1
Avertissement Ceci n’
est
pas un livre, mais un recueil de conférences et d’essais sur des suje
2
s « parlés », les autres écrits — c’est qu’ils ne
sont
pas dépourvus d’une certaine unité d’intention : ils sont tous nés d’
3
dépourvus d’une certaine unité d’intention : ils
sont
tous nés d’un même souci de la personne et de son rôle dans la commun
4
nt de rien proposer, il convient de dire qui l’on
est
, de préciser au nom de quoi l’on parle ; et ce ne peut être, sérieuse
5
réciser au nom de quoi l’on parle ; et ce ne peut
être
, sérieusement, qu’au nom d’une foi. Je prends ce mot dans son sens le
6
eux bien qu’il doit compromettant. Une foi réelle
est
une raison de vivre et non point d’échapper à la vie. Ceci dit, je ne
7
n au contraire ! Car les seuls entretiens féconds
sont
ceux où chacun se donne, dès le départ, en toute rigueur, pour ce qu’
8
e, dès le départ, en toute rigueur, pour ce qu’il
est
. Vient ensuite une conférence sur la Bataille de la culture : synthès
9
re dans l’évolution générale. Le reste du recueil
est
consacré à définir cette mission suisse, ses objectifs immédiats et l
10
générales et quelques directions de pensée. Ce n’
est
pas suffisant, mais c’est urgent. C’est de quoi nous manquons le plus
11
spécialistes et de « compétences » : leur travail
est
indispensable, mais il ne saurait être utile que s’il est orienté d’e
12
eur travail est indispensable, mais il ne saurait
être
utile que s’il est orienté d’emblée par une vision générale du monde,
13
spensable, mais il ne saurait être utile que s’il
est
orienté d’emblée par une vision générale du monde, et du rôle de la S
14
du monde, et du rôle de la Suisse dans le monde.
Soyons
modestes, c’est entendu. Nous ne sommes pas les mentors de l’Europe.
15
le monde. Soyons modestes, c’est entendu. Nous ne
sommes
pas les mentors de l’Europe. Mais n’allons pas confondre cette modest
16
istes », le scepticisme et la lâcheté civique. Il
est
, dans l’histoire des nations, des heures où l’utopie la plus nocive e
17
es nations, des heures où l’utopie la plus nocive
est
justement le petit réalisme ; des heures où toute vue courte est une
18
e petit réalisme ; des heures où toute vue courte
est
une vue fausse ; où la prudence est la pire imprudence. Que cette heu
19
te vue courte est une vue fausse ; où la prudence
est
la pire imprudence. Que cette heure ait sonné pour la Suisse, qu’il s
20
. Que cette heure ait sonné pour la Suisse, qu’il
soit
temps de voir grand et d’oser, au sein d’un grand péril et d’un beau
21
l’épreuve des âmes. Or le courage qu’il y faut n’
est
pas seulement celui de résister : il est d’abord celui de se risquer.
22
y faut n’est pas seulement celui de résister : il
est
d’abord celui de se risquer. Je demandai à l’homme qui se tenait à l
23
elui de se risquer. Je demandai à l’homme qui se
tenait
à la porte de l’année : « Donne-moi une lumière afin que je puisse al
24
rité et mets tes mains dans les mains de Dieu. Ce
sera
plus sûr pour toi qu’une lumière et qu’un chemin que tu connaisses. »
25
quelque méfiance. Je souhaite que beaucoup aient
tenu
le petit raisonnement que voici : Pour les réformateurs, l’homme deva
26
en signifier cette contradiction affligeante ? Je
serais
heureux que la question vous ait paru curieuse, ou peut-être grave, o
27
t passer de notre théologie à notre histoire ? Qu’
est
-ce que cette personnalité dont la valeur varie si curieusement entre
28
t une gloire peut-être intempestive ? Le problème
est
, je crois, d’autant plus actuel que les menaces qui pèsent aujourd’hu
29
ude, il s’agit de le combler en vérité. La menace
est
sérieuse, les événements de septembre et toute la suite l’ont fait vo
30
s3. En Russie, en Allemagne, en Italie, l’attaque
est
déjà déclenchée. Elle nous atteint déjà par contrecoup, et il est sag
31
hée. Elle nous atteint déjà par contrecoup, et il
est
sage de s’attendre à bien pire. C’est donc le moment ou jamais de se
32
s moyens de défense. Et, par exemple, si beaucoup
sont
prêts à louer la Réforme d’être une école de personnalités, donc un r
33
mple, si beaucoup sont prêts à louer la Réforme d’
être
une école de personnalités, donc un rempart contre la barbarie, c’est
34
rquoi, dans quel esprit surtout le protestantisme
est
effectivement cela. Depuis une dizaine d’années, une discussion génér
35
s une dizaine d’années, une discussion générale s’
est
instituée sur les notions de personne, d’individu et de personnalité.
36
nes protestants, beaucoup d’agnostiques aussi, se
sont
efforcés de montrer l’importance concrète d’une définition de la pers
37
le mot d’ordre « Défense de la personne humaine »
est
devenu le slogan par excellence des hommes d’État démocratiques. Tout
38
remontons aux origines, si nous cherchons comment
sont
apparues dans l’Histoire les notions d’individu et de personne, et le
39
ne certaine polémique réactionnaire, l’individu n’
est
pas une invention du siècle des Lumières et de la Déclaration des dro
40
aturel, et s’isole. Le groupe primitif, la tribu,
est
lié par le lien du sang, des morts communs, et par celui de la terreu
41
l’intolérance radicale. (On ne discute pas ce qui
est
sacré.) De plus, elle est radicalement grégaire et xénophobe. Mais su
42
n ne discute pas ce qui est sacré.) De plus, elle
est
radicalement grégaire et xénophobe. Mais supposez maintenant qu’un de
43
istinct des peuplades indo-germaniques, les Grecs
sont
les premiers à se détacher, à prendre figure, donc à s’individualiser
44
les expulse : voilà les premiers individus. Ceci
est
important : à l’origine, individu est synonyme de criminel. Mais peu
45
vidus. Ceci est important : à l’origine, individu
est
synonyme de criminel. Mais peu à peu, ces individus se groupent pour
46
les à la cité au sens moderne. Alors que la tribu
était
liée par des liens d’origine — le sang, la famille — la cité est fond
47
s liens d’origine — le sang, la famille — la cité
est
fondée sur l’intérêt commun et les contrats. Alors que la morale de l
48
t. La définition la plus noble de l’individu nous
est
fournie à ce moment par Socrate, lorsqu’il nous dit : Connais-toi toi
49
misée ». Le vide social créé par l’individualisme
est
toujours un appel à l’État dictatorial. Et cet État aux cadres géomét
50
entre individualisme et dictature, l’opposition n’
est
qu’apparente : en réalité, il y a de l’un à l’autre un lien de cause
51
ère dont le vide s’oppose au plein : plus le vide
est
absolu, plus l’appel est puissant. À bien des égards, l’étatisme ne f
52
au plein : plus le vide est absolu, plus l’appel
est
puissant. À bien des égards, l’étatisme ne fait qu’achever le process
53
ciale commencé par l’individualisme. L’individu s’
était
abstrait du groupe naturel ; l’État liquide les groupes naturels subs
54
s à l’état de fonctionnaires ou de soldats. Telle
est
l’histoire de la décadence de Rome. Le type d’homme que suppose l’éta
55
par sa fonction dans la cité. C’est celui-là qui
sera
nommé juridiquement la persona. Ce mot qui désignait à l’origine le m
56
que joue le citoyen. Dans l’Empire, tout homme n’
est
pas une persona, il s’en faut. Les esclaves, par exemple, qui forment
57
, qui forment les deux tiers de la population, ne
sont
pas des personnes, puisqu’ils ne jouent pas de rôle dans les rouages
58
jouent pas de rôle dans les rouages de l’État. Il
est
important de rappeler ce sens romain du mot personne. Je le traduirai
59
rannie, successivement, ont fait faillite. Quelle
sera
la nouvelle société ? En ce point de l’évolution, dans cette angoisse
60
ssibilité de communauté, c’est celle qu’imagine l’
être
spirituel. C’est l’espoir d’une société d’un type absolument nouveau,
61
’une société d’un type absolument nouveau, qui ne
soit
pas fondée sur les contraintes du passé, ni sur des lois, mais sur l’
62
une et enthousiaste d’un au-delà libérateur. Ce n’
est
plus le rêve du retour aux origines, c’est le rêve d’un avenir éterne
63
alisation historique de la première possibilité s’
est
amorcée dès la fin de la République romaine, quand César est devenu u
64
dès la fin de la République romaine, quand César
est
devenu un dieu. Et c’est l’échec de cette religion d’État, confondu a
65
nt une société absolument nouvelle : l’Église. Qu’
est
-ce que l’Église primitive, du point de vue sociologique où je me plac
66
terme moderne : des cellules. Ces communautés ne
sont
pas fondées sur le passé ni sur des origines communes. « Il n’y a plu
67
des esclaves et des citoyens riches. Leur lien n’
est
pas terrestre : il est dans l’au-delà. Leur chef n’est pas terrestre
68
toyens riches. Leur lien n’est pas terrestre : il
est
dans l’au-delà. Leur chef n’est pas terrestre : il s’est assis au Cie
69
as terrestre : il est dans l’au-delà. Leur chef n’
est
pas terrestre : il s’est assis au Ciel à la droite de Dieu. Leurs amb
70
s l’au-delà. Leur chef n’est pas terrestre : il s’
est
assis au Ciel à la droite de Dieu. Leurs ambitions non plus ne sont p
71
à la droite de Dieu. Leurs ambitions non plus ne
sont
pas terrestres, car ce qu’elles attendent, c’est la fin des temps. Et
72
. Ainsi, spirituellement et socialement, l’Église
est
une communauté d’hommes qui sont à la fois libres et engagés. Libérés
73
alement, l’Église est une communauté d’hommes qui
sont
à la fois libres et engagés. Libérés par Celui qui les engage à son s
74
avons bien que leur libération et leur service ne
sont
nullement contradictoires, n’étant que deux aspects complémentaires d
75
leur service ne sont nullement contradictoires, n’
étant
que deux aspects complémentaires d’une seule et même réalité : la con
76
d’une seule et même réalité : la conversion. Tel
est
l’homme neuf, créé par l’Église chrétienne. Ce n’est pas l’individu g
77
l’homme neuf, créé par l’Église chrétienne. Ce n’
est
pas l’individu grec, puisqu’il se soucie davantage de servir que de s
78
davantage de servir que de se distinguer. Et ce n’
est
pas non plus la persona du droit romain, puisque l’homme qui reçoit u
79
christianisé. Car cet homme, lui aussi, se trouve
être
à la fois autonome et en relation. Ainsi le mot avec son sens nouveau
80
ns nouveau, et la réalité sociale de la personne,
sont
bel et bien des créations chrétiennes ou, pour mieux dire, des créati
81
ction entre ces deux vocables si courants, loin d’
être
une querelle byzantine, ne traduit rien de moins, dans les débuts, qu
82
re l’homme naturel et l’homme chrétien. Ces bases
étant
posées, faisons dans nos pensées un petit saut de quelques siècles, p
83
s peu à peu l’héritage de l’Empire romain. Elle s’
est
peu à peu substituée aux cadres sclérosés du vieux régime. La capital
84
lait le prévoir. En effet, la personne chrétienne
était
une sorte de paradoxe : elle unissait l’individu libre et la persona
85
ociété et tend à s’imposer par la force, comme ce
fut
le cas dès le xiie siècle, on se retrouve dans une situation quelque
86
rèce individualiste. L’individu de la Renaissance
est
d’abord un révolté qui oppose ses besoins propres aux dogmes sacrés d
87
c’est-à-dire le libre examen de toutes choses. Il
est
assoiffé de gloire et de richesse, de sa propre gloire, et de sa prop
88
e, de sa propre gloire, et de sa propre richesse,
fussent
-elles acquises aux dépens de sa famille et de sa cité, aux dépens mêm
89
ême de la vie d’autrui. Un grand nombre de crimes
furent
commis dans l’Italie du xve siècle à seule fin d’acquérir de la reno
90
siciliens, fondateurs du capitalisme commercial,
sont
souvent cités comme les premiers types d’individus au sens moderne. N
91
e profanation que l’on opère. Du moins ces gestes
sont
-ils ressentis comme tels à cette époque. Or il est évident que cet in
92
nt-ils ressentis comme tels à cette époque. Or il
est
évident que cet individualisme est un retour du paganisme grec. Mais
93
époque. Or il est évident que cet individualisme
est
un retour du paganisme grec. Mais il est non moins évident qu’il repr
94
dualisme est un retour du paganisme grec. Mais il
est
non moins évident qu’il représente une réaction inévitable à la dévia
95
ssayer de vous montrer ce que pourrait et devrait
être
un personnalisme inspiré de la Réforme. Calvin ni Luther n’ont parlé
96
dant toutes les réalités que désignent ces termes
sont
présentes, et sont en conflit à l’époque de la Réforme. Essayons de l
97
lités que désignent ces termes sont présentes, et
sont
en conflit à l’époque de la Réforme. Essayons de les dégager sommaire
98
ager sommairement. Le but unique des réformateurs
était
de restaurer la fidélité de l’Église à la Parole de Dieu. Jamais ils
99
ise à la Parole de Dieu. Jamais ils n’ont admis d’
être
présentés comme des novateurs. « Nous nous sommes efforcés, écrit Cal
100
d’être présentés comme des novateurs. « Nous nous
sommes
efforcés, écrit Calvin, de ne pas mettre nos opinions personnelles à
101
mbarrer ces deux vices, toute la pureté de la foi
serait
confuse. » L’Église primitive était une communauté spirituelle de per
102
té de la foi serait confuse. » L’Église primitive
était
une communauté spirituelle de personnes, d’hommes nouveaux, à la fois
103
uant une multitude de communautés locales. Telles
seront
à nouveau les Églises réformées. Point de centralisation, point de ca
104
ans le plan de l’État. La personne chrétienne, ce
sera
le rôle que Dieu attribue à chaque homme dans Son plan. Notez bien qu
105
son prochain. Ainsi la dignité de chaque individu
est
garantie non pas du seul fait qu’il existe physiquement, mais du fait
106
dès lors, cet homme n’a pas seulement le droit d’
être
respecté par l’État, il a surtout le devoir d’agir, en tant qu’il est
107
tat, il a surtout le devoir d’agir, en tant qu’il
est
chargé d’une responsabilité unique dans la société, à sa juste place.
108
à sa juste place. Notons que si la personne doit
être
respectée par l’État, ce n’est pas en vertu d’on ne sait quel « droit
109
la personne doit être respectée par l’État, ce n’
est
pas en vertu d’on ne sait quel « droit naturel » à la désobéissance !
110
béissance ! Calvin précise que l’État, quel qu’il
soit
, doit être obéi par chacun. Mais il ajoute une restriction mémorable,
111
Calvin précise que l’État, quel qu’il soit, doit
être
obéi par chacun. Mais il ajoute une restriction mémorable, qui figure
112
et le peuple de telle manière que par cela je ne
sois
nullement empêché de rendre à Dieu le service que je lui dois par ma
113
e seul texte constitutionnel existant, qui puisse
être
qualifié de personnaliste, au sens précis où je l’entends. Diversité
114
n strictement ecclésiastique, c’est vrai. Mais il
était
inévitable et juste que ce type de relations influençât peu à peu tou
115
elations politiques. Toute l’histoire de l’Europe
serait
à refaire à partir de cette constatation : que les formes et structur
116
errons quelques exemples un peu plus loin. Quelle
fut
donc la traduction politique de la doctrine calvinienne de l’Église e
117
on réfléchit aux deux questions suivantes : quels
furent
les régimes qui persécutèrent la Réforme ? Et quelle fut l’action his
118
régimes qui persécutèrent la Réforme ? Et quelle
fut
l’action historique des hommes d’État de la Réforme calviniste ? Par
119
s le début, l’obstacle principal à la Réforme, ce
fut
l’absolutisme, la passion unitaire et centralisatrice, tant chez les
120
ou moins inspiré du stathoudérat hollandais. Et n’
est
-ce pas le huguenot Sully qui, le premier, sous Henry IV, conçut le «
121
ndance fédéraliste protestante jusqu’à nos jours,
est
d’ordre proprement spirituel. C’est bien le même état d’esprit qui ex
122
quer. Et vous savez que les problèmes d’éducation
furent
dès le début le grand souci des réformés. Calvin fonde le Collège de
123
e sa vocation. C’est à cause de sa vocation qu’il
est
à la fois libre et engagé, autonome et pourtant responsable au sein d
124
initive, c’est de cela qu’il s’agit. L’histoire n’
est
jamais qu’un tremplin pour mieux sauter en plein cœur de l’actuel. Co
125
éforme et sa morale ? Calvin, vous le savez, ne s’
est
jamais préoccupé de la forme des gouvernements. Il insiste à maintes
126
e fait que monarchies, oligarchies et républiques
sont
également voulues de Dieu et doivent être obéies comme telles. Une fo
127
bliques sont également voulues de Dieu et doivent
être
obéies comme telles. Une fois cependant il marque une préférence, mai
128
squ’il écrit : « Le meilleur état de gouvernement
est
celui-là où il y a une liberté bien tempérée et pour durer longuement
129
e donne raison au réformateur. Et je ne crois pas
être
infidèle à sa pensée en y ajoutant cette précision : ce n’est pas la
130
à sa pensée en y ajoutant cette précision : ce n’
est
pas la forme d’un État qui compte, mais bien la condition qu’il ménag
131
s qui s’affrontent aujourd’hui. Le premier groupe
est
celui des nations qui respectent l’Église et la personne. Nous y trou
132
er entre ces trois États : d’abord parce que ce n’
est
pas notre sujet, ensuite parce que ces différences, qui ne le voit, s
133
nnée7. Ce qu’il nous importe de souligner ici, ce
sont
deux traits évidemment communs à ces régimes : leur opposition brutal
134
ur opposition brutale au christianisme dès qu’ils
sont
assez forts pour lever le masque, et leur mépris de la personne. Voic
135
stinction entre l’Église et l’État n’avait jamais
été
établie d’une manière satisfaisante. Le tsar par exemple, était à la
136
d’une manière satisfaisante. Le tsar par exemple,
était
à la fois chef de l’État et chef de l’Église : c’est ce qu’on nomme l
137
ropapisme. D’autre part, ses décisions politiques
étaient
fortement influencées par le clergé : c’est ce qu’on nomme la théocra
138
La coupure entre le spirituel et le temporel n’y
était
pas faite au bon endroit, ou mal faite, ou pas faite du tout. Il en r
139
oup plus rigoureusement, car la religion dont ils
étaient
les chefs était une religion de guerre, possédant toute la virulence
140
ement, car la religion dont ils étaient les chefs
était
une religion de guerre, possédant toute la virulence des corps chimiq
141
e part, l’instauration de ces régimes tyranniques
fut
largement facilitée, et même appelée, par l’absence dans tous ces pay
142
’il nomme « l’absence des meilleurs », ne saurait
être
que l’absolutisme. Or, si nous nous rappelons que le calvinisme a tou
143
e fait suivant qui, à ma connaissance, n’a jamais
été
signalé : c’est qu’il existe une forme de totalitarisme correspondant
144
que le calvinisme ne puisse dévier lui aussi, et
soit
sans défauts. Mais cela signifie que ses défauts et déviations n’entr
145
t totalitaire. Mais lorsque le calvinisme cesse d’
être
une foi vivante, il laisse derrière lui une empreinte tout à fait dif
146
rtains qui se demandent encore, par exemple, s’il
est
de gauche ou de droite, alors qu’il est du diable, et que c’est en ch
147
ple, s’il est de gauche ou de droite, alors qu’il
est
du diable, et que c’est en chrétiens que nous avons maintenant à nous
148
enant à nous défendre, dans cette guerre qui nous
est
déclarée. Or le meilleur, le seul moyen de se défendre — surtout quan
149
condition pour éviter chez nous, pendant qu’il en
est
temps, des déviations qui feraient le jeu de l’ennemi. Connaître la d
150
aierai de tirer des conclusions pratiques. Quelle
est
la condition faite à l’Église dans les pays totalitaires ? Cette prem
151
s les pays totalitaires ? Cette première question
est
capitale. Car la politique d’un régime est toujours étroitement dépen
152
estion est capitale. Car la politique d’un régime
est
toujours étroitement dépendante de l’attitude qu’il prend vis-à-vis d
153
Église et du fait religieux en général. Un régime
est
totalitaire lorsqu’il prétend centraliser radicalement tous les pouvo
154
t cela d’autant plus que la religion qu’il adopte
est
, comme dans le cas des fascismes et du communisme, une religion de l’
155
ace, la tradition, les morts. Voilà pourquoi elle
est
intolérante au suprême degré, et plus qu’intolérante : on ne peut mêm
156
rigines, on ne pourra jamais y entrer — si l’on n’
est
pas de sang aryen, par exemple — car cette religion n’admet pas que «
157
te religion n’admet pas que « les choses vieilles
sont
passées » selon la parole de l’Apôtre. Elle n’admet pas la conversion
158
is-tu ? qu’espères-tu ? mais elle demande : quels
sont
tes morts ? Religion du sang, religion de la terre et des morts, reli
159
u monde, d’une défense spirituelle du pays. Et je
suis
le premier à l’approuver. Mais lorsqu’on fonde cette défense spiritue
160
quand beaucoup de Suisses, et des plus influents,
sont
incroyants, cela mène tout simplement, dans la pratique, à l’utilisat
161
sme. Si le mot d’ordre « Suisse chrétienne » doit
être
lancé, ce ne peut être que par les Églises seules, et non par un part
162
« Suisse chrétienne » doit être lancé, ce ne peut
être
que par les Églises seules, et non par un parti ou par une ligue. Une
163
i ou par une ligue. Une « Suisse chrétienne », ce
serait
une Suisse dont les citoyens seraient chrétiens, ou tout au moins acc
164
étienne », ce serait une Suisse dont les citoyens
seraient
chrétiens, ou tout au moins accepteraient en bonne conscience des dir
165
e à la doctrine totalitaire. Le fédéralisme, ce n’
est
pas seulement un pour tous — qui serait une devise collectiviste — ce
166
alisme, ce n’est pas seulement un pour tous — qui
serait
une devise collectiviste — ce n’est pas seulement tous pour un — qui
167
tous — qui serait une devise collectiviste — ce n’
est
pas seulement tous pour un — qui serait individualiste — c’est l’équi
168
viste — ce n’est pas seulement tous pour un — qui
serait
individualiste — c’est l’équilibre vivant des deux termes. Ceux qui d
169
lidaire. Ceci nous amène au second point : quelle
est
la condition faite à la personne dans les pays totalitaires ? C’est t
170
utre pôle : celui de l’engagement social. L’homme
étant
totalement engagé, corps et esprit, dans les rouages de l’État, et ce
171
: caporalisation. Et la personne ainsi comprise n’
est
plus qu’à peine une persona au sens romain, un rôle, un masque, une f
172
à l’héroïsme collectif — le plus facile, si c’en
est
encore un ! — mais qui n’ont plus de courage civique. Militarisation
173
ent humaines. À force de louer la Réforme d’avoir
été
, comme on dit, « une pépinière d’individualités et de caractères bien
174
nous courons le risque d’oublier que la Réforme n’
est
pas faite pour l’homme d’abord. À force de louer ses effets humains,
175
ause divine. N’oublions pas que la personnalité n’
est
bien souvent que le résidu, l’empreinte d’une personne sur un individ
176
ne croit plus à sa vocation, et qui a simplement
été
formé par une éducation et une ambiance protestante. Nous n’en avons
177
te de nationalisme huguenot, de ces hommes qui ne
sont
en fait que « sortis » du protestantisme… Certes, nous pouvons nous
178
e ce que la foi réformée, même quand elle cesse d’
être
vivante, laisse en se retirant beaucoup de personnalités. Cela consti
179
aut alors rappeler que la personnalité, si grande
soit
-elle, devant Dieu c’est zéro. Et si l’on se borne au point de vue soc
180
uis, une personnalité en soi, sans vocation, ce n’
est
rien de plus, après tout, qu’un individu aux caractères accusés. Ains
181
t c’est pourquoi l’on a pu dire que le calvinisme
était
à l’origine du capitalisme moderne, avec sa concurrence sans frein, p
182
is ce qu’il ne peut ni surtout ne veut former, ce
sont
justement des personnes, des vocations irréductibles aux ambitions sp
183
ions spirituelles de l’État. Ces personnes-là, ce
sont
ses véritables adversaires, les seuls sérieux, et il le sait ! Si Nie
184
, les seuls sérieux, et il le sait ! Si Niemöller
est
dans un camp de concentration, prisonnier personnel du Führer, ce n’e
185
ncentration, prisonnier personnel du Führer, ce n’
est
point parce qu’on lui reproche son énergie ou ses talents, ses traits
186
sonnalité, car bien d’autres en ont autant qui ne
sont
pas pour cela en prison. Ce qu’on lui reproche, ce que l’on ne peut p
187
sonne, c’est-à-dire sa vocation particulière, qui
est
de prêcher l’Évangile. — Vous voyez que le Führer sait parfaitement o
188
le bénéfice exclusif d’une telle clairvoyance. Il
est
temps de tirer, en deux mots, la conclusion de cette série de mises a
189
Réforme, et spécialement sa tendance calviniste,
est
appelée à figurer, dans notre siècle, le type même de la sûre doctrin
190
. Un véritable protestant, les faits le prouvent,
sera
toujours l’adversaire le plus efficace de l’esprit totalitaire. Déjà,
191
ar une espèce de croisade intérieure. Le chrétien
est
celui qui n’a pas d’autre ennemi à craindre que l’ennemi qu’il porte
192
ui-même. Car un ennemi visible et extérieur, ce n’
est
jamais que l’incarnation d’une possibilité secrète, d’une tentation q
193
Même rappel que ci-dessus. Le « Pacte d’acier » s’
étant
révélé un pacte ordinaire, les amis de l’Italie ont eu plutôt tendanc
194
pas de ces remarques que les trois Églises citées
sont
responsables des trois mouvements totalitaires, mais bien que ces mou
195
la forme de leur doctrine. Encore le phénomène s’
est
-il limité aux grands pays. Les États balkaniques orthodoxes ne sont p
196
grands pays. Les États balkaniques orthodoxes ne
sont
pas communistes ; les États scandinaves luthériens ne sont pas nation
197
communistes ; les États scandinaves luthériens ne
sont
pas nationaux-socialistes ; la Belgique catholique n’est pas fasciste
198
nationaux-socialistes ; la Belgique catholique n’
est
pas fasciste. 9. Sur la distinction, d’une importance capitale, entr
199
fs ; selon Marx, tout vient des bourgeois… Ce qui
est
certain, c’est que l’invention du système est antérieure de plusieurs
200
qui est certain, c’est que l’invention du système
est
antérieure de plusieurs siècles à la Réforme, et son triomphe postéri
201
faut des remèdes ou une opération. Et les remèdes
sont
souvent composés de poisons… 12. Cette devise rend un son « suisse »
202
et le visage et les soucis, et devant lequel je m’
étais
engagé à disserter de la culture… Un sentiment d’absurdité et d’impui
203
nteraient la garde dans la neige, d’autres hommes
seraient
assis dans une salle bien chauffée, et je leur parlerais de la cultur
204
rre que personne ne voulait, et qui tout de même,
était
là ? Il n’y avait plus qu’à se taire, qu’à se laisser glisser dans l’
205
ais vous dire ici. En effet : ou bien la culture
est
une affaire d’agrément, un ensemble de spécialités paisibles, un supe
206
situation devient sérieuse ; — ou bien la culture
est
action, création et bataille réelle, et alors il faut en parler, et l
207
nité d’une conférence en temps de guerre, ce fait
est
significatif. Il prouve que nous tenons la culture pour quelque chose
208
rre, ce fait est significatif. Il prouve que nous
tenons
la culture pour quelque chose d’un peu moins sérieux que l’action, ou
209
e voudrais vous montrer ce soir que cette crise n’
est
pas théorique ; qu’elle a des conséquences pratiques ; qu’elle est l’
210
; qu’elle a des conséquences pratiques ; qu’elle
est
l’une des origines de la présente guerre ; et que cette guerre n’est,
211
nes de la présente guerre ; et que cette guerre n’
est
, en fin de compte, malgré tous ses prétextes matériels, qu’un épisode
212
millénaire bataille de la culture. L’adversaire
est
en nous S’il y a bataille, c’est donc qu’il y a deux adversaires.
213
lle, c’est donc qu’il y a deux adversaires. Quels
sont
-ils ? Mais d’abord, essayons d’écarter un malentendu menaçant. La bat
214
menaçant. La bataille dont je vais vous parler n’
est
pas une bataille politique. Les adversaires ne sont nullement les act
215
st pas une bataille politique. Les adversaires ne
sont
nullement les actuels belligérants, et il n’est pas question, ici, de
216
sont nullement les actuels belligérants, et il n’
est
pas question, ici, de confondre l’un des partis avec la cause de la c
217
n des partis avec la cause de la culture, l’autre
étant
le parti de l’anti-culture. Ce genre d’opposition est très tentant, j
218
le parti de l’anti-culture. Ce genre d’opposition
est
très tentant, je l’avoue, et aujourd’hui plus que jamais… C’est malgr
219
tzendorf, avait coutume de dire : « Tout ce qui n’
est
pas aussi simple qu’une gifle ne vaut rien pour la guerre. » Grâce à
220
ne vaut rien pour la guerre. » Grâce à Dieu, nous
sommes
encore neutres, et nous avons encore le droit de ne pas nous livrer à
221
fier les forces mauvaises qui les menacent. S’ils
sont
malades, ils pensent que c’est la faute d’un objet maléfique, ou d’un
222
ours, la cause du mal, c’est-à-dire l’adversaire,
est
devant eux, à l’extérieur. Or, notre civilisation, sous l’influence d
223
ivilisation, sous l’influence du christianisme, s’
est
efforcée de nous faire comprendre que la vraie cause de nos malheurs
224
ire comprendre que la vraie cause de nos malheurs
est
presque toujours en nous-mêmes. Il faut reconnaître, hélas, que cette
225
ts enfants qui battent la table à laquelle ils se
sont
heurtés. Il est facile et rassurant de noircir le voisin pour mieux s
226
ttent la table à laquelle ils se sont heurtés. Il
est
facile et rassurant de noircir le voisin pour mieux se blanchir soi-m
227
imaginables. Et cet ennemi qui nous menace, il ne
serait
nullement suffisant de l’anéantir pour nous en délivrer. Car la tenda
228
prit Songeant à notre civilisation moderne, je
suis
de plus en plus frappé par ces deux traits : d’une part, une étonnant
229
leront pour la paix. Mais l’état de notre culture
est
tel que l’invention sera utilisée pour détruire cette paix, préciséme
230
s l’état de notre culture est tel que l’invention
sera
utilisée pour détruire cette paix, précisément, que le prix devait co
231
vager la civilisation qui les produit ? Vous vous
êtes
tous posé cette question-là. Mais il ne suffit pas de se la poser et
232
que signifie une si cruelle disharmonie, quelles
sont
ses causes, et s’il existe des remèdes. Car il ne serait pas suffisan
233
ses causes, et s’il existe des remèdes. Car il ne
serait
pas suffisant de n’accuser que la méchanceté des hommes : c’est l’esp
234
s ce même ordre. Le but des inventions techniques
est
double : il est d’une part d’économiser du travail d’hommes par les m
235
Le but des inventions techniques est double : il
est
d’une part d’économiser du travail d’hommes par les machines, et donc
236
sait que les résultats pratiques du machinisme ne
sont
pas d’augmenter les loisirs, mais bien d’augmenter le chômage, et qu’
237
ier de Paris, membre d’un comité de bienfaisance,
fut
interrogé un jour, devant moi, par un de ses collègues. Était-il vrai
238
ogé un jour, devant moi, par un de ses collègues.
Était
-il vrai, lui demandait-on, que sa banque finançât la guerre des Japon
239
i ? Il répondit que c’était vrai. — Mais alors, n’
êtes
-vous pas torturé par la pensée que votre argent contribue à prolonger
240
ent, répondit-il. Car tout ce que j’ai à voir, ce
sont
deux colonnes de chiffres, dont la balance est favorable à ma maison.
241
e sont deux colonnes de chiffres, dont la balance
est
favorable à ma maison. L’exemple peut paraître caricatural. Toutefois
242
nos actions. Cette absence d’un principe d’unité
est
si totale qu’on ne la ressent même plus comme un scandale. Elle est d
243
n ne la ressent même plus comme un scandale. Elle
est
devenue toute naturelle. Le banquier dont je viens de vous parler aur
244
ur des raisons dont il ne remarquait pas qu’elles
étaient
sans commune mesure. Au moraliste qui s’indignait, il aurait simpleme
245
it, il aurait simplement répondu que les affaires
sont
les affaires. On ne peut pas additionner des chiffres et des sentimen
246
pensée sur la conduite générale des affaires, tel
est
le dogme fondamental de la mentalité moderne. C’est plus qu’un dogme,
247
croyance spontanée et universelle. Et ses effets
sont
si nombreux, si quotidiens, qu’on finit par ne plus les voir. Il est
248
quotidiens, qu’on finit par ne plus les voir. Il
est
admis, dans notre société, que les hommes de la pensée n’ont rien à d
249
ines de l’industrie ou de la guerre. Le divorce a
été
prononcé entre la culture et l’action, entre le cerveau et la main. L
250
e cerveau et la main. Les résultats de ce divorce
sont
infinis. Mais le plus décisif, sans doute, est celui-ci : la culture
251
e sont infinis. Mais le plus décisif, sans doute,
est
celui-ci : la culture apparaît aujourd’hui comme une activité de luxe
252
naturel de se priver de dessert. Oui, la culture
est
devenue pour nous quelque chose comme une friandise. Elle n’est plus
253
ur nous quelque chose comme une friandise. Elle n’
est
plus un pain quotidien. Et après tout, cela est juste, si l’on commen
254
n’est plus un pain quotidien. Et après tout, cela
est
juste, si l’on commence par admettre que la pensée est impuissante su
255
uste, si l’on commence par admettre que la pensée
est
impuissante sur les lois fatales de l’action. Si les discours ne trom
256
ritiques même les plus perspicaces de notre temps
sont
autant de cris dans le désert, alors ? Laissons les choses aller… Les
257
i manque à ce point d’harmonie, et où ce manque n’
est
même plus ressenti comme un scandale, je la vois condamnée à glisser,
258
, comme la nôtre, dans un désordre dont la guerre
sera
toujours le seul aboutissement. L’esprit de Ponce Pilate Mais a
259
t. L’esprit de Ponce Pilate Mais alors, qui
est
responsable de ce divorce entre la main et le cerveau ? Nous voyons b
260
le plus remarquable des débuts du xixe siècle a
été
, en effet, et dans tous les domaines, l’agrandissement très brusque d
261
5 000 habitants à 4 millions. Dans ces villes, se
sont
entassées des masses humaines informes et démesurées, là où l’on ne c
262
tites entreprises. Les richesses, elles aussi, se
sont
tant agrandies qu’elles ont échappé aux regards : elles sont devenues
263
grandies qu’elles ont échappé aux regards : elles
sont
devenues chiffres abstraits, puissances lointaines, dont les économis
264
s, puissances lointaines, dont les économistes se
sont
mis à étudier les mœurs étranges, qui paraissaient aussi mystérieuses
265
a plus que doublé en cent ans, ses richesses ont
été
décuplées, sa production industrielle centuplée, et enfin tous ces él
266
ble que la société devienne trop gigantesque pour
être
dominée d’un seul regard. Une seule intelligence ne peut plus en comp
267
anorama de la société devient confus. Plus rien n’
est
à la mesure de l’homme individuel. Quand nous regardons en arrière, n
268
midable effort de mise en ordre ; ils auraient dû
être
saisis tout à la fois d’angoisse et d’enthousiasme devant ce monde dé
269
mort. Songez donc : si tous ces pouvoirs avaient
été
coordonnés, orientés par une vue générale, par une notion générale de
270
créer une belle vie ! Mais si ces mêmes pouvoirs
étaient
abandonnés à l’anarchie, s’ils se développaient chacun de son côté sa
271
vie fausse, une vie mauvaise, antihumaine. C’eût
été
le rôle des hommes de la pensée que d’avertir les hommes d’action. Il
272
’est chez les philosophes et les penseurs qu’il s’
est
d’abord manifesté. Et je le nommerai : l’esprit de démission, de non-
273
eut plus rien faire, car l’histoire et l’économie
sont
régies par des lois inflexibles. Et surtout, au développement formida
274
asses humaines rassemblées ? Primo : notre esprit
est
trop distingué et délicat pour agir sur ces faits ; secundo : le Prog
275
placer la bienveillante Providence. « La religion
est
l’opium du peuple », disait Marx. Je lui réponds que la croyance au P
276
t Marx. Je lui réponds que la croyance au Progrès
est
devenue l’opium de la pensée. Bien entendu, ce n’est point parce qu’i
277
devenue l’opium de la pensée. Bien entendu, ce n’
est
point parce qu’ils étaient méchants ou très stupides que les penseurs
278
pensée. Bien entendu, ce n’est point parce qu’ils
étaient
méchants ou très stupides que les penseurs du dernier siècle ont adop
279
ibéralisme, par exemple, exalte une liberté qui n’
est
que du laisser-aller ; on connaît sa devise : laisser-passer, laisser
280
intimes. Mais cela revient au même : car si tout
est
déterminé par les lois économiques, donc par la matière, là encore l’
281
rien. Aussi bien, Marx prétend-il que l’esprit n’
est
qu’un reflet, un sous-produit des processus matériels. Vous voyez que
282
processus matériels. Vous voyez que tout le monde
est
d’accord pour déclarer que la pensée n’a rien à voir avec l’action. S
283
arer que la pensée n’a rien à voir avec l’action.
Soit
qu’elle plane, orgueilleuse et pure au-dessus de la matière et de ses
284
la matière et de ses lois — selon les libéraux —
soit
qu’au contraire, humble et servile, elle se borne à refléter ces lois
285
pour les uns, trop basse pour les autres, elle n’
est
jamais au niveau de notre action. S’il fallait résumer rapidement les
286
rganiser et de centraliser en écrivant : « L’État
est
le plus froid parmi les monstres froids. » Mais à part ces deux solit
287
rel. Tout cela parce qu’on pensait que le Progrès
était
sain, juste et infaillible, et que la seule tâche sérieuse était de g
288
te et infaillible, et que la seule tâche sérieuse
était
de gagner de l’argent en attendant que les choses s’arrangent d’elles
289
rrangent d’elles-mêmes. Or, en réalité, rien ne s’
est
arrangé. Et voici où nous rejoignons le temps présent. Dans une cité
290
é où la culture n’a plus en fait l’initiative, ce
sont
les lois de la production et de la guerre qui imposent leurs nécessit
291
é donnée. Dans la cité grecque, par exemple, tout
était
rapporté à la mesure de l’individu raisonnable. Dans l’Empire romain,
292
’individu raisonnable. Dans l’Empire romain, tout
était
réglé par le droit d’État. Chez les Juifs, c’était la Loi de Moïse qu
293
ui que la Loi des Juifs, le droit et la théologie
sont
méprisés ou ignorés, maintenant que tout, dans le monde, échappe aux
294
us d’argent : c’est la misère. Et quand la misère
est
trop grande, alors c’est l’État-providence qui se charge de tout mett
295
au pas. Le malheur, c’est que l’Argent et l’État
sont
des principes qui ne valent rien dans le monde de l’esprit. Et dès lo
296
uire sans erreur ni malentendu. Les lieux communs
étaient
donc à la base de toute la vie sociale du siècle. Que sont-ils devenu
297
à la base de toute la vie sociale du siècle. Que
sont
-ils devenus parmi nous ? Prenons trois mots parmi les plus fréquents
298
rents dans le dictionnaire de Littré. Mais cela n’
est
pas un mal, car ces sens, justement, sont exactement définis. Ce qui
299
s cela n’est pas un mal, car ces sens, justement,
sont
exactement définis. Ce qui est grave, c’est qu’à ces 29 sens, nous en
300
sens, justement, sont exactement définis. Ce qui
est
grave, c’est qu’à ces 29 sens, nous en avons ajouté d’autres sur lesq
301
tionnaire des créateurs. Si j’affirme que mon but
est
de sauver l’esprit, le marxiste en déduira que je néglige la vie conc
302
ce monde. La liberté, tout le monde l’invoque, n’
est
-ce pas ? Mais pour l’économiste libéral, cela signifie le droit de ru
303
ncurrence ; pour l’individualiste anarchisant, ce
sera
le refus d’obéir à l’État ; dans tel pays, la liberté consiste à s’ar
304
oisin faible ; dans un troisième pays, la liberté
sera
tout simplement la permission de dire à haute voix ce que l’on pense.
305
iera tantôt le statu quo social, si absurde qu’il
soit
, tantôt l’établissement d’une hiérarchie nouvelle au prix d’une révol
306
ise et la théologie qui s’en chargeaient. Puis ce
furent
les écrivains. Mais que peuvent-ils dans notre monde démesuré ? Un Va
307
mpte. Or quand la parole se détruit, quand elle n’
est
plus le don qu’un homme fait à un homme, et qui engage quelque chose
308
it à un homme, et qui engage quelque chose de son
être
, c’est l’amitié humaine qui se détruit, le fondement même de toute co
309
à un dialogue d’Alice au pays des Merveilles (qui
est
un de mes livres préférés), dialogue dont voici trois répliques : « Q
310
x qu’il signifie… ni plus ni moins. — La question
est
de savoir, dit Alice, si vous pouvez faire que les mêmes mots signifi
311
signifient des choses différentes ? — La question
est
de savoir, dit Humpty-Dumpty, qui est le plus fort… et c’est tout. »
312
La question est de savoir, dit Humpty-Dumpty, qui
est
le plus fort… et c’est tout. » Nous en sommes exactement là : c’est l
313
y, qui est le plus fort… et c’est tout. » Nous en
sommes
exactement là : c’est le plus fort qui définit le sens des mots et qu
314
pareille décadence des lieux communs, la culture
est
à l’agonie. Mais en même temps, la vie sociale et politique devient p
315
est une angoisse informulée, mais dont les signes
sont
partout. Or maintenant, de cette angoisse monte un appel, le formidab
316
e réponse à la fois frappante et concrète. « Tout
est
en désordre ? ont-ils dit. C’est bien simple. Nous allons proclamer q
317
llons proclamer que l’intérêt de l’État dont nous
sommes
devenus les maîtres est la seule règle de toute activité, culturelle,
318
êt de l’État dont nous sommes devenus les maîtres
est
la seule règle de toute activité, culturelle, politique, ou même reli
319
ire de grosses fautes de calcul. Surtout quand on
est
très pressé. Or il est certain que ces chefs étaient horriblement pre
320
e calcul. Surtout quand on est très pressé. Or il
est
certain que ces chefs étaient horriblement pressés, à cause de la mis
321
est très pressé. Or il est certain que ces chefs
étaient
horriblement pressés, à cause de la misère que subissaient leurs peup
322
ont voulu imposer à l’ensemble des principes qui
étaient
partiels. La discipline d’État, ou le sang, ou la classe, ce sont cer
323
a discipline d’État, ou le sang, ou la classe, ce
sont
certes des réalités. Mais des réalités partielles. Si la loi qu’on im
324
éalités partielles. Si la loi qu’on impose à tous
est
calculée seulement pour certains types, soit physiques, soit sociolog
325
tous est calculée seulement pour certains types,
soit
physiques, soit sociologiques, cette loi est pratiquement une odieuse
326
ée seulement pour certains types, soit physiques,
soit
sociologiques, cette loi est pratiquement une odieuse tyrannie pour t
327
es, soit physiques, soit sociologiques, cette loi
est
pratiquement une odieuse tyrannie pour tous ceux qui débordent le cad
328
une manière incomplète. Or, en pareil domaine, il
est
très dangereux de se tromper si peu que ce soit, et de donner une rép
329
il est très dangereux de se tromper si peu que ce
soit
, et de donner une réponse qui ne soit pas vraiment totale. Nous conna
330
peu que ce soit, et de donner une réponse qui ne
soit
pas vraiment totale. Nous connaissons les résultats d’une pareille fa
331
oser la plus sérieuse question humaine. Et s’il n’
est
pas encore aussi tragique dans des pays moins menacés par la misère,
332
savoir si nous saurons utiliser le délai qui nous
est
accordé, à nous les neutres, pour découvrir les vraies causes du mal,
333
nous d’abord. Car nous aussi, je le répète, nous
sommes
atteints ! À la recherche de l’homme réel J’aime employer les m
334
r sens étymologique. L’étymologie, vous le savez,
est
une science très incertaine, mais c’est un art très significatif. Lor
335
actériser certains aspects du monde moderne, ce n’
était
pas sans intention. Car énorme ne signifie pas seulement grand, immen
336
sort de la norme — de la mesure. Un monde énorme
est
un monde sans mesure, un monde démesuré par rapport à l’homme seul et
337
quel principe pourrions-nous rebâtir un monde qui
soit
vraiment à hauteur d’homme ? Un monde où la pensée, la culture et l’e
338
? Un monde où la pensée, la culture et l’esprit,
soient
de nouveau capables d’agir ? Et quelle est l’attitude de pensée qui p
339
it, soient de nouveau capables d’agir ? Et quelle
est
l’attitude de pensée qui peut nous orienter dès à présent vers une co
340
il ne change pas, toutes les réformes matérielles
sont
inutiles et tournent au malheur. Car le mal qui est dans l’action n’a
341
t inutiles et tournent au malheur. Car le mal qui
est
dans l’action n’a pas d’autres racines que le mal qui est dans la pen
342
l’action n’a pas d’autres racines que le mal qui
est
dans la pensée. Et voici sa racine profonde : politiciens ou intellec
343
ont oublié l’homme dans leurs calculs, ou bien se
sont
trompés sur sa nature. Ils ont perdu de vue sa définition même. Leur
344
u de vue sa définition même. Leur point de départ
est
faux, et c’est pourquoi leurs efforts, même les plus sincères, abouti
345
groupe humain, ni trop vaste ni trop étroit. Il n’
est
pas bon que l’homme soit seul ; il n’est pas bon non plus que l’homme
346
aste ni trop étroit. Il n’est pas bon que l’homme
soit
seul ; il n’est pas bon non plus que l’homme soit foule. Le monde rat
347
it. Il n’est pas bon que l’homme soit seul ; il n’
est
pas bon non plus que l’homme soit foule. Le monde rationaliste et lib
348
soit seul ; il n’est pas bon non plus que l’homme
soit
foule. Le monde rationaliste et libéral supposait que l’humanité n’ét
349
ationaliste et libéral supposait que l’humanité n’
était
qu’un assemblage d’individus, d’hommes qui avaient surtout des droits
350
C’est pourquoi l’individualisme, qui les néglige,
est
une doctrine antisociale. Elle a pour effet mécanique de dissocier to
351
randes firmes et des grands partis politiques. Il
est
prêt à se laisser « aimanter » comme limaille par le premier magnétis
352
er, nous nous trouvons portés à l’autre pôle, qui
est
le pôle collectiviste. Toute l’histoire de l’Europe peut être ramenée
353
collectiviste. Toute l’histoire de l’Europe peut
être
ramenée à ces grands balancements d’un pôle à l’autre. À l’anarchie i
354
ectivité. Il s’agit de voir que l’homme concret n’
est
pas le Robinson d’une île déserte, ni l’anonyme numéro d’un rang, mai
355
éserte, ni l’anonyme numéro d’un rang, mais qu’il
est
à la fois un être unique, et un être qui a des semblables. Rester soi
356
yme numéro d’un rang, mais qu’il est à la fois un
être
unique, et un être qui a des semblables. Rester soi-même au sein d’un
357
g, mais qu’il est à la fois un être unique, et un
être
qui a des semblables. Rester soi-même au sein d’un groupe, être un ho
358
semblables. Rester soi-même au sein d’un groupe,
être
un homme libre et pourtant relié, c’est l’idéal de l’homme occidental
359
pas dire que c’est une utopie ! Car ce problème a
été
résolu, cet idéal réalisé, au ier siècle de notre ère, par les commu
360
autés de l’Église primitive. Le chrétien primitif
est
un homme qui, du fait de sa conversion, se trouve chargé d’une vocati
361
le. Voilà l’homme que j’appelle une personne : il
est
à la fois libre et engagé, et il est libéré par cela même qui l’engag
362
ersonne : il est à la fois libre et engagé, et il
est
libéré par cela même qui l’engage envers son prochain, je veux dire p
363
Eh bien, je dis que les maux dont nous souffrons
sont
avant tout des maladies de la personne. Quand l’homme oublie qu’il es
364
ladies de la personne. Quand l’homme oublie qu’il
est
responsable de sa vocation envers ses prochains, il devient individua
365
devient individualiste. Et quand il oublie qu’il
est
responsable de sa vocation envers lui-même, il devient collectiviste.
366
t réel, c’est celui qui se sait à la fois libre d’
être
soi-même vis-à-vis de l’ensemble, et engagé vis-à-vis de cet ensemble
367
tu veux faire quelque chose, mais alors, cesse d’
être
toi-même ! Comment sortir de ce cercle vicieux ? Par un changement d’
368
ibliothèques. Or cette idée de lois fatales avait
été
empruntée à la science et transportée abusivement dans les domaines p
369
psychologie. Et voici que cette idée paralysante
est
en train de subir certains coups décisifs : ce sont précisément les h
370
st en train de subir certains coups décisifs : ce
sont
précisément les hommes de science qui, les premiers, cessent d’y croi
371
s, de lois absolument indépendantes de l’homme, n’
était
qu’une illusion rationaliste. Qu’il me suffise de rappeler ici les dé
372
ujourd’hui que les fameuses lois scientifiques ne
sont
en fait que de commodes conventions, dépendant des systèmes de mesure
373
nt nous dire que même dans l’ordre matériel, il n’
est
plus permis de concevoir une observation impartiale, à combien plus f
374
s lois rigides de notre société. En vérité, il n’
est
de lois fatales que là où l’esprit démissionne. Toute action créatric
375
s statistiques. Ainsi les lois de la publicité ne
sont
exactes que dans la mesure où l’homme n’est qu’un mouton ; elles sont
376
é ne sont exactes que dans la mesure où l’homme n’
est
qu’un mouton ; elles sont fausses et inexistantes dès qu’un homme red
377
s la mesure où l’homme n’est qu’un mouton ; elles
sont
fausses et inexistantes dès qu’un homme redevient conscient des vrais
378
s temps révolus ? Chaque historien, si scrupuleux
soit
-il, est bien obligé de choisir, dans la masse de ses renseignements.
379
évolus ? Chaque historien, si scrupuleux soit-il,
est
bien obligé de choisir, dans la masse de ses renseignements. Et qui d
380
stèmes de faits. Et l’historien qui croit pouvoir
être
impartial est simplement un homme qui refuse de s’avouer ses partis p
381
. Et l’historien qui croit pouvoir être impartial
est
simplement un homme qui refuse de s’avouer ses partis pris. Il oublie
382
culière. Si j’insiste sur cet axiome, c’est qu’il
est
particulièrement libérateur pour la pensée et la culture en général,
383
conomiques, ou historiques, ou biologiques. Or il
est
clair que ces lois ne sont vraies, ou plutôt ne deviennent vraies, qu
384
, ou biologiques. Or il est clair que ces lois ne
sont
vraies, ou plutôt ne deviennent vraies, qu’en vertu d’une immense dém
385
s brutales, et le ton sur lequel on les prône, ne
sont
en fait que des solutions de paresse intellectuelle, des solutions de
386
a capacité de ses prises immédiates. Mais quelles
seront
alors les directives de cette action redevenue possible ? Qui recréer
387
damentaux d’une société plus harmonieuse puissent
être
formulés dès maintenant comme un programme de parti politique. Ils do
388
d. Jusqu’à l’ère du rationalisme, les Églises ont
été
les grandes pourvoyeuses de lieux communs pour la cité. La théologie
389
uns pour la cité. La théologie médiévale, par les
sommes
de Thomas d’Aquin, fixait à la pensée et à l’action des règles vérita
390
fasciné les masses ouvrières, c’est parce qu’il s’
est
chargé de la mission sociale qu’avaient trahie toutes les Églises. Ni
391
es. Nicolas Berdiaev l’a bien vu : le bolchévisme
fut
le châtiment d’un christianisme devenu passif devant le monde. Or il
392
aux économistes aussi. Car après tout, l’économie
est
une création des hommes, d’autres hommes peuvent la modifier, et l’im
393
tres hommes peuvent la modifier, et l’important n’
est
pas de produire au maximum selon les règles que fournissent les techn
394
ai insisté sur le rôle des Églises parce qu’elles
sont
le type même des groupes au sein desquels la culture d’Occident a tou
395
é ses mesures. Bien d’autres groupes, je le sais,
sont
à l’œuvre. Mouvement des groupes d’Oxford, mouvement des groupes pers
396
s l’intolérance qui veut tout uniformiser, et qui
est
donc une mort de l’esprit. La tolérance était la pâle vertu des libér
397
t qui est donc une mort de l’esprit. La tolérance
était
la pâle vertu des libéraux individualistes. L’intolérance est la somb
398
vertu des libéraux individualistes. L’intolérance
est
la sombre vertu des partisans collectivistes. De leur lutte est sorti
399
vertu des partisans collectivistes. De leur lutte
est
sortie la guerre. Le seul moyen de dépasser cette mauvaise position d
400
inconvénients : car chacun, dans le groupe où il
est
né, ou dans le groupe qu’il a choisi, peut donner le meilleur de soi-
401
de préparer une paix solide. Car, après tout, qu’
est
-ce que la guerre actuelle ? C’est la rançon fatale du gigantisme et d
402
a plus extraordinaire des rencontres, se trouvent
être
également valables pour ceux qui veulent défendre la culture, et pour
403
s, la plus belle promesse ! Maintenant, la preuve
est
faite, attestée par le sang, que la solution suisse et fédérale est s
404
e par le sang, que la solution suisse et fédérale
est
seule capable de fonder la paix, puisque l’autre aboutit à la guerre.
405
a paix, puisque l’autre aboutit à la guerre. Ce n’
est
pas notre orgueil qui l’imagine, ce sont les faits qui nous obligent
406
rre. Ce n’est pas notre orgueil qui l’imagine, ce
sont
les faits qui nous obligent à le reconnaître avec une tragique éviden
407
possible de l’Europe. Le seul lieu où cet avenir
soit
, d’ores et déjà, un présent. Il ne s’agit pas de grands mots, de lyri
408
’idéalisme. Il s’agit de voir qu’en fait, si nous
sommes
là, au service du pays, ce n’est pas pour défendre des « fromages »,
409
fait, si nous sommes là, au service du pays, ce n’
est
pas pour défendre des « fromages », des conseils d’administration, no
410
cela aussi bien que nous — peut-être mieux ! Ce n’
est
pas non plus, comme le disait fort bien Karl Barth, pour protéger nos
411
lontiers de cette œuvre de Heimatschutz.) Si nous
sommes
là, c’est pour exécuter la mission dont nous sommes responsables depu
412
mmes là, c’est pour exécuter la mission dont nous
sommes
responsables depuis des siècles, depuis les temps du Saint-Empire : n
413
mpire : notre mission vis-à-vis de l’Europe. Nous
sommes
chargés de la défendre contre elle-même, de garder son trésor, d’affi
414
s connaissons mieux que personne. Tout mon espoir
est
qu’il se forme ici des équipes de fédérateurs, d’hommes qui comprenne
415
teurs, d’hommes qui comprennent enfin que l’heure
est
venue, pour nous autres Suisses, de voir grand, de voir aux proportio
416
individu engagé dans la communauté. Cette œuvre n’
est
pas utopique : car je me refuse à nommer utopie le seul espoir qui no
417
me refuse à nommer utopie le seul espoir qui nous
soit
accordé. Encore faut-il que cet espoir soit soutenu par tout un peupl
418
nous soit accordé. Encore faut-il que cet espoir
soit
soutenu par tout un peuple, et qu’il ne se laisse pas décourager par
419
cosmiques. La vie de la cité et de la culture, ce
sera
toujours une bataille. Entre l’esprit de lourdeur, comme disait Nietz
420
it Nietzsche, et les forces de création, la lutte
sera
toujours ouverte, tant qu’il y aura du péché sur la terre. Non, l’heu
421
u’il y aura du péché sur la terre. Non, l’heure n’
est
pas au facile optimisme, dans une Europe tout obscurcie par la menace
422
tout obscurcie par la menace des avions. L’heure
est
plutôt venue de répéter la question du prophète Isaïe : « Sentinelle,
423
! » La paix que nous devons invoquer ne peut pas
être
une simple absence de guerre. Spirituellement, une vraie paix sera to
424
bsence de guerre. Spirituellement, une vraie paix
sera
toujours plus difficile à vivre et à gagner que cette guerre où tout
425
ver une cité à la mesure de la personne, nous qui
sommes
encore épargnés, ne perdons pas notre délai de grâce ! C’est à nous d
426
un seul trait prophétique : « Le combat spirituel
est
aussi brutal que la bataille d’hommes, mais la vision de la justice e
427
a bataille d’hommes, mais la vision de la justice
est
le plaisir de Dieu seul. » 13. Conférence prononcée le 15 janvier
428
en, et dans plusieurs villes de Hollande. 14. Je
tiens
à préciser que cette déclaration ne tend nullement à justifier « les
429
re en septembre 1939 le manifeste intitulé « Nous
sommes
tous coupables ». Je veux dire ceci : nous sommes coupables dans la m
430
sommes tous coupables ». Je veux dire ceci : nous
sommes
coupables dans la mesure où nous ne condamnons pas en nous aussi, et
431
n nous d’abord, la mentalité totalitaire. 15. Il
serait
juste d’ajouter ici les noms de deux grands Suisses : Jacob Burckhard
432
e. 16. Cf. Penser avec les mains , où ces idées
sont
développées plus au long.
433
ur voir venir, et puis vous vous apercevez que ce
sont
vos réponses elles-mêmes, celles que déjà vous étiez prêt à lui donne
434
nt vos réponses elles-mêmes, celles que déjà vous
étiez
prêt à lui donner, qui se trouvent mises en question par sa méfiance
435
ises en question par sa méfiance paysanne. Cela n’
est
pas sans irriter certains. Pour moi, je ne sais rien de plus salutair
436
u « plan moral », comme nous aimons à dire. Elles
sont
d’usage interne, individuel. Les doutes que Ramuz nous propose touche
437
ut commun que la sécurité et le profit ? Pourquoi
sommes
-nous confédérés ? Et pourquoi, enfin, sommes-nous neutres ? Je voudra
438
quoi sommes-nous confédérés ? Et pourquoi, enfin,
sommes
-nous neutres ? Je voudrais souligner ceci : que c’est aux Suisses, fi
439
garde en même temps le souci d’expliquer qui nous
sommes
à nos voisins, c’est peut-être que notre lot, en tant que Suisses, et
440
n en tant que Vaudois, ou Genevois, ou Zurichois,
est
d’exister en fonction de ces voisins. Je vois l’équivoque de la phras
441
ne dis pas que cette interprétation désobligeante
soit
toujours fausse dans le fait. Mais on peut et on doit concevoir une t
442
it concevoir une tout autre forme d’existence qui
serait
« en fonction des voisins », et qui serait tout de même, ou par là mê
443
ce qui serait « en fonction des voisins », et qui
serait
tout de même, ou par là même, une existence, au sens plein de ce term
444
amuz. Cela revient à dire : a-t-elle une raison d’
être
? J’essaierai de répondre ici du point de vue qui me paraît le plus f
445
du personnalisme. ⁂ La question de la neutralité
est
peut-être la plus importante qu’il faille poser à la Suisse. Parce qu
446
, que l’état de fait créé par le traité de Vienne
est
aussi mal interprété par ses garants que par ses soi-disant bénéficia
447
l’on considère volontiers que la neutralité nous
est
due, comme l’air et les beautés de la nature. Privilège inconditionne
448
s et fortes raisons de notre neutralité, celle-ci
sera
balayée un jour prochain avec les vieux chiffons de papier qui sont c
449
ur prochain avec les vieux chiffons de papier qui
sont
censés la garantir. Quand bien même nous aurions voté des milliards d
450
pays comme le nôtre, la conscience de sa raison d’
être
, et le prestige qui s’y attache. On croit souvent, surtout chez nous,
451
dans l’équilibre européen. Et quand bien même il
serait
démontré que la Suisse ne peut plus prétendre à jouer un rôle analogu
452
analogue, croit-on que son droit à rester neutre
soit
suffisamment garanti du seul fait qu’elle le juge naturel ? La meille
453
leure garantie d’un droit, la seule peut-être qui
soit
efficace, c’est l’exercice réel de la charge dont ce droit représente
454
contrepartie. Le droit de propriété, par exemple,
est
à la fois la condition d’une entreprise personnelle, et la juste cont
455
des coupons de papier dans une banque, ses droits
sont
ressentis comme des abus. Ils cessent dès lors d’être assurés en fait
456
ressentis comme des abus. Ils cessent dès lors d’
être
assurés en fait ; comme le démontre l’histoire récente du capitalisme
457
. Trop assurés dans un statut dont les commodités
sont
surtout matérielles, et les obligations surtout spirituelles, ils se
458
neutralité dans le cadre nouveau de l’Europe. Il
est
fatal que ces dilemmes se multiplient à l’avenir. Le fameux équilibre
459
ement bouleversé et réorganisé, au sein duquel il
est
urgent que nous trouvions une place nettement redéfinie. Bref, tout n
460
Europe d’aujourd’hui. Notre chance et nos risques
sont
là. La mission essentielle de la Suisse est une mission personnaliste
461
ques sont là. La mission essentielle de la Suisse
est
une mission personnaliste au premier chef : sauvegarder une Weltansch
462
ndent mutuellement19. Cette conception du monde n’
est
pas nouvelle : elle constitue l’apport spécifique de l’Europe à l’hum
463
st autour d’elle et grâce à elle que l’Occident s’
est
édifié, et qu’il a dominé le monde. Elle n’est nullement, comme certa
464
s’est édifié, et qu’il a dominé le monde. Elle n’
est
nullement, comme certains voudraient le croire, une espèce de juste m
465
e bourgeois et du collectivisme dictatorial. Elle
est
la position centrale, à la fois naturelle et spirituelle, dont l’indi
466
rbides. Et dès lors, la mission de la Suisse peut
être
définie à l’échelle de l’Europe : la Suisse doit être la gardienne de
467
définie à l’échelle de l’Europe : la Suisse doit
être
la gardienne de ce principe central, fédératif ; et elle ne peut être
468
ce principe central, fédératif ; et elle ne peut
être
autre chose, de par sa nature même, physique et historique. Gardiens
469
et de celui de la Croix-Rouge, gardiens de ce qui
est
européen et commun à toutes les nations20 étant eux-mêmes dans la mes
470
qui est européen et commun à toutes les nations20
étant
eux-mêmes dans la mesure où ils sont cela, dans la mesure où ils exis
471
s nations20 étant eux-mêmes dans la mesure où ils
sont
cela, dans la mesure où ils existent pour l’ensemble — voilà les Suis
472
s là je ne sais quelle manière d’idéaliser ce qui
est
mesquin. Car ce qui est mesquin chez nous, n’est en fait qu’une dégra
473
anière d’idéaliser ce qui est mesquin. Car ce qui
est
mesquin chez nous, n’est en fait qu’une dégradation de l’idéal qui de
474
est mesquin. Car ce qui est mesquin chez nous, n’
est
en fait qu’une dégradation de l’idéal qui devrait nous unir. La devis
475
face à l’Europe son droit à la neutralité. Elle n’
est
réellement intangible que parce qu’elle est l’expérience témoin, l’an
476
lle n’est réellement intangible que parce qu’elle
est
l’expérience témoin, l’annonciatrice d’une Europe fédérée dont elle p
477
nion suisse, telle que la traduisent nos journaux
est
en contradiction fréquente avec notre neutralité, et ce qui est pire,
478
iction fréquente avec notre neutralité, et ce qui
est
pire, avec la mission même qui justifie cette neutralité. Elle se per
479
u’elle y court moins de risques immédiats. Rien n’
est
plus agaçant pour l’étranger que cette espèce de suffisance moralisan
480
nd nos journaux font la leçon à Léon Blum22, ce n’
est
pas — comme ce pourrait l’être — au nom de la démocratie réelle, comm
481
à Léon Blum22, ce n’est pas — comme ce pourrait l’
être
— au nom de la démocratie réelle, communale et fédéraliste, mais au n
482
éraliste, mais au nom d’intérêts de classe qui ne
sont
ni démocratiques ni nationaux. La même critique peut d’ailleurs s’adr
483
pourra dire que la Suisse a retrouvé sa raison d’
être
, et d’être neutre. Quoi de plus comique et de plus irritant que d’ad
484
e que la Suisse a retrouvé sa raison d’être, et d’
être
neutre. Quoi de plus comique et de plus irritant que d’admirer les f
485
ue d’admirer les fascismes étrangers alors qu’ils
sont
les formes politiques les plus violemment centralistes, les plus cont
486
but d’exalter leur mission nationale. Quelles que
soient
les réserves de fond qu’il y ait à faire, et je les fais, sur l’authe
487
es missions qu’ils proclament à son de trompe, il
est
clair que leur force est là, et qu’en les admirant, en les enviant, n
488
ment à son de trompe, il est clair que leur force
est
là, et qu’en les admirant, en les enviant, nous sommes précisément en
489
t là, et qu’en les admirant, en les enviant, nous
sommes
précisément en train de perdre ce qu’ils ont retrouvé : le sens de la
490
ation. L’autorité qu’une certaine presse suisse s’
était
acquise à l’étranger reposait justement sur le fait que nous étions s
491
’étranger reposait justement sur le fait que nous
étions
seuls à juger dans une perspective européenne. (Nos trois cultures no
492
la manière des partisans français ou allemands, n’
est
plus qu’une presse d’intérêt local. Là encore, nos chances sont uniqu
493
ne presse d’intérêt local. Là encore, nos chances
sont
uniques, nous pourrions être les premiers. Mais à cette seule conditi
494
encore, nos chances sont uniques, nous pourrions
être
les premiers. Mais à cette seule condition : de savoir au nom de quoi
495
savoir au nom de quoi nous parlons. Et ce ne peut
être
qu’au nom de l’avenir de l’Europe, puisque c’est cela que nous sommes
496
l’avenir de l’Europe, puisque c’est cela que nous
sommes
dès maintenant. 2. La culture. Je ne l’envisagerai ici que sous l’ang
497
ndre chez les intellectuels à l’endroit de ce qui
est
« germanique » dans notre vie confédérale. Réaction de faiblesse, et
498
construire des Bastions de l’Est23, la situation
est
bien plus favorable. Mais il faudrait savoir l’envisager dans sa gran
499
pu synthétiser et relier. Toutes ces nations ont
été
grandes tour à tour, dans la musique ou la peinture, la poésie ou la
500
ure, la poésie ou la philosophie. Et peut-être ne
serons
-nous jamais aussi grands qu’aucune d’entre elles dans aucun de ces do
501
ces domaines particuliers24. Mais notre grandeur
est
ailleurs : elle est dans l’harmonie intime, ou dans l’opposition trag
502
uliers24. Mais notre grandeur est ailleurs : elle
est
dans l’harmonie intime, ou dans l’opposition tragique à l’intérieur d
503
vocation. Neutralité, sur le plan culturel, ce n’
est
pas mélange, ni accommodation et encore moins imitation médiocre. Ce
504
modation et encore moins imitation médiocre. Ce n’
est
pas forcément cela. C’est au contraire (ou plutôt ce doit être) un co
505
ément cela. C’est au contraire (ou plutôt ce doit
être
) un combat perpétuel, exaltant, le battement du cœur de l’Europe. Vou
506
’Europe. Vouloir créer une « culture suisse », ce
serait
trahir notre mission, ce serait le péché même d’idolâtrie qui consist
507
ture suisse », ce serait trahir notre mission, ce
serait
le péché même d’idolâtrie qui consiste dans son principe à adorer les
508
je pas jusqu’à dire que notre grandeur culturelle
est
de n’avoir pas de culture suisse, mais seulement une culture européen
509
essus un Jérémie Gotthelf et un Ramuz. Ceux-là ne
sont
Européens que parce qu’ils sont d’abord, et génialement, pasteur bern
510
Ramuz. Ceux-là ne sont Européens que parce qu’ils
sont
d’abord, et génialement, pasteur bernois et Vaudois rhodanien. Mais d
511
« enracinés » ne font pas une culture suisse. Ce
sont
deux vocations isolées, et la culture suppose une suite, un progrès,
512
mais au niveau de la vraie culture, nous pouvons
être
les moyens de la grandeur future de l’Europe. (Il y a là plus qu’un c
513
ure de l’Europe. (Il y a là plus qu’un calembour,
soit
dit pour essayer de rassurer ces gens sérieux que sont les Suisses mo
514
dit pour essayer de rassurer ces gens sérieux que
sont
les Suisses moyens — et même les autres.) 3. Avec l’armée, je reviens
515
ée, je reviens au concret, ou du moins à ce qu’on
tient
pour tel dans un pays où les valeurs intellectuelles passent plus qu’
516
s n’ont moins d’action sur la vie politique.) Il
est
clair, et on le dit assez pour que je n’aie pas à insister, que l’arm
517
as à insister, que l’armée d’un petit pays neutre
est
très facilement justifiable, aux yeux du pacifiste le plus ardent. El
518
peut livrer qu’une « guerre juste », puisqu’elle
est
incapable d’attaquer. Elle ne joue que le rôle d’une garde, et par là
519
oue que le rôle d’une garde, et par là même, elle
est
conforme à notre vocation profonde. Garde montée autour des cols, dir
520
ure des frontières par les habitants de la région
sont
absolument dans la ligne du fédéralisme réel26. Armée démocratique, d
521
écoles militaires. Oui, c’est bien là ce que doit
être
une armée consciente de son rôle de garde neutre. Il s’agit que cette
522
it que cette conscience reste vivace. Que l’armée
soit
proche du peuple, cela doit avoir pour effet idéal de « civiliser » l
523
milice et non de militariser l’esprit public. Il
est
important de rappeler que l’armée d’une fédération ne conserve sa rai
524
l’armée d’une fédération ne conserve sa raison d’
être
que si l’on croit à cette fédération et à la tâche qui lui incombe au
525
lui incombe au milieu de voisins redoutables. Il
est
important de rappeler que l’armée étant chose fédérale, ne peut être
526
utables. Il est important de rappeler que l’armée
étant
chose fédérale, ne peut être l’armée d’une classe, de ses intérêts, d
527
appeler que l’armée étant chose fédérale, ne peut
être
l’armée d’une classe, de ses intérêts, de son ordre. Il n’y aurait au
528
l’on nomme chez nous « le militaire », ne saurait
être
légitime qu’à proportion du sens profond des raisons d’être de la Sui
529
ime qu’à proportion du sens profond des raisons d’
être
de la Suisse dont nous témoignons par ailleurs. N’allons pas croire q
530
ignons par ailleurs. N’allons pas croire que pour
être
un bon Suisse, il faut et il suffit que l’on soit un bon soldat ! Car
531
être un bon Suisse, il faut et il suffit que l’on
soit
un bon soldat ! Car on ne peut être un bon soldat, chez nous, que si
532
ffit que l’on soit un bon soldat ! Car on ne peut
être
un bon soldat, chez nous, que si d’abord on prouve que l’on est un bo
533
dat, chez nous, que si d’abord on prouve que l’on
est
un bon Suisse. Après tout, notre armée n’est qu’un aspect de notre dé
534
l’on est un bon Suisse. Après tout, notre armée n’
est
qu’un aspect de notre défense fédérale. Et un aspect subordonné. Si l
535
ne crois pas d’ailleurs que les armes matérielles
soient
pour nous une défense suffisante27. Je vois bien qu’elles sont nécess
536
s une défense suffisante27. Je vois bien qu’elles
sont
nécessaires. Mais je vois aussi qu’avec la cinquantième partie de l’a
537
nse nationale dans un pays dont la vraie raison d’
être
est en fin de compte spirituelle, devrait comporter normalement à côt
538
ationale dans un pays dont la vraie raison d’être
est
en fin de compte spirituelle, devrait comporter normalement à côté du
539
fications parfois mythiques à des réalités qui se
sont
constituées par le jeu d’intérêts et de routines médiocres. Vous donn
540
des rangs devant la menace extérieure29 ». Rien n’
est
plus vrai, et c’est très consciemment que nous opérons ce redressemen
541
ment que nous opérons ce redressement urgent ! Qu’
est
-ce donc qu’une révolution, sinon justement un effort pour restaurer l
542
ivant et pur contre les ennemis du dedans, afin d’
être
fort au-dehors. L’esprit bourgeois, l’économie capitaliste, une pares
543
à nous réduire à nos proportions matérielles, qui
sont
petites, qui sont médiocres. J’ai cité le cas de la presse, se réduis
544
os proportions matérielles, qui sont petites, qui
sont
médiocres. J’ai cité le cas de la presse, se réduisant elle-même au r
545
la passion, des communications fécondes entre les
êtres
, une circulation des cultures, une respiration des âmes. Et ceci qui
546
s cultures, une respiration des âmes. Et ceci qui
est
le plus important : des possibilités d’imaginer, donc d’innover et de
547
l œcuménique de toutes les Églises non romaines a
été
fixé à Genève. Ici, il s’agit plutôt d’un germe, d’un avenir. 21. Qu
548
r. 21. Quant à la civilisation britannique, elle
fut
, pour nous, de la Réforme jusqu’au xixe siècle, une quatrième voisin
549
e rappelle que ces pages datent de 1937. 23. À l’
est
de la Suisse romande, s’entend. 24. En passant : nos grands artistes
550
les maîtres de première grandeur. Nicolas Manuel
fut
peintre, architecte, soldat, dramaturge et homme d’État ; Gottfried K
551
promettre dès le germe cette renaissance. 26. Il
est
curieux de noter, à ce propos, que le groupe de l’Ordre nouveau avait
552
les milieux les plus divers reconnaissent qu’il n’
est
plus possible de s’en tenir à cette seule défense. » Message du Conse
553
s reconnaissent qu’il n’est plus possible de s’en
tenir
à cette seule défense. » Message du Conseil fédéral, du 9 nov. 1938.
554
te de 1940.) 28. Ce vœu que j’émettais en 1937 s’
est
vu exaucé l’année suivante. Voir le très remarquable Message du Conse
555
rvir, largement, et vite. (Note de 1940.) 29. Ce
fut
le cas en 1814-1815, lorsque les députés de la Confédération demandèr
556
éfendre31 Les voix que rien n’arrête Nous
sommes
là, nous sommes prêts. Nous avons élevé autour de ce pays une barrièr
557
es voix que rien n’arrête Nous sommes là, nous
sommes
prêts. Nous avons élevé autour de ce pays une barrière. Nous avons cr
558
los, reclus dans ses sécurités. Et rien ne passe…
Êtes
-vous bien sûrs que réellement plus rien ne passe ? Certes, toutes ces
559
ssaut et les armées d’envahissement. Certes, nous
sommes
matériellement en état de garder nos frontières. Mais les plus épaiss
560
patriotiques et officiels ? Figurez-vous que vous
êtes
, en cet instant, devant un poste de radio, et que j’arrête tout exprè
561
ent depuis 1933, la face de l’Europe a changé. Il
est
temps de nous en rendre compte. Autrefois, et naguère encore, il suff
562
ole unique, symbole « sacré » de la nation. Et qu’
est
-ce que le « sacré », sinon précisément ce qui ne souffre pas de doute
563
re pas de doute, et même pas de réflexion, ce qui
est
tabou. Or voici que depuis quelques années, ce ne sont plus les armée
564
tabou. Or voici que depuis quelques années, ce ne
sont
plus les armées qui conquièrent un pays. Mais c’est d’abord la propag
565
t un pays. Mais c’est d’abord la propagande. Ce n’
est
plus le territoire qu’on cherche à envahir, mais c’est en premier lie
566
ne vient qu’en dernier lieu, quand le principal a
été
fait par les agents secrets et les propagandistes. Et que disent ces
567
utrefois, l’on croyait volontiers que chaque État
était
voulu de Dieu, et qu’il jouissait par conséquent d’une légitimité ind
568
: elle dit que certains États modernes n’ont pas
été
créés par Dieu, mais par le traité de Versailles. Et c’est bien vrai.
569
es États, et en particulier les petits États, ont
été
créés, eux aussi par d’autres traités plus anciens, qui se trouvent e
570
lobe, comme par hasard, tous les pays voisins qui
sont
trop petits pour se défendre seuls. Au nom de ce concept d’espace vit
571
clare donc que ces États n’ont plus de « raison d’
être
historique ». Pour peu qu’elle arrive à le faire croire, soit aux mas
572
que ». Pour peu qu’elle arrive à le faire croire,
soit
aux masses, soit plutôt à certains dirigeants, la victoire lui est ac
573
u’elle arrive à le faire croire, soit aux masses,
soit
plutôt à certains dirigeants, la victoire lui est acquise d’avance. E
574
oit plutôt à certains dirigeants, la victoire lui
est
acquise d’avance. Et les ceintures de fortification les mieux conçues
575
parce que, des centres vitaux du pays, les ordres
seront
déjà donnés dans la langue de l’envahisseur. Voici alors ce que nous
576
us les Suisses, si nous avons encore une raison d’
être
, si nous osons encore la proclamer, et si nous en gardons encore une
577
euls, à nous Suisses. Elles nous demandent quelle
est
la Suisse que nous sommes décidés à défendre. Voilà le défi que nous
578
lles nous demandent quelle est la Suisse que nous
sommes
décidés à défendre. Voilà le défi que nous adresse l’Europe moderne.
579
ous contenter de déclarer que notre Confédération
fut
autrefois voulue par Dieu. Il nous faut nous demander maintenant si v
580
e défendre la Suisse jusqu’à la mort. Eh bien, il
serait
fou de mourir pour une Suisse dont nous ne serions pas sûrs qu’elle a
581
serait fou de mourir pour une Suisse dont nous ne
serions
pas sûrs qu’elle a le droit et le devoir d’exister, devant Dieu. On n
582
e une conscience sérieuse de nos vraies raisons d’
être
et de persévérer, il nous faut tout d’abord écarter un certain nombre
583
de ces clichés. Notre assemblée, et ce discours,
seraient
inutiles, si nous ne cherchions pas ensemble, et si nous ne trouvions
584
certaines réalités solides qui valent la peine d’
être
affirmées sans rhétorique. Nous entendons dire, très souvent, que la
585
endons dire, très souvent, que la Suisse mérite d’
être
défendue parce qu’elle détient d’immenses privilèges. Admettons ce po
586
Admettons ce point de vue, pour l’instant. Quels
sont
donc ces grands privilèges ? J’en citerai trois, qui sont sans contre
587
c ces grands privilèges ? J’en citerai trois, qui
sont
sans contredit les plus illustres : d’abord notre nature incomparable
588
utes les grandes puissances européennes. Voilà, n’
est
-ce pas, trois belles et bonnes raisons de nous montrer fiers de notre
589
e début de 1940. Il convient de se demander s’ils
sont
de purs et simples privilèges, ou s’ils ne comporteraient pas aussi d
590
nt pas fournir certains prétextes à la violer.
Sommes
-nous « à la hauteur » de notre nature ? La Suisse est belle, c’est
591
s « à la hauteur » de notre nature ? La Suisse
est
belle, c’est entendu, c’est connu dans le monde entier. On a fait ave
592
anuels, et tant mieux pour l’argent. Mais le fait
est
qu’on a coutume de parler de nos Alpes soit d’un point de vue puremen
593
e fait est qu’on a coutume de parler de nos Alpes
soit
d’un point de vue purement sentimental, soit d’un point de vue pureme
594
lpes soit d’un point de vue purement sentimental,
soit
d’un point de vue purement utilitaire ou touristique, en style de Män
595
as. Qu’on y prenne garde cependant : si nos Alpes
sont
belles et nos glaciers « sublimes », il n’y a pas là de quoi nous van
596
l n’y a pas là de quoi nous vanter ! D’abord ce n’
est
pas notre faute, car nous ne sommes pour rien dans notre géographie.
597
r ! D’abord ce n’est pas notre faute, car nous ne
sommes
pour rien dans notre géographie. Ensuite, si nous bénéficions d’un pr
598
cisément, peut tenter certains de nos voisins… Ne
seraient
-ils pas aussi capables que nous de chanter et de gagner de l’argent,
599
nous de chanter et de gagner de l’argent, si nous
étions
contraints de leur céder la place ? Sommes-nous vraiment plus dignes
600
i nous étions contraints de leur céder la place ?
Sommes
-nous vraiment plus dignes et plus conscients que d’autres des charges
601
s charges que supposent de pareils avantages ? Il
est
une page de Victor Hugo à laquelle je ne puis m’empêcher de penser, n
602
agnifiques, pleines de la grandeur de Dieu. Je me
suis
retourné, me demandant à quel être supérieur et choisi la nature serv
603
de Dieu. Je me suis retourné, me demandant à quel
être
supérieur et choisi la nature servait ce merveilleux festin de montag
604
oin, en effet, un seul ; car du reste l’esplanade
était
sauvage, abrupte et déserte. Je n’oublierai cela de ma vie. Dans une
605
gardait au hasard devant lui. O abîme ! les Alpes
étaient
le spectacle, le spectateur était un crétin ! Je me suis perdu dans c
606
e ! les Alpes étaient le spectacle, le spectateur
était
un crétin ! Je me suis perdu dans cette effrayante antithèse : l’homm
607
spectacle, le spectateur était un crétin ! Je me
suis
perdu dans cette effrayante antithèse : l’homme opposé à la nature ;
608
la posture la plus misérable de l’homme ». Et je
suis
loin de penser que nous sommes des crétins ! Je dis seulement qu’en f
609
de l’homme ». Et je suis loin de penser que nous
sommes
des crétins ! Je dis seulement qu’en face de cette nature « dans son
610
perbe », il ne suffit pas de chanter. Il s’agit d’
être
moralement « à la hauteur ». Non, ce n’est pas si facile que cela d’h
611
git d’être moralement « à la hauteur ». Non, ce n’
est
pas si facile que cela d’habiter et de posséder un pays dont l’altièr
612
ans l’âme de ses enfants. Le fait-il ? Hélas ! Il
est
bien à craindre que le voyageur ne soit encore trop fondé à trouver,
613
Hélas ! Il est bien à craindre que le voyageur ne
soit
encore trop fondé à trouver, avec Rousseau, que ce peuple n’est pas n
614
p fondé à trouver, avec Rousseau, que ce peuple n’
est
pas né pour ce pays, ou que ce pays n’a pas été fait pour ce peuple.
615
n’est pas né pour ce pays, ou que ce pays n’a pas
été
fait pour ce peuple. Cependant, ce pays et ce peuple sont mariés l’un
616
t pour ce peuple. Cependant, ce pays et ce peuple
sont
mariés l’un à l’autre, et comme le pays ne peut pas descendre au nive
617
premier de nos privilèges, une belle nature, doit
être
considéré par nous, avant toute autre chose, comme un appel, comme un
618
ose, comme un appel, comme une responsabilité.
Sommes
-nous vraiment libres ? Il faut donc que les Suisses deviennent et
619
rix de leur héroïsme civique et militaire, et qui
sont
un modèle pour l’Europe ». Oui certes, mais ici encore, n’ayons pas p
620
ncore, n’ayons pas peur d’y regarder de près. Que
sont
devenues en fait ces libertés antiques qu’on nous envie ? Avons-nous
621
es vanter pour qu’elles subsistent ? La liberté n’
est
pas seulement un privilège que l’on hérite. C’est une conquête perpét
622
l’on hérite. C’est une conquête perpétuelle. Elle
est
sans doute un héritage politique. Mais rien ne se déprécie plus rapid
623
jouit ne sait pas les mériter par ses manières d’
être
et de penser. Goethe a écrit, à ce propos, quelques phrases extrêmeme
624
, persuadé que l’une des marques de notre liberté
est
justement le courage d’admettre les critiques les plus amères, et d’e
625
e. On les entend dire, jusqu’à satiété, qu’ils se
sont
affranchis un jour, et qu’ils sont demeurés libres. En vérité, derriè
626
été, qu’ils se sont affranchis un jour, et qu’ils
sont
demeurés libres. En vérité, derrière leurs murailles, ils ne sont plu
627
bres. En vérité, derrière leurs murailles, ils ne
sont
plus esclaves que de leurs lois et de leurs coutumes, de leurs commér
628
au xviie siècle. Les petits tyrans dont il parle
étaient
peut-être alors les petites oligarchies que la Révolution devait renv
629
évolution devait renverser un peu plus tard. Mais
sommes
-nous bien certains que, pour autant, le jugement de Goethe n’est plus
630
ertains que, pour autant, le jugement de Goethe n’
est
plus du tout valable de nos jours ? Sommes-nous bien certains que la
631
Goethe n’est plus du tout valable de nos jours ?
Sommes
-nous bien certains que la tyrannie de l’opinion publique vaut mieux q
632
publique vaut mieux que celle des aristocrates ?
Sommes
-nous bien certains que les Suisses sont, plus que d’autres, libérés d
633
rates ? Sommes-nous bien certains que les Suisses
sont
, plus que d’autres, libérés des préjugés bourgeois ? Sommes-nous bien
634
us que d’autres, libérés des préjugés bourgeois ?
Sommes
-nous bien certains, enfin, qu’il a suffi à nos pères de s’affranchir
635
us ayons le droit de répéter à tout jamais : nous
sommes
libres ! Ayons le courage de le reconnaître en toute franchise : la S
636
nnaître en toute franchise : la Suisse actuelle n’
est
pas, comme elle devrait et pourrait l’être, l’un des pays où l’on a l
637
uelle n’est pas, comme elle devrait et pourrait l’
être
, l’un des pays où l’on a le plus de véritable liberté d’esprit. C’est
638
t que l’autre, celui qui pense différemment, doit
être
un type dangereux, méchant, machiavélique. Ceci pour le plan des idée
639
lérant. Qu’il me suffise de remarquer que si nous
étions
plus chrétiens, nous serions beaucoup plus tolérants dans ce domaine,
640
remarquer que si nous étions plus chrétiens, nous
serions
beaucoup plus tolérants dans ce domaine, nous aurions beaucoup plus d
641
l s’agit de défendre, en ce mois de janvier 1940,
sont
avant tout nos libertés politiques. Je répondrai que nos libertés pol
642
ire en témoigne. Une politique de liberté ne peut
être
faite que par des esprits libres. Et libres dans tous les domaines. L
643
ertés, l’extérieure et l’intérieure, ont toujours
été
liées dans notre histoire. C’est parce que les premiers Suisses avaie
644
lus d’une véritable liberté intérieure qu’ils ont
été
une proie facile pour l’étranger, pour les armées de la Révolution fr
645
es ne pourront subsister longtemps, et alors c’en
sera
fait de notre liberté vis-à-vis de l’étranger, c’est-à-dire de notre
646
armée défende quelque chose de valable. Or quels
sont
les ennemis intérieurs de notre liberté ? Je n’en désignerai ici que
647
ui vous paraîtront peut-être assez inattendus. Ce
sont
la paresse d’esprit et l’égalitarisme. Voilà ce que j’entends par pa
648
i ? Parce qu’on se contentait de dire : M. Hitler
est
pour l’ordre, les bolchévistes sont pour le désordre. Sans se demande
649
re : M. Hitler est pour l’ordre, les bolchévistes
sont
pour le désordre. Sans se demander un seul instant de quelle espèce d
650
holicisme. Je ne dis pas qu’ils ont eu raison. Je
suis
plus agacé que n’importe qui par certaine façon peu chrétienne de com
651
p. Notre bonne inconscience ne nous empêche pas d’
être
« ceux par qui le scandale arrive » ! Notre égalitarisme est, lui aus
652
par qui le scandale arrive » ! Notre égalitarisme
est
, lui aussi, une forme de notre paresse d’esprit, bien plus encore qu’
653
ourd’hui, l’égalitarisme hérité du xixe siècle n’
est
plus qu’une dégénérescence de cet instinct démocratique. Il veut tout
654
vocations infiniment diverses. Là encore, si nous
étions
plus chrétiens, nous serions moins farouchement égalitaires. Nous ser
655
s. Là encore, si nous étions plus chrétiens, nous
serions
moins farouchement égalitaires. Nous serions beaucoup plus respectueu
656
nous serions moins farouchement égalitaires. Nous
serions
beaucoup plus respectueux de la complexité humaine, parce que nous sa
657
le nous paraît exceptionnelle. Sans doute faut-il
être
vraiment chrétien pour respecter sans nulle arrière-pensée la vocatio
658
révèle en écrivant : « C’est pour obéir que nous
sommes
libres ». Vinet entend évidemment : pour obéir à Dieu plutôt qu’aux h
659
i ne savent pas que le but de toutes nos libertés
est
uniquement de laisser à chacun le droit d’obéir à Dieu seul, plutôt q
660
de notre amour de la vraie liberté, et cet amour
est
le fondement solide de toutes nos libertés civiques, comme aussi de n
661
ession de nos convictions, même lorsque celles-ci
sont
basées sur notre foi non point politique, mais chrétienne ? Oui, comm
662
s, sans commencement ni fin imaginables, qui nous
serait
due sans discussion et même sans contrepartie, et qui représenterait,
663
ège de droit divin. Nous savons que la neutralité
est
une conception menacée ; qu’elle est en quelque sorte contre nature,
664
a neutralité est une conception menacée ; qu’elle
est
en quelque sorte contre nature, car l’instinct normal de tout homme l
665
uleversements historiques dont la guerre actuelle
est
le signe ? Pour certains, qui se disent réalistes, si nous sommes neu
666
? Pour certains, qui se disent réalistes, si nous
sommes
neutres, c’est uniquement en vertu de nécessités toutes matérielles :
667
de nécessités toutes matérielles : parce que nous
sommes
un trop petit pays, parce que notre situation géographique centrale n
668
parti. Notons que cet argument de la nécessité n’
est
guère valable que pour nous, Suisses. Nos voisins n’ont aucune raison
669
u contraire. Au lieu de laisser entendre que nous
sommes
neutres parce que nous sommes trop faibles pour faire la guerre, pour
670
r entendre que nous sommes neutres parce que nous
sommes
trop faibles pour faire la guerre, pourquoi ne dirions-nous pas plutô
671
uerre, pourquoi ne dirions-nous pas plutôt : nous
sommes
neutres parce que nous détestons la guerre ? Vient ensuite l’argument
672
yeux d’un chrétien et d’un Suisse, les traités ne
seront
jamais de simples chiffons de papier ! La Confédération reste fondée
673
frontières. Les voisins que nous avons à redouter
sont
justement ceux qui déclarent que les traités et les serments ne sont
674
qui déclarent que les traités et les serments ne
sont
faits que pour être violés. Enfin, l’on donne parfois une justificati
675
es traités et les serments ne sont faits que pour
être
violés. Enfin, l’on donne parfois une justification militaire à notre
676
e justification militaire à notre neutralité : il
serait
de l’intérêt des puissances belligérantes de ne point utiliser le pas
677
1914-1918. Je crois que les Suisses, aujourd’hui,
sont
unanimes à reconnaître lesquels, parmi les belligérants, représentent
678
e de l’Europe. Je ne dis pas que ces arguments ne
sont
plus valables. Je dis seulement qu’ils ne représentent plus une raiso
679
convaincante pour nos voisins, et, par suite, ne
sont
plus pour nous cette garantie morale dont nous avons un besoin réelle
680
sse a le devoir de rester neutre, ce ne peut donc
être
qu’au nom d’une réalité qui ne sera ni matérielle, ni légale, ni mili
681
ne peut donc être qu’au nom d’une réalité qui ne
sera
ni matérielle, ni légale, ni militaire seulement, mais spirituelle au
682
éenne. Non, la neutralité de la Suisse ne saurait
être
un privilège : c’est une charge ! Et ce serait bien mal la défendre q
683
rait être un privilège : c’est une charge ! Et ce
serait
bien mal la défendre que de la défendre au nom de nos seuls intérêts
684
isants. Notre position géographique, par exemple,
est
un péril certain si l’on ne s’attache qu’à l’aspect matériel des chos
685
De même, la garantie légale de notre neutralité n’
est
qu’un chiffon de papier, si l’on veut y voir simplement une garantie
686
un traité signé à Vienne il y a plus de cent ans,
soit
! Mais il ne faudrait pas retenir de ce traité uniquement ce qui nous
687
et son indépendance de toute influence étrangère,
sont
dans les vrais intérêts de la politique de L’Europe entière.32 » Et j
688
st de les considérer comme les charges, dont nous
sommes
responsables vis-à-vis de la communauté européenne. Je voudrais marq
689
arge autant qu’un privilège, et même le privilège
était
subordonné à la charge, il n’avait d’autre but que d’en faciliter l’e
690
naturels, n’ont d’autre sens et d’autre raison d’
être
que de nous permettre d’accomplir notre mission spéciale de Suisses.
691
lité oblige ! Vocation de la Suisse Mais il
est
temps que je définisse ce que j’appelle la mission de la Suisse, ou m
692
nous espérons. C’est très facile à dire, et ce n’
est
pas très neuf, en apparences. Mais dès qu’on veut prendre au sérieux
693
sérieux cette vocation, l’on s’aperçoit que ce n’
est
pas si simple. On s’aperçoit aussi que ces mots, un peu usés, recouvr
694
rt on ne saurait attaquer avec succès que si l’on
est
sûr de ses armes, et solidement appuyé par l’arrière. Il en va de mêm
695
illustration concrète de ce que l’on prêche. Ce n’
est
pas par hasard que j’emploie ici une comparaison religieuse. Ce n’est
696
ue j’emploie ici une comparaison religieuse. Ce n’
est
pas sans raison non plus que j’ai voulu profiter de cette rencontre d
697
ir de parler d’une vocation de la Suisse, si ce n’
était
à nous, chrétiens suisses ? C’est pourquoi je voudrais consacrer cett
698
tion de la Suisse vis-à-vis de l’Europe, nombreux
sont
ceux qui crient à l’utopie. Eh bien, j’estime qu’un chrétien est l’ho
699
ient à l’utopie. Eh bien, j’estime qu’un chrétien
est
l’homme qui doit savoir mieux que tout autre qu’une vocation est autr
700
doit savoir mieux que tout autre qu’une vocation
est
autre chose qu’une utopie. Beaucoup de gens s’imaginent que les petit
701
ucoup de gens s’imaginent que les petites raisons
sont
plus réalistes que les grandes. Beaucoup de gens s’imaginent que les
702
aginent que les réalités matérielles et pratiques
sont
plus sérieuses que les réalités spirituelles, qu’ils traitent volonti
703
aujourd’hui plus qu’à toute autre époque. Car il
est
clair que la guerre actuelle est une guerre de doctrines et même de r
704
e époque. Car il est clair que la guerre actuelle
est
une guerre de doctrines et même de religions. Des raisons spirituelle
705
e. Épargnés jusqu’ici par les bombardements, nous
sommes
engagés comme les autres dans le conflit spirituel. Chose étrange, su
706
s de le constater, à propos de la neutralité : ce
sont
les faits eux-mêmes qui nous invitent à prendre une attitude active v
707
cation d’une utopie. Il ne suffit pas qu’une idée
soit
généreuse ou grande pour qu’on ait le droit d’y voir une vocation. Il
708
d’un conquérant, d’un Hitler ou d’un Napoléon, on
serait
en droit de lui dire : ta prétendue vocation n’est qu’une utopie, par
709
it en droit de lui dire : ta prétendue vocation n’
est
qu’une utopie, parce qu’elle ne se fonde sur aucune possibilité exist
710
rès solides. De par notre situation de fait, nous
sommes
, si je puis dire, pratiquement condamnés à l’idéalisme. Mais beaucoup
711
Ils prétendent tenir compte uniquement de ce qui
est
inscrit dans nos nécessités, dans notre situation géographique et mat
712
affirment que dans toutes ces choses qui peuvent
être
vues et touchées, nos Alpes, la petitesse de notre territoire, et nos
713
certain sens, ils n’ont pas tort. Une vocation n’
est
jamais inscrite en clair dans les faits matériels. Il faut savoir l’y
714
Nous ne pouvons jamais partir que de ce que nous
sommes
, c’est entendu, mais ce n’est pas une raison pour rester emprisonnés
715
e de ce que nous sommes, c’est entendu, mais ce n’
est
pas une raison pour rester emprisonnés en nous-mêmes et dans nos néce
716
n nous-mêmes et dans nos nécessités. Une vocation
est
toujours un appel, un appel qui vient du dehors, de Quelqu’un d’autre
717
son hérédité raciale, ni de son milieu, et qui n’
était
nullement « inscrit » dans tous ces faits. Que cela soit donc bien cl
718
llement « inscrit » dans tous ces faits. Que cela
soit
donc bien clairement établi : l’individu ou le pays qui se reconnaît
719
ement, aller au-delà, et dans un sens qui ne peut
être
révélé que par la foi. Maintenant donc, il s’agit pour nous tous de r
720
la vocation suisse, d’en revêtir la charge, d’en
être
les porteurs. Premièrement en la défendant, deuxièmement en l’illustr
721
se trouveraient mieux placés dans ce combat, et d’
être
prêt à leur porter main-forte, cas échéant. Car tout revient, dans ce
722
ic favorable à des entreprises éventuelles, qu’il
serait
imprudent de préciser trop vite, mais qui naîtront sans aucun doute,
723
nous les croirons justes et nécessaires. Mais il
est
temps que j’apporte une correction ou plus exactement un complément à
724
ition de la vocation. Je viens de vous dire qu’il
serait
prématuré de préciser dès maintenant le plan d’une entreprise fédéral
725
Or on pourrait me faire remarquer qu’une vocation
est
toujours un appel précis. Le type même de la vocation, c’est l’appel
726
jusqu’ici, aucun appel aussi déterminé. Nous n’en
sommes
pas encore là : mais je dis que nous devons nous attendre à pareille
727
r quelque chose de grand pour l’Europe. Peut-être
est
-il encore trop tôt pour mobiliser l’opinion en faveur d’une action de
728
un certain régime subsiste, vous savez où33. Ce n’
est
pas encore une mobilisation spirituelle que je réclame, c’est plutôt
729
que je réclame, c’est plutôt une mise de piquet.
Soyons
prêts à répondre à tout appel, même balbutiant, qui se ferait entendr
730
nous aurons à dire à nos voisins, forts que nous
sommes
d’une expérience fédéraliste de six siècles. Et surtout, ne dénigrons
731
en sorte que cette réduction d’Europe fédérée, qu’
est
la Suisse, soit au moins de l’ouvrage bien faite, digne d’être exposé
732
tte réduction d’Europe fédérée, qu’est la Suisse,
soit
au moins de l’ouvrage bien faite, digne d’être exposée, et en bonne p
733
e, soit au moins de l’ouvrage bien faite, digne d’
être
exposée, et en bonne place, comme un modèle valable pour l’Europe de
734
proche pour s’y mettre. Notre vocation intérieure
est
pour le moment plus précise que notre vocation européenne ; mais je v
735
s étroit du problème. J’estime que le fédéralisme
est
tout d’abord une réalité morale, et même spirituelle. Et c’est sur ce
736
qui savent souvent tellement mieux que nous ce qu’
est
la Suisse. Il nous reste surtout à développer en profondeur ce que j’
737
ans le monde et pour le monde, dans la cité où il
est
né, et pour son bien. Il n’a pas le droit de s’en désintéresser, et d
738
urellement s’insérer dans les données de fait qui
sont
celles du pays, qui sont communes à tous les citoyens. Mais la missio
739
les données de fait qui sont celles du pays, qui
sont
communes à tous les citoyens. Mais la mission spéciale du citoyen chr
740
Mais la mission spéciale du citoyen chrétien, ce
sera
de dégager de ces données communes un sens spirituel, une vocation. C
741
un sens spirituel, une vocation. Car le chrétien
est
, si l’ose dire, un spécialiste de la vocation. Cette action particuli
742
on. Cette action particulière du citoyen chrétien
sera
dans l’intérêt de la Suisse, certes. Mais elle sera d’abord obéissanc
743
ra dans l’intérêt de la Suisse, certes. Mais elle
sera
d’abord obéissance à la foi. J’insiste sur ce point, qui est capital.
744
obéissance à la foi. J’insiste sur ce point, qui
est
capital. Nous ne devons pas être chrétiens parce que nous sommes Sui
745
sur ce point, qui est capital. Nous ne devons pas
être
chrétiens parce que nous sommes Suisses, mais nous devons être de bo
746
Nous ne devons pas être chrétiens parce que nous
sommes
Suisses, mais nous devons être de bons Suisses parce que nous sommes
747
parce que nous sommes Suisses, mais nous devons
être
de bons Suisses parce que nous sommes chrétiens d’abord. Je tiens à d
748
s nous devons être de bons Suisses parce que nous
sommes
chrétiens d’abord. Je tiens à dissiper ici toute équivoque. Il ne man
749
isses parce que nous sommes chrétiens d’abord. Je
tiens
à dissiper ici toute équivoque. Il ne manque pas de gens, chez nous,
750
pour dire qu’un bon citoyen suisse a le devoir d’
être
chrétien, comme si ce devoir était la conséquence obligatoire d’un tr
751
e a le devoir d’être chrétien, comme si ce devoir
était
la conséquence obligatoire d’un très ardent patriotisme. Si certains
752
actement le contraire, je le répète : nous devons
être
de bons Suisses parce que nous sommes chrétiens d’abord. Gardons-nous
753
: nous devons être de bons Suisses parce que nous
sommes
chrétiens d’abord. Gardons-nous du Schweizerchristentum ! À ces Schwe
754
ui veut en avoir une ». ⁂ Faut-il me résumer ? Ce
sera
vite fait. Je n’ai développé devant vous, à vrai dire, qu’une seule i
755
: c’est que la Suisse que nous devons défendre n’
est
pas la Suisse des manuels, des cartes postales, des discours de tirs
756
artes postales, des discours de tirs fédéraux ; n’
est
pas la Suisse qui se vante de ses beautés, de ses libertés et de sa n
757
ces privilèges les signes d’une mission dont elle
est
responsable. Une seule idée… Mais si nous l’acceptons avec courage et
758
si nous l’acceptons avec courage et avec joie, je
suis
certain que la plupart des critiques auxquelles j’ai dû me livrer en
759
itimité. Si nous refusons de considérer le fait d’
être
Suisses comme une espèce de « filon », dans notre Europe déchirée, si
760
rement, et avec plus de générosité. Et alors nous
serons
en état de mesurer la vraie grandeur des événements actuels, la vraie
761
nts actuels, la vraie grandeur du rôle qui peut y
être
le nôtre. Et parce que nous serons plus conscients de ce que nous avo
762
rôle qui peut y être le nôtre. Et parce que nous
serons
plus conscients de ce que nous avons à donner, nous serons mieux armé
763
us conscients de ce que nous avons à donner, nous
serons
mieux armés pour défendre la Suisse où Dieu nous veut à son service.
764
ue si l’on se rappelle que les Waldstätten, déjà,
furent
libérés de tout vasselage dans l’intérêt du Saint-Empire, et non poin
765
u Saint-Empire, et non point parce que l’empereur
tenait
à leur faire un petit plaisir ! Ainsi le fondement même de la Confédé
766
sir ! Ainsi le fondement même de la Confédération
est
sa mission européenne. 33. En Russie, évidemment, chère Anastasie.
767
fédéraliste Il se peut que le fédéralisme n’ait
été
à son origine qu’une nécessité naturelle. Il se peut que durant des s
768
naturelle. Il se peut que durant des siècles, il
soit
demeuré une pratique terre à terre, et n’en ait que mieux fonctionné.
769
à terre, et n’en ait que mieux fonctionné. Ce qui
est
certain, c’est qu’une praxis ne peut rayonner et créer qu’avec l’appu
770
theoria, à partir d’un certain moment. Ce moment
est
venu. Nous y sommes. Dans la révolution du xxe siècle, ceux qui se t
771
r d’un certain moment. Ce moment est venu. Nous y
sommes
. Dans la révolution du xxe siècle, ceux qui se taisent n’ont peut-êt
772
qui se taisent n’ont peut-être pas tort, mais ils
sont
certainement battus. L’« arme secrète » dont on parle souvent, c’est
773
c’est simplement la propagande. Toute propagande
est
efficace, voilà le principe tactique fondamental de notre siècle. Si
774
éralisme une nécessité de s’exprimer, quand ce ne
serait
que pour se défendre. Mais en même temps, une possibilité se révèle,
775
mber à la bête.) Ainsi pour le fédéralisme. Qu’il
soit
né de la géographie, c’est un fait dont il faut partir sous peine d’u
776
géographisme » fort voisin du racisme, et qui ne
serait
à tout prendre qu’une des formes du matérialisme moderne, disons la f
777
isme moderne, disons la forme poétique. Or rien n’
est
plus artificiel, plus utopique, que le matérialisme, d’où qu’il vienn
778
matérialisme, d’où qu’il vienne. Cette doctrine n’
est
en fait qu’un ressentiment. Elle naît toujours des déceptions de l’id
779
l’idéalisme, de ses abus et de ses lacunes. Elle
est
toujours une revanche des instincts, une nostalgie des éléments concr
780
e. La réponse à l’idéalisme déficient ne doit pas
être
le matérialisme, mais l’idéalisme efficient : la foi qui œuvre. On a
781
s brumeux », ceux parmi nous qui se souviennent d’
être
hommes, créatures de l’esprit autant que de la terre, chargés d’une v
782
es de l’Asie. Le fait géographique que le Gothard
est
le seul point où un seul col permette de traverser les Alpes suffit à
783
e point très précis de l’espace et du temps, ce n’
est
pas seulement le fait physique de l’ouverture du col du St-Gothard, m
784
, la Réforme a sauvé la Suisse. Et c’est elle qui
est
restée fidèle aux préceptes du Frère Claus. Un grand État participant
785
n — tel que le rêva Mathieu Schinner — ne pouvait
être
gouverné par les cantons dépourvus de pouvoir central. Ou bien ce pou
786
de pouvoir central. Ou bien ce pouvoir aurait dû
être
improvisé, et c’eût été la fin de notre fédéralisme ; ou bien les pro
787
ien ce pouvoir aurait dû être improvisé, et c’eût
été
la fin de notre fédéralisme ; ou bien les provinces annexées auraient
788
auraient pris une trop grande influence, et c’eût
été
la guerre perpétuelle jusqu’au démembrement inévitable. La division d
789
les Zurichois et les Bernois. Dès lors la Suisse
est
ramenée à sa mission exceptionnelle. Les deux partis renoncent aux ap
790
ance beaucoup plus spirituelle. Et quand celle-ci
sera
stabilisée — après les guerres de Villmergen, au xviiie siècle —, la
791
Villmergen, au xviiie siècle —, la Confédération
sera
capable d’intégrer et des « races » et des langues nouvelles : c’est
792
ralisme actuel ne date donc que de 1848 ; et ce n’
est
même qu’à partir de 1919 que son statut légal a pris force de vie. (Q
793
égal a pris force de vie. (Quand le « fossé » eut
été
comblé.) Nous sommes donc au sommet de notre histoire, si l’on admet
794
de vie. (Quand le « fossé » eut été comblé.) Nous
sommes
donc au sommet de notre histoire, si l’on admet que le sens de cette
795
oire, si l’on admet que le sens de cette histoire
est
de créer et d’illustrer la réalité fédérale. Cependant de nouveaux pr
796
ue doit s’élargir ; et le seul horizon qu’il nous
soit
permis d’embrasser, c’est celui de l’Europe entière, non tel groupe d
797
on tel groupe de puissances voisines. Or l’Europe
est
un idéal, une civilisation et un esprit, bien plus qu’une entité géog
798
s pour un ». 2. Je m’excuse du calembour, mais il
est
proprement irrésistible : il y a des idées qui sont « dans l’air » et
799
st proprement irrésistible : il y a des idées qui
sont
« dans l’air » et qui risquent bien de rester des idées « en l’air ».
800
uteur d’homme. 3. Promouvoir une fédération, ce n’
est
pas créer un nouvel ordre systématique, simple de lignes, clair et sa
801
nt arranger ensemble des réalités concrètes. Pour
être
en mesure de comprendre vraiment la véritable alternative politique d
802
une petite catastrophe totalitaire ! Mes dossiers
sont
« mis au pas », alignés et empilés, rien ne dépasse et tout est broui
803
as », alignés et empilés, rien ne dépasse et tout
est
brouillé. Pour moi, quand j’arrange mes feuilles en une série de lias
804
xemple enseignant pour l’Europe. En vérité, ce ne
sont
ni les idées qui ont « inspiré » son statut primitif, ni la nature qu
805
, ni la nature qui l’a « dicté » ; mais ce statut
est
né de l’arrangement tout empirique de réalités très diverses, voire m
806
deux ou trois réseaux d’alliances, lesquelles ne
sont
pas toujours réciproques dans toutes leurs obligations. (Comme si de
807
ours deux pays concluaient un pacte qui pour l’un
serait
d’assistance obligatoire, pour l’autre seulement de non-agression.) D
808
oire violente et complexe ? Le secret de sa force
est
à peine formulable : il est de l’ordre du sentiment. Oui, ce n’est gu
809
Le secret de sa force est à peine formulable : il
est
de l’ordre du sentiment. Oui, ce n’est guère qu’un sentiment communau
810
lable : il est de l’ordre du sentiment. Oui, ce n’
est
guère qu’un sentiment communautaire informulé — je dirais même : soig
811
— je dirais même : soigneusement informulé — qui
tient
ensemble ces pays35. La crise réelle ne commencera qu’au jour où ce s
812
e réelle ne commencera qu’au jour où ce sentiment
sera
dit, traduit en lois, et par là même soumis au risque de se voir disc
813
e se voir discuté. 5. La force des choses — qui n’
est
qu’une traduction automatique de la faiblesse des hommes — fait aujou
814
urer, doit devenir à son tour missionnaire. Telle
est
sa crise : ou se nier, ou triompher mais sur le plan de l’Europe enti
815
it peu à peu, depuis la guerre de 1914-18. La SDN
fut
l’un de ses symptômes, bien faible encore. L’idée d’un réseau de pact
816
de pactes bilatéraux, ou à trois, ou à quatre, en
fut
un autre. Dans les deux cas, le sentiment fédéraliste fut promptement
817
utre. Dans les deux cas, le sentiment fédéraliste
fut
promptement détourné au profit de politiques d’hégémonie. Toutefois c
818
r dans la plupart des peuples. La guerre actuelle
est
venue le fouetter. Brusquement, la question se pose de fédérer l’Euro
819
parce qu’elle se pose brusquement, elle risque d’
être
mal posée. J’entends qu’elle risque de ne susciter que des plans rati
820
lans rationnels et des systèmes. Or tout système,
fût
-il nommé fédéraliste, est unitaire par essence, et donc antifédéralis
821
tèmes. Or tout système, fût-il nommé fédéraliste,
est
unitaire par essence, et donc antifédéraliste. Il l’est dans son espr
822
itaire par essence, et donc antifédéraliste. Il l’
est
dans son esprit, il le sera donc aussi, et fatalement, dans son appli
823
antifédéraliste. Il l’est dans son esprit, il le
sera
donc aussi, et fatalement, dans son application. Le fédéralisme réel
824
lement, dans son application. Le fédéralisme réel
est
le contraire absolu d’un système, toujours conçu par un cerveau et, à
825
’approches bien diverses.) 7. L’expérience suisse
est
minuscule, mais concluante. Elle peut et doit servir d’exemple par se
826
e nouent les unions fécondes. L’union fédéraliste
est
un mariage, et non pas un alignement militaire et géométrique. 9. Le
827
s’imaginent, hors de Suisse, que l’Europe ne peut
être
fédérée que par l’action d’une grande puissance. Ce fut l’idée de Nap
828
dérée que par l’action d’une grande puissance. Ce
fut
l’idée de Napoléon. C’est peut-être l’idée d’Hitler. C’est aussi cell
829
ener. L’intervention fameuse de Nicolas de Flue n’
est
si importante, pour nous autres, que parce qu’elle fut une efficace p
830
i importante, pour nous autres, que parce qu’elle
fut
une efficace protestation contre une double tentative d’hégémonie, de
831
ion déjà réalisée entre la France et l’Angleterre
soit
le germe d’une fédération. Il est certain que ce germe sera tué si l’
832
t l’Angleterre soit le germe d’une fédération. Il
est
certain que ce germe sera tué si l’un de ces États, ou tous les deux
833
rme d’une fédération. Il est certain que ce germe
sera
tué si l’un de ces États, ou tous les deux ensemble, conçoivent la fé
834
conçoivent la fédération comme un corps dont ils
seraient
la tête. C’est le renoncement à toute idée d’hégémonie qui est créate
835
C’est le renoncement à toute idée d’hégémonie qui
est
créateur de la fédération. 10. Le fédéralisme est une éducation mutue
836
est créateur de la fédération. 10. Le fédéralisme
est
une éducation mutuelle, plutôt qu’une éducation autoritaire. C’est en
837
ôt qu’une éducation autoritaire. C’est en quoi il
est
véritablement personnaliste. La philosophie de la personne est d’aill
838
ment personnaliste. La philosophie de la personne
est
d’ailleurs la seule philosophie acceptable pour le fédéraliste. Je dé
839
ns sociales de cette vocation. Le personnalisme n’
est
pas une moyenne, un « parti du centre », un juste milieu entre l’indi
840
isme agglutinant. Au contraire ! Le personnalisme
est
la position centrale, dont l’individualisme et le collectivisme ne so
841
ale, dont l’individualisme et le collectivisme ne
sont
que des déviations morbides. « Quand l’homme oublie qu’il est respons
842
déviations morbides. « Quand l’homme oublie qu’il
est
responsable de sa vocation devant la communauté, il devient individua
843
il devient individualiste. Quand il oublie qu’il
est
responsable de sa vocation devant Dieu et devant lui-même, il devient
844
une enquête technique, en tous domaines, quelles
sont
les activités créatrices et quelles sont les activités mécaniques. Da
845
quelles sont les activités créatrices et quelles
sont
les activités mécaniques. Dans le domaine industriel, cette enquête n
846
ques. Dans le domaine industriel, cette enquête n’
est
plus à faire : n’importe quel chef d’entreprise connaît exactement la
847
un manœuvre. La solution fédéraliste en économie
est
alors celle-ci : centraliser tout ce qui est de l’ordre du travail «
848
omie est alors celle-ci : centraliser tout ce qui
est
de l’ordre du travail « indifférencié » ou parcellaire, afin de perme
849
atif que nous devons tirer de l’expérience suisse
est
d’un ordre plus quotidien et intime. Le morcellement d’un pays — ou d
850
rançon de la grandeur matérielle sacrifiée. Nous
sommes
ici en présence d’une maladie spécifique du fédéralisme. Elle se mani
851
de langue ou de confession, crainte perpétuelle d’
être
majorisé. Notons que cette maladie a fait son apparition en Suisse à
852
s réseaux d’alliances superposées. Ainsi chacun s’
est
refermé sur soi, tendant à une espèce boiteuse d’autarcie. Chacun s’e
853
endant à une espèce boiteuse d’autarcie. Chacun s’
est
trouvé isolé en présence de tous les autres. D’où sa timidité déguisé
854
die, dans l’Europe de demain, comme en Suisse, il
est
essentiel d’insister sur le caractère non systématique et non unitair
855
tématique et non unitaire du fédéralisme sain. Il
est
essentiel que les groupes, ou les individus qui les composent, garden
856
es esprits les plus libres et les plus personnels
sont
ceux qui se rattachent : sentimentalement à une région ; légalement à
857
; religieusement à une Église dont les frontières
sont
bien plus vastes que celles de l’État ; intellectuellement à l’une de
858
traire. Tandis que les petits esprits intolérants
sont
ceux qui ne conçoivent le « fédéralisme » que sous la forme du Kantön
859
ue et totalitaire en miniature ; ceux qui veulent
être
de leur canton d’abord ou uniquement et appellent cela « fédéralisme
860
appelle donc que la formule de la tyrannie maxima
est
celle de l’État qui prétend que ses frontières douanières et politiqu
861
étend que ses frontières douanières et politiques
soient
en même temps celles de la religion des citoyens, de leur culture, de
862
avidité. Construire la fédération européenne, ce
sera
peut-être simplement développer tout d’abord, et affirmer, une plural
863
.) 13. La fédération européenne, si elle se fait,
sera
faite par des personnes, et non point par des troupes, au sens politi
864
uisse que de produire des hommes dont la fonction
est
avant tout de connaître l’Europe : juges et négociateurs d’accords in
865
oix-Rouge, etc., etc. Le « Suisse international »
est
un homme qui peut et doit connaître l’Europe, par tradition, par goût
866
en servir. 14. La mission historique de la Suisse
fut
, à partir du xiiie siècle, de garder libres pour les peuples et les
867
du drapeau rouge à la croix blanche, où le rouge
est
couleur d’Empire, c’est-à-dire d’union des nations, et la croix signe
868
d’où renaîtra la paix si Dieu le veut, la Suisse
tient
les clefs de l’Europe, et c’est là sa vraie vocation. Elle est le lie
869
de l’Europe, et c’est là sa vraie vocation. Elle
est
le lieu et la formule, le génie tutélaire de l’Empire. De cet Empire,
870
e l’Empire. De cet Empire, on a bien dit que nous
sommes
le dernier vestige. Toute la question est de savoir si c’est là notre
871
nous sommes le dernier vestige. Toute la question
est
de savoir si c’est là notre dernier mot — ou le premier d’un chapitre
872
premier d’un chapitre nouveau ; toute la question
est
de savoir si ce vestige ne va pas devenir un germe ! Un germe, ce n’
873
tige ne va pas devenir un germe ! Un germe, ce n’
est
jamais grand : l’image convient à notre taille. Encore faut-il que le
874
à notre taille. Encore faut-il que le petit grain
soit
fécondé… Il y a beaucoup à faire pour que la Suisse puisse prétendre
875
t, n’en doutons pas, d’accepter notre démission —
soit
volontaire, soit forcée. 34. Voir là-dessus les travaux du profess
876
as, d’accepter notre démission — soit volontaire,
soit
forcée. 34. Voir là-dessus les travaux du professeur zurichois Kar
877
professeur zurichois Karl Meyer. Le Pacte de 1291
est
le dernier d’une longue série, dont le pacte de la Torre, au Tessin,
878
ngue série, dont le pacte de la Torre, au Tessin,
fut
l’un des premiers : 1182. 35. Voir sur ce point capital Richard Fell
879
nschaft, Rektoratsrede, Berne 1937. 36. Laquelle
est
à la fois ou alternativement jacobine, raciste, nationaliste, marxist
880
pants (cf. service militaire), etc., etc. 39. Ce
sont
les successeurs pacifiques des officiers au service étranger d’autres
881
e de la Suisse Nul pays, à ma connaissance, n’a
été
plus souvent expliqué à lui-même et au monde que la Suisse. C’est qu’
882
t qu’il en a besoin plus que nul autre. Sa devise
est
un paradoxe qu’il n’a pas toujours bien compris. Elle exclut en princ
883
arifions notre langage ! — Puisque le fédéralisme
est
une forme politique qui suppose l’équilibre vivant entre les droits d
884
haque région et ses devoirs envers l’ensemble, il
est
absurde de nommer « fédéraliste » un parti qui n’a d’autre programme
885
ux qui se disent, chez nous, « fédéralistes », ne
sont
souvent, je le crains, que des nationalistes cantonaux. Ceux qui insi
886
eur fédéralisme se résume à combattre tout ce qui
est
dit fédéral. Comprenne qui pourra ! Cette confusion verbale, symboliq
887
e confusion verbale, symbolique de tant d’autres,
est
à la base de la plupart de nos conflits politiques, économiques, parl
888
on. Ils se font un programme de ce qui ne saurait
être
que la maladie individualiste ou la maladie collectiviste de notre Ét
889
À quand le parti de la santé fédéraliste ? Il ne
sera
ni de gauche ni de droite. Car sous l’opposition, indéfendable en thé
890
on gauche-droite. Les radicaux centralisateurs ne
sont
que des socialistes qui s’ignorent ; ceux-ci à leur tour ne sont que
891
cialistes qui s’ignorent ; ceux-ci à leur tour ne
sont
que des totalitaires timorés, c’est-à-dire quelque chose d’absolument
892
béraux » et les conservateurs « fédéralistes » ne
sont
que des réactionnaires inconséquents : tant que je ne les aurai pas v
893
érieux leurs convictions « fédéralistes » (ce mot
étant
pris dans leur sens). (Et ce ne sont pas seulement les particuliers,
894
s » (ce mot étant pris dans leur sens). (Et ce ne
sont
pas seulement les particuliers, propriétaires ou industriels, qui men
895
cations ; mais les cantons les plus conservateurs
sont
souvent ceux qui, me dit-on, se gênent le moins…40) Or l’opposition g
896
gênent le moins…40) Or l’opposition gauche-droite
est
étrangère au génie de la Suisse. Son origine parlementaire le prouve
897
ues françaises. L’idée même de parti, d’ailleurs,
est
antisuisse, dans ce sens qu’elle est antifédéraliste. Tout parti poli
898
d’ailleurs, est antisuisse, dans ce sens qu’elle
est
antifédéraliste. Tout parti politique est en puissance un petit État
899
qu’elle est antifédéraliste. Tout parti politique
est
en puissance un petit État totalitaire et unifié, qui voudrait bien t
900
Les seuls partis qu’une fédération puisse tolérer
sont
les partis à programme restreint, représentant une région, ou un grou
901
t tout assimiler, tout juger et tout absorber. Il
serait
temps de se remettre à la Diète ! 3. Suite du précédent. — Comment pe
902
agne et du Pacte germano-russe ? Les Espagnols se
sont
entretués pendant trois ans, en toute sincérité et en tout héroïsme,
903
er les antihitlériens, qui se trouvent d’ailleurs
être
les mêmes. (« Réactionnaires et capitalistes internationaux »…) Nos d
904
»…) Nos descendants diront de notre siècle qu’il
fut
celui des gogos enragés. 4. Paresse d’esprit. — Je parle ici par expé
905
dapter, distinguer, assouplir, traduire : ce ne n’
est
pas beaucoup plus difficile ; c’est beaucoup plus intéressant ; et c’
906
plupart des bureaux font tout le contraire, cela
tient
à la paresse d’esprit des messieurs qui en occupent les fauteuils. Le
907
nfort et la prudence. Ne dites donc plus : « Nous
sommes
opposés par principe à tout ce qui vient de Berne — sauf les crédits
908
ez, la révolution nationale dont certains parlent
sera
faite. Mais autrement, elle ne servira de rien. 5. Notre matérialism
909
helle des valeurs. Le cadre matériel de notre vie
est
parfait, mais il n’encadrera bientôt plus aucune vie digne de ce nom.
910
t aux salaires fixes, tandis que moins d’un tiers
est
consacré au but de l’œuvre. Je vois une revue d’art et de littérature
911
d’entre eux s’étonne, on lui répond que les temps
sont
difficiles. Je vois que dans le budget moyen d’un ouvrier suisse, le
912
par an. Je vois enfin que toute notre politique
est
alourdie et comme paralysée par des soucis budgétaires de cet ordre,
913
quelque chose aujourd’hui menace la liberté, ce n’
est
pas comme jadis la superstition… c’est la préoccupation, la passion d
914
u bien-être matériel. Sa pente, n’en doutons pas,
est
du côté de la tyrannie. » C’est Vinet qui parlait ainsi, il y a longt
915
ds qui se rétractent au seul mot de germanisme ne
sont
pas ceux qui sauront illustrer la Suisse romande, donc la défendre. R
916
eur du germanisme, l’ont étudié et l’ont aimé. Ce
sont
nos meilleurs écrivains. 7. Tolérance. — Le fédéralisme véritable sup
917
énager non seulement la chèvre et le chou, ce qui
est
humain, mais encore l’agneau… et le loup, ce qui est moins impartial
918
humain, mais encore l’agneau… et le loup, ce qui
est
moins impartial qu’il ne semble. Ne commettons plus l’imprudence capi
919
uis plusieurs années. De ce point de vue, nous ne
sommes
plus neutres en fait, nous sommes en guerre parce que victimes d’une
920
de vue, nous ne sommes plus neutres en fait, nous
sommes
en guerre parce que victimes d’une agression systématique et quotidie
921
tifier nos frontières ? L’intégrité du territoire
serait
-elle plus importante de nos jours que l’intégrité de la conscience na
922
Celle-là conserve-t-elle son sens quand celle-ci
est
déjà compromise ? 10. Poésie et prose. — Revenons à la géographie ! d
923
lligérants qui viennent nous dire : « Ceux qui ne
sont
ni froids ni bouillants seront vomis ». Qu’est-ce que cela signifie,
924
dire : « Ceux qui ne sont ni froids ni bouillants
seront
vomis ». Qu’est-ce que cela signifie, pratiquement ? Que ceux qui do
925
sont ni froids ni bouillants seront vomis ». Qu’
est
-ce que cela signifie, pratiquement ? Que ceux qui dont froids ou boui
926
iquement ? Que ceux qui dont froids ou bouillants
seront
mangés. Je demande à voir ce qui vaut le mieux. Il ne faut pas parler
927
ut dépend de ceci : vis-à-vis de quoi, ou de qui,
est
-on tiède, est-on neutre ? Si c’est vis-à-vis du Christ, la parole éva
928
eci : vis-à-vis de quoi, ou de qui, est-on tiède,
est
-on neutre ? Si c’est vis-à-vis du Christ, la parole évangélique nous
929
ole évangélique nous apprend que cette neutralité
est
suprêmement désavantageuse : elle entraîne notre expulsion violente h
930
utres que l’on reste tiède, cette neutralité peut
être
avantageuse dans certains cas, dans la mesure où elle nous exclut, pr
931
ons mauvais. (Reste à savoir si le conflit actuel
est
« mauvais ». Puis, si notre tiédeur suffira pour que le monstre de la
932
e le monstre de la guerre nous vomisse… Mais ceci
est
une autre histoire.) On ferait bien de ne pas utiliser comme des prov
933
n Royaume, à son Éternité. Répéter que les tièdes
seront
vomis, en détournant ce verset de son sens spirituel, c’est toujours
934
même jusqu’à nous affirmer que cette « éternité »
est
la base officielle de notre politique. Dans ce cas, notre politique r
935
itique reposerait sur une faute de français, j’en
suis
fâché. Ce n’est pas éternelle qu’il convient de dire, mais perpétuell
936
sur une faute de français, j’en suis fâché. Ce n’
est
pas éternelle qu’il convient de dire, mais perpétuelle. Se figure-t-o
937
prenons donc à qui de droit que nul État humain n’
est
éternel ; que la Suisse est un État humain ; et que par conséquent l’
938
que nul État humain n’est éternel ; que la Suisse
est
un État humain ; et que par conséquent l’épithète « éternelle » ne sa
939
par la Suisse en politique. De plus, la Suisse n’
est
devenue neutre qu’à partir d’un certain moment de son histoire. Or ce
940
ir d’un certain moment de son histoire. Or ce qui
est
éternel ne commence pas à un certain moment, en 1648 ou en 1815 par e
941
ar exemple : tant que notre mission européenne ne
sera
pas accomplie. (L’Empire fédératif ?) Mais toute politique digne de c
942
Toujours à gauche, mais pas plus loin. » Pourquoi
est
-ce comique ? Parce que l’histoire et la politique ne cessent pas de m
943
as de modifier ces positions toutes relatives que
sont
la gauche et la droite. Affirmer dans l’absolu une position relative,
944
absolu une position relative, si légitime qu’elle
soit
, c’est se condamner à être sans cesse dépassé et ridiculisé par les f
945
e, si légitime qu’elle soit, c’est se condamner à
être
sans cesse dépassé et ridiculisé par les faits. 14. Neutralité « mora
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opinion. Renoncer au droit de nous exprimer, ce n’
est
donc pas nous conformer aux exigences de la neutralité. Ce peut être,
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conformer aux exigences de la neutralité. Ce peut
être
, dans certains cas, une mesure opportune ; mais passé certaine limite
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un point décisif pour notre indépendance future,
étant
donnée la nature des guerres modernes, qui sont d’abord des guerres m
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étant donnée la nature des guerres modernes, qui
sont
d’abord des guerres morales, des guerres de propagande. Quand une tro
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ales, des guerres de propagande. Quand une troupe
est
réduite à l’impuissance par l’adversaire, on ne dit pas qu’elle est n
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puissance par l’adversaire, on ne dit pas qu’elle
est
neutre, on dit qu’elle est neutralisée. Taire nos opinions, aujourd’h
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on ne dit pas qu’elle est neutre, on dit qu’elle
est
neutralisée. Taire nos opinions, aujourd’hui, ce n’est pas rester neu
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eutralisée. Taire nos opinions, aujourd’hui, ce n’
est
pas rester neutres, c’est accepter d’être neutralisés moralement. Le
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ui, ce n’est pas rester neutres, c’est accepter d’
être
neutralisés moralement. Le Conseil fédéral a repoussé officiellement
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lle l’affirme au contraire ! Le devoir de l’armée
est
de garantir par la force l’intégrité de notre indépendance, et non pa
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édiocrité des vues politiques. Les petits pays ne
sont
pas dispensés d’imaginer et de voir grand. Bien au contraire : ils so
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maginer et de voir grand. Bien au contraire : ils
sont
contraints de compenser leur petitesse physique par leur prestige mor
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récemment découvert qu’un diplomate moderne doit
être
un expert commercial. Conception bien typique du siècle dernier, où,
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e du siècle dernier, où, en effet, la politique n’
était
plus guère qu’une annexe des affaires. Rien de plus dangereusement ut
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ique que le réalisme d’avant-hier. Notre époque n’
est
plus celle du grand commerce ; ni même de la grande industrie (réalis
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grande industrie (réalisme d’hier). Notre époque
est
celle des religions politiques, sociales, nationales. Le commerce, l’
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l, ont cessé d’imposer leurs « lois fatales ». Ce
sont
les chefs qui dictent les prix, les cours des changes, la consommatio
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ce — et en particulier à dominer les masses43. Il
est
temps que la Suisse comprenne que le souci de son économie ne saurait
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reste, le fonctionnement technique de la machine,
étant
l’affaire des fonctionnaires — leur nom l’indique — et des conseiller
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e notre gouvernement comprenne ceci : La prudence
est
le vice des timides et la vertu des audacieux. 40. Peut-être me cro
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r pleinement cette déclaration de Spitteler : « N’
est
-ce pas un spectacle grotesque que celui d’une feuille de chou qui, sû
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olique devenu national-socialiste. 44. « Nous ne
sommes
pas gouvernés, nous sommes seulement administrés », répète avec raiso
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aliste. 44. « Nous ne sommes pas gouvernés, nous
sommes
seulement administrés », répète avec raison G. de Reynold. — À propos
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fèrent des siennes. Je répondrai : 1° que Reynold
est
catholique, et je suis calviniste ; 2° que lorsqu’il écrit : « Faire
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répondrai : 1° que Reynold est catholique, et je
suis
calviniste ; 2° que lorsqu’il écrit : « Faire du socialisme, c’est fa
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nationalisme, c’est faire l’autre moitié… » Nous
sommes
d’accord pour condamner le tout.