1 1942, La Part du diable. Introduction. Que la connaissance du vrai danger nous guérit des fausses peurs
1 en général, et à l’Amérique en particulier, c’est de croire au diable. On sortit de table. C’était au club. Tandis que nou
2 particulier, c’est de croire au diable. On sortit de table. C’était au club. Tandis que nous attendions l’ascenseur, je di
3 ue ? répondit-il avec sa grande douceur. La porte de l’ascenseur s’ouvrait, nous entrâmes. — Ce serait enfin une situation
4 angélisèrent la Suisse expliquait à son auditoire de paysans que les martyrs sont nos meilleurs intercesseurs auprès de Di
5 eilleurs intercesseurs auprès de Dieu. Les pâtres de la Suisse alpestre sont des gens simples et réalistes. Ils crurent l’
6 ait vers les salons. Et je pensais : il nous faut de ces paraboles pour nous rappeler combien il est dangereux de dire la
7 boles pour nous rappeler combien il est dangereux de dire la vérité en général, et la vérité chrétienne en particulier. Da
8 i nous voulons être chrétiens, soit, mais sachons de quel prix cela se paye. Il y a dix-neuf siècles que ce Prix a été fix
9 e que j’ai senti ce livre se proposer à moi : car de l’auteur ou du sujet, sait-on jamais lequel a choisi l’autre ? Parler
10 ire sur lui, n’était-ce pas une manière impudente de le provoquer publiquement ? Je songeais à cette phrase de Kafka : « L
11 ovoquer publiquement ? Je songeais à cette phrase de Kafka : « L’un des artifices de séduction les plus efficaces du diabl
12 is à cette phrase de Kafka : « L’un des artifices de séduction les plus efficaces du diable, c’est de nous provoquer au co
13 de séduction les plus efficaces du diable, c’est de nous provoquer au combat. C’est comme la lutte avec une femme, qui fi
14 se. Il est vrai que pour certains auteurs, l’acte d’ écrire résulte simplement d’une démangeaison de l’esprit que l’on calm
15 tains auteurs, l’acte d’écrire résulte simplement d’ une démangeaison de l’esprit que l’on calme en grattant du papier, san
16 te d’écrire résulte simplement d’une démangeaison de l’esprit que l’on calme en grattant du papier, sans nul souci des con
17 dans ce sens que chaque vérité comporte une part d’ accusation pour notre vie, et tend à déranger cet équilibre de pieux m
18 pour notre vie, et tend à déranger cet équilibre de pieux mensonges tacitement admis, sans lesquels « l’existence deviend
19 t pour troubler une absinthe. Ainsi chaque goutte de vérité trouble la vie. Mais c’est de quoi l’on peut faire son ivresse
20 haque goutte de vérité trouble la vie. Mais c’est de quoi l’on peut faire son ivresse. Je n’aime écrire que des livres dan
21 bagarre à l’heure où nous aurions besoin, dit-on, d’ un « message positif » et rassurant ? Eh bien, surtout que l’on ne se
22 trouble empire, dans le monde, c’est qu’on a peur de regarder en face ses vraies causes. Nous croyons à trente-six-mille m
23 ns trente-six-mille périls, mais nous avons cessé de croire au Mal et de redouter le vrai Péril. Montrer la réalité du dia
24 périls, mais nous avons cessé de croire au Mal et de redouter le vrai Péril. Montrer la réalité du diable dans ce monde, c
25 lui donner son véritable Objet. C’est faire peur de la bonne manière. Et c’est peut-être le moyen de nous guérir des faus
26 de la bonne manière. Et c’est peut-être le moyen de nous guérir des fausses angoisses qui nous paralysaient, ou de l’ango
27 r des fausses angoisses qui nous paralysaient, ou de l’angoisse de faux périls. On n’est jamais plus en danger que dans le
28 angoisses qui nous paralysaient, ou de l’angoisse de faux périls. On n’est jamais plus en danger que dans les moments où l
29 moments où l’on se trompe sur la vraie direction de la menace, et où l’on tend ses énergies dans une défense orientée ver
30 l’Ennemi, mesurer sa puissance, tel est le sujet de ce petit ouvrage. Toutefois, qu’on ne s’attende pas à un portrait du
31 le : il faut tenir tous ses portraits pour autant de victoires qu’il remporte sur notre complaisance ou nos crédulités. Le
32 pparences, le bluff éhonté ou subtil, bref, l’art de faire mentir les formes. À défaut donc d’une peinture impossible, ou
33 , l’art de faire mentir les formes. À défaut donc d’ une peinture impossible, ou trop aisément pittoresque, on tentera de d
34 ossible, ou trop aisément pittoresque, on tentera de décrire l’œuvre du diable au temps présent, en face de nous et parmi
35 ceux qui prennent à coup sûr le plus grand nombre d’ hommes dans les basses époques spirituelles. ⁂ Encore un mot. On se tr
36 ⁂ Encore un mot. On se tromperait sur l’intention de ce petit traité, si l’on y voyait un effort pour « démontrer » l’exis
37 rer » l’existence du diable. Il ne s’agit ici que d’ un essai d’interpréter certains déboires de notre temps, en les rappor
38 stence du diable. Il ne s’agit ici que d’un essai d’ interpréter certains déboires de notre temps, en les rapportant à l’ac
39 ci que d’un essai d’interpréter certains déboires de notre temps, en les rapportant à l’action du seul être qui s’en réjou
2 1942, La Part du diable. Première partie. L’Incognito et la Révélation
40 ier tour C’est dans les Petits Poèmes en prose de Baudelaire que l’on peut lire la phrase la plus profonde écrite par u
41 erne sur Satan : La plus belle ruse du diable est de nous persuader qu’il n’existe pas. 2. L’Incognito Reconnaissons
42 si peu au diable que l’on m’accusera certainement d’ obscurantisme, ou simplement de manque de sérieux, si je persiste en m
43 usera certainement d’obscurantisme, ou simplement de manque de sérieux, si je persiste en mon projet de lui consacrer tout
44 ainement d’obscurantisme, ou simplement de manque de sérieux, si je persiste en mon projet de lui consacrer tout un livre.
45 e manque de sérieux, si je persiste en mon projet de lui consacrer tout un livre. Le premier tour du diable est son incogn
46 celui qui suis ». Mais le diable, qui a la manie de vouloir imiter la vérité en la retournant, le diable nous dit comme U
47 it comme Ulysse au Cyclope : Je ne suis personne. De quoi aurais-tu peur ? Vas-tu trembler devant l’inexistant ? Cependant
48 ible dénonce l’existence du diable à chaque page, de la première où il apparaît sous la forme du serpent, jusqu’à l’avant-
49 oyé par le feu du ciel et précipité dans un étang de flammes et de souffre avec ses faux prophètes, pour y être tourmenté
50 du ciel et précipité dans un étang de flammes et de souffre avec ses faux prophètes, pour y être tourmenté nuit et jour,
51 les textes originaux). Si l’on croit à la vérité de la Bible, il est impossible de douter un seul instant de la réalité o
52 croit à la vérité de la Bible, il est impossible de douter un seul instant de la réalité objective du diable. D’ailleurs,
53 ible, il est impossible de douter un seul instant de la réalité objective du diable. D’ailleurs, la Bible donne de Satan u
54 é objective du diable. D’ailleurs, la Bible donne de Satan une quantité de noms éminemment révélateurs, et qui pourraient
55 D’ailleurs, la Bible donne de Satan une quantité de noms éminemment révélateurs, et qui pourraient fournir les bases d’un
56 révélateurs, et qui pourraient fournir les bases d’ une démonologie assez complète. À tout le moins vont-ils nous permettr
57 complète. À tout le moins vont-ils nous permettre de repérer le diable sous ses déguisements quotidiens, dans la vie coura
58 pirituelles vivant et agissant sur les frontières de l’Éternel et de la Création, de l’éternité et du temps. Ce sont des i
59 nt et agissant sur les frontières de l’Éternel et de la Création, de l’éternité et du temps. Ce sont des intentions divine
60 ur les frontières de l’Éternel et de la Création, de l’éternité et du temps. Ce sont des intentions divines, des messagers
61 à la fulgurante volée, dont la vitesse est celle de la pensée — c’est pourquoi ils nous sont invisibles ; des intelligenc
62 bles ; des intelligences sans fraude, participant de l’omniscience du Créateur — c’est pourquoi nous les comprenons mal. «
63 . Mais tout ange est bon, servant Dieu. Au sommet de leur hiérarchie sont les archanges. Un seul archange a trahi sa missi
64 ssage et son être même, c’est Lucifer, le Porteur de Lumière. Satan s’est révolté, il a refusé de servir, il a refusé de t
65 teur de Lumière. Satan s’est révolté, il a refusé de servir, il a refusé de transmettre son message divin, il a voulu se f
66 s’est révolté, il a refusé de servir, il a refusé de transmettre son message divin, il a voulu se faire original, auteur d
67 ssage divin, il a voulu se faire original, auteur de son destin, porteur de ses lumières à lui. Et aussitôt, par les lois
68 se faire original, auteur de son destin, porteur de ses lumières à lui. Et aussitôt, par les lois mêmes de l’être, il est
69 s lumières à lui. Et aussitôt, par les lois mêmes de l’être, il est « tombé » du Ciel, qui est le Royaume où l’intention d
70 ombé » du Ciel, qui est le Royaume où l’intention de Dieu règne absolue. (Coupez la communication, le courant « tombe ».)
71 le courant « tombe ».) Il est devenu le messager de soi, et comme il n’est qu’un esprit pur, une fois coupé de la source
72 t comme il n’est qu’un esprit pur, une fois coupé de la source de l’Esprit, il est devenu le messager du Néant et de ses m
73 est qu’un esprit pur, une fois coupé de la source de l’Esprit, il est devenu le messager du Néant et de ses mystères. Mais
74 e l’Esprit, il est devenu le messager du Néant et de ses mystères. Mais quoique déchu, il a gardé sa science d’esprit pur.
75 stères. Mais quoique déchu, il a gardé sa science d’ esprit pur. Comme un artiste qui a perdu son génie et ne croit plus à
76 re, mais qui a conservé son « métier » et l’envie d’ être à l’avant-garde. Satan connaît encore l’Esprit et les esprits, ma
77 gloire à laquelle ils sont destinés. Ayant refusé de servir Dieu, de servir à Dieu, il est devenu celui qui sert le Rien,
78 e ils sont destinés. Ayant refusé de servir Dieu, de servir à Dieu, il est devenu celui qui sert le Rien, ne sert à Rien.
79 que diabolique. Mais il a conservé son « métier » d’ esprit pur. Il en sait plus que nous sur les mystères du monde et le s
80 t le secret des âmes qu’il abuse… 4. Le Prince de ce monde L’acte d’orgueil éblouissant et consumant qui transforma
81 u’il abuse… 4. Le Prince de ce monde L’acte d’ orgueil éblouissant et consumant qui transforma l’Ange de lumière en A
82 il éblouissant et consumant qui transforma l’Ange de lumière en Ange et Prince des ténèbres, l’a condamné à un impérialism
83 limites, donc par définition désespéré. La perte de l’Unique Nécessaire fait naître une soif essentiellement inextinguibl
84 tier ne saurait combler le vide que forme au cœur d’ une créature la conscience d’avoir quitté sa juste place dans le monde
85 de que forme au cœur d’une créature la conscience d’ avoir quitté sa juste place dans le monde. Tombé de l’éternel, Satan v
86 ’avoir quitté sa juste place dans le monde. Tombé de l’éternel, Satan veut l’infini. Tombé de l’Être, il veut l’Avoir. Mai
87 e. Tombé de l’éternel, Satan veut l’infini. Tombé de l’Être, il veut l’Avoir. Mais le problème est insoluble à tout jamais
88 l pourra tout avoir — puisqu’il est appelé Prince de ce monde dans l’Évangile — mais il n’aura jamais que ce monde-ci. Il
89 onquerra jamais le Ciel, qui est proprement l’âme de ce monde et le mystère du transcendant dans l’immanence. Il n’aura de
90 stère du transcendant dans l’immanence. Il n’aura de notre univers que la carcasse matérielle. Et c’est probablement de ce
91 que la carcasse matérielle. Et c’est probablement de ces débris de la Maison désaffectée qu’il fera le bois de chauffage d
92 e matérielle. Et c’est probablement de ces débris de la Maison désaffectée qu’il fera le bois de chauffage de son Enfer. I
93 ébris de la Maison désaffectée qu’il fera le bois de chauffage de son Enfer. Il le sait bien. C’est pourquoi son désir et
94 aison désaffectée qu’il fera le bois de chauffage de son Enfer. Il le sait bien. C’est pourquoi son désir et sa jalousie f
95 e autour de nous comme un lion rugissant en quête de sa proie, dit la Bible. Il rôde autour de nous comme un gangster obsé
96 perdre toutes ces choses, qui sont notre héritage d’ « enfants de Dieu ». C’est la seule chance du diable. Il ne la manquer
97 s ces choses, qui sont notre héritage d’« enfants de Dieu ». C’est la seule chance du diable. Il ne la manquera pas… 5.
98 5. Le Tentateur Le serpent était le plus rusé de tous les animaux des champs que l’Éternel Dieu avait fait. Il dit à l
99 Dieu a-t-il réellement dit : vous ne mangerez pas de tous les arbres du jardin ? La femme répondit au serpent : nous mange
100 u fruit des arbres du jardin. Mais quant au fruit de l’arbre qui est au milieu du jardin, Dieu a dit : vous n’en mangerez
101 n’en mangerez point et vous n’y toucherez point, de peur que vous n’en mouriez. Alors le serpent dit à la femme : vous ne
102 y a le doute ! Le premier procédé du démon, c’est de jeter un doute sur la réalité de la loi divine, et donc sur la réalit
103 du démon, c’est de jeter un doute sur la réalité de la loi divine, et donc sur la réalité elle-même et ses structures. « 
104 itude est insinuée dans un esprit, la possibilité d’ une tentation s’entrouvre. Car il n’y a pas de tentation là où n’exist
105 ité d’une tentation s’entrouvre. Car il n’y a pas de tentation là où n’existe aucune possibilité d’imaginer quelque autre
106 as de tentation là où n’existe aucune possibilité d’ imaginer quelque autre chose que l’état de fait. On dit bien : l’occas
107 ibilité d’imaginer quelque autre chose que l’état de fait. On dit bien : l’occasion fait le larron. Vous n’êtes pas tenté
108 l’occasion fait le larron. Vous n’êtes pas tenté d’ aller dans la Lune, parce que vous savez que c’est absolument impossib
109 t impossible. Mais vous seriez probablement tenté d’ y aller, si l’on vous suggérait quelque moyen de le faire. Ève ne pens
110 é d’y aller, si l’on vous suggérait quelque moyen de le faire. Ève ne pensait même pas à manger cette pomme avant que le s
111 vant que le serpent n’ait mis en doute la réalité de l’ordonnance de Dieu. À l’origine de toute tentation, il y a l’occasi
112 ent n’ait mis en doute la réalité de l’ordonnance de Dieu. À l’origine de toute tentation, il y a l’occasion entrevue d’al
113 e la réalité de l’ordonnance de Dieu. À l’origine de toute tentation, il y a l’occasion entrevue d’aller à la divinité par
114 ne de toute tentation, il y a l’occasion entrevue d’ aller à la divinité par un plus court chemin que celui du réel ; par u
115 e, en dépit des interdictions que posent les lois de la Création, l’ordre divin et la nature de l’homme. Et voici le deuxi
116 s lois de la Création, l’ordre divin et la nature de l’homme. Et voici le deuxième temps de la tentation : La femme vit q
117 la nature de l’homme. Et voici le deuxième temps de la tentation : La femme vit que l’arbre était bon à manger et agréab
118 t précieux pour ouvrir l’intelligence : elle prit de son fruit et en mangea.2 Voyez : ce n’est pas le mal en soi qui ten
119 our l’esprit. Elle ne fut pas tentée par le désir de nuire, mais par l’idée de se diviniser, ce qui paraît en somme une ex
120 pas tentée par le désir de nuire, mais par l’idée de se diviniser, ce qui paraît en somme une excellente idée. Par malheur
121 le, Dieu n’aimait pas cette idée-là et l’excluait de sa réalité. Manger cette pomme et se diviniser de cette manière convo
122 de sa réalité. Manger cette pomme et se diviniser de cette manière convoiteuse, il se trouvait qu’aux yeux de Dieu c’était
123 , — si l’utopie est l’imagination, puis le désir, d’ un bien que le réel condamne et que le plan divin ne prévoit pas. Sata
124 e Christ, lui propose trois utopies, trois moyens de gagner le monde par un plus court chemin que le sentier du Golgotha.
125 ’est plus tard, c’est après plusieurs générations de pécheurs dans l’histoire, ou de péchés dans une vie, que le mal finir
126 ieurs générations de pécheurs dans l’histoire, ou de péchés dans une vie, que le mal finira par exister en soi, — apparenc
127 delaire peut écrire : L’homme et la femme savent de naissance que dans le mal se trouve la volupté… La volupté unique et
128 a volupté unique et suprême gît dans la certitude de faire le mal. Mais ici se sont déclenchés les mécanismes compliqués
129 ici se sont déclenchés les mécanismes compliqués de la perversion, de l’autopunition d’une conscience déchirée, et du dés
130 nchés les mécanismes compliqués de la perversion, de l’autopunition d’une conscience déchirée, et du désir enfin de se dét
131 es compliqués de la perversion, de l’autopunition d’ une conscience déchirée, et du désir enfin de se détruire. Se détruire
132 tion d’une conscience déchirée, et du désir enfin de se détruire. Se détruire pour s’innocenter ! Pour échapper à sa maniè
133 éparer. C’est le mystère du suicide et la logique de Judas, la dernière tentation, la suprême utopie. 6. L’Accusateur
134 st peut-être au monde qu’une seule chose pire que de douter du bien et du réel, et c’est de douter du pardon, une fois qu’
135 e pire que de douter du bien et du réel, et c’est de douter du pardon, une fois qu’on a trahi le bien et le réel. Car dout
136 esser le mal qu’on a commis ; pour oser qualifier de faute sa propre faute ; et pour que puisse renaître la confiance qui
137 enaître la confiance qui donnera seule le courage de rebâtir. Celui qui doute du pardon ne peut pas confesser son crime, e
138 ble est cet Accusateur qui veut nous faire douter de notre pardon pour nous forcer à fuir dans les remèdes du pire. L’Apoc
139 ire. L’Apocalypse le désigne comme « l’Accusateur de nos frères, celui qui les accuse devant Dieu jour et nuit »3. C’est l
140 jour et nuit »3. C’est lui qui demandait la tête de Job devant le tribunal céleste. Non content de nous prendre à ses piè
141 ris il est le premier à nous dénoncer devant Dieu de la manière la plus impitoyable. Non par amour de la justice mais par
142 de la manière la plus impitoyable. Non par amour de la justice mais par amour de notre châtiment, par haine froide. Pour
143 yable. Non par amour de la justice mais par amour de notre châtiment, par haine froide. Pour le stérile plaisir d’avoir ra
144 timent, par haine froide. Pour le stérile plaisir d’ avoir raison. Aussi, partout où l’on condamne sans pitié son prochain
145 simple faute de logique, la grâce pour une erreur de calcul statistique. La duplicité infernale, c’est de nous faire croir
146 calcul statistique. La duplicité infernale, c’est de nous faire croire qu’il n’y a pas de juge, ni d’ordre divin du réel,
147 rnale, c’est de nous faire croire qu’il n’y a pas de juge, ni d’ordre divin du réel, et aussitôt que nous l’avons cru, de
148 de nous faire croire qu’il n’y a pas de juge, ni d’ ordre divin du réel, et aussitôt que nous l’avons cru, de nous accuser
149 divin du réel, et aussitôt que nous l’avons cru, de nous accuser de contravention devant le Juge. Ainsi la morale laïque,
150 et aussitôt que nous l’avons cru, de nous accuser de contravention devant le Juge. Ainsi la morale laïque, morale du devoi
151 ersonnel, nous accuse et nous prive en même temps de tout recours à Celui qui pardonne. Elle ne laisse aux meilleures de s
152 Celui qui pardonne. Elle ne laisse aux meilleures de ses victimes que l’héroïsme autosadique de la révolte. 7. Le Mente
153 leures de ses victimes que l’héroïsme autosadique de la révolte. 7. Le Menteur L’homme seul, dans toute la Création,
154 ixa la graine, les animaux muets sont prisonniers de l’ordre intarissablement prodigue et infaillible de l’instinct. Mais
155 l’ordre intarissablement prodigue et infaillible de l’instinct. Mais l’homme a reçu le pouvoir de parler, de créer et de
156 ble de l’instinct. Mais l’homme a reçu le pouvoir de parler, de créer et de dénaturer. Par la grâce du langage, il peut di
157 stinct. Mais l’homme a reçu le pouvoir de parler, de créer et de dénaturer. Par la grâce du langage, il peut dire le vrai 
158 l’homme a reçu le pouvoir de parler, de créer et de dénaturer. Par la grâce du langage, il peut dire le vrai ; par la fau
159 peut créer dans le prolongement des perspectives de la Création, il peut aussi créer à tort et à travers. Il peut être un
160 t et à travers. Il peut être un agent responsable de la nature naturante, mais il peut aussi faire la grève, se révolter,
161 riquer l’anti-nature ou dénature. Cette duplicité de nos pouvoirs constitue notre liberté. Elle en est à la fois le signe
162 e gloire équivoque. C’est par la liberté, à cause d’ elle, et dans elle, que nous avons le pouvoir de pécher. Car pécher c’
163 e d’elle, et dans elle, que nous avons le pouvoir de pécher. Car pécher c’est tricher avec l’ordre, opposer à la loi divin
164 à la loi divine nos dérogations égoïstes, fautes de calcul et courtes vues intéressées. Pécher c’est fausser quelque chos
165 grand paraît l’enjeu, et plus grande la tentation de gagner dans l’instant ce qu’on voit, quitte à se fermer l’invisible e
166 agit dans le monde, et c’est en provoquant l’abus de notre liberté qu’il agit en nous et nous lie. Si Ève n’avait pas été
167 en nous et nous lie. Si Ève n’avait pas été libre de manger cette pomme interdite, Ève n’aurait pu pécher, ni Adam après e
168 it pu pécher, ni Adam après elle. Ainsi la gloire de l’homme étant sa liberté, il est clair que c’est en ce point que le M
169 lair que la grande ambition satanique devait être de s’emparer de la parole dans notre bouche, pour altérer le témoignage
170 rande ambition satanique devait être de s’emparer de la parole dans notre bouche, pour altérer le témoignage dans sa sourc
171 ue dans notre langue ». Mais il est deux manières de mentir, comme il est deux manières de tromper un client. Si la balanc
172 ux manières de mentir, comme il est deux manières de tromper un client. Si la balance marque 980 grammes, vous pouvez dire
173 ontrôle il peut voir qu’on le vole, et vous savez de combien vous le volez : une vérité reste juge entre vous. Mais si le
174 e critère du vrai qui est dénaturé, il n’y a plus de contrôle possible. Et peu à peu vous oublierez que vous trichez. Pari
175 es pincées « pour le bon poids », pour le sourire de l’acheteur et la satisfaction de votre vertu. C’est là le mensonge pu
176 pour le sourire de l’acheteur et la satisfaction de votre vertu. C’est là le mensonge pur, l’œuvre propre du diable. À pa
177 artir de l’instant où vous faussez la mesure même de la vérité, toutes vos « vertus » sont au service du mal et sont compl
178 vertus » sont au service du mal et sont complices de l’œuvre du Malin. « Le diable est Menteur, et le Père du mensonge »,
179 e du mensonge », dit l’Évangile tel qu’on le cite d’ ordinaire. Ceci concerne le premier mensonge, celui qui se borne à tai
180 ui se borne à taire la vérité (tout en ne cessant de la connaître) ou à la nier (tout en sachant que pour si peu, elle ne
181 out en sachant que pour si peu, elle ne cesse pas d’ exister). Mais le texte original de ce passage est infiniment plus étr
182 e ne cesse pas d’exister). Mais le texte original de ce passage est infiniment plus étrange. « Le diable est menteur, nous
183 iable est menteur, nous dit-il, et il est le père de son propre mensonge. » Par ici nous entrons au mystère du mal. Le pèr
184 » Par ici nous entrons au mystère du mal. Le père de son mensonge est celui qui l’engendre, le conçoit par ses propres œuv
185 re, le conçoit par ses propres œuvres, en abusant d’ une vérité qu’il rejette aussitôt qu’avilie et qui mourra du monstre m
186 nsonge, par essence, n’est pas ! C’est une espèce de décréation. C’est le trompe-l’œil et le sonne-creux de l’invention bâ
187 création. C’est le trompe-l’œil et le sonne-creux de l’invention bâtarde et de l’art inauthentique. Le diable est le père
188 l’œil et le sonne-creux de l’invention bâtarde et de l’art inauthentique. Le diable est le père du faux art, de toutes ces
189 inauthentique. Le diable est le père du faux art, de toutes ces œuvres qui ne sont « ni bien ni mal », parce que l’acte do
190 supprime les mesures mêmes du beau. Il n’y a plus de fautes de goût possibles là où n’existe plus de goût, comme il n’y a
191 es mesures mêmes du beau. Il n’y a plus de fautes de goût possibles là où n’existe plus de goût, comme il n’y a pas de cri
192 s de fautes de goût possibles là où n’existe plus de goût, comme il n’y a pas de crime possible là où n’existe pas de Loi.
193 s là où n’existe plus de goût, comme il n’y a pas de crime possible là où n’existe pas de Loi. Peut-être ici découvrons-no
194 il n’y a pas de crime possible là où n’existe pas de Loi. Peut-être ici découvrons-nous la raison dernière du mensonge : c
195 on dernière du mensonge : c’est toujours le désir d’ innocence utopique. Le mensonge ordinaire n’était que l’omission ou la
196 inaire n’était que l’omission ou la contradiction d’ une vérité, qui subsistait ailleurs et nous jugeait encore. Mais le me
197 e mensonge diabolique tue le juge. Il ne part que de soi, et prolifère en autarcie, comme une monade cancéreuse, introduis
198 ncéreuse, introduisant dans l’univers ce sophisme de pure angoisse : le mensonge d’aucune vérité. 8. Légion Enfin la
199 nivers ce sophisme de pure angoisse : le mensonge d’ aucune vérité. 8. Légion Enfin la Bible appelle le diable : Légi
200 e le diable : Légion. Ici nous n’en finirions pas de commenter, conformément à la nature du sujet. Bornons-nous à marquer
201 du sujet. Bornons-nous à marquer trois directions de pensée : nous les suivrons tout au travers du livre. Si le diable est
202 bord que tout en étant un, il peut revêtir autant d’ aspects divers qu’il y a d’individus de par le monde. Mais cela peut s
203 il peut revêtir autant d’aspects divers qu’il y a d’ individus de par le monde. Mais cela peut signifier aussi que le diabl
204 ne en particulier. Et ceci nous ramène au premier de ses tours, qui était de nous faire douter de son existence même. 9
205 ci nous ramène au premier de ses tours, qui était de nous faire douter de son existence même. 9. Le sophisme L’Ange
206 mier de ses tours, qui était de nous faire douter de son existence même. 9. Le sophisme L’Ange déchu nous dit : je s
207 e déchu nous dit : je suis ton ciel, il n’y a pas d’ autre espérance. Le Prince de ce monde nous dit : il n’y a pas d’autre
208 n ciel, il n’y a pas d’autre espérance. Le Prince de ce monde nous dit : il n’y a pas d’autre monde. Le Tentateur nous dit
209 ce. Le Prince de ce monde nous dit : il n’y a pas d’ autre monde. Le Tentateur nous dit : il n’y a point de juge. L’Accusat
210 tre monde. Le Tentateur nous dit : il n’y a point de juge. L’Accusateur : il n’y a point de pardon. Le Menteur résume tout
211 ’y a point de juge. L’Accusateur : il n’y a point de pardon. Le Menteur résume tout en nous offrant un monde sans obligati
212 s, fermé sur soi mais recréé sans cesse à l’image de nos complaisances : il n’y a pas de réalité. Enfin Légion dit le dern
213 sse à l’image de nos complaisances : il n’y a pas de réalité. Enfin Légion dit le dernier blasphème : il n’y a Personne. L
214  : il n’y a Personne. Le monde moderne (et chacun de nous en lui) dans la mesure où il cultive un rêve de déification de l
215 nous en lui) dans la mesure où il cultive un rêve de déification de l’homme par sa science ; où il nie toute transcendance
216 ns la mesure où il cultive un rêve de déification de l’homme par sa science ; où il nie toute transcendance ; où il s’enfe
217 ranscendance ; où il s’enferme dans les autarcies de la puissance et de la passion ; où il noie finalement la vocation de
218 l s’enferme dans les autarcies de la puissance et de la passion ; où il noie finalement la vocation de la personne dans l’
219 de la passion ; où il noie finalement la vocation de la personne dans l’anonyme irresponsable, — le monde moderne (et chac
220 nyme irresponsable, — le monde moderne (et chacun de nous en lui) se rend à la loi de Satan. Mais du même coup il devient
221 derne (et chacun de nous en lui) se rend à la loi de Satan. Mais du même coup il devient incapable de connaître celui qu’i
222 de Satan. Mais du même coup il devient incapable de connaître celui qu’il sert ! Satan veut nous faire croire qu’il n’y a
223 rt ! Satan veut nous faire croire qu’il n’y a pas d’ autre monde. Si nous le croyons, il se trouve qu’aussitôt nous ne pouv
224 ns plus croire à Dieu ni à Satan ! S’il n’y a pas de ciel, comme nous le dit Satan, il n’y a pas non plus d’enfer, ni de M
225 l, comme nous le dit Satan, il n’y a pas non plus d’ enfer, ni de Maître de l’enfer. S’il n’y a pas de juge, il n’y a pas n
226 s le dit Satan, il n’y a pas non plus d’enfer, ni de Maître de l’enfer. S’il n’y a pas de juge, il n’y a pas non plus de f
227 atan, il n’y a pas non plus d’enfer, ni de Maître de l’enfer. S’il n’y a pas de juge, il n’y a pas non plus de faute ni d’
228 d’enfer, ni de Maître de l’enfer. S’il n’y a pas de juge, il n’y a pas non plus de faute ni d’Auteur du mal. S’il n’y a p
229 er. S’il n’y a pas de juge, il n’y a pas non plus de faute ni d’Auteur du mal. S’il n’y a pas de vérité, il n’y a pas non
230 a pas de juge, il n’y a pas non plus de faute ni d’ Auteur du mal. S’il n’y a pas de vérité, il n’y a pas non plus de mens
231 plus de faute ni d’Auteur du mal. S’il n’y a pas de vérité, il n’y a pas non plus de mensonge, ni de Menteur. S’il n’y a
232 . S’il n’y a pas de vérité, il n’y a pas non plus de mensonge, ni de Menteur. S’il n’y a personne enfin, il n’y a pas non
233 de vérité, il n’y a pas non plus de mensonge, ni de Menteur. S’il n’y a personne enfin, il n’y a pas non plus lui ! Ainsi
234 photographes, et qu’on le prive ainsi du bénéfice de l’attaque par surprise, sa tactique favorite. Nous avons donc soumis
235 ique favorite. Nous avons donc soumis l’incognito de Satan au réactif de la Révélation, qui le rend visible à l’œil spirit
236 avons donc soumis l’incognito de Satan au réactif de la Révélation, qui le rend visible à l’œil spirituel. L’objectif repé
237 arque en passant, mais nécessaire. C’est au sujet d’ une variation sur le thème de l’incognito, d’un camouflage encore, mai
238 aire. C’est au sujet d’une variation sur le thème de l’incognito, d’un camouflage encore, mais très élémentaire, c’est-à-d
239 ujet d’une variation sur le thème de l’incognito, d’ un camouflage encore, mais très élémentaire, c’est-à-dire fort bien ad
240 depuis deux ou trois siècles, il a plu au diable de revêtir une apparence moyenâgeuse qui le rend inoffensif aux yeux de
241 nu des mystères médiévaux, ou le faune à barbiche de chèvre et à longue queue des légendes populaires, il est vraiment tro
242 légendes populaires, il est vraiment trop facile d’ y croire : qui s’en donnerait encore la peine ? De fait, j’ai connu be
243 d’y croire : qui s’en donnerait encore la peine ? De fait, j’ai connu beaucoup d’hommes qui voulaient bien admettre en sou
244 it encore la peine ? De fait, j’ai connu beaucoup d’ hommes qui voulaient bien admettre en souriant un diable de ce genre,
245 qui voulaient bien admettre en souriant un diable de ce genre, mais non pas croire en Dieu ; ce qui revient à ne pas croir
246 ment peut-on perdre son temps avec ces balivernes d’ un autre âge ? » Or ce sont eux qui s’y laissent prendre ! Fascinés pa
247 s les anges, mais bien la candeur et la crédulité de ces « sceptiques », et l’impardonnable sophisme dont ils se montrent
248 u’il demandait. Et ceux qui en restent aux contes de bonnes femmes, ce sont ceux qui refusent de croire au diable à cause
249 ontes de bonnes femmes, ce sont ceux qui refusent de croire au diable à cause de l’image qu’ils s’en font, et qui est tiré
250 age qu’ils s’en font, et qui est tirée des contes de bonnes femmes. 11. Diable et péché Mais voici d’un tour plus su
251 nnes femmes. 11. Diable et péché Mais voici d’ un tour plus subtil. Imaginez que le diable aille se cacher dans le pé
252 éché même, pour nous faire croire qu’il n’a point d’ existence personnelle, qu’il n’est en somme qu’une figuration mytholog
253 s fait moins peur qu’envie. Nous connaissons tous de ces dames qui se récrient quand on leur parle du diable — c’est trop
254 s avec passion, et n’ont en général aucune espèce de trouble de conscience. Elles ne conçoivent pas le diable comme l’aute
255 ion, et n’ont en général aucune espèce de trouble de conscience. Elles ne conçoivent pas le diable comme l’auteur du péché
256 ble comme l’auteur du péché, mais comme une sorte d’ apparition de cauchemar, qui porte malheur et qui leur veut du mal. El
257 uteur du péché, mais comme une sorte d’apparition de cauchemar, qui porte malheur et qui leur veut du mal. Elles ne se dou
258 le diable fait peur. L’astuce du diable est donc de se rendre invisible dans nos tentations. Il s’arrange pour montrer pa
259 isent, au camp des vertuistes : « Pourquoi parler d’ un diable personnel ? Nous voyons bien le péché, mais pas le diable. N
260 notre seconde nature, il peut sembler qu’il agit de soi-même et sans Auteur, en vertu d’une espèce d’inertie ou de force
261 de soi-même et sans Auteur, en vertu d’une espèce d’ inertie ou de force de l’habitude. Une coutume du mal nous habite, que
262 t sans Auteur, en vertu d’une espèce d’inertie ou de force de l’habitude. Une coutume du mal nous habite, que l’on pourrai
263 teur, en vertu d’une espèce d’inertie ou de force de l’habitude. Une coutume du mal nous habite, que l’on pourrait nommer
264 est-à-dire à commettre des péchés, qui n’ont rien de très mystérieux et sont exactement catalogués : lâchetés et mensonges
265 ctement catalogués : lâchetés et mensonges, actes d’ orgueil ou d’égoïsme, vols, trahisons et méchancetés de toute espèce.
266 ogués : lâchetés et mensonges, actes d’orgueil ou d’ égoïsme, vols, trahisons et méchancetés de toute espèce. Il est possib
267 ueil ou d’égoïsme, vols, trahisons et méchancetés de toute espèce. Il est possible que le diable en personne ne se dérange
268 ne se dérange pas pour si peu. Comme un directeur de journal qui ne fait pas les chiens écrasés, se réservant pour les gra
269 rasés, se réservant pour les grandes catastrophes de la politique mondiale. Voici cependant où l’on verra percer le bout d
270 ale. Voici cependant où l’on verra percer le bout de son oreille pointue : c’est au moment précis où le péché n’est plus r
271 et veut se justifier. Dans les mécanismes hérités de nos petits péchés quotidiens, nous sentons quelquefois intervenir com
272 us sentons quelquefois intervenir comme un moment d’ accélération panique : c’est lui ! Tout d’un coup, les choses s’aggrav
273 moment d’accélération panique : c’est lui ! Tout d’ un coup, les choses s’aggravent et s’embrouillent, vous ne savez pourq
274 plus le bien du mal, le faux du vrai, la charité de la cruauté ; c’est lui qui a pris le jeu en main ! C’est lui qui inve
275 abituel en une « vertu » délirante, en un vertige de fausse innocence, en une exaltation de puissance destructive. C’est l
276 un vertige de fausse innocence, en une exaltation de puissance destructive. C’est lui qui crée les situations extrêmes, sa
277 qu’il en a fait un peu trop, dès que vous tentez de le démasquer dans le péché, il vous égare en vous faisant dire par le
278 t social insuffisant… Nous ne sommes responsables de rien. Nous ne sommes pas méchants, mais malades… 12. Le psychanaly
279 sciente ! — peut être définie comme une tentative de ramener le « péché » et le « Mal » à des mécanismes subjectifs, dont
280 e dans les cornues des alchimistes. Nous essayons de dissoudre le diable dans les eaux troubles du subconscient. Ce n’est
281 t encore qu’une variante scientifique du sophisme de l’incognito. Point de diable aux yeux des freudiens, mais seulement u
282 te scientifique du sophisme de l’incognito. Point de diable aux yeux des freudiens, mais seulement une croyance au diable,
283 mais seulement une croyance au diable, résultant de la « projection » d’un complexe de culpabilité. Guérissez ce complexe
284 royance au diable, résultant de la « projection » d’ un complexe de culpabilité. Guérissez ce complexe, vous n’aurez plus d
285 ble, résultant de la « projection » d’un complexe de culpabilité. Guérissez ce complexe, vous n’aurez plus de croyance au
286 abilité. Guérissez ce complexe, vous n’aurez plus de croyance au diable, ni donc de diable. Le démon ne serait qu’une imag
287 vous n’aurez plus de croyance au diable, ni donc de diable. Le démon ne serait qu’une image de névrose, quelque chose qui
288 i donc de diable. Le démon ne serait qu’une image de névrose, quelque chose qui se soigne, se guérit, et s’évanouit au ter
289 me du traitement. On ne demanderait pas mieux que d’ y croire. Mais les psychanalystes et les Christian Scientists eux-même
290 ur l’homme torturé par ses complexes. Or la chute de l’ange Lucifer est justement l’Accident absolu qui survint dans l’his
291 ènes occultes, le grand psychanalyste se contenta de répondre par l’anecdote suivante. Un jour une dame vient le trouver à
292 oiture fermée. Jugeant elle-même qu’il s’agissait d’ une hallucination, elle demandait à Jung de la traiter. Chacun sait ce
293 issait d’une hallucination, elle demandait à Jung de la traiter. Chacun sait ce qu’un oiseau veut dire. Le cas paraissait
294 ussitôt. Après deux ou trois mois, l’état général de cette dame s’était notablement amélioré. Elle dormait mieux, l’appéti
295 finalement se résolvaient dans toutes les règles de l’art. Mais toujours rien ne se manifestait, qui parût se rapporter d
296 rs rien ne se manifestait, qui parût se rapporter de près ou de loin au mystère des oiseaux agresseurs. Un an s’écoula, sa
297 se manifestait, qui parût se rapporter de près ou de loin au mystère des oiseaux agresseurs. Un an s’écoula, sans progrès.
298 ecin commençait à désespérer, il envisageait même d’ abandonner la cure. (Et vous savez pourtant si rien égale la patience
299 (Et vous savez pourtant si rien égale la patience d’ un psychanalyste !) Enfin, par un beau jour d’été, la malade vint pour
300 nce d’un psychanalyste !) Enfin, par un beau jour d’ été, la malade vint pour une dernière tentative. Il faisait une chaleu
301 ride. Jung possède une villa sur les rives du lac de Zurich. Il proposa que la séance eût lieu dans un petit pavillon au b
3 1942, La Part du diable. Deuxième partie. Hitler ou l’alibi
302 eHitler ou l’alibi 13. Où paraît la nécessité d’ un alibi Il est étrange de constater que depuis la fin du Moyen Âge
303 paraît la nécessité d’un alibi Il est étrange de constater que depuis la fin du Moyen Âge, depuis que Luther lui jeta
304 it peut-être reconnu précisément sous les espèces de l’encre d’imprimerie, lorsqu’il notait qu’on ne peut plus prêcher uti
305 e reconnu précisément sous les espèces de l’encre d’ imprimerie, lorsqu’il notait qu’on ne peut plus prêcher utilement le c
306 sse quotidienne. Toutefois, l’incognito du Prince de ce monde devint difficile à maintenir au cours du premier tiers de no
307 t difficile à maintenir au cours du premier tiers de notre siècle, tandis que des catastrophes trop voyantes ébranlaient l
308 catastrophes trop voyantes ébranlaient les bases de notre optimisme et de notre foi naïve dans l’élimination progressive
309 antes ébranlaient les bases de notre optimisme et de notre foi naïve dans l’élimination progressive du mal par la Science
310 la Science et l’Éducation. Sur nos têtes, au ciel de nos villes, de grands oiseaux tournaient avec un bourdonnement sinist
311 ’Éducation. Sur nos têtes, au ciel de nos villes, de grands oiseaux tournaient avec un bourdonnement sinistre, et ces oise
312 ’il était simplement M. Adolf Hitler, et personne d’ autre. Ce fut son second tour. 15. Hitler est-il l’Antéchrist ?
313 Hitler est-il l’Antéchrist ? Je tiens l’action d’ Hitler pour plus réellement diabolique que ne l’imaginent ceux qui cro
314 serait peut-être un peu trop simple. Il suffirait de le supprimer pour supprimer tout le mal qui est dans ce monde. Et, qu
315 itler est le diable, nous faisons évidemment trop d’ honneur à l’ex-caporal autrichien ; mais surtout nous nous faisons ill
316 nous nous faisons illusion sur la réelle stature de Satan. N’oublions pas que Satan est Légion ! Supprimer un dictateur n
317 maux profonds qui la travaillent. Il me souvient d’ avoir entendu en Suisse, au début de cette guerre, le grand théologien
318 l me souvient d’avoir entendu en Suisse, au début de cette guerre, le grand théologien Karl Barth répondre à la fameuse qu
319 ologien Karl Barth répondre à la fameuse question d’ Hitler et de l’Antéchrist. Voici ce qu’il disait en substance, et pour
320 Barth répondre à la fameuse question d’Hitler et de l’Antéchrist. Voici ce qu’il disait en substance, et pour autant que
321 e le trahit pas : — « Cet homme qu’il est inutile de nommer, et dont la censure d’ailleurs m’a fait oublier le nom, ce n’e
322 est certainement pas l’Antéchrist. Car il n’a pas de pouvoir sur notre salut éternel. Le véritable Antéchrist ne se révéle
323 usateur impitoyable. Et alors, nous n’aurons plus d’ autre intercesseur auprès de Dieu que Christ lui-même ! Mais l’homme a
324 re qu’un petit monsieur, un premier avant-coureur de l’Antéchrist. Et la lutte qu’il mène contre les Églises et le monde c
325 ur » et cet avertissement, nous voici bien forcés de les prendre au sérieux ! Pour n’être pas le diable en personne, on pe
326 t de même passablement diabolique. Et je vois peu d’ aspects de l’action du Führer qui ne portent en évidence l’insigne sat
327 passablement diabolique. Et je vois peu d’aspects de l’action du Führer qui ne portent en évidence l’insigne satanique.
328 our l’avoir éprouvé en sa présence par une espèce de frisson d’horreur sacrée, qu’il est le siège d’une « domination », d’
329 éprouvé en sa présence par une espèce de frisson d’ horreur sacrée, qu’il est le siège d’une « domination », d’un « trône 
330 e de frisson d’horreur sacrée, qu’il est le siège d’ une « domination », d’un « trône » ou d’une « puissance », ainsi que s
331 sacrée, qu’il est le siège d’une « domination », d’ un « trône » ou d’une « puissance », ainsi que saint Paul désigne les
332 le siège d’une « domination », d’un « trône » ou d’ une « puissance », ainsi que saint Paul désigne les esprits de second
333 sance », ainsi que saint Paul désigne les esprits de second rang, qui peuvent aussi déchoir dans un corps d’homme quelconq
334 ond rang, qui peuvent aussi déchoir dans un corps d’ homme quelconque et l’occuper comme une garnison. Je l’ai entendu pro
335 mme une garnison. Je l’ai entendu prononcer l’un de ses grands discours, et je l’ai vu à la sortie de son culte, debout d
336 t une rue étroite, mal éclairée. Une seule chaîne de SS le séparait de la foule. J’étais au premier rang, à deux mètres de
337 mal éclairée. Une seule chaîne de SS le séparait de la foule. J’étais au premier rang, à deux mètres de lui. Un bon tireu
338 la foule. J’étais au premier rang, à deux mètres de lui. Un bon tireur l’eût descendu très facilement. Mais ce bon tireur
339 dans cent occasions analogues. Voilà le principal de ce que je sais sur Hitler. On peut réfléchir là-dessus. Réfléchir ou
340 e tire pas sur un petit-bourgeois qui est le rêve de 60 millions d’hommes. On tire sur un tyran, ou sur un roi, mais les f
341 un petit-bourgeois qui est le rêve de 60 millions d’ hommes. On tire sur un tyran, ou sur un roi, mais les fondateurs de re
342 sur un tyran, ou sur un roi, mais les fondateurs de religion sont réservés à d’autres catastrophes. Certes il y a des fou
343 tastrophes. Certes il y a des fous, des accidents de circulation et des erreurs de l’histoire. Le Führer déclarait un jour
344 fous, des accidents de circulation et des erreurs de l’histoire. Le Führer déclarait un jour qu’il ne craint pas les Ravai
345 e un homme qui dit cela. Qu’il soit un instrument de la Providence comme il l’affirme, ou qu’il soit un fléau de Dieu (c’e
346 idence comme il l’affirme, ou qu’il soit un fléau de Dieu (c’est une nuance !) son destin ne dépend plus des hommes, pas m
347 !) son destin ne dépend plus des hommes, pas même de l’homme Adolf Hitler. À plus forte raison, notre jugement sur lui doi
348 être indépendant des mérites qu’il a ou n’a pas, de la sympathie ou des haines qu’il excite. Et cela définit un génie, au
349 cite. Et cela définit un génie, au sens démonique de ce terme. D’où lui vient le pouvoir surhumain qu’il développe pendant
350 définit un génie, au sens démonique de ce terme. D’ où lui vient le pouvoir surhumain qu’il développe pendant un discours 
351 qu’il développe pendant un discours ? Une énergie de cette nature, on sent très bien qu’elle n’est pas de l’individu, et m
352 cette nature, on sent très bien qu’elle n’est pas de l’individu, et même qu’elle ne saurait se manifester qu’autant que l’
353 e l’individu ne compte plus, n’est que le support d’ une puissance qui échappe à nos psychologies. Ce que je dis là serait
354 ychologies. Ce que je dis là serait du romantisme de la plus déplorable espèce si l’œuvre accomplie par cet homme — et j’e
355 é ni intelligent. Il ne s’appartient pas, n’a pas de qualités propres, de vices ou de vertus, ni même de compte en banque,
356 ne s’appartient pas, n’a pas de qualités propres, de vices ou de vertus, ni même de compte en banque, et à peine un état c
357 ent pas, n’a pas de qualités propres, de vices ou de vertus, ni même de compte en banque, et à peine un état civil. Il est
358 qualités propres, de vices ou de vertus, ni même de compte en banque, et à peine un état civil. Il est le lieu de passage
359 banque, et à peine un état civil. Il est le lieu de passage des forces de l’Histoire, le catalyseur de ces forces qui déj
360 état civil. Il est le lieu de passage des forces de l’Histoire, le catalyseur de ces forces qui déjà sont dressées devant
361 e passage des forces de l’Histoire, le catalyseur de ces forces qui déjà sont dressées devant vous ; et après cela, vous p
362 cela, vous pouvez le supprimer sans rien détruire de ce qui s’est fait par lui. Qu’il y ait eu dans ces temps aveugles à t
363 elgruber habité par un trône… On a ri. On a cessé de rire. Et ce n’était pourtant qu’un petit envoyé… 17. Le directeur
364 pourtant qu’un petit envoyé… 17. Le directeur d’ inconscience L’hitlérisme se présente à nous comme une catastrophe
365 , des hommes et des femmes subissent la contagion de ce mal, changent subitement de visage, se raidissent, se ferment à to
366 ssent la contagion de ce mal, changent subitement de visage, se raidissent, se ferment à tout raisonnement, à toute discus
367 amentales sur lesquelles s’édifia la civilisation de l’Occident depuis des millénaires ? C’est qu’Hitler est assez démoni
368 our avoir su réveiller nos démons, par une espèce de contagion, ou plutôt d’induction spirituelle. Toute son œuvre de tent
369 os démons, par une espèce de contagion, ou plutôt d’ induction spirituelle. Toute son œuvre de tentateur a consisté à prive
370 u plutôt d’induction spirituelle. Toute son œuvre de tentateur a consisté à priver les individus du sentiment de leur resp
371 ur a consisté à priver les individus du sentiment de leur responsabilité morale, donc du sens de leur culpabilité. En les
372 iment de leur responsabilité morale, donc du sens de leur culpabilité. En les fondant dans une masse passionnée, il exalte
373 alte dans l’âme des plus déshérités une sensation de puissance invincible. Il leur répète les vieux slogans du diable : « 
374 serez comme des dieux ! » En combattant le traité de Versailles, « cette Gorgone terrorisant le peuple allemand qui vivait
375 mand qui vivait désarmé et humilié sous le regard de ces milliers d’yeux » (Mein Kampf), il supprime le Juge, il supprime
376 désarmé et humilié sous le regard de ces milliers d’ yeux » (Mein Kampf), il supprime le Juge, il supprime la faute, il les
377 Juge, il supprime la faute, il les rend à l’état d’ innocence première. Enfin, en condamnant tout ce qui est universel ou
378 sion dans Wagner ; il réduit les masses à un état d’ hypnose, d’inconscience somnambulique, dans lequel le moins courageux
379 agner ; il réduit les masses à un état d’hypnose, d’ inconscience somnambulique, dans lequel le moins courageux sera capabl
380 ique, dans lequel le moins courageux sera capable d’ exécuter des actes étonnants d’énergie et de discipline mécanique, jus
381 ageux sera capable d’exécuter des actes étonnants d’ énergie et de discipline mécanique, jusqu’à la mort, terme idéal de to
382 pable d’exécuter des actes étonnants d’énergie et de discipline mécanique, jusqu’à la mort, terme idéal de toute passion.
383 iscipline mécanique, jusqu’à la mort, terme idéal de toute passion. Autrefois les hommes demandaient des directeurs de con
384 . Autrefois les hommes demandaient des directeurs de conscience. Mais la misère des temps et le sentiment d’impuissance qu
385 science. Mais la misère des temps et le sentiment d’ impuissance qu’éprouvent les individus dans notre monde démesuré, font
386 emandent et se donnent aujourd’hui des directeurs d’ inconscience collective. L’extraordinaire, l’effrayant, c’est de voir
387 collective. L’extraordinaire, l’effrayant, c’est de voir à quel point le Führer, le « guide », le directeur de l’inconsci
388 quel point le Führer, le « guide », le directeur de l’inconscience allemande, est en même temps conscient de ce qu’il fai
389 conscience allemande, est en même temps conscient de ce qu’il fait, maître de sa technique, lucide et froid comme le serpe
390 en même temps conscient de ce qu’il fait, maître de sa technique, lucide et froid comme le serpent ! Dans Mein Kampf, il
391 Mein Kampf, il donnait dès 1924, des descriptions d’ une surprenante précision du réveil des puissances souterraines qu’il
392 il des puissances souterraines qu’il se proposait d’ opérer. « Tous les grands mouvements de l’Histoire, sont des éruptions
393 proposait d’opérer. « Tous les grands mouvements de l’Histoire, sont des éruptions volcaniques de passions et de sensatio
394 nts de l’Histoire, sont des éruptions volcaniques de passions et de sensations spirituelles provoquées soit par la cruelle
395 re, sont des éruptions volcaniques de passions et de sensations spirituelles provoquées soit par la cruelle déesse de la M
396 pirituelles provoquées soit par la cruelle déesse de la Misère, soit par la torche de la parole jetée dans les masses. Seu
397 a cruelle déesse de la Misère, soit par la torche de la parole jetée dans les masses. Seule une tempête de passion brûlant
398 a parole jetée dans les masses. Seule une tempête de passion brûlante peut changer les destinées d’un peuple. » Surtout ne
399 te de passion brûlante peut changer les destinées d’ un peuple. » Surtout ne donnez pas de raisons aux masses, car de tous
400 es destinées d’un peuple. » Surtout ne donnez pas de raisons aux masses, car de tous temps, « les forces qui ont produit l
401 Surtout ne donnez pas de raisons aux masses, car de tous temps, « les forces qui ont produit les plus grands changements
402 érie qui les pousse en avant. » Ailleurs il parle de « l’appel aux forces mystérieuses » qui pourra seul réduire les « obs
403 l’au-delà, parce qu’il limite l’empire du Prince de ce monde. Les âmes vont lui échapper s’il subsiste un recours à l’Éte
404 ui domine les pouvoirs terrestres. Il s’agit donc de supprimer l’idée d’au-delà, de transcendance ; d’intégrer Dieu lui-mê
405 rs terrestres. Il s’agit donc de supprimer l’idée d’ au-delà, de transcendance ; d’intégrer Dieu lui-même dans la Nation. C
406 es. Il s’agit donc de supprimer l’idée d’au-delà, de transcendance ; d’intégrer Dieu lui-même dans la Nation. Comprenons b
407 de supprimer l’idée d’au-delà, de transcendance ; d’ intégrer Dieu lui-même dans la Nation. Comprenons bien ce que signifie
408 nifie, dans cette perspective satanique, le terme d’ État totalitaire. Un régime est totalitaire lorsqu’il prétend centrali
409 rs en une religion politique, ou en une politique d’ allure religieuse. Et cela d’autant mieux que la religion qu’il adopte
410 ou en une politique d’allure religieuse. Et cela d’ autant mieux que la religion qu’il adopte ne connaît point de transcen
411 eux que la religion qu’il adopte ne connaît point de transcendance, et que ses buts purement terrestres non seulement ne d
412 non seulement ne divergent plus des buts normaux de la politique, mais se confondent avec ceux-ci. Alors il n’y a plus de
413 s se confondent avec ceux-ci. Alors il n’y a plus de recours, plus de pardon à espérer : la communauté spirituelle ne peut
414 vec ceux-ci. Alors il n’y a plus de recours, plus de pardon à espérer : la communauté spirituelle ne peut pas en appeler à
415 tique religieuse totalitaire, a créé le type même d’ une communauté régressive, fondée sur le passé : le sang, la race, la
416 on ne pourra jamais y entrer — si l’on n’est pas de sang aryen, par exemple — car cette religion n’admet pas que « les ch
417 es choses vieilles sont passées » selon la parole de l’Apôtre. Elle n’admet pas la conversion spirituelle, à partir de laq
418 quels sont tes morts ? Religion du sang, religion de la terre et des morts, religion sanglante et mortelle, religion des c
419 des morts, des cortèges funèbres, des cérémonies d’ imprécations, des sacrifices propitiatoires, le tam-tam des tambours l
420 propitiatoires, le tam-tam des tambours lugubres, d’ hallucinants sabbats de nègres blancs ! Qui oserait encore nous souten
421 tam des tambours lugubres, d’hallucinants sabbats de nègres blancs ! Qui oserait encore nous soutenir que ce délire représ
422 s le pardon, le futur éternel, le rachat du péché d’ origine ? 18. Midas prolétarien Nous disions que le Prince de ce
423 . Midas prolétarien Nous disions que le Prince de ce monde peut tout avoir du monde sauf son âme, qui en fait le sens e
424 itler, battant la terre entière, ne jouira jamais de sa victoire. Gagnant tout, il ne gagne rien. Les religions de la terr
425 re. Gagnant tout, il ne gagne rien. Les religions de la terre sont religions de la mort. Vieille vérité théologique, que l
426 ne rien. Les religions de la terre sont religions de la mort. Vieille vérité théologique, que les malheurs du temps illust
427 n faire de plus. » Beaucoup ont découvert le sens de cette parole quand le Führer est entré dans Paris. Pour ma part, j’éc
428 rivis ce jour-là une page qui trouve ici son sens de parabole. À cette heure où Paris exsangue voile sa face d’un nuage,
429 e. À cette heure où Paris exsangue voile sa face d’ un nuage, et se tait, que son deuil soit le deuil du monde ! Nous sent
430 sait : Si Paris est détruit, j’en perdrai le goût d’ être un Européen. La Ville Lumière n’est pas détruite : elle s’est éte
431 e n’est pas détruite : elle s’est éteinte. Désert de hautes pierres sans âme, cimetière… L’envahisseur avait prophétisé :
432 devant le sentiment, devant ce qui fait la valeur de la vie. Je songe au chef de guerre qui traverse aujourd’hui ces rues
433 ce qui fait la valeur de la vie. Je songe au chef de guerre qui traverse aujourd’hui ces rues les plus émouvantes du monde
434 nde : il ne les connaîtra jamais. Il ne verra que d’ aveugles façades. Il s’est privé à tout jamais de quelque chose d’irre
435 d’aveugles façades. Il s’est privé à tout jamais de quelque chose d’irremplaçable, de quelque chose qu’on peut tuer mais
436 es. Il s’est privé à tout jamais de quelque chose d’ irremplaçable, de quelque chose qu’on peut tuer mais qu’on ne peut con
437 é à tout jamais de quelque chose d’irremplaçable, de quelque chose qu’on peut tuer mais qu’on ne peut conquérir par la for
438 les servants des Panzerdivisionen. Quelque chose d’ indéfinissable et que nous appelions Paris. C’est ici l’impuissance tr
439 appelions Paris. C’est ici l’impuissance tragique de ce conquérant victorieux : tout ce qu’il veut saisir se change à son
440 u’il veut saisir se change à son approche — Midas de l’ère prolétarienne — en fer tordu, en pierraille lépreuse. N’importe
441 du, en pierraille lépreuse. N’importe quel badaud d’ un soir de juin pouvait s’annexer pour toujours le bonheur d’un coucha
442 rraille lépreuse. N’importe quel badaud d’un soir de juin pouvait s’annexer pour toujours le bonheur d’un couchant sur Sai
443 e juin pouvait s’annexer pour toujours le bonheur d’ un couchant sur Saint-Germain-des-Prés, le grisant glissement de la fo
444 sur Saint-Germain-des-Prés, le grisant glissement de la foule de l’Arc aux Chevaux de Marly, les siècles de grandeur, de m
445 rmain-des-Prés, le grisant glissement de la foule de l’Arc aux Chevaux de Marly, les siècles de grandeur, de misère, de sa
446 isant glissement de la foule de l’Arc aux Chevaux de Marly, les siècles de grandeur, de misère, de sagesse, dont le visage
447 foule de l’Arc aux Chevaux de Marly, les siècles de grandeur, de misère, de sagesse, dont le visage de cette capitale plu
448 rc aux Chevaux de Marly, les siècles de grandeur, de misère, de sagesse, dont le visage de cette capitale plus douce et pl
449 aux de Marly, les siècles de grandeur, de misère, de sagesse, dont le visage de cette capitale plus douce et plus fière qu
450 e grandeur, de misère, de sagesse, dont le visage de cette capitale plus douce et plus fière qu’aucune autre portait les t
451 pas un conquérant. La confrontation stupéfiante de cet homme et de cette Ville était peut-être nécessaire pour faire com
452 nt. La confrontation stupéfiante de cet homme et de cette Ville était peut-être nécessaire pour faire comprendre au monde
453 bles. On ne conquiert pas avec des chars les dons de l’âme et les raisons de vivre dont on manque. Qu’ils fassent dix fois
454 s avec des chars les dons de l’âme et les raisons de vivre dont on manque. Qu’ils fassent dix fois le tour du monde ! Ils
455 e. Jusqu’au jour bien plus terrifiant que le jour de la pire vengeance où, s’arrêtant enfin, ils comprendront qu’aucun tri
456 ils ne savent ce qu’ils font ». 19. Le Fléau de Dieu S’ils ne savent pas ce qu’ils font, pitié pour eux, sans dout
457 ne nous appartient pas. Et l’hitlérisme enseigne de le mépriser. Ce n’est pas l’aspect le moins diabolique de l’œuvre du
458 priser. Ce n’est pas l’aspect le moins diabolique de l’œuvre du Führer, que le caractère de châtiment sans pitié des faibl
459 diabolique de l’œuvre du Führer, que le caractère de châtiment sans pitié des faiblesses du monde moderne, que revêt la vi
460 iolence hitlérienne. La tactique et la stratégie d’ Hitler sont en somme très simples. Il est apparu dans le monde comme u
461 e qui entrerait dans une maison et qui essaierait d’ ébranler tous les meubles. Si le meuble résiste, on n’insiste pas. Si
462 pardon. Il est le châtiment automatique, l’Attila de notre civilisation, — son Fléau de Dieu. Mais cette absence de pitié,
463 ique, l’Attila de notre civilisation, — son Fléau de Dieu. Mais cette absence de pitié, justement, nous rappelle l’un des
464 lisation, — son Fléau de Dieu. Mais cette absence de pitié, justement, nous rappelle l’un des noms du diable que nous citi
465 justifications qu’il en donne, et c’est l’espèce de douceur médiumnique dont il la revêt aux yeux de son peuple. Ce n’est
466 il la revêt aux yeux de son peuple. Ce n’est pas d’ envahir un petit pays qui est diabolique, cela s’est fait de tous les
467 un petit pays qui est diabolique, cela s’est fait de tous les temps, c’était, si l’on peut dire, égoïsme normal, soif de r
468 c’était, si l’on peut dire, égoïsme normal, soif de richesses, vulgaire impérialisme ; ce qui est diabolique, c’est d’app
469 gaire impérialisme ; ce qui est diabolique, c’est d’ appeler cela « consolider la paix » ou « fonder le nouvel ordre ». Ce
470 aix » ou « fonder le nouvel ordre ». Ce n’est pas d’ annexer la Tchécoslovaquie qui est diabolique, mais c’est de le faire
471 la Tchécoslovaquie qui est diabolique, mais c’est de le faire au lendemain d’un discours où l’on invoque « le droit des pe
472 t diabolique, mais c’est de le faire au lendemain d’ un discours où l’on invoque « le droit des peuples à disposer d’eux-mê
473 où l’on invoque « le droit des peuples à disposer d’ eux-mêmes ». Ce n’est pas de transformer le territoire du voisin en ch
474 es peuples à disposer d’eux-mêmes ». Ce n’est pas de transformer le territoire du voisin en champ de carnage et de bombard
475 s de transformer le territoire du voisin en champ de carnage et de bombardement, mais c’est d’appeler ce champ de mort « e
476 er le territoire du voisin en champ de carnage et de bombardement, mais c’est d’appeler ce champ de mort « espace vital ».
477 n champ de carnage et de bombardement, mais c’est d’ appeler ce champ de mort « espace vital ». Ce n’est pas de violer les
478 et de bombardement, mais c’est d’appeler ce champ de mort « espace vital ». Ce n’est pas de violer les traités, mais c’est
479 r ce champ de mort « espace vital ». Ce n’est pas de violer les traités, mais c’est de vouloir s’innocenter en proclamant
480 ». Ce n’est pas de violer les traités, mais c’est de vouloir s’innocenter en proclamant en tête d’un nouveau Code : « Le D
481 est de vouloir s’innocenter en proclamant en tête d’ un nouveau Code : « Le Droit est ce qui sert le peuple allemand. » Ce
482 st ce qui sert le peuple allemand. » Ce n’est pas d’ attaquer les Églises, mais c’est de le faire en nationalisant la Provi
483 » Ce n’est pas d’attaquer les Églises, mais c’est de le faire en nationalisant la Providence, et en son Nom. Ce qui est pr
484 om. Ce qui est proprement diabolique, c’est moins de faire le mal que de le baptiser bien, quand on le fait. C’est de vide
485 ement diabolique, c’est moins de faire le mal que de le baptiser bien, quand on le fait. C’est de vider tous les mots de l
486 que de le baptiser bien, quand on le fait. C’est de vider tous les mots de leur sens, de les retourner et de les lire à r
487 n, quand on le fait. C’est de vider tous les mots de leur sens, de les retourner et de les lire à rebours, selon la coutum
488 fait. C’est de vider tous les mots de leur sens, de les retourner et de les lire à rebours, selon la coutume des messes n
489 r tous les mots de leur sens, de les retourner et de les lire à rebours, selon la coutume des messes noires. C’est d’inver
490 ebours, selon la coutume des messes noires. C’est d’ invertir et de ruiner par l’intérieur les critères mêmes de la vérité.
491 la coutume des messes noires. C’est d’invertir et de ruiner par l’intérieur les critères mêmes de la vérité. Et c’est enfi
492 r et de ruiner par l’intérieur les critères mêmes de la vérité. Et c’est enfin d’aller loger le mensonge, de préférence, d
493 r les critères mêmes de la vérité. Et c’est enfin d’ aller loger le mensonge, de préférence, dans une parole de vérité !
494 vérité. Et c’est enfin d’aller loger le mensonge, de préférence, dans une parole de vérité !
495 loger le mensonge, de préférence, dans une parole de vérité !
4 1942, La Part du diable. Troisième partie. Le diable démocrate
496 sent l’œuvre du démon : l’esprit tombé, le prince de l’ici-bas, le tentateur, l’accusateur et le menteur. Il reste à dépis
497 d que toutes ses misères venaient de l’extérieur, de l’étranger, du traité de Versailles, ou des Juifs, ou des Soviets, ou
498 venaient de l’extérieur, de l’étranger, du traité de Versailles, ou des Juifs, ou des Soviets, ou des Ploutocrates anglo-s
499 e procédé que l’on reconnaît le mieux la tactique de Satan chez tous ses délégués. Mais ici, prenons garde ! (Ce livre es
500 s. Mais ici, prenons garde ! (Ce livre est plein de pièges.) Si l’on vient d’accepter les phrases qui précèdent, c’est pe
501 e ! (Ce livre est plein de pièges.) Si l’on vient d’ accepter les phrases qui précèdent, c’est peut-être assez grave pour n
502 s, délaissant le Führer et les siens, vont porter de plein fouet contre nous-mêmes. Beaucoup de démocrates croient sincère
503 nt sincèrement qu’Hitler incarne seul tout le mal de notre temps. Or ce disant, ils usent en vérité d’un procédé exactemen
504 de notre temps. Or ce disant, ils usent en vérité d’ un procédé exactement semblable à celui que l’on vient de dénoncer, mi
505 e fois non plus par le Führer, mais par le Prince de ce monde et par Légion lui-même. « Voyez, je ne suis qu’Hitler ! », n
506 e détestons. Nous lui opposons avec plus ou moins de détermination nos vieilles vertus démocratiques, — et nous ne voyons
507 est la grande porte par laquelle il entre en nous de préférence, en se faisant annoncer sous un faux nom. 22. Notre pri
508 primitivisme Chacun sait que les « primitifs » de la Mélanésie, victimes des plus célèbres études sociologiques du sièc
509 èbres études sociologiques du siècle, ont coutume de personnifier les forces mauvaises qui les menacent, les causes des cr
510 s menacent, les causes des crimes, des accidents, de la stérilité ou de la mort. Que ce soit un sorcier, un profanateur du
511 ses des crimes, des accidents, de la stérilité ou de la mort. Que ce soit un sorcier, un profanateur du sacré, un animal,
512 rofanateur du sacré, un animal, un nuage, un bout de bois colorié, toujours la cause du mal dont souffrent ces sauvages es
513 mal dont souffrent ces sauvages est indépendante d’ eux-mêmes, et doit donc être combattue et anéantie hors d’eux-mêmes. À
514 mes, et doit donc être combattue et anéantie hors d’ eux-mêmes. À l’inverse, le christianisme s’est efforcé depuis des sièc
515 le christianisme s’est efforcé depuis des siècles de nous faire comprendre que le Royaume de Dieu est en nous, que le Mal
516 s siècles de nous faire comprendre que le Royaume de Dieu est en nous, que le Mal aussi est en nous, et que le champ de le
517 us, que le Mal aussi est en nous, et que le champ de leur bataille n’est pas ailleurs que dans nos cœurs. Cette éducation
518 ans notre primitivisme. Nous rendons responsables de nos maux les gens d’en face, toujours, ou la force des choses. Si nou
519 e. Nous rendons responsables de nos maux les gens d’ en face, toujours, ou la force des choses. Si nous sommes révolutionna
520 ires, nous croyons qu’en changeant la disposition de certains objets — en déplaçant les richesses, par exemple — nous supp
521 mêmes objets, nous sauverons tout. Si nous sommes de braves démocrates, inquiets ou optimistes, nous croyons qu’en rôtissa
522 sommes encore en pleine mentalité magique. Comme de petits enfants en colère, nous battons la table à laquelle nous nous
523 eurtés. Ou comme Xerxès, nous flagellons les eaux de l’Hellespont, à grands coups de discours sur les ondes courtes. Nous
524 agellons les eaux de l’Hellespont, à grands coups de discours sur les ondes courtes. Nous oublions ce fait fondamental : c
525 nos adversaires ne diffèrent pas essentiellement de nous. Car tout homme porte dans son corps (et dans son âme) les micro
526 rte dans son corps (et dans son âme) les microbes de toutes les maladies connues, et de bien d’autres. Anéantir les signes
527 ) les microbes de toutes les maladies connues, et de bien d’autres. Anéantir les signes extérieurs de la menace ne serait
528 de bien d’autres. Anéantir les signes extérieurs de la menace ne serait nullement suffisant pour nous en délivrer. Ces si
529 ient fort bien se développer un jour, à la faveur de la misère ou de la fatigue, ou de quelque déséquilibre temporaire. L’
530 e développer un jour, à la faveur de la misère ou de la fatigue, ou de quelque déséquilibre temporaire. L’adversaire est t
531 ur, à la faveur de la misère ou de la fatigue, ou de quelque déséquilibre temporaire. L’adversaire est toujours en nous. E
532 ble, s’il existait, serait cet homme qui n’aurait d’ autre ennemi à craindre que celui qu’il loge en lui-même. 23. « Nou
533 Nous sommes tous, Hitler y compris, des « hommes de bonne volonté »4. Pourtant voyez ce qui se passe dans le monde, et di
534 par nos mains et nos pensées. C’est ici le moment de nous rappeler notre slogan démocratique : Tous les hommes se valent !
535 tention des remarques précédentes n’est nullement de justifier « les autres », que l’on avait d’abord accusés de tout le m
536 er « les autres », que l’on avait d’abord accusés de tout le mal ; ni de nous fourrer tous dans le même sac, sans distinct
537 ue l’on avait d’abord accusés de tout le mal ; ni de nous fourrer tous dans le même sac, sans distinctions, comme semblait
538 ons, comme semblait le faire en 1939 un manifeste de l’Oxford Group, largement répandu en Europe, et qui s’intitulait non
539 le du démon dans nos passions ; dans notre besoin de sensation ; dans notre crainte des responsabilités ; dans notre inert
540 e ; dans notre lâcheté vis-à-vis du grand nombre, de ses modes et de ses slogans ; dans notre ignorance du prochain ; dans
541 âcheté vis-à-vis du grand nombre, de ses modes et de ses slogans ; dans notre ignorance du prochain ; dans notre refus enf
542 re ignorance du prochain ; dans notre refus enfin de tout Absolu qui transcende et qui juge nos intérêts « vitaux » (comme
543 ls le sont toujours…). Il est juste et nécessaire de dire que le diabolisme n’est pas seulement hitlérien, que l’hitlérism
544 dirai pas que je vais laisser courir le criminel d’ en face, pour mieux me livrer d’abord à ma réforme intérieure ! Je dir
545 me réformer et la lutte pour empêcher le criminel de poursuivre ses méfaits, sont une seule et même lutte. Que servirait d
546 aits, sont une seule et même lutte. Que servirait de gagner cette lutte en moi seulement, puisque le criminel risquerait d
547 en moi seulement, puisque le criminel risquerait de me supprimer ? Que servirait de la gagner hors de moi seulement, puis
548 iminel risquerait de me supprimer ? Que servirait de la gagner hors de moi seulement, puisque je risquerais de devenir à m
549 gner hors de moi seulement, puisque je risquerais de devenir à mon tour un autre criminel ? Il n’y a qu’un crime, en moi e
550 disent-ils, donc nous n’avons pas le droit moral de nous battre contre Hitler. » — Nous sommes tous coupables, certes, ma
551 e des pompiers et des gendarmes. Cela ne fait pas de nous des saints. Cela n’implique même pas que nous soyons « meilleurs
552 us précisément diaboliques chez Hitler — sa façon de localiser tout le mal à l’étranger, pour s’innocenter — nous sommes t
553 bés dans la même erreur que lui : nous avons fait d’ Hitler une image du démon tout extérieure à notre réalité. Et pendant
554 rogrès automatique. Devant les résultats présents de cette croyance quasi universelle dans les masses et l’élite, l’on est
555 e fataliste et réconfortante que tout s’arrangera de soi-même, dans l’ensemble et à la longue, alors le Progrès devient le
556 soporifiques, une véritable drogue du démon, l’un de ses nouveaux noms. Nous avons cru à la bonté foncière de l’homme. Par
557 nouveaux noms. Nous avons cru à la bonté foncière de l’homme. Par gentillesse pour les autres, évidemment… Mais c’est touj
558 tres, évidemment… Mais c’est toujours une manière de croire aussi à sa propre bonté. Et donc de s’aveugler sur le mal que
559 anière de croire aussi à sa propre bonté. Et donc de s’aveugler sur le mal que l’on porte en soi. Et donc de ne pas se sou
560 veugler sur le mal que l’on porte en soi. Et donc de ne pas se soucier de la présence active du démon. Et donc enfin de lu
561 e l’on porte en soi. Et donc de ne pas se soucier de la présence active du démon. Et donc enfin de lui laisser le champ li
562 ier de la présence active du démon. Et donc enfin de lui laisser le champ libre pour nous duper. Nous avons cru que le mal
563 mal était relatif dans le monde, qu’il provenait d’ une mauvaise répartition des biens, d’une éducation mal comprise, de l
564 l provenait d’une mauvaise répartition des biens, d’ une éducation mal comprise, de lois inadéquates, ou de refoulements et
565 artition des biens, d’une éducation mal comprise, de lois inadéquates, ou de refoulements et d’injustices qui pouvaient êt
566 e éducation mal comprise, de lois inadéquates, ou de refoulements et d’injustices qui pouvaient être éliminés par des mesu
567 prise, de lois inadéquates, ou de refoulements et d’ injustices qui pouvaient être éliminés par des mesures adroites. Toute
568 rtie superstitieuses, ont eu pour principal effet de nous aveugler sur la réalité de l’homme, c’est-à-dire sur la réalité
569 r principal effet de nous aveugler sur la réalité de l’homme, c’est-à-dire sur la réalité essentielle du mal enraciné dans
570 mières, dans la nature et dans la définition même de l’homme en tant qu’il est humain. Nous avons été optimistes par princ
571 savoir-vivre, dirait-on, malgré tous les démentis de la réalité. Cet optimisme n’est pas la confiance naïve de l’enfant, m
572 alité. Cet optimisme n’est pas la confiance naïve de l’enfant, mais une espèce de mensonge. Exactement : une fuite devant
573 s la confiance naïve de l’enfant, mais une espèce de mensonge. Exactement : une fuite devant le réel. Car dans le réel, no
574 s scandalise et nous effraye. Alors nous essayons de conjurer le mal en le niant : c’est encore la mentalité magique. Nous
575 Nous croyons qu’en avouant le mal, nous le créons d’ une certaine manière. Nous préférons ne pas insister. Nous « refoulons
576 ce mensonge inconscients nous rendent incapables de comprendre ce qui se passe dans le monde, et nous livrent aux ruses l
577 ses les plus simples du Malin. Nous avons éliminé de notre existence bourgeoise le sens du tragique, pour nous tourner exc
578 ’il représente. Autant que la compensation fatale de nos défauts, Hitler est le négatif exact de nos idéaux optimistes, da
579 atale de nos défauts, Hitler est le négatif exact de nos idéaux optimistes, dans la mesure où ils étaient irréalistes, uto
580 édiocre, dilué et trop étendu (comme on « étend » d’ eau une solution concentrée) de divinisation prométhéenne. Nos vertus
581 comme on « étend » d’eau une solution concentrée) de divinisation prométhéenne. Nos vertus comme nos vices n’avaient plus
582 . Nos vertus comme nos vices n’avaient plus l’air de rien, et leur insignifiance était leur diabolisme. Il est trop clair
583 émocraties, en tant que telles, n’ont pas produit d’ exemples d’héroïsme et de vertu5 comparables en grandeur aux atrocités
584 en tant que telles, n’ont pas produit d’exemples d’ héroïsme et de vertu5 comparables en grandeur aux atrocités rigoureuse
585 elles, n’ont pas produit d’exemples d’héroïsme et de vertu5 comparables en grandeur aux atrocités rigoureuses produites pa
586 s par l’hitlérisme au nom d’Hitler. Ce qui a paru de grand, dans notre camp n’a pas été le fait de la démocratie bourgeois
587 aru de grand, dans notre camp n’a pas été le fait de la démocratie bourgeoise, mais de chrétiens comme Niemöller, ou de ré
588 pas été le fait de la démocratie bourgeoise, mais de chrétiens comme Niemöller, ou de révolutionnaires mystiques. Après to
589 bourgeoise, mais de chrétiens comme Niemöller, ou de révolutionnaires mystiques. Après tout, dira-t-on, c’est normal, car
590 me qui permet aux croyants, comme aux incroyants, de se manifester sans être massacrés6. Oui, mais encore faut-il qu’il y
591 qu’il y ait des croyants ! Or nous étions devenus d’ incurables sceptiques. De même que nous disions, en présence d’un mira
592 la nous gênait. Nous l’écartions irrésistiblement de nos pensées… Car si ce « trop affreux » eût été vraiment vrai, il eût
593 ffreux » eût été vraiment vrai, il eût fallu agir d’ urgence et sans réserve ; et si nous nous étions mis à agir sans réser
594 mal avait des racines dans nos vies aussi, et que d’ une certaine manière, nous l’aimions ! Voilà le grand secret. Le diabl
595 plus que des armées. Elle oppose des conceptions de la vie. C’est une espèce de guerre civile mondiale. Elle sera perdue
596 ppose des conceptions de la vie. C’est une espèce de guerre civile mondiale. Elle sera perdue si nous perdons d’abord le s
597 Elle sera perdue si nous perdons d’abord le sens de la réalité morale. Et certaines simplifications le perdent à coup sûr
598 coup sûr. Je parle ici comme un Européen qui a vu de près des phénomènes bizarres de désintégration démocratique et de con
599 Européen qui a vu de près des phénomènes bizarres de désintégration démocratique et de conversion au fascisme. La France é
600 omènes bizarres de désintégration démocratique et de conversion au fascisme. La France était démocratique dans son ensembl
601 atique dans son ensemble en 1939 ; presque chacun de ses citoyens se disait sincèrement antinazi, et se croyait parfaiteme
602 ent antinazi, et se croyait parfaitement à l’abri de ce genre de tentation. Il avait sa bonne conscience de démocrate. Hit
603 , et se croyait parfaitement à l’abri de ce genre de tentation. Il avait sa bonne conscience de démocrate. Hitler est venu
604 genre de tentation. Il avait sa bonne conscience de démocrate. Hitler est venu, le pays a capitulé, et aujourd’hui, certa
605 ertains ci-devant « intellectuels antifascistes » de Paris découvrent soudain qu’au fond, le nazisme n’est pas si mal que
606 ru et croit encore que les nazis sont des animaux d’ une tout autre race que les Américains. Elle aussi risque de découvrir
607 autre race que les Américains. Elle aussi risque de découvrir un jour qu’« après tout, ils sont des hommes comme nous ».
608 itain tenté et qui se fait une caricature du vice d’ autrui pour éviter de le reconnaître en lui-même. Je soupçonne une pro
609 fait une caricature du vice d’autrui pour éviter de le reconnaître en lui-même. Je soupçonne une profonde ambivalence dan
610 ivalence dans certaines dénonciations passionnées de l’hitlérisme : la violence du ton et le simplisme obstiné de certains
611 isme : la violence du ton et le simplisme obstiné de certains jugements trahissent une vague mauvaise conscience, une anxi
612 e pour leur propre cas ! —, je ne puis m’empêcher de penser qu’un jour ou l’autre, le pro qui sommeille dans un coin de le
613 our ou l’autre, le pro qui sommeille dans un coin de leur cœur se réveillera brusquement et les renversera. Nous avons vu
614 brusquement et les renversera. Nous avons vu trop de cas de ce genre, individuels ou collectifs. Nous avons vu la populati
615 ment et les renversera. Nous avons vu trop de cas de ce genre, individuels ou collectifs. Nous avons vu la population de l
616 iduels ou collectifs. Nous avons vu la population de la Sarre se jeter dans les bras d’Hitler en 1935. Nous avons vu la Vi
617 la population de la Sarre se jeter dans les bras d’ Hitler en 1935. Nous avons vu la Vienne sozialdemokrat se transformer
618 ienne sozialdemokrat se transformer dans l’espace de vingt-quatre heures en une Vienne délirante de passion hitlérienne. N
619 ce de vingt-quatre heures en une Vienne délirante de passion hitlérienne. Nous avons vu quelques-uns de nos amis « occupés
620 e passion hitlérienne. Nous avons vu quelques-uns de nos amis « occupés » découvrir subitement les « bons côtés » du systè
621 — Regardez le diable qui est parmi nous ! Cessez de croire qu’il ne peut ressembler qu’à Hitler ou à ses émules, car c’es
622 r le fait. Et alors seulement, vous serez en état de le dépister chez autrui, et de l’y combattre avec succès. Car alors s
623 vous serez en état de le dépister chez autrui, et de l’y combattre avec succès. Car alors seulement, vous serez guéris de
624 ec succès. Car alors seulement, vous serez guéris de votre naïveté invraisemblable devant le danger totalitaire. Vous pour
625 Vous pourrez échapper à l’hypnose. Nous manquions d’ une représentation moderne du démon. Nous avions donc cessé d’y croire
626 entation moderne du démon. Nous avions donc cessé d’ y croire. Puis nous avons imaginé que le diable était Hitler. Et le di
627 ant, plus amusant aussi, et finalement plus vrai, d’ essayer de nous représenter le diable sous les traits d’un playboy dyn
628 amusant aussi, et finalement plus vrai, d’essayer de nous représenter le diable sous les traits d’un playboy dynamique et
629 yer de nous représenter le diable sous les traits d’ un playboy dynamique et optimiste, vierge de toute pensée. Ou, si nous
630 raits d’un playboy dynamique et optimiste, vierge de toute pensée. Ou, si nous sommes par hasard des intellectuels libérau
631 asard des intellectuels libéraux, sous les traits d’ un intellectuel libéral qui ne croit pas au diable… 25. La Cinquièm
632 croit pas au diable… 25. La Cinquième Colonne de tous les temps J’ai dit du mal de tout le monde, des hitlériens et
633 ième Colonne de tous les temps J’ai dit du mal de tout le monde, des hitlériens et des démocrates, des autres, de nous,
634 de, des hitlériens et des démocrates, des autres, de nous, et donc de moi aussi. Mais si le diable est partout, sa figure
635 s et des démocrates, des autres, de nous, et donc de moi aussi. Mais si le diable est partout, sa figure se brouille. Et l
636 nner une image nette et facilement reconnaissable de la personne de Satan ? C’est que le diable est justement celui qui n’
637 nette et facilement reconnaissable de la personne de Satan ? C’est que le diable est justement celui qui n’est jamais clai
638 pour être à la fois juge et partie dans le procès de sa définition. Un être paradoxal par essence. Il est, oui, mais il es
639 néant, ce qui souhaite secrètement la destruction de l’existence, — celle des autres ou la sienne propre. Sa qualité de n’
640  celle des autres ou la sienne propre. Sa qualité de n’être pas ceci ou cela de positif lui donne une liberté indéfinie d’
641 nne propre. Sa qualité de n’être pas ceci ou cela de positif lui donne une liberté indéfinie d’action, d’incognito et d’al
642 u cela de positif lui donne une liberté indéfinie d’ action, d’incognito et d’alibis à perte de vue. Vulgaire et séduisant,
643 positif lui donne une liberté indéfinie d’action, d’ incognito et d’alibis à perte de vue. Vulgaire et séduisant, pharisien
644 ne une liberté indéfinie d’action, d’incognito et d’ alibis à perte de vue. Vulgaire et séduisant, pharisien et voyou, hypo
645 ure la plus poétique du monde, au sens romantique de ce terme. Il est beau aux yeux des naïfs qui croient que le mal doit
646 nt que le mal doit toujours être laid ; et il est d’ une laideur irrésistiblement attirante aux yeux des désabusés ou des r
647 notre raison. On sait assez que le procédé favori de la Cinquième Colonne consiste à semer la confusion dans le camp de l’
648 olonne consiste à semer la confusion dans le camp de l’adversaire en y répandant alternativement de vraies et de fausses n
649 mp de l’adversaire en y répandant alternativement de vraies et de fausses nouvelles. Voilà le diable à l’œuvre dans nos vi
650 saire en y répandant alternativement de vraies et de fausses nouvelles. Voilà le diable à l’œuvre dans nos vies ! Le maîtr
651 aître du confusionnisme dirigé ! Hitler est l’âme de la cinquième colonne du siècle, mais Satan est l’essence même de la C
652 colonne du siècle, mais Satan est l’essence même de la Cinquième Colonne au siècle des siècles. Enfin — et ceci doit me r
653 re qui, lorsqu’une dénonciation le fait déguerpir de sa cachette, va se loger de préférence chez celui qui l’a dénoncé, et
654 ion le fait déguerpir de sa cachette, va se loger de préférence chez celui qui l’a dénoncé, et qui se tient pour assuré da
655 Expression empruntée à l’Évangile par une erreur de traduction. Le texte véritable ne dit pas « Paix sur la terre aux hom
656 ritable ne dit pas « Paix sur la terre aux hommes de bonne volonté » mais « Paix sur la terre, et bonne volonté (de Dieu)
657 nté » mais « Paix sur la terre, et bonne volonté ( de Dieu) envers les hommes ». Ce qui est complètement différent. 5. Je
658 lètement différent. 5. Je ne parle pas des héros de la guerre, mais de la paix. 6. Est-ce un si grand bien ? Pour le gra
659 5. Je ne parle pas des héros de la guerre, mais de la paix. 6. Est-ce un si grand bien ? Pour le grand nombre, oui, pro
660 . Je pense à Mein Kampf, aux deux premiers livres de Rauschning, à d’innombrables documentaires publiés sur les mœurs tota
661 Kampf, aux deux premiers livres de Rauschning, à d’ innombrables documentaires publiés sur les mœurs totalitaires. Notre i
662 ité bourgeoise a été l’une des meilleures chances d’ Hitler.
5 1942, La Part du diable. Quatrième partie. Le diable dans nos dieux et dans nos maladies
663 seulement surent connaître le Christ dans le fils de Joseph, charpentier de village. Mais l’incognito et l’alibi du diable
664 tre le Christ dans le fils de Joseph, charpentier de village. Mais l’incognito et l’alibi du diable sont exactement invers
665 ble sont exactement inverses : c’est dans l’image de nos dieux qu’il va se dissimuler, au cœur même de nos idéaux et de no
666 de nos dieux qu’il va se dissimuler, au cœur même de nos idéaux et de nos vérités trop humaines, dans les religions que no
667 l va se dissimuler, au cœur même de nos idéaux et de nos vérités trop humaines, dans les religions que nous confabulons en
668 dehors de la foi révélée. Le diable nous empêche de reconnaître Dieu dans Jésus-Christ, mais à l’inverse, il nous empêche
669 s-Christ, mais à l’inverse, il nous empêche aussi de nous reconnaître dans nos idoles. Voici comment les hommes s’enchaîne
670  Dieu » qui était le moi conscient ou inconscient de ses croyants. Une image de leur impérialisme, ou une compensation rêv
671 nscient ou inconscient de ses croyants. Une image de leur impérialisme, ou une compensation rêvée de leurs défauts. Et ce
672 e de leur impérialisme, ou une compensation rêvée de leurs défauts. Et ce fut le Dieu de la Raison pour les tempéraments r
673 péraments rationalistes, le Dieu de l’Instinct et de la Passion pour les hypercivilisés, le Dieu du Succès pour les robust
674 uisé qu’en un nous. Et ces trois entités ont ceci de commun : elles ne sont responsables de rien devant personne, s’étant
675 s ont ceci de commun : elles ne sont responsables de rien devant personne, s’étant faites elles-mêmes les critères de tout
676 personne, s’étant faites elles-mêmes les critères de toute vérité purement humaine, et décrétant qu’il n’est plus d’autre
677 é purement humaine, et décrétant qu’il n’est plus d’ autre vérité. Or aux yeux de ceux qui les servent, l’homme n’existe qu
678 obéissons, nous ne sommes donc plus responsables de nos actes, mais elles le sont à notre place. Et comme elles-mêmes n’o
679 ace. Et comme elles-mêmes n’ont à répondre auprès d’ aucune instance supérieure, il n’y a plus de responsabilité nulle part
680 uprès d’aucune instance supérieure, il n’y a plus de responsabilité nulle part. Mais s’il apparaît, à l’inverse, que nous
681 s avec l’entité divinisée — parce que nous sommes d’ une autre race, d’une autre classe, ou d’une autre génération physique
682 vinisée — parce que nous sommes d’une autre race, d’ une autre classe, ou d’une autre génération physique et mentale que ce
683 s sommes d’une autre race, d’une autre classe, ou d’ une autre génération physique et mentale que celle qui détient le pouv
684 me Avenue. Il avait la tête et les poches pleines de projets philanthropiques, propres à réformer l’humanité au-delà de to
685 thropiques, propres à réformer l’humanité au-delà de tout ce que je désirerais même imaginer. Il venait d’allumer un cigar
686 out ce que je désirerais même imaginer. Il venait d’ allumer un cigare de trente cents, dont la fumée montait comme un ence
687 rais même imaginer. Il venait d’allumer un cigare de trente cents, dont la fumée montait comme un encens et devait être en
688 s mètres derrière lui suivaient le diable et l’un de ses compères. Ils observaient le Philanthrope, d’un œil critique. Un
689 de ses compères. Ils observaient le Philanthrope, d’ un œil critique. Un pauvre homme l’arrêta pour lui demander une cigare
690 pour lui demander une cigarette, dans un anglais de réfugié. Le Philanthrope sans hésiter lui remit un quarter, et poursu
691 plendissait comme un sou neuf. « Tu n’as pas peur de lui ? dit le compère au diable, il m’a l’air terriblement bon ! Et se
692 épondit rien, il souriait, tout en lisant un bout de papier qu’il venait de ramasser sur le trottoir. Après quelques insta
693 très bien ? Entre les gens du monde et le Prince de ce monde, les mots suggèrent, dans presque toutes les langues, certai
694 ré peut-être par les traditionnels avertissements de la chaire chrétienne, a toujours vu dans la « mondanité » quelque cho
695 a toujours vu dans la « mondanité » quelque chose de vaguement satanique. Il imaginerait volontiers un diable en cravate b
696 que l’on peut penser aussi des gens du monde, et de la sagesse mondaine en général. Elle a son charme et son utilité ; ma
697 t vieille, elle est trop avertie, elle offre trop de recettes éprouvées : elle finit par ne plus croire au bien, ni au sér
698 te insondable ruse des cœurs purs qui leur permet de passer au travers des cercles vicieux de la raison et de l’égoïsme « 
699 r permet de passer au travers des cercles vicieux de la raison et de l’égoïsme « bien compris ». La fonction normale de la
700 er au travers des cercles vicieux de la raison et de l’égoïsme « bien compris ». La fonction normale de la vie mondaine se
701 e l’égoïsme « bien compris ». La fonction normale de la vie mondaine serait de maintenir et d’illustrer un certain nombre
702  ». La fonction normale de la vie mondaine serait de maintenir et d’illustrer un certain nombre de devises d’élégance mora
703 normale de la vie mondaine serait de maintenir et d’ illustrer un certain nombre de devises d’élégance morale et de sagesse
704 ait de maintenir et d’illustrer un certain nombre de devises d’élégance morale et de sagesse pratique. Il n’y a rien là de
705 tenir et d’illustrer un certain nombre de devises d’ élégance morale et de sagesse pratique. Il n’y a rien là de diabolique
706 un certain nombre de devises d’élégance morale et de sagesse pratique. Il n’y a rien là de diabolique, tout au contraire.
707 e morale et de sagesse pratique. Il n’y a rien là de diabolique, tout au contraire. Le jeu mondain, s’il est bien joué, mé
708 Le jeu mondain, s’il est bien joué, ménage autant de liberté qu’il ne suppose, dit-on, d’hypocrisie. Il a le charme reposa
709 énage autant de liberté qu’il ne suppose, dit-on, d’ hypocrisie. Il a le charme reposant des formes fixes. Mais le mondain
710 s le mondain qui n’est que cela inspire une sorte d’ effroi furtif, révélateur d’une présence perverse au sein même de l’in
711 ela inspire une sorte d’effroi furtif, révélateur d’ une présence perverse au sein même de l’insignifiance. L’exactitude im
712 , révélateur d’une présence perverse au sein même de l’insignifiance. L’exactitude impitoyable de ses jugements, qui ne po
713 même de l’insignifiance. L’exactitude impitoyable de ses jugements, qui ne portent d’ailleurs que sur les apparences ; sa
714 t d’ailleurs que sur les apparences ; sa capacité d’ éliminer froidement ce qui n’est pas conforme aux goûts appris ; sa pr
715 ris ; sa propension presque maniaque à n’attacher de l’importance qu’à un détail fortuit dans un être ou une œuvre ; tous
716 tous ces traits qui pourraient dénoter l’exigence d’ un artiste véritable, prennent soudain quelque chose de satanique lors
717 artiste véritable, prennent soudain quelque chose de satanique lorsque l’on s’aperçoit de la stérilité du personnage, et d
718 uelque chose de satanique lorsque l’on s’aperçoit de la stérilité du personnage, et des effets stérilisants qu’entraîne sa
719 ation. Ce n’est pas le goût ni même le pédantisme de la forme qui est satanique, c’est le goût de la forme imitée. Le mili
720 isme de la forme qui est satanique, c’est le goût de la forme imitée. Le milieu mondain le plus suavement correct et moral
721 re préféré par le diable à ces milieux bohèmes et de mœurs relâchées qui se croiraient volontiers damnés. C’est, je crois,
722 rs improbable. 30. Le diable auteur « Point d’ œuvre sans la collaboration du démon », dit André Gide, l’un des rares
723 t au diable et qui en parlent bien. La discussion de cette sentence inconfortable ne paraît que trop indiquée dans un livr
724 ée dans un livre qui, plus que tout autre, menace d’ impliquer l’active complicité de son modèle. Jakob Boehme raconte qu’o
725 out autre, menace d’impliquer l’active complicité de son modèle. Jakob Boehme raconte qu’on demandait à Satan : Pourquoi e
726 éniale si nous considérons les divers sens du nom d’ auteur. L’Auteur de toutes choses est leur autorité. Il s’autorise à l
727 idérons les divers sens du nom d’auteur. L’Auteur de toutes choses est leur autorité. Il s’autorise à l’infini dans Sa Cré
728 i-même sa grandeur « et l’étendue célèbre l’œuvre de ses mains ». Le diable a voulu faire aussi son propre Ouvrage. Mais i
729 est là pour les guider. Et comment faire la part de son incitation ? Tout écrivain digne du nom, tout créateur en général
730 hoisissant tel mot, tel rythme ou tel accent ; et de quel insondable imbroglio cette petite phrase toute claire en apparen
731 fallu pour polir un galet…) En vérité, la volonté de création, le besoin d’écrire, simplement, coïncide en sa profondeur a
732 et…) En vérité, la volonté de création, le besoin d’ écrire, simplement, coïncide en sa profondeur avec la tentation lucifé
733 es meilleurs se voient tentés plus que les autres d’ accepter les conseils de ce génial Souffleur. « C’est avec les beaux s
734 entés plus que les autres d’accepter les conseils de ce génial Souffleur. « C’est avec les beaux sentiments qu’on fait de
735 eur. « C’est avec les beaux sentiments qu’on fait de la mauvaise littérature », dit encore Gide. Et William Blake estimait
736 l’on apporte à son appui l’exemple un peu facile d’ innombrables ouvrages édifiants. Non, ce n’est pas la vraie beauté des
737 fausse beauté (donc leur laideur réelle) qui fait de la mauvaise littérature. Mais voilà bien la misère du vieux monde. Au
738 sion. Nous ne savions plus concevoir et illustrer de vrais beaux sentiments, de vrais types de vie haute, de vrais idéaux
739 concevoir et illustrer de vrais beaux sentiments, de vrais types de vie haute, de vrais idéaux qui propagent une énergie,
740 lustrer de vrais beaux sentiments, de vrais types de vie haute, de vrais idéaux qui propagent une énergie, une virtu conta
741 is beaux sentiments, de vrais types de vie haute, de vrais idéaux qui propagent une énergie, une virtu contagieuse. Presqu
742 aliste sécrétée par la bourgeoisie est tributaire de la morale bourgeoise : elle reste hélas au niveau de l’ennemi. Sa con
743 este hélas au niveau de l’ennemi. Sa condamnation de la morale participe de la légèreté, de l’arbitraire et de l’insignifi
744 l’ennemi. Sa condamnation de la morale participe de la légèreté, de l’arbitraire et de l’insignifiance qui signalaient la
745 ndamnation de la morale participe de la légèreté, de l’arbitraire et de l’insignifiance qui signalaient la morale bourgeoi
746 rale participe de la légèreté, de l’arbitraire et de l’insignifiance qui signalaient la morale bourgeoise. La guerre actue
747 ye tout cela, mais nous laissera Les Sept Piliers de la Sagesse. Fermons cette parenthèse. Le vrai danger subsiste. Commen
748 er l’apport du diable aux plus sublimes créations de l’esprit ? Je ne pense pas qu’aucun créateur puisse se faire d’illusi
749 Je ne pense pas qu’aucun créateur puisse se faire d’ illusions là-dessus. « Aux sources du poème » et dans nos encriers, da
750 ’est pas seul, mais il est là. La solution, c’est de le faire travailler autrement qu’il ne l’entendait. Ou disons mieux :
751 la fin seule qui « justifie » les moyens ambigus de l’art. Et si le diable collabore, tant pis pour lui : la dédicace est
752 tant pis pour lui : la dédicace est le vrai sens de l’œuvre. Elle ravit au démon le bénéfice de ses conseils intéressés.
753 sens de l’œuvre. Elle ravit au démon le bénéfice de ses conseils intéressés. Un écrivain, s’il est bon artisan, vaudra to
754 un but qu’il ignore ; car sa faiblesse unique est de ne pas croire au bien. 31. Le pacte avec le diable Peter Schlem
755 au diable devint très riche, mais perdit le goût de vivre. C’est l’une des plus belles fables de ce monde, l’une des plus
756 goût de vivre. C’est l’une des plus belles fables de ce monde, l’une des plus tristes dans sa fantaisie géniale, et peu so
757 e géniale, et peu sont plus profondes avec autant de grâce. Que signifie cette ombre dans le conte ? Je pense que c’est la
758 dans le conte ? Je pense que c’est la créativité de l’homme, sa liberté, c’est-à-dire son « âme ». (Et c’est pourquoi l’u
759  ». (Et c’est pourquoi l’un des premiers malheurs de notre héros est de ne plus pouvoir aimer ni être aimé.) J’ai dit que
760 uoi l’un des premiers malheurs de notre héros est de ne plus pouvoir aimer ni être aimé.) J’ai dit que la liberté de l’hom
761 voir aimer ni être aimé.) J’ai dit que la liberté de l’homme réside dans son pouvoir unique au monde de suivre l’ordre — o
762 e l’homme réside dans son pouvoir unique au monde de suivre l’ordre — ou de tricher. S’il suit l’ordre de la Création, sa
763 on pouvoir unique au monde de suivre l’ordre — ou de tricher. S’il suit l’ordre de la Création, sa liberté s’accroît, et s
764 suivre l’ordre — ou de tricher. S’il suit l’ordre de la Création, sa liberté s’accroît, et son pouvoir de choix porte sur
765 la Création, sa liberté s’accroît, et son pouvoir de choix porte sur des enjeux toujours plus vastes. Mais s’il triche pou
766 erté, sa proie le lie. « Que servirait à un homme de gagner le monde s’il perdait son âme ? », dit l’Évangile. Le Pacte av
767 ctement à gagner le monde au prix de notre âme et de notre ombre, au prix de notre libre faculté de créer dans le réel — o
768 et de notre ombre, au prix de notre libre faculté de créer dans le réel — ou à côté. Tant que vous faites effort pour vous
769 dans la vérité, vous conservez la pleine faculté de dire le vrai ou de mentir. Mais une fois que vous avez menti, vous êt
770 us conservez la pleine faculté de dire le vrai ou de mentir. Mais une fois que vous avez menti, vous êtes lié par le menso
771 t, vous conservez la possibilité à chaque instant de monter ou de redescendre. Plus vous montez et plus l’effort devient p
772 rvez la possibilité à chaque instant de monter ou de redescendre. Plus vous montez et plus l’effort devient pénible, et pl
773 abîme vous tente, mais l’horizon s’étend. Si tout d’ un coup votre fatigue ou quelque vertige l’emporte, ou si votre pied g
774 à rouler vers l’abîme ou simplement vers le fond de la vallée, où vit le commun des mortels. Vous êtes délivré de votre e
775 , où vit le commun des mortels. Vous êtes délivré de votre effort, tout est facile, il n’y a qu’à se laisser aller. Vous «
776 ches et populeux. Mais vous avez perdu la liberté de monter ou de descendre à votre choix. Vous êtes pris dans un mécanism
777 eux. Mais vous avez perdu la liberté de monter ou de descendre à votre choix. Vous êtes pris dans un mécanisme à sens uniq
778 nique, vous n’êtes qu’un corps abandonné aux lois de la gravitation, et toutes vos gesticulations ne feront qu’accélérer l
779 cela que résume et figure l’expression légendaire de pacte avec le diable. Le peuple sent obscurément qu’un succès trop ra
780 un succès trop rapide dans le monde doit provenir d’ une sorte de marché conclu avec le Prince de ce monde, et dont le prix
781 op rapide dans le monde doit provenir d’une sorte de marché conclu avec le Prince de ce monde, et dont le prix est notre l
782 venir d’une sorte de marché conclu avec le Prince de ce monde, et dont le prix est notre liberté. Et c’est pourquoi la mor
783 dentition ! Comment cette belle humeur et ce goût de mieux vivre pourraient-ils être diaboliques ? Les démons, ce sont les
784 iaboliques ? Les démons, ce sont les nazis, vêtus de noir, grinçant des dents, mal nourris et semant la mort. Mais quoi ?
785 . Mais quoi ? Vous voulez gagner le monde à coups de dollars, et les méchants nazis veulent le gagner à coups de canon. Vo
786 , et les méchants nazis veulent le gagner à coups de canon. Vous pensez que le premier système a l’avantage d’être plus hy
787 . Vous pensez que le premier système a l’avantage d’ être plus hygiénique. C’est peut-être vrai. Mais je doute que ce soit
788 étaient sûres ! Je ne vais pas prêcher une morale de l’échec. Succès ou insuccès ne signifient rien en soi, tout dépend du
789 is il faut bien rappeler que le plus grand succès de toute l’Histoire, ce fut la mort ignominieuse du Christ en croix. Ce
790 ’âme du monde, que nous avions vendue pour un peu de plaisir… 32. Le mal du siècle : la dépersonnalisation Le philan
791 , l’auteur, et l’homme qui réussit, cette galerie de victimes est classique au point d’en être presque démodée. Car Satan
792 cette galerie de victimes est classique au point d’ en être presque démodée. Car Satan marche avec son temps, et paraît se
793 Satan marche avec son temps, et paraît se soucier de moins en moins de persuader l’individu, dans une époque où celui-ci n
794 son temps, et paraît se soucier de moins en moins de persuader l’individu, dans une époque où celui-ci n’existe guère. Son
795 eilleure interprétation des phénomènes collectifs d’ aujourd’hui fut donnée vers 1848 par l’écrivain danois Søren Kierkegaa
796 vain danois Søren Kierkegaard, le penseur capital de notre ère. Voici ce que l’on peut lire dans son journal intime : En
797 e et des époques qui discutaient sans fin les cas de possession, c’est-à-dire d’individus particuliers se livrant au mal,
798 ient sans fin les cas de possession, c’est-à-dire d’ individus particuliers se livrant au mal, je voudrais écrire un livre
799 ontrer comment l’humanité qui se donne au diable, de nos jours, le fait en masse. C’est pour cela que les gens se rassembl
800 pour que l’hystérie naturelle et animale s’empare d’ eux, pour qu’ils se sentent stimulés, enflammés et hors d’eux-mêmes. L
801 our qu’ils se sentent stimulés, enflammés et hors d’ eux-mêmes. Les scènes du Blocksberg sont le pendant exact de ces plais
802 s. Les scènes du Blocksberg sont le pendant exact de ces plaisirs démoniaques, qui consistent à se perdre soi-même, à se l
803 ne sait plus ce que l’on est en train de faire ou de dire, on ne sait plus ce qui parle à travers vous, tandis que le sang
804 e, et avant tous, le principe diabolique créateur de la masse : fuir sa propre personne, n’être plus responsable, donc plu
805 lus coupable, et devenir du même coup participant de la puissance divinisée de l’Anonyme. Or l’Anonyme a bien des chances
806 u même coup participant de la puissance divinisée de l’Anonyme. Or l’Anonyme a bien des chances d’être celui qui aime à di
807 sée de l’Anonyme. Or l’Anonyme a bien des chances d’ être celui qui aime à dire : Je ne suis Personne… La foule, c’est le l
808 re : Je ne suis Personne… La foule, c’est le lieu de rendez-vous des hommes qui se fuient, eux et leur vocation. Elle n’es
809 eux et leur vocation. Elle n’est personne et tire de là son assurance dans le crime. Il ne s’est pas trouvé un seul solda
810 ité. Mais trois ou quatre femmes, dans l’illusion d’ être une foule, et que personne peut-être ne saurait dire qui l’avait
811 !… Car une foule est une abstraction, qui n’a pas de mains, mais chaque homme isolé a, dans la règle, deux mains, et lorsq
812 nt ses mains, non celles du voisin, et non celles de la foule qui n’a pas de mains.9 Reconnaissons ici la vieille tactiq
813 du voisin, et non celles de la foule qui n’a pas de mains.9 Reconnaissons ici la vieille tactique, la sempiternelle tac
814 ci la vieille tactique, la sempiternelle tactique de Satan. Dès la première tentation en Eden, il a recours au même et uni
815 omme qu’il n’est pas responsable, qu’il n’y a pas de Juge, que la Loi est douteuse, qu’on ne saura pas, et que d’ailleurs,
816 e coup réussi, on sera Dieu soi-même, donc maître de fixer le Bien et le Mal à sa guise. Alors ils entendirent la voix d
817 e Mal à sa guise. Alors ils entendirent la voix de l’Éternel Dieu, qui parcourait le jardin vers le soir, et l’homme et
818 l’homme et sa femme se cachèrent loin de la face de l’Éternel Dieu, au milieu des arbres du jardin. Mais l’Éternel Dieu a
819 t’a appris que tu es nu ? Est-ce que tu as mangé de l’arbre dont je t’avais défendu de manger ? L’homme répondit : La fem
820 ue tu as mangé de l’arbre dont je t’avais défendu de manger ? L’homme répondit : La femme que tu as mise auprès de moi m’a
821 : La femme que tu as mise auprès de moi m’a donné de l’arbre, et j’en ai mangé. Et l’Éternel Dieu dit à la femme : Pourquo
822 ils disent que c’était l’autre. Ainsi les hommes de notre temps, poussés par leurs « complexes de culpabilité » et fuyant
823 mes de notre temps, poussés par leurs « complexes de culpabilité » et fuyant devant l’aveu de leurs fautes, vont se cacher
824 omplexes de culpabilité » et fuyant devant l’aveu de leurs fautes, vont se cacher dans les arbres, dans la foule. C’est-à-
825 ù l’on est, à coup sûr, le plus « loin de la face de l’Éternel ». Pour qu’il n’y ait plus de responsabilité, il faut qu’il
826 e la face de l’Éternel ». Pour qu’il n’y ait plus de responsabilité, il faut qu’il n’y ait plus personne. Or si j’appelle
827 plus personne. Or si j’appelle et qu’il n’y a pas de réponse, je dis qu’il n’y a personne ; la personne est en nous ce qui
828 personne ; la personne est en nous ce qui répond de nos actes, ce qui est « capable de réponse », ou responsable ; dans u
829 ce qui répond de nos actes, ce qui est « capable de réponse », ou responsable ; dans une foule il n’y a plus de réponse i
830  », ou responsable ; dans une foule il n’y a plus de réponse individuelle ; pour qu’il n’y ait plus de responsable, il suf
831 de réponse individuelle ; pour qu’il n’y ait plus de responsable, il suffit qu’il y ait une masse. Satan va donc créer les
832 donc créer les masses. Nous tenons ici le secret de sa grande stratégie : produire le péché en série et rationaliser la c
833 l’évolution générale du temps, favorisent ce Plan de mille manières. Tout concourt, dans le cadre de nos vies, à nous priv
834 n de mille manières. Tout concourt, dans le cadre de nos vies, à nous priver du sentiment d’être une personne responsable.
835 le cadre de nos vies, à nous priver du sentiment d’ être une personne responsable. Nous vivons tous, de plus en plus, dans
836 Nous vivons tous, de plus en plus, dans un monde de transe collective. Nous participons tous, de plus en plus, à des form
837 s participons tous, de plus en plus, à des formes de vie étrangères à notre sort particulier et à nos aptitudes normales.
838 par leurs chefs. Tout cela contribue à l’arracher de sa vie propre, où il ne se passerait jamais rien de semblable. Quant
839 sa vie propre, où il ne se passerait jamais rien de semblable. Quant aux inconvénients et à l’ennui de cette vie propre,
840 e semblable. Quant aux inconvénients et à l’ennui de cette vie propre, autrefois jugés normaux, ils apparaissent de plus e
841 acceptables à mesure que se répandent les notions de Progrès indéfini, de confort à tout prix, de succès rapide, et à mesu
842 que se répandent les notions de Progrès indéfini, de confort à tout prix, de succès rapide, et à mesure que s’efface la cr
843 ions de Progrès indéfini, de confort à tout prix, de succès rapide, et à mesure que s’efface la croyance dans un au-delà q
844 oyance dans un au-delà qui, autrefois, permettait de prendre ses maux en patience. D’une part, l’individu moderne est inci
845 Elles poussent l’homme à rechercher les occasions d’ être dépossédé de soi. Elles font de chacun de nous un sujet prédispos
846 homme à rechercher les occasions d’être dépossédé de soi. Elles font de chacun de nous un sujet prédisposé à l’hypnose col
847 les occasions d’être dépossédé de soi. Elles font de chacun de nous un sujet prédisposé à l’hypnose collective, une victim
848 ons d’être dépossédé de soi. Elles font de chacun de nous un sujet prédisposé à l’hypnose collective, une victime virtuell
849 se collective, une victime virtuelle des passions de masse. Partout où un individu prend sa vie personnelle en dégoût, l’h
850 sme trouve un candidat. Certes, il n’y aurait pas de masses possibles, au sens précis de concentration d’hommes, sans la r
851 ’y aurait pas de masses possibles, au sens précis de concentration d’hommes, sans la radio, les haut-parleurs, la presse e
852 masses possibles, au sens précis de concentration d’ hommes, sans la radio, les haut-parleurs, la presse et les transports
853 rue seulement. Elle est dans la pensée des hommes de ce temps, elle a ses sources au plus intime des existences individuel
854 seulement qu’on peut la dénoncer. 33. La tour de Babel Si la personne se perd dans le monde moderne, c’est que les
855 uoi les avoir agrandis, depuis un siècle, au-delà de toute mesure ? Pourquoi veut-on du grand, du plus grand à tout prix ?
856 x ? Sinon justement pour s’y perdre ! À l’origine de toutes ces choses trop vastes et trop complexes qui nous entourent sa
857 niques, sociales et financières. Mais à l’origine de ces « nécessités » elles-mêmes, je pressens notre obscur désir de fui
858 tés » elles-mêmes, je pressens notre obscur désir de fuite dans l’anonyme irresponsable, et la très vieille tentation de c
859 onyme irresponsable, et la très vieille tentation de compenser nos inquiétudes par l’utopie de l’eritis sicut dii. Or quan
860 ntation de compenser nos inquiétudes par l’utopie de l’eritis sicut dii. Or quand nous nous perdons, c’est le diable qui n
861 est le diable encore qui nous accueille au sommet de notre ascension. Comme le rappelle l’histoire de la tour de Babel, qu
862 de notre ascension. Comme le rappelle l’histoire de la tour de Babel, qui est le grand mythe de notre temps. Bien qu’il n
863 scension. Comme le rappelle l’histoire de la tour de Babel, qui est le grand mythe de notre temps. Bien qu’il ne soit pas
864 toire de la tour de Babel, qui est le grand mythe de notre temps. Bien qu’il ne soit pas mentionné dans le récit du chapit
865 soit pas mentionné dans le récit du chapitre onze de la Genèse, le diable est de toute évidence le principal Entrepreneur
866 écit du chapitre onze de la Genèse, le diable est de toute évidence le principal Entrepreneur de la Tour primitive et de s
867 e est de toute évidence le principal Entrepreneur de la Tour primitive et de ses répliques modernes. (Je ne fais pas allus
868 le principal Entrepreneur de la Tour primitive et de ses répliques modernes. (Je ne fais pas allusion aux gratte-ciel, ces
869 ioses et toujours un peu bêtes, mais à l’ensemble de nos entreprises économiques, politiques et urbaines.) Reprenons ce ré
870 afin que nous ne soyons pas dispersés sur la face de toute la terre. » Vous reconnaissez Satan à ce doute qui les prend, à
871 ute qui les prend, à ce besoin qu’ils ont soudain de s’assurer de leur bonheur, dans le cas présent, leur unité. Et c’est
872 rend, à ce besoin qu’ils ont soudain de s’assurer de leur bonheur, dans le cas présent, leur unité. Et c’est pourquoi ils
873 r voulu s’assurer qu’elle le suivait ; par manque de foi. Vous reconnaissez cette idée romantique qu’il leur suggère : fai
874 ers devait prévoir, sera nécessairement l’inverse de ce qu’ils voulaient. Si vous mangez la pomme vous ne mourrez pas, dis
875 ir de là que « l’Éternel les dispersa sur la face de toute la terre ». Cette déconvenue mémorable est attribuée par le réc
876 e est attribuée par le récit biblique à la colère de l’Éternel, qui « descendit pour voir la ville et la tour que bâtissai
877 ont entrepris ! » On dirait qu’il veut les punir d’ être aussi bêtes. Mais le Dante imagine qu’ils se seraient bien punis
878 ’y avait qu’à les laisser aller ! Dans son Traité de l’éloquence vulgaire, il propose une explication fort naturelle du ph
879 opose une explication fort naturelle du phénomène de confusion des langues. Si les hommes ne se sont plus entendus lors de
880 ne se sont plus entendus lors de la construction de ce premier gratte-ciel, c’est que l’entreprise était trop vaste, simp
881 lement. En effet, pour mener à chef l’édification de la tour, ils furent obligés de se diviser en équipes spécialisées. Le
882 chef l’édification de la tour, ils furent obligés de se diviser en équipes spécialisées. Les uns faisaient la brique qui l
883 ées. Les uns faisaient la brique qui leur servait de pierre, les autres le bitume qui leur servait de ciment ; d’autres en
884 de pierre, les autres le bitume qui leur servait de ciment ; d’autres encore n’étaient chargés que de monter les matériau
885 de ciment ; d’autres encore n’étaient chargés que de monter les matériaux, d’autres de bâtir les murs, de charpenter, ou d
886 ent chargés que de monter les matériaux, d’autres de bâtir les murs, de charpenter, ou de crépir. À cause de l’énormité de
887 monter les matériaux, d’autres de bâtir les murs, de charpenter, ou de crépir. À cause de l’énormité de l’entreprise, ces
888 ux, d’autres de bâtir les murs, de charpenter, ou de crépir. À cause de l’énormité de l’entreprise, ces équipes spécialisé
889 e charpenter, ou de crépir. À cause de l’énormité de l’entreprise, ces équipes spécialisées vivaient à part les unes des a
890 lles se créèrent des langages techniques, jargons de métier, patois divers, tant qu’à la fin elles ne se comprirent plus.
891 fin elles ne se comprirent plus. La multiplicité de langues était née du travail lui-même. Mais ce travail bientôt traîna
892 n sommes à peu près là. L’anarchie sans précédent de notre vocabulaire, en politique surtout, suffirait à trahir l’absence
893 n politique surtout, suffirait à trahir l’absence de toute commune mesure dans notre siècle. Nous avons vu trop grand pour
894 nos pouvoirs, nous avons perdu en chemin la règle d’ or, l’étalon-homme. Et pour avoir été trop vite en tout, nous avons pe
895 our avoir été trop vite en tout, nous avons perdu de vue la mesure et le sens des fins dernières de l’œuvre humaine. L’ind
896 du de vue la mesure et le sens des fins dernières de l’œuvre humaine. L’individu s’égare dans ces vastes rouages, il s’y s
897 son préfabriquée avec une telle rapidité que l’un d’ eux resta pris dans la bâtisse, dont il fallut détruire toute une sect
898 r mieux dire la babélisation des cadres matériels de notre vie. L’invention des machines a brusquement accru nos possibili
899 des machines a brusquement accru nos possibilités d’ action sur la matière. L’industrie et le commerce ont provoqué la brus
900 e et le commerce ont provoqué la brusque création de villes énormes, dix ou cent fois plus grandes que celles qu’on connai
901 ent d’ailleurs toute l’instabilité. La population de l’Europe a plus que doublé en cent ans ; ses richesses ont été décupl
902 tion industrielle centuplée. Et le concours enfin de tous ces éléments a provoqué la création d’armées considérables, agra
903 enfin de tous ces éléments a provoqué la création d’ armées considérables, agrandissant le phénomène de la guerre, brusquem
904 d’armées considérables, agrandissant le phénomène de la guerre, brusquement, aux proportions de la nation entière. Ainsi,
905 nomène de la guerre, brusquement, aux proportions de la nation entière. Ainsi, par une mutation brusque, dans l’espace de
906 e. Ainsi, par une mutation brusque, dans l’espace de cinquante à cent ans, la société est devenue trop gigantesque pour êt
907 té est devenue trop gigantesque pour être dominée d’ un seul regard. Une seule intelligence ne peut plus en comprendre et e
908 aux plus grossiers et aux plus ignorants le droit de voter et de dire leur mot sur tout : ce ne sera pas pire.) Alors le v
909 ssiers et aux plus ignorants le droit de voter et de dire leur mot sur tout : ce ne sera pas pire.) Alors le vertige de Ba
910 sur tout : ce ne sera pas pire.) Alors le vertige de Babel s’empare de l’esprit humain. Comme tout vertige, il naît de l’i
911 era pas pire.) Alors le vertige de Babel s’empare de l’esprit humain. Comme tout vertige, il naît de l’incapacité de suppo
912 e de l’esprit humain. Comme tout vertige, il naît de l’incapacité de supporter des altitudes ou des dimensions inhumaines.
913 main. Comme tout vertige, il naît de l’incapacité de supporter des altitudes ou des dimensions inhumaines. Comme tout vert
914 fut plus savant, et jamais il n’eut l’impression de comprendre aussi mal ce qui se passe dans son monde. Jamais avec plus
915 ce qui se passe dans son monde. Jamais avec plus de ferveur il n’approcha des buts de son Progrès, jamais non plus sa bar
916 amais avec plus de ferveur il n’approcha des buts de son Progrès, jamais non plus sa barbarie ne se montra mieux armée pou
917 e, et soyez comme des dieux, oubliez votre mesure d’ hommes ! » Mais plus on monte et mieux on tombe. Allez chercher mainte
918 it jamais rien, des gouvernants qui ont trop peur d’ elle pour l’informer, — une fuite universelle dans l’anonyme, une énor
919 me cacophonie dominée par le bruit des bombes. Un de ces fous à la sagesse bavarde, comme on en trouve dans les cafés, ava
920 comme on en trouve dans les cafés, avait coutume de me faire la théorie suivante : tout le mal vient des étages, inventio
921 ent pour abriter les hommes. Il n’est pas naturel de lui ajouter des étages. Car en tombant du quatrième, par exemple, on
922 l croie la science ou invoque le mystère, l’homme d’ aujourd’hui montre une constante et masochiste propension à se vouloir
923 pension à se vouloir irresponsable. Tout lui sert d’ alibi, tout lui est bon pour prouver qu’il n’y était pas, que ce n’est
924 sa passion lui dit : c’était vital, il n’y a pas de faute. Ceux de mes contemporains qui se représentent l’homme comme un
925 dit : c’était vital, il n’y a pas de faute. Ceux de mes contemporains qui se représentent l’homme comme un complexe de gl
926 ins qui se représentent l’homme comme un complexe de glandes endocrines, d’enzymes et de vitamines, ont de plus en plus de
927 l’homme comme un complexe de glandes endocrines, d’ enzymes et de vitamines, ont de plus en plus de peine à concevoir que
928 e un complexe de glandes endocrines, d’enzymes et de vitamines, ont de plus en plus de peine à concevoir que le jugement m
929 s, d’enzymes et de vitamines, ont de plus en plus de peine à concevoir que le jugement moral garde un sens, et que la pers
930  péché » ne sont plus, à leur vue, que les effets d’ un trouble temporaire ou chronique dans le régime des sécrétions inter
931 que fois que nous découvrons un nouveau mécanisme de la vie, nous sommes aussitôt obsédés par l’idée que « cela explique t
932 idée que « cela explique tout ». Étrange psychose de l’homme moderne ! Quoi de plus sot que de prétendre expliquer la cond
933 sychose de l’homme moderne ! Quoi de plus sot que de prétendre expliquer la conduite et les décisions morales d’un tout pa
934 re expliquer la conduite et les décisions morales d’ un tout par la description du fonctionnement de quelques-unes de ses p
935 es d’un tout par la description du fonctionnement de quelques-unes de ses parties, les dernières analysées toujours ? Qui
936 la description du fonctionnement de quelques-unes de ses parties, les dernières analysées toujours ? Qui vous prouve que v
937 aussi bien. Qui a commencé ? Qui est responsable de cette méchante décision ? L’homme ou son foie ? Nous sommes bien trop
938 que j’accorde à l’hypothèse matérialiste le droit de se dire objective. J’y vois trop facilement le coup de pouce du diabl
939 dire objective. J’y vois trop facilement le coup de pouce du diable. Certes, je n’accuse pas la Science — rien de moins d
940 diable. Certes, je n’accuse pas la Science — rien de moins diabolique qu’une observation juste — mais seulement les sophis
941 ur justifier nos démissions morales. Mais en fait de prétextes, il en a de meilleurs que la science et que ses vulgarisati
942 sions morales. Mais en fait de prétextes, il en a de meilleurs que la science et que ses vulgarisations imprudentes. L’adj
943 it un mensonge, on sait qu’on ment, et l’on tâche de ne pas se faire prendre. Si l’on commet quelque mauvaise action, on e
944 quelque mauvaise action, on essaie tout au moins de se disculper par rapport à une vérité et à un bien généralement admis
945 admis. Mais notre époque a remplacé les critères de la vérité par des valeurs d’intensité, et le respect du bien par celu
946 emplacé les critères de la vérité par des valeurs d’ intensité, et le respect du bien par celui de la « vie ». Tout ce qui
947 eurs d’intensité, et le respect du bien par celui de la « vie ». Tout ce qui paraît suffisamment intense, désormais, cesse
948 qui paraît suffisamment intense, désormais, cesse de relever de la vérité ou du mensonge. Il est admis, de nos jours, que
949 suffisamment intense, désormais, cesse de relever de la vérité ou du mensonge. Il est admis, de nos jours, que la passion,
950 elever de la vérité ou du mensonge. Il est admis, de nos jours, que la passion, l’émotion et l’hystérie même vous mettent
951 assion, l’émotion et l’hystérie même vous mettent de droit au-delà du bien et du mal. Elles vous libèrent de toute obligat
952 it au-delà du bien et du mal. Elles vous libèrent de toute obligation, elles n’ont plus à se justifier. J’avais juré d’êtr
953 on, elles n’ont plus à se justifier. J’avais juré d’ être fidèle, dit un conjoint, mais je m’aperçois que c’est incompatibl
954 i qui est nouveau : l’on s’en vante, avec l’appui de tous les romanciers, des journalistes, des philosophes et des doctrin
955 olitiques. Les tribunaux français avaient coutume d’ acquitter les crimes passionnels. Aux grandes époques, on eût doublé l
956 ornons-nous à le noter en passant : notre respect de la passion et de « la vie » sont des signes de décadence des passions
957 noter en passant : notre respect de la passion et de « la vie » sont des signes de décadence des passions mêmes et de la v
958 ct de la passion et de « la vie » sont des signes de décadence des passions mêmes et de la vraie vie. J’emprunte ici à And
959 ont des signes de décadence des passions mêmes et de la vraie vie. J’emprunte ici à André Gide une pénétrante et minutieus
960 dré Gide une pénétrante et minutieuse description de ce glissement du vrai vers le « vital » au secret d’une conscience mo
961 ce glissement du vrai vers le « vital » au secret d’ une conscience moderne : Mais j’étais scrupuleux et, devant que je m’
962 de force te viendrait, ajoutait-il, si plutôt que de t’user à lutter ainsi contre toi-même, tu ne luttais plus que contre
963 ’empêchement du dehors… Va, sache triompher enfin de toi-même et de ta propre honnêteté »… Bref, il tirait argument et ava
964 dehors… Va, sache triompher enfin de toi-même et de ta propre honnêteté »… Bref, il tirait argument et avantage de ce qu’
965 honnêteté »… Bref, il tirait argument et avantage de ce qu’il m’en coûtait de céder à mon désir plutôt que de le brider en
966 ait argument et avantage de ce qu’il m’en coûtait de céder à mon désir plutôt que de le brider encore… Il va sans dire que
967 u’il m’en coûtait de céder à mon désir plutôt que de le brider encore… Il va sans dire que je ne compris que beaucoup plus
968 us tard ce qu’il y avait, dans cette exhortation, de diabolique. Je croyais alors que j’étais le seul à parler et que ce d
969 ue je ne le distinguais encore pas. Il avait fait de moi sa conquête ; je me croyais victorieux, oui : victorieux de moi-m
970 uête ; je me croyais victorieux, oui : victorieux de moi-même parce que je me livrais à lui. Parce qu’il m’avait convaincu
971 conscience individuelle, c’est le même, en chacun de ses détails, qu’Hitler propose au peuple allemand ! Et cela s’appelle
972 au peuple allemand ! Et cela s’appelle la théorie de l’espace vital. « Comment ce qui t’est nécessaire ne te serait-il pas
973 oif ? Une grande force te viendrait si plutôt que de t’user à tenir tes engagements, tu ne luttais plus que contre l’étran
974 qui sert tes intérêts. N’est-ce pas ici le moment de se demander au nom de quoi nos moralistes de la passion combattent Hi
975 ment de se demander au nom de quoi nos moralistes de la passion combattent Hitler ? 35. Le diable au cœur This passi
976 times of weakness. Francis Bacon. Il n’est pas de domaine où l’argument de l’espace vital, individuel, cette fois-ci, a
977 is Bacon. Il n’est pas de domaine où l’argument de l’espace vital, individuel, cette fois-ci, ait eu plus de succès que
978 ace vital, individuel, cette fois-ci, ait eu plus de succès que dans l’amour tel qu’on le cultive en Occident. Depuis un s
979 epuis un siècle, tous les romans illustrent, avec d’ autant moins d’art qu’ils y rencontrent plus de complaisance, la théor
980 , tous les romans illustrent, avec d’autant moins d’ art qu’ils y rencontrent plus de complaisance, la théorie du droit de
981 ec d’autant moins d’art qu’ils y rencontrent plus de complaisance, la théorie du droit de la passion : « Une femme apparti
982 ontrent plus de complaisance, la théorie du droit de la passion : « Une femme appartient de droit à l’homme qui l’aime et
983 e du droit de la passion : « Une femme appartient de droit à l’homme qui l’aime et qu’elle aime plus que la vie, et il n’y
984 aime et qu’elle aime plus que la vie, et il n’y a d’ unions à jamais légitimes que celles qui sont commandées par la vraie
985 permis quand on s’aime ». La première conséquence de cette grande permission est de faire sauter l’alliance du mariage. Da
986 emière conséquence de cette grande permission est de faire sauter l’alliance du mariage. Dans la morale que pratiquent nos
987 morale que pratiquent nos contemporains, la force de l’amour prime le droit du serment. Mais cette proposition ébranle un
988 ion ébranle un monde. Car attaquer au plus intime de l’être le sens de l’alliance jurée, c’est faire le lit d’une éthique
989 de. Car attaquer au plus intime de l’être le sens de l’alliance jurée, c’est faire le lit d’une éthique de barbares. Prend
990 e le sens de l’alliance jurée, c’est faire le lit d’ une éthique de barbares. Prendre la femme du voisin ou ses terres parc
991 ’alliance jurée, c’est faire le lit d’une éthique de barbares. Prendre la femme du voisin ou ses terres parce qu’on a déco
992 ue les mêmes principes dont s’autorise l’anarchie de nos mœurs privées. Toutefois les partisans du romantisme maintiendron
993 t on prétend qu’il permet tout, est véritablement de l’amour, ou s’il n’est pas plutôt quelque hantise abusivement parée d
994 ’est pas plutôt quelque hantise abusivement parée de ce beau nom. Or chacun voit que « l’amour » moderne est une immense f
995 l’amour » moderne est une immense faillite intime de notre civilisation. C’est une affaire si tragiquement confuse que le
996 i tragiquement confuse que le diable seul est sûr de s’y retrouver. Niera-t-on qu’il s’en donne à cœur joie ? Mais il exis
997 donne à cœur joie ? Mais il existe un moyen court de le dépister, ici encore. La part du diable dans « l’amour », c’est si
998 l’amour », c’est simplement tout ce qui n’est pas de l’amour. C’est tout ce qui se glisse en nous sous le couvert du mot.
999 ’aime pas qu’on aime, et dont tout le plaisir est d’ altérer nos vertus dans leur source. Vous le sentirez présent, dans sa
1000 ésent, dans sa force immobile, derrière le regard de l’être sans amour. Et partout où l’amour est contrefait, vous le conn
1001 , et si l’alliance primordiale du mariage n’a pas de pire ennemi que « l’amour » tel qu’on le parle, c’est que le plus bea
1002  » tel qu’on le parle, c’est que le plus beau mot de toutes les langues est pipé sur nos lèvres par Satan. Nulle époque n’
1003 èvres par Satan. Nulle époque n’a parlé davantage de l’amour, avec si peu d’exigence réelle. Le diable nous a fait nommer
1004 poque n’a parlé davantage de l’amour, avec si peu d’ exigence réelle. Le diable nous a fait nommer « amour » une vague obse
1005 , et dont les romans et les films sont les agents de diffusion. Cette obsession était devenue la grande affaire de notre c
1006 . Cette obsession était devenue la grande affaire de notre civilisation en temps de paix, — la religion de ceux qui n’en v
1007 la grande affaire de notre civilisation en temps de paix, — la religion de ceux qui n’en voulaient plus. Son empire s’est
1008 otre civilisation en temps de paix, — la religion de ceux qui n’en voulaient plus. Son empire s’est étendu sur les domaine
1009 brairie, sur la vente des parfums, sur l’activité de millions d’avocats et de médecins, sur les magazines illustrés, sur t
1010 la vente des parfums, sur l’activité de millions d’ avocats et de médecins, sur les magazines illustrés, sur tous les comm
1011 parfums, sur l’activité de millions d’avocats et de médecins, sur les magazines illustrés, sur tous les commerces de mode
1012 r les magazines illustrés, sur tous les commerces de modes. Sur beaucoup plus ! Car elle a modifié notre échelle des valeu
1013 chelle des valeurs. La surestimation extravagante de l’amour — j’entends bien de cette forme de hantise qui ressemble à l’
1014 timation extravagante de l’amour — j’entends bien de cette forme de hantise qui ressemble à l’amour véritable comme la vil
1015 agante de l’amour — j’entends bien de cette forme de hantise qui ressemble à l’amour véritable comme la ville de Lyon à un
1016 qui ressemble à l’amour véritable comme la ville de Lyon à un lion — a déprimé progressivement dans notre époque le sens
1017 ssivement dans notre époque le sens et le respect de la tenue morale, du sacrifice au bien commun, des vertus viriles et d
1018 bonheur individuel est devenu notre tabou : signe de décadence d’une civilisation. Auguste obligé de choisir entre le trôn
1019 iduel est devenu notre tabou : signe de décadence d’ une civilisation. Auguste obligé de choisir entre le trône et Bérénice
1020 e de décadence d’une civilisation. Auguste obligé de choisir entre le trône et Bérénice, renvoie la femme. Dans le même ca
1021 ique, avec l’approbation des foules. La décadence de la vertu est un thème millénaire de l’éloquence sacrée. Mais je signa
1022 La décadence de la vertu est un thème millénaire de l’éloquence sacrée. Mais je signale ici un trait plus inquiétant : la
1023 gnale ici un trait plus inquiétant : la décadence de la virtu dans notre siècle, sous l’effet de la publicité faite à l’am
1024 dence de la virtu dans notre siècle, sous l’effet de la publicité faite à l’amour vulgarisé. En toute époque, c’est à cert
1025 certaines nuances « modernes » des sentiments et de leurs modes que se révèle de la manière la plus précise l’œuvre du di
1026  » des sentiments et de leurs modes que se révèle de la manière la plus précise l’œuvre du diable. Ce qui distingue l’amou
1027 ce qui devrait disqualifier le très grand nombre de ceux qui s’en prévalent, c’est justement cette nuance d’obsession, et
1028 qui s’en prévalent, c’est justement cette nuance d’ obsession, et la facilité qu’on montre à y céder. C’est une sinistre a
1029 n d’autres temps, on se défendait, on avait honte de perdre le contrôle de soi. C’était tout perdre, ou pire : c’était mal
1030 e défendait, on avait honte de perdre le contrôle de soi. C’était tout perdre, ou pire : c’était mal vu. Aujourd’hui l’obs
1031 e, — et moins encore un ridicule. Certes l’amour, de tous les sentiments, est celui qui se prête le mieux à justifier l’ab
1032 ui qui se prête le mieux à justifier l’abdication de soi, puisqu’à son comble il nous porte à donner notre vie même pour c
1033 ntre ce don viril et l’abandon, Satan ménage plus d’ une pente insensible. Il sait que l’amour est le domaine par excellenc
1034 mieux sur ses motifs et ne se paye plus aisément de sophismes cousus de fil blanc. Nulle part le masochisme et l’égoïsme
1035 s et ne se paye plus aisément de sophismes cousus de fil blanc. Nulle part le masochisme et l’égoïsme étroit ne revêtent a
1036 ochisme et l’égoïsme étroit ne revêtent avec plus de succès les apparences du sacrifice. D’ailleurs, l’un des premiers eff
1037 u sacrifice. D’ailleurs, l’un des premiers effets de la passion est de nous empêcher de nous sentir coupables, dans l’inst
1038 leurs, l’un des premiers effets de la passion est de nous empêcher de nous sentir coupables, dans l’instant même où nous s
1039 remiers effets de la passion est de nous empêcher de nous sentir coupables, dans l’instant même où nous savons le mieux qu
1040 le mieux que nous le sommes. Voyez cette héroïne de Stendhal : « Je ne me fais plus aucune illusion, lui disait-elle, mêm
1041 ait à commettre. » C’est l’un des plus vieux cris de l’humanité, le plus terriblement sincère ! Si par colère, orgueil, en
1042 être, vous pouvez éprouver du remords et le désir de réparer la faute. Mais si c’est par « amour », rien ne vous arrête, e
1043 oit ! Or à ce point l’amour devient indiscernable de l’égoïsme ou même de la haine. Non seulement la lucidité y est plus r
1044 ’amour devient indiscernable de l’égoïsme ou même de la haine. Non seulement la lucidité y est plus rare et difficile qu’a
1045 u’au sein de toute autre passion, mais elle y est de surcroît parfaitement inutile. « Je vois bien le mal que je fais et l
1046 r en faire quelque chose l’appui sans restriction d’ une morale dure, d’une coutume intransigeante, ou d’une foi plus forte
1047 chose l’appui sans restriction d’une morale dure, d’ une coutume intransigeante, ou d’une foi plus forte que la vie. Il fau
1048 une morale dure, d’une coutume intransigeante, ou d’ une foi plus forte que la vie. Il faudrait un critère permettant de qu
1049 rte que la vie. Il faudrait un critère permettant de qualifier d’égoïsme, de haine ou de maladie psychique tout amour dont
1050 e. Il faudrait un critère permettant de qualifier d’ égoïsme, de haine ou de maladie psychique tout amour dont les fruits s
1051 ait un critère permettant de qualifier d’égoïsme, de haine ou de maladie psychique tout amour dont les fruits sont amers,
1052 re permettant de qualifier d’égoïsme, de haine ou de maladie psychique tout amour dont les fruits sont amers, le privant a
1053 r dont les fruits sont amers, le privant aussitôt de ses droits absolus. Mais nous avons une morale romantique exaltant la
1054 ue exaltant la passion « fatale » : c’en est fait de la toute petite chance de liberté qui nous restait. Cette « fatalité 
1055 atale » : c’en est fait de la toute petite chance de liberté qui nous restait. Cette « fatalité » de la passion n’est qu’u
1056 e de liberté qui nous restait. Cette « fatalité » de la passion n’est qu’une manière de parler romanesque, mais combien d’
1057 e « fatalité » de la passion n’est qu’une manière de parler romanesque, mais combien d’amoureux s’en autorisent pour évite
1058 qu’une manière de parler romanesque, mais combien d’ amoureux s’en autorisent pour éviter d’avouer leurs vraies raisons, le
1059 is combien d’amoureux s’en autorisent pour éviter d’ avouer leurs vraies raisons, leurs complaisances, leurs volontés secrè
1060 le diable a substitué dans nos esprits le respect de la sincérité au respect — même distant et théorique — du bien de l’au
1061 au respect — même distant et théorique — du bien de l’autre et de la foi jurée. Sublime astuce, car cette sincérité garde
1062 même distant et théorique — du bien de l’autre et de la foi jurée. Sublime astuce, car cette sincérité garde encore le nom
1063 e astuce, car cette sincérité garde encore le nom d’ une vertu. Mais voici comment elle agit dans un monde où elle ne sert
1064 t la loi ou devant Dieu, vous prenez l’engagement d’ être fidèle « dans les bons et les mauvais jours », quoi qu’il advienn
1065 notre fidélité, quand elle s’oppose à la loi même de la Vie ? Est-il “sincère” de s’y cramponner ? J’ai juré, soit, mais j
1066 oppose à la loi même de la Vie ? Est-il “sincère” de s’y cramponner ? J’ai juré, soit, mais je ne suis plus le même. Et dè
1067 r malheur, ce beau raisonnement détruit les bases de tout traité, de toute parole donnée ou échangée, enfin du langage mêm
1068 au raisonnement détruit les bases de tout traité, de toute parole donnée ou échangée, enfin du langage même et de la possi
1069 role donnée ou échangée, enfin du langage même et de la possibilité de s’entendre sur quoi que ce soit. Car pourquoi fait-
1070 angée, enfin du langage même et de la possibilité de s’entendre sur quoi que ce soit. Car pourquoi fait-on des serments ?
1071 al. Mais si l’on pense qu’il est plus « sincère » de suivre son instinct que de garder parole, que le bonheur vaut mieux q
1072 l est plus « sincère » de suivre son instinct que de garder parole, que le bonheur vaut mieux que la vérité, et que l’inté
1073 vérité, et que l’intérêt « vital » ne connaît pas de loi, alors on entre dans un monde où l’hitlérisme est justifié. L’ord
1074 ’en vertu d’un effort constant contre ce genre-là de « sincérité » ; qu’en vertu d’une constante « hypocrisie » s’efforçan
1075 vertu d’une constante « hypocrisie » s’efforçant de subordonner nos petits bonheurs à la justice, nos désirs à l’amour du
1076 la tête ce qui unit les hommes — la compréhension de l’utilité et du préjudice général — et dans le cœur ce qui sépare — l
1077 r que le diable nous a pris. Certes, ce n’est pas d’ hier qu’on trompe sa femme, et qu’on trahit ses serments par amour. « 
1078 la faute qui me paraît nouvelle, c’est la manière de l’accepter au nom de la Vie et de la Sincérité, — devises de faibles.
1079 ’est la manière de l’accepter au nom de la Vie et de la Sincérité, — devises de faibles. ⁂ L’amour moderne, si j’en crois
1080 er au nom de la Vie et de la Sincérité, — devises de faibles. ⁂ L’amour moderne, si j’en crois nos romanciers et les stati
1081 si j’en crois nos romanciers et les statistiques de divorce, atteint un degré de complexité inégalé dans toute l’Histoire
1082 et les statistiques de divorce, atteint un degré de complexité inégalé dans toute l’Histoire : trouble mélange de pathéti
1083 é inégalé dans toute l’Histoire : trouble mélange de pathétique sentimental, de freudisme mal digéré, d’égoïste sincérité,
1084 oire : trouble mélange de pathétique sentimental, de freudisme mal digéré, d’égoïste sincérité, d’idées sur le droit au bo
1085 pathétique sentimental, de freudisme mal digéré, d’ égoïste sincérité, d’idées sur le droit au bonheur, d’intensité nerveu
1086 al, de freudisme mal digéré, d’égoïste sincérité, d’ idées sur le droit au bonheur, d’intensité nerveuse et de faiblesse de
1087 oïste sincérité, d’idées sur le droit au bonheur, d’ intensité nerveuse et de faiblesse de caractère. Au cinéma, c’est plus
1088 sur le droit au bonheur, d’intensité nerveuse et de faiblesse de caractère. Au cinéma, c’est plus aimable et moins ressem
1089 au bonheur, d’intensité nerveuse et de faiblesse de caractère. Au cinéma, c’est plus aimable et moins ressemblant. Dans l
1090 t. Dans la vie — regardez dans vos vies —, il y a de tout bien sûr, il y a de bons ménages et des sentiments authentiques,
1091 dans vos vies —, il y a de tout bien sûr, il y a de bons ménages et des sentiments authentiques, mais il y a ce que décri
1092 t certainement, il y a bien pire. Surtout, il y a de moins en moins de passions fortes, simplement parce que nous cherchon
1093 y a bien pire. Surtout, il y a de moins en moins de passions fortes, simplement parce que nous cherchons la passion pour
1094 ui d’abord leur résistent. L’importance démesurée de « l’amour » dans nos mœurs, moins comme réalité que comme arrière-pen
1095 perpétuelle et nostalgie, révèle toute l’étendue de notre ennui, le dégoût de l’homme moyen pour sa vie quotidienne, l’ab
1096 révèle toute l’étendue de notre ennui, le dégoût de l’homme moyen pour sa vie quotidienne, l’absence de buts et d’intérêt
1097 l’homme moyen pour sa vie quotidienne, l’absence de buts et d’intérêts puissants capables d’absorber nos rêves. Ce culte
1098 yen pour sa vie quotidienne, l’absence de buts et d’ intérêts puissants capables d’absorber nos rêves. Ce culte de la passi
1099 ’absence de buts et d’intérêts puissants capables d’ absorber nos rêves. Ce culte de la passion toujours fuyante, j’y vois
1100 puissants capables d’absorber nos rêves. Ce culte de la passion toujours fuyante, j’y vois le signe d’une espèce de névros
1101 de la passion toujours fuyante, j’y vois le signe d’ une espèce de névrose ou de vertige épidémique : le besoin d’être dépo
1102 toujours fuyante, j’y vois le signe d’une espèce de névrose ou de vertige épidémique : le besoin d’être dépossédé de soi,
1103 nte, j’y vois le signe d’une espèce de névrose ou de vertige épidémique : le besoin d’être dépossédé de soi, donc possédé
1104 e de névrose ou de vertige épidémique : le besoin d’ être dépossédé de soi, donc possédé par l’extérieur ou l’étranger, par
1105 e vertige épidémique : le besoin d’être dépossédé de soi, donc possédé par l’extérieur ou l’étranger, par une chose, par u
1106 les faiblesses qu’il autorise, il est grand temps de le disqualifier au nom et pour l’amour de l’amour même. Il est temps
1107 d temps de le disqualifier au nom et pour l’amour de l’amour même. Il est temps de décourager les innombrables amateurs sa
1108 nom et pour l’amour de l’amour même. Il est temps de décourager les innombrables amateurs sans vocation qui l’apprennent p
1109 uctures qui nous protégeaient contre les paniques de l’instinct. La morale bourgeoise est trop faible. Quand les romancier
1110 r aux valeurs dures et rationnelles. Elle se doit de restaurer d’urgence des interdits drastiques, des préjugés solides — 
1111 dures et rationnelles. Elle se doit de restaurer d’ urgence des interdits drastiques, des préjugés solides — même si le di
1112 haîner la tyrannie, bientôt sanglante, des démons de la jungle intérieure. Telle est la leçon de notre crise. C’est une qu
1113 émons de la jungle intérieure. Telle est la leçon de notre crise. C’est une question de physique sociale plus que de vertu
1114 e est la leçon de notre crise. C’est une question de physique sociale plus que de vertu, une question de vie ou de mort po
1115 . C’est une question de physique sociale plus que de vertu, une question de vie ou de mort pour notre civilisation et pour
1116 physique sociale plus que de vertu, une question de vie ou de mort pour notre civilisation et pour tout ordre, quel qu’il
1117 sociale plus que de vertu, une question de vie ou de mort pour notre civilisation et pour tout ordre, quel qu’il soit, qui
1118 out ordre, quel qu’il soit, qui mérite l’épithète d’ humain. 36. La passion Je parlerai maintenant de l’amour même, n
1119 main. 36. La passion Je parlerai maintenant de l’amour même, non plus de ses contrefaçons. Je parlerai de la passion
1120 Je parlerai maintenant de l’amour même, non plus de ses contrefaçons. Je parlerai de la passion dans son éclat. L’amour-p
1121 r même, non plus de ses contrefaçons. Je parlerai de la passion dans son éclat. L’amour-passion, signe particulier de la p
1122 ans son éclat. L’amour-passion, signe particulier de la psyché occidentale, est né d’un retour de flamme du christianisme
1123 igne particulier de la psyché occidentale, est né d’ un retour de flamme du christianisme dans les marges de l’hérésie. Inc
1124 lier de la psyché occidentale, est né d’un retour de flamme du christianisme dans les marges de l’hérésie. Inconnu de l’An
1125 retour de flamme du christianisme dans les marges de l’hérésie. Inconnu de l’Antiquité et de l’Orient, il ne peut exister
1126 ristianisme dans les marges de l’hérésie. Inconnu de l’Antiquité et de l’Orient, il ne peut exister que dans une civilisat
1127 es marges de l’hérésie. Inconnu de l’Antiquité et de l’Orient, il ne peut exister que dans une civilisation marquée par la
1128 ation marquée par la croyance en la valeur unique de chaque être. Il suppose un objet irremplaçable, et comme prédestiné p
1129 enne à l’origine, et dont cette phrase du Mystère de Jésus nous donne peut-être l’expression la plus poignante : « Je pens
1130 is à toi dans mon agonie, j’ai versé telle goutte de sang pour toi. » Mais l’idée du divin dans un être, source et objet d
1131 ais l’idée du divin dans un être, source et objet de tout amour profond, va faire naître l’idolâtrie pour peu que l’élan q
1132 isse et s’arrête à l’image créée. Le désir infini de l’âme souffre alors des limitations d’un objet qui résiste et qui bie
1133 sir infini de l’âme souffre alors des limitations d’ un objet qui résiste et qui bientôt l’embrase. Secrètement déçu, mais
1134 ’indistinction. Et finalement, passant les bornes de la réalité disqualifiée et de la vie jamais assez vivante, il se jett
1135 passant les bornes de la réalité disqualifiée et de la vie jamais assez vivante, il se jette avec lui dans la mort. Extas
1136 ec lui dans la mort. Extase des derniers instants de Tristan et d’Isolde, ou des amants de Vérone. La contradiction tortur
1137 mort. Extase des derniers instants de Tristan et d’ Isolde, ou des amants de Vérone. La contradiction torturante que souff
1138 rs instants de Tristan et d’Isolde, ou des amants de Vérone. La contradiction torturante que souffre l’infini désir séduit
1139 origine et cette catastrophe ne cesseront jamais d’ être instantes au cœur secret de la passion occidentale. L’une, ignoré
1140 cesseront jamais d’être instantes au cœur secret de la passion occidentale. L’une, ignorée ou reniée, demeure à l’arrière
1141 lan lointain, l’autre, voilée, attend à l’horizon de tout amour digne du nom de passion. C’est pourquoi la passion peut bi
1142 ée, attend à l’horizon de tout amour digne du nom de passion. C’est pourquoi la passion peut bien être le lieu de la plus
1143 C’est pourquoi la passion peut bien être le lieu de la plus grande intensité vitale, en même temps qu’elle se fait l’agen
1144 véritable, car elle suppose une très grande force d’ imagination créatrice ; des dispositions spirituelles à la fois délica
1145 vé leur véritable objet ; un pouvoir exceptionnel de concentration, c’est-à-dire de fidélité ; enfin le mépris des biens t
1146 uvoir exceptionnel de concentration, c’est-à-dire de fidélité ; enfin le mépris des biens terrestres et du bonheur. Ce com
1147 it croire. Je mets en fait qu’il n’y a guère plus de grands amants que de vrais mystiques, la passion étant au sentimental
1148 fait qu’il n’y a guère plus de grands amants que de vrais mystiques, la passion étant au sentimentalisme normal ce que la
1149 n moyenne. Mais la passion comme la mystique sont de ces attitudes capitales dont les très rares moments de pureté suffise
1150 s attitudes capitales dont les très rares moments de pureté suffisent à déterminer l’atmosphère d’un ensemble humain comme
1151 nts de pureté suffisent à déterminer l’atmosphère d’ un ensemble humain comme celui que l’on nomme Occident. Et les minimes
1152 à cet ensemble. Or tout ce que l’on vient de dire de la passion suffit à laisser voir les chances extraordinaires qu’elle
1153 tabilité des états et des jugements, qui changent de signe en un instant, jointe à l’extrême intensité des sensations parf
1154 rême intensité des sensations parfois simultanées de présence et d’absence infinie, créent chez tout être passionné l’illu
1155 des sensations parfois simultanées de présence et d’ absence infinie, créent chez tout être passionné l’illusion d’un trans
1156 finie, créent chez tout être passionné l’illusion d’ un transport mystique dans l’au-delà du bien et du mal. Une vraie pass
1157 nt « légitimes » ou non. Passer outre est le fait de la passion. Mais sacrifie-t-on l’autre ou soi ? Et dans soi, le meill
1158 u, il donne ce qu’il n’a pas en soi mais qui naît de l’exaltation, il donne enfin ce qu’il est, sans réserve. Mais à ce po
1159 ui, il s’y était accoutumé, établissant une sorte d’ équilibre du microbe et de la maladie. Mais s’il le communique à un êt
1160 , établissant une sorte d’équilibre du microbe et de la maladie. Mais s’il le communique à un être plus faible, ou plus pu
1161 n’est pas armé pour composer avec cette espèce-là de mal, il risque d’altérer ou de détruire l’objet de sa tendresse et l’
1162 r composer avec cette espèce-là de mal, il risque d’ altérer ou de détruire l’objet de sa tendresse et l’amour même. Ces se
1163 ec cette espèce-là de mal, il risque d’altérer ou de détruire l’objet de sa tendresse et l’amour même. Ces secrets monstru
1164 e mal, il risque d’altérer ou de détruire l’objet de sa tendresse et l’amour même. Ces secrets monstrueux, ignorés de nous
1165 et l’amour même. Ces secrets monstrueux, ignorés de nous-mêmes, que notre passion livre à l’être aimé dans la contagion d
1166 délire, voici qu’ils apparaissent comme des dons de la haine. Il est rare que l’amour ne soit pas criminel, d’une manière
1167 ne. Il est rare que l’amour ne soit pas criminel, d’ une manière invisible peut-être, quand il dépasse les bornes d’une sob
1168 invisible peut-être, quand il dépasse les bornes d’ une sobriété d’ailleurs presque impossible à définir. Et toute passion
1169 le viol spirituel. Et si l’on veut tout posséder d’ un être, on risque bien d’en faire un possédé… Où donc le diable est-i
1170 l’on veut tout posséder d’un être, on risque bien d’ en faire un possédé… Où donc le diable est-il intervenu ? Ce Désir qui
1171 ’indicible Vérité, comme un élan vers la guérison de l’être blessé, vers la plénitude et vers la rédemption, voici qu’il s
1172 s la rédemption, voici qu’il se fait l’instrument de nos plus épuisantes tortures. À quel moment l’amour est-il devenu sou
1173 ’amour est-il devenu souffrance ? Dans le langage de la théologie, il est aisé de définir le point : c’est à l’instant où
1174 ce ? Dans le langage de la théologie, il est aisé de définir le point : c’est à l’instant où la passion transgresse les li
1175 à l’instant où la passion transgresse les limites de la créature et s’emporte à la diviniser, que le Tentateur a parlé. « 
1176 tout vous est permis… » Mais encore, ce mouvement de l’orgueil fantastique, comment le distinguer d’une sensation de grâce
1177 t de l’orgueil fantastique, comment le distinguer d’ une sensation de grâce inséparable de toute vraie passion — et la grâc
1178 antastique, comment le distinguer d’une sensation de grâce inséparable de toute vraie passion — et la grâce nous délivre d
1179 e distinguer d’une sensation de grâce inséparable de toute vraie passion — et la grâce nous délivre de la loi… Poursuivons
1180 de toute vraie passion — et la grâce nous délivre de la loi… Poursuivons cette analogie. Le coup de foudre est le reflet d
1181 s cette analogie. Le coup de foudre est le reflet d’ une conversion. Il ne se discute pas davantage. Vous êtes élu « parce
1182 est elle ». L’amour accepte avec joie ce mystère, d’ une « injustice » aussi flagrante, cependant, que celle que l’on repro
1183 lle que l’on reproche à la doctrine augustinienne de l’élection. Pour la passion, tout est destin, rien n’est mérite, et l
1184 est destin, rien n’est mérite, et le « scandale » de la double prédestination, au salut ou à la damnation, se reproduit da
1185 ueille ou que l’on rejette un être, dans le temps d’ un premier regard. Voici l’accueil, et l’on entre en passion comme on
1186 ue. On renonce au monde, on s’enclot avec l’image de l’objet aimé. Mais le diable est assis dans un coin de la cellule. Il
1187 objet aimé. Mais le diable est assis dans un coin de la cellule. Il ne fait rien, il vous attend. Il connaît la logique de
1188 fait rien, il vous attend. Il connaît la logique de la passion. Il attend votre pire souffrance, son seul baume. Il a ces
1189 votre pire souffrance, son seul baume. Il a cessé de sourire, il est à son affaire, guettant les premiers plis de la paniq
1190 il est à son affaire, guettant les premiers plis de la panique à votre front. Que va devenir votre bonheur ? Pourquoi l’ê
1191 e aimé vous manque-t-il ? Pourquoi s’éloigne-t-il de l’image adorée ? S’il reste libre, ne va-t-il pas vous échapper ? Et
1192 t-être bientôt vous haïr ? Alors vous l’accuserez d’ une injustice dont il n’est pas plus responsable que vous ne l’étiez d
1193 il n’est pas plus responsable que vous ne l’étiez de votre choix. Qu’il se détourne de vous pour un temps, voici le monde
1194 vous ne l’étiez de votre choix. Qu’il se détourne de vous pour un temps, voici le monde dépeuplé. Qu’il vous repousse, et
1195 é. Qu’il vous repousse, et vous voici comme exclu de la réalité. Mais il y a pire. La passion la plus forte est celle qui
1196 La passion la plus forte est celle qui se nourrit d’ obstacles, et qui bientôt les crée s’ils viennent à faire défaut. Cet
1197 ils viennent à faire défaut. Cet usage mystifiant de la réalité, qu’elle soit sociale, morale, ou naturelle, entraîne un m
1198 r. Certes, le passionné affecte souvent une sorte de respect méticuleux de la vérité, dans toutes les occasions où il le p
1199 é affecte souvent une sorte de respect méticuleux de la vérité, dans toutes les occasions où il le peut sans compromettre
1200 licence absolue qu’il s’accorde dès qu’il s’agit de satisfaire ou de préserver sa passion. Madame Guyon rapporte qu’elle
1201 qu’il s’accorde dès qu’il s’agit de satisfaire ou de préserver sa passion. Madame Guyon rapporte qu’elle dut mentir un jou
1202 ulait pas que ses laquais fussent mis dans le cas de répéter ce même mensonge, car, dit-elle avec naïveté, « j’avais moi-m
1203 ême pour le mensonge ». Jalousie, injustice, état de mensonge constant, perte du sens des devoirs immédiats, faiblesses ex
1204 ration, — c’est peu dire, car les vrais tourments de la passion sont indicibles par essence, ou ne trouveraient à s’exprim
1205 finit par voir dans ses souffrances le signe même de l’authenticité de sa passion. Alors il ne voit plus qu’il aime peut-ê
1206 s ses souffrances le signe même de l’authenticité de sa passion. Alors il ne voit plus qu’il aime peut-être comme on hait,
1207 de tyrannise ou méprise, que ses dons sont autant de violences intimes, et qu’il en vient à souffrir davantage par l’absen
1208 qu’il en vient à souffrir davantage par l’absence de l’être aimé qu’il n’a de joie par sa présence… Dans ce dédale de nos
1209 davantage par l’absence de l’être aimé qu’il n’a de joie par sa présence… Dans ce dédale de nos enfers privés, quel talis
1210 qu’il n’a de joie par sa présence… Dans ce dédale de nos enfers privés, quel talisman pourrions-nous emporter pour déjouer
1211 ns réjouir le diable ou susciter les plus subtils de ses démons. Il faudrait une abnégation dont les plus grands mystiques
1212 capables. Il faudrait surtout conserver la règle d’ or de l’amour du prochain, de l’Agapè qui seul peut brider notre Éros
1213 bles. Il faudrait surtout conserver la règle d’or de l’amour du prochain, de l’Agapè qui seul peut brider notre Éros et le
1214 t conserver la règle d’or de l’amour du prochain, de l’Agapè qui seul peut brider notre Éros et le sauver de ses propres f
1215 gapè qui seul peut brider notre Éros et le sauver de ses propres fureurs. Rien de moins ne saurait composer les exigences
1216 re Éros et le sauver de ses propres fureurs. Rien de moins ne saurait composer les exigences d’une passion avec celles de
1217 . Rien de moins ne saurait composer les exigences d’ une passion avec celles de la déficiente réalité, avec la liberté de l
1218 composer les exigences d’une passion avec celles de la déficiente réalité, avec la liberté de l’être aimé et le respect d
1219 celles de la déficiente réalité, avec la liberté de l’être aimé et le respect de son mystère. Rien de moins ne suffirait
1220 ité, avec la liberté de l’être aimé et le respect de son mystère. Rien de moins ne suffirait pour construire ce chef-d’œuv
1221 de l’être aimé et le respect de son mystère. Rien de moins ne suffirait pour construire ce chef-d’œuvre de l’amour vrai :
1222 oins ne suffirait pour construire ce chef-d’œuvre de l’amour vrai : l’alliance de deux êtres qui s’acceptent, qui ne sont
1223 uire ce chef-d’œuvre de l’amour vrai : l’alliance de deux êtres qui s’acceptent, qui ne sont plus l’un pour l’autre des pr
1224 sexe Le jeune lecteur qui parcourt le sommaire de ce livre se rue sur le chapitre 37. Voilà le point ! pense-t-il. Quel
1225 e réside dans la sexualité. L’illusion s’aperçoit d’ une manière assez simple : la sexualité est le domaine des tentations
1226 es plus sensibles et les plus communes. Assez peu d’ hommes sont réellement tentés de voler le portefeuille du voisin, mais
1227 mmunes. Assez peu d’hommes sont réellement tentés de voler le portefeuille du voisin, mais presque tout homme s’est vu ten
1228 du voisin, mais presque tout homme s’est vu tenté de prendre la femme du voisin, soit en recourant aux raisons pathétiques
1229 ital ! » — soit en se persuadant que « ça n’a pas d’ importance » ; ou les deux ensemble. En vérité, la sexualité en soi n’
1230 originel fut l’acte sexuel, dont la consommation de la pomme serait le symbole, c’est parce qu’ils assimilent le péché en
1231 e que l’on croit, notez que ce n’est pas le geste de manger une pomme qui était mauvais aux yeux de l’Éternel, ni la pomme
1232 en soi (au contraire), mais seulement la révolte d’ Ève et son désir de se diviniser à sa façon. Si la sexualité pouvait r
1233 re), mais seulement la révolte d’Ève et son désir de se diviniser à sa façon. Si la sexualité pouvait rester pure, c’est-à
1234 elle va se pervertir et devenir à son tour source de perversion. La paillardise joyeuse est certainement l’une des formes
1235 s diaboliques du péché. Je n’en dirais pas autant de certaines amours pseudo-mystiques, nœuds de sophismes spirituels où l
1236 utant de certaines amours pseudo-mystiques, nœuds de sophismes spirituels où le serpent se love avec délices. La sexualité
1237 autres fonctions naturelles par un certain manque de nécessité. Il est nécessaire de manger et de respirer, et il est néce
1238 un certain manque de nécessité. Il est nécessaire de manger et de respirer, et il est nécessaire que le sang circule, mais
1239 nque de nécessité. Il est nécessaire de manger et de respirer, et il est nécessaire que le sang circule, mais on peut vivr
1240 nscient. D’autre part, il est lié à la créativité de l’homme, il en est l’aspect corporel, le symbole ou le signe physique
1241 est libre, c’est-à-dire parce qu’il peut choisir de créer selon l’ordre divin, ou au contraire selon ses propres utopies.
1242 res utopies. C’est donc en tant qu’elle participe de notre libre créativité, comme le langage et les activités de l’esprit
1243 bre créativité, comme le langage et les activités de l’esprit, que la sexualité donne prise au diable. Et certes il ne s’y
1244 i rend un culte obsédé. L’idéalisation romantique de l’amour dans l’époque moderne, entraînant une pruderie morbide du lan
1245 tout expliquer » par les censures et refoulements de la morale en vigueur dans son milieu, et de son temps. D’où l’on devr
1246 ments de la morale en vigueur dans son milieu, et de son temps. D’où l’on devrait déduire que le meilleur moyen de préveni
1247 rale en vigueur dans son milieu, et de son temps. D’ où l’on devrait déduire que le meilleur moyen de prévenir les états de
1248 . D’où l’on devrait déduire que le meilleur moyen de prévenir les états de possession satanique et les névroses nées de tr
1249 duire que le meilleur moyen de prévenir les états de possession satanique et les névroses nées de troubles sexuels, serait
1250 tats de possession satanique et les névroses nées de troubles sexuels, serait simplement la franchise, non pas « scientifi
1251 e en proposant une licence absolue. Or, l’absence de contraintes choisies rend la sexualité insignifiante, et déprime secr
1252 insignifiante, et déprime secrètement l’humanité de l’homme. Le sexe n’est pas plus divin qu’il n’est honteux, mais il es
1253 st lié intimement aux fonctions les plus humaines de l’homme, à ses pouvoirs de création dans tous les ordres, à ses jugem
1254 ions les plus humaines de l’homme, à ses pouvoirs de création dans tous les ordres, à ses jugements esthétiques ou moraux,
1255 , à tout ce qui qualifie l’individu et lui permet de se posséder en tant que personne responsable. L’indifférence croissan
1256 nterdits qui prêtaient à l’acte sexuel la gravité d’ un engagement, cette espèce d’insouciance morale se traduit moins par
1257 e sexuel la gravité d’un engagement, cette espèce d’ insouciance morale se traduit moins par une libération que par une fla
1258 présence de cet affadissement, l’on serait tenté de regretter le temps où Satan proposait des combats plus féconds… 38
1259 ais le diable y trouve l’occasion la plus commune de nous faire abuser de notre liberté. Reste la femme, dont l’homme ne s
1260 e l’occasion la plus commune de nous faire abuser de notre liberté. Reste la femme, dont l’homme ne se lassera jamais de f
1261 Reste la femme, dont l’homme ne se lassera jamais de faire un ange ou un démon. « Instrument dont use le diable pour possé
1262 t Cyprien, et Tertullien plus énergique : « Porte de l’Enfer ! » Mais Goethe et tous les romantiques la divinisent. Souven
1263 tous les romantiques la divinisent. Souvenez-vous de l’exaltation finale du Second Faust : « L’Éternel féminin nous entraî
1264 s les hauteurs »… En vérité, la femme n’est porte de l’Enfer que pour ceux qui se laissent aller à voir en elle une porte
1265 el. Montaigne le dit bien, contre les romantiques de tous les temps : « Entre nous, ce sont choses que j’ai toujours vues
1266 Entre nous, ce sont choses que j’ai toujours vues de singulier accord : les opinions supercélestes et les mœurs souterrain
1267 les mœurs souterraines. » S’il y a quelque chose de démoniaque dans la femme, c’est sans doute moins dans sa nature que d
1268 ns doute moins dans sa nature que dans sa faculté d’ oublier cette nature, de se tromper sur elle, ou de laisser les autres
1269 ature que dans sa faculté d’oublier cette nature, de se tromper sur elle, ou de laisser les autres s’y tromper. Qu’elle so
1270 ’oublier cette nature, de se tromper sur elle, ou de laisser les autres s’y tromper. Qu’elle soit moins bien armée que l’h
1271 mme contre Satan, c’est ce que fait voir le récit de la Chute. Croyez bien que ce n’est point par politesse que le serpent
1272 jamais rien sans calcul. Mais voilà ce romantique d’ Adam qui s’y laisse prendre. Il s’imagine que la belle Ève, grâce à so
1273 « Das ewig weibliche zieht uns hinan ! », dit-il d’ un air ému, et il mord dans la pomme. C’est à ce moment que le mal est
1274 mais plus facilement égarée, parce qu’elle manque d’ objectivité, de sécheresse dans l’appréciation, de distance par rappor
1275 ement égarée, parce qu’elle manque d’objectivité, de sécheresse dans l’appréciation, de distance par rapport au réel, ou e
1276 d’objectivité, de sécheresse dans l’appréciation, de distance par rapport au réel, ou en un mot : de rhétorique. Elle met
1277 , de distance par rapport au réel, ou en un mot : de rhétorique. Elle met trop peu de raison dans l’exercice ému de sa cha
1278 . Elle met trop peu de raison dans l’exercice ému de sa charité, et trop peu d’ironie dans l’exercice occasionnel de sa ra
1279 on dans l’exercice ému de sa charité, et trop peu d’ ironie dans l’exercice occasionnel de sa raison. Elle manque de forme,
1280 et trop peu d’ironie dans l’exercice occasionnel de sa raison. Elle manque de forme, et c’est à l’homme de lui en donner.
1281 l’exercice occasionnel de sa raison. Elle manque de forme, et c’est à l’homme de lui en donner. Mais si l’homme au contra
1282 raison. Elle manque de forme, et c’est à l’homme de lui en donner. Mais si l’homme au contraire se met à l’adorer, à rend
1283 un culte aux valeurs féminines, il prive la femme de ses appuis et transforme la tentation dans laquelle elle glissait en
1284 ble. C’est Ève qui a commencé. Mais c’est à cause d’ Adam que les choses ont si mal tourné. Saint Paul dit que le mari est
1285 l tourné. Saint Paul dit que le mari est le chef de la femme, et que la femme sans l’homme ne peut être sauvée. C’est une
1286 scription. (Saint Paul est le plus grand réaliste de tous les temps.) Mais le culte romantique de la femme a inverti cet o
1287 iste de tous les temps.) Mais le culte romantique de la femme a inverti cet ordre naturel. Trop d’abus de pouvoir masculin
1288 que de la femme a inverti cet ordre naturel. Trop d’ abus de pouvoir masculins, et trop d’abdications aussi, l’ont fait par
1289 la femme a inverti cet ordre naturel. Trop d’abus de pouvoir masculins, et trop d’abdications aussi, l’ont fait paraître t
1290 aturel. Trop d’abus de pouvoir masculins, et trop d’ abdications aussi, l’ont fait paraître tyrannique. Et toute l’évolutio
1291 nsensiblement, l’homme renonce à exercer son rôle de chef. La femme l’a persuadé qu’elle était opprimée. Il la croit, par
1292 tait opprimée. Il la croit, par fatigue, par gain de paix, ou par idéalisme mal placé. Tous ces facteurs ont créé dans nos
1293 dans nos mœurs un malaise fondamental. Une espèce de révolte sourde anime la femme contre sa condition. Dans cette liberté
1294 voici livrée à elle-même. Le jeu ou la complicité de l’égoïsme masculin et de l’astuce féminine en panique, multiplient de
1295 Le jeu ou la complicité de l’égoïsme masculin et de l’astuce féminine en panique, multiplient des conflits inextricables.
1296 t les relations sociales des deux sexes, à partir d’ un mensonge à la nature ? L’expérience millénaire du couple permet d’i
1297 nature ? L’expérience millénaire du couple permet d’ imaginer ce qui va se passer à l’échelle de la société. La femme qui n
1298 permet d’imaginer ce qui va se passer à l’échelle de la société. La femme qui n’est plus dominée par l’homme — que la faut
1299 elle ne conçoit sa « liberté » que sous la forme d’ une passion pure, indépendante de tout objet, méprisant, sans toujours
1300 ue sous la forme d’une passion pure, indépendante de tout objet, méprisant, sans toujours se l’avouer, celui qui s’offre à
1301 s se l’avouer, celui qui s’offre à la fixer, — et d’ autant plus qu’il y parvient. Vis-à-vis d’elle-même et d’autrui, sa pr
1302 r, — et d’autant plus qu’il y parvient. Vis-à-vis d’ elle-même et d’autrui, sa première défense est de dire « qu’elle ne sa
1303 t plus qu’il y parvient. Vis-à-vis d’elle-même et d’ autrui, sa première défense est de dire « qu’elle ne sait pas ce qui l
1304 d’elle-même et d’autrui, sa première défense est de dire « qu’elle ne sait pas ce qui lui arrive ». C’est une feinte, un
1305 elle. Chez l’homme qui se laisse aller à ce genre d’ argument, c’est une lâcheté plus naïvement sincère… Mais il en fait, h
1306 l’opinion courante du temps, qui voient le signe de la vraie passion dans le cri « c’est plus fort que moi ! », l’on voud
1307 rait dire cette chose très simple : — Cessez donc d’ aimer « malgré vous » et sachez un peu ce que vous faites, c’est une q
1308 hez un peu ce que vous faites, c’est une question de tenue morale, et c’est la condition d’un amour authentique. N’imitez
1309 e question de tenue morale, et c’est la condition d’ un amour authentique. N’imitez pas le mensonge féminin, sinon les femm
1310 animé) Ils s’aimaient tant qu’ils ne cessaient de dire : Comment peut-on s’aimer autant ? Un beau soir, elle se mit à l
1311 le battre, et le laissa pour mort sur la descente de lit. Puis elle s’endormit, fatiguée. Le lendemain, il vivait encore.
1312 ts avant qu’ils aient quitté sa langue. Il essaya de dire : — Je t’aime, et prononça quelque chose comme : — Putain. Alors
1313 e te battrai encore. Dis-moi pourquoi j’ai besoin de te battre ? Mais lui pense dans sa tristesse : — Si je lui dis qu’ell
1314 s, elle le croira. Si je lui dis : — « Cesse donc d’ être méchante », elle me demandera pourquoi elle est méchante. Or je l
1315 veux pas qu’elle soit désespérée. Le mieux serait de la quitter. Mais alors nous ne saurons jamais. Il se tait. — Cet hom
1316 L’histoire que l’on vient de lire peut être celle d’ un couple, mais aussi, d’une certaine manière, celle des relations de
1317 de lire peut être celle d’un couple, mais aussi, d’ une certaine manière, celle des relations de l’Allemagne et de l’Europ
1318 ussi, d’une certaine manière, celle des relations de l’Allemagne et de l’Europe, ou d’une masse quelconque et du Prince. O
1319 ne manière, celle des relations de l’Allemagne et de l’Europe, ou d’une masse quelconque et du Prince. Ou encore, elle fig
1320 e des relations de l’Allemagne et de l’Europe, ou d’ une masse quelconque et du Prince. Ou encore, elle figure le conflit p
1321 e, elle figure le conflit permanent, dans le cœur d’ un individu, entre le besoin d’anarchie et le besoin de conservation.
1322 nent, dans le cœur d’un individu, entre le besoin d’ anarchie et le besoin de conservation. Parabole de la démission des pu
1323 individu, entre le besoin d’anarchie et le besoin de conservation. Parabole de la démission des puissances d’ordre dans le
1324 d’anarchie et le besoin de conservation. Parabole de la démission des puissances d’ordre dans le monde moderne. Même histo
1325 ervation. Parabole de la démission des puissances d’ ordre dans le monde moderne. Même histoire, mêmes conflits sur tous le
1326 parce qu’elle a les mêmes sources, avec la crise de nos vies privées. Nous sommes au centre de tout le mal dès que nous l
1327 crise de nos vies privées. Nous sommes au centre de tout le mal dès que nous l’atteignons dans notre cœur. Lorsque nos ci
1328 point faillir, il eût fallu l’héroïque vigilance d’ un saint. Ah ! mais jamais un saint ne se fût laissé tomber dans une s
1329 dernier cercle : dans cet enfer né du vertige et de l’effroi sinistre de l’orgueil, l’enfer de la passion qui n’a pas d’a
1330 s cet enfer né du vertige et de l’effroi sinistre de l’orgueil, l’enfer de la passion qui n’a pas d’autre objet que le mal
1331 ige et de l’effroi sinistre de l’orgueil, l’enfer de la passion qui n’a pas d’autre objet que le malheur qu’elle va créer,
1332 e de l’orgueil, l’enfer de la passion qui n’a pas d’ autre objet que le malheur qu’elle va créer, en vertu de sa logique fo
1333 Évidemment, je n’aurais pas dû entrer. On fait de ces bêtises, par négligence, croit-on. Bref, je suis entré, c’était t
1334 ouges, comme lorsqu’on choisit une couleur au jeu de cartes, rouge ou noir. J’arrive à la salle de lecture. Il n’y avait q
1335 jeu de cartes, rouge ou noir. J’arrive à la salle de lecture. Il n’y avait que des feuilles de papier blanc sur les tables
1336 a salle de lecture. Il n’y avait que des feuilles de papier blanc sur les tables, et tout le monde lisait. Je dis : — Est-
1337 e ici ? Quelqu’un l’a-t-il vue ? Ils me regardent d’ un air vexé. Un valet s’approche rapidement et me dit à voix basse : —
1338 is dit que : Fine day to-day, c’eût été une sorte de question ou de réponse. Je pensais que le mieux serait de m’en aller
1339 ne day to-day, c’eût été une sorte de question ou de réponse. Je pensais que le mieux serait de m’en aller sans bruit. Mai
1340 ion ou de réponse. Je pensais que le mieux serait de m’en aller sans bruit. Mais vous connaissez ces couloirs. Et je ne vo
1341 ? C’était la question par excellence ! Le résumé de toutes mes erreurs, si vous voulez. Je trouve la porte du bureau dire
1342 t par-derrière, je ne puis l’expliquer autrement. D’ une certaine manière, c’était mon propre regard qui traversait ses yeu
1343 elle. (Je tenais sa main. Je sentis qu’elle avait de la fièvre.) Je suis là parce que tu es venu, tout simplement. Nous ét
1344 Nous étions couchés chez nous. Je ne sais combien de temps cela va durer. Elle délire et j’ai cette balle dans le cœur. Et
1345 r. Et voici que maintenant, je ne puis plus poser de question. Car si vous me dites que c’est une vraie balle que j’ai dan
1346 es questions possibles, et donc toute possibilité de réponse à quoi que ce soit. Laissez-moi donc seul. C’est mon ordre. E
1347 le cri même du désespoir, et c’est l’autosadisme de ce siècle. Tout est faux mais tout est réel. Puisqu’on en meurt de pl
1348 mar mais sans réveil possible. C’est le cauchemar de la réalité. La guerre existe autour de nous, elle est fausse, impossi
1349 ugmentent l’amertume. Elles nous suggèrent l’idée d’ une possession… Est-ce nous vraiment qui avons laissé les choses en ve
1350 es choses en venir là ? Si ce n’est pas nous, qui d’ Autre ? Ah, nous sommes tous complices ! Mais alors pourquoi mourrons-
1351 é que nous n’avons pas aimé assez pour l’empêcher de se perdre ? Pour un avenir que nous devinons à peine et savons encore
1352 us valable que la vie ? Et si nous ne voulons pas de foi, pour quelle vie plus valable que la foi ? C’est couru, notre mon
1353 ant. Cela paraît absurde et révoltant. Il est dur de se défaire de l’idée qu’on était né pour vivre heureux. Jadis la trag
1354 ît absurde et révoltant. Il est dur de se défaire de l’idée qu’on était né pour vivre heureux. Jadis la tragédie n’était q
1355 utres, et dans les livres ; et la voilà substance de nos vies. Encore un navire torpillé et comme le dit l’Amirauté : « Th
1356 victimes ont été informées. (Grand développement de l’information dans notre siècle !) Qu’on nous informe donc, une fois
1357 donc, une fois pour toutes, que nous sommes tous de la famille, et que nous sommes aussi les victimes ! « Vous êtes tous
1358 e temps nous sommes tous dans le bateau qui vient d’ envoyer la torpille. Ce n’est pas une image, hélas, c’est simplement u
1359 st pas une image, hélas, c’est simplement une vue d’ ensemble. (Tôt et tard confondus, ou plutôt embrassés d’un seul regard
1360 mble. (Tôt et tard confondus, ou plutôt embrassés d’ un seul regard.) Que faudra-t-il encore pour que nous comprenions l’ét
1361 a-t-il encore pour que nous comprenions l’étendue de la catastrophe, et qu’elle est vraiment sans limites ? Et qu’il n’y a
1362 t. » Je sais, nous sommes en guerre, et il s’agit de gagner. Mais à quel Bien et à quel Mal avons-nous cru, pour montrer t
1363 n et à quel Mal avons-nous cru, pour montrer tout d’ un coup tant d’assurance ? Se faire tuer pour la liberté d’avoir ses p
1364 avons-nous cru, pour montrer tout d’un coup tant d’ assurance ? Se faire tuer pour la liberté d’avoir ses propres opinions
1365 tant d’assurance ? Se faire tuer pour la liberté d’ avoir ses propres opinions, c’est magnifique, mais c’est aussi mettre
1366 e grabuge où nous sombrons ?… J’ai décrit l’œuvre de Satan, et cela finit dans un cauchemar qui ressemble à s’y méprendre
1367 illé, c’est-à-dire dévêtu des oripeaux tout-faits de l’illusion — c’est peut-être sa cruauté. Mais si l’époque est sans is
1368 le cauchemar est vrai cette fois, s’il n’est plus de réveil possible, pourquoi le dire et troubler davantage ? « Ôter ses
1369 r attristé…13 » ⁂ Mais j’entendais un chant plein de force et de grâce, quelque part au secret de la vie, quand la clameur
1370 3 » ⁂ Mais j’entendais un chant plein de force et de grâce, quelque part au secret de la vie, quand la clameur du néant s’
1371 lein de force et de grâce, quelque part au secret de la vie, quand la clameur du néant s’abaissait, quelque part au-dessus
1372 meur du néant s’abaissait, quelque part au-dessus de la mort, comme une grande fugue puissante et soutenue, quand tout sem
1373 n, mais il est plus dur que la mort et le mutisme de la mort, il est plus pur que nos douleurs, je l’ai nommé : cantique a
1374 ans l’Amérique contemporaine, est une laïcisation de l’hérésie des puritains, qui déformèrent le calvinisme au point de lu
1375 puritains, qui déformèrent le calvinisme au point de lui faire dire que le succès matériel est une marque d’élection. Il s
1376 faire dire que le succès matériel est une marque d’ élection. Il se peut que les grandes fortunes puritaines soient nées d
1377 t que les grandes fortunes puritaines soient nées d’ un pacte avec le diable, béni et enregistré par les pasteurs. Mais san
1378 puritains, il y avait sans doute, plus que l’idée de gain, l’idée « catholique », au sens large, du rachat de la création
1379 , l’idée « catholique », au sens large, du rachat de la création par le travail et la vertu. 9. Kierkegaard. 10. Genèse
1380 8-13. 11. Stendhal. 12. Selon cette conception de la sincérité il serait hypocrite de dire la vérité quand on a fort en
1381 te conception de la sincérité il serait hypocrite de dire la vérité quand on a fort envie de mentir. 13. Proverbes, 15-20
1382 hypocrite de dire la vérité quand on a fort envie de mentir. 13. Proverbes, 15-20.
6 1942, La Part du diable. Cinquième partie. Le Bleu du Ciel
1383 ble Ne réponds pas à l’insensé selon sa folie De peur que tu ne lui ressembles toi-même. Réponds à l’insensé selon sa
1384 u combat contre le mal en général, qu’il s’agisse de la résistance d’une âme au diable, ou de la guerre des démocraties co
1385 e mal en général, qu’il s’agisse de la résistance d’ une âme au diable, ou de la guerre des démocraties contre Hitler. Si v
1386 s’agisse de la résistance d’une âme au diable, ou de la guerre des démocraties contre Hitler. Si vous opposez au diable la
1387 , l’ironie et l’intelligence froide, vous risquez de devenir méchants, c’est-à-dire que plus vous cherchez à être forts à
1388 orts à la manière du diable, plus vous lui donnez d’ avantages, son seul but étant de vous rendre semblables à lui. Mais si
1389 s vous lui donnez d’avantages, son seul but étant de vous rendre semblables à lui. Mais si vous ne le faites pas, vous ser
1390 ocraties opposent à Hitler des tanks, des avions, de la propagande démagogique et une discipline de fer, elles risquent de
1391 s, de la propagande démagogique et une discipline de fer, elles risquent de devenir totalitaires, c’est-à-dire que plus el
1392 agogique et une discipline de fer, elles risquent de devenir totalitaires, c’est-à-dire que plus elles cherchent à être fo
1393 er pour l’ordre. Tout sera perdu. La solution est de répondre à l’insensé à la fois selon sa folie et selon la sagesse qui
1394 us, nous ne deviendrons pas fous. La solution est de résister au diable par la ruse et la subtilité, par l’ironie et l’int
1395 ce froide, et en même temps, par toutes les armes de la foi, de l’espérance et de la charité, dont il ignore la puissance.
1396 et en même temps, par toutes les armes de la foi, de l’espérance et de la charité, dont il ignore la puissance. Car ainsi
1397 par toutes les armes de la foi, de l’espérance et de la charité, dont il ignore la puissance. Car ainsi nous ne serons pas
1398 s les trois grandes Vertus sauront nous préserver de l’abus des vertus mineures, par où le diable pourrait nous asservir.
1399 le diable pourrait nous asservir. La solution est d’ attaquer Hitler — puisqu’il nous attaque — avec des tanks, des avions,
1400 squ’il nous attaque — avec des tanks, des avions, de la propagande massive, et une discipline de fer, — et en même temps d
1401 ions, de la propagande massive, et une discipline de fer, — et en même temps de l’attaquer avec un nouvel idéal. Car ainsi
1402 ive, et une discipline de fer, — et en même temps de l’attaquer avec un nouvel idéal. Car ainsi nous ne serons pas annexés
1403 as non plus par l’intérieur. J’ai tenté jusqu’ici de dénoncer l’action du diable, en me servant parfois de ses propres arm
1404 énoncer l’action du diable, en me servant parfois de ses propres armes. Et pendant que j’écris, la Russie oppose à Hitler
1405 stapo. Occupons-nous maintenant du deuxième temps de l’attaque. Il y faut des hommes réveillés. Deutschland erwache ! — A
1406 même où il plongeait son peuple dans le cauchemar de l’hypnose collective. Procédé constant du démon ! Le tonnerre des bom
1407 , et tous ceux parmi nous qui ont cédé au vertige de l’Abîme politique ou moral ? Pour dissiper l’hypnose, le médecin parf
1408 sur le visage du patient. Ce n’est peut-être que d’ un souffle de l’Esprit, passant sur le visage torturé du siècle, que n
1409 e du patient. Ce n’est peut-être que d’un souffle de l’Esprit, passant sur le visage torturé du siècle, que nous devons at
1410 est, disait Sénèque : conter le rêve est le fait de l’homme qui ne dort plus. C’est un écho lointain du grand cri de sain
1411 ne dort plus. C’est un écho lointain du grand cri de saint Paul : « J’ai cru, c’est pourquoi j’ai parlé ! » Qu’ai-je donc
1412 ’ai parlé ! » Qu’ai-je donc cru, qui m’ait permis d’ articuler ce peu que j’ai pu dire de nos maux ? Et quelle est la visio
1413 m’ait permis d’articuler ce peu que j’ai pu dire de nos maux ? Et quelle est la vision qui m’éveille ? Je m’essaierai à l
1414 ordre céleste, aussi nommé spirituel Le secret de la seule confiance qui ne soit pas une illusion réside dans la simple
1415 ne sommes pas Dieu. Car alors, tout ne dépend pas de nous ! Le principe et la fin de l’Ordre, la sommation, le sens final,
1416 out ne dépend pas de nous ! Le principe et la fin de l’Ordre, la sommation, le sens final, sont dans la main de Dieu, qui
1417 e, la sommation, le sens final, sont dans la main de Dieu, qui est le Bien. Si au contraire, tout était dans nos mains, co
1418 ut était dans nos mains, comme le serpent tentait de nous en persuader, tout serait bientôt gâché et dans les mains du dia
1419 ble. Si nous étions des dieux, il n’y aurait plus d’ espoir : la catastrophe présente étant notre œuvre à tous, l’échec des
1420 ité démontrée sans recours. C’est pourquoi l’aide de l’archange Michel, chef suprême des milices célestes, est la plus gra
1421 int Michel irrésistiblement triomphe par l’énoncé de son nom seul, par le seul cri de son nom qui veut dire : Quis sicut D
1422 phe par l’énoncé de son nom seul, par le seul cri de son nom qui veut dire : Quis sicut Deus ? « Qui est comme Dieu ? » Et
1423 ait : « Vous serez comme des dieux. » Le nom même de Michel formule et définit l’ordre céleste, le gage inaliénable de tou
1424 e et définit l’ordre céleste, le gage inaliénable de toute confiance humaine. L’imagerie populaire de l’archange peut pass
1425 de toute confiance humaine. L’imagerie populaire de l’archange peut passer pour une histoire pieuse, une mythologie médié
1426 masque plus longtemps le moment décisif du drame de notre histoire, le principe même de toute victoire sur le Malin ! Aux
1427 isif du drame de notre histoire, le principe même de toute victoire sur le Malin ! Aux grandes époques de notre évolution,
1428 toute victoire sur le Malin ! Aux grandes époques de notre évolution, c’est l’événement lui-même qui répercute le cri de g
1429 , c’est l’événement lui-même qui répercute le cri de guerre de l’archange lumineux. Avez-vous des oreilles pour l’entendre
1430 événement lui-même qui répercute le cri de guerre de l’archange lumineux. Avez-vous des oreilles pour l’entendre ? Le malh
1431 ez-vous des oreilles pour l’entendre ? Le malheur de ce temps les ouvrira ! Et c’est ici que m’apparaît dans sa grandeur l
1432 démocraties capitalistes et commerçantes : Fils de l’homme, dis au prince de Tyr : Ainsi parle le Seigneur, l’Éternel. T
1433 as dit : Je suis Dieu, Je suis assis sur le siège de Dieu au sein des mers ! Toi tu es homme, et non Dieu. Par ta sagesse
1434 ligence Tu t’es acquis des richesses Tu as amassé de l’or et de l’argent Dans tes coffres-forts ; Par ta grande sagesse et
1435 t’es acquis des richesses Tu as amassé de l’or et de l’argent Dans tes coffres-forts ; Par ta grande sagesse et par ton co
1436  : Parce que tu prends ta volonté pour la volonté de Dieu Voici, je ferai venir contre toi des étrangers, Les plus violent
1437 osse Et tu mourras comme ceux qui tombent percés de coups Au milieu des mers. En face de ton meurtrier, diras-tu : Je sui
1438 s Dieu ? Tu seras homme, et non Dieu Sous la main de celui qui te tuera. En face d’Hitler tout devient clair et décisif.
1439 cent comme illusions. La tactique et la stratégie d’ Hitler illustrent aux yeux des plus sceptiques et des plus lourds, par
1440 onnaître, par la plus évidente analogie, l’action de Satan dans nos vies et le mensonge de l’éternelle Tentation. C’est dé
1441 e, l’action de Satan dans nos vies et le mensonge de l’éternelle Tentation. C’est déjà la moitié de la victoire. Ah, pour
1442 ge de l’éternelle Tentation. C’est déjà la moitié de la victoire. Ah, pour tout l’or du monde je ne souhaiterais pas d’êtr
1443 h, pour tout l’or du monde je ne souhaiterais pas d’ être né dans un autre temps ! Tout signifie, autour de nous, tout s’am
1444 e, autour de nous, tout s’amplifie aux dimensions de la plus vaste poésie ! Tout ce qui m’est arrivé ces jours-ci est à l’
1445 ut ce qui m’est arrivé ces jours-ci est à l’image de l’histoire mondiale. Jamais nos objectifs ne furent plus manifestes.
1446 reflète sa « grande stratégie » dans la confusion de nos mœurs. À nous l’effort, à Dieu l’issue et le jugement. Si nous pe
1447 . Si nous perdons toutes nos batailles, le destin de Satan n’en est pas moins scellé. Tout ce qui nous est demandé, c’est
1448 moins scellé. Tout ce qui nous est demandé, c’est de coïncider avec l’esprit de cette victoire finale. Là gît le secret de
1449 ous est demandé, c’est de coïncider avec l’esprit de cette victoire finale. Là gît le secret de la plus grande liberté d’a
1450 esprit de cette victoire finale. Là gît le secret de la plus grande liberté d’action et d’imagination. Le méchant fait une
1451 inale. Là gît le secret de la plus grande liberté d’ action et d’imagination. Le méchant fait une œuvre qui le trompe : Hit
1452 t le secret de la plus grande liberté d’action et d’ imagination. Le méchant fait une œuvre qui le trompe : Hitler déjoue l
1453 re qui le trompe : Hitler déjoue lui-même le plan de Satan en nous forçant à voir ce que nous sommes. Nous voici délivrés
1454 i délivrés du souci monstrueux des fins dernières de notre destinée, du souci même de notre orgueil, qui nous accable inco
1455 s fins dernières de notre destinée, du souci même de notre orgueil, qui nous accable inconsciemment. Quoi qu’il arrive, le
1456 , — le bleu du ciel n’est pas terni par les nuées de notre angoisse. Et voyez : le jugement final lui-même ne nous apparti
1457 ême ne nous appartient pas, non plus que le souci de la victoire décisive. Car ainsi qu’on le lit dans l’Épître de Jude, é
1458 re décisive. Car ainsi qu’on le lit dans l’Épître de Jude, étonnante explosion de lyrisme vengeur : L’archange Michel, lo
1459 le lit dans l’Épître de Jude, étonnante explosion de lyrisme vengeur : L’archange Michel, lorsqu’il contestait avec le di
1460 ntestait avec le diable et lui disputait le corps de Moïse, n’osa pas porter contre lui un jugement injurieux, mais il dit
1461 igneur te réprime ! Eux, au contraire ils parlent d’ une manière injurieuse de ce qu’ils ignorent, et ils se corrompent dan
1462 au contraire ils parlent d’une manière injurieuse de ce qu’ils ignorent, et ils se corrompent dans ce qu’ils savent nature
1463 ées sans eau, poussées par les vents ; des arbres d’ automne sans fruits, deux fois morts, déracinés ; des vagues furieuses
1464 deux fois morts, déracinés ; des vagues furieuses de la mer, rejetant l’écume de leurs impuretés ; des astres errants, aux
1465 des vagues furieuses de la mer, rejetant l’écume de leurs impuretés ; des astres errants, auxquels l’obscurité des ténèbr
1466 des ténèbres est réservée pour l’éternité. Mais de qui parle-t-il ainsi ? Il tient à nous que ce ne soit pas de nous…
1467 e-t-il ainsi ? Il tient à nous que ce ne soit pas de nous… 45. L’exorcisme, ou l’ordre personnel Le diable et sa col
1468 , ou l’ordre personnel Le diable et sa colonne d’ anges noirs « qui n’ont pas conservé leur dignité, mais qui ont désert
1469 erté leur propre demeure » sont déjà dans l’étang de feu. Du point de vue de l’éternité, c’en est fait, la partie est gagn
1470  » sont déjà dans l’étang de feu. Du point de vue de l’éternité, c’en est fait, la partie est gagnée. Mais ce qui nous imp
1471 e. Mais ce qui nous importe dans ce siècle, c’est de nous rendre immédiatement participants de cette victoire. Un des prop
1472 , c’est de nous rendre immédiatement participants de cette victoire. Un des prophètes mineurs de l’ère moderne, Joseph de
1473 pants de cette victoire. Un des prophètes mineurs de l’ère moderne, Joseph de Maistre, écrivait sous Napoléon : Lorsqu’un
1474 op prépondérante épouvante l’univers, on s’irrite de ne trouver aucun moyen pour l’arrêter ; on se répand en reproches ame
1475 l’immoralité des gouvernements, qui les empêchent de se réunir pour conjurer le danger commun. Mais dans le fond, ces plai
1476 alition entre souverains, faite sur les principes d’ une morale pure et désintéressée, serait un miracle. Dieu, qui ne doit
1477 sintéressée, serait un miracle. Dieu, qui ne doit de miracle à personne et qui n’en fait point d’inutiles, emploie pour ré
1478 doit de miracle à personne et qui n’en fait point d’ inutiles, emploie pour rétablir l’équilibre deux moyens plus simples :
1479  ; comme un faible roseau, arrêté dans le courant d’ un fleuve, produit à la fin un amoncellement de terre qui le détourne.
1480 nt d’un fleuve, produit à la fin un amoncellement de terre qui le détourne. Je dis que nous pouvons participer à cette vi
1481  » qui arrête le courant. Je dis que la condition de cette victoire, c’est que nous devenions, chacun pour notre compte, u
1482 c’est le saint. Seul un saint serait à la hauteur de cette espèce d’héroïsme dans le mal que déploie de nos jours l’advers
1483 Seul un saint serait à la hauteur de cette espèce d’ héroïsme dans le mal que déploie de nos jours l’adversaire. Voilà la v
1484 e cette espèce d’héroïsme dans le mal que déploie de nos jours l’adversaire. Voilà la vérité qui nous éclaire, mais nous c
1485 Et qui donc oserait même, sérieusement, souhaiter d’ en devenir un ? Mais pour devenir ou pour rester des hommes, simplemen
1486 t-ce que se sanctifier ? L’action du diable étant d’ obnubiler en nous le sentiment de la culpabilité, et de nous faire cro
1487 du diable étant d’obnubiler en nous le sentiment de la culpabilité, et de nous faire croire que c’est l’autre toujours, l
1488 ubiler en nous le sentiment de la culpabilité, et de nous faire croire que c’est l’autre toujours, la force des choses ou
1489 vraie sanctification consiste dans l’augmentation de notre sentiment d’être complices de tout le mal qui se fait dans le m
1490 n consiste dans l’augmentation de notre sentiment d’ être complices de tout le mal qui se fait dans le monde. Dans la Confe
1491 ’augmentation de notre sentiment d’être complices de tout le mal qui se fait dans le monde. Dans la Confession des Péchés
1492 fait dans le monde. Dans la Confession des Péchés de Théodore de Bèze, ces mots : « reconnaissant de plus en plus nos faut
1493 du seul progrès humain non équivoque15. Le sommet de la sainteté n’est pas dans la certitude illusoire d’être sans péché.
1494 la sainteté n’est pas dans la certitude illusoire d’ être sans péché. Il nous est au contraire révélé par le Christ lorsqu’
1495 contraire révélé par le Christ lorsqu’il accepte de mourir en assumant tout le péché du monde. Le monde est plein de dém
1496 umant tout le péché du monde. Le monde est plein de démons, ils sévissent par millions, et nous n’arriverons pas à les ch
1497 ne pas qu’il n’en ait point trouvé. Le vrai moyen de rencontrer un homme, c’est d’en devenir un soi-même. (Si ce n’est pas
1498 ouvé. Le vrai moyen de rencontrer un homme, c’est d’ en devenir un soi-même. (Si ce n’est pas le seul moyen, c’est assuréme
1499 faite absolue et sans recours, un élément premier de l’ordre impérissable. Or cet élément personnel doit s’encadrer dans u
1500 étant à donner ; le premier figurant la condition de possibilité de tout ordre personnel, le second sa condition de fécond
1501 ; le premier figurant la condition de possibilité de tout ordre personnel, le second sa condition de fécondité. 46. L’o
1502 é de tout ordre personnel, le second sa condition de fécondité. 46. L’ordre cosmique Le développement aberrant de no
1503 46. L’ordre cosmique Le développement aberrant de nos techniques et par elles de notre impérialisme rationnel, nous a f
1504 loppement aberrant de nos techniques et par elles de notre impérialisme rationnel, nous a fait perdre, depuis quelques siè
1505 ns cosmique, c’est-à-dire la conscience immédiate de nos liens avec l’ensemble de l’Univers, ses lois connues et ses mystè
1506 conscience immédiate de nos liens avec l’ensemble de l’Univers, ses lois connues et ses mystères. Dans le même temps le dé
1507 res. Dans le même temps le développement aberrant de nos morales rationalistes, puis individualistes, puis irrationalistes
1508 élémentaire, c’est-à-dire la conscience immédiate d’ un absolu qui serait, hors de nous, le gage universel du bien et du ma
1509 et du mal. Et nous voici coupés des deux sources de l’Ordre, qui sont les lois ordonnées de la Création et les interventi
1510 x sources de l’Ordre, qui sont les lois ordonnées de la Création et les interventions ordonnatrices du Créateur. Nous avon
1511 du Créateur. Nous avons cru pouvoir nous libérer de l’interdépendance de toutes les choses créées, et de notre dépendance
1512 ons cru pouvoir nous libérer de l’interdépendance de toutes les choses créées, et de notre dépendance de Dieu. Alors nous
1513 l’interdépendance de toutes les choses créées, et de notre dépendance de Dieu. Alors nous sommes entrés dans le monde de l
1514 toutes les choses créées, et de notre dépendance de Dieu. Alors nous sommes entrés dans le monde de l’arbitraire, où l’Ar
1515 e de Dieu. Alors nous sommes entrés dans le monde de l’arbitraire, où l’Arbitre tricheur nous affole à plaisir. Nietzsche
1516 à plaisir. Nietzsche a bien vu que la philosophie de ce monde-là ne pouvait être que le nihilisme. Et tôt après, Hitler en
1517 e que je sente admirable au-delà des fascinations de ma plus secrète utopie. Nous avons à redécouvrir la catholicité fonda
1518 éterminée et révélée par Dieu comme étant l’ordre de sa Création. Et nous avons à redécouvrir l’absolu d’un bien et d’un m
1519 sa Création. Et nous avons à redécouvrir l’absolu d’ un bien et d’un mal non relatifs à nos idées morales, aux suggestions
1520 Et nous avons à redécouvrir l’absolu d’un bien et d’ un mal non relatifs à nos idées morales, aux suggestions aveuglantes d
1521 à nos idées morales, aux suggestions aveuglantes de l’instinct ou aux pressions de l’intérêt momentané ; l’absolu d’un bi
1522 stions aveuglantes de l’instinct ou aux pressions de l’intérêt momentané ; l’absolu d’un bien et d’un mal déterminés et ré
1523 u aux pressions de l’intérêt momentané ; l’absolu d’ un bien et d’un mal déterminés et révélés par Dieu comme étant l’ordre
1524 ns de l’intérêt momentané ; l’absolu d’un bien et d’ un mal déterminés et révélés par Dieu comme étant l’ordre de sa Volont
1525 éterminés et révélés par Dieu comme étant l’ordre de sa Volonté. Toute ma confiance repose dans la certitude que nos méfai
1526 titude que nos méfaits et ceux du diable, et ceux d’ Hitler, ne changent rien à l’Ordre de ce monde, où le hasard n’existe
1527 ble, et ceux d’Hitler, ne changent rien à l’Ordre de ce monde, où le hasard n’existe pas, simple illusion d’une impatience
1528 monde, où le hasard n’existe pas, simple illusion d’ une impatience oblitérant nos sens spirituels, mais qui ne peut empêch
1529 ns spirituels, mais qui ne peut empêcher l’Esprit d’ agir plus qu’elle ne peut influencer le cours des astres. Nous pouvons
1530 tion poétique qui sonde les abîmes microscopiques de la matière, la grande dynamique sidérale, et les correspondances de l
1531 grande dynamique sidérale, et les correspondances de la vie organique, à tel point qu’un savant, un peintre, un visionnair
1532 savant, un peintre, un visionnaire, sont capables de réinventer le « réel » à sa ressemblance ; mais nous ne pouvons préve
1533 ; mais nous ne pouvons prévenir toutes ces choses d’ exister, de graviter, de naître, de mourir, et de porter leurs justes
1534 ne pouvons prévenir toutes ces choses d’exister, de graviter, de naître, de mourir, et de porter leurs justes conséquence
1535 révenir toutes ces choses d’exister, de graviter, de naître, de mourir, et de porter leurs justes conséquences jusqu’au te
1536 tes ces choses d’exister, de graviter, de naître, de mourir, et de porter leurs justes conséquences jusqu’au terme des cyc
1537 d’exister, de graviter, de naître, de mourir, et de porter leurs justes conséquences jusqu’au terme des cycles possibles.
1538 nces jusqu’au terme des cycles possibles. Du fond d’ un cœur aux bornes du cosmos, une résonance universelle émeut tout l’e
1539 rselle émeut tout l’existant à la quête éternelle d’ un accord qui sera le nom secret de Dieu. Ah ! nous pouvons mentir, tu
1540 uête éternelle d’un accord qui sera le nom secret de Dieu. Ah ! nous pouvons mentir, tuer, et nous exclure, nous pouvons f
1541 mentir, tuer, et nous exclure, nous pouvons faire de pitoyables fautes d’orgueil, de négligence ou de calcul, mais nous ne
1542 exclure, nous pouvons faire de pitoyables fautes d’ orgueil, de négligence ou de calcul, mais nous ne pouvons rien, à jama
1543 ous pouvons faire de pitoyables fautes d’orgueil, de négligence ou de calcul, mais nous ne pouvons rien, à jamais, sur le
1544 de pitoyables fautes d’orgueil, de négligence ou de calcul, mais nous ne pouvons rien, à jamais, sur le miracle perpétuel
1545 der la justice et la joie, les pures spéculations de la mathématique et les structures du monde matériel, l’amour et l’obj
1546 structures du monde matériel, l’amour et l’objet de l’amour, la prière et le vœu divin. Si moi, petit individu, erreur in
1547 insignifiante, parole articulée dans le discours de toutes les créatures, je prétends m’isoler ou m’abstraire du cosmos,
1548 u plan providentiel. Mais si je réponds à l’appel de mon nom, si j’assume la vocation qui me distingue et rend vraie ma pa
1549 et rend vraie ma parole, si je m’efforce au moins de converger avec l’ordre cosmique et le vouloir divin, tout indigne enc
1550 c’est toujours aux déserts qu’il habite, déserts de sables, d’eaux amères ou de rochers, déserts des foules, ou ceux que
1551 ours aux déserts qu’il habite, déserts de sables, d’ eaux amères ou de rochers, déserts des foules, ou ceux que porte un cœ
1552 qu’il habite, déserts de sables, d’eaux amères ou de rochers, déserts des foules, ou ceux que porte un cœur dénué d’amour
1553 serts des foules, ou ceux que porte un cœur dénué d’ amour et d’espérance. Il n’est pas bon que l’homme soit seul. Il n’est
1554 oules, ou ceux que porte un cœur dénué d’amour et d’ espérance. Il n’est pas bon que l’homme soit seul. Il n’est pas bon no
1555 repose sur le voisinage vécu, qui est la relation de prochain à prochain.17 Sans voisinage réel, vous n’êtes plus responsa
1556 Sans voisinage réel, vous n’êtes plus responsable de rien ni de personne. Mais sans le sentiment de la responsabilité de c
1557 age réel, vous n’êtes plus responsable de rien ni de personne. Mais sans le sentiment de la responsabilité de chacun enver
1558 le de rien ni de personne. Mais sans le sentiment de la responsabilité de chacun envers autrui, il n’est point de liberté
1559 onne. Mais sans le sentiment de la responsabilité de chacun envers autrui, il n’est point de liberté civique possible : la
1560 nsabilité de chacun envers autrui, il n’est point de liberté civique possible : la dictature devient inévitable dans toute
1561 xime est le « chacun pour soi et Dieu pour tous » de ceux qui ne croient pas en Dieu. C’est ce que nous voyons se produire
1562 e nous voyons se produire dans les États atteints de gigantisme, où les relations humaines, du fait des grandes distances,
1563 nes, du fait des grandes distances, des masses et de l’anonymat, ne sont plus que d’abstraites contraintes, qui d’ailleurs
1564 es, des masses et de l’anonymat, ne sont plus que d’ abstraites contraintes, qui d’ailleurs ne contraignent bientôt qu’à la
1565 à-dire que l’abstraite contrainte doit se doubler d’ une contrainte physique, seule efficace désormais : la police. Mais ce
1566 ur est en réalité le souverain désordre. Il n’y a d’ ordre vrai que dans la liberté. Il n’y a de liberté que chez les homme
1567 n’y a d’ordre vrai que dans la liberté. Il n’y a de liberté que chez les hommes qui réalisent leur vocation et qui la ser
1568 l’homme libre est le seul qui respecte la liberté de ses semblables. Tout cela se tient. Sens du prochain, responsabilité,
1569 ien longtemps l’une sans l’autre. Et l’ordre naît de leur alliance. Ceux qui n’ont pas encore compris que la liberté est l
1570 re compris que la liberté est le fondement vivant de l’ordre ; qu’elle ne peut être donnée à personne, mais seulement conq
1571 tible avec l’égoïsme, l’insignifiance et l’esprit de combine, l’arrivisme, l’opportunisme et la fuite devant les responsab
1572 esponsabilités, la bêtise vaniteuse et la paresse de pensée, le respect de l’argent, le ton hâbleur, le bluff et le sentim
1573 ise vaniteuse et la paresse de pensée, le respect de l’argent, le ton hâbleur, le bluff et le sentimentalisme qui font tou
1574 : tout ce qui caractérise les mœurs politiciennes de nos pseudo-démocraties, et les goûts de leur « grand public » tels qu
1575 ticiennes de nos pseudo-démocraties, et les goûts de leur « grand public » tels que les entretiennent et les exploitent le
1576 qu’ils l’ont compris — ceux-là n’ont aucun droit de se dire démocrates, ils ne méritent rien de mieux qu’Hitler. Ceux qu
1577 droit de se dire démocrates, ils ne méritent rien de mieux qu’Hitler. Ceux qui n’ont pas encore compris que liberté égale
1578 é égale responsabilité, ceux-là n’ont aucun droit de revendiquer une liberté dont ils ne sauraient rien tirer s’ils la rec
1579 vaient les conditions. Mais il serait insuffisant de démasquer l’hypocrisie, et Dieu sait si les mots démocratie et libert
1580 ont une, pitoyable ou scandaleuse, dans la bouche de milliers de nigauds ou de cyniques qui s’en prévalent. Ce serait insu
1581 oyable ou scandaleuse, dans la bouche de milliers de nigauds ou de cyniques qui s’en prévalent. Ce serait insuffisant et m
1582 daleuse, dans la bouche de milliers de nigauds ou de cyniques qui s’en prévalent. Ce serait insuffisant et même dangereux.
1583 rter vers une définition intransigeante et claire de l’idéal qui seul justifie notre lutte ; et vers la recherche de moyen
1584 seul justifie notre lutte ; et vers la recherche de moyens d’incorporer cet idéal, qui ne soient point eux-mêmes des trah
1585 ifie notre lutte ; et vers la recherche de moyens d’ incorporer cet idéal, qui ne soient point eux-mêmes des trahisons de l
1586 déal, qui ne soient point eux-mêmes des trahisons de leur fin. Il faut aider les hommes si faibles d’aujourd’hui à devenir
1587 de leur fin. Il faut aider les hommes si faibles d’ aujourd’hui à devenir un peu plus responsables, un peu plus dignes d’ê
1588 enir un peu plus responsables, un peu plus dignes d’ être libres, un peu plus dignes de se faire tuer ou de tuer, nous en s
1589 peu plus dignes d’être libres, un peu plus dignes de se faire tuer ou de tuer, nous en sommes là, au nom de la liberté et
1590 re libres, un peu plus dignes de se faire tuer ou de tuer, nous en sommes là, au nom de la liberté et de la démocratie. Ce
1591 tuer, nous en sommes là, au nom de la liberté et de la démocratie. Cet « un peu » représente une énorme ambition, si l’on
1592 éal et ma vision ? Mon horreur des programmes n’a d’ égale que l’étendue de mon scepticisme quant aux objurgations de la pr
1593 horreur des programmes n’a d’égale que l’étendue de mon scepticisme quant aux objurgations de la propagande. Aussi bien,
1594 étendue de mon scepticisme quant aux objurgations de la propagande. Aussi bien, je ne prêche pas : je vais dire simplement
1595 ement les conclusions qui m’apparaissent résulter de notre état. Je crois à la vertu de l’élucidation, qui dit le vrai en
1596 ssent résulter de notre état. Je crois à la vertu de l’élucidation, qui dit le vrai en baissant le ton, sans nul effort de
1597 i dit le vrai en baissant le ton, sans nul effort de persuader. Je me tiens l’argument suivant : le gigantisme moderne pri
1598 suivant : le gigantisme moderne prive les hommes de la possibilité d’être et de se sentir responsables dans la société et
1599 ntisme moderne prive les hommes de la possibilité d’ être et de se sentir responsables dans la société et dans la politique
1600 erne prive les hommes de la possibilité d’être et de se sentir responsables dans la société et dans la politique, donc d’ê
1601 sables dans la société et dans la politique, donc d’ être libres ; cette irresponsabilité anxieuse appelle la dictature par
1602 r, et nous rend impuissants contre les dictatures de l’extérieur ; notre désordre intime nous livre donc nécessairement et
1603 taires ; si nous n’aimons pas ça, il faut changer de méthodes ou d’attitude ; mais quelles sont les méthodes et l’attitude
1604 s n’aimons pas ça, il faut changer de méthodes ou d’ attitude ; mais quelles sont les méthodes et l’attitude contraires au
1605 t l’attitude contraires au gigantisme et capables de le prévenir ? Je réponds qu’il n’y a d’ordre solide et libéral que da
1606 capables de le prévenir ? Je réponds qu’il n’y a d’ ordre solide et libéral que dans les petites communautés, dans les cit
1607 tenus par le citoyen, en connaissance de cause et de personnes. Je réponds que ces petites communautés ne pourront subsist
1608 e fédéralisme, est la seule qui permette aux mots de liberté, d’ordre, d’humanité et de démocratie de signifier quelque ch
1609 e, est la seule qui permette aux mots de liberté, d’ ordre, d’humanité et de démocratie de signifier quelque chose qui m’ém
1610 seule qui permette aux mots de liberté, d’ordre, d’ humanité et de démocratie de signifier quelque chose qui m’émeuve. Qua
1611 mette aux mots de liberté, d’ordre, d’humanité et de démocratie de signifier quelque chose qui m’émeuve. Quant à ceux qui
1612 de liberté, d’ordre, d’humanité et de démocratie de signifier quelque chose qui m’émeuve. Quant à ceux qui disent : « Je
1613 ce qu’ils estiment possible, hors de la guerre et de l’État totalitaire, qui n’est rien d’autre que l’état de guerre en pe
1614 a guerre et de l’État totalitaire, qui n’est rien d’ autre que l’état de guerre en permanence ? Beaucoup de choses « imposs
1615 at totalitaire, qui n’est rien d’autre que l’état de guerre en permanence ? Beaucoup de choses « impossibles » nous arrive
1616 lles sont là, malgré nous. Ne serait-il pas temps de vouloir ce qui arrive, de vouloir l’impossible favorable, c’est-à-dir
1617 Ne serait-il pas temps de vouloir ce qui arrive, de vouloir l’impossible favorable, c’est-à-dire de créer un ordre, et de
1618 , de vouloir l’impossible favorable, c’est-à-dire de créer un ordre, et de passer à l’offensive ? 48. Le sens des mots
1619 ble favorable, c’est-à-dire de créer un ordre, et de passer à l’offensive ? 48. Le sens des mots Mais l’offensive su
1620 . Un plan commun, clairement déterminé et compris de la même manière par tous ceux qui devront l’exécuter. Un plan qui s’e
1621 exprime par des mots, et par des mots qui mettent de l’ordre dans nos volontés égarées : tous les mots clairs sont des mot
1622 s. Il semble même que l’on se batte pour eux avec d’ autant plus de passion que l’on sait moins clairement ce qu’ils signif
1623 ême que l’on se batte pour eux avec d’autant plus de passion que l’on sait moins clairement ce qu’ils signifient. J’ai dit
1624 J’ai dit que l’ordre véritable suppose la liberté de l’homme responsable. Mais combien de bourgeois apeurés voient encore
1625 e la liberté de l’homme responsable. Mais combien de bourgeois apeurés voient encore dans Hitler, cet homme des masses, « 
1626 dans Hitler, cet homme des masses, « le rempart » de leur ordre contre le bolchévisme ? Vous vous battez au nom de votre l
1627 ens que l’on pût déclarer sans hésiter. Si chacun de vous savait ce qu’il défend. (Car se faire tuer ne prouve rien : les
1628 ils ont un sens défini. Et ce qui définit le sens d’ un mot, c’est sa correspondance indiscutable à certaines choses, à cer
1629 ement des actes. Or cette correspondance ne cesse d’ être arbitraire qu’en vertu d’un accord unanime. C’est dire qu’elle ne
1630 lle ne peut se produire qu’au sein d’un groupe ou d’ une communauté vivante. Une tradition, un droit, une foi et une autori
1631 oi et une autorité communes, sont seules capables de définir le sens de ce qu’on appelle les mots courants. Mais toutes ce
1632 communes, sont seules capables de définir le sens de ce qu’on appelle les mots courants. Mais toutes ces choses ont dispar
1633 siècle apparaîtra dans l’avenir comme une espèce de cauchemar verbal, de cacophonie délirante. On y parlait plus qu’on n’
1634 ns l’avenir comme une espèce de cauchemar verbal, de cacophonie délirante. On y parlait plus qu’on n’avait jamais parlé :
1635 qu’on n’avait jamais parlé : imaginez ces postes de radio qui ne peuvent plus se taire ni nuit ni jour, où la parole est
1636 ù les mots s’usaient plus vite qu’en aucun siècle de l’Histoire, temps de la grande prostitution de cette parole qui devai
1637 plus vite qu’en aucun siècle de l’Histoire, temps de la grande prostitution de cette parole qui devait être la mesure du v
1638 le de l’Histoire, temps de la grande prostitution de cette parole qui devait être la mesure du vrai, et dont l’Évangile di
1639 lumière des hommes » ! Hélas, qu’avons-nous fait de la parole ! Elle ne saurait plus même mentir dans certaines bouches,
1640 le ronron du style officiel, le gâtisme des fins de banquet ; et quand nous sommes abêtis de discours, lui, le romantique
1641 des fins de banquet ; et quand nous sommes abêtis de discours, lui, le romantique qui nous suggère que l’indicible est peu
1642 os structures sociales, il précipite la confusion de notre langage. Il sait que les hommes ne peuvent s’engager que par de
1643 primant le sens des mots, il détruit la base même de nos fidélités. Il sait que partout où l’on appelle un chat un chat, l
1644 on appelle un chat un chat, le mal recule et perd de ses prestiges ; c’est pourquoi il a inventé la langue des diplomates
1645 n, qu’elle achèvera mieux que les pires tyrannies d’ ahurir notre sens moral… J’allais écrire que le seul remède serait de
1646 moral… J’allais écrire que le seul remède serait de lui opposer la sémantique, qui est la science des significations, du
1647 étymologies. Un ministère du Sens des mots, doté de pouvoirs discrétionnaires, voilà ce qu’il faut à la Démocratie, puisq
1648 8 (Ce ministère était jadis l’Église. Une analyse de nos vocabulaires montrerait que le peu de sens commun qu’ils conserve
1649 liturgiques.) Je pourrais indiquer vingt remèdes de ce genre : mais je sais trop qu’ils seront sans vertu dans le monde i
1650 e détruire et les mots, justement, trop dépourvus de prises pour qu’un conseil soit encore entendu. Mais voici la confianc
1651 t le silence adorant : nous ne sommes pas maîtres de détruire la vraie Parole ! Tous les mensonges du diable, et tous nos
1652 ssent dès que l’Esprit nous parle, par une phrase de la Bible ou de nos liturgies, par un mot que dit un passant, par une
1653 ’Esprit nous parle, par une phrase de la Bible ou de nos liturgies, par un mot que dit un passant, par une prière née dans
1654 par une prière née dans un cœur. Il ne dépend pas de nous que ces syllabes vivent : tout d’un coup elles nous ont parlé. (
1655 dépend pas de nous que ces syllabes vivent : tout d’ un coup elles nous ont parlé. (La naissance d’un poème ou d’un rythme
1656 out d’un coup elles nous ont parlé. (La naissance d’ un poème ou d’un rythme de phrase, quelque part en nous-mêmes, nous do
1657 elles nous ont parlé. (La naissance d’un poème ou d’ un rythme de phrase, quelque part en nous-mêmes, nous donne une faible
1658 nt parlé. (La naissance d’un poème ou d’un rythme de phrase, quelque part en nous-mêmes, nous donne une faible idée de ces
1659 ue part en nous-mêmes, nous donne une faible idée de ces surprises.) Si le langage nous appartenait, il y a longtemps qu’o
1660 Mais si deux êtres communiquent, si ces mots tout d’ un coup me mettent en mouvement, si cet accent suffit à me rendre à ma
1661 ils ne pourront rien sur le mystère qui fait qu’à de certains moments, certains mots nous parlent, et non d’autres, fût-ce
1662 , et non d’autres, fût-ce à voix basse, au secret d’ un cachot. Ils pourront réduire au silence les bavards et les grands o
1663 la souffrance et la honte ne nous permettent plus d’ articuler même une plainte intelligible, — c’est elle à présent qui no
1664 le ! 49. Vertus J’ai désigné les dimensions de l’Ordre indestructible au sein duquel le drame de nos destins s’encad
1665 de l’Ordre indestructible au sein duquel le drame de nos destins s’encadre. Ainsi armés et appuyés, nous pouvons porter su
1666 et les fait parfois s’évanouir avec un dégagement de fumée noire qui obscurcit le ciel pour un temps, et peut-être nous fa
1667 u diable des injures, qu’il prendrait pour autant d’ hommages. Détournons-nous et regardons le Bien. Armons-nous de cette g
1668 Détournons-nous et regardons le Bien. Armons-nous de cette grande Confiance qui survit à la catastrophe, parce qu’en ayant
1669 la joie, ni la grandeur et ni l’amour ne cessent d’ attendre, intacts et souverains, notre désir. Il nous suffit de retrou
1670 ntacts et souverains, notre désir. Il nous suffit de retrouver le courage d’être vertueux. Il nous suffit de rendre à la v
1671 tre désir. Il nous suffit de retrouver le courage d’ être vertueux. Il nous suffit de rendre à la vertu sa gloire. Certes,
1672 rouver le courage d’être vertueux. Il nous suffit de rendre à la vertu sa gloire. Certes, nous avions fait de la vertu si
1673 re à la vertu sa gloire. Certes, nous avions fait de la vertu si triste chose qu’il paraissait mesquin de s’y tenir. Perso
1674 la vertu si triste chose qu’il paraissait mesquin de s’y tenir. Personne n’osait plus en parler : elle n’était plus que la
1675 au mot même, qui avait électrisé jadis les héros de la Révolution. La morale était ennuyeuse, et le gangster plein de pre
1676 . La morale était ennuyeuse, et le gangster plein de prestige. Le bon ton consistait en somme à préférer le mauvais genre.
1677 èglement des critères19 a toujours annoncé la fin d’ une cité et de sa culture. À l’orgueil et à la brutalité proclamés com
1678 ritères19 a toujours annoncé la fin d’une cité et de sa culture. À l’orgueil et à la brutalité proclamés comme vertus par
1679 âches, et cela s’appelait du réalisme. À l’esprit de vengeance et de ressentiment, elles ne surent opposer que leurs inqui
1680 ’appelait du réalisme. À l’esprit de vengeance et de ressentiment, elles ne surent opposer que leurs inquiétudes de propri
1681 nt, elles ne surent opposer que leurs inquiétudes de propriétaires fatigués, et cela s’appelait défense de l’ordre. À la g
1682 a confusion spirituelle, et cela s’appelait droit de libre critique. Tout cela s’explique et des générations de romanciers
1683 critique. Tout cela s’explique et des générations de romanciers nous ont montré d’une manière convaincante que l’homme « m
1684 et des générations de romanciers nous ont montré d’ une manière convaincante que l’homme « moral » n’était qu’un hypocrite
1685 s montre autre chose. Quand une démocratie rougit de ses vertus, sur quelle force peut-elle compter ? Et quand l’élite d’u
1686 quelle force peut-elle compter ? Et quand l’élite d’ une société n’attache plus que du ridicule aux disciplines qui l’ont f
1687 musent le plus grand nombre et rapportent le plus d’ argent, quand elle rend un culte à des stars d’une intolérable sottise
1688 us d’argent, quand elle rend un culte à des stars d’ une intolérable sottise, quand tout cela paraît naturel, et le contrai
1689 poser aux barbares ? La barbarie débile et bébête de nos foules, la démission sans élégance de nos élites, est-ce que c’es
1690 bébête de nos foules, la démission sans élégance de nos élites, est-ce que c’est cela qu’il faut sauver au prix de sa vie
1691 inexorable : rien au monde ne saurait l’empêcher de se détruire. Et si l’on tue ce qui était déjà mort, je n’y vois pas d
1692 l’on tue ce qui était déjà mort, je n’y vois pas d’ inconvénient. Tout cela ne m’empêchera pas d’avoir confiance ! Le malh
1693 pas d’inconvénient. Tout cela ne m’empêchera pas d’ avoir confiance ! Le malheur nous rend au sérieux. Il nous apprend à o
1694 à opposer au mal le bien, et non pas le demi-mal de petites perversions. Il nous rend le courage d’opposer à cet orgueil
1695 l de petites perversions. Il nous rend le courage d’ opposer à cet orgueil prôné par les totalitaires, l’humilité et non la
1696 et non pas des calculs « réalistes » ; à la soif de vengeance et au ressentiment, à la grossièreté spirituelle, la justic
1697 a justice à double tranchant et l’austère rigueur de pensée, non pas cette hystérie sentimentale et cette panique de possé
1698 pas cette hystérie sentimentale et cette panique de possédants taxés. Je voudrais dire ces choses plus simplement encore,
1699 me ciel ramène un printemps pur sur les décombres de la vie. Je suppose une cité parvenue au dernier terme de sa corruptio
1700 ie. Je suppose une cité parvenue au dernier terme de sa corruption. « Je demande à tout homme qui pense de me montrer ce q
1701 a corruption. « Je demande à tout homme qui pense de me montrer ce qui subsiste de la vie. »20 Et je réponds : le grand or
1702 out homme qui pense de me montrer ce qui subsiste de la vie. »20 Et je réponds : le grand ordre de vivre, et d’assumer un
1703 ste de la vie. »20 Et je réponds : le grand ordre de vivre, et d’assumer un destin neuf. La vertu n’est plus ennuyeuse qua
1704 . »20 Et je réponds : le grand ordre de vivre, et d’ assumer un destin neuf. La vertu n’est plus ennuyeuse quand les vertue
1705 relles où nous nous attardions. Il ne s’agit plus de leur morale qui mourut sur la défensive, et qu’ils ont si mal défendu
1706 qu’ils ont si mal défendue, il s’agit simplement de la grandeur que nous saurons imaginer, et d’une vision nouvelle de la
1707 ment de la grandeur que nous saurons imaginer, et d’ une vision nouvelle de la force. Assis sur nos ruines, j’esquisse… Je
1708 e nous saurons imaginer, et d’une vision nouvelle de la force. Assis sur nos ruines, j’esquisse… Je me plais à inscrire ce
1709 plus beau jeu ! Je me plais à copier des phrases de ce ton : « L’égoïsme a aussi sa niaiserie, il n’est pas moins ignoran
1710 . » « Pour connaître les hommes, il ne suffit pas de les mépriser. »21 « Les personnes faibles ne peuvent être sincères. »
1711 faibles ne peuvent être sincères. »22 Et je rêve d’ une anthologie de ces maximes d’une virtu sans jactance… J’imagine que
1712 nt être sincères. »22 Et je rêve d’une anthologie de ces maximes d’une virtu sans jactance… J’imagine que l’humilité passe
1713 s. »22 Et je rêve d’une anthologie de ces maximes d’ une virtu sans jactance… J’imagine que l’humilité passe à travers les
1714 J’imagine que l’humilité passe à travers les murs de la cellule que bâtissaient nos craintes et nos vanités faibles, et qu
1715 es et nos vanités faibles, et qu’elle nous permet d’ être libres comme ceux qui n’ont plus rien à perdre. Je pense à cette
1716 le pécheur, puisqu’il réveille en lui le courage de l’amour. Je pense que le malheur nous rendra sobres, et que l’empire
1717 aciturnes par l’éducation du danger et la coutume de la mort, plus absurde et plus simple que jamais. J’élève ces vertus d
1718 e ces vertus devant mes yeux non comme une utopie de lendemains meilleurs, car l’Ecclésiaste avait raison, « les hommes ne
1719 que l’époque nous rappelle, je vois notre chance de grandeur : elle nous rend à la réalité. Les vraies vertus ne vont pas
1720 s ne vont pas à un happy ending, mais à la gloire de la Vérité. J’imagine, je ne rêve pas : je me prépare à marcher. Je se
1721 jà ce livre, et les quelques accords que je viens d’ essayer me donnent le ton d’une harmonie nouvelle, d’un style de vie p
1722 accords que je viens d’essayer me donnent le ton d’ une harmonie nouvelle, d’un style de vie plus dur et plus joyeux… J’ap
1723 ssayer me donnent le ton d’une harmonie nouvelle, d’ un style de vie plus dur et plus joyeux… J’appelle et je pressens — c’
1724 onnent le ton d’une harmonie nouvelle, d’un style de vie plus dur et plus joyeux… J’appelle et je pressens — c’est une phr
1725 yeux… J’appelle et je pressens — c’est une phrase de Poe qui depuis quelque temps me fascine — « une certaine énergie calm
1726 et indomptable, telle que nous pouvons l’imaginer d’ un large fleuve d’or fondu »… O da quod jubes, domine !23 50. Le
1727 lle que nous pouvons l’imaginer d’un large fleuve d’ or fondu »… O da quod jubes, domine !23 50. Le Bleu du Ciel Ec
1728 la vertu et la splendeur. Je lui oppose les gages d’ une confiance que n’atteindra jamais sa ruse. Je lui oppose les hiérar
1729 dra jamais sa ruse. Je lui oppose les hiérarchies de l’Ordre : l’ordre céleste et le cri de guerre de l’Ange blanc, l’ordr
1730 iérarchies de l’Ordre : l’ordre céleste et le cri de guerre de l’Ange blanc, l’ordre intérieur de la sainteté, l’ordre cos
1731 de l’Ordre : l’ordre céleste et le cri de guerre de l’Ange blanc, l’ordre intérieur de la sainteté, l’ordre cosmique et s
1732 cri de guerre de l’Ange blanc, l’ordre intérieur de la sainteté, l’ordre cosmique et son discours immense, l’ordre des lo
1733 se, l’ordre des lois jurées dans la cité, l’ordre de la parole et l’ordre des vertus. Je lui oppose l’Esprit, l’Eau et le
1734 le Pain et le Vin. Je lui oppose aussi les œuvres d’ hommes où sa part a été consumée. Je lui oppose le bleu du ciel. Le bl
1735 Le bleu des ciels que j’ai aimés. Le bleu du ciel de l’Île-de-France, la douceur de l’art et des âges, et le sourire d’une
1736 s. Le bleu du ciel de l’Île-de-France, la douceur de l’art et des âges, et le sourire d’une femme à l’amour fidèle et gai.
1737 e, la douceur de l’art et des âges, et le sourire d’ une femme à l’amour fidèle et gai. Le bleu du ciel de Manhattan, fusan
1738 ne femme à l’amour fidèle et gai. Le bleu du ciel de Manhattan, fusant comme une inexorable joie entre les verticalités ar
1739 des gratte-ciel. Le bleu du ciel des Alpes moiré d’ éclatante noirceur, à midi, sur la tranche des glaciers. Que ces image
1740 e du malheur ; et qu’elles réfutent les sophismes de l’Abîme comme une aube d’été évapore les brumes ! On dit que le démon
1741 réfutent les sophismes de l’Abîme comme une aube d’ été évapore les brumes ! On dit que le démon aime l’heure de minuit. A
1742 ore les brumes ! On dit que le démon aime l’heure de minuit. Ah ! tournons-nous, le visage levé, vers le symbole universel
1743 s-nous, le visage levé, vers le symbole universel de la rigueur et de la paix profonde du pardon, et baignons un regard au
1744 levé, vers le symbole universel de la rigueur et de la paix profonde du pardon, et baignons un regard aux étendues de pur
1745 nde du pardon, et baignons un regard aux étendues de pureté ardente et dure du bleu du ciel au cœur du jour ! 14. Prove
1746 une virile clairvoyance, c’est la vraie guérison de nos fameux « complexes de culpabilité ». 16. Daniel Defoe. 17. Je p
1747 c’est la vraie guérison de nos fameux « complexes de culpabilité ». 16. Daniel Defoe. 17. Je prends le mot prochain au s
1748 in. — Qui est mon prochain ? — Celui qui a besoin de ton aide, ou celui qui t’en donne. Ce peut être n’importe quel homme,
1749 st plus que mensonge dirigé. 19. Je ne parle pas de l’immoralité, j’ignore si elle était plus grande qu’en d’autres temps
1750 eulement qu’on n’avait même plus « l’hypocrisie » de la condamner comme telle. 20. Baudelaire encore, en plein xixe sièc