1
t ou tard viendra lui fermer le bec au nom de ses
devoirs
d’État, convaincu que la cité a pour but la personne, paradoxe d’une
2
ésistance, dans les pays de l’Axe autant que dans
notre
camp. Et de là sortiront les chefs de file des futurs mouvements fédé
3
neux des vacances, traînée d’espoirs délivrés qui
nous
frôle, éveille chez ceux qui restent un sentiment confus d’exil et de
4
és de l’Europe sentimentale. Pourquoi faut-il que
notre
langue les traduise, en vertu d’une convention qu’il serait temps de
5
guments sanglants. Et s’il est des domaines où de
nos
jours, l’on peut réclamer à bon droit l’économie de nuances vaines et
6
système philosophique. Ainsi se dessineraient, si
nous
étendions l’analyse, deux « natures » fondamentalement divergentes, d
7
du sentiment Une rumeur lointaine et continue,
nous
l’entendons seulement lorsqu’elle cesse, ou bien lorsqu’elle grandit
8
orsqu’elle grandit soudain. Ainsi de la rumeur en
nous
du sang qui court ; ainsi de la respiration. Il n’y a sensation que d
9
e du discontinu. Il n’y a sentiment que de ce qui
nous
quitte, ou nous surprend, ou bien encore au fond de l’être nous déchi
10
Il n’y a sentiment que de ce qui nous quitte, ou
nous
surprend, ou bien encore au fond de l’être nous déchire et nous ressu
11
u nous surprend, ou bien encore au fond de l’être
nous
déchire et nous ressuscite. À la naissance du sentiment, nous trouvon
12
ou bien encore au fond de l’être nous déchire et
nous
ressuscite. À la naissance du sentiment, nous trouvons invariablement
13
et nous ressuscite. À la naissance du sentiment,
nous
trouvons invariablement une contradiction interne, une séparation, qu
14
st pas du tout le contraire du rationalisme (mais
nous
vivons sur des distinctions de manuels). Il est même étonnant de cons
15
quelle défense d’un Occident latin dont justement
nous
récusons l’idéal d’orgueilleuse et stérilisante perfection. L’intelli
16
lenteur, — encore un paradis perdu ! C’était bien
notre
dernier luxe, notre dernière gravité. C’était encore vivre sa vie. Ma
17
paradis perdu ! C’était bien notre dernier luxe,
notre
dernière gravité. C’était encore vivre sa vie. Mais ils s’achètent de
18
ressentent absurde. Rien désormais ne pourra plus
nous
rendre le silence et la lenteur des choses. Derniers refuges, vastes
19
e des états d’âme. L’Europe du sentiment, c’est
notre
Europe des adieux. Elle ne vit plus qu’en nous déjà, nous la portons
20
t notre Europe des adieux. Elle ne vit plus qu’en
nous
déjà, nous la portons encore comme le souvenir d’un soir d’adolescenc
21
ope des adieux. Elle ne vit plus qu’en nous déjà,
nous
la portons encore comme le souvenir d’un soir d’adolescence sur la pr
22
it du souvenir, brève nuit d’août et souvenirs de
nos
enfances. Ce soir des Signes où des renards sortirent à la lisière de
23
souvenir. Et bientôt paraîtra l’aube dure. Alors
nous
entrerons dans cette joie sauvage du Grand Jour, où nous irons avec c
24
trerons dans cette joie sauvage du Grand Jour, où
nous
irons avec ce qu’il restera de bonté dans notre cœur, plus inutile qu
25
où nous irons avec ce qu’il restera de bonté dans
notre
cœur, plus inutile que jamais, dominatrice et bafouée. Chevreuse, 19
26
é écumer sous la masse du soleil. Une lisière qui
nous
accompagnait vira largement, nous fit front, et il n’y eut plus qu’un
27
Une lisière qui nous accompagnait vira largement,
nous
fit front, et il n’y eut plus qu’une piste de terre entre les sapins
28
noirs, la rumeur du rivage et du soleil derrière
nous
décroissant, tumulte d’un matin d’été. Maintenant une odeur fine de b
29
: cent fenêtres dans une façade de grès Louis XV.
Nous
la longeons, nous montons une rampe pavée qui s’engage sous un porche
30
ns une façade de grès Louis XV. Nous la longeons,
nous
montons une rampe pavée qui s’engage sous un porche couvert aux colon
31
rophes de Novalis, des mélodies de Bach. Après le
Notre
Père, chacun s’en va, sérieux, de son côté. Le reste de la matinée se
32
pourpres. Les chevaux ruisselants s’échappent de
nos
bras, et nous les poursuivons, le long des grèves, dans les blés. Mid
33
s chevaux ruisselants s’échappent de nos bras, et
nous
les poursuivons, le long des grèves, dans les blés. Midi. Au haut de
34
t consacré à l’inspection des terres. Chaque jour
nous
partons en break à deux chevaux, pour l’un des onze villages du burgr
35
et parfois hors des pistes, à travers la forêt —,
nous
gagnons la maison de l’inspecteur. On la distingue de loin, seule bât
36
érer un « Bock » mal encorné. Le fusil déposé sur
nos
genoux, par habitude, ce sera pour tirer un chat qui rôde autour de l
37
e forêts maigres et de pâturages, à perte de vue.
Nous
sommes, pour trois jours, les hôtes d’une immense demeure en briques
38
ceux de Waldburg qui ne boivent que du lait ». Et
nous
servent du thé bouillant où nagent des morceaux de glace. À ces détai
39
ement des bœufs ne s’apaise pas sous le soleil et
nous
entoure d’une rumeur animale tenace comme toutes ces odeurs de la ter
40
ouffle le vent marin ; et des cigognes filent sur
nos
têtes, tirant leurs pattes roses. À l’horizon toujours passent des vo
41
ue l’on exige des jeunes Prussiens, ferait hurler
nos
pédagogues. Mais elle s’unit à un régime de responsabilités concrètes
42
ommes, des animaux et des éléments naturels. Pour
nous
, nous développons un sens plutôt fictif de la responsabilité. Nous dé
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des animaux et des éléments naturels. Pour nous,
nous
développons un sens plutôt fictif de la responsabilité. Nous développ
44
ppons un sens plutôt fictif de la responsabilité.
Nous
développons au vrai un hamlétisme. Notre préparation à l’autonomie de
45
sabilité. Nous développons au vrai un hamlétisme.
Notre
préparation à l’autonomie de l’individu demeure théorique, et son app
46
retardée, contrecarrée, découragée sournoisement.
Nous
créons par nos préceptes, et par toute notre ambiance éducatrice, un
47
carrée, découragée sournoisement. Nous créons par
nos
préceptes, et par toute notre ambiance éducatrice, un organe de l’aut
48
ment. Nous créons par nos préceptes, et par toute
notre
ambiance éducatrice, un organe de l’autonomie qui ne trouve nulle par
49
ercer : d’où les conflits purement « moraux » qui
nous
empêtrent, jusqu’au-delà de nos adolescences. Jeux des enfants prussi
50
t « moraux » qui nous empêtrent, jusqu’au-delà de
nos
adolescences. Jeux des enfants prussiens : s’asseoir à six ou sept su
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ticulations, en sorte qu’il ne peut se coucher et
doit
dormir appuyé aux arbres. Pour le capturer, les indigènes scient à mo
52
donne aux plaisirs mondains l’aspect absurde que
nous
leur connaissons, cette superstition ne leur est nullement nécessaire
53
unkers… J’entends les gens de villes : « Ça ne
doit
pas être bien drôle à la longue ! » Avec cela que vos plaisirs vous a
54
donnent sa raison d’être au labeur des journées.
Nous
voici délivrés de la grande bourgeoisie, de ces gens qui croient devo
55
de la grande bourgeoisie, de ces gens qui croient
devoir
, ou se devoir. De ces gens grossièrement distingués qui ne vous ont p
56
ourgeoisie, de ces gens qui croient devoir, ou se
devoir
. De ces gens grossièrement distingués qui ne vous ont pas vu, qui dét
57
eau riche, en regard de cette seule classe qui ne
doit
rien à l’opinion. Non, je ne peux rien voir dans cette « féodalité
58
cette « féodalité » qui soit plus répugnant pour
notre
humanité que tant de systèmes prônés par les partisans du progrès, —
59
e figuration pour une satire à grand spectacle de
notre
civilisation finissante ! (Vous souriez ? Vous mourrez avec elle.) Ce
60
esse Adélaïde en soie d’aurore, voici l’heure que
nous
attendions. Les escaliers s’abaissent dans le silence nouveau, nous e
61
es escaliers s’abaissent dans le silence nouveau,
nous
entendons nos pas jusqu’aux jardins tendus en tapisserie entre les ar
62
abaissent dans le silence nouveau, nous entendons
nos
pas jusqu’aux jardins tendus en tapisserie entre les arcades d’un pér
63
ans fin dans le frisson désespéré de l’aube, — et
nous
, au bord du péristyle arrêtés, au bord de la nuit qui nous possède en
64
bord du péristyle arrêtés, au bord de la nuit qui
nous
possède encore, nous assistons au miracle hostile. Elle se tait. Alor
65
êtés, au bord de la nuit qui nous possède encore,
nous
assistons au miracle hostile. Elle se tait. Alors je me tourne vers c
66
e encore vacillante, le vide absurde où s’en vont
nos
plaisirs et d’où remonte notre peine. Ah ! surprendre sur un visage d
67
absurde où s’en vont nos plaisirs et d’où remonte
notre
peine. Ah ! surprendre sur un visage décontenancé, et jusque dans le
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que moi. Le jour qui déjà me saisit va-t-il ainsi
nous
séparer ? Ce corps de femme défend encore sa nuit, si nu pourtant dan
69
ends par une certaine qualité de déception, qu’il
nous
propose. La joie du jour, hélas, la plus forte… Vienne, 1928. 5. C
70
et ses façades exubérantes de reflets, — et déjà
nous
passons sous de hauts ponts sonores, au long d’un quai tout fleuri de
71
, au long d’un quai tout fleuri de terrasses ; on
nous
déverse dans cette foule et ces musiques, deux visages amis me sourie
72
saient de décrire sans l’avoir jamais vu, et dont
nous
savons seulement que tout y a son écho le plus pur. Le voyage trompe
73
qui, mais qu’êtes-vous venu chercher jusque chez
nous
? » On me demandera donc toujours des passeports ? Dussè-je les inven
74
. Barnabooth, vous êtes, m’écrié-je, mes frères !
Nous
traînons tous notre sabot, qui, loin de s’user, ne tarde pas à deveni
75
êtes, m’écrié-je, mes frères ! Nous traînons tous
notre
sabot, qui, loin de s’user, ne tarde pas à devenir notre raison de vi
76
abot, qui, loin de s’user, ne tarde pas à devenir
notre
raison de vivre. Mais combien votre sort, ô grands empêtrés ! me para
77
de troubles distingués. Peu de sens du réel. Mais
nous
vous montrerons notre Hongrie, ou tout au moins ce qu’il en reste. Su
78
s. Peu de sens du réel. Mais nous vous montrerons
notre
Hongrie, ou tout au moins ce qu’il en reste. Sur quoi l’on m’entraîna
79
es ruelles qui sentent encore le Turc. Tandis que
nous
y rôdions, un soir étouffant, vous m’avez montré en passant des murs
80
hète Gül Baba. Puis, comme le soleil se couchait,
nous
avons repassé un grand pont vibrant et nous sommes rentrés en Europe.
81
hait, nous avons repassé un grand pont vibrant et
nous
sommes rentrés en Europe. Mais dès le lendemain, m’échappant du progr
82
brûlant, je savais bien que j’obéissais à ce que
nos
psychologues appellent une conduite magique. Or il est délicieux de r
83
urées —elle n’a rien d’étrange, si l’on songe que
nous
sommes en Hongrie. Et ce n’est pas que je trouve ce raisonnement fin,
84
microscopique. (Il a tellement l’air de rien que
nous
sommes presque excusables de ne le point apercevoir.) Je vais cependa
85
que les voûtes soient celles d’un ancien couvent.
Nous
pénétrons dans une grande salle vivement éclairée. Murs chaulés, et d
86
ce cette fumée, les yeux à terre, dans l’attente.
Nous
sommes assis autour d’une table et nous voyons, au milieu de la salle
87
’attente. Nous sommes assis autour d’une table et
nous
voyons, au milieu de la salle, un arbre de Noël aux amples branches r
88
de ce café trop amer qui pince la gorge. Dehors,
nous
ne parlons pas : le froid paralyse la mâchoire. Les magnats en tax
89
s, ô pathétique dissonance, tangible absurdité de
notre
époque, beaucoup ont dû louer des taxis démodés, au tarif inférieur.
90
tangible absurdité de notre époque, beaucoup ont
dû
louer des taxis démodés, au tarif inférieur. Des chauffeurs vautrés,
91
réfute pas cette haine. Ici, la sympathie est un
devoir
de politesse. Comment la mesurer sans mauvaise grâce à qui vous a reç
92
s de « la Hongrie mutilée ». — « Savez-vous qu’on
nous
a volé les deux tiers de notre patrie ? » — Ah ! ce n’est pas vous, m
93
« Savez-vous qu’on nous a volé les deux tiers de
notre
patrie ? » — Ah ! ce n’est pas vous, maintenant, qui allez demander r
94
Dans l’inextricable confusion d’injustices à quoi
devait
mener le wilsonisme schématique qui traça les frontières actuelles, d
95
e violacée à l’horizon — chez les Tchèques déjà.
Nous
allons aux bains, car c’est dans la piscine que nous devons rencontre
96
s allons aux bains, car c’est dans la piscine que
nous
devons rencontrer le poète. Cheveux noirs d’aigle collés sur son larg
97
ons aux bains, car c’est dans la piscine que nous
devons
rencontrer le poète. Cheveux noirs d’aigle collés sur son large front
98
ur son large front, belle carrure ruisselante, il
nous
sourit, dans l’eau jusqu’à mi-corps, mythologique. Nous sortons ensem
99
ourit, dans l’eau jusqu’à mi-corps, mythologique.
Nous
sortons ensemble de la petite ville aux rues de terre brûlante, aux m
100
jaunes basses, ville sans ombre, sans arbres, et
nous
montons vers la maison du poète, sur un coteau. Trois chambres boisée
101
nts ne l’emportent pas. L’après-midi est immense.
Nous
buvons des vins dorés et doux que nous verse Ilonka Babits (elle est
102
t immense. Nous buvons des vins dorés et doux que
nous
verse Ilonka Babits (elle est aussi poète, et très belle), nous inscr
103
nka Babits (elle est aussi poète, et très belle),
nous
inscrivons nos noms au charbon sur le mur chaulé, Gachot prend des ph
104
est aussi poète, et très belle), nous inscrivons
nos
noms au charbon sur le mur chaulé, Gachot prend des photos, Gyergyai
105
que poursuivre est une sorte d’enivrant péché. —
Nous
aurions une maison dans ce désert aux formes tendres et déjà familièr
106
familières, et le passage des trains chaque soir
nous
redirait un adieu bref, — chaque soir plus infime, à cause de l’éloig
107
oici la nuit des faubourgs de Pest, au-dessous de
nous
. Un bal, ou de l’ivresse considérée comme un des beaux-arts Ils
108
D’ailleurs ces Égyptiens venaient des Indes, qui
nous
apportèrent le tarot et la roulotte, dont descendent le bridge et la
109
oderne », dans un sens vaste et mystique, elle le
doit
au charme égyptien du peuple errant qui lui donna sa musique national
110
tionale8. Les signes parlent, et certains sages :
nous
entrons dans une ère égyptienne. Mais que dire des pouvoirs de la pla
111
n se plaignent de n’avoir pas ce faux confort que
nous
n’avons qu’au prix de tout ce qu’à Debrecen je viens admirer. On aime
112
sique seule s’en souvient. Trésor si pur qu’on ne
doit
même pas savoir qu’on le possède… Tout près d’ici, peut-être, mais in
113
res baissés, à l’abri de la lune. Le contrôleur a
dû
jouer un rôle dans mes cauchemars. L’aube m’éveille dans les faubourg
114
comme un pan de la nuit fuyante, un songe où j’ai
dû
voir l’objet pour la première fois — ou bien était-ce un être ? In
115
somnie ! Cela tourne tout de suite à la débauche.
Notre
liberté de penser est absurde au regard des contraintes que subissent
116
t absurde au regard des contraintes que subissent
nos
gestes. Imaginer ce qui se produirait, si par quelque Décret l’on éle
117
pas encore »… Bon point de vue pour déconsidérer
nos
raisons de vivre. La maladie aussi. Rien ne ressemble au voyage comme
118
nes de voyage ? Cela va paraître improbable. On a
dû
voir sur moi que je le cherche, c’est pourquoi l’œil est implacable…
119
pari dont tu n’as vu l’enjeu qu’un seul instant —
nos
rêves sont instantanés — que tu es parti ; et maintenant tu joues ce
120
n sur l’eau Tu es appuyée debout contre moi, et
nous
regardons à nos pieds l’eau vivante. La brume est proche. Une haute m
121
es appuyée debout contre moi, et nous regardons à
nos
pieds l’eau vivante. La brume est proche. Une haute muraille derrière
122
La brume est proche. Une haute muraille derrière
nous
ferme le monde. Tu ne trembles pas, tu t’appuies. Nos reflets ondulen
123
ferme le monde. Tu ne trembles pas, tu t’appuies.
Nos
reflets ondulent très peu, gris sur le blanc doucement luisant de la
124
dresse, et se retient… Et l’air chargé d’attente.
Nos
têtes immobiles sont près de se toucher, nos regards s’en vont à la r
125
nte. Nos têtes immobiles sont près de se toucher,
nos
regards s’en vont à la rencontre de ce qui est voilé. Retiens ton sou
126
écoute encore plus purement… Solennité autour de
nous
: il y a une grande lenteur. C’est l’avenir ou l’éternité qui ouvre l
127
eçue quelque part en nous-mêmes, dans la brume où
nous
sommes perdus avec ce clapotis d’une eau étrangement vivante et qui r
128
eau étrangement vivante et qui rêve ; et rien que
nos
yeux qui brillent dans l’étendue où nos deux formes confondent leur o
129
rien que nos yeux qui brillent dans l’étendue où
nos
deux formes confondent leur ombre et leur songe… Odeur de l’eau, — po
130
ccupant assez longuement d’un des poètes auxquels
notre
temps doit vouer l’attention la plus grave — car il vécut dans ces ma
131
z longuement d’un des poètes auxquels notre temps
doit
vouer l’attention la plus grave — car il vécut dans ces marches de l’
132
à l’Esprit et dont certains des plus purs d’entre
nous
ont voulu tenter le climat, — j’avais rêvé sur ce passage de l’émouva
133
de. L’amour s’éloigne le premier, quand Hölderlin
doit
quitter la maison de Mme Gontard11, déchirement à peine sensible dans
134
s, ils ne savent pas trop qui c’était… Alors vous
devez
connaître ces portraits ? — (et comme je considère un ravissant médai
135
d’eux… Cela s’oublie. Et l’amour, tout justement,
nous
fait comprendre, dans le temps même qu’il nous entrouvre le ciel, qu’
136
t, nous fait comprendre, dans le temps même qu’il
nous
entrouvre le ciel, qu’il est bon qu’il y ait la terre… Mais que cette
137
C’est une jolie fille potelée, qui rit, — et qui
doit
savoir se défendre à l’occasion, mais comme elles font, pas trop tôt.
138
s, à cette heure qui serait celle de rentrer chez
nous
s’asseoir auprès d’un feu… — Mais non. 7 mai 1929 « J’ai mes br
139
ts, ces symétries minérales qu’on instruisit dans
nos
esprits et qui nous laissent comme perclus au milieu des métamorphose
140
inérales qu’on instruisit dans nos esprits et qui
nous
laissent comme perclus au milieu des métamorphoses. Il s’agit que l’e
141
que ce médecin parle avec mystère des objets que
nous
touchons, — ce mystique avec naturel de ce qui nous est invisible. To
142
us touchons, — ce mystique avec naturel de ce qui
nous
est invisible. Tous deux orientent la réflexion vers le sens et vers
143
concret. N’est-ce point ce genre de démarche que
notre
« culture » a le plus méprisé ? N’est-ce point à cause de ce mépris q
144
ecret de l’humain ? Car voici bien le monde qu’on
nous
a fait. Tout encombré d’idées sans corps, de corps stupides — de nihi
145
bstraites ont au contraire le pouvoir de rendre à
nos
sens leur efficacité et leur étonnement. Je regarde les feuilles de m
146
gnification. (L’état de l’âme et du corps où tout
nous
apparaît en relations concrètes.) 31 mai 1929 Personne n’a fabr
147
traduis cette page Sur la mort. Mes funérailles
devront
se dérouler dans le cadre de Jésus-Sirach, 38, versets 16-24. Qu’on m
148
ris soin de moi au moment de ma mort et tôt après
devront
être largement dédommagés. Nul ne sait si je ne flotterai pas encore
149
pas », dis-je, mentant. Une grosse averse d’orage
nous
a fait fuir sous la tonnelle du vestiaire. « N’est-ce pas, les França
150
ême temps. — « Ne regardez donc pas mes mains, je
dois
faire le ménage ces jours, la peau devient toute sèche et je n’ai mêm
151
t. Presque les mêmes mots !). Doux malentendu qui
nous
rapproche sous la forme d’une carte postale et d’une réminiscence lit
152
raire. Ses deux sœurs sont venues la chercher, et
nous
sommes rentrés sous le même parapluie, jusqu’à leur petite maison cou
153
nitié », ne saurait laisser aucun doute, fussions-
nous
même privés de certains témoignages oraux ou de quelques textes irréf
154
re à cette « Germanie aimée13 » ? Ah ! les livres
nous
avaient bien trompés. Pas trace ici de « merveilleux ». Tout ce qui,
155
ainte. — Des Werthers aux yeux secs, voilà ce que
nous
sommes. 14 juin 1929 Je suis assis en face du magazine que lit
156
e soir. Je ne sais pas ce qu’il y a, sinon que je
dois
retenir violemment une espèce de joie qui attrape la fièvre dans mon
157
dit-il (et l’on sent qu’il pense : maintenant que
nous
avons clos cette journée par une récréation bien méritée), nous voulo
158
s cette journée par une récréation bien méritée),
nous
voulons aller dormir. Ainsi, dormez bien, faites de doux rêves, — il
159
doux, hein !… » Tout cela est très juste ; la vie
doit
être ainsi : parfaitement compréhensible et d’une vulgarité toute nat
160
s yeux clos. L’arbre, en sa nuit vivante, rêve de
nous
. Plus tard, nous nous sommes regardés sans fin. (Ah ! comment dire !
161
bre, en sa nuit vivante, rêve de nous. Plus tard,
nous
nous sommes regardés sans fin. (Ah ! comment dire ! Vraiment ce fut c
162
en sa nuit vivante, rêve de nous. Plus tard, nous
nous
sommes regardés sans fin. (Ah ! comment dire ! Vraiment ce fut cette
163
t une branche et la Lune éclairait à longs traits
nos
visages. Je reconnus la jeune fille tzigane, ma Rose noire de Tannenb
164
it doucement, au sein du silence et du regard. Et
nous
sommes demeurés des heures au-delà de ce que l’on ignore d’un être, d
165
aient sans mesure tout ce que l’anxiété de la vie
nous
dérobe : la nudité, la plénitude et la violence infiniment comblée. O
166
musical. Ainsi coula cette nuit sans partage, et
nos
mains ne s’étaient pas touchées, lorsque au point du jour je vis pâli
167
ndant une promenade d’après dîner avec mes hôtes,
nous
parlions de prémonitions, et je venais de raconter comment parfois j’
168
recevoir le lendemain. Le soir montait autour de
nous
, des fenêtres s’allumaient à nos pieds dans le bourg, et le père Rein
169
ntait autour de nous, des fenêtres s’allumaient à
nos
pieds dans le bourg, et le père Reinecke refusait de croire à mes his
170
i à leur manière, et très éloignés, qui composent
notre
imagerie quotidienne du vaste monde. J’étais seul et tranquille, à ma
171
e, résultat selon lui de l’excellente cuisine que
nous
sert la Gnädige. Je n’aurais plus l’air citadin. Allons bon, félicito
172
point de cela que l’homme des villes a besoin de
nos
jours ? On parle toujours de son appétit du plaisir. C’est un cliché
173
sang, amplifie le rythme des marées qui baignent
nos
membres. J’ai connu peu de joies plus hautes que celle-ci : se promen
174
ns le mouvement. Et c’est par là qu’ils parlent à
notre
âme et la retiennent, la captivent. Fin juillet 1929 Vraiment l
175
ra une douzaine encore jusqu’à Stuttgart, où l’on
doit
arriver vers huit heures. J’ai d’abord essayé de me confiner dans cet
176
des populations qu’il traverse. À chaque station
nous
débarquons un peu moins de paysans et de paniers ventrus, embarquons
177
encore en regardant devant moi. J’ai honte. Comme
nous
sommes peu capables de nous libérer de barrières sociales ou de pudeu
178
oi. J’ai honte. Comme nous sommes peu capables de
nous
libérer de barrières sociales ou de pudeurs qu’en pensée nous tenions
179
de barrières sociales ou de pudeurs qu’en pensée
nous
tenions pour nulles. Si j’étais vraiment libre, j’aurais fait place a
180
faire des courses en ville, probablement ; elle a
dû
prendre le train des ouvriers, — et c’est à elle que va ma sympathie
181
re interrogation des visages devant l’atrocité de
notre
vie sociale ! Je baisse les yeux sur mon livre. Et la foule menaçante
182
. Je suis chargé d’un service d’éditions que j’ai
dû
d’abord mettre sur pied. Je sais maintenant ce que signifient une « r
183
plus huit minutes à pied de la voûte d’entrée de
notre
bloc à la gare locale, à travers des terrains vagues : journées asser
184
et la représentation du monde chez l’enfant. (Il
nous
initiait aussi à la psychanalyse et nous introduisait dans des maison
185
ant. (Il nous initiait aussi à la psychanalyse et
nous
introduisait dans des maisons de santé pour y interroger paranoïaques
186
les informant. Et le produit de cette interaction
devait
être d’une part l’œuvre écrite, un style d’abord, seul instrument qui
187
ument qui pût capter un éventuel « message » pour
notre
époque ; d’autre part la métamorphose d’un individu empirique, d’un m
188
e, la seconde actuelle. Je rentre de Francfort où
nous
avons tenu un congrès des jeunesses européennes. J’y suis allé avec d
189
ages d’un wagon de troisième classe. À Francfort,
nous
étions logés dans une auberge de jeunesse. Philippe Lamour présidait,
190
n uniforme de chef du Front noir, et plus près de
nos
idées, Harro Schulze-Boysen, chef du groupe « Gegner » (les Adversair
191
arité de l’époque « tardive » et « décadente » où
nous
vivions. J’écrivais sur ma table improvisée (un rayon de placard sur
192
lacard sur deux valises) ces lignes : …les temps
nous
pressent de toutes parts au choix, jusque dans nos admirations, nous
193
us pressent de toutes parts au choix, jusque dans
nos
admirations, nous pressent d’affecter toute chose, même spirituelle,
194
utes parts au choix, jusque dans nos admirations,
nous
pressent d’affecter toute chose, même spirituelle, d’une sorte de coe
195
des cadres d’une logique statique et cartésienne
nous
porte en des régions nouvelles de l’esprit où l’action redevient notr
196
gions nouvelles de l’esprit où l’action redevient
notre
seul critère de cohérence… C’est dire que nous demandons aux œuvres q
197
t notre seul critère de cohérence… C’est dire que
nous
demandons aux œuvres que nous aimons de témoigner d’une certaine forc
198
nce… C’est dire que nous demandons aux œuvres que
nous
aimons de témoigner d’une certaine force de révolte. Notre premier mo
199
ons de témoigner d’une certaine force de révolte.
Notre
premier mouvement nous porte pers Rimbaud, nous détourne de Goethe. M
200
ertaine force de révolte. Notre premier mouvement
nous
porte pers Rimbaud, nous détourne de Goethe. Mais prenons garde de to
201
Notre premier mouvement nous porte pers Rimbaud,
nous
détourne de Goethe. Mais prenons garde de tomber dans un conformisme
202
ales héritées des temps révolus. Prenons garde de
nous
laisser convaincre par les seuls éclats d’un fanatisme à vrai dire sp
203
ndre, que l’imprécation de Rimbaud ; et tous deux
nous
contraignent aux tâches immédiates, c’est-à-dire : à l’actualisation
204
s immédiates, c’est-à-dire : à l’actualisation de
notre
réalité. « Il faut être absolument moderne. » Dès mes premiers pas d
205
scule : « ni individualistes ni collectivistes,
nous
sommes personnalistes ! » À 15 ans, militant socialiste-révolutionn
206
évolutionnaire. Et en même temps la définition de
notre
humanisme, s’il est bien cette volonté de vivre « humainement » que d
207
de vivre « humainement » que dans le monde entier
nous
voyons se dresser contre la stérilisante convention capitaliste, cont
208
ennes à la fois. Car s’il faut une morale simple,
nous
ne saurions admettre que celle qui dirait : « Faites ce que vous pens
209
alité de telles remarques constitue précisément à
nos
yeux leur intérêt humain ? Dans leur simplicité, elles suffiront long
210
, a révélé cette unité fondamentale que créent en
nous
non pas des maîtres ni des noms, mais la consternante misère d’une ép
211
ri, dénaturé, inverti, saboté. La Révolution pour
nous
n’est pas la haine ; et ce n’est pas détruire. C’est le salut de l’ho
212
solution » concrète chez les meilleurs esprits de
notre
génération, ceux de l’Ordre nouveau (Arnaud Dandieu, Robert Aron), ce
213
aussi pressante et planétaire. Rien ne peut plus
nous
détourner de la solidarité du péril. Et les problèmes exquis où s’att
214
que je décrirai comme les Prêtres de l’Insoluble,
nous
n’avons plus le droit d’y prêter une libérale complaisance. Laisse do
215
ire quelque chose, et comment et pourquoi. Ce que
nous
devons faire est toujours assez simple, est toujours évident dès que
216
uelque chose, et comment et pourquoi. Ce que nous
devons
faire est toujours assez simple, est toujours évident dès que nous po
217
ujours assez simple, est toujours évident dès que
nous
possédons le courage de le voir et de l’assumer. Un acte de présence
218
e, une présence enfin qui soit un acte : car pour
nous
désormais la Révolution vit, si nous vivons. Autour de nous tout craq
219
e : car pour nous désormais la Révolution vit, si
nous
vivons. Autour de nous tout craque et nous appelle. Sur les tenants d
220
mais la Révolution vit, si nous vivons. Autour de
nous
tout craque et nous appelle. Sur les tenants d’un ordre délabré, le S
221
it, si nous vivons. Autour de nous tout craque et
nous
appelle. Sur les tenants d’un ordre délabré, le Souci tend son aile m
222
Souci tend son aile mortifère, — la Frau Sorge de
notre
Goethe. De tout cela nous ne sommes plus, n’appartenant plus à la mor
223
re, — la Frau Sorge de notre Goethe. De tout cela
nous
ne sommes plus, n’appartenant plus à la mort, mais au combat de ce qu
224
cette mort. La neurasthénie broie les villes, où
nous
sommes peut-être seuls à connaître la force et la présence. Nous conn
225
t-être seuls à connaître la force et la présence.
Nous
connaissons la vérité. Qu’elle soit tombée du ciel ou qu’elle éclate
226
bée du ciel ou qu’elle éclate dans les choses, on
nous
demande seulement l’acte de la saisir dans son impérieuse évidence et
227
pour préciser les conditions auxquelles la vérité
devrait
d’être acceptable ? Sans doute ; mais n’allez pas beaucoup plus loin.
228
séances nocturnes, présidées par Arnaud Dandieu.
Nous
discutons thèses doctrinales et tactique, et préparons des manifestat
229
me actif ». Quant à l’attitude que veut signifier
notre
titre et qui nous est commune à tous les cinq, rien ne la définit mie
230
l’attitude que veut signifier notre titre et qui
nous
est commune à tous les cinq, rien ne la définit mieux que ces lignes
231
rbin : Que signifie être-là ? (…) Par existence,
nous
ne pouvons essentiellement entendre que décision concrète, décision d
232
s possibles, qui dans cette décision vérifie pour
nous
sa réalité et sa réalisation. Elle n’est pas une hypostase ni une fix
233
avec des frères, mais seul préoccupé de tirer de
nos
recherches et de nos certitudes nouvelles des conséquences politiques
234
s seul préoccupé de tirer de nos recherches et de
nos
certitudes nouvelles des conséquences politiques et sociales, et ceci
235
. Dans cette cacophonie de refus de la société où
nous
vivions (l’hitlérisme montant et la guerre jetaient déjà leurs ombres
236
ai d’analyser dans les Conclusions que voici :
Nous
sommes une génération comblée. Comblée de chances de grandeur, et com
237
s’agit, ni même de conflits d’intérêts. Mais pour
nous
, entrés dans la vie sous le coup d’une menace de faillite planétaire,
238
— l’imposer. Ce n’est plus pour quelque idéal que
nous
avons à lutter maintenant, mais pour que les hommes vivent et demeure
239
ugles, mais pas si sourds qu’ils ne s’irritent de
nos
cris. Il est vrai que certains, au lendemain de la guerre, ont trop s
240
e de tout le mal ? Telles sont les composantes de
notre
situation. Nous sommes là : n’y pouvant plus tenir longtemps ; ne pou
241
? Telles sont les composantes de notre situation.
Nous
sommes là : n’y pouvant plus tenir longtemps ; ne pouvant accepter de
242
ant plus tenir longtemps ; ne pouvant accepter de
nous
battre pour un « ordre » et des « idéaux » criminels. Il y a la guerr
243
x » criminels. Il y a la guerre proche. La ferons-
nous
? pour qui ? Il y a la misère présente : pour quoi la supporterons-no
244
a la misère présente : pour quoi la supporterons-
nous
? La révolution, ce n’est plus un état d’esprit, ni un refus des tâch
245
terme, et aussi à son sens de misère qui appelle.
Nous
ne sommes pas des « bourgeois-dégoûtés » ou des « prolétaires-avides-
246
audrait qu’elle le paie du prix de l’âme même. On
nous
donne à choisir entre un régime bourgeois odieux, raté, dont beaucoup
247
et d’autre part une espérance, une utopie, qu’il
nous
est impossible d’accepter de « bon cœur », parce que nous n’y voyons
248
impossible d’accepter de « bon cœur », parce que
nous
n’y voyons qu’une réalisation épurée, tyrannique et privée de toute r
249
de cela justement que, dans le désordre régnant,
nous
détestons de toute la force de notre être : la primauté du matériel.
250
rdre régnant, nous détestons de toute la force de
notre
être : la primauté du matériel. Comment penser — si penser est insépa
251
ux ? Ni à gauche, ni à droite, il n’y a rien pour
nous
. Nous nous plaçons à l’origine de quelque chose d’autre, dont la réal
252
i à gauche, ni à droite, il n’y a rien pour nous.
Nous
nous plaçons à l’origine de quelque chose d’autre, dont la réalité éc
253
auche, ni à droite, il n’y a rien pour nous. Nous
nous
plaçons à l’origine de quelque chose d’autre, dont la réalité échappe
254
les révolutionnaires non marxistes. Mais comment
nous
laisser convaincre par une réussite matérielle, temporaire, et d’aill
255
eurs discutable ? C’est l’homme qui se révolte en
nous
contre le marxiste. Vous n’y ferez rien. Et nous ne trahirons pas l’h
256
nous contre le marxiste. Vous n’y ferez rien. Et
nous
ne trahirons pas l’homme tel qu’il est, sous prétexte qu’il faut se h
257
hâter, et qu’en Russie c’est en train de marcher.
Nous
jouerons tout sur une révolution vraie. Les catastrophes sont proches
258
révolution vraie. Les catastrophes sont proches.
Nous
ne sommes plus les seuls à le dire. Beaucoup de capitalistes l’ont si
259
en sous-main des terrains d’entente avec l’URSS.
Nous
ne pensons pas que la guerre soit, comme l’écrit Henri Lefebvre, la s
260
onflit d’intérêts ? Et d’intérêts qui ne sont pas
les nôtres
, qui ne sont pas les intérêts réels d’un être aux prises avec la cond
261
pour le mensonge d’hier, ni pour celui de demain
nous
ne verserons notre sang. Il y a une vérité qui domine et condamne tou
262
d’hier, ni pour celui de demain nous ne verserons
notre
sang. Il y a une vérité qui domine et condamne tout cela. Entre le co
263
atries personnalistes. Mais où sont les motifs de
notre
choix ? J’en indiquerai trois : 1° La seule révolution qui nous impor
264
’en indiquerai trois : 1° La seule révolution qui
nous
importe concerne l’homme, exprime ses données élémentaires : elle n’e
265
ojection du conflit de la personne. Les marxistes
nous
accusent de mêler des notions « morales » — ainsi désignent-ils la no
266
si « ces faits sont les faits » comme on voudrait
nous
le faire croire. Une révolution n’agit pas dans le vide, mais contre
267
l’acte toute efficacité créatrice et par là même
doit
être dénoncée comme antirévolutionnaire. Le matérialisme, c’est l’opi
268
de la statistique. Mais les marxistes répugnent à
nous
suivre sur ce terrain. Suivons-les donc sur le leur. Ils opposent à n
269
ain. Suivons-les donc sur le leur. Ils opposent à
nos
« rêveries » l’action. Qu’appellent-ils l’action ? Est-ce un opportun
270
écrit Nizan. Voilà bien la suprême « évasion » de
nos
intellectuels, même marxistes. Abdication de la pensée entre les main
271
llions de membres, sévèrement contrôlées. « Mais,
nous
dit-on, les constructions d’un Lénine n’étaient pas songes, elles s’a
272
es s’appuyaient sur le mouvement de l’histoire. »
Nous
avons affaire ici à un véritable mysticisme de la réussite, à un fata
273
mment analysés. Les faits, demain, parleront pour
nous
. L’Ordre nouveau , Esprit , travaillent dans la ligne des forces ré
274
ne vois pas qu’ils connaissent l’homme mieux que
nous
. Je ne les vois pas plus forts. Je vois bien l’accumulation de leurs
275
ccumulation de leurs griefs, — dont beaucoup sont
les nôtres
, mais nous en avons davantage. Ils jouent sur une révolte des hommes
276
urs griefs, — dont beaucoup sont les nôtres, mais
nous
en avons davantage. Ils jouent sur une révolte des hommes contre le c
277
la fois des bourgeois, et de la vérité humaine de
nos
doctrines antibourgeoises. Mais ils ne donnent pas de pain. Ceux qui
278
ent que du pain, finalement, n’en donnent jamais.
Nous
avons en commun avec eux certains mots d’ordre immédiats : lutte cont
279
auxquelles se maintient le désordre établi. Mais
nous
allons plus loin dans la critique de ce désordre jusqu’à ce point où
280
te-matérialiste. Non, ce n’est pas une classe que
nous
devons sauver, c’est l’homme menacé dans son intégrité. Sauver l’homm
281
térialiste. Non, ce n’est pas une classe que nous
devons
sauver, c’est l’homme menacé dans son intégrité. Sauver l’homme, ce n
282
rises, des nations, les intérêts (?) du monde. On
nous
demande : que signifie « sauver le monde » ? Rien. Au sens fort du mo
283
de la révolution nouvelle. Ici, je ne dirai plus
nous
, mais je. À la question « Prenez-vous au sérieux vos idées, y croyez-
284
mble. Loin de moi la pensée que par des arguments
nous
pourrons triompher d’autre chose que d’arguments. À l’effort admirabl
285
nt la grandeur des luttes élémentaires, n’aurions-
nous
à répondre qu’un dogmatique « Tu te trompes » ? Les hommes n’entendro
286
ue « Tu te trompes » ? Les hommes n’entendront de
nous
que notre volonté de sacrifice, de pauvreté. C’est dangereux, c’est g
287
e trompes » ? Les hommes n’entendront de nous que
notre
volonté de sacrifice, de pauvreté. C’est dangereux, c’est grave de pe
288
de penser juste. La vérité ne peut exister parmi
nous
que sous la forme d’une accusation personnelle. Il faut savoir entend
289
enu tout de suite sonner chez moi pour savoir qui
devait
être de l’affaire. Il y eut pendant sa visite une panne d’électricité
290
pendant sa visite une panne d’électricité, et il
dut
profiter de la lueur des réverbères de la rue Saint-Placide pour écri
291
in Front unique » (Europe du 15 janvier 1933), il
nous
traite de « sergents recruteurs » et de « fascistes », et dénonce « u
292
m’indigner de ce mensonge en service commandé. Je
devais
en voir d’autres par la suite, n’émanant pas souvent d’aussi pures co
293
ération intellectuelle s’est noué. Dès maintenant
nos
choix publiés engagent ce que nous allons « faire » de toute nécessit
294
Dès maintenant nos choix publiés engagent ce que
nous
allons « faire » de toute nécessité intime et déclarée, le temps venu
295
oute nécessité intime et déclarée, le temps venu.
Nos
destins individuels sont signés, eux aussi, dans ce Cahier — qui put
296
ssion vraie (quoique égarée) qui le faisait alors
nous
traiter de fascistes, et pas seulement la discipline aveugle d’un par
297
se tenant un peu en retrait — et il va subitement
nous
manquer pour toujours. Mais plus encore que nos personnes et les anci
298
nous manquer pour toujours. Mais plus encore que
nos
personnes et les anciens jeunes militants de nos groupes devenus dépu
299
nos personnes et les anciens jeunes militants de
nos
groupes devenus députés ou ministres, ce sont toutes nos idées maître
300
upes devenus députés ou ministres, ce sont toutes
nos
idées maîtresses qui vont dominer l’aile marchante du Mouvement europ
301
eux qui affectaient de mépriser l’inefficacité de
nos
doctrines « utopiques », ceux qui n’avaient pas assez de sarcasmes po
302
arcasmes pour l’âme et les « belles âmes » qu’ils
nous
attribuaient, ceux qui enfin se voulaient (et sans doute se croyaient
303
ls disposés « dans le sens de l’Histoire », quand
nous
tentions de l’orienter. Qu’ont-ils donc obtenu pour ce Prolétariat qu
304
s en vous-même et vous pensez pourtant si près de
nous
, vous luttez avec nous… » Il se peut que mon évocation rapide des cir
305
pensez pourtant si près de nous, vous luttez avec
nous
… » Il se peut que mon évocation rapide des circonstances de l’automne
306
omne 1932 réponde à la question de Silone. Ce qui
nous
réunit, c’est une angoisse commune devant l’aliénation croissante de
307
isme. Le jeune Marx — dont on parle beaucoup dans
nos
groupes — avait repris de Hegel ce terme d’aliénation, que j’interprè
308
r de la notion de personne. Arnaud Dandieu et moi
nous
étions partagé la rédaction d’un long essai sur L’Acte comme point d
309
long essai sur L’Acte comme point de départ et
nous
le défendîmes devant le groupe de Koyré, Gurvitch, J. Wahl, etc., qui
310
publiait alors les Recherches philosophiques, où
notre
texte parut. Ma « Définition de la Personne », écrite à cette époque
311
époque et publiée un peu plus tard dans Esprit ,
devait
faire l’objet de deux débats d’un autre groupe de philosophes réunis
312
é je me mariai, et au retour d’un bref voyage qui
nous
avait conduits à Port-Cros chez les Paulhan, je reçus coup sur coup u
313
fin de l’été 1933. Une petite compagnie d’édition
devait
lui survivre pour exploiter le fonds précieux des auteurs qu’elle ava
314
cceptable. Mais dans l’argumentation par laquelle
nous
jugions plaisant et utile d’étayer nos thèses personnalistes, les néo
315
laquelle nous jugions plaisant et utile d’étayer
nos
thèses personnalistes, les néothomistes plus (ou moins ?) Blondel et
316
expérience de Service civil était destinée, dans
notre
esprit, à démontrer la possibilité pratique d’une « suppression de la
317
ougemont en tête de son article de Demain, que si
nous
combattons le communisme, ce n’est pas par peur ou par volonté prééta
318
ment « noyés parmi les autres témoignages » comme
devait
s’en plaindre Nizan, mais proportionnellement avantagés, d’autant que
319
e ?) 23. Le succès du communisme serait-il « de
nous
rendre la vie de caserne acceptable » ? (R. de Pury, dans Hic et Nun
320
.) 24. J’ai sous les yeux une page ronéotée qui
doit
dater de 1936. Il s’agit d’un « Programme présenté au mouvement perso
321
ticles 9 à 13 : « ix. — À l’étatisme totalitaire,
nous
opposons le fédéralisme politique et économique, seul régime capable
322
les producteurs associés et responsables. xii. —
Nous
réclamons l’institution d’un minimum vital assuré gratuitement à tous
323
les membres de la fédération. xiii. — L’État ne
doit
pas être au-dessus des personnes, mais à leur service ; il doit être
324
au-dessus des personnes, mais à leur service ; il
doit
être fort dans son domaine limité. « Voir aussi le n° 15 de L’Ordre
325
is qu’existe cette revue, depuis que se développe
notre
mouvement, beaucoup ont perçu avec quelque clarté, et d’un regard neu
326
i couvre l’avant du bateau, et de l’eau gicle sur
nos
visages glacés. « Tire le gramophone entre tes jambes, là, sous ton i
327
le, que le cuir ne soit pas mouillé. (C’est qu’on
nous
l’a prêté, il faut le soigner…) Nous sortons du port, et tout de suit
328
(C’est qu’on nous l’a prêté, il faut le soigner…)
Nous
sortons du port, et tout de suite la mer est forte. Un éclair sur l’e
329
air sur l’eau verte, un gros coup de vent : voilà
nos
compagnons de voyage, le médecin de l’île et trois représentants de c
330
ns la cabine de la cale par une espèce de trappe.
Nous
restons seuls sur le pont, ma femme et moi, à entasser nos valises ta
331
ns seuls sur le pont, ma femme et moi, à entasser
nos
valises tant bien que mal à l’abri. Un autre éclair siffle et claque
332
t venue brusquement avec l’aube. Depuis une heure
nous
battions la semelle sur les quais déserts de ce port fantomatique, sa
333
puis s’apaise non moins subitement à l’instant où
nous
touchons l’île. La colère du détroit nous a salués ! J’accepte cet au
334
tant où nous touchons l’île. La colère du détroit
nous
a salués ! J’accepte cet augure à double sens, certifiant la présence
335
age basse, quelques pins, deux ou trois baraques.
Nous
traînons nos valises le long d’un appontement interminable jusqu’à l’
336
lques pins, deux ou trois baraques. Nous traînons
nos
valises le long d’un appontement interminable jusqu’à l’autocar où no
337
’un appontement interminable jusqu’à l’autocar où
notre
petit groupe de voyageurs transis s’installe rapidement. Après quoi l
338
de partout. Un incroyable cliquetis de vitres va
nous
accompagner pendant deux heures et demie, — car l’horaire n’en prévoi
339
trente-huit kilomètres de l’île dans sa longueur.
Nous
traversons de longs villages blancs et bleus aux maisons basses, des
340
otone. Je crois que je me suis endormi un moment.
Nous
approchons du dernier village. L’île devient très étroite. Par endroi
341
asses qui ondulent à peine, en demi-cercle devant
nous
, marquant la fin des terres vers l’ouest. Sur la dernière lande, la d
342
ernière lande, la dernière maison luit doucement.
Nous
voyons de loin sa façade blanchie, où les volets d’un bleu pâle sembl
343
terre, la mer, le ciel, et le feu de la lumière.
Nous
vivrons bien ! ⁂ Je revois, je revis si bien cette traversée, cette t
344
ais je sens bien qu’il me faut expliquer pourquoi
nous
venions dans cette île à la saison où il convient plutôt de la quitte
345
cela dont on ne peut pas se délivrer à temps, et
devrait
être défini franchement comme ce qui est incommode ou impropre, et do
346
ce beau vertige de liberté. Depuis six jours que
nous
sommes arrivés, je n’ai lu que les Règles de Descartes, comme on fera
347
tion est d’ailleurs excellente pour l’instant. Il
nous
reste encore de quoi vivre pendant six semaines environ, si du moins
348
i vivre pendant six semaines environ, si du moins
nos
calculs sont justes : 900 francs, un bon toit, et le temps de voir ve
349
oute écrire d’un trait, parce que j’y parlerai de
notre
affaire, avec nos mots, dans notre liberté. Après quoi, je pourrai tr
350
it, parce que j’y parlerai de notre affaire, avec
nos
mots, dans notre liberté. Après quoi, je pourrai travailler. Aujourd’
351
’y parlerai de notre affaire, avec nos mots, dans
notre
liberté. Après quoi, je pourrai travailler. Aujourd’hui c’est le jour
352
tit. Laissons donc de côté ce petit travail qui a
dû
valoir les palmes à son auteur. Le second bouquin, c’est l’œuvre d’un
353
u tout au moins à son instigation. Enfin, et cela
nous
sera des plus utiles, une minutieuse description de la faune et de la
354
avec les gens. — Le village se termine au bout de
notre
jardin. Passé la porte, on enfile une petite rue toute blanche qui co
355
i. Elle corrige la mauvaise humeur que m’a donnée
notre
épicière. Car il faut bien, hélas, commencer par l’épicière, quand on
356
ut l’hiver ? C’est plutôt en été qu’on vient chez
nous
, me fait-elle prudemment observer. — Je le sais bien, madame Aujard,
357
ce pays… Je l’ai laissée en plein mystère. Elle a
dû
en parler longuement avec les clients qui attendaient en silence, le
358
à verser sans délai la somme de 67 fr. 25 restant
due
sur l’envoi de ce matin. En effet, Pédenaud, qui a voulu en avoir le
359
c’est d’aller réfléchir le long des plages. Quand
nous
sortons de notre enclos, nous avons trois promenades au choix : elles
360
fléchir le long des plages. Quand nous sortons de
notre
enclos, nous avons trois promenades au choix : elles conduisent toute
361
g des plages. Quand nous sortons de notre enclos,
nous
avons trois promenades au choix : elles conduisent toutes les trois,
362
nt toutes les trois, en dix minutes, à une plage.
Notre
village est en effet situé sur une pointe avancée de l’île, et la qua
363
marais, à peu près impraticable en cette saison.
Nous
suivons des sentiers bordés de tamaris jusqu’aux dunes. Elles ne sont
364
ur embrasser du regard une bonne partie de l’île,
notre
village, les marais et deux ou trois clochers lointains, noirs et bla
365
ère n’a plus cette intensité blanche et bleue qui
nous
avait comme étourdis à l’arrivée. Des faisceaux de rayons divisés par
366
il n’arrive rien ? « On ne meurt pas de faim dans
nos
pays », dit-on, et je crois bien que je l’ai dit quelquefois. Mais il
367
absolument. C’est peut-être à cause du bonheur de
notre
vie. Trouver son rythme naturel, et les moyens de s’y réduire, voilà
368
s la racine de tout l’idéalisme dont les modernes
doivent
se guérir, s’ils veulent enfin devenir « actuels » ? Est-ce que ce n’
369
a racine de cet esprit d’abstraction égoïste dont
nous
souffrons tous ? Enfin, n’est-il point trop facile de trouver son ryt
370
urquoi les hommes vivent-ils sur des îles ? Quand
nous
sortons pour une promenade et que nous mesurons toute l’étroitesse de
371
es ? Quand nous sortons pour une promenade et que
nous
mesurons toute l’étroitesse de notre domaine, la mer partout à dix mi
372
menade et que nous mesurons toute l’étroitesse de
notre
domaine, la mer partout à dix minutes et ces marécages hostiles, nous
373
partout à dix minutes et ces marécages hostiles,
nous
souffrons de ne pouvoir prolonger en pensée notre marche jusqu’au pay
374
nous souffrons de ne pouvoir prolonger en pensée
notre
marche jusqu’au pays voisin. Cette liberté insulaire est une liberté
375
liberté insulaire est une liberté négative. Elle
nous
met à l’abri du monde et nous ramène tout physiquement à nos limites.
376
erté négative. Elle nous met à l’abri du monde et
nous
ramène tout physiquement à nos limites. Mais l’homme est ainsi fait q
377
’abri du monde et nous ramène tout physiquement à
nos
limites. Mais l’homme est ainsi fait qu’il désire sans cesse se risqu
378
je travaille vraiment en écrivant, cela met entre
nous
une barrière sentimentale, une gêne constamment sensible. Et je n’ai
379
e), qui est une vieille amie des propriétaires de
notre
maison, est venue plusieurs fois nous voir. Hier, elle m’a demandé av
380
étaires de notre maison, est venue plusieurs fois
nous
voir. Hier, elle m’a demandé avec toutes sortes de précautions oratoi
381
ns ses souvenirs, trop souvent racontés. (« Quand
nous
étions devant Tamatave, en 1886… ») Il s’occupe maintenant à fabrique
382
nde moderne n’a rien en eux. Ils sont indemnes de
nos
fièvres. Ils ne connaîtront pas nos douloureuses confusions, nos inad
383
t indemnes de nos fièvres. Ils ne connaîtront pas
nos
douloureuses confusions, nos inadaptations, nos désirs discordants. I
384
s ne connaîtront pas nos douloureuses confusions,
nos
inadaptations, nos désirs discordants. Ils se sont fait un entourage
385
s nos douloureuses confusions, nos inadaptations,
nos
désirs discordants. Ils se sont fait un entourage à la mesure de leur
386
eulement paraissent les absurdités sur lesquelles
nous
vivons depuis des siècles, dans un accord peut-être excessivement tac
387
nouveau, mais nouvellement intéressant. Et quand
nous
sommes en confiance, si j’essaie d’amener l’entretien sur leurs lectu
388
dans un siècle ou deux, se demandera-t-on comment
nous
avons pu rester si parfaitement aveugles ? Ou bien est-ce ma gêne qui
389
nt fait ses preuves. 5 décembre 1933 Une de
nos
joies, c’est de pouvoir enfin mettre au gramophone, et avec l’aiguill
390
rne, — sans voisins pour taper à la paroi ou pour
nous
faire des scènes, conventionnelles mais épuisantes, sur le palier. No
391
conventionnelles mais épuisantes, sur le palier.
Nous
n’avons qu’une dizaine de disques : Bach, Mozart, Stravinsky, Honegge
392
lleurs que chez le marchand. C’est l’événement de
notre
solitude. Et certainement c’était ici, dans ce désert, qu’il convenai
393
musique de foule et de la lande désolée autour de
nous
! Proximité de l’océan. Clameur des masses contre le ciel fatal, et l
394
1933 Il fait très froid depuis quelques jours.
Nous
n’avons pour chauffer la grande chambre du rez-de-chaussée qu’un peti
395
es fenêtres ferment très mal — comme partout — et
nous
sentons l’air froid qui souffle jusqu’au milieu de la chambre. Chaque
396
sque tous laids de visage et très épais de corps.
Nous
étions assis derrière eux. Au fond, sur deux armoires basses, siégeai
397
Poucet, qui remporte un gros succès. En sortant,
nous
passons devant la salle du curé, qui donne aussi ce soir une séance d
398
z de pétrole sujet à des pannes mystérieuses, qui
nous
menace sans cesse d’explosion. (Deux petites pompes, à droite et à ga
399
n renvoie 100 par le courrier de ce matin. « Vous
devez
être bien content, me dit la factrice pendant que je signe le mandat,
400
et sérieuse. « Eh bien, Messieurs et chers amis,
nous
allons procéder, selon votre coutume, à l’élection du bureau, puisque
401
fois qu’il vient à A… mais certainement qu’il va
nous
intéresser, et je lui donne la parole. » M. Palut sourit cordialement
402
que le roi payât les ouvriers. L’Ancien Testament
nous
montre que le système de propriété chez les juifs est presque communi
403
re chrétien, c’est aimer son prochain comme Jésus
nous
aime. Si tous les hommes étaient chrétiens, il n’y aurait plus d’expl
404
e : il y avait pourtant bien des auditeurs qui ne
devaient
pas être d’accord ? « Ben quoi, fait-il convaincu, c’est la vérité ce
405
mme ça… » Je vais me présenter au conférencier et
nous
sortons ensemble. Dans la rue noire, un homme nous rejoint : c’est ce
406
ous sortons ensemble. Dans la rue noire, un homme
nous
rejoint : c’est celui qui a présidé la réunion. Il veut encore remerc
407
» et promet de lui envoyer un Nouveau Testament.
Nous
faisons les cent pas sur la place. M. Palut sait que je suis écrivain
408
le pour vous, ce que je leur ai dit ce soir, j’ai
dû
vous ennuyer, hein ? » Je le rassure vivement. Ce n’est pas moi qui l
409
qui ils sont d’accord. Il ne faut pas oublier que
nous
vivons à une époque de propagande forcenée, et je vous assure qu’un c
410
ilieu de cette population bigote ou indifférente.
Nous
prenons rendez-vous pour un dimanche prochain, au chef-lieu, après so
411
trait de lumière. Lundi dernier, au petit matin,
nous
nous sommes réveillés couverts de puces. J’exagère à peine : pour mon
412
t de lumière. Lundi dernier, au petit matin, nous
nous
sommes réveillés couverts de puces. J’exagère à peine : pour mon comp
413
mon pyjama dans l’espace de deux minutes, ce qui
doit
constituer une sorte de record. D’autres sautaient sur le couvre-pied
414
enais pas large. Comme la mère Renaud était venue
nous
voir la veille, nous ne cherchâmes pas plus loin la cause du phénomèn
415
e la mère Renaud était venue nous voir la veille,
nous
ne cherchâmes pas plus loin la cause du phénomène. Il est vrai qu’on
416
beau porter un nombre excessif de jupons, cela ne
devrait
pas suffire à rendre vraisemblable une hypothèse à ce point injurieus
417
ble une hypothèse à ce point injurieuse. Pourtant
nous
n’en trouvions pas d’autre. Or, peu de jours auparavant, un petit hér
418
it très vite, il avait l’air malade. Le lendemain
nous
le trouvions mort. Et je l’avais oublié là, sans sépulture, caché sou
419
ise. Grâce à Colette, je sais maintenant pourquoi
notre
chambre était pleine de puces. Cela n’a l’air de rien, mais je vois l
420
ien, mais je vois là comme un symbole. Les livres
devraient
être utiles. On devrait y trouver des renseignements concrets, des re
421
un symbole. Les livres devraient être utiles. On
devrait
y trouver des renseignements concrets, des recettes exactes, des expl
422
les choses de rien. Au lieu de cela, les modernes
nous
servent des états d’âme improbables ou excessifs, des inquiétudes don
423
que faire, ou des doctrines dont ils négligent de
nous
dire s’ils les ont essayées sur le vif, dans le détail de la vie quot
424
le vif, dans le détail de la vie quotidienne. Ils
nous
donnent très rarement des réponses, ou alors par malchance ce sont ju
425
ionnelle, mais que veulent-ils qu’on en fasse ? —
Nous
avons tout à apprendre de Goethe. Non seulement des révélations du se
426
néma. Il n’y aurait là rien d’étonnant si l’on ne
nous
rebattait les oreilles de phrases sur la volonté et la mission du peu
427
: il est très difficile d’aimer des hommes qui ne
nous
sont rien, qui ne nous demandent rien, qui peut-être ne voudraient pa
428
d’aimer des hommes qui ne nous sont rien, qui ne
nous
demandent rien, qui peut-être ne voudraient pas même de notre aide (n
429
ent rien, qui peut-être ne voudraient pas même de
notre
aide (nous égale les intellectuels bourgeois). Il est très difficile
430
i peut-être ne voudraient pas même de notre aide (
nous
égale les intellectuels bourgeois). Il est très difficile d’aimer ces
431
ïr et de condamner un certain ordre de choses qui
nous
vexe et dont nous souffrons. Et il est très tentant d’appeler cette h
432
un certain ordre de choses qui nous vexe et dont
nous
souffrons. Et il est très tentant d’appeler cette haine amour du peup
433
l a raison » ne signifie pas pour eux : « Donc je
dois
régler ma conduite sur ce qu’il dit », mais simplement : « étant donn
434
u peuple il y a belle lurette qu’il sait ce qu’on
doit
penser des gens instruits. La plupart sont des égoïstes, des orgueill
435
hommes cultivés, au lieu de s’efforcer, comme ils
devraient
, de combattre activement cette erreur, en tirent au contraire leur co
436
ux port de cette vieille ville, la plus proche de
notre
île, et où nous devons encore passer deux heures en attendant le dépa
437
vieille ville, la plus proche de notre île, et où
nous
devons encore passer deux heures en attendant le départ de l’autobus
438
le ville, la plus proche de notre île, et où nous
devons
encore passer deux heures en attendant le départ de l’autobus pour Ro
439
s en attendant le départ de l’autobus pour Royan.
Nous
sommes attablés ici depuis un bon moment déjà, tout contents de revoi
440
ournal. Tout d’abord, j’ai à constater l’échec de
notre
première tentative d’autonomie. Je ne suis pas arrivé à gagner assez
441
e ne suis pas arrivé à gagner assez vite ce qu’il
nous
fallait pour subsister après l’épuisement de notre réserve. J’ai trav
442
nous fallait pour subsister après l’épuisement de
notre
réserve. J’ai travaillé beaucoup, mais je ne serai pas payé avant un
443
t à venir, j’ai accepté l’invitation d’un ami qui
nous
offre de passer trois semaines chez lui. Il habite à une petite journ
444
lui. Il habite à une petite journée de voyage de
notre
île. La leçon pratique de cette première expérience de deux mois, c’e
445
n décidé à renouveler ma tentative, dans un mois.
Nous
sommes partis ce matin à 5 heures, par l’autobus, ou « hustubuse » co
446
is qu’elle est morte. L’autobus brinquebalant, où
nous
étions seuls au départ, rappelait les plus inconfortables légendes :
447
lait les plus inconfortables légendes : où allait
nous
conduire ce personnage muet, enfermé dans la cabine du petit tracteur
448
uet, enfermé dans la cabine du petit tracteur qui
nous
remorquait ? Non, le voyage des contes et des rêves où l’on passe tou
449
tranquille et obstinée de ceux auprès desquels il
devrait
exercer sa mission. Ils ne veulent pas même l’écouter, et toute sa ra
450
le faire. Et de plus, il est seul à croire qu’il
doit
le faire. J’imagine qu’il doit apparaître, aux yeux des habitants de
451
eul à croire qu’il doit le faire. J’imagine qu’il
doit
apparaître, aux yeux des habitants de cette petite ville comme une es
452
a signification complexe du chômage intellectuel.
Nos
conversations de ces jours derniers avec nos amis, et les précisions
453
uel. Nos conversations de ces jours derniers avec
nos
amis, et les précisions que j’ai dû fournir à des personnes curieuses
454
erniers avec nos amis, et les précisions que j’ai
dû
fournir à des personnes curieuses de mon état, m’ont amené à me poser
455
cet habitus bourgeois qui, hélas, est encore chez
nous
la marque de l’intellectuel. Par là même, l’intellectuel chômeur risq
456
rs 1662.) Que dire alors du sort fait à celui qui
doit
se montrer aux hommes tel qu’il est ? S’entendre répéter que l’homme
457
de se comparer aux seuls humains que le métier ou
notre
rang social nous met en mesure d’approcher. L’épreuve décisive est ce
458
seuls humains que le métier ou notre rang social
nous
met en mesure d’approcher. L’épreuve décisive est celle que l’on subi
459
que l’on subit du contact de voisins que rien en
nous
, que rien dans notre vie n’attendait et ne prévoyait. Ce n’est qu’au
460
ontact de voisins que rien en nous, que rien dans
notre
vie n’attendait et ne prévoyait. Ce n’est qu’au prix d’un désordre so
461
géographique… 21 janvier 1934 (dans l’île)
Nous
sommes rentrés hier soir dans cette maison glaciale et humide. Il n’y
462
qui ne cesse pas de siffler autour de la maison.
Nous
avons trouvé des noix et bu un verre de vin, à la lueur d’une bougie.
463
verre de vin, à la lueur d’une bougie. Heureux de
nous
retrouver chez nous, dans notre campement au bout du monde. Confort p
464
ueur d’une bougie. Heureux de nous retrouver chez
nous
, dans notre campement au bout du monde. Confort profond dans cet inco
465
bougie. Heureux de nous retrouver chez nous, dans
notre
campement au bout du monde. Confort profond dans cet inconfort matéri
466
ouvert de tous côtés… Une seule vertu peut alors
nous
sauver de cette tentation du désespoir et c’est l’humilité. Si je ne
467
e lis dans le Journal de Kierkegaard : « La lande
doit
favoriser le développement de pensées puissantes. Ici tout est sans v
468
vaille ces bouts de champ grands comme ma chambre
doit
passer une partie de la journée à marcher de l’un à l’autre. Disposit
469
ourgeois et leurs journalistes. Ce n’est pas dans
notre
île, d’ailleurs, que j’ai pu constater cette contagion ! Les deux jou
470
e bonheur, pour oser bouleverser la petite vie de
notre
île. À noter et à souligner : Seules les guerres de religion ont tiré
471
a venir un beau jour, de Paris, faire la loi dans
notre
village ? 19 février 1934 Les gens : récit d’une journée paysa
472
t pas anéantir physiquement toute la bourgeoisie (
nous
ne sommes pas en Russie). Et tant qu’il y aura des bourgeois, il y au
473
fonction de chaque « personne ». C’est l’État qui
devrait
donner à chacun de ses membres le minimum qu’il mérite. Mais comment
474
t d’une lecture très douteuse pour ceux mêmes qui
devraient
les exercer ! Il faudrait donc, dans la pratique, se contenter d’appr
475
n peut imaginer de moins déraisonnable, cela peut
nous
donner une bonne idée du maximum d’absurdité que représente l’anarchi
476
me rappelle un bout de conversation que j’aurais
dû
noter plus tôt. Le monsieur rencontré dans l’autocar de Royan voulait
477
la société. Vous avez le temps de réfléchir et de
nous
faire part de vos lumières, et sans vous, où irions-nous donc, nous q
478
ire part de vos lumières, et sans vous, où irions-
nous
donc, nous qui ne croyons plus aux curés ! — Comptez, Monsieur, lui d
479
vos lumières, et sans vous, où irions-nous donc,
nous
qui ne croyons plus aux curés ! — Comptez, Monsieur, lui dis-je, qu’u
480
s milliardaires ou des saints. Croyez-moi, ce que
nous
vous donnons, c’est justement ce qui nous manque, et quand vous aurez
481
ce que nous vous donnons, c’est justement ce qui
nous
manque, et quand vous aurez compris cela, vous cesserez, je le crains
482
us les villages voisins. Du haut de la colline où
nous
étions tous réunis pour déjeuner, on dominait tout un canton de maréc
483
peut contenir une centaine d’auditeurs. L’orateur
doit
se tenir debout au milieu d’eux, de manière à pouvoir, tout en parlan
484
; vérité de la fable qui donne une forme grande à
nos
obscurs et grands désirs informulés. En finissant je craignis un mome
485
haut de forme ? Il a l’air d’un brave type comme
nous
autres. Rêverie des jeunes cultivateurs.) Et quand j’ai terminé ma ca
486
s ». 17 mars 1934 L’instituteur vendéen. —
Nous
étions assis dans sa cuisine avec sa femme et ses deux enfants. C’est
487
le ; prudent. Il se plaint de son isolement. « On
nous
laisse seuls, sans direction. Nous ne savons pas que lire. Le travail
488
solement. « On nous laisse seuls, sans direction.
Nous
ne savons pas que lire. Le travail est dur, ici. Il faut lutter contr
489
rents, contre la concurrence de l’école libre qui
nous
a pris les deux tiers de nos élèves. On aurait besoin de nourriture i
490
e l’école libre qui nous a pris les deux tiers de
nos
élèves. On aurait besoin de nourriture intellectuelle pour se souteni
491
cette centralisation : qu’est-ce qu’ils savent de
notre
situation, à Paris ? Est-ce qu’il n’y aurait pas moyen de faire un mo
492
a langue française telle qu’on l’écrit à Paris de
nos
jours (car c’est faux sous tout autre rapport, pour tout autre pays,
493
pour tout autre pays, pour toute autre époque de
nos
lettres) je pense que ce n’est pas par hasard que tous les grands art
494
éjà, sans une seule heure d’interruption. Et cela
doit
durer deux jours encore, puisqu’une nouvelle période de trois jours e
495
et à travers le toit fragile, jour et nuit. Quand
nous
sortons pour aller voir la côte bouleversée, il nous faut marcher pli
496
s sortons pour aller voir la côte bouleversée, il
nous
faut marcher pliés en avant, et nous rentrons étourdis. Depuis plusie
497
leversée, il nous faut marcher pliés en avant, et
nous
rentrons étourdis. Depuis plusieurs jours, le bateau n’a pas pu abord
498
est sur le prix de ce travail, payé d’avance, que
nous
avons vécu depuis janvier, je crois que j’avais omis de le noter jusq
499
jeunie, des fleurs partout, la grande lumière sur
nos
murs blanchis. J’ai travaillé au jardin, tous ces jours. Labouré et d
500
avril 1934 La solitude est une jeunesse. Elle
nous
apprend cette chose nouvelle que nous savions déjà, c’est vrai, quand
501
nesse. Elle nous apprend cette chose nouvelle que
nous
savions déjà, c’est vrai, quand nous étions adolescents, chose nouvel
502
nouvelle que nous savions déjà, c’est vrai, quand
nous
étions adolescents, chose nouvelle au goût de souvenir, que trop de t
503
rendez-vous d’indifférence avaient repoussée dans
nos
lombes ; cette chose toujours neuve et nouvelle qu’est l’attente d’on
504
aussi pour gagner ma mort, je le sais bien. Toute
notre
attente imagine l’avenir, et l’imagine nécessairement sur fond de mor
505
aussi l’âge le plus familier avec la mort.) Ainsi
nos
gestes se prolongent : leur grandeur est dans l’attente qu’ils trahis
506
écrit cela, je me le rappelle, peu de temps après
notre
arrivée, en haut d’une page que je retrouve dans une pile de notes. L
507
ule au bout du jardin. Elle y est pourtant depuis
notre
arrivée, héritée du propriétaire. Nous l’avons nourrie sans espoir pe
508
nt depuis notre arrivée, héritée du propriétaire.
Nous
l’avons nourrie sans espoir pendant des mois, la croyant trop vieille
509
te. Il y a probablement une fatalité interne dans
notre
culture : elle s’enchante, se critique, se légitime elle-même. Elle a
510
est pas Descartes qui eût écrit ce Journal ! Mais
nous
, nous chercherons le salut de la pensée ailleurs que dans la fuite de
511
s Descartes qui eût écrit ce Journal ! Mais nous,
nous
chercherons le salut de la pensée ailleurs que dans la fuite devant c
512
s’agit de maintenir par un constant effort entre
nos
belles séries de pensées et la diversité désordonnée des êtres et des
513
diversité désordonnée des êtres et des choses, où
nous
vivons ? « Je pense, donc j’en suis. » Et je ne suis guère, si je n’e
514
et d’os eût porté la déroute en son système. Mais
nous
, serons-nous assez forts pour penser les yeux bien ouverts ? 16 av
515
orté la déroute en son système. Mais nous, serons-
nous
assez forts pour penser les yeux bien ouverts ? 16 avril 1934 J
516
mières roses au soleil, le long des murs du chai.
Nous
déjeunons sous les tilleuls. Il y a un grand bonheur dans la lumière
517
ssion et des limites de Goethe. Et c’est là qu’il
nous
faut reprendre, avec une patience obstinée malgré tant de grossières
518
cation de ce petit coin de conscience humaine qui
nous
est accessible en Occident. Le romantisme s’évapore de nos vies. L’es
519
ccessible en Occident. Le romantisme s’évapore de
nos
vies. L’esprit pur a cessé de nous séduire : nous posons nos regards
520
me s’évapore de nos vies. L’esprit pur a cessé de
nous
séduire : nous posons nos regards à hauteur d’homme. Et nous voyons u
521
nos vies. L’esprit pur a cessé de nous séduire :
nous
posons nos regards à hauteur d’homme. Et nous voyons un monde neuf où
522
’esprit pur a cessé de nous séduire : nous posons
nos
regards à hauteur d’homme. Et nous voyons un monde neuf où la pensée
523
e : nous posons nos regards à hauteur d’homme. Et
nous
voyons un monde neuf où la pensée avait perdu, depuis un siècle, la c
524
coutume de chercher ses résistances. Or ce monde
nous
apparaît démesurément agrandi, hors de nos prises intellectuelles. No
525
monde nous apparaît démesurément agrandi, hors de
nos
prises intellectuelles. Nous ne savons plus comment parler à nos vois
526
ment agrandi, hors de nos prises intellectuelles.
Nous
ne savons plus comment parler à nos voisins, nos échanges sont lourds
527
llectuelles. Nous ne savons plus comment parler à
nos
voisins, nos échanges sont lourds et naïfs, incertains et souvent abs
528
Nous ne savons plus comment parler à nos voisins,
nos
échanges sont lourds et naïfs, incertains et souvent absurdes, les ma
529
nt absurdes, les matériaux informes et bruts pour
nos
mains déshabituées. Notre langage n’émeut plus ces objets, qui n’en r
530
ux informes et bruts pour nos mains déshabituées.
Notre
langage n’émeut plus ces objets, qui n’en renvoient pas même l’écho.
531
s ces objets, qui n’en renvoient pas même l’écho.
Nous
sommes là, petits individus, devant ce qu’on nomme les « masses », ex
532
mme les « masses », exprimant par cette métaphore
notre
impuissance à former ce réel. Notre complication, notre perfectionnem
533
tte métaphore notre impuissance à former ce réel.
Notre
complication, notre perfectionnement nous ont si bien séparés de cela
534
impuissance à former ce réel. Notre complication,
notre
perfectionnement nous ont si bien séparés de cela qu’il nous semble p
535
réel. Notre complication, notre perfectionnement
nous
ont si bien séparés de cela qu’il nous semble parfois qu’il n’est plu
536
tionnement nous ont si bien séparés de cela qu’il
nous
semble parfois qu’il n’est plus qu’une alternative de manœuvre : nous
537
qu’il n’est plus qu’une alternative de manœuvre :
nous
laisser prendre par la foule, dont le torrent arrondira nos angles, n
538
r prendre par la foule, dont le torrent arrondira
nos
angles, nous simplifier dans le cadre grossier des disciplines partis
539
r la foule, dont le torrent arrondira nos angles,
nous
simplifier dans le cadre grossier des disciplines partisanes, ou bien
540
a vu le premier. Et c’est pourquoi je pense qu’il
nous
est bon de reprendre aujourd’hui son problème, là où il l’a porté, et
541
où il l’a porté, et dans ses termes. ⁂ La pensée
doit
conduire l’action ; mais sans agir, elle n’est pas vraie pensée. L’in
542
ut en se maintenant dans leur plan, c’est définir
notre
problème actuel. Notre pensée nous donne des modèles d’ordre que la s
543
s leur plan, c’est définir notre problème actuel.
Notre
pensée nous donne des modèles d’ordre que la société toute défaite qu
544
c’est définir notre problème actuel. Notre pensée
nous
donne des modèles d’ordre que la société toute défaite qui est la nôt
545
s d’ordre que la société toute défaite qui est la
nôtre
ne paraît plus capable de subir. Il y a, ou tout au moins il peut y a
546
au moins il peut y avoir beaucoup plus d’ordre en
nous
que dans le monde. Le vertige est à l’extérieur. Et lorsque éclate le
547
à l’extérieur. Et lorsque éclate le conflit entre
notre
moi et le monde c’est au monde que nous donnons tort. Nous le mettons
548
it entre notre moi et le monde c’est au monde que
nous
donnons tort. Nous le mettons en question, nous démasquons son arbitr
549
et le monde c’est au monde que nous donnons tort.
Nous
le mettons en question, nous démasquons son arbitraire, nous refusons
550
e nous donnons tort. Nous le mettons en question,
nous
démasquons son arbitraire, nous refusons les règles de son jeu, et la
551
tons en question, nous démasquons son arbitraire,
nous
refusons les règles de son jeu, et la plupart de ses établissements n
552
et la plupart de ses établissements ne sont pour
nous
que signes du désordre. C’est à son anarchie, non à la nôtre, que nou
553
ignes du désordre. C’est à son anarchie, non à la
nôtre
, que nous déclarons cette guerre que l’on appelle révolution. Ainsi n
554
sordre. C’est à son anarchie, non à la nôtre, que
nous
déclarons cette guerre que l’on appelle révolution. Ainsi notre révol
555
s cette guerre que l’on appelle révolution. Ainsi
notre
révolte même assure nos relations avec le monde. La tension se produi
556
pelle révolution. Ainsi notre révolte même assure
nos
relations avec le monde. La tension se produit de nouveau entre les p
557
gne : elle pointe sa flèche contre la société34.
Nous
ne pouvons nous réaliser que dans le corps à corps avec le monde et c
558
e sa flèche contre la société34. Nous ne pouvons
nous
réaliser que dans le corps à corps avec le monde et c’est toujours le
559
e passe comme si le but final était bien moins de
nous
réaliser que d’informer un monde neuf, qui enfin nous paraisse accept
560
réaliser que d’informer un monde neuf, qui enfin
nous
paraisse acceptable. Les « leçons » que nous tirons aujourd’hui du sp
561
nfin nous paraisse acceptable. Les « leçons » que
nous
tirons aujourd’hui du spectacle des gens, de l’examen de leurs coutum
562
eurs raisons, ces leçons ne sont plus destinées à
notre
seul usage interne : elles prennent l’allure de revendications contre
563
e ce simple changement de signe dont l’importance
nous
est encore incalculable, je voudrais indiquer maintenant l’un des pre
564
ens de la parfaire en l’enseignant. Ce que Goethe
doit
au monde, c’est de devenir Goethe. Il doit montrer l’exemple d’un ind
565
Goethe doit au monde, c’est de devenir Goethe. Il
doit
montrer l’exemple d’un individu qui a su tirer du monde où il est né
566
ait vis-à-vis d’un « sujet ». Mais, tout inverse,
notre
effort contre le monde vise à l’affirmation d’un ordre externe, d’une
567
ne, d’une communauté vivante. Les témoignages que
nous
devons porter en faveur de cet ordre à créer ne pourront plus revêtir
568
’une communauté vivante. Les témoignages que nous
devons
porter en faveur de cet ordre à créer ne pourront plus revêtir la for
569
eraient plus parfaites, c’est-à-dire détachées de
nos
contingences présentes. Faites pour durer, elles resteraient des « ut
570
esteraient des « utopies ». Les seuls modèles que
nous
puissions prétendre offrir, ce sont les preuves de notre engagement d
571
uissions prétendre offrir, ce sont les preuves de
notre
engagement dans la réalité vulgaire du monde actuel. Si nous devons q
572
ment dans la réalité vulgaire du monde actuel. Si
nous
devons quelque chose à ce monde, c’est notre volonté de le changer, d
573
dans la réalité vulgaire du monde actuel. Si nous
devons
quelque chose à ce monde, c’est notre volonté de le changer, de le co
574
l. Si nous devons quelque chose à ce monde, c’est
notre
volonté de le changer, de le connaître afin de le changer, de le conn
575
e afin de le changer, de le connaître en tant que
notre
action peut modifier le sort de ses victimes, dont nous sommes. Je vo
576
ction peut modifier le sort de ses victimes, dont
nous
sommes. Je vois alors une littérature de transition dont l’ambition n
577
esprit se découvre d’autres tâches. Goethe encore
doit
choisir ses sujets et le cadre de ses pensées dans un certain ordre «
578
i peut agrandir et clarifier l’univers intérieur.
Nous
, c’est le monde informe, impersonnel, hétéroclite et quotidien qu’il
579
orme, impersonnel, hétéroclite et quotidien qu’il
nous
faudrait clarifier et « reprendre ». Mais où le prendre sinon au plus
580
prendre sinon au plus près, et tout d’abord dans
nos
contacts humains les plus banals ! Nous serons d’autant plus assurés
581
abord dans nos contacts humains les plus banals !
Nous
serons d’autant plus assurés de le toucher utilement que nous aurons
582
d’autant plus assurés de le toucher utilement que
nous
aurons moins calculé le mode et le lieu des contacts. D’où je vois na
583
de rencontres, une sorte de perpétuel journal de
nos
relations avec le monde, empruntant toutes les formes qu’on voudra, r
584
le vrai progrès de l’esprit, c’est l’ouverture de
notre
vie aux « influx de vigueur et de tendresse réelle », notre réponse d
585
aux « influx de vigueur et de tendresse réelle »,
notre
réponse d’homme à toute la création, longtemps trompée dans son « att
586
l’homme n’est pas fait pour durer : la vie étale
nous
ennuie, c’est ce qui naît et ce qui meurt qui nous émeut. Cette nuit,
587
ous ennuie, c’est ce qui naît et ce qui meurt qui
nous
émeut. Cette nuit, avant d’aller me coucher, j’ai été voir encore au
588
me coucher, j’ai été voir encore au poulailler. (
Nous
attendions depuis deux jours l’éclosion des œufs.) Il me semble qu’il
589
e vais chercher une bougie, je réveille ma femme.
Nous
essayons de soulever par les ailes la poule, qui fait un caquet déchi
590
Armés de treilles à long manche, les jambes nues,
nous
courons sur les roches tapissées d’algues sombres dont le crépitement
591
pissées d’algues sombres dont le crépitement sous
nos
pas fait fuir et choir de tous côtés de petits crabes. Des ruisseaux,
592
s impétueuses parcourent ce territoire compliqué.
Nous
les suivons, dans l’eau jusqu’aux genoux, les jambes caressées de cou
593
s rougeâtres et doucement mouvantes. C’est là que
nous
commençons la pêche. Il faut se planter au centre du bassin, et fouil
594
la ceinture et qui se remplit de tressaillements.
Nous
ne gardons que les plus belles crevettes, dites « bouquets », grosses
595
rose sombre, aux longues antennes grenat. Un jour
nous
avons pris une seiche énorme, de celles que les gens de l’île mangent
596
retirer dans son trou. Quand la marée remonte et
nous
chasse peu à peu vers la plage, nous nous attardons encore à chercher
597
e remonte et nous chasse peu à peu vers la plage,
nous
nous attardons encore à chercher dans les flaques d’eau tiédie ou sou
598
onte et nous chasse peu à peu vers la plage, nous
nous
attardons encore à chercher dans les flaques d’eau tiédie ou sous les
599
es huîtres sur les murs des écluses à poisson. Il
nous
a fallu trois belles heures pour rapporter de quoi déjeuner, des coup
600
» des créatures, songeant au passage où l’Apôtre
nous
fait entendre ce soupir de toute la création vers la révélation des «
601
là la dernière trace de la conscience cosmique en
nous
, de la conscience de notre royauté nécessaire et réparatrice. Il est
602
conscience cosmique en nous, de la conscience de
notre
royauté nécessaire et réparatrice. Il est probable que le tigre en tr
603
igne de l’homme que ces vertus de carnassiers que
nous
partageons, d’ailleurs maladroitement, avec le tigre et le requin. J’
604
, avec le tigre et le requin. J’allais conclure :
nos
rapports avec la nature ne sont guère plus satisfaisants que nos rapp
605
ec la nature ne sont guère plus satisfaisants que
nos
rapports avec les hommes. Mais attention : Si l’homme n’est que natur
606
lus en plus évident. 22 mai 1934 « C’est en
notre
vie seule que la nature vit » (Coleridge). « Car nous sommes là pour
607
vie seule que la nature vit » (Coleridge). « Car
nous
sommes là pour deviner les choses dans leurs natures particulières, a
608
ses dans leurs natures particulières, alors elles
nous
en sont reconnaissantes » (C. F. Ramuz). « D’autant plus nous connais
609
reconnaissantes » (C. F. Ramuz). « D’autant plus
nous
connaissons les choses particulières, d’autant plus nous connaissons
610
nnaissons les choses particulières, d’autant plus
nous
connaissons Dieu » (Spinoza). « Tout l’univers s’adresse à l’homme da
611
iner que cet effort de la nature pour pénétrer en
nous
n’est pas sans une mystérieuse signification ? » (Benjamin Constant).
612
à la liberté de la gloire des enfants de Dieu. Or
nous
savons que jusqu’à ce jour, la création tout entière soupire et souff
613
eurs de l’enfantement… Car c’est en espérance que
nous
sommes sauvés » (Romains 8, 20-24). Fin mai 1934 Nous mangeons
614
s sauvés » (Romains 8, 20-24). Fin mai 1934
Nous
mangeons les premiers légumes du jardin : salades et radis. Pour les
615
nt que quelques feuilles. Mais avec le produit de
nos
pêches, les bons de pain, le reste du tonneau de vin blanc, nous pour
616
s bons de pain, le reste du tonneau de vin blanc,
nous
pourrions subsister sans argent pendant quelques semaines encore. Il
617
une traduction et de la correction d’un manuscrit
nous
a fait vivre jusqu’en avril. Pendant ce temps, j’ai pu écrire quelque
618
l faut vivre assez longtemps loin de Paris, comme
nous
vivons ici, pour arriver à distinguer : eux ne s’en doutent pas, ils
619
s ou moins spirituelle de, etc. Parlons plutôt de
nos
bains, les premiers vrais bains de la saison, à la Grande-Conche. Une
620
ans une pierre. Merveilleuse piste de bicyclette.
Nous
nous sommes procuré deux vieux clous tout rouillés. Ils supportent tr
621
ne pierre. Merveilleuse piste de bicyclette. Nous
nous
sommes procuré deux vieux clous tout rouillés. Ils supportent très bi
622
Le jardin à sept heures du matin. Chaque jour,
nous
le découvrons ! Touffu, feuillu et odorant, plein de giroflées multic
623
grandissent d’un pouce au moins pendant la nuit.
Nous
allumons une première cigarette pour enfumer les pucerons des rosiers
624
bruits des champs. 10 juin 1934 Depuis que
nous
parcourons cette pointe de l’île à bicyclette, de la Grande-Conche, à
625
pins à l’est et au Fier, qui termine les marais,
nous
découvrons que notre domaine est bien étroit… Cela n’a plus la grande
626
Fier, qui termine les marais, nous découvrons que
notre
domaine est bien étroit… Cela n’a plus la grandeur romantique de la d
627
cultivateurs, au travail sur leurs petits champs,
nous
crient quand nous passons : — Alors, on se promène ? 14 juin 1934
628
ravail sur leurs petits champs, nous crient quand
nous
passons : — Alors, on se promène ? 14 juin 1934 Il vient de m’a
629
t. Hier soir, j’avais fait une dernière revue de
nos
possibilités de subsister pendant les semaines qui viennent. Articles
630
ur contre « le sort » depuis sept à huit mois que
nous
sommes dans l’île. Je n’étais pas fier. Ce matin, nous avons décidé d
631
sommes dans l’île. Je n’étais pas fier. Ce matin,
nous
avons décidé de réagir. Quand une auto risque de rater le tournant, e
632
ndé à Mellouin d’apporter un nouveau tonnelet. Et
nous
allions nous mettre à table pour manger le canard des grandes occasio
633
n d’apporter un nouveau tonnelet. Et nous allions
nous
mettre à table pour manger le canard des grandes occasions, quand la
634
se payait ma tête. Ensuite, j’ai calculé que cela
nous
permettait de passer l’été ici, sans inquiétude. Ou encore, de le pas
635
tends qu’on sort, et le gérant vient me chercher.
Notre
affaire réglée, il croit devoir s’excuser de m’avoir fait passer à cô
636
vient me chercher. Notre affaire réglée, il croit
devoir
s’excuser de m’avoir fait passer à côté tout à l’heure. « Vous savez,
637
s sont tout fiers de venir à la banque. Ici, on a
dû
faire cette salle d’attente… » Autant que j’en puis juger d’après les
638
fférent et cordial qui a fini par s’établir entre
nous
; et il ne reste que l’ennui de nos conversations toujours pareilles.
639
tablir entre nous ; et il ne reste que l’ennui de
nos
conversations toujours pareilles. Grande différence entre eux et moi
640
e à réfléchir un moment sur « ce que c’est que de
nous
» ; la mère Renaud, par exemple, qui s’est fait opérer en mai, d’un c
641
e genre de métier. Ce n’est pas la « classe » qui
nous
sépare ici, mais la profession, les préoccupations professionnelles,
642
934 La sécheresse a été la plus forte : malgré
nos
arrosages, les salades et les choux sont brûlés, la terre se craquell
643
plus que quelques roses aux pétales fatigués. Et
nous
, nous n’avons plus la même patience, depuis qu’il y a de l’argent dan
644
que quelques roses aux pétales fatigués. Et nous,
nous
n’avons plus la même patience, depuis qu’il y a de l’argent dans un t
645
n. Voici un an bientôt que j’ai quitté Paris pour
notre
« Maison du berger ». Voici un an que je dors bien, que je travaille
646
les questions réelles sont celles que l’existence
nous
pose, et non point celles que nous posions pour éviter de répondre au
647
ue l’existence nous pose, et non point celles que
nous
posions pour éviter de répondre au présent. À lire les romans d’aujou
648
mais. Le grain de la terre ; et aussi le grain de
nos
idées, de notre vie, plus facile à décrire avec les mots de notre lan
649
de la terre ; et aussi le grain de nos idées, de
notre
vie, plus facile à décrire avec les mots de notre langue. Il ne se pa
650
notre vie, plus facile à décrire avec les mots de
notre
langue. Il ne se passe pas grand-chose dans ces pages, mais ce peu m’
651
les romaines sous un ciel doux. Au nord, derrière
notre
maison, c’est le rocher, la montagne brûlée. La maison : une ancienne
652
ur le versant nord d’un vallon qui vient mourir à
notre
hauteur sur la droite, tandis que le versant sud, avec ses restanques
653
d’oliviers, ferme l’horizon immédiat. Au sud-est,
nous
avons une échappée sur la fin de la vallée, la rivière et la plaine.
654
sible, massée au pied des rochers, en retrait sur
notre
gauche. À peine s’il nous en vient quelques rumeurs de gare, un coup
655
ochers, en retrait sur notre gauche. À peine s’il
nous
en vient quelques rumeurs de gare, un coup de trompe d’auto, des cris
656
relles, de telle sorte qu’on puisse y travailler.
Nous
faisons l’inventaire minutieux et le plan d’arrangement actuel de cha
657
endeloques de verre taillé. Fascinant, ce lustre.
Nous
sommes éreintés et couverts de poussière. Mais on va pouvoir respirer
658
La traduction d’un considérable ouvrage allemand
nous
permettra de passer trois mois ou quatre sans trop de soucis matériel
659
araît un peu moins chère dans ce pays-ci que dans
notre
île. Mais les gens sont encore plus pauvres, si possible. Les petites
660
trevois déjà ce qu’ils appellent ici se nourrir :
nos
voisins n’ont sur leur table, quand on va les voir à midi, que des ch
661
s privilégiés, cela se sent à la manière dont ils
nous
parlent de quelques familles des environs qui n’ont pas la ressource
662
égère nuance de supériorité sociale chez Simard.)
Nos
hôtes nous avaient signalé la famille d’un mineur retraité, dont la f
663
ce de supériorité sociale chez Simard.) Nos hôtes
nous
avaient signalé la famille d’un mineur retraité, dont la femme fait d
664
— car je gagne à peu près 1000 francs par mois —
nous
avons engagé la mère Calixte pour donner un coup de main le matin et
665
Mais bavarde ! De gré ou de force, c’est certain,
nous
saurons tout sur les gens de la ville… 5 octobre 1934 Petite ci
666
e espoir vague et profond. Or, tout ce que l’État
nous
apprend, par le moyen de l’école primaire entre autres, ridiculise et
667
est pourquoi leurs pensées guident et soutiennent
notre
marche. Et c’est Kierkegaard qui a écrit : « …la marche verticale, si
668
rd qui a écrit : « …la marche verticale, signe de
notre
verticalité infinie ou du sublime de notre spiritualité ». 10 octo
669
gne de notre verticalité infinie ou du sublime de
notre
spiritualité ». 10 octobre 1934 (Suite et fin.) — Deux classes
670
résent. Elle met en question tout un monde qui ne
nous
laisse plus de choix qu’entre un rationalisme « libéral » et stérilis
671
et toujours vertes ; on ne les mange pas.) Simard
nous
a indiqué une ferme, de l’autre côté de la colline du sud, où nous po
672
e ferme, de l’autre côté de la colline du sud, où
nous
pourrons acheter une provision d’« œillades ». C’est leur gros raisin
673
sion d’« œillades ». C’est leur gros raisin bleu.
Nous
y sommes allés hier au soir. Des hauteurs, on voyait la plaine rose e
674
la colline, déjà dans l’ombre, paraissait désert.
Nous
nous sommes assis sur la terrasse, au pied d’un grand micocoulier. Bi
675
lline, déjà dans l’ombre, paraissait désert. Nous
nous
sommes assis sur la terrasse, au pied d’un grand micocoulier. Bientôt
676
me en noir. C’est la propriétaire, Mme Turc. Elle
nous
fait entrer. Pour la vente du raisin, il faut attendre sa fille qui v
677
champs, où elle travaille jusqu’à la nuit tombée.
Nous
sommes dans une cuisine de ferme, mais la fermière nous reçoit comme
678
ommes dans une cuisine de ferme, mais la fermière
nous
reçoit comme une « dame », ou plutôt un peu mieux, avec une politesse
679
engagé de chômeurs, monsieur, c’est un principe.
Nous
ne voulons que des ouvriers honnêtes. Pensez donc, deux femmes seules
680
même chose. » Elle a sans doute entendu parler de
nous
. Rien à faire : je suis un « monsieur ». La fille rentre : une forte
681
rte femme, environ 35 ans, un peu masculine. Elle
nous
conduit à la chambre de conserve des raisins. Pendant qu’elle fait la
682
emps de lire beaucoup ? — Oh ! on le prend. Comme
nous
ne voyons jamais personne… » 16 octobre 1934 Complexité des «
683
tion de tout cela dont le marxisme, justement, se
doit
de ne pas tenir compte. Un communiste traitera les dames Turc de « ko
684
ontre le monde, contre soi-même… Et pourtant il a
dû
sentir que j’avais de l’amitié pour lui. Il me parlait de ses lecture
685
e ces esthètes fortunés qui, dit-on, encombraient
notre
littérature aux environs de 1900. Et puis, faut-il chercher si loin ?
686
jours… Reprenons cela. « Moins d’idées ! Méfions-
nous
de l’intellectualisme ! » Est-ce qu’il y a vraiment lieu de se plaind
687
stration, dirait Freud. Allons, allons, reprenons-
nous
! Pour moi, je suis bien décidé, dorénavant, à maintenir le droit imp
688
s l’heure des mauvaises nostalgies ? Qui pourrait
nous
écrire une histoire des inventions de l’insomnie ? Ne serait-ce pas t
689
pas tout simplement l’histoire de la naissance de
nos
démons ? La nuit ne pose pas de questions immédiates. C’est pourquoi,
690
du genre journal intime ? Depuis six semaines que
nous
sommes à A…, me suis-je assez intéressé aux autres qui m’entourent ?
691
lles sur les gens. — Je vais chez les Calixte. On
nous
a dit que la mère est malade. Je trouve à la cuisine sa fille et une
692
re aussi. Elle me dit qu’elle a été assez mal. On
devait
lui retirer son linge toutes les deux heures. Quand elle sortait sa m
693
e une lessive à la maison pour remplacer sa mère.
Nous
manquons de corde pour étendre le linge ; elle imagine de le mettre à
694
grand tort de croire que rien au monde dépend de
nous
. Ceci vaut pour les femmes, qui sont la part la plus civilisée de la
695
i relevé quelques chiffres dans un ouvrage sur A…
dû
à la plume d’un de ses pasteurs à la retraite36. En 1570, le mûrier,
696
impossible. Le camouflage de l’honnête appareil a
dû
coûter fort cher, mais au moins on a de la laideur pour son argent. M
697
novembre 1934 Leur langage. — La mère Calixte
devait
faire notre lessive la semaine prochaine. Elle vient s’excuser : « Qu
698
Leur langage. — La mère Calixte devait faire
notre
lessive la semaine prochaine. Elle vient s’excuser : « Qui sait, mada
699
t, résume un drame, qui est celui du langage dans
notre
société présente. Les mots que nous disons ou que nous écrivons, nous
700
langage dans notre société présente. Les mots que
nous
disons ou que nous écrivons, nous autres intellectuels, éveillent dan
701
société présente. Les mots que nous disons ou que
nous
écrivons, nous autres intellectuels, éveillent dans l’esprit populair
702
e. Les mots que nous disons ou que nous écrivons,
nous
autres intellectuels, éveillent dans l’esprit populaire des harmoniqu
703
llent dans l’esprit populaire des harmoniques que
nous
ne savons plus prévoir. Littéralement, les mots n’ont plus le même se
704
ns. Mais il est clair que le sens des termes dont
nous
usons doit subir des métamorphoses non moins effarantes. Travail, lib
705
est clair que le sens des termes dont nous usons
doit
subir des métamorphoses non moins effarantes. Travail, liberté ou uni
706
ion, richesse et pauvreté, tous ces vocables dont
nous
pensions qu’ils exprimaient les lieux communs, sur quoi repose, tacit
707
ple les mêmes espoirs, les mêmes dégoûts que chez
nous
. Leur résonance sentimentale est différente, et c’est pourquoi leur s
708
d’autorité sur l’esprit de la lettre. Aussi bien
nous
parlons au hasard, pour ne pas dire dans le vide (il vaudrait mieux q
709
oit le vide, dans bien des cas), quels que soient
nos
efforts vers la rigueur et vers l’adaptation de notre style à notre a
710
s efforts vers la rigueur et vers l’adaptation de
notre
style à notre action. On serait même tenté d’estimer que la plus gran
711
la rigueur et vers l’adaptation de notre style à
notre
action. On serait même tenté d’estimer que la plus grande rigueur ent
712
« le public ». Cette vie spirituelle et ce public
nous
posent des exigences dont il faut admirer qu’elles soient aussi exact
713
gme de sa vie. C’est émouvant… Mais la plupart de
nos
contemporains, est-ce qu’ils ne disent pas plutôt : « Fichez-moi la p
714
. Le conducteur est seul. Il me prend volontiers.
Nous
causons. C’est un commerçant de Lyon, la cinquantaine, assez bavard.
715
aieté de la vie de garçon, reprise par nécessité…
Nous
arrivons sur la place de mon village. « Je vous dépose ici ? Où voule
716
ha ! Ça me rappelle une bien bonne histoire, vous
devriez
lire ça, Clochemerle que ça s’appelle, je ne sais plus le nom du type
717
ont l’air d’être, ou mieux pour ce qu’ils croient
devoir
se donner l’air d’être ou de n’être pas. Comme si le fin du fin, c’ét
718
tant. Mais pour une causerie sur un sujet neutre,
nous
en avons toujours dans les quarante à cinquante. Et une fois qu’ils s
719
lques retraités qui « travaillent le mazet » dans
nos
parages, un ou deux cultivateurs, les trois instituteurs. Le pasteur
720
es instituteurs. Il s’agissait de « l’histoire de
notre
département ». La discussion n’a vraiment démarré que lorsqu’on s’est
721
e, et cela rend les échanges bien pauvres…) Quand
nous
nous sommes levés pour sortir, le facteur ronflait, le front sur un d
722
cela rend les échanges bien pauvres…) Quand nous
nous
sommes levés pour sortir, le facteur ronflait, le front sur un dossie
723
es d’odeurs dès que le vent cesse de les balayer.
Nous
sommes installés au presbytère sur une galerie d’où l’on domine un am
724
mine un ample paysage horizontal. La plaine est à
nos
pieds, des Cévennes grises au nord jusqu’à l’horizon des collines ver
725
paroissiens. Mais s’ils sont communistes, ils ne
doivent
tout de même pas faire partie de votre Église, pratiquement ? — C’est
726
e la place à traverser. — ? — Oui, vous savez que
nos
temples du Midi sont construits en général sur la place du village. E
727
lève et résume le débat : « En somme, dit-il, si
nous
ne croyons pas en Dieu, nous autres, ce serait que nous sommes trop o
728
En somme, dit-il, si nous ne croyons pas en Dieu,
nous
autres, ce serait que nous sommes trop orgueilleux ? » En général, on
729
e croyons pas en Dieu, nous autres, ce serait que
nous
sommes trop orgueilleux ? » En général, on peut dire que les communis
730
contemporains. Au fond, ils en ont peur. Or, ils
devraient
n’avoir peur que de Dieu, et des vocations bouleversantes qu’il arriv
731
es vocations bouleversantes qu’il arrive que Dieu
nous
adresse. C’est un comique profond, lugubre et déprimant que celui du
732
courant lyrique de l’époque qui donnait un sens à
nos
gestes et comme une apparence de but aux nostalgies élémentaires. Tou
733
ins de le dire ; mais eux… 22 décembre 1934
Nous
ne sortons plus guère qu’à la tombée de la nuit, pour la descente quo
734
uotidienne au village. Emmitouflés et silencieux,
nous
devons ressembler à cette « chouette de Minerve » — la conscience — d
735
ienne au village. Emmitouflés et silencieux, nous
devons
ressembler à cette « chouette de Minerve » — la conscience — dont Heg
736
met à voler qu’au crépuscule. Et peut-être sommes-
nous
la seule conscience de cette bourgade léthargique, si vraiment la con
737
e souvenir que tout est infiniment plus perdu que
nous
ne pouvons l’imaginer dans nos instants de lucidité extrême ; que rie
738
nt plus perdu que nous ne pouvons l’imaginer dans
nos
instants de lucidité extrême ; que rien n’a de sens en soi, dans le m
739
néant, et que c’est à cause de cela, et non pour
nous
masquer ce désespoir total, mais pour nous le révéler en nous montran
740
n pour nous masquer ce désespoir total, mais pour
nous
le révéler en nous montrant sa fin, que Dieu est né, mort, ressuscité
741
ce désespoir total, mais pour nous le révéler en
nous
montrant sa fin, que Dieu est né, mort, ressuscité. Palavas-les-Fl
742
r au hasard vers le sud, de « tout lâcher » comme
nous
disions à 18 ans, me paraît soudain tellement pauvre et banale, au re
743
arriérés, quoi. Ils n’ont pas l’instruction comme
nous
autres. » Arriérés, illettrés. Je n’en suis plus au temps où j’approu
744
c’est démentir les lois les plus fondamentales de
notre
science la plus élémentaire et la plus sûre, l’arithmétique. Mais qui
745
ins individus « ont la veine » dans ces loteries,
notre
image scientifique (physico-mathématique) du monde est fausse. Il est
746
t impossible de concevoir la vérité simultanée de
notre
science et de la « veine » individuelle. C’est l’un ou l’autre ; ou m
747
gieux le plus obtus s’opposent infiniment moins à
notre
image scientifique du monde que cette petite phrase si courante : il
748
e petite phrase si courante : il a la veine. Mais
notre
jacobin ne croit à la Raison et à la Science, mère du Progrès, que da
749
que je ne fiche rien. Mais ce qui trouble un peu
notre
voisin, c’est qu’à deux reprises déjà, s’étant couché fort tard, il a
750
que mon travail c’était d’écrire des livres. Il a
dû
trouver l’excuse assez faible. Je n’ai pas la tête d’un écrivain, et
751
urs un écrivain, est-ce qu’on en a jamais vu ? Ça
doit
habiter Paris. Il faudra que je lui glisse un de ces jours que j’écri
752
une situation bien définie dans le corps social.)
Nous
sommes méprisés dans la mesure où nous sommes intellectuels, et accep
753
s social.) Nous sommes méprisés dans la mesure où
nous
sommes intellectuels, et acceptés — ou utilisés — dans la mesure où n
754
ls, et acceptés — ou utilisés — dans la mesure où
nous
réussissons à nous faire passer pour des bourgeois ou des défenseurs
755
u utilisés — dans la mesure où nous réussissons à
nous
faire passer pour des bourgeois ou des défenseurs du prolétariat.
756
e sur l’espèce de mauvaise humeur singulière dont
nous
souffrons ici, ma femme et moi, et qui déjà nous a fait quitter l’île
757
nous souffrons ici, ma femme et moi, et qui déjà
nous
a fait quitter l’île. Problème des gens : le plus commun et le plus e
758
encombrant. Voici comment il me paraît se poser.
Nous
serions parfaitement contents de notre sort, loin des villes, pour to
759
t se poser. Nous serions parfaitement contents de
notre
sort, loin des villes, pour tout ce qui est de notre vie privée, de n
760
re sort, loin des villes, pour tout ce qui est de
notre
vie privée, de nos travaux et de notre confort. Mais du seul fait que
761
les, pour tout ce qui est de notre vie privée, de
nos
travaux et de notre confort. Mais du seul fait que ma condition n’est
762
qui est de notre vie privée, de nos travaux et de
notre
confort. Mais du seul fait que ma condition n’est pas socialement cla
763
lassée, la « distance » normale entre les gens et
nous
se trouve tantôt supprimée, tantôt exagérée. Nous ne bénéficions plus
764
nous se trouve tantôt supprimée, tantôt exagérée.
Nous
ne bénéficions plus de la protection des conventions. Tantôt mêlés de
765
tantôt moralement exclus de la communauté locale,
nous
assistons non sans une gêne croissante, au développement furieux de n
766
une gêne croissante, au développement furieux de
notre
esprit critique. Il y a des jours où tout, oui vraiment tout, les rue
767
les gens, les PTT, les magasins et les journaux,
nous
irrite ou excite notre ironie. Si l’on nous écoutait, il faudrait ref
768
s magasins et les journaux, nous irrite ou excite
notre
ironie. Si l’on nous écoutait, il faudrait refaire ce petit monde de
769
naux, nous irrite ou excite notre ironie. Si l’on
nous
écoutait, il faudrait refaire ce petit monde de fond en comble ! La l
770
onditions de leur existence n’admettent guère. 2.
Nous
ne sommes ici que de passage. Au fond, nous n’avons rien à faire à A…
771
e. 2. Nous ne sommes ici que de passage. Au fond,
nous
n’avons rien à faire à A…, ni rien à faire pour ces gens-là, ni eux p
772
A…, ni rien à faire pour ces gens-là, ni eux pour
nous
. Leur présence, leur proximité matérielle n’exige pas de nous des act
773
résence, leur proximité matérielle n’exige pas de
nous
des actes ou des échanges réels, ou même les refuse. Alors ils ne son
774
, ou même les refuse. Alors ils ne sont plus pour
nous
que des « voisins inévitables », selon le mot de Keyserling, et non p
775
érence auxquels sont condamnés la plupart d’entre
nous
. Le secret de ma mauvaise humeur, c’est qu’il n’y a plus de communaut
776
mes sont frères de par leur commune origine, cela
nous
conduit tout au plus à élargir à toute la terre le champ des querelle
777
une. Et c’est cela finalement qu’appellent toutes
nos
petites récriminations. C’est ce qui leur donne raison bien au-delà d
778
on bien au-delà d’elles-mêmes, tout autrement que
nous
l’imaginions. L’irritation chronique que je ressens au contact des «
779
ne obscure protestation contre la vie défaite que
nous
vivons. Or, il ne s’agit pas d’étouffer cette protestation, mais au c
780
res révolutions — hors de la fin dernière qu’elle
nous
désigne et qu’elle appelle. Toutes les nostalgies de l’Europe, tous l
781
t, toute la misère des millions d’isolés qui font
nos
foules et qui saluent les dictateurs, tout cela en vérité n’est qu’un
782
copain : « Pour moi, c’est un fasciste ! » Toutes
nos
confusions politiques résumées dans cette petite phrase ! Je me dis :
783
l est tourné du côté de la plaine. Signe qu’il va
nous
arriver quelque chose par là ? Du côté de Marseille… Et soudain je me
784
oudain je me suis souvenu de la conférence que je
dois
donner à Marseille dans quinze jours. Je ne voulais pas la préparer a
785
s, mais n’est-ce pas une étrangeté plus aiguë que
nous
révèle cette foi toute quotidienne aux « signes », cette activité cré
786
l’exception vécue, reconnue, c’est cela même qui
nous
fait découvrir notre commune condition. Car, en effet, la condition c
787
reconnue, c’est cela même qui nous fait découvrir
notre
commune condition. Car, en effet, la condition commune, c’est de se s
788
n tant qu’il s’oppose au réel, lequel est fait de
nos
monades superstitieuses ? Accorder libre cours à nos superstitions, q
789
monades superstitieuses ? Accorder libre cours à
nos
superstitions, qui du point de vue psychologique sont notre vraie réa
790
rstitions, qui du point de vue psychologique sont
notre
vraie réalité, ce serait jeter la société dans l’anarchie la plus san
791
ans l’anarchie la plus sanglante. La politique ne
doit
jamais partir de la réalité irrationnelle de l’homme : d’ailleurs ell
792
en le plus précieux !) Au contraire, la politique
doit
aller à l’encontre de la réalité individuelle, et c’est pour elle la
793
nant à plusieurs reprises que la politique idéale
devrait
partir de la personne. Elle doit tenir compte de la personne, et fina
794
itique idéale devrait partir de la personne. Elle
doit
tenir compte de la personne, et finalement favoriser son développemen
795
expansion, de combattre en définitive le réel que
nous
incarnons. Toute politique est normative, mais seulement de l’extérie
796
e formuler. Premier principe : l’équilibre social
doit
être quelque chose de mouvant. Tout équilibre stable et sclérosé prod
797
excessif du général dans la vie réelle. Telle est
notre
situation — celle du monde bourgeois capitaliste, mais aussi celle de
798
res, d’une manière encore plus frappante. Certes,
nos
institutions n’ont guère changé depuis un siècle, et c’est pourquoi l
799
uilibre social, pour rester sain, mouvant, tendu,
doit
être orienté constamment par un léger excès de la composante « person
800
léger excès de la composante « personnelle ». Il
doit
en permanence se déplacer au profit des personnes. (Au profit des irr
801
rofit de la politique et des doctrines d’État qui
doivent
justement la combattre, le désordre s’installe et grandit. Dans notre
802
ombattre, le désordre s’installe et grandit. Dans
notre
cas, l’État devient totalitaire. « Là où l’homme veut être total, l’É
803
ême manière aux lois et aux pouvoirs qu’il aurait
dû
combattre. (Volonté et Pouvoir des masses, fatalités économiques, évo
804
cauchemar qu’elles affectent, — dont les affecte
notre
démission. Et c’est ainsi d’un refoulement, puis d’un transfert fatal
805
si d’un refoulement, puis d’un transfert fatal de
nos
superstitions les plus valables, que naissent par exemple la menace f
806
ameuses « lois » économiques ou sociologiques que
nous
pensons avoir récemment « découvertes » ne sont, au sens freudien du
807
au sens freudien du terme, que les phantasmes de
notre
peur de vivre. On les ramènerait aisément à ce « complexe de castrati
808
une situation matérielle. Il est entendu qu’on ne
doit
pas parler de « questions matérielles » dans une société distinguée.
809
es uns contre les autres. Et qui ou quoi pourrait
nous
en guérir ? — Commençons par nous avouer. Passons outre à nos vieille
810
u quoi pourrait nous en guérir ? — Commençons par
nous
avouer. Passons outre à nos vieilles pudeurs : c’est le début de la c
811
r ? — Commençons par nous avouer. Passons outre à
nos
vieilles pudeurs : c’est le début de la cure. Ensuite il faudra essay
812
de la cure. Ensuite il faudra essayer de réviser
nos
préjugés en fonction du vrai but de notre vie, de nous refaire une hi
813
e réviser nos préjugés en fonction du vrai but de
notre
vie, de nous refaire une hiérarchie éthique, et de rendre ainsi à l’a
814
préjugés en fonction du vrai but de notre vie, de
nous
refaire une hiérarchie éthique, et de rendre ainsi à l’argent son rôl
815
e, touche à son terme dans le cœur d’un homme. Je
dois
à ces rencontres d’avoir pressenti quelquefois — assez pour en garder
816
ante — ce qu’il y a d’inhumain dans la plupart de
nos
habiletés littéraires, et au contraire ce qu’il y a d’humain dans cer
817
aïves — ce qu’il y a d’inutile dans la plupart de
nos
précautions oratoires, logiques ou mondaines, et ce qu’il y a au cont
818
t sans l’avoir jamais vu. Il n’est pas arrêté par
nos
tabous critiques. Il va tout droit à ce qui le concerne, et c’était j
819
mps. Ce ne sont pas des abstractions qui achètent
nos
livres. Ce qu’il s’agit de retrouver, c’est le contact avec l’homme q
820
arfois dramatique, c’est bien la seule qui puisse
nous
rendre peu à peu le sens de la responsabilité de l’écrivain. Pour l’a
821
abilité de l’écrivain. Pour l’avoir négligée dans
nos
villes, au milieu des feuilletonistes et des snobs, nous en sommes ar
822
lles, au milieu des feuilletonistes et des snobs,
nous
en sommes arrivés à parler dans le vide, à ne parler qu’à ces lecteur
823
livres pour remplir les rayons d’un studio-divan.
Nous
sommes des ingénieux, des amuseurs, des spécialistes, des éléments de
824
de publicité, des académiciens, des journalistes.
Nous
ne sommes plus des gens utiles. Nous ne sommes plus des hommes normau
825
ournalistes. Nous ne sommes plus des gens utiles.
Nous
ne sommes plus des hommes normaux chargés d’une vocation d’expression
826
rgés d’une vocation d’expression et de réflexion.
Nous
sommes des hommes spéciaux exploitant leur spécialité pour arriver à
827
our arriver à un succès sur le marché. Combien de
nos
romanciers devraient être classés dans la catégorie des femmes à barb
828
n succès sur le marché. Combien de nos romanciers
devraient
être classés dans la catégorie des femmes à barbe et des veaux à deux
829
à deux têtes qu’on montre aux foires. On dit que
nous
avons trahi l’esprit : mais l’esprit n’a pas besoin de nous. Il vit s
830
trahi l’esprit : mais l’esprit n’a pas besoin de
nous
. Il vit sans nous. Nous le retrouverons intact. C’est le lecteur que
831
mais l’esprit n’a pas besoin de nous. Il vit sans
nous
. Nous le retrouverons intact. C’est le lecteur que nous avons trahi,
832
’esprit n’a pas besoin de nous. Il vit sans nous.
Nous
le retrouverons intact. C’est le lecteur que nous avons trahi, c’est
833
Nous le retrouverons intact. C’est le lecteur que
nous
avons trahi, c’est avec lui que nous devons retrouver un contact qui
834
lecteur que nous avons trahi, c’est avec lui que
nous
devons retrouver un contact qui nous renverra, plus sûrement que tout
835
eur que nous avons trahi, c’est avec lui que nous
devons
retrouver un contact qui nous renverra, plus sûrement que toutes les
836
avec lui que nous devons retrouver un contact qui
nous
renverra, plus sûrement que toutes les diatribes, au respect des vale
837
nthousiasmes aux soins que réclame la vieillesse.
Notre
opinion publique, à en croire les journaux, est actuellement dominée
838
et ce culte du jeune guerrier à quoi certains de
nos
voisins sacrifient davantage que leur vie : leur dignité de personnes
839
n effet, malgré elle, d’une certaine vitalité qui
doit
paraître un peu suspecte à cette population de retraités, d’« exclus
840
at de simplicité envers l’argent. C’est parce que
nous
avons perdu cette simplicité envers l’argent, parce que nous en avons
841
perdu cette simplicité envers l’argent, parce que
nous
en avons fait une valeur sentimentale, que nous sommes pris dans nos
842
e nous en avons fait une valeur sentimentale, que
nous
sommes pris dans nos calculs. Il faut apprendre cette simplicité : l’
843
ne valeur sentimentale, que nous sommes pris dans
nos
calculs. Il faut apprendre cette simplicité : l’imprévoyance, l’accep
844
ent que par la joie, et la joie ne vaut rien dans
nos
calculs. Il faut beaucoup d’argent (jamais assez) à celui qui n’a pas
845
llé par les signes visibles du pain et du vin, je
dois
croire identiquement que c’est là le centre vivant de toute réalité r
846
e vivant de toute réalité réelle sur la terre. Je
dois
croire qu’à cet événement central doivent se rapporter toutes nos pen
847
terre. Je dois croire qu’à cet événement central
doivent
se rapporter toutes nos pensées, toutes nos actions, tous nos système
848
cet événement central doivent se rapporter toutes
nos
pensées, toutes nos actions, tous nos systèmes… Une politique, une ét
849
l doivent se rapporter toutes nos pensées, toutes
nos
actions, tous nos systèmes… Une politique, une éthique, une idée qui
850
rter toutes nos pensées, toutes nos actions, tous
nos
systèmes… Une politique, une éthique, une idée qui ne peuvent être ra
851
grands soulèvements de l’instinct vers la clarté,
notre
raison les repousse au lieu de les transfigurer. En présence de tout
852
15 avril 1935 La sieste de la Marquise. —
Nous
espérions pouvoir dormir de nouveau, après la grande semaine des chat
853
battus dans la remise qui est juste au-dessous de
notre
chambre, et dans la cour, et sur toutes les terrasses. Avec des cris
854
a nature ! Littérateurs, allez-y voir de près ! «
Nous
savons, en effet, que jusqu’à ce jour, la création tout entière gémit
855
enfantement. Et ce n’est pas elle seulement, mais
nous
aussi, qui avons les prémices de l’Esprit ; nous aussi nous soupirons
856
nous aussi, qui avons les prémices de l’Esprit ;
nous
aussi nous soupirons en nous-mêmes, en attendant l’adoption, la rédem
857
, qui avons les prémices de l’Esprit ; nous aussi
nous
soupirons en nous-mêmes, en attendant l’adoption, la rédemption de no
858
-mêmes, en attendant l’adoption, la rédemption de
notre
corps. Car c’est en espérance que nous sommes sauvés. » (Romains 8, 2
859
mption de notre corps. Car c’est en espérance que
nous
sommes sauvés. » (Romains 8, 22-24.) Parler de la Nature comme le fir
860
re a su percevoir. C’est la nature qui cherche en
nous
ce que notre délire allait lui demander : les prémices d’une nouvelle
861
evoir. C’est la nature qui cherche en nous ce que
notre
délire allait lui demander : les prémices d’une nouvelle création, et
862
u’ils ont fait imprimer en lettres grasses : Tout
notre
programme municipal tient en un seul mot : nous sommes antifascistes
863
notre programme municipal tient en un seul mot :
nous
sommes antifascistes ! Après quoi viennent les revendications pratiqu
864
pale. Si c’est cela l’antifascisme, les fascistes
doivent
être de drôles de gens. 25 avril 1935 Communisme. — Dans la pe
865
sa canne le bout des souliers : « Tu m’entends ?
Nous
ôtres, nous allons vous passer à tabaque, toute la bande ! — Oh ! dit
866
bout des souliers : « Tu m’entends ? Nous ôtres,
nous
allons vous passer à tabaque, toute la bande ! — Oh ! dit l’homme, si
867
me, si vous y arrivez, c’est bien votre droit ! —
Notre
droit ? Peuchère, c’est notre devoir ! (Il glousse d’un air malin.) —
868
ien votre droit ! — Notre droit ? Peuchère, c’est
notre
devoir ! (Il glousse d’un air malin.) — On sait bien, dit le communis
869
tre droit ! — Notre droit ? Peuchère, c’est notre
devoir
! (Il glousse d’un air malin.) — On sait bien, dit le communiste, que
870
! — Les gros ! mon bon. Mais c’est donc vous, qui
nous
pressez toute notre argent, depuis quatre ans que vous l’avez, le pou
871
bon. Mais c’est donc vous, qui nous pressez toute
notre
argent, depuis quatre ans que vous l’avez, le pouvoir ! » L’autre se
872
ver à ne s’en indigner plus que dans la mesure où
notre
action réparatrice a besoin d’un élan passionné qui la soutienne ? En
873
assionné qui la soutienne ? En agissant davantage
notre
« idéal », sans doute laisserions-nous moins de loisirs à notre facul
874
davantage notre « idéal », sans doute laisserions-
nous
moins de loisirs à notre faculté judicatoire pour exercer ses compara
875
», sans doute laisserions-nous moins de loisirs à
notre
faculté judicatoire pour exercer ses comparaisons trop exactes entre
876
ctes entre cet idéal et les réalités stupides qui
nous
blessent. S’engager au lieu de s’indigner : voilà bien le principe de
877
oi ! rien n’est moins sûr que cette permanence de
nos
maux. Non que je croie à un « Progrès » réel possible. Mais je crois
878
e. Mais je crois à une décadence certaine dès que
nous
relâchons notre effort vers un mieux. Or, ma faiblesse veut que cet e
879
s à une décadence certaine dès que nous relâchons
notre
effort vers un mieux. Or, ma faiblesse veut que cet effort se traduis
880
ile. Elle n’a qu’un argument très puissant contre
nous
: sur qui et sur quoi tablez-vous, nous dit-elle, sur quelle classe,
881
nt contre nous : sur qui et sur quoi tablez-vous,
nous
dit-elle, sur quelle classe, sur quels intérêts ? — Nous comptons sur
882
t-elle, sur quelle classe, sur quels intérêts ? —
Nous
comptons sur l’effort des hommes les plus humains. C’est peu, dites-v
883
et qu’on m’avait laissé ignorer : une belle-mère.
Nous
apprenons son existence en même temps que l’imminence de sa mort — et
884
’esprit du lecteur philosophe. Déjà huit mois que
nous
sommes ici, et combien de fois ne sommes-nous pas entrés dans la gran
885
que nous sommes ici, et combien de fois ne sommes-
nous
pas entrés dans la grande cuisine qui était, pensions-nous, tout leur
886
entrés dans la grande cuisine qui était, pensions-
nous
, tout leur logis — nous avions cru comprendre que les autres pièces é
887
isine qui était, pensions-nous, tout leur logis —
nous
avions cru comprendre que les autres pièces étaient vides ou ne serva
888
e servaient que de débarras —, et rien ne pouvait
nous
faire soupçonner cette présence, à côté. Hier matin, la mère Calixte
889
fois par jour, le bruit d’effroyables discussions
nous
parvient de la cuisine des Simard. Un beau-frère est arrivé, et on pa
890
nus discuter dans la remise qui est au-dessous de
notre
chambre, et leurs éclats de voix nous ont plusieurs fois réveillés.
891
dessous de notre chambre, et leurs éclats de voix
nous
ont plusieurs fois réveillés. 7 mai 1935 « Alors, madame Calixt
892
y a eu du bruit toute la nuit. Vers deux heures,
nous
nous réveillons. Une âcre fumée remplit la chambre, des lueurs d’ince
893
eu du bruit toute la nuit. Vers deux heures, nous
nous
réveillons. Une âcre fumée remplit la chambre, des lueurs d’incendie
894
l’apprend ce matin. Le ménage Simard est furieux.
Nous
n’avons pas du tout fait ce qu’il fallait. Je me récrie : « Mais comm
895
t que je vous explique. Une visite de deuil, chez
nous
, ça doit se faire dans la cuisine. Aussi, je lui ai dit, à Fernane, i
896
vous explique. Une visite de deuil, chez nous, ça
doit
se faire dans la cuisine. Aussi, je lui ai dit, à Fernane, il aurait
897
isine. Aussi, je lui ai dit, à Fernane, il aurait
dû
venir chez vous pour dire qu’il ne voulait pas qu’on lave. Je le lui
898
crivant ici que leurs charmes ont cessé d’opérer.
Nous
avons épuisé les environs, dans un rayon d’exploration normal — metto
899
d d’un bâtiment considérable, à trois étages, qui
devait
servir de communs, de magnanerie, de cellier et de grange. Au sud, un
900
monte jamais là-haut, ni maréchaussée ni gabelle.
Nous
aurions des fusils et des bibles, nous serions camisés de rouge, et l
901
i gabelle. Nous aurions des fusils et des bibles,
nous
serions camisés de rouge, et l’on irait de temps à autre arraisonner
902
se répand dans la jeunesse. Fonder une colonie ne
devrait
pas avoir pour but la colonie, mais la vie plus normale et plus fécon
903
n peut en déduire facilement les deux formules de
notre
renaissance : mettre les villes au vert, urbaniser tout le reste du p
904
ince deviendra vivable. La révolution sera faite.
Nous
reviendrons pour faire quelque chose en commun avec tous ces hommes,
905
uéridons et les dessus de cheminée. Après-demain,
nous
partons. Nous fuyons. 35. Descartes, Spinoza, Hegel. 36. L’équiva
906
s dessus de cheminée. Après-demain, nous partons.
Nous
fuyons. 35. Descartes, Spinoza, Hegel. 36. L’équivalent de l’ouvr
907
roire à un rapprochement absurde. Il fait erreur.
Nous
sommes dans le Midi, où un sentiment obscure de latinité a survécu. E
908
plus dur et agressif, tendu, nerveux, discontinu…
Nos
valises empilées dans un taxi, nous filons vers la porte d’Italie.
909
x, discontinu… Nos valises empilées dans un taxi,
nous
filons vers la porte d’Italie. 5 juillet 1935 Porte de Choisy.
910
population de couples aux balcons. (Je distingue
nos
fenêtres obscures.) Ville aérienne, où la hauteur des murs n’évoque p
911
e, pour tant de mauvaises raisons plus fortes que
nous
tous. — Et alors, dira-t-on : « Faire la révolution ! », ce substitut
912
l’on s’avisait de le diriger contre la politique,
notre
superstition. « J’entends crier de toutes parts au mauvais citoyen. L
913
du réel, et qui commencent à s’en douter. Gardons-
nous
de les décourager ! 21 juillet 1935 Je traversais hier soir le
914
sensuelle et sensible (ou sensorielle pendant que
nous
y sommes) est l’expression architecturale et mécanique de l’état de f
915
signes, une de ces dernières preuves concrètes de
notre
vocation spirituelle. Cet ennui qui envahit le monde moderne possède
916
religieuse infinie. C’est parce qu’il existe que
nous
savons encore que l’homme est né pour autre chose que ce bonheur 44.
917
ver de plus normal. À Madagascar, quand une femme
doit
accoucher, elle s’isole dans une case, parfois avec une aide, cependa
918
fauteuil trop bas, et qui se nomme Otto Abetz. Il
nous
a beaucoup lus, semble-t-il, dans Esprit et L’Ordre nouveau , et j
919
ance. — Vous avez écrit des choses très dures sur
notre
régime, commence-t-il. — En effet. — Vous ne le connaissez pas. — Je
920
f et véridique, et surtout, si vous voulez servir
notre
cause, j’entends la cause commune de la jeunesse européenne, comme vo
921
riviez il y a quelques années, c’est pour vous un
devoir
absolu d’aller voir et juger sur place la tentative nationale-sociali
922
t meilleur que je ne l’avais cru, je me ferais un
devoir
de le dire et publier ; mais qu’en revanche, s’il se révélait aussi m
923
inverse de la fonction de la presse. Qu’attendons-
nous
des journalistes publics, des grands reporters ? Une espèce de stylis
924
traduit la réalité de l’époque qui prend fin sous
nos
yeux, il se peut que le journal privé soit la forme de transition qui
925
r de certains rudiments de toute compréhension de
notre
temps. Mais encore, ce serait peu que le voir de ses yeux. Il faudrai
926
uves : on s’imagine que tout, êtres et choses, va
nous
montrer des marques de la révolution. Et certes, en ce petit matin de
927
propaganda48 ? demande-t-il d’un air menaçant. —
Nous
ne connaissons pas ce genre de littérature en France. — Traduisez-moi
928
ais un second douanier s’est approché, attiré par
nos
éclats de voix. Il coupe court : Nie mehr Krieg. Erledigt ! (Plus jam
929
t pas émigré essaient de louer un ou deux étages.
Nous
avons visité de beaux appartements, au mobilier trop luxueusement 190
930
mais ils sont réservés aux juifs, comme j’aurais
dû
le voir par cette indication : für n. a. (pour non aryens) que portai
931
aryens) que portaient les annonces du journal. On
nous
reçoit et l’on nous renvoie avec un sérieux méfiant et résigné, presq
932
t les annonces du journal. On nous reçoit et l’on
nous
renvoie avec un sérieux méfiant et résigné, presque sans nous regarde
933
avec un sérieux méfiant et résigné, presque sans
nous
regarder. À la fin de l’après-midi, nous trouvons enfin un propriétai
934
que sans nous regarder. À la fin de l’après-midi,
nous
trouvons enfin un propriétaire aryen. C’est une vieille dame aimable
935
s ménages et trois célibataires. Cuisine commune.
Nous
aurons le rez-de-chaussée : trois pièces immenses et sombres, un hall
936
escalier. Premier échange. — Trois jours après
notre
arrivée, j’ai pris contact avec le Séminaire de langues romanes où je
937
re.) Dans la bibliothèque, un seul étudiant. Il a
dû
penser que j’étais le nouveau professeur. Je l’aborde et il se lève b
938
La Révolution nécessaire, d’Aron et Dandieu. — Je
dois
faire, me dit-il, une causerie sur le mouvement personnaliste, ce soi
939
a France, me semble-t-il, mais c’est injuste pour
nous
. Vous avez vos problèmes et nous les nôtres49. 5 novembre 1935
940
est injuste pour nous. Vous avez vos problèmes et
nous
les nôtres49. 5 novembre 1935 Séance d’ouverture du semestre d’
941
5 Séance d’ouverture du semestre d’hiver, pour
notre
séminaire. Le Dr N… professeur ordinaire, me reçoit dans son bureau a
942
aturellement, les non aryens… (Geste de barrage.)
Nous
pénétrons dans la grande salle. Ils sont en effet une quarantaine au
943
le bras d’un geste timide : « Et en l’honneur de
nos
études romanes, Sieg heil ! » Un court silence, puis il se reprend :
944
bitude du geste par lequel tout discours officiel
doit
réglementairement se terminer. 6 novembre 1935 Les premiers jou
945
rminer. 6 novembre 1935 Les premiers jours,
nous
courions aux fenêtres chaque fois que la rue retentissait de chants.
946
une phrase, puis un silence pendant quatre pas —
nous
est devenu familier. Le défilé fait partie de l’atmosphère allemande
947
n traitement comme « don volontaire » au WHW. Mon
devoir
est donc fait, si devoir il y a. Et au surplus, je tiens essentiellem
948
volontaire » au WHW. Mon devoir est donc fait, si
devoir
il y a. Et au surplus, je tiens essentiellement à ce qu’un passant su
949
gwort » : La lutte contre la faim et le froid est
notre
guerre. Est-ce une déclaration pacifiste ? Ou bien ne peut-on enthous
950
les répète entre les dents : il est question de «
notre
force » et de drapeaux qu’il faut teindre dans le sang des juifs.
951
citoyen, tandis que le second ne parle que de ses
devoirs
. Je ne vois pas de raisons théoriques de préférer l’un de ces système
952
La paix sociale a été obtenue par la fixation des
devoirs
réciproques à un niveau de justice fort médiocre, mais stable. — En s
953
peu les épaules, fait oui de la tête. Demain, il
doit
partir pour un Schulungslager (camp d’éducation sociale). Ça ne l’enc
954
semaines plus tard. — Ce camp ? — Eh bien voilà :
nous
étions dans une grande maison, logeant deux par deux dans des chambre
955
end à se connaître en partageant la même chambre.
Nous
suivions des cours de politique et d’économie. Nous chantions ensembl
956
us suivions des cours de politique et d’économie.
Nous
chantions ensemble. On nous interrogeait. La plupart des soirées libr
957
itique et d’économie. Nous chantions ensemble. On
nous
interrogeait. La plupart des soirées libres, nous les passions en com
958
nous interrogeait. La plupart des soirées libres,
nous
les passions en commun à l’auberge du village… Je le sens tout rajeun
959
en l’hitlérisme est de gauche. Dans les deux cas,
nos
droites se trompent ; mais nos gauches, dans le second cas. Les ét
960
Dans les deux cas, nos droites se trompent ; mais
nos
gauches, dans le second cas. Les étudiants. — Dans la plupart des
961
s livres français, à cause du régime des devises.
Notre
culture perd du terrain dans des proportions inquiétantes. Et la cult
962
munisme affiché par l’auteur, et conclut que « ce
doit
être une erreur, de la part de ce poète ». Même réaction à propos de
963
il. Le professeur ne leur inspire plus ce respect
dû
au titre et même à l’âge, qui était naguère si frappant en Allemagne.
964
s en Allemagne où l’on se croyait tout permis, et
nous
pensons avec un doux ricanement à cette époque wilhelminienne où un «
965
ns la nation. Et les partis bourgeois, sans qu’il
nous
en ait coûté beaucoup d’efforts, ont tourné en bouillie comme un pudd
966
é en bouillie comme un pudding raté. Pourtant, il
nous
semble parfois que l’épuration n’a pas été poussée aussi loin de ce c
967
cache encore l’opinion des « gens bien ». Ce qui
nous
choque en particulier, c’est l’attitude réticente des universitaires.
968
Pour eux et leur caste, c’était le bon temps ! Il
doit
être pénible de “s’abaisser” de l’état de demi-dieu académique à celu
969
5. Un communiste. — Dans sa petite cuisine, où
nous
sommes attablés, depuis deux heures il me raconte ses bagarres avec l
970
tions et émeutes. Vous ne savez pas ce que c’est.
Nous
en avons eu assez chez nous. Maintenant nous voulons du travail et no
971
vez pas ce que c’est. Nous en avons eu assez chez
nous
. Maintenant nous voulons du travail et notre tasse de café au lait le
972
est. Nous en avons eu assez chez nous. Maintenant
nous
voulons du travail et notre tasse de café au lait le matin. Qu’on nou
973
chez nous. Maintenant nous voulons du travail et
notre
tasse de café au lait le matin. Qu’on nous donne ça, Hitler ou un aut
974
il et notre tasse de café au lait le matin. Qu’on
nous
donne ça, Hitler ou un autre, ça suffira. La politique n’intéresse pa
975
il a gagné. C’était presque le même programme que
le nôtre
! Mais il a été plus malin, il a rassuré les bourgeois en n’attaquant
976
e ce grand industriel qu’il a invité ce soir avec
nous
, et qui posait naguère au social-démocrate. Nous parlons politique, s
977
nous, et qui posait naguère au social-démocrate.
Nous
parlons politique, sujet banni chez les bourgeois de l’opposition. No
978
, sujet banni chez les bourgeois de l’opposition.
Notre
hôte discute brièvement et poliment mes objections (portant surtout s
979
stion de l’Anschluss. (Tout le monde ici répète :
nous
n’en voulons pas, ce serait une opération économiquement désastreuse,
980
serait une opération économiquement désastreuse,
nous
avons déjà assez de catholiques, seul le Führer y pense, etc.) « L’An
981
seul le Führer y pense, etc.) « L’Anschluss ? dit
notre
hôte. Cela se fera si vite que personne n’aura le temps de bouger. Au
982
tout sera terminé. N’ayez pas peur pour la paix,
nous
savons calculer, et tout est calculé dans cette affaire. » Dans la ch
983
t “Führerin” d’un groupe de jeunes filles qu’elle
doit
commander deux fois par semaine : gymnastique et culture politique. D
984
., vous me comprenez. Vous imaginez qu’avec cela,
nous
ne la voyons plus guère. Et comment voulez-vous que les parents garde
985
ent leur autorité ? Le Parti passe avant tout. Si
nous
voulions empêcher notre fils, qui a 15 ans, de sortir un soir qu’il e
986
Parti passe avant tout. Si nous voulions empêcher
notre
fils, qui a 15 ans, de sortir un soir qu’il est un peu malade, par ex
987
tir un soir qu’il est un peu malade, par exemple,
nous
risquerions une mauvaise histoire avec les autorités du Parti. Nous n
988
ne mauvaise histoire avec les autorités du Parti.
Nous
ne sommes que des civils pour nos enfants. Eux, ils se sentent des mi
989
ités du Parti. Nous ne sommes que des civils pour
nos
enfants. Eux, ils se sentent des militaires. » Plainte vingt fois ent
990
eune Führerin à une jeune fille du même âge, chez
nous
! Mais l’initiative qu’on exige, c’est celle qui sert l’État et qui e
991
des faits et gestes de Mlle Darrieux, la star. On
nous
affirme aussi qu’il est prêt à se faire tuer pour assurer la liberté
992
l faut aller à la boutique suivante. C’est ce que
nous
faisons. Les magasins sont magnifiques à voir. Perfection des vitrine
993
itrines, des installations matérielles. Tout cela
doit
entraîner de gros frais généraux, d’où les prix de détail fort élevés
994
entaires chez les Allemands. Les propriétaires de
notre
maison sont ruinés. Ils n’ont plus d’autre argent liquide que celui q
995
emagne et de sa richesse réelle. Propagande. —
Nous
oublions trop souvent que la propagande hitlérienne flatte un des goû
996
, etc. Ils vous expliquent surtout quels sont les
devoirs
très rationnels (à leurs yeux tout au moins) qu’exige d’eux le nouvel
997
vec un pédantisme pathétique… N’allons pas faire,
nous
, une religion de la Liberté ! Ce serait le signe que nous en perdons
998
e religion de la Liberté ! Ce serait le signe que
nous
en perdons le goût et l’usage naturel, spontané. Vertige de la relat
999
e erreur, me dit-il, c’est exactement ce que j’ai
dû
payer pour vous, d’après le compteur ! — Mais notre contrat prévoyait
1000
dû payer pour vous, d’après le compteur ! — Mais
notre
contrat prévoyait l’éclairage et le gaz compris ? — Possible, mais c’
1001
grette pour vous, cher monsieur, mais vous auriez
dû
le prévoir dès le début. Je m’en tiens à notre contrat. (J’ai pris la
1002
uriez dû le prévoir dès le début. Je m’en tiens à
notre
contrat. (J’ai pris la pose de Poincaré.) — Dans ces conditions, je n
1003
illes. 3 janvier 1936 « Nie mehr Krieg ! ».
Nous
avons transigé. Morale : Un Français né juriste et malin aurait essay
1004
es fumantes du temple57 et prient : « Ô Dieu, qui
nous
a faits libres et forts, reste avec nous, Amen ! » C’est la prière au
1005
ieu, qui nous a faits libres et forts, reste avec
nous
, Amen ! » C’est la prière au dieu de la tribu. Quant au Livre qui dit
1006
uant au Livre qui dit : « Aimez vos ennemis », on
nous
explique que c’est une lettre morte (toter Buchstabe), et qui ne peut
1007
ttre morte (toter Buchstabe), et qui ne peut plus
nous
aider ». En effet. Tout cela précise opportunément le sens des déclar
1008
maison pour bavarder. Lui. — Quoi de neuf depuis
notre
dernière rencontre ? Moi. — Quelques observations, en flânant dans v
1009
i. — Ce n’est là, tout simplement, qu’un goût que
nous
avons. Cela n’a rien à voir avec la guerre, la guerre contre un pays
1010
urs voisins. Moi. — Bon. Admettons. C’est là que
nous
en étions restés. Je vous avais dit pour conclure : Souhaitons que vo
1011
Krieg. « La lutte contre la faim et le froid est
notre
guerre. » Je sais bien ce que vous entendez par là : « Les autres peu
1012
autres peuples en sont encore à la guerre armée,
nous
, nous luttons pour édifier un monde sans misère : voilà notre guerre
1013
s peuples en sont encore à la guerre armée, nous,
nous
luttons pour édifier un monde sans misère : voilà notre guerre ! » Ma
1014
luttons pour édifier un monde sans misère : voilà
notre
guerre ! » Mais pourquoi faut-il que votre paix soit encore une guerr
1015
cilement : c’est le Führer qui l’a introduit dans
nos
habitudes de langage, avec sa fameuse autobiographie. Mais peu import
1016
iographie. Mais peu importe. La vérité, c’est que
nous
avons une conception héroïque de la vie. Tout dépend de cela. Moi. —
1017
héroïque de la vie. Tout dépend de cela. Moi. —
Nous
y voilà. Je ne vais pas combattre votre conception du monde dans la m
1018
» des coureurs cyclistes, par exemple. Seulement
nous
avons deux conceptions radicalement opposées de l’héroïsme. Vous mett
1019
n générale et stérile qui caractérise ces années.
Nous
avons à construire un ordre. Cela me paraît bien plus urgent que d’al
1020
x aussi. Lui. — Bien sûr. Mais n’oubliez pas que
nous
avons fait notre révolution, nous. Nous avons un autre problème à rés
1021
Bien sûr. Mais n’oubliez pas que nous avons fait
notre
révolution, nous. Nous avons un autre problème à résoudre maintenant.
1022
oubliez pas que nous avons fait notre révolution,
nous
. Nous avons un autre problème à résoudre maintenant. Le spirituel est
1023
z pas que nous avons fait notre révolution, nous.
Nous
avons un autre problème à résoudre maintenant. Le spirituel est réglé
1024
st réglé… officiellement du moins. Mais qu’allons-
nous
faire de notre énergie physique ? Et c’est plus grave encore. Voyez-v
1025
ciellement du moins. Mais qu’allons-nous faire de
notre
énergie physique ? Et c’est plus grave encore. Voyez-vous, nous ne po
1026
hysique ? Et c’est plus grave encore. Voyez-vous,
nous
ne pouvons pas échapper à cette espèce de hantise, comme vous dites :
1027
me vous dites : les Anciens Combattants à côté de
nous
. Ils ont subi une épreuve formidable, ils ont fait une expérience max
1028
se d’extrême, et rien ne peut remplacer cela pour
nous
. Nous avons honte devant eux. Nous sentons que nous ne sommes jamais
1029
xtrême, et rien ne peut remplacer cela pour nous.
Nous
avons honte devant eux. Nous sentons que nous ne sommes jamais allés
1030
acer cela pour nous. Nous avons honte devant eux.
Nous
sentons que nous ne sommes jamais allés jusqu’au bout de nos forces.
1031
us. Nous avons honte devant eux. Nous sentons que
nous
ne sommes jamais allés jusqu’au bout de nos forces. Il y a un instinc
1032
que nous ne sommes jamais allés jusqu’au bout de
nos
forces. Il y a un instinct profond, dans tout homme, qui réclame cett
1033
n’est pas un vrai adversaire, comme à la guerre.
Nous
avons besoin de sentir devant nous un adversaire vraiment dangereux,
1034
e à la guerre. Nous avons besoin de sentir devant
nous
un adversaire vraiment dangereux, il nous faut cela pour provoquer le
1035
devant nous un adversaire vraiment dangereux, il
nous
faut cela pour provoquer le déploiement de toutes nos forces viriles.
1036
faut cela pour provoquer le déploiement de toutes
nos
forces viriles. On ne peut pourtant pas le nier, purement et simpleme
1037
ctuelle n’est pas du tout un appel à la virilité.
Nous
ne sommes plus au temps de Frédéric le Grand. La guerre actuelle n’es
1038
ment à une destruction matérielle. Au contraire :
nous
autres personnalistes, nous avons un trop grand besoin des différence
1039
ielle. Au contraire : nous autres personnalistes,
nous
avons un trop grand besoin des différences et des oppositions naturel
1040
oppositions naturelles pour vouloir les anéantir.
Nous
sommes fédéralistes, c’est-à-dire que nous voulons que toutes les dif
1041
antir. Nous sommes fédéralistes, c’est-à-dire que
nous
voulons que toutes les différences s’exaltent mutuellement par leur o
1042
ce de l’État. Lui. — Ach ! C’est uniquement pour
notre
éducation intérieure. Vous savez bien que nous n’avons aucune raison
1043
r notre éducation intérieure. Vous savez bien que
nous
n’avons aucune raison de vouloir la guerre avec la France. Qu’aurions
1044
n de vouloir la guerre avec la France. Qu’aurions-
nous
à y gagner, je vous le demande ? Moi. — En effet. Mais avec la Russi
1045
ait encore la Pologne entre deux. Mais surtout il
nous
faut une force, à l’intérieur, pour assurer la défense du régime. Mo
1046
urer la défense du régime. Moi. — J’en reviens à
notre
problème de la guerre en soi. Quelle solution donnez-vous à cette que
1047
ssité du déploiement physique de l’homme… Moi. —
Nous
ne la laissons pas de côté. Nous voulons lui créer un autre champ que
1048
l’homme… Moi. — Nous ne la laissons pas de côté.
Nous
voulons lui créer un autre champ que celui de la guerre moderne. Nous
1049
er un autre champ que celui de la guerre moderne.
Nous
nions que la guerre soit jamais une solution, étant donné ses instrum
1050
ne solution, étant donné ses instruments actuels.
Nous
voulons une lutte créatrice, et non pas destructrice. Tout l’effort d
1051
ue le mot civilisation est mal vu chez vous. Mais
nous
ne renoncerons pas à la civilisation sous prétexte que les juifs alle
1052
tôt… Je veux bien, pourvu que ce ne soit pas chez
nous
. Mais je vous répondrai plus sérieusement, d’un seul mot : c’est une
1053
n seul mot : c’est une question d’éducation. Pour
nous
, éduquer les hommes, ce n’est pas leur bourrer le crâne de notions in
1054
s’allie-t-elle avec Staline ? Il a fait pire que
nous
contre la liberté. » Chaque fois que l’on m’envoie un livre de Fran
1055
que fois que l’on m’envoie un livre de France, je
dois
aller le retirer au bureau de douane. Ce matin, il s’agissait de l’in
1056
ers y trouvent mille occasions de s’élever. Voyez
notre
Gauleiter59 : un employé de postes ! Et voyez nos domestiques : ils
1057
re Gauleiter59 : un employé de postes ! Et voyez
nos
domestiques : ils ne nous respectent plus. » (Cela signifie qu’ils so
1058
oyé de postes ! Et voyez nos domestiques : ils ne
nous
respectent plus. » (Cela signifie qu’ils sont devenus moins serviles,
1059
Mais encore, tout cela ne me satisfait guère : il
doit
y avoir une clef. Quelque chose là-dessous. Quelque chose d’invisible
1060
orgueil mieux fondé ? C’est Goethe le premier qui
nous
apprit à considérer notre vie dans une durée biographique et historiq
1061
st Goethe le premier qui nous apprit à considérer
notre
vie dans une durée biographique et historique où l’instant se relativ
1062
e : il est au terme du progrès, de l’évolution de
notre
individu. Les nazis corrigent : de la race. C’est encore un progrès «
1063
urrait objecter M. le Ministre ? Mais Kierkegaard
nous
dit : C’est dans l’instant présent, dans la décision immédiate et pri
1064
tragique de ce régime, je puis encore — et je le
dois
sans doute — méditer sur le cours de l’Histoire. Préparation aux déci
1065
ne peut s’opposer à son triomphe tôt ou tard, il
nous
faut l’étudier de très près, sur place, avec une passion froide. Car
1066
ce, avec une passion froide. Car il y va de toute
notre
culture. Comment sauver au plus secret d’un tel régime les valeurs qu
1067
er au plus secret d’un tel régime les valeurs qui
nous
sont vitales ? Pour un chrétien, il y va de bien plus : de la forme q
1068
it la chrétienté allemande sous la croix est pour
nous
d’une valeur exemplaire : jusqu’où peut-on céder à ce César sans rien
1069
i est à Dieu ? Tragique révision des valeurs, qui
nous
oblige à dépouiller enfin tout l’élément humain de nos religions. Il
1070
blige à dépouiller enfin tout l’élément humain de
nos
religions. Il fallait cette épreuve du feu pour les chrétiens embourg
1071
la radio à l’étage supérieur sans comprendre. Ce
doit
être le discours du Führer. Personne dans la maison ne répond plus au
1072
a Rhénanie ». Libérer, c’est armer, dans ce pays.
Nous
voici reportés au temps des Francs et Wisigoths, où la dignité d’homm
1073
éconcerté. 9 mars 1936 Journaux français. «
Nous
opposerons la force du droit au droit de la force ! » Signifie : nous
1074
orce du droit au droit de la force ! » Signifie :
nous
opposerons de la rhétorique à des canons. C’était couru. Pourtant, il
1075
he, et je l’entends encore au loin. Cette fois-ci
nous
y sommes. C’est le grand tam-tam de la tribu qui est déclenché. Le so
1076
am de la tribu qui est déclenché. Le sommeil même
doit
être mis au pas, et l’inconscient rythmé lugubrement. 11 mars 1936
1077
e ? L… hoche la tête : — Allez écouter le Führer,
nous
en reparlerons demain. Seulement allez-y tout de suite, car les porte
1078
et la Réaction tuèrent — marchent en esprit dans
nos
rangs. » J’ai compris. Cela ne peut se comprendre que par une sorte p
1079
de. Ce que j’éprouve maintenant, c’est cela qu’on
doit
appeler l’horreur sacrée. Je me croyais à un meeting de masses, à que
1080
ait que toutes les descriptions « objectives » de
nos
journalistes paraissaient, vues d’ici, décrire un monde factice, où n
1081
e ni ses souffrances secrètes ni son espoir. « Il
doit
y avoir une clé », écrivais-je à ce moment. Je l’ai trouvée, cette cl
1082
d que je suis hitlérien ! C’est que les hommes de
notre
temps ne croient pas au jugement de l’esprit mais seulement au frisso
1083
ême de l’homme Adolf Hitler. À plus forte raison,
notre
jugement sur lui doit être absolument indépendant des mérites qu’il a
1084
tler. À plus forte raison, notre jugement sur lui
doit
être absolument indépendant des mérites qu’il a ou n’a pas, de la sym
1085
’est que le support d’une puissance qui échappe à
nos
psychologies. Ce que je dis là serait du romantisme de la plus déplor
1086
Mais ce serait trop beau dans le genre édifiant.
Notre
destin ne dépend pas seulement de nos bassesses. Arrêtons-nous sur le
1087
édifiant. Notre destin ne dépend pas seulement de
nos
bassesses. Arrêtons-nous sur le seuil du mystère, car dès ici le diab
1088
e dépend pas seulement de nos bassesses. Arrêtons-
nous
sur le seuil du mystère, car dès ici le diable en sait plus que nous.
1089
u mystère, car dès ici le diable en sait plus que
nous
. J’aurais pu dire tout cela beaucoup plus vite, mais on redoute de
1090
et l’autre cas, l’on est totalitaire. La religion
doit
y passer, comme le reste, et peut-être avant tout. Ici et là, mêmes t
1091
tion fit éditer l’un de ses discours dont Gardère
nous
donne l’analyse. Il s’agit de répondre à cette question : Les spectac
1092
ité et pain pour le Peuple. N’oublions pas, dans
nos
démocraties, que la grande majorité du peuple allemand croit cela, et
1093
là-dessus. Ceci me rend attentif à une erreur que
nous
commettons fréquemment, nous qui regardons l’Allemagne ou l’URSS du d
1094
tif à une erreur que nous commettons fréquemment,
nous
qui regardons l’Allemagne ou l’URSS du dehors ; nous croyons que tous
1095
s qui regardons l’Allemagne ou l’URSS du dehors ;
nous
croyons que tous ceux qui y vivent sont affectés d’un signe de haine
1096
e liberté d’esprit ? Les contraintes totalitaires
nous
hypnotisent. Elles nous privent de toute liberté à la manière d’une o
1097
contraintes totalitaires nous hypnotisent. Elles
nous
privent de toute liberté à la manière d’une obsession. À chaque phras
1098
ndra-t-il quand ces dangers n’exciteront plus que
nos
réflexes ? Retrouverons-nous une liberté nouvelle ? 1er juin 1936
1099
n’exciteront plus que nos réflexes ? Retrouverons-
nous
une liberté nouvelle ? 1er juin 1936 Instruction spirituelle d
1100
chargé de l’instruction de la province. Sujet : “
Notre
sang, notre conception du monde.” Il débuta en rappelant les présuppo
1101
’instruction de la province. Sujet : “Notre sang,
notre
conception du monde.” Il débuta en rappelant les présuppositions sur
1102
s présuppositions sur lesquelles les participants
doivent
évidemment être au clair. Il s’exprima comme il suit — je sténographi
1103
Parti et les nationaux-socialistes ou porteurs de
notre
conception du monde… Le Führer a en effet déclaré à la journée du par
1104
e l’Harmonie et du Beau… Les hommes qui n’ont pas
notre
foi, ou ne peuvent l’avoir à cause de leur infériorité raciale, doive
1105
vent l’avoir à cause de leur infériorité raciale,
doivent
être rejetés, ce qui se produit en partie grâce aux mesures de stéril
1106
nfessions mourront d’elles-mêmes, de toute façon…
Nous
ne rejetons pas seulement les cent formes diverses de christianisme,
1107
loyal désir de servir le peuple — et il y en a —
doivent
être combattus, car leur erreur est préjudiciable à la communauté pop
1108
oivent l’autorisation de quitter le camp. Ils ont
dû
émigrer tôt après en Angleterre « pour échapper à la prison et peut-ê
1109
hie est célèbre : Du sous-marin à la chaire. Elle
nous
le montre à Kiel, en janvier 1919, refusant à un supérieur d’aller li
1110
Il m’est arrivé de souhaiter que les écrivains de
nos
démocraties soient soumis pendant quelque temps à des sanctions condi
1111
estapo, qu’on sait nombreux. Rien n’empêchera que
nous
soyons ici des frères en communion avec l’Église universelle. Rien n’
1112
t noire, sur une plaine inégale, où le pied bute,
nous
suivons des foules silencieuses et hâtives, vers ce carré de lumière
1113
ecteurs dont le faisceau se perd dans la hauteur.
Nous
nous sommes assis sur l’herbe, à côté des porte-drapeaux de la vieill
1114
rs dont le faisceau se perd dans la hauteur. Nous
nous
sommes assis sur l’herbe, à côté des porte-drapeaux de la vieille gar
1115
civils honteux, à la hauteur des bottes. Derrière
nous
, la plaine est vide, parfois parcourue de moteurs. Une voix dure et n
1116
voix dure et nasillarde s’élève d’une tribune que
nous
ne voyons pas. (J’ai déjà entendu ce discours, et le résume d’avance
1117
’on annonce un jeu radiophonique. Chœur parlé : «
Nous
gisions dans la boue, maintenus au sol et humiliés… » Quelques rythme
1118
re s’élève : « Mais la vieille légende germanique
nous
annonçait que le Libérateur descendrait des montagnes neigeuses… » Mu
1119
exigences amènent au repentir et à l’humilité, on
nous
parle d’un odieux traité, générateur de rancune, d’humiliation. Au li
1120
es filles s’éloignant vers la ville avec la foule
nous
rappelleront la nostalgie heureuse des Wandervögel d’autres temps. Pa
1121
lle le châtie avec une sombre rage honteuse. Pour
nous
faire peur ? Non, pour se rassurer par la peur qu’elle se fait à elle
1122
la vérité de cette nation paraît, et alors, c’est
nous
qui rêvions lorsque nous lui trouvions des charmes… 30 juin 1936.
1123
paraît, et alors, c’est nous qui rêvions lorsque
nous
lui trouvions des charmes… 30 juin 1936. Départ Nous quittons l
1124
trouvions des charmes… 30 juin 1936. Départ
Nous
quittons l’Allemagne ce soir. Hier, nous chantions encore avec les ét
1125
épart Nous quittons l’Allemagne ce soir. Hier,
nous
chantions encore avec les étudiants, dans une auberge forestière. Des
1126
oit de le critiquer ? Vous me dites que tout cela
devait
être, vous me le prouvez à l’évidence… « Vous avez vos problèmes, et
1127
ouvez à l’évidence… « Vous avez vos problèmes, et
nous
les nôtres », je vous retourne cette petite phrase par laquelle l’un
1128
à l’évidence… « Vous avez vos problèmes, et nous
les nôtres
», je vous retourne cette petite phrase par laquelle l’un de vous m’a
1129
a jamais raison contre aucun mal qui se fait dans
notre
monde. S’il existe vraiment un réalisme à peu près digne de ce nom, c
1130
, c’est bien celui qui consiste à reconnaître que
nous
sommes tous responsables de tout ; et que la question sérieuse n’est
1131
l’est le plus ou qui l’est le moins, mais comment
nous
allons nous y prendre pour éviter ce mal chez nous, pour prévenir ces
1132
s ou qui l’est le moins, mais comment nous allons
nous
y prendre pour éviter ce mal chez nous, pour prévenir ces fatalités.
1133
ous allons nous y prendre pour éviter ce mal chez
nous
, pour prévenir ces fatalités. Alors, si nous y parvenons, nous aurons
1134
chez nous, pour prévenir ces fatalités. Alors, si
nous
y parvenons, nous aurons le droit de répondre, et de juger l’effort p
1135
évenir ces fatalités. Alors, si nous y parvenons,
nous
aurons le droit de répondre, et de juger l’effort pathétique du voisi
1136
nt, au fond, ce qu’ils méritent. Mais attention :
nous
autres « démocrates », nous ne pouvons pas encore en dire autant… Sav
1137
ent. Mais attention : nous autres « démocrates »,
nous
ne pouvons pas encore en dire autant… Savons-nous ce que nous mériton
1138
nous ne pouvons pas encore en dire autant… Savons-
nous
ce que nous méritons ? Savons-nous ce que préparent nos luttes ? Un p
1139
ons pas encore en dire autant… Savons-nous ce que
nous
méritons ? Savons-nous ce que préparent nos luttes ? Un peu de pruden
1140
autant… Savons-nous ce que nous méritons ? Savons-
nous
ce que préparent nos luttes ? Un peu de prudence dans le cynisme, nou
1141
que nous méritons ? Savons-nous ce que préparent
nos
luttes ? Un peu de prudence dans le cynisme, nous dirait Machiavel, l
1142
nos luttes ? Un peu de prudence dans le cynisme,
nous
dirait Machiavel, le vrai, qui n’est pas celui qu’invoquent nos réali
1143
hiavel, le vrai, qui n’est pas celui qu’invoquent
nos
réalistes pour justifier les sottises de leur classe. Je ne suis pas
1144
econnaître ailleurs à sa naissance, là où il peut
nous
concerner ; là où si peu que ce soit dépend de notre effort, et de no
1145
us concerner ; là où si peu que ce soit dépend de
notre
effort, et de notre lucidité. Que sert de critiquer la « religion » d
1146
si peu que ce soit dépend de notre effort, et de
notre
lucidité. Que sert de critiquer la « religion » des autres ? Il vaut
1147
t destinés à les prendre au sérieux. La foi seule
nous
délivrera des religions nées de la peur des hommes. 46. Il s’agit
1148
ple a été brûlé par les bolchéviques, comme il se
doit
. Mais ces « pieux Germains le détruisent bien mieux en esprit. 58.
1149
êveries plus ou moins naïves que nourrissent dans
nos
bons pays les « nationaux » et en même temps les « socialistes ». Les
1150
isme » (au sens atténué du xixe ) est condamné de
nos
jours à se vouloir franchement totalitaire, sinon c’est l’échec assur
1151
n’est plus possible sans l’autre, dans l’état de
nos
sociétés. On peut n’aimer ni l’un ni l’autre, mais il serait un peu s
1152
e à savoir pourquoi cela s’est réalisé. Car on ne
nous
parle jamais que du comment. Et les « explications » qu’on nous fourn
1153
ais que du comment. Et les « explications » qu’on
nous
fournit se réduisent en définitive à une reconstruction plus ou moins
1154
térieurs. La raison profonde d’un mouvement comme
le nôtre
est irrationnelle. Nous voulions croire à quelque chose, nous voulion
1155
d’un mouvement comme le nôtre est irrationnelle.
Nous
voulions croire à quelque chose, nous voulions vivre pour quelque cho
1156
ationnelle. Nous voulions croire à quelque chose,
nous
voulions vivre pour quelque chose. Nous avons été reconnaissants à ce
1157
ue chose, nous voulions vivre pour quelque chose.
Nous
avons été reconnaissants à celui qui nous apportait cette possibilité
1158
chose. Nous avons été reconnaissants à celui qui
nous
apportait cette possibilité de croire. Le christianisme, probablement
1159
mps au besoin de croire de la majorité du peuple.
Nous
voulons croire à la mission du peuple allemand. Nous voulons croire à
1160
s voulons croire à la mission du peuple allemand.
Nous
voulons croire à l’immortalité du peuple (un arbre dont nous ne somme
1161
s croire à l’immortalité du peuple (un arbre dont
nous
ne sommes que les feuilles qui tombent à chaque génération) et peut-ê
1162
bent à chaque génération) et peut-être réussirons-
nous
à y croire. » Ruine des croyances communes, carence du christianisme
1163
tion est rétablie. L’autorité est restaurée. « Et
nous
voici sauvés du communisme. » C’est ainsi que beaucoup de braves gens
1164
ole, à l’effort de la propagande totalitaire dans
nos
pays. Ils le font sans malice, et au nom du bon sens. Ils me rappelle
1165
toute expression libre des antagonismes qui chez
nous
sont encore la réalité même du social ? Que la paix est obtenue par l
1166
ture puisse bien finir. Tout se ramène donc, pour
nous
, à un problème de force. Mais non pas de force pour « gagner » la gue
1167
ons démocratiques. D’une guerre totale, telle que
nous
l’imposerait l’Allemagne, ne peut sortir qu’un État totalitaire. Il s
1168
es plans de « réarmement », c’est introduire chez
nous
le cheval de Troie. Car pour s’armer autant que l’adversaire, il faud
1169
t celui qui dispose de la plus forte mystique qui
doit
fatalement triompher. Et en s’armant autant que l’État totalitaire, l
1170
urgent et réellement fondamental, c’est celui que
nous
pose l’angoisse des individus isolés, et l’appel religieux qui naît d
1171
e inconscient. Toute la question est de savoir si
nous
saurons mettre à profit pour le résoudre le délai que nous accordent
1172
ons mettre à profit pour le résoudre le délai que
nous
accordent encore une situation matérielle supportable et quelques res
1173
feu sur celui qui en avertit. Dans un monde comme
le nôtre
, où si peu d’hommes connaissent leur vraie croyance et leurs vrais dé
1174
ouve dans les écrits et les propos de certains de
nos
antifascistes. Introduisez la discussion, vous rendrez impossible le
1175
a part le droit de discuter, et j’en fais même un
devoir
civique. Si vous me le contestez, je vous jugerai là-dessus. Je dirai
1176
taires, sans parler d’autres dont le nationalisme
nous
épouvantait lorsque nous fûmes, en 1924, à Hambourg, au premier congr
1177
res dont le nationalisme nous épouvantait lorsque
nous
fûmes, en 1924, à Hambourg, au premier congrès de l’Internationale re
1178
chrétiennes peut très bien faire ce pas, et même
devra
le faire un jour, s’il reste conséquent dans l’évolution de sa pensée
1179
ement de la révolution allemande. Elle rendrait à
notre
peuple son unité spirituelle et politique, et, par l’adjonction d’un
1180
rte que le reproche d’étatisme totalitaire, qu’on
nous
fait, serait encore plus agréable à porter qu’il ne l’est actuellemen
1181
nde, à l’intérieur comme devant l’extérieur. Pour
notre
communauté religieuse et populaire, nous avons encore besoin de temps
1182
r. Pour notre communauté religieuse et populaire,
nous
avons encore besoin de temps, et, à bien des égards, de maturation. M
1183
ligion est en effet quelque chose de sentimental.
Notre
conception du monde, au contraire, embrasse tout à la fois le domaine
1184
l’opportunité de sa propagande. La révolution, de
nos
jours, c’est d’abord une question de mots, une question de slogans, u
1185
rois termes : liberté et justice, qui viennent de
notre
fonds, et le néologisme espace vital. On ignore trop souvent que la l
1186
’armement pour les Allemands n’est pas comme pour
nous
autres démocrates un moyen de protéger des libertés d’ordre civil. Il
1187
nulle autre n’est concevable… La justice est pour
nous
le respect du droit, et au-delà de la lettre d’un code, une manière o
1188
elle-même » et de « consolider la paix »… Bornons-
nous
à remarquer que pour les peuples revendiqués par le Reich en ces term
1189
nvisible spirituel, à la veille d’un discours qui
devait
être un acte, nous laisse tous en suspens sur le mystère de notre épo
1190
la veille d’un discours qui devait être un acte,
nous
laisse tous en suspens sur le mystère de notre époque : un mystère de
1191
te, nous laisse tous en suspens sur le mystère de
notre
époque : un mystère de nature religieuse. Vous l’éprouverez sans dout
1192
et niée. L’histoire de l’après-guerre aux yeux de
nos
descendants sera peut-être moins l’histoire des traités et de leur pé
1193
térieurs d’une communion tacite entre les hommes.
Nous
sommes là, petits individus, impuissants, isolés, méfiants, posés les
1194
lés, méfiants, posés les uns auprès des autres, à
nous
demander pourquoi nous sommes ensemble. Il s’est formé dans la cité u
1195
s uns auprès des autres, à nous demander pourquoi
nous
sommes ensemble. Il s’est formé dans la cité un sentiment encore diff
1196
ncore diffus de vide social, analogue à celui qui
dut
marquer la décadence de l’Empire romain. Mais de ce vide naît un appe
1197
lui du Dieu vivant. L’ère des religions s’ouvre à
nous
, chargée de promesses équivoques. Ère nouvelle pour les chrétiens qui
1198
cial, communautaire, qui dès maintenant se pose à
nous
aussi. Car si d’autres y ont mal répondu — les communistes et les fas
1199
mal répondu — les communistes et les fascistes —
nous
ne pourrons pas nous en tirer, pour notre part, en critiquant simplem
1200
mmunistes et les fascistes — nous ne pourrons pas
nous
en tirer, pour notre part, en critiquant simplement leurs erreurs. Il
1201
cistes — nous ne pourrons pas nous en tirer, pour
notre
part, en critiquant simplement leurs erreurs. Il est facile d’avoir r
1202
de conseil à donner aux ministres, et peu d’entre
nous
sont en mesure d’influencer les décisions au jour le jour qu’ont à pr
1203
. Ici, la tâche n’est pas douteuse : si chacun de
nous
prenait sa part dans la lutte contre le chômage, si chacun de nous s’
1204
art dans la lutte contre le chômage, si chacun de
nous
s’efforçait de réduire les injustices qui pèsent encore sur la classe
1205
dans les villes, le sens social renaîtrait parmi
nous
, et par là même, les séductions totalitaires perdraient beaucoup de l
1206
diat. Sur le plan international, où l’opinion, de
nos
jours, joue un rôle décisif, la direction qu’il convient d’adopter ne
1207
hoses mais surtout des esprits. Reste à savoir si
nous
devons enregistrer cet état comme fatal et permanent. Reste à savoir
1208
mais surtout des esprits. Reste à savoir si nous
devons
enregistrer cet état comme fatal et permanent. Reste à savoir si, jus
1209
fatal et permanent. Reste à savoir si, justement,
nous
ne devons pas tenter l’impossible — qui rendra tout le reste possible
1210
permanent. Reste à savoir si, justement, nous ne
devons
pas tenter l’impossible — qui rendra tout le reste possible, et consa
1211
ra tout le reste possible, et consacrer désormais
nos
efforts à transformer la vie morale des masses, de telle façon que le
1212
raison puissent devenir des solutions pratiques.
Nous
voici ramenés au problème des religions. ⁂ Certaines phrases de ma Co
1213
re. » Mais dans l’attente du prophète, que dirons-
nous
? On peut être tenté de répondre à la religion totalitaire en lui opp
1214
te qu’il s’agissait maintenant de comprendre, car
nous
aurions sous peu à la subir. Je voyais venir le temps des monstres. J
1215
adossé à la cheminée, qui écoutait sans mot dire
nos
propos sur Hitler.) Je répondis à Rops que je consentirais ce sacrifi
1216
ris les deux dernières places libres. Le taxi qui
nous
emmène au crépuscule traverse la cour du Louvre dans la lueur soudain
1217
nt-Marc. Le conservateur du Palais des Doges, que
nous
y retrouvons parfois, aime à parler politique à voix très haute, pour
1218
! dit-il très haut. Et c’est justement lui qui va
nous
empêcher de faire cette guerre idiote67 ! » Télégramme de Gaston Gall
1219
one. Ce n’est pas la guerre, c’est « la paix pour
notre
génération », a dit l’Anglais armé d’un parapluie. Je puis ranger mes
1220
la tension, et l’émotion finale de la journée que
nous
venons de vivre, mais tout cela transposé dans les termes d’une sorte
1221
ue les moyens que peut offrir, par exemple, un de
nos
cantons suisses : fanfare, chœurs, troupe d’acteurs non professionnel
1222
e à poursuivre sur sa lancée, dans l’euphorie qui
nous
anime tous les deux. Fin décembre, l’affaire est achevée. Pas une seu
1223
embre, l’affaire est achevée. Pas une seule fois,
nous
n’avons eu l’idée de parler du sens religieux, ou historique, ou poli
1224
que, ou politique, ou même helvétique de l’œuvre.
Nous
n’avons discuté que de problèmes techniques : du nombre de minutes, v
1225
is même l’architecture de leur théâtre. Tout cela
nous
étant donné par les termes précis de la commande, nous n’avions qu’à
1226
étant donné par les termes précis de la commande,
nous
n’avions qu’à jouer librement, à cœur joie ! Avant Noël, mes trois ac
1227
élateur et en quelque sorte le ludion, — jouet de
nos
pulsions et répulsions — autant que l’agent démoniaque ; et là-dessus
1228
onstate qu’un « immense glissement de la réalité…
nous
porte en des régions nouvelles de l’esprit où l’action redevient notr
1229
gions nouvelles de l’esprit où l’action redevient
notre
seul critère de cohérence… » Deux ans plus tard, l’introduction à Po
1230
us prétexte de science objective. Enfin, en 1935,
nous
ouvrons dans Esprit une rubrique que Mounier intitule « La Pensée e
1231
Il n’est pas inutile de rappeler aujourd’hui que
notre
engagement signifiait à peu près le contraire de ce qu’il allait deve
1232
iserie des échos et des snobs. L’engagement, pour
nous
, impliquait justement le refus de tout embrigadement, de toute abdica
1233
ire démocrate. (Il était entendu que ceux d’entre
nous
qui se présentaient aux élections sous quelque étiquette que ce fût s
1234
xcluaient par là même d’un groupe personnaliste.)
Nous
ne pensions pas que Drieu s’engageait lorsqu’il se livrait à l’Homme
1235
e d’André Malraux en Chine, puis en Espagne, elle
nous
semblait relever du goût de l’action en soi, d’une efficacité dramati
1236
t l’on ne pouvait par conséquent les reconnaître.
Nous
avions peu d’audience, trop de sérieux et guère de prestige, faute de
1237
e la Rhénanie à la fin de la « drôle de guerre »,
nous
fûmes livrés au pillage impuni de nos concepts. Plus tard, Abetz et R
1238
guerre », nous fûmes livrés au pillage impuni de
nos
concepts. Plus tard, Abetz et Ribbentrop devaient nous voler le terme
1239
i de nos concepts. Plus tard, Abetz et Ribbentrop
devaient
nous voler le terme même d’Ordre nouveau. Mais, dès 1938, la notion d
1240
concepts. Plus tard, Abetz et Ribbentrop devaient
nous
voler le terme même d’Ordre nouveau. Mais, dès 1938, la notion d’enga
1241
inition. Il n’y a pas que du mal à en dire : cela
nous
a valu quelques œuvres durables, mineures sans doute, mais délicates
1242
ieuses. Cependant, les temps ont changé. La crise
nous
a fait voir soudain que les positions intellectuelles héritées du lib
1243
égime de faillite qu’on nomme l’État totalitaire.
Nous
avons constaté que rien, ni la pensée, ni l’acte individuel, n’est en
1244
, n’est en réalité gratuit. Que tout se paye. Que
notre
liberté de penser n’importe quoi, sans tenir compte de l’époque, étai
1245
« désintéressée ». C’est alors qu’on lança parmi
nous
le mot d’ordre : « Défense de la Culture ». Toute la confusion vient
1246
te la confusion vient de là. Car la culture qu’on
nous
propose de défendre, c’est elle, précisément, qui est responsable de
1247
i est responsable de la brutalité totalitaire. On
nous
propose donc de défendre une maladie contre la mort à quoi elle mène
1248
mort à quoi elle mène nécessairement. Au lieu de
nous
refaire une santé. Au lieu de nous proposer une cure de désintoxicati
1249
nt. Au lieu de nous refaire une santé. Au lieu de
nous
proposer une cure de désintoxication énergique. Au lieu de rechercher
1250
ité. Et cela suffirait bien à définir le sens que
nous
donnons à ce mot d’engagement. Je l’ai dit ailleurs : un gant qui se
1251
me. Et c’est la pensée libérale. Voyez donc comme
nos
libéraux se mettent d’eux-mêmes en rangs et marquent le pas dès qu’un
1252
e de « l’union sacrée » qui vient de souffler sur
notre
élite en est l’ahurissant exemple. Du moins a-t-elle eu cela de bon :
1253
rprétation des formes, écrit au début de l’année,
devait
rester inédit. 69. Bien entendu, je ne retiens ici que la réalité ps
1254
d’horizon dépend à chaque instant de l’endroit où
nous
nous tenons, elle se déplace et change, et l’on peut dire que nous la
1255
izon dépend à chaque instant de l’endroit où nous
nous
tenons, elle se déplace et change, et l’on peut dire que nous la port
1256
elle se déplace et change, et l’on peut dire que
nous
la portons avec nous. Ainsi de la plupart de nos observations sur les
1257
hange, et l’on peut dire que nous la portons avec
nous
. Ainsi de la plupart de nos observations sur les faits réputés object
1258
nous la portons avec nous. Ainsi de la plupart de
nos
observations sur les faits réputés objectifs. Et c’est pourquoi l’eff
1259
i se voit déjoué par les descriptions mêmes qu’il
nous
propose, et qui ne sont que les rébus de ce qu’il s’imaginait taire o
1260
un âge, un climat de musiques, soudain se fixe en
nos
mémoires, s’idéalise. Un « bon vieux temps » de plus, tout près de no
1261
ise. Un « bon vieux temps » de plus, tout près de
nous
… Le bon vieux temps, pour nos ancêtres, c’était très loin dans le pas
1262
plus, tout près de nous… Le bon vieux temps, pour
nos
ancêtres, c’était très loin dans le passé, dans la légende, si loin q
1263
, ne l’avait vu. Mais déjà, pour beaucoup d’entre
nous
, ce fut simplement l’avant-guerre, les souvenirs de notre enfance. Et
1264
e fut simplement l’avant-guerre, les souvenirs de
notre
enfance. Et voici que ce Temps Perdu, tout d’un coup, est encore plus
1265
est-ce — aujourd’hui ? Mais oui, peut-être vivons-
nous
, ici, dans ce Paris de mars 1939, les derniers jours du bon vieux tem
1266
emps européen. Jours de sursis d’une liberté dont
nous
avions à peine conscience, parce qu’elle était notre manière toute na
1267
us avions à peine conscience, parce qu’elle était
notre
manière toute naturelle de respirer et de penser, d’aller et venir, e
1268
r et de penser, d’aller et venir, et d’entretenir
nos
soucis, nos plaisirs personnels. Combien de temps encore, combien de
1269
er, d’aller et venir, et d’entretenir nos soucis,
nos
plaisirs personnels. Combien de temps encore, combien de semaines po
1270
ien de temps encore, combien de semaines pourrons-
nous
goûter ce répit, et sentir que nous prolongeons une existence que nos
1271
ines pourrons-nous goûter ce répit, et sentir que
nous
prolongeons une existence que nos fils appelleront douceur de vivre ?
1272
et sentir que nous prolongeons une existence que
nos
fils appelleront douceur de vivre ? Déjà nous éprouvons que le monde
1273
que nos fils appelleront douceur de vivre ? Déjà
nous
éprouvons que le monde a glissé dans une ère étrange et brutale, où c
1274
et brutale, où ces formes de vie qui sont encore
les nôtres
ne peuvent plus apprivoiser le destin. Soit que les tyrans nous accab
1275
t plus apprivoiser le destin. Soit que les tyrans
nous
accablent, soit qu’un sursaut nous dresse à résister, il faudra chang
1276
que les tyrans nous accablent, soit qu’un sursaut
nous
dresse à résister, il faudra changer le rythme et rectifier la tenue,
1277
n. Et dès lors qu’il l’a mis en question et qu’il
nous
force au réalisme à sa manière, le charme est détruit dans nos vies.
1278
réalisme à sa manière, le charme est détruit dans
nos
vies. Nous sommes pareils à celui qui s’éveille et goûte encore quelq
1279
sa manière, le charme est détruit dans nos vies.
Nous
sommes pareils à celui qui s’éveille et goûte encore quelques instant
1280
n temps sa loi, en préservant, s’il se peut, dans
nos
cœurs, ce droit d’aimer, cette bonté humaine, plus inutile que jamais
1281
vres, mais surtout : — entre l’espèce de paix que
nous
laissa l’hiver et la guerre qui revient nous avertir, au seuil de ce
1282
que nous laissa l’hiver et la guerre qui revient
nous
avertir, au seuil de ce printemps qu’elle dénature. Envies d’écrire,
1283
esponsabilités. C’est en cela qu’il est utopique.
Nous
n’en croyons pas moins qu’il aurait les plus fortes chances de succès
1284
ité, à la terre ocrée, sous les pins. Pendant que
nous
choisissons ensemble quelques choux-fleurs — « N’allez pas couper les
1285
s ! Il faut les cuire avec, c’est succulent ! » —
nous
entendons la TSF monologuer dans sa maisonnette blanche aux volets bl
1286
de force d’Albanie. — Voyez-vous, me dit-il, pour
nous
autres, qu’est-ce que cela fait, ceux qui gouvernent ? Ça peut bien ê
1287
nglais, ou tout ce que vous voudrez, pourvu qu’on
nous
laisse travailler. Qu’est-ce que cela change ? J’ai semé et taillé co
1288
lus élémentaires, exigent et supposent un avenir.
Nous
l’oublions souvent, dans notre vie individuelle. Les statistiques nou
1289
upposent un avenir. Nous l’oublions souvent, dans
notre
vie individuelle. Les statistiques nous le rappelleront. On constater
1290
nt, dans notre vie individuelle. Les statistiques
nous
le rappelleront. On constatera l’année prochaine (s’il y en a une) qu
1291
ents affectifs, ont su capter quelques secrets de
notre
existence ; cependant que les masses, créées par des puissances inhum
1292
quelle mesure un écrivain a-t-il le droit, ou le
devoir
, de se montrer publiquement objectif vis-à-vis de ses propres ouvrage
1293
s quelle mesure un citoyen a-t-il le droit, ou le
devoir
, de se montrer publiquement objectif vis-à-vis de sa propre nation ?
1294
he ne l’écarte pas, bien au contraire. Le premier
devoir
est de ne point se laisser surprendre. » C’est qu’il ne croit plus à
1295
si normal, que j’en viens à me demander si toutes
nos
crises ne seraient pas machinées par nous-mêmes, dans notre inconscie
1296
es ne seraient pas machinées par nous-mêmes, dans
notre
inconscient collectif. Je puis l’avouer parce que je suis un écrivain
1297
ont à coup sûr… La guerre qui vient n’augmente en
nous
ni le courage ni la peur, mais plutôt un certain cynisme. Peut-être a
1298
isation permanente, préventive… Militarisation de
nos
pensées, de nos images. Hier, dans l’autobus, une petite bourgeoise a
1299
te, préventive… Militarisation de nos pensées, de
nos
images. Hier, dans l’autobus, une petite bourgeoise assise devant moi
1300
s matériels et spirituels, impossible ailleurs de
nos
jours, et peut-être à toute autre époque. Imaginer là-dessus un livre
1301
être touchant, bizarre et pitoyable que chacun de
nous
dissimule. Alors on verrait le réel, alors on cesserait de haïr, ou d
1302
l’enthousiasme déchirant les voiles, du salut qui
nous
est promis ! 21 mai 1939 Promenade au Bois avec Victoria Ocampo
1303
des Plantes, et du dernier livre de Huizinga, qui
nous
parvint hier de Hollande. Nous avons passé deux belles heures dans la
1304
e de Huizinga, qui nous parvint hier de Hollande.
Nous
avons passé deux belles heures dans la roseraie de Bagatelle transfig
1305
n d’après-midi dorée. Échangeant des nouvelles de
nos
amis communs d’Argentine, d’Angleterre, d’Autriche, de Roumanie : la
1306
rit. 5 juin 1939 Le désarroi de l’époque —
nous
lisons cela partout depuis vingt ans. Comme si rien de pire n’était i
1307
Et pourtant le désordre dure. Il se confond avec
notre
vie même, avec la Vie ! Certes, l’anarchie des mœurs et des idées s’a
1308
se des crises sociales et politiques. Et pourtant
nous
vivons ! Et notre vie, loin de se replier dans la crainte, s’exalte a
1309
iales et politiques. Et pourtant nous vivons ! Et
notre
vie, loin de se replier dans la crainte, s’exalte aux approches du pé
1310
ourrit plus qu’on n’oserait l’avouer. Après tout,
nous
ne sommes pas les premiers à croire que notre époque est l’époque mêm
1311
out, nous ne sommes pas les premiers à croire que
notre
époque est l’époque même de la crise. S’il est juste et salutaire de
1312
r dans ce qu’elle a d’unique, dans sa réalité qui
nous
met en question, n’oublions pas que toute réalité, à toute époque de
1313
onnu des paniques et des nuits plus terribles que
les nôtres
, au lendemain des grandes invasions, du ve siècle au viiie de notre
1314
des grandes invasions, du ve siècle au viiie de
notre
ère, avant l’an 1000, pendant les pestes noires, pendant les guerres
1315
inconscience, d’une ignorance, dont la presse de
nos
jours nous prive avec acharnement. Du moins voudrait-on rappeler à to
1316
nce, d’une ignorance, dont la presse de nos jours
nous
prive avec acharnement. Du moins voudrait-on rappeler à tous ces fron
1317
Voilà la grande et la seule différence. Et voilà
notre
chance aussi. L’homme n’est pas fait pour vivre en état de guerre, au
1318
stices établies. La menace de guerre qui pèse sur
nous
pourrait et devrait être le remède à cette paix-là. Tout dépend de l’
1319
La menace de guerre qui pèse sur nous pourrait et
devrait
être le remède à cette paix-là. Tout dépend de l’usage que l’on en fa
1320
e ou tonifie. Dans l’atmosphère de catastrophe où
nous
vivons, une profonde ambiguïté se manifeste. Tout invite à désespérer
1321
e sans menaces, sans résistances, sans vigilance.
Notre
génération trouve, au contraire, dans la connaissance du désordre et
1322
a nuit aussi ! » C’est toujours le même drame que
nous
vivons, qu’il s’agisse de flèches ou d’obus. Car ce qui compte, en fi
1323
a faveur de ces vicissitudes acceptées. Acceptons
notre
chance de vivre une vie plus consciente et réelle. Quoi qu’il advienn
1324
esseront de venir jusqu’au Jour éternel ! Prenons
notre
régime de vie tendue : il suffit de savoir ce qui compte, et que la j
1325
ir ce qui compte, et que la joie ne dépend pas de
nos
misères. J’y songeais l’autre soir, à Orléans, en entendant la Jeanne
1326
évidence, la délivrance, le « malgré tout » dont
nous
vivrons ! 10 juin 1939 L’origine de toutes nos haines, l’origin
1327
vivrons ! 10 juin 1939 L’origine de toutes
nos
haines, l’origine de toute amertume, c’est un bien que nous n’avons p
1328
s, l’origine de toute amertume, c’est un bien que
nous
n’avons plus, c’est un amour perdu, allé ailleurs. Mais qu’il existe
1329
sa perte insupportable à qui croyait le posséder.
Nos
haines… Pourquoi la haine, par exemple, de tel régime qui nous menace
1330
Pourquoi la haine, par exemple, de tel régime qui
nous
menace depuis des mois ? Serait-ce à cause de la menace ? Je ne le cr
1331
’y avait pas un bien, dans ce régime, un bien que
nous
avons perdu, et qu’il séquestre, s’il n’y avait que du mal en lui, no
1332
u’il séquestre, s’il n’y avait que du mal en lui,
nous
n’aurions pas de haine ni d’amertume : on ne hait pas les catastrophe
1333
phes, les incendies et les tremblements de terre.
Notre
amertume et notre indignation devant le phénomène totalitaire naissen
1334
s et les tremblements de terre. Notre amertume et
notre
indignation devant le phénomène totalitaire naissent d’un désir secre
1335
ce de dépit amoureux de la révolution manquée par
nous
, mais séduite et violée par le voisin ; d’une nostalgie de cette comm
1336
e communauté qu’ils disent avoir réinventée, dont
nous
ne sommes pas, et dont nous sentons bien qu’ils nous excluent dans l’
1337
voir réinventée, dont nous ne sommes pas, et dont
nous
sentons bien qu’ils nous excluent dans l’intention d’en abuser 72.
1338
s ne sommes pas, et dont nous sentons bien qu’ils
nous
excluent dans l’intention d’en abuser 72. 1bis, rue Vaneau, 16 jui
1339
. 1bis, rue Vaneau, 16 juin 1939 Hier soir,
nous
trouvâmes en rentrant une prodigieuse gerbe de roses rouges envoyée p
1340
euse gerbe de roses rouges envoyée par V. O. pour
notre
installation dans ce studio que Gide nous prête. Plantée au milieu de
1341
. pour notre installation dans ce studio que Gide
nous
prête. Plantée au milieu de la pièce, dans un gros pot de grès, elle
1342
té même, comme la Passion despotique et fervente.
Nous
sentons bien qu’elle marquera tout ce printemps dans notre souvenir,
1343
tons bien qu’elle marquera tout ce printemps dans
notre
souvenir, le dernier printemps de la paix… 19 juin 1939 « Notre
1344
ernier printemps de la paix… 19 juin 1939 «
Notre
Führer fait une politique d’artiste ! », a proclamé le Dr Goebbels. V
1345
ds où s’alimente le désir. Les délais de ce genre
nous
sont-ils mesurés par la qualité de notre espoir ? Mais quel espoir, a
1346
ce genre nous sont-ils mesurés par la qualité de
notre
espoir ? Mais quel espoir, alors, pourrait rythmer toute la durée de
1347
espoir, alors, pourrait rythmer toute la durée de
notre
vie, jusqu’à la mort, — sinon l’espoir d’un rendez-vous au-delà du mo
1348
assez certain et assez glorieux pour disqualifier
nos
soucis, tout serait à chaque instant libre et allègre, ouvert sur la
1349
… À l’œuvre donc, advienne que pourra ! Que l’été
nous
apporte — c’est probable — un nouveau serpent de mer des dictateurs,
1350
nal à ce journal de petite attente. Il faut juger
notre
vie par sa fin, pour mesurer l’importance relative des événements qui
1351
mesurer l’importance relative des événements qui
nous
font les gros yeux. Joie du temps retrouvé, dans l’instant d’un espoi
1352
uand le seul terme redoutable est le Jugement qui
nous
délivrera ? Eh quoi ! suffisait-il d’y penser ? Non, mais d’y croire.
1353
radio brusquement interrompit les conversations.
Nous
entendîmes la fin d’une phrase en italien, puis une fanfare joua l’hy
1354
us un ciel d’angoisse et de haine ! — Malheur sur
nous
! Nuit lugubre, sans sommeil — rythmée d’armes martelées — meute foll
1355
« C’est difficile de chanter ça ce soir. Les mots
nous
restent dans la gorge… » Le drame ne put être joué, la plupart des ac
1356
sûr on y est ! L’impression générale, c’est qu’on
nous
a « mis dedans ». (Je dis on, je ne sais pas qui c’est. Comme le brav
1357
« Je n’accuse personne, mais c’est dégoûtant ! »)
Nous
voilà faits, refaits par l’événement, plongés d’un coup dans le détai
1358
, qu’on redoutait, qu’on croyait préparer, et qui
nous
trouvent sans peur et sans préparation dès l’instant qu’elles devienn
1359
es grandes lignes de la guerre, et çà et là, dans
nos
frontières, des secteurs minuscules, comme au hasard, qu’on voit d’un
1360
les plus stricts, mais c’est très bien ainsi, car
nous
sommes n’importe où, sans raison prévisible. J’aime beaucoup les adre
1361
cordeau qu’il faut inspecter gravement. Partirons-
nous
au milieu de la nuit ? Ou passerons-nous l’hiver ici ? Plus rien ne d
1362
artirons-nous au milieu de la nuit ? Ou passerons-
nous
l’hiver ici ? Plus rien ne dépend de nous. C’est notre liberté. Les h
1363
sserons-nous l’hiver ici ? Plus rien ne dépend de
nous
. C’est notre liberté. Les hommes sont à la soupe. Nous dînerons dans
1364
l’hiver ici ? Plus rien ne dépend de nous. C’est
notre
liberté. Les hommes sont à la soupe. Nous dînerons dans une heure au
1365
C’est notre liberté. Les hommes sont à la soupe.
Nous
dînerons dans une heure au café du village. Une heure creuse, à l’arm
1366
eau vide, ou quelle plénitude du loisir ! Amusons-
nous
à dire un peu de quoi se fait la vie quotidienne, dans les débuts d’u
1367
re le mystérieux Esprit de Subversion. Ces dames,
nos
mères, étaient victimes d’expressions telles que « sous les drapeaux
1368
bois, cela peut être un des plus beaux moments de
notre
furtive existence. Surtout quand il tombe une pluie fine. Ce n’est pa
1369
en, avant longtemps, dans ces champs et forêts où
nous
marchons sans suivre les chemins. (À ce petit signe nous sentons la d
1370
rchons sans suivre les chemins. (À ce petit signe
nous
sentons la différence d’avec la vie civile, dans le pays des règlemen
1371
avec la vie civile, dans le pays des règlements.)
Nous
vivons à côté de la population, mêlés à elle, et cependant hors de sa
1372
ocons humides sur ce petit vallon du haut Jura où
nous
avons à préparer des positions. Et la neige fondait dans la boue. J’a
1373
à la lueur d’une lampe à pétrole. Pourquoi sommes-
nous
là, quelque part, loin de tout ce qui faisait notre vie ? Il faudrait
1374
ous là, quelque part, loin de tout ce qui faisait
notre
vie ? Il faudrait essayer de répondre. L’homme n’est pas né pour fair
1375
pu ? Parce que tous ils s’imaginent — ou croient
devoir
s’imaginer ! — que le bonheur et la force d’un peuple dépendent de sa
1376
mise au pas militaire, de son arrogance étatique.
Nous
sommes ici à patauger parce que nos voisins se font la guerre, et s’i
1377
ce étatique. Nous sommes ici à patauger parce que
nos
voisins se font la guerre, et s’ils la font, c’est parce qu’ils n’ont
1378
s antisuisse de toute l’Histoire. C’est donc pour
nous
la pire menace. Mais en même temps, la plus belle promesse ! Maintena
1379
puisque l’autre aboutit à la guerre. Ce n’est pas
notre
orgueil qui l’imagine, ce sont les faits qui nous obligent à le recon
1380
otre orgueil qui l’imagine, ce sont les faits qui
nous
obligent à le reconnaître avec une tragique évidence. Et c’est cela q
1381
tre avec une tragique évidence. Et c’est cela que
nous
avons à défendre : le seul avenir possible de l’Europe. Le seul lieu
1382
ou d’idéalisme. Il s’agit de voir qu’en fait, si
nous
sommes là, ce n’est pas pour défendre des fromages, des conseils d’ad
1383
ndre des fromages, des conseils d’administration,
notre
confort et nos hôtels. Les fascistes feraient marcher cela aussi bien
1384
, des conseils d’administration, notre confort et
nos
hôtels. Les fascistes feraient marcher cela aussi bien que nous, peut
1385
es fascistes feraient marcher cela aussi bien que
nous
, peut-être mieux ! Ce n’est pas non plus pour protéger nos « lacs d’a
1386
-être mieux ! Ce n’est pas non plus pour protéger
nos
« lacs d’azur » et nos « glaciers sublimes ». (Certain ministre de la
1387
pas non plus pour protéger nos « lacs d’azur » et
nos
« glaciers sublimes ». (Certain ministre de la propagande se chargera
1388
rès volontiers de ce travail de Heimatschutz.) Si
nous
sommes là, c’est pour exécuter la mission dont nous sommes responsabl
1389
us sommes là, c’est pour exécuter la mission dont
nous
sommes responsables, depuis des siècles, devant l’Europe. D’autres se
1390
brigands qui voulaient profiter de sa faiblesse.
Nous
sommes chargés de la défendre contre elle-même, de garder son trésor,
1391
l est le sens de la mission spéciale qui justifie
notre
neutralité. Si nous trahissons cette mission, si nous n’en gardons pa
1392
ission spéciale qui justifie notre neutralité. Si
nous
trahissons cette mission, si nous n’en gardons pas conscience, je ne
1393
neutralité. Si nous trahissons cette mission, si
nous
n’en gardons pas conscience, je ne donne pas cher de notre indépendan
1394
n gardons pas conscience, je ne donne pas cher de
notre
indépendance. Berne, fin novembre 1939. (Au retour d’un voyage en
1395
débraillés, de musettes et de masques à gaz. Déjà
nous
roulons lourdement. Le nom de cette gare — comme de toutes les autres
1396
deux conceptions de « l’ordre » qui se partagent
notre
Europe : harmonie intérieure ou uniformité géométrique et militaire.
1397
évolution actuelle. La déprimante architecture de
notre
Palais fédéral — où je corrige ces notes de voyage, ayant fini le tra
1398
peu, ce soir. C’est le contraire de ce qui fonde
nos
vraies valeurs et notre raison d’être. Cette école primaire démesurée
1399
e contraire de ce qui fonde nos vraies valeurs et
notre
raison d’être. Cette école primaire démesurée, c’est l’image même, en
1400
image même, en pierre verdâtre, de l’esprit qu’il
nous
faut combattre si nous voulons mériter notre paix. Berne, 2 décemb
1401
erdâtre, de l’esprit qu’il nous faut combattre si
nous
voulons mériter notre paix. Berne, 2 décembre 1939 Rapport, dès
1402
qu’il nous faut combattre si nous voulons mériter
notre
paix. Berne, 2 décembre 1939 Rapport, dès mon retour, au colone
1403
hin, sont minés 73. — Merci, vous tombez bien. Je
dois
donner demain au Général la carte des défenses hollandaises. Ce que n
1404
énéral la carte des défenses hollandaises. Ce que
nous
savons mieux qu’eux, c’est ce qu’ils ont en face d’eux… » Janvier
1405
session de quelque territoire, mais la défense de
nos
libertés — dont je vais faire le titre du bréviaire. Il faut que chac
1406
ches. Vous aurez un sacré boulot !… En attendant,
nous
les futurs combattus, nous reposons dans le creux de la main des dieu
1407
oulot !… En attendant, nous les futurs combattus,
nous
reposons dans le creux de la main des dieux du monde, comme les pierr
1408
us avez du travail. Car il faut bien, il faut que
nous
comptions sur vous… (Novembre 1939) Nizan (…) a démissionné du PC le
1409
ne bronche — Alain, Gide, Pontigny, Romains — qui
devraient
cependant faire respecter la littérature à travers un homme, cet homm
1410
Lausanne, reçue hier) : Que peuvent être devenus
nos
amis, nos vrais amis (…) et d’autres dont les visages palissent et s’
1411
reçue hier) : Que peuvent être devenus nos amis,
nos
vrais amis (…) et d’autres dont les visages palissent et s’effacent t
1412
nt les visages palissent et s’effacent tandis que
nous
y pensons. En 1914, nous n’avons pas été coupés ainsi du reste du mon
1413
et s’effacent tandis que nous y pensons. En 1914,
nous
n’avons pas été coupés ainsi du reste du monde. Quelle cruauté, quell
1414
qualifier ; elle ne ressemble à aucune autre. Je
devais
avoir 13 ou 15 ans lorsque j’y vins pour la première fois, descendant
1415
t encore par des lacets immenses, passait enfin à
notre
hauteur, puis courait s’engouffrer dans les rochers, à la base d’une
1416
pour cette raison même, l’origine très précise de
nos
libertés suisses et de notre union fédérale. Quand je n’en saurais ri
1417
rigine très précise de nos libertés suisses et de
notre
union fédérale. Quand je n’en saurais rien, j’ai lieu de supposer que
1418
rminées par un roulement de tambour, voilà ce qui
doit
logiquement se produire. » Et encore, en 1889 : « Les chefs futurs se
1419
n détachement serait étrange, voire haïssable, si
nous
vivions dans un monde acceptable ou simplement à la mesure de notre a
1420
un monde acceptable ou simplement à la mesure de
notre
action. Je vais à lui pour me défendre contre l’écœurement qui me gue
1421
naïveté politique qui trop souvent caractérisent
notre
opinion. Début de mars 1940 L’homme au poignard enguirlandé. —
1422
onne n’a mieux traduit et illustré les vertus qui
devraient
nourrir, aujourd’hui, notre esprit de résistance. Ce réalisme liberta
1423
ré les vertus qui devraient nourrir, aujourd’hui,
notre
esprit de résistance. Ce réalisme libertaire, cette liberté d’allure
1424
rotte sur le nez, trois dans ta barbe 75 ! » Mais
nous
voici mieux muselés que ces ours du duc de Milan ramenés en laisse, a
1425
ils fait à la mort, dans leurs rêves, la part que
nous
fîmes à l’amour ? Urs Graf, Holbein, Hans Kluber, Grünewald, et tant
1426
as de majuscule, et qu’elle est quelque chose qui
doit
brûler, flamber, et non pas rapporter du trois pour cent. Sérieuse co
1427
nté ont prêché sur le thème du memento mori, mais
nous
préférons aujourd’hui l’éloge de la vie au grand air. Et tout se pass
1428
i de l’épargne dans tous les domaines, tuaient en
nous
le sens métaphysique… ⁂ Sobre dans la plus libre fantaisie, mais éner
1429
e d’admirer chez Manuel la plupart des vertus qui
nous
manquent. Böcklin manque de sobriété, Hodler aussi. D’où l’espèce de
1430
architecture théologique, c’est à peu près ce que
nous
avons perdu par une longue suite de « libérations » qui ne laissent e
1431
bien moins encore ces planches de minéralogie que
nous
bariolent les peintres d’Alpe. Ce qu’il peint, lui, c’est la terre de
1432
die « à la louange de Dieu ». ⁂ Quand on dit chez
nous
de quelqu’un « qu’il a fait un peu tous les métiers », ce n’est pas u
1433
nduire leur vie vers un but qui transcende toutes
nos
activités. Fougueux et appliqué dans sa peinture, Manuel n’hésite pas
1434
té n’a plus de vraies mesures, c’est l’Église qui
doit
les refaire. Qu’elle s’y refuse, il faut la réformer. Après quoi l’on
1435
pour s’excuser, comme s’il croyait au fond qu’on
devrait
tout savoir, et que pourtant… C’est la passion de la Renaissance, si
1436
l a mieux éclairé, écrit un chroniqueur du temps,
notre
banneret Manuel apparut parmi nous comme un flambeau brûlant et éclat
1437
eur du temps, notre banneret Manuel apparut parmi
nous
comme un flambeau brûlant et éclatant. Survint alors la maladie qui n
1438
brûlant et éclatant. Survint alors la maladie qui
nous
l’arrache dans sa quarante-sixième année. » Le seul autoportrait qui
1439
année. » Le seul autoportrait qui subsiste de lui
nous
montre, à la fin de sa vie, un regard doux et perspicace, un visage a
1440
une vie d’homme devant Dieu. 9 mars 1940 Il
nous
est né hier une fille que nous avons nommée Martine. J’inscris ici, p
1441
9 mars 1940 Il nous est né hier une fille que
nous
avons nommée Martine. J’inscris ici, pour qu’elle les lise plus tard,
1442
pour qu’elle les lise plus tard, les raisons qui
nous
firent adopter ce prénom. C’est un souvenir de France et de la paix f
1443
un souvenir de France et de la paix française qui
nous
émeut comme un adieu à la douceur de vivre, à la confiance. Cela se p
1444
oses et de blés, aux bords du plateau de la Brie.
Nous
montions vers Périgny par un sentier fort raide entre les ronces, abo
1445
uceur du ciel, retrait des âmes dans leur destin.
Nous
longions cette rue silencieuse, imaginant d’y vivre un jour dans une
1446
cline lentement vers la vallée, dans les vergers.
Nous
nous étions arrêtés là, hésitant sur le chemin à prendre. Et soudain
1447
lentement vers la vallée, dans les vergers. Nous
nous
étions arrêtés là, hésitant sur le chemin à prendre. Et soudain nous
1448
là, hésitant sur le chemin à prendre. Et soudain
nous
vîmes à nos pieds, tracé à la craie sur le sol, un grand cercle entou
1449
sur le chemin à prendre. Et soudain nous vîmes à
nos
pieds, tracé à la craie sur le sol, un grand cercle entourant une ins
1450
s choses de toujours. Et le moindre signe suffit.
Nous
sommes redescendus vers la vallée de l’Yerres, qui coule entre des sa
1451
tégique du col du Saint-Gothard dès les débuts de
notre
histoire. Mars 1940 Entre le déclenchement précis des mécanisme
1452
changé, la guerre est là, mais rien n’arrive. Et
nous
vivons dans le suspens. À moins que ce ne soit dans une chute prolong
1453
redoute parfois que l’instruction publique, dans
nos
démocraties, ne réussisse qu’à élever le niveau de la bêtise moyenne.
1454
ise moyenne. (Voir les magazines populaires, chez
nous
autant qu’en Amérique.) ⁂ Pourquoi les Suisses ne condamnent-ils que
1455
« Le petit nuage n’est pas passé. Il passera, et
nous
serons encore une fois assis au café des Deux Magots. La vie reprendr
1456
econde me dit : « Le petit nuage passera, oui… et
nous
avec ! » Selon l’humeur du jour, je donne raison à l’une ou à l’autre
1457
t, c’est la certitude « qu’il passera ». Que sont
nos
petits accès de découragement, ces brumes qu’un léger vent d’avant-pr
1458
gard du Règlement des comptes universels que sera
notre
jugement au dernier jour de tous les temps. Karl Barth nous le disait
1459
ent au dernier jour de tous les temps. Karl Barth
nous
le disait l’autre jour à Tavannes où nous avions donné deux conférenc
1460
l Barth nous le disait l’autre jour à Tavannes où
nous
avions donné deux conférences devant un vaste rassemblement de jeunes
1461
rassemblement de jeunes gens : « Comme chrétiens,
nous
n’avons à redouter que le Prince de tous les démons, et non pas tel o
1462
ous les démons, et non pas tel ou tel démon qu’il
nous
délègue de temps à autre. Le combat que nous devrons peut-être engage
1463
u’il nous délègue de temps à autre. Le combat que
nous
devrons peut-être engager militairement contre l’un de ces petits per
1464
nous délègue de temps à autre. Le combat que nous
devrons
peut-être engager militairement contre l’un de ces petits personnages
1465
t, si “total” qu’il soit, ne saurait figurer pour
nous
qu’un exercice, une première escarmouche, un entraînement pour le “co
1466
t pour le “combat final” où le Christ seul pourra
nous
sauver, lorsque le Malin en personne nous accusera au Jugement dernie
1467
pourra nous sauver, lorsque le Malin en personne
nous
accusera au Jugement dernier. » Voilà les dimensions réelles qu’il fa
1468
er envisager. Elles ne sont pas démesurées. Elles
doivent
au contraire nous donner la vraie mesure de nos soucis, de nos miséra
1469
e sont pas démesurées. Elles doivent au contraire
nous
donner la vraie mesure de nos soucis, de nos misérables cafards, de n
1470
ivent au contraire nous donner la vraie mesure de
nos
soucis, de nos misérables cafards, de nos craintes dérisoires et mesq
1471
ire nous donner la vraie mesure de nos soucis, de
nos
misérables cafards, de nos craintes dérisoires et mesquines. « C’est
1472
sure de nos soucis, de nos misérables cafards, de
nos
craintes dérisoires et mesquines. « C’est un petit nuage, il passera.
1473
ue je viens de trouver dans un livre interdit par
nos
censeurs 78. L’auteur fut l’un des chefs du parti hitlérien ; écœuré,
1474
secrète de la démocratie, c’est la franchise. On
nous
répète : « Qui ne sait se taire nuit à son pays. » Fort bien. Mais il
1475
Nouvelle mobilisation générale. Il m’apparaît que
notre
section Armée et Foyer n’aura plus rien à faire pendant les jours qui
1476
e de Berne qui a demandé quelques volontaires. Il
nous
expose notre tâche : prendre le commandement des pelotons chargés d’a
1477
ui a demandé quelques volontaires. Il nous expose
notre
tâche : prendre le commandement des pelotons chargés d’arrêter en cas
1478
ype, ramasser les papiers… La légation allemande,
nous
dit-il, est un dépôt d’armes et un blockhaus bétonné. Mais nous avons
1479
st un dépôt d’armes et un blockhaus bétonné. Mais
nous
avons installé un canon dans la maison d’en face. L’ordre récemment d
1480
personne ne peut agir. » Ou faudra-t-il enterrer
nos
secrets pour d’autres qui peut-être ne viendront jamais ? Car la cart
1481
r au passé. Vaudrait-il mieux qu’alors ? Saurions-
nous
mieux le vivre, augmenté du souvenir de sa perte ? Mais le passé ne r
1482
— même si la guerre était gagnée, même si demain
nous
devions vivre encore… À quoi pensent-ils, ceux de la bataille ? Ont-i
1483
me si la guerre était gagnée, même si demain nous
devions
vivre encore… À quoi pensent-ils, ceux de la bataille ? Ont-ils de ce
1484
s-ci ça y est ! Vivant un cauchemar qui est vrai,
nous
allons en désordre au réveil. La mort, le désespoir en plein midi, —
1485
moi de la Suisse allemande. En sortant du studio,
nous
apprenons que Paris vient d’être bombardé pour la première fois. Dan
1486
ombardé pour la première fois. Dans le train qui
nous
ramenait ce matin à Berne, je lui ai dit : « Si la France est battue,
1487
nt tentés de céder à diverses pressions. Pourtant
nous
sommes les seuls à pouvoir nous défendre. Depuis plusieurs années, je
1488
essions. Pourtant nous sommes les seuls à pouvoir
nous
défendre. Depuis plusieurs années, je pense au Saint-Gothard comme au
1489
son bastion sacré. C’est pour le garder libre que
nos
premiers cantons ont reçu la liberté d’Empire. Or il se trouve que, p
1490
12 juin 1940 Débâcle française sur la Seine.
Notre
projet me travaille. Spoerri insiste, agit, et des contacts sont pris
1491
t se tait, que son deuil soit le deuil du monde !
Nous
sentons bien que nous sommes tous atteints. Quelqu’un disait : Si Par
1492
il soit le deuil du monde ! Nous sentons bien que
nous
sommes tous atteints. Quelqu’un disait : Si Paris est détruit, j’en p
1493
visionen ». Quelque chose d’indéfinissable et que
nous
appelions Paris. C’est ici l’impuissance tragique de ce conquérant vi
1494
du Jura, et au-delà se passe la guerre. Derrière
notre
maison, des prairies montent jusqu’aux lisières de la forêt de sapins
1495
s’il est bien à la mesure du tragique dans lequel
nous
baignons… L’ai fait lire au lieutenant-colonel et aux autres camarade
1496
i ? — Je ne suis pas officier de carrière. — Vous
deviez
le faire quand même. Vous êtes accusé d’injures à un chef d’État étra
1497
ave, c’est… très grave ! Terminé. — Terminé. Bon.
Nous
verrons cela demain matin. Arriver à sept heures tapantes au bureau,
1498
rriver à sept heures tapantes au bureau, surtout.
Notre
projet du 6 juin se précise. Ph. M. est en train de convoquer pour le
1499
e convoquer pour le 22 juin les dix personnes que
nous
avons « contactées » ces jours derniers. Secret bien gardé jusqu’ici.
1500
rniers. Secret bien gardé jusqu’ici. Ce matin, on
nous
a informés au bureau de ce qui s’est passé la nuit dernière. C’était
1501
re. C’était sérieux. Attaques de saboteurs contre
nos
aérodromes. Mais on veillait partout. À la nuit, des barricades ont é
1502
heure, les nouvelles de l’action entreprise pour
notre
« défense à tout prix ». (Beaucoup de précautions sont nécessaires, c
1503
uin 1940 Mon colonel se présente à la porte de
notre
petite maison du Gurten. Je prends la position. Il tient dans chaque
1504
cées, j’ai eu le temps de rédiger le manifeste de
notre
mouvement, qui a pris le nom de Ligue du Gothard pour ma plus grande
1505
de l’horizon politique, décidés à faire converger
nos
efforts, nous fondons la Ligue du Gothard. Bastion naturel de la Suis
1506
politique, décidés à faire converger nos efforts,
nous
fondons la Ligue du Gothard. Bastion naturel de la Suisse, cœur de l’
1507
Confédérés peuvent s’unir dans leurs diversités…
Nous
n’avons qu’un seul but : maintenir la Suisse dans le présent et pour
1508
tenir la Suisse dans le présent et pour l’avenir.
Nous
ne vous promettons qu’un grand effort commun. Mais il nous rendra fie
1509
ous promettons qu’un grand effort commun. Mais il
nous
rendra fiers d’être hommes, et d’être Suisses. Ce texte va paraître d
1510
soixante-quatorze journaux du pays. Dans chacun,
nous
avons acheté une page entière. (Formule de la publicité politique ou
1511
que aux États-Unis.) Frais payés sur la somme que
nous
a remise le capitaine E…, l’un des chefs de la Ligue des officiers. C
1512
propos du cessez-le-feu en France, il a parlé de
notre
« soulagement » ! Cela peut s’entendre de diverses manières, dont l’u
1513
des membres du directoire de la Ligue, soit avec
notre
homme de liaison entre la Ligue dans l’armée et la Ligue civile : le
1514
rgent L…81. Une maison de Berne, à double entrée,
nous
permet des contacts discrets avec les représentants de la Ligue dans
1515
! Beaucoup de lettres, de pamphlets, d’articles,
nous
accusent tour à tour de tendances fascistes, ou marxistes, ou corpora
1516
dances fascistes, ou marxistes, ou corporatistes.
Nos
vrais « meneurs de jeu » seraient à la fois la grande industrie, les
1517
old, dont on annonce par ailleurs la démission de
notre
directoire ; or, il n’en a jamais été membre. Rien de plus normal. En
1518
l’ampleur du péril, et que c’est bien le tout de
notre
vie suisse et non pas tel parti plutôt qu’un autre, qui est radicalem
1519
neront. Le Conseil fédéral paraît hésitant. Selon
nos
renseignements très précis, certains de ses membres seraient prêts à
1520
divers cantons, n’auraient pas vu si tôt le jour.
Nous
savons qu’en réunissant des efforts jusqu’ici dispersés et des groupe
1521
ci dispersés et des groupements naguère hostiles,
nous
créons le visage de la nouvelle génération et nous marchons dans la s
1522
ous créons le visage de la nouvelle génération et
nous
marchons dans la seule voie possible. Nous savons que la Suisse est g
1523
ion et nous marchons dans la seule voie possible.
Nous
savons que la Suisse est gravement menacée, mais que notre action la
1524
ons que la Suisse est gravement menacée, mais que
notre
action la renforce. De tout temps, à l’appel du danger, nos ancêtres
1525
la renforce. De tout temps, à l’appel du danger,
nos
ancêtres se sont levés. C’est notre tour. 25 juillet 1940 Hier
1526
ppel du danger, nos ancêtres se sont levés. C’est
notre
tour. 25 juillet 1940 Hier a eu lieu le rapport du Grütli84. T
1527
40 Hier a eu lieu le rapport du Grütli84. Tout
notre
dispositif de défense regroupé autour du Gothard ! Notre rêve devient
1528
ispositif de défense regroupé autour du Gothard !
Notre
rêve devient vrai ! Profonde impression dans l’armée et dans la popul
1529
Zurich, dans une villa du Zürichberg. Tandis que
nous
nous dirigeons vers un café, à l’heure du déjeuner, sur une route pre
1530
ch, dans une villa du Zürichberg. Tandis que nous
nous
dirigeons vers un café, à l’heure du déjeuner, sur une route presque
1531
une voiture militaire ouverte ralentit le long de
nos
petits groupes. Un jeune lieutenant inconnu de moi saute à terre, fai
1532
de cette démarche dans les archives fédérales. On
devait
s’y attendre. Et personne n’ébruita la chose à l’époque. Il y avait u
1533
cette manière d’aller dire à un gouvernement : «
Nous
vous avertissons qu’il existe un complot pour vous renverser, et que
1534
’il existe un complot pour vous renverser, et que
nous
en sommes les fauteurs ! » Logiquement, si le gouvernement nous croya
1535
les fauteurs ! » Logiquement, si le gouvernement
nous
croyait, il devait nous faire arrêter sur-le-champ. S’il ne nous croy
1536
Logiquement, si le gouvernement nous croyait, il
devait
nous faire arrêter sur-le-champ. S’il ne nous croyait pas, notre déma
1537
ement, si le gouvernement nous croyait, il devait
nous
faire arrêter sur-le-champ. S’il ne nous croyait pas, notre démarche
1538
l devait nous faire arrêter sur-le-champ. S’il ne
nous
croyait pas, notre démarche était ratée, et au surplus couvrait la Li
1539
e arrêter sur-le-champ. S’il ne nous croyait pas,
notre
démarche était ratée, et au surplus couvrait la Ligue de ridicule. En
1540
élégation comprit très bien qu’il s’agissait pour
nous
d’appuyer les durs et de faire peur aux mous. Le Conseil fédéral deva
1541
urs et de faire peur aux mous. Le Conseil fédéral
devait
donc nous croire et ne pas nous croire à la fois. Finalement, il rési
1542
ire peur aux mous. Le Conseil fédéral devait donc
nous
croire et ne pas nous croire à la fois. Finalement, il résista, comme
1543
Conseil fédéral devait donc nous croire et ne pas
nous
croire à la fois. Finalement, il résista, comme on sait. 83. Fête na
1544
essait vraiment comme le bastion de l’Europe dont
nous
avions rêvé, sans oser croire que quelques mois plus tard il serait u
1545
serait une réalité. L’opinion s’était ressaisie.
Notre
Ligue du Gothard, fondée sur l’idée simple d’organiser les volontés d
1546
emier mouvement de Résistance, au sens que ce mot
devait
prendre un peu plus tard dans les pays occupés par Hitler. Je suis co
1547
litairement moins forte et moins bien alertée. Et
notre
mouvement de résistance, pour « théorique » et préventif qu’il soit r
1548
, pas beaucoup dire. Me taire ou ne parler que de
notre
belle nature me semblait également intolérable, tant qu’Hitler séviss
1549
ressentais que dans la lutte en cours, perdue sur
notre
continent, l’élément décisif allait venir et ne pouvait venir que d’A
1550
e pincer, n’importe où, cette mince artère par où
notre
vieux monde se vide peu à peu de son élite en même temps que de ses p
1551
quelconque préside aux modifications du monde que
nous
commençons d’entrevoir. Route de Lisbonne, route de l’émigration et d
1552
le endormie. Tous les fauteuils sont occupés dans
notre
voiture et point de couloir libre au milieu. Des bagages à main, des
1553
allemands. Tout le monde s’est tu dans l’autobus.
Nous
nous sommes arrêtés pour déjeuner dans un restaurant de Grenoble. Men
1554
ands. Tout le monde s’est tu dans l’autobus. Nous
nous
sommes arrêtés pour déjeuner dans un restaurant de Grenoble. Menu par
1555
. Mais à Valence, la tenancière d’une épicerie où
nous
entrons nous tend d’abord la liste des articles qu’on ne peut plus ve
1556
nce, la tenancière d’une épicerie où nous entrons
nous
tend d’abord la liste des articles qu’on ne peut plus vendre : café,
1557
café. Beaucoup de monde, mais peu d’animation. On
nous
sert, sous le nom de café noir, un breuvage au goût d’encre additionn
1558
chaque nuit et que vous allez mourir de faim ? »
Nous
la rassurons. Tout se réduit à quelques bombes jetées par erreur sur
1559
, au lendemain de la victoire (celle de 1918) : «
Nous
autres civilisations, nous savons maintenant que nous sommes mortelle
1560
re (celle de 1918) : « Nous autres civilisations,
nous
savons maintenant que nous sommes mortelles. » Oui, nous savons maint
1561
autres civilisations, nous savons maintenant que
nous
sommes mortelles. » Oui, nous savons maintenant que c’est possible :
1562
vons maintenant que nous sommes mortelles. » Oui,
nous
savons maintenant que c’est possible : on peut détruire une grande na
1563
iècle. Il n’y aura même pas besoin de les brûler.
Nous
roulons maintenant vers l’Espagne, à travers un pays de vignes, dont
1564
uveau », en espadrilles et uniformes dépareillés.
Nous
sommes ici depuis midi, la nuit approche et je ne crois plus guère au
1565
cinq-cents mètres du bâtiment des douanes dont on
nous
interdit l’approche, sauf pour le contrôle des devises et des visas,
1566
our le contrôle des devises et des visas, où l’on
nous
conduit par petits groupes. Ces opérations, qui se poursuivent depuis
1567
pérante. Le bruit court, parmi les voyageurs, que
nous
risquons d’être refoulés à Perpignan lorsque tout sera terminé, le ch
1568
r-ci ayant été atteint dès le matin. Il y a, dans
notre
convoi, quelques antifascistes notoires qui ne paraissent pas rassuré
1569
a ramassée en vitesse et s’est éloigné. Partirons-
nous
? Troisième journée Barcelone sans taxis, les Ramblas presque d
1570
s et sans avenir que j’ai déjà surpris en France…
Nous
devions repartir ce soir en train, mais en prenant l’avion de Madrid,
1571
sans avenir que j’ai déjà surpris en France… Nous
devions
repartir ce soir en train, mais en prenant l’avion de Madrid, demain
1572
mais en prenant l’avion de Madrid, demain matin,
nous
gagnerons une vingtaine d’heures. Curieuse obstination des Espagnols
1573
icade — neuf heures à la douane d’entrée, et l’on
nous
en prédit autant à la sortie — et qui ne s’inquiète plus de vous une
1574
s la gare ou aux alentours. Durant toute la nuit,
nous
avons fait une moyenne de trente kilomètres à l’heure. Cet express s’
1575
’un seul coup sur la tablette du compartiment, et
nous
arrosent de pépins crachés à la ronde. Ici au moins, il y a de la gai
1576
orte de gentillesse, malheureusement vociférante.
Nous
atteignons la frontière vers huit heures du matin, exténués et assoif
1577
t le petit jeu des douanes recommence. À midi, on
nous
ouvre enfin une sorte de buffet de gare, et nous nous ruons aveugléme
1578
nous ouvre enfin une sorte de buffet de gare, et
nous
nous ruons aveuglément sur des nourritures indéfinissables. Deux heur
1579
ouvre enfin une sorte de buffet de gare, et nous
nous
ruons aveuglément sur des nourritures indéfinissables. Deux heures. J
1580
Deux heures. Je demande au chef de train pourquoi
nous
restons là. « C’est, me dit-il, que le train a déraillé. » Et il sour
1581
ier que tous les wagons sont sur les rails. Parmi
nos
compagnons de voyage, tous ne sont pas encore très rassurés : il arri
1582
nt pas encore très rassurés : il arrive en effet,
nous
dit-on, qu’à la dernière minute la police retienne certaines personne
1583
t est propre et gai, et les visages se détendent.
Nous
venons de quitter les terres où s’étend l’ombre du destin le plus cru
1584
mbre du destin le plus cruel qu’ait jamais mérité
notre
Europe. Vers trois heures du matin, si tout va bien, nous atteindrons
1585
ope. Vers trois heures du matin, si tout va bien,
nous
atteindrons Lisbonne. Où coucherons-nous ? Le Portugal a vu passer dé
1586
va bien, nous atteindrons Lisbonne. Où coucherons-
nous
? Le Portugal a vu passer déjà des centaines de milliers de réfugiés,
1587
de wagon-restaurant, le chef de train accepte de
nous
arrêter pour une heure dans un village. Nous dînons sur la place, à d
1588
e de nous arrêter pour une heure dans un village.
Nous
dînons sur la place, à des tables rapidement dressées. Toute la popul
1589
cornes traverse la place au dessert. À Lisbonne,
nous
avons trouvé une chambre immense pour nous quatre. Et le lendemain no
1590
bonne, nous avons trouvé une chambre immense pour
nous
quatre. Et le lendemain nous étions accueillis dans cette quinta tout
1591
chambre immense pour nous quatre. Et le lendemain
nous
étions accueillis dans cette quinta toute hérissée de grilles et de c
1592
collines renie la guerre, oublie l’Europe. Demain
nous
embarquons pour l’Amérique. Mais ici je fais le serment d’opposer une
1593
ages venant des terres abandonnées du Nord et que
nos
paysans s’efforcent d’arrêter avant qu’elles n’étouffent leurs champs
1594
aître les paniques dévastatrices du ve siècle de
notre
ère. Et je songe au bastion que mon pays élève, nuit et jour, autour
1595
i ne peut plus vivre que sous la cuirasse. Hâtons-
nous
, car tout peut périr. Nous qui sommes encore épargnés, ne perdons pas
1596
us la cuirasse. Hâtons-nous, car tout peut périr.
Nous
qui sommes encore épargnés, ne perdons pas notre délai de grâce !
1597
. Nous qui sommes encore épargnés, ne perdons pas
notre
délai de grâce ! À bord de l’Exeter, 11 septembre 1940 Les dern
1598
ers barrages traversés, la passerelle relevée, et
nos
papiers enfin déposés chez le purser, nous n’avons plus devant nous q
1599
vée, et nos papiers enfin déposés chez le purser,
nous
n’avons plus devant nous qu’un océan sans douanes ! Dix jours vierges
1600
déposés chez le purser, nous n’avons plus devant
nous
qu’un océan sans douanes ! Dix jours vierges, dix jours durant lesque
1601
peut imaginer que la police renoncera au viol de
notre
vie privée. Pourtant, certains des passagers gardent encore l’air de
1602
el est le sadisme policier. De Genève à Lisbonne,
nous
avons traversé sept contrôles différents de douane et de police. Seco
1603
s de douane et de police. Secondés par la chance,
nous
n’y avons passé, si je compte bien, guère plus de vingt-deux heures,
1604
emps. — Royaume ? 3. Guerre. — La décision paraît
devoir
intervenir cette semaine. (Ce matin on annonçait que les transports d
1605
agers de la radio. Le monde a changé de face sous
nos
yeux, mais nous le regardions de trop près : d’heure en heure, nous n
1606
io. Le monde a changé de face sous nos yeux, mais
nous
le regardions de trop près : d’heure en heure, nous n’avons rien vu.
1607
us le regardions de trop près : d’heure en heure,
nous
n’avons rien vu. C’est après coup, en nous retournant, que nous avons
1608
heure, nous n’avons rien vu. C’est après coup, en
nous
retournant, que nous avons entrevu l’ampleur et la rapidité des événe
1609
ien vu. C’est après coup, en nous retournant, que
nous
avons entrevu l’ampleur et la rapidité des événements. Il a dit « Rie
1610
utre jour à Lisbonne, Lady M. of A… me disait : «
Nous
ne serons jamais battus, parce que nous sommes un peuple qui ne sait
1611
isait : « Nous ne serons jamais battus, parce que
nous
sommes un peuple qui ne sait pas quand il est battu. » J’ai pensé aux
1612
proches défilaient au hublot ! Couru sur le pont.
Nous
sommes dans les passes de l’Hudson. Une brume de chaleur tropicale bl
1613
de claire et neuve : la première rue américaine !
Nous
approchons. Tournant la tête vers l’avant, un peu au-dessus de la pou
1614
s, font rater l’arrivée la plus célèbre au monde.
Nous
remontions donc l’Hudson, guettant New York avec une émotion croissan
1615
s haut-parleurs impérieux et lugubres ont réclamé
notre
attention. Nous n’avons plus rien vu que des grues et des mâts, penda
1616
mpérieux et lugubres ont réclamé notre attention.
Nous
n’avons plus rien vu que des grues et des mâts, pendant deux heures a
1617
geaient ces messieurs d’Ellis Island. Ils palpent
nos
passeports et les feuillettent avec une lenteur taciturne. Nous somme
1618
s et les feuillettent avec une lenteur taciturne.
Nous
sommes tous des prévenus, des coupables sans doute. Nous sommes tous
1619
mmes tous des prévenus, des coupables sans doute.
Nous
sommes tous des Européens, des gens qui viennent du pays de la guerre
1620
euse. Tous les yeux sont fixés sur cette table où
nos
passeports attendent, près des tampons sacrés. C’est bien le mien qu’
1621
es découpent l’espace aussi haut qu’on peut voir.
Nous
défilons lentement près de leur base. Des pans de brique rosée, ocrée
1622
urs bleu sombre, et j’ai regardé mes voisins, car
nous
roulions dans un tunnel. Dans l’ensemble, les femmes m’ont paru digne
1623
les femmes m’ont paru dignes de ce que le cinéma
nous
en promet — mais il suffit de trois ou quatre beautés saines ou frapp
1624
Une falaise de granit se dresse près de la voie.
Nous
la passons. Sur son autre versant s’étale un cimetière d’autos décarc
1625
n, fin d’octobre 1940 À une heure de New York,
nous
sommes en pleine campagne, et l’on cesse de sentir l’Amérique telle q
1626
hington, 30 octobre 1940 Depuis le temps qu’on
nous
vante en Europe les autostrades fascistes et hitlériennes, qui semble
1627
avaient raison, puisque Tuxedo Park existe, sous
nos
yeux. On y pénètre par un porche médiéval, où des agents de police ar
1628
sera la famine ! Le bolchévisme ! Les gens comme
nous
seront liquidés ! ». New York, 3 novembre 1940 Ville pure. — E
1629
en Allemagne, lors des grands discours du Führer.
Nous
étions un million, disent les journaux, et trois-cents agents à cheva
1630
e en Europe ! 10 novembre 1940 Religion. —
Nous
sommes en quête d’une maison dans la banlieue de Manhattan. Les prosp
1631
ent. 13 novembre 1940 Conférences. — Elles
doivent
être courtes — cinquante minutes — et garder autant que possible le t
1632
gnés à la machine, dans tous les pays non latins.
Nous
autres, vieux maniaques, tenons au coupe-papier. 15 novembre 1940
1633
Trouvé la maison, signé le bail sur l’heure et
nous
nous installons demain, avec des meubles d’occasion achetés pour un p
1634
ouvé la maison, signé le bail sur l’heure et nous
nous
installons demain, avec des meubles d’occasion achetés pour un prix d
1635
ser en 1940. Forest Hills, 30 novembre 1940
Notre
propriétaire est un médecin des chiens. Il vient sonner vers les huit
1636
se chargent eux-mêmes du message. Le dimanche, on
nous
transmet les cultes des principales confessions religieuses, mais là
1637
artisanat se maintiendrait-il ? Il est fondé chez
nous
sur le goût de l’objet, mais aussi, avouons-le, sur la disette et le
1638
i étaient venus parlaient du Noël de la France et
nous
mangions nos chocolats comme si nous les avions volés… Début de ja
1639
s parlaient du Noël de la France et nous mangions
nos
chocolats comme si nous les avions volés… Début de janvier 1941
1640
la France et nous mangions nos chocolats comme si
nous
les avions volés… Début de janvier 1941 Éditeurs. — Vu mon édi
1641
allant à la caisse toucher un petit chèque qu’on
doit
feindre d’avoir mérité, bien qu’on sache qu’il n’a pas le moindre rap
1642
ités de la vie américaine, disciples réticents de
nos
écoles d’Europe, cherchant une méthode de pensée plutôt que des fonde
1643
brusquerie de leurs jugements et un style tough (
nous
dirions « dur » ou « vache ») leur défaut de responsabilité. Tout cel
1644
jugent en général trop formalistes ou rhétoriques
nos
poèmes et nos essais. Une jeune romancière me disait : « Vous autres
1645
ral trop formalistes ou rhétoriques nos poèmes et
nos
essais. Une jeune romancière me disait : « Vous autres Européens, vou
1646
it trop. Le savent-ils eux-mêmes ? L’exigence que
nous
gardons encore de dégager, d’expliciter un sens, leur apparaît vaguem
1647
En tant que citoyen, me dit-il, il serait de mon
devoir
de publier ce livre. Mais en tant qu’éditeur, ce serait un suicide. —
1648
inion gouverne ? La vraie Cinquième Colonne, dans
nos
démocraties, je vous le dis, c’est la paresse d’esprit ! » Cet éditeu
1649
le dis, c’est la paresse d’esprit ! » Cet éditeur
doit
publier le livre sur la Suisse que je projette à l’usage des Américai
1650
vous savez traiter vos affaires sans canons. Vous
nous
avez admis, et il convient que nous nous tenions bien tranquilles. La
1651
canons. Vous nous avez admis, et il convient que
nous
nous tenions bien tranquilles. La démocratie est chez vous la religio
1652
ns. Vous nous avez admis, et il convient que nous
nous
tenions bien tranquilles. La démocratie est chez vous la religion de
1653
hée, et d’excellents amis la disent justifiée par
notre
situation précaire au cœur de l’Axe. S’ils ont raison, je leur serais
1654
quoi serais-je utile, si je ne suis pas moi ? Et
nos
chances de nous battre paraissent faibles ou nulles… 16 février 19
1655
utile, si je ne suis pas moi ? Et nos chances de
nous
battre paraissent faibles ou nulles… 16 février 1941 Seul à la
1656
an Club, en face de Jacques Maritain. Au dessert,
nous
étions d’accord : ce qui manque le plus aux démocraties en général et
1657
croire au diable. On sort de table et pendant que
nous
attendons l’ascenseur, je dis : — La difficulté, c’est que si l’on pa
1658
isèrent votre pays affirmait que les martyrs sont
nos
meilleurs intercesseurs auprès de Dieu. Les pâtres de la Suisse alpes
1659
tiques ?) utilisée par Hitler dans ses discours. (
Nous
en avons longtemps parlé hier soir chez Raymond de Saussure, avec deu
1660
i est venu après le dîner dans la chambre d’Auden
nous
faire entendre un disque de son Requiem pour un Mikado, aux angoissan
1661
ns à me poser au sujet d’un de mes livres dont il
devra
parler au séminaire de littérature. Que veut-il donc savoir ? Simplem
1662
cafétéria — un restaurant très bon marché où l’on
doit
se munir d’un plateau, de couverts et d’assiettes pris sur la pile, p
1663
sens logique, la rapidité du raisonnement, etc.)
doit
donner un chiffre total supérieur à 135. Le génie, s’il est physicien
1664
la ville. Tout au long de la route assez étroite,
nos
phares illuminèrent des files d’autos arrêtées au bord du talus, tous
1665
et ils s’y tiennent ; sans plus d’hypocrisie que
nous
aux nôtres. ⁂ Visite à Wellesley College, université de jeunes filles
1666
du pont, sinon dans les hauts draps de brume qui
nous
serrent, le reflet de nos propres lueurs. Je me suis enfermé dans ma
1667
uts draps de brume qui nous serrent, le reflet de
nos
propres lueurs. Je me suis enfermé dans ma cabine. Je constate que j’
1668
pense rester seul pendant les dix-sept jours que
doit
durer la traversée. Les fils qui me liaient aux autres et que les aut
1669
inavouable de libération. Avouons-la, et couchons-
nous
. 21 juillet 1941, en mer Nuit des tropiques. Tout à l’avant du
1670
bar ferme. Une irrésistible euphorie règne parmi
notre
communauté d’inconnus d’hier, plongés dans tous les charmes de la pai
1671
be, — à cette même heure en France, et en Russie…
Nous
le savons tous. Que sert de comparer ? Quel sens ? Il y a des roses d
1672
la machine où l’on joue par quarters (25 cents).
Nous
décidons de partager profits et pertes. Je joue deux pièces et gagne
1673
rd. Sur les trois tours, elle en a gagné deux, et
nous
étions plus d’une centaine de joueurs. Or elle n’est pas seulement la
1674
es catalogues de timbres-poste de mon enfance. On
nous
y montre des maisonnettes coupées en deux du faîte au sol, les moitié
1675
par milliers, pendant toute une nuit d’insomnie.
Nous
entrons dans l’hiver du Sud. Sur le pont déserté, un couple passe et
1676
metière, tandis qu’une amie me disait : « La mort
doit
être douce à Montevideo… » Buenos Aires, début de septembre 1941
1677
stingue Ortega, et ce grand écrivain que l’Europe
doit
connaître, J.-L. Borgès, et tant d’autres du groupe de Sur, l’honneur
1678
’avant-veille de ma conférence sur le diable dans
notre
siècle, un reporter américain avec qui je dînais me proposa d’aller v
1679
r le directeur d’El Mundo, grand journal du soir.
Nous
entrons à minuit dans son bureau. Il me tend un verre de whisky et un
1680
et une coupure de journal : c’est un article qui
doit
paraître le lendemain, où l’on discute mes idées sur le diable. — Qu’
1681
z-vous ? Je n’ai pas encore écrit ma conférence ?
Nous
savons tout, prenez ce fauteuil. — Vous en savez en tout cas plus que
1682
irculation l’objet que vous voyez. Chaque employé
doit
le toucher et signer la feuille de contrôle. Et sitôt la chose faite,
1683
bien, monsieur, c’était pire que sans rien ! J’ai
dû
les jeter par la fenêtre. Il me raconte encore quelques histoires du
1684
re quelques histoires du diable. Je prends congé,
nous
déjeunerons ensemble, c’est convenu, et j’exprime le souhait de l’ent
1685
e. — Non, monsieur, je ne crois pas, je regrette…
Nous
parlerons encore du diable. C’est ainsi. Entre nous, rien n’est plus
1686
us parlerons encore du diable. C’est ainsi. Entre
nous
, rien n’est plus important ! ⁂ Dans un taxi, la nuit. — Madeleine Oz
1687
t dans une très vaste halle décorée d’écussons de
nos
vingt-deux cantons, je serre les mains les plus énormes et calleuses
1688
ais touchées, et le banquet commence incontinent.
Nous
sommes une bonne centaine, assis à trois longues tables qu’on a dress
1689
ût un village de ce nom-là) où il est né en 1847.
Nous
nous comprenons par sourires, aidés des quelques mots de schwyzer düt
1690
village de ce nom-là) où il est né en 1847. Nous
nous
comprenons par sourires, aidés des quelques mots de schwyzer dütsch d
1691
⁂ Estancias près de Mar del Plata. — La voiture
nous
suivra de loin. Devant nous, une allée d’eucalyptus, quatre rangs de
1692
l Plata. — La voiture nous suivra de loin. Devant
nous
, une allée d’eucalyptus, quatre rangs de chaque côté, pendant des kil
1693
ne, moderne et blanche ; ou comme Chapadmalal, où
nous
arrivons aujourd’hui, un château anglais entouré de terrasses et de j
1694
maîtres sont absents. Mais la porte s’entrouvre à
notre
approche. Des domestiques circulent sans bruit. Deux grands feux de c
1695
coupes et trophées de concours. Des gants blancs
nous
servent le thé dans un silence fantomatique. Signons, ce sera poli, d
1696
ersement des saisons paraît si confondant dès que
nous
dépassons le tropique du Capricorne. Ici, Noël tombe en été, le Midi
1697
e américain atteint ici son paroxysme. Mais c’est
nous
qui l’appelons gaspillage. Pour eux, c’est un usage normal de l’abond
1698
oprement son assiette, ainsi qu’on l’inculquait à
notre
enfance, on la laisse remplie aux trois quarts quand le domestique vi
1699
nsieur avait vu, du temps des parents de Madame !
Nous
ne faisons que pour une personne, mais dans ce temps-là, c’était pour
1700
tiennent l’école de l’estancia. Ces jeunes filles
nous
ont accueillis avec une aimable réserve, un maté et des disques de ja
1701
de grands couteaux, l’intendant, un péon et moi,
nous
découpions de larges tranches juteuses qu’il faut tenir à deux mains
1702
l’ombre des ombus et des mandariniers. Plus tard,
nous
sommes partis pour les lagunes, à l’autre extrémité de l’estancia. Vi
1703
’enfuyaient à droite et à gauche, et des cigognes
nous
accompagnaient. Une nuée de mouettes éclatantes et criardes attaquaie
1704
avais vues raser les vagues brunes soulevées par
notre
bateau dans l’estuaire de la Plata. Et je suis demeuré pendant des he
1705
sont eux-mêmes qui refusent les améliorations que
nous
leur proposons. Ils sont heureux dans leur état. ») Le premier meneur
1706
presque désert, et ses stewards qui me rappellent
notre
croisière du mois d’août, mais les temps ne sont plus ce qu’ils étaie
1707
ernier orage rougeoie dans la direction du Tigré.
Nous
montons vers l’hiver américain. 7 novembre 1941, en mer Saudad
1708
de m’est donné, par cette chambre d’hôtel, dirons-
nous
. (Comme une tranchée peut signifier la guerre, sinon ses causes.) J’a
1709
Si cet Hitler gagnait la guerre, pensez-vous que
notre
vie américaine en serait vraiment fort changée ? — Madame, il faudrai
1710
erchait une maison à vendre, et dans une ferme où
nous
entrons pour quêter quelque information, on nous dit : « Pas la peine
1711
nous entrons pour quêter quelque information, on
nous
dit : « Pas la peine, c’est la guerre. Les Japonais attaquent à Pearl
1712
la guerre. Les Japonais attaquent à Pearl Harbor.
Nous
venons de l’entendre à la radio. » Une fois de plus, la vie qui chang
1713
eune Européen. Le « premier jour de guerre » pour
nous
, c’est déjà presque une routine… 1er août 1914, 2 septembre 1939. L’a
1714
9. L’alerte de Munich, aussi. Et quel jour sommes-
nous
aujourd’hui ? Eh bien ce sera le 7 décembre de 1941. Si vous voulez s
1715
n rentrant à New York, à la gare de Pennsylvanie.
Nous
y fûmes. La bannière étoilée pendait immensément du dôme perdu dans l
1716
t, on apporte une radio, et dans un grand silence
nous
avons écouté le discours de Roosevelt sur la déclaration de guerre. U
1717
sque trop distingué, m’a-t-il semblé. Et à la fin
nous
nous sommes tous levés, émus, pendant qu’on jouait le Star-Spangled B
1718
trop distingué, m’a-t-il semblé. Et à la fin nous
nous
sommes tous levés, émus, pendant qu’on jouait le Star-Spangled Banner
1719
ins de Blanche-Neige. Vers trois heures du matin,
nous
sortons. Toute envie de dormir s’évapore dans l’air trop vif d’une nu
1720
ées pour justifier des dépenses. » (Ainsi jugeons-
nous
l’Amérique.) Métraux m’emmène de là au Musée d’Art moderne où passe s
1721
rt moderne où passe son film sur l’île de Pâques.
Nous
y retrouvons Buñuel et André Masson. Ce dernier vient de recevoir une
1722
livre et ferais bien de ne plus m’en échapper. Je
devais
aller chez des amis après le dîner. J’entre au hasard dans un petit r
1723
nue. La salle étroite et profonde paraît vide. Il
doit
être environ neuf heures et demie. J’hésite sur le seuil : va-t-on me
1724
depuis deux ans. Je me sens posthume. » Bien que
nous
soyons à peu près du même âge, voilà un homme plus moderne que moi.
1725
st bien assez profonde pour ce format, le facteur
devrait
le savoir ! » Je voyais une mince enveloppe grise pliée en V derrière
1726
es de suie s’écrasent sur mon papier, la verrière
doit
être fendue ou mal jointe. Raccommodé avec un ligament de ficelle ver
1727
Huizinga (qu’il m’avait envoyé en allemand après
nos
entretiens de l’automne 1940) et The Philosophy of Physical Science d
1728
n droit, dans la cité, dans la passion…). 2. Mais
nous
vivons dans le monde de la tricherie. (La lutte contre les lois est m
1729
s, physiognomonie, rhétorique) et l’actualité qui
nous
harcèle et qui m’a pourchassé jusqu’ici. Ou encore les formes fixes d
1730
e le mieux explicables. Cette méthode descriptive
doit
prévenir le danger de systématisation inhérent à toute étude du phéno
1731
ages en général, à la réalité communicable. Car «
nous
ne pouvons communiquer que notre connaissance des structures » (Eddin
1732
mmunicable. Car « nous ne pouvons communiquer que
notre
connaissance des structures » (Eddington). Il y a plus : le mouvement
1733
s données régulières et organiques sur lesquelles
doivent
et peuvent se fonder les règles. Les ignorer, tenter de les détruire,
1734
t, avec la même chaleur humaine, tient encore sur
nous
son regard de vivant ? jusqu’au beau coup d’archet de la péroraison :
1735
iques, il attend l’heure de se lever encore parmi
nous
: pour la France, pour l’Europe et pour l’humanité. » Grande prose mu
1736
et le dimanche matin j’annonce subitement que je
dois
rentrer en ville pour une affaire pressante. En vérité j’ignorais que
1737
nces, me disait l’autre jour : « Ce n’est pas que
nous
refusions les règles, et ce n’est pas ignorance ou maladresse, non :
1738
norance ou maladresse, non : les règles existent,
nous
voulons bien, mais pour quelque raison qu’il faudrait dégager, nous n
1739
mais pour quelque raison qu’il faudrait dégager,
nous
ne pouvons plus nous en servir. » Raisons que je « dégage » pour ma p
1740
ison qu’il faudrait dégager, nous ne pouvons plus
nous
en servir. » Raisons que je « dégage » pour ma part : 1. Notre projet
1741
ir. » Raisons que je « dégage » pour ma part : 1.
Notre
projet n’est plus le même que celui des hommes qui avaient posé ou ac
1742
mes qui avaient posé ou accepté les règles. Elles
nous
sont donc défavorables. 2. Nos instruments ont changé, et la nature d
1743
les règles. Elles nous sont donc défavorables. 2.
Nos
instruments ont changé, et la nature des résistances aussi : matériau
1744
etc. Les règles ne sont donc plus applicables. 3.
Nous
cherchons davantage à exprimer une particularité qu’une réalité commu
1745
xprimer une particularité qu’une réalité commune.
Notre
intention est donc antirégulière, créatrice d’un malaise sans cesse r
1746
usant de noter, pour plus tard, la composition de
notre
équipe en termes de gazette littéraire. L’ancien rédacteur en chef de
1747
cinq heures au fond de la grande salle. Il vient
nous
prêter sa voix noble, agrémentée d’un léger sifflement, mais il garde
1748
la polycopie, avant d’être remis aux announcers,
nous
trouvons un moment pour causer. Et souvent nous parlons des fêtes que
1749
, nous trouvons un moment pour causer. Et souvent
nous
parlons des fêtes que nous rêvons d’organiser. Celle par exemple qui
1750
our causer. Et souvent nous parlons des fêtes que
nous
rêvons d’organiser. Celle par exemple qui devrait durer trois jours d
1751
ue nous rêvons d’organiser. Celle par exemple qui
devrait
durer trois jours dans une vaste demeure aux portes condamnées, où ch
1752
êve de compensation, si l’on voit dans quel cadre
nous
sommes en train de causer. Trente machines à écrire dans cette salle,
1753
le avions, et la promesse du général Marshall : «
Nous
débarquerons en France. » 26 juin 1942 Déjeuné chez des amis be
1754
n petit récif perdu à plus de deux-mille miles de
notre
continent… et si on la reprend : c’est une importante base d’attaque,
1755
de trois-cents miles du Japon. Dans les deux cas,
nous
aurons dit une vérité. 2 août 1942 Un climat tempéré. — Une no
1756
semaine dernière, il gelait presque. L’Américain
doit
conserver sa garde-robe entière et tout son équipement d’appareils él
1757
ungles qui couvrent neuf dixièmes des continents…
Notre
terre est à peine habitable, dans l’ensemble ! Et dans les régions pl
1758
et la révolution. Seul pays dont tous les manuels
nous
apprennent dès l’enfance — et nul ne s’en étonne — qu’il possède un c
1759
anète, est une exception surprenante. Tout ce que
nos
pères considéraient comme simple, typique, évident et « normal », la
1760
ds le mot puissance au sens de potentiel. Si elle
doit
cesser demain de tirer d’un privilège unique les créations qu’on atte
1761
r du tout, il nomme A. M… avec imprécations. Chez
nos
hôtes, je retrouve Saint-Exupéry. Il m’explique que le Maréchal sauve
1762
aître. J’ai répondu à Saint-Ex que dans mon pays,
nous
tenons pour normal de sacrifier ce qu’il appelle la substance à ce qu
1763
eut être qu’une plage, un loisir sur la plage, et
nous
l’avons ici. New York, 2 septembre 1942 Quoi de plus sale qu’un
1764
? II faut être fou pour rentrer… Mais à l’office,
notre
travail s’intensifie, et les échos nous en reviennent de France. Leur
1765
’office, notre travail s’intensifie, et les échos
nous
en reviennent de France. Leur dire là-bas, dire à la Résistance, que
1766
ine… Mais dire aussi les revers et les défaites :
notre
consigne de véracité est absolue. Washington part de l’idée juste qu’
1767
en montrant ce dessin : c’est moi ! » Le soir, il
nous
lit les fragments d’un livre énorme (« Je vais vous lire mon œuvre po
1768
s beau. Tard dans la nuit je me retire épuisé (je
dois
être demain à neuf heures à New York), mais il vient encore dans ma c
1769
re 1942 Débarquement allié en Afrique du Nord.
Nous
n’avons pas quitté le bureau pendant une trentaine d’heures. Émotion
1770
r la France, à l’instant même où le GQG américain
nous
fait savoir qu’on peut y aller. 89. En novembre 1939, passant par
1771
ais libre encore de remonter la rue. L’occupation
doit
achever la ressemblance et la pousser jusqu’à l’identité. 90. Quarti
1772
ntres. 91. Il s’agit de La Part du diable , qui
devait
paraître à New York à la fin de 1942, dans une première version. La s
1773
aru en Suisse en 1945, puis à Paris en 1947. 92.
Nous
annoncions chaque semaine, à cette époque, le résultat de l’effort sp
1774
Intermède …mais sachez-le :
nous
n’étions pas absents de vous plus que de nous-mêmes. Vous étiez « occ
1775
s plus que de nous-mêmes. Vous étiez « occupés »,
nous
étions en exil, et les uns comme les autres dans l’inaccepté, dans la
1776
au pire moment, à l’heure de moindre résistance.
Notre
angoisse était de penser : parlerons-nous encore le même langage au j
1777
tance. Notre angoisse était de penser : parlerons-
nous
encore le même langage au jour de ce retour en France, — dans quelle
1778
ce, — dans quelle France, et dans quelle Europe ?
Nous
étions soumis à l’érosion de l’exil, moins brutale, certes, mais plus
1779
vous n’êtes plus l’invité mais un client, et qui
devrait
s’arranger pour payer. Et quand vous n’avez plus d’argent, c’est tout
1780
s’occuper de chacun de vous. Et c’est bien vrai.
Nous
étions trop nombreux. En France, en Suisse aussi, avant la guerre, no
1781
eux. En France, en Suisse aussi, avant la guerre,
nous
trouvions qu’il y avait trop de juifs réfugiés. Des gens frappés par
1782
ù que ce soit, il y en a toujours trop. Cependant
notre
sort vous paraissait enviable, à juste titre. Les pires tourments de
1783
. Autant dire qu’on les tient pour moins sérieux.
Nous
étions mal placés pour discuter cela, donc en somme pour défendre l’e
1784
ait pourtant tout ce qu’il restait à défendre par
nous
, dans l’exil…
1785
oles de l’âme que forment les châteaux au fond de
nos
mémoires. L’idéal de l’Américain serait sans doute la maison d’une se
1786
qui me dit aussitôt que « Marcel aura une idée ».
Nous
appelons Duchamp. Il arrive et propose un plafond de parapluies ouver
1787
rideau relevé, à midi juste, Breton et moi allons
nous
poster au bord du large trottoir de l’Avenue, pour guetter l’effet su
1788
s le comportement américain, et de le comparer au
nôtre
: car il n’y a guère moins d’Européens que d’Américains dans nos bure
1789
y a guère moins d’Européens que d’Américains dans
nos
bureaux. La correction soigneuse de l’exposé et le méthodisme un peu
1790
se m’est fournie par les dactylos et secrétaires.
Nos
Françaises, avec naturel, font des prodiges de vitesse précise, et tr
1791
e vitesse précise, et trouvent encore le temps de
nous
signaler les tours de phrase qui leur paraissent fautifs. Les América
1792
gence mais la mémoire. Faute de mémoire, le singe
doit
chaque matin redécouvrir ce qu’il apprit la veille. Il se voit condam
1793
es de la mémorisation, — l’Amérique où les livres
durent
six mois ; où l’on néglige l’enseignement de l’Histoire ; où l’actual
1794
des frigidaires ou vers des comptes en banque qui
doivent
être remplis. Comment supporterait-elle l’épreuve d’une guerre qui ra
1795
garants infaillibles d’un bonheur qui lui serait
dû
. L’échec pour lui — guerre, privations, retards — n’est pas une décep
1796
’au saisissement du suprême. De fait, qu’opposons-
nous
à l’exaltation totalitaire ? Pas une idée, ni même un rêve. Pas une v
1797
rfois la crainte vague de perdre une liberté dont
nous
ne savons plus formuler les conditions… Avril 1943 Restriction
1798
révèlent souples et disciplinées. Il est vrai que
nous
manquons de peu de choses encore. Mais la disette se produit par à-co
1799
seulement leur nom, vous pensez aussitôt qu’elles
doivent
être jolies, jeunes et riches. Je croyais à un bluff, mais non : je v
1800
le Pacifique ou en Europe me semblent minces. Je
devrais
passer un an dans un camp d’entraînement, et d’ici là… Ou bien l’on m
1801
ent à toutes ces coquetteries de style imitées de
nos
« bons » auteurs qu’on trouvait à chaque page chez Valéry, chez Gide
1802
nce à des modèles anciens. (Que de pastiches dans
nos
lettres modernes !) Mais ces anciens, que l’on copie de travers, avai
1803
er, selon les cas. ⁂ Défaut commun à presque tous
nos
bons auteurs français contemporains : n’importe qui dira qu’ils « écr
1804
blanc. On y est fort sensible à Paris. Cependant
nous
vivons au xxe siècle, et je voudrais un style qui supporte le transp
1805
ou d’un Goethe ; d’un Valéry et d’un Gide, parmi
nous
. La gloire est devenue le droit d’énoncer des banalités mais qui ne p
1806
sont les réalités d’un monde tout artificiel que
nous
, les hommes, avons bâti selon nos caprices, nos passions et nos raiso
1807
artificiel que nous, les hommes, avons bâti selon
nos
caprices, nos passions et nos raisons folles. Si nous changions un jo
1808
nous, les hommes, avons bâti selon nos caprices,
nos
passions et nos raisons folles. Si nous changions un jour de goûts et
1809
s, avons bâti selon nos caprices, nos passions et
nos
raisons folles. Si nous changions un jour de goûts et d’ambition, ce
1810
caprices, nos passions et nos raisons folles. Si
nous
changions un jour de goûts et d’ambition, ce paysage se transformerai
1811
péennes : ils ne sont pas du tout responsables de
nos
démences nationalistes. Mais les Russes ont le droit d’estimer qu’on
1812
ur ceux de ma sorte. Cette guerre n’est-elle plus
notre
affaire ? Tout se passe comme si Hitler avait cessé d’être et d’agir
1813
e comme si Hitler avait cessé d’être et d’agir en
nous
, Occidentaux, et n’était plus une tentation pour l’âme collective, ma
1814
rt est déjà décidé. Et le reste intéresse surtout
nos
grands États, nos grandes Nations. Ne ferais-je pas mieux de retourne
1815
. Et le reste intéresse surtout nos grands États,
nos
grandes Nations. Ne ferais-je pas mieux de retourner à mon travail ?
1816
’alléger sur des terres plus nues, j’ai senti que
nous
passions un seuil, comme on le sent un peu après Valence quand on des
1817
on descend vers le Midi. Pendant une heure encore
nous
avons traversé des plateaux légèrement vallonnés où galopaient des tr
1818
et quelques cavaliers en redingote rouge. Et puis
nous
avons ralenti pour prendre une petite route sinueuse où l’on croisait
1819
er mettons deux ou trois-cents fois plus qu’un de
nos
plus grands millionnaires se traduit par certains avantages sensibles
1820
nt cette forme d’imagination qui manque le plus à
nos
élites : l’intuition des mythes de notre âge et de leur dynamisme pro
1821
le plus à nos élites : l’intuition des mythes de
notre
âge et de leur dynamisme profond. Existe-t-il une seule femme en Euro
1822
moyens pareils au service d’une si ferme vision ?
Nous
répétons que l’Amérique est barbare. Mais qu’avons-nous fait de la fo
1823
épétons que l’Amérique est barbare. Mais qu’avons-
nous
fait de la force ? Nous la laissons à la brute hitlérienne. Et qu’avo
1824
st barbare. Mais qu’avons-nous fait de la force ?
Nous
la laissons à la brute hitlérienne. Et qu’avons-nous fait de l’esprit
1825
s la laissons à la brute hitlérienne. Et qu’avons-
nous
fait de l’esprit ? L’inefficacité par excellence. « Trop intelligent
1826
Londres et même à Berlin. Or la langue française
nous
apprend que celui qui ne peut rien, fût-il un grand esprit, s’appelle
1827
supprime les droits de recours et de révolte qui
nous
sont encore impartis : il prétend distribuer lui-même les vocations,
1828
ur la réalité et sur la liberté des vocations. Je
dois
mon œuvre à la communauté, c’est un service qu’on ne saurait chiffrer
1829
ait chiffrer, je le lui donne. En retour, elle me
doit
les moyens de mon travail. Si j’exige trop, j’en serai le premier gên
1830
moins cher que vos guerres. 21 octobre 1943
Nous
avons inventé un jeu de cartes — une manière entièrement nouvelle de
1831
que personne ne voit plus sur les cartes à jouer.
Nous
nous sommes inspirés librement des recherches de C. G. Jung, dont Mar
1832
ersonne ne voit plus sur les cartes à jouer. Nous
nous
sommes inspirés librement des recherches de C. G. Jung, dont Mary a e
1833
usqu’à l’horizon bleu des Appalaches. Pendant que
nous
roulons sur une route de campagne, au creux des haies, le ciel se cou
1834
nt de la porte dont un battant s’entrouvre devant
nous
. Trois grands longs chiens sortent, le museau bas, et l’un vient vomi
1835
ens sortent, le museau bas, et l’un vient vomir à
nos
pieds des morceaux de cire mal mâchés. Une servante les poursuit armé
1836
George Washington. (C’est une pièce de musée que
nous
allons voir, remisée sous la colonnade des écuries.) Nous pénétrons d
1837
ons voir, remisée sous la colonnade des écuries.)
Nous
pénétrons dans un vestibule sombre. La maîtresse de maison est sortie
1838
aîtresse de maison est sortie à cheval. Promenons-
nous
en l’attendant. L’odeur des chiens imprègne les corridors. Dans un fu
1839
s blondes boivent des whiskies, sans se déranger.
Nous
traversons toute la maison, puis une large galerie ouverte, encombrée
1840
eaux, les coussins de velours rouges sont moisis.
Nous
redescendons. Le ciel est devenu noir. Du portique, entre les hautes
1841
n coup de vent violent a jeté contre la façade et
nos
visages un tourbillon de feuilles et de grosses gouttes obliques. Ent
1842
s décapitées, ou renversées dans les branchages —
nous
arrivons au coin d’un bâtiment de ferme. C’est le chenil. Le parc s’a
1843
s loin, en silhouette sur la crête d’une colline,
nous
voyons deux chevaux au galop. Ils disparaissent dans un vallonnement,
1844
ans un vallonnement, et maintenant remontent vers
nous
sans ralentir. Une femme en jaune, suivie d’un homme. Comme ils s’app
1845
n fin sweater jaune. Elle rit, jette la pomme, et
nous
salue de la main. Le jeune homme mince, immobile sur son cheval nous
1846
in. Le jeune homme mince, immobile sur son cheval
nous
considère avec hostilité. Il a les yeux d’un bleu très pâle et dur. I
1847
u très pâle et dur. Il n’a pas salué. Son silence
nous
supprime. C’est sans doute le nouvel intendant. « Je vous retrouve à
1848
des entrent et vont s’asseoir un peu à l’écart de
notre
groupe. Un autre homme apporte un plateau. On le renvoie chercher des
1849
bien ? m’ont demandé mes amis dans la voiture qui
nous
emporte sous la pluie, qu’en pensez-vous ? — Well… pour la première f
1850
Chacun s’imagine que la guerre va faire surgir de
nos
décombres quelques œuvres de premier plan, beaucoup d’idées nouvelles
1851
un souhaite que l’épreuve balaye les préjugés qui
nous
encombraient l’âme, paralysaient le cœur, faussaient l’intelligence.
1852
elligence. Je crains qu’il n’en soit rien, voyant
nos
émigrés et lisant quelques-uns de leurs écrits. Quant à l’Europe, si
1853
resque automatique. « Un monde nouveau surgira de
nos
ruines » — un monde meilleur, bien entendu. C’est un rêve de compensa
1854
par une évolution fatale au défaut d’invention de
nos
esprits. Et qui donc parmi nous se soucie d’inventer ? Une atonie mon
1855
aut d’invention de nos esprits. Et qui donc parmi
nous
se soucie d’inventer ? Une atonie mondiale répond à l’événement. Nous
1856
enter ? Une atonie mondiale répond à l’événement.
Nous
aurons peu pensé, pendant la guerre. Les hommes politiques de ce temp
1857
mal à pousser leurs efforts au maximum. La guerre
nous
porte. Elle est le temps de l’effort aisé parce qu’imposé. Nous auron
1858
le est le temps de l’effort aisé parce qu’imposé.
Nous
aurons peu pensé, pendant la guerre. Le principal de nos conversation
1859
ons peu pensé, pendant la guerre. Le principal de
nos
conversations était fourni par les journaux et la radio. Heureux celu
1860
rs, ce n’était qu’aux dépens de sa signification.
Nous
aurons peu senti, peu réfléchi. Nous attendions, dans la rumeur des c
1861
gnification. Nous aurons peu senti, peu réfléchi.
Nous
attendions, dans la rumeur des commentaires et des regrets, et des vi
1862
e. Ceux qui sont morts n’en savaient pas plus que
nous
. Les héros. Et moi ? Si je ne suis pas héros, c’est que je suis père
1863
la foi des vedettes. À leurs yeux, tout Français
devait
ressembler aux types d’humanité que représentaient dans le monde les
1864
hui, dans sa véritable grandeur. Les journaux qui
nous
donnent à New York des nouvelles de la Résistance nous parlent du peu
1865
donnent à New York des nouvelles de la Résistance
nous
parlent du peuple de France ; les récits et les témoignages clandesti
1866
e ; les récits et les témoignages clandestins qui
nous
parviennent de plus en plus nombreux nous parlent du peuple de France
1867
ins qui nous parviennent de plus en plus nombreux
nous
parlent du peuple de France ; et des films tournés à Hollywood ou à L
1868
Londres sur l’épopée secrète de la Résistance ne
nous
montrent encore que le peuple de France, pour la première fois à l’ét
1869
bien par ici, qu’il se dépêche ! » Au Waldorf, on
nous
a répartis dans quatre salons communicants. J’écoute le speech du Gén
1870
n de la guerre, dans les six mois. G. B. — Sommes-
nous
proches de l’ère des monstres dont parle D. de R… ? A. B. — On va ver
1871
nquent de filières. Le rationalisme le plus fermé
nous
menace. 96. On peut bien dire que Ford, par exemple, qui est l’hom
1872
parmi les signes. Sédiments séculaires, socles de
nos
patries ! Monuments que l’on ne voit plus, mais qui renvoient l’écho
1873
voit plus, mais qui renvoient l’écho familier de
nos
pas. Et ces rues qui tournaient doucement vers une place plantée d’ar
1874
stionnait, répondait. La force était au secret de
nos
vies, nouée parfois dans une rancune obscure, ou bien dans la contemp
1875
’un vieil arbre — il était vieux déjà du temps de
notre
enfance, et notre possession la plus tenace, il nous réduisait au sil
1876
il était vieux déjà du temps de notre enfance, et
notre
possession la plus tenace, il nous réduisait au silence. La force éta
1877
e enfance, et notre possession la plus tenace, il
nous
réduisait au silence. La force était chanson fredonnée sur le seuil,
1878
(hélas ?) bien plus à dire et à faire par ceux de
notre
engagement que je ne pouvais le penser il y a quatre ans. Et tout ce
1879
rte secousse. Enfin la certitude de l’arrêt, mais
nous
étions encore tout étourdis. Je n’ai vraiment « réalisé » que ça y ét
1880
es grandes manchettes après douze ans ? Qu’allons-
nous
devenir ? Maintenant que de nouveau les choses anciennes sont là, non
1881
ertes, mais celle-ci en tout cas : que de nouveau
notre
avenir dépend de nous. Et notre mort. La mort était si simple et absu
1882
tout cas : que de nouveau notre avenir dépend de
nous
. Et notre mort. La mort était si simple et absurde en série. Elle ten
1883
: que de nouveau notre avenir dépend de nous. Et
notre
mort. La mort était si simple et absurde en série. Elle tenait de la
1884
la loterie, non plus de la tragédie intime. Elle
nous
était distribuée à la volée. Il va falloir se remettre à la mûrir cha
1885
sérieuse et lente, et chargée d’un sens inconnu.
Nous
roulions tous ensemble dans une descente aux vertiges variés et passi
1886
ir. Et plus d’Ennemi numéro Un, après douze ans.
Nous
étions « conditionnés » pour la mort en grande série et soudain, nous
1887
ionnés » pour la mort en grande série et soudain,
nous
trouvons le tiroir vide — la vie à faire. Sommes-nous donc une généra
1888
trouvons le tiroir vide — la vie à faire. Sommes-
nous
donc une génération sacrifiée, qui aura perdu ses belles années à s’a
1889
ru ? Oui, si le danger a vraiment disparu ; et si
nous
ne savons rien tirer de cette épreuve de nos forces. Or presque aucun
1890
si nous ne savons rien tirer de cette épreuve de
nos
forces. Or presque aucun danger n’a vraiment disparu. Et je ne vois p
1891
ns. Tout ce qu’il paraît sensé de dire, c’est que
notre
génération n’aura lutté en vain que si elle cesse de lutter. Lake
1892
méthodiste. Un curé canadien prêche en français :
nous
sommes ici un peu plus près de Montréal que de New York. L’hôtel se n
1893
er dans l’État, la pancarte porte aujourd’hui : «
Nous
sommes catholiques et protestants. » Les rives, les îles s’ornent de
1894
isémitisme. — Un voisin de l’été dernier est venu
nous
rendre visite et nous conter les événements de la région. (Je ne dis
1895
n de l’été dernier est venu nous rendre visite et
nous
conter les événements de la région. (Je ne dis pas les potins, car sa
1896
armi ces événements locaux le plus marquant, pour
notre
ami, paraît être la vente d’un grand hôtel à une nouvelle direction j
1897
cher aux chrétiens qui s’égarent chez eux ? Pour
nous
, c’est dix dollars de plus que pour un Juif ! — Mais cet hôtel, si je
1898
l’État, extrêmement bien fréquenté. — C’est donc
nous
qui avons commencé. Et les mesures prises par ce Juif sont de bonne g
1899
nt conformes au génie juif, tel que l’ont façonné
nos
persécutions. Au lieu d’interdire brutalement l’entrée de l’hôtel à c
1900
l’entrée de l’hôtel à ceux de l’autre race, comme
nous
le faisons, il se borne à les écœurer tout en tirant son petit profit
1901
le ridicule ; quand on les tue. Mais le fait que
notre
ami, cependant, l’ait dite aussi spontanément, prouverait qu’un effor
1902
« bon Allemand », dit-il, est le plus dangereux.
Nous
avons en commun, par ailleurs, quelques très bons amis allemands réfu
1903
ugiés à New York depuis la guerre ou depuis 1933.
Nous
n’en sortirons donc jamais par ce biais-là. Abandonnons toute prétent
1904
en Allemagne et aujourd’hui, aux yeux de ceux qui
doivent
en décider. Une anecdote la résumera, que je viens de voir citée par
1905
régime hitlérien, par d’écrasantes majorités ? Il
doit
donc bien y avoir des nazis en Allemagne et même en assez grande quan
1906
ains, les démocrates et les bolchéviques ! Jamais
nous
n’avons été nazis ! » Qu’il y ait ou non de « bons Allemands », cette
1907
l’ai observé : les Allemands ne mentent pas comme
nous
. Et c’est un fait fondamental dont il convient de tenir compte quand
1908
oblème allemand ». Ils mentent avec sincérité, et
nous
mentons avec mauvaise conscience. Quand nous mentons, nous savons bie
1909
, et nous mentons avec mauvaise conscience. Quand
nous
mentons, nous savons bien que la vérité ne change pas pour si peu. El
1910
ons avec mauvaise conscience. Quand nous mentons,
nous
savons bien que la vérité ne change pas pour si peu. Elle subsiste in
1911
change pas pour si peu. Elle subsiste intacte et
nous
juge. Eux croient, s’ils changent d’avis par « intérêt vital », que t
1912
e du village, et que j’en paraissais fort ennuyé,
nos
voisins vinrent un soir nous en offrir, et c’est ainsi que nous avons
1913
raissais fort ennuyé, nos voisins vinrent un soir
nous
en offrir, et c’est ainsi que nous avons fait connaissance. Deux femm
1914
inrent un soir nous en offrir, et c’est ainsi que
nous
avons fait connaissance. Deux femmes d’âge moyen et leurs maris se pa
1915
leurs maris se partagent une maison que les pins
nous
cachent, à deux-cents pas, plus petite que la nôtre, donc plus commod
1916
ous cachent, à deux-cents pas, plus petite que la
nôtre
, donc plus commode et plus confortable à leur sens. (Seuls les Europé
1917
ais Américains moyens) concluent-ils en souriant.
Nous
leur avons offert des boissons, et nous nous appelons par nos prénoms
1918
souriant. Nous leur avons offert des boissons, et
nous
nous appelons par nos prénoms, sans avoir jamais bien compris nos nom
1919
ant. Nous leur avons offert des boissons, et nous
nous
appelons par nos prénoms, sans avoir jamais bien compris nos noms de
1920
ns offert des boissons, et nous nous appelons par
nos
prénoms, sans avoir jamais bien compris nos noms de famille. L’autre
1921
s par nos prénoms, sans avoir jamais bien compris
nos
noms de famille. L’autre jour, Robert m’a conduit à Albany, pour m’év
1922
s doute d’origine indienne. « Personne ne connaît
notre
ville, me dit Robert, et pourtant elle avait les plus grandes filatur
1923
e rappelle la Souabe, le Wurtemberg. Et justement
nous
arrivons devant une maison de bois peinte en jaune clair, ornée de gé
1924
le West, et de la partie nord de la Pennsylvanie.
Nous
traversons maintenant la ville pour aller au bureau de Robert. Plusie
1925
ne église orthodoxe ? — Oui, dit Robert, l’une de
nos
deux églises ukrainiennes. » La moitié de la population de Cohoes est
1926
sie ? Non, il y a trop d’autos. Robert revient et
nous
roulons vers Albany. À la sortie de la ville, il me montre un terrain
1927
un terrain d’aviation : — C’est moi qui ai fondé
notre
Air Club, il y a quinze ans, j’étais tout jeune. J’ai eu jusqu’à tren
1928
ohoes à une ville du même nombre d’habitants chez
nous
; de comparer Robert à un Robert d’Europe, de même niveau social et d
1929
rope, de même niveau social et de même éducation.
Nous
ne manquons pas de petits-bourgeois pieux et honnêtes, mais ils n’ont
1930
ils n’ont pas le sens du risque et de la vitesse.
Nous
avons bien des fanatiques de l’aviation, mais ce ne sont pas des agen
1931
te ville, aux images que par Hollywood l’Amérique
nous
propose d’elle-même, et qu’elle s’efforce d’imiter. Lake George, 3
1932
ns et l’eau tout de suite, au pied de la galerie.
Nous
attendions Marcel Duchamp sans trop savoir quand il viendrait, et pou
1933
st très bien. » Il va donc rester quelques jours.
Nos
voisins sont venus en fin d’après-midi, gentils et trop gentils, prôn
1934
asses sont inéducables, dit-il après le départ de
nos
hôtes. Elles nous détestent et nous tueraient volontiers. Ce sont les
1935
ables, dit-il après le départ de nos hôtes. Elles
nous
détestent et nous tueraient volontiers. Ce sont les imbéciles qui, en
1936
s le départ de nos hôtes. Elles nous détestent et
nous
tueraient volontiers. Ce sont les imbéciles qui, en se liguant contre
1937
pellent la réalité, le monde « matériel » tel que
nous
le souffrons. Ça les arrange. C’est ce même monde que la science, ens
1938
ence, la lenteur, et la solitude. Aujourd’hui, on
nous
traque… — Oui, dis-je, mais tout dépend des vrais désirs des hommes :
1939
t d’assumer. Le reste est beaucoup plus facile. À
nous
de choisir nos fées, puisque nous le pouvons en vertu de l’extrême li
1940
reste est beaucoup plus facile. À nous de choisir
nos
fées, puisque nous le pouvons en vertu de l’extrême liberté que nous
1941
plus facile. À nous de choisir nos fées, puisque
nous
le pouvons en vertu de l’extrême liberté que nous nous accordons par
1942
nous le pouvons en vertu de l’extrême liberté que
nous
nous accordons par convention. Voulons-nous susciter les fées du brui
1943
le pouvons en vertu de l’extrême liberté que nous
nous
accordons par convention. Voulons-nous susciter les fées du bruit et
1944
é que nous nous accordons par convention. Voulons-
nous
susciter les fées du bruit et de la vitesse, ou celles de la lenteur
1945
sse, ou celles de la lenteur et du silence ? Mais
notre
ami le Dr M. V…, qui passe l’été près ici avec deux girls, nous écras
1946
M. V…, qui passe l’été près ici avec deux girls,
nous
écrase d’un souriant dédain. « Vous aurez bientôt, nous dit-il, les p
1947
crase d’un souriant dédain. « Vous aurez bientôt,
nous
dit-il, les preuves les plus éclatantes de la réalité des lois de la
1948
té des lois de la science, je sais ce que je dis.
Nous
calculons les mouvements de l’électron, la puissance des rayons cosmi
1949
de l’électron, la puissance des rayons cosmiques,
nous
ferons marcher des moteurs avec ça ! Allez en faire autant avec vos f
1950
e considère comme l’origine, non comme l’effet de
notre
idée de cause. Indémontrable, évidemment… D’ailleurs, ce n’est pas ce
1951
e n’est pas cela. Je crois que Dieu est fou selon
nos
normes rationnelles, infiniment plus fou que tout ce que nous pouvons
1952
rationnelles, infiniment plus fou que tout ce que
nous
pouvons imaginer de lui… Avant d’aller me coucher, je lui donne Le No
1953
tés. Le mariage, par exemple. Il me semble que je
devrais
d’abord aller demander à mon père son opinion, — son OK. Probablement
1954
nte ans, chez un artiste. C’est à ce moment qu’il
doit
se renouveler entièrement, ou se résigner à s’imiter lui-même. Vous a
1955
evenir son propre père ? 6 août 1945 Ce qui
nous
manque ici, c’est un jeu d’échecs. Celui dont Duchamp se sert pour se
1956
aillements », précise-t-il. Mais faute d’y jouer,
nous
en parlons. C’est d’ailleurs le mot de sa vie : échec de l’art, art d
1957
s par jour — son régime ordinaire — la plupart de
nos
aliments, surtout la viande, n’étant pas assimilés et ne servant qu’à
1958
viande, n’étant pas assimilés et ne servant qu’à
nous
bourrer l’estomac d’une sorte de caoutchouc. « Et tout ce temps qu’on
1959
e mouvement de retrait.) Le soir, faute d’échecs,
nous
essayons de créer quelques problèmes avec des Chinese Checkers trouvé
1960
se Checkers trouvés dans la bibliothèque, et cela
nous
mène assez tard. Nous avons fini hier par un petit jeu de questions e
1961
ns la bibliothèque, et cela nous mène assez tard.
Nous
avons fini hier par un petit jeu de questions et réponses écrites sim
1962
dain : — La seule chose ennuyeuse, c’est que j’ai
dû
racheter ce chèque à mon dentiste, pour le faire figurer dans ma vali
1963
deurs s’épousent par infra-mince. » Voudriez-vous
nous
donner d’autres exemples ? — En effet, on ne peut guère en donner que
1964
xemples. C’est quelque chose qui échappe encore à
nos
définitions scientifiques. J’ai pris à dessein le mot mince qui est u
1965
ndre, ni vous goûter goûtant, et ainsi de suite ?
Nous
sommes en train de déjeuner sur la galerie, au-dessus de l’eau. Entre
1966
de la terre en est changée, mais combien de temps
nous
faudra-t-il pour le comprendre ? Si nous n’y arrivons pas très vite,
1967
de temps nous faudra-t-il pour le comprendre ? Si
nous
n’y arrivons pas très vite, nous n’y arriverons sans doute jamais : n
1968
comprendre ? Si nous n’y arrivons pas très vite,
nous
n’y arriverons sans doute jamais : nous sauterons comme des imbéciles
1969
rès vite, nous n’y arriverons sans doute jamais :
nous
sauterons comme des imbéciles. Il ne nous reste qu’une alternative :
1970
amais : nous sauterons comme des imbéciles. Il ne
nous
reste qu’une alternative : le Monde uni ou l’Autre monde. Le dire tou
1971
Commencer par raconter l’entrée de la Chose dans
nos
esprits. Ce sera le début de la première de mes Lettres. Hier, j’ai r
1972
st accouru sur la galerie, à la nouvelle, et j’ai
dû
raconter l’histoire comme si je revenais d’Hiroshima, comme si j’en é
1973
shima, comme si j’en étais responsable. À minuit,
nous
en parlions encore. Le choc nous avait jetés dans l’élucubration, plu
1974
sable. À minuit, nous en parlions encore. Le choc
nous
avait jetés dans l’élucubration, plutôt que dans la terreur ou la méd
1975
ante qu’affecte Sherlock Holmes devant Watson. Il
nous
donnait ainsi, d’un mot, la clef de ses mystérieuses disparitions dan
1976
magazine du genre Look. C… s’écria que l’idée que
nous
mourrons tous dans une grande explosion la hantait depuis son enfance
1977
La Mort lente), il avait disparu dans les bois et
nous
revint au bout d’une heure, pâle et défait, disant que sa vie n’avait
1978
lectuel dont il est la seule ceinture noire parmi
nos
artistes et penseurs. J’admire l’économie de ses moyens : un rien, un
1979
12 août 1945 C’était l’heure du cocktail sur
notre
grande galerie, par une fin d’après-midi dorée. Le lac n’avait jamais
1980
rée. Le lac n’avait jamais été plus pur et calme.
Nous
parlions peu et nous étions heureux. À sept heures une sourde explosi
1981
amais été plus pur et calme. Nous parlions peu et
nous
étions heureux. À sept heures une sourde explosion s’est longuement r
1982
pleurait. Et le jeune capitaine parachutiste qui
devait
repartir pour l’attaque du Japon : « Je vivrai donc !… » Les autres s
1983
Mon appartement ayant été vendu pendant l’été, je
dois
le quitter dans quelques jours. Il n’y a rien à louer dans toute la v
1984
e.) Les boîtes à lettres portent des noms en cek,
nous
sommes dans le quartier slovaque. Je gravis l’escalier jusqu’au trois
1985
lle me saisit le bras : — Ah vous ! Je reviens de
notre
capitale, j’avais des choses très importantes à demander à notre Gran
1986
j’avais des choses très importantes à demander à
notre
Grand Patron100 qui m’avait invitée à dîner, mais croirez-vous que de
1987
n… — Pourquoi jeune ? Elle a dit son âge ? — Oh !
nous
savons, nous avons l’habitude. Le 4, un jeune homme qui arrivait de C
1988
jeune ? Elle a dit son âge ? — Oh ! nous savons,
nous
avons l’habitude. Le 4, un jeune homme qui arrivait de Chicago. C’est
1989
git d’une ivrogne ou d’une évangéliste qui maudit
nos
vices… 15 décembre 1945 Saison de Noël à New York. — Le 1er dé
1990
nt officiellement le Yuletide, la saison de Noël.
Nous
sommes le 15 et les rayons de jouets sont déjà presque vides. Depuis
1991
istoire de l’hôtel — à partir de $ 20 la place ».
Nous
fûmes hier chez Schwartz, grand magasin de jouets de la Cinquième Ave
1992
puis ses yeux s’écarquillèrent largement : devant
nous
venait d’apparaître une jeune femme au visage anguleux et couvert de
1993
, dit-elle en lui pinçant la joue, et la vendeuse
nous
planta là. Il neigeait sur la Cinquième Avenue, sur les paquets enrub
1994
d meeting. Sur le coup de minuit, le 31 décembre,
nous
perdrons le meilleur maire de New York. Tammany reviendra au pouvoir.
1995
l », qualités préférées de l’Américain. Déjà l’on
nous
annonce de Hollywood un superfilm sur la bombe atomique, où le love i
1996
e, et de l’antiaméricanisme de l’Europe, pour que
nous
comprenions que les hommes ont fort peu de bonne volonté ? La plupart
1997
reportages sur l’Amérique que publient en Europe
nos
journalistes me paraissent arbitraires et contestables, même s’ils so
1998
geste intime ou d’un visage aimé. Prenons-en donc
notre
parti. Sauf si l’on se borne à la géographie, ces entités ne souffren
1999
me contenter de répondre : c’est plutôt vous qui
devriez
sortir, sous peine de ne pas comprendre la réalité mondiale. Après to
2000
les termes où l’on me dit qu’elle est posée dans
nos
pays : Faut-il partir ? (Peut-on partir est une tout autre affaire.)
2001
semaines encore, du côté où les jeunes Européens
devraient
aller s’il s’agissait pour eux de partir. Je vois les avantages de l’
2002
remment, puisqu’on pose le problème. Supposez que
nous
soyons libres de circuler à notre guise. Je répondrais sans hésiter :
2003
me. Supposez que nous soyons libres de circuler à
notre
guise. Je répondrais sans hésiter : il ne s’agit ni de choisir une te
2004
au xxe siècle, en tenant compte des réalités que
nous
avons créées ou laissé s’imposer ; de la rapidité des transports, par
2005
ples : on verrait vite que c’est un faux dilemme.
Nous
allons en dix heures de Lisbonne à New York au Pacifique. Un très lon
2006
ork au Pacifique. Un très long voyage aujourd’hui
nous
ramènerait nécessairement au point de départ, après un petit tour de
2007
point de départ, après un petit tour de planète.
Nous
changeons de continent comme on part en week-end. Le mot partir a don
2008
vécu. Mais ce qui naît, ce qui peut naître parmi
nous
, c’est un amour plus large de l’humain, une conception de la fidélité
2009
on des visas, de ces anachronismes scandaleux qui
nous
empêchent de rejoindre le siècle, de l’habiter et d’user de ses dons.
2010
et d’user de ses dons. Forçons les gouvernants à
nous
répondre : à quoi servent ces barrages de tampons ? Comment peut-on l
2011
nts. Ils rendent vains les progrès matériels dont
notre
époque pourrait enfin s’enorgueillir. Ils représentent dans l’esprit
2012
la Fatalité imbécile. Pourquoi donc les acceptons-
nous
comme des moutons, sans qu’une seule voix proteste ? Février 1946
2013
rridors et dans le vestibule qui sent le fruit de
notre
ancienne maison de campagne, et mon pied reconnaît cette brique, près
2014
si matinal dans une grande ville de l’Europe. Je
dois
me tromper. Je verrai cela demain… Ces deux types vont rester ici. Le
2015
’était déjà presque l’été. Cinq heures plus tard,
nous
avons rejoint l’hiver, un ouragan de neige horizontale sur le désert
2016
le désert des forêts canadiennes aux lacs gelés.
Nous
dûmes passer toute une nuit dans les lugubres baraquements de la base
2017
ésert des forêts canadiennes aux lacs gelés. Nous
dûmes
passer toute une nuit dans les lugubres baraquements de la base de Ga
2018
base de Gander, à Terre-Neuve. Une aurore boréale
nous
avait arrêtés, non point que sa beauté nous eût cloués sur place, mai
2019
réale nous avait arrêtés, non point que sa beauté
nous
eût cloués sur place, mais parce qu’elle provoquait des tempêtes magn
2020
ement dénouée dans les hauteurs du ciel arctique,
nous
montâmes en spirale à 5000 mètres, au-dessus d’une mer morte de glace
2021
on s’élance pour franchir l’Océan d’un seul bond.
Nous
volons à tire-d’aile vers l’Irlande ». Mais ce cliché et ces jolies s
2022
d de l’avion, attendre que la boule au-dessous de
nous
ait tourné jusqu’au point désiré, pour y descendre et s’y poser. Rien
2023
t qui en est à la troisième journée du trajet que
nous
ferons à rebours en trois heures. Nous sommes partis tout au début de
2024
trajet que nous ferons à rebours en trois heures.
Nous
sommes partis tout au début de la matinée. Voici déjà l’après-midi, v
2025
matinée. Voici déjà l’après-midi, voici le soir,
nous
volons contre le soleil et le temps coule deux fois plus vite. La str
2026
feu sur l’horizon follement lointain, tandis que
nous
survolons des profondeurs multipliées, cavernes d’ombre et gonflement
2027
ux approches de l’Irlande vient la nuit. Derrière
nous
, tout est flamme et or. Mais un toit d’ombre épaisse descend obliquem
2028
bliquement, rejoint la mer, ferme le monde devant
nous
. En deux minutes nous sommes passés de la gloire aux ténèbres denses.
2029
mer, ferme le monde devant nous. En deux minutes
nous
sommes passés de la gloire aux ténèbres denses. Il n’y a plus, tout p
2030
aux ténèbres denses. Il n’y a plus, tout près sur
nos
têtes, que les lampes en veilleuses, et le ronron assourdi des moteur
2031
nent. 2 avril 1946 Les oiseaux de Paris. —
Nous
roulons dans un petit autobus, du terrain d’Orly vers Paris. Sept ans
2032
epuis que je l’ai quitté… Par quelle porte allons-
nous
entrer ? Je ne puis pas distinguer les noms des rues sur ces maisons
2033
quand je me croyais encore dans la banlieue… Déjà
nous
descendons une rue déserte et provinciale. C’était cela, le boulevard
2034
vard Saint-Michel ? Mais sur les quais, où le car
nous
dépose, j’ai retrouvé les grandes mesures de Paris. Dans quel silence
2035
uel silence, à quatre heures du matin. Trouverons-
nous
quelques chambres pour le reste de la nuit ? Deux jeunes Américains d
2036
is pas à Paris. Et c’est bien un de ces tours que
nous
jouent les cauchemars, de rapetisser méchamment tous les êtres, d’eff
2037
. L’Europe ancienne s’est rétrécie à la mesure de
nos
frontières. En une semaine, aux deux bouts de mon voyage, je viens de
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iels, ne se risquait à prononcer : « Messieurs,
nous
voici réunis pour célébrer une défaite victorieuse. On a parlé de fun
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attendant une vraie Ligue des Peuples, préparons-
nous
à de nombreux voyages. La SDN ressemble à l’ONU comme le négatif d’un
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tif d’un cliché au positif que l’on va proposer à
notre
admiration. Elle tient ses dernières assises dans le pays qui lui off
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cène ne sont pas représentés dans cette enceinte.
Nous
laissons à la Suisse minuscule un gigantesque palais vide, pour nous
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Suisse minuscule un gigantesque palais vide, pour
nous
ruer vers la grande Amérique où l’on ne trouve pas une chambre à loue
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doxe de la crise des logements ! Mais qu’importe.
Notre
idée se “développe” comme on le dit en photographie. Nous partons pou
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e se “développe” comme on le dit en photographie.
Nous
partons pour une Ligue meilleure. Et plus heureux que Moïse, nous nou
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r une Ligue meilleure. Et plus heureux que Moïse,
nous
nous sentons certains d’entrer dans l’ère de la Terre unifiée, qui ét
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Ligue meilleure. Et plus heureux que Moïse, nous
nous
sentons certains d’entrer dans l’ère de la Terre unifiée, qui était l
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ns l’ère de la Terre unifiée, qui était le but de
nos
travaux diserts. Nous y touchons, messieurs, vraiment — il ne s’en fa
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unifiée, qui était le but de nos travaux diserts.
Nous
y touchons, messieurs, vraiment — il ne s’en faut que d’un atome… »
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dans ma vie, sinon dans l’histoire du monde ; car
nous
sommes loin d’avoir quitté la guerre. « Journal d’un habitant de la p
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u sien : car le même sort paradoxal a décrété que
nous
fussions au centre du conflit tout en restant en marge des batailles.
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de se préparer pour la suite, pour l’heure où ils
devront
« donner ». Le premier devoir d’une réserve est de maintenir ses forc
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our l’heure où ils devront « donner ». Le premier
devoir
d’une réserve est de maintenir ses forces intactes et alertées. Intac
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aintenir ses forces intactes et alertées. Intacts
nous
le sommes, relativement. Alertés, je n’en suis pas sûr. L’ennui, avec
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pparences, les subsistances de l’ordre masquent à
nos
vues immédiates toute l’ampleur de la catastrophe. Il y a des trains
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es et des paroles tenues, la poste fonctionne, on
nous
promet un peu plus de charbon pour cet hiver ; des millions de femmes
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fois… La couche est mince et partout déchirée qui
nous
sépare du désordre profond. Mais ce n’est pas en Suisse qu’on voit ce