1 1939, L’Amour et l’Occident (1956). Livre premier. Le mythe de Tristan
1 , comme beaucoup le pensent, la conception dite «  chrétienne  » du mariage qui cause tout notre tourment, ou au contraire, est-ce u
2 amour courtois non moins qu’aux yeux de la morale chrétienne et féodale. Mais sans cette faute initiale, il n’y aurait pas de roma
2 1939, L’Amour et l’Occident (1956). Livre II. Les origines religieuses du mythe
3 leurs croyances, des formes très diverses, tantôt chrétiennes , tantôt bouddhistes ou musulmanes. Dans un hymne manichéen récemment
4 te incantation d’un mythe ? 3.Agapè ou l’amour chrétien Prologue de l’Évangile de Jean : Au commencement était la Parole,
5 de tout le christianisme, et le foyer de l’amour chrétien que l’Écriture nomme Agapè. Événement sans précédent, et « naturellem
6 créatures ignorées par son dieu. Mais le Dieu des chrétiens — et lui seul, parmi tous les dieux que l’on connaît — ne s’est pas d
7 Éros cherchait le dépassement à l’infini. L’amour chrétien est obéissance dans le présent. Car aimer Dieu, c’est obéir à Dieu qu
8 me. » C’est ainsi dans l’amour du prochain que le chrétien se réalise et s’aime lui-même en vérité. Pour l’Agapè, point de fusio
9 ui adorent Éros ? Et qu’au contraire, les peuples chrétiens — historiquement les peuples d’Occident — ne devraient pas connaître
10 rmettaient le concubinat27. Tandis que le mariage chrétien , en devenant un sacrement, imposait une fidélité insupportable à l’ho
11 nverti par force. Engagé malgré lui dans un cadre chrétien , mais privé des secours d’une foi réelle, un tel homme, fatalement, d
12 des influences religieuses, néo-platoniciennes et chrétiennes dénaturées… Mais ces « affirmations hardies » ont aussitôt dressé con
13 e monisme eschatologique, tandis que l’orthodoxie chrétienne , décrétant la damnation éternelle du diable et des pécheurs endurcis,
14 es — jaïnisme, bouddhisme, essénisme, gnosticisme chrétien  — l’Église cathare se divisait en deux groupes : les « Parfaits » (pe
15 ces : « Il n’y a certainement pas de sermons plus chrétiens que les leurs, et leurs mœurs étaient pures… » Ce jugement rachète en
16 s’étonne de voir ce saint docteur qualifier de «  chrétienne  » une prédication qui nie plusieurs des dogmes fondamentaux de son Ég
17 fort différentes de celles qui fondent la morale chrétienne orthodoxe. La condamnation de la chair, où certains croient voir aujo
18 ains croient voir aujourd’hui une caractéristique chrétienne , est en fait d’origine manichéenne et « hérétique ». Car il est essen
19 , pour prendre un exemple moderne, le « sentiment chrétien  » que l’on reconnaît chez un Baudelaire est autre chose qu’une transp
20 la confuse combinaison de doctrines plus ou moins chrétiennes , manichéennes et néo-platoniciennes eût-il pu naître une rhétorique a
21 t son opposition sournoise ou déclarée au concept chrétien du mariage. Mais il nous resterait indifférent s’il n’avait gardé dan
22 e par sa cour d’amour où le mariage fut condamné. Chrétien avait écrit un Roman de Tristan dont les manuscrits sont perdus. Béro
23 Et c’est dans le fonds celtibérique que l’hérésie chrétienne des « purs » a puisé certains traits de sa mythologie. Que celle-ci a
24 marquer que les romans bretons sont tantôt plus «  chrétiens  » et tantôt plus « barbares » que les poèmes des troubadours, dont il
25 u sens « courtois », non pas au sens de la morale chrétienne .) Les ouvrages de Chrétien de Troyes ne sont pas seulement des poèmes
26 gion brittonique : elle s’est formée dans un pays chrétien , romanisé, puis colonisé par les Irlandais93 ». Le miracle est cepend
27 chevalerie féodale ; des apparences d’orthodoxie chrétienne  ; une sensualité parfois très complaisante ; enfin la fantaisie indiv
28 ui permet de comparer l’architecture d’une église chrétienne et celle du temple de l’amour ; c) il décide que le mariage de Trist
29 la force de ce terme, et spécialement une hérésie chrétienne historiquement déterminée. D’où l’on pourra déduire : 1° que la pass
30 isition. Le terme de bonshommes (ou simplement de chrétiens ) paraît avoir été utilisé par les cathares eux-mêmes, et « parfaits »
31 ique d’un peuple, enregistré par notre histoire «  chrétienne  » de l’Occident. 73. Consoler vient de consolari, formée de cum et
32 hez Wolfram d’Eschenbach « le roi Pescière » chez Chrétien ) est commun aux orphiques, aux manichéens, et même aux premiers chrét
33 x orphiques, aux manichéens, et même aux premiers chrétiens  ; la pierre sacrée du Graal joue un rôle dans les religions hindoue e
3 1939, L’Amour et l’Occident (1956). Livre III. Passion et mystique
34 gnification toute différente de celle du repentir chrétien . Et bien que l’orthodoxie et l’hérésie semblent parfois étrangement c
35 ble à la créature imparfaite ; tandis que pour le chrétien , l’amour divin est un malheur recréateur. Loin de nier l’amour profan
36 ntaire dans l’endura. Au contraire, les mystiques chrétiens voient dans les actes et les œuvres qui découlent de l’état mystique
37 ist s’est incarné, c’est-à-dire abaissé. Ainsi le chrétien ne se jette pas dans l’illusion d’une mort d’amour transfigurante, ma
38 ée dans les mœurs comme poésie, que les mystiques chrétiens utiliseront ses métaphores devenues profanes comme si elles étaient t
39 al de toute vie religieuse de forme et de contenu chrétiens , c’est l’événement de l’Incarnation. Dès que l’on s’écarte un tant so
40 pathologique ». L’amour, pour lui, c’est la vertu chrétienne de l’Agapè, forte comme la mort, mais non point ivre ; intime, mais h
41 e, mais l’amour plotinien n’est nullement l’Agapè chrétienne  : c’est l’Éros grec, qui est jouissance, et jouissance d’une naturell
42 is encore elle figure la pureté même du sentiment chrétien dans sa chasteté et sa simplicité élémentaires, sans exaltation ni aj
43 mour spirituel est initial, et non final. Pour le chrétien , la mort à soi-même est le début d’une vie plus réelle ici-bas, non l
44 istinguer la mystique des cathares et la doctrine chrétienne de l’amour. ⁂ Mais Eckhart ne fut pas en odeur de sainteté. Le pape J
45 tiellement à Dieu, comme le soutient l’orthodoxie chrétienne , il en résulte que l’amour de l’âme pour Dieu est, dans ce sens préci
46 ait autre chose que la nature — c’est la mystique chrétienne qui vient le reprendre pour en revêtir l’Agapè ! ⁂ Quant à la psychol
47 e dans ses formes sublimées. Le cycle de l’ascèse chrétienne ramène l’âme à l’obéissance heureuse, c’est-à-dire à l’acceptation de
4 1939, L’Amour et l’Occident (1956). Livre IV. Le mythe dans la littérature
48 , pratiquement, est-elle bien proche d’une vision chrétienne réaliste. Nous aurons l’occasion d’y revenir.) 3.Sicile, Italie, B
49 e de tout le Moyen Âge païen tourmenté par la loi chrétienne  —, c’est la secrète volonté qui devait donner naissance au mythe. Mai
50 le premier témoignage d’un conflit que le mariage chrétien était censé résoudre. On y voit l’âme récemment séparée de son corps
51 rer de la vie matérielle par la mort ; et l’Agapè chrétienne veut sanctifier la vie ; mais les « passions excitées » par Racine, c
52 ns Bérénice par une « censure » morale évidemment chrétienne d’origine. Racine ne peut ni ne veut être pleinement lucide. Car sa l
53 aux lois de la raison du siècle, reniant l’absolu chrétien . Les « mérites » et non plus la grâce imprévisible décident désormais
54 oncement à la passion, et cette mort de Julie est chrétienne — autant qu’il peut dépendre de Rousseau. (Il insiste longuement, dan
55 anichéenne de Parsival, et par-dessous l’imagerie chrétienne , dans le Saint-Graal, la pierre sacrée des Iraniens et des cathares,
5 1939, L’Amour et l’Occident (1956). Livre VI. Le mythe contre le mariage
56 eut « la Princesse lointaine » tandis que l’amour chrétien veut « le prochain ». 206. Le Dict de Padma. 207. L’encyclique Cast
6 1939, L’Amour et l’Occident (1956). Livre VII. L’amour action, ou de la fidélité
57 « essentiellement malheureux », et cette passion chrétienne est la seule vérité, et tous nos « devoirs » humains (dont le bonheur
58 l, pour l’avoir toléré… (Seul le Christ a vécu en chrétien  !) Et comment réfuter ce furieux ? Les incroyants sont renvoyés aux a
59 vé par Agapè Alors l’amour de charité, l’amour chrétien , qui est Agapè, paraît enfin, dans sa pleine stature : il est l’affir
60 dra corriger sensiblement ce schéma de l’Occident chrétien . Tout d’abord : ce n’est pas le christianisme qui a fait naître la pa
61 ne vie secrète. L’amour-passion n’est pas l’amour chrétien , ni même le « sous-produit du christianisme » ou le « changement d’ad
62 lit de l’hérésie qui en résulta avec l’orthodoxie chrétienne . Première correction d’importance. Ensuite, il est urgent de rappeler
63 al ? Ou quelque influence indirecte de l’ambition chrétienne définie par l’Apôtre (Romains, 8), et qui tendrait à restaurer le Cos
64 loi primitive, troublée par le péché ? La volonté chrétienne de transformer le pécheur dans son âme et dans sa conduite a entraîné
65 sme et l’Occident, comme si tout l’Occident était chrétien . Si donc l’Europe succombe à son mauvais génie, ce sera pour avoir tr
66 la prise sur le concret dans ses limitations. Le chrétien prend le monde tel qu’il est, et non point tel qu’il peut le rêver. S
67 ême coup nous sommes jetés au cœur même de la foi chrétienne  ! Car voici : cet homme mort au monde, tué par l’amour infini, devra
68 ristan. Il y a des cas de passion dans le mariage chrétien  ; et des états de mariage dans la passion… 215. Plus on s’écarte de
69 de la sexualité (collection « Présences ») : « Un chrétien peut et doit accepter Éros en tant qu’Éros, et justement pas en tant
70 ens d’une hygiène morale bourgeoise, mais au sens chrétien — la guérison à obtenir, c’est que l’infidèle croie — devrait conduir
71 oie — devrait conduire à désirer pour l’homme non chrétien qu’il traverse tout le « bonheur » de la passion. Or on s’efforce de