1 1970, Lettre ouverte aux Européens. Lettre ouverte
1 banaises, Albanais ! Allemandes fédérales et de l’ Est , Allemands fédéraux et de l’Est ! Autrichiennes, Autrichiens ! Baltiq
2 fédérales et de l’Est, Allemands fédéraux et de l’ Est  ! Autrichiennes, Autrichiens ! Baltiques et Baltes d’Estonie, de Lett
3 , dès qu’il s’agit de collaborer pour quoi que ce soit . Laissez-moi donc vous dire tout simplement : Européennes, Européens 
4 ose qu’« Albanaises, Albanais ! » et la suite. Il était et demeure persuadé que la seule réalité qui compte est nationale.) M
5 demeure persuadé que la seule réalité qui compte est nationale.) Mais on me dit que vous n’existez pas ! On me dit qu’il n
6 , des Albanais, etc., et que les « Européens » ne sont qu’une vue de l’esprit. À ce titre, il n’y a pas de Suisses, mais seu
7 se. La France, la Suisse et les autres nations ne sont pas pour autant de simples vues de l’esprit, mais des réalités bien m
8 et bardées de cordons douaniers. Cependant, elles sont plus transitoires que la Bretagne, la Castille, l’Écosse ou Berne, qu
9 nt. Le problème se ramène à ceci : – ou bien vous êtes Français d’abord et à jamais, ou Tchèques, ou Suisses, et vous croyez
10 ur vous découvrirez — ou vos enfants — que vous n’ êtes plus réellement Français, Tchèques, ou Suisses, que vous ne l’êtes pl
11 ent Français, Tchèques, ou Suisses, que vous ne l’ êtes plus qu’à titre honorifique, par courtoisie ou par simple routine adm
12 aux conditions de fait, comme il arrive, car vous serez Américains ou Soviétiques par allégeance obligatoire, économique, soc
13 ndez le seul pouvoir capable de sauvegarder votre être national et régional, vos manières d’être différents, votre droit à r
14 r votre être national et régional, vos manières d’ être différents, votre droit à rester vous-mêmes. En d’autres termes : si
15 , en tant que Français, Tchèques ou Suisses. Vous serez colonisés l’un après l’autre, et insensiblement dénaturés par le doll
16 ou par vos partis communistes, comme vous l’avez été , il n’y a pas longtemps, par le national-socialisme. Vous n’existerez
17 n’existerez plus, faute d’avoir reconnu qu’il ne tient qu’à vous d’exister — puisque, après tout, vous êtes déjà là, vous êt
18 t qu’à vous d’exister — puisque, après tout, vous êtes déjà là, vous êtes tous là depuis des siècles, et qu’il s’agit seulem
19 er — puisque, après tout, vous êtes déjà là, vous êtes tous là depuis des siècles, et qu’il s’agit seulement de le reconnaît
20 que tous ensemble. Mais alors tous ensemble, vous serez plus et mieux que les égaux des deux grands qui aujourd’hui vous écra
21 scutent le sort du monde par-dessus votre tête et sont prêts à vous jouer aux dés. Je vous le démontre. Considérez attentive
22 otez que le rectangle du milieu, qui a même base, est plus haut que les deux autres additionnés. Question : Que représente
23 tionnés 480 millions (dont 360 à l’Ouest, 120 à l’ Est ). Ces quantités démographiques ne disent évidemment qu’une partie de
24 xemple, constitue un lourd handicap. Avouez qu’il est au moins curieux que l’Europe se sente écrasée entre deux colosses pl
25 le en montant l’un sur l’autre, et qui au surplus sont loin d’additionner leurs forces contre nous : ils sont rivaux, et l’u
26 loin d’additionner leurs forces contre nous : ils sont rivaux, et l’un est notre allié, si l’autre est le despote que subiss
27 urs forces contre nous : ils sont rivaux, et l’un est notre allié, si l’autre est le despote que subissent encore à peu prè
28 sont rivaux, et l’un est notre allié, si l’autre est le despote que subissent encore à peu près un quart d’entre nous. Mai
29 t d’un petit État qui ne fait pas le poids, qui n’ est plus à l’échelle du monde nouveau. C’est que l’union de l’Europe n’es
30 du monde nouveau. C’est que l’union de l’Europe n’ est pas faite, et il faut donc absolument la faire pour que notre capacit
31 ance collective que pour vivre nos libertés. Ce n’ est pas, ou ce n’est plus une question de vie ou de mort : on peut très b
32 ue pour vivre nos libertés. Ce n’est pas, ou ce n’ est plus une question de vie ou de mort : on peut très bien vivre à l’amé
33 en. Les mêmes motifs, l’un déclaré, l’autre réel, sont repris au siècle suivant par Georges Podiebrad, roi de Bohême, et par
34 es plans qui ont précédé le sien, mais comme s’il était seul à l’avoir remarqué, sauf s’il s’agit du Grand Dessein, toujours
35 à l’union contre la guerre, comme si la guerre n’ était pas le jeu favori des princes, en attendant qu’elle soit celui des pe
36 s le jeu favori des princes, en attendant qu’elle soit celui des peuples, grâce aux conquêtes de la Révolution. Alors, on ch
37 rises que toute guerre suscite. Car autrement, où serait la politique, telle qu’ils l’entendent ? Faute d’oser avouer qu’ils o
38 r le vérifier, déclenchent la guerre mondiale. Ce sera contre le nationalisme qui vient de faire ses preuves que Coudenhove-
39 t critiqués par les « démocraties » qui n’ont pas été jusqu’au bout de leur nationalisme et de leur étatisme, et qui en fon
40 istance européenne. Le temps des plans sans suite est révolu. Désormais, tout s’enchaîne et s’entraîne : chaque pas nouveau
41 urs pays et ils déclarent : Ces buts ne peuvent être atteints que si les divers pays du monde acceptent de dépasser le dog
42 unique organisation fédérale. La paix européenne est la clé de voûte de la paix du monde. En effet, dans l’espace d’une se
43 dans l’espace d’une seule génération, l’Europe a été l’épicentre de deux conflits mondiaux qui ont eu avant tout pour orig
44 que j’ai cités. Rien de nouveau, sinon ceci, qui est décisif : nous n’avons plus affaire à des voix isolées, parlant dans
45 e le dira jamais assez. Car le congrès de La Haye fut la synthèse vivante des grands motifs d’union représentés en fait par
46 Haye, ne sortira qu’un retentissant échec. (S’il était vrai que la peur de Staline ait été le vrai moteur de notre union, la
47 chec. (S’il était vrai que la peur de Staline ait été le vrai moteur de notre union, la première institution européenne acc
48 , la première institution européenne acceptée eût été logiquement la CED : or, c’est en fait la seule qui ait été refusée.)
49 ement la CED : or, c’est en fait la seule qui ait été refusée.) Voici ce qui a été réalisé : La commission politique de La
50 ait la seule qui ait été refusée.) Voici ce qui a été réalisé : La commission politique de La Haye avait demandé l’institut
51 mois plus tard, le Conseil de l’Europe et la Cour sont créés. Puis l’Assemblée (seulement consultative, hélas) est inaugurée
52 Puis l’Assemblée (seulement consultative, hélas) est inaugurée à Strasbourg. La commission économique avait demandé la cr
53 des idéaux au contact de la réalité » ! Car ce n’ est pas notre idéal fédéraliste, mais un modèle d’union très différent, l
54 d’union très différent, l’« intégration », qui s’ est vu proposé peu après à l’attention méfiante des gouvernants — toute a
55 ents dits sectoriels, et l’esquisse — si le mot n’ est pas trop fort — d’une politique commune dans l’industrie, l’agricultu
56 surtout), cela me paraît indéniable, encore qu’il soit très malaisé de le mesurer et très aisé de le nier cyniquement, tant
57 même plutôt reculé6. Pourquoi ce recul ? Le défi serait -il moins pressant, les motifs d’union moins nombreux, ou affaiblis ?
58 faiblis ? Reconnaissons que certaines urgences ne sont plus celles de l’après-guerre. Les risques de conflits armés entre pa
59 es risques de conflits armés entre pays européens sont aujourd’hui faibles ou nuls, grâce aux mises en commun économiques, g
60 our des capitaux. Les ruines des bombardements ne sont plus guère visibles qu’en l’église du Souvenir à Berlin. Enfin, les c
61 ’église du Souvenir à Berlin. Enfin, les colonies sont liquidées, et avec elles c’est une source de conflits séculaires qui
62 elles c’est une source de conflits séculaires qui est tarie. Mais ces quelques problèmes vitaux, à peine résolus, ont créé
63 le Portugal, pour établir un empire colonial, ce serait à peine assez de toute l’Europe unie pour contribuer à résoudre, aujo
64 s dans les colonies d’hier. La stabilisation de l’ Est européen n’a été garantie que par la satellisation politique et comme
65 es d’hier. La stabilisation de l’Est européen n’a été garantie que par la satellisation politique et commerciale imposée et
66 68. La stabilisation des démocraties de l’Ouest n’ est garantie que par les armements et les investissements américains. Tou
67 u recueil de textes que je publiais au début de l’ été 1948, sous le titre L’Europe en jeu , portait ces mots : unie ou co
68 ou d’information — aucune de ces réalités ne peut être traitée sensément dans un cadre stato-national ; en revanche, chacune
69 dres de l’État-nation. Or on voit bien que toutes sont en interaction. Faute d’une concertation continentale, leurs effets s
70 e moteur de l’histoire du monde. Entre le peu qui est en train de se faire et le défi qui nous est adressé par l’existence
71 qui est en train de se faire et le défi qui nous est adressé par l’existence des deux grands, et de la Chine, et du tiers-
72 ers-monde, et des problèmes du xxie siècle, ce n’ est pas seulement un hiatus, mais un abîme qui s’élargit. Plus on va et p
73 es, nous commandent d’unir l’Europe, mais le fait est que rien ou presque rien n’est fait, à l’échelle de l’Europe tout ent
74 rope, mais le fait est que rien ou presque rien n’ est fait, à l’échelle de l’Europe tout entière. Vingt-cinq ans de discour
75 re. Ceux qui n’auraient pas encore remarqué qu’il est vital pour les Européens de faire l’Europe, ce n’est pas à eux que j’
76 vital pour les Européens de faire l’Europe, ce n’ est pas à eux que j’écris : qu’ils ferment ma lettre à cette page. J’écri
77 eux ou trois millénaires. Je vois que cette unité est comparable à celle d’un corps organisé : elle est faite de diversités
78 est comparable à celle d’un corps organisé : elle est faite de diversités et de tensions, elle n’est pas du tout homogène.
79 le est faite de diversités et de tensions, elle n’ est pas du tout homogène. Je vois que la traduction de ces données de bas
80 se en termes politiques d’institutions ne saurait être que le fédéralisme, méthode d’union dans la diversité, radicalement c
81 ntraire à la méthode d’unité par l’uniformité qui fut celle de Louis XIV, des jacobins, de Napoléon et de nos États totalit
82 ou secrètes. Mais il va de soi que tous ces noms sont implicites et en un certain sens mobilisables : nous sommes prêts à l
83 licites et en un certain sens mobilisables : nous sommes prêts à les réciter du même ton que les hippies, aux États-Unis, lisa
84 et hors de temps le rôle des tués au Vietnam : ce serait le rôle des régions annexées par la force ou la ruse aux Puissances q
85 e pour Suisse et princesse pour prince ? Bougre n’ est -il pas démodé ? Peut-on risquer Yougoslavone ? etc. 4. Ce « plan »
86  plan » d’union, d’une cohérence problématique, a été composé par les commentateurs à partir d’une trentaine de passages di
87 oits souverains à un futur pouvoir européen avait été introduite dans les constitutions de l’Italie et de la France, au len
88 r le compte de leur maître que « le roi de France est empereur en son royaume » et ne reconnaît « aucun supérieur sur la te
2 1970, Lettre ouverte aux Européens. I. L’unité de culture
89 I. L’unité de culture L’Europe, avant d’ être une alliance militaire ou une entité économique, doit être une commun
90 alliance militaire ou une entité économique, doit être une communauté culturelle. L’unité de l’Europe ne se fera ni uniqueme
91 ts. Robert Schuman, Pour l’Europe. 1. L’Europe est -elle jamais née ? Quand on me demande à brûle-pourpoint : « Qu’est
92 ? Quand on me demande à brûle-pourpoint : « Qu’ est -ce que l’Europe ? Pouvez-vous me répondre en une phrase ? », je dis :
93 son objet : car ce qu’on nomme l’idée européenne est en fait un programme, une action créatrice. Encore faut-il que cette
94 une même question revient sans cesse : « L’Europe est -elle vraiment une unité de civilisation et de culture ? Peut-on fonde
95 lassent pas de découvrir l’un après l’autre qu’il est si difficile de définir l’Europe qu’on peut en profiter pour nier son
96 d’eux. Et tous les autres nous redisent à satiété soit que les Européens sont trop différents entre eux pour s’unir, soit qu
97 es nous redisent à satiété soit que les Européens sont trop différents entre eux pour s’unir, soit qu’ils ressemblent trop à
98 péens sont trop différents entre eux pour s’unir, soit qu’ils ressemblent trop à tous les autres hommes pour former un group
99 . Naissance ? — « On a voulu que l’Empire romain fût une première ébauche de l’Europe. Mais il excluait Francfort, Copenha
100 cluait Francfort, Copenhague, Amsterdam. Spengler tient que l’Europe débute avec le Saint-Empire romain germanique, mais celu
101 Europe de l’Est. La naissance de l’Europe ne nous est pas mieux connue que ses limites7. » L’Europe ne serait-elle donc pas
102 pas mieux connue que ses limites7. » L’Europe ne serait -elle donc pas née du tout, parce qu’on ne s’accorde pas sur sa date d
103 congrès de Vienne, s’intitulait pourtant l’Europe est née ! Montesquieu, et Leibniz avant lui, mettent l’Europe au-dessus d
104 ssus de leur « nation ». Mais l’adjectif européen est d’un usage bien plus ancien : il paraît déjà au lendemain de la batai
105 ise de conscience d’une entité européenne ne peut être attestée qu’à partir de l’an 1300 : les premiers portulans, ou cartes
106 cartes de l’Europe en tant que telle, et (ce qui est encore plus important) ils étaient le témoignage de l’intérêt porté a
107 telle, et (ce qui est encore plus important) ils étaient le témoignage de l’intérêt porté au caractère culturel et politique d
108 uropa. C’est enfin dans les œuvres d’un homme qui fut d’abord grand humaniste sous le nom d’Æneas Sylvius Piccolomini, puis
109 une Europe dont il faut croire, au moins, qu’elle est là comme besoin d’exister dans les meilleurs esprits de tous ces sièc
110 tok ? ou seulement jusqu’à l’Oural ? ou encore en est -elle « exclue » ? Et la Turquie d’Asie ? Il est clair que les frontiè
111 n est-elle « exclue » ? Et la Turquie d’Asie ? Il est clair que les frontières de l’Europe n’ont cessé de varier au cours d
112 cessé de varier au cours des siècles, surtout à l’ Est , où elles se sont déplacées selon les poussées asiatiques et les cont
113 u cours des siècles, surtout à l’Est, où elles se sont déplacées selon les poussées asiatiques et les contre-poussées occide
114 Espagne, au début du xiiie siècle, à ce qu’elles sont aujourd’hui. En vérité, une définition géographique de l’Europe, si e
115 une définition géographique de l’Europe, si elle était possible, ne présenterait guère d’intérêt, puisque ce ne sont pas des
116 e, ne présenterait guère d’intérêt, puisque ce ne sont pas des terres qu’il s’agit de réunir, mais des hommes. Or, les homme
117 git de réunir, mais des hommes. Or, les hommes ne sont pas des produits du sol, mais d’une tradition ; ils ne naissent pas d
118 nvoqué sans fatigue contre l’union de l’Europe, n’ est qu’une étourderie aux yeux de l’historien et de l’observateur des cul
119 Or il se trouve que cet argument, précisément, n’ est pas soutenable au plan de la nation. Comment le serait-il donc au pla
120 t pas soutenable au plan de la nation. Comment le serait -il donc au plan de l’Europe entière ? On nous dit que les contrastes
121 ore que les écoles d’État, en France surtout, s’y soient efforcées depuis un siècle : or personne n’a jamais attendu rien de p
122 ope, et les dangers qu’on redoute de cette union, sont également imaginaires, comme le prouve l’expérience de la nation elle
123 refuse l’union. 2° Si pittoresques et voyants que soient les contrastes entre Suédois et Grecs, par exemple, il n’en reste pas
124 oirs et les mêmes doutes, et malgré tout ce qu’il serait tellement facile de dire, la même foi dominant l’arrière-plan milléna
125 r à la bonne distance. Vue d’assez loin, l’Europe est évidente. Vus d’Amérique, quelle que soit notre nation, nous sommes t
126 l’Europe est évidente. Vus d’Amérique, quelle que soit notre nation, nous sommes tous des Européens. Vus d’Asie, je n’ai pas
127 us d’Amérique, quelle que soit notre nation, nous sommes tous des Européens. Vus d’Asie, je n’ai pas besoin d’insister, on nou
128 ui voulait étudier l’éléphant au microscope. Il n’ est jamais venu à bout de sa description, n’a jamais constaté l’unité de
129 nants. Là-dessus, j’observerai que nos diversités sont en effet si nombreuses, si profondes, et au surplus si jalousement en
130 singularité jusqu’à l’excès d’y voir sa raison d’ être  ! C’est à tel point que tout en présidant une imposante table ronde d
131 uler » cette définition irritée : « L’Européen ne serait -il pas cet homme étrange qui se manifeste comme Européen dans la mesu
132 opéen dans la mesure précise où il doute qu’il le soit , et prétend au contraire s’identifier soit avec l’homme universel, so
133 ’il le soit, et prétend au contraire s’identifier soit avec l’homme universel, soit avec l’homme d’une seule nation du grand
134 ntraire s’identifier soit avec l’homme universel, soit avec l’homme d’une seule nation du grand complexe continental dont il
135 fait qu’il le conteste ? » Mais cette définition est encore trop simpliste pour la furieuse diversité qui caractérise notr
136 re culture pluraliste. J’ajoute une précision qui est capitale : il ne faut pas aller vers l’unité conçue comme uniformité
137 l’entropie. Il faut partir de l’unité donnée, qui est derrière nous et qui se continue en nous, pour aller vers l’union dan
138 s simple, principe du nombre ou qualité de ce qui est un, homogène et sans parties. Je laisse ce sens aux jacobins et autre
139 ins équilibrés. L’unité de l’Europe comme culture est une communauté de valeurs antinomiques et d’origines très diverses, m
140 ale : « L’unité intelligible d’étude historique n’ est ni un État-nation (nation state), ni l’humanité dans son ensemble, ma
141 que nous avons nommé société. » L’Europe ne peut être comprise globalement qu’en tant qu’unité de culture, et en retour, no
142 n’a jamais encore connu de culture commune, s’il est vrai qu’elle essaie d’en confectionner une au moyen d’éléments emprun
143 re… 3. Les options de base Que l’Europe ait été d’abord un fait de culture, voilà qui ne signifie pas un instant qu’e
144 ure, voilà qui ne signifie pas un instant qu’elle soit l’affaire des seuls hommes cultivés ou conscients de ce qu’ils donnen
145 vertes futures, mais encore la nature de ce qu’on tiendra plus tard pour la réalité elle-même. Dis-moi ce que tu trouves, je te
146 chose, une toute autre Réalité. Et la question n’ est pas, ici, de savoir si elle est plus ou moins vraie que l’orientale ;
147 Et la question n’est pas, ici, de savoir si elle est plus ou moins vraie que l’orientale ; mais seulement de bien voir la
148 confusions politiques dignes de notre temps, ont été formulées les options décisives de notre civilisation européenne. J’e
149 n corps d’homme et dans la matière même dont nous sommes faits. Tel est le dogme du Dieu-homme. Il implique immédiatement que
150 dans la matière même dont nous sommes faits. Tel est le dogme du Dieu-homme. Il implique immédiatement que le corps et la
151 ue le corps et la matière existent réellement, ne sont pas une illusion, comme le voulaient les docétistes, et ne sont pas s
152 llusion, comme le voulaient les docétistes, et ne sont pas seulement un « voile de Maya ». Si l’on croit avec les Hindous qu
153 croit avec les Hindous que le corps et la matière sont illusoires, il n’est pas très intéressant d’étudier leur nature et le
154 que le corps et la matière sont illusoires, il n’ est pas très intéressant d’étudier leur nature et leurs lois. Cela devien
155 ontraire très important si le corps et la matière sont bien réels. L’option prise à Nicée en faveur de la réalité matérielle
156 s techniques. Le cosmos dans lequel nous vivons n’ est pas une fantasmagorie, pour les pères de Nicée. C’est une réalité qu’
157 evient possible, dès lors que le monde sensible n’ est pas absurde, mais qu’il existe un accord entre notre esprit et le cos
158 esprit et le cosmos, tous deux créés par Dieu. Il est remarquable que Nietzsche, le premier, l’ait compris et l’ait dit : l
159 s et l’ait dit : la science occidentale n’eût pas été possible sans le christianisme. Il est important que Kepler ait décla
160 n’eût pas été possible sans le christianisme. Il est important que Kepler ait déclaré : « Les œuvres de Dieu sont dignes d
161 ant que Kepler ait déclaré : « Les œuvres de Dieu sont dignes d’être contemplées. » Il est frappant que Descartes ait écrit 
162 ait déclaré : « Les œuvres de Dieu sont dignes d’ être contemplées. » Il est frappant que Descartes ait écrit : « Un athée n
163 vres de Dieu sont dignes d’être contemplées. » Il est frappant que Descartes ait écrit : « Un athée ne pourrait pas faire d
164 it de la physique, vraiment, cela prouve qu’ils n’ étaient pas vraiment athées. Car le mouvement créateur de la science procède
165 foi dans leur fondement commun, « fondement de l’ être dans le monde, à savoir Dieu », comme l’écrit Ernest Ansermet dans
166 ermet dans ses Fondements de la musique.) Et il n’ est pas sans intérêt de rappeler qu’Einstein, juif conscient dans un mond
167 urrait « jouer aux dés avec le monde ». Enfin, il est nécessaire de marquer que le christianisme, à ses débuts, fut accusé
168 re de marquer que le christianisme, à ses débuts, fut accusé de matérialisme par les tenants des religions orientales et de
169 des hérésies docétistes et gnostiques, lesquelles furent condamnées par les conciles pour leur spiritualisme excessif et unila
170 personne. — La formulation du dogme de la Trinité fut l’une des tâches majeures des grands conciles. Le problème était le s
171 tâches majeures des grands conciles. Le problème était le suivant : Comment définir les trois fonctions de Dieu — le Père, l
172 ient, par une extension normale — puisque le Fils est « à la fois vrai Dieu et vrai homme » —, notre idée de la personne hu
173 igne l’individu naturel chargé d’une vocation qui est sociale à l’égard du « prochain », dans la communauté, et spirituelle
174 des institutions typiques de l’Europe, celles qui sont chargées d’assurer à la fois les libertés individuelles et les devoir
175 continue et sans retour. Le seul « retour » prévu sera celui du Christ, mais il marquera aussi la fin du temps, le passage à
176 lors l’Histoire devient possible, vaut la peine d’ être prise au sérieux, puisqu’elle apporte sans relâche l’Imprévu. L’avent
177 u’elle apporte sans relâche l’Imprévu. L’aventure est unique, comme la vie du chrétien est unique, et l’homme y joue son rô
178 . L’aventure est unique, comme la vie du chrétien est unique, et l’homme y joue son rôle selon sa vocation, non plus selon
179 intentions lointaines. Fuyant l’histoire dont il est responsable et qu’il doit faire, le partisan totalitaire cherche à se
180 u sens de l’aventure historique et personnelle, n’ est -elle pas, elle aussi, caractéristique de l’Europe ? Partant des gran
181 hasardeux des premiers siècles de notre ère, ce n’ est pas une fusion organique ou logique qui s’est opérée, c’est plutôt un
182 e n’est pas une fusion organique ou logique qui s’ est opérée, c’est plutôt une interminable polémique qui a pris son départ
183 aclite écrivait cette phrase décisive, qu’il faut tenir pour la formule même d’une unité spécifiquement européenne : Ce qui
184 ut concourt à nourrir ce paradoxe qui paraît bien être la loi constitutive de notre histoire et le ressort de notre pensée :
185 nsable. (Dans plusieurs cités, chaque homme libre est appelé à revêtir une charge publique par rotation.) Mais elle invente
186 ans les trop grandes cités hellénistiques : nul n’ est plus responsable de rien, et la fortune sans visage prend la place de
187 « Tant que tu vis, ne dis jamais : ce sort-là ne sera pas le mien », dit un personnage de Ménandre, marquant la destruction
188 Bien plus, il porte la contradiction au cœur de l’ Être et la traduit dans l’énoncé de ses dogmes fondamentaux : la Trinité t
189 ois », selon les formules conciliaires. Mais ce n’ est pas tout. Avec les trois sources classiques viennent confluer dans le
190 u « retour d’Aristote », ni à l’algèbre, mais qui est l’une des sources principales de la lyrique des troubadours, donc de
191 lus ou moins stables et rarement prévisibles ne s’ étaient opérées au cours des siècles. J’en indique rapidement trois exemples.
192 ui domine l’existence de l’homme médiéval ne peut être compris dans ses structures complexes qu’à partir des modèles romains
193 de l’imperium, titres et vêtements de sa religion sont repris par l’Église de Rome. Cependant que l’esprit évangélique des p
194 remières paroisses autonomes et fédérées, où tout était mis en commun, prend corps dans les formes sociales et les structures
195 général : notre sens de la liberté. Il se trouve être exactement aussi complexe que nos origines. Car la liberté, pour le G
196 endant ; pour le Germain, symboliquement, c’est d’ être armé et de porter des cheveux longs ; pour le Romain, c’est de jouir
197 ses variables dans notre idée de la liberté. Il n’ est pas de concept plus difficile à définir, plus facile à nier en théori
198 à définir, plus facile à nier en théorie, et il n’ est pas d’idée plus exaltante en fait pour les Européens de toute nation
199 liberté, la revendication de la liberté (quel que soit le sens qu’on donne au mot), est sans nul doute le thème affectif le
200 berté (quel que soit le sens qu’on donne au mot), est sans nul doute le thème affectif le plus généralement européen, le pl
201 r ces valeurs qui se contredisent avec passion et sont souvent contradictoires en soi ne se détruisent pas pour autant : ent
202 éfinition il ne peut exister. Car l’Européen type est celui qui parfois déclare, et toujours pense : « Quelle serait ma rai
203 qui parfois déclare, et toujours pense : « Quelle serait ma raison d’être si j’étais comme tout le monde ? » À ses yeux — et c
204 , et toujours pense : « Quelle serait ma raison d’ être si j’étais comme tout le monde ? » À ses yeux — et cela peut servir à
205 urs pense : « Quelle serait ma raison d’être si j’ étais comme tout le monde ? » À ses yeux — et cela peut servir à le définir
206 peut servir à le définir — « se distinguer » ou «  être distingué » est synonyme d’honneur mérité ou reçu, non pas d’impardon
207 définir — « se distinguer » ou « être distingué » est synonyme d’honneur mérité ou reçu, non pas d’impardonnable faute cont
208 iental, je pense aux Hindous plus qu’aux Chinois, est d’une caste, d’un ordre, d’un karma, et ne peut se poser le problème
209 ’un pays totalitaire, le parti sait pour lui quel est son bien, et lui prouve au besoin qu’il le sait mieux que lui. L’idée
210 ures, tandis que le Soviétique, dès cette vie-ci, sera « rééduqué » pour l’avenir collectif. Nous voyons au contraire l’homm
211 fèrent (ou du moins il s’en flatte) de celles qui sont censées régner, ses talents qu’il expérimente, enfin sa vocation, s’i
212 ressent, mais au monde ou à la société, voilà qui est proprement occidental. Cela donne le révolté, l’objecteur de conscien
213 a compté dans la vie de l’Europe, tout ce qui s’y est fait un nom et un visage distinct. Soulignons maintenant que ce drame
214 ocial, entre la personne libre et la fatalité, ne serait pas concevable hors d’un monde qui date ses années de la Crucifixion,
215 humaine. Pour beaucoup d’entre nous, l’expression est passée au rang de cliché. Mais l’historien jugera différemment. Pour
216 e nos activités. Ôtez le moi distinct, le droit d’ être une personne, et du même coup nos vies n’auraient plus sel ni sens :
217 rope, que dis-je : sur l’espoir humain. Ma thèse est simple. Elle consiste à rappeler que la plupart de nos valeurs et idé
218 n dérivent en tout cas d’une manière démontrable, fût -ce par une suite de laïcisations, ou même de dégradations, parfois au
219 ve au plan collectif. Ces valeurs, ces activités, seraient proprement inconcevables sans la notion originelle de la personne. Ma
220 ncore, ce qui les blesse. S’il se trouve que « je est un autre », comme dit Rimbaud, on a là le modèle de toute aliénation.
221 toute aliénation. Mais s’il n’y a pas de je, qui serait aliéné ? (Pour le bouddhiste, pour le cathare, pas d’autre aliénation
222 ’est la personne en moi, et c’est elle seule, qui est passible d’aliénation. Si vous n’y croyez pas, l’ordinateur est là.
223 ’aliénation. Si vous n’y croyez pas, l’ordinateur est là. 8. Révolution et passion Prenons le phénomène de la révolut
224 rner complètement. On peut dire que la révolution est , pour une collectivité, l’équivalent exact d’une conversion. Or, la c
225 , radicale, changeant tout — le Chemin de Damas — est un phénomène caractéristique du christianisme. La notion de révolutio
226 iste ou bouddhiste, ne peut la concevoir. Elle ne serait à ses yeux qu’indécence, blessure à l’ordre du cosmos, crime absurde.
227 s seuls hommes touchés par l’idéologie communiste sont restés longtemps ceux que l’Occident avait contaminés : jeunes intell
228 naires ne peuvent se former que dans un monde qui tient la liberté et la vocation prophétique pour plus vraies que les lois s
229 . Je constaterai maintenant que cette passion qui tient une telle place dans nos vies, ou tout au moins dans nos secrètes nos
230 ose une croyance innée dans la valeur unique de l’ être aimé, irremplaçable, infiniment distinct de tous les autres. Or, cett
231 romanesque. Il estime à bon droit que la passion est une force antisociale, et qui ne peut que gêner son rendement. Cette
232 passion, donc, qui nous paraît si « naturelle », est en réalité exceptionnelle dans le monde. On peut la qualifier d’extra
233 ntaine — dans la révolution chrétienne et qu’elle est inconcevable hors d’un monde où Pascal peut placer dans la bouche mêm
234 , mon amour à jamais personnel. Ces deux exemples sont extrêmes. Nous ne sommes pas tous des révolutionnaires, ni les héros
235 rsonnel. Ces deux exemples sont extrêmes. Nous ne sommes pas tous des révolutionnaires, ni les héros d’une grande passion mort
236 assion mortelle, mais la révolution et la passion sont pour nous tous des repères décisifs. Nos vies sont orientées par rapp
237 ont pour nous tous des repères décisifs. Nos vies sont orientées par rapport à ces pôles. 9. Originalité et humour Voi
238 iveau de culture, en Occident, le non-conformiste est bien vu, tandis que la banalité disqualifie. Tout l’effort de l’artis
239 e aztèque, ou le grand sorcier nègre, le problème est non pas de différer, mais au contraire d’appliquer les recettes, de t
240 gestes rituels. L’innovation individuelle ne peut être à leurs yeux qu’une erreur. Elle risquerait de faire rater l’opératio
241 istes que terrifie l’idée de passer si peu que ce soit pour un « original », et dont toute la morale est d’imiter. Je dis se
242 oit pour un « original », et dont toute la morale est d’imiter. Je dis seulement que les modèles dont ils disposent pour le
243 ste et le révolté, l’Europe connaît d’ailleurs un être intermédiaire : celui qui a le sens de l’humour. L’Occident a créé l’
244 d’hui dans le pouvoir anonyme de l’État. L’humour est la combustion lente de la révolte des individus. C’est pourquoi vous
245 rtaine distance par rapport à ce que l’on se voit être . Dans l’humour, c’est donc la personne qui juge son propre individu…
246 par le risque Dernier exemple : le progrès. Il est de mode aujourd’hui d’en douter. Les plus grands esprits de notre siè
247 volutions à l’État totalitaire ; que le progrès n’ est donc nullement fatal ; qu’il n’est plus même un idéal européen, mais
248 e le progrès n’est donc nullement fatal ; qu’il n’ est plus même un idéal européen, mais bien russe et américain, et tout ce
249 éricain, et tout cela semble bien vrai. Mais il n’ est pas moins vrai que l’horizon d’un progrès toujours possible reste vit
250 ain plus vaste et libre reste ouvert. De plus, il serait faux de penser que notre idée européenne du progrès ait vraiment émig
251 fait, à nos yeux, tout son prix : elle cessera d’ être liée à l’idée de liberté, c’est-à-dire à la perspective d’une vie plu
252 ous vient, en effet, le concept de progrès ? Il n’ est apparu comme tel qu’au xviiie siècle. Mais ses origines sont beaucou
253 comme tel qu’au xviiie siècle. Mais ses origines sont beaucoup plus anciennes et remontent incontestablement — encore une f
254 de véritable création possible. Leur nostalgie n’ était pas dans l’avenir, mais dans le temps mythique des origines. L’idée q
255 ovations bénéfiques, que les petits-fils puissent être plus heureux que leurs ancêtres, était tout étrangère aux Anciens, co
256 ls puissent être plus heureux que leurs ancêtres, était tout étrangère aux Anciens, comme elle le reste à la plupart des Orie
257 de nos jours, notre foi dans le progrès a cessé d’ être une foi naïve. Nous nous posons à son sujet des questions parfois ang
258 re un pur et simple acte de foi, devant lequel il est permis de rester sceptique… En vérité, l’idée de progrès ne peut repr
259 té ne peut avoir de sens que pour l’individu (que serait une liberté de masse ?). Je définirai donc le progrès véritable comme
260 ntation continuelle des possibilités de choix qui sont offertes, tant matérielles que culturelles, à un nombre sans cesse cr
261 nt d’individus. Et la mesure de ce progrès, ce ne sera pas seulement l’augmentation de notre sécurité, de notre confort, mai
262 et des moyens de nous décider nous-mêmes, donc d’ être libres. Car la seule liberté qui compte pour moi — dira tout véritabl
263 ement. Chacune pourrait fonder une communauté qui serait l’expression d’un dosage singulier. Il en résulterait autant de clans
264 une cité, une région ou une petite république se sont trouvées coïncider avec une de ces combinaisons plus ou moins stables
265 ts-cités aussi divers et contrastés que l’avaient été Athènes et Sparte. Cependant, même là, le plus souvent, et toujours d
266 valeurs de l’héritage commun ne cessent jamais d’ être présentes, actuelles ou potentielles en mélanges variables. En sorte
267 ar l’école, sur la nature de nos diversités, peut être mortellement dangereuse pour l’Europe, dans la mesure où elle sert d’
268 acle majeur à l’union nécessaire du continent. Il est donc urgent de faire voir : – que les diversités qui font notre riche
269 : – que les diversités qui font notre richesse ne sont précisément pas celles de nos États ; – qu’elles sont présentes et ag
270 précisément pas celles de nos États ; – qu’elles sont présentes et agissantes dans toute l’Europe sans nul respect pour les
271 ap asiatique », a découvert la terre entière sans être jamais découverte, et a soumis les continents l’un après l’autre sans
272 fiant et stimulant les énergies. Et si l’Europe a été pendant cinq siècles « la perle de la sphère et le cerveau d’un vaste
273 gure sur le globe que comme un appendice à l’Asie est devenue la métropole du genre humain13 », c’est au seul « pouvoir de
274 vidence. Obéissant à cette force des choses qui n’ est souvent que l’inertie de notre esprit, elle fût restée ce qu’elle est
275 n’est souvent que l’inertie de notre esprit, elle fût restée ce qu’elle est matériellement : 4 % des terres émergées de la
276 ertie de notre esprit, elle fût restée ce qu’elle est matériellement : 4 % des terres émergées de la planète. L’Europe est
277 : 4 % des terres émergées de la planète. L’Europe est donc une énergie, que nous désignerons par E, et qui est égale au pro
278 c une énergie, que nous désignerons par E, et qui est égale au produit de sa masse (étendue, matières premières, population
279 masse (étendue, matières premières, population), soit m, par une culture dont les effets induits se multiplient en progress
280 les tensions génératrices de l’énergie européenne sont nées de la pluralité de nos origines et des antinomies qui devaient e
281 goût du risque et besoin de sécurité. La seconde est formée d’antithèses aux deux termes également condamnables, comme : –
282 l’histoire, accroissent l’entropie, et devraient être éliminées par leur transposition terme à terme au plan du conflit cré
283 ainsi le couple individualisme-collectivisme, qui est en fait un cercle vicieux, peut s’ouvrir une fois transposé au plan d
284 personnes-communauté, antinomie féconde qui doit être maintenue. Mais ces diversités, tensions et antinomies seules créatri
285 tés, tensions et antinomies seules créatrices, il est radicalement exclu qu’elles aient jamais coïncidé avec le territoire
286 , elles traversent et animent chacun d’eux, et ce serait à chacun d’eux de respecter dans son sein ces vraies diversités, mais
287 tion, avant que le xixe siècle ne l’ait étatisé, était donné par des réalités ethniques et linguistiques. Respecter les « pe
288 on respecte leur « personnalité » synthétique, se sont formés précisément au mépris de la personnalité authentique des natio
289 ations. La cause des « personnalités nationales » est liée à la cause de l’Europe fédérée dans le respect des diversités, e
290 it refuse de compter avec aucun d’entre eux. Ce n’ est pas le Danemark qui compte pour Kierkegaard ou qui nous intéresse en
291 voir à la France, souhaite que son Ardenne natale soit occupée par les Prussiens, et la fuit, l’injure à la bouche, pour all
292 rs, et ce qu’il regrettera — il l’a prédit — ce n’ est pas sa nation, mais l’Europe — « l’Europe aux anciens parapets ». Ceu
293 traire, disent tout devoir à leur État-nation, ne sont jamais ceux qui l’illustrent, ce sont les Déroulède et les Détaillé,
294 -nation, ne sont jamais ceux qui l’illustrent, ce sont les Déroulède et les Détaillé, non les Baudelaire et les Courbet. Qua
295 ctuelles de leur État, ils oublient que l’homme n’ est pas un légume, et que le légume qui a la plus grosse racine, qui est
296 et que le légume qui a la plus grosse racine, qui est tout racine pour ainsi dire, c’est le navet. S’il est vrai que les di
297 tout racine pour ainsi dire, c’est le navet. S’il est vrai que les diversités, voire les contradictions de notre culture, o
298 s, voire les contradictions de notre culture, ont été le ressort de notre histoire, les États-nations modernes n’ont fait q
299 La « personnalité » de nos États-nations, qu’elle soit hexagonale ou insulaire, en forme de botte ou de peau de taureau, est
300 sulaire, en forme de botte ou de peau de taureau, est finalement la moins sociable de toutes celles qui prétendent à notre
301 tionalisme ; et chacun sait que le nationalisme a été propagé par l’école et ses manuels depuis le milieu du xixe siècle.
302 tinctes, autonomes et rivales. Cette conception n’ est pas seulement responsable des guerres absurdes, justifiées aux yeux d
303 e multiplient au xve siècle : Guillaume Dufay en est l’illustration. Une nouvelle école s’épanouit dans les Flandres avec
304 ni à l’Italie actuelles, de même que Grünewald n’ est pas devenu un peintre français du fait de l’annexion de Colmar à la F
305 a religion qui les inspira toutes au départ, il n’ est pas une seule des branches de notre culture qui ne résulte de mille é
306 issant l’œuvre commune des Européens ; et il n’en est pas une seule que l’on puisse étudier d’une manière sérieuse ou intel
307 s relâche et en toute occasion à vos élèves, ce n’ est pas seulement faire de l’histoire honnête, après un siècle de falsifi
308 e à l’inverse qu’un État national au sens moderne soit en partie le produit de certains auteurs et des propagandes qui s’en
309 t de certains auteurs et des propagandes qui s’en sont inspirées. De même, ce n’est pas le génie de la France du Grand Siècl
310 ropagandes qui s’en sont inspirées. De même, ce n’ est pas le génie de la France du Grand Siècle qui a fait Racine ; c’est p
311 a réalité historique (aucun pays, comme tel, ne s’ est jamais préoccupé de faire un « apport » littéraire à l’on ne sait que
312 ), ni à la réalité de la création littéraire, qui est toujours le fait d’un individu (celui-ci certes utilise des instrumen
313 , traditions, croyances du milieu, etc., mais ils sont là pour tous, et lui seul en tire cette œuvre qui nous intéresse, non
314 t pour une fois décisif, l’Espagnol Unamuno — qui était d’ailleurs un Basque et tenait à ce qu’on le sache. Dans tous ces ca
315 agnol Unamuno — qui était d’ailleurs un Basque et tenait à ce qu’on le sache. Dans tous ces cas, ce n’est pas le passeport qu
316 ait à ce qu’on le sache. Dans tous ces cas, ce n’ est pas le passeport qui caractérise l’écrivain, mais la région où s’est
317 t qui caractérise l’écrivain, mais la région où s’ est formée sa sensibilité, la religion qu’il suit ou qu’il a rejetée, ses
318 ier (horribile dictu !), mais c’est l’inverse qui est vrai : nos littératures « nationales » résultent d’une différenciatio
319 urs et spécifiants de l’« unité intelligible » qu’ est la littérature européenne sont faciles à énumérer. Rappelons d’abord
320 é intelligible » qu’est la littérature européenne sont faciles à énumérer. Rappelons d’abord un grand fait de base qu’on ne
321 grand fait de base qu’on ne voit plus parce qu’il est trop évident : l’Europe seule a conçu et possède, dès l’aube grecque,
322 domination anglaise, tout ce qui s’écrit en Inde est poésie ou prose sacrée, religieuse, rituelle, symbolique : les Vedas
323 tèques, incas ou mandarins, aujourd’hui maoïstes, sont lus avec vénération, c’est-à-dire sans esprit critique, et ceci les d
324 interpréter la vérité de ce texte ? Nous disons : est -ce que c’est vrai ? est-ce que cela m’intéresse ? ou m’amuse ? a du s
325 ce texte ? Nous disons : est-ce que c’est vrai ? est -ce que cela m’intéresse ? ou m’amuse ? a du succès ? est-ce qu’on en
326 que cela m’intéresse ? ou m’amuse ? a du succès ? est -ce qu’on en a parlé à la TV ? Le concept même de littérature est donc
327 a parlé à la TV ? Le concept même de littérature est donc spécifiquement européen. Quant aux éléments communs, relevons :
328 agit dans nos écrits : La littérature européenne est coextensive dans le temps, avec la culture européenne. Elle embrasse
329 n la morcelle (…). Le « présent intemporel », qui est une caractéristique essentielle de la littérature, signifie que la li
330 ignifie que la littérature du passé peut toujours être active dans celle du présent. Ainsi, Homère dans Virgile, Virgile en
331 mysticisme espagnol dans T. S. Eliot. Inépuisable est la richesse des interrelations possibles14. b) Les formes, procédés
332 mes, procédés rhétoriques, structures. — Là, tout est commun : l’épopée, le roman d’aventures, puis d’amour ; la ballade, l
333 tons, les genres, l’orchestre, le concert, etc., sont des créations typiques des Européens.) Cette similitude des procédés,
334 que nous ne voyons plus parce que trop évidente, est décisive : elle atteste la spécificité et l’unité fondamentale des ac
335 ens du terme, puis la légende de Don Juan, qui en est le négatif. Le mythe de Faust, version renaissante de Prométhée. Les
336 ste dans telle ville d’art ; non pas l’État où il était né ni le pays où était située cette ville. En revanche, les styles ét
337 art ; non pas l’État où il était né ni le pays où était située cette ville. En revanche, les styles étaient continentaux et s
338 était située cette ville. En revanche, les styles étaient continentaux et sont devenus mondiaux au xxe siècle : roman, gothiqu
339 . En revanche, les styles étaient continentaux et sont devenus mondiaux au xxe siècle : roman, gothique, classique, baroque
340 au xxe siècle : l’École de Paris, en peinture, n’ est pas « française », et le style dodécaphonique ou sériel n’est pas plu
341 ançaise », et le style dodécaphonique ou sériel n’ est pas plus « autrichien » que le ballet russe ne fut « russe », ou le d
342 st pas plus « autrichien » que le ballet russe ne fut « russe », ou le dadaïsme « suisse ». 16. Mais la diversité des la
343 portions. a) Nos langues littéraires, en Europe, sont étroitement apparentées (à la seule exception du groupe finno-ougrien
344 r leurs emprunts mutuels dans l’ère moderne. Ce n’ est pas le cas pour l’Inde, encore moins pour la Chine, dont souvent les
345 « grandes langues » (quatorze dans les deux cas) sont radicalement différentes les unes des autres, je veux dire : sans rac
346 fférenciation de nos littératures par leur langue est relativement récente. Le français devient langue officielle dans le r
347 Le norvégien, l’irlandais, le turc d’aujourd’hui sont des produits du xxe siècle. Renan a fait justice de la confusion ent
348 rle encore sept langues en France, et le français est la langue maternelle de communautés importantes appartenant à cinq na
349 sités linguistiques. c) Les styles et les écoles sont des facteurs de ressemblance ou de dissemblance entre auteurs, non mo
350 es ou rénovées par ces mêmes auteurs. Quelles que soient les différences entre les romantiques allemands, français, anglais, i
351 the Definition of Culture. L’anglais, selon lui, est la langue la plus riche pour un poète, parce qu’elle combine la plus
352 en au contraire une pluralité des allégeances. Il est faux de penser que le seul devoir de l’individu serait son devoir env
353 t faux de penser que le seul devoir de l’individu serait son devoir envers l’État ; et il est exorbitant de considérer comme l
354 ’individu serait son devoir envers l’État ; et il est exorbitant de considérer comme le devoir suprême de l’individu celui
355 i prétendent redouter que l’Europe unie de demain soit un affreux méli-mélo où l’on ne parle plus que l’espéranto ou le « vo
356 nt à ne jamais faire aux nations quelles qu’elles soient ce que les unitaires et centralisateurs qui les combattent au nom de
357 ux-là seuls qui ne demandent qu’à croire qu’ils y sont enfermés. Au-delà des impasses logiques, le désir bâtit la cité. Le d
358 s et de participer à son gouvernement, le désir d’ être citoyen pousse à construire la ville, qui à son tour formera des trad
359 s de l’Histoire », comme certains disent. Elle ne sera pas non plus l’œuvre d’un dictateur : Napoléon, Hitler ont échoué pou
360 Ni spontanée, ni fatale, ni imposée, elle ne peut être que choisie et voulue — exactement comme la démocratie — par une majo
361 elles ne font en tout cas pas cela, et l’on peut être heureux si elles ne font pas le contraire. L’éducation du citoyen qui
362 toyen qui se pratique dans les écoles de nos pays est , aux dires de ses responsables17 généralement insuffisante (parfois i
363 r quand il votera. La leçon d’instruction civique est universellement considérée comme la plus ennuyeuse de toutes. En un s
364 ’est heureux, car si elle passionnait, les choses étant ce qu’elles sont, ce serait inévitablement au bénéfice du chauvinisme
365 si elle passionnait, les choses étant ce qu’elles sont , ce serait inévitablement au bénéfice du chauvinisme national. Un rem
366 assionnait, les choses étant ce qu’elles sont, ce serait inévitablement au bénéfice du chauvinisme national. Un remède pire qu
367 u chauvinisme national. Un remède pire que le mal serait de substituer à l’heure d’ennui civique national une heure d’ennui ci
368 à la vie de la cité et dans l’éveil du désir d’y tenir son rôle de citoyen. (« Cité » signifiant ici toute communauté social
369 lèmes vivants et réels de l’Europe, telle qu’elle est aujourd’hui désunie et telle qu’elle pourrait être unie demain, n’app
370 est aujourd’hui désunie et telle qu’elle pourrait être unie demain, n’apparaissent pas souvent dans les discours des militan
371 é du xxe siècle. Quand on a vu de quoi cette vie est faite, on voit aussi sans discussion possible, sans adjurations pathé
372 e matérielle. On pense bien que le but ne saurait être d’instaurer une branche de plus dans l’enseignement pléthorique du se
373 eur parti, il faut que le professeur lui-même ait été sensibilisé aux réalités de l’Europe encore désunie et aux possibilit
374 ientation antinationaliste et pro-européen ne s’y sera pas produit et qu’il n’aura pas fait sentir ses effets dans l’enseign
375 les n’aboutira, ou ne prendra vraiment le départ. Est -ce dire que l’Europe attend son « Petit Livre rouge » à distribuer au
376 de millions d’écoliers de nos pays ? Oui, mais ce serait le livre des questions réelles éveillant le sens critique et le besoi
377 on, tandis que l’autre, que j’ai sous les yeux, n’ est qu’un recueil de réponses toutes faites, uniformément optimistes, et
378 ltent de l’examen objectif de la situation, et je suis bien certain qu’il révélerait de la sorte la nécessité de l’union, et
379 urope ! », mais ferait voir que l’Europe risque d’ être détruite par ce qui tue l’esprit critique, déprime le goût de la libe
380 tout change. La transmission des connaissances n’ est plus initiation mais instruction publique, c’est-à-dire communication
381 e de nullité le rite. En Europe, au contraire, il est courant que le maître inscrive au bas d’une rédaction d’élève qu’il v
382 ue loi de l’Histoire, et que par suite l’autorité serait quelque chose de « périmé », de « réactionnaire », et en tout cas de
383 en tout cas de condamnable, tandis que la liberté serait moderne, progressiste et louable en tous les cas. Car en fait toute é
384 x éléments à doses variables. Autorité et liberté sont aussi nécessaires à la vie de l’éducation que la diastole et la systo
385 vue de la culture au sens large, trois régions se sont dessinées au cours du second tiers du xxe siècle : l’Europe, l’URSS
386 ne crise aiguë, que les observateurs étrangers ne sont pas les seuls ni les premiers à détecter. Un nombre croissant d’Améri
387 rope le film Blackboard Jungle : la description y est certes à l’excès dramatisée et poussée au noir, mais n’en demeure pas
388 t formé une génération d’enfants que plus rien ne tient en respect, qu’aucune loi ni règlement n’effraie plus. L’école est de
389 u’aucune loi ni règlement n’effraie plus. L’école est devenue leur jouet, et ils ne peuvent comprendre qu’un maître les emp
390 e le casser, comme il leur plaît. L’idée générale est la suivante : si un texte est trop difficile, qu’on en choisisse un p
391 ît. L’idée générale est la suivante : si un texte est trop difficile, qu’on en choisisse un plus facile, un plus « moderne 
392 porte, et que vingt auteurs confirment, pourrait être résumé de la sorte : on pousse le respect de l’individualité enfantin
393 ns : si la formation intellectuelle qu’elle offre est de plus en plus médiocre, l’école américaine n’en prétend pas moins p
394 es droits de la collectivité. Le trait distinctif est ici la spécialisation dirigée par l’État. L’élève qui a réussi ses ép
395 nq-cent-dix sous-spécialisations. Le plan d’étude est rigoureusement prescrit pour chaque spécialité : l’élève n’a aucun dr
396 du parti, qui n’occupent que 6 % des études, 27 % étant consacré aux sciences et 67 % à la spécialisation. Quelques jours apr
397 trois ans. Après quoi, quelques-uns des meilleurs sont autorisés à poursuivre des études supérieures et à préparer un doctor
398 parer un doctorat, trois sur quatre des candidats étant dirigés vers un doctorat en sciences19. Ce sont ainsi les besoins du
399 étant dirigés vers un doctorat en sciences19. Ce sont ainsi les besoins du Plan, c’est-à-dire les besoins de la collectivit
400 idu, comme dans les sociétés religieuses, où tout était prescrit sans discussions. Nous sommes ici aux antipodes de la pratiq
401 es, où tout était prescrit sans discussions. Nous sommes ici aux antipodes de la pratique américaine. À l’excès de liberté dan
402 Ces deux repères extrêmes une fois posés, il nous est plus facile de définir ce qu’est la voie européenne. Posons-nous cett
403 s posés, il nous est plus facile de définir ce qu’ est la voie européenne. Posons-nous cette question très simple : Pourquoi
404 Posons-nous cette question très simple : Pourquoi sommes -nous choqués par les excès américain et soviétique ? Pourquoi les res
405 x excès conduisent à des résultats analogues, qui sont le déclin du sens critique, la non-résistance aux modes ou aux réglem
406 nt européenne apparaît alors bien clairement : il est de former et promouvoir des hommes à la fois libres et responsables,
407 é. J’accorde enfin qu’en Europe même, et quel que soit notre idéal, nous souffrons nous aussi, dans la pratique, des excès a
408 a Parabole des trois colombes. La colombe de Kant est célèbre, qui s’imagine qu’elle volerait mieux dans le vide, sans la r
409 stant la question : que faire ? où aller ? Tout a été réglé d’avance par le régime. La colombe européenne, elle, sait qu’el
410 us condamnent à l’expansion. Que ce mouvement ait été baptisé impérialisme paraît accidentel et relatif : toute énergie, to
411 énergie, toute force physique ou spirituelle peut être qualifiée d’impérialiste par les objets ou individus qui la subissent
412 avons presque tout inventé. L’espace d’abord. Ce sont les Européens qui ont découvert la terre entière, alors qu’aucun autr
413 utre peuple ne songeait à venir les découvrir. Ce sont eux qui ont ainsi permis à l’humanité tout entière de prendre peu à p
414 z les sages de plusieurs autres cultures, mais ce sont les Européens qui lui ont donné son contenu concret et qui ont seuls
415 s démontré sa consistance. L’idée de genre humain est notre création. Le temps ensuite. Ce sont les Européens qui ont inven
416 e humain est notre création. Le temps ensuite. Ce sont les Européens qui ont inventé l’histoire et l’historiographie, avec t
417 politiques des masses. À partir de l’histoire, ce sont les Européens qui ont inventé l’archéologie, comme ils ont inventé l’
418 monde depuis cinquante ans, la part des Européens est largement prépondérante. Et je dis bien : des Européens, non de tel d
419 l de leurs pays. Car chacune de leurs découvertes est née du grand dialogue entre les esprits du passé et du présent, par-d
420 t du présent, par-dessus les frontières ; chacune est prise dans le contexte d’une réflexion européenne (contexte qui tend
421 tre et sculpture : presque tous leurs grands noms sont des noms de l’Europe, et les très rares qui n’en sont pas ont appris
422 des noms de l’Europe, et les très rares qui n’en sont pas ont appris leur métier de nos maîtres, dans nos écoles, aux terra
423 dirai plus. Le monde moderne en tant que tel peut être appelé une création européenne. Pour le bien comme pour le mal, il im
424 car toutes les créations que je viens d’énumérer sont en expansion vers le monde, appellent le monde, s’en nourrissent, et
425 dépens de l’Europe et à ceux du tiers-monde. Tel est le drame. Il intéresse l’avenir de tous les peuples de la terre. En v
426 simple, je crois : la diffusion de nos valeurs n’ est pas coextensive à celle de nos produits et n’en est pas contemporaine
427 t pas coextensive à celle de nos produits et n’en est pas contemporaine. Elle reste loin derrière dans l’espace et le temps
428 e de diffusion de la civilisation née en Europe n’ est pas loin de recouvrir l’ensemble des terres habitées, mais la densité
429 s L’énoncé des plus hautes valeurs européennes tient dans l’œuvre de Bach et dans celle de Mozart. Les Messes et les Passi
430 me, elle n’ira pas plus haut, peut-être, mais qui serait en mesure d’exiger davantage ou de proposer mieux dans le monde d’auj
431 le monde d’aujourd’hui ? Certes, l’Europe réelle est loin de tels sommets, mais ce sont tout de même ses sommets. Elle n’e
432 l’Europe réelle est loin de tels sommets, mais ce sont tout de même ses sommets. Elle n’est pas souvent digne de ces œuvres,
433 ts, mais ce sont tout de même ses sommets. Elle n’ est pas souvent digne de ces œuvres, mais c’est elle qui les a créées. No
434 es l’ignorent ; ils voient plus facilement ce qui est beaucoup plus bas, au niveau du contact brutal entre leurs coutumes e
435 ur sagesse ancestrale et nos machines. Nos péchés sont criants, et tout l’Orient les crie, mais il n’entend pas nos grandeur
436 ais il n’entend pas nos grandeurs. Car la musique est le sublime de l’Occident, mais pour l’oreille d’un Oriental, c’est un
437 e, une espèce de rumeur insensée… Seulement, elle est issue du même complexe, et elle répond dans le monde de l’âme au même
438 » Une autre fois, il me raconte que sa femme, qui est une Hollandaise, donnait des leçons de solfège aux enfants d’une écol
439 mais entendues 20. Ainsi, chaque machine exportée est , en fait, un cheval de Troie. Nous avons évacué nos guerriers et reti
440 re vivre, au sens le plus fort de ce terme. Nous sommes au point de l’évolution de l’humanité où les Européens, ayant créé « 
441 ens, ayant créé « le monde », se voient menacés d’ être dépossédés par ce monde même qu’ils ont suscité et qui se voit en mes
442 emps que nos créations. On voit que l’alternative est utopique, chacun de ses termes l’étant. Il nous reste à trouver des c
443 ’alternative est utopique, chacun de ses termes l’ étant . Il nous reste à trouver des compromis viables, aussi imprévisibles q
444 xxe siècle a vu la civilisation — qui ne saurait être que la nôtre, quand on en parle au singulier — étendre à toute la ter
445 les prophètes de la décadence européenne : et ils sont tous, ou presque tous, Européens. Loin de s’émerveiller du fait que l
446 es civilisations, nous savons maintenant que nous sommes mortelles. Et il ajoutait : Elam, Ninive, Babylone étaient de beau
447 elles. Et il ajoutait : Elam, Ninive, Babylone étaient de beaux noms vagues, et la ruine totale de ces mondes avait aussi pe
448 istence même. Mais France, Angleterre, Russie… ce seraient aussi de beaux noms. Lusitania aussi est un beau nom. Et voyons maint
449 ce seraient aussi de beaux noms. Lusitania aussi est un beau nom. Et voyons maintenant que l’abîme de l’histoire est assez
450 m. Et voyons maintenant que l’abîme de l’histoire est assez grand pour tout le monde. Nous sentons qu’une civilisation a la
451 de Baudelaire rejoindre les œuvres de Ménandre ne sont plus du tout inconcevables : elles sont dans les journaux. L’écho de
452 nandre ne sont plus du tout inconcevables : elles sont dans les journaux. L’écho de cette page fut immense et je sais peu d
453 les sont dans les journaux. L’écho de cette page fut immense et je sais peu de phrases plus fréquemment citées que celle q
454 qui annonce en somme que toutes les civilisations étant mortelles, la nôtre aussi pourrait périr, va donc probablement périr.
455 a donc probablement périr. Pour émouvante qu’elle soit , elle exprime, à mon sens, l’une des erreurs les plus célèbres de l’é
456 pour illustrer le même argument que Valéry : Que sont devenues tant de brillantes créations de la main de l’homme ? Où sont
457 e brillantes créations de la main de l’homme ? Où sont -ils, ces remparts de Ninive, ces murs de Babylone, ces palais de Pers
458 de Persépolis ?… Hélas, j’ai visité les lieux qui furent le théâtre de tant de splendeur, et je n’ai vu qu’abandon et que soli
459 tard, Hegel introduisait l’idée que chaque peuple est « un individu dans la marche de l’Histoire » et qu’il obéit donc, com
460 débuts du xxe siècle, Spengler va plus loin ; il est convaincu que toute culture est un organisme et correspond morphologi
461 va plus loin ; il est convaincu que toute culture est un organisme et correspond morphologiquement à un individu, animal ou
462 l. Il en résulte inexorablement que toute culture est mortelle, et l’on rejoint la phrase de Valéry. Enfin, dans un effort
463 dence historique. Primo, l’hégémonie politique n’ est pas toujours et nécessairement liée à la vitalité d’une civilisation.
464 tion. L’une peut exister sans l’autre. L’une peut être perdue sans que l’autre soit ruinée du même coup. Gengis Khan eut l’h
465 l’autre. L’une peut être perdue sans que l’autre soit ruinée du même coup. Gengis Khan eut l’hégémonie sans la civilisation
466 t une civilisation sans hégémonie. Secundo, il n’ est pas du tout certain que les précédents historiques soient applicables
467 as du tout certain que les précédents historiques soient applicables dans notre situation, ni que la courbe croissance-grandeu
468 n, ni que la courbe croissance-grandeur-décadence soit la même pour toutes les cultures dans tous les temps. Les prophètes d
469 nnu des Européens, celui de la chute de Rome, qui est censée avoir entraîné la disparition de la civilisation gréco-romaine
470 dans la partie occidentale de l’Empire. L’exemple est -il valable pour l’Europe ? La civilisation européenne est-elle une ci
471 alable pour l’Europe ? La civilisation européenne est -elle une civilisation comme les autres ? Son destin peut-il être préd
472 ivilisation comme les autres ? Son destin peut-il être prédit par extrapolation des exemples antiques ? Il se pourrait, bien
473 totalitaires d’aujourd’hui, URSS ou Chine de Mao, tiennent leur unité d’une doctrine uniforme, imposée à tous par l’État. Compar
474 ’elle en a héritées, la civilisation européenne s’ est trouvée fondée sur une culture de dialogue et de contestation. Elle n
475 rite Novalis : nous savons aujourd’hui qu’il n’en fut rien, et que les conflits qui déchirèrent le Moyen Âge ne furent pas
476 que les conflits qui déchirèrent le Moyen Âge ne furent pas moins violents que ceux que nous vivons. L’unité de notre culture
477 a civilisation créée par cette culture n’a jamais été autre chose qu’une unité paradoxale consistant dans la seule volonté
478 commune à tous de refuser l’uniformité. 24. Où sont les candidats à la relève ? Aux prophètes de la décadence européen
479 ope. Première raison : La civilisation européenne est la seule qui soit effectivement devenue universelle. Bien d’autres
480 son : La civilisation européenne est la seule qui soit effectivement devenue universelle. Bien d’autres avaient cru cela d
481 se trompaient, mais cette erreur ne saurait plus être commise, à présent que la terre entière est explorée dans ses dernier
482 plus être commise, à présent que la terre entière est explorée dans ses derniers recoins. Alexandre le Grand et les empereu
483 mouvement d’imitation s’opère à sens unique et n’ est plus réversible. Mais comment expliquer ce phénomène sans précédent d
484 monolithiques et homogènes. Voilà pourquoi elle s’ est trouvée la seule qui fût assez complexe et multiforme pour pouvoir, s
485 s. Voilà pourquoi elle s’est trouvée la seule qui fût assez complexe et multiforme pour pouvoir, sinon satisfaire, du moins
486 hniques que de livres et de missionnaires. Elle s’ est laïcisée, ou sécularisée, et détachée du christianisme qui contribua
487 ition de son « succès » le plus visible —, elle s’ est rendue plus transportable, plus acceptable et imitable qu’aucune autr
488 aleur égale de tout homme devant Dieu, quelle que soit sa nation, sa couleur ou sa race. L’Égypte ancienne ne croyait rien d
489 e ancienne ne croyait rien de tel. Le mot homme y était synonyme d’habitant de la vallée et du delta du Nil. Il y avait un mo
490 e style, Bismarck définit le Bavarois comme « cet être intermédiaire entre l’Autrichien et l’homme ».) Pour les Grecs et les
491 les barbares, c’est-à-dire tous les autres, qui n’ étaient pas vraiment et complètement humains. Ces très hautes civilisations d
492 s ni hommes libres, ni hommes ni femmes, car vous êtes tous fils de Dieu, vous êtes tous un en Jésus-Christ. »), cette conce
493 ni femmes, car vous êtes tous fils de Dieu, vous êtes tous un en Jésus-Christ. »), cette conception devait seule permettre
494 de Baudelaire rejoindre les œuvres de Ménandre ne sont plus du tout inconcevables : elles sont dans les journaux ». Depuis l
495 nandre ne sont plus du tout inconcevables : elles sont dans les journaux ». Depuis lors, on a retrouvé — et même joué — plus
496 nregistrées sur bandes et sur microsillons, elles sont en mesure de résister au temps beaucoup mieux que les fresques de Las
497 t la romaine, dont l’essentiel vit dans la nôtre, sont -elles vraiment mortes ? Leurs conquêtes ont été préservées par le mus
498 sont-elles vraiment mortes ? Leurs conquêtes ont été préservées par le musée et le laboratoire européens, pour être diffus
499 es par le musée et le laboratoire européens, pour être diffusées de nos jours sur toute la terre. Il s’en faut de beaucoup q
500 plus raffinées, aient connu pareille fortune. Ce sont les lois de Minos, de Dracon et de Solon, venues de la Crète et de l’
501 la Crète et de l’Égypte ancienne par la Grèce, ce sont le Décalogue et les Béatitudes, c’est enfin le code de Justinien, d’o
502 ne mourrons jamais entièrement et que nos cendres sont fécondes. Le temps est passé où les civilisations étaient mortelles. 
503 rement et que nos cendres sont fécondes. Le temps est passé où les civilisations étaient mortelles. » J’ajouterai cette sim
504 fécondes. Le temps est passé où les civilisations étaient mortelles. » J’ajouterai cette simple remarque : si tant de civilisat
505 si tant de civilisations qu’on croyait endormies sont tirées de l’oubli au xxe siècle, si tant d’écoles antiques de sagess
506 rminée. Et les autres n’en savaient rien. Mais ce fut plus souvent l’agression d’une civilisation rivale, plus primitive et
507  barbares » mal connus. Les candidats à la relève étaient nombreux. En est-il un seul aujourd’hui qui réclame l’oblitération ou
508 s. Les candidats à la relève étaient nombreux. En est -il un seul aujourd’hui qui réclame l’oblitération ou simplement la re
509 de succès ? Les États-Unis ? dira-t-on. Mais ils sont nés de la substance même de l’Europe, et je les vois s’européaniser p
510 ain. L’URSS ? Mais qu’apporte-t-elle de nouveau ? Est -elle une autre civilisation ? Lénine disait de sa Révolution : « C’es
511 marxisme plus l’électricité. » Or, le marxisme n’ est pas un apport soviétique, ce n’est pas Popov qui l’a inventé, mais bi
512 le marxisme n’est pas un apport soviétique, ce n’ est pas Popov qui l’a inventé, mais bien un Juif allemand, dont le père é
513 inventé, mais bien un Juif allemand, dont le père était devenu protestant, et qui rédigeait au British Museum, pour le Herald
514 et qui forment une partie du Kapital. Le marxisme est né en Europe et de l’Europe, au carrefour d’un débat séculaire entre
515 anisé la Russie. Et c’est l’URSS à son tour qui s’ est chargée d’aider la Chine à liquider la civilisation des mandarins, c’
516 Le fameux « bond en avant » de la Chine n’a guère été qu’un bond vers l’industrie et vers le socialisme, inventés par l’Eur
517 a Russie, laquelle veut rejoindre l’Amérique, qui est une invention de l’Europe… Où est donc dans tout cela « l’éclipse » d
518 l’Amérique, qui est une invention de l’Europe… Où est donc dans tout cela « l’éclipse » de l’Europe comme culture ? Dans l’
519 e péril noir. Je n’y crois guère. Notre éclipse n’ est rien que notre aveuglement sur nos propres pouvoirs et notre vocation
520 . La civilisation européenne, devenue mondiale, n’ est menacée en fait que par les maladies qu’elle a produites et propagées
521 ité créatrice, c’est en Europe, que ce péril doit être conjuré. Car ce qui nous menace de l’extérieur, c’est aussi ce qui no
522 s, une saveur à nos vies. Ce matérialisme plat ne serait guère plus dangereux que la bêtise humaine en général, s’il n’avait p
523 tendre les ressorts créateurs du progrès, dont il est trop souvent l’aboutissement. Or, chacun sait que les ressorts du pro
524 ment. Or, chacun sait que les ressorts du progrès sont l’inquiétude philosophique, la passion de défier le destin, le refus
525 et la police des États. Ces maladies de l’Europe sont plus dangereuses pour le reste du genre humain que pour l’Europe elle
526 enre humain que pour l’Europe elle-même, où elles sont nées. Car l’Europe, à travers des crises atroces, s’est vaccinée. L’E
527 es. Car l’Europe, à travers des crises atroces, s’ est vaccinée. L’Europe a sécrété Hitler, mais en douze ans elle l’a élimi
528 uelque temps contre la tentation totalitaire, qui est l’essence du nationalisme. Il n’en va pas de même sur d’autres contin
529 ous avaient avertis — ceux que j’ai cités. Le mal est venu, nous l’avons vu, et nous l’avons vaincu au prix de millions de
530 au prix de millions de morts… Et maintenant, ce n’ est pas chez nous, mais chez les autres, qu’il triomphe. Le grand Jacob B
531 uropéennes au xxe siècle : Le sort des ouvriers sera le plus étrange… l’État militaire va devenir le Grand Fabricant. Ces
532 s humaines dans les grandes usines ne peuvent pas être éternellement abandonnées à leur pauvreté et à leur envie. Un certain
533 ilà ce qui doit logiquement se produire. Or ce n’ est pas chez nous, en Europe, mais en Chine, que cette prédiction se réal
534 poutnik. Un quart d’heure après, les travailleurs étaient alignés. Sur l’ordre des commandants de compagnies et de brigades, le
535 e millénaire des paysans à vivre au petit bonheur est à jamais disparue. Quel énorme changement ! La religion du travail f
536 n’a jamais atteint en Europe de tels excès. Elle est née chez nous, il est vrai, et c’était bien chez nous que Burckhardt
537 Europe de tels excès. Elle est née chez nous, il est vrai, et c’était bien chez nous que Burckhardt en avait pressenti les
538 avec succès. Notre tâche en Europe, aujourd’hui, est de créer les anticorps qui permettront au genre humain de résister à
539 hénie du spirituel. C’est dire que notre vocation est désormais de présenter au monde, et d’illustrer d’abord par l’exemple
540 la coexistence en tension des contraires. Car tel est le secret occidental de la recherche spirituelle sans quoi la science
541 ves. Secret lui-même paradoxal, puisqu’il exige d’ être communiqué, comme l’amour même, sous peine de lésions explosantes dan
3 1970, Lettre ouverte aux Européens. II. L’union fédérale
542 sauvegarde de nos autonomies. Car ces autonomies seront perdues une à une si elles refusent l’union qui ferait leur seule for
543 le force ; mais en retour, cette union ne saurait être acquise au prix des libertés qu’elle doit servir. Rien de plus limpid
544 impide que la déduction qui fait toute ma thèse : étant donné que notre base d’unité est une culture pluraliste, on ne peut f
545 ute ma thèse : étant donné que notre base d’unité est une culture pluraliste, on ne peut fonder sur elle qu’une union fédér
546 ifficile à expliquer, c’est que rien n’ait encore été fait dans ce sens, depuis près de vingt-cinq ans qu’on nous déclare a
547 Zurich, qu’il n’y a pas une minute à perdre. Quel est l’obstacle apparemment insurmontable à cette union que tout indique,
548 ersonne ne fait ? Il y en a deux, en vérité. L’un tient au sens des mots, l’autre au sens de l’histoire, j’entends bien : au
549 ra un purgatoire de mille ans. » Dans quelle voie sommes -nous engagés après un siècle ? Celle des fédérations et de l’harmonie
550 Je répondrai : dans les deux à la fois, et cela n’ est pas contradictoire. Un phénomène très général de convergence inspire
551 dictoire, c’est en effet l’État-nation, tel qu’il est né de la Révolution et de l’Empire napoléonien, produit de la confisc
552 r sa souveraineté (car nul pays de notre Europe n’ est plus en mesure de jouer un rôle mondial, d’assurer seul sa défense, d
553 sa capitale, et les accusent de colonialisme. Il est certain que la prétention à une politique indépendante, au plein sens
554 indépendante, au plein sens du terme, ne saurait être soutenue à la rigueur que par la Chine, l’URSS et surtout les USA, s’
555 acceptaient toutefois d’en payer le prix, lequel serait celui d’une autarcie presque totale ou d’une sorte d’isolation parano
556 enne, voici donc une première réponse : oui, nous sommes bel et bien au seuil d’une ère potentiellement fédéraliste. Peut-on d
557 regroupent 40 % de la population du globe, et il est frappant de constater qu’on trouve parmi eux les plus grands États de
558 rope de l’Ouest et la Yougoslavie pour celle de l’ Est , et au-delà l’URSS, l’Inde et l’Australie. Voilà qui réfute le cliché
559 ique de la convergence et de la diversification n’ est pas toujours mieux satisfaite dans ces États officiellement fédératif
560 tifs que dans les nations unitaires : en URSS, ce sont les autonomies régionales et les diversités religieuses et politiques
561 s et les diversités religieuses et politiques qui sont opprimées par l’État central, dont un parti unique s’est emparé ; au
562 rimées par l’État central, dont un parti unique s’ est emparé ; au Nigéria, c’est au contraire une des régions fédérées qui
563 exemple de la fédération des cantons suisses ! Il est certain que, dans ces trois cas, c’est moins le fédéralisme qu’on est
564 s ces trois cas, c’est moins le fédéralisme qu’on est en droit d’incriminer que sa trahison pure et simple, ou son usage ma
565 ralisme, mais d’un défaut de fédéralisme. Et l’on est en droit de penser que l’application correcte de la méthode fédéralis
566 plus totales et vers des unions plus vastes, qui est le battement même du cœur d’un régime sain, j’entends immunisé contre
567 xxe siècle, il faudrait, avant de le prescrire, être très sûr de sa formule. Or, je ne vois pas de terme du langage politi
568 , au mépris de l’union dans l’intérêt commun. Tel est le malentendu tragique et ridicule qui bloque tous les efforts d’unio
569 rine du gouvernement fédératif. Cette définition est assurément moins éclairante que les deux citations qui l’illustrent :
570 ux citations qui l’illustrent : « Le fédéralisme était une des formes politiques les plus communes employées par les sauvage
571 l voudrait savoir ce qu’un mot signifie, la cause est jugée. Il s’agit d’un système qui est bon pour les sauvages, et qui s
572 e, la cause est jugée. Il s’agit d’un système qui est bon pour les sauvages, et qui semble n’avoir été préconisé que par de
573 est bon pour les sauvages, et qui semble n’avoir été préconisé que par des traîtres à la République… Pratiquement, le Fran
574 me, inverse de la première mais non moins fausse, est la plus répandue en Amérique. Si les Vaudois se disent fédéralistes c
575 aine. Mon Littré date de 1865 : « fédéralisme » y est encore qualifié de « néologisme ». C’était deux ans après le livre de
576 ut : le malheur congénital du fédéralisme reste d’ être un concept dialectique, ambigu, et qui autorise — ou incite en tout c
577 té directeur d’un congrès européen qu’une journée fût réservée à des travaux sur le fédéralisme. Le représentant du Conseil
578 déralisme. Le représentant du Conseil de l’Europe tint à déclarer aussitôt que le terme de fédéralisme étant tabou à Strasbo
579 t à déclarer aussitôt que le terme de fédéralisme étant tabou à Strasbourg, il se verrait obligé de quitter le comité si l’on
580 Je compris par la suite que ce haut fonctionnaire tenait le fédéralisme pour un système d’unification intégrale, sans respect
581 t-à-dire très exactement le contraire de ce qu’il est . À l’inverse, le fédéralisme est assimilé par beaucoup à une attitude
582 aire de ce qu’il est. À l’inverse, le fédéralisme est assimilé par beaucoup à une attitude de suspicion envers tout pouvoir
583 e, et grand européen, écrivait récemment : « Ce n’ est pas dans le fédéralisme, ce n’est pas en se repliant sur elle-même qu
584 emment : « Ce n’est pas dans le fédéralisme, ce n’ est pas en se repliant sur elle-même que la Wallonie trouvera son salut. 
585 vention fédérale, « parce qu’ici, disait-il, nous sommes fédéralistes ! ». Pareils malentendus, s’ils sont le fait d’Européens
586 mmes fédéralistes ! ». Pareils malentendus, s’ils sont le fait d’Européens professionnels ou de gardiens jaloux des traditio
587 u de gardiens jaloux des traditions helvètes, que sera -ce ailleurs ? Le fédéralisme n’étant ni ceci, ni cela, mais la coexis
588 helvètes, que sera-ce ailleurs ? Le fédéralisme n’ étant ni ceci, ni cela, mais la coexistence en tension de ceci et de cela,
589 ions partielles, donc ruineuses dans son cas, lui soit pour ainsi dire congénital. Or, s’il est vrai que l’union de l’Europe
590 as, lui soit pour ainsi dire congénital. Or, s’il est vrai que l’union de l’Europe est l’entreprise capitale de ce siècle,
591 énital. Or, s’il est vrai que l’union de l’Europe est l’entreprise capitale de ce siècle, et s’il est vraisemblable que cet
592 e est l’entreprise capitale de ce siècle, et s’il est vraisemblable que cette union sera fédérale ou ne sera pas, on sent t
593 siècle, et s’il est vraisemblable que cette union sera fédérale ou ne sera pas, on sent tous les dangers qu’entraînent en fa
594 vraisemblable que cette union sera fédérale ou ne sera pas, on sent tous les dangers qu’entraînent en fait les malentendus q
595 vitales, de telle sorte que la solution ne puisse être cherchée ni dans la réduction de l’un des termes, ni dans la subordin
596 e telle manière que la résultante de leur tension soit positive. (On dirait, dans le langage de la théoriea des jeux de von
597 de relations bipolaires, dont le « modèle » nous est connu : c’est celui qu’ont élaboré les fondateurs de la philosophie o
598 lule de base des ligues et fédérations. Voilà qui est proprement occidental : devant ce même problème de l’Un et du Divers,
599 nte. Le but pour le brahmane, pour le bouddhiste, est d’effacer l’individu, la différence, de tout fondre dans l’Un sans di
600 ue. De même que le modèle trinitaire des conciles sera utilisé par Kepler dans ses spéculations sur le cercle et leurs appli
601 nce des natures, sauvegarde leurs propriétés21 », sera repris par tous les penseurs occidentaux respectueux du réel et des c
602 pectueux du réel et des conditions de la vie, qui sont  : antinomies, oppositions, lutte des contraires « d’où procède la plu
603 définis comme exclusifs l’un de l’autre a cessé d’ être un scandale, est même devenu principe fondamental d’interprétation du
604 usifs l’un de l’autre a cessé d’être un scandale, est même devenu principe fondamental d’interprétation du réel. (Je pense
605 utres hommes, ses semblables. Ces groupes devront être à leur tour à la fois autonomes et solidaires : pour eux aussi, l’un
606 sans l’autre, bien mieux : l’un — la solidarité — sera la garantie de l’autre — l’autonomie. Quelques exemples : 1. Le probl
607 i veut à la fois sa vie privée et une vie sociale est homologue de la situation de la région qui veut à la fois son autonom
608 . 4. Enfin, le problème général de l’œcuménisme n’ est -il pas le même en sa forme que ceux que nous venons d’évoquer, puisqu
609 analyse, des vocations particulières au sein de l’ Être même de l’Universel, source et fin de toute communauté. 31. Princi
610 iste Dans tous ces domaines d’existence, quels seront les principes de méthode dictés par le souci fédéraliste de respect d
611 ne reste qu’à désigner le niveau de compétence où seront prises les décisions relatives à cette tâche. Il peut y avoir d’aille
612 it le marxisme plus l’électricité, le fédéralisme sera l’autonomie des régions plus les ordinateurs, c’est-à-dire le respect
613 ndu possible par la technique moderne. Ce débat n’ est pas d’aujourd’hui. Aux projets de découpage géométrique de la France
614 ar cette grande phrase : « Le but de la société n’ est pas que l’administration soit facile, mais qu’elle soit juste et écla
615 but de la société n’est pas que l’administration soit facile, mais qu’elle soit juste et éclairée. » Nous allons voir, enfi
616 as que l’administration soit facile, mais qu’elle soit juste et éclairée. » Nous allons voir, enfin, que nos critères d’éval
617 cipation, l’efficacité et l’économie des moyens — sont en interdépendance générale. 32. Les unités de base Prenons l’e
618 rop serré avec d’autres chez soi, et qui voudrait être enfin seul, sort et se mêle à la foule anonyme. Mais c’est une mauvai
619 unication avec ceux que l’on côtoie comme s’ils n’ étaient pas là. La solution consisterait à recréer les conditions de communau
620 aménagements. Les dimensions, d’ailleurs, peuvent être numériques aussi bien qu’architecturales : prenez les conflits actuel
621 rofessionnel souvent d’autant plus rentable qu’il est plus étroitement spécialisé et adapté sans nul souci critique à sa fo
622 étudiants, sorte de tourbillon dans l’égarement, est aussi le contrecoup mécanique de l’explosion des effectifs. Multiplie
623 dimensions d’une université digne du nom, qui ne soit pas une simple juxtaposition d’écoles professionnelles, et qui ménage
624 des recteurs, à Göttingen, en 1964. L’université fut une commune libre au Moyen Âge. Toute vie civique, depuis la cité gre
625 n Âge. Toute vie civique, depuis la cité grecque, est communale d’abord, municipale. C’est au niveau de la vie civique ou p
626 unités de base ? Comment devenir assez grand pour être fort, tout en restant assez petit pour être libre ? Ce n’est pas le v
627 pour être fort, tout en restant assez petit pour être libre ? Ce n’est pas le vote d’une constitution, de type plus ou moin
628 out en restant assez petit pour être libre ? Ce n’ est pas le vote d’une constitution, de type plus ou moins fédéral, qui pe
629 ivisme, c’est dans cette dialectique concrète que sont en train de se former sous nos yeux, en Europe, plus d’une centaine d
630 is en considération par les auteurs classiques, n’ était en réalité qu’un cas particulier d’une conception beaucoup plus large
631 re à épuiser »… Et il ajoutait : « Le fédéralisme est autre chose qu’une simple recette juridique ou politique : il est un
632 qu’une simple recette juridique ou politique : il est un des grands types d’aménagement du rapport politique et peut-être p
633 e viens de le définir ne fait que commencer. Il n’ est pas matière historique, mais prospective. Il a plus d’avenir que de p
634 s, Le Fédéralisme contemporain : « Le fédéralisme est présence au pouvoir global des éléments particuliers — demeurant dist
635 connaissables — dont se compose la fédération. Il est une symbiose sans confusion ni disparition des spécificités. » 22.
4 1970, Lettre ouverte aux Européens. III. La puissance ou la liberté
636 sible de l’Europe, donc à toute union fédérale, n’ est autre que l’État-nation, tel que Napoléon en a posé le modèle, intégr
637 ar le tiers-monde, mal décolonisé à cet égard… Qu’ est -ce en somme qu’instituer un État-nation ? C’est soumettre toute une n
638 donc, de plus hostile à toute espèce d’union tant soit peu sérieuse ou sincère que cet État-nation qui, par ailleurs, se rév
639 aux exigences concrètes de notre temps, puisqu’il est à la fois trop petit pour le monde, trop grand pour ses régions, et s
640 ces du désordre dans la cité, mais ces confusions sont stériles, et leur critique impitoyable peut être à la rigueur féconde
641 sont stériles, et leur critique impitoyable peut être à la rigueur féconde. 35. Critique fédéraliste du nationalisme
642 t, par exemple, s’écria solennellement que la CED était « la fin de la France », parce que cette convention prétendait limite
643 nce non absolument et non totalement souveraine n’ était plus la France. La seule évocation d’une atteinte possible à la souve
644 , on touchait au sacré. Le très laïque M. Herriot était en réalité un fanatique de la religion de la nation. S’il n’eût pas é
645 tique de la religion de la nation. S’il n’eût pas été aveuglé par la superstition jacobine, il eût vu comme nous tous que l
646 vu comme nous tous que la souveraineté absolue n’ est qu’un mythe, inventé par les prêtres de la nation dans le dessein d’a
647 Pour Jean Bodin, au xvie siècle, la souveraineté est le droit de poser et de casser les lois, le fait du prince, et seul e
648 ue rien le limite hors la Justice divine, dont il est le seul interprète… Par la suite, on a défini la souveraineté comme «
649 r le droit applicable à chaque domaine ». Or il n’ est pas un seul État européen qui, de nos jours, ait conservé la faculté
650 faculté d’agir à sa guise à l’extérieur. Il n’en est pas un seul qui soit capable de déclarer la guerre ou de conclure la
651 guise à l’extérieur. Il n’en est pas un seul qui soit capable de déclarer la guerre ou de conclure la paix comme il l’enten
652 irate. Ces limites décisives à la souveraineté ne sont point posées par le droit, mais par les circonstances réelles du sièc
653 des forces réelles et des pouvoirs concrets, elle est devenue le réceptacle où se recueillent pêle-mêle nostalgies de gloir
654 un complexe. D’où la difficulté, pour ceux qui en sont victimes, de s’adapter aux réalités changeantes du siècle, et même de
655 icien : le partisan de l’État-nation, en effet, n’ est pas simplement un homme qui a tort, ou qui persiste méchamment dans s
656 es par Nietzsche. La patrie, pour le fédéraliste, est une réalité d’instinct et de sentiment, un fait de naissance et d’ata
657 tte implantation géophysique reste locale. Elle n’ est guère extensible au-delà de la région. La nation, au contraire, au se
658 oderne, au sens du « Vive la Nation ! » de Valmy, est une réalité d’ordre plutôt mystique, idéale ou idéologique. D’où cett
659 mais on ne peut rien annexer à une patrie. L’État est un agencement d’activités administratives et politiques, une construc
660 Il suffit de constater que la structure de l’État est à peu près la même de nos jours dans les patries et les nations les p
661 eur de parler sa langue, quand celle-ci se trouve être majoritaire dans les frontières actuelles (et en somme accidentelles)
662 réalités économiques. C’est ainsi que le charbon fut français ou allemand, selon qu’il se trouvait d’un côté ou de l’autre
663 s-sol muet. La tendance à l’autarcie économique n’ est qu’une transposition particulièrement insensée de la volonté d’isolem
664 l’autarcie implique que le bien-être des citoyens soit sacrifié à la puissance de l’État, et leur liberté personnelle et con
665 aux élites modernes que l’indépendance nationale est la suprême valeur humaine, puisque en fait on lui sacrifie la santé d
666 gue étrangère. Ajoutons que l’autarcie économique est irréalisable au xxe siècle, et n’existe pas, même en Chine. Tout com
667 courant qu’ils prolongent. Si nous croyons qu’il est une « culture nationale » française ou danoise par exemple, comme la
668 ’imprudentes les trois questions suivantes que je tiens pour décisives : — Faut-il sacrifier les souverainetés absolues ? — S
669 ? Certains stato-nationalistes de droite, ou de l’ Est , disent qu’ils veulent bien de l’Europe unie, si elle respecte les so
670 es droits de célibataire. Logiquement, l’attitude est comique ; pratiquement, elle permet tous les refus et n’autorise que
671 ypocrisies. Quant à son absurdité théorique, elle est parfaitement exprimée par la devise que proposait l’historien autrich
672 La première, c’est que la souveraineté nationale est encore un mythe puissamment agissant sur les esprits primaires de la
673 ’objections. Chacun sait que son régime politique est l’un des plus stables du monde, depuis plus d’un siècle. Ce que l’on
674 er par les vingt-cinq cantons et demi-cantons qui étaient encore, au début de 1848, des États parfaitement souverains. Tout le
675 t depuis des siècles entre les cantons souverains étaient trop lâches : elles ne permettaient pas une défense commune efficace.
676 in de la guerre civile dite du Sonderbund (1847), fut la suivante : loin d’exiger des cantons une renonciation à leur souve
677 a Confédération suisse. Article 3. — Les cantons sont souverains en tant que leur souveraineté n’est pas limitée par la Con
678 s sont souverains en tant que leur souveraineté n’ est pas limitée par la Constitution fédérale, et comme tels, ils exercent
679 t comme tels, ils exercent tous les droits qui ne sont pas délégués au pouvoir fédéral. Article 5. — La Confédération garan
680 depuis cent-vingt-deux ans. On peut les qualifier soit d’habiles compromis, soit d’échappatoires, selon qu’on a le tempérame
681 . On peut les qualifier soit d’habiles compromis, soit d’échappatoires, selon qu’on a le tempérament pragmatique ou doctrina
682 ragmatique ou doctrinaire. Un fait demeure : il n’ est pas de Constitution plus fédéraliste que celle de la Suisse, et pourt
683 ttre pour survivre. Aujourd’hui que le nécessaire est assuré, on se bat pour le contrôle de zones d’influence plus idéologi
684 le Vietnam) et l’on travaille pour le profit, qui est en somme du superflu. Mais dès lors que ce choix de notre avenir est
685 erflu. Mais dès lors que ce choix de notre avenir est libre, nous voici contraints de le faire, à nos risques et périls ! N
686 tat décent, une communauté vivante ? Et quel prix sommes -nous prêts à payer pour cela ? Le prix de certaines libertés, ou le p
687 te de Troisième Grand préoccupé principalement de tenir tête aux deux autres, alors il faut créer un super-État-nation contin
688 a formule d’État-nation à l’échelle continentale, serait capable sans nul doute de créer une Europe très forte, mais qui serai
689 ul doute de créer une Europe très forte, mais qui serait très peu européenne. Sans compter qu’un super-État-nation ne pourrait
690 Sans compter qu’un super-État-nation ne pourrait être imposé à tous nos peuples qu’à la faveur d’une guerre générale — selo
691 tastrophique, mais dont la réalisation ne saurait être exclue pour autant. Au contraire, si nous donnons pour finalité à la
692 mie des communautés (la production industrielle n’ étant qu’un des moyens de ces libertés), alors il faut reconnaître que l’Ét
693 s), alors il faut reconnaître que l’État-nation n’ est pas seulement un modèle périmé, mais qu’il est en fait aujourd’hui ra
694 n’est pas seulement un modèle périmé, mais qu’il est en fait aujourd’hui radicalement incompatible avec les fins de l’Euro
695 mun à l’échelle fédérale continentale tout ce qui est nécessaire pour garantir les autonomies de tous ordres, régionales, c
696 ue ; le reste — la justice, la paix, la liberté — étant manière de parler plus ou moins nobles, ou pure et simple captatio dé
697 mieux que la puissance collective. L’Europe unie sera seule capable de réaliser leur vision. On me dira peut-être aussi que
698 ration » qu’évoquait le général de Gaulle, et qui serait formée d’États-nations conservant jalousement leurs prétentions à la
699 dre une occasion de faire voir à quel point elles sont absurdes. Elles sont encore efficaces, il est vrai, pour gêner ce qu’
700 aire voir à quel point elles sont absurdes. Elles sont encore efficaces, il est vrai, pour gêner ce qu’il faudrait aider : l
701 es sont absurdes. Elles sont encore efficaces, il est vrai, pour gêner ce qu’il faudrait aider : les échanges culturels, le
702 t absolument à rien pour arrêter ce qui devrait l’ être  : les tempêtes et les épidémies, la pollution de l’air et des fleuves
703 . Ce statut des frontières, doublement déficient, est caractéristique de tout ce qui touche à l’État-nation : néfaste dans
704 he à l’État-nation : néfaste dans la mesure où il est encore réel, inexistant quand on voudrait compter sur lui. Je ne sais
705 ose leur balance commerciale (laquelle ne saurait être positive, me semble-t-il, dans tous les pays à la fois…) ne sont pas
706 me semble-t-il, dans tous les pays à la fois…) ne sont pas le type même de faux problèmes, résultant de la seule fiction d’é
707 e. Et les diversités que nous devons respecter ne sont pas celles de ces États-nations nés d’hier : elles les traversent et
708 ant la « majesté de l’État ». Mais non ! l’État n’ est pas un dieu, ce n’est qu’un appareil plus ou moins efficace, qui doit
709 État ». Mais non ! l’État n’est pas un dieu, ce n’ est qu’un appareil plus ou moins efficace, qui doit être mis au service d
710 t qu’un appareil plus ou moins efficace, qui doit être mis au service des citoyens et de leurs cités, et non l’inverse. Cess
711 aire l’Europe qu’ils traitent de blague, et qui l’ est en effet dans leurs calculs. Non qu’elle soit le cadet de leurs souci
712 ui l’est en effet dans leurs calculs. Non qu’elle soit le cadet de leurs soucis : elle est le spectre qui les hante et qu’il
713 Non qu’elle soit le cadet de leurs soucis : elle est le spectre qui les hante et qu’ils refoulent, en le bagatellisant. L’
714 t. L’Europe unie à bref délai, de leur vivant, ce serait , pour la plupart d’entre eux, la limite supérieure ou la fin de leur
715 que ou militaire. Et l’on sait que l’abnégation n’ est pas une valeur politicienne. L’Europe ne se fera pas non plus spontan
716 us spontanément, par la « force des choses », qui est la mesure exacte de la faiblesse de notre esprit, ou bien parce qu’el
717 faiblesse de notre esprit, ou bien parce qu’elle est nécessaire, ou encore en vertu de quelque « sens de l’histoire » que
718 uvoir », comme le répètent les adolescents qui en sont encore au Lénine de Que faire ? (1902). Il n’y a pas de pouvoir à pre
719 re au niveau des États-nations. La seule question serait d’en créer un, au niveau des réalités de notre société électronique.
720 échelon où le pouvoir puisse à la fois servir et être contrôlé, seul échelon de participation, de responsabilité, et donc d
721 lité, et donc de liberté. 23. Les Basques de l’ Est et de l’Ouest, les Catalans de Perpignan et de Barcelone, ne sont pas
722 st, les Catalans de Perpignan et de Barcelone, ne sont pas séparés par les Pyrénées, mais par les décrets de Paris et de Mad
723 ces modestes sommets et cet affluent de la Volga sont au centre de la région la plus industrielle de l’URSS, quelque chose
724 . Encore que, dans un sens particulier, je puisse tenir ma langue pour ma patrie, mais ce n’est plus celle de mon enfance, c’
725 puisse tenir ma langue pour ma patrie, mais ce n’ est plus celle de mon enfance, c’est celle que j’emporte avec mes livres.
5 1970, Lettre ouverte aux Européens. IV. Vers une fédération des régions
726 nt, ou il les étirait à l’aide de cordes si elles étaient plus courtes que le lit. Thésée lui ayant fait subir ce même supplice
727 les États-Unis d’Europe, sous quelque nom que ce soit , il faut commencer maintenant… Debout, l’Europe ! » Il y a vingt-quat
728 e ! » Il y a vingt-quatre ans de cela. L’Europe n’ est toujours pas debout. Sans corps constitué, sans tête, comment pourrai
729 ntes, comme celle d’André Malraux : « Les nations sont redevenues le phénomène fondamental du siècle. L’évolution a joué et
730 contestablement dans le sens de la nation26. » Il est vrai que le même André Malraux, quelques jours plus tard, interrogé p
731 nes gens à la radio, répondait : « Faire l’Europe est la seule chose véritablement importante de notre temps27. » Mais qui
732 que cette « réalité fondamentale du siècle », que serait la nation, est précisément celle qui fait obstacle à cette « seule ch
733 é fondamentale du siècle », que serait la nation, est précisément celle qui fait obstacle à cette « seule chose véritableme
734 t que si l’Europe qu’appelait Winston Churchill n’ est pas faite, c’est parce que les nations qu’exalte l’ex-ministre d’État
735 ’y opposent encore irréductiblement, de tout leur être de nations « souveraines »28 ? Quand on nous affirme que le xxe siè
736 28 ? Quand on nous affirme que le xxe siècle ne sera pas celui du triomphe de l’Internationale, comme Marx l’avait dit, ni
737 n l’avait prévu, mais bien le siècle des nations, est -ce qu’on s’en félicite, ou bien est-ce que l’on dit « le siècle des n
738 des nations, est-ce qu’on s’en félicite, ou bien est -ce que l’on dit « le siècle des nations » comme on dirait « l’année d
739 dirait « l’année de mon infarctus » ? Autre chose est de constater que la réalité politique de notre temps est encore la na
740 constater que la réalité politique de notre temps est encore la nation, autre chose d’affirmer qu’on ne veut rien y changer
741 cela réalisme. Le cancer et les maladies mentales sont aussi des réalités importantes de notre temps, mais je ne pense pas q
742 sévir. 40. Nations en crise Que les nations soient encore bien réelles, et très fortes à quelques égards, l’impossibilit
743 c une évidence presque écrasante. Que les nations soient en même temps mal adaptées (pour dire le moins) à l’évolution de notr
744 ins) à l’évolution de notre société, la preuve en est fournie par les deux guerres mondiales, résultant du nationalisme et
745 du Guipuzcoa ou de la Catalogne —, crises dont il est concevable qu’elles se résolvent un jour (soit pas l’octroi d’un régi
746 il est concevable qu’elles se résolvent un jour ( soit pas l’octroi d’un régime plus différencié et libéral, soit par une sé
747 l’octroi d’un régime plus différencié et libéral, soit par une sécession, mais qui ne serait parfois qu’un rattachement à l’
748 é et libéral, soit par une sécession, mais qui ne serait parfois qu’un rattachement à l’État-nation voisin), viennent s’ajoute
749 rises plus amples et dramatiques, qui affectent l’ être même de plusieurs États-nations européens. La Belgique est menacée d’
750 de plusieurs États-nations européens. La Belgique est menacée d’éclatement. La Grande-Bretagne envisage sans fièvre sa muta
751 es plasticages en Bretagne ». On sait ce qu’il en est advenu deux ans plus tard. Tout cela dans la patrie de la centralisat
752 souvent confondues avec le fédéralisme dont elles sont deux négations ; l’autre d’un dépassement du fédéralisme interétatiqu
753 rrait que tuer l’Europe du xxe siècle, si elle n’ est pas surmontée à temps. 41. Origines de l’État-nation La grande
754 qu’il y a toujours eu des États, que les nations sont immortelles (au moins la leur), que rien d’autre n’est donc possible,
755 mmortelles (au moins la leur), que rien d’autre n’ est donc possible, et que d’ailleurs l’État et la nation marquent l’about
756 naissance de la première nation, la France, peut être datée de cette déclaration des légistes de Philippe le Bel : « Le Roy
757 légistes de Philippe le Bel : « Le Roy de France est empereur en son royaume », ce qui veut dire que le chef de l’État d’u
758 celle dont il se trouve qu’on peut la contrôler — sera vite suivi par les rois d’Espagne et d’Angleterre, puis par les princ
759 lon la formule du xive siècle. Ce spectacle, qui est celui de la naissance des nations, remplit d’effroi les sages de l’ép
760 ffroi les sages de l’époque. « Ô genre humain, tu es devenu un monstre aux multiples têtes ! » s’écrie Dante dans son trai
761 lus l’idée fatale de la souveraineté absolue, qui est à peine supportable quand un prince l’incarne, s’il n’est pas un géni
762 ine supportable quand un prince l’incarne, s’il n’ est pas un génie ou un saint, mais qui devient proprement révoltante — et
763 parti qui s’en empare au nom du peuple, comme ce fut le cas des jacobins puis des « démocraties » plébiscitaires et totali
764 de l’idéal national par l’appareil étatique — qui est l’œuvre des jacobins et de Napoléon —, la nationalisation de l’État r
765 ce que l’on ne fait pas, parce que l’État-nation est devenu sacré, c’est-à-dire intangible en nos esprits, qui résistent à
766 ui résistent à l’idée qu’il pourrait après tout n’ être qu’une forme transitoire, comme tant d’autres. On le soustrait à tout
767 gion pour le peuple », assure-t-on, et comme ce n’ est plus guère le christianisme, ce sera donc le nationalisme, le culte d
768 et comme ce n’est plus guère le christianisme, ce sera donc le nationalisme, le culte de la patrie étatisée, seul Absolu auq
769 tout. L’État-nation moderne, unitaire et absolu n’ est enfin qu’un empire manqué. Voilà la vérité fondamentale du xxe siècl
770 les États-nations unitaires en tant que tels ont été et sont des empires manqués, à commencer par celui de Napoléon, les s
771 ats-nations unitaires en tant que tels ont été et sont des empires manqués, à commencer par celui de Napoléon, les seuls emp
772 seuls empires réussis de notre temps se trouvent être des fédérations : les USA et l’URSS. Poussons plus loin le paradoxe :
773 ssons plus loin le paradoxe : la Suisse elle-même est un empire réussi, en tant qu’elle groupe sous une égide suprême et ar
774 ge suprême (mais non pas dimensions gigantesques) sont , en effet, les notes essentielles de l’empire. 43. Trop petits et
775 aintenant ces États-nations unitaires tels qu’ils sont dans leur être et leur agir concret, non plus dans leurs seules préte
776 tats-nations unitaires tels qu’ils sont dans leur être et leur agir concret, non plus dans leurs seules prétentions. Nous ve
777 . Nous verrons aussitôt que tous, sans exception, sont à la fois trop petits si on les regarde à l’échelle mondiale, et trop
778 res) confrontés aux trois seuls vrais Grands. Ils sont trop petits « à l’échelle des moyens techniques modernes, à la mesure
779 Jean Monnet (Lettre de démission de la CECA). Ils sont trop petits pour se défendre seuls, même avec l’aide d’une petite ou
780 ar les barrages antimissiles des deux grands. Ils sont trop petits dans le domaine économique pour répondre au « défi améric
781 répondre au « défi américain » — cela n’a plus à être démontré — mais aussi pour répondre au défi du tiers-monde, c’est-à-d
782 naguère coloniales, et qui vivent mal… Enfin, ils sont trop petits pour agir politiquement au niveau des empires véritables
783 es et centralisés — et dans la mesure même où ils sont centralisés — sont tous trop grands : trop grands pour assurer le dév
784  et dans la mesure même où ils sont centralisés — sont tous trop grands : trop grands pour assurer le développement de toute
785 ement à la vie de la cité ; donc trop grands pour être encore de vraies communautés humaines : et cela, c’est la plus grave
786 n corps politique. 44. Double dilemme Telle étant la crise présente de l’État-nation, le régime à prescrire paraît faci
787 prescrire paraît facile à formuler : Parce qu’ils sont trop petits, les États-nations devraient se fédérer à l’échelle conti
788 édérer à l’échelle continentale ; et parce qu’ils sont trop grands, ils devraient se fédéraliser à l’intérieur. Remède facil
789 dirait-on. En effet, l’existence des empires de l’ Est et de l’Ouest leur pose un dilemme aussi simple qu’inexorable : — ou
790 ne autorité supranationale, fédérale et alors ils seront fatalement satellisés un à un ; — ou bien ils font ce qu’il faut pour
791 en direction de leur fédération politique. Force est donc de penser que dans leur nature même, quelque chose de profond et
792 n par méchanceté ou bêtise, que les États-nations sont impropres à l’union. Leurs relations normales sont de rivalité, non d
793 ont impropres à l’union. Leurs relations normales sont de rivalité, non de coopération. Leur mode de contact normal n’est pa
794 non de coopération. Leur mode de contact normal n’ est pas l’échange, mais le choc. Bakounine l’avait déjà dit, il y a cent
795 lication majeure : Développons en commun ce qui est neuf. Laissons de côté les héritages du passé dont l’unification pren
796 e mon côté : L’union, pour deux États-nations, n’ est jamais qu’une mesure de fortune, voire un expédient désespéré (comme
797 par Churchill en juin 1940), autrement dit : ce n’ est jamais qu’une concession douloureuse à la nécessité, quand on se sent
798 euse à la nécessité, quand on se sent trop faible soit pour subsister seul, soit pour dominer et absorber les voisins. Si l’
799 on se sent trop faible soit pour subsister seul, soit pour dominer et absorber les voisins. Si l’on veut unir l’Europe, il
800 se révèle insoluble. Il faut se fonder sur ce qui est destiné à devenir demain la vraie réalité de notre société, et je vai
801 les régions, réalités absolument modernes. Ce ne sont pas les provinces de l’Ancien Régime, encore moins les départements d
802 ’hui, ni les « States » de l’Amérique du Nord. Ce sont vraiment des créations de notre temps, des organismes en train de naî
803 , et enfin l’unité territoriale. Cette dernière n’ est d’ailleurs plus définie primairement par une frontière marquée sur le
804 candinavie ; des Balkans ; et enfin des pays de l’ Est , anciens royaumes de Hongrie, de Bohême et de Pologne, ou formations
805 on permanente, combinés avec tous les autres : ce sont les résultantes de ces complexes de forces qui dénotent, définissent
806 et une zone d’intense production industrielle, où sont venues s’implanter les plus importantes usines atomiques françaises.
807 me vis le seul non-Français : j’en conclus que j’ étais censé représenter dans le colloque l’idée européenne. Invité à parler
808 ssiner, s’organiser et s’affirmer. Et comme elles seront jeunes et souples, pleines de vitalité, ouvertes sur le monde, elles
809 ussi nombreuses et fréquentes que possible. Elles seront amenées à se grouper selon leurs affinités et complémentarités, selon
810 lles nations. Ce passage de la nation aux régions sera le phénomène majeur de l’Europe de la fin du xxe siècle. La politiqu
811 a lutte pour notre indépendance nationale ne peut être menée que dans le cadre de l’Europe unie, laquelle sera fédéraliste o
812 enée que dans le cadre de l’Europe unie, laquelle sera fédéraliste ou ne sera pas. Dans cette Europe unie, la représentation
813 de l’Europe unie, laquelle sera fédéraliste ou ne sera pas. Dans cette Europe unie, la représentation du peuple français ser
814 Europe unie, la représentation du peuple français sera assurée par l’État fédéral français. Parmi les plus graves méfaits de
815 doit réparation du tort ainsi causé35. Tout cela est intéressant, disaient naguère les augures du gaullisme, mais n’allez
816 y attacher trop d’importance. L’État français ne sera pas si aisément ébranlé. Son chef le tient très bien en main, et vos
817 çais ne sera pas si aisément ébranlé. Son chef le tient très bien en main, et vos excités de la région ne l’impressionnent pa
818 qui, de proche en proche, mèneront très loin… Ce sont ces nécessités qui expliquent que le Marché commun ait cru devoir con
819 r enfin de la régionalisation du territoire. On s’ est aperçu que ce sous-développement provenait directement de la structur
820 exploitation des régions par l’État central. On s’ est intéressé très spécialement aux régions périphériques les plus néglig
821 oise, qui touche la Belgique. Vue de Paris, Lille est une gare terminus, et Roubaix-Tourcoing un cul-de-sac dans un coin de
822 u surplus liée au sud de l’Angleterre. Or Lille n’ est qu’un exemple entre bien d’autres. La Regio Basiliensis rayonne sur t
823 l’Europe » — comme les communes libres médiévales étaient « immédiates à l’Empire » et tiraient de là leurs libertés — sera-t-e
824 s à l’Empire » et tiraient de là leurs libertés — sera-t -elle fondée sur des réalités en plein essor, non sur des vieilles car
825 atin… vers 1985. La région dans le cadre européen est une unité géographique beaucoup plus opérationnelle que le départemen
826 me que la nation36. Qu’une telle déclaration ait été faite en France, et devant le corps des fonctionnaires institué par N
827 olution régionaliste, condition de l’Europe unie, est autre chose qu’une mode ou un slogan. Le processus sera long et paraî
828 utre chose qu’une mode ou un slogan. Le processus sera long et paraîtra très lent, au jour le jour. Nous n’en sommes encore,
829 et paraîtra très lent, au jour le jour. Nous n’en sommes encore, aujourd’hui, qu’au stade de la prise de conscience du phénomè
830 nelles. Des réalisations à ce niveau ne sauraient être décrétées sans transition. Elles exigent une période de mise en place
831 ions, puis les doter d’institutions autonomes, ce sera la tâche au moins d’une génération, en admettant que, de nos jours, t
832 toire. Je ne cite pas la Grèce par hasard. Car je tiens la région pour une forme de communauté aussi nouvelle dans notre civi
833 uté aussi nouvelle dans notre civilisation que le fut au vie siècle avant notre ère l’apparition de la polis, dans la soci
834 nt aujourd’hui se partager le monde. Si nous n’en sommes encore qu’à la petite aube de la formation des régions, éléments de b
835 sûr, dès la fin du siècle dernier, Ernest Renan s’ était écrié dans un discours célèbre à la Sorbonne : Les nations ne sont p
836 discours célèbre à la Sorbonne : Les nations ne sont pas quelque chose d’éternel. Elles ont commencé, elles finiront. La c
837 ment de l’histoire », triste alibi de nos refus d’ être libres. Il faudra que la succession, le remplacement s’opèrent dans l
838 e taille donnée, en sorte que ces limites doivent être tracées avec une certaine liberté de jugement39 . Là où, dans le mo
839 us faire sortir de l’ère néolithique, celle qui a été marquée par la fixation des tribus nomades sur des territoires cultiv
840 es sur des territoires cultivés, celle qui a donc été dominée pendant dix à douze millénaires par les notions de terre sacr
841 , diraient les scientifiques : il faut chercher à être aussi indispensables aux autres que les autres nous sont indispensabl
842 ssi indispensables aux autres que les autres nous sont indispensables40 ». Je propose que l’on substitue au terme d’indépend
843 délires de la souveraineté illimitée. L’autonomie est une notion relative et très précise, quand on parle par exemple de l’
844 re dont se vantaient les États-nations. Enfin, il est une grande notion que les régions nous amèneront à mettre en lumière,
845 ère, c’est celle de la pluralité des allégeances, soit d’une personne, soit d’un groupe ou d’une région. L’État-nation voula
846 a pluralité des allégeances, soit d’une personne, soit d’un groupe ou d’une région. L’État-nation voulait tout faire coïncid
847 a liberté de chacun et l’efficacité de son action seront garanties par la possibilité de se rattacher et de donner son allégea
848 des régions On a vu que la notion de région s’ est imposée à l’attention des économistes d’avant-garde, puis des sociolo
849 i ont motivé ces prises de conscience successives sont faciles à énumérer : a) la CEE, dès ses débuts, a reconnu la nécessi
850 ions membres ; b) des régions plurinationales se sont définies ou constituées et elles ne peuvent que se multiplier à mesur
851 quelque théorie générale du fédéralisme. Si l’on tient ces facteurs ensemble en son esprit, on reconnaîtra aussitôt la néces
852 s auront à se défendre sur deux fronts — et telle est la faiblesse à long terme de l’obstination unitaire. Toute analyse ho
853 r les régions et non sur les États-nationsb, j’ai été amené à relever et à classer les objections les plus fréquentes à l’e
854 ettre. Je note d’abord que le terme de difficulté est souvent plus exact que celui d’objection. Dans la plupart des cas, la
855 non l’entreprise des fédéralistes. Pour eux, nous serons d’abord traîtres à la patrie, que nous soyons tenants d’un plus ou d’
856 ous serons d’abord traîtres à la patrie, que nous soyons tenants d’un plus ou d’un moins que les dimensions actuelles de notre
857 logne, d’une Écosse — ou de l’Europe42. Mais nous serons aussi de doux rêveurs, des esprits « brumeux », idéalistes utopistes
858 is des objections apparemment plus réalistes nous sont faites par les partisans « malgré tout » d’une Europe composée d’État
859 e mouvement de l’histoire, selon lequel la nation est le progrès. » « La région est une nostalgie réactionnaire. Le progrès
860 on lequel la nation est le progrès. » « La région est une nostalgie réactionnaire. Le progrès et l’efficacité, au xxe sièc
861 formées par extrapolation du passé ou du présent, sont toutes à la merci d’une équation nouvelle, d’une action aujourd’hui e
862 oyens. Si l’on ne déclare pas ce qu’on veut, il n’ est pas très intéressant de chercher à deviner ce qui sera : « l’objectiv
863 pas très intéressant de chercher à deviner ce qui sera  : « l’objectivité scientifique » dissimulant une démission civique re
864 us sûr. Objections tactiques « Comme s’il n’ était déjà pas assez difficile de faire l’Europe avec les Six, et d’ajouter
865 ransition, et cela prendra des décennies ! Ce qui est urgent, c’est le prix du lait et le taux d’accroissement du PNB. » Pr
866 ssement du PNB. » Principes d’une réponse : a) N’ est -il pas justement trop difficile de faire l’Europe politique sur la ba
867 n politique à partir des États-nations souverains étant demeurée nulle depuis un quart de siècle, il serait difficile de ne p
868 tant demeurée nulle depuis un quart de siècle, il serait difficile de ne pas faire mieux. La construction fédérale à partir de
869 éalités. Ce jour-là, une dernière « explication » sera peut-être nécessaire avec les détenteurs des pouvoirs stato-nationaux
870 fédération qui ait réussi en Europe, la Suisse, a été conçu, formé et accouché en neuf mois exactement, du 17 février au 16
871 ctement, du 17 février au 16 novembre 1848, et il est entré en vigueur à cette date sans la moindre mesure de transition. (
872 par l’éducation stato-nationaliste « La France est immortelle », mais « l’Allemagne éternelle » (François Mauriac), tand
873 le » (François Mauriac), tandis que « les régions sont encore à naître ». « Les gens n’en veulent pas, de vos régions autono
874 ent gaulliste. » « Les conflits entre les régions seront forcément plus nombreux et plus mesquins que les conflits entre nos n
875 réflexes passionnels, boutades ou étourderies, ne sont guère passibles d’une réfutation. Résistances conditionnées par no
876 ent allez-vous découper vos régions ? » « Quelles seront leurs frontières exactes ? » « Faut-il qu’elles aient des superficies
877 de Paris, avec ses 9 ou 10 millions d’habitants, est plus petite que le Limousin, qui n’a que 0,7 million d’habitants. Ça
878 in, qui n’a que 0,7 million d’habitants. Ça ne se tient pas ! » « La Bretagne n’est pas une entité économique viable. Et qui
879 abitants. Ça ne se tient pas ! » « La Bretagne n’ est pas une entité économique viable. Et qui parle breton à Rennes ? » « 
880 ce dernier groupe d’objections ou difficultés qui est la cause principale de l’ajournement des solutions régionalistes, c’e
881 ue l’on va tenter d’analyser. 53. La région n’ est pas un État-nation en réduction Presque toutes les difficultés, ob
882 ositions axiomatiques de ce genre : — L’État doit être unique et indivisible44. — De son siège dans la capitale, l’État régi
883 ). Au cours des siècles de l’histoire moderne, ce sont les guerres qui ont servi de prétexte à ces concentrations forcées, c
884 qui ont notamment accrédité l’idée que l’économie est au service des desseins politiques d’un État, et non pas de la prospé
885 -là. Aux yeux de cet homme gutenbergien, que nous sommes tous, peu ou prou, et dans son système de représentation, la région n
886 entrés dans une métropole régionale, au lieu de l’ être dans une capitale. Les possibilités pratiques de participation du cit
887 on du citoyen à la vie d’une région de ce type ne seraient pas d’un ordre essentiellement différent de ce qu’elles sont aujourd’
888 un ordre essentiellement différent de ce qu’elles sont aujourd’hui. La vie communale — seule école efficace du civisme — ne
889 communale — seule école efficace du civisme — ne serait pas nécessairement restaurée par la simple division d’un pays en ving
890 ve que d’accroître les libertés civiques. Elle ne serait à aucun titre un modèle neuf de relations humaines et de structure du
891 fédéralistes intégraux, au nombre desquels je me suis toujours rangé. (Il n’en reste pas moins probable qu’elle va constitu
892 série de raisons (pas seulement militaires) qu’il serait trop long de développer ici : qu’il suffise d’évoquer la sécurité sui
893 -nationalistes, dont, je le répète, nul de nous n’ est indemne. 54. De la pluralité des allégeances Comment échapper a
894 el, pour aller vite et rester dans le concret. Je suis Neuchâtelois par ma naissance, ma tradition et mon accent : à ce cant
895 ce, ma tradition et mon accent : à ce canton (qui fut durant des siècles une principauté souveraine) va donc mon allégeance
896 uisse : mon passeport et mon allégeance nationale sont donc suisses. Je suis aussi un écrivain français : la francophonie eu
897 et mon allégeance nationale sont donc suisses. Je suis aussi un écrivain français : la francophonie européenne, c’est-à-dire
898 constitue donc mon allégeance culturelle. Mais je suis aussi protestant, ce qui représente une allégeance mondiale (ce serai
899 nt, ce qui représente une allégeance mondiale (ce serait pareil si j’étais communiste, ou catholique, évidemment). Et je fais
900 te une allégeance mondiale (ce serait pareil si j’ étais communiste, ou catholique, évidemment). Et je fais partie d’un très g
901 rontières du tout. Si l’on exigeait que tout cela soit unifié et uniformisé dans les limites géographiques d’un territoire d
902 orte quel État-nation contemporain, la continuité est indéniable… Ce n’est pas que je récuse l’État, ni l’ordre contractuel
903 contemporain, la continuité est indéniable… Ce n’ est pas que je récuse l’État, ni l’ordre contractuel d’une société avec s
904 ul lieu, accaparés par l’État national, et qui le seront , demain, par l’État régional. 55. Vers une formule fédéraliste de
905 x dire : séparer dans le pouvoir tout ce qui peut être séparé, définir tout ce qui peut être défini, distribuer entre organe
906 ce qui peut être séparé, définir tout ce qui peut être défini, distribuer entre organes ou fonctionnaires différents tout ce
907 nes ou fonctionnaires différents tout ce qui aura été séparé et défini, ne rien laisser dans l’indivision. Proudhon entend
908 ion des pouvoirs aux membres d’un cabinet : Ce n’ est pas seulement entre sept ou huit élus […] que doit être partagé le go
909 as seulement entre sept ou huit élus […] que doit être partagé le gouvernement d’un pays, c’est entre les provinces et les c
910 Proudhon, ni de décentraliser ni de déconcentrer ( est -ce différent ?), ni de déléguer les pouvoirs de l’autorité centrale.
911 de diviser, de partager. Seulement, Proudhon s’en tient à un partage ou répartition du pouvoir entre les échelons géographiqu
912 bien adopter la structure proudhonienne, sans que soit pour autant décidée la structure des réseaux d’échange et groupes de
913 unités de base politiques et leurs structures ne sont pas, en principe, superposables aux modules ou unités de base économi
914 autres se chevauchent, se recoupent différemment, sont parfois englobés l’un par l’autre. Il se peut que les régions politiq
915 ar l’autre. Il se peut que les régions politiques soient définies demain comme les intersections de « classes » de faits écono
916 és vivantes de l’existence civique, et où il peut être contrôlé par l’usager ; distribuer et répartir l’État du niveau de la
917 siège dans des villes différentes du continent46, seront chargées de la concertation des grandes tâches d’intérêt public. Tâch
918 fs et responsables de ces agences ou départements serait le Conseil fédéral, ou gouvernement de l’Europe. Les régions relèvero
919 ndante. « Faut-il vous faire un dessin ? » Ce ne serait pas facile. Essayez de figurer, par exemple, ma définition personnell
920 , ma définition personnelle, donnée plus haut. Il est assez facile de visualiser l’appartenance d’un élément à deux ensembl
921 ons ! J’ai dit déjà que le fédéralisme intégral n’ est devenu possible qu’à partir de l’avènement de l’ordinateur. L’objecti
922 eur. L’objection de la « trop grande complexité » est donc en réalité anachronique. Prenons l’exemple le plus simple d’une
923 tiquement à l’une des trois nations dont la Regio est le carrefour ou l’intersection. La résistance qu’opposent certains es
924 u un retard d’éducation démocratique. (« Ce qui n’ est pas prescrit à tous, d’une manière uniforme, sans choix possible, n’e
925 s, d’une manière uniforme, sans choix possible, n’ est pas sérieux », pensent tous les jacobins et les sous-offs, dont le sa
926 s jacobins et les sous-offs, dont le saint patron fut « le Petit caporal ».) Le champ d’études régionaliste, que ces quelqu
927 ionaliste, que ces quelques exemples définissent, est à peine exploré, inutile de le dire. Il faudrait commencer par opérer
928 bien définis. Le Marché commun, par exemple, qui est un pouvoir économique, doit-il entretenir des visées politiques, ou l
929 etenir des visées politiques, ou laisser ce soin, soit à une autre agence fédérale constituée sur la base de régions à défin
930 éfinition politique (ou ethnique, ou culturelle), soit à la réunion de toutes les agences spécialisées au sein d’un gouverne
931 nement fédéral, formule de l’exécutif suisse ? Il est certain que le Marché commun ne cessera d’être menacé par les États-n
932 Il est certain que le Marché commun ne cessera d’ être menacé par les États-nations, tant que ceux-ci n’auront pas renoncé a
933 é au « totalitarisme » de leurs pouvoirs et ne se seront pas dessaisis, en tant qu’entités politiques, des « droits » économiq
934 olitique fédérale. Quelles relations existent, ou sont souhaitables, entre l’économie et l’Université ? ou entre les formule
935 ules de participation civique et l’urbanisme ? Il serait facile de multiplier ces types de problèmes à résoudre au niveau comm
936 es sociétés il cotise, où il paie ses impôts, qui est de sa paroisse et quels sont les paysages de son cœur. Et nul n’exige
937 paie ses impôts, qui est de sa paroisse et quels sont les paysages de son cœur. Et nul n’exige que tout cela soit inscrit d
938 aysages de son cœur. Et nul n’exige que tout cela soit inscrit dans les limites peintes en couleurs plates, sans déborder, d
939 l’ai dit à propos de l’éducation. Les régions ne seront créées que par les relations qui se nouent entre elles. Ce n’est pas
940 par les relations qui se nouent entre elles. Ce n’ est pas logique, c’est concret. Il arrive — et cela se vérifie en biologi
941 oriquement de support à une relation mesurable ne soit créé que par cette relation. Les régions se constitueront dans le jeu
942 ndre à l’autarcie, comme les États-nations. Elles seront des pôles de forces et des facteurs d’échanges. Leurs spécificités s’
943 Leurs spécificités s’opposeront moins qu’elles ne seront nécessairement complémentaires. Quand donc les flux d’échanges réels
944 entre régions à travers les frontières nationales seront devenus plus forts que les liens juridiques entre telle métropole rég
945 relations de fait entre les métropoles régionales sera devenu la réalité vive et solide, tandis que les appareils stato-nati
946 ide, tandis que les appareils stato-nationalistes seront réduits à l’inertie bureaucratique — alors se produira un mouvement d
947 s des États anciens. Et la révolution fédéraliste sera là, sans fracas, instaurée dans les faits. Je vois le processus se dé
948  : 1. Réaliser pleinement le Marché commun, qui n’ est encore que virtuel en bonne partie ; l’élargir à tout le continent ;
949 sée. 6. À ce moment, des agences fédérales auront été créées et mises en place par la nécessité de la concertation en chacu
950 o-national progressivement tombé en désuétude. 7. Est -il besoin de préciser qu’il ne s’agit nullement d’étapes chronologiqu
951 on ? L’Europe des réalités, qui peut en résulter, sera sans nul doute beaucoup moins simple à dessiner — et surtout à mobili
952 r, L’Express, 30 octobre-5 novembre 1967. 28. Il est évident que les « nations » dont parle Malraux sont en réalité les Ét
953 st évident que les « nations » dont parle Malraux sont en réalité les États-nations tels que les a formés le xixe siècle, e
954 sens premier — peuples, régions, ethnies ; elles sont du type France, Espagne, Grande-Bretagne, non du type Bretagne, Catal
955 type Bretagne, Catalogne, pays de Galles ; elles sont donc des États impérialistes, non des communautés qui revendiquent co
956 …), qui pourrait admettre de bonne foi, à moins d’ être un imbécile, qu’une seule d’entre elles consentira jamais à remettre
957 e J.-J. Servan-Schreiber. 31. Cf. Janus, n° 15, été 1967, p. 84. 32. L’URSS devra bien restituer un jour ou l’autre à la
958 un titre-programme… On y ajoutera Comment peut-on être breton ? par Morvan Lebesque, qui est sans doute de tous ces ouvrages
959 nt peut-on être breton ? par Morvan Lebesque, qui est sans doute de tous ces ouvrages le plus actif, émouvant, convaincant.
960 itas donne civisme, synonymes réels qui devraient être perçus et vécus comme tels… Que pourrait donner regio, sans évoquer j
961 s-centraliste de « provincialisme » ? 38. Cf. Qu’ est -ce qu’une Nation ?, Paris, 1882. 39. Documents de la Conférence sur
962 comme la Bretagne, ou plus grand, comme l’Europe, est regardé comme un traître. Pourquoi cela ? C’est tout à fait arbitrair
963 araît juste. Mais quand Malraux dit que la nation est le phénomène dominant du xxe siècle, on doute qu’il pense d’abord à
964 angue officielle imposée par François Ier, et qui était celle de l’Île-de-France. 46. L’Agence économique restant à Bruxelle
6 1970, Lettre ouverte aux Européens. Lettre ouverte, suite et fin
965 « Moi, je voudrais bien, vous me connaissez, mais serais -je suivi ? » Après les sondages que je cite, cette phrase ne traduit
966 re : « Moi, je voudrais bien, idéalement, mais je suis là, selon la Constitution, pour sauvegarder l’indépendance nationale 
967 sauvegarder l’indépendance nationale ! » Or, ils sont là en vérité pour autre chose, pour quelque chose de beaucoup plus sé
968 x que le maintien d’une fiction juridique, et qui est d’exécuter la volonté du peuple. Cette volonté, on vient de le voir,
969 du peuple. Cette volonté, on vient de le voir, n’ est nullement de refuser l’union au nom de « l’indépendance » qui obsède
970 ède les ministres, mais n’obsède qu’eux, et qui n’ est plus qu’une nostalgie. Diront-ils enfin que les peuples ignorent ce q
971 ndre à l’exercer pour eux, quand « le souverain » sera de nouveau le peuple, comme le voulait Rousseau, et comme on le dit e
972 pteriez un président de l’union européenne qui ne fût pas de votre nation, et 59 % d’entre vous ont dit oui. Tout cela fait
973 ouvernements, j’en conclus que la démocratie, qui est la loi de la majorité, n’est qu’un leurre dans l’Europe de l’Ouest, s
974 e la démocratie, qui est la loi de la majorité, n’ est qu’un leurre dans l’Europe de l’Ouest, si elle n’est qu’une antiphras
975 qu’un leurre dans l’Europe de l’Ouest, si elle n’ est qu’une antiphrase à l’Est. La démocratie ne fonctionne pas dans les s
976 e de l’Ouest, si elle n’est qu’une antiphrase à l’ Est . La démocratie ne fonctionne pas dans les structures stato-nationalis
977 on de l’Europe à partir des États-nations, car ce serait l’union des ennemis de l’Europe, voire des ennemis de toute union en
978 llicité son entrée, que « la conquête de l’Europe sera , n’en doutons pas, son grand dessein ». Conquête économique s’entend
979 quête » du marché européen par la Grande-Bretagne serait un scandale, il faut l’empêcher d’entrer ; et si ce n’est pas un scan
980 candale, il faut l’empêcher d’entrer ; et si ce n’ est pas un scandale, si c’est le but même de la Communauté que d’offrir à
981 e nation ouverte, qui appelle chez elle quiconque est frère ou veut l’être. De leur côté, invasion ; du côté de la France,
982 i appelle chez elle quiconque est frère ou veut l’ être . De leur côté, invasion ; du côté de la France, expansion ! Il suffi
983 la France, expansion ! Il suffit, on le voit, d’ être du bon côté, pour que l’impérialisme devienne philanthropie et que la
984 oi les élargir ? Et si les conquêtes anglaises ne sont pas en même temps les nôtres, pourquoi faire un marché commun ? Ainsi
985 lus courante qui exaspère les débats sur l’Europe est le sophisme anachronique : on dénonce les dangers qu’une certaine pol
986 ruction ou union fédérale de l’Europe, ne saurait être « politique », au sens belliqueux de ce terme, qui évoque des luttes
987 teurs. Le but d’une société européenne fédérale n’ est pas le triomphe des Bleus ou des Verts de Byzance, c’est-à-dire, parm
988 ières de la cité : le nationalisme, après tout, n’ est pas moins communiste que fasciste, socialiste que grand-bourgeois, im
989 if. L’État-nation et la religion de la production sont les superstitions fondamentales que partagent dans la même ferveur ca
990 ’union, nous autres vrais fédéralistes européens, est politique au sens écologique du terme, qui évoque l’équilibre vivant
991 l’aménagement fécond des différences. L’Europe n’ est pas pour nous, fédéralistes, un champ de bataille où il s’agit de vai
992 y jouer aussi librement qu’ils l’imaginent. Ce ne sera pas un jardin à la française, parfaite image du pouvoir étatique qui
993 ’hommes et de femmes et les jeux des enfants. Qui serait contre cette Europe unie, follement complexe, heureuse, aventureuse ?
994 ent complexe, heureuse, aventureuse ? Tout ce qui est jeune est pour, dans nos vingt-six pays, et je me borne à citer en Fr
995 xe, heureuse, aventureuse ? Tout ce qui est jeune est pour, dans nos vingt-six pays, et je me borne à citer en France : Mai
996 obes et toutes les inerties réactionnaires qui ne sont qu’anxiétés refoulées : celles qui ont applaudi les chars russes en H
997 demandent tout simplement : « Pourquoi l’Europe n’ est pas encore unie ? » Je crois leur avoir répondu : c’est à cause de l’
998 e défend Duclos comme Debré, et sur lequel Sartre est muet. Si l’on entend tenir compte des conditions économiques, sociale
999 u’implique la survivance de nos États-nations, il est clair que l’union de l’Europe ne peut pas se faire et ne se fera jama
1000 mment, pas plus que deux amoureux du même sexe ne sont capables d’engendrer. Ce n’est pas affaire d’opinion, de sentiment ni
1001 x du même sexe ne sont capables d’engendrer. Ce n’ est pas affaire d’opinion, de sentiment ni de morale politique, c’est org
1002 iment ni de morale politique, c’est organique. Il est grand temps de déniaiser toute une jeunesse qui parle avec passion de
1003 rope des régions, de refaire une communauté. Vous êtes d’accord, n’est-ce pas, pour estimer que la révolution ne consiste pa
1004 de refaire une communauté. Vous êtes d’accord, n’ est -ce pas, pour estimer que la révolution ne consiste pas à tout casser,
1005 ’appelle, qui fera seule l’Europe, et qui ne peut être faite que par l’Europe en train de se faire, consiste, en remarquable
1006 d’information. (« Du passé, faisons table rase » est une assez touchante absurdité : il n’y a pas de révolution sur fond d
1007 utos, de prothèses. Mais je demande en vain où il serait défini par : – la pureté de l’air, de l’eau et du silence ; – la qual
1008 inissais dès 1932. S’engager, expliquais-je, ce n’ est pas murmurer avec les loups, comme je le reprochais à André Gide, du
1009 ings par la « clique stalinienne » d’Aragon. Ce n’ est pas non plus se mettre au service d’une « révolution » qui n’a d’autr
1010 lices d’État des PC au pouvoir. S’engager ne peut être qu’assumer les moyens justes des fins dernières que l’on assigne à la
1011 dictature, parce que le centre vivant d’un pays n’ est pas dans un organisme de contrainte, mais doit être en chacun des cit
1012 st pas dans un organisme de contrainte, mais doit être en chacun des citoyens conscients, fussent-ils, et c’est le cas, une
1013 mais doit être en chacun des citoyens conscients, fussent -ils, et c’est le cas, une minorité. Il y a peu d’hommes réellement hu
1014 le pouvoir doit revenir, c’est par eux qu’il peut être humanisé. Le but de la société, c’est la personne. On n’y atteindra j
1015 u régions fédérées à l’échelle de l’Europe — ce n’ est pas ma faute si le dilemme est aussi dur. Si vous ne faites pas l’Eur
1016 de l’Europe — ce n’est pas ma faute si le dilemme est aussi dur. Si vous ne faites pas l’Europe, donc si vous persistez à v
1017 st pourquoi le projet fédéraliste doit accepter d’ être dit « révolutionnaire », nonobstant la mode actuelle qui vulgarise et
1018 terme. Mais le fédéralisme tel que je le conçois est bien moins révolutionnaire parce qu’il demande le dépassement de l’Ét
1019 és communautaires et personnelles. Si sérieux que soient les problèmes de prix du lait, du blé ou même du vin, il est clair qu
1020 blèmes de prix du lait, du blé ou même du vin, il est clair que l’Europe des marchandages entre économies étatiques ne peut
1021 s enthousiastes. Les jeunes gens d’aujourd’hui ne seront pas convaincus par des avantages matériels : ils sont presque comblés
1022 pas convaincus par des avantages matériels : ils sont presque comblés à cet égard. Ce qui leur manque le plus durement, c’e
1023 est un sens de la vie, maintenant que la guerre n’ est plus leur exutoire, l’alibi des raisons de vivre inexistantes. La rép
1024 umanité, nous lui devons cela ! Une Europe qui ne sera pas nécessairement la plus puissante ou la plus riche, mais bien ce c