1 1961, Vingt-huit siècles d’Europe. Avant-propos
1 Avant-propos Ce n’est pas une histoire de l’Europe qu’on va lire, mais seulement une chronique — illustrée de c
2 va lire, mais seulement une chronique — illustrée de citations — des prises de conscience successives de notre unité de cu
3 e chronique — illustrée de citations — des prises de conscience successives de notre unité de culture, des temps homérique
4 citations — des prises de conscience successives de notre unité de culture, des temps homériques à nos jours. Au cours de
5 s prises de conscience successives de notre unité de culture, des temps homériques à nos jours. Au cours de ces trois mill
6 jours. Au cours de ces trois millénaires, combien d’ auteurs ont-ils écrit sur le sujet qui nous occupe ? On en trouve nomm
7  ? On en trouve nommés près de 2.000 dans l’index d’ un ouvrage récent sur l’histoire de l’idée européenne, où n’ont été re
8 0 dans l’index d’un ouvrage récent sur l’histoire de l’idée européenne, où n’ont été retenus que les meilleurs ou les plus
9 meilleurs ou les plus significatifs. J’ai choisi de citer ceux qui demeurent actuels et peuvent encore parler aux hommes
10 urent actuels et peuvent encore parler aux hommes de cette époque, soit en tant que témoins des origines de notre civilisa
11 tte époque, soit en tant que témoins des origines de notre civilisation ou de l’apparition de ses problèmes cruciaux au ni
12 que témoins des origines de notre civilisation ou de l’apparition de ses problèmes cruciaux au niveau de la conscience et
13 origines de notre civilisation ou de l’apparition de ses problèmes cruciaux au niveau de la conscience et de l’histoire ;
14 problèmes cruciaux au niveau de la conscience et de l’histoire ; soit en tant que précurseurs ou champions des plans d’un
15 it en tant que précurseurs ou champions des plans d’ union fédérative qui, sous nos yeux, commencent à prendre corps. De ce
16 e qui, sous nos yeux, commencent à prendre corps. De cette évolution, qui va du Mythe au Fait en passant par les Utopies e
17 Fait en passant par les Utopies et par une série de Plans issus les uns des autres, quelques thèmes généraux se dégagent.
18 généraux se dégagent. Si je les formule au seuil de cet ouvrage, c’est dans l’espoir que le lecteur les prenne pour guide
19 le lecteur les prenne pour guides dans un dédale de citations tirées de vingt-huit siècles de littérature, d’histoire et
20 ne pour guides dans un dédale de citations tirées de vingt-huit siècles de littérature, d’histoire et de philosophie en do
21 dédale de citations tirées de vingt-huit siècles de littérature, d’histoire et de philosophie en douze langues anciennes
22 ions tirées de vingt-huit siècles de littérature, d’ histoire et de philosophie en douze langues anciennes et modernes : 1.
23 vingt-huit siècles de littérature, d’histoire et de philosophie en douze langues anciennes et modernes : 1. L’Europe est
24 aucoup plus ancienne que ses nations. Elle risque de périr du fait de leur désunion et de leurs prétentions — toujours plu
25 nne que ses nations. Elle risque de périr du fait de leur désunion et de leurs prétentions — toujours plus illusoires — à
26 Elle risque de périr du fait de leur désunion et de leurs prétentions — toujours plus illusoires — à la souveraineté abso
27 nce une fonction non seulement universelle, mais, de fait, universalisante. Elle a fomenté le Monde, en l’explorant d’abor
28 es moyens intellectuels, techniques et politiques d’ une future unité du « genre humain ». Elle demeure responsable d’une v
29 ité du « genre humain ». Elle demeure responsable d’ une vocation mondiale, qu’elle ne pourra soutenir qu’en fédérant ses f
30 ceux qui ont vu loin. Homère déjà qualifiait Zeus d’ europos, adjectif signifiant « qui voit très loin ». 4. Nous ne trouve
31 urope qu’en la faisant, comme l’enseigne le mythe de Cadmus, qu’on va citer. Le vrai moyen de la définir, c’est de la bâti
32 le mythe de Cadmus, qu’on va citer. Le vrai moyen de la définir, c’est de la bâtir. Et il s’agit bien moins de la délimite
33 u’on va citer. Le vrai moyen de la définir, c’est de la bâtir. Et il s’agit bien moins de la délimiter dans le temps de l’
34 finir, c’est de la bâtir. Et il s’agit bien moins de la délimiter dans le temps de l’histoire et l’espace terrestre, que d
35 l s’agit bien moins de la délimiter dans le temps de l’histoire et l’espace terrestre, que de renouveler sans cesse le ray
36 le temps de l’histoire et l’espace terrestre, que de renouveler sans cesse le rayonnement de son génie particulier, qui se
37 stre, que de renouveler sans cesse le rayonnement de son génie particulier, qui se trouve être, justement, universel. J’ét
38 ais loin de soupçonner l’ampleur et la complexité de la matière lorsque j’entrepris cet ouvrage. Je suis allé de découvert
39 ère lorsque j’entrepris cet ouvrage. Je suis allé de découverte en découverte, et mon espoir est que le lecteur participe
40 européen de la culture, qui eut la première idée de cette anthologie, et auquel je dois une bonne part des recherches bib
41 rains dont les travaux m’ont inspiré, il me plaît de citer au premier rang Gonzague de Reynold et son monumental ouvrage e
42 monumental ouvrage en 8 volumes sur la Formation de l’Europe. Puis Carlo Curcio et ses deux volumes exhaustifs intitulés
43 uropagedanke ; enfin les trois auteurs classiques d’ ouvrages de base sur l’internationalisme européen, Jacob ter Meulen, C
44 e ; enfin les trois auteurs classiques d’ouvrages de base sur l’internationalisme européen, Jacob ter Meulen, Christian L.
45 e souhaite la venue prochaine, qui entreprendront d’ améliorer ce premier essai téméraire d’orientation dans un sujet illim
46 eprendront d’améliorer ce premier essai téméraire d’ orientation dans un sujet illimité, puiseront sans doute à d’autres so
2 1961, Vingt-huit siècles d’Europe. Première partie. Les Origines d’Hésiode à Charlemagne, (du ixe siècle av. J.-C. au xie siècle de notre ère)
47 Première partieLes Origines d’ Hésiode à Charlemagne (du ixe siècle av. J.-C. au xie siècle de notr
48 rlemagne (du ixe siècle av. J.-C. au xie siècle de notre ère) D’où vient le nom ? Quel est son sens ? Depuis quand par
49 siècle av. J.-C. au xie siècle de notre ère) D’ où vient le nom ? Quel est son sens ? Depuis quand parle-t-on de l’Eur
50 nom ? Quel est son sens ? Depuis quand parle-t-on de l’Europe ? (Serait-ce seulement depuis Victor Hugo et Mazzini ? Ou de
51 is Coudenhove et Briand ? Voire depuis le congrès de La Haye, au mois de mai 1948 ?) Nous avons cherché la réponse ou plut
52 and ? Voire depuis le congrès de La Haye, au mois de mai 1948 ?) Nous avons cherché la réponse ou plutôt les réponses à ce
53 on s’arrête, en général, à Pierre Dubois, juriste de Philippe le Bel, premier auteur d’un plan d’union de nos États, au dé
54 ubois, juriste de Philippe le Bel, premier auteur d’ un plan d’union de nos États, au début du xive siècle. Nous avons déc
55 iste de Philippe le Bel, premier auteur d’un plan d’ union de nos États, au début du xive siècle. Nous avons décidé d’alle
56 Philippe le Bel, premier auteur d’un plan d’union de nos États, au début du xive siècle. Nous avons décidé d’aller beauco
57 tats, au début du xive siècle. Nous avons décidé d’ aller beaucoup plus haut. Cette recherche nous a conduit vers des conf
58 s temps fabuleux. Le premier qui ait écrit le nom d’ Europe, c’est Hésiode, qui apparaît vers l’an 900 avant notre ère1. Et
59 ’Asie, c’est Hippocrate. Mais la première mention de l’Europe comme unité non seulement géographique, mais humaine, et des
60 qui la défendent, ne remonte qu’au viiie siècle de notre ère, après la bataille de Poitiers, qui eut lieu en 732. L’empi
61 ’au viiie siècle de notre ère, après la bataille de Poitiers, qui eut lieu en 732. L’empire carolingien marque un sommet
62 ieu en 732. L’empire carolingien marque un sommet de la conscience d’une Europe unie, puis on redescend vers des guerres e
63 ire carolingien marque un sommet de la conscience d’ une Europe unie, puis on redescend vers des guerres et des querelles d
64 is on redescend vers des guerres et des querelles d’ investitures : notre enquête sur les Origines se termine donc au xie
65 e sur les Origines se termine donc au xie siècle de notre ère. 1.Protohistoire d’un continent sans nom La quatrième
66 nc au xie siècle de notre ère. 1.Protohistoire d’ un continent sans nom La quatrième période glaciaire avait recouver
67 rt près de la moitié des plaines et des montagnes d’ une épaisse calotte, dont la fonte transforma le continent en marécage
68 avait produit les fascinantes peintures rupestres de Lascaux et d’Altamira. C’est dans le Moyen-Orient qu’une tout autre c
69 les fascinantes peintures rupestres de Lascaux et d’ Altamira. C’est dans le Moyen-Orient qu’une tout autre civilisation va
70 u chasseresse — elle envahira d’abord le pourtour de la Méditerranée, pour remonter de là sur notre continent et pénétrer
71 ord le pourtour de la Méditerranée, pour remonter de là sur notre continent et pénétrer profondément dans sa forêt central
72 aies qui s’étendent du Portugal jusqu’aux rivages de l’Asie Mineure. Le continent prend sa forme actuelle. Vers 6000 av. J
73 Écosse sont recouverts par la mer du Nord. Partis de l’Asie Mineure et de l’Égée, des colons remontent le cours du Vardar
74 s par la mer du Nord. Partis de l’Asie Mineure et de l’Égée, des colons remontent le cours du Vardar et du Danube pour all
75 e pour aller défricher les fertiles terres noires de l’Ukraine, les rives de la Baltique et de la mer du Nord, enfin la va
76 es fertiles terres noires de l’Ukraine, les rives de la Baltique et de la mer du Nord, enfin la vallée du Rhin et la Belgi
77 noires de l’Ukraine, les rives de la Baltique et de la mer du Nord, enfin la vallée du Rhin et la Belgique, poussant jusq
78 e, les abandonnent bientôt, brûlent d’autres pans de forêts, avancent lentement. Un autre courant de colons venus par mer
79 s de forêts, avancent lentement. Un autre courant de colons venus par mer des rives de l’Égypte actuelle et du Proche-Orie
80 n autre courant de colons venus par mer des rives de l’Égypte actuelle et du Proche-Orient, remonte peu à peu l’Italie et
81 il établit ses cités lacustres, occupe le bassin de la Seine, et s’aventure même jusqu’en Angleterre. Vers la fin du iiie
82 i nous cédons la parole à M. André Varagnac, l’un de nos meilleurs guides dans la protohistoire du continent : Avec cett
83 encore attestées par des milliers et des milliers de monuments dans presque toute l’Europe occidentale. Ses origines demeu
84 à la conquête des âmes, comme feront, après plus de trois-mille ans, les conquistadors. Quels qu’aient pu être ces rituel
85 la conscience paysanne, la vénération des morts. De hardis prospecteurs ont porté jusqu’aux îles lointaines du nord de l’
86 teurs ont porté jusqu’aux îles lointaines du nord de l’Écosse, ce culte et son architecture. Ils atteignirent le Jutland,
87 tentrionale. Avec eux voyageaient armes et outils de cuivre. Ainsi s’établit, dès la première moitié du iie millénaire av
88 ié du iie millénaire avant notre ère, un système d’ échanges maritimes associant à la Méditerranée cette Méditerranée du N
89 aire avant notre ère, il semble bien qu’une sorte de civilisation commune se soit étendue à la majeure partie du continent
90 ntinent : elle est marquée par le rite généralisé de l’incinération (« Champs d’urnes »). Puis la Grèce et l’Italie des Ét
91 ar le rite généralisé de l’incinération (« Champs d’ urnes »). Puis la Grèce et l’Italie des Étrusques, quelques siècles pl
92 ent vers l’ouest et le nord les produits raffinés de leurs arts et métiers : le vase de Vix illustre cette période dite de
93 duits raffinés de leurs arts et métiers : le vase de Vix illustre cette période dite de Hallstatt. Celle-ci fera place à l
94 iers : le vase de Vix illustre cette période dite de Hallstatt. Celle-ci fera place à la civilisation des Celtes, au ve s
95 tes, au ve siècle av. J.-C. Des Gaëls d’Irlande, d’ Angleterre et de Bretagne, en passant par les Gaulois, jusqu’aux Galat
96 le av. J.-C. Des Gaëls d’Irlande, d’Angleterre et de Bretagne, en passant par les Gaulois, jusqu’aux Galates parvenus en A
97 J.-C., les Celtes ont recouvert la majeure partie de la péninsule occidentale, à l’exclusion toutefois de l’Italie et de l
98 la péninsule occidentale, à l’exclusion toutefois de l’Italie et de la Grèce, où ils n’ont fait que de rapides incursions
99 cidentale, à l’exclusion toutefois de l’Italie et de la Grèce, où ils n’ont fait que de rapides incursions (à Rome et à De
100 de l’Italie et de la Grèce, où ils n’ont fait que de rapides incursions (à Rome et à Delphes). Leur empire décentralisé, l
101 rmée, justement, par la pensée, l’art et les lois de ces deux peuples de la mer du Sud, mystérieusement inaccessibles aux
102 la pensée, l’art et les lois de ces deux peuples de la mer du Sud, mystérieusement inaccessibles aux Celtes. La conquête
103 érieusement inaccessibles aux Celtes. La conquête de la Gaule par César va marquer le début de la fusion séculaire du mond
104 onquête de la Gaule par César va marquer le début de la fusion séculaire du monde continental et du monde méditerranéen. E
105 préhistoire, ou mieux protohistoire dont on vient d’ indiquer quelques étapes, c’est celle d’un continent sans nom, lenteme
106 on vient d’indiquer quelques étapes, c’est celle d’ un continent sans nom, lentement peuplé, civilisé et travaillé par des
107 pices ? Et que signifiera son nom ? 2.Le mythe de l’enlèvement d’Europe Quant à l’Europe, il ne paraît pas que l’on
108 ignifiera son nom ? 2.Le mythe de l’enlèvement d’ Europe Quant à l’Europe, il ne paraît pas que l’on sache, ni d’où e
109 t à l’Europe, il ne paraît pas que l’on sache, ni d’ où elle a tiré ce nom ni qui le lui a donné, à moins que nous ne disio
110 nné, à moins que nous ne disions qu’elle l’a pris d’ Europe de Tyr, car, auparavant, ainsi que les deux autres parties du m
111 deux autres parties du monde, elle n’avait point de nom. Il est certain qu’Europe était Asiatique et qu’elle n’est jamais
112 maintenant l’Europe, mais qu’elle passa seulement de Phénicie en Crète et de Crète en Lycie.4 Hérodote Europe fut d’abo
113 s qu’elle passa seulement de Phénicie en Crète et de Crète en Lycie.4 Hérodote Europe fut d’abord une déesse, l’une des
114 e, l’une des trois-mille Océanides, « race sainte de filles qui, avec Apollon et les fleuves, nourrissent la jeunesse des
115 C., nous devons la première mention connue du nom d’ Europe, au vers 357 de sa Théogonie. Parmi les innombrables sœurs Océa
116 mière mention connue du nom d’Europe, au vers 357 de sa Théogonie. Parmi les innombrables sœurs Océanides — dont il ne cit
117 core Asie, et Métis ou la Raison, première épouse de Zeus. Beaucoup plus tard, nous retrouvons Europe non plus déesse mais
118 re. Agénor, roi de Tyr en Phénicie, et descendant de Neptune, est son père. Elle est si belle quant aux yeux — comme son n
119 uant aux yeux — comme son nom grec l’indique — et d’ une si éclatante blancheur, que Zeus lui-même s’en éprend. Métamorphos
120 d. Métamorphosé en taureau, il l’enlève aux rives de l’Asie pour la conduire en Crète, où elle deviendra reine, et mère de
121 Crète, où elle deviendra reine, et mère des rois de la dynastie de Minos. De cette légende, qui inspira sans nul doute be
122 deviendra reine, et mère des rois de la dynastie de Minos. De cette légende, qui inspira sans nul doute beaucoup d’œuvres
123 reine, et mère des rois de la dynastie de Minos. De cette légende, qui inspira sans nul doute beaucoup d’œuvres perdues d
124 ette légende, qui inspira sans nul doute beaucoup d’ œuvres perdues de poètes antérieurs, et dont nous parlent Hérodote et
125 inspira sans nul doute beaucoup d’œuvres perdues de poètes antérieurs, et dont nous parlent Hérodote et Thucydide entre a
126 e version grecque tardive : la célèbre « Idylle » de Moschos, qui date du iie siècle avant notre ère, en pleine littératu
127 rine. Il est probable que Moschos, poète sicilien de Syracuse, artiste érudit et précieux, s’est inspiré de peintures trad
128 racuse, artiste érudit et précieux, s’est inspiré de peintures traditionnelles, fresques, mosaïques ou cratères, vases déc
129 printanier où les poètes, sculpteurs et peintres de vingt siècles occidentaux feront jouer leur imagination sensuelle du
130 gination sensuelle du Mythe, et cela va du métope de Sélinonte au bas-relief ornant une gare moderne — celle de Genève —,
131 nte au bas-relief ornant une gare moderne — celle de Genève —, d’Ovide à Victor Hugo et de l’auteur des mosaïques d’Aquilé
132 lief ornant une gare moderne — celle de Genève —, d’ Ovide à Victor Hugo et de l’auteur des mosaïques d’Aquilée jusqu’aux d
133 rne — celle de Genève —, d’Ovide à Victor Hugo et de l’auteur des mosaïques d’Aquilée jusqu’aux décorateurs du xxe siècle
134 ’Ovide à Victor Hugo et de l’auteur des mosaïques d’ Aquilée jusqu’aux décorateurs du xxe siècle, en passant par Véronèse,
135 èse, le Titien, le Lorrain et Tiepolo. L’Idylle de Moschos5 Une fois, Kypris envoya à Europé un doux songe. C’était
136 e. C’était l’heure où commence le troisième tiers de la nuit et où l’aurore est proche, l’heure où le sommeil, plus doux q
137 songes véridiques ; alors, la fille encore vierge de Phoinix, Europé, qui dormait dans sa chambre à l’étage supérieur, cru
138 oir deux terres se disputer à son sujet, la terre d’ Asie et la terre d’en face ; leur aspect était celui de femmes. L’une
139 disputer à son sujet, la terre d’Asie et la terre d’ en face ; leur aspect était celui de femmes. L’une avait les traits d’
140 e et la terre d’en face ; leur aspect était celui de femmes. L’une avait les traits d’une étrangère ; l’autre ressemblait
141 ect était celui de femmes. L’une avait les traits d’ une étrangère ; l’autre ressemblait à une femme du pays ; elle s’attac
142 it mise au jour et que seule elle avait pris soin d’ elle ; mais l’autre, la saisissant de force de ses mains puissantes, l
143 it pris soin d’elle ; mais l’autre, la saisissant de force de ses mains puissantes, l’entraînait sans qu’elle résistât, et
144 oin d’elle ; mais l’autre, la saisissant de force de ses mains puissantes, l’entraînait sans qu’elle résistât, et déclarai
145 lle résistât, et déclarait que, de par la volonté de Zeus porteur d’égide, il était décidé qu’Europé lui appartenait. Cell
146 déclarait que, de par la volonté de Zeus porteur d’ égide, il était décidé qu’Europé lui appartenait. Celle-ci se précipit
147 nait. Celle-ci se précipita hors de son lit garni de couvertures ; elle avait peur et son cœur palpitait car le songe qu’e
148 intive : « Qui, des habitants du ciel, m’a envoyé de semblables visions ? Que signifient les songes, qui, planant dans ma
149 es songes, qui, planant dans ma chambre au-dessus de ma couche garnie de couvertures, m’ont dressée tout émue, pendant que
150 ant dans ma chambre au-dessus de ma couche garnie de couvertures, m’ont dressée tout émue, pendant que je dormais doucemen
151 angère que j’ai vue dans mon sommeil ? Quel désir d’ elle a envahi mon âme ! Et elle, de son côté, avec quelle affection el
152 l ? Quel désir d’elle a envahi mon âme ! Et elle, de son côté, avec quelle affection elle me faisait accueil et me regarda
153 va, et alla chercher ses compagnes, nobles filles de son âge, nées la même année qu’elle, qui plaisaient à son cœur et éta
154 qu’elle se préparât pour prendre part à un chœur de danse, qu’elle baignât son corps à l’embouchure des rivières, ou qu’e
155 es fleurs ; elles gagnèrent les prairies voisines de la mer, qui étaient le lieu de réunion habituel de leur troupe, charm
156 prairies voisines de la mer, qui étaient le lieu de réunion habituel de leur troupe, charmées par la beauté des roses et
157 e la mer, qui étaient le lieu de réunion habituel de leur troupe, charmées par la beauté des roses et par le bruit des flo
158 des flots. Europé elle-même portait une corbeille d’ or magnifique, admirable merveille, admirable travail d’Héphaistos ; i
159 agnifique, admirable merveille, admirable travail d’ Héphaistos ; il l’avait donnée à Libye, quand elle était entrée dans l
160 it donnée à la toute belle Téléphaassa, qui était de son sang ; et Téléphaassa, mère d’Europé, avait remis ce superbe prés
161 présent à sa fille non mariée. L’objet était orné de beaucoup d’ouvrages d’orfèvrerie brillant d’un vif éclat. Il y avait,
162 fille non mariée. L’objet était orné de beaucoup d’ ouvrages d’orfèvrerie brillant d’un vif éclat. Il y avait, en or, Io f
163 mariée. L’objet était orné de beaucoup d’ouvrages d’ orfèvrerie brillant d’un vif éclat. Il y avait, en or, Io fille d’Inac
164 orné de beaucoup d’ouvrages d’orfèvrerie brillant d’ un vif éclat. Il y avait, en or, Io fille d’Inachos, dans le temps qu’
165 llant d’un vif éclat. Il y avait, en or, Io fille d’ Inachos, dans le temps qu’elle était encore génisse et qu’elle n’avait
166 était encore génisse et qu’elle n’avait pas forme de femme ; vagabonde elle marchait sur les chemins de la plaine salée, c
167 e femme ; vagabonde elle marchait sur les chemins de la plaine salée, comme si elle eût nagé ; la mer était faite de métal
168 alée, comme si elle eût nagé ; la mer était faite de métal azuré. Haut placés, deux hommes se tenaient debout sur l’escarp
169 qui traversait la mer. Il y avait aussi Zeus fils de Cronos, effleurant doucement de la main la génisse fille d’Inachos, q
170 t aussi Zeus fils de Cronos, effleurant doucement de la main la génisse fille d’Inachos, qu’auprès du Nil aux sept bouches
171 effleurant doucement de la main la génisse fille d’ Inachos, qu’auprès du Nil aux sept bouches, de vache cornue, il transf
172 lle d’Inachos, qu’auprès du Nil aux sept bouches, de vache cornue, il transforma de nouveau en femme ; le cours du Nil éta
173 forma de nouveau en femme ; le cours du Nil était d’ argent ; la vache, de bronze ; quant à Zeus, il était fait en or. Auto
174 emme ; le cours du Nil était d’argent ; la vache, de bronze ; quant à Zeus, il était fait en or. Autour de la corbeille ro
175 était représenté Hermès ; près de lui gisait tout de son long Argos, orné d’yeux rebelles au sommeil ; du sang rouge d’Arg
176 ; près de lui gisait tout de son long Argos, orné d’ yeux rebelles au sommeil ; du sang rouge d’Argos, surgissait un oiseau
177 , orné d’yeux rebelles au sommeil ; du sang rouge d’ Argos, surgissait un oiseau, fier de son plumage fleuri et multicolore
178 du sang rouge d’Argos, surgissait un oiseau, fier de son plumage fleuri et multicolore ; il déployait ses pennes — tel un
179  tel un navire qui fend rapidement les flots — et de ses pennes déployées couvrait les bords de la corbeille d’or. Telle é
180 s — et de ses pennes déployées couvrait les bords de la corbeille d’or. Telle était la corbeille de la toute belle Europé.
181 nnes déployées couvrait les bords de la corbeille d’ or. Telle était la corbeille de la toute belle Europé. Arrivées dans l
182 ds de la corbeille d’or. Telle était la corbeille de la toute belle Europé. Arrivées dans les prés fleuris, les jeunes fil
183 tissaient à chercher chacune telle ou telle sorte de fleur ; l’une prenait le narcisse odorant, une autre l’hyacinthe, cel
184 nes mains les roses resplendissantes à la couleur de flamme, attirait parmi elles les regards comme parmi les Charites la
185 es regards comme parmi les Charites la déesse née de l’écume. Elle ne devait pas longtemps prendre plaisir à ces fleurs, n
186 tacte sa ceinture virginale. Aussitôt que le fils de Cronos l’eut aperçue, de quel vertige saisi il fut dompté par les tra
187 le. Aussitôt que le fils de Cronos l’eut aperçue, de quel vertige saisi il fut dompté par les traits imprévus de Kypris, s
188 rtige saisi il fut dompté par les traits imprévus de Kypris, seule capable de dompter Zeus lui-même ! Voulant à la fois év
189 par les traits imprévus de Kypris, seule capable de dompter Zeus lui-même ! Voulant à la fois éviter le courroux de la ja
190 s lui-même ! Voulant à la fois éviter le courroux de la jalouse Héra et décevoir l’esprit naïf de la jeune fille, il mit u
191 roux de la jalouse Héra et décevoir l’esprit naïf de la jeune fille, il mit un masque au dieu, transforma sa personne, se
192 ptés par l’aiguillon, traînent des chars porteurs de lourds fardeaux. Tout son corps était de couleur blonde, à l’exceptio
193 porteurs de lourds fardeaux. Tout son corps était de couleur blonde, à l’exception d’un cercle blanc pur qui brillait au m
194 son corps était de couleur blonde, à l’exception d’ un cercle blanc pur qui brillait au milieu de son front ; ses yeux, de
195 us, étincelaient et lançaient des éclairs chargés d’ amour ; ses cornes s’élevaient, l’une en face de l’autre, égales au-de
196 aient, l’une en face de l’autre, égales au-dessus de sa tête, pareilles au croissant demi-circulaire de la lune cornue. Il
197 e sa tête, pareilles au croissant demi-circulaire de la lune cornue. Il vint dans la prairie, et son apparition n’effraya
198 les jeunes filles ; toutes furent prises du désir de s’approcher, de toucher le joli animal, dont la divine odeur, se répa
199 s ; toutes furent prises du désir de s’approcher, de toucher le joli animal, dont la divine odeur, se répandant au loin, d
200 pandant au loin, dominait même le souffle embaumé de la prée. Il s’arrêta en face de l’irréprochable Europé ; il lui lécha
201 le charme. Elle le caressait, essuyait doucement de ses mains l’écume qui lui tombait, abondante, de la bouche ; et au ta
202 de ses mains l’écume qui lui tombait, abondante, de la bouche ; et au taureau elle donna un baiser. Lui, poussa un tendre
203 aurait cru entendre résonner le chant harmonieux de la flûte mygdonienne. Il s’agenouilla aux pieds d’Europé ; tournant l
204 e la flûte mygdonienne. Il s’agenouilla aux pieds d’ Europé ; tournant le col, il la regardait et lui montrait son large do
205 es tresses : « Venez, chères compagnes, compagnes de mon âge, asseyons-nous sur ce taureau, pour notre divertissement ; à
206 lles allaient en faire autant ; mais il se releva d’ un bond, enlevant celle qu’il voulait et gagna rapidement la mer. Euro
207 s poissons, alentour, s’ébattaient devant les pas de Zeus ; le dauphin, sorti de l’abîme, cabriolait joyeux au-dessus de l
208 taient devant les pas de Zeus ; le dauphin, sorti de l’abîme, cabriolait joyeux au-dessus de l’eau qui s’enflait. Les Néré
209 in, sorti de l’abîme, cabriolait joyeux au-dessus de l’eau qui s’enflait. Les Néréides surgirent du fond de l’onde, et, as
210 eau qui s’enflait. Les Néréides surgirent du fond de l’onde, et, assises sur le dos de poissons, défilaient en cortège ; à
211 rgirent du fond de l’onde, et, assises sur le dos de poissons, défilaient en cortège ; à la surface des flots, qu’il gouve
212 ui s’assemblaient les tritons, bruyants musiciens de la mer ; soufflant dans de longs coquillages, ils faisaient retentir
213 ns, bruyants musiciens de la mer ; soufflant dans de longs coquillages, ils faisaient retentir le chant nuptial. Assise su
214 ant nuptial. Assise sur le dos du taureau, Europé d’ une main, serrait la grande corne de la bête ; de l’autre, elle mainte
215 ureau, Europé d’une main, serrait la grande corne de la bête ; de l’autre, elle maintenait contre elle le pli pourpré de s
216 d’une main, serrait la grande corne de la bête ; de l’autre, elle maintenait contre elle le pli pourpré de sa robe, pour
217 autre, elle maintenait contre elle le pli pourpré de sa robe, pour éviter que, traînant derrière elle, il ne fût mouillé p
218 rrière elle, il ne fût mouillé par l’onde immense de la mer blanchissante. Aux épaules, le péplos d’Europé se gonfla en un
219 e de la mer blanchissante. Aux épaules, le péplos d’ Europé se gonfla en une poche profonde, comme la voile d’un navire, et
220 é se gonfla en une poche profonde, comme la voile d’ un navire, et allégeait le poids de la jeune fille. Déjà elle était lo
221 comme la voile d’un navire, et allégeait le poids de la jeune fille. Déjà elle était loin de la terre natale ; il n’y avai
222 bas la mer sans limites. Alors, promenant autour d’ elle ses regards, elle fit entendre ces mots : « Où m’emportes-tu, tau
223 s à fendre les flots ; mais les taureaux ont peur de la voie marine. Quelle boisson capable de te plaire, quelle nourritur
224 nt peur de la voie marine. Quelle boisson capable de te plaire, quelle nourriture trouves-tu dans l’onde salée ? Sans dout
225 je pense, tu vas t’élever aussi dans les hauteurs de l’air étincelant et tu voleras comme les oiseaux rapides. Hélas, gran
226 est mon infortune, à moi qui ai quitté la demeure de mon père, et, suivant ce taureau, accomplis une étrange navigation, e
227 gation, errante et solitaire. Mais toi, souverain de la mer blanchissante, ébranleur de la terre, montre-toi pour moi bien
228 toi, souverain de la mer blanchissante, ébranleur de la terre, montre-toi pour moi bienveillant, toi qu’il me semble voir
229 me tracer la route. Ce n’est pas sans le vouloir d’ un dieu que je suis ces humides chemins. » Elle dit ; et le taureau au
230 ssure-toi, jeune fille ; ne crains pas les vagues de la mer ; je suis Zeus en personne, bien que, de près, j’aie l’air d’ê
231 s de la mer ; je suis Zeus en personne, bien que, de près, j’aie l’air d’être un taureau ; il est en ma puissance de paraî
232 Zeus en personne, bien que, de près, j’aie l’air d’ être un taureau ; il est en ma puissance de paraître ce que je veux. C
233 l’air d’être un taureau ; il est en ma puissance de paraître ce que je veux. C’est mon amour pour toi qui m’a poussé à pa
234 parcourir une telle étendue marine, sous l’aspect d’ un taureau. Mais la Crète te recevra bientôt ; elle m’a nourri moi-mêm
235 e se célébreront tes noces. Et je te rendrai mère de nobles fils, qui tous, parmi les hommes, seront porteurs de sceptre. 
236 fils, qui tous, parmi les hommes, seront porteurs de sceptre. » Il dit ; et ce qu’il avait dit était chose accomplie. Déjà
237 Zeus reprenait sa figure ; il détacha la ceinture d’ Europé ; les Heures lui préparaient une couche ; elle qui était vierge
238 it vierge auparavant, sans tarder devint l’épouse de Zeus ; sans tarder, elle conçut des enfants du fils de Cronos et devi
239 us ; sans tarder, elle conçut des enfants du fils de Cronos et devint mère. C’est sans nul doute le songe du début de l’I
240 int mère. C’est sans nul doute le songe du début de l’Idylle qui contient, pour nous tout au moins, la véritable signific
241 s deux terres qui se disputent Europe, « la terre d’ Asie et la terre d’en face », le continent déjà civilisé et celui qui
242 e disputent Europe, « la terre d’Asie et la terre d’ en face », le continent déjà civilisé et celui qui n’a pas de nom, qui
243 , le continent déjà civilisé et celui qui n’a pas de nom, qui veut un nom et un esprit, et qui va l’arracher par la violen
244 l’arracher par la violence, mais non sans l’aide de Zeus lui-même. Le thème du songe où deux femmes se disputent apparaît
245 apparaît déjà dans les Perses, l’admirable récit de Salamine qu’Eschyle fit jouer sept ans après la bataille, en 473. Il
246 s après la bataille, en 473. Il s’agit, là aussi, de la rivalité entre l’Europe et l’Asie, l’une représentée par la Grèce
247 domptable, l’autre par la Perse docile : Songe de la reine, mère de Xerxès Deux femmes, bien mises, ont semblé s’of
248 ises, ont semblé s’offrir à mes yeux, l’une parée de la robe perse, l’autre vêtue en Dorienne, toutes deux surpassant de b
249 l’autre vêtue en Dorienne, toutes deux surpassant de beaucoup les femmes d’aujourd’hui, aussi bien par leur taille que par
250 ne, toutes deux surpassant de beaucoup les femmes d’ aujourd’hui, aussi bien par leur taille que par leur beauté sans tache
251 leur met le harnais sur la nuque. Et l’une alors de tirer vanité de cet accoutrement et d’offrir une bouche toute docile
252 nais sur la nuque. Et l’une alors de tirer vanité de cet accoutrement et d’offrir une bouche toute docile aux rênes, tandi
253 ’une alors de tirer vanité de cet accoutrement et d’ offrir une bouche toute docile aux rênes, tandis que l’autre trépignai
254 es, tandis que l’autre trépignait, puis, soudain, de ses mains met en pièces le harnais qui la lie au char, l’entraîne de
255 pièces le harnais qui la lie au char, l’entraîne de vive force en dépit du mors, brise enfin le joug en deux. Mon fils to
256 ui couvrent son corps ! Voilà d’abord mes visions de la nuit. Mais je me lève, je trempe mes mains au cours d’une onde pur
257 it. Mais je me lève, je trempe mes mains au cours d’ une onde pure et, les chargeant d’offrandes, je m’approche de l’autel,
258 mains au cours d’une onde pure et, les chargeant d’ offrandes, je m’approche de l’autel, pour y consacrer le gâteau rituel
259 pure et, les chargeant d’offrandes, je m’approche de l’autel, pour y consacrer le gâteau rituel aux dieux préservateurs à
260 aperçois alors un aigle qui fuit vers l’autel bas de Phoibos ! Muette d’effroi, je m’arrête, amis. Mais bientôt, sous mes
261 gle qui fuit vers l’autel bas de Phoibos ! Muette d’ effroi, je m’arrête, amis. Mais bientôt, sous mes yeux, un milan fond
262 s mes yeux, un milan fond du ciel, à grands coups d’ ailes rapides et, de ses serres, se met à déchirer la tête de l’aigle,
263 fond du ciel, à grands coups d’ailes rapides et, de ses serres, se met à déchirer la tête de l’aigle, qui ne sait plus qu
264 ides et, de ses serres, se met à déchirer la tête de l’aigle, qui ne sait plus que se pelotonner sans défense ! Le milan
265 rec qui fond sur l’aigle perse annonce la défaite de Xerxès et sa dernière apparition, abandonné et désarmé, à la fin du d
266 ont des réalités plus générales et plus anciennes d’ un millénaire au moins, comme nous le verrons, que symbolise l’Idylle
267 ns, comme nous le verrons, que symbolise l’Idylle de Moschos, si tardive qu’elle soit. Selon la plupart des commentateurs
268 ait en somme une manifestation locale et poétique de la Grande Déesse, dont le culte dominait le Proche-Orient, de l’Euphr
269 Déesse, dont le culte dominait le Proche-Orient, de l’Euphrate au Bosphore et au Nil. Un autre érudit, le poète Robert Gr
270 n complexe assyrio-hébraïque auquel la Bible fait de fréquentes et très précises allusions et au centre duquel se situent
271 se situent des poèmes légendaires comme l’épopée de Keret (retrouvée à Ras Shamra en 1929). Keret est roi des Sidoniens-T
272 Phéniciens et qui sont des Sémites : les Hébreux de la mer. Or, Keret est le nom de la Crète ; les Keretites que mentionn
273 tes : les Hébreux de la mer. Or, Keret est le nom de la Crète ; les Keretites que mentionne le prophète Sophonie (II, 5) s
274 wé des Hébreux, est un dieu-taureau qui a coutume d’ enlever des filles sur les rives de Canaan, de Tyr et de Sidon, donc d
275 qui a coutume d’enlever des filles sur les rives de Canaan, de Tyr et de Sidon, donc de la « Phénicie » des Grecs. Il a s
276 ume d’enlever des filles sur les rives de Canaan, de Tyr et de Sidon, donc de la « Phénicie » des Grecs. Il a son siège en
277 ver des filles sur les rives de Canaan, de Tyr et de Sidon, donc de la « Phénicie » des Grecs. Il a son siège en Kaphtor (
278 sur les rives de Canaan, de Tyr et de Sidon, donc de la « Phénicie » des Grecs. Il a son siège en Kaphtor (Crète) et il es
279 en Kaphtor (Crète) et il est aussi le grand dieu d’ Edom, qui est le même nom qu’Adam, qui signifie « rouge » ou Phœnix, —
280 nom qu’Adam, qui signifie « rouge » ou Phœnix, —  d’ où Phéniciens. (Hérodote pense que les Phéniciens viennent de la mer É
281 croissant géminés, proclame l’origine phénicienne de cette représentation »8. Tout concourt à prouver l’ascendance sémitiq
282 qui n’a rien pour étonner le lecteur des travaux de Bérard sur les poèmes homériques et la Bible et sur les origines sémi
283 riques et la Bible et sur les origines sémitiques de tant de noms de dieux et de lieux grecs. Et tout cela nous renvoie, h
284 le et sur les origines sémitiques de tant de noms de dieux et de lieux grecs. Et tout cela nous renvoie, historiquement, à
285 s origines sémitiques de tant de noms de dieux et de lieux grecs. Et tout cela nous renvoie, historiquement, à des événeme
286 héologiques les plus récentes. Quoi qu’il en soit de toutes ces hypothèses, ou de ces preuves, si l’on en revient au mythe
287 . Quoi qu’il en soit de toutes ces hypothèses, ou de ces preuves, si l’on en revient au mythe grec, on voit qu’Europe rest
288 ent au mythe grec, on voit qu’Europe reste le nom d’ une puissance féminine enlevée à l’Asie, puis fécondée par le dieu mâl
289 l’Olympe des Grecs continentaux : le grand masque d’ or retrouvé sous les ruines de Mycènes, un Zeus solaire contemporain d
290 x : le grand masque d’or retrouvé sous les ruines de Mycènes, un Zeus solaire contemporain du déclin de la Crète et de son
291 e Mycènes, un Zeus solaire contemporain du déclin de la Crète et de son culte de la Grande Mère, éclaire et reflète à la f
292 eus solaire contemporain du déclin de la Crète et de son culte de la Grande Mère, éclaire et reflète à la fois la naissanc
293 ontemporain du déclin de la Crète et de son culte de la Grande Mère, éclaire et reflète à la fois la naissance de l’Europe
294 e Mère, éclaire et reflète à la fois la naissance de l’Europe hellénique. Ainsi le mythe traduit la mutation religieuse d’
295 ue. Ainsi le mythe traduit la mutation religieuse d’ une civilisation venue du Proche-Orient sur l’obscur continent occiden
296 bscur continent occidental, qui va prendre le nom de sa précieuse proie. Nous ne donnerons pas ici d’autres versions fameu
297 s ne donnerons pas ici d’autres versions fameuses de l’Enlèvement, celle d’Ovide et celle de Diodore (ier siècle av. J.-C
298 d’autres versions fameuses de l’Enlèvement, celle d’ Ovide et celle de Diodore (ier siècle av. J.-C.) : elles ne font qu’i
299 fameuses de l’Enlèvement, celle d’Ovide et celle de Diodore (ier siècle av. J.-C.) : elles ne font qu’imiter le modèle d
300 le av. J.-C.) : elles ne font qu’imiter le modèle de Moschos, que nous avons tenu à citer en entier parce qu’il figure en
301 parce qu’il figure en quelque sorte l’étymologie d’ une tradition de l’Art qui traversera les siècles. Mais les traits de
302 ure en quelque sorte l’étymologie d’une tradition de l’Art qui traversera les siècles. Mais les traits de cette gracieuse
303 l’Art qui traversera les siècles. Mais les traits de cette gracieuse allégorie décorative — le songe du début mis à part —
304 aucune réalité historique ou psychologique. Rien de commun entre l’Idylle et le destin de l’Europe dans l’histoire à veni
305 gique. Rien de commun entre l’Idylle et le destin de l’Europe dans l’histoire à venir. Il n’en va pas de même avec Horace.
306 dans l’émouvante et solennelle apostrophe finale de Vénus : … bene ferre magnum Disce fortunam ; tua sectus orbis Nomina
307 rtunam ; tua sectus orbis Nomina ducet. L’ode d’ Horace À Galatée Ainsi Europe confia au taureau séducteur son flan
308 insi Europe confia au taureau séducteur son flanc de neige, Europe, devant les monstres pullulant sur la mer et les pièges
309 r la mer et les pièges qui l’environnaient, pâlit de son audace. Elle qui, naguère dans les prés, n’était occupée que des
310 uée aux nymphes, maintenant, à la clarté douteuse de la nuit, elle ne voit rien que les astres et les flots. Mais dès qu’e
311 e aux cent villes : « Ô mon père, dit-elle, ô nom de fille que j’ai trahi, ô piété qu’a vaincue mon délire ! D’où suis-je
312 que j’ai trahi, ô piété qu’a vaincue mon délire ! D’ où suis-je venue, et où ? Une seule mort est trop légère pour la faute
313 onteux ? ou bien, sans reproche, suis-je le jouet d’ une image Dont le vol trompeur, par la porte d’ivoire, m’amène un song
314 et d’une image Dont le vol trompeur, par la porte d’ ivoire, m’amène un songe ? Valait-il mieux s’en aller à travers les fl
315 colère, ce taureau qui me déshonore, je voudrais, de toutes mes forces, déchirer, briser avec le fer les cornes du monstre
316 ant qu’une affreuse maigreur n’ait envahi l’éclat de mes joues, que cette proie, tendre et pleine de sève, se soit desséch
317 t de mes joues, que cette proie, tendre et pleine de sève, se soit desséchée, je veux belle encore nourrir les tigres. Mép
318 pide, à moins que tu n’aimes mieux filer ta tâche d’ esclave. Toi, le sang des rois, livrée à une maîtresse des pays barbar
319 barbares. » Ainsi elle se lamentait, mais à côté d’ elle se tenait Vénus, souriant malignement, et son fils, l’arc détendu
320 déesse se fut assez divertie : « Trêve, dit-elle, de colères et de bouillantes querelles, quand l’odieux taureau viendra t
321 assez divertie : « Trêve, dit-elle, de colères et de bouillantes querelles, quand l’odieux taureau viendra te donner ses c
322 ornes à déchirer. Tu es, sans le savoir, la femme de l’invincible Jupiter. Laisse là les sanglots, apprends à bien porter
323 nce, qui sera suivi par saint Jérôme, s’efforcent d’ en évacuer le merveilleux : Europe fut enlevée par les Crétois dans u
324 n deux lignes le récit primitif : il l’introduira de la sorte, grâce au succès durable de ses Étymologies, dans les écoles
325 l’introduira de la sorte, grâce au succès durable de ses Étymologies, dans les écoles du Moyen Âge. À l’inverse de Lactanc
326 logies, dans les écoles du Moyen Âge. À l’inverse de Lactance et de Jérôme, qui avaient privé le mythe de son contenu reli
327 s écoles du Moyen Âge. À l’inverse de Lactance et de Jérôme, qui avaient privé le mythe de son contenu religieux païen, le
328 Lactance et de Jérôme, qui avaient privé le mythe de son contenu religieux païen, le Moyen Âge tente parfois de lui rendre
329 ntenu religieux païen, le Moyen Âge tente parfois de lui rendre un contenu religieux chrétien, un peu comme Simone Weil, d
330 enu religieux chrétien, un peu comme Simone Weil, de nos jours, le fera pour d’autres mythes, celui de Prométhée notamment
331 de nos jours, le fera pour d’autres mythes, celui de Prométhée notamment. En voici un exemple touchant : le moine Pierre B
332 que la Crète serait la vie contemplative. Le rapt d’ Europe symbolise à ses yeux le passage de l’âme du temporel à l’éterne
333 Le rapt d’Europe symbolise à ses yeux le passage de l’âme du temporel à l’éternel : Cette pucelle Europe signifie l’âme…
334 e Europe signifie l’âme… Jupiter signifie le fils de Dieu qui pour sauver l’âme se mua en taureau, c’est-à-dire qu’il prit
335 corporelle en prenant l’humaine chair. Comme l’un de nous il vint demeurer en ce monde terrestre plein de tribulations… l’
336 nous il vint demeurer en ce monde terrestre plein de tribulations… l’âme dévote doit le suivre et se tenir à lui comme à u
337 enlevée en un navire, portant en proue la figure d’ un taureau. Et aucuns reconnaissent la nef, portant l’effigie de Jupin
338 Et aucuns reconnaissent la nef, portant l’effigie de Jupin tutélaire et du taureau. Palephatus dit qu’un Candiot nommé Tau
339 Palephatus dit qu’un Candiot nommé Taurus enleva d’ Italie ou région des Tyrrhènes, avec autres filles, Europe fille du ro
340 nnière. Y en a qui disent, qu’il y eut une légion de gens de guerre, qui portait entre autres enseignes un taureau. Quelqu
341 Y en a qui disent, qu’il y eut une légion de gens de guerre, qui portait entre autres enseignes un taureau. Quelques-uns d
342 appelée, à cause de sa beauté par la ressemblance de cette fille ravie. Le taureau certes, par lequel ils veulent qu’Europ
343 propos les mœurs et naturel des Européens. Il est d’ un courage un peu élevé, insolent, embelli par ses cornes, de couleur
344 e un peu élevé, insolent, embelli par ses cornes, de couleur blanche, d’un gosier large, d’un col gras, guide et commandeu
345 lent, embelli par ses cornes, de couleur blanche, d’ un gosier large, d’un col gras, guide et commandeur des haras ; de trè
346 es cornes, de couleur blanche, d’un gosier large, d’ un col gras, guide et commandeur des haras ; de très grande continence
347 e, d’un col gras, guide et commandeur des haras ; de très grande continence, mais s’il est amené à sexe dissemblable, il s
348 est amené à sexe dissemblable, il se montre être de chaleur extrême, toutefois en après chaste et modéré. Tel est quasi l
349 rd, André Chénier, Victor Hugo, en font une sorte d’ exercice de description, dans le style de l’Idylle antique. Citons Hug
350 hénier, Victor Hugo, en font une sorte d’exercice de description, dans le style de l’Idylle antique. Citons Hugo : Un ouv
351 ne sorte d’exercice de description, dans le style de l’Idylle antique. Citons Hugo : Un ouvrier d’Égine a sculpté sur la
352 le de l’Idylle antique. Citons Hugo : Un ouvrier d’ Égine a sculpté sur la plinthe Europe dont un dieu n’écoute pas la pla
353 s espoir, Crie, et baissant les yeux, s’épouvante de voir L’Océan monstrueux qui baise ses pieds roses. Seul, Leconte de
354 eul, Leconte de Lisle retrouve un peu de l’accent d’ Horace, dans le discours qu’il attribue à Zeus lui-même, non plus à Vé
355 phétiques Où tu célébreras ton hymen glorieux, Et de toi sortiront des Enfants héroïques Qui régiront la terre et deviendr
356 Entre le mythe primitif et la réalité — le drame de l’Europe dans l’histoire — ces poètes ont mis toute la distance qui s
357 toute la distance qui sépare l’archétype profond de la littérature décorative. Revenons au réel, c’est-à-dire à la relati
358 l symbolise et l’Europe naissant à l’histoire. Un de nos grands historiens contemporains, G. de Reynold, nous y aidera mie
359 idera mieux que personne : Europe nous est venue d’ Asie, mère de toutes les grandes religions, génératrice de tous les gr
360 ue personne : Europe nous est venue d’Asie, mère de toutes les grandes religions, génératrice de tous les grands mythes.
361 mère de toutes les grandes religions, génératrice de tous les grands mythes. Europe est une des formes prises par le premi
362 . Europe est une des formes prises par le premier de ces mythes, par le panthéisme primitif et informe : l’adoration de la
363 r le panthéisme primitif et informe : l’adoration de la terre et de la fécondité, la Grande Mère où tout est un et divers
364 primitif et informe : l’adoration de la terre et de la fécondité, la Grande Mère où tout est un et divers à la fois. Dès
365 rencontre avec une intense vie maritime, une vie de piraterie et de commerce, de conflits et d’échanges, une vie dont il
366 une intense vie maritime, une vie de piraterie et de commerce, de conflits et d’échanges, une vie dont il se colore à tel
367 ie maritime, une vie de piraterie et de commerce, de conflits et d’échanges, une vie dont il se colore à tel point que l’o
368 e vie de piraterie et de commerce, de conflits et d’ échanges, une vie dont il se colore à tel point que l’on a longtemps c
369 olore à tel point que l’on a longtemps cru facile de l’expliquer par l’histoire et par les mœurs. Sitôt méditerranéen, le
370 he Europe passe en Crète. Il y devient le symbole de toute une civilisation intermédiaire entre la Grèce et l’Asie. État p
371 colonisateur, la Crète des Minos répand le culte d’ Europe associé à celui de Zeus dans le monde égéen, dans la Grèce cont
372 es Minos répand le culte d’Europe associé à celui de Zeus dans le monde égéen, dans la Grèce continentale. Et voici le mom
373 péenne. Qu’est-ce que l’Europe ? Europe est venue d’ Asie. Elle a été enlevée à l’Orient par un dieu du Nord. Zeus-Jupiter
374 rs le dieu par excellence, le principe, la racine de tout le polythéisme grec. Il maintient l’unité entre toutes ces divin
375 lution durant laquelle les énergies élémentaires, d’ hypostase en hypostase, sont arrivées à se concrétiser, à s’humaniser.
376 e Zeus apparaît le dieu-homme dont la mission est de dominer le monde et de le gouverner, afin que les hommes puissent y v
377 -homme dont la mission est de dominer le monde et de le gouverner, afin que les hommes puissent y vivre. Il prendra pour p
378 son ; mais il l’absorbera en soi, dans la crainte d’ en avoir un fils plus fort que lui-même, et il engendrera par la tête
379 Junon, sera la morale. Ces mythes ne font-ils pas de lui le symbole de la grande civilisation génératrice de toute la civi
380 ale. Ces mythes ne font-ils pas de lui le symbole de la grande civilisation génératrice de toute la civilisation européenn
381 le symbole de la grande civilisation génératrice de toute la civilisation européenne ? Au culte de Zeus, celui d’Europe
382 e de toute la civilisation européenne ? Au culte de Zeus, celui d’Europe est associé, mais comme une manifestation second
383 ivilisation européenne ? Au culte de Zeus, celui d’ Europe est associé, mais comme une manifestation secondaire. Comment v
384 rd, se répandre peu à peu dans l’Hellade entière. De Crète, il prend trois directions : vers Corinthe, la Thessalie, puis,
385 avers la Thrace, jusqu’à la partie septentrionale de l’Asie Mineure — vers la Béotie, la Locride, la Phocide, jusque dans
386 es et phéniciennes où le mythe retrouve son point de départ. Cependant, les légendes et les traditions s’embrouillent, se
387 a déesse, paraît le continent.10 3.Le Mythe de Japhet S’il reste vrai que le mythe du rapt d’Europe se trouve tra
388 de Japhet S’il reste vrai que le mythe du rapt d’ Europe se trouve traduire le mouvement général qui a porté d’Est en Ou
389 trouve traduire le mouvement général qui a porté d’ Est en Ouest, du Proche-Orient sémitique vers le « continent sans nom 
390 nom » des peuplades colonisantes et des éléments de civilisation religieux et techniques, c’est à un autre mythe, moins c
391 t techniques, c’est à un autre mythe, moins connu de nos jours, que nous devons attribuer la persistance d’un concept de l
392 s jours, que nous devons attribuer la persistance d’ un concept de l’Europe comme continent distinct, même aux époques où l
393 nous devons attribuer la persistance d’un concept de l’Europe comme continent distinct, même aux époques où le nom d’Europ
394 me continent distinct, même aux époques où le nom d’ Europe n’éveillait plus, dans les esprits, que la seule idée géographi
395 dans les esprits, que la seule idée géographique d’ une des trois grandes régions de l’univers alors connu. C’est à la Bib
396 idée géographique d’une des trois grandes régions de l’univers alors connu. C’est à la Bible, interprétée par les premiers
397 l’Église, qu’entend remonter, dès le ive siècle de notre ère, cette tradition indépendante de la Grèce : nous l’appeller
398 siècle de notre ère, cette tradition indépendante de la Grèce : nous l’appellerons le Mythe de Japhet. Selon saint Jérôme
399 endante de la Grèce : nous l’appellerons le Mythe de Japhet. Selon saint Jérôme (346-420) dans son Liber hebraicarum quest
400 selon saint Ambroise (né en 340), les trois fils de Noé, Sem, Cham et Japhet, ont reçu en partage les trois parties du mo
401 Afrique et l’Europe. Cette tripartition mythique de la terre va dominer toute la géographie du Moyen Âge. Elle se fonde s
402 oyen Âge. Elle se fonde sur les chapitres 9 et 10 de la Genèse, qui racontent comment les fils de Noé au sortir de l’Arche
403 t 10 de la Genèse, qui racontent comment les fils de Noé au sortir de l’Arche, reçurent de leur père l’ordre de remplir to
404 nt les fils de Noé au sortir de l’Arche, reçurent de leur père l’ordre de remplir toute la terre de leur postérité. Ils ne
405 sortir de l’Arche, reçurent de leur père l’ordre de remplir toute la terre de leur postérité. Ils ne furent pas traités é
406 nt de leur père l’ordre de remplir toute la terre de leur postérité. Ils ne furent pas traités également, car Sem et Japhe
407 lement, car Sem et Japhet ayant couvert la nudité de Noé ivre furent seuls bénis par lui : Béni soit l’Éternel, Dieu de S
408 soit l’Éternel, Dieu de Sem, et que Canaan (fils de Cham) soit leur esclave ! Que Dieu étende les possessions de Japhet,
409 it leur esclave ! Que Dieu étende les possessions de Japhet, qu’il habite dans les tentes de Sem, et que Canaan soit leur
410 ssessions de Japhet, qu’il habite dans les tentes de Sem, et que Canaan soit leur esclave ! (Gen. 9, 26 et 27.) Pour Ambr
411 ve ! (Gen. 9, 26 et 27.) Pour Ambroise, les fils de Sem sont bons, ceux de Cham mauvais, ceux de Japhet « indifférents »,
412 ) Pour Ambroise, les fils de Sem sont bons, ceux de Cham mauvais, ceux de Japhet « indifférents », c’est-à-dire païens, «
413 fils de Sem sont bons, ceux de Cham mauvais, ceux de Japhet « indifférents », c’est-à-dire païens, « attachés aux biens de
414 ents », c’est-à-dire païens, « attachés aux biens de ce monde », mais capables de se convertir11. Les commentateurs des si
415 « attachés aux biens de ce monde », mais capables de se convertir11. Les commentateurs des siècles suivants comme Paul Oro
416 e Brescia reprennent et précisent la tripartition d’ Ambroise. Pour saint Augustin, Japhet est l’ancêtre des peuples de l’O
417 saint Augustin, Japhet est l’ancêtre des peuples de l’Occident, qui comprend l’Europe et l’Afrique, tandis que Sem est l’
418 Afrique, tandis que Sem est l’ancêtre des peuples de l’Orient. Augustin voit dans Genèse 9, 27 une prophétie, prophetica b
419 ca benedictio, et l’interprète ainsi : les tentes de Sem représentent l’Église ; Japhet, par sa postérité « s’étendra » ju
420 , par sa postérité « s’étendra » jusqu’au domaine de Sem, donc les peuples de l’Europe se convertiront au vrai Dieu. Le mo
421 endra » jusqu’au domaine de Sem, donc les peuples de l’Europe se convertiront au vrai Dieu. Le mot sur lequel insistent to
422 é : dilatet selon la Vulgate. Japhet (ou Yepheth, de phatah = se dilater, se répandre) signifie latitude, largeur, expansi
423 e latitude, largeur, expansion. Ainsi l’expansion de l’Empire romain en Europe et dans tout l’orbis terrarum connu à l’épo
424 pré-formé, selon Isidore de Séville, l’expansion de l’Église chrétienne. Le concept d’Europe reçoit ainsi un contenu reli
425 e, l’expansion de l’Église chrétienne. Le concept d’ Europe reçoit ainsi un contenu religieux en même temps qu’un contenu g
426 ographique. Isidore fait entrer dans la postérité de Japhet les Cappadociens, Ciliciens, Ioniens, Thraces, Gaulois et Espa
427 es, Gaulois et Espagnols : Tels sont les peuples de la lignée de Japhet, qui, du Mont Taurus dans l’Asie médiane jusqu’à
428 t Espagnols : Tels sont les peuples de la lignée de Japhet, qui, du Mont Taurus dans l’Asie médiane jusqu’à l’Océan Brita
429 omnem Europam). Jürgen Fischer cite une douzaine d’ auteurs du ve au xve siècle qui rattachent à Japhet et à ses 23 ou 2
430 gues distinctes. Relevons en passant que certains de ces auteurs divisent le genre humain en trois classes : Les hommes li
431 humain en trois classes : Les hommes libres, fils de Sem, les soldais, fils de Japhet, et les esclaves, fils de Cham. Il
432 Les hommes libres, fils de Sem, les soldais, fils de Japhet, et les esclaves, fils de Cham. Il n’est certes pas démontrab
433 es soldais, fils de Japhet, et les esclaves, fils de Cham. Il n’est certes pas démontrable, mais possible, que la relatio
434 t et l’Europe se soit vue confirmée dans l’esprit de ces auteurs par la traduction en grec de l’allégorie (biblique) : au
435 l’esprit de ces auteurs par la traduction en grec de l’allégorie (biblique) : au latin latus (large, étendu) correspond le
436 et la mythologie grecque. L’Europe ferait partie de l’économie du salut, serait donc un concept acceptable aux yeux des P
437 oncept acceptable aux yeux des Pères. Et le mythe de Japhet, ainsi interprété, exprimerait assez bien l’état du continent
438 z bien l’état du continent dans la seconde moitié de notre premier millénaire : ce mélange originellement « indifférent »
439 ement « indifférent » (à l’égard de la vraie foi) de païens et de convertis toujours plus nombreux, qui porte en bloc le n
440 férent » (à l’égard de la vraie foi) de païens et de convertis toujours plus nombreux, qui porte en bloc le nom d’Europe.
441 toujours plus nombreux, qui porte en bloc le nom d’ Europe. L’origine japhétique de l’Europe ne fut guère contestée jusqu’
442 rte en bloc le nom d’Europe. L’origine japhétique de l’Europe ne fut guère contestée jusqu’au xixe siècle. Joseph de Mais
443 tient pour un dogme établi. Vico spécule à partir d’ elle sur la formation des langues. Campanella se demande si « l’expans
444 langues. Campanella se demande si « l’expansion » de Japhet dans les tentes de Sem ne peut pas signifier « domination » de
445 ande si « l’expansion » de Japhet dans les tentes de Sem ne peut pas signifier « domination » de l’Europe sur le monde ara
446 entes de Sem ne peut pas signifier « domination » de l’Europe sur le monde arabe… Mais Voltaire croit pouvoir réfuter la l
447 ire croit pouvoir réfuter la légende en affectant de l’interpréter littéralement jusqu’à l’absurde — l’un de ses procédés
448 nterpréter littéralement jusqu’à l’absurde — l’un de ses procédés favoris : Je laisse à de plus savans que moi le soin de
449 ris : Je laisse à de plus savans que moi le soin de prouver que les trois enfans de Noé, qui étaient les seuls habitans d
450 s que moi le soin de prouver que les trois enfans de Noé, qui étaient les seuls habitans du globe, le partagèrent tout ent
451 llèrent chacun, à deux ou trois-mille lieues l’un de l’autre, fonder par-tout de puissans empires ; et que Javan son petit
452 ois-mille lieues l’un de l’autre, fonder par-tout de puissans empires ; et que Javan son petit-fils peupla la Grèce en pas
453 peupla la Grèce en passant en Italie : que c’est de là que les Grecs s’appelèrent Ioniens parce qu’Ion envoya des colonie
454 ns parce qu’Ion envoya des colonies sur les côtes de l’Asie Mineure ; que cet Ion est visiblement Javan, en changeant I en
455 avan, en changeant I en Ja, et on en van. On fait de ces contes aux enfans, et les enfans n’en croient rien.13 Mais les
456 nfants parfois sont mauvais juges et la gaminerie de Voltaire a tort en l’occurrence. L’émigration des Sémites « phénicien
457 n des Sémites « phéniciens » vers l’Ionie, patrie d’ Homère (certains ayant passé par la Boétie de Cadmus) est aujourd’hui
458 stée14. Mais si l’on songe à l’immense popularité de la légende de Japhet chez les clercs de tout rang, pendant quatorze s
459 i l’on songe à l’immense popularité de la légende de Japhet chez les clercs de tout rang, pendant quatorze siècles, on s’é
460 opularité de la légende de Japhet chez les clercs de tout rang, pendant quatorze siècles, on s’étonne d’observer que deux
461 tout rang, pendant quatorze siècles, on s’étonne d’ observer que deux ou trois humanistes seulement aient osé suggérer que
462 ient osé suggérer que cette tradition étant celle de la chrétienté, la logique eût voulu que notre continent fût nommé Jap
463 principem institutum.15 4.Cadmus ou la quête d’ Europe Les légendes et l’archéologie révèlent une autre zone de con
464 légendes et l’archéologie révèlent une autre zone de contact ou de contamination entre les deux mythes, le grec et le bibl
465 archéologie révèlent une autre zone de contact ou de contamination entre les deux mythes, le grec et le biblique. Voyons d
466 r venu de la région du Delta pour habiter le pays de Canaan, est le père de cinq fils et d’une fille : Europe. Cette derni
467 Delta pour habiter le pays de Canaan, est le père de cinq fils et d’une fille : Europe. Cette dernière ayant été enlevée p
468 er le pays de Canaan, est le père de cinq fils et d’ une fille : Europe. Cette dernière ayant été enlevée par le taureau di
469 in (ou par le roi de Crète Taurus), les cinq fils d’ Agénor partent à sa recherche, sur l’ordre de leur père. Comme ils ign
470 fils d’Agénor partent à sa recherche, sur l’ordre de leur père. Comme ils ignorent où est allé le taureau, ils prennent ch
471 future Carthage, où il donne son nom aux Punici ( de Pœni) puis revient en Canaan, qui sera rebaptisé Phénicie en son honn
472 inq frères va d’abord à Rhodes, puis en Thrace et de là, à Delphes. Il interroge l’oracle pour savoir où il trouvera Europ
473 ir où il trouvera Europe. La Pythie lui conseille d’ abandonner sa Quête, et de suivre plutôt une vache : là où cette vache
474 La Pythie lui conseille d’abandonner sa Quête, et de suivre plutôt une vache : là où cette vache tombera de fatigue, Cadmu
475 ivre plutôt une vache : là où cette vache tombera de fatigue, Cadmus devra bâtir une ville. Il achète donc une vache marqu
476 bâtir une ville. Il achète donc une vache marquée d’ une pleine lune blanche sur chaque flanc, la chasse devant lui sans ré
477 ’effondre, épuisée, au lieu où s’élèvera la ville de Thèbes. On voit donc que la Quête d’Europe — selon ce groupe de légen
478 era la ville de Thèbes. On voit donc que la Quête d’ Europe — selon ce groupe de légendes rapportées notamment par Pausania
479 voit donc que la Quête d’Europe — selon ce groupe de légendes rapportées notamment par Pausanias — se confond avec les voy
480 ien, dès ces débuts fabuleux, il paraît difficile de « retrouver Europe » ! C’est la poursuite de son image mythique qui f
481 cile de « retrouver Europe » ! C’est la poursuite de son image mythique qui fait découvrir aux cinq frères sa réalité géog
482 le au plus actif d’entre eux. Voilà qui est plein d’ enseignements. Rechercher l’Europe c’est la faire ! En d’autres termes
483 en Chnas, qui apparaît dans la Genèse sous le nom de Canaan. Nombre de coutumes cananéennes indiquent une provenance est-a
484 raît dans la Genèse sous le nom de Canaan. Nombre de coutumes cananéennes indiquent une provenance est-africaine, et les C
485 vallée du Nil et le Delta. La dispersion des fils d’ Agénor rappellerait, selon Robert Graves, la fuite vers l’ouest des Ca
486 Elle correspond en tout cas à la grande aventure de ces premiers descubridores que furent les Phéniciens. Voici comment V
487 d ramasse en une page étonnante tout cet ensemble de symboles et de réalités historiques que sa thèse « phénicienne » nous
488 e page étonnante tout cet ensemble de symboles et de réalités historiques que sa thèse « phénicienne » nous rend intelligi
489 mérique, s’étaient lancés pareillement à la quête d’ une Terre occidentale, qu’en leur langue, ils devaient nommer la « ter
490 mer la « terre du Couchant », Eréba. Ils tenaient de leurs maîtres égyptiens la notion de cette « belle Amenât », de ce Co
491 Ils tenaient de leurs maîtres égyptiens la notion de cette « belle Amenât », de ce Couchant mystérieux où l’Égypte plaçait
492 es égyptiens la notion de cette « belle Amenât », de ce Couchant mystérieux où l’Égypte plaçait le séjour éternel et bienh
493 l’Égypte plaçait le séjour éternel et bienheureux de ses morts. De cette quête de l’Eréba, les Hellènes firent leur légend
494 it le séjour éternel et bienheureux de ses morts. De cette quête de l’Eréba, les Hellènes firent leur légende de la belle
495 ernel et bienheureux de ses morts. De cette quête de l’Eréba, les Hellènes firent leur légende de la belle Europé, « l’Occ
496 uête de l’Eréba, les Hellènes firent leur légende de la belle Europé, « l’Occidentale », poursuivie par son frère Cadmos,
497 Agénor, roi de Tyr, avait envoyé à la recherche : de Phénicie en Crète, en Béotie, en Illyrie, Cadmos avait marché vers ce
498 alents pour cette Terre du Couchant, que les gens de Tyr-Sidon se figuraient sans doute à l’origine comme une masse compac
499 te, un continent « prodigieux », semblable à l’un de ceux qu’ils pouvaient connaître en leur voisinage, Asie et Libye… Com
500 leur voisinage, Asie et Libye… Combien fallut-il d’ années aux découvreurs de passes pour découper cette masse en îles, pr
501 Libye… Combien fallut-il d’années aux découvreurs de passes pour découper cette masse en îles, presqu’îles et territoires
502 ue : ils voulurent pousser plus loin la recherche de Cadmos et reculer toujours le gîte de cet autre monde : quand, au-del
503 a recherche de Cadmos et reculer toujours le gîte de cet autre monde : quand, au-delà de Calypso et des Colonnes d’Hercule
504 jours le gîte de cet autre monde : quand, au-delà de Calypso et des Colonnes d’Hercule, s’ouvrit devant eux l’Océan sans b
505 monde : quand, au-delà de Calypso et des Colonnes d’ Hercule, s’ouvrit devant eux l’Océan sans bornes, ils soutinrent qu’Es
506 éan sans bornes, ils soutinrent qu’Espéris, fille d’ Atlas, — l’Atlantide — s’était effondrée dans ces eaux, où quelques-un
507 s’était effondrée dans ces eaux, où quelques-uns de nos navigateurs modernes ont pensé la retrouver, où certains de nos g
508 eurs modernes ont pensé la retrouver, où certains de nos géographes et géologues s’entêtent encore à l’entrevoir.17 Mais
509 e à l’entrevoir.17 Mais la pleine signification de la légende de Cadmus est encore loin d’être épuisée par ce rappel de
510 r.17 Mais la pleine signification de la légende de Cadmus est encore loin d’être épuisée par ce rappel de la découverte
511 ification de la légende de Cadmus est encore loin d’ être épuisée par ce rappel de la découverte du Couchant. En effet, et
512 dmus est encore loin d’être épuisée par ce rappel de la découverte du Couchant. En effet, et toujours selon Victor Bérard,
513 resque unanime attribuait à Cadmus l’introduction de l’alphabet en Grèce, et plaçait la venue de Cadmus au début du xve s
514 but du xve siècle ». Or les trouvailles récentes de l’archéologie confirment cette date. Par la Crète, l’alphabet nous vi
515 x-ci colonisèrent la Béotie et y firent souche et de leurs nobles dynasties des « Cadméens » procèdent nombre des lettrés
516 Sept Sages, fondèrent plus tard en Ionie, patrie d’ Homère, la prose grecque et la philosophie. Qu’on n’oublie pas non plu
517 cu en Béotie… Relevons enfin deux autres éléments de parenté mythologique. Si Agénor, père d’Europe, est Canaan, il serait
518 , est Canaan, il serait, selon la Genèse, ce fils de Cham promis à l’esclavage. Le mythe gréco-phénicien et la légende de
519 esclavage. Le mythe gréco-phénicien et la légende de Japhet se recouperaient donc en ce point, non sans qu’il en résulte d
520 aient donc en ce point, non sans qu’il en résulte de nouvelles incertitudes et complexités, puisque Europe descendrait ain
521 et complexités, puisque Europe descendrait ainsi de Cham selon la légende classique et son interprétation phénicienne, ta
522 elon la tradition biblique, c’est aux descendants de Japhet qu’aurait été promis le continent occidental. Non moins curieu
523 is déconcerte, entre le Japhet de la Genèse, fils de Noé, et le Japet de la mythologie, ce Titan père de Prométhée, et don
524 le Japhet de la Genèse, fils de Noé, et le Japet de la mythologie, ce Titan père de Prométhée, et donc grand-père de Deuc
525 Noé, et le Japet de la mythologie, ce Titan père de Prométhée, et donc grand-père de Deucalion, qui fut précisément le No
526 18 : Japhet, qui a peuplé la plus grande partie de l’Occident, y est demeuré célèbre sous le nom fameux d’Iapet. Nous a
527 ccident, y est demeuré célèbre sous le nom fameux d’ Iapet. Nous allons voir comment s’explique cette apparente confusion.
528 la pratiquent sans art. À travers des filiations de signes et de sons qu’il est parfois possible d’établir sans équivoque
529 t sans art. À travers des filiations de signes et de sons qu’il est parfois possible d’établir sans équivoque, elle se pro
530 s de signes et de sons qu’il est parfois possible d’ établir sans équivoque, elle se propose de rechercher des significatio
531 ossible d’établir sans équivoque, elle se propose de rechercher des significations, tenant les primitives pour plus authen
532 st significatif. Elle décrit donc les préférences de celui qui découvre une « vraie » racine, plutôt qu’elle ne statue sur
533 ne, plutôt qu’elle ne statue sur le « vrai » sens d’ un mot. Et c’est pourquoi il est intéressant de rappeler ici quelques-
534 ns d’un mot. Et c’est pourquoi il est intéressant de rappeler ici quelques-unes des « origines » retenues par diverses épo
535 tenues par diverses époques pour expliquer ce nom d’ Europe, dont Hérodote pensait que nul mortel ne saurait espérer découv
536 sur la double croyance traditionnelle que le nom d’ Europe vient de l’hébreu et que notre continent fut la part de Japhet.
537 nt de l’hébreu et que notre continent fut la part de Japhet. (Il s’agit donc, comme on l’a vu plus haut, de donner une rac
538 phet. (Il s’agit donc, comme on l’a vu plus haut, de donner une racine biblique à ce nom qui, autrement, rappellerait fâch
539 t les coupables amours du roi des dieux païens et d’ une fille de Tyr, cette ville cent fois maudite par les Prophètes.) Go
540 les amours du roi des dieux païens et d’une fille de Tyr, cette ville cent fois maudite par les Prophètes.) Goropius écrit
541 n mariage légitime ; Ur, excellent, Hop, espoir : d’ où réussit Europ soit espoir excellent d’un mariage légitime, lequel a
542 espoir : d’où réussit Europ soit espoir excellent d’ un mariage légitime, lequel a été propre de cette portion des terres,
543 ellent d’un mariage légitime, lequel a été propre de cette portion des terres, laquelle Noé donna à Japhet pour sa demeure
544 het pour sa demeure. Car combien que la postérité de Sem a été plusieurs siècles alliée avec Dieu en la race d’Abraham, si
545 été plusieurs siècles alliée avec Dieu en la race d’ Abraham, si a elle toutefois répudiée. Mais le mariage, par lequel le
546 jamais rompu : de sorte qu’à bon droit la portion de Japhet est dite Europe. b) Après l’étymologie fantaisiste, voici la
547 fantaisiste, voici la celtique : dans leur Atlas de géographie ancienne et moderne publié en 1829, Lapie père et Lapie fi
548 t, paraît s’imposer tout d’abord par des raisons… d’ orientation ! Ainsi l’historien roumain Nicolas Jorga écrivait en 1932
549 iens peuples orientaux qui vivaient dans les pays d’ où se lève le soleil, c’est-à-dire en Asie, par le mot Europe, on ente
550 ope, on entendait le pays où le soleil se couche. De leur côté, la lumière ; du nôtre, l’obscurité, les ténèbres, l’Arip,
551 , mot que l’on doit mettre à côté du sombre Érèbe de la mythologie grecque. En effet, ne pouvant pas déplacer encore davan
552 s haut sur les origines « phéniciennes » du mythe d’ Europe vient renforcer la vraisemblance de l’étymologie ereb. Mais voi
553 u mythe d’Europe vient renforcer la vraisemblance de l’étymologie ereb. Mais voici, de surcroît, un argument immédiatement
554 a vraisemblance de l’étymologie ereb. Mais voici, de surcroît, un argument immédiatement tiré de la phonétique. On sait qu
555 oici, de surcroît, un argument immédiatement tiré de la phonétique. On sait qu’en hébreu, ce sont les consonnes qui compte
556 re en faveur de l’origine sémitique : On a cessé de croire à la parenté d’Erèbe et d’Europe, par quoi entendre une parent
557 ne sémitique : On a cessé de croire à la parenté d’ Erèbe et d’Europe, par quoi entendre une parenté directe, comme celle
558 e : On a cessé de croire à la parenté d’Erèbe et d’ Europe, par quoi entendre une parenté directe, comme celle du frère et
559 ndre une parenté directe, comme celle du frère et de la sœur. Cependant, il y a un lien indirect, et c’est encore la mytho
560 iode — engendra donc la Nuit. Et la Nuit engendra de terribles enfants : la Détresse, le Trépas, la Mort, les Parques, Ném
561 personne », le Sommeil, les Songes ; mais enfin, de son frère Erèbe lui-même, l’Éther et la Lumière du jour, cette lumièr
562 mière du jour, cette lumière victorieuse qui naît de la nuit pour la tuer. Puis Erèbe prit un sens dérivé : les profondeur
563 ique ereb, soir. d) Reste notre nom grec, celui de la fille d’Agénor. Ici, nous invoquerons de nouveau G. de Reynold21 :
564 oir. d) Reste notre nom grec, celui de la fille d’ Agénor. Ici, nous invoquerons de nouveau G. de Reynold21 : Europe est
565 us rarement euruopè, une des épithètes homériques de Zeus. Euruopa se relève plusieurs fois dans l’Iliade et l’Odyssée : e
566 ment récents. Ces formes sont des vocatifs. Celle d’ euruopa est également employée comme nominatif éolien ou bien comme ac
567 ogie, elle est facile. Nous avons là des composés de deux autres mots grecs : l’adjectif eurus, large, ample, spacieux ; l
568 yeux, au beau regard, au beau visage. La parenté d’ Europe avec l’épithète homérique de Zeus est ainsi évidente. Eurôpè,
569 ge. La parenté d’Europe avec l’épithète homérique de Zeus est ainsi évidente. Eurôpè, de son côté, n’a point tardé à prod
570 te homérique de Zeus est ainsi évidente. Eurôpè, de son côté, n’a point tardé à produire son masculin eurôpos. « Zeus qui
571  » a sa cité divine sur l’Olympe : dans le massif de l’Olympe, le Pénée prend sa source, et il a pour affluent l’Europos.
572 uropos. Le fait qu’« europe » est un qualificatif de Zeus amène à se demander s’il ne se serait pas produit un dédoublemen
573 à son tour des possibilités diverses. Voici l’une d’ elles, explorée par Robert Graves22, dans les notes jointes à son chap
574 ues signalées par cet auteur donnera quelque idée de l’extrême complexité du thème : Europe signifie « large face », syno
575 thème : Europe signifie « large face », synonyme de pleine lune et l’un des titres des déesses-Lune, Demeter à Labadie et
576  bien irrigué ». Le saule régit le cinquième mois de l’année sacrée23 et il est associé à la magie et aux rites de fertili
577 acrée23 et il est associé à la magie et aux rites de fertilité dans toute l’Europe… Le rapt d’Europe par Zeus, qui rappell
578 x rites de fertilité dans toute l’Europe… Le rapt d’ Europe par Zeus, qui rappelle une très longue occupation de la Crète p
579 par Zeus, qui rappelle une très longue occupation de la Crète par les Hellènes, a été tiré d’images préhelléniques de la P
580 cupation de la Crète par les Hellènes, a été tiré d’ images préhelléniques de la Prêtresse lunaire chevauchant triomphaleme
581 les Hellènes, a été tiré d’images préhelléniques de la Prêtresse lunaire chevauchant triomphalement le taureau solaire, s
582 e. La scène est dépeinte par huit plaques moulées de verre bleu, trouvées dans la cité mycénienne de Midea : il semble qu’
583 s de verre bleu, trouvées dans la cité mycénienne de Midea : il semble qu’elle fasse partie d’un rituel de fertilité au co
584 énienne de Midea : il semble qu’elle fasse partie d’ un rituel de fertilité au cours duquel la guirlande de Mai d’Europe ét
585 idea : il semble qu’elle fasse partie d’un rituel de fertilité au cours duquel la guirlande de Mai d’Europe était portée e
586 rituel de fertilité au cours duquel la guirlande de Mai d’Europe était portée en procession. Quant à la séduction d’Europ
587 de fertilité au cours duquel la guirlande de Mai d’ Europe était portée en procession. Quant à la séduction d’Europe par Z
588 était portée en procession. Quant à la séduction d’ Europe par Zeus changé en aigle24, elle rappelle la séduction d’Héra p
589 eus changé en aigle24, elle rappelle la séduction d’ Héra par Zeus changé en coucou ; et selon Hésychius, Héra portait le t
590 oucou ; et selon Hésychius, Héra portait le titre d’ Europia. Le nom crétois et corinthien d’Europe était Hellotis, qui évo
591 le titre d’Europia. Le nom crétois et corinthien d’ Europe était Hellotis, qui évoque Helice (saule) ; Hellé et Hélène son
592 que le plane était aussi tenu pour l’arbre sacré d’ Hélène. Sa sainteté s’explique par les cinq pointes de sa feuille, rep
593 lène. Sa sainteté s’explique par les cinq pointes de sa feuille, représentant les cinq doigts de la déesse… Faut-il rappe
594 intes de sa feuille, représentant les cinq doigts de la déesse… Faut-il rappeler au surplus que Hellén — masculin d’Hélèn
595 Faut-il rappeler au surplus que Hellén — masculin d’ Hélène et ancêtre éponyme de tous les Hellènes — était le fils de Deuc
596 que Hellén — masculin d’Hélène et ancêtre éponyme de tous les Hellènes — était le fils de Deucalion ? Que celui-ci est le
597 être éponyme de tous les Hellènes — était le fils de Deucalion ? Que celui-ci est le Noé de la mythologie grecque, seul re
598 it le fils de Deucalion ? Que celui-ci est le Noé de la mythologie grecque, seul rescapé avec Pyrrha sa femme (grâce à l’A
599 une que Prométhée son père lui a fait construire) d’ un déluge dont une colombe lui annonça la fin ? Hellén est donc l’arri
600 des symboles et des mythes ! On n’en finirait pas de les préciser, de les distinguer, de les contraster — jusqu’au moment
601 es mythes ! On n’en finirait pas de les préciser, de les distinguer, de les contraster — jusqu’au moment où ils apparaîtra
602 finirait pas de les préciser, de les distinguer, de les contraster — jusqu’au moment où ils apparaîtraient, peut-être, co
603 nt où ils apparaîtraient, peut-être, comme autant de récits véridiques d’une seule et même histoire, vue par divers témoin
604 ent, peut-être, comme autant de récits véridiques d’ une seule et même histoire, vue par divers témoins. 6.Le concept gé
605 ins. 6.Le concept géographique On a coutume d’ attribuer à Paul Valéry la remarque que l’Europe n’est qu’un cap ou « 
606 ue que l’Europe n’est qu’un cap ou « un appendice de l’Asie ». Voici son texte le plus souvent cité à ce sujet : L’Europe
607 u’elle paraît, c’est-à-dire : la partie précieuse de l’univers terrestre, la perle de la sphère, le cerveau d’un vaste cor
608 partie précieuse de l’univers terrestre, la perle de la sphère, le cerveau d’un vaste corps ?25 Ailleurs encore Valéry n
609 vers terrestre, la perle de la sphère, le cerveau d’ un vaste corps ?25 Ailleurs encore Valéry nomme l’Europe une sorte
610 Ailleurs encore Valéry nomme l’Europe une sorte de cap du vieux continent, un appendice occidental de l’Asie. Cela fit
611 e cap du vieux continent, un appendice occidental de l’Asie. Cela fit naguère sensation. Il s’agit en réalité d’un lieu c
612 Cela fit naguère sensation. Il s’agit en réalité d’ un lieu commun des géographes depuis des siècles. Citons-en quelques-u
613 er un tout indépendant. Ce n’est qu’une péninsule de l’Asie, l’extrémité, la pointe du continent asiatique.29 Et, dans l
614 lus, Auguste Himly, Raoul Blanchard, tous auteurs d’ Atlas et de manuels classiques. Mais une comparaison non moins traditi
615 e Himly, Raoul Blanchard, tous auteurs d’Atlas et de manuels classiques. Mais une comparaison non moins traditionnelle fai
616 ais une comparaison non moins traditionnelle fait de l’Europe une Grèce agrandie30 : On a souvent dit que l’Europe était
617 riée et coupée, des limites naturelles ; entourée de mers, baignée de golfes profonds, elle tenait un heureux milieu entre
618 es limites naturelles ; entourée de mers, baignée de golfes profonds, elle tenait un heureux milieu entre l’hiver de la Sc
619 onds, elle tenait un heureux milieu entre l’hiver de la Scythie et les ardeurs de l’Égypte. Elle dominait alors les mers l
620 milieu entre l’hiver de la Scythie et les ardeurs de l’Égypte. Elle dominait alors les mers les plus connues. Mais ce para
621 t être étendu à des rapports plus nobles que ceux de la nature corporelle. Le jeu mutuel de plusieurs caractères nationaux
622 s que ceux de la nature corporelle. Le jeu mutuel de plusieurs caractères nationaux différents et même opposés ; l’esprit
623 s nationaux différents et même opposés ; l’esprit de liberté tant civil que politique : voilà les deux grands points de re
624 ivil que politique : voilà les deux grands points de ressemblance. Pourtant ce ne sont pas les Grecs qui ont « découvert 
625 ais bien les Phéniciens, étendant leurs comptoirs de commerce, leur piraterie et leurs explorations maritimes à toute la M
626 toute la Méditerranée, puis au-delà des Colonnes d’ Hercule jusqu’aux Canaries, à la Bretagne, aux Îles Britanniques et à
627 tanniques et à la mer du Nord, où le Monde cesse… De Carthage, colonie de Tyr (fondée nous l’avons vu, par Phœnix, l’un de
628 du Nord, où le Monde cesse… De Carthage, colonie de Tyr (fondée nous l’avons vu, par Phœnix, l’un des frères d’Europe), H
629 selon Pline, reçut un siècle plus tard la mission de remonter les côtes atlantiques de l’Europe : Sicut ad extera Europæ
630 tard la mission de remonter les côtes atlantiques de l’Europe : Sicut ad extera Europæ noscenda missus eodem tempore Himi
631 noscenda missus eodem tempore Himilco. Un poète de la décadence, Rufius Festus Avenius, devait mettre en vers latin, ver
632 ttre en vers latin, vers 370, le récit du périple d’ Himilco : Au-delà des Colonnes, sur les plages d’Europe, les Carthagi
633 d’Himilco : Au-delà des Colonnes, sur les plages d’ Europe, les Carthaginois eurent autrefois des établissements et des vi
634 établissements et des villes. Leur coutume était de construire des navires à carène plate, propres à glisser sur une mer
635 rapporte qu’en dehors des Colonnes, à l’Occident de l’Europe, s’étend une mer sans limites ; l’océan s’y déploie vers des
636 it la voile. Aussi l’air y est-il enveloppé comme d’ un manteau de brouillards ; une brume épaisse cache en tout temps les
637 Aussi l’air y est-il enveloppé comme d’un manteau de brouillards ; une brume épaisse cache en tout temps les flots, et de
638 e brume épaisse cache en tout temps les flots, et de sombres vapeurs y voilent la clarté du jour. Cependant les Grecs ont
639 t été les premiers à donner à ce continent le nom de la princesse enlevée par leur dieu aux Phéniciens, précisément : d’ap
640 c’est le savant Hippias d’Élis, inventeur allégué de la mnémotechnie, qui aurait le premier nommé les parties du monde d’a
641 é vers 540 av. J.-C., avait écrit une Description de la Terre en deux livres, dont l’un consacré à l’Europe, l’autre à l’A
642 n Prométhée joué en 472, Eschyle fait dire à l’un de ses héros décrivant un voyage qui implique la traversée du Bosphore :
643 raversée du Bosphore : Dès lors, laissant le sol d’ Europe, tu prendras pied sur le continent d’Asie. Anaximandre pense
644 e sol d’Europe, tu prendras pied sur le continent d’ Asie. Anaximandre pense de même31. Mais à partir de là, tous les aut
645 pied sur le continent d’Asie. Anaximandre pense de même31. Mais à partir de là, tous les auteurs antiques jusqu’à Strabo
646 ent la même définition : l’Europe va des Colonnes d’ Hercule (c’est Gibraltar) jusqu’au Phase — ou Rioni — petit fleuve qui
647 te et que nous qui habitons du Phase aux Colonnes d’ Hercule, nous n’en habitons qu’une petite partie, vivant tout autour d
648 mer, comme des fourmis et des grenouilles autour d’ un marécage, et qu’il y a par ailleurs divers et nombreux peuples qui
649 d’autres contrées semblables. C’est ici le lieu de rappeler que Socrate fut le premier philosophe à dire que sa patrie é
650 Reynold32 distingue trois étapes dans le passage de la conception mythique et géographique au plan politique et « culture
651 hique au plan politique et « culturel » : l’étape d’ Hippocrate, celle d’Aristote et celle d’Isocrate. Voici les textes : V
652 que et « culturel » : l’étape d’Hippocrate, celle d’ Aristote et celle d’Isocrate. Voici les textes : Vers la fin du Ve siè
653 : l’étape d’Hippocrate, celle d’Aristote et celle d’ Isocrate. Voici les textes : Vers la fin du Ve siècle av. J.-C., Hippo
654 a fin du Ve siècle av. J.-C., Hippocrate (ou l’un de ses disciples), dans son Traité des airs, des eaux et des lieux fait
655 s différens phénomènes qui, par leur dissemblance de caractère, font distinguer l’Asie de l’Europe. Dissemblance qui s’éte
656 ux parties du monde, qu’ils contrastent entre eux d’ une manière étonnante. Comme il serait trop difficile de traiter ces p
657 manière étonnante. Comme il serait trop difficile de traiter ces phénomènes dans tous leurs développements, je me bornerai
658 J’avance donc que l’Asie diffère considérablement de l’Europe, non seulement en ce qui est particulier aux hommes, mais en
659 re en ce qui est relatif à toutes les productions de la terre. Tous les caractères des différens phénomènes sont donc comm
660 empérature la plus habituelle en est plus douce ; d’ où il suit encore que les peuples qui l’habitent sont d’un naturel plu
661 l suit encore que les peuples qui l’habitent sont d’ un naturel plus doux et d’un esprit plus pénétrant… § 21. Si donc les
662 les qui l’habitent sont d’un naturel plus doux et d’ un esprit plus pénétrant… § 21. Si donc les Asiatiques sont pusillanim
663 t pusillanimes, sans courage, moins belliqueux et d’ un caractère plus doux que les Européens, c’est encore dans la nature
664 faut chercher la principale cause. En Asie, loin d’ éprouver de fortes tribulations, celles-ci ont à peu près les mêmes ca
665 her la principale cause. En Asie, loin d’éprouver de fortes tribulations, celles-ci ont à peu près les mêmes caractères, p
666 s les mêmes caractères, passant du froid au chaud d’ une manière insensible ; de sorte que dans une telle température la fa
667 toujours égale ; car ce sont les passages rapides d’ un extrême à l’autre qui stimulent les esprits de l’homme, et font naî
668 d’un extrême à l’autre qui stimulent les esprits de l’homme, et font naître les idées de s’arracher à son état d’inertie
669 les esprits de l’homme, et font naître les idées de s’arracher à son état d’inertie et d’insouciance. Mais, non seulement
670 et font naître les idées de s’arracher à son état d’ inertie et d’insouciance. Mais, non seulement, je pense que c’est au d
671 e les idées de s’arracher à son état d’inertie et d’ insouciance. Mais, non seulement, je pense que c’est au défaut de pare
672 Mais, non seulement, je pense que c’est au défaut de pareils changemens qu’il faut attribuer la pusillanimité des Asiatiqu
673 auxquelles ils sont soumis. La plus grande partie de l’Asie étant gouvernée par des rois, il en résulte que partout où les
674 ulte que partout où les hommes ne sont ni maîtres de leurs volontés, ni gouvernés par les lois qu’ils se sont données, mai
675 uper du métier des armes, ils ont même grand soin de ne point paraître avoir l’inclination guerrière, par la raison que le
676 es intérêts) ne sont pas également partagés. Sous de tels gouvernements les sujets sont forcés d’aller à la guerre, d’en s
677 Sous de tels gouvernements les sujets sont forcés d’ aller à la guerre, d’en supporter toutes les peines, et de mourir même
678 ments les sujets sont forcés d’aller à la guerre, d’ en supporter toutes les peines, et de mourir même pour leurs maîtres,
679 à la guerre, d’en supporter toutes les peines, et de mourir même pour leurs maîtres, loin de leurs enfans, de leurs femmes
680 ir même pour leurs maîtres, loin de leurs enfans, de leurs femmes et de leurs amis. Leurs exploits ne servent donc qu’à au
681 maîtres, loin de leurs enfans, de leurs femmes et de leurs amis. Leurs exploits ne servent donc qu’à augmenter et à propag
682 nt donc qu’à augmenter et à propager la puissance de leurs tyrans, lorsque les dangers et la mort sont les seuls fruits qu
683 la mort sont les seuls fruits qu’ils recueillent de leur bravoure. Ajoutez à cela que sous de tels hommes la terre reste
684 eillent de leur bravoure. Ajoutez à cela que sous de tels hommes la terre reste encore sans culture, autant par l’inertie
685 e reste encore sans culture, autant par l’inertie de leur tempérament, que par la crainte des ravages de la guerre ; de so
686 leur tempérament, que par la crainte des ravages de la guerre ; de sorte que, quand même il se trouverait parmi eux des h
687 rmi eux des hommes braves et courageux, la nature de leurs lois doit s’ajouter à la répugnance de donner essor à leur cour
688 ture de leurs lois doit s’ajouter à la répugnance de donner essor à leur courage. § 23… Ce qu’on vient d’observer à l’égar
689 donner essor à leur courage. § 23… Ce qu’on vient d’ observer à l’égard du caractère du physique, peut aussi s’appliquer au
690 ractères moraux. Aussi voit-on les Européens être d’ un naturel plus sauvage, insociable, emporté, par cela même que vivant
691 rendent l’homme agreste, et dépouillent ses mœurs de douceur et d’aménité. Par la même raison, je les regarde donc comme p
692 e agreste, et dépouillent ses mœurs de douceur et d’ aménité. Par la même raison, je les regarde donc comme plus courageux
693 donc comme plus courageux que les Asiatiques, car de l’influence d’une température uniforme naît l’insouciance et la pares
694 courageux que les Asiatiques, car de l’influence d’ une température uniforme naît l’insouciance et la paresse, ce qui est
695 causes du caractère plus belliqueux des habitants de l’Europe que des Asiatiques. Mais il n’en est pas moins certain que l
696 ce que l’âme asservie ne peut avoir aucune envie de risquer sa personne, sans autre intérêt que celui d’augmenter la puis
697 risquer sa personne, sans autre intérêt que celui d’ augmenter la puissance de qui l’opprime. Le passage essentiel d’Arist
698 autre intérêt que celui d’augmenter la puissance de qui l’opprime. Le passage essentiel d’Aristote (384-322 av. J.-C.) s
699 puissance de qui l’opprime. Le passage essentiel d’ Aristote (384-322 av. J.-C.) sur l’Europe se trouve au livre VII, chap
700 sur l’Europe se trouve au livre VII, chapitre 6, de la Politique : Les peuples qui habitent les pays froids et les diffé
701 itent les pays froids et les différentes contrées de l’Europe sont généralement pleins de courage, mais ils sont inférieur
702 tes contrées de l’Europe sont généralement pleins de courage, mais ils sont inférieurs sous le rapport de l’intelligence e
703 t inférieurs sous le rapport de l’intelligence et de l’industrie. C’est pour cette raison qu’ils savent mieux conserver le
704 conserver leur liberté, mais ils sont incapables d’ organiser un gouvernement et ils ne peuvent pas conquérir les pays voi
705 uvent pas conquérir les pays voisins. Les peuples de l’Asie sont intelligents et propres à l’industrie, mais ils manquent
706 gents et propres à l’industrie, mais ils manquent de courage, et c’est pour cela qu’ils ne sortent pas de leur assujettiss
707 courage, et c’est pour cela qu’ils ne sortent pas de leur assujettissement et de leur esclavage perpétuels. La race des Gr
708 qu’ils ne sortent pas de leur assujettissement et de leur esclavage perpétuels. La race des Grecs, occupant les contrées i
709 s contrées intermédiaires, réunit ces deux sortes de caractères, elle est brave et intelligente. Aussi demeure-t-elle libr
710 Après cette étape « hégémonique » vient l’étape de « l’adoption ». Elle est caractérisée par la phrase célèbre d’Isocrat
711 on ». Elle est caractérisée par la phrase célèbre d’ Isocrate, contemporain de Platon (ve au ive siècle av. J.-C.) et anc
712 ée par la phrase célèbre d’Isocrate, contemporain de Platon (ve au ive siècle av. J.-C.) et ancêtre de tous les « conféd
713 Platon (ve au ive siècle av. J.-C.) et ancêtre de tous les « confédéralistes » ou « unionistes » européens : On appell
714 nant la généalogie des descriptions géographiques de l’Europe, d’Hérodote à saint Augustin. Hérodote, écrivant au ve siè
715 logie des descriptions géographiques de l’Europe, d’ Hérodote à saint Augustin. Hérodote, écrivant au ve siècle av. J.-C.
716 pe comme une région nordique assez mal distinguée de la Scythie, qui est la plaine russe. Il lui donne pour axe le Danube,
717 ’Europe entière, il entre dans la Scythie par une de ses extrémités. Cependant, Hérodote se demande pourquoi la Terre ét
718 ui donne trois noms différents, qui sont des noms de femmes. En effet, selon Strabon : Du temps d’Homère, ni l’Europe, n
719 s de femmes. En effet, selon Strabon : Du temps d’ Homère, ni l’Europe, ni l’Asie n’avaient reçu leurs noms respectifs ;
720 fait trop marquant qu’il n’eût certes pas négligé de mentionner. Et pourtant, il semble qu’Homère ait eu la notion de l’E
721 Et pourtant, il semble qu’Homère ait eu la notion de l’Europe. On lit au chant XIV de l’Iliade, à propos d’Hypnos et d’Hér
722 ait eu la notion de l’Europe. On lit au chant XIV de l’Iliade, à propos d’Hypnos et d’Héré : Tous deux allèrent sur le co
723 it au chant XIV de l’Iliade, à propos d’Hypnos et d’ Héré : Tous deux allèrent sur le continent, et le haut des forêts s’a
724 Strabon, Grec du Pont, écrivant sous les règnes d’ Auguste et de Tibère, nous donne un premier grand tableau géographique
725 ec du Pont, écrivant sous les règnes d’Auguste et de Tibère, nous donne un premier grand tableau géographique de l’Europe,
726 nous donne un premier grand tableau géographique de l’Europe, continent supérieur aux deux autres, nous dit-il, à cause
727 e l’a placé pour le développement moral et social de ses habitants… Car même dans les régions montagneuses, leur intellige
728 nt vaincu la nature et permis à leur civilisation de se développer. Suit une théorie des climats, qui rappelle l’école d’
729 uit une théorie des climats, qui rappelle l’école d’ Hippocrate et qui fera fortune jusqu’au xixe siècle ; on la retrouve
730 eur goût pour les arts et à leur parfaite entente de toutes les conditions de la vie matérielle. Les Romains, de leur côté
731 à leur parfaite entente de toutes les conditions de la vie matérielle. Les Romains, de leur côté, après avoir incorporé à
732 les conditions de la vie matérielle. Les Romains, de leur côté, après avoir incorporé à leur empire maintes nations restée
733 upaient et que leur âpreté naturelle, leur manque de ports, la rigueur de leur climat ou telle autre cause rendaient presq
734 preté naturelle, leur manque de ports, la rigueur de leur climat ou telle autre cause rendaient presque inhabitables, sont
735 t presque inhabitables, sont parvenus à les tirer de leur isolement, à les mettre en rapport les unes avec les autres, et
736 tres, et à ployer les plus barbares aux habitudes de la vie sociale. Mais dans le reste de la partie habitable, là où le s
737 x habitudes de la vie sociale. Mais dans le reste de la partie habitable, là où le sol de l’Europe est uni et son climat t
738 ans le reste de la partie habitable, là où le sol de l’Europe est uni et son climat tempéré, la nature semble avoir tout f
739 ure semble avoir tout fait pour hâter les progrès de la civilisation. Comme il arrive, en effet, que dans les contrées ria
740 iantes et fertiles, les populations sont toujours d’ humeur pacifique, tandis qu’elles sont belliqueuses et énergiques dans
741 s’établit entre les unes et les autres un échange de mutuels services, les secondes prêtant le secours de leurs armes aux
742 mutuels services, les secondes prêtant le secours de leurs armes aux premières qui les aident à leur tour des productions
743 mières qui les aident à leur tour des productions de leur sol, des travaux de leurs artistes et des leçons de leurs philos
744 eur tour des productions de leur sol, des travaux de leurs artistes et des leçons de leurs philosophes. En revanche, on co
745 sol, des travaux de leurs artistes et des leçons de leurs philosophes. En revanche, on conçoit tout le mal qu’elles peuve
746 ’elles peuvent se faire pour peu qu’elles cessent de s’entraider ainsi, l’avantage dans le cas d’un conflit, devant être,
747 sent de s’entraider ainsi, l’avantage dans le cas d’ un conflit, devant être, à ce qu’il semble, du côté de ces populations
748 lations toujours armées et toujours prêtes à user de violence, à moins pourtant qu’elles ne succombent sous le nombre. Eh
749 Eh bien ! à cet égard, là encore, l’Europe a reçu de la nature de grands avantages. Comme elle est, en effet, toute parsem
750 et égard, là encore, l’Europe a reçu de la nature de grands avantages. Comme elle est, en effet, toute parsemée de montagn
751 antages. Comme elle est, en effet, toute parsemée de montagnes et de plaines, partout les populations agricoles et civilis
752 lle est, en effet, toute parsemée de montagnes et de plaines, partout les populations agricoles et civilisées y vivent côt
753 ervir et la propager. Il s’ensuit aussi qu’en cas de guerre, l’Europe est en état de suffire à elle-même, puisque, à côté
754 t aussi qu’en cas de guerre, l’Europe est en état de suffire à elle-même, puisque, à côté d’une population nombreuse de cu
755 t en état de suffire à elle-même, puisque, à côté d’ une population nombreuse de cultivateurs et de citadins, elle compte b
756 -même, puisque, à côté d’une population nombreuse de cultivateurs et de citadins, elle compte beaucoup de soldats exercés.
757 ôté d’une population nombreuse de cultivateurs et de citadins, elle compte beaucoup de soldats exercés. Un autre de ces av
758 elle compte beaucoup de soldats exercés. Un autre de ces avantages, c’est qu’elle tire de son sol les produits les meilleu
759 és. Un autre de ces avantages, c’est qu’elle tire de son sol les produits les meilleurs et les plus nécessaires à la vie,
760 es meilleurs et les plus nécessaires à la vie, et de ses mines les métaux les plus utiles. Restent donc les parfums et les
761 ums et les pierres précieuses qu’elle est obligée de tirer du dehors, mais ce sont là des biens dont on peut être privé sa
762 ns enfin qu’elle nourrit une très grande quantité de bétail et fort peu de bêtes féroces, et nous aurons achevé de donner
763 fort peu de bêtes féroces, et nous aurons achevé de donner de la nature de ce continent une idée générale. Dira-t-on que
764 de bêtes féroces, et nous aurons achevé de donner de la nature de ce continent une idée générale. Dira-t-on que tous ces
765 ces, et nous aurons achevé de donner de la nature de ce continent une idée générale. Dira-t-on que tous ces auteurs grecs
766 grecs confondent l’Europe avec la seule province de Thrace qui porta en effet ce nom, ou avec la Grèce, comme c’est le ca
767 ffet ce nom, ou avec la Grèce, comme c’est le cas d’ Eschyle ? Mais on s’expliquerait mal qu’ils aient éprouvé le besoin de
768 s’expliquerait mal qu’ils aient éprouvé le besoin de désigner la Grèce par un terme plus général, s’ils n’entendaient vrai
769 général, s’ils n’entendaient vraiment parler que d’ elle. On a vu, dans la page citée plus haut de Victor Bérard qu’il exi
770 que d’elle. On a vu, dans la page citée plus haut de Victor Bérard qu’il existait dès la plus haute époque une « utopie »
771 existait dès la plus haute époque une « utopie » de l’Europe continentale, très comparable à l’utopie qui animera Christo
772 ement que la Grèce n’est qu’une « petite partie » de l’Europe. Cicéron (Pro Flacco, XXVII), dit de la Grèce : Parvum quen
773 e » de l’Europe. Cicéron (Pro Flacco, XXVII), dit de la Grèce : Parvum quendam locum Europætenet. Saint Augustin, dans
774 locum Europætenet. Saint Augustin, dans La Cité de Dieu, pense que le monde est partagé en deux moitiés, l’Asie occupant
775 lités modernes : Et maintenant je vais parcourir de la plume l’Europe en tant qu’elle est connue des hommes. Elle commenc
776 i sont à l’orient. Elle se continue par le rivage de l’océan septentrional jusqu’à la Gaule Belgique et au fleuve Rhin qui
777 à la Gaule Belgique et au fleuve Rhin qui descend de l’occident, puis jusqu’au Danube, que l’on appelle aussi l’Ister, qui
778 ble représente cinquante-quatre nations. Sautons de là au xive siècle de notre ère. Dans son Commento alla Comedia 36, G
779 te-quatre nations. Sautons de là au xive siècle de notre ère. Dans son Commento alla Comedia 36, Giovanni Boccace (1313-
780 prend la division tripartite du Monde, et insiste d’ une manière significative sur la position centrale de la Crète, où Zeu
781 ne manière significative sur la position centrale de la Crète, où Zeus avait fait Europe reine : Il n’y a au monde aucune
782 s anciens se plurent à diviser le monde habitable de notre hémisphère supérieur en trois parties, qu’ils nommèrent l’Asie,
783 nsi l’île de Crète paraît être située aux confins de ces trois parties du monde. Les géographes qui ont délimité l’Europe
784 es frontières du côté du Levant : par l’extrémité de la mer Égée, l’Hellespont, la mer appelée Propontide, le cours du fle
785 Norvège, l’Angleterre et les parties occidentales de l’Espagne jusqu’à l’endroit où commence la mer Méditerranée ; ensuite
786 péré, un ciel doux, et n’y a dedans nulle pénurie de vin et d’arbres fruitiers. En sus, c’est un beau pays, bien orné de v
787 iel doux, et n’y a dedans nulle pénurie de vin et d’ arbres fruitiers. En sus, c’est un beau pays, bien orné de villes, châ
788 fruitiers. En sus, c’est un beau pays, bien orné de villes, châteaux, villages, et a un peuple viril, qu’elle surpasse As
789 a aussi des régions occupées tout à la ronde par d’ âpres montagnes, et là c’est dur de rester. Mais là où c’est plat, c’e
790 à la ronde par d’âpres montagnes, et là c’est dur de rester. Mais là où c’est plat, c’est un bon pays, et y croissent tout
791 agnes.37 En 1679, Robbe, ingénieur et géographe de Louis XIV, fait imprimer à Paris une Méthode pour apprendre facilemen
792 est la plus grande en qualité… Si l’Asie se vante d’ avoir vu former le premier homme par les mains mêmes du Créateur du ci
793 homme par les mains mêmes du Créateur du ciel et de la terre, et d’avoir été honorée de la naissance et de la présence du
794 ains mêmes du Créateur du ciel et de la terre, et d’ avoir été honorée de la naissance et de la présence du Sauveur du mond
795 ur du ciel et de la terre, et d’avoir été honorée de la naissance et de la présence du Sauveur du monde pendant le cours d
796 terre, et d’avoir été honorée de la naissance et de la présence du Sauveur du monde pendant le cours de sa vie mortelle :
797 la présence du Sauveur du monde pendant le cours de sa vie mortelle : l’Europe dira que c’est une grâce singulière, à la
798 ne grâce singulière, à la vérité, qu’elle a reçue de la Sagesse éternelle ; mais que la gloire en est empruntée pour l’Asi
799 rendent illustre. Même idée dans le Dictionnaire de Moreri : Quoique l’Europe soit la moindre des trois parties de conti
800 uoique l’Europe soit la moindre des trois parties de continent, elle a pourtant des avantages qui la doivent faire préfére
801 le continent. Elle est abondante en toutes sortes de biens, et les peuples y sont ordinairement doux, honnêtes, civilisés
802 es termes presque, dans la Géographie universelle de Mantelle et Malte Brun, parue à Paris en 1816 : En sortant des mains
803 un, parue à Paris en 1816 : En sortant des mains de la nature, notre partie du monde n’avait reçu aucun titre à cette glo
804 ujourd’hui. Petit continent, qui possède le moins de richesses territoriales… nous ne sommes riches que d’emprunts. Tel es
805 ichesses territoriales… nous ne sommes riches que d’ emprunts. Tel est néanmoins le pouvoir de l’esprit humain. Cette régio
806 ches que d’emprunts. Tel est néanmoins le pouvoir de l’esprit humain. Cette région, que la nature n’avait ornée que de for
807 in. Cette région, que la nature n’avait ornée que de forêts immenses, s’est peuplée de nations puissantes, s’est couverte
808 avait ornée que de forêts immenses, s’est peuplée de nations puissantes, s’est couverte de cités magnifiques, s’est enrich
809 est peuplée de nations puissantes, s’est couverte de cités magnifiques, s’est enrichie du butin des deux mondes ; cette ét
810 est devenue la métropole du genre humain. Ainsi d’ Hérodote et d’Hippocrate jusqu’à nos jours, l’Europe physique n’a pas
811 a métropole du genre humain. Ainsi d’Hérodote et d’ Hippocrate jusqu’à nos jours, l’Europe physique n’a pas cessé d’être c
812 usqu’à nos jours, l’Europe physique n’a pas cessé d’ être conçue comme un ensemble caractéristique, diversifié mais disting
813 t le seul continent articulé, semble déjà l’œuvre de l’intelligence plus que de la nature. L’Europe, c’est le continent qu
814 é, semble déjà l’œuvre de l’intelligence plus que de la nature. L’Europe, c’est le continent qui doit se projeter hors de
815 nent qui doit se projeter hors de soi-même, celui de l’expansion et de la conquête, de la découverte et de la colonisation
816 rojeter hors de soi-même, celui de l’expansion et de la conquête, de la découverte et de la colonisation. L’Europe est née
817 soi-même, celui de l’expansion et de la conquête, de la découverte et de la colonisation. L’Europe est née impériale. Elle
818 ’expansion et de la conquête, de la découverte et de la colonisation. L’Europe est née impériale. Elle a été créée pour êt
819 le a été créée pour être le globe. Voyez sa ligne de force sortir de l’Asie pour se tendre vers l’infini par-dessus l’océa
820 our être le globe. Voyez sa ligne de force sortir de l’Asie pour se tendre vers l’infini par-dessus l’océan. Les autres co
821 ’article Europe, la représente ainsi en l’honneur de Charles-Quint : « L’Espagne était la tête de cette femme ; le col, le
822 neur de Charles-Quint : « L’Espagne était la tête de cette femme ; le col, les provinces de Languedoc et de Gascogne ; le
823 it la tête de cette femme ; le col, les provinces de Languedoc et de Gascogne ; le reste de la Gaule, la poitrine ; les br
824 tte femme ; le col, les provinces de Languedoc et de Gascogne ; le reste de la Gaule, la poitrine ; les bras, l’Italie et
825 provinces de Languedoc et de Gascogne ; le reste de la Gaule, la poitrine ; les bras, l’Italie et la Grande-Bretagne ; le
826 emagne ; la Bohême, le nombril ; et tout le reste de son corps, les autres royaumes et provinces. » Mais la représentation
827 eprésentation la plus symbolique est encore celle de quelques anciens géographes. Ils voyaient dans l’Europe l’image de la
828 ns géographes. Ils voyaient dans l’Europe l’image de la Vierge : une Vierge couronnée, pour tête l’Espagne, pour cœur la F
829 ne Vierge dont la plaine russe se perdant au fond de l’Asie obscure, représentait la robe aux vastes et vagues plis. La Vi
830 conclusions se dégagent : le concept géographique d’ Europe est beaucoup plus ancien, et les mythes grecs et sémitiques bea
831 ythes grecs et sémitiques beaucoup moins éloignés de la réalité qu’on ne l’imagine généralement de nos jours. Mais la cons
832 nés de la réalité qu’on ne l’imagine généralement de nos jours. Mais la conscience politico-historique d’une entité europé
833 nos jours. Mais la conscience politico-historique d’ une entité européenne, c’est-à-dire d’une communauté de destin des peu
834 -historique d’une entité européenne, c’est-à-dire d’ une communauté de destin des peuples habitant l’Europe telle qu’Hérodo
835 entité européenne, c’est-à-dire d’une communauté de destin des peuples habitant l’Europe telle qu’Hérodote ou Strabon la
836 comparaisons globales entre le destin des peuples de l’Europe et de l’Asie, esquissées par Hippocrate et Aristote. Mais ce
837 obales entre le destin des peuples de l’Europe et de l’Asie, esquissées par Hippocrate et Aristote. Mais ces deux grands g
838 ces deux grands génies n’étaient pas l’expression d’ une opinion courante ou d’une conscience populaire : celles-ci ne pouv
839 taient pas l’expression d’une opinion courante ou d’ une conscience populaire : celles-ci ne pouvaient exister, de leur tem
840 ience populaire : celles-ci ne pouvaient exister, de leur temps, que dans la croyance religieuse et dans les mythes. Penda
841 et dans les mythes. Pendant l’ère romaine, l’idée d’ une Europe politique est tout naturellement refoulée par celle de l’un
842 litique est tout naturellement refoulée par celle de l’unité impériale commune à l’Orient et à l’Occident, moitiés géograp
843 és géographiques et administrativement distinctes d’ un seul et même État : utraques pars, pars orientalis et pars occident
844 nommée en lieu et place de la moitié occidentale de l’Empire, l’Asie en lieu et place de la moitié orientale : ainsi dans
845 de la moitié orientale : ainsi dans l’inscription de l’an 7 av. J.-C., trouvée sur l’île de Philae, en Égypte, et désignan
846 t désignant Auguste comme Seigneur de l’Europe et de l’Asie 39. Ce ne sont là ni l’Europe réelle ni encore moins l’Asie da
847 des désignations allégoriques. C’est ici le lieu de remarquer que les termes d’Orient et d’Occident ont subi au cours des
848 es. C’est ici le lieu de remarquer que les termes d’ Orient et d’Occident ont subi au cours des siècles antiques et moderne
849 i le lieu de remarquer que les termes d’Orient et d’ Occident ont subi au cours des siècles antiques et modernes des fluctu
850 es fluctuations beaucoup plus fortes que le terme d’ Europe : tantôt moitiés administratives de l’Empire (Arcadius et Honor
851 e terme d’Europe : tantôt moitiés administratives de l’Empire (Arcadius et Honorius), tantôt moitiés théologiques de l’Égl
852 rcadius et Honorius), tantôt moitiés théologiques de l’Église (Rome et Byzance), ou enfin vastes et vagues désignations my
853 és lumineuses et spirituelles, l’Occident la nuit de la matière. Relevant les caractères régulièrement attribués à cet Ori
854 t à cet Occident mystiques par les métaphysiciens de la Grèce présocratique, puis de la Perse avicenienne, et enfin par to
855 es métaphysiciens de la Grèce présocratique, puis de la Perse avicenienne, et enfin par tous les auteurs européens jusqu’à
856 opéens jusqu’à nos jours qui déclarent s’inspirer de « la Tradition », D. de Rougemont donne le tableau suivant formé de q
857 », D. de Rougemont donne le tableau suivant formé de quatorze antithèses40 : Orient : l’aurore, le matin, le haut, la dr
858 droite, l’extrême raffinement, la lumière, l’Ange de la Révélation, le but dernier, l’âme, l’initiation, la sagesse, la ré
859 gauche, l’épaisseur opaque, la pénombre, le démon de l’utilitarisme et de la puissance aveugle, l’oubli des buts de l’âme,
860 paque, la pénombre, le démon de l’utilitarisme et de la puissance aveugle, l’oubli des buts de l’âme, le corps et la matiè
861 isme et de la puissance aveugle, l’oubli des buts de l’âme, le corps et la matière, l’activité désordonnée, la passion, la
862 e par les liens matériels et passionnels, le lieu d’ exil. Cette unanimité dans l’interprétation, uniquement favorable à l’
863 ’interprétation, uniquement favorable à l’Orient, de nos deux termes symboliques ne peut manquer d’impressionner. On ne sa
864 t, de nos deux termes symboliques ne peut manquer d’ impressionner. On ne saurait la réduire à rien d’accidentel, de physiq
865 d’impressionner. On ne saurait la réduire à rien d’ accidentel, de physique ou d’anecdotique. Car si le soleil se lève à l
866 er. On ne saurait la réduire à rien d’accidentel, de physique ou d’anecdotique. Car si le soleil se lève à l’Orient pour l
867 it la réduire à rien d’accidentel, de physique ou d’ anecdotique. Car si le soleil se lève à l’Orient pour les Grecs, il en
868 et ceux-ci ne figurent pas pour autant l’Occident de la Chine41 ou de la Malaisie, ni le Japon, l’Occident de l’Amérique !
869 urent pas pour autant l’Occident de la Chine41 ou de la Malaisie, ni le Japon, l’Occident de l’Amérique ! Elle révèle donc
870 hine41 ou de la Malaisie, ni le Japon, l’Occident de l’Amérique ! Elle révèle donc une forme de l’âme, une pente de l’âme,
871 cident de l’Amérique ! Elle révèle donc une forme de l’âme, une pente de l’âme, voire une « orientation » de la psyché occ
872  ! Elle révèle donc une forme de l’âme, une pente de l’âme, voire une « orientation » de la psyché occidentale42. Ajouto
873 me, une pente de l’âme, voire une « orientation » de la psyché occidentale42. Ajoutons à tout cela l’influence de plusie
874 occidentale42. Ajoutons à tout cela l’influence de plusieurs passages des psaumes, des prophètes et des évangiles célébr
875 et des évangiles célébrant l’Orient comme le lieu d’ où vient le salut. Ainsi Matthieu 24, 27 : Comme l’éclair part de l’O
876 lut. Ainsi Matthieu 24, 27 : Comme l’éclair part de l’Orient et se montre jusqu’en Occident, ainsi sera l’avènement du Fi
877 jusqu’en Occident, ainsi sera l’avènement du Fils de l’Homme. Ce thème de l’ex oriente lux est si puissant, que la Vulgat
878 si sera l’avènement du Fils de l’Homme. Ce thème de l’ex oriente lux est si puissant, que la Vulgate traduit presque touj
879 r « germe » ! (ainsi Zacharie 6, 12). Le prestige de l’Orient biblique, métaphysique et occultiste empêchera longtemps que
880 ra longtemps que l’Europe (plus ou moins synonyme d’ Occident) prenne un sens autre que géographique, c’est-à-dire prenne l
881 tre que géographique, c’est-à-dire prenne le sens d’ une entité historique et spirituelle que l’on puisse opposer à l’Asie,
882 pologètes. Il faut attendre le début du Ve siècle de notre ère pour voir reparaître — et c’est la première fois depuis Hér
883 e fois depuis Hérodote43 — l’autonomie historique de l’Europe. Un poème latin de Claudius Claudien (né à Alexandrie vers 3
884 ’autonomie historique de l’Europe. Un poème latin de Claudius Claudien (né à Alexandrie vers 365, et demeuré païen) désign
885 t demeuré païen) désigne en effet les « ennemis » de l’Europe : le maure Gildon et le barbare Alaric : … Duo namque fuere
886 ricum barbara Peuce Nutrierat…44 Au iie siècle de notre ère — donc 200 ans après l’inscription de Philae : notons ce lo
887 e de notre ère — donc 200 ans après l’inscription de Philae : notons ce long silence — c’est un polémiste antichrétien, Ce
888 détruirait les diversités politiques des peuples de la Terre, voulues et garanties par les dieux païens ! Pour cet ancêtr
889 ur cet ancêtre du nationalisme, qui ne manque pas de lucidité, l’ennemi juré c’est l’universalisme des chrétiens. Mais cec
890 le doit. Sulpice Sévère est en effet le biographe de saint Martin de Tours, qui passera pour « le plus grand ascète de tou
891 de Tours, qui passera pour « le plus grand ascète de toute l’Europe » pendant les siècles à venir. Et ce seul saint, selon
892 celle-ci s’enorgueillisse du nombre et des vertus de ses saints, il ne sera pas mauvais de lui faire entendre que l’Europe
893 des vertus de ses saints, il ne sera pas mauvais de lui faire entendre que l’Europe ne le cède pas à toute l’Asie, et cel
894 Martin.46 À Martin de Tours s’ajoutent bientôt d’ innombrables saints européens : Vital de Ravenne, Gervais et Ambroise
895 t bientôt d’innombrables saints européens : Vital de Ravenne, Gervais et Ambroise de Milan, Justine de Padoue, Eulalie de
896 e Rome, Cécile de Sicile, et finalement tous ceux de la Légion Thébaine, saint Maurice à leur tête, sacrifiés pour leur fo
897 ir, selon les chroniqueurs du temps, fait le tour de presque toute l’Europe : omne … fere Europa circuita. C’est donc à se
898 rcuita. C’est donc à ses saints que l’Europe doit de se distinguer enfin de « l’Occident » — si mal vu par les spirituels 
899 s saints que l’Europe doit de se distinguer enfin de « l’Occident » — si mal vu par les spirituels — et de revêtir une dig
900  l’Occident » — si mal vu par les spirituels — et de revêtir une dignité qui la rapproche de « l’Orient » des mystiques. D
901 uels — et de revêtir une dignité qui la rapproche de « l’Orient » des mystiques. Dès lors, le nom d’Europe et le concept d
902 e de « l’Orient » des mystiques. Dès lors, le nom d’ Europe et le concept d’Europe vont revenir avec une insistance croissa
903 ystiques. Dès lors, le nom d’Europe et le concept d’ Europe vont revenir avec une insistance croissante, jusqu’à l’Empire d
904 avec une insistance croissante, jusqu’à l’Empire de Charlemagne, dans les textes solennels des apostrophes au pape, dans
905 600, s’adresse au pape Grégoire comme à la fleur de toute l’Europe, puis en 615 au pape Boniface IV comme au chef de tou
906 e, puis en 615 au pape Boniface IV comme au chef de toutes les Églises de toute l’Europe (omnium totius Europæ ecclesiaru
907 Boniface IV comme au chef de toutes les Églises de toute l’Europe (omnium totius Europæ ecclesiarum capiti). Dans les A
908 ecclesiarum capiti). Dans les Annales burgondes d’ Avenches (milieu du viie siècle) on lit à plusieurs reprises le nom d
909 viie siècle) on lit à plusieurs reprises le nom de Eurupa, désignant à la fois les peuples francs et le continent arrosé
910 son Histoire des Goths, montre tous les peuples de l’Europe tremblant devant eux (Hos Europæ omnes tremuere gentes). L’
911 eux (Hos Europæ omnes tremuere gentes). L’auteur de la Vie de Gertrude, parlant de la fille de Pépin de Landen, déclare q
912 uropæ omnes tremuere gentes). L’auteur de la Vie de Gertrude, parlant de la fille de Pépin de Landen, déclare que tout un
913 gentes). L’auteur de la Vie de Gertrude, parlant de la fille de Pépin de Landen, déclare que tout un chacun en Europe (qu
914 auteur de la Vie de Gertrude, parlant de la fille de Pépin de Landen, déclare que tout un chacun en Europe (quisnam in Eur
915 la Vie de Gertrude, parlant de la fille de Pépin de Landen, déclare que tout un chacun en Europe (quisnam in Euruppa habi
916 in Euruppa habitans) connaît son nom et la gloire de sa race ; tandis que l’auteur de la Vie de Landibert écrit : En ce t
917 nom et la gloire de sa race ; tandis que l’auteur de la Vie de Landibert écrit : En ce temps-là, Pépin était le prince de
918 gloire de sa race ; tandis que l’auteur de la Vie de Landibert écrit : En ce temps-là, Pépin était le prince de nombreuse
919 rt écrit : En ce temps-là, Pépin était le prince de nombreuses régions et cités d’Europe. (Il orthographie Eoruppa.) Mai
920 in était le prince de nombreuses régions et cités d’ Europe. (Il orthographie Eoruppa.) Mais voici le texte capital, que l
921 le texte capital, que l’on peut tenir pour l’acte de naissance de l’Europe historique et politique : on le trouve dans une
922 tal, que l’on peut tenir pour l’acte de naissance de l’Europe historique et politique : on le trouve dans une suite à la f
923 n le trouve dans une suite à la fameuse Chronique d’ Isidore de Séville, rédigée un siècle plus tôt. Le continuateur anonym
924 nonyme (Isidor Pacensis, ou Isidore de Badajoz ou de Beja ? on ne sait, et l’on appelle aujourd’hui ce texte la « chroniqu
925 elle aujourd’hui ce texte la « chronique mozarabe de 754 ») décrit la bataille de Poitiers, gagnée par Charles-Martel sur
926 « chronique mozarabe de 754 ») décrit la bataille de Poitiers, gagnée par Charles-Martel sur les Arabes en 732. Il a certa
927 sur les Arabes en 732. Il a certainement été mêlé de près à l’événement, qu’il rapporte en détail quelques années plus tar
928 Européens » (soldats des contrées diverses allant de l’Aquitaine à la Germanie et formant l’armée du Maire du Palais) vire
929 les tentes des Arabes sont vides ; les guerriers de Charles-Martel, après le pillage, n’ont plus qu’à s’en retourner, joy
930 n suas leti recipiunt patrias.47 Ainsi le terme d’ Européens, pour la première fois dans notre ère, désigne une communaut
931 ntinentale, celle qui englobe dans un même destin de défense contre un même ennemi les peuples vivant au nord des Pyrénées
932 peut que les historiens qui ramènent la bataille de Poitiers à un « mythe » ou à « un incident sans importance » aient ra
933 s Arabes n’aient qu’à peine enregistré la défaite d’ Abdarrahmân : selon leurs historiens de l’époque, elle n’aurait marqué
934 la défaite d’Abdarrahmân : selon leurs historiens de l’époque, elle n’aurait marqué que l’issue malheureuse d’une razzia d
935 que, elle n’aurait marqué que l’issue malheureuse d’ une razzia de plus chez les Francs. Le recul de l’islam à partir de ce
936 se d’une razzia de plus chez les Francs. Le recul de l’islam à partir de cette date serait dû à une crise intérieure du mo
937 t Byzance, dès 71848. Mais il y a cette chronique de l’anonyme espagnol, il y a ce mot Europenses qui suffit à lui seul po
938 nt naturellement décrits non comme les défenseurs d’ une Romania devenue mythique, ni de l’Occident en général, ni de la pa
939 les défenseurs d’une Romania devenue mythique, ni de l’Occident en général, ni de la papauté, ni de leur « nation » ou pat
940 devenue mythique, ni de l’Occident en général, ni de la papauté, ni de leur « nation » ou patrie particulière, mais bien c
941 ni de l’Occident en général, ni de la papauté, ni de leur « nation » ou patrie particulière, mais bien comme les membres d
942 patrie particulière, mais bien comme les membres d’ une même famille de peuples. 8.« Europa vel regnum Caroli » Cett
943 e, mais bien comme les membres d’une même famille de peuples. 8.« Europa vel regnum Caroli » Cette conscience commun
944 a vel regnum Caroli » Cette conscience commune de l’Europe — remplaçant de plus en plus le concept déprécié ou déprécia
945 e plus en plus le concept déprécié ou dépréciatif d’ Occident — va s’affermir et se préciser avec les conquêtes de Charlema
946 — va s’affermir et se préciser avec les conquêtes de Charlemagne, de 768 à 814. Selon Bède le Vénérable (675-755), histori
947 et se préciser avec les conquêtes de Charlemagne, de 768 à 814. Selon Bède le Vénérable (675-755), historien des Anglais e
948 monde », l’Europe était essentiellement composée de la Gaulle, de la Germanie et de l’Espagne, l’Italie s’y joignant plus
949 rope était essentiellement composée de la Gaulle, de la Germanie et de l’Espagne, l’Italie s’y joignant plus tard. (L’Angl
950 ellement composée de la Gaulle, de la Germanie et de l’Espagne, l’Italie s’y joignant plus tard. (L’Angleterre et la Scand
951 arlemagne conquiert les Lombards, ajoute le titre de roi d’Italie à ceux de roi de Neustrie, d’Aquitaine et d’Austrasie, d
952 Lombards, ajoute le titre de roi d’Italie à ceux de roi de Neustrie, d’Aquitaine et d’Austrasie, déborde largement l’anci
953 titre de roi d’Italie à ceux de roi de Neustrie, d’ Aquitaine et d’Austrasie, déborde largement l’ancien limes à l’est et
954 ’Italie à ceux de roi de Neustrie, d’Aquitaine et d’ Austrasie, déborde largement l’ancien limes à l’est et au nord, ainsi
955 ine et chrétienne, impérialiste et universaliste, d’ un impossible imperium mundi. Voici le prêtre Cathwulf qui loue Charle
956 oici le prêtre Cathwulf qui loue Charles, en 775, d’ avoir été choisi par Dieu pour être élevé au rang de « gloire de l’emp
957 avoir été choisi par Dieu pour être élevé au rang de « gloire de l’empire d’Europe » : quoi ipse te exaltavit in honorem
958 oisi par Dieu pour être élevé au rang de « gloire de l’empire d’Europe » : quoi ipse te exaltavit in honorem gloriæ regni
959 u pour être élevé au rang de « gloire de l’empire d’ Europe » : quoi ipse te exaltavit in honorem gloriæ regni Europæ. V
960 in honorem gloriæ regni Europæ. Voici le poète de la cour, Angilbert, gendre de l’empereur, qui décerne à Charles, en 7
961 æ. Voici le poète de la cour, Angilbert, gendre de l’empereur, qui décerne à Charles, en 799, les titres de « tête du mo
962 pereur, qui décerne à Charles, en 799, les titres de « tête du monde…, cime (ou tiare) de l’Europe, … père suprême » et ce
963 , les titres de « tête du monde…, cime (ou tiare) de l’Europe, … père suprême » et ce sont là titres mêlés et conjugués d’
964 suprême » et ce sont là titres mêlés et conjugués d’ imperator et de pontifex : Rex Carolus caput orbis, amor populique, d
965 sont là titres mêlés et conjugués d’imperator et de pontifex : Rex Carolus caput orbis, amor populique, decusque Europæ
966 49 : Rex, pater Europæ… Cette « Europe ou règne de Charles », Europa vel regnum Caroli comme la nomment les Annales de F
967 pa vel regnum Caroli comme la nomment les Annales de Fulda (fin du ixe siècle), est donc un seul empire chrétien, né hors
968 n’est donc plus seulement l’une des trois parties de la carte du Monde traditionnelle (l’Europe, la Libye ou Afrique, l’As
969 ue, l’Asie), mais une existence autonome et dotée de vertus spirituelles. Selon Alcuin (735-804), maître de l’école du pal
970 rtus spirituelles. Selon Alcuin (735-804), maître de l’école du palais, éducateur, théologien et rhéteur de cour, elle est
971 école du palais, éducateur, théologien et rhéteur de cour, elle est le continent de la foi. En tant que telle, l’Europe de
972 ologien et rhéteur de cour, elle est le continent de la foi. En tant que telle, l’Europe de Charles se trouve plus près de
973 s près de « l’Orient », qui est Jésus-Christ, que de « l’Occident » classique, mauvaise moitié du monde… C’est ici le prem
974 tié du monde… C’est ici le premier épanouissement d’ une véritable idée européenne, d’une conscience commune attestée par d
975 r épanouissement d’une véritable idée européenne, d’ une conscience commune attestée par d’innombrables expressions exclama
976 européenne, d’une conscience commune attestée par d’ innombrables expressions exclamatives et par des fêtes communes50. Hél
977 Tôt après Charlemagne, en effet, la grande image d’ un « règne européen » s’estompe. Déjà, sous Louis le Pieux, son fils —
978 Déjà, sous Louis le Pieux, son fils — le partage de l’empire vient d’être consommé — on note un changement bien typique d
979 le Pieux, son fils — le partage de l’empire vient d’ être consommé — on note un changement bien typique dans les formules d
980 num Europæ — empire unique —, voici dans un poème de l’Espagnol Theowulf (après 814) l’expression de regna, ou royaumes d’
981 e de l’Espagnol Theowulf (après 814) l’expression de regna, ou royaumes d’Europe : Tu pius Europæ regna potenter habes51.
982 lf (après 814) l’expression de regna, ou royaumes d’ Europe : Tu pius Europæ regna potenter habes51. L’idée du regnum Eu
983 ter habes51. L’idée du regnum Europæ se détache de l’idée d’un empire terrestre — qui déjà ne se compose plus que de reg
984 1. L’idée du regnum Europæ se détache de l’idée d’ un empire terrestre — qui déjà ne se compose plus que de regna, c’est-
985 mpire terrestre — qui déjà ne se compose plus que de regna, c’est-à-dire d’une multiplicité de royaumes distincts — pour s
986 éjà ne se compose plus que de regna, c’est-à-dire d’ une multiplicité de royaumes distincts — pour se rapprocher de l’idée
987 lus que de regna, c’est-à-dire d’une multiplicité de royaumes distincts — pour se rapprocher de l’idée médiévale d’un empi
988 licité de royaumes distincts — pour se rapprocher de l’idée médiévale d’un empire sur les âmes, c’est-à-dire au concret :
989 istincts — pour se rapprocher de l’idée médiévale d’ un empire sur les âmes, c’est-à-dire au concret : d’une chrétienté pap
990 un empire sur les âmes, c’est-à-dire au concret : d’ une chrétienté papale. Au lieu de l’Europe unie de Charlemagne, règne
991 d’une chrétienté papale. Au lieu de l’Europe unie de Charlemagne, règne sacerdotal et impérial tout à la fois, une confédé
992 tal et impérial tout à la fois, une confédération de princes occidentaux se dessine vaguement dans l’ombre des intrigues p
993 re des intrigues pré-nationales, et sera le champ de l’ambition « romaine » des empereurs « de nation germanique » ; tandi
994 e champ de l’ambition « romaine » des empereurs «  de nation germanique » ; tandis que l’unité spirituelle deviendra l’autr
995 l’unité spirituelle deviendra l’autre pôle, celui de la papauté. Dès 843, Léon IV s’oppose au Patriarche de Constantinople
996 papauté. Dès 843, Léon IV s’oppose au Patriarche de Constantinople, en invoquant toutes les Églises d’Europe contre l’Emp
997 e Constantinople, en invoquant toutes les Églises d’ Europe contre l’Empire romano-byzantin. Empire et papauté, dans les si
998 ront notre Moyen Âge, vont remplir les chroniques de leurs luttes, refoulant le concept d’Europe dans le domaine du mythe
999 chroniques de leurs luttes, refoulant le concept d’ Europe dans le domaine du mythe et de l’allégorie, ou dans la nostalgi
1000 t le concept d’Europe dans le domaine du mythe et de l’allégorie, ou dans la nostalgie du grand passé carolingien. Parfois
1001 and passé carolingien. Parfois, cependant, le nom d’ Europe affleure et brille encore pour un instant. Notker le Bègue, cha
1002 nt. Notker le Bègue, chargé par Charles le Simple de rédiger les Gesta Caroli dès 883, célèbre la construction du pont de
1003 a Caroli dès 883, célèbre la construction du pont de Mayence comme une démonstration du pouvoir des Européens, « grands et
1004 unis : … Comme en témoignent les arches du pont de Mayence, que toute l’Europe édifia par une œuvre commune certes, mais
1005 mieux ordonnées (ordinatissimæ participationis). De cette fin du ixe et de tout le xe siècle, Jürgen Fischer nous cite
1006 issimæ participationis). De cette fin du ixe et de tout le xe siècle, Jürgen Fischer nous cite plusieurs dizaines d’aut
1007 ècle, Jürgen Fischer nous cite plusieurs dizaines d’ auteurs qui parlent encore de l’Europe, mais le sens du nom n’est plus
1008 e plusieurs dizaines d’auteurs qui parlent encore de l’Europe, mais le sens du nom n’est plus que rhétorique (souvenir de
1009 e sens du nom n’est plus que rhétorique (souvenir de Charles) ou simplement géographique ; tout cela, le plus souvent, dan
1010 vent, dans un latin douteux. Après le règne agité d’ Othon III, « imperator » d’imitation, l’idée revit d’un « peuple europ
1011 . Après le règne agité d’Othon III, « imperator » d’ imitation, l’idée revit d’un « peuple européen » : des expressions tel
1012 thon III, « imperator » d’imitation, l’idée revit d’ un « peuple européen » : des expressions telles que populus Europæ, ou
1013 plume des annalistes : c’est que l’utopie tenace d’ une rénovation de l’Empire romain a provisoirement reculé. Derniers ra
1014 stes : c’est que l’utopie tenace d’une rénovation de l’Empire romain a provisoirement reculé. Derniers rayons furtifs, mai
1015 lemagnes, accompagné seulement, nous dit le récit de l’époque52, par très peu de soldats, c’est-à-dire : … soutenu par ce
1016 a occurendo admiserat). Sur le manteau constellé de l’empereur était brodée cette inscription : O decus Europæ Cæsar He
1017 erii tibi rex qui régnât in ævum. (Ô toi, honneur de l’Europe, César Henri, bienheureux ! Que celui qui règne en éternité
1018 t funèbre, rimé par un poète rhénan, clama la fin de l’idée carolingienne de l’Europe : « Pleure l’Europe décapitée ! » :
1019 oète rhénan, clama la fin de l’idée carolingienne de l’Europe : « Pleure l’Europe décapitée ! » : Ploret hunc Europa iam
1020 iam decapitata. Et commença l’éclipse médiévale de la conscience — non certes de la réalité — européenne. Il faudra les
1021 l’éclipse médiévale de la conscience — non certes de la réalité — européenne. Il faudra les menaces mongole et turque pour
1022 turque pour réveiller, avec la chrétienté, l’idée de l’Europe. Ici donc prend fin notre enquête sur les origines attestées
1023 origines attestées. 1. Selon la démonstration de Victor Bérard dans sa Résurrection d’Homère, chap. VIII, Hésiode aura
1024 monstration de Victor Bérard dans sa Résurrection d’ Homère, chap. VIII, Hésiode aurait vécu vers l’an 900, Homère vers l’a
1025 el puis Ranke ont fortement souligné l’importance de la conquête des Gaules, dans laquelle ils voient l’un et l’autre l’ac
1026 ié à Melpomène. 5. Nous empruntons la traduction de l’Idylle au précieux petit livre d’Alfred Lombard intitulé : Un Mythe
1027 la traduction de l’Idylle au précieux petit livre d’ Alfred Lombard intitulé : Un Mythe dans la poésie et dans l’art : l’En
1028 Mythe dans la poésie et dans l’art : l’Enlèvement d’ Europe, qui donne aussi les textes d’Horace et des poètes de l’ère mod
1029 l’Enlèvement d’Europe, qui donne aussi les textes d’ Horace et des poètes de l’ère moderne qu’on lira plus loin. Éditions d
1030 qui donne aussi les textes d’Horace et des poètes de l’ère moderne qu’on lira plus loin. Éditions de la Baconnière, Neuchâ
1031 s de l’ère moderne qu’on lira plus loin. Éditions de la Baconnière, Neuchâtel, 1946, 32 illustrations. 6. Voir notamment
1032 auf dem Stier, cité par G. de Reynold, Formation de l’Europe, t. I, LUF Fribourg, 1944 et Plon, Paris ; et par Jürgen Fis
1033 , Londres, 1955. 8. V. Bérard : La Résurrection d’ Homère, p. 207, Paris, 1930. 9. Notons que cette interprétation « rat
1034 Notons que cette interprétation « rationaliste » de saint Jérôme était déjà celle d’Hérodote — évhémériste avant la lettr
1035 « rationaliste » de saint Jérôme était déjà celle d’ Hérodote — évhémériste avant la lettre — qui écrit dans son premier li
1036 s Crétois. 10. Gonzague de Reynold, La formation de l’Europe, I, p. 112, 110, 111. 11. Nous suivons ici la démonstration
1037 110, 111. 11. Nous suivons ici la démonstration de Jürgen Fischer, op. cit., p. 10 à 19 : Die Japhet-Historie. 12. Jürg
1038 sage blanc ». De même, le Dictionnaire historique de Moreri (1674) donne l’avis de Bouchart, qui pense qu’Europe vient du
1039 ionnaire historique de Moreri (1674) donne l’avis de Bouchart, qui pense qu’Europe vient du phénicien chur-appe = visage b
1040 isage blanc, et rappelle la blancheur tant vantée de la fille d’Agénor. 20. Au sujet du nom « arabe », G. Rawlinson, Note
1041 et rappelle la blancheur tant vantée de la fille d’ Agénor. 20. Au sujet du nom « arabe », G. Rawlinson, Notes to Herodot
1042 i paraît avoir été commune aux traditions sacrées de toute l’Europe, commençait un jour après le solstice d’hiver et se di
1043 te l’Europe, commençait un jour après le solstice d’ hiver et se divisait en 13 mois désignés chacun par une lettre et par
1044 un par une lettre et par un arbre. 24. Il s’agit d’ une autre légende d’Europe, beaucoup moins connue. 25. Variétés I, p
1045 par un arbre. 24. Il s’agit d’une autre légende d’ Europe, beaucoup moins connue. 25. Variétés I, p. 24, puis p. 38. 2
1046 J.-C.) divise la Terre en deux moitiés : à l’est de l’Hellespont, l’Asie, qui n’est encore que l’Asie Mineure ; à l’ouest
1047 sse au sujet de cette Anthologie. 33. Traduction de Delavaud, chez Bossange et consorts, Paris, 1804. 34. Panégyrique,
1048 e, 50. Cf. Georges Mathieu : Les Idées politiques d’ Isocrate, Paris, 1925. L’auteur fait des réserves sur l’universalisme
1049 5. L’auteur fait des réserves sur l’universalisme d’ Isocrate… 35. C’est aujourd’hui le Don. 36. Commento alla Comedia a
1050 pertinentes, 1906. 40. L’Aventure occidentale de l’homme , Albin Michel, Paris, 1957, p. 26. 41. L’auteur a simplifié
1051 t en soi » qui est l’Asie. 43. Selon la remarque de J. Fischer, op. cit., p. 41. 44. Claudius Claudianus, Paneg. de sext
1052 op. cit., p. 41. 44. Claudius Claudianus, Paneg. de sext. consul. Honorii, Monumenta Germaniæ Historica, AA, X, 293. 45.
1053 363, 20 et 30. 48. Emmanuel Berl, Les Impostures de l’Histoire, Paris 1959. 49. Monumenta germ. Hist., Pœt. Carol. I.,
1054 opagedanke, Münich, 1951, p. 417, cite une « Fête de la Toussaint de l’Europe » (a feast of the Saints of Europe) institué
3 1961, Vingt-huit siècles d’Europe. Deuxième partie. Prises de conscience européennes. De Pierre Dubois à l’abbé de Saint-Pierre, (xive au xixe siècle) — 1. Sur plusieurs siècles de silence « européen »
1055 1.Sur plusieurs siècles de silence « européen » À partir du milieu du xie siècle jusqu’à la R
1056 endant la haute époque du Moyen Âge, peu ou point de textes sur l’Europe. Et pourtant, c’est précisément cette période des
1057 ette période des xiie et xiiie siècles que tant d’ ouvrages récents désignent, dans leurs titres, comme étant celle, par
1058 leurs titres, comme étant celle, par excellence, de « la Naissance », ou de « l’Essor », ou de « l’Ascension », ou de la
1059 nt celle, par excellence, de « la Naissance », ou de « l’Essor », ou de « l’Ascension », ou de la « Formation », ou même d
1060 lence, de « la Naissance », ou de « l’Essor », ou de « l’Ascension », ou de la « Formation », ou même des « Origines » de
1061 e », ou de « l’Essor », ou de « l’Ascension », ou de la « Formation », ou même des « Origines » de l’Europe53. Ainsi les h
1062 ou de la « Formation », ou même des « Origines » de l’Europe53. Ainsi les historiens modernes considéreraient comme le so
1063 storiens modernes considéreraient comme le sommet de l’Europe — son « toit », dit l’un d’entre eux — ces temps où nos ancê
1064 où nos ancêtres n’ont manifesté nulle conscience de former une Europe ? Cette période d’unité exemplaire serait aussi cel
1065 e conscience de former une Europe ? Cette période d’ unité exemplaire serait aussi celle où le sujet de cette unité eût ign
1066 d’unité exemplaire serait aussi celle où le sujet de cette unité eût ignoré qu’il existât ? J. Calmette ouvre son livre su
1067  ? J. Calmette ouvre son livre sur l’Effondrement d’ un Empire et la naissance d’une Europe 54 par cette phrase paradoxale 
1068 re sur l’Effondrement d’un Empire et la naissance d’ une Europe 54 par cette phrase paradoxale : « L’Europe occidentale est
1069 ase paradoxale : « L’Europe occidentale est issue de la désintégration de l’Empire carolingien. » Or, l’Empire carolingien
1070 Europe occidentale est issue de la désintégration de l’Empire carolingien. » Or, l’Empire carolingien était une Europe occ
1071 Europe occidentale unie. L’Europe serait donc née de la désintégration de son unité politique ? Là-dessus, des centaines d
1072 ie. L’Europe serait donc née de la désintégration de son unité politique ? Là-dessus, des centaines d’essais et de gros vo
1073 de son unité politique ? Là-dessus, des centaines d’ essais et de gros volumes. Essayons de simplifier. L’Europe de Charlem
1074 politique ? Là-dessus, des centaines d’essais et de gros volumes. Essayons de simplifier. L’Europe de Charlemagne est un
1075 s centaines d’essais et de gros volumes. Essayons de simplifier. L’Europe de Charlemagne est un empire sacerdotal. À parti
1076 tir de la querelle des Investitures, elle cessera d’ être une en esprit. Elle retombera donc au niveau d’une entité puremen
1077 être une en esprit. Elle retombera donc au niveau d’ une entité purement géographique. Ce qui compte désormais, ce qui pass
1078 (ne sauraient d’ailleurs en appeler) qu’à l’idée de chrétienté, seule commune. L’apparition d’un tiers parti interne, men
1079 l’idée de chrétienté, seule commune. L’apparition d’ un tiers parti interne, menaçant à la fois les deux autres, changera l
1080 a la situation dès le xive siècle. Alors, l’idée d’ Europe poindra de nouveau obscurément, comme le nouveau symbole presse
1081 u obscurément, comme le nouveau symbole pressenti d’ une unité qui allait de soi, et que l’empereur, pas plus que le pape,
1082 ettre en question : il ne voulait qu’en disposer. De l’extérieur vient une autre menace, propre à réveiller, elle aussi, l
1083 ce, propre à réveiller, elle aussi, la conscience de ce qui reste commun, malgré tout, aux gibelins et aux guelfes. L’isla
1084 gibelins et aux guelfes. L’islam a séparé la part de Japhet de celle de Sem et de celle de Cham. Il n’y a donc plus, en tê
1085 t aux guelfes. L’islam a séparé la part de Japhet de celle de Sem et de celle de Cham. Il n’y a donc plus, en tête à tête
1086 lfes. L’islam a séparé la part de Japhet de celle de Sem et de celle de Cham. Il n’y a donc plus, en tête à tête et en con
1087 lam a séparé la part de Japhet de celle de Sem et de celle de Cham. Il n’y a donc plus, en tête à tête et en contacts guer
1088 aré la part de Japhet de celle de Sem et de celle de Cham. Il n’y a donc plus, en tête à tête et en contacts guerriers ou
1089 nfidèles. Pratiquement refoulée sur le territoire de l’Europe, la chrétienté définit l’unité la plus visible, la plus prof
1090 s visible, la plus profonde et la mieux ressentie de tous les peuples qui habitent ce continent. Mais les dissensions inte
1091 issante et vulnérable. La dernière croisade vient d’ échouer, celle de saint Louis. Marco Polo, redécouvrant la Chine, vien
1092 able. La dernière croisade vient d’échouer, celle de saint Louis. Marco Polo, redécouvrant la Chine, vient d’ajouter une d
1093 t Louis. Marco Polo, redécouvrant la Chine, vient d’ ajouter une dimension nouvelle au monde connu. Cette situation ne va p
1094 au monde connu. Cette situation ne va pas manquer de poser à la conscience européenne deux problèmes concrets : celui de l
1095 cience européenne deux problèmes concrets : celui de l’établissement de la paix entre les peuples chrétiens et celui d’une
1096 eux problèmes concrets : celui de l’établissement de la paix entre les peuples chrétiens et celui d’une reprise de la guer
1097 t de la paix entre les peuples chrétiens et celui d’ une reprise de la guerre contre les Infidèles. La plupart des projets
1098 ntre les peuples chrétiens et celui d’une reprise de la guerre contre les Infidèles. La plupart des projets de pacificatio
1099 erre contre les Infidèles. La plupart des projets de pacification, et par suite d’union de l’Europe se trouveront donc org
1100 plupart des projets de pacification, et par suite d’ union de l’Europe se trouveront donc organiquement liés — et cela jusq
1101 des projets de pacification, et par suite d’union de l’Europe se trouveront donc organiquement liés — et cela jusqu’au xvi
1102 et cela jusqu’au xviiie siècle ! — à des projets de reconquête des lieux saints, puis de coalition défensive contre les T
1103 des projets de reconquête des lieux saints, puis de coalition défensive contre les Turcs. Trois grands motifs commandent
1104 la croisade, la lutte pour ou contre l’hégémonie d’ une puissance à l’intérieur de l’Europe. On les voit combinés chez le
1105 X ; et jusque chez l’universel Leibniz. Le motif de la croisade contre les Turcs n’est guère absent que chez trois des au
1106 que nous citerons : chez Dante, surtout préoccupé de faire triompher le principe impérial ; chez Sully, surtout préoccupé
1107 principe impérial ; chez Sully, surtout préoccupé de contenir la Maison d’Autriche ; et chez Émeric Crucé, pacifiste intég
1108 ez Sully, surtout préoccupé de contenir la Maison d’ Autriche ; et chez Émeric Crucé, pacifiste intégral, qui voudrait engl
1109 ourquoi les premiers appels à l’union des princes de l’Europe n’ont-ils été lancés — en vain d’ailleurs — qu’au début du x
1110 tife : la France de Philippe le Bel ? (L’attentat d’ Anagni date de 1303.) Jusqu’ici les tensions qui animaient le corps ch
1111 ce de Philippe le Bel ? (L’attentat d’Anagni date de 1303.) Jusqu’ici les tensions qui animaient le corps chrétien étaient
1112 tensions qui animaient le corps chrétien étaient de nature « universelle » ou pouvaient apparaître telles. Elles concerna
1113 ut homme et tout état social. Elles vont devenir, d’ une manière avouée, particulières, nationales, donc séparatistes. À la
1114 développer, comme par compensation, la nostalgie de l’unité. Dante en est le premier témoin, viril, sublime et absolu. Si
1115 é et les nations. 53. On pense ici aux ouvrages de J. Calmette, de Louis Halphen, de Friedrich Heer, de G. de Reynold et
1116 . 53. On pense ici aux ouvrages de J. Calmette, de Louis Halphen, de Friedrich Heer, de G. de Reynold et de H. Brugmans.
1117 ci aux ouvrages de J. Calmette, de Louis Halphen, de Friedrich Heer, de G. de Reynold et de H. Brugmans. 54. Paris, 1941
1118 J. Calmette, de Louis Halphen, de Friedrich Heer, de G. de Reynold et de H. Brugmans. 54. Paris, 1941. La date et le lie
1119 s Halphen, de Friedrich Heer, de G. de Reynold et de H. Brugmans. 54. Paris, 1941. La date et le lieu sont à noter.
4 1961, Vingt-huit siècles d’Europe. Deuxième partie. Prises de conscience européennes. De Pierre Dubois à l’abbé de Saint-Pierre, (xive au xixe siècle) — 2. Premiers plans d’union
1120 2.Premiers plans d’ union Dante (1265-1321) Selon Gilles de Rome (xiiie s.) le pap
1121 ’instar de Dieu, premier Moteur. Il est la source de l’ordre cosmique, du mouvement des choses et de la juridiction des pr
1122 e de l’ordre cosmique, du mouvement des choses et de la juridiction des princes et des peuples. L’empereur reçoit de lui s
1123 ion des princes et des peuples. L’empereur reçoit de lui son autorité temporelle, comme la Lune reçoit du Soleil la lumièr
1124 reçoit du Soleil la lumière qu’elle nous renvoie. De lui viennent l’autorité (un prince païen ne saurait être qu’un « brig
1125 aïen ne saurait être qu’un « brigand »), le droit de propriété et de succession, la légitimité du mariage. Un pécheur sépa
1126 être qu’un « brigand »), le droit de propriété et de succession, la légitimité du mariage. Un pécheur séparé du pape n’est
1127 doue, c’est le peuple qui est le vrai dépositaire de toute autorité, et il la délègue à l’empereur. Ce dernier représente
1128 empereur. Ce dernier représente donc la plénitude de la juridiction. Hors de lui, point d’autorité. L’Église peut avertir,
1129 a plénitude de la juridiction. Hors de lui, point d’ autorité. L’Église peut avertir, éclairer les âmes ; lui gouverne la t
1130 e pour la première fois les droits « souverains » de l’État national. Comment se situe Dante dans ce drame ? Pour lui, le
1131 ce drame ? Pour lui, le pape est la source unique de l’autorité, la neuvième sphère du Ciel qui communique son mouvement a
1132 rité. Cependant, l’empereur est la cause première de l’ordre social, et nul baron ne commande sans tenir de lui son pouvoi
1133 ordre social, et nul baron ne commande sans tenir de lui son pouvoir. Il est le principe d’unité du genre humain. Et il es
1134 sans tenir de lui son pouvoir. Il est le principe d’ unité du genre humain. Et il est nécessairement juste, étant tout-puis
1135 s âmes à la lumière, qui est leur seule liberté. ( De Monarchia, III, XVI.) Dans un tel système, point de place pour la sou
1136 Monarchia, III, XVI.) Dans un tel système, point de place pour la souveraineté absolue des États, qui ne saurait mener qu
1137 équivalent, a-t-on remarqué56, du pouvoir moderne de la Science ?) C’est pour saluer la marche de l’empereur Henri VII qui
1138 erne de la Science ?) C’est pour saluer la marche de l’empereur Henri VII qui vient se faire couronner à Rome par Clément
1139 à Rome par Clément V, que Dante écrit en 1308 son De Monarchia. (Il a 46 ans, et il n’a composé de sa Comédie que l’Enfer.
1140 son De Monarchia. (Il a 46 ans, et il n’a composé de sa Comédie que l’Enfer.) Le paradoxe central de cet ouvrage, en leque
1141 é de sa Comédie que l’Enfer.) Le paradoxe central de cet ouvrage, en lequel on a voulu voir la première proclamation de l’
1142 n lequel on a voulu voir la première proclamation de l’union fédérale des nations sous l’égide « romaine » (lisons europée
1143 ropre du genre humain, pris en sa totalité, c’est d’ actuer continuellement la plénitude de la puissance de l’intellect pos
1144 lité, c’est d’actuer continuellement la plénitude de la puissance de l’intellect possible, d’abord en vue de la spéculatio
1145 tuer continuellement la plénitude de la puissance de l’intellect possible, d’abord en vue de la spéculation, puis, par voi
1146 d’abord en vue de la spéculation, puis, par voie de conséquence, pour la pratique. Or parties et tout obéissent aux mêmes
1147 nt à sa tâche propre, lorsqu’il jouit du repos et de la paix ; et sa tâche est presque divine, selon la parole sainte : tu
1148 sainte : tu l’as placé peu au-dessous des anges. D’ où il suit que la paix universelle est le meilleur de tous les moyens
1149 ù il suit que la paix universelle est le meilleur de tous les moyens qui peuvent nous procurer le bonheur…57 Si nous cons
1150 rs, ou que sa propre supériorité, du consentement de tous, lui donne l’autorité ; autrement, le village, non seulement n’a
1151 non seulement n’atteint pas le minimum nécessaire de bien-être, mais, souvent, sous la pression des rivalités qui luttent
1152 Le contraire se produit-il, non seulement la fin de la vie sociale est perdue, mais la cité elle-même disparaît. Enfin da
1153 disparaît. Enfin dans un royaume, dont la fin est d’ assurer, avec plus de sécurité et de tranquillité les bienfaits de la
1154 un royaume, dont la fin est d’assurer, avec plus de sécurité et de tranquillité les bienfaits de la cité, un seul roi doi
1155 nt la fin est d’assurer, avec plus de sécurité et de tranquillité les bienfaits de la cité, un seul roi doit régner et gou
1156 plus de sécurité et de tranquillité les bienfaits de la cité, un seul roi doit régner et gouverner ; autrement, non seulem
1157 royaume tombe en dissolution, selon cette parole de l’infaillible vérité : tout royaume divisé est perdu. Ce qui se passe
1158 i sont ordonnés à un but unique établit la vérité de ce qui a été avancé plus haut. Désormais, il est évident que la total
1159 que la bonne existence du monde exige l’existence de la Monarchie ou de l’Empire.58 Entre deux princes, dont l’un n’est n
1160 nce du monde exige l’existence de la Monarchie ou de l’Empire.58 Entre deux princes, dont l’un n’est nullement soumis à l
1161 gement. Puisque l’un ne peut examiner la conduite de l’autre (chacun d’eux étant indépendant, et un égal n’ayant sur son é
1162 n ne peut examiner la conduite de l’autre (chacun d’ eux étant indépendant, et un égal n’ayant sur son égal aucun pouvoir),
1163 aucun pouvoir), un troisième prince doit exister, d’ une juridiction plus ample, et qui tienne les deux princes précédents
1164 entendue au sens que les plus minimes règlements d’ une ville quelconque doivent émaner directement du prince suprême ; so
1165 unicipales sont défectueuses, et elles ont besoin d’ être jugées, ainsi qu’il résulte du cinquième livre à Nicomaque, où le
1166 es par des lois différentes. La loi est une règle de direction pour la vie. Autrement doivent être dirigés les Scythes qui
1167 ptième climat, ils subissent une grande inégalité de jours et de nuits, et ils supportent un froid presque intolérable ; a
1168 t, ils subissent une grande inégalité de jours et de nuits, et ils supportent un froid presque intolérable ; autrement, le
1169 ntes qui habitent sous l’équinoxe ; ils jouissent de jours et de nuits toujours égaux et ils ne peuvent se couvrir de vête
1170 itent sous l’équinoxe ; ils jouissent de jours et de nuits toujours égaux et ils ne peuvent se couvrir de vêtements à caus
1171 nuits toujours égaux et ils ne peuvent se couvrir de vêtements à cause de la trop grande chaleur. Le véritable sens de la
1172 ause de la trop grande chaleur. Le véritable sens de la phrase du début est celui-ci : le genre humain, sur les points com
1173 r du monarque ; ainsi l’intellect pratique reçoit de l’intellect spéculatif la majeure qui commande la conclusion pratique
1174 le ne peut être faite que par un seul, sous peine d’ introduire la confusion dans les principes universels.60 Si, depuis l
1175 les principes universels.60 Si, depuis la chute de nos premiers parents, cause de toutes nos erreurs, nous considérons l
1176 i, depuis la chute de nos premiers parents, cause de toutes nos erreurs, nous considérons les mœurs des hommes et les évén
1177 n fût alors heureux, au milieu de la tranquillité de la paix universelle, tous les historiens, tous les poètes illustres,
1178 ens, tous les poètes illustres, et même le témoin de la bonté du Christ l’ont témoigné ; enfin Paul nomma cet état très he
1179 tunique sans couture fut déchirée par les ongles de la cupidité, nous pouvons le lire chez les historiens, puissions-nous
1180 puissions-nous ne pas le revoir. Ô genre humain, de quelles luttes et querelles, de quels naufrages dois-tu être agité !
1181 . Ô genre humain, de quelles luttes et querelles, de quels naufrages dois-tu être agité ! Tu es devenu un monstre aux mult
1182 contradictoires. Tu es malade en l’un et l’autre de tes intellects, et aussi en ta sensibilité ; tu n’as pas souci de nou
1183 s, et aussi en ta sensibilité ; tu n’as pas souci de nourrir l’intellect supérieur par des raisons irréfragables ; ni l’in
1184 r l’expérience ; ni la sensibilité par la douceur de l’appel divin, lorsque les trompettes divines, au nom du Saint-Esprit
1185 t : « combien il est bon, combien il est agréable de vivre avec des frères et d’être fondu en un. »61 Après cette utopie
1186 mbien il est agréable de vivre avec des frères et d’ être fondu en un. »61 Après cette utopie sublime de la Paix par l’Em
1187 tre fondu en un. »61 Après cette utopie sublime de la Paix par l’Empire — bafouée par des siècles de progrès constant du
1188 de la Paix par l’Empire — bafouée par des siècles de progrès constant du nationalisme, mais qui pourtant, ne cessera d’agi
1189 nt du nationalisme, mais qui pourtant, ne cessera d’ agir sur la conscience des meilleurs jusqu’à nous — voici la descripti
1190 la description étonnamment précise pour l’époque, d’ une Europe qui n’est pas seulement géographique mais déjà « culturelle
1191 strée par l’exemple des langues. Citons le traité De vulgari eloquentia (I, 8) : Par suite de la confusion des langues do
1192 des langues dont on vient de parler62, nous avons de sérieuses raisons de penser qu’alors pour la première fois les hommes
1193 ient de parler62, nous avons de sérieuses raisons de penser qu’alors pour la première fois les hommes se dispersèrent pour
1194 du monde, toutes les régions et tous les recoins de ces pays. Et comme la souche primitive de la race humaine fut plantée
1195 recoins de ces pays. Et comme la souche primitive de la race humaine fut plantée aux rivages de l’Orient, et que de là not
1196 mitive de la race humaine fut plantée aux rivages de l’Orient, et que de là notre race s’est propagée des deux côtés en mu
1197 maine fut plantée aux rivages de l’Orient, et que de là notre race s’est propagée des deux côtés en multiples rameaux pour
1198 iples rameaux pour s’étendre enfin jusqu’aux pays d’ Occident, peut-être est-ce alors pour la première fois que les fleuves
1199 st-ce alors pour la première fois que les fleuves de l’Europe, ou du moins certains d’entre eux, ont désaltéré des êtres d
1200 rtains d’entre eux, ont désaltéré des êtres doués de raison. Mais, que ses derniers occupants soient venus de l’étranger o
1201 s soient venus de l’étranger ou que des indigènes de l’Europe y soient revenus, ces hommes y apportèrent un langage divisé
1202 ortèrent un langage divisé en trois branches ; et de ceux qui l’apportèrent, les uns s’attribuèrent la région méridionale
1203 ent, les uns s’attribuèrent la région méridionale de l’Europe, d’autres la région septentrionale ; et le troisième groupe,
1204 appelons maintenant les Grecs, occupa une partie de l’Europe et une partie de l’Asie. C’est d’un seul et même langage reç
1205 recs, occupa une partie de l’Europe et une partie de l’Asie. C’est d’un seul et même langage reçu dans le châtiment de la
1206 partie de l’Europe et une partie de l’Asie. C’est d’ un seul et même langage reçu dans le châtiment de la confusion que les
1207 d’un seul et même langage reçu dans le châtiment de la confusion que les diverses langues vulgaires ont pris naissance, c
1208 nube ou du Palus-Méotide aux limites occidentales de l’Angleterre, est borné par le pays des Italiens et des Français et p
1209 re d’autres nations. Il ne resta qu’un seul signe de la même origine commune : presque tous les peuples cités ci-dessus po
1210 e à partir du pays des Hongrois dans la direction de l’orient, un autre a occupé tout ce qui, au-delà, porte le nom d’Euro
1211 autre a occupé tout ce qui, au-delà, porte le nom d’ Europe, et s’est propagé plus loin. Tout le reste de l’Europe a été oc
1212 Europe, et s’est propagé plus loin. Tout le reste de l’Europe a été occupé par un troisième langage, bien que maintenant i
1213 is et les Latins. Mais le signe évident que c’est d’ un seul et même langage que procèdent les langues vulgaires de ces tro
1214 même langage que procèdent les langues vulgaires de ces trois peuples, c’est qu’on les voit désigner une foule d’objets p
1215 peuples, c’est qu’on les voit désigner une foule d’ objets par les mêmes mots : ainsi Dieu, le ciel, l’amour, la mer, la t
1216 t, il aime, et presque tout le reste. Les peuples de langue d’oc occupent l’occident de l’Europe méridionale au-delà du pa
1217 , et presque tout le reste. Les peuples de langue d’ oc occupent l’occident de l’Europe méridionale au-delà du pays des Gén
1218 e. Les peuples de langue d’oc occupent l’occident de l’Europe méridionale au-delà du pays des Génois. Ceux qui disent si o
1219 des Génois. Ceux qui disent si occupent l’orient de ces pays jusqu’au promontoire de l’Italie où commence la mer Adriatiq
1220 ccupent l’orient de ces pays jusqu’au promontoire de l’Italie où commence la mer Adriatique, ainsi que la Sicile. Quant au
1221 r Adriatique, ainsi que la Sicile. Quant aux gens de langue d’oïl, ce sont en quelque sorte des septentrionaux en regard d
1222 ue, ainsi que la Sicile. Quant aux gens de langue d’ oïl, ce sont en quelque sorte des septentrionaux en regard de ceux-là,
1223 ds, sont entourés à l’ouest et au nord par la mer d’ Angleterre, et limités par les montagnes d’Aragon ; au midi également,
1224 la mer d’Angleterre, et limités par les montagnes d’ Aragon ; au midi également, ils sont bornés par les Provençaux et par
1225 sont bornés par les Provençaux et par les pentes de l’Apennin. Pierre Dubois (env. 1250-1320) Contemporain de la M
1226 Pierre Dubois (env. 1250-1320) Contemporain de la Monarchie (1308), l’essai de Pierre Dubois (1306) s’en distingue p
1227 ) Contemporain de la Monarchie (1308), l’essai de Pierre Dubois (1306) s’en distingue par un empirisme sans vergogne, o
1228 st à Ernest Renan que nous devons la résurrection de ce projet, enterré pendant cinq siècles dans la paix des archives de
1229 ré pendant cinq siècles dans la paix des archives de Christine de Suède, puis du Vatican. Depuis Renan, tout le monde le c
1230 r rendre un peu de son relief à la figure étrange de l’avocat normand que l’historien français Charles Langlois caractéris
1231 glois caractérisait comme « le premier publiciste de son époque », citons ici quelques extraits du chapitre que Renan lui
1232 e Renan lui consacre dans son Histoire littéraire de la France 63. Pierre Dubois naquit certainement en Normandie et très
1233 nces ou aux environs. Il étudia dans l’Université de Paris, où il entendit saint Thomas d’Aquin prononcer un sermon et Sig
1234 rmon et Siger de Brabant64 commenter la Politique d’ Aristote. Saint Thomas d’Aquin étant mort en 1274 et l’enseignement de
1235 omas d’Aquin étant mort en 1274 et l’enseignement de Siger devant être placé vers le même temps, il semble que l’on ne se
1236 e prenait définitivement le dessus sur la justice d’ église, et reléguait celle-ci dans un for ecclésiastique très large en
1237 Pierre Dubois exerçant à Coutances les fonctions d’ avocat des causes royales. Déjà, sans doute, avant cette époque, il ét
1238 nement. En effet, le premier écrit qui nous reste de lui, le Traité sur l’abrègement des guerres et des procès, daté avec
1239 c la plus grande précision des cinq derniers mois de l’an 1300, est adressé à Philippe le Bel, et rentre tout à fait dans
1240 es préoccupations qui dictèrent le prononcé papal de 1298, ainsi que les actes de la diplomatie royale en 1300. Cet ouvrag
1241 nt le prononcé papal de 1298, ainsi que les actes de la diplomatie royale en 1300. Cet ouvrage témoigne d’une connaissance
1242 a diplomatie royale en 1300. Cet ouvrage témoigne d’ une connaissance étendue des affaires politiques de l’Europe et des se
1243 ’une connaissance étendue des affaires politiques de l’Europe et des secrets de la maison de France ; on ne peut supposer
1244 es affaires politiques de l’Europe et des secrets de la maison de France ; on ne peut supposer qu’un obscur avocat de prov
1245 olitiques de l’Europe et des secrets de la maison de France ; on ne peut supposer qu’un obscur avocat de province, sans ra
1246 France ; on ne peut supposer qu’un obscur avocat de province, sans rapport avec la cour, fût si bien renseigné… La pensée
1247 cour, fût si bien renseigné… La pensée dominante de Pierre Dubois était la résistance aux empiètements de l’Église et l’e
1248 ierre Dubois était la résistance aux empiètements de l’Église et l’extension des pouvoirs de la société civile. La lutte d
1249 iètements de l’Église et l’extension des pouvoirs de la société civile. La lutte de Philippe le Bel et de Boniface VIII vi
1250 nsion des pouvoirs de la société civile. La lutte de Philippe le Bel et de Boniface VIII vint lui offrir une occasion exce
1251 la société civile. La lutte de Philippe le Bel et de Boniface VIII vint lui offrir une occasion excellente pour donner cou
1252 s passions anticléricales. Pendant toute la durée de cette lutte, nous le voyons à côté du roi, recevant ses inspirations,
1253 guments, tenant la plume pour défendre les droits de la couronne… Avant 1306, pour des raisons qu’on ignore, et certaineme
1254 t certainement sans rompre ses liens avec la cour de France, Dubois entrait au service d’Édouard Ier, roi d’Angleterre. …
1255 avec la cour de France, Dubois entrait au service d’ Édouard Ier, roi d’Angleterre. … En 1306, il composa le plus important
1256 gleterre. … En 1306, il composa le plus important de ses ouvrages, celui où il s’est plu à rassembler toutes ses idées de
1257 lui où il s’est plu à rassembler toutes ses idées de politique et de réformes sociales. C’est un traité adressé à Édouard
1258 plu à rassembler toutes ses idées de politique et de réformes sociales. C’est un traité adressé à Édouard Ier, sur les moy
1259 t un traité adressé à Édouard Ier, sur les moyens de recouvrer la Terre sainte65. … Il est permis de penser que Dubois ten
1260 s de recouvrer la Terre sainte65. … Il est permis de penser que Dubois tenait assez peu au but lointain qu’il assignait à
1261 l’activité des nations chrétiennes… Sous prétexte d’ indiquer les meilleurs procédés pour conquérir la Terre sainte, Dubois
1262 érir la Terre sainte, Dubois expose un vaste plan de réformes, qui consiste à détruire le pouvoir temporel du pape, à dépo
1263 pouvoir temporel du pape, à dépouiller le clergé de ses biens, à transformer ces biens en pensions payées par le pouvoir
1264 ouvoir séculier et à donner la direction générale de la chrétienté au roi de France. En 1307 nous trouvons de nouveau Dubo
1265 nnée 1308, il paraît avoir été au plus haut degré de son crédit auprès de Philippe. En cette année, l’empereur Albert d’Au
1266 Clément V se trouvant à Poitiers entre les mains de Philippe le Bel, Dubois proposa au roi de profiter de l’occasion pour
1267 s mains de Philippe le Bel, Dubois proposa au roi de profiter de l’occasion pour se faire élire empereur… Une fois nommé e
1268 hilippe le Bel, Dubois proposa au roi de profiter de l’occasion pour se faire élire empereur… Une fois nommé empereur, le
1269 e fois nommé empereur, le roi se mettra à la tête de la chrétienté et marchera sur Jérusalem par terre, comme le firent Ch
1270 l serait assez difficile, écrit Chr. L. Lange 66, d’ exposer les idées du traité de Pierre Dubois d’après le plan suivi par
1271 t Chr. L. Lange 66, d’exposer les idées du traité de Pierre Dubois d’après le plan suivi par l’auteur lui-même. Son ouvrag
1272 suivi par l’auteur lui-même. Son ouvrage n’a rien de systématique : les digressions et les répétitions sont fréquentes ; l
1273 l’auteur semblent assez disparates et n’ont guère de relation avec le sujet principal : il disserte sur l’éducation des fe
1274 cation des femmes et sur l’organisation militaire de la France, sur la réforme des couvents de religieuses et sur l’utilit
1275 litaire de la France, sur la réforme des couvents de religieuses et sur l’utilité d’apprendre les langues, sur les mariage
1276 orme des couvents de religieuses et sur l’utilité d’ apprendre les langues, sur les mariages mixtes entre sarrasins et chré
1277 entre sarrasins et chrétiennes et sur les moyens d’ abréger les procès. Ce dernier sujet lui tient notamment à cœur, il le
1278 ur, il le considère comme étroitement lié à celui de « l’abréviation des guerres ». Nous suivrons donc ici l’analyse propo
1279 nations chrétiennes, condition absolue du succès de la croisade. Les croisés ne demeureront pas en Terre sainte s’ils app
1280 inte s’ils apprennent que leur pays est en danger de guerre. Cependant, il ne suffit pas de prêcher la paix : Ne voit-on
1281 en danger de guerre. Cependant, il ne suffit pas de prêcher la paix : Ne voit-on pas que l’Écriture sainte, qui déteste
1282 et l’enseignement des ministres actuels et futurs de l’Église puissent faire cesser les guerres et les cupidités dont elle
1283 mme à leur supérieur ; car si l’évolution tendait de ce côté-là, il y aurait des guerres, des séditions, des dissensions s
1284 fin ; et il serait impossible pour n’importe qui d’ y mettre fin, à cause de la multitude des nations, de l’éloignement et
1285 mettre fin, à cause de la multitude des nations, de l’éloignement et de la diversité des lieux, et de la disposition natu
1286 de la multitude des nations, de l’éloignement et de la diversité des lieux, et de la disposition naturelle des hommes au
1287 de l’éloignement et de la diversité des lieux, et de la disposition naturelle des hommes au désaccord ; il est vrai que qu
1288 i, quant au spirituel, gouvernerait et dirigerait de l’est à l’ouest et du nord au sud. La « république chrétienne » de P
1289 et du nord au sud. La « république chrétienne » de Pierre Dubois est une sorte de Confédération, qui serait placée sous
1290 lique chrétienne » de Pierre Dubois est une sorte de Confédération, qui serait placée sous la direction d’un concile, dans
1291 onfédération, qui serait placée sous la direction d’ un concile, dans lequel les différentes nations garderaient une indépe
1292 il ne croit pas la paix possible sans une réforme de l’Église. Fort de l’autorité gagnée par ce moyen, le pape devrait pre
1293 paix possible sans une réforme de l’Église. Fort de l’autorité gagnée par ce moyen, le pape devrait prendre l’initiative
1294 ar ce moyen, le pape devrait prendre l’initiative de la convocation d’un concile qui établirait la paix entre les chrétien
1295 pe devrait prendre l’initiative de la convocation d’ un concile qui établirait la paix entre les chrétiens, en organisant l
1296 nt la société internationale en vue de la reprise de la Terre sainte. Il faut surtout organiser des moyens judiciaires afi
1297 Pierre Dubois développe alors un projet détaillé d’ arbitrage international entre les princes, qu’il admet d’ailleurs « so
1298 tés et ces princes nombreux, ne reconnaissant pas de supérieurs au monde qui exercent la justice sur eux selon les lois et
1299 autres pour chacune des parties, hommes aisés et de telle condition qu’il soit probable qu’ils ne puissent être corrompus
1300 dans un endroit approprié, et, étant assermentés de la manière la plus stricte, après qu’ils auraient reçu avant leur réu
1301 leur réunion les plaidoiries sommaires et claires de chaque partie, ils recevraient — en éliminant d’abord tout ce qui ser
1302 eusement… Si l’une des parties n’est pas contente de la sentence, les juges eux-mêmes doivent renvoyer tout le procès, acc
1303 être confirmées et enregistrées dans les archives de l’Église ad perpetuam memoriam. Il est intéressant de noter que le p
1304 Église ad perpetuam memoriam. Il est intéressant de noter que le pape est désigné par cet avocat de l’État national pour
1305 t de noter que le pape est désigné par cet avocat de l’État national pour être le juge suprême dans les litiges des prince
1306 nts et amis des condamnés. Il veut donc profiter de l’esprit guerrier de son époque pour faire avancer son projet de conq
1307 mnés. Il veut donc profiter de l’esprit guerrier de son époque pour faire avancer son projet de conquête des lieux saints
1308 rrier de son époque pour faire avancer son projet de conquête des lieux saints : les trouble-paix seront déportés en Orien
1309 ront déportés en Orient, où ils auront l’occasion de développer leurs capacités militaires contre les Infidèles, au lieu q
1310 ’en restant en Europe, ils y détruiraient la paix de la république chrétienne ! Mais cette disposition ne suffit pas. Dubo
1311 ilement que les armes. « Le trait caractéristique de ce projet, remarque Lange67, c’est son esprit réaliste. Dubois sait a
1312 me qui se pose, c’est la coexistence dans la paix d’ États souverains ; il voit également que le moyen judiciaire de vider
1313 rains ; il voit également que le moyen judiciaire de vider les litiges entre États souverains est l’arbitrage. Il recomman
1314 s en usage depuis le xiie siècle ; les sanctions de l’arbitrage, qui également entraient tout à fait dans la pratique de
1315 également entraient tout à fait dans la pratique de son époque… S’il n’a pas trouvé d’écho, c’est qu’il y a peu d’hommes
1316 ns la pratique de son époque… S’il n’a pas trouvé d’ écho, c’est qu’il y a peu d’hommes qui voient vraiment la réalité, com
1317 … S’il n’a pas trouvé d’écho, c’est qu’il y a peu d’ hommes qui voient vraiment la réalité, comme il l’a vue. Il était trop
1318 sentielle — qui fait aussi l’intérêt — du système de Dubois : « Le point de départ de son raisonnement est l’existence de
1319 ssi l’intérêt — du système de Dubois : « Le point de départ de son raisonnement est l’existence de l’État, du prince souve
1320 rêt — du système de Dubois : « Le point de départ de son raisonnement est l’existence de l’État, du prince souverain, rex
1321 int de départ de son raisonnement est l’existence de l’État, du prince souverain, rex qui non recognoscit superiorem in te
1322 t superiorem in terris… Or, l’affirmation absolue de la souveraineté de l’État doit, poussée à fond, amener l’établissemen
1323 ris… Or, l’affirmation absolue de la souveraineté de l’État doit, poussée à fond, amener l’établissement de l’anarchie dan
1324 État doit, poussée à fond, amener l’établissement de l’anarchie dans les relations entre les États, anarchie qui, en princ
1325 e toujours devant notre époque comme devant celle de Philippe le Bel et de Boniface VIII. Pierre Dubois est le premier qui
1326 e époque comme devant celle de Philippe le Bel et de Boniface VIII. Pierre Dubois est le premier qui l’a posé, et qui a tâ
1327 ubois est le premier qui l’a posé, et qui a tâché d’ en indiquer une solution. » Pétrarque (1304-1374) Cependant l’an
1328 et virulent, déchirent son corps. Est-ce le corps de la chrétienté ? Pétrarque n’a pas l’air de le penser, lorsqu’il lamen
1329 corps de la chrétienté ? Pétrarque n’a pas l’air de le penser, lorsqu’il lamente la décadence d’une Europe où, dans plusi
1330 ’air de le penser, lorsqu’il lamente la décadence d’ une Europe où, dans plusieurs régions, « le Christ est inconnu ou méco
1331 esprit plus loin ; toute la Gaule, limite extrême de notre continent, et la Grande-Bretagne, projetée hors du continent, s
1332 ses. La Germanie, non moins que l’Italie, souffre de luttes intestines et brûle en son propre feu. Les rois d’Espagne pren
1333 s intestines et brûle en son propre feu. Les rois d’ Espagne prennent les armes l’un contre l’autre… La Grèce laboure pour
1334 alut, délaisse la crèche. Dans les autres régions d’ Europe, le Christ est inconnu ou mal vu… Le lieu de naissance et le sé
1335 ’Europe, le Christ est inconnu ou mal vu… Le lieu de naissance et le sépulcre même du Seigneur, double port de la paix pou
1336 ance et le sépulcre même du Seigneur, double port de la paix pour les chrétiens, sont piétinés par les chiens et ceux qui
1337 briguant l’Empire bien qu’hérétique, il a besoin de l’appui du pape et des princes de la chrétienté. « C’est probablement
1338 ue, il a besoin de l’appui du pape et des princes de la chrétienté. « C’est probablement pendant l’année même de son avène
1339 tienté. « C’est probablement pendant l’année même de son avènement au trône — écrit Lange69 — que Georges a fait la connai
1340 crit Lange69 — que Georges a fait la connaissance d’ Antoine Marini, originaire de Grenoble, inventeur et grand industriel,
1341 fait la connaissance d’Antoine Marini, originaire de Grenoble, inventeur et grand industriel, qui avait fondé des entrepri
1342 grand industriel, qui avait fondé des entreprises de tuileries et de chaufournerie en Styrie et en Salzburg. Antoine déplo
1343 , qui avait fondé des entreprises de tuileries et de chaufournerie en Styrie et en Salzburg. Antoine déployait depuis 1456
1344 llemands, probablement aussi en Bohême ; dans une de ses lettres de créance, le roi appelle Antoine carbonista, charbonnie
1345 blement aussi en Bohême ; dans une de ses lettres de créance, le roi appelle Antoine carbonista, charbonnier. On doit supp
1346 che en ressources, qui a suggéré à Georges l’idée de faire introduire ses projets d’alliances politiques par un plan grand
1347 à Georges l’idée de faire introduire ses projets d’ alliances politiques par un plan grandiose de fédération européenne. C
1348 jets d’alliances politiques par un plan grandiose de fédération européenne. C’est encore Antoine qui a présenté le projet
1349 enfin soumis le projet à Louis XI pendant l’hiver de 1462 à 1463. En 1464 Antoine prend part à une grande ambassade bohémi
1350 s XI. C’est sa dernière apparition ; il disparaît de l’histoire après cet événement. — On sait que plus tard, en 1466, le
1351 XI en 1463 est écrit en latin. Dans les Mémoires de Philippe de Comines, qui le reproduisent, il porte ce titre en frança
1352 roduisent, il porte ce titre en français : Traité d’ alliance et confédération entre le roy Louis XI, Georges roy de Bohême
1353 confédération entre le roy Louis XI, Georges roy de Bohême et la seigneurie de Venise, pour résister au Turc. Podiebrad c
1354 Louis XI, Georges roy de Bohême et la seigneurie de Venise, pour résister au Turc. Podiebrad comptait y faire participer
1355 er au Turc. Podiebrad comptait y faire participer d’ entrée de jeu les rois de Pologne et de Hongrie, ainsi que les ducs de
1356 c. Podiebrad comptait y faire participer d’entrée de jeu les rois de Pologne et de Hongrie, ainsi que les ducs de Bourgogn
1357 ptait y faire participer d’entrée de jeu les rois de Pologne et de Hongrie, ainsi que les ducs de Bourgogne et de Bavière 
1358 participer d’entrée de jeu les rois de Pologne et de Hongrie, ainsi que les ducs de Bourgogne et de Bavière ; mais l’emper
1359 rois de Pologne et de Hongrie, ainsi que les ducs de Bourgogne et de Bavière ; mais l’empereur et le pape s’en voyaient ex
1360 et de Hongrie, ainsi que les ducs de Bourgogne et de Bavière ; mais l’empereur et le pape s’en voyaient exclus. C’est donc
1361 elle des États et des nations naissantes, — celle de Pierre Dubois — qu’entendait se fonder ce plan fédératif : il prenait
1362 ait se fonder ce plan fédératif : il prenait acte d’ une situation de fait, et tentait de prévenir le péril de l’anarchie d
1363 plan fédératif : il prenait acte d’une situation de fait, et tentait de prévenir le péril de l’anarchie des souverainetés
1364 prenait acte d’une situation de fait, et tentait de prévenir le péril de l’anarchie des souverainetés. Bien qu’il ait éch
1365 ituation de fait, et tentait de prévenir le péril de l’anarchie des souverainetés. Bien qu’il ait échoué devant la résista
1366 netés. Bien qu’il ait échoué devant la résistance de deux papes, au pouvoir desquels il entendait faire pièce, ce projet m
1367 pièce, ce projet marque une date dans l’histoire de l’Europe : il esquisse pour la première fois une Confédération contin
1368 l’autonomie des États membres. Il porte création d’ une Assemblée votant à la majorité simple ; d’une Cour de Justice ; d’
1369 ion d’une Assemblée votant à la majorité simple ; d’ une Cour de Justice ; d’une procédure d’arbitrage international ; d’un
1370 ssemblée votant à la majorité simple ; d’une Cour de Justice ; d’une procédure d’arbitrage international ; d’une force arm
1371 nt à la majorité simple ; d’une Cour de Justice ; d’ une procédure d’arbitrage international ; d’une force armée commune ;
1372 simple ; d’une Cour de Justice ; d’une procédure d’ arbitrage international ; d’une force armée commune ; et d’un budget f
1373 ice ; d’une procédure d’arbitrage international ; d’ une force armée commune ; et d’un budget fédéral, alimenté d’ailleurs
1374 ge international ; d’une force armée commune ; et d’ un budget fédéral, alimenté d’ailleurs aux dépens de la dîme ecclésias
1375 d’ailleurs aux dépens de la dîme ecclésiastique. De ce texte fort long, redondant et fleuri comme il se devait à l’époque
1376 omme il se devait à l’époque, nous traduirons ici d’ amples extraits : il nous paraît que le justifient les nombreux rappro
1377 que cette lecture suggère avec les circonstances de notre temps. Au nom de notre Seigneur Jésus-Christ, Nous, Georges, r
1378 mps que le sépulcre du Seigneur. Il n’y avait pas de nation à cette époque dans le monde entier qui osât attaquer la domin
1379 elle est déchirée, réduite, affaiblie, dépouillée de tout son éclat et de toute sa splendeur d’autrefois… Car l’islam, pu
1380 duite, affaiblie, dépouillée de tout son éclat et de toute sa splendeur d’autrefois… Car l’islam, puis les Turcs, sont su
1381 uillée de tout son éclat et de toute sa splendeur d’ autrefois… Car l’islam, puis les Turcs, sont survenus, « réduisant en
1382 uis … déportant hors des pays chrétiens un nombre d’ âmes presque infini ». Ô Province dorée ! Ô chrétienté, gloire de l’u
1383 nfini ». Ô Province dorée ! Ô chrétienté, gloire de l’univers, comment tout honneur s’est-il retiré de toi ? Comment a di
1384 e l’univers, comment tout honneur s’est-il retiré de toi ? Comment a disparu ton éclat sans rival ? Où est la vigueur de t
1385 disparu ton éclat sans rival ? Où est la vigueur de ton peuple ? Où, le respect que toutes les nations te portaient ? Où,
1386 ires, si tu devais si vite être menée au triomphe de tes vainqueurs ? À quoi bon avoir résisté à la puissance des chefs pa
1387 , si maintenant tu ne peux plus soutenir l’assaut de tes voisins ? Ô vicissitudes de la fortune, que de changements vous a
1388 soutenir l’assaut de tes voisins ? Ô vicissitudes de la fortune, que de changements vous apportez aux empires ! Avec quell
1389 e tes voisins ? Ô vicissitudes de la fortune, que de changements vous apportez aux empires ! Avec quelle rapidité se trans
1390 évanouissent les puissances ! Quelle est la cause d’ un tel changement et d’une telle ruine ? Il n’est pas facile de la dis
1391 nces ! Quelle est la cause d’un tel changement et d’ une telle ruine ? Il n’est pas facile de la discerner, parce que les j
1392 gement et d’une telle ruine ? Il n’est pas facile de la discerner, parce que les jugements de Dieu sont cachés. Les champs
1393 s facile de la discerner, parce que les jugements de Dieu sont cachés. Les champs ne sont pas moins fertiles aujourd’hui q
1394 troupeaux ne sont pas moins féconds ; le produit de la vigne emplit les cuves avec usure ; des hommes industrieux ont déc
1395  ; des hommes industrieux ont découvert des mines d’ or et d’argent, de grands esprits ont fait leurs preuves dans une foul
1396 ommes industrieux ont découvert des mines d’or et d’ argent, de grands esprits ont fait leurs preuves dans une foule de dom
1397 strieux ont découvert des mines d’or et d’argent, de grands esprits ont fait leurs preuves dans une foule de domaines, les
1398 nds esprits ont fait leurs preuves dans une foule de domaines, les lettres sont aussi florissantes que jamais. Qu’est-ce d
1399 soit lamentable et qu’il faille déplorer la ruine de Constantinople et d’autres provinces, nous devons pourtant, si nous s
1400 nces, nous devons pourtant, si nous sommes avides de gloire, souhaiter cette occasion qui peut nous réserver l’honneur d’ê
1401 r cette occasion qui peut nous réserver l’honneur d’ être appelés défenseurs et mainteneurs du nom chrétien. C’est pourquoi
1402 du nom chrétien. C’est pourquoi, dans notre désir de voir cesser et disparaître entièrement ces guerres, rapines, désordre
1403 s prélats, des princes, des grands, des nobles et de nos docteurs en droit divin et humain, à cet acte d’alliance, de paix
1404 nos docteurs en droit divin et humain, à cet acte d’ alliance, de paix, de fraternité et de concorde destiné à durer inébra
1405 en droit divin et humain, à cet acte d’alliance, de paix, de fraternité et de concorde destiné à durer inébranlablement,
1406 divin et humain, à cet acte d’alliance, de paix, de fraternité et de concorde destiné à durer inébranlablement, à cause d
1407 à cet acte d’alliance, de paix, de fraternité et de concorde destiné à durer inébranlablement, à cause du respect de Dieu
1408 tiné à durer inébranlablement, à cause du respect de Dieu et du maintien de la foi, pour nous, nos héritiers et nos futurs
1409 lement, à cause du respect de Dieu et du maintien de la foi, pour nous, nos héritiers et nos futurs successeurs, à perpétu
1410 té statuent : que les contractants s’abstiendront de recourir aux armes les uns contre les autres ; qu’ils ne prêteront se
1411 ours ni conseil à aucune conspiration contre l’un d’ eux ; et qu’ils s’entraideront pour réprimer les délits commis par leu
1412 délits commis par leurs sujets sur le territoire de n’importe quel pays membre. L’article suivant aborde le sujet capital
1413 membre. L’article suivant aborde le sujet capital de l’assistance mutuelle et de l’arbitrage international : Quatrièmemen
1414 orde le sujet capital de l’assistance mutuelle et de l’arbitrage international : Quatrièmement, nous voulons que si par h
1415 es-uns, en dehors de cette convention qui réclame de nous amour et fraternité, et sans avoir été attaqués ou provoqués, ou
1416 ou provoqués, ouvrent les hostilités contre l’un de nous, ou qu’il arrivât qu’elles fussent ouvertes (ce qui paraît fort
1417 es ; et là, en présence des parties en conflit ou de leurs ambassadeurs plénipotentiaires, employer tout son zèle et toute
1418 ci-dessous désigné. Et si, du fait et par défaut de l’agresseur, la paix et l’union ne peuvent se faire par l’un des moye
1419 n des moyens susdits, tous les autres parmi nous, d’ un accord unanime, voulons secourir notre allié attaqué ou contraint d
1420 voulons secourir notre allié attaqué ou contraint de se défendre en lui procurant chaque année pour sa défense les dîmes d
1421 procurant chaque année pour sa défense les dîmes de notre royaume, ainsi que les revenus, gains ou émoluments de nos gens
1422 yaume, ainsi que les revenus, gains ou émoluments de nos gens et de nos sujets, qu’ils auront versé à proportion de trois
1423 e les revenus, gains ou émoluments de nos gens et de nos sujets, qu’ils auront versé à proportion de trois jours par année
1424 t de nos sujets, qu’ils auront versé à proportion de trois jours par année pour la jouissance de leur maison ou habitation
1425 rtion de trois jours par année pour la jouissance de leur maison ou habitation… Les organes de la Confédération sont ensu
1426 ssance de leur maison ou habitation… Les organes de la Confédération sont ensuite indiqués : Cour de justice ou Consistoi
1427 de la Confédération sont ensuite indiqués : Cour de justice ou Consistoire, Assemblée, enfin force armée commune, ainsi q
1428 , enfin force armée commune, ainsi que la manière de la financer et de la faire entrer en action : Mais, comme la paix n
1429 e commune, ainsi que la manière de la financer et de la faire entrer en action : Mais, comme la paix ne peut être cultiv
1430 la justice sans la paix… nous avons prévu d’abord d’ organiser une sorte de Consistoire général qui siégera au lieu où l’As
1431 x… nous avons prévu d’abord d’organiser une sorte de Consistoire général qui siégera au lieu où l’Assemblée elle-même se t
1432 ssemblée elle-même se trouvera pour le moment, et d’ où, comme d’une source, découleront de partout les ruisseaux de la jus
1433 e-même se trouvera pour le moment, et d’où, comme d’ une source, découleront de partout les ruisseaux de la justice. Ce tri
1434 moment, et d’où, comme d’une source, découleront de partout les ruisseaux de la justice. Ce tribunal sera organisé, quant
1435 ’une source, découleront de partout les ruisseaux de la justice. Ce tribunal sera organisé, quant au nombre et à la qualit
1436 otre Assemblée ci-dessous désignée ou la majorité de celle-ci l’aura arrêté et décidé. Et afin que dans ce tribunal un ter
1437 simplement et clairement, sans figure et tumulte de procès, en l’absence de tout subterfuge et de toute manœuvre dilatoir
1438 t, sans figure et tumulte de procès, en l’absence de tout subterfuge et de toute manœuvre dilatoire. … D’autre part, comme
1439 lte de procès, en l’absence de tout subterfuge et de toute manœuvre dilatoire. … D’autre part, comme cet acte de bonne int
1440 anœuvre dilatoire. … D’autre part, comme cet acte de bonne intelligence et de charité est fait et établi avant tout à la g
1441 tre part, comme cet acte de bonne intelligence et de charité est fait et établi avant tout à la gloire et à l’honneur de l
1442 t et établi avant tout à la gloire et à l’honneur de la divine majesté de la sainte Église romaine et de la foi catholique
1443 t à la gloire et à l’honneur de la divine majesté de la sainte Église romaine et de la foi catholique, de défendre et prot
1444 la divine majesté de la sainte Église romaine et de la foi catholique, de défendre et protéger la religion chrétienne et
1445 la sainte Église romaine et de la foi catholique, de défendre et protéger la religion chrétienne et tous les fidèles oppri
1446 s avec nos revenus, profits et émoluments et ceux de nos sujets, à fournir, comme il est dit, à raison de trois jours par
1447 e par accabler l’imprévoyance, nous décidons que, d’ un commun accord de toute notre Assemblée ou de la majeure partie de c
1448 prévoyance, nous décidons que, d’un commun accord de toute notre Assemblée ou de la majeure partie de celle-ci, on fixera
1449 e, d’un commun accord de toute notre Assemblée ou de la majeure partie de celle-ci, on fixera à quel moment il conviendra
1450 de toute notre Assemblée ou de la majeure partie de celle-ci, on fixera à quel moment il conviendra d’attaquer l’ennemi,
1451 e celle-ci, on fixera à quel moment il conviendra d’ attaquer l’ennemi, avec quelles forces de terre et de mer il faudra fa
1452 nviendra d’attaquer l’ennemi, avec quelles forces de terre et de mer il faudra faire la guerre, quels chefs militaires, qu
1453 ttaquer l’ennemi, avec quelles forces de terre et de mer il faudra faire la guerre, quels chefs militaires, quelles machin
1454 efs militaires, quelles machines et quel matériel de guerre il sera nécessaire d’employer, à quel endroit toutes les armée
1455 nes et quel matériel de guerre il sera nécessaire d’ employer, à quel endroit toutes les armées de terre devront se réunir
1456 aire d’employer, à quel endroit toutes les armées de terre devront se réunir pour poursuivre leur marche contre les Turcs.
1457 voici comment le traité prévoit le fonctionnement de l’Assemblée fédérale, pièce maîtresse de la construction : Item, af
1458 onnement de l’Assemblée fédérale, pièce maîtresse de la construction : Item, afin que ce qui est écrit ci-dessus et ci-d
1459 l est dû, nous promettons et prenons l’engagement de la manière susdite que chacun de nous assemblera ses ambassadeurs, ge
1460 ons l’engagement de la manière susdite que chacun de nous assemblera ses ambassadeurs, gens notables et jouissant d’une gr
1461 lera ses ambassadeurs, gens notables et jouissant d’ une grande autorité, munis des plus larges pouvoirs et de son sceau, l
1462 rande autorité, munis des plus larges pouvoirs et de son sceau, le dimanche Reminiscere de l’année 1464 après la nativité
1463 pouvoirs et de son sceau, le dimanche Reminiscere de l’année 1464 après la nativité du Seigneur70, dans la cité de Bâle en
1464 464 après la nativité du Seigneur70, dans la cité de Bâle en Allemagne, afin qu’ils y demeurent tous pendant les cinq ans
1465 corps, communauté ou Collège ; que, ces cinq ans de l’Assemblée de Bâle une fois écoulés, cette même Assemblée se réunira
1466 cinq ans immédiatement suivants dans une ville X de France, et, au cours de la troisième période de cinq ans, dans une ci
1467 X de France, et, au cours de la troisième période de cinq ans, dans une cité X d’Italie, de sorte qu’en faisant toujours p
1468 la troisième période de cinq ans, dans une cité X d’ Italie, de sorte qu’en faisant toujours par la suite une rotation de c
1469 qu’en faisant toujours par la suite une rotation de cinq en cinq ans jusqu’à ce que l’Assemblée elle-même ou la majorité
1470 squ’à ce que l’Assemblée elle-même ou la majorité de celle-ci juge devoir en ordonner et disposer autrement, l’Assemblée e
1471 re et la tête, et que nous autres rois et princes de la chrétienté en soyons les membres ; que ledit Collège ait aussi sur
1472 empire, selon que ladite Assemblée ou la majorité de celle-ci l’aura arrêté et décidé ; qu’enfin il ait ses propres armes,
1473 oment, on mettra à la tête des principaux offices de l’Assemblée des hommes qui soient issus et originaires de cette même
1474 emblée des hommes qui soient issus et originaires de cette même nation, et en connaissent et comprennent les coutumes et l
1475 s, roi de France, avec les autres rois et princes de la Gaule, ayons une voix dans l’Assemblée elle-même, nous, rois et pr
1476 dans l’Assemblée elle-même, nous, rois et princes de Germanie, une autre, et nous, doge de Venise, avec les princes et com
1477 et princes de Germanie, une autre, et nous, doge de Venise, avec les princes et communes d’Italie, une troisième ; mais q
1478 ous, doge de Venise, avec les princes et communes d’ Italie, une troisième ; mais que si le roi de Castille ou d’autres roi
1479 si le roi de Castille ou d’autres rois et princes d’ Espagne se joignaient à notre union, amitié et fraternité, ils aient e
1480 is si, entre les ambassadeurs des rois et princes d’ une seule et même nation, des votes contraires sont donnés et émis sur
1481 res clauses du traité fut la raison bien évidente de l’échec final du projet : par une ruse cousue de fil blanc, les princ
1482 de l’échec final du projet : par une ruse cousue de fil blanc, les princes décident de s’adresser au pape pour le charger
1483 ne ruse cousue de fil blanc, les princes décident de s’adresser au pape pour le charger de veiller à ce que les dîmes, per
1484 es décident de s’adresser au pape pour le charger de veiller à ce que les dîmes, perçues par l’Église, soient désormais ve
1485 ésormais versées à l’Assemblée, nouveau défenseur de la Foi ! Poliment écarté par Louis XI, expressément condamné par le p
1486 XI, expressément condamné par le pape, le projet de Podiebrad n’eut aucune suite. Æneas Silvius Piccolomini (1405-1464
1487 Pierre Dubois, ni Podiebrad, ne font usage du nom d’ Europe ou de l’adjectif européen, dans leurs plans qui cependant ne co
1488 s, ni Podiebrad, ne font usage du nom d’Europe ou de l’adjectif européen, dans leurs plans qui cependant ne concernent que
1489 e concernent que l’Europe, en tant que chrétienté de fait. Chose curieuse, c’est un pape, à l’aube de la Renaissance, qui
1490 de fait. Chose curieuse, c’est un pape, à l’aube de la Renaissance, qui sera le premier à désigner de nouveau par son nom
1491 dont il ne sait que trop que les premiers efforts d’ unité se sont dessinés jusqu’alors contre le Saint-Siège, précisément,
1492 us Piccolomini, l’un des plus glorieux humanistes de son temps71, fut élevé au pontificat sous le nom de Pie II en 1458, l
1493 son temps71, fut élevé au pontificat sous le nom de Pie II en 1458, l’année même, notons-le, où Georges Podiebrad était é
1494 otre patrie, notre maison », car tout y participe d’ un même destin menacé : Maintenant, c’est en Europe même, c’est-à-dir
1495 que nous sommes attaqués et tués.72 Vers la fin de sa vie, il avait entrepris la rédaction d’une Cosmographie générale,
1496 la fin de sa vie, il avait entrepris la rédaction d’ une Cosmographie générale, dont seuls les chapitres sur « Asie » et « 
1497 t géographique. Il est malheureusement impossible d’ en citer des extraits significatifs, car l’œuvre se divise en chapitre
1498 3, et quand il devint pape, sa première tâche fut de défendre la chrétienté par la force de la persuasion et par la force
1499 tâche fut de défendre la chrétienté par la force de la persuasion et par la force des armes. Pour Pie II, la chrétienté e
1500 se Lettre à Mahomet II, il énumère les ressources de la chrétienté comme étant les ressources de l’Europe, et nie l’existe
1501 urces de la chrétienté comme étant les ressources de l’Europe, et nie l’existence de véritables chrétiens en dehors de l’E
1502 nt les ressources de l’Europe, et nie l’existence de véritables chrétiens en dehors de l’Europe. Nous ne pouvons croire q
1503 Nous ne pouvons croire que tu sois assez ignorant de ce qui nous concerne pour ne pas voir quelle est la puissance du peup
1504 aux chrétiens non européens, que Mahomet se vante de dominer, Pie II a tôt fait de les exclure en tant que faux chrétiens 
1505 ue Mahomet se vante de dominer, Pie II a tôt fait de les exclure en tant que faux chrétiens : Ils sont tous imbus d’erreu
1506 en tant que faux chrétiens : Ils sont tous imbus d’ erreur, quoiqu’ils rendent un culte au Christ — Arméniens, Jacobites,
1507 s, Maronites et le reste. Les Grecs se séparèrent de l’unité de l’Église romaine lorsque tu envahis Constantinople. Ils n’
1508 s et le reste. Les Grecs se séparèrent de l’unité de l’Église romaine lorsque tu envahis Constantinople. Ils n’ont jamais
1509 sance des chrétiens, dit le pape, s’il approchait de l’intérieur de la chrétienté, c’est-à-dire de l’intérieur de l’Europe
1510 iens, dit le pape, s’il approchait de l’intérieur de la chrétienté, c’est-à-dire de l’intérieur de l’Europe. Tandis que si
1511 ait de l’intérieur de la chrétienté, c’est-à-dire de l’intérieur de l’Europe. Tandis que si Mahomet accepte la conversion
1512 eur de la chrétienté, c’est-à-dire de l’intérieur de l’Europe. Tandis que si Mahomet accepte la conversion (comme un autre
1513 utre Constantin), le pape lui promet l’admiration de toute la Grèce, de toute l’Italie, de toute l’Europe. Quant à la croi
1514 e pape lui promet l’admiration de toute la Grèce, de toute l’Italie, de toute l’Europe. Quant à la croisade que Pie II ess
1515 ’admiration de toute la Grèce, de toute l’Italie, de toute l’Europe. Quant à la croisade que Pie II essaya de promouvoir à
1516 e l’Europe. Quant à la croisade que Pie II essaya de promouvoir à Mantoue, c’était, selon ses propres termes, pour chasser
1517 selon ses propres termes, pour chasser l’infidèle d’ Europe. Lorsque, à la fin de sa vie, il prie pour le succès des croisé
1518 ur chasser l’infidèle d’Europe. Lorsque, à la fin de sa vie, il prie pour le succès des croisés, il dit : Donne-nous la vi
1519 ope. Relevons la triade significative des termes de Grèce, d’Italie et de chrétienté pour désigner « toute l’Europe » : p
1520 vons la triade significative des termes de Grèce, d’ Italie et de chrétienté pour désigner « toute l’Europe » : première es
1521 de significative des termes de Grèce, d’Italie et de chrétienté pour désigner « toute l’Europe » : première esquisse de ce
1522 r désigner « toute l’Europe » : première esquisse de cette définition de notre culture par ses trois sources principales,
1523 ’Europe » : première esquisse de cette définition de notre culture par ses trois sources principales, Athènes, Rome et Jér
1524 is les chefs des nouveaux États divisant le corps de l’Europe restèrent sourds aux appels du Pontife, comme à ceux de son
1525 tèrent sourds aux appels du Pontife, comme à ceux de son rival le roi de Bohême. Il eut beau joindre à ses prières l’annon
1526 prières l’annonce, qu’il croyait décisive, du don de sa personne sacrée, en promettant de se mettre lui-même à la tête d’u
1527 sive, du don de sa personne sacrée, en promettant de se mettre lui-même à la tête d’une nouvelle croisade : Qui pourrait r
1528 ée, en promettant de se mettre lui-même à la tête d’ une nouvelle croisade : Qui pourrait refuser son concours quand l’évêq
1529 Qui pourrait refuser son concours quand l’évêque de Rome est fret à exposer sa propre vie ? Rien n’y fit. À Ancône, où il
1530 en 1464 — l’année même où Podiebrad avait proposé de réunir à Bâle la première Assemblée fédérale ! — il ne trouva qu’une
1531 Assemblée fédérale ! — il ne trouva qu’une cohue d’ aventuriers sans armes ni chefs. Il mourut quelques semaines plus tard
1532 mourut quelques semaines plus tard, sous le coup de cette déception. Ne devait-il pas, cependant, l’avoir prévue, lui qui
1533 avant de devenir pape : La chrétienté n’a point de chef auquel tous veuillent obéir. Ni au Souverain Pontife ni à l’empe
1534 ni à l’empereur on ne rend leur dû. Il n’est plus de respect ni d’obéissance. Nous regardons le pape et l’empereur comme d
1535 r on ne rend leur dû. Il n’est plus de respect ni d’ obéissance. Nous regardons le pape et l’empereur comme des noms, des f
1536 prince.74 55. Lorsque Dante se fait l’avocat d’ un Empire qui réaliserait l’ordinatio ad unum, il n’envisage pas un in
1537 , dans son introduction à la traduction française de la Monarchie, Felix Alcan, Paris, 1933, qu’on va citer. 57. De Mona
1538 , Felix Alcan, Paris, 1933, qu’on va citer. 57. De Monarchia, I, 4. 58. Ibid., I, 5. 59. Ibid., I, 10. 60. Op. cit
1539 . cit., I, 14. 61. Ibid., I, 16. 62. Il s’agit de la tour de Babel. 63. E. Renan, Histoire littéraire de la France, T
1540 14. 61. Ibid., I, 16. 62. Il s’agit de la tour de Babel. 63. E. Renan, Histoire littéraire de la France, Tome XXVI, F
1541 our de Babel. 63. E. Renan, Histoire littéraire de la France, Tome XXVI, Firmin-Didot, Paris, 1873. 64. Siger de Braban
1542 ar l’Église en tant que propagateur des doctrines d’ Averroès, fut aussi l’un des maîtres de Dante. 65. Il s’agit de l’ouv
1543 t aussi l’un des maîtres de Dante. 65. Il s’agit de l’ouvrage qu’on va citer : De recuperatione Terra Sancte. La première
1544 nte. 65. Il s’agit de l’ouvrage qu’on va citer : De recuperatione Terra Sancte. La première partie du traité est adressée
1545 dressée en forme de circulaire à tous les princes de la chrétienté, Édouard d’abord ; tandis qu’une lettre à Philippe le B
1546 orme la conclusion. 66. Chr. L. Lange : Histoire de l’internationalisme, Christiania, 1919. Tome I, chap. IV : Les précur
1547 stiania, 1919. Tome I, chap. IV : Les précurseurs de l’internationalisme moderne. Le tome II (de 1648 à 1815) terminé par
1548 seurs de l’internationalisme moderne. Le tome II ( de 1648 à 1815) terminé par Auguste Schou, a paru en 1954. 67. Chr. L.
1549 tyle nouveau). 71. On connaît la fresque fameuse de Benozzo Gozzoli (Le départ des trois Mages) où l’on peut le voir chev
1550 où l’on peut le voir chevauchant vers le concile de Bâle, dans un paysage hautement civilisé ; et le tableau de Pinturicc
1551 ans un paysage hautement civilisé ; et le tableau de Pinturicchio qui le montre recevant la couronne des poètes des mains
1552 montre recevant la couronne des poètes des mains de Frédéric III, dernier empereur du Saint-Empire qui ait été couronné à
1553 ait été couronné à Rome. Grands symboles ! 72. De Constantinopolitana clade ac bello contra Turcos congregando. Texte l
1554 a, percussi cæsique sumus. » Ce « id est » mérite d’ être souligné. 73. Denis Hay : « Sur un problème de terminologie hist
1555 être souligné. 73. Denis Hay : « Sur un problème de terminologie historique : « Europe » et « chrétienté » », Diogène, n°
5 1961, Vingt-huit siècles d’Europe. Deuxième partie. Prises de conscience européennes. De Pierre Dubois à l’abbé de Saint-Pierre, (xive au xixe siècle) — 3. Le problème de la guerre et l’essor des États (xvie siècle)
1556 3.Le problème de la guerre et l’essor des États (xvie siècle) Trois événements maje
1557 es débuts du colonialisme, la Réforme, et l’échec de la grandiose tentative impériale de Charles-Quint. Leurs répercussion
1558 e, et l’échec de la grandiose tentative impériale de Charles-Quint. Leurs répercussions sur « l’image de l’Europe » ont ét
1559 Charles-Quint. Leurs répercussions sur « l’image de l’Europe » ont été diverses et contradictoires. Les grandes découvert
1560 înent pas encore une prise de conscience nouvelle de la singularité de l’Europe dans le monde (il faut attendre le xviiie
1561 ne prise de conscience nouvelle de la singularité de l’Europe dans le monde (il faut attendre le xviiie siècle pour la vo
1562 er) ni, à plus forte raison, une mise en question de l’excellence de notre civilisation, qu’elles paraissent au contraire
1563 orte raison, une mise en question de l’excellence de notre civilisation, qu’elles paraissent au contraire confirmer. Elles
1564 nt au contraire confirmer. Elles inaugurent l’ère d’ un aventureux impérialisme économique au moment où sombre l’idée du Sa
1565 continental. Elles déplacent les foyers créateurs de notre civilisation vers les rivages atlantiques. Elles créent les bas
1566 ntiques. Elles créent les bases du capitalisme et de la primauté de l’État. Mais ces transformations ne sont guère enregis
1567 créent les bases du capitalisme et de la primauté de l’État. Mais ces transformations ne sont guère enregistrées que par l
1568 ue par les « Utopies » relatives au Nouveau Monde de Thomas More et de Campanella. Pour les meilleurs esprits du temps, l’
1569 es » relatives au Nouveau Monde de Thomas More et de Campanella. Pour les meilleurs esprits du temps, l’Europe ne pose pas
1570 meilleurs esprits du temps, l’Europe ne pose pas de problème : elle va de soi, comme l’air que l’on respire. Ils la conna
1571 rement, ils y entretiennent un commerce continuel d’ idées, de colloques, de correspondances érudites, de polémiques nobles
1572 ls y entretiennent un commerce continuel d’idées, de colloques, de correspondances érudites, de polémiques nobles ou virul
1573 nent un commerce continuel d’idées, de colloques, de correspondances érudites, de polémiques nobles ou virulentes. « L’Eur
1574 idées, de colloques, de correspondances érudites, de polémiques nobles ou virulentes. « L’Europe en un seul corps », comme
1575 xtérieur : eux seuls, parfois, réveillent le sens d’ une certaine union nécessaire, mais celle-ci n’est imaginée que sous l
1576 e, mais celle-ci n’est imaginée que sous la forme d’ une coalition des Souverains. La crise profonde de la Réforme n’est pa
1577 d’une coalition des Souverains. La crise profonde de la Réforme n’est pas ressentie comme divisant l’Europe, mais seulemen
1578 gements modernes, sur ce point, sont donc frappés d’ anachronisme.) Si l’on s’en tient aux témoignages du temps, on voit qu
1579 s du temps, on voit qu’en fait, jamais le concept d’ Europe n’est invoqué par l’une ou l’autre des parties en présence, en
1580 eur de sa thèse 76. Calvin, Luther et Loyola sont de très grandes figures européennes, mais aucun n’a jamais parlé de l’Eu
1581 figures européennes, mais aucun n’a jamais parlé de l’Europe comme telle, encore moins de son unité. Dans le domaine poli
1582 amais parlé de l’Europe comme telle, encore moins de son unité. Dans le domaine politique, au contraire, la conscience d’u
1583 le domaine politique, au contraire, la conscience d’ une Europe rassemblée sous la couronne du Saint-Empire paraît plus prè
1584 ronne du Saint-Empire paraît plus près que jamais de se traduire en une grandiose réalité. Charles-Quint, à son avènement,
1585 aître des Allemagnes, des Espagnes, des Pays-Bas, de Naples et de Milan, et d’une partie de la France actuelle, c’est-à-di
1586 emagnes, des Espagnes, des Pays-Bas, de Naples et de Milan, et d’une partie de la France actuelle, c’est-à-dire des trois
1587 Espagnes, des Pays-Bas, de Naples et de Milan, et d’ une partie de la France actuelle, c’est-à-dire des trois quarts de l’E
1588 Pays-Bas, de Naples et de Milan, et d’une partie de la France actuelle, c’est-à-dire des trois quarts de l’Europe contine
1589 la France actuelle, c’est-à-dire des trois quarts de l’Europe continentale, tandis que les conquistadores vont lui apporte
1590 e les conquistadores vont lui apporter les titres de souverain des Indes et de la Terre ferme de la mer Océane, et de domi
1591 lui apporter les titres de souverain des Indes et de la Terre ferme de la mer Océane, et de dominateur de l’Afrique et de
1592 itres de souverain des Indes et de la Terre ferme de la mer Océane, et de dominateur de l’Afrique et de l’Asie. Et pourtan
1593 s Indes et de la Terre ferme de la mer Océane, et de dominateur de l’Afrique et de l’Asie. Et pourtant à sa mort, en 1558,
1594 la Terre ferme de la mer Océane, et de dominateur de l’Afrique et de l’Asie. Et pourtant à sa mort, en 1558, que reste-t-i
1595 e la mer Océane, et de dominateur de l’Afrique et de l’Asie. Et pourtant à sa mort, en 1558, que reste-t-il de ce grand rê
1596 e. Et pourtant à sa mort, en 1558, que reste-t-il de ce grand rêve d’une monarchie universelle dont le foyer eût été l’Eur
1597 sa mort, en 1558, que reste-t-il de ce grand rêve d’ une monarchie universelle dont le foyer eût été l’Europe unie ? Tout s
1598 Tout s’est défait, dénaturé et disloqué. L’unité de l’Église est brisée pour des siècles, la France s’est alliée aux Turc
1599 la France s’est alliée aux Turcs contre le reste de l’Europe, l’Espagne a perdu la plupart de ses anciennes libertés comm
1600 nies commerciales, des armateurs et des banquiers de toute l’Europe, fait place à une exploitation stérilisante sous le mo
1601 ’idéal impérial, idée platonicienne qui n’a cessé de fasciner les ambitions des grands monarques, de Charlemagne à Charles
1602 é de fasciner les ambitions des grands monarques, de Charlemagne à Charles-Quint en passant par Othon III et Frédéric II,
1603 aineté absolue posent au premier plan le problème de la guerre et du droit de guerre ; tandis que l’expansion du commerce
1604 premier plan le problème de la guerre et du droit de guerre ; tandis que l’expansion du commerce vers d’autres continents
1605 ommerce vers d’autres continents pose le problème d’ un droit international qui sera fondé au début du xviie siècle par Hu
1606 tius, à partir du droit maritime ; et le problème d’ un droit des gens (jus gentium), à partir du drame des colonies : Fran
1607 tique immédiate, n’est simplement pas mentionnée. De Francisco de Vitoria (1580-1546), dominicain, professeur à Salamanque
1608 avec Suárez, du droit des gens, célèbre auteur du De Indis, citons deux pages sur la guerre : Nulle guerre n’est légitime
1609 tage, une province chrétienne n’est qu’une partie de toute la République, j’estime que même si une guerre est utile à une
1610 ue d’autre part elle est au détriment du monde ou de la chrétienté, alors la guerre est par cela même injuste. Si par exem
1611 par cela même injuste. Si par exemple une guerre de l’Espagne contre la France était entreprise par des motifs justes, et
1612 ’elle fût sous d’autres rapports utile au royaume d’ Espagne, mais que, toutefois, elle fût menée avec un préjudice plus gr
1613 menée avec un préjudice plus grand et aux risques de la chrétienté (si par exemple les Turcs occupent, sur ces entrefaits,
1614 inces des chrétiens) alors il faudrait s’abstenir de telle guerre.77 On ne peut s’empêcher de penser que Montesquieu, da
1615 stenir de telle guerre.77 On ne peut s’empêcher de penser que Montesquieu, dans sa célèbre déclaration qui se termine pa
1616 paraphrasé Vitoria. Dans une lettre au connétable de Castille, Vitoria revient sur l’idée que les guerres ne pourraient êt
1617 demanderai pas à Dieu grâce plus grande que celle de faire de ces deux princes (Charles V et François Ier) des frères dans
1618 i pas à Dieu grâce plus grande que celle de faire de ces deux princes (Charles V et François Ier) des frères dans leur vol
1619 e sont en parenté ; car alors, il n’y aurait plus d’ hérétiques dans l’Église ni plus de Maures qui la tourmentent, et l’Ég
1620 ’y aurait plus d’hérétiques dans l’Église ni plus de Maures qui la tourmentent, et l’Église serait réformée, que le pape l
1621 dans la personne du roi de France et moins encore de l’empereur. Que Dieu pardonne aux princes ou à leurs opposants ; mais
1622 t les choses étant ainsi, veuillez voir, ô hommes de bien, si nos guerres sont au profit de l’Espagne, ou de la France, ou
1623 , ô hommes de bien, si nos guerres sont au profit de l’Espagne, ou de la France, ou de l’Italie ou de l’Allemagne, ou plut
1624 n, si nos guerres sont au profit de l’Espagne, ou de la France, ou de l’Italie ou de l’Allemagne, ou plutôt pour la destru
1625 sont au profit de l’Espagne, ou de la France, ou de l’Italie ou de l’Allemagne, ou plutôt pour la destruction de tous ces
1626 de l’Espagne, ou de la France, ou de l’Italie ou de l’Allemagne, ou plutôt pour la destruction de tous ces pays.79 Curi
1627 ou de l’Allemagne, ou plutôt pour la destruction de tous ces pays.79 Curieusement, les grands pacifistes du xvie siècl
1628 voir cherché dans un droit supranational le moyen de combattre la cause principale des guerres : l’arrogante et anarchique
1629 nte et Pierre Dubois, qui avaient vu la nécessité d’ instaurer un pouvoir supérieur à celui des souverains nationaux, ils s
1630 celui des souverains nationaux, ils se contentent de vitupérer la guerre et de ridiculiser ses prétextes (voir plus loin É
1631 naux, ils se contentent de vitupérer la guerre et de ridiculiser ses prétextes (voir plus loin Érasme) au nom de la morale
1632 us loin Érasme) au nom de la morale chrétienne et de la raison. Quant aux juristes, en régression sur la coutume du Moyen
1633 t à peine s’ils mentionnent encore la possibilité de l’arbitrage. Et quant aux penseurs politiques, loin de songer à conte
1634 ), dans sa Méthode pour faciliter la connaissance de l’histoire, publiée en 1566 à Paris, le genre humain forme une unité.
1635 s les royaumes, empires, tyrannies ou républiques de la terre sont réunis par un lien qui n’est pas autre chose que l’auto
1636 un lien qui n’est pas autre chose que l’autorité de la raison ou du droit des gens. D’où il résulte que ce monde est comm
1637 que l’autorité de la raison ou du droit des gens. D’ où il résulte que ce monde est comme une grande cité et tous les homme
1638 ’ils sont tous de même sang et sous la protection d’ une même raison. Mais parce que cet empire de la raison est dépourvu d
1639 tion d’une même raison. Mais parce que cet empire de la raison est dépourvu de contrainte, on ne saurait réunir en une seu
1640 is parce que cet empire de la raison est dépourvu de contrainte, on ne saurait réunir en une seule république toutes les n
1641 s à la seule réalité sérieuse, celle des États et de leurs luttes fratricides sans « raison », sans fin, sans merci. En ef
1642 même Jean Bodin dans sa République : La grandeur d’ un prince, à en bien parler, n’est autre chose que la ruine, ou diminu
1643 er, n’est autre chose que la ruine, ou diminution de ses voisins : et sa force n’est rien que la faiblesse d’autrui. L’ég
1644 voisins : et sa force n’est rien que la faiblesse d’ autrui. L’égoïsme sacré serait donc le dernier mot de la sagesse poli
1645 trui. L’égoïsme sacré serait donc le dernier mot de la sagesse politique ? Il en est bien ainsi, dès qu’on admet le princ
1646 Il en est bien ainsi, dès qu’on admet le principe de la souveraineté sans limites que s’arrogent un prince ou une républiq
1647 n prince ou une république. En regard de ce texte d’ un ton machiavélien, citons cependant une page célèbre de Francisco Su
1648 n machiavélien, citons cependant une page célèbre de Francisco Suárez (1548-1617). Le grand jésuite espagnol ne se content
1649 17). Le grand jésuite espagnol ne se contente pas d’ exalter la communauté du genre humain, mais suggère et implique l’idée
1650 du genre humain, mais suggère et implique l’idée d’ un droit des gens, imposant sa réelle autorité à la prétendue potestas
1651 Cette unité est indiquée par le précepte naturel de l’amour mutuel et de la miséricorde, précepte qui s’étend à tous, mêm
1652 quée par le précepte naturel de l’amour mutuel et de la miséricorde, précepte qui s’étend à tous, même aux étrangers, de q
1653 précepte qui s’étend à tous, même aux étrangers, de quelque condition qu’ils soient. C’est pourquoi tout État souverain,
1654 i et fermement assis, est néanmoins en même temps d’ une certaine manière membre de cet univers, en tant qu’il regarde le g
1655 moins en même temps d’une certaine manière membre de cet univers, en tant qu’il regarde le genre humain. Jamais aucun État
1656 in. Jamais aucun État ne peut se suffire au point de n’avoir besoin d’aucun appui, d’association et de rapports mutuels, t
1657 tat ne peut se suffire au point de n’avoir besoin d’ aucun appui, d’association et de rapports mutuels, tantôt pour son bie
1658 suffire au point de n’avoir besoin d’aucun appui, d’ association et de rapports mutuels, tantôt pour son bien-être et pour
1659 de n’avoir besoin d’aucun appui, d’association et de rapports mutuels, tantôt pour son bien-être et pour une fin d’utilité
1660 utuels, tantôt pour son bien-être et pour une fin d’ utilité, tantôt à cause d’une nécessité et d’un besoin moral, comme il
1661 en-être et pour une fin d’utilité, tantôt à cause d’ une nécessité et d’un besoin moral, comme il ressort de l’expérience m
1662 fin d’utilité, tantôt à cause d’une nécessité et d’ un besoin moral, comme il ressort de l’expérience même. Il faut donc a
1663 nécessité et d’un besoin moral, comme il ressort de l’expérience même. Il faut donc aux États un droit qui les dirige et
1664 oit qui les dirige et les gouverne, dans ce genre de communauté et de société. Sans doute à ce point de vue la raison natu
1665 e et les gouverne, dans ce genre de communauté et de société. Sans doute à ce point de vue la raison naturelle fait beauco
1666 s n’avons donc trouvé que peu de pages témoignant d’ une conscience européenne comme telle. Deux textes cependant méritent
1667 éenne comme telle. Deux textes cependant méritent d’ être cités. Ils montrent à quel point la vision des penseurs de ce tem
1668 Ils montrent à quel point la vision des penseurs de ce temps est naturellement européenne, en ce sens qu’elle ne cesse de
1669 rellement européenne, en ce sens qu’elle ne cesse de comparer entre elles nos diverses nations comme parties d’un tout imp
1670 er entre elles nos diverses nations comme parties d’ un tout implicite. Mais ils montrent aussi combien, à cette époque, la
1671 chez les autres, loin de conduire à la conscience d’ une politique positive, visant à juguler l’anarchie des États. Voici d
1672 ie des États. Voici d’abord des pages peu connues de Machiavel (1469-1527), tirées de son Art de la guerre 82. Il y dévelo
1673 ages peu connues de Machiavel (1469-1527), tirées de son Art de la guerre 82. Il y développe une thèse que l’on a vue plus
1674 nnues de Machiavel (1469-1527), tirées de son Art de la guerre 82. Il y développe une thèse que l’on a vue plus haut esqui
1675 pe : Vous savez que l’Europe célèbre la renommée d’ innombrables grands hommes qui se sont illustrés à la guerre. L’Afriqu
1676 et l’Asie encore moins. Cette différence résulte de ce que, dans ces deux dernières parties du monde, il n’y eut qu’une o
1677 urage, que lorsque l’État les emploie ou les tire de leur obscurité, qu’ils vivent dans une monarchie ou dans une républiq
1678 narchie ou dans une république. Ainsi plus il y a d’ États, plus il y a de grands hommes. Ils sont plus rares à mesure que
1679 épublique. Ainsi plus il y a d’États, plus il y a de grands hommes. Ils sont plus rares à mesure que le nombre des États d
1680 e ; on ne peut guère trouver d’autres noms dignes de leur être comparés. Et sans parler de l’ancienne Égypte, l’Afrique no
1681 noms dignes de leur être comparés. Et sans parler de l’ancienne Égypte, l’Afrique nomme ses Massinissa, ses Jugurtha, et l
1682 ses Jugurtha, et les capitaines que la république de Carthage a élevés dans son sein. Cependant ces guerriers illustres so
1683 res sont bien peu nombreux en comparaison de ceux de l’Europe : c’est en Europe en effet que l’on voit briller sans nombre
1684 cé le nom ; car l’époque où les vertus ont brillé d’ un plus grand éclat, est celle où il s’est trouvé le plus d’États à le
1685 grand éclat, est celle où il s’est trouvé le plus d’ États à les favoriser, poussés par la nécessité ou par toute autre pas
1686 e passion humaine. Ainsi l’Asie ne compte que peu d’ hommes illustres. Cette immense contrée où dominait pour ainsi dire un
1687 régnait trop souvent, ne pouvait enfanter que peu d’ hommes illustres. Il en est allé de même en Afrique. Cependant cette c
1688 lques grands hommes de plus grâce à la république de Carthage. Car les grands hommes sont plus nombreux dans une républiqu
1689 ouffer. Que si l’on considère toutes les contrées de l’Europe, on constate qu’elles furent remplies d’une foule de républi
1690 de l’Europe, on constate qu’elles furent remplies d’ une foule de républiques et de principautés qui, vivant dans la craint
1691 on constate qu’elles furent remplies d’une foule de républiques et de principautés qui, vivant dans la crainte continuell
1692 les furent remplies d’une foule de républiques et de principautés qui, vivant dans la crainte continuelle les unes des aut
1693 continuelle les unes des autres, ont été obligées de conserver leurs institutions militaires et de combler d’honneurs ceux
1694 ées de conserver leurs institutions militaires et de combler d’honneurs ceux qui se distinguaient dans l’art de la guerre.
1695 erver leurs institutions militaires et de combler d’ honneurs ceux qui se distinguaient dans l’art de la guerre. En effet,
1696 r d’honneurs ceux qui se distinguaient dans l’art de la guerre. En effet, en Grèce, sans compter le royaume de Macédoine,
1697 erre. En effet, en Grèce, sans compter le royaume de Macédoine, il y avait de nombreuses républiques qui toutes ont eu des
1698 sans compter le royaume de Macédoine, il y avait de nombreuses républiques qui toutes ont eu des hommes remarquables. L’I
1699 norent que le vainqueur. Il n’est pas raisonnable de croire que pendant les cent-cinquante années où les Samnites et les T
1700 tes et les Toscans combattirent les Romains avant d’ être vaincus, ils n’aient pas donné le jour à de nombreux hommes illus
1701 t d’être vaincus, ils n’aient pas donné le jour à de nombreux hommes illustres. Il en a été de même dans les Gaules et dan
1702 courage que les historiens n’ont pas célébré chez de simples citoyens, ils l’ont du moins loué chez les peuples dont ils p
1703 re la liberté. Puisqu’il est vrai que plus il y a d’ empires, plus on voit de grands hommes se distinguer, il s’ensuit néce
1704 est vrai que plus il y a d’empires, plus on voit de grands hommes se distinguer, il s’ensuit nécessairement qu’empêcher l
1705 ’est étouffer peu à peu la vertu que l’on empêche de se manifester dans les actions de ceux qu’elle inspire. Ainsi, lorsqu
1706 ue l’on empêche de se manifester dans les actions de ceux qu’elle inspire. Ainsi, lorsque l’Empire romain au faîte de sa g
1707 inspire. Ainsi, lorsque l’Empire romain au faîte de sa grandeur eut vaincu toutes les républiques et toutes les monarchie
1708 u toutes les républiques et toutes les monarchies de l’Europe, de l’Afrique, et la plupart de celles de l’Asie, Rome resta
1709 républiques et toutes les monarchies de l’Europe, de l’Afrique, et la plupart de celles de l’Asie, Rome resta la seule car
1710 e l’Europe, de l’Afrique, et la plupart de celles de l’Asie, Rome resta la seule carrière ouverte au courage. Et les grand
1711 qu’en Asie. La vertu tomba alors au dernier degré de l’abaissement. Car limitée comme elle l’était pour ainsi dire à Rome
1712 des Scythes vinrent et se partagèrent l’empire en de nombreux États, mais la vertu n’a pu y renaître : d’abord, parce qu’i
1713 u y renaître : d’abord, parce qu’il est difficile de faire revivre des institutions entièrement viciées, et, ensuite parce
1714 e sont telles que l’homme n’a plus le même besoin de se défendre qu’autrefois. On tuait alors les vaincus ou on les livrai
1715 it les habitants ; et, après les avoir dépouillés de leurs biens on les dispersait dans tout l’univers. Les vaincus suppor
1716 ette terreur toujours renaissante auraient craint de négliger leurs institutions militaires et ils honoraient donc tous ce
1717 raindre qu’on les détruise. On conserve les biens de leurs habitants et le plus grand malheur qu’elles aient à redouter, c
1718 us grand malheur qu’elles aient à redouter, c’est de payer des contributions. Les hommes répugnent à se soumettre aux obli
1719 Par comparaison d’ailleurs, les diverses contrées de l’Europe ont bien peu de chefs aujourd’hui. En effet, la France entiè
1720 L’Espagne également. L’Italie est divisée en peu d’ États ; de sorte que les villes faibles se défendent en s’attachant au
1721 our ses saints, et ne la mettait que par la grâce d’ eux seuls au-dessus des nations du Proche-Orient ! (Car c’est au Proch
1722 e compte, la raison et la liberté, voici l’auteur de l’Éloge de la Folie et du traité Dulce bellum inexpertis (« La guerre
1723 a raison et la liberté, voici l’auteur de l’Éloge de la Folie et du traité Dulce bellum inexpertis (« La guerre est douce
1724 n’est pas lui qui nommerait « excellent » l’homme d’ armes, qu’il tient plutôt pour une apparition monstrueuse et qui répug
1725 guerrier furieux… Je t’ai imaginé comme un animal d’ un certain caractère divin.83 » Érasme est le type même de ces grands
1726 tain caractère divin.83 » Érasme est le type même de ces grands hommes du xvie siècle qui ne parlent pas de l’Europe parc
1727 grands hommes du xvie siècle qui ne parlent pas de l’Europe parce qu’en somme ils ne voient rien qu’elle. Ce Hollandais
1728 n somme ils ne voient rien qu’elle. Ce Hollandais de naissance a vécu à Bruxelles, à Paris, en Angleterre et en Suisse, et
1729 il a visité l’Italie et l’Allemagne. On a pu dire de lui que « s’il avait une patrie, c’était l’Europe » (Lange). Par tout
1730 oute sa vie et ses travaux, par toutes les fibres de son être, il a bien mérité le titre de « premier Européen », sinon pa
1731 les fibres de son être, il a bien mérité le titre de « premier Européen », sinon par l’intention, du moins par le fait. De
1732 n », sinon par l’intention, du moins par le fait. De sa Querela pacis 84, voici quelques pages qui résument ses idées sur
1733 ur le nationalisme naissant : XXXIV. — On rougit de rappeler pour quels motifs honteux ou frivoles les princes chrétiens
1734 prend pour prétexte un point omis dans un traité de cent chapitres. Celui-ci a un ressentiment contre celui-là au sujet d
1735 lui-ci a un ressentiment contre celui-là au sujet d’ une fiancée refusée ou enlevée ou de quelque raillerie un peu trop lib
1736 i-là au sujet d’une fiancée refusée ou enlevée ou de quelque raillerie un peu trop libre ; et, le comble de l’infamie, c’e
1737 elque raillerie un peu trop libre ; et, le comble de l’infamie, c’est qu’il y a des princes qui, sentant leur autorité fai
1738 nces qui, sentant leur autorité faiblir par suite d’ une paix trop longue et de l’union de leurs sujets, s’entendent en sec
1739 orité faiblir par suite d’une paix trop longue et de l’union de leurs sujets, s’entendent en secret, de façon diabolique,
1740 ir par suite d’une paix trop longue et de l’union de leurs sujets, s’entendent en secret, de façon diabolique, avec les au
1741 e l’union de leurs sujets, s’entendent en secret, de façon diabolique, avec les autres princes qui, lorsque le prétexte es
1742 t la guerre, afin de tout diviser par la discorde de ceux qui vivaient étroitement unis et de dépouiller le malheureux peu
1743 discorde de ceux qui vivaient étroitement unis et de dépouiller le malheureux peuple, grâce à cette autorité sans frein qu
1744 e pour opprimer leurs États. Et ceux qui agissent de cette manière sont considérés comme des chrétiens ? Ainsi souillés de
1745 t considérés comme des chrétiens ? Ainsi souillés de sang osent-ils entrer dans les Églises et s’approcher des autels ? Ô
1746 procher des autels ? Ô fléaux des nations, dignes d’ être déportés dans les îles les plus éloignées ! S’ils sont les membre
1747 îles les plus éloignées ! S’ils sont les membres d’ un seul corps chrétien, pourquoi chacun d’eux ne s’estime-t-il pas heu
1748 membres d’un seul corps chrétien, pourquoi chacun d’ eux ne s’estime-t-il pas heureux du bonheur de l’autre ? XXXVI. — Aujo
1749 cun d’eux ne s’estime-t-il pas heureux du bonheur de l’autre ? XXXVI. — Aujourd’hui le voisinage d’un royaume un peu trop
1750 ur de l’autre ? XXXVI. — Aujourd’hui le voisinage d’ un royaume un peu trop florissant est presque un motif légitime de gue
1751 peu trop florissant est presque un motif légitime de guerre. En effet, si nous voulons être justes, quelle autre cause a p
1752 sinon le fait que ce pays est le plus florissant de tous ? Nul ne possède une étendue plus vaste ; nulle part le Sénat n’
1753 l’Académie plus célèbre ; aucun ne jouit de plus de concorde et par cela même de plus de pouvoir. Nulle part les lois ne
1754 ouit de plus de concorde et par cela même de plus de pouvoir. Nulle part les lois ne sont mieux appliquées et, en ce qui c
1755 ou les Espagnols. L’Allemagne, pour ne rien dire de la Bohême, est divisée en une foule de royaumes et on ne voit cependa
1756 rien dire de la Bohême, est divisée en une foule de royaumes et on ne voit cependant chez elle nulle ombre d’autorité. Se
1757 mes et on ne voit cependant chez elle nulle ombre d’ autorité. Seule la France, fleur intacte du royaume du Christ, est son
1758 hasard quelque orage survient, elle sera attaquée de toutes les façons, assaillie par toutes les ruses de ceux qui la boul
1759 toutes les façons, assaillie par toutes les ruses de ceux qui la bouleversent, pour le seul plaisir de se féliciter de l’o
1760 de ceux qui la bouleversent, pour le seul plaisir de se féliciter de l’orage qu’ils auront provoqué. Et après cela, peut-o
1761 ouleversent, pour le seul plaisir de se féliciter de l’orage qu’ils auront provoqué. Et après cela, peut-on dire que ces h
1762 après cela, peut-on dire que ces hommes jouissent de la moindre parcelle de l’esprit chrétien ? LV. — La guerre, qui est l
1763 e que ces hommes jouissent de la moindre parcelle de l’esprit chrétien ? LV. — La guerre, qui est la chose la plus dangere
1764 soit, ne doit être faite qu’avec le consentement de toute la nation. Il faut supprimer les causes de la guerre dès qu’ell
1765 de toute la nation. Il faut supprimer les causes de la guerre dès qu’elles se manifestent… LVII. — Mais, si la guerre, ce
1766 r les Turcs ? Il serait, naturellement préférable de convertir les Turcs au christianisme, par la persuasion, par les bien
1767 a persuasion, par les bienfaits, et par l’exemple d’ une vie pure, plutôt que par les armes : cependant, si la guerre est a
1768 uaient entre eux. Si l’amour réciproque n’est pas de nature à les unir, que du moins ils soient unis contre l’ennemi commu
1769 seule à les diviser à ce point et le titre commun d’ hommes et de chrétiens ne peut pas les unir ! Pourquoi une chose de si
1770 diviser à ce point et le titre commun d’hommes et de chrétiens ne peut pas les unir ! Pourquoi une chose de si peu d’impor
1771 rétiens ne peut pas les unir ! Pourquoi une chose de si peu d’importance agit-elle avec plus de force sur eux que les lien
1772 peut pas les unir ! Pourquoi une chose de si peu d’ importance agit-elle avec plus de force sur eux que les liens de la na
1773 chose de si peu d’importance agit-elle avec plus de force sur eux que les liens de la nature et du Christ ? La distance d
1774 git-elle avec plus de force sur eux que les liens de la nature et du Christ ? La distance d’un pays à l’autre sépare les c
1775 les liens de la nature et du Christ ? La distance d’ un pays à l’autre sépare les corps et non les âmes. Jadis le Rhin sépa
1776 des Français, mais elle ne peut rompre les liens de la société du Christ. L’apôtre Paul s’indigna un jour, en entendant d
1777 uis Paulicien. Il ne permit pas des dénominations de ce genre qui eussent pu blesser le Christ, le conciliateur de toute c
1778 qui eussent pu blesser le Christ, le conciliateur de toute chose. Et nous considérons cette dissemblance de noms communs à
1779 ute chose. Et nous considérons cette dissemblance de noms communs à chaque pays, comme un motif suffisant pour que les nat
1780 pas applaudir à ces sarcasmes contre les « causes de guerre », alléguées par les « princes » ? Mais comment ne pas voir, e
1781 as voir, en même temps, qu’en se faisant l’avocat d’ une cristallisation des frontières et d’une sorte de « nationalisation
1782 l’avocat d’une cristallisation des frontières et d’ une sorte de « nationalisation » des princes, de même qu’en proposant
1783 une cristallisation des frontières et d’une sorte de « nationalisation » des princes, de même qu’en proposant que la guerr
1784 la guerre ne soit faite « qu’avec le consentement de toute la nation », loin de « supprimer les causes de guerre », Érasme
1785 toute la nation », loin de « supprimer les causes de guerre », Érasme fait le jeu de ces forces collectives et régressives
1786 primer les causes de guerre », Érasme fait le jeu de ces forces collectives et régressives dont l’avenir devait révéler qu
1787 r la guerre aux Turcs, il en vient enfin à l’idée d’ un Pouvoir supranational : il ne peut toutefois l’imaginer qu’à l’inst
1788 outefois l’imaginer qu’à l’instar de la Monarchie de Dante, qui lui semble idéale mais utopique ; il faut donc se rabattre
1789 uilibre plus ou moins fédératif des puissances : D’ aucuns sont effrayés par le mot de Monarchie universelle, que certains
1790 s puissances : D’aucuns sont effrayés par le mot de Monarchie universelle, que certains paraissent ambitionner… Certes, l
1791 œurs des hommes étant ce qu’elles sont, les États de grandeur moyenne (moderata imperia) sont les plus sûrs, s’ils sont un
1792 pactes chrétiens. Cependant, à l’autre extrémité de l’Europe, en Scandinavie, une voix de rude bon sens s’élève contre l’
1793 e extrémité de l’Europe, en Scandinavie, une voix de rude bon sens s’élève contre l’exaltation machiavélienne de la virtù
1794 n sens s’élève contre l’exaltation machiavélienne de la virtù guerrière. C’est celle du réformateur de la Suède, Olaus Pet
1795 de la virtù guerrière. C’est celle du réformateur de la Suède, Olaus Petri (1497-1552), qui fut le chancelier du roi Gusta
1796 ncelier du roi Gustav Vasa, et le premier pasteur de Stockholm : Nos chroniques suédoises font grand honneur à nos ancêtr
1797 rangers. Mais si l’on y réfléchit, il y avait peu d’ honneur en tout cela… Loue qui veut les anciens Goths : ceux qui euren
1798 e les louèrent pas, mais les appelèrent une horde de bandits et de tyrans, pour avoir pillé et brûlé campagnes et cités, e
1799 pas, mais les appelèrent une horde de bandits et de tyrans, pour avoir pillé et brûlé campagnes et cités, et privé de leu
1800 avoir pillé et brûlé campagnes et cités, et privé de leurs biens et de leur vie des centaines de milliers d’hommes. Tel fu
1801 lé campagnes et cités, et privé de leurs biens et de leur vie des centaines de milliers d’hommes. Tel fut leur courage tan
1802 privé de leurs biens et de leur vie des centaines de milliers d’hommes. Tel fut leur courage tant vanté, ainsi que les chr
1803 rs biens et de leur vie des centaines de milliers d’ hommes. Tel fut leur courage tant vanté, ainsi que les chroniques le f
1804 us jamais les réparer. Celui qui pense s’acquérir de l’honneur par l’incendie, le meurtre et la guerre devrait pouvoir se
1805 meurtre et la guerre devrait pouvoir se réclamer d’ une juste cause, sinon l’on verra que c’est une grossière brutalité, n
1806 courage, qui l’anime.86 75. Dans son Abrégé de cosmographie, cité par Moreri, et d’après la présentation que Christi
1807 n du siècle que la Réforme a provoqué une rupture de l’« unité des peuples et des princes » dans « une Europe autrefois to
1808 e. 77. Relectiones theologicæ tredecim, édition de Venise, 1626. 78. On trouvera le texte entier de ce passage de Monte
1809 de Venise, 1626. 78. On trouvera le texte entier de ce passage de Montesquieu, p. 132. 79. Au Connétable de Castille, 19
1810 6. 78. On trouvera le texte entier de ce passage de Montesquieu, p. 132. 79. Au Connétable de Castille, 19 novembre 1536
1811 assage de Montesquieu, p. 132. 79. Au Connétable de Castille, 19 novembre 1536. 80. « On y pourrait ajouter (à ces cause
1812 1536. 80. « On y pourrait ajouter (à ces causes de guerre) la religion — écrira Émeric Crucé —, si l’expérience n’eût fa
1813 n’eût fait connaître qu’elle sert le plus souvent de prétexte. » 81. Tractatus de legibus ac de Deo legislatores, II, XI
1814 rt le plus souvent de prétexte. » 81. Tractatus de legibus ac de Deo legislatores, II, XIX, 9, publié à Anvers en 1614,
1815 vent de prétexte. » 81. Tractatus de legibus ac de Deo legislatores, II, XIX, 9, publié à Anvers en 1614, mais composé à
1816 Sur l’idée européenne chez Machiavel, cf. l’essai de C. Curcio in Macchiavelli nel Risorgimento, Milan, 1953. 83. Dulce
1817 15, dédiée au jeune Charles-Quint, dont il venait d’ être nommé conseiller, Érasme écrivait, non sans une profonde ironie :
1818 ns une profonde ironie : Faisons d’abord en sorte d’ être nous-mêmes chrétiens sincères ; puis, si cela est acquis, alors a
1819 cela est acquis, alors attaquons les Turcs. 86. De la chronique suédoise du xvie siècle, d’Olaf Petri.
1820 . 86. De la chronique suédoise du xvie siècle, d’ Olaf Petri.
6 1961, Vingt-huit siècles d’Europe. Deuxième partie. Prises de conscience européennes. De Pierre Dubois à l’abbé de Saint-Pierre, (xive au xixe siècle) — 4. « Têtes de Turcs »
1821 4.« Têtes de Turcs » Nous avons dit, au reste, que le xvie siècle n’apporte rie
1822 dit, au reste, que le xvie siècle n’apporte rien de neuf quant à l’union de l’Europe : il n’y penserait plus sans les Tur
1823 ie siècle n’apporte rien de neuf quant à l’union de l’Europe : il n’y penserait plus sans les Turcs. Ceux-ci ont certes a
1824 nt certes assiégé Vienne en 1552, au grand effroi de la chrétienté. Mais don Juan d’Autriche a battu leur flotte à Lépante
1825 voit-on pas que les guerres intestines font plus de mal à l’Europe que le Turc ? Peut-être, mais on n’ose appeler l’union
1826 n’ose appeler l’union qu’en se réclamant du mythe de la croisade, levier traditionnel, cause bien vue par les princes. Ain
1827 Bruges en 1540, après avoir vécu à Louvain auprès d’ Érasme, puis en Angleterre au service d’Henry VIII) se persuade que po
1828 in auprès d’Érasme, puis en Angleterre au service d’ Henry VIII) se persuade que pour pacifier l’Europe, il suffirait de co
1829 persuade que pour pacifier l’Europe, il suffirait de convaincre quelques princes et leurs conseillers. À cette fin, il écr
1830 fin, il écrit au pape : Ce qu’on attend d’abord de toi, c’est de faire la paix entre les princes… Dis que la guerre entr
1831 au pape : Ce qu’on attend d’abord de toi, c’est de faire la paix entre les princes… Dis que la guerre entre chrétiens es
1832 a absolument, comme une dispute entre les membres d’ un même corps.87 Cette exhortation étant restée sans effets, il reco
1833 vrage le plus connu porte un titre significatif : De Europæ Dissidiis et Bello Turcico Dialogus. Vives y reprend, après Ma
1834 et tant d’autres Renaissants, le vieux thème grec de l’opposition Asie-Europe : Aristote, grand sectateur de la sagesse,
1835 osition Asie-Europe : Aristote, grand sectateur de la sagesse, et avec lui beaucoup d’autres grands hommes qui se sont d
1836 nds hommes qui se sont dédiés à l’étude fatigante de la Nature et des causes des choses, nous ont tous confirmé que la rac
1837 par le courage et la force, mais il en va de même de ses bêtes sauvages. Les lions nés en Europe ont plus de courage que l
1838 bêtes sauvages. Les lions nés en Europe ont plus de courage que les lions puniques ; cela vaut également pour les chiens,
1839 ns, les loups et les autres animaux, quoique ceux de l’Afrique semblent avoir plus de férocité… La discorde de l’Europe, n
1840 ux, quoique ceux de l’Afrique semblent avoir plus de férocité… La discorde de l’Europe, notamment celle qui s’enflamma ent
1841 ique semblent avoir plus de férocité… La discorde de l’Europe, notamment celle qui s’enflamma entre les princes de Constan
1842 notamment celle qui s’enflamma entre les princes de Constantinople, a livré l’Asie aux mains des Turcs ; elle leur a ouve
1843 x mains des Turcs ; elle leur a ouvert les portes de la Thrace. Par la suite, les dissensions entre les rois de l’Europe e
1844 ace. Par la suite, les dissensions entre les rois de l’Europe et les guerres naissant l’une de l’autre comme les têtes de
1845 es rois de l’Europe et les guerres naissant l’une de l’autre comme les têtes de l’hydre ont encouragé les Turcs à s’étendr
1846 guerres naissant l’une de l’autre comme les têtes de l’hydre ont encouragé les Turcs à s’étendre sur l’Europe plus largeme
1847 Parfois l’art arrive à corriger quelques défauts de la Nature, mais il n’en supprime pas la racine ; et quand l’art recul
1848 siatiques. L’adversité révélerait ce qu’une série de succès ininterrompue a caché, et ferait voir en toute clarté que les
1849 en toute clarté que les Turcs ne furent pas forts de leur propre force et courage, mais de vos erreurs. … Les chrétiens po
1850 t pas forts de leur propre force et courage, mais de vos erreurs. … Les chrétiens possèdent encore la part la plus solide
1851 chrétiens possèdent encore la part la plus solide de l’Europe : l’Allemagne. Qu’ils cessent de se combattre, sinon ils son
1852 solide de l’Europe : l’Allemagne. Qu’ils cessent de se combattre, sinon ils sont perdus. Qu’ils fortifient l’Allemagne, o
1853 ravaillent en commun pour que le Turc ne s’empare de l’Allemagne ; sinon il n’y a plus d’espoir que tout l’Occident ne tom
1854 ne s’empare de l’Allemagne ; sinon il n’y a plus d’ espoir que tout l’Occident ne tombe au pouvoir des Turcs, et que ceux
1855 be au pouvoir des Turcs, et que ceux qui refusent de vivre sous ce joug, n’émigrent en grandes flottes vers le Nouveau Mon
1856 là même, ils ne seront pas à l’abri des attaques de ce tyran piqué par le taon de l’avidité et de l’ambition. Quelle redo
1857 l’abri des attaques de ce tyran piqué par le taon de l’avidité et de l’ambition. Quelle redoute pourrions-nous encore lui
1858 ues de ce tyran piqué par le taon de l’avidité et de l’ambition. Quelle redoute pourrions-nous encore lui opposer s’il s’e
1859 pourrions-nous encore lui opposer s’il s’emparait de l’Allemagne ? Tout autre obstacle serait un château de cartes. Il est
1860 Allemagne ? Tout autre obstacle serait un château de cartes. Il est douloureux d’avoir à dire que seule la faiblesse pourr
1861 le serait un château de cartes. Il est douloureux d’ avoir à dire que seule la faiblesse pourrait être opposée au souverain
1862 e la faiblesse pourrait être opposée au souverain de l’Allemagne et d’un si grand nombre de races et de royaumes. Il est v
1863 rrait être opposée au souverain de l’Allemagne et d’ un si grand nombre de races et de royaumes. Il est vrai que l’Europe e
1864 souverain de l’Allemagne et d’un si grand nombre de races et de royaumes. Il est vrai que l’Europe est très forte ; mais
1865 e l’Allemagne et d’un si grand nombre de races et de royaumes. Il est vrai que l’Europe est très forte ; mais de quoi cela
1866 s. Il est vrai que l’Europe est très forte ; mais de quoi cela lui servirait-il, si le Turc possédait la meilleure partie
1867 rait-il, si le Turc possédait la meilleure partie de l’Europe ? Vives rejoint ici l’opinion d’un autre champion de la rés
1868 partie de l’Europe ? Vives rejoint ici l’opinion d’ un autre champion de la résistance aux Turcs, Gaspard Peucer (1525-160
1869 Vives rejoint ici l’opinion d’un autre champion de la résistance aux Turcs, Gaspard Peucer (1525-1602), savant allemand,
1870 spard Peucer (1525-1602), savant allemand, gendre de Melanchton, dont il partageait la conviction que seule la pulchra con
1871 eait la conviction que seule la pulchra coniuncto de l’Allemagne, de la France et de l’Italie serait capable de sauver l’E
1872 on que seule la pulchra coniuncto de l’Allemagne, de la France et de l’Italie serait capable de sauver l’Europe. C’est en
1873 pulchra coniuncto de l’Allemagne, de la France et de l’Italie serait capable de sauver l’Europe. C’est en s’appuyant avant
1874 magne, de la France et de l’Italie serait capable de sauver l’Europe. C’est en s’appuyant avant tout sur les Allemagnes qu
1875 ces luthériens entrevoyaient la création possible d’ une respublica cristiana en Europe, c’est-à-dire une confédération ant
1876 édération antipapale et anti-impériale à la fois. De son côté, Vives dans un écrit complémentaire à celui qu’on vient de c
1877 rit complémentaire à celui qu’on vient de citer : De Concordia et Discordia in Humano Genere 89 dit la nécessité d’une « r
1878 et Discordia in Humano Genere 89 dit la nécessité d’ une « reconstruction générale de l’Europe », mais n’en décrit pas les
1879 dit la nécessité d’une « reconstruction générale de l’Europe », mais n’en décrit pas les moyens : les « grands desseins »
1880 s plus tard : Dès lors, dans une série si longue de guerres qui sont nées l’une de l’autre par une fécondité incroyable,
1881 ne série si longue de guerres qui sont nées l’une de l’autre par une fécondité incroyable, toute l’Europe a souffert des d
1882 s et aura besoin, dans presque tous les domaines, d’ une grande et quasi universelle reconstruction ; mais de nulle autre c
1883 grande et quasi universelle reconstruction ; mais de nulle autre chose la nécessité n’est plus pressante, que d’une immédi
1884 utre chose la nécessité n’est plus pressante, que d’ une immédiate réconciliation et concorde, qui s’étendent et se communi
1885 ensemble, peuvent en quatre ans chasser les Turcs de l’Europe. La Noue propose une confédération entre les princes chrétie
1886 s chrétiens réunis à Augsbourg sous la présidence de l’empereur : Ayant basti une telle confédération, il conviendrait en
1887 ons expediens pour la continuer au moins l’espace de quatre années. Projet modeste, en vérité, mais qui n’en eut pas plus
1888 et modeste, en vérité, mais qui n’en eut pas plus de suites. Il convient de citer enfin dans ce contexte Guillaume Postel
1889 mais qui n’en eut pas plus de suites. Il convient de citer enfin dans ce contexte Guillaume Postel (1510-1581), humaniste
1890 talien, en latin et traduit les Saintes Écritures de l’hébreu et du grec en arabe.) Postel croit à la Monarchie universell
1891 mahométans ou « Ismaéliens », par la propagation d’ un « christianisme raisonnable ». Cela fait, quand tous seront un : D
1892 e, un seul prince… meilleure image du Dieu unique d’ où procède l’ordre du monde. Un tel monarque universel ne saurait êtr
1893 oi de France, puisque ce roi descend du fils aîné de Japhet, Gomer, fondateur de la race gallique au témoignage de Josèphe
1894 descend du fils aîné de Japhet, Gomer, fondateur de la race gallique au témoignage de Josèphe… Toutefois, Postel est loin
1895 omer, fondateur de la race gallique au témoignage de Josèphe… Toutefois, Postel est loin de se regarder comme un impériali
1896 rder comme un impérialiste « gaulois ». Dans l’un de ses livres intitulé La République des Turcs (1560), il se nomme au co
7 1961, Vingt-huit siècles d’Europe. Deuxième partie. Prises de conscience européennes. De Pierre Dubois à l’abbé de Saint-Pierre, (xive au xixe siècle) — 5. Les grands desseins du xviie siècle
1897 siècle C’est au xviie siècle qu’il appartenait de tirer certaines conclusions constructives, à la fois philosophiques e
1898 s et proprement politiques, du grand remue-ménage de la Renaissance et de la Réforme. Quatre plans de vaste envergure appo
1899 iques, du grand remue-ménage de la Renaissance et de la Réforme. Quatre plans de vaste envergure apportent leur contributi
1900 de la Renaissance et de la Réforme. Quatre plans de vaste envergure apportent leur contribution à cet effort de mise en o
1901 nvergure apportent leur contribution à cet effort de mise en ordre, qui semble bien avoir été la devise du siècle. Nous le
1902 ous leur découvrons, après coup, plusieurs traits de ressemblance assez profonds. Tous les quatre sont des utopies, donnée
1903 utopies, données comme telles — encore que celui de Sully prétende à quelque réalisme politique, celui de William Penn à
1904 ully prétende à quelque réalisme politique, celui de William Penn à une économie bien entendue. Tous les quatre expriment
1905 atre expriment avec force la vocation fédératrice de l’Europe, et la sourde angoisse de l’époque devant les prétentions ab
1906 on fédératrice de l’Europe, et la sourde angoisse de l’époque devant les prétentions absolutistes des États. Tous les quat
1907 s absolutistes des États. Tous les quatre émanent d’ esprits profondément religieux mais « œcuméniques », au sens qu’a pris
1908 la mémoire des siècles aux traités « réalistes » de l’époque, rapidement effacés par le mouvement de l’histoire, et n’ont
1909 de l’époque, rapidement effacés par le mouvement de l’histoire, et n’ont cessé d’agir sur l’imagination des créateurs d’i
1910 és par le mouvement de l’histoire, et n’ont cessé d’ agir sur l’imagination des créateurs d’institutions, jusqu’à nos jours
1911 ’ont cessé d’agir sur l’imagination des créateurs d’ institutions, jusqu’à nos jours. Nous les citerons ici selon la chrono
1912 645 ; William Penn, 1692. Le « Nouveau Cynée » d’ Émeric Crucé De ce premier auteur d’un plan d’union qui engloberai
1913 1692. Le « Nouveau Cynée » d’Émeric Crucé De ce premier auteur d’un plan d’union qui engloberait non seulement l’E
1914 u Cynée » d’Émeric Crucé De ce premier auteur d’ un plan d’union qui engloberait non seulement l’Europe chrétienne mais
1915 d’Émeric Crucé De ce premier auteur d’un plan d’ union qui engloberait non seulement l’Europe chrétienne mais le monde
1916 ut « moine pédagogue dans on ne sait quel collège de Paris », enseigna les mathématiques et publia quelques pesants travau
1917 x qui le firent traiter par des érudits allemands de « petit maître d’école parisien »90. Ce personnage obscur n’en eut pa
1918 . Ce personnage obscur n’en eut pas moins le cœur de s’adresser à tous les princes d’Europe, dans l’envoi de son grand tra
1919 as moins le cœur de s’adresser à tous les princes d’ Europe, dans l’envoi de son grand traité, qui parut à Paris en 1623 :
1920 dresser à tous les princes d’Europe, dans l’envoi de son grand traité, qui parut à Paris en 1623 : Le Nouveau Cynée ou Dis
1921 ut à Paris en 1623 : Le Nouveau Cynée ou Discours d’ Estat représentant les occasions et moyens d’établir une paix générale
1922 ours d’Estat représentant les occasions et moyens d’ établir une paix générale et la liberté du commerce par tout le monde.
1923 out le monde. Aux monarques et princes souverains de ce temps. Ses 249 grandes pages ne comportent pas de divisions en cha
1924 ce temps. Ses 249 grandes pages ne comportent pas de divisions en chapitres, et seulement deux alinéas en tout ! Nous en r
1925 t mesme un fameux personnage a monstré les moyens d’ exterminer les Turcs dans les quatre ans ou environ91, et plusieurs au
1926 strangers, qu’ils estiment une prudence politique de semer parmy eux des divisions, afin de jouyr d’un repos plus asseuré.
1927 e de semer parmy eux des divisions, afin de jouyr d’ un repos plus asseuré.92 Mais je suis bien d’un autre advis, et me se
1928 uyr d’un repos plus asseuré.92 Mais je suis bien d’ un autre advis, et me semble quand on voit brusler ou tomber la maison
1929 semble quand on voit brusler ou tomber la maison de son voisin qu’on a subject de crainte, autant que de compassion, veu
1930 ou tomber la maison de son voisin qu’on a subject de crainte, autant que de compassion, veu que la société humaine est un
1931 son voisin qu’on a subject de crainte, autant que de compassion, veu que la société humaine est un corps, dont tous les me
1932 n corps, dont tous les membres ont une sympathie, de manière qu’il est impossible que les maladies de l’un ne se communiqu
1933 de manière qu’il est impossible que les maladies de l’un ne se communiquent aux autres. Faut-il que les monarchies s’étab
1934 es, il n’est plus besoing à ceux qui en ioüissent de remplir le monde de ce carnage. Crucé insistera plus loin sur cette
1935 soing à ceux qui en ioüissent de remplir le monde de ce carnage. Crucé insistera plus loin sur cette idée de statu quo à
1936 arnage. Crucé insistera plus loin sur cette idée de statu quo à conserver, chère à Érasme, nous l’avons vu. La guerre est
1937 nnent, et ne se laissent point aisément dessaisir de leurs possessions. Je confronte ces deux peuples, pour ce qu’ils sont
1938 ces deux peuples, pour ce qu’ils sont par manière de dire ennemis naturels, et ont divisé presque tout le monde en deux pa
1939 le monde en deux parties, à cause de la diversité de leur religion, tellement que s’ils se pouvoient accorder, ce serait u
1940 d acheminement pour la paix universelle. Inutile d’ insister sur le parallèle avec nos « deux blocs » actuels. La plus sûr
1941 s « deux blocs » actuels. La plus sûre prévention de la guerre, Crucé la voit dans l’arbitrage, idée reprise du Moyen Âge 
1942 rage, idée reprise du Moyen Âge : Auparavant que de venir aux armes (les princes devraient)… se rapporter à l’arbitrage d
1943 souverains : Ce faisant ils gaigneroient l’amitié de leurs semblables, pour s’en prévaloir contre leurs ennemis, au cas qu
1944 s qu’ils ne voulussent se soubsmettre au jugement d’ un tiers. Or si un prince recevoit un juge qui voulust impérieusement
1945 voit un juge qui voulust impérieusement s’ingérer de vuider les differens, cela véritablement ravaleroit sa grandeur : mai
1946 cela véritablement ravaleroit sa grandeur : mais d’ accepter volontairement les arbitres, c’est une chose jadis pratiquée
1947 t à cecy servirait grandement rassemblée generale de laquelle nous parlerons cy-après… Comments est-il possible, dira quel
1948 -après… Comments est-il possible, dira quelqu’un, d’ accorder des peuples qui sont si séparez de volonté et d’affection, co
1949 qu’un, d’accorder des peuples qui sont si séparez de volonté et d’affection, comme le Turc et le Persan, le François et l’
1950 der des peuples qui sont si séparez de volonté et d’ affection, comme le Turc et le Persan, le François et l’Espagnol, le C
1951 us oster la similitude du naturel, vray fondement d’ amitié et société humaine. Pourquoy moy qui suis François voudray-je d
1952 ble. La même tolérance doit s’étendre au domaine de la religion : Qu’est-il besoin de se faire la guerre pour la diversi
1953 dre au domaine de la religion : Qu’est-il besoin de se faire la guerre pour la diversité des cérémonies ? Je ne dirai pas
1954 our la diversité des cérémonies ? Je ne dirai pas de religion, vu que leur fin principale reside en l’adoration de Dieu, q
1955 vu que leur fin principale reside en l’adoration de Dieu, qui demande plutost le cœur des hommes que le culte extérieur e
1956 res… La pieté est un trop bel arbre pour produire de si mauvais fruits. Tandis que nous taschons de gagner le ciel par l’i
1957 re de si mauvais fruits. Tandis que nous taschons de gagner le ciel par l’ingredient de la religion, gardons-nous de tombe
1958 nous taschons de gagner le ciel par l’ingredient de la religion, gardons-nous de tomber en une stupidité et inhumanité br
1959 iel par l’ingredient de la religion, gardons-nous de tomber en une stupidité et inhumanité brutale… Toutes ces Religions (
1960 la sienne est la meilleure. Je n’ay pas entrepris de vuider ce différend. Un plus suffisant que moy y seroit bein empesché
1961 e fin, à sçavoir à la recognoissance et adoration de la divinité. Que si aucunes ne choisissent pas le bon chemin ou moyen
1962 ue par malice, et par consequent sont plus dignes de compassion que de haine… (Seuls des esprits bornés croient) que tous
1963 par consequent sont plus dignes de compassion que de haine… (Seuls des esprits bornés croient) que tous sont tenus de vivr
1964 s des esprits bornés croient) que tous sont tenus de vivre comme luy, et ne prise que ses coutusmes, à la façon de ces nia
1965 me luy, et ne prise que ses coutusmes, à la façon de ces niais d’Athènes, qui estimoient la Lune de leur pays meilleure qu
1966 prise que ses coutusmes, à la façon de ces niais d’ Athènes, qui estimoient la Lune de leur pays meilleure que celle des a
1967 on de ces niais d’Athènes, qui estimoient la Lune de leur pays meilleure que celle des autres. Les sages et divins esprits
1968 considèrent que l’harmonie du monde est composée de diverses humeurs, et que ce qui est loüable en un lieu, n’est pas tro
1969 volontez sont muables, et les actions des hommes de ce temps n’obligent pas leurs successeurs… Néantmoins pour en préveni
1970 n prévenir les inconvéniens, il seroit necessaire de choisir une ville, où tous les Souverains eussent perpétuellement leu
1971 ourraient survenir fussent vuidez par le jugement de toute l’assemblee. Les ambassadeurs de ceux qui seroient intéressez e
1972 e jugement de toute l’assemblee. Les ambassadeurs de ceux qui seroient intéressez exposeroient là les plaintes de leurs ma
1973 seroient intéressez exposeroient là les plaintes de leurs maistres, et les autres députez en jugeraient sans passion. Il
1974 s députez en jugeraient sans passion. Il propose d’ en fixer le siège sur le territoire de Venise, pour ce qu’il est comm
1975 Il propose d’en fixer le siège sur le territoire de Venise, pour ce qu’il est comme neutre et indifferent à tous princes
1976 si qu’il est proche des plus signalées Monarchies de la terre, de celles du pape, des deux empereurs, et du roy d’Hespagne
1977 proche des plus signalées Monarchies de la terre, de celles du pape, des deux empereurs, et du roy d’Hespagne. Il n’est pa
1978 pereurs, et du roy d’Hespagne. Il n’est pas loing de France, de Tartarie, Moschouie, Polongne, Angleterre, et Dannemarch.
1979 du roy d’Hespagne. Il n’est pas loing de France, de Tartarie, Moschouie, Polongne, Angleterre, et Dannemarch. Quant à la
1980 il a bien ses idées là-dessus, mais il a décidé «  de ne pas songer à soy seulement » et au contraire de parler comme s’il
1981 comme s’il était né « en la république imaginaire de Platon ou en la région de ses Idées ». Il finit donc par proposer que
1982 a république imaginaire de Platon ou en la région de ses Idées ». Il finit donc par proposer que le pape « ait la préséanc
1983 r que le pape « ait la préséance, pour le respect de l’ancienne Rome », mais — ô révolution presque impensable ! — que le
1984 atement après lui, « attendu qu’il tient le siège de l’empire oriental ». Viendront ensuite « l’empereur chrestien » puis
1985 ixiesme lieu pourroit estre debatu entre les roys de Perse, de la Chine, le Pretre-Jan, le Precop de Tartarie, et le grand
1986 eu pourroit estre debatu entre les roys de Perse, de la Chine, le Pretre-Jan, le Precop de Tartarie, et le grand duc de Mo
1987 rtarie, et le grand duc de Moschouie… Et les roys de la grand Bretagne, de Pologne, de Dannemarch, de Suede, du Jappon, de
1988 c de Moschouie… Et les roys de la grand Bretagne, de Pologne, de Dannemarch, de Suede, du Jappon, de Marroc, le grand Mogo
1989 ie… Et les roys de la grand Bretagne, de Pologne, de Dannemarch, de Suede, du Jappon, de Marroc, le grand Mogol, et autres
1990 de la grand Bretagne, de Pologne, de Dannemarch, de Suede, du Jappon, de Marroc, le grand Mogol, et autres monarques tant
1991 , de Pologne, de Dannemarch, de Suede, du Jappon, de Marroc, le grand Mogol, et autres monarques tant des Indes que d’Afri
1992 and Mogol, et autres monarques tant des Indes que d’ Afrique, ne doivent pas estre aux derniers rangs, tous braves princes,
1993 s rangs, tous braves princes, qui se maintiennent d’ eux-mesmes et ne dependent de personne… Et pour authoriser d’avantage
1994 qui se maintiennent d’eux-mesmes et ne dependent de personne… Et pour authoriser d’avantage le jugement, on prendroit adu
1995 s et ne dependent de personne… Et pour authoriser d’ avantage le jugement, on prendroit aduis des grandes Republiques, qui
1996 me celle des Vénitiens et des Suisses, et non pas de ces petites Seigneuries, qui ne se peuvent maintenir d’elles-mesmes,
1997 petites Seigneuries, qui ne se peuvent maintenir d’ elles-mesmes, et dependent de la protection d’autruy. … Ceste compagni
1998 se peuvent maintenir d’elles-mesmes, et dependent de la protection d’autruy. … Ceste compagnie donc jugeroit les débats qu
1999 nir d’elles-mesmes, et dependent de la protection d’ autruy. … Ceste compagnie donc jugeroit les débats qui surviendroient
2000 es mescontentemens, et les apoiseroit par la voye de douceur, si faire se pouvoit, ou en cas de nécessité par la force. Qu
2001 a voye de douceur, si faire se pouvoit, ou en cas de nécessité par la force. Que si quelqu’un contrevenoit à l’arrest d’un
2002 a force. Que si quelqu’un contrevenoit à l’arrest d’ une si notable compagnie, il encourrait la disgrace de tous les autres
2003 e si notable compagnie, il encourrait la disgrace de tous les autres princes, qui auraient beau moyen de le faire venir à
2004 tous les autres princes, qui auraient beau moyen de le faire venir à la raison. Dès la première partie de son traité, Cr
2005 faire venir à la raison. Dès la première partie de son traité, Crucé s’était demandé ce que feraient les peuples, s’ils
2006 la guerre pour « exercice ». Il proposait un plan d’ éducation des peuples (sciences, médecine et mathématiques en premier
2007 decine et mathématiques en premier lieu), un plan de développement des industries artisanales, et un plan d’aménagement de
2008 eloppement des industries artisanales, et un plan d’ aménagement des territoires : rivières à rendre navigables, canal joig
2009 . Et déjà il s’écriait : Quel plaisir seroit-ce, de voir les hommes aller de part et d’autre librement, et communiquer en
2010 Quel plaisir seroit-ce, de voir les hommes aller de part et d’autre librement, et communiquer ensemble sans aucun scrupul
2011 ir seroit-ce, de voir les hommes aller de part et d’ autre librement, et communiquer ensemble sans aucun scrupule de pays,
2012 ment, et communiquer ensemble sans aucun scrupule de pays, de ceremonies, ou d’autres diversitez semblables, comme si la t
2013 communiquer ensemble sans aucun scrupule de pays, de ceremonies, ou d’autres diversitez semblables, comme si la terre esto
2014 tablement, une cité commune à tous ? Vers la fin de l’ouvrage, il reprend et développe ce thème de la libre circulation d
2015 in de l’ouvrage, il reprend et développe ce thème de la libre circulation des biens et des personnes : Voilà les moyens d
2016 on des biens et des personnes : Voilà les moyens d’ entretenir la paix particulièrement en chaque monarchie. Il y en a d’a
2017 universels, qui concernent la bonne intelligence de tous les souverains respectivement l’un avec l’autre, dont le premier
2018 us important est qu’ils se contentent des limites de leur seigneurie qui leur seront prescripts par la generale assemblée
2019 leur seront prescripts par la generale assemblée de laquelle nous avons parlé. Ce poinct estant gaigné, il faudra aduiser
2020 igné, il faudra aduiser à ce que les particuliers de diverses nations se puissent hanter et trafiquer ensemble en asseuran
2021 les accorde promptement sans faveur ny acception de personne. Car puisqu’il s’agist d’une paix universelle il faut rendre
2022 r ny acception de personne. Car puisqu’il s’agist d’ une paix universelle il faut rendre la justice aux estrangers, et ne p
2023 leur plaisir. Crucé a bien vu que cette liberté de commerce — diamétralement opposée au protectionnisme national qui com
2024 onal qui commençait à s’appesantir sur l’économie de l’Europe — supposait d’autres mesures : … il est necessaire que les
2025 es mesures : … il est necessaire que les princes d’ un commun consentement réduisent les monnoyes à un mesme pied, afin qu
2026 libres et le commerce estant ouvert par le moyen de la paix, on puisse trafiquer par tout sans dommage. Il n’y a personne
2027 dommage. Il n’y a personne qui soit plus capable de cela que le pape. C’est son devoir de moyenner une concorde générale
2028 lus capable de cela que le pape. C’est son devoir de moyenner une concorde générale entre les princes chrestiens. Et pour
2029 isser ce tesmoignage à la postérité. S’il ne sert de rien, patience. C’est peu de chose, de perdre du papier, et des parol
2030 il ne sert de rien, patience. C’est peu de chose, de perdre du papier, et des paroles. Je protesteray en ce cas comme Solo
2031 des paroles. Je protesteray en ce cas comme Solon d’ avoir dit et faict ce qui m’a esté possible pour le bien public, et qu
2032 m’en sçauront gré, et m’honoreront comme j’espère de leur souvenance. Le mémoire de Crucé n’eut pas plus de succès que le
2033 nt comme j’espère de leur souvenance. Le mémoire de Crucé n’eut pas plus de succès que les projets de ses prédécesseurs.
2034 r souvenance. Le mémoire de Crucé n’eut pas plus de succès que les projets de ses prédécesseurs. Mais ceux qui le dédaign
2035 de Crucé n’eut pas plus de succès que les projets de ses prédécesseurs. Mais ceux qui le dédaignèrent sont oubliés, lui no
2036 a fait son chemin clandestin à travers une série d’ œuvres souvent glorieuses. Le jeune Leibniz l’a lu et s’en souvient :
2037 Société des Nations, puis Churchill et le congrès de La Haye et les grands débats de notre temps. Le Grand Dessein du d
2038 ill et le congrès de La Haye et les grands débats de notre temps. Le Grand Dessein du duc de Sully Tout le monde, d
2039 u. Est-on même certain qu’il existe ? La « Charte de l’Atlantique », pendant la dernière guerre, exerça, elle aussi, une g
2040 n : ses éléments sont dispersés dans les milliers de pages des Mémoires de Sully, dont au surplus nous possédons plusieurs
2041 dispersés dans les milliers de pages des Mémoires de Sully, dont au surplus nous possédons plusieurs versions : les deux p
2042 eurs versions : les deux premières parties datées de 1638 et qui ne furent pas « mises dans le commerce » ; la troisième p
2043 bé de l’Écluse, qui fit connaître au grand public de 1745 une œuvre fortement remaniée ; enfin, des éditions modernes, res
2044 omposés par quatre secrétaires anonymes, à l’aide d’ un gigantesque fatras de documents, copies de lettres, ou lettres écri
2045 taires anonymes, à l’aide d’un gigantesque fatras de documents, copies de lettres, ou lettres écrites après coup, brouillo
2046 aide d’un gigantesque fatras de documents, copies de lettres, ou lettres écrites après coup, brouillons de discours, états
2047 ettres, ou lettres écrites après coup, brouillons de discours, états financiers, notes, souvenirs, dictées, bilans, etc. L
2048 elieu, attribue le Grand Dessein à Henry IV, plus de vingt ans après l’assassinat du roi. Les états successifs du plan qu’
2049 nous révèle (sous forme de lettres apocryphes ou de discours) défient la citation par la longueur des phrases et le désor
2050 tion par la longueur des phrases et le désordonné de la présentation. Voici tout de même un assez court fragment où, par u
2051 , Sully cherche à gagner l’Angleterre aux projets d’ Henry IV contre les Habsbourg : Suivant ce que le roi d’Angleterre vo
2052 ui ayant ainsi envoyé le plus ancien et confident de ses serviteurs et celui sur lequel lui-même pouvait prendre le plus d
2053 celui sur lequel lui-même pouvait prendre le plus de confiance. Sur quoi voyant, comme il vous sembla, l’occasion très opp
2054 hautes propositions que le roi vous avait ordonné de lui faire, mais seulement comme de vous-même, vous lui répondîtes en
2055 avait ordonné de lui faire, mais seulement comme de vous-même, vous lui répondîtes en ces termes : « […] Sire, il faut qu
2056 vanités mondaines, je préfère néanmoins la gloire de Dieu, mon salut et la subsistance de la vraie religion que je profess
2057 ns la gloire de Dieu, mon salut et la subsistance de la vraie religion que je professe, au roi mon maître, ma fortune, ma
2058 pagne, les archiducs, les princes ecclésiastiques d’ Allemagne, et tous autres grands et communautés catholiques, n’ont poi
2059 n’ont point de plus forte passion en l’esprit que de former une puissante association pour la ruine et destruction de tout
2060 uissante association pour la ruine et destruction de toute créance contraire à la romaine. Ils ne sont retardés d’y travai
2061 ance contraire à la romaine. Ils ne sont retardés d’ y travailler tout ouvertement que parce qu’ils n’ont point encore pu f
2062 ein. Mais il est à craindre que par la diminution de ma faveur (comme celle des princes est sujette à varier) ou par de tr
2063 me celle des princes est sujette à varier) ou par de trop continuelles sollicitations, il ne se laisse enfin persuader, s’
2064 bles à son généreux esprit (car c’est cette vertu de magnanimité qui tient le premier lieu en son âme), qui sont ceux desq
2065 Votre Majesté, et dans quels aussi elle trouvera de quoi accroître sa puissance et son autorité, amplifier sa domination,
2066 , et perpétuer sa renommée, qui est le second but de mes désirs. De vous seul dépend l’exécution des choses que je veux pr
2067 sa renommée, qui est le second but de mes désirs. De vous seul dépend l’exécution des choses que je veux proposer, lesquel
2068 le tous les autres rois, princes, et surtout ceux de Danemark et de Suède, États, républiques, villes et communautés prote
2069 res rois, princes, et surtout ceux de Danemark et de Suède, États, républiques, villes et communautés protestantes, qui so
2070 communautés protestantes, qui sont comme obligés d’ être toujours contraires à la faction espagnole et d’Autriche, et conf
2071 tre toujours contraires à la faction espagnole et d’ Autriche, et confirmer tout cela par l’alliance de vos communs enfants
2072 d’Autriche, et confirmer tout cela par l’alliance de vos communs enfants, qui se trouveront d’âge sortable les uns aux aut
2073 lliance de vos communs enfants, qui se trouveront d’ âge sortable les uns aux autres. Je ne désespère pas si je vous vois g
2074 turel volage et à son véhément et ambitieux désir de porter couronne royale, les plus puissants princes catholiques d’Alle
2075 ne royale, les plus puissants princes catholiques d’ Allemagne, pour l’espérance d’arracher la couronne impériale de la mai
2076 princes catholiques d’Allemagne, pour l’espérance d’ arracher la couronne impériale de la maison d’Autriche et tous les éta
2077 pour l’espérance d’arracher la couronne impériale de la maison d’Autriche et tous les états de Bohême, Autriche, Moravie,
2078 nce d’arracher la couronne impériale de la maison d’ Autriche et tous les états de Bohême, Autriche, Moravie, Silésie et Lu
2079 périale de la maison d’Autriche et tous les états de Bohême, Autriche, Moravie, Silésie et Lusatie, pour les rétablir dans
2080 ciennes libertés, voire même le pape en proposant de lui faire posséder une propriété ce dont il n’est reconnu que par une
2081 dont il n’est reconnu que par une vaine apparence de féodalité. » Sur toutes lesquelles ouvertures, quoique d’abord en gén
2082 et en gros, le roi d’Angleterre fît démonstration d’ y prendre goût, voire de les louer et approuver, si ne laissa-t-il pas
2083 leterre fît démonstration d’y prendre goût, voire de les louer et approuver, si ne laissa-t-il pas d’en vouloir entendre t
2084 de les louer et approuver, si ne laissa-t-il pas d’ en vouloir entendre tout le détail, et de former lors une infinité de
2085 t-il pas d’en vouloir entendre tout le détail, et de former lors une infinité de difficultés sur la jonction en une loyale
2086 re tout le détail, et de former lors une infinité de difficultés sur la jonction en une loyale association de tant de dive
2087 icultés sur la jonction en une loyale association de tant de diverses têtes et tant diversement intentionnées et intéressé
2088 ent intentionnées et intéressées sur la poursuite d’ un si haut dessein… Les discours que vous eûtes lors, tant sur ce suje
2089 ieurs autres très importants, vous retinrent plus de quatre heures seuls enfermés ensemble. Cependant, le Grand Dessein,
2090 s ses derniers états, déborde largement au profit de l’Europe entière, ce projet initial d’alliance protestante — nonobsta
2091 au profit de l’Europe entière, ce projet initial d’ alliance protestante — nonobstant l’adhésion de princes catholiques et
2092 al d’alliance protestante — nonobstant l’adhésion de princes catholiques et même du pape. Nous en donnerons ici l’exposé m
2093 s et royales Économies » : L’Europe sera composée de  : 5 monarchies électives : le Saint-Empire romain germanique, les Ét
2094 talie, la Suisse, la Belgique (pour la définition de ces territoires voir plus loin). Les pays dont seront composés ces Ét
2095 en détail ; s’il y a désaccord sur l’attribution d’ un territoire, il sera soumis directement à l’autorité européenne cent
2096 rficie et leurs richesses, ces États devront être d’ importance à peu près égale, pour assurer entre eux le plus haut degré
2097 our assurer entre eux le plus haut degré possible d’ équilibre, de même qu’entre les religions catholique, luthérienne et c
2098 e, luthérienne et calviniste. Cette Confédération d’ États sera placée sous la garde d’un Conseil de l’Europe composé de si
2099 e Confédération d’États sera placée sous la garde d’ un Conseil de l’Europe composé de six Conseils provinciaux et d’un Con
2100 ée sous la garde d’un Conseil de l’Europe composé de six Conseils provinciaux et d’un Conseil Général. Les Conseils provi
2101 e l’Europe composé de six Conseils provinciaux et d’ un Conseil Général. Les Conseils provinciaux auront leurs sièges à :
2102 ardie, etc., et une ville à désigner dans l’Ouest de l’Europe pour la France, l’Espagne, l’Angleterre et la Belgique. Le C
2103 l Général aura son siège dans une ville du centre de l’Europe, à désigner chaque année parmi les villes suivantes : Metz,
2104 nçon. On voit que le Rhin est l’artère principale de cette nouvelle configuration politique. Ce Conseil Général sera compo
2105 ration politique. Ce Conseil Général sera composé de représentants de chacun des gouvernements de la république chrétienne
2106 Ce Conseil Général sera composé de représentants de chacun des gouvernements de la république chrétienne, au total 40 hom
2107 posé de représentants de chacun des gouvernements de la république chrétienne, au total 40 hommes d’expérience, à raison d
2108 s de la république chrétienne, au total 40 hommes d’ expérience, à raison de 4 représentants pour les grands États et de 2
2109 aison de 4 représentants pour les grands États et de 2 pour les États plus petits. Ces Conseils recevront le pouvoir de tr
2110 ts plus petits. Ces Conseils recevront le pouvoir de trancher tout différend, tant entre un souverain et son peuple qu’ent
2111 e qu’entre différents États. Ils ont pour mission de régler toutes les questions d’intérêt commun et d’élaborer tous les p
2112 s ont pour mission de régler toutes les questions d’ intérêt commun et d’élaborer tous les projets concernant l’ensemble de
2113 e régler toutes les questions d’intérêt commun et d’ élaborer tous les projets concernant l’ensemble de la République chrét
2114 d’élaborer tous les projets concernant l’ensemble de la République chrétienne. Le Conseil de l’Europe a les compétences et
2115 seil de l’Europe a les compétences et les devoirs d’ un Sénat, ses membres étant à réélire tous les trois ans. Les décision
2116 ra qu’une souveraineté conditionnelle. Comme base de la république européenne, Sully exige la liberté du commerce et même
2117 e la suppression des barrières douanières. L’idée de l’arbitrage et aussi du « concert européen » apparaît avec une nettet
2118 lection des souverains des trois royaumes chargés d’ assurer la défense de l’Europe à l’Est. Il prévoit en effet : comme « 
2119  marche » et rempart contre les Turcs, un royaume de Hongrie (Basse-Autriche, Styrie, Carinthie, Croatie, Bosnie, Slovénie
2120 contre les Moscovites et les Tartares, un royaume de Pologne, enfin un royaume de Bohême. Pour associer ces royaumes le pl
2121 Tartares, un royaume de Pologne, enfin un royaume de Bohême. Pour associer ces royaumes le plus étroitement possible au so
2122 aumes le plus étroitement possible au sort commun de l’Europe, deux dispositions : d’une part leurs souverains devront êtr
2123 uverains devront être élus par un collège composé de huit souverains : le pape, l’empereur, les rois de France, d’Espagne,
2124 e huit souverains : le pape, l’empereur, les rois de France, d’Espagne, d’Angleterre, du Danemark, de Suède et de Lombardi
2125 erains : le pape, l’empereur, les rois de France, d’ Espagne, d’Angleterre, du Danemark, de Suède et de Lombardie, d’autre
2126 pape, l’empereur, les rois de France, d’Espagne, d’ Angleterre, du Danemark, de Suède et de Lombardie, d’autre part ces hu
2127 de France, d’Espagne, d’Angleterre, du Danemark, de Suède et de Lombardie, d’autre part ces huit souverains seront obligé
2128 d’Espagne, d’Angleterre, du Danemark, de Suède et de Lombardie, d’autre part ces huit souverains seront obligés par devoir
2129 art ces huit souverains seront obligés par devoir d’ alliance à défendre ces royaumes contre toute agression. Arbitrage aus
2130 e roi d’Espagne et les cantons suisses. Le devoir d’ alliance des huit souverains joue également pour Venise et le royaume
2131 uverains joue également pour Venise et le royaume de Sicile. Enfin, le plan Sully prévoit en détail les ajustements territ
2132 erritoriaux nécessaires pour cette réorganisation de l’Europe : La souveraineté espagnole est limitée à la péninsule ibéri
2133 rk et la Suède gardent leur statu quo. Le royaume de Lombardie est formé par : la Savoie, le Piémont, Montferrat et Milan.
2134 e est renforcée territorialement : elle s’accroît de la Franche-Comté, de l’Alsace et du Tyrol. La République de Belgique
2135 torialement : elle s’accroît de la Franche-Comté, de l’Alsace et du Tyrol. La République de Belgique se compose de la Belg
2136 et du Tyrol. La République de Belgique se compose de la Belgique et de la Hollande actuelles. Enfin, une république italie
2137 publique de Belgique se compose de la Belgique et de la Hollande actuelles. Enfin, une république italienne sera formée, e
2138 à la Savoie, ni à Venise. Cette république faite d’ une mosaïque de territoires en surplus sera placée sous la souverainet
2139 i à Venise. Cette république faite d’une mosaïque de territoires en surplus sera placée sous la souveraineté du pape. La R
2140 elon Sully, ne devra pas être admise comme membre de la Communauté chrétienne. C. J. Burckhardt compare, en conclusion, l
2141 J. Burckhardt compare, en conclusion, le Dessein de Sully et les autres projets européens de paix perpétuelle : Cet effo
2142 Dessein de Sully et les autres projets européens de paix perpétuelle : Cet effort toujours repris à nouveau peut se rame
2143 mobiles constants : l’espoir placé dans l’action de la volonté libre pour surmonter l’entraînement fatidique vers la guer
2144 supérieure aux États ; et surtout : le sentiment de tout ce que les Européens, malgré contrastes et conflits, possèdent d
2145 ropéens, malgré contrastes et conflits, possèdent de commun et d’irremplaçable. Ce qui distingue les écrits de Sully de ce
2146 ré contrastes et conflits, possèdent de commun et d’ irremplaçable. Ce qui distingue les écrits de Sully de ceux de ses pré
2147 n et d’irremplaçable. Ce qui distingue les écrits de Sully de ceux de ses prédécesseurs et contemporains, c’est qu’en sa q
2148 remplaçable. Ce qui distingue les écrits de Sully de ceux de ses prédécesseurs et contemporains, c’est qu’en sa qualité d’
2149 ble. Ce qui distingue les écrits de Sully de ceux de ses prédécesseurs et contemporains, c’est qu’en sa qualité d’homme d’
2150 cesseurs et contemporains, c’est qu’en sa qualité d’ homme d’État il part d’un contexte politique tout à fait concret et pa
2151 ns, c’est qu’en sa qualité d’homme d’État il part d’ un contexte politique tout à fait concret et particulier et qu’ensuite
2152 mesure que lentement il mûrit son plan, le désir d’ assurer la primauté à sa propre nation s’estompe de plus en plus chez
2153 e que, dans son grand âge, et déjà presque au ban de la communauté française en sa qualité de protestant, il finit par ard
2154 e au ban de la communauté française en sa qualité de protestant, il finit par ardemment souhaiter un pouvoir suprême supra
2155 , tant de défaites et tant de lamentables traités de paix qu’il ne pourra plus en supporter beaucoup d’autres sans périr…
2156 passées à observer l’agitation des hommes du fond de sa retraite l’ont amené pour finir à surmonter en lui-même, dans son
2157 ns son propre cœur, la force la plus considérable de son époque, cette force qui jadis dans sa jeunesse l’avait poussé à l
2158 t tendu vers l’avenir.94 Le Réveil universel de Comenius Le principal titre de gloire d’Amos Comenius (nom latini
2159 veil universel de Comenius Le principal titre de gloire d’Amos Comenius (nom latinisé de Jean Amos Komenski), né en Mo
2160 rsel de Comenius Le principal titre de gloire d’ Amos Comenius (nom latinisé de Jean Amos Komenski), né en Moravie en 1
2161 pal titre de gloire d’Amos Comenius (nom latinisé de Jean Amos Komenski), né en Moravie en 1592, mort en Hollande en 1670,
2162 en Moravie en 1592, mort en Hollande en 1670, est d’ avoir contribué plus que tout autre, en écrivant sa Grande Didactique
2163 e tout autre, en écrivant sa Grande Didactique et de nombreux traités spéciaux, à créer la science de l’éducation en Europ
2164 de nombreux traités spéciaux, à créer la science de l’éducation en Europe. Mais ses recherches de philosophe et de théolo
2165 nce de l’éducation en Europe. Mais ses recherches de philosophe et de théologien (il fut évêque de l’Unité des frères mora
2166 n en Europe. Mais ses recherches de philosophe et de théologien (il fut évêque de l’Unité des frères moraves) autant que s
2167 hes de philosophe et de théologien (il fut évêque de l’Unité des frères moraves) autant que son action de pédagogue, devai
2168 l’Unité des frères moraves) autant que son action de pédagogue, devaient trouver leur couronnement et l’expression de leur
2169 evaient trouver leur couronnement et l’expression de leur unité profonde dans un ouvrage qu’il ne put achever : la Délibér
2170 pansophique ». Elle porte le sous-titre suivant : De rerum humanarum emendatione consultatio catholica ad genus humanum, a
2171 n système scolaire perfectionné sous la direction d’ une sorte d’académie internationale ; coordination politique, sous la
2172 olaire perfectionné sous la direction d’une sorte d’ académie internationale ; coordination politique, sous la direction d’
2173 onale ; coordination politique, sous la direction d’ institutions internationales ; réconciliation des Églises, qui se donn
2174 ent un Consistoire mondial. Le projet gigantesque d’ une fédération mondiale à la fois culturelle, politique et religieuse,
2175 la fois culturelle, politique et religieuse, fait de Comenius l’un des grands précurseurs de l’union européenne autant que
2176 use, fait de Comenius l’un des grands précurseurs de l’union européenne autant que du mouvement œcuménique. Notons une foi
2177 nt parle Comenius n’est en fait que la chrétienté de son temps, donc l’Europe. Au reste, Comenius se qualifie lui-même d’E
2178 l’Europe. Au reste, Comenius se qualifie lui-même d’ Européen. Dans la Præfatio ad Europeos qui ouvre sa Panegersia, il par
2179 a Panegersia, il parle — le premier peut-être ? —  de notre patrie européenne : Afin que nous cessions de dissimuler nos p
2180 notre patrie européenne : Afin que nous cessions de dissimuler nos projets et nos efforts, et de travailler chacun pour s
2181 ions de dissimuler nos projets et nos efforts, et de travailler chacun pour soi, je vais payer d’exemple : car mon but sup
2182 , et de travailler chacun pour soi, je vais payer d’ exemple : car mon but suprême est d’annoncer le Christ à tous les peup
2183 je vais payer d’exemple : car mon but suprême est d’ annoncer le Christ à tous les peuples. Cette Lumière doit être apporté
2184 e navire. Je ne puis me taire, car mon espoir est d’ adoucir les maux de la guerre par mon message, comme par une musique t
2185 s me taire, car mon espoir est d’adoucir les maux de la guerre par mon message, comme par une musique tout harmonieuse, et
2186 à cette action par les efforts qui se produisent de notre temps, en Europe plus qu’ailleurs, et qui portent en eux la pro
2187 s qu’ailleurs, et qui portent en eux la pro messe de grandes choses. Voici quelques extraits de la Panegersia 95 § 6. I
2188 messe de grandes choses. Voici quelques extraits de la Panegersia 95 § 6. Il importe, dis-je, d’adjoindre aux Lettrés d
2189 ts de la Panegersia 95 § 6. Il importe, dis-je, d’ adjoindre aux Lettrés des gardiens vigilants ; leur tâche sera de leur
2190 Lettrés des gardiens vigilants ; leur tâche sera de leur apprendre, en les exhortant, leur principale mission, qui est d’
2191 n les exhortant, leur principale mission, qui est d’ éliminer tous les restes de l’ignorance ou des erreurs dans les esprit
2192 ipale mission, qui est d’éliminer tous les restes de l’ignorance ou des erreurs dans les esprits humains. Il faut adjoindr
2193 er, avec leur aide, tout ce qui subsistera encore d’ athéisme, d’épicurisme et d’impiété. Et il faut adjoindre aux Puissant
2194 r aide, tout ce qui subsistera encore d’athéisme, d’ épicurisme et d’impiété. Et il faut adjoindre aux Puissants des gardie
2195 qui subsistera encore d’athéisme, d’épicurisme et d’ impiété. Et il faut adjoindre aux Puissants des gardiens du pouvoir po
2196 pouvoir pour que, par un zèle exagéré, la semence de discorde ne germe pas de nouveau ; ou, si elle commence à germer, pou
2197 ce célèbre passage, Matth. 23, 8-10, en ordonnant de ne pas établir parmi les hommes le gouvernement d’un seul chef, la co
2198 e ne pas établir parmi les hommes le gouvernement d’ un seul chef, la conduite d’un seul conducteur et la sagesse d’un seul
2199 ommes le gouvernement d’un seul chef, la conduite d’ un seul conducteur et la sagesse d’un seul sage. Il interdit, en effet
2200 f, la conduite d’un seul conducteur et la sagesse d’ un seul sage. Il interdit, en effet, que quelqu’un au monde se fasse a
2201 introduire autre chose que l’enseignement commun de nous tous, unis par des liens fraternels, que l’assujettissement de n
2202 par des liens fraternels, que l’assujettissement de nous tous au seul Père dans les cieux et au Christ qui nous a été don
2203 rois états, on instituera par conséquent un corps de dirigeants. Le chef suprême de chacun de ces corps sera cet Hermès Tr
2204 onséquent un corps de dirigeants. Le chef suprême de chacun de ces corps sera cet Hermès Trimégiste96 (le trois fois grand
2205 un corps de dirigeants. Le chef suprême de chacun de ces corps sera cet Hermès Trimégiste96 (le trois fois grand truchemen
2206 te96 (le trois fois grand truchement des volontés de Dieu concernant les hommes, le suprême prophète, le suprême prêtre, l
2207 e roi), c’est-à-dire le Christ qui seul a pouvoir de tout diriger puissamment. Mais, pour maintenir l’ordre, partout les u
2208 st soient solidement établis. § 12. Il sera utile d’ adopter des appellations différentes pour ces tribunaux : le tribunal
2209 le tribunal des lettrés s’appellerait le Conseil de la lumière, le tribunal ecclésiastique le Consistoire et le tribunal
2210 e le Consistoire et le tribunal politique la Cour de justice. § 13. Le Conseil de la lumière veillera à ce qu’il ne soit n
2211 al politique la Cour de justice. § 13. Le Conseil de la lumière veillera à ce qu’il ne soit nécessaire, nulle part au mond
2212 ce qu’il ne soit nécessaire, nulle part au monde, d’ instruire quelqu’un et moins encore à ce qu’il se trouve quelqu’un qui
2213 u’il se trouve quelqu’un qui ignore quelque chose d’ indispensable, et à ce que tous les hommes soient instruits par Dieu.
2214 bles, permettra à tous les hommes du monde entier de tourner leurs yeux vers cette lumière dans laquelle tous verront, par
2215 énitude soit consacrée à Dieu ; qu’il n’y ait pas de scandale, ni d’écrits, ni de gravures, ni de peintures, etc., scandal
2216 sacrée à Dieu ; qu’il n’y ait pas de scandale, ni d’ écrits, ni de gravures, ni de peintures, etc., scandaleux mais qu’il y
2217  ; qu’il n’y ait pas de scandale, ni d’écrits, ni de gravures, ni de peintures, etc., scandaleux mais qu’il y ait partout
2218 pas de scandale, ni d’écrits, ni de gravures, ni de peintures, etc., scandaleux mais qu’il y ait partout à profusion des
2219 que chacun, où qu’il se tourne, trouve matière à de saintes réflexions. § 15. Enfin, la Cour de la paix veillera à ce que
2220 ère à de saintes réflexions. § 15. Enfin, la Cour de la paix veillera à ce que nulle part une nation ne s’élève contre une
2221 rsonne n’ose se montrer pour enseigner la manière de combattre ou de fabriquer les armes ; à ce que toutes les épées et le
2222 montrer pour enseigner la manière de combattre ou de fabriquer les armes ; à ce que toutes les épées et les lances soient
2223 s lances soient transformées en serpes et en socs de charrue (Es. 2, 4, etc.). § 16. Par conséquent, tous les corps savant
2224 ociété fructifère en Allemagne, etc.) feront bien de se réunir en un seul Conseil de la lumière ; car c’est le Père éterne
2225 etc.) feront bien de se réunir en un seul Conseil de la lumière ; car c’est le Père éternel des lumières lui-même qui les
2226 e qui les invite à former une unité et communauté de la lumière… § 17. Et tous les consistoires ou conseils des anciens de
2227 , les Éthiopiens, les réformés, etc.) feront bien de fusionner en un seul Consistoire de l’Église, telle qu’elle est préfi
2228 ) feront bien de fusionner en un seul Consistoire de l’Église, telle qu’elle est préfigurée par la Jérusalem merveilleusem
2229 difiée, la seule ville où sont dressés les trônes de la justice, les trônes de la maison de David (Psaume 122, 3, 5). § 18
2230 sont dressés les trônes de la justice, les trônes de la maison de David (Psaume 122, 3, 5). § 18. Et tous les tribunaux du
2231 les trônes de la justice, les trônes de la maison de David (Psaume 122, 3, 5). § 18. Et tous les tribunaux du monde feront
2232 § 18. Et tous les tribunaux du monde feront bien de devenir un seul tribunal de Christ ; car, une fois que tous les royau
2233 du monde feront bien de devenir un seul tribunal de Christ ; car, une fois que tous les royaumes du monde lui seront remi
2234 rès les plans du moine français, du duc huguenot, de l’évêque morave, voici enfin celui d’un « dissenter » anglais, qui, à
2235 c huguenot, de l’évêque morave, voici enfin celui d’ un « dissenter » anglais, qui, à la différence de ses prédécesseurs, f
2236 d’un « dissenter » anglais, qui, à la différence de ses prédécesseurs, fut un grand fondateur d’État : « le Lycurgue mode
2237 ence de ses prédécesseurs, fut un grand fondateur d’ État : « le Lycurgue moderne », dira de lui Montesquieu. Fils d’un ric
2238 fondateur d’État : « le Lycurgue moderne », dira de lui Montesquieu. Fils d’un riche et noble amiral qui l’envoya très je
2239 Lycurgue moderne », dira de lui Montesquieu. Fils d’ un riche et noble amiral qui l’envoya très jeune en France apprendre l
2240 retour en Angleterre et plusieurs fois emprisonné de ce chef à la Tour de Londres, William Penn obtint de la Couronne, en
2241 et plusieurs fois emprisonné de ce chef à la Tour de Londres, William Penn obtint de la Couronne, en échange d’une créance
2242 ce chef à la Tour de Londres, William Penn obtint de la Couronne, en échange d’une créance laissée par son père sur le roi
2243 s, William Penn obtint de la Couronne, en échange d’ une créance laissée par son père sur le roi Charles II, le vaste terri
2244 te territoire américain qui allait prendre le nom de sa famille. Cela se passait en 1681, Louis XIV régnant en France et W
2245 s XIV régnant en France et William Penn étant âgé de 37 ans. Il introduisit en « Pennsylvania » la constitution la plus to
2246 l’histoire occidentale ait connue. C’est au cours d’ une brève interruption de sa carrière de Gouverneur — de 1692 à 1694 —
2247 t connue. C’est au cours d’une brève interruption de sa carrière de Gouverneur — de 1692 à 1694 — qu’il composa son Essay
2248 au cours d’une brève interruption de sa carrière de Gouverneur — de 1692 à 1694 — qu’il composa son Essay towards the Pre
2249 brève interruption de sa carrière de Gouverneur —  de 1692 à 1694 — qu’il composa son Essay towards the Present and Future
2250 1701, laissant à ses descendants le gouvernement de son État, et mourut en 1718. On sait les circonstances de l’Europe à
2251 tat, et mourut en 1718. On sait les circonstances de l’Europe à la date où William Penn rédige son Essay : l’agression de
2252 te où William Penn rédige son Essay : l’agression de Louis XIV contre le Palatinat a provoqué la Grande Alliance de 1689,
2253 contre le Palatinat a provoqué la Grande Alliance de 1689, sous la direction de Guillaume III d’Orange, devenu roi d’Angle
2254 qué la Grande Alliance de 1689, sous la direction de Guillaume III d’Orange, devenu roi d’Angleterre. La guerre est généra
2255 le. C’est le spectacle des « tragédies sanglantes de cette guerre, en Hongrie, en Allemagne, en Flandres, en Irlande, et s
2256 ut à écrire le pacifiste quaker et le législateur d’ un État neuf, délivré des folies invétérées de l’absolutisme du vieux
2257 eur d’un État neuf, délivré des folies invétérées de l’absolutisme du vieux Monde. « J’ai entrepris un sujet qui est au-de
2258 onde. « J’ai entrepris un sujet qui est au-dessus de mes forces, mais qui mérite vraiment d’être discuté, étant donné l’ét
2259 au-dessus de mes forces, mais qui mérite vraiment d’ être discuté, étant donné l’état lamentable de l’Europe. » Ainsi début
2260 ent d’être discuté, étant donné l’état lamentable de l’Europe. » Ainsi débute l’ouvrage. Ses trois premières sections sont
2261 en la paix est désirable ; quel est le vrai moyen de la réaliser, à savoir la justice, non la guerre ; et « que la justice
2262 uvernement, comme le gouvernement est le résultat de la société, laquelle provient d’abord d’un dessein raisonnable des ho
2263 résultat de la société, laquelle provient d’abord d’ un dessein raisonnable des hommes paisibles ». La IVe section, que nou
2264 ction, que nous allons citer, introduit un projet de fédération de princes, qui rappelle celui de Crucé, encore qu’il se r
2265 s allons citer, introduit un projet de fédération de princes, qui rappelle celui de Crucé, encore qu’il se réclame d’Henri
2266 ojet de fédération de princes, qui rappelle celui de Crucé, encore qu’il se réclame d’Henri IV (c’est-à-dire du Dessein de
2267 rappelle celui de Crucé, encore qu’il se réclame d’ Henri IV (c’est-à-dire du Dessein de Sully) et de l’exemple qu’ont don
2268 il se réclame d’Henri IV (c’est-à-dire du Dessein de Sully) et de l’exemple qu’ont donné les Provinces-Unies des Pays-Bas9
2269 d’Henri IV (c’est-à-dire du Dessein de Sully) et de l’exemple qu’ont donné les Provinces-Unies des Pays-Bas97. Si les s
2270 ovinces-Unies des Pays-Bas97. Si les souverains d’ Europe, qui représentent cette société ou cet état indépendant des hom
2271 cline les hommes à la vie sociale, savoir l’amour de la paix et de l’ordre, pour se rencontrer, par leurs délégués, dans u
2272 es à la vie sociale, savoir l’amour de la paix et de l’ordre, pour se rencontrer, par leurs délégués, dans une Diète génér
2273 le, un État ou Parlement, et y établir des règles de justice à observer mutuellement par eux tous ; pour se réunir ainsi t
2274 l’une des souverainetés participantes refuserait de soumettre au jugement de la Diète ses réclamations ou prétentions, ou
2275 participantes refuserait de soumettre au jugement de la Diète ses réclamations ou prétentions, ou refuserait d’exécuter la
2276 te ses réclamations ou prétentions, ou refuserait d’ exécuter la décision intervenue, ou chercherait une solution par les a
2277 rée pour ses habitants torturés, harassés. VII. —  De la composition de la Diète générale Cette composition semble donner l
2278 ants torturés, harassés. VII. — De la composition de la Diète générale Cette composition semble donner lieu à certaines di
2279 ltés soient insurmontables, car s’il est possible de connaître chaque année la valeur des pays souverains dont les délégué
2280 auguste assemblée, on pourra déterminer le nombre de personnes ou de voix pour chacune des souverainetés. Maintenant que l
2281 e, on pourra déterminer le nombre de personnes ou de voix pour chacune des souverainetés. Maintenant que l’Angleterre, la
2282 l’objection ci-dessus, si l’on a le moindre désir de parvenir à la paix européenne… Je suppose donc que l’Empire germaniqu
2283 petites souverainetés voisines, deux ; les duchés de Holstein et de Courlande, un ; si les Turcs et les Russes étaient com
2284 inetés voisines, deux ; les duchés de Holstein et de Courlande, un ; si les Turcs et les Russes étaient compris, ce qui se
2285 sie et les arts ont leur place et empire… Le lieu de la première session de la Diète devrait être au centre de l’Europe, a
2286 r place et empire… Le lieu de la première session de la Diète devrait être au centre de l’Europe, autant que possible, et
2287 emière session de la Diète devrait être au centre de l’Europe, autant que possible, et ensuite comme elle en déciderait. V
2288 comme elle en déciderait. VIII. — Des règlements de la Diète européenne ès session Afin d’éviter des discussions au sujet
2289 ils rempliront, chacun à leur tour, les fonctions de président à qui on devra s’adresser pour obtenir la parole ; ce prési
2290 e, dans une grande proportion, les mauvais effets de la corruption. Car, si l’un des délégués de cette haute assemblée pou
2291 ffets de la corruption. Car, si l’un des délégués de cette haute assemblée pouvait être assez vil, faux et malhonnête au p
2292 uvait être assez vil, faux et malhonnête au point d’ être influencé par l’argent, il aurait la possibilité de prendre l’arg
2293 influencé par l’argent, il aurait la possibilité de prendre l’argent et de voter selon sa conscience sans qu’on le sache.
2294 , il aurait la possibilité de prendre l’argent et de voter selon sa conscience sans qu’on le sache. C’est aussi un remède,
2295 st aussi un remède, car celui qui voudrait donner de l’argent avec un pareil risque d’être dupé, préférera s’abstenir. Et
2296 voudrait donner de l’argent avec un pareil risque d’ être dupé, préférera s’abstenir. Et ceux qui accepteraient de l’argent
2297 , préférera s’abstenir. Et ceux qui accepteraient de l’argent dans de pareilles conditions préféreront mentir aux corrupte
2298 tenir. Et ceux qui accepteraient de l’argent dans de pareilles conditions préféreront mentir aux corrupteurs plutôt que fa
2299 t que faire tort à leur pays, car ils seront sûrs de ne pas être découverts. Il me semble que dans ce Parlement impérial,
2300 ajorité des trois quarts des membres, ou au moins de la moitié plus sept. Toutes les plaintes seraient remises par écrit s
2301 une armoire ou un coffre qui comporterait autant de fermetures qu’il y aurait de dizaines d’États, et s’il y avait un sec
2302 comporterait autant de fermetures qu’il y aurait de dizaines d’États, et s’il y avait un secrétaire pour chaque dizaine d
2303 t autant de fermetures qu’il y aurait de dizaines d’ États, et s’il y avait un secrétaire pour chaque dizaine de délégués,
2304 et s’il y avait un secrétaire pour chaque dizaine de délégués, une table ou un banc serait prévu pour ces employés. À la f
2305 un banc serait prévu pour ces employés. À la fin de chaque session, un délégué de chaque dizaine sera chargé d’examiner e
2306 employés. À la fin de chaque session, un délégué de chaque dizaine sera chargé d’examiner et de comparer les mémoires ou
2307 session, un délégué de chaque dizaine sera chargé d’ examiner et de comparer les mémoires ou journaux de ces secrétaires et
2308 légué de chaque dizaine sera chargé d’examiner et de comparer les mémoires ou journaux de ces secrétaires et de les mettre
2309 ’examiner et de comparer les mémoires ou journaux de ces secrétaires et de les mettre sous clés comme je l’ai dit ci-dessu
2310 er les mémoires ou journaux de ces secrétaires et de les mettre sous clés comme je l’ai dit ci-dessus ; cela serait sûr et
2311 istes, mais le second plus pratique pour les gens de qualité. IX. — Des objections qui peuvent être avancées contre le pro
2312 e la suppression du métier militaire et qu’en cas de besoin on n’aurait pas d’armée suffisante, comme cela s’est produit e
2313 militaire et qu’en cas de besoin on n’aurait pas d’ armée suffisante, comme cela s’est produit en Hollande en 72. Il n’y a
2314 ela s’est produit en Hollande en 72. Il n’y a pas de danger d’effémination, parce que chaque pays peut introduire une disc
2315 produit en Hollande en 72. Il n’y a pas de danger d’ effémination, parce que chaque pays peut introduire une discipline sév
2316 une discipline sévère ou modérée dans l’éducation de la jeunesse, par une vie simple et un labeur convenable. Apprenez-lui
2317 naturelle par la pratique, ce qui fait l’honneur de la noblesse allemande. Cela fera des hommes, non des femmes ni des li
2318 s lions : car les soldats se trouvent à l’extrême de l’effémination. La connaissance de la nature et la culture des arts a
2319 nt à l’extrême de l’effémination. La connaissance de la nature et la culture des arts aussi utiles qu’agréables, donnent a
2320 qu’agréables, donnent aux hommes la connaissance d’ eux-mêmes, du monde où ils sont nés, et les moyens d’être utiles aux a
2321 ux-mêmes, du monde où ils sont nés, et les moyens d’ être utiles aux autres et à eux aussi et encore de secourir et aider,
2322 d’être utiles aux autres et à eux aussi et encore de secourir et aider, mais non de nuire et de détruire. La connaissance
2323 ux aussi et encore de secourir et aider, mais non de nuire et de détruire. La connaissance du gouvernement en général, des
2324 encore de secourir et aider, mais non de nuire et de détruire. La connaissance du gouvernement en général, des constitutio
2325 ement en général, des constitutions particulières de l’Europe, et pardessus tout de celle de son propre pays, sont des cho
2326 ions particulières de l’Europe, et pardessus tout de celle de son propre pays, sont des choses très recommandables. Cela p
2327 iculières de l’Europe, et pardessus tout de celle de son propre pays, sont des choses très recommandables. Cela prépare le
2328 ela prépare le citoyen au parlement et au conseil de l’intérieur, aux cours des princes et à la Diète générale à l’extérie
2329 ième objection est qu’il y aurait un grand besoin d’ emplois pour les frères cadets et que le pauvre ne peut être que solda
2330 réponse à la seconde objection. Nous aurons plus de commerçants et de cultivateurs ou d’ingénieux naturalistes, si le gou
2331 nde objection. Nous aurons plus de commerçants et de cultivateurs ou d’ingénieux naturalistes, si le gouvernement a tant s
2332 aurons plus de commerçants et de cultivateurs ou d’ ingénieux naturalistes, si le gouvernement a tant soit peu le souci de
2333 stes, si le gouvernement a tant soit peu le souci de l’éducation de la jeunesse, ce qui, après le bien-être présent et imm
2334 vernement a tant soit peu le souci de l’éducation de la jeunesse, ce qui, après le bien-être présent et immédiat de chaque
2335 e, ce qui, après le bien-être présent et immédiat de chaque pays, doit être la préoccupation et l’art du gouvernement. Car
2336 gouvernement. Car la prochaine génération dépend de la façon dont la jeunesse est élevée ; de même le gouvernement se tro
2337 enus ne seront diminués ; au contraire, le budget de la guerre pouvant être réduit, par suite de mon plan, les deniers ser
2338 netés demeurent comme elles étaient ; mais aucune d’ elles n’a de suprématie sur les autres. Si cela peut s’appeler un amoi
2339 ent comme elles étaient ; mais aucune d’elles n’a de suprématie sur les autres. Si cela peut s’appeler un amoindrissement
2340 autres. Si cela peut s’appeler un amoindrissement de leur puissance, ce serait seulement parce que le gros poisson ne pour
2341 avaler les petits et que chaque pays est préservé de tout dommage et incapable d’en commettre. X.— Des réels avantages qui
2342 ue pays est préservé de tout dommage et incapable d’ en commettre. X.— Des réels avantages qui résulteraient de cette propo
2343 mettre. X.— Des réels avantages qui résulteraient de cette proposition en vue de la paix Je suis maintenant parvenu à mon
2344 hapitre dans lequel je vais énumérer quelques-uns de ces nombreux et réels bienfaits qui découleraient de cette propositio
2345 ces nombreux et réels bienfaits qui découleraient de cette proposition pour la présente et future paix de l’Europe… En deh
2346 cette proposition pour la présente et future paix de l’Europe… En dehors de la perte de tant de vies si importantes pour t
2347 et future paix de l’Europe… En dehors de la perte de tant de vies si importantes pour tout gouvernement, aussi bien au poi
2348 vue du travail qu’à l’égard du progrès, les cris de tant de veuves, d’orphelins, qui ne sont agréables aux oreilles d’auc
2349 à l’égard du progrès, les cris de tant de veuves, d’ orphelins, qui ne sont agréables aux oreilles d’aucun gouvernement, qu
2350 , d’orphelins, qui ne sont agréables aux oreilles d’ aucun gouvernement, qui sont la conséquence de la guerre partout, sero
2351 les d’aucun gouvernement, qui sont la conséquence de la guerre partout, seront évités. Il y a encore un bienfait manifeste
2352 en quelque sorte recouvrée. Car pour le scandale de ce saint état, les chrétiens qui se glorifient du nom de leur Sauveur
2353 aint état, les chrétiens qui se glorifient du nom de leur Sauveur ont sacrifié son crédit et sa dignité à leurs passions d
2354 si souvent qu’ils ont été excités par l’impulsion de l’ambition ou de la vengeance. Ils n’ont pas toujours été dans le dro
2355 ont été excités par l’impulsion de l’ambition ou de la vengeance. Ils n’ont pas toujours été dans le droit et le droit n’
2356 e droit et le droit n’a pas été non plus la cause de la guerre. Non seulement des chrétiens contre des chrétiens, mais enc
2357 e secte, ils ont souillé leurs mains dans le sang de leurs frères, invoquant de toutes leurs forces le Dieu bon et miséric
2358 urs mains dans le sang de leurs frères, invoquant de toutes leurs forces le Dieu bon et miséricordieux pour le succès de l
2359 rces le Dieu bon et miséricordieux pour le succès de leurs armes dans la destruction de leurs frères. … Le troisième bienf
2360 pour le succès de leurs armes dans la destruction de leurs frères. … Le troisième bienfait est l’économie de l’argent pour
2361 rs frères. … Le troisième bienfait est l’économie de l’argent pour les princes comme pour les peuples. Par ce moyen sont d
2362 t qui sont la conséquence des dépenses dévorantes de la guerre. Ils auront alors la possibilité d’améliorer les œuvres pub
2363 tes de la guerre. Ils auront alors la possibilité d’ améliorer les œuvres publiques pour l’enseignement, la charité, les ma
2364 ntionner les pensions aux veuves et aux orphelins de ceux qui meurent dans les guerres et à ceux qui ont été estropiés ; e
2365 les, cités et pays qui sont mis à sac par la rage de la guerre seront préservés. Ce vœu sera bien entendu dans les Flandre
2366 des ruines et des misères. Le cinquième bienfait de cette paix est l’aisance et la sécurité du voyage et du trafic, bonhe
2367 ons aisément concevoir la commodité et l’avantage de pouvoir voyager à travers l’Europe avec un passeport délivré par une
2368 voyagé en Allemagne où il y a un si grand nombre d’ États se rendent compte de la nécessité et de la valeur de ce privilèg
2369 y a un si grand nombre d’États se rendent compte de la nécessité et de la valeur de ce privilège par les nombreux arrêts
2370 mbre d’États se rendent compte de la nécessité et de la valeur de ce privilège par les nombreux arrêts qu’ils subissent en
2371 se rendent compte de la nécessité et de la valeur de ce privilège par les nombreux arrêts qu’ils subissent en cours de rou
2372 par les nombreux arrêts qu’ils subissent en cours de route ; et surtout ceux qui ont fait le grand tour de l’Europe. Concl
2373 oute ; et surtout ceux qui ont fait le grand tour de l’Europe. Conclusion … J’avoue que je désire sincèrement que l’honneu
2374 … J’avoue que je désire sincèrement que l’honneur de proposer et de réaliser un dessein si bon et si grand revienne à l’An
2375 e désire sincèrement que l’honneur de proposer et de réaliser un dessein si bon et si grand revienne à l’Angleterre, parmi
2376 grand revienne à l’Angleterre, parmi les nations de l’Europe, quoique certaines parties de ma proposition aient été envis
2377 es nations de l’Europe, quoique certaines parties de ma proposition aient été envisagées par la sagesse, la justice et la
2378 nvisagées par la sagesse, la justice et la valeur d’ Henri IV de France, dont les qualités supérieures l’élevant au-dessus
2379 dont les qualités supérieures l’élevant au-dessus de ses ancêtres ou contemporains lui méritèrent le titre d’Henri le Gran
2380 ancêtres ou contemporains lui méritèrent le titre d’ Henri le Grand. La Paix perpétuelle de l’abbé de Saint-Pierre.
2381 e titre d’Henri le Grand. La Paix perpétuelle de l’abbé de Saint-Pierre. Aux quatre grands projets du xviiie sièc
2382 du xviiie siècle fait immédiatement suite celui de l’abbé de Saint-Pierre, publié pour la première fois en 1712. S’il es
2383 a première fois en 1712. S’il est le plus célèbre de tous, ce n’est point qu’il soit le meilleur, il s’en faut ; mais c’es
2384 , et c’est ensuite qu’il a valu à son auteur plus de railleries qu’aucun écrit de l’ère moderne n’en aura jamais motivées.
2385 lu à son auteur plus de railleries qu’aucun écrit de l’ère moderne n’en aura jamais motivées. Bien entendu, ni cet excès d
2386 aura jamais motivées. Bien entendu, ni cet excès d’ honneur, ni cette indignité ne sont justifiés. Charles-Irénée Castel d
2387 Saint-Pierre (1658-1743) naquit dans le Cotentin, d’ une très ancienne famille, peu fortunée. Il entra dans les ordres mine
2388 trise. À Paris, il fit carrière sous les auspices de Fontenelle et du salon de la marquise de Lambert, qui lui ouvrirent l
2389 rière sous les auspices de Fontenelle et du salon de la marquise de Lambert, qui lui ouvrirent les portes de l’Académie fr
2390 marquise de Lambert, qui lui ouvrirent les portes de l’Académie française en 1695. Il venait d’acheter la charge d’aumônie
2391 portes de l’Académie française en 1695. Il venait d’ acheter la charge d’aumônier de Madame et connut la Cour. En qualité d
2392 française en 1695. Il venait d’acheter la charge d’ aumônier de Madame et connut la Cour. En qualité de secrétaire de l’ab
2393 en 1695. Il venait d’acheter la charge d’aumônier de Madame et connut la Cour. En qualité de secrétaire de l’abbé de Polig
2394 ’aumônier de Madame et connut la Cour. En qualité de secrétaire de l’abbé de Polignac, envoyé de la France au congrès de l
2395 adame et connut la Cour. En qualité de secrétaire de l’abbé de Polignac, envoyé de la France au congrès de la paix d’Utrec
2396 alité de secrétaire de l’abbé de Polignac, envoyé de la France au congrès de la paix d’Utrecht (1712) il put voir de tout
2397 ’abbé de Polignac, envoyé de la France au congrès de la paix d’Utrecht (1712) il put voir de tout près la pratique des tra
2398 lignac, envoyé de la France au congrès de la paix d’ Utrecht (1712) il put voir de tout près la pratique des traités et ses
2399 u congrès de la paix d’Utrecht (1712) il put voir de tout près la pratique des traités et ses défauts. Exclu de l’Académie
2400 rès la pratique des traités et ses défauts. Exclu de l’Académie en 1716 pour avoir critiqué la mémoire de Louis XIV, il fo
2401 l’Académie en 1716 pour avoir critiqué la mémoire de Louis XIV, il fonda le « Club de l’Entresol », société de libres disc
2402 tiqué la mémoire de Louis XIV, il fonda le « Club de l’Entresol », société de libres discussions, qui lui valut de nouveau
2403 XIV, il fonda le « Club de l’Entresol », société de libres discussions, qui lui valut de nouveaux ennuis. « Il avait de l
2404 l », société de libres discussions, qui lui valut de nouveaux ennuis. « Il avait de l’esprit, des lettres et des chimères 
2405 ons, qui lui valut de nouveaux ennuis. « Il avait de l’esprit, des lettres et des chimères », dit Saint-Simon dans ses mém
2406 il mourut insensible aux sarcasmes que ne cessait de provoquer son Projet. Et l’on dit que son dernier mot fut « Espérance
2407 que son dernier mot fut « Espérance ». Le Projet de paix perpétuelle parut d’abord à Cologne, sans nom d’auteur, en 1712.
2408 aix perpétuelle parut d’abord à Cologne, sans nom d’ auteur, en 1712. L’année suivante paraissait à Utrecht une version amp
2409 dédié à Louis XV, fut publié à Rotterdam en 1729. De ces ouvrages assez médiocrement écrits, mal construits et pleins de r
2410 sez médiocrement écrits, mal construits et pleins de répétitions, il n’est pas facile de tirer des extraits qui rendent ju
2411 its et pleins de répétitions, il n’est pas facile de tirer des extraits qui rendent justice aux idées positives de l’abbé
2412 extraits qui rendent justice aux idées positives de l’abbé ou qui en dégagent l’originalité. Cependant, pour leur intérêt
2413 sèque, nous donnerons ci-après quelques fragments de la Préface et des XII Articles principaux du Projet de 1713. Mais rap
2414 Préface et des XII Articles principaux du Projet de 1713. Mais rapportons d’abord l’occasion singulière qui inspira son p
2415 ière qui inspira son projet au bon abbé. Au cours d’ un voyage en Normandie, durant l’hiver 1706-1707, sa voiture ayant ver
2416 vre, et sans transition, il écrit : Je finissais de mettre la dernière main à ce mémoire, lorsqu’il m’est venu à l’esprit
2417 émoire, lorsqu’il m’est venu à l’esprit un projet d’ établissement qui par sa grande beauté m’a frappé d’étonnement. Il a a
2418 établissement qui par sa grande beauté m’a frappé d’ étonnement. Il a attiré depuis quinze jours toute mon attention. Je me
2419 puis quinze jours toute mon attention. Je me sens d’ autant plus d’inclination à l’approfondir que plus je le considère, et
2420 urs toute mon attention. Je me sens d’autant plus d’ inclination à l’approfondir que plus je le considère, et ce par différ
2421 avantageux aux souverains. C’est l’établissement d’ un arbitrage permanent entre eux pour terminer sans guerre leurs diffé
2422 . Je ne sais si je me trompe, mais on a fondement d’ espérer qu’un traité se signera quelque jour… C’est avec cette espéran
2423 Socrate : Que l’on va loin lorsqu’on a le courage de marcher longtemps et sur la même ligne. Voyons maintenant les chemin
2424 ntenant les chemins nouveaux que l’abbé s’efforça d’ ouvrir. Préface98 … Il y a environ quatre ans qu’après avoir chevé l
2425 atre ans qu’après avoir chevé la première ébauche d’ un Règlement utile au Commerce intérieur du royaume, instruit par mes
2426 merce intérieur du royaume, instruit par mes yeux de l’extrême misère où les Peuples sont réduits par les grandes Impositi
2427 tions particulières des Contributions excessives, de Fouragemens, des Incendies, des violences, des cruautez, & des me
2428 s des États chrétiens ; enfin touché sensiblement de tous les maux que la Guerre cause aux Souverains d’Europe & à leu
2429 tous les maux que la Guerre cause aux Souverains d’ Europe & à leurs Sujets, je pris la résolution de pénétrer jusqu’a
2430 urope & à leurs Sujets, je pris la résolution de pénétrer jusqu’aux premières sources du mal, & de chercher par me
2431 énétrer jusqu’aux premières sources du mal, & de chercher par mes propres réflexions si ce mal étoit tellement attaché
2432 r la matière pour découvrir s’il étoit impossible de trouver des moyens praticables pour terminer sans Guerre tous leurs d
2433 Paix perpétuelle. … Il me parut alors nécessaire de commencer par faire quelques réflexions sur la nécessité où sont les
2434 éflexions sur la nécessité où sont les Souverains d’ Europe, comme les autres hommes, de vivre en Paix, unis par quelque so
2435 les Souverains d’Europe, comme les autres hommes, de vivre en Paix, unis par quelque société permanente, pour vivre plus h
2436 plus heureux, sur la nécessité où ils se trouvent d’ avoir des Guerres entre eux, pour la possession ou pour le partage de
2437 entre eux, pour la possession ou pour le partage de quelques biens, & enfin sur les moyens dont ils se sont servi jus
2438 ont servi jusqu’à présent, soit pour se dispenser d’ entreprendre ces Guerres, soit pour n’y pas succomber quand elles ont
2439 s promesses mutuelles écrites ou dans des Traitez de Commerce, de Trêve, de Paix, où l’on règle les limites du Territoire,
2440 utuelles écrites ou dans des Traitez de Commerce, de Trêve, de Paix, où l’on règle les limites du Territoire, & les au
2441 crites ou dans des Traitez de Commerce, de Trêve, de Paix, où l’on règle les limites du Territoire, & les autres préte
2442 tres prétentions réciproques, ou dans des Traitez de Garantie ou de Ligue offensive & défensive pour établir, pour mai
2443 s réciproques, ou dans des Traitez de Garantie ou de Ligue offensive & défensive pour établir, pour maintenir ou pour
2444 blir, pour maintenir ou pour rétablir l’Équilibre de puissance des maisons dominantes ; Système qui jusques ici semble êtr
2445 me qui jusques ici semble être le plus haut degré de prudence, auquel les Souverains d’Europe & les ministres ayent po
2446 lus haut degré de prudence, auquel les Souverains d’ Europe & les ministres ayent porté leur politique. Je ne fus pas l
2447 -tems sans voir que tant que l’on se contenteroit de pareils moyens, on n’auroit jamais de sûreté suffisante de l’exécutio
2448 ontenteroit de pareils moyens, on n’auroit jamais de sûreté suffisante de l’exécution des Traitez, ni de moyens suffisans
2449 s moyens, on n’auroit jamais de sûreté suffisante de l’exécution des Traitez, ni de moyens suffisans pour terminer équitab
2450 sûreté suffisante de l’exécution des Traitez, ni de moyens suffisans pour terminer équitablement, & sur tout sans Gue
2451 x chefs ou à deux Propositions, que je me propose d’ y démontrer. 1° La constitution présente de l’Europe ne sçauroit jamai
2452 ropose d’y démontrer. 1° La constitution présente de l’Europe ne sçauroit jamais produire que des Guerres presque continue
2453 ne sçauroit jamais procurer la sûreté suffisante de l’exécution des Traitez. 2° L’Équilibre de puissance entre la Maison
2454 sante de l’exécution des Traitez. 2° L’Équilibre de puissance entre la Maison de France & la Maison d’Autriche ne sça
2455 tez. 2° L’Équilibre de puissance entre la Maison de France & la Maison d’Autriche ne sçauroit procurer de sûreté suff
2456 issance entre la Maison de France & la Maison d’ Autriche ne sçauroit procurer de sûreté suffisante ni contre les Guerr
2457 e & la Maison d’Autriche ne sçauroit procurer de sûreté suffisante ni contre les Guerres Étrangères, ni contre les Gue
2458 iviles, & ne sçauroit par conséquent procurer de sûreté suffisante soit pour la conservation des États, soit pour la c
2459 pourraient pas trouver quelque sûreté suffisante de l’exécution des promesses mutuelles en établissant entre eux un Arbit
2460 elles, & pour se procurer tous les avantages d’ un Commerce perpétuel de nation à Nation, vouloient faire un traité d’
2461 ocurer tous les avantages d’un Commerce perpétuel de nation à Nation, vouloient faire un traité d’Union & un Congrez p
2462 uel de nation à Nation, vouloient faire un traité d’ Union & un Congrez perpétuel à peu près sur le même modèle, ou des
2463 rès sur le même modèle, ou des Sept Souverainetés de Hollande, ou des treize Souverainetés des Suisses, ou des Souverainet
2464 e Souverainetés des Suisses, ou des Souverainetés d’ Allemagne, & former l’Union européenne sur ce qu’il y a de bon dan
2465 & former l’Union européenne sur ce qu’il y a de bon dans ces Unions, & sur tout dans l’Union Germanique composée
2466 sur tout dans l’Union Germanique composée de plus de deux cens Souverainetés, je trouvai, dis-je, que les plus foibles aur
2467 la. … En examinant le gouvernement des Souverains d’ Allemagne, je ne trouvai pas plus de difficultez à former de nos jours
2468 es Souverains d’Allemagne, je ne trouvai pas plus de difficultez à former de nos jours le Corps Européen, qu’on en trouva
2469 e, je ne trouvai pas plus de difficultez à former de nos jours le Corps Européen, qu’on en trouva autrefois à former le Co
2470 nd ; au contraire je trouvai qu’il y auroit moins d’ obstacles & plus de facilitez pour former le Corps Européen, &
2471 ouvai qu’il y auroit moins d’obstacles & plus de facilitez pour former le Corps Européen, & ce qui m’aida beaucoup
2472 mère, ce fut l’avis que me donna bientôt après un de mes amis, lorsque je lui montrai la première ébauche de cet Ouvrage d
2473 amis, lorsque je lui montrai la première ébauche de cet Ouvrage dans ma Province : il me dit qu’Henry IV avoit formé un P
2474 u duc de Sully son Premier ministre… … Je sçavois de quel poids sont les préjugez, & que souvent ils font plus d’impre
2475 ont les préjugez, & que souvent ils font plus d’ impression sur le commun des esprits, que les véritables raisons prise
2476 & les Sociétez que je donne comme des espèces de modèles ; qu’après tout Henri IV avoit pû se tromper en croyant possi
2477 bles & suffisans, qui consistent aux articles d’ un traité d’union, dans lequel on trouvât pour tout le monde une sûret
2478 uffisans, qui consistent aux articles d’un traité d’ union, dans lequel on trouvât pour tout le monde une sûreté suffisante
2479 trouvât pour tout le monde une sûreté suffisante, de la perpétuité de la paix, je ne négligerai rien pour les inventer, &a
2480 le monde une sûreté suffisante, de la perpétuité de la paix, je ne négligerai rien pour les inventer, & je crois les
2481 er à tous les princes chrétiens sûreté suffisante de la perpétuité de la Paix au-dedans & dehors de leurs États, il n’
2482 nces chrétiens sûreté suffisante de la perpétuité de la Paix au-dedans & dehors de leurs États, il n’y a aucun d’eux p
2483 e la perpétuité de la Paix au-dedans & dehors de leurs États, il n’y a aucun d’eux pour qui il n’y ait beaucoup plus d
2484 edans & dehors de leurs États, il n’y a aucun d’ eux pour qui il n’y ait beaucoup plus d’avantages à signer le traité p
2485 y a aucun d’eux pour qui il n’y ait beaucoup plus d’ avantages à signer le traité pour l’établissement de cette Société, qu
2486 avantages à signer le traité pour l’établissement de cette Société, qu’à ne le pas signer. Or la Société européenne, que l
2487 er à tous les princes chrétiens sûreté suffisante de la perpétuité de la paix au-dedans & au-dehors de leurs États. Do
2488 nces chrétiens sûreté suffisante de la perpétuité de la paix au-dedans & au-dehors de leurs États. Donc il n’y aura au
2489 a perpétuité de la paix au-dedans & au-dehors de leurs États. Donc il n’y aura aucun d’eux pour qui il n’y ait beaucou
2490 au-dehors de leurs États. Donc il n’y aura aucun d’ eux pour qui il n’y ait beaucoup plus d’avantages à signer le traité p
2491 ura aucun d’eux pour qui il n’y ait beaucoup plus d’ avantages à signer le traité pour l’établissement de cette Société, qu
2492 avantages à signer le traité pour l’établissement de cette Société, qu’à ne le pas signer. La majeure, ou la première pro
2493 ur disposer l’esprit du Lecteur à sentir la force de la démonstration. La mineure ou la seconde proposition contient les m
2494 iscours. À l’égard de la dernière proposition, ou de la conclusion, c’est le but que je me suis proposé dans cet Ouvrage…
2495 re tous les Souverains chrétiens, dans le dessein de rendre la Paix inaltérable en Europe, & dans cette vue l’Union fe
2496 es Souverains Mahometans ses voisins, des Traitez de Ligue offensive & défensive, pour maintenir chacun en Paix dans l
2497 ve, pour maintenir chacun en Paix dans les bornes de son Territoire, en prenant d’eux, & leur donnant toutes les sûret
2498 aix dans les bornes de son Territoire, en prenant d’ eux, & leur donnant toutes les sûretez possibles réciproques. Les
2499 été Européenne ne se mêlera point du gouvernement de chaque État, si ce n’est pour en conserver la forme fondamentale, &am
2500 -joint… Les Souverains ne pourront entr’eux faire d’ échange d’aucun Territoire, ni signer aucun Traité entr’eux que du con
2501 s Souverains ne pourront entr’eux faire d’échange d’ aucun Territoire, ni signer aucun Traité entr’eux que du consentement,
2502 r’eux que du consentement, & sous la garantie de l’Union aux trois quarts des vingt-quatre voix, & l’Union démeure
2503 ingt-quatre voix, & l’Union démeurera garante de l’éxécution des promesses réciproques. VII. — Les Députez travaillero
2504 férens Commerces entre les Nations particulières, de sorte cependant que les Loix soient égales & réciproques pour tou
2505 Chambres pour le maintien du Commerce, composées de Députez autorisez à concilier, & à juger à la rigueur, & en d
2506 le Commerce, ou autres matières entre les Sujets de divers Souverains, au-dessus de dix mille livres : les autres procez
2507 entre les Sujets de divers Souverains, au-dessus de dix mille livres : les autres procez de moindre conséquence seront dé
2508 au-dessus de dix mille livres : les autres procez de moindre conséquence seront décidez à l’ordinaire par les Juges du lie
2509 lité que contre celui qui aura été déclaré ennemi de la Société européenne : mais s’il y a quelque sujet de se plaindre de
2510 Société européenne : mais s’il y a quelque sujet de se plaindre de quelqu’un des Membres ou quelque demande à lui faire,
2511 enne : mais s’il y a quelque sujet de se plaindre de quelqu’un des Membres ou quelque demande à lui faire, il fera donner
2512 par son Député son Mémoire au Sénat dans la Ville de paix, & le Sénat prendra soin de concilier les différens par ses
2513 ans la Ville de paix, & le Sénat prendra soin de concilier les différens par ses Commissaires Médiateurs, ou s’ils ne
2514 verain qui prendra les armes avant la déclaration de guerre de l’Union, ou qui refusera d’exécuter un Réglement de la Soci
2515 prendra les armes avant la déclaration de guerre de l’Union, ou qui refusera d’exécuter un Réglement de la Société, elle
2516 déclaration de guerre de l’Union, ou qui refusera d’ exécuter un Réglement de la Société, elle lui fera la Guerre, jusqu’à
2517 ment & des Réglemens il payera même les frais de la Guerre, & le Païs qui sera conquis sur lui lors de la suspensi
2518 ïs qui sera conquis sur lui lors de la suspension d’ armes, demeurera pour toujours séparé de son État… IX. — Il y aura da
2519 uspension d’armes, demeurera pour toujours séparé de son État… IX. — Il y aura dans le Sénat d’Europe vingt-quatre Sénate
2520 éparé de son État… IX. — Il y aura dans le Sénat d’ Europe vingt-quatre Sénateurs ou Députez des Souverains unis, ni plus,
2521 qu’une voix. X. — Les Membres & les Associez de l’Union contribueront aux frais de la Société, & aux subsides pou
2522 ; les Associez de l’Union contribueront aux frais de la Société, & aux subsides pour la sûreté à proportion chacun de
2523 ; aux subsides pour la sûreté à proportion chacun de leurs révenus & des richesses de leurs Peuples… XII. — On ne chan
2524 rtion chacun de leurs révenus & des richesses de leurs Peuples… XII. — On ne changera jamais rien aux onze Articles fo
2525 ci-dessus exprimez, sans le consentement unanime de tous les membres : mais à l’égard des autres Articles, la Société pou
2526 généralement sur « l’utopie ».et les « chimères » de son Projet, l’abbé avait écrit avec une sobre lucidité : Je conviens
2527 il avait ajouté : Il ne s’agit présentement que de commencer la ligue dans un congrès, à La Haye ou ailleurs. Deux-cent
2528 le Projet devait surtout sa célébrité au concert de railleries qu’il provoqua : c’est qu’elles n’émanaient point d’obscur
2529 qu’il provoqua : c’est qu’elles n’émanaient point d’ obscurantistes invétérés, mais plutôt d’esprits « éclairés », quoique
2530 ent point d’obscurantistes invétérés, mais plutôt d’ esprits « éclairés », quoique mauvaises langues, comme Voltaire et Fré
2531 ses langues, comme Voltaire et Frédéric II, voire d’ illustres protagonistes d’une Europe fédérée, comme Leibniz et Roussea
2532 e et Frédéric II, voire d’illustres protagonistes d’ une Europe fédérée, comme Leibniz et Rousseau, qui redoutaient que le
2533 Projet ne desservît la cause. Voltaire, parlant de l’art militaire : Je vous l’avoue, je formais des souhaits Pour que
2534 quité fît régner sur la terre L’impraticable paix de l’abbé de Saint-Pierre. Frédéric II, dans une lettre à Voltaire99 :
2535 int-Pierre, qui me distingue assez pour m’honorer de sa correspondance, m’a envoyé un bel ouvrage sur la façon de rétablir
2536 spondance, m’a envoyé un bel ouvrage sur la façon de rétablir la paix en Europe. La chose est très praticable : il ne manq
2537 manque pour la faire réussir que le consentement de l’Europe et quelques autres bagatelles semblables. Leibniz, à propos
2538 gatelles semblables. Leibniz, à propos d’un plan de Tribunal catholique européen100 : Voilà des projets qui réussiront a
2539 s projets qui réussiront aussi aisément que celui de M. l’abbé de Saint-Pierre, mais puisqu’il est permis de faire des rom
2540 réussiront aussi aisément que celui de M. l’abbé de Saint-Pierre, mais puisqu’il est permis de faire des romans, pourquoi
2541 l’abbé de Saint-Pierre, mais puisqu’il est permis de faire des romans, pourquoi trouverons-nous sa fiction mauvaise, qui n
2542 a fiction mauvaise, qui nous ramènerait le siècle d’ or. Rousseau, dans son Extrait du Projet : Si le Projet demeure san
2543 e les hommes sont insensés et que c’est une sorte de folie que d’être sage au milieu des fous.101 Bluntschli, juriste i
2544 sont insensés et que c’est une sorte de folie que d’ être sage au milieu des fous.101 Bluntschli, juriste international
2545 sort au mot du Cardinal Dubois : « C’est le rêve d’ un homme de bien. » À quoi Th. Ruyssen ajoute : « Mais ce rêve ne cess
2546 t du Cardinal Dubois : « C’est le rêve d’un homme de bien. » À quoi Th. Ruyssen ajoute : « Mais ce rêve ne cessera de hant
2547 oi Th. Ruyssen ajoute : « Mais ce rêve ne cessera de hanter la conscience de l’humanité. » 90. Ernest Nys, Émeric Crucé
2548 « Mais ce rêve ne cessera de hanter la conscience de l’humanité. » 90. Ernest Nys, Émeric Crucé, in Études de Droit Int
2549 ité. » 90. Ernest Nys, Émeric Crucé, in Études de Droit International, I, 1896. 91. Allusion au projet de La Noue, voi
2550 t International, I, 1896. 91. Allusion au projet de La Noue, voir plus haut. 92. Allusion à Jean Bodin, cité plus haut.
2551 imitif : Mémoires des sages et royales oeconomies d’ Estat, domestiques, politiques et militaires de Henry le Grand, l’Exem
2552 es d’Estat, domestiques, politiques et militaires de Henry le Grand, l’Exemplaire des roys, le prince des Vertus, des Arme
2553 ertus, des Armes et des Loix, et le Père en effet de ses Peuples François, et des servitudes utiles, obéissances convenabl
2554 béissances convenables et administrations loyales de Maximilien de Béthune…, etc. 94. C. J. Burckhardt : Vier historisch
2555 Verlag, Zürich, 1953, p. 25-29, 48-49. 95. Tirés de Jean Amos Comenius — Pages choisies, avec une introduction de Jean Pi
2556 Comenius — Pages choisies, avec une introduction de Jean Piaget — Unesco, 1957. 96. Hermès Trimégiste : c’est sous ce no
2557 rmès Trimégiste : c’est sous ce nom que les Grecs de la basse époque désignaient le dieu égyptien Toth, qui était le dieu
2558 ur dieu Hermès. 97. Nos citations sont extraites de l’Essai pour la paix présente et future de l’Europe par William Penn,
2559 raites de l’Essai pour la paix présente et future de l’Europe par William Penn, traduit par R. Umbdenstock, in William Pen
2560 k, in William Penn théoricien du Pacifisme. Thèse de l’Université de Dijon, 1931. 98. Extraits du Projet pour rendre la P
2561 nn théoricien du Pacifisme. Thèse de l’Université de Dijon, 1931. 98. Extraits du Projet pour rendre la Paix perpétuelle
2562 tuelle en Europe, Tome 1, Utrecht, 1713 (sans nom d’ auteur). 99. Frédéric II, Œuvres, tome XIV, p. 247. 100. Lettre à G
2563 101. La Rochefoucauld : « C’est une grande folie de vouloir être sage tout seul. »
8 1961, Vingt-huit siècles d’Europe. Deuxième partie. Prises de conscience européennes. De Pierre Dubois à l’abbé de Saint-Pierre, (xive au xixe siècle) — 6. En marge des grands plans, l’utopie prolifère
2564 entre 1623 et 1713, gravitent plusieurs douzaines d’ utopies politico-mystiques, de plans de fédérations, d’anticipations p
2565 plusieurs douzaines d’utopies politico-mystiques, de plans de fédérations, d’anticipations pacifistes ou d’élucubrations :
2566 douzaines d’utopies politico-mystiques, de plans de fédérations, d’anticipations pacifistes ou d’élucubrations : les titr
2567 pies politico-mystiques, de plans de fédérations, d’ anticipations pacifistes ou d’élucubrations : les titres seuls souvent
2568 ans de fédérations, d’anticipations pacifistes ou d’ élucubrations : les titres seuls souvent vaudraient d’être cités, dans
2569 ucubrations : les titres seuls souvent vaudraient d’ être cités, dans la mesure où ils nomment l’Europe comme unité, mais i
2570 ent l’Europe comme unité, mais il y faudrait trop de pages. Bornons-nous à quelques exemples choisis aux quatre coins du c
2571 und Haüpter Europæ geschrieben… C’était l’œuvre d’ un jeune théologien luthérien, Valentin Andreæ, inspirée de la Riforma
2572 e théologien luthérien, Valentin Andreæ, inspirée de la Riforma Generale dell’Universo du satiriste italien Trajano Boccal
2573 trouver au cours de leurs voyages, un seul membre de cette société. Cependant, il est établi que Leibniz fut, à vingt ans,
2574 tabli que Leibniz fut, à vingt ans, le secrétaire d’ une confrérie de rose-croix, à Nuremberg… En 1691, un commerçant suiss
2575 z fut, à vingt ans, le secrétaire d’une confrérie de rose-croix, à Nuremberg… En 1691, un commerçant suisse du nom de Goud
2576 à Nuremberg… En 1691, un commerçant suisse du nom de Goudet publiait en Hollande un ouvrage aujourd’hui introuvable, et qu
2577 sujet Jurieu et Pierre Bayle. Ces Huit Entretiens d’ Irène et Ariste proposaient aux Européens de s’unir pour se partager l
2578 tiens d’Irène et Ariste proposaient aux Européens de s’unir pour se partager l’Empire ottoman102. La paix perpétuelle deva
2579 x perpétuelle devait être assurée « par une armée de 40.000 Suisses équipée et maintenue sous les armes après accord de to
2580 équipée et maintenue sous les armes après accord de tous les pays d’Europe, ainsi que par 30.000 hommes recrutés chez d’a
2581 enue sous les armes après accord de tous les pays d’ Europe, ainsi que par 30.000 hommes recrutés chez d’autres nations eur
2582 me auteur du libelle, ce dernier perdit la chaire de philosophie qu’il occupait à Rotterdam. Le Projet de l’abbé de Saint-
2583 philosophie qu’il occupait à Rotterdam. Le Projet de l’abbé de Saint-Pierre devait donner lieu à une série d’ouvrages plus
2584 bé de Saint-Pierre devait donner lieu à une série d’ ouvrages plus ou moins analogues, tout au long du xviiie siècle. En I
2585 t entre les princes. On en revient donc aux plans de l’abbé. En Allemagne c’est le Dr Eobald Toze qui reprend l’idée dans
2586 Mecklembourg, 1752. Il passe en revue les projets d’ « Henry IV » (Sully), de Goudet, et de l’abbé, et les juges irréaliste
2587 asse en revue les projets d’« Henry IV » (Sully), de Goudet, et de l’abbé, et les juges irréalistes, parce que contraires
2588 les projets d’« Henry IV » (Sully), de Goudet, et de l’abbé, et les juges irréalistes, parce que contraires au principe tr
2589 stes, parce que contraires au principe triomphant de la souveraineté des États. Il n’a d’espoirs que dans une lente éducat
2590 e triomphant de la souveraineté des États. Il n’a d’ espoirs que dans une lente éducation « de l’esprit de justice, de l’am
2591 . Il n’a d’espoirs que dans une lente éducation «  de l’esprit de justice, de l’amour du prochain et de la maîtrise de soi,
2592 spoirs que dans une lente éducation « de l’esprit de justice, de l’amour du prochain et de la maîtrise de soi, aussi bien
2593 ans une lente éducation « de l’esprit de justice, de l’amour du prochain et de la maîtrise de soi, aussi bien chez les pri
2594 de l’esprit de justice, de l’amour du prochain et de la maîtrise de soi, aussi bien chez les princes que chez les peuples 
2595 justice, de l’amour du prochain et de la maîtrise de soi, aussi bien chez les princes que chez les peuples »105. Dans un m
2596 05. Dans un manuscrit retrouvé à Nancy, et datant de 1748, le roi Stanislas Leczinski critique lui aussi le Projet de l’ab
2597 Stanislas Leczinski critique lui aussi le Projet de l’abbé, et propose que le roi de France prenne la tête d’une union de
2598 é, et propose que le roi de France prenne la tête d’ une union des républiques européennes, car, dit-il avec un bel optimis
2599 e pour s’agrandir. Un aventurier français, auteur d’ un ouvrage d’économie, Ange Goudar, fait paraître à Rotterdam en 1757
2600 ndir. Un aventurier français, auteur d’un ouvrage d’ économie, Ange Goudar, fait paraître à Rotterdam en 1757 un écrit inti
2601 tre à Rotterdam en 1757 un écrit intitulé La paix de l’Europe ne petit s’établir qu’à la suite d’une longue trêve : par le
2602 paix de l’Europe ne petit s’établir qu’à la suite d’ une longue trêve : par le Chevalier G. La situation de l’Europe est as
2603 e longue trêve : par le Chevalier G. La situation de l’Europe est assez triste à l’en croire : On ne parle que des machin
2604 ste à l’en croire : On ne parle que des machines de Guerre et les plus destructives sont toujours les mieux reçues. Un Pa
2605 reçues. Un Particulier qui découvriroit un moyen d’ exterminer une nation entière, d’un seul coup, seroit regardé aujourd’
2606 Européens, observe-t-il, qui ont propagé le fléau de leurs guerres sur les autres continents, et cela du fait de leur expa
2607 uerres sur les autres continents, et cela du fait de leur expansion économique. Les armes économiques sont devenues décisi
2608 qu’ils procurent les richesses qui sont les nerfs de la Guerre. Cet esprit très moderne, et sobre, ne voit d’espoir que d
2609 erre. Cet esprit très moderne, et sobre, ne voit d’ espoir que dans une trêve de vingt ans pour apaiser les fièvres guerri
2610 ne, et sobre, ne voit d’espoir que dans une trêve de vingt ans pour apaiser les fièvres guerrières des souverains d’Europe
2611 our apaiser les fièvres guerrières des souverains d’ Europe. Un grand seigneur livonien, J. H. von Lilienfeld, publie à Lei
2612 s Staats-Gebaüde. Il propose lui aussi la réunion d’ un congrès des puissances chrétiennes, mais il ajoute deux importantes
2613 ibunal souverain » appliquerait aux États un Code de droit international, et désignerait en cas de besoin les forces armée
2614 ode de droit international, et désignerait en cas de besoin les forces armées chargées d’exécuter contre tel État récalcit
2615 erait en cas de besoin les forces armées chargées d’ exécuter contre tel État récalcitrant les sanctions requises par le co
2616 es mêmes motifs militent en faveur d’un même type d’ union : c’est toujours pour assurer la paix, et donc pour juguler les
2617 our juguler les souverainetés que l’on se propose d’ unir les puissances chrétiennes par quelque lien de droit confédéral.
2618 ’unir les puissances chrétiennes par quelque lien de droit confédéral. Et toujours, l’élément fédérateur apparemment indis
2619 e Révolution française pour voir paraître un plan d’ union qui change de « tête de Turc » si l’on ose dire. Anticipons sur
2620 ise pour voir paraître un plan d’union qui change de « tête de Turc » si l’on ose dire. Anticipons sur la chronologie, pou
2621 oir paraître un plan d’union qui change de « tête de Turc » si l’on ose dire. Anticipons sur la chronologie, pour marquer
2622 cipons sur la chronologie, pour marquer cette fin d’ une époque. Il s’agit du Plan d’une pacification générale en Europe pa
2623 marquer cette fin d’une époque. Il s’agit du Plan d’ une pacification générale en Europe par le Citoyen Delaunay, Consul de
2624 énérale en Europe par le Citoyen Delaunay, Consul de la République, Paris 1794. L’auteur commence par avertir que quand on
2625 and on rêve pour le public, il faut prendre garde de s’endormir et de mettre sa sensibilité à la place de son jugement. Il
2626 le public, il faut prendre garde de s’endormir et de mettre sa sensibilité à la place de son jugement. Il s’agit de créer
2627 sensibilité à la place de son jugement. Il s’agit de créer une Convention européenne. Mais, à cette fin, qu’on n’attende p
2628 gramme aux futurs députés, mais qu’on se contente d’ indiquer les moyens de parvenir à cette Convention. Enfin et surtout,
2629 tés, mais qu’on se contente d’indiquer les moyens de parvenir à cette Convention. Enfin et surtout, qu’on se garde de reco
2630 ette Convention. Enfin et surtout, qu’on se garde de recourir au mythe de la croisade contre les Turcs : car il faut au co
2631 n et surtout, qu’on se garde de recourir au mythe de la croisade contre les Turcs : car il faut au contraire les avoir ave
2632 me organisation européenne, on doit tout craindre de l’influence russe : Si on réfléchit sur l’étonnante augmentation de
2633 e : Si on réfléchit sur l’étonnante augmentation de puissance de la Russie, depuis un siècle, sur ce qu’elle peut devenir
2634 fléchit sur l’étonnante augmentation de puissance de la Russie, depuis un siècle, sur ce qu’elle peut devenir, et sur son
2635 alement qu’on mette un frein à la seule puissance de l’Europe qui puisse y lancer de grandes révolutions. D’où l’idée d’i
2636 a seule puissance de l’Europe qui puisse y lancer de grandes révolutions. D’où l’idée d’instituer deux grands groupes : u
2637 rope qui puisse y lancer de grandes révolutions. D’ où l’idée d’instituer deux grands groupes : une Confédération d’Occide
2638 sse y lancer de grandes révolutions. D’où l’idée d’ instituer deux grands groupes : une Confédération d’Occident, centrée
2639 instituer deux grands groupes : une Confédération d’ Occident, centrée sur la France, l’Angleterre et l’Espagne, et une Con
2640 , l’Angleterre et l’Espagne, et une Confédération d’ Orient, centrée sur la Russie, l’Autriche et le corps germanique. Quan
2641 serait entièrement neutre et deviendrait le siège de la Confédération d’Occident, tandis que Danzig serait le siège de cel
2642 eutre et deviendrait le siège de la Confédération d’ Occident, tandis que Danzig serait le siège de celle d’Orient. Au res
2643 ion d’Occident, tandis que Danzig serait le siège de celle d’Orient. Au reste, qu’on ne croie pas que l’uniformité économ
2644 ident, tandis que Danzig serait le siège de celle d’ Orient. Au reste, qu’on ne croie pas que l’uniformité économique soit
2645 e pas que l’uniformité économique soit un facteur d’ union, bien au contraire : C’est parce que le sol de l’Europe n’est pa
2646 union, bien au contraire : C’est parce que le sol de l’Europe n’est pas le même partout, n’est pas également fertile, prod
2647 ile, produit des fruits différents et des trésors de diverses natures, que les Européens sont appelés à s’unir et à se bie
2648 des échanges faciles, tout ce qui peut leur être de nécessité, d’utilité ou de luxe.107 102. Il s’agit donc d’un des C
2649 faciles, tout ce qui peut leur être de nécessité, d’ utilité ou de luxe.107 102. Il s’agit donc d’un des Cent projets de
2650 ce qui peut leur être de nécessité, d’utilité ou de luxe.107 102. Il s’agit donc d’un des Cent projets de partage de l
2651 , d’utilité ou de luxe.107 102. Il s’agit donc d’ un des Cent projets de partage de la Turquie recensés par Djuvara dans
2652 .107 102. Il s’agit donc d’un des Cent projets de partage de la Turquie recensés par Djuvara dans un livre qui porte ce
2653 . Il s’agit donc d’un des Cent projets de partage de la Turquie recensés par Djuvara dans un livre qui porte ce titre, Par
2654 etzevitch, La Révolution française et les projets d’ union européenne in La Révolution française, Paris, 1931, Tome 84, p. 
9 1961, Vingt-huit siècles d’Europe. Troisième partie. L’ère des philosophes. De Leibniz à Condorcet — 1. Perspectives élargies
2655 Il a vécu dans la plupart de nos pays, il souffre de leurs dissensions, il veut l’union de l’Europe dans ses diversités, e
2656 il souffre de leurs dissensions, il veut l’union de l’Europe dans ses diversités, en fait un plan et le propose à Louis X
2657 mais admirateur sincère du catholicisme romain et de l’orthodoxie russe, il s’épuise à les concilier, d’où sa correspondan
2658 l’orthodoxie russe, il s’épuise à les concilier, d’ où sa correspondance fameuse avec Bossuet : œcuménisme. Européen consc
2659 use avec Bossuet : œcuménisme. Européen conscient de nos valeurs spécifiques, il voit le monde s’agrandir et s’en réjouit 
2660 en réjouit : universalisme. Il a cherché le moyen de correspondre en toutes les langues, par le moyen d’un ars combinatori
2661 correspondre en toutes les langues, par le moyen d’ un ars combinatoria, et sa plus glorieuse découverte mathématique, le
2662 que, le calcul infinitésimal, est encore un moyen de passage du discontinu au continu, une harmonie… « Les académies qu’il
2663 , une harmonie… « Les académies qu’il s’efforçait de fonder dans les différents pays n’étaient dans sa pensée que les frag
2664 sa pensée que les fragments épars et provisoires d’ une vaste Académie européenne, d’une fédération des savants dont elles
2665 s et provisoires d’une vaste Académie européenne, d’ une fédération des savants dont elles eussent constitué simplement des
2666 ici d’abord le citoyen du monde : Je ne suis pas de ceux qui sont fanatisés par leur pays ou encore par une nation partic
2667 sidère le Ciel comme la Patrie et tous les hommes de bonne volonté comme les concitoyens en ce Ciel ; et j’aime mieux acco
2668 En 1670, déjà, Leibniz redoutant les ambitions de Louis XIV avait cherché à les détourner vers l’Orient. De là l’ébauch
2669 XIV avait cherché à les détourner vers l’Orient. De là l’ébauche du plan qu’il soumit au roi, intitulé Consilium Ægypticm
2670 i, intitulé Consilium Ægypticmorum. Il s’agissait de se tourner contre les Turcs, une fois de plus, de conquérir l’Égypte
2671 de se tourner contre les Turcs, une fois de plus, de conquérir l’Égypte et de percer l’isthme de Suez. Leibniz espérait ai
2672 Turcs, une fois de plus, de conquérir l’Égypte et de percer l’isthme de Suez. Leibniz espérait ainsi pacifier l’Europe et
2673 plus, de conquérir l’Égypte et de percer l’isthme de Suez. Leibniz espérait ainsi pacifier l’Europe et provoquer son union
2674 me à Paris, mais ne le reçut pas, les difficultés de la France avec le Sultan s’étant aplanies entre-temps… En 1676, la pa
2675 an s’étant aplanies entre-temps… En 1676, la paix de Nimègue ayant affirmé la prédominance menaçante de Louis XIV en Europ
2676 e Nimègue ayant affirmé la prédominance menaçante de Louis XIV en Europe, Leibniz publie un traité en latin sous le pseudo
2677 bniz publie un traité en latin sous le pseudonyme de Cæsarius Fursterinus, dans lequel il prend la défense des princes du
2678 l prend la défense des princes du Saint-Empire et de leur autonomie. Il rappelle qu’au Moyen Âge la double autorité de l’e
2679 e. Il rappelle qu’au Moyen Âge la double autorité de l’empereur et du pape ménageait la liberté des souverainetés fédérées
2680 mes, le pape et l’empereur, exerçaient le pouvoir de sa part, l’un le pouvoir spirituel, l’autre le pouvoir temporel. Et i
2681 emporel. Et il était manifestement dans l’intérêt de tous que les chrétiens fussent réunis sous une autorité commune, en s
2682 mps ils se fissent craindre davantage des ennemis de la foi… Et parce que manifestement, dans le monde chrétien, la majest
2683 tement, dans le monde chrétien, la majesté sacrée de l’empereur romain repose sur cette base, il s’ensuit qu’elle ne doit
2684 mpereur doit être investi, dans une grande partie de l’Europe, d’un pouvoir, ainsi que d’une sorte de souveraineté suprême
2685 être investi, dans une grande partie de l’Europe, d’ un pouvoir, ainsi que d’une sorte de souveraineté suprême correspondan
2686 rande partie de l’Europe, d’un pouvoir, ainsi que d’ une sorte de souveraineté suprême correspondant à celle de l’Église ;
2687 de l’Europe, d’un pouvoir, ainsi que d’une sorte de souveraineté suprême correspondant à celle de l’Église ; et de même q
2688 rte de souveraineté suprême correspondant à celle de l’Église ; et de même que, dans notre Empire, en vue du maintien de l
2689 e même que, dans notre Empire, en vue du maintien de la paix universelle, des contributions communes sont exigées pour la
2690 étien. On reconnaît ici les thèses fondamentales de la Monarchie de Dante. Par ailleurs, la sympathie qu’éprouvait ce lut
2691 naît ici les thèses fondamentales de la Monarchie de Dante. Par ailleurs, la sympathie qu’éprouvait ce luthérien pour la p
2692 feste à maintes reprises, quoique parfois teintée de quelque ironie. Ainsi une lettre relative au projet du prince de Hess
2693 du prince de Hesse-Rheinfels : celui-ci proposait d’ établir un « Tribunal catholique européen » et d’en fixer le siège à L
2694 d’établir un « Tribunal catholique européen » et d’ en fixer le siège à Lucerne. Leibniz commente : S’il existait un cons
2695 permanent ou un Sénat créé par ce concile, chargé de veiller aux intérêts généraux de la chrétienté, ce qui se fait mainte
2696 concile, chargé de veiller aux intérêts généraux de la chrétienté, ce qui se fait maintenant par les alliances, et, comme
2697 public fondé par le pape et l’empereur en qualité de chefs de la chrétienté ; donc par le moyen d’une entente amicale et d
2698 ndé par le pape et l’empereur en qualité de chefs de la chrétienté ; donc par le moyen d’une entente amicale et d’une mani
2699 ité de chefs de la chrétienté ; donc par le moyen d’ une entente amicale et d’une manière plus pratique et convenable qu’ac
2700 enté ; donc par le moyen d’une entente amicale et d’ une manière plus pratique et convenable qu’actuellement. … Pour moi, j
2701 convenable qu’actuellement. … Pour moi, je serois d’ avis de l’établir à Rome même et d’en faire le pape président, comme e
2702 ble qu’actuellement. … Pour moi, je serois d’avis de l’établir à Rome même et d’en faire le pape président, comme en effet
2703 moi, je serois d’avis de l’établir à Rome même et d’ en faire le pape président, comme en effet il faisoit autrefois figure
2704 ident, comme en effet il faisoit autrefois figure de juge entre les princes chrétiens. Mais il faudroit en même temps que
2705 trembler des rois et des royaumes, comme du tems de Nicolas Ier ou de Grégoire VII. Et pour y faire consentir les protest
2706 et des royaumes, comme du tems de Nicolas Ier ou de Grégoire VII. Et pour y faire consentir les protestants, il faudroit
2707 ir les protestants, il faudroit prier sa Sainteté de rétablir la forme de l’Église telle qu’elle fut du tems de Charlemagn
2708 l faudroit prier sa Sainteté de rétablir la forme de l’Église telle qu’elle fut du tems de Charlemagne, lorsqu’il tenait l
2709 ir la forme de l’Église telle qu’elle fut du tems de Charlemagne, lorsqu’il tenait le concile de Francfort ; et de renonce
2710 tems de Charlemagne, lorsqu’il tenait le concile de Francfort ; et de renoncer à tous conciles tenus depuis, qui ne sauro
2711 ne, lorsqu’il tenait le concile de Francfort ; et de renoncer à tous conciles tenus depuis, qui ne sauroient passer pour œ
2712 que les papes ressemblassent aux premiers évêques de Rome. Voilà des projets qui réussiront aussi aisément que celui de M.
2713 s projets qui réussiront aussi aisément que celui de M. l’abbé de Saint-Pierre, mais puisqu’il est permis de faire des rom
2714 réussiront aussi aisément que celui de M. l’abbé de Saint-Pierre, mais puisqu’il est permis de faire des romans, pourquoi
2715 l’abbé de Saint-Pierre, mais puisqu’il est permis de faire des romans, pourquoi trouverons-nous sa fiction mauvaise, qui n
2716 a fiction mauvaise, qui nous ramènerait le siècle d’ or.110 Au sujet de l’abbé de Saint-Pierre, Leibniz s’exprimera un pe
2717 des objections, et à votre manière nette et ronde d’ y répondre. Il n’y a que la volonté qui manque aux hommes pour se déli
2718 la volonté qui manque aux hommes pour se délivrer d’ une infinité de maux. Si cinq ou six personnes vouloient, elles pourro
2719 manque aux hommes pour se délivrer d’une infinité de maux. Si cinq ou six personnes vouloient, elles pourroient faire cess
2720 t, elles pourroient faire cesser le grand Schisme d’ Occident, et mettre l’Église dans un bon ordre. Un Souverain qui le ve
2721 uverain qui le veut bien peut préserver ses États de la peste ; la maison de Brunswick n’y a pas mal réussi, grâces à Dieu
2722 peut préserver ses États de la peste ; la maison de Brunswick n’y a pas mal réussi, grâces à Dieu ; la peste s’est arrêté
2723 al réussi, grâces à Dieu ; la peste s’est arrêtée de mon tems à ses frontières. Un Souverain pourrait encore garantir ses
2724 . Un Souverain pourrait encore garantir ses États de la famine. Mais pour faire cesser les guerres, il faudroit qu’un autr
2725 u’un autre Henri IV, avec quelques grands princes de son tems, goûtât votre Projet. Le mal est qu’il est difficile de le f
2726 ûtât votre Projet. Le mal est qu’il est difficile de le faire entendre aux grands princes. Il n’y a point de Ministre main
2727 faire entendre aux grands princes. Il n’y a point de Ministre maintenant qui voudrait proposer à l’empereur de renoncer à
2728 tre maintenant qui voudrait proposer à l’empereur de renoncer à la succession de l’Espagne, et des Indes. Les Puissances M
2729 proposer à l’empereur de renoncer à la succession de l’Espagne, et des Indes. Les Puissances Maritimes et tant d’autres y
2730 us souvent des fatalités qui empêchent les hommes d’ être heureux… Leibniz, conseiller de Pierre le Grand, considérait que
2731 t les hommes d’être heureux… Leibniz, conseiller de Pierre le Grand, considérait que le rôle de la Russie devait être cel
2732 iller de Pierre le Grand, considérait que le rôle de la Russie devait être celui d’un trait d’union chrétien entre l’Europ
2733 dérait que le rôle de la Russie devait être celui d’ un trait d’union chrétien entre l’Europe et la Chine, en vue d’une syn
2734 le rôle de la Russie devait être celui d’un trait d’ union chrétien entre l’Europe et la Chine, en vue d’une synthèse supér
2735 union chrétien entre l’Europe et la Chine, en vue d’ une synthèse supérieure des civilisations. Il semble encore, que c’es
2736 ’est une fatalité singulière, ou plustost un coup de la Providence, qu’à même temps dans le Nord, dans l’Est et dans le Su
2737 iewiecz, souverain Seigneur des Russes et presque de tout le Nord, nous apprenons que Cam-hi, Amalogdo-Chan, monarque de l
2738 ous apprenons que Cam-hi, Amalogdo-Chan, monarque de la Chine et des Tartares les plus orientaux, et Jakso Adjam-Saugbed,
2739 res — ont tous conçu des desseins, qui surpassent de beaucoup ceux de leurs ancestres, comme nous apprenons tant par les r
2740 nçu des desseins, qui surpassent de beaucoup ceux de leurs ancestres, comme nous apprenons tant par les relations nouvelle
2741 e nous apprenons tant par les relations nouvelles de la Chine, où le christianisme vient d’être autorisé et appuyé d’un éd
2742 nouvelles de la Chine, où le christianisme vient d’ être autorisé et appuyé d’un édit du roy, que par l’ambassade des Abys
2743 le christianisme vient d’être autorisé et appuyé d’ un édit du roy, que par l’ambassade des Abyssins à Batavie en 1692. Le
2744 et frontiers du Turc, quoique bien éloignés l’un de l’autre. Mais le tsar et le monarque des Chinois sont frontiers entre
2745 les arts et les bonnes manières particulièrement de notre Europe, et ils se peuvent prester la main et obliger mutuelleme
2746 t à celles des jésuites : J’insinue qu’il serait de la gloire de Dieu et de l’honneur des protestants de prendre part à c
2747 s jésuites : J’insinue qu’il serait de la gloire de Dieu et de l’honneur des protestants de prendre part à cette grande a
2748 : J’insinue qu’il serait de la gloire de Dieu et de l’honneur des protestants de prendre part à cette grande aventure dan
2749 la gloire de Dieu et de l’honneur des protestants de prendre part à cette grande aventure dans le champ du Seigneur, afin
2750 juge que cette mission est la plus grande affaire de notre temps, tant pour la gloire de Dieu et la propagation de la reli
2751 rande affaire de notre temps, tant pour la gloire de Dieu et la propagation de la religion chrétienne, que pour le bien gé
2752 ps, tant pour la gloire de Dieu et la propagation de la religion chrétienne, que pour le bien général des hommes et l’accr
2753 bien que chez les Chinois ; car c’est un commerce de lumière qui nous peut donner d’un seul coup leurs travaux de quelques
2754 qui nous peut donner d’un seul coup leurs travaux de quelques milliers d’années… et doubler, pour ainsi dire, nos véritabl
2755 d’un seul coup leurs travaux de quelques milliers d’ années… et doubler, pour ainsi dire, nos véritables richesses de part
2756 oubler, pour ainsi dire, nos véritables richesses de part et d’autre.113 Enfin ce trait final : dans un fragment latin i
2757 r ainsi dire, nos véritables richesses de part et d’ autre.113 Enfin ce trait final : dans un fragment latin intitulé : «
2758 , l’Europe se découvre Ces dernières citations de Leibniz sont importantes. Elles témoignent d’une révolution de l’espr
2759 ons de Leibniz sont importantes. Elles témoignent d’ une révolution de l’esprit qui se produit à la fin du xviie et au déb
2760 nt importantes. Elles témoignent d’une révolution de l’esprit qui se produit à la fin du xviie et au début du xviiie siè
2761 t remis à voyager, plus encore qu’aux beaux jours de la Renaissance, et surtout bien plus loin. Ce ne sont plus seulement
2762 e découvre elle-même, en se comparant aux peuples d’ outre-mer. Au début et au terme de cette vaste enquête, plaçons en épi
2763 ant aux peuples d’outre-mer. Au début et au terme de cette vaste enquête, plaçons en épigraphes quatre cartes postales du
2764 s : Miguel de Cervantès (1547-1616) : Je sortis de notre nation pour entrer en France, et quoique nous y fussions bien a
2765 il me sembla que l’on pouvait vivre avec le plus de liberté.114 Balthazar Gracian (1601-1658), célèbre auteur de « L’H
2766 Balthazar Gracian (1601-1658), célèbre auteur de « L’Homme de Cour » : L’Europe est la face admirable du monde : gra
2767 Gracian (1601-1658), célèbre auteur de « L’Homme de Cour » : L’Europe est la face admirable du monde : grave en Espagne
2768 du monde : grave en Espagne, jolie en Angleterre, de bel air en France, fine en Italie, fraîche en Allemagne, précieuse en
2769 arl von Linné (1707-1778), le « premier botaniste de l’Europe », aussi zoologiste, et ici anthropologue : Homo Europæus.
2770 ur ritibus.116 Le Grand Dictionnaire historique de Louis Moreri, publié en 1674, donne une description sommaire de l’Eur
2771 i, publié en 1674, donne une description sommaire de l’Europe où déjà se retrouvent tous les clichés sur la psychologie de
2772 prisans et fiers jusqu’à la férocité. Les peuples d’ Europe, par leur adresse et par leur courage, se sont soumis ceux des
2773 abitent. Nous devons encore ajouter aux avantages de l’Europe, celui qu’elle a d’être presque toute éclairée des lumières
2774 jouter aux avantages de l’Europe, celui qu’elle a d’ être presque toute éclairée des lumières de l’Évangile. Suit une « li
2775 elle a d’être presque toute éclairée des lumières de l’Évangile. Suit une « liste des auteurs qui parlent de l’Europe » (
2776 angile. Suit une « liste des auteurs qui parlent de l’Europe » (premier sommaire pour une Anthologie européenne !) qui va
2777 sommaire pour une Anthologie européenne !) qui va de Strabon et Ptolémée jusqu’aux géographes modernes, comme Rabbe. L’hi
2778 ux géographes modernes, comme Rabbe. L’historien de la culture Paul Hazard a décrit mieux que personne, de nos jours, ce
2779 culture Paul Hazard a décrit mieux que personne, de nos jours, ce phénomène de découverte de l’Europe par elle-même117 :
2780 it mieux que personne, de nos jours, ce phénomène de découverte de l’Europe par elle-même117 : Quand Boileau prenait les
2781 ersonne, de nos jours, ce phénomène de découverte de l’Europe par elle-même117 : Quand Boileau prenait les eaux de Bourbo
2782 ar elle-même117 : Quand Boileau prenait les eaux de Bourbon, il pensait être au but du monde ; Auteuil lui suffisait. Par
2783 , ils aimaient tant la nouveauté qu’ils faisaient de leur mieux pour ne pas conserver longtemps un ami ; qu’ils inventaien
2784 l’Asie et tantôt pour l’Afrique, afin de changer de lieu et de se divertir118. Les Allemands voyageaient, c’était leur ha
2785 tantôt pour l’Afrique, afin de changer de lieu et de se divertir118. Les Allemands voyageaient, c’était leur habitude, leu
2786 t, c’était leur habitude, leur manie ; impossible de les retenir chez eux. « Nous voyageons de père en fils, sans qu’aucun
2787 ossible de les retenir chez eux. « Nous voyageons de père en fils, sans qu’aucune affaire nous en empêche jamais », dit l’
2788 age ; la première chose dont on se fournit, c’est d’ un Itinéraire, qui enseigne les voies ; la seconde, d’un petit livre q
2789 Itinéraire, qui enseigne les voies ; la seconde, d’ un petit livre qui apprend ce qu’il y a de curieux en chaque pays. Lor
2790 econde, d’un petit livre qui apprend ce qu’il y a de curieux en chaque pays. Lorsque nos voyageurs sont gens de lettres, i
2791 x en chaque pays. Lorsque nos voyageurs sont gens de lettres, ils se munissent en partant de chez eux d’un livre blanc, bi
2792 sont gens de lettres, ils se munissent en partant de chez eux d’un livre blanc, bien relié, qu’on nomme Album Amicorum, et
2793 lettres, ils se munissent en partant de chez eux d’ un livre blanc, bien relié, qu’on nomme Album Amicorum, et ne manquent
2794 é, qu’on nomme Album Amicorum, et ne manquent pas d’ aller visiter les savants de tous les lieux où ils passent, et de le l
2795 m, et ne manquent pas d’aller visiter les savants de tous les lieux où ils passent, et de le leur présenter afin qu’ils y
2796 les savants de tous les lieux où ils passent, et de le leur présenter afin qu’ils y mettent leur nom… Les Anglais voyagea
2797 m… Les Anglais voyageaient, c’était le complément de leur éducation ; les jeunes seigneurs fraîchement sortis d’Oxford et
2798 ucation ; les jeunes seigneurs fraîchement sortis d’ Oxford et de Cambridge, bien pourvus de guinées et flanqués d’un sage
2799 s jeunes seigneurs fraîchement sortis d’Oxford et de Cambridge, bien pourvus de guinées et flanqués d’un sage précepteur,
2800 ent sortis d’Oxford et de Cambridge, bien pourvus de guinées et flanqués d’un sage précepteur, franchissaient le détroit e
2801 de Cambridge, bien pourvus de guinées et flanqués d’ un sage précepteur, franchissaient le détroit et entreprenaient le gra
2802 troit et entreprenaient le grand tour. On en a vu de toute espèce ; certains se contentaient de connaître le muscat de Fro
2803 n a vu de toute espèce ; certains se contentaient de connaître le muscat de Frontignan et de Montefiascone, les vins d’Ay,
2804 ; certains se contentaient de connaître le muscat de Frontignan et de Montefiascone, les vins d’Ay, d’Arbois, de Bordeaux,
2805 tentaient de connaître le muscat de Frontignan et de Montefiascone, les vins d’Ay, d’Arbois, de Bordeaux, de Xérez, tandis
2806 uscat de Frontignan et de Montefiascone, les vins d’ Ay, d’Arbois, de Bordeaux, de Xérez, tandis que d’autres, avec conscie
2807 de Frontignan et de Montefiascone, les vins d’Ay, d’ Arbois, de Bordeaux, de Xérez, tandis que d’autres, avec conscience, é
2808 nan et de Montefiascone, les vins d’Ay, d’Arbois, de Bordeaux, de Xérez, tandis que d’autres, avec conscience, étudiaient
2809 tefiascone, les vins d’Ay, d’Arbois, de Bordeaux, de Xérez, tandis que d’autres, avec conscience, étudiaient tous les cabi
2810 es, avec conscience, étudiaient tous les cabinets d’ histoire naturelle, toutes les collections d’antiquités. À chacun son
2811 nets d’histoire naturelle, toutes les collections d’ antiquités. À chacun son caractère : « Les Français voyagent ordinaire
2812 rgner, de sorte qu’ils apportent quelquefois plus de dommage que de profit dans les endroits où ils logent. Les Anglais, a
2813 qu’ils apportent quelquefois plus de dommage que de profit dans les endroits où ils logent. Les Anglais, au contraire, so
2814 où ils logent. Les Anglais, au contraire, sortent d’ Angleterre avec de bonnes lettres de change, avec un bel équipage et u
2815 Anglais, au contraire, sortent d’Angleterre avec de bonnes lettres de change, avec un bel équipage et une grande suite, e
2816 aire, sortent d’Angleterre avec de bonnes lettres de change, avec un bel équipage et une grande suite, et font de magnifiq
2817 avec un bel équipage et une grande suite, et font de magnifiques dépenses. On compte que, dans la seule ville de Rome, il
2818 ques dépenses. On compte que, dans la seule ville de Rome, il y a pour l’ordinaire plus de cinquante gentilshommes anglais
2819 seule ville de Rome, il y a pour l’ordinaire plus de cinquante gentilshommes anglais, et toujours avec des gens à leurs ga
2820 x-mille écus par an ; de sorte que la seule ville de Rome tire tous les ans d’Angleterre plus de trente mille pistoles eff
2821 orte que la seule ville de Rome tire tous les ans d’ Angleterre plus de trente mille pistoles effectives. » C’est Gregorio
2822 ville de Rome tire tous les ans d’Angleterre plus de trente mille pistoles effectives. » C’est Gregorio Leti qui nous le d
2823 à Milan, se fit calviniste à Genève, panégyriste de Louis XIV à Paris, historien d’Angleterre à Londres, pamphlétaire au
2824 nève, panégyriste de Louis XIV à Paris, historien d’ Angleterre à Londres, pamphlétaire au service des États en Hollande, o
2825 née 1701. Des savants enrichissaient leur science de ville en ville, comme Antonio Conti, Padouan, qui fut en 1713 à Paris
2826 Leibniz, et, en passant par la Hollande, eut soin de rendre visite à Leuwenhœck. Des philosophes voyageaient, et non pas a
2827 ites, les catalogues des musées, ou les histoires d’ amour, le Voyage triomphait. … Il existe un titre charmant, qu’on ne
2828 tre charmant, qu’on ne peut lire sans avoir envie de prendre la poste, sans entrevoir un horizon plein de douces promesses
2829 prendre la poste, sans entrevoir un horizon plein de douces promesses : les Délices. Les Délices de l’Italie ; Les Délices
2830 in de douces promesses : les Délices. Les Délices de l’Italie ; Les Délices et Agréments du Danemark et de la Norvège ; Le
2831 ’Italie ; Les Délices et Agréments du Danemark et de la Norvège ; Les Délices de la Grande-Bretagne et de l’Irlande ; L’Ét
2832 éments du Danemark et de la Norvège ; Les Délices de la Grande-Bretagne et de l’Irlande ; L’État et les Délices de la Suis
2833 la Norvège ; Les Délices de la Grande-Bretagne et de l’Irlande ; L’État et les Délices de la Suisse. Et toutes ces Délices
2834 -Bretagne et de l’Irlande ; L’État et les Délices de la Suisse. Et toutes ces Délices, réunies, donnent Les Merveilles de
2835 utes ces Délices, réunies, donnent Les Merveilles de l’Europe. Mais la Galerie agréable du monde, n’est-elle pas plus sédu
2836 ante encore ? L’Europe, en effet, ne cessait plus de travailler à découvrir le monde, et à l’exploiter ; le xviie siècle
2837 mers, mais publient la plus copieuse littérature de voyages qui soit au monde ; à mesure que Colbert propose à l’activité
2838 riches colonies et les comptoirs lointains : que de récits en reviendront, « faits par ordre du roi » ! Le roi ne se dout
2839 par ordre du roi » ! Le roi ne se doutait pas que de ces récits eux-mêmes, naîtraient des idées capables d’ébranler les no
2840 s récits eux-mêmes, naîtraient des idées capables d’ ébranler les notions les plus chères à sa croyance, et les plus nécess
2841 sa croyance, et les plus nécessaires au maintien de son autorité. … Il est parfaitement exact d’affirmer que toutes les i
2842 tien de son autorité. … Il est parfaitement exact d’ affirmer que toutes les idées vitales, celle de propriété, celle de li
2843 ct d’affirmer que toutes les idées vitales, celle de propriété, celle de liberté, celle de justice, ont été remises en dis
2844 utes les idées vitales, celle de propriété, celle de liberté, celle de justice, ont été remises en discussion par l’exempl
2845 ales, celle de propriété, celle de liberté, celle de justice, ont été remises en discussion par l’exemple du lointain. D’a
2846 versel, on a constaté l’existence du particulier, de l’irréductible, de l’individuel. Ensuite parce qu’aux opinions reçues
2847 té l’existence du particulier, de l’irréductible, de l’individuel. Ensuite parce qu’aux opinions reçues, on peut opposer d
2848 qu’aux opinions reçues, on peut opposer des faits d’ expérience, mis sans peine à la portée des penseurs. … De toutes les l
2849 ience, mis sans peine à la portée des penseurs. … De toutes les leçons que donne l’espace, la plus neuve peut-être fut cel
2850 donne l’espace, la plus neuve peut-être fut celle de la relativité. » Jésuites missionnaires, réformés chassés par la rév
2851 missionnaires, réformés chassés par la révocation de l’édit de Nantes, « dissenters » embarqués pour la Nouvelle Amsterdam
2852 s antipodes donnent surtout une vision nouvelle … de l’Europe. D’une Europe relativisée, certes, mais mieux vue dans son u
2853 onnent surtout une vision nouvelle … de l’Europe. D’ une Europe relativisée, certes, mais mieux vue dans son unicité, et au
2854 e dans son unicité, et aussi dans son unité. Plus d’ un, d’ailleurs, a cru trouver chez les « barbares » l’idéal qu’il avai
2855 érante. L’éloge du Primitif lointain sert d’abord d’ argument contre certains voisins. De là les nombreux mythes de compens
2856 sert d’abord d’argument contre certains voisins. De là les nombreux mythes de compensation qui se développent au xviiie
2857 ontre certains voisins. De là les nombreux mythes de compensation qui se développent au xviiie siècle : le bon sauvage, l
2858 Hindou tolérant et surtout le Chinois philosophe. De là les « utopies » (mot créé par Thomas More au xvie siècle) et les
2859 inien Cyrano de Bergerac et ses Estats et empires de la Lune puis du Soleil, Swift et ses Voyages de Gulliver, Giovanni Pa
2860 s de la Lune puis du Soleil, Swift et ses Voyages de Gulliver, Giovanni Paolo Marana et son Espoir du Grand Seigneur, Mont
2861 son Ingénu, Rousseau et son Homme né bon. Autant de pamphlets d’ailleurs, autant de manœuvres politiques et philosophique
2862 me né bon. Autant de pamphlets d’ailleurs, autant de manœuvres politiques et philosophiques, autant de prises de conscienc
2863 de manœuvres politiques et philosophiques, autant de prises de conscience critiques du rôle de l’Europe dans le monde. Le
2864 es politiques et philosophiques, autant de prises de conscience critiques du rôle de l’Europe dans le monde. Le xviiie si
2865 autant de prises de conscience critiques du rôle de l’Europe dans le monde. Le xviiie siècle marque ainsi le mouvement d
2866 onde. Le xviiie siècle marque ainsi le mouvement de réflexion sur l’Europe de ses propres « grandes découvertes ». Vic
2867 rque ainsi le mouvement de réflexion sur l’Europe de ses propres « grandes découvertes ». Vico Jean-Baptiste Vico na
2868 ien aux vues amples et poétiques mais peu capable d’ exactitude, métaphysicien baroque mais devançant plus d’une fois la sc
2869 titude, métaphysicien baroque mais devançant plus d’ une fois la science physique et la sociologie des siècles à venir, il
2870 sants et le premier des Modernes, le continuateur de Pic de la Mirandole, de Giordano Bruno, de Cardan, et le précurseur d
2871 t le premier des Modernes, le continuateur de Pic de la Mirandole, de Giordano Bruno, de Cardan, et le précurseur de Hegel
2872 Modernes, le continuateur de Pic de la Mirandole, de Giordano Bruno, de Cardan, et le précurseur de Hegel et de Croce. C’e
2873 uateur de Pic de la Mirandole, de Giordano Bruno, de Cardan, et le précurseur de Hegel et de Croce. C’est à son œuvre prin
2874 e, de Giordano Bruno, de Cardan, et le précurseur de Hegel et de Croce. C’est à son œuvre principale, la Scienza Nuova que
2875 no Bruno, de Cardan, et le précurseur de Hegel et de Croce. C’est à son œuvre principale, la Scienza Nuova que nous emprun
2876 cription du Monde Moderne », très caractéristique de la vision de l’Europe et de sa place dans le monde, que pouvait prend
2877 onde Moderne », très caractéristique de la vision de l’Europe et de sa place dans le monde, que pouvait prendre un grand e
2878 très caractéristique de la vision de l’Europe et de sa place dans le monde, que pouvait prendre un grand esprit de cette
2879 ans le monde, que pouvait prendre un grand esprit de cette époque. À notre époque la civilisation se trouve répandue dans
2880 s toutes les nations et un petit nombre seulement de grands monarques règnent dans le monde ; s’il s’en trouve encore de b
2881 s règnent dans le monde ; s’il s’en trouve encore de barbares c’est qu’ils ont pu maintenir leur autorité grâce à des croy
2882 les pays froids du Nord, nous rencontrons le tsar de Moscovie, prince chrétien sans doute mais qui commande à des hommes d
2883 hrétien sans doute mais qui commande à des hommes d’ une grande paresse d’esprit ; le khan de Tartarie étend son autorité s
2884 is qui commande à des hommes d’une grande paresse d’ esprit ; le khan de Tartarie étend son autorité sur un peuple sans éne
2885 es hommes d’une grande paresse d’esprit ; le khan de Tartarie étend son autorité sur un peuple sans énergie comme le furen
2886 les anciens Sères qui formaient la majeure partie de la population de son empire et dont le pays a été rattaché à la Chine
2887 qui formaient la majeure partie de la population de son empire et dont le pays a été rattaché à la Chine ; quant au négus
2888 e pays a été rattaché à la Chine ; quant au négus d’ Éthiopie et aux puissants rois de Fez et du Maroc, ils régnent sur des
2889 ; quant au négus d’Éthiopie et aux puissants rois de Fez et du Maroc, ils régnent sur des peuples faibles et très simples
2890 s régnent sur des peuples faibles et très simples de goûts. Mais si l’on passe à la zone tempérée, on trouve que la nature
2891 arouche et belliqueux et la langue même — au dire de certains doctes voyageurs — rappelle par ses consonances le latin ; c
2892 frayante et cruelle, des dieux terribles couverts d’ armes redoutables. Les missionnaires qui ont visité ces régions, rappo
2893 du peuple sont hommes comme eux. Il y a beaucoup d’ humanité chez les Chinois car leur religion est faite de douceur et de
2894 nité chez les Chinois car leur religion est faite de douceur et de mansuétude et les lettres y sont fort cultivées ; il en
2895 Chinois car leur religion est faite de douceur et de mansuétude et les lettres y sont fort cultivées ; il en est de même d
2896 s ; Persans et Turcs enfin ont mêlé à la mollesse de l’Asie qu’ils ont soumise, les croyances grossières de leur religion 
2897 Asie qu’ils ont soumise, les croyances grossières de leur religion ; les Turcs en particulier tempèrent leur orgueil par l
2898 iniment pur et parfait, le christianisme qui fait de la charité un devoir envers tous les hommes, domine partout en Europe
2899 rs tous les hommes, domine partout en Europe ; là de puissantes monarchies entretiennent une civilisation des plus évoluée
2900 plus évoluées. Sans doute trouvera-t-on au nord —  de nos jours en Pologne et en Angleterre comme ce fut le cas il y a quel
2901 e ce fut le cas il y a quelque cent-cinquante ans de la Suède et du Danemark — des monarchies gouvernées aristocratiquemen
2902 eaucoup les sciences, il y a un plus grand nombre d’ États populaires que dans les trois autres. Le retour des mêmes besoin
2903 pour se défendre contre la puissance grandissante de Rome et c’est ce qu’on observe aujourd’hui avec les cantons Suisses e
2904 trouvent ainsi liées les unes aux autres en temps de paix et de guerre ; l’Empire germanique lui-même n’est qu’un ensemble
2905 nsi liées les unes aux autres en temps de paix et de guerre ; l’Empire germanique lui-même n’est qu’un ensemble de cités l
2906 l’Empire germanique lui-même n’est qu’un ensemble de cités libres dont les souverains sont indépendants et à la tête desqu
2907 s états aristocratiques entraînant une atmosphère de soupçon et de crainte propres à ces sortes d’états comme nous l’avons
2908 cratiques entraînant une atmosphère de soupçon et de crainte propres à ces sortes d’états comme nous l’avons déjà montré.
2909 ère de soupçon et de crainte propres à ces sortes d’ états comme nous l’avons déjà montré. C’est là la forme ultime des soc
2910 s sociétés politiques et l’on ne saurait imaginer d’ État qui fût supérieur à ces aristocraties ; ce fut également la forme
2911 aître avec l’union des pères, ces véritables rois de l’âge des familles qui gouvernèrent aristocratiquement les premières
2912 bien en effet la nature des véritables principes d’ être à l’origine, et de marquer la fin des choses.120 Pour revenir à
2913 e des véritables principes d’être à l’origine, et de marquer la fin des choses.120 Pour revenir à notre sujet, nous diron
2914 evenir à notre sujet, nous dirons qu’on ne trouve de nos jours en Europe que cinq aristocraties, Venise, Gênes et Lucques
2915 fort limité. Mais cette Europe chrétienne brille d’ une admirable civilisation ; tous les biens auxquels l’homme peut aspi
2916 plus profonds d’entre les systèmes philosophiques de l’antiquité païenne la secondent et que, d’autre part, elle cultive t
2917 ur découverte.121 108. L. Couturat, Logique de Leibniz, Paris 1901, p. 527-528. Notons ici que Campanella le premier
2918 7-528. Notons ici que Campanella le premier, rêva d’ une « Académie européenne ». 109. Lettre à Pierre Ier, 16 janvier 171
2919 ld und Europagedanke. 117. Paul Hazard, La Crise de la conscience européenne, 1680-1715, Paris, 1935. Nous citons des ext
2920 pages 5 à 11. 118. Giovanni Paolo Marana, Lettre d’ un Sicilien à l’un de ses amis, contenant une agréable critique de Par
2921 iovanni Paolo Marana, Lettre d’un Sicilien à l’un de ses amis, contenant une agréable critique de Paris et des Français, 1
2922 l’un de ses amis, contenant une agréable critique de Paris et des Français, 1700 et 1710. 119. Gregorio Leti, Historia e
2923 msterdam, 1692. Trad. fr., 1694. — Il est amusant de citer ici une page de l’Émile de Rousseau (Tome IV, édition de 1762)
2924 fr., 1694. — Il est amusant de citer ici une page de l’Émile de Rousseau (Tome IV, édition de 1762) qui s’inspire libremen
2925 une page de l’Émile de Rousseau (Tome IV, édition de 1762) qui s’inspire librement de Saint-Évremond et de G. Leti, tels q
2926 Tome IV, édition de 1762) qui s’inspire librement de Saint-Évremond et de G. Leti, tels que P. Hazard vient de les citer :
2927 762) qui s’inspire librement de Saint-Évremond et de G. Leti, tels que P. Hazard vient de les citer : « De tous les peuple
2928 . Leti, tels que P. Hazard vient de les citer : «  De tous les peuples du monde le François est celui qui voyage le plus, m
2929 François est celui qui voyage le plus, mais plein de ses usages, il confond tout ce qui n’y ressemble pas. Il y a des Fran
2930 çais dans tous les coins du monde. Il n’y a point de pays où l’on trouve plus de gens qui aient voyagé qu’on en trouve en
2931 monde. Il n’y a point de pays où l’on trouve plus de gens qui aient voyagé qu’on en trouve en France. Avec cela pourtant,
2932 gé qu’on en trouve en France. Avec cela pourtant, de tous les peuples de l’Europe celui qui en voit le plus connoît le moi
2933 n France. Avec cela pourtant, de tous les peuples de l’Europe celui qui en voit le plus connoît le moins. L’Anglois voyage
2934 us connoît le moins. L’Anglois voyage aussi, mais d’ une autre manière ; il faut que ces deux Peuples soient contraires en
2935 er. Les François ont presque toujours quelque vue d’ intérêt dans leurs voyages : mais les Anglois ne vont point chercher f
2936 , c’est pour y verser leur argent, non pour vivre d’ industrie ; ils sont trop fiers pour aller ramper hors de chez eux. Ce
2937 norance qu’à la passion. L’Anglois a les préjugés de l’orgueil, & le François ceux de la vanité. Comme les Peuples les
2938 les préjugés de l’orgueil, & le François ceux de la vanité. Comme les Peuples les moins cultivés sont généralement les
2939 cherches frivoles, & moins occupés des objets de notre vaine curiosité, ils donnent toute leur attention à ce qui est
2940 e ne connois guère que les Espagnols qui voyagent de cette manière. Tandis qu’un François court chez les Artistes d’un pay
2941 re. Tandis qu’un François court chez les Artistes d’ un pays, qu’un Anglois en fait dessiner quelque antique, et qu’un Alle
2942 s, la police, & il est le seul des quatre qui de retour chez lui, rapporte de ce qu’il a vu quelque remarque utile à s
2943 seul des quatre qui de retour chez lui, rapporte de ce qu’il a vu quelque remarque utile à son Pays. » Et Rousseau de con
2944 quelque remarque utile à son Pays. » Et Rousseau de conclure : « Il y a cent fois plus de liaison maintenant entre l’Euro
2945 Et Rousseau de conclure : « Il y a cent fois plus de liaison maintenant entre l’Europe et l’Asie, qu’il y en avoit jadis e
2946 rima (Œuvres, III, 1, 56) il n’avait imaginé rien de moins qu’une confédération comprenant toutes les nations unies comme
2947 e V, chap. III, §§ 1089 à 1095. Collection Unesco d’ œuvres représentatives, Éd. Nagel, Paris 1953.
10 1961, Vingt-huit siècles d’Europe. Troisième partie. L’ère des philosophes. De Leibniz à Condorcet — 2. L’Europe des lumières
2948 e à peu près absolu avec le génie sombre et tendu d’ un Vico, voici un hédoniste, un sceptique indulgent, épris d’observati
2949 voici un hédoniste, un sceptique indulgent, épris d’ observations exactes, qui conclut également en faveur de l’Europe, apr
2950 , il est l’ancêtre distingué et tout involontaire de cette immense littérature qui aboutit de nos jours à la science-ficti
2951 lontaire de cette immense littérature qui aboutit de nos jours à la science-fiction. Au Sixième Soir de ses promenades ave
2952 e nos jours à la science-fiction. Au Sixième Soir de ses promenades avec une marquise, dans un parc, lui ayant expliqué to
2953 ue l’on sait des autres mondes et ce qu’en permet d’ imaginer l’astronomie, la marquise lui fait observer que les Chinois,
2954 is, selon ce qu’elle en a lu, ont décrit la chute de mille étoiles à la fois. Fontenelle en doute. La marquise réitère :
2955 -je pas toujours ouï dire que les Chinois étoient de très-grands Astronomes ? Il est vrai, repris-je ; mais les Chinois y
2956 -je ; mais les Chinois y ont gagné à être séparés de nous par un long espace de terre, comme les Grecs et les Romains à êt
2957 t gagné à être séparés de nous par un long espace de terre, comme les Grecs et les Romains à être séparés par une longue s
2958 t les Romains à être séparés par une longue suite de siècles ; tout éloignement est en droit de nous en imposer. En vérité
2959 suite de siècles ; tout éloignement est en droit de nous en imposer. En vérité, je crois toujours de plus en plus qu’il y
2960 up éloigné. Peut-être qu’il ne lui est pas permis de se répandre dans une grande étendue de terre à la fois, et que quelqu
2961 pas permis de se répandre dans une grande étendue de terre à la fois, et que quelque fatalité lui prescrit des bornes asse
2962 ns-en tandis que nous le possédons ; ce qu’il y a de meilleur, c’est qu’il ne se renferme pas dans les sciences et dans le
2963 les spéculations sèches ; il s’étend avec autant de succès jusqu’aux choses d’agrément, sur lesquelles je doute qu’aucun
2964 il s’étend avec autant de succès jusqu’aux choses d’ agrément, sur lesquelles je doute qu’aucun peuple nous égale.122 M
2965 du gouvernement libéral, mais le plus sûr témoin de l’Europe de son temps, qu’il avait parcourue en tous sens. L’artifice
2966 ment libéral, mais le plus sûr témoin de l’Europe de son temps, qu’il avait parcourue en tous sens. L’artifice du « barbar
2967 arbare perspicace » n’est pour lui qu’une manière d’ exposer sa méthode d’observation sociologique. C’est ainsi qu’il fait
2968 ’est pour lui qu’une manière d’exposer sa méthode d’ observation sociologique. C’est ainsi qu’il fait dire à l’un de ses Pe
2969 sociologique. C’est ainsi qu’il fait dire à l’un de ses Persans comment il entend mener sa propre enquête sur les diversi
2970 es secrets du commerce, des intérêts des princes, de la forme de leur gouvernement ; je ne néglige pas même les superstiti
2971 u commerce, des intérêts des princes, de la forme de leur gouvernement ; je ne néglige pas même les superstitions européen
2972 s des nuages qui couvraient mes yeux dans le pays de ma naissance. Citons, sans plus de système qu’on en trouve dans les
2973 stème qu’on en trouve dans les notes et opuscules de Montesquieu, quelques résultats de cette méthode. Sur l’interdépendan
2974 s et opuscules de Montesquieu, quelques résultats de cette méthode. Sur l’interdépendance de nos nations : Un prince croi
2975 résultats de cette méthode. Sur l’interdépendance de nos nations : Un prince croit qu’il sera plus grand par la ruine d’u
2976 n prince croit qu’il sera plus grand par la ruine d’ un état voisin. Au contraire. Les choses sont telles en Europe que tou
2977 dépendent les uns des autres. La France a besoin de l’opulence de la Pologne et de la Moscovie, comme la Guyenne a besoin
2978 uns des autres. La France a besoin de l’opulence de la Pologne et de la Moscovie, comme la Guyenne a besoin de la Bretagn
2979 La France a besoin de l’opulence de la Pologne et de la Moscovie, comme la Guyenne a besoin de la Bretagne et la Bretagne
2980 ogne et de la Moscovie, comme la Guyenne a besoin de la Bretagne et la Bretagne de l’Anjou. L’Europe est un état composé d
2981 Bretagne de l’Anjou. L’Europe est un état composé de plusieurs provinces.124 Sur la puissance de l’esprit et l’atout qu
2982 sé de plusieurs provinces.124 Sur la puissance de l’esprit et l’atout que sa culture représente pour l’Europe : On ne
2983 as dire que les lettres ne soyent qu’un amusement d’ une certaine partie des citoyens ; il faut les regarder sois une autre
2984 les plus cultivées ont aussi, à proportion, plus de puissance.125 Sur la position de l’Europe dans le Monde : L’effet
2985 oportion, plus de puissance.125 Sur la position de l’Europe dans le Monde : L’effet de la découverte de l’Amérique fut
2986 la position de l’Europe dans le Monde : L’effet de la découverte de l’Amérique fut de lier à l’Europe l’Asie et l’Afriqu
2987 ’Europe dans le Monde : L’effet de la découverte de l’Amérique fut de lier à l’Europe l’Asie et l’Afrique. L’Amérique fou
2988 nde : L’effet de la découverte de l’Amérique fut de lier à l’Europe l’Asie et l’Afrique. L’Amérique fournit à l’Europe la
2989 Afrique. L’Amérique fournit à l’Europe la matière de son commerce avec cette vaste partie de l’Asie qu’on appelle les Inde
2990 a matière de son commerce avec cette vaste partie de l’Asie qu’on appelle les Indes orientales. L’argent, ce métal si util
2991 signe, fut encore la base du plus grand commerce de l’univers, comme marchandise. Enfin, la navigation d’Afrique devint n
2992 ’univers, comme marchandise. Enfin, la navigation d’ Afrique devint nécessaire ; elle fournissait des hommes pour le travai
2993 es hommes pour le travail des mines et des terres de l’Amérique. L’Europe est parvenue à un si haut degré de puissance, qu
2994 mérique. L’Europe est parvenue à un si haut degré de puissance, que l’histoire n’a rien à comparer là-dessus, si l’on cons
2995 dépenses, la grandeur des engagements, le nombre de troupes, et la continuité de leur entretien, même lorsqu’elles sont l
2996 gagements, le nombre de troupes, et la continuité de leur entretien, même lorsqu’elles sont le plus inutiles, et qu’on ne
2997 tion. Le P. Duhalde dit que le commerce intérieur de la Chine est plus grand que celui de toute l’Europe. Cela pourrait êt
2998 ce intérieur de la Chine est plus grand que celui de toute l’Europe. Cela pourrait être, si notre commerce extérieur n’aug
2999 ande font à peu près la navigation et le commerce de l’Europe.126 Sur le parallèle Europe-Asie : L’Asie n’a point propr
3000 allèle Europe-Asie : L’Asie n’a point proprement de zone tempérée ; et les lieux situés dans un climat très-froid y touch
3001 limats très-différents entre eux, n’y ayant point de rapport entre les climats d’Espagne et d’Italie, et ceux de Norwège e
3002 eux, n’y ayant point de rapport entre les climats d’ Espagne et d’Italie, et ceux de Norwège et de Suède. Mais, comme le cl
3003 t point de rapport entre les climats d’Espagne et d’ Italie, et ceux de Norwège et de Suède. Mais, comme le climat y devien
3004 entre les climats d’Espagne et d’Italie, et ceux de Norwège et de Suède. Mais, comme le climat y devient insensiblement f
3005 mats d’Espagne et d’Italie, et ceux de Norwège et de Suède. Mais, comme le climat y devient insensiblement froid en allant
3006 n allant du midi au nord, à peu près à proportion de la latitude de chaque pays, il y arrive que chaque pays est à peu prè
3007 i au nord, à peu près à proportion de la latitude de chaque pays, il y arrive que chaque pays est à peu près semblable à c
3008 de le dire, la zone tempérée y est très-étendue. De là suit qu’en Asie les nations sont opposées aux nations du fort au f
3009 peu près le même courage. C’est la grande raison de la faiblesse de l’Asie et de la force de l’Europe, de la liberté de l
3010 e courage. C’est la grande raison de la faiblesse de l’Asie et de la force de l’Europe, de la liberté de l’Europe et de la
3011 est la grande raison de la faiblesse de l’Asie et de la force de l’Europe, de la liberté de l’Europe et de la servitude de
3012 e raison de la faiblesse de l’Asie et de la force de l’Europe, de la liberté de l’Europe et de la servitude de l’Asie ; ca
3013 a faiblesse de l’Asie et de la force de l’Europe, de la liberté de l’Europe et de la servitude de l’Asie ; cause que je ne
3014 l’Asie et de la force de l’Europe, de la liberté de l’Europe et de la servitude de l’Asie ; cause que je ne sache pas que
3015 a force de l’Europe, de la liberté de l’Europe et de la servitude de l’Asie ; cause que je ne sache pas que l’on ait encor
3016 ope, de la liberté de l’Europe et de la servitude de l’Asie ; cause que je ne sache pas que l’on ait encore remarquée. C’e
3017 en est que le peuple tartare, conquérant naturel de l’Asie, est devenu esclave lui-même. … C’est ce qui a fait que le gén
3018 lave lui-même. … C’est ce qui a fait que le génie de la nation tartare ou gétique a toujours été semblable à celui des emp
3019 ique a toujours été semblable à celui des empires de l’Asie. Les peuples, dans ceux-ci, sont gouvernés par le bâton ; les
3020 s peuples tartares par les longs fouets. L’esprit de l’Europe a toujours été contraire à ces mœurs ; et, dans tous les tem
3021 urs ; et, dans tous les temps, ce que les peuples d’ Asie ont appelé punition, les peuples d’Europe l’ont appelé outrage. L
3022 s peuples d’Asie ont appelé punition, les peuples d’ Europe l’ont appelé outrage. Les Tartares, détruisant l’empire grec, é
3023 n Atlantique, a tant loué la Scandinavie, a parlé de cette grande prérogative qui doit mettre les nations qui l’habitent a
3024 doit mettre les nations qui l’habitent au-dessus de tous les peuples du monde : c’est qu’elles ont été la source de la li
3025 uples du monde : c’est qu’elles ont été la source de la liberté de l’Europe, c’est-à-dire de presque toute celle qui est a
3026  : c’est qu’elles ont été la source de la liberté de l’Europe, c’est-à-dire de presque toute celle qui est aujourd’hui par
3027 la source de la liberté de l’Europe, c’est-à-dire de presque toute celle qui est aujourd’hui parmi les hommes. Le Goth Jor
3028 mi les hommes. Le Goth Jornandès a appelé le nord de l’Europe la fabrique du genre humain : je l’appellerai plutôt la fabr
3029 que se forment ces nations vaillantes qui sortent de leur pays pour détruire les tyrans et les esclaves, et apprendre aux
3030 que pour le bonheur128. En Asie on a toujours vu de grands empires ; en Europe, ils n’ont jamais pu subsister. C’est que
3031 Europe, le partage naturel forme plusieurs États d’ une étendue médiocre, dans lesquels le gouvernement des lois n’est pas
3032 des lois n’est pas incompatible avec le maintien de l’État : au contraire, il y est si favorable, que sans elles cet État
3033 à tous les autres. C’est ce qui a formé un génie de liberté qui rend chaque partie très-difficile à être subjuguée et sou
3034 trangère, autrement que par les lois et l’utilité de son commerce. Au contraire, il règne en Asie un esprit de servitude q
3035 ommerce. Au contraire, il règne en Asie un esprit de servitude qui ne l’a jamais quitté ; et, dans toutes les histoires de
3036 l’a jamais quitté ; et, dans toutes les histoires de ce pays, il n’est pas possible de trouver un seul trait qui marque un
3037 s les histoires de ce pays, il n’est pas possible de trouver un seul trait qui marque une âme libre : on y verra jamais qu
3038 une âme libre : on y verra jamais que l’héroïsme de la servitude129. Enfin ce texte célèbre entre tous : Si je savais q
3039 fût préjudiciable à ma famille, je la rejetterais de mon esprit. Si je savais quelque chose qui serait utile à ma famille
3040 ns l’utopie, ni dans celle du passé ni dans celle de l’avenir. « Il faut examiner l’état où l’on est, et non l’état où l’o
3041 le second, il publie en 1769 un opuscule intitulé De la Paix perpétuelle, par le Dr Goodheart, où l’on peut lire : La seu
3042 servi ! — voici ce qu’il fait dire au personnage d’ un de ses Dialogues qu’il désigne par A. et qui semble être anglais (C
3043 i ! — voici ce qu’il fait dire au personnage d’un de ses Dialogues qu’il désigne par A. et qui semble être anglais (C. éta
3044 ue les Athéniens et les Romains ; que vos combats de coqs ou de gladiateurs, dans une enceinte de planches pourries, l’emp
3045 niens et les Romains ; que vos combats de coqs ou de gladiateurs, dans une enceinte de planches pourries, l’emportent sur
3046 bats de coqs ou de gladiateurs, dans une enceinte de planches pourries, l’emportent sur le Colisée ? Les savetiers et les
3047 dans vos tragédies sont-ils supérieurs aux héros de Sophocle ? Vos orateurs font-ils oublier Cicéron et Démosthène ? Et e
3048 le ne valait alors, et il en est de même du reste de l’Europe. B. — Ah ! exceptez-en, je vous prie, la Grèce, qui obéit au
3049 qui obéit au Grand Turc, et la malheureuse partie de l’Italie qui obéit au pape. A. — Je les excepte aussi ; mais songez q
3050 epte aussi ; mais songez que Paris, qui n’est que d’ un dixième moins grand que Londres, n’était alors qu’une petite cité b
3051 terdam n’était qu’un marais. Madrid un désert, et de la rive droite du Rhin jusqu’au golfe de Bothnie tout était sauvage ;
3052 lfe de Bothnie tout était sauvage ; les habitants de ces climats vivaient, comme les Tartares ont toujours vécu, dans l’ig
3053 de, en Pologne, en Russie, et que les découvertes de notre grand Newton soient devenues le catéchisme de la noblesse de Mo
3054 notre grand Newton soient devenues le catéchisme de la noblesse de Moscou et de Pétersbourg ? C. — Vous m’avouerez qu’il
3055 wton soient devenues le catéchisme de la noblesse de Moscou et de Pétersbourg ? C. — Vous m’avouerez qu’il n’en est pas de
3056 evenues le catéchisme de la noblesse de Moscou et de Pétersbourg ? C. — Vous m’avouerez qu’il n’en est pas de même sur les
3057 rouva à moitié nus ? A. — Je le crois fermement ; de bonnes maisons, de bons vêtements, de la bonne chère, avec de bonnes
3058 ? A. — Je le crois fermement ; de bonnes maisons, de bons vêtements, de la bonne chère, avec de bonnes lois et de la liber
3059 fermement ; de bonnes maisons, de bons vêtements, de la bonne chère, avec de bonnes lois et de la liberté, valent mieux qu
3060 isons, de bons vêtements, de la bonne chère, avec de bonnes lois et de la liberté, valent mieux que la disette, l’anarchie
3061 ements, de la bonne chère, avec de bonnes lois et de la liberté, valent mieux que la disette, l’anarchie et l’esclavage. C
3062 anarchie et l’esclavage. Ceux qui sont mécontents de Londres n’ont qu’à s’en aller aux Orcades : ils y vivront comme nous
3063 s y vivront comme nous vivions à Londres du temps de César ; ils mangeront du pain d’avoine, et s’égorgeront à coups de co
3064 Londres du temps de César ; ils mangeront du pain d’ avoine, et s’égorgeront à coups de couteau pour un poisson séché au so
3065 ngeront du pain d’avoine, et s’égorgeront à coups de couteau pour un poisson séché au soleil et pour une cabane de paille.
3066 our un poisson séché au soleil et pour une cabane de paille. La vie sauvage a ses charmes ; ceux qui la prêchent n’ont qu’
3067 urelle. La pure nature n’a jamais connu ni débats de parlement, ni prérogatives de la couronne, ni compagnie des Indes, ni
3068 ais connu ni débats de parlement, ni prérogatives de la couronne, ni compagnie des Indes, ni impôts de trois schellings pa
3069 de la couronne, ni compagnie des Indes, ni impôts de trois schellings par livre sur son champ et sur son pré, et d’un sche
3070 llings par livre sur son champ et sur son pré, et d’ un schelling par fenêtre. Vous pourriez bien avoir corrompu la nature 
3071 ous m’étonnez ; quoi ! c’est suivre la nature que de sacrer un archevêque de Cantorbéry ? d’appeler un Allemand transplant
3072 ’est suivre la nature que de sacrer un archevêque de Cantorbéry ? d’appeler un Allemand transplanté chez vous « Votre Maje
3073 ature que de sacrer un archevêque de Cantorbéry ? d’ appeler un Allemand transplanté chez vous « Votre Majesté » ? de ne po
3074 llemand transplanté chez vous « Votre Majesté » ? de ne pouvoir épouser qu’une seule femme, et de payer plus du quart de v
3075  » ? de ne pouvoir épouser qu’une seule femme, et de payer plus du quart de votre revenu tous les ans ? sans compter bien
3076 ser qu’une seule femme, et de payer plus du quart de votre revenu tous les ans ? sans compter bien d’autres transgressions
3077 ue l’instinct et le jugement, ces deux fils aînés de la nature, nous enseignent à chercher en tout notre bien-être, et à p
3078 ieux cardinaux se rencontraient à jeun et mourant de faim sous un prunier, ils s’aideraient tous deux machinalement à mont
3079 r cueillir des prunes, et que deux petits coquins de la Forêt-Noire ou des Chicachas en feraient autant ? B. — Eh bien ! q
3080 il faut s’entraider. Ceux qui fourniront le plus de secours à la société seront donc ceux qui suivront la nature de plus
3081 ux qui inventeront les arts (qui est un grand don de Dieu), ceux qui proposeront des lois (ce qui est infiniment plus aisé
3082 é en effet observée. Donc, lorsque nous convenons de payer trois schellings en commun par livre sterling, pour jouir plus
3083 dix-sept autres schellings ; quand nous convenons de choisir un Allemand pour être, sous le nom de roi, le conservateur de
3084 ons de choisir un Allemand pour être, sous le nom de roi, le conservateur de notre liberté, l’arbitre entre les lords et l
3085 nd pour être, sous le nom de roi, le conservateur de notre liberté, l’arbitre entre les lords et les communes, le chef de
3086 ’arbitre entre les lords et les communes, le chef de la république ; quand nous n’épousons qu’une seule femme par économie
3087 s (parce que nous sommes riches) qu’un archevêque de Cantorbéry ait douze mille pièces de revenu pour soulager les pauvres
3088 n archevêque de Cantorbéry ait douze mille pièces de revenu pour soulager les pauvres, pour prêcher la vertu s’il sait prê
3089 dans le clergé, etc., etc., nous faisons plus que de perfectionner la loi naturelle, nous allons au-delà du but ; mais le
3090 du but ; mais le sauvage isolé et brut (s’il y a de tels animaux sur la terre, ce dont je doute fort), que fait-il du mat
3091 je doute fort), que fait-il du matin au soir, que de pervertir la loi naturelle en étant inutile à lui-même et à tous les
3092 ct : les hommes insociables corrompent l’instinct de la nature humaine. C. — Ainsi l’homme, déguisé sous la laine des mou
3093 et allant chercher la vérole à deux-mille lieues de chez lui, c’est là l’homme naturel, et le Brésilien tout nu est l’hom
3094 n animal qui n’a pas encore atteint le complément de son espèce. C’est un oiseau qui n’a ses plumes que fort tard, une che
3095 es Locke, et alors il aura rempli toute l’étendue de la carrière humaine, supposé que les organes du Brésilien soient asse
3096 nes. Mais que m’importent après tout le caractère d’ un Brésilien et les sentiments d’un Topinambou ? Je ne suis ni l’un ni
3097 out le caractère d’un Brésilien et les sentiments d’ un Topinambou ? Je ne suis ni l’un ni l’autre, je veux être heureux ch
3098 c à mi-chemin entre les détracteurs systématiques de l’Europe et ceux qui veulent en faire un paradis par leur Système ; c
3099 comme il se tient à mi-chemin entre le pessimisme de Hobbes et l’optimisme de Leibniz, ou encore entre les tyrans éclairés
3100 emin entre le pessimisme de Hobbes et l’optimisme de Leibniz, ou encore entre les tyrans éclairés et le pacifisme intégral
3101 sidérant l’Europe dans l’état où elle est, pleine d’ abus et d’intolérance mais aussi de « lumières » nouvelles et de grand
3102 ’Europe dans l’état où elle est, pleine d’abus et d’ intolérance mais aussi de « lumières » nouvelles et de grands génies t
3103 le est, pleine d’abus et d’intolérance mais aussi de « lumières » nouvelles et de grands génies tels que Newton, il écrit
3104 tolérance mais aussi de « lumières » nouvelles et de grands génies tels que Newton, il écrit en 1767 : Je vois avec plais
3105 ’il se forme dans l’Europe une république immense d’ esprits cultivés. C’est donc l’Europe de la culture — comme nous diri
3106 immense d’esprits cultivés. C’est donc l’Europe de la culture — comme nous dirions aujourd’hui — la société des esprits
3107 écrivait en 1752, dans son introduction au Siècle de Louis XIV : L’Europe surpasse en toutes choses les autres parties du
3108 pe chrétienne (à la Russie près) comme une espèce de grande république partagée en plusieurs États, les uns monarchiques,
3109 les uns avec les autres, tous ayant un même fond de religion, quoique divisés en plusieurs sectes ; tous ayant les mêmes
3110 plusieurs sectes ; tous ayant les mêmes principes de droit public et de politique, inconnus dans les autres parties du mon
3111 tous ayant les mêmes principes de droit public et de politique, inconnus dans les autres parties du monde. C’est par ces p
3112 prisonniers, qu’elles respectent les ambassadeurs de leurs ennemis, qu’elles conviennent ensemble de la prééminence et de
3113 s de leurs ennemis, qu’elles conviennent ensemble de la prééminence et de quelques droits de certains princes, comme de l’
3114 u’elles conviennent ensemble de la prééminence et de quelques droits de certains princes, comme de l’empereur, des rois et
3115 ensemble de la prééminence et de quelques droits de certains princes, comme de l’empereur, des rois et des autres moindre
3116 et de quelques droits de certains princes, comme de l’empereur, des rois et des autres moindres potents et qu’elles s’acc
3117 elles s’accordent surtout, dans la sage politique de tenir entr’elles, autant qu’elles peuvent, une balance égale de pouvo
3118 elles, autant qu’elles peuvent, une balance égale de pouvoir, employant sans cesse les négociations, même au milieu de la
3119 qui peuvent avertir toutes les cours des desseins d’ une seule, donner à la fois l’allarme à l’Europe et garantir les plus
3120 des invasions que le plus fort est toujours prêt d’ entreprendre. Rousseau (1712-1778) « Rousseau n’a rien inventé,
3121 tout enflammé », disait Mme de Staël, et c’est un de ces jugements qui caractérisent leur auteur mieux que leur objet. Car
3122 ir » ; et peut-être l’a-t-il été. Il se proposait d’ en exposer le système dans une suite au Contrat social qui a été perdu
3123 ais il s’est exprimé longuement sur les avantages de l’union européenne dans Extrait, et sur le principe fédératif lui-mêm
3124 nnu, mais beaucoup plus original, le Gouvernement de Pologne. Une dame Dupin avait confié à Jean-Jacques l’éducation de so
3125 ame Dupin avait confié à Jean-Jacques l’éducation de son fils. Elle pria le précepteur de rédiger un « condensé » (procédé
3126 l’éducation de son fils. Elle pria le précepteur de rédiger un « condensé » (procédé littéraire cher à l’époque) du Proje
3127  » (procédé littéraire cher à l’époque) du Projet de l’abbé de Saint-Pierre. Rousseau l’écrivit le garda longtemps dans se
3128 1, à Amsterdam, sous le titre : Extrait du Projet de paix perpétuelle de M. l’abbé de Saint-Pierre, par J. J. Rousseau, ci
3129 le titre : Extrait du Projet de paix perpétuelle de M. l’abbé de Saint-Pierre, par J. J. Rousseau, citoyen de Genève. Au
3130 xtrait du Projet de paix perpétuelle de M. l’abbé de Saint-Pierre, par J. J. Rousseau, citoyen de Genève. Au début, l’élog
3131 abbé de Saint-Pierre, par J. J. Rousseau, citoyen de Genève. Au début, l’éloge est fervent, bien que Rousseau n’entende pa
3132 i plus utile, n’occupa l’esprit humain, que celui d’ une paix perpétuelle et universelle entre tous les peuples d’Europe, j
3133 perpétuelle et universelle entre tous les peuples d’ Europe, jamais auteur ne mérita mieux l’attention du public que celui
3134 sentiment dont j’étais plein. Tâchons maintenant de raisonner de sang-froid. Quel est l’état réel de l’Europe ? On n’y
3135 nt j’étais plein. Tâchons maintenant de raisonner de sang-froid. Quel est l’état réel de l’Europe ? On n’y a su prévenir
3136 e raisonner de sang-froid. Quel est l’état réel de l’Europe ? On n’y a su prévenir les guerres particulières que pour en
3137 nir les guerres particulières que pour en allumer de générales, on ne s’unit à quelques-uns que contre tous les autres :
3138 contre tous les autres : S’il y a quelque moyen de lever ces dangereuses contradictions, ce ne peut être que par une for
3139 contradictions, ce ne peut être que par une forme de gouvernement confédérative, qui, unissant les peuples par des liens s
3140 s, les Gaules leurs cités et les derniers soupirs de la Grèce devinrent encore illustres dans la ligne achéenne. Mais null
3141 ore illustres dans la ligne achéenne. Mais nulles de ces confédérations n’approchèrent, pour la sagesse, de celle du corps
3142 s confédérations n’approchèrent, pour la sagesse, de celle du corps germanique, de la ligue helvétique, et des états génér
3143 t, pour la sagesse, de celle du corps germanique, de la ligue helvétique, et des états généraux. Outre ces confédérations
3144 réelles, par l’union des intérêts, par le rapport de nos maximes, par la conformité des coutumes, ou par d’autres circonst
3145 es divisés. C’est ainsi que toutes les puissances de l’Europe forment entre elles une sorte de système qui les unit par un
3146 ssances de l’Europe forment entre elles une sorte de système qui les unit par une même religion, par un même droit des gen
3147 , par les lettres, par le commerce, par une sorte d’ équilibre qui est l’effet nécessaire de tout cela, et qui, sans que pe
3148 une sorte d’équilibre qui est l’effet nécessaire de tout cela, et qui, sans que personne songe en effet à le conserver, n
3149 oujours existé : c’est à l’Empire puis à l’Église de Rome que nous devons une sorte de « société étroite entre les nations
3150 puis à l’Église de Rome que nous devons une sorte de « société étroite entre les nations de l’Europe ». Mais il y a plus :
3151 une sorte de « société étroite entre les nations de l’Europe ». Mais il y a plus : Joignez à cela la situation particuli
3152 plus : Joignez à cela la situation particulière de l’Europe, plus également peuplée, plus également fertile, mieux réuni
3153 verains ; la multitude des rivières et la variété de leur cours, qui rend toutes les communications faciles ; l’humeur inc
3154 fréquemment les uns chez les autres ; l’invention de l’imprimerie et le goût général des lettres, qui a mis entre eux une
3155 l des lettres, qui a mis entre eux une communauté d’ études et de connaissances ; enfin la multitude et la petitesse des ét
3156 s, qui a mis entre eux une communauté d’études et de connaissances ; enfin la multitude et la petitesse des états, qui, jo
3157 es aux autres. Toutes ces causes réunies, forment de l’Europe, non seulement, comme l’Asie ou l’Afrique, une idéale collec
3158 comme l’Asie ou l’Afrique, une idéale collection de peuples qui n’ont de commun qu’un nom, mais une société réelle qui a
3159 rique, une idéale collection de peuples qui n’ont de commun qu’un nom, mais une société réelle qui a sa religion, ses mœur
3160 os beaux discours et nos procédés horribles, tant d’ humanité dans les maximes et de cruauté dans les actions, une religion
3161 és horribles, tant d’humanité dans les maximes et de cruauté dans les actions, une religion si douce et une si sanguinaire
3162 iétés ; et cette fraternité prétendue des peuples de l’Europe ne semble être qu’un nom de dérision pour exprimer avec iron
3163 des peuples de l’Europe ne semble être qu’un nom de dérision pour exprimer avec ironie leur mutuelle animosité. Cependant
3164 qui vient à changer. L’antique union des peuples de l’Europe a compliqué leurs intérêts et leurs droits de mille manières
3165 Europe a compliqué leurs intérêts et leurs droits de mille manières ; ils se touchent par tant de points, que le moindre m
3166 que le moindre mouvement des uns ne peut manquer de choquer les autres ; leurs divisions sont d’autant plus funestes, que
3167 quer de choquer les autres ; leurs divisions sont d’ autant plus funestes, que leurs liaisons sont plus intimes, et leurs f
3168 la cruauté des guerres civiles. Voyons maintenant de quelle manière ce grand ouvrage, commencé par la fortune, peut être a
3169 états européens, prenant la force et la solidité d’ un vrai corps politique, peut se changer en une confédération réelle.
3170 se forme de temps en temps parmi nous des espèces de diètes générales sous le nom de congrès, où l’on se rend solennelleme
3171 nous des espèces de diètes générales sous le nom de congrès, où l’on se rend solennellement de tous les états de l’Europe
3172 le nom de congrès, où l’on se rend solennellement de tous les états de l’Europe pour s’en retourner de même ; où l’on s’as
3173 où l’on se rend solennellement de tous les états de l’Europe pour s’en retourner de même ; où l’on s’assemble pour ne rie
3174 a ronde ou carrée, si la salle aura plus ou moins de portes, si un tel plénipotentiaire aura le visage ou le dos tourné ve
3175 né vers la fenêtre, si tel autre fera deux pouces de chemin de plus ou de moins dans une visite, et sur mille questions de
3176 i tel autre fera deux pouces de chemin de plus ou de moins dans une visite, et sur mille questions de pareille importance,
3177 de moins dans une visite, et sur mille questions de pareille importance, inutilement agitée depuis trois siècles, et très
3178 e depuis trois siècles, et très dignes assurément d’ occuper les politiques du nôtre. Il se peut faire que les membres d’un
3179 tiques du nôtre. Il se peut faire que les membres d’ une de ces assemblées soient une fois doués du sens commun ; il n’est
3180 du nôtre. Il se peut faire que les membres d’une de ces assemblées soient une fois doués du sens commun ; il n’est pas mê
3181 oir aplani bien des difficultés, ils auront ordre de leurs souverains respectifs de signer la confédération générale que j
3182 , ils auront ordre de leurs souverains respectifs de signer la confédération générale que je suppose sommairement contenue
3183 icles suivants. Suit un long résumé des 23 tomes de l’abbé, suivi de cette conclusion justement célèbre : L’établissemen
3184 Suit un long résumé des 23 tomes de l’abbé, suivi de cette conclusion justement célèbre : L’établissement de la paix perp
3185 e conclusion justement célèbre : L’établissement de la paix perpétuelle dépend uniquement du consentement des souverains,
3186 entement des souverains, et n’offre point à lever d’ autre difficulté que leur résistance. Sans doute ce n’est pas à dire q
3187 ouverains adopteront ce projet (qui peut répondre de la raison d’autrui ?) mais seulement qu’ils l’adopteraient s’ils cons
3188 pteront ce projet (qui peut répondre de la raison d’ autrui ?) mais seulement qu’ils l’adopteraient s’ils consultaient leur
3189 t. La seule chose qu’on leur suppose, c’est assez de raison pour voir ce qui leur est utile, et assez de courage pour fair
3190 raison pour voir ce qui leur est utile, et assez de courage pour faire leur propre bonheur. Si, malgré tout cela, ce proj
3191 les hommes sont insensés, et que c’est une sorte de folie d’être sage au milieu des fous. Dans un Jugement sur la Paix p
3192 es sont insensés, et que c’est une sorte de folie d’ être sage au milieu des fous. Dans un Jugement sur la Paix perpétuell
3193 bé, c’est aux princes souverains qu’il appartient de convoquer le Congrès européen. Pour Rousseau, c’est aux peuples eux-m
3194 à créer leur fédération. Car : … peut-on espérer de soumettre à un tribunal supérieur des hommes qui s’osent vanter de ne
3195 tribunal supérieur des hommes qui s’osent vanter de ne tenir leur pouvoir que de leur épée, et qui ne font mention de Die
3196 s qui s’osent vanter de ne tenir leur pouvoir que de leur épée, et qui ne font mention de Dieu même que parce qu’il est au
3197 pouvoir que de leur épée, et qui ne font mention de Dieu même que parce qu’il est au ciel ? Les souverains se soumettront
3198 ur des lois n’a jamais pu forcer les particuliers d’ admettre dans les leurs ? Un simple gentilhomme offensé dédaigne de po
3199 es leurs ? Un simple gentilhomme offensé dédaigne de porter ses plaintes au tribunal des maréchaux de France, et vous voul
3200 de porter ses plaintes au tribunal des maréchaux de France, et vous voulez qu’un roi porte les siennes à la diète europée
3201 jours à ceux du prince ? Les ministres ont besoin de la guerre pour se rendre nécessaires… Et le public ne laisse pas de d
3202 se rendre nécessaires… Et le public ne laisse pas de demander pourquoi, si ce projet est possible, ils ne l’ont pas adopté
3203 ’ont pas adopté ? Il ne voit pas qu’il n’y a rien d’ impossible dans ce projet, sinon qu’il soit adopté par eux. Que feront
3204 n ridicule. Près de vingt ans après la rédaction de l’Extrait, en 1771, Rousseau est approché par les Confédérés polonais
3205 st approché par les Confédérés polonais, au cours d’ une suspension de leur guerre contre les Russes. À la veille du partag
3206 es Confédérés polonais, au cours d’une suspension de leur guerre contre les Russes. À la veille du partage tragique, ces p
3207 patriotes demandent à l’auteur du Contrat social d’ élaborer le plan d’une constitution moins bizarre et anarchique que ce
3208 t à l’auteur du Contrat social d’élaborer le plan d’ une constitution moins bizarre et anarchique que celle qui a causé la
3209 arre et anarchique que celle qui a causé la ruine de leur pays. Rousseau accepte ce travail considérable, tout en se plaig
3210 pte ce travail considérable, tout en se plaignant de son état « qui lui laisse à peine la faculté de lier ses idées ». Il
3211 t de son état « qui lui laisse à peine la faculté de lier ses idées ». Il terminera l’ouvrage en 1773, l’année même du Tra
3212 et l’intitulera Considération sur le gouvernement de Pologne et sur sa réformation projetée en 1772. Son premier souci, qu
3213 Son premier souci, qui dominera tout l’essai, est de détourner les Polonais d’imiter « l’Europe », c’est-à-dire les puissa
3214 inera tout l’essai, est de détourner les Polonais d’ imiter « l’Europe », c’est-à-dire les puissances de l’Ouest qui « s’ab
3215 ’imiter « l’Europe », c’est-à-dire les puissances de l’Ouest qui « s’abâtardissent journellement par la pente générale de
3216 abâtardissent journellement par la pente générale de prendre les goûts et les mœurs des Français ». Au cosmopolitisme à la
3217 la suite. La Pologne est un grand état environné d’ États encore plus considérables, qui, par leur despotisme, et par leur
3218 s dans l’état présent des choses qu’un seul moyen de lui donner cette consistance qui lui manque ; c’est d’infuser pour ai
3219 i donner cette consistance qui lui manque ; c’est d’ infuser pour ainsi dire dans toute la nation l’âme des confédérés : c’
3220 dans toute la nation l’âme des confédérés : c’est d’ établir tellement la république dans le cœur des Polonais, qu’elle y s
3221 onais, qu’elle y subsiste malgré tous les efforts de ses oppresseurs. C’est là, ce me semble, l’unique asile où la force n
3222 e ne peut ni l’atteindre ni la détruire. On vient d’ en voir une preuve à jamais mémorable. La Pologne était dans les fers
3223 ent vous pouvez braver la puissance et l’ambition de vos voisins. Vous ne sauriez empêcher qu’ils ne vous engloutissent ;
3224 nt le génie, le caractère, les goûts et les mœurs d’ un peuple, qui le font être lui et non pas un autre… Il n’y a plus auj
3225 ui et non pas un autre… Il n’y a plus aujourd’hui de Français, d’Allemands, d’Espagnols, d’Anglais même, quoi qu’on en dis
3226 un autre… Il n’y a plus aujourd’hui de Français, d’ Allemands, d’Espagnols, d’Anglais même, quoi qu’on en dise ; il n’y a
3227 n’y a plus aujourd’hui de Français, d’Allemands, d’ Espagnols, d’Anglais même, quoi qu’on en dise ; il n’y a que des Europ
3228 ujourd’hui de Français, d’Allemands, d’Espagnols, d’ Anglais même, quoi qu’on en dise ; il n’y a que des Européens. Tous on
3229 assions, les mêmes mœurs, parce qu’aucun n’a reçu de forme nationale par une institution particulière… Que leur importe à
3230 re… Que leur importe à quel maître ils obéissent, de quel état ils suivent les lois, pourvu qu’ils trouvent de l’argent à
3231 état ils suivent les lois, pourvu qu’ils trouvent de l’argent à voler, et des femmes à corrompre, ils sont partout dans le
3232 uent leur âme à n’aimer que leur patrie ! L’éloge de cette « éducation nationale » ne se lit pas aujourd’hui sans quelque
3233 qu’elle. Tout vrai républicain suça avec le lait de sa mère l’amour qui fait toute son existence : il ne voit que la patr
3234 qu’il est seul, il est nul ; sitôt qu’il n’a plus de patrie, il n’est plus : et s’il n’est pas mort, il est pis. L’éducati
3235 Je veux qu’en apprenant à lire il lise des choses de son pays ; qu’à dix ans il en connaisse toutes les productions, à dou
3236 a loi doit régler la matière, l’ordre et la forme de leurs études… Tous, étant égaux par la constitution de l’état, doiven
3237 urs études… Tous, étant égaux par la constitution de l’état, doivent être élevés ensemble et de la même manière ; et si l’
3238 tution de l’état, doivent être élevés ensemble et de la même manière ; et si l’on ne peut établir une éducation publique t
3239 mettre à un prix que les pauvres puissent payer… De telles pages ne feraient-elles pas de Rousseau le véritable précurseu
3240 ent payer… De telles pages ne feraient-elles pas de Rousseau le véritable précurseur des régimes totalitaires du xxe siè
3241 ternes qu’une gradation nécessaire force les rois de leur donner… La première réforme dont vous auriez besoin serait celle
3242 ière réforme dont vous auriez besoin serait celle de votre étendue… Commencez par resserrer vos limites, si vous voulez ré
3243 rées ; mais ce serait un grand bien pour le corps de la nation… Je voudrais, s’il était possible, que vous eussiez autant
3244 ais, s’il était possible, que vous eussiez autant d’ États que de palatinats133. Formez dans chacun autant d’administration
3245 ait possible, que vous eussiez autant d’États que de palatinats133. Formez dans chacun autant d’administrations particuliè
3246 s que de palatinats133. Formez dans chacun autant d’ administrations particulières. Perfectionnez la forme des diétines, ét
3247 tes que rien ne puisse rompre entre elles le lien de la commune législation, et de la subordination au corps de la républi
3248 entre elles le lien de la commune législation, et de la subordination au corps de la république. En un mot, appliquez-vous
3249 mune législation, et de la subordination au corps de la république. En un mot, appliquez-vous à étendre et perfectionner l
3250 puisse vous convenir. En cette partie centrale de son mémoire, Rousseau rappelle expressément les moyens qu’il préconis
3251 s qu’une nation ne peut être légitimement sujette d’ une autre, parce que l’essence du corps politique est dans l’accord de
3252 ue l’essence du corps politique est dans l’accord de l’obéissance et de la liberté, et que ces mots de sujet et de souvera
3253 ps politique est dans l’accord de l’obéissance et de la liberté, et que ces mots de sujet et de souverain sont des corréla
3254 de l’obéissance et de la liberté, et que ces mots de sujet et de souverain sont des corrélations identiques dont l’idée se
3255 nce et de la liberté, et que ces mots de sujet et de souverain sont des corrélations identiques dont l’idée se réunit sous
3256 identiques dont l’idée se réunit sous le seul mot de citoyen… Mais comment donner aux petits états assez de force pour rés
3257 toyen… Mais comment donner aux petits états assez de force pour résister aux grands ? Comme jadis les villes grecques rési
3258 la Hollande et la Suisse ont résisté à la maison d’ Autriche. Que si les Polonais préfèrent à ce fédéralisme intégral la
3259 e fois), alors, qu’ils suivent l’exemple du reste de l’Europe, qu’ils développent les sciences, les arts, le commerce, les
3260 ent tout cela au nom de la puissance nationale : De cette manière, vous formerez un peuple ingrat, avide, servile et frip
3261 ujours sans aucun milieu à l’un des deux extrêmes de la misère ou de l’opulence, de la licence ou de l’esclavage : mais on
3262 n milieu à l’un des deux extrêmes de la misère ou de l’opulence, de la licence ou de l’esclavage : mais on vous comptera p
3263 des deux extrêmes de la misère ou de l’opulence, de la licence ou de l’esclavage : mais on vous comptera parmi les grande
3264 s de la misère ou de l’opulence, de la licence ou de l’esclavage : mais on vous comptera parmi les grandes puissances de l
3265 ais on vous comptera parmi les grandes puissances de l’Europe, vous entrerez dans les systèmes politiques ; dans toutes le
3266 pas une guerre en Europe où vous n’ayez l’honneur d’ être fourrés : si le bonheur vous en veut, vous pourrez rentrer dans v
3267 vos anciennes possessions, peut-être en conquérir de nouvelles, et puis dire comme Pyrrhus ou comme les Russes, c’est-à-di
3268 ra à moi, je mangerai bien du sucre. » Gloire de l’Europe L’Europe de Montesquieu, de Voltaire et de Rousseau peut
3269 Gloire de l’Europe L’Europe de Montesquieu, de Voltaire et de Rousseau peut se mettre en question, se comparer, et l
3270 Europe L’Europe de Montesquieu, de Voltaire et de Rousseau peut se mettre en question, se comparer, et le fait pour la
3271 e des idées ; mais elle ne doute pas sérieusement d’ elle-même. C’est une Europe française, et la France au sommet de son h
3272 ’est une Europe française, et la France au sommet de son hégémonie intellectuelle ne saurait concevoir aucune comparaison
3273 son avantage, même si elle tourne à la confusion d’ un parti détesté, qui ne la représente pas. (C’est Rousseau pour Volta
3274 ce, la vraie Europe par conséquent, ne peut pâtir de la défaite de ceux qui ont tort contre son vrai génie !) Les trois te
3275 urope par conséquent, ne peut pâtir de la défaite de ceux qui ont tort contre son vrai génie !) Les trois textes qui suive
3276 trois textes qui suivent donneront une juste idée de la confiance orgueilleuse que met en ses destins l’Europe française.
3277 ament la supériorité essentielle et comme absolue de la religion européenne, de la race blanche et de la langue française.
3278 ielle et comme absolue de la religion européenne, de la race blanche et de la langue française. Anne-Robert-Jacques Turgot
3279 de la religion européenne, de la race blanche et de la langue française. Anne-Robert-Jacques Turgot, baron de l’Aulne (17
3280 (1727-1781), fut tout d’abord séminariste, avant d’ entrer dans une carrière civile qui devait faire de lui l’un des plus
3281 ’entrer dans une carrière civile qui devait faire de lui l’un des plus grands ministres de Louis XVI. En 1750, prieur de l
3282 evait faire de lui l’un des plus grands ministres de Louis XVI. En 1750, prieur de la Sorbonne, et tout jeune homme il pro
3283 us grands ministres de Louis XVI. En 1750, prieur de la Sorbonne, et tout jeune homme il prononce en latin un « Premier di
3284 t du christianisme a procurés au genre humain ». De ce long exercice de rhétorique, détachons une prosopopée typique du s
3285 procurés au genre humain ». De ce long exercice de rhétorique, détachons une prosopopée typique du siècle : … Superbe G
3286 splendeur avait rendues si brillantes ? Une foule de barbares a effacé jusqu’aux traces de ces arts par lesquels tu avais
3287 ? Une foule de barbares a effacé jusqu’aux traces de ces arts par lesquels tu avais autrefois triomphé des Romains et soum
3288 is tes vainqueurs mêmes. Tout a cédé au fanatisme de cette religion destructive qui consacre la barbarie. L’Égypte, l’Asie
3289 Quel heureux abri put conserver au milieu de tant d’ orages le flambeau des sciences prêt à s’éteindre ? Quoi ! cette relig
3290 coup, si les divisions des conquérants, les vices de leurs gouvernements, le séjour de la noblesse à la campagne, le défau
3291 ants, les vices de leurs gouvernements, le séjour de la noblesse à la campagne, le défaut de commerce, le mélange de tant
3292 le séjour de la noblesse à la campagne, le défaut de commerce, le mélange de tant de peuples et de leurs langages, retinre
3293 à la campagne, le défaut de commerce, le mélange de tant de peuples et de leurs langages, retinrent longtemps l’Europe da
3294 aut de commerce, le mélange de tant de peuples et de leurs langages, retinrent longtemps l’Europe dans une ignorance gross
3295 l a fallu du temps pour effacer toutes les traces de la barbarie, du moins les monuments du génie, les modèles du goût peu
3296 ltés, peu suivis, furent conservés dans les mains de l’ignorance, comme des dépôts, pour être ouverts dans des temps plus
3297 ; mais elle subsista, comme les arbres dépouillés de leurs feuilles par l’hiver, subsistent au milieu des frimas pour donn
3298 (1727-1787) né dans les Abruzzes, auteur à 22 ans d’ un ouvrage sur les monnaies, fut au dire de Marmontel « le plus joli p
3299 22 ans d’un ouvrage sur les monnaies, fut au dire de Marmontel « le plus joli petit arlequin qu’ait produit l’Italie », ma
3300 rige : « C’est Platon avec la verve et les gestes d’ Arlequin. » De ses « Dialogues sur les blés » publiés en 1770, Voltair
3301 Platon avec la verve et les gestes d’Arlequin. » De ses « Dialogues sur les blés » publiés en 1770, Voltaire put écrire :
3302 pos que pouvaient accepter les salons « avancés » de l’époque. En voici deux fragments134 : … Les hommes aussi ont mis un
3303 s immense à leur perfectibilité ; car les peuples de la Californie et de la Nouvelle-Hollande, qui sont anciens de trois o
3304 fectibilité ; car les peuples de la Californie et de la Nouvelle-Hollande, qui sont anciens de trois ou quatre-mille ans,
3305 rnie et de la Nouvelle-Hollande, qui sont anciens de trois ou quatre-mille ans, sont encore de vraies brutes. La perfectib
3306 anciens de trois ou quatre-mille ans, sont encore de vraies brutes. La perfectibilité a commencé à faire de grands progrès
3307 aies brutes. La perfectibilité a commencé à faire de grands progrès en Asie, à ce qu’on dit, il y a plus de douze mille an
3308 ands progrès en Asie, à ce qu’on dit, il y a plus de douze mille ans ; et Dieu sait combien de temps auparavant on n’avait
3309 a plus de douze mille ans ; et Dieu sait combien de temps auparavant on n’avait fait que de vains efforts. Si une race as
3310 t combien de temps auparavant on n’avait fait que de vains efforts. Si une race asiatique n’avait point passé en Europe et
3311 ’avait point passé en Europe et en Afrique, et si d’ Europe elle n’eût passé en Amérique, d’où elle a fait le tour du globe
3312 que, et si d’Europe elle n’eût passé en Amérique, d’ où elle a fait le tour du globe, l’homme ne serait encore que le plus
3313 singes. Ainsi la perfectibilité n’est pas un don de l’homme en entier, mais de la seule race blanche et barbue. Par allia
3314 ilité n’est pas un don de l’homme en entier, mais de la seule race blanche et barbue. Par alliance, la race basanée et bar
3315 e, un non causa pro causa, erreur la plus commune de la logique. Tout tient aux races. La première, la plus noble des race
3316 lus près, et c’est pour cela qu’ils ont fait plus de progrès en cinquante ans, qu’on n’en fera faire aux Portugais en cinq
3317 inconstance est une loi physique… Sans elle point de fertilité, point de variété, point de perfectibilité. L’immense varié
3318 loi physique… Sans elle point de fertilité, point de variété, point de perfectibilité. L’immense variété des nations qui o
3319 elle point de fertilité, point de variété, point de perfectibilité. L’immense variété des nations qui ont peuplé ou se so
3320 u se sont alliées en Europe, a fait la perfection de notre race. Les Chinois ne se sont abrutis que par la non-mixtion ; e
3321 gné beaucoup. Antoine Rivarol (1753-1801), homme d’ esprit et précurseur des auteurs d’échos scandaleux dans la presse, n’
3322 3-1801), homme d’esprit et précurseur des auteurs d’ échos scandaleux dans la presse, n’est guère connu de nos jours que pa
3323 chos scandaleux dans la presse, n’est guère connu de nos jours que par son Discours sur l’Universalité de la langue frança
3324 nos jours que par son Discours sur l’Universalité de la langue française, couronné par l’Académie de Berlin en 1784. On y
3325 é de la langue française, couronné par l’Académie de Berlin en 1784. On y lit, à propos de la Renaissance : À cette époqu
3326 époque, la renaissance des lettres, la découverte de l’Amérique & du passage aux Indes, l’invention de la poudre &
3327 ’Amérique & du passage aux Indes, l’invention de la poudre & de l’Imprimerie, ont donné une autre face aux empires
3328 passage aux Indes, l’invention de la poudre & de l’Imprimerie, ont donné une autre face aux empires. Ceux qui brilloie
3329 nt tout-à-coup obscurcis ; & d’autres sortant de leur obscurité, sont venus figurer à leur tour sur la scène du monde.
3330 ur la scène du monde. Si du nord au midi le voile de la Religion s’est déchiré, un commerce immense a jetté de nouveaux li
3331 ligion s’est déchiré, un commerce immense a jetté de nouveaux liens parmi les hommes. C’est avec les sujets de l’Afrique q
3332 aux liens parmi les hommes. C’est avec les sujets de l’Afrique que nous cultivons l’Amérique & c’est avec les richesse
3333 ltivons l’Amérique & c’est avec les richesses de l’Amérique que nous trafiquons en Asie. L’Univers n’offrit jamais un
3334 L’Europe surtout est parvenue à un si haut degré de puissance, que l’histoire n’a rien à lui comparer : le nombre des Cap
3335 rope présente une République fédérative, composée d’ empires & de royaumes, & la plus redoutable qui ait jamais exi
3336 e République fédérative, composée d’empires & de royaumes, & la plus redoutable qui ait jamais existé ; on ne peut
3337 ure & sa clarté : jusqu’au moment où, par une de ces grandes révolutions qui remettent les choses à leur premier point
3338 enre humain. Comme en écho à ces voix optimistes de la France, voici d’Espagne le message non moins « philosophique » d’u
3339 en écho à ces voix optimistes de la France, voici d’ Espagne le message non moins « philosophique » d’un partisan de l’Euro
3340 d’Espagne le message non moins « philosophique » d’ un partisan de l’Europe fédérée… par l’Instruction : Melchior-Gaspar d
3341 message non moins « philosophique » d’un partisan de l’Europe fédérée… par l’Instruction : Melchior-Gaspar de Jovellanos (
3342 re, et poète : Qui ne voit que grâce au progrès ( de l’Enseignement) les gouvernements travailleront seulement et efficace
3343 lleront seulement et efficacement pour le bonheur de leurs gouvernés, et que les nations, au heu de se combattre et de se
3344 ur de leurs gouvernés, et que les nations, au heu de se combattre et de se détruire pour de mesquines raisons d’intérêt ou
3345 és, et que les nations, au heu de se combattre et de se détruire pour de mesquines raisons d’intérêt ou d’ambition, resser
3346 ns, au heu de se combattre et de se détruire pour de mesquines raisons d’intérêt ou d’ambition, resserreront entre elles l
3347 attre et de se détruire pour de mesquines raisons d’ intérêt ou d’ambition, resserreront entre elles les liens d’amour et d
3348 e détruire pour de mesquines raisons d’intérêt ou d’ ambition, resserreront entre elles les liens d’amour et de fraternité
3349 ou d’ambition, resserreront entre elles les liens d’ amour et de fraternité auxquels les a destinées la Providence ? Qui ne
3350 on, resserreront entre elles les liens d’amour et de fraternité auxquels les a destinées la Providence ? Qui ne voit que l
3351 s la Providence ? Qui ne voit que le progrès même de l’instruction conduira un jour les nations les plus éclairées d’Europ
3352 n conduira un jour les nations les plus éclairées d’ Europe d’abord, et toutes celles du globe ensuite, à une confédération
3353 te, à une confédération générale dont le but sera d’ assurer à chacune d’elles la jouissance des avantages que le ciel leur
3354 ion générale dont le but sera d’assurer à chacune d’ elles la jouissance des avantages que le ciel leur a donnés, ainsi que
3355 es avantages que le ciel leur a donnés, ainsi que de maintenir une paix inviolable et perpétuelle, et de réprimer, non pas
3356 maintenir une paix inviolable et perpétuelle, et de réprimer, non pas avec des armées ou des canons, mais avec la force d
3357 avec des armées ou des canons, mais avec la force de sa voix, qui sera plus forte et terrible qu’eux, ces peuples témérair
3358 religion lui dictent, et la seule qui soit digne de la haute destinée pour laquelle Dieu l’a créée ?135 122. B. de
3359 onclusion. 123. Lettres persanes, XXXIe lettre, de Rhédi à Usbek, datée de Venise. 124. Cahiers, Sur la puissance des
3360 s persanes, XXXIe lettre, de Rhédi à Usbek, datée de Venise. 124. Cahiers, Sur la puissance des États. C’est une réfutat
3361 Sur la puissance des États. C’est une réfutation de Jean Bodin, cf. p. 77. Dans les Réflexions sur la Monarchie universel
3362 pe : « L’Europe n’est plus qu’une nation composée de plusieurs provinces. » 125. Cahiers, Sur les ouvrages de l’Esprit.
3363 urs provinces. » 125. Cahiers, Sur les ouvrages de l’Esprit. 126. De l’Esprit des Lois. Firmin Didot et Cie, Paris, Li
3364 5. Cahiers, Sur les ouvrages de l’Esprit. 126. De l’Esprit des Lois. Firmin Didot et Cie, Paris, Livre XXI, chap. XXI,
3365 Cie, Paris, Livre XXI, chap. XXI, p. 316. 127. De l’Esprit des Lois, Livre XVII, chap. Ill, p. 228. 128. Ibid., Livre
3366 VI, p. 230-231. 130. Pensées diverses (Portrait de soi-même). Cf. supra la citation de Vitoria, p. 75. 131. Extrait de
3367 ses (Portrait de soi-même). Cf. supra la citation de Vitoria, p. 75. 131. Extrait de Dialogues et anecdotes philosophique
3368 upra la citation de Vitoria, p. 75. 131. Extrait de Dialogues et anecdotes philosophiques, septième entretien : « Que l’E
3369 les Institutions Politiques qu’il rêva longtemps d’ écrire. 133. À cette date, la Pologne était divisée en 33 « palatinat
3370 134. Ferdinand Galiani : Correspondance inédite de l’abbé F. G., conseiller du roi, pendant les années 1765 à 1783 (Extr
3371 du roi, pendant les années 1765 à 1783 (Extraits de deux lettres à Madame d’Épinay), tome II, Paris, I. G. Dentu, 1818. L
3372 22 novembre 1777. 135. Tratado teorico-practico de Ensenanza. Biblioteca de autores espanoles, Œuvres de Jovellanos, I,
3373 Tratado teorico-practico de Ensenanza. Biblioteca de autores espanoles, Œuvres de Jovellanos, I, p. 251.
3374 nsenanza. Biblioteca de autores espanoles, Œuvres de Jovellanos, I, p. 251.
11 1961, Vingt-huit siècles d’Europe. Troisième partie. L’ère des philosophes. De Leibniz à Condorcet — 3. Évolution : vers le progrès ou vers la décadence ?
3375 l’étudie dans ses « Considérations sur les causes de la grandeur et de la décadence des Romains » formait une sorte d’orga
3376 « Considérations sur les causes de la grandeur et de la décadence des Romains » formait une sorte d’organisme soumis à des
3377 t de la décadence des Romains » formait une sorte d’ organisme soumis à des lois immanentes de développement, ou, pour s’en
3378 ne sorte d’organisme soumis à des lois immanentes de développement, ou, pour s’en tenir à ses propres termes, « à des caus
3379 u xviiie siècle s’ouvre l’ère des vues générales de l’Histoire du monde. L’idée d’un développement organique ou « dialect
3380 des vues générales de l’Histoire du monde. L’idée d’ un développement organique ou « dialectique » des civilisations s’impo
3381 ences incalculables. Car s’il existe des « lois » d’ évolution, il en résulte à première vue qu’à toute ascension vers la g
3382 science européenne un doute anxieux sur le destin de notre civilisation : d’où la naissance exactement simultanée des idée
3383 ute anxieux sur le destin de notre civilisation : d’ où la naissance exactement simultanée des idées de Progrès à l’infini
3384 d’où la naissance exactement simultanée des idées de Progrès à l’infini et de Déclin fatal de l’Occident. Robertson entrep
3385 ent simultanée des idées de Progrès à l’infini et de Déclin fatal de l’Occident. Robertson entreprend d’écrire une histoir
3386 es idées de Progrès à l’infini et de Déclin fatal de l’Occident. Robertson entreprend d’écrire une histoire de l’Europe co
3387 Déclin fatal de l’Occident. Robertson entreprend d’ écrire une histoire de l’Europe comme ensemble organique. Gibbon, quel
3388 ident. Robertson entreprend d’écrire une histoire de l’Europe comme ensemble organique. Gibbon, quelques années plus tard,
3389 bbon, quelques années plus tard, reprend le sujet de Montesquieu mais dans une vue plus historique, moins moraliste : il e
3390 lus historique, moins moraliste : il entend tirer de l’évolution de Rome des conclusions instructives pour l’évolution de
3391 moins moraliste : il entend tirer de l’évolution de Rome des conclusions instructives pour l’évolution de l’Europe, et el
3392 ome des conclusions instructives pour l’évolution de l’Europe, et elles sont, de justesse, optimistes. Mais le problème de
3393 ives pour l’évolution de l’Europe, et elles sont, de justesse, optimistes. Mais le problème de notre décadence n’en demeur
3394 s sont, de justesse, optimistes. Mais le problème de notre décadence n’en demeure pas moins posé, dès ce moment. Condorcet
3395 voit bien, mais répond au défi en lançant l’idée de Progrès. Volney cède au contraire, premier des romantiques, aux verti
3396 contraire, premier des romantiques, aux vertiges de la Décadence. Quant à Wieland, dernier des philosophes « éclairés »,
3397 lairés », il croira jusqu’au dernier jour — celui de la Révolution — et même au-delà, que l’ère de la raison « cosmopolite
3398 lui de la Révolution — et même au-delà, que l’ère de la raison « cosmopolite » a été instaurée pour toujours par l’Europe…
3399 793), chapelain du roi pour l’Écosse et principal de l’Université d’Édimbourg, peut être considéré comme le premier histor
3400 du roi pour l’Écosse et principal de l’Université d’ Édimbourg, peut être considéré comme le premier historien qui ait pris
3401 omme le premier historien qui ait pris pour objet de son étude l’Europe entière, considérée comme unité, non comme une add
3402 e, considérée comme unité, non comme une addition de chroniques régionales. Le lecteur d’aujourd’hui ne manquera pas de vo
3403 une addition de chroniques régionales. Le lecteur d’ aujourd’hui ne manquera pas de voir dans cette méthode l’annonce de la
3404 ionales. Le lecteur d’aujourd’hui ne manquera pas de voir dans cette méthode l’annonce de la thèse de Toynbee sur les « ch
3405 manquera pas de voir dans cette méthode l’annonce de la thèse de Toynbee sur les « champs d’étude intelligibles ». Dans la
3406 de voir dans cette méthode l’annonce de la thèse de Toynbee sur les « champs d’étude intelligibles ». Dans la Préface à s
3407 l’annonce de la thèse de Toynbee sur les « champs d’ étude intelligibles ». Dans la Préface à son Histoire de Charles-Quint
3408 e intelligibles ». Dans la Préface à son Histoire de Charles-Quint (1769), Robertson déclare expressément qu’il entend « b
3409 éclare expressément qu’il entend « borner l’étude de l’Histoire à cette période surtout où les différentes Puissances de l
3410 tte période surtout où les différentes Puissances de l’Europe s’étant plus étroitement unies, les opérations d’un État ont
3411 pe s’étant plus étroitement unies, les opérations d’ un État ont affecté toutes les autres, au point d’influer sur leurs pr
3412 d’un État ont affecté toutes les autres, au point d’ influer sur leurs projets et de régler leurs démarches ». C’est pourqu
3413 s autres, au point d’influer sur leurs projets et de régler leurs démarches ». C’est pourquoi il a entrepris de présenter
3414 leurs démarches ». C’est pourquoi il a entrepris de présenter l’histoire de Charles-Quint, car, écrit-il : Il est une ép
3415 t pourquoi il a entrepris de présenter l’histoire de Charles-Quint, car, écrit-il : Il est une époque, avant laquelle cha
3416 propre Histoire, et après laquelle les événements de chaque nation considérable de l’Europe deviennent instructifs et inté
3417 elle les événements de chaque nation considérable de l’Europe deviennent instructifs et intéressants pour toutes les autre
3418 terminer. C’est dans cette vue que j’ai entrepris d’ écrire l’Histoire de l’empereur Charles-Quint. Ce fut pendant son règn
3419 cette vue que j’ai entrepris d’écrire l’Histoire de l’empereur Charles-Quint. Ce fut pendant son règne que les Puissances
3420 uint. Ce fut pendant son règne que les Puissances de l’Europe formèrent un vaste système politique, où chacune prit un ran
3421 ang, qu’elle a conservé depuis avec beaucoup plus de stabilité qu’on n’aurait pu l’attendre… Le siècle de Charles-Quint pe
3422 stabilité qu’on n’aurait pu l’attendre… Le siècle de Charles-Quint peut donc être regardé comme la période à laquelle l’ét
3423 ardé comme la période à laquelle l’état politique de l’Europe commença de prendre une nouvelle forme. Deux passages de ce
3424 à laquelle l’état politique de l’Europe commença de prendre une nouvelle forme. Deux passages de cette préface, intitulé
3425 nça de prendre une nouvelle forme. Deux passages de cette préface, intitulée « Tableau des progrès de la société en Europ
3426 de cette préface, intitulée « Tableau des progrès de la société en Europe, depuis la destruction de l’Empire romain jusqu’
3427 ès de la société en Europe, depuis la destruction de l’Empire romain jusqu’au commencement du xvie siècle », éclairent et
3428 iée par Robertson136 : Il paroit que les nations d’ Europe se sont regardées pendant plusieurs siècles comme des sociétés
3429 rce étendu et suivi, qui leur donnât une occasion d’ observer et de pénétrer leurs vues et leurs projets réciproques. Ils n
3430 suivi, qui leur donnât une occasion d’observer et de pénétrer leurs vues et leurs projets réciproques. Ils n’avoient point
3431 et leurs projets réciproques. Ils n’avoient point d’ ambassadeurs qui, résidant constamment dans chaque cour, fussent à por
3432 nt constamment dans chaque cour, fussent à portée d’ épier tous ses mouvements et d’en donner sur le champ avis à leurs maî
3433 , fussent à portée d’épier tous ses mouvements et d’ en donner sur le champ avis à leurs maîtres. L’espérance de quelques a
3434 er sur le champ avis à leurs maîtres. L’espérance de quelques avantages éloignés, ou la crainte de quelques dangers incert
3435 nce de quelques avantages éloignés, ou la crainte de quelques dangers incertains ou possibles, n’étoient pas des motifs su
3436 r propre sûreté. Quiconque veut écrire l’histoire de quelqu’un des grands États de l’Europe pendant les deux derniers sièc
3437 ope pendant les deux derniers siècles, est obligé d’ écrire l’histoire de l’Europe entière. Depuis cette époque, les différ
3438 derniers siècles, est obligé d’écrire l’histoire de l’Europe entière. Depuis cette époque, les différens royaumes n’ont f
3439 et vaste système, si étroitement, uni, que chacun d’ entr’eux ayant un rang déterminé, les opérations de l’un se font senti
3440 ’entr’eux ayant un rang déterminé, les opérations de l’un se font sentir à tous les autres assez puissamment pour influer
3441 e mêloient rarement, excepté lorsque le voisinage de territoire rendoit les occasions de querelles fréquentes et inévitabl
3442 le voisinage de territoire rendoit les occasions de querelles fréquentes et inévitables… Cependant, la connaissance des
3443 ables… Cependant, la connaissance des diversités de l’Europe n’en est pas moins essentielle à l’historien que celle de so
3444 est pas moins essentielle à l’historien que celle de son unité : Tandis que les institutions et les événemens que j’ai dé
3445 loient devoir donner les mêmes mœurs aux habitans de l’Europe, en les conduisant de la barbarie à la civilisation, par les
3446 mœurs aux habitans de l’Europe, en les conduisant de la barbarie à la civilisation, par les mêmes sentiers et à peu près d
3447 ivilisation, par les mêmes sentiers et à peu près d’ un pas égal, il se rencontra d’autres circonstances qui produisirent u
3448 et donnèrent naissance à ces formes particulières de gouvernement, d’où résulta une si grande variété dans le caractère et
3449 sance à ces formes particulières de gouvernement, d’ où résulta une si grande variété dans le caractère et le génie des nat
3450 aractère et le génie des nations. La connoissance de ces dernières circonstances n’est pas moins nécessaire que celle des
3451 ce a été universelle, mettra mes lecteurs en état d’ expliquer cette singulière ressemblance qu’on remarque dans la police
3452 re et dans les expéditions militaires des peuples de l’Europe. Mais sans une connoissance exacte de la forme particulière
3453 es de l’Europe. Mais sans une connoissance exacte de la forme particulière et du caractère de leur gouvernement civil, une
3454 e exacte de la forme particulière et du caractère de leur gouvernement civil, une grande partie de leur histoire paroîtroi
3455 ère de leur gouvernement civil, une grande partie de leur histoire paroîtroit mystérieuse et inexpliquable. Les auteurs qu
3456 expliquable. Les auteurs qui ont écrit l’histoire d’ une nation particulière, ne se sont guère proposé que d’intéresser et
3457 nation particulière, ne se sont guère proposé que d’ intéresser et d’instruire leurs compatriotes, à qui ils pouvoient supp
3458 ère, ne se sont guère proposé que d’intéresser et d’ instruire leurs compatriotes, à qui ils pouvoient supposer que les mœu
3459 connues ; en conséquence ils ont souvent négligé d’ entrer à cet égard, dans des détails suffisans pour faire connoître au
3460 t. Mais une histoire qui embrasse les révolutions de tant de pays divers, serait extrêmement imparfaite, sans un examen pr
3461 trêmement imparfaite, sans un examen préliminaire de leur constitution et de leur état politique.137 Robertson, en défin
3462 ns un examen préliminaire de leur constitution et de leur état politique.137 Robertson, en définitive, sera donc ramené
3463 er l’une après l’autre les composantes nationales de son Tableau, comme vient de le faire Voltaire dans son Essai sur les
3464 e le fera bientôt Jean de Müller. C’est le centre de référence des jugements de l’historien qui a changé : décrivant telle
3465 üller. C’est le centre de référence des jugements de l’historien qui a changé : décrivant telle ou telle évolution nationa
3466 ’il fondait une redoutable tradition par le titre de l’ouvrage monumental dont il nous dit aux dernières lignes qu’il a « 
3467 res lignes qu’il a « occupé et amusé vingt années de sa vie » : l’Histoire de la Décadence et de la Chute de l’Empire roma
3468 pé et amusé vingt années de sa vie » : l’Histoire de la Décadence et de la Chute de l’Empire romain. Son exemple n’a cessé
3469 nnées de sa vie » : l’Histoire de la Décadence et de la Chute de l’Empire romain. Son exemple n’a cessé d’inspirer jusqu’à
3470 vie » : l’Histoire de la Décadence et de la Chute de l’Empire romain. Son exemple n’a cessé d’inspirer jusqu’à nos jours l
3471 a Chute de l’Empire romain. Son exemple n’a cessé d’ inspirer jusqu’à nos jours les auteurs de grandes synthèses de l’histo
3472 ’a cessé d’inspirer jusqu’à nos jours les auteurs de grandes synthèses de l’histoire des civilisations. Mais à la différen
3473 usqu’à nos jours les auteurs de grandes synthèses de l’histoire des civilisations. Mais à la différence d’un Spengler ou d
3474 ’histoire des civilisations. Mais à la différence d’ un Spengler ou d’un Toynbee, Gibbon, comme les Schlegel, Hegel et Comt
3475 ilisations. Mais à la différence d’un Spengler ou d’ un Toynbee, Gibbon, comme les Schlegel, Hegel et Comte, qui écrivirent
3476 ui écrivirent avant Darwin et Marx, ne déduit pas de la décadence du monde antique la fatalité organique d’une décadence d
3477 décadence du monde antique la fatalité organique d’ une décadence de l’Europe. Bien au contraire ! Dans les Observations g
3478 nde antique la fatalité organique d’une décadence de l’Europe. Bien au contraire ! Dans les Observations générales sur la
3479 re ! Dans les Observations générales sur la chute de l’Empire romain d’Occident (qui font suite au chapitre XXXVIII de son
3480 vations générales sur la chute de l’Empire romain d’ Occident (qui font suite au chapitre XXXVIII de son grand ouvrage), il
3481 in d’Occident (qui font suite au chapitre XXXVIII de son grand ouvrage), il examine les trois grandes causes, qui, selon l
3482 auses, qui, selon lui, ayant contribué à la ruine de Rome, motivent désormais la sécurité de l’Europe. Et certes il serait
3483 la ruine de Rome, motivent désormais la sécurité de l’Europe. Et certes il serait aisé de renverser, au nom des expérienc
3484 la sécurité de l’Europe. Et certes il serait aisé de renverser, au nom des expériences de notre siècle, les prévisions qu’
3485 serait aisé de renverser, au nom des expériences de notre siècle, les prévisions qu’il fondait sur l’observation du sien.
3486 ue nous soyons trop pessimistes, ces deux erreurs d’ appréciation ne changeant rien aux faits de civilisation que Gibbon én
3487 rreurs d’appréciation ne changeant rien aux faits de civilisation que Gibbon énumère avec lucidité. Les « 10 000 vaisseaux
3488  » prêts à porter vers les États-Unis les trésors de l’Europe ont déjà plus d’une fois traversé l’Atlantique… Un patriote
3489 États-Unis les trésors de l’Europe ont déjà plus d’ une fois traversé l’Atlantique… Un patriote doit sans doute préférer
3490 et chercher exclusivement l’intérêt et la gloire de son pays natal ; mais il est permis à un philosophe d’étendre ses vue
3491 n pays natal ; mais il est permis à un philosophe d’ étendre ses vues, et de considérer l’Europe entière comme une républiq
3492 est permis à un philosophe d’étendre ses vues, et de considérer l’Europe entière comme une république dont tous les habita
3493 es habitants ont atteint à peu près au même degré de culture et de perfection. La prépondérance continuera de passer succe
3494 nt atteint à peu près au même degré de culture et de perfection. La prépondérance continuera de passer successivement d’un
3495 ure et de perfection. La prépondérance continuera de passer successivement d’une puissance à l’autre, et la prospérité de
3496 prépondérance continuera de passer successivement d’ une puissance à l’autre, et la prospérité de notre patrie ou des royau
3497 ement d’une puissance à l’autre, et la prospérité de notre patrie ou des royaumes voisins peut alternativement s’accroître
3498 es. Les peuples sauvages sont les ennemis communs de toutes les sociétés civilisées ; nous allons examiner si l’Europe peu
3499 épétition des calamités qui renversèrent l’empire de Rome et anéantirent ses institutions. La même réflexion servira peut-
3500 expliquer les causes qui contribuèrent à la ruine de ce puissant empire, et celles qui motivent aujourd’hui notre sécurité
3501 tre sécurité. I. Les Romains ignoraient l’étendue de leur danger et le nombre de leurs ennemis. Au-delà du Danube et du Rh
3502 ignoraient l’étendue de leur danger et le nombre de leurs ennemis. Au-delà du Danube et du Rhin, les pays septentrionaux
3503 elà du Danube et du Rhin, les pays septentrionaux de l’Europe étaient remplis d’innombrables tribus de pâtres et de chasse
3504 s pays septentrionaux de l’Europe étaient remplis d’ innombrables tribus de pâtres et de chasseurs, pauvres, voraces et tur
3505 de l’Europe étaient remplis d’innombrables tribus de pâtres et de chasseurs, pauvres, voraces et turbulents, intrépides da
3506 taient remplis d’innombrables tribus de pâtres et de chasseurs, pauvres, voraces et turbulents, intrépides dans les combat
3507 urbulents, intrépides dans les combats, et avides de s’emparer des fruits de l’industrie. La rapide impulsion de la guerre
3508 ns les combats, et avides de s’emparer des fruits de l’industrie. La rapide impulsion de la guerre agita le monde barbare,
3509 er des fruits de l’industrie. La rapide impulsion de la guerre agita le monde barbare, et les révolutions de la Chine entr
3510 guerre agita le monde barbare, et les révolutions de la Chine entraînèrent celles de la Gaule et de l’Italie. Les Huns, qu
3511 t les révolutions de la Chine entraînèrent celles de la Gaule et de l’Italie. Les Huns, qui fuyaient devant un ennemi vict
3512 ns de la Chine entraînèrent celles de la Gaule et de l’Italie. Les Huns, qui fuyaient devant un ennemi victorieux, dirigèr
3513 rent à leur tour des conquêtes. Le poids accumulé d’ une multitude de barbares qui se précipitaient les uns sur les autres
3514 des conquêtes. Le poids accumulé d’une multitude de barbares qui se précipitaient les uns sur les autres fondit avec impé
3515 ue d’autres occupaient leur place et présentaient de nouveaux assaillans. On ne voit plus sortir du Nord ces émigrations f
3516 le long repos qui a été attribué au décroissement de la population est la suite heureuse des progrès des arts et de l’agri
3517 ion est la suite heureuse des progrès des arts et de l’agriculture. Au lieu de quelques villages placés de loin en loin, a
3518 ’agriculture. Au lieu de quelques villages placés de loin en loin, au milieu des bois et des marais, l’Allemagne compte au
3519 urd’hui deux-mille-trois-cents villes environnées de murs. Les royaumes chrétiens du Danemarck, de la Suède et de la Polog
3520 ées de murs. Les royaumes chrétiens du Danemarck, de la Suède et de la Pologne se sont élevés successivement ; les négocia
3521 s royaumes chrétiens du Danemarck, de la Suède et de la Pologne se sont élevés successivement ; les négocians hanséatiques
3522 iques ont étendu leurs colonies le long des côtes de la mer Baltique jusqu’au golfe de Finlande. Depuis le golfe de Finlan
3523 an Oriental, la Russie prend aujourd’hui la forme d’ un empire puissant et civilisé. On voit sur les bords de la Volga, de
3524 mpire puissant et civilisé. On voit sur les bords de la Volga, de l’Obi et du Lena, le laboureur conduire sa charrue, le t
3525 t et civilisé. On voit sur les bords de la Volga, de l’Obi et du Lena, le laboureur conduire sa charrue, le tisserand trav
3526 t pas inquiéter sérieusement la grande république d’ Europe. Cependant cette sécurité apparente ne doit pas nous faire oubl
3527 isible sur la carte du monde, peut nous présenter de nouveaux ennemis et des dangers imprévus. Les Arabes ou Sarrasins, qu
3528 que Mahomet anima leurs corps sauvages du souffle de l’enthousiasme. II. L’empire de Rome était solidement établi sur la p
3529 uvages du souffle de l’enthousiasme. II. L’empire de Rome était solidement établi sur la parfaite union de toutes ses part
3530 ome était solidement établi sur la parfaite union de toutes ses parties. Les peuples, devenus des sujets, renoncèrent à l’
3531 s sujets, renoncèrent à l’espoir et même au désir de l’indépendance, et se trouvèrent honorés du titre de citoyens romains
3532 l’indépendance, et se trouvèrent honorés du titre de citoyens romains. Forcées de céder aux barbares, les provinces de l’O
3533 ent honorés du titre de citoyens romains. Forcées de céder aux barbares, les provinces de l’Occident se virent avec douleu
3534 ins. Forcées de céder aux barbares, les provinces de l’Occident se virent avec douleur séparées de leur mère-patrie ; mais
3535 ces de l’Occident se virent avec douleur séparées de leur mère-patrie ; mais elles avaient acheté cette union par la perte
3536 ais elles avaient acheté cette union par la perte de la liberté nationale et de l’esprit militaire. Renonçant à tout senti
3537 tte union par la perte de la liberté nationale et de l’esprit militaire. Renonçant à tout sentiment de vigueur et d’activi
3538 de l’esprit militaire. Renonçant à tout sentiment de vigueur et d’activité, les provinces asservies attendaient leur salut
3539 litaire. Renonçant à tout sentiment de vigueur et d’ activité, les provinces asservies attendaient leur salut de troupes me
3540 é, les provinces asservies attendaient leur salut de troupes mercenaires et de gouvernemens dirigés par les ordres d’une c
3541 attendaient leur salut de troupes mercenaires et de gouvernemens dirigés par les ordres d’une cour éloignée. Le bonheur d
3542 enaires et de gouvernemens dirigés par les ordres d’ une cour éloignée. Le bonheur de cent-millions d’individus dépendait d
3543 és par les ordres d’une cour éloignée. Le bonheur de cent-millions d’individus dépendait du mérite personnel d’un ou de de
3544 d’une cour éloignée. Le bonheur de cent-millions d’ individus dépendait du mérite personnel d’un ou de deux hommes, peut-ê
3545 illions d’individus dépendait du mérite personnel d’ un ou de deux hommes, peut-être de deux enfans, dont l’éducation, le l
3546 d’individus dépendait du mérite personnel d’un ou de deux hommes, peut-être de deux enfans, dont l’éducation, le luxe et l
3547 érite personnel d’un ou de deux hommes, peut-être de deux enfans, dont l’éducation, le luxe et le despotisme avaient corro
3548 ut sous les minorités des fils et des petits-fils de Théodose que l’empire éprouva les plus funestes calamités ; et, lorsq
3549 sque ces princes méprisables eurent atteint l’âge de la virilité, ils abandonnèrent l’église aux évêques, l’état aux eunuq
3550 tés plus petites, mais indépendantes. Les chances de talens dans les rois et les ministres sont au moins multipliées en ra
3551 sommeilleront sur les trônes du sud. L’influence de la crainte et la honte arrêtent l’abus de la tyrannie. Les république
3552 fluence de la crainte et la honte arrêtent l’abus de la tyrannie. Les républiques ont acquis de l’ordre et de la stabilité
3553 l’abus de la tyrannie. Les républiques ont acquis de l’ordre et de la stabilité ; les monarchies ont adopté des maximes de
3554 yrannie. Les républiques ont acquis de l’ordre et de la stabilité ; les monarchies ont adopté des maximes de liberté, ou a
3555 stabilité ; les monarchies ont adopté des maximes de liberté, ou au moins de modération ; et les mœurs générales du siècle
3556 es ont adopté des maximes de liberté, ou au moins de modération ; et les mœurs générales du siècle ont introduit quelques
3557 rales du siècle ont introduit quelques sentiments d’ honneur et de justice dans les constitutions les plus défectueuses. En
3558 le ont introduit quelques sentiments d’honneur et de justice dans les constitutions les plus défectueuses. En temps de pai
3559 les constitutions les plus défectueuses. En temps de paix, l’émulation active de tant de rivaux accélère les progrès des s
3560 éfectueuses. En temps de paix, l’émulation active de tant de rivaux accélère les progrès des sciences et de l’industrie ;
3561 nt de rivaux accélère les progrès des sciences et de l’industrie ; en temps de guerre, des contestations passagères et peu
3562 progrès des sciences et de l’industrie ; en temps de guerre, des contestations passagères et peu décisives exercent les fo
3563 s et peu décisives exercent les forces militaires de l’Europe. Si un conquérant sauvage sortait des déserts de la Tartarie
3564 ope. Si un conquérant sauvage sortait des déserts de la Tartarie, il faudrait qu’il vainquît successivement les paysans ro
3565 u’il vainquît successivement les paysans robustes de la Russie, les nombreuses armées de l’Allemagne, la vaillante nobless
3566 sans robustes de la Russie, les nombreuses armées de l’Allemagne, la vaillante noblesse de France, et les intrépides citoy
3567 uses armées de l’Allemagne, la vaillante noblesse de France, et les intrépides citoyens de la Bretagne, que la défense com
3568 te noblesse de France, et les intrépides citoyens de la Bretagne, que la défense commune pourrait peut-être réunir. En sup
3569 ntique, dix mille vaisseaux mettraient les restes de la société civilisée à l’abri de leurs poursuites, et l’Europe renaît
3570 aient les restes de la société civilisée à l’abri de leurs poursuites, et l’Europe renaîtrait et fleurirait en Amérique, o
3571 Le froid, la pauvreté, l’habitude des dangers et de la fatigue entretiennent les forces et le courage des peuples barbare
3572 ont fait la loi aux nations paisibles et policées de la Chine, de l’Inde, et de la Perse, qui négligeaient et négligent en
3573 oi aux nations paisibles et policées de la Chine, de l’Inde, et de la Perse, qui négligeaient et négligent encore de suppl
3574 paisibles et policées de la Chine, de l’Inde, et de la Perse, qui négligeaient et négligent encore de suppléer à ces avan
3575 de la Perse, qui négligeaient et négligent encore de suppléer à ces avantages naturels par les ressources de l’art militai
3576 pléer à ces avantages naturels par les ressources de l’art militaire. Les nations guerrières de l’antiquité, de la Grèce,
3577 ources de l’art militaire. Les nations guerrières de l’antiquité, de la Grèce, de la Macédoine et de Rome, élevaient une r
3578 militaire. Les nations guerrières de l’antiquité, de la Grèce, de la Macédoine et de Rome, élevaient une race de soldats,
3579 s nations guerrières de l’antiquité, de la Grèce, de la Macédoine et de Rome, élevaient une race de soldats, exerçaient le
3580 s de l’antiquité, de la Grèce, de la Macédoine et de Rome, élevaient une race de soldats, exerçaient leurs corps, discipli
3581 e, de la Macédoine et de Rome, élevaient une race de soldats, exerçaient leurs corps, disciplinaient leur courage, multipl
3582 l’attaque et pour la défense. Mais la corruption de leurs mœurs et de leurs lois fit disparaître insensiblement cette sup
3583 la défense. Mais la corruption de leurs mœurs et de leurs lois fit disparaître insensiblement cette supériorité. La polit
3584 nsiblement cette supériorité. La politique faible de Constantin et de ses successeurs arma et introduisit la valeur indisc
3585 supériorité. La politique faible de Constantin et de ses successeurs arma et introduisit la valeur indisciplinée des merce
3586 s barbares qui renversèrent l’empire. L’invention de la poudre a produit une grande révolution dans l’art militaire, en so
3587 on dans l’art militaire, en soumettant au pouvoir de l’homme l’air et le feu, les deux plus redoutables agens de la nature
3588 l’air et le feu, les deux plus redoutables agens de la nature. Les mathématiques, la chimie, la mécanique, et l’architect
3589 ecture, ont appliqué leurs découvertes au service de la guerre ; et les combattans emploient aujourd’hui les méthodes les
3590 ion qu’avec l’argent dépensé pour les préparatifs d’ un siège on établirait et entretiendrait une colonie florissante ; mai
3591 moins comme une chose heureuse que la destruction d’ une ville soit une entreprise difficile et dispendieuse, ou qu’un peup
3592 es, et l’Europe n’a plus à redouter une irruption de barbares, puisqu’il serait indispensable qu’ils se civilisassent avan
3593 voir conquérir. Leurs découvertes dans la science de la guerre seraient nécessairement accompagnées comme l’exemple de la
3594 aient nécessairement accompagnées comme l’exemple de la Russie le démontre, de progrès proportionnels dans les arts paisib
3595 pagnées comme l’exemple de la Russie le démontre, de progrès proportionnels dans les arts paisibles et dans la politique c
3596 dans la politique civile ; ils mériteraient alors d’ être comptés au nombre des nations civilisées qu’ils auraient soumises
3597 arquis Antoine de Condorcet (1743-1794), partisan de la Révolution et tué par elle, avait écrit un an avant sa mort, caché
3598 avant sa mort, caché chez des amis, son Esquisse d’ un tableau historique des progrès de l’esprit humain. Il fut le précur
3599 son Esquisse d’un tableau historique des progrès de l’esprit humain. Il fut le précurseur des assurances sociales « par l
3600 urances sociales « par le calcul des probabilités de la vie », et le précurseur de la coopération scientifique internation
3601 ul des probabilités de la vie », et le précurseur de la coopération scientifique internationale139. Nous citerons les page
3602 ifique internationale139. Nous citerons les pages de l’Esquisse où il prévoit avec lucidité (mais résout avec trop d’optim
3603 ù il prévoit avec lucidité (mais résout avec trop d’ optimisme) les problèmes que créera dans le monde l’expansion de nos c
3604 es problèmes que créera dans le monde l’expansion de nos concepts et techniques, ou comme il dit « des lumières et de la r
3605 et techniques, ou comme il dit « des lumières et de la raison en Europe ». Toutes les nations doivent-elles se rapproche
3606 s les nations doivent-elles se rapprocher un jour de l’état de civilisation où sont parvenus les peuples les plus éclairés
3607 ons doivent-elles se rapprocher un jour de l’état de civilisation où sont parvenus les peuples les plus éclairés, les plus
3608 us éclairés, les plus libres, les plus affranchis de préjugés, tels que les Français et les Anglo-Américains ? Cette dista
3609 s ? Cette distance immense qui sépare ces peuples de la servitude des nations soumises à des rois, de la barbarie des peup
3610 de la servitude des nations soumises à des rois, de la barbarie des peuplades africaines, de l’ignorance des sauvages, do
3611 es rois, de la barbarie des peuplades africaines, de l’ignorance des sauvages, doit-elle peu à peu s’évanouir ? Y a-t-il s
3612 ture ait condamné les habitants à ne jamais jouir de la liberté, à ne jamais exercer leur raison ? Cette différence de lum
3613 ne jamais exercer leur raison ? Cette différence de lumière, de moyens ou de richesses, observée jusqu’à présent chez tou
3614 xercer leur raison ? Cette différence de lumière, de moyens ou de richesses, observée jusqu’à présent chez tous les peuple
3615 aison ? Cette différence de lumière, de moyens ou de richesses, observée jusqu’à présent chez tous les peuples civilisés,
3616 ntre les différentes classes qui composent chacun d’ eux ; cette inégalité, que les premiers progrès de la société ont augm
3617 d’eux ; cette inégalité, que les premiers progrès de la société ont augmentée et pour ainsi dire produite, tient-elle à la
3618 civilisation même, ou aux imperfections actuelles de l’art social ? doit-elle continuellement s’affaiblir pour faire place
3619 ment s’affaiblir pour faire place à cette égalité de fait, dernier but de l’art social, qui, diminuant même les effets de
3620 faire place à cette égalité de fait, dernier but de l’art social, qui, diminuant même les effets de la différence naturel
3621 t de l’art social, qui, diminuant même les effets de la différence naturelle des facultés, ne laisse plus subsister qu’une
3622 plus subsister qu’une inégalité utile à l’intérêt de tous, parce qu’elle favorisera les progrès de la civilisation, de l’i
3623 rêt de tous, parce qu’elle favorisera les progrès de la civilisation, de l’instruction et de l’industrie, sans entraîner n
3624 u’elle favorisera les progrès de la civilisation, de l’instruction et de l’industrie, sans entraîner ni dépendance, ni hum
3625 s progrès de la civilisation, de l’instruction et de l’industrie, sans entraîner ni dépendance, ni humiliation, ni appauvr
3626 s, et par conséquence nécessaire, dans les moyens de bien-être particulier et de prospérité commune ; soit par des progrès
3627 aire, dans les moyens de bien-être particulier et de prospérité commune ; soit par des progrès dans les principes de condu
3628 commune ; soit par des progrès dans les principes de conduite et dans la morale pratique ; soit enfin par le perfectionnem
3629 acultés intellectuelles, morales et physiques, ou de l’organisation naturelle de l’homme ? En répondant à ces trois questi
3630 ales et physiques, ou de l’organisation naturelle de l’homme ? En répondant à ces trois questions, nous trouverons… les mo
3631 tions, nous trouverons… les motifs les plus forts de croire que la nature n’a mis aucun terme à nos espérances. Si nous je
3632 verrons d’abord que, dans l’Europe, les principes de la constitution française sont déjà ceux de tous les hommes éclairés.
3633 cipes de la constitution française sont déjà ceux de tous les hommes éclairés. Nous les y verrons trop répandus, et trop h
3634 s des tyrans et des prêtres puissent les empêcher de pénétrer peu à peu jusqu’aux cabanes de leurs esclaves ; et ces princ
3635 empêcher de pénétrer peu à peu jusqu’aux cabanes de leurs esclaves ; et ces principes y réveilleront bientôt un reste de
3636 et ces principes y réveilleront bientôt un reste de bon sens, et cette sourde indignation que l’habitude de l’humiliation
3637 sens, et cette sourde indignation que l’habitude de l’humiliation et de la terreur ne peuvent étouffer dans l’âme des opp
3638 de indignation que l’habitude de l’humiliation et de la terreur ne peuvent étouffer dans l’âme des opprimés. … Peut-on dou
3639 les effets lents, mais infaillibles, des progrès de leurs colonies, ne produisent bientôt l’indépendance du Nouveau Monde
3640 quête, les nations sauvages qui y occupent encore de vastes contrées ? Parcourez l’histoire de nos entreprises, de nos éta
3641 encore de vastes contrées ? Parcourez l’histoire de nos entreprises, de nos établissements en Afrique et ou en Asie, vous
3642 ntrées ? Parcourez l’histoire de nos entreprises, de nos établissements en Afrique et ou en Asie, vous verrez nos monopole
3643 Afrique et ou en Asie, vous verrez nos monopoles de commerce, nos trahisons, notre mépris sanguinaire pour les hommes d’u
3644 ahisons, notre mépris sanguinaire pour les hommes d’ une autre couleur ou d’une autre croyance, l’insolence de nos usurpati
3645 anguinaire pour les hommes d’une autre couleur ou d’ une autre croyance, l’insolence de nos usurpations, l’extravagant pros
3646 utre couleur ou d’une autre croyance, l’insolence de nos usurpations, l’extravagant prosélytisme ou les intrigues de nos p
3647 ions, l’extravagant prosélytisme ou les intrigues de nos prêtres, détruire ces sentiments de respect et de bienveillance q
3648 intrigues de nos prêtres, détruire ces sentiments de respect et de bienveillance que la supériorité de nos lumières et les
3649 os prêtres, détruire ces sentiments de respect et de bienveillance que la supériorité de nos lumières et les avantages de
3650 de respect et de bienveillance que la supériorité de nos lumières et les avantages de notre commerce avaient d’abord obten
3651 e la supériorité de nos lumières et les avantages de notre commerce avaient d’abord obtenu. Mais l’instant approche sans d
3652 u. Mais l’instant approche sans doute où, cessant de ne leur montrer que des corrupteurs ou des tyrans, nous deviendrons p
3653 op éclairé sur leurs propres droits pour se jouer de ceux des autres peuples, respecteront cette indépendance, qu’ils ont
3654 dépendance, qu’ils ont jusqu’ici violée avec tant d’ audace. Leurs établissements, au lieu de se remplir de protégés des go
3655 dace. Leurs établissements, au lieu de se remplir de protégés des gouvernements qui, à la faveur d’une place ou d’un privi
3656 ir de protégés des gouvernements qui, à la faveur d’ une place ou d’un privilège, courent amasser des trésors par le brigan
3657 des gouvernements qui, à la faveur d’une place ou d’ un privilège, courent amasser des trésors par le brigandage et la perf
3658 Europe des honneurs et des titres, se peupleront d’ hommes industrieux, qui iront chercher dans ces climats heureux l’aisa
3659 . La liberté les y retiendra ; l’ambition cessera de les rappeler, et ces comptoirs de brigands deviendront des colonies d
3660 mbition cessera de les rappeler, et ces comptoirs de brigands deviendront des colonies de citoyens qui répandront dans l’A
3661 es comptoirs de brigands deviendront des colonies de citoyens qui répandront dans l’Afrique et dans l’Asie les principes e
3662 Afrique et dans l’Asie les principes et l’exemple de la liberté, les lumières et la raison de l’Europe. Le comte Constant
3663 ’exemple de la liberté, les lumières et la raison de l’Europe. Le comte Constantin-François Chassebœuf de Volney, né en 1
3664 né par la Révolution, finalement sénateur et pair de France sous la Restauration, dut sa célébrité à un ouvrage Les Ruines
3665 es auteurs du xxe siècle qui ont rêvé sur la fin de l’Europe, « sur la cendre des peuples et la mémoire de leur grandeur 
3666 Europe, « sur la cendre des peuples et la mémoire de leur grandeur ». (Paul Valéry s’en est sans doute souvenu en écrivant
3667 enu en écrivant ses pages fameuses sur la « Crise de l’Esprit ».) Ici, me dis-je, ici fleurit jadis une ville opulente :
3668 eurit jadis une ville opulente : ici fut le siège d’ un empire puissant. Oui ! ces lieux maintenant si déserts, jadis une m
3669 ssaient sans cesse le bruit des arts, et les cris d’ allégresse et de fête : ces marbres amoncelés formaient des palais rég
3670 se le bruit des arts, et les cris d’allégresse et de fête : ces marbres amoncelés formaient des palais réguliers ; ces col
3671 aces publiques. Là, pour les devoirs respectables de son culte, pour les soins touchans de sa subsistance, affluait un peu
3672 espectables de son culte, pour les soins touchans de sa subsistance, affluait un peuple nombreux : là, une industrie créat
3673 un peuple nombreux : là, une industrie créatrice de jouissances appelait les richesses de tous les climats, et l’on voyai
3674 e créatrice de jouissances appelait les richesses de tous les climats, et l’on voyait s’échanger la pourpre de Tyr pour le
3675 les climats, et l’on voyait s’échanger la pourpre de Tyr pour le fil précieux de la Sérique, les tissus moelleux de Kachem
3676 s’échanger la pourpre de Tyr pour le fil précieux de la Sérique, les tissus moelleux de Kachemire, pour les tapis fastueux
3677 e fil précieux de la Sérique, les tissus moelleux de Kachemire, pour les tapis fastueux de la Lydie, l’ambre de la Baltiqu
3678 us moelleux de Kachemire, pour les tapis fastueux de la Lydie, l’ambre de la Baltique pour les perles et les parfums arabe
3679 ire, pour les tapis fastueux de la Lydie, l’ambre de la Baltique pour les perles et les parfums arabes, l’or d’Ophir pour
3680 tique pour les perles et les parfums arabes, l’or d’ Ophir pour l’étain de Thulé. Et maintenant voilà ce qui subsiste de ce
3681 et les parfums arabes, l’or d’Ophir pour l’étain de Thulé. Et maintenant voilà ce qui subsiste de cette ville puissante,
3682 ain de Thulé. Et maintenant voilà ce qui subsiste de cette ville puissante, un lugubre squelette ! Voilà ce qui reste d’un
3683 ssante, un lugubre squelette ! Voilà ce qui reste d’ une vaste domination, un souvenir obscur et vain ! Au concours bruyant
3684 ressait sous ces portiques a succédé une solitude de mort. Le silence des tombeaux s’est substitué au murmure des places p
3685 titué au murmure des places publiques. L’opulence d’ une cité de commerce s’est échangée en une pauvreté hideuse. Les palai
3686 rmure des places publiques. L’opulence d’une cité de commerce s’est échangée en une pauvreté hideuse. Les palais des rois
3687 es… Que sont devenus tant de brillantes créations de la main de l’homme ? Où sont-ils ces remparts de Ninive, ces murs de
3688 t devenus tant de brillantes créations de la main de l’homme ? Où sont-ils ces remparts de Ninive, ces murs de Babylonie,
3689 de la main de l’homme ? Où sont-ils ces remparts de Ninive, ces murs de Babylonie, ces palais de Persépolis, ces temples
3690 me ? Où sont-ils ces remparts de Ninive, ces murs de Babylonie, ces palais de Persépolis, ces temples de Balbeck et de Jér
3691 arts de Ninive, ces murs de Babylonie, ces palais de Persépolis, ces temples de Balbeck et de Jérusalem ? Où sont ces flot
3692 Babylonie, ces palais de Persépolis, ces temples de Balbeck et de Jérusalem ? Où sont ces flottes de Tyr, ces chantiers d
3693 s palais de Persépolis, ces temples de Balbeck et de Jérusalem ? Où sont ces flottes de Tyr, ces chantiers d’Arad, ces ate
3694 de Balbeck et de Jérusalem ? Où sont ces flottes de Tyr, ces chantiers d’Arad, ces ateliers de Sidon, et cette multitude
3695 salem ? Où sont ces flottes de Tyr, ces chantiers d’ Arad, ces ateliers de Sidon, et cette multitude de matelots, de pilote
3696 lottes de Tyr, ces chantiers d’Arad, ces ateliers de Sidon, et cette multitude de matelots, de pilotes, de marchands, de s
3697 d’Arad, ces ateliers de Sidon, et cette multitude de matelots, de pilotes, de marchands, de soldats ? et ces laboureurs, e
3698 teliers de Sidon, et cette multitude de matelots, de pilotes, de marchands, de soldats ? et ces laboureurs, et ces moisson
3699 idon, et cette multitude de matelots, de pilotes, de marchands, de soldats ? et ces laboureurs, et ces moissons, et ces tr
3700 multitude de matelots, de pilotes, de marchands, de soldats ? et ces laboureurs, et ces moissons, et ces troupeaux, et to
3701 issons, et ces troupeaux, et toute cette création d’ êtres vivants dont s’enorgueillissait la face de la terre ? Hélas ! je
3702 n d’êtres vivants dont s’enorgueillissait la face de la terre ? Hélas ! je l’ai parcourue, cette terre ravagée ! J’ai visi
3703 gée ! J’ai visité les lieux qui furent le théâtre de tant de splendeur, et je n’ai vu qu’abandon et que solitude. … Et à c
3704 is le sceptre du monde à des peuples si différens de cultes et de mœurs, depuis ceux de l’Asie antique jusqu’aux plus réce
3705 du monde à des peuples si différens de cultes et de mœurs, depuis ceux de l’Asie antique jusqu’aux plus récens de l’Europ
3706 s si différens de cultes et de mœurs, depuis ceux de l’Asie antique jusqu’aux plus récens de l’Europe, ce nom d’une terre
3707 puis ceux de l’Asie antique jusqu’aux plus récens de l’Europe, ce nom d’une terre natale réveilla en moi le sentiment de l
3708 antique jusqu’aux plus récens de l’Europe, ce nom d’ une terre natale réveilla en moi le sentiment de la patrie ; et tourna
3709 m d’une terre natale réveilla en moi le sentiment de la patrie ; et tournant vers elle mes regards, j’arrêtai toutes mes p
3710 r toutes les mers, ses ports couverts des tributs de l’une et de l’autre Inde ; et comparant à l’activité de son commerce,
3711 mers, ses ports couverts des tributs de l’une et de l’autre Inde ; et comparant à l’activité de son commerce, à l’étendue
3712 ne et de l’autre Inde ; et comparant à l’activité de son commerce, à l’étendue de sa navigation, à la richesse de ses monu
3713 mparant à l’activité de son commerce, à l’étendue de sa navigation, à la richesse de ses monumens, aux arts et à l’industr
3714 erce, à l’étendue de sa navigation, à la richesse de ses monumens, aux arts et à l’industrie de ses habitants, tout ce que
3715 chesse de ses monumens, aux arts et à l’industrie de ses habitants, tout ce que l’Égypte et la Syrie purent jadis posséder
3716 ce que l’Égypte et la Syrie purent jadis posséder de semblable, je me plaisais à retrouver la splendeur passée de l’Asie d
3717 e, je me plaisais à retrouver la splendeur passée de l’Asie dans l’Europe moderne ; mais bientôt le charme de ma rêverie f
3718 ie dans l’Europe moderne ; mais bientôt le charme de ma rêverie fut flétri par un dernier terme de comparaison. Réfléchiss
3719 rme de ma rêverie fut flétri par un dernier terme de comparaison. Réfléchissant que telle avait été jadis l’activité des l
3720 , me dis-je, si tel ne sera pas un jour l’abandon de nos propres contrées ? Qui sait si sur les rives de la Seine, de la T
3721 nos propres contrées ? Qui sait si sur les rives de la Seine, de la Tamise ou du Zuydersée, là où maintenant, dans le tou
3722 contrées ? Qui sait si sur les rives de la Seine, de la Tamise ou du Zuydersée, là où maintenant, dans le tourbillon de ta
3723 u Zuydersée, là où maintenant, dans le tourbillon de tant de jouissances, le cœur et les yeux ne peuvent suffire à la mult
3724 voyageur comme moi ne s’asseoira pas un jour sur de muettes ruines, et ne pleurera pas solitaire sur la cendre des peuple
3725 solitaire sur la cendre des peuples et la mémoire de leur grandeur ?140 Christoph Martin Wieland (1733-1813), à la veill
3726 Christoph Martin Wieland (1733-1813), à la veille de la Révolution, exprimera une dernière fois l’idéal des Montesquieu et
3727 olite » : Le cosmopolite obéit à toutes les lois de l’État dans lequel il vit, quand celles-ci reflètent manifestement la
3728 t aux autres, il s’y soumet par nécessité. Il est de bonne foi à l’endroit de sa nation, mais aussi à l’endroit des autres
3729 ’endroit des autres nations ; et il est incapable de vouloir fonder le bien-être, la gloire et la grandeur de sa patrie su
3730 oir fonder le bien-être, la gloire et la grandeur de sa patrie sur une oppression et une exploitation volontaire des autre
3731 incompatibles avec leur idéal. Ils s’abstiennent de faire partie de toute administration d’État qui prescrirait des princ
3732 vec leur idéal. Ils s’abstiennent de faire partie de toute administration d’État qui prescrirait des principes contraires
3733 stiennent de faire partie de toute administration d’ État qui prescrirait des principes contraires à leurs propres maximes.
3734 les différents régimes existants comme autant … d’ échafaudages pour l’édification de ce temple immortel de la félicité u
3735 comme autant … d’échafaudages pour l’édification de ce temple immortel de la félicité universelle, à laquelle, en un cert
3736 faudages pour l’édification de ce temple immortel de la félicité universelle, à laquelle, en un certain sens, tous les siè
3737 nt travaillé. La page que l’on va lire, extraite d’ un ouvrage intitulé Das Geheimnis des Kosmopoliten-Ordens — et qui par
3738 és ceux qui connurent comme il convient la valeur de la liberté ; les Grecs le surent et c’est grâce à eux — dont les méri
3739 habitants ont su conserver sur les autres peuples de la terre de par un perfectionnement des facultés naturelles de l’homm
3740 e par un perfectionnement des facultés naturelles de l’homme toujours plus grand et poussé toujours plus loin. On connaît
3741 oujours plus loin. On connaît bien cet effet issu de causes également connues : malgré les progrès très rapides de la civi
3742 alement connues : malgré les progrès très rapides de la civilisation dans le domaine des arts et des sciences particulière
3743 tif, à l’industrie, au zèle opiniâtre, à l’esprit de compétition que l’homme puise dans la rivalité —, l’art suprême qui s
3744 slation et une direction responsable des affaires de l’État est de loin, comparativement, le moins avancé. Dans la plus gr
3745 direction responsable des affaires de l’État est de loin, comparativement, le moins avancé. Dans la plus grande et la plu
3746 ancé. Dans la plus grande et la plus belle partie de l’Europe, les forces les plus nobles de l’Humanité étouffent encore s
3747 le partie de l’Europe, les forces les plus nobles de l’Humanité étouffent encore sous le poids de tous ces résidus de la c
3748 bles de l’Humanité étouffent encore sous le poids de tous ces résidus de la constitution barbare, de l’incertitude et des
3749 touffent encore sous le poids de tous ces résidus de la constitution barbare, de l’incertitude et des erreurs d’un milléna
3750 s de tous ces résidus de la constitution barbare, de l’incertitude et des erreurs d’un millénaire sauvage et sombre. Et ce
3751 titution barbare, de l’incertitude et des erreurs d’ un millénaire sauvage et sombre. Et cela en Europe, dans un siècle où
3752 ilisation et le raffinement ont gravi, en un laps de temps relativement court, tant d’échelons, que ce n’est pas sans une
3753 avi, en un laps de temps relativement court, tant d’ échelons, que ce n’est pas sans une sorte de vertige qu’on regarde les
3754 tant d’échelons, que ce n’est pas sans une sorte de vertige qu’on regarde les siècles précédents. Mais après ces étapes i
3755 sive et, en fin de compte, irrésistible puissance de la raison ; bref, une révolution qui, sans souiller l’Europe de sang,
3756 bref, une révolution qui, sans souiller l’Europe de sang, ni mettre partout le feu, saura n’être qu’une œuvre toute simpl
3757 nt leurs droits et leurs devoirs, quel est le but de leur existence et quels sont les moyens qui permettront d’atteindre s
3758 xistence et quels sont les moyens qui permettront d’ atteindre sûrement et immanquablement ce but. En 1796, Wieland lui-mê
3759 t années qui se sont écoulées depuis la rédaction de cet essai, d’une manière telle que tous nos concitoyens ne peuvent pl
3760 e sont écoulées depuis la rédaction de cet essai, d’ une manière telle que tous nos concitoyens ne peuvent plus guère consi
3761 mêmes par le passé, du moins quand ils agissaient de concert, en grande foule. Il est admirable que le démenti sanglant i
3762 à son idéal cosmopolite n’ait pas empêché Wieland de poursuivre le projet d’une association des peuples européens. C’est a
3763 n’ait pas empêché Wieland de poursuivre le projet d’ une association des peuples européens. C’est ainsi que dans ses Gesprä
3764 rançais qu’il nomme « Frankgall » : À quel degré de perfection et de bien-être les peuples d’Europe ne parviendraient-ils
3765 me « Frankgall » : À quel degré de perfection et de bien-être les peuples d’Europe ne parviendraient-ils, avec nous ou in
3766 l degré de perfection et de bien-être les peuples d’ Europe ne parviendraient-ils, avec nous ou indépendamment de nous, s’i
3767 e parviendraient-ils, avec nous ou indépendamment de nous, s’ils renonçaient définitivement à tous ces résidus honteux de
3768 nçaient définitivement à tous ces résidus honteux de la vieille barbarie, à cette sanguinaire haine de nation à nation, au
3769 de la vieille barbarie, à cette sanguinaire haine de nation à nation, au bas préjugé, à ce bonheur étranger qu’on veut ass
3770 assurer au détriment du nôtre à toutes ces ruses d’ épicier et tours de coupeur de bourse que l’on nommait autrefois polit
3771 nt du nôtre à toutes ces ruses d’épicier et tours de coupeur de bourse que l’on nommait autrefois politique et qui ne trom
3772 à toutes ces ruses d’épicier et tours de coupeur de bourse que l’on nommait autrefois politique et qui ne trompent plus p
3773 rraient atteindre ce résultat par une association de peuples, constituée sans tenir compte de cette variété des formes de
3774 ociation de peuples, constituée sans tenir compte de cette variété des formes de gouvernement peu importante dans le fond 
3775 uée sans tenir compte de cette variété des formes de gouvernement peu importante dans le fond ; et ainsi serait créée et o
3776 ans le fond ; et ainsi serait créée et organisée, de façon durable, une communauté d’États européenne. Quelques années pl
3777 ée et organisée, de façon durable, une communauté d’ États européenne. Quelques années plus tard, en 1806, Wieland exposer
3778 ra encore dans sa revue Teutscher Merkur, un plan de Tribunal européen, comptant cette fois-ci sur Napoléon pour le réalis
3779 frapper… 136. W. Robertson : Histoire du règne de l’empereur Charles-Quint. Tableau des progrès de la Société en Europe
3780 de l’empereur Charles-Quint. Tableau des progrès de la Société en Europe, depuis la destruction de l’Empire romain jusqu’
3781 ès de la Société en Europe, depuis la destruction de l’Empire romain jusqu’au commencement du xvie siècle. — Traduction f
3782 III, p. 168, 169. 138. Edward Gibbon : Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain, Éd. A. Desrez, Paris.
3783 138. Edward Gibbon : Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain, Éd. A. Desrez, Paris. Tome I. Observatio
3784 Gibbon : Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain, Éd. A. Desrez, Paris. Tome I. Observations générales
3785 miné qu’en 1787, à Lausanne. 139. « Je parlerai… de la réunion des savants du globe en une république universelle des sci
3786 . » Fragment sur l’Atlantide, ou efforts combinés de l’Espèce humaine pour le Progrès des Sciences. 140. Les Ruines, par
12 1961, Vingt-huit siècles d’Europe. Troisième partie. L’ère des philosophes. De Leibniz à Condorcet — 4. Pendant ce temps, l’Amérique du Nord…
3787 Amérique décidait du sien. Elle devenait l’avenir de l’Europe, ou du moins l’avenir de ces Européens qui désespéraient de
3788 venait l’avenir de l’Europe, ou du moins l’avenir de ces Européens qui désespéraient de réussir sur leur sol l’union néces
3789 moins l’avenir de ces Européens qui désespéraient de réussir sur leur sol l’union nécessaire. C’est ce que Benjamin Frankl
3790 (1706-1790) a bien su voir et dire dans une série de lettres écrites de Paris à ses compatriotes : Toute l’Europe est gag
3791 su voir et dire dans une série de lettres écrites de Paris à ses compatriotes : Toute l’Europe est gagnée à notre cause (
3792 te l’Europe est gagnée à notre cause (la création de l’Union des États indépendants américains), elle applaudit à nos effo
3793 , elle applaudit à nos efforts et nous accompagne de ses vœux. Les hommes qui vivent sous le joug du pouvoir arbitraire n’
3794 nt pas moins la liberté : ils désespèrent presque de voir jamais le rétablissement de l’Europe et lisent avec impatience t
3795 espèrent presque de voir jamais le rétablissement de l’Europe et lisent avec impatience tout ce que l’on écrit sur l’établ
3796 tience tout ce que l’on écrit sur l’établissement de constitutions indépendantes dans notre continent. On rencontre partou
3797 dantes dans notre continent. On rencontre partout d’ innombrables personnes qui envisagent de se rendre en Amérique avec le
3798 e partout d’innombrables personnes qui envisagent de se rendre en Amérique avec leurs familles et leurs fortunes, dès que
3799 n peut généralement escompter que les émigrations de l’Europe nous vaudront un surcroît de puissance, de richesse et de sc
3800 émigrations de l’Europe nous vaudront un surcroît de puissance, de richesse et de science. L’idée se répand de plus en plu
3801 l’Europe nous vaudront un surcroît de puissance, de richesse et de science. L’idée se répand de plus en plus que les régi
3802 vaudront un surcroît de puissance, de richesse et de science. L’idée se répand de plus en plus que les régimes tyranniques
3803 ir en Europe devront s’assouplir et accorder plus de libertés aux peuples, s’ils veulent diminuer l’ampleur des émigration
3804 que tous les milieux que notre cause est la cause de tout le genre humain, et qu’en défendant notre liberté, nous combatto
3805 pour la remplir et qu’elle couronnera nos efforts de succès.141 Et tandis que l’Europe intellectuelle, négligée par les
3806 e par les grands politiques, accumulait les plans d’ union mais n’en réalisait aucun, l’Amérique, elle, se fédérait. Ses ho
3807 ses idées étaient européennes. Elle ne se sépara de la mère patrie que sur la seule question de la réalisation de ces idé
3808 épara de la mère patrie que sur la seule question de la réalisation de ces idées. Or à ce point, intérêts précis entraient
3809 atrie que sur la seule question de la réalisation de ces idées. Or à ce point, intérêts précis entraient en jeu, et comme
3810 hommes d’État européens se révélaient incapables de les prendre au sérieux, il n’y eut pas convergence mais conflit. Cert
3811 s convergence mais conflit. Certes, les pionniers de l’Union américaine n’opposaient à l’Europe que les principes formulés
3812 Or il faut voir que si cette colonie a trouvé bon de mettre un terme à la désunion de ses États, c’est aussi pour se rendr
3813 nie a trouvé bon de mettre un terme à la désunion de ses États, c’est aussi pour se rendre indépendante « de tout contrôle
3814 États, c’est aussi pour se rendre indépendante «  de tout contrôle et de toute influence européenne ». Citons une page du
3815 pour se rendre indépendante « de tout contrôle et de toute influence européenne ». Citons une page du Federalist, qui ne m
3816 itons une page du Federalist, qui ne manquera pas de suggérer aujourd’hui l’idée d’un nouveau retour des choses… The Fede
3817 ui ne manquera pas de suggérer aujourd’hui l’idée d’ un nouveau retour des choses… The Federalist est un recueil de 85 art
3818 retour des choses… The Federalist est un recueil de 85 articles de journaux écrits pour défendre la Constitution votée pa
3819 es… The Federalist est un recueil de 85 articles de journaux écrits pour défendre la Constitution votée par la Convention
3820 eptembre 1787. Ce plaidoyer est adressé au peuple de l’État de New York par Alexander Hamilton, John Jay et James Madison.
3821 e considérable jusqu’à nos jours. Les publicistes d’ Amérique, les professeurs et les étudiants, les juges de la Cour suprê
3822 ique, les professeurs et les étudiants, les juges de la Cour suprême, y voient avec raison le premier commentaire de la Co
3823 rême, y voient avec raison le premier commentaire de la Constitution fédérale, et l’un des monuments de la science politiq
3824 e la Constitution fédérale, et l’un des monuments de la science politique. Le texte que nous citons est de Hamilton, et il
3825 a science politique. Le texte que nous citons est de Hamilton, et il est extrait du chapitre XI : Le monde peut être divi
3826 vée l’a disposée à se regarder comme la Maîtresse de l’univers, et à croire le reste du genre humain créé pour son utilité
3827 créé pour son utilité. Des hommes, admirés comme de grands philosophes, ont positivement attribué à ses habitants une sup
3828 érique ; que les chiens même perdaient la faculté d’ aboyer, après avoir respiré quelque temps dans notre atmosphère. Les f
3829 s des Européens. C’est à nous à relever l’honneur de la race humaine et à faire connaître la modération à ces frères usurp
3830 son triomphe. Que les Américains se lassent enfin d’ être les instruments de la grandeur européenne ! Que les Treize-États,
3831 méricains se lassent enfin d’être les instruments de la grandeur européenne ! Que les Treize-États, réunis dans une étroit
3832 et indissoluble Union, concourent à la formation d’ un grand système américain qui soit au-dessus du contrôle de toute for
3833 système américain qui soit au-dessus du contrôle de toute force ou de toute influence européenne, et qui lui permette de
3834 qui soit au-dessus du contrôle de toute force ou de toute influence européenne, et qui lui permette de dicter les termes
3835 e toute influence européenne, et qui lui permette de dicter les termes des relations entre l’Ancien et le Nouveau Monde !
3836 Monde ! 141. Benjamin Franklin, Lettre écrite de Paris, 1777.
13 1961, Vingt-huit siècles d’Europe. Quatrième Partie. L’Ère de la Révolution de Kant à Hegel — 1. La Révolution française et l’Europe
3837 Révolution française et l’Europe Les illusions d’ un Wieland n’ont-elles pas été partagées par ceux-là mêmes qui donnère
3838 ’éloquence « cosmopolite » et « philanthropique » d’ un Mirabeau, d’un Robespierre, est certainement sincère. Mais comme el
3839 smopolite » et « philanthropique » d’un Mirabeau, d’ un Robespierre, est certainement sincère. Mais comme elle change vite
3840 certainement sincère. Mais comme elle change vite de registre quand il s’agit de reconnaître que l’idéal qu’elle exalte ne
3841 omme elle change vite de registre quand il s’agit de reconnaître que l’idéal qu’elle exalte ne saurait entrer dans l’Histo
3842 nfondant avec les intérêts ou la survie militaire d’ une nation ! Partie pour instaurer la fraternité mondiale et « la soci
3843 on va se voir rapidement entraînée dans une suite de guerres qui créeront le nationalisme moderne. Une déclaration de Mira
3844 créeront le nationalisme moderne. Une déclaration de Mirabeau, le 25 août 1790, annonce, par le coup de frein des derniers
3845 e Mirabeau, le 25 août 1790, annonce, par le coup de frein des derniers mots, cette dramatique évolution : La France aura
3846 matique évolution : La France aura-t-elle besoin d’ alliés, lorsqu’elle n’aura plus d’ennemis ? Il n’est pas loin de nous
3847 a-t-elle besoin d’alliés, lorsqu’elle n’aura plus d’ ennemis ? Il n’est pas loin de nous peut-être, ce moment où la liberté
3848 sans rivale sur les deux mondes, réalisera le vœu de la philosophie, absoudra l’espèce humaine du crime de la guerre et pr
3849 a philosophie, absoudra l’espèce humaine du crime de la guerre et proclamera la paix universelle ; alors le bonheur des pe
3850 eront plus par des querelles sanglantes les nœuds de la fraternité qui doivent unir tous les gouvernements et tous les hom
3851 et tous les hommes ; alors se consommera le pacte de la fédération du genre humain ; mais avouons-le à regret, ces considé
3852 r la guerre, qu’elle mène au nom de la liberté et de la paix universelle. Robespierre l’a dit en une phrase dans son disco
3853 du 15 mai 1790 à l’Assemblée nationale : Il est de l’intérêt des nations de protéger la nation française, parce que c’es
3854 blée nationale : Il est de l’intérêt des nations de protéger la nation française, parce que c’est de la France que doit p
3855 de protéger la nation française, parce que c’est de la France que doit partir la liberté et le bonheur du monde. Il faut
3856 us tard, le 9 novembre 1792, la Convention décide de célébrer les victoires de l’armée de la Liberté par une « fête de l’H
3857 2, la Convention décide de célébrer les victoires de l’armée de la Liberté par une « fête de l’Humanité », que Vergniaud c
3858 ntion décide de célébrer les victoires de l’armée de la Liberté par une « fête de l’Humanité », que Vergniaud célèbre en c
3859 victoires de l’armée de la Liberté par une « fête de l’Humanité », que Vergniaud célèbre en ces termes : Chantez donc, ch
3860 Chantez donc, chantez une victoire qui sera celle de l’humanité. Il a péri des hommes ; mais c’est pour qu’il n’en périsse
3861 ernité universelle que vous allez établir, chacun de vos combats sera un pas de fait vers la paix, l’humanité et le bonheu
3862 allez établir, chacun de vos combats sera un pas de fait vers la paix, l’humanité et le bonheur des peuples. Déjà, le Pa
3863 5 décembre 1791, cet appel à la « guerre sainte » de la Raison anticléricale : La guerre ! la guerre ! tel est le cri de
3864 éricale : La guerre ! la guerre ! tel est le cri de tous les patriotes, tel est le vœu de tous les amis de la liberté rép
3865 est le cri de tous les patriotes, tel est le vœu de tous les amis de la liberté répandus sur la surface de l’Europe, qui
3866 us les patriotes, tel est le vœu de tous les amis de la liberté répandus sur la surface de l’Europe, qui n’attendent plus
3867 us les amis de la liberté répandus sur la surface de l’Europe, qui n’attendent plus que cette heureuse diversion pour atta
3868 m du genre humain dont il n’a jamais mieux mérité d’ être appelé l’ami. C’est en effet à Jean-Baptiste, dit Anacharsis Clo
3869 à Jean-Baptiste, dit Anacharsis Cloots, Prussien de naissance, mais aristocrate hollandais d’ascendance, qu’il appartiend
3870 russien de naissance, mais aristocrate hollandais d’ ascendance, qu’il appartiendra de formuler de la manière la plus théât
3871 crate hollandais d’ascendance, qu’il appartiendra de formuler de la manière la plus théâtrale l’idéal unitaire de la Révol
3872 dais d’ascendance, qu’il appartiendra de formuler de la manière la plus théâtrale l’idéal unitaire de la Révolution, étend
3873 de la manière la plus théâtrale l’idéal unitaire de la Révolution, étendu à un genre humain totalement « nivelé » par les
3874 n genre humain totalement « nivelé » par les lois de la Liberté. Cloots, lui aussi, est parti de l’idéal cosmopolite. Il s
3875 lois de la Liberté. Cloots, lui aussi, est parti de l’idéal cosmopolite. Il s’écrie dans son discours du 13 juin 1790 :
3876 , ni vaincus, ni vainqueurs… L’Océan sera couvert de navires qui formeront un superbe pont de communication, et les grande
3877 couvert de navires qui formeront un superbe pont de communication, et les grandes routes de France se prolongeront jusqu’
3878 erbe pont de communication, et les grandes routes de France se prolongeront jusqu’aux confins de la Chine. On ira en poste
3879 outes de France se prolongeront jusqu’aux confins de la Chine. On ira en poste de Paris à Pékin, comme de Bordeaux à Stras
3880 nt jusqu’aux confins de la Chine. On ira en poste de Paris à Pékin, comme de Bordeaux à Strasbourg, sans que rien ne nous
3881 la Chine. On ira en poste de Paris à Pékin, comme de Bordeaux à Strasbourg, sans que rien ne nous arrête, ni barrières, ni
3882 ailles, ni commis, ni chasseurs. Il n’y aura plus de déserts ; toute la terre sera un jardin. L’Orient et l’Occident s’emb
3883 n. L’Orient et l’Occident s’embrasseront au champ de la Fédération. Et il ajoute, dans le même sens, le 26 avril 1793 :
3884 le bon sens et le bonheur ; elle coupe les canaux de la prospérité universelle ; sa Constitution, manquant par la base, se
3885 t en effet dans ces termes : Nous ne voulons pas d’ autre maître que l’expression de la volonté générale, absolue, suprême
3886 us ne voulons pas d’autre maître que l’expression de la volonté générale, absolue, suprême. Or, si je rencontre sur la ter
3887 sel, je m’y oppose ; cette résistance est un état de guerre et de servitude dont le genre humain, l’être suprême, fera jus
3888 ppose ; cette résistance est un état de guerre et de servitude dont le genre humain, l’être suprême, fera justice tôt ou t
3889 ra qu’un seul corps, la nation unique… La commune de Paris sera le point de réunion, le fanal central de la communauté uni
3890 nation unique… La commune de Paris sera le point de réunion, le fanal central de la communauté universelle. Il pense qu’
3891 Paris sera le point de réunion, le fanal central de la communauté universelle. Il pense qu’il ne serait pas difficile de
3892 verselle. Il pense qu’il ne serait pas difficile de régir le monde à partir de Paris : Quand un Lama de Rome et un Lama
3893 régir le monde à partir de Paris : Quand un Lama de Rome et un Lama de la Mecque donnent des lois aux Péruviens et aux Ma
3894 rtir de Paris : Quand un Lama de Rome et un Lama de la Mecque donnent des lois aux Péruviens et aux Malais ; quand des ma
3895 aux Péruviens et aux Malais ; quand des marchands d’ Amsterdam et de Londres dominent sur le Bengale et les Moluques, je co
3896 t aux Malais ; quand des marchands d’Amsterdam et de Londres dominent sur le Bengale et les Moluques, je conçois la facili
3897 le fédéraliste lui paraît réactionnaire : Nombre d’ écrivains politiques ont présenté des projets de paix perpétuelle, de
3898 e d’écrivains politiques ont présenté des projets de paix perpétuelle, de confédérations d’États, de nations ; mais aucun
3899 ues ont présenté des projets de paix perpétuelle, de confédérations d’États, de nations ; mais aucun homme ne s’est élevé
3900 es projets de paix perpétuelle, de confédérations d’ États, de nations ; mais aucun homme ne s’est élevé au véritable princ
3901 s de paix perpétuelle, de confédérations d’États, de nations ; mais aucun homme ne s’est élevé au véritable principe de l’
3902 aucun homme ne s’est élevé au véritable principe de l’unité souveraine, de la confédération individuelle. Au nom — pour
3903 levé au véritable principe de l’unité souveraine, de la confédération individuelle. Au nom — pour le moins paradoxal — de
3904 individuelle. Au nom — pour le moins paradoxal — de cette « confédération individuelle », Cloots dépose en conclusion le
3905 viduelle », Cloots dépose en conclusion le Projet de décret suivant : La Convention nationale voulant mettre un terme au
3906 es des droits de l’homme : Art. I. — Il n’y a pas d’ autre souverain que le genre humain. Art. II. — Tout individu, toute c
3907 oîtra ce principe lumineux et immuable, sera reçu de droit dans notre association fraternelle, dans la République des Homm
3908 Universels. Art. III. — À défaut de contiguïté ou de communication maritime, on attendra la propagation de la vérité, pour
3909 ommunication maritime, on attendra la propagation de la vérité, pour admettre les communes, et les enclaves lointaines. M
3910 r ce Projet fantastique en adjurant la Convention de revenir à la « réalité » : Laissons aux philosophes, laissons-leur l
3911 Laissons aux philosophes, laissons-leur le soin d’ examiner l’humanité sous tous les rapports : nous ne sommes pas les re
3912 du genre humain. Je veux donc que le législateur de la France oublie un instant l’univers pour ne s’occuper que de son pa
3913 oublie un instant l’univers pour ne s’occuper que de son pays ; je veux cette espèce d’égoïsme national sans lequel nous t
3914 s’occuper que de son pays ; je veux cette espèce d’ égoïsme national sans lequel nous trahirons nos devoirs, sans lequel n
3915 mmes libres ; mais j’aime mieux les hommes libres de la France que tous les autres hommes de l’univers. Le refus jacobin
3916 es libres de la France que tous les autres hommes de l’univers. Le refus jacobin de la formule fédéraliste, tant pour la
3917 les autres hommes de l’univers. Le refus jacobin de la formule fédéraliste, tant pour la France que pour l’Europe, le dél
3918 tant pour la France que pour l’Europe, le délire d’ unité universelle nivelée et centralisée, devait conduire la Révolutio
3919 n, par une nécessité concrète, à la négation même de ses premiers principes : à l’« égoïsme national », au nationalisme ag
3920 sez souligner l’importance décisive pour l’Europe de cette évolution de la pensée politique et du vocabulaire français. Le
3921 ortance décisive pour l’Europe de cette évolution de la pensée politique et du vocabulaire français. Les girondins qui se
3922 ot, si l’on en croit le dictionnaire étymologique de Warburg — furent dénoncés par les jacobins comme traîtres à la Patrie
3923 nçais et des Européens qui tiennent à se réclamer de la Révolution et de la tradition jacobine. D’où le malentendu permane
3924 ns qui tiennent à se réclamer de la Révolution et de la tradition jacobine. D’où le malentendu permanent qui les oppose dè
3925 mer de la Révolution et de la tradition jacobine. D’ où le malentendu permanent qui les oppose dès cette date, aux démocrat
3926 monde anglo-saxon et des petits pays. Un Français d’ aujourd’hui, s’il tient à s’assurer du sens de ce mot décrié, recourt
3927 ais d’aujourd’hui, s’il tient à s’assurer du sens de ce mot décrié, recourt au dictionnaire Littré, et lit ceci à l’articl
3928 dant la révolution, projet attribué aux girondins de rompre l’unité nationale et de transformer la France en une fédératio
3929 ibué aux girondins de rompre l’unité nationale et de transformer la France en une fédération de petits États. — Aux jacobi
3930 ale et de transformer la France en une fédération de petits États. — Aux jacobins, on agita gravement la question du fédér
3931 mille fureurs contre les girondins, Thiers, Hist. de la Rév.
14 1961, Vingt-huit siècles d’Europe. Quatrième Partie. L’Ère de la Révolution de Kant à Hegel — 2. Plans d’union européenne contemporains de la Révolution
3932 2.Plans d’ union européenne contemporains de la Révolution En dépit des nombreu
3933 2.Plans d’union européenne contemporains de la Révolution En dépit des nombreuses déclamations des conventionne
3934 déclamations des conventionnels invoquant le nom de l’Europe, pas un seul plan sérieux d’union continentale n’est sorti d
3935 uant le nom de l’Europe, pas un seul plan sérieux d’ union continentale n’est sorti de la Révolution, du moins en France et
3936 eul plan sérieux d’union continentale n’est sorti de la Révolution, du moins en France et cela s’explique. L’explosion pas
3937 ique. L’explosion passionnelle a jeté ses acteurs de l’utopie du « genre humain » à l’idéal nationaliste en sautant le sta
3938 l’idéal nationaliste en sautant le stade réaliste de la fédération de l’Europe. Le résidu concret du phénomène sera la « n
3939 ste en sautant le stade réaliste de la fédération de l’Europe. Le résidu concret du phénomène sera la « nationalisation »
3940 euples. Le « qui veut faire l’ange fait la bête » de Pascal se traduit ici par « qui veut le Monde abstrait fait la nation
3941 smoulins écrivait : Nous avons arraché les haies de division qui séparaient les Français entre eux, et déjà il n’y a plus
3942 ent les Français entre eux, et déjà il n’y a plus de provinces ; espérons que bientôt la division des royaumes ne sera plu
3943 e, qu’on appellera le genre humain. Le processus de nivellement des diversités régionales, préconisé par cette déclaratio
3944 omme que l’Europe, comme le faisaient les auteurs d’ avant la Renaissance lorsqu’ils parlaient de la « chrétienté ». Mais p
3945 teurs d’avant la Renaissance lorsqu’ils parlaient de la « chrétienté ». Mais précisément ce défaut de perspective historiq
3946 de la « chrétienté ». Mais précisément ce défaut de perspective historique l’empêche de voir les caractères spécifiques d
3947 ent ce défaut de perspective historique l’empêche de voir les caractères spécifiques de l’ensemble Europe dans le monde. H
3948 ique l’empêche de voir les caractères spécifiques de l’ensemble Europe dans le monde. Hors du drame de Paris, on les disti
3949 de l’ensemble Europe dans le monde. Hors du drame de Paris, on les distingue mieux. Les plans d’union de l’Anglais Bentham
3950 drame de Paris, on les distingue mieux. Les plans d’ union de l’Anglais Bentham, de l’Italien E. L’Aurora, des Allemands Ka
3951 Paris, on les distingue mieux. Les plans d’union de l’Anglais Bentham, de l’Italien E. L’Aurora, des Allemands Kant et Ge
3952 ue mieux. Les plans d’union de l’Anglais Bentham, de l’Italien E. L’Aurora, des Allemands Kant et Gentz, seront expresséme
3953 logique qu’exprime la Révolution, ils s’efforcent de rejoindre les réalités concrètes qu’il s’agirait maintenant d’organis
3954 les réalités concrètes qu’il s’agirait maintenant d’ organiser. Jeremy Bentham (1747-1832) fut décrété citoyen français par
3955 é citoyen français par la Convention à l’occasion d’ un grand discours contre le colonialisme. Il n’a pas seulement lié son
3956 sme. Il n’a pas seulement lié son nom au principe de l’utilitarisme : il a lancé l’idée d’une législation internationale d
3957 au principe de l’utilitarisme : il a lancé l’idée d’ une législation internationale dans ses Principles of International La
3958 des Objets et des Sujets du droit international, de la Guerre et de la Paix. C’est dans le quatrième essai, « A Plan for
3959 es Sujets du droit international, de la Guerre et de la Paix. C’est dans le quatrième essai, « A Plan for an Universal and
3960 e Bentham aborde la question européenne. Le champ de son ambition est le monde, annonce-t-il. Mais les mesures qu’il propo
3961 seule compte, avec la France, et ce qu’il va dire de l’une vaudra pour l’autre142. L’objet du présent essai est de soumet
3962 ra pour l’autre142. L’objet du présent essai est de soumettre au monde un plan de paix universel et perpétuel. Le Globe e
3963 u présent essai est de soumettre au monde un plan de paix universel et perpétuel. Le Globe est l’aire de l’influence à laq
3964 paix universel et perpétuel. Le Globe est l’aire de l’influence à laquelle aspire l’auteur, — la Presse son instrument, e
3965 t, et le seul auquel il ait recours, — le Cabinet de l’Humanité le théâtre de son intrigue. Le plan qui suit se fonde sur
3966 it recours, — le Cabinet de l’Humanité le théâtre de son intrigue. Le plan qui suit se fonde sur deux propositions fondame
3967 ns fondamentales : 1. La réduction et la fixation de la force des différentes nations qui composent le système européen ;
3968 en ; 2. l’émancipation des dépendances lointaines de chaque État. Chacune de ces propositions possède ses avantages distin
3969 es dépendances lointaines de chaque État. Chacune de ces propositions possède ses avantages distincts ; mais ni l’une ni l
3970 une ni l’autre, comme on le verra, ne permettrait d’ atteindre seule le but recherché Quant à l’utilité d’une paix universe
3971 tteindre seule le but recherché Quant à l’utilité d’ une paix universelle et durable, moyennant un plan praticable à cet ef
3972 un plan praticable à cet effet, et qui ait chance d’ être adopté, il ne saurait y avoir qu’une voix. La seule objection pos
3973 tel que toute proposition dans ce sens mériterait d’ être tenue pour visionnaire et ridicule. Je m’appliquerai tout d’abord
3974 cette objection, car il se peut que la réduction d’ un tel préjugé soit nécessaire pour que le plan reçoive audience. Quoi
3975 écessaire pour que le plan reçoive audience. Quoi de mieux fait, pour préparer les esprits à recevoir une proposition de c
3976 r préparer les esprits à recevoir une proposition de ce genre, que la proposition elle-même ? Et qu’on ne m’objecte pas qu
3977 entreprendre ce qui peut les faire mûrir. Un plan de cette nature est de ceux qui ne viennent jamais trop tôt, ni trop tar
3978 peut les faire mûrir. Un plan de cette nature est de ceux qui ne viennent jamais trop tôt, ni trop tard. … Les feuillets q
3979 feuillets qui suivent sont dédiés au bien commun de toutes les nations civilisées, mais plus particulièrement à celui de
3980 ns civilisées, mais plus particulièrement à celui de la Grande-Bretagne et de la France. Leur but est de promouvoir trois
3981 particulièrement à celui de la Grande-Bretagne et de la France. Leur but est de promouvoir trois grands objets : — la simp
3982 la Grande-Bretagne et de la France. Leur but est de promouvoir trois grands objets : — la simplicité du gouvernement, la
3983 nationale, et la paix. La réflexion m’a convaincu de la vérité des propositions suivantes : I. Qu’il n’est pas de l’intérê
3984 é des propositions suivantes : I. Qu’il n’est pas de l’intérêt de la Grande-Bretagne d’avoir des dépendances lointaines, q
3985 tions suivantes : I. Qu’il n’est pas de l’intérêt de la Grande-Bretagne d’avoir des dépendances lointaines, quelles qu’ell
3986 u’il n’est pas de l’intérêt de la Grande-Bretagne d’ avoir des dépendances lointaines, quelles qu’elles soient. II Qu’il n’
3987 ines, quelles qu’elles soient. II Qu’il n’est pas de l’intérêt de la Grande-Bretagne d’avoir des traités d’alliance, offen
3988 qu’elles soient. II Qu’il n’est pas de l’intérêt de la Grande-Bretagne d’avoir des traités d’alliance, offensive ou défen
3989 u’il n’est pas de l’intérêt de la Grande-Bretagne d’ avoir des traités d’alliance, offensive ou défensive, avec quelque pui
3990 intérêt de la Grande-Bretagne d’avoir des traités d’ alliance, offensive ou défensive, avec quelque puissance que ce soit.
3991 elque puissance que ce soit. III. Qu’il n’est pas de l’intérêt de la Grande-Bretagne d’avoir aucun traité, avec quelque pu
3992 ce que ce soit. III. Qu’il n’est pas de l’intérêt de la Grande-Bretagne d’avoir aucun traité, avec quelque puissance que c
3993 u’il n’est pas de l’intérêt de la Grande-Bretagne d’ avoir aucun traité, avec quelque puissance que ce soit, aux fins de s’
3994 porte quelle autre puissance. IV. Qu’il n’est pas de l’intérêt de la Grande-Bretagne d’entretenir aucune force navale excé
3995 autre puissance. IV. Qu’il n’est pas de l’intérêt de la Grande-Bretagne d’entretenir aucune force navale excédant celle qu
3996 u’il n’est pas de l’intérêt de la Grande-Bretagne d’ entretenir aucune force navale excédant celle qui lui suffit pour défe
3997 n commerce contre les pirates. V. Qu’il n’est pas de l’intérêt de la Grande-Bretagne de garder en vigueur quelque ordonnan
3998 ntre les pirates. V. Qu’il n’est pas de l’intérêt de la Grande-Bretagne de garder en vigueur quelque ordonnance que ce soi
3999 u’il n’est pas de l’intérêt de la Grande-Bretagne de garder en vigueur quelque ordonnance que ce soit visant à l’augmentat
4000 ue ce soit visant à l’augmentation ou au maintien de ses forces navales au loin, telles que l’Acte de Navigation, les prim
4001 de ses forces navales au loin, telles que l’Acte de Navigation, les primes au commerce avec le Groënland, et autres dispo
4002 ement vrai pour la France. XI. Que l’accord total de la Grande-Bretagne et de la France étant supposé acquis, les principa
4003 . XI. Que l’accord total de la Grande-Bretagne et de la France étant supposé acquis, les principales difficultés d’un plan
4004 étant supposé acquis, les principales difficultés d’ un plan de pacification générale et permanente pour toute l’Europe ser
4005 osé acquis, les principales difficultés d’un plan de pacification générale et permanente pour toute l’Europe seraient écar
4006 fs des troupes entretenues. XIII. Que le maintien de cette pacification serait considérablement facilité par l’institution
4007 erait considérablement facilité par l’institution d’ une Cour de Justice commune pour régler les différends entre nations,
4008 dérablement facilité par l’institution d’une Cour de Justice commune pour régler les différends entre nations, encore qu’u
4009 , encore qu’une telle Cour n’ait pas à être dotée de pouvoirs de coercition. XIV. Que le secret des opérations du ministèr
4010 une telle Cour n’ait pas à être dotée de pouvoirs de coercition. XIV. Que le secret des opérations du ministère des Affair
4011 ent inutile, et au surplus contraire aux intérêts de la liberté comme à ceux de la paix. Après avoir discuté tambour batt
4012 contraire aux intérêts de la liberté comme à ceux de la paix. Après avoir discuté tambour battant les douze premiers arti
4013 scuté tambour battant les douze premiers articles de son plan, Bentham remarque au sujet du treizième : Établissez un Tri
4014 : Établissez un Tribunal commun, et la nécessité de faire la guerre ne résultera plus des différences d’opinion. Juste ou
4015 faire la guerre ne résultera plus des différences d’ opinion. Juste ou non, la sentence des arbitres sauvera l’honneur et l
4016 tence des arbitres sauvera l’honneur et le crédit de la partie plaignante. Peut-on vraiment traiter de visionnaire un tel
4017 de la partie plaignante. Peut-on vraiment traiter de visionnaire un tel arrangement, une fois prouvé à son sujet que : 1.
4018 ou la Ligue helvétique ? Ces dernières n’ont pas d’ ambitions. Qu’il en soit donc ainsi ; mais n’est-ce pas déjà le cas de
4019 ventions ? L’un des principaux objets du plan est d’ effectuer une réduction — et très considérable — des dépenses des peup
4020 nsidérable — des dépenses des peuples. Le montant de cette réduction, pour chaque nation, devrait être stipulé par le Trai
4021 ratification du Traité par les différents États. De cette manière, la masse des peuples, qui est la partie la plus exposé
4022 des préventions, ne serait pas plus tôt informée de la ratification du Traité qu’elle en sentirait les bienfaits. Ils ver
4023 aire reconnaître et circuler dans toute l’étendue de chaque État ; 3, après un certain délai, à mettre l’État réfractaire
4024 certain délai, à mettre l’État réfractaire au ban de l’Europe. Il ne serait peut-être pas mauvais de fixer le contingent q
4025 n de l’Europe. Il ne serait peut-être pas mauvais de fixer le contingent que les différents États devraient fournir pour d
4026 force aux décrets du Tribunal. Mais la nécessité de recourir à cette ultime ressource serait, en toute probabilité suppri
4027 l’expédient beaucoup plus simple et moins onéreux d’ une clause introduite dans l’instrument créant la Cour, et garantissan
4028 rument créant la Cour, et garantissant la liberté de la presse dans chaque État… Le reste de l’essai est occupé par une l
4029 liberté de la presse dans chaque État… Le reste de l’essai est occupé par une longue polémique contre le secret diplomat
4030 ècle, ait su voir à la fois l’importance décisive d’ une presse libre, et les dangers d’une telle liberté lorsqu’elle n’est
4031 tance décisive d’une presse libre, et les dangers d’ une telle liberté lorsqu’elle n’est inspirée que par l’égoïsme nationa
4032 que par l’égoïsme national, sacralisé sous le nom de « patriotisme » : La voix de la nation ne peut se faire entendre que
4033 cralisé sous le nom de « patriotisme » : La voix de la nation ne peut se faire entendre que par les journaux. Mais sur ce
4034 tenus pour criminels ou vicieux dans la poursuite d’ intérêts individuels, se voient aussitôt sublimés et qualifiés de vert
4035 viduels, se voient aussitôt sublimés et qualifiés de vertueux, dans la poursuite d’intérêts nationaux. Que celui qui a jam
4036 limés et qualifiés de vertueux, dans la poursuite d’ intérêts nationaux. Que celui qui a jamais lu un journal anglais ose d
4037 rer qu’il n’en va pas ainsi ! Et là-dessus, point de différences entre les partis. Quelque opposés qu’ils soient sur tous
4038 soi que les faits doivent se plier. Qui rougirait de les fausser, quand les fausser est une vertu ? Mais s’il est vrai que
4039 voix des journaux n’est encore qu’une faible part de la voix du peuple, il n’en reste pas moins que l’enseignement qu’ils
4040 itatore », fut un des jacobins les plus éloquents de l’Italie, comme on peut en juger par le titre de l’ouvrage qu’il publ
4041 de l’Italie, comme on peut en juger par le titre de l’ouvrage qu’il publia en 1796 : All’Italia nelle tenebre L’Aurora po
4042 à s’unir en une seule nation pour inaugurer l’ère de la Liberté-égalité-fraternité, succédant aux ères historiques de l’âg
4043 galité-fraternité, succédant aux ères historiques de l’âge d’or, de la barbarie, de la justice et de la monarchie. Non, E
4044 aternité, succédant aux ères historiques de l’âge d’ or, de la barbarie, de la justice et de la monarchie. Non, Européens,
4045 té, succédant aux ères historiques de l’âge d’or, de la barbarie, de la justice et de la monarchie. Non, Européens, que n
4046 x ères historiques de l’âge d’or, de la barbarie, de la justice et de la monarchie. Non, Européens, que notre enfance, no
4047 s de l’âge d’or, de la barbarie, de la justice et de la monarchie. Non, Européens, que notre enfance, notre ignorance et
4048 colère universelle s’abatte sur la tête branlante de nos persécuteurs, que les vicissitudes d’une guerre sanglante touchen
4049 anlante de nos persécuteurs, que les vicissitudes d’ une guerre sanglante touchent nos seuls ennemis ! Et que les nations,
4050 , soient gouvernées selon les droits sacro-saints de la liberté et de l’égalité, dirigées selon les principes de la paix,
4051 es selon les droits sacro-saints de la liberté et de l’égalité, dirigées selon les principes de la paix, de la vertu et de
4052 rté et de l’égalité, dirigées selon les principes de la paix, de la vertu et de la justice… Que toutes les nations de l’Eu
4053 égalité, dirigées selon les principes de la paix, de la vertu et de la justice… Que toutes les nations de l’Europe puissen
4054 es selon les principes de la paix, de la vertu et de la justice… Que toutes les nations de l’Europe puissent se considérer
4055 la vertu et de la justice… Que toutes les nations de l’Europe puissent se considérer comme appartenant à un seul État, que
4056 Europe puisse être tenue pour la mère universelle de tous ses habitants ! Il demandait la convocation d’un « congrès uni
4057 ous ses habitants ! Il demandait la convocation d’ un « congrès universel des hommes sages et érudits » élus par la « gen
4058 fût réuni en Sicile ou à Majorque pour délibérer d’ une « constitution générale pour toute l’Europe » et de trois pactes o
4059 « constitution générale pour toute l’Europe » et de trois pactes ou codes réglant les relations morales, sociales et mili
4060 sociales et militaires entre les nations. Le plan de Bentham ne fut publié qu’un demi-siècle après avoir été écrit, et cel
4061 qu’un demi-siècle après avoir été écrit, et celui de L’Aurora n’a été redécouvert que par des érudits italiens de notre si
4062 n’a été redécouvert que par des érudits italiens de notre siècle143. Beaucoup plus célèbre sera dès 1795 le plan de Kant,
4063 e143. Beaucoup plus célèbre sera dès 1795 le plan de Kant, et beaucoup plus efficace la pensée de Gentz, homme politique m
4064 plan de Kant, et beaucoup plus efficace la pensée de Gentz, homme politique mêlé aux grandes affaires du temps. Emmanuel K
4065 res du temps. Emmanuel Kant (1724-1804) était âgé de 71 ans lorsqu’il publia en 1795 son traité Zum ewigen Friede. Il n’ét
4066 95 son traité Zum ewigen Friede. Il n’était sorti de sa ville natale de Königsberg qu’une seule fois en sa vie, mais suiva
4067 wigen Friede. Il n’était sorti de sa ville natale de Königsberg qu’une seule fois en sa vie, mais suivait de près les gran
4068 igsberg qu’une seule fois en sa vie, mais suivait de près les grands mouvements de l’époque : on sait que l’annonce de la
4069 a vie, mais suivait de près les grands mouvements de l’époque : on sait que l’annonce de la Révolution française lui fit m
4070 ds mouvements de l’époque : on sait que l’annonce de la Révolution française lui fit modifier d’Est en Ouest la direction
4071 nonce de la Révolution française lui fit modifier d’ Est en Ouest la direction de sa promenade quotidienne. Il connaissait
4072 aise lui fit modifier d’Est en Ouest la direction de sa promenade quotidienne. Il connaissait le Projet de l’abbé de Saint
4073 a promenade quotidienne. Il connaissait le Projet de l’abbé de Saint-Pierre (qu’il cite avec éloges dès 1750) et l’Extrait
4074 qu’en avait donné Rousseau. Dès 1760, l’influence de Rousseau l’amène à s’occuper de l’idée d’un « Völkerbund ». Il en pré
4075 1760, l’influence de Rousseau l’amène à s’occuper de l’idée d’un « Völkerbund ». Il en précise les bases morales dans plus
4076 fluence de Rousseau l’amène à s’occuper de l’idée d’ un « Völkerbund ». Il en précise les bases morales dans plusieurs de s
4077 ». Il en précise les bases morales dans plusieurs de ses ouvrages rédigés à la veille de la Révolution. Puis dans un petit
4078 ans plusieurs de ses ouvrages rédigés à la veille de la Révolution. Puis dans un petit écrit datant de 1793 : Ueber den Ge
4079 de la Révolution. Puis dans un petit écrit datant de 1793 : Ueber den Gemeinspruch : Das mag in der Théorie richtigsein, t
4080 forme systématique, mais avec un souci manifeste de réalisme politique : il se réfère en effet (jusque dans l’ordonnance
4081 : il se réfère en effet (jusque dans l’ordonnance de son plan) à la Paix de Bâle, que la Prusse et l’Espagne viennent de s
4082 (jusque dans l’ordonnance de son plan) à la Paix de Bâle, que la Prusse et l’Espagne viennent de signer avec la Républiqu
4083 c la République Française. L’essai revêt la forme d’ un traité international divisé en 6 articles préliminaires, 3 « articl
4084 uxième article définitif » que réside l’essentiel de la pensée fédéraliste européenne du grand philosophe : Si l’on ne pe
4085 s un profond mépris les sauvages, dans leur amour d’ une indépendance sans règle, préférer se battre sans cesse, plutôt que
4086 erté raisonnable, et si l’on considère cela comme de la barbarie, comme un manque de civilisation et comme une dégradation
4087 sidère cela comme de la barbarie, comme un manque de civilisation et comme une dégradation brutale de l’humanité, dès lors
4088 de civilisation et comme une dégradation brutale de l’humanité, dès lors ne devrions-nous pas penser que les peuples civi
4089 chacun forme un État distinct) devraient se hâter de sortir au plus tôt d’un état si abject ? Au lieu de cela, chaque État
4090 istinct) devraient se hâter de sortir au plus tôt d’ un état si abject ? Au lieu de cela, chaque État fait bien plutôt cons
4091 n plutôt consister sa majesté (car il est absurde de parler de la majesté populaire) à ne se soumettre à aucune contrainte
4092 onsister sa majesté (car il est absurde de parler de la majesté populaire) à ne se soumettre à aucune contrainte légale ex
4093 r, sans qu’il ait lui-même à courir aucun danger, de plusieurs milliers d’hommes qui se laissent sacrifier pour une cause
4094 même à courir aucun danger, de plusieurs milliers d’ hommes qui se laissent sacrifier pour une cause qui ne les concerne pa
4095 cerne pas. Toute la différence entre les sauvages de l’Amérique et ceux de l’Europe, consiste en ce que les premiers ont d
4096 fférence entre les sauvages de l’Amérique et ceux de l’Europe, consiste en ce que les premiers ont déjà mangé maintes trib
4097 eur parti des vaincus ; ils préfèrent, plutôt que de les manger, augmenter le nombre de leurs sujets, et, par conséquent,
4098 nt, plutôt que de les manger, augmenter le nombre de leurs sujets, et, par conséquent, celui des instruments qu’ils destin
4099 s conquêtes. […] Quand on considère la méchanceté de la nature humaine, qui se montre à nu dans les libres relations des p
4100 mot droit n’ait pas encore été tout à fait banni de la politique de la guerre comme une expression pédante, et qu’aucun É
4101 pas encore été tout à fait banni de la politique de la guerre comme une expression pédante, et qu’aucun État ne se soit e
4102 re ingénument, pour « justifier » une déclaration de guerre, Hugo Grotius, Pufendorf, Vattel et d’autres encore (tristes c
4103 (tristes consolateurs), bien que leur code, conçu de manière philosophique ou diplomatique, n’ait ou ne puisse avoir la mo
4104 sseins. Cet hommage que chaque État rend à l’idée de droit (du moins en paroles) prouve cependant qu’il y a en l’homme une
4105 ) est l’avantage que la nature donne au plus fort de se faire obéir par le plus faible. » […] La possibilité de réaliser
4106 e obéir par le plus faible. » […] La possibilité de réaliser (il s’agit de réalité objective) cette idée de fédération, q
4107 ble. » […] La possibilité de réaliser (il s’agit de réalité objective) cette idée de fédération, qui doit s’étendre progr
4108 liser (il s’agit de réalité objective) cette idée de fédération, qui doit s’étendre progressivement à tous les États, et l
4109 la paix perpétuelle), il y aurait ainsi un centre d’ alliance fédérative à laquelle les autres États pourraient adhérer, af
4110 erté, conformément à l’idée du droit des gens, et d’ étendre cette alliance peu à peu par d’autres associations de ce genre
4111 ette alliance peu à peu par d’autres associations de ce genre. L’idée du droit des gens, comprise comme un droit à la guer
4112 oprement inconcevable (puisque ce serait le droit de décider ce qui est juste non pas d’après des lois extérieures univers
4113 s universellement valables et limitant la liberté de chaque individu, mais par la force, selon des maximes particulières).
4114 force, selon des maximes particulières). À moins d’ entendre par là qu’il est tout à fait juste que des hommes dans de sem
4115 à qu’il est tout à fait juste que des hommes dans de semblables dispositions se détruisent les uns les autres et trouvent
4116 tombeau qui recouvre avec eux toutes les horreurs de la violence. Aux yeux de la raison, il n’y a pas, pour des États entr
4117 des États entretenant des relations réciproques, d’ autre moyen de sortir de l’absence de légalité, source de guerres décl
4118 retenant des relations réciproques, d’autre moyen de sortir de l’absence de légalité, source de guerres déclarées, que de
4119 es relations réciproques, d’autre moyen de sortir de l’absence de légalité, source de guerres déclarées, que de renoncer,
4120 réciproques, d’autre moyen de sortir de l’absence de légalité, source de guerres déclarées, que de renoncer, comme les ind
4121 moyen de sortir de l’absence de légalité, source de guerres déclarées, que de renoncer, comme les individus, à leur liber
4122 nce de légalité, source de guerres déclarées, que de renoncer, comme les individus, à leur liberté sauvage (anarchique), p
4123 r liberté sauvage (anarchique), pour s’accommoder de la contrainte publique des lois et former ainsi un « État des nations
4124 ment, qui s’étendrait à la fin à tous les peuples de la terre. Mais comme, d’après l’idée qu’ils se font du droit des gens
4125 t du droit des gens, ils ne veulent point du tout de ce moyen, et rejettent in hypothesi ce qui est juste in thesi, à défa
4126 i est juste in thesi, à défaut de l’idée positive d’ une « république mondiale », il n’y a (si l’on ne veut pas tout perdre
4127 ne veut pas tout perdre) que l’ersatz « négatif » d’ une « alliance » permanente, sans cesse élargie, qui puisse préserver
4128 manente, sans cesse élargie, qui puisse préserver de la guerre et contenir le torrent de ces dispositions hostiles et oppo
4129 sse préserver de la guerre et contenir le torrent de ces dispositions hostiles et opposées au droit ; pourtant, le danger
4130 stiles et opposées au droit ; pourtant, le danger de leur déchaînement subsiste. (Furor impius intus frémit horridus ore c
4131 leur et la vivacité des discussions que le projet de Kant provoqua en Allemagne s’expliquent par l’intérêt qu’avait déjà s
4132 dans l’élite prussienne la redécouverte des plans de Sully et de l’abbé de Saint-Pierre (grâce à l’édition des Œconomies r
4133 prussienne la redécouverte des plans de Sully et de l’abbé de Saint-Pierre (grâce à l’édition des Œconomies royales due à
4134 t à l’influence qu’exercèrent très vite les idées de Kant, elle est illustrée par la publication, cinq ans après La Paix é
4135 la publication, cinq ans après La Paix éternelle, d’ un important essai de Gentz qui porte à peu près le même titre. Friedr
4136 ans après La Paix éternelle, d’un important essai de Gentz qui porte à peu près le même titre. Friedrich von Gentz (1764-1
4137 ministre du roi de Prusse, puis conseiller intime de la politique autrichienne, bras droit de Metternich et secrétaire du
4138 r intime de la politique autrichienne, bras droit de Metternich et secrétaire du congrès de Vienne, avait été dès sa jeune
4139 bras droit de Metternich et secrétaire du congrès de Vienne, avait été dès sa jeunesse un disciple de Kant, dont il partag
4140 de Vienne, avait été dès sa jeunesse un disciple de Kant, dont il partagea au début l’enthousiasme pour la Révolution. Ma
4141 ture des Reflections on the Revolution in France, d’ Edmund Burke, qu’il traduisit un an après leur publication en 1790, le
4142 e. Ses vues sur le problème européen, dans chacun de ses ouvrages comme dans sa carrière politique, manifestent le même ba
4143 qu’inspirerait la raison pure au non qu’il déduit de son expérience politique, et, vers la fin de sa vie, d’une lassitude
4144 duit de son expérience politique, et, vers la fin de sa vie, d’une lassitude désenchantée. Cet homme que le tsar Alexandre
4145 expérience politique, et, vers la fin de sa vie, d’ une lassitude désenchantée. Cet homme que le tsar Alexandre avait pu b
4146 e tsar Alexandre avait pu baptiser « le chevalier de l’Europe » et « le secrétaire général présomptif de l’Europe », finit
4147 l’Europe » et « le secrétaire général présomptif de l’Europe », finit par écrire en 1814 : « Ma politique devient tous le
4148 égoïste et plus étroitement autrichienne. Le mot d’ Europe m’est devenu objet d’horreur » ; ou encore : « … j’ai perdu tou
4149 autrichienne. Le mot d’Europe m’est devenu objet d’ horreur » ; ou encore : « … j’ai perdu toute envie d’être un Européen.
4150 orreur » ; ou encore : « … j’ai perdu toute envie d’ être un Européen. » Ce qui retient notre attention dans son essai de 1
4151 . » Ce qui retient notre attention dans son essai de 1800 intitulé Über den ewigen Frieden, c’est la critique lucide (quoi
4152 enfin la fédération des États soit par un système d’ arbitrage, soit par des liens constitutionnels. Gentz repousse avec fo
4153 stitutionnels. Gentz repousse avec force l’utopie de la République universelle et unitaire des jacobins, qui n’est autre q
4154 u’une version renouvelée du vieux mythe effrayant de la Monarchie universelle : « L’Europe soumise à un seul gouvernement
4155 faut faire quelque chose pour prévenir le retour de guerres intestines qui ruinent l’Europe, cette « vingtième partie des
4156 urope, cette « vingtième partie des terres fermes de la planète » qui n’a dû qu’à sa culture de dominer le monde. Cette hé
4157 fermes de la planète » qui n’a dû qu’à sa culture de dominer le monde. Cette hégémonie durera-t-elle ? L’Amérique ne va-t-
4158 ient de proposer l’année même : la transformation de nos États en autarcies commerciales, politiques et culturelles (voir
4159 ceptique que Gentz consacre la partie essentielle de son essai : Le troisième moyen d’assurer ou de préparer la paix éter
4160 ie essentielle de son essai : Le troisième moyen d’ assurer ou de préparer la paix éternelle serait d’instaurer une libre
4161 e de son essai : Le troisième moyen d’assurer ou de préparer la paix éternelle serait d’instaurer une libre fédération ou
4162 d’assurer ou de préparer la paix éternelle serait d’ instaurer une libre fédération ou d’élaborer dans ses moindres détails
4163 rnelle serait d’instaurer une libre fédération ou d’ élaborer dans ses moindres détails une constitution fédérale entre les
4164 insi, les États fédérés se réserveraient le droit de nommer, en cas de litige, un ou plusieurs arbitres ; ou bien ils adop
4165 dérés se réserveraient le droit de nommer, en cas de litige, un ou plusieurs arbitres ; ou bien ils adopteraient le princi
4166 ue la nécessité s’en ferait sentir, aux décisions de la majorité ; et enfin un congrès permanent serait institué, chargé d
4167 nfin un congrès permanent serait institué, chargé de régler toutes les affaires communes des États confédérés, de mener à
4168 outes les affaires communes des États confédérés, de mener à terme tous leurs procès et de mettre fin, en dernière instanc
4169 confédérés, de mener à terme tous leurs procès et de mettre fin, en dernière instance, à tous les contentieux. Suit une c
4170 criraient jamais à une constitution les empêchant d’ être injustes quand il leur plaît ; s’il était vrai, comme il le préte
4171 nous ne devrions pas laisser s’évanouir l’espoir de la voir se réaliser. Il s’est trouvé plus d’un moment dans l’histoire
4172 poir de la voir se réaliser. Il s’est trouvé plus d’ un moment dans l’histoire récente de l’Europe, où tous les gouvernemen
4173 t trouvé plus d’un moment dans l’histoire récente de l’Europe, où tous les gouvernements eussent préféré avec empressement
4174 nts eussent préféré avec empressement la sécurité d’ une paix durable au succès incertain des guerres ; un tel moment peut
4175 etrouver et tout ce qui, parmi les hommes, dépend d’ une décision instantanée, est possible et pratiquement réalisable. La
4176 e. La difficulté, ou même la totale impossibilité de ce projet, réside moins dans la création de la fédération que dans le
4177 ilité de ce projet, réside moins dans la création de la fédération que dans les conditions mêmes de sa durée. Un libre con
4178 on de la fédération que dans les conditions mêmes de sa durée. Un libre contrat conclu entre les États n’entrera en consid
4179 s ne possède à la fois la volonté et la puissance de le rompre ; ou, en d’autres termes, que si la paix, que ce contrat de
4180 urer sans lui. C’est donc à un retour au système de l’« équilibre européen » que conclut Gentz, annonçant ainsi la politi
4181 » que conclut Gentz, annonçant ainsi la politique de la Sainte-Alliance dont il sera l’un des grands artisans : Le but de
4182 e dont il sera l’un des grands artisans : Le but de ce système n’a jamais été, comme on l’en a accusé à tort, de rendre t
4183 me n’a jamais été, comme on l’en a accusé à tort, de rendre tous les États également puissants, mais bien, autant que poss
4184 lement puissants, mais bien, autant que possible, de protéger les plus faibles, en les alliant avec les plus forts, contre
4185 liant avec les plus forts, contre les entreprises d’ un État prépondérant. On se proposait d’organiser cette manière de con
4186 treprises d’un État prépondérant. On se proposait d’ organiser cette manière de constitution fédérale, qui s’est naturellem
4187 dérant. On se proposait d’organiser cette manière de constitution fédérale, qui s’est naturellement créée en Europe, de te
4188 édérale, qui s’est naturellement créée en Europe, de telle sorte que chaque poids dans la grande masse politique eût quelq
4189 ait, chaque fois qu’il le fallait, à la tentation de la guerre les grandes difficultés que celle-ci soulève ; ou on cherch
4190 ner, par la peur ou l’intérêt, ce qu’en l’absence de toute autorité supérieure, ni la loi ni la moralité n’étaient capable
4191 eure, ni la loi ni la moralité n’étaient capables de réprimer. On voulait, en un mot, obtenir par des pactes séparés ce qu
4192 , obtenir par des pactes séparés ce que le projet de Saint-Pierre promettait de réaliser par un pacte général. Quant à la
4193 parés ce que le projet de Saint-Pierre promettait de réaliser par un pacte général. Quant à la quatrième possibilité, cel
4194 général. Quant à la quatrième possibilité, celle d’ une Constitution fédérale, c’est hélas — dit Gentz — « une éternelle c
4195  », car : 1. Elle devrait, pour réaliser l’idéal de la paix éternelle, pouvoir régir la terre entière. Un système fédérat
4196 u monde, n’offrirait en aucune façon une garantie de paix suffisante. L’état de nature, qui règne entre les différents pay
4197 ys, ne cessera véritablement sur toute la surface de la Terre que le jour où tous les États pourront s’unir en un seul ; c
4198 en aucune condition, pour un nombre considérable de pays et surtout de grands pays. Une association de petits États, que
4199 n, pour un nombre considérable de pays et surtout de grands pays. Une association de petits États, que relie entre eux un
4200 e pays et surtout de grands pays. Une association de petits États, que relie entre eux un intérêt commun, peut certes vivr
4201 ut certes vivre et se développer, si on l’a dotée d’ une constitution de ce genre145. Mais s’il fallait appliquer le systèm
4202 se développer, si on l’a dotée d’une constitution de ce genre145. Mais s’il fallait appliquer le système fédératif à de gr
4203 ais s’il fallait appliquer le système fédératif à de grands États, s’il fallait transformer l’Europe en une véritable répu
4204 fédérative — non pas d’après le plan insuffisant de Saint-Pierre, mais dans le sens indiqué ici et seul valable — il conv
4205 ens indiqué ici et seul valable — il conviendrait d’ investir le Sénat suprême de cette immense république d’une autorité q
4206 ble — il conviendrait d’investir le Sénat suprême de cette immense république d’une autorité qui ne souffrît aucune compar
4207 stir le Sénat suprême de cette immense république d’ une autorité qui ne souffrît aucune comparaison avec celle de chacun d
4208 ité qui ne souffrît aucune comparaison avec celle de chacun des États membres ; ce qui, une fois de plus, est absolument i
4209 t purement idéal du projet. Car il est impossible d’ admettre que chaque État puisse se soumettre de plein gré aux jugement
4210 at puisse se soumettre de plein gré aux jugements de la Haute Cour de la fédération. À l’intérieur des États il faut souve
4211 ettre de plein gré aux jugements de la Haute Cour de la fédération. À l’intérieur des États il faut souvent avoir recours
4212 eut-être plus souvent encore que dans les litiges d’ ordre privé, la bonne exécution des décisions du Tribunal devrait être
4213 res coercitives contre un État ne signifient rien d’ autre que la guerre ; par conséquent, la guerre reste inévitable, même
4214 névitable, et comme la Révolution française vient d’ aggraver ses conditions — ici Gentz reprend la critique de Burke et de
4215 er ses conditions — ici Gentz reprend la critique de Burke et de Bonald — tout ce que l’on est en droit d’espérer et de pr
4216 tions — ici Gentz reprend la critique de Burke et de Bonald — tout ce que l’on est en droit d’espérer et de préparer, c’es
4217 urke et de Bonald — tout ce que l’on est en droit d’ espérer et de préparer, c’est un système d’équilibre qui « limite le m
4218 nald — tout ce que l’on est en droit d’espérer et de préparer, c’est un système d’équilibre qui « limite le mal » : Les h
4219 droit d’espérer et de préparer, c’est un système d’ équilibre qui « limite le mal » : Les hommes de la Révolution croyaie
4220 e d’équilibre qui « limite le mal » : Les hommes de la Révolution croyaient unir tous les peuples de la terre en une gran
4221 de la Révolution croyaient unir tous les peuples de la terre en une grande fédération cosmopolite, et ils n’ont réussi qu
4222 à fait quelques pas importants dans l’élaboration d’ une constitution pacifique de droit international. Le pas le plus impo
4223 s dans l’élaboration d’une constitution pacifique de droit international. Le pas le plus important de tous était sans cont
4224 de droit international. Le pas le plus important de tous était sans contredit la découverte des vrais principes de l’écon
4225 sans contredit la découverte des vrais principes de l’économie politique. Une conception éclairée, libérale et bienfaisan
4226 système selon lequel la grandeur et le bien-être de l’État reposent sur la guerre et les conquêtes. Les gouvernements app
4227 rnements apprenaient peu à peu que la source même de leur puissance, qu’ils avaient cherchée bien loin de leur patrie, gis
4228 el État, contribuaient plus ou moins au bien-être de tous. Même la nation la plus riche retire de plus grands avantages de
4229 ion la plus riche retire de plus grands avantages de l’opulence que de la pauvreté de ses voisins et de toutes les autres
4230 retire de plus grands avantages de l’opulence que de la pauvreté de ses voisins et de toutes les autres nations. Quant aux
4231 grands avantages de l’opulence que de la pauvreté de ses voisins et de toutes les autres nations. Quant aux ravages causés
4232 e l’opulence que de la pauvreté de ses voisins et de toutes les autres nations. Quant aux ravages causés par la guerre, qu
4233 es semblaient bien avoir trouvé le chemin de plus d’ un trône. Ainsi paraissait s’ouvrir en Europe, partout à la fois, une
4234 ir en Europe, partout à la fois, une ère nouvelle de sagesse, d’humanité et de paix. Cette terrible Révolution a fini par
4235 , partout à la fois, une ère nouvelle de sagesse, d’ humanité et de paix. Cette terrible Révolution a fini par contaminer l
4236 fois, une ère nouvelle de sagesse, d’humanité et de paix. Cette terrible Révolution a fini par contaminer la vie politiqu
4237 Révolution a fini par contaminer la vie politique de l’Europe entière, car elle ne trouvait plus à l’intérieur de la Franc
4238 elle ne trouvait plus à l’intérieur de la France de quoi satisfaire sa grande puissance destructrice. Son résultat final
4239 uissance destructrice. Son résultat final dépasse de loin toutes les évaluations des hommes. Mais actuellement une seule c
4240 ellement une seule certitude a été acquise : loin d’ avoir affermi la paix sur la terre, elle s’est mise au service de la g
4241 la paix sur la terre, elle s’est mise au service de la guerre, lui fournissant maintes occasions d’éclater et maints moye
4242 e de la guerre, lui fournissant maintes occasions d’ éclater et maints moyens de se développer, disposant même les esprits
4243 sant maintes occasions d’éclater et maints moyens de se développer, disposant même les esprits en sa faveur. Certes, des é
4244 eversement des guerres, une nouvelle Constitution de droit international peut naître et se développer plus rapidement qu’o
4245 se développer plus rapidement qu’on est en droit de l’espérer. Un ordre des choses plus pacifique, fondé sur de meilleurs
4246 er. Un ordre des choses plus pacifique, fondé sur de meilleurs principes, s’établirait alors de façon tout à fait inattend
4247 dé sur de meilleurs principes, s’établirait alors de façon tout à fait inattendue pour la plus grande joie de l’humanité.
4248 n tout à fait inattendue pour la plus grande joie de l’humanité. Mais ce sont là de ces bienfaits de la Fortune, sur lesqu
4249 a plus grande joie de l’humanité. Mais ce sont là de ces bienfaits de la Fortune, sur lesquels personne ne peut compter, s
4250 e de l’humanité. Mais ce sont là de ces bienfaits de la Fortune, sur lesquels personne ne peut compter, surtout pas lorsqu
4251 nne ne peut compter, surtout pas lorsqu’il s’agit d’ édifier l’avenir. Dans l’état actuel des choses, une seule vérité subs
4252 non seulement la paix, mais la simple possibilité de la paix est très éloignée de nous ; la guerre est notre destin sur te
4253 a simple possibilité de la paix est très éloignée de nous ; la guerre est notre destin sur terre, et si des changements et
4254 assez souvent cette vérité dans les antichambres de la politique, pour que diplomates et politiciens se rendent compte de
4255 r que diplomates et politiciens se rendent compte de la lourde tâche et de la grande vocation qui est désormais la leur ;
4256 liticiens se rendent compte de la lourde tâche et de la grande vocation qui est désormais la leur ; et qu’ils redoublent d
4257 qui est désormais la leur ; et qu’ils redoublent de volonté, de courage et de force pour trouver enfin la voie du salut o
4258 ormais la leur ; et qu’ils redoublent de volonté, de courage et de force pour trouver enfin la voie du salut ou, du moins,
4259  ; et qu’ils redoublent de volonté, de courage et de force pour trouver enfin la voie du salut ou, du moins, une limite au
4260 , écrivain politique abondant et brillant orateur de la Chambre des communes, fut à la fois le premier défenseur des droit
4261 ur des droits américains et le premier adversaire de l’idéologie jacobine. Héritier de Montesquieu, maître de Gentz, il no
4262 mier adversaire de l’idéologie jacobine. Héritier de Montesquieu, maître de Gentz, il nous apparaît comme le précurseur de
4263 carme qu’entretiennent les clameurs enthousiastes de la gauche et les anathèmes de la droite, sa voix s’élève de nouveau a
4264 meurs enthousiastes de la gauche et les anathèmes de la droite, sa voix s’élève de nouveau au xxe siècle, en Angleterre e
4265 tats-Unis, où le « néo-conservatisme » s’autorise de la pondération et du sens réaliste qu’il défendit avec tant de violen
4266 réaliste qu’il défendit avec tant de violence et de généreux paradoxes. Contrairement à Kant, il croit la guerre inévita
4267 viniser comme J. de Maistre : il se fait l’avocat d’ un équilibre difficile, précieux et toujours menacé, entre l’idéal chr
4268 ou à l’autre, découlent dans notre monde européen de deux principes : … de l’esprit chevaleresque (spirit of gentleman) et
4269 t dans notre monde européen de deux principes : … de l’esprit chevaleresque (spirit of gentleman) et de l’esprit religieux
4270 e l’esprit chevaleresque (spirit of gentleman) et de l’esprit religieux. Mais les temps de la chevalerie sont révolus ; v
4271 tleman) et de l’esprit religieux. Mais les temps de la chevalerie sont révolus ; voici venu le temps de la « barbarie phi
4272 la chevalerie sont révolus ; voici venu le temps de la « barbarie philosophique », des économistes et des cyniques. « La
4273 e », des économistes et des cyniques. « La gloire de l’Europe est éteinte. » Voici, tirée de ses quatre Letters on the Pro
4274 La gloire de l’Europe est éteinte. » Voici, tirée de ses quatre Letters on the Proposal for peace with the regicide Direct
4275 rectory of France (1796) sa description classique de l’unité européenne : La conformité et l’analogie dont j’ai parlé, qu
4276 et l’analogie dont j’ai parlé, quoique incapables de préserver à elles seules une parfaite confiance et tranquillité parmi
4277 utres que ne l’ont été plus tard bien des nations de l’Europe, au cours de guerres longues et sanglantes. La cause doit en
4278 nt écrit sur le droit public ont souvent qualifié de Commonwealth cet agrégat de nations. Ils avaient raison. Car il repré
4279 ont souvent qualifié de Commonwealth cet agrégat de nations. Ils avaient raison. Car il représente virtuellement un seul
4280 llement un seul grand État, ayant les mêmes bases de droit, malgré quelques diversités de coutumes régionales et d’ordonna
4281 mêmes bases de droit, malgré quelques diversités de coutumes régionales et d’ordonnances locales. Les nations de l’Europe
4282 gré quelques diversités de coutumes régionales et d’ ordonnances locales. Les nations de l’Europe ont eu la même religion c
4283 régionales et d’ordonnances locales. Les nations de l’Europe ont eu la même religion chrétienne, s’accordant quant aux fo
4284 s subordonnées. Le régime politique et l’économie de chaque pays, dans leur ensemble, dérivaient des mêmes sources. Ils av
4285 , qui en avait fait un système et une discipline. De là naquirent les ordres multiples, avec ou sans monarque, qu’on nomme
4286 trées qui avaient rejeté cette dernière, l’esprit de la monarchie européenne subsistait. On y trouvait encore les états, c
4287 à peine changés. En fait, la vigueur et la forme de l’institution des états se maintenaient plus parfaitement dans ces co
4288 ommunautés républicaines que sous les monarchies. De toutes ces sources s’était composé un système de mœurs et d’éducation
4289 De toutes ces sources s’était composé un système de mœurs et d’éducation qui était à peu près le même dans toute cette ré
4290 es sources s’était composé un système de mœurs et d’ éducation qui était à peu près le même dans toute cette région du Glob
4291 qui estompait, mêlait et harmonisait les couleurs de l’ensemble. Il y avait peu de variations dans le régime des universit
4292 iences, ou des formes plus libérales et élégantes de l’érudition. Cette ressemblance dans le mode des relations et dans to
4293 s relations et dans toutes les formes et coutumes de la vie courante faisait que nul citoyen de l’Europe ne pouvait se reg
4294 utumes de la vie courante faisait que nul citoyen de l’Europe ne pouvait se regarder comme un exilé dans aucun de nos pays
4295 ne pouvait se regarder comme un exilé dans aucun de nos pays. Il n’y trouvait rien d’autre qu’une plaisante variété, récr
4296 xilé dans aucun de nos pays. Il n’y trouvait rien d’ autre qu’une plaisante variété, récréant et instruisant l’esprit, enri
4297 . Car, selon Burke, « les principes et les formes de l’antique constitution commune des États européens, améliorés et adap
4298 ens, améliorés et adaptés à la situation présente de l’Europe, ne se trouvent plus conservés qu’en Angleterre »147. Mais d
4299 ouvent plus conservés qu’en Angleterre »147. Mais de fait, l’Angleterre va devenir l’ennemie du continent conquis par les
4300 enir l’ennemie du continent conquis par les idées de la Révolution ; et la politique « d’équilibre des Puissances », telle
4301 ar les idées de la Révolution ; et la politique «  d’ équilibre des Puissances », telle que la Sainte-Alliance pourra la réa
4302 p. 67-113. 145. « Dans ce domaine, les exemples de réussite ont démontré que seule une fédération, dont l’ensemble des é
4303 ’ensemble des états membres ne compose qu’un pays de petite ou de moyenne dimension, a des chances de se maintenir. Par de
4304 états membres ne compose qu’un pays de petite ou de moyenne dimension, a des chances de se maintenir. Par deux fois, l’es
4305 de petite ou de moyenne dimension, a des chances de se maintenir. Par deux fois, l’essai a été tenté en des régions très
4306 dues : en Allemagne et en Amérique du Nord. L’une de ces tentatives a eu l’issue que l’on sait, l’avenir seul permettra de
4307 eu l’issue que l’on sait, l’avenir seul permettra de porter un jugement sur l’autre. Mais si des circonstances tout à fait
4308 à fait exceptionnelles ne préservent pas l’unité de l’état indépendant d’Amérique du Nord, celle-ci aura beaucoup de pein
4309 s ne préservent pas l’unité de l’état indépendant d’ Amérique du Nord, celle-ci aura beaucoup de peine à subsister, ne sera
4310 ine à subsister, ne serait-ce qu’une cinquantaine d’ années. » 146. Edmund Burke Selected Works, éd. E. J. Payne, Clarendo
15 1961, Vingt-huit siècles d’Europe. Quatrième Partie. L’Ère de la Révolution de Kant à Hegel — 3. Synthèses historico-philosophiques (I)
4311 ais par excellence, celui du rayonnement européen de la France, de Montesquieu à Condorcet, par Voltaire le cosmopolite et
4312 ence, celui du rayonnement européen de la France, de Montesquieu à Condorcet, par Voltaire le cosmopolite et Rousseau le f
4313 xixe siècles en prenant pour axe la Révolution. De Wieland à Schelling, de Herder à Hegel, en passant par un Kant ou par
4314 t pour axe la Révolution. De Wieland à Schelling, de Herder à Hegel, en passant par un Kant ou par un Goethe, l’Allemagne
4315 Kant ou par un Goethe, l’Allemagne a pris la tête d’ une révolution intellectuelle et poétique qui évolue en marge de l’aut
4316 contre elle, et la débordera largement : théories de l’Histoire, systèmes métaphysiques, romantisme, inconscient, dialecti
4317 romantisme, inconscient, dialectique — naissance de la pensée moderne. Groupons ici quatre écrivains et philosophes qui,
4318 ce grand renouvellement des valeurs dont la chute de Napoléon, après leur mort, semblera déclencher le processus européen.
4319 Schiller (1759-1805) lorsqu’il écrit son Histoire de la guerre de Trente Ans (dès 1790) vient enfin de s’établir à Weimar.
4320 9-1805) lorsqu’il écrit son Histoire de la guerre de Trente Ans (dès 1790) vient enfin de s’établir à Weimar. Son « Sturm
4321 de la guerre de Trente Ans (dès 1790) vient enfin de s’établir à Weimar. Son « Sturm und Drang » est terminé et l’auteur d
4322 et l’auteur des Brigands professe à l’Université d’ Iéna ! C’est alors qu’il reçoit de la Convention le titre de citoyen f
4323 à l’Université d’Iéna ! C’est alors qu’il reçoit de la Convention le titre de citoyen français : et certes, son cœur et s
4324 ’est alors qu’il reçoit de la Convention le titre de citoyen français : et certes, son cœur et son tempérament sont avec l
4325 sing, comme Herder et Kant, et comme les orateurs de la Révolution, Schiller s’inspire de Rousseau : et c’est parce qu’il
4326 les orateurs de la Révolution, Schiller s’inspire de Rousseau : et c’est parce qu’il a lu l’Extrait du système de l’abbé d
4327  : et c’est parce qu’il a lu l’Extrait du système de l’abbé de Saint-Pierre qu’il écrit cette strophe illustre chantée par
4328 rit cette strophe illustre chantée par les chœurs de Beethoven : Seid umschlungen, Millionen, Diesen Kuss der ganzen Welt
4329 wohnen.148 Mais il ne partage pas les illusions d’ un Cloots sur l’unité de style néo-romain qu’il faudrait imposer à tou
4330 partage pas les illusions d’un Cloots sur l’unité de style néo-romain qu’il faudrait imposer à toute l’humanité. Sa concep
4331 audrait imposer à toute l’humanité. Sa conception de l’Europe est en effet bien plus fédéraliste que jacobine. C’est aux l
4332 la Réformation qu’il attribue l’origine véritable de la Communauté des peuples européens. Le contraste est total avec les
4333 tions des Schlegel, Novalis et Görres, ses cadets d’ une quinzaine d’années — qui bientôt accuseront la Réforme d’avoir bri
4334 el, Novalis et Görres, ses cadets d’une quinzaine d’ années — qui bientôt accuseront la Réforme d’avoir brisé l’antique uni
4335 aine d’années — qui bientôt accuseront la Réforme d’ avoir brisé l’antique union et marqué le commencement de la fin d’une
4336 r brisé l’antique union et marqué le commencement de la fin d’une Europe germano-catholique, utopie nostalgique du romanti
4337 antique union et marqué le commencement de la fin d’ une Europe germano-catholique, utopie nostalgique du romantisme allema
4338 gique du romantisme allemand. Dès la seconde page de l’Histoire de la guerre de Trente Ans, il expose sa thèse à grands tr
4339 tisme allemand. Dès la seconde page de l’Histoire de la guerre de Trente Ans, il expose sa thèse à grands traits : C’est
4340 d. Dès la seconde page de l’Histoire de la guerre de Trente Ans, il expose sa thèse à grands traits : C’est la Réformatio
4341 ncèrent, grâce à la Réformation, à avoir un point de contact et à se rapprocher les uns des autres, mus par une sympathie
4342 ie politique réciproque. De même que les rapports de citoyen à citoyen, de souverain à sujet furent complètement transform
4343 e. De même que les rapports de citoyen à citoyen, de souverain à sujet furent complètement transformés par la Réformation,
4344 choses, la séparation des Églises devint la cause d’ une union plus étroite entre les États. Il est vrai que les premiers e
4345 ais l’Europe réchappa, insoumise et indépendante, de cette terrible guerre, pendant laquelle elle s’affirma pour la premiè
4346 ffirma pour la première fois comme une communauté d’ États cohérente ; et cette collaboration étroite entre États, qui s’in
4347 raintes dissipées. Au IIe Livre, Schiller évoque d’ une manière plus précise la nature des liens tissés par la Réforme ent
4348 , des mœurs, des caractères nationaux, qui a fait de chaque pays et nation un « tout » isolé, élevant entre eux des cloiso
4349 s, a rendu chaque État insensible aux difficultés d’ un autre, quand elle ne les a pas dressés les uns contre les autres pa
4350 pas dressés les uns contre les autres par le fait d’ une rivalité impitoyable de nation à nation. La Réformation abattit ce
4351 les autres par le fait d’une rivalité impitoyable de nation à nation. La Réformation abattit ces cloisons. Un intérêt plus
4352 us immédiat que l’intérêt national ou que l’amour de la patrie, sans rapport aucun avec la vie civique, commença à animer
4353 t même des États entiers. Cet intérêt fut capable de lier entre eux plusieurs États, même les plus éloignés les uns des au
4354 en pouvait fort bien disparaître entre les sujets d’ un même État. Le calviniste français avait donc avec le réformé genevo
4355 enevois, anglais, allemand ou hollandais un point de contact qu’il n’avait plus avec son propre concitoyen catholique. Ain
4356 olique. Ainsi il cessait, sur un point important, d’ être le citoyen d’un État particulier et d’accorder à cet unique État
4357 essait, sur un point important, d’être le citoyen d’ un État particulier et d’accorder à cet unique État toute son attentio
4358 rtant, d’être le citoyen d’un État particulier et d’ accorder à cet unique État toute son attention et sa collaboration. So
4359 commence à faire dépendre son propre destin futur de celui des pays étrangers qui ont la même foi que lui et à considérer
4360 ur la première fois des gouvernants se permettent de soumettre à l’assemblée de leurs États des questions provenant de pay
4361 vernants se permettent de soumettre à l’assemblée de leurs États des questions provenant de pays étrangers, sachant très b
4362 ’assemblée de leurs États des questions provenant de pays étrangers, sachant très bien qu’ils peuvent espérer trouver des
4363 le maltraite et passe en l’autre camp, acceptant de mourir pour la liberté de la Hollande. On voit maintenant, sur les ri
4364 l’autre camp, acceptant de mourir pour la liberté de la Hollande. On voit maintenant, sur les rives de la Loire et de la S
4365 de la Hollande. On voit maintenant, sur les rives de la Loire et de la Seine, le Suisse se battre contre le Suisse, l’Alle
4366 On voit maintenant, sur les rives de la Loire et de la Seine, le Suisse se battre contre le Suisse, l’Allemand contre l’A
4367 d contre l’Allemand, afin de trancher la question de la succession du trône en France. Le Danois passe l’Eider, le Suédois
4368 eurs l’un des premiers à mettre en valeur l’unité de mœurs et la similitude des institutions dans l’Europe médiévale, en d
4369 ns dans l’Europe médiévale, en dépit de l’absence de relations régulières et d’échanges entre nos divers peuples. Dans un
4370 en dépit de l’absence de relations régulières et d’ échanges entre nos divers peuples. Dans un fragment sur les Croisades
4371 ivers peuples. Dans un fragment sur les Croisades de son Universalhistorische Uebersicht, on lit : L’Occident européen, q
4372 aient issues, qui se trouvaient, lors de la prise de possession du pays, à peu près dans la même situation, l’Occident aur
4373 cle très varié, ce qui aurait eu pour conséquence de faire apparaître, par la suite, d’importantes différences entre ces n
4374 ur conséquence de faire apparaître, par la suite, d’ importantes différences entre ces nations. Mais la même rage dévastatr
4375 lture ; elles foulèrent aux pieds et détruisirent de la même façon tout ce qui s’offrait à elles, transformant ces pays de
4376 t ce qui s’offrait à elles, transformant ces pays de telle manière que l’État nouveau dans lequel ils se trouvèrent n’eut
4377 édiats, la situation géographique furent la cause de différences sensibles, que, d’autre part, les vestiges laissés par la
4378 bes cultivés dans les pays du Sud-Ouest, le siège de la hiérarchie en Italie et le commerce actif de ce même pays avec les
4379 e de la hiérarchie en Italie et le commerce actif de ce même pays avec les Grecs n’aient pas pu rester sans conséquences p
4380 as pu rester sans conséquences pour les habitants de toutes ces contrées, il faut tout de même reconnaître que toutes ces
4381 es, trop peu marquées pour effacer ou transformer de façon visible la forte empreinte générique que ces nations avaient ap
4382 l’historien constate, en général, aux extrémités de l’Europe, en Sicile, en Grande-Bretagne, sur les bords du Danube et d
4383 e, en Grande-Bretagne, sur les bords du Danube et de l’Eider, sur ceux de l’Elbe et de l’Ebre, une similitude de constitut
4384 , sur les bords du Danube et de l’Eider, sur ceux de l’Elbe et de l’Ebre, une similitude de constitutions et de mœurs qui
4385 ds du Danube et de l’Eider, sur ceux de l’Elbe et de l’Ebre, une similitude de constitutions et de mœurs qui le remplit d’
4386 , sur ceux de l’Elbe et de l’Ebre, une similitude de constitutions et de mœurs qui le remplit d’autant plus d’admiration q
4387 et de l’Ebre, une similitude de constitutions et de mœurs qui le remplit d’autant plus d’admiration qu’elle s’accompagne
4388 itude de constitutions et de mœurs qui le remplit d’ autant plus d’admiration qu’elle s’accompagne d’une très grande indépe
4389 itutions et de mœurs qui le remplit d’autant plus d’ admiration qu’elle s’accompagne d’une très grande indépendance et d’un
4390 t d’autant plus d’admiration qu’elle s’accompagne d’ une très grande indépendance et d’une absence presque complète de rela
4391 le s’accompagne d’une très grande indépendance et d’ une absence presque complète de relations réciproques. Si nombreux soi
4392 de indépendance et d’une absence presque complète de relations réciproques. Si nombreux soient les siècles qui ont passé s
4393 de nouvelles situations, par suite du changement de religion et de langue, de l’acquisition de nouveaux arts, de nouveaux
4394 ituations, par suite du changement de religion et de langue, de l’acquisition de nouveaux arts, de nouveaux objets d’envie
4395 par suite du changement de religion et de langue, de l’acquisition de nouveaux arts, de nouveaux objets d’envie, de nouvel
4396 gement de religion et de langue, de l’acquisition de nouveaux arts, de nouveaux objets d’envie, de nouvelles jouissances e
4397 et de langue, de l’acquisition de nouveaux arts, de nouveaux objets d’envie, de nouvelles jouissances et commodités de la
4398 ’acquisition de nouveaux arts, de nouveaux objets d’ envie, de nouvelles jouissances et commodités de la vie, il n’en subsi
4399 ion de nouveaux arts, de nouveaux objets d’envie, de nouvelles jouissances et commodités de la vie, il n’en subsiste pas m
4400 s d’envie, de nouvelles jouissances et commodités de la vie, il n’en subsiste pas moins, en général, une structure de l’Ét
4401 ’en subsiste pas moins, en général, une structure de l’État inchangée, édifiée par leurs ancêtres. Actuellement encore ils
4402 qu’ils furent en leur patrie scythe, dans un état d’ indépendance sauvage, armés pour l’attaque et la défense, disséminés d
4403 et la défense, disséminés dans tous ces districts d’ Europe comme dans un immense camp militaire, ayant transplanté leur pr
4404 ant l’Europe déchirée et concevant la possibilité de sa décadence, prend une conscience nouvelle du rôle qu’elle a joué da
4405 mps je me suis passé le temps en lisant le voyage de Niebuhr et Volney en Syrie et en Égypte et je ne saurais qu’en recomm
4406 pour la première fois quel bienfait nous est échu d’ être nés en Europe. Il est véritablement incompréhensible que la force
4407 que la force vivifiante en l’homme n’ait un champ d’ action que dans une petite partie du monde et que des foules innombrab
4408 te partie du monde et que des foules innombrables de peuples n’entrent absolument pas en ligne de compte pour ce qui est d
4409 absolument pas en ligne de compte pour ce qui est de la perfectibilité humaine. Je ne puis que difficilement concevoir que
4410 énéral tous les non-Européens manquent totalement de dispositions morales ou esthétiques. Le réalisme ainsi que l’idéalism
4411 oethe se borne à répondre : Soyons donc contents de vivre sur cette partie du globe, même si l’Europe doit connaître enco
4412 lobe, même si l’Europe doit connaître encore plus de remous. Johann Gottlieb Fichte (1762-1814) peut être considéré comme
4413 Pourtant, la série des grandes œuvres politiques de ce disciple de Rousseau et de Kant, contemporaines de la Révolution f
4414 érie des grandes œuvres politiques de ce disciple de Rousseau et de Kant, contemporaines de la Révolution française (qu’il
4415 s œuvres politiques de ce disciple de Rousseau et de Kant, contemporaines de la Révolution française (qu’il défend dès 179
4416 e disciple de Rousseau et de Kant, contemporaines de la Révolution française (qu’il défend dès 1793) et de Napoléon (qu’il
4417 a Révolution française (qu’il défend dès 1793) et de Napoléon (qu’il attaquera violemment) s’ouvre par un projet de Sociét
4418 qu’il attaquera violemment) s’ouvre par un projet de Société des Nations et de citoyenneté mondiale : Grundriss der Völker
4419 ) s’ouvre par un projet de Société des Nations et de citoyenneté mondiale : Grundriss der Völker- und Weltbürgerrechts, 17
4420 ire triompher dans le monde entier les conditions de la liberté populaire conquises par la Révolution. Fichte n’abandonner
4421 oies militaires par lesquelles Napoléon va tenter d’ imposer la révolution jacobine à l’Europe. Dans l’un et l’autre cas, l
4422 nettes, Fichte veut l’instaurer par la contrainte de l’État national autarcique. Partant de l’idée de société des peuples
4423 contrainte de l’État national autarcique. Partant de l’idée de société des peuples libres, Fichte constate d’abord que l’e
4424 de l’État national autarcique. Partant de l’idée de société des peuples libres, Fichte constate d’abord que l’expansion c
4425 bord que l’expansion coloniale est le grand péché de l’Europe : elle est inutile et immorale — Bentham pensait de même — e
4426 est elle qui a provoqué la dissolution anarchique de l’Europe, jadis indivise, en États instables et belliqueux. Le mouvem
4427 et refermés chacun sur soi, sans espoir ni besoin d’ agrandissement. Alors, l’État qui a la plus haute culture (« der auf d
4428 ce finalement réunira le genre humain. Les étapes de ce raisonnement — qui annonce souvent de la manière la plus précise l
4429 s étapes de ce raisonnement — qui annonce souvent de la manière la plus précise le national-socialisme et le communisme  —
4430 illustrées par les citations suivantes, extraites de l’ouvrage intitulé Der geschlossene Handelsstaat (L’État commercial f
4431 monde antique étaient séparés les uns des autres d’ une manière très rigoureuse, par une foule de conditions. Pour eux l’é
4432 tres d’une manière très rigoureuse, par une foule de conditions. Pour eux l’étranger était un ennemi ou un barbare. On peu
4433 bare. On peut au contraire considérer les peuples de la nouvelle Europe chrétienne comme formant une seule nation. Unis pa
4434 es et les mêmes conceptions primitives des forêts de Germanie, ils furent aussi liés les uns aux autres, depuis leur expan
4435 autres, depuis leur expansion dans les provinces de l’Empire romain d’Occident, par une même religion commune et la même
4436 r expansion dans les provinces de l’Empire romain d’ Occident, par une même religion commune et la même soumission au chef
4437 ion commune et la même soumission au chef visible de cette dernière. Aux peuples de race différente qui vinrent plus tard,
4438 on au chef visible de cette dernière. Aux peuples de race différente qui vinrent plus tard, on inculqua, en même temps que
4439 religion, le même système germanique fondamental d’ usages et d’idées… Quoi d’étonnant si ces peuples qui, unis de toute m
4440 e même système germanique fondamental d’usages et d’ idées… Quoi d’étonnant si ces peuples qui, unis de toute manière, n’ét
4441 germanique fondamental d’usages et d’idées… Quoi d’ étonnant si ces peuples qui, unis de toute manière, n’étaient pas sépa
4442 d’idées… Quoi d’étonnant si ces peuples qui, unis de toute manière, n’étaient pas séparés par ce qui d’ordinaire sépare le
4443 e toute manière, n’étaient pas séparés par ce qui d’ ordinaire sépare les hommes, la constitution de l’État, n’en ayant poi
4444 ui d’ordinaire sépare les hommes, la constitution de l’État, n’en ayant point en fait, se considéraient et se comportaient
4445 ient du service et si chacun, arrivé dans le pays d’ autrui se croyait toujours chez lui. Plus tard seulement, avec l’intro
4446 e à l’origine, ne fut considéré que comme général de la chrétienté, devant être pour l’Église entière ce qu’étaient les pa
4447 se sont ainsi formés ; — non, comme on a coutume de décrire dans la doctrine du droit la formation d’un État, par le rass
4448 de décrire dans la doctrine du droit la formation d’ un État, par le rassemblement et la réunion d’individus isolés sous l’
4449 ion d’un État, par le rassemblement et la réunion d’ individus isolés sous l’unité de la loi, mais plutôt par la séparation
4450 ent et la réunion d’individus isolés sous l’unité de la loi, mais plutôt par la séparation et la division d’une seule gran
4451 loi, mais plutôt par la séparation et la division d’ une seule grande masse humaine, faiblement unie. Ainsi les divers État
4452 insi les divers États de l’Europe chrétienne sont de ces morceaux détachés de l’ancien ensemble, déterminés en grande part
4453 l’Europe chrétienne sont de ces morceaux détachés de l’ancien ensemble, déterminés en grande partie pour leur étendue par
4454 pour leur étendue par le hasard. C’est à l’époque de cette unité de l’Europe chrétienne que s’est formé aussi, entre autre
4455 ue par le hasard. C’est à l’époque de cette unité de l’Europe chrétienne que s’est formé aussi, entre autres, le système c
4456 s’est maintenu jusqu’à aujourd’hui. Chaque partie de ce grand Tout et chaque individu, cultivait, fabriquait, acquérait pa
4457 ns les autres parties du monde, ce qu’il pouvait, de la façon la plus pratique, suivant sa condition naturelle, et le port
4458 , et le portait au marché dans toutes les parties de ce même Tout, sans empêchement, et les prix des objets s’établissaien
4459 pêchement, et les prix des objets s’établissaient d’ eux-mêmes… Les citoyens d’un même État doivent tous trafiquer entre e
4460 objets s’établissaient d’eux-mêmes… Les citoyens d’ un même État doivent tous trafiquer entre eux. L’Europe chrétienne for
4461 opéens entre eux devait être libre. Il est facile de faire l’application à l’état actuel des choses. Si toute l’Europe chr
4462 Europe chrétienne avec les colonies et les places de commerce qui s’y sont ajoutées dans les autres parties du monde, form
4463 orme encore un tout, alors assurément le commerce de toutes les parties entre elles doit rester libre, comme il l’était à
4464 plètement fermés. Nous voici parvenus à la source de la plus grande partie des abus qui existent encore. Dans l’Europe nou
4465 t encore. Dans l’Europe nouvelle, il n’y a pas eu d’ États du tout pendant un long espace de temps. On en est encore à la p
4466 y a pas eu d’États du tout pendant un long espace de temps. On en est encore à la période des essais pour en former. De pl
4467 former. De plus, on a jusqu’ici conçu la mission de l’État seulement d’une manière unilatérale et à moitié incomplète, co
4468 a jusqu’ici conçu la mission de l’État seulement d’ une manière unilatérale et à moitié incomplète, comme une institution
4469 nstitution pour maintenir le citoyen par le moyen de la loi, dans les conditions de propriété où on le trouve. On a néglig
4470 toyen par le moyen de la loi, dans les conditions de propriété où on le trouve. On a négligé le devoir plus profond de l’É
4471 on le trouve. On a négligé le devoir plus profond de l’État qui consiste à établir d’abord chacun dans la propriété qui lu
4472 en ce qui concerne sa législation et sa fonction de juge.150 Faut-il se lamenter sur la division de l’Europe ? Non, il
4473 de juge.150 Faut-il se lamenter sur la division de l’Europe ? Non, il serait vain de « déplorer l’inévitable » : Si l’o
4474 sur la division de l’Europe ? Non, il serait vain de « déplorer l’inévitable » : Si l’on veut supprimer la guerre, il fau
4475 l faut que chaque État obtienne ce qu’il projette d’ obtenir par la guerre et ce que seulement il peut projeter raisonnable
4476 ce que seulement il peut projeter raisonnablement d’ obtenir, ses frontières naturelles. Dès lors, il n’a plus rien à deman
4477 il cherchait.151 Ainsi, à l’utopie rousseauiste de l’homme naturellement bon, correspond chez Fichte l’utopie de l’État
4478 aturellement bon, correspond chez Fichte l’utopie de l’État naturellement raisonnable. Il n’y a plus qu’à tirer les conséq
4479 l n’y a plus qu’à tirer les conséquences logiques de ces prémisses : fermer les États, interdire entre eux les échanges, d
4480 diversifier leurs monnaies, etc. C’est la théorie de l’autarcie absolue qui naît sous nos yeux. C’est d’un processus exact
4481 l’autarcie absolue qui naît sous nos yeux. C’est d’ un processus exactement inverse de celui du Marché commun que Fichte s
4482 nos yeux. C’est d’un processus exactement inverse de celui du Marché commun que Fichte se fait l’avocat : Toute la monnai
4483 c’est-à-dire tout l’or et l’argent, sera retirée de la circulation et échangée contre une nouvelle monnaie nationale, c’e
4484 vue de restreindre périodiquement ce commerce et de le faire cesser entièrement après un laps de temps déterminé… Tous le
4485 e et de le faire cesser entièrement après un laps de temps déterminé… Tous les ans l’importation étrangère doit diminuer.
4486 us les ans l’importation étrangère doit diminuer. D’ une année à l’autre le public a moins besoin de ces marchandises qui n
4487 r. D’une année à l’autre le public a moins besoin de ces marchandises qui ne peuvent être produites en leur pureté ni remp
4488 sage des marchandises où il n’est tenu compte que de l’opinion, peuvent même être interdits sur le champ. Le besoin de ces
4489 uvent même être interdits sur le champ. Le besoin de ces marchandises importées de l’étranger diminue également si elles-m
4490 le champ. Le besoin de ces marchandises importées de l’étranger diminue également si elles-mêmes ou leurs succédanés, doiv
4491 se développent constamment et ainsi les produits de l’extérieur sont remplacés par ceux de l’intérieur. L’exportation éga
4492 s produits de l’extérieur sont remplacés par ceux de l’intérieur. L’exportation également doit diminuer… Car, suivant le p
4493 r les étrangers à des travaux pour les nationaux, de la manière convenable. Il ne cherche pas en effet à acquérir une prép
4494 Le savant seul et l’artiste supérieur ont besoin de voyager hors de l’État commercial fermé : il ne doit pas être permis
4495 longtemps à une vaine curiosité et à la recherche de distractions de transporter en tout pays leur ennui. Les voyages des
4496 vaine curiosité et à la recherche de distractions de transporter en tout pays leur ennui. Les voyages des premiers s’effec
4497 des premiers s’effectuent pour le plus grand bien de l’humanité et de l’État ; loin de les empêcher, le gouvernement devra
4498 fectuent pour le plus grand bien de l’humanité et de l’État ; loin de les empêcher, le gouvernement devrait même les encou
4499 it même les encourager et faire voyager aux frais de l’État savants et artistes.153 Il est évident que dans une nation ai
4500 acquiert par suite des mesures indiquées sa façon de vivre, son organisation et ses mœurs particulières, qui aime avec dév
4501 aime avec dévouement la patrie et tout ce qui est de la patrie, l’honneur national se développera très vite, à un degré él
4502 e nation, absolument nouvelle. Cette introduction d’ une monnaie nationale en est véritablement la création… Un seul lien
4503 ul lien devra subsister entre les peuples : celui de la science. Grâce à elle, mais à elle seule, les hommes s’uniront de
4504 e à elle, mais à elle seule, les hommes s’uniront de manière durable et ils le doivent, quand pour tout le reste, leur div
4505 en, il le favorisera plutôt, car l’enrichissement de la Science par la puissance réunie de l’espèce humaine, avance même c
4506 ichissement de la Science par la puissance réunie de l’espèce humaine, avance même ces fins terrestres particulières. Les
4507 ribuer sur eux une prépondérance quelconque.154 De toutes les utopies issues de la philosophie pré-romantique, il faut a
4508 nce quelconque.154 De toutes les utopies issues de la philosophie pré-romantique, il faut avouer que celle de Fichte, po
4509 losophie pré-romantique, il faut avouer que celle de Fichte, pour délirante qu’elle nous paraisse, se trouve avoir le mieu
4510 allaient suivre. Et cependant, il serait injuste de considérer Fichte sous le seul aspect d’un précurseur de l’Anti-Europ
4511 injuste de considérer Fichte sous le seul aspect d’ un précurseur de l’Anti-Europe des nationalismes totalitaires. Par des
4512 idérer Fichte sous le seul aspect d’un précurseur de l’Anti-Europe des nationalismes totalitaires. Par des voies « dialect
4513 croyait atteindre. Cinq ans après la publication de son manifeste de l’Autarcie, il écrivait, dans ses Grundzüge des gege
4514 e. Cinq ans après la publication de son manifeste de l’Autarcie, il écrivait, dans ses Grundzüge des gegenwärtigen Zeitalt
4515 ärtigen Zeitalters (1804-1805) : … les Européens de religion chrétienne ne forment en réalité qu’un seul peuple, ils ne r
4516 e que cette Europe qui est leur terre commune, et d’ une extrémité à l’autre du continent, ils ne poursuivent, à peu de cho
4517 seins, grâce à eux cependant la première esquisse de l’organisation mondiale se prépare et les progrès de la culture unive
4518 l’organisation mondiale se prépare et les progrès de la culture universelle s’intensifient peu à peu ; et selon la même rè
4519 bite notre globe, sera réuni par les institutions de l’unique République universelle de la culture, qui comprendra tous le
4520 s institutions de l’unique République universelle de la culture, qui comprendra tous les peuples. À l’expansion coloniali
4521 peuples. À l’expansion colonialiste, responsable de la division de l’Europe en nations hostiles, puis au processus de fer
4522 xpansion colonialiste, responsable de la division de l’Europe en nations hostiles, puis au processus de fermeture totale d
4523 e l’Europe en nations hostiles, puis au processus de fermeture totale de ces monades politiques, succédera donc un jour, s
4524 s hostiles, puis au processus de fermeture totale de ces monades politiques, succédera donc un jour, selon Fichte, l’expan
4525 onc un jour, selon Fichte, l’expansion triomphale de la culture européenne, portée par la Science et libérée de tout impér
4526 ture européenne, portée par la Science et libérée de tout impérialisme. Nous n’en sommes pas si loin, dans cette seconde m
4527 uvait l’imaginer : ne fût-ce que par la collusion de la science et des nationalismes… Johann Gottfried von Herder (1744-18
4528 n fécondes hypothèses contradictoires sur le rôle de l’Europe dans l’histoire. Il a célébré « l’âme des peuples » en précu
4529 omantique, « l’équilibre européen » en précurseur de la Sainte-Alliance, les vertus nordiques en précurseur du racisme, la
4530 précurseur du racisme, la supériorité spirituelle de l’Orient en précurseur des philosophes modernes de notre « décadence
4531 e l’Orient en précurseur des philosophes modernes de notre « décadence fatale ». Tantôt il voit l’Europe à la tête du prog
4532 qu’elle a colonisés et pillés. Essayons cependant de saisir, dans ce balancement pendulaire de sa pensée, quelques-uns des
4533 pendant de saisir, dans ce balancement pendulaire de sa pensée, quelques-uns des moments de passage à l’axe européen. Voic
4534 pendulaire de sa pensée, quelques-uns des moments de passage à l’axe européen. Voici d’abord l’Europe « République des sav
4535 s qu’elle est allée chercher sur toute la surface de la Terre, a su se donner une forme idéale que seuls le savant perçoit
4536 ent leur cours : nous poursuivons l’image magique d’ une Science suprême et d’une Connaissance universelle, que nous n’atte
4537 rsuivons l’image magique d’une Science suprême et d’ une Connaissance universelle, que nous n’atteindrons jamais, mais qui
4538 si longtemps que durera la Constitution politique de l’Europe. Les États qui ne sont jamais entrés dans ce conflit, ne com
4539 mptent pour ainsi dire pas.155 Mais voici l’une de ces intuitions typiquement herdériennes, c’est-à-dire géo-historico-l
4540 noncent les grands systèmes « weltgeschichtlich » de Schlegel à Spengler en passant par Hegel : Est-ce le Nord ou le Sud,
4541 été la « vagina hominum » ? Quelle est l’origine de l’espèce humaine, des inventions, des arts et des religions ? Faut-il
4542 ons ? Faut-il croire que le genre humain a émigré de l’est vers le nord, pour s’y reproduire dans les montagnes du froid,
4543 uire dans les montagnes du froid, mû par sa force de géant, comme ces monstrueux poissons conservés sous les glaces ? Ensu
4544 ces ? Ensuite, après avoir inventé cette religion de la cruauté conforme à son climat, il aurait envahi l’Europe à la forc
4545 son climat, il aurait envahi l’Europe à la force de l’épée, y implantant ses mœurs et sa conception de la justice. S’il e
4546 e l’épée, y implantant ses mœurs et sa conception de la justice. S’il en est ainsi, je vois deux courants : l’un, venu d’O
4547 en est ainsi, je vois deux courants : l’un, venu d’ Orient, passe par la Grèce et l’Italie et s’infléchit légèrement dans
4548 et l’Italie et s’infléchit légèrement dans le sud de l’Europe, inventeur d’une douce religion méridionale, d’une poésie de
4549 hit légèrement dans le sud de l’Europe, inventeur d’ une douce religion méridionale, d’une poésie de l’imagination, d’une m
4550 rope, inventeur d’une douce religion méridionale, d’ une poésie de l’imagination, d’une musique, d’un art, d’une sagesse de
4551 ur d’une douce religion méridionale, d’une poésie de l’imagination, d’une musique, d’un art, d’une sagesse des mœurs, d’un
4552 igion méridionale, d’une poésie de l’imagination, d’ une musique, d’un art, d’une sagesse des mœurs, d’une science qui form
4553 le, d’une poésie de l’imagination, d’une musique, d’ un art, d’une sagesse des mœurs, d’une science qui forment le patrimoi
4554 poésie de l’imagination, d’une musique, d’un art, d’ une sagesse des mœurs, d’une science qui forment le patrimoine du Sud-
4555 d’une musique, d’un art, d’une sagesse des mœurs, d’ une science qui forment le patrimoine du Sud-Ouest européen. Quant au
4556 uest européen. Quant au deuxième courant, il part d’ Asie, par le nord rejoint l’Europe où il submerge l’autre courant… S’i
4557 t ainsi, le troisième courant ne viendra-t-il pas d’ Amérique et le dernier peut-être du cap de Bonne-Espérance ou des régi
4558 s situées au-delà ?156 Sur la fonction mondiale de l’Europe, Herder a des vues prophétiques, que vérifie l’évolution ant
4559 siècle. Déjà dans ses Idées pour une Philosophie de l’Histoire (1784) il annonçait que les instruments et moyens inventés
4560 dû se souvenir : On peut considérer l’existence d’ un État en soi ou par rapport aux autres États ; l’Europe se trouve da
4561 tres États ; l’Europe se trouve dans l’obligation d’ utiliser les deux échelles, les États d’Asie n’en ont qu’une seule.159
4562 752-1809), historien des Suisses, combla les vœux de Herder en donnant à ses contemporains une Vue générale de l’Histoire
4563 r en donnant à ses contemporains une Vue générale de l’Histoire du Genre Humain (1797) dont le succès fut immense à l’époq
4564 chen Menschheit) cette vue générale ne laisse pas d’ être pessimiste. Selon Heinz Gollwitzer, J. von Müller « fut le premie
4565 parfois assumé le contenu affectif et conceptuel d’ une conscience de la décadence spécifiquement européenne, apparentée (
4566 e contenu affectif et conceptuel d’une conscience de la décadence spécifiquement européenne, apparentée (mais non identiqu
4567 e, apparentée (mais non identique), au pessimisme de la vision chrétienne du monde »160. Comme Rousseau, il voyait « tous
4568 soit à l’Amérique ». Voici le tableau qu’il donne de l’état des puissances européennes, tel qu’on pouvait le concevoir à l
4569 ensemble, l’intérêt protestant dans cette partie de l’Europe ; un jour la neutralité armée se joindra ici… Parmi les pui
4570 alité armée se joindra ici… Parmi les puissances de la seconde classe, qui tiennent l’équilibre de la liberté européenne,
4571 es de la seconde classe, qui tiennent l’équilibre de la liberté européenne, l’empereur, la Russie et la Prusse sont par le
4572 e et la Prusse sont par le nombre et l’excellence de leurs troupes, naturellement les principales. D’autres leur disputera
4573 uelque nouveau Gustave Adolphe, qui par l’énergie de son héroïsme, sût placer un petit peuple à la tête des Potentats. À l
4574 nces barbares est le Padisha ; l’Europe n’a point de relations avec les Cours d’Asie ; en Afrique, Alger, Tunis, Tripoli,
4575  ; l’Europe n’a point de relations avec les Cours d’ Asie ; en Afrique, Alger, Tunis, Tripoli, Maroc, sont dignes de remarq
4576 frique, Alger, Tunis, Tripoli, Maroc, sont dignes de remarque. On peut traiter de la Suisse et des rois de Sardaigne et de
4577 , Maroc, sont dignes de remarque. On peut traiter de la Suisse et des rois de Sardaigne et de Portugal après la maison de
4578 emarque. On peut traiter de la Suisse et des rois de Sardaigne et de Portugal après la maison de Bourbon, dont l’un est ce
4579 traiter de la Suisse et des rois de Sardaigne et de Portugal après la maison de Bourbon, dont l’un est censé d’être allié
4580 rois de Sardaigne et de Portugal après la maison de Bourbon, dont l’un est censé d’être allié ; et dont les liaisons peuv
4581 l après la maison de Bourbon, dont l’un est censé d’ être allié ; et dont les liaisons peuvent seules faire valoir les droi
4582 cernant la Lombardie. La Scandinavie, les princes de l’Empire, la Pologne, quelques États d’Italie peuvent être considérés
4583 ribuer surtout à gêner ou à accélérer les progrès de l’une contre l’autre de ces puissances. Parmi les États gouvernés par
4584 u à accélérer les progrès de l’une contre l’autre de ces puissances. Parmi les États gouvernés par les Bourbons, la France
4585 tion, son terroir, sa population, et le caractère de ses habitants, pourroit seule donner la loi au monde, si un système s
4586 monde, si un système suivi, approprié à la nature d’ une grande puissance, faisoit valoir ses prodigieuses ressources.161
4587 On est frappé par la complication et la fragilité de ces divers groupes de puissances censées « tenir l’équilibre de la li
4588 omplication et la fragilité de ces divers groupes de puissances censées « tenir l’équilibre de la liberté européenne ». El
4589 groupes de puissances censées « tenir l’équilibre de la liberté européenne ». Elles évoquent la page dans laquelle Kant, c
4590 ent la page dans laquelle Kant, critiquant l’idée d’ équilibre européen chère à Gentz et à Burke, rappelait cette maison dé
4591 cette maison décrite par Swift et qui était bâtie d’ une manière si conforme au seul principe d’équilibre que lorsqu’un moi
4592 bâtie d’une manière si conforme au seul principe d’ équilibre que lorsqu’un moineau se posa sur son toit, elle s’écroula.
4593 rs, Müller est surtout intéressant par ses essais de comparaison globale des civilisations. À cet égard, le Résumé du ixe
4594 gard, le Résumé du ixe Discours est très typique de cette apparition d’une conscience de l’Europe-dans-le-Monde qui marqu
4595 xe Discours est très typique de cette apparition d’ une conscience de l’Europe-dans-le-Monde qui marque la pensée germaniq
4596 très typique de cette apparition d’une conscience de l’Europe-dans-le-Monde qui marque la pensée germanique de l’époque :
4597 ope-dans-le-Monde qui marque la pensée germanique de l’époque : Pendant huit siècles depuis la ruine de l’Empire romain n
4598 l’époque : Pendant huit siècles depuis la ruine de l’Empire romain nous avons vu l’Orient toujours semblable à lui-même 
4599 me ; un empire, aussi prompt à s’élever que celui de Ninus et de Cyrus, s’affoiblir, se partager, et diverses dynasties se
4600 re, aussi prompt à s’élever que celui de Ninus et de Cyrus, s’affoiblir, se partager, et diverses dynasties se succéder, p
4601 espotes ; les Mongols, comme les Scythes du temps de Cyaxares, envahir mille diverses tribus du genre humain, et disparoît
4602 ssager du premier empereur des Francs, le passage de la vie des anciens Germains à l’état de police, quand les nations con
4603 e passage de la vie des anciens Germains à l’état de police, quand les nations contenues l’une par l’autre, furent forcées
4604 ntenues l’une par l’autre, furent forcées à tirer de leur sol, ce qu’ils auraient mieux aimé conquérir. De cette applicati
4605 eur sol, ce qu’ils auraient mieux aimé conquérir. De cette application résulte l’industrie, puis le courage de la liberté,
4606 application résulte l’industrie, puis le courage de la liberté, parmi les bourgeois, enfin le développement de l’esprit h
4607 erté, parmi les bourgeois, enfin le développement de l’esprit humain. Toutes les religions sont venues de l’Orient ; le se
4608 l’esprit humain. Toutes les religions sont venues de l’Orient ; le sentiment y est plus vif, plus élevé ; ces connoissance
4609 emploient, ici elles accélèrent le grand ouvrage de l’établissement de l’ordre civil. On voit plus d’art, plus de persévé
4610 es accélèrent le grand ouvrage de l’établissement de l’ordre civil. On voit plus d’art, plus de persévérance dans la polit
4611 de l’établissement de l’ordre civil. On voit plus d’ art, plus de persévérance dans la politique des Européens, dans celle
4612 sement de l’ordre civil. On voit plus d’art, plus de persévérance dans la politique des Européens, dans celle des Orientau
4613 ique des Européens, dans celle des Orientaux plus de cette énergie momentanée. Nous sommes au milieu du Drame qu’ont ouver
4614 qu’ont ouvert les Géans du Nord, les destructeurs de l’ancien Empire. 148. Soyez embrassés, ô millions. Par ce baiser
4615 1951, p.117. 161. Jean de Müller : Vue générale de l’histoire du genre humain. Vingt-unième discours, conclusion. Paris,
16 1961, Vingt-huit siècles d’Europe. Quatrième Partie. L’Ère de la Révolution de Kant à Hegel — 4. Napoléon et l’Europe
4616 t l’Autriche et la Prusse, et combattu toute idée d’ hégémonie européenne, estima qu’il était temps « de substituer aux for
4617 ’hégémonie européenne, estima qu’il était temps «  de substituer aux formes surannées de la vieille Europe un nouvel ordre
4618 était temps « de substituer aux formes surannées de la vieille Europe un nouvel ordre des choses »162 et devint ministre
4619 ôme de Westphalie. C’était le temps où la Gazette de France écrivait sous le titre de « Tableau de l’Europe »163 : Ce ne
4620 ps où la Gazette de France écrivait sous le titre de « Tableau de l’Europe »163 : Ce ne seront plus des forces égales qui
4621 tte de France écrivait sous le titre de « Tableau de l’Europe »163 : Ce ne seront plus des forces égales qui, par leur op
4622 ur être attaquée et trop grande pour avoir besoin de s’étendre, tiendra tout en paix autour d’elle… Désormais la France se
4623 besoin de s’étendre, tiendra tout en paix autour d’ elle… Désormais la France sera le point d’appui sur lequel reposera l’
4624 autour d’elle… Désormais la France sera le point d’ appui sur lequel reposera l’Europe entière. C’était le temps aussi où
4625 que celle, où Napoléon le Grand réunit la moitié de l’Europe sous son empire et par l’ascendant de son exemple exerce sur
4626 ié de l’Europe sous son empire et par l’ascendant de son exemple exerce sur l’autre moitié la plus heureuse influence ? Gr
4627 ce et en Allemagne, reprenant les anciens projets de paix en Europe par l’union des États, mais cette fois sous l’égide du
4628 s cette fois sous l’égide du Premier Consul, puis de l’empereur : ainsi le Tableau politique de l’Europe par Echassériaux
4629 , puis de l’empereur : ainsi le Tableau politique de l’Europe par Echassériaux (1802), Die Europäische Republik par Niklas
4630 opäische Republik par Niklas Vogt (1802 et 1808), De la Paix de l’Europe et de ses bases par Delisle de Sales, Du droit pu
4631 publik par Niklas Vogt (1802 et 1808), De la Paix de l’Europe et de ses bases par Delisle de Sales, Du droit public et du
4632 as Vogt (1802 et 1808), De la Paix de l’Europe et de ses bases par Delisle de Sales, Du droit public et du droit des gens,
4633 ales, Du droit public et du droit des gens, suivi d’ un projet de paix générale et perpétuelle par Gondon (1807), Das Urbil
4634 it public et du droit des gens, suivi d’un projet de paix générale et perpétuelle par Gondon (1807), Das Urbild der Mensch
4635 (1807-1811), et vingt autres… On sait d’ailleurs de quel étrange prestige Napoléon bénéficia auprès des grands esprits de
4636 tige Napoléon bénéficia auprès des grands esprits de Weimar et de Iéna, un Goethe, un Wieland, un Hegel, les plus « europé
4637 bénéficia auprès des grands esprits de Weimar et de Iéna, un Goethe, un Wieland, un Hegel, les plus « européens » du mond
4638 « européens » du monde germanique, et même auprès d’ un poète aussi peu politique que Jean Paul (Johann Paul Friedrich Rich
4639 . Cet enthousiaste a été jusqu’à louer l’empereur d’ avoir tenté de transformer le continent tout entier en l’« État commer
4640 aste a été jusqu’à louer l’empereur d’avoir tenté de transformer le continent tout entier en l’« État commercial fermé » q
4641 mait Fichte ! Mais c’est en réalité l’imagination de l’Humanité unie et de l’Europe s’ouvrant au monde qui inspirent les é
4642 st en réalité l’imagination de l’Humanité unie et de l’Europe s’ouvrant au monde qui inspirent les écrits politiques de Je
4643 rant au monde qui inspirent les écrits politiques de Jean Paul, tels que Dämmerungen für Deutschland et Politische Fastenp
4644 ssage qui rappelle si curieusement la description de l’Europe en un seul corps par Guillaume Postel et par les graveurs de
4645 ul corps par Guillaume Postel et par les graveurs de la Renaissance. Non seulement l’Allemagne occupe le centre géographi
4646 ulement l’Allemagne occupe le centre géographique de l’Europe, mais elle en est aussi le centre moral. À juste titre, on l
4647 ste titre, on la représente souvent sur l’effigie d’ une jeune fille sous la forme du cœur, tandis que mainte autre partie
4648 la forme du cœur, tandis que mainte autre partie de l’Europe n’est que la tête ou le bras avec le poing. Ce bon cœur si h
4649 es les guerres européennes ont transpercé à coups de canon !165 Que pensait dans le même temps le héros de ces utopistes
4650 on !165 Que pensait dans le même temps le héros de ces utopistes, le porteur de leurs espoirs européens, celui qui avait
4651 même temps le héros de ces utopistes, le porteur de leurs espoirs européens, celui qui avait rêvé d’une conquête de l’Asi
4652 de leurs espoirs européens, celui qui avait rêvé d’ une conquête de l’Asie mais que son échec égyptien avait contraint de
4653 rs européens, celui qui avait rêvé d’une conquête de l’Asie mais que son échec égyptien avait contraint de limiter ses amb
4654 ’Asie mais que son échec égyptien avait contraint de limiter ses ambitions au continent dont on prétend qu’il dit un jour 
4655 pète que l’empereur n’a « révélé » ses intentions d’ unir l’Europe qu’au temps de Sainte-Hélène, quand il était trop tard.
4656 as exact. Si l’Acte additionnel aux Constitutions de l’Empire, rédigé au retour de l’île d’Elbe, fut comme on sait l’œuvre
4657 l aux Constitutions de l’Empire, rédigé au retour de l’île d’Elbe, fut comme on sait l’œuvre de Benjamin Constant, son pré
4658 retour de l’île d’Elbe, fut comme on sait l’œuvre de Benjamin Constant, son préambule porte les marques de la pensée et de
4659 enjamin Constant, son préambule porte les marques de la pensée et de la main de l’empereur. Or on y lit : Nous avions alo
4660 , son préambule porte les marques de la pensée et de la main de l’empereur. Or on y lit : Nous avions alors pour but d’or
4661 bule porte les marques de la pensée et de la main de l’empereur. Or on y lit : Nous avions alors pour but d’organiser un
4662 pereur. Or on y lit : Nous avions alors pour but d’ organiser un grand système fédératif européen, que nous avions adopté
4663 me à l’esprit du siècle, et favorable aux progrès de la civilisation. Pour parvenir à le compléter et à lui donner toute l
4664 susceptible, nous avions ajourné l’établissement de plusieurs institutions intérieures, plus spécialement destinées à pro
4665 é des citoyens… On conçoit que l’inaction forcée de Sainte-Hélène ait seule permis au despote déposé de se former une vue
4666 Sainte-Hélène ait seule permis au despote déposé de se former une vue cohérente des motifs qui animaient son action polit
4667 te des motifs qui animaient son action politique. D’ où les déclarations fréquentes faites à Las Cases sur l’organisation q
4668 ation qu’il souhaite pour l’Europe. À la question de savoir ce qui fût advenu s’il était sorti victorieux de la campagne d
4669 oir ce qui fût advenu s’il était sorti victorieux de la campagne de Russie, Napoléon répond : La paix dans Moscou accompl
4670 advenu s’il était sorti victorieux de la campagne de Russie, Napoléon répond : La paix dans Moscou accomplissait et termi
4671 Moscou accomplissait et terminait mes expéditions de guerre. C’était, pour la grande cause, la fin des hasards et le comme
4672 ande cause, la fin des hasards et le commencement de la sécurité. Un nouvel horizon, de nouveaux travaux allaient se dérou
4673 e commencement de la sécurité. Un nouvel horizon, de nouveaux travaux allaient se dérouler, tous pleins du bien-être et de
4674 allaient se dérouler, tous pleins du bien-être et de la prospérité de tous. Le système européen se trouvait fondé ; il n’é
4675 ler, tous pleins du bien-être et de la prospérité de tous. Le système européen se trouvait fondé ; il n’était plus questio
4676 se trouvait fondé ; il n’était plus question que de l’organiser. Satisfait sur ces grands points, et tranquille partout,
4677 nt des idées qu’on m’a volées. Dans cette réunion de tous les souverains, nous eussions traité de nos intérêts en famille,
4678 nion de tous les souverains, nous eussions traité de nos intérêts en famille, et compté de clerc à maître avec les peuples
4679 ions traité de nos intérêts en famille, et compté de clerc à maître avec les peuples. L’empereur, ajoute Las Cases dans l
4680 s. L’empereur, ajoute Las Cases dans le Mémorial de Sainte-Hélène, passait ensuite en revue ce qu’il eût proposé pour la
4681 rité, les intérêts, la jouissance et le bien-être de l’association européenne. Il eût voulu les mêmes principes, le même s
4682 même système partout. Un Code européen ; une Cour de Cassation européenne, redressant, pour tous, les erreurs, comme la nô
4683 erreurs, comme la nôtre redresse chez nous celles de nos tribunaux. Une même monnaie sous des coins différents ; les mêmes
4684 tc., etc. L’Europe, disait-il, n’eût bientôt fait de la sorte véritablement qu’un même peuple, et chacun en voyageant, par
4685 cobin — et nullement fédéraliste ! — la condition de toute union européenne résidait dans une « simplification sommaire »
4686 unifiés à l’intérieur des grandes nations : Une de mes plus grandes pensées avait été l’agglomération, la concentration
4687 Ainsi l’on compte en Europe, bien qu’épars, plus de trente millions de Français, quinze millions d’Espagnols, quinze mill
4688 en Europe, bien qu’épars, plus de trente millions de Français, quinze millions d’Espagnols, quinze millions d’Italiens, tr
4689 s de trente millions de Français, quinze millions d’ Espagnols, quinze millions d’Italiens, trente millions d’Allemands : j
4690 ais, quinze millions d’Espagnols, quinze millions d’ Italiens, trente millions d’Allemands : j’eusse voulu faire de chacun
4691 nols, quinze millions d’Italiens, trente millions d’ Allemands : j’eusse voulu faire de chacun de ces peuples un seul et mê
4692 trente millions d’Allemands : j’eusse voulu faire de chacun de ces peuples un seul et même corps de nation. C’est avec un
4693 lions d’Allemands : j’eusse voulu faire de chacun de ces peuples un seul et même corps de nation. C’est avec un tel cortèg
4694 re de chacun de ces peuples un seul et même corps de nation. C’est avec un tel cortège qu’il eût été beau de s’avancer dan
4695 ion. C’est avec un tel cortège qu’il eût été beau de s’avancer dans la postérité et la bénédiction des siècles. Je me sent
4696 t la bénédiction des siècles. Je me sentais digne de cette gloire ! Après cette simplification sommaire, il eût été plus p
4697 simplification sommaire, il eût été plus possible de se livrer à la chimère du beau idéal de la civilisation : c’est dans
4698 possible de se livrer à la chimère du beau idéal de la civilisation : c’est dans cet état de choses qu’on eût trouvé plus
4699 est dans cet état de choses qu’on eût trouvé plus de chances d’amener partout l’unité des codes, celle des principes, des
4700 t état de choses qu’on eût trouvé plus de chances d’ amener partout l’unité des codes, celle des principes, des opinions, d
4701 res universellement répandues, devenait-il permis de rêver, pour la grande famille européenne, l’application du Congrès am
4702 on du Congrès américain, ou celle des amphictions de la Grèce ; et quelle perspective alors de force, de grandeur, de joui
4703 ictions de la Grèce ; et quelle perspective alors de force, de grandeur, de jouissances, de prospérité ! Quel grand et mag
4704 la Grèce ; et quelle perspective alors de force, de grandeur, de jouissances, de prospérité ! Quel grand et magnifique sp
4705 t quelle perspective alors de force, de grandeur, de jouissances, de prospérité ! Quel grand et magnifique spectacle ! … Q
4706 tive alors de force, de grandeur, de jouissances, de prospérité ! Quel grand et magnifique spectacle ! … Quoi qu’il en soi
4707 ne pense pas qu’après ma chute et la disparition de mon système, il y ait en Europe d’autre grand équilibre possible que
4708 la disparition de mon système, il y ait en Europe d’ autre grand équilibre possible que l’agglomération et la confédération
4709 au milieu de la première grande mêlée, embrassera de bonne foi la cause des peuples, se trouvera à la tête de toute l’Euro
4710 e foi la cause des peuples, se trouvera à la tête de toute l’Europe, et pourra tenter tout ce qu’il voudra. 162. Cf. Go
4711 und J. v. Müller, Frauenfeld, 1893. La lettre est de 1804. 163. Numéro du 2 janvier 1806. 164. Marquis de Laplace : Expo
17 1961, Vingt-huit siècles d’Europe. Quatrième Partie. L’Ère de la Révolution de Kant à Hegel — 5. L’Europe des adversaires de l’empereur
4712 5.L’Europe des adversaires de l’empereur Napoléon avait raison sur ce dernier point : le seul « é
4713 t : le seul « équilibre possible » après la chute de son empire, eût été la fédération. De fait, l’équilibre impossible de
4714 ès la chute de son empire, eût été la fédération. De fait, l’équilibre impossible de la Sainte-Alliance fut imposé par des
4715 té la fédération. De fait, l’équilibre impossible de la Sainte-Alliance fut imposé par des souverains qui, très loin d’« e
4716 ance fut imposé par des souverains qui, très loin d’ « embrasser de bonne foi la cause des peuples », ne purent nouer au no
4717 é par des souverains qui, très loin d’« embrasser de bonne foi la cause des peuples », ne purent nouer au nom de la stabil
4718 is. Toutefois, l’idée européenne avait pris assez de force et rassemblé assez d’espoirs divers pour que les négociateurs d
4719 enne avait pris assez de force et rassemblé assez d’ espoirs divers pour que les négociateurs des Traités de paix se sentis
4720 oirs divers pour que les négociateurs des Traités de paix se sentissent obligés de l’honorer au moins des lèvres : Extrait
4721 iateurs des Traités de paix se sentissent obligés de l’honorer au moins des lèvres : Extrait du protocole de la séance du
4722 onorer au moins des lèvres : Extrait du protocole de la séance du 5 février 1814, au congrès de Châtillon : Les plénipote
4723 tocole de la séance du 5 février 1814, au congrès de Châtillon : Les plénipotentiaires des cours alliées déclarent qu’ils
4724 ces comme uniquement envoyés par les quatre cours de la part desquelles ils sont munis de pleins pouvoirs, mais se trouvan
4725 quatre cours de la part desquelles ils sont munis de pleins pouvoirs, mais se trouvant chargés de traiter la paix avec la
4726 unis de pleins pouvoirs, mais se trouvant chargés de traiter la paix avec la France au nom de l’Europe, ne formant qu’un s
4727 e, ne formant qu’un seul tout. Extrait du traité de Chaumont, 1er mars 1814 : Le présent traité d’alliance défensive, ay
4728 é de Chaumont, 1er mars 1814 : Le présent traité d’ alliance défensive, ayant pour but de maintenir l’équilibre en Europe,
4729 ésent traité d’alliance défensive, ayant pour but de maintenir l’équilibre en Europe, d’assurer le repos et l’indépendance
4730 yant pour but de maintenir l’équilibre en Europe, d’ assurer le repos et l’indépendance des puissances et de prévenir les e
4731 urer le repos et l’indépendance des puissances et de prévenir les envahissements qui, depuis tant d’années, ont désolé le
4732 t de prévenir les envahissements qui, depuis tant d’ années, ont désolé le monde, les Hautes Parties contractantes sont con
4733 Parties contractantes sont convenues entre elles d’ en étendre la durée de vingt ans, à date du jour de la signature. Ext
4734 sont convenues entre elles d’en étendre la durée de vingt ans, à date du jour de la signature. Extrait de la Déclaration
4735 ’en étendre la durée de vingt ans, à date du jour de la signature. Extrait de la Déclaration de Vichy, 15 mars 1814 : La
4736 ngt ans, à date du jour de la signature. Extrait de la Déclaration de Vichy, 15 mars 1814 : La marche des événements (a
4737 jour de la signature. Extrait de la Déclaration de Vichy, 15 mars 1814 : La marche des événements (a donné) aux Cours a
4738 énements (a donné) aux Cours alliées le sentiment de toute la force de la ligue européenne… La paix sera celle de l’Europe
4739 aux Cours alliées le sentiment de toute la force de la ligue européenne… La paix sera celle de l’Europe, toute autre est
4740 force de la ligue européenne… La paix sera celle de l’Europe, toute autre est inadmissible. Extrait de l’Acte de reconna
4741 l’Europe, toute autre est inadmissible. Extrait de l’Acte de reconnaissance de la neutralité de la Suisse, 1814 et 1815 
4742 toute autre est inadmissible. Extrait de l’Acte de reconnaissance de la neutralité de la Suisse, 1814 et 1815 : Les Pui
4743 nadmissible. Extrait de l’Acte de reconnaissance de la neutralité de la Suisse, 1814 et 1815 : Les Puissances signataire
4744 rait de l’Acte de reconnaissance de la neutralité de la Suisse, 1814 et 1815 : Les Puissances signataires… reconnaissent…
4745 connaissent… que la neutralité et l’inviolabilité de la Suisse… sont dans les vrais intérêts de l’Europe tout entière. Et
4746 bilité de la Suisse… sont dans les vrais intérêts de l’Europe tout entière. Et Metternich lui-même, l’un des principaux i
4747 ernich lui-même, l’un des principaux inspirateurs de ces Traités, déclarait : Depuis longtemps, l’Europe est pour moi une
4748 une patrie. Toute l’Europe se mit donc à parler de l’Europe, contre Napoléon qui avait voulu la faire. Mais ce concert d
4749 stico-métaphysiques ou socioéconomiques). Domaine d’ expression française : deux libéraux suisses, Constant et Mme de Staël
4750 iste, Saint-Simon. Domaine germanique : un groupe de romantiques catholicisants, Novalis, Görres, Baader et Adam Müller ;
4751 lis, Görres, Baader et Adam Müller ; et un groupe de philosophes aux vues profondes, systématiques et mondiales à la Ficht
4752 chlegel, Hegel et Schelling. Mme de Staël servira de trait d’union entre les deux domaines. Et Goethe les dominera de sa s
4753 Hegel et Schelling. Mme de Staël servira de trait d’ union entre les deux domaines. Et Goethe les dominera de sa stature, m
4754 n entre les deux domaines. Et Goethe les dominera de sa stature, mais non pas de son influence. C’est au moment où Napoléo
4755 t Goethe les dominera de sa stature, mais non pas de son influence. C’est au moment où Napoléon vient de quitter l’île d’E
4756 onstant (1767-1830) publie son célèbre pamphlet : De l’Esprit de conquête et de l’usurpation dans leurs rapports avec la c
4757 7-1830) publie son célèbre pamphlet : De l’Esprit de conquête et de l’usurpation dans leurs rapports avec la civilisation
4758 son célèbre pamphlet : De l’Esprit de conquête et de l’usurpation dans leurs rapports avec la civilisation européenne. Cer
4759 on européenne. Certes, il n’y propose pas un plan d’ union166, mais l’idée de l’Europe comme formant un ensemble n’est pas
4760 l n’y propose pas un plan d’union166, mais l’idée de l’Europe comme formant un ensemble n’est pas seulement dans le titre 
4761 eulement dans le titre : elle est le sous-entendu de l’ouvrage entier. Napoléon, c’est l’esprit de conquête et d’uniformit
4762 ndu de l’ouvrage entier. Napoléon, c’est l’esprit de conquête et d’uniformité imposé par les armes, c’est l’anti-Europe. L
4763 e entier. Napoléon, c’est l’esprit de conquête et d’ uniformité imposé par les armes, c’est l’anti-Europe. La polémique de
4764 par les armes, c’est l’anti-Europe. La polémique de Benjamin Constant contre la guerre se lie donc à une attaque contre l
4765 se lie donc à une attaque contre l’idée jacobine de la nation centralisée. Par là même, Benjamin Constant se fait le préc
4766 e précurseur des fédéralistes modernes, partisans d’ une Europe unie dans ses diversités et opposant au nationalisme abstra
4767 able que l’uniformité n’ait jamais rencontré plus de faveur que dans une révolution faite au nom des droits et de la liber
4768 ue dans une révolution faite au nom des droits et de la liberté des hommes. L’esprit systématique s’est d’abord extasié su
4769 attachement aux intérêts, aux mœurs, aux coutumes de localité, nos soi-disant patriotes ont déclaré la guerre à toutes ces
4770 s un être abstrait, une idée générale, dépouillée de tout ce qui frappe l’imagination et de tout ce qui parle à la mémoire
4771 dépouillée de tout ce qui frappe l’imagination et de tout ce qui parle à la mémoire. Pour bâtir l’édifice, ils commençaien
4772 gnaient par des chiffres les légions et les corps d’ armée, tant ils semblaient craindre qu’une idée morale ne pût se ratta
4773 is longtemps, et dont l’amalgame a perdu l’odieux de la violence et de la conquête, on voit le patriotisme qui naît des va
4774 ont l’amalgame a perdu l’odieux de la violence et de la conquête, on voit le patriotisme qui naît des variétés locales, se
4775 iotisme qui naît des variétés locales, seul genre de patriotisme véritable, renaître comme des cendres, dès que la main du
4776 ut ce qui leur donne l’apparence, même trompeuse, d’ être constitués en corps de nation, et réunis par des hens particulier
4777 rence, même trompeuse, d’être constitués en corps de nation, et réunis par des hens particuliers. On sent que s’ils n’étai
4778 que s’ils n’étaient arrêtés dans le développement de cette inclination innocente et bienfaisante, il se formerait bientôt
4779 aisante, il se formerait bientôt en eux une sorte d’ honneur communal, pour ainsi dire, d’honneur de ville, d’honneur de pr
4780 ux une sorte d’honneur communal, pour ainsi dire, d’ honneur de ville, d’honneur de province, qui serait à la fois une joui
4781 te d’honneur communal, pour ainsi dire, d’honneur de ville, d’honneur de province, qui serait à la fois une jouissance et
4782 ur communal, pour ainsi dire, d’honneur de ville, d’ honneur de province, qui serait à la fois une jouissance et une vertu.
4783 l, pour ainsi dire, d’honneur de ville, d’honneur de province, qui serait à la fois une jouissance et une vertu. Mais la j
4784 ois une jouissance et une vertu. Mais la jalousie de l’autorité les surveille, s’alarme, et brise le germe prêt à éclore.
4785 Quelle politique déplorable que celle qui en fait de la rébellion ! Qu’arrive-t-il ? que dans tous les États où l’on détru
4786 dans un isolement contre nature, étrangers au heu de leur naissance, sans contact avec le passé, ne vivant que dans un pré
4787 s sur une plaine immense et nivelée, se détachent d’ une patrie qu’ils n’aperçoivent nulle part, et dont l’ensemble leur de
4788 que leur affection ne peut se reposer sur aucune de ses parties. La variété, c’est de l’organisation : l’uniformité, c’es
4789 oser sur aucune de ses parties. La variété, c’est de l’organisation : l’uniformité, c’est du mécanisme. La variété, c’est
4790 la mort. L’année même où paraissait la brochure de Constant, manifeste du libéralisme politique, où mourait Fichte, théo
4791 ur Sainte-Hélène tandis que Gentz, le « chevalier de l’Europe » se voyait placé au cœur des grandes affaires, un obscur ar
4792 ncien officier, ancien spéculateur, ancien détenu de la Terreur, économiste, ingénieur, écrivain, et futur fondateur d’une
4793 onomiste, ingénieur, écrivain, et futur fondateur d’ une secte religieuse, publiait un plan d’États-Unis d’Europe d’une con
4794 ondateur d’une secte religieuse, publiait un plan d’ États-Unis d’Europe d’une conception absolument nouvelle. En voici le
4795 eligieuse, publiait un plan d’États-Unis d’Europe d’ une conception absolument nouvelle. En voici le titre complet : De la
4796 absolument nouvelle. En voici le titre complet : De la réorganisation de la Société européenne, ou de la nécessité de ras
4797 En voici le titre complet : De la réorganisation de la Société européenne, ou de la nécessité de rassembler les peuples d
4798 De la réorganisation de la Société européenne, ou de la nécessité de rassembler les peuples de l’Europe en un seul corps p
4799 tion de la Société européenne, ou de la nécessité de rassembler les peuples de l’Europe en un seul corps politique, en con
4800 nne, ou de la nécessité de rassembler les peuples de l’Europe en un seul corps politique, en conservant à chacun son indép
4801 n indépendance nationale. Sans même tenir compte de l’influence que Saint-Simon devait exercer par la suite sur l’histori
4802 u capitalisme industriel par F. de Lesseps (canal de Suez) et sur le socialisme français par Enfantin, Fourier et les phal
4803 nces, que Metternich et Alexandre allaient tenter de réaliser, en vain, et il propose l’élection de députés européens par
4804 er de réaliser, en vain, et il propose l’élection de députés européens par les « corporations », ou professions qu’ils rep
4805 engagements solides ». Plus que tout autre auteur de Plans antérieurs, il se fonde sur l’économie. Il est le vrai précurse
4806 e fonde sur l’économie. Il est le vrai précurseur de la tendance institutionnaliste du xxe siècle, qui a produit le March
4807 rché commun et l’OCDE. Qu’on en juge : Le traité de Westphalie établit un nouvel ordre de choses par une opération politi
4808 Le traité de Westphalie établit un nouvel ordre de choses par une opération politique, qu’on appela équilibre des puissa
4809 partagée en deux confédérations qu’on s’efforçait de maintenir égales : c’était créer la guerre et l’entretenir constituti
4810 ntretenir constitutionnellement ; car deux ligues d’ égale force sont nécessairement rivales, et il n’y a pas de rivalités
4811 orce sont nécessairement rivales, et il n’y a pas de rivalités sans guerres. Dès lors chaque puissance n’eut d’autre occup
4812 tés sans guerres. Dès lors chaque puissance n’eut d’ autre occupation que d’accroître ses forces militaires. Au lieu de ces
4813 ors chaque puissance n’eut d’autre occupation que d’ accroître ses forces militaires. Au lieu de ces chétives poignées de s
4814 rces militaires. Au lieu de ces chétives poignées de soldats levées pour un temps et bientôt licenciées, on vit partout de
4815 , presque toujours actives ; car depuis le traité de Westphalie la guerre a été l’état habituel de l’Europe… L’Europe a fo
4816 ité de Westphalie la guerre a été l’état habituel de l’Europe… L’Europe a formé autrefois une société confédérative unie p
4817 réparer. Je ne prétends pas sans doute qu’on tire de la poussière cette vieille organisation qui fatigue encore l’Europe d
4818 vieille organisation qui fatigue encore l’Europe de ses débris inutiles : le xixe siècle est trop loin du xiiie . Une co
4819 là ce que je propose aujourd’hui… À toute réunion de peuples comme à toute réunion d’hommes, il faut des institutions comm
4820 À toute réunion de peuples comme à toute réunion d’ hommes, il faut des institutions communes, il faut une organisation :
4821 e par un parlement, reconnaissaient la suprématie d’ un parlement général placé au-dessus de tous les gouvememens nationaux
4822 suprématie d’un parlement général placé au-dessus de tous les gouvememens nationaux et investi du pouvoir de juger leurs d
4823 s les gouvememens nationaux et investi du pouvoir de juger leurs différens. … Il en est du gouvernement européen, comme de
4824 omme des Gouvernemens nationaux, il ne peut avoir d’ action sans une volonté commune à tous ses membres. Or, cette volonté
4825 nté commune à tous ses membres. Or, cette volonté de corps qui, dans un gouvernement national, naît du patriotisme nationa
4826 ans le gouvernement européen ne peut provenir que d’ une plus grande généralité de vues, d’un sentiment plus étendu, qu’on
4827 ne peut provenir que d’une plus grande généralité de vues, d’un sentiment plus étendu, qu’on peut appeler le patriotisme e
4828 rovenir que d’une plus grande généralité de vues, d’ un sentiment plus étendu, qu’on peut appeler le patriotisme européen.
4829 nt qui fait sortir le patriotisme hors des bornes de la patrie, cette habitude de considérer les intérêts de l’Europe, au
4830 isme hors des bornes de la patrie, cette habitude de considérer les intérêts de l’Europe, au lieu des intérêts nationaux,
4831 patrie, cette habitude de considérer les intérêts de l’Europe, au lieu des intérêts nationaux, sera pour ceux qui doivent
4832 former le parlement européen, un fruit nécessaire de son établissement. Il est vrai ; mais aussi ce sont les hommes qui fo
4833 peut s’établir si elle ne les trouve tout formés d’ avance, ou du moins préparés à l’être. C’est donc une nécessité de n’a
4834 moins préparés à l’être. C’est donc une nécessité de n’admettre dans la chambre des députés du parlement européen, c’est-à
4835 , c’est-à-dire dans l’un des deux pouvoirs actifs de la constitution européenne, que des hommes qui, par des relations plu
4836 e répand sur tous les peuples, sont plus capables d’ arriver bientôt à cette généralité de vues qui doit être l’esprit de c
4837 lus capables d’arriver bientôt à cette généralité de vues qui doit être l’esprit de corps, à cet intérêt général qui doit
4838 à cette généralité de vues qui doit être l’esprit de corps, à cet intérêt général qui doit être l’intérêt de corps du parl
4839 ps, à cet intérêt général qui doit être l’intérêt de corps du parlement européen. Des négocians, des savans, des magistrat
4840 u grand parlement. Et en effet, tout ce qu’il y a d’ intérêts communs à la société européenne, peut être rapporté aux scien
4841 l’administration et à l’industrie. Chaque million d’ hommes sachant lire et écrire en Europe, devra députer à la chambre de
4842 supposant qu’il y ait en Europe soixante millions d’ hommes sachant lire et écrire, la chambre sera composée de deux-cent-q
4843 sachant lire et écrire, la chambre sera composée de deux-cent-quarante membres. Les élections de chacun des membres se fe
4844 osée de deux-cent-quarante membres. Les élections de chacun des membres se feront par la corporation à laquelle il apparti
4845 us seront nommés pour dix années… Toute question d’ intérêt général de la société européenne sera portée devant le grand p
4846 our dix années… Toute question d’intérêt général de la société européenne sera portée devant le grand parlement, et exami
4847 e et son territoire. Le parlement aura le pouvoir de lever sur la confédération tous les impôts qu’il jugera nécessaires.
4848 qu’il jugera nécessaires. Toutes les entreprises d’ une utilité générale pour la société européenne, seront dirigées par l
4849 que, etc. Sans activité au-dehors, il n’y a point de tranquillité au-dedans. Le plus sûr moyen de maintenir la paix dans l
4850 oint de tranquillité au-dedans. Le plus sûr moyen de maintenir la paix dans la confédération sera de la porter sans cesse
4851 n de maintenir la paix dans la confédération sera de la porter sans cesse hors d’elle-même, et de l’occuper sans relâche p
4852 a confédération sera de la porter sans cesse hors d’ elle-même, et de l’occuper sans relâche par des grands travaux intérie
4853 sera de la porter sans cesse hors d’elle-même, et de l’occuper sans relâche par des grands travaux intérieurs. Peupler le
4854 r des grands travaux intérieurs. Peupler le globe de la race européenne, qui est supérieure à toutes les autres races d’ho
4855 nne, qui est supérieure à toutes les autres races d’ hommes ; le rendre voyageable et habitable comme l’Europe, voilà l’ent
4856 européen devra continuellement exercer l’activité de l’Europe, et la tenir toujours en haleine. L’instruction publique dan
4857 on et la surveillance du grand parlement. Un code de morale tant générale que nationale et individuelle, sera rédigé par l
4858 s meilleurs, les plus solides, les seuls capables de rendre la société aussi heureuse qu’elle puisse l’être, et par la nat
4859 e l’être, et par la nature humaine, et par l’état de ses lumières. Le grand parlement permettra l’entière liberté de consc
4860 s. Le grand parlement permettra l’entière liberté de conscience, et l’exercice libre de toutes les religions ; mais il rép
4861 ntière liberté de conscience, et l’exercice libre de toutes les religions ; mais il réprimera celles dont les principes se
4862 t les principes seraient contraires au grand code de morale qui aura été établi. Ainsi, il y aura entre les peuples europé
4863 peuples européens ce qui fait le lien et la base de toute association politique : conformité d’institutions, union d’inté
4864 base de toute association politique : conformité d’ institutions, union d’intérêts, rapport de maximes, communauté de mora
4865 tion politique : conformité d’institutions, union d’ intérêts, rapport de maximes, communauté de morale et d’instruction pu
4866 formité d’institutions, union d’intérêts, rapport de maximes, communauté de morale et d’instruction publique… Après de gra
4867 union d’intérêts, rapport de maximes, communauté de morale et d’instruction publique… Après de grands efforts et de grand
4868 rêts, rapport de maximes, communauté de morale et d’ instruction publique… Après de grands efforts et de grands travaux, je
4869 unauté de morale et d’instruction publique… Après de grands efforts et de grands travaux, je me suis placé du point de vue
4870 ’instruction publique… Après de grands efforts et de grands travaux, je me suis placé du point de vue de l’intérêt commun
4871 grands travaux, je me suis placé du point de vue de l’intérêt commun des peuples européens. Ce point est le seul duquel o
4872 evoir et les maux qui nous menacent et les moyens d’ éviter ces maux. Que ceux qui dirigent les affaires s’élèvent à la mêm
4873 l viendra sans doute un temps où tous les peuples de l’Europe sentiront qu’il faut régler les points d’intérêt général, av
4874 e l’Europe sentiront qu’il faut régler les points d’ intérêt général, avant de descendre aux intérêts nationaux ; alors les
4875 ue nous tendons sans cesse, c’est là que le cours de l’esprit humain nous emporte ! mais lequel est le plus digne de la pr
4876 main nous emporte ! mais lequel est le plus digne de la prudence de l’homme ou de s’y traîner, ou d’y courir ? Le comte J
4877 te ! mais lequel est le plus digne de la prudence de l’homme ou de s’y traîner, ou d’y courir ? Le comte Joseph de Maistr
4878 el est le plus digne de la prudence de l’homme ou de s’y traîner, ou d’y courir ? Le comte Joseph de Maistre (1754-1821)
4879 e de la prudence de l’homme ou de s’y traîner, ou d’ y courir ? Le comte Joseph de Maistre (1754-1821) né en Savoie, longt
4880 e en marge de la France, — quoique grand écrivain de langue française — l’opposition la plus fanatique à la Révolution lib
4881 eti genus, comme l’écrivait Horace) est à la tête de l’humanité, il n’en énonce pas moins les prophéties les plus sombres
4882 t imaginer pour elle qu’un seul salut : le retour de tous les peuples à Rome, et leur subordination sans condition au pape
4883 dination sans condition au pape, « grand Démiurge de la civilisation », fondateur de la « monarchie européenne » et « sour
4884 « grand Démiurge de la civilisation », fondateur de la « monarchie européenne » et « source de la souveraineté de l’Europ
4885 dateur de la « monarchie européenne » et « source de la souveraineté de l’Europe ». Mais comment croire à la réalisation d
4886 rchie européenne » et « source de la souveraineté de l’Europe ». Mais comment croire à la réalisation de cette grandiose r
4887 l’Europe ». Mais comment croire à la réalisation de cette grandiose rêverie théocratique ? On doute que son auteur y ait
4888 us tard, il n’en définit pas moins la supériorité de l’Europe et de la liberté sur l’Asie et le despotisme : L’univers s’
4889 n définit pas moins la supériorité de l’Europe et de la liberté sur l’Asie et le despotisme : L’univers s’est partagé en
4890 tisme : L’univers s’est partagé en deux systèmes d’ une diversité tranchante. La race audacieuse de Japhet n’a cessé, s’i
4891 s d’une diversité tranchante. La race audacieuse de Japhet n’a cessé, s’il est permis de s’exprimer ainsi, de graviter ve
4892 e audacieuse de Japhet n’a cessé, s’il est permis de s’exprimer ainsi, de graviter vers ce qu’on appelle la liberté, c’est
4893 t n’a cessé, s’il est permis de s’exprimer ainsi, de graviter vers ce qu’on appelle la liberté, c’est-à-dire vers cet État
4894 tenté, il a épuisé toutes les formes imaginables de gouvernement, pour se passer de maîtres ou pour restreindre leur puis
4895 ormes imaginables de gouvernement, pour se passer de maîtres ou pour restreindre leur puissance. L’immense postérité de Se
4896 r restreindre leur puissance. L’immense postérité de Sem et de Cham a pris une autre route. Depuis les temps primitifs jus
4897 dre leur puissance. L’immense postérité de Sem et de Cham a pris une autre route. Depuis les temps primitifs jusqu’à ceux
4898 hez elle, l’homme le plus riche et le plus maître de ses actions, le possesseur d’une immense fortune mobilière, absolumen
4899 e et le plus maître de ses actions, le possesseur d’ une immense fortune mobilière, absolument libre de la transporter où i
4900 d’une immense fortune mobilière, absolument libre de la transporter où il voudroit, sûr d’ailleurs d’une protection parfai
4901 de la transporter où il voudroit, sûr d’ailleurs d’ une protection parfaite sur le sol européen, et voyant déjà arriver à
4902 ou le poignard, les préfère cependant au malheur de mourir d’ennui au milieu de nous. Personne sans doute n’imaginera de
4903 gnard, les préfère cependant au malheur de mourir d’ ennui au milieu de nous. Personne sans doute n’imaginera de conseiller
4904 u milieu de nous. Personne sans doute n’imaginera de conseiller à l’Europe le droit public, si court et si clair, de l’Asi
4905 à l’Europe le droit public, si court et si clair, de l’Asie et de l’Afrique ; mais puisque le pouvoir chez elle est toujou
4906 droit public, si court et si clair, de l’Asie et de l’Afrique ; mais puisque le pouvoir chez elle est toujours craint, di
4907 uté, attaqué ou transporté ; puisqu’il n’y a rien de si insupportable à notre orgueil que le gouvernement despotique, le p
4908 potique, le plus grand problème européen est donc de savoir : Comment on peut restreindre le pouvoir souverain sans le dét
4909 s’est demandé si le vrai but du livre n’était pas de ramener à l’obédience de Rome l’empereur Alexandre Ier. Pour une négo
4910 but du livre n’était pas de ramener à l’obédience de Rome l’empereur Alexandre Ier. Pour une négociation de cette nature,
4911 me l’empereur Alexandre Ier. Pour une négociation de cette nature, de Maistre a peu d’atouts : il condamne d’avance toute
4912 une négociation de cette nature, de Maistre a peu d’ atouts : il condamne d’avance toute idée de rapprochement avec l’ortho
4913 e nature, de Maistre a peu d’atouts : il condamne d’ avance toute idée de rapprochement avec l’orthodoxie ou avec les prote
4914 a peu d’atouts : il condamne d’avance toute idée de rapprochement avec l’orthodoxie ou avec les protestants, qui n’ont qu
4915 s premiers, le retour à Rome serait le seul moyen de « s’élever au plus haut niveau de la culture européenne » ; pour les
4916 t le seul moyen de « s’élever au plus haut niveau de la culture européenne » ; pour les seconds, il s’agirait d’une abdica
4917 ure européenne » ; pour les seconds, il s’agirait d’ une abdication de leur « orgueil » et d’une conversion totale, car, di
4918 ; pour les seconds, il s’agirait d’une abdication de leur « orgueil » et d’une conversion totale, car, dit-il, « la moitié
4919 s’agirait d’une abdication de leur « orgueil » et d’ une conversion totale, car, dit-il, « la moitié (protestante) de l’Eur
4920 on totale, car, dit-il, « la moitié (protestante) de l’Europe est sans religion ». Bien plus, à l’en croire : Le plus gra
4921 Bien plus, à l’en croire : Le plus grand ennemi de l’Europe, qu’il importe d’étouffer par tous les moyens qui ne sont pa
4922 Le plus grand ennemi de l’Europe, qu’il importe d’ étouffer par tous les moyens qui ne sont pas des crimes, l’ulcère fune
4923 verainetés et qui les ronge sans relâche, le fils de l’orgueil, le père de l’anarchie, le dissolvant universel, c’est le p
4924 ronge sans relâche, le fils de l’orgueil, le père de l’anarchie, le dissolvant universel, c’est le protestantisme. Fille
4925 olvant universel, c’est le protestantisme. Fille de Necker, ministre genevois, protestant et libéral, de Louis XVI, la ba
4926 Necker, ministre genevois, protestant et libéral, de Louis XVI, la baronne de Staël-Holstein (1766-1817) est aux antipodes
4927 Holstein (1766-1817) est aux antipodes spirituels de son voisin de Chambéry, le ministre savoyard du roi de Sardaigne. Ell
4928 -1817) est aux antipodes spirituels de son voisin de Chambéry, le ministre savoyard du roi de Sardaigne. Elle est née pour
4929 et lui ne voit dans la Réforme que l’ennemi juré de l’unité. Ne serait-ce pas qu’il se fait de l’unité la même idée forme
4930 i juré de l’unité. Ne serait-ce pas qu’il se fait de l’unité la même idée formelle et coercitive que les jacobins exécrés 
4931 itive que les jacobins exécrés ? Mme de Staël est de l’école fédéraliste, qui est aussi œcuménique : Il y a dans l’esprit
4932 forces très distinctes : l’une inspire le besoin de croire, l’autre celui d’examiner. L’une de ces facultés ne doit pas ê
4933 l’une inspire le besoin de croire, l’autre celui d’ examiner. L’une de ces facultés ne doit pas être satisfaite aux dépens
4934 besoin de croire, l’autre celui d’examiner. L’une de ces facultés ne doit pas être satisfaite aux dépens de l’autre : le p
4935 otestantisme et le catholicisme ne viennent point de ce qu’il y a eu des papes et Luther ; c’est une pauvre manière de con
4936 eu des papes et Luther ; c’est une pauvre manière de considérer l’histoire que de l’attribuer à des hasards. Le protestant
4937 t une pauvre manière de considérer l’histoire que de l’attribuer à des hasards. Le protestantisme et le catholicisme exist
4938 dans chaque homme. … Il se peut qu’un jour un cri d’ union s’élève, et que l’universalité des chrétiens aspire à professer
4939 ternelle prodigue les siècles à l’accomplissement de ses desseins, et notre existence passagère s’en irrite et s’en étonne
4940 ’être plus qu’un même peuple dans les divers pays de l’Europe et la religion chrétienne y a puissamment contribué.169 Le
4941 Napoléon, que dans l’usage fécond qu’elle a fait de son exil. Coppet devint grâce à elle (comme le lui reprocheront les n
4942 elle (comme le lui reprocheront les nationalistes de l’école de Charles Maurras) la « trouée » par laquelle la France fut
4943 le lui reprocheront les nationalistes de l’école de Charles Maurras) la « trouée » par laquelle la France fut ouverte au
4944 » par laquelle la France fut ouverte au renouveau de la pensée européenne, initié par le génie des Goethe et des Herder. S
4945 ie des Goethe et des Herder. Son ouvrage intitulé De l’Allemagne est un acte européen dont les conséquences se révéleront
4946 nt plus amples que celles des actes diplomatiques de l’époque : Il faut, dans nos temps modernes, avoir l’esprit européen
4947 ’esprit européen. … Les nations doivent se servir de guide les unes aux autres, et toutes auraient tort de se priver des l
4948 uide les unes aux autres, et toutes auraient tort de se priver des lumières qu’elles peuvent mutuellement se prêter. Il y
4949 vent mutuellement se prêter. Il y a quelque chose de très-singulier dans la différence d’un peuple à un autre : le climat,
4950 uelque chose de très-singulier dans la différence d’ un peuple à un autre : le climat, l’aspect de la nature, la langue, le
4951 ence d’un peuple à un autre : le climat, l’aspect de la nature, la langue, le gouvernement, enfin surtout les événements d
4952 ue, le gouvernement, enfin surtout les événements de l’histoire, puissance plus extraordinaire encore que toutes les autre
4953 r ce qui se développe naturellement dans l’esprit de celui qui vit sur un autre sol et respire un autre air ; on se trouve
4954 autre air ; on se trouvera donc bien en tout pays d’ accueillir les pensées étrangères ; car dans ce genre, l’hospitalité f
4955 car dans ce genre, l’hospitalité fait la fortune de celui qui reçoit. … Enfin, il reste encore une chose, dont l’ignoranc
4956 a frivolité ne peuvent jouir, c’est l’association de tous les hommes qui pensent, d’un bout de l’Europe à l’autre. Souvent
4957 est l’association de tous les hommes qui pensent, d’ un bout de l’Europe à l’autre. Souvent ils n’ont entre eux aucune rela
4958 ciation de tous les hommes qui pensent, d’un bout de l’Europe à l’autre. Souvent ils n’ont entre eux aucune relation ; ils
4959 nt dispersés souvent à des grandes distances l’un de l’autre ; mais quand ils se rencontrent, un mot suffit pour qu’ils se
4960 ’est pas telle religion, telle opinion, tel genre d’ étude, c’est le culte de la vérité qui les réunit. Tantôt, comme les m
4961 telle opinion, tel genre d’étude, c’est le culte de la vérité qui les réunit. Tantôt, comme les mineurs, ils creusent jus
4962 ôt, comme les mineurs, ils creusent jusqu’au fond de la terre, pour pénétrer, au sein de l’éternelle nuit, les mystères du
4963 nomènes inconnus, tantôt ils étudient les langues de l’Orient, pour y chercher l’histoire primitive de l’homme, tantôt ils
4964 de l’Orient, pour y chercher l’histoire primitive de l’homme, tantôt ils vont à Jérusalem pour faire sortir des ruines sai
4965 et la poésie ; enfin, ils sont vraiment le peuple de Dieu, ces hommes qui ne désespèrent pas encore de la racine humaine,
4966 de Dieu, ces hommes qui ne désespèrent pas encore de la racine humaine, et veulent lui conserver l’empire de la pensée.170
4967 racine humaine, et veulent lui conserver l’empire de la pensée.170 Il n’y a pas de plus éminent service à rendre à la lit
4968 us éminent service à rendre à la littérature, que de transporter d’une langue à l’autre les chefs-d’œuvre de l’esprit huma
4969 ice à rendre à la littérature, que de transporter d’ une langue à l’autre les chefs-d’œuvre de l’esprit humain. Il existe s
4970 nsporter d’une langue à l’autre les chefs-d’œuvre de l’esprit humain. Il existe si peu de productions du premier rang ; le
4971 pauvre. D’ailleurs, la circulation des idées est, de tous les genres de commerce, celui dont les avantages sont les plus c
4972 la circulation des idées est, de tous les genres de commerce, celui dont les avantages sont les plus certains.171 On va
4973 nt les plus certains.171 On va retrouver l’écho de cet œcuménisme ou fédéralisme des esprits dans les déclarations de Go
4974 ou fédéralisme des esprits dans les déclarations de Goethe sur la littérature mondiale. 166. Il aura l’occasion de le f
4975 a littérature mondiale. 166. Il aura l’occasion de le faire quelques semaines plus tard, lorsqu’il rédigera sur la deman
4976 ines plus tard, lorsqu’il rédigera sur la demande de Napoléon lui-même, l’Acte additionnel aux Constitutions de l’Empire,
4977 on lui-même, l’Acte additionnel aux Constitutions de l’Empire, dans lequel est affirmée expressément la volonté de créer u
4978 dans lequel est affirmée expressément la volonté de créer une fédération européenne. 167. De l’Esprit de conquête. Chap
4979 olonté de créer une fédération européenne. 167. De l’Esprit de conquête. Chap. XIII : De l’Uniformité. 168. Livre II, c
4980 éer une fédération européenne. 167. De l’Esprit de conquête. Chap. XIII : De l’Uniformité. 168. Livre II, chap. 2 : « I
4981 nne. 167. De l’Esprit de conquête. Chap. XIII : De l’Uniformité. 168. Livre II, chap. 2 : « Inconvéniens de la Souverai
4982 veraineté », Paris, 1821. 169. Œuvres complètes de la baronne de Staël, tome IV, De la Littérature, Paris, 1820. 170.
4983 Œuvres complètes de la baronne de Staël, tome IV, De la Littérature, Paris, 1820. 170. De l’Allemagne, op. cit., T. XI.
4984 , tome IV, De la Littérature, Paris, 1820. 170. De l’Allemagne, op. cit., T. XI. Cet ouvrage, confisqué et détruit par l
4985 é en France qu’en 1814. 171. Op. cit., t. XVII, De l’esprit des traductions.
18 1961, Vingt-huit siècles d’Europe. Quatrième Partie. L’Ère de la Révolution de Kant à Hegel — 6. Goethe
4986 ans les 143 volumes in octavo qui forment l’œuvre de ce « grand Européen », on trouve peu de choses sur l’Europe : c’est q
4987 te à sa personne qu’il ne trouve guère l’occasion d’ en parler comme d’une entité objective. Les plans d’union le laissent
4988 u’il ne trouve guère l’occasion d’en parler comme d’ une entité objective. Les plans d’union le laissent indifférent, comme
4989 en parler comme d’une entité objective. Les plans d’ union le laissent indifférent, comme la chose politique en général. To
4990 al-oriental, ou la jeune Amérique dans Les Années de voyage de Wilhelm Meister, ses prises de position peuvent paraître am
4991 l, ou la jeune Amérique dans Les Années de voyage de Wilhelm Meister, ses prises de position peuvent paraître ambiguës. On
4992 s Années de voyage de Wilhelm Meister, ses prises de position peuvent paraître ambiguës. On a lu sa réponse évasive à Schi
4993 à Schiller, qui lui vantait les avantages uniques de l’Europe. On va lire ses déclarations contrastées sur les avantages r
4994 arations contrastées sur les avantages respectifs de l’ancienneté de notre culture et de la nouveauté de l’american way of
4995 tées sur les avantages respectifs de l’ancienneté de notre culture et de la nouveauté de l’american way of life. On ne sau
4996 es respectifs de l’ancienneté de notre culture et de la nouveauté de l’american way of life. On ne saurait s’en étonner. C
4997 l’ancienneté de notre culture et de la nouveauté de l’american way of life. On ne saurait s’en étonner. Ces contradiction
4998 adictions apparentes relèvent aussi naturellement de la formule vitale de Goethe que de la formule créatrice de l’Europe.
4999 relèvent aussi naturellement de la formule vitale de Goethe que de la formule créatrice de l’Europe. Rien ne serait moins
5000 naturellement de la formule vitale de Goethe que de la formule créatrice de l’Europe. Rien ne serait moins goethéen qu’un
5001 mule vitale de Goethe que de la formule créatrice de l’Europe. Rien ne serait moins goethéen qu’un « nationalisme européen
5002  », rien de plus contraire à l’Europe qu’un refus de la mettre en question, de la comparer objectivement aux autres, et de
5003 à l’Europe qu’un refus de la mettre en question, de la comparer objectivement aux autres, et de lui donner tort, cas éché
5004 tion, de la comparer objectivement aux autres, et de lui donner tort, cas échéant, quoique au nom même des idéaux universe
5005 ’abord conçus et propagés… Voici d’abord un choix de propos de Goethe où l’on retrouvera les mêmes idées, parfois presque
5006 çus et propagés… Voici d’abord un choix de propos de Goethe où l’on retrouvera les mêmes idées, parfois presque dans les m
5007 u’exprimait Mme de Staël : Les diversités innées de conceptions et de sentiments… propres à des peuples entiers aussi bie
5008 Staël : Les diversités innées de conceptions et de sentiments… propres à des peuples entiers aussi bien qu’à des individ
5009 ntiers aussi bien qu’à des individus et résultant de l’inclination, de l’orgueil, ou de vues erronées, ou d’exagérations p
5010 qu’à des individus et résultant de l’inclination, de l’orgueil, ou de vues erronées, ou d’exagérations passionnées, prenne
5011 s et résultant de l’inclination, de l’orgueil, ou de vues erronées, ou d’exagérations passionnées, prennent avec le temps
5012 nclination, de l’orgueil, ou de vues erronées, ou d’ exagérations passionnées, prennent avec le temps et pour les foules av
5013 c le temps et pour les foules aveugles, la valeur de frontières infranchissables, tout comme les mers et les montagnes lim
5014 omme les mers et les montagnes limitent les pays. De là, pour les gens cultivés et pour l’élite, le devoir d’exercer sur l
5015 pour les gens cultivés et pour l’élite, le devoir d’ exercer sur les relations entre les peuples une influence pacifiante e
5016 gnes. Le libre commerce des idées et des manières de sentir accroît, tout autant que l’échange des produits et denrées, la
5017 s et denrées, la richesse et le bien-être général de l’humanité. Qu’il n’ait pas eu lieu jusqu’ici, cela ne tient à rien d
5018 n’ait pas eu lieu jusqu’ici, cela ne tient à rien d’ autre qu’au fait que la communauté internationale n’a pas encore de lo
5019 t que la communauté internationale n’a pas encore de lois morales et de principes fermes, comme il en existe dans les rela
5020 internationale n’a pas encore de lois morales et de principes fermes, comme il en existe dans les relations privées, et q
5021 ans les relations privées, et qui soient capables de fondre en un tour plus ou moins harmonieux les innombrables diversité
5022 , Anglais et Allemands, nous ayons la possibilité de nous corriger l’un l’autre. Tel est le grand profit qu’apporte une li
5023 t qui se révélera toujours davantage173. Le terme de littérature nationale ne signifie plus grand-chose aujourd’hui ; nous
5024 nous ne devons pas nous attacher à quelque chose de particulier et vouloir le considérer comme un modèle, que ce soit la
5025 ou les Nibelungen ; mais quand nous avons besoin d’ un modèle, il nous faut sans cesse retourner vers les anciens Grecs do
5026 rier dans la mesure du possible ce qui s’y trouve de bon.174 Il n’existe pas d’art patriotique ni de science patriotique.
5027 ble ce qui s’y trouve de bon.174 Il n’existe pas d’ art patriotique ni de science patriotique. L’un et l’autre, comme tout
5028 de bon.174 Il n’existe pas d’art patriotique ni de science patriotique. L’un et l’autre, comme tout ce qui est haut et b
5029 entier175. … La haine nationale est quelque chose de singulier. Vous la trouverez toujours plus forte et plus ardente aux
5030 plus forte et plus ardente aux degrés inférieurs de la culture. Or, il est un degré où elle disparaît complètement et où
5031 es nations, où l’on sent le bonheur et le malheur de la nation voisine comme si c’était le nôtre. Ce degré de culture répo
5032 ation voisine comme si c’était le nôtre. Ce degré de culture répondait à ma nature et je m’y étais solidement fixé longtem
5033 e et je m’y étais solidement fixé longtemps avant d’ être parvenu à la soixantaine176. C’est la culture qui a fait la véri
5034 . C’est la culture qui a fait la véritable unité de l’Europe, et c’est la politique idéologique, adoptée par les masses,
5035 la technique jouera de plus en plus dans le sens de l’union : L’Europe — dit Goethe — était autrefois l’une des plus ext
5036 mais existé, et sa ruine a été due au fait qu’une de ses parties a voulu devenir ce qu’était le tout, à savoir la France,
5037 , qui voulut devenir République177. Nous parlâmes de l’unité de l’Allemagne et dîmes en quel sens elle est possible et dés
5038 t devenir République177. Nous parlâmes de l’unité de l’Allemagne et dîmes en quel sens elle est possible et désirable. « J
5039 le, … qui a également imprégné toutes les parties de l’empire. »178 Mais Goethe craint qu’une centralisation politique t
5040 sation politique trop poussée nuise à cette unité de culture qui ne saurait prospérer que dans la diversité : tout ce qu’i
5041 ospérer que dans la diversité : tout ce qu’il dit de l’Allemagne, ici, s’applique identiquement à l’Europe. Les grands tra
5042 u Second Faust — sont aussi pour lui une promesse d’ union des peuples. Il s’enthousiasme à l’idée du percement de l’isthme
5043 peuples. Il s’enthousiasme à l’idée du percement de l’isthme de Panama : J’aimerais vivre assez pour le voir, mais ce n’
5044 s’enthousiasme à l’idée du percement de l’isthme de Panama : J’aimerais vivre assez pour le voir, mais ce n’est pas poss
5045 lieu, je voudrais voir les Anglais en possession d’ un canal à Suez. Oui, je voudrais vivre assez pour voir se réaliser ce
5046 the, devient le symbole du monde technique, libre de toutes contraintes traditionnelles, succédant au monde européen de la
5047 ntes traditionnelles, succédant au monde européen de la culture. (Une fois de plus, le stade politique est survolé). Mais
5048 t, il exprime son irritation devant la complexité de nos relations humaines et leur absence de cordialité ; ainsi : Du re
5049 plexité de nos relations humaines et leur absence de cordialité ; ainsi : Du reste, nous autres vieux Européens, nous nou
5050 nous nous portons tous plutôt mal. Nos conditions de vie sont trop artificielles et trop compliquées, notre nourriture et
5051 trop compliquées, notre nourriture et notre genre de vie sont trop éloignés de la saine nature et nos relations sociales m
5052 urriture et notre genre de vie sont trop éloignés de la saine nature et nos relations sociales manquent de charité et de b
5053 a saine nature et nos relations sociales manquent de charité et de bienveillance. Chacun est distingué et poli, mais perso
5054 et nos relations sociales manquent de charité et de bienveillance. Chacun est distingué et poli, mais personne n’a le cou
5055 t distingué et poli, mais personne n’a le courage d’ être sincère et vrai, de sorte qu’un honnête homme, avec des tendances
5056 al à sa place parmi nous. Souvent on souhaiterait d’ être un de ces soi-disant sauvages nés dans les îles des mers du Sud,
5057 ace parmi nous. Souvent on souhaiterait d’être un de ces soi-disant sauvages nés dans les îles des mers du Sud, pour pouvo
5058 jamais rien mettre sur pied ». Et il se félicite d’ avoir encore vécu dans l’âge de la culture, comme « l’un des derniers
5059 Et il se félicite d’avoir encore vécu dans l’âge de la culture, comme « l’un des derniers d’une époque qui ne reviendra p
5060 ns l’âge de la culture, comme « l’un des derniers d’ une époque qui ne reviendra pas de si tôt »182. Cette ambivalence de s
5061 un des derniers d’une époque qui ne reviendra pas de si tôt »182. Cette ambivalence de son jugement se traduit par le doub
5062 e reviendra pas de si tôt »182. Cette ambivalence de son jugement se traduit par le double mouvement qu’il donne aux perso
5063 nt qu’il donne aux personnages des Années nomades de Wilhelm Meister : tandis que les uns s’embarquent pour le Nouveau Mon
5064 barquent pour le Nouveau Monde, un autre a décidé de revenir à l’Europe, après avoir été élevé en Amérique par ses parents
5065 ir été élevé en Amérique par ses parents, émigrés de la première génération. Au commencement du xviiie siècle, les espri
5066 que la population se fût étendue vers l’Occident. De vastes territoires, sous le nom de comtés, étaient encore à vendre au
5067 rs l’Occident. De vastes territoires, sous le nom de comtés, étaient encore à vendre aux limites des terres habitées. Le p
5068 à vendre aux limites des terres habitées. Le père de notre vieillard s’y était fait lui-même un établissement considérable
5069 autrefois, sous mille et mille formes, lui donna de tout autres idées du point où l’humanité peut parvenir. Il aima mieux
5070 et se perdre dans le mouvement vaste et régulier de la foule, en travaillant avec elle, que de reculer de plusieurs siècl
5071 gulier de la foule, en travaillant avec elle, que de reculer de plusieurs siècles et de jouer, au-delà des mers, le rôle d
5072 a foule, en travaillant avec elle, que de reculer de plusieurs siècles et de jouer, au-delà des mers, le rôle d’Orphée et
5073 avec elle, que de reculer de plusieurs siècles et de jouer, au-delà des mers, le rôle d’Orphée et de Lycurgue. Partout, se
5074 rs siècles et de jouer, au-delà des mers, le rôle d’ Orphée et de Lycurgue. Partout, se disait-il, l’homme a besoin de pati
5075 t de jouer, au-delà des mers, le rôle d’Orphée et de Lycurgue. Partout, se disait-il, l’homme a besoin de patience ; parto
5076 Lycurgue. Partout, se disait-il, l’homme a besoin de patience ; partout il a des ménagements à garder, et j’aime mieux m’a
5077 isant, d’un autre côté, quelques concessions, que de guerroyer avec les Iroquois, pour les refouler, ou de les tromper par
5078 uerroyer avec les Iroquois, pour les refouler, ou de les tromper par des traités, pour les chasser de leurs marais, ou l’o
5079 de les tromper par des traités, pour les chasser de leurs marais, ou l’on souffre à mourir de la morsure des moustiques.1
5080 chasser de leurs marais, ou l’on souffre à mourir de la morsure des moustiques.183 172. Gespräche, zu Mickiewicz, 182
5081 illeur Sur notre continent, l’ancien. Tu n’as pas de châteaux en ruines Pas de basalte. Et tu n’es pas, au plus intime Des
5082 , l’ancien. Tu n’as pas de châteaux en ruines Pas de basalte. Et tu n’es pas, au plus intime Des heures vitales Troublée p
5083 s, au plus intime Des heures vitales Troublée par de vains souvenirs. Par tant de vieux conflits en vain… Saisis les chanc
5084  ! » 182. Cité par E. Ludwig : Goethe, histoire d’ un homme, III, 362. 183. Wilhelm Meisters Wanderjahre, Ire partie, c
19 1961, Vingt-huit siècles d’Europe. Quatrième Partie. L’Ère de la Révolution de Kant à Hegel — 7. Synthèses historico-philosophiques (II)
5085 l’Europe, dont il avait donné lecture à un groupe d’ amis (parmi lesquels les frères Schlegel et le jeune Schelling), mais
5086 ublier, comme trop « catholicisant » selon l’avis de Goethe. L’écrit ne parut qu’en 1826, longtemps après la mort prématur
5087 ut qu’en 1826, longtemps après la mort prématurée de son auteur. Mais si son influence ne s’est pas exercée sur la premièr
5088 ermanique qui allait devenir la nostalgie commune de tous les amis de Novalis, penseurs, artistes et poètes, catholiques d
5089 ait devenir la nostalgie commune de tous les amis de Novalis, penseurs, artistes et poètes, catholiques de naissance ou né
5090 ovalis, penseurs, artistes et poètes, catholiques de naissance ou néophytes comme le fut Novalis lui-même : Schlegel, Sche
5091 z Joseph de Maistre. C’est aussi le pressentiment d’ une réconciliation des âmes et d’une renaissance religieuse, d’un gran
5092 le pressentiment d’une réconciliation des âmes et d’ une renaissance religieuse, d’un grand « concile européen » réunissant
5093 liation des âmes et d’une renaissance religieuse, d’ un grand « concile européen » réunissant dans une nouvelle Jérusalem c
5094 pour célébrer le « Liebesmahl », l’agape, la Fête de la paix. Les fragments que nous citons restituent la succession des a
5095 commun unissait les provinces les plus éloignées de ce vaste empire spirituel. Un seul chef dénué de grandes possessions
5096 de ce vaste empire spirituel. Un seul chef dénué de grandes possessions temporelles, dirigeait et unissait les grandes pu
5097 t les grandes puissances politiques… Le sage chef de l’Église s’opposait à bon droit aux empiètements insolents des instit
5098 maines quand elles lésaient les privilèges sacrés de l’esprit, ainsi qu’aux découvertes importunes et dangereuses dans le
5099 rassemblaient tous les hommes sages et vénérables de l’Europe. Tous les trésors y affluaient, Jérusalem détruite avait pri
5100 Des princes soumettaient leurs différends au Père de la chrétienté, mettaient volontairement à ses pieds leurs couronnes e
5101 , et allaient jusqu’à tirer gloire, comme membres de cette sublime corporation, d’aller finir leur vie dans de pieuses méd
5102 oire, comme membres de cette sublime corporation, d’ aller finir leur vie dans de pieuses méditations entre les murailles s
5103 sublime corporation, d’aller finir leur vie dans de pieuses méditations entre les murailles solitaires des monastères… …
5104 tères… … Tels étaient les beaux traits essentiels de ces temps véritablement catholiques ou chrétiens. L’humanité n’était
5105 assez mûre ni tout à fait formée pour ce royaume de splendeur. C’était un premier amour qui mourut sous le poids de la vi
5106 C’était un premier amour qui mourut sous le poids de la vie temporelle, dont le souvenir fut effacé par des soucis égoïste
5107 destructrices, fut une démonstration remarquable de la nocivité de la culture pour le sens de l’invisible, à tout le moin
5108 fut une démonstration remarquable de la nocivité de la culture pour le sens de l’invisible, à tout le moins de la nocivit
5109 rquable de la nocivité de la culture pour le sens de l’invisible, à tout le moins de la nocivité temporelle d’un certain d
5110 ture pour le sens de l’invisible, à tout le moins de la nocivité temporelle d’un certain degré de culture… […] Les insurgé
5111 isible, à tout le moins de la nocivité temporelle d’ un certain degré de culture… […] Les insurgés prirent avec raison le n
5112 oins de la nocivité temporelle d’un certain degré de culture… […] Les insurgés prirent avec raison le nom de protestants,
5113 ture… […] Les insurgés prirent avec raison le nom de protestants, car ils protestaient solennellement contre tout empiètem
5114 otestaient solennellement contre tout empiètement d’ un pouvoir incommode et qui semblait illégitime, sur les consciences.
5115 ndiquèrent provisoirement pour eux-mêmes le droit d’ examiner, de définir et de choisir en matière religieuse, droit auquel
5116 rovisoirement pour eux-mêmes le droit d’examiner, de définir et de choisir en matière religieuse, droit auquel ce pouvoir
5117 pour eux-mêmes le droit d’examiner, de définir et de choisir en matière religieuse, droit auquel ce pouvoir avait renoncé
5118 i demeurait vacant. Ils érigèrent aussi une foule de principes justes, introduisirent une foule de choses louables et abol
5119 ule de principes justes, introduisirent une foule de choses louables et abolirent une foule d’institutions néfastes ; mais
5120 e foule de choses louables et abolirent une foule d’ institutions néfastes ; mais ils perdirent de vue l’aboutissement néce
5121 oule d’institutions néfastes ; mais ils perdirent de vue l’aboutissement nécessaire de leur action, ils séparèrent ce qui
5122 s ils perdirent de vue l’aboutissement nécessaire de leur action, ils séparèrent ce qui est inséparable, divisèrent l’Égli
5123 t durable renaissance… La Réforme a sonné le glas de la chrétienté. Celle-ci n’existe plus désormais. Catholiques et prote
5124 t à végéter, non sans se ressentir insensiblement de l’influence pernicieuse des États protestants voisins. La politique m
5125 estants voisins. La politique moderne ne date que d’ alors et certains États puissants s’efforcèrent de prendre possession
5126 d’alors et certains États puissants s’efforcèrent de prendre possession du siège de la puissance catholique, transformé en
5127 ants s’efforcèrent de prendre possession du siège de la puissance catholique, transformé en un trône… La Réforme avait été
5128 dans l’Allemagne vraiment libre. Les bons esprits de toutes les nations s’étaient secrètement émancipés, et pleins du sent
5129 ement émancipés, et pleins du sentiment illusoire de leur vocation ils répudiaient avec d’autant plus d’insolence une cont
5130 t illusoire de leur vocation ils répudiaient avec d’ autant plus d’insolence une contrainte périmée. Le savant est instinct
5131 leur vocation ils répudiaient avec d’autant plus d’ insolence une contrainte périmée. Le savant est instinctivement l’enne
5132 clésiastique se livrent nécessairement une guerre d’ extermination, dès qu’elles sont séparées ; car elles se disputent une
5133 centuée de plus en plus, et les savants gagnèrent d’ autant plus de terrain que l’histoire de l’humanité européenne approch
5134 s en plus, et les savants gagnèrent d’autant plus de terrain que l’histoire de l’humanité européenne approchait de l’ère d
5135 gagnèrent d’autant plus de terrain que l’histoire de l’humanité européenne approchait de l’ère de la science triomphante,
5136 ue l’histoire de l’humanité européenne approchait de l’ère de la science triomphante, et que le savoir et la foi s’affront
5137 oire de l’humanité européenne approchait de l’ère de la science triomphante, et que le savoir et la foi s’affrontaient de
5138 phante, et que le savoir et la foi s’affrontaient de façon de plus en plus marquée. On chercha dans la foi la cause de la
5139 en plus marquée. On chercha dans la foi la cause de la stagnation générale que l’on espérait guérir grâce au savoir. Part
5140 ’esprit religieux souffrait diverses persécutions de son mode ancien et de ses formes individuelles présentes. On donna au
5141 frait diverses persécutions de son mode ancien et de ses formes individuelles présentes. On donna au fruit de la nouvelle
5142 formes individuelles présentes. On donna au fruit de la nouvelle façon de penser le nom de philosophie et l’on comprit sou
5143 présentes. On donna au fruit de la nouvelle façon de penser le nom de philosophie et l’on comprit sous ce terme tout ce qu
5144 na au fruit de la nouvelle façon de penser le nom de philosophie et l’on comprit sous ce terme tout ce qui était contraire
5145 tachée à la foi catholique devint peu à peu haine de la Bible, de la foi chrétienne et finalement de la religion. Bien plu
5146 oi catholique devint peu à peu haine de la Bible, de la foi chrétienne et finalement de la religion. Bien plus : cette hai
5147 e de la Bible, de la foi chrétienne et finalement de la religion. Bien plus : cette haine de la religion s’étendit de faço
5148 inalement de la religion. Bien plus : cette haine de la religion s’étendit de façon très naturelle et logique à tout ce qu
5149 Bien plus : cette haine de la religion s’étendit de façon très naturelle et logique à tout ce qui peut être objet d’entho
5150 aturelle et logique à tout ce qui peut être objet d’ enthousiasme et condamna l’imagination et le sentiment, la morale et l
5151 imagination et le sentiment, la morale et l’amour de l’art, l’avenir et le passé ; on en vint à placer nécessairement l’ho
5152 en vint à placer nécessairement l’homme au sommet de l’échelle des êtres et à faire de la musique éternelle et inépuisable
5153 homme au sommet de l’échelle des êtres et à faire de la musique éternelle et inépuisable de l’univers le tic-tac monotone
5154 et à faire de la musique éternelle et inépuisable de l’univers le tic-tac monotone d’un immense moulin, mû et porté par le
5155 e et inépuisable de l’univers le tic-tac monotone d’ un immense moulin, mû et porté par le torrent du hasard, un moulin en
5156 use race humaine et rendu obligatoire pour chacun de ses actionnaires, comme la pierre de touche de la plus haute culture
5157 pour chacun de ses actionnaires, comme la pierre de touche de la plus haute culture — l’enthousiasme pour cette magnifiqu
5158 un de ses actionnaires, comme la pierre de touche de la plus haute culture — l’enthousiasme pour cette magnifique et grand
5159 tres et ses mystagogues. La France eut le bonheur d’ être le centre et le siège de cette religion nouvelle, faite de fragme
5160 rance eut le bonheur d’être le centre et le siège de cette religion nouvelle, faite de fragments de savoir mal recollés. S
5161 tre et le siège de cette religion nouvelle, faite de fragments de savoir mal recollés. Si décriée que fût la poésie dans c
5162 ge de cette religion nouvelle, faite de fragments de savoir mal recollés. Si décriée que fût la poésie dans cette nouvelle
5163 ments anciens et des lumières anciennes, mais qui de ce fait risquaient de consumer par ce feu ancien le nouveau système d
5164 umières anciennes, mais qui de ce fait risquaient de consumer par ce feu ancien le nouveau système de l’univers. Des adept
5165 de consumer par ce feu ancien le nouveau système de l’univers. Des adeptes plus avisés surent arroser d’eau froide les au
5166 l’univers. Des adeptes plus avisés surent arroser d’ eau froide les auditeurs déjà trop échauffés. Ces adeptes étaient sans
5167 Ces adeptes étaient sans cesse occupés à nettoyer de toute poésie la nature, le sol, les âmes humaines et les sciences à d
5168 divin, à déshonorer par des sarcasmes le souvenir de tous les événements et de tous les hommes dignes d’admiration, et à d
5169 s sarcasmes le souvenir de tous les événements et de tous les hommes dignes d’admiration, et à dépouiller le monde de tout
5170 tous les événements et de tous les hommes dignes d’ admiration, et à dépouiller le monde de toute sa parure bigarrée. À ca
5171 mes dignes d’admiration, et à dépouiller le monde de toute sa parure bigarrée. À cause de sa docilité mathématique et de s
5172 bigarrée. À cause de sa docilité mathématique et de son impudeur, la lumière était devenue leur favorite. Ils se félicita
5173 félicitaient qu’elle se laissât briser plutôt que de jouer avec les couleurs et c’est ainsi qu’ils nommèrent d’après elle
5174 peu près complètement la forme, c’est la période de transition entre la religion grecque et le christianisme. Entrez donc
5175 philanthropes et encyclopédistes dans cette loge de paix, et recevez le baiser fraternel, dépouillez ce voile gris et reg
5176 z avec un amour juvénile la miraculeuse splendeur de la nature, de l’histoire et de l’humanité. Je vous conduirai vers un
5177 r juvénile la miraculeuse splendeur de la nature, de l’histoire et de l’humanité. Je vous conduirai vers un frère à la par
5178 aculeuse splendeur de la nature, de l’histoire et de l’humanité. Je vous conduirai vers un frère à la parole duquel vos cœ
5179 e duquel vos cœurs s’ouvriront, et vous revêtirez d’ un corps nouveau l’âme défunte de votre pressentiment aimé, vous l’étr
5180 t vous revêtirez d’un corps nouveau l’âme défunte de votre pressentiment aimé, vous l’étreindrez à nouveau et reconnaîtrez
5181 as vous procurer. Ce frère, c’est le cœur battant de l’ère nouvelle ; quiconque l’a senti battre ne doute plus qu’elle n’a
5182 i battre ne doute plus qu’elle n’arrive et, plein de la douce fierté d’appartenir à son époque, il se détache lui aussi de
5183 lus qu’elle n’arrive et, plein de la douce fierté d’ appartenir à son époque, il se détache lui aussi de la foule pour se j
5184 ’appartenir à son époque, il se détache lui aussi de la foule pour se joindre à la troupe des disciples nouveaux… Tournons
5185 urnons-nous à présent vers le spectacle politique de notre temps. Le monde ancien et le monde nouveau sont en lutte, l’ins
5186 i, ici comme dans les sciences, la fin historique de la guerre ne serait point d’abord d’amener une connexion plus étroite
5187 n historique de la guerre ne serait point d’abord d’ amener une connexion plus étroite et plus variée et un rapprochement e
5188 ons pas nous trouver en face d’un État des États, d’ une Doctrine de la Science appliquée à la politique ! La hiérarchie, c
5189 ouver en face d’un État des États, d’une Doctrine de la Science appliquée à la politique ! La hiérarchie, cette figure géo
5190 mentale des États, ne serait-elle pas le principe d’ une société des États, étant l’intuition intellectuelle du moi politiq
5191 moi politique ? Il est impossible que les forces de l’univers se mettent d’elles-mêmes en équilibre, seul un troisième él
5192 impossible que les forces de l’univers se mettent d’ elles-mêmes en équilibre, seul un troisième élément, à la fois séculie
5193 n, un armistice ; du point de vue des politiciens de cabinet, de la conscience commune, aucune conciliation n’est possible
5194 ice ; du point de vue des politiciens de cabinet, de la conscience commune, aucune conciliation n’est possible. Les deux p
5195 conciliation n’est possible. Les deux partis ont de grandes et nécessaires revendications et sont tenus de les faire valo
5196 andes et nécessaires revendications et sont tenus de les faire valoir, pour obéir aux impulsions de l’esprit de l’univers
5197 us de les faire valoir, pour obéir aux impulsions de l’esprit de l’univers et de l’humanité. Tous deux représentent des fo
5198 ire valoir, pour obéir aux impulsions de l’esprit de l’univers et de l’humanité. Tous deux représentent des forces indestr
5199 obéir aux impulsions de l’esprit de l’univers et de l’humanité. Tous deux représentent des forces indestructibles au cœur
5200 x représentent des forces indestructibles au cœur de l’humanité ; d’une part le sentiment exaltant de la liberté, l’espoir
5201 de l’humanité ; d’une part le sentiment exaltant de la liberté, l’espoir illimité de puissantes sphères d’action, le goût
5202 ntiment exaltant de la liberté, l’espoir illimité de puissantes sphères d’action, le goût de la nouveauté, et de la jeunes
5203 liberté, l’espoir illimité de puissantes sphères d’ action, le goût de la nouveauté, et de la jeunesse, les relations fami
5204 illimité de puissantes sphères d’action, le goût de la nouveauté, et de la jeunesse, les relations familières entre tous
5205 tes sphères d’action, le goût de la nouveauté, et de la jeunesse, les relations familières entre tous les concitoyens, la
5206 familières entre tous les concitoyens, la fierté de vérités universellement humaines et valables, le goût du droit indivi
5207 aines et valables, le goût du droit individuel et de la propriété collective, et le vigoureux sens civique. Que ni l’un ni
5208 gnifient rien, car la capitale la plus intérieure de chaque empire ne se trouve pas derrière des murailles et ne saurait ê
5209 s derrière des murailles et ne saurait être prise d’ assaut. Qui sait si la guerre n’a pas assez duré ? Mais elle ne cesser
5210 pe jusqu’à ce que les nations prennent conscience de la redoutable folie qui les fait tourner en rond, jusqu’à ce que sens
5211 pied des anciens autels, entreprenant des œuvres de paix et célébrant sur des champs de bataille fumants, sous un déluge
5212 nt des œuvres de paix et célébrant sur des champs de bataille fumants, sous un déluge de chaudes larmes, de grandes agapes
5213 ur des champs de bataille fumants, sous un déluge de chaudes larmes, de grandes agapes en guise de fête de la paix. Seule
5214 taille fumants, sous un déluge de chaudes larmes, de grandes agapes en guise de fête de la paix. Seule la religion peut ré
5215 haudes larmes, de grandes agapes en guise de fête de la paix. Seule la religion peut réveiller l’Europe et rassurer les pe
5216 ts attendent la réconciliation et la résurrection de l’Europe pour se joindre à elle et devenir concitoyens du Royaume des
5217 as y avoir bientôt de nouveau en Europe une foule d’ esprits vraiment consacrés ? Tous les véritables membres de la famille
5218 vraiment consacrés ? Tous les véritables membres de la famille religieuse ne devraient-ils pas aspirer ardemment à voir l
5219 oyaume des cieux s’établir sur terre, et y entrer de bon gré, et entonner des hymnes sacrées ? Il faut que la chrétienté r
5220 accueille dans son sein toutes les âmes altérées de ciel et qui s’offre à devenir médiatrice entre le monde ancien et le
5221 ’elle déverse de nouveau sur les peuples la corne d’ abondance de ses bénédictions. Du sein sacré d’un vénérable concile eu
5222 e de nouveau sur les peuples la corne d’abondance de ses bénédictions. Du sein sacré d’un vénérable concile européen, la c
5223 ne d’abondance de ses bénédictions. Du sein sacré d’ un vénérable concile européen, la chrétienté renaîtra, et la tâche qui
5224 naîtra, et la tâche qui consistera dans le réveil de la religion sera menée selon un vaste plan divin où rien ne sera négl
5225 contrainte chrétienne ou séculière, car l’essence de l’Église sera la vraie liberté, et toutes les réformes bienfaisantes
5226 il vient, il viendra nécessairement, l’âge sacré de la paix éternelle où la Jérusalem nouvelle sera la capitale de l’univ
5227 ernelle où la Jérusalem nouvelle sera la capitale de l’univers. Jusque-là demeurez calmes et courageux dans les dangers du
5228 courageux dans les dangers du siècle, compagnons de ma foi, annoncez par la parole et par l’action l’évangile divin, et r
5229 res (1776-1848) est celui des penseurs politiques de la Restauration et du romantisme qui a le plus écrit sur l’Europe. Ob
5230 uée dans cet ouvrage, ne fût-ce que par un aperçu de ses thèses les plus constantes. Comme tant d’autres Allemands, il s’e
5231 toi aussi tu vas te dresser pour libérer l’Europe de ses despotes ! Et il propose une organisation internationale dirigée
5232 tres, il retourne ses batteries, dès les journées de Brumaire 1799 — Bonaparte a trahi, pense-t-il — et la Restauration le
5233 -t-il — et la Restauration le trouve dans le camp de la Sainte-Alliance. En 1815, il publie dans son journal Der Rheinisch
5234 il salue la Sainte-Alliance comme la « fondation d’ une République européenne au pied des autels du Dieu inconnu. » Il ann
5235 la grandeur allemande : si ce peuple a le bonheur de trouver un jour son Wallenstein, dit-il, celui-ci « soumettra l’Europ
5236 i « soumettra l’Europe entière, jusqu’aux limites de l’Asie » ! En 1821, dans un écrit intitulé Europa und die Revolution,
5237 lution, il attaque la Réformation, qu’il qualifie de « second péché originel », et il la compare aux autres catastrophes q
5238 tionales, la Révolution, et finalement « l’empire de Satan », celui de Napoléon. Tous les thèmes favoris de Joseph de Mais
5239 ution, et finalement « l’empire de Satan », celui de Napoléon. Tous les thèmes favoris de Joseph de Maistre (Du pape vient
5240 tan », celui de Napoléon. Tous les thèmes favoris de Joseph de Maistre (Du pape vient de paraître deux ans plus tôt) sont
5241 sur La Sainte-Alliance et les peuples au congrès de Vérone, il demande que l’Allemagne redevienne … l’Autorité supérieur
5242 e redevienne … l’Autorité supérieure honorifique de la république européenne, l’Instance de conciliation qui apaise les d
5243 norifique de la république européenne, l’Instance de conciliation qui apaise les différends, et tout cela parce que sa pos
5244 ela parce que sa position, sa situation, sa façon de penser, tout la pousse vers la paix et non vers la conquête ; c’est e
5245 fixe des limites, c’est elle qui sépare l’Orient de l’Occident, le Nord du Sud, c’est elle le point d’appui de tout le sy
5246 e l’Occident, le Nord du Sud, c’est elle le point d’ appui de tout le système des États européens, le centre naturel de ce
5247 dent, le Nord du Sud, c’est elle le point d’appui de tout le système des États européens, le centre naturel de ce nouveau
5248 le système des États européens, le centre naturel de ce nouveau Saint-Empire romain germanique, plus grand que l’ancien, f
5249 e contrainte par la Sainte-Alliance sous la forme d’ une confédération d’États. Et quels seront les ennemis de cet Empire
5250 Sainte-Alliance sous la forme d’une confédération d’ États. Et quels seront les ennemis de cet Empire germano-catholique e
5251 nfédération d’États. Et quels seront les ennemis de cet Empire germano-catholique enfin relevé ? Non pas la Russie, « col
5252 lique enfin relevé ? Non pas la Russie, « colonie de l’Europe » qui va s’ouvrir librement à notre culture, mais bien l’Asi
5253 varois, théosophe et mystique, longtemps disciple de Claude de Saint-Martin, voit lui aussi dans une renaissance religieus
5254 ssi dans une renaissance religieuse le seul salut de la « Société européenne ». Mais loin d’exiger comme condition préalab
5255 eul salut de la « Société européenne ». Mais loin d’ exiger comme condition préalable l’anéantissement du protestantisme et
5256 tissement du protestantisme et le retour au giron de l’orthodoxie, comme Görres et Maistre, il communie dans l’espérance œ
5257 Maistre, il communie dans l’espérance œcuménique de Novalis. Dans un écrit qu’il adresse en 1814 aux empereurs de Russie
5258 Dans un écrit qu’il adresse en 1814 aux empereurs de Russie et d’Autriche, et au roi de Prusse, il propose une fédération
5259 qu’il adresse en 1814 aux empereurs de Russie et d’ Autriche, et au roi de Prusse, il propose une fédération chrétienne de
5260 i de Prusse, il propose une fédération chrétienne de l’Europe, fondée sur « une liaison nouvelle et plus intime de la reli
5261 fondée sur « une liaison nouvelle et plus intime de la religion et de la politique », et sur l’union des trois grandes co
5262 liaison nouvelle et plus intime de la religion et de la politique », et sur l’union des trois grandes confessions représen
5263 es par ces monarques. L’idée centrale paraît être de ramener la Russie dans le concert européen comme une hérétique repent
5264 jour, dès cette époque, chez Baader et plusieurs de ses contemporains : les premiers slavophiles ne furent pas Russes mai
5265 remière revue européenne du xixe siècle, Europa, de 1803 à 1805. (Il la dirigeait de Paris, mais elle paraissait à Francf
5266 siècle, Europa, de 1803 à 1805. (Il la dirigeait de Paris, mais elle paraissait à Francfort.) Il y développa les mêmes id
5267 Il y développa les mêmes idées générales qui font de sa Philosophie de l’histoire universelle le monument de la pensée rom
5268 mêmes idées générales qui font de sa Philosophie de l’histoire universelle le monument de la pensée romantique. L’Asie — 
5269 Philosophie de l’histoire universelle le monument de la pensée romantique. L’Asie — l’Inde en particulier — est la patrie
5270 e. L’Asie — l’Inde en particulier — est la patrie de toute religion véritable mais le christianisme a fait l’Europe et peu
5271 d, du romantisme et du classicisme, du moderne et de l’antique, du christianisme et de l’hellénisme. L’Empire de Charlemag
5272 , du moderne et de l’antique, du christianisme et de l’hellénisme. L’Empire de Charlemagne, puis la papauté (Schlegel alla
5273 ue, du christianisme et de l’hellénisme. L’Empire de Charlemagne, puis la papauté (Schlegel allait devenir catholique en 1
5274 1808) ont représenté les plus hautes institutions de la « république européenne », et depuis lors, tout n’est que décadenc
5275 début du xixe siècle. Pourtant nous aurions tort de désespérer de l’Europe, car elle reste la terre décisive, si l’on pen
5276 siècle. Pourtant nous aurions tort de désespérer de l’Europe, car elle reste la terre décisive, si l’on pense que c’est
5277 lit, que c’est ici que le bien lutte avec le plus de véhémence sur la terre avec le mal, et que c’est donc ici que doit êt
5278 t que c’est donc ici que doit être scellé le sort de l’Humanité… La véritable Europe doit d’abord voir le jour.184 Sembl
5279 ’abord voir le jour.184 Semblables déclarations de foi dans l’avenir européen (qu’on rapprochera de celles de Hegel sur
5280 de foi dans l’avenir européen (qu’on rapprochera de celles de Hegel sur l’Europe considérée comme « fin de l’Histoire »)1
5281 ns l’avenir européen (qu’on rapprochera de celles de Hegel sur l’Europe considérée comme « fin de l’Histoire »)185 revienn
5282 lles de Hegel sur l’Europe considérée comme « fin de l’Histoire »)185 reviennent maintes fois dans Europa et dans les Leço
5283 gel et les romantiques allemands, même romanisés, de Joseph de Maistre et des catholiques français préromantiques. On ne l
5284 On ne l’oubliera pas en lisant les pages fameuses de Schlegel sur l’unité de l’Europe médiévale, écho direct de la ferveur
5285 lisant les pages fameuses de Schlegel sur l’unité de l’Europe médiévale, écho direct de la ferveur et des illusions de Nov
5286 el sur l’unité de l’Europe médiévale, écho direct de la ferveur et des illusions de Novalis186 : L’idée qui présidait à l
5287 évale, écho direct de la ferveur et des illusions de Novalis186 : L’idée qui présidait à l’ensemble de l’empire chrétien
5288 e Novalis186 : L’idée qui présidait à l’ensemble de l’empire chrétien était celle d’une grande autorité protectrice, part
5289 ait à l’ensemble de l’empire chrétien était celle d’ une grande autorité protectrice, partant du centre d’une puissance fon
5290 ne grande autorité protectrice, partant du centre d’ une puissance fondée sur le droit, qui servirait d’égide à tous les pa
5291 ’une puissance fondée sur le droit, qui servirait d’ égide à tous les pays et à tous les peuples chrétiens, et c’était dans
5292 tout ce grand corps. Sitôt que cette force cessa d’ agir, tout l’édifice dut nécessairement s’écrouler. Aussi dans les con
5293 n y substituant la relation purement artificielle d’ un équilibre dynamique et d’une égalité républicaine entre les divers
5294 purement artificielle d’un équilibre dynamique et d’ une égalité républicaine entre les divers États, sans aucune tendance
5295 rétienne des États, et cette alliance des peuples de l’Europe occidentale ; et n’a-t-on réussi à faire sortir de cette rév
5296 e occidentale ; et n’a-t-on réussi à faire sortir de cette révolution générale et antichrétienne qui s’opéra dans les mœur
5297 confusion symétriquement organisée. Si le partage de l’empire de Charlemagne était conforme aux usages antiques et fondé s
5298 métriquement organisée. Si le partage de l’empire de Charlemagne était conforme aux usages antiques et fondé sur les droit
5299 forme aux usages antiques et fondé sur les droits d’ héritage usités dans les familles des grands, il n’annonce pas moins u
5300 ands, il n’annonce pas moins une confiance pleine d’ une naïveté antique, une confiance presque héroïque en une conformité
5301 iance presque héroïque en une conformité et unité de tendance, dont on supposait l’existence, à ce qu’il paraît. Car on cr
5302 ce qu’il paraît. Car on croyait pouvoir concilier de cette manière la nécessité de la présence d’un souverain dans un pays
5303 t pouvoir concilier de cette manière la nécessité de la présence d’un souverain dans un pays d’une étendue raisonnable ave
5304 lier de cette manière la nécessité de la présence d’ un souverain dans un pays d’une étendue raisonnable avec l’unité d’ens
5305 essité de la présence d’un souverain dans un pays d’ une étendue raisonnable avec l’unité d’ensemble d’une grande monarchie
5306 ns un pays d’une étendue raisonnable avec l’unité d’ ensemble d’une grande monarchie collective… Dans la première monarchie
5307 d’une étendue raisonnable avec l’unité d’ensemble d’ une grande monarchie collective… Dans la première monarchie allemande,
5308 … Dans la première monarchie allemande, le besoin d’ un gouvernement indigène, résidant dans le pays, et régnant comme un p
5309 comme un père au sein de sa famille, fut concilié d’ une manière beaucoup moins imparfaite avec la puissante unité de l’ens
5310 beaucoup moins imparfaite avec la puissante unité de l’ensemble, par le moyen des quatre grands duchés nationaux soumis à
5311 e grands duchés nationaux soumis à la suzeraineté d’ un seul roi ou empereur ; quoique là aussi l’union ne soit pas restée
5312 n’a jamais encore imaginé ou découvert une forme de constitution ou de système politique qui pût résister à la longue au
5313 imaginé ou découvert une forme de constitution ou de système politique qui pût résister à la longue au manque et au change
5314 t résister à la longue au manque et au changement de tendance. Les parlements, les états généraux, les droits civils et po
5315 ssemblées nationales des États, grands et petits, de ce temps-là, dans les conciliabules et les délibérations des ducs et
5316 s une forme tout à fait locale, suivant les mœurs de la nation et les usages de la vie ; de même qu’ils étaient basés sur
5317 ale, suivant les mœurs de la nation et les usages de la vie ; de même qu’ils étaient basés sur des coutumes positives et s
5318 d’être fondés sur la théorie purement spéculative d’ une égalité parfaite et générale ; on ne cherchait pas l’unité et la s
5319 rale ; on ne cherchait pas l’unité et la solidité de l’ensemble dans la combinaison d’un équilibre appuyé sur une forme ar
5320 et la solidité de l’ensemble dans la combinaison d’ un équilibre appuyé sur une forme artificielle, mais bien dans les mœu
5321 ennement parlant unique même dans la vie, l’union de la force et de l’esprit peut subsister malgré la division des pouvoir
5322 t unique même dans la vie, l’union de la force et de l’esprit peut subsister malgré la division des pouvoirs, on n’a qu’à
5323 rent prospères, la paix et la justice croissaient de jour en jour et les peuples jouissaient du bien-être… L’Église était
5324 e qui embrassait tout, et sous l’abri hospitalier de laquelle ces peuples guerriers [du Nord] commencèrent à se ranger pai
5325 se former, et à se constituer selon les principes de l’équité. Le soin de l’enseignement, le patrimoine des connaissances,
5326 nstituer selon les principes de l’équité. Le soin de l’enseignement, le patrimoine des connaissances, l’étude des sciences
5327 ssances, l’étude des sciences et le développement de l’esprit, étaient confiés à sa sollicitude protectrice, et se distrib
5328 e des écoles chrétiennes. Si la science avait peu d’ étendue, elle n’était pas du moins ensevelie sans utilité dans les cab
5329 tard, comme elle l’était en partie chez les Grecs d’ alors ; puis elle répondait suffisamment aux forces et à la civilisati
5330 dait suffisamment aux forces et à la civilisation de cette époque ; attendu qu’en fait de développement, on ne peut franch
5331 civilisation de cette époque ; attendu qu’en fait de développement, on ne peut franchir tous les degrés d’un seul bond, ma
5332 éveloppement, on ne peut franchir tous les degrés d’ un seul bond, mais qu’il faut les monter progressivement, et les uns a
5333 Occident alors si actif, et à l’excellent clergé de ce temps ; car le savoir n’était pas encore entré en opposition hosti
5334 a vraie croyance et avec la vie, comme il le fit, d’ une manière si arrogante et si dédaigneuse, dans la période subséquent
5335 insi que les pensées salutaires descendirent donc de la voûte céleste de la foi, non comme un déluge envahissant, mais com
5336 salutaires descendirent donc de la voûte céleste de la foi, non comme un déluge envahissant, mais comme une douce ondée,
5337 mme une pluie féconde, pour tomber sur le terrain de la vie, continuellement agité dans la guerre et dans la paix, dans le
5338 ’Europe, surtout en ce qui concerne la conception de la liberté ; après celui de l’Unité, voici l’éloge de nos diversités 
5339 oncerne la conception de la liberté ; après celui de l’Unité, voici l’éloge de nos diversités : Si les invasions barbares
5340 a liberté ; après celui de l’Unité, voici l’éloge de nos diversités : Si les invasions barbares n’avaient pas eu lieu, si
5341 iser le joug romain, si au contraire tout le nord de l’Europe non occupé avait pu aussi être incorporé à l’Empire et que l
5342 cette lutte magnifique ni cet ample développement de l’esprit humain au sein de ces nouvelles nations. Et cependant c’est
5343 ustement cette richesse, cette diversité qui fait de l’Europe ce qu’elle est, qui lui donne l’avantage d’être le siège le
5344 l’Europe ce qu’elle est, qui lui donne l’avantage d’ être le siège le plus favorable de la vie et de la culture de l’Humani
5345 onne l’avantage d’être le siège le plus favorable de la vie et de la culture de l’Humanité. Cette Europe, libre et riche,
5346 ge d’être le siège le plus favorable de la vie et de la culture de l’Humanité. Cette Europe, libre et riche, n’existerait
5347 iège le plus favorable de la vie et de la culture de l’Humanité. Cette Europe, libre et riche, n’existerait donc pas et à
5348 e cette copieuse histoire européenne, les annales de l’Unique Empire romain feraient pendant à ces chroniques chinoises d’
5349 omain feraient pendant à ces chroniques chinoises d’ une si triste uniformité. … Jetons d’abord un coup d’œil sur la situat
5350 d un coup d’œil sur la situation la plus ancienne de l’Europe. C’est un spectacle étrange et attirant que de voir l’homme
5351 urope. C’est un spectacle étrange et attirant que de voir l’homme si richement doté par la nature, plein d’une force extra
5352 ir l’homme si richement doté par la nature, plein d’ une force extraordinaire, revêtir un aspect si différent de l’état auq
5353 ce extraordinaire, revêtir un aspect si différent de l’état auquel nous sommes accoutumés. Avant que cette propension à la
5354 tte propension à la domination du monde ait passé d’ Asie en Grèce pour se transmettre ensuite aux Romains, l’état de l’Eur
5355 e pour se transmettre ensuite aux Romains, l’état de l’Europe était à peu près le même partout. Les rudiments de la cultur
5356 e était à peu près le même partout. Les rudiments de la culture étaient déjà connus, l’agriculture était répandue et quelq
5357 illes en quantité, mais il y avait presque autant de petits États que de villes importantes. Dans l’ensemble d’ailleurs to
5358 ais il y avait presque autant de petits États que de villes importantes. Dans l’ensemble d’ailleurs tout était particulier
5359 nt à trois ou quatre grandes nations, mais aucune d’ elles n’était « une » ni ne formait un tout. Chacune se subdivisait en
5360 ut. Chacune se subdivisait en une grande quantité de petites peuplades et tribus composant tout autant d’États particulier
5361 petites peuplades et tribus composant tout autant d’ États particuliers. Chacune de ces peuplades n’entendait que très peu
5362 mposant tout autant d’États particuliers. Chacune de ces peuplades n’entendait que très peu parler de celles qui étaient t
5363 de ces peuplades n’entendait que très peu parler de celles qui étaient très éloignées, mais était en guerre avec les plus
5364 al, si misérable que puisse paraître la condition de ces anciennes peuplades, celles-ci n’en possédaient pas moins presque
5365 pposition à l’Asie, comme le caractère distinctif de l’Europe. En Asie nous trouvons dès le commencement de grandes quanti
5366 Europe. En Asie nous trouvons dès le commencement de grandes quantités d’États et de nations ainsi qu’une domination unive
5367 trouvons dès le commencement de grandes quantités d’ États et de nations ainsi qu’une domination universelle. En Europe tou
5368 s le commencement de grandes quantités d’États et de nations ainsi qu’une domination universelle. En Europe tout était ori
5369 ginellement particularisé, par conséquent en état de lutte et de rivalité constantes, chacun se développant selon les poss
5370 particularisé, par conséquent en état de lutte et de rivalité constantes, chacun se développant selon les possibilités de
5371 tes, chacun se développant selon les possibilités de sa propre liberté. L’Asie, pourrait-on dire, est le pays de l’unité,
5372 re liberté. L’Asie, pourrait-on dire, est le pays de l’unité, où tout s’épanouit en grandes masses et dans des circonstanc
5373 ces on ne peut plus simples. L’Europe est le pays de la liberté, c’est-à-dire de la formation, par la rivalité entre États
5374 L’Europe est le pays de la liberté, c’est-à-dire de la formation, par la rivalité entre États, de forces particulières et
5375 ire de la formation, par la rivalité entre États, de forces particulières et différentes l’une de l’autre. Cette diversité
5376 ats, de forces particulières et différentes l’une de l’autre. Cette diversité est devenue, tout au long des siècles, le ca
5377 tout au long des siècles, le caractère distinctif de la formation de l’Europe ; car, même après que de plus grands États e
5378 siècles, le caractère distinctif de la formation de l’Europe ; car, même après que de plus grands États et nations furent
5379 États et nations furent constitués, ce qu’il y a d’ essentiel dans ce caractère originel est resté intact. Et dans ses Vo
5380 sungen über Karl V (15e leçon), il déplore la fin de cette synthèse vivante entre l’unité et la diversité, que l’empereur
5381 ’unité et la diversité, que l’empereur avait rêvé de faire revivre : … Ainsi se retira à nouveau du monde l’homme qui, en
5382 urope. À sa mort les États chrétiens rivalisèrent de splendeur et de pompe lors des cérémonies funèbres, pour glorifier so
5383 les États chrétiens rivalisèrent de splendeur et de pompe lors des cérémonies funèbres, pour glorifier son nom et sa gran
5384 er son nom et sa grandeur ; même dans la capitale de l’empire turc un noble ennemi honora par un service funèbre public la
5385 ’Europe parut sentir que le héros et le défenseur d’ une époque n’était plus, époque à laquelle allait succéder, d’autant p
5386 n’était plus, époque à laquelle allait succéder, d’ autant plus sûrement que cette ultime force au service de l’unité avai
5387 t plus sûrement que cette ultime force au service de l’unité avait disparu, un siècle de guerre et d’ébranlement. Pour Ge
5388 ce au service de l’unité avait disparu, un siècle de guerre et d’ébranlement. Pour Georg Friedrich Hegel (1770-1831), l’H
5389 de l’unité avait disparu, un siècle de guerre et d’ ébranlement. Pour Georg Friedrich Hegel (1770-1831), l’Histoire mondi
5390 stoire mondiale reflète et traduit la dialectique de « l’Idée qui se réalise », de l’Idée de liberté, c’est-à-dire du « de
5391 duit la dialectique de « l’Idée qui se réalise », de l’Idée de liberté, c’est-à-dire du « devenir réel de l’Esprit ». C’es
5392 alectique de « l’Idée qui se réalise », de l’Idée de liberté, c’est-à-dire du « devenir réel de l’Esprit ». C’est donc, au
5393 l’Idée de liberté, c’est-à-dire du « devenir réel de l’Esprit ». C’est donc, au vrai, une Théodicée. Conformément au Systè
5394 d für sich »). Dans ses Leçons sur la Philosophie de l’Histoire (publication posthume), Hegel décrit l’évolution de l’Asie
5395 (publication posthume), Hegel décrit l’évolution de l’Asie, de l’Antiquité et de l’Europe moderne, comme s’il s’agissait
5396 on posthume), Hegel décrit l’évolution de l’Asie, de l’Antiquité et de l’Europe moderne, comme s’il s’agissait réellement
5397 l décrit l’évolution de l’Asie, de l’Antiquité et de l’Europe moderne, comme s’il s’agissait réellement d’une évolution de
5398 ’Europe moderne, comme s’il s’agissait réellement d’ une évolution de l’Esprit. Le terme ultime de ce grandiose processus n
5399 comme s’il s’agissait réellement d’une évolution de l’Esprit. Le terme ultime de ce grandiose processus n’est autre que l
5400 ment d’une évolution de l’Esprit. Le terme ultime de ce grandiose processus n’est autre que l’Europe « vraiment fin de l’H
5401 processus n’est autre que l’Europe « vraiment fin de l’Histoire », éminemment représentée par sa composante germanique, et
5402 germanique, et comme le préciseront les hégéliens de droite, par l’État prussien. Deux citations célèbres (empruntées à l’
5403 ntroduction) suffiront ici à caractériser le rôle de l’Europe dans l’Histoire mondiale, selon Hegel : J’ai dit que les Or
5404 ’homme est libre. Ces stades dans la connaissance de la Liberté constituent la division que nous ferons dans l’Histoire un
5405 elle nous l’étudierons… L’Histoire universelle va de l’est à l’ouest, car l’Europe est vraiment la fin de l’Histoire, dont
5406 l’est à l’ouest, car l’Europe est vraiment la fin de l’Histoire, dont l’Asie est le commencement. Pour l’Histoire universe
5407 i, κατ`έξοχήν, l’Est pour-soi étant quelque chose de tout relatif ; car, quoique la Terre soit une sphère, l’Histoire ne d
5408 ’Histoire ne décrit pourtant pas un cercle autour d’ elle, mais elle a bien plutôt un Est déterminé, et c’est l’Asie. Là se
5409 c’est pourquoi. ici, se lève le soleil intérieur de la conscience de soi, qui répand un plus haut éclat.187 Wilhelm Jos
5410 ici, se lève le soleil intérieur de la conscience de soi, qui répand un plus haut éclat.187 Wilhelm Josef von Schelling
5411 on Schelling (1775-1854) fut le dernier survivant de la grande génération des philosophes romantiques. Avec la fin de sa c
5412 nération des philosophes romantiques. Avec la fin de sa carrière, nous voyons se fermer les cycles inaugurés par Herder, K
5413 Système » porte la même date que « l’État fermé » de Fichte et l’essai sur l’Europe de Gentz. Ami de Novalis dans sa jeune
5414 » de Fichte et l’essai sur l’Europe de Gentz. Ami de Novalis dans sa jeunesse et devenu plus tard catholique comme lui, il
5415 e lui, il fut l’un des maîtres les plus influents de la pensée européenne du xixe siècle : car on ne compte pas seulement
5416 siècle : car on ne compte pas seulement au nombre de ses disciples ses camarades du cercle de l’Athenæum (tous ceux qu’on
5417 u nombre de ses disciples ses camarades du cercle de l’Athenæum (tous ceux qu’on a cités dans les pages qui précèdent), ma
5418 plupart des penseurs russes, surtout slavophiles, de son temps. Déjà, dans l’Introduction à son System der Transcendentale
5419 ismus 188 publié en 1800, Schelling défend l’idée d’ une fédération et d’une Cour de justice internationales, dans lesquell
5420 1800, Schelling défend l’idée d’une fédération et d’ une Cour de justice internationales, dans lesquelles il voit le couron
5421 ling défend l’idée d’une fédération et d’une Cour de justice internationales, dans lesquelles il voit le couronnement néce
5422 ans lesquelles il voit le couronnement nécessaire de l’ère historique de la « Nature » succédant à celle du « Destin » et
5423 it le couronnement nécessaire de l’ère historique de la « Nature » succédant à celle du « Destin » et annonçant celle de l
5424 uccédant à celle du « Destin » et annonçant celle de la « Providence ». L’histoire dans son ensemble est une révélation c
5425 semble est une révélation continue et progressive de l’absolu. Nous pouvons distinguer trois périodes dans cette manifesta
5426 y a de plus grand et de plus noble. Cette période de l’histoire, que nous pouvons appeler tragique, est celle de la décade
5427 ire, que nous pouvons appeler tragique, est celle de la décadence de la splendeur et des merveilles du monde ancien, et de
5428 uvons appeler tragique, est celle de la décadence de la splendeur et des merveilles du monde ancien, et de la chute des gr
5429 a splendeur et des merveilles du monde ancien, et de la chute des grands empires dont le souvenir s’est à peine conservé e
5430 les nous font présumer la grandeur : la décadence de l’humanité la plus noble qui ait jamais fleuri et dont le retour sur
5431 fleuri et dont le retour sur la terre est l’objet de vœux éternels. La seconde période est celle où ce qui dans la premièr
5432 me nature. Elle paraît commencer avec l’expansion de la république romaine qui, dans sa soif de conquêtes et d’asservissem
5433 ansion de la république romaine qui, dans sa soif de conquêtes et d’asservissement —  manifestations du despotisme effréné
5434 ublique romaine qui, dans sa soif de conquêtes et d’ asservissement —  manifestations du despotisme effréné qui y régnait —
5435 sciences qui, jusqu’alors avaient été le monopole de quelques peuples isolés, contrainte qu’elle était, sans en avoir cons
5436 ns en avoir conscience et même contre sa volonté, de s’adapter à un plan naturel dont l’aboutissement verra l’union univer
5437 e développeront et se manifesteront comme l’œuvre de la providence ; ainsi même ce qui paraissait l’œuvre du destin ou de
5438 ainsi même ce qui paraissait l’œuvre du destin ou de la nature n’était que le commencement d’une providence qui ne se révé
5439 estin ou de la nature n’était que le commencement d’ une providence qui ne se révélait qu’imparfaitement. Quand cette pério
5440 On ne saurait donc envisager l’existence durable d’ une constitution politique unique — fût-elle parfaite dans sa forme —
5441 erposant à l’État individuel, sans une fédération de tous les États où chacun d’entre eux serait le garant de la constitut
5442 les États où chacun d’entre eux serait le garant de la constitution de l’autre. Cependant, d’une part, cette garantie gén
5443 n d’entre eux serait le garant de la constitution de l’autre. Cependant, d’une part, cette garantie générale et mutuelle n
5444 possible que si les États acceptent les principes d’ un véritable ordre judiciaire, de sorte que chaque État ait intérêt à
5445 Je forme des vœux pour la réconciliation complète de tous les peuples européens et veux croire qu’ils adopteront à nouveau
5446 te, Schelling en viendra, lui aussi, à n’attendre d’ autre salut pour l’Europe que de la libre coopération de l’État et de
5447 ssi, à n’attendre d’autre salut pour l’Europe que de la libre coopération de l’État et de l’Église, seule base d’une union
5448 e salut pour l’Europe que de la libre coopération de l’État et de l’Église, seule base d’une union durable des peuples :
5449 l’Europe que de la libre coopération de l’État et de l’Église, seule base d’une union durable des peuples : L’étude de l’
5450 coopération de l’État et de l’Église, seule base d’ une union durable des peuples : L’étude de l’histoire moderne qui déb
5451 e base d’une union durable des peuples : L’étude de l’histoire moderne qui débute, au fond, avec l’apparition du christia
5452 tianisme en Europe fait ressortir deux tentatives de l’humanité dans sa quête de l’unité. La première qui visait la créati
5453 ortir deux tentatives de l’humanité dans sa quête de l’unité. La première qui visait la création d’une unité spirituelle a
5454 te de l’unité. La première qui visait la création d’ une unité spirituelle au sein de l’Église était vouée à l’échec, car e
5455 e l’État. L’erreur que commit l’Église à l’époque de la hiérarchie ecclésiastique ne fut pas d’intervenir dans le domaine
5456 époque de la hiérarchie ecclésiastique ne fut pas d’ intervenir dans le domaine de l’État mais au contraire, de laisser cel
5457 siastique ne fut pas d’intervenir dans le domaine de l’État mais au contraire, de laisser celui-ci s’immiscer dans le sien
5458 enir dans le domaine de l’État mais au contraire, de laisser celui-ci s’immiscer dans le sien propre. Au lieu de se garder
5459 er dans le sien propre. Au lieu de se garder pure de tout élément extérieur, elle se livra à l’État en épousant certaines
5460 eur, elle se livra à l’État en épousant certaines de ses formes. La violence extérieure ne pourra jamais servir la cause d
5461 a cause du vrai et du divin, et l’Église s’écarta de sa vraie vocation dès qu’elle commença à persécuter les hérétiques. L
5462 ença à persécuter les hérétiques. L’État a acquis de l’importance au moment du renversement de la hiérarchie ecclésiastiqu
5463 acquis de l’importance au moment du renversement de la hiérarchie ecclésiastique, et il est évident que le joug des tyran
5464 la mesure même où ils croyaient pouvoir se passer de l’unité spirituelle. Il est certain en tout cas que, quel que puisse
5465 vraie unité ne peut être réalisée que par la voie de la religion. Il ne s’agit pas là de la domination de l’Église par l’É
5466 e par la voie de la religion. Il ne s’agit pas là de la domination de l’Église par l’État ou vice versa, mais de la nécess
5467 la religion. Il ne s’agit pas là de la domination de l’Église par l’État ou vice versa, mais de la nécessité ou se trouve
5468 nation de l’Église par l’État ou vice versa, mais de la nécessité ou se trouve l’État lui-même de développer les principes
5469 mais de la nécessité ou se trouve l’État lui-même de développer les principes religieux de façon que l’union de tous les p
5470 at lui-même de développer les principes religieux de façon que l’union de tous les peuples puisse se fonder sur la communa
5471 pper les principes religieux de façon que l’union de tous les peuples puisse se fonder sur la communauté des convictions r
5472 te époque, l’un des seuls équivalents des auteurs de grands systèmes historico-philosophiques que nous venons de citer. Ma
5473 que nous venons de citer. Mais il ne se rattache de près ni de loin à aucun d’eux. Disciple préféré de Saint-Simon, auprè
5474 enons de citer. Mais il ne se rattache de près ni de loin à aucun d’eux. Disciple préféré de Saint-Simon, auprès duquel il
5475 Mais il ne se rattache de près ni de loin à aucun d’ eux. Disciple préféré de Saint-Simon, auprès duquel il a remplacé Augu
5476 e près ni de loin à aucun d’eux. Disciple préféré de Saint-Simon, auprès duquel il a remplacé Augustin Thierry dans le rôl
5477 uquel il a remplacé Augustin Thierry dans le rôle de « fils adoptif », il fonde à son tour une secte, la religion positivi
5478 ciologie moderne. Comme tous les saint-simoniens ( d’ Eichthal, Pierre Leroux, Feugueray, Considérant, Pecqueur, Littré et t
5479 , Pecqueur, Littré et tant d’autres, tous auteurs de traités sur l’unité européenne), Auguste Comte est un défenseur conva
5480 Comte est un défenseur convaincu, quasi mystique, de l’européocentrisme, du rôle privilégié et redoutable que l’Europe doi
5481 l’unir, après s’être elle-même unifiée. Le titre d’ une de ses publications donnera une idée de l’espèce de délire rationn
5482 r, après s’être elle-même unifiée. Le titre d’une de ses publications donnera une idée de l’espèce de délire rationnel (et
5483 titre d’une de ses publications donnera une idée de l’espèce de délire rationnel (et romantique à sa façon, quoiqu’il se
5484 de ses publications donnera une idée de l’espèce de délire rationnel (et romantique à sa façon, quoiqu’il se dise « posit
5485 a pensée européenne des saint-simoniens, et celle de Comte en particulier : Calendrier positiviste ou système général de
5486 lier : Calendrier positiviste ou système général de commémoration publique, destiné surtout à la transition finale de la
5487 publique, destiné surtout à la transition finale de la grande République occidentale, formée des cinq populations avancée
5488 50. Cependant, dans son œuvre capitale, le Cours de philosophie positive 190 Comte entend donner une solide base critique
5489 ’on puisse trouver : l’Europe. Il se propose donc de … considérer exclusivement le développement effectif des populations
5490 ionnelle digression sur les divers autres centres de civilisation indépendante, dont l’évolution a été, par des causes que
5491 plus imparfait ; à moins que l’examen comparatif de ces séries accessoires ne puisse utilement éclairer le sujet principa
5492 jet principal, comme je l’ai expliqué en traitant de la méthode sociologique. Notre exploration historique devra donc être
5493 que uniquement réduite à l’élite ou l’avant-garde de l’humanité, comprenant la majeure partie de la race blanche ou des na
5494 garde de l’humanité, comprenant la majeure partie de la race blanche ou des nations européennes, en nous bornant même, pou
5495 ions européennes, en nous bornant même, pour plus de précision, surtout dans les temps modernes, aux peuples de l’Europe o
5496 ion, surtout dans les temps modernes, aux peuples de l’Europe occidentale. … On ne peut certainement espérer de reconnaîtr
5497 pe occidentale. … On ne peut certainement espérer de reconnaître d’abord la véritable marche fondamentale des sociétés hum
5498 iétés humaines que par la considération exclusive de l’évolution la plus complète et la mieux caractérisée, à l’éclairciss
5499 ète et la mieux caractérisée, à l’éclaircissement de laquelle doivent être constamment subordonnées toutes les observation
5500 ifestation, il deviendra possible, et même utile, de procéder à l’explication rationnelle des modifications plus ou moins
5501 ers titres, sont restées plus ou moins en arrière d’ un tel type de développement. Jusqu’alors, ce puéril et inopportun éta
5502 nt restées plus ou moins en arrière d’un tel type de développement. Jusqu’alors, ce puéril et inopportun étalage d’une éru
5503 ent. Jusqu’alors, ce puéril et inopportun étalage d’ une érudition stérile et mal dirigée, qui tend aujourd’hui à entraver
5504 dirigée, qui tend aujourd’hui à entraver l’étude de notre évolution sociale par le vicieux mélange de l’histoire des popu
5505 de notre évolution sociale par le vicieux mélange de l’histoire des populations qui, telles que celles de l’Inde, de la Ch
5506 l’histoire des populations qui, telles que celles de l’Inde, de la Chine, etc., n’ont pu exercer sur notre passé aucune vé
5507 des populations qui, telles que celles de l’Inde, de la Chine, etc., n’ont pu exercer sur notre passé aucune véritable inf
5508 e hautement signalé comme une source inextricable de confusion radicale dans la recherche des lois réelles de la sociabili
5509 usion radicale dans la recherche des lois réelles de la sociabilité humaine, dont la marche fondamentale et toutes les mod
5510 dé sans doute par le principe purement littéraire de l’unité de composition, me paraît avoir d’avance senti instinctivemen
5511 te par le principe purement littéraire de l’unité de composition, me paraît avoir d’avance senti instinctivement les condi
5512 éraire de l’unité de composition, me paraît avoir d’ avance senti instinctivement les conditions logiques imposées par la n
5513 rit son appréciation historique à l’unique examen d’ une série homogène et continue, et néanmoins justement qualifiée d’uni
5514 ène et continue, et néanmoins justement qualifiée d’ universelle ; restriction éminemment judicieuse, qui lui a été si étra
5515 , qui lui a été si étrangement reprochée par tant d’ esprits antiphilosophiques, et vers laquelle nous ramène aujourd’hui e
5516 aujourd’hui essentiellement l’analyse approfondie de la marche intellectuelle propre à de telles études. Voilà pourquoi A
5517 approfondie de la marche intellectuelle propre à de telles études. Voilà pourquoi Auguste Comte bornera son étude à « l’
5518 omte bornera son étude à « l’explication spéciale de l’agent et du théâtre de l’évolution sociale la plus complète », à l’
5519 « l’explication spéciale de l’agent et du théâtre de l’évolution sociale la plus complète », à l’Europe. Et il exposera da
5520 aisons pour lesquelles « la race blanche possède, d’ une manière si prononcée, le privilège effectif du principal développe
5521  », tandis que « l’Europe a été le lien essentiel de cette civilisation prépondérante ». 184. Europa, Frankfurt a. Main
5522 p. 38 et 39. 185. Cf. p. 224. 186. Philosophie de l’Histoire, professée en dix-huit leçons publiques à Vienne, par F. d
5523 187. G. W. F. Hegel : Leçons sur la philosophie de l’histoire. Traduction par J. Gibelin, Éd. H. Vrin, Paris, 1946. 188
5524 tuttgarter Privatvorlesungen), 1810. 190. Cours de Philosophie Positive, 1830-42, tome V, Paris, 1894.
20 1961, Vingt-huit siècles d’Europe. Cinquième Partie. L’Ère des nations, (de 1848 à 1914) — 1. De l’harmonie entre les nations libérées à l’anarchie des États souverains
5525 1842), écrivait dans un ouvrage sur L’État actuel de l’Humanité les phrases suivantes, qu’on croirait d’aujourd’hui, et qu
5526 l’Humanité les phrases suivantes, qu’on croirait d’ aujourd’hui, et qui étaient vraies déjà en tant que diagnostic, bien q
5527 stic, bien que l’Histoire n’ait guère tenu compte de leur pronostic pendant le siècle qui suivit : Il ne s’agit plus aujo
5528 vit : Il ne s’agit plus aujourd’hui en politique de la balance de l’Europe, mais de l’avenir de l’humanité. Les guerres c
5529 ’agit plus aujourd’hui en politique de la balance de l’Europe, mais de l’avenir de l’humanité. Les guerres civiles de l’Eu
5530 ’hui en politique de la balance de l’Europe, mais de l’avenir de l’humanité. Les guerres civiles de l’Europe sont finies,
5531 tique de la balance de l’Europe, mais de l’avenir de l’humanité. Les guerres civiles de l’Europe sont finies, la rivalité
5532 is de l’avenir de l’humanité. Les guerres civiles de l’Europe sont finies, la rivalité des peuples qui la composent va s’é
5533 s’éloignant, comme s’éteignit, sous la domination d’ Alexandre, la rivalité des cités grecques… et de même, l’Europe commen
5534 il y a une Amérique, une Asie, une Afrique. C’est de l’unité de l’Europe contre ces masses et de la balance de ces masses
5535 Amérique, une Asie, une Afrique. C’est de l’unité de l’Europe contre ces masses et de la balance de ces masses entre elles
5536 C’est de l’unité de l’Europe contre ces masses et de la balance de ces masses entre elles, que l’homme doit à présent s’oc
5537 té de l’Europe contre ces masses et de la balance de ces masses entre elles, que l’homme doit à présent s’occuper.191 Jo
5538 nde. L’Europe représentait pour lui l’avant-garde de l’humanité, en tant que civilisation ; la France, l’avant-garde de l’
5539 tant que civilisation ; la France, l’avant-garde de l’Europe en tant que nation. Quant aux intérêts des individus dans ch
5540 ivilisation, et des civilisations dans l’ensemble de l’humanité, ils ne pouvaient finalement que converger au sein d’une a
5541 e, nous avons du Hegel. Pourquoi ce beau système d’ évolution globale vers l’harmonie de l’un et de divers a-t-il été brut
5542 beau système d’évolution globale vers l’harmonie de l’un et de divers a-t-il été brutalement démenti au terme même du pro
5543 me d’évolution globale vers l’harmonie de l’un et de divers a-t-il été brutalement démenti au terme même du processus d’ép
5544 té brutalement démenti au terme même du processus d’ épanouissement des grandes nations, qui était censé produire la paix,
5545 t la formation des « nationalités », comme autant d’ étapes nécessaires d’une dialectique de l’Esprit, s’est trouvé déchaîn
5546 nationalités », comme autant d’étapes nécessaires d’ une dialectique de l’Esprit, s’est trouvé déchaîner en fait des passio
5547 mme autant d’étapes nécessaires d’une dialectique de l’Esprit, s’est trouvé déchaîner en fait des passions que l’esprit ne
5548 exploiter et bientôt nationaliser au sens actuel de l’expression. De ce tragique malentendu, les poètes de la génération
5549 ntôt nationaliser au sens actuel de l’expression. De ce tragique malentendu, les poètes de la génération de 1848 furent le
5550 expression. De ce tragique malentendu, les poètes de la génération de 1848 furent les premières victimes, enthousiastes et
5551 tragique malentendu, les poètes de la génération de 1848 furent les premières victimes, enthousiastes et bernées. Ils cro
5552 gale liberté. Ils s’inspirent tous du messianisme de la Révolution française : libérer sa propre nation du joug des tyrans
5553 l’Europe et le genre humain… En fait, la liberté de la Nation, une fois acquise, ne sera rien que la souveraineté de l’Ét
5554 ne fois acquise, ne sera rien que la souveraineté de l’État qui s’en prévaudra. Et l’anarchie des souverainetés divinisées
5555 rande Dialectique idéaliste prévoyait l’avènement de la paix. Inaugurée par le traumatisme de la Révolution, imposée à tou
5556 vènement de la paix. Inaugurée par le traumatisme de la Révolution, imposée à toute l’Europe par les armées de Napoléon, l
5557 volution, imposée à toute l’Europe par les armées de Napoléon, l’ère des Nations a succédé à l’ère du cosmopolitisme des É
5558 a trouver grâce aux poètes nationaux et militants de 1848 ses traductions lyriques et populaires, en termes de liberté et
5559 s lyriques et populaires, en termes de liberté et de patriotisme. La « Sainte-Alliance des Peuples » va proclamer son utop
5560 able face à la politique courte mais « positive » de la Sainte-Alliance des rois. Puis les derniers saint-simoniens, les f
5561 iéristes, un agitateur italien, Mazzini, un poète de génie, Hugo, et un idéologue socialiste, Proudhon, essaieront de comb
5562 et un idéologue socialiste, Proudhon, essaieront de combler le vide laissé par le grand mythe du Saint-Empire, en proclam
5563 es « États-Unis d’Europe », substitut démocratisé de l’instance supérieure aux Nations. Hélas ! l’histoire réelle se passe
5564 -Simon aboutit entre autres au percement du canal de Suez, dont aussitôt la politique des États, après s’y être opposée, s
5565 ire des Quarante-huitards échoue dans les manuels d’ écoles primaires, et s’y dénature en nationalisme, culte laïque de l’É
5566 es, et s’y dénature en nationalisme, culte laïque de l’État. Le mouvement Jeune Europe, qui voulait utiliser les passions
5567 ulait utiliser les passions nationales au service de l’idée fédéraliste, voit l’inverse se réaliser. Jamais les idéaux n’o
5568 mieux démentis par les faits, ni mieux détournés de leurs buts. Jamais l’Europe qui crée par la révolution industrielle l
5569 ui crée par la révolution industrielle les moyens d’ unifier l’humanité, et qui en attendant, achève de la subjuguer par le
5570 d’unifier l’humanité, et qui en attendant, achève de la subjuguer par les armes, ne s’est montrée à la fois moins humanita
5571 e fait par les États et dans leur cadre au profit de leurs intérêts immédiats, mal calculés, et au détriment de cet équili
5572 les données. Et c’est pourquoi les grands esprits de la fin du xixe siècle, enregistrant cette dissolution de l’idéal eur
5573 n du xixe siècle, enregistrant cette dissolution de l’idéal européen, de Ranke à Renan et de Nietzsche à Sorel, aboutiron
5574 registrant cette dissolution de l’idéal européen, de Ranke à Renan et de Nietzsche à Sorel, aboutiront à une série de prop
5575 solution de l’idéal européen, de Ranke à Renan et de Nietzsche à Sorel, aboutiront à une série de prophéties uniformément
5576 n et de Nietzsche à Sorel, aboutiront à une série de prophéties uniformément pessimistes, quant à l’avenir de notre civili
5577 héties uniformément pessimistes, quant à l’avenir de notre civilisation. Voici les textes qui jalonnent, de Heine à George
5578 tre civilisation. Voici les textes qui jalonnent, de Heine à Georges Sorel, cette double évolution des idées et des faits,
5579 914. Citons d’abord une page très caractéristique de la révolution qui s’est opérée dans tous nos pays, entre 1789 et 1848
5580 tre 1789 et 1848, et qui s’annonçait dans l’œuvre de Herder. L’humanisme nouveau, celui qui inspire les fondateurs de l’in
5581 manisme nouveau, celui qui inspire les fondateurs de l’instruction publique obligatoire, se présente comme anticosmopolite
5582 ntons cette page, fut à la fois le grand pionnier de l’éducation populaire en Europe du Nord et l’initiateur d’un mouvemen
5583 ation populaire en Europe du Nord et l’initiateur d’ un mouvement religieux (dérivé du luthéranisme) qui marqua longuement
5584 ivé du luthéranisme) qui marqua longuement la vie de son pays. Poète, théologien, éducateur, et homme politique au surplus
5585 fois la pensée et l’action, et aussi le sentiment de son époque. Le monde que l’on nomme cultivé est victime d’une grave
5586 que. Le monde que l’on nomme cultivé est victime d’ une grave erreur sur la vie humaine et sur les conditions de son évolu
5587 e erreur sur la vie humaine et sur les conditions de son évolution éclairée, lorsqu’il se met à choyer l’idée que, parce q
5588 que toutes les différences entre les hommes sont de nature purement fortuite étant nées de l’habitude et des circonstance
5589 ommes sont de nature purement fortuite étant nées de l’habitude et des circonstances, en sorte qu’on ferait aussi bien de
5590 s circonstances, en sorte qu’on ferait aussi bien de les tenir toutes pour équivalentes, et que la pure humanité se manife
5591 alentes, et que la pure humanité se manifesterait d’ autant mieux que l’on négligerait davantage toute particularité. On ne
5592 à une autre et où l’on ne peut mener deux chevaux de la même façon, seule une sagesse démente prétendrait que l’on peut tr
5593 prétendrait que l’on peut traiter tous les hommes de la même manière, alors que bien au contraire la diversité est l’un de
5594 ontraire la diversité est l’un des biens suprêmes de la nature humaine… En dépit de cela, le siècle dernier a considéré qu
5595 a, le siècle dernier a considéré que l’excellence de la culture consistait à nier les différences entre Anglais, Français,
5596 en est résulté qu’aussitôt l’on a perdu la notion de ce qui distingue un sage d’un sot, l’intelligence du sentiment, voire
5597 ’on a perdu la notion de ce qui distingue un sage d’ un sot, l’intelligence du sentiment, voire l’homme de la femme. Mais l
5598 n sot, l’intelligence du sentiment, voire l’homme de la femme. Mais la vraie culture doit s’en tenir à ceci : de même que
5599 dont chacun parlait sa propre langue et montrait de nombreux traits qui lui étaient essentiellement propres. D’autant plu
5600 x traits qui lui étaient essentiellement propres. D’ autant plus courageusement un peuple défend ses particularités, d’auta
5601 urageusement un peuple défend ses particularités, d’ autant mieux la vie générale peut se déployer dans toutes les directio
5602 e peut se déployer dans toutes les directions, et d’ autant plus féconde sera l’influence que chacun pourra exercer sur les
5603 l ne faut pas confondre avec la section allemande de la « Jeune Europe » de Mazzini dont nous aurons à reparler. Point de
5604 avec la section allemande de la « Jeune Europe » de Mazzini dont nous aurons à reparler. Point de pensée européenne systé
5605 e » de Mazzini dont nous aurons à reparler. Point de pensée européenne systématique, chez Heine, mais une série de « point
5606 ropéenne systématique, chez Heine, mais une série de « pointes » alternées, — diastole lyrique, systole sardonique. L’idée
5607 s, — diastole lyrique, systole sardonique. L’idée de l’Europe, omniprésente dans ses œuvres, s’y manifeste par des observa
5608 ts et prophéties contradictoires, dont on tentera de communiquer le mouvement par quelques citations fort disparates. Au d
5609 s. Au début, Heine épouse l’idéologie herdérienne d’ une Europe des « nationalités » qu’il considère, un peu à la manière d
5610 manière de Fichte, comme une étape indispensable de l’évolution historique : Tous les peuples de l’Europe et du monde de
5611 ble de l’évolution historique : Tous les peuples de l’Europe et du monde devront traverser cette agonie, pour que la vie
5612 traverser cette agonie, pour que la vie surgisse de la mort et pour qu’à la nationalité païenne succède la fraternité chr
5613 cède la fraternité chrétienne.193 Sa conception de l’union des peuples est d’ailleurs très nettement fédéraliste : « har
5614 ître, chaque peuple lui paraissait être une corde de cette harpe géante, montée sur un ton particulier, et il percevait l’
5615 rticulier, et il percevait l’harmonie universelle de leurs sons différents.194 Mais ces élans lyriques ne l’empêchent pa
5616 s ces élans lyriques ne l’empêchent pas longtemps d’ exercer sa lucidité sur l’Europe telle qu’elle est, menacée à la fois
5617 est, menacée à la fois (dirait-on) par son excès de conscience et par son manque de vigilance, tantôt vieillard et tantôt
5618 on) par son excès de conscience et par son manque de vigilance, tantôt vieillard et tantôt vierge folle : Cette spiritual
5619 littérature européenne, est peut-être le symptôme d’ une proche agonie ; de même certains hommes deviennent voyants sur leu
5620 e certains hommes deviennent voyants sur leur lit de mort et, de leurs lèvres livides, laissent échapper des secrets de l’
5621 ommes deviennent voyants sur leur lit de mort et, de leurs lèvres livides, laissent échapper des secrets de l’au-delà. Ou
5622 urs lèvres livides, laissent échapper des secrets de l’au-delà. Ou faut-il penser que la vieille Europe est en train de ra
5623 ition du mourant, mais l’inquiétant pressentiment d’ une renaissance, le souffle spirituel d’un nouveau printemps ?195 Que
5624 sentiment d’une renaissance, le souffle spirituel d’ un nouveau printemps ?195 Quel que soit le comportement de la vierge
5625 eau printemps ?195 Quel que soit le comportement de la vierge Europe — elle peut veiller avec sagesse près de sa lampe ou
5626 s’endormir à côté de la lampe éteinte — nul jour de joie ne l’attend.196 Dans le poème intitulé Germania, Heine a ce no
5627 e poème intitulé Germania, Heine a ce nouvel élan d’ espoir : La vierge Europe est fiancée au beau génie de la Liberté : i
5628 oir : La vierge Europe est fiancée au beau génie de la Liberté : ils tendent amoureusement les bras pour un premier baise
5629 allemands. Elle a pour axe, ici et là, la passion d’ une liberté conçue tantôt comme celle du groupe populaire, de la « nat
5630 té conçue tantôt comme celle du groupe populaire, de la « nationalité » secouant le joug de tous les despotismes, politiqu
5631 populaire, de la « nationalité » secouant le joug de tous les despotismes, politiques ou spirituels, tantôt comme l’embras
5632 qués par Schiller. Quand Heine fait sienne l’idée de nation, c’est dans le sens mazzinien d’une « Internationale des natio
5633 ne l’idée de nation, c’est dans le sens mazzinien d’ une « Internationale des nationalistes » : c’est donc pour préserver l
5634 les diversités, contre les « terribles niveleurs de l’Europe » (« die furchtbarsten Nivelleurs Europas ») que sont les un
5635 Richelieu ou à la Robespierre, ou les « empereurs de la finance » à la Rothschild. Ce nivellement mortel, qui rendrait not
5636 rait notre monde invivable, serait l’issue fatale d’ une grande guerre franco-allemande, déclenchée par les idées révolutio
5637 emande, déclenchée par les idées révolutionnaires de Paris : Quel serait l’aboutissement de ce mouvement, dont Paris, com
5638 ionnaires de Paris : Quel serait l’aboutissement de ce mouvement, dont Paris, comme toujours, aurait donné le signal ? Ce
5639 erait la guerre, la plus épouvantable des guerres d’ anéantissement, qui enverrait dans l’arène les deux plus nobles peuple
5640 verrait dans l’arène les deux plus nobles peuples de la civilisation, causant leur perte à tous les deux ; je veux parler
5641 usant leur perte à tous les deux ; je veux parler de la France et de l’Allemagne… Le deuxième acte sera certainement la ré
5642 à tous les deux ; je veux parler de la France et de l’Allemagne… Le deuxième acte sera certainement la révolution europée
5643 mplacable entre les prolétaires et l’aristocratie de la propriété ; il ne sera alors question ni de nationalité ni de reli
5644 ie de la propriété ; il ne sera alors question ni de nationalité ni de religion ; il n’y aura qu’une seule patrie, la terr
5645  ; il ne sera alors question ni de nationalité ni de religion ; il n’y aura qu’une seule patrie, la terre, et qu’une seule
5646 pense qu’à la fin on écrasera la tête du serpent de mer et qu’on écorchera l’ours du Nord. Il n’y aura plus alors qu’un s
5647 ucoup de coups. Je conseille à nos petits-enfants de venir au monde avec la peau du dos fort épaisse.197 Cette curieuse
5648 ion ! En voici une autre version, dans une lettre de Heine écrite deux ans plus tôt. Ce qu’a dit Napoléon à Sainte-Hélène
5649 rageante prophétie !… Ce rêve n’est pas une bulle de savon qu’un souffle anéantit, mais en lui nous épie une possibilité t
5650 e possibilité terrible, pétrifiante comme la tête de Méduse. Quelle perspective ! Dans le meilleur des cas, mourir d’ennui
5651 le perspective ! Dans le meilleur des cas, mourir d’ ennui en tant que Républicain ! Pauvres petits-neveux !198 On sait qu
5652 les Russes des révoltes hongroises et polonaises de 1848. Ce fut l’équivalent de 1956, à tous égards, y compris la paraly
5653 roises et polonaises de 1848. Ce fut l’équivalent de 1956, à tous égards, y compris la paralysie politique de nos États, d
5654 , à tous égards, y compris la paralysie politique de nos États, demeurés pratiquement insensibles au soulèvement de l’opin
5655 demeurés pratiquement insensibles au soulèvement de l’opinion unanime. Voici deux textes brefs comme deux cris, échappés
5656 ux textes brefs comme deux cris, échappés au chef de la révolte hongroise, Lajos Kossuth (1802-1894), qui put émigrer en E
5657 même ; car elle ne peut devenir que l’avant-garde de la monarchie universelle de la Russie.199 Et Petöfi, dans son poème
5658 nir que l’avant-garde de la monarchie universelle de la Russie.199 Et Petöfi, dans son poème de 1848 intitulé Silence de
5659 elle de la Russie.199 Et Petöfi, dans son poème de 1848 intitulé Silence de l’Europe : L’Europe se tait… Honte à cette
5660 t Petöfi, dans son poème de 1848 intitulé Silence de l’Europe : L’Europe se tait… Honte à cette Europe silencieuse Et qui
5661 1798-1855) il élève la plainte séculaire des pays de l’Est européen périodiquement « libérés » par les Russes. Voici quelq
5662 libérés » par les Russes. Voici quelques strophes de son grand poème intitulé Le Livre des Pèlerins 200 : Lorsque la Libe
5663 e criai vers toi, nation, afin d’avoir un morceau de fer pour défense et une poignée de poudre, et toi tu m’as donné un ar
5664 oir un morceau de fer pour défense et une poignée de poudre, et toi tu m’as donné un article de gazette. Mais cette nation
5665 oignée de poudre, et toi tu m’as donné un article de gazette. Mais cette nation répondra : Quand m’avez-vous appelée ? Et
5666 t la Liberté répondra : J’ai appelé par la bouche de ces pèlerins, et tu ne m’as pas écoutée ; va donc en servitude, là où
5667 sère, et je t’ai demandé, ô nation, la protection de tes lois et des secours, et toi tu m’as jeté des ordonnances. Et la n
5668 berté répondra : Je suis venue à toi sous l’habit de ces pèlerins, et tu m’as méprisée ; va donc dans la servitude là où i
5669 re pèlerinage sera pour les Puissances une pierre d’ achoppement. Les Puissances ont rejeté votre pierre de l’édifice europ
5670 hoppement. Les Puissances ont rejeté votre pierre de l’édifice européen, et voici que cette pierre deviendra la pierre ang
5671 e pierre deviendra la pierre angulaire et la clef de voûte de l’édifice futur ; et celui sur qui elle tombera, elle l’écra
5672 deviendra la pierre angulaire et la clef de voûte de l’édifice futur ; et celui sur qui elle tombera, elle l’écrasera et c
5673 econnaîtra plus. « Aujourd’hui, l’Occident meurt de ses doctrines ! » s’écriait le Polonais, désespérant pour sa patrie.
5674 sa patrie. Les Italiens, qui se sentent au seuil de leur indépendance, prennent une vue beaucoup moins pessimiste de l’Eu
5675 dance, prennent une vue beaucoup moins pessimiste de l’Europe. Ainsi Vincenzo Gioberti (1801-1852). Philosophe et théologi
5676 que, qui fut mêlé aux conspirations républicaines de 1833, exilé à Paris et Bruxelles, puis réhabilité par le Piémont dont
5677 e, Gioberti fut un néo-guelfe. Il voulait l’union de l’Italie et il voulait aussi l’union de l’Europe : l’une étant condit
5678 t l’union de l’Italie et il voulait aussi l’union de l’Europe : l’une étant condition de l’autre. À ses yeux, l’Italie (« 
5679 aussi l’union de l’Europe : l’une étant condition de l’autre. À ses yeux, l’Italie (« cet Orient de l’Occident ») devait j
5680 on de l’autre. À ses yeux, l’Italie (« cet Orient de l’Occident ») devait jouer pour l’Europe le rôle de nation-guide, sou
5681 l’Occident ») devait jouer pour l’Europe le rôle de nation-guide, sous la haute direction du pape, Rome devenant la métro
5682 ute direction du pape, Rome devenant la métropole d’ un monde au sein duquel toutes les « nationalités » politiques et spir
5683 rdant leur diversité, entreraient dans un rapport d’ union « dialectique » : « La dictature du Pontife, chargé de la direct
5684 dialectique » : « La dictature du Pontife, chargé de la direction politique de l’Italie et de l’organisation de l’Europe,
5685 ture du Pontife, chargé de la direction politique de l’Italie et de l’organisation de l’Europe, avait pour but d’instituer
5686 , chargé de la direction politique de l’Italie et de l’organisation de l’Europe, avait pour but d’instituer les différente
5687 ection politique de l’Italie et de l’organisation de l’Europe, avait pour but d’instituer les différentes chrétientés nati
5688 et de l’organisation de l’Europe, avait pour but d’ instituer les différentes chrétientés nationales », écrivait-il en 184
5689 -il en 1843, dans un ouvrage publié à Bruxelles : De la primauté morale et civile des Italiens, que l’on appelle en Italie
5690 il donnait la formule du passage « dialectique » de la cité à la nation, puis à l’Europe et au monde : Le Christ, en fix
5691 n fixant à la civilisation l’ultime but terrestre d’ unifier la grande famille des humains, suggéra l’idée dialectique de n
5692 e famille des humains, suggéra l’idée dialectique de nation, qui est, si l’on peut dire, la cité agrandie et l’humanité en
5693 et l’humanité en petit… Le même concept unitaire de l’Europe, sorte de confédération amphictionique des nations chrétienn
5694 etit… Le même concept unitaire de l’Europe, sorte de confédération amphictionique des nations chrétiennes et dernière étap
5695 ionique des nations chrétiennes et dernière étape de ce processus d’unification qui tend à embrasser tout le genre humain,
5696 ons chrétiennes et dernière étape de ce processus d’ unification qui tend à embrasser tout le genre humain, n’eut pas d’aut
5697 tend à embrasser tout le genre humain, n’eut pas d’ autre origine. Et il ajoutait dans Rinnovamento : Tout peuple divisé
5698 appel se réfère à l’Europe. Au reste, il donnait de l’Europe la définition classique formulée d’abord par les Grecs, véri
5699 rd par les Grecs, véritables ancêtres, selon lui, de notre « idée européenne » : L’Europe est la première partie du monde
5700 ctique du genre humain aussi bien du point de vue de la situation géographique que de celui du climat ou de la race. Ce fa
5701 du point de vue de la situation géographique que de celui du climat ou de la race. Ce fait apparaît clairement si on cons
5702 situation géographique que de celui du climat ou de la race. Ce fait apparaît clairement si on considère sa structure ent
5703 airement si on considère sa structure entrecoupée de mers et de grands fleuves, ou sa température intermédiaire entre cell
5704 on considère sa structure entrecoupée de mers et de grands fleuves, ou sa température intermédiaire entre celle du Colure
5705 mes latitudes. Ce même fait peut se déduire aussi de la qualité de la race, qui est blanche, japhétique, et qui appartient
5706 Ce même fait peut se déduire aussi de la qualité de la race, qui est blanche, japhétique, et qui appartient à la branche
5707 la branche principale des Indo-pélages ; ou enfin de la religion, qui est le christianisme, père de cette civilisation adu
5708 in de la religion, qui est le christianisme, père de cette civilisation adulte qui marche à grands pas vers la conquête de
5709 n adulte qui marche à grands pas vers la conquête de la paix et la concorde dans le monde. Sa supériorité [de l’Europe] pr
5710 aix et la concorde dans le monde. Sa supériorité [ de l’Europe] provient de la variété et de l’opposition de ses composante
5711 s le monde. Sa supériorité [de l’Europe] provient de la variété et de l’opposition de ses composantes, qui sont harmonisée
5712 périorité [de l’Europe] provient de la variété et de l’opposition de ses composantes, qui sont harmonisées par l’unité dom
5713 Europe] provient de la variété et de l’opposition de ses composantes, qui sont harmonisées par l’unité dominante de la rac
5714 antes, qui sont harmonisées par l’unité dominante de la race et des rites chrétiens, puisque la valeur de chaque force cré
5715 la race et des rites chrétiens, puisque la valeur de chaque force créée naît du concours de deux moments dialectiques, à s
5716 la valeur de chaque force créée naît du concours de deux moments dialectiques, à savoir de l’opposition des contraires et
5717 u concours de deux moments dialectiques, à savoir de l’opposition des contraires et de leur nature conciliante. L’Europe,
5718 iques, à savoir de l’opposition des contraires et de leur nature conciliante. L’Europe, du point de vue du droit constitut
5719 ée ; ce qui revient à dire qu’elle est un composé de plusieurs États qui ont besoin d’une union réciproque (sans perdre po
5720 est un composé de plusieurs États qui ont besoin d’ une union réciproque (sans perdre pour autant leur individualité), mai
5721 , ils sont désunis et opposés par bien des foyers de haine et discorde réciproque.201 La Pologne et la Hongrie sont des
5722 ationale se confonde irrésistiblement avec l’idée de liberté et s’harmonise avec l’idée d’une Europe unie : une nation en
5723 avec l’idée de liberté et s’harmonise avec l’idée d’ une Europe unie : une nation en devenir n’a pas encore d’intérêts « tr
5724 urope unie : une nation en devenir n’a pas encore d’ intérêts « traditionnels » qui l’opposent au plus vaste ensemble. Mais
5725 sent au plus vaste ensemble. Mais qu’en sera-t-il de la France et de l’Espagne, ces aînées, ces modèles de l’État national
5726 te ensemble. Mais qu’en sera-t-il de la France et de l’Espagne, ces aînées, ces modèles de l’État national fortement const
5727 a France et de l’Espagne, ces aînées, ces modèles de l’État national fortement constitué et qui ne veut rien devoir à pers
5728 Les deux cas sont très différents. Car la France de 1848 se considère comme une nation qui vient de renaître, dans une Eu
5729 , dans une Europe rénovée par les principes mêmes de sa révolution ; tandis que l’Espagne ne voit dans ces principes étend
5730 es et des Méditations, mais l’historien (peu sûr) de la Révolution et l’homme d’État éloquent du gouvernement provisoire d
5731 ’homme d’État éloquent du gouvernement provisoire de 1848, partisan d’un régime « sincèrement progressiste et énergiquemen
5732 uent du gouvernement provisoire de 1848, partisan d’ un régime « sincèrement progressiste et énergiquement conservateur ».
5733 ns tous ses discours, exaltant le rôle libérateur de la France des deux révolutions, il se réfère à l’Europe comme à une v
5734 gouvernement provisoire établi par la révolution de février 1848, Lamartine adresse aux agents diplomatiques français un
5735 02 destiné à rassurer l’Europe sur les intentions de la France nouvelle. L’idée de l’harmonie des Nations au bénéfice de l
5736 sur les intentions de la France nouvelle. L’idée de l’harmonie des Nations au bénéfice de l’ensemble européen y revient a
5737 lle. L’idée de l’harmonie des Nations au bénéfice de l’ensemble européen y revient avec insistance : En 1792, les idées d
5738 n y revient avec insistance : En 1792, les idées de la France et de l’Europe n’étaient pas préparées à comprendre et à ac
5739 insistance : En 1792, les idées de la France et de l’Europe n’étaient pas préparées à comprendre et à accepter la grande
5740 du siècle qui finissait n’était que dans la tête de quelques philosophes. La philosophie est populaire aujourd’hui. Cinqu
5741 ophie est populaire aujourd’hui. Cinquante années de liberté de penser, de parler et d’écrire, ont produit leur résultat.
5742 opulaire aujourd’hui. Cinquante années de liberté de penser, de parler et d’écrire, ont produit leur résultat. Les livres,
5743 jourd’hui. Cinquante années de liberté de penser, de parler et d’écrire, ont produit leur résultat. Les livres, les journa
5744 nquante années de liberté de penser, de parler et d’ écrire, ont produit leur résultat. Les livres, les journaux, les tribu
5745 les journaux, les tribunes ont opéré l’apostolat de l’intelligence européenne. La raison, rayonnant de partout, par-dessu
5746 e l’intelligence européenne. La raison, rayonnant de partout, par-dessus les frontières des peuples, a créé entre les espr
5747 nationalité intellectuelle qui sera l’achèvement de la Révolution française et la constitution de la fraternité internati
5748 ent de la Révolution française et la constitution de la fraternité internationale sur le globe… La République exercera, pa
5749 ur le globe… La République exercera, par la lueur de ses idées, par le spectacle d’ordre et de paix qu’elle espère donner
5750 cera, par la lueur de ses idées, par le spectacle d’ ordre et de paix qu’elle espère donner au monde, le seul et honnête pr
5751 a lueur de ses idées, par le spectacle d’ordre et de paix qu’elle espère donner au monde, le seul et honnête prosélytisme,
5752 le seul et honnête prosélytisme, le prosélytisme de l’estime et de la sympathie. Ce n’est point là la guerre, c’est la na
5753 nête prosélytisme, le prosélytisme de l’estime et de la sympathie. Ce n’est point là la guerre, c’est la nature. Ce n’est
5754 e, c’est la nature. Ce n’est point là l’agitation de l’Europe, c’est la vie. Ce n’est point là incendier le monde, c’est b
5755 n’est point là incendier le monde, c’est briller de sa place sur l’horizon des peuples pour les devancer et les guider à
5756 r à la fois. Dans le même esprit, mais avec plus de profondeur, l’historien Jules Michelet (1798-1874) exaltait « l’intim
5757 qui devait unir toutes les parties constituantes de l’Europe, et tous les patriotismes, si « unique » que chacun d’eux se
5758 t tous les patriotismes, si « unique » que chacun d’ eux se conçût : Ce qu’il y a de moins simple, de moins naturel, de pl
5759 ique » que chacun d’eux se conçût : Ce qu’il y a de moins simple, de moins naturel, de plus artificiel, c’est-à-dire de m
5760 d’eux se conçût : Ce qu’il y a de moins simple, de moins naturel, de plus artificiel, c’est-à-dire de moins fatal, de pl
5761 e moins naturel, de plus artificiel, c’est-à-dire de moins fatal, de plus humain et de plus libre dans le monde, c’est l’E
5762 go qu’il appartiendra, bien des années plus tard, d’ opérer la « transfiguration » des idéaux de 1848 en un européisme et e
5763 tard, d’opérer la « transfiguration » des idéaux de 1848 en un européisme et en un mondialisme sublimes, achevant ainsi —
5764 mantisme politique. Parce qu’il n’est pas suspect de nationalisme borné, et parce qu’il fut au xixe siècle, le prophète l
5765 l fut au xixe siècle, le prophète le plus exalté de l’union européenne, ses déclarations réitérées sur l’avenir européen
5766 ses déclarations réitérées sur l’avenir européen de sa patrie illustrent mieux que toute autre la grandiose ambiguïté de
5767 rent mieux que toute autre la grandiose ambiguïté de l’idée nationale. Cette généreuse et sincère volonté de se perdre dan
5768 dée nationale. Cette généreuse et sincère volonté de se perdre dans l’universel, de se transfigurer en Europe et en monde
5769 et sincère volonté de se perdre dans l’universel, de se transfigurer en Europe et en monde ne sera-t-elle pas nécessaireme
5770 interprétée par les autres comme un désir secret de gagner tout l’univers au style de vie et de pensée d’une « nation mèr
5771 un désir secret de gagner tout l’univers au style de vie et de pensée d’une « nation mère » ? Parlant des « sauvages » de
5772 ecret de gagner tout l’univers au style de vie et de pensée d’une « nation mère » ? Parlant des « sauvages » de l’empire f
5773 agner tout l’univers au style de vie et de pensée d’ une « nation mère » ? Parlant des « sauvages » de l’empire français qu
5774 d’une « nation mère » ? Parlant des « sauvages » de l’empire français qui viennent contempler à Paris l’exposition univer
5775 nnent contempler à Paris l’exposition universelle de 1867, il a des phrases qui découragent la critique : Ces yeux saturé
5776 s qui découragent la critique : Ces yeux saturés de nuit viennent regarder la vérité… Ils savent qu’il existe un peuple d
5777 rder la vérité… Ils savent qu’il existe un peuple de réconciliation… une nation ouverte, qui appelle chez elle quiconque e
5778 lle chez elle quiconque est frère ou veut l’être. De leur côté, invasion ; du côté de la France, expansion. Sur ce thème
5779 oici quelques pages inspirées : La France a cela d’ admirable qu’elle est destinée à mourir, mais à mourir comme les dieux
5780 tre en constellation ; les autres peuples, astres de deuxième grandeur, se groupent autour de lui, et c’est ainsi qu’Athèn
5781 urera et deviendra le monde humain. La révolution de France s’appellera l’évolution des peuples. Pourquoi ? Parce que la F
5782 ce que la France le mérite ; parce qu’elle manque d’ égoïsme, parce qu’elle ne travaille pas pour elle seule, parce qu’elle
5783 pas pour elle seule, parce qu’elle] est créatrice d’ espérances universelles, parce qu’elle représente toute la bonne volon
5784 ulement des sœurs, elle est mère. Cette maternité de la généreuse France éclate dans tous les phénomènes sociaux de ce tem
5785 se France éclate dans tous les phénomènes sociaux de ce temps ; les autres peuples lui font ses malheurs, elle leur fait l
5786 tte nation sera grande, ce qui ne l’empêchera pas d’ être libre. Elle sera illustre, riche, pensante, pacifique, cordiale a
5787 re, riche, pensante, pacifique, cordiale au reste de l’humanité. Elle aura la gravité douce d’une aînée. […] Cette nation
5788 u reste de l’humanité. Elle aura la gravité douce d’ une aînée. […] Cette nation aura pour capitale Paris, et ne s’appeller
5789 uoi assiste le xixe siècle, c’est à la formation de l’Europe.205 Enfin, dans son discours pour saluer l’Exposition univ
5790 son discours pour saluer l’Exposition universelle de 1867, à Paris206, Hugo s’élève à des sommets d’éloquence d’où l’on vo
5791 e de 1867, à Paris206, Hugo s’élève à des sommets d’ éloquence d’où l’on voit l’Europe elle-même se fondre dans l’immensité
5792 Paris206, Hugo s’élève à des sommets d’éloquence d’ où l’on voit l’Europe elle-même se fondre dans l’immensité de l’humani
5793 oit l’Europe elle-même se fondre dans l’immensité de l’humanité la plus moderne. Voici l’exorde : Que l’Europe soit la bi
5794 u’elle entre chez elle. Qu’elle prenne possession de ce Paris qui lui appartient, et auquel elle appartient ! Qu’elle ait
5795 qu’elle respire à pleins poumons dans cette ville de tous et pour tous, qui a le privilège de faire des actes européens !
5796 te ville de tous et pour tous, qui a le privilège de faire des actes européens ! c’est d’ici que sont parties toutes les h
5797 ici que sont parties toutes les hautes impulsions de l’esprit du xixe siècle ; c’est ici que s’est tenu, magnifique spect
5798 ue spectacle contemporain, pendant trente-six ans de liberté, le concile des intelligences ; c’est ici qu’ont été posées,
5799 nt été posées, débattues et résolues dans le sens de la délivrance, toutes les grandes questions de cette époque : droit d
5800 ns de la délivrance, toutes les grandes questions de cette époque : droit de l’individu, base et point de départ du droit
5801 tes les grandes questions de cette époque : droit de l’individu, base et point de départ du droit social, droit du travail
5802 cette époque : droit de l’individu, base et point de départ du droit social, droit du travail, droit de la femme, droit de
5803 e départ du droit social, droit du travail, droit de la femme, droit de l’enfant, abolition de l’ignorance, abolition de l
5804 ocial, droit du travail, droit de la femme, droit de l’enfant, abolition de l’ignorance, abolition de la misère, abolition
5805 , droit de la femme, droit de l’enfant, abolition de l’ignorance, abolition de la misère, abolition du glaive sous toutes
5806 de l’enfant, abolition de l’ignorance, abolition de la misère, abolition du glaive sous toutes ses formes, inviolabilité
5807 n du glaive sous toutes ses formes, inviolabilité de la vue humaine. Comme les glaciers, qui ont on ne sait quelle chastet
5808 ont on ne sait quelle chasteté grandiose, et qui, d’ un mouvement insensible, mais irrésistible et inconnu, rejettent sur l
5809 es immondices, la voirie, les abattoirs, la peine de mort. Et voici la péroraison : Ô France, adieu ! tu es trop grande
5810 op grande pour n’être qu’une patrie. On se sépare de sa mère qui devient déesse. Encore un peu de temps, et tu t’évanouira
5811 auguste à cette heure comme l’effacement visible de ta frontière. Résigne-toi à ton immensité. Adieu Peuple ! Salut Homme
5812 elle entend rester ce qu’elle fut, même diminuée de son empire américain, n’espérant rien du Progrès, ni de la Science, n
5813 empire américain, n’espérant rien du Progrès, ni de la Science, ni de la Démocratie sociale, ni du mouvement de l’Histoir
5814 n’espérant rien du Progrès, ni de la Science, ni de la Démocratie sociale, ni du mouvement de l’Histoire, et encore moins
5815 nce, ni de la Démocratie sociale, ni du mouvement de l’Histoire, et encore moins de la Liberté, mais plaçant toute sa foi
5816 e, ni du mouvement de l’Histoire, et encore moins de la Liberté, mais plaçant toute sa foi terrestre et politique dans un
5817 ), le nationalisme le plus hautain prend la forme d’ un antijacobinisme et d’un antiromantisme absolus : ce n’est pas une i
5818 us hautain prend la forme d’un antijacobinisme et d’ un antiromantisme absolus : ce n’est pas une idéologie libertaire qui
5819 lent et simpliste que chez Hugo, mais il a changé de signe. Voici, en quelques phrases, tirées de deux lettres à Montalemb
5820 angé de signe. Voici, en quelques phrases, tirées de deux lettres à Montalembert, toute la philosophie de l’Objecteur le p
5821 deux lettres à Montalembert, toute la philosophie de l’Objecteur le plus total aux idéaux politiques de 1848 : Je crois q
5822 e l’Objecteur le plus total aux idéaux politiques de 1848 : Je crois que la civilisation catholique contient le bien sans
5823 lisation catholique contient le bien sans mélange de mal, et que la civilisation philosophique contient le mal sans mélang
5824 sation philosophique contient le mal sans mélange de bien… Si je considère la civilisation catholique dans sa réalité hist
5825 je dirai que ses imperfections venant uniquement de sa combinaison avec la liberté humaine, le véritable progrès aurait c
5826 ne voie différente. En donnant pour mort l’empire de la foi, et en proclamant l’indépendance de la raison et de la volonté
5827 empire de la foi, et en proclamant l’indépendance de la raison et de la volonté de l’homme, elle a rendu absolu, universel
5828 , et en proclamant l’indépendance de la raison et de la volonté de l’homme, elle a rendu absolu, universel et nécessaire l
5829 mant l’indépendance de la raison et de la volonté de l’homme, elle a rendu absolu, universel et nécessaire le mal, qui éta
5830 elatif, exceptionnel et contingent. Cette période de rapide rétrogradation a commencé en Europe avec la restauration du pa
5831 e politique. Aujourd’hui le monde est à la veille de la dernière de ces restaurations : la restauration du paganisme socia
5832 jourd’hui le monde est à la veille de la dernière de ces restaurations : la restauration du paganisme socialiste… L’histoi
5833 ’une consiste à conformer la raison et la volonté de l’homme à l’élément divin, et l’autre à laisser de côté l’élément div
5834 e l’homme à l’élément divin, et l’autre à laisser de côté l’élément divin et à proclamer l’indépendance et la souveraineté
5835 et à proclamer l’indépendance et la souveraineté de l’élément humain… Du reste ce grand retour en arrière était dans la l
5836 continu, la terre aurait fini par être le paradis de l’homme, et Dieu a voulu que la terre fût une vallée de larmes. Dieu
5837 omme, et Dieu a voulu que la terre fût une vallée de larmes. Dieu aurait été socialiste. Alors qu’eût été Proudhon ? Chacu
5838 le rencontrer jamais, un paradis dans une vallée de larmes, et Dieu plaçant cette vallée de larmes entre deux paradis, po
5839 ne vallée de larmes, et Dieu plaçant cette vallée de larmes entre deux paradis, pour que l’homme puisse se trouver toujour
5840 ique hugolienne n’empêche nullement Donoso Cortès de porter sur l’Europe politique des jugements d’une lucidité cruelle. D
5841 ès de porter sur l’Europe politique des jugements d’ une lucidité cruelle. Dans son célèbre discours « Sur la situation gén
5842 son célèbre discours « Sur la situation générale de l’Europe » prononcé à la Chambre des Députés d’Espagne le 30 janvier
5843 e de l’Europe » prononcé à la Chambre des Députés d’ Espagne le 30 janvier 1850, il n’annonce pas, comme le fera Hugo, la p
5844 tés qu’il faut redouter et que les meneurs du jeu de l’Histoire laissent monter : La cause de toutes vos erreurs, messieu
5845 du jeu de l’Histoire laissent monter : La cause de toutes vos erreurs, messieurs (l’orateur s’adresse aux bancs de la ga
5846 erreurs, messieurs (l’orateur s’adresse aux bancs de la gauche), c’est que vous ignorez la marche de la civilisation et du
5847 s de la gauche), c’est que vous ignorez la marche de la civilisation et du monde. Vous croyez, vous autres, que la civilis
5848 t. Le monde marche à grands pas à la constitution d’ un despotisme, le plus gigantesque et le plus terrible que les hommes
5849 . Et pour annoncer ces choses, je n’ai pas besoin d’ être prophète ; il me suffit de considérer l’ensemble des événements h
5850 je n’ai pas besoin d’être prophète ; il me suffit de considérer l’ensemble des événements humains de leur seul et vrai poi
5851 t de considérer l’ensemble des événements humains de leur seul et vrai point de vue, je veux dire des hauteurs catholiques
5852 ons hier, ce que nous sommes depuis la révolution de février. Depuis cette révolution de formidable mémoire, il n’y a plus
5853 la révolution de février. Depuis cette révolution de formidable mémoire, il n’y a plus rien de solide, plus rien de sûr en
5854 olution de formidable mémoire, il n’y a plus rien de solide, plus rien de sûr en Europe… Voyez l’état de l’Europe. Il semb
5855 mémoire, il n’y a plus rien de solide, plus rien de sûr en Europe… Voyez l’état de l’Europe. Il semble que tous les chefs
5856 solide, plus rien de sûr en Europe… Voyez l’état de l’Europe. Il semble que tous les chefs d’État ont perdu le don de con
5857 semble que tous les chefs d’État ont perdu le don de conseil ; la raison humaine subit des éclipses, les institutions subi
5858 ons subissent des bouleversements, et les nations de grandes et soudaines décadences. Jetez, messieurs, jetez avec moi les
5859 messieurs, jetez avec moi les yeux sur l’Europe, de la Pologne au Portugal, et dites-moi, la main sur la conscience, dite
5860 t dites-moi, la main sur la conscience, dites-moi de bonne foi si vous rencontrez une seule société qui puisse dire : Je s
5861 les concentrées et portées à leur plus haut degré de puissance, ont suffi à peine, et n’ont rien fait de plus que suffire
5862 ance qu’elle n’a pas le moindre danger à redouter de ce côté. L’influence que la Russie exerçait en Europe, messieurs, ell
5863 la Russie ne pouvait, en aucun cas, s’accommoder d’ avoir en face d’elle un empire allemand et toutes les races allemandes
5864 emandes réunies. La Confédération se composa donc de principautés microscopiques et de deux grandes monarchies. Qu’est-ce
5865 se composa donc de principautés microscopiques et de deux grandes monarchies. Qu’est-ce qui convenait dans l’hypothèse d’u
5866 archies. Qu’est-ce qui convenait dans l’hypothèse d’ une guerre en France ? Ce qui convenait à la Russie, c’était que ces m
5867 messieurs, comment il est arrivé que l’influence de la Russie, depuis la formation de la Confédération jusqu’à la révolut
5868 que l’influence de la Russie, depuis la formation de la Confédération jusqu’à la révolution de février, s’est étendue de S
5869 rmation de la Confédération jusqu’à la révolution de février, s’est étendue de Saint-Pétersbourg à Paris. Mais depuis la r
5870 n jusqu’à la révolution de février, s’est étendue de Saint-Pétersbourg à Paris. Mais depuis la révolution de février les c
5871 nt-Pétersbourg à Paris. Mais depuis la révolution de février les choses ont changé de face ; la tempête révolutionnaire a
5872 is la révolution de février les choses ont changé de face ; la tempête révolutionnaire a jeté bas les trônes, traîné dans
5873 aos. C’est vous dire, messieurs, qu’à l’influence de la Russie, qui s’étendait de Saint-Pétersbourg à Paris, a succédé l’i
5874 rs, qu’à l’influence de la Russie, qui s’étendait de Saint-Pétersbourg à Paris, a succédé l’influence démagogique de Paris
5875 sbourg à Paris, a succédé l’influence démagogique de Paris, qui s’étend jusqu’en Pologne… Ce n’est pas mon opinion cependa
5876 nion cependant que l’Europe n’ait rien à redouter de la Russie ; je crois tout le contraire ; mais pour que la Russie acce
5877 une guerre générale, pour que la Russie s’empare de l’Europe, il faut auparavant les trois événements que je vais dire, l
5878 ’à cette angoisse, tout patriotisme meurt au cœur de l’homme ; en troisième heu, il faut que se réalise la confédération p
5879 il faut que se réalise la confédération puissante de tous les peuples slaves sous l’influence et le protectorat de la Russ
5880 peuples slaves sous l’influence et le protectorat de la Russie. Les nations slaves comptent, messieurs, 80 millions d’habi
5881 s nations slaves comptent, messieurs, 80 millions d’ habitants. Eh bien, lorsque la révolution aura détruit en Europe les a
5882 int le patriotisme en Europe, lorsque, à l’orient de l’Europe, se sera accomplie la grande fédération des peuples slaves ;
5883 s spoliés et celle des spoliateurs, alors l’heure de la Russie sonnera ; alors la Russie pourra se promener tranquillement
5884 oire, ce châtiment épouvantable sera le châtiment de l’Angleterre. 191. Théodore Jouffroy : De l’État actuel de l’Human
5885 ment de l’Angleterre. 191. Théodore Jouffroy : De l’État actuel de l’Humanité, mélanges philosophiques, Bruxelles, 1834
5886 rre. 191. Théodore Jouffroy : De l’État actuel de l’Humanité, mélanges philosophiques, Bruxelles, 1834. 192. An Gustav
5887 192. An Gustav Kolb, Florenz, 11-11-1828. 193. De la Pologne, in Œuvres complètes, Patries et Portraits, Paris, 1868.
5888 rie, Bruxelles, 1859. 200. Chap. XXII : La Cause de la Liberté des peuples. 201. Prolegomeni al Primato. 202. Parfois
5889 i al Primato. 202. Parfois désigné sous le titre de Manifeste à l’Europe, cf. Gollwitzer, op. cit., p. 323. 203. J. Mic
5890 89 et 295. 206. Article intitulé : « Déclaration de Paix », 1867, op. cit., tome IV, p. 349-350, 351. 365. 207. Lettres
5891 it., tome IV, p. 349-350, 351. 365. 207. Lettres de M. Donoso Cortès sur l’Avenir de la Société Nouvelle, à M. le comte d
5892 5. 207. Lettres de M. Donoso Cortès sur l’Avenir de la Société Nouvelle, à M. le comte de Montalembert, 26 mai et 4 juin
5893 ur l’Avenir de la Société Nouvelle, à M. le comte de Montalembert, 26 mai et 4 juin 1849.
21 1961, Vingt-huit siècles d’Europe. Cinquième Partie. L’Ère des nations, (de 1848 à 1914) — 2. Un idéal de compensation : les États-Unis d’Europe
5894 2.Un idéal de compensation : les États-Unis d’Europe Quel fut le premier auteur d
5895 États-Unis d’Europe Quel fut le premier auteur de l’expression ? Cattaneo ? Cobden ? Mazzini ? ou Hugo ? Un obscur orat
5896  ? Cobden ? Mazzini ? ou Hugo ? Un obscur orateur de la « campagne des Banquets », qui préluda en 1847 à la révolution, ou
5897 en 1847 à la révolution, ou le rédacteur anonyme d’ un article du Moniteur daté du 26 février 1848208 ? Les historiens hés
5898 génies collectifs. Le recours à l’Europe mystique d’ un Lamartine ne serait plus qu’une clause de style dès qu’au nom de le
5899 tique d’un Lamartine ne serait plus qu’une clause de style dès qu’au nom de leurs intérêts les États refuseraient de jouer
5900 u’au nom de leurs intérêts les États refuseraient de jouer le beau jeu de la dialectique idéaliste. D’où le besoin d’une s
5901 érêts les États refuseraient de jouer le beau jeu de la dialectique idéaliste. D’où le besoin d’une souveraineté nouvelle,
5902 de jouer le beau jeu de la dialectique idéaliste. D’ où le besoin d’une souveraineté nouvelle, d’une instance supérieure au
5903 u jeu de la dialectique idéaliste. D’où le besoin d’ une souveraineté nouvelle, d’une instance supérieure aux États, d’une
5904 iste. D’où le besoin d’une souveraineté nouvelle, d’ une instance supérieure aux États, d’une Europe fédérale plus efficace
5905 té nouvelle, d’une instance supérieure aux États, d’ une Europe fédérale plus efficace et franche que « l’Europe des nation
5906 ploitée par les politiciens aux courtes ruses. Né d’ une angoisse prémonitoire, le mot d’ordre des « États-Unis d’Europe »
5907  États-Unis d’Europe » n’est en somme qu’un idéal de compensation. Sauf peut-être chez Proudhon, il ne prend pas la suite
5908 chez Proudhon, il ne prend pas la suite des plans de paix européenne que nous avons cités plus haut, de Pierre Dubois à Sa
5909 e paix européenne que nous avons cités plus haut, de Pierre Dubois à Saint-Simon. Il essaie plutôt de conjurer les méfaits
5910 de Pierre Dubois à Saint-Simon. Il essaie plutôt de conjurer les méfaits pressentis de passions nationales qu’on a trop l
5911 essaie plutôt de conjurer les méfaits pressentis de passions nationales qu’on a trop lyriquement célébrées pour oser s’y
5912 économiste, mais aussi chef des insurgés milanais de mars 1848, n’a pas été amené à l’idée européenne par un élan passionn
5913 e par un élan passionnel ni par la logique idéale d’ une construction à la Hegel. Nous assistons avec lui à la découverte e
5914 Nous assistons avec lui à la découverte empirique d’ une réalité européenne sous-jacente, seule assez vaste et assez bien d
5915 vaste et assez bien délimitée pour rendre compte de la naissance et de l’interaction des complexes d’intérêts qu’il étudi
5916 n délimitée pour rendre compte de la naissance et de l’interaction des complexes d’intérêts qu’il étudiait. (Par un proces
5917 de la naissance et de l’interaction des complexes d’ intérêts qu’il étudiait. (Par un processus analogue, Toynbee choisira
5918 pas les nations, ni le monde, comme seul « champ d’ étude intelligible de l’Histoire »). Toutefois, Cattaneo n’envisage p
5919 le monde, comme seul « champ d’étude intelligible de l’Histoire »). Toutefois, Cattaneo n’envisage pas une unification de
5920 outefois, Cattaneo n’envisage pas une unification de nos diversités de tous ordres. La variété, la multiplicité, l’individ
5921 n’envisage pas une unification de nos diversités de tous ordres. La variété, la multiplicité, l’individualité, la nationa
5922 essentielles à l’Europe, qui par là se distingue de l’Asie-mère, encore qu’elle en ait hérité les éléments d’uniformité c
5923 e-mère, encore qu’elle en ait hérité les éléments d’ uniformité constitutifs de toute civilisation. Posant ainsi le problèm
5924 ait hérité les éléments d’uniformité constitutifs de toute civilisation. Posant ainsi le problème des tensions nécessaires
5925 roprement fédéraliste. Le développement organique de l’Europe, la logique des faits économiques autant que celle de l’hist
5926 la logique des faits économiques autant que celle de l’histoire, nous conduisent inévitablement vers une intégration fédér
5927 ement, comme le pensaient les romantiques, un âge d’ or primitif qu’il faudrait restaurer ; bien au contraire, elle est au
5928 restaurer ; bien au contraire, elle est au terme de l’effort civilisateur209 : Il serait vain de croire que l’Europe, en
5929 rme de l’effort civilisateur209 : Il serait vain de croire que l’Europe, en ces siècles de sauvagerie, ait été différente
5930 erait vain de croire que l’Europe, en ces siècles de sauvagerie, ait été différente des terres qui sont restées telles que
5931 i, bien avant les grandes nations, il dut y avoir de petits peuples, et avant ces peuples, des tribus divisées. Et chaque
5932 le habitât une vallée écartée ou une lande ceinte de marais et entrecoupée de fleuves, dut vivre d’abord en vase clos, cha
5933 rtée ou une lande ceinte de marais et entrecoupée de fleuves, dut vivre d’abord en vase clos, chacune ayant son propre idi
5934 clos, chacune ayant son propre idiome et sa façon de se vêtir particulière, dans le cercle étroit que lui assignaient les
5935 mies. Ce serait faux et aller à fin contraire que de rechercher à laquelle des grandes nations qui se sont ensuite dévelop
5936 cours des siècles, au gré des lentes préparations de l’histoire, telle ou telle tribu appartenait ; ce serait aussi absurd
5937 e tribu appartenait ; ce serait aussi absurde que de vouloir savoir de quel fleuve les ruisseaux dérivent, alors qu’au con
5938 t ; ce serait aussi absurde que de vouloir savoir de quel fleuve les ruisseaux dérivent, alors qu’au contraire ceux-ci des
5939 à. Par conséquent il serait temps plus que jamais de cesser ces divagations au sujet de la postérité des Celtes, des Illyr
5940 orientale ne pénétrât en Europe avec son système de colonisation, ses rites religieux, son commerce, ses armes de conquér
5941 ion, ses rites religieux, son commerce, ses armes de conquérant, ainsi que toutes les misères de l’exil et de la servitude
5942 armes de conquérant, ainsi que toutes les misères de l’exil et de la servitude ; civilisation qui, d’un autre côté, propag
5943 uérant, ainsi que toutes les misères de l’exil et de la servitude ; civilisation qui, d’un autre côté, propagea le long de
5944 re côté, propagea le long des mers et des fleuves d’ Europe cette mystérieuse unité de langage qui a sa source, pour notre
5945 s et des fleuves d’Europe cette mystérieuse unité de langage qui a sa source, pour notre plus grand émerveillement, aux In
5946 ermanique et slave. S’il y a en Europe un élément d’ unité prenant racine certainement en Asie, mère antique des religions,
5947 es écritures et des arts, il y a aussi un élément de variété ; celui-ci constitue le principe des nationalités respectives
5948 résente ce que les peuples autochtones ont retenu d’ eux-mêmes, y compris leur façon de s’agréger et celle de s’adapter à c
5949 ones ont retenu d’eux-mêmes, y compris leur façon de s’agréger et celle de s’adapter à cette civilisation diffusée par les
5950 mêmes, y compris leur façon de s’agréger et celle de s’adapter à cette civilisation diffusée par les centres que l’influen
5951 t la variété autochtone se formèrent sur la terre d’ Europe, et non en Asie. Les principales langues se répandirent en des
5952 nts originels ; et si on enlève tout ce qu’il y a d’ uniforme, c’est-à-dire d’étranger et de factice, les rauques dialectes
5953 enlève tout ce qu’il y a d’uniforme, c’est-à-dire d’ étranger et de factice, les rauques dialectes reprennent vie et redevi
5954 qu’il y a d’uniforme, c’est-à-dire d’étranger et de factice, les rauques dialectes reprennent vie et redeviennent ces lan
5955 indépendants et absolus, créés par les conditions de vie que le genre humain connut à son origine. De Cattaneo à Giuseppe
5956 de vie que le genre humain connut à son origine. De Cattaneo à Giuseppe Mazzini (1807-1872), le contraste est grand : c’e
5957 (1807-1872), le contraste est grand : c’est celui de la science prudente et de l’éloquence militante, de la sobre sociolog
5958 est grand : c’est celui de la science prudente et de l’éloquence militante, de la sobre sociologie et de la propagande exa
5959 la science prudente et de l’éloquence militante, de la sobre sociologie et de la propagande exaltée. Ils ont voulu tous l
5960 l’éloquence militante, de la sobre sociologie et de la propagande exaltée. Ils ont voulu tous les deux l’union de l’Itali
5961 ande exaltée. Ils ont voulu tous les deux l’union de l’Italie dans une Europe unie ; ils ont cru tous les deux que la « na
5962 « nationalité » était l’un des termes essentiels de toute union vivante de l’Europe — l’autre terme étant l’Humanité. Mai
5963 l’un des termes essentiels de toute union vivante de l’Europe — l’autre terme étant l’Humanité. Mais Cattaneo reste un pen
5964 un penseur, Mazzini est avant tout un agitateur. D’ où l’emploi différent des idées, chez l’un et l’autre. Le philosophe v
5965 fie des concepts en les confrontant au réel serré de près, par des méthodes variées, tandis que l’agitateur veut entraîner
5966 veut entraîner les réalités dans l’élan mystique d’ une idéologie, qui est beaucoup moins sa création individuelle que le
5967 e résumé tourbillonnant des plus nobles illusions de son temps. Dénoncé par le vieux Metternich comme un danger public pou
5968 r Cavour qui soupçonne en lui un dictateur doublé d’ un démagogue, admiré par le jeune Nietzsche qu’un hasard le fait renco
5969 1 au sommet du Gothard — lieu sacré, cœur et toit de l’Europe —, il touche aux deux extrémités du siècle : entre la Réacti
5970 le dur pessimisme historique qui marquera la fin de l’ère des Nations, il a cru tout ce qu’homme de son temps a pu croire
5971 n de l’ère des Nations, il a cru tout ce qu’homme de son temps a pu croire sur la liberté, sur l’amour et sur l’harmonie,
5972 s peuples : « Le Peuple, dira-t-il, parole sacrée de l’avenir… » Il fut d’abord l’apôtre de l’italianité, de l’unité itali
5973 ole sacrée de l’avenir… » Il fut d’abord l’apôtre de l’italianité, de l’unité italienne dans le républicanisme ; puis, par
5974 venir… » Il fut d’abord l’apôtre de l’italianité, de l’unité italienne dans le républicanisme ; puis, partant de là210, de
5975 italienne dans le républicanisme ; puis, partant de là210, de l’union européenne ; mais il la concevait comme l’union des
5976 dans le républicanisme ; puis, partant de là210, de l’union européenne ; mais il la concevait comme l’union des proscrits
5977 mais il la concevait comme l’union des proscrits de toutes les monarchies, l’autrichienne, la française, puis l’italienne
5978 t utopistes cités jusqu’ici, ce n’est pas un plan d’ union des princes ou des États qu’il propose, mais il rédige la premiè
5979 qu’il propose, mais il rédige la première charte d’ un mouvement de militants européens. Ce document date de 1834, et port
5980 mais il rédige la première charte d’un mouvement de militants européens. Ce document date de 1834, et porte la signature
5981 ouvement de militants européens. Ce document date de 1834, et porte la signature de sept Italiens, de cinq Allemands et de
5982 . Ce document date de 1834, et porte la signature de sept Italiens, de cinq Allemands et de sept Polonais. Mazzini est en
5983 de 1834, et porte la signature de sept Italiens, de cinq Allemands et de sept Polonais. Mazzini est en ce moment réfugié
5984 signature de sept Italiens, de cinq Allemands et de sept Polonais. Mazzini est en ce moment réfugié clandestin en Suisse.
5985 pétés qu’essuie le mouvement en Italie (une série de soulèvements ont été écrasés) Mazzini décide d’élargir son action. Il
5986 e de soulèvements ont été écrasés) Mazzini décide d’ élargir son action. Il crée des comités Jeune Allemagne et Jeune Polog
5987 nce. La charte qu’on va lire doit sceller l’union de ces groupements nationaux et républicains : JEUNE EUROPE Liberté — É
5988 : JEUNE EUROPE Liberté — Égalité — Humanité ACTE DE FRATERNITÉ Nous soussignés, hommes de Progrès et de Liberté, croyant 
5989 manité ACTE DE FRATERNITÉ Nous soussignés, hommes de Progrès et de Liberté, croyant : Dans l’Église et la Fraternité des H
5990 FRATERNITÉ Nous soussignés, hommes de Progrès et de Liberté, croyant : Dans l’Église et la Fraternité des Hommes ; Dans l
5991 océder, par un progrès continuel et sous l’empire de la loi morale universelle, au développement libre et harmonieux de se
5992 universelle, au développement libre et harmonieux de ses propres facultés et à l’accomplissement de sa propre mission dans
5993 ux de ses propres facultés et à l’accomplissement de sa propre mission dans l’univers ; Qu’elle ne le peut pas sans le con
5994 s ; Qu’elle ne le peut pas sans le concours actif de tous ses membres, librement unis ; Que l’association ne peut se const
5995 x, puisque toute inégalité entraîne une violation de l’indépendance, et que toute violation d’indépendance empêche la libe
5996 olation de l’indépendance, et que toute violation d’ indépendance empêche la liberté du consentement ; Que la Liberté, l’Ég
5997 du problème social, et que toutes les fois qu’un de ces éléments est sacrifié aux deux autres, l’ordonnance des travaux h
5998 ère, qui tandis qu’elle constitue l’individualité de cet homme et de ce peuple, concourt nécessairement à l’accomplissemen
5999 qu’elle constitue l’individualité de cet homme et de ce peuple, concourt nécessairement à l’accomplissement de la mission
6000 uple, concourt nécessairement à l’accomplissement de la mission générale de l’humanité ; Convaincus enfin : Que l’associat
6001 rement à l’accomplissement de la mission générale de l’humanité ; Convaincus enfin : Que l’association des hommes et des p
6002 uples doit réunir la protection du libre exercice de la mission individuelle à la certitude que tout est fait en vue du dé
6003 rtitude que tout est fait en vue du développement de la mission générale ; Forts de nos droits d’hommes et de citoyens, fo
6004 e du développement de la mission générale ; Forts de nos droits d’hommes et de citoyens, forts de notre conscience et du m
6005 ment de la mission générale ; Forts de nos droits d’ hommes et de citoyens, forts de notre conscience et du mandat que Dieu
6006 ission générale ; Forts de nos droits d’hommes et de citoyens, forts de notre conscience et du mandat que Dieu et l’Humani
6007 orts de nos droits d’hommes et de citoyens, forts de notre conscience et du mandat que Dieu et l’Humanité confient à ceux
6008 onales libres et indépendantes : noyaux primitifs de la Jeune Italie, de la Jeune Pologne et de la Jeune Allemagne. Réunis
6009 épendantes : noyaux primitifs de la Jeune Italie, de la Jeune Pologne et de la Jeune Allemagne. Réunis en assemblée dans u
6010 mitifs de la Jeune Italie, de la Jeune Pologne et de la Jeune Allemagne. Réunis en assemblée dans un but d’utilité général
6011 Jeune Allemagne. Réunis en assemblée dans un but d’ utilité générale, le 15 avril 1834, la main sur le cœur et nous portan
6012 1834, la main sur le cœur et nous portant garants de l’avenir, nous avons décidé ce qui suit : I La Jeune Allemagne, la Je
6013 entique qui embrasse l’Humanité, et sous l’empire d’ une même foi de Liberté, d’Égalité et de Progrès, signent un acte de f
6014 rasse l’Humanité, et sous l’empire d’une même foi de Liberté, d’Égalité et de Progrès, signent un acte de fraternité valab
6015 nité, et sous l’empire d’une même foi de Liberté, d’ Égalité et de Progrès, signent un acte de fraternité valable aujourd’h
6016 l’empire d’une même foi de Liberté, d’Égalité et de Progrès, signent un acte de fraternité valable aujourd’hui et toujour
6017 Liberté, d’Égalité et de Progrès, signent un acte de fraternité valable aujourd’hui et toujours pour tout ce qui concerne
6018 e qui concerne le but général. II Une déclaration de principe constituant la loi morale universelle appliquée aux sociétés
6019 la direction générale des trois sociétés. Aucune d’ elles ne pourra s’en écarter dans ses travaux, sans violer de façon co
6020 pourra s’en écarter dans ses travaux, sans violer de façon coupable l’acte de fraternité et sans en subir les conséquences
6021 ses travaux, sans violer de façon coupable l’acte de fraternité et sans en subir les conséquences. III Pour ce qui sort de
6022 s en subir les conséquences. III Pour ce qui sort de la sphère des intérêts généraux et de la déclaration de principes, ch
6023 ce qui sort de la sphère des intérêts généraux et de la déclaration de principes, chacune des associations est libre et in
6024 sphère des intérêts généraux et de la déclaration de principes, chacune des associations est libre et indépendante. IV La
6025 sociations est libre et indépendante. IV La ligne d’ attaque et de défense solidaire des peuples qui se reconnaissent est c
6026 t libre et indépendante. IV La ligne d’attaque et de défense solidaire des peuples qui se reconnaissent est constituée par
6027 réunion des Congreghe nationales ou des délégués de chacune d’elles constituera la Congrega de la Jeune Europe. VI Les in
6028 s Congreghe nationales ou des délégués de chacune d’ elles constituera la Congrega de la Jeune Europe. VI Les individus qui
6029 posent les trois associations sont frères. Chacun d’ eux accomplira vis-à-vis des autres les devoirs de la fraternité. VII
6030 d’eux accomplira vis-à-vis des autres les devoirs de la fraternité. VII La Congrega de la Jeune Europe choisira un symbole
6031 e placée en tête des écrits contresignera l’œuvre de la société. VIII Tout peuple qui voudrait participer aux droits et au
6032 qui voudrait participer aux droits et aux devoirs de la fraternité établie entre les trois peuples fédérés par cet acte, a
6033 llement à l’acte même, le signant par l’entremise de sa Congrega nationale. Fait à Berne (Suisse), le 15 avril 1834. Tout
6034 Berne (Suisse), le 15 avril 1834. Tout l’espoir de 1848 est dans ce texte, et lorsque éclata la Révolution de février à
6035 st dans ce texte, et lorsque éclata la Révolution de février à Paris, cependant que les cantons suisses décidaient de se f
6036 ris, cependant que les cantons suisses décidaient de se fédérer, qu’un Parlement fédéral allemand se réunissait à Francfor
6037 on put croire pendant quelques mois à l’avènement de la Jeune Europe, tout au moins de ses idéaux. En 1850, réfugié à Lond
6038 s à l’avènement de la Jeune Europe, tout au moins de ses idéaux. En 1850, réfugié à Londres, où il subit les sarcasmes d’u
6039 850, réfugié à Londres, où il subit les sarcasmes d’ un exilé qui va mieux réussir, Karl Marx, Mazzini constate l’écrasemen
6040 » des nationalités. Il s’interroge sur les causes de cette défaite et les trouve dans la désunion des fédéralistes eux-mêm
6041 il fut le premier Européen, répétons-le, à tenter d’ organiser en mouvement : Oui, la cause est en nous, elle est dans not
6042 la cause est en nous, elle est dans notre manque d’ organisation, dans le fractionnement que des systèmes, quelquefois abs
6043 ant soutenus avec l’exclusivisme et l’acharnement de l’intolérance, ont produit dans nos rangs. Elle est dans nos défiance
6044 uines vanités perpétuelles, dans le manque absolu de cet esprit de discipline qui seul accomplit les grandes choses, dans
6045 perpétuelles, dans le manque absolu de cet esprit de discipline qui seul accomplit les grandes choses, dans l’éparpillemen
6046 ccomplit les grandes choses, dans l’éparpillement de nos forces en une multitude de petits foyers, de groupes, de sectes,
6047 ns l’éparpillement de nos forces en une multitude de petits foyers, de groupes, de sectes, de coteries puissantes à dissou
6048 de nos forces en une multitude de petits foyers, de groupes, de sectes, de coteries puissantes à dissoudre, impuissantes
6049 es en une multitude de petits foyers, de groupes, de sectes, de coteries puissantes à dissoudre, impuissantes à fonder. El
6050 ultitude de petits foyers, de groupes, de sectes, de coteries puissantes à dissoudre, impuissantes à fonder. Elle est dans
6051 iels qui s’est peu à peu substitué sur le drapeau de nos écoles à l’adoration des saintes idées, au grand problème éducati
6052 qui seul rend nos efforts légitimes, au sentiment de la Vie et de sa mission. Elle est dans l’oubli de Dieu, de sa loi d’a
6053 nos efforts légitimes, au sentiment de la Vie et de sa mission. Elle est dans l’oubli de Dieu, de sa loi d’amour, de dévo
6054 de la Vie et de sa mission. Elle est dans l’oubli de Dieu, de sa loi d’amour, de dévouement et de progrès moral de la gran
6055 et de sa mission. Elle est dans l’oubli de Dieu, de sa loi d’amour, de dévouement et de progrès moral de la grande tradit
6056 mission. Elle est dans l’oubli de Dieu, de sa loi d’ amour, de dévouement et de progrès moral de la grande tradition religi
6057 Elle est dans l’oubli de Dieu, de sa loi d’amour, de dévouement et de progrès moral de la grande tradition religieuse de l
6058 ubli de Dieu, de sa loi d’amour, de dévouement et de progrès moral de la grande tradition religieuse de l’humanité, pour l
6059 sa loi d’amour, de dévouement et de progrès moral de la grande tradition religieuse de l’humanité, pour le bien-être, pour
6060 e progrès moral de la grande tradition religieuse de l’humanité, pour le bien-être, pour le catéchisme de Volney, pour le
6061 l’humanité, pour le bien-être, pour le catéchisme de Volney, pour le principe égoïste de Bentham, pour l’indifférence aux
6062 le catéchisme de Volney, pour le principe égoïste de Bentham, pour l’indifférence aux vérités d’un ordre plus élevé que la
6063 oïste de Bentham, pour l’indifférence aux vérités d’ un ordre plus élevé que la terre, seules capables de la transformer. E
6064 un ordre plus élevé que la terre, seules capables de la transformer. Elle est dans l’esprit de nationalisme substitué part
6065 apables de la transformer. Elle est dans l’esprit de nationalisme substitué partout à l’esprit de nationalité, dans la fol
6066 prit de nationalisme substitué partout à l’esprit de nationalité, dans la folle prétention que chaque peuple a eue de pouv
6067 dans la folle prétention que chaque peuple a eue de pouvoir résoudre le problème politique, économique et social en son s
6068 n son sein et par ses seules forces, dans l’oubli de cette grande vérité : que la cause des peuples est une ; que la patri
6069 e révolution qui n’est pas explicitement un culte de dévouement envers tous ceux qui souffrent et combattent doit se consu
6070 r ; que la Sainte-Alliance des nations est le but de nos luttes, la seule force qui puisse terrasser la ligue des pouvoirs
6071 asser la ligue des pouvoirs issus du privilège ou de l’égoïsme des intérêts. Et quant à nos ennemis, ils sont à la merci d
6072 rêts. Et quant à nos ennemis, ils sont à la merci de notre travail. Ils ne sont forts que par nos fautes, à nous. Nous mar
6073 s l’orage ; mais au-delà est le soleil, le soleil de Dieu, brillant, éternel. Ils peuvent, pendant quelque temps, l’obscur
6074 he encore ; et ce n’est pas par quelques chiffons de papier qu’on l’arrêtera dans sa marche.211 Le mouvement Jeune Europ
6075 eune Europe avait échoué. Mais plusieurs Sociétés d’ allures moins subversives se fondèrent à sa suite, sous les auspices d
6076 rsives se fondèrent à sa suite, sous les auspices de Frédéric Passy puis de Camille Lemonnier, notamment. On y retrouve le
6077 a suite, sous les auspices de Frédéric Passy puis de Camille Lemonnier, notamment. On y retrouve les derniers disciples de
6078 , notamment. On y retrouve les derniers disciples de Saint-Simon, de Cobden, de Bastiat, de Mazzini lui-même, des anarchis
6079 y retrouve les derniers disciples de Saint-Simon, de Cobden, de Bastiat, de Mazzini lui-même, des anarchistes, des pacifis
6080 les derniers disciples de Saint-Simon, de Cobden, de Bastiat, de Mazzini lui-même, des anarchistes, des pacifistes illumin
6081 disciples de Saint-Simon, de Cobden, de Bastiat, de Mazzini lui-même, des anarchistes, des pacifistes illuminés, ainsi qu
6082 s, ainsi que le Général Garibaldi, qui préside un de leurs congrès à Genève, en 1867 ; et enfin et surtout on y retrouve,
6083 urtout on y retrouve, pendant vingt ans environné d’ un long tonnerre d’acclamations, Victor Hugo (1802-1885), ce poète qu’
6084 e, pendant vingt ans environné d’un long tonnerre d’ acclamations, Victor Hugo (1802-1885), ce poète qu’il faut saluer comm
6085 ète qu’il faut saluer comme le plus grand lyrique de l’idéal d’union européenne. C’est dans son discours du 17 juillet 185
6086 aut saluer comme le plus grand lyrique de l’idéal d’ union européenne. C’est dans son discours du 17 juillet 1851 à l’Assem
6087 u 17 juillet 1851 à l’Assemblée législative, lors d’ un débat sur la révision de la Constitution, qu’il prononce pour la pr
6088 blée législative, lors d’un débat sur la révision de la Constitution, qu’il prononce pour la première fois à la tribune le
6089 du monde a fait trois révolutions comme les dieux d’ Homère faisaient trois pas. Ces trois révolutions qui n’en font qu’une
6090 révolution humaine ; ce n’est pas le cri égoïste d’ un peuple, c’est la revendication de la sainte équité universelle, c’e
6091 e cri égoïste d’un peuple, c’est la revendication de la sainte équité universelle, c’est la liquidation des griefs générau
6092 erselle, c’est la liquidation des griefs généraux de l’humanité depuis que l’histoire existe ; c’est après les siècles de
6093 s que l’histoire existe ; c’est après les siècles de l’esclavage, du servage, de la théocratie, de la féodalité, de l’inqu
6094 est après les siècles de l’esclavage, du servage, de la théocratie, de la féodalité, de l’inquisition, du despotisme sous
6095 les de l’esclavage, du servage, de la théocratie, de la féodalité, de l’inquisition, du despotisme sous tous les noms, du
6096 e, du servage, de la théocratie, de la féodalité, de l’inquisition, du despotisme sous tous les noms, du supplice humain s
6097 roclamation auguste des droits de l’homme ! Après de longues épreuves, cette révolution a enfanté en France la république…
6098 … la république, qui est pour le peuple une sorte de droit naturel comme la liberté pour l’homme. Le peuple français a tai
6099 du vieux continent monarchique la première assise de cet immense édifice de l’avenir, qui s’appellera un jour les États-Un
6100 rchique la première assise de cet immense édifice de l’avenir, qui s’appellera un jour les États-Unis d’Europe ! M. de Mo
6101 le 21 août 1849, Hugo, nommé président du Congrès de la paix, réuni à Paris, avait proclamé sa foi dans la venue « inévita
6102 vait proclamé sa foi dans la venue « inévitable » de l’union européenne. Son discours inaugural, dont on va lire les premi
6103 ges et la conclusion, préfigure les grands thèmes d’ espérance et les plus nobles anticipations qui vont nourrir pendant un
6104 pendant un siècle toute l’éloquence des militants de l’Europe unie : Messieurs, si quelqu’un, il y a quatre siècles, à l’
6105 quatre siècles, à l’époque où la guerre existait de commune à commune, de ville à ville, de province à province, si quelq
6106 poque où la guerre existait de commune à commune, de ville à ville, de province à province, si quelqu’un eût dit à la Lorr
6107 existait de commune à commune, de ville à ville, de province à province, si quelqu’un eût dit à la Lorraine, à la Picardi
6108 a guerre, un jour viendra où vous ne lèverez plus d’ hommes d’armes les uns contre les autres, un jour viendra où l’on ne d
6109 un jour viendra où vous ne lèverez plus d’hommes d’ armes les uns contre les autres, un jour viendra où l’on ne dira plus 
6110 ez-vous ce que vous mettrez à la place des hommes d’ armes ? Savez-vous ce que vous mettrez à la place des gens de pied et
6111 avez-vous ce que vous mettrez à la place des gens de pied et de cheval, des canons, des fauconneaux, des lances, des pique
6112 e que vous mettrez à la place des gens de pied et de cheval, des canons, des fauconneaux, des lances, des piques, des épée
6113 piques, des épées ? Vous mettrez une petite boîte de sapin que vous appellerez l’urne du scrutin, et de cette boîte, il so
6114 e sapin que vous appellerez l’urne du scrutin, et de cette boîte, il sortira, quoi ? une assemblée en laquelle vous vous s
6115 i résoudra tout en loi, qui fera tomber le glaive de toutes les mains et surgir la justice dans tous les cœurs, qui dira à
6116 tous les gens sérieux, tous les grands politiques d’ alors se fussent écriés : — Oh ! le songeur ! Oh ! le rêve-creux ! Com
6117 jour viendra où il n’y aura plus d’autres champs de bataille que les marchés s’ouvrant au commerce et les esprits s’ouvra
6118 universel des peuples, par le véritable arbitrage d’ un grand sénat souverain qui sera à l’Europe ce que le parlement est à
6119 que, les États-Unis d’Europe, placés en face l’un de l’autre, se tendant la main par-dessus les mers, échangeant leurs pro
6120 et combinant ensemble, pour en tirer le bien-être de tous, ces deux forces infinies, la fraternité des hommes et la puissa
6121 nfinies, la fraternité des hommes et la puissance de Dieu ! En 1872, Hugo ne paraît pas au Congrès de la paix qui se tien
6122 de Dieu ! En 1872, Hugo ne paraît pas au Congrès de la paix qui se tient cette année-là à Lugano, mais lui envoie un mess
6123 mots : « Mes compatriotes européens. » La guerre de 1870 a remis la civilisation en question. Allons-nous vers l’Europe c
6124 rique couronnent le nouveau. Nous aurons l’esprit de conquête transfiguré en esprit de découverte ; nous aurons la généreu
6125 aurons l’esprit de conquête transfiguré en esprit de découverte ; nous aurons la généreuse fraternité des nations au lieu
6126 ache au vieux poète des pages dont les événements de Budapest ont tragiquement actualisé l’accent dans notre siècle : Il
6127 accent dans notre siècle : Il devient nécessaire d’ appeler l’attention des gouvernements européens sur un fait tellement
6128 ts le voient-ils ? Non. Les nations ont au-dessus d’ elles quelque chose qui est au-dessous d’elles, les gouvernements. À d
6129 u-dessus d’elles quelque chose qui est au-dessous d’ elles, les gouvernements. À de certains moments, ce contresens éclate 
6130 qui est au-dessous d’elles, les gouvernements. À de certains moments, ce contresens éclate : la civilisation est dans les
6131 voient rien qu’à travers cette myopie, la raison d’ État ; le genre humain regarde avec un autre œil, la conscience. Nous
6132 as plus permis à un gouvernement qu’à un individu d’ être assassin, c’est que l’Europe est solidaire, c’est que tout ce qui
6133 trop petits pour être vendus, on les fend en deux d’ un coup de sabre ; c’est qu’on brûle les familles dans les maisons ; c
6134 s pour être vendus, on les fend en deux d’un coup de sabre ; c’est qu’on brûle les familles dans les maisons ; c’est que t
6135 alak, par exemple, est réduite en quelques heures de neuf-mille habitants à treize cents ; c’est que les cimetières sont e
6136 ; c’est que les cimetières sont encombrés de plus de cadavres qu’on n’en peut enterrer, de sorte qu’aux vivants qui leur o
6137 est bien fait ; nous apprenons aux gouvernements d’ Europe ceci, c’est qu’on ouvre les femmes grosses pour leur tuer les e
6138 c’est qu’il y a dans les places publiques des tas de squelettes de femmes ayant la trace de l’éventrement, c’est que les c
6139 a dans les places publiques des tas de squelettes de femmes ayant la trace de l’éventrement, c’est que les chiens rongent
6140 es des tas de squelettes de femmes ayant la trace de l’éventrement, c’est que les chiens rongent dans les rues le crâne de
6141 que tout cela est horrible, c’est qu’il suffirait d’ un geste des gouvernements d’Europe pour l’empêcher, et que les sauvag
6142 ’est qu’il suffirait d’un geste des gouvernements d’ Europe pour l’empêcher, et que les sauvages qui commettent ces forfait
6143 ttre sont épouvantables. Il est temps qu’il sorte de la civilisation une majestueuse défense d’aller plus loin… Ce qui se
6144 sorte de la civilisation une majestueuse défense d’ aller plus loin… Ce qui se passe en Serbie démontre la nécessité des É
6145 ons et les dogmes qui ont le sabre au poing. Plus de guerres, plus de massacres, plus de carnages ; libre pensée, libre éc
6146 qui ont le sabre au poing. Plus de guerres, plus de massacres, plus de carnages ; libre pensée, libre échange ; fraternit
6147 u poing. Plus de guerres, plus de massacres, plus de carnages ; libre pensée, libre échange ; fraternité. Est-ce donc si d
6148 ’Europe, la fédération continentale, il n’y a pas d’ autre réalité politique que celle-là. Les raisonnements le constatent,
6149 monstration des philosophes… Ce que les atrocités de Serbie mettent hors de doute, c’est qu’il faut à l’Europe une nationa
6150 Verbe, voici le penseur actif qui ouvre une voie d’ avenir. Pierre-Joseph Proudhon (1809-1865) a pu se vanter à juste titr
6151 Proudhon (1809-1865) a pu se vanter à juste titre d’ avoir été le premier théoricien du fédéralisme, encore que Rousseau — 
6152 il faut bien avouer que Proudhon garde l’avantage d’ avoir traité le sujet d’une manière exhaustive et réaliste, avec une s
6153 Proudhon garde l’avantage d’avoir traité le sujet d’ une manière exhaustive et réaliste, avec une sorte d’acharnement intel
6154 ne manière exhaustive et réaliste, avec une sorte d’ acharnement intellectuel dont Jean-Jacques ne peut être accusé. Si Mar
6155 es démocratiques du socialisme : pas un seul chef de camp de travail forcé, pas une seule brute totalitaire n’a jamais pu
6156 ratiques du socialisme : pas un seul chef de camp de travail forcé, pas une seule brute totalitaire n’a jamais pu se récla
6157 seule brute totalitaire n’a jamais pu se réclamer de sa doctrine pour tenter de justifier ses crimes. Le socialisme fédéra
6158 jamais pu se réclamer de sa doctrine pour tenter de justifier ses crimes. Le socialisme fédéraliste et libertaire de Prou
6159 s crimes. Le socialisme fédéraliste et libertaire de Proudhon n’a guère eu de succès jusqu’ici ; le socialisme collectivis
6160 édéraliste et libertaire de Proudhon n’a guère eu de succès jusqu’ici ; le socialisme collectiviste, centralisateur et aut
6161 isme collectiviste, centralisateur et autoritaire de Marx a fait l’URSS et domine la moitié de notre monde. Il y a sans do
6162 ritaire de Marx a fait l’URSS et domine la moitié de notre monde. Il y a sans doute erreur sur la doctrine dans les deux c
6163 son maître — en retard sur l’évolution créatrice de l’humanité. Proudhon n’aura sa revanche que dans la seule mesure où l
6164 e saura découvrir que le fédéralisme est la santé de ses peuples, et le secret de son rayonnement sur la planète. On a lu
6165 ralisme est la santé de ses peuples, et le secret de son rayonnement sur la planète. On a lu les attaques virulentes de Do
6166 t sur la planète. On a lu les attaques virulentes de Donoso Cortès contre le jeune Proudhon assimilé (ou peu s’en faut) à
6167 é (ou peu s’en faut) à l’Antéchrist. Il est juste de citer également ce que Proudhon dit de lui-même : Et moi aussi j’ai
6168 est juste de citer également ce que Proudhon dit de lui-même : Et moi aussi j’ai une tradition, une généalogie politique
6169 litique à laquelle je tiens comme à la légitimité de ma naissance ; je suis fils de la Révolution, qui fut fille elle-même
6170 me à la légitimité de ma naissance ; je suis fils de la Révolution, qui fut fille elle-même de la Philosophie du xviiie s
6171 is fils de la Révolution, qui fut fille elle-même de la Philosophie du xviiie siècle, laquelle eut pour mère la Réforme,
6172 s, orthodoxes et hétérodoxes, qui se sont succédé d’ âge en âge depuis l’origine du christianisme jusqu’à la chute de l’emp
6173 epuis l’origine du christianisme jusqu’à la chute de l’empire d’Orient. N’oublions pas, dans cette génération splendide, l
6174 ine du christianisme jusqu’à la chute de l’empire d’ Orient. N’oublions pas, dans cette génération splendide, les communes,
6175 des castes, fut aussi, dans son temps, une forme de liberté. Et de qui est fils le christianisme lui-même, que je ne sépa
6176 t aussi, dans son temps, une forme de liberté. Et de qui est fils le christianisme lui-même, que je ne sépare pas de cette
6177 s le christianisme lui-même, que je ne sépare pas de cette généalogie révolutionnaire ? Le christianisme est fils du judaï
6178 ionnaire ? Le christianisme est fils du judaïsme, de l’égyptianisme, du brahmanisme, du magisme, du platonisme, de la phil
6179 nisme, du brahmanisme, du magisme, du platonisme, de la philosophie grecque et du droit romain. Si je ne croyais pas à l’É
6180 ts du grand ouvrage qui ne parut qu’après la mort de son auteur : Du Principe fédératif. On ne saurait assez souligner leu
6181 rant dans l’association, 1° ait autant à recevoir de l’État qu’il lui sacrifie ; 2° qu’il conserve toute sa liberté, sa so
6182 une convention par laquelle un ou plusieurs chefs de famille, une ou plusieurs commîmes, un ou plusieurs groupes de commun
6183 ne ou plusieurs commîmes, un ou plusieurs groupes de communes ou États, s’obligent réciproquement et également les uns env
6184 spécialement alors et exclusivement aux délégués de la fédération. En résumé, le système fédératif est l’opposé de la hié
6185 ion. En résumé, le système fédératif est l’opposé de la hiérarchie ou centralisation administrative et gouvernementale par
6186 est celle-ci : Dans la fédération, les attributs de l’autorité centrale se spécialisent et se restreignent, diminuent de
6187 ale se spécialisent et se restreignent, diminuent de nombre, d’immédiateté, et, si j’ose ainsi dire, d’intensité, à mesure
6188 ialisent et se restreignent, diminuent de nombre, d’ immédiateté, et, si j’ose ainsi dire, d’intensité, à mesure que la Con
6189 e nombre, d’immédiateté, et, si j’ose ainsi dire, d’ intensité, à mesure que la Confédération se développe par l’accession
6190 que la Confédération se développe par l’accession de nouveaux États. Dans les gouvernements centralisés, au contraire, les
6191 , corporations et particuliers, en raison directe de la superficie territoriale et du chiffre de la population. De là cet
6192 recte de la superficie territoriale et du chiffre de la population. De là cet écrasement sous lequel disparaît toute liber
6193 icie territoriale et du chiffre de la population. De là cet écrasement sous lequel disparaît toute liberté, non seulement
6194 s même individuelle et nationale. Une conséquence de ce fait, c’est que, le système unitaire étant l’inverse du système fé
6195 e, la Prusse, peuvent faire entre eux des traités d’ alliance ou de commerce ; il répugne qu’ils se fédéralisent, d’abord p
6196 peuvent faire entre eux des traités d’alliance ou de commerce ; il répugne qu’ils se fédéralisent, d’abord parce que leur
6197 équence il leur faudrait abandonner quelque chose de leur souveraineté, et reconnaître au-dessus d’eux, au moins pour cert
6198 se de leur souveraineté, et reconnaître au-dessus d’ eux, au moins pour certains cas, un arbitre. Leur nature est de comman
6199 ns pour certains cas, un arbitre. Leur nature est de commander, non de transiger ni d’obéir. Les princes qui, en 1813, sou
6200 as, un arbitre. Leur nature est de commander, non de transiger ni d’obéir. Les princes qui, en 1813, soutenus par l’insurr
6201 Leur nature est de commander, non de transiger ni d’ obéir. Les princes qui, en 1813, soutenus par l’insurrection des masse
6202 ection des masses, combattaient pour les libertés de l’Europe contre Napoléon, qui plus tard formèrent la Sainte-Alliance,
6203 nce, n’étaient pas des confédérés : l’absolutisme de leur pouvoir leur défendait d’en prendre le titre. C’étaient, comme e
6204 és : l’absolutisme de leur pouvoir leur défendait d’ en prendre le titre. C’étaient, comme en 92, des coalisés ; l’histoire
6205 92, des coalisés ; l’histoire ne leur donnera pas d’ autre nom. … l’idée d’une confédération universelle est contradictoire
6206 istoire ne leur donnera pas d’autre nom. … l’idée d’ une confédération universelle est contradictoire. En cela se manifeste
6207 umis à tous les inconvénients et à tous les vices de l’indéfini, de l’illimité, de l’absolu, de l’idéal. L’Europe serait e
6208 inconvénients et à tous les vices de l’indéfini, de l’illimité, de l’absolu, de l’idéal. L’Europe serait encore trop gran
6209 et à tous les vices de l’indéfini, de l’illimité, de l’absolu, de l’idéal. L’Europe serait encore trop grande pour une con
6210 vices de l’indéfini, de l’illimité, de l’absolu, de l’idéal. L’Europe serait encore trop grande pour une confédération un
6211 ue : elle ne pourrait former qu’une confédération de confédérations. C’est d’après cette idée que j’indiquais, dans ma der
6212 recque, batave, scandinave et danubienne, prélude de la décentralisation des grands États, et par suite, du désarmement gé
6213 ndrait à la liberté ; alors se réaliserait l’idée d’ un équilibre européen, prévu par tous les publicistes et hommes d’État
6214 et hommes d’État, mais impossible à obtenir avec de grandes puissances à constitutions unitaires. Le peuple, dans la vag
6215 onstitutions unitaires. Le peuple, dans la vague de sa pensée, se contemple comme une gigantesque et mystérieuse existenc
6216 gage semble fait pour l’entretenir dans l’opinion de son indivisible unité. Il s’appelle le Peuple, la Nation ; c’est-à-di
6217 es, sa Voix, pareille au tonnerre, la grande voix de Dieu. Autant il se sent innombrable, irrésistible, immense, autant il
6218 des masses, à toutes les ambitions et excitations de la démagogie : c’est la fin du régime de la place publique, des triom
6219 itations de la démagogie : c’est la fin du régime de la place publique, des triomphes des tribuns, comme de l’absorption d
6220 place publique, des triomphes des tribuns, comme de l’absorption des capitales. Que Paris fasse, dans l’enceinte de ses m
6221 n des capitales. Que Paris fasse, dans l’enceinte de ses murs, des révolutions : à quoi bon si Lyon, Marseille, Toulouse,
6222 sbourg, Dijon, etc., si les départements, maîtres d’ eux-mêmes, ne suivent pas ? Paris en sera pour ses frais… La fédératio
6223 le : car elle le sauve à la fois, en le divisant, de la tyrannie de ses meneurs et de sa propre folie. … Après la révoluti
6224 e sauve à la fois, en le divisant, de la tyrannie de ses meneurs et de sa propre folie. … Après la révolution des idées do
6225 en le divisant, de la tyrannie de ses meneurs et de sa propre folie. … Après la révolution des idées doit arriver, comme
6226 rations, ou l’humanité recommencera un purgatoire de mille ans. Quelque dix ans après la publication du Principe fédérati
6227 araissent en allemand deux ouvrages qu’il importe de citer ici : en 1878 celui du Suisse J. C. Bluntschli sur L’Organisati
6228 lui du Suisse J. C. Bluntschli sur L’Organisation d’ une Société d’États européens et en 1879 celui de l’Allemand Constanti
6229 d’une Société d’États européens et en 1879 celui de l’Allemand Constantin Frantz sur Le Fédéralisme. Ni le juriste suisse
6230 n devoir au socialiste français ; ils tirent tout de leur expérience nationale et professionnelle. Le problème du fédérali
6231 isme européen se trouve ainsi ramené des hauteurs de l’éloquence à la Hugo et de l’idéologie à la Mazzini au niveau d’une
6232 i ramené des hauteurs de l’éloquence à la Hugo et de l’idéologie à la Mazzini au niveau d’une pratique politique et à l’ex
6233 la Hugo et de l’idéologie à la Mazzini au niveau d’ une pratique politique et à l’examen de ses conditions d’application.
6234 au niveau d’une pratique politique et à l’examen de ses conditions d’application. Johann Caspar Bluntschli (1808-1881) av
6235 ratique politique et à l’examen de ses conditions d’ application. Johann Caspar Bluntschli (1808-1881) avait été l’auteur d
6236 chli (1808-1881) avait été l’auteur du code civil de son canton natal, Zurich, avant de devenir à Heidelberg l’un des plus
6237 r à Heidelberg l’un des plus célèbres professeurs de droit international de son temps. L’expérience vécue du fédéralisme s
6238 plus célèbres professeurs de droit international de son temps. L’expérience vécue du fédéralisme suisse le met en mesure
6239 ence vécue du fédéralisme suisse le met en mesure de préciser certaines distinctions fondamentales qui devaient presque né
6240 mantisme politique. Ainsi aborde-t-il le problème de la « nationalité », dont nous avons vu les ambiguïtés pervertir tout
6241 ous avons vu les ambiguïtés pervertir tout l’élan de 1848. Comment concevoir une « nationalité européenne » sur le modèle
6242 soluble, et c’est qu’il était mal posé. L’exemple d’ une nation « internationale » par essence permet au contraire d’imagin
6243  internationale » par essence permet au contraire d’ imaginer ce que serait un État fédéral européen : La Suisse, pays de
6244 erait un État fédéral européen : La Suisse, pays de montagnes en Europe centrale, où les grands fleuves européens, le Rhi
6245 l’Allemagne, l’Italie, la France et l’Autriche, a de ce fait un caractère très particulier. De même le peuple suisse et le
6246 a grande république qu’est la Confédération — ont de grandes tâches vitales à accomplir, d’importance non seulement locale
6247 tion — ont de grandes tâches vitales à accomplir, d’ importance non seulement locale, mais européenne. Ces États populaires
6248 péenne. Ces États populaires, petits, mais pleins de force, jouissant pleinement d’une liberté politique générale dans ce
6249 etits, mais pleins de force, jouissant pleinement d’ une liberté politique générale dans ce pays où règne la paix, ont la p
6250 où règne la paix, ont la possibilité et le devoir d’ aborder, par eux-mêmes, suivant leur disposition naturelle, toutes les
6251 s les questions que le destin et le développement de l’humanité posent aux nations européennes, et de les résoudre entière
6252 de l’humanité posent aux nations européennes, et de les résoudre entièrement, conformément aux circonstances du moment. A
6253 stances du moment. Ainsi ces États peuvent servir d’ exemples, sous ce rapport, aux autres peuples et jouer un rôle détermi
6254 les et jouer un rôle déterminant dans l’évolution de l’humanité. … Aussi longtemps que le peuple suisse aspire à remplir c
6255 es nations, formant avec celles-ci une communauté de culture qui détermine leur vie spirituelle. Pour cette raison la nati
6256 uté culturelle et plus ce caractère international de la nationalité suisse aura sa juste valeur. Il est devenu pour la Sui
6257 uropéens une importance à laquelle une population de trois millions et demi d’habitants parlant une seule et même langue n
6258 laquelle une population de trois millions et demi d’ habitants parlant une seule et même langue ne pourrait plus prétendre
6259 nt pour l’ensemble des États européens une source de prospérité et de développement et qui seront un jour destinés à assur
6260 e des États européens une source de prospérité et de développement et qui seront un jour destinés à assurer la paix en Eur
6261 estinés à assurer la paix en Europe… Si cet idéal de l’avenir se réalise un jour, la nationalité suisse de caractère inter
6262 ’avenir se réalise un jour, la nationalité suisse de caractère international devra s’incorporer à la communauté de la Gran
6263 international devra s’incorporer à la communauté de la Grande Europe. De cette façon elle n’aura pas vécu en vain ni sans
6264 s’incorporer à la communauté de la Grande Europe. De cette façon elle n’aura pas vécu en vain ni sans gloire.216 Ainsi s
6265 ce passage à l’Europe, cette « transfiguration » d’ une vocation nationale dont rêvait Hugo pour la France et Mazzini pour
6266 is voilà qui ne paraît concevable que dans le cas d’ une nation non unitaire, c’est-à-dire de structure fédéraliste. « L’In
6267 ns le cas d’une nation non unitaire, c’est-à-dire de structure fédéraliste. « L’Internationale des nationalismes » préconi
6268 des nationalismes » préconisée par les prophètes de 1848, évoque l’idée d’une amicale universelle des misanthropes ou d’u
6269 éconisée par les prophètes de 1848, évoque l’idée d’ une amicale universelle des misanthropes ou d’une mutuelle des égoïste
6270 dée d’une amicale universelle des misanthropes ou d’ une mutuelle des égoïstes. On peut écrire de telles choses, non les fa
6271 es ou d’une mutuelle des égoïstes. On peut écrire de telles choses, non les faire. Cependant, il est curieux qu’un Bluntsc
6272 ieux qu’un Bluntschli, si conscient des avantages d’ une vraie fédération pour les cantons jadis « souverains » de son pays
6273 fédération pour les cantons jadis « souverains » de son pays, recule devant cette solution lorsqu’il s’agit de l’applique
6274 ys, recule devant cette solution lorsqu’il s’agit de l’appliquer à l’Europe. À l’Écossais James Lorimer, qui venait de pub
6275 is James Lorimer, qui venait de publier un projet d’ État fédéral européen, Bluntschli oppose un plan beaucoup plus prudemm
6276 ral. En voici le principe : Si le grand problème de la constitution de la communauté des États européens doit trouver sa
6277 incipe : Si le grand problème de la constitution de la communauté des États européens doit trouver sa solution, la condit
6278 qu’il faudra remplir sera le maintien scrupuleux de l’indépendance et de la liberté des États associés. Les États europée
6279 sera le maintien scrupuleux de l’indépendance et de la liberté des États associés. Les États européens se considèrent com
6280 soustraire à toute influence due à la suprématie d’ un autre État. Ils peuvent bien coopérer entre eux pour l’accomplissem
6281 nt bien coopérer entre eux pour l’accomplissement de tâches communes, mais ils ne vont pas se soumettre volontairement au
6282 e vont pas se soumettre volontairement au pouvoir d’ une constitution qui leur paraîtra étrangère. Ils ne renonceront jamai
6283 propre armée ; jamais ils ne toléreront au-dessus d’ eux un monarque universel ni un parlement européen unique. C’est pourq
6284 irréalisable. Bluntschli propose alors une Union d’ États souverains (Staatenbund) dirigée par un Conseil Fédéral représen
6285 un Sénat représentant les peuples : Le maintien de la paix des peuples, les délibérations et résolutions dans le domaine
6286 les délibérations et résolutions dans le domaine de la grande politique européenne seront confiés de préférence au Consei
6287 mise à l’approbation du Sénat. Parmi les affaires de la grande politique, il faut ranger toutes les questions concernant l
6288 liberté des États, dont dépendent les conditions de vie, la sécurité et le développement des peuples. Pour trancher toute
6289 ats en litige auront à se soumettre aux décisions de cette autorité. Celle-ci ne trouvera la force d’imposer ses résolutio
6290 de cette autorité. Celle-ci ne trouvera la force d’ imposer ses résolutions que par une collaboration entre les gouverneme
6291 n étroite entre eux, pour le moins par le soutien d’ une majorité importante. Et il conclut, avec une sobriété tout helvét
6292 une sobriété tout helvétique : Le nouveau projet d’ une constitution fédérale européenne n’est pas très brillant et n’a ri
6293 le européenne n’est pas très brillant et n’a rien d’ extraordinaire ; il est modeste et modéré ; mais étant donné qu’il ne
6294 philosophe politique, diplomate et fonctionnaire de l’État prussien (dont il ne cessa de condamner les prétentions hégémo
6295 onctionnaire de l’État prussien (dont il ne cessa de condamner les prétentions hégémoniques), fut non seulement l’un des p
6296 , fut non seulement l’un des plus zélés partisans d’ une unité allemande de type fédéraliste, mais le théoricien d’une unio
6297 un des plus zélés partisans d’une unité allemande de type fédéraliste, mais le théoricien d’une union des pays centraux et
6298 allemande de type fédéraliste, mais le théoricien d’ une union des pays centraux et nordiques de l’Europe, en laquelle il v
6299 ricien d’une union des pays centraux et nordiques de l’Europe, en laquelle il voyait le noyau d’une future fédération mond
6300 iques de l’Europe, en laquelle il voyait le noyau d’ une future fédération mondiale à base chrétienne217. Il s’agissait d’a
6301 ase chrétienne217. Il s’agissait d’abord pour lui de tenir en échec les deux puissances impérialistes, France à l’ouest et
6302 ie à l’est ; puis une fois l’atmosphère purifiée, de les faire adhérer à l’union, ainsi que l’Amérique du Nord. Constantin
6303 si que l’Amérique du Nord. Constantin Frantz part de l’expérience vécue d’une Allemagne moins une que diverse, donc destin
6304 ord. Constantin Frantz part de l’expérience vécue d’ une Allemagne moins une que diverse, donc destinée et préparée par son
6305 it que l’Allemagne ne convient pas à la formation d’ un État unitaire centralisé, ni même, d’une façon générale, à celle d’
6306 formation d’un État unitaire centralisé, ni même, d’ une façon générale, à celle d’une simple nation « fermée », étant donn
6307 entralisé, ni même, d’une façon générale, à celle d’ une simple nation « fermée », étant donné les rapports étroits, déterm
6308 ritoire allemand ne se prête guère à la formation d’ un État unitaire, la nation allemande s’y prête encore moins, parce qu
6309 té, dès le début, — pour reprendre une expression de Schelling — « un peuple de peuples ».218 Frantz a bien vu et dit qu
6310 prendre une expression de Schelling — « un peuple de peuples ».218 Frantz a bien vu et dit que l’État unitaire ne saurai
6311 ue l’État unitaire ne saurait en aucun cas servir de base à une union fédérative : ou bien il reste formé et il n’y a pas
6312 dérative : ou bien il reste formé et il n’y a pas d’ union possible, ou bien le carcan est brisé et l’union devient possibl
6313 où vont les choses actuellement, que la formation d’ un pur État unitaire est proche. Il n’est pas impossible que nous soyo
6314 n’est pas impossible que nous soyons les témoins de cette transformation ; mais supposons l’État unitaire constitué, déve
6315 t pas longtemps et ferait vite sauter la camisole de force qu’on lui aurait mise. Ceci est un des termes de notre alternat
6316 rce qu’on lui aurait mise. Ceci est un des termes de notre alternative. En revanche, si nous voulons échapper à l’actuel c
6317 on pourrait sérieusement envisager la possibilité d’ une fédération d’Europe Centrale. Et chaque pas que nous ferions dans
6318 usement envisager la possibilité d’une fédération d’ Europe Centrale. Et chaque pas que nous ferions dans cette direction n
6319 nous ferions dans cette direction nous assurerait d’ un double gain : en effet, non seulement cette fédération créerait un
6320 t étendue, mais elle permettrait aussi la réunion d’ une telle masse de forces défensives que chaque État membre n’aurait à
6321 le permettrait aussi la réunion d’une telle masse de forces défensives que chaque État membre n’aurait à maintenir sur pie
6322 ion du budget militaire et favoriserait le retour d’ une importante main-d’œuvre à des travaux plus productifs. Aucune puis
6323 u monde n’oserait attaquer cette fédération, qui, de son côté, ne pourrait en aucune manière manifester de tendances agres
6324 on côté, ne pourrait en aucune manière manifester de tendances agressives. De cette façon serait fondé un système pour le
6325 ucune manière manifester de tendances agressives. De cette façon serait fondé un système pour le maintien de la paix tel q
6326 te façon serait fondé un système pour le maintien de la paix tel que l’Europe n’en a encore jamais vu. Et quel honneur pou
6327 eur pour l’Allemagne si elle pouvait être la base d’ une fédération pour la paix, au lieu d’avoir, par le système de 1866,
6328 ion pour la paix, au lieu d’avoir, par le système de 1866, créé le militarisme européen qui nous suce notre propre sang. S
6329 difficultés réelles qui s’opposent à la fondation de la fédération d’Europe Centrale — et nous sommes les derniers à nous
6330 es qui s’opposent à la fondation de la fédération d’ Europe Centrale — et nous sommes les derniers à nous bercer d’illusion
6331 trale — et nous sommes les derniers à nous bercer d’ illusions —, elles pourraient très bien être surmontées grâce à une pr
6332 ses qui ont prévalu jusqu’à présent. Ainsi l’idée d’ État, avec laquelle de toute façon on ne peut rien construire… Il ren
6333 squ’à présent. Ainsi l’idée d’État, avec laquelle de toute façon on ne peut rien construire… Il rend justice à l’élan pri
6334 va au-delà du but assigné, ainsi la valorisation de la nationalité devint un but absolu… Au stade des nations fermées co
6335 ermanentes : Il est bien établi que le but final de l’organisation n’est pas l’État universel, mais bien la fédération de
6336 iances » qui constitue manifestement le préalable d’ un tel processus. Par alliances, nous entendons des associations concl
6337 tif : elle sera constituée pour toujours et dotée d’ organes permanents prêts à fonctionner de façon durable. De ce point d
6338 et dotée d’organes permanents prêts à fonctionner de façon durable. De ce point de vue, le système politique appelé « Conc
6339 permanents prêts à fonctionner de façon durable. De ce point de vue, le système politique appelé « Concert européen des g
6340 ns propre, ce mot, à l’origine, ne désignait rien d’ autre qu’un système d’alliances… À examiner de près l’essence même de
6341 ’origine, ne désignait rien d’autre qu’un système d’ alliances… À examiner de près l’essence même de ce système des grandes
6342 ien d’autre qu’un système d’alliances… À examiner de près l’essence même de ce système des grandes puissances, on constate
6343 me d’alliances… À examiner de près l’essence même de ce système des grandes puissances, on constate d’après son nom même q
6344 e d’après son nom même qu’il est fondé sur l’idée de la seule puissance, et qu’il fait abstraction aussi bien des principe
6345 t qu’il fait abstraction aussi bien des principes de l’histoire et de la moralité que des buts élevés de la civilisation.
6346 raction aussi bien des principes de l’histoire et de la moralité que des buts élevés de la civilisation. La seule fin est
6347 l’histoire et de la moralité que des buts élevés de la civilisation. La seule fin est d’être ou de devenir une grande pui
6348 buts élevés de la civilisation. La seule fin est d’ être ou de devenir une grande puissance. Et pour autant que plusieurs
6349 és de la civilisation. La seule fin est d’être ou de devenir une grande puissance. Et pour autant que plusieurs de ces gra
6350 ne grande puissance. Et pour autant que plusieurs de ces grandes puissances se trouvent être l’une à côté de l’autre, quel
6351 ut poursuivront-elles principalement, sinon celui d’ augmenter leur force militaire ? Il est frappant de constater que la p
6352 ’augmenter leur force militaire ? Il est frappant de constater que la prédominance de l’élément militaire va de pair avec
6353 Il est frappant de constater que la prédominance de l’élément militaire va de pair avec le règne de l’argent, ce qui a po
6354 ter que la prédominance de l’élément militaire va de pair avec le règne de l’argent, ce qui a pour conséquence que tout le
6355 e de l’élément militaire va de pair avec le règne de l’argent, ce qui a pour conséquence que tout le développement des peu
6356 ourse… … Tous les petits États sont ainsi menacés de décadence, à moins qu’ils ne soient déjà réellement déchus… En revanc
6357 ue les grandes puissances militaires… Allons donc de l’avant ! Puisque ce système a vu le jour uniquement par un processus
6358 uniquement par un processus historique, la notion de grande puissance n’est par conséquent qu’une catégorie de l’histoire,
6359 e puissance n’est par conséquent qu’une catégorie de l’histoire, destinée à disparaître à la prochaine étape de l’évolutio
6360 oire, destinée à disparaître à la prochaine étape de l’évolution, de la même manière qu’elle est apparue un jour et qu’ell
6361 disparaître à la prochaine étape de l’évolution, de la même manière qu’elle est apparue un jour et qu’elle a acquis, temp
6362 n jour et qu’elle a acquis, temporairement, droit de cité un peu partout. Le principe de non-intervention, proclamé depuis
6363 rement, droit de cité un peu partout. Le principe de non-intervention, proclamé depuis longtemps, n’est-il pas la déclarat
6364 amé depuis longtemps, n’est-il pas la déclaration de faillite de la politique du concert européen ? De ce fait même, cette
6365 ongtemps, n’est-il pas la déclaration de faillite de la politique du concert européen ? De ce fait même, cette dernière es
6366 de faillite de la politique du concert européen ? De ce fait même, cette dernière est devenue, si l’on peut dire, un « asy
6367 ». Et maintenant la tâche importante nous incombe de créer un nouveau système, c’est-à-dire un ordre fondé sur la réalité,
6368 ion du temps exige, devra se fonder sur le modèle de l’union allemande, qui exclut toute hégémonie d’un de ses États. Ains
6369 de l’union allemande, qui exclut toute hégémonie d’ un de ses États. Ainsi le nationalisme condamné par Frantz sous sa for
6370 ’union allemande, qui exclut toute hégémonie d’un de ses États. Ainsi le nationalisme condamné par Frantz sous sa forme ét
6371 réapparaît irrésistiblement sous la forme épurée d’ une « mission européenne » de l’Allemagne. Nous connaissons maintenant
6372 sous la forme épurée d’une « mission européenne » de l’Allemagne. Nous connaissons maintenant le processus pour l’avoir il
6373 le processus pour l’avoir illustré par des textes de Gioberti et de Mazzini, de Lamartine et de Hugo, de Mickiewicz, de Do
6374 ur l’avoir illustré par des textes de Gioberti et de Mazzini, de Lamartine et de Hugo, de Mickiewicz, de Donoso Cortès et
6375 llustré par des textes de Gioberti et de Mazzini, de Lamartine et de Hugo, de Mickiewicz, de Donoso Cortès et même de Blun
6376 textes de Gioberti et de Mazzini, de Lamartine et de Hugo, de Mickiewicz, de Donoso Cortès et même de Bluntschli. Il manqu
6377 Gioberti et de Mazzini, de Lamartine et de Hugo, de Mickiewicz, de Donoso Cortès et même de Bluntschli. Il manquait à ce
6378 Mazzini, de Lamartine et de Hugo, de Mickiewicz, de Donoso Cortès et même de Bluntschli. Il manquait à ce concert une voi
6379 de Hugo, de Mickiewicz, de Donoso Cortès et même de Bluntschli. Il manquait à ce concert une voix allemande, et la voici 
6380 t qu’une telle fédération ne peut pas s’instaurer d’ un coup. Il faut d’abord qu’elle s’établisse sur une base réelle, d’où
6381 d’abord qu’elle s’établisse sur une base réelle, d’ où, par la suite, l’impulsion pourra être donnée… Si c’est l’Allemagne
6382 … Si c’est l’Allemagne, où a commencé la scission de l’Église, qui a contribué le plus à la décadence de la communauté des
6383 l’Église, qui a contribué le plus à la décadence de la communauté des peuples occidentaux, il conviendrait que ce pays se
6384 x, il conviendrait que ce pays se fasse un devoir de participer activement au rétablissement de cette communauté et de se
6385 devoir de participer activement au rétablissement de cette communauté et de se consacrer à cette tâche de telle façon que
6386 tivement au rétablissement de cette communauté et de se consacrer à cette tâche de telle façon que l’on puisse bien augure
6387 cette communauté et de se consacrer à cette tâche de telle façon que l’on puisse bien augurer de la transformation du syst
6388 tâche de telle façon que l’on puisse bien augurer de la transformation du système européen dans sa totalité… Seul le fédér
6389 -t-il dans la politique actuelle, est le principe de l’évolution politique de l’avenir. 208. Cf. P. Renouvin, L’idée de
6390 ctuelle, est le principe de l’évolution politique de l’avenir. 208. Cf. P. Renouvin, L’idée de fédération européenne da
6391 ique de l’avenir. 208. Cf. P. Renouvin, L’idée de fédération européenne dans la pensée politique du xixe siècle, Oxfor
6392 spiration patriotique qui nous a donné le courage d’ entreprendre cet immense travail ? N’avons-nous pas voulu la ceindre d
6393 mense travail ? N’avons-nous pas voulu la ceindre d’ une couronne d’éléments qui saluassent sa première résurrection ? » Cf
6394 N’avons-nous pas voulu la ceindre d’une couronne d’ éléments qui saluassent sa première résurrection ? » Cf. Dora Melegari
6395 é par le Bureau du Nouveau Monde, Paris (brochure de 104 p. écrite en français). 212. V. Hugo, Œuvres complètes, Actes e
6396 politique extérieure. 218. Toutes les citations de C. Frantz sont empruntées à son ouvrage paru en 1879 sous ce titre :
22 1961, Vingt-huit siècles d’Europe. Cinquième Partie. L’Ère des nations, (de 1848 à 1914) — 3. Un problème séculaire : la Russie et l’Europe
6397 ou à l’Allemagne, voire à la Suisse fédéraliste, de faire l’Europe et de s’y fondre, accomplissant ainsi une vocation nat
6398 ire à la Suisse fédéraliste, de faire l’Europe et de s’y fondre, accomplissant ainsi une vocation nationale, universelle ?
6399 s du xixe siècle — c’est elle qui a pour mission de régénérer l’Europe et de l’unir, car c’est ainsi seulement que la Rus
6400 elle qui a pour mission de régénérer l’Europe et de l’unir, car c’est ainsi seulement que la Russie pourra devenir europé
6401 isse en font indiscutablement partie. Mais le cas de la Russie est différent. Elle peut choisir d’être d’Europe ou non, se
6402 cas de la Russie est différent. Elle peut choisir d’ être d’Europe ou non, selon que l’Europe sera conforme ou non à l’idée
6403 la Russie est différent. Elle peut choisir d’être d’ Europe ou non, selon que l’Europe sera conforme ou non à l’idée russe
6404 que l’Europe sera conforme ou non à l’idée russe de l’humanité, du christianisme et de l’ordre social. Ce privilège exorb
6405 à l’idée russe de l’humanité, du christianisme et de l’ordre social. Ce privilège exorbitant, existe-t-il en fait, est-il
6406 ? Ou bien ne serait-il qu’un phantasme, un besoin de surcompenser le retard de la Russie sur les « progrès » de l’Ouest, —
6407 un phantasme, un besoin de surcompenser le retard de la Russie sur les « progrès » de l’Ouest, — ces progrès à la fois jal
6408 penser le retard de la Russie sur les « progrès » de l’Ouest, — ces progrès à la fois jalousés et honnis ? Notre propos da
6409 s et honnis ? Notre propos dans cet ouvrage étant de présenter des textes afin de les mieux laisser parler, nous rappeller
6410 rappellerons d’abord les opinions contradictoires de l’Ouest sur la Russie, puis celles des deux écoles antagonistes qui d
6411 oïevski. A. Opinions européennes sur la Russie, de Voltaire à Karl Marx Nous avons vu Sully exclure la Russie de son
6412 arl Marx Nous avons vu Sully exclure la Russie de son grand dessein, Leibniz tenter de l’inclure — non sans réserve — d
6413 re la Russie de son grand dessein, Leibniz tenter de l’inclure — non sans réserve — dans l’ensemble spirituel de l’Europe,
6414 re — non sans réserve — dans l’ensemble spirituel de l’Europe, William Penn l’accepter dans sa Ligue des Nations, et leurs
6415 udain le vrai danger, contre lequel il serait bon de s’unir et de s’entendre avec les Turcs. Voltaire et ses contemporains
6416 danger, contre lequel il serait bon de s’unir et de s’entendre avec les Turcs. Voltaire et ses contemporains tenaient enc
6417 me Impératrice que le premier gazetier littéraire de Paris, Melchior Grimm, peut écrire cette prophétie sensationnelle, qu
6418 t écrire cette prophétie sensationnelle, que tant d’ esprits plus grands que lui ne feront que répéter jusqu’à nos jours :
6419 eux empires se partageront […] tous les avantages de la civilisation, de la puissance, du génie, des lettres, des arts, de
6420 geront […] tous les avantages de la civilisation, de la puissance, du génie, des lettres, des arts, des armes et de l’indu
6421 ce, du génie, des lettres, des arts, des armes et de l’industrie : la Russie du côté de l’orient, et l’Amérique, devenue l
6422 du côté de l’orient, et l’Amérique, devenue libre de nos jours, du côté de l’occident, et nous autres, peuples du noyau, n
6423 noyau ». L’Amérique et la Russie sont les « pays d’ avenir » destinés à succéder à l’Europe lorsque ses divisions spiritue
6424 visions spirituelles et ses guerres auront achevé de l’épuiser. En 1797, Jean de Müller annonce que « l’avenir appartiendr
6425 soit à l’Amérique » : Napoléon, dans le Mémorial de Sainte-Hélène, prévoit que le monde sera sous peu « République améric
6426 du nom : Qu’il se trouve, disait-il, un empereur de Russie vaillant, impétueux, capable, en un mot un tsar qui ait de la
6427 nt, impétueux, capable, en un mot un tsar qui ait de la barbe au menton (ce qu’il exprimait, du reste, beaucoup plus énerg
6428 ’arriverais à Calais à temps fixe et par journées d’ étape, et je m’y trouverais le maître et l’arbitre de l’Europe… L’ab
6429 tape, et je m’y trouverais le maître et l’arbitre de l’Europe… L’abbé de Pradt, contemporain de Metternich, publie en 18
6430 itre de l’Europe… L’abbé de Pradt, contemporain de Metternich, publie en 1823 un « Parallèle de la puissance anglaise et
6431 rain de Metternich, publie en 1823 un « Parallèle de la puissance anglaise et russe relativement à l’Europe », où il démon
6432 une à renouveler le vieux monde, l’autre à tenter de le dominer. Précurseur de Churchill lançant le slogan du « rideau de
6433 monde, l’autre à tenter de le dominer. Précurseur de Churchill lançant le slogan du « rideau de fer », il écrit : Au-delà
6434 urseur de Churchill lançant le slogan du « rideau de fer », il écrit : Au-delà de la Vistule tombe un rideau derrière leq
6435 slogan du « rideau de fer », il écrit : Au-delà de la Vistule tombe un rideau derrière lequel il est fort difficile de b
6436 e un rideau derrière lequel il est fort difficile de bien voir ce qui se passe dans l’intérieur de l’empire russe. À la ma
6437 ile de bien voir ce qui se passe dans l’intérieur de l’empire russe. À la manière de l’Orient, dont il a reçu l’origine et
6438 ussi d’après elles seulement que l’on peut parler de l’armée russe… … Depuis Pierre le Grand jusqu’à ce jour, la politique
6439 uis Pierre le Grand jusqu’à ce jour, la politique de la Russie n’a pas cessé d’être conquérante ; on dirait que depuis un
6440 ce jour, la politique de la Russie n’a pas cessé d’ être conquérante ; on dirait que depuis un siècle entier son cabinet n
6441 un siècle entier son cabinet n’a été composé que d’ un seul et même homme tant il n’a eu qu’une seule et même pensée, cell
6442 tant il n’a eu qu’une seule et même pensée, celle de l’agrandissement méthodique. Sainte-Beuve, commentant et paraphrasan
6443 les courants vont vers deux fins : ou l’Autocrate d’ Europe, ou les États-Unis d’Europe. Vers le même temps, et dans le mê
6444 re que bientôt parmi elles il ne se trouvera plus de place que pour la liberté démocratique ou la tyrannie des Césars. J
6445 longtemps, il est clair que le monde va au-devant de l’alternative suivante : ou la Démocratie totale, ou le Despotisme ab
6446 se résument en ceci : l’Amérique a un bon siècle d’ avance sur la Russie, et l’Europe de l’Ouest devra marcher derrière no
6447 devra marcher derrière nous pendant une centaine d’ années, avant que la Russie puisse étendre son aile au-dessus de l’Atl
6448 t que la Russie puisse étendre son aile au-dessus de l’Atlantique. Mais la formulation la plus fameuse et d’ailleurs la p
6449 ion la plus fameuse et d’ailleurs la plus précise de ce que je voudrais nommer le mythe européen des deux grands, nous la
6450 ’hui sur la terre deux grands peuples qui, partis de points différents, semblent s’avancer vers le même but : ce sont les
6451 ancent qu’avec mille efforts ; eux seuls marchent d’ un pas aisé et rapide dans une carrière dont l’œil ne saurait encore a
6452 t et la barbarie, l’autre la civilisation revêtue de toutes ses armes ; aussi les conquêtes de l’Américain se font-elles a
6453 revêtue de toutes ses armes ; aussi les conquêtes de l’Américain se font-elles avec le soc du laboureur, celles du Russe a
6454 en quelque sorte dans un homme toute la puissance de la société. L’un a pour principal moyen d’action la liberté ; l’autre
6455 ssance de la société. L’un a pour principal moyen d’ action la liberté ; l’autre, la servitude. Leur point de départ est di
6456 on la liberté ; l’autre, la servitude. Leur point de départ est différent, leurs voies sont diverses ; néanmoins, chacun d
6457 nt, leurs voies sont diverses ; néanmoins, chacun d’ eux semble appelé par un dessein secret de la Providence à tenir un jo
6458 chacun d’eux semble appelé par un dessein secret de la Providence à tenir un jour dans ses mains les destinées de la moit
6459 ence à tenir un jour dans ses mains les destinées de la moitié du monde.223 On notera que Tocqueville ne se fait pas fau
6460 oins, en réalité, dans l’évolution qu’il annonce, d’ une double fatalité que d’une alternative, ménageant à l’Europe un cho
6461 volution qu’il annonce, d’une double fatalité que d’ une alternative, ménageant à l’Europe un choix final, sans doute inévi
6462 pensent la plupart des auteurs innombrables qui, de la fin du xviiie siècle à nos jours, ont supputé l’avenir de notre c
6463 xviiie siècle à nos jours, ont supputé l’avenir de notre continent : le seul fait qu’ils s’expriment pour ou contre l’un
6464 essimisme tende à l’emporter. S’ils avaient assez de foi dans le destin de l’Europe, ils opposeraient aux deux empires un
6465 porter. S’ils avaient assez de foi dans le destin de l’Europe, ils opposeraient aux deux empires un même refus, serein et
6466 une ou l’autre des roues. En vérité, leurs prises de position révèlent une anxiété de l’imagination plutôt qu’une angoisse
6467 té, leurs prises de position révèlent une anxiété de l’imagination plutôt qu’une angoisse immédiate, sans horizon. Nous av
6468 me le puissant refuge des trésors et des libertés de l’Europe. En revanche, de Joseph de Maistre à Georges Sorel, en passa
6469 trésors et des libertés de l’Europe. En revanche, de Joseph de Maistre à Georges Sorel, en passant par Proudhon et Renan,
6470 ue virulente et hautaine du « pays du dollar » et de son « matérialisme » ne cessera de s’amplifier jusqu’à nos jours, où
6471 du dollar » et de son « matérialisme » ne cessera de s’amplifier jusqu’à nos jours, où elle deviendra le lieu commun des n
6472 ù elle deviendra le lieu commun des nationalistes d’ extrême gauche et d’extrême droite. Beaucoup plus rares sont les auteu
6473 lieu commun des nationalistes d’extrême gauche et d’ extrême droite. Beaucoup plus rares sont les auteurs qui, comme Jean-P
6474 » — bien avant l’ère soviétique ! — n’a pas cessé de hanter à la fois les conservateurs, les libéraux et les socialistes.
6475 x et les socialistes. Seuls, certains catholiques d’ extrême droite comme le Savoyard Joseph de Maistre, le Bavarois Ernst
6476 ns une secrète complaisance à rêver l’éventualité d’ un juste châtiment fondant de Moscou sur nos démocraties… Plus sobre e
6477 rêver l’éventualité d’un juste châtiment fondant de Moscou sur nos démocraties… Plus sobre et plus serein, à sa coutume,
6478 24, dans son premier ouvrage : Il faut se garder de mettre en contraste l’Europe et l’Amérique : ce que l’on trouve là-ba
6479 que l’on trouve là-bas n’est qu’un développement de nos races et de notre genre de vie : en fait, New York et Lima nous i
6480 là-bas n’est qu’un développement de nos races et de notre genre de vie : en fait, New York et Lima nous importent davanta
6481 u’un développement de nos races et de notre genre de vie : en fait, New York et Lima nous importent davantage que Kiev et
6482 Certes, les Russes, selon Ranke, ont bien mérité de l’Europe en la protégeant contre les Mongols. Mais leur manière de s’
6483 protégeant contre les Mongols. Mais leur manière de s’occidentaliser reste à ses yeux liée à la tendance à s’approprier
6484 eux liée à la tendance à s’approprier la culture de l’Occident dans ses aspects matériels (in materieller Beziehung).224
6485 te : le marquis de Custine, dans son fameux récit d’ un séjour en Russie, « La Russie en 1839 », prédit le réveil effrayant
6486 russe, et alors « la violence mettra fin au règne de la parole » : Une ambition désordonnée, immense, une de ces ambition
6487 arole » : Une ambition désordonnée, immense, une de ces ambitions qui ne peuvent germer que dans l’âme des opprimés, et s
6488 l’âme des opprimés, et se nourrir que du malheur d’ une nation entière, fermente au cœur du peuple russe. Cette nation, es
6489 t conquérante, avide à force de privations, expie d’ avance chez elle, par une soumission avilissante, l’espoir d’exercer l
6490 ez elle, par une soumission avilissante, l’espoir d’ exercer la tyrannie chez les autres ; la gloire, la richesse qu’elle a
6491 gloire, la richesse qu’elle attend la distraient de la honte qu’elle subit, et, pour se laver du sacrifice impie de toute
6492 ’elle subit, et, pour se laver du sacrifice impie de toute liberté publique et personnelle, l’esclave, à genoux, rêve la d
6493 ; elle fomente chez nous l’anarchie dans l’espoir de profiter d’une corruption favorisée par elle, parce qu’elle est favor
6494 te chez nous l’anarchie dans l’espoir de profiter d’ une corruption favorisée par elle, parce qu’elle est favorable à ses v
6495 ’elle est favorable à ses vues : c’est l’histoire de la Pologne recommencée en grand. Depuis de longues années Paris lit d
6496 stoire de la Pologne recommencée en grand. Depuis de longues années Paris lit des journaux révolutionnaires, révolutionnai
6497 ai par tout homme initié à la marche des affaires de l’Europe et aux secrets des cabinets pendant les vingt dernières anné
6498 me occidental. Dans le même sens, mais avec plus de précision et une lucidité qui se révèle aujourd’hui prophétique, Jaco
6499 Burckhardt constate : Le tragique, dans le destin de l’Europe jusqu’ici, réside en ce que les peuples de l’Ouest, considér
6500 l’Europe jusqu’ici, réside en ce que les peuples de l’Ouest, considérés dans leurs perpétuelles mutations et révolutions,
6501 . (On l’eût embarrassé en lui demandant la raison de cette supériorité paradoxale, lui qui estimait que la culture n’est q
6502 même que son ami Engels, il salua les mouvements de libération nationale des Polonais, des Hongrois et des Allemands (tou
6503 des Allemands (tous écrasés par les interventions de la Russie) comme autant d’étapes « dialectiques » vers l’union finale
6504 par les interventions de la Russie) comme autant d’ étapes « dialectiques » vers l’union finale des Européens, dans une so
6505 ui devait triompher d’abord en France : La chute de la bourgeoisie en France, le triomphe de la classe ouvrière française
6506 La chute de la bourgeoisie en France, le triomphe de la classe ouvrière française, l’émancipation de la classe ouvrière en
6507 e de la classe ouvrière française, l’émancipation de la classe ouvrière en général, voilà le mot et la solution de la libé
6508 ouvrière en général, voilà le mot et la solution de la libération européenne.226 Certes, l’Angleterre bourgeoise ne man
6509 Certes, l’Angleterre bourgeoise ne manquerait pas de s’opposer à ce mouvement, mais une « guerre mondiale » l’obligerait à
6510 ue les États-Unis devaient former part intégrante de l’Occident et intervenir en Europe. Il écrivait en 1853 : Le grand é
6511 : Le grand événement du jour, c’est l’apparition de la politique américaine à l’horizon européen. Salué par les uns, reje
6512 mis par tous. À Beirouth, les Américains viennent d’ arracher un fugitif hongrois de plus aux serres de l’aigle autrichien.
6513 d’arracher un fugitif hongrois de plus aux serres de l’aigle autrichien. Il est réconfortant de constater que l’interventi
6514 serres de l’aigle autrichien. Il est réconfortant de constater que l’intervention américaine en Europe se produit d’abord
6515 Europe se produit d’abord à propos de la question d’ Orient… Dans l’explication violente et permanente qui oppose l’Est à l
6516 st le plus jeune et le plus puissant représentant de l’Ouest.227 Mais le grand adversaire de cette « libération de l’Eu
6517 entant de l’Ouest.227 Mais le grand adversaire de cette « libération de l’Europe » restait — et resterait toujours, sel
6518 Mais le grand adversaire de cette « libération de l’Europe » restait — et resterait toujours, selon Marx — la Russie, p
6519 et la « barbarie mongole », et dont la politique d’ hégémonie mondiale ne cesserait de duper les nations européennes : Co
6520 nt la politique d’hégémonie mondiale ne cesserait de duper les nations européennes : Comptant sur la lâcheté et la peur d
6521 Comptant sur la lâcheté et la peur des puissances de l’Ouest, la Russie joue les spadassins et accroît ses exigences à la
6522 mite du possible, afin d’être en mesure plus tard de se donner l’air magnanime en se contentant des avantages les plus imm
6523 dant un siècle, jusqu’à ce que le grand mouvement de 1789 lui ait opposé un puissant adversaire. Nous entendons la révolut
6524 dons la révolution européenne, la force explosive de ses idées démocratiques et de sa soif innée de liberté. Depuis ce tem
6525 la force explosive de ses idées démocratiques et de sa soif innée de liberté. Depuis ce temps, il n’y a plus eu en Europe
6526 ve de ses idées démocratiques et de sa soif innée de liberté. Depuis ce temps, il n’y a plus eu en Europe que deux forces
6527 cé en 1867, Marx précise que l’objectif permanent de la politique russe, son « étoile polaire », est la domination du mond
6528 », est la domination du monde : Il ne manque pas de naïfs qui s’imaginent que tout cela (l’impérialisme russe) s’est modi
6529 isme russe) s’est modifié, que la Pologne a cessé d’ être une « nation nécessaire » comme l’appelait un écrivain, et n’est
6530 ? Non, seul l’aveuglement des couches dirigeantes de l’Europe s’est accru et a atteint son zénith. La politique russe est
6531 s manœuvres peuvent varier, mais l’étoile polaire de sa politique — la domination mondiale — est une étoile fixe. Cependa
6532 révoyait la chute finale du despotisme congénital de la Russie, sous les coups du « progrès des masses » et de la « force
6533 ssie, sous les coups du « progrès des masses » et de la « force des idées », — recréant la « puissance et l’unité » de l’E
6534 s idées », — recréant la « puissance et l’unité » de l’Europe. Dans l’un des quelque 500 articles que Marx donna au New Yo
6535 rticles que Marx donna au New York Herald Tribune de 1851 à 1861, nous trouvons les lignes suivantes, parues le 31 décembr
6536 vantes, parues le 31 décembre 1853 : Les peuples de l’Ouest remonteront au pouvoir et retrouveront l’unité de but, tandis
6537 st remonteront au pouvoir et retrouveront l’unité de but, tandis que le Colosse russe sera ruiné par le progrès des masses
6538 sses et la force explosive des idées.229 Marx, de toute évidence, ne pouvait penser qu’à la Russie des tsars, mais sa p
6539 prophétie, si elle s’applique mal aux événements de 1917, est loin d’avoir perdu son sens pour autant. B. Opinions rus
6540 e s’applique mal aux événements de 1917, est loin d’ avoir perdu son sens pour autant. B. Opinions russes sur l’Europe,
6541 pour autant. B. Opinions russes sur l’Europe, de Tchaadaïev à Tolstoï Russie de l’époque de Kiev, occidentale. Russ
6542 s sur l’Europe, de Tchaadaïev à Tolstoï Russie de l’époque de Kiev, occidentale. Russie de la Horde d’Or, asiatique. Ru
6543 pe, de Tchaadaïev à Tolstoï Russie de l’époque de Kiev, occidentale. Russie de la Horde d’Or, asiatique. Russie moscovi
6544 des Tartares, et se considérant, selon les termes de la lettre du moine Philotée à Ivan III, comme « la Troisième Rome » p
6545 tique que Byzance, si l’on en croit la prétention d’ Ivan le Terrible à détenir non seulement le pouvoir politique, mais le
6546 n seulement le pouvoir politique, mais le pouvoir de sauver les âmes. Enfin Russie de Pierre le Grand, ouverte de force à
6547 es âmes. Enfin Russie de Pierre le Grand, ouverte de force à l’Europe par son maître. Les encyclopédistes français y domin
6548 is y dominent par correspondance pendant le règne de la Grande Catherine. Dès le début du xixe , c’est le tour des philoso
6549 identalistes. Les premiers n’ont vu dans l’œuvre de Pierre qu’une transgression des bases de la Russie, une contrainte qu
6550 l’œuvre de Pierre qu’une transgression des bases de la Russie, une contrainte qui pesa sur son développement et en interr
6551 autres n’ont pas reconnu le caractère particulier de la Russie, l’ont considérée comme un pays arriéré, en face de ce type
6552 cidental qui représentait pour eux le type unique de culture et de civilisation.230 La Russie d’Alexandre, puis de Nicol
6553 eprésentait pour eux le type unique de culture et de civilisation.230 La Russie d’Alexandre, puis de Nicolas Ier, au sor
6554 de civilisation.230 La Russie d’Alexandre, puis de Nicolas Ier, au sortir des guerres napoléoniennes, est encore en plei
6555 intelligentzia, comme on va la nommer, se nourrit de Saint-Simon, de Fourier, et de la philosophie des romantiques alleman
6556 comme on va la nommer, se nourrit de Saint-Simon, de Fourier, et de la philosophie des romantiques allemands. Le grand pro
6557 nommer, se nourrit de Saint-Simon, de Fourier, et de la philosophie des romantiques allemands. Le grand problème qu’elle s
6558 problème qu’elle se pose est celui des relations de la Russie et de l’Europe. La première réponse importante sera donnée
6559 e se pose est celui des relations de la Russie et de l’Europe. La première réponse importante sera donnée par un occidenta
6560 u. Pierre Tchaadaïev (1790-1856), ancien officier de la Garde, disciple de Maistre, de Bonald et de Schelling, publie en 1
6561 ancien officier de la Garde, disciple de Maistre, de Bonald et de Schelling, publie en 1836, dans une revue de Moscou, sa
6562 er de la Garde, disciple de Maistre, de Bonald et de Schelling, publie en 1836, dans une revue de Moscou, sa première Lett
6563 d et de Schelling, publie en 1836, dans une revue de Moscou, sa première Lettre philosophique (traduite du français en rus
6564 t en germe dans ces Lettres : « Il nie l’histoire de son pays, écrit Berdiaev, et sa négation est précisément le type de l
6565 Berdiaev, et sa négation est précisément le type de la négation russe. » Il veut que la Russie s’européanise, et il affir
6566 t il affirme que le peuple russe est seul capable de résoudre les problèmes spirituels et sociaux de l’Occident. Le tsar l
6567 e de résoudre les problèmes spirituels et sociaux de l’Occident. Le tsar l’ayant fait déclarer fou, il publie L’Apologie d
6568 r l’ayant fait déclarer fou, il publie L’Apologie d’ un fou, où il réitère sa condamnation du passé russe mais sa foi dans
6569 ue du peuple russe. Voici la définition lumineuse de l’Europe qu’il oppose aux ténèbres fécondes de la Russie231 : Les pe
6570 se de l’Europe qu’il oppose aux ténèbres fécondes de la Russie231 : Les peuples de l’Europe ont une physionomie commune,
6571 ténèbres fécondes de la Russie231 : Les peuples de l’Europe ont une physionomie commune, un air de famille. Malgré la di
6572 s de l’Europe ont une physionomie commune, un air de famille. Malgré la division générale de ces peuples en branche latine
6573 e, un air de famille. Malgré la division générale de ces peuples en branche latine et teutonique, en Méridionaux et Septen
6574 droit public. Outre ce caractère général, chacun de ces peuples a un caractère particulier, mais tout cela n’est que de l
6575 n caractère particulier, mais tout cela n’est que de l’Histoire et de la tradition. Cela fait le patrimoine héréditaire d’
6576 culier, mais tout cela n’est que de l’Histoire et de la tradition. Cela fait le patrimoine héréditaire d’idées de ces peup
6577 la tradition. Cela fait le patrimoine héréditaire d’ idées de ces peuples. Chaque individu y jouit de son usufruit, amasse
6578 tion. Cela fait le patrimoine héréditaire d’idées de ces peuples. Chaque individu y jouit de son usufruit, amasse dans la
6579 e d’idées de ces peuples. Chaque individu y jouit de son usufruit, amasse dans la vie, sans fatigue, sans travail, ces not
6580 pouvons recueillir ainsi dans le simple commerce d’ idées élémentaires, pour nous en servir tant bien que mal à nous dirig
6581 dans la vie ? Et remarquez qu’il ne s’agit ici ni d’ étude ni de lecture, de rien de littéraire ou de scientifique, mais si
6582  ? Et remarquez qu’il ne s’agit ici ni d’étude ni de lecture, de rien de littéraire ou de scientifique, mais simplement du
6583 uez qu’il ne s’agit ici ni d’étude ni de lecture, de rien de littéraire ou de scientifique, mais simplement du contact des
6584 l ne s’agit ici ni d’étude ni de lecture, de rien de littéraire ou de scientifique, mais simplement du contact des intelli
6585 i d’étude ni de lecture, de rien de littéraire ou de scientifique, mais simplement du contact des intelligences ; de ces i
6586 e, mais simplement du contact des intelligences ; de ces idées qui s’emparent de l’enfant au berceau, qui l’environnent au
6587 t des intelligences ; de ces idées qui s’emparent de l’enfant au berceau, qui l’environnent au milieu de ses jeux, que sa
6588 ui souffle dans ses caresses ; qui, sous la forme de sentiments divers, pénètrent dans la moelle de ses os avec l’air qu’i
6589 me de sentiments divers, pénètrent dans la moelle de ses os avec l’air qu’il respire, et qui ont déjà fait son être moral
6590 avoir qu’elles sont ces idées ? Ce sont les idées de devoir, de justice, de droit, d’ordre. Elles dérivent des événements
6591 les sont ces idées ? Ce sont les idées de devoir, de justice, de droit, d’ordre. Elles dérivent des événements mêmes qui y
6592 idées ? Ce sont les idées de devoir, de justice, de droit, d’ordre. Elles dérivent des événements mêmes qui y ont constit
6593 e sont les idées de devoir, de justice, de droit, d’ ordre. Elles dérivent des événements mêmes qui y ont constitué la soci
6594 lles sont des éléments intégrants du monde social de ces pays. C’est l’atmosphère de l’Occident ; c’est plus que de l’hist
6595 s du monde social de ces pays. C’est l’atmosphère de l’Occident ; c’est plus que de l’histoire, c’est plus que de la psych
6596 C’est l’atmosphère de l’Occident ; c’est plus que de l’histoire, c’est plus que de la psychologie, c’est la physiologie de
6597 nt ; c’est plus que de l’histoire, c’est plus que de la psychologie, c’est la physiologie de l’homme de l’Europe. Qu’avez-
6598 plus que de la psychologie, c’est la physiologie de l’homme de l’Europe. Qu’avez-vous à mettre à la place de cela chez no
6599 e la psychologie, c’est la physiologie de l’homme de l’Europe. Qu’avez-vous à mettre à la place de cela chez nous ? Toutes
6600 à la place de cela chez nous ? Toutes les nations de l’Europe se tenaient par la main en avançant dans les siècles. Quelqu
6601 ur la même route. Pour concevoir le développement de famille de ces peuples, il n’est pas besoin d’étudier l’histoire. Lis
6602 route. Pour concevoir le développement de famille de ces peuples, il n’est pas besoin d’étudier l’histoire. Lisez seulemen
6603 nt de famille de ces peuples, il n’est pas besoin d’ étudier l’histoire. Lisez seulement le Tasse, et voyez-les tous proste
6604 se, et voyez-les tous prosternés au pied des murs de Jérusalem. Rappelez-vous que, pendant quinze siècles, ils n’ont eu qu
6605 prême, pour célébrer sa gloire dans le plus grand de ses bienfaits. Et cependant, Tchaadaïev ne croit pas que la Russie s
6606 ndant, Tchaadaïev ne croit pas que la Russie soit d’ Europe — bien qu’elle soit destinée à sauver l’Europe en adoptant ses
6607 destinée à sauver l’Europe en adoptant ses formes de pensée, son sens de la durée, de la continuité, de l’unité… Dans ses
6608 Europe en adoptant ses formes de pensée, son sens de la durée, de la continuité, de l’unité… Dans ses Lettres philosophiqu
6609 ptant ses formes de pensée, son sens de la durée, de la continuité, de l’unité… Dans ses Lettres philosophiques, il repren
6610 e pensée, son sens de la durée, de la continuité, de l’unité… Dans ses Lettres philosophiques, il reprend l’idée que la Ru
6611 aines ; nous n’avons en rien contribué au progrès de l’esprit humain, et tout ce qui nous est revenu de ce progrès, nous l
6612 e l’esprit humain, et tout ce qui nous est revenu de ce progrès, nous l’avons défiguré. Nous ne nous sommes donné la peine
6613 vons défiguré. Nous ne nous sommes donné la peine de rien imaginer nous-mêmes, et, de tout ce que les autres ont imaginé,
6614 s donné la peine de rien imaginer nous-mêmes, et, de tout ce que les autres ont imaginé, nous n’avons emprunté que des app
6615 ses et le luxe inutile.232 Mais dans une lettre de 1835, il pousse cette autocritique jusqu’au point « dialectique » où
6616 e se renverse : du désert russe sortira le messie de la culture européenne : Il ne s’agit donc nullement pour nous de cou
6617 ropéenne : Il ne s’agit donc nullement pour nous de courir après les autres ; il s’agit de nous apprécier franchement, de
6618 pour nous de courir après les autres ; il s’agit de nous apprécier franchement, de nous concevoir tels que nous sommes, d
6619 autres ; il s’agit de nous apprécier franchement, de nous concevoir tels que nous sommes, de sortir du mensonge, et de nou
6620 nchement, de nous concevoir tels que nous sommes, de sortir du mensonge, et de nous placer dans la vérité. Après cela, nou
6621 r tels que nous sommes, de sortir du mensonge, et de nous placer dans la vérité. Après cela, nous avancerons, et nous avan
6622 avail des siècles qui nous ont précédés. Les gens de l’Europe se méprennent étrangement sur notre compte. Voilà M. Jouffro
6623 ez-lui donc, je vous prie, quels sont les peuples de l’Asie que nous avons civilisés ? Apparemment les mastodontes et les
6624 es mastodontes et les autres populations fossiles de la Sibérie, seules races d’êtres, à ma connaissance, que nous ayons t
6625 populations fossiles de la Sibérie, seules races d’ êtres, à ma connaissance, que nous ayons tirés de l’obscurité, et cela
6626 d’êtres, à ma connaissance, que nous ayons tirés de l’obscurité, et cela encore grâce aux Pallas et Fischer. Ils s’obstin
6627 ’obstinent à nous livrer l’Orient ; par une sorte d’ instinct de nationalité européenne, ils nous refoulent en Orient pour
6628 à nous livrer l’Orient ; par une sorte d’instinct de nationalité européenne, ils nous refoulent en Orient pour ne plus nou
6629 nous rencontrer en Occident. Ne soyons pas dupes de leur artifice involontaire ; cherchons nous-mêmes à découvrir notre a
6630 que nous avons à faire. L’Orient est aux maîtres de la mer, cela est évident, nous en sommes beaucoup plus éloignés que l
6631 ne sommes plus au temps où toutes les révolutions de l’Orient partaient de l’Asie centrale. La nouvelle Charte de la Compa
6632 s où toutes les révolutions de l’Orient partaient de l’Asie centrale. La nouvelle Charte de la Compagnie des Indes, voilà
6633 partaient de l’Asie centrale. La nouvelle Charte de la Compagnie des Indes, voilà désormais le véritable élément civilisa
6634 voilà désormais le véritable élément civilisateur de l’Asie. C’est l’Europe au contraire, que nous sommes destinés à instr
6635 nous sommes destinés à instruire sur une infinité de choses qu’elle ne saurait concevoir sans cela. Ne riez pas, vous save
6636 re force matérielle. Tel sera le résultat logique de notre longue solitude : toujours les grandes choses sont venues du dé
6637 servira singulièrement à hâter l’accomplissement de nos destinées. Frappée de stupeur et d’épouvante, l’Europe nous a rep
6638 hâter l’accomplissement de nos destinées. Frappée de stupeur et d’épouvante, l’Europe nous a repoussés avec colère ; la pa
6639 lissement de nos destinées. Frappée de stupeur et d’ épouvante, l’Europe nous a repoussés avec colère ; la page fatale de n
6640 ope nous a repoussés avec colère ; la page fatale de notre histoire, écrite de la main de Pierre le Grand, est déchirée :
6641 colère ; la page fatale de notre histoire, écrite de la main de Pierre le Grand, est déchirée : grâce à Dieu, nous ne somm
6642 page fatale de notre histoire, écrite de la main de Pierre le Grand, est déchirée : grâce à Dieu, nous ne sommes plus de
6643 est déchirée : grâce à Dieu, nous ne sommes plus de l’Europe ; dès ce jour donc notre mission universelle a commencé. Tc
6644 t ici tout près des adversaires les plus acharnés de son Apologie d’un fou. Un an plus tard, en 1837, paraît le premier nu
6645 des adversaires les plus acharnés de son Apologie d’ un fou. Un an plus tard, en 1837, paraît le premier numéro de la revue
6646 n an plus tard, en 1837, paraît le premier numéro de la revue des slavophiles, partisans d’un nationalisme spirituel et cu
6647 ier numéro de la revue des slavophiles, partisans d’ un nationalisme spirituel et culturel, de l’orthodoxie pure et des cou
6648 artisans d’un nationalisme spirituel et culturel, de l’orthodoxie pure et des coutumes ancestrales de la Russie paysanne,
6649 de l’orthodoxie pure et des coutumes ancestrales de la Russie paysanne, telles que le mir, adversaires donc de « l’Europe
6650 sie paysanne, telles que le mir, adversaires donc de « l’Europe », et cette revue s’intitule Europa ! Par la plume d’Ivan
6651 , et cette revue s’intitule Europa ! Par la plume d’ Ivan Kireievsky, son principal rédacteur, elle oppose à l’Europe la no
6652 cipal rédacteur, elle oppose à l’Europe la notion d’ enthousiasme, qui serait restée le privilège des Russes et que nos pay
6653 it restée le privilège des Russes et que nos pays de l’Ouest auraient perdue ; mais cette notion se trouve empruntée à Sch
6654 rialiste et bourgeoisement satisfaite, la mission de la Russie authentique est d’inverser l’œuvre de Pierre le Grand : le
6655 tisfaite, la mission de la Russie authentique est d’ inverser l’œuvre de Pierre le Grand : le salut de l’Europe sera russe.
6656 n de la Russie authentique est d’inverser l’œuvre de Pierre le Grand : le salut de l’Europe sera russe. Pour Kireievsky et
6657 d’inverser l’œuvre de Pierre le Grand : le salut de l’Europe sera russe. Pour Kireievsky et ses amis, la notion d’hégémon
6658 era russe. Pour Kireievsky et ses amis, la notion d’ hégémonie organisatrice est capitale : Mais pour que l’unité de l’Eur
6659 ganisatrice est capitale : Mais pour que l’unité de l’Europe se constitue organiquement et harmonieusement, il est nécess
6660 un centre défini, un peuple qui domine les autres de sa supériorité politique et culturelle. Toutes les grandes nations d
6661 itique et culturelle. Toutes les grandes nations de l’Europe ont exercé successivement cette hégémonie. Mais elles sont é
6662 bien que non européenne ou à cause de cela même — de restaurer l’Europe en la rendant conforme au génie russe ; pourtant,
6663 pourtant, cela ne pourra se faire qu’avec l’aide de l’Europe… … notre nationalité a été jusqu’ici une nationalité barbar
6664 iliser, l’élever, lui donner la vie et le pouvoir d’ évoluer, ne serait possible que par la médiation d’une influence étran
6665 ’évoluer, ne serait possible que par la médiation d’ une influence étrangère ; et comme jusqu’ici toute notre civilisation
6666 omme jusqu’ici toute notre civilisation s’inspire de l’étranger ce n’est que de l’étranger que nous pourrons la recevoir j
6667 civilisation s’inspire de l’étranger ce n’est que de l’étranger que nous pourrons la recevoir jusqu’au moment où nous égal
6668 cevoir jusqu’au moment où nous égalerons le reste de l’Europe. Alors, quand la civilisation commune de l’Europe coïncidera
6669 de l’Europe. Alors, quand la civilisation commune de l’Europe coïncidera avec le nôtre propre, naîtra une civilisation vra
6670 aîtra une civilisation vraiment russe, expression de la vie spirituelle d’une nation instruite, d’une civilisation stable,
6671 vraiment russe, expression de la vie spirituelle d’ une nation instruite, d’une civilisation stable, profonde, vivante et
6672 ion de la vie spirituelle d’une nation instruite, d’ une civilisation stable, profonde, vivante et pleine de conséquences h
6673 civilisation stable, profonde, vivante et pleine de conséquences heureuses, pour la Russie et pour l’humanité. Telles so
6674 qu’à la fin du siècle. Il faut avouer qu’aux yeux d’ un Européen d’aujourd’hui, les thèses communes aux deux écoles (décade
6675 siècle. Il faut avouer qu’aux yeux d’un Européen d’ aujourd’hui, les thèses communes aux deux écoles (décadence européenne
6676 social), paraissent plus décisives que les points de désaccord (appréciation de la valeur du passé russe, insistance sur l
6677 cisives que les points de désaccord (appréciation de la valeur du passé russe, insistance sur la religion et ses conséquen
6678 antin). Nicolas Berdiaev, dans une page étonnante de ses Sources et sens du communisme russe (cité plus haut) donne une de
6679 isme russe (cité plus haut) donne une description de l’Intelligentzia russe que toute l’histoire récente de la vie soviéti
6680 Intelligentzia russe que toute l’histoire récente de la vie soviétique illustre et confirme. Les Russes ont témoigné d’un
6681 ue illustre et confirme. Les Russes ont témoigné d’ une disposition spéciale à adopter les idées occidentales et à les bra
6682 sion ou dans l’erreur, mais c’est aussi une sorte de vertu qui témoigne d’un élan religieux total de l’âme. L’intelligentz
6683 mais c’est aussi une sorte de vertu qui témoigne d’ un élan religieux total de l’âme. L’intelligentziste russe applique à
6684 e de vertu qui témoigne d’un élan religieux total de l’âme. L’intelligentziste russe applique à la science ces méthodes id
6685 ient pas ce dogme, et, par exemple, les partisans de Lamarck, étaient en butte à son mépris. Le philosophe le plus importa
6686 d que Léon Tolstoï (1828-1910), dans le préambule de son pamphlet intitulé « Les Décembristes », ait pu railler l’époque o
6687 n, mais avec une philosophie russe, et des revues de sens exclusivement russe, développant des principes russes, mais avec
6688 uropéenne […]. Tout le monde cherchait à déterrer de nouvelles questions et à les résoudre, tout le monde écrivait, lisait
6689 Russes, comme un seul homme, étaient dans un état d’ exaltation indescriptible… Qui peut dire si Tolstoï se sent plus près
6690 occidentalistes quand il écrit233 : Il n’y a pas de raison de croire que les Russes soient nécessairement soumis à la mêm
6691 istes quand il écrit233 : Il n’y a pas de raison de croire que les Russes soient nécessairement soumis à la même loi de p
6692 Russes soient nécessairement soumis à la même loi de progression de la civilisation qui régit les peuples européens, ni qu
6693 écessairement soumis à la même loi de progression de la civilisation qui régit les peuples européens, ni que cette progres
6694 non se prolétariser, à l’imitation de l’Europe et de l’Amérique, mais au contraire, il doit résoudre chez lui le problème
6695 en slavophile comme Vladimir Soloviev, la mission de la Russie tient tout entière dans la spiritualité de l’orthodoxie, ta
6696 la Russie tient tout entière dans la spiritualité de l’orthodoxie, tandis que pour le révolutionnaire occidentaliste Alexa
6697 on et messianisme, mission (divine ou historique) de la Russie, face à l’Europe qui a perdu la vraie religion ou qui manqu
6698 e l’Orient et l’Occident sur le rôle et la nature de la « civilisation » elle-même ? C’est bien ce que nous suggère un des
6699 e nous suggère un des plus grands poètes lyriques de la Russie, Fiodor Ivan Tiouttchev (1803-1873) lorsqu’il écrit : Un b
6700 73) lorsqu’il écrit : Un bien grand inconvénient de notre position, c’est cette obligation où nous sommes d’appeler du no
6701 e position, c’est cette obligation où nous sommes d’ appeler du nom d’Europe un fait qui ne devrait jamais s’appeler que pa
6702 cette obligation où nous sommes d’appeler du nom d’ Europe un fait qui ne devrait jamais s’appeler que par son propre nom 
6703  : Civilisation. C. Dostoïevski et la mission de la Russie Toutes ces contradictions, apparentes ou réelles, nous a
6704 serrés, fiévreuses et exaltées comme les hachures de Van Gogh et tourmentées comme ses nuages, dans les œuvres de Dostoïev
6705 et tourmentées comme ses nuages, dans les œuvres de Dostoïevski. À la question de savoir si la Russie appartient ou non à
6706 es, dans les œuvres de Dostoïevski. À la question de savoir si la Russie appartient ou non à l’Europe, personne n’a répond
6707 ppartient ou non à l’Europe, personne n’a répondu d’ une manière à la fois plus abondante, plus sincère, et plus désespérém
6708 , et plus désespérément ambiguë. Il ne manque pas d’ Européens de nos jours pour protester contre une prétendue « exclusion
6709 sespérément ambiguë. Il ne manque pas d’Européens de nos jours pour protester contre une prétendue « exclusion de la Russi
6710 s pour protester contre une prétendue « exclusion de la Russie » dont les conseils européens, non pas Staline, seraient re
6711 ïevski ne ferait-il pas partie du trésor culturel de l’Europe ? Voyons ce que lui-même en a dit. Fiodor Michaïlovitch Dost
6712 (1821-1881) se mit à publier en 1876 son Journal d’ un écrivain, gazette mensuelle dont il était le seul rédacteur. Des pa
6713 n voici quelques brefs extraits. L’idée constante de Dostoïevski est celle de la mission de l’orthodoxie, en laquelle seul
6714 traits. L’idée constante de Dostoïevski est celle de la mission de l’orthodoxie, en laquelle seule …la face divine du Chr
6715 constante de Dostoïevski est celle de la mission de l’orthodoxie, en laquelle seule …la face divine du Christ s’est cons
6716 te image divine afin, lorsque le temps sera venu, de la révéler à un monde qui a perdu sa voie… Ce « monde » est en réali
6717 l’Europe n’a été aussi travaillée, et par autant d’ éléments hostiles qu’à notre époque. On dirait que tout est sapé, miné
6718 ue l’Europe frappera à notre porte et nous criera de venir la sauver quand viendra l’heure dernière et que l’ordre des cho
6719 ans quelque droit, elle l’exigera, nous ordonnant de la lui accorder ; elle nous dira que nous faisons partie d’elle-même,
6720 accorder ; elle nous dira que nous faisons partie d’ elle-même, que par conséquent le même ordre de choses se retrouve chez
6721 tie d’elle-même, que par conséquent le même ordre de choses se retrouve chez nous comme chez elle, que ce n’est pas en vai
6722 nts ans nous l’avons imitée et nous sommes vantés d’ être des Européens, donc en la sauvant nous nous sauverons nous-mêmes…
6723 quel point nous avons toujours été dissemblables de l’Europe, en dépit de notre désir deux fois séculaire d’appartenir à
6724 rope, en dépit de notre désir deux fois séculaire d’ appartenir à l’Europe, désir et rêve qui nous ont poussés à des actes
6725 prendrons certainement pas ce que l’Europe attend de nous, ce qu’elle nous demande, et en quoi nous pourrions alors lui êt
6726 us pas, au contraire, mettre à la raison l’ennemi de l’Europe et de son ordre par le même « fer et feu » que le prince de
6727 raire, mettre à la raison l’ennemi de l’Europe et de son ordre par le même « fer et feu » que le prince de Bismarck ? C’es
6728 ploit, que nous pourrons hardiment nous féliciter d’ être tout à fait des Européens !235 Dostoïevski pense d’ailleurs que
6729 nse d’ailleurs que la Russie, tout en n’étant pas d’ Europe sera bientôt la plus forte nation d’Europe : Dans le numéro de
6730 nt pas d’Europe sera bientôt la plus forte nation d’ Europe : Dans le numéro de mars de mon Journal, je me suis laissé all
6731 t la plus forte nation d’Europe : Dans le numéro de mars de mon Journal, je me suis laissé aller à quelques rêveries sur
6732 s forte nation d’Europe : Dans le numéro de mars de mon Journal, je me suis laissé aller à quelques rêveries sur l’avenir
6733 uis laissé aller à quelques rêveries sur l’avenir de l’Europe. Mais ce n’est plus une rêverie, c’est presque une certitude
6734 tôt la Russie sera peut-être la plus forte nation de l’Europe. Cela résultera du fait que toutes les grandes puissances en
6735 faiblies et sapées par les efforts mal satisfaits de leur démocratie, par la proportion trop considérable des éléments app
6736 ge à cela, par une commune disposition, ou mieux, d’ un commun accord. Il ne restera donc qu’un seul colosse sur le contine
6737 ira-t-il encore plus tôt qu’on ne pense. L’avenir de l’Europe appartient à la Russie…236 Ses affirmations réitérées (dan
6738 l’Europe, leur « seconde patrie », n’ont en somme d’ autre effet que de mieux souligner la dualité existante et que certain
6739 econde patrie », n’ont en somme d’autre effet que de mieux souligner la dualité existante et que certains Européens s’obst
6740 nt ceux-ci ne pas s’en offusquer ! Il est inutile de protester contre un fait semblable. La plus haute parmi les hautes mi
6741 sentons devoir un jour assumer, c’est la mission de grouper l’humanité en un seul faisceau, car nous, ce n’est pas seulem
6742 re chair et à notre sang… La Convention française de 1793, tout en décernant un brevet de citoyen au poète allemand Schill
6743 on française de 1793, tout en décernant un brevet de citoyen au poète allemand Schiller, l’ami de l’humanité, et bien qu’e
6744 evet de citoyen au poète allemand Schiller, l’ami de l’humanité, et bien qu’elle ait fait par là un beau geste, voire un g
6745 upçonnait certainement pas qu’à l’autre extrémité de l’Europe, dans la Moscovie inculte, ce même Schiller était bien plus
6746 aux Russes barbares non seulement qu’à la France de ce temps-là, mais à celle de tout le xixe siècle, où Schiller, citoy
6747 ement qu’à la France de ce temps-là, mais à celle de tout le xixe siècle, où Schiller, citoyen français et ami de l’human
6748 ixe siècle, où Schiller, citoyen français et ami de l’humanité, n’a jamais été connu que des professeurs de littérature,
6749 umanité, n’a jamais été connu que des professeurs de littérature, et encore pas de tous, et très partiellement. Or, Schill
6750 que des professeurs de littérature, et encore pas de tous, et très partiellement. Or, Schiller s’est incorporé à l’âme rus
6751 , il a presque marqué une période dans l’histoire de notre civilisation. Cette façon à nous de considérer la littérature u
6752 istoire de notre civilisation. Cette façon à nous de considérer la littérature universelle est un phénomène à peu près san
6753 ale, manifester une force active, ne peut manquer de devenir aussitôt un poète russe, ne peut échapper à la pensée russe,
6754 peut échapper à la pensée russe, ne peut manquer d’ être presque une force russe […]237 Non, la Russie ne sera jamais d
6755 rce russe […]237 Non, la Russie ne sera jamais d’ Europe … à moins que l’Europe ne devienne russe. Et le ton monte : La
6756 e. Et le ton monte : La Russie est quelque chose de tout à fait à part, ne ressemblant en rien à l’Europe, et doué de sa
6757 part, ne ressemblant en rien à l’Europe, et doué de sa vie propre. L’Europe a peut-être grand tort de se moquer des Russe
6758 de sa vie propre. L’Europe a peut-être grand tort de se moquer des Russes en les qualifiant de révolutionnaires : car nous
6759 nd tort de se moquer des Russes en les qualifiant de révolutionnaires : car nous sommes des révolutionnaires non seulement
6760 pas moins invincibles, justement grâce à l’unité de notre esprit national et de notre conscience nationale. Nous ne somme
6761 ement grâce à l’unité de notre esprit national et de notre conscience nationale. Nous ne sommes pas la France qui est tout
6762 pas l’Europe qui tout entière dépend des Bourses de sa bourgeoisie et de la tranquillité de ses prolétaires, tranquillité
6763 t entière dépend des Bourses de sa bourgeoisie et de la tranquillité de ses prolétaires, tranquillité que les gouvernement
6764 s Bourses de sa bourgeoisie et de la tranquillité de ses prolétaires, tranquillité que les gouvernements de là-bas s’effor
6765 s prolétaires, tranquillité que les gouvernements de là-bas s’efforcent d’acheter et qu’ils obtiennent tout au plus pour u
6766 llité que les gouvernements de là-bas s’efforcent d’ acheter et qu’ils obtiennent tout au plus pour un laps de temps… Tiron
6767 er et qu’ils obtiennent tout au plus pour un laps de temps… Tirons l’épée, s’il le faut, au nom des malheureux persécutés,
6768 roirons que plus fortement à la véritable mission de la Russie, à sa puissance et à sa vérité : se sacrifier pour ceux qui
6769 rimés et abandonnés au nom des prétendus intérêts de la civilisation. Il faut que les organes politiques reconnaissent la
6770 quelque fart, que tout au moins une nation serve de flambeau. Qu’adviendrait-il sans cela ?239 Au nom de la véritable r
6771 rer et libérer par la sainte Russie, sous peine «  de sombrer dans le cynisme » et d’y trouver leur fin, « vers laquelle il
6772 sie, sous peine « de sombrer dans le cynisme » et d’ y trouver leur fin, « vers laquelle il semble bien qu’ils s’acheminent
6773  idées » — ou plutôt prophéties — mais les expose d’ une manière moins haletante, et sur un ton plus ample et nostalgique :
6774 blait contradiction dans ses articles devient jeu de symboles poétiques. Un même « rêve de l’Europe » le hante, qu’il fait
6775 devient jeu de symboles poétiques. Un même « rêve de l’Europe » le hante, qu’il fait rêver successivement au Stavroguine d
6776 de L’Adolescent, et à l’homme ridicule du Journal d’ un écrivain. Nous en donnons ici la version tirée de L’Adolescent 240,
6777 un écrivain. Nous en donnons ici la version tirée de L’Adolescent 240, la plus complète et la plus belle. Le soleil coucha
6778 e et la plus belle. Le soleil couchant du tableau de Claude Lorrain, après avoir illuminé L’Âge d’Or de l’humanité europée
6779 eau de Claude Lorrain, après avoir illuminé L’Âge d’ Or de l’humanité européenne devient soudain, mêlé aux flammes des Tuil
6780 e Claude Lorrain, après avoir illuminé L’Âge d’Or de l’humanité européenne devient soudain, mêlé aux flammes des Tuileries
6781 ammes des Tuileries, l’éclairage du Grand Soir et de la fin de l’Europe. Je n’oublierai jamais mes premiers instants d’Eu
6782 Tuileries, l’éclairage du Grand Soir et de la fin de l’Europe. Je n’oublierai jamais mes premiers instants d’Europe… Je t
6783 ope. Je n’oublierai jamais mes premiers instants d’ Europe… Je te raconterai une de mes premières impressions d’alors, un
6784 premiers instants d’Europe… Je te raconterai une de mes premières impressions d’alors, un songe que j’ai eu, un véritable
6785 Je te raconterai une de mes premières impressions d’ alors, un songe que j’ai eu, un véritable songe. Il y a à Dresde, au M
6786 able songe. Il y a à Dresde, au Musée, un tableau de Claude Lorrain que le catalogue intitule L’âge d’or, j’ignore d’aille
6787 de Claude Lorrain que le catalogue intitule L’âge d’ or, j’ignore d’ailleurs pourquoi… Je l’avais remarqué en passant. Je v
6788 que je vis ainsi ; comme dans le tableau, un coin de l’Archipel, il y a plus de trois-mille ans ; des vagues bleues et car
6789 ns le tableau, un coin de l’Archipel, il y a plus de trois-mille ans ; des vagues bleues et caressantes, des îles et des r
6790 dans le lointain un panorama féerique, un coucher de soleil séducteur… impossible de rendre cela en paroles. C’est l’human
6791 rique, un coucher de soleil séducteur… impossible de rendre cela en paroles. C’est l’humanité européenne qui se rappelle s
6792 rappelle son berceau : cette idée emplit mon âme d’ un amour filial. C’était là le paradis terrestre de l’humanité : les d
6793 ’un amour filial. C’était là le paradis terrestre de l’humanité : les dieux descendus du ciel et s’apparentant aux hommes…
6794 nnocents ; les prés et les bocages s’emplissaient de leurs chants et de leurs cris joyeux ; un immense surplus d’énergies
6795 et les bocages s’emplissaient de leurs chants et de leurs cris joyeux ; un immense surplus d’énergies vierges se répandai
6796 ants et de leurs cris joyeux ; un immense surplus d’ énergies vierges se répandait en amour et en joies naïves. Le soleil l
6797 amour et en joies naïves. Le soleil les inondait de chaleur et de lumière, en admirant ces merveilleux enfants… Songe mer
6798 oies naïves. Le soleil les inondait de chaleur et de lumière, en admirant ces merveilleux enfants… Songe merveilleux, subl
6799 ux enfants… Songe merveilleux, sublime aberration de l’humanité ! L’âge d’or est le rêve le plus invraisemblable de tous c
6800 eilleux, sublime aberration de l’humanité ! L’âge d’ or est le rêve le plus invraisemblable de tous ceux qui ont jamais été
6801  ! L’âge d’or est le rêve le plus invraisemblable de tous ceux qui ont jamais été, mais pour lui des hommes ont donné tout
6802 éveillai et ouvris les yeux, littéralement baigné de larmes. J’étais heureux, je m’en souviens. Une sensation de bonheur e
6803 J’étais heureux, je m’en souviens. Une sensation de bonheur encore inéprouvé traversa mon cœur, jusqu’à la douleur ; c’ét
6804 a mon cœur, jusqu’à la douleur ; c’était un amour de toute l’humanité. C’était maintenant tout à fait le soir ; à travers
6805 re des fleurs placées sur la fenêtre, un faisceau de rayons obliques frappait la vitre de ma petite chambrette et m’inonda
6806 un faisceau de rayons obliques frappait la vitre de ma petite chambrette et m’inondait de lumière. Eh bien, mon ami, eh b
6807 it la vitre de ma petite chambrette et m’inondait de lumière. Eh bien, mon ami, eh bien ! ce soleil couchant du premier jo
6808 ami, eh bien ! ce soleil couchant du premier jour de l’humanité européenne, que je voyais dans mon songe, se transforma to
6809 n une réalité, en soleil couchant du dernier jour de l’humanité européenne ! À ce moment surtout on entendait tinter sur l
6810 surtout on entendait tinter sur l’Europe un glas d’ enterrement. Je ne veux pas parler seulement de la guerre, ni des Tuil
6811 as d’enterrement. Je ne veux pas parler seulement de la guerre, ni des Tuileries ; je savais sans cela que tout passerait,
6812 e pouvais pas l’admettre. Oui, ils venaient alors de brûler les Tuileries… Oh ! sois tranquille, je sais que c’était « log
6813 ». Et je comprends bien la puissance irrésistible de l’idée courante, mais, comme représentant de la haute pensée russe, j
6814 ible de l’idée courante, mais, comme représentant de la haute pensée russe, je ne pouvais l’admettre, car la haute pensée
6815 entier : j’étais seul et errant. Je ne parle pas de moi personnellement, mais de la pensée russe. Là-bas, il y avait comb
6816 ant. Je ne parle pas de moi personnellement, mais de la pensée russe. Là-bas, il y avait combat et logique ; là-bas le Fra
6817 ar conséquent, jamais le Français n’a fait autant de mal à la France, ni l’Allemand à son Allemagne qu’à cette époque-là !
6818 J’émigrai, poursuivit-il, et je ne regrettai rien de ce que je laissais derrière moi. Tout ce que j’avais de forces, je l’
6819 que je laissais derrière moi. Tout ce que j’avais de forces, je l’avais mis au service de la Russie tant que j’y avais véc
6820 que j’avais de forces, je l’avais mis au service de la Russie tant que j’y avais vécu ; une fois parti, je continuai à la
6821 avais été tout bonnement Russe, comme le Français d’ alors n’était que Français, et l’Allemand qu’Allemand. En Europe, on n
6822 as. L’Europe a créé les nobles types du Français, de l’Anglais, de l’Allemand, mais de son homme futur elle ne sait encore
6823 créé les nobles types du Français, de l’Anglais, de l’Allemand, mais de son homme futur elle ne sait encore à peu près ri
6824 es du Français, de l’Anglais, de l’Allemand, mais de son homme futur elle ne sait encore à peu près rien. Et je crois bien
6825 it été dressé le bilan général, a reçu la faculté d’ être le plus russe précisément lorsqu’il est le plus européen. C’est l
6826 ion nationale la plus essentielle qui nous sépare de tous les autres, et, à cet égard, nous ne sommes comme personne […] O
6827 i, c’est un fait remarquable que, voici déjà près d’ un siècle, la Russie ne vit décidément plus pour elle-même, mais uniqu
6828 ent pour l’Europe ! Quant à eux, ils sont voués à de terribles souffrances, avant d’atteindre au Royaume de Dieu. Finis
6829 ils sont voués à de terribles souffrances, avant d’ atteindre au Royaume de Dieu. Finis Europæ… Dans les Frères Karamazo
6830 rribles souffrances, avant d’atteindre au Royaume de Dieu. Finis Europæ… Dans les Frères Karamazov, Ivan parle en ces te
6831 ns les Frères Karamazov, Ivan parle en ces termes de son prochain départ pour l’Europe : Je sais bien que je vais dans un
6832 e vais dans un cimetière, mais c’est le plus cher de tous les cimetières… Tout proche des Russes par la passion spirituel
6833 6) appartient à son siècle comme l’œil à la tombe de Caïn. C’est notre temps qui l’a compris. Où le classer ? Tout l’exist
6834 istentialisme vient de lui, et c’est le contraire d’ un système. Plaçons-le entre deux chapitres, comme il eût souhaité, lu
6835 « Le Solitaire » : Toute l’Europe, avec la hâte d’ une passion croissante, se perd dans des problèmes mondains qui ne sau
6836 les hommes — est apparu, il est devenu impossible d’ avancer d’un pas vers la solution du problème de l’égalité de l’homme
6837  — est apparu, il est devenu impossible d’avancer d’ un pas vers la solution du problème de l’égalité de l’homme avec l’hom
6838 e d’avancer d’un pas vers la solution du problème de l’égalité de l’homme avec l’homme, selon ce monde dont l’essence est
6839 ’un pas vers la solution du problème de l’égalité de l’homme avec l’homme, selon ce monde dont l’essence est la diversité 
6840 barrée pour toujours ; et cette frontière se rit de tous les efforts humains, se rit de la mesquinerie du temporel face a
6841 ntière se rit de tous les efforts humains, se rit de la mesquinerie du temporel face au droit suprême et seigneurial de l’
6842 du temporel face au droit suprême et seigneurial de l’éternel, lorsque le temporel prétend expliquer à la manière du mond
6843 res et bombardements soient nécessaires, item que de nombreux ministres perdent la raison… Mais nul ne peut savoir combien
6844 erdent la raison… Mais nul ne peut savoir combien de temps l’on passera dans la pure convulsivité.242 219. Cattaneo :
6845 Danger russe et l’Europe ». 222. La Russie est, de toutes les nations de l’Ancien Monde, celle dont la population augmen
6846 ope ». 222. La Russie est, de toutes les nations de l’Ancien Monde, celle dont la population augmente le plus rapidement,
6847 mente le plus rapidement, proportion gardée (Note de Tocqueville). 223. Alexis de Tocqueville : Œuvres complètes, Édition
6848 tes, Édition définitive publiée sous la direction de J.-P. Mayer, tome I, i : De la Démocratie en Amérique, pages 430-431.
6849 iée sous la direction de J.-P. Mayer, tome I, i : De la Démocratie en Amérique, pages 430-431. Éd. Gallimard, Paris. 224.
6850 7. K. Marx, articles du New York Herald Tribune, de 1853 à 1856, publiés en 1897 sous le titre « The Eastern Question ».
6851 ions Gallimard. 231. Lettres sur la Philosophie de l’Histoire, éd. Gerchenson, Moscou 1913, p. 81-88. 232. op. cit., p
6852 Russie face à l’Occident, suite tirée du Journal d’ un écrivain, par André Chédel, Lausanne, 1945. 235. Journal d’un écr
6853 par André Chédel, Lausanne, 1945. 235. Journal d’ un écrivain, ch. I, mars 1876. 236. Journal d’un écrivain, II, avril
6854 l d’un écrivain, ch. I, mars 1876. 236. Journal d’ un écrivain, II, avril 1876. 237. Ibid., 1er juin 1876. 238. Ibid.
6855 239. Ibid., février 1877. 240. Trad. française de Pierre Pascal, Paris 1934. 241. Cf. Dimitri Merejkowsky, dans son Rè
6856 34. 241. Cf. Dimitri Merejkowsky, dans son Règne de l’Antéchrist, Paris 1921 : « Les Européens, en Europe, sont Anglais,
6857 sie et l’Europe. » Rousseau, dans le Gouvernement de la Pologne, déplorait au contraire qu’il n’y eut plus en Europe que d
23 1961, Vingt-huit siècles d’Europe. Cinquième Partie. L’Ère des nations, (de 1848 à 1914) — 4. De l’historisme au pessimisme
6858 emand Léopold von Ranke (1795-1886), un sentiment d’ incongruité profond s’empare de l’esprit : ou bien les descriptions de
6859 886), un sentiment d’incongruité profond s’empare de l’esprit : ou bien les descriptions des Russes sont délirantes et ne
6860 e leur propre esprit, ou bien le sobre interprète de l’Europe n’a simplement pas vu les réalités parmi lesquelles il a véc
6861 réalités parmi lesquelles il a vécu pendant près d’ un siècle. Les deux mondes en tout cas ne sont pas contemporains, en d
6862 demandait lequel est le plus vrai, il serait vain d’ espérer aucune réponse sérieuse : les méthodes ne sont pas comparables
6863 es ne sont pas comparables ici et là, et les fins d’ ordres différents. Ranke est en plus d’un sens l’anti-Hegel, par sa vo
6864 t les fins d’ordres différents. Ranke est en plus d’ un sens l’anti-Hegel, par sa volonté d’objectivité, de sobriété spirit
6865 st en plus d’un sens l’anti-Hegel, par sa volonté d’ objectivité, de sobriété spirituelle, de description contrôlée de « ce
6866 sens l’anti-Hegel, par sa volonté d’objectivité, de sobriété spirituelle, de description contrôlée de « ce qui s’est vrai
6867 a volonté d’objectivité, de sobriété spirituelle, de description contrôlée de « ce qui s’est vraiment passé », et par son
6868 de sobriété spirituelle, de description contrôlée de « ce qui s’est vraiment passé », et par son refus de tout système dia
6869 « ce qui s’est vraiment passé », et par son refus de tout système dialectique permettant de survoler les faits et dotant l
6870 son refus de tout système dialectique permettant de survoler les faits et dotant l’évolution d’on ne sait quelle énergie
6871 ttant de survoler les faits et dotant l’évolution d’ on ne sait quelle énergie intrinsèque : « Chaque génération est immédi
6872 lui, ne conquiert que par sa « culture » le droit de jouer un rôle actif dans l’histoire mondiale. La primauté appartient
6873 « romano-germanique » : Italie — France — Espagne d’ un côté, Allemagne — Angleterre — Scandinavie de l’autre. César, par s
6874 e d’un côté, Allemagne — Angleterre — Scandinavie de l’autre. César, par sa conquête des Gaules a rendu possible cette con
6875 e cette configuration, dont Charlemagne, « prince de la culture », a créé la première unité. Sous la conduite des papes ro
6876 s romains et des empereurs germains, la « liaison de l’Europe entière » n’a cessé de se développer et de s’affirmer. Ranke
6877 ins, la « liaison de l’Europe entière » n’a cessé de se développer et de s’affirmer. Ranke ne croit nullement que le confl
6878 l’Europe entière » n’a cessé de se développer et de s’affirmer. Ranke ne croit nullement que le conflit de la papauté et
6879 affirmer. Ranke ne croit nullement que le conflit de la papauté et de l’Empire, puis du Catholicisme et de la Réforme, aie
6880 e croit nullement que le conflit de la papauté et de l’Empire, puis du Catholicisme et de la Réforme, aient été des grands
6881 a papauté et de l’Empire, puis du Catholicisme et de la Réforme, aient été des grands malheurs pour l’Europe, car cette bi
6882 alheurs pour l’Europe, car cette bipolarité … a de profondes racines dans la nature même des choses et c’est même grâce
6883 s et c’est même grâce à ces conflits que l’esprit de l’Europe a mûri. Tensions fécondes donc, et non pas déchirements cat
6884 doivent pas empêcher l’historien fidèle aux faits de constater … que le complexe des États chrétiens d’Europe doit être c
6885 constater … que le complexe des États chrétiens d’ Europe doit être considéré comme un ensemble, en quelque sorte comme u
6886 plus grave que représentent pour l’unité foncière de l’Europe les souverainetés nationales absolues : Cependant, celui qu
6887 onales absolues : Cependant, celui qui s’efforce de ne voir qu’une simple tendance de l’histoire universelle dans cette i
6888 i qui s’efforce de ne voir qu’une simple tendance de l’histoire universelle dans cette importance de plus en plus grande q
6889 Ses derniers ouvrages — contemporains du Journal d’ un écrivain de Dostoïevski ! — sont à la gloire de la civilisation et
6890 ouvrages — contemporains du Journal d’un écrivain de Dostoïevski ! — sont à la gloire de la civilisation et du génie chrét
6891 d’un écrivain de Dostoïevski ! — sont à la gloire de la civilisation et du génie chrétien de l’Europe, summum bonum de l’h
6892 la gloire de la civilisation et du génie chrétien de l’Europe, summum bonum de l’humanité. Élevons notre pensée, non par
6893 on et du génie chrétien de l’Europe, summum bonum de l’humanité. Élevons notre pensée, non par l’imagination, mais par un
6894 oulement des faits, afin d’avoir une vue générale de l’histoire universelle… Si variés que puissent être nos déchirements
6895 Autrefois d’autres nations et d’autres ensembles de peuples furent florissants, qui étaient animés par d’autres principes
6896 in de nous… L’Empire ottoman est écrasé, traversé de tous côtés par le fait chrétien. Disons-le tout net : par « fait chré
6897 ignent qu’incomplètement la chose. C’est le génie de l’Occident. C’est l’esprit qui transforme les peuples en armées bien
6898 les canaux, s’approprie les mers en les couvrant de flottes, remplit les lointains continents de colonies, sonde les myst
6899 rant de flottes, remplit les lointains continents de colonies, sonde les mystères de la nature par la recherche scientifiq
6900 ntains continents de colonies, sonde les mystères de la nature par la recherche scientifique, pénètre dans tous les domain
6901 par un travail incessant, sans pour autant perdre de vue la vérité éternelle, enfin qui fait régner l’ordre et la loi parm
6902 re et la loi parmi les hommes malgré la diversité de leurs passions. Cet esprit, nous le voyons accomplir des progrès énor
6903 conquis l’Amérique, l’enlevant aux forces brutes de la nature et aux peuplades indomptables qui l’habitaient, puis il l’a
6904  ; par différentes voies il pénètre jusqu’au fond de la lointaine Asie où il n’y a guère que la Chine qui puisse encore lu
6905 univers spirituel et historique où la prééminence de l’Europe dans la civilisation mondiale ne saurait être mise en questi
6906 ques illusions rationalistes (ainsi dans L’Avenir de la Science), il a su voir mieux que Ranke le danger du nationalisme p
6907 u nationalisme pour l’Europe, pour « les intérêts de la raison et de la civilisation ». C’est la guerre de 1870, illustran
6908 our l’Europe, pour « les intérêts de la raison et de la civilisation ». C’est la guerre de 1870, illustrant les conséquenc
6909 a raison et de la civilisation ». C’est la guerre de 1870, illustrant les conséquences tragiques du nationalisme d’État, q
6910 strant les conséquences tragiques du nationalisme d’ État, qui l’oblige, toutes affaires cessantes, à faire face aux problè
6911 fait national. À l’idée romantique et herdérienne d’ une nation fondée sur la race, la langue, la naissance, le passé, Rena
6912 ngue, la naissance, le passé, Renan oppose l’idée d’ une nation fédérée par le « consentement actuel » des populations et p
6913 nt actuel » des populations et par leur « volonté de vivre ensemble » en vue d’un avenir commun. Cette analyse capitale po
6914 et par leur « volonté de vivre ensemble » en vue d’ un avenir commun. Cette analyse capitale pour toute l’évolution de l’i
6915 un. Cette analyse capitale pour toute l’évolution de l’idée européenne dont il formule la thèse en plein drame collectif,
6916 ule la thèse en plein drame collectif, il choisit de l’adresser personnellement à l’un de ses pairs dans la science neuve
6917 , il choisit de l’adresser personnellement à l’un de ses pairs dans la science neuve des civilisations, le professeur alle
6918 id Strauss. Sa première lettre est datée du début de la guerre, sa seconde lettre de la fin. L’idée de fédération y surgit
6919 st datée du début de la guerre, sa seconde lettre de la fin. L’idée de fédération y surgit une fois de plus, comme la solu
6920 de la guerre, sa seconde lettre de la fin. L’idée de fédération y surgit une fois de plus, comme la solution évidente des
6921 me la solution évidente des déchirements absurdes de l’Europe : La paix ne peut, à ce qu’il semble, être conclue directem
6922 et l’Allemagne ; elle ne peut être l’ouvrage que de l’Europe, qui a blâmé la guerre et qui doit vouloir qu’aucun des memb
6923 a guerre et qui doit vouloir qu’aucun des membres de la famille européenne ne soit trop affaibli. Vous parlez à bon droit
6924 ne ne soit trop affaibli. Vous parlez à bon droit de garanties contre le retour de rêves malsains ; mais quelle garantie v
6925 parlez à bon droit de garanties contre le retour de rêves malsains ; mais quelle garantie vaudrait celle de l’Europe, con
6926 es malsains ; mais quelle garantie vaudrait celle de l’Europe, consacrant de nouveau les frontières actuelles et interdisa
6927 tières actuelles et interdisant à qui que ce soit de songer à déplacer les bornes fixées par les anciens traités ? Toute a
6928 se cela, et elle aura posé pour l’avenir le germe de la plus féconde institution, je veux dire d’une autorité centrale, so
6929 erme de la plus féconde institution, je veux dire d’ une autorité centrale, sorte de congrès des États-Unis d’Europe, jugea
6930 tion, je veux dire d’une autorité centrale, sorte de congrès des États-Unis d’Europe, jugeant les nations, s’imposant à el
6931 eant le principe des nationalités par le principe de fédération… Le principe de la fédération européenne peut ainsi offrir
6932 alités par le principe de fédération… Le principe de la fédération européenne peut ainsi offrir une base de médiation semb
6933 fédération européenne peut ainsi offrir une base de médiation semblable à celle que l’Église offrait au Moyen Âge.245 …
6934 les violences du passé. La Lorraine a fait partie de l’empire germanique, sans aucun doute ; mais la Hollande, la Suisse,
6935 squ’à Bénévent, et en remontant au-delà du traité de Verdun, la France entière, en y comprenant même la Catalogne, en ont
6936 artie. L’Alsace est maintenant un pays germanique de langue et de race ; mais, avant d’être envahie par la race germanique
6937 ce est maintenant un pays germanique de langue et de race ; mais, avant d’être envahie par la race germanique, l’Alsace ét
6938 ays germanique de langue et de race ; mais, avant d’ être envahie par la race germanique, l’Alsace était un pays celtique,
6939 lsace était un pays celtique, ainsi qu’une partie de l’Allemagne du Sud. Nous ne concluons pas de là que l’Allemagne du Su
6940 rtie de l’Allemagne du Sud. Nous ne concluons pas de là que l’Allemagne du Sud doive être française ; mais qu’on ne vienne
6941 terait. Presque partout où les patriotes fougueux de l’Allemagne réclament un droit germanique, nous pourrions réclamer un
6942 y eut les orangs-outangs. Avec cette philosophie de l’histoire, il n’y aura de légitime dans le monde que le droit des or
6943 Avec cette philosophie de l’histoire, il n’y aura de légitime dans le monde que le droit des orangs-outangs, injustement d
6944 telles que les a faites l’histoire sont les pairs d’ un grand sénat où chaque membre est inviolable. L’Europe est une confé
6945 re est inviolable. L’Europe est une confédération d’ États réunis par l’idée commune de la civilisation. L’individualité de
6946 e confédération d’États réunis par l’idée commune de la civilisation. L’individualité de chaque nation est constituée sans
6947 ’idée commune de la civilisation. L’individualité de chaque nation est constituée sans doute par la race, la langue, l’his
6948 stoire, la religion, mais aussi par quelque chose de beaucoup plus tangible, par le consentement actuel, par la volonté qu
6949 , par la volonté qu’ont les différentes provinces d’ un État de vivre ensemble.246 Douze ans plus tard, dans une confére
6950 olonté qu’ont les différentes provinces d’un État de vivre ensemble.246 Douze ans plus tard, dans une conférence à la S
6951 es. Et tout d’abord, dans une préface à l’édition de son texte, datée du 8 mai 1887, il réitère sa thèse fondamentale : L
6952 un être moral. On n’admet plus qu’il soit permis de persécuter les gens pour leur faire changer de religion ; les persécu
6953 is de persécuter les gens pour leur faire changer de religion ; les persécuter pour leur faire changer de langue ou de pat
6954 religion ; les persécuter pour leur faire changer de langue ou de patrie nous paraît tout aussi mal… Ce qui constitue une
6955 s persécuter pour leur faire changer de langue ou de patrie nous paraît tout aussi mal… Ce qui constitue une nation, ce n’
6956 si mal… Ce qui constitue une nation, ce n’est pas de parler la même langue ou d’appartenir au même groupe ethnographique,
6957 nation, ce n’est pas de parler la même langue ou d’ appartenir au même groupe ethnographique, c’est d’avoir fait ensemble
6958 d’appartenir au même groupe ethnographique, c’est d’ avoir fait ensemble de grandes choses dans le passé et de vouloir en f
6959 roupe ethnographique, c’est d’avoir fait ensemble de grandes choses dans le passé et de vouloir en faire encore dans l’ave
6960 fait ensemble de grandes choses dans le passé et de vouloir en faire encore dans l’avenir. De la conférence elle-même, q
6961 ssé et de vouloir en faire encore dans l’avenir. De la conférence elle-même, qui marque une date, et dont on a si souvent
6962 roduction et précautions liminaires : À l’époque de la Révolution française, on croyait que les institutions de petites v
6963 lution française, on croyait que les institutions de petites villes indépendantes, telles que Sparte et Rome, pouvaient s’
6964 Rome, pouvaient s’appliquer à nos grandes nations de trente à quarante millions d’âmes. De nos jours, on commet une erreur
6965 nos grandes nations de trente à quarante millions d’ âmes. De nos jours, on commet une erreur plus grave : on confond la ra
6966 des nations de trente à quarante millions d’âmes. De nos jours, on commet une erreur plus grave : on confond la race avec
6967 à celle des peuples réellement existants. Tâchons d’ arriver à quelque précision en ces questions difficiles, où la moindre
6968 que nous allons faire est délicat ; c’est presque de la vivisection ; nous allons traiter les vivants comme d’ordinaire on
6969 visection ; nous allons traiter les vivants comme d’ ordinaire on traite les morts. Nous y mettrons la froideur, l’impartia
6970 absolue… L’Europe s’est constituée par le refus de toute hégémonie d’une de ses nations ou régions : Depuis la fin de l
6971 s’est constituée par le refus de toute hégémonie d’ une de ses nations ou régions : Depuis la fin de l’Empire romain, ou,
6972 constituée par le refus de toute hégémonie d’une de ses nations ou régions : Depuis la fin de l’Empire romain, ou, mieux
6973 d’une de ses nations ou régions : Depuis la fin de l’Empire romain, ou, mieux, depuis la dislocation de l’empire de Char
6974 l’Empire romain, ou, mieux, depuis la dislocation de l’empire de Charlemagne, l’Europe occidentale nous apparaît divisée e
6975 ain, ou, mieux, depuis la dislocation de l’empire de Charlemagne, l’Europe occidentale nous apparaît divisée en nations, d
6976 e hégémonie sur les autres, sans jamais y réussir d’ une manière durable. Ce que n’ont pu Charles-Quint, Louis XIV, Napoléo
6977 ement ne le pourra dans l’avenir. L’établissement d’ un nouvel Empire romain ou d’un nouvel empire de Charlemagne est deven
6978 nir. L’établissement d’un nouvel Empire romain ou d’ un nouvel empire de Charlemagne est devenu une impossibilité. La divis
6979 t d’un nouvel Empire romain ou d’un nouvel empire de Charlemagne est devenu une impossibilité. La division de l’Europe est
6980 lemagne est devenu une impossibilité. La division de l’Europe est trop grande pour qu’une tentative de domination universe
6981 de l’Europe est trop grande pour qu’une tentative de domination universelle ne provoque pas très vite une coalition qui fa
6982 t européens et modernes : Les nations, entendues de cette manière, sont quelque chose d’assez nouveau dans l’histoire. L’
6983 s, entendues de cette manière, sont quelque chose d’ assez nouveau dans l’histoire. L’antiquité ne les connut pas : l’Égypt
6984 fils du Soleil ou un fils du Ciel. Il n’y eut pas de citoyens égyptiens, pas plus qu’il n’y a de citoyens chinois. L’antiq
6985 t pas de citoyens égyptiens, pas plus qu’il n’y a de citoyens chinois. L’antiquité classique eut des républiques et des ro
6986 s et des royautés municipales, des confédérations de républiques locales, des empires ; elle n’eut guère la nation au sens
6987 s la comprenons. Athènes, Sparte, Sidon, Tyr sont de petits centres d’admirable patriotisme ; mais ce sont des cités avec
6988 thènes, Sparte, Sidon, Tyr sont de petits centres d’ admirable patriotisme ; mais ce sont des cités avec un territoire rela
6989 ption dans l’Empire romain, étaient des ensembles de peuplades, souvent liguées entre elles, mais sans institutions centra
6990 ies. L’empire assyrien, l’empire persan, l’empire d’ Alexandre ne furent pas non plus des patries. Il n’y eut jamais de pat
6991 urent pas non plus des patries. Il n’y eut jamais de patriotes assyriens… La race, la langue, la culture, définissent-ell
6992 science instinctive qui a présidé à la confection de la carte d’Europe n’a tenu aucun compte de la race, et les premières
6993 inctive qui a présidé à la confection de la carte d’ Europe n’a tenu aucun compte de la race, et les premières nations de l
6994 ection de la carte d’Europe n’a tenu aucun compte de la race, et les premières nations de l’Europe sont des nations de san
6995 aucun compte de la race, et les premières nations de l’Europe sont des nations de sang essentiellement mélangé. Le fait de
6996 es premières nations de l’Europe sont des nations de sang essentiellement mélangé. Le fait de la race, capital à l’origine
6997 nations de sang essentiellement mélangé. Le fait de la race, capital à l’origine, va donc toujours perdant de son importa
6998 ce, capital à l’origine, va donc toujours perdant de son importance. L’histoire humaine diffère essentiellement de la zool
6999 tance. L’histoire humaine diffère essentiellement de la zoologie. La race n’y est pas tout, comme chez les rongeurs ou les
7000 es rongeurs ou les félins, et on n’a pas le droit d’ aller par le monde tâter le crâne des gens, puis les prendre à la gorg
7001 s les prendre à la gorge en leur disant : — Tu es de notre sang tu nous appartiens !… … Ce que nous venons de dire de la r
7002 u nous appartiens !… … Ce que nous venons de dire de la race, il faut le dire de la langue. La langue invite à se réunir ;
7003 e nous venons de dire de la race, il faut le dire de la langue. La langue invite à se réunir ; elle n’y force pas. Les Éta
7004 faite, puisqu’elle a été faite par l’assentiment de ses différentes parties, compte trois ou quatre langues. Il y a dans
7005 quatre langues. Il y a dans l’homme quelque chose de supérieur à la langue : c’est la volonté. La volonté de la Suisse d’ê
7006 érieur à la langue : c’est la volonté. La volonté de la Suisse d’être unie, malgré la variété de ses idiomes, est un fait
7007 angue : c’est la volonté. La volonté de la Suisse d’ être unie, malgré la variété de ses idiomes, est un fait bien plus imp
7008 lonté de la Suisse d’être unie, malgré la variété de ses idiomes, est un fait bien plus important qu’une similitude de lan
7009 est un fait bien plus important qu’une similitude de langage souvent obtenue par des vexations. La nation serait-elle mi
7010 ons. La géographie est un des facteurs essentiels de l’histoire… Peut-on dire cependant, comme le croient certains partis,
7011 comme le croient certains partis, que les limites d’ une nation sont écrites sur la carte et que cette nation a le droit de
7012 rites sur la carte et que cette nation a le droit de s’adjuger ce qui est nécessaire pour arrondir certains contours, pour
7013 gne, telle rivière, à laquelle on prête une sorte de faculté limitante a priori ? Je ne connais pas de doctrine plus arbit
7014 de faculté limitante a priori ? Je ne connais pas de doctrine plus arbitraire ni plus funeste. Avec cela, on justifie tout
7015 lles qui séparent et celles qui ne séparent pas ? De Biarritz à Tomea, il n’y a pas une embouchure de fleuve qui ait plus
7016 De Biarritz à Tomea, il n’y a pas une embouchure de fleuve qui ait plus qu’une autre un caractère bornal. Si l’histoire l
7017 l’Oder auraient, autant que le Rhin, ce caractère de frontière naturelle qui a fait commettre tant d’infractions au droit
7018 de frontière naturelle qui a fait commettre tant d’ infractions au droit fondamental, qui est la volonté des hommes. Une
7019 autre dans le présent. Dans le passé, un héritage de gloire et de regrets à partager, dans l’avenir un même programme à ré
7020 présent. Dans le passé, un héritage de gloire et de regrets à partager, dans l’avenir un même programme à réaliser ; avoi
7021 voilà ce que l’on comprend malgré les diversités de race et de langue. … Par leurs facultés diverses, souvent opposées, l
7022 ue l’on comprend malgré les diversités de race et de langue. … Par leurs facultés diverses, souvent opposées, les nations
7023 t opposées, les nations servent à l’œuvre commune de la civilisation ; toutes apportent une note à ce grand concert de l’h
7024 on ; toutes apportent une note à ce grand concert de l’humanité, qui, en somme, est la plus haute réalité idéale que nous
7025 les nations pour des qualités, qui se nourrirait de vaine gloire ; qui serait à ce point jaloux, égoïste, querelleur ; qu
7026 s hommes. … Les nations ne sont pas quelque chose d’ éternel. Elles ont commencé, elles finiront. La confédération européen
7027 ropéenne, probablement, les remplacera. L’auteur de La Culture de la Renaissance et des Considérations sur l’Histoire uni
7028 ablement, les remplacera. L’auteur de La Culture de la Renaissance et des Considérations sur l’Histoire universelle, l’hi
7029 kob Burckhardt (1818-1897) a incarné la tradition d’ une cité humaniste, allemande par la langue et suisse par le civisme,
7030 la langue et suisse par le civisme, mais nourrie d’ influences françaises et italiennes. On ne trouve pas dans son œuvre d
7031 es et italiennes. On ne trouve pas dans son œuvre de système d’interprétation ou de construction métaphysique ; mais une e
7032 ennes. On ne trouve pas dans son œuvre de système d’ interprétation ou de construction métaphysique ; mais une espèce d’imp
7033 pas dans son œuvre de système d’interprétation ou de construction métaphysique ; mais une espèce d’impersonnalité classiqu
7034 ou de construction métaphysique ; mais une espèce d’ impersonnalité classique, secrètement passionnée, et la pénétration d’
7035 ssique, secrètement passionnée, et la pénétration d’ un regard imaginatif qui ressuscite le passé qu’il aime, « taxe » avec
7036 rophètes inspirés. Nietzsche l’excessif n’a cessé de rechercher l’amitié de Burckhardt le mesuré. Et certes, ce dernier av
7037 zsche l’excessif n’a cessé de rechercher l’amitié de Burckhardt le mesuré. Et certes, ce dernier avait chaudement soutenu
7038 liment écarté les avances pathétiques du prophète de Zarathoustra. Au moment de sombrer, à Turin, Nietzsche envoie deux dé
7039 seur bâlois se trouve être un « Polizeidirektor » de Karlsruhe, Friedrich von Preen. Lorsque Burckhardt parle de « l’histo
7040 he, Friedrich von Preen. Lorsque Burckhardt parle de « l’histoire mondiale », il se limite très consciemment à l’Europe, c
7041 u sens le plus élevé du mot, les peuples à l’état de civilisation, et non ceux qui sont à l’état de nature. Et même parmi
7042 ux dont la culture n’est pas embranchée sur celle de l’Europe, par exemple le Japon et la Chine. Pour ce qui est des Indes
7043 erses, Macédoniens et autres peuples. Notre objet d’ étude se circonscrit donc au seul passé qui ait un rapport distinct av
7044 l’on sait que cette époque heureuse appelée l’âge d’ or, au sens mythique du mot, n’a jamais existé et n’existera jamais, o
7045 jamais existé et n’existera jamais, on s’abstient de surévaluer follement un certain passé ou de désespérer follement du p
7046 tient de surévaluer follement un certain passé ou de désespérer follement du présent ou enfin d’espérer follement en l’ave
7047 sé ou de désespérer follement du présent ou enfin d’ espérer follement en l’avenir ; mais on voit cependant dans l’étude de
7048 des plus nobles occupations. Le passé n’est rien d’ autre que l’histoire de la vie et des souffrances de l’humanité consid
7049 tions. Le passé n’est rien d’autre que l’histoire de la vie et des souffrances de l’humanité considérée dans son ensemble.
7050 autre que l’histoire de la vie et des souffrances de l’humanité considérée dans son ensemble. Et cependant l’Antiquité a d
7051 e : c’est à elle que nous devons notre conception de l’État ; elle vit naître nos religions et est encore aujourd’hui l’él
7052 est encore aujourd’hui l’élément le plus durable de notre civilisation. Ses créations, dans le domaine des arts plastique
7053 nous oppose à elle… Et même si nous sommes issus de peuples qui, encore en leur enfance, sommeillèrent à côté des grands
7054 sommeillèrent à côté des grands peuples civilisés de l’Antiquité, nous ne nous sentons pas moins les descendants de ceux-c
7055 é, nous ne nous sentons pas moins les descendants de ceux-ci, parce que leur âme a passé en nous et que leur labeur, leur
7056 répond : la papauté, le Saint-Empire, la conquête de l’Outremer, quelques grandes individualités, et la lutte permanente c
7057 és, et la lutte permanente contre toute hégémonie d’ un des grands États : Un seul danger mortel a paru constamment menace
7058 ’écrasante puissance mécanique, qu’elle provienne d’ un peuple barbare conquérant ou d’une accumulation des moyens de guerr
7059 ’elle provienne d’un peuple barbare conquérant ou d’ une accumulation des moyens de guerre au service d’un État ou d’une te
7060 rbare conquérant ou d’une accumulation des moyens de guerre au service d’un État ou d’une tendance, ou peut-être même des
7061 ’une accumulation des moyens de guerre au service d’ un État ou d’une tendance, ou peut-être même des masses actuelles. Ce
7062 tion des moyens de guerre au service d’un État ou d’ une tendance, ou peut-être même des masses actuelles. Ce ne sont pas l
7063 asses actuelles. Ce ne sont pas les pires ennemis de Rome qui ont sauvé l’Europe, mais bien les ennemis les plus opiniâtre
7064 Europe, mais bien les ennemis les plus opiniâtres de l’Espagne : les Hollandais, l’Angleterre (la protestante et la cathol
7065 ’arrache au danger que constituent les tentatives d’ unification et de nivellement politico-socialo-religieux qu’on cherche
7066 r que constituent les tentatives d’unification et de nivellement politico-socialo-religieux qu’on cherche à lui imposer pa
7067 la plus spécifique, la richesse infiniment variée de son esprit. C’est bien un lieu commun de répéter que l’esprit est inv
7068 t variée de son esprit. C’est bien un lieu commun de répéter que l’esprit est invincible et qu’il vaincra toujours, alors
7069 que réellement il ne dépend parfois que du degré d’ énergie d’un seul homme à un certain moment pour que des peuples ou de
7070 ement il ne dépend parfois que du degré d’énergie d’ un seul homme à un certain moment pour que des peuples ou des civilisa
7071 ères soient ou non appelés à disparaître. Il faut de grands individus et ceux-ci ont besoin de réussir. Mais l’Europe a fr
7072 Il faut de grands individus et ceux-ci ont besoin de réussir. Mais l’Europe a fréquemment eu de grands hommes aux moments
7073 besoin de réussir. Mais l’Europe a fréquemment eu de grands hommes aux moments cruciaux de son histoire.250 Mais qu’est-
7074 quemment eu de grands hommes aux moments cruciaux de son histoire.250 Mais qu’est-ce que l’Europe, en fin de compte ? Bu
7075 pe en tant que foyer, à la fois vieux et nouveau, d’ une vie aux mille aspects, lieu de naissance des plus riches créations
7076 eux et nouveau, d’une vie aux mille aspects, lieu de naissance des plus riches créations, patrie de tous les contrastes qu
7077 eu de naissance des plus riches créations, patrie de tous les contrastes qui se résorbent en la seule unité ; ici, tout ce
7078 moyen. Voilà qui est européen : la manifestation de toutes les forces, y compris l’individu, par le truchement du monumen
7079 ompris l’individu, par le truchement du monument, de la représentation plastique, du mot, des institutions, des partis ; l
7080 sens et toutes les directions ; cette aspiration de l’esprit à vouloir absolument faire connaître tout ce qui est en lui
7081 ate que les cloches sonnent en harmonie, même si, de tout près, elles font entendre quelques dissonances : Discordia conco
7082 u’un obscur besoin ait conduit certaines branches d’ Indo-européens vers l’Occident simplement parce qu’ici un autre sol, u
7083 parce qu’ici un autre sol, un autre climat (celui de la liberté et de la diversité), tout un monde déchiqueté d’îles et de
7084 utre sol, un autre climat (celui de la liberté et de la diversité), tout un monde déchiqueté d’îles et de caps les attenda
7085 rté et de la diversité), tout un monde déchiqueté d’ îles et de caps les attendaient. Car, voilà qui est aussi européen : a
7086 la diversité), tout un monde déchiqueté d’îles et de caps les attendaient. Car, voilà qui est aussi européen : aimer non s
7087 celte et germanique ; civilisations qui dépassent de beaucoup celles d’Asie par le fait qu’elles sont d’aspect et de forme
7088  ; civilisations qui dépassent de beaucoup celles d’ Asie par le fait qu’elles sont d’aspect et de forme multiples et qu’en
7089 beaucoup celles d’Asie par le fait qu’elles sont d’ aspect et de forme multiples et qu’en elles l’individu put se développ
7090 lles d’Asie par le fait qu’elles sont d’aspect et de forme multiples et qu’en elles l’individu put se développer pleinemen
7091 aisait partie… L’historien ne peut que se réjouir de cette richesse et laisser tous les appétits de victoire aux partisans
7092 ir de cette richesse et laisser tous les appétits de victoire aux partisans de telle ou telle tendance. Étant donné la vio
7093 isser tous les appétits de victoire aux partisans de telle ou telle tendance. Étant donné la violence extrême des combats
7094 e extrême des combats du passé, le désir constant d’ anéantir l’ennemi, nous ne pourrions, nous autres tard-venus de l’huma
7095 ennemi, nous ne pourrions, nous autres tard-venus de l’humanité, tenir pour un parti, même s’il s’agit de celui qu’en nous
7096 l’humanité, tenir pour un parti, même s’il s’agit de celui qu’en nous-mêmes nous croyons être le nôtre.251 « Nous autres
7097 ons être le nôtre.251 « Nous autres tards-venus de l’humanité »… Cette incidente (qui fait penser à Nietzsche) trahit le
7098 r à Nietzsche) trahit le pessimisme irrépressible de l’historien de la civilisation. Bien qu’il ait observé qu’en Europe t
7099 trahit le pessimisme irrépressible de l’historien de la civilisation. Bien qu’il ait observé qu’en Europe toute évolution
7100 ne peut s’empêcher, dans ses Lettres à von Preen, de porter sur l’avenir prochain (le xxe siècle) un jugement des plus du
7101 nfirmé : Vous ne croirez jamais quel cas on fait de ces roulements de tambour au fur et à mesure que les années passent ;
7102 croirez jamais quel cas on fait de ces roulements de tambour au fur et à mesure que les années passent ; la grande masse,
7103 nt ; la grande masse, dans sa confusion, a besoin d’ un rythme pour marcher, sans lequel elle n’aurait « aucune façon ». En
7104 anges attend les travailleurs. La vision que j’ai de leur avenir confine, pour le moment, à la folie ; mais je ne peux m’e
7105 taire doit devenir un fabricant en gros. Ces amas d’ humains dans les usines ne doivent pas éternellement être abandonnés à
7106 à leur misère et à leurs envies. Un certain degré de misère contrôlée, avec de l’avancement, et en uniforme, chaque journé
7107 nvies. Un certain degré de misère contrôlée, avec de l’avancement, et en uniforme, chaque journée commencée et terminée pa
7108 ue journée commencée et terminée par un roulement de tambour, voilà ce qui devrait logiquement se produire. (Mais j’en con
7109 rouve irrémédiablement placé devant l’alternative d’ une démocratie totale ou d’un despotisme sans loi et absolu, ce dernie
7110 é devant l’alternative d’une démocratie totale ou d’ un despotisme sans loi et absolu, ce dernier n’étant d’ailleurs pas le
7111 ties qui ont maintenant le cœur trop tendre, mais de dictatures militaires prétendues républicaines. On n’aime guère se re
7112 ’aime guère se représenter le monde sous la botte de gouvernants qui fassent entièrement abstraction des notions de droit,
7113 s qui fassent entièrement abstraction des notions de droit, de prospérité, de travail et d’industrie toujours plus enrichi
7114 ent entièrement abstraction des notions de droit, de prospérité, de travail et d’industrie toujours plus enrichissants, de
7115 abstraction des notions de droit, de prospérité, de travail et d’industrie toujours plus enrichissants, de crédit, etc. e
7116 es notions de droit, de prospérité, de travail et d’ industrie toujours plus enrichissants, de crédit, etc. et qui gouverne
7117 avail et d’industrie toujours plus enrichissants, de crédit, etc. et qui gouvernent, au contraire, brutalement. Cependant,
7118 lement. Cependant, c’est justement dans les mains de gens pareils que l’on précipite le monde, par cette folle concurrence
7119 cernant, la participation des masses. … Ma vision de ces « terribles simplificateurs » que l’Europe va connaître, est loin
7120 lificateurs » que l’Europe va connaître, est loin d’ être agréable ; et de temps en temps, lors de mes rêveries, je vois ce
7121 uand nous serons, en septembre, devant un demi. … De temps à autre je suppute ce que pourront devenir notre érudition et n
7122 ne commencé son déclin. Il m’arrive parfois aussi d’ imaginer un des beaux côtés de ces temps nouveaux : comment, sur tous
7123 rrive parfois aussi d’imaginer un des beaux côtés de ces temps nouveaux : comment, sur tous les efforts et aspirations, s’
7124 fforts et aspirations, s’étendra l’horreur livide de la mort, parce qu’une fois de plus la force nue aura le dessus et la
7125 e plus la force nue aura le dessus et la consigne de fermer son bec sera donnée partout. Friedrich Nietzsche (1844-1900)
7126 Baudelaire d’une part, Tocqueville et Burckhardt de l’autre, il le sauve de la stupidité spirituelle et de la sottise pol
7127 Tocqueville et Burckhardt de l’autre, il le sauve de la stupidité spirituelle et de la sottise politique, mais c’est pour
7128 autre, il le sauve de la stupidité spirituelle et de la sottise politique, mais c’est pour mieux le condamner dans son ens
7129 iser, par une réaction instinctive, « l’éducation d’ une caste nouvelle destinée à régner sur l’Europe », — et c’est là, éc
7130 que je l’entends »252. Les aphorismes 242 et 243 de Par-delà le bien et le mal décrivent sans aucun ménagement pour les t
7131 l décrivent sans aucun ménagement pour les tabous de l’époque, ce processus européen : Qu’on appelle « civilisation », ou
7132 rs, et qui s’affranchissent chaque jour davantage de tout milieu défini qui voudrait s’implanter pendant des siècles, dans
7133 mêmes revendications, — donc la lente apparition d’ une espèce d’hommes essentiellement surnationale et nomade qui, comme
7134 ications, — donc la lente apparition d’une espèce d’ hommes essentiellement surnationale et nomade qui, comme signe distinc
7135 if, possède physiologiquement parlant, un maximum de faculté et de force d’assimilation. Ce phénomène de création de l’Eur
7136 ysiologiquement parlant, un maximum de faculté et de force d’assimilation. Ce phénomène de création de l’Européen, qui pou
7137 uement parlant, un maximum de faculté et de force d’ assimilation. Ce phénomène de création de l’Européen, qui pourra être
7138 faculté et de force d’assimilation. Ce phénomène de création de l’Européen, qui pourra être retardé dans son allure par d
7139 de force d’assimilation. Ce phénomène de création de l’Européen, qui pourra être retardé dans son allure par de grands ret
7140 péen, qui pourra être retardé dans son allure par de grands retours en arrière, mais qui, par cela même, gagnera peut-être
7141 es naïfs promoteurs et protagonistes, les apôtres de l’« idée moderne », voudraient le moins faire entrer en ligne de comp
7142 ront en moyenne au nivellement et à l’abaissement de l’homme — de la bête de troupeau humain, habile, laborieuse, utile et
7143 ne au nivellement et à l’abaissement de l’homme —  de la bête de troupeau humain, habile, laborieuse, utile et utilisable d
7144 lement et à l’abaissement de l’homme — de la bête de troupeau humain, habile, laborieuse, utile et utilisable de façon mul
7145 u humain, habile, laborieuse, utile et utilisable de façon multiple, — ces conditions sont au plus haut degré aptes à prod
7146 ont au plus haut degré aptes à produire des êtres d’ exception, de la qualité la plus dangereuse et la plus attrayante […]2
7147 aut degré aptes à produire des êtres d’exception, de la qualité la plus dangereuse et la plus attrayante […]253 Mais plu
7148 plus attrayante […]253 Mais plusieurs maladies de l’esprit affectent l’Europe, selon Nietzsche. Tout d’abord le nationa
7149 ures où nous nous permettons un patriotisme plein de courage, un bond et un retour à de vieilles amours et de vieilles étr
7150 riotisme plein de courage, un bond et un retour à de vieilles amours et de vieilles étroitesses — je viens d’en donner une
7151 age, un bond et un retour à de vieilles amours et de vieilles étroitesses — je viens d’en donner une preuve —, des heures
7152 lles amours et de vieilles étroitesses — je viens d’ en donner une preuve —, des heures d’effervescence nationale, d’angois
7153 s — je viens d’en donner une preuve —, des heures d’ effervescence nationale, d’angoisse patriotique, des heures où bien d’
7154 e preuve —, des heures d’effervescence nationale, d’ angoisse patriotique, des heures où bien d’autres sentiments antiques
7155 t. Des esprits plus lourds que nous mettront plus de temps à en finir avec ce qui chez nous n’occupe que quelques heures e
7156 quelques heures : pour les uns, il faut la moitié d’ une année, pour les autres la moitié d’une vie humaine, selon la rapid
7157 la moitié d’une année, pour les autres la moitié d’ une vie humaine, selon la rapidité de leurs facultés d’assimilation et
7158 es la moitié d’une vie humaine, selon la rapidité de leurs facultés d’assimilation et de renouvellement. Je saurais même m
7159 vie humaine, selon la rapidité de leurs facultés d’ assimilation et de renouvellement. Je saurais même me figurer des race
7160 n la rapidité de leurs facultés d’assimilation et de renouvellement. Je saurais même me figurer des races épaisses et hési
7161 s, qui, dans notre Europe hâtive, auraient besoin de demi-siècles pour surmonter de tels excès de patriotisme atavique et
7162 e, auraient besoin de demi-siècles pour surmonter de tels excès de patriotisme atavique et d’attachement à la glèbe, pour
7163 soin de demi-siècles pour surmonter de tels excès de patriotisme atavique et d’attachement à la glèbe, pour revenir à la r
7164 urmonter de tels excès de patriotisme atavique et d’ attachement à la glèbe, pour revenir à la raison, je veux dire au « bo
7165 u « bon européanisme ».254 L’exemple privilégié de la musique, cette création essentiellement européenne, permet de suiv
7166 cette création essentiellement européenne, permet de suivre le processus de décomposition qui conduit de l’européanisme co
7167 llement européenne, permet de suivre le processus de décomposition qui conduit de l’européanisme cosmopolite au nationalis
7168 suivre le processus de décomposition qui conduit de l’européanisme cosmopolite au nationalisme borné : Le « bon vieux te
7169 coco ait encore un sens pour nous, que ce qu’il a de « bonne compagnie », de tendres ardeurs, de goût enfantin pour la chi
7170 pour nous, que ce qu’il a de « bonne compagnie », de tendres ardeurs, de goût enfantin pour la chinoiserie et la fioriture
7171 ’il a de « bonne compagnie », de tendres ardeurs, de goût enfantin pour la chinoiserie et la fioriture, de politesse du cœ
7172 oût enfantin pour la chinoiserie et la fioriture, de politesse du cœur, d’aspiration vers ce qui est précieux, amoureux, d
7173 hinoiserie et la fioriture, de politesse du cœur, d’ aspiration vers ce qui est précieux, amoureux, dansant, sentimental, d
7174 qui est précieux, amoureux, dansant, sentimental, de foi au Midi, que tout cela trouve encore en nous quelque chose qui l’
7175 — Mais n’en doutez pas, l’intelligence et le goût de Beethoven passeront plus vite encore ; car celui-là ne fut que le der
7176 encore ; car celui-là ne fut que le dernier écho d’ une transformation et d’une brisure du style ; au lieu que Mozart fut
7177 e fut que le dernier écho d’une transformation et d’ une brisure du style ; au lieu que Mozart fut la dernière expression d
7178 e ; au lieu que Mozart fut la dernière expression de tout un goût européen vivant depuis des siècles. Beethoven est l’inte
7179 sur sa musique est épandue la lueur crépusculaire d’ une éternelle déception, et d’une éternelle et errante espérance, — ce
7180 lueur crépusculaire d’une éternelle déception, et d’ une éternelle et errante espérance, — cette même lueur qui baignait l’
7181 qu’elle dansait autour de l’arbre révolutionnaire de la liberté, qu’elle s’agenouillait enfin aux pieds de Napoléon. Comme
7182 a liberté, qu’elle s’agenouillait enfin aux pieds de Napoléon. Comme tous ces sentiments pâlissent vite, comme il nous est
7183 pâlissent vite, comme il nous est difficile déjà de les comprendre, comme elle est lointaine et étrange la langue des Rou
7184 Byron, la langue où s’exprima cette même destinée de l’Europe qui chantait en Beethoven ! Puis ce fut, dans la musique all
7185 iel que n’avait été le grand entracte, le passage de Rousseau à Napoléon et à la démocratie montante. […] Schuman était dé
7186 i la musique allemande courait cet immense risque de cesser d’être la voix par où s’énonce l’âme de l’Europe et de tomber
7187 ue allemande courait cet immense risque de cesser d’ être la voix par où s’énonce l’âme de l’Europe et de tomber au rang mé
7188 ue de cesser d’être la voix par où s’énonce l’âme de l’Europe et de tomber au rang médiocre d’une chose purement nationale
7189 être la voix par où s’énonce l’âme de l’Europe et de tomber au rang médiocre d’une chose purement nationale.255 Le natio
7190 e l’âme de l’Europe et de tomber au rang médiocre d’ une chose purement nationale.255 Le nationalisme est issu du romanti
7191 ar une fatalité à laquelle les plus grands hommes de la première moitié du xixe siècle semblent avoir tous succombé : Gr
7192 ionalités a mises et met encore entre les peuples de l’Europe, grâce aux politiciens à la vue courte et aux mains promptes
7193 isme, sans soupçonner à quel point leur politique de désunion est fatalement une simple politique d’entracte, — grâce à to
7194 e de désunion est fatalement une simple politique d’ entracte, — grâce à tout cela, et à bien des choses encore qu’on ne pe
7195 on déforme mensongèrement les signes qui prouvent de la manière la plus manifeste que l’Europe veut devenir une. Tous les
7196 t devenir une. Tous les hommes un peu profonds et d’ esprit large qu’a vus ce siècle ont tendu vers ce but unique le travai
7197 le ont tendu vers ce but unique le travail secret de leur âme : ils voulurent frayer les voies à un nouvel accord et tentè
7198 frayer les voies à un nouvel accord et tentèrent de réaliser en eux-mêmes l’Européen à venir ; s’ils appartinrent à une p
7199 ne fut jamais que par les régions superficielles de leur intelligence, ou aux heures de défaillance, ou l’âge venu : ils
7200 uperficielles de leur intelligence, ou aux heures de défaillance, ou l’âge venu : ils se reposaient d’eux-mêmes en devenan
7201 de défaillance, ou l’âge venu : ils se reposaient d’ eux-mêmes en devenant « patriotes ». Je songe à des hommes comme Napol
7202 ine, Schopenhauer. Qu’on ne m’en veuille pas trop de nommer à leur suite Richard Wagner.256 Avec le romantisme est né l
7203 omine la pensée européenne du siècle. La position de Nietzsche devant l’historisme est nécessairement ambiguë, car sa visi
7204 torisme est nécessairement ambiguë, car sa vision de l’Europe est historique, mais ses jugements de valeur se veulent de p
7205 on de l’Europe est historique, mais ses jugements de valeur se veulent de plus en plus intemporels : Ce sens historique q
7206 ième sens. Toutes les formes, toutes les manières de vivre, toutes les civilisations du passé, autrefois entassées les une
7207 confusion. Nos instincts se dispersent maintenant de tous côtés, nous sommes nous-mêmes une sorte de chaos ; enfin « l’esp
7208 t de tous côtés, nous sommes nous-mêmes une sorte de chaos ; enfin « l’esprit », je le répète, finit par y trouver son pro
7209 it par y trouver son profit. Par la demi-barbarie de notre âme et de nos désirs, nous avons des échappées secrètes de tout
7210 son profit. Par la demi-barbarie de notre âme et de nos désirs, nous avons des échappées secrètes de toutes espèces, tell
7211 de nos désirs, nous avons des échappées secrètes de toutes espèces, telles qu’une époque noble n’en a jamais eu, surtout
7212 civilisations incomplètes et aux enchevêtrements de toutes les demi-barbaries qu’il y eut jamais au monde. Et, dans la me
7213 Et, dans la mesure où la part la plus importante de la culture fut jusqu’à présent une demi-barbarie, le « sens historiqu
7214 éressés, modestes, endurants, pleinement capables de nous dominer nous-mêmes, pleins d’abandon, très reconnaissants, très
7215 ement capables de nous dominer nous-mêmes, pleins d’ abandon, très reconnaissants, très patients, très accueillants. Avec t
7216 s et presque hostiles, c’est précisément le point de perfection, de maturité dernière dans toute culture et tout art, la m
7217 stiles, c’est précisément le point de perfection, de maturité dernière dans toute culture et tout art, la marque propre d’
7218 dans toute culture et tout art, la marque propre d’ aristocratie dans les œuvres et les hommes, leur aspect de mer unie et
7219 cratie dans les œuvres et les hommes, leur aspect de mer unie et de contentement alcyonien, l’éclat d’or brillant et froid
7220 œuvres et les hommes, leur aspect de mer unie et de contentement alcyonien, l’éclat d’or brillant et froid qui apparaît s
7221 de mer unie et de contentement alcyonien, l’éclat d’ or brillant et froid qui apparaît sur toute chose achevée.257 Si l’E
7222 chevée.257 Si l’Europe est plus loin que jamais de concevoir et d’assurer ce plus haut idéal d’elle-même, c’est qu’elle
7223 l’Europe est plus loin que jamais de concevoir et d’ assurer ce plus haut idéal d’elle-même, c’est qu’elle souffre d’une ma
7224 mais de concevoir et d’assurer ce plus haut idéal d’ elle-même, c’est qu’elle souffre d’une maladie de la volonté, d’une im
7225 lus haut idéal d’elle-même, c’est qu’elle souffre d’ une maladie de la volonté, d’une impuissance à se vouloir une, dont la
7226 d’elle-même, c’est qu’elle souffre d’une maladie de la volonté, d’une impuissance à se vouloir une, dont la Russie va pro
7227 ’est qu’elle souffre d’une maladie de la volonté, d’ une impuissance à se vouloir une, dont la Russie va profiter : Notre
7228 profiter : Notre Europe contemporaine, ce foyer d’ un effort soudain et irréfléchi pour mélanger radicalement les rangs e
7229 ces, est, par cela même, sceptique du haut en bas de l’échelle, tantôt animée de ce scepticisme mobile, qui impatient et l
7230 ptique du haut en bas de l’échelle, tantôt animée de ce scepticisme mobile, qui impatient et lascif, saute d’une branche à
7231 cepticisme mobile, qui impatient et lascif, saute d’ une branche à l’autre, tantôt troublé et comme obscurci par un nuage d
7232 re, tantôt troublé et comme obscurci par un nuage de questions — et parfois las de sa volonté à en mourir ! Paralysie de l
7233 scurci par un nuage de questions — et parfois las de sa volonté à en mourir ! Paralysie de la volonté, où ne rencontre-t-o
7234 parfois las de sa volonté à en mourir ! Paralysie de la volonté, où ne rencontre-t-on pas aujourd’hui cette infirmité ! Et
7235 teurs ! Pour cacher cette maladie on a des habits d’ apparat, des parures menteuses ; par exemple ce qu’on étale aujourd’hu
7236 ar exemple ce qu’on étale aujourd’hui sous le nom d’ « objectivité », d’« esprit scientifique », d’« art pour l’art », de «
7237 étale aujourd’hui sous le nom d’« objectivité », d’ « esprit scientifique », d’« art pour l’art », de « connaissance pure,
7238 nom d’« objectivité », d’« esprit scientifique », d’ « art pour l’art », de « connaissance pure, indépendante de la volonté
7239 d’« esprit scientifique », d’« art pour l’art », de « connaissance pure, indépendante de la volonté », tout cela n’est qu
7240 our l’art », de « connaissance pure, indépendante de la volonté », tout cela n’est que du scepticisme fardé, la paralysie
7241 cela n’est que du scepticisme fardé, la paralysie de la volonté qui se déguise. Je me porte garant du diagnostic de cette
7242 qui se déguise. Je me porte garant du diagnostic de cette maladie européenne. — La maladie de la volonté s’est propagée à
7243 gnostic de cette maladie européenne. — La maladie de la volonté s’est propagée à travers l’Europe d’une façon inégale ; el
7244 e de la volonté s’est propagée à travers l’Europe d’ une façon inégale ; elle sévit avec le plus de force et sous les aspec
7245 ope d’une façon inégale ; elle sévit avec le plus de force et sous les aspects les plus variés partout où la civilisation
7246 evendiquer — ses droits sous les vêtements lâches de la civilisation occidentale. En conséquence, c’est dans la France con
7247 dans la France contemporaine, comme il est facile de le montrer et de le démontrer, que la volonté est le plus malade ; et
7248 ntemporaine, comme il est facile de le montrer et de le démontrer, que la volonté est le plus malade ; et la France qui a
7249 séduisante, jusqu’aux tournures les plus néfastes de son esprit, apparaît aujourd’hui à l’Europe, dans l’excès de son géni
7250 it, apparaît aujourd’hui à l’Europe, dans l’excès de son génie national, comme la véritable école et le théâtre du sceptic
7251 de plus attrayant. La force du vouloir, la force de vouloir longtemps dans un même sens, est déjà un peu plus accentuée e
7252 e, ici grâce à la dureté des crânes — sans parler de l’Italie qui est trop jeune pour savoir encore ce qu’elle veut, et qu
7253 ait si elle sera affirmative ou négative — attend d’ une façon menaçante le moment où elle sera déclenchée, pour emprunter
7254 ée, pour emprunter leur mot favori aux physiciens d’ aujourd’hui. Ce n’est pas à la guerre avec l’Inde, ni aux complication
7255 mplications en Asie que l’Europe devrait demander de la protéger contre le danger le plus sérieux qui la menace, mais à un
7256 ion émiettant l’empire et surtout à l’importation de l’absurdité parlementaire, avec l’obligation pour chacun de lire le j
7257 dité parlementaire, avec l’obligation pour chacun de lire le journal à son déjeuner… Je voudrais voir l’Europe, en face de
7258 , en face de l’attitude de plus en plus menaçante de la Russie, se décider à devenir menaçante à son tour, à se créer, au
7259 evenir menaçante à son tour, à se créer, au moyen d’ une nouvelle caste qui la régirait, une volonté unique, formidable, ca
7260 régirait, une volonté unique, formidable, capable de poursuivre un but pendant des milliers d’années, afin de mettre un te
7261 capable de poursuivre un but pendant des milliers d’ années, afin de mettre un terme à la trop longue comédie de sa petite
7262 afin de mettre un terme à la trop longue comédie de sa petite politique et à ses mesquines et innombrables volontés dynas
7263 s volontés dynastiques ou démocratiques. Le temps de la petite politique est passé ; déjà le siècle qui s’annonce fait pré
7264 politique.258 Mais l’Europe sera-t-elle capable de mener cette « grande politique » à l’échelle mondiale, donc d’affront
7265 e « grande politique » à l’échelle mondiale, donc d’ affronter ce que lui réserve le xxe siècle ? Dans la préface à Par-de
7266 stiano-ecclésiastique exercée depuis des milliers d’ années — car le christianisme est du platonisme à l’usage du « peuple 
7267 e lutte a créé en Europe une merveilleuse tension de l’esprit, telle qu’il n’y en eut pas encore sur terre : et avec un ar
7268 arc si fortement tendu il est possible, dès lors, de tirer sur les cibles les plus lointaines. Il est vrai que l’homme d’E
7269 bles les plus lointaines. Il est vrai que l’homme d’ Europe souffre de cette tension et, par deux fois, l’on fit de vastes
7270 ntaines. Il est vrai que l’homme d’Europe souffre de cette tension et, par deux fois, l’on fit de vastes tentatives pour d
7271 ffre de cette tension et, par deux fois, l’on fit de vastes tentatives pour détendre l’arc ; ce fut d’abord par le jésuiti
7272 rationalisme démocratique. À l’aide de la liberté de la presse, de la lecture des journaux, il se pourrait que l’on obtînt
7273 émocratique. À l’aide de la liberté de la presse, de la lecture des journaux, il se pourrait que l’on obtînt véritablement
7274 prits — nous sentons encore en nous tout le péril de l’intelligence et toute la tension de son arc ! Et peut-être aussi la
7275 ut le péril de l’intelligence et toute la tension de son arc ! Et peut-être aussi la flèche, la mission, qui sait ? le but
7276 in) : La diversité des langues, surtout, empêche de voir ce qui se passe au fond : la disparition de l’homme national et
7277 de voir ce qui se passe au fond : la disparition de l’homme national et l’apparition de l’homme européen. et dans la Vol
7278 a disparition de l’homme national et l’apparition de l’homme européen. et dans la Volonté de Puissance : Un peu d’air pu
7279 parition de l’homme européen. et dans la Volonté de Puissance : Un peu d’air pur ! Il ne faut pas que cet absurde état d
7280 opéen. et dans la Volonté de Puissance : Un peu d’ air pur ! Il ne faut pas que cet absurde état de l’Europe dure plus lo
7281 u d’air pur ! Il ne faut pas que cet absurde état de l’Europe dure plus longtemps ! Y a-t-il une pensée quelconque derrièr
7282 il une pensée quelconque derrière ce nationalisme de bêtes à cornes ? À présent que tout s’oriente vers de plus larges int
7283 vers de plus larges intérêts communs, à quoi rime d’ exciter ces égoïsmes galeux ? Et cela au moment où l’absence d’indépen
7284 égoïsmes galeux ? Et cela au moment où l’absence d’ indépendance intellectuelle et la déchéance des nationalismes sautent
7285 autent aux yeux, où toute la valeur, tout le sens de la civilisation présente consiste à se fondre en un seul ensemble où
7286 nderont réciproquement !260 Mais les conditions d’ une restauration, telles qu’il les énumère dans ses notes inédites des
7287 et il le sent bien : le pessimisme, ce « marteau de la philosophie », reste la dernière arme à la disposition des « bons
7288 nt son choix : veut-elle sa décadence ? Se garder de la médiocrisation. Plutôt périr.261 C’est à l’historien suédois Har
7289 mme « Siècle du nationalisme » : tel est le titre d’ un article qu’il publia le 31 décembre 1899 dans le Svenska Dagbladet,
7290 dans le Svenska Dagbladet, grand journal libéral de Stockholm : Le siècle qui se termine ce soir a été le témoin de bien
7291 Le siècle qui se termine ce soir a été le témoin de bien des efforts et de bien des illusions dans la vie des peuples. Sa
7292 ne ce soir a été le témoin de bien des efforts et de bien des illusions dans la vie des peuples. Savoir laquelle de ses in
7293 llusions dans la vie des peuples. Savoir laquelle de ses innombrables tendances fut la plus importante, c’est peut-être un
7294 la plus importante, c’est peut-être une question de goût. Pour ma part, en ces dernières heures du siècle, je voudrais mé
7295 servi la culture, en ce sens qu’elles ont permis de surmonter bien des obstacles qui, jusqu’alors, avaient empêché les pe
7296 usqu’alors, avaient empêché les peuples dispersés de participer à une communauté culturelle. Mais ces avantages pèsent moi
7297 e le facteur politique dominant. La revendication de la pleine égalité de droits par toutes les nationalités ayant pris fo
7298 e dominant. La revendication de la pleine égalité de droits par toutes les nationalités ayant pris forme d’État souverain
7299 oits par toutes les nationalités ayant pris forme d’ État souverain est aussi contraire à l’Histoire et étrangère à la réal
7300 mondial vers quoi certains tendent […]. La haine de tout ce qui est étranger, entretenue au nom du patriotisme, est proch
7301 retenue au nom du patriotisme, est proche parente de la passion de persécuter les hérétiques ; elle transforme rapidement
7302 du patriotisme, est proche parente de la passion de persécuter les hérétiques ; elle transforme rapidement le sentiment n
7303 t national en un instinct qui échappe au contrôle de la raison. Du même coup, le nationalisme cesse d’être un facteur de d
7304 de la raison. Du même coup, le nationalisme cesse d’ être un facteur de développement culturel et devient superstition. Dan
7305 ême coup, le nationalisme cesse d’être un facteur de développement culturel et devient superstition. Dans quelle mesure le
7306 ù j’écris. Il semble au moins aussi vraisemblable de penser que le nationalisme, en se combinant avec d’autres forces, anc
7307 s et modernes, nous conduit irrésistiblement vers de nouvelles catastrophes, qui ne seront pas de moindre envergure que la
7308 vers de nouvelles catastrophes, qui ne seront pas de moindre envergure que la guerre de Trente Ans ou la Révolution frança
7309 ne seront pas de moindre envergure que la guerre de Trente Ans ou la Révolution française et ses suites. Mais le xixe s
7310 re mondiale qui l’achève, aux deux sens du terme. De cet achèvement normal, logique, et pourtant criminel, le témoin le pl
7311 sintéressé ». Plus européen, sans doute, qu’aucun de ses compatriotes au début de ce siècle, il n’a parlé de l’Europe que
7312 sans doute, qu’aucun de ses compatriotes au début de ce siècle, il n’a parlé de l’Europe que sur le ton d’un sombre dépit
7313 compatriotes au début de ce siècle, il n’a parlé de l’Europe que sur le ton d’un sombre dépit prophétique. Voici quelques
7314 e siècle, il n’a parlé de l’Europe que sur le ton d’ un sombre dépit prophétique. Voici quelques extraits de ses Propos rec
7315 sombre dépit prophétique. Voici quelques extraits de ses Propos recueillis par l’un de ses disciples à la veille de la Pre
7316 elques extraits de ses Propos recueillis par l’un de ses disciples à la veille de la Première Guerre mondiale262 : Octobr
7317 recueillis par l’un de ses disciples à la veille de la Première Guerre mondiale262 : Octobre 1908. — L’Europe est, par e
7318 ent des lois élémentaires, ou des malins qui font de la démagogie et vivent de leurs mensonges. Personne n’a le courage de
7319 ou des malins qui font de la démagogie et vivent de leurs mensonges. Personne n’a le courage de dire ou d’écrire que l’ét
7320 ivent de leurs mensonges. Personne n’a le courage de dire ou d’écrire que l’état de paix en Europe est un état anormal. Po
7321 urs mensonges. Personne n’a le courage de dire ou d’ écrire que l’état de paix en Europe est un état anormal. Pourquoi l’Eu
7322 nne n’a le courage de dire ou d’écrire que l’état de paix en Europe est un état anormal. Pourquoi l’Europe est-elle par ex
7323 iers ? Parce qu’elle est habitée par une quantité de races qui sont singulièrement opposées les unes aux autres, et dans l
7324 mœurs, et dans leurs ambitions. L’Europe n’a pas de chance. Tous ses habitants ne peuvent faire que mauvais voisinage. …
7325 sinage. … Et il y a le Slavisme qui met son grain de sel là-dedans. La politique panslave… C’est gai pour demain ! Je vous
7326 is ; des Allemands ambitieux ; des Anglais jaloux d’ autorité ; des Français avares ; des Italiens souffrant d’une crise de
7327 té ; des Français avares ; des Italiens souffrant d’ une crise de croissance ; des Balkaniques braconniers ; des Hongrois g
7328 nçais avares ; des Italiens souffrant d’une crise de croissance ; des Balkaniques braconniers ; des Hongrois guerriers ? C
7329 uerriers ? Comment calmerez-vous ce panier rempli de crabes qui se pincent toute la sainte journée ? Malheureuse Europe !
7330 cle. 8 novembre 1912. — Rien n’améliorera le sort de l’Europe. Pourquoi voulez-vous qu’il s’améliore ? Que signifie ce vie
7331 ous qu’il s’améliore ? Que signifie ce vieux fond d’ optimisme qui attend que les choses s’arrangent ? Il n’y a aucune rais
7332 ns un récipient. L’Europe est un récipient rempli de cette sorte de composés chimiques. Ça met le feu ; que diable ! Prene
7333 . L’Europe est un récipient rempli de cette sorte de composés chimiques. Ça met le feu ; que diable ! Prenez-en votre part
7334 e, est peuplée par des peuples qui chantent avant d’ aller s’entretuer. Les Français et les Allemands chanteront bientôt.
7335 Allemands chanteront bientôt. Sorel, désespérant de « cette Europe qui est la terre-type du malheur de l’humanité », et r
7336 e « cette Europe qui est la terre-type du malheur de l’humanité », et réinventant le mot d’Ivan Karamazov sur le « cimetiè
7337 du malheur de l’humanité », et réinventant le mot d’ Ivan Karamazov sur le « cimetière européen263 », fut sans doute l’obse
7338 , fut sans doute l’observateur le plus pessimiste de la fatalité nationaliste ; et c’est à lui que 1914 donna raison. Car
7339 na raison. Car 1914 sonna le glas du rôle mondial de l’Europe des nations. Cette catastrophe fut déclenchée dans l’allégre
7340 ette catastrophe fut déclenchée dans l’allégresse de nationalismes pimpants, « fleur au fusil », dans l’inconscience génér
7341 , dans l’inconscience générale du véritable enjeu de la guerre. Car en 1914, ainsi que l’écrira plus tard Jules Romains :
7342 s autres n’avaient présents à l’esprit le miracle de ce continent, ni le miracle plus fragile encore qu’était sa chance da
7343 e. Cette Europe, la leur, devenue mère ou tutrice de tous les peuples, source des pensées et des inventions, détentrice de
7344 qu’un chant national, qu’un dialecte, qu’un tracé de frontière, qu’un nom de bataille à inscrire sur un socle, qu’un gisem
7345 ’un dialecte, qu’un tracé de frontière, qu’un nom de bataille à inscrire sur un socle, qu’un gisement de phosphates, qu’un
7346 bataille à inscrire sur un socle, qu’un gisement de phosphates, qu’une statistique du tonnage comparé, que le plaisir d’h
7347 ne statistique du tonnage comparé, que le plaisir d’ humilier le voisin.264 Il nous plaît de citer ici cette page de l’un
7348 plaisir d’humilier le voisin.264 Il nous plaît de citer ici cette page de l’un des rares auteurs français vivants qui a
7349 oisin.264 Il nous plaît de citer ici cette page de l’un des rares auteurs français vivants qui aient eu le courage et la
7350 is vivants qui aient eu le courage et la lucidité de militer pour une Europe unie, — Europe, mon pays que j’ai voulu chant
7351 mon pays que j’ai voulu chanter ! — tout au long d’ une œuvre importante qui s’étend du poème intitulé « Europe », publié
7352 « Europe », publié en 1915, jusqu’à des campagnes de presse en faveur de la CED, en passant par la suite romanesque des Ho
7353 ED, en passant par la suite romanesque des Hommes de Bonne Volonté. En pleine guerre des nations, Romains avait lancé un p
7354 sacrée. Même sort ou pire, fut réservé aux appels d’ un Romain Rolland qui, dès septembre 1914, en publiant son pamphlet Au
7355 eptembre 1914, en publiant son pamphlet Au-dessus de la mêlée, avait eu l’intuition du crime contre l’Europe et contre la
7356 les peuples avaient été conduits par la politique de leurs gouvernements et la faillite des puissances chargées de défendr
7357 vernements et la faillite des puissances chargées de défendre la paix : socialisme et christianisme.265 La renaissance d
7358 et christianisme.265 La renaissance des projets d’ union date des lendemains de la Première Guerre mondiale. Et la naissa
7359 naissance des projets d’union date des lendemains de la Première Guerre mondiale. Et la naissance d’une action politique,
7360 s de la Première Guerre mondiale. Et la naissance d’ une action politique, économique et culturelle pour faire de ces proje
7361 on politique, économique et culturelle pour faire de ces projets une réalité date du lendemain de la Seconde Guerre mondia
7362 aire de ces projets une réalité date du lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Il fallait toucher le fond, c’est fait. L
7363 L’Europe unie naît à l’histoire parmi les ruines de sa dernière grande guerre civile. Et nous allons voir les prophètes d
7364 guerre civile. Et nous allons voir les prophètes de sa décadence finale controuvés par les faits et réfutés par une génér
7365 Nietzsche va plus loin : il prévoit la nécessité d’ un Marché commun européen : « Au-delà de toutes ces guerres nationales
7366 nécessité d’un Marché commun européen : « Au-delà de toutes ces guerres nationales, de ces « empires » et de ce qui occupe
7367 éen : « Au-delà de toutes ces guerres nationales, de ces « empires » et de ce qui occupe le premier plan, je vois plus loi
7368 tes ces guerres nationales, de ces « empires » et de ce qui occupe le premier plan, je vois plus loin. Ce qui m’importe, c
7369 ’Europe une, et je la vois se préparer lentement, d’ une manière hésitante. Chez tous les esprits étendus et profonds de ce
7370 itante. Chez tous les esprits étendus et profonds de ce siècle, l’œuvre commune de l’âme a consisté à préparer, à supputer
7371 étendus et profonds de ce siècle, l’œuvre commune de l’âme a consisté à préparer, à supputer et à anticiper cette nouvelle
7372 à anticiper cette nouvelle synthèse : l’Européen de l’avenir. Ce ne fut qu’une fois devenus vieux, ou aux heures de faibl
7373 e ne fut qu’une fois devenus vieux, ou aux heures de faiblesse, qu’ils retombèrent dans l’étroitesse nationale et devinren
7374 e qui éveille et forme dans ces esprits le besoin d’ une unité nouvelle, ou déjà les besoins nouveaux de cette nouvelle uni
7375 ’une unité nouvelle, ou déjà les besoins nouveaux de cette nouvelle unité, il faut placer un grand fait économique qui écl
7376 économiquement intenables, à bref délai, du fait de la tendance absolue du grand trafic et du grand commerce à dépasser t
7377 -delà le bien et le mal, § 208. 259. Ibid., fin de l’avant-propos. 260. Volonté de Puissance, III, 3. 261. « Zucht un
7378 59. Ibid., fin de l’avant-propos. 260. Volonté de Puissance, III, 3. 261. « Zucht und Züchtung », III, « Die ewige Wie
7379 e ewige Wiederkunft ». 262. Jean Variot : Propos de Georges Sorel, Paris, 1935. 263. Cf., p. 288. 264. Jules Romains, L
7380 263. Cf., p. 288. 264. Jules Romains, Les Hommes de Bonne Volonté, vol. XIV, p. 293-4. 265. Romain Rolland, Journal des
7381 . 293-4. 265. Romain Rolland, Journal des années de guerre, p. 735.
24 1961, Vingt-huit siècles d’Europe. Sixième Partie. L’Europe en question : de Spengler à Ortega — 1. « Tout s’est senti périr »
7382 onalistes accumulées depuis un siècle, l’incendie de 1914 ne fut éteint, provisoirement, qu’avec l’aide des Américains et
7383 provisoirement, qu’avec l’aide des Américains et de forts contingents recrutés en Asie, en Australie et en Afrique. Appel
7384 en Australie et en Afrique. Appelés à nous tirer de nos décombres, ils le firent, librement ou non, puis s’en retournèren
7385 ux, sans insister, mais édifiés sur notre compte. D’ une expérience durement acquise de la réalité européenne, les uns conc
7386 r notre compte. D’une expérience durement acquise de la réalité européenne, les uns conclurent qu’ils pourraient désormais
7387 s s’approprier nos forces matérielles et certains de nos principes politiques, quitte à les retourner contre nous profitan
7388 ues, quitte à les retourner contre nous profitant de nos faiblesses morales et de nos désunions passionnées : ainsi pensèr
7389 ontre nous profitant de nos faiblesses morales et de nos désunions passionnées : ainsi pensèrent aussi les Soviétiques ; d
7390  ; d’autres conclurent que le nationalisme, cause de nos ruines, devait être enfin surmonté, mais à l’échelle de l’arbitra
7391 nes, devait être enfin surmonté, mais à l’échelle de l’arbitrage mondial, c’est-à-dire à l’échelle des troubles que l’Euro
7392 s pour y répondre, donc loin de mesurer l’ampleur de notre crise, ils marquèrent leur « victoire » par des Traités qui dev
7393 es du mal. L’Europe ne comptait en 1914 pas moins de vingt nations souveraines. Après les Traités de Versailles, Trianon e
7394 s de vingt nations souveraines. Après les Traités de Versailles, Trianon et St-Germain, elle en compta trente et une (plus
7395 et les mieux dénoncés par Renan et par Nietzsche) d’ un nationalisme scolaire. Le problème des colonies ne fut pas posé : e
7396 les auteurs des Traités posèrent ainsi les bases de l’échec de la Société des Nations et du succès des entreprises totali
7397 s des Traités posèrent ainsi les bases de l’échec de la Société des Nations et du succès des entreprises totalitaires, d’o
7398 ations et du succès des entreprises totalitaires, d’ où devait résulter la Deuxième Guerre mondiale. Paul Valéry les juge
7399 ul Valéry les juge ainsi : L’Europe avait en soi de quoi ordonner à des fins européennes le reste du monde. Elle avait de
7400 u-dessous de ceux-ci étaient ceux qui disposaient d’ elle. Ils étaient nourris du passé ; ils n’ont su faire que du passé.
7401  ; ils n’ont su faire que du passé. Ses querelles de clocher ont fait perdre à l’Europe cette immense occasion dont elle n
7402 aimé jouer aux Armagnacs et aux Bourguignons que de prendre sur la terre le grand rôle que les Romains surent prendre et
7403 .266 Mais dans le même temps, quelques penseurs d’ un type nouveau essayaient de regarder la réalité de l’Europe, négligé
7404 s, quelques penseurs d’un type nouveau essayaient de regarder la réalité de l’Europe, négligée par les réalistes. Tenant c
7405 un type nouveau essayaient de regarder la réalité de l’Europe, négligée par les réalistes. Tenant compte à la fois de l’hi
7406 gligée par les réalistes. Tenant compte à la fois de l’histoire, de la sociologie, des arts, des sciences nouvelles, de la
7407 réalistes. Tenant compte à la fois de l’histoire, de la sociologie, des arts, des sciences nouvelles, de la morale et de l
7408 la sociologie, des arts, des sciences nouvelles, de la morale et de la politique, ils tentaient d’estimer nos chances. Il
7409 des arts, des sciences nouvelles, de la morale et de la politique, ils tentaient d’estimer nos chances. Ils les jugeaient
7410 s, de la morale et de la politique, ils tentaient d’ estimer nos chances. Ils les jugeaient avec raison fort compromises. E
7411 ses ne les écouteraient, ils se donnaient le luxe de prévoir le pire, surcompensant par une lucidité désespérée le cynisme
7412 et la naïveté qui dominaient en fait l’évolution de l’histoire. Le premier d’entre eux fut Spengler. Il est remarquable q
7413 Il est remarquable que le titre du grand ouvrage d’ Oswald Spengler (1880-1936), ait été trouvé par l’auteur dès 1912 : Le
7414 ait été trouvé par l’auteur dès 1912 : Le Déclin de l’Occident. Le sentiment de notre décadence aura donc précédé chez le
7415 dès 1912 : Le Déclin de l’Occident. Le sentiment de notre décadence aura donc précédé chez les meilleurs esprits cet évén
7416 C’est à ce titre que Spengler doit le plus clair de sa célébrité, dans un public immense qui souvent ne l’a pas lu, mais
7417 l prévoit notre déclin. Qu’en est-il, en réalité, de ce livre qui a fait époque ? Par son recours effervescent aux analogi
7418 lanétaires et millénaires, portant sur les formes d’ art les plus variées et sur les civilisations les plus lointaines, il
7419 ntisme allemand, et préfigure le Musée imaginaire d’ André Malraux. Par son recours à la comparaison des lois cycliques de
7420 r son recours à la comparaison des lois cycliques de formation, d’essor, d’apogée et de déclin des cultures et des civilis
7421 à la comparaison des lois cycliques de formation, d’ essor, d’apogée et de déclin des cultures et des civilisations, il con
7422 araison des lois cycliques de formation, d’essor, d’ apogée et de déclin des cultures et des civilisations, il continue Heg
7423 lois cycliques de formation, d’essor, d’apogée et de déclin des cultures et des civilisations, il continue Hegel et préfig
7424 ples sont contestables, surtout quand il les tire d’ une actualité que nous voyons déjà périmée. (Il déclare, en 1917, que
7425 jà périmée. (Il déclare, en 1917, que la peinture de plein air — alors « moderne » — « n’est pas faite pour le peuple » ;
7426 ur la vraie peinture et oppose à l’art abstrait.) D’ une entreprise aussi vaste que la sienne, qui se donne d’innombrables
7427 ntreprise aussi vaste que la sienne, qui se donne d’ innombrables possibilités de « vérifier » ses thèses par des exemples
7428 sienne, qui se donne d’innombrables possibilités de « vérifier » ses thèses par des exemples prestigieux — soit que chacu
7429 oit le premier à les signaler — retenons un style de pensée qui a fait école, et un parti pris pessimiste qui a fourni ses
7430 s références à toute une époque. Ses entrevisions d’ un avenir césarien, noyant le pouvoir de l’argent dans le « sang », c’
7431 revisions d’un avenir césarien, noyant le pouvoir de l’argent dans le « sang », c’est-à-dire dans une éruption des forces
7432 dire dans une éruption des forces instinctives et de la volonté de puissance ont été réalisées par Hitler beaucoup plus tô
7433 éruption des forces instinctives et de la volonté de puissance ont été réalisées par Hitler beaucoup plus tôt qu’il ne le
7434 te un des témoins les plus sincères et importants de l’aventure occidentale au xxe siècle. Ses deux maîtres sont Goethe e
7435 e (abusivement peut-être) une théorie organiciste de la culture : chaque culture serait comparable à une plante, à un anim
7436 orté ses fruits. Du second il retient une manière de regarder en face les catastrophes et d’aimer le destin qu’on ne peut
7437 e manière de regarder en face les catastrophes et d’ aimer le destin qu’on ne peut infléchir. Mais pour autant, il ne veut
7438 autant, il ne veut pas renoncer au mythe faustien de l’individu actif et créateur… Voici deux pages qui illustrent bien le
7439 eux pages qui illustrent bien les thèmes centraux de cet énorme ouvrage. Organicisme : comme les nations, selon Hegel, le
7440 moment où une grande âme se réveille, se détache de l’état psychique primaire d’éternelle enfance humaine, forme issue de
7441 réveille, se détache de l’état psychique primaire d’ éternelle enfance humaine, forme issue de l’informe, limite et caducit
7442 primaire d’éternelle enfance humaine, forme issue de l’informe, limite et caducité sorties de l’infini et de la durée. Ell
7443 me issue de l’informe, limite et caducité sorties de l’infini et de la durée. Elle croît sur le sol d’un paysage exactemen
7444 nforme, limite et caducité sorties de l’infini et de la durée. Elle croît sur le sol d’un paysage exactement délimitable a
7445 de l’infini et de la durée. Elle croît sur le sol d’ un paysage exactement délimitable auquel elle reste liée comme la plan
7446 ture meurt quand l’âme a réalisé la somme entière de ses possibilités sous la forme de peuples, de langues, de doctrines r
7447 a somme entière de ses possibilités sous la forme de peuples, de langues, de doctrines religieuses, d’arts, d’États, de sc
7448 ère de ses possibilités sous la forme de peuples, de langues, de doctrines religieuses, d’arts, d’États, de sciences, et r
7449 ossibilités sous la forme de peuples, de langues, de doctrines religieuses, d’arts, d’États, de sciences, et retourne ains
7450 de peuples, de langues, de doctrines religieuses, d’ arts, d’États, de sciences, et retourne ainsi à l’état psychique prima
7451 es, de langues, de doctrines religieuses, d’arts, d’ États, de sciences, et retourne ainsi à l’état psychique primaire. Mai
7452 ngues, de doctrines religieuses, d’arts, d’États, de sciences, et retourne ainsi à l’état psychique primaire. Mais son êtr
7453 primaire. Mais son être vivant, cette succession de grandes époques qui marquent à grands traits précis son accomplisseme
7454 lutte très intime et passionnée pour la conquête de l’idée sur les puissances extérieures du chaos et sur l’instinct où c
7455 eulement l’artiste qui lutte contre la résistance de la matière et contre la destruction de l’idée en lui. Chaque culture
7456 résistance de la matière et contre la destruction de l’idée en lui. Chaque culture se trouve dans un rapport profondément
7457 anisme, byzantinisme, mandarinisme. C’est le sens de tous les déclins dans l’histoire — le sens de l’accomplissement intér
7458 ens de tous les déclins dans l’histoire — le sens de l’accomplissement intérieur et extérieur, celui de la fin qui menace
7459 e l’accomplissement intérieur et extérieur, celui de la fin qui menace toutes les cultures vivantes ; — parmi ces déclins,
7460 es ; — parmi ces déclins, le plus distinct, celui de « l’antiquité », s’étale à grands traits sous nos yeux, tandis qu’en
7461 vons clairement à la trace les premiers symptômes de notre événement, absolument semblable au premier par son cours et sa
7462 miers siècles du prochain millénaire, le « déclin de l’Occident ».267 Amor fati : si tu veux prévenir le désastre, il t
7463 loi ; mieux même : à la vouloir, dernier recours de ton étroite liberté : Une puissance ne peut être détruite que par un
7464 autre, non par un principe, et il n’y en a point d’ autre contre l’argent. L’argent ne sera dominé que par le sang et supp
7465 ujours et uniquement la vie, la race, la victoire de la volonté de puissance, non celle des vérités, des inventions ou de
7466 uement la vie, la race, la victoire de la volonté de puissance, non celle des vérités, des inventions ou de l’argent. L’hi
7467 issance, non celle des vérités, des inventions ou de l’argent. L’histoire universelle est le tribunal universel : elle a t
7468 nné à la vie plus forte, plus complète, plus sûre d’ elle-même, le droit à l’existence, dût-il ne pas être un droit pour l’
7469 la justice plus que la puissance. Ainsi le drame d’ une haute culture, tout ce monde merveilleux de divinités, d’arts, de
7470 me d’une haute culture, tout ce monde merveilleux de divinités, d’arts, de pensées, de batailles, de villes, se termine en
7471 culture, tout ce monde merveilleux de divinités, d’ arts, de pensées, de batailles, de villes, se termine encore par les f
7472 , tout ce monde merveilleux de divinités, d’arts, de pensées, de batailles, de villes, se termine encore par les faits élé
7473 nde merveilleux de divinités, d’arts, de pensées, de batailles, de villes, se termine encore par les faits élémentaux du s
7474 x de divinités, d’arts, de pensées, de batailles, de villes, se termine encore par les faits élémentaux du sang éternel qu
7475 estin a placés dans cette culture, et à ce moment de son devenir, où l’argent célèbre ses dernières victoires et où son hé
7476 roche doucement et irrésistiblement, la direction de notre vouloir et de notre devoir — hors desquels la vie n’a pas de se
7477 rrésistiblement, la direction de notre vouloir et de notre devoir — hors desquels la vie n’a pas de sens — est par là même
7478 et de notre devoir — hors desquels la vie n’a pas de sens — est par là même tracée dans un cercle étroitement circonscrit.
7479 oitement circonscrit. Nous n’avons pas la liberté de choisir le point à atteindre, mais celle de faire le nécessaire ou ri
7480 berté de choisir le point à atteindre, mais celle de faire le nécessaire ou rien. Et un problème que la nécessité historiq
7481 ière Guerre mondiale et terminé en 1917, le livre de Spengler fut en réalité un ouvrage d’anticipation : il révélait les c
7482 7, le livre de Spengler fut en réalité un ouvrage d’ anticipation : il révélait les causes des catastrophes à venir. Dès 19
7483 nous sommes mortelles. Nous avions entendu parler de mondes disparus tout entiers, d’empires coulés à pic avec tous leurs
7484 s entendu parler de mondes disparus tout entiers, d’ empires coulés à pic avec tous leurs hommes et tous leurs engins ; des
7485 urs symbolistes, leurs critiques et les critiques de leurs critiques. Nous savions bien que toute la terre apparente est f
7486 vions bien que toute la terre apparente est faite de cendres, que la cendre signifie quelque chose. Nous apercevions à tra
7487 que chose. Nous apercevions à travers l’épaisseur de l’histoire, les fantômes d’immenses navires qui furent chargés de ric
7488 à travers l’épaisseur de l’histoire, les fantômes d’ immenses navires qui furent chargés de richesse et d’esprit. Nous ne p
7489 es fantômes d’immenses navires qui furent chargés de richesse et d’esprit. Nous ne pouvions pas les compter. Mais ces nauf
7490 mmenses navires qui furent chargés de richesse et d’ esprit. Nous ne pouvions pas les compter. Mais ces naufrages, après to
7491 as notre affaire. Elam, Ninive, Babylone étaient de beaux noms vagues, et la ruine totale de ces mondes avait aussi peu d
7492 étaient de beaux noms vagues, et la ruine totale de ces mondes avait aussi peu de signification pour nous que leur existe
7493 ais France, Angleterre, Russie… ce seraient aussi de beaux noms. Lusitania aussi est un beau nom. Et nous voyons maintenan
7494 n beau nom. Et nous voyons maintenant que l’abîme de l’histoire est assez grand pour tout le monde. Nous sentons qu’une ci
7495 vie. Les circonstances qui enverraient les œuvres de Keats et celles de Baudelaire rejoindre les œuvres de Ménandre ne son
7496 ces qui enverraient les œuvres de Keats et celles de Baudelaire rejoindre les œuvres de Ménandre ne sont plus du tout inco
7497 eats et celles de Baudelaire rejoindre les œuvres de Ménandre ne sont plus du tout inconcevables : elles sont dans les jou
7498 érir. Un frisson extraordinaire a couru la moelle de l’Europe. Elle a senti, par tous ses noyaux pensants qu’elle ne se re
7499 qu’elle ne se reconnaissait plus, qu’elle cessait de se ressembler, qu’elle allait perdre conscience — une conscience acqu
7500 nscience — une conscience acquise par des siècles de malheurs supportables, par des milliers d’hommes du premier ordre, pa
7501 iècles de malheurs supportables, par des milliers d’ hommes du premier ordre, par des chances géographiques, ethniques, his
7502 brables. Alors, comme pour une défense désespérée de son être et de son avoir physiologiques, toute sa mémoire lui est rev
7503 comme pour une défense désespérée de son être et de son avoir physiologiques, toute sa mémoire lui est revenue confusémen
7504 onaux… Et dans le même désordre mental, à l’appel de la même angoisse, l’Europe cultivée a subi la reviviscence rapide de
7505 , l’Europe cultivée a subi la reviviscence rapide de ses innombrables pensées : dogmes, philosophies, idéaux hétérogènes ;
7506 es, idéaux hétérogènes ; les trois-cents manières d’ expliquer le Monde, les mille et une nuances du christianisme, les deu
7507 une nuances du christianisme, les deux douzaines de positivismes : tout le spectre de la lumière intellectuelle a étalé s
7508 deux douzaines de positivismes : tout le spectre de la lumière intellectuelle a étalé ses couleurs incompatibles, éclaira
7509 lle a étalé ses couleurs incompatibles, éclairant d’ une étrange lueur contradictoire l’agonie de l’âme européenne. … Maint
7510 irant d’une étrange lueur contradictoire l’agonie de l’âme européenne. … Maintenant, sur une immense terrasse d’Elsinore,
7511 uropéenne. … Maintenant, sur une immense terrasse d’ Elsinore, qui va de Bâle à Cologne, qui touche aux sables de Nieuport,
7512 nant, sur une immense terrasse d’Elsinore, qui va de Bâle à Cologne, qui touche aux sables de Nieuport, aux marais de la S
7513 , qui va de Bâle à Cologne, qui touche aux sables de Nieuport, aux marais de la Somme, aux craies de Champagne, aux granit
7514 ne, qui touche aux sables de Nieuport, aux marais de la Somme, aux craies de Champagne, aux granits d’Alsace, — l’Hamlet e
7515 s de Nieuport, aux marais de la Somme, aux craies de Champagne, aux granits d’Alsace, — l’Hamlet européen regarde des mill
7516 de la Somme, aux craies de Champagne, aux granits d’ Alsace, — l’Hamlet européen regarde des millions de spectres. Mais il
7517 ’Alsace, — l’Hamlet européen regarde des millions de spectres. Mais il est un Hamlet intellectuel. Il médite sur la vie et
7518 t des vérités. Il a pour fantômes tous les objets de nos controverses ; il a pour remords tous les titres de notre gloire 
7519 controverses ; il a pour remords tous les titres de notre gloire ; il est accablé sous le poids des découvertes, des conn
7520 ids des découvertes, des connaissances, incapable de se reprendre à cette activité illimitée. Il songe à l’ennui de recomm
7521 re à cette activité illimitée. Il songe à l’ennui de recommencer le passé, à la folie de vouloir innover toujours. Il chan
7522 nge à l’ennui de recommencer le passé, à la folie de vouloir innover toujours. Il chancelle entre les deux abîmes, car deu
7523 ntre les deux abîmes, car deux dangers ne cessent de menacer le monde : l’ordre et le désordre. S’il saisit un crâne, c’es
7524 e volant n’a pas précisément servi les intentions de l’inventeur : nous savons que l’homme volant monté sur son grand cygn
7525 uccello sopra del dosso del suo magnio cecero) a, de nos jours, d’autres emplois que d’aller prendre de la neige à la cime
7526 nio cecero) a, de nos jours, d’autres emplois que d’ aller prendre de la neige à la cime des monts pour la jeter, pendant l
7527 e nos jours, d’autres emplois que d’aller prendre de la neige à la cime des monts pour la jeter, pendant les jours de chal
7528 a cime des monts pour la jeter, pendant les jours de chaleur, sur le pavé des villes… Et cet autre crâne est celui de Leib
7529 le pavé des villes… Et cet autre crâne est celui de Leibniz qui rêva de la paix universelle. Et celui-ci fut Kant, Kant q
7530 Et cet autre crâne est celui de Leibniz qui rêva de la paix universelle. Et celui-ci fut Kant, Kant qui genuit Hegel, qui
7531 t Marx, qui genuit… Hamlet ne sait trop que faire de tous ces crânes. Mais s’il les abandonne !… Va-t-il cesser d’être lui
7532 crânes. Mais s’il les abandonne !… Va-t-il cesser d’ être lui-même ? Son esprit affreusement clairvoyant contemple le passa
7533 rit affreusement clairvoyant contemple le passage de la guerre à la paix. Ce passage est plus obscur, plus dangereux que l
7534 ge est plus obscur, plus dangereux que le passage de la paix à la guerre ; tous les peuples en sont troublés. « Et moi, se
7535 destructions comme fait la guerre. C’est le temps d’ une concurrence créatrice, et de la lutte des productions. Mais Moi, n
7536 e. C’est le temps d’une concurrence créatrice, et de la lutte des productions. Mais Moi, ne suis-je pas fatigué de produir
7537 des productions. Mais Moi, ne suis-je pas fatigué de produire ? N’ai-je pas épuisé le désir des tentatives extrêmes et n’a
7538 pas abusé des savants mélanges ? Faut-il laisser de côté mes devoirs difficiles et mes ambitions transcendantes ? Dois-je
7539 se ? — Adieu, fantômes ! Le monde n’a plus besoin de vous. Ni de moi. Le monde, qui baptise du nom de progrès sa tendance
7540 , fantômes ! Le monde n’a plus besoin de vous. Ni de moi. Le monde, qui baptise du nom de progrès sa tendance à une précis
7541 de vous. Ni de moi. Le monde, qui baptise du nom de progrès sa tendance à une précision fatale, cherche à unir aux bienfa
7542 ne précision fatale, cherche à unir aux bienfaits de la vie, les avantages de la mort. Une certaine confusion règne encore
7543 che à unir aux bienfaits de la vie, les avantages de la mort. Une certaine confusion règne encore, mais encore un peu de t
7544 ircira ; nous verrons enfin apparaître le miracle d’ une société animale, une parfaite et définitive fourmilière ».269 Da
7545 Dans le même temps — à mi-chemin, entre l’année de la rédaction des fameuses lettres de Paul Valéry et l’année de leur p
7546 ntre l’année de la rédaction des fameuses lettres de Paul Valéry et l’année de leur publication — une jeune diplomate suis
7547 on des fameuses lettres de Paul Valéry et l’année de leur publication — une jeune diplomate suisse promis à une grande car
7548 nsthal, quelques pages prophétiques sur le destin de l’Europe270 : Ces semaines en Italie ont modifié pour moi bien des p
7549 Européen. En êtes-vous un ? Avez-vous le courage d’ être aujourd’hui encore — ou de nouveau — un Européen ? N’est-ce pas l
7550 ujours, relève du passé ? N’était-ce pas l’espoir de la chrétienté de jadis ? Car l’humanisme, l’héritage des Grecs, ont-i
7551 passé ? N’était-ce pas l’espoir de la chrétienté de jadis ? Car l’humanisme, l’héritage des Grecs, ont-ils jamais été plu
7552 pano-italo-slaves avec l’essence slave comme note de basse profonde. Une fédération ne se conçoit que sous le dénominateur
7553 ion ne se conçoit que sous le dénominateur commun d’ une forte pensée de base, d’une conviction. Or, elles font défaut. Un
7554 ue sous le dénominateur commun d’une forte pensée de base, d’une conviction. Or, elles font défaut. Un danger commun, comm
7555 e dénominateur commun d’une forte pensée de base, d’ une conviction. Or, elles font défaut. Un danger commun, comme jadis l
7556 , résolu, même le danger. Dans toutes les parties de la monarchie, vos compatriotes ont été gagnés par le nationalisme ; c
7557 es naturelles et le romantisme, l’idée romantisée de la Révolution française y ont contribué, indirectement dirigés contre
7558 tellectuels autrichiens, ces opportunistes dénués de flair, qui auraient pu entraver ce processus. Chez nous, en Suisse ?
7559 ant des affinités avec l’Allemagne, à l’exclusion de tout nationalisme. Gotthelf, Keller, Meyer, Jacob Burckhardt se sont
7560 on politiquement. Mais ils se sont déjà détournés de l’Allemagne des années 48, et n’ont plus rien voulu avoir de commun a
7561 gne des années 48, et n’ont plus rien voulu avoir de commun avec le Reich de Bismarck, modelé en si grande partie sur le p
7562 ont plus rien voulu avoir de commun avec le Reich de Bismarck, modelé en si grande partie sur le prototype français du xvi
7563 siècle. Le dernier fédéraliste global, et citoyen d’ un monde polyphonique où antiquité et christianisme s’amalgament en un
7564 cours. En lui le sanctum Imperium réduit à l’état d’ ombre, est devenu une réalité. Quant au message de Herder, c’est préci
7565 d’ombre, est devenu une réalité. Quant au message de Herder, c’est précisément contre son esprit que la majorité du peuple
7566 on esprit que la majorité du peuple allemand, née de la défaite, est en révolte. On ne peut qu’attendre, et si possible du
7567 iode, mais il faudra attendre longtemps que cesse de résonner la note nationaliste. C’est un état d’hypnose, il gagne de p
7568 e de résonner la note nationaliste. C’est un état d’ hypnose, il gagne de plus en plus les esprits autour de lui, tout est
7569 es et les grandes chimères… Peut-être les progrès de la technique amorceront-ils, dès ce siècle, une sorte d’organisation
7570 echnique amorceront-ils, dès ce siècle, une sorte d’ organisation mondiale. Pour l’instant, il semble néanmoins que le mond
7571 randes nations européennes renonce à son exigence de primauté. « Les grandes puissances », « le concert des puissances »,
7572 Sont-ils donc si peu nombreux, les gens capables de lire l’inscription sur le mur que tracent notre art et notre musique
7573 ique actuels ? Si peu nombreux, les gens capables de méditer sur la mort de la mélodie profondément européenne ? Il n’est
7574 ombreux, les gens capables de méditer sur la mort de la mélodie profondément européenne ? Il n’est pas de retour en arrièr
7575 la mélodie profondément européenne ? Il n’est pas de retour en arrière possible, rien n’est jamais récupéré de ce qui fut
7576 r en arrière possible, rien n’est jamais récupéré de ce qui fut perdu ; mais qui demeurera fidèle et supportera de rester
7577 t perdu ; mais qui demeurera fidèle et supportera de rester seul, ressuscitera peut-être un jour, en des temps très lointa
7578 , en des temps très lointains. C’est là le secret de toutes les Renaissances. Peut-être, après de lourdes défaites et des
7579 cret de toutes les Renaissances. Peut-être, après de lourdes défaites et des dévastations, le grain semé germera-t-il à no
7580 ol profondément labouré. Demeurer fidèle, secret de toutes les Renaissances… Mais les uns veulent être fidèles à l’humani
7581 libéral, tandis que les autres y voient la source de nos maux. Si nous ne sauvons pas les valeurs de liberté, de tolérance
7582 e de nos maux. Si nous ne sauvons pas les valeurs de liberté, de tolérance et de libre examen, dit l’un, — si nous ne sauv
7583 x. Si nous ne sauvons pas les valeurs de liberté, de tolérance et de libre examen, dit l’un, — si nous ne sauvons pas, au
7584 uvons pas les valeurs de liberté, de tolérance et de libre examen, dit l’un, — si nous ne sauvons pas, au contraire, les v
7585 75-1955) : Dans tout humanisme il y a un élément de faiblesse qui vient de sa répugnance pour tout fanatisme, de sa tolér
7586 e qui vient de sa répugnance pour tout fanatisme, de sa tolérance et de son penchant pour un scepticisme indulgent, en un
7587 épugnance pour tout fanatisme, de sa tolérance et de son penchant pour un scepticisme indulgent, en un mot de sa bonté nat
7588 penchant pour un scepticisme indulgent, en un mot de sa bonté naturelle. Et cela peut, en certaines circonstances, lui dev
7589 virilité et qui serait convaincu que le principe de la liberté, de la tolérance et du libre examen n’a pas le droit de se
7590 i serait convaincu que le principe de la liberté, de la tolérance et du libre examen n’a pas le droit de se laisser exploi
7591 la tolérance et du libre examen n’a pas le droit de se laisser exploiter par le fanatisme sans vergogne de ses ennemis. L
7592 laisser exploiter par le fanatisme sans vergogne de ses ennemis. L’humanisme européen est-il devenu incapable d’une résur
7593 mis. L’humanisme européen est-il devenu incapable d’ une résurrection qui rendrait à ses principes leur valeur de combat ?
7594 rrection qui rendrait à ses principes leur valeur de combat ? S’il n’est pas plus capable de prendre conscience de lui-mêm
7595 ur valeur de combat ? S’il n’est pas plus capable de prendre conscience de lui-même, de se préparer à la lutte dans un ren
7596 S’il n’est pas plus capable de prendre conscience de lui-même, de se préparer à la lutte dans un renouveau de ses forces v
7597 s plus capable de prendre conscience de lui-même, de se préparer à la lutte dans un renouveau de ses forces vitales, alors
7598 même, de se préparer à la lutte dans un renouveau de ses forces vitales, alors il périra et avec lui l’Europe, dont le nom
7599 hercher dès maintenant un refuge hors du temps et de l’espace.271 Or, cet humanisme, précisément, cet idéal européen mod
7600 umanisme, précisément, cet idéal européen moderne de la Raison, du Progrès, de la Science et de la Culture, répugne à l’Es
7601 idéal européen moderne de la Raison, du Progrès, de la Science et de la Culture, répugne à l’Espagnol « suressentiel et q
7602 oderne de la Raison, du Progrès, de la Science et de la Culture, répugne à l’Espagnol « suressentiel et quichottesque » qu
7603 uelques phrases son argument, ou plutôt son refus d’ argumenter, son cri : En deux mots se résume l’ensemble de ce que l’o
7604 ter, son cri : En deux mots se résume l’ensemble de ce que l’on demande pour notre pays. Ces deux mots sont européen et m
7605 aniser », tels sont ces lieux communs… Je ne veux d’ autre méthode que celle de la passion ; et quand ma poitrine se soulèv
7606 eux communs… Je ne veux d’autre méthode que celle de la passion ; et quand ma poitrine se soulève de dégoût, de répugnance
7607 e de la passion ; et quand ma poitrine se soulève de dégoût, de répugnance, de pitié ou de mépris, je laisse, débordée par
7608 sion ; et quand ma poitrine se soulève de dégoût, de répugnance, de pitié ou de mépris, je laisse, débordée par le cœur, p
7609 ma poitrine se soulève de dégoût, de répugnance, de pitié ou de mépris, je laisse, débordée par le cœur, parler la bouche
7610 se soulève de dégoût, de répugnance, de pitié ou de mépris, je laisse, débordée par le cœur, parler la bouche et les mots
7611 ommes des charlatans fantaisistes, qui farcissons de rhétorique les vides de la logique, qui raffinons avec plus ou moins
7612 taisistes, qui farcissons de rhétorique les vides de la logique, qui raffinons avec plus ou moins d’esprit mais sans utili
7613 s de la logique, qui raffinons avec plus ou moins d’ esprit mais sans utilité aucune, qui manquons du sens de l’enchaînemen
7614 it mais sans utilité aucune, qui manquons du sens de l’enchaînement et de la dépendance, des scolastiques, des casuistes,
7615 aucune, qui manquons du sens de l’enchaînement et de la dépendance, des scolastiques, des casuistes, etc., etc. J’ai enten
7616 asuistes, etc., etc. J’ai entendu dire des choses de ce genre d’Augustin, le grand Africain, âme de feu qui s’épanchait en
7617 c., etc. J’ai entendu dire des choses de ce genre d’ Augustin, le grand Africain, âme de feu qui s’épanchait en flots de rh
7618 es de ce genre d’Augustin, le grand Africain, âme de feu qui s’épanchait en flots de rhétorique, de phrases retorses, d’an
7619 and Africain, âme de feu qui s’épanchait en flots de rhétorique, de phrases retorses, d’antithèses, de paradoxes et de sub
7620 me de feu qui s’épanchait en flots de rhétorique, de phrases retorses, d’antithèses, de paradoxes et de subtilités. Saint
7621 hait en flots de rhétorique, de phrases retorses, d’ antithèses, de paradoxes et de subtilités. Saint Augustin fut un gongo
7622 de rhétorique, de phrases retorses, d’antithèses, de paradoxes et de subtilités. Saint Augustin fut un gongoriste et conce
7623 e phrases retorses, d’antithèses, de paradoxes et de subtilités. Saint Augustin fut un gongoriste et conceptiste en même t
7624 le gongorisme sont les formes les plus naturelles de la passion et de la véhémence. Le grand Africain, le grand Africain a
7625 t les formes les plus naturelles de la passion et de la véhémence. Le grand Africain, le grand Africain ancien ! Voilà une
7626  : « africain ancien » qui peut s’opposer à celle d’ « européen moderne » et qui vaut autant qu’elle, pour le moins. Saint
7627 deux ans, après avoir voyagé dans divers domaines de la culture européenne moderne et, seul avec ma conscience, je me dema
7628 ’appelle moderne. » Et je continue : « Et ce fait de ne te sentir ni Européen ni moderne, ne t’ôte-t-il point ta qualité d
7629 ropéen ni moderne, ne t’ôte-t-il point ta qualité d’ Espagnol ? » … Avant tout, et pour ce qui me concerne, je dois avouer
7630 nvers tout ce qui passe pour principes directeurs de l’esprit européen moderne, envers l’orthodoxie scientifique d’aujourd
7631 uropéen moderne, envers l’orthodoxie scientifique d’ aujourd’hui, ses méthodes et ses tendances. Il y a deux choses dont on
7632 s avouer, me sont antipathiques. … L’unique moyen d’ entrer en relation vivante avec un autre est le moyen de l’agression ;
7633 er en relation vivante avec un autre est le moyen de l’agression ; seuls arrivent à une vraie compénétration, à une frater
7634 n, à une fraternité spirituelle ceux qui essaient de se subjuguer spirituellement les uns les autres, que ce soient des in
7635 idus ou que ce soient des peuples. Quand je tente de mettre mon esprit dans l’esprit de mon prochain, c’est alors seulemen
7636 Quand je tente de mettre mon esprit dans l’esprit de mon prochain, c’est alors seulement que je reçois dans le mien l’espr
7637 ors seulement que je reçois dans le mien l’esprit de ce prochain. La bénédiction de l’apôtre est qu’il reçoit en soi les â
7638 s le mien l’esprit de ce prochain. La bénédiction de l’apôtre est qu’il reçoit en soi les âmes de tous ceux qu’il évangéli
7639 tion de l’apôtre est qu’il reçoit en soi les âmes de tous ceux qu’il évangélise : c’est la noblesse du prosélytisme. … J’a
7640 rofonde conviction, pour arbitraire qu’elle soit ( d’ autant plus profonde que plus arbitraire, car c’est ainsi pour les vér
7641 plus arbitraire, car c’est ainsi pour les vérités de foi) j’ai la profonde conviction que l’européanisation véritable et i
7642 viction que l’européanisation véritable et intime de l’Espagne, c’est-à-dire notre digestion de cette partie de l’esprit e
7643 intime de l’Espagne, c’est-à-dire notre digestion de cette partie de l’esprit européen qui peut devenir notre esprit, ne c
7644 gne, c’est-à-dire notre digestion de cette partie de l’esprit européen qui peut devenir notre esprit, ne commencera que qu
7645 sprit, ne commencera que quand nous aurons essayé de nous imposer à l’ordre spirituel de l’Europe, de lui faire avaler ce
7646 aurons essayé de nous imposer à l’ordre spirituel de l’Europe, de lui faire avaler ce qui est nôtre, essentiellement nôtre
7647 de nous imposer à l’ordre spirituel de l’Europe, de lui faire avaler ce qui est nôtre, essentiellement nôtre, en échange
7648 qui est nôtre, essentiellement nôtre, en échange de ce qui est sien, quand nous aurons essayé d’espagnoliser l’Europe.272
7649 ange de ce qui est sien, quand nous aurons essayé d’ espagnoliser l’Europe.272 Ce n’est pas un nationaliste qui parle ici
7650 parle ici. C’est un homme qui « a désir et besoin de l’âme, et d’une âme substantielle »273. Et c’est l’Europe de la Passi
7651 est un homme qui « a désir et besoin de l’âme, et d’ une âme substantielle »273. Et c’est l’Europe de la Passion, de l’Espr
7652 stantielle »273. Et c’est l’Europe de la Passion, de l’Esprit le plus subversif, qui rejette par sa bouche l’Europe tiède,
7653 , humanitaire, occupée à survivre. Hitler tentera de les tuer toutes les deux. L’essayiste anglais Hilaire Belloc condamne
7654 nglais Hilaire Belloc condamne lui aussi le culte de la Science et du Progrès, mais au nom de l’Église et de l’Autorité :
7655 Science et du Progrès, mais au nom de l’Église et de l’Autorité : Voici ma thèse : la culture et la civilisation de la ch
7656 : Voici ma thèse : la culture et la civilisation de la chrétienté — qui fut désignée pendant des siècles par le terme gén
7657 e catholique, rassemblant les traditions sociales de l’empire gréco-romain, et animant l’ensemble de ce grand corps d’une
7658 s de l’empire gréco-romain, et animant l’ensemble de ce grand corps d’une vie nouvelle. C’est l’Église catholique qui nous
7659 o-romain, et animant l’ensemble de ce grand corps d’ une vie nouvelle. C’est l’Église catholique qui nous a faits, qui nous
7660 us a donné notre unité et toute notre philosophie de la vie, et qui a formé la nature du monde blanc. Ce monde — la chréti
7661 c. Ce monde — la chrétienté — surmonta les périls de la barbarie païenne, résistant à ses assauts tant extérieurs qu’intér
7662 ts tant extérieurs qu’intérieurs et à la pression de la grande hérésie qui allait devenir une religion nouvelle : le mahom
7663 tous les périls, il tint tête, bien que dépouillé de vastes territoires ; il se releva, une fois la tourmente passée, et e
7664 montra, dès le début du xive siècle, les signes d’ un déclin qui se précipita rapidement durant le xve siècle. La Foi do
7665 ait, contestée. La société chrétienne fut soumise de la sorte à une tension, prolongée, qui la menaçait de disruption ; el
7666 a sorte à une tension, prolongée, qui la menaçait de disruption ; elle devint toujours plus instable, jusqu’à ce qu’enfin,
7667 . Selon l’usage courant, ce désastre porte le nom de Réformation. Dès ce moment, à travers les xvie , xviie et xviiie si
7668 viie et xviiie siècles, jusqu’au xixe , l’unité de la chrétienté ayant disparu et le principe vital dont sa vie dépendai
7669 re elle-même. Cette mauvaise fortune s’accompagna d’ un accroissement rapide de la connaissance du monde extérieur, c’est-à
7670 se fortune s’accompagna d’un accroissement rapide de la connaissance du monde extérieur, c’est-à-dire de la science et du
7671 la connaissance du monde extérieur, c’est-à-dire de la science et du pouvoir de l’homme sur les choses matérielles, au dé
7672 térieur, c’est-à-dire de la science et du pouvoir de l’homme sur les choses matérielles, au détriment de la saisie des vér
7673 saisie des vérités spirituelles. Ce fut l’inverse de ce qui s’était produit au début de notre civilisation : alors, notre
7674 fut l’inverse de ce qui s’était produit au début de notre civilisation : alors, notre religion avait sauvé le monde ancie
7675 religion avait sauvé le monde ancien à l’instant de périr, et formé une culture nouvelle, quoique obérée par le déclin de
7676 ue obérée par le déclin des sciences, des arts et de la vie matérielle. L’accroissement de notre savoir extérieur et de no
7677 des arts et de la vie matérielle. L’accroissement de notre savoir extérieur et de notre pouvoir sur la nature ne fit rien
7678 lle. L’accroissement de notre savoir extérieur et de notre pouvoir sur la nature ne fit rien pour apaiser les tensions int
7679 t entre idolâtries nationales opposées, l’absence de communes mesures et de doctrines invariables les garantissant, nous c
7680 onales opposées, l’absence de communes mesures et de doctrines invariables les garantissant, nous conduisit, aux débuts du
7681 os et à des dissensions entre les hommes menaçant de détruire toute société. Dans cette crise, une seule alternative demeu
7682 rnative demeure : la guérison par la restauration de la foi catholique, ou l’extinction de notre culture.274 Cependant,
7683 estauration de la foi catholique, ou l’extinction de notre culture.274 Cependant, un autre philosophe catholique, Jacque
7684 çant lui aussi au nom du thomisme les « erreurs » de l’humanisme libéral, entend faire confiance non point à quelque réact
7685 manisme, à un « humanisme intégral ». À la veille de la Seconde Guerre mondiale, dans une conférence sur le Crépuscule de
7686 e mondiale, dans une conférence sur le Crépuscule de la Civilisation, il dit sa foi dans les « voies de la liberté et de l
7687 e la Civilisation, il dit sa foi dans les « voies de la liberté et de l’esprit » : La fatalité qui joue contre les démocr
7688 , il dit sa foi dans les « voies de la liberté et de l’esprit » : La fatalité qui joue contre les démocraties modernes, c
7689 joue contre les démocraties modernes, c’est celle de la fausse philosophie de la vie qui pendant un siècle a altéré leur p
7690 es modernes, c’est celle de la fausse philosophie de la vie qui pendant un siècle a altéré leur principe vital authentique
7691 le principe — enfin dégagé dans sa vraie nature — d’ une espérance renouvelée et d’une foi invincible. Si les démocraties o
7692 s sa vraie nature — d’une espérance renouvelée et d’ une foi invincible. Si les démocraties occidentales ne doivent pas êtr
7693 ntales ne doivent pas être emportées, et une nuit de plusieurs siècles s’étendre sur la civilisation, c’est à condition qu
7694 e politique, et qu’elles retrouvent ainsi le sens de la justice, et de l’héroïsme, en retrouvant Dieu. Au crépuscule du so
7695 ’elles retrouvent ainsi le sens de la justice, et de l’héroïsme, en retrouvant Dieu. Au crépuscule du soir où nous sommes,
7696 penser que se mêlent déjà les lueurs incertaines d’ un crépuscule du matin. Le redressement spirituel qui s’accomplit depu
7697 es années dans notre pays importe à tout l’avenir de la civilisation. Et aussi le développement, dans des parties de plus
7698 t, dans des parties de plus en plus considérables de la jeunesse française, de conceptions politiques et sociales fondées
7699 s en plus considérables de la jeunesse française, de conceptions politiques et sociales fondées sur la valeur de la person
7700 ions politiques et sociales fondées sur la valeur de la personne humaine. L’Europe, cependant, est-il trop tard pour l’Eur
7701 t, est-il trop tard pour l’Europe ? Avec l’Europe d’ aujourd’hui, qui oserait espérer en la possibilité d’une nouvelle chré
7702 ujourd’hui, qui oserait espérer en la possibilité d’ une nouvelle chrétienté ? — D’abord l’Europe n’est pas isolée, ce n’es
7703 urope, c’est pour le monde entier que le problème de la civilisation se pose maintenant. D’autre part l’important pour cha
7704 t. D’autre part l’important pour chacun n’est pas de savoir ce que fera l’univers, mais ce qu’il a à faire, lui. Le reste
7705 es États totalitaires n’ignorent pas l’importance de l’unanimité morale ; ils s’efforcent de la procurer, ils ne peuvent y
7706 mportance de l’unanimité morale ; ils s’efforcent de la procurer, ils ne peuvent y parvenir que par l’intimidation et la c
7707 itive, à l’égard de l’adhésion interne des cœurs, d’ une efficacité douteuse. La question est de savoir si les peuples des
7708 cœurs, d’une efficacité douteuse. La question est de savoir si les peuples des pays encore libres sont capables d’atteindr
7709 les peuples des pays encore libres sont capables d’ atteindre par les voies de la liberté et de l’esprit une suffisante un
7710 re libres sont capables d’atteindre par les voies de la liberté et de l’esprit une suffisante unanimité morale et de résis
7711 pables d’atteindre par les voies de la liberté et de l’esprit une suffisante unanimité morale et de résister aux altératio
7712 et de l’esprit une suffisante unanimité morale et de résister aux altérations qui menacent du dedans leur conscience. Rel
7713 tte formule qu’on retrouve par ailleurs dans plus d’ un essai de cette époque : « L’importance pour chacun n’est pas de sav
7714 qu’on retrouve par ailleurs dans plus d’un essai de cette époque : « L’importance pour chacun n’est pas de savoir ce que
7715 tte époque : « L’importance pour chacun n’est pas de savoir ce que fera l’univers, mais de savoir ce qu’il fera, lui. » Vo
7716 n n’est pas de savoir ce que fera l’univers, mais de savoir ce qu’il fera, lui. » Voilà qui marque la limite existentielle
7717 , lui. » Voilà qui marque la limite existentielle de la valeur des prévisions qu’on vient de citer. Au reste, qu’il s’agis
7718 Au reste, qu’il s’agisse des Cassandres modernes ( de Thomas Hobbes à Orwell, en passant par Swift, Butler, Spengler et Hux
7719 ler, Spengler et Huxley) ou des grands Utopistes ( de Bacon à notre science-fiction, en passant par Thomas Moore, Campanell
7720 gerac, Jules Verne et H. G. Wells) la notion même de prévision doit être sérieusement revue. Karl Jaspers, dans un des ouv
7721 Jaspers, dans un des ouvrages les plus marquants de l’entre-deux-guerres, La Situation spirituelle de notre époque (paru
7722 de l’entre-deux-guerres, La Situation spirituelle de notre époque (paru en 1931), a senti cette nécessité, devant le décha
7723 échaînement des prophètes du néant, annonciateurs de l’hitlérisme. Avant de proclamer que tout est perdu, rétablissons les
7724 que tout est perdu, rétablissons les proportions de notre drame dans la relativité de l’Histoire humaine : … Comparés au
7725 les proportions de notre drame dans la relativité de l’Histoire humaine : … Comparés aux milliards d’années sur lesquelle
7726 de l’Histoire humaine : … Comparés aux milliards d’ années sur lesquelles s’étend l’histoire de la terre, les six-mille an
7727 liards d’années sur lesquelles s’étend l’histoire de la terre, les six-mille ans de la tradition humaine sont comme les pr
7728 s’étend l’histoire de la terre, les six-mille ans de la tradition humaine sont comme les premières secondes d’une nouvelle
7729 adition humaine sont comme les premières secondes d’ une nouvelle période de transformation de la planète. Comparée aux mil
7730 mme les premières secondes d’une nouvelle période de transformation de la planète. Comparée aux milliers d’années qui se s
7731 secondes d’une nouvelle période de transformation de la planète. Comparée aux milliers d’années qui se sont écoulées, d’ap
7732 ansformation de la planète. Comparée aux milliers d’ années qui se sont écoulées, d’après les découvertes paléontologiques,
7733 découvertes paléontologiques, depuis l’apparition de l’homme, la période historique est comme une première ébauche des pos
7734 s à l’homme, depuis que, ayant surmonté l’inertie d’ une pure répétition, il s’est mis en mouvement. Six-mille ans, il est
7735 . Le souvenir nous donne évidemment la conscience de notre vieillesse, nous avons l’impression — aujourd’hui comme il y a
7736 ourd’hui comme il y a deux-mille ans — que la fin de l’histoire est proche : il semble que les meilleures époques sont déj
7737 sont déjà révolues. Mais à considérer l’histoire de la terre, nous prenons conscience de ce que notre entreprise est enco
7738 r l’histoire de la terre, nous prenons conscience de ce que notre entreprise est encore très limitée et de ce que notre si
7739 e que notre entreprise est encore très limitée et de ce que notre situation n’est que celle d’un premier commencement ; to
7740 itée et de ce que notre situation n’est que celle d’ un premier commencement ; tout se trouve encore en avant de nous ; la
7741 idité des découvertes techniques qui se succèdent de décade en décade paraît en fournir une preuve infaillible. Mais nous
7742 ut entière est autre chose qu’un épisode passager de l’histoire de la terre ; l’homme pourrait disparaître et son histoire
7743 autre chose qu’un épisode passager de l’histoire de la terre ; l’homme pourrait disparaître et son histoire faire place à
7744 toire faire place à une pure évolution géologique de durée indéterminée. Tout est possible, devant nous : l’épuisement de
7745 e. Tout est possible, devant nous : l’épuisement de nos ressources énergétiques, le refroidissement mortel de la Terre, o
7746 essources énergétiques, le refroidissement mortel de la Terre, ou air contraire la domination par la technique du mécanism
7747 a technique du mécanisme terrestre et la conquête de l’espace cosmique, offrant à l’homme de nouvelles conditions de vie ;
7748 conquête de l’espace cosmique, offrant à l’homme de nouvelles conditions de vie ; la fin de la culture, ou au contraire l
7749 smique, offrant à l’homme de nouvelles conditions de vie ; la fin de la culture, ou au contraire le début d’une ère de dév
7750 à l’homme de nouvelles conditions de vie ; la fin de la culture, ou au contraire le début d’une ère de développement inint
7751  ; la fin de la culture, ou au contraire le début d’ une ère de développement ininterrompu. Certes, nous sommes frappés par
7752 de la culture, ou au contraire le début d’une ère de développement ininterrompu. Certes, nous sommes frappés par les signe
7753 loi obscure qui détermine inexorablement le cours de l’histoire humaine tout entière ? Ne consommons-nous pas lentement un
7754 qui nous a été léguée par le passé ? La décadence de l’art, de la poésie, de la philosophie n’est-elle pas le symptôme d’u
7755 été léguée par le passé ? La décadence de l’art, de la poésie, de la philosophie n’est-elle pas le symptôme d’un proche é
7756 r le passé ? La décadence de l’art, de la poésie, de la philosophie n’est-elle pas le symptôme d’un proche épuisement de c
7757 sie, de la philosophie n’est-elle pas le symptôme d’ un proche épuisement de cette substance ? La dispersion et l’affaireme
7758 n’est-elle pas le symptôme d’un proche épuisement de cette substance ? La dispersion et l’affairement qui caractérisent le
7759 ion et l’affairement qui caractérisent les hommes d’ aujourd’hui, leur comportement social, la façon mécanique dont ils s’a
7760 social, la façon mécanique dont ils s’acquittent de leurs tâches professionnelles, leur manque de conviction dans l’activ
7761 ent de leurs tâches professionnelles, leur manque de conviction dans l’activité politique, le caractère superficiel de leu
7762 ns l’activité politique, le caractère superficiel de leurs distractions, tout cela n’est-il pas une preuve de ce que cette
7763 s distractions, tout cela n’est-il pas une preuve de ce que cette substance est déjà presque consommée ? Sans doute savons
7764  ? Sans doute savons-nous encore quel est l’enjeu de la perte que nous éprouvons au moment même où nous la subissons. Mais
7765 rons même plus, car ils seront devenus incapables de le comprendre. De pareilles questions et toutes les réponses qu’on pe
7766 r ils seront devenus incapables de le comprendre. De pareilles questions et toutes les réponses qu’on peut y faire ne nous
7767 nos doctrines militantes, peut être une démission de l’esprit mais peut être aussi, et doit être, une décision existentiel
7768 n existentielle : … Cette prévision descriptive de la totalité, qui se sépare de la volonté agissante, devient une dérob
7769 évision descriptive de la totalité, qui se sépare de la volonté agissante, devient une dérobade devant l’action authentiqu
7770 authentique qui commence avec l’action intérieure de l’individu. Nous nous laissons éblouir par le « théâtre de l’histoire
7771 vidu. Nous nous laissons éblouir par le « théâtre de l’histoire du monde » et par les théories qui défendent la nécessité
7772 grès doit conduire à une société sans classe — ou de la morphologie de la culture, qui en fait un processus soumis à des l
7773 à une société sans classe — ou de la morphologie de la culture, qui en fait un processus soumis à des lois — ou de la phi
7774 , qui en fait un processus soumis à des lois — ou de la philosophie dogmatique, qui y voit l’extension progressive et la r
7775 y voit l’extension progressive et la réalisation d’ une vérité absolue et définitive… … Plus le terme sur lequel porte la
7776 ne voit pas le cours des événements sous la forme d’ un déroulement inéluctable, mais seulement sous forme de possibilité e
7777 monde actuel. Éd. Stock, Paris. 267. Le Déclin de l’Occident, I, p. 114. Trad. française, Gallimard, Paris. 268. Ibid
7778 e page. 269. Paul Valéry : Variété I. « La crise de l’esprit » (deux lettres datées de 1919), Gallimard, Paris, 1924. 27
7779 I. « La crise de l’esprit » (deux lettres datées de 1919), Gallimard, Paris, 1924. 270. C. J. Burckhardt, Hugo von Hofma
7780 traires, chapitre sur « L’Européanisation », daté de 1906. 273. Cf. Le Sentiment tragique de la vie, 1912. 274. Hilaire
7781  », daté de 1906. 273. Cf. Le Sentiment tragique de la vie, 1912. 274. Hilaire Belloc : The Crisis of our Civilization.
25 1961, Vingt-huit siècles d’Europe. Sixième Partie. L’Europe en question : de Spengler à Ortega — 2. Crépuscule ou nouvelle aurore ?
7782 re sont tous sévères, mais on a pu remarquer que, de Spengler à Maritain, une évolution se dessine vers un possible espoir
7783 rsonnaliste qui, dès 1933, lançait le mot d’ordre de « l’engagement », c’est-à-dire, à ce moment-là, du refus de la démiss
7784 agement », c’est-à-dire, à ce moment-là, du refus de la démission de l’esprit devant les lois réputées « fatales » de notr
7785 -à-dire, à ce moment-là, du refus de la démission de l’esprit devant les lois réputées « fatales » de notre décadence.) Le
7786 de l’esprit devant les lois réputées « fatales » de notre décadence.) Les nombreux « retours à l’orthodoxie » qui animent
7787 qui nient nos fatalités, sont dans ce sens autant de signes d’une vitalité neuve, d’un renouvellement des tensions qui ont
7788 nos fatalités, sont dans ce sens autant de signes d’ une vitalité neuve, d’un renouvellement des tensions qui ont fait, dep
7789 ns ce sens autant de signes d’une vitalité neuve, d’ un renouvellement des tensions qui ont fait, depuis les origines, le d
7790 s qui ont fait, depuis les origines, le dynamisme de notre culture. Mais ils ne se réfèrent à l’Europe que comme au cadre
7791 se réfèrent à l’Europe que comme au cadre naturel de leur action. Qu’en est-il de l’Europe elle-même, considérée comme uni
7792 mme au cadre naturel de leur action. Qu’en est-il de l’Europe elle-même, considérée comme unité, et face au Monde du xxe
7793 sa vocation mondiale ? A-t-elle encore conscience d’ elle-même ? Le seul fait qu’Ortega et Benda posent ces questions — l’u
7794 uestions — l’un à la veille, l’autre au lendemain de la Deuxième Guerre — ne serait-il pas le signe avant-coureur d’une re
7795 Guerre — ne serait-il pas le signe avant-coureur d’ une renaissance ? José Ortega y Gasset (1883-1955), dans son livre le
7796 estion qui hante l’époque : On a tellement parlé de la décadence européenne, que beaucoup ont fini par la prendre pour un
7797 bien que, sincèrement, ils ne se souviennent pas d’ en avoir été convaincus résolument, à aucune date déterminée. … Le spe
7798 n décadence, et, par conséquent, ne s’occupe plus de commander, chaque nation, même la plus minuscule, bondit, gesticule,
7799 ou se redresse et s’étire pour se donner des airs de grande personne, qui conduit elle-même son propre destin. Delà, ce vi
7800 son propre destin. Delà, ce vibrionique panorama de « nationalismes » que l’on nous offre de tous côtés… Il est vraiment
7801 panorama de « nationalismes » que l’on nous offre de tous côtés… Il est vraiment comique de contempler telle ou telle peti
7802 nous offre de tous côtés… Il est vraiment comique de contempler telle ou telle petite république qui, de son petit coin pe
7803 contempler telle ou telle petite république qui, de son petit coin perdu, se hausse sur la pointe des pieds, tance l’Euro
7804 l’Europe, et déclare que les Européens n’ont plus de rôle à jouer dans l’histoire universelle. Qu’en résulte-t-il ? L’Euro
7805 ’en résulte-t-il ? L’Europe avait créé un système de normes dont les siècles ont montré l’efficacité et la fertilité. Ces
7806 normes ne sont pas les meilleures — il s’en faut de beaucoup, certes — mais elles sont, sans aucun doute, définitives tan
7807 ’autres. Aujourd’hui les peuples-masse ont résolu de tenir pour caduc ce système de normes qu’est la civilisation. Mais co
7808 s-masse ont résolu de tenir pour caduc ce système de normes qu’est la civilisation. Mais comme ils sont incapables d’en cr
7809 t la civilisation. Mais comme ils sont incapables d’ en créer un autre, ils ne savent que faire, et pour passer le temps, i
7810 ui survient lorsque dans le monde quelqu’un cesse de commander ; les autres, en se révoltant, se trouvent sans avoir rien
7811 trouvent sans avoir rien à faire, sans programme de vie. Le Gitan s’en vint à confesse. Mais le curé, prudemment, commenç
7812 r lui demander s’il connaissait les commandements de Dieu. À quoi le Gitan répondit : « Voilà, mon père, j’allais me mettr
7813 plus cours ; aussitôt hommes et peuples profitent de l’occasion pour vivre sans impératifs. Car les impératifs européens e
7814 ui est généralement vacance, fainéantise, vacuité de la vie, désolation. Il importerait peu que l’Europe cessât de command
7815 ésolation. Il importerait peu que l’Europe cessât de commander, s’il y avait quelqu’un qui fût capable de la remplacer. Ma
7816 commander, s’il y avait quelqu’un qui fût capable de la remplacer. Mais nous ne voyons pas même l’ombre d’un remplaçant. N
7817 a remplacer. Mais nous ne voyons pas même l’ombre d’ un remplaçant. New York et Moscou ne sont rien de nouveau par rapport
7818 lui-même s’habitue à ne pas commander, il suffira d’ une génération et demie pour que l’ancien continent, et avec lui le mo
7819 ale. Seule l’illusion du pouvoir et la discipline de responsabilité qu’elle inspire peuvent maintenir tendues les âmes d’O
7820 u’elle inspire peuvent maintenir tendues les âmes d’ Occident. La science, l’art, la technique et tout le reste vivent de l
7821 ence, l’art, la technique et tout le reste vivent de l’atmosphère tonique que crée la conscience du commandement. Si celle
7822 éen deviendra définitivement quotidien. Incapable de tout effort créateur et gratuit, il retombera dans le passé, dans l’h
7823 éature vulgaire, formaliste, vide comme les Grecs de la décadence et ceux de l’histoire byzantine. Telles seraient les ra
7824 ste, vide comme les Grecs de la décadence et ceux de l’histoire byzantine. Telles seraient les raisons de notre décadence
7825 ’histoire byzantine. Telles seraient les raisons de notre décadence. Mais voici les formules de notre renaissance : … Le
7826 isons de notre décadence. Mais voici les formules de notre renaissance : … Les Européens ne savent pas vivre s’ils ne son
7827 désagrège. Nous avons aujourd’hui un commencement de désagrégation sous nos yeux. Les cercles qui, jusqu’à nos jours, se s
7828 n passé qui l’emprisonne et l’alourdit. Avec plus de liberté vitale que jamais, nous sentons tous que l’air est irrespirab
7829 lus purement dynamique exige la permanence active de cette pluralité qui a toujours été la vie de l’Occident. Tout le mond
7830 tive de cette pluralité qui a toujours été la vie de l’Occident. Tout le monde perçoit l’urgence d’un nouveau principe de
7831 ie de l’Occident. Tout le monde perçoit l’urgence d’ un nouveau principe de vie. Mais — comme il arrive toujours en de semb
7832 le monde perçoit l’urgence d’un nouveau principe de vie. Mais — comme il arrive toujours en de semblables crises — quelqu
7833 incipe de vie. Mais — comme il arrive toujours en de semblables crises — quelques-uns essaient de sauver l’instant présent
7834 s en de semblables crises — quelques-uns essaient de sauver l’instant présent par une intensification extrême et artificie
7835 t par une intensification extrême et artificielle de ce principe qui, précisément, est depuis longtemps caduc. Tel est le
7836 ment, est depuis longtemps caduc. Tel est le sens de l’irruption des « nationalismes » de ces dernières années. Et je ne c
7837 est le sens de l’irruption des « nationalismes » de ces dernières années. Et je ne cesse de le redire : il en a toujours
7838 alismes » de ces dernières années. Et je ne cesse de le redire : il en a toujours été ainsi. C’est la dernière flamme qui
7839 rnier soupir qui est le plus profond. À la veille de disparaître, les frontières deviennent plus sensibles que jamais — le
7840 es nationalismes sont des impasses ; qu’on essaie de les projeter vers le futur et l’on ressentira le contrecoup. Ils n’of
7841 e, un prétexte qui s’offre pour éluder le pouvoir d’ invention, le devoir de grandes entreprises. D’ailleurs, la simplicité
7842 fre pour éluder le pouvoir d’invention, le devoir de grandes entreprises. D’ailleurs, la simplicité des moyens avec lesque
7843 exalte, révèlent amplement qu’il est le contraire d’ une création historique. Seule, la décision de construire une grande n
7844 ire d’une création historique. Seule, la décision de construire une grande nation avec le groupe des peuples continentaux
7845 oupe des peuples continentaux relèverait le pouls de l’Europe. Celle-ci recommencerait à croire en elle-même et automatiqu
7846 en elle-même et automatiquement à exiger beaucoup d’ elle, à se discipliner. La dialectique romantique de Spengler conclua
7847 lle, à se discipliner. La dialectique romantique de Spengler concluait à la décadence inévitable. Ortega, concluant à l’u
7848 ne fait pas autre chose quand il accuse l’Europe d’ inconscience : c’est pour la réveiller qu’il la fustige : L’Europe n’
7849 a fustige : L’Europe n’a pas connu la conscience d’ une unité politique. Du point de vue politique la volonté de l’Europe
7850 é politique. Du point de vue politique la volonté de l’Europe aura été exclusivement nationaliste. Elle aura consisté dans
7851 sisté dans un double travail qui fut, d’une part, de former des nations et, d’autre part, de les rendre indépendantes les
7852 une part, de former des nations et, d’autre part, de les rendre indépendantes les unes des autres. Le mouvement commence a
7853 e qu’ils opposèrent les « gentes » à ces éléments d’ internationalisme qu’étaient l’Empire romain et l’Église, en ce qu’ils
7854 et l’Église, en ce qu’ils incarnèrent la négation de l’« Imperium » et de l’« Ecclesia ». Il prend corps lors de la disloc
7855 ’ils incarnèrent la négation de l’« Imperium » et de l’« Ecclesia ». Il prend corps lors de la dislocation de l’unité créé
7856 Ecclesia ». Il prend corps lors de la dislocation de l’unité créée par Charlemagne, avec le partage de Verdun. Quelques ho
7857 de l’unité créée par Charlemagne, avec le partage de Verdun. Quelques hommes — des clercs nourris dans la religion de l’Em
7858 ques hommes — des clercs nourris dans la religion de l’Empire romain — pleurent ce partage, mais la majorité s’en réjouit.
7859 uit. Elle se réjouit, dans chacun des trois lots, de penser qu’elle pourra désormais réaliser une destinée indépendante. À
7860 indépendante. À partir de ce moment, la tendance de l’Europe vers des groupes séparés n’ira qu’en se précisant. Comme il
7861 ntions universalistes des Hohenstaufen, plus tard de Charles-Quint, ne font que précipiter la volonté de sécession de la F
7862 Charles-Quint, ne font que précipiter la volonté de sécession de la France, de l’Autriche, des cités italiennes, des cant
7863 t, ne font que précipiter la volonté de sécession de la France, de l’Autriche, des cités italiennes, des cantons suisses,
7864 précipiter la volonté de sécession de la France, de l’Autriche, des cités italiennes, des cantons suisses, des Flandres.
7865 iennes, des cantons suisses, des Flandres. Celles de la papauté produisent le même effet sur les diverses parties de la ch
7866 produisent le même effet sur les diverses parties de la chrétienté. Toutes se signent dans ce cri de l’une d’elles : « Nou
7867 s de la chrétienté. Toutes se signent dans ce cri de l’une d’elles : « Nous sommes d’abord vénitiens, ensuite chrétiens… »
7868 hrétienté. Toutes se signent dans ce cri de l’une d’ elles : « Nous sommes d’abord vénitiens, ensuite chrétiens… » Enfin, a
7869 ples (particulièrement l’Allemagne !), la volonté de l’Europe d’être désunie et de former des nations indépendantes les un
7870 ulièrement l’Allemagne !), la volonté de l’Europe d’ être désunie et de former des nations indépendantes les unes des autre
7871 agne !), la volonté de l’Europe d’être désunie et de former des nations indépendantes les unes des autres atteint son apog
7872 atteint son apogée. Elle se traduit par une furie de séparations : la Belgique d’avec la Hollande, la Suède d’avec la Norv
7873 lande, la Suède d’avec la Norvège. Elle s’incarne d’ une façon saisissante dans Bismarck qui, contre-pied exact de Napoléon
7874 saisissante dans Bismarck qui, contre-pied exact de Napoléon, entend, par ses conquêtes, faire sa nation à lui, repousse
7875 e sa nation à lui, repousse résolument toute idée d’ Europe, où il ne voit qu’idéalisme stupide. En conséquence logique de
7876 voit qu’idéalisme stupide. En conséquence logique de son œuvre, du Niémen jusqu’à l’Atlantique s’établit un régime où chaq
7877 régime où chaque État s’enferme dans une religion de lui-même, dans un mépris des autres — « l’égoïsme sacré » — tels qu’o
7878  l’égoïsme sacré » — tels qu’on n’en avait pas vu de semblables, cependant que de nouvelles doctrines philosophiques, accl
7879 on n’en avait pas vu de semblables, cependant que de nouvelles doctrines philosophiques, acclamées par toutes les nations
7880 . Le xxe siècle qui verra peut-être la formation de l’Europe, s’ouvre dans le triomphe violent de l’anti-Europe… Le fait
7881 ion de l’Europe, s’ouvre dans le triomphe violent de l’anti-Europe… Le fait que l’Europe n’a jamais constitué une unité po
7882 cet autre fait : on n’a jamais écrit une histoire de l’Europe. Les livres qui portent ce titre, sauf peut-être — et encore
7883 nne a composé dans sa captivité pendant la guerre de 1914, nous exposent l’histoire des différentes parties de l’Europe, d
7884 nous exposent l’histoire des différentes parties de l’Europe, de leurs développements respectifs, surtout de leurs opposi
7885 t l’histoire des différentes parties de l’Europe, de leurs développements respectifs, surtout de leurs oppositions, non ce
7886 rope, de leurs développements respectifs, surtout de leurs oppositions, non celle d’un être historique qui leur serait tra
7887 spectifs, surtout de leurs oppositions, non celle d’ un être historique qui leur serait transcendant. J’ai parfois reproché
7888 scendant. J’ai parfois reproché à des professeurs d’ histoire que je savais acquis à l’idée d’une unification européenne de
7889 fesseurs d’histoire que je savais acquis à l’idée d’ une unification européenne de ne point faire à leurs élèves quelques l
7890 vais acquis à l’idée d’une unification européenne de ne point faire à leurs élèves quelques leçons sur l’Europe, envisagée
7891 politique indivise. Ils m’opposaient la nécessité d’ observer les programmes… L’Europe n’a pas connu davantage la conscienc
7892 s… L’Europe n’a pas connu davantage la conscience d’ une unité spirituelle. Ici encore, il faut bien distinguer entre le fa
7893 moins façonnées par l’Église et justifiant le mot de Stendhal : « L’Europe moderne est née du christianisme. » Accordons à
7894 anisme. » Accordons à notre historien qu’au début de l’Europe cette communauté de civilisation ait existé. Allons même plu
7895 istorien qu’au début de l’Europe cette communauté de civilisation ait existé. Allons même plus loin et reconnaissons que p
7896 s nationaux n’exista point. Il ne venait à l’idée d’ aucun étudiant parisien au xiie siècle de s’étonner d’avoir pour dire
7897 l’idée d’aucun étudiant parisien au xiie siècle de s’étonner d’avoir pour directeur l’Allemand Albert le Grand ou l’Ital
7898 un étudiant parisien au xiie siècle de s’étonner d’ avoir pour directeur l’Allemand Albert le Grand ou l’Italien Thomas d’
7899 d Albert le Grand ou l’Italien Thomas d’Aquin, ni d’ aucun bachelier viennois de trouver mauvais de confier la formation de
7900 ien Thomas d’Aquin, ni d’aucun bachelier viennois de trouver mauvais de confier la formation de son esprit au Français Jea
7901 ni d’aucun bachelier viennois de trouver mauvais de confier la formation de son esprit au Français Jean Gerson ; encore a
7902 ennois de trouver mauvais de confier la formation de son esprit au Français Jean Gerson ; encore au xviiie siècle, pendan
7903 isaient nos livres, adoptaient nos modes. Le fait d’ une certaine communauté spirituelle européenne a donc existé, mais la
7904 elle européenne a donc existé, mais la conscience de ce fait, de son opposition aux particularismes nationaux, n’existait
7905 nne a donc existé, mais la conscience de ce fait, de son opposition aux particularismes nationaux, n’existait pas. Ce qui,
7906 s leurs oppositions. C’est la volonté des savants de parler désormais leur langue nationale et non plus le latin, qui les
7907 sait par-dessus leurs nations ; celle des peuples de nationaliser la prière, la prédication ; celle des littérateurs de ne
7908 a prière, la prédication ; celle des littérateurs de nettement dégager leur idiome de ce qu’il pouvait avoir de non nation
7909 des littérateurs de nettement dégager leur idiome de ce qu’il pouvait avoir de non national… Nous allons pourtant voir app
7910 ent dégager leur idiome de ce qu’il pouvait avoir de non national… Nous allons pourtant voir apparaître dans ce passé une
7911 ssé une époque qui a vraiment connu la conscience d’ un esprit européen, c’est la fin du xviiie siècle, avec ces hommes qu
7912 qu’« il se forme en Europe une république immense d’ esprits cultivés », dont le type a été le prince de Ligne et dont on p
7913 etzsche, Romain Rolland, André Gide. Ai-je besoin de dire si ce mouvement a été violemment enrayé par le xixe siècle au n
7914 par un Maurras jetant l’infamie, dans la personne de Romain Rolland, sur tout ce qui sert l’esprit européen. Ce nationalis
7915 , encore une fois, verra peut-être la réalisation de l’Europe, débute par l’affirmation la plus farouche et la plus consci
7916 s farouche et la plus consciente qu’on vit jamais de l’anti-Europe… Aujourd’hui, l’idée de nation semble avoir terminé sa
7917 vit jamais de l’anti-Europe… Aujourd’hui, l’idée de nation semble avoir terminé sa carrière, être devenue malfaisante aux
7918 e, être devenue malfaisante aux Européens, l’idée d’ Europe apparaît. Mais ne nous berçons pas d’illusions ; n’allons pas c
7919 ’idée d’Europe apparaît. Mais ne nous berçons pas d’ illusions ; n’allons pas croire que cette idée va triompher naturellem
7920 ner une forte opposition, une résistance nourrie, de très sérieux obstacles.275 Ces obstacles nationalistes, le poète au
7921 es dépasser, par une prise de conscience nouvelle de nos grandeurs spirituelles : Nul doute que le concept d’« Europe »,
7922 randeurs spirituelles : Nul doute que le concept d’ « Europe », comme bien d’autres hautes conceptions d’ensemble, ne soit
7923  Europe », comme bien d’autres hautes conceptions d’ ensemble, ne soit devenu problématique, — nul doute non plus que notre
7924 ute non plus que notre survie spirituelle dépende de sa restauration. On ne le trouvera jamais au terme d’un processus d’a
7925 a restauration. On ne le trouvera jamais au terme d’ un processus d’abstraction, ni en retranchant — ou en ajoutant — quelq
7926 On ne le trouvera jamais au terme d’un processus d’ abstraction, ni en retranchant — ou en ajoutant — quelque chose au con
7927 chant — ou en ajoutant — quelque chose au concept de nation, et moins encore par des évocations sentimentales. Vers ce gra
7928 on. Car c’est dans les plus hautes manifestations de chaque nation qu’on le découvre, et d’autant plus clairement que s’y
7929 festations de chaque nation qu’on le découvre, et d’ autant plus clairement que s’y exprime d’une manière plus pure et plus
7930 uvre, et d’autant plus clairement que s’y exprime d’ une manière plus pure et plus nette ce que la nation possède en propre
7931 rand phénomène devient européen : ainsi en fut-il de Jules César et de Napoléon, de Pétrarque et de Kant, de la musique al
7932 ient européen : ainsi en fut-il de Jules César et de Napoléon, de Pétrarque et de Kant, de la musique allemande de Bach à
7933  : ainsi en fut-il de Jules César et de Napoléon, de Pétrarque et de Kant, de la musique allemande de Bach à Beethoven, de
7934 il de Jules César et de Napoléon, de Pétrarque et de Kant, de la musique allemande de Bach à Beethoven, de la peinture fra
7935 es César et de Napoléon, de Pétrarque et de Kant, de la musique allemande de Bach à Beethoven, de la peinture française d’
7936 de Pétrarque et de Kant, de la musique allemande de Bach à Beethoven, de la peinture française d’Ingres à Cézanne. Là où
7937 ant, de la musique allemande de Bach à Beethoven, de la peinture française d’Ingres à Cézanne. Là où une grande pensée est
7938 nde de Bach à Beethoven, de la peinture française d’ Ingres à Cézanne. Là où une grande pensée est conçue, là est l’Europe.
7939 uir dans l’universel. Aujourd’hui, comme au temps d’ Anaximandre, toute philosophie est européenne. Toute grande idée polit
7940 connaissance féconde du passé est européenne. (Et de quoi aurions-nous davantage besoin, que d’une vision profonde, totale
7941 e. (Et de quoi aurions-nous davantage besoin, que d’ une vision profonde, totalement renouvelée et purifiée, de la non-Euro
7942 sion profonde, totalement renouvelée et purifiée, de la non-Europe !) Notre époque est une époque de rétablissement, — bie
7943 , de la non-Europe !) Notre époque est une époque de rétablissement, — bien que jamais l’expression de la faiblesse n’ait
7944 de rétablissement, — bien que jamais l’expression de la faiblesse n’ait été si impudique, la volonté de désintégration si
7945 e la faiblesse n’ait été si impudique, la volonté de désintégration si débridée. Derrière le remue-ménage des prophètes de
7946 débridée. Derrière le remue-ménage des prophètes de la décadence et des bacchantes du chaos, des chauvinistes et des cosm
7947 chauvinistes et des cosmopolites, des adorateurs de l’instant et des adorateurs de l’apparence, sur le grand arrière-fond
7948 es, des adorateurs de l’instant et des adorateurs de l’apparence, sur le grand arrière-fond sérieux des choses européennes
7949 es nations, s’unir dans une grande pensée : celle de la restauration créatrice.276 Il appartenait à Martin Heidegger de
7950 créatrice.276 Il appartenait à Martin Heidegger de ramasser sous sa forme la plus dense, celle de l’interrogation en soi
7951 er de ramasser sous sa forme la plus dense, celle de l’interrogation en soi — qui me paraît la formule de sa philosophie —
7952 l’interrogation en soi — qui me paraît la formule de sa philosophie —, le problème de l’être même du « crépuscule occident
7953 araît la formule de sa philosophie —, le problème de l’être même du « crépuscule occidental » : Anaximandre aurait vécu d
7954 répuscule occidental » : Anaximandre aurait vécu de la fin du viie au milieu du vie siècle avant J.-C. dans l’île de Sa
7955 Samos, et sa sentence passe pour la plus ancienne de la pensée occidentale. La voici, selon le texte communément accepté :
7956 iné en 1873 et intitulé La Philosophie à l’époque de la tragédie grecque. Du fond d’un éloignement chronologique et histor
7957 sophie à l’époque de la tragédie grecque. Du fond d’ un éloignement chronologique et historique de deux millénaires et demi
7958 fond d’un éloignement chronologique et historique de deux millénaires et demi, la sentence d’Anaximandre a-t-elle encore q
7959 storique de deux millénaires et demi, la sentence d’ Anaximandre a-t-elle encore quelque chose à nous dire ? Par quelle aut
7960 a plus ancienne ? L’antiquité par elle-même n’est d’ aucun poids. Au surplus, si la sentence est la plus ancienne de celles
7961 . Au surplus, si la sentence est la plus ancienne de celles qui nous ont été transmises, nous n’en ignorons pas moins si e
7962 le est à sa manière la sentence la plus primitive de la pensée occidentale. Nous ne pouvons le supposer que pour autant qu
7963 pposer que pour autant que nous pensons l’essence de l’Occident à partir de cela même dont parle la sentence primitive. Ma
7964 cela même dont parle la sentence primitive. Mais de quel droit ce qui vient en premier lieu nous parlerait-il, à nous aut
7965 sommes sans doute les plus tardifs des tard-venus de la philosophie ? Sommes-nous les tard-venus d’une Histoire qui parvie
7966 us de la philosophie ? Sommes-nous les tard-venus d’ une Histoire qui parvient aujourd’hui à sa fin, qui met un terme à tou
7967 Ou bien l’éloignement chronologique et historique de la sentence cache-t-il une proximité historique de l’informulé, qui p
7968 e la sentence cache-t-il une proximité historique de l’informulé, qui parlerait à ce qui vient ? Sommes-nous donc à la vei
7969 ait à ce qui vient ? Sommes-nous donc à la veille de la transformation la plus inouïe de toute la Terre et du temps de l’H
7970 c à la veille de la transformation la plus inouïe de toute la Terre et du temps de l’Histoire ? Sommes-nous devant le crép
7971 tion la plus inouïe de toute la Terre et du temps de l’Histoire ? Sommes-nous devant le crépuscule d’une nuit qui prépare
7972 de l’Histoire ? Sommes-nous devant le crépuscule d’ une nuit qui prépare une autre aube ? Surgissons-nous précisément pour
7973 rs ce qui est Européen, le lieu des commencements de l’Histoire à venir ? Sommes-nous déjà, nous les hommes d’aujourd’hui,
7974 toire à venir ? Sommes-nous déjà, nous les hommes d’ aujourd’hui, occidentaux dans un sens qui se révélera d’abord à la fav
7975 dans un sens qui se révélera d’abord à la faveur de notre entrée dans la nuit universelle ? […] Sommes-nous vraiment les
7976 s-nous pas en même temps les précurseurs du matin d’ une autre ère du monde, qui aurait laissé derrière elle nos représenta
7977 aissé derrière elle nos représentations actuelles de l’Histoire ? Nietzsche, de la philosophie duquel Spengler a déduit, p
7978 résentations actuelles de l’Histoire ? Nietzsche, de la philosophie duquel Spengler a déduit, par une grossière incompréhe
7979 grossière incompréhension, sa doctrine historique de la décadence de l’Occident, écrivait en 1880 dans Le Voyageur et son
7980 réhension, sa doctrine historique de la décadence de l’Occident, écrivait en 1880 dans Le Voyageur et son Ombre : « C’est
7981 s Le Voyageur et son Ombre : « C’est un haut état de l’humanité que celui dans lequel l’Europe des peuples n’est qu’un plu
7982 ’Europe des peuples n’est qu’un plus sombre passé d’ oubli, mais où l’Europe vit encore par trente livres très anciens, et
7983 ait peut-être été le premier à voir dans la crise de l’Europe la condition d’une renaissance. Laissons-le donc conclure ce
7984 ier à voir dans la crise de l’Europe la condition d’ une renaissance. Laissons-le donc conclure ce chapitre : Est-il aussi
7985 la crise bienfaisante qui permettrait à l’Europe d’ être véritablement l’Europe ? L’évidente décadence des nations europée
7986 ropéen, Conférence des Rencontres internationales de Genève 1946, Éditions de la Baconnière, Neuchâtel, 1957. 276. H. von
7987 ncontres internationales de Genève 1946, Éditions de la Baconnière, Neuchâtel, 1957. 276. H. von Hofmannsthal : article d
7988 l, 1957. 276. H. von Hofmannsthal : article daté de 1925, in Gesammelte Werke, Prosa IV, S. Fischer Verlag, 1955. 277. M
26 1961, Vingt-huit siècles d’Europe. Septième Partie. L’Ère des fédérations. De l’Unité de culture à l’union politique
7989 Septième PartieL’Ère des fédérations De l’Unité de culture à l’union politique Le Grand Dessein de Sully es
7990 Septième PartieL’Ère des fédérations De l’Unité de culture à l’union politique Le Grand Dessein de Sully est un projet
7991 de culture à l’union politique Le Grand Dessein de Sully est un projet posthume. L’abbé de Saint-Pierre ne fut pas écout
7992 naux tirent leur doctrine (même s’ils l’ignorent) d’ une atmosphère intellectuelle que les auteurs qu’on va citer ont large
7993 citer ont largement contribué à définir. Laissons de côté l’ordre chronologique — qui perd son importance dans une période
7994 presque simultanément — pour cette partie finale de notre ouvrage. Le choix des textes sera fonction d’un plan dont voici
7995 notre ouvrage. Le choix des textes sera fonction d’ un plan dont voici le très simple argument : L’Europe contestée par le
7996 son salut cherche d’abord à remonter aux sources d’ où dérivent ses valeurs constituantes et spécifiques ; pour mieux voir
7997 ons, et par suite elle retrouve à la fois le sens de sa fonction mondiale et le sens de son unité très singulière, qui est
7998 a fois le sens de sa fonction mondiale et le sens de son unité très singulière, qui est unité dans la diversité ; il lui r
7999 diversité ; il lui reste à tirer les conséquences de cette reprise de conscience… 1.Les sources vives On ne va pas re
8000 i reste à tirer les conséquences de cette reprise de conscience… 1.Les sources vives On ne va pas refaire l’inventair
8001 e l’inventaire bien connu des sources historiques de l’Occident : l’Antiquité proche-orientale, Athènes, Rome et Jérusalem
8002 era simplement quelques textes-témoins des prises de conscience renouvelées de nos diverses origines, au stade présent de
8003 xtes-témoins des prises de conscience renouvelées de nos diverses origines, au stade présent de notre évolution. À chaque
8004 velées de nos diverses origines, au stade présent de notre évolution. À chaque époque de son histoire, l’Europe s’est en e
8005 stade présent de notre évolution. À chaque époque de son histoire, l’Europe s’est en effet redéfinie par ce qu’elle choisi
8006 it ou refusait — dans ses Antiquités diverses. Et de nos jours, il semble bien que le choix proposé dès 1922 par Paul Valé
8007 nte sur la plupart des écrits ultérieurs traitant de l’Europe. Voici donc sa fameuse définition des trois sources de toute
8008 oici donc sa fameuse définition des trois sources de toute culture qui, selon lui, mérite d’être nommée « européenne ». J
8009 s sources de toute culture qui, selon lui, mérite d’ être nommée « européenne ». Je considérerai comme européens tous les
8010 nfluences que je vais dire. La première est celle de Rome. Partout où l’Empire romain a dominé, et partout où sa puissance
8011 entir ; et même partout où l’Empire a été l’objet de crainte, d’admiration et d’envie ; partout où le poids du glaive roma
8012 ême partout où l’Empire a été l’objet de crainte, d’ admiration et d’envie ; partout où le poids du glaive romain s’est fai
8013 ’Empire a été l’objet de crainte, d’admiration et d’ envie ; partout où le poids du glaive romain s’est fait sentir, partou
8014 itutions et des lois, où l’appareil et la dignité de la magistrature ont été reconnus, copiés, parfois même bizarrement si
8015 s même bizarrement singés, — là est quelque chose d’ européen. Rome est le modèle éternel de la puissance organisée et stab
8016 lque chose d’européen. Rome est le modèle éternel de la puissance organisée et stable. Vint ensuite le christianisme : À
8017 le. Vint ensuite le christianisme : À la parole de saint Pierre, quoique l’une des très rares religions qui fussent mal
8018 i fussent mal vues à Rome, le christianisme, issu de la nation juive, s’étend aux gentils de toute race ; il leur confère
8019 sme, issu de la nation juive, s’étend aux gentils de toute race ; il leur confère par le baptême la dignité nouvelle de ch
8020 l leur confère par le baptême la dignité nouvelle de chrétien comme Rome conférait à ses ennemis de la veille la cité roma
8021 le de chrétien comme Rome conférait à ses ennemis de la veille la cité romaine. Il s’étend peu à peu dans le lit de la pui
8022 la cité romaine. Il s’étend peu à peu dans le lit de la puissance latine, il épouse les formes de l’empire. Il en adopte m
8023 lit de la puissance latine, il épouse les formes de l’empire. Il en adopte même les divisions administratives (Civitas au
8024 yen romain et même magistrat, il peut être évêque de la religion nouvelle. Le même Gaulois, qui est préfet impérial, écrit
8025 lois, qui est préfet impérial, écrit en pur latin de belles hymnes à la gloire du fils de Dieu qui est né juif et sujet d’
8026 en pur latin de belles hymnes à la gloire du fils de Dieu qui est né juif et sujet d’Hérode. Voici déjà un Européen presqu
8027 a gloire du fils de Dieu qui est né juif et sujet d’ Hérode. Voici déjà un Européen presque achevé. Un droit commun, un die
8028 tienne vise et atteint progressivement le profond de la conscience. … Le christianisme propose à l’esprit les problèmes le
8029 portants et même les plus féconds. Qu’il s’agisse de la valeur des témoignages, de la critique des textes, des sources et
8030 nds. Qu’il s’agisse de la valeur des témoignages, de la critique des textes, des sources et des garanties de la connaissan
8031 critique des textes, des sources et des garanties de la connaissance ; qu’il s’agisse de la distinction de la raison ou de
8032 des garanties de la connaissance ; qu’il s’agisse de la distinction de la raison ou de la foi, de l’opposition qui se décl
8033 a connaissance ; qu’il s’agisse de la distinction de la raison ou de la foi, de l’opposition qui se déclare entre elles, d
8034 qu’il s’agisse de la distinction de la raison ou de la foi, de l’opposition qui se déclare entre elles, de l’antagonisme
8035 isse de la distinction de la raison ou de la foi, de l’opposition qui se déclare entre elles, de l’antagonisme entre la fo
8036 foi, de l’opposition qui se déclare entre elles, de l’antagonisme entre la foi et les actes et les œuvres ; qu’il s’agiss
8037 a foi et les actes et les œuvres ; qu’il s’agisse de la liberté, de la servitude, de la grâce ; qu’il s’agisse des pouvoir
8038 tes et les œuvres ; qu’il s’agisse de la liberté, de la servitude, de la grâce ; qu’il s’agisse des pouvoirs spirituel et
8039  ; qu’il s’agisse de la liberté, de la servitude, de la grâce ; qu’il s’agisse des pouvoirs spirituel et matériel et de le
8040 il s’agisse des pouvoirs spirituel et matériel et de leur mutuel conflit, de l’égalité des hommes, des conditions des femm
8041 spirituel et matériel et de leur mutuel conflit, de l’égalité des hommes, des conditions des femmes, que sais-je encore ?
8042 éduque, excite, fait agir et réagir des millions d’ esprits pendant une suite de siècles. Mais il manque encore quelque c
8043 t réagir des millions d’esprits pendant une suite de siècles. Mais il manque encore quelque chose à la figure de l’Europé
8044 Mais il manque encore quelque chose à la figure de l’Européen : Ce que nous devons à la Grèce est peut-être ce qui nous
8045 i nous a distingués le plus profondément du reste de l’humanité. Nous lui devons la discipline de l’Esprit, l’exemple extr
8046 este de l’humanité. Nous lui devons la discipline de l’Esprit, l’exemple extraordinaire de la perfection dans tous les ord
8047 discipline de l’Esprit, l’exemple extraordinaire de la perfection dans tous les ordres. Nous lui devons une méthode de pe
8048 dans tous les ordres. Nous lui devons une méthode de penser qui tend à rapporter toutes choses à l’homme, à l’homme comple
8049 omplet ; l’homme se devient à soi-même le système de références auquel toutes choses doivent enfin pouvoir s’appliquer. Il
8050 iquer. Il doit donc développer toutes les parties de son être et les maintenir dans une harmonie aussi claire, et même aus
8051 son esprit. Quant à l’esprit même, il se défendra de ses excès, de ses rêveries, de sa production vague et purement imagin
8052 ant à l’esprit même, il se défendra de ses excès, de ses rêveries, de sa production vague et purement imaginaire, par une
8053 me, il se défendra de ses excès, de ses rêveries, de sa production vague et purement imaginaire, par une critique et une a
8054 naire, par une critique et une analyse minutieuse de ses jugements, par une division rationnelle de ses fonctions, par la
8055 se de ses jugements, par une division rationnelle de ses fonctions, par la régulation des formes. … Telles m’apparaissent
8056 ut habiter dans sa plénitude. Partout où les noms de César, de Gaius, de Trajan et de Virgile, partout où les noms de Moïs
8057 dans sa plénitude. Partout où les noms de César, de Gaius, de Trajan et de Virgile, partout où les noms de Moïse et de sa
8058 lénitude. Partout où les noms de César, de Gaius, de Trajan et de Virgile, partout où les noms de Moïse et de saint Paul,
8059 tout où les noms de César, de Gaius, de Trajan et de Virgile, partout où les noms de Moïse et de saint Paul, partout où le
8060 ius, de Trajan et de Virgile, partout où les noms de Moïse et de saint Paul, partout où les noms d’Aristote, de Platon et
8061 an et de Virgile, partout où les noms de Moïse et de saint Paul, partout où les noms d’Aristote, de Platon et d’Euclide on
8062 ms de Moïse et de saint Paul, partout où les noms d’ Aristote, de Platon et d’Euclide ont eu une signification et une autor
8063 et de saint Paul, partout où les noms d’Aristote, de Platon et d’Euclide ont eu une signification et une autorité simultan
8064 aul, partout où les noms d’Aristote, de Platon et d’ Euclide ont eu une signification et une autorité simultanées, là est l
8065 e biblique. Les pays protestants se nourrissaient de la lecture d’un Ancien Testament dont les héros, les guerres et les m
8066 s pays protestants se nourrissaient de la lecture d’ un Ancien Testament dont les héros, les guerres et les miracles, étaie
8067 ntré dans le Génie du christianisme que le secret de la grande littérature européenne réside dans la synthèse de la tradit
8068 de littérature européenne réside dans la synthèse de la tradition grecque et de la tradition biblique. Au xxe siècle, ce
8069 éside dans la synthèse de la tradition grecque et de la tradition biblique. Au xxe siècle, cependant, les Européens pren
8070 cle, cependant, les Européens prennent conscience de plusieurs aspects « nouveaux » de leur héritage sémite. Rappelons d’a
8071 nent conscience de plusieurs aspects « nouveaux » de leur héritage sémite. Rappelons d’abord les thèses de Victor Bérard,
8072 eur héritage sémite. Rappelons d’abord les thèses de Victor Bérard, qui fait remonter aux mythes et à l’histoire des Phéni
8073 décèle une parenté formelle entre les Chroniques de l’Ancien Testament et Les Travaux et les Jours d’Hésiode. Ainsi la so
8074 de l’Ancien Testament et Les Travaux et les Jours d’ Hésiode. Ainsi la source biblique rejaillit parmi nous mêlée à la sour
8075 urce hellénique la plus ancienne et la plus vive. D’ une manière plus précise, l’Européen d’aujourd’hui découvre que certai
8076 plus vive. D’une manière plus précise, l’Européen d’ aujourd’hui découvre que certaines de ses attitudes les plus typiques,
8077 , l’Européen d’aujourd’hui découvre que certaines de ses attitudes les plus typiques, qu’on avait coutume de rapporter à d
8078 attitudes les plus typiques, qu’on avait coutume de rapporter à des origines romaines ou grecques, relèvent plutôt de la
8079 es origines romaines ou grecques, relèvent plutôt de la source hébraïque. Ainsi, les jacobins croyaient trouver dans Rome
8080 cobins croyaient trouver dans Rome les prototypes de l’esprit révolutionnaire. Mais, nous dit André Siegfried : Notre con
8081 pirituelle, et non plus seulement intellectuelle, de l’homme… c’est à la tradition juive, magnifiquement épanouie dans l’É
8082 ans l’Évangile, que nous la devons. Les prophètes d’ Israël, ces démagogues fulgurants et divins, ont déposé dans notre esp
8083 posé dans notre esprit cette soif révolutionnaire de la justice qui distingue socialement l’Occident. Et de même, ajoute
8084 dent. Et de même, ajoute Siegfried, ce n’est pas de la tradition gréco-latine que les révolutions d’aujourd’hui portent l
8085 de la tradition gréco-latine que les révolutions d’ aujourd’hui portent la marque : La passion marxiste se rattache plutô
8086 sion marxiste se rattache plutôt au vieux ferment d’ Israël, à la fois destructeur et chargé d’un espoir indestructiblement
8087 ferment d’Israël, à la fois destructeur et chargé d’ un espoir indestructiblement tourné vers l’avenir. Mais voici dans un
8088 tout autre domaine un aspect non moins surprenant de l’héritage hébraïque des Européens, un aspect que les siècles précéde
8089 tu de leurs scientismes antireligieux : l’origine de la science moderne serait bien moins grecque que biblique. C’est Karl
8090 Il n’y a rien, pour elle, qui ne vaille la peine d’ être connu ; elle paraît se disperser dans l’infini. Mais quel que soi
8091 e une extension universelle avec la concentration de toute connaissance dans le cosmos des sciences. Elle ne souffre aucun
8092 aucun voile ; elle ne permet pas la tranquillité d’ opinions faites une fois pour toutes. Sa critique impitoyable révèle d
8093 e. Elle éclaire ses méthodes, reconnaît les modes de son savoir, le sens et les limites de ses connaissances. Une telle sc
8094 t les modes de son savoir, le sens et les limites de ses connaissances. Une telle science dépasse de loin les amorces qu’i
8095 s de ses connaissances. Une telle science dépasse de loin les amorces qu’il y eut en Chine, aux Indes, et aussi dans la Gr
8096 ulement une introduction et un moyen pédagogique. D’ où vient la science moderne, quelles impulsions l’ont engendrée ? Elle
8097 n essence. C’est, pourquoi tout ce qui est mérite d’ être connu, en tant que parcelle de la création. Mais il n’est pas rar
8098 qui est mérite d’être connu, en tant que parcelle de la création. Mais il n’est pas rare qu’une connaissance nouvelle vien
8099 dans la conception du monde et dans la conscience de l’être des Grecs — la science en tant que construction logique fait é
8100 ique fait éclater la logique. La cohérence fermée de la connaissance se trouve sacrifiée en faveur d’une recherche infinie
8101 rifiée en faveur d’une recherche infinie, la paix de la certitude systématique en faveur d’une mise en question qui ne ces
8102 mise en question qui ne cesse jamais. La logique de la science s’ouvre à l’irrationnel et pénètre en lui tout en s’y soum
8103 n lui tout en s’y soumettant. C’est l’interaction d’ hypothèses conçues et d’expériences faites qui permet d’aller de l’ava
8104 tant. C’est l’interaction d’hypothèses conçues et d’ expériences faites qui permet d’aller de l’avant, dans une lutte conti
8105 thèses conçues et d’expériences faites qui permet d’ aller de l’avant, dans une lutte continue pour atteindre la réalité. M
8106 onçues et d’expériences faites qui permet d’aller de l’avant, dans une lutte continue pour atteindre la réalité. Mais enco
8107 e ce combat contre l’apparence pour la découverte de l’être, une autre impulsion est agissante ici. Dieu ayant créé le mon
8108 ici. Dieu ayant créé le monde paraît responsable de ce qu’il est. La connaissance devient une attaque contre Dieu. Mais,
8109 part, une telle connaissance répond à l’exigence de Dieu qui veut une véracité absolue. Ainsi se développe, à la source d
8110 véracité absolue. Ainsi se développe, à la source de la science, le besoin d’interroger Dieu contre Dieu. Cette impulsion,
8111 e développe, à la source de la science, le besoin d’ interroger Dieu contre Dieu. Cette impulsion, partie du livre de Job,
8112 ieu contre Dieu. Cette impulsion, partie du livre de Job, traverse toute la pensée européenne. C’est cette accusation pass
8113 qui, liée à l’amour pour tout ce qui est création de Dieu, a donné naissance à la science européenne — cette science qui,
8114 ertes archéologiques comme celle des « manuscrits de la mer Morte » — et c’est un fait patent qu’elle demeure par la Bible
8115 résente et agissante des trois, dans des millions de vies intimes. Quant à la source grecque, qui ne peut irriguer que les
8116 ne peut irriguer que les couches intellectuelles de nos pays, elle apparaît décidément en crue, aux dépens de la source r
8117 , aux dépens de la source romaine. La renaissance de notre intérêt pour les choses grecques se traduit au xxe siècle par
8118 tiques (qu’on peut lire depuis peu même en livres de poche) ; vogue des mythes (du complexe d’Œdipe chez Freud jusqu’aux U
8119 livres de poche) ; vogue des mythes (du complexe d’ Œdipe chez Freud jusqu’aux Ulysses de Joyce ou de Kazantzakis, au Prom
8120 d’Œdipe chez Freud jusqu’aux Ulysses de Joyce ou de Kazantzakis, au Prométhée de Spitteler, au Thésée de Gide, aux Orphée
8121 Cocteau, etc.) ; reprise des thèmes et des titres de la tragédie grecque par la plupart de nos dramaturges, poètes et comp
8122 sme et les mystères… Un des meilleurs hellénistes de ce temps, le Pr Bruno Snell, de Hambourg, pose ainsi le problème de l
8123 leurs hellénistes de ce temps, le Pr Bruno Snell, de Hambourg, pose ainsi le problème de la vitalité de la source grecque
8124 Bruno Snell, de Hambourg, pose ainsi le problème de la vitalité de la source grecque dans notre temps : L’homme — celui
8125 e Hambourg, pose ainsi le problème de la vitalité de la source grecque dans notre temps : L’homme — celui de l’Occident d
8126 ource grecque dans notre temps : L’homme — celui de l’Occident du moins — travaille avec conscience et volonté pour son a
8127 rsque nous éprouvons les nombreuses insuffisances de la culture européenne moderne, nous nous demandons d’autant plus inst
8128 a culture européenne moderne, nous nous demandons d’ autant plus instamment : que fut donc cette culture aux temps des orig
8129 tion historique déterminée, doit et peut attendre de l’hellénisme : Vers le milieu du xxe siècle, après la Première Gue
8130 mit à réfléchir sur ce qui valait encore la peine d’ être sauvé en Europe, certains doutes se manifestèrent chez nous : les
8131 se manifestèrent chez nous : les formes anciennes de l’humanisme n’avaient-elles pas fait leur temps ? L’humanisme d’un Ér
8132 n’avaient-elles pas fait leur temps ? L’humanisme d’ un Érasme, semblait-il, n’était plus qu’une affaire d’érudits, celui d
8133 Érasme, semblait-il, n’était plus qu’une affaire d’ érudits, celui de l’époque de Goethe était trop lié à l’esthétique. C’
8134 -il, n’était plus qu’une affaire d’érudits, celui de l’époque de Goethe était trop lié à l’esthétique. C’était d’un nouvel
8135 plus qu’une affaire d’érudits, celui de l’époque de Goethe était trop lié à l’esthétique. C’était d’un nouvel humanisme q
8136 de Goethe était trop lié à l’esthétique. C’était d’ un nouvel humanisme que l’on avait besoin, embrassant le tout de l’hom
8137 manisme que l’on avait besoin, embrassant le tout de l’homme, non seulement la pensée et le sentiment, mais l’action. Cet
8138 éthique et politique plaçait au centre la notion de Paideia, de culture, et remontait, en fait, à ce qui fut l’origine de
8139 politique plaçait au centre la notion de Paideia, de culture, et remontait, en fait, à ce qui fut l’origine de l’humanisme
8140 re, et remontait, en fait, à ce qui fut l’origine de l’humanisme isocratique et cicéronien. Toutefois, il n’entendait pas
8141 quité dans son ensemble et surtout à cet antipode d’ Isocrate que fut Platon : lequel, précisément, n’attribuait pas une di
8142 à l’homme et à sa culture, et prenait pour mesure de toutes choses non pas l’homme, mais Dieu […] Que les dieux soient la
8143 mme, mais Dieu […] Que les dieux soient la mesure de toutes choses, signifie pour les Grecs que le monde est un cosmos et
8144 te « Nature », les Grecs ne se sont pas contentés d’ y croire : ils ont cherché à la comprendre, et plus ils s’y appliquaie
8145 vie direction, sens et consistance. Le fondement de la culture de l’Europe, c’est la découverte par les Grecs de la maniè
8146 , sens et consistance. Le fondement de la culture de l’Europe, c’est la découverte par les Grecs de la manière dont cet Or
8147 re de l’Europe, c’est la découverte par les Grecs de la manière dont cet Ordre se manifeste à notre connaissance comme Loi
8148 notre activité comme Droit. Croire à l’existence de la Vérité, de la Beauté et du Droit, même quand leurs manifestations
8149 é comme Droit. Croire à l’existence de la Vérité, de la Beauté et du Droit, même quand leurs manifestations n’apparaissent
8150 es réponses que celle des dieux modérateurs. Deux de ses mythes fascinent l’Européen moderne, selon qu’il croit y reconnaî
8151 derne, selon qu’il croit y reconnaître sa passion de l’aventure technique ou de la navigation politique : Prométhée l’orgu
8152 reconnaître sa passion de l’aventure technique ou de la navigation politique : Prométhée l’orgueilleux et le rusé Ulysse.
8153 ours un mythe fondamental qui préside à la genèse d’ une civilisation. Ce mythe, pour celle qui nous occupe, n’est pas diff
8154 n’est pas difficile à découvrir : c’est le mythe de Prométhée… Le mythe de Prométhée, c’est la préfiguration de l’esprit
8155 découvrir : c’est le mythe de Prométhée… Le mythe de Prométhée, c’est la préfiguration de l’esprit de l’Occident. C’est l’
8156 ée… Le mythe de Prométhée, c’est la préfiguration de l’esprit de l’Occident. C’est l’esprit de révolte contre les interdit
8157 de Prométhée, c’est la préfiguration de l’esprit de l’Occident. C’est l’esprit de révolte contre les interdits des dieux
8158 uration de l’esprit de l’Occident. C’est l’esprit de révolte contre les interdits des dieux jaloux, qui symbolisent les cr
8159 ts des dieux jaloux, qui symbolisent les craintes de l’humanité primitive en présence des forces aveugles de la nature qui
8160 umanité primitive en présence des forces aveugles de la nature qui la dominent et qui l’effrayent. C’est l’esprit de curio
8161 ui la dominent et qui l’effrayent. C’est l’esprit de curiosité et d’aventure qui pousse Ulysse vers des horizons inconnus,
8162 t qui l’effrayent. C’est l’esprit de curiosité et d’ aventure qui pousse Ulysse vers des horizons inconnus, lui fait affron
8163 horizons inconnus, lui fait affronter les périls de la mer, les ruses de Poséidon, et surmonter les dangers qui l’assaill
8164 ui fait affronter les périls de la mer, les ruses de Poséidon, et surmonter les dangers qui l’assaillent à force d’intelli
8165 et surmonter les dangers qui l’assaillent à force d’ intelligence et de courage. C’est le culte du travail et de l’effort q
8166 angers qui l’assaillent à force d’intelligence et de courage. C’est le culte du travail et de l’effort qui incite Hercule
8167 gence et de courage. C’est le culte du travail et de l’effort qui incite Hercule à purger la terre de ses tyrans, de ses b
8168 de l’effort qui incite Hercule à purger la terre de ses tyrans, de ses brigands et de ses monstres, à dompter les fleuves
8169 i incite Hercule à purger la terre de ses tyrans, de ses brigands et de ses monstres, à dompter les fleuves, à assainir le
8170 purger la terre de ses tyrans, de ses brigands et de ses monstres, à dompter les fleuves, à assainir les vallées, à percer
8171 pacifier et à civiliser la nature. C’est la soif de connaître qui précipite Pline l’Ancien sur le Vésuve en éruption, qui
8172 cet esprit que célèbre Lucrèce en faisant l’éloge d’ Épicure : « Alors que l’humanité traînait sur la terre une vie abjecte
8173 r la terre une vie abjecte, écrasée sous le poids d’ une religion dont le visage terrifiant menaçait les mortels du haut de
8174 elle, en libérant les humains des vaines terreurs de l’Achéron et du Tartare. » Aux yeux de l’un des hommes auxquels l’un
8175 . » Aux yeux de l’un des hommes auxquels l’union de l’Europe devra le plus, le comte Richard Coudenhove-Kalergi, c’est Ul
8176  : Ulysse est au vrai sens du terme le prototype de l’Européen, en même temps que le héros du premier roman d’aventures d
8177 péen, en même temps que le héros du premier roman d’ aventures de l’Occident. Il apparaît dans sa pleine stature, à la fois
8178 e temps que le héros du premier roman d’aventures de l’Occident. Il apparaît dans sa pleine stature, à la fois éternelle e
8179 ternelle et moderne, quand on le compare au héros de l’Iliade. Achille, l’idole de l’Antiquité, le premier modèle d’Alexan
8180 le compare au héros de l’Iliade. Achille, l’idole de l’Antiquité, le premier modèle d’Alexandre le Grand, fut le Siegfried
8181 chille, l’idole de l’Antiquité, le premier modèle d’ Alexandre le Grand, fut le Siegfried des Grecs, héros juvénile, fort e
8182 ecs, héros juvénile, fort et courageux, sans trop d’ esprit, qui se précipite dans la lutte pour y périr bientôt et entrer
8183 l ne cherche pas la lutte, mais il gagne. Le sort de ses compagnons lui importe autant que le sien. Malgré ses aventures a
8184 ent, mais supporte un dur destin avec la patience de Job. Revêtu d’un costume moderne, Ulysse apparaît aussitôt comme un a
8185 rte un dur destin avec la patience de Job. Revêtu d’ un costume moderne, Ulysse apparaît aussitôt comme un authentique Euro
8186 ès bien nous le représenter sous la figure trapue d’ un Churchill, avec son grand front. Il est vraisemblable que Churchill
8187 e astuce et la même audace qui permirent à Ulysse de se sauver avec ses compagnons de la caverne de Polyphème. Tous les de
8188 rmirent à Ulysse de se sauver avec ses compagnons de la caverne de Polyphème. Tous les deux sont d’abord des marins. Ulyss
8189 se de se sauver avec ses compagnons de la caverne de Polyphème. Tous les deux sont d’abord des marins. Ulysse n’est pas se
8190 st pas seulement un guerrier, comme ses camarades de l’Iliade, mais un héros de la mer. Sa lutte principale, tout au long
8191 r, comme ses camarades de l’Iliade, mais un héros de la mer. Sa lutte principale, tout au long de l’Odyssée, n’est pas dir
8192 éros de la mer. Sa lutte principale, tout au long de l’Odyssée, n’est pas dirigée contre les hommes mais contre les élémen
8193 et les vagues. En cela aussi, il est un prototype de l’Européen, qui conquit l’hégémonie mondiale parce qu’il avait appris
8194 l’accomplissement majeur réside dans le triomphe de la technique sur la nature. Véritable Européen, enfin, par la rencont
8195 fin, par la rencontre en lui, le Grec, des traits de caractères nationaux les plus divers, français, anglais, allemand, it
8196 çais, anglais, allemand, italien… S’il renaissait de nos jours, il pourrait être le fils de n’importe laquelle de ces nati
8197 renaissait de nos jours, il pourrait être le fils de n’importe laquelle de ces nations. Et il pourrait aussi se distinguer
8198 s, il pourrait être le fils de n’importe laquelle de ces nations. Et il pourrait aussi se distinguer dans n’importe quelle
8199 porte quelle profession : comme ingénieur ou chef d’ équipe, comme propriétaire terrien ou officier, comme diplomate ou par
8200 e diplomate ou parlementaire. Sa grandeur procède de sa plénitude dans les trois dimensions du corps, de la volonté et de
8201 sa plénitude dans les trois dimensions du corps, de la volonté et de l’esprit. C’est pourquoi il est le précurseur des mo
8202 s les trois dimensions du corps, de la volonté et de l’esprit. C’est pourquoi il est le précurseur des modèles de l’humani
8203 . C’est pourquoi il est le précurseur des modèles de l’humanité à venir : du chevalier médiéval et du gentleman de notre é
8204 é à venir : du chevalier médiéval et du gentleman de notre époque. Son port royal contredit le proverbe à bon marché qui d
8205 tempête le jette sans aucun vêtement sur la grève de l’île d’Alcinoüs, le roi lui-même et sa fille Nausicaa l’accueillent
8206 i-même et sa fille Nausicaa l’accueillent en hôte d’ honneur, sans savoir qui il est : ils ont senti qu’ils avaient à faire
8207 à un seigneur, à un héros, mais aussi à un homme d’ esprit délié et élevé. On n’imagine pas le vieux Ménélas composant des
8208 s on voit très bien le vieil Ulysse, dans son nid d’ aigle d’Ithaque, écrivant ses mémoires, Poésie et Vérité. Cette Odyssé
8209 t très bien le vieil Ulysse, dans son nid d’aigle d’ Ithaque, écrivant ses mémoires, Poésie et Vérité. Cette Odyssée primit
8210 bien être celle qui a survécu aux siècles et qui, de nos jours, passionne encore la jeunesse européenne, par sa fraîcheur
8211 ire et insolite, mais qui a porté au plus profond de beaucoup de nos meilleurs esprits, la voix de Simone Weil (1909-1943)
8212 ond de beaucoup de nos meilleurs esprits, la voix de Simone Weil (1909-1943), qui fut, pour peu de temps, l’âme la plus na
8213 l’âme la plus naturellement grecque et chrétienne de notre temps. Jugeant, et avec quelle intransigeance, du seul point de
8214 avec quelle intransigeance, du seul point de vue de la spiritualité et de l’amour divin, elle écarte de la vraie traditio
8215 eance, du seul point de vue de la spiritualité et de l’amour divin, elle écarte de la vraie tradition européenne tout ce q
8216 la spiritualité et de l’amour divin, elle écarte de la vraie tradition européenne tout ce qui n’est pas grec ou évangéliq
8217 rec, comme l’Iliade en est la première ; l’esprit de la Grèce s’y laisse voir non seulement en ce qu’il y est ordonné de r
8218 isse voir non seulement en ce qu’il y est ordonné de rechercher à l’exclusion de tout autre bien « le royaume et la justic
8219 e qu’il y est ordonné de rechercher à l’exclusion de tout autre bien « le royaume et la justice de notre Père céleste », m
8220 ion de tout autre bien « le royaume et la justice de notre Père céleste », mais aussi en ce que la misère humaine y est ex
8221 un être divin en même temps qu’humain. Les récits de la Passion montrent qu’un esprit divin, uni à la chair, est altéré pa
8222 devant la souffrance et la mort, se sent au fond de la détresse, séparé des hommes et de Dieu. Le sentiment de la misère
8223 sent au fond de la détresse, séparé des hommes et de Dieu. Le sentiment de la misère humaine leur donne cet accent de simp
8224 resse, séparé des hommes et de Dieu. Le sentiment de la misère humaine leur donne cet accent de simplicité qui est la marq
8225 timent de la misère humaine leur donne cet accent de simplicité qui est la marque du génie grec, et qui fait tout le prix
8226 la marque du génie grec, et qui fait tout le prix de la tragédie attique et de l’Iliade. … Rien n’est plus rare qu’une jus
8227 t qui fait tout le prix de la tragédie attique et de l’Iliade. … Rien n’est plus rare qu’une juste expression du malheur ;
8228 lheur ; en le peignant, on feint presque toujours de croire tantôt que la déchéance est une vocation innée du malheureux,
8229 r la marque, sans qu’il change toutes les pensées d’ une manière qui n’appartient qu’à lui. Les Grecs, le plus souvent, eur
8230 lui. Les Grecs, le plus souvent, eurent la force d’ âme qui permet de ne pas se mentir ; ils en furent récompensés et sure
8231 le plus souvent, eurent la force d’âme qui permet de ne pas se mentir ; ils en furent récompensés et surent atteindre en t
8232 urent atteindre en toute chose le plus haut degré de lucidité, de pureté et de simplicité… Les Romains et les Hébreux se s
8233 re en toute chose le plus haut degré de lucidité, de pureté et de simplicité… Les Romains et les Hébreux se sont crus les
8234 hose le plus haut degré de lucidité, de pureté et de simplicité… Les Romains et les Hébreux se sont crus les uns et les au
8235 la maîtresse du monde, les seconds par la faveur de leur Dieu et dans la mesure exacte où ils lui obéissaient. Les Romain
8236 dies. Ils remplaçaient les tragédies par les jeux de gladiateurs. Les Hébreux voyaient dans le malheur le signe du péché e
8237 le signe du péché et par suite un motif légitime de mépris. Ils regardaient leurs ennemis vaincus comme étant en horreur
8238 par la découverte des lettres grecques, le génie de la Grèce n’a pas ressuscité au cours de vingt siècles. Il en apparaît
8239 , dans l’École des Femmes, dans Phèdre. Mais rien de ce qu’ont produit les peuples d’Europe ne vaut le premier poème connu
8240 hèdre. Mais rien de ce qu’ont produit les peuples d’ Europe ne vaut le premier poème connu qui soit apparu chez l’un d’eux.
8241 le premier poème connu qui soit apparu chez l’un d’ eux. Ils retrouveront peut-être le génie épique quand ils sauront ne r
8242 l’avait mieux comprise que les jacobins ne firent de la Rome de Brutus. Rome a donc mauvaise presse dans l’intelligentsia
8243 religion en l’adoptant » : Les Romains, poignée d’ aventuriers réunis par le besoin…, les Romains ne pouvaient rien tolér
8244 lérer qui fût riche en contenu spirituel. L’amour de Dieu est un feu dangereux dont le contact pouvait être funeste à leur
8245 ouvait être funeste à leur misérable divinisation de l’esclavage. Aussi ont-ils impitoyablement détruit la vie spirituelle
8246 uthentiques. … Ils ont exterminé tous les druides de Gaule ; anéanti les cultes égyptiens ; noyé dans le sang et déshonoré
8247 es égyptiens ; noyé dans le sang et déshonoré par d’ ingénieuses calomnies l’adoration de Dionysos. On sait ce qu’ils ont f
8248 déshonoré par d’ingénieuses calomnies l’adoration de Dionysos. On sait ce qu’ils ont fait des chrétiens au début… L’inspir
8249 ien adore Dieu avec un cœur disposé comme le cœur d’ un païen de Rome dans l’hommage rendu à l’empereur, ce chrétien aussi
8250 ieu avec un cœur disposé comme le cœur d’un païen de Rome dans l’hommage rendu à l’empereur, ce chrétien aussi est idolâtr
8251 e la culture hellénique et le néant. Leur faculté d’ imagination visant uniquement au pratique — ils possédaient un droit s
8252 , mais ils n’avaient pas une seule légende divine d’ origine proprement romaine — est un trait qu’on ne rencontre nulle par
8253 le gigantesque qui, pour beaucoup, domine le type de l’économie, de la magistrature et de la vie antique et qui a rabaissé
8254 qui, pour beaucoup, domine le type de l’économie, de la magistrature et de la vie antique et qui a rabaissé en tout cas co
8255 mine le type de l’économie, de la magistrature et de la vie antique et qui a rabaissé en tout cas considérablement la vale
8256 , qui enseigna d’abord à l’Antiquité la splendeur de l’argent — entre les mains d’hommes d’affaires à l’esprit fort et pui
8257 iquité la splendeur de l’argent — entre les mains d’ hommes d’affaires à l’esprit fort et puissamment doués. Autrement, ni
8258 splendeur de l’argent — entre les mains d’hommes d’ affaires à l’esprit fort et puissamment doués. Autrement, ni César ni
8259 ne seraient intelligibles. Chaque Grec a un trait de Don Quichotte, chaque Romain un de Sancho Panca, toutes leurs autres
8260 rec a un trait de Don Quichotte, chaque Romain un de Sancho Panca, toutes leurs autres qualités disparaissent sous celles-
8261 ique des derniers temps, mais aussi le haut idéal de Virgile, l’un des pères spirituels de l’Europe : Même ceux qui possè
8262 haut idéal de Virgile, l’un des pères spirituels de l’Europe : Même ceux qui possèdent aussi peu que moi leur latin ne s
8263 n pouvait attendre que Virgile imaginât comme fin de l’Histoire, et que c’était une digne fin. Pensera-t-on vraiment qu’il
8264 . Dans la mesure où nous héritons la civilisation de l’Europe, nous sommes encore tous citoyens de l’Empire romain, et le
8265 ion de l’Europe, nous sommes encore tous citoyens de l’Empire romain, et le temps n’a pas encore donné tort à Virgile lors
8266 es, des proconsuls et des gouverneurs, des hommes d’ affaires et des spéculateurs, des démagogues et des généraux. C’était
8267 nte assigne à Virgile dans la vie future, ce rôle de guide et de maître jusqu’à la barrière qu’il n’était pas autorisé à f
8268 à Virgile dans la vie future, ce rôle de guide et de maître jusqu’à la barrière qu’il n’était pas autorisé à franchir, et
8269 t pas autorisé à franchir, et n’était pas capable de franchir, définit exactement la relation entre Virgile et le monde ch
8270 le et le monde chrétien. Nous voyons que le monde de Virgile, comparé à celui d’Homère, est une approximation du monde chr
8271 s voyons que le monde de Virgile, comparé à celui d’ Homère, est une approximation du monde chrétien par le choix, l’ordre
8272 e chrétien par le choix, l’ordre et les relations de ses valeurs. Ceci n’implique aucune comparaison entre Homère comme po
8273 out simplement nous en sachions plus sur le monde de Virgile et le comprenions mieux ; et qu’ainsi nous voyions plus clair
8274 in selon Virgile, est dû à l’esprit philosophique de Virgile lui-même. Car, au sens où un poète est un philosophe (par opp
8275 ande œuvre), Virgile est le plus grand philosophe de la Rome ancienne. Ce n’est donc pas simplement que la civilisation en
8276 che de celle du christianisme que la civilisation d’ Homère ; nous sommes en droit de dire que Virgile, parmi les poètes cl
8277 e la civilisation d’Homère ; nous sommes en droit de dire que Virgile, parmi les poètes classiques et les prosateurs latin
8278 es prosateurs latins, est proche du christianisme d’ une manière unique. Il est une formule que j’ai tenté d’éviter mais qu
8279 manière unique. Il est une formule que j’ai tenté d’ éviter mais que je me sens contraint d’utiliser ici : anima naturalite
8280 j’ai tenté d’éviter mais que je me sens contraint d’ utiliser ici : anima naturaliter Christiana. Est-elle applicable à Vir
8281 na. Est-elle applicable à Virgile ? C’est matière de choix personnel. Mais j’incline à penser que Virgile manque de très p
8282 onnel. Mais j’incline à penser que Virgile manque de très peu la marque : et c’est pourquoi, je disais tout à l’heure que
8283 tir la valeur affective que garde en nous l’image de la Pax Romana : Fontaine de la présente histoire européenne, telle e
8284 arde en nous l’image de la Pax Romana : Fontaine de la présente histoire européenne, telle est la place du Capitole, conç
8285 se par lui à la Ville. On ne la comprend bien que de nuit, quand Marc Aurèle chevauche solitaire dans la lumière atténuée,
8286 es. Très peu de l’or des anciens temps, des temps de la paix impériale, reste attaché à l’armure de l’empereur ; mais, sel
8287 ps de la paix impériale, reste attaché à l’armure de l’empereur ; mais, selon la tradition du peuple romain, cet or s’accr
8288 s’accroît et lorsqu’il recouvrira toute la statue de l’empereur qui consuma sa vie dans les camps, les expéditions, et sur
8289 ans les camps, les expéditions, et sur les champs de bataille, la paix régnera : ainsi l’Europe a trouvé sa figure dans l’
8290 bénissant la Ville et le Monde. Mais gardons-nous de fuir dans les rêves de peuples souffrants, ce ne serait pas conforme
8291 e Monde. Mais gardons-nous de fuir dans les rêves de peuples souffrants, ce ne serait pas conforme à l’esprit de Marc Aurè
8292 souffrants, ce ne serait pas conforme à l’esprit de Marc Aurèle ! « Celui qui a vu ce qui existe aujourd’hui a contemplé
8293 ui qui a vu ce qui existe aujourd’hui a contemplé d’ un seul regard ce qui fut de tout temps et sera de toute éternité. » L
8294 jourd’hui a contemplé d’un seul regard ce qui fut de tout temps et sera de toute éternité. » Le présent contient toute l’h
8295 d’un seul regard ce qui fut de tout temps et sera de toute éternité. » Le présent contient toute l’histoire du monde. Et s
8296 Et si l’Europe existe en nous, dans la plénitude de ses diversités contradictoires et de sa mission infinie, l’Europe est
8297 la plénitude de ses diversités contradictoires et de sa mission infinie, l’Europe est là dès maintenant, comme un destin ;
8298 si cette figure ne s’instaure pas dans l’intimité de notre être, dans la vie de notre vie et le cœur de notre cœur, comme
8299 re pas dans l’intimité de notre être, dans la vie de notre vie et le cœur de notre cœur, comme dit Hamlet à Horatio, alors
8300 e notre être, dans la vie de notre vie et le cœur de notre cœur, comme dit Hamlet à Horatio, alors l’Europe n’existe plus,
8301 p de bataille abandonné aux puissances techniques de l’inhumain.288 La source germanique n’est même pas mentionnée par V
8302 même pas mentionnée par Valéry, dans son discours de 1922. Ce Français d’origine génoise n’avait conscience que de ses hér
8303 ar Valéry, dans son discours de 1922. Ce Français d’ origine génoise n’avait conscience que de ses héritages méditerranéens
8304 Français d’origine génoise n’avait conscience que de ses héritages méditerranéens. Un peu plus tard, la notion même de « G
8305 méditerranéens. Un peu plus tard, la notion même de « Germanentum » se trouvera obscurcie et refoulée sous l’effet des do
8306 arbares et chimériques du national-socialisme, et de la réaction d’horreur universelle à la découverte des crimes que ces
8307 ériques du national-socialisme, et de la réaction d’ horreur universelle à la découverte des crimes que ces doctrines préte
8308 rdiques autant que les Latines gardent un réflexe d’ hostilité à l’endroit du Saint-Empire. Serait-ce, pour les unes, parce
8309 « romain », pour les autres, parce qu’il était «  de nation germanique » ? C’est plutôt que la notion même de Saint-Empire
8310 on germanique » ? C’est plutôt que la notion même de Saint-Empire n’est plus comprise. (Elle ne l’a d’ailleurs jamais été
8311 l’apport germanique ? C’est un historien suisse, de vieille souche fribourgeoise, écrivant en français et vivant aux lisi
8312 ique : Gonzague de Reynold. L’un des huit volumes de son œuvre maîtresse, La Formation de l’Europe, est consacré aux Germa
8313 huit volumes de son œuvre maîtresse, La Formation de l’Europe, est consacré aux Germains, des origines jusqu’aux Carolingi
8314 décrit largement cette « fusion du Barbaricum et de la Romania, sous les auspices de l’Église », dont on peut soutenir (c
8315 du Barbaricum et de la Romania, sous les auspices de l’Église », dont on peut soutenir (comme on peut le faire aussi de l’
8316 nt on peut soutenir (comme on peut le faire aussi de l’entreprise de Charlemagne) qu’elle a véritablement fait l’Europe. R
8317 nir (comme on peut le faire aussi de l’entreprise de Charlemagne) qu’elle a véritablement fait l’Europe. Résumons, d’après
8318 d’après lui, les deux principales « découvertes » de l’historiographie du xxe siècle européen concernant l’héritage germa
8319 uropéen concernant l’héritage germanique : 1° Fin de la légende des « Grandes invasions » ruinant l’Empire : … Sans les d
8320 Empire : … Sans les divisions, sans la faiblesse de l’empire, il n’y aurait pas eu de péril germanique. Les Germains ne f
8321 ns la faiblesse de l’empire, il n’y aurait pas eu de péril germanique. Les Germains ne furent jamais assez nombreux pour l
8322 t jamais assez nombreux pour le conquérir. Parler d’ invasions germaniques et même de grandes invasions, est une sottise.
8323 conquérir. Parler d’invasions germaniques et même de grandes invasions, est une sottise. Il y a les Germains de l’extérie
8324 invasions, est une sottise. Il y a les Germains de l’extérieur, et ceux qui se trouvent à l’intérieur de l’Empire : les
8325 ntre les premiers, prendront le haut commandement de l’armée, deviendront l’Empire : … À la fin, la question sera de savo
8326 iendront l’Empire : … À la fin, la question sera de savoir quel sera le peuple germain capable d’assumer la succession du
8327 era de savoir quel sera le peuple germain capable d’ assumer la succession du peuple romain et de restaurer l’imperium.289
8328 pable d’assumer la succession du peuple romain et de restaurer l’imperium.289 Ce peuple sera celui des Francs, d’où est
8329 l’imperium.289 Ce peuple sera celui des Francs, d’ où est issu Charlemagne, « Père de l’Europe »290. La première tentativ
8330 de l’Europe »290. La première tentative concrète de fédération européenne au xxe siècle, celle des Six, sera baptisée no
8331 s en tribu, tribus réunies en peuple ; assemblées d’ hommes libres et de guerriers : le Volksthing, qui survit en Suisse da
8332 réunies en peuple ; assemblées d’hommes libres et de guerriers : le Volksthing, qui survit en Suisse dans les Landsgemeind
8333 dans les Landsgemeinden des cantons montagnards. De là un droit qui, entre les deux extrêmes du jus romanum : l’individu,
8334 rtisseurs qui empêchent l’individu, terme faible, d’ être absorbé par l’État, terme fort. Le principe du droit germanique e
8335 rincipe du droit germanique est, en effet, l’idée d’ association. Genossenschaftsrecht, dit le grand juriste Gierke. … Lors
8336 le, devenu chrétien, l’empereur descendit du rang de dieu au rang de représentant de Dieu. Constantin se montra humble vis
8337 ien, l’empereur descendit du rang de dieu au rang de représentant de Dieu. Constantin se montra humble vis-à-vis de l’Égli
8338 descendit du rang de dieu au rang de représentant de Dieu. Constantin se montra humble vis-à-vis de l’Église, mais ses suc
8339 a dans l’empereur tout-puissant. Avec le triomphe de la doctrine trinitaire, cette conception ne fut plus possible. « L’em
8340 t plus possible. « L’empereur n’est pas au-dessus de l’Église mais dans l’Église », rappela durement saint Ambroise à Théo
8341 aint Ambroise à Théodore le pénitent. Le disciple de saint Ambroise fut saint Augustin… Faire correspondre à un empereur c
8342 hrétien fut l’un des buts que se proposa l’auteur de La Cité de Dieu, ce bréviaire de Charlemagne. Dans cet ouvrage qui eu
8343 l’un des buts que se proposa l’auteur de La Cité de Dieu, ce bréviaire de Charlemagne. Dans cet ouvrage qui eut, durant d
8344 proposa l’auteur de La Cité de Dieu, ce bréviaire de Charlemagne. Dans cet ouvrage qui eut, durant des siècles, autant d’i
8345 s cet ouvrage qui eut, durant des siècles, autant d’ influence que, bien des siècles plus tard, le Contrat social ou le Cap
8346 u’elle protège et qu’elle suit. L’idéal politique de saint Augustin, c’est la societas civitatum, l’association des cités
8347 La diversité devient alors la condition première de l’unité. C’est le fédéralisme dont on est en droit de dire qu’il est
8348 ’unité. C’est le fédéralisme dont on est en droit de dire qu’il est la conception chrétienne de la vie politique et social
8349 droit de dire qu’il est la conception chrétienne de la vie politique et sociale, l’ordre qui assure à tous la tranquillit
8350 ociale, l’ordre qui assure à tous la tranquillité de la paix. Avec cette dernière citation, c’est l’héritage chrétien qui
8351 age chrétien qui est invoqué. Deux grandes écoles d’ historiens de la culture s’opposent, sur ce sujet, non sans violence,
8352 qui est invoqué. Deux grandes écoles d’historiens de la culture s’opposent, sur ce sujet, non sans violence, durant la pér
8353 sujet, non sans violence, durant la période dite de l’entre-deux-guerres (1919-1939). L’une, optimiste par programme, con
8354 ar programme, continue la tradition des Lumières, de la science et de la technique prométhéennes, et tient l’Europe pour u
8355 tinue la tradition des Lumières, de la science et de la technique prométhéennes, et tient l’Europe pour une création de la
8356 rométhéennes, et tient l’Europe pour une création de la Renaissance. L’autre, pessimiste par position plus que par nature,
8357 a seule Europe digne du nom. Europe de l’Homme et de l’avenir contre Europe de la chrétienté et du passé ? Il s’agit bien
8358 m. Europe de l’Homme et de l’avenir contre Europe de la chrétienté et du passé ? Il s’agit bien plutôt d’une polémique ent
8359 la chrétienté et du passé ? Il s’agit bien plutôt d’ une polémique entre les militants de deux partis qui ont en commun le
8360 t bien plutôt d’une polémique entre les militants de deux partis qui ont en commun le même souci de sauver l’Europe dans l
8361 ts de deux partis qui ont en commun le même souci de sauver l’Europe dans le présent, — cette Europe menacée de l’extérieu
8362 l’Europe dans le présent, — cette Europe menacée de l’extérieur par la montée d’empires « quantitatifs », et menacée de l
8363 cette Europe menacée de l’extérieur par la montée d’ empires « quantitatifs », et menacée de l’intérieur par ses divisions
8364 la montée d’empires « quantitatifs », et menacée de l’intérieur par ses divisions séculaires. Mais à quels saints se voue
8365 ? ou à quels savants ? Laissons à l’un des doyens de l’historiographie européenne, Christopher Dawson, le soin de définir
8366 iographie européenne, Christopher Dawson, le soin de définir les erreurs symétriques auxquelles s’exposent les deux écoles
8367 fréquemment tendance à se servir du présent comme d’ un modèle parfait permettant de juger le passé, et à considérer toute
8368 r du présent comme d’un modèle parfait permettant de juger le passé, et à considérer toute l’histoire comme un processus i
8369 ctuel des choses serait la phase dernière. Le cas d’ un écrivain comme Wells justifie dans une certaine mesure cette interp
8370 mesure cette interprétation. Son but est en effet de fournir à l’homme moderne un arrière-plan historique et de quoi se fo
8371 r à l’homme moderne un arrière-plan historique et de quoi se former une conception du monde. Mais, même à son point de per
8372 r une conception du monde. Mais, même à son point de perfection, cette façon d’écrire l’histoire est fondamentalement cont
8373 Mais, même à son point de perfection, cette façon d’ écrire l’histoire est fondamentalement contraire à l’esprit de l’histo
8374 istoire est fondamentalement contraire à l’esprit de l’histoire, puisqu’elle implique la subordination du passé au présent
8375 ’opposé, un autre danger qui consiste à se servir de l’histoire comme d’une arme contre l’époque moderne, soit par suite d
8376 nger qui consiste à se servir de l’histoire comme d’ une arme contre l’époque moderne, soit par suite d’une idéalisation ro
8377 ’une arme contre l’époque moderne, soit par suite d’ une idéalisation romantique du passé, soit au profit d’une propagande
8378 idéalisation romantique du passé, soit au profit d’ une propagande religieuse ou patriotique. Le second cas est assurément
8379 iévale pour elle-même, et non plus comme un moyen d’ atteindre quelque autre but. L’historien propagandiste, au contraire,
8380 ’historien propagandiste, au contraire, s’inspire de motifs d’un ordre tout à fait étranger à l’histoire et tend inconscie
8381 propagandiste, au contraire, s’inspire de motifs d’ un ordre tout à fait étranger à l’histoire et tend inconsciemment à la
8382 renaissance romantique en a exalté « les siècles de foi » et qu’elle a présenté la civilisation de cette période comme l’
8383 es de foi » et qu’elle a présenté la civilisation de cette période comme l’expression sociale de l’idéal chrétien… Au dern
8384 ation de cette période comme l’expression sociale de l’idéal chrétien… Au dernier siècle et au début du présent, ils ont c
8385 présent, ils ont certainement été enclins à faire de l’histoire une branche de l’apologétique, et à idéaliser la culture m
8386 ent été enclins à faire de l’histoire une branche de l’apologétique, et à idéaliser la culture médiévale pour exalter leur
8387 ter leur idéal religieux. En réalité, cette façon d’ écrire l’histoire manque son but, puisque aussitôt que le lecteur se m
8388 son but, puisque aussitôt que le lecteur se méfie de l’impartialité de l’historien, il doute de la vérité de tout ce que c
8389 ussitôt que le lecteur se méfie de l’impartialité de l’historien, il doute de la vérité de tout ce que celui-ci lui présen
8390 méfie de l’impartialité de l’historien, il doute de la vérité de tout ce que celui-ci lui présente.291 Certes, Christop
8391 mpartialité de l’historien, il doute de la vérité de tout ce que celui-ci lui présente.291 Certes, Christopher Dawson ne
8392 1 Certes, Christopher Dawson ne se contente pas de renvoyer dos à dos les deux écoles. Il a décrit mieux que personne l’
8393 a décrit mieux que personne l’influence décisive de l’Église sur la formation d’une première synthèse européenne pendant
8394 l’influence décisive de l’Église sur la formation d’ une première synthèse européenne pendant l’âge sombre qui sépare le dé
8395 opéenne pendant l’âge sombre qui sépare le déclin de l’Empire romain et l’aurore de « l’unité médiévale » (ve au xie siè
8396 i sépare le déclin de l’Empire romain et l’aurore de « l’unité médiévale » (ve au xie siècle). Il ne croit pas que l’hum
8397 t seuls. Mais il ne décrète pas non plus, qu’hors d’ un « retour » à la philosophie de saint Thomas ou à la chrétienté de G
8398 on plus, qu’hors d’un « retour » à la philosophie de saint Thomas ou à la chrétienté de Grégoire le Grand, il n’y aura plu
8399 la philosophie de saint Thomas ou à la chrétienté de Grégoire le Grand, il n’y aura plus d’Europe viable ni d’unité europé
8400 chrétienté de Grégoire le Grand, il n’y aura plus d’ Europe viable ni d’unité européenne praticable : À la fin du Moyen Âg
8401 ire le Grand, il n’y aura plus d’Europe viable ni d’ unité européenne praticable : À la fin du Moyen Âge, l’Europe se déto
8402 le : À la fin du Moyen Âge, l’Europe se détourne de l’Orient et commence à regarder du côté de l’Ouest, vers l’Atlantique
8403 dura donc point, car elle avait pour base l’union de l’Église et des peuples du Nord, avec, en plus, un levain d’influence
8404 et des peuples du Nord, avec, en plus, un levain d’ influence orientale. Sa mort ne signifia pas néanmoins la fin de l’uni
8405 ientale. Sa mort ne signifia pas néanmoins la fin de l’unité européenne. Au contraire, la culture des pays de l’Ouest devi
8406 ité européenne. Au contraire, la culture des pays de l’Ouest devint plus autonome, plus indépendante et plus occidentale q
8407 cidentale qu’elle ne l’avait jamais été. La perte de l’unité spirituelle n’entraîna pas le partage de l’Occident entre deu
8408 de l’unité spirituelle n’entraîna pas le partage de l’Occident entre deux types de civilisation irréductibles l’un à l’au
8409 îna pas le partage de l’Occident entre deux types de civilisation irréductibles l’un à l’autre et hostiles, comme elle l’e
8410 désunion religieuse, l’Europe conserva son unité de culture, mais celle-ci eut désormais pour base une tradition intellec
8411 tine remplaça la liturgie latine en tant que lien d’ unité intellectuelle ; l’érudit et le gentilhomme, en tant que représe
8412 udit et le gentilhomme, en tant que représentants de la culture occidentale, remplacèrent le moine et le chevalier. À quat
8413 cèrent le moine et le chevalier. À quatre siècles de catholicisme nordique et d’influence orientale succédèrent quatre siè
8414 ier. À quatre siècles de catholicisme nordique et d’ influence orientale succédèrent quatre siècles d’humanisme et d’autono
8415 d’influence orientale succédèrent quatre siècles d’ humanisme et d’autonomie occidentale. Aujourd’hui l’Europe est menacée
8416 ientale succédèrent quatre siècles d’humanisme et d’ autonomie occidentale. Aujourd’hui l’Europe est menacée de voir s’effo
8417 mie occidentale. Aujourd’hui l’Europe est menacée de voir s’effondrer la culture séculière et aristocratique qui servit de
8418 la culture séculière et aristocratique qui servit de base à la seconde phase de son unité. Nous ressentons une fois de plu
8419 stocratique qui servit de base à la seconde phase de son unité. Nous ressentons une fois de plus le besoin d’une unité spi
8420 unité. Nous ressentons une fois de plus le besoin d’ une unité spirituelle, ou tout au moins morale ; nous comprenons qu’un
8421  ; nous ne pouvons nous satisfaire plus longtemps d’ une civilisation aristocratique qui trouve son unité dans un monde ext
8422 perficiel, sans tenir compte des besoins profonds de la nature spirituelle de l’homme. Et en même temps nous n’avons plus
8423 pte des besoins profonds de la nature spirituelle de l’homme. Et en même temps nous n’avons plus la même foi en la supério
8424 n’avons plus la même foi en la supériorité innée de la civilisation occidentale et en son droit à dominer le monde. Nous
8425 sujettes, et nous ressentons à la fois le besoin de nous protéger contre les forces insurgées du monde oriental et d’entr
8426 contre les forces insurgées du monde oriental et d’ entrer en contact plus étroit avec ses traditions spirituelles. Commen
8427 faire ces besoins, ou même s’il nous est possible de les satisfaire, nous ne pouvons à l’heure présente que le conjecturer
8428 eure présente que le conjecturer. Mais il est bon de ne pas oublier que l’unité de notre civilisation ne repose pas entièr
8429 er. Mais il est bon de ne pas oublier que l’unité de notre civilisation ne repose pas entièrement sur la culture laïque et
8430 plus profondes, et il nous faut remonter au-delà de l’humanisme et des triomphes superficiels de la civilisation moderne,
8431 delà de l’humanisme et des triomphes superficiels de la civilisation moderne, si nous tenons à découvrir les forces social
8432 u Moyen Âge, trop souvent décrit comme une époque de foi universelle et d’harmonie profonde des esprits, dont la Réforme s
8433 ent décrit comme une époque de foi universelle et d’ harmonie profonde des esprits, dont la Réforme serait venue briser tra
8434  l’unité ». Cette utopie à rebours, qui fut celle de Novalis dans La Chrétienté ou l’Europe, est devenue lieu commun pour
8435 , est devenue lieu commun pour l’école catholique de la première moitié du siècle. Personne ne l’a mieux réfutée que l’his
8436 Heer, lui-même catholique convaincu : On ne cesse de parler de la christianisation et de la déchristianisation de l’Europe
8437 même catholique convaincu : On ne cesse de parler de la christianisation et de la déchristianisation de l’Europe. Combien
8438 : On ne cesse de parler de la christianisation et de la déchristianisation de l’Europe. Combien ces termes erronés trahiss
8439 e la christianisation et de la déchristianisation de l’Europe. Combien ces termes erronés trahissent-ils une fausse positi
8440 un jour avait été chrétienne, et puis avait cessé de l’être ! C’est là pure légende. Les faits et les archives de l’Histoi
8441 C’est là pure légende. Les faits et les archives de l’Histoire démontrent surabondamment que les choses se sont passées t
8442 rent l’unité, la cohérence interne et même intime de l’histoire européenne, à laquelle appartiennent Augustin, Luther et V
8443 es empereurs médiévaux et les rois « par la grâce de Dieu » de France et d’Espagne, dans l’évolution commune d’un phénomèn
8444 rs médiévaux et les rois « par la grâce de Dieu » de France et d’Espagne, dans l’évolution commune d’un phénomène historiq
8445 et les rois « par la grâce de Dieu » de France et d’ Espagne, dans l’évolution commune d’un phénomène historique, dans l’al
8446 de France et d’Espagne, dans l’évolution commune d’ un phénomène historique, dans l’allégeance à l’Europe. … Au début du x
8447 u du xiie siècle. la Vita Heriberti — biographie d’ un évêque othonien de Cologne — nous conte l’histoire de ce pauvre qui
8448 Vita Heriberti — biographie d’un évêque othonien de Cologne — nous conte l’histoire de ce pauvre qui court les rues de la
8449 vêque othonien de Cologne — nous conte l’histoire de ce pauvre qui court les rues de la Sainte Cologne, de la cité de la C
8450 conte l’histoire de ce pauvre qui court les rues de la Sainte Cologne, de la cité de la Cathédrale et des plus prestigieu
8451 e pauvre qui court les rues de la Sainte Cologne, de la cité de la Cathédrale et des plus prestigieuses fondations religie
8452 i court les rues de la Sainte Cologne, de la cité de la Cathédrale et des plus prestigieuses fondations religieuses, mais
8453 es, mais ne trouve pas un seul prêtre qui accepte de baptiser son fils nouveau-né sans exiger une somme que l’homme ne peu
8454 ut payer. Cinquante ans plus tard, la bourgeoisie de Cologne s’adresse au pape Innocent II pour le supplier de diviser en
8455 ne s’adresse au pape Innocent II pour le supplier de diviser en deux paroisses la communauté unique de 60.000 âmes qu’un s
8456 de diviser en deux paroisses la communauté unique de 60.000 âmes qu’un seul prêtre administre, faute de moyens suffisants
8457 enir d’autres gardiens des âmes. Le commun peuple d’ Europe, jusqu’à l’époque de Jeanne d’Arc et même bien plus tard, ne co
8458 âmes. Le commun peuple d’Europe, jusqu’à l’époque de Jeanne d’Arc et même bien plus tard, ne connaît dans ses larges masse
8459 s tard, ne connaît dans ses larges masses ni cure d’ âme individuelle, ni enseignement de la foi, ni institutions paroissia
8460 asses ni cure d’âme individuelle, ni enseignement de la foi, ni institutions paroissiales au sens actuel. Ainsi, jusque bi
8461 transmise, à quoi s’ajoute la prédication muette de l’architecture romane et des fresques d’églises. La lecture de la Bib
8462 n muette de l’architecture romane et des fresques d’ églises. La lecture de la Bible est interdite aux fidèles dès le synod
8463 ture romane et des fresques d’églises. La lecture de la Bible est interdite aux fidèles dès le synode de Toulouse en 1229,
8464 la Bible est interdite aux fidèles dès le synode de Toulouse en 1229, rappelle F. Heer. La Bible en langue vulgaire est m
8465 par Paul IV en 1559. « Charles-Quint sur son lit de mort doit solliciter de l’Inquisition la permission de lire l’Évangil
8466 Charles-Quint sur son lit de mort doit solliciter de l’Inquisition la permission de lire l’Évangile en français (il n’exis
8467 rt doit solliciter de l’Inquisition la permission de lire l’Évangile en français (il n’existe pas de traduction espagnole)
8468 n de lire l’Évangile en français (il n’existe pas de traduction espagnole). » Pendant ce temps, le monachisme est entré en
8469 en Allemagne ; des laïques, non le pape, tentent de réformer l’Église au concile de Bâle, mais en vain… Friedrich Heer co
8470 le pape, tentent de réformer l’Église au concile de Bâle, mais en vain… Friedrich Heer conclut : Toujours et encore, dan
8471 riedrich Heer conclut : Toujours et encore, dans de nombreuses publications sur l’Europe et le christianisme, revient ce
8472 ut que la sécularisation et la déchristianisation de l’Occident aient commencé au xvie siècle avec la Renaissance, l’Huma
8473 ue voulait dégager Friedrich Heer — si la légende d’ un Moyen Âge à la Novalis a vécu, si ce passé était fort loin d’être a
8474 à la Novalis a vécu, si ce passé était fort loin d’ être aussi chrétien qu’on l’a dit, ce qui l’a suivi et ce qui va suivr
8475 — soit positifs, soit négatifs — qui n’ont cessé d’ exister entre les grandes confessions et conceptions du monde qui s’op
8476 iie et xiiie « appartiennent » au christianisme de leur époque, tout comme le catholicisme post-tridentin, du xvie au x
8477 siècle, reste intimement relié au protestantisme de ces époques, tant par ses réalisations positives que par ses échecs.
8478 u ixe au xixe siècle, possède un certain nombre d’ éléments unitifs fondamentaux. La liturgie profane intériorisée des po
8479 llemand est aussi peu concevable sans la liturgie de l’Église, que l’idéalisme allemand sans la théologie chrétienne, ou e
8480 ans Thomas d’Aquin, Hegel sans Eusèbe de Césarée. De 800 à 1815, tous les traités de paix en Europe sont conclus in nomine
8481 usèbe de Césarée. De 800 à 1815, tous les traités de paix en Europe sont conclus in nomine sanctæ et individuæ Trinitatis.
8482 ue des chancelleries). Notre tâche est maintenant de montrer comment cette unité millénaire s’est développée en contrastes
8483 ues multipliés, à une richesse et à une plénitude de possibilités terribles et grandes, qui s’offrent aujourd’hui aux rega
8484 ards du Monde comme constituant l’héritage vivant de l’Europe.293 Source grecque et source chrétienne sont restées de no
8485 Source grecque et source chrétienne sont restées de nos jours les deux plus vives. Simone Weil essayait de les confondre.
8486 s jours les deux plus vives. Simone Weil essayait de les confondre. Un grand humaniste libéral, Salvador de Madariaga, pré
8487 reprend et rénove un thème classique, le dialogue de Socrate et de Jésus-Christ. La primauté de l’esprit et de la volonté
8488 ove un thème classique, le dialogue de Socrate et de Jésus-Christ. La primauté de l’esprit et de la volonté, et l’étroite
8489 logue de Socrate et de Jésus-Christ. La primauté de l’esprit et de la volonté, et l’étroite parenté entre ces deux facult
8490 e et de Jésus-Christ. La primauté de l’esprit et de la volonté, et l’étroite parenté entre ces deux facultés dans la psyc
8491 la tradition chrétienne. Socrate domine l’esprit de l’Europe, le Christ, sa volonté. Il est vain de se demander si ces de
8492 t de l’Europe, le Christ, sa volonté. Il est vain de se demander si ces deux traditions sont la cause ou l’effet du caract
8493 naturellement, de sorte que, au cours des siècles de vie européenne, Socrate est devenu chrétien et le Christ est devenu s
8494 ocratique, un esprit ouvert aux faits, au service de la logique et loyal envers la vérité, mais libre et résistant envers
8495 stant envers toute doctrine ou conclusion imposée d’ avance. L’esprit socratique est fier à l’égard des autres esprits, mai
8496 vis-à-vis des faits. C’est sur cette double vertu de l’esprit socratique en Europe qu’est fondée la liberté de pensée… En
8497 rit socratique en Europe qu’est fondée la liberté de pensée… En profondeur, l’histoire intérieure de l’Europe doit être co
8498 é de pensée… En profondeur, l’histoire intérieure de l’Europe doit être comprise comme un effort pour atteindre ce style s
8499 teindre ce style socratique dans le développement de son esprit, malgré tous les obstacles inhérents aux stades précédents
8500 ition — celle du Christ. Le trait caractéristique de la chrétienté réside en ceci : en mourant sur la Croix pour tous les
8501 personne ne peut mettre en doute. En choisissant de boire volontairement la ciguë, plutôt que de renier sa doctrine, Socr
8502 sant de boire volontairement la ciguë, plutôt que de renier sa doctrine, Socrate a délivré l’esprit humain du mensonge ; e
8503 élivré l’esprit humain du mensonge ; en acceptant de mourir sur la croix, pour expier les péchés de tous les hommes, le Ch
8504 nt de mourir sur la croix, pour expier les péchés de tous les hommes, le Christ a libéré définitivement la volonté de l’Eu
8505 mes, le Christ a libéré définitivement la volonté de l’Europe de toute inhumanité. Bien entendu, les mensonges et l’inhuma
8506 st a libéré définitivement la volonté de l’Europe de toute inhumanité. Bien entendu, les mensonges et l’inhumanité ont con
8507 e doit la vie, mais seulement comme des négations de son être foncier. L’individualisme européen n’est pas né sur le Golgo
8508 qui restent aveugles devant l’origine chrétienne de leur foi, renvoyons-les à cet Espagnol qui, à la question : quelle es
8509 côté de cette tradition puissante qui a renforcé de son esprit notre individualisme actif, le christianisme a apporté à l
8510 ’Europe un système surnaturel qui ne tolérait pas de rivaux. Dans la mesure où le christianisme a détruit ou écarté les cr
8511 tendance socratique vers la liberté et la clarté de l’esprit. Bientôt, cependant, l’apport de l’Ancien Testament venu d’A
8512 clarté de l’esprit. Bientôt, cependant, l’apport de l’Ancien Testament venu d’Asie Mineure et même un certain « folklore 
8513 t, cependant, l’apport de l’Ancien Testament venu d’ Asie Mineure et même un certain « folklore » local et païen, qui vint
8514 en, qui vint s’ajouter au cours des temps, firent de la tradition chrétienne un danger pour la tradition socratique. Ce fu
8515 r pour la tradition socratique. Ce fut la période de lutte entre la science et l’Église, l’ère de l’Inquisition, de Giorda
8516 iode de lutte entre la science et l’Église, l’ère de l’Inquisition, de Giordano Bruno et de Galilée, pendant laquelle Desc
8517 e la science et l’Église, l’ère de l’Inquisition, de Giordano Bruno et de Galilée, pendant laquelle Descartes devait surve
8518 ise, l’ère de l’Inquisition, de Giordano Bruno et de Galilée, pendant laquelle Descartes devait surveiller ses propos et m
8519 surveiller ses propos et même conserver certains de ses manuscrits. Les erreurs ne furent d’ailleurs pas toutes du même c
8520 côté. Lorsque, au xixe siècle, un certain nombre d’ inventions spectaculaires (la vapeur, le gaz, l’électricité, le téléph
8521 èrent en croyance ; la « science » menaçait alors d’ envahir le domaine de la religion en tenant aussi peu compte de la réa
8522 a « science » menaçait alors d’envahir le domaine de la religion en tenant aussi peu compte de la réalité foncière des cho
8523 domaine de la religion en tenant aussi peu compte de la réalité foncière des choses que la religion l’avait fait auparavan
8524 fait auparavant lorsqu’elle avait envahi le champ de la science. Cet épisode se termina grâce à une compréhension plus cla
8525 grâce à une compréhension plus claire des limites de la connaissance. Peu à peu, les deux domaines furent mieux délimités
8526 s. La tradition socratique ne viola plus le seuil de la révélation ; la tradition chrétienne accepta pour les choses de la
8527 ; la tradition chrétienne accepta pour les choses de la nature les méthodes et les principes de la tradition socratique. L
8528 choses de la nature les méthodes et les principes de la tradition socratique. La tradition socratique a fortement agi sur
8529 cratique a fortement agi sur le côté intellectuel de l’Église et a contribué à doter la religion chrétienne d’un système c
8530 ise et a contribué à doter la religion chrétienne d’ un système clair et solide de pensée, sous l’impulsion de saint Thomas
8531 religion chrétienne d’un système clair et solide de pensée, sous l’impulsion de saint Thomas d’Aquin. Cela revint à europ
8532 stème clair et solide de pensée, sous l’impulsion de saint Thomas d’Aquin. Cela revint à européaniser une religion provena
8533 Cela revint à européaniser une religion provenant d’ Asie Mineure. Dès lors, la religion non seulement dominera le cœur des
8534 ondant son système intellectuel sur les principes de Socrate. À son tour, le christianisme pose des limites humaines à la
8535 se des limites humaines à la neutralité inhumaine de la recherche socratique. Instruisons-nous, bien entendu, par tous les
8536 s n’oublions jamais que nous n’avons pas le droit de faire d’un être humain un simple outil, sans son consentement. Les en
8537 ons jamais que nous n’avons pas le droit de faire d’ un être humain un simple outil, sans son consentement. Les enquêtes fa
8538 onsentement. Les enquêtes faites par les médecins de Goering sur des prisonniers des camps de concentration pour découvrir
8539 médecins de Goering sur des prisonniers des camps de concentration pour découvrir la limite de la résistance humaine étaie
8540 s camps de concentration pour découvrir la limite de la résistance humaine étaient socratiques, mais n’étaient pas chrétie
8541 us les Européens du xxe siècle ? Depuis un tiers de siècle, l’Europe intellectuelle — précédant l’Europe politique, donc
8542 e, donc la presse, qui fait l’opinion — n’a cessé de s’interroger sur ses vrais buts, sur ceux qu’elle peut et doit donner
8543 raient au monde et à l’humanité, si l’Europe tout d’ un coup venait à disparaître, engloutie par une catastrophe dont les c
8544 ’elles traduisent fidèlement ce que l’Europe veut d’ elle-même par ses meilleurs esprits. (Quant aux répétitions inévitable
8545 leurs esprits. (Quant aux répétitions inévitables de certains thèmes — celui de la liberté ou celui du refus — observons q
8546 épétitions inévitables de certains thèmes — celui de la liberté ou celui du refus — observons que leur fréquence est signi
8547 es différencient ne le sont pas moins.) Fondateur de la phénoménologie, maître de Heidegger et de la plupart des philosoph
8548 teur de la phénoménologie, maître de Heidegger et de la plupart des philosophes qui comptent aujourd’hui, Edmund Husserl (
8549 , pour l’esprit ? » Et il répond : c’est l’esprit de la Philosophie, née de la Grèce : « La forme spirituelle de l’Europe
8550 il répond : c’est l’esprit de la Philosophie, née de la Grèce : « La forme spirituelle de l’Europe », qu’est-ce à dire ?
8551 sophie, née de la Grèce : « La forme spirituelle de l’Europe », qu’est-ce à dire ? C’est l’idée philosophique immanente à
8552 C’est l’idée philosophique immanente à l’histoire de l’Europe, ou ce qui revient au même, sa téléologie immanente, qui se
8553 logie immanente, qui se manifeste par l’irruption d’ une époque nouvelle de l’humanité, l’époque de l’humanité qui désormai
8554 e manifeste par l’irruption d’une époque nouvelle de l’humanité, l’époque de l’humanité qui désormais entend vivre et peut
8555 ion d’une époque nouvelle de l’humanité, l’époque de l’humanité qui désormais entend vivre et peut vivre en configurant li
8556 rement son existence, sa vie historique, à l’aide d’ idées rationnelles et pour des tâches infinies […] L’Europe de l’espri
8557 onnelles et pour des tâches infinies […] L’Europe de l’esprit a son lieu de naissance. Et j’entends moins par là un lieu g
8558 ches infinies […] L’Europe de l’esprit a son lieu de naissance. Et j’entends moins par là un lieu géographique situé dans
8559 ion ou dans certains individus et groupes humains de cette nation. C’est l’antique nation grecque des viie et vie siècle
8560 C. En son sein se manifeste une attitude nouvelle de l’individu face au monde environnant. Et à la faveur de cette disposi
8561 ndividu face au monde environnant. Et à la faveur de cette disposition s’accomplit la percée d’une nouvelle formation spir
8562 faveur de cette disposition s’accomplit la percée d’ une nouvelle formation spirituelle, qui se développe rapidement en une
8563 ituelle, qui se développe rapidement en une forme de culture cohérente et systématique : les Grecs la nommèrent philosophi
8564 cs la nommèrent philosophie… Dans cette irruption de la philosophie, entraînant avec elle toutes les sciences, je vois, si
8565 adoxal que cela paraisse, le phénomène primordial de l’Europe de l’esprit. On objectera tout de suite que la philosophie,
8566 ela paraisse, le phénomène primordial de l’Europe de l’esprit. On objectera tout de suite que la philosophie, la science d
8567 la science des Grecs, n’est rien qui les désigne d’ une manière spécifique ni qui soit apparu pour la première fois dans l
8568 avec eux. Eux-mêmes n’ont-ils pas parlé des sages de l’Égypte, de Babylone, etc., et n’ont-ils pas reçu leurs enseignement
8569 -mêmes n’ont-ils pas parlé des sages de l’Égypte, de Babylone, etc., et n’ont-ils pas reçu leurs enseignements ? Nous poss
8570 eignements ? Nous possédons aujourd’hui une masse de travaux sur les philosophies indiennes et chinoises, qui mettent ces
8571 e des configurations historiques variées relevant d’ une seule et même conception de la culture. Naturellement, tout élémen
8572 s variées relevant d’une seule et même conception de la culture. Naturellement, tout élément commun ne fait pas défaut. Ce
8573 r sur les différences tout à fait essentielles et de principe. Ce n’est en effet que chez les Grecs que nous trouvons cet
8574 des vérités universelles plutôt que des recettes d’ action : Ce sont des hommes dont l’effort se porte sur la theoria et
8575 dont l’effort se porte sur la theoria et sur rien d’ autre qu’elle, et qui ne cherchent pas individuellement mais ensemble
8576 e et les uns pour les autres, dans une communauté de travail interpersonnelle dont la croissance et le constant perfection
8577 t et que les résultats acquis par des générations de chercheurs se suivent, conduisent enfin à la volonté d’assumer une tâ
8578 rcheurs se suivent, conduisent enfin à la volonté d’ assumer une tâche infinie et générale. L’attitude théorique prend chez
8579 chez les Grecs son origine historique. La « crise de l’existence européenne » dont on parle tant et qui se manifeste par d
8580 enne » dont on parle tant et qui se manifeste par de nombreux symptômes de dévitalisation n’est pas un sombre destin, ni u
8581 ant et qui se manifeste par de nombreux symptômes de dévitalisation n’est pas un sombre destin, ni une impénétrable fatali
8582 ompréhensible si on la replace sur l’arrière-plan de la téléologie de l’histoire européenne, philosophiquement interprétab
8583 on la replace sur l’arrière-plan de la téléologie de l’histoire européenne, philosophiquement interprétable. La condition
8584 ne, philosophiquement interprétable. La condition d’ une telle compréhension étant d’ailleurs de saisir d’abord le phénomèn
8585 dition d’une telle compréhension étant d’ailleurs de saisir d’abord le phénomène « Europe » dans le noyau central de son e
8586 ord le phénomène « Europe » dans le noyau central de son existence. Pour concevoir tout ce que la « crise » actuelle à d’i
8587 our concevoir tout ce que la « crise » actuelle à d’ inessentiel, il s’agirait d’élaborer le concept d’Europe en tant que t
8588 « crise » actuelle à d’inessentiel, il s’agirait d’ élaborer le concept d’Europe en tant que téléologie historique de buts
8589 d’inessentiel, il s’agirait d’élaborer le concept d’ Europe en tant que téléologie historique de buts rationnels infinis. I
8590 oncept d’Europe en tant que téléologie historique de buts rationnels infinis. Il s’agit de montrer comment le « monde » eu
8591 historique de buts rationnels infinis. Il s’agit de montrer comment le « monde » européen est né d’idées rationnelles, c’
8592 t de montrer comment le « monde » européen est né d’ idées rationnelles, c’est-à-dire de l’esprit de la philosophie. La « c
8593 uropéen est né d’idées rationnelles, c’est-à-dire de l’esprit de la philosophie. La « crise » alors pourrait être claireme
8594 né d’idées rationnelles, c’est-à-dire de l’esprit de la philosophie. La « crise » alors pourrait être clairement interprét
8595 le naturalisme et dans l’objectivisme. … La crise de l’existence européenne n’a que deux issues possibles : ou la décadenc
8596 e n’a que deux issues possibles : ou la décadence de l’Europe devenant étrangère à son propre sens rationnel de la vie, la
8597 pe devenant étrangère à son propre sens rationnel de la vie, la chute dans la haine contre l’esprit et la barbarie ; ou la
8598 ontre l’esprit et la barbarie ; ou la renaissance de l’Europe dans l’esprit de la philosophie, surmontant définitivement l
8599 rie ; ou la renaissance de l’Europe dans l’esprit de la philosophie, surmontant définitivement le naturalisme par l’héroïs
8600 tant définitivement le naturalisme par l’héroïsme de la raison. Le plus grand péril de l’Europe réside dans la fatigue. Si
8601 par l’héroïsme de la raison. Le plus grand péril de l’Europe réside dans la fatigue. Si nous combattons ce danger des dan
8602 pas devant les tâches infinies, alors, du bûcher de l’incroyance, du feu couvant de la désespérance en la mission humaine
8603 alors, du bûcher de l’incroyance, du feu couvant de la désespérance en la mission humaine de l’Occident, des cendres de l
8604 couvant de la désespérance en la mission humaine de l’Occident, des cendres de la grande fatigue, renaîtra le phénix d’un
8605 en la mission humaine de l’Occident, des cendres de la grande fatigue, renaîtra le phénix d’une intériorité et d’une spir
8606 cendres de la grande fatigue, renaîtra le phénix d’ une intériorité et d’une spiritualité nouvelles, gages d’un grand et l
8607 fatigue, renaîtra le phénix d’une intériorité et d’ une spiritualité nouvelles, gages d’un grand et lointain avenir de l’h
8608 ntériorité et d’une spiritualité nouvelles, gages d’ un grand et lointain avenir de l’humanité. Car l’esprit seul est immor
8609 té nouvelles, gages d’un grand et lointain avenir de l’humanité. Car l’esprit seul est immortel.295 Un autre « bon Europ
8610 Européen », qui fut longtemps le père autoritaire de la pensée des libéraux, Benedetto Croce (1866-1952), tient que l’hist
8611 ire européenne se confond avec celle des concepts de liberté et d’humanité : Parce que c’est là le seul idéal qui ait la
8612 se confond avec celle des concepts de liberté et d’ humanité : Parce que c’est là le seul idéal qui ait la solidité qu’eu
8613  : qu’elle a l’éternité… Elle demeure dans nombre de nobles intelligences de toutes les parties du monde, qui dispersées e
8614 Elle demeure dans nombre de nobles intelligences de toutes les parties du monde, qui dispersées et isolées, réduites à un
8615 , qui dispersées et isolées, réduites à une sorte d’ aristocratique, mais petite « respublica literaria », lui restent malg
8616 a », lui restent malgré tout fidèles, l’entourent d’ un respect plus grand et l’accompagnent d’un plus ardent amour qu’au t
8617 tourent d’un respect plus grand et l’accompagnent d’ un plus ardent amour qu’au temps où il n’y avait personne pour l’offen
8618 trise, au temps où le vulgaire se pressait autour d’ elle en acclamant son nom et par là même en le contaminant d’une vulga
8619 cclamant son nom et par là même en le contaminant d’ une vulgarité dont il s’est maintenant dégagé. Non seulement la libert
8620 ement elle existe, et résiste dans l’organisation de beaucoup des plus grands États, dans les institutions et dans les usa
8621 s la pensée, qui sollicitent maintenant les âmes, d’ une trêve et d’une réduction des armements, d’une paix et d’une allian
8622 i sollicitent maintenant les âmes, d’une trêve et d’ une réduction des armements, d’une paix et d’une alliance entre les Ét
8623 es, d’une trêve et d’une réduction des armements, d’ une paix et d’une alliance entre les États de l’Europe, d’une concorde
8624 e et d’une réduction des armements, d’une paix et d’ une alliance entre les États de l’Europe, d’une concorde d’intentions
8625 ix et d’une alliance entre les États de l’Europe, d’ une concorde d’intentions et d’efforts entre les peuples de la même Eu
8626 iance entre les États de l’Europe, d’une concorde d’ intentions et d’efforts entre les peuples de la même Europe, pour sauv
8627 États de l’Europe, d’une concorde d’intentions et d’ efforts entre les peuples de la même Europe, pour sauver dans le monde
8628 corde d’intentions et d’efforts entre les peuples de la même Europe, pour sauver dans le monde et pour le bien du monde, s
8629 et politique, du moins leur séculaire suprématie de créateurs et de promoteurs de civilisation, les aptitudes qu’ils ont
8630 u moins leur séculaire suprématie de créateurs et de promoteurs de civilisation, les aptitudes qu’ils ont acquises pour ce
8631 éculaire suprématie de créateurs et de promoteurs de civilisation, les aptitudes qu’ils ont acquises pour cette œuvre ince
8632 pas perdu et dissipé et qui même gagne du terrain d’ année en année et convertisse à lui les esprits qui y répugnaient ou q
8633 déreront peut-être comme la réduction à l’absurde de tous les nationalismes — si elle a aigri certains rapports entre les
8634 entre les États à cause de l’inique et sot traité de paix qui l’a close, a du moins établi une conscience commune des peup
8635 s maintenant l’on assiste dans toutes les parties de l’Europe à la germination d’une nouvelle conscience, d’une nouvelle n
8636 s toutes les parties de l’Europe à la germination d’ une nouvelle conscience, d’une nouvelle nationalité (parce que, comme
8637 urope à la germination d’une nouvelle conscience, d’ une nouvelle nationalité (parce que, comme nous l’avons vu déjà, les n
8638 e sont pas des données naturelles, mais des états de conscience et des formations historiques). Et de la même manière dont
8639 de conscience et des formations historiques). Et de la même manière dont, voici soixante-dix ans, un Napolitain de l’anti
8640 nière dont, voici soixante-dix ans, un Napolitain de l’antique royaume de Naples et un Piémontais du royaume subalpin se f
8641 xante-dix ans, un Napolitain de l’antique royaume de Naples et un Piémontais du royaume subalpin se firent Italiens sans r
8642 Italiens et tous les autres se hausseront au rang d’ Européens, tourneront leurs pensées vers l’Europe et sentiront leurs c
8643 rand libéral lui aussi, elle est « l’essence même de la vie ». Elle ne serait pas une forme décisive de l’existence si ell
8644 e la vie ». Elle ne serait pas une forme décisive de l’existence si elle n’était pas liée à cette autre valeur qu’a toujou
8645 nt à la qualité ; elle comprend la valeur suprême de l’inutile… Pour nous, Européens, la vie est un processus créateur qui
8646 us créateur qui se poursuit avec chaque pulsation de chaque individu, grâce à sa liberté de décider quelle combinaison d’é
8647 pulsation de chaque individu, grâce à sa liberté de décider quelle combinaison d’événements possibles il choisit… Par sa
8648 grâce à sa liberté de décider quelle combinaison d’ événements possibles il choisit… Par sa libre décision, l’individu con
8649 ions. La première, c’est que, lorsqu’il est libre de choisir, chacun choisira ce qu’il y a de mieux, de sorte que, dans l’
8650 st libre de choisir, chacun choisira ce qu’il y a de mieux, de sorte que, dans l’ensemble, grâce à l’intégration de tous c
8651 sorte que, dans l’ensemble, grâce à l’intégration de tous ces choix heureux, le niveau mondial s’élèvera. Cette affirmatio
8652 ceci présuppose un principe général : l’existence d’ un critère de perfection acceptable pour tous. D’où provient cette pré
8653 se un principe général : l’existence d’un critère de perfection acceptable pour tous. D’où provient cette présupposition ?
8654 d’un critère de perfection acceptable pour tous. D’ où provient cette présupposition ? De l’intuition de « l’esprit humain
8655 e pour tous. D’où provient cette présupposition ? De l’intuition de « l’esprit humain » dans lequel sont intégrées toutes
8656 où provient cette présupposition ? De l’intuition de « l’esprit humain » dans lequel sont intégrées toutes les facultés hu
8657 humaines dans ce qu’elles ont de plus puissant et de meilleur. Nous pouvons imaginer cet « esprit humain » comme une sphèr
8658 n ; en mathématiques, Newton et Leibniz, et ainsi de suite. Nous admettons instinctivement que chaque individu, à l’intéri
8659 dimensions pitoyables et menues, mais susceptible de croître. Les degrés que nous observons dans cette croissance et dans
8660 s en la qualité. La qualité est aussi inséparable de l’individualisme que la liberté. Moyennant le processus créateur de l
8661 e que la liberté. Moyennant le processus créateur de liberté, l’individu produit la qualité, par une accumulation de diver
8662 individu produit la qualité, par une accumulation de diversités. La diversité, la qualité, la distinction, sont dès lors l
8663 distinction, sont dès lors les aspects essentiels de la vie européenne. Elles expliquent l’abondance, la variété et la ric
8664 nt l’abondance, la variété et la richesse humaine de nombreux types d’Européens, depuis les Irlandais jusqu’aux Grecs et d
8665 variété et la richesse humaine de nombreux types d’ Européens, depuis les Irlandais jusqu’aux Grecs et des Portugais aux F
8666 Portugais aux Finnois. Il est exact que certains de ces mots sont parfois devenus mesquins et superficiels ; à la fin du
8667 perficiels ; à la fin du xviiie siècle, un homme de qualité n’était souvent qu’un benêt, et au xxe siècle, un homme de d
8668 souvent qu’un benêt, et au xxe siècle, un homme de distinction n’est souvent qu’un parasite sans grâce. Mais, malgré ces
8669 te sans grâce. Mais, malgré ces torsions frivoles de leur sens primitif, la distinction et la qualité restent néanmoins le
8670 stent néanmoins les caractéristiques essentielles de la vie européenne. Cela est surtout vrai pour la qualité, car la qual
8671 a qualité est pour nous Européens, l’essence même de la vie. Toute vie est qualitative et c’est pourquoi en Europe, nous d
8672 angers qui menacent notre vie, les deux antipodes de la qualité : la quantité et l’égalité. Notre répugnance pour ces deux
8673 dans mon verre »… La qualité, la variété, le coin de terre, la vigne, le cru, la saison, autant de concepts qui poussent c
8674 oin de terre, la vigne, le cru, la saison, autant de concepts qui poussent comme des champignons de choix à l’ombre du goû
8675 nt de concepts qui poussent comme des champignons de choix à l’ombre du goût, autant de formes de la vie européenne qui éc
8676 es champignons de choix à l’ombre du goût, autant de formes de la vie européenne qui échapperont toujours au cadre trop ri
8677 nons de choix à l’ombre du goût, autant de formes de la vie européenne qui échapperont toujours au cadre trop rigide des s
8678 sation. Elles demeurent elles-mêmes et n’essaient de s’améliorer que comme telles. Elles sont à la fois les fleurs et les
8679 Elles sont à la fois les fleurs et les jardiniers de la forme. La forme est une autre manifestation spécifique de l’esprit
8680 . La forme est une autre manifestation spécifique de l’esprit européen. Rien ne serait plus erroné que de qualifier la for
8681 l’esprit européen. Rien ne serait plus erroné que de qualifier la forme de superficielle. Quoique d’apparence extérieure,
8682 n ne serait plus erroné que de qualifier la forme de superficielle. Quoique d’apparence extérieure, elle surgit en réalité
8683 e de qualifier la forme de superficielle. Quoique d’ apparence extérieure, elle surgit en réalité des profondeurs des objet
8684 ondeurs des objets qu’elle façonne et fait partie de leur substance même. Le potier sait cela d’instinct. La civilisation,
8685 artie de leur substance même. Le potier sait cela d’ instinct. La civilisation, en particulier, est une question de forme…
8686 La civilisation, en particulier, est une question de forme… Souvent, une décision qui serait opportune et que la morale ne
8687 as prise par l’Européen, parce qu’elle manquerait de forme. Le refus d’accorder la première place à l’opportunité, démontr
8688 péen, parce qu’elle manquerait de forme. Le refus d’ accorder la première place à l’opportunité, démontre le caractère non
8689 opportunité, démontre le caractère non utilitaire de l’esprit européen. L’utilitarisme est le signe d’une maturité insuffi
8690 de l’esprit européen. L’utilitarisme est le signe d’ une maturité insuffisante. C’est le symptôme clé d’une culture restée
8691 ’une maturité insuffisante. C’est le symptôme clé d’ une culture restée en arrêt. Car, lorsque nous exécutons un acte utile
8692 parce qu’il sert un troisième but utile, et ainsi de suite. Mais, quelle serait l’utilité de tout cela, si, à la fin de ce
8693 et ainsi de suite. Mais, quelle serait l’utilité de tout cela, si, à la fin de cette chaîne d’utilité ne brillait pas l’é
8694 uelle serait l’utilité de tout cela, si, à la fin de cette chaîne d’utilité ne brillait pas l’étoile glorieuse de l’inutil
8695 tilité de tout cela, si, à la fin de cette chaîne d’ utilité ne brillait pas l’étoile glorieuse de l’inutile ? Les hommes d
8696 aîne d’utilité ne brillait pas l’étoile glorieuse de l’inutile ? Les hommes demeurent esclaves aussi longtemps qu’ils se l
8697 sque leurs actes quotidiens et utiles s’inspirent d’ un esprit de haute inutilité qui donne à la vie son vrai sens, sa poés
8698 ctes quotidiens et utiles s’inspirent d’un esprit de haute inutilité qui donne à la vie son vrai sens, sa poésie, son côté
8699 eur éternelle.297 Et voilà pour la qualité, but d’ une culture, mais qu’en est-il de sa puissance ? Elle dépend, en Europ
8700 la qualité, but d’une culture, mais qu’en est-il de sa puissance ? Elle dépend, en Europe, d’un heureux équilibre de l’es
8701 est-il de sa puissance ? Elle dépend, en Europe, d’ un heureux équilibre de l’esprit et de la volonté : Lorsqu’on vient d
8702  ? Elle dépend, en Europe, d’un heureux équilibre de l’esprit et de la volonté : Lorsqu’on vient de l’Ouest, on est encli
8703 en Europe, d’un heureux équilibre de l’esprit et de la volonté : Lorsqu’on vient de l’Ouest, on est enclin à considérer
8704 ce sur la volonté, la caractéristique essentielle de l’Europe est un équilibre entre la volonté et l’esprit. C’est cet heu
8705 prit et la volonté, qui est probablement la cause de cette intuition que nous avons de l’unité des Européens. Tout cela es
8706 lement la cause de cette intuition que nous avons de l’unité des Européens. Tout cela est évidemment très relatif et très
8707 e et ne doit pas être compris comme si ce mélange d’ esprit et de volonté était un don dénié aux personnes nées dans tout a
8708 pas être compris comme si ce mélange d’esprit et de volonté était un don dénié aux personnes nées dans tout autre Contine
8709 caractérise les actions et les œuvres des hommes d’ Europe est précisément ce développement harmonieux de l’esprit et de l
8710 urope est précisément ce développement harmonieux de l’esprit et de la volonté. L’esprit et la volonté sont les facultés l
8711 sément ce développement harmonieux de l’esprit et de la volonté. L’esprit et la volonté sont les facultés les plus individ
8712 olonté sont les facultés les plus individualisées de l’homme… Notre continent est sans conteste le plus individualiste de
8713 ontinent est sans conteste le plus individualiste de tous. En Asie, l’individu commence tout juste à compter ; en Amérique
8714 au moule sont plus loin de l’esprit européen que de celui de n’importe quel autre continent. En Europe, l’individu est ro
8715 sont plus loin de l’esprit européen que de celui de n’importe quel autre continent. En Europe, l’individu est roi… Ceci e
8716 individu est roi… Ceci explique la qualité active de l’esprit européen. Il ne se borne pas à observer l’objet, mais va dro
8717 et en prend possession — il s’en saisit. L’esprit de l’Européen est « acquisitif ». Pour lui, le savoir est un moyen de pr
8718 « acquisitif ». Pour lui, le savoir est un moyen de prendre possession de la nature ; attitude qui s’insère entre celle d
8719 lui, le savoir est un moyen de prendre possession de la nature ; attitude qui s’insère entre celle de l’Américain pour qui
8720 de la nature ; attitude qui s’insère entre celle de l’Américain pour qui le savoir est un outil pour l’action, et celle d
8721 ui le savoir est un outil pour l’action, et celle de l’Hindou, pour qui il est un moyen pour se libérer de lui-même. C’est
8722 ’Hindou, pour qui il est un moyen pour se libérer de lui-même. C’est donc peut-être en Europe que l’esprit et la volonté s
8723 à un tel degré qu’ils sont même inséparables l’un de l’autre. Ceci détermine le rythme particulier de toute la vie europée
8724 de l’autre. Ceci détermine le rythme particulier de toute la vie européenne, dans laquelle la volonté l’emportant sur l’e
8725 ’emportant sur l’esprit, va droit au but au cours d’ une première phase opiniâtre, délibérée et ultraindividualiste, suivie
8726 iniâtre, délibérée et ultraindividualiste, suivie d’ une seconde phase où l’esprit l’emportant sur la volonté, essaie de me
8727 se où l’esprit l’emportant sur la volonté, essaie de mettre de l’ordre dans ce chaos initial ; tandis qu’enfin une troisiè
8728 prit l’emportant sur la volonté, essaie de mettre de l’ordre dans ce chaos initial ; tandis qu’enfin une troisième phase,
8729 rythme à trois temps est caractéristique du genre de vie européen, dans le domaine scientifique aussi bien que politique,
8730 scientifique aussi bien que politique, dans celui de l’évolution juridique comme dans celui de l’expansion mondiale.298
8731 s celui de l’évolution juridique comme dans celui de l’expansion mondiale.298 « Pour construire le schéma de ce qui appa
8732 ansion mondiale.298 « Pour construire le schéma de ce qui appartient en propre à l’Europe », Karl Jaspers a choisi trois
8733 liberté et l’histoire, il nous dit quelque chose de neuf : c’est que l’une ne serait pas concevable sans l’autre : Le co
8734 serait pas concevable sans l’autre : Le contenu de la liberté se révèle par deux phénomènes européens fondamentaux. Ce s
8735 la vie tendue entre deux pôles : Pour toute prise de position, l’Europe a elle-même développé la position inverse. Elle ne
8736 ne possède peut-être en propre que cette capacité d’ être toute chose. C’est ce qui la rend apte non seulement à concevoir
8737 encore à se l’assimiler et à en faire un élément de sa propre essence. L’Europe connaît la majesté des vastes structures
8738 dans la négation nihiliste. Elle favorise l’idée d’ autorité, dans sa portée chrétienne et universelle, comme aussi celle
8739 rtée chrétienne et universelle, comme aussi celle de libre recherche. Elle édifie les grands systèmes de la philosophie, e
8740 libre recherche. Elle édifie les grands systèmes de la philosophie, et elle les laisse abattre par des prophètes proclama
8741 proclamant la vérité. Elle vit avec la conscience de la totalité politique, et en même temps, de ce qu’il y a de plus inti
8742 ience de la totalité politique, et en même temps, de ce qu’il y a de plus intime dans le domaine personnel et privé. Cette
8743 et privé. Cette réalité foncièrement dialectique de l’Europe s’enracine dans ses traditions les plus reculées : la Bible,
8744 itions les plus reculées : la Bible, ce fondement de la vie européenne, cache déjà en elle, d’une façon unique, la tension
8745 ndement de la vie européenne, cache déjà en elle, d’ une façon unique, la tension entre les pôles. Elle est le livre sacré
8746 permit à toutes les possibilités contradictoires de s’épanouir avec sa bénédiction. Puis on trouve à la base de l’Europe
8747 uir avec sa bénédiction. Puis on trouve à la base de l’Europe la grande antithèse de l’antiquité et du christianisme ; tou
8748 trouve à la base de l’Europe la grande antithèse de l’antiquité et du christianisme ; tous deux se combattent et s’unisse
8749 sont européennes aussi, les oppositions fécondes de l’Église et de l’État, des nations et de l’Empire, des nations romane
8750 es aussi, les oppositions fécondes de l’Église et de l’État, des nations et de l’Empire, des nations romanes et germanique
8751 fécondes de l’Église et de l’État, des nations et de l’Empire, des nations romanes et germaniques, du catholicisme et du p
8752 ermaniques, du catholicisme et du protestantisme, de la théologie et de la philosophie, — aujourd’hui de la Russie et de l
8753 olicisme et du protestantisme, de la théologie et de la philosophie, — aujourd’hui de la Russie et de l’Amérique. L’Europe
8754 la théologie et de la philosophie, — aujourd’hui de la Russie et de l’Amérique. L’Europe lie ce qu’en même temps elle opp
8755 de la philosophie, — aujourd’hui de la Russie et de l’Amérique. L’Europe lie ce qu’en même temps elle oppose à l’extrême 
8756 aise, soit en s’installant dans un ordre oublieux de ses limites, soit en se portant à des extrémités qui excluent tout or
8757 de ses possibilités et qu’à travers le changement de situations, puisant à sa source, elle déploie sans cesse à nouveau, i
8758 ne sommes jamais sûrs du vrai dans sa totalité et de façon définitive. Notre liberté reste relative à autre chose, elle n’
8759 Subjectivement, comme individu, il a l’expérience de l’origine de son être : je ne suis pas libre par moi-même ; quand je
8760 t, comme individu, il a l’expérience de l’origine de son être : je ne suis pas libre par moi-même ; quand je me sais vraim
8761 nigmatique qui correspond à l’expérience possible d’ être pour soi-même un don. L’existence que nous pouvons être n’est rée
8762 qui nous fait être. Lorsque l’existence s’assure d’ elle-même, elle s’assure du même coup de la transcendance. Mais object
8763 s’assure d’elle-même, elle s’assure du même coup de la transcendance. Mais objectivement, on peut dire de la liberté ce q
8764 a transcendance. Mais objectivement, on peut dire de la liberté ce qui suit : la liberté a besoin de la liberté de tous le
8765 e de la liberté ce qui suit : la liberté a besoin de la liberté de tous les autres ; c’est pourquoi la liberté politique n
8766 é ce qui suit : la liberté a besoin de la liberté de tous les autres ; c’est pourquoi la liberté politique ne saurait se r
8767 té politique ne saurait se réaliser sous la forme d’ une stabilité sûre des institutions. La liberté a besoin de l’achèveme
8768 bilité sûre des institutions. La liberté a besoin de l’achèvement du vrai ; mais la vérité est multiple et, sous toutes se
8769 uvement ; la connaissance scientifique échoue sur d’ insurmontables antinomies et reste limitée au fini, aux apparences. To
8770 é à l’échec. Mais l’échec lui-même, pris dans une de ces tensions entre pôles opposés propres à l’Europe, y est devenu sym
8771 qu’elle exista en Grèce, connaît la signification de l’échec même et le désir de l’échec authentique ; et la croix chrétie
8772 naît la signification de l’échec même et le désir de l’échec authentique ; et la croix chrétienne, qui permet de vaincre l
8773 authentique ; et la croix chrétienne, qui permet de vaincre la conscience tragique ou de l’éviter dès le début, donne sa
8774 , qui permet de vaincre la conscience tragique ou de l’éviter dès le début, donne sa signification à la vie dans une récon
8775 dans une réconciliation transcendante. La liberté de l’Européen tend aux limites extrêmes, elle cherche la profondeur des
8776 citée, à travers le nihilisme vers une conscience de soi fondée ; il vit dans l’angoisse qui est l’aiguillon de sa bonne f
8777 ndée ; il vit dans l’angoisse qui est l’aiguillon de sa bonne foi. Dans la liberté s’enracinent deux autres phénomènes eur
8778 deux autres phénomènes européens : la conscience de l’histoire et la volonté de science. Ce n’est qu’en Occident que même
8779 péens : la conscience de l’histoire et la volonté de science. Ce n’est qu’en Occident que même dans la conscience individu
8780 res. Liberté sociale, liberté religieuse, liberté de la personnalité se conditionnent l’une l’autre. Mais comme la liberté
8781 ne, l’histoire est indispensable pour la conquête de la liberté. Ainsi le besoin de liberté produit l’histoire. Notre hist
8782 e pour la conquête de la liberté. Ainsi le besoin de liberté produit l’histoire. Notre histoire n’est pas faite de simple
8783 roduit l’histoire. Notre histoire n’est pas faite de simple changement, de la chute et du rétablissement d’une idée éterne
8784 re histoire n’est pas faite de simple changement, de la chute et du rétablissement d’une idée éternelle ; elle ne raconte
8785 mple changement, de la chute et du rétablissement d’ une idée éternelle ; elle ne raconte pas comment se réalise une situat
8786 e ne raconte pas comment se réalise une situation d’ ensemble conçue comme définitive, mais une succession significative de
8787 mme définitive, mais une succession significative de faits dérivant les uns des autres, succession qui devient consciente
8788 uns des autres, succession qui devient consciente d’ elle-même en tant que lutte pour la liberté. L’histoire, dans ce sens,
8789 sente, comme partout dans le monde, sous l’aspect d’ un effort pour faire passer de force le malheur d’une forme dans une a
8790 onde, sous l’aspect d’un effort pour faire passer de force le malheur d’une forme dans une autre. La douleur devient le be
8791 d’un effort pour faire passer de force le malheur d’ une forme dans une autre. La douleur devient le berceau de l’homme qui
8792 rme dans une autre. La douleur devient le berceau de l’homme qui veut l’histoire. Seul l’homme qui s’expose intérieurement
8793 pas aveuglément détruire, s’il ne se contente pas d’ attendre « que ce soit passé » pour vivre ensuite comme si rien ne s’é
8794 ète. … C’est en Occident seulement que l’exigence de la liberté a mené l’histoire en tant que recherche de la liberté poli
8795 a liberté a mené l’histoire en tant que recherche de la liberté politique.299 Quant à la science, nous l’avons vu, Jaspe
8796 ns vu, Jaspers lui donne pour origines le respect de la vérité et le sens critique « impitoyable », valeurs chrétiennes. O
8797 st le défi aux ordres sacrés, plus que le respect de la création divine ou le désir de servir l’homme en le libérant de la
8798 que le respect de la création divine ou le désir de servir l’homme en le libérant de la Nature, qui semble, aux yeux de l
8799 vine ou le désir de servir l’homme en le libérant de la Nature, qui semble, aux yeux de l’Asie traditionnelle, avoir produ
8800 it notre technique. On peut juger qu’il s’agit là d’ une illusion, mais elle s’explique : elle était même inévitable. Il y
8801 que : elle était même inévitable. Il y a, au cœur de la civilisation européenne, un refus du destin qui paraît un défi à c
8802 pés. Il y a des sociétés qui, à travers les aléas de leur histoire, ont cherché à perpétuer un statu quo, sans tenter des
8803 millénaire reposant sur l’ordre du monde, modèle de l’ordre social, offrit pendant des siècles l’image d’un semblable imm
8804 ’ordre social, offrit pendant des siècles l’image d’ un semblable immobilisme. Il y a des civilisations caractérisées par u
8805 sion mystique fondée sur le détachement des biens de ce monde, l’illusion de l’individualité, l’effort pour échapper par l
8806 le détachement des biens de ce monde, l’illusion de l’individualité, l’effort pour échapper par le nirvana à la roue des
8807 s le grand Tout : telles furent les civilisations de l’Inde. Ce qui caractérise la civilisation occidentale, c’est qu’elle
8808 menaçaient. Elle les a relevés et s’est efforcée de les surmonter.300 Et pourtant, la technique européenne n’est pas né
8809 t pourtant, la technique européenne n’est pas née d’ un élan prométhéen. Après tout, Prométhée est un mythe grec, et ce n’e
8810 ous vient la technique. Platon : Entre l’exercice d’ une profession mécanique et le devoir des citoyens, il y a incompatibi
8811 ravail manuel : Jésus charpentier, Paul fabricant de tentes, « confréries de liberté », guildes et corporations du Moyen Â
8812 arpentier, Paul fabricant de tentes, « confréries de liberté », guildes et corporations du Moyen Âge, cathédrales… Et voic
8813 n’est plus considérée comme une pure spéculation de l’esprit, à la façon des Anciens, ni comme un simple divertissement d
8814 on des Anciens, ni comme un simple divertissement d’ homme de loisir ainsi qu’elle le sera pour les mondains. On lui demand
8815 nciens, ni comme un simple divertissement d’homme de loisir ainsi qu’elle le sera pour les mondains. On lui demande d’être
8816 qu’elle le sera pour les mondains. On lui demande d’ être utile et pratique, de promouvoir les arts mécaniques, en vue de s
8817 ondains. On lui demande d’être utile et pratique, de promouvoir les arts mécaniques, en vue de soulager la peine des homme
8818 niques, en vue de soulager la peine des hommes et d’ améliorer leur condition. Les grands savants de la Renaissance, Léonar
8819 et d’améliorer leur condition. Les grands savants de la Renaissance, Léonard de Vinci, Tartaglia, Agricola, Galilée sont d
8820 s Discours admirables. Leone Alberti fait l’éloge de la Technique qui transforme, pour notre commodité, le visage de la te
8821 e qui transforme, pour notre commodité, le visage de la terre. Jérôme Cardan, au grand scandale d’un humaniste tel que Sca
8822 age de la terre. Jérôme Cardan, au grand scandale d’ un humaniste tel que Scaliger, classe Archimède, en raison de ses inve
8823 ison de ses inventions mécaniques, bien au-dessus d’ Aristote, dont le chancelier Bacon souhaiterait voir brûler tous les l
8824 les livres, « parce que Aristote a été incapable de produire des œuvres qui servissent au bien-être de l’homme ». « Ce n’
8825 e produire des œuvres qui servissent au bien-être de l’homme ». « Ce n’est proprement valoir rien que de n’être utile à pe
8826 l’homme ». « Ce n’est proprement valoir rien que de n’être utile à personne », proclame Descartes. À « cette philosophie
8827 ive qu’on enseigne dans les écoles », le Discours de la Méthode oppose « une pratique, par laquelle, connaissant la force
8828 aquelle, connaissant la force et l’action du feu, de l’eau, de l’air, des astres, des cieux et de tous les autres corps qu
8829 onnaissant la force et l’action du feu, de l’eau, de l’air, des astres, des cieux et de tous les autres corps qui nous env
8830 feu, de l’eau, de l’air, des astres, des cieux et de tous les autres corps qui nous environnent, aussi distinctement que n
8831 inctement que nous connaissons les divers métiers de nos artisans, nous les pourrions employer en même façon à tous les us
8832 et ainsi nous rendre comme maîtres et possesseurs de la nature ». C’est l’idée du Chancelier Bacon : on commande à la natu
8833 nature en obéissant à ses lois. Il ne suffit plus de connaître le monde ; il convient de le changer.301 On a reconnu dan
8834 e suffit plus de connaître le monde ; il convient de le changer.301 On a reconnu dans cette dernière phrase la « Deuxièm
8835 rnière phrase la « Deuxième thèse sur Feuerbach » de Karl Marx. Or le marxisme est postérieur au grand essor de la techniq
8836 arx. Or le marxisme est postérieur au grand essor de la technique européenne, et ne lui a rien apporté. En revanche, on co
8837 stes et par les héritiers mystiques du vieux rêve de l’alchimie : parfaire la Création de Dieu et coopérer à sa rédemption
8838 u vieux rêve de l’alchimie : parfaire la Création de Dieu et coopérer à sa rédemption. Mais d’où viennent encore un coup c
8839 réation de Dieu et coopérer à sa rédemption. Mais d’ où viennent encore un coup ces passions pratiquement conjuguées de la
8840 core un coup ces passions pratiquement conjuguées de la liberté, de la technique, et du défi aux ordres consacrés par l’us
8841 s passions pratiquement conjuguées de la liberté, de la technique, et du défi aux ordres consacrés par l’usage, non par la
8842 noncé à Lausanne lors de la Conférence européenne de la culture (1949), Carlo Schmid ramène toutes nos valeurs à ce refus
8843 mid ramène toutes nos valeurs à ce refus créateur de l’Europe : le refus de la fatalité : Mais qu’est-ce donc ce qui cara
8844 aleurs à ce refus créateur de l’Europe : le refus de la fatalité : Mais qu’est-ce donc ce qui caractérise l’Europe ? Quel
8845 ise l’Europe ? Quelle question, quelle complexité de réponses possibles ! Et cependant il existe certaines données qui nou
8846 t il existe certaines données qui nous permettent de pressentir de quel côté à peu près nous devrions chercher pour distin
8847 rtaines données qui nous permettent de pressentir de quel côté à peu près nous devrions chercher pour distinguer, ne fût-c
8848 hercher pour distinguer, ne fût-ce que les ombres de cette réalité que l’esclavage de Platon, enchaîné dans la Grotte, voi
8849 e que les ombres de cette réalité que l’esclavage de Platon, enchaîné dans la Grotte, voit remuer sur les parois. Il me se
8850 voir Prométhée qui, ayant formé l’homme du limon de la terre, déroba le feu du ciel pour animer sa créature et qui, par c
8851 fatalité. En effet, lutter contre tout ce qui n’a d’ autre dignité que celle qu’accorde la matérialité, se refuser à n’être
8852 ’accorde la matérialité, se refuser à n’être rien d’ autre qu’un élément passif et déterminé de l’ordre de la Création — ce
8853 re rien d’autre qu’un élément passif et déterminé de l’ordre de la Création — ceci me semble la vertu primordiale qui a fa
8854 utre qu’un élément passif et déterminé de l’ordre de la Création — ceci me semble la vertu primordiale qui a fait d’une pr
8855 — ceci me semble la vertu primordiale qui a fait d’ une presqu’île de l’Asie, l’Europe. Dante, l’Européen, le fait dire à
8856 la vertu primordiale qui a fait d’une presqu’île de l’Asie, l’Europe. Dante, l’Européen, le fait dire à Ulysse qui voulai
8857 ir del mondo esperto malgré l’interdiction sévère de dépasser le détroit de Gibraltar : O frati… Considerate la vostra se
8858 lgré l’interdiction sévère de dépasser le détroit de Gibraltar : O frati… Considerate la vostra semenza : fatti non foste
8859 conoscenza. Ceci est-il autre chose que le refus d’ être rien d’autre qu’une particule de la nature, une créature acceptan
8860 Ceci est-il autre chose que le refus d’être rien d’ autre qu’une particule de la nature, une créature acceptant le Paradis
8861 que le refus d’être rien d’autre qu’une particule de la nature, une créature acceptant le Paradis de la Fatalité ? Et cet
8862 e de la nature, une créature acceptant le Paradis de la Fatalité ? Et cet Ulysse du Dante, n’est-il pas le frère de Promét
8863 ateur, et non pas en vertu d’une délégation, mais de son plein droit ? De ceci, comme du besoin de subir sciemment le poid
8864 vertu d’une délégation, mais de son plein droit ? De ceci, comme du besoin de subir sciemment le poids de l’Histoire pour,
8865 ais de son plein droit ? De ceci, comme du besoin de subir sciemment le poids de l’Histoire pour, à chaque moment, secouer
8866 ceci, comme du besoin de subir sciemment le poids de l’Histoire pour, à chaque moment, secouer le joug du passé qu’elle a
8867 moment, secouer le joug du passé qu’elle a créé, de ce besoin de baser ses actions sur un perpétuel présent que, malgré s
8868 uer le joug du passé qu’elle a créé, de ce besoin de baser ses actions sur un perpétuel présent que, malgré sa connaissanc
8869 un perpétuel présent que, malgré sa connaissance de la relation des causes et des effets, il veut toujours charger de spo
8870 es causes et des effets, il veut toujours charger de spontanéité, l’homme d’Europe a tiré son bonheur et presque tous ses
8871 il veut toujours charger de spontanéité, l’homme d’ Europe a tiré son bonheur et presque tous ses malheurs. Dans les momen
8872 sque tous ses malheurs. Dans les moments fortunés de son histoire, il sut user de la mesure. Nous appelons ces moments heu
8873 les moments fortunés de son histoire, il sut user de la mesure. Nous appelons ces moments heureux les époques classiques.
8874 ureux les époques classiques. Prométhée est aussi d’ une façon mystérieuse Antée, fils de Neptune et de la Terre, qui pour
8875 hée est aussi d’une façon mystérieuse Antée, fils de Neptune et de la Terre, qui pour se régénérer et redoubler ses forces
8876 d’une façon mystérieuse Antée, fils de Neptune et de la Terre, qui pour se régénérer et redoubler ses forces recherche la
8877 rces recherche la Terre, la Nature — mais l’Homme d’ Europe ne s’abandonne pas à la Nature : il ne l’accepte dans tout son
8878 ée et dénombrée, et là, il n’y a pas en substance de différence entre Thalès et Anaxagore, la « decompositio » et « recomp
8879 naxagore, la « decompositio » et « recompositio » de Descartes et la nature « reproduite » au sens littéral du mot par Cla
8880 ues et qui pourtant ne font que recomposer la vie de l’âme humaine décomposée par l’esprit humain. (D’ailleurs, les romant
8881 ment l’Européen, en isolant la conscience humaine de ses rapports avec ce qui est en dehors du Moi, a permis à l’homme, no
8882 is à l’homme, noyé dans la collectivité et le jeu de ses contingences, de devenir un individu. Or la dignité de l’individu
8883 ns la collectivité et le jeu de ses contingences, de devenir un individu. Or la dignité de l’individu consiste justement e
8884 ntingences, de devenir un individu. Or la dignité de l’individu consiste justement en ce qu’il n’est plus permis à l’homme
8885 justement en ce qu’il n’est plus permis à l’homme de justifier ses actes par ce qui n’est que nature, histoire, société. I
8886 société. Il doit se justifier devant le tribunal de sa conscience et de la raison (qui, partout où elle se réfère à l’évi
8887 justifier devant le tribunal de sa conscience et de la raison (qui, partout où elle se réfère à l’évidence, n’est autre c
8888 ndons à la société qu’elle respecte les décisions de notre conscience à nous, nous sommes obligés de respecter la dignité
8889 s de notre conscience à nous, nous sommes obligés de respecter la dignité de la conscience de tout autre être humain. Voic
8890 nous, nous sommes obligés de respecter la dignité de la conscience de tout autre être humain. Voici l’une des raisons qui
8891 obligés de respecter la dignité de la conscience de tout autre être humain. Voici l’une des raisons qui nous ont contrain
8892 aie en elle-même et pour elle-même et non du fait d’ être approuvées par les doctrines de la tradition ou par l’âme collect
8893 t non du fait d’être approuvées par les doctrines de la tradition ou par l’âme collective. C’est ici que l’essor miraculeu
8894 ’âme collective. C’est ici que l’essor miraculeux de la pensée et de la science européennes — toutes les deux sorties du L
8895 C’est ici que l’essor miraculeux de la pensée et de la science européennes — toutes les deux sorties du Logos geomotretos
8896 es — toutes les deux sorties du Logos geomotretos de Platon — plonge l’une de ses racines les plus profondes. Et nous auri
8897 ies du Logos geomotretos de Platon — plonge l’une de ses racines les plus profondes. Et nous aurions passé sous silence un
8898 ons passé sous silence une des plus pures gloires de l’Europe si, dans cet ordre d’idées, nous avions oublié de nommer la
8899 plus pures gloires de l’Europe si, dans cet ordre d’ idées, nous avions oublié de nommer la musique. N’oublions pas non plu
8900 pe si, dans cet ordre d’idées, nous avions oublié de nommer la musique. N’oublions pas non plus que c’est bien l’homme d’E
8901 e. N’oublions pas non plus que c’est bien l’homme d’ Europe qui n’a pas voulu que l’existence matérielle et politique de l’
8902 pas voulu que l’existence matérielle et politique de l’homme ne soit que fonction des circonstances, et que c’est lui qui,
8903 rs marché droit sur tout ce qui entrave la marche de l’homme vers un avenir de plus en plus riche en liberté spirituelle,
8904 nt qui a fait germer partout sur terre la volonté de ne pas accepter la tyrannie des circonstances et du passé, la volonté
8905 yrannie des circonstances et du passé, la volonté de modifier les facteurs décisifs de notre existence temporelle jusque d
8906 ssé, la volonté de modifier les facteurs décisifs de notre existence temporelle jusque dans leur substance, afin de permet
8907 dans leur substance, afin de permettre à l’homme de sortir de l’aliénation dans laquelle la brutalité d’un mécanisme écon
8908 substance, afin de permettre à l’homme de sortir de l’aliénation dans laquelle la brutalité d’un mécanisme économique et
8909 sortir de l’aliénation dans laquelle la brutalité d’ un mécanisme économique et social a fait sombrer sa liberté de dispose
8910 me économique et social a fait sombrer sa liberté de disposer de lui-même. C’est en Europe que l’homme a refusé de tenir p
8911 e et social a fait sombrer sa liberté de disposer de lui-même. C’est en Europe que l’homme a refusé de tenir pour une loi
8912 de lui-même. C’est en Europe que l’homme a refusé de tenir pour une loi fatale la stabilité de l’ordre social, et c’est ic
8913 refusé de tenir pour une loi fatale la stabilité de l’ordre social, et c’est ici qu’à chaque époque, le tiers État de l’é
8914 l, et c’est ici qu’à chaque époque, le tiers État de l’époque a élevé les barricades de la liberté, de l’égalité et de la
8915 le tiers État de l’époque a élevé les barricades de la liberté, de l’égalité et de la justice. Néanmoins, cette liberté,
8916 de l’époque a élevé les barricades de la liberté, de l’égalité et de la justice. Néanmoins, cette liberté, cette égalité,
8917 evé les barricades de la liberté, de l’égalité et de la justice. Néanmoins, cette liberté, cette égalité, cette justice se
8918 tte justice se sont toujours réclamées des vertus de l’origine. En somme, ce que les peuples et les classes ont recherché
8919 us reconnaissons chez Socrate, dans la république de Cicéron, dans le agi et pati fortia de Tite Live, dans le pax et just
8920 république de Cicéron, dans le agi et pati fortia de Tite Live, dans le pax et justicia de saint Augustin, et dans la « De
8921 pati fortia de Tite Live, dans le pax et justicia de saint Augustin, et dans la « Declaration of Rights » de l’État de Vir
8922 nt Augustin, et dans la « Declaration of Rights » de l’État de Virginie — don précieux par lequel le Nouveau Monde a rendu
8923 ait pu lui prêter. Trois ans avant la conférence de Lausanne, les premières Rencontres internationales de Genève (septemb
8924 ausanne, les premières Rencontres internationales de Genève (septembre 1946), avaient posé d’une manière mémorable, devant
8925 tionales de Genève (septembre 1946), avaient posé d’ une manière mémorable, devant le grand public intellectuel du continen
8926 and public intellectuel du continent, le problème de « l’Esprit européen » dans le monde bouleversé de l’après-guerre. On
8927 de « l’Esprit européen » dans le monde bouleversé de l’après-guerre. On a pu lire plus haut des extraits de discours prono
8928 après-guerre. On a pu lire plus haut des extraits de discours prononcés à cette occasion par Julien Benda et par Karl Jasp
8929 haient à définir la conscience que l’Europe prend d’ elle-même et les valeurs de sa culture. Quant à Denis de Rougemont, il
8930 nce que l’Europe prend d’elle-même et les valeurs de sa culture. Quant à Denis de Rougemont, il tentait d’évaluer les chan
8931 a culture. Quant à Denis de Rougemont, il tentait d’ évaluer les chances du génie spécifique de l’Europe, on le comparant a
8932 tentait d’évaluer les chances du génie spécifique de l’Europe, on le comparant avec les idéaux des grands empires mondiaux
8933 et la foi au progrès… Avant cette guerre, le nom d’ Europe évoquait un foyer intense dont le rayonnement s’élargissait sur
8934 e nous semblait donc plus grande qu’elle n’était. D’ où l’effet de choc que produisit dans nos esprits, au lendemain de l’a
8935 it donc plus grande qu’elle n’était. D’où l’effet de choc que produisit dans nos esprits, au lendemain de l’autre guerre,
8936 choc que produisit dans nos esprits, au lendemain de l’autre guerre, la phrase fameuse de Valéry sur l’Europe « petit cap
8937 au lendemain de l’autre guerre, la phrase fameuse de Valéry sur l’Europe « petit cap de l’Asie ». Aujourd’hui l’Europe vue
8938 « petit cap de l’Asie ». Aujourd’hui l’Europe vue d’ Amérique, et j’imagine aussi vue de Russie, paraît plus petite que nat
8939 i l’Europe vue d’Amérique, et j’imagine aussi vue de Russie, paraît plus petite que nature : physiquement resserrée entre
8940 s dont les ombres immenses s’affrontent au-dessus d’ elle, rongée et ruinée sur ses bords, moralement refermée sur elle-mêm
8941 plus. Nous voyons l’Europe comme vidée, au profit de ces deux empires, de certaines ambitions, de certains rêves et de cer
8942 urope comme vidée, au profit de ces deux empires, de certaines ambitions, de certains rêves et de certaines croyances appa
8943 ofit de ces deux empires, de certaines ambitions, de certains rêves et de certaines croyances apparus sur son sol, et qui
8944 res, de certaines ambitions, de certains rêves et de certaines croyances apparus sur son sol, et qui semblaient parfois dé
8945 des grandes découvertes, par ses armes et son art de la guerre mis au service tantôt de la rapacité de telle nation ou de
8946 mes et son art de la guerre mis au service tantôt de la rapacité de telle nation ou de tel prince, tantôt d’idéaux contagi
8947 de la guerre mis au service tantôt de la rapacité de telle nation ou de tel prince, tantôt d’idéaux contagieux ; enfin par
8948 service tantôt de la rapacité de telle nation ou de tel prince, tantôt d’idéaux contagieux ; enfin par ses machines et pa
8949 rapacité de telle nation ou de tel prince, tantôt d’ idéaux contagieux ; enfin par ses machines et par ses capitaux. Mais v
8950 armes, le grand commerce et jusqu’à la curiosité de la planète ! Tout cela dans l’espace de trente ans, et sans retour po
8951 curiosité de la planète ! Tout cela dans l’espace de trente ans, et sans retour possible, à vues humaines. Que nous reste-
8952 -t-il donc en propre ? Un monopole unique : celui de la culture au sens le plus large du terme, c’est-à-dire : une mesure
8953 le plus large du terme, c’est-à-dire : une mesure de l’homme, un principe de critique permanente, un certain équilibre hum
8954 c’est-à-dire : une mesure de l’homme, un principe de critique permanente, un certain équilibre humain résultant de tension
8955 permanente, un certain équilibre humain résultant de tensions innombrables. Cela, on nous le laisse encore, et à vrai dire
8956 c’est aussi le plus difficile à maintenir en état d’ efficacité. À l’origine de la religion, de la culture et de la morale
8957 ile à maintenir en état d’efficacité. À l’origine de la religion, de la culture et de la morale européennes, il y a l’idée
8958 en état d’efficacité. À l’origine de la religion, de la culture et de la morale européennes, il y a l’idée de la contradic
8959 ité. À l’origine de la religion, de la culture et de la morale européennes, il y a l’idée de la contradiction, du déchirem
8960 ulture et de la morale européennes, il y a l’idée de la contradiction, du déchirement fécond, du conflit créateur. Il y a
8961 ment fécond, du conflit créateur. Il y a ce signe de contradiction par excellence qui est la croix. Au contraire, à l’orig
8962 ’origine des deux empires nouveaux, il y a l’idée de l’unification de l’homme lui-même, de l’élimination des antithèses, e
8963 empires nouveaux, il y a l’idée de l’unification de l’homme lui-même, de l’élimination des antithèses, et du triomphe de
8964 y a l’idée de l’unification de l’homme lui-même, de l’élimination des antithèses, et du triomphe de l’organisation bien h
8965 , de l’élimination des antithèses, et du triomphe de l’organisation bien huilée, sans histoire, et sans drame. Il s’ensuit
8966 e qui atteint, dramatiquement, le plus haut point de conscience et de signification : le saint, le mystique, le martyr. Ta
8967 amatiquement, le plus haut point de conscience et de signification : le saint, le mystique, le martyr. Tandis que le héros
8968 plus haut exemple ; pour eux, c’est l’exemplaire de série… Pour nous, la vie résulte d’un conflit permanent, et son but n
8969 l’exemplaire de série… Pour nous, la vie résulte d’ un conflit permanent, et son but n’est pas le bonheur, mais la conscie
8970 eur, mais la conscience plus aiguë, la découverte d’ un sens, d’une signification, fût-ce dans le malheur de la passion, fû
8971 a conscience plus aiguë, la découverte d’un sens, d’ une signification, fût-ce dans le malheur de la passion, fût-ce dans l
8972 sens, d’une signification, fût-ce dans le malheur de la passion, fût-ce dans l’échec. Ils visent à l’inconscience heureuse
8973 e quel prix. Ils veulent la vie, nous des raisons de vivre, même mortelles. Voilà pourquoi l’Européen typique sera tantôt
8974 naît donc la valeur essentielle des antagonismes, de l’opposition créatrice, tandis que l’Américain et le Russe soviétique
8975 cain et le Russe soviétique considère l’existence de l’opposition comme l’indice d’un mauvais fonctionnement, qu’il faut é
8976 sidère l’existence de l’opposition comme l’indice d’ un mauvais fonctionnement, qu’il faut éliminer doucement ou brutalemen
8977 ndront par la publicité, le cinéma, la production de série, et les autres par des moyens un peu moins souples, comme on sa
8978 ont de plus en plus. Ainsi donc, la confrontation de l’Europe et de ces deux filles parfois ingrates du plus grand Occiden
8979 plus. Ainsi donc, la confrontation de l’Europe et de ces deux filles parfois ingrates du plus grand Occident nous suggère
8980 s du plus grand Occident nous suggère une formule de l’homme typiquement européen : c’est l’homme de la contradiction, l’h
8981 e de l’homme typiquement européen : c’est l’homme de la contradiction, l’homme dialectique par excellence. Nous le voyons
8982 ar l’homme européen en tant que tel n’accepte pas d’ être réduit à l’un ou à l’autre de ces termes. Mais il entend les assu
8983 liférer ailleurs. D’autre part, elle a pour effet de concentrer sur l’homme lui-même, créateur ou victime de ces tensions,
8984 centrer sur l’homme lui-même, créateur ou victime de ces tensions, l’effort principal de l’esprit. Européenne sera donc, t
8985 ur ou victime de ces tensions, l’effort principal de l’esprit. Européenne sera donc, typiquement, la volonté de rapporter
8986 it. Européenne sera donc, typiquement, la volonté de rapporter à l’homme, de mesurer à l’homme toutes les institutions. Ce
8987 , typiquement, la volonté de rapporter à l’homme, de mesurer à l’homme toutes les institutions. Cet homme de la contradict
8988 urer à l’homme toutes les institutions. Cet homme de la contradiction (s’il la domine en création) c’est celui que j’appel
8989 sonne. Et ces institutions à sa mesure, à hauteur d’ homme, traduisant dans la vie de la culture, comme dans les structures
8990 mesure, à hauteur d’homme, traduisant dans la vie de la culture, comme dans les structures politiques, les mêmes tensions
8991 t grand. Il y ramasse et porte au plus haut point de tension dramatique plusieurs des thèmes illustrés dans ce chapitre, q
8992 lusion. À l’heure actuelle, que sont les valeurs de l’Occident ? Nous en avons assez vu pour savoir que ce n’est certaine
8993 . La première valeur européenne, c’est la volonté de conscience. La seconde, c’est la volonté de découverte… La force occi
8994 lonté de conscience. La seconde, c’est la volonté de découverte… La force occidentale, c’est l’acceptation de l’inconnu. I
8995 uverte… La force occidentale, c’est l’acceptation de l’inconnu. Il y a un humanisme possible, mais il faut bien nous dire,
8996 e vouloir. Ne nous y méprenons pas : les volontés de conscience et de découverte, comme valeurs fondamentales, appartienne
8997 s y méprenons pas : les volontés de conscience et de découverte, comme valeurs fondamentales, appartiennent à l’Europe et
8998 et à l’Europe seule. Vous les avez vues à l’œuvre d’ une façon quotidienne dans le domaine des sciences. Les formes de l’es
8999 tidienne dans le domaine des sciences. Les formes de l’esprit le définissent, à l’heure actuelle, par leur point de départ
9000 e définissent, à l’heure actuelle, par leur point de départ et la nature de leur recherche. Colomb savait mieux d’où il pa
9001 e actuelle, par leur point de départ et la nature de leur recherche. Colomb savait mieux d’où il partait qu’où il irait. E
9002 la nature de leur recherche. Colomb savait mieux d’ où il partait qu’où il irait. Et nous ne pouvons fonder une attitude h
9003 pas où il va, et sur l’humanisme parce qu’il sait d’ où il part et où est sa volonté… … Nous sommes au point crucial où la
9004 tout grand héritier ignore ou dilapide les objets de son héritage, et n’hérite vraiment que l’intelligence et la force. L’
9005 u christianisme heureux, c’est Pascal. L’héritage de l’Europe, c’est l’humanisme tragique. … Nous avons fait un certain no
9006 sme tragique. … Nous avons fait un certain nombre d’ images qui valent qu’on en parle, non seulement dans les arts, mais da
9007 lement dans les arts, mais dans l’immense domaine de ce que l’homme tire de lui-même pour s’accuser, se nier, se grandir o
9008 ais dans l’immense domaine de ce que l’homme tire de lui-même pour s’accuser, se nier, se grandir ou tenter de s’éterniser
9009 ême pour s’accuser, se nier, se grandir ou tenter de s’éterniser. Des plus hautes solitudes, même celle en Dieu, nous avon
9010 brandt, est-ce que ce sont seulement des rapports de volumes et de couleurs, ou aussi des hommes jetés en pâture à leur fa
9011 que ce sont seulement des rapports de volumes et de couleurs, ou aussi des hommes jetés en pâture à leur faculté divine,
9012 etés en pâture à leur faculté divine, au bénéfice de tous ceux qui en seront dignes ? La justice de la Bible, la vieille l
9013 ce de tous ceux qui en seront dignes ? La justice de la Bible, la vieille liberté des cités, qui les a imposées au monde ?
9014 est seule à le chercher. En face de l’inconnu et de la torture pas encore oubliée. Bien entendu, de siècle en siècle, un
9015 t de la torture pas encore oubliée. Bien entendu, de siècle en siècle, un même destin de mort courbe à jamais les hommes ;
9016 Bien entendu, de siècle en siècle, un même destin de mort courbe à jamais les hommes ; mais de siècle en siècle aussi, en
9017 destin de mort courbe à jamais les hommes ; mais de siècle en siècle aussi, en ce lieu qui s’appelle l’Europe — et en ce
9018 ertes au lieu d’en faire des secrets, pour tenter de fonder en qualité victorieuse de la mort le monde éphémère, pour comp
9019 ets, pour tenter de fonder en qualité victorieuse de la mort le monde éphémère, pour comprendre que l’homme ne naît pas de
9020 éphémère, pour comprendre que l’homme ne naît pas de sa propre affirmation, mais de la mise en question de l’univers. Comm
9021 ’homme ne naît pas de sa propre affirmation, mais de la mise en question de l’univers. Comme de l’Angleterre de la bataill
9022 a propre affirmation, mais de la mise en question de l’univers. Comme de l’Angleterre de la bataille de Londres, disons :
9023 , mais de la mise en question de l’univers. Comme de l’Angleterre de la bataille de Londres, disons : « Si ceci doit mouri
9024 e en question de l’univers. Comme de l’Angleterre de la bataille de Londres, disons : « Si ceci doit mourir, puissent tout
9025 e l’univers. Comme de l’Angleterre de la bataille de Londres, disons : « Si ceci doit mourir, puissent toutes les cultures
9026 contemporaine avec stupéfaction ; et que l’Europe de la prise de Rome, l’Europe de Nicopolis, l’Europe de la chute de Byza
9027 e avec stupéfaction ; et que l’Europe de la prise de Rome, l’Europe de Nicopolis, l’Europe de la chute de Byzance, ne leur
9028 la prise de Rome, l’Europe de Nicopolis, l’Europe de la chute de Byzance, ne leur sembleront peut-être qu’un remous miséra
9029 Rome, l’Europe de Nicopolis, l’Europe de la chute de Byzance, ne leur sembleront peut-être qu’un remous misérable à côté d
9030 menaçantes qui commencent à s’étendre sur lui : «  De vous comme du reste, nous nous servirons, une fois de plus, pour tire
9031 s servirons, une fois de plus, pour tirer l’homme de l’argile. »303 3.L’Europe et le Monde Pour nous connaître mie
9032 se soustraire à ce risque, mais il faut se garder de le sous-estimer : aux premiers pas de toute enquête sur les jugements
9033 t se garder de le sous-estimer : aux premiers pas de toute enquête sur les jugements que le Monde porte sur nous, c’est to
9034 tout d’abord la haine que nous rencontrerons, et d’ aveuglantes raisons de douter de nous-mêmes. Le grand historien compar
9035 que nous rencontrerons, et d’aveuglantes raisons de douter de nous-mêmes. Le grand historien comparatiste, Arnold Toynbee
9036 rencontrerons, et d’aveuglantes raisons de douter de nous-mêmes. Le grand historien comparatiste, Arnold Toynbee, a tenté
9037 qui désire s’attaquer à ce problème doit essayer de sortir, pour un instant, de sa peau d’Occidental et considérer la lut
9038 problème doit essayer de sortir, pour un instant, de sa peau d’Occidental et considérer la lutte entre le monde et l’Occid
9039 it essayer de sortir, pour un instant, de sa peau d’ Occidental et considérer la lutte entre le monde et l’Occident avec le
9040 identaux, lesquels constituent la grande majorité de l’humanité. Les peuples non occidentaux peuvent différer par la race,
9041 s en 1941, 1915, 1812, 1709 et 1610 ; les peuples d’ Asie et d’Afrique rappelleront que, depuis le xve siècle, les Occiden
9042 1915, 1812, 1709 et 1610 ; les peuples d’Asie et d’ Afrique rappelleront que, depuis le xve siècle, les Occidentaux, qu’i
9043 tralie, en Nouvelle-Zélande, dans le sud et l’est de l’Afrique. Les Africains rappelleront qu’ils furent réduits en esclav
9044 qu’ils furent réduits en esclavage et transportés de l’autre côté de l’Atlantique pour servir les Européens qui avaient co
9045 duits en esclavage et transportés de l’autre côté de l’Atlantique pour servir les Européens qui avaient colonisé les Améri
9046 Amériques, et qu’entre leurs mains, ils devinrent de simples instruments, chargés de leur procurer les richesses dont ils
9047 ns, ils devinrent de simples instruments, chargés de leur procurer les richesses dont ils avaient soif. En Amérique du Nor
9048 envahisseurs européens et à leurs esclaves venus d’ Afrique. La plupart des Occidentaux d’aujourd’hui seront surpris, choq
9049 laves venus d’Afrique. La plupart des Occidentaux d’ aujourd’hui seront surpris, choqués et peinés par ce réquisitoire… Vo
9050 ce réquisitoire… Voici donc notre Europe sommée de confesser devant le monde une culpabilité sans précédent dans l’histo
9051 de une culpabilité sans précédent dans l’histoire de l’humanité. Toynbee va-t-il relever le défi ? Loin de là, il donne ra
9052 certainement justifié, du moins pour une période de quatre siècles et demi, période qui s’achève en 1945. Jusqu’à cette d
9053 ôles, c’est que nous entamons un nouveau chapitre de cette histoire, chapitre qui ne commence qu’après la fin de la Second
9054 istoire, chapitre qui ne commence qu’après la fin de la Seconde Guerre mondiale. L’inquiétude et la colère que provoquèren
9055 identaux, c’est une expérience toute nouvelle que de subir de la part du monde ce que le monde a subi, depuis des siècles,
9056 , la tyrannie et leurs souffrances ? Toynbee taxe d’ orgueil cette objection : Nous Occidentaux, parce qu’humains, avons t
9057 sure avec tout ce qui a précédé. Pour nous guérir de cette illusion occidentale qui est la nôtre, il suffit de jeter un re
9058 illusion occidentale qui est la nôtre, il suffit de jeter un regard en arrière sur ce qu’accomplirent les Grecs et les Ro
9059 lirent, au profit du monde gréco-romain, une tête de pont sur l’océan Atlantique, à l’emplacement de ce qui est aujourd’hu
9060 e de pont sur l’océan Atlantique, à l’emplacement de ce qui est aujourd’hui l’Espagne du Sud et le Portugal. Le grec « pop
9061 el fut rédigé le Nouveau Testament, au Ier siècle de notre ère, était parlé et compris de Travancore à Marseille. À la mêm
9062 u Ier siècle de notre ère, était parlé et compris de Travancore à Marseille. À la même époque, la Grande-Bretagne était an
9063 rmées romaines, tandis que l’art grec, au service d’ une religion hindoue — le bouddhisme — accomplissait une conquête paci
9064 — accomplissait une conquête pacifique en partant de l’Afghanistan et en se dirigeant au nord-est, pour atteindre éventuel
9065 n temps, sur le monde antique aussi largement que de nos jours la culture occidentale. À une époque où la civilisation ind
9066 vanter, comme nous pouvons le faire aujourd’hui, d’ avoir atteint et pénétré par le rayonnement de leur culture toutes les
9067 ui, d’avoir atteint et pénétré par le rayonnement de leur culture toutes les civilisations de la planète, dont ils avaient
9068 onnement de leur culture toutes les civilisations de la planète, dont ils avaient d’ailleurs calculé avec précision la for
9069 écision la forme et les dimensions. Cette emprise de la culture grecque, à partir du ive siècle avant Jésus-Christ, fut p
9070 monde un choc aussi considérable que la rencontre de notre civilisation occidentale moderne, depuis le xve siècle de notr
9071 sation occidentale moderne, depuis le xve siècle de notre ère. Et la nature humaine n’ayant guère changé depuis cette épo
9072 t guère changé depuis cette époque, il n’y a rien d’ étonnant à ce que l’assaut d’une civilisation étrangère provoque aujou
9073 poque, il n’y a rien d’étonnant à ce que l’assaut d’ une civilisation étrangère provoque aujourd’hui les mêmes réactions ps
9074 ue aujourd’hui les mêmes réactions psychologiques de défense qu’au temps des Grecs et des Romains… Naturellement, je ne ve
9075 peut faire pour nous l’oracle gréco-romain c’est de nous révéler, parmi beaucoup d’autres, un des dénouements possibles d
9076 i beaucoup d’autres, un des dénouements possibles de notre drame personnel. Dans notre cas, il se peut très bien que les c
9077 tâtonnons dans l’obscurité et devons nous garder de croire que nous pourrons tracer l’itinéraire à suivre. Tout de même c
9078 cer l’itinéraire à suivre. Tout de même ce serait de la folie de ne pas tenir compte de la lueur qui s’offre à nous, car l
9079 aire à suivre. Tout de même ce serait de la folie de ne pas tenir compte de la lueur qui s’offre à nous, car la lumière pr
9080 même ce serait de la folie de ne pas tenir compte de la lueur qui s’offre à nous, car la lumière projetée sur notre avenir
9081 r le miroir du passé gréco-romain est en tout cas de celles qui peuvent le mieux éclairer ce qui pour nous reste encore da
9082 ique Stephen Spender, nous rappeler que les torts de l’Europe, bien réels, ne lui ôtent pourtant ni le droit ni le devoir
9083 s, ne lui ôtent pourtant ni le droit ni le devoir d’ affirmer sa fonction culturelle dans le monde : De bien des manières,
9084 ’affirmer sa fonction culturelle dans le monde : De bien des manières, nous autres Occidentaux, nous nous sommes rendus m
9085 ux, nous nous sommes rendus moralement incapables de riposter à nos adversaires. En partie parce que nous sommes coupables
9086 saires. En partie parce que nous sommes coupables d’ avoir recouru dans le passé à des méthodes brutales, mais en partie au
9087 parce que nous avons réellement atteint un niveau de civilisation qui nous porte à éviter la franchise brutale. Culpabilit
9088 éviter la franchise brutale. Culpabilité, respect d’ autrui et conscience de notre histoire concourent ainsi à nous désarme
9089 tale. Culpabilité, respect d’autrui et conscience de notre histoire concourent ainsi à nous désarmer. Ce goût de l’autocri
9090 istoire concourent ainsi à nous désarmer. Ce goût de l’autocritique ne tirerait pas à conséquence si nous étions certains
9091 ire par les jeunes Œdipes, nous courons le danger de sacrifier notre passé et notre présent à un avenir plus tyrannique et
9092 e propre histoire. Au stade où nous voici, pleins de remords quant à notre passé colonialiste, et conscients de tant d’ins
9093 s quant à notre passé colonialiste, et conscients de tant d’insuffisances actuelles, — la question que nous devons nous po
9094 à notre passé colonialiste, et conscients de tant d’ insuffisances actuelles, — la question que nous devons nous poser est
9095  la question que nous devons nous poser est moins de savoir si nous sommes meilleurs que les autres, que de savoir si les
9096 voir si nous sommes meilleurs que les autres, que de savoir si les autres ne sont pas pires que nous. Car s’ils sont pires
9097 ous. Car s’ils sont pires, notre devoir est alors de vivre pour nos valeurs et de les affirmer. … Il n’est certes pas faci
9098 tre devoir est alors de vivre pour nos valeurs et de les affirmer. … Il n’est certes pas facile de reconnaître ses torts e
9099 et de les affirmer. … Il n’est certes pas facile de reconnaître ses torts et de rester malgré tout conscient du fait que,
9100 est certes pas facile de reconnaître ses torts et de rester malgré tout conscient du fait que, par comparaison, l’on est e
9101 également, l’Europe ne pourra faire autrement que d’ appliquer ce procédé assez compliqué de comparaison et de mesure. Il e
9102 rement que d’appliquer ce procédé assez compliqué de comparaison et de mesure. Il est évident que nous ne pouvons plus éta
9103 quer ce procédé assez compliqué de comparaison et de mesure. Il est évident que nous ne pouvons plus établir notre supério
9104 pouvons plus établir notre supériorité en arguant de notre peau blanche ou de notre glorieux passé, des cathédrales gothiq
9105 e supériorité en arguant de notre peau blanche ou de notre glorieux passé, des cathédrales gothiques ou de la peinture de
9106 otre glorieux passé, des cathédrales gothiques ou de la peinture de la Renaissance. Nous ne pouvons que nous demander si d
9107 assé, des cathédrales gothiques ou de la peinture de la Renaissance. Nous ne pouvons que nous demander si de tous ces fact
9108 Renaissance. Nous ne pouvons que nous demander si de tous ces facteurs, et de beaucoup d’autres encore, ne continue pas de
9109 ons que nous demander si de tous ces facteurs, et de beaucoup d’autres encore, ne continue pas de résulter un potentiel qu
9110 , et de beaucoup d’autres encore, ne continue pas de résulter un potentiel qui légitime notre réalité présente ; si, privé
9111 l qui légitime notre réalité présente ; si, privé de ces traditions européennes que nous nous devons de gérer, le monde ne
9112 e ces traditions européennes que nous nous devons de gérer, le monde ne serait pas dans un état pire encore ; et si, en vi
9113 oui à toutes ces questions… Je crois à la mission de la culture européenne, et j’ai foi dans son aptitude à contribuer à l
9114 les plus difficiles, y compris ceux qui dépassent de loin les limites du champ culturel proprement dit. J’y crois, parce q
9115 ns hautement développé des traditions ; parce que de tous temps elle s’est efforcée d’assurer une relation étroite entre c
9116 ons ; parce que de tous temps elle s’est efforcée d’ assurer une relation étroite entre ce que j’appellerais la « constante
9117 lement mouvantes ; parce que même ses révolutions de style les plus étonnantes n’ont jamais cessé d’exprimer les valeurs t
9118 s de style les plus étonnantes n’ont jamais cessé d’ exprimer les valeurs traditionnelles, tout en s’adaptant aux changemen
9119 et elle y a, jusqu’ici, toujours réussi. La somme de son passé — alors même que les contemporains ne s’en rendent pas touj
9120 ompte — restera sans cesse calculée dans la somme de son présent. Au plan politique, l’Europe a peut-être failli, mais au
9121 ommercial populaire, le plus grand succès mondial de tous les temps, et, ne serait-ce que pour cette raison, elle justifie
9122 actuelle avec celle qui régnait avant l’invention de la bombe atomique et l’on admettra qu’il n’a pas fallu moins d’un mir
9123 omique et l’on admettra qu’il n’a pas fallu moins d’ un miracle du génie européen pour que les ponts entre le passé et le p
9124 présent ne soient pas coupés, et continuent même d’ être fréquentés. On ne doit pas se lasser de le répéter : notre vieill
9125 même d’être fréquentés. On ne doit pas se lasser de le répéter : notre vieille Europe est la seule partie du monde où nul
9126 artie du monde où nul fossé ne sépare aujourd’hui d’ hier. Cette vérité éclate avec le plus de force dans l’œuvre des deux
9127 ourd’hui d’hier. Cette vérité éclate avec le plus de force dans l’œuvre des deux écrivains (que les Soviétiques considèren
9128 et Marcel Proust. Ce sont deux exemples typiques de ce que l’Europe est capable de donner au monde. Ils sont tous les deu
9129 exemples typiques de ce que l’Europe est capable de donner au monde. Ils sont tous les deux modernes, dans le plein sens
9130 nditions présentes. Le titre même du chef-d’œuvre de Joyce exprime ce sens profond des traditions : Ulysse. Et chaque fois
9131 ons : Ulysse. Et chaque fois qu’un Picasso avance d’ un pas dans la vie moderne, il avance en même temps d’un pas dans le p
9132 pas dans la vie moderne, il avance en même temps d’ un pas dans le passé européen… Hors d’Europe, le fossé entre le présen
9133 même temps d’un pas dans le passé européen… Hors d’ Europe, le fossé entre le présent et le passé se creuse de plus en plu
9134 s en plus. Conséquence directe, presque toujours, d’ une politique totalitaire dont les chefs avides de pouvoir savent très
9135 d’une politique totalitaire dont les chefs avides de pouvoir savent très bien pourquoi ils interdisent à leurs « sujets »
9136 bien pourquoi ils interdisent à leurs « sujets » de se raccrocher à un passé quelconque. Parfois aussi, la rupture résult
9137 ssé quelconque. Parfois aussi, la rupture résulte d’ un choc entre l’Est et l’industrialisation importée de l’Ouest. En Eur
9138 choc entre l’Est et l’industrialisation importée de l’Ouest. En Europe, l’industrialisation est apparue et s’est développ
9139 Asie, où tel un corps étranger elle a été imposée de l’extérieur, son apparition a provoqué de profonds remous. Remous qui
9140 imposée de l’extérieur, son apparition a provoqué de profonds remous. Remous qui dans le domaine culturel se traduisent pa
9141 le domaine culturel se traduisent par une rupture d’ autant plus brutale avec toutes les traditions : tel ou tel produit d’
9142 e avec toutes les traditions : tel ou tel produit d’ un « art prolétarien moderne » dans la Chine d’aujourd’hui n’a plus ri
9143 it d’un « art prolétarien moderne » dans la Chine d’ aujourd’hui n’a plus rien de commun avec ce que nous connaissons de la
9144 derne » dans la Chine d’aujourd’hui n’a plus rien de commun avec ce que nous connaissons de la peinture chinoise. Non seul
9145 plus rien de commun avec ce que nous connaissons de la peinture chinoise. Non seulement les révolutions asiatiques s’opèr
9146 bérément à la tradition. Que nous soyons capables de constater ces faits et d’en tirer des conclusions (et même, à mon avi
9147 ue nous soyons capables de constater ces faits et d’ en tirer des conclusions (et même, à mon avis, des conclusions encoura
9148 rageantes), voilà qui fournit la meilleure preuve de ce que l’Europe et sa culture ont le droit de vivre. Peut-être ce « t
9149 uve de ce que l’Europe et sa culture ont le droit de vivre. Peut-être ce « traditionalisme révolutionnaire » de l’Europe,
9150 Peut-être ce « traditionalisme révolutionnaire » de l’Europe, comme tant de mouvements avant lui, gagnera-t-il d’autres p
9151 arties du monde, Russie comprise. Pour ce qui est de l’Amérique, l’évolution va déjà dans ce sens. Car l’Amérique se souvi
9152 va déjà dans ce sens. Car l’Amérique se souvient de façon beaucoup plus vivante de ses origines européennes, et s’« europ
9153 érique se souvient de façon beaucoup plus vivante de ses origines européennes, et s’« européanise » beaucoup plus en profo
9154 ue l’Europe ne s’« américanisera » jamais à coups de millions de bouteilles de Coca-Cola. L’Europe doit vivre et continuer
9155 ne s’« américanisera » jamais à coups de millions de bouteilles de Coca-Cola. L’Europe doit vivre et continuer de vivre. M
9156 nisera » jamais à coups de millions de bouteilles de Coca-Cola. L’Europe doit vivre et continuer de vivre. Mais elle ne le
9157 es de Coca-Cola. L’Europe doit vivre et continuer de vivre. Mais elle ne le pourra que sur la base d’une autoaffirmation c
9158 de vivre. Mais elle ne le pourra que sur la base d’ une autoaffirmation culturelle.305 Au-delà, ou en deçà de la morale,
9159 écouvrir. Ce sont eux qui ont permis à l’humanité de prendre conscience de son unité. L’idée d’universalité, l’idée même d
9160 qui ont permis à l’humanité de prendre conscience de son unité. L’idée d’universalité, l’idée même de « genre humain » son
9161 manité de prendre conscience de son unité. L’idée d’ universalité, l’idée même de « genre humain » sont des créations de l’
9162 de son unité. L’idée d’universalité, l’idée même de « genre humain » sont des créations de l’Europe chrétienne et technic
9163 ’idée même de « genre humain » sont des créations de l’Europe chrétienne et technicienne. 2° Les prophètes de la décadence
9164 rope chrétienne et technicienne. 2° Les prophètes de la décadence de l’Europe, Spengler, Valéry et Toynbee, se fondaient t
9165 et technicienne. 2° Les prophètes de la décadence de l’Europe, Spengler, Valéry et Toynbee, se fondaient tous sur le précé
9166 ry et Toynbee, se fondaient tous sur le précédent de la chute de Rome, du monde gréco-romain. Cet exemple est-il valable p
9167 e, se fondaient tous sur le précédent de la chute de Rome, du monde gréco-romain. Cet exemple est-il valable pour nous ? L
9168 ok suffirait aujourd’hui pour les mettre à l’abri de ce genre d’illusion. Der Erdenkreis ist mir genug bekannt, dit Faust,
9169 aujourd’hui pour les mettre à l’abri de ce genre d’ illusion. Der Erdenkreis ist mir genug bekannt, dit Faust, le grand Eu
9170 e grand Européen moderne. 4° Toutes les créations de l’Europe (l’Église et la philosophie, les sciences et la technique, l
9171 les sont seules à l’avoir fait. 5° On ne voit pas de candidats sérieux à la Relève de notre civilisation devenue mondiale.
9172 ° On ne voit pas de candidats sérieux à la Relève de notre civilisation devenue mondiale. On ne voit pas qui saurait mieux
9173 pas qui saurait mieux qu’elle prescrire les modes d’ emploi de ses créations, et trouver les remèdes aux maladies dont elle
9174 aurait mieux qu’elle prescrire les modes d’emploi de ses créations, et trouver les remèdes aux maladies dont elle a répand
9175 et l’a bien dit, dans un ouvrage intitulé Le Rapt de l’Europe, méditation sur le sort d’une culture « dépossédée » de ses
9176 itulé Le Rapt de l’Europe, méditation sur le sort d’ une culture « dépossédée » de ses conquêtes par ce monde même qu’elle
9177 ditation sur le sort d’une culture « dépossédée » de ses conquêtes par ce monde même qu’elle a suscité. Voici la donnée du
9178 opéen (au sens géographique) et le cadre mondial ( d’ origine européenne) s’est agrandi au point qu’en marge des vieilles na
9179 agrandi au point qu’en marge des vieilles nations d’ Europe se sont constituées des puissances politiques qui vont se retou
9180 t bouleverser littéralement le paysage historique de l’Europe. Par sa fécondité même, son objectivité rationnelle, la vert
9181 , son objectivité rationnelle, la vertu expansive de la plupart de ses créations, l’histoire universelle de l’Occident va
9182 plupart de ses créations, l’histoire universelle de l’Occident va se retourner contre l’histoire concrète de l’Europe géo
9183 cident va se retourner contre l’histoire concrète de l’Europe géographique. C’est une espèce de renversement gigantesque o
9184 ncrète de l’Europe géographique. C’est une espèce de renversement gigantesque où les idées, les habitudes, les styles prop
9185 Sophocle mettait les mots suivants dans la bouche d’ Œdipe, victime suprême de la fatalité : De toutes les souffrances, les
9186 suivants dans la bouche d’Œdipe, victime suprême de la fatalité : De toutes les souffrances, les plus douloureuses sont c
9187 bouche d’Œdipe, victime suprême de la fatalité : De toutes les souffrances, les plus douloureuses sont celles dont nous s
9188 rectement, la plupart de ses malheurs. Son esprit d’ aventure, son élan de jeunesse, son incapacité de renoncement ont fait
9189 de ses malheurs. Son esprit d’aventure, son élan de jeunesse, son incapacité de renoncement ont fait sa perte. Plutôt sa
9190 d’aventure, son élan de jeunesse, son incapacité de renoncement ont fait sa perte. Plutôt sa « crise » que sa « perte »,
9191 l’histoire universelle est comme une grande salle d’ hôpital comptant vingt-et-un lits. La plupart des occupants sont déjà
9192 ours du malade sont comptés. Il s’agit, en effet, d’ un être sujet à la mort, à quoi le mène un épuisement de ses forces or
9193 tre sujet à la mort, à quoi le mène un épuisement de ses forces organiques contre lequel la politique n’est qu’une médecin
9194 cine impuissante. Tout ce qu’on peut faire, c’est de compter les jours restants de vie, savoir les mettre à profit, n’en p
9195 n peut faire, c’est de compter les jours restants de vie, savoir les mettre à profit, n’en point accélérer le cours et acc
9196 ique entre 100 et 300 après J.-C., par conséquent de Trajan et Marc-Aurèle à Septime-Sévère, époque, après tout, assez séd
9197 ire » que lui attribue Splengler, ne peut manquer de tenter l’esprit fébrile de nos contemporains comme une promesse de re
9198 ngler, ne peut manquer de tenter l’esprit fébrile de nos contemporains comme une promesse de repos. La vérité est que la
9199 t fébrile de nos contemporains comme une promesse de repos. La vérité est que la situation de l’Europe prête à la fois à
9200 omesse de repos. La vérité est que la situation de l’Europe prête à la fois à plus d’optimisme et de pessimisme que ne l
9201 e la situation de l’Europe prête à la fois à plus d’ optimisme et de pessimisme que ne l’imaginent ces historiens. À plus d
9202 de l’Europe prête à la fois à plus d’optimisme et de pessimisme que ne l’imaginent ces historiens. À plus d’optimisme à lo
9203 simisme que ne l’imaginent ces historiens. À plus d’ optimisme à long terme en ce qui concerne la signification positive de
9204 erme en ce qui concerne la signification positive de la culture européenne ; à plus de pessimisme en ce qui concerne le pr
9205 cation positive de la culture européenne ; à plus de pessimisme en ce qui concerne le présent. Pour ce qui est de la scien
9206 me en ce qui concerne le présent. Pour ce qui est de la science, de la technique, de la vitalité et de la volonté d’organi
9207 ncerne le présent. Pour ce qui est de la science, de la technique, de la vitalité et de la volonté d’organisation, le mond
9208 . Pour ce qui est de la science, de la technique, de la vitalité et de la volonté d’organisation, le monde occidental est
9209 de la science, de la technique, de la vitalité et de la volonté d’organisation, le monde occidental est beaucoup moins en
9210 de la technique, de la vitalité et de la volonté d’ organisation, le monde occidental est beaucoup moins en décadence que
9211 ar son énorme fécondité, le déchaînement spontané de conséquences qu’elle suppose, sa vertu inouïe d’expansion, peut faire
9212 de conséquences qu’elle suppose, sa vertu inouïe d’ expansion, peut faire passer, et à bref délai, quelques mauvais moment
9213 é naissance. Diez del Corral reprend le précédent de la décadence hellénistique, invoqué par Toynbee, mais il y trouve des
9214 r Toynbee, mais il y trouve des raisons nouvelles de croire en l’avenir européen ; L’Hellade, elle aussi, devint pays hel
9215 , politiques, économiques, spirituels, etc. Fruit de l’hellénisme après son expansion, le monde hellénistique reflua sur l
9216 un nouveau facteur historique, fragment désormais d’ une vaste constellation qui élargissait et multipliait les problèmes d
9217 tion qui élargissait et multipliait les problèmes de la « polis » grecque. Mais, dans la perspective où nous le voyons mai
9218 r du temps qui grinçait si fort pour les oreilles d’ un Démosthène, à peine s’il est perceptible pour l’historien qui, s’ef
9219 est perceptible pour l’historien qui, s’efforçant de découvrir les grands enchaînements de l’histoire, voit, sous les évén
9220 s’efforçant de découvrir les grands enchaînements de l’histoire, voit, sous les événements, les lignes directrices de la p
9221 voit, sous les événements, les lignes directrices de la philosophie, l’art, la science, la technique de la Grèce se prolon
9222 e la philosophie, l’art, la science, la technique de la Grèce se prolonger en substance dans l’époque hellénistique. Les l
9223 e hellénistique. Les lignes directrices analogues de la culture européenne semblent montrer plus de vigueur encore tandis
9224 es de la culture européenne semblent montrer plus de vigueur encore tandis que cette culture s’universalise, et rien ne la
9225 mmodation aux idéologies européennes, leur défaut de véritable résistance. L’empreinte européenne sur eux est plus profond
9226 elle du monde grec sur l’Orient ; elle s’insinue, d’ une façon ou d’une autre, et d’aventure par de pauvres succédanés, jus
9227 rec sur l’Orient ; elle s’insinue, d’une façon ou d’ une autre, et d’aventure par de pauvres succédanés, jusqu’au tréfonds
9228  ; elle s’insinue, d’une façon ou d’une autre, et d’ aventure par de pauvres succédanés, jusqu’au tréfonds religieux, leque
9229 ue, d’une façon ou d’une autre, et d’aventure par de pauvres succédanés, jusqu’au tréfonds religieux, lequel fut la ligne
9230 jusqu’au tréfonds religieux, lequel fut la ligne de défense et de contre-attaque de l’Asie contre la Grèce. En prolongean
9231 onds religieux, lequel fut la ligne de défense et de contre-attaque de l’Asie contre la Grèce. En prolongeant les lignes e
9232 quel fut la ligne de défense et de contre-attaque de l’Asie contre la Grèce. En prolongeant les lignes et les problèmes de
9233 Grèce. En prolongeant les lignes et les problèmes de la culture européenne dans leur projection universelle, on pourrait e
9234 n universelle, on pourrait estimer qu’il y a plus d’ intérêt à étudier leurs modalités nouvelles, du fait même de cette pro
9235 à étudier leurs modalités nouvelles, du fait même de cette projection, leurs infléchissements dans le nouveau milieu où il
9236 on nouvelle, oublier les grandeurs passées, tirer de ses propres entrailles un renouveau de vitalité, unifier ses forces d
9237 ées, tirer de ses propres entrailles un renouveau de vitalité, unifier ses forces dispersées jusqu’ici dans le fractionnem
9238 des récents, jeunes et gigantesques protagonistes de l’histoire présente. Au reste, le problème de l’avenir des Européens
9239 es de l’histoire présente. Au reste, le problème de l’avenir des Européens et de leur civilisation « dépossédée » n’est p
9240 u reste, le problème de l’avenir des Européens et de leur civilisation « dépossédée » n’est plus séparable, en fait, de ce
9241 ion « dépossédée » n’est plus séparable, en fait, de celui de l’avenir du reste des hommes : Le problème du rapt n’intére
9242 ossédée » n’est plus séparable, en fait, de celui de l’avenir du reste des hommes : Le problème du rapt n’intéresse pas s
9243 aussi le spoliateur. Celui-ci aura beau se saisir de l’objet, il n’en sera pas moins toujours en état de déficience. Il va
9244 l’objet, il n’en sera pas moins toujours en état de déficience. Il va agencer sa vie selon des formes venues du dehors, q
9245 et étouffer sa vitalité… Il y a quelques dizaines d’ années encore, on croyait la civilisation européenne monopole exclusif
9246 yait la civilisation européenne monopole exclusif de l’Europe. Tout au plus admettait-on que certaines modalités extérieur
9247 ieures et purement techniques étaient à la portée de l’imitation étrangère. Mais « leur point d’origine, écrivait Ranke, c
9248 ortée de l’imitation étrangère. Mais « leur point d’ origine, écrivait Ranke, c’est-à-dire non seulement le fondement histo
9249 t. La technique n’appartient pas au seul épiderme de la culture européenne ; elle s’est nourrie du suc intime, des aspirat
9250 urrie du suc intime, des aspirations spirituelles de cette dernière et a pris une telle ampleur qu’elle englobe, condition
9251 lobe, conditionne et entraîne tout. Véhicule aisé d’ exportation, elle porte avec elle, même si c’est sous une forme larvée
9252 élans, les valeurs et les idéaux les plus divers de la vie européenne. Sans doute, ne peut-elle pas les porter tous, ni p
9253 ous, ni peut-être les plus essentiels… La mission de l’Europe n’est pas achevée, loin de là, même si, sur certains points,
9254 traeuropéens, mais elle a aussi fourni les hommes de science, nés dans ses vieilles villes moyenâgeuses, formés dans ses v
9255 s dans ses vieilles universités, toujours en tête de la connaissance, auteurs des grandes, des prodigieuses découvertes ré
9256 ndes, des prodigieuses découvertes réalisées hors d’ Europe. Nous n’en voulons, pour exemple, que la physique nucléaire, do
9257 té réalisées ailleurs. Nulle part notre phénomène de rapt n’offre de traits mieux discernables. Mais ce phénomène est si
9258 leurs. Nulle part notre phénomène de rapt n’offre de traits mieux discernables. Mais ce phénomène est si neuf et si souda
9259 elles conséquences il entraînera à la longue sous de nouveaux cieux. L’expropriation a porté, dans une très large mesure,
9260 able. L’activité intellectuelle est quelque chose de si délicat, est conditionnée par de si multiples facteurs qu’on peut
9261 quelque chose de si délicat, est conditionnée par de si multiples facteurs qu’on peut se demander si, sous une apparente c
9262 nières années sur le vieux Continent. La mission de l’Europe n’est-elle pas, désormais, de repenser pour l’Homme le bon u
9263 La mission de l’Europe n’est-elle pas, désormais, de repenser pour l’Homme le bon usage de ses conquêtes ? D’autre part,
9264 désormais, de repenser pour l’Homme le bon usage de ses conquêtes ? D’autre part, après une avance aussi décisive que ce
9265 n réajustement des gains s’impose, centrés autour d’ une plus vaste poussée d’humanisme intégral. Et qui, mieux que l’Europ
9266 s’impose, centrés autour d’une plus vaste poussée d’ humanisme intégral. Et qui, mieux que l’Europe, peut faire face à ce g
9267 nd problème actuel ? Elle, et elle seule, dispose d’ un point de vue assez ample et assez pondéré pour englober les différe
9268 assez pondéré pour englober les différents ordres de vie, si diversement développés dans l’expansion du monde contemporain
9269 n du monde contemporain. Elle seule est en mesure de redonner actualité et efficacité au vieux trésor impérissable de l’hu
9270 ualité et efficacité au vieux trésor impérissable de l’humanisme antique et chrétien. Ses devoirs envers l’avenir ont pu s
9271 ponsable du destin historique, non plus seulement d’ elle-même et d’une planète qui lui était soumise, mais d’une planète q
9272 tin historique, non plus seulement d’elle-même et d’ une planète qui lui était soumise, mais d’une planète qui a atteint sa
9273 même et d’une planète qui lui était soumise, mais d’ une planète qui a atteint sa majorité et conquis son indépendance et,
9274 rgie et des forces issues du patrimoine paternel, de l’usage duquel le « pater familias » est toujours solidaire.306 Sur
9275 toujours solidaire.306 Sur la mission mondiale de l’Europe, interrogeons maintenant deux grands aînés qui eurent le dro
9276 maintenant deux grands aînés qui eurent le droit de parler du Monde : peu d’hommes l’auront aussi passionnément interrogé
9277 înés qui eurent le droit de parler du Monde : peu d’ hommes l’auront aussi passionnément interrogé leur vie durant, dans to
9278 rrogé leur vie durant, dans toutes les dimensions de sa réalité, physiques, traditionnelles et spirituelles, que Keyserlin
9279 erling (1880-1946), rendu célèbre par son Journal de voyage d’un Philosophe (qui décrit l’Inde, entre autres, à coup d’int
9280 80-1946), rendu célèbre par son Journal de voyage d’ un Philosophe (qui décrit l’Inde, entre autres, à coup d’intuitions fu
9281 ilosophe (qui décrit l’Inde, entre autres, à coup d’ intuitions fulgurantes), n’en vint à l’« analyse spectrale » de l’Euro
9282 fulgurantes), n’en vint à l’« analyse spectrale » de l’Europe qu’au terme d’un périple planétaire. Il n’en est que plus fr
9283 à l’« analyse spectrale » de l’Europe qu’au terme d’ un périple planétaire. Il n’en est que plus frappant de constater que
9284 périple planétaire. Il n’en est que plus frappant de constater que c’est à l’Europe finalement — cette Europe si souvent m
9285 tte Europe si souvent méprisée par les spirituels de l’Orient, tandis que leurs masses envient son régime matériel — que K
9286 ime matériel — que Keyserling attribue la mission de sauver l’Esprit : Il s’agit de tirer de chaque peuple le meilleur, e
9287 tribue la mission de sauver l’Esprit : Il s’agit de tirer de chaque peuple le meilleur, et rien que cela, de ce dont il e
9288 mission de sauver l’Esprit : Il s’agit de tirer de chaque peuple le meilleur, et rien que cela, de ce dont il est capabl
9289 r de chaque peuple le meilleur, et rien que cela, de ce dont il est capable. Et ce, non plus pour s’élever soi-même à l’ex
9290 soi-même à l’exclusion des autres, mais au profit d’ un organisme supérieur ; non pas aux dépens des autres, mais pour le b
9291 non pas aux dépens des autres, mais pour le bien de tous. … Bornons-nous donc à montrer dans quel sens l’Europe, en tant
9292 sens l’Europe, en tant qu’ensemble, doit changer d’ orientation et en quoi elle doit voir sa tâche véritable pour continue
9293 elle doit voir sa tâche véritable pour continuer d’ être un facteur positif dans le développement de l’humanité. Sa suprém
9294 r d’être un facteur positif dans le développement de l’humanité. Sa suprématie matérielle est évidemment finie. Elle est d
9295 bientôt fin. Peut-être même le centre industriel de notre planète se transportera-t-il en Asie. L’invention est difficile
9296 ion est difficile, mais le singe même est capable d’ imitation. Bientôt toute notre capacité technique sera le bien commun
9297 oute notre capacité technique sera le bien commun de l’humanité entière. Bientôt nous, Européens, si nous nous vantons de
9298 re. Bientôt nous, Européens, si nous nous vantons de nos conquêtes scientifiques, nous serons regardés comme le serait Cor
9299 assiques. Ainsi notre prestige, le plus important de tous les facteurs de puissance, est périmé. Mais surtout les conquête
9300 prestige, le plus important de tous les facteurs de puissance, est périmé. Mais surtout les conquêtes sociales des derniè
9301 érielle. Dans ces circonstances, le simple esprit de conservation oblige l’Europe à se concentrer sur ce qu’elle peut fair
9302 ’Europe à se concentrer sur ce qu’elle peut faire de mieux, sur ce que personne ne peut lui ravir. C’est-à-dire sur sa spi
9303 té. … Nous ne serions pas les porteurs qualifiés de la spiritualité intellectuelle sur terre, nous ne serions pas les mai
9304 ectuelle sur terre, nous ne serions pas les mains de Dieu, si chez nous l’accent significatif ne reposait pas exclusivemen
9305 l’esprit. La forme grecque est encore à la racine de l’art de l’Extrême-Orient, et l’Éthos juif est à la racine de tout Ét
9306 La forme grecque est encore à la racine de l’art de l’Extrême-Orient, et l’Éthos juif est à la racine de tout Éthos qui s
9307 l’Extrême-Orient, et l’Éthos juif est à la racine de tout Éthos qui s’affirme dans le monde. Toute science est d’origine e
9308 os qui s’affirme dans le monde. Toute science est d’ origine européenne. Mais pour ce qui est du christianisme, sa force ex
9309 e, sa force expansive et active vient précisément de ce qu’il incarne la compréhension tournée vers le pratique. Il y a en
9310 profondes ; mais en elles ne vit pas le principe de l’Esprit dominateur de la Terre. En lui-même, l’esprit est terrestrem
9311 les ne vit pas le principe de l’Esprit dominateur de la Terre. En lui-même, l’esprit est terrestrement impuissant ; même l
9312 n Europe, l’esprit est essentiellement dominateur de la terre. Grâce à lui l’Européen peut avoir sur terre une action hist
9313 une action historique. Il représente une synthèse d’ esprit, d’âme et de corps, grâce à laquelle, en vertu de la loi de cor
9314 historique. Il représente une synthèse d’esprit, d’ âme et de corps, grâce à laquelle, en vertu de la loi de correspondanc
9315 ue. Il représente une synthèse d’esprit, d’âme et de corps, grâce à laquelle, en vertu de la loi de correspondance du sens
9316 et de corps, grâce à laquelle, en vertu de la loi de correspondance du sens et de l’expression, l’esprit suprême peut agir
9317 , en vertu de la loi de correspondance du sens et de l’expression, l’esprit suprême peut agir terrestrement. Le fait que l
9318 e vue extérieur, ne fut pas l’expression primaire de l’esprit européen, mais sa conséquence dans le domaine des applicatio
9319 tions pratiques, tout comme des fortunes naissent d’ inventions faites dans un intérêt purement intellectuel par un savant
9320 étranger au monde. Or, aujourd’hui, l’importance de l’Europe repose plus que jamais sur sa spiritualité intellectuelle. C
9321 c’est la seule chose qui maintenant soit capable d’ être développée à un degré inouï. … La raison principale pour laquelle
9322 incipale pour laquelle l’Europe a, dans cet ordre d’ idées, les plus grandes perspectives d’avenir vient de ce que l’esprit
9323 cet ordre d’idées, les plus grandes perspectives d’ avenir vient de ce que l’esprit ne peut régner que là où tout l’accent
9324 De même que le Christ proclama la valeur infinie de l’âme humaine et enseigna qu’aucun gain temporel ne compense le domma
9325 toute éthique a son sens dans la libre résolution de l’individu, de même que toute originalité créatrice a sa racine dans
9326 atrice a sa racine dans l’individu et qu’il n’y a d’ autre compréhension que celle qui est personnelle, — de même la souver
9327 le qui est personnelle, — de même la souveraineté de l’esprit sur la terre est liée à ce que l’accent significatif repose
9328 et son entrée à elle seule, s’opère sans solution de continuité. La science et la technique sont les enfants authentiques
9329 nce et la technique sont les enfants authentiques de son esprit : par conséquent, leur réception ne détermine aucune révol
9330 pourra plus, en Europe, renier l’esprit au profit de la matière. L’Europe a psychologiquement le pas sur tout le reste du
9331 le pas sur tout le reste du monde.307 Dans l’un de ses derniers écrits — une préface à la traduction française du Rapt d
9332 s — une préface à la traduction française du Rapt de l’Europe de Diez del Corral308 —, André Siegfried résume, avec son se
9333 grands ensembles, les données du problème crucial de notre temps : celui que pose la diffusion mondiale d’une technique sé
9334 otre temps : celui que pose la diffusion mondiale d’ une technique séparée de l’esprit qui l’a créée. Siegfried enregistre
9335 ose la diffusion mondiale d’une technique séparée de l’esprit qui l’a créée. Siegfried enregistre d’abord la victoire « se
9336 toire « sensationnelle, presque invraisemblable » de l’influence civilisatrice de l’Europe : Le monde est en train de pre
9337 ue invraisemblable » de l’influence civilisatrice de l’Europe : Le monde est en train de prendre à notre Europe ses armes
9338 , pense-t-il, jusqu’à son esprit. Ces instruments de puissance, l’Europe se les est laissé ravir ; bien plus, elle les a l
9339 t peut-être le génie des civilisations créatrices de travailler pour d’autres qu’elles-mêmes. Du point de vue de son influ
9340 ler pour d’autres qu’elles-mêmes. Du point de vue de son influence civilisatrice, la victoire de l’Europe est extraordinai
9341 e vue de son influence civilisatrice, la victoire de l’Europe est extraordinaire, sensationnelle, presque invraisemblable,
9342 nte non seulement sa technique, mais ses manières de vivre et jusqu’à ses façons de se vêtir. Mais c’est au prix de son an
9343 mais ses manières de vivre et jusqu’à ses façons de se vêtir. Mais c’est au prix de son ancienne hégémonie, qui lui échap
9344 nne hégémonie, qui lui échappe, au prix peut-être de son intégrité spirituelle, que compromettent de subtiles et dangereus
9345 e de son intégrité spirituelle, que compromettent de subtiles et dangereuses contre-pénétrations. Une ère de toute-puissan
9346 tiles et dangereuses contre-pénétrations. Une ère de toute-puissance depuis le xvie siècle, de haute et unique culture de
9347 ne ère de toute-puissance depuis le xvie siècle, de haute et unique culture depuis le vie siècle avant Jésus-Christ, est
9348 ssistons. L’enjeu en sera demain l’existence même de notre continent. Nous mesurons la différence qui sépare la civilisati
9349 différence qui sépare la civilisation européenne de la civilisation occidentale, la seconde issue de la première, mais la
9350 de la civilisation occidentale, la seconde issue de la première, mais la transformant, la trahissant peut-être en la débo
9351 n. Il se pourrait que, dès aujourd’hui, le centre de gravité de l’Occident ne soit plus en Europe, et ceci nous invite à a
9352 urrait que, dès aujourd’hui, le centre de gravité de l’Occident ne soit plus en Europe, et ceci nous invite à analyser les
9353 té et ce que nous avions cru être l’intangibilité de notre puissance. Il suffisait à nos yeux que l’Europe existât, irrési
9354 s ce qu’elle était, où résidait le secret ressort de son incomparable hégémonie. Le secret de cette hégémonie, aux temps
9355 ressort de son incomparable hégémonie. Le secret de cette hégémonie, aux temps modernes, semble bien avoir résidé dans la
9356 ésidé dans la puissance industrielle et technique de notre continent. Mais le secret de cette puissance industrielle, où s
9357 e et technique de notre continent. Mais le secret de cette puissance industrielle, où se cache-t-il ? La source initiale
9358 ecque, car celle-ci avait discerné déjà l’essence de nos méthodes scientifiques modernes ; mais elle ne s’en était servie
9359 la contemplation, pour la recherche désintéressée de la connaissance (qu’on se rappelle les réserves de Platon sur la tech
9360 e la connaissance (qu’on se rappelle les réserves de Platon sur la technique, les excuses d’Archimède d’avoir utilisé sa s
9361 réserves de Platon sur la technique, les excuses d’ Archimède d’avoir utilisé sa science pour des fins pratiques !). Les r
9362 Platon sur la technique, les excuses d’Archimède d’ avoir utilisé sa science pour des fins pratiques !). Les réalisations
9363 que par une mise au point des méthodes anciennes de pensée. Le centre de gravité de la civilisation s’était déplacé vers
9364 point des méthodes anciennes de pensée. Le centre de gravité de la civilisation s’était déplacé vers les contrées du Nord
9365 éthodes anciennes de pensée. Le centre de gravité de la civilisation s’était déplacé vers les contrées du Nord où il faisa
9366 symboliquement, en 1764, avec la machine à vapeur de Watt, n’eût pu produire toutes ses immenses conséquences si ces « maî
9367 penser » que sont Descartes, l’ancêtre véritable de la rationalisation, Bacon, le père de l’induction, n’avaient mis au p
9368 e véritable de la rationalisation, Bacon, le père de l’induction, n’avaient mis au point l’instrument de raisonnement inte
9369 l’induction, n’avaient mis au point l’instrument de raisonnement intellectuel sans lequel la technique mécanique n’eût pa
9370 ue n’eût pas connu son étonnante fécondité. C’est de là qu’est issue, au xixe siècle, l’irrésistible hégémonie de l’Europ
9371 issue, au xixe siècle, l’irrésistible hégémonie de l’Europe. Jusqu’alors, l’Asie pouvait en somme opposer à l’Occident d
9372 nt cent-cinquante ans, l’Europe allait bénéficier d’ une avance industrielle telle que toute concurrence se manifesterait c
9373 voilà les deux dates qui encadrent cette période de l’histoire pendant laquelle l’Europe a indiscutablement dominé le mon
9374 t un optimum, car, alors qu’elle bénéficiait déjà de tous les avantages de la machine, elle continuait à alimenter sa forc
9375 rs qu’elle bénéficiait déjà de tous les avantages de la machine, elle continuait à alimenter sa force du dynamisme qu’elle
9376 à alimenter sa force du dynamisme qu’elle tenait de sa double conception de la connaissance et de l’individu. Il était ce
9377 dynamisme qu’elle tenait de sa double conception de la connaissance et de l’individu. Il était cependant impossible que c
9378 ait de sa double conception de la connaissance et de l’individu. Il était cependant impossible que ce monopole extraordina
9379 urs, car sa technique pouvait lui être empruntée, d’ autant plus qu’elle ne se faisait pas faute de la distribuer libéralem
9380 ibéralement. Cependant, loin de porter au crédit de l’Europe ce qu’elle lui a donné (mais en le conquérant !), le « tiers
9381  : Révolte d’abord simplement technique, affaire d’ ingénieurs et d’outillage, à laquelle l’Europe prêtait négligemment et
9382 ord simplement technique, affaire d’ingénieurs et d’ outillage, à laquelle l’Europe prêtait négligemment et imprudemment so
9383 sous l’égide du marxisme, la résonance passionnée d’ un dynamisme tourné contre l’Occident. Doctrine étonnante de puissance
9384 isme tourné contre l’Occident. Doctrine étonnante de puissance infuse, le marxisme se mue en instrument de revanche contre
9385 uissance infuse, le marxisme se mue en instrument de revanche contre nous. Tel que pratiqué en Russie, puis en Asie, il ap
9386 ioccidentale que réclamation sociale ou programme d’ industrialisation. Dans cette atmosphère nouvelle, l’acquisition d’un
9387 on. Dans cette atmosphère nouvelle, l’acquisition d’ un appareil mécanique, acclamé comme libérateur, se charge de passion
9388 il mécanique, acclamé comme libérateur, se charge de passion et c’est en termes mystiques qu’on salue le tracteur ou la ce
9389 jourd’hui l’accueil le plus convaincu. Quel sujet de réflexion pour le philosophe, pour un Bossuet du xixe siècle : la le
9390 r un Bossuet du xixe siècle : la leçon technique de l’Europe, transmise à l’Asie non par ses initiateurs, mais par l’entr
9391 sie non par ses initiateurs, mais par l’entremise d’ une Russie à peine européenne, disciple sans doute mais disciple révol
9392 péenne, disciple sans doute mais disciple révolté de l’Europe ! Mais que fera le « tiers-monde » de nos techniques, s’il
9393 é de l’Europe ! Mais que fera le « tiers-monde » de nos techniques, s’il ignore les secrets de leur origine et de leur vr
9394 onde » de nos techniques, s’il ignore les secrets de leur origine et de leur vraie fin, la liberté de la personne ? Ici s
9395 iques, s’il ignore les secrets de leur origine et de leur vraie fin, la liberté de la personne ? Ici se pose une question
9396 de leur origine et de leur vraie fin, la liberté de la personne ? Ici se pose une question fondamentale, celle de savoir
9397 e ? Ici se pose une question fondamentale, celle de savoir dans quelle mesure la civilisation européenne, transmise en ta
9398 le fût, ne s’était alimentée à la source profonde d’ une pensée créatrice, en possession de toutes les ressources du raison
9399 ce profonde d’une pensée créatrice, en possession de toutes les ressources du raisonnement logique. La charnière de l’espr
9400 ressources du raisonnement logique. La charnière de l’esprit logique et de son application pratique, ne nous y trompons p
9401 ment logique. La charnière de l’esprit logique et de son application pratique, ne nous y trompons pas, c’est chose jusqu’i
9402 la véritable supériorité occidentale, la pratique de l’Europe est efficace parce qu’elle se nourrit d’esprit. L’esprit sou
9403 de l’Europe est efficace parce qu’elle se nourrit d’ esprit. L’esprit souffle où il veut, c’est sa nature, mais il lui faut
9404 en effet, le praticien ne trouve pas en soi-même de quoi se renouveler et l’industrie s’étiole si elle croit tout devoir
9405 recettes qui y sont attachées, lui emprunte-t-il de ce fait son esprit créateur ? Les dons intellectuels de l’Asie sont i
9406 fait son esprit créateur ? Les dons intellectuels de l’Asie sont incontestables ; mais il y a une atmosphère, essentiellem
9407 il y a une atmosphère, essentiellement créatrice, de l’Europe, dont on peut se demander si elle est effectivement transpor
9408 est effectivement transportable. La revendication d’ un domaine où règne la liberté de l’esprit est typiquement européenne,
9409 La revendication d’un domaine où règne la liberté de l’esprit est typiquement européenne, et si nous y renoncions, nous ne
9410 lus nous-mêmes. Mais elle n’est nullement le fait de ces pays qui, sous l’égide Marx, se sont récemment engagés à fond dan
9411 urs conceptions totalitaires ne se contentent pas de méconnaître, elles condamnent intégralement tout dualisme susceptible
9412 ondamnent intégralement tout dualisme susceptible de ménager quelque jardin secret où la pensée puisse fleurir selon ses p
9413 s seulement le travailleur, agent presque anonyme d’ une collectivité qui l’absorbe. Or l’individu seul est créateur, et il
9414 l’esprit que par la technique. Telle est la leçon de deux-mille ans d’histoire ayant abouti à ce nouveau miracle qu’est l’
9415 a technique. Telle est la leçon de deux-mille ans d’ histoire ayant abouti à ce nouveau miracle qu’est l’étonnante marée te
9416 i déferle sur le monde. En indiquant le principe d’ un « programme pour l’Europe » assumant les contradictions inéluctable
9417 propre action, Siegfried rejoint les conclusions de Keyserling : À la vérité, il y a dans l’Europe une destinée contradi
9418 e contradictoire, due au caractère contradictoire de son génie. Pour renouveler le monde, il fallait que l’esprit européen
9419 ue l’esprit européen eût sa source dans un esprit de liberté critique, générateur de créations sans cesse renouvelées parc
9420 ce dans un esprit de liberté critique, générateur de créations sans cesse renouvelées parce que sans cesse discutées : la
9421 es unes avec les autres, reflète cette atmosphère de liberté créatrice. Mais c’est aussi de cette division invétérée que l
9422 atmosphère de liberté créatrice. Mais c’est aussi de cette division invétérée que l’Europe finit par pâtir, du fait de ses
9423 n invétérée que l’Europe finit par pâtir, du fait de ses guerres fratricides dans lesquelles elle s’épuise. Et cependant,
9424 le-même et surtout conserverait-elle la puissance de rénovation qui a marqué d’un trait de feu son passage dans l’histoire
9425 rait-elle la puissance de rénovation qui a marqué d’ un trait de feu son passage dans l’histoire ? De ce fait commence sous
9426 a puissance de rénovation qui a marqué d’un trait de feu son passage dans l’histoire ? De ce fait commence sous nos yeux u
9427 é d’un trait de feu son passage dans l’histoire ? De ce fait commence sous nos yeux une période nouvelle de l’évolution hu
9428 fait commence sous nos yeux une période nouvelle de l’évolution humaine, faisant suite à la période gréco-romaine-europée
9429 e ne remplaçant pas celle-ci dans ce qu’elle a eu d’ ailé, de spirituel, de divinement libre dans le rayonnement de son esp
9430 plaçant pas celle-ci dans ce qu’elle a eu d’ailé, de spirituel, de divinement libre dans le rayonnement de son esprit. L’â
9431 lle-ci dans ce qu’elle a eu d’ailé, de spirituel, de divinement libre dans le rayonnement de son esprit. L’âge qui vient,
9432 pirituel, de divinement libre dans le rayonnement de son esprit. L’âge qui vient, d’inspiration surtout technique, mesuran
9433 ns le rayonnement de son esprit. L’âge qui vient, d’ inspiration surtout technique, mesurant la supériorité de l’homme moin
9434 ration surtout technique, mesurant la supériorité de l’homme moins par la pensée que par le niveau de vie, repose sur une
9435 . On pourrait, dans ce contraste, trouver la base d’ un programme pour l’Europe d’aujourd’hui et de demain. Encore faudrait
9436 ste, trouver la base d’un programme pour l’Europe d’ aujourd’hui et de demain. Encore faudrait-il qu’elle conserve un corps
9437 ase d’un programme pour l’Europe d’aujourd’hui et de demain. Encore faudrait-il qu’elle conserve un corps, susceptible de
9438 audrait-il qu’elle conserve un corps, susceptible de servir de support à ce qui lui reste d’âme. 4.L’Unité dans la div
9439 qu’elle conserve un corps, susceptible de servir de support à ce qui lui reste d’âme. 4.L’Unité dans la diversité Fon
9440 sceptible de servir de support à ce qui lui reste d’ âme. 4.L’Unité dans la diversité Fondement de l’Union fédérale
9441 d’âme. 4.L’Unité dans la diversité Fondement de l’Union fédérale Si telle est bien la vocation particulière de l’E
9442 ale Si telle est bien la vocation particulière de l’Europe dans le Monde réveillé par nos œuvres, deux conclusions géné
9443 ons générales en résultent : 1° l’union politique de nos peuples est désormais la condition non seulement de leur survie m
9444 peuples est désormais la condition non seulement de leur survie mais du juste exercice de leur fonction mondiale ; 2° cet
9445 n seulement de leur survie mais du juste exercice de leur fonction mondiale ; 2° cette union doit prendre la forme que dic
9446 res historiques et vivantes du complexe organisme de notre culture : donc une forme fédéraliste. L’union politique suppos
9447 fédéraliste. L’union politique suppose une prise de « conscience européenne commune », disait Christopher Dawson dès 1932
9448 du xviiie et du xixe siècle, quand le prestige de la civilisation européenne était tel qu’elle semblait n’avoir point d
9449 ropéenne était tel qu’elle semblait n’avoir point de rivales et qu’elle s’identifiait à la civilisation en général, il éta
9450 vilisation en général, il était sans doute facile de perdre de vue cette unité ; mais il n’en va plus du tout de même aujo
9451 en général, il était sans doute facile de perdre de vue cette unité ; mais il n’en va plus du tout de même aujourd’hui, o
9452 lus du tout de même aujourd’hui, où l’on conteste de tous côtés l’hégémonie de l’Europe ; où il devient impossible de cons
9453 d’hui, où l’on conteste de tous côtés l’hégémonie de l’Europe ; où il devient impossible de considérer plus longtemps la R
9454 ’hégémonie de l’Europe ; où il devient impossible de considérer plus longtemps la Russie et l’Amérique comme des colonies
9455 gtemps la Russie et l’Amérique comme des colonies de culture européenne, puisqu’elles commencent à rivaliser avec l’Europe
9456 tions qui leur sont propres, où enfin les peuples de l’Orient font valoir à nouveau les droits de la civilisation oriental
9457 ples de l’Orient font valoir à nouveau les droits de la civilisation orientale et où nous-mêmes nous perdons notre confian
9458 nous perdons notre confiance dans la supériorité de nos traditions. Personne, malheureusement, n’a la charge de plaider
9459 itions. Personne, malheureusement, n’a la charge de plaider la cause de l’Europe. Chaque nation, du fait qu’elle existe,
9460 alheureusement, n’a la charge de plaider la cause de l’Europe. Chaque nation, du fait qu’elle existe, se crée tout un ense
9461 du fait qu’elle existe, se crée tout un ensemble d’ intérêts auxquels est lié le soin de sa défense ; la cause de l’intern
9462 t un ensemble d’intérêts auxquels est lié le soin de sa défense ; la cause de l’internationalisme a, elle aussi, ses champ
9463 auxquels est lié le soin de sa défense ; la cause de l’internationalisme a, elle aussi, ses champions dans les forces du l
9464 dans les forces du libéralisme, du socialisme et de la finance internationale ; il n’est pas jusqu’aux civilisations orie
9465 ilisations orientales qui n’aient pris conscience d’ elles-mêmes en empruntant au nationalisme occidental ses formes et en
9466 mes et en développant, à leur tour, sur le modèle de la propagande occidentale, une propagande nationaliste ; mais personn
9467 ongé à nommer l’Europe une nation. Aussi la cause de l’Europe est-elle d’avance perdue, par défaut. Si pourtant notre civi
9468 e une nation. Aussi la cause de l’Europe est-elle d’ avance perdue, par défaut. Si pourtant notre civilisation doit survivr
9469 ce européenne commune et qu’elle acquière le sens de son unité historique et organique. On n’a pas à craindre de porter ai
9470 té historique et organique. On n’a pas à craindre de porter ainsi préjudice à la cause de la paix internationale ou d’accr
9471 s à craindre de porter ainsi préjudice à la cause de la paix internationale ou d’accroître l’hostilité entre l’Europe et l
9472 préjudice à la cause de la paix internationale ou d’ accroître l’hostilité entre l’Europe et les sociétés non européennes.
9473 étés non européennes. L’Oriental qui nous en veut de notre arrogante prétention à affirmer que notre civilisation est la s
9474 qui compte, regardera celle-ci, sans aucun doute, d’ un œil beaucoup plus sympathique lorsqu’il apercevra le tout spirituel
9475 éhension mutuelle309. Quant à l’unité culturelle de base, sur laquelle devra s’édifier notre fédération, il s’agit de la
9476 uelle devra s’édifier notre fédération, il s’agit de la retrouver et de la restituer, en deçà et au-delà des « nations » c
9477 er notre fédération, il s’agit de la retrouver et de la restituer, en deçà et au-delà des « nations » constituées au cours
9478 es : … Seulement, avant qu’il nous soit possible de donner à la culture européenne la place qui lui revient dans la socié
9479 ce qui lui revient dans la société internationale de l’avenir, il faut nous défaire des fausses représentations du passé q
9480 du dernier siècle et recouvrer le sens historique de la tradition européenne ; il nous faut récrire notre histoire du poin
9481 européen et nous donner, pour comprendre l’unité de notre civilisation commune, autant de peine que nous en avons pris po
9482 dre l’unité de notre civilisation commune, autant de peine que nous en avons pris pour étudier nos individualités national
9483 énéralement admise est dû avant tout à ce qu’on a d’ ordinaire écrit l’histoire moderne du point de vue nationaliste. Quelq
9484 isme, et leurs histoires sont souvent des manuels de propagande nationaliste. Cette tendance est manifeste tant chez les h
9485 ilosophes, qui tenaient l’idéalisation hégélienne de l’État pour la suprême expression de l’idée universelle, que chez des
9486 n hégélienne de l’État pour la suprême expression de l’idée universelle, que chez des écrivains comme Treitschke et Froude
9487 reitschke et Froude, qui furent les représentants d’ un nationalisme purement politique. Au cours du xixe siècle, la consc
9488 conscience populaire en a été imprégnée, et c’est de là qu’est issue la conception que l’homme moyen se fait de l’histoire
9489 est issue la conception que l’homme moyen se fait de l’histoire. Celle-ci a filtré de l’Université à l’école primaire et d
9490 me moyen se fait de l’histoire. Celle-ci a filtré de l’Université à l’école primaire et du penseur au journaliste et au ro
9491 ncier. Il en résulte que chaque nation se réclame d’ une unité et d’une indépendance de culture qu’elle ne possède point et
9492 sulte que chaque nation se réclame d’une unité et d’ une indépendance de culture qu’elle ne possède point et que chacune co
9493 tion se réclame d’une unité et d’une indépendance de culture qu’elle ne possède point et que chacune considère son lot de
9494 ne possède point et que chacune considère son lot de tradition européenne comme son œuvre propre et originale, sans tenir
9495 elle a miné et vicié toute la vie internationale de l’Europe moderne, elle a trouvé sa revanche dans la guerre européenne
9496 la guerre européenne, qui a provoqué dans la vie de l’Europe un schisme beaucoup plus profond que toutes les guerres pass
9497 dans les folles rivalités nationales qui menacent de ruiner l’économie de l’Europe entière. … Le mal du nationalisme ne ré
9498 ités nationales qui menacent de ruiner l’économie de l’Europe entière. … Le mal du nationalisme ne réside ni dans sa fidél
9499 aux traditions du passé, ni dans sa revendication de l’unité nationale et du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, mai
9500 nité nationale et du droit des peuples à disposer d’ eux-mêmes, mais bien plutôt dans le fait qu’il identifie cette unité à
9501 ans le fait qu’il identifie cette unité à l’unité de culture, laquelle dépasse les nations. Les vrais fondements de notre
9502 aquelle dépasse les nations. Les vrais fondements de notre culture sont non pas l’État national, mais l’unité européenne.3
9503 te thèse que se sont attachés les historiographes de l’Europe considérée comme unité de culture. C’est pourquoi la plupart
9504 istoriographes de l’Europe considérée comme unité de culture. C’est pourquoi la plupart — de Dawson à Heer en passant par
9505 mme unité de culture. C’est pourquoi la plupart —  de Dawson à Heer en passant par Halphen, Marc Bloch, Reynold, Denys Hay
9506 her — ont centré leurs travaux sur la « formation de l’Europe », c’est-à-dire sur les périodes pré-nationales de notre his
9507 e », c’est-à-dire sur les périodes pré-nationales de notre histoire. Le plus récent d’entre eux, Henri Brugmans, résume en
9508 , des entités immuables : elle n’est pas la somme de leurs histoires nationales juxtaposées. C’est l’Europe, au contraire,
9509 e nationalisme fut international, et les conflits de l’impérialisme moderne démontrent une convergence européenne des appé
9510 ctivité européenne et son destin forment la toile de fond de notre histoire. … Civilisation incomparablement dynamique, l’
9511 européenne et son destin forment la toile de fond de notre histoire. … Civilisation incomparablement dynamique, l’Europe r
9512 grandes autorités traditionnelles. Les variations de son histoire ne s’expliquent que par un fonds commun.311 Il est fra
9513 ent que par un fonds commun.311 Il est frappant de constater que l’unanimité des auteurs qui ont contribué au xxe siècl
9514 contribué au xxe siècle à la prise de conscience de notre unité de culture, la conçoivent comme unité dans la diversité.
9515 e siècle à la prise de conscience de notre unité de culture, la conçoivent comme unité dans la diversité. Mais qu’entende
9516 meuse diversité ? S’agirait-il d’abord et surtout de la multiplicité de nos nations actuelles, comme on le croit trop faci
9517 ’agirait-il d’abord et surtout de la multiplicité de nos nations actuelles, comme on le croit trop facilement ? Non, la di
9518 ractère progressif, nous ne pouvons nous empêcher de dresser l’oreille. Cet homme sait ce qu’il dit… La liberté et le plur
9519 constituent toutes les deux l’essence permanente de l’Europe. Le découpage de l’Europe moderne en nations n’exprime pas
9520 x l’essence permanente de l’Europe. Le découpage de l’Europe moderne en nations n’exprime pas cette « essence permanente 
9521 écondes, mais au contraire, explique le sentiment de paralysie et de décadence qui a régné sur la première moitié de notre
9522 contraire, explique le sentiment de paralysie et de décadence qui a régné sur la première moitié de notre siècle312 : La
9523 t de décadence qui a régné sur la première moitié de notre siècle312 : La seule chose qui apparaisse (et sans grande préc
9524 sion) lorsqu’on veut définir l’actuelle décadence de l’Europe, c’est l’ensemble des difficultés économiques devant lesquel
9525 . Mais quand on veut préciser un peu le caractère de ces difficultés, on remarque qu’aucune d’elles n’affecte sérieusement
9526 ractère de ces difficultés, on remarque qu’aucune d’ elles n’affecte sérieusement le pouvoir de création de richesse, et qu
9527 ’aucune d’elles n’affecte sérieusement le pouvoir de création de richesse, et que l’ancien continent est passé par des cri
9528 les n’affecte sérieusement le pouvoir de création de richesse, et que l’ancien continent est passé par des crises de ce ge
9529 t que l’ancien continent est passé par des crises de ce genre beaucoup plus graves. Est-ce que, par hasard, l’Allemand ou
9530 glais ne se sentiraient plus capables aujourd’hui de produire plus et mieux que jamais ? Pas du tout. Et il importe beauco
9531 Et il importe beaucoup de définir l’état d’esprit de cet Allemand ou de cet Anglais dans cette dimension de l’économique.
9532 oup de définir l’état d’esprit de cet Allemand ou de cet Anglais dans cette dimension de l’économique. Car le fait véritab
9533 t Allemand ou de cet Anglais dans cette dimension de l’économique. Car le fait véritablement curieux est précisément que l
9534 blement curieux est précisément que la dépression de leurs âmes ne provient pas de ce qu’ils se sentent peu capables, mais
9535 t que la dépression de leurs âmes ne provient pas de ce qu’ils se sentent peu capables, mais au contraire de ce que, senta
9536 t à certaines barrières fatales qui les empêchent de réaliser ce qu’ils pourraient fort bien faire. Ces frontières fatales
9537 ourraient fort bien faire. Ces frontières fatales de l’économie actuelle allemande, anglaise, française, sont les frontièr
9538 nomiques qui se posent, mais dans ce que la forme de vie publique où doivent se mouvoir les capacités économiques, n’est p
9539 sur l’âme continentale ressemble beaucoup à celui de l’oiseau à grandes ailes qui, en battant l’air, se blesse contre les
9540 , en battant l’air, se blesse contre les barreaux de sa cage. La meilleure preuve en est que cette combinaison se répète d
9541 s se sent aujourd’hui à l’étroit dans les limites de sa nation, sent sa nationalité comme une limitation absolue… Si l’on
9542 périence purement imaginaire — à vivre uniquement de ce que nous sommes, en tant que « nationaux », et que, par un artific
9543 errifié. Il verrait qu’il ne lui est pas possible de vivre avec ce maigre recours purement national, mais que les quatre c
9544 purement national, mais que les quatre cinquièmes de son avoir intime sont des biens de la communauté européenne. On ne vo
9545 tre cinquièmes de son avoir intime sont des biens de la communauté européenne. On ne voit guère quelle autre chose d’impor
9546 é européenne. On ne voit guère quelle autre chose d’ importance nous pourrions bien faire, nous qui existons de ce côté de
9547 ance nous pourrions bien faire, nous qui existons de ce côté de la planète, si ce n’est de réaliser la promesse que, depui
9548 ourrions bien faire, nous qui existons de ce côté de la planète, si ce n’est de réaliser la promesse que, depuis quatre si
9549 ui existons de ce côté de la planète, si ce n’est de réaliser la promesse que, depuis quatre siècles, signifie le mot Euro
9550 ppose le préjugé des vieilles « nations », l’idée de nation en tant que passé. On va voir de nos jours si les Européens so
9551 », l’idée de nation en tant que passé. On va voir de nos jours si les Européens sont eux aussi les enfants de la femme de
9552 jours si les Européens sont eux aussi les enfants de la femme de Loth et s’ils s’obstinent à faire de l’Histoire en regard
9553 Européens sont eux aussi les enfants de la femme de Loth et s’ils s’obstinent à faire de l’Histoire en regardant derrière
9554 de la femme de Loth et s’ils s’obstinent à faire de l’Histoire en regardant derrière eux. Quant à lui, Ortega croit que
9555 eux. Quant à lui, Ortega croit que la nécessité de l’union politique est inscrite dans nos réalités présentes : L’unit
9556 inscrite dans nos réalités présentes : L’unité de l’Europe n’est pas une fantaisie. Elle est la réalité même ; et ce qu
9557 s, ne soit pas près de créer l’appareil politique d’ un État, pour donner une forme à l’exercice du pouvoir public européen
9558 storique qui m’a appris à reconnaître que l’unité de l’Europe comme société n’est pas un idéal mais un fait de très ancien
9559 ope comme société n’est pas un idéal mais un fait de très ancienne quotidienneté. Et lorsqu’on a vu cela, la probabilité d
9560 idienneté. Et lorsqu’on a vu cela, la probabilité d’ un État général européen s’impose mécaniquement. Quant à l’occasion qu
9561 n terme, elle peut être Dieu sait quoi ! la natte d’ un Chinois émergeant de derrière les Ourals ou bien la secousse du gra
9562 Dieu sait quoi ! la natte d’un Chinois émergeant de derrière les Ourals ou bien la secousse du grand magma islamique.313
9563 que l’union est inscrite dans la logique profonde de l’Europe : L’Europe se constitue parce que ce qu’il y a de commun ch
9564 e : L’Europe se constitue parce que ce qu’il y a de commun chez tous les Européens prend de plus en plus d’importance par
9565 mun chez tous les Européens prend de plus en plus d’ importance par rapport à ce qui les sépare, en face d’une humanité non
9566 onc, une « Europe » vivante se forme comme membre de l’œcuménicité humaine. Chez tous les esprits dirigeants elle existe d
9567 cet inconscient qui décide, en dernière instance, de la position par rapport au monde extérieur — commence à agir dans la
9568 caractère allemand pouvait être considérée comme d’ une importance primaire. Aujourd’hui c’est la conscience de la différe
9569 ortance primaire. Aujourd’hui c’est la conscience de la différence par rapport au caractère russe et surtout au caractère
9570 asiatique qui prédomine. […] Ainsi les habitants de l’Europe prennent de plus en plus conscience qu’il y a en Europe, au-
9571 es cultures, une nouvelle réalité vivante : celle de l’Européen. En conséquence, le Français, l’Allemand, etc., deviennent
9572 Français, l’Allemand, etc., deviennent différents de ce qu’ils étaient autrefois : c’est que leurs relations avec le tout
9573 s avec le tout se sont modifiées. L’instauration d’ une « supranationalité » européenne (le terme apparaît ici pour la pre
9574 ne doit cependant pas entraîner l’uniformisation de nos peuples. D’une part, face aux autres cultures, nos oppositions in
9575 enne, elles feront place à un sentiment plus fort de complémentarité dans la diversité des styles : L’Européen, et avec l
9576 écessité naturelle. Il se constitue comme produit de différenciation spécifique au sein de l’humanité sentie intérieuremen
9577 n plus prédominer chez les Européens le sentiment de ce qui les unit sur ce qui les sépare. Or, si notre voyage spirituel
9578 ation. C’est pourquoi il ne saurait être question d’ une unification effaçant les différences, si on aspire à un avenir mei
9579 rences, si on aspire à un avenir meilleur. Exiger de l’Europe qu’elle s’unifie comme l’Amérique ou la Russie, c’est la méc
9580 oir sa ruine. Si tout va bien, une nouvelle unité d’ ordre supérieur se constituera au-dessus des nations, lesquelles subsi
9581 e, avec leur ancienne vigueur… … La glorification de sa propre nation au détriment des autres, qui jusqu’à présent allait
9582 Grillparzer, lorsqu’il déclarait que « le chemin de l’humanité, en passant par la nationalité, mène à la bestialité ». Le
9583 Certes, Keyserling ne sous-estime pas les dangers d’ un « supranationalisme virulent », mais il y voit cependant un progrès
9584 e le fut jamais ; ce serait l’équivalent européen de l’américanisme messianique. Il va sans dire que l’Européen, lui non p
9585 peut devenir supérieur à n’importe quel habitant de l’ancienne Europe, parce qu’il est d’envergure plus vaste. Toute supé
9586 el habitant de l’ancienne Europe, parce qu’il est d’ envergure plus vaste. Toute supériorité repose sur l’intégration en un
9587 supériorité repose sur l’intégration en une unité d’ ordre supérieur des éléments qui, dans leur plan, s’excluaient mutuell
9588 observions plus haut que les diversités fécondes de l’Europe existent sur un plan plus profond et plus organique que celu
9589 que celui du fait national. Paul Valéry, tentant de définir l’Europe, ne mentionne même pas la nation au nombre des diver
9590 . Au point de vue physique, c’est un chef-d’œuvre de tempérament et de rapprochement des conditions favorables à l’homme.
9591 physique, c’est un chef-d’œuvre de tempérament et de rapprochement des conditions favorables à l’homme. Et l’homme y est d
9592 l’homme y est devenu l’Européen. Vous m’excuserez de donner à ces mots d’Europe et d’Européen une signification un peu plu
9593 l’Européen. Vous m’excuserez de donner à ces mots d’ Europe et d’Européen une signification un peu plus que géographique, e
9594 Vous m’excuserez de donner à ces mots d’Europe et d’ Européen une signification un peu plus que géographique, et un peu plu
9595 onctionnelle. Je dirai presque, ma pensée abusant de mon langage, qu’une Europe est une espèce de système formé d’une cert
9596 sant de mon langage, qu’une Europe est une espèce de système formé d’une certaine diversité humaine et d’une localité part
9597 ge, qu’une Europe est une espèce de système formé d’ une certaine diversité humaine et d’une localité particulièrement favo
9598 système formé d’une certaine diversité humaine et d’ une localité particulièrement favorable ; façonnée enfin par une histo
9599 singulièrement mouvementée et vivante. Le produit de cette conjoncture de circonstances est un Européen. Valéry, écrivant
9600 entée et vivante. Le produit de cette conjoncture de circonstances est un Européen. Valéry, écrivant en 1922, dans une Fr
9601 nnoncer le dépassement des nations et l’avènement d’ une fédération démocratique, lorsqu’on écrivait en Allemagne : c’est c
9602 e fut publié qu’en 1946. Approfondissant le thème de l’unité dans la diversité, Jünger imagine qu’une future Constitution
9603 des deux principes maintenus en tension : l’unité d’ organisation devrait régner sur l’économie, la technique, le commerce,
9604 oteur, l’avion, la radio et l’énergie jaillissant de l’atome le signifient aujourd’hui sur d’autres plans et dans d’autres
9605 e serait devenu trop étroit. Au libre déploiement de nos moyens s’opposent les frontières et les structures nationales et
9606 des biens. Ceci vaut surtout pour l’Europe, riche d’ un antique héritage et qui porte en multiples fragments le fardeau de
9607 ge et qui porte en multiples fragments le fardeau de l’Histoire vécue et soufferte. On comprend alors que ce soit ici, en
9608 itesse héritée. … Il s’agit, dans cette fondation de l’Europe, de conférer une unité géopolitique à un espace divisé par l
9609 e. … Il s’agit, dans cette fondation de l’Europe, de conférer une unité géopolitique à un espace divisé par l’évolution hi
9610 ce divisé par l’évolution historique. … Le besoin d’ espace sera satisfait par l’union des peuples ; et il n’est pas de sol
9611 tisfait par l’union des peuples ; et il n’est pas de solution plus juste. Les formes de vie commune dans la maison nouvell
9612 t il n’est pas de solution plus juste. Les formes de vie commune dans la maison nouvelle seront instaurées par la Constitu
9613 itution. Entrer ici dans les détails n’aurait pas de sens. Mais il est deux principes supérieurs qui doivent s’exprimer da
9614 les deux tendances qui se partagent la démocratie de notre temps, celle de l’État libéral et celle de l’État autoritaire.
9615 se partagent la démocratie de notre temps, celle de l’État libéral et celle de l’État autoritaire. Les deux sont valables
9616 de notre temps, celle de l’État libéral et celle de l’État autoritaire. Les deux sont valables et motivées, et pourtant l
9617 otalement livrée au libre arbitre. Il s’agit donc de distinguer les niveaux auxquels chacune d’elles est le mieux adaptée.
9618 t donc de distinguer les niveaux auxquels chacune d’ elles est le mieux adaptée. Les formes autoritaires de l’ordre étatiqu
9619 les est le mieux adaptée. Les formes autoritaires de l’ordre étatique sont adéquates là où les hommes et les choses sont t
9620 e plus profonde est à l’œuvre… Doit être organisé d’ une manière uniforme tout ce qui relève de la technique, de l’industri
9621 rganisé d’une manière uniforme tout ce qui relève de la technique, de l’industrie, de l’économie, des transports, du comme
9622 ière uniforme tout ce qui relève de la technique, de l’industrie, de l’économie, des transports, du commerce, des mesures,
9623 ut ce qui relève de la technique, de l’industrie, de l’économie, des transports, du commerce, des mesures, et de la défens
9624 mie, des transports, du commerce, des mesures, et de la défense… La liberté au contraire doit régner dans le multiple et l
9625 et leur religion. Là, il ne saurait y avoir trop de couleurs sur la palette. La Constitution européenne doit donc disting
9626 r avec art, comme cadre et tableau, ce qui relève de la civilisation et ce qui relève de la culture, pour mieux les réunir
9627 ce qui relève de la civilisation et ce qui relève de la culture, pour mieux les réunir au bénéfice de l’homme. Elle doit c
9628 de la culture, pour mieux les réunir au bénéfice de l’homme. Elle doit créer un espace politique unifié en tenant compte
9629 mplique également que soient délimités le domaine de la technique et celui de la vie organique. L’État symbole suprême de
9630 ent délimités le domaine de la technique et celui de la vie organique. L’État symbole suprême de la technique, jette son f
9631 celui de la vie organique. L’État symbole suprême de la technique, jette son filet sur les peuples, mais ils vivent en lib
9632 a protection. L’Histoire ensuite interviendra, et de nouveaux contenus apparaîtront… Dans ce cadre, grands et petits peupl
9633 grands et petits peuples s’épanouiront avec plus de vigueur qu’auparavant. À mesure que la concurrence des nations s’étei
9634 ais (destinés à la radio allemande) sur « L’Unité de la culture européenne ». Les rapports entre la culture et la politiqu
9635 t clairement définis316 : La structure politique d’ une nation affecte sa culture, et inversement. Mais nos divers pays au
9636 alors qu’ils ont trop peu de contacts sur le plan de la culture. Or, le fait de confondre culture et politique peut mener
9637 e contacts sur le plan de la culture. Or, le fait de confondre culture et politique peut mener dans deux directions différ
9638 toutes les cultures avoisinantes. Une des erreurs de l’Allemagne hitlérienne a été précisément de poser en principe que to
9639 eurs de l’Allemagne hitlérienne a été précisément de poser en principe que toute culture autre que la sienne était ou déca
9640 était ou décadente ou barbare. Finissons-en avec de telles prétentions ! L’autre aboutissement possible d’une confusion d
9641 lles prétentions ! L’autre aboutissement possible d’ une confusion de la politique et de la culture, c’est l’idéal d’un Éta
9642  ! L’autre aboutissement possible d’une confusion de la politique et de la culture, c’est l’idéal d’un État mondial dans l
9643 ement possible d’une confusion de la politique et de la culture, c’est l’idéal d’un État mondial dans lequel, pour finir,
9644 n de la politique et de la culture, c’est l’idéal d’ un État mondial dans lequel, pour finir, il n’y aurait plus qu’une seu
9645 re uniforme. Je ne critique pas tel ou tel projet d’ organisation mondiale. Ces projets relèvent du domaine de l’organisati
9646 isation mondiale. Ces projets relèvent du domaine de l’organisation, de l’ingéniosité organisatrice. Et certes, il faut un
9647 es projets relèvent du domaine de l’organisation, de l’ingéniosité organisatrice. Et certes, il faut une organisation, et
9648 a pas vous plaindre si vous constatez qu’un gland de chêne a produit un chêne au lieu de produire un orme. Or, une structu
9649 hommes ; et partiellement croissance liée à celle de la culture d’une nation donnée et se nourrissant d’elle — et dans cet
9650 rtiellement croissance liée à celle de la culture d’ une nation donnée et se nourrissant d’elle — et dans cette mesure elle
9651 la culture d’une nation donnée et se nourrissant d’ elle — et dans cette mesure elle est différente de la structure politi
9652 d’elle — et dans cette mesure elle est différente de la structure politique d’autres nations. Il importe d’être bien clair
9653 structure politique d’autres nations. Il importe d’ être bien clair sur le sens que nous donnons à ce mot de « culture »,
9654 bien clair sur le sens que nous donnons à ce mot de « culture », de manière à faire clairement ressortir la distinction e
9655 tion entre, d’une part, l’organisation matérielle de l’Europe, et, d’autre part, cet organisme spirituel propre qu’est l’E
9656 ent ne sera plus l’Europe, mais une foule amorphe d’ êtres humains parlant différentes langues. Ajoutons que ces êtres huma
9657 ues. Ajoutons que ces êtres humains n’auront plus de raison valable de parler des langues différentes, parce qu’ils n’auro
9658 ces êtres humains n’auront plus de raison valable de parler des langues différentes, parce qu’ils n’auront plus rien à dir
9659 oir une culture « européenne » si les divers pays d’ Europe sont isolés les uns des autres ; j’ajouterai à présent qu’il ne
9660 opéenne si ces divers pays sont ramenés à un état d’ uniformité. Nous avons besoin de diversité dans l’unité ; non pas dans
9661 ramenés à un état d’uniformité. Nous avons besoin de diversité dans l’unité ; non pas dans l’unité d’organisation mais dan
9662 de diversité dans l’unité ; non pas dans l’unité d’ organisation mais dans l’unité de nature. T. S. Eliot met en garde co
9663 pas dans l’unité d’organisation mais dans l’unité de nature. T. S. Eliot met en garde contre toute planification européen
9664 ne qui ne respecterait pas la nature particulière de notre unité culturelle317 : Le monde occidental tient son unité prop
9665 317 : Le monde occidental tient son unité propre de son patrimoine culturel, du christianisme et des anciennes civilisati
9666 , du christianisme et des anciennes civilisations de la Grèce, de Rome et d’Israël, dont deux millénaires de chrétienté no
9667 nisme et des anciennes civilisations de la Grèce, de Rome et d’Israël, dont deux millénaires de chrétienté nous ont tous f
9668 s anciennes civilisations de la Grèce, de Rome et d’ Israël, dont deux millénaires de chrétienté nous ont tous faits les hé
9669 Grèce, de Rome et d’Israël, dont deux millénaires de chrétienté nous ont tous faits les héritiers… C’est cette unité défin
9670 placer ce que nous donne cette unité fondamentale de culture. Si nous dissipons ou si nous aliénons ce commun patrimoine c
9671 esprits les plus ingénieux, ne pourra nous tirer d’ affaire ou nous rapprocher les uns des autres. Cette unité culturelle,
9672 traire une pluralité des allégeances. Il est faux de penser que le seul devoir de l’individu serait son devoir envers l’Ét
9673 geances. Il est faux de penser que le seul devoir de l’individu serait son devoir envers l’État ; et il est exorbitant de
9674 t son devoir envers l’État ; et il est exorbitant de considérer comme le devoir suprême de l’individu celui qui le lierait
9675 exorbitant de considérer comme le devoir suprême de l’individu celui qui le lierait à quelque super-État. Quant à cette
9676 ierait à quelque super-État. Quant à cette unité de culture toute nourrie de nos diversités, T. S. Eliot en donne un exem
9677 at. Quant à cette unité de culture toute nourrie de nos diversités, T. S. Eliot en donne un exemple d’autant plus frappan
9678 e nos diversités, T. S. Eliot en donne un exemple d’ autant plus frappant qu’il est emprunté au domaine de la poésie, que l
9679 utant plus frappant qu’il est emprunté au domaine de la poésie, que le romantisme nous faisait considérer comme le plus « 
9680 nal » et le plus fermé aux échanges318 : L’unité de la culture européenne est un sujet très vaste, en vérité, et nul ne d
9681 iculière qu’il possède… Je suis poète et critique de la poésie. Je tenterai de montrer ce que cette profession peut avoir
9682 suis poète et critique de la poésie. Je tenterai de montrer ce que cette profession peut avoir à faire avec mon sujet et
9683 expérience me conduit. On a souvent soutenu que, de toutes les langues de l’Europe moderne, c’est l’anglais qui offre le
9684 . On a souvent soutenu que, de toutes les langues de l’Europe moderne, c’est l’anglais qui offre le plus de richesses à qu
9685 Europe moderne, c’est l’anglais qui offre le plus de richesses à qui veut écrire de la poésie. Je le crois pour ma part. E
9686 qui offre le plus de richesses à qui veut écrire de la poésie. Je le crois pour ma part. Et j’en vois la raison dans la v
9687 conquête normande. Survient alors une succession d’ influences françaises, vérifiables grâce aux mots adoptés à différente
9688 … Enfin, moins facile à détecter, mais à mon sens d’ une importance considérable, il y a l’élément celtique. Mais je ne pen
9689 bord, à propos de la poésie, aux Rythmes. Chacune de ces langues a apporté sa musique propre, et la richesse poétique de l
9690 pporté sa musique propre, et la richesse poétique de l’anglais consiste surtout dans la variété de ses éléments métriques.
9691 que de l’anglais consiste surtout dans la variété de ses éléments métriques. Voici le rythme des premiers vers saxons, le
9692 franco-normand, le rythme gallois, et l’influence de générations d’étude de la poésie latine et grecque. Aujourd’hui encor
9693 le rythme gallois, et l’influence de générations d’ étude de la poésie latine et grecque. Aujourd’hui encore, l’anglais di
9694 me gallois, et l’influence de générations d’étude de la poésie latine et grecque. Aujourd’hui encore, l’anglais dispose de
9695 et grecque. Aujourd’hui encore, l’anglais dispose de possibilités permanentes de se rafraîchir à ces sources : sans même p
9696 re, l’anglais dispose de possibilités permanentes de se rafraîchir à ces sources : sans même parler du vocabulaire, les po
9697 péennes. La possibilité, pour chaque littérature, de se renouveler, d’accéder à une nouvelle étape créatrice, et de découv
9698 ilité, pour chaque littérature, de se renouveler, d’ accéder à une nouvelle étape créatrice, et de découvrir de nouveaux us
9699 ler, d’accéder à une nouvelle étape créatrice, et de découvrir de nouveaux usages des mots, dépend de deux choses : premiè
9700 r à une nouvelle étape créatrice, et de découvrir de nouveaux usages des mots, dépend de deux choses : premièrement, de sa
9701 de découvrir de nouveaux usages des mots, dépend de deux choses : premièrement, de sa faculté d’assimiler des influences
9702 s des mots, dépend de deux choses : premièrement, de sa faculté d’assimiler des influences étrangères, secondement, de sa
9703 pend de deux choses : premièrement, de sa faculté d’ assimiler des influences étrangères, secondement, de sa faculté de rev
9704 assimiler des influences étrangères, secondement, de sa faculté de revenir à ses sources et de s’en instruire. Quant à la
9705 influences étrangères, secondement, de sa faculté de revenir à ses sources et de s’en instruire. Quant à la première condi
9706 dement, de sa faculté de revenir à ses sources et de s’en instruire. Quant à la première condition : lorsque les diverses
9707 première condition : lorsque les diverses nations de l’Europe sont coupées les unes des autres et que les poètes ne lisent
9708 unes des autres et que les poètes ne lisent plus d’ autre littérature que celle de leur propre langue, la poésie dépérit n
9709 ètes ne lisent plus d’autre littérature que celle de leur propre langue, la poésie dépérit nécessairement dans chaque pays
9710 s qui lui soient propres et qui remontent du fond de son histoire ; mais d’une importance au moins égale m’apparaissent le
9711 s et qui remontent du fond de son histoire ; mais d’ une importance au moins égale m’apparaissent les sources auxquelles no
9712 xquelles nous puisons en commun, les littératures de Rome, de la Grèce et d’Israël. Ce que j’ai dit de la poésie me paraît
9713 nous puisons en commun, les littératures de Rome, de la Grèce et d’Israël. Ce que j’ai dit de la poésie me paraît aussi vr
9714 commun, les littératures de Rome, de la Grèce et d’ Israël. Ce que j’ai dit de la poésie me paraît aussi vrai des autres a
9715 de Rome, de la Grèce et d’Israël. Ce que j’ai dit de la poésie me paraît aussi vrai des autres arts… Dans la pratique de c
9716 raît aussi vrai des autres arts… Dans la pratique de chacun d’eux nous découvrons les trois mêmes éléments : la tradition
9717 vrai des autres arts… Dans la pratique de chacun d’ eux nous découvrons les trois mêmes éléments : la tradition locale, la
9718 ion européenne commune, et l’influence réciproque de l’art d’un pays sur celui d’un autre. Nul n’a mieux illustré ces éch
9719 éenne commune, et l’influence réciproque de l’art d’ un pays sur celui d’un autre. Nul n’a mieux illustré ces échanges d’i
9720 influence réciproque de l’art d’un pays sur celui d’ un autre. Nul n’a mieux illustré ces échanges d’influences au sein de
9721 d’un autre. Nul n’a mieux illustré ces échanges d’ influences au sein de l’unité foncière de la littérature européenne qu
9722 échanges d’influences au sein de l’unité foncière de la littérature européenne que celui qui fut le plus grand « comparati
9723 que celui qui fut le plus grand « comparatiste » de la littérature de notre temps : Ernst Robert Curtius. Dans l’introduc
9724 le plus grand « comparatiste » de la littérature de notre temps : Ernst Robert Curtius. Dans l’introduction de son dernie
9725 temps : Ernst Robert Curtius. Dans l’introduction de son dernier ouvrage il insiste sur l’impossibilité d’interpréter aucu
9726 on dernier ouvrage il insiste sur l’impossibilité d’ interpréter aucune de nos « littératures nationales » en l’isolant art
9727 insiste sur l’impossibilité d’interpréter aucune de nos « littératures nationales » en l’isolant artificiellement des aut
9728 terme géographique » (comme Metternich le disait de l’Italie) si elle n’est pas perçue comme une entité historique. C’est
9729 orique. C’est ce que l’histoire à l’ancienne mode de nos manuels ne peut nous montrer : pour elle, l’histoire générale de
9730 eut nous montrer : pour elle, l’histoire générale de l’Europe n’existe pas ; c’est simplement une coexistence d’histoires
9731 e n’existe pas ; c’est simplement une coexistence d’ histoires sans liens, de peuples et d’États… « L’européanisation du ta
9732 implement une coexistence d’histoires sans liens, de peuples et d’États… « L’européanisation du tableau historique », qu’i
9733 coexistence d’histoires sans liens, de peuples et d’ États… « L’européanisation du tableau historique », qu’il nous faut en
9734 ulture européenne. Elle embrasse donc une période de vingt-six siècles (d’Homère à Goethe)… Elle constitue une « unité int
9735 e embrasse donc une période de vingt-six siècles ( d’ Homère à Goethe)… Elle constitue une « unité intelligible », qui s’éva
9736 emporel » qui est une caractéristique essentielle de la littérature, signifie que la littérature du passé peut toujours êt
9737 Euripide dans l’Iphigénie de Racine et dans celle de Goethe. Ou, de nos jours, les Mille et Une Nuits et Calderon dans Hof
9738 ’Iphigénie de Racine et dans celle de Goethe. Ou, de nos jours, les Mille et Une Nuits et Calderon dans Hofmannsthal, l’Od
9739 pe, Sémiramis, Faust, Don Juan. La dernière œuvre d’ André Gide, et la plus mûre, fut un Thésée 319. C’est également de so
9740 la plus mûre, fut un Thésée 319. C’est également de son expérience d’écrivain que partait Jean-Paul Sartre, lorsqu’il déf
9741 un Thésée 319. C’est également de son expérience d’ écrivain que partait Jean-Paul Sartre, lorsqu’il définissait, en 19493
9742 lorsqu’il définissait, en 1949320, les conditions d’ une défense de nos diversités culturelles : il les voyait, lui aussi,
9743 voyait, lui aussi, dans une intégration à l’unité de la culture européenne : Peut-on défendre la culture française en tan
9744 implement : non. … Avons-nous donc un autre moyen de sauver les éléments essentiels de cette culture ? Oui. Mais à la cond
9745 un autre moyen de sauver les éléments essentiels de cette culture ? Oui. Mais à la condition de reprendre le problème d’u
9746 Oui. Mais à la condition de reprendre le problème d’ une façon entièrement différente et de comprendre qu’aujourd’hui il ne
9747 le problème d’une façon entièrement différente et de comprendre qu’aujourd’hui il ne peut plus être question d’une culture
9748 ndre qu’aujourd’hui il ne peut plus être question d’ une culture française, pas plus que d’une culture hollandaise ou suiss
9749 re question d’une culture française, pas plus que d’ une culture hollandaise ou suisse ou allemande. Si nous voulons que la
9750 e reste, il faut qu’elle soit intégrée aux cadres d’ une grande culture européenne. Et il ajoutait, passant comme malgré l
9751 vernements, aux associations ou aux particuliers, d’ inaugurer une politique culturelle ; bien sûr, on peut multiplier les
9752 rnationaux. Tout cela a été tenté avant la guerre de 1939. Aujourd’hui ces réalisations, qui ne manquent pas d’intérêt, se
9753 Aujourd’hui ces réalisations, qui ne manquent pas d’ intérêt, seraient inefficaces parce que nous aurions alors une superst
9754 aucune unité des infrastructures. Il s’agit donc de concevoir — et c’est ici que je m’arrêterai, parce que je souhaite év
9755 nité culturelle européenne comme la seule capable de sauver, dans son sein, les cultures de chaque pays en ce qu’elles ont
9756 le capable de sauver, dans son sein, les cultures de chaque pays en ce qu’elles ont de valable. C’est en visant à une unit
9757 n, les cultures de chaque pays en ce qu’elles ont de valable. C’est en visant à une unité de culture européenne que nous s
9758 elles ont de valable. C’est en visant à une unité de culture européenne que nous sauverons la culture française ; mais cet
9759 sauverons la culture française ; mais cette unité de culture n’aura aucun sens et ne sera faite que de mots, si elle ne se
9760 de culture n’aura aucun sens et ne sera faite que de mots, si elle ne se place pas dans le cadre d’un effort beaucoup plus
9761 ue de mots, si elle ne se place pas dans le cadre d’ un effort beaucoup plus profond pour réaliser une unité économique et
9762 d pour réaliser une unité économique et politique de l’Europe. Au thème de l’unité dans la diversité, Arthur Koestler lie
9763 té économique et politique de l’Europe. Au thème de l’unité dans la diversité, Arthur Koestler lie étroitement celui de l
9764 diversité, Arthur Koestler lie étroitement celui de la continuité dans le changement321 qui est sa traduction dans le tem
9765 ce dont nulle autre région ou culture ne fournit d’ exemples, hors des deux millénaires et demi d’histoire européenne. L’a
9766 nit d’exemples, hors des deux millénaires et demi d’ histoire européenne. L’art égyptien, représente peut-être le plus haut
9767 en, représente peut-être le plus haut degré connu de continuité pendant 2.000 ans ou plus, mais il se produisit dans une c
9768 tout, a modifié l’environnement naturel et social de l’homo sapiens d’une manière si radicale qu’on dirait qu’une espèce n
9769 environnement naturel et social de l’homo sapiens d’ une manière si radicale qu’on dirait qu’une espèce nouvelle s’est étab
9770 ne identité continue et bien distincte, une sorte de personnalité historique. Continuité dans le changement, unité dans la
9771 té, semblent bien être (comme les quatre éléments d’ Aristote : la terre et l’air, l’eau et le feu) les constituants d’une
9772 terre et l’air, l’eau et le feu) les constituants d’ une culture vivante, et plus spécifiquement, d’une culture européenne.
9773 ts d’une culture vivante, et plus spécifiquement, d’ une culture européenne. La continuité sans changement caractérise quel
9774 érise quelques-unes des plus hautes civilisations de l’Asie ; le changement mais sans conscience profonde d’une continuité
9775 sie ; le changement mais sans conscience profonde d’ une continuité enracinée dans le passé, caractérise les nations de pio
9776 enracinée dans le passé, caractérise les nations de pionniers des continents américain et australien. Mais les humanistes
9777 australien. Mais les humanistes révolutionnaires de la Renaissance et les têtes chaudes de la Réformation puisèrent leurs
9778 tionnaires de la Renaissance et les têtes chaudes de la Réformation puisèrent leurs inspirations modernes dans les vieux t
9779 ion française emprunta ses symboles et les titres de ses fonctions d’État aux institutions républicaines de Rome, et les e
9780 runta ses symboles et les titres de ses fonctions d’ État aux institutions républicaines de Rome, et les enseignements de M
9781 s fonctions d’État aux institutions républicaines de Rome, et les enseignements de Marx lui-même ont leurs archétypes et l
9782 tions républicaines de Rome, et les enseignements de Marx lui-même ont leurs archétypes et leurs racines dans le pathos de
9783 pes et leurs racines dans le pathos des Prophètes de l’Ancien Testament, dans les éléments platoniciens de la philosophie
9784 ’Ancien Testament, dans les éléments platoniciens de la philosophie de Hegel, et dans les acrobaties dialectiques de l’Éco
9785 dans les éléments platoniciens de la philosophie de Hegel, et dans les acrobaties dialectiques de l’École aristotélicienn
9786 hie de Hegel, et dans les acrobaties dialectiques de l’École aristotélicienne. Il y a toujours quelque chose de nouveau so
9787 s c’est la nouveauté organique des jeunes pousses d’ un vieil arbre, nourries par les sucs de ses racines souterraines. Res
9788 s pousses d’un vieil arbre, nourries par les sucs de ses racines souterraines. Reste l’autre polarité : l’unité dans la di
9789 la diversité. Que l’Europe évolue vers des formes d’ union plus étroite et d’intégration plus poussée, nul n’en peut plus d
9790 pe évolue vers des formes d’union plus étroite et d’ intégration plus poussée, nul n’en peut plus douter ; mais le temps es
9791 er ; mais le temps est une dimension qu’il s’agit de prendre au sérieux, et le rythme de cette évolution est de nature à n
9792 qu’il s’agit de prendre au sérieux, et le rythme de cette évolution est de nature à nous inquiéter sérieusement. Il ne m’
9793 e au sérieux, et le rythme de cette évolution est de nature à nous inquiéter sérieusement. Il ne m’a fallu que trois heure
9794 alogues visant à nous unir, rappelle plutôt celle d’ un char à bœufs grec peinant dans la boue de la Thessalie. Reconnaisso
9795 celle d’un char à bœufs grec peinant dans la boue de la Thessalie. Reconnaissons ici, et dans la fragmentation persistante
9796 aissons ici, et dans la fragmentation persistante de l’Europe, le plus grand anachronisme du xxe siècle322. Condensant e
9797 siècle322. Condensant et clarifiant les apports de ses aînés, anticipant sur ceux de ses cadets, l’animateur de la Revu
9798 ant les apports de ses aînés, anticipant sur ceux de ses cadets, l’animateur de la Revue de Genève , Robert de Traz (1884
9799 s, anticipant sur ceux de ses cadets, l’animateur de la Revue de Genève , Robert de Traz (1884-1951) appelait l’Europe, d
9800 sur ceux de ses cadets, l’animateur de la Revue de Genève , Robert de Traz (1884-1951) appelait l’Europe, dès 1929, à re
9801 1) appelait l’Europe, dès 1929, à relever le défi de l’Histoire en s’unissant : Héritiers magnifiquement privilégiés, les
9802 Héritiers magnifiquement privilégiés, les hommes d’ Occident n’ont aucun motif de déserter leur propre cause. Qu’ils se ra
9803 vilégiés, les hommes d’Occident n’ont aucun motif de déserter leur propre cause. Qu’ils se rapprochent donc pour mieux en
9804 er. Qu’ils fassent, avec sang-froid, l’inventaire de leur patrimoine commun. La civilisation européenne est le produit d’u
9805 commun. La civilisation européenne est le produit d’ une collaboration séculaire et l’on ne saurait en supprimer l’apport d
9806 éculaire et l’on ne saurait en supprimer l’apport d’ aucun peuple sans la défigurer et l’affaiblir. Or notre génie d’invent
9807 sans la défigurer et l’affaiblir. Or notre génie d’ invention est intact. Nos méthodes critiques doivent à leurs principes
9808 éthodes critiques doivent à leurs principes mêmes de pouvoir toujours s’adapter aux circonstances imprévues. Une égale pas
9809 er aux circonstances imprévues. Une égale passion de l’effort nous anime encore, de l’effort qui conquiert, qui utilise, e
9810 Une égale passion de l’effort nous anime encore, de l’effort qui conquiert, qui utilise, et surtout qui transfigure. Car
9811 possibilité réside peut-être dans notre capacité de renouvellement. Je dirai mieux : notre capacité de résurrection. À fo
9812 e renouvellement. Je dirai mieux : notre capacité de résurrection. À force d’imagination et de courage, nos rêves ne se pe
9813 i mieux : notre capacité de résurrection. À force d’ imagination et de courage, nos rêves ne se perdent pas dans une extase
9814 apacité de résurrection. À force d’imagination et de courage, nos rêves ne se perdent pas dans une extase somnolente : ils
9815 olente : ils sont actifs. Est-ce rêver encore que de conseiller à l’Europe, pour se redresser, pour imposer silence à ses
9816 edresser, pour imposer silence à ses détracteurs, de se reconnaître une mission nouvelle ? En affirmant son unité conquise
9817 es dangers du dedans, elle aurait conclu un pacte d’ alliance entre ses fils : ce pacte elle le proposerait ensuite à l’uni
9818 tur, elle les désarmerait en harmonisant non plus de petits États que divisent quelques collines, mais des continents que
9819 éans séparent. Elle prendrait la tête des nations de la terre parce qu’elle serait seule à leur fournir des principes d’or
9820 qu’elle serait seule à leur fournir des principes d’ ordre rationnel, un programme d’actions conjuguées, en un mot les dire
9821 nir des principes d’ordre rationnel, un programme d’ actions conjuguées, en un mot les directives du commandement.323 Ces
9822 rs mots répercutent l’écho des pages prophétiques d’ Ortega, citées plus haut. Ils s’adressent aux Européens pour leur rapp
9823 er une vocation plus difficile que le dénigrement de soi-même : celle de faire l’Europe parce qu’il faut faire le Monde, e
9824 difficile que le dénigrement de soi-même : celle de faire l’Europe parce qu’il faut faire le Monde, et parce que l’Europe
9825 ation. 278. Dans une conférence à l’Université de Zurich, nov. 1922. Cf. Variété I, Gallimard, Paris, 1924. 279. Dans
9826 tons, résumant les développements du chapitre III de ce livre, est extrait d’une conférence de Karl Jaspers recueillie dan
9827 ppements du chapitre III de ce livre, est extrait d’ une conférence de Karl Jaspers recueillie dans l’Esprit européen, Édit
9828 tre III de ce livre, est extrait d’une conférence de Karl Jaspers recueillie dans l’Esprit européen, Éditions de la Baconn
9829 spers recueillie dans l’Esprit européen, Éditions de la Baconnière, 1947, p. 303-304. 280. Die Entdeckung des Geistes, C
9830 à 42 (chapitre intitulé : « L’Iliade ou le poème de la force »). 285. L’Enracinement, Gallimard, Paris, 1949. 286. Le
9831 inement, Gallimard, Paris, 1949. 286. Le Déclin de l’Occident, trad. Tazerout, coll. « Bibliothèque des idées », Gallima
9832 pa als Lebensform, Hegner, 1957. 289. Formation de l’Europe, t. VII, 340, Plon, Paris, 1937. 290. Cette expression que
9833 l’on en croit O. Forst de Battaglia et son Traité de généalogie, Lausanne, 1945, on peut évaluer à 20 millions le nombre d
9834 t évaluer à 20 millions le nombre des descendants de Charlemagne actuellement en vie ! 291. The Making of Europe, 1932.
9835 ng of Europe, 1932. Nous citons d’après l’édition de Meridian Books, New York, 1958, p. 16-17. 292. Id. ibid., p. 243-44
9836 ag, Einsiedeln. 294. S. de Madariaga : L’Esprit de l’Europe, Mouvement européen, Bruxelles, 1952. 295. E. Husserl : Die
9837 , tome VI des Œuvres complètes, sous la direction de H. L. van Breda, Martinus Nijhoff, La Haye, 1954. 296. Benedetto Cro
9838 anç. Librairie Plon, Paris, 1960. 297. L’Esprit de l’Europe, édité par le Mouvement européen, Bruxelles, 1952, chapitre
9839 ibid., p. 433. 302. L’Esprit européen, Éditions de la Baconnière, Neuchâtel, 1949, p. 148-156. 303. Conférence prononcé
9840 1946, et publiée dans le recueil des Conférences de l’Unesco, Éditions de la revue Fontaine, Paris, 1947. 304. Extraits
9841 le recueil des Conférences de l’Unesco, Éditions de la revue Fontaine, Paris, 1947. 304. Extraits de The World and the W
9842 de la revue Fontaine, Paris, 1947. 304. Extraits de The World and the West, Oxford University Press, 1953. 305. Extraits
9843 st, Oxford University Press, 1953. 305. Extraits d’ une conférence donnée à Vienne en 1956, parue dans le Bulletin du Cent
9844 t Épilogue, trad. française par M. Pomès. Le Rapt de l’Europe, Stock, Paris, 1960. 307. Spektrum Europas, 19. 308. Publ
9845 Books, New York. 310. Ibid. 311. Les Origines de la civilisation européenne, 1958, I. 312. Rappelons qu’Ortega écriva
9846 Francke Verlag, Berne 1948. 320. Dans un article de la revue Politique étrangère, dont les extraits furent présentés à la
9847 raits furent présentés à la Conférence européenne de la culture, Lausanne, 1949. 321. Cf. plus haut la citation de Stephe
9848 , Lausanne, 1949. 321. Cf. plus haut la citation de Stephen Spender. 322. Extrait d’une conférence à Vienne, mars 1958,
9849 aut la citation de Stephen Spender. 322. Extrait d’ une conférence à Vienne, mars 1958, Texte allemand dans Forum, Vienne,
9850 anglais communiqué par l’auteur. 323. L’Esprit de Genève, Grasset, Paris 1929, p. 259-260.
27 1961, Vingt-huit siècles d’Europe. Appendice. Manifestes pour l’union européenne, (de 1922 à 1960)
9851 Appendice Manifestes pour l’union européenne ( de 1922 à 1960) Parmi les centaines de textes de toute nature, manifes
9852 européenne (de 1922 à 1960) Parmi les centaines de textes de toute nature, manifestes de mouvements, déclarations de con
9853 (de 1922 à 1960) Parmi les centaines de textes de toute nature, manifestes de mouvements, déclarations de congrès, réso
9854 s centaines de textes de toute nature, manifestes de mouvements, déclarations de congrès, résolutions de parlements, disco
9855 te nature, manifestes de mouvements, déclarations de congrès, résolutions de parlements, discours d’hommes d’État, préambu
9856 mouvements, déclarations de congrès, résolutions de parlements, discours d’hommes d’État, préambules aux traités et conve
9857 s de congrès, résolutions de parlements, discours d’ hommes d’État, préambules aux traités et conventions, qui balisent le
9858 traités et conventions, qui balisent le parcours de l’Idée européenne depuis un tiers de siècle, ceux que l’on va citer o
9859 le parcours de l’Idée européenne depuis un tiers de siècle, ceux que l’on va citer ont marqué des étapes, à divers titres
9860 e Richard Coudenhove-Kalergi lançait, par la voie de la presse allemande et autrichienne, un premier appel à créer la « Pa
9861 ts : Européens ! Européennes ! L’heure du destin de l’Europe a sonné ! Dans les usines de toute l’Europe, on forge chaque
9862 e du destin de l’Europe a sonné ! Dans les usines de toute l’Europe, on forge chaque jour des armes destinées au massacre
9863 e jour des armes destinées au massacre des hommes de l’Europe, — dans les laboratoires européens, on prépare des poisons d
9864 inés à l’anéantissement des femmes et des enfants de l’Europe. Avec une inconcevable légèreté, l’Europe joue ses destinées
9865 ées, avec un inconcevable aveuglement elle refuse de voir ce qui vient, avec une inconcevable passivité elle se laisse pou
9866 t réside dans la Paneurope, dans le rassemblement de tous les États démocratiques du continent en un groupement politique
9867 es dans ses affaires. … Sans une garantie durable de la paix en Europe, toute union douanière européenne reste impossible.
9868 emps que chaque État vit dans la peur continuelle de ses voisins, il doit s’assurer de sa subsistance autonome en temps de
9869 eur continuelle de ses voisins, il doit s’assurer de sa subsistance autonome en temps de guerre, comme une place assiégée.
9870 oit s’assurer de sa subsistance autonome en temps de guerre, comme une place assiégée. Il lui faut pour cela des industrie
9871 et des cordons douaniers. Seule, la substitution de l’arbitrage obligatoire au risque de guerre pourrait ouvrir la voie à
9872 he politique, économique et culturelle ? L’avenir de l’Europe dépend de la réponse qui sera donnée à cette question. Il es
9873 mique et culturelle ? L’avenir de l’Europe dépend de la réponse qui sera donnée à cette question. Il est donc entre les ma
9874 États démocratiques, nous sommes co-responsables de la politique de nos gouvernements. Nous n’avons pas le droit de nous
9875 ques, nous sommes co-responsables de la politique de nos gouvernements. Nous n’avons pas le droit de nous borner à la crit
9876 e de nos gouvernements. Nous n’avons pas le droit de nous borner à la critique, nous avons le devoir de contribuer à l’éla
9877 e nous borner à la critique, nous avons le devoir de contribuer à l’élaboration de nos destins politiques. Si les peuples
9878 ous avons le devoir de contribuer à l’élaboration de nos destins politiques. Si les peuples de l’Europe le veulent, la Pan
9879 oration de nos destins politiques. Si les peuples de l’Europe le veulent, la Paneurope se réalisera : Il leur suffit, pour
9880 neurope se réalisera : Il leur suffit, pour cela, de refuser leurs voix à tous les candidats et partis dont le programme e
9881 gramme est antieuropéen. Il ne faut pas se lasser de répéter cette vérité simple : une Europe divisée conduit à la guerre,
9882 grès qui se réunit à Vienne en 1927. Les effigies de Sully, Comenius, l’abbé de Saint-Pierre, Kant, Mazzini, Hugo et Nietz
9883 ministre des Affaires étrangères, décida en 1928 de soumettre à la Société des Nations un projet de Confédération europée
9884 8 de soumettre à la Société des Nations un projet de Confédération européenne. Devenu président du Conseil en 1929, et par
9885 ce, il prononça le 5 septembre devant l’assemblée de la Société des Nations à Genève, un discours retentissant, appelant l
9886 e, un discours retentissant, appelant les peuples de l’Europe à nouer une « sorte de lien fédéral » : Je me suis associé
9887 elant les peuples de l’Europe à nouer une « sorte de lien fédéral » : Je me suis associé pendant ces dernières années à u
9888 en faveur d’une idée qu’on a bien voulu qualifier de généreuse, peut-être pour se dispenser de la qualifier d’imprudente.
9889 alifier de généreuse, peut-être pour se dispenser de la qualifier d’imprudente. Cette idée, qui est née il y a bien des an
9890 euse, peut-être pour se dispenser de la qualifier d’ imprudente. Cette idée, qui est née il y a bien des années, qui a hant
9891 qui leur a valu ce qu’on peut appeler des succès d’ estime, cette idée a progressé dans les esprits par sa valeur propre.
9892 i sont géographiquement groupés comme les peuples d’ Europe, il doit exister une sorte de lien fédéral […]. C’est ce lien q
9893 e les peuples d’Europe, il doit exister une sorte de lien fédéral […]. C’est ce lien que je voudrais m’efforcer d’établir.
9894 ral […]. C’est ce lien que je voudrais m’efforcer d’ établir. Évidemment, l’association agira surtout dans le domaine écono
9895 , le lien fédéral, sans toucher à la souveraineté d’ aucune des nations qui pourraient faire partie d’une telle association
9896 d’aucune des nations qui pourraient faire partie d’ une telle association, peut être bienfaisant. Il fut décidé peu après
9897 é par la France. Le Mémorandum sur l’organisation d’ un régime d’union fédérale européenne, daté du 1er mai 1930 et présent
9898 nce. Le Mémorandum sur l’organisation d’un régime d’ union fédérale européenne, daté du 1er mai 1930 et présenté à la Socié
9899 et présenté à la Société des Nations en septembre de la même année, fut rédigé par Alexis Léger, le plus proche collaborat
9900 gé par Alexis Léger, le plus proche collaborateur de Briand. (On sait qu’Alexis Léger est aussi le grand poète qui signe S
9901 t-John Perse.) En voici deux brefs extraits tirés de l’introduction et de la conclusion : … Nul ne doute aujourd’hui que
9902 ci deux brefs extraits tirés de l’introduction et de la conclusion : … Nul ne doute aujourd’hui que le manque de cohésion
9903 usion : … Nul ne doute aujourd’hui que le manque de cohésion dans le groupement des forces matérielles et morales de l’Eu
9904 s le groupement des forces matérielles et morales de l’Europe ne constitue, pratiquement, le plus sérieux obstacle au déve
9905 rieux obstacle au développement et à l’efficacité de toutes institutions politiques ou juridiques sur quoi tendent à se fo
9906 uoi tendent à se fonder les premières entreprises d’ une organisation universelle de la paix. Cette dispersion de forces ne
9907 mières entreprises d’une organisation universelle de la paix. Cette dispersion de forces ne limite pas moins gravement, en
9908 nisation universelle de la paix. Cette dispersion de forces ne limite pas moins gravement, en Europe, les possibilités d’é
9909 pas moins gravement, en Europe, les possibilités d’ élargissement du marché économique, les tentatives d’intensification e
9910 largissement du marché économique, les tentatives d’ intensification et d’amélioration de la production industrielle, et pa
9911 é économique, les tentatives d’intensification et d’ amélioration de la production industrielle, et par là même toutes gara
9912 es tentatives d’intensification et d’amélioration de la production industrielle, et par là même toutes garanties contre le
9913 s garanties contre les crises du travail, sources d’ instabilité politique aussi bien que sociale. Or, le danger d’un tel m
9914 é politique aussi bien que sociale. Or, le danger d’ un tel morcellement se trouve encore accru du fait de l’étendue des fr
9915 n tel morcellement se trouve encore accru du fait de l’étendue des frontières nouvelles (plus de 20.000 kilomètres de barr
9916 fait de l’étendue des frontières nouvelles (plus de 20.000 kilomètres de barrières douanières) que les Traités de paix on
9917 s frontières nouvelles (plus de 20.000 kilomètres de barrières douanières) que les Traités de paix ont dû créer pour faire
9918 lomètres de barrières douanières) que les Traités de paix ont dû créer pour faire droit, en Europe, aux aspirations nation
9919 pe, aux aspirations nationales… C’est sur le plan de la souveraineté absolue et de l’entière indépendance politique que do
9920 … C’est sur le plan de la souveraineté absolue et de l’entière indépendance politique que doit être réalisée l’entente ent
9921 te entre Nations européennes. […] Avec les droits de souveraineté, n’est-ce pas le génie même de chaque nation qui peut tr
9922 roits de souveraineté, n’est-ce pas le génie même de chaque nation qui peut trouver à s’affirmer encore plus consciemment,
9923 particulière à l’œuvre collective, sous un régime d’ Union fédérale pleinement compatible avec le respect des traditions et
9924 lus propice ni plus pressante pour l’inauguration d’ une œuvre constructive en Europe. Le règlement des principaux problème
9925 ière guerre aura bientôt libéré l’Europe nouvelle de ce qui grevait le plus lourdement sa psychologie, autant que son écon
9926 ve, où l’Europe attentive peut disposer elle-même de son propre destin. S’unir pour vivre et prospérer : telle est la stri
9927 devant laquelle se trouvent désormais les Nations d’ Europe. Il semble que le sentiment des peuples se soit déjà clairement
9928 lairement manifesté à ce sujet. Aux gouvernements d’ assumer aujourd’hui leurs responsabilités, sous peine d’abandonner au
9929 mer aujourd’hui leurs responsabilités, sous peine d’ abandonner au risque d’initiatives particulières et d’entreprises déso
9930 esponsabilités, sous peine d’abandonner au risque d’ initiatives particulières et d’entreprises désordonnées le groupement
9931 andonner au risque d’initiatives particulières et d’ entreprises désordonnées le groupement de forces matérielles et morale
9932 ières et d’entreprises désordonnées le groupement de forces matérielles et morales dont il leur appartient de garder la ma
9933 es matérielles et morales dont il leur appartient de garder la maîtrise collective, au bénéfice de la communauté européenn
9934 ent de garder la maîtrise collective, au bénéfice de la communauté européenne autant que de l’humanité. La proposition fr
9935 u bénéfice de la communauté européenne autant que de l’humanité. La proposition française n’eut pas de suites concrètes :
9936 e l’humanité. La proposition française n’eut pas de suites concrètes : d’une part, tout en préconisant une conférence des
9937 e part, la Grande-Bretagne affirmait une attitude d’ isolation, cependant qu’Hitler remportait son premier grand succès éle
9938 mme raisonnables, échouait devant le déchaînement de souverainetés devenues folles. La guerre de 1939 était dès lors fatal
9939 ement de souverainetés devenues folles. La guerre de 1939 était dès lors fatale. On n’a pas oublié qu’Hitler prétendait lu
9940 ne dans le camp fédéraliste. Et c’est précisément de la Résistance que ressurgit l’idée d’union. Dès 1942, un groupe de pr
9941 précisément de la Résistance que ressurgit l’idée d’ union. Dès 1942, un groupe de prisonniers politiques concentrés dans l
9942 que ressurgit l’idée d’union. Dès 1942, un groupe de prisonniers politiques concentrés dans l’Île de Ventotene fait circul
9943 in, réunis en grand secret à Genève, au printemps de 1944, les représentants des mouvements de résistance de neuf pays met
9944 intemps de 1944, les représentants des mouvements de résistance de neuf pays mettent au point la déclaration suivante :
9945 4, les représentants des mouvements de résistance de neuf pays mettent au point la déclaration suivante : Projet de décl
9946 ttent au point la déclaration suivante : Projet de déclaration des Résistances européennes (extrait)324 Quelques milita
9947 s (extrait)324 Quelques militants des mouvements de résistance du Danemark, de France, d’Italie, de Norvège, des Pays-Bas
9948 litants des mouvements de résistance du Danemark, de France, d’Italie, de Norvège, des Pays-Bas, de Pologne, de Tchécoslov
9949 mouvements de résistance du Danemark, de France, d’ Italie, de Norvège, des Pays-Bas, de Pologne, de Tchécoslovaquie et de
9950 s de résistance du Danemark, de France, d’Italie, de Norvège, des Pays-Bas, de Pologne, de Tchécoslovaquie et de Yougoslav
9951 k, de France, d’Italie, de Norvège, des Pays-Bas, de Pologne, de Tchécoslovaquie et de Yougoslavie, et le représentant d’u
9952 , d’Italie, de Norvège, des Pays-Bas, de Pologne, de Tchécoslovaquie et de Yougoslavie, et le représentant d’un groupe de
9953 , des Pays-Bas, de Pologne, de Tchécoslovaquie et de Yougoslavie, et le représentant d’un groupe de militants antinazis en
9954 coslovaquie et de Yougoslavie, et le représentant d’ un groupe de militants antinazis en Allemagne, se sont réunis dans une
9955 et de Yougoslavie, et le représentant d’un groupe de militants antinazis en Allemagne, se sont réunis dans une ville d’Eur
9956 nazis en Allemagne, se sont réunis dans une ville d’ Europe les 31 mars, 29 avril, 20 mai, 6 et 7 juillet. Ils ont élaboré
9957 20 mai, 6 et 7 juillet. Ils ont élaboré le projet de déclaration ci-dessous qu’ils ont soumis à la discussion et à l’appro
9958 ils ont soumis à la discussion et à l’approbation de leurs mouvements respectifs et de l’ensemble des mouvements de résist
9959 à l’approbation de leurs mouvements respectifs et de l’ensemble des mouvements de résistance européens… La résistance à l’
9960 ements respectifs et de l’ensemble des mouvements de résistance européens… La résistance à l’oppression nazie qui unit les
9961 istance à l’oppression nazie qui unit les peuples d’ Europe dans un même combat a créé entre eux une solidarité et une comm
9962 a créé entre eux une solidarité et une communauté de but et d’intérêts qui prennent toute leur signification et toute leur
9963 re eux une solidarité et une communauté de but et d’ intérêts qui prennent toute leur signification et toute leur portée da
9964 rtée dans le fait que les délégués des mouvements de résistance européens se sont réunis pour rédiger la présente déclarat
9965 tion. … Souscrivant aux déclarations essentielles de la Charte de l’Atlantique, ils affirment que la vie des peuples qu’il
9966 rivant aux déclarations essentielles de la Charte de l’Atlantique, ils affirment que la vie des peuples qu’ils représenten
9967 ’ils représentent doit être fondée sur le respect de la personne, la sécurité, la justice sociale, l’utilisation intégrale
9968 ctivité tout entière et l’épanouissement autonome de la vie nationale. Ces buts ne peuvent être atteints que si les divers
9969 tteints que si les divers pays du monde acceptent de dépasser le dogme de la souveraineté absolue des États en s’intégrant
9970 vers pays du monde acceptent de dépasser le dogme de la souveraineté absolue des États en s’intégrant dans une unique orga
9971 anisation fédérale. La paix européenne est la clé de voûte de la paix du monde. En effet, dans l’espace d’une seule généra
9972 fédérale. La paix européenne est la clé de voûte de la paix du monde. En effet, dans l’espace d’une seule génération, l’E
9973 oûte de la paix du monde. En effet, dans l’espace d’ une seule génération, l’Europe a été l’épicentre de deux conflits mond
9974 ’une seule génération, l’Europe a été l’épicentre de deux conflits mondiaux qui ont eu avant tout pour origine l’existence
9975 nt tout pour origine l’existence sur ce continent de trente États souverains. Il importe de remédier à cette anarchie par
9976 continent de trente États souverains. Il importe de remédier à cette anarchie par la création d’une Union fédérale entre
9977 orte de remédier à cette anarchie par la création d’ une Union fédérale entre les peuples européens. Seule une Union fédéra
9978 utres peuples. Seule une Union fédérale permettra de résoudre les problèmes des tracés de frontières dans les zones de pop
9979 le permettra de résoudre les problèmes des tracés de frontières dans les zones de population mixte, qui cesseront ainsi d’
9980 problèmes des tracés de frontières dans les zones de population mixte, qui cesseront ainsi d’être l’objet des folles convo
9981 es zones de population mixte, qui cesseront ainsi d’ être l’objet des folles convoitises nationalistes et deviendront de si
9982 s folles convoitises nationalistes et deviendront de simples questions de délimitation territoriale, de pure compétence ad
9983 nationalistes et deviendront de simples questions de délimitation territoriale, de pure compétence administrative. Seule u
9984 e simples questions de délimitation territoriale, de pure compétence administrative. Seule une Union fédérale permettra la
9985 ra la solution logique et naturelle des problèmes de l’accès à la mer des pays situés à l’intérieur du continent, de l’uti
9986 a mer des pays situés à l’intérieur du continent, de l’utilisation rationnelle des fleuves qui traversent plusieurs États,
9987 ent plusieurs États, du contrôle des détroits et, d’ une manière générale, de la plupart des problèmes qui ont troublé les
9988 contrôle des détroits et, d’une manière générale, de la plupart des problèmes qui ont troublé les relations internationale
9989 exercer une juridiction directe dans les limites de ses attributions. 2. Une armée placée sous les ordres de ce gouvernem
9990 attributions. 2. Une armée placée sous les ordres de ce gouvernement et excluant toute autre armée nationale. 3. Un tribun
9991 toutes les questions relatives à l’interprétation de la Constitution fédérale et tranchera les différends éventuels entre
9992 ntre les États et la fédération. … Les mouvements de résistance soussignés s’engagent à considérer leurs problèmes nationa
9993 oblème européen dans son ensemble et ils décident de constituer dès à présent un bureau permanent chargé de coordonner leu
9994 nstituer dès à présent un bureau permanent chargé de coordonner leurs efforts pour la libération de leurs pays, pour l’org
9995 gé de coordonner leurs efforts pour la libération de leurs pays, pour l’organisation de l’Union fédérale des peuples europ
9996 la libération de leurs pays, pour l’organisation de l’Union fédérale des peuples européens et pour l’instauration de la p
9997 rale des peuples européens et pour l’instauration de la paix et de la justice dans le monde. Les mouvements fédéralistes
9998 es européens et pour l’instauration de la paix et de la justice dans le monde. Les mouvements fédéralistes qui se constit
9999 congrès européen après la guerre, sont animés par de jeunes chefs issus de la Résistance : Spinelli, Kogon, Brugmans, Fren
10000 la guerre, sont animés par de jeunes chefs issus de la Résistance : Spinelli, Kogon, Brugmans, Frenay. En même temps, que
10001 ême temps, quelques hommes politiques qui ont été de ceux qu’Hitler a emprisonnés ou exilés, ou de ceux qui ont conduit la
10002 été de ceux qu’Hitler a emprisonnés ou exilés, ou de ceux qui ont conduit la lutte contre les totalitaires, se prononcent
10003 prononcent en faveur d’une « union plus étroite » de nos peuples. Les militants travaillent, écrivent et organisent ; les
10004 Zurich, le 16 septembre 1946, propose « une sorte d’ États-Unis d’Europe325 : Ce noble continent est le foyer des grandes
10005 tinent est le foyer des grandes races ancestrales de l’Occident. Il est la source de la foi et de l’éthique chrétienne. Il
10006 races ancestrales de l’Occident. Il est la source de la foi et de l’éthique chrétienne. Il est le berceau de la civilisati
10007 ales de l’Occident. Il est la source de la foi et de l’éthique chrétienne. Il est le berceau de la civilisation occidental
10008 foi et de l’éthique chrétienne. Il est le berceau de la civilisation occidentale. Et pourtant, c’est de l’Europe que sont
10009 e la civilisation occidentale. Et pourtant, c’est de l’Europe que sont issues toutes les terribles querelles nationalistes
10010 es nationalistes qui, par deux fois dans le temps de nos vies, sont venues briser la paix et obscurcir l’avenir de toute l
10011 sont venues briser la paix et obscurcir l’avenir de toute l’humanité. Quel est donc le sort misérable auquel l’Europe se
10012 ts États ont certes réussi à se relever, mais sur de vastes territoires des masses tremblantes d’êtres humains tourmentés
10013 sur de vastes territoires des masses tremblantes d’ êtres humains tourmentés et angoissés, affamés, rongés de soucis et se
10014 humains tourmentés et angoissés, affamés, rongés de soucis et se sentant perdus ouvrent des yeux agrandis sur les ruines
10015 t perdus ouvrent des yeux agrandis sur les ruines de leurs villes et de leurs foyers, et scrutent le sombre horizon, cherc
10016 s yeux agrandis sur les ruines de leurs villes et de leurs foyers, et scrutent le sombre horizon, cherchant d’où vont veni
10017 foyers, et scrutent le sombre horizon, cherchant d’ où vont venir les nouveaux périls, la tyrannie ou la terreur. Parmi le
10018 ie ou la terreur. Parmi les vainqueurs, une Babel de voix confuses ; parmi les vaincus le morne silence du désespoir. N’ét
10019 is désormais que la ruine et la mise en esclavage de l’Europe scelleraient aussi leur propre destin, les temps sombres du
10020 erait comme par miracle toute la scène, et ferait de l’Europe, en peu d’années, une terre aussi libre et heureuse que cell
10021 cle toute la scène, et ferait de l’Europe, en peu d’ années, une terre aussi libre et heureuse que celle de la Suisse d’auj
10022 nées, une terre aussi libre et heureuse que celle de la Suisse d’aujourd’hui. Quel est ce remède souverain ? C’est de refo
10023 re aussi libre et heureuse que celle de la Suisse d’ aujourd’hui. Quel est ce remède souverain ? C’est de reformer la famil
10024 aujourd’hui. Quel est ce remède souverain ? C’est de reformer la famille européenne, dans toute la mesure où nous le pouvo
10025 ans toute la mesure où nous le pouvons encore, et de l’assurer d’une structure à l’abri de laquelle elle puisse vivre en p
10026 mesure où nous le pouvons encore, et de l’assurer d’ une structure à l’abri de laquelle elle puisse vivre en paix et en séc
10027 encore, et de l’assurer d’une structure à l’abri de laquelle elle puisse vivre en paix et en sécurité. Nous devons constr
10028 et en sécurité. Nous devons construire une sorte d’ États-Unis d’Europe. Ainsi seulement, des centaines de millions de tra
10029 ats-Unis d’Europe. Ainsi seulement, des centaines de millions de travailleurs seront capables de retrouver les simples joi
10030 urope. Ainsi seulement, des centaines de millions de travailleurs seront capables de retrouver les simples joies et les es
10031 aines de millions de travailleurs seront capables de retrouver les simples joies et les espoirs qui rendent la vie digne d
10032 les joies et les espoirs qui rendent la vie digne d’ être vécue. De la conjonction d’une vingtaine de « mouvements fédéral
10033 s espoirs qui rendent la vie digne d’être vécue. De la conjonction d’une vingtaine de « mouvements fédéralistes », de que
10034 ent la vie digne d’être vécue. De la conjonction d’ une vingtaine de « mouvements fédéralistes », de quelques grands homme
10035 d’être vécue. De la conjonction d’une vingtaine de « mouvements fédéralistes », de quelques grands hommes politiques, et
10036 n d’une vingtaine de « mouvements fédéralistes », de quelques grands hommes politiques, et de plusieurs centaines de déput
10037 istes », de quelques grands hommes politiques, et de plusieurs centaines de députés, dirigeants syndicalistes, intellectue
10038 ands hommes politiques, et de plusieurs centaines de députés, dirigeants syndicalistes, intellectuels et économistes, conj
10039 , le Polonais Joseph Retinger, résulte le Congrès de l’Europe, qui se réunit à La Haye le 7 mai 1948. Le document que nous
10040 nace vient de ses divisions. Appauvrie, encombrée de barrières qui empêchent ses biens de circuler, mais qui ne sauraient
10041 e, encombrée de barrières qui empêchent ses biens de circuler, mais qui ne sauraient plus la protéger, notre Europe désuni
10042 éger, notre Europe désunie marche à sa fin. Aucun de nos pays ne peut prétendre, seul, à une défense sérieuse de son indép
10043 s ne peut prétendre, seul, à une défense sérieuse de son indépendance. Aucun de nos pays ne peut résoudre, seul, les probl
10044 à une défense sérieuse de son indépendance. Aucun de nos pays ne peut résoudre, seul, les problèmes que lui pose l’économi
10045 oblèmes que lui pose l’économie moderne. À défaut d’ une union librement consentie, notre anarchie présente nous exposera d
10046 n à l’unification forcée, soit par l’intervention d’ un empire du dehors, soit par l’usurpation d’un parti du dedans. L’heu
10047 tion d’un empire du dehors, soit par l’usurpation d’ un parti du dedans. L’heure est venue d’entreprendre une action qui so
10048 surpation d’un parti du dedans. L’heure est venue d’ entreprendre une action qui soit à la mesure du danger. Tous ensemble,
10049 le, demain, nous pouvons édifier avec les peuples d’ outre-mer associés à nos destinées, la plus grande formation politique
10050 on politique et le plus vaste ensemble économique de notre temps. Jamais l’histoire du monde n’aura connu un si puissant r
10051 u monde n’aura connu un si puissant rassemblement d’ hommes libres. Jamais la guerre, la peur et la misère n’auront été mis
10052 grand péril et cette grande espérance la vocation de l’Europe se définit clairement. Elle est d’unir ses peuples selon leu
10053 ation de l’Europe se définit clairement. Elle est d’ unir ses peuples selon leur vrai génie, qui est celui de la diversité,
10054 ses peuples selon leur vrai génie, qui est celui de la diversité, et dans les conditions du xxe siècle, qui sont celles
10055 ns les conditions du xxe siècle, qui sont celles de la communauté, afin d’ouvrir au monde la voie qu’il cherche, la voie
10056 herche, la voie des libertés organisées. Elle est de ranimer ses pouvoirs d’invention pour la défense et pour l’illustrati
10057 rtés organisées. Elle est de ranimer ses pouvoirs d’ invention pour la défense et pour l’illustration des droits et des dev
10058 et pour l’illustration des droits et des devoirs de la personne humaine, dont malgré toute ses infidélités, l’Europe deme
10059 eux du monde le grand témoin. La conquête suprême de l’Europe s’appelle la dignité de l’homme et sa vraie force est dans l
10060 conquête suprême de l’Europe s’appelle la dignité de l’homme et sa vraie force est dans la liberté. Tel est l’enjeu final
10061 force est dans la liberté. Tel est l’enjeu final de notre lutte. C’est pour sauver nos libertés acquises, mais aussi pour
10062 éfice à tous les hommes, que nous voulons l’union de notre continent. Sur cette union l’Europe joue son destin et celui de
10063 Sur cette union l’Europe joue son destin et celui de la paix du monde. Soit donc notoire à tous que nous, Européens, rasse
10064 assemblés pour donner une voix à tous les peuples de ce continent, déclarons solennellement notre commune volonté dans les
10065 des droits de l’homme, garantissant les libertés de pensée, de réunion et d’expression, ainsi que le libre exercice d’une
10066 de l’homme, garantissant les libertés de pensée, de réunion et d’expression, ainsi que le libre exercice d’une opposition
10067 arantissant les libertés de pensée, de réunion et d’ expression, ainsi que le libre exercice d’une opposition politique. 3°
10068 nion et d’expression, ainsi que le libre exercice d’ une opposition politique. 3° Nous voulons une Cour de justice capable
10069 ne opposition politique. 3° Nous voulons une Cour de justice capable d’appliquer les sanctions nécessaires pour que soit r
10070 ique. 3° Nous voulons une Cour de justice capable d’ appliquer les sanctions nécessaires pour que soit respectée la Charte.
10071 ropéenne, où soient représentées les forces vives de toutes nos nations. 5° Et nous prenons de bonne foi l’engagement d’ap
10072 s vives de toutes nos nations. 5° Et nous prenons de bonne foi l’engagement d’appuyer de tous nos efforts, dans nos foyers
10073 ons. 5° Et nous prenons de bonne foi l’engagement d’ appuyer de tous nos efforts, dans nos foyers et en public, dans nos pa
10074 nous prenons de bonne foi l’engagement d’appuyer de tous nos efforts, dans nos foyers et en public, dans nos partis, dans
10075 t les gouvernements qui travaillent à cette œuvre de salut public, suprême chance de la paix et gage d’un grand avenir, po
10076 ent à cette œuvre de salut public, suprême chance de la paix et gage d’un grand avenir, pour cette génération et celles qu
10077 e salut public, suprême chance de la paix et gage d’ un grand avenir, pour cette génération et celles qui la suivront. Du
10078 génération et celles qui la suivront. Du congrès de La Haye naît le Mouvement européen, dont l’action immédiate aboutit,
10079 à la création du Conseil de l’Europe. Le congrès de La Haye, dans sa Résolution politique, avait proclamé : « L’heure est
10080 t proclamé : « L’heure est venue pour les nations de l’Europe de transférer certains de leurs droits souverains pour les e
10081 « L’heure est venue pour les nations de l’Europe de transférer certains de leurs droits souverains pour les exercer désor
10082 ur les nations de l’Europe de transférer certains de leurs droits souverains pour les exercer désormais en commun. » En fa
10083 e à ce vœu, se trouva réaliser plutôt les projets d’ Aristide Briand. La conférence des délégués nationaux, le comité polit
10084 le tribunal européen préconisés par le Mémorandum de 1930 trouvent en effet leur réalisation dans l’Assemblée consultative
10085 , le secrétariat et la Cour des droits de l’homme de Strasbourg. Aussi n’est-il pas question de « lien fédéral » ni de « t
10086 ’homme de Strasbourg. Aussi n’est-il pas question de « lien fédéral » ni de « transfert de souveraineté », mais seulement
10087 ussi n’est-il pas question de « lien fédéral » ni de « transfert de souveraineté », mais seulement « d’union plus étroite 
10088 as question de « lien fédéral » ni de « transfert de souveraineté », mais seulement « d’union plus étroite » dans l’articl
10089 e « transfert de souveraineté », mais seulement «  d’ union plus étroite » dans l’article 1er du Statut du Conseil de l’Euro
10090 rticle 1er (a) Le but du Conseil de l’Europe est de réaliser une union plus étroite entre ses Membres afin de sauvegarder
10091 étroite entre ses Membres afin de sauvegarder et de promouvoir les idéaux et les principes qui sont leur patrimoine commu
10092 les principes qui sont leur patrimoine commun et de favoriser leur progrès économique et social. (b) Ce but sera poursuiv
10093 es organes du Conseil, par l’examen des questions d’ intérêt commun, par la conclusion d’accords et par l’adoption d’une ac
10094 des questions d’intérêt commun, par la conclusion d’ accords et par l’adoption d’une action commune dans les domaines écono
10095 un, par la conclusion d’accords et par l’adoption d’ une action commune dans les domaines économique, social, culturel, sci
10096 ions relatives à la défense nationale ne sont pas de la compétence du Conseil de l’Europe. En revanche, trois ans plus ta
10097 ui répond, dès son préambule, aux vœux du congrès de La Haye, en parlant d’une « fusion des intérêts essentiels » et « d’i
10098 mbule, aux vœux du congrès de La Haye, en parlant d’ une « fusion des intérêts essentiels » et « d’institutions communes ca
10099 ant d’une « fusion des intérêts essentiels » et «  d’ institutions communes capables d’orienter un destin désormais partagé 
10100 ssentiels » et « d’institutions communes capables d’ orienter un destin désormais partagé ». Les six parties contractantes 
10101 lisations concrètes créant d’abord une solidarité de fait, et par l’établissement de bases communes de développement écono
10102 rd une solidarité de fait, et par l’établissement de bases communes de développement économique ; Soucieux de concourir p
10103 de fait, et par l’établissement de bases communes de développement économique ; Soucieux de concourir par l’expansion de
10104 communes de développement économique ; Soucieux de concourir par l’expansion de leurs productions fondamentales au relèv
10105 onomique ; Soucieux de concourir par l’expansion de leurs productions fondamentales au relèvement du niveau de la vie et
10106 productions fondamentales au relèvement du niveau de la vie et au progrès des œuvres de paix ; Résolus à substituer aux r
10107 ment du niveau de la vie et au progrès des œuvres de paix ; Résolus à substituer aux rivalités séculaires une fusion de l
10108 à substituer aux rivalités séculaires une fusion de leurs intérêts essentiels, à fonder par l’instauration d’une communau
10109 intérêts essentiels, à fonder par l’instauration d’ une communauté économique les premières assises d’une communauté plus
10110 d’une communauté économique les premières assises d’ une communauté plus large et plus profonde entre des peuples longtemps
10111 ar des divisions sanglantes, et à jeter les bases d’ institutions capables d’orienter un destin désormais partagé ; Ont dé
10112 tes, et à jeter les bases d’institutions capables d’ orienter un destin désormais partagé ; Ont décidé de créer une Commun
10113 rienter un destin désormais partagé ; Ont décidé de créer une Communauté européenne du charbon et de l’acier… Et l’artic
10114 igné à Rome le 25 mars 1957) revient à la formule de l’union « plus étroite » : mais ce comparatif prend cette fois-ci un
10115 end cette fois-ci un sens concret, puisqu’on part d’ une union existante réalisée par la CECA. Les chefs des États membres
10116 ne action commune le progrès économique et social de leur pays en éliminant les barrières qui divisent l’Europe… Soucieux
10117 ant les barrières qui divisent l’Europe… Soucieux de renforcer l’unité de leurs économies et d’en assurer le développement
10118 divisent l’Europe… Soucieux de renforcer l’unité de leurs économies et d’en assurer le développement harmonieux en réduis
10119 ucieux de renforcer l’unité de leurs économies et d’ en assurer le développement harmonieux en réduisant l’écart entre les
10120 gions et le retard des moins favorisées. Désireux de contribuer, grâce à une politique commerciale commune, à la suppressi
10121 instituant la CECA. Quant aux aspects politiques de l’union, les porte-paroles des gouvernements ne les évoquent encore q
10122 des gouvernements ne les évoquent encore qu’avec d’ infinies précautions. Ainsi le général de Gaulle, dans son discours du
10123 il que les nations qui s’associent ne cessent pas d’ être elles-mêmes et que la voie suivie soit celle d’une coopération or
10124 être elles-mêmes et que la voie suivie soit celle d’ une coopération organisée des États, en attendant d’en venir, peut-êtr
10125 une coopération organisée des États, en attendant d’ en venir, peut-être, à une imposante Confédération. Cette attente, ce
10126 essés », répètent les hommes d’État aux pionniers de la fédération. Pour le malheur de l’Europe et du monde, ils le répète
10127 t aux pionniers de la fédération. Pour le malheur de l’Europe et du monde, ils le répètent depuis six siècles et demi — ex
10128 ècles et demi — exactement depuis 1306. Le projet de Pierre Dubois était « prématuré », comme le furent ceux de Podiebrad
10129 Dubois était « prématuré », comme le furent ceux de Podiebrad et de Crucé, de Sully et de Comenius, de William Penn et de
10130 prématuré », comme le furent ceux de Podiebrad et de Crucé, de Sully et de Comenius, de William Penn et de l’abbé de Saint
10131 », comme le furent ceux de Podiebrad et de Crucé, de Sully et de Comenius, de William Penn et de l’abbé de Saint-Pierre, d
10132 furent ceux de Podiebrad et de Crucé, de Sully et de Comenius, de William Penn et de l’abbé de Saint-Pierre, de Kant, de S
10133 e Podiebrad et de Crucé, de Sully et de Comenius, de William Penn et de l’abbé de Saint-Pierre, de Kant, de Saint-Simon, d
10134 rucé, de Sully et de Comenius, de William Penn et de l’abbé de Saint-Pierre, de Kant, de Saint-Simon, de Mazzini, de Coude
10135 us, de William Penn et de l’abbé de Saint-Pierre, de Kant, de Saint-Simon, de Mazzini, de Coudenhove et de Briand, enfin d
10136 lliam Penn et de l’abbé de Saint-Pierre, de Kant, de Saint-Simon, de Mazzini, de Coudenhove et de Briand, enfin du congrès
10137 l’abbé de Saint-Pierre, de Kant, de Saint-Simon, de Mazzini, de Coudenhove et de Briand, enfin du congrès de La Haye. Les
10138 aint-Pierre, de Kant, de Saint-Simon, de Mazzini, de Coudenhove et de Briand, enfin du congrès de La Haye. Les conditions
10139 ant, de Saint-Simon, de Mazzini, de Coudenhove et de Briand, enfin du congrès de La Haye. Les conditions de « maturité » d
10140 ini, de Coudenhove et de Briand, enfin du congrès de La Haye. Les conditions de « maturité » de la fédération politique n’
10141 iand, enfin du congrès de La Haye. Les conditions de « maturité » de la fédération politique n’ayant pas été définies, ce
10142 ongrès de La Haye. Les conditions de « maturité » de la fédération politique n’ayant pas été définies, ce jeu peut continu
10143 eu peut continuer aussi longtemps que les ennemis de l’Europe lui en laisseront le loisir, pas davantage. 324. Texte com
10144 ement commenté, dans L’Europe de Demain, Éditions de la Baconnière, Neuchâtel, 1945. 325. Cf. le discours de Briand, supr
10145 aconnière, Neuchâtel, 1945. 325. Cf. le discours de Briand, supra : « une sorte de lien fédéral ». La gaucherie de ces fo
10146 5. Cf. le discours de Briand, supra : « une sorte de lien fédéral ». La gaucherie de ces formules traduit bien l’hésitatio
10147 pra : « une sorte de lien fédéral ». La gaucherie de ces formules traduit bien l’hésitation de la pensée politique. 326.
10148 ucherie de ces formules traduit bien l’hésitation de la pensée politique. 326. Texte recueilli dans l’Europe en Jeu, par
10149 ns l’Europe en Jeu, par D. de Rougemont, Éditions de la Baconnière, Neuchâtel, 1948.