe
6624 Bouisson, dont mon alcoolique fait partie. Voilà l’ aspect local et personnel de la question, sur le plan des prochaines é
6625 ue fait partie. Voilà l’aspect local et personnel de la question, sur le plan des prochaines élections municipales. Mais i
6626 fait partie. Voilà l’aspect local et personnel de la question, sur le plan des prochaines élections municipales. Mais il y
6627 s sont du même niveau social, sans doute parents, de mœurs et de langage pareils. S’ils s’opposent, c’est que l’un est ava
6628 me niveau social, sans doute parents, de mœurs et de langage pareils. S’ils s’opposent, c’est que l’un est avare et légère
6629 l’autre énergique et assez sensé. Simple question de tempérament. Peut-être aussi le communiste n’est-il pas encore parven
6630 . Simple question de tempérament. Peut-être aussi le communiste n’est-il pas encore parvenu à « mettre de côté » autant qu
6631 communiste n’est-il pas encore parvenu à « mettre de côté » autant qu’il le voudrait. Mais ce n’est pas sûr. Je sais bien
6632 encore parvenu à « mettre de côté » autant qu’il le voudrait. Mais ce n’est pas sûr. Je sais bien une douzaine de ses cam
6633 Mais ce n’est pas sûr. Je sais bien une douzaine de ses camarades qui comptent parmi les mieux rentés de ce pays. Faut-il
6634 une douzaine de ses camarades qui comptent parmi les mieux rentés de ce pays. Faut-il donc penser que les partis expriment
6635 ses camarades qui comptent parmi les mieux rentés de ce pays. Faut-il donc penser que les partis expriment tout simplement
6636 mieux rentés de ce pays. Faut-il donc penser que les partis expriment tout simplement des attitudes morales différentes ?
6637 qui avais acheté, innocemment, le dernier numéro de l’Huma. De la haine et encore de la haine, quelques mensonges grossie
6638 i avais acheté, innocemment, le dernier numéro de l’ Huma. De la haine et encore de la haine, quelques mensonges grossiers,
6639 acheté, innocemment, le dernier numéro de l’Huma. De la haine et encore de la haine, quelques mensonges grossiers, le truq
6640 eté, innocemment, le dernier numéro de l’Huma. De la haine et encore de la haine, quelques mensonges grossiers, le truquag
6641 e dernier numéro de l’Huma. De la haine et encore de la haine, quelques mensonges grossiers, le truquage habituel des titr
6642 ernier numéro de l’Huma. De la haine et encore de la haine, quelques mensonges grossiers, le truquage habituel des titres,
6643 encore de la haine, quelques mensonges grossiers, le truquage habituel des titres, une sauce aigre où nagent de grandes vé
6644 ge habituel des titres, une sauce aigre où nagent de grandes vérités brutales, toujours bonnes à dire, mais mal dites. J’a
6645 ujours bonnes à dire, mais mal dites. J’accepte à la rigueur cette division du monde en gros et en petits, si c’est le seu
6646 division du monde en gros et en petits, si c’est le seul moyen pratique de faire valoir les droits élémentaires d’une par
6647 ros et en petits, si c’est le seul moyen pratique de faire valoir les droits élémentaires d’une partie de la population. M
6648 , si c’est le seul moyen pratique de faire valoir les droits élémentaires d’une partie de la population. Mais quelle trahis
6649 pratique de faire valoir les droits élémentaires d’ une partie de la population. Mais quelle trahison des « petits » repré
6650 faire valoir les droits élémentaires d’une partie de la population. Mais quelle trahison des « petits » représente alors c
6651 re valoir les droits élémentaires d’une partie de la population. Mais quelle trahison des « petits » représente alors ce j
6652 ésente alors ce journal ! Leur seule force contre les capitalistes, et surtout contre leurs suppôts, ces retraités radicaux
6653 ces retraités radicaux ou socialistes, ce serait d’ être le parti de la vérité et du bon sens. Ils auraient avec eux tous
6654 traités radicaux ou socialistes, ce serait d’être le parti de la vérité et du bon sens. Ils auraient avec eux tous les hom
6655 adicaux ou socialistes, ce serait d’être le parti de la vérité et du bon sens. Ils auraient avec eux tous les hommes — bou
6656 caux ou socialistes, ce serait d’être le parti de la vérité et du bon sens. Ils auraient avec eux tous les hommes — bourge
6657 vérité et du bon sens. Ils auraient avec eux tous les hommes — bourgeois ou intellectuels — qui détestent la politique et l
6658 mmes — bourgeois ou intellectuels — qui détestent la politique et la combine électorale. Au lieu de quoi, on pervertit les
6659 ou intellectuels — qui détestent la politique et la combine électorale. Au lieu de quoi, on pervertit les révoltes les mi
6660 combine électorale. Au lieu de quoi, on pervertit les révoltes les mieux justifiées, on les étourdit de mensonges, on les a
6661 orale. Au lieu de quoi, on pervertit les révoltes les mieux justifiées, on les étourdit de mensonges, on les abreuve d’une
6662 n pervertit les révoltes les mieux justifiées, on les étourdit de mensonges, on les abreuve d’une prose abstraite, brutale
6663 es révoltes les mieux justifiées, on les étourdit de mensonges, on les abreuve d’une prose abstraite, brutale — eux qui le
6664 ieux justifiées, on les étourdit de mensonges, on les abreuve d’une prose abstraite, brutale — eux qui le sont si peu ! — e
6665 ées, on les étourdit de mensonges, on les abreuve d’ une prose abstraite, brutale — eux qui le sont si peu ! — et si possib
6666 abreuve d’une prose abstraite, brutale — eux qui le sont si peu ! — et si possible, plus médiocre que celle des grands jo
6667 ible, plus médiocre que celle des grands journaux d’ information. On leur impose une mystique confectionnée à l’usage des m
6668 tion. On leur impose une mystique confectionnée à l’ usage des moujiks… Quel est l’homme sain qui oserait affirmer que ce q
6669 que confectionnée à l’usage des moujiks… Quel est l’ homme sain qui oserait affirmer que ce quotidien lamentable, hérissé d
6670 ait affirmer que ce quotidien lamentable, hérissé de clichés hargneux, travaille pour le bien de ses lecteurs ? Si l’on pr
6671 able, hérissé de clichés hargneux, travaille pour le bien de ses lecteurs ? Si l’on prend au sérieux le sort qui est fait
6672 rissé de clichés hargneux, travaille pour le bien de ses lecteurs ? Si l’on prend au sérieux le sort qui est fait aux ouvr
6673 neux, travaille pour le bien de ses lecteurs ? Si l’ on prend au sérieux le sort qui est fait aux ouvriers — ce n’est pas l
6674 e bien de ses lecteurs ? Si l’on prend au sérieux le sort qui est fait aux ouvriers — ce n’est pas le cas des intellectuel
6675 le sort qui est fait aux ouvriers — ce n’est pas le cas des intellectuels qui « adhèrent » aux disciplines staliniennes e
6676  adhèrent » aux disciplines staliniennes en haine d’ une société qu’ils sont encore les seuls à croire « chrétienne » — il
6677 niennes en haine d’une société qu’ils sont encore les seuls à croire « chrétienne » — il faut bien dire que le parti commun
6678 s à croire « chrétienne » — il faut bien dire que le parti communiste est une sinistre trahison des pauvres hommes. Beauco
6679 inistre trahison des pauvres hommes. Beaucoup, je le sais, résistent à l’intoxication, mais cela prouve simplement, une fo
6680 pauvres hommes. Beaucoup, je le sais, résistent à l’ intoxication, mais cela prouve simplement, une fois de plus, que l’hom
6681 ais cela prouve simplement, une fois de plus, que l’ homme du peuple ne comprend pas profondément ce qu’on lui donne à lire
6682 est sans rapport réel avec cette situation. Mais les intellectuels, dont le métier est de comprendre, dont le métier est d
6683 vec cette situation. Mais les intellectuels, dont le métier est de comprendre, dont le métier est de vouloir la vérité, do
6684 ation. Mais les intellectuels, dont le métier est de comprendre, dont le métier est de vouloir la vérité, dont la seule di
6685 llectuels, dont le métier est de comprendre, dont le métier est de vouloir la vérité, dont la seule dignité est d’avoir fo
6686 t le métier est de comprendre, dont le métier est de vouloir la vérité, dont la seule dignité est d’avoir foi dans le pouv
6687 est de comprendre, dont le métier est de vouloir la vérité, dont la seule dignité est d’avoir foi dans le pouvoir d’une p
6688 re, dont le métier est de vouloir la vérité, dont la seule dignité est d’avoir foi dans le pouvoir d’une pensée droite, — 
6689 t de vouloir la vérité, dont la seule dignité est d’ avoir foi dans le pouvoir d’une pensée droite, — on se demande par que
6690 érité, dont la seule dignité est d’avoir foi dans le pouvoir d’une pensée droite, — on se demande par quelle rancune vague
6691 la seule dignité est d’avoir foi dans le pouvoir d’ une pensée droite, — on se demande par quelle rancune vaguement démoni
6692 viennent à s’imaginer qu’ils défendent eux aussi les « petits » en défendant ces exploiteurs de la bassesse et du mensonge
6693 aussi les « petits » en défendant ces exploiteurs de la bassesse et du mensonge en service commandé. L’homme à la veste bl
6694 si les « petits » en défendant ces exploiteurs de la bassesse et du mensonge en service commandé. L’homme à la veste bleue
6695 e la bassesse et du mensonge en service commandé. L’ homme à la veste bleue, je le comprends et je l’aime dans son effort m
6696 sse et du mensonge en service commandé. L’homme à la veste bleue, je le comprends et je l’aime dans son effort maladroit e
6697 en service commandé. L’homme à la veste bleue, je le comprends et je l’aime dans son effort maladroit et réel. Mais dans l
6698 . L’homme à la veste bleue, je le comprends et je l’ aime dans son effort maladroit et réel. Mais dans la mesure où je l’ai
6699 aime dans son effort maladroit et réel. Mais dans la mesure où je l’aime, ils me dégoûtent. 28 avril 1935 Le problè
6700 fort maladroit et réel. Mais dans la mesure où je l’ aime, ils me dégoûtent. 28 avril 1935 Le problème des gens. — C
6701 je l’aime, ils me dégoûtent. 28 avril 1935 Le problème des gens. — Comment arriver à ne plus s’indigner sans cesse
6702 — Comment arriver à ne plus s’indigner sans cesse de la bêtise des gens ? Ou mieux : comment arriver à ne s’en indigner pl
6703 omment arriver à ne plus s’indigner sans cesse de la bêtise des gens ? Ou mieux : comment arriver à ne s’en indigner plus
6704 comment arriver à ne s’en indigner plus que dans la mesure où notre action réparatrice a besoin d’un élan passionné qui l
6705 ns la mesure où notre action réparatrice a besoin d’ un élan passionné qui la soutienne ? En agissant davantage notre « idé
6706 tion réparatrice a besoin d’un élan passionné qui la soutienne ? En agissant davantage notre « idéal », sans doute laisser
6707 otre « idéal », sans doute laisserions-nous moins de loisirs à notre faculté judicatoire pour exercer ses comparaisons tro
6708 ses comparaisons trop exactes entre cet idéal et les réalités stupides qui nous blessent. S’engager au lieu de s’indigner 
6709 ent. S’engager au lieu de s’indigner : voilà bien le principe de la guérison que j’attends. Je n’ose croire qu’il me soit
6710 er au lieu de s’indigner : voilà bien le principe de la guérison que j’attends. Je n’ose croire qu’il me soit bien utile d
6711 au lieu de s’indigner : voilà bien le principe de la guérison que j’attends. Je n’ose croire qu’il me soit bien utile de s
6712 attends. Je n’ose croire qu’il me soit bien utile de seulement le savoir… Si j’étais sûr que la bêtise humaine est à jamai
6713 ’ose croire qu’il me soit bien utile de seulement le savoir… Si j’étais sûr que la bêtise humaine est à jamais irrémédiabl
6714 utile de seulement le savoir… Si j’étais sûr que la bêtise humaine est à jamais irrémédiable, je serais tranquille : je n
6715 ille : je ne m’occuperais en bonne conscience que d’ art et de littérature. Mais quoi ! rien n’est moins sûr que cette perm
6716 ne m’occuperais en bonne conscience que d’art et de littérature. Mais quoi ! rien n’est moins sûr que cette permanence de
6717 quoi ! rien n’est moins sûr que cette permanence de nos maux. Non que je croie à un « Progrès » réel possible. Mais je cr
6718 iblesse veut que cet effort se traduise chez moi, d’ ordinaire, par une simple mauvaise humeur (trop justifiée) contre l’ép
6719 ne simple mauvaise humeur (trop justifiée) contre l’ époque. Mes sarcasmes me prouvent en effet que je n’accepte pas l’inac
6720 rcasmes me prouvent en effet que je n’accepte pas l’ inacceptable, que je le juge et m’en détache, et c’est déjà ça de sauv
6721 effet que je n’accepte pas l’inacceptable, que je le juge et m’en détache, et c’est déjà ça de sauvé. Mais il faudrait pas
6722 que je le juge et m’en détache, et c’est déjà ça de sauvé. Mais il faudrait passer à une attaque active, et je cesserais
6723 une attaque active, et je cesserais tout aussitôt de m’agacer. (Au fond tout cela est des plus simples, évident, et si j’é
6724 es, évident, et si j’éprouve quelque difficulté à le formuler, c’est que mon dire reste dans mon esprit inséparable d’un f
6725 st que mon dire reste dans mon esprit inséparable d’ un faire qui, lui, n’est pas aisé, et reste même fort obscur et ardu —
6726 même fort obscur et ardu — pour autant que je ne l’ envisage pas avec une loyauté entière, un esprit d’obéissance, une abs
6727 ’envisage pas avec une loyauté entière, un esprit d’ obéissance, une absolue disponibilité.) 2 mai 1935 Politique et
6728 2 mai 1935 Politique et réalité. — Je sors d’ une réunion populaire qui s’est tenue dans la salle désaffectée d’un c
6729 sors d’une réunion populaire qui s’est tenue dans la salle désaffectée d’un cinéma. (J’avais omis de noter ce fait curieux
6730 pulaire qui s’est tenue dans la salle désaffectée d’ un cinéma. (J’avais omis de noter ce fait curieux : il n’y a plus de c
6731 s la salle désaffectée d’un cinéma. (J’avais omis de noter ce fait curieux : il n’y a plus de ciné à A…) Le député sociali
6732 ais omis de noter ce fait curieux : il n’y a plus de ciné à A…) Le député socialiste, maire de N…, et deux autres militant
6733 ter ce fait curieux : il n’y a plus de ciné à A…) Le député socialiste, maire de N…, et deux autres militants socialistes
6734 a plus de ciné à A…) Le député socialiste, maire de N…, et deux autres militants socialistes et communistes ont parlé. Co
6735 eussent parlé à Pantin ou à Lille ; comme parlent le Popu et l’Huma, sauf quelques coups de gueule contre les riches du pa
6736 lé à Pantin ou à Lille ; comme parlent le Popu et l’ Huma, sauf quelques coups de gueule contre les riches du pays. Tout le
6737 me parlent le Popu et l’Huma, sauf quelques coups de gueule contre les riches du pays. Tout le monde est très content. Là-
6738 u et l’Huma, sauf quelques coups de gueule contre les riches du pays. Tout le monde est très content. Là-dessus, deux série
6739 le monde est très content. Là-dessus, deux séries de réflexions me tentent. 1) Réflexion du « fasciste » ou du disciple de
6740 tent. 1) Réflexion du « fasciste » ou du disciple de Lénine. — Le peuple, tel qu’il est en réalité, ou tel qu’il est deven
6741 exion du « fasciste » ou du disciple de Lénine. —  Le peuple, tel qu’il est en réalité, ou tel qu’il est devenu après x ann
6742 n réalité, ou tel qu’il est devenu après x années de régime capitaliste parlementaire et laïque, le peuple ne sait plus vo
6743 es de régime capitaliste parlementaire et laïque, le peuple ne sait plus voir le réel. Provisoirement, il a perdu ce qui f
6744 lementaire et laïque, le peuple ne sait plus voir le réel. Provisoirement, il a perdu ce qui fut de tous temps sa vraie fo
6745 ir le réel. Provisoirement, il a perdu ce qui fut de tous temps sa vraie force. Il ne sait plus où sont ses intérêts, à qu
6746 s où sont ses intérêts, à quel niveau il faudrait les défendre. « Aliéné » par un ordre inhumain, il ne sait plus penser sa
6747 ermes de revendications abstraites, il vous parle de la réaction, du laïcisme, du fascisme, etc. Poussez-le dans le détail
6748 es de revendications abstraites, il vous parle de la réaction, du laïcisme, du fascisme, etc. Poussez-le dans le détail de
6749 réaction, du laïcisme, du fascisme, etc. Poussez- le dans le détail de ses revendications, posez-lui des questions précise
6750 n, du laïcisme, du fascisme, etc. Poussez-le dans le détail de ses revendications, posez-lui des questions précises sur le
6751 isme, du fascisme, etc. Poussez-le dans le détail de ses revendications, posez-lui des questions précises sur les causes d
6752 endications, posez-lui des questions précises sur les causes de la crise dont il souffre et sur les remèdes qu’il estime né
6753 , posez-lui des questions précises sur les causes de la crise dont il souffre et sur les remèdes qu’il estime nécessaires 
6754 osez-lui des questions précises sur les causes de la crise dont il souffre et sur les remèdes qu’il estime nécessaires : i
6755 sur les causes de la crise dont il souffre et sur les remèdes qu’il estime nécessaires : il vous débite des clichés de jour
6756 l estime nécessaires : il vous débite des clichés de journal, ou se contente de hocher la tête et de menacer le capitalism
6757 ous débite des clichés de journal, ou se contente de hocher la tête et de menacer le capitalisme ou les fauteurs d’anarchi
6758 des clichés de journal, ou se contente de hocher la tête et de menacer le capitalisme ou les fauteurs d’anarchie. Et cela
6759 s de journal, ou se contente de hocher la tête et de menacer le capitalisme ou les fauteurs d’anarchie. Et cela finit touj
6760 l, ou se contente de hocher la tête et de menacer le capitalisme ou les fauteurs d’anarchie. Et cela finit toujours par un
6761 de hocher la tête et de menacer le capitalisme ou les fauteurs d’anarchie. Et cela finit toujours par une discussion de pol
6762 tête et de menacer le capitalisme ou les fauteurs d’ anarchie. Et cela finit toujours par une discussion de politique génér
6763 archie. Et cela finit toujours par une discussion de politique générale. Ils connaissent tous quelques moyens très simples
6764 s qui empêcheraient « Hidler » (comme dit Simard) de faire la guerre. Conclusion : il appartient à un seul chef, à un Part
6765 êcheraient « Hidler » (comme dit Simard) de faire la guerre. Conclusion : il appartient à un seul chef, à un Parti, ou enc
6766 un seul chef, à un Parti, ou encore à une équipe de techniciens et d’hommes de main d’imposer à ce peuple déprimé un cadr
6767 n Parti, ou encore à une équipe de techniciens et d’ hommes de main d’imposer à ce peuple déprimé un cadre politique nouvea
6768 ou encore à une équipe de techniciens et d’hommes de main d’imposer à ce peuple déprimé un cadre politique nouveau, qui lu
6769 e à une équipe de techniciens et d’hommes de main d’ imposer à ce peuple déprimé un cadre politique nouveau, qui lui permet
6770 rimé un cadre politique nouveau, qui lui permette de se refaire des racines, de travailler et de se reproduire. Il faut ab
6771 veau, qui lui permette de se refaire des racines, de travailler et de se reproduire. Il faut abandonner la croyance illuso
6772 mette de se refaire des racines, de travailler et de se reproduire. Il faut abandonner la croyance illusoire en quelque Vo
6773 ravailler et de se reproduire. Il faut abandonner la croyance illusoire en quelque Volonté infaillible du Peuple. Ou mieux
6774 nfaillible du Peuple. Ou mieux : présenter ce que l’ on fait comme l’expression de cette Volonté. Aider le peuple sans dema
6775 uple. Ou mieux : présenter ce que l’on fait comme l’ expression de cette Volonté. Aider le peuple sans demander son avis. A
6776 x : présenter ce que l’on fait comme l’expression de cette Volonté. Aider le peuple sans demander son avis. Avec l’espoir
6777 n fait comme l’expression de cette Volonté. Aider le peuple sans demander son avis. Avec l’espoir qu’un jour ou l’autre, i
6778 nté. Aider le peuple sans demander son avis. Avec l’ espoir qu’un jour ou l’autre, il se retrouvera capable d’exprimer des
6779 r qu’un jour ou l’autre, il se retrouvera capable d’ exprimer des désirs réels, disciplinés et « raisonnables ». 2) Réflexi
6780  raisonnables ». 2) Réflexion du personnaliste. —  Le peuple tel qu’on le voit paraît tout ignorant de ses intérêts véritab
6781 Réflexion du personnaliste. — Le peuple tel qu’on le voit paraît tout ignorant de ses intérêts véritables. Mais c’est qu’i
6782  Le peuple tel qu’on le voit paraît tout ignorant de ses intérêts véritables. Mais c’est qu’il ne peut pas les exprimer tr
6783 intérêts véritables. Mais c’est qu’il ne peut pas les exprimer très aisément. Question de langage. Revenez voir ces mêmes h
6784 ne peut pas les exprimer très aisément. Question de langage. Revenez voir ces mêmes hommes que j’ai dit, revenez deux foi
6785 revenez deux fois, trois fois, vingt fois, prenez- les sur le fait au détour d’une phrase maladroite, rendez-les attentifs a
6786 deux fois, trois fois, vingt fois, prenez-les sur le fait au détour d’une phrase maladroite, rendez-les attentifs au sens
6787 ois, vingt fois, prenez-les sur le fait au détour d’ une phrase maladroite, rendez-les attentifs au sens de leurs clichés.
6788 le fait au détour d’une phrase maladroite, rendez- les attentifs au sens de leurs clichés. Mieux encore, parlez-leur de leur
6789 e phrase maladroite, rendez-les attentifs au sens de leurs clichés. Mieux encore, parlez-leur de leur travail, de celui qu
6790 sens de leurs clichés. Mieux encore, parlez-leur de leur travail, de celui qu’ils sont en train de faire tandis que vous
6791 ichés. Mieux encore, parlez-leur de leur travail, de celui qu’ils sont en train de faire tandis que vous causez, vous arri
6792 causez, vous arriverez à leur tirer quelque chose de sensé, de vécu, de réel, — et qui renversera les conclusions cyniques
6793 us arriverez à leur tirer quelque chose de sensé, de vécu, de réel, — et qui renversera les conclusions cyniques de tout à
6794 rez à leur tirer quelque chose de sensé, de vécu, de réel, — et qui renversera les conclusions cyniques de tout à l’heure.
6795 e de sensé, de vécu, de réel, — et qui renversera les conclusions cyniques de tout à l’heure. Ils vous diront d’abord que l
6796 éel, — et qui renversera les conclusions cyniques de tout à l’heure. Ils vous diront d’abord que le fond de leur vie, c’es
6797 qui renversera les conclusions cyniques de tout à l’ heure. Ils vous diront d’abord que le fond de leur vie, c’est l’ennui.
6798 es de tout à l’heure. Ils vous diront d’abord que le fond de leur vie, c’est l’ennui. Ils expliqueront presque toujours ce
6799 ut à l’heure. Ils vous diront d’abord que le fond de leur vie, c’est l’ennui. Ils expliqueront presque toujours cet ennui
6800 ous diront d’abord que le fond de leur vie, c’est l’ ennui. Ils expliqueront presque toujours cet ennui par les conditions
6801 . Ils expliqueront presque toujours cet ennui par les conditions du travail créées depuis la guerre dans les campagnes : no
6802 ennui par les conditions du travail créées depuis la guerre dans les campagnes : nomadisme des employés et ouvriers, impos
6803 onditions du travail créées depuis la guerre dans les campagnes : nomadisme des employés et ouvriers, impossibilité de « su
6804 nomadisme des employés et ouvriers, impossibilité de « suivre » un effort bien localisé, de s’attacher à ce qu’on fait ; n
6805 ossibilité de « suivre » un effort bien localisé, de s’attacher à ce qu’on fait ; nécessité où l’on se trouve de bâcler so
6806 isé, de s’attacher à ce qu’on fait ; nécessité où l’ on se trouve de bâcler son ouvrage, pour gagner de quoi vivre, tentati
6807 her à ce qu’on fait ; nécessité où l’on se trouve de bâcler son ouvrage, pour gagner de quoi vivre, tentation perpétuelle
6808 l’on se trouve de bâcler son ouvrage, pour gagner de quoi vivre, tentation perpétuelle de changer de condition. Ils vous d
6809 pour gagner de quoi vivre, tentation perpétuelle de changer de condition. Ils vous diront aussi qu’ils n’ont plus le cœur
6810 r de quoi vivre, tentation perpétuelle de changer de condition. Ils vous diront aussi qu’ils n’ont plus le cœur à leur ouv
6811 ondition. Ils vous diront aussi qu’ils n’ont plus le cœur à leur ouvrage, quand ils savent que les résultats sont à la mer
6812 plus le cœur à leur ouvrage, quand ils savent que les résultats sont à la merci soit d’un trust, soit d’un syndicat d’incap
6813 uvrage, quand ils savent que les résultats sont à la merci soit d’un trust, soit d’un syndicat d’incapables. Ils vous diro
6814 ils savent que les résultats sont à la merci soit d’ un trust, soit d’un syndicat d’incapables. Ils vous diront que le mal
6815 s résultats sont à la merci soit d’un trust, soit d’ un syndicat d’incapables. Ils vous diront que le mal vient de l’État —
6816 nt à la merci soit d’un trust, soit d’un syndicat d’ incapables. Ils vous diront que le mal vient de l’État — et cela veut
6817 t d’un syndicat d’incapables. Ils vous diront que le mal vient de l’État — et cela veut dire : de ceux qui font les lois s
6818 d’incapables. Ils vous diront que le mal vient de l’ État — et cela veut dire : de ceux qui font les lois sans rien savoir
6819 que le mal vient de l’État — et cela veut dire : de ceux qui font les lois sans rien savoir des situations locales. Parfo
6820 de l’État — et cela veut dire : de ceux qui font les lois sans rien savoir des situations locales. Parfois ils proposeront
6821 ils proposeront quelque réforme pratique : faire de la place aux jeunes en abaissant la limite d’âge dans les chemins de
6822 s proposeront quelque réforme pratique : faire de la place aux jeunes en abaissant la limite d’âge dans les chemins de fer
6823 tique : faire de la place aux jeunes en abaissant la limite d’âge dans les chemins de fer et l’administration ; faire des
6824 ire de la place aux jeunes en abaissant la limite d’ âge dans les chemins de fer et l’administration ; faire des lois régio
6825 lace aux jeunes en abaissant la limite d’âge dans les chemins de fer et l’administration ; faire des lois régionales pour l
6826 issant la limite d’âge dans les chemins de fer et l’ administration ; faire des lois régionales pour la viticulture ; mettr
6827 l’administration ; faire des lois régionales pour la viticulture ; mettre en commun les terres d’un petit village ; vendre
6828 régionales pour la viticulture ; mettre en commun les terres d’un petit village ; vendre le vin du pays dans les épiceries
6829 pour la viticulture ; mettre en commun les terres d’ un petit village ; vendre le vin du pays dans les épiceries du pays, l
6830 en commun les terres d’un petit village ; vendre le vin du pays dans les épiceries du pays, lesquelles ne vendent que des
6831 s d’un petit village ; vendre le vin du pays dans les épiceries du pays, lesquelles ne vendent que des succédanés fabriqués
6832 riqués dans des « caves centrales » avec des vins d’ Afrique et des produits chimiques (« que vous avez la gorge brûlante a
6833 frique et des produits chimiques (« que vous avez la gorge brûlante après un verre »). Enfin ils se plaindront de ce que d
6834 ûlante après un verre »). Enfin ils se plaindront de ce que dans leur pays, il n’y a plus de vie, d’initiative, de vrai pl
6835 laindront de ce que dans leur pays, il n’y a plus de vie, d’initiative, de vrai plaisir. On n’est plus fier d’en être, on
6836 t de ce que dans leur pays, il n’y a plus de vie, d’ initiative, de vrai plaisir. On n’est plus fier d’en être, on approuve
6837 ns leur pays, il n’y a plus de vie, d’initiative, de vrai plaisir. On n’est plus fier d’en être, on approuve la jeunesse q
6838 d’initiative, de vrai plaisir. On n’est plus fier d’ en être, on approuve la jeunesse qui délaisse la terre pour la ville.
6839 laisir. On n’est plus fier d’en être, on approuve la jeunesse qui délaisse la terre pour la ville. (« C’est mort, ici ! »
6840 r d’en être, on approuve la jeunesse qui délaisse la terre pour la ville. (« C’est mort, ici ! » phrase entendue un peu pa
6841 n approuve la jeunesse qui délaisse la terre pour la ville. (« C’est mort, ici ! » phrase entendue un peu partout dans la
6842 mort, ici ! » phrase entendue un peu partout dans la province). Et puis « leur » politique, parlez-moi de « leurs combines
6843 province). Et puis « leur » politique, parlez-moi de « leurs combines », il n’y a rien à y comprendre. Dans une assemblée
6844 ns une assemblée populaire, on ne dira pas un mot de tout cela, on s’en tiendra aux clichés du journal. On n’aura pas le t
6845 ’en tiendra aux clichés du journal. On n’aura pas le temps ni le courage, ni même l’idée de pousser plus loin, d’aborder d
6846 aux clichés du journal. On n’aura pas le temps ni le courage, ni même l’idée de pousser plus loin, d’aborder des réalités.
6847 al. On n’aura pas le temps ni le courage, ni même l’ idée de pousser plus loin, d’aborder des réalités. Donc, par amour du
6848 n’aura pas le temps ni le courage, ni même l’idée de pousser plus loin, d’aborder des réalités. Donc, par amour du peuple,
6849 le courage, ni même l’idée de pousser plus loin, d’ aborder des réalités. Donc, par amour du peuple, n’écoutons plus ses a
6850 s plus ses assemblées, ce n’est pas lui. Écoutons les observations que formulent des individus pris à part, dans leur vie c
6851 e concrète. Je constate qu’elles vont toutes dans le sens de ce que proposent les personnalistes : autonomie de la région
6852 te. Je constate qu’elles vont toutes dans le sens de ce que proposent les personnalistes : autonomie de la région naturell
6853 lles vont toutes dans le sens de ce que proposent les personnalistes : autonomie de la région naturelle, communalisme, synd
6854 e ce que proposent les personnalistes : autonomie de la région naturelle, communalisme, syndicats locaux, rajeunissement d
6855 e que proposent les personnalistes : autonomie de la région naturelle, communalisme, syndicats locaux, rajeunissement des
6856 s techniques libératrices, des sports, des moyens de circuler et de s’instruire, résistance à l’état tentaculaire. (Quant
6857 bératrices, des sports, des moyens de circuler et de s’instruire, résistance à l’état tentaculaire. (Quant à la lutte cont
6858 oyens de circuler et de s’instruire, résistance à l’ état tentaculaire. (Quant à la lutte contre le capitalisme, tout le mo
6859 ruire, résistance à l’état tentaculaire. (Quant à la lutte contre le capitalisme, tout le monde en est, ou feint d’en être
6860 e à l’état tentaculaire. (Quant à la lutte contre le capitalisme, tout le monde en est, ou feint d’en être ; c’est bien mo
6861 re le capitalisme, tout le monde en est, ou feint d’ en être ; c’est bien moins concret qu’il ne semble.) Conclusion : il a
6862 semble.) Conclusion : il appartient à des équipes d’ hommes nouveaux, jeunes et sortis de toutes les classes, d’exprimer ce
6863 à des équipes d’hommes nouveaux, jeunes et sortis de toutes les classes, d’exprimer ce que taisent les journaux, les orate
6864 pes d’hommes nouveaux, jeunes et sortis de toutes les classes, d’exprimer ce que taisent les journaux, les orateurs et les
6865 nouveaux, jeunes et sortis de toutes les classes, d’ exprimer ce que taisent les journaux, les orateurs et les affiches. Et
6866 de toutes les classes, d’exprimer ce que taisent les journaux, les orateurs et les affiches. Et c’est la volonté réelle de
6867 classes, d’exprimer ce que taisent les journaux, les orateurs et les affiches. Et c’est la volonté réelle des travailleurs
6868 imer ce que taisent les journaux, les orateurs et les affiches. Et c’est la volonté réelle des travailleurs, trahie par le
6869 journaux, les orateurs et les affiches. Et c’est la volonté réelle des travailleurs, trahie par le langage politicien. La
6870 st la volonté réelle des travailleurs, trahie par le langage politicien. La dictature est la seule solution de ceux qui re
6871 s travailleurs, trahie par le langage politicien. La dictature est la seule solution de ceux qui refusent d’éduquer le peu
6872 rahie par le langage politicien. La dictature est la seule solution de ceux qui refusent d’éduquer le peuple. Dictature ou
6873 ge politicien. La dictature est la seule solution de ceux qui refusent d’éduquer le peuple. Dictature ou éducation, voilà
6874 tature est la seule solution de ceux qui refusent d’ éduquer le peuple. Dictature ou éducation, voilà le dilemme du xxe si
6875 la seule solution de ceux qui refusent d’éduquer le peuple. Dictature ou éducation, voilà le dilemme du xxe siècle. La d
6876 ’éduquer le peuple. Dictature ou éducation, voilà le dilemme du xxe siècle. La dictature est très fragile. Elle n’a qu’un
6877 re ou éducation, voilà le dilemme du xxe siècle. La dictature est très fragile. Elle n’a qu’un argument très puissant con
6878 classe, sur quels intérêts ? — Nous comptons sur l’ effort des hommes les plus humains. C’est peu, dites-vous. Mais rien d
6879 ntérêts ? — Nous comptons sur l’effort des hommes les plus humains. C’est peu, dites-vous. Mais rien d’autre n’est vrai…
6880 es plus humains. C’est peu, dites-vous. Mais rien d’ autre n’est vrai… 6 mai 1935 La mort et les cérémonies dans le
6881 Mais rien d’autre n’est vrai… 6 mai 1935 La mort et les cérémonies dans le Gard. La maison de Simard recèle un ef
6882 d’autre n’est vrai… 6 mai 1935 La mort et les cérémonies dans le Gard. La maison de Simard recèle un effrayant secr
6883 6 mai 1935 La mort et les cérémonies dans le Gard. La maison de Simard recèle un effrayant secret qu’on m’avait la
6884 1935 La mort et les cérémonies dans le Gard. La maison de Simard recèle un effrayant secret qu’on m’avait laissé igno
6885 La mort et les cérémonies dans le Gard. La maison de Simard recèle un effrayant secret qu’on m’avait laissé ignorer : une
6886 e. Nous apprenons son existence en même temps que l’ imminence de sa mort — et voici qui éveillera peut-être des réflexions
6887 enons son existence en même temps que l’imminence de sa mort — et voici qui éveillera peut-être des réflexions fécondes da
6888 éveillera peut-être des réflexions fécondes dans l’ esprit du lecteur philosophe. Déjà huit mois que nous sommes ici, et
6889 . Déjà huit mois que nous sommes ici, et combien de fois ne sommes-nous pas entrés dans la grande cuisine qui était, pens
6890 et combien de fois ne sommes-nous pas entrés dans la grande cuisine qui était, pensions-nous, tout leur logis — nous avion
6891 tout leur logis — nous avions cru comprendre que les autres pièces étaient vides ou ne servaient que de débarras —, et rie
6892 s autres pièces étaient vides ou ne servaient que de débarras —, et rien ne pouvait nous faire soupçonner cette présence,
6893 re soupçonner cette présence, à côté. Hier matin, la mère Calixte arrive tout agitée : Madame se meurt ! s’écrie-t-elle. C
6894 ame se meurt ! s’écrie-t-elle. C’est Mme Bastide, la belle-mère. — Qu’a-t-elle ? — Oh, elle m’a bien reconnue, mais elle v
6895 it, vous savez, elle est toute chargée, bou die ! l’ estomac et tout. — Mais les Simard ne m’avaient jamais parlé d’elle !
6896 oute chargée, bou die ! l’estomac et tout. — Mais les Simard ne m’avaient jamais parlé d’elle ! — Peuchère ! ils languissai
6897 tout. — Mais les Simard ne m’avaient jamais parlé d’ elle ! — Peuchère ! ils languissaient de l’emballer, la vieille ! Ils
6898 ais parlé d’elle ! — Peuchère ! ils languissaient de l’emballer, la vieille ! Ils n’auront plus à languir bien longtemps.
6899 parlé d’elle ! — Peuchère ! ils languissaient de l’ emballer, la vieille ! Ils n’auront plus à languir bien longtemps. On
6900 e ! — Peuchère ! ils languissaient de l’emballer, la vieille ! Ils n’auront plus à languir bien longtemps. On peut dire qu
6901 t plus à languir bien longtemps. On peut dire que la chose est sûre. Et on l’entend ! Trois fois par jour, le bruit d’effr
6902 gtemps. On peut dire que la chose est sûre. Et on l’ entend ! Trois fois par jour, le bruit d’effroyables discussions nous
6903 e est sûre. Et on l’entend ! Trois fois par jour, le bruit d’effroyables discussions nous parvient de la cuisine des Simar
6904 e. Et on l’entend ! Trois fois par jour, le bruit d’ effroyables discussions nous parvient de la cuisine des Simard. Un bea
6905 le bruit d’effroyables discussions nous parvient de la cuisine des Simard. Un beau-frère est arrivé, et on partage. C’est
6906 bruit d’effroyables discussions nous parvient de la cuisine des Simard. Un beau-frère est arrivé, et on partage. C’est to
6907 é, et on partage. C’est toujours assez compliqué. La nuit, par un dernier respect pour la moribonde qu’ils veillent à tour
6908 z compliqué. La nuit, par un dernier respect pour la moribonde qu’ils veillent à tour de rôle, ils sont venus discuter dan
6909 respect pour la moribonde qu’ils veillent à tour de rôle, ils sont venus discuter dans la remise qui est au-dessous de no
6910 lent à tour de rôle, ils sont venus discuter dans la remise qui est au-dessous de notre chambre, et leurs éclats de voix n
6911 est au-dessous de notre chambre, et leurs éclats de voix nous ont plusieurs fois réveillés. 7 mai 1935 Alors, Madam
6912 a-t-il, à côté ? — Elle dure, elle dure… Je viens d’ aller la voir. Elle a un bâton sur son lit, qu’elle ne veut pas le lâc
6913 à côté ? — Elle dure, elle dure… Je viens d’aller la voir. Elle a un bâton sur son lit, qu’elle ne veut pas le lâcher, c’e
6914 Elle a un bâton sur son lit, qu’elle ne veut pas le lâcher, c’est pour lui tenir compagnie… On a été chercher le pasteur.
6915 c’est pour lui tenir compagnie… On a été chercher le pasteur. Je le rencontre comme il sort de sa visite. — Elle est curie
6916 tenir compagnie… On a été chercher le pasteur. Je le rencontre comme il sort de sa visite. — Elle est curieuse, cette viei
6917 hercher le pasteur. Je le rencontre comme il sort de sa visite. — Elle est curieuse, cette vieille, me dit-il. Figurez-vou
6918 me dit-il. Figurez-vous qu’elle tient sa canne à la main, comme ça, sur la couverture, et elle explique que c’est pour mo
6919 s qu’elle tient sa canne à la main, comme ça, sur la couverture, et elle explique que c’est pour monter « là-haut », pour
6920 aider ! 8 mai 1935 Il y a eu du bruit toute la nuit. Vers 2 heures, nous nous réveillons. Une âcre fumée remplit la
6921 res, nous nous réveillons. Une âcre fumée remplit la chambre, des lueurs d’incendie passent devant la fenêtre. Je me préci
6922 ns. Une âcre fumée remplit la chambre, des lueurs d’ incendie passent devant la fenêtre. Je me précipite : ce sont les deux
6923 la chambre, des lueurs d’incendie passent devant la fenêtre. Je me précipite : ce sont les deux Simard qui font un grand
6924 sent devant la fenêtre. Je me précipite : ce sont les deux Simard qui font un grand feu dans la cour. Est-ce qu’ils la rôti
6925 e sont les deux Simard qui font un grand feu dans la cour. Est-ce qu’ils la rôtissent ? On distingue des étoffes noires qu
6926 qui font un grand feu dans la cour. Est-ce qu’ils la rôtissent ? On distingue des étoffes noires qui se gonflent sur le br
6927 distingue des étoffes noires qui se gonflent sur le brasier… Je me suis réveillé tard. Tandis que je me rase, j’entends S
6928 s que je me rase, j’entends Simard qui apostrophe la mère Calixte près du bassin. « Je ne veux pas qu’on lave aujourd’hui 
6929 pas qu’on lave aujourd’hui ! Vous m’entendez ! Je l’ ennterdis, vous n’avez qu’à le leur dire ! » Je passe la tête par la f
6930 ous m’entendez ! Je l’ennterdis, vous n’avez qu’à le leur dire ! » Je passe la tête par la fenêtre. — Qu’est-ce que c’est,
6931 erdis, vous n’avez qu’à le leur dire ! » Je passe la tête par la fenêtre. — Qu’est-ce que c’est, Simard ? Il est rouge et
6932 n’avez qu’à le leur dire ! » Je passe la tête par la fenêtre. — Qu’est-ce que c’est, Simard ? Il est rouge et boursouflé,
6933 t, Simard ? Il est rouge et boursouflé, tremblant de colère et gesticulant. Il crie : Je l’ai dit à Madame Calixte, je ne
6934 tremblant de colère et gesticulant. Il crie : Je l’ ai dit à Madame Calixte, je ne veux pas qu’on lave aujourd’hui ! Ma be
6935 n deuil ! — Mais Monsieur Simard… — Il est parti. Le bassin est à 50 mètres de la maison, sur une terrasse qu’on ne peut v
6936 Simard… — Il est parti. Le bassin est à 50 mètres de la maison, sur une terrasse qu’on ne peut voir d’ici. Je ne comprends
6937 ard… — Il est parti. Le bassin est à 50 mètres de la maison, sur une terrasse qu’on ne peut voir d’ici. Je ne comprends pa
6938 d’ici. Je ne comprends pas très bien. S’il s’agit de respect, ne vaudrait-il pas mieux respecter les vieux pendant qu’ils
6939 it de respect, ne vaudrait-il pas mieux respecter les vieux pendant qu’ils vivent ? — Déjà les voisines arrivent, par petit
6940 especter les vieux pendant qu’ils vivent ? — Déjà les voisines arrivent, par petits groupes, parlant beaucoup. 9 mai 193
6941 1935 Me voilà donc brouillé avec Simard. Après l’ algarade d’hier matin, je ne me sentais pas le cœur à lui jouer une co
6942 voilà donc brouillé avec Simard. Après l’algarade d’ hier matin, je ne me sentais pas le cœur à lui jouer une comédie de sy
6943 rès l’algarade d’hier matin, je ne me sentais pas le cœur à lui jouer une comédie de sympathie, d’autant qu’il n’a vraimen
6944 ne me sentais pas le cœur à lui jouer une comédie de sympathie, d’autant qu’il n’a vraiment pas l’air trop affecté par la
6945 die de sympathie, d’autant qu’il n’a vraiment pas l’ air trop affecté par la perte de cette belle-mère (sauf que les discus
6946 ant qu’il n’a vraiment pas l’air trop affecté par la perte de cette belle-mère (sauf que les discussions avec le beau-frèr
6947 n’a vraiment pas l’air trop affecté par la perte de cette belle-mère (sauf que les discussions avec le beau-frère font to
6948 ffecté par la perte de cette belle-mère (sauf que les discussions avec le beau-frère font toujours rage). Je me suis donc b
6949 e cette belle-mère (sauf que les discussions avec le beau-frère font toujours rage). Je me suis donc borné à exprimer mes
6950 j’ai trouvée hier soir devant son seuil, entourée de commères qui entretiennent son chagrin décent. Aux premiers mots que
6951 premiers mots que j’ai dits, elle a pleuré, gémi d’ une toute petite voix fausse, et m’a beaucoup remercié. Bref, il m’a s
6952 ue tout s’était bien passé. Je me trompais. C’est la mère Calixte qui me l’apprend ce matin. Le ménage Simard est furieux.
6953 ssé. Je me trompais. C’est la mère Calixte qui me l’ apprend ce matin. Le ménage Simard est furieux. Nous n’avons pas du to
6954 C’est la mère Calixte qui me l’apprend ce matin. Le ménage Simard est furieux. Nous n’avons pas du tout fait ce qu’il fal
6955 eux ? — Il faut que je vous explique. Une visite de deuil, chez nous, ça doit se faire dans la cuisine. Aussi, je lui ai
6956 visite de deuil, chez nous, ça doit se faire dans la cuisine. Aussi, je lui ai dit, à Fernane, il aurait dû venir chez vou
6957 ous pour dire qu’il ne voulait pas qu’on lave. Je le lui ai dit : c’est bien ta fôte ! Ça aurait été dans votre maison qu’
6958 t, je comprendrais, je n’aurais pas non plus lavé la vaisselle. Mais ce n’est pas la même chose. — Je ne comprends pas, Mm
6959 pas non plus lavé la vaisselle. Mais ce n’est pas la même chose. — Je ne comprends pas, Mme Calixte. Pourquoi ne peut-on p
6960 s pas, Mme Calixte. Pourquoi ne peut-on pas laver la vaisselle quand il y a un mort dans la maison ? Il faut bien continue
6961 pas laver la vaisselle quand il y a un mort dans la maison ? Il faut bien continuer à vivre, et à manger, et à laver, il
6962 nse pas comme vous, Monsieur, mais il a tort pour la lessive. Voyez-vous ils sont trop orgueilleux ces gens-là ! S’ils ava
6963 orgueilleux ces gens-là ! S’ils avaient eu toute la peine que j’ai eue dans ma vie, moi, ça serait autrement, je vous ass
6964 tout ce protocole. Je sens bien qu’il est inutile de leur demander de s’expliquer. Tout cela repose sur un vieux fonds de
6965 . Je sens bien qu’il est inutile de leur demander de s’expliquer. Tout cela repose sur un vieux fonds de rites de protecti
6966 s’expliquer. Tout cela repose sur un vieux fonds de rites de protection très compliqués dont ils n’arriveraient pas à con
6967 uer. Tout cela repose sur un vieux fonds de rites de protection très compliqués dont ils n’arriveraient pas à concevoir qu
6968 onner. Et ne pas croire, surtout, qu’il s’agit là de « préjugés », comme disent les jeunes personnes en mal d’émancipation
6969 ut, qu’il s’agit là de « préjugés », comme disent les jeunes personnes en mal d’émancipation. C’est bien plus grave. C’est
6970 jugés », comme disent les jeunes personnes en mal d’ émancipation. C’est bien plus grave. C’est aussi grave que les questio
6971 ion. C’est bien plus grave. C’est aussi grave que les questions d’argent. C’est un fait d’ordre religieux. Et la colère de
6972 n plus grave. C’est aussi grave que les questions d’ argent. C’est un fait d’ordre religieux. Et la colère de Simard en tém
6973 i grave que les questions d’argent. C’est un fait d’ ordre religieux. Et la colère de Simard en témoigne. 15 mai 1935
6974 ons d’argent. C’est un fait d’ordre religieux. Et la colère de Simard en témoigne. 15 mai 1935 Comme l’année dernièr
6975 nt. C’est un fait d’ordre religieux. Et la colère de Simard en témoigne. 15 mai 1935 Comme l’année dernière, à la mê
6976 re de Simard en témoigne. 15 mai 1935 Comme l’ année dernière, à la même date je crois, me voici au bout de mon roule
6977 igne. 15 mai 1935 Comme l’année dernière, à la même date je crois, me voici au bout de mon rouleau. Impécuniosité cy
6978 i au bout de mon rouleau. Impécuniosité cyclique. Les dieux locaux me seraient-ils donc défavorables ? Je me vengerai d’eux
6979 e seraient-ils donc défavorables ? Je me vengerai d’ eux en écrivant ici que leurs charmes ont cessé d’opérer. Nous avons é
6980 d’eux en écrivant ici que leurs charmes ont cessé d’ opérer. Nous avons épuisé les environs, dans un rayon d’exploration no
6981 urs charmes ont cessé d’opérer. Nous avons épuisé les environs, dans un rayon d’exploration normal — mettons deux à trois h
6982 er. Nous avons épuisé les environs, dans un rayon d’ exploration normal — mettons deux à trois heures de marche — et vraime
6983 ’exploration normal — mettons deux à trois heures de marche — et vraiment il n’y a guère à signaler. Sinon peut-être les m
6984 aiment il n’y a guère à signaler. Sinon peut-être les maisons vides. Il faut avouer qu’on en trouve d’assez belles. Au fond
6985 les maisons vides. Il faut avouer qu’on en trouve d’ assez belles. Au fond d’un val qui paraît sans issue, ce grand mas nom
6986 ut avouer qu’on en trouve d’assez belles. Au fond d’ un val qui paraît sans issue, ce grand mas nommé Montaigu… (Pourquoi c
6987 … (Pourquoi ce nom ?) On dit que cela ressemble à l’ Albanie. C’est un groupe de hautes bâtisses compliquées, en pierre ocr
6988 t que cela ressemble à l’Albanie. C’est un groupe de hautes bâtisses compliquées, en pierre ocrée, enfermant une cour à de
6989 ermant une cour à deux étages. On devine un reste de jardin, avec quelques cyprès, une pierre tombale, et la margelle d’un
6990 din, avec quelques cyprès, une pierre tombale, et la margelle d’un puits. La plupart des vitres sont cassées. Une poule bl
6991 elques cyprès, une pierre tombale, et la margelle d’ un puits. La plupart des vitres sont cassées. Une poule blanche se pro
6992 es. Une poule blanche se promène quelquefois dans la cour. Mais on m’assure que ces habitations sont délaissées depuis deu
6993 s sont délaissées depuis deux ans. Plus haut dans la montagne, un autre mas dit « le Château ». C’est à l’orée d’un bois d
6994 s. Plus haut dans la montagne, un autre mas dit «  le Château ». C’est à l’orée d’un bois de châtaigniers. On y accède par
6995 ontagne, un autre mas dit « le Château ». C’est à l’ orée d’un bois de châtaigniers. On y accède par une rampe monumentale
6996 , un autre mas dit « le Château ». C’est à l’orée d’ un bois de châtaigniers. On y accède par une rampe monumentale coupée
6997 mas dit « le Château ». C’est à l’orée d’un bois de châtaigniers. On y accède par une rampe monumentale coupée régulièrem
6998 de par une rampe monumentale coupée régulièrement de marches nobles. La rampe conduit à une vaste terrasse herbue. Une mai
6999 numentale coupée régulièrement de marches nobles. La rampe conduit à une vaste terrasse herbue. Une maison de maître d’ass
7000 e conduit à une vaste terrasse herbue. Une maison de maître d’assez beau style, ornée d’un perron à double escalier, forme
7001 à une vaste terrasse herbue. Une maison de maître d’ assez beau style, ornée d’un perron à double escalier, forme l’extrémi
7002 e. Une maison de maître d’assez beau style, ornée d’ un perron à double escalier, forme l’extrémité nord d’un bâtiment cons
7003 style, ornée d’un perron à double escalier, forme l’ extrémité nord d’un bâtiment considérable, à trois étages, qui devait
7004 perron à double escalier, forme l’extrémité nord d’ un bâtiment considérable, à trois étages, qui devait servir de communs
7005 t considérable, à trois étages, qui devait servir de communs, de magnanerie, de cellier et de grange. Au sud, une tour à c
7006 le, à trois étages, qui devait servir de communs, de magnanerie, de cellier et de grange. Au sud, une tour à cadran solair
7007 ges, qui devait servir de communs, de magnanerie, de cellier et de grange. Au sud, une tour à cadran solaire, surmontée d’
7008 t servir de communs, de magnanerie, de cellier et de grange. Au sud, une tour à cadran solaire, surmontée d’une girouette.
7009 nge. Au sud, une tour à cadran solaire, surmontée d’ une girouette. Derrière la maison de maître, sur le flanc de la montag
7010 dran solaire, surmontée d’une girouette. Derrière la maison de maître, sur le flanc de la montagne, un jardin en terrasses
7011 re, surmontée d’une girouette. Derrière la maison de maître, sur le flanc de la montagne, un jardin en terrasses, enclos d
7012 ’une girouette. Derrière la maison de maître, sur le flanc de la montagne, un jardin en terrasses, enclos de très hauts mu
7013 uette. Derrière la maison de maître, sur le flanc de la montagne, un jardin en terrasses, enclos de très hauts murs. À tra
7014 te. Derrière la maison de maître, sur le flanc de la montagne, un jardin en terrasses, enclos de très hauts murs. À traver
7015 nc de la montagne, un jardin en terrasses, enclos de très hauts murs. À travers la grille ouvragée, on voit une profusion
7016 n terrasses, enclos de très hauts murs. À travers la grille ouvragée, on voit une profusion de fleurs violentes et d’ortie
7017 travers la grille ouvragée, on voit une profusion de fleurs violentes et d’orties. L’ensemble est imposant et comme démesu
7018 gée, on voit une profusion de fleurs violentes et d’ orties. L’ensemble est imposant et comme démesuré dans ce paysage de v
7019 it une profusion de fleurs violentes et d’orties. L’ ensemble est imposant et comme démesuré dans ce paysage de vallons, de
7020 le est imposant et comme démesuré dans ce paysage de vallons, de collines et de petits sommets rocheux. Soudain la girouet
7021 ant et comme démesuré dans ce paysage de vallons, de collines et de petits sommets rocheux. Soudain la girouette fait ente
7022 mesuré dans ce paysage de vallons, de collines et de petits sommets rocheux. Soudain la girouette fait entendre un long cr
7023 de collines et de petits sommets rocheux. Soudain la girouette fait entendre un long cri presque humain. La maison la plus
7024 rouette fait entendre un long cri presque humain. La maison la plus proche est à une bonne demi-heure. Il n’y a pas de rou
7025 it entendre un long cri presque humain. La maison la plus proche est à une bonne demi-heure. Il n’y a pas de route. On ima
7026 s proche est à une bonne demi-heure. Il n’y a pas de route. On imagine de vivre là, dans un style colonial-moyenâgeux. On
7027 nne demi-heure. Il n’y a pas de route. On imagine de vivre là, dans un style colonial-moyenâgeux. On pourrait loger bien d
7028 ns des fusils et des bibles, nous serions camisés de rouge, et l’on irait de temps à autre arraisonner les féodaux d’indus
7029 et des bibles, nous serions camisés de rouge, et l’ on irait de temps à autre arraisonner les féodaux d’industrie du pays.
7030 les, nous serions camisés de rouge, et l’on irait de temps à autre arraisonner les féodaux d’industrie du pays. 18 mai
7031 rouge, et l’on irait de temps à autre arraisonner les féodaux d’industrie du pays. 18 mai 1935 « Communautés ». — On
7032 on irait de temps à autre arraisonner les féodaux d’ industrie du pays. 18 mai 1935 « Communautés ». — On en parle be
7033 ne paraît guère entraîner à des actes. Pourquoi ? Les essais qu’on a faits, et mal faits semble-t-il, ne prouvent rien cont
7034 et mal faits semble-t-il, ne prouvent rien contre la chose en soi, mais contre ceux qui l’ont tentée. C’étaient des hommes
7035 rien contre la chose en soi, mais contre ceux qui l’ ont tentée. C’étaient des hommes qui ne supportaient pas la société ca
7036 tée. C’étaient des hommes qui ne supportaient pas la société capitaliste, disaient-ils ; mais dès qu’ils en étaient sortis
7037 s en étaient sortis, ils découvraient que c’était la société en général qui les vexait. Pensaient-ils faire une colonie en
7038 écouvraient que c’était la société en général qui les vexait. Pensaient-ils faire une colonie en groupant leurs dégoûts d’a
7039 t-ils faire une colonie en groupant leurs dégoûts d’ anarchistes ? Si l’on veut une communauté, il faut d’abord un but comm
7040 onie en groupant leurs dégoûts d’anarchistes ? Si l’ on veut une communauté, il faut d’abord un but commun, et positif, un
7041 et positif, un principe créateur et pas seulement de la révolte. Ensuite, il faut que les femmes ne s’arrachent pas les ch
7042 positif, un principe créateur et pas seulement de la révolte. Ensuite, il faut que les femmes ne s’arrachent pas les cheve
7043 pas seulement de la révolte. Ensuite, il faut que les femmes ne s’arrachent pas les cheveux dans les cuisines communes, et
7044 nsuite, il faut que les femmes ne s’arrachent pas les cheveux dans les cuisines communes, et soient fidèles… La grande affa
7045 ue les femmes ne s’arrachent pas les cheveux dans les cuisines communes, et soient fidèles… La grande affaire, c’est de se
7046 ux dans les cuisines communes, et soient fidèles… La grande affaire, c’est de se méfier d’un romantisme communautaire qui
7047 unes, et soient fidèles… La grande affaire, c’est de se méfier d’un romantisme communautaire qui se répand dans la jeuness
7048 nt fidèles… La grande affaire, c’est de se méfier d’ un romantisme communautaire qui se répand dans la jeunesse. Fonder une
7049 d’un romantisme communautaire qui se répand dans la jeunesse. Fonder une colonie ne devrait pas avoir pour but la colonie
7050 Fonder une colonie ne devrait pas avoir pour but la colonie, mais la vie plus normale et plus féconde de chacun de ses me
7051 ie ne devrait pas avoir pour but la colonie, mais la vie plus normale et plus féconde de chacun de ses membres. L’idéal co
7052 colonie, mais la vie plus normale et plus féconde de chacun de ses membres. L’idéal commun ne suffit pas : il faut encore
7053 ais la vie plus normale et plus féconde de chacun de ses membres. L’idéal commun ne suffit pas : il faut encore que l’entr
7054 normale et plus féconde de chacun de ses membres. L’ idéal commun ne suffit pas : il faut encore que l’entraide des colons
7055 L’idéal commun ne suffit pas : il faut encore que l’ entraide des colons crée des conditions matérielles plus favorables qu
7056 avorables que celles des villes. Il ne s’agit pas d’ échapper à la misère pour tomber dans l’ascèse volontaire ; ni d’échap
7057 celles des villes. Il ne s’agit pas d’échapper à la misère pour tomber dans l’ascèse volontaire ; ni d’échapper à la disp
7058 ’agit pas d’échapper à la misère pour tomber dans l’ ascèse volontaire ; ni d’échapper à la dispersion et à l’isolement pou
7059 misère pour tomber dans l’ascèse volontaire ; ni d’ échapper à la dispersion et à l’isolement pour tomber dans la discipli
7060 tomber dans l’ascèse volontaire ; ni d’échapper à la dispersion et à l’isolement pour tomber dans la discipline des travau
7061 e volontaire ; ni d’échapper à la dispersion et à l’ isolement pour tomber dans la discipline des travaux forcés. Il faut q
7062 à la dispersion et à l’isolement pour tomber dans la discipline des travaux forcés. Il faut que la communauté soit pour ch
7063 ans la discipline des travaux forcés. Il faut que la communauté soit pour chacun la possibilité de vivre mieux sa vie. Mai
7064 orcés. Il faut que la communauté soit pour chacun la possibilité de vivre mieux sa vie. Mais cela pose des problèmes techn
7065 que la communauté soit pour chacun la possibilité de vivre mieux sa vie. Mais cela pose des problèmes techniques beaucoup
7066 techniques beaucoup plus vastes. « N’habitez pas les villes ! », bien sûr. Reste à savoir si la province est habitable, da
7067 z pas les villes ! », bien sûr. Reste à savoir si la province est habitable, dans l’état actuel des choses. Tant de région
7068 t actuel des choses. Tant de régions abandonnées, de villages vides, de champs en friche et de propriétaires ruinés ; et s
7069 . Tant de régions abandonnées, de villages vides, de champs en friche et de propriétaires ruinés ; et surtout cet ennui da
7070 onnées, de villages vides, de champs en friche et de propriétaires ruinés ; et surtout cet ennui dans la jeunesse rurale,
7071 propriétaires ruinés ; et surtout cet ennui dans la jeunesse rurale, ce sentiment d’être à l’écart du monde, — et de n’êt
7072 t cet ennui dans la jeunesse rurale, ce sentiment d’ être à l’écart du monde, — et de n’être lié à son voisin que par le so
7073 ui dans la jeunesse rurale, ce sentiment d’être à l’ écart du monde, — et de n’être lié à son voisin que par le souvenir de
7074 ale, ce sentiment d’être à l’écart du monde, — et de n’être lié à son voisin que par le souvenir de vieilles offenses… Ce
7075 du monde, — et de n’être lié à son voisin que par le souvenir de vieilles offenses… Ce n’est pas seulement défaut de commu
7076 et de n’être lié à son voisin que par le souvenir de vieilles offenses… Ce n’est pas seulement défaut de communion, mais a
7077 vieilles offenses… Ce n’est pas seulement défaut de communion, mais aussi, plus prosaïquement, défaut de communications.
7078 communion, mais aussi, plus prosaïquement, défaut de communications. Toutes ces autos qui s’embouteillent sur la petite su
7079 cations. Toutes ces autos qui s’embouteillent sur la petite superficie de Paris, ne seraient-elles pas d’un usage plus nor
7080 utos qui s’embouteillent sur la petite superficie de Paris, ne seraient-elles pas d’un usage plus normal là où les hommes
7081 petite superficie de Paris, ne seraient-elles pas d’ un usage plus normal là où les hommes sont séparés par de grandes dist
7082 e seraient-elles pas d’un usage plus normal là où les hommes sont séparés par de grandes distances désertes ? C’est un symb
7083 age plus normal là où les hommes sont séparés par de grandes distances désertes ? C’est un symbole. On peut en déduire fac
7084 ? C’est un symbole. On peut en déduire facilement les deux formules de notre renaissance : mettre les villes au vert, urban
7085 . On peut en déduire facilement les deux formules de notre renaissance : mettre les villes au vert, urbaniser tout le rest
7086 t les deux formules de notre renaissance : mettre les villes au vert, urbaniser tout le reste du pays… 5 juin 1935 …
7087 sance : mettre les villes au vert, urbaniser tout le reste du pays… 5 juin 1935 …Et un beau jour, plus moyen d’écha
7088 … 5 juin 1935 …Et un beau jour, plus moyen d’ échapper à cette humiliante évidence : sans argent et sans amis proche
7089 ante évidence : sans argent et sans amis proches, la solitude, ici, devient un isolement. Il y a « les gens » bien sûr. C’
7090 la solitude, ici, devient un isolement. Il y a «  les gens » bien sûr. C’est instructif. Mais le désir de s’instruire a des
7091 y a « les gens » bien sûr. C’est instructif. Mais le désir de s’instruire a des limites. Déjà les relations se stabilisent
7092 gens » bien sûr. C’est instructif. Mais le désir de s’instruire a des limites. Déjà les relations se stabilisent, les « c
7093 Mais le désir de s’instruire a des limites. Déjà les relations se stabilisent, les « courtes habitudes » épuisent leur ver
7094 a des limites. Déjà les relations se stabilisent, les « courtes habitudes » épuisent leur vertu. C’est le moment de lever s
7095 « courtes habitudes » épuisent leur vertu. C’est le moment de lever son camp. Plus tard, peut-être, quand toutes ces mais
7096 habitudes » épuisent leur vertu. C’est le moment de lever son camp. Plus tard, peut-être, quand toutes ces maisons vides
7097 des des environs seront habitées par des colonies de jeunes gens — si jamais ils en ont assez de se plaindre des villes, o
7098 onies de jeunes gens — si jamais ils en ont assez de se plaindre des villes, où ils s’incrustent — la province deviendra v
7099 de se plaindre des villes, où ils s’incrustent — la province deviendra vivable. La révolution sera faite. Nous reviendron
7100 ils s’incrustent — la province deviendra vivable. La révolution sera faite. Nous reviendrons pour faire quelque chose en c
7101 u leurs fils… — Demain, il faut remettre en place les aquarelles, les guéridons et les dessus de cheminée. Après-demain, no
7102 Demain, il faut remettre en place les aquarelles, les guéridons et les dessus de cheminée. Après-demain, nous partons. Nous
7103 emettre en place les aquarelles, les guéridons et les dessus de cheminée. Après-demain, nous partons. Nous fuyons. 9. De
7104 place les aquarelles, les guéridons et les dessus de cheminée. Après-demain, nous partons. Nous fuyons. 9. Descartes, S
7105 ous fuyons. 9. Descartes, Spinoza, Hegel. 10. L’ équivalent de l’ouvrage du vieux médecin sur l’île. 11. Je n’ai pas s
7106 9. Descartes, Spinoza, Hegel. 10. L’équivalent de l’ouvrage du vieux médecin sur l’île. 11. Je n’ai pas suivi le conse
7107 . Descartes, Spinoza, Hegel. 10. L’équivalent de l’ ouvrage du vieux médecin sur l’île. 11. Je n’ai pas suivi le conseil
7108 0. L’équivalent de l’ouvrage du vieux médecin sur l’ île. 11. Je n’ai pas suivi le conseil de cet homme, et n’ai pas lu le
7109 u vieux médecin sur l’île. 11. Je n’ai pas suivi le conseil de cet homme, et n’ai pas lu le livre. Je lui laisse donc la
7110 ecin sur l’île. 11. Je n’ai pas suivi le conseil de cet homme, et n’ai pas lu le livre. Je lui laisse donc la responsabil
7111 pas suivi le conseil de cet homme, et n’ai pas lu le livre. Je lui laisse donc la responsabilité du compte rendu qu’il m’e
7112 omme, et n’ai pas lu le livre. Je lui laisse donc la responsabilité du compte rendu qu’il m’en a fait. 12. Monsieur X… « 
7113 t. 12. Monsieur X… « orateur distingué », disait la convocation. 13. La stratégie qu’inaugurèrent les généraux de la Rév
7114  orateur distingué », disait la convocation. 13. La stratégie qu’inaugurèrent les généraux de la Révolution, et qui fut c
7115 la convocation. 13. La stratégie qu’inaugurèrent les généraux de la Révolution, et qui fut celle de Bonaparte, n’est en so
7116 n. 13. La stratégie qu’inaugurèrent les généraux de la Révolution, et qui fut celle de Bonaparte, n’est en somme que l’ap
7117 13. La stratégie qu’inaugurèrent les généraux de la Révolution, et qui fut celle de Bonaparte, n’est en somme que l’appli
7118 t les généraux de la Révolution, et qui fut celle de Bonaparte, n’est en somme que l’application du style français à la ch
7119 et qui fut celle de Bonaparte, n’est en somme que l’ application du style français à la chose militaire. 14. À Montmartre,
7120 st en somme que l’application du style français à la chose militaire. 14. À Montmartre, il y a deux ou trois ans, j’assis
7121 ’assistais à une conférence contradictoire contre le christianisme. « Ils prétendent qu’ils ne croient qu’à un seul Dieu,
7122 nt qu’ils ne croient qu’à un seul Dieu, s’écriait l’ orateur, et ils adorent la Trinité ! Ils disent que le Père, le Fils e
7123 un seul Dieu, s’écriait l’orateur, et ils adorent la Trinité ! Ils disent que le Père, le Fils et le Saint-Esprit ne font
7124 ateur, et ils adorent la Trinité ! Ils disent que le Père, le Fils et le Saint-Esprit ne font qu’un. Vous voyez que l’Égli
7125 ils adorent la Trinité ! Ils disent que le Père, le Fils et le Saint-Esprit ne font qu’un. Vous voyez que l’Église est ré
7126 t la Trinité ! Ils disent que le Père, le Fils et le Saint-Esprit ne font qu’un. Vous voyez que l’Église est réfutée par l
7127 et le Saint-Esprit ne font qu’un. Vous voyez que l’ Église est réfutée par l’arithmétique. En effet, prenez l’addition : u
7128 nt qu’un. Vous voyez que l’Église est réfutée par l’ arithmétique. En effet, prenez l’addition : un plus un, plus un, cela
7129 est réfutée par l’arithmétique. En effet, prenez l’ addition : un plus un, plus un, cela fait trois, si je ne me trompe, e
7130 rois, si je ne me trompe, et non pas un. » Prenez la multiplication ! cria l’abbé V… qui était dans la salle. 15. Voir p
7131 et non pas un. » Prenez la multiplication ! cria l’ abbé V… qui était dans la salle. 15. Voir plus haut, p. 59-65. 16.
7132 la multiplication ! cria l’abbé V… qui était dans la salle. 15. Voir plus haut, p. 59-65. 16. Que ne connaît pas le gr
7133 oir plus haut, p. 59-65. 16. Que ne connaît pas le grand conférencier littéraire ou politique « en tournée ». 17. Ils o
7134 17. Ils ont donc au moins 65 ans aujourd’hui, où l’ article paraît.
4 1937, Journal d’un intellectuel en chômage. Troisième partie. L’été parisien
7135 n 2 juillet 1935 Arrivée à Paris. — Après la Beauce au grand soleil, pendant des heures, après Versailles, voici l
7136 leil, pendant des heures, après Versailles, voici la rencontre émouvante de la province et de Paris. Et cela s’appelle la
7137 s, après Versailles, voici la rencontre émouvante de la province et de Paris. Et cela s’appelle la banlieue. La campagne i
7138 après Versailles, voici la rencontre émouvante de la province et de Paris. Et cela s’appelle la banlieue. La campagne ici
7139 s, voici la rencontre émouvante de la province et de Paris. Et cela s’appelle la banlieue. La campagne ici touche à la gra
7140 nte de la province et de Paris. Et cela s’appelle la banlieue. La campagne ici touche à la grande ville, et aussitôt elles
7141 vince et de Paris. Et cela s’appelle la banlieue. La campagne ici touche à la grande ville, et aussitôt elles se dégradent
7142 a s’appelle la banlieue. La campagne ici touche à la grande ville, et aussitôt elles se dégradent l’une l’autre. Zone : mé
7143 elles se dégradent l’une l’autre. Zone : mélange de pylônes et d’arbres maigres, de champs pelés et de grands murs de bri
7144 adent l’une l’autre. Zone : mélange de pylônes et d’ arbres maigres, de champs pelés et de grands murs de briques interromp
7145 e. Zone : mélange de pylônes et d’arbres maigres, de champs pelés et de grands murs de briques interrompus ; tranchée de l
7146 e pylônes et d’arbres maigres, de champs pelés et de grands murs de briques interrompus ; tranchée de la ceinture, amas de
7147 arbres maigres, de champs pelés et de grands murs de briques interrompus ; tranchée de la ceinture, amas de détritus, bist
7148 de grands murs de briques interrompus ; tranchée de la ceinture, amas de détritus, bistrots noircis. Et j’imagine d’un co
7149 grands murs de briques interrompus ; tranchée de la ceinture, amas de détritus, bistrots noircis. Et j’imagine d’un coup
7150 iques interrompus ; tranchée de la ceinture, amas de détritus, bistrots noircis. Et j’imagine d’un coup toute la populatio
7151 amas de détritus, bistrots noircis. Et j’imagine d’ un coup toute la population de ce « pays » fait de déchets. Misère, fa
7152 s, bistrots noircis. Et j’imagine d’un coup toute la population de ce « pays » fait de déchets. Misère, fatigue, laideurs
7153 ircis. Et j’imagine d’un coup toute la population de ce « pays » fait de déchets. Misère, fatigue, laideurs partout, toute
7154 d’un coup toute la population de ce « pays » fait de déchets. Misère, fatigue, laideurs partout, toutes raisons de haïr et
7155 Misère, fatigue, laideurs partout, toutes raisons de haïr et aucune d’admirer. Au sortir de la gare Montparnasse, ces bouf
7156 aideurs partout, toutes raisons de haïr et aucune d’ admirer. Au sortir de la gare Montparnasse, ces bouffées de chaleur in
7157 raisons de haïr et aucune d’admirer. Au sortir de la gare Montparnasse, ces bouffées de chaleur insupportable qui montent
7158 . Au sortir de la gare Montparnasse, ces bouffées de chaleur insupportable qui montent du trottoir bleu huileux, ces premi
7159 er au pantalon trop court traverse sans assurance l’ avenue où cinglent violemment de belles autos. Un long bruit de ferrai
7160 se sans assurance l’avenue où cinglent violemment de belles autos. Un long bruit de ferraille sur les passerelles, des cam
7161 inglent violemment de belles autos. Un long bruit de ferraille sur les passerelles, des camions fous et des affiches tragi
7162 t de belles autos. Un long bruit de ferraille sur les passerelles, des camions fous et des affiches tragiques dénonçant je
7163 nonçant je ne sais quelle émeute : voilà ce Paris de juillet que toute la province oubliait, des blés de Beauce aux plages
7164 elle émeute : voilà ce Paris de juillet que toute la province oubliait, des blés de Beauce aux plages de l’Océan, voilà le
7165 juillet que toute la province oubliait, des blés de Beauce aux plages de l’Océan, voilà le cœur crispé, le cerveau délira
7166 province oubliait, des blés de Beauce aux plages de l’Océan, voilà le cœur crispé, le cerveau délirant en plein midi du g
7167 ovince oubliait, des blés de Beauce aux plages de l’ Océan, voilà le cœur crispé, le cerveau délirant en plein midi du gran
7168 , des blés de Beauce aux plages de l’Océan, voilà le cœur crispé, le cerveau délirant en plein midi du grand corps de la F
7169 auce aux plages de l’Océan, voilà le cœur crispé, le cerveau délirant en plein midi du grand corps de la France étirée au
7170 le cerveau délirant en plein midi du grand corps de la France étirée au soleil. Tous les problèmes vont se poser autremen
7171 cerveau délirant en plein midi du grand corps de la France étirée au soleil. Tous les problèmes vont se poser autrement.
7172 u grand corps de la France étirée au soleil. Tous les problèmes vont se poser autrement. Tout est soudain plus dur et agres
7173 s valises empilées dans un taxi, nous filons vers la porte d’Italie. 5 juillet 1935 Porte de Choisy. — Dans le ciel
7174 empilées dans un taxi, nous filons vers la porte d’ Italie. 5 juillet 1935 Porte de Choisy. — Dans le ciel vert d’u
7175 rs la porte d’Italie. 5 juillet 1935 Porte de Choisy. — Dans le ciel vert d’un couchant de banlieue, le groupe scol
7176 ie. 5 juillet 1935 Porte de Choisy. — Dans le ciel vert d’un couchant de banlieue, le groupe scolaire de la mairie
7177 let 1935 Porte de Choisy. — Dans le ciel vert d’ un couchant de banlieue, le groupe scolaire de la mairie communiste dé
7178 orte de Choisy. — Dans le ciel vert d’un couchant de banlieue, le groupe scolaire de la mairie communiste découpe une silh
7179 y. — Dans le ciel vert d’un couchant de banlieue, le groupe scolaire de la mairie communiste découpe une silhouette blanch
7180 ert d’un couchant de banlieue, le groupe scolaire de la mairie communiste découpe une silhouette blanche d’un modernisme t
7181 d’un couchant de banlieue, le groupe scolaire de la mairie communiste découpe une silhouette blanche d’un modernisme très
7182 mairie communiste découpe une silhouette blanche d’ un modernisme très classique. Verre et ciment, angles droits, propreté
7183 ue. Verre et ciment, angles droits, propreté. Sur les trottoirs immenses, des enfants jouent pieds nus, heureux. Les arbres
7184 immenses, des enfants jouent pieds nus, heureux. Les arbres du boulevard sont encore verts, ici ; il y a de l’espace. Les
7185 bres du boulevard sont encore verts, ici ; il y a de l’espace. Les masses de briques vernies striées de bandes blanches de
7186 s du boulevard sont encore verts, ici ; il y a de l’ espace. Les masses de briques vernies striées de bandes blanches des H
7187 vard sont encore verts, ici ; il y a de l’espace. Les masses de briques vernies striées de bandes blanches des HBM s’ordonn
7188 ncore verts, ici ; il y a de l’espace. Les masses de briques vernies striées de bandes blanches des HBM s’ordonnent à gauc
7189 e l’espace. Les masses de briques vernies striées de bandes blanches des HBM s’ordonnent à gauche et à droite, majestueuse
7190 rouve une beauté à ces façades monotones, animées de lumières çà et là, de linges qui pendent aux fenêtres, et d’une popul
7191 façades monotones, animées de lumières çà et là, de linges qui pendent aux fenêtres, et d’une population de couples aux b
7192 çà et là, de linges qui pendent aux fenêtres, et d’ une population de couples aux balcons. (Je distingue nos fenêtres obsc
7193 ges qui pendent aux fenêtres, et d’une population de couples aux balcons. (Je distingue nos fenêtres obscures.) Ville aéri
7194 tingue nos fenêtres obscures.) Ville aérienne, où la hauteur des murs n’évoque plus les parois d’un puits sale, mais plutô
7195 le aérienne, où la hauteur des murs n’évoque plus les parois d’un puits sale, mais plutôt une falaise élevée… Où donc ? Je
7196 , où la hauteur des murs n’évoque plus les parois d’ un puits sale, mais plutôt une falaise élevée… Où donc ? Je me souvien
7197 utôt une falaise élevée… Où donc ? Je me souviens de hauts rochers encore clairs dans un soir alpestre… Immédiatement aprè
7198 clairs dans un soir alpestre… Immédiatement après les blocs, s’étend la zone. Je longe l’avenue bordée de marronniers qui l
7199 alpestre… Immédiatement après les blocs, s’étend la zone. Je longe l’avenue bordée de marronniers qui la traverse. À droi
7200 tement après les blocs, s’étend la zone. Je longe l’ avenue bordée de marronniers qui la traverse. À droite et à gauche, de
7201 blocs, s’étend la zone. Je longe l’avenue bordée de marronniers qui la traverse. À droite et à gauche, des ruelles s’en v
7202 zone. Je longe l’avenue bordée de marronniers qui la traverse. À droite et à gauche, des ruelles s’en vont dans le désordr
7203 À droite et à gauche, des ruelles s’en vont dans le désordre des baraquements de carton goudronné. Petites allées de camp
7204 elles s’en vont dans le désordre des baraquements de carton goudronné. Petites allées de campagne, en terre noire. Parfois
7205 baraquements de carton goudronné. Petites allées de campagne, en terre noire. Parfois on voit une haie fleurie, un buisso
7206 lombe une palissade mal jointe. Quelques échoppes de foire bordent le trottoir, débits de boisson, de tabac, légumes défra
7207 de mal jointe. Quelques échoppes de foire bordent le trottoir, débits de boisson, de tabac, légumes défraîchis. D’une allé
7208 ues échoppes de foire bordent le trottoir, débits de boisson, de tabac, légumes défraîchis. D’une allée sort un homme en e
7209 de foire bordent le trottoir, débits de boisson, de tabac, légumes défraîchis. D’une allée sort un homme en espadrilles.
7210 débits de boisson, de tabac, légumes défraîchis. D’ une allée sort un homme en espadrilles. Il porte un broc et va le remp
7211 t un homme en espadrilles. Il porte un broc et va le remplir au bord de la chaussée, à une prise d’eau. Il sifflote, il n’
7212 les. Il porte un broc et va le remplir au bord de la chaussée, à une prise d’eau. Il sifflote, il n’est pas pressé. Des en
7213 va le remplir au bord de la chaussée, à une prise d’ eau. Il sifflote, il n’est pas pressé. Des enfants courent derrière la
7214 il n’est pas pressé. Des enfants courent derrière la palissade. Bouffées d’odeurs, fumées grasses. La zone, terme des pire
7215 s enfants courent derrière la palissade. Bouffées d’ odeurs, fumées grasses. La zone, terme des pires déchéances, on le dit
7216 la palissade. Bouffées d’odeurs, fumées grasses. La zone, terme des pires déchéances, on le dit… Des familles de huit per
7217 grasses. La zone, terme des pires déchéances, on le dit… Des familles de huit personnes couchant dans une baraque à un se
7218 rme des pires déchéances, on le dit… Des familles de huit personnes couchant dans une baraque à un seul lit. Tous ceux qui
7219 s une baraque à un seul lit. Tous ceux qui fuient la société et la police, les sans-nom, les rebuts d’humanité, la fin des
7220 à un seul lit. Tous ceux qui fuient la société et la police, les sans-nom, les rebuts d’humanité, la fin des fins, le bout
7221 it. Tous ceux qui fuient la société et la police, les sans-nom, les rebuts d’humanité, la fin des fins, le bout de la nuit…
7222 qui fuient la société et la police, les sans-nom, les rebuts d’humanité, la fin des fins, le bout de la nuit… Mais ce soir,
7223 la société et la police, les sans-nom, les rebuts d’ humanité, la fin des fins, le bout de la nuit… Mais ce soir, sous les
7224 t la police, les sans-nom, les rebuts d’humanité, la fin des fins, le bout de la nuit… Mais ce soir, sous les marronniers
7225 sans-nom, les rebuts d’humanité, la fin des fins, le bout de la nuit… Mais ce soir, sous les marronniers de l’avenue, tout
7226 , les rebuts d’humanité, la fin des fins, le bout de la nuit… Mais ce soir, sous les marronniers de l’avenue, tout ce peti
7227 es rebuts d’humanité, la fin des fins, le bout de la nuit… Mais ce soir, sous les marronniers de l’avenue, tout ce petit m
7228 des fins, le bout de la nuit… Mais ce soir, sous les marronniers de l’avenue, tout ce petit monde me paraît libre et presq
7229 ut de la nuit… Mais ce soir, sous les marronniers de l’avenue, tout ce petit monde me paraît libre et presque heureux. Soi
7230 de la nuit… Mais ce soir, sous les marronniers de l’ avenue, tout ce petit monde me paraît libre et presque heureux. Soir v
7231 t libre et presque heureux. Soir villageois, ciel de province, jeux d’enfants et chansons, accordéon… Je me dis qu’on pour
7232 heureux. Soir villageois, ciel de province, jeux d’ enfants et chansons, accordéon… Je me dis qu’on pourrait vivre là. Non
7233 rter. — Ou annoncer une bonne nouvelle à ceux qui l’ attendent pour vivre. Kagawa aux carrefours des bas-fonds de Kobé.
7234 t pour vivre. Kagawa aux carrefours des bas-fonds de Kobé. 7 juillet 1935 Depuis une semaine que j’habite près de ce
7235 e près de cette Porte, je n’avais pas été au-delà de la Place d’Italie. Cet après-midi, première incursion dans le centre
7236 rès de cette Porte, je n’avais pas été au-delà de la Place d’Italie. Cet après-midi, première incursion dans le centre — 
7237 tte Porte, je n’avais pas été au-delà de la Place d’ Italie. Cet après-midi, première incursion dans le centre — rive gauc
7238 ’Italie. Cet après-midi, première incursion dans le centre — rive gauche, boulevards, Champs-Élysées. Ville des souvenirs
7239 ps-Élysées. Ville des souvenirs ! Rien n’a bougé. Les mêmes têtes aux mêmes heures à la terrasse des mêmes cafés. Chaque ch
7240 ien n’a bougé. Les mêmes têtes aux mêmes heures à la terrasse des mêmes cafés. Chaque chose est à sa place dans l’espace e
7241 des mêmes cafés. Chaque chose est à sa place dans l’ espace et l’histoire, chaque nuance de la Tradition possède sa rue, ou
7242 fés. Chaque chose est à sa place dans l’espace et l’ histoire, chaque nuance de la Tradition possède sa rue, ou au moins so
7243 place dans l’espace et l’histoire, chaque nuance de la Tradition possède sa rue, ou au moins son quartier. On circule à t
7244 ace dans l’espace et l’histoire, chaque nuance de la Tradition possède sa rue, ou au moins son quartier. On circule à trav
7245 e, ou au moins son quartier. On circule à travers les classiques, les encyclopédistes, l’Empire ; toutes les écoles du xixe
7246 on quartier. On circule à travers les classiques, les encyclopédistes, l’Empire ; toutes les écoles du xixe  ; l’avant-guer
7247 le à travers les classiques, les encyclopédistes, l’ Empire ; toutes les écoles du xixe  ; l’avant-guerre et le modernisme,
7248 lassiques, les encyclopédistes, l’Empire ; toutes les écoles du xixe  ; l’avant-guerre et le modernisme, encore plus périmé
7249 pédistes, l’Empire ; toutes les écoles du xixe  ; l’ avant-guerre et le modernisme, encore plus périmé, de l’après-guerre,
7250  ; toutes les écoles du xixe  ; l’avant-guerre et le modernisme, encore plus périmé, de l’après-guerre, conservé aux Champ
7251 vant-guerre et le modernisme, encore plus périmé, de l’après-guerre, conservé aux Champs-Élysées. Ce n’est qu’aux portes e
7252 t-guerre et le modernisme, encore plus périmé, de l’ après-guerre, conservé aux Champs-Élysées. Ce n’est qu’aux portes et d
7253 ux Champs-Élysées. Ce n’est qu’aux portes et dans les quartiers clairs et chaotiques de la Ceinture qu’on rejoint l’Europe
7254 portes et dans les quartiers clairs et chaotiques de la Ceinture qu’on rejoint l’Europe d’aujourd’hui. 10 juillet 1935
7255 tes et dans les quartiers clairs et chaotiques de la Ceinture qu’on rejoint l’Europe d’aujourd’hui. 10 juillet 1935
7256 clairs et chaotiques de la Ceinture qu’on rejoint l’ Europe d’aujourd’hui. 10 juillet 1935 Toutes les radios du bloc
7257 chaotiques de la Ceinture qu’on rejoint l’Europe d’ aujourd’hui. 10 juillet 1935 Toutes les radios du bloc par les f
7258 urope d’aujourd’hui. 10 juillet 1935 Toutes les radios du bloc par les fenêtres grandes ouvertes à l’heure du dîner,
7259 10 juillet 1935 Toutes les radios du bloc par les fenêtres grandes ouvertes à l’heure du dîner, si seulement elles vous
7260 adios du bloc par les fenêtres grandes ouvertes à l’ heure du dîner, si seulement elles vous abrutissaient comme l’écrit M.
7261 îner, si seulement elles vous abrutissaient comme l’ écrit M. Duhamel ! Mais non, elles vous forcent à écouter dix mélodies
7262 urs à la fois, de sorte qu’il n’est plus possible de dormir ni de lire, ni même de penser sans colère, sans une dégradante
7263 , de sorte qu’il n’est plus possible de dormir ni de lire, ni même de penser sans colère, sans une dégradante et honteuse
7264 n’est plus possible de dormir ni de lire, ni même de penser sans colère, sans une dégradante et honteuse colère. Il suffir
7265 s une dégradante et honteuse colère. Il suffirait d’ un bon décret municipal pour y mettre un peu d’ordre et restituer la b
7266 it d’un bon décret municipal pour y mettre un peu d’ ordre et restituer la bonne humeur à mille personnes de mon intolérant
7267 nicipal pour y mettre un peu d’ordre et restituer la bonne humeur à mille personnes de mon intolérante espèce. En attendan
7268 re et restituer la bonne humeur à mille personnes de mon intolérante espèce. En attendant, toute cette cacophonie révèle q
7269 e cette cacophonie révèle qu’il y a quelque chose de sérieusement détraqué dans ces populations urbaines. S’ils ne devienn
7270 ’ils ne deviennent pas fous, s’ils ne sortent pas de leurs boîtes comme des guignols vociférants, comme des bourgeois sûrs
7271 es guignols vociférants, comme des bourgeois sûrs de leurs droits, lorsque toutes ces radios se déchaînent, — moi je me co
7272 ’ailleurs — c’est qu’ils n’ont plus aucune espèce de sens, je n’ose pas dire : de la musique, mais de la saveur des sons e
7273 t plus aucune espèce de sens, je n’ose pas dire : de la musique, mais de la saveur des sons et de la force des rythmes. S’
7274 lus aucune espèce de sens, je n’ose pas dire : de la musique, mais de la saveur des sons et de la force des rythmes. S’ils
7275 de sens, je n’ose pas dire : de la musique, mais de la saveur des sons et de la force des rythmes. S’ils tolèrent ces rad
7276 sens, je n’ose pas dire : de la musique, mais de la saveur des sons et de la force des rythmes. S’ils tolèrent ces radios
7277 re : de la musique, mais de la saveur des sons et de la force des rythmes. S’ils tolèrent ces radios, c’est sûrement pour
7278 : de la musique, mais de la saveur des sons et de la force des rythmes. S’ils tolèrent ces radios, c’est sûrement pour la
7279 s. S’ils tolèrent ces radios, c’est sûrement pour la même raison qui fait qu’ils chantent faux. Et s’ils chantent faux, c’
7280 faux, c’est parce qu’ils se croiraient déshonorés de chanter juste, comme aussi de marcher au pas. La dignité humaine du p
7281 oiraient déshonorés de chanter juste, comme aussi de marcher au pas. La dignité humaine du petit-bourgeois rationaliste, h
7282 de chanter juste, comme aussi de marcher au pas. La dignité humaine du petit-bourgeois rationaliste, héritier de la Décla
7283 humaine du petit-bourgeois rationaliste, héritier de la Déclaration des droits de l’homme, consiste à chanter faux et à tr
7284 aine du petit-bourgeois rationaliste, héritier de la Déclaration des droits de l’homme, consiste à chanter faux et à troub
7285 de l’homme, consiste à chanter faux et à troubler le cortège. Voilà ce qu’illustre cette cacophonie : c’est l’expression d
7286 ge. Voilà ce qu’illustre cette cacophonie : c’est l’ expression démente et quotidienne de l’individualisme petit-bourgeois.
7287 honie : c’est l’expression démente et quotidienne de l’individualisme petit-bourgeois. Ce « peuple »-là n’a plus d’instinc
7288 ie : c’est l’expression démente et quotidienne de l’ individualisme petit-bourgeois. Ce « peuple »-là n’a plus d’instinct.
7289 alisme petit-bourgeois. Ce « peuple »-là n’a plus d’ instinct. Et les chansons dites populaires ne sont même plus en musiqu
7290 urgeois. Ce « peuple »-là n’a plus d’instinct. Et les chansons dites populaires ne sont même plus en musique : c’est du « p
7291 t même plus en musique : c’est du « parlé » coupé de fioritures rapides comme des « n’est-ce pas ». Soir du 14 juillet
7292 Voici une heure que je suis assis à une terrasse de la Porte d’Italie, au milieu de ce que les journaux appellent le « pe
7293 ici une heure que je suis assis à une terrasse de la Porte d’Italie, au milieu de ce que les journaux appellent le « peupl
7294 eure que je suis assis à une terrasse de la Porte d’ Italie, au milieu de ce que les journaux appellent le « peuple en lies
7295 errasse de la Porte d’Italie, au milieu de ce que les journaux appellent le « peuple en liesse ». Eh bien, quel manque de f
7296 talie, au milieu de ce que les journaux appellent le « peuple en liesse ». Eh bien, quel manque de fantaisie dans cette li
7297 ent le « peuple en liesse ». Eh bien, quel manque de fantaisie dans cette liesse ! Je m’y ennuie presque autant que dans «
7298 liesse ! Je m’y ennuie presque autant que dans «  le monde ». Dans « le monde », on s’agite plus vivement, sur un fond d’e
7299 nuie presque autant que dans « le monde ». Dans «  le monde », on s’agite plus vivement, sur un fond d’ennui multicolore. I
7300 le monde », on s’agite plus vivement, sur un fond d’ ennui multicolore. Ici tout est plus calme, la joie, si joie il y a, e
7301 ond d’ennui multicolore. Ici tout est plus calme, la joie, si joie il y a, est sans gestes et sans flots de paroles. Nul p
7302 ie, si joie il y a, est sans gestes et sans flots de paroles. Nul pittoresque. Rien à « remarquer » parmi les danseurs du
7303 oles. Nul pittoresque. Rien à « remarquer » parmi les danseurs du quartier, alors que dans la société, l’on se montre au mo
7304  » parmi les danseurs du quartier, alors que dans la société, l’on se montre au moins des têtes, en racontant de petites h
7305 danseurs du quartier, alors que dans la société, l’ on se montre au moins des têtes, en racontant de petites histoires… Ic
7306 , l’on se montre au moins des têtes, en racontant de petites histoires… Ici on parle peu, on boit son bock, sa grenadine,
7307 uce détente apathique. En somme, que ce soit dans la société bourgeoise ou dans le peuple, les « artistes » aujourd’hui, s
7308 e, que ce soit dans la société bourgeoise ou dans le peuple, les « artistes » aujourd’hui, sont les seuls hommes qui se pr
7309 oit dans la société bourgeoise ou dans le peuple, les « artistes » aujourd’hui, sont les seuls hommes qui se préoccupent de
7310 ans le peuple, les « artistes » aujourd’hui, sont les seuls hommes qui se préoccupent de colorer leur vie. On n’en a pas as
7311 urd’hui, sont les seuls hommes qui se préoccupent de colorer leur vie. On n’en a pas assez tenu compte dans la littérature
7312 er leur vie. On n’en a pas assez tenu compte dans la littérature moderne, faite uniquement pour des artistes semble-t-il,
7313 tensément, et qui exagèrent autant qu’ils peuvent l’ intensité de leurs sensations. La littérature populiste, si elle veut
7314 t qui exagèrent autant qu’ils peuvent l’intensité de leurs sensations. La littérature populiste, si elle veut rester vraie
7315 t qu’ils peuvent l’intensité de leurs sensations. La littérature populiste, si elle veut rester vraie objectivement, sera
7316 terne et même conventionnelle comme ses modèles à la distance où elle les voit. Je crains qu’elle n’intéresse que les bour
7317 tionnelle comme ses modèles à la distance où elle les voit. Je crains qu’elle n’intéresse que les bourgeois, tandis que les
7318 elle les voit. Je crains qu’elle n’intéresse que les bourgeois, tandis que les duchesses de romans font encore les délices
7319 qu’elle n’intéresse que les bourgeois, tandis que les duchesses de romans font encore les délices du peuple. Je regarde aut
7320 resse que les bourgeois, tandis que les duchesses de romans font encore les délices du peuple. Je regarde autour de moi ce
7321 s, tandis que les duchesses de romans font encore les délices du peuple. Je regarde autour de moi ces hommes en casquette e
7322 s petits bourgeois. Costume, langage, psychologie de leurs classes. On peut aussi penser : ce sont des hommes pour qui le
7323 n peut aussi penser : ce sont des hommes pour qui le Christ est mort. Ils ont chacun en eux ce problème insondable, qu’ils
7324 ont chacun en eux ce problème insondable, qu’ils le sachent ou l’ignorent, — et sans doute l’ignorent-ils à peu près tous
7325 eux ce problème insondable, qu’ils le sachent ou l’ ignorent, — et sans doute l’ignorent-ils à peu près tous ; ce mystère
7326 qu’ils le sachent ou l’ignorent, — et sans doute l’ ignorent-ils à peu près tous ; ce mystère que représente pour chaque h
7327 présente pour chaque homme sa propre vie, dès que la question de Dieu s’y pose. L’observation des sociologues a pour effet
7328 r chaque homme sa propre vie, dès que la question de Dieu s’y pose. L’observation des sociologues a pour effet systématiqu
7329 propre vie, dès que la question de Dieu s’y pose. L’ observation des sociologues a pour effet systématique d’anéantir le vr
7330 rvation des sociologues a pour effet systématique d’ anéantir le vrai tragique, les vraies beautés et les vraies hontes dan
7331 sociologues a pour effet systématique d’anéantir le vrai tragique, les vraies beautés et les vraies hontes dans l’existen
7332 r effet systématique d’anéantir le vrai tragique, les vraies beautés et les vraies hontes dans l’existence monotone des « c
7333 ’anéantir le vrai tragique, les vraies beautés et les vraies hontes dans l’existence monotone des « classes ». Il me semble
7334 que, les vraies beautés et les vraies hontes dans l’ existence monotone des « classes ». Il me semble que seuls les romanci
7335 monotone des « classes ». Il me semble que seuls les romanciers chrétiens — Dostoïevski, Lagerlöf ou Ramuz — ont su prendr
7336 — Dostoïevski, Lagerlöf ou Ramuz — ont su prendre la vie des hommes « quelconques » sur le fait de l’invraisemblable, de l
7337 su prendre la vie des hommes « quelconques » sur le fait de l’invraisemblable, de la vérité mystérieuse, de l’abyssale or
7338 dre la vie des hommes « quelconques » sur le fait de l’invraisemblable, de la vérité mystérieuse, de l’abyssale originalit
7339 la vie des hommes « quelconques » sur le fait de l’ invraisemblable, de la vérité mystérieuse, de l’abyssale originalité q
7340 « quelconques » sur le fait de l’invraisemblable, de la vérité mystérieuse, de l’abyssale originalité qui est pour chacun
7341 uelconques » sur le fait de l’invraisemblable, de la vérité mystérieuse, de l’abyssale originalité qui est pour chacun ce
7342 t de l’invraisemblable, de la vérité mystérieuse, de l’abyssale originalité qui est pour chacun ce qu’il a de plus réel, d
7343 e l’invraisemblable, de la vérité mystérieuse, de l’ abyssale originalité qui est pour chacun ce qu’il a de plus réel, de p
7344 lus réel, de plus inexprimablement réel. Après les cortèges du 14 juillet 1935 Scepticisme et politique. — « J’enten
7345 politique. — « J’entends crier de toutes parts à l’ impiété. Le chrétien est impie en Asie, le musulman en Europe, le papi
7346 — « J’entends crier de toutes parts à l’impiété. Le chrétien est impie en Asie, le musulman en Europe, le papiste à Londr
7347 parts à l’impiété. Le chrétien est impie en Asie, le musulman en Europe, le papiste à Londres, le calviniste à Paris, le j
7348 hrétien est impie en Asie, le musulman en Europe, le papiste à Londres, le calviniste à Paris, le janséniste au haut de la
7349 sie, le musulman en Europe, le papiste à Londres, le calviniste à Paris, le janséniste au haut de la rue Saint-Jacques, le
7350 ope, le papiste à Londres, le calviniste à Paris, le janséniste au haut de la rue Saint-Jacques, le moliniste au fond du f
7351 res, le calviniste à Paris, le janséniste au haut de la rue Saint-Jacques, le moliniste au fond du faubourg Saint-Médard.
7352 , le calviniste à Paris, le janséniste au haut de la rue Saint-Jacques, le moliniste au fond du faubourg Saint-Médard. Qu’
7353 s, le janséniste au haut de la rue Saint-Jacques, le moliniste au fond du faubourg Saint-Médard. Qu’est-ce donc qu’un impi
7354 édard. Qu’est-ce donc qu’un impie ? Tout le monde l’ est-il, ou personne ? » Cet argument de Diderot contre la religion de
7355 t le monde l’est-il, ou personne ? » Cet argument de Diderot contre la religion de son temps ne ferait pas moins de scanda
7356 l, ou personne ? » Cet argument de Diderot contre la religion de son temps ne ferait pas moins de scandale aujourd’hui si
7357 ne ? » Cet argument de Diderot contre la religion de son temps ne ferait pas moins de scandale aujourd’hui si l’on s’avisa
7358 ntre la religion de son temps ne ferait pas moins de scandale aujourd’hui si l’on s’avisait de le diriger contre la politi
7359 ps ne ferait pas moins de scandale aujourd’hui si l’ on s’avisait de le diriger contre la politique, notre superstition. « 
7360 s moins de scandale aujourd’hui si l’on s’avisait de le diriger contre la politique, notre superstition. « J’entends crier
7361 oins de scandale aujourd’hui si l’on s’avisait de le diriger contre la politique, notre superstition. « J’entends crier de
7362 ujourd’hui si l’on s’avisait de le diriger contre la politique, notre superstition. « J’entends crier de toutes parts au m
7363 entends crier de toutes parts au mauvais citoyen. Le capitaliste est l’ennemi public en URSS, le communiste en Europe, le
7364 utes parts au mauvais citoyen. Le capitaliste est l’ ennemi public en URSS, le communiste en Europe, le fasciste à Londres,
7365 oyen. Le capitaliste est l’ennemi public en URSS, le communiste en Europe, le fasciste à Londres, le libéral à Nuremberg,
7366 l’ennemi public en URSS, le communiste en Europe, le fasciste à Londres, le libéral à Nuremberg, le « national » place de
7367 , le communiste en Europe, le fasciste à Londres, le libéral à Nuremberg, le « national » place de la République, le « pop
7368 e, le fasciste à Londres, le libéral à Nuremberg, le « national » place de la République, le « populaire » au haut des Cha
7369 es, le libéral à Nuremberg, le « national » place de la République, le « populaire » au haut des Champs-Élysées. Qu’est-ce
7370 le libéral à Nuremberg, le « national » place de la République, le « populaire » au haut des Champs-Élysées. Qu’est-ce qu
7371 uremberg, le « national » place de la République, le « populaire » au haut des Champs-Élysées. Qu’est-ce qu’un mauvais cit
7372 . Qu’est-ce qu’un mauvais citoyen ? Tout le monde l’ est-il, ou personne ? » — Mais je crains que mes contemporains, tout p
7373 s sont à applaudir Diderot, ne sentent plus guère la force de cette similitude si je l’applique à leurs croyances. Ils aur
7374 applaudir Diderot, ne sentent plus guère la force de cette similitude si je l’applique à leurs croyances. Ils auront aussi
7375 ent plus guère la force de cette similitude si je l’ applique à leurs croyances. Ils auront aussitôt tant de réponses à me
7376 Ils auront aussitôt tant de réponses à me jeter à la tête qu’ils ne trouveront pas même le temps de réfléchir à ma questio
7377 me jeter à la tête qu’ils ne trouveront pas même le temps de réfléchir à ma question. 18 juillet 1935 Mystificatio
7378 à la tête qu’ils ne trouveront pas même le temps de réfléchir à ma question. 18 juillet 1935 Mystifications. — Que
7379 s rencontres avec des écrivains impressionnés par les Soviets, aussi par le cortège de la Bastille. Je leur demande ce qu’i
7380 crivains impressionnés par les Soviets, aussi par le cortège de la Bastille. Je leur demande ce qu’ils pensent de la bruta
7381 pressionnés par les Soviets, aussi par le cortège de la Bastille. Je leur demande ce qu’ils pensent de la brutalité tyrann
7382 ssionnés par les Soviets, aussi par le cortège de la Bastille. Je leur demande ce qu’ils pensent de la brutalité tyranniqu
7383 de la Bastille. Je leur demande ce qu’ils pensent de la brutalité tyrannique de Staline, des camps de concentration sibéri
7384 la Bastille. Je leur demande ce qu’ils pensent de la brutalité tyrannique de Staline, des camps de concentration sibériens
7385 ande ce qu’ils pensent de la brutalité tyrannique de Staline, des camps de concentration sibériens, des fusillades massive
7386 de la brutalité tyrannique de Staline, des camps de concentration sibériens, des fusillades massives, de l’asservissement
7387 concentration sibériens, des fusillades massives, de l’asservissement des paysans, de la puissance des trusts étatisés, de
7388 centration sibériens, des fusillades massives, de l’ asservissement des paysans, de la puissance des trusts étatisés, des n
7389 llades massives, de l’asservissement des paysans, de la puissance des trusts étatisés, des nouveaux maréchaux rouges, de l
7390 des massives, de l’asservissement des paysans, de la puissance des trusts étatisés, des nouveaux maréchaux rouges, de la s
7391 s trusts étatisés, des nouveaux maréchaux rouges, de la suppression totale des libertés culturelles et politiques, etc. Il
7392 rusts étatisés, des nouveaux maréchaux rouges, de la suppression totale des libertés culturelles et politiques, etc. Ils m
7393 que provisoire et simplement « tactique », et que l’ idée qui préside à tout cela est si belle et si grande qu’elle mérite
7394 rite bien des sacrifices… Ainsi parlaient naguère les grands bonzes du capitalisme et de l’ordre bourgeois (quand ils y cro
7395 aient naguère les grands bonzes du capitalisme et de l’ordre bourgeois (quand ils y croyaient encore). Le Progrès, les Val
7396 nt naguère les grands bonzes du capitalisme et de l’ ordre bourgeois (quand ils y croyaient encore). Le Progrès, les Valeur
7397 l’ordre bourgeois (quand ils y croyaient encore). Le Progrès, les Valeurs spirituelles, cela couvrait toute l’injustice co
7398 geois (quand ils y croyaient encore). Le Progrès, les Valeurs spirituelles, cela couvrait toute l’injustice concrète de l’o
7399 ès, les Valeurs spirituelles, cela couvrait toute l’ injustice concrète de l’ordre social. Aujourd’hui, on invoque le deven
7400 tuelles, cela couvrait toute l’injustice concrète de l’ordre social. Aujourd’hui, on invoque le devenir dialectique de l’h
7401 lles, cela couvrait toute l’injustice concrète de l’ ordre social. Aujourd’hui, on invoque le devenir dialectique de l’hist
7402 ncrète de l’ordre social. Aujourd’hui, on invoque le devenir dialectique de l’histoire (« Progrès ») et l’idéal prolétarie
7403 l. Aujourd’hui, on invoque le devenir dialectique de l’histoire (« Progrès ») et l’idéal prolétarien (« Valeurs spirituell
7404 Aujourd’hui, on invoque le devenir dialectique de l’ histoire (« Progrès ») et l’idéal prolétarien (« Valeurs spirituelles 
7405 evenir dialectique de l’histoire (« Progrès ») et l’ idéal prolétarien (« Valeurs spirituelles »). Qu’importe que Staline s
7406 que je suis fasciste. Cette lâcheté était naguère le fait des bourgeois : ils vous traitaient de bolcheviste dès que vous
7407 guère le fait des bourgeois : ils vous traitaient de bolcheviste dès que vous tâchiez de leur montrer que leurs idéaux n’é
7408 us traitaient de bolcheviste dès que vous tâchiez de leur montrer que leurs idéaux n’étaient guère pratiqués. — Le marxism
7409 rer que leurs idéaux n’étaient guère pratiqués. — Le marxisme représente la Réalité aux yeux des intellectuels bourgeois c
7410 étaient guère pratiqués. — Le marxisme représente la Réalité aux yeux des intellectuels bourgeois complètement séparés du
7411 el, et qui commencent à s’en douter. Gardons-nous de les décourager ! 21 juillet 1935 Je traversais hier soir le qua
7412 et qui commencent à s’en douter. Gardons-nous de les décourager ! 21 juillet 1935 Je traversais hier soir le quartie
7413 r ! 21 juillet 1935 Je traversais hier soir le quartier de Passy, en proie aux tourments bienheureux d’une idée savo
7414 illet 1935 Je traversais hier soir le quartier de Passy, en proie aux tourments bienheureux d’une idée savoureuse et di
7415 tier de Passy, en proie aux tourments bienheureux d’ une idée savoureuse et difficile dont je préfère tenir le nom secret,
7416 dée savoureuse et difficile dont je préfère tenir le nom secret, encore un temps, et je goûtais la douceur de ces rues, si
7417 nir le nom secret, encore un temps, et je goûtais la douceur de ces rues, sinueuses et mal éclairées, lorsqu’un groupe de
7418 secret, encore un temps, et je goûtais la douceur de ces rues, sinueuses et mal éclairées, lorsqu’un groupe de jeunes gens
7419 ues, sinueuses et mal éclairées, lorsqu’un groupe de jeunes gens et de jeunes femmes sortit à vingt pas de moi d’une porte
7420 mal éclairées, lorsqu’un groupe de jeunes gens et de jeunes femmes sortit à vingt pas de moi d’une porte cochère, avec une
7421 eunes gens et de jeunes femmes sortit à vingt pas de moi d’une porte cochère, avec une espèce d’éclat de rire. Ce n’était
7422 ens et de jeunes femmes sortit à vingt pas de moi d’ une porte cochère, avec une espèce d’éclat de rire. Ce n’était pas un
7423 t pas de moi d’une porte cochère, avec une espèce d’ éclat de rire. Ce n’était pas un rire de vraie gaieté ni de folie. C’é
7424 ne espèce d’éclat de rire. Ce n’était pas un rire de vraie gaieté ni de folie. C’était quelque chose d’à peine exagéré, qu
7425 e rire. Ce n’était pas un rire de vraie gaieté ni de folie. C’était quelque chose d’à peine exagéré, quelque chose de pres
7426 e vraie gaieté ni de folie. C’était quelque chose d’ à peine exagéré, quelque chose de presque voulu, à la fois insolite et
7427 it quelque chose d’à peine exagéré, quelque chose de presque voulu, à la fois insolite et trop connu — le rire conventionn
7428 presque voulu, à la fois insolite et trop connu —  le rire conventionnel des films français, des petites actrices piquantes
7429 s films français, des petites actrices piquantes, de toutes les femmes qui les imitent. Je ne compris pas leurs paroles tr
7430 ançais, des petites actrices piquantes, de toutes les femmes qui les imitent. Je ne compris pas leurs paroles trop rapides.
7431 ites actrices piquantes, de toutes les femmes qui les imitent. Je ne compris pas leurs paroles trop rapides. Une jeune femm
7432 femme au profil très pur, quelques gestes autour d’ une auto, le claquement d’une portière, et je me retrouvai seul. Mon i
7433 ofil très pur, quelques gestes autour d’une auto, le claquement d’une portière, et je me retrouvai seul. Mon idée s’en éta
7434 quelques gestes autour d’une auto, le claquement d’ une portière, et je me retrouvai seul. Mon idée s’en était allée (Je n
7435 retrouvai seul. Mon idée s’en était allée (Je ne l’ ai retrouvée que ce matin). Mais je venais de voir, le temps d’une lan
7436 retrouvée que ce matin). Mais je venais de voir, le temps d’une lancée névralgique, l’inutilité de penser dans un monde o
7437 e que ce matin). Mais je venais de voir, le temps d’ une lancée névralgique, l’inutilité de penser dans un monde où l’on ri
7438 enais de voir, le temps d’une lancée névralgique, l’ inutilité de penser dans un monde où l’on rit comme cela. 28 juill
7439 r, le temps d’une lancée névralgique, l’inutilité de penser dans un monde où l’on rit comme cela. 28 juillet 1935
7440 vralgique, l’inutilité de penser dans un monde où l’ on rit comme cela. 28 juillet 1935 Le Prochain. — Dans la pres
7441 e où l’on rit comme cela. 28 juillet 1935 Le Prochain. — Dans la presse du métro, vers 7 heures du soir, j’avais r
7442 cela. 28 juillet 1935 Le Prochain. — Dans la presse du métro, vers 7 heures du soir, j’avais réussi à ouvrir le li
7443 o, vers 7 heures du soir, j’avais réussi à ouvrir le livre que je portais, et j’avais coupé quelques pages avec mon ticket
7444 e du Bienheureux Henri Suso : « Quand tu es parmi les hommes, oublie tout ce que tu vois ou entends, et tiens-toi seulement
7445 Je refermai alors mon livre et me mis à regarder les êtres qui me pressaient de tous côtés. Tantôt ils m’offusquaient par
7446 et me mis à regarder les êtres qui me pressaient de tous côtés. Tantôt ils m’offusquaient par leurs visages fermés et pâl
7447 e ou insolente, par leurs parfums et leurs odeurs de bêtes sales, tantôt ils me tentaient par cela même, par leur faibless
7448 ui s’est révélé à ton être intérieur. » Je voyais la laideur et la beauté des hommes, mais je me souvenais de cette « révé
7449 é à ton être intérieur. » Je voyais la laideur et la beauté des hommes, mais je me souvenais de cette « révélation » : Tu
7450 eur et la beauté des hommes, mais je me souvenais de cette « révélation » : Tu aimeras ton prochain comme toi-même. Et j’a
7451 comme toi-même. Et j’ai compris que ce peut être la même chose : regarder pour aimer, et oublier ce que l’on voit. Aoû
7452 me chose : regarder pour aimer, et oublier ce que l’ on voit. Août 1935 Le voisin intolérable. — En face de moi, der
7453 er, et oublier ce que l’on voit. Août 1935 Le voisin intolérable. — En face de moi, derrière mon journal, il y a un
7454 face de moi, derrière mon journal, il y a un être d’ une espèce inquiétante. C’est son contact qui m’en avertit. Je ne l’a
7455 tante. C’est son contact qui m’en avertit. Je ne l’ ai pas encore vu, mais ses deux genoux qui enserrent les miens me font
7456 ge encore, voilà son pied maintenant qui pèse sur le bord de mon soulier. Je ne puis presque plus bouger, comprimé par une
7457 e, voilà son pied maintenant qui pèse sur le bord de mon soulier. Je ne puis presque plus bouger, comprimé par une grosse
7458 se mon journal : je vois un homme plutôt petit, à la tête pointue. Des yeux en lames de canif serrés contre la racine d’un
7459 lutôt petit, à la tête pointue. Des yeux en lames de canif serrés contre la racine d’un nez pâle. Cheveux roux. Une bouche
7460 pointue. Des yeux en lames de canif serrés contre la racine d’un nez pâle. Cheveux roux. Une bouche proéminente couleur de
7461 es yeux en lames de canif serrés contre la racine d’ un nez pâle. Cheveux roux. Une bouche proéminente couleur de planche d
7462 âle. Cheveux roux. Une bouche proéminente couleur de planche d’anatomie. Le torse véritablement énorme bombe une chemise v
7463 x roux. Une bouche proéminente couleur de planche d’ anatomie. Le torse véritablement énorme bombe une chemise verte à peti
7464 bouche proéminente couleur de planche d’anatomie. Le torse véritablement énorme bombe une chemise verte à petits carreaux
7465 e bombe une chemise verte à petits carreaux ornée d’ un nœud papillon mauve. Son pied pèse toujours et insiste. Je retire v
7466 ent le mien. Lui revient. Je suis hors de moi. Je le tuerais ! D’ailleurs il a l’air colossalement fort et refuse de me re
7467 ’ailleurs il a l’air colossalement fort et refuse de me regarder. Voilà ses genoux qui se rapprochent encore et pèsent. J’
7468 t encore et pèsent. J’étouffe un cri. À ce moment la grosse dame se lève et s’en va. Je balbutie, tremblant de colère : « 
7469 e dame se lève et s’en va. Je balbutie, tremblant de colère : « Vous avez de la place à côté, Monsieur. » Il n’entend rien
7470 a. Je balbutie, tremblant de colère : « Vous avez de la place à côté, Monsieur. » Il n’entend rien. Que va-t-il se passer 
7471 Je balbutie, tremblant de colère : « Vous avez de la place à côté, Monsieur. » Il n’entend rien. Que va-t-il se passer ? S
7472 . Que va-t-il se passer ? Simplement il se lève à l’ arrêt : c’est un jeune homme, plutôt petit, quelconque, qui descend sa
7473 e, qui descend sans se retourner. Août 1935 Le métro considéré dans sa réalité sentimentale, sensuelle et sensible (
7474 le (ou sensorielle pendant que nous y sommes) est l’ expression architecturale et mécanique de l’état de fièvre. C’est une
7475 mes) est l’expression architecturale et mécanique de l’état de fièvre. C’est une divagation souterraine de lueurs et de vi
7476 ) est l’expression architecturale et mécanique de l’ état de fièvre. C’est une divagation souterraine de lueurs et de visag
7477 ’expression architecturale et mécanique de l’état de fièvre. C’est une divagation souterraine de lueurs et de visages supe
7478 ’état de fièvre. C’est une divagation souterraine de lueurs et de visages superposés dans les vitres fuyantes, c’est un fr
7479 re. C’est une divagation souterraine de lueurs et de visages superposés dans les vitres fuyantes, c’est un fracas rythmé q
7480 uterraine de lueurs et de visages superposés dans les vitres fuyantes, c’est un fracas rythmé qui rejoint parfois l’asympto
7481 antes, c’est un fracas rythmé qui rejoint parfois l’ asymptote d’un silence mort — cette absence de musique quand le silenc
7482 un fracas rythmé qui rejoint parfois l’asymptote d’ un silence mort — cette absence de musique quand le silence a été tué,
7483 ois l’asymptote d’un silence mort — cette absence de musique quand le silence a été tué, absence qui se confond avec la pr
7484 ’un silence mort — cette absence de musique quand le silence a été tué, absence qui se confond avec la présence d’un bruit
7485 le silence a été tué, absence qui se confond avec la présence d’un bruit universel ; c’est une lassitude douloureuse et bo
7486 été tué, absence qui se confond avec la présence d’ un bruit universel ; c’est une lassitude douloureuse et bousculée au l
7487 st une lassitude douloureuse et bousculée au long d’ un tunnel qui ressemble à la caverne de Platon : des ombres d’êtres y
7488 et bousculée au long d’un tunnel qui ressemble à la caverne de Platon : des ombres d’êtres y dansent sur les voûtes, et c
7489 ée au long d’un tunnel qui ressemble à la caverne de Platon : des ombres d’êtres y dansent sur les voûtes, et chacun s’y s
7490 qui ressemble à la caverne de Platon : des ombres d’ êtres y dansent sur les voûtes, et chacun s’y sent seul, tournant le d
7491 erne de Platon : des ombres d’êtres y dansent sur les voûtes, et chacun s’y sent seul, tournant le dos au soleil toujours a
7492 sur les voûtes, et chacun s’y sent seul, tournant le dos au soleil toujours absent de l’imagerie des cauchemars. Pour bien
7493 t seul, tournant le dos au soleil toujours absent de l’imagerie des cauchemars. Pour bien comprendre le métro, il faut êtr
7494 eul, tournant le dos au soleil toujours absent de l’ imagerie des cauchemars. Pour bien comprendre le métro, il faut être p
7495 e l’imagerie des cauchemars. Pour bien comprendre le métro, il faut être pauvre, éreinté et enfiévré par une maladie encor
7496 par une maladie encore incertaine. Oui, il existe de ces maladies qui vous essaient un peu tous les organes, sans rien dir
7497 ste de ces maladies qui vous essaient un peu tous les organes, sans rien dire, comme le médecin qui ausculte en silence et
7498 nt un peu tous les organes, sans rien dire, comme le médecin qui ausculte en silence et déjà votre sort lui est connu. Je
7499 cieux, plus rapide, mais par longs bonds soudains d’ une lueur à l’autre, obscur lui-même, populeux et canaille avec des îl
7500 cur lui-même, populeux et canaille avec des îlots de luxe révoltant, des musiques féminines raffinées, quelques éclairs su
7501 abîmes verdâtres… Un métro qui serait simplement le subconscient des citadins. Août 1935 Considération des cités o
7502 à ? Si c’est celui que ces hommes désirent et qui les satisfait ? Pourquoi pas cette vie aux allées droites bordées de gazo
7503 Pourquoi pas cette vie aux allées droites bordées de gazon ras, en teintes plates et pâles comme le lavis d’un architecte,
7504 es de gazon ras, en teintes plates et pâles comme le lavis d’un architecte, oui, pourquoi pas ce bonheur au lavis et au co
7505 on ras, en teintes plates et pâles comme le lavis d’ un architecte, oui, pourquoi pas ce bonheur au lavis et au compas ? La
7506 , pourquoi pas ce bonheur au lavis et au compas ? La courbe d’une auto sur le gravier devant ces façades toutes sonores de
7507 pas ce bonheur au lavis et au compas ? La courbe d’ une auto sur le gravier devant ces façades toutes sonores de radios et
7508 au lavis et au compas ? La courbe d’une auto sur le gravier devant ces façades toutes sonores de radios et de lumières, n
7509 sur le gravier devant ces façades toutes sonores de radios et de lumières, n’est-ce pas beau ? Pourquoi ce ricanement « r
7510 er devant ces façades toutes sonores de radios et de lumières, n’est-ce pas beau ? Pourquoi ce ricanement « réactionnaire 
7511 uoi ce ricanement « réactionnaire » dans mon coin d’ ombre ? Des esprits exigeants se plaignent : il n’y aura plus de tensi
7512 esprits exigeants se plaignent : il n’y aura plus de tension créatrice chez ces hommes grossièrement satisfaits. Qu’est-ce
7513 sont enfin heureux, délivrés des maux dégradants, de la misère et du taudis ? Je réponds qu’ils s’ennuieront. J’en réponds
7514 t enfin heureux, délivrés des maux dégradants, de la misère et du taudis ? Je réponds qu’ils s’ennuieront. J’en réponds à
7515 u’ils s’ennuieront. J’en réponds à leur place. Je le sais et c’est plus grave qu’ils ne le croient. L’ennui dans le monde
7516 r place. Je le sais et c’est plus grave qu’ils ne le croient. L’ennui dans le monde actuel, c’est un de ces derniers signe
7517 le sais et c’est plus grave qu’ils ne le croient. L’ ennui dans le monde actuel, c’est un de ces derniers signes, une de ce
7518 est plus grave qu’ils ne le croient. L’ennui dans le monde actuel, c’est un de ces derniers signes, une de ces dernières p
7519 e croient. L’ennui dans le monde actuel, c’est un de ces derniers signes, une de ces dernières preuves concrètes de notre
7520 onde actuel, c’est un de ces derniers signes, une de ces dernières preuves concrètes de notre vocation spirituelle. Cet en
7521 rs signes, une de ces dernières preuves concrètes de notre vocation spirituelle. Cet ennui qui envahit le monde moderne po
7522 notre vocation spirituelle. Cet ennui qui envahit le monde moderne possède une signification métaphysique et religieuse in
7523 est parce qu’il existe que nous savons encore que l’ homme est né pour autre chose que ce bonheur18. Qu’il est né pour un B
7524 ue ce bonheur18. Qu’il est né pour un Bonheur que la nature ne lui enseigne pas, qu’elle attend au contraire de lui, dans
7525 cette « attente ardente » dont parle saint Paul. L’ ennui sera la condition des hommes qui auront tout sauf la seule chose
7526 nte ardente » dont parle saint Paul. L’ennui sera la condition des hommes qui auront tout sauf la seule chose nécessaire.
7527 sera la condition des hommes qui auront tout sauf la seule chose nécessaire. Craignons qu’ils ne préfèrent un jour les gra
7528 nécessaire. Craignons qu’ils ne préfèrent un jour les grands malheurs à cette démission confortable ! Août 1935 La p
7529 à cette démission confortable ! Août 1935 La pire injustice du chômage : il vous oblige à prendre la première plac
7530 ndre la première place qu’on vous offre, fût-elle la plus contraire à votre vocation, sous peine de passer pour un feignan
7531 ocation, sous peine de passer pour un feignant et de se voir refuser toute espèce d’aide ou de considération amicale. Bien
7532 ur un feignant et de se voir refuser toute espèce d’ aide ou de considération amicale. Bienfait correspondant : cela force
7533 nant et de se voir refuser toute espèce d’aide ou de considération amicale. Bienfait correspondant : cela force à choisir
7534 rce à choisir bien nettement entre sa vocation et l’ opinion. Paracelse avait cette devise impérialiste : Alterius non sit
7535 liste : Alterius non sit qui suus esse potest. Je la renverse : « Que rien ne soit à moi, qui puisse être à un autre. »
7536 er encore. Savoir ce qui compte, et s’y tenir. Je le dis avec d’autant moins d’amertume qu’un espoir vient de m’être donné
7537 avoir ce qui compte, et s’y tenir. Je le dis avec d’ autant moins d’amertume qu’un espoir vient de m’être donné. Une feuill
7538 mpte, et s’y tenir. Je le dis avec d’autant moins d’ amertume qu’un espoir vient de m’être donné. Une feuille de papier-mac
7539 e qu’un espoir vient de m’être donné. Une feuille de papier-machine avec ce petit poème en prose : À Thivars, 8 kilomètre
7540 e petit poème en prose : À Thivars, 8 kilomètres de Chartres, Petite fermette 3 pièces meublées — 2 grandes cours et jard
7541 es meublées — 2 grandes cours et jardin — un bras de rivière au bas du jardin — la maison donne sur la route en face de tr
7542 et jardin — un bras de rivière au bas du jardin —  la maison donne sur la route en face de très grands prés, on peut pêcher
7543 de rivière au bas du jardin — la maison donne sur la route en face de très grands prés, on peut pêcher. — Eau de puits dan
7544 n face de très grands prés, on peut pêcher. — Eau de puits dans la cour actionnée par une pompe — électricité. Commerçants
7545 grands prés, on peut pêcher. — Eau de puits dans la cour actionnée par une pompe — électricité. Commerçants : boucher, ép
7546 charcutier, ferme — et docteur, boulanger. Moyens de communication : 2 autobus pour venir de Chartres. 2 autobus pour reto
7547 de Chartres. 2 autobus pour retourner à Chartres. Le samedi 3 dans les deux sens.   1933-1935 18. « Que l’homme est né
7548 tobus pour retourner à Chartres. Le samedi 3 dans les deux sens.   1933-1935 18. « Que l’homme est né pour le bonheur,
7549 i 3 dans les deux sens.   1933-1935 18. « Que l’ homme est né pour le bonheur, certes, toute la nature l’enseigne » (Gi
7550 ns.   1933-1935 18. « Que l’homme est né pour le bonheur, certes, toute la nature l’enseigne » (Gide).
7551 Que l’homme est né pour le bonheur, certes, toute la nature l’enseigne » (Gide).
7552 e est né pour le bonheur, certes, toute la nature l’ enseigne » (Gide).