1 1940, Mission ou démission de la Suisse. Avertissement
1 cercles concentriques, ils s’efforcent de situer notre mission dans l’Europe d’aujourd’hui. On trouvera tout d’abord une con
2 dans son sens le plus fort, et je veux bien qu’il doit compromettant. Une foi réelle est une raison de vivre et non point d’
3 éterminent l’état présent de l’Europe, et situent notre action particulière dans l’évolution générale. Le reste du recueil es
4 t pas suffisant, mais c’est urgent. C’est de quoi nous manquons le plus, et j’ajouterai : c’est de quoi nous savons le moins
5 manquons le plus, et j’ajouterai : c’est de quoi nous savons le moins que nous manquons dangereusement. Nous avons bien ass
6 jouterai : c’est de quoi nous savons le moins que nous manquons dangereusement. Nous avons bien assez de techniciens, de spé
7 savons le moins que nous manquons dangereusement. Nous avons bien assez de techniciens, de spécialistes et de « compétences 
8 se dans le monde. Soyons modestes, c’est entendu. Nous ne sommes pas les mentors de l’Europe. Mais n’allons pas confondre ce
9 ée qui anime tous ces essais. L’épreuve des armes nous attend peut-être ; mais nous courons déjà l’épreuve des âmes. Or le c
10 L’épreuve des armes nous attend peut-être ; mais nous courons déjà l’épreuve des âmes. Or le courage qu’il y faut n’est pas
2 1940, Mission ou démission de la Suisse. Le protestantisme créateur de personnes
11 ur infinie de la personnalité ? Comment passer de notre théologie à notre histoire ? Qu’est-ce que cette personnalité dont la
12 ersonnalité ? Comment passer de notre théologie à notre histoire ? Qu’est-ce que cette personnalité dont la valeur varie si c
13 ro et l’infini, et dont tant d’auteurs incroyants nous font une gloire peut-être intempestive ? Le problème est, je crois, d
14 ivilisation dite chrétienne, incitent beaucoup de nos contemporains à se tourner vers le passé pour y trouver le réconfort
15 à ce désir de retrouver confiance en soi, que je devais répondre en exaltant ici le protestantisme créateur de personnalités,
16 e, en Italie, l’attaque est déjà déclenchée. Elle nous atteint déjà par contrecoup, et il est sage de s’attendre à bien pire
17 rempart contre la barbarie, c’est le moment pour nous de préciser comment, pourquoi, dans quel esprit surtout le protestant
18 raît une tâche d’une importance particulière pour notre pensée réformée. Car il se trouve que nous passons, nous protestants,
19 pour notre pensée réformée. Car il se trouve que nous passons, nous protestants, tantôt pour les fermes soutiens de la pers
20 nsée réformée. Car il se trouve que nous passons, nous protestants, tantôt pour les fermes soutiens de la personnalité, tant
21 dangereux individualistes. C’est donc vraiment de nos affaires qu’il s’agit dans cette discussion. Nous y avons notre mot à
22 nos affaires qu’il s’agit dans cette discussion. Nous y avons notre mot à dire, peut-être même avant quiconque, si l’on veu
23 qu’il s’agit dans cette discussion. Nous y avons notre mot à dire, peut-être même avant quiconque, si l’on veut éviter les p
24 mples historiques susceptibles de faire image. Si nous remontons aux origines, si nous cherchons comment sont apparues dans
25 e faire image. Si nous remontons aux origines, si nous cherchons comment sont apparues dans l’Histoire les notions d’individ
26 et de personne, et les systèmes qui s’y opposent, nous verrons mieux comment se situe la Réforme dans l’évolution de l’Europ
27 lution de l’Europe, et quel principe central elle doit y incarner, de nos jours sans doute plus que jamais. Prenons d’abord
28 et quel principe central elle doit y incarner, de nos jours sans doute plus que jamais. Prenons d’abord l’individu. Contrai
29 s d’abord l’individu. Contrairement à ce que peut nous faire croire une certaine polémique réactionnaire, l’individu n’est p
30 ntrats. Alors que la morale de la tribu dicte des devoirs sacrés, dans la cité on parle de droits. Tous les membres de la tribu
31 on parle de droits. Tous les membres de la tribu devaient agir de la même manière minutieusement prescrite par les usages, et t
32 scient. La définition la plus noble de l’individu nous est fournie à ce moment par Socrate, lorsqu’il nous dit : Connais-toi
33 us est fournie à ce moment par Socrate, lorsqu’il nous dit : Connais-toi toi-même, c’est-à-dire : prends conscience de ton e
34 elle. C’est Rome alors, c’est l’Empire romain qui nous donnera le symbole éternel de cette réaction collective. La victoire
35 in, rural et militaire, avec son appareil rigide, devait fatalement triompher d’une Grèce que nous dirions « atomisée ». Le vi
36 gide, devait fatalement triompher d’une Grèce que nous dirions « atomisée ». Le vide social créé par l’individualisme est to
37 langage moderne par le terme de soldat politique. Nous allons le voir se transformer substantiellement dans le vocabulaire c
38 bulaire chrétien. Car voici le moment décisif de notre histoire. La Grèce individualiste a triomphé de la communauté barbare
39 nt donc comme des paradoxes vivants, et cependant nous savons bien que leur libération et leur service ne sont nullement con
40 dans leur genèse historique, les maîtres mots de notre conception occidentale de l’homme : l’individu et la personne. Et vou
41 me chrétien. Ces bases étant posées, faisons dans nos pensées un petit saut de quelques siècles, pour retomber tout à la fo
42 que de la Réformation et dans le sujet précis qui nous occupe. L’Église primitive a repris peu à peu l’héritage de l’Empire
43 e les premiers types d’individus au sens moderne. Nous retrouvons ici cette liaison mystérieuse entre la naissance de l’indi
44 ui va se dresser pour proclamer les droits et les devoirs de la personne chrétienne — c’est la Réforme. Nous touchons au cœur m
45 irs de la personne chrétienne — c’est la Réforme. Nous touchons au cœur même du sujet. Qu’on m’entende bien : je ne prétends
46 e vais essayer de vous montrer ce que pourrait et devrait être un personnalisme inspiré de la Réforme. Calvin ni Luther n’ont p
47 ont admis d’être présentés comme des novateurs. «  Nous nous sommes efforcés, écrit Calvin, de ne pas mettre nos opinions per
48 dmis d’être présentés comme des novateurs. « Nous nous sommes efforcés, écrit Calvin, de ne pas mettre nos opinions personne
49 s sommes efforcés, écrit Calvin, de ne pas mettre nos opinions personnelles à la place de l’exposition simple et fidèle de
50 de la pure Parole de Dieu. » Du point de vue qui nous intéresse ici, je dirai que l’œuvre de Calvin a consisté essentiellem
51 une et sainte, l’Una Sancta, le Corps de Christ, nous apparaît, selon les propres termes de Calvin, dans la diversité « des
52 ibue à chaque homme dans Son plan. Notez bien que nous retrouvons ici le paradoxe essentiel de la personne : à la fois libre
53 droit d’être respecté par l’État, il a surtout le devoir d’agir, en tant qu’il est chargé d’une responsabilité unique dans la
54 iété, à sa juste place. Notons que si la personne doit être respectée par l’État, ce n’est pas en vertu d’on ne sait quel « 
55 nce ! Calvin précise que l’État, quel qu’il soit, doit être obéi par chacun. Mais il ajoute une restriction mémorable, qui f
56 nt empêché de rendre à Dieu le service que je lui dois par ma vocation. » C’est à ma connaissance le seul texte constitution
57 te contaminé les formes et structures politiques. Nous en verrons quelques exemples un peu plus loin. Quelle fut donc la tra
58 collusion des pouvoirs politiques et spirituels, nous les trouvons chez un Charles-Quint, chez un Philippe II d’Espagne, et
59 le parti protestant relève la tête, en tous pays, nous le voyons adopter une politique toute différente. Il ne tombe jamais
60 de défense constituées par les huguenots ; ou de nos jours, bien que d’une manière plus vague, des États-Unis d’Amérique e
61 de de la tendance fédéraliste protestante jusqu’à nos jours, est d’ordre proprement spirituel. C’est bien le même état d’es
62 un entraîne l’autre, l’un ne va pas sans l’autre. Nous pouvons le vérifier d’une autre manière encore. Qui dit respect des p
63 mple qui me ferait la part trop belle. Contentons- nous de le poser comme un repère. Ce que je voulais dégager, c’est que la
64 es telles que l’individu et la personne, abordons notre siècle et l’histoire présente. Car en définitive, c’est de cela qu’il
65 et républiques sont également voulues de Dieu et doivent être obéies comme telles. Une fois cependant il marque une préférence
66 ise, et l’idée de l’homme qu’il suppose. C’est en nous plaçant à ce double point de vue : condition de l’Église et conceptio
67 ndition de l’Église et conception de l’homme, que nous pourrons le mieux départager les deux groupes de régimes qui s’affron
68 s nations qui respectent l’Église et la personne. Nous y trouvons des formes de gouvernement aussi disparates que possible :
69 ces trois États : d’abord parce que ce n’est pas notre sujet, ensuite parce que ces différences, qui ne le voit, s’atténuent
70 le voit, s’atténuent d’année en année7. Ce qu’il nous importe de souligner ici, ce sont deux traits évidemment communs à ce
71 eurs », ne saurait être que l’absolutisme. Or, si nous nous rappelons que le calvinisme a toujours maintenu avec rigueur la
72 », ne saurait être que l’absolutisme. Or, si nous nous rappelons que le calvinisme a toujours maintenu avec rigueur la disti
73 catholiques, alors qu’il n’en existe point qui se doit développée en pays « calvinistes » ou simplement influencés par des é
74 t à fait différente : une forme d’individualisme. Nous aurons l’occasion d’y revenir tout à l’heure. Car, en effet, une oppo
75 talité totalitaire et la mentalité calviniste, va nous permettre une confrontation utile des deux doctrines. Je dis bien uti
76 esprit totalitaire comme une menace terrible pour notre civilisation et plus encore pour nos Églises. Je considère que nous n
77 rible pour notre civilisation et plus encore pour nos Églises. Je considère que nous n’avons plus le droit de l’étudier en
78 et plus encore pour nos Églises. Je considère que nous n’avons plus le droit de l’étudier en curieux, en théoriciens ou en o
79 u’il est du diable, et que c’est en chrétiens que nous avons maintenant à nous défendre, dans cette guerre qui nous est décl
80 ue c’est en chrétiens que nous avons maintenant à nous défendre, dans cette guerre qui nous est déclarée. Or le meilleur, le
81 maintenant à nous défendre, dans cette guerre qui nous est déclarée. Or le meilleur, le seul moyen de se défendre — surtout
82 plus secrètes complicités qu’il a su ménager dans nos cœurs. Connaître la religion totalitaire, c’est la première condition
83 ire, c’est la première condition pour éviter chez nous , pendant qu’il en est temps, des déviations qui feraient le jeu de l’
84 coup certains dangers qui menacent en permanence notre morale de la personne. Je vais le montrer par deux exemples dont j’es
85 elle communauté, reprenons une des catégories que nous définissions en débutant. La religion politique, ou la politique reli
86 nts sabbats de nègres blancs ! Qui oserait encore nous soutenir que ce délire représente l’ordre ? Qui ne voit qu’une telle
87 e futur éternel, le rachat du péché d’origine ? À nous maintenant de rester vigilants, exigeants et vigilants, même et surto
88 e. Par exemple : partout où l’on exalte ici, chez nous , la vertu régénératrice du sang et le culte des morts sacrés, même s’
89 elque chose qu’il ne faut pas laisser grandir. On nous parle, avec les meilleures intentions du monde, d’une défense spiritu
90 e sur la notion de « Suisse chrétienne », défions- nous de certains élans qui nous feraient tomber à pieds joints dans la fat
91 chrétienne », défions-nous de certains élans qui nous feraient tomber à pieds joints dans la fatale confusion du temporel e
92 opapisme. Si le mot d’ordre « Suisse chrétienne » doit être lancé, ce ne peut être que par les Églises seules, et non par un
93 de comprendre une bonne fois le sens spirituel de notre fédéralisme, seule doctrine politique existante qui doit radicalement
94 déralisme, seule doctrine politique existante qui doit radicalement contraire à la doctrine totalitaire. Le fédéralisme, ce
95 is au paradoxe vivant que représente en chacun de nous , la personne : l’homme qui sait ce qu’il doit engager tout en gardant
96 de nous, la personne : l’homme qui sait ce qu’il doit engager tout en gardant sa liberté, l’homme autonome mais aussi solid
97 erté, l’homme autonome mais aussi solidaire. Ceci nous amène au second point : quelle est la condition faite à la personne d
98 ’indique, d’une véritable civilisation. Qu’allons- nous opposer à cela ? Tout simplement, la force préventive, inattaquable t
99 s, pour peu qu’il vienne à s’accentuer, risque de nous conduire un jour par une voie directe au fascisme, une certaine dévia
100 ie directe au fascisme, une certaine déviation de notre morale, un certain culte de la « personnalité » en soi, un certain in
101 soi, un certain individualisme, risquent aussi de nous y conduire, cette fois-ci d’une manière indirecte, du simple fait qu’
102 re indirecte, du simple fait qu’ils affaiblissent nos résistances spirituelles et nous font perdre le sens de l’Église. C’e
103 ils affaiblissent nos résistances spirituelles et nous font perdre le sens de l’Église. C’est ici de nos vertus mêmes qu’il
104 ous font perdre le sens de l’Église. C’est ici de nos vertus mêmes qu’il importe de nous méfier. Méfions-nous d’une certain
105 e. C’est ici de nos vertus mêmes qu’il importe de nous méfier. Méfions-nous d’une certaine manière trop humaine de prôner ou
106 ertus mêmes qu’il importe de nous méfier. Méfions- nous d’une certaine manière trop humaine de prôner ou de laisser prôner le
107 ôner le protestantisme créateur de personnalités. Notre danger intime et permanent, c’est le moralisme, le culte de nos vertu
108 ime et permanent, c’est le moralisme, le culte de nos vertus utilisées pour des fins purement humaines. À force de louer la
109 d’individualités et de caractères bien trempés », nous courons le risque d’oublier que la Réforme n’est pas faite pour l’hom
110 mme d’abord. À force de louer ses effets humains, nous risquons de trahir sa cause divine. N’oublions pas que la personnalit
111 mé par une éducation et une ambiance protestante. Nous n’en avons que trop, de ces gloires « protestantes », laborieusement
112 n fait que « sortis » du protestantisme… Certes, nous pouvons nous réjouir de ce que la foi réformée, même quand elle cesse
113 sortis » du protestantisme… Certes, nous pouvons nous réjouir de ce que la foi réformée, même quand elle cesse d’être vivan
114 bien trempés, se feront de plus en plus rares si nous laissons tarir les sources vives de la Réforme. Et puis, une personna
115 tendance calviniste, est appelée à figurer, dans notre siècle, le type même de la sûre doctrine de résistance au paganisme p
116 ine de résistance au paganisme politique 11. Ceci nous charge d’une responsabilité devant l’Histoire. Que devons-nous faire
117 harge d’une responsabilité devant l’Histoire. Que devons -nous faire pour nous montrer à peu près dignes de cette mission ? Sim
118 ’une responsabilité devant l’Histoire. Que devons- nous faire pour nous montrer à peu près dignes de cette mission ? Simpleme
119 ité devant l’Histoire. Que devons-nous faire pour nous montrer à peu près dignes de cette mission ? Simplement, mais aussi r
120 e de l’esprit totalitaire. Déjà, beaucoup d’entre nous ont repris au sérieux la théologie réformée. Il nous reste à prendre
121 s ont repris au sérieux la théologie réformée. Il nous reste à prendre au sérieux la doctrine réformée de l’homme et de l’Ét
122 programme comme tant d’autres, mais bien qu’elle doit marquer en toute clarté certaines limites, et, d’autre part, qu’elle
123 é certaines limites, et, d’autre part, qu’elle ne doit pas hésiter à appuyer certaines revendications conformes au Décalogue
124 Décalogue et à l’esprit de l’Évangile. Tout cela doit rester « occasionnel », mais dans le sens du hic et nunc chrétien. Or
125 c chrétien. Or il se trouve qu’ici et maintenant, notre situation ressemble fort à celle qu’eut à résoudre la Réforme. Calvin
126 ’une position non point centriste, mais centrale. Nous de même, reprenons le combat contre l’esprit collectiviste, mais auss
127 viations humanistes de la personne : transformons nos démocraties individualistes en démocraties vraiment personnalistes. E
128 oublions jamais que l’ennemi qui se dresse devant nous , c’est en nous tout d’abord que nous devons le vaincre, chez nous, pa
129 que l’ennemi qui se dresse devant nous, c’est en nous tout d’abord que nous devons le vaincre, chez nous, par une espèce de
130 resse devant nous, c’est en nous tout d’abord que nous devons le vaincre, chez nous, par une espèce de croisade intérieure.
131 devant nous, c’est en nous tout d’abord que nous devons le vaincre, chez nous, par une espèce de croisade intérieure. Le chré
132 ous tout d’abord que nous devons le vaincre, chez nous , par une espèce de croisade intérieure. Le chrétien est celui qui n’a
133 cœur. Alors seulement, purifiés et lucides, quand nous aurons repris conscience de notre force véritable, celle qui ne vient
134 t lucides, quand nous aurons repris conscience de notre force véritable, celle qui ne vient pas de nous, de nos « personnalit
135 notre force véritable, celle qui ne vient pas de nous , de nos « personnalités », mais de nos vocations, de nos personnes, a
136 rce véritable, celle qui ne vient pas de nous, de nos « personnalités », mais de nos vocations, de nos personnes, alors seu
137 nt pas de nous, de nos « personnalités », mais de nos vocations, de nos personnes, alors seulement nous pourrons répéter la
138 nos « personnalités », mais de nos vocations, de nos personnes, alors seulement nous pourrons répéter la fière devise des
139 nos vocations, de nos personnes, alors seulement nous pourrons répéter la fière devise des vieux huguenots : « Tant plus à
3 1940, Mission ou démission de la Suisse. La bataille de la culture
140 a situation devient sérieuse. Or le fait même que nous éprouvions tous un doute sur l’opportunité d’une conférence en temps
141 e guerre, ce fait est significatif. Il prouve que nous tenons la culture pour quelque chose d’un peu moins sérieux que l’act
142 ire bataille de la culture. L’adversaire est en nous S’il y a bataille, c’est donc qu’il y a deux adversaires. Quels so
143 ifle ne vaut rien pour la guerre. » Grâce à Dieu, nous sommes encore neutres, et nous avons encore le droit de ne pas nous l
144 e. » Grâce à Dieu, nous sommes encore neutres, et nous avons encore le droit de ne pas nous livrer à ce genre de simplificat
145 neutres, et nous avons encore le droit de ne pas nous livrer à ce genre de simplifications brutales. Notre premier devoir m
146 us livrer à ce genre de simplifications brutales. Notre premier devoir me paraît, au contraire, de défendre l’intelligence co
147 genre de simplifications brutales. Notre premier devoir me paraît, au contraire, de défendre l’intelligence contre un certain
148 l’adversaire, est devant eux, à l’extérieur. Or, notre civilisation, sous l’influence du christianisme, s’est efforcée de no
149 s l’influence du christianisme, s’est efforcée de nous faire comprendre que la vraie cause de nos malheurs est presque toujo
150 ée de nous faire comprendre que la vraie cause de nos malheurs est presque toujours en nous-mêmes. Il faut reconnaître, hél
151 cette éducation n’a pas merveilleusement réussi. Nous persistons tous, plus ou moins, dans la manie des primitifs : nous re
152 ous, plus ou moins, dans la manie des primitifs : nous rendons responsables de nos maux — les autres, uniquement les autres,
153 anie des primitifs : nous rendons responsables de nos maux — les autres, uniquement les autres, ceux d’un autre parti, ceux
154 , ceux d’un autre parti, ceux d’une autre nation… Nous faisons tous comme les petits enfants qui battent la table à laquelle
155 pour mieux se blanchir soi-même. Mais en réalité, nos adversaires ne diffèrent pas essentiellement de nous. Tout homme port
156 s adversaires ne diffèrent pas essentiellement de nous . Tout homme porte en soi les microbes de presque toutes les maladies
157 outes les maladies imaginables. Et cet ennemi qui nous menace, il ne serait nullement suffisant de l’anéantir pour nous en d
158 ne serait nullement suffisant de l’anéantir pour nous en délivrer. Car la tendance qu’il personnifie à nos yeux, elle exist
159 en délivrer. Car la tendance qu’il personnifie à nos yeux, elle existe en nous aussi, et elle pourrait fort bien s’y dével
160 ance qu’il personnifie à nos yeux, elle existe en nous aussi, et elle pourrait fort bien s’y développer un jour. Pour la com
161 per un jour. Pour la combattre sérieusement, pour nous défendre, c’est en nous qu’il s’agit de l’attaquer, et avant tout, de
162 battre sérieusement, pour nous défendre, c’est en nous qu’il s’agit de l’attaquer, et avant tout, de la reconnaître14. Défen
163 4. Défendre la culture contre elle-même et contre nous  ; attaquer ses ennemis en nous ; voilà la vraie bataille dont j’enten
164 lle-même et contre nous ; attaquer ses ennemis en nous  ; voilà la vraie bataille dont j’entends vous parler. Or cet adversai
165 u’une leçon claire s’en dégage. Disharmonie de nos activités et impuissance de l’esprit Songeant à notre civilisation
166 ctivités et impuissance de l’esprit Songeant à notre civilisation moderne, je suis de plus en plus frappé par ces deux tra
167 étonnante disharmonie entre les divers ordres de nos activités — d’autre part, une angoissante impuissance de l’esprit dev
168 structure qu’un de ces discours de propagande que nous déverse la radio… Si vous passez du poème au discours, vous avez l’im
169 ux qui travailleront pour la paix. Mais l’état de notre culture est tel que l’invention sera utilisée pour détruire cette pai
170 our détruire cette paix, précisément, que le prix devait couronner. Et le chimiste pacifique verra retomber sur sa tête, sous
171 Par quelle fatalité mauvaise tous les progrès de notre science contribuent-ils à ravager la civilisation qui les produit ? V
172 t, il illustre à merveille le vice fondamental de notre société et aussi de notre culture : c’est une absence totale de vues
173 le vice fondamental de notre société et aussi de notre culture : c’est une absence totale de vues d’ensemble. Ce qui nous ma
174 est une absence totale de vues d’ensemble. Ce qui nous manque absolument, c’est un grand principe d’unité entre notre pensée
175 absolument, c’est un grand principe d’unité entre notre pensée et nos actions. Cette absence d’un principe d’unité est si tot
176 t un grand principe d’unité entre notre pensée et nos actions. Cette absence d’un principe d’unité est si totale qu’on ne l
177 ents. Il ne faut pas tout mélanger… Et, en effet, nous mélangeons de moins en moins notre pensée à notre action. L’impuissan
178 … Et, en effet, nous mélangeons de moins en moins notre pensée à notre action. L’impuissance de la pensée sur la conduite gén
179 nous mélangeons de moins en moins notre pensée à notre action. L’impuissance de la pensée sur la conduite générale des affai
180 on finit par ne plus les voir. Il est admis, dans notre société, que les hommes de la pensée n’ont rien à dire d’utile aux ho
181 soins de l’action, du haut en bas de l’échelle de nos occupations. Tout le monde trouve parfaitement naturel de cesser d’ac
182 iver de dessert. Oui, la culture est devenue pour nous quelque chose comme une friandise. Elle n’est plus un pain quotidien.
183 ir, si les critiques même les plus perspicaces de notre temps sont autant de cris dans le désert, alors ? Laissons les choses
184 candale, je la vois condamnée à glisser, comme la nôtre , dans un désordre dont la guerre sera toujours le seul aboutissement.
185 sable de ce divorce entre la main et le cerveau ? Nous voyons bien où il nous a menés. Essayons de voir d’où il vient. Il y
186 re la main et le cerveau ? Nous voyons bien où il nous a menés. Essayons de voir d’où il vient. Il y a des causes matérielle
187 s, d’abord, qui peuvent dans une certaine mesure, nous excuser. Les plus marquantes se situent au début du siècle passé. Le
188 nes. L’invention des machines a brusquement accru nos possibilités d’action sur la matière. L’industrie et le commerce ont
189 entière. Voici donc, dans tous les domaines, que nos pouvoirs d’agir matériellement grandissent, par une mutation brusque
190 en n’est à la mesure de l’homme individuel. Quand nous regardons en arrière, nous nous disons : les intellectuels auraient d
191 omme individuel. Quand nous regardons en arrière, nous nous disons : les intellectuels auraient dû faire à ce moment-là un f
192 individuel. Quand nous regardons en arrière, nous nous disons : les intellectuels auraient dû faire à ce moment-là un formid
193 re, nous nous disons : les intellectuels auraient faire à ce moment-là un formidable effort de mise en ordre ; ils aura
194 formidable effort de mise en ordre ; ils auraient être saisis tout à la fois d’angoisse et d’enthousiasme devant ce mon
195 hommes d’action. Ils avaient là une chance et un devoir vital. Or, ils ont perdu cette chance. Ils n’ont pas vu le danger, il
196 , ils ont eu peur de le prévoir. Et c’est ici que nous allons découvrir le grand ennemi intime de la culture, c’est chez les
197 rituels de la cité. Bien sûr, ils n’ont pas dit : notre pensée, à partir d’aujourd’hui, renonce à agir, mais ils ont dit : la
198 ésintéressement scientifique. Ils n’ont pas dit : nous ne voulons plus rien faire d’utile, mais ils ont dit : on ne peut plu
199 sort de ces masses humaines rassemblées ? Primo : notre esprit est trop distingué et délicat pour agir sur ces faits ; secund
200 rxisme, au contraire, décrit avec une sombre joie notre absence de liberté, toutes les fatalités économiques qui, selon lui,
201 es fatalités économiques qui, selon lui, dominent nos croyances intimes. Mais cela revient au même : car si tout est déterm
202 e pour les autres, elle n’est jamais au niveau de notre action. S’il fallait résumer rapidement les caractères généraux par l
203 solitaires, personne ne sut ou n’osa voir à quoi devait conduire le Progrès, abandonné à son mouvement fatal. Le développemen
204 r, en réalité, rien ne s’est arrangé. Et voici où nous rejoignons le temps présent. Dans une cité où la culture n’a plus en
205 n et de la guerre qui imposent leurs nécessités à notre pensée impuissante. Quand la culture ne domine plus l’action, c’est l
206 mesure d’une civilisation : c’est le principe qui doit harmoniser toutes les activités d’une société donnée. Dans la cité gr
207 ste qu’un seul principe pour mesurer la valeur de nos actes : c’est l’Argent. Et quand il n’y a plus d’argent : c’est la mi
208 le symbole de toute culture, c’est le langage. Or nous assistons aujourd’hui à une extraordinaire décadence du langage, en t
209 vie sociale du siècle. Que sont-ils devenus parmi nous  ? Prenons trois mots parmi les plus fréquents dans les discours et le
210 plus fréquents dans les discours et les écrits de notre époque : esprit, liberté et ordre. Je constate que le mot esprit a dé
211 éfinis. Ce qui est grave, c’est qu’à ces 29 sens, nous en avons ajouté d’autres sur lesquels plus personne ne s’entend. Tout
212 e furent les écrivains. Mais que peuvent-ils dans notre monde démesuré ? Un Valéry, un Gide ou un Claudel ont quelques millie
213 rands lieux communs chargés de sens traditionnel, nous aurons des slogans, des mots d’ordre simplistes. Et l’on pourra chang
214 ty-Dumpty, qui est le plus fort… et c’est tout. » Nous en sommes exactement là : c’est le plus fort qui définit le sens des
215 est en désordre ? ont-ils dit. C’est bien simple. Nous allons proclamer que l’intérêt de l’État dont nous sommes devenus les
216 ous allons proclamer que l’intérêt de l’État dont nous sommes devenus les maîtres est la seule règle de toute activité, cult
217 nner une réponse qui ne soit pas vraiment totale. Nous connaissons les résultats d’une pareille faute, nous ne cessons d’y p
218 s connaissons les résultats d’une pareille faute, nous ne cessons d’y penser ce soir. L’appel des peuples reste insatisfait
219 ppel des peuples reste insatisfait. Il continue à nous poser la plus sérieuse question humaine. Et s’il n’est pas encore aus
220 ys moins menacés par la misère, comme par exemple nos petits états neutres, ne nous faisons pas d’illusions : tôt ou tard,
221 e, comme par exemple nos petits états neutres, ne nous faisons pas d’illusions : tôt ou tard, là aussi, cet appel exigera un
222 cet appel exigera une réponse. Reste à savoir si nous saurons la lui donner. Reste à savoir si nous saurons utiliser le dél
223 si nous saurons la lui donner. Reste à savoir si nous saurons utiliser le délai qui nous est accordé, à nous les neutres, p
224 te à savoir si nous saurons utiliser le délai qui nous est accordé, à nous les neutres, pour découvrir les vraies causes du
225 saurons utiliser le délai qui nous est accordé, à nous les neutres, pour découvrir les vraies causes du mal, et par suite, l
226 re ces remèdes, mais surtout pour les essayer sur nous d’abord. Car nous aussi, je le répète, nous sommes atteints ! À la
227 is surtout pour les essayer sur nous d’abord. Car nous aussi, je le répète, nous sommes atteints ! À la recherche de l’ho
228 r sur nous d’abord. Car nous aussi, je le répète, nous sommes atteints ! À la recherche de l’homme réel J’aime employe
229 eul et aux pouvoirs de son esprit. Et de là vient notre désordre mais aussi, notre impuissance à en sortir, malgré toutes nos
230 esprit. Et de là vient notre désordre mais aussi, notre impuissance à en sortir, malgré toutes nos bonnes intentions. Sur que
231 ssi, notre impuissance à en sortir, malgré toutes nos bonnes intentions. Sur quel principe pourrions-nous rebâtir un monde
232 os bonnes intentions. Sur quel principe pourrions- nous rebâtir un monde qui soit vraiment à hauteur d’homme ? Un monde où la
233 gir ? Et quelle est l’attitude de pensée qui peut nous orienter dès à présent vers une communauté solide et pourtant libéral
234 t vient de là, et tout dépend en premier lieu, de notre état d’esprit. S’il change, tout commence à changer. S’il ne change p
235 mme. Dans ce monde qui a perdu la mesure, le seul devoir des intellectuels, et j’ajouterai : leur seul pouvoir — c’est donc de
236 t donc de rechercher l’homme perdu. Or l’histoire nous apprend que l’homme ne trouve sa pleine réalité et sa mesure qu’au se
237 avaient surtout des droits légaux, et très peu de devoirs naturels. L’individu rationaliste, c’était un homme in abstracto, pri
238 aturelle. Et alors se produit le phénomène auquel nous avons assisté depuis une trentaine d’années. L’homme isolé, dans un m
239 gnétiseur venu. Et alors, d’un coup de balancier, nous nous trouvons portés à l’autre pôle, qui est le pôle collectiviste. T
240 seur venu. Et alors, d’un coup de balancier, nous nous trouvons portés à l’autre pôle, qui est le pôle collectiviste. Toute
241 elle une puissante réaction collective. Sortirons- nous jamais de cette dialectique, dont les phases et les renversements men
242 l s’agit de résoudre enfin l’éternel problème que nous posent les relations de l’individu et de la collectivité. Il s’agit d
243 été résolu, cet idéal réalisé, au ier siècle de notre ère, par les communautés de l’Église primitive. Le chrétien primitif
244 ar sa vocation. Eh bien, je dis que les maux dont nous souffrons sont avant tout des maladies de la personne. Quand l’homme
245 et homme réel qu’il faut tout rebâtir. Cependant, nous avons montré que c’est justement cet homme-là qui a le plus de peine
246 sa vocation personnelle. Voici donc le dilemme où nous placent la culture actuelle et le monde actuel : ou bien tu veux rest
247 é les phénomènes que l’on observe. Et les savants nous disent aujourd’hui que les fameuses lois scientifiques ne sont en fai
248 l’esprit humain. Or si la science elle-même vient nous dire que même dans l’ordre matériel, il n’est plus permis de concevoi
249 impartiale, à combien plus forte raison pourrons- nous dénoncer l’illusion des historiens et sociologues qui prétendaient dé
250 ndaient décrire objectivement les lois rigides de notre société. En vérité, il n’est de lois fatales que là où l’esprit démi
251 . Prenons le domaine de l’histoire, par exemple. Nous y voyons s’opérer depuis peu une critique générale de l’illusion déte
252 randt qu’aux modèles qui posaient devant lui. Ils nous décrivent le regard d’un génie, bien plus que la réalité en soi. De m
253 en soi. De même pour l’histoire fataliste : elle nous décrit son propre esprit de démission, et non pas des fatalités objec
254 eur pour la pensée et la culture en général, dans notre époque totalitaire. Nul n’ignore, en effet, que les États totalitaire
255 lopper soi-même une énergie normale et souple. Or nous savons maintenant que c’est possible, que c’est encore et de nouveau
256 ossible, que c’est encore et de nouveau possible. Notre culture libérée de la superstition des lois fatales peut envisager de
257 tenant comme un programme de parti politique. Ils doivent mûrir, et lentement se dégager de l’ensemble de mille efforts orienté
258 tous animés de cet esprit d’équipe qui seul peut nous guérir de l’individualisme, tout en prévenant la maladie collectivist
259 t, que je vois la commune mesure de la cité qu’il nous faut rebâtir. Cité solide et pourtant libérale : c’est tout le problè
260 la plus antisuisse de l’histoire. C’est donc pour nous la pire menace. Mais en même temps, la plus belle promesse ! Maintena
261 puisque l’autre aboutit à la guerre. Ce n’est pas notre orgueil qui l’imagine, ce sont les faits qui nous obligent à le recon
262 otre orgueil qui l’imagine, ce sont les faits qui nous obligent à le reconnaître avec une tragique évidence. Et c’est cela q
263 tre avec une tragique évidence. Et c’est cela que nous avons à défendre en défendant notre patrie : la réalité fédéraliste e
264 c’est cela que nous avons à défendre en défendant notre patrie : la réalité fédéraliste en politique et dans tous les domaine
265 ou d’idéalisme. Il s’agit de voir qu’en fait, si nous sommes là, au service du pays, ce n’est pas pour défendre des « froma
266 des « fromages », des conseils d’administration, notre confort et nos hôtels. D’autres — on sait qui — feraient marcher tout
267 , des conseils d’administration, notre confort et nos hôtels. D’autres — on sait qui — feraient marcher tout cela aussi bie
268 t qui — feraient marcher tout cela aussi bien que nous — peut-être mieux ! Ce n’est pas non plus, comme le disait fort bien
269 mme le disait fort bien Karl Barth, pour protéger nos « lacs d’azur » et nos « glaciers sublimes ». (Certain ministre de la
270 Karl Barth, pour protéger nos « lacs d’azur » et nos « glaciers sublimes ». (Certain ministre de la propagande se chargera
271 ès volontiers de cette œuvre de Heimatschutz.) Si nous sommes là, c’est pour exécuter la mission dont nous sommes responsabl
272 us sommes là, c’est pour exécuter la mission dont nous sommes responsables depuis des siècles, depuis les temps du Saint-Emp
273 s des siècles, depuis les temps du Saint-Empire : notre mission vis-à-vis de l’Europe. Nous sommes chargés de la défendre con
274 int-Empire : notre mission vis-à-vis de l’Europe. Nous sommes chargés de la défendre contre elle-même, de garder son trésor,
275 d’affirmer sa santé, et de sauver son avenir. Si nous trahissons cette mission, si nous n’en prenons pas conscience, alors
276 son avenir. Si nous trahissons cette mission, si nous n’en prenons pas conscience, alors seulement j’aurais des craintes sé
277 rs seulement j’aurais des craintes sérieuses pour notre indépendance nationale. Mais pourquoi les trahirions-nous ? Toute not
278 épendance nationale. Mais pourquoi les trahirions- nous  ? Toute notre tradition civique et culturelle nous y prépare, nous a
279 ionale. Mais pourquoi les trahirions-nous ? Toute notre tradition civique et culturelle nous y prépare, nous a dressés pour l
280 ous ? Toute notre tradition civique et culturelle nous y prépare, nous a dressés pour l’accomplir. On parle un peu partout d
281 e tradition civique et culturelle nous y prépare, nous a dressés pour l’accomplir. On parle un peu partout de fédérer l’Euro
282 et travailler que dans les pays neutres. Et chez nous tout d’abord, puisqu’il s’agit en somme d’utiliser notre expérience,
283 out d’abord, puisqu’il s’agit en somme d’utiliser notre expérience, et de tirer des leçons non pas seulement de ses succès ma
284 ement de ses succès mais aussi de ses échecs, que nous connaissons mieux que personne. Tout mon espoir est qu’il se forme ic
285 qui comprennent enfin que l’heure est venue, pour nous autres Suisses, de voir grand, de voir aux proportions de l’Europe mo
286 de l’Europe moderne, tout en gardant la mesure de notre histoire, la mesure de l’individu engagé dans la communauté. Cette œu
287 r je me refuse à nommer utopie le seul espoir qui nous soit accordé. Encore faut-il que cet espoir soit soutenu par tout un
288 ns terrestres. En appelant et préparant de toutes nos forces une Europe fédéralisée, nous ne demanderons pas un paradis sur
289 rant de toutes nos forces une Europe fédéralisée, nous ne demanderons pas un paradis sur terre. Nous demanderons simplement
290 ée, nous ne demanderons pas un paradis sur terre. Nous demanderons simplement un monde humain. Non pas un monde d’utopie où
291 Le matin vient, et la nuit aussi ! » La paix que nous devons invoquer ne peut pas être une simple absence de guerre. Spirit
292 atin vient, et la nuit aussi ! » La paix que nous devons invoquer ne peut pas être une simple absence de guerre. Spirituelleme
293 re où tout s’abaisse et s’obscurcit. Mais qu’elle nous donne au moins la possibilité de rendre un sens aux conflits éternels
294 nt pas le temps de préparer un monde humain. Mais nous qui avons encore su conserver une cité à la mesure de la personne, no
295 su conserver une cité à la mesure de la personne, nous qui sommes encore épargnés, ne perdons pas notre délai de grâce ! C’e
296 , nous qui sommes encore épargnés, ne perdons pas notre délai de grâce ! C’est à nous de gagner la vraie paix, c’est à nous d
297 és, ne perdons pas notre délai de grâce ! C’est à nous de gagner la vraie paix, c’est à nous d’engager sans illusion le vrai
298 e ! C’est à nous de gagner la vraie paix, c’est à nous d’engager sans illusion le vrai combat qui nous maintienne humains. T
299 à nous d’engager sans illusion le vrai combat qui nous maintienne humains. Tout cela, un jeune poète de génie, Arthur Rimbau
300 e faire en septembre 1939 le manifeste intitulé «  Nous sommes tous coupables ». Je veux dire ceci : nous sommes coupables da
301 Nous sommes tous coupables ». Je veux dire ceci : nous sommes coupables dans la mesure où nous ne condamnons pas en nous aus
302 re ceci : nous sommes coupables dans la mesure où nous ne condamnons pas en nous aussi, et en nous d’abord, la mentalité tot
303 ables dans la mesure où nous ne condamnons pas en nous aussi, et en nous d’abord, la mentalité totalitaire. 15. Il serait j
304 re où nous ne condamnons pas en nous aussi, et en nous d’abord, la mentalité totalitaire. 15. Il serait juste d’ajouter ici
4 1940, Mission ou démission de la Suisse. Neutralité oblige, (1937)
305 e, dans un pays où tant de choses vont de soi. Il nous faut un homme comme Ramuz pour nous tirer de l’optimisme épais où s’e
306 nt de soi. Il nous faut un homme comme Ramuz pour nous tirer de l’optimisme épais où s’endorment les jeunes Suisses, trop as
307 gros bol de café au lait. Qu’on m’entende bien : nous avons eu Amiel, et nous ne manquons pas de douteurs, de tourmentés, d
308 t. Qu’on m’entende bien : nous avons eu Amiel, et nous ne manquons pas de douteurs, de tourmentés, de refoulés et d’hésitant
309 inquiétudes se limitent au « plan moral », comme nous aimons à dire. Elles sont d’usage interne, individuel. Les doutes que
310 d’usage interne, individuel. Les doutes que Ramuz nous propose touchent au contraire les fondements mêmes de notre vie dans
311 ose touchent au contraire les fondements mêmes de notre vie dans la cité, de notre existence comme « Suisses ». Ils affectent
312 es fondements mêmes de notre vie dans la cité, de notre existence comme « Suisses ». Ils affectent nos tabous les plus inébra
313 notre existence comme « Suisses ». Ils affectent nos tabous les plus inébranlés, nos sécurités matérielles, ou sociales, o
314  ». Ils affectent nos tabous les plus inébranlés, nos sécurités matérielles, ou sociales, ou nationales. Ce que personne n’
315 n’a jamais eu l’idée de mettre en question parmi nous . Par exemple, demande Ramuz : Avons-nous autre chose à dire que propr
316 on parmi nous. Par exemple, demande Ramuz : Avons- nous autre chose à dire que propreté, confort et instruction ? Avons-nous
317 dire que propreté, confort et instruction ? Avons- nous d’autre but commun que la sécurité et le profit ? Pourquoi sommes-nou
318 un que la sécurité et le profit ? Pourquoi sommes- nous confédérés ? Et pourquoi, enfin, sommes-nous neutres ? Je voudrais so
319 mmes-nous confédérés ? Et pourquoi, enfin, sommes- nous neutres ? Je voudrais souligner ceci : que c’est aux Suisses, finalem
320 s’il garde en même temps le souci d’expliquer qui nous sommes à nos voisins, c’est peut-être que notre lot, en tant que Suis
321 même temps le souci d’expliquer qui nous sommes à nos voisins, c’est peut-être que notre lot, en tant que Suisses, et non e
322 ui nous sommes à nos voisins, c’est peut-être que notre lot, en tant que Suisses, et non en tant que Vaudois, ou Genevois, ou
323 ue c’est à peu près l’idéal que Keyserling juge à notre mesure, celui du tenancier du grand palace. (Ramuz, plus dur, parle d
324 toujours fausse dans le fait. Mais on peut et on doit concevoir une tout autre forme d’existence qui serait « en fonction d
325 ue nul autre n’a reçue. La Suisse existe-t-elle ? nous demande Ramuz. Cela revient à dire : a-t-elle une raison d’être ? J’e
326 ent que c’est la question qui ne se pose pas. Que nous le voulions ou non, notre neutralité caractérise non seulement notre
327 qui ne se pose pas. Que nous le voulions ou non, notre neutralité caractérise non seulement notre rôle politique en Europe,
328 u non, notre neutralité caractérise non seulement notre rôle politique en Europe, mais encore notre mentalité par rapport aux
329 ement notre rôle politique en Europe, mais encore notre mentalité par rapport aux pays voisins. Or il faut bien avouer, dès l
330 ue par ses soi-disant bénéficiaires. Hors de chez nous , l’on pense généralement : la Suisse tire son épingle du jeu. Neutral
331 itions mesquines. Cela n’augmente pas précisément notre prestige. Chez nous, l’on considère volontiers que la neutralité nous
332 a n’augmente pas précisément notre prestige. Chez nous , l’on considère volontiers que la neutralité nous est due, comme l’ai
333 nous, l’on considère volontiers que la neutralité nous est due, comme l’air et les beautés de la nature. Privilège inconditi
334 n considère volontiers que la neutralité nous est due , comme l’air et les beautés de la nature. Privilège inconditionnel, n
335 s beautés de la nature. Privilège inconditionnel, nous laissant au surplus le droit de faire la leçon à toute l’Europe dans
336 ire la leçon à toute l’Europe dans les leaders de nos journaux. Et cela ne contribue guère à nous donner un sens actif de n
337 ers de nos journaux. Et cela ne contribue guère à nous donner un sens actif de nos chances et de nos destins, dans une époqu
338 ne contribue guère à nous donner un sens actif de nos chances et de nos destins, dans une époque où des choses plus ancienn
339 à nous donner un sens actif de nos chances et de nos destins, dans une époque où des choses plus anciennes et plus grandes
340 où des choses plus anciennes et plus grandes que notre statut se trouvent remises en discussion, bouleversées, brutalement n
341 du, il faudra bien sortir un jour. Les événements nous y obligeront si nous ne savons pas les prévenir. Si nous nous refuson
342 rtir un jour. Les événements nous y obligeront si nous ne savons pas les prévenir. Si nous nous refusons à voir, à dire, à i
343 obligeront si nous ne savons pas les prévenir. Si nous nous refusons à voir, à dire, à illustrer, à incarner aux yeux de tou
344 eront si nous ne savons pas les prévenir. Si nous nous refusons à voir, à dire, à illustrer, à incarner aux yeux de tous les
345 aux yeux de tous les grandes et fortes raisons de notre neutralité, celle-ci sera balayée un jour prochain avec les vieux chi
346 pier qui sont censés la garantir. Quand bien même nous aurions voté des milliards de crédits d’armement, et des mesures d’in
347 pourra jamais remplacer, pour un petit pays comme le nôtre , la conscience de sa raison d’être, et le prestige qui s’y attache. O
348 e qui s’y attache. On croit souvent, surtout chez nous , qu’un petit pays a, comme tel, l’obligation de rester neutre. D’où l
349 tions contre l’Italie : premier avertissement que nous donnaient les faits d’avoir à repenser notre neutralité dans le cadre
350 t que nous donnaient les faits d’avoir à repenser notre neutralité dans le cadre nouveau de l’Europe. Il est fatal que ces di
351 itorialité dont jouit la Suisse sur le continent, nous le voyons, lui aussi, se transformer d’année en année. Et nous voyons
352 s, lui aussi, se transformer d’année en année. Et nous voyons que lui aussi dépend d’un équilibre spirituel18 totalement bou
353 é et réorganisé, au sein duquel il est urgent que nous trouvions une place nettement redéfinie. Bref, tout nous pousse à un
354 ouvions une place nettement redéfinie. Bref, tout nous pousse à un réveil de notre conscience fédérale. Tout nous met au déf
355 redéfinie. Bref, tout nous pousse à un réveil de notre conscience fédérale. Tout nous met au défi d’agrandir cette conscienc
356 se à un réveil de notre conscience fédérale. Tout nous met au défi d’agrandir cette conscience aux proportions nouvelles des
357 mystiques » qui régissent l’Europe d’aujourd’hui. Notre chance et nos risques sont là. La mission essentielle de la Suisse es
358 régissent l’Europe d’aujourd’hui. Notre chance et nos risques sont là. La mission essentielle de la Suisse est une mission
359 eltanschauung où les droits du particulier et les devoirs envers l’ensemble se fécondent mutuellement19. Cette conception du mo
360 être définie à l’échelle de l’Europe : la Suisse doit être la gardienne de ce principe central, fédératif ; et elle ne peut
361 r ce qui est mesquin. Car ce qui est mesquin chez nous , n’est en fait qu’une dégradation de l’idéal qui devrait nous unir. L
362 , n’est en fait qu’une dégradation de l’idéal qui devrait nous unir. La devise des Suisses : « Un pour tous, tous pour un », c’
363 en fait qu’une dégradation de l’idéal qui devrait nous unir. La devise des Suisses : « Un pour tous, tous pour un », c’est l
364 ardienne du principe commun que la Suisse peut et doit maintenant revendiquer face à l’Europe son droit à la neutralité. Ell
365 21. ⁂ De cette mission qui justifie en même temps notre statut européen de neutralité et notre statut intérieur de confédérat
366 même temps notre statut européen de neutralité et notre statut intérieur de confédération de cantons, découlent des conséquen
367 mée. 1. L’opinion suisse, telle que la traduisent nos journaux est en contradiction fréquente avec notre neutralité, et ce
368 nos journaux est en contradiction fréquente avec notre neutralité, et ce qui est pire, avec la mission même qui justifie cet
369 de fermeté ou ces protestations intempestives que nous prodiguons chaque jour aux « nationaux » de tel pays ou aux « rouges 
370 ation bien définie et de portée européenne. Quand nos journaux font la leçon à Léon Blum22, ce n’est pas — comme ce pourrai
371 ux. La même critique peut d’ailleurs s’adresser à notre presse d’extrême gauche lorsqu’elle défend le même Léon Blum pour des
372 ent inverses, et par suite non moins étrangères à notre ligne fédérale. Quand nous verrons nos grands journaux se préoccuper
373 on moins étrangères à notre ligne fédérale. Quand nous verrons nos grands journaux se préoccuper de juger ce qui se passe ch
374 ngères à notre ligne fédérale. Quand nous verrons nos grands journaux se préoccuper de juger ce qui se passe chez nos voisi
375 rnaux se préoccuper de juger ce qui se passe chez nos voisins non plus au nom de la droite française ou de la gauche allema
376 ande émigrée, mais au nom du principe fédéral que nous avons à incarner, on pourra dire que la Suisse a retrouvé sa raison d
377 us violemment centralistes, les plus contraires à nos statuts ! Nous ne pourrions en tirer qu’une seule leçon : les fascism
378 centralistes, les plus contraires à nos statuts ! Nous ne pourrions en tirer qu’une seule leçon : les fascismes se donnent p
379 ce est là, et qu’en les admirant, en les enviant, nous sommes précisément en train de perdre ce qu’ils ont retrouvé : le sen
380 e à l’étranger reposait justement sur le fait que nous étions seuls à juger dans une perspective européenne. (Nos trois cult
381 s seuls à juger dans une perspective européenne. ( Nos trois cultures nous y préparaient, nous y contraignaient même en quel
382 s une perspective européenne. (Nos trois cultures nous y préparaient, nous y contraignaient même en quelque mesure.) Mais un
383 ropéenne. (Nos trois cultures nous y préparaient, nous y contraignaient même en quelque mesure.) Mais une presse suisse part
384 st plus qu’une presse d’intérêt local. Là encore, nos chances sont uniques, nous pourrions être les premiers. Mais à cette
385 térêt local. Là encore, nos chances sont uniques, nous pourrions être les premiers. Mais à cette seule condition : de savoir
386 cette seule condition : de savoir au nom de quoi nous parlons. Et ce ne peut être qu’au nom de l’avenir de l’Europe, puisqu
387 m de l’avenir de l’Europe, puisque c’est cela que nous sommes dès maintenant. 2. La culture. Je ne l’envisagerai ici que sou
388 l’envisagerai ici que sous l’angle particulier de nos responsabilités comme neutres. Ramuz insiste avec raison sur le fait
389 eutres. Ramuz insiste avec raison sur le fait que nous n’avons pas une culture nationale unifiée, mais des cultures diversif
390 ionales ou étrangères. Une fois de plus, c’est là notre chance. Mais savons-nous l’utiliser ? Il y faudrait une conscience tr
391 fois de plus, c’est là notre chance. Mais savons- nous l’utiliser ? Il y faudrait une conscience très forte de la réalité fé
392 vient à faiblir, quand par exemple on se met chez nous à l’école de la droite française et de sa politique particulière cond
393 els à l’endroit de ce qui est « germanique » dans notre vie confédérale. Réaction de faiblesse, et néfaste à un double titre.
394 sse, et néfaste à un double titre. Car d’une part nous y perdons ce qui fait notre valeur propre dans la culture de langue f
395 titre. Car d’une part nous y perdons ce qui fait notre valeur propre dans la culture de langue française ; et d’autre part,
396 culture de langue française ; et d’autre part, en nous refusant aux contacts et aux échanges, nous perdons la meilleure occa
397 t, en nous refusant aux contacts et aux échanges, nous perdons la meilleure occasion de prendre conscience de nous-mêmes, et
398 casion de prendre conscience de nous-mêmes, et de nos singularités sinon latines, du moins romanes. On se découvre en s’opp
399 à corps. Croit-on que Ramuz eût écrit ce Chant de notre Rhône, si « roman », sans le voisinage germanique qui l’a contraint à
400 ment tenté et enrichi par le génie du Rhin ? Pour nous qui n’avons pas les mêmes raisons de construire des Bastions de l’Est
401 rpétuelle de n’aboutir qu’à des mélanges bâtards. Notre unité existe, mais sur un plan à la fois plus élevé et plus vaste que
402 nale, des diversités de l’Europe, symbolisées par nos quatre langues, nos deux religions, nos vingt-cinq républiques. Et su
403 de l’Europe, symbolisées par nos quatre langues, nos deux religions, nos vingt-cinq républiques. Et surtout qu’on ne déplo
404 isées par nos quatre langues, nos deux religions, nos vingt-cinq républiques. Et surtout qu’on ne déplore pas le fait que l
405 e : un microcosme des valeurs que les nations qui nous entourent ont illustrées l’une après l’autre, mais n’ont pas pu synth
406 poésie ou la philosophie. Et peut-être ne serons- nous jamais aussi grands qu’aucune d’entre elles dans aucun de ces domaine
407 s dans aucun de ces domaines particuliers24. Mais notre grandeur est ailleurs : elle est dans l’harmonie intime, ou dans l’op
408 vocations spéciales d’autres nations. Et c’est là notre vocation. Neutralité, sur le plan culturel, ce n’est pas mélange, ni
409 forcément cela. C’est au contraire (ou plutôt ce doit être) un combat perpétuel, exaltant, le battement du cœur de l’Europe
410 ir créer une « culture suisse », ce serait trahir notre mission, ce serait le péché même d’idolâtrie qui consiste dans son pr
411 èbre. Et pourquoi n’irais-je pas jusqu’à dire que notre grandeur culturelle est de n’avoir pas de culture suisse, mais seulem
412 uisse, mais seulement une culture européenne ? On nous a donné par-dessus un Jérémie Gotthelf et un Ramuz. Ceux-là ne sont E
413 Lausanne des beaux esprits cosmopolites, tel que nous l’ont décrit Gibbon et le marquis de Boufflers. Avec le xixe , la Sui
414 lle culture européenne25. Je ne vois pas pourquoi nous douterions d’une tradition que tout nous pousse à continuer, et qui,
415 pourquoi nous douterions d’une tradition que tout nous pousse à continuer, et qui, je le crois, n’a pas encore réalisé ses p
416 n’a pas encore réalisé ses possibilités extrêmes. Nous avons le goût du moyen, c’est entendu, et je l’accorde à Ramuz, et je
417 tion unique. Au niveau de l’instruction publique, nous étouffons dans le moyen ; mais au niveau de la vraie culture, nous po
418 ns le moyen ; mais au niveau de la vraie culture, nous pouvons être les moyens de la grandeur future de l’Europe. (Il y a là
419 d’une garde, et par là même, elle est conforme à notre vocation profonde. Garde montée autour des cols, dirait Liehburg ; mi
420 les écoles militaires. Oui, c’est bien là ce que doit être une armée consciente de son rôle de garde neutre. Il s’agit que
421 e vivace. Que l’armée soit proche du peuple, cela doit avoir pour effet idéal de « civiliser » la milice et non de militaris
422 siasme entretenu autour de ce que l’on nomme chez nous « le militaire », ne saurait être légitime qu’à proportion du sens pr
423 sens profond des raisons d’être de la Suisse dont nous témoignons par ailleurs. N’allons pas croire que pour être un bon Sui
424 soldat ! Car on ne peut être un bon soldat, chez nous , que si d’abord on prouve que l’on est un bon Suisse. Après tout, not
425 on prouve que l’on est un bon Suisse. Après tout, notre armée n’est qu’un aspect de notre défense fédérale. Et un aspect subo
426 se. Après tout, notre armée n’est qu’un aspect de notre défense fédérale. Et un aspect subordonné. Si l’on néglige à son prof
427 d’ailleurs que les armes matérielles soient pour nous une défense suffisante27. Je vois bien qu’elles sont nécessaires. Mai
428 nsacré à leur acquisition, on pourrait apporter à nos institutions de haute culture, à nos savants, artistes ou écrivains,
429 t apporter à nos institutions de haute culture, à nos savants, artistes ou écrivains, les moyens d’assurer au pays un prest
430 s d’assurer au pays un prestige international qui nous donnerait peut-être davantage qu’une garantie d’autonomie : une exist
431 e raison d’être est en fin de compte spirituelle, devrait comporter normalement à côté du budget militaire, un important budget
432 Car le jour où il existera, l’on pourra dire que nos hommes politiques, si réellement représentatifs, dans ce pays, de l’o
433 ion moyenne des citoyens, ont retrouvé le sens de notre destinée, et notre chance unique de grandeur28. ⁂ Je vois ce que l’on
434 oyens, ont retrouvé le sens de notre destinée, et notre chance unique de grandeur28. ⁂ Je vois ce que l’on peut m’objecter :
435 n n’est plus vrai, et c’est très consciemment que nous opérons ce redressement urgent ! Qu’est-ce donc qu’une révolution, si
436 tir des formes existantes ? Il ne s’agit pas pour nous de « révolutionner », au sens que le bourgeois craintif prête à ce te
437 sens que le bourgeois craintif prête à ce terme. Nous partons, dans ce pays, d’un certain nombre de structures politiques e
438 parfois en fait, les « utopies » personnalistes. Nous n’avons donc pas à renverser l’ordre politique existant mais à donner
439 pitaliste, une paresse spirituelle entretenue par nos écoles, la tentation de copier nos voisins dans les mœurs politiques
440 entretenue par nos écoles, la tentation de copier nos voisins dans les mœurs politiques et dans la presse, tout cela menace
441 esse, tout cela menace et compromet non seulement nos chances à venir, mais les bases politiques et morales sur lesquelles
442 is les bases politiques et morales sur lesquelles nous pouvions compter, et la mission même de la Suisse. Tout cela tend à n
443 et la mission même de la Suisse. Tout cela tend à nous réduire à nos proportions matérielles, qui sont petites, qui sont méd
444 ême de la Suisse. Tout cela tend à nous réduire à nos proportions matérielles, qui sont petites, qui sont médiocres. J’ai c
445 ôle de presse locale. Il faut bien dire aussi que notre fédéralisme tend souvent à se réduire à l’esprit de clocher, à une li
446 plutôt qu’il ne favorise de fécondes oppositions. Notre neutralité, conçue comme une prudence, devient la pire des imprudence
447 e des imprudences au milieu de l’Europe fasciste. Notre instruction publique très développée à tous les degrés, mais fondée s
448 des inégalités favorisées et protégées30.) Seule notre économie cherche à se mettre au pas des grandes économies européennes
449 tant vanté. Autant de constatations qui dictent à notre action des objectifs immédiats. Mais avant toute action précise, il i
450 vant toute action précise, il importe de rendre à notre peuple le sens d’un destin qui le dépasse. Petit peuple chargé d’une
451 nd air de l’Europe et du monde reviendra vivifier nos pays. Il y aura de nouveau du jeu, de la passion, des communications
452 : Questions. (Note de 1940.) 18. Les guerres qui nous menacent n’opposeront pas seulement des colonnes motorisées, mais des
453 ant à la civilisation britannique, elle fut, pour nous , de la Réforme jusqu’au xixe siècle, une quatrième voisine spirituel
454 de la Suisse romande, s’entend. 24. En passant : nos grands artistes ou écrivains ont souvent dispersé leur génie dans plu
455 25. La Genève des beaux jours de la SDN semblait devoir renouveler ce rayonnement. Asile ou lieu d’élection d’Européens comme
456 comme Ferrero ou Thibaudet ; agence de liaison de nos cultures grâce à la très remarquable Revue de Genève de Robert de T
457 s internationales… Le caractère factice de la SDN devait par malheur compromettre dès le germe cette renaissance. 26. Il est
458 armée d’un état personnaliste. 27. « La Suisse a prendre au cours de ces dernières années, pour sa défense militaire e
5 1940, Mission ou démission de la Suisse. La Suisse que nous devons défendre
459 La Suisse que nous devons défendre31 Les voix que rien n’arrête Nous sommes là,
460 La Suisse que nous devons défendre31 Les voix que rien n’arrête Nous sommes là, nous so
461 ons défendre31 Les voix que rien n’arrête Nous sommes là, nous sommes prêts. Nous avons élevé autour de ce pays une
462 Les voix que rien n’arrête Nous sommes là, nous sommes prêts. Nous avons élevé autour de ce pays une barrière. Nous a
463 en n’arrête Nous sommes là, nous sommes prêts. Nous avons élevé autour de ce pays une barrière. Nous avons creusé un foss
464 Nous avons élevé autour de ce pays une barrière. Nous avons creusé un fossé. Nous avons hermétiquement fermé toutes les fis
465 ce pays une barrière. Nous avons creusé un fossé. Nous avons hermétiquement fermé toutes les fissures, et plus rien ne passe
466 plus rien ne passe ? Certes, toutes ces barrières doivent suffire, et suffiront, pour arrêter les hommes, les chars d’assaut et
467 s d’assaut et les armées d’envahissement. Certes, nous sommes matériellement en état de garder nos frontières. Mais les plus
468 tes, nous sommes matériellement en état de garder nos frontières. Mais les plus épaisses murailles ne peuvent arrêter certa
469 oix insinuantes, et dont on ne sait trop si elles nous viennent d’ailleurs, ou si elles parlent en nous-mêmes. Voix d’une an
470 nt ces parasites gênants ? Pourquoi ne tenterions- nous pas, une fois pour toutes, de déchiffrer ces messages secrets, que ri
471 saurait empêcher de passer, et qui peut-être vont nous apporter des nouvelles beaucoup moins rassurantes que les discours pa
472 du cadran sur l’un de ces endroits indéfinis d’où nous vient l’inquiétante voix. Le son s’amplifie, se précise. C’est la voi
473 e précise. C’est la voix de l’Europe moderne. Que nous dit-elle ? J’essaierai de l’interpréter. Depuis une dizaine d’années,
474 33, la face de l’Europe a changé. Il est temps de nous en rendre compte. Autrefois, et naguère encore, il suffisait à une na
475 ns la langue de l’envahisseur. Voici alors ce que nous disent ces voix européennes que rien n’arrête, et qui passeront toujo
476 ien n’arrête, et qui passeront toujours, quoi que nous fassions : elles nous demandent, à nous les Suisses, si nous avons en
477 asseront toujours, quoi que nous fassions : elles nous demandent, à nous les Suisses, si nous avons encore une raison d’être
478 quoi que nous fassions : elles nous demandent, à nous les Suisses, si nous avons encore une raison d’être, si nous osons en
479 ns : elles nous demandent, à nous les Suisses, si nous avons encore une raison d’être, si nous osons encore la proclamer, et
480 isses, si nous avons encore une raison d’être, si nous osons encore la proclamer, et si nous en gardons encore une conscienc
481 d’être, si nous osons encore la proclamer, et si nous en gardons encore une conscience claire et forte. Elles nous mettent
482 dons encore une conscience claire et forte. Elles nous mettent au défi de produire le pourquoi de notre défense, le pourquoi
483 s nous mettent au défi de produire le pourquoi de notre défense, le pourquoi de notre volonté d’autonomie. Elles nous forcent
484 uire le pourquoi de notre défense, le pourquoi de notre volonté d’autonomie. Elles nous forcent, non sans brutalité, à dire e
485 , le pourquoi de notre volonté d’autonomie. Elles nous forcent, non sans brutalité, à dire enfin ce qui naguère allait sans
486 ce qui naguère allait sans dire, à dire pourquoi nous voulons que notre sol n’appartienne qu’à nous seuls, à nous Suisses.
487 llait sans dire, à dire pourquoi nous voulons que notre sol n’appartienne qu’à nous seuls, à nous Suisses. Elles nous demande
488 uoi nous voulons que notre sol n’appartienne qu’à nous seuls, à nous Suisses. Elles nous demandent quelle est la Suisse que
489 ns que notre sol n’appartienne qu’à nous seuls, à nous Suisses. Elles nous demandent quelle est la Suisse que nous sommes dé
490 ppartienne qu’à nous seuls, à nous Suisses. Elles nous demandent quelle est la Suisse que nous sommes décidés à défendre. Vo
491 es. Elles nous demandent quelle est la Suisse que nous sommes décidés à défendre. Voilà le défi que nous adresse l’Europe mo
492 nous sommes décidés à défendre. Voilà le défi que nous adresse l’Europe moderne. Il s’agit maintenant d’y répondre. Nous ne
493 urope moderne. Il s’agit maintenant d’y répondre. Nous ne pouvons plus nous contenter de déclarer que notre Confédération fu
494 git maintenant d’y répondre. Nous ne pouvons plus nous contenter de déclarer que notre Confédération fut autrefois voulue pa
495 us ne pouvons plus nous contenter de déclarer que notre Confédération fut autrefois voulue par Dieu. Il nous faut nous demand
496 e Confédération fut autrefois voulue par Dieu. Il nous faut nous demander maintenant si vraiment Dieu la veut encore. Redout
497 ation fut autrefois voulue par Dieu. Il nous faut nous demander maintenant si vraiment Dieu la veut encore. Redoutable quest
498 ncore. Redoutable question, je le vois bien. Mais nous ne pouvons plus l’éviter. Nous ne pouvons plus nous boucher les oreil
499 le vois bien. Mais nous ne pouvons plus l’éviter. Nous ne pouvons plus nous boucher les oreilles. Nous ne pouvons plus nous
500 us ne pouvons plus l’éviter. Nous ne pouvons plus nous boucher les oreilles. Nous ne pouvons plus nous mettre à l’abri de no
501 . Nous ne pouvons plus nous boucher les oreilles. Nous ne pouvons plus nous mettre à l’abri de notre histoire, ou de nos Alp
502 s nous boucher les oreilles. Nous ne pouvons plus nous mettre à l’abri de notre histoire, ou de nos Alpes, ou simplement de
503 les. Nous ne pouvons plus nous mettre à l’abri de notre histoire, ou de nos Alpes, ou simplement de nos habitudes ancestrales
504 lus nous mettre à l’abri de notre histoire, ou de nos Alpes, ou simplement de nos habitudes ancestrales. À la question nouv
505 notre histoire, ou de nos Alpes, ou simplement de nos habitudes ancestrales. À la question nouvelle que nous pose la grande
506 habitudes ancestrales. À la question nouvelle que nous pose la grande révolution européenne, il s’agit maintenant de donner
507 it maintenant de donner une réponse dont dépendra notre existence. Nous avons fait serment, le 2 septembre, de défendre la Su
508 donner une réponse dont dépendra notre existence. Nous avons fait serment, le 2 septembre, de défendre la Suisse jusqu’à la
509 ien, il serait fou de mourir pour une Suisse dont nous ne serions pas sûrs qu’elle a le droit et le devoir d’exister, devant
510 nous ne serions pas sûrs qu’elle a le droit et le devoir d’exister, devant Dieu. On n’a pas le droit de mourir pour quelque ch
511 ue chose qui ne fournit pas des raisons de vivre. Notre serment nous engage donc AUSSI à prendre conscience des raisons de vi
512 e fournit pas des raisons de vivre. Notre serment nous engage donc AUSSI à prendre conscience des raisons de vivre de la Sui
513 nscience des raisons de vivre de la Suisse, et de nos raisons de vivre en tant que Suisses. Nos privilèges Si nous v
514 de nos raisons de vivre en tant que Suisses. Nos privilèges Si nous voulons prendre une conscience sérieuse de nos
515 vre en tant que Suisses. Nos privilèges Si nous voulons prendre une conscience sérieuse de nos vraies raisons d’être
516 i nous voulons prendre une conscience sérieuse de nos vraies raisons d’être et de persévérer, il nous faut tout d’abord éca
517 de nos vraies raisons d’être et de persévérer, il nous faut tout d’abord écarter un certain nombre de fausses raisons et d’i
518 e, pour ne pas dire au dégonflage de ces clichés. Notre assemblée, et ce discours, seraient inutiles, si nous ne cherchions p
519 assemblée, et ce discours, seraient inutiles, si nous ne cherchions pas ensemble, et si nous ne trouvions pas ensemble, par
520 utiles, si nous ne cherchions pas ensemble, et si nous ne trouvions pas ensemble, par dessous les grandes phrases habituelle
521 valent la peine d’être affirmées sans rhétorique. Nous entendons dire, très souvent, que la Suisse mérite d’être défendue pa
522 sont sans contredit les plus illustres : d’abord notre nature incomparable, ensuite nos libertés traditionnelles, enfin notr
523 tres : d’abord notre nature incomparable, ensuite nos libertés traditionnelles, enfin notre neutralité, solennellement gara
524 able, ensuite nos libertés traditionnelles, enfin notre neutralité, solennellement garantie depuis 1815 par toutes les grande
525 , n’est-ce pas, trois belles et bonnes raisons de nous montrer fiers de notre Suisse ? Certes. Mais il convient de se demand
526 belles et bonnes raisons de nous montrer fiers de notre Suisse ? Certes. Mais il convient de se demander ce que valent ces fa
527 fameux privilèges dans l’Europe toute nouvelle où nous vivons en ce début de 1940. Il convient de se demander s’ils sont de
528 vilèges, ou s’ils ne comporteraient pas aussi des devoirs  ; ensuite, s’il y a lieu de s’en vanter ; enfin, s’ils représentent p
529 ’ils représentent pratiquement des garanties pour notre indépendance, ou, au contraire, s’ils ne peuvent pas fournir certains
530 fournir certains prétextes à la violer. Sommes- nous « à la hauteur » de notre nature ? La Suisse est belle, c’est ente
531 s à la violer. Sommes-nous « à la hauteur » de notre nature ? La Suisse est belle, c’est entendu, c’est connu dans le m
532 nt. Mais le fait est qu’on a coutume de parler de nos Alpes soit d’un point de vue purement sentimental, soit d’un point de
533 ou trop bas. Qu’on y prenne garde cependant : si nos Alpes sont belles et nos glaciers « sublimes », il n’y a pas là de qu
534 nne garde cependant : si nos Alpes sont belles et nos glaciers « sublimes », il n’y a pas là de quoi nous vanter ! D’abord
535 os glaciers « sublimes », il n’y a pas là de quoi nous vanter ! D’abord ce n’est pas notre faute, car nous ne sommes pour ri
536 pas là de quoi nous vanter ! D’abord ce n’est pas notre faute, car nous ne sommes pour rien dans notre géographie. Ensuite, s
537 us vanter ! D’abord ce n’est pas notre faute, car nous ne sommes pour rien dans notre géographie. Ensuite, si nous bénéficio
538 as notre faute, car nous ne sommes pour rien dans notre géographie. Ensuite, si nous bénéficions d’un privilège aussi considé
539 mmes pour rien dans notre géographie. Ensuite, si nous bénéficions d’un privilège aussi considérable, il s’agirait de nous e
540 ’un privilège aussi considérable, il s’agirait de nous en rendre dignes, avant même que de le défendre. Le seul moyen de con
541 un privilège, après tout, c’est de le mériter. Or nous chantons nos lacs d’azur, nous chantons nos glaciers qui touchent aux
542 après tout, c’est de le mériter. Or nous chantons nos lacs d’azur, nous chantons nos glaciers qui touchent aux cieux, et no
543 de le mériter. Or nous chantons nos lacs d’azur, nous chantons nos glaciers qui touchent aux cieux, et nous en retirons d’i
544 . Or nous chantons nos lacs d’azur, nous chantons nos glaciers qui touchent aux cieux, et nous en retirons d’importants bén
545 chantons nos glaciers qui touchent aux cieux, et nous en retirons d’importants bénéfices, mais nous oublions trop souvent q
546 et nous en retirons d’importants bénéfices, mais nous oublions trop souvent que tout cela, précisément, peut tenter certain
547 e tout cela, précisément, peut tenter certains de nos voisins… Ne seraient-ils pas aussi capables que nous de chanter et de
548 s voisins… Ne seraient-ils pas aussi capables que nous de chanter et de gagner de l’argent, si nous étions contraints de leu
549 que nous de chanter et de gagner de l’argent, si nous étions contraints de leur céder la place ? Sommes-nous vraiment plus
550 étions contraints de leur céder la place ? Sommes- nous vraiment plus dignes et plus conscients que d’autres des charges que
551 voir, lorsque j’entends vanter avec intempérance notre nature « incomparable ». C’est une de ces pages excessives dans ses a
552 une sorte de parabole terriblement ironique pour nous autres, et par là même, peut-être, salutaire. Victor Hugo a gravi les
553 rable de l’homme ». Et je suis loin de penser que nous sommes des crétins ! Je dis seulement qu’en face de cette nature « da
554 plaire dans cette merveilleuse nature : rappelons- nous qu’on peut aussi nous comparer, nous autres Suisses, à ces grandeurs,
555 eilleuse nature : rappelons-nous qu’on peut aussi nous comparer, nous autres Suisses, à ces grandeurs, à ces beautés… Et c’e
556  : rappelons-nous qu’on peut aussi nous comparer, nous autres Suisses, à ces grandeurs, à ces beautés… Et c’est ici le lieu
557 st ici le lieu de relire quelques phrases d’un de nos auteurs un peu oubliés aujourd’hui, le bon vaudois Eugène Rambert :
558 i, le bon vaudois Eugène Rambert : Un pays comme le nôtre , écrivait-il, doit réfléchir sa beauté dans l’âme de ses enfants. Le
559 e Rambert : Un pays comme le nôtre, écrivait-il, doit réfléchir sa beauté dans l’âme de ses enfants. Le fait-il ? Hélas ! I
560 de retentir dans les âmes d’élite. Oui, Rambert nous le dit fort bien : ce premier de nos privilèges, une belle nature, do
561 ui, Rambert nous le dit fort bien : ce premier de nos privilèges, une belle nature, doit être considéré par nous, avant tou
562 : ce premier de nos privilèges, une belle nature, doit être considéré par nous, avant toute autre chose, comme un appel, com
563 ilèges, une belle nature, doit être considéré par nous , avant toute autre chose, comme un appel, comme une responsabilité.
564 mme un appel, comme une responsabilité. Sommes- nous vraiment libres ? Il faut donc que les Suisses deviennent et reste
565 ire. Et à ce propos, voici quelques remarques sur nos fameuses libertés, non moins fameuses et non moins célébrées que nos
566 és, non moins fameuses et non moins célébrées que nos grandioses panoramas. « Nous défendrons nos libertés — répétons-nous
567 n moins célébrées que nos grandioses panoramas. «  Nous défendrons nos libertés — répétons-nous dans nos discours patriotique
568 s que nos grandioses panoramas. « Nous défendrons nos libertés — répétons-nous dans nos discours patriotiques — ces liberté
569 oramas. « Nous défendrons nos libertés — répétons- nous dans nos discours patriotiques — ces libertés que nos pères nous ont
570 Nous défendrons nos libertés — répétons-nous dans nos discours patriotiques — ces libertés que nos pères nous ont acquises
571 dans nos discours patriotiques — ces libertés que nos pères nous ont acquises au prix de leur héroïsme civique et militaire
572 iscours patriotiques — ces libertés que nos pères nous ont acquises au prix de leur héroïsme civique et militaire, et qui so
573 sont devenues en fait ces libertés antiques qu’on nous envie ? Avons-nous bien le droit de nous en vanter encore, et suffit-
574 it ces libertés antiques qu’on nous envie ? Avons- nous bien le droit de nous en vanter encore, et suffit-il de les vanter po
575 es qu’on nous envie ? Avons-nous bien le droit de nous en vanter encore, et suffit-il de les vanter pour qu’elles subsistent
576 vous les lire, persuadé que l’une des marques de notre liberté est justement le courage d’admettre les critiques les plus am
577 e alors les petites oligarchies que la Révolution devait renverser un peu plus tard. Mais sommes-nous bien certains que, pour
578 on devait renverser un peu plus tard. Mais sommes- nous bien certains que, pour autant, le jugement de Goethe n’est plus du t
579 jugement de Goethe n’est plus du tout valable de nos jours ? Sommes-nous bien certains que la tyrannie de l’opinion publiq
580 n’est plus du tout valable de nos jours ? Sommes- nous bien certains que la tyrannie de l’opinion publique vaut mieux que ce
581 ue vaut mieux que celle des aristocrates ? Sommes- nous bien certains que les Suisses sont, plus que d’autres, libérés des pr
582 d’autres, libérés des préjugés bourgeois ? Sommes- nous bien certains, enfin, qu’il a suffi à nos pères de s’affranchir un jo
583 Sommes-nous bien certains, enfin, qu’il a suffi à nos pères de s’affranchir un jour pour que nous ayons le droit de répéter
584 uffi à nos pères de s’affranchir un jour pour que nous ayons le droit de répéter à tout jamais : nous sommes libres ! Ayons
585 ue nous ayons le droit de répéter à tout jamais : nous sommes libres ! Ayons le courage de le reconnaître en toute franchise
586 nchise : la Suisse actuelle n’est pas, comme elle devrait et pourrait l’être, l’un des pays où l’on a le plus de véritable libe
587 eries, ou simplement les idées imprévues. Certes, nous avons peu ou point de polémiques personnelles : mais c’est peut-être
588 ce. Les adversaires politiques ou religieux, chez nous , se fréquentent peu, ne se parlent pas, et souvent ne se saluent même
589 roient que l’autre, celui qui pense différemment, doit être un type dangereux, méchant, machiavélique. Ceci pour le plan des
590 as refaire ici, après tant d’autres, le procès de notre moralisme intolérant. Qu’il me suffise de remarquer que si nous étion
591 intolérant. Qu’il me suffise de remarquer que si nous étions plus chrétiens, nous serions beaucoup plus tolérants dans ce d
592 e de remarquer que si nous étions plus chrétiens, nous serions beaucoup plus tolérants dans ce domaine, nous aurions beaucou
593 serions beaucoup plus tolérants dans ce domaine, nous aurions beaucoup plus de liberté dans nos jugements, nous respecterio
594 maine, nous aurions beaucoup plus de liberté dans nos jugements, nous respecterions beaucoup mieux les façons de vivre du v
595 ions beaucoup plus de liberté dans nos jugements, nous respecterions beaucoup mieux les façons de vivre du voisin, le mystèr
596 ndre, en ce mois de janvier 1940, sont avant tout nos libertés politiques. Je répondrai que nos libertés politiques ne saur
597 nt tout nos libertés politiques. Je répondrai que nos libertés politiques ne sauraient subsister et garder leur valeur conc
598 t subsister et garder leur valeur concrète que si nous conquérons une plus grande liberté morale et intellectuelle. Car les
599 ar les unes ne vont pas sans les autres, et toute notre histoire en témoigne. Une politique de liberté ne peut être faite que
600 eure et l’intérieure, ont toujours été liées dans notre histoire. C’est parce que les premiers Suisses avaient la passion de
601 française. Je voudrais insister sur ce point : si nous perdons le sens et le goût de la liberté quotidienne, celle qui se ma
602 rsité infinie des manières de penser et de vivre, nos libertés politiques ne pourront subsister longtemps, et alors c’en se
603 t subsister longtemps, et alors c’en sera fait de notre liberté vis-à-vis de l’étranger, c’est-à-dire de notre indépendance n
604 liberté vis-à-vis de l’étranger, c’est-à-dire de notre indépendance nationale. Il ne suffit donc pas de protéger notre indép
605 ance nationale. Il ne suffit donc pas de protéger notre indépendance par des fortifications. C’est l’intérieur du pays qu’il
606 s fortifications. C’est l’intérieur du pays qu’il nous faut maintenant fortifier, moralement, si nous voulons que notre armé
607 il nous faut maintenant fortifier, moralement, si nous voulons que notre armée défende quelque chose de valable. Or quels so
608 tenant fortifier, moralement, si nous voulons que notre armée défende quelque chose de valable. Or quels sont les ennemis int
609 valable. Or quels sont les ennemis intérieurs de notre liberté ? Je n’en désignerai ici que deux, qui vous paraîtront peut-ê
610 t. C’est ainsi que l’hitlérisme a pu passer, chez nous , pendant longtemps, pour un « rempart contre le bolchévisme ». Pourqu
611 j’ajouterai : je connais bien des protestants que notre moralisme simpliste, notre méfiance à l’égard de toute rigueur théolo
612 en des protestants que notre moralisme simpliste, notre méfiance à l’égard de toute rigueur théologique, notre incompréhensio
613 méfiance à l’égard de toute rigueur théologique, notre incompréhension des vraies complexités spirituelles, ont rejetés vers
614 isme. Mais enfin ces défauts n’existent que trop. Notre bonne inconscience ne nous empêche pas d’être « ceux par qui le scand
615 n’existent que trop. Notre bonne inconscience ne nous empêche pas d’être « ceux par qui le scandale arrive » ! Notre égalit
616 pas d’être « ceux par qui le scandale arrive » ! Notre égalitarisme est, lui aussi, une forme de notre paresse d’esprit, bie
617 ! Notre égalitarisme est, lui aussi, une forme de notre paresse d’esprit, bien plus encore qu’une forme de l’envie, comme on
618 des vocations infiniment diverses. Là encore, si nous étions plus chrétiens, nous serions moins farouchement égalitaires. N
619 verses. Là encore, si nous étions plus chrétiens, nous serions moins farouchement égalitaires. Nous serions beaucoup plus re
620 ens, nous serions moins farouchement égalitaires. Nous serions beaucoup plus respectueux de la complexité humaine, parce que
621 s respectueux de la complexité humaine, parce que nous saurions beaucoup mieux ce que c’est qu’une vocation, et qu’il faut l
622 qu’il faut lui faire confiance, même lorsqu’elle nous paraît exceptionnelle. Sans doute faut-il être vraiment chrétien pour
623 onnaît et aime le secret de la liberté, que Vinet nous révèle en écrivant : « C’est pour obéir que nous sommes libres ». Vin
624 nous révèle en écrivant : « C’est pour obéir que nous sommes libres ». Vinet entend évidemment : pour obéir à Dieu plutôt q
625 mmes. Ceux qui ne savent pas que le but de toutes nos libertés est uniquement de laisser à chacun le droit d’obéir à Dieu s
626 alors ils n’aimeront pas une vraie liberté. Oui, nous pouvons le proclamer : il n’y a de liberté réelle dans notre monde qu
627 ns le proclamer : il n’y a de liberté réelle dans notre monde que grâce à la foi des chrétiens, et à leur action politique. E
628 qu’au bout du compte, et « pratiquement » (comme nous aimons à dire en Suisse), le meilleur fondement de notre indépendance
629 imons à dire en Suisse), le meilleur fondement de notre indépendance nationale, c’est encore notre foi personnelle. Car c’est
630 ent de notre indépendance nationale, c’est encore notre foi personnelle. Car c’est elle qui reste la source de notre amour de
631 ersonnelle. Car c’est elle qui reste la source de notre amour de la vraie liberté, et cet amour est le fondement solide de to
632 é, et cet amour est le fondement solide de toutes nos libertés civiques, comme aussi de notre résistance intime aux tentati
633 e de toutes nos libertés civiques, comme aussi de notre résistance intime aux tentations de la propagande totalitaire. Dev
634 e aux tentations de la propagande totalitaire. Devons -nous rester neutres ? Liberté, totalitarisme… Ceci nous amène à po
635 entations de la propagande totalitaire. Devons- nous rester neutres ? Liberté, totalitarisme… Ceci nous amène à poser l
636 rester neutres ? Liberté, totalitarisme… Ceci nous amène à poser la question de notre troisième grand privilège : la neu
637 litarisme… Ceci nous amène à poser la question de notre troisième grand privilège : la neutralité. Notre neutralité, en effet
638 notre troisième grand privilège : la neutralité. Notre neutralité, en effet, n’impose-t-elle pas, dès maintenant, certaines
639 rtaines limites pénibles à la libre expression de nos convictions, même lorsque celles-ci sont basées sur notre foi non poi
640 nvictions, même lorsque celles-ci sont basées sur notre foi non point politique, mais chrétienne ? Oui, comment justifier enc
641 , dans cette guerre-ci, aux yeux de l’Europe et à nos propres yeux, notre situation privilégiée de neutres ? Il semble que
642 e-ci, aux yeux de l’Europe et à nos propres yeux, notre situation privilégiée de neutres ? Il semble que depuis quelques anné
643 e neutres ? Il semble que depuis quelques années, nous ayons renoncé, et c’est heureux, à regarder notre neutralité comme un
644 nous ayons renoncé, et c’est heureux, à regarder notre neutralité comme une chose qui irait de soi, qui aurait existé de tou
645 temps, sans commencement ni fin imaginables, qui nous serait due sans discussion et même sans contrepartie, et qui représen
646 commencement ni fin imaginables, qui nous serait due sans discussion et même sans contrepartie, et qui représenterait, en
647 senterait, en somme, un privilège de droit divin. Nous savons que la neutralité est une conception menacée ; qu’elle est en
648 le pousse toujours à prendre parti ; et qu’enfin nous devons la justifier, sous peine de passer pour des lâches, ou des tiè
649 ousse toujours à prendre parti ; et qu’enfin nous devons la justifier, sous peine de passer pour des lâches, ou des tièdes, ou
650 inconscients. Que valent les justifications qu’on nous propose, au regard des bouleversements historiques dont la guerre act
651 igne ? Pour certains, qui se disent réalistes, si nous sommes neutres, c’est uniquement en vertu de nécessités toutes matéri
652 ertu de nécessités toutes matérielles : parce que nous sommes un trop petit pays, parce que notre situation géographique cen
653 rce que nous sommes un trop petit pays, parce que notre situation géographique centrale nous exposerait à de trop grands dang
654 , parce que notre situation géographique centrale nous exposerait à de trop grands dangers en cas de guerre, enfin, parce qu
655 grands dangers en cas de guerre, enfin, parce que notre diversité raciale et religieuse risquerait d’entraîner la dislocation
656 ligieuse risquerait d’entraîner la dislocation de notre fédération, si nous venions à prendre parti. Notons que cet argument
657 ’entraîner la dislocation de notre fédération, si nous venions à prendre parti. Notons que cet argument de la nécessité n’es
658 ment de la nécessité n’est guère valable que pour nous , Suisses. Nos voisins n’ont aucune raison d’en tenir compte, bien au
659 ssité n’est guère valable que pour nous, Suisses. Nos voisins n’ont aucune raison d’en tenir compte, bien au contraire. Au
660 ien au contraire. Au lieu de laisser entendre que nous sommes neutres parce que nous sommes trop faibles pour faire la guerr
661 aisser entendre que nous sommes neutres parce que nous sommes trop faibles pour faire la guerre, pourquoi ne dirions-nous pa
662 faibles pour faire la guerre, pourquoi ne dirions- nous pas plutôt : nous sommes neutres parce que nous détestons la guerre ?
663 la guerre, pourquoi ne dirions-nous pas plutôt : nous sommes neutres parce que nous détestons la guerre ? Vient ensuite l’a
664 s-nous pas plutôt : nous sommes neutres parce que nous détestons la guerre ? Vient ensuite l’argument juridique. Nous devons
665 s la guerre ? Vient ensuite l’argument juridique. Nous devons rester neutres, nous dit-on, parce que les traités nous y forc
666 guerre ? Vient ensuite l’argument juridique. Nous devons rester neutres, nous dit-on, parce que les traités nous y forcent. Et
667 l’argument juridique. Nous devons rester neutres, nous dit-on, parce que les traités nous y forcent. Et certes, aux yeux d’u
668 ester neutres, nous dit-on, parce que les traités nous y forcent. Et certes, aux yeux d’un chrétien et d’un Suisse, les trai
669 de ceux qui ont fait serment. Mais ici encore, il nous faut bien voir que cette raison a peu de poids en dehors de nos front
670 voir que cette raison a peu de poids en dehors de nos frontières. Les voisins que nous avons à redouter sont justement ceux
671 oids en dehors de nos frontières. Les voisins que nous avons à redouter sont justement ceux qui déclarent que les traités et
672 l’on donne parfois une justification militaire à notre neutralité : il serait de l’intérêt des puissances belligérantes de n
673 disparaître d’un jour à l’autre. Et la preuve que nous ne la prenons pas au sérieux, c’est que nous restons mobilisés. Je ne
674 que nous ne la prenons pas au sérieux, c’est que nous restons mobilisés. Je ne discuterai même pas ici, l’argument de l’imp
675 ation la plus radicale de l’idéal fédéraliste qui nous unit, par conséquent, la plus grave menace pour notre État. Que reste
676 s unit, par conséquent, la plus grave menace pour notre État. Que reste-t-il donc à répondre à ceux qui nous demandent d’entr
677 e État. Que reste-t-il donc à répondre à ceux qui nous demandent d’entrer en guerre ? Ni l’argument des réalistes, ni celui
678 i celui des stratèges, ne suffiraient à justifier notre refus de payer, nous aussi, notre part dans la défense de l’Europe. J
679 ne suffiraient à justifier notre refus de payer, nous aussi, notre part dans la défense de l’Europe. Je ne dis pas que ces
680 ent à justifier notre refus de payer, nous aussi, notre part dans la défense de l’Europe. Je ne dis pas que ces arguments ne
681 art, qu’ils n’ont plus de force convaincante pour nos voisins, et, par suite, ne sont plus pour nous cette garantie morale
682 our nos voisins, et, par suite, ne sont plus pour nous cette garantie morale dont nous avons un besoin réellement vital. Si
683 ne sont plus pour nous cette garantie morale dont nous avons un besoin réellement vital. Si maintenant et malgré tout nous a
684 in réellement vital. Si maintenant et malgré tout nous affirmons que la Suisse a le devoir de rester neutre, ce ne peut donc
685 et malgré tout nous affirmons que la Suisse a le devoir de rester neutre, ce ne peut donc être qu’au nom d’une réalité qui ne
686 bien mal la défendre que de la défendre au nom de nos seuls intérêts helvétiques, car elle ne peut et ne doit subsister qu’
687 euls intérêts helvétiques, car elle ne peut et ne doit subsister qu’au nom de l’intérêt de l’Europe entière. Seule, la missi
688 Suisse rend un sens et un poids aux arguments que nous jugions tout à l’heure insuffisants. Notre position géographique, par
689 nts que nous jugions tout à l’heure insuffisants. Notre position géographique, par exemple, est un péril certain si l’on ne s
690 age dès qu’on la considère dans la perspective de notre mission médiatrice. De même, la garantie légale de notre neutralité n
691 ission médiatrice. De même, la garantie légale de notre neutralité n’est qu’un chiffon de papier, si l’on veut y voir simplem
692 r, si l’on veut y voir simplement une garantie de nos privilèges. Mais elle devient notre meilleure sûreté dès qu’on la con
693 une garantie de nos privilèges. Mais elle devient notre meilleure sûreté dès qu’on la considère comme une mesure d’intérêt gé
694 udrait pas retenir de ce traité uniquement ce qui nous semblerait y garantir notre sécurité ; car le texte dit autre chose,
695 aité uniquement ce qui nous semblerait y garantir notre sécurité ; car le texte dit autre chose, dit beaucoup plus : « Les Pu
696 hui : le seul moyen réel et réaliste de conserver nos privilèges, c’est de les considérer comme les charges, dont nous somm
697 , c’est de les considérer comme les charges, dont nous sommes responsables vis-à-vis de la communauté européenne. Je voudra
698 st pourquoi l’on disait : Noblesse oblige. Disons- nous pareillement que tous nos privilèges, même naturels, n’ont d’autre se
699 oblesse oblige. Disons-nous pareillement que tous nos privilèges, même naturels, n’ont d’autre sens et d’autre raison d’êtr
700 ’ont d’autre sens et d’autre raison d’être que de nous permettre d’accomplir notre mission spéciale de Suisses. Disons-nous
701 e raison d’être que de nous permettre d’accomplir notre mission spéciale de Suisses. Disons-nous donc : beauté du sol oblige,
702 complir notre mission spéciale de Suisses. Disons- nous donc : beauté du sol oblige, liberté oblige, neutralité oblige ! V
703 , et seule base possible et solide de la paix que nous espérons. C’est très facile à dire, et ce n’est pas très neuf, en app
704 ncipe du fédéralisme ? Le défendre, c’est d’abord nous défendre, certes, mais c’est aussi le répandre au-dehors, le prêcher
705 prêcher à l’Europe, le propager, et préparer par nos études, par nos conseils, par nos initiatives, par certaines prises d
706 ope, le propager, et préparer par nos études, par nos conseils, par nos initiatives, par certaines prises de position peut-
707 et préparer par nos études, par nos conseils, par nos initiatives, par certaines prises de position peut-être, les bases de
708 er, c’est le réaliser, ici et maintenant, et dans nos vies, à l’intérieur de nos frontières. C’est faire que notre Suisse a
709 et maintenant, et dans nos vies, à l’intérieur de nos frontières. C’est faire que notre Suisse ait vraiment le droit de s’o
710 à l’intérieur de nos frontières. C’est faire que notre Suisse ait vraiment le droit de s’offrir en exemple à l’Europe, sur l
711 , sur le plan du fédéralisme. Ces deux aspects de notre vocation me paraissent inséparables. Il faut répandre l’idée fédérali
712 parables. Il faut répandre l’idée fédéraliste, si nous voulons la sauvegarder, car on ne se défend bien qu’en attaquant. Mai
713 ui reviendraient, en premier lieu, le droit et le devoir de parler d’une vocation de la Suisse, si ce n’était à nous, chrétien
714 rler d’une vocation de la Suisse, si ce n’était à nous , chrétiens suisses ? C’est pourquoi je voudrais consacrer cette derni
715 n général, et ensuite, sur les moyens de réaliser notre vocation chrétienne en tant que Suisses. Quand on parle d’une vocatio
716 Eh bien, j’estime qu’un chrétien est l’homme qui doit savoir mieux que tout autre qu’une vocation est autre chose qu’une ut
717 aliste. Épargnés jusqu’ici par les bombardements, nous sommes engagés comme les autres dans le conflit spirituel. Chose étra
718 conflit spirituel. Chose étrange, sur ce plan-là, nous combattons en tant que neutres, justement ! Affirmer la mission de no
719 t que neutres, justement ! Affirmer la mission de notre neutralité, voilà notre rôle stratégique dans cette bataille de doctr
720  ! Affirmer la mission de notre neutralité, voilà notre rôle stratégique dans cette bataille de doctrines. Nous venons de le
721 ôle stratégique dans cette bataille de doctrines. Nous venons de le constater, à propos de la neutralité : ce sont les faits
722 e la neutralité : ce sont les faits eux-mêmes qui nous invitent à prendre une attitude active vis-à-vis de l’Europe. Voilà c
723 existante en Suisse. Il n’en va pas de même pour notre vocation fédéraliste : elle s’appuie sur une tradition et sur des don
724 tradition et sur des données très solides. De par notre situation de fait, nous sommes, si je puis dire, pratiquement condamn
725 ées très solides. De par notre situation de fait, nous sommes, si je puis dire, pratiquement condamnés à l’idéalisme. Mais b
726 enir compte uniquement de ce qui est inscrit dans nos nécessités, dans notre situation géographique et matérielle. Et ils a
727 t de ce qui est inscrit dans nos nécessités, dans notre situation géographique et matérielle. Et ils affirment que dans toute
728 tes ces choses qui peuvent être vues et touchées, nos Alpes, la petitesse de notre territoire, et nos difficultés économiqu
729 être vues et touchées, nos Alpes, la petitesse de notre territoire, et nos difficultés économiques, ils n’aperçoivent nulleme
730 , nos Alpes, la petitesse de notre territoire, et nos difficultés économiques, ils n’aperçoivent nullement l’indication d’u
731 Il n’en va pas autrement dans la vie du chrétien. Nous ne pouvons jamais partir que de ce que nous sommes, c’est entendu, ma
732 tien. Nous ne pouvons jamais partir que de ce que nous sommes, c’est entendu, mais ce n’est pas une raison pour rester empri
733 son pour rester emprisonnés en nous-mêmes et dans nos nécessités. Une vocation est toujours un appel, un appel qui vient du
734 qui vient du dehors, de Quelqu’un d’autre, et qui nous force à sortir de nous-mêmes. Elle ne résulte pas mécaniquement de no
735 nous-mêmes. Elle ne résulte pas mécaniquement de notre situation de fait : elle s’y ajoute. Notre foi l’y ajoute. Pourquoi u
736 ent de notre situation de fait : elle s’y ajoute. Notre foi l’y ajoute. Pourquoi un incroyant devient-il chrétien, et se met-
737 le pays qui se reconnaît une vocation chrétienne doit sans nul doute partir des faits — sous peine de divaguer dans l’utopi
738 — sous peine de divaguer dans l’utopie — mais il doit en partir justement, aller au-delà, et dans un sens qui ne peut être
739 é que par la foi. Maintenant donc, il s’agit pour nous tous de reconnaître la vocation suisse, d’en revêtir la charge, d’en
740 ndre, c’est-à-dire à la faire connaître autour de nous et en dehors de nos frontières. Si quelqu’un d’entre vous me dit que
741 la faire connaître autour de nous et en dehors de nos frontières. Si quelqu’un d’entre vous me dit que pour sa part, il ne
742 nt sans aucun doute, ici ou là, dans la mesure où nous les attendrons, où nous les appellerons, où nous les croirons justes
743 ou là, dans la mesure où nous les attendrons, où nous les appellerons, où nous les croirons justes et nécessaires. Mais il
744 nous les attendrons, où nous les appellerons, où nous les croirons justes et nécessaires. Mais il est temps que j’apporte u
745  : Lève-toi, et va dire telle chose à tel peuple. Nous n’avons entendu, jusqu’ici, aucun appel aussi déterminé. Nous n’en so
746 entendu, jusqu’ici, aucun appel aussi déterminé. Nous n’en sommes pas encore là : mais je dis que nous devons nous attendre
747 Nous n’en sommes pas encore là : mais je dis que nous devons nous attendre à pareille éventualité. Nous devons d’ores et dé
748 n’en sommes pas encore là : mais je dis que nous devons nous attendre à pareille éventualité. Nous devons d’ores et déjà nous
749 ommes pas encore là : mais je dis que nous devons nous attendre à pareille éventualité. Nous devons d’ores et déjà nous habi
750 nous devons nous attendre à pareille éventualité. Nous devons d’ores et déjà nous habituer à voir plus grand sans décoller d
751 devons nous attendre à pareille éventualité. Nous devons d’ores et déjà nous habituer à voir plus grand sans décoller de la ré
752 pareille éventualité. Nous devons d’ores et déjà nous habituer à voir plus grand sans décoller de la réalité, à voir plus g
753 ité, à voir plus grand pour rester dans le réel ; nous habituer à l’idée de faire un jour quelque chose de grand pour l’Euro
754 e. Peut-être n’y a-t-il rien à faire hors de chez nous tant qu’un certain régime subsiste, vous savez où33. Ce n’est pas enc
755 ême balbutiant, qui se ferait entendre. Préparons- nous à dire très haut, dès que l’occasion s’en montrera, ce que nous auron
756 ès haut, dès que l’occasion s’en montrera, ce que nous aurons à dire à nos voisins, forts que nous sommes d’une expérience f
757 casion s’en montrera, ce que nous aurons à dire à nos voisins, forts que nous sommes d’une expérience fédéraliste de six si
758 e que nous aurons à dire à nos voisins, forts que nous sommes d’une expérience fédéraliste de six siècles. Et surtout, ne dé
759 entatives qui se feraient jour dans ce sens comme nous avons trop souvent dénigré l’essai de Société des Nations. Essayons a
760 tions. Essayons au contraire de les améliorer, si nous les jugeons maladroites ou mal fondées. Travaillons aussi, c’est le d
761 llons aussi, c’est le deuxième point, à illustrer notre fédéralisme, c’est-à-dire à le réaliser d’une manière qui le rende ex
762 emplaire au sens littéral de ce mot. Profitons de notre paix matérielle pour le parfaire et pour l’approfondir jusque dans le
763 re et pour l’approfondir jusque dans le détail de nos vies, en sorte que cette réduction d’Europe fédérée, qu’est la Suisse
764 ’attendre que la paix s’approche pour s’y mettre. Notre vocation intérieure est pour le moment plus précise que notre vocatio
765 on intérieure est pour le moment plus précise que notre vocation européenne ; mais je vous l’ai dit : l’une suppose l’autre e
766 spirituelle. Et c’est sur ce plan décisif, qu’il nous reste le plus à faire. Il nous reste, par exemple, à découvrir toute
767 lan décisif, qu’il nous reste le plus à faire. Il nous reste, par exemple, à découvrir toute notre histoire, ou nos histoire
768 re. Il nous reste, par exemple, à découvrir toute notre histoire, ou nos histoires diverses, si curieusement défigurées et af
769 par exemple, à découvrir toute notre histoire, ou nos histoires diverses, si curieusement défigurées et affadies par les ma
770 sement défigurées et affadies par les manuels. Il nous reste à connaître vraiment nos confédérés suisses allemands, qui save
771 r les manuels. Il nous reste à connaître vraiment nos confédérés suisses allemands, qui savent souvent tellement mieux que
772 allemands, qui savent souvent tellement mieux que nous ce qu’est la Suisse. Il nous reste surtout à développer en profondeur
773 tellement mieux que nous ce qu’est la Suisse. Il nous reste surtout à développer en profondeur ce que j’appellerai le sens
774 férente ; lui reconnaître le droit de différer de nous  ; le comprendre jusqu’à la limite du possible comme il se comprend lu
775 iste, et c’est aussi tout l’idéal œcuménique, que nos Églises devraient soutenir, précisément, au nom de leur vocation d’Ég
776 st aussi tout l’idéal œcuménique, que nos Églises devraient soutenir, précisément, au nom de leur vocation d’Églises suisses. Cec
777 sième et dernier point. C’est comme chrétiens que nous devons travailler à cette défense, à cette illustration de l’idée sui
778 et dernier point. C’est comme chrétiens que nous devons travailler à cette défense, à cette illustration de l’idée suisse. Je
779 de l’idée suisse. Je m’explique. Le chrétien a le devoir d’agir, d’agir dans le monde et pour le monde, dans la cité où il est
780 par sa naissance dans la communauté des Suisses, doit naturellement s’insérer dans les données de fait qui sont celles du p
781 la foi. J’insiste sur ce point, qui est capital. Nous ne devons pas être chrétiens parce que nous sommes Suisses, mais nou
782 J’insiste sur ce point, qui est capital. Nous ne devons pas être chrétiens parce que nous sommes Suisses, mais nous devons ê
783 tal. Nous ne devons pas être chrétiens parce que nous sommes Suisses, mais nous devons être de bons Suisses parce que nous
784 re chrétiens parce que nous sommes Suisses, mais nous devons être de bons Suisses parce que nous sommes chrétiens d’abord.
785 rétiens parce que nous sommes Suisses, mais nous devons être de bons Suisses parce que nous sommes chrétiens d’abord. Je tien
786 , mais nous devons être de bons Suisses parce que nous sommes chrétiens d’abord. Je tiens à dissiper ici toute équivoque. Il
787 i toute équivoque. Il ne manque pas de gens, chez nous , pour dire qu’un bon citoyen suisse a le devoir d’être chrétien, comm
788 hez nous, pour dire qu’un bon citoyen suisse a le devoir d’être chrétien, comme si ce devoir était la conséquence obligatoire
789 n suisse a le devoir d’être chrétien, comme si ce devoir était la conséquence obligatoire d’un très ardent patriotisme. Si cer
790 t pas, dans leurs discours, à invoquer le Dieu de nos pères, il semble parfois que c’est moins parce qu’ils croient le chri
791 t ils ont une façon d’exalter la croix blanche de notre drapeau qui rappelle davantage le Gott mit uns de Guillaume II que le
792 rdonné à celui qu’ils portent à l’État suisse. Or nous devons croire exactement le contraire, je le répète : nous devons êtr
793 é à celui qu’ils portent à l’État suisse. Or nous devons croire exactement le contraire, je le répète : nous devons être de bo
794 ns croire exactement le contraire, je le répète : nous devons être de bons Suisses parce que nous sommes chrétiens d’abord.
795 oire exactement le contraire, je le répète : nous devons être de bons Suisses parce que nous sommes chrétiens d’abord. Gardons
796 pète : nous devons être de bons Suisses parce que nous sommes chrétiens d’abord. Gardons-nous du Schweizerchristentum ! À ce
797 parce que nous sommes chrétiens d’abord. Gardons- nous du Schweizerchristentum ! À ces Schweizer Christen dont je viens de p
798 r vous, mais seulement pour tout le monde, faites- nous la grâce de n’en point vouloir. » Car « la société qui veut m’ôter ma
799 dire, qu’une seule idée : c’est que la Suisse que nous devons défendre n’est pas la Suisse des manuels, des cartes postales,
800 qu’une seule idée : c’est que la Suisse que nous devons défendre n’est pas la Suisse des manuels, des cartes postales, des di
801 ont elle est responsable. Une seule idée… Mais si nous l’acceptons avec courage et avec joie, je suis certain que la plupart
802 tain que la plupart des critiques auxquelles j’ai me livrer en débutant perdront leur légitimité. Si nous refusons de c
803 e livrer en débutant perdront leur légitimité. Si nous refusons de considérer le fait d’être Suisses comme une espèce de « f
804 ’être Suisses comme une espèce de « filon », dans notre Europe déchirée, si nous le considérons tout au contraire comme une «
805 pèce de « filon », dans notre Europe déchirée, si nous le considérons tout au contraire comme une « mission spéciale », nous
806 tout au contraire comme une « mission spéciale », nous apprendrons à voir au-delà de nous-mêmes et par suite à penser plus l
807 s librement, et avec plus de générosité. Et alors nous serons en état de mesurer la vraie grandeur des événements actuels, l
808 ctuels, la vraie grandeur du rôle qui peut y être le nôtre . Et parce que nous serons plus conscients de ce que nous avons à donn
809 ur du rôle qui peut y être le nôtre. Et parce que nous serons plus conscients de ce que nous avons à donner, nous serons mie
810 t parce que nous serons plus conscients de ce que nous avons à donner, nous serons mieux armés pour défendre la Suisse où Di
811 ns plus conscients de ce que nous avons à donner, nous serons mieux armés pour défendre la Suisse où Dieu nous veut à son se
812 erons mieux armés pour défendre la Suisse où Dieu nous veut à son service. 31. Conférence prononcée le 28 janvier 1940 au
6 1940, Mission ou démission de la Suisse. Esquisses d’une politique fédéraliste
813 à partir d’un certain moment. Ce moment est venu. Nous y sommes. Dans la révolution du xxe siècle, ceux qui se taisent n’on
814 ficace, voilà le principe tactique fondamental de notre siècle. Si aucune contre-propagande n’entre en action pour la neutral
815 ment européen ; un appel, voire une exigence, qui nous fait un devoir d’attaquer au niveau des idées et des doctrines. Mais
816  ; un appel, voire une exigence, qui nous fait un devoir d’attaquer au niveau des idées et des doctrines. Mais afin de nous me
817 u niveau des idées et des doctrines. Mais afin de nous mettre en mesure de « prêcher » le fédéralisme, il nous faut savoir d
818 ettre en mesure de « prêcher » le fédéralisme, il nous faut savoir d’où il vient ; savoir aussi à quoi il tend ; et prouver
819 péché, tout commence par la nécessité, et tend à nous y enfermer. Dans le monde de l’esprit, tout s’ouvre et se libère, dev
820 la nécessité à celui de la liberté. Cet acte seul nous rend humains et nous maintient à hauteur d’homme. (Pas question de mo
821 de la liberté. Cet acte seul nous rend humains et nous maintient à hauteur d’homme. (Pas question de monter jusqu’à l’ange ;
822 d’homme. (Pas question de monter jusqu’à l’ange ; nous avons bien assez à faire à ne point retomber à la bête.) Ainsi pour l
823 it seul donne un sens aux données dans lesquelles notre histoire prit son départ. Les données matérielles du fédéralisme cond
824 données matérielles du fédéralisme conditionnent notre destinée, mais ne la déterminent pas. À négliger cette distinction, n
825 la déterminent pas. À négliger cette distinction, nous tomberions dans un « géographisme » fort voisin du racisme, et qui ne
826 naïf, avait cru pouvoir négliger. Mais l’abus ne doit pas nous interdire l’usage. La réponse à l’idéalisme déficient ne doi
827 ait cru pouvoir négliger. Mais l’abus ne doit pas nous interdire l’usage. La réponse à l’idéalisme déficient ne doit pas êtr
828 re l’usage. La réponse à l’idéalisme déficient ne doit pas être le matérialisme, mais l’idéalisme efficient : la foi qui œuv
829 erai pas de les rappeler ici. Quand abandonnerons- nous cette manie suisse de dénoncer comme « utopistes », « rêveurs abstrai
830 s abstraits », « idéologues brumeux », ceux parmi nous qui se souviennent d’être hommes, créatures de l’esprit autant que de
831 lan vers la mer et l’aventure. En vérité, Zwingli nous a sauvés, la Réforme a sauvé la Suisse. Et c’est elle qui est restée
832 vus de pouvoir central. Ou bien ce pouvoir aurait être improvisé, et c’eût été la fin de notre fédéralisme ; ou bien le
833 aurait dû être improvisé, et c’eût été la fin de notre fédéralisme ; ou bien les provinces annexées auraient pris une trop g
834 ’ambition centralisatrice, chez ceux-là mêmes qui devaient y rêver, les Zurichois et les Bernois. Dès lors la Suisse est ramenée
835 ppuis étrangers, et c’est le nouveau fondement de notre neutralité. Ils accommodent leurs exigences aux nécessités de l’union
836 ités de l’union, et c’est le nouveau fondement de notre fédéralisme. Ainsi l’on a passé progressivement d’une alliance avant
837 r pied d’égalité des cantons italiens et romands. Notre fédéralisme actuel ne date donc que de 1848 ; et ce n’est même qu’à p
838 orce de vie. (Quand le « fossé » eut été comblé.) Nous sommes donc au sommet de notre histoire, si l’on admet que le sens de
839  » eut été comblé.) Nous sommes donc au sommet de notre histoire, si l’on admet que le sens de cette histoire est de créer et
840 it de prévoir, l’empirisme ne suffit plus. La vue doit s’élargir ; et le seul horizon qu’il nous soit permis d’embrasser, c’
841 La vue doit s’élargir ; et le seul horizon qu’il nous soit permis d’embrasser, c’est celui de l’Europe entière, non tel gro
842 er le problème du fédéralisme sur le seul plan où nos conflits internes aient quelque chance de se résoudre : le plan de l’
843 lque chance de se résoudre : le plan de l’Europe. Notre fédéralisme ne peut durer que si nous lui donnons pour fin la fédérat
844 l’Europe. Notre fédéralisme ne peut durer que si nous lui donnons pour fin la fédération de l’Occident. 1. Tout d’abord une
845 la faire redescendre dans les complexités où elle doit s’incarner ; non pas trop bas, dans cette fausse réalité des réaliste
846 té des réalistes terre à terre, mais au niveau de notre action, à hauteur d’homme. 3. Promouvoir une fédération, ce n’est pas
847 re vraiment la véritable alternative politique de notre temps : totalitarisme ou fédéralisme (et non point gauche ou droite,
848 la Confédération. Cette confédération primitive, nous l’avons vue s’accroître organiquement par un jeu d’alliances très com
849 oques dans toutes leurs obligations. (Comme si de nos jours deux pays concluaient un pacte qui pour l’un serait d’assistanc
850 rainte de développer pour sa défense une théorie. Nous vivons ce moment de l’histoire où le fédéralisme, s’il veut durer, do
851 de l’histoire où le fédéralisme, s’il veut durer, doit devenir à son tour missionnaire. Telle est sa crise : ou se nier, ou
852 , pour la Suisse, je le vois dans ce fait qu’elle doit se formuler. Elle doit dire ce qui allait sans dire et qui alors n’en
853 isse est minuscule, mais concluante. Elle peut et doit servir d’exemple par ses échecs non moins que par ses réussites. Elle
854 ecs non moins que par ses réussites. Elle peut et doit figurer pour l’Europe une « expérience-témoin » opérée dans le concre
855 » opérée dans le concret. À tout le moins pouvons- nous en déduire ce qu’il ne faut pas faire si l’on veut réussir la fédérat
856 d’Occident. 8. Le premier enseignement négatif de notre petite expérience, nous venons de le voir : c’est qu’il faut renoncer
857 enseignement négatif de notre petite expérience, nous venons de le voir : c’est qu’il faut renoncer à tout système pour pro
858 taires. Qu’on ne dise plus : « Renonçons à ce qui nous distingue et soulignons ce qui nous unit ». Car c’est justement sur l
859 çons à ce qui nous distingue et soulignons ce qui nous unit ». Car c’est justement sur la base des distinctions et des diver
860 euse de Nicolas de Flue n’est si importante, pour nous autres, que parce qu’elle fut une efficace protestation contre une do
861 ersonne, au sens où je l’ai définie, sait qu’elle doit normalement sacrifier à l’ensemble une part de ses prérogatives, si e
862 vieux conflits. Au lieu de la lutte stérile dont nous souffrons en Suisse, entre le parti des centralisateurs et le parti d
863 ration. 12. Le troisième enseignement négatif que nous devons tirer de l’expérience suisse est d’un ordre plus quotidien et
864 n. 12. Le troisième enseignement négatif que nous devons tirer de l’expérience suisse est d’un ordre plus quotidien et intime.
865 prit, rançon de la grandeur matérielle sacrifiée. Nous sommes ici en présence d’une maladie spécifique du fédéralisme. Elle
866 d’intolérance sourde et larvée qui paralyse chez nous les esprits « trop » entreprenants. Pour prévenir cette maladie, dans
867 t de sa déchéance bureaucratique. Normalement, il devrait désigner non pas une troupe d’employés anonymes, mais une équipe de p
868 « Suisse international » est un homme qui peut et doit connaître l’Europe, par tradition, par goût et par nécessité. Et la c
869 ssion pratique, devenue symbolique. Désormais, il nous appartient d’en proclamer la signification moderne : c’est la défense
870 ire de l’Empire. De cet Empire, on a bien dit que nous sommes le dernier vestige. Toute la question est de savoir si c’est l
871 tige. Toute la question est de savoir si c’est là notre dernier mot — ou le premier d’un chapitre nouveau ; toute la question
872 germe, ce n’est jamais grand : l’image convient à notre taille. Encore faut-il que le petit grain soit fécondé… Il y a beauco
873 e de germe d’une Europe nouvelle. Mais il y va de notre indépendance autant que de la paix occidentale. Si nous n’embrassons
874 ndépendance autant que de la paix occidentale. Si nous n’embrassons pas cette mission-là, l’Histoire aura tôt fait, n’en dou
875 toire aura tôt fait, n’en doutons pas, d’accepter notre démission — soit volontaire, soit forcée. 34. Voir là-dessus les t
7 1940, Mission ou démission de la Suisse. Appendice, ou « in cauda venenum » Autocritique de la Suisse
876 l’on prétend se donner en exemple. 1. Clarifions notre langage ! — Puisque le fédéralisme est une forme politique qui suppos
877 e vivant entre les droits de chaque région et ses devoirs envers l’ensemble, il est absurde de nommer « fédéraliste » un parti
878 locaux contre le centre. Ceux qui se disent, chez nous , « fédéralistes », ne sont souvent, je le crains, que des nationalist
879 de tant d’autres, est à la base de la plupart de nos conflits politiques, économiques, parlementaires. 2. Ni gauche ni dro
880 die individualiste ou la maladie collectiviste de notre État. À quand le parti de la santé fédéraliste ? Il ne sera ni de gau
881 arlementaire le prouve : rien de moins suisse que notre Parlement, importé d’Amérique à une époque récente, et plus ou moins
882 squé leur fructueuse entente… Mais rien n’y fait, notre presse continue, nos partis continuent, nos arguments ne changent pas
883 tente… Mais rien n’y fait, notre presse continue, nos partis continuent, nos arguments ne changent pas d’un demi-ton, nos p
884 it, notre presse continue, nos partis continuent, nos arguments ne changent pas d’un demi-ton, nos philo-fascistes continue
885 ent, nos arguments ne changent pas d’un demi-ton, nos philo-fascistes continuent à reprocher à nos socialistes un étatisme
886 ton, nos philo-fascistes continuent à reprocher à nos socialistes un étatisme qui, en réalité, fait partie de tout programm
887 réalité, fait partie de tout programme fasciste ; nos marxistes continuent à se croire libertaires, etc. Seuls nos stalinie
888 es continuent à se croire libertaires, etc. Seuls nos staliniens ont cessé de dénoncer les hitlériens, mais c’est pour déno
889 Réactionnaires et capitalistes internationaux »…) Nos descendants diront de notre siècle qu’il fut celui des gogos enragés.
890 stes internationaux »…) Nos descendants diront de notre siècle qu’il fut celui des gogos enragés. 4. Paresse d’esprit. — Je p
891 décrets rigides ; rien ne l’empêche de respecter nos précieuses diversités, et de se mettre à leur service, comme il se do
892 ités, et de se mettre à leur service, comme il se doit . Prévoir des exceptions, tenir compte des faits locaux, adapter, dist
893 le confort et la prudence. Ne dites donc plus : «  Nous sommes opposés par principe à tout ce qui vient de Berne — sauf les c
894 ent de Berne — sauf les crédits ». Mais dites : «  Nous voulons des fonctionnaires frais et dispos, capables d’imagination, d
895 ite. Mais autrement, elle ne servira de rien. 5. Notre matérialisme. — Le pire danger qui nous menace : nous avons renversé
896 ien. 5. Notre matérialisme. — Le pire danger qui nous menace : nous avons renversé l’échelle des valeurs. Le cadre matériel
897 matérialisme. — Le pire danger qui nous menace : nous avons renversé l’échelle des valeurs. Le cadre matériel de notre vie
898 versé l’échelle des valeurs. Le cadre matériel de notre vie est parfait, mais il n’encadrera bientôt plus aucune vie digne de
899 r coûtait 10 fr. par an. Je vois enfin que toute notre politique est alourdie et comme paralysée par des soucis budgétaires
900 u germanisme, l’ont étudié et l’ont aimé. Ce sont nos meilleurs écrivains. 7. Tolérance. — Le fédéralisme véritable suppose
901 érie. Car « l’exception » dans la vie quotidienne doit jouer le même rôle que la minorité dans une vie fédérale saine : elle
902 groupements restreints. Les petits cantons, chez nous , ont voix égale avec les grands ; les catholiques avec les protestant
903 quer sans loyauté, dans n’importe quel domaine de notre vie, même « privée », c’est nier le fédéralisme et ruiner les bases d
904 fédéralisme et ruiner les bases de la Suisse. Que nos moralistes s’en souviennent, et que nos conformistes ne l’oublient pa
905 isse. Que nos moralistes s’en souviennent, et que nos conformistes ne l’oublient pas ! 8. Intolérance. — À mon avis, un féd
906 8. Intolérance. — À mon avis, un fédéralisme sain doit se montrer radicalement intolérant envers toute influence totalitaire
907 totalitaire ou unitaire. Exemple : ceux qui, chez nous , font profession d’admirer la méthode d’un dictateur qui a pu écrire 
908 nt en Suisse et ce qu’ils admirent au-dehors…) 9. Notre naïveté. — Elle éclate dans certaines mesures « de prudence » prises
909 sommer. Or je connais une certaine propagande qui nous tape sur le crâne, littéralement, et cela depuis plusieurs années. De
910 cela depuis plusieurs années. De ce point de vue, nous ne sommes plus neutres en fait, nous sommes en guerre parce que victi
911 oint de vue, nous ne sommes plus neutres en fait, nous sommes en guerre parce que victimes d’une agression systématique et q
912 uotidienne contre les principes mêmes qui fondent notre État. (Je me garderai bien de donner ici un autre exemple que celui d
913 que celui de la propagande stalinienne.) Si l’on nous interdit de le dire, et de nous défendre en ripostant, pourquoi donc,
914 inienne.) Si l’on nous interdit de le dire, et de nous défendre en ripostant, pourquoi donc, demanderai-je, fortifier nos fr
915 ipostant, pourquoi donc, demanderai-je, fortifier nos frontières ? L’intégrité du territoire serait-elle plus importante de
916 rité du territoire serait-elle plus importante de nos jours que l’intégrité de la conscience nationale ? Celle-là conserve-
917 — Revenons à la géographie ! dit ce poète. Et de nous décrire une Suisse héroïque protégée par les Alpes, ce rempart, le Ju
918 ntir ! 11. Neutralité. — Pendant l’hiver 1939-40, nous avons pu lire dans les journaux cet avertissement sibyllin : « Tempér
919 ’inciter le public à des économies de charbon. On nous recommandait la tiédeur… Mais voici nos voisins belligérants qui vien
920 rbon. On nous recommandait la tiédeur… Mais voici nos voisins belligérants qui viennent nous dire : « Ceux qui ne sont ni f
921 Mais voici nos voisins belligérants qui viennent nous dire : « Ceux qui ne sont ni froids ni bouillants seront vomis ». Qu
922 c’est vis-à-vis du Christ, la parole évangélique nous apprend que cette neutralité est suprêmement désavantageuse : elle en
923 té est suprêmement désavantageuse : elle entraîne notre expulsion violente hors du Royaume de Dieu. « Je vous vomirai », dit
924 tageuse dans certains cas, dans la mesure où elle nous exclut, précisément, d’un conflit que nous jugeons mauvais. (Reste à
925 ù elle nous exclut, précisément, d’un conflit que nous jugeons mauvais. (Reste à savoir si le conflit actuel est « mauvais »
926 ir si le conflit actuel est « mauvais ». Puis, si notre tiédeur suffira pour que le monstre de la guerre nous vomisse… Mais c
927 tiédeur suffira pour que le monstre de la guerre nous vomisse… Mais ceci est une autre histoire.) On ferait bien de ne pas
928 rosse sottise. 12. Neutralité « éternelle ». — On nous parle aujourd’hui de « neutralité éternelle », et l’on va même jusqu’
929 « neutralité éternelle », et l’on va même jusqu’à nous affirmer que cette « éternité » est la base officielle de notre polit
930 que cette « éternité » est la base officielle de notre politique. Dans ce cas, notre politique reposerait sur une faute de f
931 base officielle de notre politique. Dans ce cas, notre politique reposerait sur une faute de français, j’en suis fâché. Ce n
932 premiers Confédérés déclarèrent que leur alliance devait , s’il plaisait à Dieu, durer « éternellement ». C’était une manière d
933 té « perpétuelle » : cela signifie simplement que nous refusons d’envisager son abandon, et que nous le refuserons aussi lon
934 que nous refusons d’envisager son abandon, et que nous le refuserons aussi longtemps que possible. Par exemple : tant que no
935 si longtemps que possible. Par exemple : tant que notre mission européenne ne sera pas accomplie. (L’Empire fédératif ?) Mais
936 même le pire, et même la réalisation prochaine de nos plus lointaines ambitions. Or prévoir, c’est aussi se préparer, peser
937 s faits. 14. Neutralité « morale ». — Les traités nous reconnaissent une neutralité politique et militaire. Ils nous obligen
938 issent une neutralité politique et militaire. Ils nous obligent aussi à la défendre intégralement. Mais ils ne nous imposent
939 nt aussi à la défendre intégralement. Mais ils ne nous imposent nullement une neutralité d’opinion. Renoncer au droit de nou
940 nt une neutralité d’opinion. Renoncer au droit de nous exprimer, ce n’est donc pas nous conformer aux exigences de la neutra
941 ncer au droit de nous exprimer, ce n’est donc pas nous conformer aux exigences de la neutralité. Ce peut être, dans certains
942 ’est tout simplement renoncer à une belle part de notre indépendance. C’est renoncer à nous défendre intégralement. Et c’est
943 elle part de notre indépendance. C’est renoncer à nous défendre intégralement. Et c’est enfin céder sur un point décisif pou
944 t. Et c’est enfin céder sur un point décisif pour notre indépendance future, étant donnée la nature des guerres modernes, qui
945 est neutre, on dit qu’elle est neutralisée. Taire nos opinions, aujourd’hui, ce n’est pas rester neutres, c’est accepter d’
946 ux qui voulaient « neutraliser » de cette manière notre opinion. En tant que citoyen suisse respectueux des décisions de nos
947 t que citoyen suisse respectueux des décisions de nos autorités suprêmes, j’ai donc le droit de condamner ouvertement des r
948 t des régimes étrangers qui attaquent ouvertement le nôtre . Et qu’on ne vienne pas me dire qu’une pareille attitude peut comprom
949 e dire qu’une pareille attitude peut compromettre notre indépendance : elle l’affirme au contraire ! Le devoir de l’armée est
950 e indépendance : elle l’affirme au contraire ! Le devoir de l’armée est de garantir par la force l’intégrité de notre indépend
951 armée est de garantir par la force l’intégrité de notre indépendance, et non pas seulement sa matérialité (le territoire). Le
952 condition de leur indépendance, même matérielle. Nos réalistes — toujours en retard d’une guerre, d’une époque — ont récem
953 — ont récemment découvert qu’un diplomate moderne doit être un expert commercial. Conception bien typique du siècle dernier,
954 ereusement utopique que le réalisme d’avant-hier. Notre époque n’est plus celle du grand commerce ; ni même de la grande indu
955 ni même de la grande industrie (réalisme d’hier). Notre époque est celle des religions politiques, sociales, nationales. Le c
956 s choses de la SDN et de la chose européenne, qui nous représenteraient à l’étranger — officiellement ou non — avec combien
957 plan diplomatique européen, la Suisse pourrait et devrait jouer dans notre siècle une partie magnifique. Mais il faudrait que n
958 uropéen, la Suisse pourrait et devrait jouer dans notre siècle une partie magnifique. Mais il faudrait que notre gouvernement
959 iècle une partie magnifique. Mais il faudrait que notre gouvernement comprenne ceci : La prudence est le vice des timides et
960 e et un malandrin. 42. Ceci ne veut pas dire que nous devons préférer la mort à l’interdiction de proclamer des sottises. J
961 un malandrin. 42. Ceci ne veut pas dire que nous devons préférer la mort à l’interdiction de proclamer des sottises. Je m’exc
962 ste catholique devenu national-socialiste. 44. «  Nous ne sommes pas gouvernés, nous sommes seulement administrés », répète
963 -socialiste. 44. « Nous ne sommes pas gouvernés, nous sommes seulement administrés », répète avec raison G. de Reynold. — À
964 re du nationalisme, c’est faire l’autre moitié… » Nous sommes d’accord pour condamner le tout.