1
clos, « renonceraient même à leurs plaisirs, s’il
devait
leur en coûter la fatigue d’une réflexion ». Il s’ensuit que ce livre
2
e en apparence : le mythe de Tristan et Iseut. Il
nous
faut ce repère fabuleux, cet exemple éclatant et « banal » — comme on
3
n dit d’un four qu’il est banal, donc unique — si
nous
voulons comprendre dans nos vies le sens et la fin de la passion. Il
4
al, donc unique — si nous voulons comprendre dans
nos
vies le sens et la fin de la passion. Il est donc entendu que j’ai si
5
confuse ne saurait signifier qu’une œuvre écrite
doit
l’imiter. Si j’ai parfois dogmatisé, je n’en demanderai pardon qu’à c
6
t je m’honore se trouve être T. S. Eliot — que je
dois
d’avoir entrepris la révision de cet ouvrage. Trois lustres ont passé
7
nt de place aux formes de passage sans lesquelles
nous
ne saurions vivre. Aux historiens, je répondrai simplement que j’étai
8
de divorce permettent d’en mesurer l’ampleur. Si
notre
civilisation doit subsister, il faudra qu’elle opère une grande révol
9
ent d’en mesurer l’ampleur. Si notre civilisation
doit
subsister, il faudra qu’elle opère une grande révolution ; qu’elle re
10
u’une belle fièvre. Les voies de cette révolution
nous
sont encore imprévisibles ; je m’en explique au livre VI. Mon ambitio
11
d’amour et de mort ?… » Rien au monde ne saurait
nous
plaire davantage. À tel point que ce début du Tristan de Bédier doit
12
ge. À tel point que ce début du Tristan de Bédier
doit
passer pour le type idéal de la première phrase d’un roman. C’est le
13
un roman. C’est le trait d’un art infaillible qui
nous
jette dès le seuil du conte dans l’état passionné d’attente où naît l
14
de « rhétorique profonde » sait-il rejoindre dans
nos
cœurs ? Que l’accord d’amour et de mort soit celui qui émeuve en nous
15
ccord d’amour et de mort soit celui qui émeuve en
nous
les résonances les plus profondes, c’est un fait qu’établit à premièr
16
tout ce qu’il y a d’universellement émouvant dans
nos
littératures ; et dans nos plus vieilles légendes, et dans nos plus b
17
ellement émouvant dans nos littératures ; et dans
nos
plus vieilles légendes, et dans nos plus belles chansons. L’amour heu
18
res ; et dans nos plus vieilles légendes, et dans
nos
plus belles chansons. L’amour heureux n’a pas d’histoire. Il n’est de
19
oilà le fait fondamental. Mais l’enthousiasme que
nous
montrons pour le roman, et pour le film né du roman ; l’érotisme idéa
20
du roman ; l’érotisme idéalisé diffus dans toute
notre
culture, dans notre éducation, dans les images qui font le décor de n
21
me idéalisé diffus dans toute notre culture, dans
notre
éducation, dans les images qui font le décor de nos vies ; enfin le b
22
e éducation, dans les images qui font le décor de
nos
vies ; enfin le besoin d’évasion exaspéré par l’ennui mécanique, tout
23
d’évasion exaspéré par l’ennui mécanique, tout en
nous
et autour de nous glorifie à tel point la passion que nous en sommes
24
par l’ennui mécanique, tout en nous et autour de
nous
glorifie à tel point la passion que nous en sommes venus à voir en el
25
utour de nous glorifie à tel point la passion que
nous
en sommes venus à voir en elle une promesse de vie plus vivante, une
26
uffrance, une béatitude ardente. Dans « passion »
nous
ne sentons plus « ce qui souffre » mais « ce qui est passionnant ». E
27
mour signifie, de fait, un malheur. La société où
nous
vivons et dont les mœurs n’ont guère changé, sous ce rapport, depuis
28
on, mais la statistique est cruelle : elle réfute
notre
poésie. Vivons-nous dans une telle illusion, dans une telle « mystifi
29
ue est cruelle : elle réfute notre poésie. Vivons-
nous
dans une telle illusion, dans une telle « mystification » que nous ay
30
le illusion, dans une telle « mystification » que
nous
ayons vraiment oublié ce malheur ? Ou faut-il croire qu’en secret nou
31
ublié ce malheur ? Ou faut-il croire qu’en secret
nous
préférons ce qui nous blesse et nous exalte à ce qui semblerait combl
32
faut-il croire qu’en secret nous préférons ce qui
nous
blesse et nous exalte à ce qui semblerait combler notre idéal de vie
33
qu’en secret nous préférons ce qui nous blesse et
nous
exalte à ce qui semblerait combler notre idéal de vie harmonieuse ? S
34
blesse et nous exalte à ce qui semblerait combler
notre
idéal de vie harmonieuse ? Serrons de plus près cette contradiction,
35
plus près cette contradiction, par un effort qui
doit
paraître déplaisant, puisqu’il tend à détruire une illusion. Affirmer
36
it, l’adultère, c’est insister sur la réalité que
notre
culte de l’amour masque et transfigure à la fois ; c’est mettre au jo
37
ulte dissimule, refoule, et refuse de nommer pour
nous
permettre un abandon ardent à ce que nous n’osions pas revendiquer. L
38
er pour nous permettre un abandon ardent à ce que
nous
n’osions pas revendiquer. La résistance même qu’éprouvera le lecteur
39
ondent le plus souvent dans la société qui est la
nôtre
, n’est-ce pas une première preuve de ce fait paradoxal : que nous vou
40
as une première preuve de ce fait paradoxal : que
nous
voulons la passion et le malheur à condition de ne jamais avouer que
41
et le malheur à condition de ne jamais avouer que
nous
les voulons en tant que tels ? ⁂ Pour qui nous jugerait sur nos litté
42
ue nous les voulons en tant que tels ? ⁂ Pour qui
nous
jugerait sur nos littératures, l’adultère paraîtrait l’une des occupa
43
s en tant que tels ? ⁂ Pour qui nous jugerait sur
nos
littératures, l’adultère paraîtrait l’une des occupations les plus re
44
couples, sous un régime qui a fait du mariage un
devoir
et une commodité. Sans l’adultère, que seraient toutes nos littératur
45
e commodité. Sans l’adultère, que seraient toutes
nos
littératures ? Elles vivent de la « crise du mariage ». Il est probab
46
n se résume dans le mot d’adultère. Malgré toutes
nos
littératures — ou peut-être à cause d’elles justement — il peut sembl
47
ur « quelque chose » qui la ruine au cœur même de
nos
ambitions ? Est-ce vraiment, comme beaucoup le pensent, la conception
48
ion dite « chrétienne » du mariage qui cause tout
notre
tourment, ou au contraire, est-ce une conception de l’amour dont on n
49
iage est simplement l’attrait de l’interdit, d’où
nous
vient ce goût du malheur ? Quelle idée de l’amour trahit-il ? Quel se
50
Quelle idée de l’amour trahit-il ? Quel secret de
notre
existence, de notre esprit, de notre histoire peut-être ? 2.Le myt
51
ur trahit-il ? Quel secret de notre existence, de
notre
esprit, de notre histoire peut-être ? 2.Le mythe Il existe un g
52
el secret de notre existence, de notre esprit, de
notre
histoire peut-être ? 2.Le mythe Il existe un grand mythe europé
53
istan et Iseut. Au travers du désordre extrême de
nos
mœurs, dans la confusion des morales et des immoralismes qui en viven
54
image simple, comme une sorte de type primitif de
nos
tourments les plus complexes. Et de même que pour se tirer des confus
55
s. Et de même que pour se tirer des confusions de
notre
langue, les poètes ont coutume de rapporter les mots à leurs origines
56
rais rapporter à ce mythe certaines confusions de
nos
mœurs. Étymologie des passions, moins décevante que celle des mots, p
57
vante que celle des mots, puisqu’elle trouve dans
notre
existence — et non dans quelque science hypothétique — son immédiate
58
détruire son charme que d’essayer de l’analyser ?
Nous
n’en sommes plus à croire que mythe est synonyme d’irréalité ou d’ill
59
é ou d’illusion. Trop de mythes manifestent parmi
nous
une puissance trop incontestable. Mais l’abus que l’on fait du mot ob
60
souvent : un mythe n’a pas d’auteur. Son origine
doit
être obscure. Et son sens même l’est en partie. Il se présente comme
61
rofond du mythe, c’est le pouvoir qu’il prend sur
nous
, généralement à notre insu. Ce qui fait qu’une histoire, un événement
62
t le pouvoir qu’il prend sur nous, généralement à
notre
insu. Ce qui fait qu’une histoire, un événement ou même un personnage
63
c’est précisément cet empire qu’ils exercent sur
nous
comme malgré nous. Une œuvre d’art, comme telle, n’a pas à proprement
64
cet empire qu’ils exercent sur nous comme malgré
nous
. Une œuvre d’art, comme telle, n’a pas à proprement parler un pouvoir
65
s depuis longtemps. Pourtant ses lois sont encore
les nôtres
d’une manière secrète et diffuse. Profanées et reniées par nos codes
66
ière secrète et diffuse. Profanées et reniées par
nos
codes officiels, elles sont devenues d’autant plus contraignantes qu’
67
raignantes qu’elles n’ont plus de pouvoir que sur
nos
rêves. ⁂ Bien des traits de la légende de Tristan sont de ceux qui si
68
teur — à supposer qu’il y en eût un, et un seul —
nous
est totalement inconnu. Les cinq versions « originales » qui nous res
69
ent inconnu. Les cinq versions « originales » qui
nous
restent sont des remaniements artistiques d’un archétype dont on n’a
70
1). Le progrès de l’action, et les effets qu’elle
devait
exercer sur l’auditeur, dépendent dans une certaine mesure (que nous
71
auditeur, dépendent dans une certaine mesure (que
nous
aurons à préciser) d’un ensemble de règles et de cérémonies qui n’est
72
ndice 2). Enfin la nature même de l’obscurité que
nous
découvrirons dans la légende, dénote sa parenté profonde avec le myth
73
à conserver, ou qu’il est impossible de détruire.
Nous
n’avons plus besoin de mythes, par exemple, pour exprimer les vérités
74
xemple, pour exprimer les vérités de la science :
nous
les considérons en effet d’une manière parfaitement « profane », et e
75
nc tout à gagner à la critique individuelle. Mais
nous
avons besoin d’un mythe pour exprimer le fait obscur et inavouable qu
76
s’y abandonnent de toutes leurs forces. C’est que
nous
voulons sauver cette passion, et que nous chérissons ce malheur, cepe
77
est que nous voulons sauver cette passion, et que
nous
chérissons ce malheur, cependant que nos morales officielles et notre
78
et que nous chérissons ce malheur, cependant que
nos
morales officielles et notre raison les condamnent. L’obscurité du my
79
malheur, cependant que nos morales officielles et
notre
raison les condamnent. L’obscurité du mythe nous met donc en mesure d
80
notre raison les condamnent. L’obscurité du mythe
nous
met donc en mesure d’accueillir son contenu déguisé et d’en jouir par
81
ri de la critique certaines réalités humaines que
nous
sentons ou pressentons fondamentales. Le mythe exprime ces réalités,
82
Le mythe exprime ces réalités, dans la mesure où
notre
instinct l’exige, mais il les voile aussi dans la mesure où le grand
83
ythe ? Cette question ne peut être esquivée. Elle
nous
porte au cœur du problème et de son actualité. Précisons que les règl
84
lles contraintes, se les inventera au besoin… Car
nous
verrons que ce n’est pas seulement la nature de la société, mais l’ar
85
niqueurs, les sermons et les satires de ce siècle
nous
révèlent qu’il connut une première « crise du mariage ». Elle appelai
86
thique à laquelle répondait le Roman. Élargissant
notre
définition, nous appellerons mythe, désormais, cette permanence d’un
87
répondait le Roman. Élargissant notre définition,
nous
appellerons mythe, désormais, cette permanence d’un type de relations
88
nt l’influence n’a pas cessé de s’étendre jusqu’à
nos
jours. Passion de la nature obscure, dynamisme excité par l’esprit, p
89
, charme, terreur ou idéal : tel est le mythe qui
nous
tourmente. Qu’il ait perdu sa forme primitive voilà précisément ce qu
90
e Nietzsche. 3.Actualité du mythe ; raisons de
notre
analyse Nul besoin d’avoir lu le Tristan de Béroul, ou celui de M.
91
e d’un tel mythe. Il se trahit dans la plupart de
nos
romans et de nos films, dans leurs succès auprès des masses, dans les
92
Il se trahit dans la plupart de nos romans et de
nos
films, dans leurs succès auprès des masses, dans les complaisances qu
93
la morale. Il vit de la vie même du romantisme en
nous
; il est le grand mystère de cette religion dont les poètes du siècle
94
ythique, la preuve est d’ailleurs immédiate. Elle
nous
sera donnée ici même par une certaine répugnance du lecteur à envisag
95
cteur à envisager mon projet. Le Roman de Tristan
nous
est « sacré » dans la mesure exacte où l’on estimera que je commets u
96
ra si elles sont diaboliques. La première est que
nous
sommes parvenus au point de désordre social où l’immoralisme se révèl
97
’est qu’il permet de dégager une raison simple de
notre
confusion présente. C’est qu’il permet aussi de formuler certaines re
98
anentes noyées sous les vulgarités minutieuses de
nos
psychologies. C’est enfin qu’il permet de mettre à nu certain dilemme
99
qu’il permet de mettre à nu certain dilemme dont
notre
vie hâtive, notre culture et le ronron de nos morales sont en passe d
100
ettre à nu certain dilemme dont notre vie hâtive,
notre
culture et le ronron de nos morales sont en passe de nous faire oubli
101
t notre vie hâtive, notre culture et le ronron de
nos
morales sont en passe de nous faire oublier la sévère réalité. Dresse
102
ture et le ronron de nos morales sont en passe de
nous
faire oublier la sévère réalité. Dresser le mythe de la passion dans
103
ureté monumentale, comme une ironie salutaire sur
nos
complaisances tortueuses et sur notre impuissance à choisir vaillamme
104
salutaire sur nos complaisances tortueuses et sur
notre
impuissance à choisir vaillamment entre la Norme du Jour et la Passio
105
quelle que soit « l’utilité » de mon entreprise,
notre
sort n’en demeure pas moins, à nous autres Occidentaux, de devenir de
106
entreprise, notre sort n’en demeure pas moins, à
nous
autres Occidentaux, de devenir de plus en plus conscients des illusio
107
nir de plus en plus conscients des illusions dont
nous
vivons. Et peut-être que la fonction du philosophe, du moraliste, du
108
aise conscience des hommes. Qui sait où cela peut
nous
mener ? Là-dessus, il est temps de passer à l’opération annoncée. La
109
st sans doute une certaine froideur avec laquelle
nous
la mènerons. Sourds et aveugles aux « charmes » du récit, essayons de
110
yons de résumer « objectivement » les faits qu’il
nous
rapporte et les raisons qu’il en propose, ou qu’il omet très curieuse
111
il en propose, ou qu’il omet très curieusement de
nous
indiquer. 4.Le contenu manifeste du Roman de Tristan3 Amors pa
112
ien de plus significatif que ces variantes, comme
nous
le verrons.) La faute est donc consommée. Mais Tristan reste lié par
113
uté ». Maintenant, ces « raisons » mises à part —
nous
aurons l’occasion d’y revenir — on s’aperçoit que le Roman repose sur
114
roit ? Mise en éveil par cette première question,
notre
méfiance critique ne tarde pas à découvrir d’autres énigmes, non moin
115
ment de Dieu » ? Elle sait bien que cette épreuve
doit
la perdre. Elle n’en triomphe que par une ruse improvisée in extremis
116
tions aussi peu défendables ? Comment peuvent-ils
nous
présenter tel un modèle de chevalerie ce Tristan qui a trompé son roi
117
y voir un « conflit cornélien entre l’amour et le
devoir
». Cette interprétation classique est d’un aimable anachronisme. Outr
118
aux réalités tyranniques ? Plus d’une énigme que
nous
pose le Roman nous incite à chercher de ce côté les éléments d’une pr
119
niques ? Plus d’une énigme que nous pose le Roman
nous
incite à chercher de ce côté les éléments d’une première solution. Si
120
solution. Si l’on admet que l’aventure de Tristan
devait
servir à illustrer le conflit de la chevalerie et de la société féoda
121
t de la société féodale — donc le conflit de deux
devoirs
ou même, nous l’avons vu page 21, le conflit de deux « religions » —,
122
éodale — donc le conflit de deux devoirs ou même,
nous
l’avons vu page 21, le conflit de deux « religions » —, l’on s’aperço
123
tan, les barons dénoncent Iseut au roi Marc : ils
devraient
donc passer pour « féaux » et loyaux. Et si l’auteur les traite cepen
124
alerie « courtoise » contre le droit féodal. Mais
nous
avons d’autres raisons de le croire. La conception de la fidélité et
125
st plus amour, qui tourne à réalité. »7 Voilà qui
nous
met sur la voie d’une première explication d’épisodes tels que ceux d
126
élité courtoise. Il choisit en toute liberté, car
nous
avons marqué plus haut qu’étant plus fort que le roi et les barons, i
127
ue le Roman illustre un conflit de « religions »,
nous
avons pu préciser et cerner les principales difficultés de l’intrigue
128
ée. 7.L’amour du roman Si l’on se reporte à
notre
résumé de la légende, on ne peut manquer d’être frappé de ce fait : l
129
ituer par elle-même une explication. À chacune de
nos
questions, il serait évidemment facile de répondre : les choses se pa
130
vaincante qu’en vertu d’une coutume paresseuse de
notre
critique littéraire. En vérité, elle ne répond à rien. Elle nous ramè
131
ittéraire. En vérité, elle ne répond à rien. Elle
nous
ramène simplement à poser la question fondamentale : pourquoi faut-il
132
u’on pressent qu’elle n’est pas sans danger. Elle
nous
met en effet au cœur de tout le problème — et sa portée dépasse sans
133
ée dépasse sans aucun doute le cas particulier de
notre
mythe. Pour qui se place, par un effort d’abstraction, à l’extérieur
134
igeant qu’il sait que le déroulement des faits ne
doit
dépendre ni de son désir ni des fantaisies de l’auteur.) Supposez au
135
la mesure exacte où l’on partage ses intentions.
Nous
avons vu que les obstacles extérieurs qui s’opposent à l’amour de Tri
136
, que des artifices romanesques. Or il résulte de
nos
remarques au sujet de la vraisemblance, que la gratuité même des obst
137
e à la manière d’un rêve, et non point à celle de
nos
vies : les prétextes du romancier, les actions de ses deux héros, et
138
détriment de leur bonheur et de leur vie même… ⁂
Nous
commençons à distinguer le sens secret et inquiétant du mythe : le da
139
tige… Mais ce n’est plus l’heure de se détourner.
Nous
sommes atteints, nous subissons le charme, nous co-naissons au « tour
140
us l’heure de se détourner. Nous sommes atteints,
nous
subissons le charme, nous co-naissons au « tourment délicieux ». Tout
141
. Nous sommes atteints, nous subissons le charme,
nous
co-naissons au « tourment délicieux ». Toute condamnation serait vain
142
elle ? (Seules les questions « stupides » peuvent
nous
instruire, et tout ce qui passe pour évident cache quelque chose qui
143
près Valéry.) Rien d’humain ne paraît rapprocher
nos
amants, bien au contraire. Lors de leur première rencontre, ils n’ont
144
tes de cette époque furent moins sentimentaux que
nous
ne le sommes devenus, et qu’ils n’éprouvaient pas le besoin d’insiste
145
n et le mal », dans une sorte de transcendance de
nos
communes conditions, dans un absolu indicible, incompatible avec les
146
et avouent leur nouveau tourment : « En mal uson
notre
jovente »… La décision de se séparer est bientôt prise. Tristan propo
147
ge qui fait pâlir le romantisme tout entier ! Qui
nous
rendra ce dur « patois du cœur ? ») Un dernier trait : lorsque Trista
148
par l’absence. 9.L’amour de la Mort Mais il
nous
faut pousser plus loin : l’amabam amare d’Augustin est une émouvante
149
lui-même ne s’est pas satisfait. L’obstacle dont
nous
avons souvent parlé, et la création de l’obstacle par la passion des
150
a passion, — si l’on descend au fond du mythe ? ⁂
Nous
avons vu que le progrès du roman a pour principe les séparations et l
151
ui met le roi sur la trace de l’adultère. Quant à
nous
, elle nous met sur la trace du dessein secret des amants : leur reche
152
oi sur la trace de l’adultère. Quant à nous, elle
nous
met sur la trace du dessein secret des amants : leur recherche du pér
153
, il s’agit d’être le plus fort, ou le plus rusé.
Nous
avons vu que cela le conduirait à enlever la reine à son roi. Et que
154
la négation de la passion, au moins de celle dont
nous
nous occupons. L’ardeur amoureuse spontanée, couronnée et non combatt
155
gation de la passion, au moins de celle dont nous
nous
occupons. L’ardeur amoureuse spontanée, couronnée et non combattue, e
156
nitence au service de cette mort qui transfigure.
Nous
touchons au secret dernier. L’amour de l’amour même dissimulait une p
157
vient de préciser le sens du mot « trompeur » que
nous
venons d’utiliser. La vulgarisation de la psychanalyse nous habitue à
158
s d’utiliser. La vulgarisation de la psychanalyse
nous
habitue à concevoir qu’un désir refoulé « s’exprime » toujours, mais
159
la chevalerie fournira donc le cadre du Roman. Et
nous
avons marqué, en maint endroit, le caractère de « prétexte rêvé » des
160
oyez que c’est plus fort que moi. » Et cependant,
nous
voyons bien qu’à la faveur de cette fatalité trompeuse, tous leurs ac
161
faillible qu’elle peut agir à l’abri du jugement.
Nos
actions les moins calculées sont parfois les plus efficaces. La pierr
162
ute « vérité », et la vie même. Il est au-delà de
nos
bonheurs, de nos souffrances. Il s’élance vers l’instant suprême où l
163
t la vie même. Il est au-delà de nos bonheurs, de
nos
souffrances. Il s’élance vers l’instant suprême où la totale jouissan
164
e, mais la musique est savante, vraiment, et elle
nous
chante immensément le beau secret : c’est lui qui a voulu son destin
165
er la souffrance. Amour-passion : désir de ce qui
nous
blesse, et nous anéantit par son triomphe. C’est un secret dont l’Occ
166
. Amour-passion : désir de ce qui nous blesse, et
nous
anéantit par son triomphe. C’est un secret dont l’Occident n’a jamais
167
l en est peu de plus tragiques, et sa persistance
nous
invite à porter sur l’avenir de l’Europe un jugement très pessimiste.
168
rtain mode de connaître qui définirait à lui seul
notre
psyché occidentale. Pourquoi l’homme d’Occident veut-il subir cette p
169
manesque : il décrit l’essentielle catastrophe de
notre
sadique génie, ce goût réprimé de la mort, ce goût de se connaître à
170
achable des racines de l’instinct de la guerre en
nous
. ⁂ De cette extrémité tragique, illustrée, avouée et constatée par la
171
e succès prodigieux du Roman de Tristan révèle en
nous
, que nous le voulions ou non, une préférence intime pour le malheur.
172
rodigieux du Roman de Tristan révèle en nous, que
nous
le voulions ou non, une préférence intime pour le malheur. Que ce mal
173
our le malheur. Que ce malheur, selon la force de
notre
âme, soit la « délicieuse tristesse » et le spleen de la décadence, o
174
e, ou le défi que l’esprit jette au monde, ce que
nous
cherchons, c’est ce qui peut nous exalter jusqu’à nous faire accéder,
175
u monde, ce que nous cherchons, c’est ce qui peut
nous
exalter jusqu’à nous faire accéder, malgré nous, à la « vraie vie » d
176
cherchons, c’est ce qui peut nous exalter jusqu’à
nous
faire accéder, malgré nous, à la « vraie vie » dont parlent les poète
177
t nous exalter jusqu’à nous faire accéder, malgré
nous
, à la « vraie vie » dont parlent les poètes. Mais cette « vraie vie »
178
qu’un des noms de la Mort, le seul nom par lequel
nous
osions l’appeler — tout en feignant de la repousser. Pourquoi préféro
179
t en feignant de la repousser. Pourquoi préférons-
nous
à tout autre récit celui d’un amour impossible ? C’est que nous aimon
180
tre récit celui d’un amour impossible ? C’est que
nous
aimons la brûlure, et la conscience de ce qui brûle en nous. Liaison
181
s la brûlure, et la conscience de ce qui brûle en
nous
. Liaison profonde de la souffrance et du savoir. Complicité de la con
182
a pu fonder sur elle une explication générale de
notre
esprit et même de notre Histoire.) Je définirais volontiers le romant
183
e explication générale de notre esprit et même de
notre
Histoire.) Je définirais volontiers le romantique occidental comme un
184
l me paraît que cela explique une bonne partie de
notre
psychologie. Sans traverses à l’amour, point de « roman ». Or c’est l
185
ophe — et non point sa rapide flambée. Considérez
notre
littérature. Le bonheur des amants ne nous émeut que par l’attente du
186
dérez notre littérature. Le bonheur des amants ne
nous
émeut que par l’attente du malheur qui le guette. Il y faut cette men
187
a nostalgie, le souvenir, et non pas la présence,
nous
émeuvent. La présence est inexprimable, elle ne possède aucune durée
188
ophe, — l’amour réciproque malheureux. ⁂ Arrêtons-
nous
sur cette formule du mythe. Amour réciproque, en ce sens que Tristan
189
e et grave mélodie Un résumé objectif du Roman
nous
a fait pressentir certaines contradictions. L’hypothèse d’une opposit
190
re la loi de chevalerie et les coutumes féodales,
nous
a permis de surprendre le mécanisme de ces contradictions. Alors a co
191
mécanisme de ces contradictions. Alors a commencé
notre
recherche du vrai sujet de la légende. Derrière la préférence accord
192
est appréciable — mais dont la conscience commune
doit
renier l’intime évidence. Que la sécheresse d’une description réduite
193
n que j’ai stylisée à dessein, il demeure qu’elle
nous
a permis de surprendre à l’état naissant quelques relations fondament
194
quelques relations fondamentales qui sous-tendent
nos
destinées. Pour autant que l’amour-passion rénove le mythe dans nos v
195
r autant que l’amour-passion rénove le mythe dans
nos
vies, nous ne pouvons plus ignorer, désormais, la condamnation radica
196
ue l’amour-passion rénove le mythe dans nos vies,
nous
ne pouvons plus ignorer, désormais, la condamnation radicale qu’il re
197
nation radicale qu’il représente pour le mariage.
Nous
savons, par la fin du mythe, que la passion est une ascèse. Elle s’op
198
à son tour, se déguise en fatalité. Incidemment,
nous
avons indiqué qu’un tel amour n’est pas sans lien profond avec notre
199
qu’un tel amour n’est pas sans lien profond avec
notre
goût de la guerre. Enfin, s’il est vrai que la passion, et le besoin
200
, et le besoin de la passion, sont des aspects de
notre
mode occidental de connaissance, il faut en venir — au moins sous for
201
france, n’est-ce pas l’acte même, et l’audace, de
nos
mystiques les plus lucides ? Érotique au sens noble, et mystique : qu
202
rlent un même langage, et chantent peut-être dans
notre
âme la même « vieille et grave mélodie » orchestrée par le drame de W
203
onomique » des formes et des structures du Roman,
nous
avons pu saisir le contenu originel du mythe, dans sa pureté fruste e
204
ythe, dans sa pureté fruste et grande. Deux voies
nous
tentent maintenant : l’une remonte vers les arrière-plans historiques
205
ieux du mythe, — l’autre descend du mythe jusqu’à
nos
jours. Parcourons-les l’une après l’autre, librement. Nous ferons hal
206
s. Parcourons-les l’une après l’autre, librement.
Nous
ferons halte ici ou là pour vérifier telle origine nettement localisé
207
, ou telle conséquence imprévue des relations que
nous
venons de dégager. 2. La raison dont je parle ici étant l’activité
208
isme soit passé au rang de doctrine officielle ne
doit
pas nous faire oublier son efficacité proprement sacrilège, antisocia
209
passé au rang de doctrine officielle ne doit pas
nous
faire oublier son efficacité proprement sacrilège, antisociale, « dis
210
édition Bédier du poème de Thomas (t. I, p. 240),
nous
lisons que le veneur du roi, pénétrant dans la retraite des amants «
211
e de l’éternelle nuit. Là-bas, une science unique
nous
est donnée : le divin, l’éternel, l’originel oubli… Oh ! si je pouvai
212
du mythe 1.L’« obstacle » naturel et sacré
Nous
sommes tous plus ou moins matérialistes, nous autres héritiers du xix
213
Nous sommes tous plus ou moins matérialistes,
nous
autres héritiers du xixe . Qu’on nous montre dans la nature, ou dans
214
érialistes, nous autres héritiers du xixe . Qu’on
nous
montre dans la nature, ou dans l’instinct, les esquisses grossières d
215
sses grossières de faits « spirituels », aussitôt
nous
croyons tenir une explication de ces faits. Le plus bas nous paraît l
216
s tenir une explication de ces faits. Le plus bas
nous
paraît le plus vrai. C’est la superstition du temps, la manie de « ra
217
nécessaire. C’est aussi le scrupule scientifique,
nous
dit-on. Il fallait cela pour affranchir l’esprit des illusions spirit
218
ogue à certains égards à celle de la passion dans
notre
mythe, beaucoup penseront que voilà qui suffit… Donnons une page à ce
219
ons. ⁂ L’obstacle dont on a vu le jeu au cours de
notre
analyse du mythe, n’est-il pas d’origine toute naturelle ? Retarder
220
on du mythe, et encore moins sa localisation dans
notre
histoire européenne… L’antiquité n’a rien connu de semblable à l’amou
221
ification de la passion, qui est justement ce qui
nous
touche dans le Roman ? Parler de déviation de l’instinct, c’est ne ri
222
n Platonisme, druidisme, manichéisme. Platon
nous
parle dans Phèdre et le Banquet d’une fureur qui va du corps à l’âme,
223
e divinité, ni ne se crée dans l’âme au-dedans de
nous
: c’est une inspiration tout étrangère, un attrait qui agit du dehors
224
», car ce délire procède de la divinité et porte
notre
élan vers Dieu. Tel est l’amour platonicien : « délire divin », trans
225
sse même et fuit la tentation de s’accomplir dans
notre
monde, parce qu’il ne veut embrasser que le Tout. C’est le dépassemen
226
au monde médiéval. Ainsi l’Orient vint rêver dans
nos
vies, réveillant de très vieux souvenirs. Car du fond de notre Occide
227
éveillant de très vieux souvenirs. Car du fond de
notre
Occident, la voix des bardes celtes lui répondait. Je ne sais si c’ét
228
un écho, ou quelque harmonie ancestrale — toutes
nos
races sont venues ou revenues du Proche-Orient — ou simplement si la
229
es opposées : dieux lumineux et dieux sombres. Il
nous
importe de souligner ce fait du dualisme fondamental de la religion d
230
de l’Europe. De l’Inde aux rives de l’Atlantique,
nous
retrouvons exprimé, dans les formes les plus diverses, ce même mystèr
231
e Dispater gaulois… Bien d’autres rapprochements
nous
tentent, dont l’un au moins intéresse directement l’objet de ce livre
232
e, symbole de l’au-delà et de cette nostalgie qui
nous
fait mépriser les joies terrestres. Mais symbole équivoque puisqu’il
233
urtant sa nature est fuyante. « L’Éternel féminin
nous
entraîne », dira Goethe. Et Novalis : « La femme est le but de l’homm
234
éé, aux yeux de la chair, n’est que la Nuit. Mais
notre
jour, aux yeux du dieu qui réside par-delà les étoiles, c’est le roya
235
, et la rappelèrent au culte des lettres. Et ceci
nous
amène aux abords de l’époque où se forma notre mythe… ⁂ Mais plus prè
236
eci nous amène aux abords de l’époque où se forma
notre
mythe… ⁂ Mais plus près de nous que Platon et les druides, une sorte
237
oque où se forma notre mythe… ⁂ Mais plus près de
nous
que Platon et les druides, une sorte d’unité mystique du monde indo-e
238
ne à l’arrière-plan des hérésies du Moyen Âge. Si
nous
embrassons le domaine géographique et historique qui va de l’Inde à l
239
que et historique qui va de l’Inde à la Bretagne,
nous
constatons qu’une religion s’y est répandue, d’une manière à vrai dir
240
e à vrai dire souterraine, dès le iiie siècle de
notre
ère, syncrétisant l’ensemble des mythes du Jour et de la Nuit tels qu
241
héenne. Les difficultés mêmes que l’on éprouve de
nos
jours à définir cette religion ne sont pas sans nous renseigner sur s
242
s jours à définir cette religion ne sont pas sans
nous
renseigner sur sa nature profonde et sa portée humaine. D’abord elle
243
témoignages sur lesquels elle a été jugée jusqu’à
nos
jours émanent presque exclusivement de ses adversaires. Ensuite, il s
244
s développements qui suivront, deux faits surtout
doivent
être retenus : 1° Le dogme fondamental de toutes les sectes manichéen
245
ns… 2° Il est très important et significatif pour
nous
de remarquer que la structure de la foi manichéenne « est essentielle
246
ente l’ascèse (aspect négatif de l’illumination),
nous
pouvons accéder à la Lumière. Mais la fin de l’esprit, son but, c’est
247
e, obscurcie par la multiplicité immédiate. Éros,
notre
Désir suprême, n’exalte nos désirs que pour les sacrifier. L’accompli
248
té immédiate. Éros, notre Désir suprême, n’exalte
nos
désirs que pour les sacrifier. L’accomplissement de l’Amour nie tout
249
ganisme oriental-occidental sur lequel se détache
notre
mythe. Mais d’où vient qu’il s’en soit « détaché » justement ? Quelle
250
s s’avouer que par symboles trompeurs — à ne plus
nous
séduire que par le charme et la secrète incantation d’un mythe ? 3
251
Parole a été faite chair, et elle a habité parmi
nous
, pleine de grâce et de vérité ; et nous avons contemplé sa gloire, un
252
ité parmi nous, pleine de grâce et de vérité ; et
nous
avons contemplé sa gloire, une gloire comme la gloire du Fils unique
253
ans les Ténèbres —, tel est l’événement inouï qui
nous
délivre du malheur de vivre. Tel est le centre de tout le christianis
254
n. Il est le suprême scandale, non seulement pour
notre
raison qui n’admet point cette impensable confusion de l’infini et du
255
sa vie « finie ». Le dieu Éros exalte et sublime
nos
désirs, les rassemblant dans un Désir unique, qui aboutit à les nier.
256
naît — ne s’est pas détourné, au contraire ; « Il
nous
a aimés le premier » dans notre forme et nos limitations. Il a été ju
257
u contraire ; « Il nous a aimés le premier » dans
notre
forme et nos limitations. Il a été jusqu’à les revêtir. Et revêtant l
258
Il nous a aimés le premier » dans notre forme et
nos
limitations. Il a été jusqu’à les revêtir. Et revêtant la condition d
259
s sans pécher et sans se diviser, l’Amour de Dieu
nous
a ouvert une voie radicalement nouvelle : celle de la sanctification.
260
e présent. Car aimer Dieu, c’est obéir à Dieu qui
nous
ordonne de nous aimer les uns les autres. Que signifie : Aimez vos en
261
imer Dieu, c’est obéir à Dieu qui nous ordonne de
nous
aimer les uns les autres. Que signifie : Aimez vos ennemis ? C’est l’
262
ntale » une conception religieuse qui à vrai dire
nous
est venue du Proche-Orient mais qui n’a triomphé qu’en Occident : cel
263
histoire des religions.) ⁂ Maintenant, rappelons-
nous
qu’Éros veut l’union, c’est-à-dire la fusion essentielle de l’individ
264
L’individu distinct — cette erreur douloureuse —
doit
s’élever jusqu’à se perdre dans la divine perfection. Que l’homme ne
265
elles ne représentent que des défauts de l’Être.
Nous
n’avons donc point de prochain. Et l’exaltation de l’Amour sera en mê
266
mais d’avoir perdu Dieu en devenant autonome. Or,
nous
ne trouverons pas Dieu par une élévation indéfinie de notre désir. No
267
rouverons pas Dieu par une élévation indéfinie de
notre
désir. Nous aurons beau sublimer notre Éros, il ne sera jamais que no
268
Dieu par une élévation indéfinie de notre désir.
Nous
aurons beau sublimer notre Éros, il ne sera jamais que nous-mêmes ! P
269
définie de notre désir. Nous aurons beau sublimer
notre
Éros, il ne sera jamais que nous-mêmes ! Point d’illusions ni d’optim
270
onne Nouvelle ; et cette nouvelle, c’est que Dieu
nous
cherche. Et il nous trouve lorsque nous percevons sa voix, et que nou
271
ette nouvelle, c’est que Dieu nous cherche. Et il
nous
trouve lorsque nous percevons sa voix, et que nous répondons en obéis
272
que Dieu nous cherche. Et il nous trouve lorsque
nous
percevons sa voix, et que nous répondons en obéissant. Dieu nous cher
273
ous trouve lorsque nous percevons sa voix, et que
nous
répondons en obéissant. Dieu nous cherche et nous a trouvés par l’amo
274
sa voix, et que nous répondons en obéissant. Dieu
nous
cherche et nous a trouvés par l’amour de son Fils abaissé jusqu’à nou
275
nous répondons en obéissant. Dieu nous cherche et
nous
a trouvés par l’amour de son Fils abaissé jusqu’à nous. L’Incarnation
276
a trouvés par l’amour de son Fils abaissé jusqu’à
nous
. L’Incarnation est le signe historique d’une création renouvelée, où
277
e conclure que cette forme d’amour nommée passion
doit
normalement se développer au sein des peuples qui adorent Éros ? Et q
278
iens — historiquement les peuples d’Occident — ne
devraient
pas connaître la passion, ou tout au moins la traiter d’incroyance ?
279
au moins la traiter d’incroyance ? Or l’Histoire
nous
oblige à le constater : c’est l’inverse qui s’est réalisé. Nous voyon
280
le constater : c’est l’inverse qui s’est réalisé.
Nous
voyons qu’en Orient (Appendice 4), et dans la Grèce contemporaine de
281
étique. « Aucuns pensent que c’est une rage… » Et
nous
voyons qu’en Occident, au xiie siècle, c’est le mariage qui est en b
282
soi. L’identification des éléments religieux dont
nous
avions décelé la présence dans le mythe nous amène donc à constater u
283
dont nous avions décelé la présence dans le mythe
nous
amène donc à constater une contradiction flagrante entre les doctrine
284
cours d’une foi réelle, un tel homme, fatalement,
devait
sentir en lui s’exalter la révolte du sang barbare. Il était prêt à a
285
r ». C’est ainsi que les doctrines secrètes, dont
nous
avons rappelé la parenté, ne devinrent largement vivantes en Occident
286
Elles s’insinuèrent d’une part dans le clergé, où
nous
les retrouverons un peu plus tard mêlées de la manière la plus comple
287
de et qu’elle accommodait à ses plaisirs. Elle ne
devait
pas tarder à matérialiser les préceptes d’une religion qui pourtant s
288
e excellence. Qu’est devenue cette doctrine parmi
nous
? « Personne ne saurait dire jusqu’à quelles couches profondes de l’h
289
ccidental. C’est ainsi que le platonisme vulgaire
nous
a conduits à une terrible confusion : à cette idée que l’amour dépend
290
age d’être aimé. Mais le platonisme dégénéré, qui
nous
obsède, nous rend aveugles à la réalité de l’objet tel qu’il est dans
291
mé. Mais le platonisme dégénéré, qui nous obsède,
nous
rend aveugles à la réalité de l’objet tel qu’il est dans sa vérité —
292
de l’objet tel qu’il est dans sa vérité — ou bien
nous
la rend peu aimable. Et il nous jette à la poursuite de chimères qui
293
vérité — ou bien nous la rend peu aimable. Et il
nous
jette à la poursuite de chimères qui n’existent qu’en nous. Mais enco
294
e à la poursuite de chimères qui n’existent qu’en
nous
. Mais encore, d’où vient ce succès et cette permanence invincible de
295
ccidental de très obscures complicités. Souvenons-
nous
du culte druidique pour la Femme, être prophétique, « éternel féminin
296
lui donner un support corporel. Mais il y a plus,
nous
le savons depuis Freud : le « type de femme » que chaque homme porte
297
t cela resterait bien théorique et contestable si
nous
n’étions pas en mesure de retracer les voies et moyens historiques de
298
ns historiques de cette renaissance de l’Éros. Or
nous
avons déjà fixé sa date : vers le début du xiie siècle. (Date de nai
299
e. (Date de naissance de l’amour-passion !21). Et
nous
allons montrer qu’elle porte un nom par ailleurs bien connu : la cort
300
ui n’est pas tout à fait synonyme de la chasteté,
nous
le verrons, mais plutôt de la retenue… Et surtout, l’homme sera le se
301
quelles raisons elle est demeurée obscure jusqu’à
nos
jours. Ce qui est curieux au plus haut point, c’est l’embarras des ro
302
et la lyrique provençale : ce n’est pas sérieux,
nous
dit-on. Brinkmann et d’autres ont supposé que la poésie latine des xi
303
» ont aussitôt dressé contre elles l’ensemble de
nos
érudits. Wechssler s’est vu traiter de « doctrinaire » — suprême inju
304
er un système incompatible avec le clair génie de
notre
race. Il reste donc d’une part un phénomène étrange, et d’autre part,
305
quer. « Il est également impossible — écrit un de
nos
professeurs — de voir dans ces chansons d’amour, qui forment les troi
306
et Péladan, si le secret de toute cette poésie ne
devrait
pas être cherché beaucoup plus près d’elle qu’on ne l’a fait — tout p
307
’auteur du monde, de ses ténèbres et du péché qui
nous
enserre. Sa création première dans l’ordre spirituel, puis animique,
308
er un sentiment fondamental chez l’homme, même de
nos
jours.) L’âme, dès lors, se trouve séparée de son esprit, qui reste a
309
tion et de la mort. Mais le Christ est venu parmi
nous
, pour nous montrer le chemin du retour à la Lumière. Ce Christ, en ce
310
la mort. Mais le Christ est venu parmi nous, pour
nous
montrer le chemin du retour à la Lumière. Ce Christ, en cela semblabl
311
grec dokesis, apparence) qui, de Marcion jusqu’à
nos
jours, traduit notre refus tout « naturel » d’admettre le scandale d’
312
rence) qui, de Marcion jusqu’à nos jours, traduit
notre
refus tout « naturel » d’admettre le scandale d’un Dieu-Homme. Les ca
313
Église. Quant à la pureté de mœurs des cathares,
nous
avons vu qu’elle traduisait des croyances fort différentes de celles
314
cette culture et de ses doctrines fondamentales,
nous
sommes encore tributaires, au-delà de ce que l’on imagine… (Comme j’e
315
montrer par ce livre.) 7.Hérésie et poésie
Doit
-on considérer les troubadours comme des « croyants » de l’Église cath
316
ps, l’aube, les vergers fleuris et la Dame ? Tout
notre
rationalisme moderne appuie les savants romanistes dans leur conclusi
317
on des « aventureux » que j’ai cités répond, avec
notre
bon sens : démontrez-nous, dans ce cas, comment cathares et troubadou
318
’ai cités répond, avec notre bon sens : démontrez-
nous
, dans ce cas, comment cathares et troubadours auraient pu se côtoyer
319
bert de Castres, la dirigea en personne dès 1193 (
notre
poème pouvant être daté des environs de 1190) et c’est là qu’Esclarmo
320
ns qui l’ont bien reçu et les régions qu’hélas il
doit
quitter pour aller en Provence : ce sont les châteaux de Laurac, de G
321
foi ! ses doux ris restent dans mon cœur ! ». Or
nous
savons que tous ces châteaux sont des foyers connus de l’hérésie, ou
322
ent point de leurs croyances dans les poésies qui
nous
restent — il suffit de rappeler que les cathares promettaient, lors d
323
à la fois marié et fidèle à sa dame ? » voilà qui
nous
donne à penser, si l’on songe à tous les troubadours qui devaient sub
324
penser, si l’on songe à tous les troubadours qui
devaient
subir un apparent « mariage » avec l’Église de Rome dont ils étaient
325
tendant l’aube du jour terrestre : cette aube qui
doit
le réunir à son « copain » de route, et donc d’épreuves dans le monde
326
au corps, mais désirant l’esprit ? Mais souvenons-
nous
aussi de la coutume des missionnaires cheminant deux par deux) : Roi
327
an répond, lui aussi : « Qu’éternellement la nuit
nous
enveloppe ! » Tout comme dans ce début d’une autre « aube »43 anonyme
328
le ciel et toutes les étoiles », et dont Guiraut
nous
dit ici qu’il plane « au-dessus du ciel », n’est-ce point déjà la Div
329
ques hétérodoxes, le Dieu d’avant la Trinité dont
nous
parlent la Gnose et Maître Eckhart, et plus précisément encore, le Di
330
ques, le ton est réellement mystique. Les érudits
nous
ressassent leur formule : il n’y aurait là, « tout simplement », qu’u
331
cantique de Peire de Rogiers : Âpre tourment je
dois
souffrir Pour chagrin d’elle que j’ai si grand Mon cœur ne s’en doit
332
chagrin d’elle que j’ai si grand Mon cœur ne s’en
doit
point défaire Ni jamais joie, ni douce, ni bonne, Ne puis entrevoir e
333
re de Rome, ni qu’on m’en nomme le pape, si je ne
dois
pas faire retour vers elle pour qui mon cœur s’embrase et se fend. Ma
334
érétique, dont les poètes eussent été les agents,
nous
passons maintenant au mystère d’une passion proprement religieuse, d’
335
r me saura gré de tenir compte des doutes qui ont
dû
s’élever dans son esprit, et d’indiquer en bref par quelles raisons j
336
t et on me dira : 1° que la religion des cathares
nous
est encore mal connue et qu’il est donc au moins prématuré d’y voir l
337
t liturgique. On peut imaginer que les thèmes que
nous
avons relevés chez les poètes provençaux entretiennent avec le néo-ma
338
ont-elles pas aux antipodes du christianisme ? Ne
devaient
-ils pas s’en apercevoir ? Et pourquoi n’y a-t-il dans leurs œuvres au
339
ait beaucoup plus scandaleux que ne peut l’être à
nos
yeux, par exemple, le symbolisme de la Dame. Dans l’optique de l’homm
340
distincte. Il est indemne de ce rationalisme qui
nous
permet, à nous autres modernes, d’isoler et d’abstraire de toute ambi
341
est indemne de ce rationalisme qui nous permet, à
nous
autres modernes, d’isoler et d’abstraire de toute ambiance significat
342
re de toute ambiance significative les objets que
nous
considérons49. L’un des meilleurs historiens des mœurs médiévales, J.
343
urs historiens des mœurs médiévales, J. Huizinga,
nous
propose sur ce point des exemples topiques ; celui, entre autres, du
344
stique de l’envergure d’un Henri Suso, le sublime
nous
semble parfois frôler le ridicule. Il est sublime quand, par piété en
345
nt moderne, que les symboles, pour être valables,
dussent
être commentés et expliqués d’une manière non symbolique… Une objecti
346
t bien moins tranchées qu’elles ne le seraient de
nos
jours. Ils chantaient, pour un public en majorité favorable à l’hérés
347
une littérature naissante », et qui au surplus «
doit
avoir d’autres causes », qu’on « ne se flatte pas de débrouiller ». (
348
plus générale, quelle espèce de conscience avons-
nous
des métaphores que nous utilisons dans nos écrits ?52 Il ne faudrait
349
spèce de conscience avons-nous des métaphores que
nous
utilisons dans nos écrits ?52 Il ne faudrait pas oublier ce que l’on
350
avons-nous des métaphores que nous utilisons dans
nos
écrits ?52 Il ne faudrait pas oublier ce que l’on vient de dire sur l
351
n’est donc que sur le double sens allégorique que
devrait
porter la question… Et enfin toute cette poésie baignait dans l’atmos
352
hère la plus chargée de passions. Les actions que
nous
rapportent les chroniqueurs du temps sont parmi les plus folles, les
353
lus « surréalistes » qu’ait connues l’histoire de
nos
mœurs… Qu’on se rappelle ce seigneur jaloux qui tue le troubadour fav
354
et leurs résonances mystiques. « II est certain —
doit
-il avouer — que les idées religieuses d’une époque influent généralem
355
uver dans ses poèmes « des détails qui paraissent
nous
plonger dans la réalité et que rien n’explique ». Exemples donnés : «
356
e ! Car trop parler est pis que péché mortel. Or
nous
avons de ce même Raimbaut d’Orange d’admirables poèmes à la louange d
357
e d’admirables poèmes à la louange de la Dame. Et
nous
savons par ailleurs que l’anneau (échangé par Tristan et Iseut) est l
358
ssément au refus de l’amour physique. Au surplus,
nous
verrons plus tard les poèmes de Dante être d’autant plus passionnés e
359
dans le cercle des sodomistes !54 Mais tout cela
nous
amène à reconnaître enfin la réelle complexité d’un problème dont nou
360
tre enfin la réelle complexité d’un problème dont
nous
avons souligné jusqu’ici, non sans une volontaire partialité, l’un de
361
roduit presque toujours des excès luxurieux. Sans
nous
attarder aux accusations de débauche que beaucoup ont portées contre
362
— l’on sait au vrai peu de chose de leurs vies —
nous
rappellerons l’exemple de sectes gnostiques, qui condamnaient aussi l
363
mes recherches, dans les procédures dressées par
nos
frères, je n’ai pas trouvé que les hérétiques « consolés » se livrass
364
sensualité. »56 Retenons donc ceci, qui nuance
notre
schéma : si les erreurs de la passion — au sens précis que je donne à
365
fois impliquer et expliquer bien davantage. Pour
nous
faciliter une représentation analogique de ce processus minimum d’ins
366
sur ce mouvement. Supposons l’historien futur de
notre
civilisation détruite : il a devant les yeux quelques poèmes surréali
367
suffit à démontrer : 1° que le peu de choses que
nous
savons de la psychanalyse n’autorise pas à faire de cette doctrine la
368
ontraire la liberté qu’ils exaltent est celle que
devaient
nier tous les psychanalystes ; 4° qu’enfin l’on distingue mal comment
369
psychiatrique en particulier… Or il se trouve que
nous
savons exactement, nous autres hommes du xxe siècle, comment toutes
370
lier… Or il se trouve que nous savons exactement,
nous
autres hommes du xxe siècle, comment toutes ces choses improbables s
371
choses improbables se sont réellement produites ;
nous
savons que les initiateurs du mouvement surréaliste ont lu Freud et l
372
vement surréaliste ont lu Freud et l’ont vénéré ;
nous
savons que, sans lui, leurs théories et leur lyrisme eussent été tout
373
ies et leur lyrisme eussent été tout différents ;
nous
savons que ces poètes n’éprouvaient nul besoin et n’avaient pas la po
374
ssibilité de parler de libido dans leurs poèmes ;
nous
savons même que c’est à la faveur d’une erreur initiale sur la portée
375
raît capital pour l’analogie que je propose) ; et
nous
savons enfin qu’il a suffi que quelques-uns des chefs de cette école
376
C’est qu’elle mérite un traitement particulier et
nous
engage dans un nouveau chapitre. 9.Les mystiques arabes Comment
377
dans l’islam, d’une école de mystiques poètes qui
devaient
avoir plus tard pour principales illustrations al-Hallaj, Ruzhbehan d
378
mêmes disputes théologiques se produisirent, qui
devaient
renaître un peu plus tard dans le Moyen Âge occidental. Elles se comp
379
rs pas sans rapport avec la situation courtoise —
nous
retrouvons en Occident et dans le Proche-Orient les mêmes problèmes.
380
leur langage symbolique. Al-Hallaj et Sohrawardi
devaient
même payer de leur vie cette accusation d’hérésie.58 Il est bien émo
381
’appliquent au cas des troubadours, et plus tard,
nous
le verrons, mutatis mutandis, au cas des grands mystiques occidentaux
382
gélique de l’homme, son vrai moi. Ce qui pourrait
nous
orienter vers une compréhension nouvelle de ce que nous appelions le
383
rienter vers une compréhension nouvelle de ce que
nous
appelions le « narcissisme de la passion » (à propos de Tristan, chap
384
eurs des planètes et que visite un roi-chevalier.
Nous
retrouverons le Château de l’Âme parmi les symboles préférés d’un Ruy
385
d’un nom conventionnel ou senhal, derrière lequel
nos
érudits s’épuisent à retrouver des personnages historiques… e) La sa
386
fisme ? » Al-Hallaj répond : « Ne t’attaque pas à
Nous
, regarde notre doigt que nous avons déjà teint dans le sang des amant
387
allaj répond : « Ne t’attaque pas à Nous, regarde
notre
doigt que nous avons déjà teint dans le sang des amants. » De plus, l
388
Ne t’attaque pas à Nous, regarde notre doigt que
nous
avons déjà teint dans le sang des amants. » De plus, les indiscrets s
389
spions) et que le troubadour couvre d’invectives.
Nos
savants commentateurs ne savent trop que faire de ces encombrants los
390
sement du lyrisme andalou aux xe et xie siècles
nous
est aujourd’hui bien connu. La prosodie précise du zadjal est celle-l
391
oitiers, dans cinq sur onze des poèmes de lui qui
nous
restent. Les « preuves » de l’influence andalouse sur les poètes cour
392
pages de citations d’Arabes et de Provençaux dont
nos
grands spécialistes de « l’abîme qui sépare » auraient parfois peine
393
la crois vitale pour l’Occident moderne, et pour
notre
conduite morale et religieuse. Je vais donc poser quelques faits, com
394
ettres, le premier grand roman d’amour-passion de
notre
histoire. Jaufré Rudel va mourir dans les bras de la comtesse de Trip
395
ur, dont je viens de rappeler les manifestations.
Nous
voici donc devant une réalisation (ou épiphanie dans l’Histoire) du p
396
n (ou épiphanie dans l’Histoire) du phénomène que
nous
venons d’imaginer au paragraphe précédent. Si nous cherchons à nous r
397
ous venons d’imaginer au paragraphe précédent. Si
nous
cherchons à nous représenter la situation psychique et éthique de l’h
398
iner au paragraphe précédent. Si nous cherchons à
nous
représenter la situation psychique et éthique de l’homme en ce temps-
399
n psychique et éthique de l’homme en ce temps-là,
nous
constatons d’abord qu’il se trouve impliqué bon gré mal gré dans la l
400
ement de l’autorité et des pouvoirs ménage, comme
nous
l’avons vu, une possibilité nouvelle d’admettre la femme, mais sous l
401
st comme une résultante de tant de confusions qui
devaient
s’y nouer, qu’apparaît la cortezia, « religion » littéraire de l’Amou
402
fait leur gloire mondaine dans toute l’Europe. Or
nous
voyons cette religion de l’amour ennoblissant célébrée par les mêmes
403
istent à tenir la sexualité pour « vilaine » ; et
nous
voyons souvent dans le même poète un adorateur enthousiaste de la Dam
404
8). Chose curieuse, les troubadours chez lesquels
nous
constatons cette contradiction ne s’en plaignent pas ! On dirait qu’i
405
non pas à comprendre leur vie. Car tous, tant que
nous
sommes, sans le savoir, menons nos vies de civilisés dans une confusi
406
ous, tant que nous sommes, sans le savoir, menons
nos
vies de civilisés dans une confusion proprement insensée de religions
407
e superposent ou se combinent à l’arrière-plan de
nos
conduites élémentaires ; de complexes ignorés mais d’autant plus acti
408
vajroli mudra) qui détruit la Ténèbre du monde et
doit
être tenu pour le secret des secrets. » Les précisions données par le
409
iate pour obtenir l’état nirvanique. « Autrement,
nous
rappellent les textes, le dévot devient la proie de la triste loi kar
410
et difficile apprentissage ascétique… Le néophyte
doit
servir la « femme dévote » pendant les quatre premiers mois, comme un
411
jongleurs besogneux, que les romanistes unanimes
nous
décrivent comme de purs « rhétoriqueurs »74. D’Amour, je sais qu’il
412
ion » reste indémontrable « dans l’état actuel de
nos
connaissances », reste donc incroyable jusqu’à nouvel avis. Je cherch
413
t encore plus surprenant. Sous sa forme connue de
nos
jours, c’est l’histoire romancée de l’évolution spirituelle qui condu
414
iqués par le « bonhomme » Barlaam. La version qui
nous
est restée, en provençal du xive siècle, quoique orthodoxe dans les
415
le manichéisme bouddhiste et les hérésies du Midi
doit
apparaître « hautement fantaisiste et improbable ». 7. En lieu et pla
416
esque tous les grands mystiques de l’Occident. Il
nous
semble parfois se réduire à des fadaises sophistiquées, dans le goût
417
imultanément, et de plusieurs manières. Tout cela
nous
aide à mieux comprendre — si rien ne suffit à l’« expliquer » — l’amo
418
occidental, le retour d’un Orient symbolique. Il
nous
devient intelligible par certaines de ses marques historiques : sa re
419
déclarée au concept chrétien du mariage. Mais il
nous
resterait indifférent s’il n’avait gardé dans nos vies, au travers de
420
ous resterait indifférent s’il n’avait gardé dans
nos
vies, au travers des nombreux avatars dont nous allons décrire la pro
421
ns nos vies, au travers des nombreux avatars dont
nous
allons décrire la procession, une virulence intime, perpétuellement n
422
on Remontons maintenant du Midi vers le nord :
nous
découvrons dans le roman breton — Lancelot, Tristan et tout le cycle
423
di précathare et les Celtes gaéliques et bretons.
Nous
avons vu que la religion druidique, d’où sont issues les traditions d
424
es plus approfondies sur tous ces points, bornons-
nous
à remarquer que les romans bretons sont tantôt plus « chrétiens » et
425
ant inspirés de la manière la plus incontestable.
Nous
ne savons si Chrétien de Troyes a bien compris les lois d’amour que l
426
is d’amour que lui enseignait Marie de Champagne.
Nous
ne savons dans quelle mesure il a voulu que ses romans fussent des ch
427
les froides aventures s’enchaînent à l’infini »,
nous
dit de ces légendes l’un de leurs meilleurs adaptateurs modernes ! Ai
428
niais, dont le succès demeure incompréhensible à
notre
esprit si pénétrant et averti. Un peu plus de pénétration nous ferait
429
i pénétrant et averti. Un peu plus de pénétration
nous
ferait voir au contraire que la vraie barbarie est dans la conception
430
roman breton procède d’une cohérence intime dont
nous
avons perdu jusqu’au pressentiment. En vérité, tout « signifie », dan
431
.Des mythes celtiques au roman breton Tristan
nous
apparaît comme le plus purement courtois des romans bretons, en ce se
432
mystères. Dans le cycle des légendes irlandaises,
nous
trouvons un grand nombre de récits qui racontent le voyage d’un héros
433
, veut revenir. C’est finalement pour mourir »86.
Nous
avons là l’origine évidente de la première navigation à l’aventure de
434
aisons littéraires. Mais certains traits de mœurs
nous
incitent à des rapprochements plus précis. On se rappelle que Tristan
435
d de fosterage s’est maintenue en pays celtique :
nous
trouvons les enfants confiés à des parents nourriciers, à l’égard des
436
puberté, donc au sortir de la maison des hommes,
devaient
accomplir un exploit (meurtre d’un étranger ou chasse glorieuse) pour
437
iption de la légende, est si nettement sensible à
notre
cœur qu’il nous met en mesure d’isoler l’élément non celtique, donc p
438
nde, est si nettement sensible à notre cœur qu’il
nous
met en mesure d’isoler l’élément non celtique, donc proprement courto
439
qui provoqua, au xiie siècle, la constitution de
notre
mythe. Qu’on lise l’une après l’autre une légende irlandaise et la lé
440
te analogie reste purement formelle. Tout au plus
devait
-elle favoriser la confusion moderne entre la passion de Tristan et la
441
anches mains est devenue sa femme légitime, il ne
doit
plus et ne peut plus la désirer : Jamais il n’eût méprisé le bien qu’
442
’analyser le processus de cette métamorphose : il
nous
échappe doublement, étant poétique et mystique. Mais nous savons main
443
appe doublement, étant poétique et mystique. Mais
nous
savons maintenant d’où vient le mythe, et où il mène. Et peut-être pr
444
le mythe, et où il mène. Et peut-être pressentons-
nous
— mais alors c’est intraduisible — comment il peut se recréer dans un
445
s, mais il en fait ce qu’il veut. Il modifie — et
nous
dressons l’oreille — trois moments décisifs de l’action : a) il met
446
nc », mais consommé. Son long poème inachevé — il
nous
en reste près de 19 000 vers, mais la mort des amants, quoique annonc
447
et dans cet ordre le mariage. b) La Minnegrotte
nous
est décrite comme une église, avec une science réelle du symbolisme l
448
our deviennent mieux que possibles : inévitables.
Nous
n’en sommes pas sortis au xxe siècle, sinon ce livre n’aurait plus d
449
êtaient au projet du poète d’une manière que l’on
doit
qualifier de proprement congénitale. Dans son essence, dans sa struct
450
er. Et c’est par là que son œuvre agit encore sur
nous
, plus insidieuse et fascinante pour notre sensibilité que la restaura
451
core sur nous, plus insidieuse et fascinante pour
notre
sensibilité que la restauration esthétique d’un Bédier. 14.Premièr
452
s troubadours au Nord plus barbare des trouvères,
nous
sommes en mesure de voir dorénavant dans le chef-d’œuvre de Béroul, T
453
ottfried de Strasbourg, l’aboutissement de toutes
nos
pérégrinations. Les religions antiques, certaines mystiques du Proche
454
out cela vient sourdement retentir dans le mythe.
Nous
avons donc rejoint le Roman de Tristan et situé sa nécessité à telle
455
pourra déduire : 1° que la passion, vulgarisée de
nos
jours par les romans et par le film, n’est rien d’autre que le reflux
456
autre que le reflux et l’invasion anarchique dans
nos
vies d’une hérésie spiritualiste dont nous avons perdu la clef ; 2° q
457
ue dans nos vies d’une hérésie spiritualiste dont
nous
avons perdu la clef ; 2° qu’à l’origine de notre crise du mariage il
458
t nous avons perdu la clef ; 2° qu’à l’origine de
notre
crise du mariage il n’y a pas moins que le conflit de deux traditions
459
itions religieuses, c’est-à-dire une décision que
nous
prenons presque toujours inconsciemment, en toute ignorance de cause,
460
s encourus, en faveur d’une morale survivante que
nous
ne savons plus justifier. ⁂ Il s’en faut d’ailleurs de beaucoup que l
461
ion et le mythe de la passion n’agissent que dans
nos
vies privées. La mystique d’Occident est une autre passion dont le la
462
trangement semblable à celui de l’amour courtois.
Nos
grandes littératures sont pour une bonne partie des laïcisations du m
463
« passionnés » dont l’histoire soit venue jusqu’à
nous
, c’est Héloïse et Abélard dont la rencontre se situe en 1118, très pr
464
r aimer ceux que tu aimes » (Cardenal) et « Donne-
nous
d’aimer ceux que Tu aimes » (Prière). Mais il faut également relever
465
s ! Donc l’un des inventeurs de ces « formules ».
Nous
tenons ici un bel exemple d’anachronisme tendancieux. On veut à tout
466
u reproche d’insincérité fait aux troubadours par
nos
érudits — reproche lui-même stéréotypé… 53. Mais catholique d’origin
467
massacre systématique d’un peuple, enregistré par
notre
histoire « chrétienne » de l’Occident. 65. Consoler vient de consol
468
. 79. Le code « exotérique » le plus complet que
nous
connaissions fut rédigé au commencement du xiiie siècle : c’est le D
469
diverses selon les cultes. Je ne pense pas qu’on
doive
s’en tenir à une seule interprétation. Il s’est produit toute une sér
470
que le « pont évage » que les chevaliers du Graal
doivent
traverser n’est autre que le pont Chinvat de la mythologie manichéenn
471
allemande de légendes irlando-écossaises ; il ne
doit
rien aux influences courtoises. Le Montsalvat des chastes (ou cathare
472
du Roman de Tristan et de ses sources historiques
nous
a conduit à renverser le rapport. C’est ici la passion mortelle qu’il
473
e à savoir dans quelle mesure ce rapprochement ne
nous
est pas suggéré par la seule nature du langage. On a remarqué depuis
474
nalogie des réalités qu’ils désignent ? Ne sommes-
nous
pas jusqu’à un certain point victimes d’une illusion verbale ? d’une
475
arquons tout de suite ce qui le rend inévitable à
notre
sens. S’il n’y avait en jeu, dans le cas de la passion, que des facte
476
e quant aux objets qui peuvent la rassasier. Mais
nous
voyons ici une passion dont la nature est justement de refuser tout c
477
tout ce qui pourrait la satisfaire et la guérir.
Nous
ne sommes donc pas en présence d’une faim, mais bien d’une intoxicati
478
eu près Schopenhauer. Prenons le problème tel que
nous
le pose le mythe, et tel qu’il se posait au xiie siècle. C’est en pa
479
re à l’essor de la grande mystique orthodoxe, que
nous
aurons les meilleures chances de surprendre à l’état naissant la dial
480
zarres »… 2.Tristan : une aventure mystique
Nous
avons constaté que le Roman de Tristan est, à bien des égards, une pr
481
le drame vient de l’adultère consommé. De là que
nous
ayons un « roman » selon la formule moderne du genre, et non pas un s
482
r par la suite les conclusions trop téméraires où
nous
pourrions induire un lecteur non prévenu. Tristan blessé s’embarque s
483
t s’offre à une grâce inconnue. La poésie moderne
nous
a montré combien d’exemples de ces départs à l’aventure, désespérés m
484
défi à la société constituée ! Est-il beaucoup de
nos
poètes qui aient trouvé leur « amour mortel » ? Pour certains, tout s
485
oncerner. Survient l’erreur fatale du philtre bu.
Nous
avons vu, par l’analyse du mythe, que cette fatalité joue le rôle d’u
486
dice 9). Normalement, ce premier et décisif appel
devrait
introduire Tristan dans la voie des macérations et le conduire à l’en
487
oureuse et sauvage ! » Toute une vie de pénitence
devra
maintenant racheter le sacrilège. Mais le malheur essentiel de cet am
488
du péché. L’ascèse qui rachètera la faute commise
doit
aussi et surtout délivrer l’homme du fait même d’être né dans ce mond
489
it même d’être né dans ce monde de ténèbres. Elle
doit
conduire au détachement final et bienheureux, à la mort volontaire de
490
cit de l’« aspre vie » dans la forêt de Morois. «
Nous
avons perdu le monde, et le monde nous », gémit Iseut (dans le Roman
491
Morois. « Nous avons perdu le monde, et le monde
nous
», gémit Iseut (dans le Roman en prose). Et Tristan de répondre : « S
492
ondre : « Si le monde entier était orendroit avec
nous
, je ne verrois fors vous seule. » Il s’agit bien d’une endura. Cette
493
ne de ces périodes de jeûne et de macération dont
nous
connaissons le but chez les cathares : l’absorption de toutes les fac
494
ent d’être présents, il n’y a plus ni prochain ni
devoirs
, ni liens qui tiennent, ni terre ni ciel : on est seul avec tout ce q
495
ciel : on est seul avec tout ce que l’on aime. «
Nous
avons perdu le monde, et le monde nous. » C’est l’extase, la fuite pr
496
on aime. « Nous avons perdu le monde, et le monde
nous
. » C’est l’extase, la fuite profonde hors de toutes les choses créées
497
s siècles avant Novalis, que dans l’extase, l’âme
doit
penser « comme s’il n’y avait que Dieu et elle au monde ». A-t-on le
498
e passion d’amour sensuel : mais tout indique que
nous
sommes ici sur la via mystica des « parfaits ». C’est alors le conten
499
mais non leur forme, qui diffère (Appendice 10). (
Nous
allons y revenir d’ailleurs un peu plus loin, et de manière à dissipe
500
tions les plus apparemment « mystiques » du Roman
doivent
être interprétées — si l’on ne veut pas errer gravement — à partir de
501
ui convient pour les grands mystiques.) Ceci dit,
nous
pouvons retrouver dans le mythe plus d’un aspect des souffrances myst
502
résenter les tourments de l’ascèse purificatrice.
Nous
avons vu que les séparations des deux amants, dans le Roman, réponden
503
plus il aime, plus il endure de souffrances. Mais
nous
savons que c’est la souffrance qui est le vrai but de la séparation v
504
ance qui est le vrai but de la séparation voulue…
Nous
rejoignons alors la situation mystique (par l’autre extrême) : plus T
505
Iseut — l’autre « foi » — l’autre Église dont il
doit
refuser la communion ! En un seul passage du Roman, l’orthodoxie trio
506
siècles à venir —, les similitudes mystiques que
nous
venons de dégager ne seraient plus que de l’ordre du langage, et spéc
507
e qu’il fut, pour se mettre à ressembler à ce que
nos
érudits conçoivent qu’il fut. C’est autant dire qu’on ne comprendrait
508
n breton qui en dérive. C’est à cette origine que
notre
poésie doit son vocabulaire pseudo-mystique ; et c’est dans ce vocabu
509
en dérive. C’est à cette origine que notre poésie
doit
son vocabulaire pseudo-mystique ; et c’est dans ce vocabulaire que le
510
s Celtes, donc d’une religion déjà morte, de même
notre
littérature et nos passions utilisent par abus, et sans le savoir, un
511
religion déjà morte, de même notre littérature et
nos
passions utilisent par abus, et sans le savoir, un langage dont la se
512
ns valable. Plus d’une fois, l’ambiguïté du mythe
nous
a fait hésiter en présence de tel épisode : s’agissait-il d’amour pro
513
es fut presque fatalement amené à transposer dans
notre
vie profane toutes ces allégories trop bien voilées. Il est facile d’
514
différence à son objet vivant et extérieur. Ainsi
nous
avons vu que Tristan aime Iseut non point dans sa réalité, mais en ta
515
ù venaient ces métaphores ? D’une mystique, comme
nous
l’avons vu — mais déguisée, persécutée, puis oubliée. À tel point oub
516
anes comme si elles étaient toutes naturelles. Et
nous
ferons de même ensuite, et nos savants. Notre « science » reste donc
517
es naturelles. Et nous ferons de même ensuite, et
nos
savants. Notre « science » reste donc valable à condition qu’on chang
518
. Et nous ferons de même ensuite, et nos savants.
Notre
« science » reste donc valable à condition qu’on change le signe de c
519
des limites de l’humain, finalement irréalisable,
devait
se traduire, et se trahir d’une manière fatale, par une exaltation en
520
Dieu. Ainsi se dessinent deux grands courants que
nous
retrouverons dans la mystique universelle. Ils seront d’ailleurs rare
521
dividuels — les seuls valables en ce domaine100 —
nous
permettront de préciser tout cela sans excessives simplifications. Il
522
er tout cela sans excessives simplifications. Ils
nous
permettront d’entrevoir les raisons de ce curieux phénomène : « l’abu
523
mène : « l’abus » du langage amoureux en religion
doit
être rattaché, historiquement, au courant le plus orthodoxe. J’emprun
524
tique hindou Sankara. Ce qui est intéressant pour
notre
objet, c’est que Rudolf Otto distingue l’Orient de l’Occident en rame
525
l’Agapè, d’une manière assez analogue à celle que
nous
proposions ci-dessus (voir II, 4). Sankara refuse le monde et le cond
526
s’opposeraient dans les termes mêmes par lesquels
nous
avons tenté de distinguer la mystique des cathares et la doctrine chr
527
a dixième, est ainsi reproduite dans la bulle : «
Nous
nous métamorphosons totalement en Dieu et nous nous convertissons en
528
ième, est ainsi reproduite dans la bulle : « Nous
nous
métamorphosons totalement en Dieu et nous nous convertissons en lui d
529
« Nous nous métamorphosons totalement en Dieu et
nous
nous convertissons en lui de la même manière que le pain dans le sacr
530
us nous métamorphosons totalement en Dieu et nous
nous
convertissons en lui de la même manière que le pain dans le sacrement
531
dans le miroir d’un esprit entièrement purifié. «
Nous
contemplons ce que nous sommes et sommes ce que nous contemplons ; ca
532
it entièrement purifié. « Nous contemplons ce que
nous
sommes et sommes ce que nous contemplons ; car notre essence, sans ri
533
s contemplons ce que nous sommes et sommes ce que
nous
contemplons ; car notre essence, sans rien perdre de sa propre person
534
us sommes et sommes ce que nous contemplons ; car
notre
essence, sans rien perdre de sa propre personnalité, est unie à la vé
535
cte la distinction. » Et ailleurs : « L’abîme qui
nous
sépare de Dieu est perçu de nous au lieu le plus secret de nous-mêmes
536
: « L’abîme qui nous sépare de Dieu est perçu de
nous
au lieu le plus secret de nous-mêmes. Il est la distance essentielle…
537
Là encore, les textes confirment l’exactitude de
notre
schéma. C’est bien avec Ruysbroek et sa doctrine de la distinction es
538
des mystiques franciscains, dès le xiiie siècle,
nous
eût fourni un autre exemple non moins frappant de l’usage des thèmes
539
dans sa jeunesse et qu’il faisait ses délices de
nos
romans de chevalerie. Il rêvait de devenir le « meilleur chevalier du
540
physique mais symbolique, est encore pratiquée de
nos
jours par la secte des Doukhobors (« combattants spirituels ») dont l
541
irectes du lyrisme franciscain, lequel à son tour
devait
influencer si profondément le langage mystique des siècles suivants.
542
. Si plus longtemps tu demeures en cette boue, tu
devras
rester toujours dans les ténèbres. lit-on dans une des laudes attrib
543
ise chez les mystiques espagnols Si maintenant
nous
parcourons les textes des grands mystiques espagnols, sainte Thérèse
544
hérèse et saint Jean de la Croix au xvie siècle,
nous
y retrouvons, jusque dans ses nuances les plus précieuses, la rhétori
545
ui tiendrait décidément trop de place113, bornons-
nous
à énumérer les principaux thèmes communs aux troubadours et aux mysti
546
lusions des savants du xixe siècle sont devenues
nos
préjugés courants. Mais sans compter que le jugement matérialiste sur
547
eux, le mieux connu, et celui qui a le plus égaré
nos
savants, le fait est que sainte Thérèse utilise constamment, et même
548
expliquer en partie sur la base des remarques que
nous
faisions au précédent chapitre ? « Comment savoir, écrit J. Baruzi, s
549
composée ? »116 Je ne pense pas que personne, de
nos
jours, soit en mesure de trancher toutes ces questions. Les spécialis
550
e termes précis dont Jean de la Croix fait usage.
Nous
pouvons cependant, pour sainte Thérèse, retrouver quelques sources ce
551
un en collaboration avec son frère Rodrigue. »117
Nous
savons d’autre part que les auteurs religieux dont elle faisait sa no
552
cle, le langage érotique était plus innocent qu’à
nos
yeux. C’est nous qui sommes des névrosés, héritiers du « puritanisme
553
érotique était plus innocent qu’à nos yeux. C’est
nous
qui sommes des névrosés, héritiers du « puritanisme » embourgeoisé d’
554
es auraient pu s’exprimer d’une autre manière. Vu
notre
grossièreté, je ne serais pas surprise que cela nous vînt à l’esprit.
555
e grossièreté, je ne serais pas surprise que cela
nous
vînt à l’esprit. J’ai même entendu dire à certaines personnes qu’elle
556
qu’elles évitaient de les entendre. O Dieu ! que
notre
misère est grande ! Il nous arrive comme à ces animaux venimeux qui c
557
tendre. O Dieu ! que notre misère est grande ! Il
nous
arrive comme à ces animaux venimeux qui changent en poison tout ce qu
558
uysbroek, d’une Thérèse et d’un Jean de la Croix,
nous
pouvons maintenant tirer cette conclusion : la nature des métaphores
559
assion. Usage et abus dont la psychologie moderne
devait
nécessairement tirer des conclusions conformes à son bon sens, mais q
560
exemple, dans le cas du langage mystique : sommes-
nous
en présence d’une matérialisation du spirituel — et celui-ci serait a
561
n donnera, une chose demeure certaine : c’est que
nous
sommes en présence de deux facteurs qui n’existent jamais l’un sans l
562
s la douleur que dans le goût du sel, mais ce que
nous
désignons dans l’une et l’autre par le même mot, c’est une même maniè
563
les sens, soit par la pensée, dans la totalité de
notre
existence. Ainsi de nos métaphores amoureuses. Le moderne n’hésite pa
564
ée, dans la totalité de notre existence. Ainsi de
nos
métaphores amoureuses. Le moderne n’hésite pas à tenir ce raisonnemen
565
e mystique est une érotomane qui s’ignore. » Mais
nous
avons vu que sainte Thérèse n’ignore rien, et qu’au contraire les ama
566
s qui s’ignorent… Ainsi les arguments s’annulent.
Nous
ne savons rien des origines premières. Ce que nous avons pu dégager,
567
ous ne savons rien des origines premières. Ce que
nous
avons pu dégager, c’est uniquement le jeu des deux facteurs dans l’év
568
Résumons-le encore une fois, pour plus de clarté.
Notre
langage passionnel nous vient de la rhétorique des troubadours. Rhéto
569
is, pour plus de clarté. Notre langage passionnel
nous
vient de la rhétorique des troubadours. Rhétorique ambiguë par excell
570
l’homme en tant qu’esprit. C’est ce fait seul qui
nous
permet de parler. Qu’est-ce que le langage en effet ? Le pouvoir de m
571
se peut que les épigones des grands mystiques122
nous
apparaissent parfois comme des érotomanes qui s’ignorent. Mais il est
572
’érotomanie est une forme d’intoxication, et tout
nous
prouve que les Eckhart, Ruysbroek, Thérèse, Jean de la Croix, sont ex
573
ative par excellence, la meilleure discipline qui
nous
permette de transcender l’amour-passion jusque dans ses formes sublim
574
e veulent pas que le Jour parfait se communique à
nous
au travers de la vie. (Ils ne croient pas l’humanité du Christ.) Ils
575
ue la Nuit, c’est la Colère de Dieu — répondant à
notre
révolte — et non pas l’œuvre d’un obscur démiurge. (Telle est du moin
576
« enthousiaste », la joy d’amor des troubadours,
devait
fatalement aboutir à la passion humaine malheureuse. Cet amour imposs
577
es grandes littératures, du xiiie siècle jusqu’à
nous
, c’est l’histoire de la déchéance du mythe courtois dans la vie « pro
578
té J. Baruzi (Saint Jean de la Croix, p. 613), si
nous
tentions de prendre une vue générale des diverses mystiques connues,
579
ses mystiques connues, « l’expérience mystique ne
nous
semblerait d’un type homogène que dans la mesure où elle serait banal
580
re où elle serait banale, dans la mesure aussi où
nous
échouerions à la saisir ». 101. Gotha 1929. Seul le livre célèbre de
581
r servirait d’argument contre la thèse d’Otto, et
nous
induirait à ranger Maître Eckhart parmi les hérétiques. 107. Un trou
582
Fioretti sous une forme narrative consacrée, qui
devait
évidemment souligner le parallélisme avec la chevalerie, aux yeux des
583
bien être son action ? L’architecture, au moins,
nous
pouvons l’habiter, mais là n’est pas son caractère d’art. De même pou
584
agi sur les mœurs de l’Europe, c’est à coup sûr à
notre
mythe qu’elle le doit. D’une manière plus précise : c’est à la rhétor
585
Europe, c’est à coup sûr à notre mythe qu’elle le
doit
. D’une manière plus précise : c’est à la rhétorique du mythe, héritag
586
uelque pouvoir magique des sons et du langage sur
nos
actes. L’adoption d’un certain langage conventionnel entraîne et favo
587
En esquissant la courbe de la mystique classique,
nous
avons pu décrire une assomption du mythe. C’était la voie montante et
588
mption du mythe. C’était la voie montante et elle
nous
a conduits à une dissolution libératrice du « charme ». La littératur
589
e, ou pour mieux dire : sa « profanation »124 que
nous
allons décrire maintenant. 2.Les deux roses Le meilleur point d
590
2.Les deux roses Le meilleur point de départ
nous
est donné par le Roman de la Rose, écrit entre les années 1237 et 128
591
aire, allant parfois jusqu’à un communisme total.
Nous
retrouvons cet ensemble de traits non seulement chez les frères du Li
592
rent ou ne voulurent les anéantir totalement : de
nos
jours, on retrouve çà et là des communautés mennonites mêlées d’éléme
593
induire à des rapprochements souvent troublants :
nous
l’avons vu à propos des mystiques. Mais en l’absence de preuves pres
594
écrivait. Ce procédé, bientôt ressenti comme tel,
devait
engendrer normalement une réaction dite « réaliste ». Double mouvemen
595
iste ». Double mouvement dont le Roman de la Rose
nous
donne l’illustre témoignage. La Rose de Guillaume de Lorris — dans la
596
se mystique, mais un raffinement de l’esprit, qui
doit
amener l’amant à mériter le don. Au contraire, pour Jean de Meung, qu
597
ne de ces parties aura sa descendance. De Lorris,
nous
irons par Dante — qui peut-être le traduisit — jusqu’à Pétrarque et b
598
lle bien proche d’une vision chrétienne réaliste.
Nous
aurons l’occasion d’y revenir.) 3.Sicile, Italie, Béatrice et Symb
599
lumière, trompeuse à force d’évidence. Maintenant
nous
pouvons distinguer les thèmes que le trobar mêlait dans la naïve tran
600
Guido Guinizelli en parle comme du principe de «
notre
foi » : Elle passe par le chemin, si pleine de grâce et de noblesse
601
quel elle donne son salut] et, s’il n’est déjà de
notre
foi, l’y amène. Faut-il penser que Dante n’est qu’un blasphémateur l
602
Saints implorent cette faveur. Seule, Pitié prend
notre
parti, car Dieu dit, et c’est de ma Dame qu’il entend parler : — Mes
603
ous aient pu recevoir la Vie nouvelle127 ? Ce qui
doit
paraître ici-bas blasphématoire, c’est l’équivoque malgré tout mainte
604
c cette conclusion : Ce fauve, à mon avis, c’est
nous
; ses petits, qu’un chasseur lui a pris, ce sont les vertus, et le ch
605
nt les vertus, et le chasseur c’est le démon, qui
nous
fait voir ce qui n’est pas. De là vient que bien des hommes ont péri
606
x charmes du miroir et de la rhétorique profanée.
Nous
allons voir Pétrarque se laisser prendre « à ce qui n’est pas », c’es
607
e chose mortelle avec une foi Qui à Dieu seul est
due
et à lui seul convient… » « Tout le monde, et sur le moindre rocher
608
dinaire, incendiaire, solaire. »128 Voilà ce qui
doit
étonner chez Pétrarque : cette inoubliable passion animant pour la pr
609
ue du cœur humain. Cette « profanation » radicale
doit
faire naître, on a vu pourquoi (au livre II), une poésie plus adéquat
610
ouve sans gouvernail en haute mer. (Sonnet 132.)
Nous
connaissons bien cette barque — où comme l’autre il emporte sa lyre —
611
chose mortelle, avec une foi qui à Dieu seul est
due
et à lui seul convient est plus interdit à qui plus désire honneur !
612
la loi chrétienne —, c’est la secrète volonté qui
devait
donner naissance au mythe. Mais la confusion de la foi, « qui à Dieu
613
ais la confusion de la foi, « qui à Dieu seul est
due
et à lui seul convient », avec l’amour d’« une chose mortelle », en f
614
te confusion — non de la doctrine orthodoxe — que
devait
résulter l’opposition tragique du corps et de l’âme. C’est la tendanc
615
ée érotique, pour acquérir une valeur de culture,
doit
être stylisée. Elle doit représenter la réalité complexe et pénible s
616
r une valeur de culture, doit être stylisée. Elle
doit
représenter la réalité complexe et pénible sous une forme simplifiée
617
s Amadis portugais puis espagnols, puis français,
nous
offrent le meilleur exemple au xve et au xvie siècle. Par un phénom
618
ge moderne. Et en Irlande, elles vivent encore de
nos
jours. Je ne puis examiner ici le problème des rapports entre ce fond
619
les fées, sans trace de scepticisme ou d’ironie.
Nous
ne savons presque rien de Shakespeare — mais nous avons le Songe d’un
620
Nous ne savons presque rien de Shakespeare — mais
nous
avons le Songe d’une Nuit d’été. Et l’on dit qu’il était catholique —
621
d’été. Et l’on dit qu’il était catholique — mais
nous
avons Roméo et Juliette qui est la seule tragédie courtoise, et la pl
622
le un instant déchiré, ne laissant au souvenir de
nos
yeux que l’image négative d’un éclat, « le soleil noir de la mélancol
623
-même d’horreur et de divinité auquel s’adressent
nos
plus beaux poèmes ; ressuscité d’un coup dans sa pleine stature, comm
624
! chère Juliette Pourquoi es-tu si belle encore ?
Dois
-je penser Que la mort non substantielle est amoureuse Et que le monst
625
t le Prince, rendu à son règne sévère : Ce matin
nous
apporte une paix assombrie… Séparons-nous pour nous entretenir encor
626
e matin nous apporte une paix assombrie… Séparons-
nous
pour nous entretenir encor de ces tristesses.140 ⁂ Il est certain q
627
us apporte une paix assombrie… Séparons-nous pour
nous
entretenir encor de ces tristesses.140 ⁂ Il est certain que Milton
628
me : n’est-ce point la même et unique hérésie que
nous
trouvons partout et en tous temps à l’origine du grand lyrisme passio
629
sir procède des principes intellectuels, et qu’il
doit
nous purger de notre mauvais désir, de la sensualité, péché majeur. E
630
rocède des principes intellectuels, et qu’il doit
nous
purger de notre mauvais désir, de la sensualité, péché majeur. Et Flu
631
cipes intellectuels, et qu’il doit nous purger de
notre
mauvais désir, de la sensualité, péché majeur. Et Fludd, son maître e
632
me un « remède contre l’incontinence ».) Aussi ne
devait
-elle point favoriser les confusions extrêmes de la chair et de l’espr
633
rtant ses charmes ne sont point inégaux à ceux de
nos
récents romans féeriques. Et la psychologie des écrivains français n’
634
fer. « Cette bonne femme, écrit-il tristement, a
dû
me prendre pour un apprenti serrurier. » ⁂ En vérité je me sens fort
635
ci c’est l’art et non « la vie » qui mène le jeu.
Nous
sommes en face d’une création de l’esprit, et non d’une confusion de
636
isme qui lui fit un succès était mieux averti que
le nôtre
. Mais aussi ce caractère d’achèvement nous permet de poser une questi
637
ue le nôtre. Mais aussi ce caractère d’achèvement
nous
permet de poser une question nette : que vaut le succès même de l’eff
638
on nomme l’intérêt civique — comme il apparaît de
nos
jours ? Alors que les mystiques et les religions prennent au contrair
639
silence et à l’oubli, jusque dans les manuels de
notre
siècle, la féerie romanesque née de l’Astrée, et le roman comique, so
640
cœur même d’un ordre intolérant — que la passion
devait
trouver sa revanche la plus éclatante. On connaît le curieux sujet de
641
la tirade : les premiers vers suffisent à attirer
notre
méfiance. Quoi, c’est le bonheur qui serait fatal au repos de cet étr
642
ns plutôt qu’on voit trop bien ce qu’il essaie de
nous
dissimuler. Lui aussi, il ne veut que « brûler ! » Mais il ne peut l’
643
iments vulgaires ? Il le prend de haut : méfions-
nous
. C’est qu’il se dispose à mentir. Il ne faut point servir d’objet qu
644
se à mentir. Il ne faut point servir d’objet qui
nous
possède ; Il ne faut point nourrir d’amour qui ne nous cède : Je le h
645
possède ; Il ne faut point nourrir d’amour qui ne
nous
cède : Je le hais s’il me force : et quand j’aime, je veux Que de ma
646
la passion. Mais la suite de la comédie, même si
nous
ignorions les ruses du mythe, nous ferait bien voir que la vraie volo
647
médie, même si nous ignorions les ruses du mythe,
nous
ferait bien voir que la vraie volonté du personnage est exactement op
648
clarations. « Il ne faut point servir d’objet qui
nous
possède » signifie en réalité : « Le seul objet qui vaille d’être ser
649
ul objet qui vaille d’être servi, c’est celui qui
nous
posséderait totalement et qui, par sa fuite même, nous enflammerait s
650
posséderait totalement et qui, par sa fuite même,
nous
enflammerait sans cesse davantage — car c’est là notre gré véritable.
651
enflammerait sans cesse davantage — car c’est là
notre
gré véritable. » Les deux derniers mots : « … et l’éteindre » étant p
652
us que j’ai appris que l’amour d’un honnête homme
doit
être toujours volontaire ; qu’on ne doit jamais aimer en un point qu’
653
te homme doit être toujours volontaire ; qu’on ne
doit
jamais aimer en un point qu’on ne puisse n’aimer pas ; que, si on vie
654
t secouer le joug ; et qu’enfin la personne aimée
nous
a beaucoup plus d’obligation de notre amour, alors qu’elle est toujou
655
rsonne aimée nous a beaucoup plus d’obligation de
notre
amour, alors qu’elle est toujours l’effet de notre choix et de son mé
656
otre amour, alors qu’elle est toujours l’effet de
notre
choix et de son mérite, que quand elle vient d’une inclination aveugl
657
t forcée par quelque ascendant de naissance à qui
nous
ne pouvons résister… On ne donne point ce qu’on ne saurait nous refus
658
s résister… On ne donne point ce qu’on ne saurait
nous
refuser. » Voici qui est bel et bon. Mais nous n’oublions pas que ce
659
it nous refuser. » Voici qui est bel et bon. Mais
nous
n’oublions pas que ce refus de la contrainte fatale, cette liberté qu
660
trouvent malgré eux dans l’état de mariés, à quoi
notre
héros veut échapper non pour l’amour de la liberté — qu’il allègue —
661
le pouvoir, Fît d’un amour par force un amour par
devoir
. C’est le plus pur langage courtois. Mais voyez la curieuse contradi
662
rd, tout en feignant de s’en étonner, comme il se
doit
, dans un Examen de sa pièce : « Cet amour de son repos n’empêche poi
663
il, une inégalité de mœurs qui est vicieuse. » Ne
nous
étonnons point de cet aveuglement de l’auteur sur son dessein réel, p
664
à chef. L’essence du mythe de l’amour malheureux,
nous
le savons, c’est une passion inavouable. L’originalité de Corneille d
665
érir. D’où la tension inégalée de ce « théâtre du
devoir
» — comme le récitent et le réciteront toujours ceux qui ne sont guèr
666
malheureux. Ainsi devient-elle la formule même de
notre
mythe. Mais Racine, dans ses premières pièces, raccourcit la portée d
667
u mythe, son aspect diurne, son reflet moral dans
notre
vie de créatures finies. Il y manque l’aspect nocturne, l’épanouissem
668
’atteindre cette limite, un Racine se condamne et
nous
condamne à goûter une mélancolie de nature essentiellement trouble. L
669
essentiellement trouble. L’Éros courtois voulait
nous
libérer de la vie matérielle par la mort ; et l’Agapè chrétienne veut
670
s » par Racine, cette « tristesse » à laquelle il
nous
invite à prendre on ne sait quel « plaisir », cela révèle en définiti
671
oup plus d’indignation que de pitié. J’ai cru lui
devoir
donner quelque faiblesse qui le rendrait un peu coupable envers son p
672
voilé de l’amour incestueux144. (La psychanalyse
nous
a accoutumés à des déguisements plus savants !) Mais ce n’est pas l’i
673
me coup, à celle de l’auteur. Ah ! Seigneur ! si
notre
heure est une fois marquée Le ciel de nos raisons ne sait point s’inf
674
! si notre heure est une fois marquée Le ciel de
nos
raisons ne sait point s’informer. (I,1.) Ce n’est pas ce ciel-là qu’
675
st à partir de ce xviie siècle « rationnel » que
nos
mœurs se séparent des croyances religieuses (comme l’avait proposé Co
676
es rationnelles de qualités, mérites et facultés,
devait
-elle aboutir nécessairement à la dissolution du mythe et de son dynam
677
tique : si la cause extérieure est un Dieu auquel
notre
âme pourrait s’identifier146. Mais Spinoza néglige « l’obstacle ». Da
678
ais Spinoza néglige « l’obstacle ». Dans le fait,
nos
passions humaines sont toujours liées à des passions contraires, notr
679
es sont toujours liées à des passions contraires,
notre
amour toujours lié à notre haine, et nos plaisirs à nos douleurs. Il
680
s passions contraires, notre amour toujours lié à
notre
haine, et nos plaisirs à nos douleurs. Il n’est pas de cause isolée q
681
aires, notre amour toujours lié à notre haine, et
nos
plaisirs à nos douleurs. Il n’est pas de cause isolée qui nous déterm
682
our toujours lié à notre haine, et nos plaisirs à
nos
douleurs. Il n’est pas de cause isolée qui nous détermine purement. E
683
à nos douleurs. Il n’est pas de cause isolée qui
nous
détermine purement. Entre la joie et sa cause extérieure il y a toujo
684
uelque obstacle : la société, le péché, la vertu,
notre
corps, notre moi distinct. Et de là vient l’ardeur de la passion. Et
685
le : la société, le péché, la vertu, notre corps,
notre
moi distinct. Et de là vient l’ardeur de la passion. Et de là vient q
686
e la passion n’existe pas sans la douleur qu’elle
nous
rend désirable notre perte. Écoutons la Religieuse portugaise, Marian
687
e pas sans la douleur qu’elle nous rend désirable
notre
perte. Écoutons la Religieuse portugaise, Mariana Alcoforado, comme e
688
ne autre femme qui dira : « Je vous aime comme on
doit
aimer : dans le désespoir » (Julie de Lespinasse). ⁂ Mais le xviiie
689
plus tard, le sang coulera sous la Terreur ; mais
nous
n’en sommes encore qu’à la « guerre en dentelles ».) Or ce siècle de
690
era toujours la réaction cynique contre le mythe.
Nous
en avons donné plus d’un exemple. Le xviiie est trop poli pour admet
691
que l’on vient de considérer, l’éclipse du mythe
devait
faire apparaître l’antithèse absolue de Tristan. Si Don Juan n’est pa
692
arce qu’il n’est pas assez pour avoir… Mais cela
nous
entraînerait à quelques développements qu’il vaut mieux réserver pour
693
évolte. C’est dans les Crimes de l’amour que Sade
nous
parle de son admiration pour la poésie de Pétrarque. Admiration tradi
694
iger l’objet, détruisons-le par des tortures d’où
nous
tirerons encore quelque plaisir, et cela fait partie de notre ascèse
695
ns encore quelque plaisir, et cela fait partie de
notre
ascèse ! Une fureur dialectique s’empare de Sade. Le meurtre seul peu
696
meurtre de ce qu’on aime, puisque c’est cela qui
nous
enchaîne. On ne tue bien que son amour, parce que lui seul est souver
697
ssiner chaque siècle des millions d’individus, et
nous
, faibles et malheureux particuliers, nous ne pourrons pas sacrifier u
698
dus, et nous, faibles et malheureux particuliers,
nous
ne pourrons pas sacrifier un seul être à nos vengeances ou à nos capr
699
rs, nous ne pourrons pas sacrifier un seul être à
nos
vengeances ou à nos caprices ? Est-il rien de si barbare, de si ridic
700
pas sacrifier un seul être à nos vengeances ou à
nos
caprices ? Est-il rien de si barbare, de si ridiculement étrange, et
701
de si barbare, de si ridiculement étrange, et ne
devons
-nous pas, sous le voile du plus profond mystère, nous venger amplemen
702
barbare, de si ridiculement étrange, et ne devons-
nous
pas, sous le voile du plus profond mystère, nous venger amplement de
703
-nous pas, sous le voile du plus profond mystère,
nous
venger amplement de cette ineptie ? » (C’est moi qui ai souligné.) Si
704
ifeste. L’Héloïse qui vécut au xiie 152 et dont
nous
possédons les lettres à Abélard, évoque Iseut, Juliette et Mlle de Le
705
ros et de l’Agapè. « La vertu est si nécessaire à
nos
cœurs que, quand on a une fois abandonné la véritable, on s’en fait e
706
nt plus fortement peut-être, parce qu’elle est de
notre
choix. » Toutefois, l’on n’a pas tort d’attribuer au « climat » de la
707
reprendre, à propos de la Nouvelle Héloïse, toute
notre
exégèse de Tristan, notre dialectique de l’obstacle. Il y a pourtant
708
Nouvelle Héloïse, toute notre exégèse de Tristan,
notre
dialectique de l’obstacle. Il y a pourtant cette différence capitale
709
rarque et l’Astrée jusqu’à la tragédie classique,
nous
avons vu le mythe se dégrader, s’humaniser, s’analyser en éléments de
710
n de Rousseau, qui naît comme en marge du siècle,
nous
allons parcourir le même chemin en sens inverse : par Werther, cette
711
ser les innombrables manifestations du mythe dans
nos
littératures, surtout modernes, mais seulement de poser des jalons et
712
t de prendre figure d’arguments, à cet endroit de
notre
voyage, du seul fait de leur trop parfaite convenance à nos définitio
713
, du seul fait de leur trop parfaite convenance à
nos
définitions du mythe…) Lettre de Diotima à Hölderlin : Hier soir, j
714
st si vrai !) Voilà le seul accomplissement. Mais
nous
avons des devoirs sacrés en ce bas monde. Il ne nous reste plus rien
715
oilà le seul accomplissement. Mais nous avons des
devoirs
sacrés en ce bas monde. Il ne nous reste plus rien que la confiance l
716
s avons des devoirs sacrés en ce bas monde. Il ne
nous
reste plus rien que la confiance la plus parfaite l’un dans l’autre e
717
toute-puissante divinité de l’Amour qui à jamais
nous
guidera, invisible, et renforcera sans cesse notre union.155 Journ
718
nous guidera, invisible, et renforcera sans cesse
notre
union.155 Journal intime de Novalis : Lorsque j’étais sur le tomb
719
r, c’est qu’on ne veut plus aimer. Celui qui aime
devra
ressentir éternellement le vide qui l’environne, et garder sa blessur
720
erve cette douleur qui m’est indiciblement chère…
Notre
engagement n’était pas pris pour ce monde… Maximes de Novalis : To
721
est conclue même pour la mort est un mariage qui
nous
donne une compagne pour la Nuit. C’est dans la mort que l’amour est l
722
tes qui rendent un son proprement manichéen : On
doit
séparer Dieu et la Nature. Dieu n’a rien à faire avec la Nature, il e
723
t le but de la Nature, l’élément avec lequel elle
doit
un jour s’harmoniser. Nous sommes des esprits émanés de Dieu, des ger
724
ément avec lequel elle doit un jour s’harmoniser.
Nous
sommes des esprits émanés de Dieu, des germes divins. Un jour nous de
725
sprits émanés de Dieu, des germes divins. Un jour
nous
deviendrons ce que notre Père est lui-même.156 Et dans les Hymnes à
726
es germes divins. Un jour nous deviendrons ce que
notre
Père est lui-même.156 Et dans les Hymnes à la Nuit, où l’Éros ténéb
727
troitement à toi, et que dure alors éternellement
notre
nuit nuptiale ! Et l’on devrait citer toutes les œuvres de Tieck, dé
728
lors éternellement notre nuit nuptiale ! Et l’on
devrait
citer toutes les œuvres de Tieck, définissant l’amour comme « une mal
729
ses amis : Elle aussi, l’ère du Christ, que Dieu
nous
voile, Passera, la Nouvelle Alliance sera rompue ; Alors nous concev
730
assera, la Nouvelle Alliance sera rompue ; Alors
nous
concevrons Dieu comme l’Esprit, Alors se célébrera l’Alliance éternel
731
nvocation : « Levez-vous vite, orages désirés qui
devez
emporter René dans les espaces d’une autre vie », c’est le chant pur
732
ridicule : « Voilà donc à quel degré de puérilité
notre
superbe raison peut descendre ! » Et c’est la « superbe raison » qui
733
ni se dissoudre, ni se posséder ni être possédé.
Nous
savions que Tristan n’aimait pas Iseut pour elle-même, mais seulement
734
stre et finie, et le désir d’une transgression de
nos
limites, mortelle mais divinisante. Rares sont toutefois les romantiq
735
cide) c’est tantôt le mariage et l’honneur, ou le
devoir
social, ou la vertu, ou le secret mélancolique de l’amant, ou quelque
736
illeurs une société des plus sceptiques, Stendhal
nous
offre un exemple parfait pour l’analyse de la profanation du mythe. V
737
eux de l’auteur. La théorie de la cristallisation
doit
l’expliquer. « Ce que j’appelle cristallisation, c’est l’opération de
738
émotion qu’elles excitent. » Voilà qui est vrai :
nous
aimons la douleur, et le bonheur nous ennuie un peu… Cela vous paraît
739
est vrai : nous aimons la douleur, et le bonheur
nous
ennuie un peu… Cela vous paraît tout naturel ? Et pourtant un Hindou,
740
rec ressuscité ne s’en étonnerait pas moins. D’où
nous
viennent donc ce goût et ce dégoût bizarres ? Ne sont-ils pas contre
741
r. « Ce phénomène, dit-il, vient de la nature qui
nous
commande d’avoir du plaisir et qui nous envoie le sang au cerveau. »
742
ature qui nous commande d’avoir du plaisir et qui
nous
envoie le sang au cerveau. » Voilà donc le jugement obscurci, et qui
743
s avant son enquête. Qu’est-ce que ce livre qu’il
nous
laisse ? Le témoignage d’une inquiétude qu’éprouve l’esprit lucide de
744
la Minne suprême inspire à Brangaine l’erreur qui
doit
sauver l’Amour. Au philtre de mort, elle substitue le breuvage d’init
745
que dans la forme de l’opéra. Si Mozart et Wagner
nous
ont donné les chefs-d’œuvre du drame musical, c’est en vertu de l’aff
746
ut Tess des d’Urberville et Jude l’Obscur ; et de
nos
jours les romans platonisants d’un Charles Morgan. ⁂ Mais les chefs-d
747
rles Morgan. ⁂ Mais les chefs-d’œuvre, désormais,
nous
en apprennent moins sur la descente du mythe dans les mœurs, que les
748
âtre à succès, enfin le film. Le vrai tragique de
notre
époque est diffus dans la médiocrité. Le vrai sérieux dès lors, impli
749
prit répugne encore à mesurer. L’envahissement de
nos
littératures, tant bourgeoises que « prolétariennes », par le roman,
750
r s’entend, traduit exactement l’envahissement de
notre
conscience par le contenu totalement profané du mythe. Celui-ci cesse
751
clé et ce but, la passion dont le besoin revient
nous
tourmenter n’est plus qu’une maladie de l’instinct, rarement mortelle
752
isien » détient une signification plus riche pour
notre
objet. La bourgeoisie du Second Empire eut le mérite de faire une der
753
eux-guerres. C’était l’époque du happy end : tout
devait
aboutir au long baiser final sur fond de roses ou de tentures luxueus
754
ant une heure ou deux le roman pourra rebondir et
notre
cœur haleter, et c’est ce que nous cherchons. Mais l’obstacle signifi
755
a rebondir et notre cœur haleter, et c’est ce que
nous
cherchons. Mais l’obstacle signifie, à la limite, la mort, le renonce
756
le renoncement aux biens terrestres. C’est ce que
nous
ne voulons plus, dès que cela nous devient clair. Il s’agit donc de s
757
. C’est ce que nous ne voulons plus, dès que cela
nous
devient clair. Il s’agit donc de supprimer l’obstacle à temps, ce qui
758
ier. L’ambiguïté du langage mystique de l’hérésie
devait
faire naître, dès le xiiie siècle, une rhétorique profane de la pass
759
sensuelle de Boccace, le romantisme a provoqué de
nos
jours une révolte qui se veut « primitive ». Ce n’est plus le sentime
760
well, un Miller et leurs imitateurs. Voici ce que
nous
disaient ces hommes : « Nous en avons assez de souffrir pour des idée
761
ateurs. Voici ce que nous disaient ces hommes : «
Nous
en avons assez de souffrir pour des idées, des idéaux, des petites hy
762
mes adultères, et vos femmes desséchées de vertu,
nous
ont gâté la joie de vivre. Nous nous vengerons de vos « divines ». La
763
séchées de vertu, nous ont gâté la joie de vivre.
Nous
nous vengerons de vos « divines ». La femme est d’abord une femelle.
764
es de vertu, nous ont gâté la joie de vivre. Nous
nous
vengerons de vos « divines ». La femme est d’abord une femelle. Nous
765
os « divines ». La femme est d’abord une femelle.
Nous
la ferons se traîner sur le ventre vers le mâle dominateur166. Au lie
766
dominateur166. Au lieu de chanter la courtoisie,
nous
chanterons les ruses du désir animal, l’emprise totale du sexe sur l’
767
exe sur l’esprit. Et la grande innocence bestiale
nous
guérira de votre goût du péché, cette maladie de l’instinct génésique
768
nésique. Ce que vous appelez morale, c’est ce qui
nous
rend méchants, tristes et honteux. Ce que vous appelez l’ordure, voil
769
. Ce que vous appelez l’ordure, voilà ce qui peut
nous
purifier. Vos tabous sont des sacrilèges contre la vraie divinité, qu
770
ntique, aux origines profondes d’un mouvement que
nous
n’avons plus à étudier ni à convaincre : il nous menace à bout portan
771
nous n’avons plus à étudier ni à convaincre : il
nous
menace à bout portant. Perdre sa personnalité morale et se retremper
772
le flux cosmique de l’instinct, c’est l’idéal de
nos
poètes du primitivisme solaire, mais la pratique de cette croyance n’
773
pratique de cette croyance n’est pas de nature à
nous
tromper un seul instant : il n’y a pas de « belles » brutes, il y a d
774
. Ce que l’on appelle hérédité, dans le jargon de
notre
siècle, ce que l’Église appelle péché originel, cela désigne la perte
775
ne la perte irrémédiable du contact immédiat avec
nos
origines. Et dès lors, redescendre au-dessous de nos morales, ce n’es
776
origines. Et dès lors, redescendre au-dessous de
nos
morales, ce n’est pas nous libérer de leurs interdictions, descendre
777
descendre au-dessous de nos morales, ce n’est pas
nous
libérer de leurs interdictions, descendre au-dessous de l’expression
778
ar l’esprit (même si l’esprit, comme je le crois,
nous
engageait dans les voies irréelles), ce n’est pas revenir au réel, ma
779
ation intoxiquée. L’« authentique » dont le désir
nous
obsède, nous ne pourrons pas le retrouver. Il n’est pas au terme d’un
780
uée. L’« authentique » dont le désir nous obsède,
nous
ne pourrons pas le retrouver. Il n’est pas au terme d’un mouvement d’
781
son revolver contre l’esprit sous prétexte qu’il
nous
a trompés.167 Agir, en vérité, c’est accepter les conditions qui nou
782
gir, en vérité, c’est accepter les conditions qui
nous
sont faites, dans le conflit de l’esprit et de la chair ; et c’est te
783
ropagation de l’espèce et à la guerre, la société
devait
la persécuter. Ce fut Rome qui porta le fer et le feu dans les provin
784
. Traquée, refoulée et désorganisée, l’hérésie ne
devait
pas tarder à se dénaturer de mille manières. Les confusions qu’elle f
785
oui restait une rhétorique. Elle pouvait exprimer
nos
instincts naturels, mais non sans les dévier, tout insensiblement, ve
786
des cultures, que la littérature a exercé jusqu’à
nos
jours sur l’élite et plus tard sur les masses. Toutefois, le classici
787
tre ordre d’ailleurs — le contenu du mythe inonda
notre
vie quotidienne. Nous ne savions plus ce que signifiait cette diffuse
788
le contenu du mythe inonda notre vie quotidienne.
Nous
ne savions plus ce que signifiait cette diffuse exaltation de l’amour
789
e signifiait cette diffuse exaltation de l’amour.
Nous
la prenions pour un printemps de l’instinct et pour une renaissance d
790
éraires, aboutisse à cette analyse marécageuse de
nos
doutes et de notre vide ? Que signifie cette libération qui nous lais
791
e à cette analyse marécageuse de nos doutes et de
notre
vide ? Que signifie cette libération qui nous laisse tellement démuni
792
de notre vide ? Que signifie cette libération qui
nous
laisse tellement démunis devant la propagande des butors ? Ne voit-on
793
Serait-ce la fin du romantisme ? Le spectacle de
nos
mœurs n’autorise pas cette conclusion. Car la crise actuelle du maria
794
on » et déjà s’exalte en « mystiques ». C’est que
nous
sommes devenus incapables de faire la part du feu, d’ordonner nos dés
795
us incapables de faire la part du feu, d’ordonner
nos
désirs, de distinguer leur nature et leur fin, d’imposer une mesure à
796
rre. Et j’insisterai sur cet exemple symbolique :
nous
ne faisons plus de « déclarations d’amour » dans le même temps que no
797
e « déclarations d’amour » dans le même temps que
nous
admettons la guerre sans « déclaration » préalable. Nous revenons au
798
mettons la guerre sans « déclaration » préalable.
Nous
revenons au stade du rapt, du viol, mais sans les rites qui accompagn
799
un domaine en apparence fort étranger à ceux que
nous
venons de parcourir : dans l’évolution de la guerre et de ses méthode
800
s le cas précis de Gottfried de Strasbourg. 139.
Nous
avons déjà relevé l’influence de cette littérature sur sainte Thérèse
801
Hippolyte parlant d’Aricie, acte Ier, scène 1 : «
Dois
-je épouser ses droits contre un père irrité ? » 145. La confession d
802
uième acte. 146. Nouvelle vérification de ce que
nous
disions à propos d’Eckhart : la mystique unitive ignore la passion di
803
le premier exemple historique de la passion dont
nous
parlons ici. Voici le Chant funèbre d’Héloïse composé (par elle-même
804
œuvre du peintre Otto Runge, les Quatre Saisons,
devait
représenter les quatre saisons de l’esprit : le matin, qui est l’écla
805
la durée. 164. Surtout les décors réalistes que
nos
metteurs en scène s’obstinent à conserver (la décoration de la tente
806
, telle est la voie du romantisme occidental ; et
nous
y sommes tous engagés pour autant que nous sommes tributaires — incon
807
l ; et nous y sommes tous engagés pour autant que
nous
sommes tributaires — inconsciemment bien entendu — d’un ensemble de m
808
réé les symboles. Or passion signifie souffrance.
Notre
notion de l’amour, enveloppant celle que nous avons de la femme, se t
809
e. Notre notion de l’amour, enveloppant celle que
nous
avons de la femme, se trouve donc liée à une notion de la souffrance
810
erait pas de trop pour en démêler les aspects. On
doit
souhaiter que ce livre soit écrit, mais sans se dissimuler l’extrême
811
s d’aimer et de guerroyer du xiie siècle jusqu’à
nos
jours. Mon propos étant simplement de marquer un parallélisme entre l
812
d’une femme. Et l’un des plus anciens romans que
nous
possédions, le Théagène et Chariclée d’Héliodore (iiie siècle) parle
813
s de commune mesure. Il n’en va plus de même dans
notre
histoire à partir des xiie et xiiie siècles. On voit alors le langa
814
e beau langage. Mais l’argot soldatesque et civil
nous
fournirait une profusion d’exemples d’une verdeur encore plus signifi
815
ive. Et plus tard, l’introduction des armes à feu
devait
donner lieu à d’innombrables plaisanteries à double sens. Ce parallél
816
t elle y puisait les normes de sa conduite. »171 (
Nous
savons en effet que la courtoisie non seulement ne devait rien à l’Ég
817
avons en effet que la courtoisie non seulement ne
devait
rien à l’Église, mais s’opposait à sa morale. Voilà qui peut nous inc
818
lise, mais s’opposait à sa morale. Voilà qui peut
nous
inciter à réviser bien des jugements sur l’unité spirituelle de la so
819
ront jamais de plus de quatre arpents ; sinon ils
devront
mourir ou se rendre. Et cette règle étrange, si l’on en croit Froissa
820
. Que l’un ou l’autre de ces penchants prédomine,
nous
avons le saint ou le pécheur ; mais en général, ils se tiennent en éq
821
rtif de la fonction mythique du Tristan telle que
nous
la définissions : exprimer la passion dans toute sa force, mais en la
822
ent : — « Les transports de l’amour romanesque ne
devaient
pas seulement être présentés sous forme de lecture, mais surtout donn
823
éroïsme par amour — voilà le motif romanesque qui
doit
apparaître partout et toujours. C’est la transformation immédiate du
824
e… qui troubla tellement la paix et l’harmonie de
nos
provinces qu’il fut depuis impossible d’y rétablir l’ordre et la tran
825
troupes disciplinées et uniformes. Évolution qui
devait
aboutir de nos jours à l’annihilation de toute passion guerrière, à m
826
ées et uniformes. Évolution qui devait aboutir de
nos
jours à l’annihilation de toute passion guerrière, à mesure que les h
827
dans le cas du xviie siècle : qu’on se reporte à
nos
chapitres sur l’Astrée et sur la tragédie classique. ⁂ « C’est ici la
828
ure ne sont proprement concevables. Racine aussi,
nous
l’avons vu, croyait qu’on pouvait faire des tragédies sans crime. Le
829
llions par an ; c’est 2 milliards pour vingt ans.
Nous
n’avons pas plus de cinq ans de guerre chaque vingt ans, et cette gue
830
uerre chaque vingt ans, et cette guerre en outre,
nous
met en arrière de 1 milliard au moins. Voilà donc 3 milliards qui nou
831
e 1 milliard au moins. Voilà donc 3 milliards qui
nous
en coûte pour guerroyer cinq ans. Quel en est le résultat ? Car le su
832
ruction directe ou indirecte d’un soldat allemand
nous
coûte 20 000 livres sans compter la perte sur notre population, qui n
833
ous coûte 20 000 livres sans compter la perte sur
notre
population, qui n’est réparée qu’au bout de vingt-cinq ans. Au lieu d
834
à qui s’adresse la passion assumée par la Nation…
Nous
savons toutefois que la passion d’amour, par exemple, est en son fond
835
lui qui écrit sur la stratégie et sur la tactique
devrait
s’astreindre à n’enseigner qu’une stratégie et une tactique nationale
836
rmer que toute la théorie prussienne de la guerre
devait
se fonder sur l’expérience des campagnes de la Révolution et de l’Emp
837
uera les provinces allemandes de l’Autriche. Mais
nous
la voyons maintenant (1903) encore nationale, et cela pour conquérir
838
lît la même fonction sociale (mais à la mesure de
notre
société). Ce n’était plus, en effet, un principe spirituel qui inspir
839
mettre au point un instrument qui, par la suite,
devait
se trouver en mesure d’opérer sur des étendues bien plus vastes, comm
840
es campagnes : elle a même porté leur nom jusqu’à
nos
jours. Mais depuis 1914, l’on assiste à son urbanisation. Pour une bo
841
tte perversion de la passion — d’ailleurs fatale,
nous
l’avons vu ailleurs — qu’est le « complexe de castration ». 11.La
842
eresque, lorsque ce champ cesse d’être clos comme
doit
l’être un terrain de jeu, et qu’il n’est plus une lice décorée de sym
843
sion. Celle-ci paraît se détacher de son support.
Nous
sommes entrés dans l’ère des libidos errantes, en quête d’un théâtre
844
la passion ; mais il dit aux peuples voisins : —
Nous
sommes trop nombreux dans nos frontières, j’exige donc des terres nou
845
euples voisins : — Nous sommes trop nombreux dans
nos
frontières, j’exige donc des terres nouvelles ! — et c’est la nouvell
846
me c’est l’étourdir de paroles flatteuses : ainsi
nos
hommes politiques quand ils courtisent une assemblée électorale. Hitl
847
e tous temps » ce fut ainsi. Mais la nouveauté de
notre
temps, c’est que l’action passionnelle sur les masses, telle que la d
848
trophe de la passion devenue totalitaire ? ⁂ Ceci
nous
mène au seuil d’une conclusion que j’étais loin de prévoir en commenç
849
eillement à cet aspect trop ignoré de la crise de
notre
époque, qui est la dissolution des formes instituées par la chevaleri
850
dans les pays totalitaires, comme il ne cesse de
nous
travailler dans nos sociétés libérales. C’est l’éventualité de la pai
851
taires, comme il ne cesse de nous travailler dans
nos
sociétés libérales. C’est l’éventualité de la paix que j’envisageai d
852
er situant le conflit du mythe et du mariage dans
nos
mœurs, le second décrivant une attitude que je donne bien moins pour
853
et la fécondité de ses vues critiques renouvelle
notre
conception du Moyen Âge en nous faisant pénétrer par mille chemins da
854
iques renouvelle notre conception du Moyen Âge en
nous
faisant pénétrer par mille chemins dans la vie quotidienne des bourge
855
en tant qu’absurdes et inhumaines (voir La Guerre
notre
mère d’Ernst Jünger et Les Réprouvés d’Ernst von Salomon). On va se b
856
asservissants. L’apparition de la passion d’Amour
devait
donc transformer radicalement le jugement porté sur l’adultère. Certe
857
que au contraire elle ordonnait la chasteté. Mais
nous
avons montré que le symbole courtois de l’amour pour une Dame (spirit
858
mment incompatible avec le mariage dans la chair,
devait
amener des confusions inextricables. Pour l’amateur non initié des po
859
u’elle ne joue plus un rôle direct dans la vie de
nos
sociétés, qu’elle a tant contribué à former. Ce qui explique, à mon s
860
c’est la confuse dissension, au sein de laquelle
nous
vivons, de deux morales, dont l’une est héritée de l’orthodoxie relig
861
ession, « essentiellement lyrique » aux origines,
nous
parvient totalement profanée, et par suite dénaturée. Voici les force
862
la passion est l’épreuve suprême, que tout homme
doit
un jour la connaître, et que la vie ne saurait être à plein vécue que
863
rs finalités s’excluent. De leur coexistence dans
nos
vies surgissent sans fin des problèmes insolubles, et ce conflit mena
864
lubles, et ce conflit menace en permanence toutes
nos
« sécurités » sociales. En d’autres temps, ce fut la fonction du myth
865
hie latente et de la composer symboliquement dans
nos
catégories morales. Rôle d’exutoire, rôle civilisateur. Mais le mythe
866
vendi, et tous ces livres, aggravant au contraire
notre
conscience du problème, contribuent à le rendre insoluble. Ils sont l
867
e. Ils sont les signes de la crise, mais aussi de
notre
impuissance à la réduire dans les cadres actuels. L’institution matri
868
s païens, s’est toujours entouré d’un rituel dont
nos
institutions gardèrent longtemps les éléments : rites de l’achat, du
869
, du rapt, de la quête et de l’exorcisme. Mais de
nos
jours, la dot perd de son importance, par suite de l’instabilité écon
870
ne occasion d’anodines galanteries picturales. De
nos
jours enfin, le « voyage de noces », pour autant qu’il subsiste et ga
871
que les modernes font dépendre leur « bonheur » (
nous
reviendrons tout à l’heure sur cette notion centrale). Cette déprécia
872
Le résultat de cette propagande est à la fois de
nous
obséder par l’idée d’un bonheur facile, et du même coup de nous rendr
873
ar l’idée d’un bonheur facile, et du même coup de
nous
rendre inaptes à le posséder. Car tout ce qu’on nous propose nous int
874
s rendre inaptes à le posséder. Car tout ce qu’on
nous
propose nous introduit dans le monde de la comparaison, où nul bonheu
875
tes à le posséder. Car tout ce qu’on nous propose
nous
introduit dans le monde de la comparaison, où nul bonheur ne saurait
876
les moralistes de tous les temps l’ont répété, et
notre
temps n’apporte rien qui doive nous faire changer d’avis. Tout bonheu
877
s l’ont répété, et notre temps n’apporte rien qui
doive
nous faire changer d’avis. Tout bonheur que l’on veut sentir, que l’o
878
t répété, et notre temps n’apporte rien qui doive
nous
faire changer d’avis. Tout bonheur que l’on veut sentir, que l’on veu
879
la passion : tel est le dilemme qu’introduit dans
nos
vies l’idée moderne du bonheur. Cela va de toute manière à la ruine d
880
aitait comme des égaux. C’est peut-être de là que
nous
vient, par le canal de la littérature, cette idée toute moderne et ro
881
e que la passion est une noblesse morale, qu’elle
nous
met au-dessus des lois et des coutumes. Celui qui aime de passion acc
882
eut plus le croire, à l’âge du film et du roman —
nous
sommes tous plus ou moins intoxiqués — et cette nuance est décisive.
883
ge de la Mère, sans nul doute, et la psychanalyse
nous
apprend quels empêchements tragiques cela peut signifier. Mais l’exem
884
i les tyrannise, c’est la « beauté standard ». De
nos
jours — et ce n’est qu’un début — un homme qui se prend de passion po
885
portive. Mais le panurgisme esthétique atteint de
nos
jours une puissance inconnue, développée par tous les moyens techniqu
886
e innombrable et écœurante littérature romanesque
nous
peint ce type du mari qui redoute la « platitude », le train-train de
887
u’Iseut fût l’Impossible, car tout amour possible
nous
ramène à ces liens, nous réduit aux limites dans l’espace et le temps
888
car tout amour possible nous ramène à ces liens,
nous
réduit aux limites dans l’espace et le temps sans lesquelles il n’est
889
l’amour infini ne peut être que le divin : Dieu,
notre
idée de Dieu, ou le Moi déifié. Mais pour celui que le mythe vient to
890
il appelait, c’était la mort transfigurante. Mais
nous
avons perdu la transcendance. La mort n’est plus qu’une lente consomp
891
ente consomption. À cette lumière, que jette sur
nos
psychologies la connaissance du mythe primitif, les succès du roman e
892
outes les complications qui servent d’intrigues à
nos
auteurs se ramènent au schéma monotone des ruses de la passion pour s
893
onge à la psychologie de la jalousie, qui envahit
nos
analyses : jalousie désirée, provoquée, sournoisement favorisée, et n
894
s, il serait excessif d’estimer que la plupart de
nos
contemporains sont en proie au délire de Tristan. Bien peu ont assez
895
es m’ont porté déjà aux limites du désobligeant :
nous
aimons trop nos illusions pour souffrir même qu’on nous les nomme…
896
jà aux limites du désobligeant : nous aimons trop
nos
illusions pour souffrir même qu’on nous les nomme… 5.De l’anarchie
897
imons trop nos illusions pour souffrir même qu’on
nous
les nomme… 5.De l’anarchie à l’eugénisme Cependant, l’anarchie
898
tatives de « restauration » du mariage auxquelles
nous
avons assisté depuis la Première Guerre mondiale, début de l’ère tota
899
le effort de redéfinition de l’institution et des
devoirs
moraux qu’elle implique193. Les humanistes reprennent les arguments d
900
ncore osé dire que l’amour tel qu’on l’imagine de
nos
jours est la négation pure et simple du mariage que l’on prétend fond
901
toujours existé, elle existera donc toujours, et
nous
ne sommes pas des Don Quichotte… » Je le crois bien ! C’est même à ca
902
lexe collectif. Deux exemples de grande envergure
nous
indiquent un type de réponse, une solution peut-être inévitable. La R
903
ue l’on serait tenté de juger sans précédent dans
notre
histoire européenne195. Quant au mariage, il fut en principe balayé d
904
art des conséquences bien plus complexes que chez
nous
, et d’apparences fort hétéroclites. Le cynisme morbide de l’après-gue
905
dait se fonder sur une base raciste et militaire,
devait
se donner pour première tâche de surmonter cette crise de mœurs. On c
906
électionnée incarnant l’idéal racial). Ces femmes
devaient
être blondes, de sang aryen, et mesurer au moins 1 m 73. Ainsi le « t
907
iste. Il n’est pas interdit d’imaginer qu’un jour
nos
démocraties y succombent, au nom d’une « science » ou d’une hygiène s
908
forcée de l’eugénisme peut réussir, là où toutes
nos
morales échouent, entraînant l’effective abolition du besoin « spirit
909
atoires. 6.Sens de la crise Pour mieux voir
notre
état, regardons l’Amérique — cette Europe délivrée de ses routines, m
910
urent l’appel suivant : « Mon amie et moi voulons
nous
marier. Nous essayons de trouver un juge de paix. N’est-ce pas une ur
911
suivant : « Mon amie et moi voulons nous marier.
Nous
essayons de trouver un juge de paix. N’est-ce pas une urgence »197 ?
912
naturelles pour un Américain : c’est par là qu’il
nous
intéresse. Il montre que les termes d’« amour » et de mariage sont pr
913
faut se marier sur l’heure ; qu’enfin « l’amour »
doit
normalement triompher de tous les obstacles, ainsi que le font voir j
914
te de la romance n’est qu’un exemple. (Mais je me
devais
de le souligner dans cet ouvrage.) La recherche du bonheur individuel
915
de la psyché moderne, dont le principe et le sens
nous
demeurent cachés, mais qui donnera peut-être aux historiens futurs de
916
is qui donnera peut-être aux historiens futurs de
notre
société occidentale, la clé d’une crise dont nous ne voyons encore qu
917
otre société occidentale, la clé d’une crise dont
nous
ne voyons encore que des symptômes superficiels, sporadiques et incoh
918
ait d’une fièvre, serait bien moins la guérir que
nous
priver de nos chances d’en comprendre un jour le secret. Et ce serait
919
e, serait bien moins la guérir que nous priver de
nos
chances d’en comprendre un jour le secret. Et ce serait en même temps
920
être évalués tant que le sens général de la crise
nous
échappe. Il s’agit bien plutôt de déchiffrer le message et de décoder
921
er patiemment les nouvelles ambiguës que la crise
nous
apporte sur nous-mêmes, sur nos vœux secrets, sur la tendance réelle,
922
uës que la crise nous apporte sur nous-mêmes, sur
nos
vœux secrets, sur la tendance réelle, peut-être créatrice, que tradui
923
elle, peut-être créatrice, que traduisent parfois
nos
révoltes, nos illusions naïves, nos péchés. Essayer de résoudre notre
924
e créatrice, que traduisent parfois nos révoltes,
nos
illusions naïves, nos péchés. Essayer de résoudre notre crise du mari
925
isent parfois nos révoltes, nos illusions naïves,
nos
péchés. Essayer de résoudre notre crise du mariage par des mesures mo
926
illusions naïves, nos péchés. Essayer de résoudre
notre
crise du mariage par des mesures morales, sociales ou scientifiques,
927
t par le passage où Jésus proclame que l’homme ne
doit
pas séparer ce que Dieu a uni ; soit par des entretiens de Jésus ress
928
t. Tandis que du point de vue des vrais cathares,
nous
l’avons vu, la véritable faute, c’est d’avoir « consommé » dans la ch
929
sich sehnt (la femme que l’on désire, la femme de
notre
nostalgie), est la meilleure définition d’Iseut. L’amour-passion veut
930
sexuel ». Fourier peut-être ? Ou Proudhon ? Cela
doit
se placer aux environs des années 1820-1830, pour une série de raison
931
e, sans doute, puisqu’il n’est plus question pour
nous
de recourir au bras séculier. (Sans compter que la Croisade, au total
932
être lui-même son dieu200. La passion brûle dans
notre
cœur sitôt que le serpent au sang-froid — le cynique pur — insinue sa
933
les raisons de la terre, et les conseils de tous
nos
arts de vivre, quand c’est la terre qui est méprisée, et la vie qui e
934
ctrine du salut). À vues humaines, la guérison de
nos
passions viendra de l’État, ce Sauveur anonyme qui assumera le poids
935
e Sauveur anonyme qui assumera le poids de toutes
nos
fautes, et de la faute initiale de vivre, pour les glorifier dans la
936
uprême obstacle du « stade religieux », puisqu’il
nous
lie au temps, précisément, quand la foi veut l’éternité ! Que répondr
937
, mais l’homme pieux qui estimait que la religion
devait
être un amour heureux, un mariage avec sa vertu. Car l’amour du péche
938
e passion chrétienne est la seule vérité, et tous
nos
« devoirs » humains (dont le bonheur) ne peuvent que nous en détourne
939
ion chrétienne est la seule vérité, et tous nos «
devoirs
» humains (dont le bonheur) ne peuvent que nous en détourner. Kierkeg
940
evoirs » humains (dont le bonheur) ne peuvent que
nous
en détourner. Kierkegaard condamna d’abord les pasteurs qui refusaien
941
t dire contre le mariage est vrai, par conséquent
doit
être dit, soit du point de vue des romantiques — si l’on croit à Iseu
942
res à la nature pour sélectionner les espèces qui
nous
paraissent adaptées. Et nous aurions la prétention de résoudre d’un c
943
nner les espèces qui nous paraissent adaptées. Et
nous
aurions la prétention de résoudre d’un coup, en une seule vie, le pro
944
a sensiblement de son « bonheur ». Alors que tout
nous
montre que cent-mille essais ne seraient pas encore assez pour consti
945
faut le reconnaître honnêtement : le problème qui
nous
est posé par la nécessité pratique du mariage apparaît d’autant plus
946
voir ne pouvant être qu’imparfait, et provisoire,
devrait
se doubler d’une garantie. Et la seule garantie concevable est dans l
947
de fidélité un problème, alors que le problème ne
devrait
se poser qu’à partir de cette promesse, considérée comme absolue. La
948
st salutaire. Cela se discute à l’infini. Et cela
nous
sera des plus utiles dès que les hommes se régleront sur la raison et
949
Cela n’a pas d’importance, cela ne change rien à
nos
rapports, c’est une passade, une erreur sans lendemain », et tantôt :
950
mantique, il n’y a pas de contradiction profonde,
nous
l’avons vu, la gauloiserie n’étant pas moins que la passion une évasi
951
plicité des expériences. Elle nie que l’être aimé
doive
réunir, pour être ou pour rester aimable, le plus grand nombre de qua
952
il se peut aussi que rien ne compense la perte :
nous
sommes ici dans un ordre de grandeur où nos mesures et nos équivalenc
953
te : nous sommes ici dans un ordre de grandeur où
nos
mesures et nos équivalences n’ont plus cours.) Mais savons-nous encor
954
s ici dans un ordre de grandeur où nos mesures et
nos
équivalences n’ont plus cours.) Mais savons-nous encore imaginer une
955
t nos équivalences n’ont plus cours.) Mais savons-
nous
encore imaginer une grandeur qui n’ait rien de romantique ? Et qui so
956
. (Pour ne rien dire des successives fidélités de
nos
« liaisons », et de tous ces Tristans qui ne sont au vrai que des Don
957
r pour l’autre. L’analyse des légendes courtoises
nous
a révélé que Tristan n’aime pas Iseut mais l’amour même, et au-delà d
958
iques, la « fidélité passionnée » n’a gardé parmi
nous
que l’illusion d’accéder à une vie plus ardente. Mais l’empire de cet
959
e de la religion primitive. Religion antérieure à
notre
« instinct » moderne, et qui détient l’intime secret de la passion, a
960
delà de ce que les psychologues peuvent y lire. «
Notre
engagement n’était pas pris pour ce monde », écrivait Novalis songean
961
lus d’Isolde, plus de Tristan, plus aucun nom qui
nous
sépare ! » Il faut que l’autre cesse d’être l’autre, donc ne soit plu
962
l se tourne avec moi vers le jour afin d’attester
notre
alliance. ⁂ Une vie qui m’est alliée — pour toute la vie, voilà le mi
963
ù l’on se trouve aujourd’hui ; mais il peut et il
doit
impliquer l’avenir d’actes conscients que l’on assume : aimer, rester
964
encore si l’on constate que le Dieu de l’Écriture
nous
ordonne d’aimer. Le premier commandant du Décalogue : « Tu aimeras le
965
’amour-passion, l’amour païen, qui a répandu dans
notre
monde occidental le poison de l’ascèse idéaliste — tout ce qu’un Niet
966
sme. C’est Éros, et non pas Agapè, qui a glorifié
notre
instinct de mort, et qui a voulu l’« idéaliser ». Mais Agapè se venge
967
mort parce qu’il veut exalter la vie au-dessus de
notre
condition finie et limitée de créatures. Ainsi le même mouvement qui
968
e créatures. Ainsi le même mouvement qui fait que
nous
adorons la vie nous précipite dans sa négation. C’est la profonde mis
969
e même mouvement qui fait que nous adorons la vie
nous
précipite dans sa négation. C’est la profonde misère, le désespoir d’
970
nce à l’Éternel. Car après tout c’est ici-bas que
notre
sort se joue. C’est sur la terre qu’il faut aimer. Au-delà, il n’y au
971
s dès lors que le Verbe s’est fait chair et qu’il
nous
a parlé en mots humains, nous avons appris cette nouvelle : ce n’est
972
fait chair et qu’il nous a parlé en mots humains,
nous
avons appris cette nouvelle : ce n’est pas l’homme qui doit se délivr
973
appris cette nouvelle : ce n’est pas l’homme qui
doit
se délivrer lui-même, c’est Dieu qui l’a aimé le premier, et qui s’es
974
s, dans l’obéissance à la Parole. ⁂ Et qu’aurions-
nous
alors à craindre du désir ? Il perd sa puissance absolue quand nous c
975
dre du désir ? Il perd sa puissance absolue quand
nous
cessons de le diviniser. C’est ce qu’atteste l’expérience de la fidél
976
ivinisation de la créature. Mais cette égalité ne
doit
pas être entendue au sens moderne et revendicateur. Elle procède du m
977
rde de confondre avec des vérités psychologiques.
Notre
analyse du mythe nous a fait voir pourquoi l’on aime croire à la fata
978
es vérités psychologiques. Notre analyse du mythe
nous
a fait voir pourquoi l’on aime croire à la fatalité, qui est l’alibi
979
fier les écarts de Don Juan. Toute la littérature
nous
engage à y voir la preuve d’une très puissante nature sensuelle. Don
980
». Mais c’est encore le mythe, naturellement, qui
nous
le fait croire, avec son obsession de l’amour contrarié. Il serait pl
981
On admettra que c’est une révolution sérieuse. Et
nous
pourrons maintenant dépasser la formule toute négative et privative d
982
c’est-à-dire des deux religions qui se disputent
notre
Occident. La connaissance de ce conflit, de ses origines historiques
983
psychologiques, de son enjeu spirituel, me paraît
devoir
entraîner la révision d’un certain nombre de jugements courants, dans
984
ns doute de dégager le principe de correction que
nos
recherches sur la passion peuvent établir. ⁂ Les Orientaux caractéris
985
oient l’héritage du christianisme et le secret de
notre
dynamisme. Et il est vrai que ces trois termes : christianisme, passi
986
reils jugements. Cependant, si les conclusions de
notre
examen du mythe courtois sont justes, il faudra corriger sensiblement
987
il est né de la complicité de cette religion avec
nos
plus vieilles croyances, et du conflit de l’hérésie qui en résulta av
988
al » procède de deux sources distinctes. Si c’est
notre
délire guerrier que l’on entend désigner par ce terme, nous avons vu
989
e guerrier que l’on entend désigner par ce terme,
nous
avons vu qu’il se rattache de la manière la plus précise, historiquem
990
l’autre aspect du dynamisme occidental, j’entends
notre
génie technique, ne saurait être un seul instant ramené à la passion.
991
nt elle est née ne sauraient proposer comme but à
notre
vie la maîtrise de la Nature, puisque c’est là le but et la fonction
992
es effets. Mais la réponse n’importe pas ici : il
nous
suffit de marquer que les éléments occidentaux-chrétiens (c’est-à-dir
993
me moderne, c’est la collusion de la guerre et de
notre
génie technique. À partir de la Révolution, la guerre devenant « nati
994
? S’il est vrai qu’elle ne s’est développée dans
notre
histoire et nos cultures qu’à partir des xiie et xiiie siècles, et
995
u’elle ne s’est développée dans notre histoire et
nos
cultures qu’à partir des xiie et xiiie siècles, et par l’impulsion
996
et de l’Iran, sources certaines de l’hérésie, que
nous
sont venues nos « mortelles » croyances. Mais dira-t-on, ces mêmes cr
997
rces certaines de l’hérésie, que nous sont venues
nos
« mortelles » croyances. Mais dira-t-on, ces mêmes croyances n’ont pa
998
es n’y ont pas trouvé les mêmes obstacles. Ainsi
notre
chance dramatique est d’avoir résisté à la passion par des moyens pré
999
Telle fut la tentation permanente d’où jaillirent
nos
plus belles créations. Mais ce qui produit la vie produit aussi la mo
1000
e qu’il a de particulier. C’est tout le secret de
notre
fidélité. La sagesse orientale cherche la connaissance dans l’aboliti
1001
naissance dans l’abolition progressive du divers.
Nous
, nous cherchons la densité de l’être dans la personne distincte, sans
1002
nce dans l’abolition progressive du divers. Nous,
nous
cherchons la densité de l’être dans la personne distincte, sans cesse
1003
ns cesse approfondie comme telle. « D’autant plus
nous
connaissons les choses particulières, d’autant plus nous connaissons
1004
nnaissons les choses particulières, d’autant plus
nous
connaissons Dieu », dit Spinoza. Cette attitude, qui définit mon Occi
1005
t donne des chances nouvelles à la passion. C’est
notre
vie et notre mort. Et c’est pourquoi la crise moderne du mariage est
1006
hances nouvelles à la passion. C’est notre vie et
notre
mort. Et c’est pourquoi la crise moderne du mariage est le signe le m
1007
es individuelles. Le signe de la crise du mariage
nous
parle et nous avertit mieux : aucun n’est plus sensible et quotidien,
1008
es. Le signe de la crise du mariage nous parle et
nous
avertit mieux : aucun n’est plus sensible et quotidien, plus intimeme
1009
x domaines où il peut entraîner la destruction de
notre
civilisation. Tout cela est, tout cela nous menace, et d’autant plus
1010
n de notre civilisation. Tout cela est, tout cela
nous
menace, et d’autant plus qu’on voudrait le nier. Cependant, à plusieu
1011
plusieurs reprises, la connaissance de ces périls
nous
a fait entrevoir des possibilités de les surmonter. Par exemple, il s
1012
endemains qui obsède aujourd’hui tant de fronts ?
Notre
vie ne se joue pas dans l’au-delà temporel, mais dans les décisions t
1013
dans les décisions toujours actuelles qui fondent
notre
fidélité. Quoi qu’il arrive, heur ou malheur, le sort du monde nous i
1014
i qu’il arrive, heur ou malheur, le sort du monde
nous
importe bien moins que la connaissance de nos devoirs présents. Car «
1015
de nous importe bien moins que la connaissance de
nos
devoirs présents. Car « la figure de ce monde passe », mais notre voc
1016
ous importe bien moins que la connaissance de nos
devoirs
présents. Car « la figure de ce monde passe », mais notre vocation es
1017
ésents. Car « la figure de ce monde passe », mais
notre
vocation est toujours hic et nunc, dans l’acte de l’Éternel où notre
1018
toujours hic et nunc, dans l’acte de l’Éternel où
notre
espoir se fonde. ⁂ Deux thèmes de réflexions, amorcés çà et là dans c
1019
si simpliste que le dilemme passion-fidélité peut
nous
le faire croire. De fait, on ne connaît jamais que les problèmes dont
1020
solution, le dépassement. Or le moyen de dépasser
notre
dilemme ne saurait être la pure et simple négation de l’un de ses ter
1021
pe, ce serait vouloir supprimer l’un des pôles de
notre
tension créatrice. De fait cela n’est pas possible. Le philistin qui
1022
ion vécue jusqu’à l’impasse mortelle, que pouvons-
nous
désormais entrevoir ? Les deux thèmes que je vais esquisser indiquent
1023
un drame personnel dont les données biographiques
nous
sont suffisamment connues. On sait que l’événement qui devint pour Ki
1024
les avec Régine. La cause intime de cette rupture
nous
demeure en partie mystérieuse : c’est « le secret » essentiellement i
1025
Dieu apparaît alors comme « mon ennemi mortel ».
Nous
nous heurtons ici à l’extrême limite, à l’origine pure de la passion
1026
apparaît alors comme « mon ennemi mortel ». Nous
nous
heurtons ici à l’extrême limite, à l’origine pure de la passion — mai
1027
l’origine pure de la passion — mais du même coup
nous
sommes jetés au cœur même de la foi chrétienne ! Car voici : cet homm
1028
cet homme mort au monde, tué par l’amour infini,
devra
marcher maintenant et vivre dans le monde comme s’il n’avait pas d’au
1029
enne mettre ses délais entre la question qu’elles
nous
posent et la réponse de notre vie.) ⁂ Le second thème que j’esquisser
1030
la question qu’elles nous posent et la réponse de
notre
vie.) ⁂ Le second thème que j’esquisserai n’est peut-être pas d’une n
1031
nature essentiellement hétérogène. Peut-être même
doit
-il être conçu comme un aspect particulier du mouvement de retour de l
1032
gaard. Au sommet de l’ascension spirituelle qu’il
nous
raconte dans le langage de la plus ardente passion, saint Jean de la
1033
bonheur sensible, cessent de souffrir, acceptent
notre
jour. Et alors le mariage est possible. Nous sommes deux dans le cont
1034
ent notre jour. Et alors le mariage est possible.
Nous
sommes deux dans le contentement. Une dernière fois pourtant nous rep
1035
dans le contentement. Une dernière fois pourtant
nous
reprendrons un parti de sobriété. Les mariés ne sont pas des saints,
1036
t un beau jour pour adopter une vérité meilleure.
Nous
sommes sans fin ni cesse dans le combat de la nature et de la grâce.
1037
élité gardée au Nom de ce qui ne change pas comme
nous
, révèle peu à peu son mystère : c’est qu’au-delà de la tragédie, il y
1038
collection « Présences ») : « Un chrétien peut et
doit
accepter, Éros en tant qu’Éros, et justement pas en tant qu’Éros subl
1039
ais les catastrophes qu’elle annonce représentent
notre
châtiment et non pas notre délivrance. Ce n’est pas la mort, la désin
1040
e annonce représentent notre châtiment et non pas
notre
délivrance. Ce n’est pas la mort, la désincarnation, qui est le salut
1041
guérison à obtenir, c’est que l’infidèle croie —
devrait
conduire à désirer pour l’homme non chrétien qu’il traverse tout le «
1042
e le renoncement à la loi ainsi comprise qui peut
nous
conduire à la foi. 210. Crainte et Tremblement, traduit d’après la
1043
ment sacré et symbolique des personnages dont ils
nous
content les amours. Et les traces qui subsistent, dans leur texte, d’
1044
la fantaisie individuelle du poète. Les faits que
nous
décrit l’auteur de la Folie Tristan étaient sans doute à l’origine to
1045
avagances. Chaque parole et chaque geste du héros
devaient
correspondre à des symboles déterminés. La maison de verre par exempl
1046
ètes du xiie siècle ; elle seule agit encore sur
nous
, en tant que mythe de l’amour-passion. 2.Chevalerie sacrée La
1047
se au « roman » proprement dit. L’épisode d’amour
nous
intéresse d’autant plus qu’il décrit une situation fort analogue — da
1048
léricale et féodale). Cette analogie avec Tristan
nous
donne un repère pour apprécier la transformation que les Béroul et le
1049
Thomas firent subir au vieux mythe celtique. Elle
nous
permet de mesurer l’influence décisive de l’amour courtois sur les au
1050
et son suzerain ; — d’un conflit entre l’hommage
dû
au suzerain et l’hommage donné à la femme ; — d’un mariage de consola
1051
fin. — Voici deux autres textes « courtois ». Ils
nous
permettent également de concevoir que Béroul et Thomas n’ont gardé du
1052
sse de Champagne : Par la teneur des présentes,
nous
disons et soutenons que l’amour ne peut étendre ses droits entre mari
1053
de nécessité, tandis que les époux sont tenus par
devoir
à toutes les volontés l’un de l’autre. Que ce jugement que nous prono
1054
les volontés l’un de l’autre. Que ce jugement que
nous
prononçons avec une extrême maturité, après avoir ouï plusieurs noble
1055
l y aurait certitude que l’amant eût manqué à ses
devoirs
et à la foi promise. Or on n’a pas oublié que Tristan épouse la seco
1056
incertain, indéfini que tous les autres, et dont
nous
voulons être sûrs. L’attitude de l’Européen qui se demande toute sa v
1057
psychiatre chinois comme un symptôme de folie. «
Nous
sommes fous sans nous en rendre compte ; toute notre vie est fondée s
1058
mme un symptôme de folie. « Nous sommes fous sans
nous
en rendre compte ; toute notre vie est fondée sur la passion, et nous
1059
us sommes fous sans nous en rendre compte ; toute
notre
vie est fondée sur la passion, et nous voulons la paix, la tranquilli
1060
e ; toute notre vie est fondée sur la passion, et
nous
voulons la paix, la tranquillité ! Je suis moi-même le plus fou de to
1061
ent appeler une mise au point très opportune dans
notre
débat. a) « On ne peut hésiter — écrit notre auteur — sur l’objet et
1062
dans notre débat. a) « On ne peut hésiter — écrit
notre
auteur — sur l’objet et la nature de l’amour mystique tel que le conç
1063
éjugés scientifiques dépassés. Il se pourrait que
nous
tenions là un bel exemple d’anachronisme. A-t-on seulement remarqué q
1064
rès couramment d’un langage plus « grossier » que
le nôtre
— signe d’une sensibilité sexuelle peu énervée — tandis que notre lan
1065
une sensibilité sexuelle peu énervée — tandis que
notre
langage décoloré et faussement puritain correspond à une érotisation
1066
il commente : « À moins de réformer sérieusement
notre
conception des amours d’Iseut et de Tristan, nous ne pouvons avoir de
1067
otre conception des amours d’Iseut et de Tristan,
nous
ne pouvons avoir de doutes sur la nature des sentiments dont Thibaut
1068
age est, entre autres, de « réformer sérieusement
notre
conception des amours d’Iseut et de Tristan »… 6.Freud et les surr
1069
die, le Convito, et même le De vulgari eloquentia
devraient
être interprétés symboliquement. Dans un opuscule postérieur, Aroux p
1070
u trône un lit de cristal, etc. Mais voici ce qui
nous
intéresse : Ce n’est pas sans raison Que la fossure est reléguée Dan
1071
« À la fin du xiie siècle et au début du xiiie ,
nous
voyons se multiplier les témoignages qui attestent à la fois le nombr
1072
, mais celle où commence le règne de la Dame, qui
devait
en vérité former l’âme de l’Occident et fixer définitivement les trai
1073
vement les traits de sa culture ». Leur mouvement
devait
« emprunter ses expressions, dans une curieuse mesure, à la littératu
1074
importants de rhétorique et de poésie amoureuse :
nous
sommes à l’époque où la Provence vaincue achevait la conquête esthéti
1075
tous les êtres n’est autre que celui de la mort ;
nous
les recevons et les nourrissons dans nous tous deux à la fois. » P. K
1076
mort ; nous les recevons et les nourrissons dans
nous
tous deux à la fois. » P. Klossowski oppose cette opinion de Sade à c
1077
re l’instinct de mort et Éros. L’analyse du mythe
nous
a montré que cette antithèse est purement apparente. Mais si la vie e
1078
. » (Cette dernière phrase suffit à m’assurer que
nous
sommes sur la même longueur d’onde.) Puis, le livre paru, 25 mars 193
1079
ousquet et qui a paru dans la presse régionale :
Nous
signalons un événement littéraire qui intéresse au plus haut point la
1080
resse au plus haut point la vie intellectuelle de
notre
région. Denis de Rougemont vient de publier une thèse d’une haute ten
1081
te, russe, allemand, danois, anglais, etc. qui ne
doive
son inspiration à la tradition littéraire et religieuse issue aux xii
1082
nnus et souvent appuyées sur la haute autorité de
notre
éminent compatriote Déodat Roché, d’Arques, naguère encore magistrat
1083
ur l’atmosphère poétique, morale et religieuse de
notre
pays à travers les siècles. Mais la guerre va suspendre tôt après no
1084
s siècles. Mais la guerre va suspendre tôt après
notre
correspondance et, j’imagine, le projet de numéro spécial composé à p
1085
e, une épopée de la chute. On dirait que le temps
devait
partager leur délire et faire entrer dans l’histoire le drame de leur
1086
État, la religion d’oc, plutôt que de se mutiler,
devait
s’idéaliser dans le domaine de la pensée pure et fabulatrice… Cette r
1087
de la pensée pure et fabulatrice… Cette religion
devait
transformer la poésie qui avait été longtemps sa sœur siamoise. À qu
1088
l’écroulement de la société celtique ne peut être
dû
qu’à des circonstances plus ou moins magiques (p. 253) Quoi de comm
1089
à l’imagination transfigurante qui, par-delà tous
nos
calculs, vaincra… Je me suis un peu attardé sur cet exemple parce qu’
1090
ncées par les maîtres d’hier soient professées de
nos
jours par leurs anciens élèves dans un grand nombre d’universités. Sa
1091
ien de commun, même pas les lieux géographiques.
Nous
ne mentionnerons que pour mémoire une thèse qui a eu un certain écho
1092
une étoile » de V. Hugo). Mais Nelli a coutume de
nous
fournir les faits qui nous permettent de discuter ses propres dires :
1093
ais Nelli a coutume de nous fournir les faits qui
nous
permettent de discuter ses propres dires : en l’occurrence, les indic
1094
s et les plus représentatifs. Ce sont eux qui ont
dû
donner le ton, à commencer par Guillaume IX, qui était « le plus gran
1095
de la Réforme, c’est une erreur par mot que l’on
devrait
relever216. Mais ce serait peine perdue, car notre auteur annonce que
1096
rait relever216. Mais ce serait peine perdue, car
notre
auteur annonce que le dogme aura le dernier mot. Il déclare en effet
1097
e les spécialistes orthodoxes ont décidé que l’on
doit
penser de la Vierge. Mais que penser de quelqu’un qui ne conçoit pas
1098
même les « mots crus » ne manquent pas, qui pour
nos
naïfs érudits « prouvaient la réalité » de la Dame !) Ainsi Suso « ti
1099
, d’autant plus il se féminise. Bref, tout ce que
nos
experts en courtoisie d’une part, et en mystique de l’autre, décrèten
1100
ire une mystique sapientiale, je répondrai qu’ils
doivent
me convaincre d’abord que Suso n’a jamais existé, n’a pas écrit, n’a
1101
pas écrit, n’a pas eu lieu. Mais d’autre part, on
nous
assure que Suso demeura toute sa vie un dominicain très fidèle aux di
1102
eler son influence sur la secte des Amis de Dieu,
nous
savons qu’il s’est formé dans l’atmosphère religieuse de Cologne, « b
1103
e la déclare Béguin, n’en est pas moins ruinée de
nos
jours : d’un ensemble de travaux menés en toute indépendance les uns
1104
tulé Les Troubadours (1961 et 1971) l’argument de
notre
« tenson », inauguré par d’assez vifs assauts dans la revue Esprit dè
1105
ontraste absolu que l’on peut établir ici entre «
nos
poètes d’Oc… qui ne cessent de parler de lum et de clartaz » et le «
1106
L’idée de mort-par-amour est l’un des traits qui
nous
paraissent constituer la commune substance de l’amour arabe et de l’a
1107
nir que les troubadours « mouraient d’amour comme
nous
mourons de soif » (p. 73). Il n’en reste pas moins que l’« amour-trép
1108
dont Béroul et Thomas, puis Gottfried et Richard
nous
répètent qu’ils sont nés « pour désirer et pour mourir, pour mourir d
1109
venture de l’âme, un « voyage », diraient-ils, où
nous
entraîne le vin herbé du Roman primitif, par l’expérience poétique et
1110
» et croisé sans esprit de retour, dont Pétrarque
nous
dit « qu’il mit la voile et prit les rames à la recherche de sa mort
1111
ropose que cette émotion soit seule arbitre entre
nos
thèses. Jaufré Rudel de Blaye fut gentilhomme de grande noblesse et
1112
vicomte de Saint-Antonin (xiie siècle), « où il
nous
est conté que la dame de ce troubadour, apprenant qu’il avait été tué
1113
rs textes sur le catharisme. Il écrit en 1963 : «
Nous
ne prétendrons pas, ce qui serait absurde, que ce roman trahit une in
1114
ter comme le fait Belperron « qu’aucune source ne
nous
décrit la rencontre d’un Parfait et d’un troubadour dans le même chât
1115
et que la possibilité même d’une telle rencontre
doit
être exclue, s’agissant de « deux éléments étrangers et même antagoni
1116
des yeux de la dame : Toute la joie du monde est
nôtre
Dame, si l’un l’autre nous aimons. et ses effets bénéfiques s’exerce
1117
la joie du monde est nôtre Dame, si l’un l’autre
nous
aimons. et ses effets bénéfiques s’exercent sur le corps autant que
1118
oux déclare en effet que selon les béguins nul ne
doit
être déclaré vertueux (ou vertueuse) nisi se possent ponere nudus cum
1119
Poitiers237 les treize systèmes d’explication de
notre
énigme, proposés (à la date de l’étude) par une quarantaine de savant
1120
Ce processus unique, d’où naît l’amour courtois,
nous
pouvons le suivre à la trace sous deux de ses aspects les mieux connu
1121
retient avec Pierre Damien une correspondance qui
nous
montre « ces âmes raffinées déjà tout près du langage de saint Bernar
1122
le sud-est provençal, avec lesquels on confond de
nos
jours les troubadours — mais Dante, qui s’y connaît, les nomme « limo
1123
joignent dans sa retraite. Des communes — dirions-
nous
— se forment autour d’eux. On leur octroie des terres à cultiver. Mai
1124
e milliers de jeunes disciples que les chroniques
nous
décrivent tels des hippies américains « marchant pieds nus, couverts
1125
is à elles, moi et mes disciples, pour le bien de
nos
âmes. » Nouveauté inouïe et qui surpasse encore celle de donner à l’a
1126
lle, sans s’en émouvoir de la moindre façon ?… Il
nous
paraît très probable que Guillaume fut vivement impressionné par le m
1127
euve de l’amour vrai, tout cela « pour le bien de
nos
âmes », disait Robert ; « pour rafraîchir ma chair et renouveler mon
1128
renouveler mon corps », traduit Guillaume ; pour
notre
salut par l’amour, diront les troubadours classiques… Je me rends, j
1129
traces de Bezzola, aborde le même problème, et il
nous
livre le principe de sa méthode dans une formule où je retrouve la le
1130
hode dans une formule où je retrouve la lettre de
notre
maître commun, Rudolf Kassner : « Bewusstwerdung ist identisch mit Fo
1131
as. Origine de la poésie occidentale ! Et Spoerri
nous
fait suivre dans le détail de la métrique des chansons I à IX la dial
1132
ssi Com la branca de l’albespi… Ainsi va-t-il de
notre
amour Comme de la branche d’aubépine Tant que dure la nuit sur l’arbr
1133
trice de toute mystique de la littérature jusqu’à
nous
, lutte qui opposa le moine au comte-duc, c’est-à-dire Raspoutine à Do
1134
ar Cercamon, les Ventadour, Marcabru et Rudel. Or
nous
savons que Marcabru, protégé par le fils de Guillaume IX, fut l’élève
1135
bbaye qu’on ferait sortir le Poème sur Boèce dont
nous
avons montré la nette inspiration cathare »243. Je cite ces « faits »
1136
ce de la cité. L’histoire de la naissance d’Amour
nous
en laisse trois exemples mémorables. Dans le duel Robert d’Arbrissel-
1137
es. Dans le duel Robert d’Arbrissel-Guillaume IX,
nous
voyons bien que les jugements portés sur l’Amour, sur le sens de la r
1138
it de leur immense popularité à l’époque, mais il
nous
reste les lettres de ce Tristan châtié et repenti à cette Iseut deven
1139
t encore aux relations de cause à effet, chères à
nos
érudits qui se veulent « scientifiques », mais abandonnées depuis lon
1140
défini. Si les Apôtres s’étaient présentés devant
nos
historiens nécessiteux de preuves au soir même de la Pentecôte, ces t
1141
tragédies grecques — je veux dire des trente qui
nous
restent — n’a l’amour pour sujet. Pas une. Est-ce que vraiment cela n
1142
écrit exactement le contraire de ce qu’un Parfait
devait
professer, tel gnostique a déclaré son aversion pour l’amour et ses s
1143
quoi revenir si longuement sur tout cela ? Parlez-
nous
plutôt du mariage, de la morale du couple ou de l’érotisme ! Pourquoi
1144
t c’est par là que le drame est arrivé, celui que
nous
attendions sans le savoir — mais dès l’instant qu’il a parlé, nous av
1145
ans le savoir — mais dès l’instant qu’il a parlé,
nous
avons su que c’était lui que nous attendions. Et après, il y a la mor
1146
qu’il a parlé, nous avons su que c’était lui que
nous
attendions. Et après, il y a la morale. (J’y reviendrai.) Il y a d’ab
1147
objet de ma dispute avec les érudits. Car ce qui
nous
sépare en fin de compte, dans ces débats que l’on pourrait croire pur
1148
urrait croire purement techniques, ce ne sont pas
nos
savoirs différents, nos inégalités d’information, ce sont nos concept
1149
echniques, ce ne sont pas nos savoirs différents,
nos
inégalités d’information, ce sont nos conceptions de l’amour, et plus
1150
différents, nos inégalités d’information, ce sont
nos
conceptions de l’amour, et plus que cela, nos expériences différentes
1151
ont nos conceptions de l’amour, et plus que cela,
nos
expériences différentes de la passion et de la poésie. Ce que l’on n’
1152
e, chez des hommes qui ne disaient pas tout comme
nous
le dirions, et qui se taisaient autrement ? Il faut entrer en consona
1153
ilité du poète », et il écrit : En premier lieu,
nous
n’acceptons pas à priori l’idée que l’amour-passion soit une affectio
1154
’idéologie chrétienne. D’une façon plus générale,
nous
estimons qu’un sentiment est toujours l’expression d’un certain mode
1155
eux dire que j’ai peut-être mieux compris comment
nos
deux termes s’impliquent, se posent en s’opposant, ne vivent pas l’un
1156
e ». Or ici, sans la moindre transition, le Roman
nous
dit : « Le roi Marc prend bientôt Tristan en haine, car il le craint
1157
urtoisie pas davantage, ni la passion, ajouterons-
nous
. Mais si l’on a de bonnes raisons de croire que la prohibition de l’i
1158
une culture se différencie de la nature248, alors
nous
voyons que Tristan, poème du Triangle essentiel (Père, Mère et Fils)
1159
atibles, en préalable aux choix que tout homme se
doit
de faire et s’imagine, à tort ou à raison, faire librement. J’ai tent
1160
mortel, mais le chlorure de sodium est le sel de
nos
repas — de nos agapes. Ni répressif ni marcusien, je n’entends rien i
1161
e chlorure de sodium est le sel de nos repas — de
nos
agapes. Ni répressif ni marcusien, je n’entends rien interdire ni rie
1162
sée en friche quand elle n’est pas vilipendée par
notre
société scientifico-technique. À tel point que toute une jeunesse se
1163
reur du romantisme embourgeoisé qui domine encore
nos
coutumes : vouloir fonder le mariage sur l’amour passionnel, c’est-à-
1164
pe, ce serait vouloir supprimer l’un des pôles de
notre
tension créatrice. De fait cela n’est pas possible. » En vérité, je n
1165
es vitaux, conflits, antinomies, qui sous-tendent
notre
réalité ; et d’en mieux définir les termes. Il s’agit maintenant d’as
1166
vouloir follement exclure l’un de leurs termes :
nous
n’avons pas ce pouvoir et le diable lui-même ne peut éliminer ni le b
1167
Croire qu’il résulte de mon livre que la passion
doive
ou puisse être oblitérée afin que règne Agapè triomphante, j’oserai d
1168
d’une manière très générale ; quant au sujet qui
nous
occupe : c’est détruire l’existence de l’Amour essentiel. 211. Urg
1169
, votre méchant seigneur Ennuyeux plus que l’aube
Nous
, en bas, nous parlons d’amour Grande peur Nous fait l’aube, l’aube, o
1170
t seigneur Ennuyeux plus que l’aube Nous, en bas,
nous
parlons d’amour Grande peur Nous fait l’aube, l’aube, oui l’aube. (Ra
1171
be Nous, en bas, nous parlons d’amour Grande peur
Nous
fait l’aube, l’aube, oui l’aube. (Raimbaut de Vacqueyras, Alba.) 2
1172
éante, de contacts entre le Nord et le Sud qui ne
doivent
rien à Wagner ? 228. Je donne de ces quatre vers la traduction de Da
1173
uillaume et leurs platitudes rimées. Guillaume ne
devait
avoir que dédain pour ces quémandeurs sans talent. 239. R. Bezzola,
1174
est d’essence musicale… Le seul texte musical que
nous
possédions de Guillaume de Poitiers use des mêmes formules mélodiques
1175
de Poitiers use des mêmes formules mélodiques que
nous
trouvons dans un versus du tropaire de Saint-Martial : 242. Cf.