1 1970, Lettre ouverte aux Européens. Lettre ouverte
1 ou Berne, qui existaient bien avant l’État-nation elles se trouvent englobées aujourd’hui, et qui lui survivront assuré
2 e crises que toute guerre suscite. Car autrement, serait la politique, telle qu’ils l’entendent ? Faute d’oser avouer q
3 industrialisation a fabriqué les grands ensembles la vie perd son sens ; elle a pollué l’air et l’eau, la terre et les
2 1970, Lettre ouverte aux Européens. I. L’unité de culture
4 il faut attendre le milieu du xve siècle, époque la chrétienté perd ses prolongements proche-orientaux, occupés par le
5 ites ? — Mais les sceptiques nous demandent alors elle s’arrête. L’URSS en fait-elle partie jusqu’à Vladivostok ? ou se
6 de varier au cours des siècles, surtout à l’Est, elles se sont déplacées selon les poussées asiatiques et les contre-p
7 e manifeste comme Européen dans la mesure précise il doute qu’il le soit, et prétend au contraire s’identifier soit ave
8 phie occidentale, dans l’une de ces cités d’Ionie prit naissance la dialectique de notre histoire, Héraclite écrivait c
9 ntraires. La Grèce, qui invente la cité (polis, d’ politique), la fonde sur le paradoxe du citoyen à la fois libre et re
10 même mot, selon l’étymologie : l’indivisible), d’ les excès de l’individualisme dans les trop grandes cités hellénistiq
11 ue des premières paroisses autonomes et fédérées, tout était mis en commun, prend corps dans les formes sociales et les
12 ctures communautaires de la coutume germanique. D’ les ordres monastiques et chevaleresques, puis les communes urbaines
13 définir l’Europe comme cette partie de la planète l’homme, sans relâche, se remet en question et veut changer le monde,
14 ienne et qu’elle est inconcevable hors d’un monde Pascal peut placer dans la bouche même du Christ cette phrase célèbre
15 uerez pas impunément dans les États totalitaires, il se voit réduit à n’exprimer qu’une clandestinité désespérée. Et c’
16 ctive, négation même de son mouvement originel. D’ nous vient, en effet, le concept de progrès ? Il n’est apparu comme t
17 tianisme et, avec lui, l’histoire comme aventure, tout reste imprévu sauf la fin : le retour du Seigneur au Jugement de
18 ellement dangereuse pour l’Europe, dans la mesure elle sert d’alibi à la volonté fanatique d’opposer les fameuses « sou
19 sité surcompense un support matériel déficient, d’ lui viennent ses exceptionnels pouvoirs transformateurs ? De bien plu
20 fuit, l’injure à la bouche, pour aller n’importe ailleurs, et ce qu’il regrettera — il l’a prédit — ce n’est pas sa na
21 seport qui caractérise l’écrivain, mais la région s’est formée sa sensibilité, la religion qu’il suit ou qu’il a rejeté
22 n artiste dans telle ville d’art ; non pas l’État il était né ni le pays où était située cette ville. En revanche, les
23 d’art ; non pas l’État où il était né ni le pays était située cette ville. En revanche, les styles étaient continentau
24 d’idéogrammes dessinés sur la paume de la main. D’ en Europe la possibilité du passage d’une langue à une autre par des
25 l’Europe unie de demain soit un affreux méli-mélo l’on ne parle plus que l’espéranto ou le « volapuk » des utopistes dé
26 es hautes écoles et la télévision, dans la mesure elles façonnent les caractères et les esprits, ne font pas des Europé
27 l’individu, comme dans les sociétés religieuses, tout était prescrit sans discussions. Nous sommes ici aux antipodes d
28 poser à chaque instant la question : que faire ? aller ? Tout a été réglé d’avance par le régime. La colombe européenn
29 n’y joignez-vous pas un petit livre expliquant d’ viennent ces objets, pourquoi vous avez eu l’idée de les construire e
30 Nous sommes au point de l’évolution de l’humanité les Européens, ayant créé « le monde », se voient menacés d’être dépo
31 t de brillantes créations de la main de l’homme ? sont-ils, ces remparts de Ninive, ces murs de Babylone, ces palais de
32 té commune à tous de refuser l’uniformité. 24. sont les candidats à la relève ? Aux prophètes de la décadence eur
33 s Béatitudes, c’est enfin le code de Justinien, d’ dérivent l’Habeas Corpus et la Déclaration des droits de l’homme, qui
34 que nos cendres sont fécondes. Le temps est passé les civilisations étaient mortelles. » J’ajouterai cette simple remar
35 ssèchement du Sahara, affectant la région entière avait fleuri une civilisation déterminée. Et les autres n’en savaient
36 re l’Amérique, qui est une invention de l’Europe… est donc dans tout cela « l’éclipse » de l’Europe comme culture ? Dan
37 rer sans défense aux fanatiques du statu quo, par j’entends les bureaucrates et la police des États. Ces maladies de l’
38 este du genre humain que pour l’Europe elle-même, elles sont nées. Car l’Europe, à travers des crises atroces, s’est va
39 peine de lésions explosantes dans l’inconscient d’ surgira l’histoire. 7. Emmanuel Berl, dans La Table ronde, janvier
3 1970, Lettre ouverte aux Européens. II. L’union fédérale
40 grand ouvrage de Proudhon, Du principe fédératif, l’on pouvait lire cette phrase devenue célèbre : « Le xxe siècle ouv
41 antinomies, oppositions, lutte des contraires « d’ procède la plus belle harmonie ». Je pense d’abord, bien sûr, aux esp
42 er les principaux domaines de la réalité moderne, l’on retrouve les structures typiques d’un problème fédéraliste. À la
43 il ne reste qu’à désigner le niveau de compétence seront prises les décisions relatives à cette tâche. Il peut y avoir
4 1970, Lettre ouverte aux Européens. III. La puissance ou la liberté
44 crit ceci : « Un diagnostic de l’âme moderne, par commencerait-il ? Par une incision résolue dans cet amalgame d’instin
45 le d’une illusion pseudo-religieuse et obsessive. la voit-on à l’œuvre ? Non pas dans les faits, mais seulement dans le
46 pouvoirs concrets, elle est devenue le réceptacle se recueillent pêle-mêle nostalgies de gloires passées, orgueils déçu
47 nc pris les caractères cliniques d’un complexe. D’ la difficulté, pour ceux qui en sont victimes, de s’adapter aux réali
48 angeantes du siècle, et même de les apercevoir. D’ la prise qu’ils offrent aux manœuvres les plus grossières du communis
49 inquiète comme Iago sur la jalousie d’Othello. D’ enfin l’extrême confusion et les éclats de passion saugrenus qui cara
50 d’ordre plutôt mystique, idéale ou idéologique. D’ cette différence foncière : on peut annexer des peuples à une nation,
51 pez de moyens, ils risquent bien de vous conduire vous ne vouliez pas aller… Voici donc le dilemme présent : Si nous at
52 i touche à l’État-nation : néfaste dans la mesure il est encore réel, inexistant quand on voudrait compter sur lui. Je
53 urtout de croire que ça deviendra sérieux le jour les ministres responsables décideront de faire élire par leurs peuple
54 re, c’est d’abord créer les régions, seul échelon le pouvoir puisse à la fois servir et être contrôlé, seul échelon de
5 1970, Lettre ouverte aux Européens. IV. Vers une fédération des régions
55 t de ses formes politiques, assez pour rappeler d’ viennent la nation, l’État et l’État-nation né de leur collusion mode
56 unitaires et centralisés — et dans la mesure même ils sont centralisés — sont tous trop grands : trop grands pour assur
57 érer sur un autre plan que celui-là, précisément, le problème se révèle insoluble. Il faut se fonder sur ce qui est des
58 ue et une zone d’intense production industrielle, sont venues s’implanter les plus importantes usines atomiques françai
59 tement liées, gravitant autour de centres urbains se localisent d’importantes fonctions économiques, en particulier les
60 es avec une certaine liberté de jugement39 . Là , dans le monde stato-national, on ne parlait que de superficies, on p
61 parle ici d’abord de pôles, de polarisations ; là l’on parlait de frontières, on parle d’ajustements variables définis
62 variables définis par des aires d’influence ; là l’on insistait sur l’étendue des domaines et sur les chiffres absolus
63 ons entre activités de tous ordres. Jusqu’au jour l’on s’apercevra qu’il n’y a plus qu’à formaliser et couronner d’un e
64 Elle ne représenterait aucune révolution, au sens j’ai toujours entendu le terme, qui ne signifie pas « tout casser »,
65 s une page essentielle de son Principe fédératif, Proudhon estime qu’il « résume toute sa science constitutionnelle »,
66 épartir l’État aux différents niveaux de décision il se révèle capable de servir les entités vivantes de l’existence ci
67 r les entités vivantes de l’existence civique, et il peut être contrôlé par l’usager ; distribuer et répartir l’État du
68 nous sait très bien à quelles sociétés il cotise, il paie ses impôts, qui est de sa paroisse et quels sont les paysages
69 e pour qu’il y ait dans le monde un coin de terre le plus grand nombre d’habitants puissent jouir de la qualité de cito
70 ux frontières stato-nationales, dans les domaines l’État central se révèle par nature inadéquat ou paralysant, comme l’
71 4. Aller toujours et dans tous les domaines jusqu’ l’on peut aller trop loin, et continuer un peu plus outre, en dépit d
72 t-Simon, le jeune Marx, Bakounine et Proudhon — d’ procèdent les personnalistes du xxe siècle. 45. Déduction faite des
6 1970, Lettre ouverte aux Européens. Lettre ouverte, suite et fin
73 l’usage de leur souveraineté véritable qu’au jour leur État-nation cessera de prétendre à l’exercer pour eux, quand « l
74 pas pour nous, fédéralistes, un champ de bataille il s’agit de vaincre ou de mourir, ni un empire à édifier comme une é
75 es aléatoires, aux densités infiniment variables, des surprises attendent derrière certains bosquets, où les forêts à p
76 s surprises attendent derrière certains bosquets, les forêts à perte de chemins et les landes à perte de vue invitent à
77 u mode de vie existentiel, « sensible au cœur » ? trouver aujourd’hui une bonne critique du niveau de vie ? Dans Marcus
78 s, d’autos, de prothèses. Mais je demande en vain il serait défini par : – la pureté de l’air, de l’eau et du silence ;
79 dans les villes tout comme dans les zoos. Partout règnent la contrainte géométrique et l’arbitraire des bureaucrates et
80 n de la planète indispensable au monde de demain, les hommes de toutes races pourront trouver non pas le plus de bonheu