1
en général, et à l’Amérique en particulier, c’est
de
croire au diable. On sortit de table. C’était au club. Tandis que nou
2
particulier, c’est de croire au diable. On sortit
de
table. C’était au club. Tandis que nous attendions l’ascenseur, je di
3
ue ? répondit-il avec sa grande douceur. La porte
de
l’ascenseur s’ouvrait, nous entrâmes. — Ce serait enfin une situation
4
angélisèrent la Suisse expliquait à son auditoire
de
paysans que les martyrs sont nos meilleurs intercesseurs auprès de Di
5
eilleurs intercesseurs auprès de Dieu. Les pâtres
de
la Suisse alpestre sont des gens simples et réalistes. Ils crurent l’
6
ait vers les salons. Et je pensais : il nous faut
de
ces paraboles pour nous rappeler combien il est dangereux de dire la
7
boles pour nous rappeler combien il est dangereux
de
dire la vérité en général, et la vérité chrétienne en particulier. Da
8
i nous voulons être chrétiens, soit, mais sachons
de
quel prix cela se paye. Il y a dix-neuf siècles que ce Prix a été fix
9
e que j’ai senti ce livre se proposer à moi : car
de
l’auteur ou du sujet, sait-on jamais lequel a choisi l’autre ? Parler
10
ire sur lui, n’était-ce pas une manière impudente
de
le provoquer publiquement ? Je songeais à cette phrase de Kafka : « L
11
ovoquer publiquement ? Je songeais à cette phrase
de
Kafka : « L’un des artifices de séduction les plus efficaces du diabl
12
is à cette phrase de Kafka : « L’un des artifices
de
séduction les plus efficaces du diable, c’est de nous provoquer au co
13
de séduction les plus efficaces du diable, c’est
de
nous provoquer au combat. C’est comme la lutte avec une femme, qui fi
14
se. Il est vrai que pour certains auteurs, l’acte
d’
écrire résulte simplement d’une démangeaison de l’esprit que l’on calm
15
tains auteurs, l’acte d’écrire résulte simplement
d’
une démangeaison de l’esprit que l’on calme en grattant du papier, san
16
te d’écrire résulte simplement d’une démangeaison
de
l’esprit que l’on calme en grattant du papier, sans nul souci des con
17
dans ce sens que chaque vérité comporte une part
d’
accusation pour notre vie, et tend à déranger cet équilibre de pieux m
18
pour notre vie, et tend à déranger cet équilibre
de
pieux mensonges tacitement admis, sans lesquels « l’existence deviend
19
t pour troubler une absinthe. Ainsi chaque goutte
de
vérité trouble la vie. Mais c’est de quoi l’on peut faire son ivresse
20
haque goutte de vérité trouble la vie. Mais c’est
de
quoi l’on peut faire son ivresse. Je n’aime écrire que des livres dan
21
bagarre à l’heure où nous aurions besoin, dit-on,
d’
un « message positif » et rassurant ? Eh bien, surtout que l’on ne se
22
trouble empire, dans le monde, c’est qu’on a peur
de
regarder en face ses vraies causes. Nous croyons à trente-six-mille m
23
ns trente-six-mille périls, mais nous avons cessé
de
croire au Mal et de redouter le vrai Péril. Montrer la réalité du dia
24
périls, mais nous avons cessé de croire au Mal et
de
redouter le vrai Péril. Montrer la réalité du diable dans ce monde, c
25
lui donner son véritable Objet. C’est faire peur
de
la bonne manière. Et c’est peut-être le moyen de nous guérir des faus
26
de la bonne manière. Et c’est peut-être le moyen
de
nous guérir des fausses angoisses qui nous paralysaient, ou de l’ango
27
r des fausses angoisses qui nous paralysaient, ou
de
l’angoisse de faux périls. On n’est jamais plus en danger que dans le
28
angoisses qui nous paralysaient, ou de l’angoisse
de
faux périls. On n’est jamais plus en danger que dans les moments où l
29
moments où l’on se trompe sur la vraie direction
de
la menace, et où l’on tend ses énergies dans une défense orientée ver
30
l’Ennemi, mesurer sa puissance, tel est le sujet
de
ce petit ouvrage. Toutefois, qu’on ne s’attende pas à un portrait du
31
le : il faut tenir tous ses portraits pour autant
de
victoires qu’il remporte sur notre complaisance ou nos crédulités. Le
32
pparences, le bluff éhonté ou subtil, bref, l’art
de
faire mentir les formes. À défaut donc d’une peinture impossible, ou
33
, l’art de faire mentir les formes. À défaut donc
d’
une peinture impossible, ou trop aisément pittoresque, on tentera de d
34
ossible, ou trop aisément pittoresque, on tentera
de
décrire l’œuvre du diable au temps présent, en face de nous et parmi
35
ceux qui prennent à coup sûr le plus grand nombre
d’
hommes dans les basses époques spirituelles. ⁂ Encore un mot. On se tr
36
⁂ Encore un mot. On se tromperait sur l’intention
de
ce petit traité, si l’on y voyait un effort pour « démontrer » l’exis
37
rer » l’existence du diable. Il ne s’agit ici que
d’
un essai d’interpréter certains déboires de notre temps, en les rappor
38
stence du diable. Il ne s’agit ici que d’un essai
d’
interpréter certains déboires de notre temps, en les rapportant à l’ac
39
ci que d’un essai d’interpréter certains déboires
de
notre temps, en les rapportant à l’action du seul être qui s’en réjou
40
ier tour C’est dans les Petits Poèmes en prose
de
Baudelaire que l’on peut lire la phrase la plus profonde écrite par u
41
erne sur Satan : La plus belle ruse du diable est
de
nous persuader qu’il n’existe pas. 2. L’Incognito Reconnaisson
42
si peu au diable que l’on m’accusera certainement
d’
obscurantisme, ou simplement de manque de sérieux, si je persiste en m
43
usera certainement d’obscurantisme, ou simplement
de
manque de sérieux, si je persiste en mon projet de lui consacrer tout
44
ainement d’obscurantisme, ou simplement de manque
de
sérieux, si je persiste en mon projet de lui consacrer tout un livre.
45
e manque de sérieux, si je persiste en mon projet
de
lui consacrer tout un livre. Le premier tour du diable est son incogn
46
celui qui suis ». Mais le diable toujours jaloux
d’
imiter Dieu, fût-ce à rebours puisqu’il voit tout d’en bas, nous dit c
47
imiter Dieu, fût-ce à rebours puisqu’il voit tout
d’
en bas, nous dit comme Ulysse au Cyclope : « Je me nomme Personne, il
48
lope : « Je me nomme Personne, il n’y a personne.
De
qui aurais-tu peur ? Vas-tu trembler devant l’inexistant ? » En Angle
49
re, circulait une gravure inspirée des diableries
de
Breughel et de Bosch. Elle représentait un personnage doté d’une tête
50
ne gravure inspirée des diableries de Breughel et
de
Bosch. Elle représentait un personnage doté d’une tête cornue et de d
51
et de Bosch. Elle représentait un personnage doté
d’
une tête cornue et de deux pieds fourchus, mais dont le corps restait
52
résentait un personnage doté d’une tête cornue et
de
deux pieds fourchus, mais dont le corps restait invisible. Et le titr
53
ible. Et le titre était : No-body. Comme le chat
de
Cheshire dans Alice, le diable a, de nos jours, achevé de disparaître
54
omme le chat de Cheshire dans Alice, le diable a,
de
nos jours, achevé de disparaître, ne laissant plus flotter dans l’air
55
ire dans Alice, le diable a, de nos jours, achevé
de
disparaître, ne laissant plus flotter dans l’air qu’un rire impercept
56
ible dénonce l’existence du diable à chaque page,
de
la première où il apparaît sous la forme du serpent, jusqu’à l’avant-
57
s raison alléguée, finalement flamboyé par le feu
de
ciel et précipité dans un étang de flammes et de soufre avec ses faux
58
oyé par le feu de ciel et précipité dans un étang
de
flammes et de soufre avec ses faux prophètes, pour y être tourmenté n
59
de ciel et précipité dans un étang de flammes et
de
soufre avec ses faux prophètes, pour y être tourmenté nuit et jour au
60
les textes originaux). Si l’on croit à la vérité
de
la Bible, il est impossible de douter un seul instant de la réalité d
61
croit à la vérité de la Bible, il est impossible
de
douter un seul instant de la réalité du diable. Mais qui croit encore
62
ible, il est impossible de douter un seul instant
de
la réalité du diable. Mais qui croit encore à la Bible, sérieusement,
63
x ? C’est un fait : l’homme moderne éprouve moins
de
peine à prêter foi aux mensonges du jour qu’aux éternelles vérités tr
64
vont lui donner mes lecteurs — m’arrête, au seuil
de
cette étude, et me dit avec un sourire d’indulgente incrédulité : — «
65
u seuil de cette étude, et me dit avec un sourire
d’
indulgente incrédulité : — « Vous croyez donc au diable ? Auquel ? Cel
66
e. Elles traduisent fort exactement nos attitudes
de
pensée les plus courantes. Négliger d’y répondre serait se condamner
67
attitudes de pensée les plus courantes. Négliger
d’
y répondre serait se condamner à baser tout un livre sur un quiproquo.
68
un grand vieillard à barbe blanche, Père éternel
de
Michel-Ange tonnant au ciel violent de la Sixtine. On nous dit « diab
69
re éternel de Michel-Ange tonnant au ciel violent
de
la Sixtine. On nous dit « diable », et nous voyons un démon ricanant
70
animé des plus mauvaises intentions. Ces réflexes
d’
optique intérieure ne prouvent rien sur Dieu, ni sur son existence. Ma
71
médiévaux. Supposons un instant qu’il s’agisse là
d’
un camouflage prémédité du diable. À première vue, il paraîtra rudimen
72
se dissimule derrière sa propre image. Il choisit
de
revêtir une apparence grotesque qui a pour effet certain de le rendre
73
une apparence grotesque qui a pour effet certain
de
le rendre inoffensif aux yeux des personnes instruites. Car si le dia
74
r si le diable est simplement le démon rouge armé
d’
un grand trident, ou le faune à barbiche de chèvre et à longue queue d
75
e armé d’un grand trident, ou le faune à barbiche
de
chèvre et à longue queue des légendes populaires, qui se donnerait en
76
ndes populaires, qui se donnerait encore la peine
d’
y croire, ou même de déclarer qu’il n’y croit pas ? Ainsi, par un tour
77
se donnerait encore la peine d’y croire, ou même
de
déclarer qu’il n’y croit pas ? Ainsi, par un tour astucieux, l’image
78
utomatique et médiévale qu’éveille en nous le nom
de
diable est devenue la Tarnkappe, le manteau qui rend invisible et que
79
ment peut-on perdre son temps avec ces balivernes
d’
un autre âge ? » Or il me semble que ce sont eux qui s’y laissent pren
80
u’il demandait. Et ceux qui en restent aux contes
de
bonnes femmes, ce sont ceux qui refusent de croire au diable à cause
81
ontes de bonnes femmes, ce sont ceux qui refusent
de
croire au diable à cause de l’image qu’ils s’en font, et qui est tiré
82
age qu’ils s’en font, et qui est tirée des contes
de
bonnes femmes. 4. Réalité du mythe Mais si nous écartons ce vo
83
nous ? Un mythe ou une réalité ? Derrière l’image
d’
un pittoresque inefficace et désuet — y a-t-il quelqu’un ? Cette fois-
84
uve en soit que je puis vous tracer son histoire,
de
sa naissance antique jusqu’à sa mort dans l’esprit de nos contemporai
85
a naissance antique jusqu’à sa mort dans l’esprit
de
nos contemporains. Les hommes ont créé ce fantôme. Et tout d’abord, l
86
. Mais ce sont les rabbins qui ont su tirer parti
de
la légende d’Ormuzd et d’Ahrimane, et de ces anges ou démons ailés do
87
les rabbins qui ont su tirer parti de la légende
d’
Ormuzd et d’Ahrimane, et de ces anges ou démons ailés dont ils trouvai
88
qui ont su tirer parti de la légende d’Ormuzd et
d’
Ahrimane, et de ces anges ou démons ailés dont ils trouvaient le modèl
89
er parti de la légende d’Ormuzd et d’Ahrimane, et
de
ces anges ou démons ailés dont ils trouvaient le modèle en Assyrie. C
90
syrie. Ce sont les rabbins qui ont écrit le livre
d’
Énoch, où l’on voit des anges mauvais descendre sur la terre — et c’es
91
du genre humain, qu’on assimile aussi au serpent
de
la Genèse. Dès lors, Satan prend son essor comme personnalité bien dé
92
e christianisme lui donne un rôle dans les récits
de
la vie de Jésus. Et dans l’Apocalypse il est autorisé à régner sur le
93
nisme lui donne un rôle dans les récits de la vie
de
Jésus. Et dans l’Apocalypse il est autorisé à régner sur le monde ent
94
t encore il reste le Roi. En l’an 547, le concile
de
Constantinople le déclare éternel. Pendant tout le Moyen Âge, il terr
95
t tout le Moyen Âge, il terrorise les populations
de
l’Europe christianisée. Les moines font autant pour sa gloire que les
96
ssance. On lui attribue des cohortes innombrables
de
démons et de diablotins1. On lui invente une église et des messes noi
97
i attribue des cohortes innombrables de démons et
de
diablotins1. On lui invente une église et des messes noires. On lui o
98
nvoient dans la panique et le délire des milliers
de
victimes convaincues de sorcellerie, et souvent prêtes à s’accuser el
99
et le délire des milliers de victimes convaincues
de
sorcellerie, et souvent prêtes à s’accuser elles-mêmes dans les terme
100
it cette névrose collective ? Non par la guérison
de
ses victimes, mais par la suppression de ceux qui prétendaient les gu
101
guérison de ses victimes, mais par la suppression
de
ceux qui prétendaient les guérir par le feu. Au siècle des Lumières,
102
e diable quitte la scène, comme l’évêque à la fin
d’
une procession. Rien de plus clair que cette histoire : les hommes ont
103
, ce fantôme les a tourmentés pendant des siècles
d’
ignorance, et finalement la raison triomphante a dissipé notre illusio
104
notre illusion morbide. » Tel est le point de vue
de
l’historien. Il est exact tant qu’il n’explique rien, et qu’il se bor
105
rien, et qu’il se borne à réciter des faits tirés
de
documents écrits. Mais il est faux et dénué d’intérêt s’il prétend pr
106
és de documents écrits. Mais il est faux et dénué
d’
intérêt s’il prétend prouver quelque chose quant à la réalité du diabl
107
e que le diable est un être mythique, une réalité
de
l’esprit. Dès lors, si l’on me dit : « Le diable n’est qu’un mythe, d
108
able est un mythe, donc il existe et ne cesse pas
d’
agir ». C’est ici le foyer du débat. Un mythe est une histoire qui déc
109
certaines structures profondes du réel. Je parle
de
structures littéralement fondamentales, car elles sont antérieures à
110
Elles informent notre univers dans tous les plans
de
sa réalité. Et c’est seulement quand nous avons saisi par intuition l
111
s avons saisi par intuition le principe et la loi
d’
une structure que nous pouvons, dans la nature ou dans la vie de l’âme
112
e que nous pouvons, dans la nature ou dans la vie
de
l’âme, reconnaître des formes, comprendre leur langage, et parfois mê
113
iques qui nous rappellent ou nous livrent le sens
de
ces structures formatrices — Idées de Platon, Catégories de Kant, Mèr
114
ent le sens de ces structures formatrices — Idées
de
Platon, Catégories de Kant, Mères de Goethe, Archétypes de Jung. Dans
115
uctures formatrices — Idées de Platon, Catégories
de
Kant, Mères de Goethe, Archétypes de Jung. Dans le mythe, une réalité
116
ices — Idées de Platon, Catégories de Kant, Mères
de
Goethe, Archétypes de Jung. Dans le mythe, une réalité équivaut par d
117
, Catégories de Kant, Mères de Goethe, Archétypes
de
Jung. Dans le mythe, une réalité équivaut par définition à un sens, —
118
du mythe, je veux dire sans le secours des moyens
d’
intuition structurelle qu’il nous offre, il n’y a que des faits dits o
119
que des faits dits objectifs, mais il n’y a plus
de
significations valables dans tous les plans simultanés de notre exist
120
fications valables dans tous les plans simultanés
de
notre existence. La raison s’imagine à tort qu’elle perçoit des objet
121
sont en réalité locales par rapport à l’ensemble
de
notre réalité. Par exemple, les lois mathématiques énoncées par notre
122
tiques énoncées par notre raison cessent aussitôt
d’
être valables si l’on passe au plan affectif, au plan moral, ou au pla
123
s lois biologiques, etc. Or loin de s’effrayer et
de
se scandaliser de carences aussi flagrantes, notre raison moderne s’e
124
, etc. Or loin de s’effrayer et de se scandaliser
de
carences aussi flagrantes, notre raison moderne s’excuse en précisant
125
ison moderne s’excuse en précisant « qu’il s’agit
de
domaines différents ». Phrase typiquement provinciale, à ce stade. Ma
126
quand elle prétend nier l’existence ou l’urgence
de
la commune mesure qu’elle ne peut concevoir, la raison nous conduit à
127
r, la raison nous conduit à la folie par la porte
de
l’incohérence. Le chaos où nous sommes en témoigne. Et la grande expl
128
ù nous sommes en témoigne. Et la grande explosion
de
l’irrationalisme dans la première moitié du xxe siècle témoigne de l
129
e dans la première moitié du xxe siècle témoigne
de
l’état pré-démentiel où le rationalisme avait amené le monde, en détr
130
ussion a mal tourné, décidément. Elle a fait trop
de
bruit dans le siècle. Il est temps de réconcilier la raison et les fo
131
a fait trop de bruit dans le siècle. Il est temps
de
réconcilier la raison et les forces qui lui échappent, dans la synthè
132
et les forces qui lui échappent, dans la synthèse
d’
une sagesse nouvelle. Je crois que l’époque est mûre pour l’entreprise
133
nt : « Je ne perçois que des maux ou des systèmes
de
maux indépendants les uns des autres. Mais je suis incapable de m’ass
134
ndants les uns des autres. Mais je suis incapable
de
m’assurer qu’une intention quelconque, un plan ou une conscience, rel
135
nifiant ou anthropomorphisant le Mal, est capable
de
lui découvrir une signification générale. Quant à moi, je me récuse,
136
as une réalité spirituelle, mais une multiplicité
de
fautes, d’erreurs, d’accidents matériels, de hasards considérés comme
137
ité spirituelle, mais une multiplicité de fautes,
d’
erreurs, d’accidents matériels, de hasards considérés comme malheureux
138
elle, mais une multiplicité de fautes, d’erreurs,
d’
accidents matériels, de hasards considérés comme malheureux, de malaju
139
cité de fautes, d’erreurs, d’accidents matériels,
de
hasards considérés comme malheureux, de malajustements et d’absurdité
140
atériels, de hasards considérés comme malheureux,
de
malajustements et d’absurdités. Une collection de grands et de petits
141
considérés comme malheureux, de malajustements et
d’
absurdités. Une collection de grands et de petits scandales parfois lo
142
de malajustements et d’absurdités. Une collection
de
grands et de petits scandales parfois localement explicables, ou qu’o
143
ents et d’absurdités. Une collection de grands et
de
petits scandales parfois localement explicables, ou qu’on se borne à
144
se trouve désarmée devant les éruptions brutales
d’
un mal organisé par des forces obscures, selon la logique mystérieuse
145
logique mystérieuse et l’efficacité irrésistible
de
l’inconscient. Enregistrons cette carence rationaliste et plaçons-nou
146
mentale : c’est que nous sommes ici dans le monde
de
l’esprit, du sens, et des essences créatrices, dans le monde d’où pro
147
u sens, et des essences créatrices, dans le monde
d’
où provient toute forme, y compris la forme de l’homme. Voltaire disai
148
nde d’où provient toute forme, y compris la forme
de
l’homme. Voltaire disait : « Dieu créa l’homme à son image, mais l’ho
149
à l’erreur. (Il se trompe dans le fait, en créant
de
faux dieux. Mais alors, c’est dans la mesure où il néglige les aides
150
ors, c’est dans la mesure où il néglige les aides
de
la Révélation corrigeant ses erreurs égoïstes. Celles-ci ne sont pas
151
itualiser, s’il veut devenir humain au plein sens
de
ce terme. Car dans le monde de l’esprit, tout est forme, intention, m
152
main au plein sens de ce terme. Car dans le monde
de
l’esprit, tout est forme, intention, mouvement, finalité, et plan. To
153
er du diable ne sera pas ici quelque moyen facile
d’
illustrer des idées. Le réel n’est pas fait d’idées et de matière. Je
154
ile d’illustrer des idées. Le réel n’est pas fait
d’
idées et de matière. Je le conçois gouverné par des structures de forc
155
trer des idées. Le réel n’est pas fait d’idées et
de
matière. Je le conçois gouverné par des structures de forces ou des e
156
atière. Je le conçois gouverné par des structures
de
forces ou des ensembles dynamiques, antérieurs à toute forme matériel
157
s décrire dans ce livre porte le nom traditionnel
de
diable. Ce diable-là n’est pas sorti d’une série de textes plus ou mo
158
ditionnel de diable. Ce diable-là n’est pas sorti
d’
une série de textes plus ou moins authentiques ou anciens. Car il est
159
diable. Ce diable-là n’est pas sorti d’une série
de
textes plus ou moins authentiques ou anciens. Car il est un agent per
160
ntiques ou anciens. Car il est un agent permanent
de
la réalité humaine, telle que nous la vivons quand nous vivons vraime
161
ivons quand nous vivons vraiment, dans notre état
de
créatures libres, c’est-à-dire constamment placées devant des choix,
162
a tragédie. Tout cela suppose et pose l’existence
d’
un bien et de quelque chose d’autre que le bien. Sinon, où seraient le
163
out cela suppose et pose l’existence d’un bien et
de
quelque chose d’autre que le bien. Sinon, où seraient le choix, la tr
164
et pose l’existence d’un bien et de quelque chose
d’
autre que le bien. Sinon, où seraient le choix, la tragédie, la libert
165
elle nous aide à mieux comprendre la vraie nature
de
l’homme, et nos vies dans ce siècle. Je pense que les figures du myth
166
rement que l’évidence moderne et que les analyses
de
la raison. Car elles transmettent une expérience millénaire, au regar
167
pirituelles vivant et agissant sur les frontières
de
l’Éternel et de la Création, de l’éternité et du temps. Ce sont des i
168
nt et agissant sur les frontières de l’Éternel et
de
la Création, de l’éternité et du temps. Ce sont des intentions divine
169
ur les frontières de l’Éternel et de la Création,
de
l’éternité et du temps. Ce sont des intentions divines, des messagers
170
à la fulgurante volée, dont la vitesse est celle
de
la pensée, et c’est pourquoi ils nous sont invisibles ; des intellige
171
bles ; des intelligences sans fraude, participant
de
l’omniscience du Créateur, et c’est pourquoi nous les comprenons mal.
172
. Mais tout ange est bon, servant Dieu. Au sommet
de
leur hiérarchie sont les archanges. Un seul archange a trahi sa missi
173
ssage et son être même, c’est Lucifer, le Porteur
de
Lumière2. Satan s’est révolté, il a refusé de servir, il a refusé de
174
eur de Lumière2. Satan s’est révolté, il a refusé
de
servir, il a refusé de transmettre son message divin, il a voulu se f
175
s’est révolté, il a refusé de servir, il a refusé
de
transmettre son message divin, il a voulu se faire original, auteur d
176
ssage divin, il a voulu se faire original, auteur
de
son destin, porteur de ses lumières à lui. Et aussitôt, par les lois
177
se faire original, auteur de son destin, porteur
de
ses lumières à lui. Et aussitôt, par les lois mêmes de l’être, il est
178
s lumières à lui. Et aussitôt, par les lois mêmes
de
l’être, il est « tombé » du Ciel, qui est le Royaume où l’intention d
179
ombé » du Ciel, qui est le Royaume où l’intention
de
Dieu règne absolue. (Coupez la communication, le courant « tombe ».)
180
le courant « tombe ».) Il est devenu le messager
de
soi, et comme il n’est qu’un esprit pur, une fois coupé de la source
181
t comme il n’est qu’un esprit pur, une fois coupé
de
la source de l’Esprit, il est devenu le messager du Néant et de ses m
182
est qu’un esprit pur, une fois coupé de la source
de
l’Esprit, il est devenu le messager du Néant et de ses mystères. Mais
183
e l’Esprit, il est devenu le messager du Néant et
de
ses mystères. Mais quoique déchu, il a gardé sa science d’esprit pur.
184
stères. Mais quoique déchu, il a gardé sa science
d’
esprit pur. Comme un artiste qui a perdu son génie et ne croit plus à
185
re, mais qui a conservé son « métier » et l’envie
d’
être à l’avant-garde, Satan connaît encore l’Esprit et les esprits, ma
186
gloire à laquelle ils sont destinés. Ayant refusé
de
servir Dieu, de servir à Dieu, il est devenu celui qui sert le Rien,
187
e ils sont destinés. Ayant refusé de servir Dieu,
de
servir à Dieu, il est devenu celui qui sert le Rien, ne sert à Rien.
188
le secret des âmes qu’il abuse… 6. Le Prince
de
ce monde L’acte d’orgueil éblouissant et consumant qui transforma
189
’il abuse… 6. Le Prince de ce monde L’acte
d’
orgueil éblouissant et consumant qui transforma l’Ange de lumière en A
190
il éblouissant et consumant qui transforma l’Ange
de
lumière en Ange et Prince des ténèbres, l’a condamné à un impérialism
191
limites, donc par définition désespéré. La perte
de
l’Unique Nécessaire fait naître une soif essentiellement inextinguibl
192
tier ne saurait combler le vide que forme au cœur
d’
une créature la conscience d’avoir quitté sa juste place dans le monde
193
de que forme au cœur d’une créature la conscience
d’
avoir quitté sa juste place dans le monde. Tombé de l’éternel, Satan v
194
’avoir quitté sa juste place dans le monde. Tombé
de
l’éternel, Satan veut l’infini. Tombé de l’Être, il veut l’Avoir. Mai
195
e. Tombé de l’éternel, Satan veut l’infini. Tombé
de
l’Être, il veut l’Avoir. Mais le problème est insoluble à tout jamais
196
il pourra tout avoir, puisqu’il est appelé Prince
de
ce monde dans l’Évangile — mais il n’aura jamais que ce monde-ci. Il
197
onquerra jamais le Ciel, qui est proprement l’âme
de
ce monde et le mystère du transcendant dans l’immanence. Il n’aura de
198
stère du transcendant dans l’immanence. Il n’aura
de
notre univers que la carcasse matérielle. Et c’est probablement de ce
199
que la carcasse matérielle. Et c’est probablement
de
ces débris de la Maison désaffectée qu’il fera le bois de chauffage d
200
e matérielle. Et c’est probablement de ces débris
de
la Maison désaffectée qu’il fera le bois de chauffage de son Enfer. I
201
ébris de la Maison désaffectée qu’il fera le bois
de
chauffage de son Enfer. Il le sait bien. C’est pourquoi son désir et
202
aison désaffectée qu’il fera le bois de chauffage
de
son Enfer. Il le sait bien. C’est pourquoi son désir et sa jalousie f
203
e autour de nous comme un lion rugissant en quête
de
sa proie, dit la Bible. Il rôde autour de nous comme un gangster obsé
204
perdre toutes ces choses, qui sont notre héritage
d’
« enfants de Dieu ». C’est la seule chance du diable. Il ne la manquer
205
s ces choses, qui sont notre héritage d’« enfants
de
Dieu ». C’est la seule chance du diable. Il ne la manquera pas… 7
206
7. Le Tentateur Le serpent était le plus rusé
de
tous les animaux des champs que l’Éternel Dieu avait fait. Il dit à l
207
Dieu a-t-il réellement dit : vous ne mangerez pas
de
tous les arbres du jardin ? La femme répondit au serpent : nous mange
208
u fruit des arbres du jardin. Mais quant au fruit
de
l’arbre qui est au milieu du jardin, Dieu a dit : vous n’en mangerez
209
n’en mangerez point et vous n’y toucherez point,
de
peur que vous n’en mouriez. Alors le serpent dit à la femme : Vous ne
210
y a le doute ! Le premier procédé du démon, c’est
de
jeter un doute sur la réalité de la loi divine, et donc sur la réalit
211
du démon, c’est de jeter un doute sur la réalité
de
la loi divine, et donc sur la réalité elle-même et ses structures. «
212
ude s’est insinuée dans un esprit, la possibilité
d’
une tentation s’entrouvre. Car il n’y a pas de tentation là où n’exist
213
ité d’une tentation s’entrouvre. Car il n’y a pas
de
tentation là où n’existe aucune possibilité d’imaginer quelque autre
214
as de tentation là où n’existe aucune possibilité
d’
imaginer quelque autre chose que l’état de fait. On dit bien : l’occas
215
ibilité d’imaginer quelque autre chose que l’état
de
fait. On dit bien : l’occasion fait le larron. Vous n’êtes pas tenté
216
l’occasion fait le larron. Vous n’êtes pas tenté
d’
aller dans la Lune parce que vous savez que c’est absolument impossibl
217
t impossible. Mais vous seriez probablement tenté
d’
y aller, si l’on vous suggérait quelque moyen de le faire. Ève ne pens
218
é d’y aller, si l’on vous suggérait quelque moyen
de
le faire. Ève ne pensait même pas à manger cette pomme avant que le s
219
vant que le serpent n’ait mis en doute la réalité
de
l’ordonnance de Dieu. À l’origine de toute tentation, il y a l’occasi
220
ent n’ait mis en doute la réalité de l’ordonnance
de
Dieu. À l’origine de toute tentation, il y a l’occasion entrevue d’al
221
e la réalité de l’ordonnance de Dieu. À l’origine
de
toute tentation, il y a l’occasion entrevue d’aller à la divinité par
222
ne de toute tentation, il y a l’occasion entrevue
d’
aller à la divinité par un plus court chemin que celui du réel ; par u
223
e, en dépit des interdictions que posent les lois
de
la Création, l’ordre divin et la nature de l’homme4. Et voici le deu
224
s lois de la Création, l’ordre divin et la nature
de
l’homme4. Et voici le deuxième temps de la tentation : « La femme vi
225
a nature de l’homme4. Et voici le deuxième temps
de
la tentation : « La femme vit que l’arbre était bon à manger et agréa
226
t précieux pour ouvrir l’intelligence : elle prit
de
son fruit et en mangea. »5 Voyez : ce n’est pas le mal en soi qui te
227
our l’esprit. Elle ne fut pas tentée par le désir
de
nuire, mais par l’idée de se diviniser, ce qui paraît en somme une ex
228
pas tentée par le désir de nuire, mais par l’idée
de
se diviniser, ce qui paraît en somme une excellente idée. Par malheur
229
le, Dieu n’aimait pas cette idée-là et l’excluait
de
sa réalité. Manger cette pomme et se diviniser de cette manière convo
230
de sa réalité. Manger cette pomme et se diviniser
de
cette manière convoiteuse, il se trouvait qu’aux yeux de Dieu c’était
231
Dieu c’était le mal, c’était contrevenir au plan
d’
ensemble et aux ordonnances du Jardin ; en d’autres termes, c’était tr
232
en d’autres termes, c’était tricher avec les lois
de
la Création, ou les utiliser à contre-fin. La suite du récit montre b
233
t au sol maudit. Pour avoir voulu dépasser l’état
d’
image divine et se faire vraiment dieux, ils se trouvent déchus de leu
234
t se faire vraiment dieux, ils se trouvent déchus
de
leur humanité parfaite. « Qui veut faire l’ange fait la bête », dira
235
, — si l’utopie est l’imagination, puis le désir,
d’
un bien que le réel condamne et que le plan divin ne prévoit pas. Sata
236
e Christ, lui propose trois utopies, trois moyens
de
gagner le monde par un plus court chemin que le sentier du Golgotha.
237
aissant le Bien et le Mal » C’est le privilège
d’
un Dieu, selon le récit de la Genèse, que de connaître le Bien et le M
238
» C’est le privilège d’un Dieu, selon le récit
de
la Genèse, que de connaître le Bien et le Mal. Les psychologues et mo
239
ilège d’un Dieu, selon le récit de la Genèse, que
de
connaître le Bien et le Mal. Les psychologues et moralistes modernes,
240
ace de Dieu, et qu’ils étaient par suite capables
de
bon sens. Le bien et le mal, tels que l’homme les conçoit, sont des c
241
sations, et souvent même aux conditions physiques
d’
un pays. Le Bien et le Mal en soi ne sont réellement distincts qu’aux
242
u — pas même aux yeux du diable, toujours la dupe
d’
un acte de charité qu’il tiendra pour une sottise. C’est que Dieu seul
243
me aux yeux du diable, toujours la dupe d’un acte
de
charité qu’il tiendra pour une sottise. C’est que Dieu seul connaît l
244
une sottise. C’est que Dieu seul connaît le plan
d’
ensemble et l’intention dernière de toute sa Création. Et c’est seulem
245
onnaît le plan d’ensemble et l’intention dernière
de
toute sa Création. Et c’est seulement par rapport à ce plan et à cett
246
ut à Dieu et à sa volonté souveraine, nous permet
de
prendre une vue du Mal moins locale et plus pénétrante que celle de n
247
du Mal moins locale et plus pénétrante que celle
de
nos morales humaines. Une illusion commune et presque inévitable nous
248
nt une réalité autonome et concrète, qu’il s’agit
de
détruire ou de combattre comme un ennemi extérieur à notre être. Pour
249
autonome et concrète, qu’il s’agit de détruire ou
de
combattre comme un ennemi extérieur à notre être. Pour dissiper cette
250
nger Dieu. Il est devenu le messager qui n’a plus
de
message réel, l’agent du Néant parmi nous. Dès lors, il ne peut plus
251
s, il ne peut plus créer que le Rien, qui n’a pas
d’
existence. Créer le mal est impossible. Ce qui revient à dire que le m
252
mal n’existe pas. Pour agir, le diable est forcé
d’
utiliser ce qui existe, et qui est bon par définition, ayant été créé
253
faire, mais il lui reste une possibilité : c’est
de
nous inciter à faire abus de notre liberté et des biens de la terre.
254
possibilité : c’est de nous inciter à faire abus
de
notre liberté et des biens de la terre. Ni le diable, ni l’homme péch
255
nciter à faire abus de notre liberté et des biens
de
la terre. Ni le diable, ni l’homme pécheur ne peuvent réellement fair
256
soit « du mal », mais il peut manger un bon fruit
d’
une manière malfaisante, contre l’Ordre donné. Le mal en soi n’existe
257
mal n’est qu’un mauvais usage du bien, entendons
de
ce qui existe. Telle est la situation fondamentale et primitive. Cepe
258
e et primitive. Cependant, le diable étant jaloux
de
Dieu, il entend nous faire croire qu’il peut aussi créer. Et c’est po
259
t c’est pourquoi il entretient en nous l’illusion
d’
un mal objectif dont il serait évidemment l’auteur. Ce mal en soi n’es
260
e. Il n’est qu’un mirage du démon, une projection
de
nos erreurs hors de nous-mêmes, obnubilant aux yeux de notre orgueil
261
’est plus tard, c’est après plusieurs générations
de
pécheurs dans l’histoire, ou de péchés dans une vie, que le mal finir
262
ieurs générations de pécheurs dans l’histoire, ou
de
péchés dans une vie, que le mal finira par révéler une espèce de cons
263
une vie, que le mal finira par révéler une espèce
de
consistance propre, — apparence encore, mais active, contre nature ma
264
elaire peut écrire : « L’homme et la femme savent
de
naissance que dans le mal se trouve la volupté… La volupté unique et
265
a volupté unique et suprême gît dans la certitude
de
faire le mal. » Je crois plutôt, comme le dit William Blake, que « la
266
plutôt nommée : douleur aimée, désir inconscient
de
la mort. Car ici se sont déclenchés les mécanismes compliqués de la p
267
ici se sont déclenchés les mécanismes compliqués
de
la perversion, de l’autopunition d’une conscience déchirée, et du dés
268
nchés les mécanismes compliqués de la perversion,
de
l’autopunition d’une conscience déchirée, et du désir enfin de se dét
269
es compliqués de la perversion, de l’autopunition
d’
une conscience déchirée, et du désir enfin de se détruire. Se détruire
270
tion d’une conscience déchirée, et du désir enfin
de
se détruire. Se détruire pour s’innocenter ! Pour échapper à sa maniè
271
éparer. C’est le mystère du suicide et la logique
de
Judas, la dernière tentation, la suprême utopie. 9. Le Menteur
272
utopie. 9. Le Menteur Examinons maintenant
d’
un peu plus près, par le détail de notre vie présente, comment le diab
273
nons maintenant d’un peu plus près, par le détail
de
notre vie présente, comment le diable arrive à s’insérer dans les str
274
le diable arrive à s’insérer dans les structures
de
l’être, donc du bien. J’ai dit qu’il doit passer par l’homme pour agi
275
peut dire ce qui n’est pas, et mentir par un acte
de
sa volonté réfléchie. Le minéral repose où il fut composé, la plante
276
ixa la graine, les animaux muets sont prisonniers
de
l’ordre intarissablement prodigue de l’instinct. Mais l’homme a reçu
277
prisonniers de l’ordre intarissablement prodigue
de
l’instinct. Mais l’homme a reçu le pouvoir de parler, de créer, et de
278
gue de l’instinct. Mais l’homme a reçu le pouvoir
de
parler, de créer, et de dénaturer. Par la grâce du langage, il peut d
279
stinct. Mais l’homme a reçu le pouvoir de parler,
de
créer, et de dénaturer. Par la grâce du langage, il peut dire le vrai
280
l’homme a reçu le pouvoir de parler, de créer, et
de
dénaturer. Par la grâce du langage, il peut dire le vrai ; par la fau
281
contredire. Il peut créer selon les perspectives
de
la Création, il peut aussi créer à tort et à travers. Il peut être un
282
t et à travers. Il peut être un agent responsable
de
la nature naturante, mais il peut aussi faire la grève, se révolter,
283
iquer l’anti-nature ou dénature. Cette duplicité
de
nos pouvoirs constitue notre liberté. Elle en est à la fois le signe
284
e gloire équivoque. C’est par la liberté, à cause
d’
elle, et dans elle, que nous avons le pouvoir de pécher. Car pécher c’
285
e d’elle, et dans elle, que nous avons le pouvoir
de
pécher. Car pécher c’est tricher avec l’ordre, opposer à la loi divin
286
à la loi divine nos dérogations égoïstes, fautes
de
calcul et courtes vues intéressées. Pécher, c’est fausser quelque cho
287
grand paraît l’enjeu, et plus grande la tentation
de
gagner dans l’instant ce qu’on voit, quitte à se fermer l’invisible e
288
agit dans le monde, et c’est en provoquant l’abus
de
notre liberté qu’il agit en nous et nous lie. Si Ève n’avait pas été
289
en nous et nous lie. Si Ève n’avait pas été libre
de
manger cette pomme interdite, Ève n’aurait pu pécher, ni Adam après e
290
it pu pécher, ni Adam après elle. Ainsi la gloire
de
l’homme étant sa liberté, il est clair que c’est en ce point que le M
291
lair que la grande ambition satanique devait être
de
s’emparer de la parole dans notre bouche, pour altérer le témoignage
292
rande ambition satanique devait être de s’emparer
de
la parole dans notre bouche, pour altérer le témoignage dans sa sourc
293
ue dans notre langue ». Mais il est deux manières
de
mentir, comme il est deux manières de tromper un client. Si la balanc
294
ux manières de mentir, comme il est deux manières
de
tromper un client. Si la balance indique 980 grammes, vous pouvez dir
295
ntrôle, il peut voir qu’on le vole, et vous savez
de
combien vous le volez : une vérité reste juge entre vous. Mais si le
296
e critère du vrai qui est dénaturé, il n’y a plus
de
contrôle possible. Et peu à peu vous oublierez que vous trichez. Pari
297
uelques pincées « pour le bon poids », le sourire
de
l’acheteur et la satisfaction de votre vertu. C’est là le mensonge pu
298
ds », le sourire de l’acheteur et la satisfaction
de
votre vertu. C’est là le mensonge pur, l’œuvre propre du diable. À pa
299
artir de l’instant où vous faussez la mesure même
de
la vérité, toutes vos « vertus » sont au service du mal et sont compl
300
vertus » sont au service du mal et sont complices
de
l’œuvre du Malin. « Le diable est menteur et le Père du mensonge », d
301
e du mensonge », dit l’Évangile tel qu’on le cite
d’
ordinaire. Ceci concerne le premier mensonge, celui qui se borne à tai
302
ui se borne à taire la vérité (tout en ne cessant
de
la connaître) ou à la nier (tout en sachant que pour si peu, elle ne
303
out en sachant que pour si peu, elle ne cesse pas
d’
exister). Mais le texte original de ce passage est infiniment plus étr
304
e ne cesse pas d’exister). Mais le texte original
de
ce passage est infiniment plus étrange. « Le diable est menteur, nous
305
iable est menteur, nous dit-on, et il est le père
de
son propre mensonge. » Par ici nous entrons au mystère du mal. Le pèr
306
» Par ici nous entrons au mystère du mal. Le père
de
son mensonge est celui qui l’engendre, le conçoit par ses propres œuv
307
re, le conçoit par ses propres œuvres, en abusant
d’
une vérité qu’il rejette aussitôt qu’avilie, et qui mourra du monstre
308
nsonge, par essence, n’est pas ! C’est une espèce
de
décréation. C’est le trompe-l’œil et le sonne-creux de l’invention bâ
309
création. C’est le trompe-l’œil et le sonne-creux
de
l’invention bâtarde et de l’art inauthentique. Le diable est le père
310
l’œil et le sonne-creux de l’invention bâtarde et
de
l’art inauthentique. Le diable est le père du faux art, de toutes ces
311
inauthentique. Le diable est le père du faux art,
de
toutes ces œuvres qui ne sont « ni bien ni mal », parce que l’acte do
312
supprime les mesures mêmes du beau. Il n’y a plus
de
fautes de goût possibles là où n’existe plus de goût, comme il n’y a
313
es mesures mêmes du beau. Il n’y a plus de fautes
de
goût possibles là où n’existe plus de goût, comme il n’y a pas de cri
314
s de fautes de goût possibles là où n’existe plus
de
goût, comme il n’y a pas de crime possible là où n’existe pas de Loi.
315
s là où n’existe plus de goût, comme il n’y a pas
de
crime possible là où n’existe pas de Loi. Peut-être ici découvrons-no
316
il n’y a pas de crime possible là où n’existe pas
de
Loi. Peut-être ici découvrons-nous la raison dernière du mensonge : c
317
on dernière du mensonge : c’est toujours le désir
d’
innocence utopique. Le mensonge ordinaire n’était que l’omission ou bi
318
inaire n’était que l’omission ou bien la négation
d’
une vérité qui subsistait ailleurs et nous jugeait encore. Mais le men
319
e mensonge diabolique nie le juge. Il ne part que
de
soi, et prolifère en autarcie, comme une cellule cancéreuse, introdui
320
ncéreuse, introduisant dans l’univers ce sophisme
de
pure angoisse : le mensonge de nulle vérité. 10. L’Accusateur
321
nivers ce sophisme de pure angoisse : le mensonge
de
nulle vérité. 10. L’Accusateur Par le doute qu’il instille en
322
t encore un bien, pensons-nous. Mais ce mouvement
de
l’âme créatrice, dès qu’il est détourné des fins prévues par Dieu, no
323
mal fait, Satan se dévoile comme un ennemi mortel
de
l’homme, qu’il avait abusé jusqu’ici en feignant de sympathiser avec
324
l’homme, qu’il avait abusé jusqu’ici en feignant
de
sympathiser avec l’idéalisme de sa révolte. Voici qu’il nous entraîne
325
u’ici en feignant de sympathiser avec l’idéalisme
de
sa révolte. Voici qu’il nous entraîne dans un nouveau tour de la spir
326
e. Voici qu’il nous entraîne dans un nouveau tour
de
la spirale qui pointe vers l’Enfer : il nous accuse avec une angéliqu
327
gélique précision, sans laisser place à la pensée
d’
une possible réparation. Il est au monde une seule chose pire que de d
328
aration. Il est au monde une seule chose pire que
de
douter du bien et du réel, et c’est de douter du pardon, une fois qu’
329
e pire que de douter du bien et du réel, et c’est
de
douter du pardon, une fois qu’on a trahi le bien et le réel. Car dout
330
esser le mal qu’on a commis ; pour oser qualifier
de
faute sa propre faute ; et pour que puisse renaître la confiance qui
331
enaître la confiance qui donnera seule le courage
de
rebâtir. Celui qui doute du pardon ne peut pas confesser son crime, e
332
ble est cet Accusateur qui veut nous faire douter
de
notre pardon pour nous forcer à fuir dans les remèdes du pire. L’Apoc
333
ire. L’Apocalypse le désigne comme « l’Accusateur
de
nos frères, celui qui les accuse devant Dieu jour et nuit ». C’est lu
334
u jour et nuit ». C’est lui qui demandait la tête
de
Job devant le tribunal céleste. Non content de nous prendre à ses piè
335
ris il est le premier à nous dénoncer devant Dieu
de
la manière la plus impitoyable. Non par amour de la justice, mais par
336
de la manière la plus impitoyable. Non par amour
de
la justice, mais par amour de notre châtiment, par haine froide. Pour
337
able. Non par amour de la justice, mais par amour
de
notre châtiment, par haine froide. Pour le stérile plaisir d’avoir ra
338
timent, par haine froide. Pour le stérile plaisir
d’
avoir raison. C’est qu’il s’en tient à la légalité, au bien qu’il conn
339
our toujours. Depuis sa chute, il a perdu le sens
de
la Création continue, du dynamisme immanent au réel. Par-dessus tout,
340
réel. Par-dessus tout, il ignore le sens du drame
de
la Rédemption. Il ne sait pas et ne veut pas savoir que Dieu maintien
341
en dépit de nos fautes, par la vertu recréatrice
d’
une mort qui est le centre de l’Histoire, et de chacune de nos histoir
342
la vertu recréatrice d’une mort qui est le centre
de
l’Histoire, et de chacune de nos histoires individuelles… Aussi, part
343
ce d’une mort qui est le centre de l’Histoire, et
de
chacune de nos histoires individuelles… Aussi, partout où l’on condam
344
rt qui est le centre de l’Histoire, et de chacune
de
nos histoires individuelles… Aussi, partout où l’on condamne sans pit
345
simple faute de logique, la grâce pour une erreur
de
calcul statistique. La duplicité infernale, c’est de nous faire croir
346
calcul statistique. La duplicité infernale, c’est
de
nous faire croire qu’il n’y a pas de juge, ni d’ordre divin du réel,
347
rnale, c’est de nous faire croire qu’il n’y a pas
de
juge, ni d’ordre divin du réel, et aussitôt que nous l’avons cru, de
348
de nous faire croire qu’il n’y a pas de juge, ni
d’
ordre divin du réel, et aussitôt que nous l’avons cru, de nous accuser
349
divin du réel, et aussitôt que nous l’avons cru,
de
nous accuser de contravention devant le Juge. Ainsi la morale laïque,
350
et aussitôt que nous l’avons cru, de nous accuser
de
contravention devant le Juge. Ainsi la morale laïque, morale du devoi
351
ersonnel, nous accuse et nous prive en même temps
de
tout recours à Celui qui pardonne. Elle ne laisse aux meilleures de s
352
Celui qui pardonne. Elle ne laisse aux meilleures
de
ses victimes que l’héroïsme autosadique de la révolte. 11. Légion
353
leures de ses victimes que l’héroïsme autosadique
de
la révolte. 11. Légion Enfin, la Bible appelle le diable : Lég
354
e le diable : Légion. Ici nous n’en finirions pas
de
commenter, conformément à la nature du sujet. Bornons-nous à marquer
355
du sujet. Bornons-nous à marquer trois directions
de
pensée : nous les suivrons tout au travers du livre. Si le diable est
356
bord que tout en étant un, il peut revêtir autant
d’
aspects divers qu’il y a d’individus de par le monde. Mais cela peut s
357
il peut revêtir autant d’aspects divers qu’il y a
d’
individus de par le monde. Mais cela peut signifier aussi que le diabl
358
ne en particulier. Et ceci nous ramène au premier
de
ses tours, qui était de nous faire douter de son existence même. Le n
359
ci nous ramène au premier de ses tours, qui était
de
nous faire douter de son existence même. Le nom de Légion évoque par
360
mier de ses tours, qui était de nous faire douter
de
son existence même. Le nom de Légion évoque par ailleurs le mythe hel
361
e nous faire douter de son existence même. Le nom
de
Légion évoque par ailleurs le mythe hellénique de Protée. Nous venons
362
de Légion évoque par ailleurs le mythe hellénique
de
Protée. Nous venons d’énumérer les rôles principaux que le diable rev
363
lleurs le mythe hellénique de Protée. Nous venons
d’
énumérer les rôles principaux que le diable revêt dans la Bible : ils
364
s sont tous, en quelque manière, des déguisements
de
son malheur originel. Satan craint de se montrer tel qu’il est, c’est
365
éguisements de son malheur originel. Satan craint
de
se montrer tel qu’il est, c’est évident, puisqu’il craint même d’exis
366
l qu’il est, c’est évident, puisqu’il craint même
d’
exister à nos yeux. Il ne présentera donc aux hommes que des masques t
367
e cette ruse. Pourquoi sommes-nous parfois tentés
de
vivre par délégation, et sous un masque ? Parce que cela permet à not
368
un masque ? Parce que cela permet à notre vanité
de
se satisfaire malgré nous, malgré nos exigences réelles et bien au-de
369
ous, malgré nos exigences réelles et bien au-delà
de
nos possibilités. Chose étrange, nous sommes ainsi faits que nous nou
370
es ainsi faits que nous nous prévalons intimement
d’
un succès remporté « sous le masque », tandis que nous attribuerons au
371
. Nous sommes prêts à nous approprier les mérites
d’
un bien dont nous n’avons été que les acteurs, alors que nous nous emp
372
é que les acteurs, alors que nous nous empressons
de
projeter sur les Choses, le Destin, ou les Autres, un mal dont les ra
373
les racines sont réellement en nous. Ainsi chacun
de
nous, en tant que patriote, se sent flatté par une victoire nationale
374
euls chefs. Ici le diable joue avec notre terreur
de
nous reconnaître responsables de nos vies. Autrefois il avait recours
375
ec notre terreur de nous reconnaître responsables
de
nos vies. Autrefois il avait recours au déguisement vestimentaire. Au
376
n rôle dans l’impunité. Le monde actuel est plein
d’
individus qui portent à l’intérieur un costume de louage. Ils se cache
377
d’individus qui portent à l’intérieur un costume
de
louage. Ils se cachent à leurs propres yeux. Comment connaîtraient-il
378
e déchu nous dit : je suis ton ciel, il n’y a pas
d’
autre espérance. Le Prince de ce monde nous dit : il n’y a pas d’autre
379
n ciel, il n’y a pas d’autre espérance. Le Prince
de
ce monde nous dit : il n’y a pas d’autre monde. Le Tentateur nous dit
380
ce. Le Prince de ce monde nous dit : il n’y a pas
d’
autre monde. Le Tentateur nous dit : il n’y a point de juge. L’Accusat
381
tre monde. Le Tentateur nous dit : il n’y a point
de
juge. L’Accusateur nous dit : il n’y a point de pardon. Le Menteur ré
382
t de juge. L’Accusateur nous dit : il n’y a point
de
pardon. Le Menteur résume tout en nous offrant un monde sans obligati
383
s, fermé sur soi mais recréé sans cesse à l’image
de
nos complaisances : il n’y a pas de réalité. Enfin Légion dit le dern
384
sse à l’image de nos complaisances : il n’y a pas
de
réalité. Enfin Légion dit le dernier blasphème : il n’y a Personne. L
385
: il n’y a Personne. Le monde moderne (et chacun
de
nous en lui) dans la mesure où il cultive un rêve de déification de l
386
nous en lui) dans la mesure où il cultive un rêve
de
déification de l’homme par sa science ; où il nie toute transcendance
387
ns la mesure où il cultive un rêve de déification
de
l’homme par sa science ; où il nie toute transcendance ; où il s’enfe
388
ranscendance ; où il s’enferme dans les autarcies
de
la puissance et de la passion ; où il noie finalement la vocation de
389
l s’enferme dans les autarcies de la puissance et
de
la passion ; où il noie finalement la vocation de la personne dans l’
390
de la passion ; où il noie finalement la vocation
de
la personne dans l’anonyme irresponsable, — le monde moderne (et chac
391
nyme irresponsable, — le monde moderne (et chacun
de
nous en lui) se rend à la loi de Satan. Mais du même coup, il devient
392
derne (et chacun de nous en lui) se rend à la loi
de
Satan. Mais du même coup, il devient incapable de connaître celui qu’
393
de Satan. Mais du même coup, il devient incapable
de
connaître celui qu’il sert ! Satan veut nous faire croire qu’il n’y a
394
rt ! Satan veut nous faire croire qu’il n’y a pas
d’
autre monde. Si nous le croyons, il se trouve qu’aussitôt nous ne pouv
395
ns plus croire à Dieu ni à Satan ! S’il n’y a pas
de
ciel, comme nous le dit Satan, il n’y a pas non plus d’enfer, ni de M
396
l, comme nous le dit Satan, il n’y a pas non plus
d’
enfer, ni de Maître de l’enfer. S’il n’y a pas de juge, il n’y a pas n
397
s le dit Satan, il n’y a pas non plus d’enfer, ni
de
Maître de l’enfer. S’il n’y a pas de juge, il n’y a pas non plus de f
398
atan, il n’y a pas non plus d’enfer, ni de Maître
de
l’enfer. S’il n’y a pas de juge, il n’y a pas non plus de faute ni d’
399
d’enfer, ni de Maître de l’enfer. S’il n’y a pas
de
juge, il n’y a pas non plus de faute ni d’Auteur du mal. S’il n’y a p
400
er. S’il n’y a pas de juge, il n’y a pas non plus
de
faute ni d’Auteur du mal. S’il n’y a pas de vérité, il n’y a pas non
401
a pas de juge, il n’y a pas non plus de faute ni
d’
Auteur du mal. S’il n’y a pas de vérité, il n’y a pas non plus de mens
402
plus de faute ni d’Auteur du mal. S’il n’y a pas
de
vérité, il n’y a pas non plus de mensonge ni de Menteur. S’il n’y a p
403
. S’il n’y a pas de vérité, il n’y a pas non plus
de
mensonge ni de Menteur. S’il n’y a personne, enfin, il n’y a pas non
404
s de vérité, il n’y a pas non plus de mensonge ni
de
Menteur. S’il n’y a personne, enfin, il n’y a pas non plus lui ! Ains
405
photographes, et qu’on le prive ainsi du bénéfice
de
l’attaque par surprise, sa tactique favorite. Nous avons donc soumis
406
ique favorite. Nous avons donc soumis l’incognito
de
Satan au réactif de la Révélation, qui le rend visible à l’œil spirit
407
avons donc soumis l’incognito de Satan au réactif
de
la Révélation, qui le rend visible à l’œil spirituel. Comment va-t-il
408
le conçoivent les prédicateurs et les moralistes
d’
aujourd’hui. Ce serait un excellent calcul, pour les deux raisons que
409
rions induits à croire que le diable n’est « rien
d’
autre » qu’une figuration naïve du péché ; en second lieu, nous n’auri
410
éché ; en second lieu, nous n’aurions plus l’idée
d’
aller chercher le diable dans nos vertus. En vérité, le diable n’est
411
ions beaucoup plus prudents. Son astuce sera donc
de
se rendre invisible au sein même de nos vraies tentations. C’est là q
412
uce sera donc de se rendre invisible au sein même
de
nos vraies tentations. C’est là qu’il va montrer patte blanche, comme
413
dans des fantaisies ridicules, bien loin du lieu
de
son action réelle. N’avez-vous pas connu de ces dames charmantes qui
414
lieu de son action réelle. N’avez-vous pas connu
de
ces dames charmantes qui se récrient dès qu’on parle du diable : — C’
415
s avec passion, et n’ont en général aucune espèce
de
trouble de conscience. Elles ne conçoivent pas le diable comme l’inst
416
ion, et n’ont en général aucune espèce de trouble
de
conscience. Elles ne conçoivent pas le diable comme l’instigateur de
417
s ne conçoivent pas le diable comme l’instigateur
de
leurs péchés, mais comme une sorte d’apparition de cauchemar, qui por
418
instigateur de leurs péchés, mais comme une sorte
d’
apparition de cauchemar, qui porte malheur et qui leur veut du mal. El
419
e leurs péchés, mais comme une sorte d’apparition
de
cauchemar, qui porte malheur et qui leur veut du mal. Elles ne se dou
420
ieur à nos fautes, celui-là n’est vraiment « rien
d’
autre » qu’une projection, hors de nous-mêmes, du péché dont nous somm
421
dont nous sommes les auteurs et que nous refusons
d’
assumer. Ce subterfuge de l’inconscient n’a d’autre but que de nous ex
422
urs et que nous refusons d’assumer. Ce subterfuge
de
l’inconscient n’a d’autre but que de nous exonérer d’une part honteus
423
ons d’assumer. Ce subterfuge de l’inconscient n’a
d’
autre but que de nous exonérer d’une part honteuse de nous-mêmes. Si l
424
e subterfuge de l’inconscient n’a d’autre but que
de
nous exonérer d’une part honteuse de nous-mêmes. Si le résultat nous
425
utre but que de nous exonérer d’une part honteuse
de
nous-mêmes. Si le résultat nous apparaît étrange et fantastique, c’es
426
es spirituels mieux réveillés : « Pourquoi parler
d’
un diable personnel ? Nous voyons bien le péché, mais pas le diable. N
427
i, le diable au lieu de se distinguer abusivement
de
notre péché, a choisi de se confondre avec lui au point qu’on croie c
428
e distinguer abusivement de notre péché, a choisi
de
se confondre avec lui au point qu’on croie cette abstraction plus vra
429
e mythique. Le tour est subtil et requiert un peu
d’
astuce spirituelle, de notre part, pour le déjouer. Certes, le péché é
430
t subtil et requiert un peu d’astuce spirituelle,
de
notre part, pour le déjouer. Certes, le péché étant devenu notre seco
431
notre seconde nature, il peut sembler qu’il agit
de
soi-même et sans Auteur, en vertu d’une espèce d’inertie ou de force
432
de soi-même et sans Auteur, en vertu d’une espèce
d’
inertie ou de force de l’habitude. Une coutume du mal nous habite, que
433
t sans Auteur, en vertu d’une espèce d’inertie ou
de
force de l’habitude. Une coutume du mal nous habite, que l’on pourrai
434
teur, en vertu d’une espèce d’inertie ou de force
de
l’habitude. Une coutume du mal nous habite, que l’on pourrait nommer
435
est-à-dire à commettre des péchés, qui n’ont rien
de
très mystérieux et sont exactement catalogués : lâchetés et mensonges
436
ctement catalogués : lâchetés et mensonges, actes
d’
orgueil ou d’égoïsme, vols, trahisons et méchancetés de toute espèce.
437
ogués : lâchetés et mensonges, actes d’orgueil ou
d’
égoïsme, vols, trahisons et méchancetés de toute espèce. Il est possib
438
ueil ou d’égoïsme, vols, trahisons et méchancetés
de
toute espèce. Il est possible que le diable en personne ne se dérange
439
ne se dérange pas pour si peu. Comme un directeur
de
journal qui ne fait pas les chiens écrasés, se réservant pour les gra
440
rasés, se réservant pour les grandes catastrophes
de
la politique mondiale. Voici cependant où l’on verra percer le bout d
441
ale. Voici cependant où l’on verra percer le bout
de
son oreille pointue : c’est au moment précis où le péché n’est plus r
442
et veut se justifier. Dans les mécanismes hérités
de
nos petits péchés quotidiens, nous sentons quelquefois intervenir com
443
us sentons quelquefois intervenir comme un moment
d’
accélération panique : c’est lui ! Tout d’un coup, les choses s’aggrav
444
moment d’accélération panique : c’est lui ! Tout
d’
un coup, les choses s’aggravent et s’embrouillent, vous ne savez pourq
445
plus le bien du mal, le faux du vrai, la charité
de
la cruauté : c’est lui qui a pris le jeu en main ! C’est lui qui inve
446
abituel en une « vertu » délirante, en un vertige
de
fausse innocence, en une exaltation de puissance destructive. C’est l
447
un vertige de fausse innocence, en une exaltation
de
puissance destructive. C’est lui qui crée les situations extrêmes, sa
448
crée les situations extrêmes, sans issue. Les cas
de
ce genre seront les seuls où j’essaierai de décrire l’action du diabl
449
s cas de ce genre seront les seuls où j’essaierai
de
décrire l’action du diable dans nos péchés catalogués7. Pour les autr
450
prédicateurs, législateurs ou dictateurs chargés
de
nous rappeler les règlements. Je compte me livrer désormais à un spor
451
au diable dans nos idéaux et dans l’insignifiance
de
nos actes. Et ce n’est point par amour du paradoxe, mais au contraire
452
iable ne peut agir que dans le bien, par le moyen
de
nos vertus. Car nous savons qu’il ne peut rien créer, pas même le cha
453
avons qu’il ne peut rien créer, pas même le champ
de
son action. Il ne peut donc que tordre et déformer ce qui existe et f
454
t bien fait par Dieu. Nos vices mêmes ne sont pas
de
véritables créations du diable, mais seulement des vertus mal orienté
455
lement des vertus mal orientées. Le sens originel
de
leur élan, gauchi ou inverti par notre orgueil et par l’inertie de no
456
chi ou inverti par notre orgueil et par l’inertie
de
nos âmes, devient presque invisible à la conscience humaine. Un vice,
457
ous avions le choix entre l’usage légal et l’abus
de
ce bien. Si donc j’évite d’aller chercher le diable là où chacun s’at
458
usage légal et l’abus de ce bien. Si donc j’évite
d’
aller chercher le diable là où chacun s’attend à le trouver, dans les
459
es mauvais lieux des faubourgs ou dans les bouges
de
notre vie privée, qu’on n’y voie de ma part nul désir de surprendre.
460
ns les bouges de notre vie privée, qu’on n’y voie
de
ma part nul désir de surprendre. Tout simplement, le diable habite ai
461
e vie privée, qu’on n’y voie de ma part nul désir
de
surprendre. Tout simplement, le diable habite ailleurs en temps norma
462
rative du camouflage, obéissant au principe fatal
de
son existence empruntée et parasitaire, il a choisi pour domicile per
463
onfondu Un dernier mot sur la réalité mythique
de
Satan : je voudrais corriger par la vertu d’un doute les conclusions
464
ique de Satan : je voudrais corriger par la vertu
d’
un doute les conclusions trop rationnelles encore qu’un lecteur peut t
465
lles encore qu’un lecteur peut tirer, malgré moi,
de
ces pages. Dès que vous croyez apercevoir le diable, parce qu’il en a
466
qu’il en a fait un peu trop, dès que vous tentez
de
le démasquer dans le péché, il vous égare en vous faisant dire par le
467
t social insuffisant. Nous ne sommes responsables
de
rien. Nous ne sommes pas méchants, mais malades… La psychanalyse, con
468
onsciente — peut être définie comme une tentative
de
ramener le péché et le Mal à des mécanismes subjectifs, dont le médec
469
e dans les cornues des alchimistes. Nous essayons
de
dissoudre le diable dans les eaux troubles du subconscient. Ce n’est
470
t encore qu’une variante scientifique du sophisme
de
l’incognito. Point de diable aux yeux des freudiens, mais seulement u
471
te scientifique du sophisme de l’incognito. Point
de
diable aux yeux des freudiens, mais seulement une croyance au diable,
472
mais seulement une croyance au diable, résultant
de
la « projection » d’un sentiment de culpabilité. Guérissez ce sentime
473
royance au diable, résultant de la « projection »
d’
un sentiment de culpabilité. Guérissez ce sentiment-là, vous n’aurez p
474
le, résultant de la « projection » d’un sentiment
de
culpabilité. Guérissez ce sentiment-là, vous n’aurez plus de croyance
475
ité. Guérissez ce sentiment-là, vous n’aurez plus
de
croyance au diable, ni donc de diable. Le démon ne serait qu’une imag
476
vous n’aurez plus de croyance au diable, ni donc
de
diable. Le démon ne serait qu’une image de névrose, quelque chose qui
477
i donc de diable. Le démon ne serait qu’une image
de
névrose, quelque chose qui se soigne, se guérit, et s’évanouit au ter
478
me du traitement. On ne demanderait pas mieux que
d’
y croire. Mais les psychanalystes et les Christian Scientists eux-même
479
ur l’homme torturé par ses complexes. Or la chute
de
l’ange Lucifer est justement l’Accident absolu qui survint dans l’his
480
ènes occultes, le grand psychanalyste se contenta
de
répondre par l’anecdote suivante. Un jour une dame vient le trouver à
481
oiture fermée. Jugeant elle-même qu’il s’agissait
d’
une hallucination, elle demandait à Jung de la traiter. Chacun sait ce
482
issait d’une hallucination, elle demandait à Jung
de
la traiter. Chacun sait ce qu’un oiseau veut dire8. Le cas paraissait
483
ussitôt. Après deux ou trois mois, l’état général
de
cette dame s’était notablement amélioré. Elle dormait mieux, l’appéti
484
finalement se résolvaient selon toutes les règles
de
l’art. Mais toujours rien ne se manifestait, qui parût se rapporter d
485
rs rien ne se manifestait, qui parût se rapporter
de
près ou de loin au mystère des oiseaux agresseurs. Un an s’écoula, sa
486
se manifestait, qui parût se rapporter de près ou
de
loin au mystère des oiseaux agresseurs. Un an s’écoula, sans progrès.
487
ecin commençait à désespérer, il envisageait même
d’
abandonner la cure. (Et vous savez pourtant si rien égale la patience
488
(Et vous savez pourtant si rien égale la patience
d’
un psychanalyste !) Enfin, par un beau jour d’été, la malade vint pour
489
nce d’un psychanalyste !) Enfin, par un beau jour
d’
été, la malade vint pour une dernière tentative. Il faisait une chaleu
490
ride. Jung possède une villa sur les rives du lac
de
Zurich. Il proposa que la séance eût lieu dans un petit pavillon au b
491
es oiseaux l’attaquaient ! » 1. Dans son livre
de
Praestigiis Daemonium publié en 1568, Jean Wier arrive à la conclusio
492
ces et 7 405 926 diables, divisés en 1111 légions
de
6666 suppôts chacune, « sauf erreur de calcul », ajoute-t-il. 2. Le
493
11 légions de 6666 suppôts chacune, « sauf erreur
de
calcul », ajoute-t-il. 2. Le Lucifer qui apparaît pour la première f
494
du symbole. 3. Genèse 3, 1-5. 4. Dans le Livre
d’
Énoch, antérieur à la Genèse, il est dit que les mauvais anges qui des
495
aux humains enseignèrent à ceux-ci des artifices
de
magie et d’artisanat, les propriétés des racines, mais aussi l’art de
496
enseignèrent à ceux-ci des artifices de magie et
d’
artisanat, les propriétés des racines, mais aussi l’art de se farder e
497
nat, les propriétés des racines, mais aussi l’art
de
se farder et l’art des armes. C’était apprendre aux hommes à se faire
498
erts sur les pouvoirs que leur offrait la faculté
de
créer, c’est-à-dire de choisir librement et d’orienter leur choix ver
499
ue leur offrait la faculté de créer, c’est-à-dire
de
choisir librement et d’orienter leur choix vers l’obéissance confiant
500
té de créer, c’est-à-dire de choisir librement et
d’
orienter leur choix vers l’obéissance confiante — suivant la voie trac
501
ivant la voie tracée par Dieu — ou vers une sorte
de
défi anxieux — suivant la voie de la divinisation suggérée par l’Aspi
502
vers une sorte de défi anxieux — suivant la voie
de
la divinisation suggérée par l’Aspic de l’orgueil. 5. Genèse 3, 6.
503
t la voie de la divinisation suggérée par l’Aspic
de
l’orgueil. 5. Genèse 3, 6. 6. Twelfth Night II, 2. 7. Voir plus
504
8. Symbole du sexe masculin selon Freud. Symbole
de
l’esprit dans un grand nombre de mythologies. L’instinct ou l’esprit
505
n Freud. Symbole de l’esprit dans un grand nombre
de
mythologies. L’instinct ou l’esprit négligés, refoulés, viennent se v
506
ligés, refoulés, viennent se venger par le détour
d’
une agression symbolique : dans nos cauchemars par exemple.
507
Hitler ou l’alibi 15. Où paraît la nécessité
d’
un alibi Il est étrange de constater que depuis la fin du Moyen Âge
508
paraît la nécessité d’un alibi Il est étrange
de
constater que depuis la fin du Moyen Âge, depuis que Luther lui jeta
509
it peut-être reconnu précisément sous les espèces
de
l’encre d’imprimerie, lorsqu’il notait qu’on ne peut plus prêcher uti
510
e reconnu précisément sous les espèces de l’encre
d’
imprimerie, lorsqu’il notait qu’on ne peut plus prêcher utilement le c
511
sse quotidienne. Toutefois, l’incognito du Prince
de
ce monde devint difficile à maintenir au cours du premier tiers de no
512
t difficile à maintenir au cours du premier tiers
de
notre siècle, tandis que des catastrophes trop voyantes ébranlaient l
513
catastrophes trop voyantes ébranlaient les bases
de
notre optimisme et de notre foi naïve dans l’élimination progressive
514
antes ébranlaient les bases de notre optimisme et
de
notre foi naïve dans l’élimination progressive du mal par la Science
515
Science et la Prospérité. Sur nos têtes, au ciel
de
nos villes, de grands oiseaux tournaient avec un bourdonnement sinist
516
Prospérité. Sur nos têtes, au ciel de nos villes,
de
grands oiseaux tournaient avec un bourdonnement sinistre, et ces oise
517
cutaient à coup de bombes, qui ne prouvaient rien
de
ce qui était en cause. Ils somnolaient dans des églises presque aussi
518
somnolaient dans des églises presque aussi vides
de
fidèles que de foi. Ils épargnaient de l’argent pendant une vie pour
519
ns des églises presque aussi vides de fidèles que
de
foi. Ils épargnaient de l’argent pendant une vie pour le perdre en un
520
ussi vides de fidèles que de foi. Ils épargnaient
de
l’argent pendant une vie pour le perdre en une heure dans une Bourse
521
r, des bruits sans suite, cacophonie abrutissante
de
musiques de tous les siècles, interrompue par des discours emphatique
522
s sans suite, cacophonie abrutissante de musiques
de
tous les siècles, interrompue par des discours emphatiques et harcela
523
on avait renversé par système toutes les échelles
de
valeurs. Tout le monde était contre la guerre et tout le monde accept
524
était contre la guerre et tout le monde acceptait
de
la faire sur le slogan de « liberté », tandis que la police et l’État
525
tout le monde acceptait de la faire sur le slogan
de
« liberté », tandis que la police et l’État chaque jour étendaient le
526
la morale en pleine déroute, et le peuple vivait
de
cinéma comme il avait jadis vécu de religion. — Si cela continue, se
527
peuple vivait de cinéma comme il avait jadis vécu
de
religion. — Si cela continue, se dit le diable, les hommes s’apercevr
528
plus trompeuse du mal qu’ils chérissent au secret
de
leur cœur, et qu’il faut leur faire croire qu’ils détestent… 16.
529
’il était simplement M. Adolf Hitler, et personne
d’
autre. Ce fut son second tour. 17. Hitler est-il l’Antéchrist ?
530
Hitler est-il l’Antéchrist ? Je tiens l’action
d’
Hitler pour plus réellement diabolique que ne l’imaginaient ceux qui o
531
serait peut-être un peu trop simple. Il suffirait
de
le supprimer pour supprimer tout le mal qui est dans ce monde. Et, qu
532
itler est le diable, nous faisons évidemment trop
d’
honneur à l’ex-caporal autrichien ; mais surtout nous nous faisons ill
533
nous nous faisons illusion sur la réelle stature
de
Satan. N’oublions pas que Satan est Légion ! Supprimer un dictateur n
534
maux profonds qui la travaillent. Il me souvient
d’
avoir entendu en Suisse, au début de la guerre, le grand théologien Ka
535
l me souvient d’avoir entendu en Suisse, au début
de
la guerre, le grand théologien Karl Barth répondre à la fameuse quest
536
e le trahit pas : — « Cet homme qu’il est inutile
de
nommer, et dont la censure d’ailleurs m’a fait oublier le nom, ce n’e
537
est certainement pas l’Antéchrist. Car il n’a pas
de
pouvoir sur notre salut éternel. Le véritable Antéchrist ne se révéle
538
cusateur impitoyable. Et alors nous n’aurons plus
d’
autre intercesseur auprès de Dieu que Christ lui-même. Mais l’homme au
539
re qu’un petit monsieur, un premier avant-coureur
de
l’Antéchrist. Et la lutte qu’il mène contre les Églises et le monde c
540
ur » et cet avertissement, nous fûmes bien forcés
de
les prendre au sérieux ! Pour n’être pas le diable en personne, on pe
541
t de même passablement diabolique. Et je vois peu
d’
aspects de l’action du Führer qui ne portent en évidence l’insigne sat
542
passablement diabolique. Et je vois peu d’aspects
de
l’action du Führer qui ne portent en évidence l’insigne satanique.
543
our l’avoir éprouvé en sa présence par une espèce
de
frisson d’horreur sacrée, qu’il était le siège d’une « domination »,
544
éprouvé en sa présence par une espèce de frisson
d’
horreur sacrée, qu’il était le siège d’une « domination », d’un « trôn
545
de frisson d’horreur sacrée, qu’il était le siège
d’
une « domination », d’un « trône » ou d’une « puissance », ainsi que s
546
acrée, qu’il était le siège d’une « domination »,
d’
un « trône » ou d’une « puissance », ainsi que saint Paul désigne les
547
le siège d’une « domination », d’un « trône » ou
d’
une « puissance », ainsi que saint Paul désigne les esprits de second
548
sance », ainsi que saint Paul désigne les esprits
de
second rang, qui peuvent aussi déchoir dans un corps d’homme quelconq
549
ond rang, qui peuvent aussi déchoir dans un corps
d’
homme quelconque et l’occuper comme une garnison. Je l’ai entendu pron
550
omme une garnison. Je l’ai entendu prononcer l’un
de
ses grands discours, et je l’ai vu à la sortie de son culte, debout d
551
t une rue étroite, mal éclairée. Une seule chaîne
de
SS le séparait de la foule. J’étais au premier rang, à deux mètres de
552
mal éclairée. Une seule chaîne de SS le séparait
de
la foule. J’étais au premier rang, à deux mètres de lui. Un bon tireu
553
la foule. J’étais au premier rang, à deux mètres
de
lui. Un bon tireur l’eût descendu très facilement. Mais ce bon tireur
554
dans cent occasions analogues. Voilà le principal
de
ce que je sais sur Hitler. On peut réfléchir là-dessus. Réfléchir ou
555
e tire pas sur un petit-bourgeois qui est le rêve
de
60 millions d’hommes. On tire sur un tyran, ou sur un roi, mais les f
556
un petit-bourgeois qui est le rêve de 60 millions
d’
hommes. On tire sur un tyran, ou sur un roi, mais les fondateurs de re
557
sur un tyran, ou sur un roi, mais les fondateurs
de
religion sont réservés à d’autres catastrophes. Certes, il y a des fo
558
astrophes. Certes, il y a des fous, des accidents
de
circulation et des erreurs de l’histoire. Mais le Führer déclarait un
559
fous, des accidents de circulation et des erreurs
de
l’histoire. Mais le Führer déclarait un jour : Je ne crains pas les R
560
e un homme qui dit cela. Qu’il soit un instrument
de
la Providence comme il l’affirme, ou qu’il soit un fléau de Dieu (c’e
561
idence comme il l’affirme, ou qu’il soit un fléau
de
Dieu (c’est une nuance !), son destin ne dépend plus des hommes, pas
562
), son destin ne dépend plus des hommes, pas même
de
l’homme Adolf Hitler. À plus forte raison, notre jugement sur lui doi
563
être indépendant des mérites qu’il a ou n’a pas,
de
la sympathie ou des haines qu’il excite. Et cela définit un génie, au
564
cite. Et cela définit un génie, au sens démonique
de
ce terme. D’où lui vient le pouvoir surhumain qu’il développe pendant
565
définit un génie, au sens démonique de ce terme.
D’
où lui vient le pouvoir surhumain qu’il développe pendant un discours
566
qu’il développe pendant un discours ? Une énergie
de
cette nature, on sent très bien qu’elle ne saurait se manifester qu’a
567
e l’individu ne compte plus, n’est que le support
d’
une puissance qui échappe à nos psychologies. Ce que je dis là serait
568
ychologies. Ce que je dis là serait du romantisme
de
la plus déplorable espèce si l’œuvre accomplie par cet homme — et j’e
569
é ni intelligent. Il ne s’appartient pas, n’a pas
de
qualités propres, de vices ou de vertus, ni même de compte en banque,
570
ne s’appartient pas, n’a pas de qualités propres,
de
vices ou de vertus, ni même de compte en banque, et à peine un état c
571
ent pas, n’a pas de qualités propres, de vices ou
de
vertus, ni même de compte en banque, et à peine un état civil. Il est
572
qualités propres, de vices ou de vertus, ni même
de
compte en banque, et à peine un état civil. Il est le lieu de passage
573
banque, et à peine un état civil. Il est le lieu
de
passage des forces de l’Histoire, le catalyseur de ces forces qui déj
574
état civil. Il est le lieu de passage des forces
de
l’Histoire, le catalyseur de ces forces qui déjà sont dressées devant
575
e passage des forces de l’Histoire, le catalyseur
de
ces forces qui déjà sont dressées devant vous ; et après cela, vous p
576
cela, vous pouvez le supprimer sans rien détruire
de
ce qui s’est fait par lui. Qu’il y ait eu dans ces temps aveugles à
577
elgruber habité par un trône… On a ri. On a cessé
de
rire. Et ce n’était pourtant qu’un petit envoyé… 19. Le directeur
578
pourtant qu’un petit envoyé… 19. Le directeur
d’
inconscience L’hitlérisme s’est présenté à nous comme une catastrop
579
oire n’en connut depuis le Déluge. L’issue fatale
de
l’aventure n’affecte pas sa portée symbolique et son actualité profon
580
puissance dans l’âme humaine depuis la formation
de
la première société ; et il existera sans aucun doute jusqu’à la fin
581
; et il existera sans aucun doute jusqu’à la fin
de
l’histoire de notre race. Hitler n’a fait que lui prêter figure et no
582
era sans aucun doute jusqu’à la fin de l’histoire
de
notre race. Hitler n’a fait que lui prêter figure et nom, à l’occasio
583
a fait que lui prêter figure et nom, à l’occasion
d’
une de ses éruptions les plus violentes. Pour nous, contemporains d’un
584
que lui prêter figure et nom, à l’occasion d’une
de
ses éruptions les plus violentes. Pour nous, contemporains d’un parox
585
ions les plus violentes. Pour nous, contemporains
d’
un paroxysme que nous avons souffert dans notre chair, il nous apparti
586
ons souffert dans notre chair, il nous appartient
de
laisser une description valable de ce phénomène, pour les générations
587
ous appartient de laisser une description valable
de
ce phénomène, pour les générations à venir. Je dis qu’avant la guerre
588
es générations à venir. Je dis qu’avant la guerre
de
1939, la majorité des hommes savaient qu’Hitler était le nom d’un dés
589
jorité des hommes savaient qu’Hitler était le nom
d’
un désastre imminent et mondial. Pourtant on ne l’a pas arrêté. Voilà
590
faut élucider. Replaçons-nous dans la situation
de
l’Europe à la veille de sa grande catastrophe. La question qui se pos
591
ns-nous dans la situation de l’Europe à la veille
de
sa grande catastrophe. La question qui se posait alors à l’inquiétude
592
e. La question qui se posait alors à l’inquiétude
de
quelques rares observateurs était la suivante : « Comment se peut-il
593
, des hommes et des femmes subissent la contagion
de
ce mal, changent subitement de visage, se raidissent, se ferment à to
594
ssent la contagion de ce mal, changent subitement
de
visage, se raidissent, se ferment à tout raisonnement, à toute discus
595
amentales sur lesquelles s’édifia la civilisation
de
l’Occident depuis des millénaires ? » Je me répondais de la manière s
596
cident depuis des millénaires ? » Je me répondais
de
la manière suivante. Hitler est assez démoniaque pour avoir su réveil
597
our avoir su réveiller nos démons, par une espèce
de
contagion, ou plutôt d’induction spirituelle. Son œuvre de tentateur
598
os démons, par une espèce de contagion, ou plutôt
d’
induction spirituelle. Son œuvre de tentateur a consisté à priver les
599
ion, ou plutôt d’induction spirituelle. Son œuvre
de
tentateur a consisté à priver les individus du sentiment de leur resp
600
ur a consisté à priver les individus du sentiment
de
leur responsabilité morale, donc du sens de leur culpabilité. En les
601
iment de leur responsabilité morale, donc du sens
de
leur culpabilité. En les fondant dans une masse passionnée, il exalte
602
alte dans l’âme des plus déshérités une sensation
de
puissance invincible. Il leur répète les vieux slogans du diable : «
603
serez comme des dieux ! » En combattant le traité
de
Versailles, « cette Gorgone terrorisant le peuple allemand qui vivait
604
mand qui vivait désarmé et humilié sous le regard
de
ces milliers d’yeux » (Mein Kampf) il supprime le Juge, il supprime l
605
désarmé et humilié sous le regard de ces milliers
d’
yeux » (Mein Kampf) il supprime le Juge, il supprime la faute, il les
606
Juge, il supprime la faute, il les rend à l’état
d’
innocence première. Enfin, en condamnant tout ce qui est universel ou
607
sion dans Wagner ; il réduit les masses à un état
d’
hypnose, d’inconscience somnambulique, dans lequel le moins courageux
608
agner ; il réduit les masses à un état d’hypnose,
d’
inconscience somnambulique, dans lequel le moins courageux sera capabl
609
ique, dans lequel le moins courageux sera capable
d’
exécuter des actes étonnants d’énergie et de discipline mécanique, jus
610
ageux sera capable d’exécuter des actes étonnants
d’
énergie et de discipline mécanique, jusqu’à la mort, terme idéal de to
611
pable d’exécuter des actes étonnants d’énergie et
de
discipline mécanique, jusqu’à la mort, terme idéal de toute passion.
612
iscipline mécanique, jusqu’à la mort, terme idéal
de
toute passion. Autrefois les hommes demandaient des directeurs de con
613
. Autrefois les hommes demandaient des directeurs
de
conscience. Mais la misère des temps et le sentiment d’impuissance qu
614
science. Mais la misère des temps et le sentiment
d’
impuissance qu’éprouvent les individus dans notre monde démesuré, font
615
emandent et se donnent aujourd’hui des directeurs
d’
inconscience collective. L’extraordinaire, l’effrayant, c’est de voir
616
collective. L’extraordinaire, l’effrayant, c’est
de
voir à quel point le Führer, le « guide », le directeur de l’inconsci
617
quel point le Führer, le « guide », le directeur
de
l’inconscience allemande, est en même temps conscient de ce qu’il fai
618
conscience allemande, est en même temps conscient
de
ce qu’il fait, maître de sa technique, lucide et froid comme le serpe
619
en même temps conscient de ce qu’il fait, maître
de
sa technique, lucide et froid comme le serpent ! Dans Mein Kampf, il
620
Mein Kampf, il donnait dès 1924 des descriptions
d’
une surprenante précision du réveil des puissances souterraines qu’il
621
il des puissances souterraines qu’il se proposait
d’
opérer. « Tous les grands mouvements de l’Histoire sont des éruptions
622
proposait d’opérer. « Tous les grands mouvements
de
l’Histoire sont des éruptions volcaniques de passions et de sensation
623
ents de l’Histoire sont des éruptions volcaniques
de
passions et de sensations spirituelles provoquées soit par la cruelle
624
ire sont des éruptions volcaniques de passions et
de
sensations spirituelles provoquées soit par la cruelle déesse de la M
625
pirituelles provoquées soit par la cruelle déesse
de
la Misère, soit par la torche de la parole jetée dans les masses. Seu
626
a cruelle déesse de la Misère, soit par la torche
de
la parole jetée dans les masses. Seule une tempête de passion brûlant
627
a parole jetée dans les masses. Seule une tempête
de
passion brûlante peut changer les destinées d’un peuple. » Surtout ne
628
te de passion brûlante peut changer les destinées
d’
un peuple. » Surtout ne donnez pas de raisons aux masses, car de tous
629
es destinées d’un peuple. » Surtout ne donnez pas
de
raisons aux masses, car de tous temps « les forces qui ont produit le
630
Surtout ne donnez pas de raisons aux masses, car
de
tous temps « les forces qui ont produit les plus grands changements d
631
érie qui les pousse en avant. » Ailleurs il parle
de
« l’appel aux forces mystérieuses » qui pourra seul réduire les « obs
632
l’au-delà, parce qu’il limite l’empire du Prince
de
ce monde. Les âmes vont lui échapper s’il subsiste un recours à l’Éte
633
ui domine les pouvoirs terrestres. Il s’agit donc
de
supprimer l’idée d’au-delà, de transcendance ; d’intégrer Dieu lui-mê
634
rs terrestres. Il s’agit donc de supprimer l’idée
d’
au-delà, de transcendance ; d’intégrer Dieu lui-même dans la Nation. C
635
es. Il s’agit donc de supprimer l’idée d’au-delà,
de
transcendance ; d’intégrer Dieu lui-même dans la Nation. Comprenons b
636
de supprimer l’idée d’au-delà, de transcendance ;
d’
intégrer Dieu lui-même dans la Nation. Comprenons bien ce que signifie
637
nifie, dans cette perspective satanique, le terme
d’
État totalitaire. Un régime est totalitaire lorsqu’il prétend central
638
rs en une religion politique, ou en une politique
d’
allure religieuse. Et cela d’autant mieux que la religion qu’il adopte
639
ou en une politique d’allure religieuse. Et cela
d’
autant mieux que la religion qu’il adopte ne connaît point de transcen
640
eux que la religion qu’il adopte ne connaît point
de
transcendance, et que ses buts purement terrestres non seulement ne d
641
non seulement ne divergent plus des buts normaux
de
la politique, mais se confondent avec ceux-ci. Alors il n’y a plus de
642
s se confondent avec ceux-ci. Alors il n’y a plus
de
recours, plus de pardon à espérer : la communauté spirituelle ne peut
643
vec ceux-ci. Alors il n’y a plus de recours, plus
de
pardon à espérer : la communauté spirituelle ne peut pas en appeler à
644
tique religieuse totalitaire, a créé le type même
d’
une communauté régressive, fondée sur le passé : le sang, la race, la
645
on ne pourra jamais y entrer — si l’on n’est pas
de
sang aryen, par exemple — car cette religion n’admet pas que « les ch
646
es choses vieilles sont passées » selon la parole
de
l’Apôtre. Elle n’admet pas la conversion spirituelle, à partir de laq
647
quels sont tes morts ? Religion du sang, religion
de
la terre et des morts, religion sanglante et mortelle, religion des c
648
des morts, des cortèges funèbres, des cérémonies
d’
imprécations, des sacrifices propitiatoires, le tam-tam des tambours l
649
propitiatoires, le tam-tam des tambours lugubres,
d’
hallucinants sabbats de nègres blancs ! Qui oserait encore nous souten
650
tam des tambours lugubres, d’hallucinants sabbats
de
nègres blancs ! Qui oserait encore nous soutenir que ce délire représ
651
s le pardon, le futur éternel, le rachat du péché
d’
origine ? 20. Midas prolétarien Le Prince de ce monde peut tout
652
’origine ? 20. Midas prolétarien Le Prince
de
ce monde peut tout avoir du monde sauf son âme, qui en fait le sens e
653
er, battant l’Europe entière, n’a jamais pu jouir
de
sa victoire. Gagnant tout, il n’a rien gagné. Car les religions de la
654
agnant tout, il n’a rien gagné. Car les religions
de
la terre sont religions de la mort. Vieille vérité théologique, que l
655
gné. Car les religions de la terre sont religions
de
la mort. Vieille vérité théologique, que les malheurs du temps illust
656
n faire de plus. » Beaucoup ont découvert le sens
de
cette parole quand le Führer est entré dans Paris. Pour ma part, j’éc
657
rivis ce jour-là une page qui trouve ici son sens
de
parabole. À cette heure où Paris exsangue voile sa face d’un nuage,
658
e. À cette heure où Paris exsangue voile sa face
d’
un nuage, et se tait, que son deuil soit le deuil du monde ! Nous sent
659
sait : Si Paris est détruit, j’en perdrai le goût
d’
être un Européen. La Ville Lumière n’est pas détruite : elle s’est éte
660
e n’est pas détruite : elle s’est éteinte. Désert
de
hautes pierres sans âme, cimetière… L’envahisseur avait prophétisé :
661
devant le sentiment, devant ce qui fait la valeur
de
la vie. Je songe au chef de guerre qui traverse aujourd’hui ces rues
662
ce qui fait la valeur de la vie. Je songe au chef
de
guerre qui traverse aujourd’hui ces rues les plus émouvantes du monde
663
nde : il ne les connaîtra jamais. Il ne verra que
d’
aveugles façades. Il s’est privé à tout jamais de quelque chose d’irre
664
d’aveugles façades. Il s’est privé à tout jamais
de
quelque chose d’irremplaçable, de quelque chose qu’on peut tuer mais
665
es. Il s’est privé à tout jamais de quelque chose
d’
irremplaçable, de quelque chose qu’on peut tuer mais qu’on ne peut con
666
é à tout jamais de quelque chose d’irremplaçable,
de
quelque chose qu’on peut tuer mais qu’on ne peut conquérir par la for
667
les servants des Panzerdivisionen. Quelque chose
d’
indéfinissable et que nous appelions Paris. C’est ici l’impuissance tr
668
appelions Paris. C’est ici l’impuissance tragique
de
ce conquérant victorieux : tout ce qu’il veut saisir se change à son
669
u’il veut saisir se change à son approche — Midas
de
l’ère prolétarienne — en fer tordu, en pierraille lépreuse. N’importe
670
du, en pierraille lépreuse. N’importe quel badaud
d’
un soir de juin pouvait s’annexer pour toujours le bonheur d’un coucha
671
rraille lépreuse. N’importe quel badaud d’un soir
de
juin pouvait s’annexer pour toujours le bonheur d’un couchant sur St-
672
e juin pouvait s’annexer pour toujours le bonheur
d’
un couchant sur St-Germain-des-Prés, le grisant glissement de la foule
673
nt sur St-Germain-des-Prés, le grisant glissement
de
la foule de l’Arc aux Chevaux de Marly, les siècles de grandeur, de m
674
rmain-des-Prés, le grisant glissement de la foule
de
l’Arc aux Chevaux de Marly, les siècles de grandeur, de misère, de sa
675
isant glissement de la foule de l’Arc aux Chevaux
de
Marly, les siècles de grandeur, de misère, de sagesse, dont le visage
676
foule de l’Arc aux Chevaux de Marly, les siècles
de
grandeur, de misère, de sagesse, dont le visage de cette capitale plu
677
rc aux Chevaux de Marly, les siècles de grandeur,
de
misère, de sagesse, dont le visage de cette capitale plus douce et pl
678
aux de Marly, les siècles de grandeur, de misère,
de
sagesse, dont le visage de cette capitale plus douce et plus fière qu
679
e grandeur, de misère, de sagesse, dont le visage
de
cette capitale plus douce et plus fière qu’aucune autre portait les t
680
s pas un conquérant. La confrontation stupéfiante
de
cet homme et de cette Ville était peut-être nécessaire pour faire com
681
ant. La confrontation stupéfiante de cet homme et
de
cette Ville était peut-être nécessaire pour faire comprendre au monde
682
bles. On ne conquiert pas avec des chars les dons
de
l’âme et les raisons de vivre dont on manque. Qu’ils fassent dix fois
683
s avec des chars les dons de l’âme et les raisons
de
vivre dont on manque. Qu’ils fassent dix fois le tour du monde ! Ils
684
e. Jusqu’au jour bien plus terrifiant que le jour
de
la pire vengeance où, s’arrêtant enfin, ils comprendront qu’aucun tri
685
ils ne savent ce qu’ils font. » 21. Le Fléau
de
Dieu S’ils ne savent pas ce qu’ils font, pitié pour eux, sans dout
686
nt pas. Et le national-socialisme nous enseignait
de
le mépriser. Ce n’est pas l’aspect le moins diabolique de l’œuvre du
687
priser. Ce n’est pas l’aspect le moins diabolique
de
l’œuvre du Führer, que le caractère de châtiment sans pitié des faibl
688
diabolique de l’œuvre du Führer, que le caractère
de
châtiment sans pitié des faiblesses du monde moderne, qu’a revêtu la
689
violence hitlérienne. La tactique et la stratégie
d’
Hitler furent en somme très simples. Il est apparu dans le monde comme
690
e qui entrerait dans une maison et qui essaierait
d’
ébranler tous les meubles. Si le meuble résiste, on n’insiste pas. Si
691
rdon. Il a été le châtiment automatique, l’Attila
de
notre civilisation, — son Fléau de Dieu. Mais cette absence de pitié,
692
ique, l’Attila de notre civilisation, — son Fléau
de
Dieu. Mais cette absence de pitié, justement, nous rappelle l’un des
693
lisation, — son Fléau de Dieu. Mais cette absence
de
pitié, justement, nous rappelle l’un des noms du diable que nous citi
694
en les justifications qu’il en donna, et l’espèce
de
douceur médiumnique dont il la revêtit aux yeux de son peuple. De l’a
695
mnique dont il la revêtit aux yeux de son peuple.
De
l’aventure connue sous le nom d’hitlérisme, dégageons maintenant des
696
x de son peuple. De l’aventure connue sous le nom
d’
hitlérisme, dégageons maintenant des conclusions valables pour bien d’
697
s conclusions valables pour bien d’autres époques
de
l’histoire. Ce n’est pas d’envahir un petit pays qui est diabolique c
698
bien d’autres époques de l’histoire. Ce n’est pas
d’
envahir un petit pays qui est diabolique cela s’est fait de tous les t
699
un petit pays qui est diabolique cela s’est fait
de
tous les temps, c’était si l’on peut dire, égoïsme normal, soif de ri
700
, c’était si l’on peut dire, égoïsme normal, soif
de
richesses, vulgaire impérialisme ; ce qui est diabolique, c’est d’app
701
gaire impérialisme ; ce qui est diabolique, c’est
d’
appeler cela « consolider la paix » ou « fonder le nouvel ordre ». Ce
702
aix » ou « fonder le nouvel ordre ». Ce n’est pas
d’
annexer la Tchécoslovaquie qui est diabolique, mais c’est de le faire
703
la Tchécoslovaquie qui est diabolique, mais c’est
de
le faire au lendemain d’un discours où l’on invoque « le droit des pe
704
t diabolique, mais c’est de le faire au lendemain
d’
un discours où l’on invoque « le droit des peuples à disposer d’eux-mê
705
où l’on invoque « le droit des peuples à disposer
d’
eux-mêmes ». Ce n’est pas de transformer le territoire du voisin en ch
706
es peuples à disposer d’eux-mêmes ». Ce n’est pas
de
transformer le territoire du voisin en champ de carnage et de bombard
707
s de transformer le territoire du voisin en champ
de
carnage et de bombardement, mais c’est d’appeler ce champ de mort « e
708
er le territoire du voisin en champ de carnage et
de
bombardement, mais c’est d’appeler ce champ de mort « espace vital ».
709
n champ de carnage et de bombardement, mais c’est
d’
appeler ce champ de mort « espace vital ». Ce n’est pas de violer les
710
et de bombardement, mais c’est d’appeler ce champ
de
mort « espace vital ». Ce n’est pas de violer les traités, mais c’est
711
r ce champ de mort « espace vital ». Ce n’est pas
de
violer les traités, mais c’est de vouloir s’innocenter en proclamant
712
». Ce n’est pas de violer les traités, mais c’est
de
vouloir s’innocenter en proclamant en tête d’un nouveau Code : « Le D
713
est de vouloir s’innocenter en proclamant en tête
d’
un nouveau Code : « Le Droit est ce qui sert le peuple allemand ». Ce
714
st ce qui sert le peuple allemand ». Ce n’est pas
d’
attaquer les Églises, mais c’est de le faire en nationalisant la Provi
715
. Ce n’est pas d’attaquer les Églises, mais c’est
de
le faire en nationalisant la Providence, et en son nom. Ce qui est pr
716
om. Ce qui est proprement diabolique, c’est moins
de
faire le mal que de le baptiser bien, quand on le fait. C’est de vide
717
ement diabolique, c’est moins de faire le mal que
de
le baptiser bien, quand on le fait. C’est de vider tous les mots de l
718
que de le baptiser bien, quand on le fait. C’est
de
vider tous les mots de leur sens, de les retourner et de les lire à r
719
n, quand on le fait. C’est de vider tous les mots
de
leur sens, de les retourner et de les lire à rebours, selon la coutum
720
fait. C’est de vider tous les mots de leur sens,
de
les retourner et de les lire à rebours, selon la coutume des messes n
721
r tous les mots de leur sens, de les retourner et
de
les lire à rebours, selon la coutume des messes noires. C’est d’inver
722
ebours, selon la coutume des messes noires. C’est
d’
invertir et de ruiner par l’intérieur les critères mêmes de la vérité.
723
la coutume des messes noires. C’est d’invertir et
de
ruiner par l’intérieur les critères mêmes de la vérité. Et c’est enfi
724
r et de ruiner par l’intérieur les critères mêmes
de
la vérité. Et c’est enfin d’aller loger le mensonge, de préférence, d
725
r les critères mêmes de la vérité. Et c’est enfin
d’
aller loger le mensonge, de préférence, dans une parole de vérité !
726
vérité. Et c’est enfin d’aller loger le mensonge,
de
préférence, dans une parole de vérité ! 23. Après Hitler Hitle
727
loger le mensonge, de préférence, dans une parole
de
vérité ! 23. Après Hitler Hitler s’est tu. L’aventure a pris f
728
a catastrophe prévue. Et devant le cadavre gisant
de
l’homme qui fit trembler tout l’univers, voici que nous nous écrions
729
que nous nous écrions avec une stupéfaction mêlée
de
honte : « Comme il était petit ! » Il n’était grand, comme Satan lui-
730
t ! » Il n’était grand, comme Satan lui-même, que
de
la grandeur de nos misères secrètes. En Hitler, le diable avait trouv
731
t grand, comme Satan lui-même, que de la grandeur
de
nos misères secrètes. En Hitler, le diable avait trouvé l’alibi le pl
732
plan stratégique du Malin ? Comment va-t-il tirer
de
sa défaite les avantages qu’il ne pouvait attendre d’une victoire par
733
a défaite les avantages qu’il ne pouvait attendre
d’
une victoire par délégation ? Voyez-le, qui se frotte les mains. La pa
734
roulement fatal du siècle — et le miracle continu
de
la charité sera seul cause d’une création de liberté qui le démente.
735
le miracle continu de la charité sera seul cause
d’
une création de liberté qui le démente. Après Hitler, après la guerre
736
tinu de la charité sera seul cause d’une création
de
liberté qui le démente. Après Hitler, après la guerre et la victoire,
737
tler, après la guerre et la victoire, les peuples
de
la terre vont s’éveiller dans un lendemain d’ivresse, une gueule de b
738
les de la terre vont s’éveiller dans un lendemain
d’
ivresse, une gueule de bois mondiale. — Que se passe-t-il ? J’ai trop
739
’éveiller dans un lendemain d’ivresse, une gueule
de
bois mondiale. — Que se passe-t-il ? J’ai trop bu cette nuit. Coups e
740
’attend comme une chemise douteuse sur le dossier
de
ma chaise. Tout me dégoûte. Pour guérir cette nausée, il n’y aurait r
741
ûte. Pour guérir cette nausée, il n’y aurait rien
de
tel qu’un reste de bouteille… Combien de peuples voudront boire encor
742
tte nausée, il n’y aurait rien de tel qu’un reste
de
bouteille… Combien de peuples voudront boire encore ? Encore un petit
743
ait rien de tel qu’un reste de bouteille… Combien
de
peuples voudront boire encore ? Encore un petit coup de dictature, ju
744
ples voudront boire encore ? Encore un petit coup
de
dictature, juste assez pour se remettre sur pied… Viendront alors les
745
eticians. Ils prescriront divers régimes : régime
d’
autorité pour nations convalescentes relevant d’une intoxication total
746
e d’autorité pour nations convalescentes relevant
d’
une intoxication totalitaire ; régime de la bouteille de lait distribu
747
relevant d’une intoxication totalitaire ; régime
de
la bouteille de lait distribuée par l’État pour peuples relevant de l
748
intoxication totalitaire ; régime de la bouteille
de
lait distribuée par l’État pour peuples relevant de la famine ; régim
749
lait distribuée par l’État pour peuples relevant
de
la famine ; régime clérical modéré pour démocraties non communistes ;
750
modéré pour démocraties non communistes ; un peu
d’
American way of life pour les pays latins, un peu de diplomatie vatica
751
au scepticisme général, combinés avec une espèce
de
soulagement physiologique. Mais dans les peuples régnera l’Ennui. Vie
752
on défaut, Hitler l’aurait fait voir par le moyen
de
cette religion synthétique (comme le caoutchouc) que fut le national-
753
lisme. Je ne parle pas ici du christianisme, mais
de
la religion en général comme phénomène humain, cause et produit de to
754
général comme phénomène humain, cause et produit
de
toute communauté vivante. Je parle d’un instinct aussi fondamental et
755
et produit de toute communauté vivante. Je parle
d’
un instinct aussi fondamental et naturel que la sexualité. Il est inco
756
des Occidentaux. Car non content de combattre et
d’
évacuer les coutumes religieuses périmées (c’était son droit et son de
757
ez une sécheresse générale, nécessairement suivie
d’
une rupture de digues et de l’irruption catastrophique des forces somb
758
sse générale, nécessairement suivie d’une rupture
de
digues et de l’irruption catastrophique des forces sombres dans la ci
759
nécessairement suivie d’une rupture de digues et
de
l’irruption catastrophique des forces sombres dans la cité. La raison
760
enchaîner. Si elle détruit tous les moyens connus
de
les apprivoiser, et prohibe la recherche hasardeuse de moyens nouveau
761
s apprivoiser, et prohibe la recherche hasardeuse
de
moyens nouveaux, elle fait lever des monstres autour de nous. Imagino
762
s avions en masse et par ce moyen-là venir à bout
d’
Hitler ; mais il ne pourra prévenir la multiplication prochaine d’autr
763
ir la multiplication prochaine d’autres symptômes
de
la même névrose. Tout porte à croire que nous allons entrer dans une
764
orte à croire que nous allons entrer dans une ère
de
religions aberrantes. Ou comme le dit une grande légende indienne, da
765
me le dit une grande légende indienne, dans l’ère
de
l’Accroissement des Monstres. Les pires sottises et les thaumaturgies
766
s sains des réalistes et des experts seront vidés
d’
un coup par ces lames de fond. Certains intellectuels incrimineront al
767
des experts seront vidés d’un coup par ces lames
de
fond. Certains intellectuels incrimineront alors l’instinct religieux
768
t nous lirons encore des jérémiades sur le déclin
de
l’esprit critique et l’abandon des grands principes. « C’est inconcev
769
ciel. Mais c’est très simple. Un homme qui meurt
de
faim mange n’importe quoi pour tromper sa faim, faute de mieux. La ra
770
e de mieux. La raison n’ose pas dire qu’il a tort
d’
avoir faim. Dira-t-elle qu’il a tort d’avoir soif de religion ? De tro
771
’il a tort d’avoir faim. Dira-t-elle qu’il a tort
d’
avoir soif de religion ? De tromper cet instinct rendu furieux par des
772
avoir faim. Dira-t-elle qu’il a tort d’avoir soif
de
religion ? De tromper cet instinct rendu furieux par des siècles de p
773
ra-t-elle qu’il a tort d’avoir soif de religion ?
De
tromper cet instinct rendu furieux par des siècles de privation ? Ell
774
romper cet instinct rendu furieux par des siècles
de
privation ? Elle dénoncera vainement des délires collectifs dont elle
775
la première responsable, aussi vrai que le régime
de
la prohibition fut responsable des méfaits de l’alcool frelaté, en Am
776
ime de la prohibition fut responsable des méfaits
de
l’alcool frelaté, en Amérique. ⁂ Viendront les remous de la dictature
777
cool frelaté, en Amérique. ⁂ Viendront les remous
de
la dictature. Viendront les grands Dieticians. Viendront les Nouveaux
778
être vient-elle pour des siècles. (Il y aura trop
d’
avions du même côté). Mais comment l’homme compensera-t-il l’absence d
779
). Mais comment l’homme compensera-t-il l’absence
de
guerre ? Voici la tragédie nouvelle : nous avons tout prévu contre un
780
le pour demain. Hitler battu, nous n’aurons plus
d’
Ennemi 10. Une dimension de la vie nous fera défaut. Imaginons les con
781
tu, nous n’aurons plus d’Ennemi 10. Une dimension
de
la vie nous fera défaut. Imaginons les conséquences de cette déceptio
782
vie nous fera défaut. Imaginons les conséquences
de
cette déception planétaire. Le seul type d’héroïsme que l’Occident ai
783
ences de cette déception planétaire. Le seul type
d’
héroïsme que l’Occident ait su concevoir (depuis qu’il n’allume plus d
784
dent ait su concevoir (depuis qu’il n’allume plus
de
bûchers pour les chrétiens, et que ceux-ci tolèrent les hérétiques) c
785
alles pour la Patrie ou le Parti. S’il n’y a plus
de
guerres, qui fera des héros ? Qui réveillera le sens du sacrifice ? P
786
ur la paix, car jamais elle ne fut plus dépourvue
de
respect pour les vertus que l’esprit seul sait porter jusqu’au paroxy
787
qu’au paroxysme. Et comment vivre s’il n’y a plus
de
paroxysmes ? La guerre était pour nous la grande permission, le grand
788
r nous la grande permission, le grand ajournement
de
nos problèmes, la justification par l’opinion publique de l’irrespons
789
roblèmes, la justification par l’opinion publique
de
l’irresponsabilité universelle. Nous l’aimions sans le savoir, pour u
790
mé sur la terre entière et dans tous les domaines
de
l’existence publique. Elle figurait pour nous l’équivalent de la Fête
791
ce publique. Elle figurait pour nous l’équivalent
de
la Fête chez les peuples anciens, elle en avait les attributs les plu
792
des lois morales (tu tueras, tu voleras, tu diras
de
faux témoignages, avec honneur) ; suspension du droit ; dépenses sans
793
humains ; déguisements ; cortèges ; déchaînement
de
passions collectives ; disqualification temporaire des conflits indiv
794
ion temporaire des conflits individuels. Je parle
d’
un état d’exception comme on dirait état de siège ou état de grâce. Te
795
les primitifs, la guerre était le « grand Temps »
de
l’humanité moderne, la seule excuse que notre esprit pût accepter pou
796
notre esprit pût accepter pour suspendre le cours
d’
une existence de plus en plus conforme aux prévisions des grandes comp
797
us conforme aux prévisions des grandes compagnies
d’
assurances. Quelle fête immense faudra-t-il à ce siècle pour lui faire
798
-t-il à ce siècle pour lui faire oublier son goût
de
la guerre ? Quels drames nouveaux pour remplacer, sur la scène vide,
799
, sur la scène vide, l’Ennemi déchu ? Les maîtres
de
la politique mondiale ont sans doute un plan dans la tête : ils presc
800
friront progressivement des programmes rationnels
d’
abondance, dans l’idée générale d’endormir les peuples, les classes ou
801
mmes rationnels d’abondance, dans l’idée générale
d’
endormir les peuples, les classes ou les individus qui seraient tentés
802
les classes ou les individus qui seraient tentés
de
causer quelque turbulence. C’est calculer sans l’homme, sans son huma
803
oire. Le diable, admettons-le, n’est pas si court
de
vue. Il n’oublie pas que l’homme a toujours su produire les ingrédien
804
sables à sa torture, à sa grandeur, à son orgueil
de
créature faite à l’image de Dieu et qui veut s’emparer du Ciel. Le di
805
andeur, à son orgueil de créature faite à l’image
de
Dieu et qui veut s’emparer du Ciel. Le diable a tiré bon parti des ég
806
ble a tiré bon parti des égarements rationalistes
de
l’Occident, maître du monde depuis des siècles. Il n’a rien perdu à c
807
puis des siècles. Il n’a rien perdu à cette crise
de
compensation délirante que fut la première guerre totale et planétair
808
ra la paix du xxe siècle. Un des dilemmes fameux
de
notre temps fut posé aux Allemands par Goering : c’était du beurre ou
809
hoisirent les canons, plus excitants. Les maîtres
de
la paix paraissent bien décidés à nous offrir du beurre à satiété. Ma
810
parce que nous sommes créateurs. Quand les usines
de
canons et d’avions auront fermé leurs portes ou feront des frigidaire
811
s sommes créateurs. Quand les usines de canons et
d’
avions auront fermé leurs portes ou feront des frigidaires, nous entre
812
feront des frigidaires, nous entrerons dans l’ère
de
la Gnose moderne. Cette réaction religieuse, déterminée par une diale
813
terminée par une dialectique irrésistible, menace
d’
être aussi meurtrière, en fin de compte, que la névrose créée par le r
814
aisirs, ou les prétextes du plaisir). Elle risque
de
nous priver des secours de la raison, comme celle-ci nous avait privé
815
plaisir). Elle risque de nous priver des secours
de
la raison, comme celle-ci nous avait privé des secours de la religion
816
ison, comme celle-ci nous avait privé des secours
de
la religion. Après avoir eu mal à droite, nous aurons mal à gauche —
817
, nous aurons mal à gauche — c’est la dialectique
de
l’Histoire — faute de concevoir un équilibre. Le diable prétendra nou
818
us faire choisir follement entre les deux moitiés
de
la réalité, entre la tête et les entrailles, entre conscience et inco
819
rs que la sagesse voudrait une conscience avertie
de
notre nature, réglant le jeu, oui, mais en tenant compte de tous les
820
ature, réglant le jeu, oui, mais en tenant compte
de
tous les éléments en jeu. Le diable nous dira : il faut choisir. Nous
821
ne que Satan va nous offrir un choix considérable
d’
Antéchrists. Tout, et n’importe quoi, sauf l’Évangile et la sobriété d
822
et n’importe quoi, sauf l’Évangile et la sobriété
de
la Croix. Et si le diable échoue dans certains peuples, dans certains
823
n’adore que son propre reflet. » Ce sera le temps
de
regretter les dictatures qui tuent les corps mais qui ne peuvent rien
824
e cours des choses. Mais l’un des grands plaisirs
de
l’homme est de prévoir. Il s’imagine, et je ne sais s’il a tort, que
825
ses. Mais l’un des grands plaisirs de l’homme est
de
prévoir. Il s’imagine, et je ne sais s’il a tort, que la lucidité peu
826
a tort, que la lucidité peut garantir l’intégrité
de
sa personne, et sinon son bonheur, du moins le sens pur de sa vocatio
827
sonne, et sinon son bonheur, du moins le sens pur
de
sa vocation. 9. Les méfaits de la psychologie rationaliste ont été
828
ins le sens pur de sa vocation. 9. Les méfaits
de
la psychologie rationaliste ont été patents dans la morale sexuelle e
829
riage au siècle dernier ; ou lorsqu’il s’agissait
d’
apprécier le rôle du sacré, l’âme collective, la création artistique,
830
ve, la création artistique, l’importance relative
de
l’argent et du travail, les dogmes chrétiens, etc., etc. 10. Si Stal
831
s classiques du démon : l’esprit tombé, le prince
de
l’ici-bas, le tentateur, l’accusateur et le menteur. Il reste à dépis
832
d que toutes ses misères venaient de l’extérieur,
de
l’étranger, du traité de Versailles, ou des Juifs, ou des Soviets, ou
833
venaient de l’extérieur, de l’étranger, du traité
de
Versailles, ou des Juifs, ou des Soviets, ou des Ploutocrates anglo-s
834
e procédé que l’on reconnaît le mieux la tactique
de
Satan chez tous ses délégués. Mais ici, prenons garde ! Ce livre est
835
ués. Mais ici, prenons garde ! Ce livre est plein
de
pièges. Si l’on vient d’accepter les phrases qui précèdent, c’est peu
836
rde ! Ce livre est plein de pièges. Si l’on vient
d’
accepter les phrases qui précèdent, c’est peut-être assez grave pour n
837
ions, délaissant nos ennemis abattus, vont porter
de
plein fouet contre nous-mêmes. Beaucoup de démocrates ont cru très si
838
sincèrement qu’Hitler incarnait seul tout le mal
de
notre temps, et qu’il était un monstre avec lequel nous n’avions vrai
839
n monstre avec lequel nous n’avions vraiment rien
de
commun. « Voyez, je ne suis qu’Hitler ! », disait Satan. Nous n’avons
840
détesté. Nous lui avons opposé avec plus ou moins
de
détermination nos vieilles vertus démocratiques. Nous n’avons plus su
841
est la grande porte par laquelle il entre en nous
de
préférence, en se faisant annoncer sous un faux nom. 25. Notre pr
842
tre primitivisme Chacun sait que les primitifs
de
la Mélanésie, victimes des plus célèbres études sociologiques du sièc
843
èbres études sociologiques du siècle, ont coutume
de
personnifier les forces mauvaises qui les menacent, les causes des cr
844
s menacent, les causes des crimes, des accidents,
de
la stérilité ou de la mort. Que ce soit un sorcier, un profanateur du
845
ses des crimes, des accidents, de la stérilité ou
de
la mort. Que ce soit un sorcier, un profanateur du sacré, un animal,
846
rofanateur du sacré, un animal, un nuage, un bout
de
bois colorié, toujours la cause du mal dont souffrent ces sauvages es
847
mal dont souffrent ces sauvages est indépendante
d’
eux-mêmes, et doit donc être combattue et anéantie hors d’eux-mêmes. À
848
mes, et doit donc être combattue et anéantie hors
d’
eux-mêmes. À l’inverse, le christianisme s’est efforcé depuis des sièc
849
le christianisme s’est efforcé depuis des siècles
de
nous faire comprendre que le Royaume de Dieu est en nous, que le Mal
850
s siècles de nous faire comprendre que le Royaume
de
Dieu est en nous, que le Mal aussi est en nous, et que le champ de le
851
us, que le Mal aussi est en nous, et que le champ
de
leur bataille n’est pas ailleurs que dans nos cœurs. Cette éducation
852
ans notre primitivisme. Nous rendons responsables
de
nos maux les gens d’en face, toujours, ou la force des choses. Si nou
853
e. Nous rendons responsables de nos maux les gens
d’
en face, toujours, ou la force des choses. Si nous sommes révolutionna
854
ires, nous croyons qu’en changeant la disposition
de
certains objets — en déplaçant les richesses par exemple — nous suppr
855
mêmes objets, nous sauverons tout. Si nous sommes
de
braves démocrates, inquiets ou optimistes, nous croyons qu’en rôtissa
856
sommes encore en pleine mentalité magique. Comme
de
petits enfants en colère, nous battons la table à laquelle nous nous
857
eurtés. Ou comme Xerxès, nous flagellons les eaux
de
l’Hellespont, à grands coups de discours sur les ondes courtes. Nous
858
agellons les eaux de l’Hellespont, à grands coups
de
discours sur les ondes courtes. Nous oublions ce fait fondamental : c
859
nos adversaires ne diffèrent pas essentiellement
de
nous. Car tout homme porte dans son corps (et dans son âme) les micro
860
rte dans son corps (et dans son âme) les microbes
de
toutes les maladies connues, et de bien d’autres. Anéantir les signes
861
) les microbes de toutes les maladies connues, et
de
bien d’autres. Anéantir les signes extérieurs de la menace ne serait
862
de bien d’autres. Anéantir les signes extérieurs
de
la menace ne serait nullement suffisant pour nous en délivrer. Ces si
863
ient fort bien se développer un jour, à la faveur
de
la misère ou de la fatigue, ou de quelque déséquilibre temporaire. Co
864
e développer un jour, à la faveur de la misère ou
de
la fatigue, ou de quelque déséquilibre temporaire. Confessons donc la
865
ur, à la faveur de la misère ou de la fatigue, ou
de
quelque déséquilibre temporaire. Confessons donc la vérité compromett
866
devant nous, mais en nous. Il était en nous avant
d’
être contre nous. C’est en nous-mêmes d’abord qu’il s’est dressé contr
867
férir si nous n’admettons pas qu’il est une part
de
nous, la part du diable dans nos cœurs. L’adversaire est toujours en
868
ble, s’il existait, serait cet homme qui n’aurait
d’
autre ennemi à craindre que celui qu’il loge en lui-même. 26. « No
869
sommes tous, nos ennemis y compris, des « hommes
de
bonne volonté »11. Pourtant voyez ce qui se passe dans le monde, et d
870
par nos mains et nos pensées. C’est ici le moment
de
nous rappeler notre slogan démocratique : Tous les hommes se valent !
871
tention des remarques précédentes n’est nullement
de
justifier « les autres », que l’on avait d’abord accusés de tout le m
872
er « les autres », que l’on avait d’abord accusés
de
tout le mal ; ni de nous fourrer tous dans le même sac, sans distinct
873
ue l’on avait d’abord accusés de tout le mal ; ni
de
nous fourrer tous dans le même sac, sans distinctions, comme semblait
874
ons, comme semblait le faire en 1939 un manifeste
de
l’Oxford Group, largement répandu en Europe, et qui s’intitulait non
875
le du démon dans nos passions ; dans notre besoin
de
sensation ; dans notre crainte des responsabilités ; dans notre inert
876
e ; dans notre lâcheté vis-à-vis du grand nombre,
de
ses modes et de ses slogans ; dans notre ignorance du prochain ; dans
877
âcheté vis-à-vis du grand nombre, de ses modes et
de
ses slogans ; dans notre ignorance du prochain ; dans notre refus enf
878
re ignorance du prochain ; dans notre refus enfin
de
tout Absolu qui transcende et qui juge nos intérêts « vitaux » (comme
879
ls le sont toujours…). Il est juste et nécessaire
de
dire que le diabolisme n’est pas seulement hitlérien, que l’hitlérism
880
dirai pas que je vais laisser courir le criminel
d’
en face, pour mieux me livrer d’abord à ma réforme intérieure ! Je dir
881
me réformer et la lutte pour empêcher le criminel
de
poursuivre ses méfaits, sont une seule et même lutte. Que servirait
882
its, sont une seule et même lutte. Que servirait
de
gagner cette lutte en moi seulement, puisque le criminel risquerait d
883
en moi seulement, puisque le criminel risquerait
de
me supprimer ? Que servirait de la gagner hors de moi seulement, puis
884
iminel risquerait de me supprimer ? Que servirait
de
la gagner hors de moi seulement, puisque je risquerais de devenir à m
885
gner hors de moi seulement, puisque je risquerais
de
devenir à mon tour un autre criminel ? Il n’y a qu’un crime, en moi e
886
disent-ils, donc nous n’avons pas le droit moral
de
nous battre contre Hitler. » — Nous sommes tous coupables, certes, ma
887
e des pompiers et des gendarmes. Cela ne fait pas
de
nous des saints. Cela n’implique même pas que nous soyons meilleurs q
888
us précisément diaboliques chez Hitler — sa façon
de
localiser tout le mal à l’étranger, pour s’innocenter — nous sommes t
889
bés dans la même erreur que lui : nous avons fait
d’
Hitler une image du démon tout extérieure à notre réalité. Et pendant
890
rogrès automatique. Devant les résultats présents
de
cette croyance quasi universelle dans les masses et l’élite, l’on est
891
e fataliste et réconfortante que tout s’arrangera
de
soi-même, dans l’ensemble et à la longue, alors le Progrès devient le
892
soporifiques, une véritable drogue du démon, l’un
de
ses nouveaux noms. Nous avons cru à la bonté foncière de l’homme. Par
893
nouveaux noms. Nous avons cru à la bonté foncière
de
l’homme. Par gentillesse pour les autres, évidemment… Mais c’est touj
894
tres, évidemment… Mais c’est toujours une manière
de
croire aussi à sa propre bonté. Et donc de s’aveugler sur le mal que
895
anière de croire aussi à sa propre bonté. Et donc
de
s’aveugler sur le mal que l’on porte en soi. Et donc de ne pas se sou
896
veugler sur le mal que l’on porte en soi. Et donc
de
ne pas se soucier de la présence active du démon. Et donc enfin de lu
897
e l’on porte en soi. Et donc de ne pas se soucier
de
la présence active du démon. Et donc enfin de lui laisser le champ li
898
ier de la présence active du démon. Et donc enfin
de
lui laisser le champ libre pour nous duper. Nous avons cru que le mal
899
l était relatif à l’ordre social, qu’il provenait
d’
une mauvaise répartition des biens, d’une éducation mal comprise, de l
900
l provenait d’une mauvaise répartition des biens,
d’
une éducation mal comprise, de lois inadéquates, ou de refoulements et
901
artition des biens, d’une éducation mal comprise,
de
lois inadéquates, ou de refoulements et d’injustices qui pouvaient êt
902
e éducation mal comprise, de lois inadéquates, ou
de
refoulements et d’injustices qui pouvaient être éliminés par des mesu
903
prise, de lois inadéquates, ou de refoulements et
d’
injustices qui pouvaient être éliminés par des mesures adroites. Toute
904
rtie superstitieuses, ont eu pour principal effet
de
nous aveugler sur la nature de l’homme, c’est-à-dire sur la nature es
905
ur principal effet de nous aveugler sur la nature
de
l’homme, c’est-à-dire sur la nature essentielle du mal enraciné dans
906
nos données premières, et dans la définition même
de
l’homme en tant qu’il est humain. Nous avons été optimistes par princ
907
savoir-vivre, dirait-on, malgré tous les démentis
de
la réalité. Cet optimisme n’était pas la confiance naïve de l’enfant,
908
ité. Cet optimisme n’était pas la confiance naïve
de
l’enfant, mais une espèce de mensonge. Exactement : une fuite devant
909
s la confiance naïve de l’enfant, mais une espèce
de
mensonge. Exactement : une fuite devant le réel. Car dans le réel, no
910
s scandalise et nous effraye. Alors nous essayons
de
conjurer le mal en le niant : c’est encore la mentalité magique. Nous
911
Nous croyons qu’en avouant le mal, nous le créons
d’
une certaine manière. Nous préférons ne pas insister. Nous refoulons,
912
ce mensonge inconscients, nous rendent incapables
de
comprendre ce qui se passe dans le monde, et nous livrent aux ruses l
913
uses le plus simples du Malin. Nous avons éliminé
de
notre existence bourgeoise le sens du tragique, pour nous tourner exc
914
’il représenta. Autant que la compensation fatale
de
nos défauts, Hitler a été le négatif exact de nos idéaux optimistes,
915
ale de nos défauts, Hitler a été le négatif exact
de
nos idéaux optimistes, dans la mesure où ils étaient irréalistes, uto
916
ir médiocre, dilué et trop étendu (comme on étend
d’
eau une solution concentrée) de divinisation prométhéenne. Nos vertus
917
du (comme on étend d’eau une solution concentrée)
de
divinisation prométhéenne. Nos vertus comme nos vices n’avaient plus
918
. Nos vertus comme nos vices n’avaient plus l’air
de
rien, et leur insignifiance était leur diabolisme. Il est trop clair
919
émocraties, en tant que telles, n’ont pas produit
d’
exemples d’héroïsme et de vertu12 comparables en grandeur aux atrocité
920
en tant que telles, n’ont pas produit d’exemples
d’
héroïsme et de vertu12 comparables en grandeur aux atrocités rigoureus
921
elles, n’ont pas produit d’exemples d’héroïsme et
de
vertu12 comparables en grandeur aux atrocités rigoureuses produites p
922
s par l’hitlérisme au nom d’Hitler. Ce qui a paru
de
grand, dans notre camp n’a pas été le fait de la démocratie bourgeois
923
aru de grand, dans notre camp n’a pas été le fait
de
la démocratie bourgeoise, mais de chrétiens comme Niemöller, ou de ré
924
pas été le fait de la démocratie bourgeoise, mais
de
chrétiens comme Niemöller, ou de révolutionnaires mystiques. Après to
925
bourgeoise, mais de chrétiens comme Niemöller, ou
de
révolutionnaires mystiques. Après tout, dira-t-on, c’est normal, car
926
me qui permet aux croyants, comme aux incroyants,
de
se manifester sans être massacrés13. Oui, mais encore faut-il qu’il y
927
qu’il y ait des croyants ! Or nous étions devenus
d’
incurables sceptiques. De même que nous disions, en présence d’un mira
928
la nous gênait. Nous l’écartions irrésistiblement
de
nos pensées… Car si ce « trop affreux » eût été vraiment vrai, il eût
929
ffreux » eût été vraiment vrai, il eût fallu agir
d’
urgence et sans réserve ; et si nous nous étions mis à agir sans réser
930
mal avait des racines dans nos vies aussi, et que
d’
une certaine manière, nous l’aimions ! Voilà le grand secret. Le diabl
931
plus que des armées. Elle oppose des conceptions
de
la vie. C’est une espèce de guerre civile mondiale. Elle sera perdue
932
ppose des conceptions de la vie. C’est une espèce
de
guerre civile mondiale. Elle sera perdue si nous perdons d’abord le s
933
Elle sera perdue si nous perdons d’abord le sens
de
la réalité morale. Et certaines simplifications le perdent à coup sûr
934
coup sûr. Je parle ici comme un Européen qui a vu
de
près des phénomènes bizarres de désintégration démocratique et de con
935
Européen qui a vu de près des phénomènes bizarres
de
désintégration démocratique et de conversion au fascisme. La France é
936
omènes bizarres de désintégration démocratique et
de
conversion au fascisme. La France était démocratique dans son ensembl
937
atique dans son ensemble en 1939 ; presque chacun
de
ses citoyens se disait sincèrement antinazi, et se croyait parfaiteme
938
ent antinazi, et se croyait parfaitement à l’abri
de
ce genre de tentation. Il avait sa bonne conscience de démocrate. Hit
939
, et se croyait parfaitement à l’abri de ce genre
de
tentation. Il avait sa bonne conscience de démocrate. Hitler est venu
940
genre de tentation. Il avait sa bonne conscience
de
démocrate. Hitler est venu, Pétain a capitulé, et aussitôt, certains
941
ertains ci-devant « intellectuels antifascistes »
de
Paris ont découvert qu’au fond, le nazisme n’était pas si mal que cel
942
lle aussi a cru que les nazis étaient des animaux
d’
une tout autre race que les Américains. Elle aussi risque de découvrir
943
autre race que les Américains. Elle aussi risque
de
découvrir un jour qu’« après tout, ils sont des hommes comme nous ».
944
itain tenté et qui se fait une caricature du vice
d’
autrui pour éviter de le reconnaître en lui-même. Je soupçonne une pro
945
fait une caricature du vice d’autrui pour éviter
de
le reconnaître en lui-même. Je soupçonne une profonde ambivalence dan
946
ivalence dans certaines dénonciations passionnées
de
l’hitlérisme : la violence du ton et le simplisme obstiné de certains
947
isme : la violence du ton et le simplisme obstiné
de
certains jugements trahissent une vague mauvaise conscience, une anxi
948
e pour leur propre cas ! —, je ne puis m’empêcher
de
penser qu’un jour ou l’autre, le pro qui sommeille dans un coin de le
949
our ou l’autre, le pro qui sommeille dans un coin
de
leur cœur se réveillera brusquement et les renversera. Nous avons vu
950
brusquement et les renversera. Nous avons vu trop
de
cas de ce genre, individuels ou collectifs. Nous avons vu la populati
951
ment et les renversera. Nous avons vu trop de cas
de
ce genre, individuels ou collectifs. Nous avons vu la population de l
952
iduels ou collectifs. Nous avons vu la population
de
la Sarre se jeter dans les bras du Reich en 1935. Nous avons vu la Vi
953
ienne sozialdemokrat se transformer dans l’espace
de
vingt-quatre heures en une Vienne délirante de passion hitlérienne. N
954
ce de vingt-quatre heures en une Vienne délirante
de
passion hitlérienne. Nous avons vu quelques-uns de nos amis « occupés
955
e passion hitlérienne. Nous avons vu quelques-uns
de
nos amis « occupés » découvrir subitement les « bons côtés » du systè
956
— Regardez le diable qui est parmi nous ! Cessez
de
croire qu’il ne peut ressembler qu’à Hitler ou à ses émules, car c’es
957
r le fait. Et alors seulement, vous serez en état
de
le dépister chez autrui, et de l’y combattre avec succès. Car alors s
958
vous serez en état de le dépister chez autrui, et
de
l’y combattre avec succès. Car alors seulement, vous serez guéris de
959
ec succès. Car alors seulement, vous serez guéris
de
votre naïveté invraisemblable devant le danger totalitaire. Vous pour
960
Vous pourrez échapper à l’hypnose. Nous manquions
d’
une représentation moderne du démon. Nous avions donc cessé d’y croire
961
entation moderne du démon. Nous avions donc cessé
d’
y croire. Puis nous avons imaginé que le diable était Hitler. Et le di
962
ant, plus amusant aussi, et finalement plus vrai,
d’
essayer de nous représenter le diable sous les traits d’un playboy dyn
963
amusant aussi, et finalement plus vrai, d’essayer
de
nous représenter le diable sous les traits d’un playboy dynamique et
964
yer de nous représenter le diable sous les traits
d’
un playboy dynamique et optimiste, vierge de toute pensée. Ou, si nous
965
raits d’un playboy dynamique et optimiste, vierge
de
toute pensée. Ou, si nous sommes par hasard des intellectuels libérau
966
asard des intellectuels libéraux, sous les traits
d’
un intellectuel libéral qui ne croit pas au diable… 28. L’Humour
967
8. L’Humour et la démocratie Il faut se moquer
de
la démocratie. D’abord parce qu’elle est le seul régime qui tolère un
968
uile et sans jeu entre ses parties. C’est le sens
de
l’humour qui sauve les hommes vivant dans un État démocratique. Et de
969
e les hommes vivant dans un État démocratique. Et
de
quoi les sauve-t-il ? De l’asphyxie par la proximité, qui serait le r
970
un État démocratique. Et de quoi les sauve-t-il ?
De
l’asphyxie par la proximité, qui serait le résultat fatal de notre de
971
ie par la proximité, qui serait le résultat fatal
de
notre destruction des hiérarchies. Grâce au sens de l’humour, une dis
972
notre destruction des hiérarchies. Grâce au sens
de
l’humour, une distance respirable et respectable peut être rétablie e
973
mes, ou entre fonctionnaires et victimes normales
de
l’État. Prenez en effet une démocratie quelconque. Supprimez toute es
974
une démocratie quelconque. Supprimez toute espèce
d’
humour aussi bien dans sa vie quotidienne — rouspétance du citoyen — q
975
— farce des partis — et vous obtiendrez au terme
de
l’opération, si elle est énergiquement poussée, l’État totalitaire da
976
at totalitaire dans sa splendeur native. L’auteur
de
ce livre étant intimement persuadé que la démocratie dépérit sans cri
977
que la démocratie dépérit sans critique, dénonce
d’
avance comme totalitaires ceux qui verront dans les prochains chapitre
978
verront dans les prochains chapitres les marques
d’
un esprit totalitaire. Qu’ils se reconnaissent eux-mêmes à ce signe !
979
s principaux démons que le diable délègue au soin
de
faire de nos démocraties ses colonies-modèles. 29. Le démon de la
980
aux démons que le diable délègue au soin de faire
de
nos démocraties ses colonies-modèles. 29. Le démon de la Liberté
981
émocraties ses colonies-modèles. 29. Le démon
de
la Liberté Pourquoi n’a-t-on jamais aimé et célébré la Liberté aut
982
de mes contemporains, la liberté, c’est le droit
de
ne pas obéir. Quand on le leur laisse, ils s’ennuient, et bientôt ils
983
un tyran. Mais dès que le tyran sévit, leur amour
de
la liberté les pousse aux sommets du courage. Et ainsi de suite : ce
984
berté les pousse aux sommets du courage. Et ainsi
de
suite : ce jeu de coquetterie profonde conditionne en partie l’Histoi
985
ux sommets du courage. Et ainsi de suite : ce jeu
de
coquetterie profonde conditionne en partie l’Histoire. C’est dire que
986
. C’est dire que fonder un régime sur le beau mot
de
Liberté équivaut à substituer à la politique de puissance telle que l
987
t de Liberté équivaut à substituer à la politique
de
puissance telle que la formula Machiavel, une politique du romanesque
988
itique du romanesque collectif. (Ainsi le mariage
d’
amour sentimental a pris la place du mariage de raison conclu par les
989
ge d’amour sentimental a pris la place du mariage
de
raison conclu par les parents et les notaires ; et c’est sans doute a
990
ctionne pas sans illusions, compensées par autant
de
déceptions automatiques. La liberté pour laquelle nous mourons n’est
991
grand malentendu que symbolise la déesse du port
de
New York, en éclairant sans condition tous les humains. Regardez-là :
992
ige vers le vide non sans grandiloquence. Combien
de
milliers de réfugiés ont pleuré en passant devant elle ! Sa seule pré
993
vide non sans grandiloquence. Combien de milliers
de
réfugiés ont pleuré en passant devant elle ! Sa seule présence était
994
ant devant elle ! Sa seule présence était le gage
d’
une aisance de pensée et de vie qu’ils venaient de perdre en Europe po
995
e ! Sa seule présence était le gage d’une aisance
de
pensée et de vie qu’ils venaient de perdre en Europe pour en avoir ab
996
présence était le gage d’une aisance de pensée et
de
vie qu’ils venaient de perdre en Europe pour en avoir abusé sans plai
997
our en avoir abusé sans plaisir. On s’en voudrait
de
commenter une situation où l’émotion la plus compréhensible couvrait
998
tion où l’émotion la plus compréhensible couvrait
d’
aussi étranges confusions. À dire le vrai, contre l’époque entière, la
999
— même pas dans le domaine politique, malgré tant
d’
éloquence et de vrais sacrifices. Cette liberté non qualifiée ne saura
1000
le domaine politique, malgré tant d’éloquence et
de
vrais sacrifices. Cette liberté non qualifiée ne saurait proprement d
1001
qualifiée ne saurait proprement désigner l’objet
d’
une revendication, car elle est le signe primordial de notre condition
1002
e revendication, car elle est le signe primordial
de
notre condition humaine. L’homme est libre, et cela signifie qu’il es
1003
« pour rien », sans condition ni but, soyez libre
de
faire ce qu’il vous plaît, et vous ferez probablement ce qui plaît au
1004
blement ce qui plaît au diable. Mais soyez libres
de
rejoindre et d’accomplir la vocation que Dieu vous donne, alors vous
1005
laît au diable. Mais soyez libres de rejoindre et
d’
accomplir la vocation que Dieu vous donne, alors vous échapperez au cy
1006
on seulement, étant ce qu’elle est, il serait fou
de
la revendiquer, mais encore il est de sa nature qu’elle se perde auss
1007
serait fou de la revendiquer, mais encore il est
de
sa nature qu’elle se perde aussitôt qu’utilisée, soit vers le mal, so
1008
c un risque neuf. Mais nous parlions, dites-vous,
de
liberté politique. J’y viendrai donc. Ce qui est en cause dans ce pla
1009
, mais c’est le droit que l’État laisse à l’homme
d’
obéir à sa vocation. Si l’homme ne se reconnaît point de vocation, la
1010
r à sa vocation. Si l’homme ne se reconnaît point
de
vocation, la liberté qu’il revendique est vide ; le diable s’y mettra
1011
se reconnaît une vocation, il ne demandera point
d’
autre droit que celui de s’y conformer. Que l’État lui refuse ce droit
1012
on, il ne demandera point d’autre droit que celui
de
s’y conformer. Que l’État lui refuse ce droit, le citoyen peut librem
1013
e conduire soit au martyre soit au rétablissement
de
lois humaines : dans ces deux cas il reste libre, non pas au nom de l
1014
, laissant sévir des lois contraires à l’exercice
de
sa foi, il perdra par sa faute la liberté du choix, qui était toute s
1015
e la liberté du choix, qui était toute sa dignité
d’
homme. Alors sans doute, il entrera dans la masse anonyme des esclaves
1016
affirmée, préférant à leur vie les vraies raisons
de
vivre. La liberté sans condition est un fantôme, annonciateur des pir
1017
es tyrannies. J’en nommerai une. 30. Le démon
de
la Police Le voyageur et l’émigré qui défilent en rade de New York
1018
e Le voyageur et l’émigré qui défilent en rade
de
New York devant le symbole dressé sur un ciel commercial de la Libert
1019
k devant le symbole dressé sur un ciel commercial
de
la Liberté aux yeux vides15, ne tardent pas à recevoir un rappel aux
1020
ment les fonctionnaires des douanes et du Service
d’
immigration pour monter à bord du navire : nous approchons d’Ellis Isl
1021
on pour monter à bord du navire : nous approchons
d’
Ellis Island. En Europe et dans les deux Amériques, j’ai traversé dura
1022
i traversé durant cette guerre une bonne douzaine
de
frontières, et j’ai rempli quelques centaines de questionnaires, dont
1023
de frontières, et j’ai rempli quelques centaines
de
questionnaires, dont l’un au moins comportait 32 pages. Ces confessio
1024
ons générales m’ont valu, je dois le dire, autant
d’
absolutions. Mais loin de me procurer le sentiment d’une bonne conscie
1025
bsolutions. Mais loin de me procurer le sentiment
d’
une bonne conscience civique brevetée par l’État, elles me laissaient
1026
u plus incertain quant à l’identité que je venais
d’
établir. De l’un à l’autre de ces questionnaires, un personnage conven
1027
rtain quant à l’identité que je venais d’établir.
De
l’un à l’autre de ces questionnaires, un personnage conventionnel se
1028
a cohérence, plus s’estompait en moi la sensation
d’
être identique à mes données légales. C’était chaque fois un procès à
1029
i sur mon propre compte. Sourde aux protestations
d’
un moi réel, mais qui ne pourrait produire ses preuves dans le langage
1030
la seule question. Et le succès pouvait dépendre
d’
un caprice de la Destinée, d’une humeur de ce Monsieur tout puissant q
1031
stion. Et le succès pouvait dépendre d’un caprice
de
la Destinée, d’une humeur de ce Monsieur tout puissant qui m’attendai
1032
cès pouvait dépendre d’un caprice de la Destinée,
d’
une humeur de ce Monsieur tout puissant qui m’attendait, le chapeau su
1033
épendre d’un caprice de la Destinée, d’une humeur
de
ce Monsieur tout puissant qui m’attendait, le chapeau sur la tête, de
1034
e chapeau sur la tête, derrière une table chargée
de
tampons. Bien entendu, ces procédures sont justifiables en temps de g
1035
ntendu, ces procédures sont justifiables en temps
de
guerre. Une société démocratique doit se protéger comme les autres. E
1036
ra même s’organiser mieux que les autres en temps
de
paix, non seulement pour sa sécurité mais aussi pour le bien commun.
1037
; vous serez pisté dans le passé jusqu’au ventre
de
votre mère, affublé d’un numéro d’ordre et privé du droit d’avoir fai
1038
s le passé jusqu’au ventre de votre mère, affublé
d’
un numéro d’ordre et privé du droit d’avoir faim. Ce qui me trouble da
1039
usqu’au ventre de votre mère, affublé d’un numéro
d’
ordre et privé du droit d’avoir faim. Ce qui me trouble dans toutes ce
1040
re, affublé d’un numéro d’ordre et privé du droit
d’
avoir faim. Ce qui me trouble dans toutes ces machines policières et p
1041
sont que trop visibles — c’est l’irresponsabilité
de
leurs agents. Supposez qu’on pourchasse les Rouges. Personne ne sait
1042
ui d’ailleurs demeure inaccessible ; ni les chefs
de
service, qui s’occupent du service ; ni les exécutants qui se content
1043
du service ; ni les exécutants qui se contentent
d’
exécuter leurs consignes à la lettre. Votre coefficient signifie Rouge
1044
à qui rend votre cas pire encore. Il n’y aura pas
de
pétitions dans les journaux. Vous serez un rebut social. Vous rappele
1045
ale du Wilhelm Meister ? Goethe conduit son héros
d’
épreuves en surprises, par une volonté mystérieuse qui est celle du ch
1046
par une volonté mystérieuse qui est celle du chef
d’
une société secrète. On veut amener Wilhelm à son salut, par les voies
1047
on salut, par les voies plus ou moins maçonniques
d’
une secte rosicrucienne. C’était alors comme une figuration de la Prov
1048
rosicrucienne. C’était alors comme une figuration
de
la Providence. C’en est une aujourd’hui de la Police. À cette différe
1049
ration de la Providence. C’en est une aujourd’hui
de
la Police. À cette différence près, toutefois, que l’intention spirit
1050
ez pas plus qu’aujourd’hui le droit ou le pouvoir
de
protester. Le vrai mythe de notre Police a été formulé par Kafka. Dan
1051
e droit ou le pouvoir de protester. Le vrai mythe
de
notre Police a été formulé par Kafka. Dans son Procès, il nous conte
1052
Kafka. Dans son Procès, il nous conte l’histoire
d’
un employé de banque qui se voit inculpé d’une faute indéterminée, et
1053
son Procès, il nous conte l’histoire d’un employé
de
banque qui se voit inculpé d’une faute indéterminée, et qui s’épuise
1054
stoire d’un employé de banque qui se voit inculpé
d’
une faute indéterminée, et qui s’épuise en vains efforts pour atteindr
1055
le condamne à mort, sans recours, malgré l’appui
d’
un avocat marron, sorte de prêtre, qui prétend connaître le Juge et n’
1056
recours, malgré l’appui d’un avocat marron, sorte
de
prêtre, qui prétend connaître le Juge et n’est pas mieux en cour que
1057
client. Je dis que le diable a toutes les chances
de
mener le jeu partout où le sens s’évanouit, quand l’organisation perd
1058
s que personne n’y puisse plus rien. Présentation
de
la police moderne. 31. Le démon de la Sécurité Lorsque l’homme
1059
ésentation de la police moderne. 31. Le démon
de
la Sécurité Lorsque l’homme se trouve confronté avec un des périls
1060
me se trouve confronté avec un des périls normaux
de
l’existence, deux possibilités s’offrent à lui : ou bien il cherche à
1061
tre choix est fait dès longtemps : c’est le désir
de
supprimer le péril, plutôt que de le dominer, qui définit l’attitude
1062
c’est le désir de supprimer le péril, plutôt que
de
le dominer, qui définit l’attitude bourgeoise et l’esprit général de
1063
définit l’attitude bourgeoise et l’esprit général
de
nos démocraties. À les prendre dans leur ensemble et leur intention
1064
fessionnelle (assurances) ; soit dans l’éducation
de
la jeunesse ; soit dans la médecine ; soit dans la politique internat
1065
n de pousser à fond une expérience sans précédent
d’
asepsie généralisée et d’extinction des risques avant terme. Morale de
1066
xpérience sans précédent d’asepsie généralisée et
d’
extinction des risques avant terme. Morale des assurances-contre-tous-
1067
vise à autre chose qu’à la suppression méthodique
de
toute morale poétique, embrassant à la fois le risque et la confiance
1068
ispirituelle, car aucune ne s’est tant préoccupée
d’
éliminer le mal à moindre prix, au lieu de le compenser par un bien su
1069
par un bien supérieur. Nous avons oublié la règle
d’
or des stratèges, qui veut que la meilleure défense soit dans l’attaqu
1070
les magies protectrices, négligeant les forces !
de
l’âme, nous cherchons le salut dans la fuite. L’assurance-vie remplac
1071
la mort. J’imagine volontiers le diable en agent
d’
assurances générales. Il comprend tout et il a tout prévu. Il connaît
1072
l connaît l’homme dans sa vulgarité, et se flatte
de
savoir l’y réduire. Il vous explique votre Bien. Il sait mieux que vo
1073
, statistiques. Il vous promet enfin ce pur néant
de
l’âme : santé — bonheur — prospérité — jovialité et vérité viagère. V
1074
us. Ou si peu. Sans rien perdre… 32. Le démon
de
l’Insignifiance … neither having the accent of Christians, nor the
1075
eur, gouverner devient un plaisir, qu’il s’agisse
de
conduire un peuple ou nos passions. Sur cette croyance repose le mond
1076
on. Tout cela peut diminuer la somme des malheurs
de
l’humanité, mais non pas y éteindre le mal, si le mal est au premier
1077
e le mal, si le mal est au premier chef l’absence
de
vertus créatrices. Dans une passion violente et dans un conflit décla
1078
Grand Vizir qui rencontre la Mort dans un jardin
de
Téhéran. Elle lui fait un petit signe énigmatique. Épouvanté, le Vizi
1079
achant qu’il se révèle trop aisément à l’occasion
de
nos malheurs, de nos crimes et de nos drames, il préfère gouverner so
1080
évèle trop aisément à l’occasion de nos malheurs,
de
nos crimes et de nos drames, il préfère gouverner sous le couvert de
1081
nt à l’occasion de nos malheurs, de nos crimes et
de
nos drames, il préfère gouverner sous le couvert de la correction des
1082
nos drames, il préfère gouverner sous le couvert
de
la correction des manières. Je ne plaide pas ici pour le manque de te
1083
des manières. Je ne plaide pas ici pour le manque
de
tenue, ni pour le culte des « belles brutes », ni pour la guerre. Mai
1084
correction des mœurs devient un idéal, la verdeur
de
langage passe pour une inconvenance, la franchise des passions fait q
1085
nce, la franchise des passions fait qu’on appelle
d’
urgence un spécialiste des troubles nerveux. On ne pense plus qu’à évi
1086
ense plus qu’à éviter les conflits qui poseraient
de
vraies questions, les éclats qui rendraient manifestes la vérité du c
1087
qu’elle paye un prix exorbitant : la saveur même
de
la vie. Nous avons institué le culte de ce qui ne tire pas à conséque
1088
veur même de la vie. Nous avons institué le culte
de
ce qui ne tire pas à conséquence. Il règne sur nos mœurs et sur notre
1089
nion publique16. Nous oublions que la conséquence
de
ce culte n’est autre que l’insignifiance de nos vertus autant que de
1090
uence de ce culte n’est autre que l’insignifiance
de
nos vertus autant que de nos vices. Or les vertus insignifiantes, pri
1091
utre que l’insignifiance de nos vertus autant que
de
nos vices. Or les vertus insignifiantes, privées de sens et qui n’ont
1092
nos vices. Or les vertus insignifiantes, privées
de
sens et qui n’ont l’air de rien, sont en réalité le Royaume du Rien.
1093
nsignifiantes, privées de sens et qui n’ont l’air
de
rien, sont en réalité le Royaume du Rien. Elles ne s’acquièrent qu’au
1094
encore le mesurer ?) Et l’on n’en peut donner que
de
petits exemples, qui paraîtront naturellement insignifiants… Quand vo
1095
en gentille dame et ses charmants amis l’écoutent
d’
une oreille, poliment, disant lorsque c’est terminé : « So lovely, rea
1096
nt lorsque c’est terminé : « So lovely, really… »
d’
un air indifférent, cela n’est rien, vous vous êtes trompé, servez un
1097
trompé, servez un drink. Mais il est juste aussi
de
remarquer qu’une qualité vient de se perdre quelque part. Ces gens ne
1098
l leur manque simplement un sens. Mais l’entropie
de
l’univers augmente : or il n’est rien de plus catastrophique au monde
1099
s « passez » là, vous passerez aussi avec l’image
de
ce monde. Mais si vous acceptez le ridicule de ne point passer sur un
1100
ge de ce monde. Mais si vous acceptez le ridicule
de
ne point passer sur une si petite chose — un rien vraiment — vous y g
1101
en vraiment — vous y gagnez peut-être votre droit
de
cité dans l’univers paradisiaque dont un Bach vous aura donné le resp
1102
essentiment qui suffit à vous rendez contemporain
de
son éternité. Le diable est insignifiant, au sens propre du mot, et s
1103
sa plus grande victoire dans notre époque, c’est
d’
avoir privé de sens presque tous nos usages, coutumes et costumes, art
1104
e victoire dans notre époque, c’est d’avoir privé
de
sens presque tous nos usages, coutumes et costumes, arts, travaux et
1105
n moderne en lui demandant quel peut être le sens
de
son nom, des formes et des couleurs dont il s’entoure, des phrases qu
1106
s dont il s’entoure, des phrases qu’il répète, ou
de
l’argent qu’il gagne. On l’étonne par la seule supposition que toutes
1107
nsemble spirituel. Je dis que tout ce qui n’a pas
de
sens appartient de droit au démon ; que tout ce qui porte un sens com
1108
Je dis que tout ce qui n’a pas de sens appartient
de
droit au démon ; que tout ce qui porte un sens comporte quelque bien,
1109
hés. Quant à l’absurde pur17, c’est une catégorie
de
la foi ou du mal absolu. Ce qui paraît absurde aux yeux de la raison,
1110
raison, la foi l’accepte comme étant la position
d’
une réalité éternelle dans le temps : ainsi l’Incarnation et le miracl
1111
le diable, l’absurde est au contraire la fixation
d’
une réalité temporelle dans l’infini ou dans l’inquestionnable : l’idé
1112
dans l’infini ou dans l’inquestionnable : l’idée
de
succès en soi, de puissance ou de richesse en soi. L’Enfer est là. Ma
1113
dans l’inquestionnable : l’idée de succès en soi,
de
puissance ou de richesse en soi. L’Enfer est là. Mais je voudrais don
1114
nnable : l’idée de succès en soi, de puissance ou
de
richesse en soi. L’Enfer est là. Mais je voudrais donner un autre exe
1115
s je voudrais donner un autre exemple des méfaits
de
l’insignifiance, créatrice de névroses dans la vie d’aujourd’hui.
1116
exemple des méfaits de l’insignifiance, créatrice
de
névroses dans la vie d’aujourd’hui. 33. Brève histoire d’un coupl
1117
’insignifiance, créatrice de névroses dans la vie
d’
aujourd’hui. 33. Brève histoire d’un couple correct Monsieur et
1118
dans la vie d’aujourd’hui. 33. Brève histoire
d’
un couple correct Monsieur et Madame sont parfaitement corrects et
1119
Scrupuleusement, ils entretiennent une atmosphère
de
paix dans le foyer. On n’injurie jamais les bonnes, d’ailleurs elles
1120
rrait leur donner des complexes. Jamais une scène
de
ménage à table, jamais une faute de tenue, un mot plus haut qu’un aut
1121
devant les enfants. Non, docteur, ne cherchez pas
de
ce côté. Si ma petite Mary est folle, vraiment, ce n’est pas qu’elle
1122
est folle, vraiment, ce n’est pas qu’elle souffre
de
l’atmosphère familiale. Mais je vais vous dire : du côté de mon mari,
1123
pas toujours été très équilibré. Entre nous, une
de
ses tantes est morte à l’asile. Cela se sent parfois chez lui. Hier
1124
mbre, il entre en fureur parce que je lui demande
d’
éteindre une lampe qui me faisait mal aux yeux. Il la lance à terre et
1125
mal aux yeux. Il la lance à terre et me fait une
de
ces scènes ! J’ai pleuré toute la nuit, sur un canapé du salon… » — M
1126
tite Mary n’est pas folle, mais comment les nerfs
d’
un enfant supporteraient-ils le bruit et la fureur qui se déchaînent d
1127
sauf quand une lampe s’éteint ? 34. Le démon
de
la popularité De toutes les créatures qui aient jamais existé, le
1128
e s’éteint ? 34. Le démon de la popularité
De
toutes les créatures qui aient jamais existé, le diable est celle qui
1129
uoi la démocratie moderne est spécialement tentée
d’
écouter ses conseils. Le pouvoir d’un régime fondé sur le grand nombre
1130
alement tentée d’écouter ses conseils. Le pouvoir
d’
un régime fondé sur le grand nombre dépend des caprices féminins de l’
1131
sur le grand nombre dépend des caprices féminins
de
l’Opinion. Il en résulte fatalement que le problème majeur des dirige
1132
lement que le problème majeur des dirigeants sera
de
rendre populaires, plutôt que justes ou efficaces, les mesures gouver
1133
ces, les mesures gouvernementales. Cette tendance
de
la vie politique à son tour va contaminer la vie privée, comme il arr
1134
e quel régime. C’est ainsi que jadis les coutumes
de
la Cour réglaient la politesse à tous les degrés de la société. Elles
1135
la Cour réglaient la politesse à tous les degrés
de
la société. Elles offraient des modèles dans l’art de courtiser un su
1136
a société. Elles offraient des modèles dans l’art
de
courtiser un supérieur, de dominer un inférieur, et d’observer partou
1137
des modèles dans l’art de courtiser un supérieur,
de
dominer un inférieur, et d’observer partout les distances convenables
1138
urtiser un supérieur, de dominer un inférieur, et
d’
observer partout les distances convenables. La coutume de nos parlemen
1139
ver partout les distances convenables. La coutume
de
nos parlements, de nos partis et de leurs chefs, paraît aujourd’hui t
1140
tances convenables. La coutume de nos parlements,
de
nos partis et de leurs chefs, paraît aujourd’hui toute contraire : il
1141
s. La coutume de nos parlements, de nos partis et
de
leurs chefs, paraît aujourd’hui toute contraire : il s’agit de courti
1142
s, paraît aujourd’hui toute contraire : il s’agit
de
courtiser les masses, puisque c’est elles qui donnent le pouvoir ; de
1143
ses, puisque c’est elles qui donnent le pouvoir ;
de
se concilier les inférieurs en les flattant, puisqu’il n’est plus per
1144
eurs en les flattant, puisqu’il n’est plus permis
de
les dominer ; enfin d’appeler par leur prénom le plus grand nombre po
1145
uisqu’il n’est plus permis de les dominer ; enfin
d’
appeler par leur prénom le plus grand nombre possible d’électeurs, de
1146
ler par leur prénom le plus grand nombre possible
d’
électeurs, de clients et de chefs de service, la marque du prestige dé
1147
prénom le plus grand nombre possible d’électeurs,
de
clients et de chefs de service, la marque du prestige démocratique n’
1148
grand nombre possible d’électeurs, de clients et
de
chefs de service, la marque du prestige démocratique n’étant plus la
1149
mbre possible d’électeurs, de clients et de chefs
de
service, la marque du prestige démocratique n’étant plus la hauteur d
1150
du prestige démocratique n’étant plus la hauteur
d’
allure, mais au contraire la familiarité. Il serait amusant de compare
1151
is au contraire la familiarité. Il serait amusant
de
comparer sous ce rapport le fameux livre de Mr. Dale Carnegie et l’Ho
1152
usant de comparer sous ce rapport le fameux livre
de
Mr. Dale Carnegie et l’Homme de Cour de Balthazar Gracian. Ce jésuite
1153
t le fameux livre de Mr. Dale Carnegie et l’Homme
de
Cour de Balthazar Gracian. Ce jésuite avait mis en manuel les maximes
1154
eux livre de Mr. Dale Carnegie et l’Homme de Cour
de
Balthazar Gracian. Ce jésuite avait mis en manuel les maximes de l’as
1155
acian. Ce jésuite avait mis en manuel les maximes
de
l’astuce sociale sous la monarchie absolue. Mr. Dale Carnegie nous ap
1156
nous apprend pour sa part comment gagner non pas
de
vrais amis, bien sûr, mais des clients, des électeurs possibles, des
1157
utes fins utiles : c’est une version démocratique
de
l’Homme de Cour, que l’on pourrait intituler l’Homme de l’Antichambre
1158
tiles : c’est une version démocratique de l’Homme
de
Cour, que l’on pourrait intituler l’Homme de l’Antichambre. Notons d’
1159
omme de Cour, que l’on pourrait intituler l’Homme
de
l’Antichambre. Notons d’abord que du jésuite à notre expert en popula
1160
bord que du jésuite à notre expert en popularité,
d’
immenses progrès semblent s’être opérés au point de vue de la moralité
1161
es progrès semblent s’être opérés au point de vue
de
la moralité. Gracian vous apprend à tromper, à ruser, à mentir, à tri
1162
r, à tricher, et tous ces procédés lui paraissent
de
bonne guerre s’ils vous assurent le prestige personnel et la faveur i
1163
éressée des grands. Mr. Carnegie au contraire est
d’
une irréprochable correction morale. Il estime en effet que la Règle d
1164
orrection morale. Il estime en effet que la Règle
d’
or des relations humaines, dans tous les ordres, fut donnée par cette
1165
dans tous les ordres, fut donnée par cette phrase
de
l’Évangile : « Faites aux autres ce que vous voudriez qu’ils vous fis
1166
vous fissent ». Exemple : Le plus profond besoin
de
l’homme, selon le professeur Dewey, étant de se sentir important, ne
1167
soin de l’homme, selon le professeur Dewey, étant
de
se sentir important, ne perdez pas une occasion de faire sentir à vot
1168
e se sentir important, ne perdez pas une occasion
de
faire sentir à votre prochain toute l’importance que vous lui accorde
1169
. C’est le bon sens même. Mais c’est le contraire
de
l’Évangile, qui voulait faire de nous des humbles et nous donner l’es
1170
est le contraire de l’Évangile, qui voulait faire
de
nous des humbles et nous donner l’esprit de Pauvreté. L’idéal de Mr.
1171
faire de nous des humbles et nous donner l’esprit
de
Pauvreté. L’idéal de Mr. Carnegie, c’est un bavard perpétuellement so
1172
bles et nous donner l’esprit de Pauvreté. L’idéal
de
Mr. Carnegie, c’est un bavard perpétuellement souriant, flatteur pour
1173
tteur pour qu’on le flatte, rompu aux stratagèmes
de
la fausse modestie la plus intéressée et d’une sympathie méthodique i
1174
gèmes de la fausse modestie la plus intéressée et
d’
une sympathie méthodique inlassablement déversée sur tout voisin qui p
1175
préceptes du Christ. Il avait la franchise féroce
de
l’immoralité donnée pour telle, respectant les catégories et défiant
1176
par l’affront. Il gardait, dans le vice, un style
de
l’âme. Le contraste qu’on vient d’esquisser peut nous faire mesurer t
1177
vice, un style de l’âme. Le contraste qu’on vient
d’
esquisser peut nous faire mesurer toute la déperdition d’énergie propr
1178
sser peut nous faire mesurer toute la déperdition
d’
énergie proprement spirituelle que représente notre « progrès moral ».
1179
affaires, sous le prétexte allégué et je cite, «
d’
entretenir des contacts faciles et agréables ». Serait-ce que j’ai l’e
1180
antisocial, et nuisible aux affaires ? Que le sel
de
la terre est malsain ? Et que la sagesse démocratique se résume dans
1181
r le monde — et perdre son âme ? 35. Paradoxe
de
la démocratie Avec beaucoup d’intelligence, les totalitaires ont m
1182
35. Paradoxe de la démocratie Avec beaucoup
d’
intelligence, les totalitaires ont mis la bêtise de leur côté. Sous le
1183
’intelligence, les totalitaires ont mis la bêtise
de
leur côté. Sous leur régime, les imbéciles n’ont rien à perdre. Les â
1184
t, le régime totalitaire n’est que la forme basse
de
la démocratie. Déchaînez parmi nous les démons que je viens de décrir
1185
es régimes totalitaires que par un certain manque
de
rigueur, un désordre plus apparent, une phraséologie moins entraînant
1186
’est, comme la santé, qu’une utopie. Je l’imagine
de
la manière suivante : l’intelligence n’aurait rien à y perdre. Les âm
1187
duquées, les âmes moyennes s’y sentiraient gênées
d’
être moyennes et de faire nombre. On y verrait des élites dures, aux d
1188
oyennes s’y sentiraient gênées d’être moyennes et
de
faire nombre. On y verrait des élites dures, aux disciplines prestigi
1189
mme complet, si l’on y réfléchit : il serait aisé
d’
en développer les conséquences sur tous les plans, pour l’économie, la
1190
Revenons au diable. 36. La cinquième colonne
de
tous les temps J’ai dit du mal de tout le monde, des totalitaires
1191
ième colonne de tous les temps J’ai dit du mal
de
tout le monde, des totalitaires et des démocrates, des autres, de nou
1192
, des totalitaires et des démocrates, des autres,
de
nous, et donc de moi aussi. Mais si le diable est partout, sa figure
1193
s et des démocrates, des autres, de nous, et donc
de
moi aussi. Mais si le diable est partout, sa figure se brouille. Et l
1194
ndre une image nette et facilement reconnaissable
de
la personne de Satan ? C’est que le diable, par nature, ne sera jamai
1195
nette et facilement reconnaissable de la personne
de
Satan ? C’est que le diable, par nature, ne sera jamais clairement et
1196
pour être à la fois juge et partie dans le procès
de
sa définition. Un être paradoxal par essence. Il existe, bien sûr, ma
1197
néant, ce qui souhaite secrètement la destruction
de
l’existence, — celle des autres ou la sienne propre. Sa qualité de n’
1198
celle des autres ou la sienne propre. Sa qualité
de
n’être pas ceci ou cela de positif lui donne une liberté indéfinie d’
1199
nne propre. Sa qualité de n’être pas ceci ou cela
de
positif lui donne une liberté indéfinie d’action, d’incognito et d’al
1200
u cela de positif lui donne une liberté indéfinie
d’
action, d’incognito et d’alibis à perte de vue. Vulgaire et séduisant,
1201
positif lui donne une liberté indéfinie d’action,
d’
incognito et d’alibis à perte de vue. Vulgaire et séduisant, pharisien
1202
ne une liberté indéfinie d’action, d’incognito et
d’
alibis à perte de vue. Vulgaire et séduisant, pharisien et voyou, hypo
1203
nt que le mal doit toujours être laid ; et il est
d’
une laideur irrésistiblement attirante aux yeux des désabusés ou des r
1204
otre raison. On sait assez que le procédé favori
de
la Cinquième Colonne consistait à semer la confusion dans le camp de
1205
onne consistait à semer la confusion dans le camp
de
l’adversaire en y répandant alternativement de vraies et de fausses n
1206
mp de l’adversaire en y répandant alternativement
de
vraies et de fausses nouvelles. Voilà le diable à l’œuvre dans nos vi
1207
saire en y répandant alternativement de vraies et
de
fausses nouvelles. Voilà le diable à l’œuvre dans nos vies : le maîtr
1208
aître du confusionnisme dirigé ! Hitler fut l’âme
de
la cinquième colonne du siècle, mais Satan reste l’essence même de la
1209
olonne du siècle, mais Satan reste l’essence même
de
la Cinquième Colonne au siècle des siècles. Enfin — et ceci doit me r
1210
re qui, lorsqu’une dénonciation le fait déguerpir
de
sa cachette, va se loger de préférence chez celui qui l’a dénoncé, et
1211
ion le fait déguerpir de sa cachette, va se loger
de
préférence chez celui qui l’a dénoncé, et qui se tient pour assuré da
1212
Expression empruntée à l’Évangile par une erreur
de
traduction. Le texte véritable ne dit pas « Paix sur la terre aux hom
1213
ritable ne dit pas « Paix sur la terre aux hommes
de
bonne volonté » mais « Paix sur la terre, et bonne volonté (de Dieu)
1214
nté » mais « Paix sur la terre, et bonne volonté (
de
Dieu) envers les hommes ». Ce qui est complètement différent. 12. Je
1215
ètement différent. 12. Je ne parle pas des héros
de
la guerre, mais de la paix. 13. Est-ce un si grand bien ? Pour le gr
1216
12. Je ne parle pas des héros de la guerre, mais
de
la paix. 13. Est-ce un si grand bien ? Pour le grand nombre, oui, pr
1217
. Je pense à Mein Kampf, aux deux premiers livres
de
Rauschning, à d’innombrables documentaires publiés sur les mœurs tota
1218
Kampf, aux deux premiers livres de Rauschning, à
d’
innombrables documentaires publiés sur les mœurs totalitaires. Notre i
1219
ité bourgeoise a été l’une des meilleures chances
d’
Hitler. 15. Dans sa tête on tient des banquets. 16. Celle-ci le comp
1220
seulement surent connaître le Christ dans le fils
de
Joseph, charpentier de village. Mais l’incognito et l’alibi du diable
1221
tre le Christ dans le fils de Joseph, charpentier
de
village. Mais l’incognito et l’alibi du diable sont exactement invers
1222
ble sont exactement inverses : c’est dans l’image
de
nos dieux qu’il va se dissimuler, au cœur même de nos idéaux et de no
1223
de nos dieux qu’il va se dissimuler, au cœur même
de
nos idéaux et de nos vérités trop humaines, dans les religions que no
1224
l va se dissimuler, au cœur même de nos idéaux et
de
nos vérités trop humaines, dans les religions que nous confabulons en
1225
dehors de la foi révélée. Le diable nous empêche
de
reconnaître Dieu dans Jésus-Christ, mais à l’inverse, il nous empêche
1226
s-Christ, mais à l’inverse, il nous empêche aussi
de
nous reconnaître dans nos idoles. Voici comment les hommes s’enchaîne
1227
Dieu » qui était le moi conscient ou inconscient
de
ses croyants. Une image de leur impérialisme, ou une compensation rêv
1228
nscient ou inconscient de ses croyants. Une image
de
leur impérialisme, ou une compensation rêvée de leurs défauts. Et ce
1229
e de leur impérialisme, ou une compensation rêvée
de
leurs défauts. Et ce fut le Dieu de la Raison pour les tempéraments r
1230
péraments rationalistes, le Dieu de l’Instinct et
de
la Passion pour les hypercivilisés, le Dieu du Succès pour les robust
1231
sé qu’en un nous. Et ces trois entités ont ceci
de
commun : elles ne sont responsables de rien devant personne, s’étant
1232
s ont ceci de commun : elles ne sont responsables
de
rien devant personne, s’étant faites elles-mêmes les critères de tout
1233
personne, s’étant faites elles-mêmes les critères
de
toute vérité purement humaine, et décrétant qu’il n’est plus d’autre
1234
é purement humaine, et décrétant qu’il n’est plus
d’
autre vérité. Or aux yeux de ceux qui les servent, l’homme n’existe qu
1235
obéissons, nous ne sommes donc plus responsables
de
nos actes, mais elles le sont à notre place. Et comme elles-mêmes n’o
1236
ace. Et comme elles-mêmes n’ont à répondre auprès
d’
aucune instance supérieure, il n’y a plus de responsabilité nulle part
1237
uprès d’aucune instance supérieure, il n’y a plus
de
responsabilité nulle part. Mais s’il apparaît, à l’inverse, que nous
1238
s avec l’entité divinisée — parce que nous sommes
d’
une autre race, d’une autre classe, ou d’une autre génération physique
1239
vinisée — parce que nous sommes d’une autre race,
d’
une autre classe, ou d’une autre génération physique et mentale que ce
1240
s sommes d’une autre race, d’une autre classe, ou
d’
une autre génération physique et mentale que celle qui détient le pouv
1241
urs évidemment méchants, que dans les sanctuaires
de
la foi qui devait mettre à genoux les dictateurs avant que les armées
1242
dans l’Église Un jour l’Église a été qualifiée
de
« Satan » par Jésus lui-même. Ce fut quelques minutes après sa fondat
1243
utes après sa fondation, et dans la personne même
de
celui sur lequel Jésus venait de la fonder : l’apôtre Pierre. Jésus a
1244
nt la parole, lui dit : Tu es heureux, Simon, pis
de
Jonas ; car ce ne sont pas la chair et le sang qui t’ont révélé cela,
1245
i est dans les deux » (Matthieu 16). Sur cet acte
de
foi, Jésus fonde l’Église : « Et moi, je te dis que tu es Pierre, et
1246
e premier pape se fait dire par Jésus : « Arrière
de
moi Satan ! Tu m’es en scandale ; car tes pensées ne sont pas les pen
1247
candale ; car tes pensées ne sont pas les pensées
de
Dieu mais celles des hommes. » Qu’est-il donc arrivé ? Comment cette
1248
t cette « pierre » sur qui l’Église vient à peine
d’
être posée est-elle déjà devenue pierre d’achoppement ? Pourquoi cet h
1249
à peine d’être posée est-elle déjà devenue pierre
d’
achoppement ? Pourquoi cet homme, auquel le Christ vient de dire qu’il
1250
, parle-t-il maintenant selon le diable ? Ce coup
de
théâtre, l’un des plus stupéfiants de l’Évangile et de la vie spiritu
1251
e ? Ce coup de théâtre, l’un des plus stupéfiants
de
l’Évangile et de la vie spirituelle, s’explique sans la moindre équiv
1252
éâtre, l’un des plus stupéfiants de l’Évangile et
de
la vie spirituelle, s’explique sans la moindre équivoque : Jésus aprè
1253
a pas ! » À peine fondée, l’Église en la personne
de
Pierre, son chef terrestre, a voulu s’assurer de son chef céleste afi
1254
de Pierre, son chef terrestre, a voulu s’assurer
de
son chef céleste afin de garantir l’institution nouvelle contre les r
1255
arantir l’institution nouvelle contre les risques
de
l’esprit, tout en se prévalant déjà d’un Nom qu’elle renie pourtant d
1256
es risques de l’esprit, tout en se prévalant déjà
d’
un Nom qu’elle renie pourtant du même souffle : « À Dieu ne plaise ! »
1257
il plaisait à Dieu… En quelques lignes, l’auteur
de
l’Évangile a décrit toute l’histoire de l’Église. À chaque instant da
1258
l’auteur de l’Évangile a décrit toute l’histoire
de
l’Église. À chaque instant dans tous les siècles, le même drame va se
1259
t l’Église. (Tout homme qui croit, dans l’instant
de
la foi devient Pierre à son tour, et fondement de l’Église.) Mais lor
1260
de la foi devient Pierre à son tour, et fondement
de
l’Église.) Mais lorsque Pierre se croit le possesseur du bien dont il
1261
plaît, non pas comme il plaisait au Créateur même
de
ce bien. Il ne va pas courir des risques fous, il a déjà sa belle pru
1262
s clés). La justice et le droit, non pas la folie
de
l’esprit ni les extravagances de l’amour. La vie certes, mais non la
1263
non pas la folie de l’esprit ni les extravagances
de
l’amour. La vie certes, mais non la mort dont elle naîtrait. Le résul
1264
ultat, mais sans la condition… Car notre rôle est
de
durer, et nos responsabilités sont écrasantes, et nous n’allons pas j
1265
é avec le trésor spirituel que Dieu nous a chargé
d’
administrer, nous son indigne serviteur… C’est Satan qui a soufflé le
1266
e serviteur… C’est Satan qui a soufflé le conseil
de
prudence. Car vouloir conserver ce bien, c’est le sûr moyen de le per
1267
Car vouloir conserver ce bien, c’est le sûr moyen
de
le perdre. Accomplir sagement cette mission de folie, c’est le sûr mo
1268
en de le perdre. Accomplir sagement cette mission
de
folie, c’est le sûr moyen de la trahir. Ce n’était pas la vie du mond
1269
gement cette mission de folie, c’est le sûr moyen
de
la trahir. Ce n’était pas la vie du monde, ni l’ordre ou la justice,
1270
ique du sacrifice, le sens du risque spirituel et
de
la catastrophe salutaire. Si Jésus n’est pas supplicié, il ne ressusc
1271
lus. L’Église n’aura plus rien à dire, le pouvoir
de
Pierre sera vide. L’Église est posée dans l’Histoire pour y représent
1272
résenter le permanent rappel au drame fondamental
de
cosmos et de l’esprit : il faut mourir pour naître de nouveau. Étrang
1273
ermanent rappel au drame fondamental de cosmos et
de
l’esprit : il faut mourir pour naître de nouveau. Étrange institution
1274
nouveau. Étrange institution dont le seul but est
de
planter au sein du monde un principe de bouleversement, de scandale e
1275
l but est de planter au sein du monde un principe
de
bouleversement, de scandale et de tragédie ! Car tout le sens du chri
1276
r au sein du monde un principe de bouleversement,
de
scandale et de tragédie ! Car tout le sens du christianisme tient en
1277
nde un principe de bouleversement, de scandale et
de
tragédie ! Car tout le sens du christianisme tient en trois actes ess
1278
en pureté. Ce drame est figuré dans le sacrement
de
la communion. Il est rappelé dans le Credo. Mais peut-on dire qu’il e
1279
r ensemble ? En fait, nous les voyons préoccupées
de
se maintenir dans le monde, au lieu d’y allumer des foyers éclatants
1280
e monde, au lieu d’y allumer des foyers éclatants
de
purification. Elles sont devenues des forces de conservation, s’oppos
1281
s de purification. Elles sont devenues des forces
de
conservation, s’opposant par leur esprit même au processus de mort et
1282
ion, s’opposant par leur esprit même au processus
de
mort et de résurrection qu’elles avaient pour mission d’animer. Or da
1283
sant par leur esprit même au processus de mort et
de
résurrection qu’elles avaient pour mission d’animer. Or dans toute la
1284
et de résurrection qu’elles avaient pour mission
d’
animer. Or dans toute la mesure où une Église s’en tient à de pieuses
1285
r dans toute la mesure où une Église s’en tient à
de
pieuses prudences, sous prétexte de sauvegarder quelques « valeurs sp
1286
ais sur le Pierre auquel Jésus disait : « Arrière
de
moi Satan ! Car tu m’es en scandale. » 40. Le diable théologien
1287
théologien Mais tout cela, pensera-t-on, c’est
de
la théologie. Je connais peu d’occupations plus décriées dans notre s
1288
nsera-t-on, c’est de la théologie. Je connais peu
d’
occupations plus décriées dans notre siècle, peu de mots qui gardent m
1289
dans notre siècle, peu de mots qui gardent moins
d’
appel pour nos contemporains, et je ne parle pas des incultes mais de
1290
ntemporains, et je ne parle pas des incultes mais
de
l’élite intellectuelle. Vous rencontrez de grands savants, des philos
1291
s mais de l’élite intellectuelle. Vous rencontrez
de
grands savants, des philosophes, des moralistes, des écrivains connus
1292
s le monde entier : neuf fois sur dix ces maîtres
de
la pensée moderne vous avouent sans la moindre rougeur, légèrement ét
1293
ouent sans la moindre rougeur, légèrement étonnés
de
la question, qu’ils n’ont pas lu de leur vie un seul traité théologiq
1294
ement étonnés de la question, qu’ils n’ont pas lu
de
leur vie un seul traité théologique. On les étonnerait davantage en l
1295
ent pas bien le rapport. Je pense qu’il s’agit là
d’
une attitude rétrograde, plus inquiétante pour la culture que les méfa
1296
e que les méfaits des hordes fascistes. La pensée
de
l’Occident et son vocabulaire sont nés des grands débats théologiques
1297
nt nés des grands débats théologiques aux siècles
de
la primitive Église. Notre musique, notre sculpture, notre peinture s
1298
et Marx, qui n’aient été, à l’origine, des prises
de
position théologiques. Ignorer la théologie, c’est rompre avec la tra
1299
e, c’est rompre avec la tradition la plus féconde
de
la culture occidentale. C’est donc se condamner à refaire sans le sav
1300
couvertes spirituelles mises en forme depuis plus
de
quinze cents ans par les Pères de l’Église et les grands hérétiques.
1301
et les grands hérétiques. La naïveté théologique
de
notre siècle est l’un des avantages les plus considérables de la nouv
1302
cle est l’un des avantages les plus considérables
de
la nouvelle barbarie. Je ne puis la comparer qu’à une espèce de carie
1303
barbarie. Je ne puis la comparer qu’à une espèce
de
carie de l’intelligence, qui nous empêche de mastiquer et de digérer
1304
. Je ne puis la comparer qu’à une espèce de carie
de
l’intelligence, qui nous empêche de mastiquer et de digérer nos expér
1305
pèce de carie de l’intelligence, qui nous empêche
de
mastiquer et de digérer nos expériences spirituelles. Tout porte à cr
1306
l’intelligence, qui nous empêche de mastiquer et
de
digérer nos expériences spirituelles. Tout porte à croire que le diab
1307
utres temps, il pouvait nous surprendre au détour
d’
un subtil argument sur la grâce, qu’il opposait à la loi, par exemple.
1308
opposait à la loi, par exemple. Mais un peu plus
de
belle et bonne théologie nous sauvait bientôt du sophisme, tandis qu’
1309
s même l’existence du problème. Un certain nombre
de
tendances théologiques traditionnelles sont très probablement d’origi
1310
éologiques traditionnelles sont très probablement
d’
origine satanique : le pélagianisme, par exemple, et les doctrines qu’
1311
les doctrines qu’on pourrait baptiser théologies
de
l’eritis sicut dii, créées par quelques-uns des mystiques les plus gr
1312
dans l’époque présente, qui les prend pour autant
d’
innovations « excitantes » de l’avant-garde. Mais sans doute sont-elle
1313
es prend pour autant d’innovations « excitantes »
de
l’avant-garde. Mais sans doute sont-elles moins déprimantes que le pr
1314
doute sont-elles moins déprimantes que le préjugé
de
l’homme moderne, qui ne sait rien de la théologie, croit pouvoir s’en
1315
e le préjugé de l’homme moderne, qui ne sait rien
de
la théologie, croit pouvoir s’en passer, mais ne se prive point d’en
1316
croit pouvoir s’en passer, mais ne se prive point
d’
en faire sans le savoir, et de la pire, quand il « adore Dieu dans la
1317
s ne se prive point d’en faire sans le savoir, et
de
la pire, quand il « adore Dieu dans la forêt mieux qu’à l’église », q
1318
a raison » (aveuglément), ou quand il se contente
de
« faire du bien »… 41. Le diable et le philanthrope Un jour un
1319
me Avenue. Il avait la tête et les poches pleines
de
projets philanthropiques, propres à réformer l’humanité au-delà de to
1320
thropiques, propres à réformer l’humanité au-delà
de
tout ce que je désirerais même imaginer. Il venait d’allumer un cigar
1321
out ce que je désirerais même imaginer. Il venait
d’
allumer un cigare de trente cents, dont la fumée montait comme un ence
1322
rais même imaginer. Il venait d’allumer un cigare
de
trente cents, dont la fumée montait comme un encens et devait être en
1323
mètres, derrière lui, suivaient le diable et l’un
de
ses compères. Ils observaient le Philanthrope, d’un œil critique. Un
1324
de ses compères. Ils observaient le Philanthrope,
d’
un œil critique. Un pauvre homme l’arrêta pour lui demander une cigare
1325
pour lui demander une cigarette, dans un anglais
de
réfugié. Le Philanthrope sans hésiter lui remit un quarter, et poursu
1326
plendissait comme un sou neuf. « Tu n’as pas peur
de
lui ? dit le compère au diable, il m’a l’air terriblement bon ! Et se
1327
épondit rien, il souriait, tout en lisant un bout
de
papier qu’il venait de ramasser sur le trottoir. Après quelques insta
1328
très bien ? Entre les gens du monde et le Prince
de
ce monde, les mots suggèrent, dans presque toutes nos langues, certai
1329
ré peut-être par les traditionnels avertissements
de
la chaire chrétienne, a toujours vu dans la mondanité quelque chose d
1330
ne, a toujours vu dans la mondanité quelque chose
de
vaguement satanique. Il imaginerait volontiers un diable en cravate b
1331
que l’on peut penser aussi des gens du monde, et
de
la sagesse mondaine en général. Elle a son charme et son utilité ; ma
1332
t vieille, elle est trop avertie, elle offre trop
de
recettes éprouvées : elle finit par ne plus croire au bien, ni au sér
1333
te insondable ruse des cœurs purs qui leur permet
de
passer au travers des cercles vicieux de la raison et de l’égoïsme «
1334
r permet de passer au travers des cercles vicieux
de
la raison et de l’égoïsme « bien compris ». La fonction normale de la
1335
er au travers des cercles vicieux de la raison et
de
l’égoïsme « bien compris ». La fonction normale de la vie mondaine se
1336
e l’égoïsme « bien compris ». La fonction normale
de
la vie mondaine serait de maintenir et d’illustrer un certain nombre
1337
». La fonction normale de la vie mondaine serait
de
maintenir et d’illustrer un certain nombre de devises d’élégance mora
1338
normale de la vie mondaine serait de maintenir et
d’
illustrer un certain nombre de devises d’élégance morale et de sagesse
1339
ait de maintenir et d’illustrer un certain nombre
de
devises d’élégance morale et de sagesse pratique. Il n’y a rien là de
1340
tenir et d’illustrer un certain nombre de devises
d’
élégance morale et de sagesse pratique. Il n’y a rien là de diabolique
1341
un certain nombre de devises d’élégance morale et
de
sagesse pratique. Il n’y a rien là de diabolique, tout au contraire.
1342
e morale et de sagesse pratique. Il n’y a rien là
de
diabolique, tout au contraire. Le jeu mondain, s’il est bien joué, mé
1343
Le jeu mondain, s’il est bien joué, ménage autant
de
liberté qu’il ne suppose, dit-on, d’hypocrisie. Il a le charme reposa
1344
énage autant de liberté qu’il ne suppose, dit-on,
d’
hypocrisie. Il a le charme reposant des formes fixes. Mais le mondain
1345
s le mondain qui n’est que cela inspire une sorte
d’
effroi furtif, révélateur d’une présence perverse au sein même de l’in
1346
ela inspire une sorte d’effroi furtif, révélateur
d’
une présence perverse au sein même de l’insignifiance. L’exactitude im
1347
, révélateur d’une présence perverse au sein même
de
l’insignifiance. L’exactitude impitoyable de ses jugements, qui ne po
1348
même de l’insignifiance. L’exactitude impitoyable
de
ses jugements, qui ne portent d’ailleurs que sur les apparences ; sa
1349
t d’ailleurs que sur les apparences ; sa capacité
d’
éliminer froidement ce qui n’est pas conforme aux goûts appris ; sa pr
1350
ris ; sa propension presque maniaque à n’attacher
de
l’importance qu’à un détail fortuit dans un être ou une œuvre ; tous
1351
tous ces traits qui pourraient dénoter l’exigence
d’
un artiste véritable, prennent soudain quelque chose de satanique lors
1352
artiste véritable, prennent soudain quelque chose
de
satanique lorsque l’on s’aperçoit de la stérilité du personnage, et d
1353
uelque chose de satanique lorsque l’on s’aperçoit
de
la stérilité du personnage, et des effets stérilisants qu’entraîne sa
1354
ation. Ce n’est pas le goût ni même le pédantisme
de
la forme qui est satanique, c’est le goût de la forme imitée. Le mili
1355
isme de la forme qui est satanique, c’est le goût
de
la forme imitée. Le milieu mondain le plus suavement correct et moral
1356
re préféré par le diable à ces milieux bohèmes et
de
mœurs relâchées qui se croiraient volontiers damnés. C’est, je crois,
1357
nde le connaît. Mr. Time croit que le temps c’est
de
l’argent. Or il gagne beaucoup d’argent et pourtant il n’a jamais le
1358
le temps c’est de l’argent. Or il gagne beaucoup
d’
argent et pourtant il n’a jamais le temps. Serait-ce qu’il n’a de temp
1359
rtant il n’a jamais le temps. Serait-ce qu’il n’a
de
temps que pour l’argent, ce Mr. Time ? Ou bien la réciproque du fameu
1360
ains prennent beaucoup de temps pour faire un peu
d’
argent, tandis que d’autres font beaucoup d’argent en un rien de temps
1361
n peu d’argent, tandis que d’autres font beaucoup
d’
argent en un rien de temps. Peu nous importe. Ce qui est frappant, c’e
1362
is que d’autres font beaucoup d’argent en un rien
de
temps. Peu nous importe. Ce qui est frappant, c’est que Mr. Time peut
1363
u contraire, ils ont tout le temps. Tout le temps
de
n’avoir pas d’argent ; ou d’en attendre ; et de n’en plus attendre, f
1364
s ont tout le temps. Tout le temps de n’avoir pas
d’
argent ; ou d’en attendre ; et de n’en plus attendre, finalement. Peut
1365
temps. Tout le temps de n’avoir pas d’argent ; ou
d’
en attendre ; et de n’en plus attendre, finalement. Peut-être à ce mom
1366
s de n’avoir pas d’argent ; ou d’en attendre ; et
de
n’en plus attendre, finalement. Peut-être à ce moment-là découvrent-i
1367
oment-là découvrent-ils quelque chose qui n’a pas
de
prix ? Mr. Time ne le verrait même pas, à supposer qu’on le lui montr
1368
u’on le lui montre du doigt, car il faut le temps
de
bien regarder ces choses pour qu’elles existent. Mr. Time n’aura jama
1369
à l’Éternité. 44. Le diable auteur « Point
d’
œuvre sans la collaboration du démon », dit André Gide, l’un des rares
1370
t au diable et qui en parlent bien. La discussion
de
cette sentence inconfortable ne paraît que trop indiquée dans un livr
1371
ée dans un livre qui, plus que tout autre, menace
d’
impliquer l’active complicité de son modèle. Jakob Boehme raconte qu’o
1372
out autre, menace d’impliquer l’active complicité
de
son modèle. Jakob Boehme raconte qu’on demandait à Satan : Pourquoi e
1373
éniale si nous considérons les divers sens du nom
d’
auteur. L’Auteur de toutes choses est leur autorité. Il s’autorise à
1374
dérons les divers sens du nom d’auteur. L’Auteur
de
toutes choses est leur autorité. Il s’autorise à l’infini dans Sa Cré
1375
i-même sa grandeur « et l’étendue célèbre l’œuvre
de
ses mains ». Le diable a voulu faire aussi son propre Ouvrage. Mais i
1376
est là pour les guider. Et comment faire la part
de
son incitation ? Tout écrivain digne du nom, tout créateur en général
1377
hoisissant tel mot, tel rythme ou tel accent ; et
de
quel insondable imbroglio cette petite phrase toute claire en apparen
1378
fallu pour polir un galet…) En vérité, la volonté
de
création, le besoin d’écrire, simplement, coïncide en sa profondeur a
1379
et…) En vérité, la volonté de création, le besoin
d’
écrire, simplement, coïncide en sa profondeur avec la tentation lucifé
1380
es meilleurs se voient tentés plus que les autres
d’
accepter les conseils de ce génial Souffleur. « C’est avec les beaux s
1381
entés plus que les autres d’accepter les conseils
de
ce génial Souffleur. « C’est avec les beaux sentiments qu’on fait de
1382
eur. « C’est avec les beaux sentiments qu’on fait
de
la mauvaise littérature », dit encore Gide. Et William Blake estimait
1383
l’on apporte à son appui l’exemple un peu facile
d’
innombrables ouvrages édifiants. Non, ce n’est pas la vraie beauté de
1384
fausse beauté (donc leur laideur réelle) qui fait
de
la mauvaise littérature. Mais voilà bien la misère du vieux monde. Au
1385
sion. Nous ne savions plus concevoir et illustrer
de
vrais beaux sentiments, de vrais types de vie haute, de vrais idéaux
1386
concevoir et illustrer de vrais beaux sentiments,
de
vrais types de vie haute, de vrais idéaux qui propagent une énergie,
1387
lustrer de vrais beaux sentiments, de vrais types
de
vie haute, de vrais idéaux qui propagent une énergie, une force d’âme
1388
is beaux sentiments, de vrais types de vie haute,
de
vrais idéaux qui propagent une énergie, une force d’âme contagieuse.
1389
vrais idéaux qui propagent une énergie, une force
d’
âme contagieuse. Presque toute la littérature immoraliste sécrétée par
1390
aliste sécrétée par la bourgeoisie est tributaire
de
la morale bourgeoise : elle reste hélas au niveau de l’ennemi. Sa con
1391
este hélas au niveau de l’ennemi. Sa condamnation
de
la morale participe de la légèreté, de l’arbitraire et de l’insignifi
1392
l’ennemi. Sa condamnation de la morale participe
de
la légèreté, de l’arbitraire et de l’insignifiance qui signalaient la
1393
ndamnation de la morale participe de la légèreté,
de
l’arbitraire et de l’insignifiance qui signalaient la morale bourgeoi
1394
rale participe de la légèreté, de l’arbitraire et
de
l’insignifiance qui signalaient la morale bourgeoise. La guerre actue
1395
ye tout cela, mais nous laissera Les Sept Piliers
de
la Sagesse. Fermons cette parenthèse. Le vrai danger subsiste. Comme
1396
er l’apport du diable aux plus sublimes créations
de
l’esprit ? Je ne pense pas qu’aucun créateur puisse se faire d’illusi
1397
Je ne pense pas qu’aucun créateur puisse se faire
d’
illusions là-dessus. Aux sources du poème et dans nos encriers, dans c
1398
’est pas seul, mais il est là. La solution, c’est
de
le faire travailler autrement qu’il ne l’entendait. Ou disons mieux :
1399
e ce diable va devenir à son tour une des pierres
de
la cathédrale, la pierre d’angle grotesque, la chimère pétrifiée qui
1400
tour une des pierres de la cathédrale, la pierre
d’
angle grotesque, la chimère pétrifiée qui regarde la plaine avec mélan
1401
le temps consacrés. Serait-ce un mystérieux écho
de
la rédemption dans son abîme d’ennui sans fin ? Un retour nostalgique
1402
n mystérieux écho de la rédemption dans son abîme
d’
ennui sans fin ? Un retour nostalgique du bien qu’il aurait provoqué m
1403
re Dante a-t-il raison lorsqu’il inscrit au seuil
de
son Enfer : Fecemi la divina potestate La somma sapienza e il primo
1404
’est la fin seule qui justifie les moyens ambigus
de
l’art. Si le diable même y collabore, qu’importe : la dédicace est le
1405
labore, qu’importe : la dédicace est le vrai sens
de
l’œuvre, pour autant que l’homme peut en juger. Elle ravit au démon l
1406
me peut en juger. Elle ravit au démon le bénéfice
de
ses conseils intéressés. Elle nous donne la mesure absolue. Un écriva
1407
un but qu’il ignore ; car sa faiblesse unique est
de
ne pas croire au bien. 45. Le pacte avec le diable Peter Schle
1408
au diable devint très riche, mais perdit le goût
de
vivre. C’est l’une des plus belles fables de ce monde, l’une des plus
1409
goût de vivre. C’est l’une des plus belles fables
de
ce monde, l’une des plus tristes dans sa fantaisie géniale, et peu so
1410
e géniale, et peu sont plus profondes avec autant
de
grâce. Que signifie cette ombre dans le conte ? Je pense que c’est l
1411
dans le conte ? Je pense que c’est la créativité
de
l’homme, sa liberté, c’est-à-dire son « âme ». (Et c’est pourquoi l’u
1412
». (Et c’est pourquoi l’un des premiers malheurs
de
notre héros est de ne plus pouvoir aimer ni être aimé). J’ai dit que
1413
uoi l’un des premiers malheurs de notre héros est
de
ne plus pouvoir aimer ni être aimé). J’ai dit que la liberté de l’hom
1414
voir aimer ni être aimé). J’ai dit que la liberté
de
l’homme réside dans son pouvoir unique au monde de suivre l’ordre — o
1415
e l’homme réside dans son pouvoir unique au monde
de
suivre l’ordre — ou de tricher. S’il suit l’ordre de la Création, sa
1416
on pouvoir unique au monde de suivre l’ordre — ou
de
tricher. S’il suit l’ordre de la Création, sa liberté s’accroît, et s
1417
suivre l’ordre — ou de tricher. S’il suit l’ordre
de
la Création, sa liberté s’accroît, et son pouvoir de choix porte sur
1418
la Création, sa liberté s’accroît, et son pouvoir
de
choix porte sur des enjeux toujours plus vastes. Mais s’il triche pou
1419
erté, sa proie le lie. « Que servirait à un homme
de
gagner le monde s’il perdait son âme ? », dit l’Évangile. Le Pacte av
1420
ctement à gagner le monde au prix de notre âme et
de
notre ombre, au prix de notre libre faculté de créer dans le réel — o
1421
et de notre ombre, au prix de notre libre faculté
de
créer dans le réel — ou à côté. Tant que vous faites effort pour vous
1422
dans la vérité, vous conservez la pleine faculté
de
dire le vrai ou de mentir. Mais une fois que vous avez menti, vous êt
1423
us conservez la pleine faculté de dire le vrai ou
de
mentir. Mais une fois que vous avez menti, vous êtes lié par le menso
1424
t, vous conservez la possibilité à chaque instant
de
monter ou de redescendre. Plus vous montez et plus l’effort devient p
1425
rvez la possibilité à chaque instant de monter ou
de
redescendre. Plus vous montez et plus l’effort devient pénible, et pl
1426
abîme vous tente, mais l’horizon s’étend. Si tout
d’
un coup votre fatigue ou quelque vertige l’emporte, ou si votre pied g
1427
à rouler vers l’abîme ou simplement vers le fond
de
la vallée, où vit le commun des mortels. Vous êtes délivré de votre e
1428
, où vit le commun des mortels. Vous êtes délivré
de
votre effort, tout est facile, il n’y a qu’à se laisser aller. Vous «
1429
ches et populeux. Mais vous avez perdu la liberté
de
monter ou de descendre à votre choix. Vous êtes pris dans un mécanism
1430
eux. Mais vous avez perdu la liberté de monter ou
de
descendre à votre choix. Vous êtes pris dans un mécanisme à sens uniq
1431
nique, vous n’êtes qu’un corps abandonné aux lois
de
la gravitation, et toutes vos gesticulations ne feront qu’accélérer l
1432
cela que résume et figure l’expression légendaire
de
pacte avec le diable. Nous sentons tous obscurément qu’un succès trop
1433
un succès trop rapide dans le monde doit provenir
d’
une sorte de marché conclu avec le Prince de ce monde, et dont le prix
1434
op rapide dans le monde doit provenir d’une sorte
de
marché conclu avec le Prince de ce monde, et dont le prix est notre l
1435
venir d’une sorte de marché conclu avec le Prince
de
ce monde, et dont le prix est notre liberté. Et c’est pourquoi la mor
1436
dentition ! Comment cette belle humeur et ce goût
de
mieux vivre pourraient-ils être diaboliques ? Les démons, ce sont les
1437
iaboliques ? Les démons, ce sont les nazis, vêtus
de
noir, grinçant des dents, mal nourris et semant la mort. Mais quoi ?
1438
. Mais quoi ? Vous voulez gagner le monde à coups
de
dollars, et les méchants nazis veulent le gagner à coups de canon. Vo
1439
, et les méchants nazis veulent le gagner à coups
de
canon. Vous pensez que le premier système a l’avantage d’être plus hy
1440
. Vous pensez que le premier système a l’avantage
d’
être plus hygiénique. C’est peut-être vrai. Mais je doute que ce soit
1441
étaient sûres ! Je ne vais pas prêcher une morale
de
l’échec. Succès ou insuccès ne signifient rien en soi, tout dépend du
1442
is il faut bien rappeler que le plus grand succès
de
toute l’Histoire, ce fut la mort ignominieuse du Christ en croix. Ce
1443
’âme du monde, que nous avions vendue pour un peu
de
plaisir… 46. Le diable tire les cartes On pressent assez facil
1444
la fois la victime et le bénéficiaire. En échange
de
sa pureté d’âme, il se verrait doté de pouvoirs extraordinaires, dont
1445
ctime et le bénéficiaire. En échange de sa pureté
d’
âme, il se verrait doté de pouvoirs extraordinaires, dont la source ne
1446
En échange de sa pureté d’âme, il se verrait doté
de
pouvoirs extraordinaires, dont la source ne saurait être — ainsi pens
1447
si pense-t-on communément — que dans les royaumes
d’
en-bas. C’est un hommage involontaire et l’on dirait presque instincti
1448
e instinctif que l’on rend à la science angélique
de
Satan. Il est vrai que sous le nom de Python, il représente le Devin,
1449
e angélique de Satan. Il est vrai que sous le nom
de
Python, il représente le Devin, et sous le vocable hébreu de ’VB, l’e
1450
il représente le Devin, et sous le vocable hébreu
de
’VB, l’esprit de la lumière descendante, pouvoir prophétique et magiq
1451
Devin, et sous le vocable hébreu de ’VB, l’esprit
de
la lumière descendante, pouvoir prophétique et magique. Mais l’assimi
1452
uvoir prophétique et magique. Mais l’assimilation
de
la clairvoyance en général avec cette puissance diabolique est une er
1453
ution tout en louant la volupté dans le plus beau
de
ses Cantiques. Dieu lui-même ne cesse d’envoyer des songes prophétiqu
1454
lus beau de ses Cantiques. Dieu lui-même ne cesse
d’
envoyer des songes prophétiques à ceux qui l’aiment, de Daniel à Jean
1455
oyer des songes prophétiques à ceux qui l’aiment,
de
Daniel à Jean de Pathmos. Et les premiers à découvrir et saluer le Ch
1456
ist naissant, ce furent les Mages. Il serait vain
de
nier les faits sous prétexte qu’ils sont encore inexplicables : les t
1457
’est encore aujourd’hui que la science incertaine
de
découvrir l’avenir, craignons qu’elle devienne dans l’avenir une déco
1458
ons qu’elle devienne dans l’avenir une découverte
de
la science. Nous regretterons alors le temps des clins d’œil de la de
1459
ience. Nous regretterons alors le temps des clins
d’
œil de la destinée, quand nous pouvions encore les accueillir avec une
1460
Nous regretterons alors le temps des clins d’œil
de
la destinée, quand nous pouvions encore les accueillir avec une amour
1461
ureuse astuce… Ceci dit, le diable a deux chances
de
se glisser en nous par la voie clandestine, lorsqu’il y échoue par le
1462
, lorsqu’il y échoue par les moyens plus raffinés
de
la raison et de la vertu. Sa première chance réside dans notre propen
1463
houe par les moyens plus raffinés de la raison et
de
la vertu. Sa première chance réside dans notre propension à réduire l
1464
, et ceux-ci à leur tour aux échecs et aux succès
de
la vie manifeste. Cette confusion de nos catégories morales sert admi
1465
t aux succès de la vie manifeste. Cette confusion
de
nos catégories morales sert admirablement les desseins du Malin. Elle
1466
ns du Malin. Elle empêche la victime du charlatan
de
comprendre que ses malheurs ne sont pas le Mal, ni même nécessairemen
1467
rement la guerre, par exemple, mais l’utilisation
de
la guerre pour stériliser notre foi, ou l’utilisation de la paix non
1468
uerre pour stériliser notre foi, ou l’utilisation
de
la paix non moins, et même à moindres risques pour Satan. Le mal et l
1469
raduits par les voyantes en termes d’obstacles ou
de
succès19 ne sauraient être définis en vérité que par rapport au but s
1470
définis en vérité que par rapport au but suprême
d’
une existence, en termes d’attitudes intérieures. La seconde chance d
1471
des intérieures. La seconde chance du diable est
de
flatter notre tendance à nous sentir irresponsables, par le moyen d’o
1472
ndance à nous sentir irresponsables, par le moyen
d’
oracles prononcés au nom d’un destin sans appel. L’angoisse de l’homme
1473
ononcés au nom d’un destin sans appel. L’angoisse
de
l’homme moderne devant sa liberté peut se mesurer au nombre des tireu
1474
sa liberté peut se mesurer au nombre des tireuses
de
cartes et de leurs clients avides d’anesthésie morale. Nous touchons
1475
ut se mesurer au nombre des tireuses de cartes et
de
leurs clients avides d’anesthésie morale. Nous touchons ici au secret
1476
des tireuses de cartes et de leurs clients avides
d’
anesthésie morale. Nous touchons ici au secret du véritable Mal du siè
1477
, l’auteur, et l’homme qui réussit, cette galerie
de
victimes est classique au point d’en être presque démodée. Car Satan
1478
cette galerie de victimes est classique au point
d’
en être presque démodée. Car Satan marche avec son temps, et paraît se
1479
Satan marche avec son temps, et paraît se soucier
de
moins en moins de persuader l’individu, dans une époque où celui-ci n
1480
son temps, et paraît se soucier de moins en moins
de
persuader l’individu, dans une époque où celui-ci n’existe guère. Son
1481
eilleure interprétation des phénomènes collectifs
d’
aujourd’hui fut donnée vers 1848 par l’écrivain danois Søren Kierkegaa
1482
vain danois Søren Kierkegaard, le penseur capital
de
notre ère. Voici ce que l’on peut lire dans son journal intime : En
1483
e et des époques qui discutaient sans fin les cas
de
possession, c’est-à-dire d’individus particuliers se livrant au mal,
1484
ient sans fin les cas de possession, c’est-à-dire
d’
individus particuliers se livrant au mal, je voudrais écrire un livre
1485
ontrer comment l’humanité qui se donne au diable,
de
nos jours, le fait en masse. C’est pour cela que les gens se rassembl
1486
pour que l’hystérie naturelle et animale s’empare
d’
eux, pour qu’ils se sentent stimulés, enflammés et hors d’eux-mêmes. L
1487
our qu’ils se sentent stimulés, enflammés et hors
d’
eux-mêmes. Les scènes du Blocksberg sont le pendant exact de ces plais
1488
s. Les scènes du Blocksberg sont le pendant exact
de
ces plaisirs démoniaques, qui consistent à se perdre soi-même, à se l
1489
ne sait plus ce que l’on est en train de faire ou
de
dire, on ne sait plus ce qui parle à travers nous, tandis que le sang
1490
e, et avant tous, le principe diabolique créateur
de
la masse : fuir sa propre personne, n’être plus responsable, donc plu
1491
lus coupable, et devenir du même coup participant
de
la puissance divinisée de l’Anonyme. Or l’Anonyme a bien des chances
1492
u même coup participant de la puissance divinisée
de
l’Anonyme. Or l’Anonyme a bien des chances d’être celui qui aime à di
1493
sée de l’Anonyme. Or l’Anonyme a bien des chances
d’
être celui qui aime à dire : Je ne suis Personne… La foule, c’est le
1494
e : Je ne suis Personne… La foule, c’est le lieu
de
rendez-vous des hommes qui se fuient, eux et leur vocation. Elle n’es
1495
eux et leur vocation. Elle n’est personne et tire
de
là son assurance dans le crime. Il ne s’est pas trouvé un seul soldat
1496
ité. Mais trois ou quatre femmes, dans l’illusion
d’
être une foule, et que personne peut-être ne saurait dire qui l’avait
1497
!… Car une foule est une abstraction, qui n’a pas
de
mains, mais chaque homme isolé a, dans la règle, deux mains, et lorsq
1498
nt ses mains, non celles du voisin, et non celles
de
la foule qui n’a pas de mains.20 Reconnaissons ici la vieille tactiq
1499
du voisin, et non celles de la foule qui n’a pas
de
mains.20 Reconnaissons ici la vieille tactique, la sempiternelle tac
1500
ci la vieille tactique, la sempiternelle tactique
de
Satan. Dès la première tentation en Eden, il a recours au même et uni
1501
omme qu’il n’est pas responsable, qu’il n’y a pas
de
Juge, que la Loi est douteuse, qu’on ne saura pas, et que d’ailleurs,
1502
e coup réussi, on sera Dieu soi-même, donc maître
de
fixer le Bien et le Mal à sa guise. Alors ils entendirent la voix de
1503
le Mal à sa guise. Alors ils entendirent la voix
de
l’Éternel Dieu, qui parcourait le jardin vers le soir, et l’homme et
1504
l’homme et sa femme se cachèrent loin de la face
de
l’Éternel Dieu, au milieu des arbres du jardin. Mais l’Éternel Dieu a
1505
t’a appris que tu es nu ? Est-ce que tu as mangé
de
l’arbre dont je t’avais défendu de manger ? L’homme répondit : La fem
1506
ue tu as mangé de l’arbre dont je t’avais défendu
de
manger ? L’homme répondit : La femme que tu as mise auprès de moi m’a
1507
: La femme que tu as mise auprès de moi m’a donné
de
l’arbre, et j’en ai mangé. Et l’Éternel Dieu dit à la femme : Pourquo
1508
ils disent que c’était l’autre. Ainsi les hommes
de
notre temps, poussés par leurs « complexes de culpabilité » et fuyant
1509
mes de notre temps, poussés par leurs « complexes
de
culpabilité » et fuyant devant l’aveu de leurs fautes, vont se cacher
1510
omplexes de culpabilité » et fuyant devant l’aveu
de
leurs fautes, vont se cacher dans les arbres, dans la foule. C’est-à-
1511
ù l’on est, à coup sûr, le plus « loin de la face
de
l’Éternel. » Pour qu’il n’y ait plus de responsabilité, il faut qu’il
1512
e la face de l’Éternel. » Pour qu’il n’y ait plus
de
responsabilité, il faut qu’il n’y ait plus personne. Or si j’appelle
1513
plus personne. Or si j’appelle et qu’il n’y a pas
de
réponse, je dis qu’il n’y a personne ; la personne est en nous ce qui
1514
personne ; la personne est en nous ce qui répond
de
nos actes, ce qui est « capable de réponse », ou responsable ; dans u
1515
ce qui répond de nos actes, ce qui est « capable
de
réponse », ou responsable ; dans une foule il n’y a plus de réponse i
1516
», ou responsable ; dans une foule il n’y a plus
de
réponse individuelle ; pour qu’il n’y ait plus de responsable, il suf
1517
de réponse individuelle ; pour qu’il n’y ait plus
de
responsable, il suffit qu’il y ait une masse. Satan va donc créer les
1518
donc créer les masses. Nous tenons ici le secret
de
sa grande stratégie : produire le péché en série et rationaliser la c
1519
l’évolution générale du temps, favorisent ce Plan
de
mille manières. Tout concourt, dans le cadre de nos vies, à nous priv
1520
n de mille manières. Tout concourt, dans le cadre
de
nos vies, à nous priver du sentiment d’être une personne responsable.
1521
le cadre de nos vies, à nous priver du sentiment
d’
être une personne responsable. Nous vivons tous, de plus en plus, dans
1522
Nous vivons tous, de plus en plus, dans un monde
de
transe collective. Nous participons tous, de plus en plus, à des form
1523
s participons tous, de plus en plus, à des formes
de
vie étrangères à notre sort particulier et à nos aptitudes normales.
1524
par leurs chefs. Tout cela contribue à l’arracher
de
sa vie propre, où il ne se passerait jamais rien de semblable. Quant
1525
sa vie propre, où il ne se passerait jamais rien
de
semblable. Quant aux inconvénients et à l’ennui de cette vie propre,
1526
e semblable. Quant aux inconvénients et à l’ennui
de
cette vie propre, autrefois jugés normaux, ils apparaissent de plus e
1527
acceptables à mesure que se répandent les notions
de
Progrès indéfini, de confort à tout prix, de succès rapide, et à mesu
1528
que se répandent les notions de Progrès indéfini,
de
confort à tout prix, de succès rapide, et à mesure que s’efface la cr
1529
ions de Progrès indéfini, de confort à tout prix,
de
succès rapide, et à mesure que s’efface la croyance dans un au-delà q
1530
oyance dans un au-delà qui, autrefois, permettait
de
prendre ses maux en patience. D’une part, l’individu moderne est inci
1531
Elles poussent l’homme à rechercher les occasions
d’
être dépossédé de soi. Elles font de chacun de nous un sujet prédispos
1532
homme à rechercher les occasions d’être dépossédé
de
soi. Elles font de chacun de nous un sujet prédisposé à l’hypnose col
1533
les occasions d’être dépossédé de soi. Elles font
de
chacun de nous un sujet prédisposé à l’hypnose collective, une victim
1534
ons d’être dépossédé de soi. Elles font de chacun
de
nous un sujet prédisposé à l’hypnose collective, une victime virtuell
1535
se collective, une victime virtuelle des passions
de
masse. Partout où un individu prend sa vie personnelle en dégoût, le
1536
sme trouve un candidat. Certes, il n’y aurait pas
de
masses possibles, au sens précis de concentration d’hommes, sans la r
1537
’y aurait pas de masses possibles, au sens précis
de
concentration d’hommes, sans la radio, les haut-parleurs, la presse e
1538
masses possibles, au sens précis de concentration
d’
hommes, sans la radio, les haut-parleurs, la presse et les transports
1539
rue seulement. Elle est dans la pensée des hommes
de
ce temps, elle a ses sources au plus intime des existences individuel
1540
seulement qu’on peut la dénoncer. 48. La tour
de
Babel Si la personne se perd dans le monde moderne, c’est que les
1541
uoi les avoir agrandis, depuis un siècle, au-delà
de
toute mesure ? Pourquoi veut-on du grand, du plus grand à tout prix ?
1542
? Sinon justement pour s’y perdre ! À l’origine
de
toutes ces choses trop vastes et trop complexes qui nous entourent sa
1543
niques, sociales et financières. Mais à l’origine
de
ces « nécessités » elles-mêmes, je pressens notre obscur désir de fui
1544
tés » elles-mêmes, je pressens notre obscur désir
de
fuite dans l’anonyme irresponsable, et la très vieille tentation de c
1545
onyme irresponsable, et la très vieille tentation
de
compenser nos inquiétudes par l’utopie de l’eritis sicut dii. Or qua
1546
ntation de compenser nos inquiétudes par l’utopie
de
l’eritis sicut dii. Or quand nous nous perdons, c’est le diable qui
1547
est le diable encore qui nous accueille au sommet
de
notre ascension. Comme le rappelle l’histoire de la tour de Babel, qu
1548
de notre ascension. Comme le rappelle l’histoire
de
la tour de Babel, qui est le grand mythe de notre temps. Bien qu’il n
1549
scension. Comme le rappelle l’histoire de la tour
de
Babel, qui est le grand mythe de notre temps. Bien qu’il ne soit pas
1550
toire de la tour de Babel, qui est le grand mythe
de
notre temps. Bien qu’il ne soit pas mentionné dans le récit du chapit
1551
soit pas mentionné dans le récit du chapitre onze
de
la Genèse, le diable est de toute évidence le principal Entrepreneur
1552
écit du chapitre onze de la Genèse, le diable est
de
toute évidence le principal Entrepreneur de la Tour primitive et de s
1553
e est de toute évidence le principal Entrepreneur
de
la Tour primitive et de ses répliques modernes. (Je ne fais pas allus
1554
le principal Entrepreneur de la Tour primitive et
de
ses répliques modernes. (Je ne fais pas allusion aux gratte-ciel, ces
1555
ioses et toujours un peu bêtes, mais à l’ensemble
de
nos entreprises économiques, politiques et urbaines.) Reprenons ce ré
1556
afin que nous ne soyons pas dispersés sur la face
de
toute la terre. » Vous reconnaissez Satan à ce doute qui les prend, à
1557
ute qui les prend, à ce besoin qu’ils ont soudain
de
s’assurer de leur bonheur, dans le cas présent, leur unité. Et c’est
1558
rend, à ce besoin qu’ils ont soudain de s’assurer
de
leur bonheur, dans le cas présent, leur unité. Et c’est pourquoi ils
1559
r voulu s’assurer qu’elle le suivait ; par manque
de
foi. Vous reconnaissez cette idée romantique qu’il leur suggère : fai
1560
ers devait prévoir, sera nécessairement l’inverse
de
ce qu’ils voulaient. Si vous mangez la pomme vous ne mourrez pas, dis
1561
ir de là que « l’Éternel les dispersa sur la face
de
toute la terre. » Cette déconvenue mémorable est attribuée par le réc
1562
e est attribuée par le récit biblique à la colère
de
l’Éternel, qui « descendit pour voir la ville et la tour que bâtissai
1563
ont entrepris ! » On dirait qu’il veut les punir
d’
être aussi bêtes. Mais le Dante imagine qu’ils se seraient bien punis
1564
’y avait qu’à les laisser aller ! Dans son Traité
de
l’éloquence vulgaire, il propose une explication fort naturelle du ph
1565
opose une explication fort naturelle du phénomène
de
confusion des langues. Si les hommes ne se sont plus entendus lors de
1566
ne se sont plus entendus lors de la construction
de
ce premier gratte-ciel, c’est que l’entreprise était trop vaste, simp
1567
lement. En effet, pour mener à chef l’édification
de
la tour, ils furent obligés de se diviser en équipes spécialisées. Le
1568
chef l’édification de la tour, ils furent obligés
de
se diviser en équipes spécialisées. Les uns faisaient la brique qui l
1569
ées. Les uns faisaient la brique qui leur servait
de
pierre, les autres le bitume qui leur servait de ciment ; d’autres en
1570
de pierre, les autres le bitume qui leur servait
de
ciment ; d’autres encore n’étaient chargés que de monter les matériau
1571
de ciment ; d’autres encore n’étaient chargés que
de
monter les matériaux, d’autres de bâtir les murs, de charpenter, ou d
1572
ent chargés que de monter les matériaux, d’autres
de
bâtir les murs, de charpenter, ou de crépir. À cause de l’énormité de
1573
monter les matériaux, d’autres de bâtir les murs,
de
charpenter, ou de crépir. À cause de l’énormité de l’entreprise, ces
1574
ux, d’autres de bâtir les murs, de charpenter, ou
de
crépir. À cause de l’énormité de l’entreprise, ces équipes spécialisé
1575
e charpenter, ou de crépir. À cause de l’énormité
de
l’entreprise, ces équipes spécialisées vivaient à part les unes des a
1576
lles se créèrent des langages techniques, jargons
de
métier, patois divers, tant qu’à la fin elles ne se comprirent plus.
1577
n sommes à peu près là. L’anarchie sans précédent
de
notre vocabulaire, en politique surtout, suffirait à trahir l’absence
1578
n politique surtout, suffirait à trahir l’absence
de
toute commune mesure dans notre siècle. Nous avons vu trop grand pour
1579
nos pouvoirs, nous avons perdu en chemin la règle
d’
or, l’étalon-homme. Et pour avoir été trop vite en tout, nous avons pe
1580
our avoir été trop vite en tout, nous avons perdu
de
vue la mesure et le sens des fins dernières de l’œuvre humaine. L’ind
1581
du de vue la mesure et le sens des fins dernières
de
l’œuvre humaine. L’individu s’égare dans ces vastes rouages, il s’y s
1582
son préfabriquée avec une telle rapidité que l’un
d’
eux resta pris dans la bâtisse, dont il fallut détruire toute une sect
1583
r mieux dire la babélisation des cadres matériels
de
notre vie. L’invention des machines a brusquement accru nos possibili
1584
des machines a brusquement accru nos possibilités
d’
action sur la matière. L’industrie et le commerce ont provoqué la brus
1585
e et le commerce ont provoqué la brusque création
de
villes énormes, dix ou cent fois plus grandes que celles qu’on connai
1586
ent d’ailleurs toute l’instabilité. La population
de
l’Europe a plus que doublé en cent ans ; ses richesses ont été décupl
1587
tion industrielle centuplée. Et le concours enfin
de
tous ces éléments a provoqué la création d’armées considérables, agra
1588
enfin de tous ces éléments a provoqué la création
d’
armées considérables, agrandissant le phénomène de la guerre, brusquem
1589
d’armées considérables, agrandissant le phénomène
de
la guerre, brusquement, aux proportions de la nation entière. Ainsi,
1590
nomène de la guerre, brusquement, aux proportions
de
la nation entière. Ainsi, par une mutation brusque, dans l’espace de
1591
e. Ainsi, par une mutation brusque, dans l’espace
de
cinquante à cent ans, la société est devenue trop gigantesque pour êt
1592
té est devenue trop gigantesque pour être dominée
d’
un seul regard. Une seule intelligence ne peut plus en comprendre et e
1593
aux plus grossiers et aux plus ignorants le droit
de
voter et de dire leur mot sur tout : ce ne sera pas pire.) Alors le v
1594
ssiers et aux plus ignorants le droit de voter et
de
dire leur mot sur tout : ce ne sera pas pire.) Alors le vertige de Ba
1595
sur tout : ce ne sera pas pire.) Alors le vertige
de
Babel s’empare de l’esprit humain. Comme tout vertige, il naît de l’i
1596
era pas pire.) Alors le vertige de Babel s’empare
de
l’esprit humain. Comme tout vertige, il naît de l’incapacité de suppo
1597
e de l’esprit humain. Comme tout vertige, il naît
de
l’incapacité de supporter des altitudes ou des dimensions inhumaines.
1598
main. Comme tout vertige, il naît de l’incapacité
de
supporter des altitudes ou des dimensions inhumaines. Comme tout vert
1599
fut plus savant, et jamais il n’eut l’impression
de
comprendre aussi mal ce qui se passe dans son monde. Jamais avec plus
1600
ce qui se passe dans son monde. Jamais avec plus
de
ferveur il n’approcha des buts de son Progrès, jamais non plus sa bar
1601
amais avec plus de ferveur il n’approcha des buts
de
son Progrès, jamais non plus sa barbarie ne se montra mieux armée pou
1602
e, et soyez comme des dieux, oubliez votre mesure
d’
hommes ! » Mais plus on monte et mieux on tombe. Allez chercher mainte
1603
it jamais rien, des gouvernants qui ont trop peur
d’
elle pour l’informer, — une fuite universelle dans l’anonyme, une énor
1604
me cacophonie dominée par le bruit des bombes. Un
de
ces fous à la sagesse bavarde, comme on en trouve dans les cafés, ava
1605
comme on en trouve dans les cafés, avait coutume
de
me faire la théorie suivante : tout le mal vient des étages, inventio
1606
ent pour abriter les hommes. Il n’est pas naturel
de
lui ajouter des étages. Car en tombant du quatrième, par exemple, on
1607
ant qu’un sentiment nouveau, et comme indépendant
de
nos catégories, se manifeste dans l’époque moderne. Au-delà du bien e
1608
blissement ou l’extinction presque totale du sens
de
la vocation personnelle. Admettons que tout y concourt dans l’ère col
1609
alisée. Tout contribue au refoulement des raisons
de
vivre non prévues par les statistiques de l’État. Mais pourquoi deven
1610
raisons de vivre non prévues par les statistiques
de
l’État. Mais pourquoi devenons-nous collectivistes, si vraiment nous
1611
ent les prétextes que nous offrent les historiens
de
l’économie matérialiste. Nous nous réfugions dans l’Ennui plutôt que
1612
iste. Nous nous réfugions dans l’Ennui plutôt que
d’
accepter le défi d’une vocation sans précédent, — elles le sont toutes
1613
ugions dans l’Ennui plutôt que d’accepter le défi
d’
une vocation sans précédent, — elles le sont toutes. Allez demander a
1614
s le sont toutes. Allez demander aux jeunes gens
d’
aujourd’hui quel est le sens de leur vie, le goût de leur existence. S
1615
er aux jeunes gens d’aujourd’hui quel est le sens
de
leur vie, le goût de leur existence. S’ils trouvent quelque emploi, c
1616
aujourd’hui quel est le sens de leur vie, le goût
de
leur existence. S’ils trouvent quelque emploi, c’est « un job » simpl
1617
sans qualification ni préférence intime. Le goût
de
l’argent — ou son besoin — obnubile chez le plus grand nombre un sent
1618
hez le plus grand nombre un sentiment fondamental
d’
ennui, mais ce n’est encore qu’un camouflage. On fait cela pour faire
1619
a pour faire quelque chose, parce qu’il n’y a pas
de
raison de faire une chose plutôt qu’une autre… Lorsque j’entends bâil
1620
re quelque chose, parce qu’il n’y a pas de raison
de
faire une chose plutôt qu’une autre… Lorsque j’entends bâiller : « Qu
1621
r : « Que faut-il que je fasse, je ne trouve plus
d’
intérêt à rien ? » il me vient à l’esprit ces phrases de Kierkegaard :
1622
rêt à rien ? » il me vient à l’esprit ces phrases
de
Kierkegaard : « Comment devenir chrétien ? prenez n’importe quelle rè
1623
devenir chrétien ? prenez n’importe quelle règle
d’
action chrétienne. Essayez de l’appliquer. » Car il clair que cet effo
1624
importe quelle règle d’action chrétienne. Essayez
de
l’appliquer. » Car il clair que cet effort, s’il est sincère, va vous
1625
conflits se manifestent, où paraissent les lignes
de
force de la vie spirituelle ou morale, où le drame de la vocation se
1626
se manifestent, où paraissent les lignes de force
de
la vie spirituelle ou morale, où le drame de la vocation se précise i
1627
orce de la vie spirituelle ou morale, où le drame
de
la vocation se précise instantanément : plus une seconde d’ennui ne s
1628
tion se précise instantanément : plus une seconde
d’
ennui ne sera possible. Et votre plainte sera de n’avoir qu’une seule
1629
e d’ennui ne sera possible. Et votre plainte sera
de
n’avoir qu’une seule vie. Ennui : chasse gardée du démon. Parce que n
1630
l croie la science ou invoque le mystère, l’homme
d’
aujourd’hui montre une constante et masochiste propension à se vouloir
1631
pension à se vouloir irresponsable. Tout lui sert
d’
alibi, tout lui est bon pour prouver qu’il n’y était pas, que ce n’est
1632
sa passion lui dit : c’était vital, il n’y a pas
de
faute. Ceux de mes contemporains qui se représentent l’homme comme un
1633
dit : c’était vital, il n’y a pas de faute. Ceux
de
mes contemporains qui se représentent l’homme comme un complexe de gl
1634
ins qui se représentent l’homme comme un complexe
de
glandes endocrines, d’enzymes et de vitamines, ont de plus en plus de
1635
l’homme comme un complexe de glandes endocrines,
d’
enzymes et de vitamines, ont de plus en plus de peine à concevoir que
1636
e un complexe de glandes endocrines, d’enzymes et
de
vitamines, ont de plus en plus de peine à concevoir que le jugement m
1637
s, d’enzymes et de vitamines, ont de plus en plus
de
peine à concevoir que le jugement moral garde un sens, et que la pers
1638
péché » ne sont plus, à leur vue, que les effets
d’
un trouble temporaire ou chronique dans le régime des sécrétions inter
1639
que fois que nous découvrons un nouveau mécanisme
de
la vie, nous sommes aussitôt obsédés par l’idée que « cela explique t
1640
idée que « cela explique tout ». Étrange psychose
de
l’homme moderne ! Quoi de plus sot que de prétendre expliquer la cond
1641
sychose de l’homme moderne ! Quoi de plus sot que
de
prétendre expliquer la conduite et les décisions morales d’un tout pa
1642
re expliquer la conduite et les décisions morales
d’
un tout par la description du fonctionnement de quelques-unes de ses p
1643
es d’un tout par la description du fonctionnement
de
quelques-unes de ses parties, les dernières analysées toujours ? Qui
1644
la description du fonctionnement de quelques-unes
de
ses parties, les dernières analysées toujours ? Qui vous prouve que v
1645
aussi bien. Qui a commencé ? Qui est responsable
de
cette méchante décision ? L’homme ou son foie ? Nous sommes bien trop
1646
que j’accorde à l’hypothèse matérialiste le droit
de
se dire objective. J’y vois trop facilement le coup de pouce du diabl
1647
dire objective. J’y vois trop facilement le coup
de
pouce du diable. Certes, je n’accuse pas la Science — rien de moins d
1648
diable. Certes, je n’accuse pas la Science — rien
de
moins diabolique qu’une observation juste — mais seulement les sophis
1649
ur justifier nos démissions morales. Mais en fait
de
prétextes, il en a de meilleurs que la science et que ses vulgarisati
1650
sions morales. Mais en fait de prétextes, il en a
de
meilleurs que la science et que ses vulgarisations imprudentes. L’adj
1651
it un mensonge, on sait qu’on ment, et l’on tâche
de
ne pas se faire prendre. Si l’on commet quelque mauvaise action, on e
1652
quelque mauvaise action, on essaie tout au moins
de
se disculper par rapport à une vérité et à un bien généralement admis
1653
admis. Mais notre époque a remplacé les critères
de
la vérité par des valeurs d’intensité, et le respect du bien par celu
1654
emplacé les critères de la vérité par des valeurs
d’
intensité, et le respect du bien par celui de la « vie ». Tout ce qui
1655
eurs d’intensité, et le respect du bien par celui
de
la « vie ». Tout ce qui paraît suffisamment intense, désormais, cesse
1656
qui paraît suffisamment intense, désormais, cesse
de
relever de la vérité ou du mensonge. Il est admis, de nos jours, que
1657
suffisamment intense, désormais, cesse de relever
de
la vérité ou du mensonge. Il est admis, de nos jours, que la passion,
1658
elever de la vérité ou du mensonge. Il est admis,
de
nos jours, que la passion, l’émotion et l’hystérie même vous mettent
1659
assion, l’émotion et l’hystérie même vous mettent
de
droit au-delà du bien et du mal. Elles vous libèrent de toute obligat
1660
it au-delà du bien et du mal. Elles vous libèrent
de
toute obligation, elles n’ont plus à se justifier. J’avais juré d’êtr
1661
on, elles n’ont plus à se justifier. J’avais juré
d’
être fidèle, dit un conjoint, mais je m’aperçois que c’est incompatibl
1662
i qui est nouveau : l’on s’en vante, avec l’appui
de
tous les romanciers, des journalistes, des philosophes et des doctrin
1663
olitiques. Les tribunaux français avaient coutume
d’
acquitter les crimes passionnels. Aux grandes époques, on eût doublé l
1664
ornons-nous à le noter en passant : notre respect
de
la passion et de « la vie » sont des signes de décadence des passions
1665
noter en passant : notre respect de la passion et
de
« la vie » sont des signes de décadence des passions mêmes et de la v
1666
ct de la passion et de « la vie » sont des signes
de
décadence des passions mêmes et de la vraie vie. J’emprunte ici à And
1667
ont des signes de décadence des passions mêmes et
de
la vraie vie. J’emprunte ici à André Gide une pénétrante et minutieus
1668
dré Gide une pénétrante et minutieuse description
de
ce glissement du vrai vers le « vital » au secret d’une conscience mo
1669
ce glissement du vrai vers le « vital » au secret
d’
une conscience moderne : « Mais j’étais scrupuleux et, devant que je m
1670
de force te viendrait, ajoutait-il, si plutôt que
de
t’user à lutter ainsi contre toi-même, tu ne luttais plus que contre
1671
’empêchement du dehors… Va, sache triompher enfin
de
toi-même et de ta propre honnêteté »… Bref, il tirait argument et ava
1672
dehors… Va, sache triompher enfin de toi-même et
de
ta propre honnêteté »… Bref, il tirait argument et avantage de ce qu’
1673
honnêteté »… Bref, il tirait argument et avantage
de
ce qu’il m’en coûtait de céder à mon désir plutôt que de le brider en
1674
ait argument et avantage de ce qu’il m’en coûtait
de
céder à mon désir plutôt que de le brider encore… Il va sans dire que
1675
u’il m’en coûtait de céder à mon désir plutôt que
de
le brider encore… Il va sans dire que je ne compris que beaucoup plus
1676
us tard ce qu’il y avait, dans cette exhortation,
de
diabolique. Je croyais alors que j’étais le seul à parler et que ce d
1677
ue je ne le distinguais encore pas. Il avait fait
de
moi sa conquête ; je me croyais victorieux, oui : victorieux de moi-m
1678
uête ; je me croyais victorieux, oui : victorieux
de
moi-même parce que je me livrais à lui. Parce qu’il m’avait convaincu
1679
conscience individuelle, c’est le même, en chacun
de
ses détails, qu’Hitler a proposé au peuple allemand. Et cela s’appela
1680
au peuple allemand. Et cela s’appelait la théorie
de
l’espace vital. « Comment ce qui t’est nécessaire ne te serait-il pas
1681
oif ? Une grande force te viendrait si plutôt que
de
t’user à tenir tes engagements, tu ne luttais plus que contre l’étran
1682
t ce qui sert tes intérêts, qui sont les intérêts
de
la nation. N’est-ce pas ici le lieu de se demander au nom de quoi nos
1683
s intérêts de la nation. N’est-ce pas ici le lieu
de
se demander au nom de quoi nos moralistes de la passion pourraient co
1684
lieu de se demander au nom de quoi nos moralistes
de
la passion pourraient combattre les doctrines nationalistes ? 51.
1685
times of weakness. Francis Bacon Il n’est pas
de
domaine où l’argument de l’espace vital, individuel, cette fois-ci, a
1686
is Bacon Il n’est pas de domaine où l’argument
de
l’espace vital, individuel, cette fois-ci, ait eu plus de succès que
1687
ace vital, individuel, cette fois-ci, ait eu plus
de
succès que dans l’amour tel qu’on le cultive en Occident. Depuis un s
1688
epuis un siècle, tous les romans illustrent, avec
d’
autant moins d’art qu’ils y rencontrent plus de complaisance, la théor
1689
, tous les romans illustrent, avec d’autant moins
d’
art qu’ils y rencontrent plus de complaisance, la théorie du droit de
1690
ec d’autant moins d’art qu’ils y rencontrent plus
de
complaisance, la théorie du droit de la passion : « Une femme apparti
1691
ontrent plus de complaisance, la théorie du droit
de
la passion : « Une femme appartient de droit à l’homme qui l’aime et
1692
e du droit de la passion : « Une femme appartient
de
droit à l’homme qui l’aime et quelle aime plus que la vie, et il n’y
1693
’aime et quelle aime plus que la vie, et il n’y a
d’
unions à jamais légitimes que celles qui sont commandées par la vraie
1694
permis quand on s’aime ». La première conséquence
de
cette grande permission est de faire sauter l’alliance du mariage. Da
1695
emière conséquence de cette grande permission est
de
faire sauter l’alliance du mariage. Dans la morale que pratiquent nos
1696
morale que pratiquent nos contemporains, la force
de
l’amour prime le droit du serment. Mais cette proposition ébranle un
1697
ion ébranle un monde. Car attaquer au plus intime
de
l’être le sens de l’alliance jurée, c’est faire le lit d’une éthique
1698
de. Car attaquer au plus intime de l’être le sens
de
l’alliance jurée, c’est faire le lit d’une éthique de barbares. Prend
1699
e le sens de l’alliance jurée, c’est faire le lit
d’
une éthique de barbares. Prendre la femme du voisin ou ses terres parc
1700
’alliance jurée, c’est faire le lit d’une éthique
de
barbares. Prendre la femme du voisin ou ses terres parce qu’on a déco
1701
ue les mêmes principes dont s’autorise l’anarchie
de
nos mœurs privées. Toutefois les partisans du romantisme maintiendron
1702
t on prétend qu’il permet tout, est véritablement
de
l’amour, ou s’il n’est pas plutôt quelque hantise abusivement parée d
1703
’est pas plutôt quelque hantise abusivement parée
de
ce beau nom. Or chacun voit que « l’amour » moderne est une immense f
1704
l’amour » moderne est une immense faillite intime
de
notre civilisation. C’est une affaire si tragiquement confuse que le
1705
i tragiquement confuse que le diable seul est sûr
de
s’y retrouver. Niera-t-on qu’il s’en donne à cœur joie ? Mais il exis
1706
donne à cœur joie ? Mais il existe un moyen court
de
le dépister, ici encore. La part du diable dans « l’amour », c’est si
1707
l’amour », c’est simplement tout ce qui n’est pas
de
l’amour. C’est tout ce qui se glisse en nous sous le couvert du mot.
1708
’aime pas qu’on aime, et dont tout le plaisir est
d’
altérer nos vertus dans leur source. Vous le sentirez présent, dans sa
1709
ésent, dans sa force immobile, derrière le regard
de
l’être sans amour. Et partout où l’amour est contrefait, vous le conn
1710
, et si l’alliance primordiale du mariage n’a pas
de
pire ennemi que « l’amour » tel qu’on le parle, c’est que le plus bea
1711
» tel qu’on le parle, c’est que le plus beau mot
de
toutes les langues est pipé sur nos lèvres par Satan. Nulle époque n’
1712
èvres par Satan. Nulle époque n’a parlé davantage
de
l’amour, avec si peu d’exigence réelle. Le diable nous a fait nommer
1713
poque n’a parlé davantage de l’amour, avec si peu
d’
exigence réelle. Le diable nous a fait nommer « amour » une vague obse
1714
, et dont les romans et les films sont les agents
de
diffusion. Cette obsession était devenue la grande affaire de notre c
1715
. Cette obsession était devenue la grande affaire
de
notre civilisation en temps de paix, — la religion de ceux qui n’en v
1716
la grande affaire de notre civilisation en temps
de
paix, — la religion de ceux qui n’en voulaient plus. Son empire s’est
1717
otre civilisation en temps de paix, — la religion
de
ceux qui n’en voulaient plus. Son empire s’est étendu sur les domaine
1718
brairie, sur la vente des parfums, sur l’activité
de
millions d’avocats et de médecins, sur les magazines illustrés, sur t
1719
la vente des parfums, sur l’activité de millions
d’
avocats et de médecins, sur les magazines illustrés, sur tous les comm
1720
parfums, sur l’activité de millions d’avocats et
de
médecins, sur les magazines illustrés, sur tous les commerces de mode
1721
r les magazines illustrés, sur tous les commerces
de
modes. Sur beaucoup plus ! Car elle a modifié notre échelle des valeu
1722
chelle des valeurs. La surestimation extravagante
de
l’amour — j’entends bien de cette forme de hantise qui ressemble à l’
1723
timation extravagante de l’amour — j’entends bien
de
cette forme de hantise qui ressemble à l’amour véritable comme la vil
1724
agante de l’amour — j’entends bien de cette forme
de
hantise qui ressemble à l’amour véritable comme la ville de Lyon à un
1725
qui ressemble à l’amour véritable comme la ville
de
Lyon à un lion — a déprimé progressivement dans notre époque le sens
1726
ssivement dans notre époque le sens et le respect
de
la tenue morale, du sacrifice au bien commun, des vertus viriles et d
1727
bonheur individuel est devenu notre tabou : signe
de
décadence d’une civilisation. Auguste obligé de choisir entre le trôn
1728
iduel est devenu notre tabou : signe de décadence
d’
une civilisation. Auguste obligé de choisir entre le trône et Bérénice
1729
e de décadence d’une civilisation. Auguste obligé
de
choisir entre le trône et Bérénice, renvoie la femme. Dans le même ca
1730
ique, avec l’approbation des foules. La décadence
de
la vertu est un thème millénaire de l’éloquence sacrée. Mais je signa
1731
La décadence de la vertu est un thème millénaire
de
l’éloquence sacrée. Mais je signale ici un trait plus inquiétant : la
1732
gnale ici un trait plus inquiétant : la décadence
de
la virtu dans notre siècle, sous l’effet de la publicité faite à l’am
1733
dence de la virtu dans notre siècle, sous l’effet
de
la publicité faite à l’amour vulgarisé. En toute époque, c’est à cert
1734
certaines nuances « modernes » des sentiments et
de
leurs modes que se révèle de la manière la plus précise l’œuvre du di
1735
» des sentiments et de leurs modes que se révèle
de
la manière la plus précise l’œuvre du diable. Ce qui distingue l’amou
1736
ce qui devrait disqualifier le très grand nombre
de
ceux qui s’en prévalent, c’est justement cette nuance d’obsession, et
1737
qui s’en prévalent, c’est justement cette nuance
d’
obsession, et la facilité qu’on montre à y céder. C’est une sinistre a
1738
n d’autres temps, on se défendait, on avait honte
de
perdre le contrôle de soi. C’était tout perdre, ou pire : c’était mal
1739
e défendait, on avait honte de perdre le contrôle
de
soi. C’était tout perdre, ou pire : c’était mal vu. Aujourd’hui l’obs
1740
e, — et moins encore un ridicule. Certes l’amour,
de
tous les sentiments, est celui qui se prête le mieux à justifier l’ab
1741
ui qui se prête le mieux à justifier l’abdication
de
soi, puisqu’à son comble il nous porte à donner notre vie même pour c
1742
ntre ce don viril et l’abandon, Satan ménage plus
d’
une pente insensible. Il sait que l’amour est le domaine par excellenc
1743
mieux sur ses motifs et ne se paye plus aisément
de
sophismes cousus de fil blanc. Nulle part le masochisme et l’égoïsme
1744
s et ne se paye plus aisément de sophismes cousus
de
fil blanc. Nulle part le masochisme et l’égoïsme étroit ne revêtent a
1745
ochisme et l’égoïsme étroit ne revêtent avec plus
de
succès les apparences du sacrifice. D’ailleurs, l’un des premiers eff
1746
u sacrifice. D’ailleurs, l’un des premiers effets
de
la passion est de nous empêcher de nous sentir coupables dans l’insta
1747
leurs, l’un des premiers effets de la passion est
de
nous empêcher de nous sentir coupables dans l’instant même où nous sa
1748
remiers effets de la passion est de nous empêcher
de
nous sentir coupables dans l’instant même où nous savons le mieux que
1749
le mieux que nous le sommes. Voyez cette héroïne
de
Stendhal : « Je ne me fais plus aucune illusion, lui disait-elle, mêm
1750
ait à commettre. » C’est l’un des plus vieux cris
de
l’humanité, le plus terriblement sincère ! Si par colère, orgueil, en
1751
être, vous pouvez éprouver du remords et le désir
de
réparer la faute. Mais si c’est par « amour », rien ne vous arrête, e
1752
oit ! Or à ce point l’amour devient indiscernable
de
l’égoïsme ou même de la haine. Non seulement la lucidité y est plus r
1753
’amour devient indiscernable de l’égoïsme ou même
de
la haine. Non seulement la lucidité y est plus rare et difficile qu’a
1754
u’au sein de toute autre passion, mais elle y est
de
surcroît parfaitement inutile. « Je vois bien le mal que je fais et l
1755
r en faire quelque chose l’appui sans restriction
d’
une morale dure, d’une coutume intransigeante, ou d’une foi plus forte
1756
chose l’appui sans restriction d’une morale dure,
d’
une coutume intransigeante, ou d’une foi plus forte que la vie. Il fau
1757
une morale dure, d’une coutume intransigeante, ou
d’
une foi plus forte que la vie. Il faudrait un critère permettant de qu
1758
rte que la vie. Il faudrait un critère permettant
de
qualifier d’égoïsme, de haine ou de maladie psychique tout amour dont
1759
e. Il faudrait un critère permettant de qualifier
d’
égoïsme, de haine ou de maladie psychique tout amour dont les fruits s
1760
ait un critère permettant de qualifier d’égoïsme,
de
haine ou de maladie psychique tout amour dont les fruits sont amers,
1761
re permettant de qualifier d’égoïsme, de haine ou
de
maladie psychique tout amour dont les fruits sont amers, le privant a
1762
r dont les fruits sont amers, le privant aussitôt
de
ses droits absolus. Mais nous avons une morale romantique exaltant la
1763
ue exaltant la passion « fatale » : c’en est fait
de
la toute petite chance de liberté qui nous restait. Cette « fatalité
1764
atale » : c’en est fait de la toute petite chance
de
liberté qui nous restait. Cette « fatalité » de la passion n’est qu’u
1765
e de liberté qui nous restait. Cette « fatalité »
de
la passion n’est qu’une manière de parler romanesque, mais combien d’
1766
e « fatalité » de la passion n’est qu’une manière
de
parler romanesque, mais combien d’amoureux s’en autorisent pour évite
1767
qu’une manière de parler romanesque, mais combien
d’
amoureux s’en autorisent pour éviter d’avouer leurs vraies raisons, le
1768
is combien d’amoureux s’en autorisent pour éviter
d’
avouer leurs vraies raisons, leurs complaisances, leurs volontés secrè
1769
le diable a substitué dans nos esprits le respect
de
la sincérité au respect — même distant et théorique — du bien de l’au
1770
au respect — même distant et théorique — du bien
de
l’autre et de la foi jurée. Sublime astuce, car cette sincérité garde
1771
même distant et théorique — du bien de l’autre et
de
la foi jurée. Sublime astuce, car cette sincérité garde encore le nom
1772
e astuce, car cette sincérité garde encore le nom
d’
une vertu. Mais voici comment elle agit dans un monde où elle ne sert
1773
t la loi ou devant Dieu, vous prenez l’engagement
d’
être fidèle « dans les bons et les mauvais jours », quoi qu’il advienn
1774
notre fidélité, quand elle s’oppose à la loi même
de
la Vie ? Est-il « sincère » de s’y cramponner ? J’ai juré, soit, mais
1775
pose à la loi même de la Vie ? Est-il « sincère »
de
s’y cramponner ? J’ai juré, soit, mais je ne suis plus le même. Et dè
1776
r malheur, ce beau raisonnement détruit les bases
de
tout traité, de toute parole donnée ou échangée, enfin du langage mêm
1777
au raisonnement détruit les bases de tout traité,
de
toute parole donnée ou échangée, enfin du langage même et de la possi
1778
role donnée ou échangée, enfin du langage même et
de
la possibilité de s’entendre sur quoi que ce soit. Car pourquoi fait-
1779
angée, enfin du langage même et de la possibilité
de
s’entendre sur quoi que ce soit. Car pourquoi fait-on des serments ?
1780
al. Mais si l’on pense qu’il est plus « sincère »
de
suivre son instinct que de garder parole, que le bonheur vaut mieux q
1781
l est plus « sincère » de suivre son instinct que
de
garder parole, que le bonheur vaut mieux que la vérité, et que l’inté
1782
vérité, et que l’intérêt « vital » ne connaît pas
de
loi, alors on entre dans un monde où l’hitlérisme est justifié. L’ord
1783
’en vertu d’un effort constant contre ce genre-là
de
« sincérité » ; qu’en vertu d’une constante « hypocrisie » s’efforçan
1784
vertu d’une constante « hypocrisie » s’efforçant
de
subordonner nos petits bonheurs à la justice, nos désirs à l’amour du
1785
la tête ce qui unit les hommes — la compréhension
de
l’utilité et du préjudice général — et dans le cœur ce qui sépare — l
1786
r que le diable nous a pris. Certes, ce n’est pas
d’
hier qu’on trompe sa femme, et qu’on trahit ses serments par amour. «
1787
la faute qui me paraît nouvelle, c’est la manière
de
l’accepter au nom de la Vie et de la Sincérité, — devises de faibles.
1788
’est la manière de l’accepter au nom de la Vie et
de
la Sincérité, — devises de faibles. ⁂ L’amour moderne, si j’en crois
1789
er au nom de la Vie et de la Sincérité, — devises
de
faibles. ⁂ L’amour moderne, si j’en crois nos romanciers et les stati
1790
si j’en crois nos romanciers et les statistiques
de
divorce, atteint un degré de complexité inégalé dans toute l’Histoire
1791
et les statistiques de divorce, atteint un degré
de
complexité inégalé dans toute l’Histoire : trouble mélange de pathéti
1792
é inégalé dans toute l’Histoire : trouble mélange
de
pathétique sentimental, de freudisme mal digéré, d’égoïste sincérité,
1793
oire : trouble mélange de pathétique sentimental,
de
freudisme mal digéré, d’égoïste sincérité, d’idées sur le droit au bo
1794
pathétique sentimental, de freudisme mal digéré,
d’
égoïste sincérité, d’idées sur le droit au bonheur, d’intensité nerveu
1795
al, de freudisme mal digéré, d’égoïste sincérité,
d’
idées sur le droit au bonheur, d’intensité nerveuse et de faiblesse de
1796
oïste sincérité, d’idées sur le droit au bonheur,
d’
intensité nerveuse et de faiblesse de caractère. Au cinéma, c’est plus
1797
sur le droit au bonheur, d’intensité nerveuse et
de
faiblesse de caractère. Au cinéma, c’est plus aimable et moins ressem
1798
au bonheur, d’intensité nerveuse et de faiblesse
de
caractère. Au cinéma, c’est plus aimable et moins ressemblant. Dans l
1799
t. Dans la vie — regardez dans vos vies —, il y a
de
tout bien sûr, il y a de bons ménages et des sentiments authentiques,
1800
dans vos vies —, il y a de tout bien sûr, il y a
de
bons ménages et des sentiments authentiques, mais il y a ce que décri
1801
t certainement, il y a bien pire. Surtout, il y a
de
moins en moins de passions fortes, simplement parce que nous cherchon
1802
y a bien pire. Surtout, il y a de moins en moins
de
passions fortes, simplement parce que nous cherchons la passion pour
1803
ui d’abord leur résistent. L’importance démesurée
de
« l’amour » dans nos mœurs, moins comme réalité que comme arrière-pen
1804
perpétuelle et nostalgie, révèle toute l’étendue
de
notre ennui, le dégoût de l’homme moyen pour sa vie quotidienne, l’ab
1805
révèle toute l’étendue de notre ennui, le dégoût
de
l’homme moyen pour sa vie quotidienne, l’absence de buts et d’intérêt
1806
l’homme moyen pour sa vie quotidienne, l’absence
de
buts et d’intérêts puissants capables d’absorber nos rêves. Ce culte
1807
yen pour sa vie quotidienne, l’absence de buts et
d’
intérêts puissants capables d’absorber nos rêves. Ce culte de la passi
1808
’absence de buts et d’intérêts puissants capables
d’
absorber nos rêves. Ce culte de la passion toujours fuyante, j’y vois
1809
puissants capables d’absorber nos rêves. Ce culte
de
la passion toujours fuyante, j’y vois le signe d’une espèce de névros
1810
de la passion toujours fuyante, j’y vois le signe
d’
une espèce de névrose ou de vertige épidémique : le besoin d’être dépo
1811
toujours fuyante, j’y vois le signe d’une espèce
de
névrose ou de vertige épidémique : le besoin d’être dépossédé de soi,
1812
nte, j’y vois le signe d’une espèce de névrose ou
de
vertige épidémique : le besoin d’être dépossédé de soi, donc possédé
1813
e de névrose ou de vertige épidémique : le besoin
d’
être dépossédé de soi, donc possédé par l’extérieur ou l’étranger, par
1814
e vertige épidémique : le besoin d’être dépossédé
de
soi, donc possédé par l’extérieur ou l’étranger, par une chose, par u
1815
les faiblesses qu’il autorise, il est grand temps
de
le disqualifier au nom et pour l’amour de l’amour même. Il est temps
1816
d temps de le disqualifier au nom et pour l’amour
de
l’amour même. Il est temps de décourager les innombrables amateurs sa
1817
nom et pour l’amour de l’amour même. Il est temps
de
décourager les innombrables amateurs sans vocation qui l’apprennent p
1818
uctures qui nous protégeaient contre les paniques
de
l’instinct. La morale bourgeoise est trop faible. Quand les romancier
1819
r aux valeurs dures et rationnelles. Elle se doit
de
restaurer d’urgence des interdits drastiques, des préjugés solides —
1820
dures et rationnelles. Elle se doit de restaurer
d’
urgence des interdits drastiques, des préjugés solides — même si le di
1821
haîner la tyrannie, bientôt sanglante, des démons
de
la jungle intérieure. Telle est la leçon de notre crise. C’est une qu
1822
émons de la jungle intérieure. Telle est la leçon
de
notre crise. C’est une question de physique sociale plus que de vertu
1823
e est la leçon de notre crise. C’est une question
de
physique sociale plus que de vertu, une question de vie ou de mort po
1824
. C’est une question de physique sociale plus que
de
vertu, une question de vie ou de mort pour notre civilisation et pour
1825
physique sociale plus que de vertu, une question
de
vie ou de mort pour notre civilisation et pour tout ordre, quel qu’il
1826
sociale plus que de vertu, une question de vie ou
de
mort pour notre civilisation et pour tout ordre, quel qu’il soit, qui
1827
out ordre, quel qu’il soit, qui mérite l’épithète
d’
humain. 52. La Passion Je parlerai maintenant de l’amour même,
1828
ain. 52. La Passion Je parlerai maintenant
de
l’amour même, non plus de ses contrefaçons. Je parlerai de la passion
1829
Je parlerai maintenant de l’amour même, non plus
de
ses contrefaçons. Je parlerai de la passion dans son éclat. L’amour-p
1830
r même, non plus de ses contrefaçons. Je parlerai
de
la passion dans son éclat. L’amour-passion, signe particulier de la p
1831
ans son éclat. L’amour-passion, signe particulier
de
la psyché occidentale, est né d’un retour de flamme du christianisme
1832
igne particulier de la psyché occidentale, est né
d’
un retour de flamme du christianisme dans les marges de l’hérésie. Inc
1833
lier de la psyché occidentale, est né d’un retour
de
flamme du christianisme dans les marges de l’hérésie. Inconnu de l’An
1834
retour de flamme du christianisme dans les marges
de
l’hérésie. Inconnu de l’Antiquité et de l’Orient, il ne peut exister
1835
ristianisme dans les marges de l’hérésie. Inconnu
de
l’Antiquité et de l’Orient, il ne peut exister que dans une civilisat
1836
es marges de l’hérésie. Inconnu de l’Antiquité et
de
l’Orient, il ne peut exister que dans une civilisation marquée par la
1837
ation marquée par la croyance en la valeur unique
de
chaque être. Il suppose un objet irremplaçable, et comme prédestiné p
1838
enne à l’origine, et dont cette phrase du Mystère
de
Jésus nous donne peut-être l’expression la plus poignante : « Je pens
1839
is à toi dans mon agonie, j’ai versé telle goutte
de
sang pour toi. » Mais l’idée du divin dans un être, source et objet d
1840
ais l’idée du divin dans un être, source et objet
de
tout amour profond, va faire naître l’idolâtrie pour peu que l’élan q
1841
isse et s’arrête à l’image créée. Le désir infini
de
l’âme souffre alors des limitations d’un objet qui résiste et qui bie
1842
sir infini de l’âme souffre alors des limitations
d’
un objet qui résiste et qui bientôt l’embrase. Secrètement déçu, mais
1843
’indistinction. Et finalement, passant les bornes
de
la réalité disqualifiée et de la vie jamais assez vivante, il se jett
1844
passant les bornes de la réalité disqualifiée et
de
la vie jamais assez vivante, il se jette avec lui dans la mort. Extas
1845
ec lui dans la mort. Extase des derniers instants
de
Tristan et d’Isolde, ou des amants de Vérone. La contradiction tortur
1846
mort. Extase des derniers instants de Tristan et
d’
Isolde, ou des amants de Vérone. La contradiction torturante que souff
1847
rs instants de Tristan et d’Isolde, ou des amants
de
Vérone. La contradiction torturante que souffre l’infini désir séduit
1848
origine et cette catastrophe ne cesseront jamais
d’
être instantes au cœur secret de la passion occidentale. L’une, ignoré
1849
cesseront jamais d’être instantes au cœur secret
de
la passion occidentale. L’une, ignorée ou reniée, demeure à l’arrière
1850
lan lointain, l’autre, voilée, attend à l’horizon
de
tout amour digne du nom de passion. C’est pourquoi la passion peut bi
1851
ée, attend à l’horizon de tout amour digne du nom
de
passion. C’est pourquoi la passion peut bien être le lieu de la plus
1852
C’est pourquoi la passion peut bien être le lieu
de
la plus grande intensité vitale, en même temps qu’elle se fait l’agen
1853
véritable, car elle suppose une très grande force
d’
imagination créatrice ; des dispositions spirituelles à la fois délica
1854
vé leur véritable objet ; un pouvoir exceptionnel
de
concentration, c’est-à-dire de fidélité ; enfin le mépris des biens t
1855
uvoir exceptionnel de concentration, c’est-à-dire
de
fidélité ; enfin le mépris des biens terrestres et du bonheur. Ce com
1856
it croire. Je mets en fait qu’il n’y a guère plus
de
grands amants que de vrais mystiques, la passion étant au sentimental
1857
fait qu’il n’y a guère plus de grands amants que
de
vrais mystiques, la passion étant au sentimentalisme normal ce que la
1858
n moyenne. Mais la passion comme la mystique sont
de
ces attitudes capitales dont les très rares moments de pureté suffise
1859
s attitudes capitales dont les très rares moments
de
pureté suffisent à déterminer l’atmosphère d’un ensemble humain comme
1860
nts de pureté suffisent à déterminer l’atmosphère
d’
un ensemble humain comme celui que l’on nomme Occident. Et les minimes
1861
à cet ensemble. Or tout ce que l’on vient de dire
de
la passion suffit à laisser voir les chances extraordinaires qu’elle
1862
tabilité des états et des jugements, qui changent
de
signe en un instant, jointe à l’extrême intensité des sensations parf
1863
rême intensité des sensations parfois simultanées
de
présence et d’absence infinie, créent chez tout être passionné l’illu
1864
des sensations parfois simultanées de présence et
d’
absence infinie, créent chez tout être passionné l’illusion d’un trans
1865
finie, créent chez tout être passionné l’illusion
d’
un transport mystique dans l’au-delà du bien et du mal. Une vraie pass
1866
nt « légitimes » ou non. Passer outre est le fait
de
la passion. Mais sacrifie-t-on l’autre ou soi ? Et dans soi, le meill
1867
u, il donne ce qu’il n’a pas en soi mais qui naît
de
l’exaltation, il donne enfin ce qu’il est, sans réserve. Mais à ce po
1868
ui, il s’y était accoutumé, établissant une sorte
d’
équilibre du microbe et de la maladie. Mais s’il le communique à un êt
1869
, établissant une sorte d’équilibre du microbe et
de
la maladie. Mais s’il le communique à un être plus faible, ou plus pu
1870
n’est pas armé pour composer avec cette espèce-là
de
mal, il risque d’altérer ou de détruire l’objet de sa tendresse et l’
1871
r composer avec cette espèce-là de mal, il risque
d’
altérer ou de détruire l’objet de sa tendresse et l’amour même. Ces se
1872
ec cette espèce-là de mal, il risque d’altérer ou
de
détruire l’objet de sa tendresse et l’amour même. Ces secrets monstru
1873
e mal, il risque d’altérer ou de détruire l’objet
de
sa tendresse et l’amour même. Ces secrets monstrueux, ignorés de nous
1874
et l’amour même. Ces secrets monstrueux, ignorés
de
nous-mêmes, que notre passion livre à l’être aimé dans la contagion d
1875
délire, voici qu’ils apparaissent comme des dons
de
la haine. Il est rare que l’amour ne soit pas criminel, d’une manière
1876
ne. Il est rare que l’amour ne soit pas criminel,
d’
une manière invisible peut-être, quand il dépasse les bornes d’une sob
1877
invisible peut-être, quand il dépasse les bornes
d’
une sobriété d’ailleurs presque impossible à définir. Et toute passion
1878
le viol spirituel. Et si l’on veut tout posséder
d’
un être, on risque bien d’en faire un possédé. Où donc le diable est-i
1879
l’on veut tout posséder d’un être, on risque bien
d’
en faire un possédé. Où donc le diable est-il intervenu ? Ce Désir qui
1880
’indicible Vérité, comme un élan vers la guérison
de
l’être blessé, vers la plénitude et vers la rédemption, voici qu’il s
1881
s la rédemption, voici qu’il se fait l’instrument
de
nos plus épuisantes tortures. À quel moment l’amour est-il devenu sou
1882
’amour est-il devenu souffrance ? Dans le langage
de
la théologie, il est aisé de définir le point : c’est à l’instant où
1883
ce ? Dans le langage de la théologie, il est aisé
de
définir le point : c’est à l’instant où la passion transgresse les li
1884
à l’instant où la passion transgresse les limites
de
la créature et s’emporte à la diviniser, que le Tentateur a parlé. «
1885
tout vous est permis… » Mais encore, ce mouvement
de
l’orgueil fantastique, comment le distinguer d’une sensation de grâce
1886
t de l’orgueil fantastique, comment le distinguer
d’
une sensation de grâce inséparable de toute vraie passion — et la grâc
1887
antastique, comment le distinguer d’une sensation
de
grâce inséparable de toute vraie passion — et la grâce nous délivre d
1888
e distinguer d’une sensation de grâce inséparable
de
toute vraie passion — et la grâce nous délivre de la loi… Poursuivons
1889
de toute vraie passion — et la grâce nous délivre
de
la loi… Poursuivons cette analogie. Le coup de foudre est le reflet d
1890
s cette analogie. Le coup de foudre est le reflet
d’
une conversion. Il ne se discute pas davantage. Vous êtes élu « parce
1891
est elle ». L’amour accepte avec joie ce mystère,
d’
une « injustice » aussi flagrante, cependant, que celle que l’on repro
1892
lle que l’on reproche à la doctrine augustinienne
de
l’élection. Pour la passion, tout est destin, rien n’est mérite, et l
1893
est destin, rien n’est mérite, et le « scandale »
de
la double prédestination, au salut ou à la damnation, se reproduit da
1894
ueille ou que l’on rejette un être, dans le temps
d’
un premier regard. Voici l’accueil, et l’on entre en passion comme on
1895
ue. On renonce au monde, on s’enclot avec l’image
de
l’objet aimé. Mais le diable est assis dans un coin de la cellule. Il
1896
objet aimé. Mais le diable est assis dans un coin
de
la cellule. Il ne fait rien, il vous attend. Il connaît la logique de
1897
fait rien, il vous attend. Il connaît la logique
de
la passion. Il attend votre pire souffrance, son seul baume. Il a ces
1898
votre pire souffrance, son seul baume. Il a cessé
de
sourire, il est à son affaire, guettant les premiers plis de la paniq
1899
il est à son affaire, guettant les premiers plis
de
la panique à votre front. Que va devenir votre bonheur ? Pourquoi l’ê
1900
e aimé vous manque-t-il ? Pourquoi s’éloigne-t-il
de
l’image adorée ? S’il reste libre, ne va-t-il pas vous échapper ? Et
1901
t-être bientôt vous haïr ? Alors vous l’accuserez
d’
une injustice dont il n’est pas plus responsable que vous ne l’étiez d
1902
il n’est pas plus responsable que vous ne l’étiez
de
votre choix. Qu’il se détourne de vous pour un temps, voici le monde
1903
vous ne l’étiez de votre choix. Qu’il se détourne
de
vous pour un temps, voici le monde dépeuplé. Qu’il vous repousse, et
1904
é. Qu’il vous repousse, et vous voici comme exclu
de
la réalité. Mais il y a pire. La passion la plus forte est celle qui
1905
La passion la plus forte est celle qui se nourrit
d’
obstacles, et qui bientôt les crée s’ils viennent à faire défaut. Cet
1906
ils viennent à faire défaut. Cet usage mystifiant
de
la réalité, qu’elle soit sociale, morale, ou naturelle, entraîne un m
1907
r. Certes, le passionné affecte souvent une sorte
de
respect méticuleux de la vérité, dans toutes les occasions où il le p
1908
é affecte souvent une sorte de respect méticuleux
de
la vérité, dans toutes les occasions où il le peut sans compromettre
1909
licence absolue qu’il s’accorde dès qu’il s’agit
de
satisfaire ou de préserver sa passion. Madame Guyon rapporte qu’elle
1910
qu’il s’accorde dès qu’il s’agit de satisfaire ou
de
préserver sa passion. Madame Guyon rapporte qu’elle dut mentir un jou
1911
ulait pas que ses laquais fussent mis dans le cas
de
répéter ce même mensonge, car, dit-elle avec naïveté, « j’avais moi-m
1912
ême pour le mensonge ». Jalousie, injustice, état
de
mensonge constant, perte du sens des devoirs immédiats, faiblesses ex
1913
ration, — c’est peu dire, car les vrais tourments
de
la passion sont indicibles par essence, ou ne trouveraient à s’exprim
1914
finit par voir dans ses souffrances le signe même
de
l’authenticité de sa passion. Alors il ne voit plus qu’il aime peut-ê
1915
s ses souffrances le signe même de l’authenticité
de
sa passion. Alors il ne voit plus qu’il aime peut-être comme on hait,
1916
de tyrannise ou méprise, que ses dons sont autant
de
violences intimes, et qu’il en vient à souffrir davantage par l’absen
1917
qu’il en vient à souffrir davantage par l’absence
de
l’être aimé qu’il n’a de joie par sa présence. Dans ce dédale de nos
1918
davantage par l’absence de l’être aimé qu’il n’a
de
joie par sa présence. Dans ce dédale de nos enfers privés, quel talis
1919
qu’il n’a de joie par sa présence. Dans ce dédale
de
nos enfers privés, quel talisman pourrions-nous emporter pour déjouer
1920
ns réjouir le diable ou susciter les plus subtils
de
ses démons. Il faudrait une abnégation dont les plus grands mystiques
1921
capables. Il faudrait surtout conserver la règle
d’
or de l’amour du prochain, de l’Agapè qui seul peut brider notre Éros
1922
bles. Il faudrait surtout conserver la règle d’or
de
l’amour du prochain, de l’Agapè qui seul peut brider notre Éros et le
1923
t conserver la règle d’or de l’amour du prochain,
de
l’Agapè qui seul peut brider notre Éros et le sauver de ses propres f
1924
gapè qui seul peut brider notre Éros et le sauver
de
ses propres fureurs. Rien de moins ne saurait composer les exigences
1925
re Éros et le sauver de ses propres fureurs. Rien
de
moins ne saurait composer les exigences d’une passion avec celles de
1926
. Rien de moins ne saurait composer les exigences
d’
une passion avec celles de la déficiente réalité, avec la liberté de l
1927
composer les exigences d’une passion avec celles
de
la déficiente réalité, avec la liberté de l’être aimé et le respect d
1928
celles de la déficiente réalité, avec la liberté
de
l’être aimé et le respect de son mystère. Rien de moins ne suffirait
1929
ité, avec la liberté de l’être aimé et le respect
de
son mystère. Rien de moins ne suffirait pour construire ce chef-d’œuv
1930
de l’être aimé et le respect de son mystère. Rien
de
moins ne suffirait pour construire ce chef-d’œuvre de l’amour vrai :
1931
oins ne suffirait pour construire ce chef-d’œuvre
de
l’amour vrai : l’alliance de deux êtres qui s’acceptent, qui ne sont
1932
uire ce chef-d’œuvre de l’amour vrai : l’alliance
de
deux êtres qui s’acceptent, qui ne sont plus l’un pour l’autre des pr
1933
sexe Le jeune lecteur qui parcourt le sommaire
de
ce livre se rue sur le chapitre 53. Voilà le point ! pense-t-il. Quel
1934
e réside dans la sexualité. L’illusion s’aperçoit
d’
une manière assez simple : la sexualité est le domaine des tentations
1935
es plus sensibles et les plus communes. Assez peu
d’
hommes sont réellement tentés de voler le portefeuille du voisin, mais
1936
mmunes. Assez peu d’hommes sont réellement tentés
de
voler le portefeuille du voisin, mais presque tout homme s’est vu ten
1937
du voisin, mais presque tout homme s’est vu tenté
de
prendre la femme du voisin, soit en recourant aux raisons pathétiques
1938
ital ! » — soit en se persuadant que « ça n’a pas
d’
importance » ; ou les deux ensemble. En vérité, la sexualité en soi n’
1939
originel fut l’acte sexuel, dont la consommation
de
la pomme serait le symbole, c’est parce qu’ils assimilent le péché en
1940
e que l’on croit, notez que ce n’est pas le geste
de
manger une pomme qui était mauvais aux yeux de l’Éternel, ni la pomme
1941
en soi (au contraire), mais seulement la révolte
d’
Ève et son désir de se diviniser à sa façon. Si la sexualité pouvait r
1942
re), mais seulement la révolte d’Ève et son désir
de
se diviniser à sa façon. Si la sexualité pouvait rester pure, c’est-à
1943
elle va se pervertir et devenir à son tour source
de
perversion. La paillardise joyeuse est certainement l’une des formes
1944
s diaboliques du péché. Je n’en dirais pas autant
de
certaines amours pseudo-mystiques, nœuds de sophismes spirituels où l
1945
utant de certaines amours pseudo-mystiques, nœuds
de
sophismes spirituels où le serpent se love avec délices. La sexualité
1946
autres fonctions naturelles par un certain manque
de
nécessité. Il est nécessaire de manger et de respirer, et il est néce
1947
un certain manque de nécessité. Il est nécessaire
de
manger et de respirer, et il est nécessaire que le sang circule, mais
1948
nque de nécessité. Il est nécessaire de manger et
de
respirer, et il est nécessaire que le sang circule, mais on peut vivr
1949
nscient. D’autre part, il est lié à la créativité
de
l’homme, il en est l’aspect corporel, le symbole ou le signe physique
1950
est libre, c’est-à-dire parce qu’il peut choisir
de
créer selon l’ordre divin, ou au contraire selon ses propres utopies.
1951
res utopies. C’est donc en tant qu’elle participe
de
notre libre créativité, comme le langage et les activités de l’esprit
1952
bre créativité, comme le langage et les activités
de
l’esprit, que la sexualité donne prise au diable. Et certes il ne s’y
1953
i rend un culte obsédé. L’idéalisation romantique
de
l’amour dans l’époque moderne, entraînant une pruderie morbide du lan
1954
tout expliquer » par les censures et refoulements
de
la morale en vigueur dans son milieu, et de son temps. D’où l’on devr
1955
ments de la morale en vigueur dans son milieu, et
de
son temps. D’où l’on devrait déduire que le meilleur moyen de préveni
1956
rale en vigueur dans son milieu, et de son temps.
D’
où l’on devrait déduire que le meilleur moyen de prévenir les états de
1957
. D’où l’on devrait déduire que le meilleur moyen
de
prévenir les états de possession satanique et les névroses nées de tr
1958
duire que le meilleur moyen de prévenir les états
de
possession satanique et les névroses nées de troubles sexuels, serait
1959
tats de possession satanique et les névroses nées
de
troubles sexuels, serait simplement la franchise, non pas « scientifi
1960
e en proposant une licence absolue. Or, l’absence
de
contraintes choisies rend la sexualité insignifiante, et déprime secr
1961
insignifiante, et déprime secrètement l’humanité
de
l’homme. Le sexe n’est pas plus divin qu’il n’est honteux, mais il es
1962
st lié intimement aux fonctions les plus humaines
de
l’homme, à ses pouvoirs de création dans tous les ordres, à ses jugem
1963
ions les plus humaines de l’homme, à ses pouvoirs
de
création dans tous les ordres, à ses jugements esthétiques ou moraux,
1964
, à tout ce qui qualifie l’individu et lui permet
de
se posséder en tant que personne responsable. L’indifférence croissan
1965
nterdits qui prêtaient à l’acte sexuel la gravité
d’
un engagement, cette espèce d’insouciance morale se traduit moins par
1966
e sexuel la gravité d’un engagement, cette espèce
d’
insouciance morale se traduit moins par une libération que par une fla
1967
présence de cet affadissement, l’on serait tenté
de
regretter le temps où Satan proposait des combats plus féconds… 5
1968
ais le diable y trouve l’occasion la plus commune
de
nous faire abuser de notre liberté. Reste la femme, dont l’homme ne s
1969
e l’occasion la plus commune de nous faire abuser
de
notre liberté. Reste la femme, dont l’homme ne se lassera jamais de f
1970
Reste la femme, dont l’homme ne se lassera jamais
de
faire un ange ou un démon. « Instrument dont use le diable pour possé
1971
t Cyprien, et Tertullien plus énergique : « Porte
de
l’Enfer ! » Mais Goethe et tous les romantiques la divinisent. Souven
1972
tous les romantiques la divinisent. Souvenez-vous
de
l’exaltation finale du Second Faust : « L’Éternel féminin nous entraî
1973
s les hauteurs »… En vérité, la femme n’est porte
de
l’Enfer que pour ceux qui se laissent aller à voir en elle une porte
1974
el. Montaigne le dit bien, contre les romantiques
de
tous les temps : « Entre nous, ce sont choses que j’ai toujours vues
1975
Entre nous, ce sont choses que j’ai toujours vues
de
singulier accord : les opinions supercélestes et les mœurs souterrain
1976
les mœurs souterraines. » S’il y a quelque chose
de
démoniaque dans la femme, c’est sans doute moins dans sa nature que d
1977
ns doute moins dans sa nature que dans sa faculté
d’
oublier cette nature, de se tromper sur elle, ou de laisser les autres
1978
ature que dans sa faculté d’oublier cette nature,
de
se tromper sur elle, ou de laisser les autres s’y tromper. Qu’elle so
1979
’oublier cette nature, de se tromper sur elle, ou
de
laisser les autres s’y tromper. Qu’elle soit moins bien armée que l’h
1980
mme contre Satan, c’est ce que fait voir le récit
de
la Chute. Croyez bien que ce n’est point par politesse que le serpent
1981
jamais rien sans calcul. Mais voilà ce romantique
d’
Adam qui s’y laisse prendre. Il s’imagine que la belle Ève, grâce à so
1982
« Das ewig weibliche zieht uns hinan ! », dit-il
d’
un air ému, et il mord dans la pomme. C’est à ce moment que le mal est
1983
mais plus facilement égarée, parce qu’elle manque
d’
objectivité, de sécheresse dans l’appréciation, de distance par rappor
1984
ement égarée, parce qu’elle manque d’objectivité,
de
sécheresse dans l’appréciation, de distance par rapport au réel, ou e
1985
d’objectivité, de sécheresse dans l’appréciation,
de
distance par rapport au réel, ou en un mot : de rhétorique. Elle met
1986
, de distance par rapport au réel, ou en un mot :
de
rhétorique. Elle met trop peu de raison dans l’exercice ému de sa cha
1987
. Elle met trop peu de raison dans l’exercice ému
de
sa charité, et trop peu d’ironie dans l’exercice occasionnel de sa ra
1988
on dans l’exercice ému de sa charité, et trop peu
d’
ironie dans l’exercice occasionnel de sa raison. Elle manque de forme,
1989
et trop peu d’ironie dans l’exercice occasionnel
de
sa raison. Elle manque de forme, et c’est à l’homme de lui en donner.
1990
l’exercice occasionnel de sa raison. Elle manque
de
forme, et c’est à l’homme de lui en donner. Mais si l’homme au contra
1991
raison. Elle manque de forme, et c’est à l’homme
de
lui en donner. Mais si l’homme au contraire se met à l’adorer, à rend
1992
un culte aux valeurs féminines, il prive la femme
de
ses appuis et transforme la tentation dans laquelle elle glissait en
1993
ble. C’est Ève qui a commencé. Mais c’est à cause
d’
Adam que les choses ont si mal tourné. Saint Paul dit que le mari est
1994
al tourné. Saint Paul dit que le mari est le chef
de
la femme, et que la femme sans l’homme ne peut être sauvée. C’est une
1995
scription. (Saint Paul est le plus grand réaliste
de
tous les temps.) Mais le culte romantique de la femme a inverti cet o
1996
iste de tous les temps.) Mais le culte romantique
de
la femme a inverti cet ordre naturel. Trop d’abus de pouvoir masculin
1997
que de la femme a inverti cet ordre naturel. Trop
d’
abus de pouvoir masculins, et trop d’abdications aussi, l’ont fait par
1998
la femme a inverti cet ordre naturel. Trop d’abus
de
pouvoir masculins, et trop d’abdications aussi, l’ont fait paraître t
1999
aturel. Trop d’abus de pouvoir masculins, et trop
d’
abdications aussi, l’ont fait paraître tyrannique. Et toute l’évolutio
2000
nsensiblement, l’homme renonce à exercer son rôle
de
chef. La femme l’a persuadé qu’elle était opprimée. Il la croit, par
2001
tait opprimée. Il la croit, par fatigue, par gain
de
paix, ou par idéalisme mal placé. Tous ces facteurs ont créé dans nos
2002
dans nos mœurs un malaise fondamental. Une espèce
de
révolte sourde anime la femme contre sa condition. Dans cette liberté
2003
voici livrée à elle-même. Le jeu ou la complicité
de
l’égoïsme masculin et de l’astuce féminine en panique, multiplient de
2004
Le jeu ou la complicité de l’égoïsme masculin et
de
l’astuce féminine en panique, multiplient des conflits inextricables.
2005
t les relations sociales des deux sexes, à partir
d’
un mensonge à la nature ? L’expérience millénaire du couple permet d’i
2006
nature ? L’expérience millénaire du couple permet
d’
imaginer ce qui va se passer à l’échelle de la société. La femme qui n
2007
permet d’imaginer ce qui va se passer à l’échelle
de
la société. La femme qui n’est plus dominée par l’homme — que la faut
2008
elle ne conçoit sa « liberté » que sous la forme
d’
une passion pure, indépendante de tout objet, méprisant, sans toujours
2009
ue sous la forme d’une passion pure, indépendante
de
tout objet, méprisant, sans toujours se l’avouer, celui qui s’offre à
2010
s se l’avouer, celui qui s’offre à la fixer, — et
d’
autant plus qu’il y parvient. Vis-à-vis d’elle-même et d’autrui, sa pr
2011
r, — et d’autant plus qu’il y parvient. Vis-à-vis
d’
elle-même et d’autrui, sa première défense est de dire « qu’elle ne sa
2012
t plus qu’il y parvient. Vis-à-vis d’elle-même et
d’
autrui, sa première défense est de dire « qu’elle ne sait pas ce qui l
2013
d’elle-même et d’autrui, sa première défense est
de
dire « qu’elle ne sait pas ce qui lui arrive ». C’est une feinte, un
2014
elle. Chez l’homme qui se laisse aller à ce genre
d’
argument, c’est une lâcheté plus naïvement sincère… Mais il en fait, h
2015
l’opinion courante du temps, qui voient le signe
de
la vraie passion dans le cri « c’est plus fort que moi ! », l’on voud
2016
rait dire cette chose très simple : — Cessez donc
d’
aimer « malgré vous » et sachez un peu ce que vous faites, c’est une q
2017
hez un peu ce que vous faites, c’est une question
de
tenue morale, et c’est la condition d’un amour authentique. N’imitez
2018
e question de tenue morale, et c’est la condition
d’
un amour authentique. N’imitez pas le mensonge féminin, sinon les femm
2019
animé) Ils s’aimaient tant qu’ils ne cessaient
de
dire : Comment peut-on s’aimer autant ? Un beau soir, elle se mit à l
2020
le battre, et le laissa pour mort sur la descente
de
lit. Puis elle s’endormit, fatiguée. Le lendemain, il vivait encore.
2021
ts avant qu’ils aient quitté sa langue. Il essaya
de
dire : — Je t’aime, et prononça quelque chose comme : — Putain. Alors
2022
e te battrai encore. Dis-moi pourquoi j’ai besoin
de
te battre ? Mais lui pense dans sa tristesse : — Si je lui dis qu’ell
2023
s, elle le croira. Si je lui dis : — « Cesse donc
d’
être méchante », elle me demandera pourquoi elle est méchante. Or je l
2024
veux pas qu’elle soit désespérée. Le mieux serait
de
la quitter. Mais alors nous ne saurons jamais. Il se tait. — Cet homm
2025
L’histoire que l’on vient de lire peut être celle
d’
un couple, mais aussi, d’une certaine manière, celle des relations de
2026
de lire peut être celle d’un couple, mais aussi,
d’
une certaine manière, celle des relations de l’Allemagne et de l’Europ
2027
ussi, d’une certaine manière, celle des relations
de
l’Allemagne et de l’Europe, ou d’une masse quelconque et du Prince. O
2028
ne manière, celle des relations de l’Allemagne et
de
l’Europe, ou d’une masse quelconque et du Prince. Ou encore, elle fig
2029
e des relations de l’Allemagne et de l’Europe, ou
d’
une masse quelconque et du Prince. Ou encore, elle figure le conflit p
2030
e, elle figure le conflit permanent, dans le cœur
d’
un individu, entre le besoin d’anarchie et le besoin de conservation.
2031
nent, dans le cœur d’un individu, entre le besoin
d’
anarchie et le besoin de conservation. Parabole de la démission des pu
2032
individu, entre le besoin d’anarchie et le besoin
de
conservation. Parabole de la démission des puissances d’ordre dans le
2033
d’anarchie et le besoin de conservation. Parabole
de
la démission des puissances d’ordre dans le monde moderne. Même histo
2034
ervation. Parabole de la démission des puissances
d’
ordre dans le monde moderne. Même histoire, mêmes conflits sur tous le
2035
parce qu’elle a les mêmes sources, avec la crise
de
nos vies privées. Nous sommes au centre de tout le mal dès que nous l
2036
crise de nos vies privées. Nous sommes au centre
de
tout le mal dès que nous l’atteignons dans notre cœur. Lorsque nos ci
2037
point faillir, il eût fallu l’héroïque vigilance
d’
un saint. Ah ! mais jamais un saint ne se fût laissé tomber dans une s
2038
dernier cercle : dans cet enfer né du vertige et
de
l’effroi sinistre de l’orgueil, l’enfer de la passion qui n’a pas d’a
2039
s cet enfer né du vertige et de l’effroi sinistre
de
l’orgueil, l’enfer de la passion qui n’a pas d’autre objet que le mal
2040
ige et de l’effroi sinistre de l’orgueil, l’enfer
de
la passion qui n’a pas d’autre objet que le malheur qu’elle va créer,
2041
e de l’orgueil, l’enfer de la passion qui n’a pas
d’
autre objet que le malheur qu’elle va créer, en vertu de sa logique fo
2042
Évidemment, je n’aurais pas dû entrer. On fait
de
ces bêtises, par négligence, croit-on. Bref, je suis entré, c’était t
2043
ouges, comme lorsqu’on choisit une couleur au jeu
de
cartes, rouge ou noir. J’arrive à la salle de lecture. Il n’y avait q
2044
jeu de cartes, rouge ou noir. J’arrive à la salle
de
lecture. Il n’y avait que des feuilles de papier blanc sur les tables
2045
a salle de lecture. Il n’y avait que des feuilles
de
papier blanc sur les tables, et tout le monde lisait. Je dis : — Est-
2046
e ici ? Quelqu’un l’a-t-il vue ? Ils me regardent
d’
un air vexé. Un valet s’approche rapidement et me dit à voix basse : —
2047
is dit que : Fine day to-day, c’eût été une sorte
de
question ou de réponse. Je pensais que le mieux serait de m’en aller
2048
ne day to-day, c’eût été une sorte de question ou
de
réponse. Je pensais que le mieux serait de m’en aller sans bruit. Mai
2049
ion ou de réponse. Je pensais que le mieux serait
de
m’en aller sans bruit. Mais vous connaissez ces couloirs. Et je ne vo
2050
? C’était la question par excellence ! Le résumé
de
toutes mes erreurs, si vous voulez. Je trouve la porte du bureau dire
2051
t par-derrière, je ne puis l’expliquer autrement.
D’
une certaine manière, c’était mon propre regard qui traversait ses yeu
2052
elle. (Je tenais sa main. Je sentis qu’elle avait
de
la fièvre). Je suis là parce que tu es venu, tout simplement. Nous ét
2053
Nous étions couchés chez nous. Je ne sais combien
de
temps cela va durer. Elle délire et j’ai cette balle dans le cœur. Et
2054
r. Et voici que maintenant, je ne puis plus poser
de
question. Car si vous me dites que c’est une vraie balle que j’ai dan
2055
es questions possibles, et donc toute possibilité
de
réponse à quoi que ce soit. Laissez-moi donc seul. C’est mon ordre. E
2056
le cri même du désespoir, et c’est l’autosadisme
de
ce siècle. Tout est faux mais tout est réel. Puisqu’on en meurt de pl
2057
mar mais sans réveil possible. C’est le cauchemar
de
la réalité. La guerre existe autour de nous, elle est fausse, impossi
2058
ugmentent l’amertume. Elles nous suggèrent l’idée
d’
une possession… Est-ce nous vraiment qui avons laissé les choses en ve
2059
es choses en venir là ? Si ce n’est pas nous, qui
d’
Autre ? Ah, nous sommes tous complices ! Mais alors pourquoi mourrons-
2060
é que nous n’avons pas aimé assez pour l’empêcher
de
se perdre ? Pour un avenir que nous devinons à peine et savons encore
2061
us valable que la vie ? Et si nous ne voulons pas
de
foi, pour quelle vie plus valable que la foi ? C’est couru, notre mon
2062
ant. Cela paraît absurde et révoltant. Il est dur
de
se défaire de l’idée qu’on était né pour vivre heureux. Jadis la trag
2063
ît absurde et révoltant. Il est dur de se défaire
de
l’idée qu’on était né pour vivre heureux. Jadis la tragédie n’était q
2064
utres, et dans les livres ; et la voilà substance
de
nos vies. Encore un navire torpillé et comme le dit l’Amirauté : « Th
2065
victimes ont été informées. (Grand développement
de
l’information dans notre siècle !) Qu’on nous informe donc, une fois
2066
donc, une fois pour toutes, que nous sommes tous
de
la famille, et que nous sommes aussi les victimes. « Vous êtes tous m
2067
e temps nous sommes tous dans le bateau qui vient
d’
envoyer la torpille. Ce n’est pas une image, hélas, c’est simplement u
2068
st pas une image, hélas, c’est simplement une vue
d’
ensemble. (Tôt et tard confondus, ou plutôt embrassés d’un seul regard
2069
mble. (Tôt et tard confondus, ou plutôt embrassés
d’
un seul regard.) Que faudra-t-il encore pour que nous comprenions l’ét
2070
a-t-il encore pour que nous comprenions l’étendue
de
la catastrophe, et qu’elle est vraiment sans limites ? Et qu’il n’y a
2071
t. » Je sais, nous sommes en guerre, et il s’agit
de
gagner. Mais à quel Bien et à quel Mal avons-nous cru, pour montrer t
2072
n et à quel Mal avons-nous cru, pour montrer tout
d’
un coup tant d’assurance ? Se faire tuer pour la liberté d’avoir ses p
2073
avons-nous cru, pour montrer tout d’un coup tant
d’
assurance ? Se faire tuer pour la liberté d’avoir ses propres opinions
2074
tant d’assurance ? Se faire tuer pour la liberté
d’
avoir ses propres opinions, c’est magnifique, mais c’est aussi mettre
2075
le grabuge où nous sombrons ? J’ai décrit l’œuvre
de
Satan, et cela finit dans un cauchemar qui ressemble à s’y méprendre
2076
illé, c’est-à-dire dévêtu des oripeaux tout-faits
de
l’illusion — c’est peut-être sa cruauté. Mais si l’époque est sans is
2077
le cauchemar est vrai cette fois, s’il n’est plus
de
réveil possible, pourquoi le dire et troubler davantage ? « Ôter ses
2078
attristé »…24 ⁂ Mais j’entendais un chant plein
de
force et de grâce, quelque part au secret de la vie, quand la clameur
2079
24 ⁂ Mais j’entendais un chant plein de force et
de
grâce, quelque part au secret de la vie, quand la clameur du néant s’
2080
lein de force et de grâce, quelque part au secret
de
la vie, quand la clameur du néant s’abaissait, quelque part au-dessus
2081
meur du néant s’abaissait, quelque part au-dessus
de
la mort, comme une grande fugue puissante et soutenue, quand tout sem
2082
n, mais il est plus dur que la mort et le mutisme
de
la mort, il est plus pur que nos douleurs, je l’ai nommé : cantique a
2083
ans l’Amérique contemporaine, est une laïcisation
de
l’hérésie des puritains, qui déformèrent le calvinisme au point de lu
2084
puritains, qui déformèrent le calvinisme au point
de
lui faire dire que le succès matériel est une marque d’élection. Il s
2085
faire dire que le succès matériel est une marque
d’
élection. Il se peut que les grandes fortunes puritaines soient nées d
2086
t que les grandes fortunes puritaines soient nées
d’
un pacte avec le diable, béni et enregistré par les pasteurs. Mais san
2087
puritains, il y avait sans doute, plus que l’idée
de
gain, l’idée « catholique » au sens large, du rachat de la création p
2088
n, l’idée « catholique » au sens large, du rachat
de
la création par le travail et la vertu. 19. À cet égard, Hitler aura
2089
À cet égard, Hitler aura été le plus grand diseur
de
bonne aventure du siècle. 20. Kierkegaard. 21. Genèse 3, 8-13. 22.
2090
8-13. 22. Stendhal. 23. Selon cette conception
de
la sincérité il serait hypocrite de dire la vérité quand on a fort en
2091
te conception de la sincérité il serait hypocrite
de
dire la vérité quand on a fort envie de mentir. 24. Proverbes, 15-20
2092
hypocrite de dire la vérité quand on a fort envie
de
mentir. 24. Proverbes, 15-20.
2093
ble Ne réponds pas à l’insensé selon sa folie
De
peur que tu ne lui ressembles toi-même. Réponds à l’insensé selon sa
2094
u combat contre le mal en général, qu’il s’agisse
de
la résistance d’une âme au diable, ou de la guerre des démocraties co
2095
e mal en général, qu’il s’agisse de la résistance
d’
une âme au diable, ou de la guerre des démocraties contre les dictatur
2096
s’agisse de la résistance d’une âme au diable, ou
de
la guerre des démocraties contre les dictatures totalitaires. Si vous
2097
, l’ironie et l’intelligence froide, vous risquez
de
devenir méchants, c’est-à-dire que plus vous cherchez à être forts à
2098
orts à la manière du diable, plus vous lui donnez
d’
avantages, son seul but étant de vous rendre semblables à lui. Mais si
2099
s vous lui donnez d’avantages, son seul but étant
de
vous rendre semblables à lui. Mais si vous ne le faites pas, vous ser
2100
es opposent aux dictateurs des tanks, des avions,
de
la propagande démagogique et une discipline de fer, elles risquent de
2101
s, de la propagande démagogique et une discipline
de
fer, elles risquent de devenir totalitaires, c’est-à-dire que plus el
2102
agogique et une discipline de fer, elles risquent
de
devenir totalitaires, c’est-à-dire que plus elles cherchent à être fo
2103
er pour l’ordre. Tout sera perdu. La solution est
de
répondre à l’insensé à la fois selon sa folie et selon la sagesse qui
2104
us, nous ne deviendrons pas fous. La solution est
de
résister au diable par la ruse et la subtilité, par l’ironie et l’int
2105
ce froide, et en même temps, par toutes les armes
de
la foi, de l’espérance et de la charité, dont il ignore la puissance.
2106
et en même temps, par toutes les armes de la foi,
de
l’espérance et de la charité, dont il ignore la puissance. Car ainsi
2107
par toutes les armes de la foi, de l’espérance et
de
la charité, dont il ignore la puissance. Car ainsi nous ne serons pas
2108
s les trois grandes Vertus sauront nous préserver
de
l’abus des vertus mineures, par où le diable pourrait nous asservir.
2109
le diable pourrait nous asservir. La solution est
d’
attaquer le tyran — puisqu’il nous attaque — avec des tanks, des avion
2110
squ’il nous attaque — avec des tanks, des avions,
de
la propagande massive, et une discipline de fer, — et en même temps d
2111
ions, de la propagande massive, et une discipline
de
fer, — et en même temps de l’attaquer avec un nouvel idéal. Car ainsi
2112
ive, et une discipline de fer, — et en même temps
de
l’attaquer avec un nouvel idéal. Car ainsi nous ne serons pas annexés
2113
as non plus par l’intérieur. J’ai tenté jusqu’ici
de
dénoncer l’action du diable, en me servant parfois de ses propres arm
2114
énoncer l’action du diable, en me servant parfois
de
ses propres armes. Et pendant que j’écris, la Russie oppose au fascis
2115
stapo. Occupons-nous maintenant du deuxième temps
de
l’attaque. Il y faut des hommes réveillés. Deutschland erwache ! — A
2116
même où il plongeait son peuple dans le cauchemar
de
l’hypnose collective. Procédé constant du démon ! Le tonnerre des bom
2117
, et tous ceux parmi nous qui ont cédé au vertige
de
l’Abîme politique ou moral ? Pour dissiper l’hypnose, le médecin parf
2118
sur le visage du patient. Ce n’est peut-être que
d’
un souffle de l’Esprit, passant sur le visage torturé du siècle, que n
2119
e du patient. Ce n’est peut-être que d’un souffle
de
l’Esprit, passant sur le visage torturé du siècle, que nous devons at
2120
est, disait Sénèque : conter le rêve est le fait
de
l’homme qui ne dort plus. C’est un écho lointain du grand cri de sain
2121
ne dort plus. C’est un écho lointain du grand cri
de
saint Paul : « J’ai cru, c’est pourquoi j’ai parlé ! » Qu’ai-je donc
2122
’ai parlé ! » Qu’ai-je donc cru, qui m’ait permis
d’
articuler ce peu que j’ai pu dire de nos maux ? Et quelle est la visio
2123
m’ait permis d’articuler ce peu que j’ai pu dire
de
nos maux ? Et quelle est la vision qui m’éveille ? Je m’essaierai à l
2124
ordre céleste, aussi nommé spirituel Le secret
de
la seule confiance qui ne soit pas une illusion réside dans la simple
2125
ne sommes pas Dieu. Car alors, tout ne dépend pas
de
nous ! Le principe et la fin de l’Ordre, la sommation, le sens final,
2126
out ne dépend pas de nous ! Le principe et la fin
de
l’Ordre, la sommation, le sens final, sont dans la main de Dieu, qui
2127
e, la sommation, le sens final, sont dans la main
de
Dieu, qui est le Bien. Si au contraire, tout était dans nos mains, co
2128
ut était dans nos mains, comme le serpent tentait
de
nous en persuader, tout serait bientôt gâché et dans les mains du dia
2129
ble. Si nous étions des dieux, il n’y aurait plus
d’
espoir : la catastrophe présente étant notre œuvre à tous, l’échec des
2130
ité démontrée sans recours. C’est pourquoi l’aide
de
l’archange Michel, chef suprême des milices célestes, est la plus gra
2131
int Michel irrésistiblement triomphe par l’énoncé
de
son nom seul, par le seul cri de son nom qui veut dire : Quis sicut D
2132
phe par l’énoncé de son nom seul, par le seul cri
de
son nom qui veut dire : Quis sicut Deus ? « Qui est comme Dieu ? » Et
2133
ait : « Vous serez comme des dieux. » Le nom même
de
Michel formule et définit l’ordre céleste, le gage inaliénable de tou
2134
e et définit l’ordre céleste, le gage inaliénable
de
toute confiance humaine. L’imagerie populaire de l’archange peut pass
2135
de toute confiance humaine. L’imagerie populaire
de
l’archange peut passer pour une histoire pieuse, une mythologie médié
2136
masque plus longtemps le moment décisif du drame
de
notre histoire, le principe même de toute victoire sur le Malin ! Aux
2137
isif du drame de notre histoire, le principe même
de
toute victoire sur le Malin ! Aux grandes époques de notre évolution,
2138
toute victoire sur le Malin ! Aux grandes époques
de
notre évolution, c’est l’événement lui-même qui répercute le cri de g
2139
, c’est l’événement lui-même qui répercute le cri
de
guerre de l’archange lumineux. Avez-vous des oreilles pour l’entendre
2140
événement lui-même qui répercute le cri de guerre
de
l’archange lumineux. Avez-vous des oreilles pour l’entendre ? Le malh
2141
ez-vous des oreilles pour l’entendre ? Le malheur
de
ce temps les ouvrira. C’est ici que nous apparaît dans sa grandeur le
2142
démocraties capitalistes et commerçantes : Fils
de
l’homme, dis au prince de Tyr : Ainsi parle le Seigneur, l’Éternel. T
2143
as dit : Je suis Dieu, Je suis assis sur le siège
de
Dieu au sein des mers ! Toi tu es homme, et non Dieu. Par ta sagesse
2144
igence Tu t’es acquis des richesses Tu as amassé
de
l’or et de l’argent Dans tes coffres-forts ; Par ta grande sagesse et
2145
t’es acquis des richesses Tu as amassé de l’or et
de
l’argent Dans tes coffres-forts ; Par ta grande sagesse et par ton co
2146
: Parce que tu prends ta volonté pour la volonté
de
Dieu Voici, je ferai venir contre toi des étrangers, Les plus violent
2147
fosse Et tu mourras comme ceux qui tombent percés
de
coups Au milieu des mers. En face de ton meurtrier, diras-tu : Je sui
2148
s Dieu ? Tu seras homme, et non Dieu Sous la main
de
celui qui te tuera. Face aux Tyrans tout devient clair et décisif. À
2149
onnaître, par la plus évidente analogie, l’action
de
Satan dans nos vies et le mensonge de l’éternelle Tentation. C’est dé
2150
e, l’action de Satan dans nos vies et le mensonge
de
l’éternelle Tentation. C’est déjà la moitié de la victoire. Ah, pour
2151
ge de l’éternelle Tentation. C’est déjà la moitié
de
la victoire. Ah, pour tout l’or du monde je ne souhaiterais pas d’êtr
2152
h, pour tout l’or du monde je ne souhaiterais pas
d’
être né dans un autre temps ! Tout signifie, autour de nous, tout s’am
2153
e, autour de nous, tout s’amplifie aux dimensions
de
la plus vaste poésie ! Tout ce qui m’est arrivé ces jours-ci est à l’
2154
ut ce qui m’est arrivé ces jours-ci est à l’image
de
l’histoire mondiale. Jamais nos objectifs ne furent plus manifestes.
2155
reflète sa « grande stratégie » dans la confusion
de
nos mœurs. À nous l’effort, à Dieu l’issue et le jugement. Si nous pe
2156
. Si nous perdons toutes nos batailles, le destin
de
Satan n’en est pas moins scellé. Tout ce qu’il nous est demandé, c’es
2157
ins scellé. Tout ce qu’il nous est demandé, c’est
de
coïncider avec l’esprit de cette victoire finale. Là gît le secret de
2158
ous est demandé, c’est de coïncider avec l’esprit
de
cette victoire finale. Là gît le secret de la plus grande liberté d’a
2159
esprit de cette victoire finale. Là gît le secret
de
la plus grande liberté d’action et d’imagination. Car aussitôt nous v
2160
inale. Là gît le secret de la plus grande liberté
d’
action et d’imagination. Car aussitôt nous voici délivrés du souci mon
2161
t le secret de la plus grande liberté d’action et
d’
imagination. Car aussitôt nous voici délivrés du souci monstrueux des
2162
i délivrés du souci monstrueux des fins dernières
de
notre destinée, du souci même de notre orgueil, qui nous accable inco
2163
s fins dernières de notre destinée, du souci même
de
notre orgueil, qui nous accable inconsciemment. Quoi qu’il arrive, le
2164
, — le bleu du ciel n’est pas terni par les nuées
de
notre angoisse. Et voyez : le jugement final lui-même ne nous apparti
2165
ême ne nous appartient pas, non plus que le souci
de
la victoire décisive. Car ainsi qu’on le lit dans l’Épître de Jude, é
2166
re décisive. Car ainsi qu’on le lit dans l’Épître
de
Jude, étonnante explosion de lyrisme vengeur : L’archange Michel, lor
2167
le lit dans l’Épître de Jude, étonnante explosion
de
lyrisme vengeur : L’archange Michel, lorsqu’il contestait avec le dia
2168
ntestait avec le diable et lui disputait le corps
de
Moïse, n’osa pas porter contre lui un jugement injurieux, mais il dit
2169
igneur te réprime ! Eux, au contraire ils parlent
d’
une manière injurieuse de ce qu’ils ignorent, et ils se corrompent dan
2170
au contraire ils parlent d’une manière injurieuse
de
ce qu’ils ignorent, et ils se corrompent dans ce qu’ils savent nature
2171
ées sans eau, poussées par les vents ; des arbres
d’
automne sans fruits, deux fois morts, déracinés ; des vagues furieuses
2172
deux fois morts, déracinés ; des vagues furieuses
de
la mer, rejetant l’écume de leurs impuretés ; des astres errants, aux
2173
des vagues furieuses de la mer, rejetant l’écume
de
leurs impuretés ; des astres errants, auxquels l’obscurité des ténèbr
2174
é des ténèbres est réservée pour l’éternité. Mais
de
qui parle-t-il ainsi ? Il tient à nous que ce ne soit pas de nous…
2175
e-t-il ainsi ? Il tient à nous que ce ne soit pas
de
nous… 61. L’exorcisme, ou l’ordre personnel Le diable et sa co
2176
, ou l’ordre personnel Le diable et sa colonne
d’
anges noirs « qui n’ont pas conservé leur dignité, mais qui ont désert
2177
erté leur propre demeure » sont déjà dans l’étang
de
feu. Du point de vue de l’éternité, c’en est fait, la partie est gagn
2178
» sont déjà dans l’étang de feu. Du point de vue
de
l’éternité, c’en est fait, la partie est gagnée. Mais ce qui nous imp
2179
e. Mais ce qui nous importe dans ce siècle, c’est
de
nous rendre immédiatement participants de cette victoire. Un des prop
2180
, c’est de nous rendre immédiatement participants
de
cette victoire. Un des prophètes mineurs de l’ère moderne, Joseph de
2181
pants de cette victoire. Un des prophètes mineurs
de
l’ère moderne, Joseph de Maistre, écrivait sous Napoléon : « Lorsqu’u
2182
op prépondérante épouvante l’univers, on s’irrite
de
ne trouver aucun moyen pour l’arrêter ; on se répand en reproches ame
2183
l’immoralité des gouvernements, qui les empêchent
de
se réunir pour conjurer le danger commun. Mais dans le fond, ces plai
2184
alition entre souverains, faite sur les principes
d’
une morale pure et désintéressée, serait un miracle. Dieu, qui ne doit
2185
sintéressée, serait un miracle. Dieu, qui ne doit
de
miracle à personne et qui n’en fait point d’inutiles, emploie pour ré
2186
doit de miracle à personne et qui n’en fait point
d’
inutiles, emploie pour rétablir l’équilibre deux moyens plus simples :
2187
; comme un faible roseau, arrêté dans le courant
d’
un fleuve, produit à la fin un amoncellement de terre qui le détourne.
2188
nt d’un fleuve, produit à la fin un amoncellement
de
terre qui le détourne. » Je dis que nous pouvons participer à cette v
2189
» qui arrête le courant. Je dis que la condition
de
cette victoire, c’est que nous devenions, chacun pour notre compte, u
2190
c’est le saint. Seul un saint serait à la hauteur
de
cette espèce d’héroïsme dans le mal que déploie de nos jours l’advers
2191
Seul un saint serait à la hauteur de cette espèce
d’
héroïsme dans le mal que déploie de nos jours l’adversaire. Voilà la v
2192
e cette espèce d’héroïsme dans le mal que déploie
de
nos jours l’adversaire. Voilà la vérité qui nous éclaire, mais nous c
2193
Et qui donc oserait même, sérieusement, souhaiter
d’
en devenir un ? Mais pour devenir ou pour rester des hommes, simplemen
2194
t-ce que se sanctifier ? L’action du diable étant
d’
obnubiler en nous le sentiment de la culpabilité, et de nous faire cro
2195
du diable étant d’obnubiler en nous le sentiment
de
la culpabilité, et de nous faire croire que c’est l’autre toujours, l
2196
ubiler en nous le sentiment de la culpabilité, et
de
nous faire croire que c’est l’autre toujours, la force des choses ou
2197
vraie sanctification consiste dans l’augmentation
de
notre sentiment d’être complices de tout le mal qui se fait dans le m
2198
n consiste dans l’augmentation de notre sentiment
d’
être complices de tout le mal qui se fait dans le monde. Dans la Confe
2199
’augmentation de notre sentiment d’être complices
de
tout le mal qui se fait dans le monde. Dans la Confession des Péchés
2200
fait dans le monde. Dans la Confession des Péchés
de
Théodore de Bèze, ces mots : « reconnaissant de plus en plus nos faut
2201
du seul progrès humain non équivoque26. Le sommet
de
la sainteté n’est pas dans la certitude illusoire d’être sans péché.
2202
la sainteté n’est pas dans la certitude illusoire
d’
être sans péché. Il nous est au contraire révélé par le Christ lorsqu’
2203
contraire révélé par le Christ lorsqu’il accepte
de
mourir en assumant tout le péché du monde. Le monde est plein de démo
2204
sumant tout le péché du monde. Le monde est plein
de
démons, ils sévissent par millions, et nous n’arriverons pas à les ch
2205
ne pas qu’il n’en ait point trouvé. Le vrai moyen
de
rencontrer un homme, c’est d’en devenir un soi-même. (Si ce n’est pas
2206
ouvé. Le vrai moyen de rencontrer un homme, c’est
d’
en devenir un soi-même. (Si ce n’est pas le seul moyen, c’est assuréme
2207
faite absolue et sans recours, un élément premier
de
l’ordre impérissable. Or cet élément personnel doit s’encadrer dans u
2208
étant à donner ; le premier figurant la condition
de
possibilité de tout ordre personnel, le second sa condition de fécond
2209
; le premier figurant la condition de possibilité
de
tout ordre personnel, le second sa condition de fécondité. 62. L’
2210
é de tout ordre personnel, le second sa condition
de
fécondité. 62. L’ordre cosmique Le développement aberrant de n
2211
62. L’ordre cosmique Le développement aberrant
de
nos techniques et par elles de notre impérialisme rationnel, nous a f
2212
loppement aberrant de nos techniques et par elles
de
notre impérialisme rationnel, nous a fait perdre, depuis j quelques s
2213
ns cosmique, c’est-à-dire la conscience immédiate
de
nos liens avec l’ensemble de l’Univers, ses lois connues et ses mystè
2214
conscience immédiate de nos liens avec l’ensemble
de
l’Univers, ses lois connues et ses mystères. Dans le même temps le dé
2215
res. Dans le même temps le développement aberrant
de
nos morales rationalistes, puis individualistes, puis irrationalistes
2216
élémentaire, c’est-à-dire la conscience immédiate
d’
un absolu qui serait, hors de nous, le gage universel du bien et du ma
2217
et du mal. Et nous voici coupés des deux sources
de
l’Ordre, qui sont les lois ordonnées de la Création et les interventi
2218
x sources de l’Ordre, qui sont les lois ordonnées
de
la Création et les interventions ordonnatrices du Créateur. Nous avon
2219
du Créateur. Nous avons cru pouvoir nous libérer
de
l’interdépendance de toutes les choses créées, et de notre dépendance
2220
ons cru pouvoir nous libérer de l’interdépendance
de
toutes les choses créées, et de notre dépendance de Dieu. Alors nous
2221
l’interdépendance de toutes les choses créées, et
de
notre dépendance de Dieu. Alors nous sommes entrés dans le monde de l
2222
toutes les choses créées, et de notre dépendance
de
Dieu. Alors nous sommes entrés dans le monde de l’arbitraire, où l’Ar
2223
e de Dieu. Alors nous sommes entrés dans le monde
de
l’arbitraire, où l’Arbitre tricheur nous affole à plaisir. Nietzsche
2224
à plaisir. Nietzsche a bien vu que la philosophie
de
ce monde-là ne pouvait être que le nihilisme. Et tôt après, son peupl
2225
e que je sente admirable au-delà des fascinations
de
ma plus secrète utopie. Nous avons à redécouvrir la catholicité fonda
2226
éterminée et révélée par Dieu comme étant l’ordre
de
sa Création. Et nous avons à redécouvrir l’absolu d’un bien et d’un m
2227
sa Création. Et nous avons à redécouvrir l’absolu
d’
un bien et d’un mal non relatifs à nos idées morales, aux suggestions
2228
Et nous avons à redécouvrir l’absolu d’un bien et
d’
un mal non relatifs à nos idées morales, aux suggestions aveuglantes d
2229
à nos idées morales, aux suggestions aveuglantes
de
l’instinct ou aux pressions de l’intérêt momentané ; l’absolu d’un bi
2230
stions aveuglantes de l’instinct ou aux pressions
de
l’intérêt momentané ; l’absolu d’un bien et d’un mal déterminés et ré
2231
u aux pressions de l’intérêt momentané ; l’absolu
d’
un bien et d’un mal déterminés et révélés par Dieu comme étant l’ordre
2232
ns de l’intérêt momentané ; l’absolu d’un bien et
d’
un mal déterminés et révélés par Dieu comme étant l’ordre de sa Volont
2233
éterminés et révélés par Dieu comme étant l’ordre
de
sa Volonté. Toute ma confiance repose dans la certitude que nos méfa
2234
aits et ceux du diable ne changent rien à l’Ordre
de
ce monde, où le hasard n’existe pas, simple illusion d’une impatience
2235
monde, où le hasard n’existe pas, simple illusion
d’
une impatience oblitérant nos sens spirituels, mais qui ne peut empêch
2236
ns spirituels, mais qui ne peut empêcher l’Esprit
d’
agir plus qu’elle ne peut influencer le cours des astres. Nous pouvons
2237
tion poétique qui sonde les abîmes microscopiques
de
la matière, la grande dynamique sidérale, et les correspondances de l
2238
grande dynamique sidérale, et les correspondances
de
la vie organique, à tel point qu’un savant, un peintre, un visionnair
2239
savant, un peintre, un visionnaire, sont capables
de
réinventer le « réel » à sa ressemblance ; mais nous ne pouvons préve
2240
; mais nous ne pouvons prévenir toutes ces choses
d’
exister, de graviter, de naître, de mourir, et de porter leurs justes
2241
ne pouvons prévenir toutes ces choses d’exister,
de
graviter, de naître, de mourir, et de porter leurs justes conséquence
2242
révenir toutes ces choses d’exister, de graviter,
de
naître, de mourir, et de porter leurs justes conséquences jusqu’au te
2243
tes ces choses d’exister, de graviter, de naître,
de
mourir, et de porter leurs justes conséquences jusqu’au terme des cyc
2244
d’exister, de graviter, de naître, de mourir, et
de
porter leurs justes conséquences jusqu’au terme des cycles possibles.
2245
nces jusqu’au terme des cycles possibles. Du fond
d’
un cœur aux bornes du cosmos, une résonance universelle émeut tout l’e
2246
rselle émeut tout l’existant à la quête éternelle
d’
un accord qui sera le nom secret de Dieu. Ah ! nous pouvons mentir, tu
2247
uête éternelle d’un accord qui sera le nom secret
de
Dieu. Ah ! nous pouvons mentir, tuer, et nous exclure, nous pouvons f
2248
mentir, tuer, et nous exclure, nous pouvons faire
de
pitoyables fautes d’orgueil, de négligence ou de calcul, mais nous ne
2249
exclure, nous pouvons faire de pitoyables fautes
d’
orgueil, de négligence ou de calcul, mais nous ne pouvons rien, à jama
2250
ous pouvons faire de pitoyables fautes d’orgueil,
de
négligence ou de calcul, mais nous ne pouvons rien, à jamais, sur le
2251
de pitoyables fautes d’orgueil, de négligence ou
de
calcul, mais nous ne pouvons rien, à jamais, sur le miracle perpétuel
2252
der la justice et la joie, les pures spéculations
de
la mathématique et les structures du monde matériel, l’amour et l’obj
2253
structures du monde matériel, l’amour et l’objet
de
l’amour, la prière et le vœu divin. Si moi, petit individu, erreur in
2254
insignifiante, parole articulée dans le discours
de
toutes les créatures, je prétends m’isoler ou m’abstraire du cosmos,
2255
u plan providentiel. Mais si je réponds à l’appel
de
mon nom, si j’assume la vocation qui me distingue et rend vraie ma pa
2256
et rend vraie ma parole, si je m’efforce au moins
de
converger avec l’ordre cosmique et le vouloir divin, tout indigne enc
2257
c’est toujours aux déserts qu’il habite, déserts
de
sables, d’eaux amères ou de rochers, déserts des foules, ou ceux que
2258
ours aux déserts qu’il habite, déserts de sables,
d’
eaux amères ou de rochers, déserts des foules, ou ceux que porte un cœ
2259
qu’il habite, déserts de sables, d’eaux amères ou
de
rochers, déserts des foules, ou ceux que porte un cœur dénué d’amour
2260
serts des foules, ou ceux que porte un cœur dénué
d’
amour et d’espérance. Il n’est pas bon que l’homme soit seul. Il n’est
2261
oules, ou ceux que porte un cœur dénué d’amour et
d’
espérance. Il n’est pas bon que l’homme soit seul. Il n’est pas bon no
2262
repose sur le voisinage vécu, qui est la relation
de
prochain à prochain28. Sans voisinage réel, vous n’êtes plus responsa
2263
Sans voisinage réel, vous n’êtes plus responsable
de
rien ni de personne. Mais sans le sentiment de la responsabilité de c
2264
age réel, vous n’êtes plus responsable de rien ni
de
personne. Mais sans le sentiment de la responsabilité de chacun enver
2265
le de rien ni de personne. Mais sans le sentiment
de
la responsabilité de chacun envers autrui, il n’est point de liberté
2266
onne. Mais sans le sentiment de la responsabilité
de
chacun envers autrui, il n’est point de liberté civique possible : la
2267
nsabilité de chacun envers autrui, il n’est point
de
liberté civique possible : la dictature devient inévitable dans toute
2268
xime est le « chacun pour soi et Dieu pour tous »
de
ceux qui ne croient pas en Dieu. C’est ce que nous voyons se produire
2269
e nous voyons se produire dans les États atteints
de
gigantisme, où les relations humaines, du fait des grandes distances,
2270
nes, du fait des grandes distances, des masses et
de
l’anonymat, ne sont plus que d’abstraites contraintes, qui d’ailleurs
2271
es, des masses et de l’anonymat, ne sont plus que
d’
abstraites contraintes, qui d’ailleurs ne contraignent bientôt qu’à la
2272
à-dire que l’abstraite contrainte doit se doubler
d’
une contrainte physique, seule efficace désormais : la police. Mais ce
2273
ur est en réalité le souverain désordre. Il n’y a
d’
ordre vrai que dans la liberté. Il n’y a de liberté que chez les homme
2274
n’y a d’ordre vrai que dans la liberté. Il n’y a
de
liberté que chez les hommes qui réalisent leur vocation et qui la ser
2275
l’homme libre est le seul qui respecte la liberté
de
ses semblables. Tout cela se tient. Sens du prochain, responsabilité,
2276
ien longtemps l’une sans l’autre. Et l’ordre naît
de
leur alliance. Ceux qui n’ont pas encore compris que la liberté est l
2277
re compris que la liberté est le fondement vivant
de
l’ordre ; qu’elle ne peut être donnée à personne, mais seulement assu
2278
tible avec l’égoïsme, l’insignifiance et l’esprit
de
combine, l’arrivisme, l’opportunisme et la fuite devant les responsab
2279
esponsabilités, la bêtise vaniteuse et la paresse
de
pensée, le respect de l’argent, le ton hâbleur, le bluff et le sentim
2280
ise vaniteuse et la paresse de pensée, le respect
de
l’argent, le ton hâbleur, le bluff et le sentimentalisme qui font tou
2281
: tout ce qui caractérise les mœurs politiciennes
de
nos pseudo-démocraties et les goûts de leur « grand public » tels que
2282
iticiennes de nos pseudo-démocraties et les goûts
de
leur « grand public » tels que les entretiennent et les exploitent le
2283
qu’ils l’ont compris — ceux-là n’ont aucun droit
de
se dire démocrates, ils ne méritent rien de mieux qu’un dictateur. C
2284
droit de se dire démocrates, ils ne méritent rien
de
mieux qu’un dictateur. Ceux qui n’ont pas encore compris que liberté
2285
é égale responsabilité, ceux-là n’ont aucun droit
de
revendiquer une liberté dont ils ne sauraient rien tirer s’ils la rec
2286
vaient les conditions. Mais il serait insuffisant
de
démasquer l’hypocrisie, et Dieu sait si les mots démocratie et libert
2287
ont une, pitoyable ou scandaleuse, dans la bouche
de
milliers de nigauds ou de cyniques qui s’en prévalent. Ce serait insu
2288
oyable ou scandaleuse, dans la bouche de milliers
de
nigauds ou de cyniques qui s’en prévalent. Ce serait insuffisant et m
2289
daleuse, dans la bouche de milliers de nigauds ou
de
cyniques qui s’en prévalent. Ce serait insuffisant et même dangereux.
2290
rter vers une définition intransigeante et claire
de
l’idéal qui seul justifie notre lutte ; et vers la recherche de moyen
2291
seul justifie notre lutte ; et vers la recherche
de
moyens d’incorporer cet idéal, qui ne soient point eux-mêmes des trah
2292
ifie notre lutte ; et vers la recherche de moyens
d’
incorporer cet idéal, qui ne soient point eux-mêmes des trahisons de l
2293
déal, qui ne soient point eux-mêmes des trahisons
de
leur fin. Il faut aider les hommes si faibles d’aujourd’hui à devenir
2294
de leur fin. Il faut aider les hommes si faibles
d’
aujourd’hui à devenir un peu plus responsables, un peu plus dignes d’ê
2295
enir un peu plus responsables, un peu plus dignes
d’
être libres, un peu plus dignes de se faire tuer ou de tuer, nous en s
2296
peu plus dignes d’être libres, un peu plus dignes
de
se faire tuer ou de tuer, nous en sommes là, au nom de la liberté et
2297
re libres, un peu plus dignes de se faire tuer ou
de
tuer, nous en sommes là, au nom de la liberté et de la démocratie. Ce
2298
tuer, nous en sommes là, au nom de la liberté et
de
la démocratie. Cet « un peu » représente une énorme ambition, si l’on
2299
éal et ma vision ? Mon horreur des programmes n’a
d’
égale que l’étendue de mon scepticisme quant aux objurgations de la pr
2300
horreur des programmes n’a d’égale que l’étendue
de
mon scepticisme quant aux objurgations de la propagande. Aussi bien,
2301
étendue de mon scepticisme quant aux objurgations
de
la propagande. Aussi bien, je ne prêche pas : je vais dire simplement
2302
ement les conclusions qui m’apparaissent résulter
de
notre état. Je crois à la vertu de l’élucidation, qui dit le vrai en
2303
ssent résulter de notre état. Je crois à la vertu
de
l’élucidation, qui dit le vrai en baissant le ton, sans nul effort de
2304
i dit le vrai en baissant le ton, sans nul effort
de
persuader. Je me tiens l’argument suivant : le gigantisme moderne pri
2305
suivant : le gigantisme moderne prive les hommes
de
la possibilité d’être et de se sentir responsables dans la société et
2306
ntisme moderne prive les hommes de la possibilité
d’
être et de se sentir responsables dans la société et dans la politique
2307
erne prive les hommes de la possibilité d’être et
de
se sentir responsables dans la société et dans la politique, donc d’ê
2308
sables dans la société et dans la politique, donc
d’
être libres ; cette irresponsabilité anxieuse appelle la dictature par
2309
r, et nous rend impuissants contre les dictatures
de
l’extérieur ; notre désordre intime nous livre donc nécessairement et
2310
taires ; si nous n’aimons pas ça, il faut changer
de
méthodes ou d’attitude ; mais quelles sont les méthodes et l’attitude
2311
s n’aimons pas ça, il faut changer de méthodes ou
d’
attitude ; mais quelles sont les méthodes et l’attitude contraires au
2312
t l’attitude contraires au gigantisme et capables
de
le prévenir ? Je réponds qu’il n’y a d’ordre solide et libéral que da
2313
capables de le prévenir ? Je réponds qu’il n’y a
d’
ordre solide et libéral que dans les petites communautés, dans les cit
2314
tenus par le citoyen, en connaissance de cause et
de
personnes. Je réponds que ces petites communautés ne pourront subsist
2315
e fédéralisme, est la seule qui permette aux mots
de
liberté, d’ordre, d’humanité et de démocratie de signifier quelque ch
2316
e, est la seule qui permette aux mots de liberté,
d’
ordre, d’humanité et de démocratie de signifier quelque chose qui m’ém
2317
seule qui permette aux mots de liberté, d’ordre,
d’
humanité et de démocratie de signifier quelque chose qui m’émeuve. Qua
2318
mette aux mots de liberté, d’ordre, d’humanité et
de
démocratie de signifier quelque chose qui m’émeuve. Quant à ceux qui
2319
de liberté, d’ordre, d’humanité et de démocratie
de
signifier quelque chose qui m’émeuve. Quant à ceux qui disent : « Je
2320
ce qu’ils estiment possible, hors de la guerre et
de
l’État totalitaire, qui n’est rien d’autre que l’état de guerre en pe
2321
a guerre et de l’État totalitaire, qui n’est rien
d’
autre que l’état de guerre en permanence ? Beaucoup de choses impossib
2322
at totalitaire, qui n’est rien d’autre que l’état
de
guerre en permanence ? Beaucoup de choses impossibles nous arrivent.
2323
lles sont là, malgré nous. Ne serait-il pas temps
de
vouloir ce qui arrive, de vouloir l’impossible favorable, c’est-à-dir
2324
Ne serait-il pas temps de vouloir ce qui arrive,
de
vouloir l’impossible favorable, c’est-à-dire de créer un ordre, et de
2325
, de vouloir l’impossible favorable, c’est-à-dire
de
créer un ordre, et de passer à l’offensive ? 64. Le sens des mots
2326
ble favorable, c’est-à-dire de créer un ordre, et
de
passer à l’offensive ? 64. Le sens des mots Mais l’offensive s
2327
. Un plan commun, clairement déterminé et compris
de
la même manière par tous ceux qui devront l’exécuter. Un plan qui s’e
2328
exprime par des mots, et par des mots qui mettent
de
l’ordre dans nos volontés égarées : tous les mots clairs sont des mot
2329
s. Il semble même que l’on se batte pour eux avec
d’
autant plus de passion que l’on sait moins clairement ce qu’ils signif
2330
ême que l’on se batte pour eux avec d’autant plus
de
passion que l’on sait moins clairement ce qu’ils signifient. J’ai dit
2331
J’ai dit que l’ordre véritable suppose la liberté
de
l’homme responsable. Mais combien de bourgeois apeurés s’obstinèrent
2332
e la liberté de l’homme responsable. Mais combien
de
bourgeois apeurés s’obstinèrent à voir dans Hitler, cet homme des mas
2333
dans Hitler, cet homme des masses, « le rempart »
de
leur ordre contre le bolchévisme ? D’autres se battaient au nom de le
2334
ens que l’on pût déclarer sans hésiter. Si chacun
de
vous savait ce qu’il défend. (Car se faire tuer ne prouve rien : nos
2335
ils ont un sens défini. Et ce qui définit le sens
d’
un mot, c’est sa correspondance indiscutable à certaines choses, à cer
2336
ement des actes. Or cette correspondance ne cesse
d’
être arbitraire qu’en vertu d’un accord unanime. C’est dire qu’elle ne
2337
lle ne peut se produire qu’au sein d’un groupe ou
d’
une communauté vivante. Une tradition, un droit, une foi et une autori
2338
oi et une autorité communes, sont seules capables
de
définir le sens de ce qu’on appelle les mots courants. Mais toutes ce
2339
communes, sont seules capables de définir le sens
de
ce qu’on appelle les mots courants. Mais toutes ces choses ont dispar
2340
siècle apparaîtra dans l’avenir comme une espèce
de
cauchemar verbal, de cacophonie délirante. On y parlait plus qu’on n’
2341
ns l’avenir comme une espèce de cauchemar verbal,
de
cacophonie délirante. On y parlait plus qu’on n’avait jamais parlé :
2342
qu’on n’avait jamais parlé : imaginez ces postes
de
radio qui ne peuvent plus se taire ni nuit ni jour, où la parole est
2343
ù les mots s’usaient plus vite qu’en aucun siècle
de
l’Histoire, temps de la grande prostitution de cette parole qui devai
2344
plus vite qu’en aucun siècle de l’Histoire, temps
de
la grande prostitution de cette parole qui devait être la mesure du v
2345
le de l’Histoire, temps de la grande prostitution
de
cette parole qui devait être la mesure du vrai, et dont l’Évangile di
2346
lumière des hommes » ! Hélas, qu’avons-nous fait
de
la parole ! Elle ne saurait plus même mentir dans certaines bouches,
2347
le ronron du style officiel, le gâtisme des fins
de
banquet ; et quand nous sommes abêtis de discours, lui, le romantique
2348
des fins de banquet ; et quand nous sommes abêtis
de
discours, lui, le romantique qui nous suggère que l’indicible est peu
2349
es structures sociales, il précipite la confusion
de
notre langage. Il sait que les hommes ne peuvent s’engager que par de
2350
primant le sens des mots, il détruit la base même
de
nos fidélités. Il sait que partout où l’on appelle un chat un chat, l
2351
on appelle un chat un chat, le mal recule et perd
de
ses prestiges ; c’est pourquoi il a inventé la langue des diplomates
2352
n, qu’elle achèvera mieux que les pires tyrannies
d’
ahurir notre sens moral… J’allais écrire que le seul remède serait de
2353
moral… J’allais écrire que le seul remède serait
de
lui opposer la sémantique, qui est la science des significations, du
2354
étymologies. Un ministère du Sens des mots, doté
de
pouvoirs discrétionnaires, voilà ce qu’il faut à la Démocratie, puisq
2355
9 (Ce ministère était jadis l’Église. Une analyse
de
nos vocabulaires montrerait que le peu de sens commun qu’ils conserve
2356
liturgiques.) Je pourrais indiquer vingt remèdes
de
ce genre : mais je sais trop qu’ils seront sans vertu dans le monde i
2357
e détruire et les mots, justement, trop dépourvus
de
prises pour qu’un conseil soit encore entendu. Mais voici la confianc
2358
t le silence adorant : nous ne sommes pas maîtres
de
détruire la vraie Parole ! Tous les mensonges du diable, et tous nos
2359
ssent dès que l’Esprit nous parle, par une phrase
de
la Bible ou de nos liturgies, par un mot que dit un passant, par une
2360
’Esprit nous parle, par une phrase de la Bible ou
de
nos liturgies, par un mot que dit un passant, par une prière née dans
2361
par une prière née dans un cœur. Il ne dépend pas
de
nous que ces syllabes vivent : tout d’un coup elles nous ont parlé. (
2362
dépend pas de nous que ces syllabes vivent : tout
d’
un coup elles nous ont parlé. (La naissance d’un poème ou d’un rythme
2363
out d’un coup elles nous ont parlé. (La naissance
d’
un poème ou d’un rythme de phrase, quelque part en nous-mêmes, nous do
2364
elles nous ont parlé. (La naissance d’un poème ou
d’
un rythme de phrase, quelque part en nous-mêmes, nous donne une faible
2365
nt parlé. (La naissance d’un poème ou d’un rythme
de
phrase, quelque part en nous-mêmes, nous donne une faible idée de ces
2366
ue part en nous-mêmes, nous donne une faible idée
de
ces surprises.) Si le langage nous appartenait, il y a longtemps qu’o
2367
Mais si deux êtres communiquent, si ces mots tout
d’
un coup me mettent en mouvement, si cet accent suffit à me rendre à ma
2368
ils ne pourront rien sur le mystère qui fait qu’à
de
certains moments, certains mots nous parlent, et non d’autres, fût-ce
2369
, et non d’autres, fût-ce à voix basse, au secret
d’
un cachot. Ils pourront réduire au silence les bavards et les grands o
2370
la souffrance et la honte ne nous permettent plus
d’
articuler même une plainte intelligible, — c’est elle à présent qui no
2371
e ! 65. Vertus J’ai désigné les dimensions
de
l’Ordre indestructible au sein duquel le drame de nos destins s’encad
2372
de l’Ordre indestructible au sein duquel le drame
de
nos destins s’encadre. Ainsi armés et appuyés, nous pouvons porter su
2373
et les fait parfois s’évanouir avec un dégagement
de
fumée noire qui obscurcit le ciel pour un temps, et peut-être nous fa
2374
u diable des injures, qu’il prendrait pour autant
d’
hommages. Détournons-nous et regardons le Bien. Armons-nous de cette g
2375
Détournons-nous et regardons le Bien. Armons-nous
de
cette grande Confiance qui survit à la catastrophe, parce qu’en ayant
2376
la joie, ni la grandeur et ni l’amour ne cessent
d’
attendre, intacts et souverains, notre désir. Il nous suffit de retrou
2377
ntacts et souverains, notre désir. Il nous suffit
de
retrouver le courage d’être vertueux. Il nous suffit de rendre à la v
2378
tre désir. Il nous suffit de retrouver le courage
d’
être vertueux. Il nous suffit de rendre à la vertu sa gloire. Certes,
2379
rouver le courage d’être vertueux. Il nous suffit
de
rendre à la vertu sa gloire. Certes, nous avions fait de la vertu si
2380
re à la vertu sa gloire. Certes, nous avions fait
de
la vertu si triste chose qu’il paraissait mesquin de s’y tenir. Perso
2381
la vertu si triste chose qu’il paraissait mesquin
de
s’y tenir. Personne n’osait plus en parler : elle n’était plus que la
2382
au mot même, qui avait électrisé jadis les héros
de
la Révolution. La morale était ennuyeuse, et le gangster plein de pre
2383
. La morale était ennuyeuse, et le gangster plein
de
prestige. Le bon ton consistait en somme à préférer le mauvais genre.
2384
èglement des critères30 a toujours annoncé la fin
d’
une cité et de sa culture. À l’orgueil et à la brutalité proclamés com
2385
ritères30 a toujours annoncé la fin d’une cité et
de
sa culture. À l’orgueil et à la brutalité proclamés comme vertus par
2386
âches, et cela s’appelait du réalisme. À l’esprit
de
vengeance et de ressentiment, elles ne surent opposer que leurs inqui
2387
’appelait du réalisme. À l’esprit de vengeance et
de
ressentiment, elles ne surent opposer que leurs inquiétudes de propri
2388
nt, elles ne surent opposer que leurs inquiétudes
de
propriétaires fatigués, et cela s’appelait défense de l’ordre. À la g
2389
a confusion spirituelle, et cela s’appelait droit
de
libre critique. Tout cela s’explique et des générations de romanciers
2390
critique. Tout cela s’explique et des générations
de
romanciers nous ont montré d’une manière convaincante que l’homme « m
2391
et des générations de romanciers nous ont montré
d’
une manière convaincante que l’homme « moral » n’était qu’un hypocrite
2392
s montre autre chose. Quand une démocratie rougit
de
ses vertus, sur quelle force peut-elle compter ? Et quand l’élite d’u
2393
quelle force peut-elle compter ? Et quand l’élite
d’
une société n’attache plus que du ridicule aux disciplines qui l’ont f
2394
musent le plus grand nombre et rapportent le plus
d’
argent, quand elle rend un culte à des stars d’une intolérable sottise
2395
us d’argent, quand elle rend un culte à des stars
d’
une intolérable sottise, quand tout cela paraît naturel, et le contrai
2396
poser aux barbares ? La barbarie débile et bébête
de
nos foules, la démission sans élégance de nos élites, est-ce que c’es
2397
bébête de nos foules, la démission sans élégance
de
nos élites, est-ce que c’est cela qu’il faut sauver au prix de sa vie
2398
inexorable : rien au monde ne saurait l’empêcher
de
se détruire. Et si l’on tue ce qui était déjà mort, je n’y vois pas d
2399
l’on tue ce qui était déjà mort, je n’y vois pas
d’
inconvénient. Tout cela ne m’empêchera pas d’avoir confiance ! Le malh
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pas d’inconvénient. Tout cela ne m’empêchera pas
d’
avoir confiance ! Le malheur nous rend au sérieux. Il nous apprend à o
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à opposer au mal le bien, et non pas le demi-mal
de
petites perversions. Il nous rend le courage d’opposer à cet orgueil
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l de petites perversions. Il nous rend le courage
d’
opposer à cet orgueil prôné par les totalitaires, l’humilité et non la
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et non pas des calculs « réalistes » ; à la soif
de
vengeance et au ressentiment, à la grossièreté spirituelle, la justic
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a justice à double tranchant et l’austère rigueur
de
pensée, non pas cette hystérie sentimentale et cette panique de possé
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pas cette hystérie sentimentale et cette panique
de
possédants taxés. Je voudrais dire ces choses plus simplement encore,
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me ciel ramène un printemps pur sur les décombres
de
la vie. Je suppose une cité parvenue au dernier terme de sa corruptio
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ie. Je suppose une cité parvenue au dernier terme
de
sa corruption. « Je demande à tout homme qui pense de me montrer ce q
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a corruption. « Je demande à tout homme qui pense
de
me montrer ce qui subsiste de la vie. »32 Et je réponds : le grand or
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out homme qui pense de me montrer ce qui subsiste
de
la vie. »32 Et je réponds : le grand ordre de vivre et d’assumer un d
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ste de la vie. »32 Et je réponds : le grand ordre
de
vivre et d’assumer un destin neuf. La vertu n’est plus ennuyeuse quan
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e. »32 Et je réponds : le grand ordre de vivre et
d’
assumer un destin neuf. La vertu n’est plus ennuyeuse quand les vertue
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relles où nous nous attardions. Il ne s’agit plus
de
leur morale qui mourut sur la défensive, et qu’ils ont si mal défendu
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qu’ils ont si mal défendue. Il s’agit simplement
de
la grandeur que nous saurons imaginer, et d’une vision nouvelle de la
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ment de la grandeur que nous saurons imaginer, et
d’
une vision nouvelle de la force. Assis sur nos ruines, j’esquisse… Je
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e nous saurons imaginer, et d’une vision nouvelle
de
la force. Assis sur nos ruines, j’esquisse… Je me plais à inscrire ce
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plus beau jeu ! Je me plais à copier des phrases
de
ce ton : « L’égoïsme a aussi sa niaiserie, il n’est pas moins ignoran
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». « Pour connaître les hommes, il ne suffit pas
de
les mépriser.33 » « Les personnes faibles ne peuvent être sincères.34
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faibles ne peuvent être sincères.34 » Et je rêve
d’
une anthologie de ces maximes d’une fierté sans jactance… J’imagine qu
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nt être sincères.34 » Et je rêve d’une anthologie
de
ces maximes d’une fierté sans jactance… J’imagine que l’humilité pass
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s.34 » Et je rêve d’une anthologie de ces maximes
d’
une fierté sans jactance… J’imagine que l’humilité passe à travers les
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J’imagine que l’humilité passe à travers les murs
de
la cellule que bâtissaient nos craintes et nos vanités faibles, et qu
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es et nos vanités faibles, et qu’elle nous permet
d’
être libres comme ceux qui n’ont plus rien à perdre. Je pense à cette
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le pécheur, puisqu’il réveille en lui le courage
de
l’amour. Je pense que le malheur nous rendra sobres, et que l’empire
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aciturnes par l’éducation du danger et la coutume
de
la mort, plus absurde et plus simple que jamais. J’élève ces vertus d
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e ces vertus devant mes yeux non comme une utopie
de
lendemains meilleurs, car l’Ecclésiaste avait raison, « les hommes ne
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que l’époque nous rappelle, je vois notre chance
de
grandeur : elle nous rend à la réalité. Les vraies vertus ne vont pas
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s ne vont pas à un happy ending, mais à la gloire
de
la Vérité. J’imagine, je ne rêve pas : je me prépare à marcher. Je se
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jà ce livre, et les quelques accords que je viens
d’
essayer me donnent le ton d’une harmonie nouvelle, d’un style de vie p
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accords que je viens d’essayer me donnent le ton
d’
une harmonie nouvelle, d’un style de vie plus dur et plus joyeux… J’ap
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ssayer me donnent le ton d’une harmonie nouvelle,
d’
un style de vie plus dur et plus joyeux… J’appelle et je pressens — c’
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onnent le ton d’une harmonie nouvelle, d’un style
de
vie plus dur et plus joyeux… J’appelle et je pressens — c’est une phr
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yeux… J’appelle et je pressens — c’est une phrase
de
Poe qui depuis quelque temps me fascine — « une certaine énergie calm
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et indomptable, telle que nous pouvons l’imaginer
d’
un large fleuve d’or fondu »… O da quod jubes, domine ! 35 66.
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lle que nous pouvons l’imaginer d’un large fleuve
d’
or fondu »… O da quod jubes, domine ! 35 66. Le Bleu du Ciel
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la vertu et la splendeur. Je lui oppose les gages
d’
une confiance que n’atteindra jamais sa ruse. Je lui oppose les hiérar
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dra jamais sa ruse. Je lui oppose les hiérarchies
de
l’Ordre : l’ordre céleste et le cri de guerre de l’Ange blanc, l’ordr
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iérarchies de l’Ordre : l’ordre céleste et le cri
de
guerre de l’Ange blanc, l’ordre intérieur de la sainteté, l’ordre cos
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de l’Ordre : l’ordre céleste et le cri de guerre
de
l’Ange blanc, l’ordre intérieur de la sainteté, l’ordre cosmique et s
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cri de guerre de l’Ange blanc, l’ordre intérieur
de
la sainteté, l’ordre cosmique et son discours immense, l’ordre des lo
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se, l’ordre des lois jurées dans la cité, l’ordre
de
la parole et l’ordre des vertus. Je lui oppose l’Esprit, l’Eau et le
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le Pain et le Vin. Je lui oppose aussi les œuvres
d’
hommes où sa part a été consumée. Je lui oppose le bleu du ciel. Le bl
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Le bleu des ciels que j’ai aimés. Le bleu du ciel
de
l’Île-de-France, la douceur de l’art et des âges, et le sourire d’une
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s. Le bleu du ciel de l’Île-de-France, la douceur
de
l’art et des âges, et le sourire d’une femme à l’amour fidèle et gai.
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e, la douceur de l’art et des âges, et le sourire
d’
une femme à l’amour fidèle et gai. Le bleu du ciel de Manhattan, fusan
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ne femme à l’amour fidèle et gai. Le bleu du ciel
de
Manhattan, fusant comme une inexorable joie entre les verticalités ar
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des gratte-ciel. Le bleu du ciel des Alpes moiré
d’
éclatante noirceur, à midi, sur la tranche des glaciers. Que ces image
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e du malheur ; et qu’elles réfutent les sophismes
de
l’Abîme comme une aube d’été évapore les brumes ! On dit que le démon
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réfutent les sophismes de l’Abîme comme une aube
d’
été évapore les brumes ! On dit que le démon aime l’heure de minuit. A
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ore les brumes ! On dit que le démon aime l’heure
de
minuit. Ah ! tournons-nous, le visage levé, vers le symbole universel
2450
s-nous, le visage levé, vers le symbole universel
de
la rigueur et de la paix profonde du pardon, et baignons un regard au
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levé, vers le symbole universel de la rigueur et
de
la paix profonde du pardon, et baignons un regard aux étendues de pur
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nde du pardon, et baignons un regard aux étendues
de
pureté ardente et dure du bleu du ciel au cœur du jour ! 25. Prove
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une virile clairvoyance, c’est la vraie guérison
de
nos fameux « complexes de culpabilité ». 27. Daniel Defoe. 28. Je p
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c’est la vraie guérison de nos fameux « complexes
de
culpabilité ». 27. Daniel Defoe. 28. Je prends le mot prochain au s
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in. — Qui est mon prochain ? — Celui qui a besoin
de
ton aide, ou celui qui t’en donne. Ce peut être n’importe quel homme,
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st plus que mensonge dirigé. 30. Je ne parle pas
de
l’immoralité, j’ignore si elle était plus grande qu’en d’autres temps
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eulement qu’on n’avait même plus « l’hypocrisie »
de
la condamner comme telle. 31. J’emploie le terme italien célébré par
2458
ar Burckhardt et par Nietzsche à propos des héros
de
la Renaissance. On pourrait le traduire à peu près par énergie de l’â
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e. On pourrait le traduire à peu près par énergie
de
l’âme, audace maîtrisée. 32. Baudelaire encore, en plein xixe siècl