1 1965, Fédéralisme culturel (1965). I. « Toute culture est création de diversité »
1 ersité » J’aime beaucoup les anniversaires. Ils nous invitent à déclarer des sentiments d’amitié trop souvent tacites, qui
2 t de ce que l’on attend d’eux. L’anniversaire qui nous réunit aujourd’hui me touche d’autant plus personnellement qu’il m’of
3 le rôle d’un institut régional tel que celui que nous célébrons, et les efforts de ceux qui ont entrepris d’élargir la form
4 e fédéraliste aux dimensions de l’Europe entière. Nous vivons à l’heure de l’Europe, de son union souhaitée par tous et comm
5 e soit acquise qu’au prix d’une uniformisation de nos cultures diverses et de nos originalités régionales ou locales. Ils r
6 une uniformisation de nos cultures diverses et de nos originalités régionales ou locales. Ils redoutent, comme le professeu
7 i prête vraiment sans justice, d’« écraser toutes nos particularités spirituelles et morales », on ne voit pas de quels moy
8 personne, par aucun des promoteurs de l’union de nos pays, mais encore n’aurait pas la moindre chance de se réaliser jamai
9 éens sains d’esprit, et par le libre consentement nos peuples. Écartons ce fantôme lugubre. Restent deux possibilités de ré
10 me lugubre. Restent deux possibilités de réaliser notre union : l’une c’est l’Europe des États, l’autre c’est l’Europe fédéré
11 Ce système, notoirement insuffisant pour assurer notre unité d’action à l’échelle mondiale, aboutirait au surplus a une Euro
12 leur union, et non pas uniformisés. Eh bien, pour nos États européens, qui se trouvent être au nombre de vingt-cinq, comme
13 i se trouvent être au nombre de vingt-cinq, comme nos cantons et demi-cantons, cette forme d’union fédérale, forte mais lim
14 mes, comme elles l’étaient toutes aux origines de notre culture commune, Padoue, Bologne, la Sorbonne, Oxford, Coimbra ou Cra
15 ou Cracovie. Or s’il est vrai que la vitalité de notre culture dépend de celle de ces foyers locaux de création, on ne peut
16 e et trop grande, la formule fédérale offrirait à nos divers pays, dans l’Europe unie, le double avantage de participer à u
17 i sont ceux du petit État. Elle offrirait ainsi à nos régions et foyers focaux des perspectives toutes nouvelles. En effet,
18 xxe siècle, les forces qui tendent à uniformiser nos mœurs et coutumes ont reçu un puissant appui de la technique. Si vous
19 nt appui de la technique. Si vous songez que dans nos grands pays — et pas seulement en Amérique — chaque soir, dix million
20 alaxage moral et affectif qui sont à l’œuvre dans notre société occidentale. Ah certes ! ce n’est pas le Marché commun qui au
21 Marché commun qui aura jamais un tel pouvoir sur nos désirs, nos imaginations et nos réflexes ! Et notez bien que je ne me
22 un qui aura jamais un tel pouvoir sur nos désirs, nos imaginations et nos réflexes ! Et notez bien que je ne me plains pas
23 n tel pouvoir sur nos désirs, nos imaginations et nos réflexes ! Et notez bien que je ne me plains pas — ce serait d’ailleu
24 ujourd’hui à des instituts comme le vôtre — comme le nôtre dirai-je, car j’en suis membre.
2 1965, Fédéralisme culturel (1965). II. « Devenons nous-mêmes ! »
25 ou locaux qui se multiplient si heureusement dans nos divers pays, courent un risque majeur : celui de se refermer sur eux-
26 en conserver de valable. Il me paraît utile, pour nous tous — car nous sommes tous fédéralistes, je pense, tout au moins à l
27 valable. Il me paraît utile, pour nous tous — car nous sommes tous fédéralistes, je pense, tout au moins à l’échelle du cant
28 adoxe, je crois qu’il est loisible d’affirmer que nous ne tenons pas nos valeurs culturelles de la terre, du terroir natal,
29 il est loisible d’affirmer que nous ne tenons pas nos valeurs culturelles de la terre, du terroir natal, mais plutôt de la
30 cours « étrangers », le plus souvent très loin de notre lieu de naissance. Le christianisme par exemple, ou l’humanisme, ou l
31 anisme, ou les sciences, ou les styles majeurs de nos arts, ne sont pas des produits tirés de notre sol par le moyen de rac
32 rs de nos arts, ne sont pas des produits tirés de notre sol par le moyen de racines imaginaires ou symboliques. Ils nous sont
33 moyen de racines imaginaires ou symboliques. Ils nous sont venus de loin, portés par de grands vents qui ont fait le tour d
34 mmunautés civiques, qu’elle germera. Ainsi voyons- nous des idées, des concepts, des valeurs, des procédés de l’art, germer e
35 e, c’est bien moins à la terre du pays qu’elle le doit — on trouve la même ailleurs, en Provence, par exemple — qu’aux génie
36 ue les nombreux peintres qui vivent près d’Aix de nos jours y sont attirés par le souvenir de Cézanne, et par le climat. Et
37 t par le climat. Et puis, la peinture hollandaise doit plus au ciel et à sa lumière humide, qu’à la terre des Pays-Bas, et b
38 type, faciles à multiplier, auraient vite fait de nous montrer que les foyers d’art et de pensée qui ont illustré notre cult
39 ue les foyers d’art et de pensée qui ont illustré notre culture européenne sont tous nés aux points d’intersection de grands
40 l’Italie (qui ont à peine cent ans), de même que nous le voyons porter sa contagion dans les pays tout neufs et à peine fin
41 rants d’idées qui ont nourri la vie culturelle de nos régions, dans la mesure où ces régions ont su fixer ces courants au p
42 à résoudre : à quel moment de l’histoire serions- nous devenus « nous-mêmes » une fois pour toutes ? Quel nous-mêmes, entre
43 e fois pour toutes ? Quel nous-mêmes, entre tant, devons -nous conserver ? Personne, je crois, n’a jamais demandé que nous rest
44 pour toutes ? Quel nous-mêmes, entre tant, devons- nous conserver ? Personne, je crois, n’a jamais demandé que nous restions
45 rver ? Personne, je crois, n’a jamais demandé que nous restions fidèles aux mœurs des lacustres, ni même à celles des Helvèt
46 . Alors, où faut-il s’arrêter avec l’intention de nous y tenir ? Aux nobles troubadours de Grandson et de Neuchâtel ? À Guil
47 personnage mythique, et qui n’est sûrement pas de nos ancêtres ? À la chronique apocryphe dite des Chanoines ? Au grand Ost
48 -ce alors suffisant ? N’a-t-il pas le droit et le devoir d’aller plus loin ? Et de corriger ses erreurs, d’intégrer d’autres v
49 de, was du bist ! Deviens ce que tu es. Avec quoi nous passons aux aspects positifs et créateurs des expressions et des devi
50 en d’une commune et c’est un trait fondamental de notre État fédéraliste. Étant citoyen d’une commune après une bonne douzain
51 elui qui veut participer de la culture européenne doit s’intégrer d’abord à une communauté, qui a transmis cette culture et
52 la vie de plus d’hommes, et d’abord de chacun de nous , et ce sens ne peut être abstrait. De même que l’on ne peut devenir u
53 je lui ai cité une phrase de Spinoza qui a scellé notre accord profond — et je la trouve, non sans émotion, reproduite dans s
54 définissent le génie occidental : « D’autant plus nous connaissons les choses particulières, d’autant plus nous connaissons
55 nnaissons les choses particulières, d’autant plus nous connaissons Dieu. » Avec cela, je pourrais dire que tout est dit. Bai
56 tout est dit. Baissons un peu le ton, rapprochons- nous des humbles conditions de notre action, mais sans perdre de vue ses f
57 e ton, rapprochons-nous des humbles conditions de notre action, mais sans perdre de vue ses fins dernières. L’originalité d’u
58 , il y a donc la vie culturelle. C’est par là que nos cités suisses se distinguent si nettement de tant de villes ayant un
59 le d’habitants, dans l’un ou l’autre des pays qui nous entourent. Nous avons cela, nous possédons cette densité exceptionnel
60 dans l’un ou l’autre des pays qui nous entourent. Nous avons cela, nous possédons cette densité exceptionnelle de lecteurs,
61 tre des pays qui nous entourent. Nous avons cela, nous possédons cette densité exceptionnelle de lecteurs, de chercheurs, d’
62 niversité de Neuchâtel l’enseignement direct (car nous étions très peu nombreux) : un Max Niedermann, un Arnold Reymond, un
63 très précise, j’en ai fait l’expérience et je la dois même au premier président de cet Institut, le professeur et colonel C