1 1942, La Part du diable (1982). Introduction. Que la connaissance du vrai danger nous guérit des fausses peurs
1 en général, et à l’Amérique en particulier, c’est de croire au diable. On sortit de table. C’était au club. Tandis que nou
2 particulier, c’est de croire au diable. On sortit de table. C’était au club. Tandis que nous attendions l’ascenseur, je di
3 ue ? répondit-il avec sa grande douceur. La porte de l’ascenseur s’ouvrait, nous entrâmes. — Ce serait enfin une situation
4 angélisèrent la Suisse expliquait à son auditoire de paysans que les martyrs sont nos meilleurs intercesseurs auprès de Di
5 eilleurs intercesseurs auprès de Dieu. Les pâtres de la Suisse alpestre sont des gens simples et réalistes. Ils crurent l’
6 ait vers les salons. Et je pensais : il nous faut de ces paraboles pour nous rappeler combien il est dangereux de dire la
7 boles pour nous rappeler combien il est dangereux de dire la vérité en général, et la vérité chrétienne en particulier. Da
8 i nous voulons être chrétiens, soit, mais sachons de quel prix cela se paye. Il y a dix-neuf siècles que ce Prix a été fix
9 e que j’ai senti ce livre se proposer à moi : car de l’auteur ou du sujet, sait-on jamais lequel a choisi l’autre ? Parler
10 re sur lui, n’était-ce pas une manière imprudente de le provoquer publiquement ? Je songeais à cette phrase de Kafka : « L
11 ovoquer publiquement ? Je songeais à cette phrase de Kafka : « L’un des artifices de séduction les plus efficaces du diabl
12 is à cette phrase de Kafka : « L’un des artifices de séduction les plus efficaces du diable, c’est de nous provoquer au co
13 de séduction les plus efficaces du diable, c’est de nous provoquer au combat. C’est comme la lutte avec une femme, qui fi
14 se. Il est vrai que pour certains auteurs, l’acte d’ écrire résulte simplement d’une démangeaison de l’esprit que l’on calm
15 tains auteurs, l’acte d’écrire résulte simplement d’ une démangeaison de l’esprit que l’on calme en grattant du papier, san
16 te d’écrire résulte simplement d’une démangeaison de l’esprit que l’on calme en grattant du papier, sans nul souci des con
17 dans ce sens que chaque vérité comporte une part d’ accusation pour notre vie, et tend à déranger cet équilibre de pieux m
18 pour notre vie, et tend à déranger cet équilibre de pieux mensonges tacitement admis, sans lesquels « l’existence deviend
19 t pour troubler une absinthe. Ainsi chaque goutte de vérité trouble la vie. Mais c’est de quoi l’on peut faire son ivresse
20 haque goutte de vérité trouble la vie. Mais c’est de quoi l’on peut faire son ivresse. Je n’aime écrire que des livres dan
21 bagarre à l’heure où nous aurions besoin, dit-on, d’ un « message positif » et rassurant ? Eh bien, surtout que l’on ne se
22 trouble empire, dans le monde, c’est qu’on a peur de regarder en face ses vraies causes. Nous croyons à trente-six-mille m
23 ns trente-six-mille périls, mais nous avons cessé de croire au Mal et de redouter le vrai Péril. Montrer la réalité du dia
24 périls, mais nous avons cessé de croire au Mal et de redouter le vrai Péril. Montrer la réalité du diable dans ce monde, c
25 lui donner son véritable Objet. C’est faire peur de la bonne manière. Et c’est peut-être le moyen de nous guérir des faus
26 de la bonne manière. Et c’est peut-être le moyen de nous guérir des fausses angoisses qui nous paralysaient, ou de l’ango
27 r des fausses angoisses qui nous paralysaient, ou de l’angoisse de faux périls. On n’est jamais plus en danger que dans le
28 angoisses qui nous paralysaient, ou de l’angoisse de faux périls. On n’est jamais plus en danger que dans les moments où l
29 moments où l’on se trompe sur la vraie direction de la menace, et où l’on tend ses énergies dans une défense orientée ver
30 l’Ennemi, mesurer sa puissance, tel est le sujet de ce petit ouvrage. Toutefois, qu’on ne s’attende pas à un portrait du
31 le : il faut tenir tous ses portraits pour autant de victoires qu’il remporte sur notre complaisance ou nos crédulités. Le
32 pparences, le bluff éhonté ou subtil, bref, l’art de faire mentir les formes. À défaut donc d’une peinture impossible, ou
33 , l’art de faire mentir les formes. À défaut donc d’ une peinture impossible, ou trop aisément pittoresque, on tentera de d
34 ossible, ou trop aisément pittoresque, on tentera de décrire l’œuvre du diable au temps présent, en face de nous et parmi
35 ceux qui prennent à coup sûr le plus grand nombre d’ hommes dans les basses époques spirituelles. ⁂ Encore un mot. On se tr
36 ⁂ Encore un mot. On se tromperait sur l’intention de ce petit traité, si l’on y voyait un effort pour « démontrer » l’exis
37 rer » l’existence du diable. Il ne s’agit ici que d’ un essai d’interpréter certains déboires de notre temps, en les rappor
38 stence du diable. Il ne s’agit ici que d’un essai d’ interpréter certains déboires de notre temps, en les rapportant à l’ac
39 ci que d’un essai d’interpréter certains déboires de notre temps, en les rapportant à l’action du seul être qui s’en réjou
40 éjouisse. New York, janvier 1942. 1. Il s’agit de Jacques Maritain. Le dialogue eut lieu en décembre 1941, à New York.
2 1942, La Part du diable (1982). Première partie. L’Incognito et la révélation
41 ier tour C’est dans les Petits Poèmes en prose de Baudelaire que l’on peut lire la phrase la plus profonde écrite par u
42 erne sur Satan : La plus belle ruse du diable est de nous persuader qu’il n’existe pas. 2. L’incognito Reconnaissons
43 si peu au diable que l’on m’accusera certainement d’ obscurantisme, ou simplement de manque de sérieux, si je persiste en m
44 usera certainement d’obscurantisme, ou simplement de manque de sérieux, si je persiste en mon projet de lui consacrer tout
45 ainement d’obscurantisme, ou simplement de manque de sérieux, si je persiste en mon projet de lui consacrer tout un livre.
46 e manque de sérieux, si je persiste en mon projet de lui consacrer tout un livre. Le premier tour du diable est son incogn
47 celui qui suis. » Mais le diable toujours jaloux d’ imiter Dieu, fût-ce à rebours puisqu’il voit tout d’en bas, nous dit c
48 imiter Dieu, fût-ce à rebours puisqu’il voit tout d’ en bas, nous dit comme Ulysse au Cyclope : « Je me nomme Personne, il
49 lope : « Je me nomme Personne, il n’y a personne. De qui aurais-tu peur ? Vas-tu trembler devant l’inexistant ? » En Angle
50 re, circulait une gravure inspirée des diableries de Breughel et de Bosch. Elle représentait un personnage doté d’une tête
51 ne gravure inspirée des diableries de Breughel et de Bosch. Elle représentait un personnage doté d’une tête cornue et de d
52 et de Bosch. Elle représentait un personnage doté d’ une tête cornue et de deux pieds fourchus, mais dont le corps restait
53 résentait un personnage doté d’une tête cornue et de deux pieds fourchus, mais dont le corps restait invisible. Et le titr
54 sible. Et le titre était : Nobody. Comme le chat de Cheshire dans Alice, le diable a, de nos jours, achevé de disparaître
55 omme le chat de Cheshire dans Alice, le diable a, de nos jours, achevé de disparaître, ne laissant plus flotter dans l’air
56 ire dans Alice, le diable a, de nos jours, achevé de disparaître, ne laissant plus flotter dans l’air qu’un rire impercept
57 ible dénonce l’existence du diable à chaque page, de la première où il apparaît sous la forme du serpent, jusqu’à l’avant-
58 s raison alléguée, finalement flamboyé par le feu de ciel et précipité dans un étang de flammes et de soufre avec ses faux
59 oyé par le feu de ciel et précipité dans un étang de flammes et de soufre avec ses faux prophètes, pour y être tourmenté n
60 de ciel et précipité dans un étang de flammes et de soufre avec ses faux prophètes, pour y être tourmenté nuit et jour au
61 les textes originaux). Si l’on croit à la vérité de la Bible, il est impossible de douter un seul instant de la réalité d
62 croit à la vérité de la Bible, il est impossible de douter un seul instant de la réalité du diable. Mais qui croit encore
63 ible, il est impossible de douter un seul instant de la réalité du diable. Mais qui croit encore à la Bible, sérieusement,
64 x ? C’est un fait : l’homme moderne éprouve moins de peine à prêter foi aux mensonges du jour qu’aux éternelles vérités tr
65 vont lui donner mes lecteurs — m’arrête, au seuil de cette étude, et me dit avec un sourire d’indulgente incrédulité : — «
66 u seuil de cette étude, et me dit avec un sourire d’ indulgente incrédulité : — « Vous croyez donc au diable ? Auquel ? Cel
67 e. Elles traduisent fort exactement nos attitudes de pensée les plus courantes. Négliger d’y répondre serait se condamner
68 attitudes de pensée les plus courantes. Négliger d’ y répondre serait se condamner à baser tout un livre sur un quiproquo.
69 un grand vieillard à barbe blanche, Père éternel de Michel-Ange tonnant au ciel violent de la Sixtine. On nous dit « diab
70 re éternel de Michel-Ange tonnant au ciel violent de la Sixtine. On nous dit « diable », et nous voyons un démon ricanant
71 animé des plus mauvaises intentions. Ces réflexes d’ optique intérieure ne prouvent rien sur Dieu, ni sur son existence. Ma
72 médiévaux. Supposons un instant qu’il s’agisse là d’ un camouflage prémédité du diable. À première vue, il paraîtra rudimen
73 se dissimule derrière sa propre image. Il choisit de revêtir une apparence grotesque qui a pour effet certain de le rendre
74 une apparence grotesque qui a pour effet certain de le rendre inoffensif aux yeux des personnes instruites. Car si le dia
75 r si le diable est simplement le démon rouge armé d’ un grand trident, ou le faune à barbiche de chèvre et à longue queue d
76 e armé d’un grand trident, ou le faune à barbiche de chèvre et à longue queue des légendes populaires, qui se donnerait en
77 ndes populaires, qui se donnerait encore la peine d’ y croire, ou même de déclarer qu’il n’y croit pas ? Ainsi, par un tour
78 se donnerait encore la peine d’y croire, ou même de déclarer qu’il n’y croit pas ? Ainsi, par un tour astucieux, l’image
79 ment peut-on perdre son temps avec ces balivernes d’ un autre âge ? » Or il me semble que ce sont eux qui s’y laissent pren
80 u’il demandait. Et ceux qui en restent aux contes de bonnes femmes, ce sont ceux qui refusent de croire au diable à cause
81 ontes de bonnes femmes, ce sont ceux qui refusent de croire au diable à cause de l’image qu’ils s’en font, et qui est tiré
82 age qu’ils s’en font, et qui est tirée des contes de bonnes femmes. 4. Réalité du mythe Mais si nous écartons ce voi
83 nous ? Un mythe ou une réalité ? Derrière l’image d’ un pittoresque inefficace et désuet — y a-t-il quelqu’un ? Cette fois-
84 uve en soit que je puis vous tracer son histoire, de sa naissance antique jusqu’à sa mort dans l’esprit de nos contemporai
85 a naissance antique jusqu’à sa mort dans l’esprit de nos contemporains. Les hommes ont créé ce fantôme. Et tout d’abord, l
86 . Mais ce sont les rabbins qui ont su tirer parti de la légende d’Ormuzd et d’Ahrimane, et de ces anges ou démons ailés do
87 les rabbins qui ont su tirer parti de la légende d’ Ormuzd et d’Ahrimane, et de ces anges ou démons ailés dont ils trouvai
88 qui ont su tirer parti de la légende d’Ormuzd et d’ Ahrimane, et de ces anges ou démons ailés dont ils trouvaient le modèl
89 er parti de la légende d’Ormuzd et d’Ahrimane, et de ces anges ou démons ailés dont ils trouvaient le modèle en Assyrie. C
90 syrie. Ce sont les rabbins qui ont écrit le livre d’ Énoch, où l’on voit des anges mauvais descendre sur la terre — et c’es
91 du genre humain, qu’on assimile aussi au serpent de la Genèse. Dès lors, Satan prend son essor comme personnalité bien dé
92 e christianisme lui donne un rôle dans les récits de la vie de Jésus. Et dans l’Apocalypse il est autorisé à régner sur le
93 nisme lui donne un rôle dans les récits de la vie de Jésus. Et dans l’Apocalypse il est autorisé à régner sur le monde ent
94 t encore il reste le Roi. En l’an 547, le concile de Constantinople le déclare éternel. Pendant tout le Moyen Âge, il terr
95 t tout le Moyen Âge, il terrorise les populations de l’Europe christianisée. Les moines font autant pour sa gloire que les
96 ssance. On lui attribue des cohortes innombrables de démons et de diablotins2. On lui invente une église et des messes noi
97 i attribue des cohortes innombrables de démons et de diablotins2. On lui invente une église et des messes noires. On lui o
98 nvoient dans la panique et le délire des milliers de victimes convaincues de sorcellerie, et souvent prêtes à s’accuser el
99 et le délire des milliers de victimes convaincues de sorcellerie, et souvent prêtes à s’accuser elles-mêmes dans les terme
100 it cette névrose collective ? Non par la guérison de ses victimes, mais par la suppression de ceux qui prétendaient les gu
101 guérison de ses victimes, mais par la suppression de ceux qui prétendaient les guérir par le feu. Au siècle des Lumières,
102 e diable quitte la scène, comme l’évêque à la fin d’ une procession. Rien de plus clair que cette histoire : les hommes ont
103 , ce fantôme les a tourmentés pendant des siècles d’ ignorance, et finalement la raison triomphante a dissipé notre illusio
104 é notre illusion morbide. Tel est le point de vue de l’historien. Il est exact tant qu’il n’explique rien, et qu’il se bor
105 rien, et qu’il se borne à réciter des faits tirés de documents écrits. Mais il est faux et dénué d’intérêt s’il prétend pr
106 és de documents écrits. Mais il est faux et dénué d’ intérêt s’il prétend prouver quelque chose quant à la réalité du diabl
107 e que le diable est un être mythique, une réalité de l’esprit. Dès lors, si l’on me dit : « Le diable n’est qu’un mythe do
108 able est un mythe, donc il existe et ne cesse pas d’ agir. » C’est ici le foyer du débat. Un mythe est une histoire qui déc
109 certaines structures profondes du réel. Je parle de structures littéralement fondamentales, car elles sont antérieures à
110 Elles informent notre univers dans tous les plans de sa réalité. Et c’est seulement quand nous avons saisi par intuition l
111 s avons saisi par intuition le principe et la loi d’ une structure que nous pouvons, dans la nature ou dans la vie de l’âme
112 e que nous pouvons, dans la nature ou dans la vie de l’âme, reconnaître des formes, comprendre leur langage, et parfois mê
113 iques qui nous rappellent ou nous livrent le sens de ces structures formatrices — Idées de Platon, Catégories de Kant, Mèr
114 ent le sens de ces structures formatrices — Idées de Platon, Catégories de Kant, Mères de Goethe, Archétypes de Jung. Dans
115 uctures formatrices — Idées de Platon, Catégories de Kant, Mères de Goethe, Archétypes de Jung. Dans le mythe, une réalité
116 ices — Idées de Platon, Catégories de Kant, Mères de Goethe, Archétypes de Jung. Dans le mythe, une réalité équivaut par d
117 , Catégories de Kant, Mères de Goethe, Archétypes de Jung. Dans le mythe, une réalité équivaut par définition à un sens — 
118 du mythe, je veux dire sans le secours des moyens d’ intuition structurelle qu’il nous offre, il n’y a que des faits dits o
119 que des faits dits objectifs, mais il n’y a plus de significations valables dans tous les plans simultanés de notre exist
120 fications valables dans tous les plans simultanés de notre existence. La raison s’imagine à tort qu’elle perçoit des objet
121 sont en réalité locales par rapport à l’ensemble de notre réalité. Par exemple, les lois mathématiques énoncées par notre
122 tiques énoncées par notre raison cessent aussitôt d’ être valables si l’on passe au plan affectif, au plan moral, ou au pla
123 s lois biologiques, etc. Or loin de s’effrayer et de se scandaliser de carences aussi flagrantes, notre raison moderne s’e
124 , etc. Or loin de s’effrayer et de se scandaliser de carences aussi flagrantes, notre raison moderne s’excuse en précisant
125 ison moderne s’excuse en précisant « qu’il s’agit de domaines différents ». Phrase typiquement provinciale, à ce stade. Ma
126 quand elle prétend nier l’existence ou l’urgence de la commune mesure qu’elle ne peut concevoir, la raison nous conduit à
127 r, la raison nous conduit à la folie par la porte de l’incohérence. Le chaos où nous sommes en témoigne. Et la grande expl
128 ù nous sommes en témoigne. Et la grande explosion de l’irrationalisme dans la première moitié du xxe siècle témoigne de l
129 e dans la première moitié du xxe siècle témoigne de l’état pré-démentiel où le rationalisme avait amené le monde, en détr
130 ussion a mal tourné, décidément. Elle a fait trop de bruit dans le siècle. Il est temps de réconcilier la raison et les fo
131 a fait trop de bruit dans le siècle. Il est temps de réconcilier la raison et les forces qui lui échappent, dans la synthè
132 et les forces qui lui échappent, dans la synthèse d’ une sagesse nouvelle. Je crois que l’époque est mûre pour l’entreprise
133 nt : « Je ne perçois que des maux ou des systèmes de maux indépendants les uns des autres. Mais je suis incapable de m’ass
134 ndants les uns des autres. Mais je suis incapable de m’assurer qu’une intention quelconque, un plan ou une conscience, rel
135 nifiant ou anthropomorphisant le Mal, est capable de lui découvrir une signification générale. Quant à moi, je me récuse m
136 as une réalité spirituelle, mais une multiplicité de fautes, d’erreurs, d’accidents matériels, de hasards considérés comme
137 ité spirituelle, mais une multiplicité de fautes, d’ erreurs, d’accidents matériels, de hasards considérés comme malheureux
138 elle, mais une multiplicité de fautes, d’erreurs, d’ accidents matériels, de hasards considérés comme malheureux, de malaju
139 cité de fautes, d’erreurs, d’accidents matériels, de hasards considérés comme malheureux, de malajustements et d’absurdité
140 atériels, de hasards considérés comme malheureux, de malajustements et d’absurdités. Une collection de grands et de petits
141 considérés comme malheureux, de malajustements et d’ absurdités. Une collection de grands et de petits scandales parfois lo
142 de malajustements et d’absurdités. Une collection de grands et de petits scandales parfois localement explicables, ou qu’o
143 ents et d’absurdités. Une collection de grands et de petits scandales parfois localement explicables, ou qu’on se borne à
144 se trouve désarmée devant les éruptions brutales d’ un mal organisé par des forces obscures, selon la logique mystérieuse
145 logique mystérieuse et l’efficacité irrésistible de l’inconscient. Enregistrons cette carence rationaliste et plaçons-nou
146 mentale : c’est que nous sommes ici dans le monde de l’esprit, du sens, et des essences créatrices, dans le monde d’où pro
147 u sens, et des essences créatrices, dans le monde d’ où provient toute forme, y compris la forme de l’homme. Voltaire disai
148 nde d’où provient toute forme, y compris la forme de l’homme. Voltaire disait : « Dieu créa l’homme à son image, mais l’ho
149 à l’erreur. (Il se trompe dans le fait, en créant de faux dieux. Mais alors, c’est dans la mesure où il néglige les aides
150 ors, c’est dans la mesure où il néglige les aides de la Révélation corrigeant ses erreurs égoïstes. Celles-ci ne sont pas
151 itualiser, s’il veut devenir humain au plein sens de ce terme. Car dans le monde de l’esprit, tout est forme, intention, m
152 main au plein sens de ce terme. Car dans le monde de l’esprit, tout est forme, intention, mouvement et finalité. Tout pren
153 er du diable ne sera pas ici quelque moyen facile d’ illustrer des idées. Le réel n’est pas fait d’idées et de matière. Je
154 ile d’illustrer des idées. Le réel n’est pas fait d’ idées et de matière. Je le conçois gouverné par des structures de forc
155 trer des idées. Le réel n’est pas fait d’idées et de matière. Je le conçois gouverné par des structures de forces ou des e
156 atière. Je le conçois gouverné par des structures de forces ou des ensembles dynamiques, antérieurs à toute forme matériel
157 s décrire dans ce livre porte le nom traditionnel de diable. Ce diable-là n’est pas sorti d’une série de textes plus ou mo
158 ditionnel de diable. Ce diable-là n’est pas sorti d’ une série de textes plus ou moins authentiques ou anciens. Car il est
159 diable. Ce diable-là n’est pas sorti d’une série de textes plus ou moins authentiques ou anciens. Car il est un agent per
160 ntiques ou anciens. Car il est un agent permanent de la réalité humaine, telle que nous la vivons quand nous vivons vraime
161 ivons quand nous vivons vraiment, dans notre état de créatures libres, c’est-à-dire constamment placées devant des choix,
162 a tragédie. Tout cela suppose et pose l’existence d’ un bien et de quelque chose d’autre que le bien. Sinon, où seraient le
163 out cela suppose et pose l’existence d’un bien et de quelque chose d’autre que le bien. Sinon, où seraient le choix, la tr
164 et pose l’existence d’un bien et de quelque chose d’ autre que le bien. Sinon, où seraient le choix, la tragédie, la libert
165 elle nous aide à mieux comprendre la vraie nature de l’homme, et nos vies dans ce siècle. Je pense que les figures du myth
166 rement que l’évidence moderne et que les analyses de la raison. Car elles transmettent une expérience millénaire, au regar
167 pirituelles vivant et agissant sur les frontières de l’Éternel et de la Création, de l’éternité et du temps. Ce sont des i
168 nt et agissant sur les frontières de l’Éternel et de la Création, de l’éternité et du temps. Ce sont des intentions divine
169 ur les frontières de l’Éternel et de la Création, de l’éternité et du temps. Ce sont des intentions divines, des messagers
170 à la fulgurante volée, dont la vitesse est celle de la pensée, et c’est pourquoi ils nous sont invisibles ; des intellige
171 . Mais tout ange est bon, servant Dieu. Au sommet de leur hiérarchie sont les archanges. Un seul archange a trahi sa missi
172 ssage et son être même, c’est Lucifer, le Porteur de Lumière3. Satan s’est révolté, il a refusé de servir, il a refusé de
173 eur de Lumière3. Satan s’est révolté, il a refusé de servir, il a refusé de transmettre son message divin, il a voulu se f
174 s’est révolté, il a refusé de servir, il a refusé de transmettre son message divin, il a voulu se faire original, auteur d
175 ssage divin, il a voulu se faire original, auteur de son destin, porteur de ses lumières à lui. Et aussitôt, par les lois
176 se faire original, auteur de son destin, porteur de ses lumières à lui. Et aussitôt, par les lois mêmes de l’être, il est
177 s lumières à lui. Et aussitôt, par les lois mêmes de l’être, il est « tombé » du Ciel, qui est le Royaume où l’intention d
178 ombé » du Ciel, qui est le Royaume où l’intention de Dieu règne absolue. (Coupez la communication, le courant « tombe ».)
179 le courant « tombe ».) Il est devenu le messager de soi, et comme il n’est qu’un esprit pur, une fois coupé de la source
180 t comme il n’est qu’un esprit pur, une fois coupé de la source de l’Esprit, il est devenu le messager du Néant et de ses m
181 est qu’un esprit pur, une fois coupé de la source de l’Esprit, il est devenu le messager du Néant et de ses mystères. Mais
182 e l’Esprit, il est devenu le messager du Néant et de ses mystères. Mais quoique déchu, il a gardé sa science d’esprit pur.
183 stères. Mais quoique déchu, il a gardé sa science d’ esprit pur. Comme un artiste qui a perdu son génie et ne croit plus à
184 re, mais qui a conservé son « métier » et l’envie d’ être à l’avant-garde, Satan connaît encore l’Esprit et les esprits, ma
185 gloire à laquelle ils sont destinés. Ayant refusé de servir Dieu, de servir à Dieu, il est devenu celui qui sert le Rien,
186 e ils sont destinés. Ayant refusé de servir Dieu, de servir à Dieu, il est devenu celui qui sert le Rien, ne sert à Rien.
187 t le secret des âmes qu’il abuse… 6. Le Prince de ce monde L’acte d’orgueil éblouissant et consumant, qui transforma
188 u’il abuse… 6. Le Prince de ce monde L’acte d’ orgueil éblouissant et consumant, qui transforma l’Ange de lumière en
189 l éblouissant et consumant, qui transforma l’Ange de lumière en Ange et Prince des ténèbres, l’a condamné à un impérialism
190 limites, donc par définition désespéré. La perte de l’Unique Nécessaire fait naître une soif essentiellement inextinguibl
191 tier ne saurait combler le vide que forme au cœur d’ une créature la conscience d’avoir quitté sa juste place dans le monde
192 de que forme au cœur d’une créature la conscience d’ avoir quitté sa juste place dans le monde. Tombé de l’éternel, Satan v
193 ’avoir quitté sa juste place dans le monde. Tombé de l’éternel, Satan veut l’infini. Tombé de l’Être, il veut l’Avoir. Mai
194 e. Tombé de l’éternel, Satan veut l’infini. Tombé de l’Être, il veut l’Avoir. Mais le problème est insoluble à tout jamais
195 il pourra tout avoir, puisqu’il est appelé Prince de ce monde dans l’Évangile — mais il n’aura jamais que ce monde-ci. Il
196 onquerra jamais le Ciel, qui est proprement l’âme de ce monde et le mystère du transcendant dans l’immanence. Il n’aura de
197 stère du transcendant dans l’immanence. Il n’aura de notre univers que la carcasse matérielle. Et c’est probablement de ce
198 que la carcasse matérielle. Et c’est probablement de ces débris de la Maison désaffectée qu’il fera le bois de chauffage d
199 e matérielle. Et c’est probablement de ces débris de la Maison désaffectée qu’il fera le bois de chauffage de son Enfer. I
200 ébris de la Maison désaffectée qu’il fera le bois de chauffage de son Enfer. Il le sait bien. C’est pourquoi son désir et
201 aison désaffectée qu’il fera le bois de chauffage de son Enfer. Il le sait bien. C’est pourquoi son désir et sa jalousie f
202 e autour de nous comme un lion rugissant en quête de sa proie, dit la Bible. Il rôde autour de nous comme un gangster obsé
203 perdre toutes ces choses, qui sont notre héritage d’ « enfants de Dieu ». C’est la seule chance du diable. Il ne la manquer
204 s ces choses, qui sont notre héritage d’« enfants de Dieu ». C’est la seule chance du diable. Il ne la manquera pas… 7.
205 7. Le Tentateur Le serpent était le plus rusé de tous les animaux des champs que l’Éternel Dieu avait faits. Il dit à
206 Dieu a-t-il réellement dit : vous ne mangerez pas de tous les arbres du jardin ? La femme répondit au serpent : nous mange
207 u fruit des arbres du jardin. Mais quant au fruit de l’arbre qui est au milieu du jardin, Dieu a dit : vous n’en mangerez
208 n’en mangerez point et vous n’y toucherez point, de peur que vous n’en mouriez. Alors le serpent dit à la femme : Vous ne
209 y a le doute ! Le premier procédé du démon, c’est de jeter un doute sur la réalité de la voix divine, et donc sur la réali
210 du démon, c’est de jeter un doute sur la réalité de la voix divine, et donc sur la réalité elle-même et ses structures.
211 ude s’est insinuée dans un esprit, la possibilité d’ une tentation s’entrouvre. Car il n’y a pas de tentation là où n’exist
212 ité d’une tentation s’entrouvre. Car il n’y a pas de tentation là où n’existe aucune possibilité d’imaginer quelque autre
213 as de tentation là où n’existe aucune possibilité d’ imaginer quelque autre chose que l’état de fait. On dit bien : l’occas
214 ibilité d’imaginer quelque autre chose que l’état de fait. On dit bien : l’occasion fait le larron. Vous n’êtes pas tenté
215 l’occasion fait le larron. Vous n’êtes pas tenté d’ aller dans la Lune parce que vous savez que c’est actuellement impossi
216 t impossible. Mais vous seriez probablement tenté d’ y aller, si l’on vous suggérait quelque moyen de le faire. Ève ne pens
217 é d’y aller, si l’on vous suggérait quelque moyen de le faire. Ève ne pensait même pas à manger cette pomme avant que le s
218 vant que le serpent n’ait mis en doute la réalité de l’ordonnance de Dieu. À l’origine de toute tentation, il y a l’occasi
219 ent n’ait mis en doute la réalité de l’ordonnance de Dieu. À l’origine de toute tentation, il y a l’occasion entrevue d’al
220 e la réalité de l’ordonnance de Dieu. À l’origine de toute tentation, il y a l’occasion entrevue d’aller à la divinité par
221 ne de toute tentation, il y a l’occasion entrevue d’ aller à la divinité par un plus court chemin que celui du réel ; par u
222 e, en dépit des interdictions que posent les lois de la Création, l’ordre divin et la nature de l’homme5. Et voici le deux
223 s lois de la Création, l’ordre divin et la nature de l’homme5. Et voici le deuxième temps de la tentation : La femme vit q
224 la nature de l’homme5. Et voici le deuxième temps de la tentation : La femme vit que l’arbre était bon à manger et agréabl
225 t précieux pour ouvrir l’intelligence : elle prit de son fruit et en mangea.6 Voyez : ce n’est pas le mal en soi qui tent
226 our l’esprit. Elle ne fut pas tentée par le désir de nuire, mais par l’idée de se diviniser, ce qui paraît en somme une ex
227 pas tentée par le désir de nuire, mais par l’idée de se diviniser, ce qui paraît en somme une excellente idée. Par malheur
228 le, Dieu n’aimait pas cette idée-là et l’excluait de sa réalité. Manger cette pomme et se diviniser de cette manière convo
229 de sa réalité. Manger cette pomme et se diviniser de cette manière convoiteuse, il se trouvait qu’aux yeux de Dieu c’était
230 Dieu c’était le mal, c’était contrevenir au plan d’ ensemble et aux ordonnances du Jardin ; en d’autres termes, c’était tr
231 en d’autres termes, c’était tricher avec les lois de la Création, ou les utiliser à contre-fin. La suite du récit montre b
232 t au sol maudit. Pour avoir voulu dépasser l’état d’ image divine et se faire vraiment dieux, ils se trouvent déchus de leu
233 t se faire vraiment dieux, ils se trouvent déchus de leur humanité parfaite. « Qui veut faire l’ange fait la bête », dira
234 , — si l’utopie est l’imagination, puis le désir, d’ un bien que le réel condamne et que le plan divin ne prévoit pas. Sata
235 e Christ, lui propose trois utopies, trois moyens de gagner le monde par un plus court chemin que le sentier du Golgotha.
236 aissant le Bien et le Mal » C’est le privilège d’ un Dieu, selon le récit de la Genèse, que de connaître le Bien et le M
237 » C’est le privilège d’un Dieu, selon le récit de la Genèse, que de connaître le Bien et le Mal. Les psychologues et mo
238 ilège d’un Dieu, selon le récit de la Genèse, que de connaître le Bien et le Mal. Les psychologues et moralistes modernes,
239 ace de Dieu, et qu’ils étaient par suite capables de bon sens. Le bien et le mal, tels que l’homme les conçoit, sont des c
240 sations, et souvent même aux conditions physiques d’ un pays. Le Bien et le Mal en soi ne sont réellement distincts qu’aux
241 u — pas même aux yeux du diable, toujours la dupe d’ un acte de charité qu’il tiendra pour sottise. C’est que Dieu seul con
242 me aux yeux du diable, toujours la dupe d’un acte de charité qu’il tiendra pour sottise. C’est que Dieu seul connaît le pl
243 pour sottise. C’est que Dieu seul connaît le plan d’ ensemble et l’intention dernière de toute sa Création. Et c’est seulem
244 onnaît le plan d’ensemble et l’intention dernière de toute sa Création. Et c’est seulement par rapport à ce plan et à cett
245 ut à Dieu et à sa volonté souveraine, nous permet de prendre une vue du Mal moins locale et plus pénétrante que celle de n
246 du Mal moins locale et plus pénétrante que celle de nos morales humaines. Une illusion commune et presque inévitable nous
247 nt une réalité autonome et concrète, qu’il s’agit de détruire ou de combattre comme un ennemi extérieur à notre être. Pour
248 autonome et concrète, qu’il s’agit de détruire ou de combattre comme un ennemi extérieur à notre être. Pour dissiper cette
249 nger Dieu. Il est devenu le messager qui n’a plus de message réel, l’agent du Néant parmi nous. Dès lors, il ne peut plus
250 s, il ne peut plus créer que le Rien, qui n’a pas d’ existence. Créer le mal est impossible. Ce qui revient à dire que le m
251 mal n’existe pas. Pour agir, le diable est forcé d’ utiliser ce qui existe, et qui est bon par définition, ayant été créé
252 faire, mais il lui reste une possibilité : c’est de nous inciter à faire abus de notre liberté et des biens de la terre.
253 possibilité : c’est de nous inciter à faire abus de notre liberté et des biens de la terre. Ni le diable ni l’homme péche
254 nciter à faire abus de notre liberté et des biens de la terre. Ni le diable ni l’homme pécheur ne peuvent réellement faire
255 soit « du mal », mais il peut manger un bon fruit d’ une manière malfaisante, contre l’Ordre donné. Le mal en soi n’existe
256 mal n’est qu’un mauvais usage du bien, entendons de ce qui existe. Telle est la situation fondamentale et primitive. Cepe
257 e et primitive. Cependant, le diable étant jaloux de Dieu, il entend nous faire croire qu’il peut aussi créer. Et c’est po
258 t c’est pourquoi il entretient en nous l’illusion d’ un mal objectif dont il serait évidemment l’auteur. Ce mal en soi n’es
259 e. Il n’est qu’un mirage du démon, une projection de nos erreurs hors de nous-mêmes, obnubilant aux yeux de notre orgueil
260 ’est plus tard, c’est après plusieurs générations de pécheurs dans l’histoire, ou de péchés dans une vie, que le mal finir
261 ieurs générations de pécheurs dans l’histoire, ou de péchés dans une vie, que le mal finira par révéler une espèce de cons
262 une vie, que le mal finira par révéler une espèce de consistance propre, — apparence encore, mais active, contre nature ma
263 elaire peut écrire : « L’homme et la femme savent de naissance que dans le mal se trouve la volupté… La volupté unique et
264 a volupté unique et suprême gît dans la certitude de faire le mal. » Je crois plutôt, comme le dit William Blake, que « la
265 plutôt nommée : douleur aimée, désir inconscient de la mort. Car ici se sont déclenchés les mécanismes compliqués de la p
266 ici se sont déclenchés les mécanismes compliqués de la perversion, de l’autopunition d’une conscience déchirée, et du dés
267 nchés les mécanismes compliqués de la perversion, de l’autopunition d’une conscience déchirée, et du désir enfin de se dét
268 es compliqués de la perversion, de l’autopunition d’ une conscience déchirée, et du désir enfin de se détruire. Se détruire
269 tion d’une conscience déchirée, et du désir enfin de se détruire. Se détruire pour s’innocenter ! Pour échapper à sa maniè
270 éparer. C’est le mystère du suicide et la logique de Judas, la dernière tentation, la suprême utopie. 9. Le menteur
271 utopie. 9. Le menteur Examinons maintenant d’ un peu plus près par le détail de notre vie présente, comment le diabl
272 inons maintenant d’un peu plus près par le détail de notre vie présente, comment le diable arrive à s’insérer dans les str
273 le diable arrive à s’insérer dans les structures de l’être, donc du bien. J’ai dit qu’il doit passer par l’homme pour agi
274 peut dire ce qui n’est pas, et mentir par un acte de sa volonté réfléchie. Le minéral repose où il fut composé, la plante
275 ixa la graine, les animaux muets sont prisonniers de l’ordre intarissablement prodigue de l’instinct. Mais l’homme a reçu
276 prisonniers de l’ordre intarissablement prodigue de l’instinct. Mais l’homme a reçu le pouvoir de parler, de créer, et de
277 gue de l’instinct. Mais l’homme a reçu le pouvoir de parler, de créer, et de dénaturer. Par la grâce du langage, il peut d
278 stinct. Mais l’homme a reçu le pouvoir de parler, de créer, et de dénaturer. Par la grâce du langage, il peut dire le vrai
279 l’homme a reçu le pouvoir de parler, de créer, et de dénaturer. Par la grâce du langage, il peut dire le vrai ; par la fau
280 contredire. Il peut créer selon les perspectives de la Création, il peut aussi créer à tort et à travers. Il peut être un
281 t et à travers. Il peut être un agent responsable de la nature naturante, mais il peut aussi faire la grève, se révolter,
282 iquer l’anti-nature ou dénature. Cette duplicité de nos pouvoirs constitue notre liberté. Elle en est à la fois le signe
283 e gloire équivoque. C’est par la liberté, à cause d’ elle, et dans elle, que nous avons le pouvoir de pécher. Car pécher c’
284 e d’elle, et dans elle, que nous avons le pouvoir de pécher. Car pécher c’est tricher avec l’ordre, opposer à la loi divin
285 à la loi divine nos dérogations égoïstes, fautes de calcul et courtes vues intéressées. Pécher, c’est fausser quelque cho
286 grand paraît l’enjeu, et plus grande la tentation de gagner dans l’instant ce qu’on voit, quitte à se fermer l’invisible e
287 agit dans le monde, et c’est en provoquant l’abus de nos libertés qu’il agit en nous et nous lie. Si Ève n’avait pas été l
288 en nous et nous lie. Si Ève n’avait pas été libre de manger cette pomme interdite, Ève n’aurait pu pécher, ni Adam après e
289 it pu pécher, ni Adam après elle. Ainsi la gloire de l’homme étant sa liberté, il est clair que c’est en ce point que le M
290 lair que la grande ambition satanique devait être de s’emparer de la parole dans notre bouche, pour altérer le témoignage
291 rande ambition satanique devait être de s’emparer de la parole dans notre bouche, pour altérer le témoignage dans sa sourc
292 ue dans notre langue ». Mais il est deux manières de mentir, comme il est deux manières de tromper un client. Si la balanc
293 ux manières de mentir, comme il est deux manières de tromper un client. Si la balance indique 980 grammes, vous pouvez dir
294 ntrôle, il peut voir qu’on le vole, et vous savez de combien vous le volez : une vérité reste juge entre vous. Mais si le
295 e critère du vrai qui est dénaturé, il n’y a plus de contrôle possible. Et peu à peu vous oublierez que vous trichez. Pari
296 uelques pincées « pour le bon poids », le sourire de l’acheteur et la satisfaction de votre vertu. C’est là le mensonge pu
297 ds », le sourire de l’acheteur et la satisfaction de votre vertu. C’est là le mensonge pur, l’œuvre propre du diable. À pa
298 artir de l’instant où vous faussez la mesure même de la vérité, toutes vos « vertus » sont au service du mal et sont compl
299 vertus » sont au service du mal et sont complices de l’œuvre du Malin. « Le diable est menteur et le Père du mensonge », d
300 e du mensonge », dit l’Évangile tel qu’on le cite d’ ordinaire. Ceci concerne le premier mensonge, celui qui se borne à tai
301 ui se borne à taire la vérité (tout en ne cessant de la connaître) ou à la nier (tout en sachant que pour si peu, elle ne
302 out en sachant que pour si peu, elle ne cesse pas d’ exister). Mais le texte original de ce passage est infiniment plus étr
303 e ne cesse pas d’exister). Mais le texte original de ce passage est infiniment plus étrange. « Le diable est menteur, nous
304 iable est menteur, nous dit-on, et il est le père de son propre mensonge. » Par ici nous entrons au mystère du mal. Le pèr
305 » Par ici nous entrons au mystère du mal. Le père de son mensonge est celui qui l’engendre, le conçoit par ses propres œuv
306 re, le conçoit par ses propres œuvres, en abusant d’ une vérité qu’il rejette aussitôt qu’avilie, et qui mourra du monstre
307 nsonge, par essence, n’est pas ! C’est une espèce de décréation. C’est le trompe-l’œil et le sonne-creux de l’invention bâ
308 création. C’est le trompe-l’œil et le sonne-creux de l’invention bâtarde et de l’art inauthentique. Le diable est le père
309 l’œil et le sonne-creux de l’invention bâtarde et de l’art inauthentique. Le diable est le père du faux art, de toutes ces
310 inauthentique. Le diable est le père du faux art, de toutes ces œuvres qui ne sont « ni bien ni mal », parce que l’acte do
311 supprime les mesures mêmes du beau. Il n’y a plus de fautes de goût possibles là où n’existe plus de goût, comme il n’y a
312 es mesures mêmes du beau. Il n’y a plus de fautes de goût possibles là où n’existe plus de goût, comme il n’y a pas de cri
313 s de fautes de goût possibles là où n’existe plus de goût, comme il n’y a pas de crime possible là où il n’existe pas de L
314 s là où n’existe plus de goût, comme il n’y a pas de crime possible là où il n’existe pas de Loi. Peut-être ici découvrons
315 n’y a pas de crime possible là où il n’existe pas de Loi. Peut-être ici découvrons-nous la raison dernière du mensonge : c
316 on dernière du mensonge : c’est toujours le désir d’ innocence utopique. Le mensonge ordinaire n’était que l’omission ou bi
317 inaire n’était que l’omission ou bien la négation d’ une vérité qui subsistait ailleurs et nous jugeait encore. Mais le men
318 e mensonge diabolique nie le juge. Il ne part que de soi, et prolifère en autarcie, comme une cellule cancéreuse, introdui
319 ncéreuse, introduisant dans l’univers ce sophisme de pure angoisse : le mensonge de nulle vérité. 10. L’accusateur P
320 nivers ce sophisme de pure angoisse : le mensonge de nulle vérité. 10. L’accusateur Par le doute qu’il instille en n
321 t encore un bien, pensons-nous. Mais ce mouvement de l’âme créatrice, dès qu’il est détourné des fins prévues par Dieu, no
322 mal fait, Satan se dévoile comme un ennemi mortel de l’homme, qu’il avait abusé jusqu’ici en feignant de sympathiser avec
323 l’homme, qu’il avait abusé jusqu’ici en feignant de sympathiser avec l’idéalisme de sa révolte. Voici qu’il nous entraîne
324 u’ici en feignant de sympathiser avec l’idéalisme de sa révolte. Voici qu’il nous entraîne dans un nouveau tour de la spir
325 e. Voici qu’il nous entraîne dans un nouveau tour de la spirale qui pointe vers l’Enfer : il nous accuse avec une angéliqu
326 gélique précision, sans laisser place à la pensée d’ une possible réparation. Il est au monde une seule chose pire que de d
327 aration. Il est au monde une seule chose pire que de douter du bien et du réel, et c’est de douter du pardon, une fois qu’
328 e pire que de douter du bien et du réel, et c’est de douter du pardon, une fois qu’on a trahi le bien et le réel. Car dout
329 esser le mal qu’on a commis ; pour oser qualifier de faute sa propre faute ; et pour que puisse renaître la confiance qui
330 enaître la confiance qui donnera seule le courage de rebâtir. Celui qui doute du pardon ne peut pas confesser son crime, e
331 ble est cet Accusateur qui veut nous faire douter de notre pardon pour nous forcer à fuir dans les remèdes du pire. L’Apoc
332 ire. L’Apocalypse le désigne comme « l’Accusateur de nos frères, celui qui les accuse devant Dieu jour et nuit ». C’est lu
333 u jour et nuit ». C’est lui qui demandait la tête de Job devant le tribunal céleste. Non content de nous prendre à ses piè
334 ris il est le premier à nous dénoncer devant Dieu de la manière la plus impitoyable. Non par amour de la justice, mais par
335 de la manière la plus impitoyable. Non par amour de la justice, mais par amour de notre châtiment, par haine froide. Pour
336 able. Non par amour de la justice, mais par amour de notre châtiment, par haine froide. Pour le stérile plaisir d’avoir ra
337 timent, par haine froide. Pour le stérile plaisir d’ avoir raison. C’est qu’il s’en tient à la légalité, au bien qu’il conn
338 our toujours. Depuis sa chute, il a perdu le sens de la Création continue, du dynamisme immanent au réel. Par-dessus tout,
339 réel. Par-dessus tout, il ignore le sens du drame de la Rédemption. Il ne sait pas et ne veut pas savoir que Dieu maintien
340 en dépit de nos fautes, par la vertu recréatrice d’ une mort qui est le centre de l’Histoire, et de chacune de nos histoir
341 la vertu recréatrice d’une mort qui est le centre de l’Histoire, et de chacune de nos histoires individuelles… Aussi, part
342 ce d’une mort qui est le centre de l’Histoire, et de chacune de nos histoires individuelles… Aussi, partout où l’on condam
343 rt qui est le centre de l’Histoire, et de chacune de nos histoires individuelles… Aussi, partout où l’on condamne sans pit
344 simple faute de logique, la grâce pour une erreur de calcul statistique. La duplicité infernale, c’est de nous faire croir
345 calcul statistique. La duplicité infernale, c’est de nous faire croire qu’il n’y a pas de juge, ni d’ordre divin du réel,
346 rnale, c’est de nous faire croire qu’il n’y a pas de juge, ni d’ordre divin du réel, et aussitôt que nous l’avons cru, de
347 de nous faire croire qu’il n’y a pas de juge, ni d’ ordre divin du réel, et aussitôt que nous l’avons cru, de nous accuser
348 divin du réel, et aussitôt que nous l’avons cru, de nous accuser de contravention devant le Juge. Ainsi la morale laïque,
349 et aussitôt que nous l’avons cru, de nous accuser de contravention devant le Juge. Ainsi la morale laïque, morale du devoi
350 ersonnel, nous accuse et nous prive en même temps de tout recours à Celui qui pardonne. Elle ne laisse aux meilleures de s
351 Celui qui pardonne. Elle ne laisse aux meilleures de ses victimes que l’héroïsme autosadique de la révolte. 11. Légion
352 leures de ses victimes que l’héroïsme autosadique de la révolte. 11. Légion Enfin, la Bible appelle le diable : Légi
353 e le diable : Légion. Ici nous n’en finirions pas de commenter, conformément à la nature du sujet. Bornons-nous à marquer
354 du sujet. Bornons-nous à marquer trois directions de pensée : nous les suivrons tout au travers du livre. Si le diable est
355 bord que tout en étant un, il peut revêtir autant d’ aspects divers qu’il y a d’individus de par le monde. Mais cela peut s
356 il peut revêtir autant d’aspects divers qu’il y a d’ individus de par le monde. Mais cela peut signifier aussi que le diabl
357 ne en particulier. Et ceci nous ramène au premier de ses tours, qui était de nous faire douter de son existence même. Le n
358 ci nous ramène au premier de ses tours, qui était de nous faire douter de son existence même. Le nom de Légion évoque par
359 mier de ses tours, qui était de nous faire douter de son existence même. Le nom de Légion évoque par ailleurs le mythe hel
360 e nous faire douter de son existence même. Le nom de Légion évoque par ailleurs le mythe hellénique de Protée. Nous venons
361 de Légion évoque par ailleurs le mythe hellénique de Protée. Nous venons d’énumérer les rôles principaux que le diable rev
362 lleurs le mythe hellénique de Protée. Nous venons d’ énumérer les rôles principaux que le diable revêt dans la Bible : ils
363 s sont tous, en quelque manière, des déguisements de son malheur originel. Satan craint de se montrer tel qu’il est, c’est
364 éguisements de son malheur originel. Satan craint de se montrer tel qu’il est, c’est évident, puisqu’il craint même d’exis
365 l qu’il est, c’est évident, puisqu’il craint même d’ exister à nos yeux. Il ne présentera donc aux hommes que des masques t
366 e cette ruse. Pourquoi sommes-nous parfois tentés de vivre par délégation, et sous un masque ? Parce que cela permet à not
367 un masque ? Parce que cela permet à notre vanité de se satisfaire malgré nous, malgré nos exigences réelles et bien au-de
368 ous, malgré nos exigences réelles et bien au-delà de nos possibilités. Chose étrange, nous sommes ainsi faits que nous nou
369 es ainsi faits que nous nous prévalons intimement d’ un succès remporté « sous le masque », tandis que nous attribuerons au
370 . Nous sommes prêts à nous approprier les mérites d’ un bien dont nous n’avons été que les acteurs, alors que nous nous emp
371 é que les acteurs, alors que nous nous empressons de projeter sur les Choses, le Destin, ou les Autres, un mal dont les ra
372 les racines sont réellement en nous. Ainsi chacun de nous, en tant que patriote, se sent flatté par une victoire nationale
373 euls chefs. Ici le diable joue avec notre terreur de nous reconnaître responsables de nos vies. Autrefois il avait recours
374 ec notre terreur de nous reconnaître responsables de nos vies. Autrefois il avait recours au déguisement vestimentaire. Au
375 n rôle dans l’impunité. Le monde actuel est plein d’ individus qui portent à l’intérieur un costume de louage. Ils se cache
376 d’individus qui portent à l’intérieur un costume de louage. Ils se cachent à leurs propres yeux. Comment connaîtraient-il
377 e déchu nous dit : je suis ton ciel, il n’y a pas d’ autre espérance. Le Prince de ce monde nous dit : il n’y a pas d’autre
378 n ciel, il n’y a pas d’autre espérance. Le Prince de ce monde nous dit : il n’y a pas d’autre monde. Le Tentateur nous dit
379 ce. Le Prince de ce monde nous dit : il n’y a pas d’ autre monde. Le Tentateur nous dit : il n’y a point de juge. L’Accusat
380 tre monde. Le Tentateur nous dit : il n’y a point de juge. L’Accusateur nous dit : il n’y a point de pardon. Le Menteur ré
381 t de juge. L’Accusateur nous dit : il n’y a point de pardon. Le Menteur résume tout en nous offrant un monde sans obligati
382 s, fermé sur soi mais recréé sans cesse à l’image de nos complaisances : il n’y a pas de réalité. Enfin Légion dit le dern
383 sse à l’image de nos complaisances : il n’y a pas de réalité. Enfin Légion dit le dernier blasphème : il n’y a Personne.
384 : il n’y a Personne. Le monde moderne (et chacun de nous en lui) dans la mesure où il cultive un rêve de déification de l
385 nous en lui) dans la mesure où il cultive un rêve de déification de l’homme par sa science ; où il nie toute transcendance
386 ns la mesure où il cultive un rêve de déification de l’homme par sa science ; où il nie toute transcendance ; où il s’enfe
387 ranscendance ; où il s’enferme dans les autarcies de la puissance et de la passion ; où il noie finalement la vocation de
388 l s’enferme dans les autarcies de la puissance et de la passion ; où il noie finalement la vocation de la personne dans l’
389 de la passion ; où il noie finalement la vocation de la personne dans l’anonyme irresponsable, — le monde moderne (et chac
390 nyme irresponsable, — le monde moderne (et chacun de nous en lui) se rend à la loi de Satan. Mais, du même coup, il devien
391 derne (et chacun de nous en lui) se rend à la loi de Satan. Mais, du même coup, il devient incapable de connaître celui qu
392 e Satan. Mais, du même coup, il devient incapable de connaître celui qu’il sert ! Satan veut nous faire croire qu’il n’y a
393 rt ! Satan veut nous faire croire qu’il n’y a pas d’ autre monde. Si nous le croyons, il se trouve qu’aussitôt nous ne pouv
394 ns plus croire à Dieu ni à Satan ! S’il n’y a pas de ciel, comme nous le dit Satan, il n’y a pas non plus d’enfer, ni de M
395 l, comme nous le dit Satan, il n’y a pas non plus d’ enfer, ni de Maître de l’enfer. S’il n’y a pas de juge, il n’y a pas n
396 s le dit Satan, il n’y a pas non plus d’enfer, ni de Maître de l’enfer. S’il n’y a pas de juge, il n’y a pas non plus de f
397 atan, il n’y a pas non plus d’enfer, ni de Maître de l’enfer. S’il n’y a pas de juge, il n’y a pas non plus de faute ni d’
398 d’enfer, ni de Maître de l’enfer. S’il n’y a pas de juge, il n’y a pas non plus de faute ni d’Auteur du mal. S’il n’y a p
399 er. S’il n’y a pas de juge, il n’y a pas non plus de faute ni d’Auteur du mal. S’il n’y a pas de vérité, il n’y a pas non
400 a pas de juge, il n’y a pas non plus de faute ni d’ Auteur du mal. S’il n’y a pas de vérité, il n’y a pas non plus de mens
401 plus de faute ni d’Auteur du mal. S’il n’y a pas de vérité, il n’y a pas non plus de mensonge ni de Menteur. S’il n’y a p
402 . S’il n’y a pas de vérité, il n’y a pas non plus de mensonge ni de Menteur. S’il n’y a personne, enfin, il n’y a pas non
403 s de vérité, il n’y a pas non plus de mensonge ni de Menteur. S’il n’y a personne, enfin, il n’y a pas non plus lui ! Ains
404 photographes, et qu’on le prive ainsi du bénéfice de l’attaque par surprise, sa tactique favorite. Nous avons donc soumis
405 ique favorite. Nous avons donc soumis l’incognito de Satan au réactif de la Révélation, qui le rend visible à l’œil spirit
406 avons donc soumis l’incognito de Satan au réactif de la Révélation, qui le rend visible à l’œil spirituel. Comment va-t-il
407 le conçoivent les prédicateurs et les moralistes d’ aujourd’hui. Ce serait un excellent calcul, pour les deux raisons que
408 rions induits à croire que le diable n’est « rien d’ autre » qu’une figuration naïve du péché ; en second lieu, nous n’auri
409 éché ; en second lieu, nous n’aurions plus l’idée d’ aller chercher le diable dans nos vertus. En vérité, le diable n’est p
410 ions beaucoup plus prudents. Son astuce sera donc de se rendre invisible au sein même de nos vraies tentations. C’est là q
411 uce sera donc de se rendre invisible au sein même de nos vraies tentations. C’est là qu’il va montrer patte blanche, comme
412 dans des fantaisies ridicules, bien loin du lieu de son action réelle. N’avez-vous pas connu de ces dames charmantes qui
413 lieu de son action réelle. N’avez-vous pas connu de ces dames charmantes qui se récrient dès qu’on parle du diable : — C’
414 s avec passion, et n’ont en général aucune espèce de trouble de conscience. Elles ne conçoivent pas le diable comme l’inst
415 ion, et n’ont en général aucune espèce de trouble de conscience. Elles ne conçoivent pas le diable comme l’instigateur de
416 s ne conçoivent pas le diable comme l’instigateur de leurs péchés, mais comme une sorte d’apparition de cauchemar, qui por
417 instigateur de leurs péchés, mais comme une sorte d’ apparition de cauchemar, qui porte malheur et qui leur veut du mal. El
418 e leurs péchés, mais comme une sorte d’apparition de cauchemar, qui porte malheur et qui leur veut du mal. Elles ne se dou
419 ieur à nos fautes, celui-là n’est vraiment « rien d’ autre » qu’une projection, hors de nous-mêmes, du péché dont nous somm
420 dont nous sommes les auteurs et que nous refusons d’ assumer. Ce subterfuge de l’inconscient n’a d’autre but que de nous ex
421 urs et que nous refusons d’assumer. Ce subterfuge de l’inconscient n’a d’autre but que de nous exonérer d’une part honteus
422 ons d’assumer. Ce subterfuge de l’inconscient n’a d’ autre but que de nous exonérer d’une part honteuse de nous-mêmes. Si l
423 e subterfuge de l’inconscient n’a d’autre but que de nous exonérer d’une part honteuse de nous-mêmes. Si le résultat nous
424 utre but que de nous exonérer d’une part honteuse de nous-mêmes. Si le résultat nous apparaît étrange et fantastique, c’es
425 es spirituels mieux réveillés : « Pourquoi parler d’ un diable personnel ? Nous voyons bien le péché, mais pas le diable. N
426 i, le diable au lieu de se distinguer abusivement de notre péché, a choisi de se confondre avec lui au point qu’on croie c
427 e distinguer abusivement de notre péché, a choisi de se confondre avec lui au point qu’on croie cette abstraction plus vra
428 e mythique. Le tour est subtil et requiert un peu d’ astuce spirituelle, de notre part, pour le déjouer. Certes, le péché é
429 t subtil et requiert un peu d’astuce spirituelle, de notre part, pour le déjouer. Certes, le péché étant devenu notre seco
430 notre seconde nature, il peut sembler qu’il agit de soi-même et sans Auteur, en vertu d’une espèce d’inertie ou de force
431 de soi-même et sans Auteur, en vertu d’une espèce d’ inertie ou de force de l’habitude. Une coutume du mal nous habite, que
432 t sans Auteur, en vertu d’une espèce d’inertie ou de force de l’habitude. Une coutume du mal nous habite, que l’on pourrai
433 teur, en vertu d’une espèce d’inertie ou de force de l’habitude. Une coutume du mal nous habite, que l’on pourrait nommer
434 est-à-dire à commettre des péchés, qui n’ont rien de très mystérieux et sont exactement catalogués : lâchetés et mensonges
435 ctement catalogués : lâchetés et mensonges, actes d’ orgueil ou d’égoïsme, vols, trahisons et méchancetés de toute espèce.
436 ogués : lâchetés et mensonges, actes d’orgueil ou d’ égoïsme, vols, trahisons et méchancetés de toute espèce. Il est possib
437 ueil ou d’égoïsme, vols, trahisons et méchancetés de toute espèce. Il est possible que le diable en personne ne se dérange
438 ne se dérange pas pour si peu. Comme un directeur de journal qui ne fait pas les chiens écrasés, se réservant pour les gra
439 rasés, se réservant pour les grandes catastrophes de la politique mondiale. Voici cependant où l’on verra percer le bout d
440 ale. Voici cependant où l’on verra percer le bout de son oreille pointue : c’est au moment précis où le péché n’est plus r
441 et veut se justifier. Dans les mécanismes hérités de nos petits péchés quotidiens, nous sentons quelquefois intervenir com
442 us sentons quelquefois intervenir comme un moment d’ accélération panique : c’est lui ! Tout d’un coup, les choses s’aggrav
443 moment d’accélération panique : c’est lui ! Tout d’ un coup, les choses s’aggravent et s’embrouillent, vous ne savez pourq
444 plus le bien du mal, le faux du vrai, la charité de la cruauté : c’est lui qui a pris le jeu en main ! C’est lui qui inve
445 abituel en une « vertu » délirante, en un vertige de fausse innocence, en une exaltation de puissance destructive. C’est l
446 un vertige de fausse innocence, en une exaltation de puissance destructive. C’est lui qui crée les situations extrêmes, sa
447 crée les situations extrêmes, sans issue. Les cas de ce genre seront les seuls où j’essaierai de décrire l’action du diabl
448 s cas de ce genre seront les seuls où j’essaierai de décrire l’action du diable dans nos péchés catalogués8. Pour les autr
449 prédicateurs, législateurs ou dictateurs chargés de nous rappeler les règlements. Je compte me livrer désormais à un spor
450 au diable dans nos idéaux et dans l’insignifiance de nos actes. Et ce n’est point par amour du paradoxe, mais au contraire
451 iable ne peut agir que dans le bien, par le moyen de nos vertus. Car nous savons qu’il ne peut rien créer, pas même le cha
452 avons qu’il ne peut rien créer, pas même le champ de son action. Il ne peut donc que tordre et déformer ce qui existe et f
453 t bien fait par Dieu. Nos vices mêmes ne sont pas de véritables créations du diable, mais seulement des vertus mal orienté
454 lement des vertus mal orientées. Le sens originel de leur élan, gauchi ou inverti par notre orgueil et par l’inertie de no
455 chi ou inverti par notre orgueil et par l’inertie de nos âmes, devient presque invisible à la conscience humaine. Un vice,
456 ous avions le choix entre l’usage légal et l’abus de ce bien. Si donc j’évite d’aller chercher le diable là où chacun s’at
457 usage légal et l’abus de ce bien. Si donc j’évite d’ aller chercher le diable là où chacun s’attend à le trouver, dans les
458 es mauvais lieux des faubourgs ou dans les bouges de notre vie privée, qu’on n’y voie de ma part nul désir de surprendre.
459 ns les bouges de notre vie privée, qu’on n’y voie de ma part nul désir de surprendre. Tout simplement, le diable habite ai
460 e vie privée, qu’on n’y voie de ma part nul désir de surprendre. Tout simplement, le diable habite ailleurs en temps norma
461 rative du camouflage, obéissant au principe fatal de son existence empruntée et parasitaire, il a choisi pour domicile per
462 onfondu Un dernier mot sur la réalité mythique de Satan : Je voudrais corriger par la vertu d’un doute les conclusions
463 ique de Satan : Je voudrais corriger par la vertu d’ un doute les conclusions trop rationnelles encore qu’un lecteur peut t
464 lles encore qu’un lecteur peut tirer, malgré moi, de ces pages. Dès que vous croyez apercevoir le diable, parce qu’il en a
465 qu’il en a fait un peu trop, dès que vous tentez de le démasquer dans le péché, il vous égare en vous faisant dire par le
466 t social insuffisant. Nous ne sommes responsables de rien. Nous ne sommes pas méchants, mais malades… La psychanalyse, con
467 onsciente — peut être définie comme une tentative de ramener le péché et le Mal à des mécanismes subjectifs, dont le médec
468 e dans les cornues des alchimistes. Nous essayons de dissoudre le diable dans les eaux troubles du subconscient. Ce n’est
469 t encore qu’une variante scientifique du sophisme de l’incognito. Point de diable aux yeux des freudiens, mais seulement u
470 te scientifique du sophisme de l’incognito. Point de diable aux yeux des freudiens, mais seulement une croyance au diable,
471 mais seulement une croyance au diable, résultant de la « projection » d’un sentiment de culpabilité. Guérissez ce sentime
472 royance au diable, résultant de la « projection » d’ un sentiment de culpabilité. Guérissez ce sentiment-là, vous n’aurez p
473 le, résultant de la « projection » d’un sentiment de culpabilité. Guérissez ce sentiment-là, vous n’aurez plus de croyance
474 ité. Guérissez ce sentiment-là, vous n’aurez plus de croyance au diable, ni donc de diable. Le démon ne serait qu’une imag
475 vous n’aurez plus de croyance au diable, ni donc de diable. Le démon ne serait qu’une image de névrose, quelque chose qui
476 i donc de diable. Le démon ne serait qu’une image de névrose, quelque chose qui se soigne, se guérit, et s’évanouit au ter
477 me du traitement. On ne demanderait pas mieux que d’ y croire. Mais les psychanalystes et les Christian Scientists eux-même
478 ur l’homme torturé par ses complexes. Or la chute de l’ange Lucifer est justement l’Accident absolu qui survint dans l’his
479 ènes occultes, le grand psychanalyste se contenta de répondre par l’anecdote suivante. Un jour une dame vient le trouver à
480 oiture fermée. Jugeant elle-même qu’il s’agissait d’ une hallucination, elle demandait à Jung de la traiter. Chacun sait ce
481 issait d’une hallucination, elle demandait à Jung de la traiter. Chacun sait ce qu’un oiseau veut dire9. Le cas paraissait
482 ussitôt. Après deux ou trois mois, l’état général de cette dame s’était notablement amélioré. Elle dormait mieux, l’appéti
483 finalement se résolvaient selon toutes les règles de l’art. Mais toujours rien ne se manifestait, qui parût se rapporter d
484 rs rien ne se manifestait, qui parût se rapporter de près ou de loin au mystère des oiseaux agresseurs. Un an s’écoula, sa
485 se manifestait, qui parût se rapporter de près ou de loin au mystère des oiseaux agresseurs. Un an s’écoula, sans progrès.
486 ecin commençait à désespérer, il envisageait même d’ abandonner la cure. (Et vous savez pourtant si rien n’égale la patienc
487 t vous savez pourtant si rien n’égale la patience d’ un psychanalyste !) Enfin, par un beau jour d’été, la malade vint pour
488 nce d’un psychanalyste !) Enfin, par un beau jour d’ été, la malade vint pour une dernière tentative. Il faisait une chaleu
489 ride. Jung possède une villa sur les rives du lac de Zurich. Il proposa que la séance eût lieu dans un petit pavillon au b
490 es oiseaux l’attaquaient ! » 2. Dans son livre De Praestigiis Daemonium publié en 1568, Jean Wier arrive à la conclusio
491 ces et 7 405 926 diables, divisés en 1111 légions de 6666 suppôts chacune, « sauf erreur de calcul », ajoute-t-il. 3. Le
492 11 légions de 6666 suppôts chacune, « sauf erreur de calcul », ajoute-t-il. 3. Le Lucifer qui apparaît pour la première f
493 du symbole. 4. Genèse 3, 1-5. 5. Dans le Livre d’ Énoch, antérieur à la Genèse, il est dit que les mauvais anges qui des
494 aux humains enseignèrent à ceux-ci des artifices de magie et d’artisanat, les propriétés des racines, mais aussi l’art de
495 enseignèrent à ceux-ci des artifices de magie et d’ artisanat, les propriétés des racines, mais aussi l’art de se farder e
496 nat, les propriétés des racines, mais aussi l’art de se farder et l’art des armes. C’était apprendre aux hommes à se faire
497 erts sur les pouvoirs que leur offrait la faculté de créer, c’est-à-dire de choisir librement et d’orienter leur choix ver
498 ue leur offrait la faculté de créer, c’est-à-dire de choisir librement et d’orienter leur choix vers l’obéissance confiant
499 té de créer, c’est-à-dire de choisir librement et d’ orienter leur choix vers l’obéissance confiante — suivant la voie trac
500 ivant la voie tracée par Dieu — ou vers une sorte de défi anxieux — suivant la voie de la divinisation suggérée par l’Aspi
501 vers une sorte de défi anxieux — suivant la voie de la divinisation suggérée par l’Aspic de l’orgueil. 6. Genèse 3, 6.
502 t la voie de la divinisation suggérée par l’Aspic de l’orgueil. 6. Genèse 3, 6. 7. Shakespeare, Twelfth Night II. 2. 8
503 9. Symbole du sexe masculin selon Freud. Symbole de l’esprit dans un grand nombre de mythologies. L’instinct ou l’esprit
504 n Freud. Symbole de l’esprit dans un grand nombre de mythologies. L’instinct ou l’esprit négligés, refoulés, viennent se v
505 ligés, refoulés, viennent se venger par le détour d’ une agression symbolique : dans nos cauchemars par exemple.
3 1942, La Part du diable (1982). Deuxième partie. Hitler ou l’alibi
506 eHitler ou l’alibi 15. Où paraît la nécessité d’ un alibi Il est étrange de constater que depuis la fin du Moyen Âge
507 paraît la nécessité d’un alibi Il est étrange de constater que depuis la fin du Moyen Âge, depuis que Luther lui jeta
508 it peut-être reconnu précisément sous les espèces de l’encre d’imprimerie, lorsqu’il notait qu’on ne peut plus prêcher uti
509 e reconnu précisément sous les espèces de l’encre d’ imprimerie, lorsqu’il notait qu’on ne peut plus prêcher utilement le c
510 sse quotidienne. Toutefois, l’incognito du Prince de ce monde devint difficile à maintenir au cours du premier tiers de no
511 t difficile à maintenir au cours du premier tiers de notre siècle, tandis que des catastrophes trop voyantes ébranlaient l
512 catastrophes trop voyantes ébranlaient les bases de notre optimisme et de notre foi naïve dans l’élimination progressive
513 antes ébranlaient les bases de notre optimisme et de notre foi naïve dans l’élimination progressive du mal par la Science
514 Science et la Prospérité. Sur nos têtes, au ciel de nos villes, de grands oiseaux tournaient avec un bourdonnement sinist
515 Prospérité. Sur nos têtes, au ciel de nos villes, de grands oiseaux tournaient avec un bourdonnement sinistre, et ces oise
516 cutaient à coup de bombes, qui ne prouvaient rien de ce qui était en cause. Ils somnolaient dans des églises presque aussi
517 somnolaient dans des églises presque aussi vides de fidèles que de foi. Ils épargnaient de l’argent pendant une vie pour
518 ns des églises presque aussi vides de fidèles que de foi. Ils épargnaient de l’argent pendant une vie pour le perdre en un
519 ussi vides de fidèles que de foi. Ils épargnaient de l’argent pendant une vie pour le perdre en une heure dans une Bourse
520 r, des bruits sans suite, cacophonie abrutissante de musiques de tous les siècles, interrompue par des discours emphatique
521 s sans suite, cacophonie abrutissante de musiques de tous les siècles, interrompue par des discours emphatiques et harcela
522 on avait renversé par système toutes les échelles de valeurs. Tout le monde était contre la guerre et tout le monde accept
523 était contre la guerre et tout le monde acceptait de la faire sur le slogan de « liberté », tandis que la police et l’État
524 tout le monde acceptait de la faire sur le slogan de « liberté », tandis que la police et l’État chaque jour étendaient le
525 la morale en pleine déroute, et le peuple vivait de cinéma comme il avait vécu de religion. — Si cela continue, se dit le
526 et le peuple vivait de cinéma comme il avait vécu de religion. — Si cela continue, se dit le diable, les hommes s’apercevr
527 plus trompeuse du mal qu’ils chérissent au secret de leur cœur, et qu’il faut leur faire croire qu’ils détestent. 16. L
528 ’il était simplement M. Adolf Hitler, et personne d’ autre. Ce fut son second tour. 17. Hitler est-il l’Antéchrist ?
529 Hitler est-il l’Antéchrist ? Je tiens l’action d’ Hitler pour plus réellement diabolique que ne l’imaginaient ceux qui o
530 serait peut-être un peu trop simple. Il suffirait de le supprimer pour supprimer tout le mal qui est dans ce monde. Et, qu
531 itler est le diable, nous faisons évidemment trop d’ honneur à l’ex-caporal autrichien ; mais surtout nous nous faisons ill
532 nous nous faisons illusion sur la réelle stature de Satan. N’oublions pas que Satan est Légion ! Supprimer un dictateur n
533 maux profonds qui la travaillent. Il me souvient d’ avoir entendu en Suisse, au début de la guerre, le grand théologien Ka
534 l me souvient d’avoir entendu en Suisse, au début de la guerre, le grand théologien Karl Barth répondre à la fameuse quest
535 e le trahit pas : — « Cet homme qu’il est inutile de nommer, et dont la censure d’ailleurs m’a fait oublier le nom, ce n’e
536 est certainement pas l’Antéchrist. Car il n’a pas de pouvoir sur notre salut éternel. Le véritable Antéchrist ne se révéle
537 cusateur impitoyable. Et alors nous n’aurons plus d’ autre intercesseur auprès de Dieu que Christ lui-même. Mais l’homme au
538 re qu’un petit monsieur, un premier avant-coureur de l’Antéchrist. Et la lutte qu’il mène contre les Églises et le monde c
539 ur » et cet avertissement, nous fûmes bien forcés de les prendre au sérieux ! Pour n’être pas le diable en personne, on pe
540 t de même passablement diabolique. Et je vois peu d’ aspects de l’action du Führer qui ne portent en évidence l’insigne sat
541 passablement diabolique. Et je vois peu d’aspects de l’action du Führer qui ne portent en évidence l’insigne satanique.
542 our l’avoir éprouvé en sa présence par une espèce de frisson d’horreur sacrée, qu’il était le siège d’une « domination »,
543 éprouvé en sa présence par une espèce de frisson d’ horreur sacrée, qu’il était le siège d’une « domination », d’un « trôn
544 de frisson d’horreur sacrée, qu’il était le siège d’ une « domination », d’un « trône » ou d’une « puissance », ainsi que s
545 acrée, qu’il était le siège d’une « domination », d’ un « trône » ou d’une « puissance », ainsi que saint Paul désigne les
546 le siège d’une « domination », d’un « trône » ou d’ une « puissance », ainsi que saint Paul désigne les esprits de second
547 sance », ainsi que saint Paul désigne les esprits de second rang, qui peuvent aussi déchoir dans un corps d’homme quelconq
548 ond rang, qui peuvent aussi déchoir dans un corps d’ homme quelconque et l’occuper comme une garnison. Je l’ai entendu pron
549 omme une garnison. Je l’ai entendu prononcer l’un de ses grands discours, et je l’ai vu à la sortie de son culte, debout d
550 t une rue étroite, mal éclairée. Une seule chaîne de SS le séparait de la foule. J’étais au premier rang, à deux mètres de
551 mal éclairée. Une seule chaîne de SS le séparait de la foule. J’étais au premier rang, à deux mètres de lui. Un bon tireu
552 la foule. J’étais au premier rang, à deux mètres de lui. Un bon tireur l’eût descendu très facilement. Mais ce bon tireur
553 dans cent occasions analogues. Voilà le principal de ce que je sais sur Hitler. On peut réfléchir là-dessus. Réfléchir ou
554 e tire pas sur un petit-bourgeois qui est le rêve de 60 millions d’hommes. On tire sur un tyran, ou sur un roi, mais les f
555 un petit-bourgeois qui est le rêve de 60 millions d’ hommes. On tire sur un tyran, ou sur un roi, mais les fondateurs de re
556 sur un tyran, ou sur un roi, mais les fondateurs de religion sont réservés à d’autres catastrophes. Certes, il y a des fo
557 astrophes. Certes, il y a des fous, des accidents de circulation et des erreurs de l’Histoire. Mais le Führer déclarait un
558 fous, des accidents de circulation et des erreurs de l’Histoire. Mais le Führer déclarait un jour : Je ne crains pas les R
559 e un homme qui dit cela. Qu’il soit un instrument de la Providence comme il l’affirme, ou qu’il soit un fléau de Dieu (c’e
560 idence comme il l’affirme, ou qu’il soit un fléau de Dieu (c’est une nuance !) son destin ne dépend plus des hommes, pas m
561 !) son destin ne dépend plus des hommes, pas même de l’homme Adolf Hitler. À plus forte raison, notre jugement sur lui doi
562 ite. Et cela définit un génie, au sens démoniaque de ce terme. D’où lui vient le pouvoir surhumain qu’il développe pendant
563 définit un génie, au sens démoniaque de ce terme. D’ où lui vient le pouvoir surhumain qu’il développe pendant un discours 
564 qu’il développe pendant un discours ? Une énergie de cette nature, on sent très bien qu’elle ne saurait se manifester qu’a
565 e l’individu ne compte plus, n’est que le support d’ une puissance qui échappe à nos psychologies. Ce que je dis là serait
566 ychologies. Ce que je dis là serait du romantisme de la plus déplorable espèce si l’œuvre accomplie par cet homme — et j’e
567 , ni intelligent. Il ne s’appartient pas, n’a pas de qualités propres, de vices ou de vertus, ni même de compte en banque,
568 ne s’appartient pas, n’a pas de qualités propres, de vices ou de vertus, ni même de compte en banque, et à peine un état c
569 ent pas, n’a pas de qualités propres, de vices ou de vertus, ni même de compte en banque, et à peine un état civil. Il est
570 qualités propres, de vices ou de vertus, ni même de compte en banque, et à peine un état civil. Il est le lieu de passage
571 banque, et à peine un état civil. Il est le lieu de passage des forces de l’Histoire, le catalyseur de ces forces qui déj
572 état civil. Il est le lieu de passage des forces de l’Histoire, le catalyseur de ces forces qui déjà sont dressées devant
573 e passage des forces de l’Histoire, le catalyseur de ces forces qui déjà sont dressées devant vous ; et après cela, vous p
574 cela, vous pouvez le supprimer sans rien détruire de ce qui s’est fait par lui. Qu’il y ait eu dans ces temps aveugles à t
575 elgruber habité par un trône… On a ri. On a cessé de rire. Et ce n’était pourtant qu’un petit envoyé… 19. Le Directeur
576 pourtant qu’un petit envoyé… 19. Le Directeur d’ inconscience L’hitlérisme s’est présenté à nous comme une catastrop
577 oire n’en connut depuis le Déluge. L’issue fatale de l’aventure n’affecte pas sa portée symbolique et son actualité profon
578 puissance dans l’âme humaine depuis la formation de la première société ; et il existera sans aucun doute jusqu’à la fin
579  ; et il existera sans aucun doute jusqu’à la fin de l’histoire de notre race. Hitler n’a fait que lui prêter figure et no
580 era sans aucun doute jusqu’à la fin de l’histoire de notre race. Hitler n’a fait que lui prêter figure et nom, à l’occasio
581 a fait que lui prêter figure et nom, à l’occasion d’ une de ses éruptions les plus violentes. Pour nous, contemporains d’un
582 que lui prêter figure et nom, à l’occasion d’une de ses éruptions les plus violentes. Pour nous, contemporains d’un parox
583 ions les plus violentes. Pour nous, contemporains d’ un paroxysme que nous avons souffert dans notre chair, il nous apparti
584 ons souffert dans notre chair, il nous appartient de laisser une description valable de ce phénomène, pour les générations
585 ous appartient de laisser une description valable de ce phénomène, pour les générations à venir. Je dis qu’avant la guerre
586 es générations à venir. Je dis qu’avant la guerre de 1939, la majorité des hommes savaient qu’Hitler était le nom d’un dés
587 jorité des hommes savaient qu’Hitler était le nom d’ un désastre imminent et mondial. Pourtant on ne l’a pas arrêté. Voilà
588 faut élucider. Replaçons-nous dans la situation de l’Europe à la veille de sa grande catastrophe. La question qui se pos
589 ns-nous dans la situation de l’Europe à la veille de sa grande catastrophe. La question qui se posait alors à l’inquiétude
590 e. La question qui se posait alors à l’inquiétude de quelques rares observateurs était la suivante : « Comment se peut-il
591 , des hommes et des femmes subissent la contagion de ce mal, changent subitement de visage, se raidissent, se ferment à to
592 ssent la contagion de ce mal, changent subitement de visage, se raidissent, se ferment à tout raisonnement, à toute discus
593 amentales sur lesquelles s’édifia la civilisation de l’Occident depuis des millénaires ? » Je me répondais de la manière s
594 cident depuis des millénaires ? » Je me répondais de la manière suivante. Hitler est assez démoniaque pour avoir su réveil
595 our avoir su réveiller nos démons, par une espèce de contagion, ou plutôt d’induction spirituelle. Son œuvre de tentateur
596 os démons, par une espèce de contagion, ou plutôt d’ induction spirituelle. Son œuvre de tentateur a consisté à priver les
597 ion, ou plutôt d’induction spirituelle. Son œuvre de tentateur a consisté à priver les individus du sentiment de leur resp
598 ur a consisté à priver les individus du sentiment de leur responsabilité morale, donc du sens de leur culpabilité. En les
599 iment de leur responsabilité morale, donc du sens de leur culpabilité. En les fondant dans une masse passionnée, il exalte
600 alte dans l’âme des plus déshérités une sensation de puissance invincible. Il leur répète les vieux slogans du diable : « 
601 serez comme des Dieux ! » En combattant le traité de Versailles, « cette Gorgone terrorisant le peuple allemand qui vivait
602 mand qui vivait désarmé et humilié sous le regard de ces milliers d’yeux » (Mein Kampf), il supprime le Juge, il supprime
603 désarmé et humilié sous le regard de ces milliers d’ yeux » (Mein Kampf), il supprime le Juge, il supprime la faute, il les
604 Juge, il supprime la faute, il les rend à l’état d’ innocence première. Enfin, en condamnant tout ce qui est universel ou
605 sion dans Wagner ; il réduit les masses à un état d’ hypnose, d’inconscience somnambulique, dans lequel le moins courageux
606 agner ; il réduit les masses à un état d’hypnose, d’ inconscience somnambulique, dans lequel le moins courageux sera capabl
607 ique, dans lequel le moins courageux sera capable d’ exécuter des actes étonnants d’énergie et de discipline mécanique, jus
608 ageux sera capable d’exécuter des actes étonnants d’ énergie et de discipline mécanique, jusqu’à la mort, terme idéal de to
609 pable d’exécuter des actes étonnants d’énergie et de discipline mécanique, jusqu’à la mort, terme idéal de toute passion.
610 iscipline mécanique, jusqu’à la mort, terme idéal de toute passion. Autrefois les hommes demandaient des directeurs de con
611 . Autrefois les hommes demandaient des directeurs de conscience. Mais la misère des temps et le sentiment d’impuissance qu
612 science. Mais la misère des temps et le sentiment d’ impuissance qu’éprouvent les individus dans notre monde démesuré, font
613 emandent et se donnent aujourd’hui des directeurs d’ inconscience collective. L’extraordinaire, l’effrayant, c’est de voir
614 collective. L’extraordinaire, l’effrayant, c’est de voir à quel point le Führer, le « guide », le directeur de l’inconsci
615 quel point le Führer, le « guide », le directeur de l’inconscience allemande, est en même temps conscient de ce qu’il fai
616 conscience allemande, est en même temps conscient de ce qu’il fait, maître de sa technique, lucide et froid comme le serpe
617 en même temps conscient de ce qu’il fait, maître de sa technique, lucide et froid comme le serpent ! Dans Mein Kampf, il
618 Mein Kampf, il donnait dès 1924 des descriptions d’ une surprenante précision du réveil des puissances souterraines qu’il
619 il des puissances souterraines qu’il se proposait d’ opérer. « Tous les grands mouvements de l’Histoire sont des éruptions
620 proposait d’opérer. « Tous les grands mouvements de l’Histoire sont des éruptions volcaniques de passions et de sensation
621 ents de l’Histoire sont des éruptions volcaniques de passions et de sensations spirituelles provoquées soit par la cruelle
622 ire sont des éruptions volcaniques de passions et de sensations spirituelles provoquées soit par la cruelle déesse de la M
623 pirituelles provoquées soit par la cruelle déesse de la Misère, soit par la torche de la parole jetée dans les masses. Seu
624 a cruelle déesse de la Misère, soit par la torche de la parole jetée dans les masses. Seule une tempête de passion brûlant
625 a parole jetée dans les masses. Seule une tempête de passion brûlante peut changer les destinées d’un peuple. » Surtout ne
626 te de passion brûlante peut changer les destinées d’ un peuple. » Surtout ne donnez pas de raisons aux masses, car de tous
627 es destinées d’un peuple. » Surtout ne donnez pas de raisons aux masses, car de tous temps « les forces qui ont produit le
628 Surtout ne donnez pas de raisons aux masses, car de tous temps « les forces qui ont produit les plus grands changements d
629 érie qui les pousse en avant ». Ailleurs il parle de « l’appel aux forces mystérieuses » qui pourra seul réduire les « obs
630 l’au-delà, parce qu’il limite l’empire du Prince de ce monde. Les âmes vont lui échapper s’il subsiste un recours à l’Éte
631 ui domine les pouvoirs terrestres. Il s’agit donc de supprimer l’idée d’au-delà, de transcendance ; d’intégrer Dieu lui-mê
632 rs terrestres. Il s’agit donc de supprimer l’idée d’ au-delà, de transcendance ; d’intégrer Dieu lui-même dans la Nation. C
633 es. Il s’agit donc de supprimer l’idée d’au-delà, de transcendance ; d’intégrer Dieu lui-même dans la Nation. Comprenons b
634 de supprimer l’idée d’au-delà, de transcendance ; d’ intégrer Dieu lui-même dans la Nation. Comprenons bien ce que signifie
635 nifie, dans cette perspective satanique, le terme d’ État totalitaire. Un régime est totalitaire lorsqu’il prétend central
636 rs en une religion politique, ou en une politique d’ allure religieuse. Et cela d’autant mieux que la religion qu’il adopte
637 ou en une politique d’allure religieuse. Et cela d’ autant mieux que la religion qu’il adopte ne connaît point de transcen
638 eux que la religion qu’il adopte ne connaît point de transcendance, et que ses buts purement terrestres non seulement ne d
639 non seulement ne divergent plus des buts normaux de la politique, mais se confondent avec ceux-ci. Alors il n’y a plus de
640 s se confondent avec ceux-ci. Alors il n’y a plus de recours, plus de pardon à espérer : la communauté spirituelle ne peut
641 vec ceux-ci. Alors il n’y a plus de recours, plus de pardon à espérer : la communauté spirituelle ne peut pas en appeler à
642 tique religieuse totalitaire, a créé le type même d’ une communauté régressive, fondée sur le passé : le sang, la race, la
643 on ne pourra jamais y entrer — si l’on n’est pas de sang aryen, par exemple — car cette religion n’admet pas que « les ch
644 es choses vieilles sont passées » selon la parole de l’Apôtre. Elle n’admet pas la conversion spirituelle, à partir de laq
645 quels sont tes morts ? Religion du sang, religion de la terre et des morts, religion sanglante et mortelle, religion des c
646 des morts, des cortèges funèbres, des cérémonies d’ imprécations, des sacrifices propitiatoires, le tam-tam des tambours l
647 propitiatoires, le tam-tam des tambours lugubres, d’ hallucinants sabbats de nègres blancs ! Qui oserait encore nous souten
648 tam des tambours lugubres, d’hallucinants sabbats de nègres blancs ! Qui oserait encore nous soutenir que ce délire représ
649 s le pardon, le futur éternel, le rachat du péché d’ origine ? 20. Midas prolétarien Le Prince de ce monde peut tout
650 d’origine ? 20. Midas prolétarien Le Prince de ce monde peut tout avoir du monde sauf son âme, qui en fait le sens e
651 er, battant l’Europe entière, n’a jamais pu jouir de sa victoire. Gagnant tout, il n’a rien gagné. Car les religions de la
652 agnant tout, il n’a rien gagné. Car les religions de la terre sont religions de la mort. Vieille vérité théologique, que l
653 gné. Car les religions de la terre sont religions de la mort. Vieille vérité théologique, que les malheurs du temps illust
654 n faire de plus. » Beaucoup ont découvert le sens de cette parole quand le Führer est entré dans Paris. Pour ma part, j’éc
655 rivis ce jour-là une page qui trouve ici son sens de parabole. À cette heure où Paris exsangue voile sa face d’un nuage,
656 . À cette heure où Paris exsangue voile sa face d’ un nuage, et se tait, que son deuil soit le deuil du monde ! Nous sent
657 sait : Si Paris est détruit, j’en perdrai le goût d’ être un Européen. La Ville Lumière n’est pas détruite : elle s’est éte
658 devant le sentiment, devant ce qui fait la valeur de la vie. Je songe au chef de guerre qui traverse aujourd’hui ces rues
659 ce qui fait la valeur de la vie. Je songe au chef de guerre qui traverse aujourd’hui ces rues les plus émouvantes du monde
660 nde : il ne les connaîtra jamais. Il ne verra que d’ aveugles façades. Il s’est privé à tout jamais de quelque chose d’irre
661 d’aveugles façades. Il s’est privé à tout jamais de quelque chose d’irremplaçable, de quelque chose qu’on peut tuer mais
662 es. Il s’est privé à tout jamais de quelque chose d’ irremplaçable, de quelque chose qu’on peut tuer mais qu’on ne peut con
663 é à tout jamais de quelque chose d’irremplaçable, de quelque chose qu’on peut tuer mais qu’on ne peut conquérir par la for
664 les servants des Panzerdivisionen. Quelque chose d’ indéfinissable et que nous appelions Paris. C’est ici l’impuissance tr
665 appelions Paris. C’est ici l’impuissance tragique de ce conquérant victorieux : tout ce qu’il veut saisir se change à son
666 u’il veut saisir se change à son approche — Midas de l’ère prolétarienne — en fer tordu, en pierraille lépreuse. « N’impor
667 , en pierraille lépreuse. « N’importe quel badaud d’ un soir de juin pouvait s’annexer pour toujours le bonheur d’un coucha
668 aille lépreuse. « N’importe quel badaud d’un soir de juin pouvait s’annexer pour toujours le bonheur d’un couchant sur Sai
669 e juin pouvait s’annexer pour toujours le bonheur d’ un couchant sur Saint-Germain-des-Prés, le grisant glissement de la fo
670 sur Saint-Germain-des-Prés, le grisant glissement de la foule de l’Arc aux Chevaux de Marly, les siècles de grandeur, de m
671 rmain-des-Prés, le grisant glissement de la foule de l’Arc aux Chevaux de Marly, les siècles de grandeur, de misère, de sa
672 isant glissement de la foule de l’Arc aux Chevaux de Marly, les siècles de grandeur, de misère, de sagesse, dont le visage
673 foule de l’Arc aux Chevaux de Marly, les siècles de grandeur, de misère, de sagesse, dont le visage de cette capitale plu
674 rc aux Chevaux de Marly, les siècles de grandeur, de misère, de sagesse, dont le visage de cette capitale plus douce et pl
675 aux de Marly, les siècles de grandeur, de misère, de sagesse, dont le visage de cette capitale plus douce et plus fière qu
676 e grandeur, de misère, de sagesse, dont le visage de cette capitale plus douce et plus fière qu’aucune autre portait les t
677 s pas un conquérant. La confrontation stupéfiante de cet homme et de cette Ville était peut-être nécessaire pour faire com
678 ant. La confrontation stupéfiante de cet homme et de cette Ville était peut-être nécessaire pour faire comprendre au monde
679 bles. On ne conquiert pas avec des chars les dons de l’âme et les raisons de vivre dont on manque. Qu’ils fassent dix fois
680 s avec des chars les dons de l’âme et les raisons de vivre dont on manque. Qu’ils fassent dix fois le tour du monde ! Ils
681 e. Jusqu’au jour bien plus terrifiant que le jour de la pire vengeance où, s’arrêtant enfin, ils comprendront qu’aucun tri
682 ar ils ne savent ce qu’ils font. 21. Le Fléau de Dieu S’ils ne savent pas ce qu’ils font, pitié pour eux, sans dout
683 nt pas. Et le national-socialisme nous enseignait de le mépriser. Ce n’est pas l’aspect le moins diabolique de l’œuvre du
684 priser. Ce n’est pas l’aspect le moins diabolique de l’œuvre du Führer, que le caractère de châtiment sans pitié des faibl
685 diabolique de l’œuvre du Führer, que le caractère de châtiment sans pitié des faiblesses du monde moderne, qu’a revêtu la
686 violence hitlérienne. La tactique et la stratégie d’ Hitler furent en sommes très simples. Il est apparu dans le monde comm
687 e qui entrerait dans une maison et qui essaierait d’ ébranler tous les meubles. Si le meuble résiste, on n’insiste pas. Si
688 rdon. Il a été le châtiment automatique, l’Attila de notre civilisation, — son Fléau de Dieu. Mais cette absence de pitié,
689 ique, l’Attila de notre civilisation, — son Fléau de Dieu. Mais cette absence de pitié, justement, nous rappelle l’un des
690 lisation, — son Fléau de Dieu. Mais cette absence de pitié, justement, nous rappelle l’un des noms du diable que nous citi
691 en les justifications qu’il en donna, et l’espèce de douceur médiumnique dont il la revêtit aux yeux de son peuple. De l’a
692 mnique dont il la revêtit aux yeux de son peuple. De l’aventure connue sous le nom d’hitlérisme, dégageons maintenant des
693 x de son peuple. De l’aventure connue sous le nom d’ hitlérisme, dégageons maintenant des conclusions valables pour bien d’
694 s conclusions valables pour bien d’autres époques de l’histoire. Ce n’est pas d’envahir un petit pays qui est diabolique,
695 bien d’autres époques de l’histoire. Ce n’est pas d’ envahir un petit pays qui est diabolique, cela s’est fait de tous les
696 un petit pays qui est diabolique, cela s’est fait de tous les temps, c’était si l’on peut dire, égoïsme normal, soif de ri
697 , c’était si l’on peut dire, égoïsme normal, soif de richesses, vulgaire impérialisme ; ce qui est diabolique, c’est d’app
698 gaire impérialisme ; ce qui est diabolique, c’est d’ appeler cela « consolider la paix » ou « fonder le nouvel ordre ». Ce
699 aix » ou « fonder le nouvel ordre ». Ce n’est pas d’ annexer la Tchécoslovaquie qui est diabolique, mais c’est de le faire
700 la Tchécoslovaquie qui est diabolique, mais c’est de le faire au lendemain d’un discours où l’on invoque « le droit des pe
701 t diabolique, mais c’est de le faire au lendemain d’ un discours où l’on invoque « le droit des peuples à disposer d’eux-mê
702 où l’on invoque « le droit des peuples à disposer d’ eux-mêmes ». Ce n’est pas de transformer le territoire du voisin en ch
703 es peuples à disposer d’eux-mêmes ». Ce n’est pas de transformer le territoire du voisin en champ de carnage et de bombard
704 s de transformer le territoire du voisin en champ de carnage et de bombardement, mais c’est d’appeler ce champ de mort « e
705 er le territoire du voisin en champ de carnage et de bombardement, mais c’est d’appeler ce champ de mort « espace vital ».
706 n champ de carnage et de bombardement, mais c’est d’ appeler ce champ de mort « espace vital ». Ce n’est pas de violer les
707 et de bombardement, mais c’est d’appeler ce champ de mort « espace vital ». Ce n’est pas de violer les traités, mais c’est
708 r ce champ de mort « espace vital ». Ce n’est pas de violer les traités, mais c’est de vouloir s’innocenter en proclamant
709 ». Ce n’est pas de violer les traités, mais c’est de vouloir s’innocenter en proclamant en tête d’un nouveau Code : « Le D
710 est de vouloir s’innocenter en proclamant en tête d’ un nouveau Code : « Le Droit est ce qui sert le peuple allemand. » Ce
711 st ce qui sert le peuple allemand. » Ce n’est pas d’ attaquer les Églises, mais c’est de le faire en nationalisant la Provi
712 » Ce n’est pas d’attaquer les Églises, mais c’est de le faire en nationalisant la Providence, et en son nom. Ce qui est pr
713 om. Ce qui est proprement diabolique, c’est moins de faire le mal que de le baptiser bien, quand on le fait. C’est de vide
714 ement diabolique, c’est moins de faire le mal que de le baptiser bien, quand on le fait. C’est de vider tous les mots de l
715 que de le baptiser bien, quand on le fait. C’est de vider tous les mots de leur sens, de les retourner et de les lire à r
716 n, quand on le fait. C’est de vider tous les mots de leur sens, de les retourner et de les lire à rebours, selon la coutum
717 fait. C’est de vider tous les mots de leur sens, de les retourner et de les lire à rebours, selon la coutume des messes n
718 r tous les mots de leur sens, de les retourner et de les lire à rebours, selon la coutume des messes noires. C’est d’inver
719 ebours, selon la coutume des messes noires. C’est d’ invertir et de ruiner par l’intérieur les critères mêmes de la vérité.
720 la coutume des messes noires. C’est d’invertir et de ruiner par l’intérieur les critères mêmes de la vérité. Et c’est enfi
721 r et de ruiner par l’intérieur les critères mêmes de la vérité. Et c’est enfin d’aller loger le mensonge, de préférence, d
722 r les critères mêmes de la vérité. Et c’est enfin d’ aller loger le mensonge, de préférence, dans une parole de vérité !
723 vérité. Et c’est enfin d’aller loger le mensonge, de préférence, dans une parole de vérité ! 23. Après Hitler10 Hit
724 loger le mensonge, de préférence, dans une parole de vérité ! 23. Après Hitler10 Hitler s’est tu. L’aventure a pris
725 a catastrophe prévue. Et devant le cadavre gisant de l’homme qui fit trembler tout l’univers, voici que nous nous écrions
726 que nous nous écrions avec une stupéfaction mêlée de honte : « Comme il était petit ! » Il n’était grand, comme Satan lui-
727 t ! » Il n’était grand, comme Satan lui-même, que de la grandeur de nos misères secrètes. En Hitler, le diable avait trouv
728 t grand, comme Satan lui-même, que de la grandeur de nos misères secrètes. En Hitler, le diable avait trouvé l’alibi le pl
729 plan stratégique du Malin ? Comment va-t-il tirer de sa défaite les avantages qu’il ne pouvait attendre d’une victoire par
730 a défaite les avantages qu’il ne pouvait attendre d’ une victoire par délégation ? Voyez-le, qui se frotte les mains. La pa
731 roulement fatal du siècle — et le miracle continu de la charité sera seul cause d’une création de liberté qui le démente.
732 le miracle continu de la charité sera seul cause d’ une création de liberté qui le démente. Après Hitler, après la guerre
733 tinu de la charité sera seul cause d’une création de liberté qui le démente. Après Hitler, après la guerre et la victoire,
734 tler, après la guerre et la victoire, les peuples de la terre vont s’éveiller dans un lendemain d’ivresse, une gueule de b
735 les de la terre vont s’éveiller dans un lendemain d’ ivresse, une gueule de bois mondiale. — Que se passe-t-il ? J’ai trop
736 ’éveiller dans un lendemain d’ivresse, une gueule de bois mondiale. — Que se passe-t-il ? J’ai trop bu cette nuit. Coups e
737 ’attend comme une chemise douteuse sur le dossier de ma chaise. Tout me dégoûte. Pour guérir cette nausée, il n’y aurait r
738 ûte. Pour guérir cette nausée, il n’y aurait rien de tel qu’un reste de bouteille… Combien de peuples voudront boire encor
739 tte nausée, il n’y aurait rien de tel qu’un reste de bouteille… Combien de peuples voudront boire encore ? Encore un petit
740 ait rien de tel qu’un reste de bouteille… Combien de peuples voudront boire encore ? Encore un petit coup de dictature, ju
741 ples voudront boire encore ? Encore un petit coup de dictature, juste assez pour se remettre sur pied… Viendront alors le
742 éticiens. Ils prescriront divers régimes : régime d’ autorité pour nations convalescentes relevant d’une intoxication total
743 e d’autorité pour nations convalescentes relevant d’ une intoxication totalitaire ; régime de la bouteille de lait distribu
744 relevant d’une intoxication totalitaire ; régime de la bouteille de lait distribuée par l’État pour peuples relevant de l
745 intoxication totalitaire ; régime de la bouteille de lait distribuée par l’État pour peuples relevant de la famine ; régim
746 lait distribuée par l’État pour peuples relevant de la famine ; régime clérical modéré pour démocraties non communistes ;
747 modéré pour démocraties non communistes ; un peu d’ American way of life pour les pays latins, un peu de diplomatie vatica
748 au scepticisme général, combinés avec une espèce de soulagement physiologique. Mais dans les peuples régnera l’Ennui. Vie
749 on défaut, Hitler l’aurait fait voir par le moyen de cette religion synthétique (comme le caoutchouc) que fut le national-
750 lisme. Je ne parle pas ici du christianisme, mais de la religion en général comme phénomène humain, cause et produit de to
751 général comme phénomène humain, cause et produit de toute communauté vivante. Je parle d’un instinct aussi fondamental et
752 et produit de toute communauté vivante. Je parle d’ un instinct aussi fondamental et naturel que la sexualité. Il est inco
753 des Occidentaux. Car non content de combattre et d’ évacuer les coutumes religieuses périmées (c’était son droit et son de
754 ez une sécheresse générale, nécessairement suivie d’ une rupture de digues et de l’irruption catastrophique des forces somb
755 sse générale, nécessairement suivie d’une rupture de digues et de l’irruption catastrophique des forces sombres dans la ci
756 nécessairement suivie d’une rupture de digues et de l’irruption catastrophique des forces sombres dans la cité. La raison
757 enchaîner. Si elle détruit tous les moyens connus de les apprivoiser, et prohibe la recherche hasardeuse de moyens nouveau
758 s apprivoiser, et prohibe la recherche hasardeuse de moyens nouveaux, elle fait lever des monstres autour de nous. Imagino
759 s avions en masse et par ce moyen-là venir à bout d’ Hitler ; mais il ne pourra prévenir la multiplication prochaine d’autr
760 ir la multiplication prochaine d’autres symptômes de la même névrose. Tout porte à croire que nous allons entrer dans une
761 orte à croire que nous allons entrer dans une ère de religions aberrantes. Ou comme le dit une grande légende indienne, da
762 me le dit une grande légende indienne, dans l’ère de l’Accroissement des Monstres. Les pires sottises et les thaumaturgies
763 s sains des réalistes et des experts seront vidés d’ un coup par ces lames de fond. Certains intellectuels incrimineront al
764 des experts seront vidés d’un coup par ces lames de fond. Certains intellectuels incrimineront alors l’instinct religieux
765 t nous lirons encore des jérémiades sur le déclin de l’esprit critique et l’abandon des grands principes. « C’est inconcev
766 ciel. Mais c’est très simple. Un homme qui meurt de faim mange n’importe quoi pour tromper sa faim, faute de mieux. La ra
767 e de mieux. La raison n’ose pas dire qu’il a tort d’ avoir faim. Dira-t-elle qu’il a tort d’avoir soif de religion ? de tro
768 ’il a tort d’avoir faim. Dira-t-elle qu’il a tort d’ avoir soif de religion ? de tromper cet instinct rendu furieux par des
769 avoir faim. Dira-t-elle qu’il a tort d’avoir soif de religion ? de tromper cet instinct rendu furieux par des siècles de p
770 ra-t-elle qu’il a tort d’avoir soif de religion ? de tromper cet instinct rendu furieux par des siècles de privations ? El
771 romper cet instinct rendu furieux par des siècles de privations ? Elle dénoncera vainement des délires collectifs dont ell
772 la première responsable, aussi vrai que le régime de la prohibition fut responsable des méfaits de l’alcool frelaté, en Am
773 ime de la prohibition fut responsable des méfaits de l’alcool frelaté, en Amérique. ⁂ Viendront les remous de la dictature
774 cool frelaté, en Amérique. ⁂ Viendront les remous de la dictature. Viendront les grands diététiciens. Viendront les Nouvea
775 être vient-elle pour des siècles. (Il y aura trop d’ avions du même côté.) Mais comment l’homme compensera-t-il l’absence d
776 .) Mais comment l’homme compensera-t-il l’absence de guerre ? Voici la tragédie nouvelle : nous avons tout prévu contre un
777 ble pour demain. Hitler battu, nous n’aurons plus d’ Ennemi 12. Une dimension de la vie nous fera défaut. Imaginons les con
778 tu, nous n’aurons plus d’Ennemi 12. Une dimension de la vie nous fera défaut. Imaginons les conséquences de cette déceptio
779 vie nous fera défaut. Imaginons les conséquences de cette déception planétaire. Le seul type d’héroïsme que l’Occident ai
780 ences de cette déception planétaire. Le seul type d’ héroïsme que l’Occident ait pu concevoir (depuis qu’il n’allume plus d
781 dent ait pu concevoir (depuis qu’il n’allume plus de bûchers pour les chrétiens, et que ceux-ci tolèrent les hérétiques) c
782 alles pour la Patrie ou le Parti. S’il n’y a plus de guerres, qui fera des héros ? Qui réveillera le sens du sacrifice ? P
783 ur la paix, car jamais elle ne fut plus dépourvue de respect pour les vertus que l’esprit seul sait porter jusqu’au paroxy
784 qu’au paroxysme. Et comment vivre s’il n’y a plus de paroxysmes ? La guerre était pour nous la grande permission, le grand
785 r nous la grande permission, le grand ajournement de nos problèmes, la justification par l’opinion publique de l’irrespons
786 roblèmes, la justification par l’opinion publique de l’irresponsabilité universelle. Nous l’aimions sans le savoir, pour u
787 mé sur la terre entière et dans tous les domaines de l’existence publique. Elle figurait pour nous l’équivalent de la Fête
788 ce publique. Elle figurait pour nous l’équivalent de la Fête chez les peuples anciens, elle en avait les attributs le plus
789 des lois morales (tu tueras, tu voleras, tu diras de faux témoignages, avec honneur) ; suspension du droit ; dépenses sans
790 humains ; déguisements ; cortèges ; déchaînement de passions collectives ; disqualification temporaire des conflits indiv
791 ion temporaire des conflits individuels. Je parle d’ un état d’exception comme on dirait état de siège ou état de grâce. Te
792 les primitifs, la guerre était le « grand Temps » de l’humanité moderne, la seule excuse que notre esprit pût accepter pou
793 notre esprit pût accepter pour suspendre le cours d’ une existence de plus en plus conforme aux prévisions des grandes comp
794 us conforme aux prévisions des grandes compagnies d’ assurances. Quelle fête immense faudra-t-il à ce siècle pour lui faire
795 -t-il à ce siècle pour lui faire oublier son goût de la guerre ? Quels drames nouveaux pour remplacer, sur la scène vide,
796 , sur la scène vide, l’Ennemi déchu ? Les maîtres de la politique mondiale ont sans doute un plan dans la tête : ils presc
797 friront progressivement des programmes rationnels d’ abondance, dans l’idée générale d’endormir les peuples, les classes ou
798 mmes rationnels d’abondance, dans l’idée générale d’ endormir les peuples, les classes ou les individus qui seraient tentés
799 les classes ou les individus qui seraient tentés de causer quelque turbulence. C’est calculer sans l’homme, sans son huma
800 oire. Le diable, admettons-le, n’est pas si court de vue. Il n’oublie pas que l’homme a toujours su produire les ingrédien
801 sables à sa torture, à sa grandeur, à son orgueil de créature faite à l’image de Dieu et qui veut s’emparer du Ciel. Le di
802 andeur, à son orgueil de créature faite à l’image de Dieu et qui veut s’emparer du Ciel. Le diable a tiré bon parti des ég
803 ble a tiré bon parti des égarements rationalistes de l’Occident, maître du monde depuis des siècles. Il n’a rien perdu à c
804 puis des siècles. Il n’a rien perdu à cette crise de compensation délirante que fut la première guerre totale et planétair
805 ra la paix du xxe siècle. Un des dilemmes fameux de notre temps fut posé aux Allemands par Goering : c’était du beurre ou
806 hoisirent les canons, plus excitants. Les maîtres de la paix paraissent bien décidés à nous offrir du beurre à satiété. Ma
807 parce que nous sommes créateurs. Quand les usines de canons et d’avions auront fermé leurs portes ou feront des frigidaire
808 s sommes créateurs. Quand les usines de canons et d’ avions auront fermé leurs portes ou feront des frigidaires, nous entre
809 feront des frigidaires, nous entrerons dans l’ère de la Gnose moderne. Cette réaction religieuse, déterminée par une diale
810 terminée par une dialectique irrésistible, menace d’ être aussi meurtrière, en fin de compte, que la névrose créée par le r
811 aisirs, ou les prétextes du plaisir.) Elle risque de nous priver des secours de la raison, comme celle-ci nous avait privé
812 plaisir.) Elle risque de nous priver des secours de la raison, comme celle-ci nous avait privés des secours de la religio
813 son, comme celle-ci nous avait privés des secours de la religion. Après avoir eu mal à droite, nous aurons mal à gauche — 
814 , nous aurons mal à gauche — c’est la dialectique de l’Histoire — faute de concevoir un équilibre. Le diable prétendra nou
815 us faire choisir follement entre les deux moitiés de la réalité, entre la tête et les entrailles, entre conscience et inco
816 rs que la sagesse voudrait une conscience avertie de notre nature, réglant le jeu, oui, mais en tenant compte de tous les
817 ature, réglant le jeu, oui, mais en tenant compte de tous les éléments en jeu. Le diable nous dira : il faut choisir. Nous
818 ne que Satan va nous offrir un choix considérable d’ Antéchrists. Tout, et n’importe quoi, sauf l’Évangile et la sobriété d
819 et n’importe quoi, sauf l’Évangile et la sobriété de la Croix. Et si le diable échoue dans certains peuples, dans certains
820 n’adore que son propre reflet. » Ce sera le temps de regretter les dictatures qui tuent les corps mais qui ne peuvent rien
821 e cours des choses. Mais l’un des grands plaisirs de l’homme est de prévoir. Il s’imagine, et je ne sais s’il a tort, que
822 ses. Mais l’un des grands plaisirs de l’homme est de prévoir. Il s’imagine, et je ne sais s’il a tort, que la lucidité peu
823 a tort, que la lucidité peut garantir l’intégrité de sa personne, et sinon son bonheur, du moins, le sens pur de sa vocati
824 onne, et sinon son bonheur, du moins, le sens pur de sa vocation. 10. Écrit en 1942. 11. Les méfaits de la psychologie
825 vocation. 10. Écrit en 1942. 11. Les méfaits de la psychologie rationaliste ont été patents dans la morale sexuelle e
826 riage au siècle dernier ; ou lorsqu’il s’agissait d’ apprécier le rôle du sacré, l’âme collective, la création artistique,
827 ve, la création artistique, l’importance relative de l’argent et du travail, les dogmes chrétiens, etc., etc. 12. Si Stal
4 1942, La Part du diable (1982). Troisième partie. Le diable démocrate
828 s classiques du démon : l’esprit tombé, le prince de l’ici-bas, le tentateur, l’accusateur et le menteur. Il reste à dépis
829 d que toutes ses misères venaient de l’extérieur, de l’étranger, du traité de Versailles, ou des Juifs, ou des Soviets, ou
830 venaient de l’extérieur, de l’étranger, du traité de Versailles, ou des Juifs, ou des Soviets, ou des Ploutocrates anglo-s
831 e procédé que l’on reconnaît le mieux la tactique de Satan chez tous ses délégués. Mais ici, prenons garde ! Ce livre est
832 ués. Mais ici, prenons garde ! Ce livre est plein de pièges. Si l’on vient d’accepter les phrases qui précèdent, c’est peu
833 rde ! Ce livre est plein de pièges. Si l’on vient d’ accepter les phrases qui précèdent, c’est peut-être assez grave pour n
834 ions, délaissant nos ennemis abattus, vont porter de plein fouet contre nous-mêmes. Beaucoup de démocrates ont cru très si
835 sincèrement qu’Hitler incarnait seul tout le mal de notre temps, et qu’il était un monstre avec lequel nous n’avions vrai
836 n monstre avec lequel nous n’avions vraiment rien de commun. « Voyez, je ne suis qu’Hitler ! », disait Satan. Nous n’avons
837 détesté. Nous lui avons opposé avec plus ou moins de détermination nos vieilles vertus démocratiques. Nous n’avons plus su
838 est la grande porte par laquelle il entre en nous de préférence, en se faisant annoncer sous un faux nom. 25. Notre pri
839 tre primitivisme Chacun sait que les primitifs de la Mélanésie, victimes des plus célèbres études sociologiques du sièc
840 èbres études sociologiques du siècle, ont coutume de personnifier les forces mauvaises qui les menacent, les causes des cr
841 s menacent, les causes des crimes, des accidents, de la stérilité ou de la mort. Que ce soit un sorcier, un profanateur du
842 ses des crimes, des accidents, de la stérilité ou de la mort. Que ce soit un sorcier, un profanateur du sacré, un animal,
843 rofanateur du sacré, un animal, un nuage, un bout de bois colorié, toujours la cause du mal dont souffrent ces sauvages es
844 mal dont souffrent ces sauvages est indépendante d’ eux-mêmes, et doit donc être combattue et anéantie hors d’eux-mêmes. À
845 mes, et doit donc être combattue et anéantie hors d’ eux-mêmes. À l’inverse, le christianisme s’est efforcé depuis des sièc
846 le christianisme s’est efforcé depuis des siècles de nous faire comprendre que le Royaume de Dieu est en nous, que le Mal
847 s siècles de nous faire comprendre que le Royaume de Dieu est en nous, que le Mal aussi est en nous, et que le champ de le
848 us, que le Mal aussi est en nous, et que le champ de leur bataille n’est pas ailleurs que dans nos cœurs. Cette éducation
849 ans notre primitivisme. Nous rendons responsables de nos maux les gens d’en face, toujours, ou la force des choses. Si nou
850 e. Nous rendons responsables de nos maux les gens d’ en face, toujours, ou la force des choses. Si nous sommes révolutionna
851 ires, nous croyons qu’en changeant la disposition de certains objets — en déplaçant les richesses par exemple — nous suppr
852 mêmes objets, nous sauverons tout. Si nous sommes de braves démocrates, inquiets ou optimistes, nous croyons qu’en rôtissa
853 sommes encore en pleine mentalité magique. Comme de petits enfants en colère, nous battons la table à laquelle nous nous
854 eurtés. Ou comme Xerxès, nous flagellons les eaux de l’Hellespont, à grands coups de discours sur les ondes courtes. Nous
855 agellons les eaux de l’Hellespont, à grands coups de discours sur les ondes courtes. Nous oublions ce fait fondamental : c
856 nos adversaires ne diffèrent pas essentiellement de nous. Car tout homme porte dans son corps (et dans son âme) les micro
857 rte dans son corps (et dans son âme) les microbes de toutes les maladies connues, et de bien d’autres. Anéantir les signes
858 ) les microbes de toutes les maladies connues, et de bien d’autres. Anéantir les signes extérieurs de la menace ne serait
859 de bien d’autres. Anéantir les signes extérieurs de la menace ne serait nullement suffisant pour nous en délivrer. Ces si
860 ient fort bien se développer un jour, à la faveur de la misère ou de la fatigue, ou de quelque déséquilibre temporaire. Co
861 e développer un jour, à la faveur de la misère ou de la fatigue, ou de quelque déséquilibre temporaire. Confessons donc la
862 ur, à la faveur de la misère ou de la fatigue, ou de quelque déséquilibre temporaire. Confessons donc la vérité compromett
863 devant nous, mais en nous. Il était en nous avant d’ être contre nous. C’est en nous-mêmes d’abord qu’il s’est dressé contr
864 férir si nous n’admettons pas qu’il est une part de nous, la part du diable dans nos cœurs. L’adversaire est toujours en
865 ble, s’il existait, serait cet homme qui n’aurait d’ autre ennemi à craindre que celui qu’il loge en lui-même. 26. « Nou
866 sommes tous, nos ennemis y compris, des « hommes de bonne volonté »13. Pourtant voyez ce qui se passe dans le monde, et d
867 par nos mains et nos pensées. C’est ici le moment de nous rappeler notre slogan démocratique : Tous les hommes se valent !
868 tention des remarques précédentes n’est nullement de justifier « les autres », que l’on avait d’abord accusés de tout le m
869 er « les autres », que l’on avait d’abord accusés de tout le mal ; ni de nous fourrer tous dans le même sac, sans distinct
870 ue l’on avait d’abord accusés de tout le mal ; ni de nous fourrer tous dans le même sac, sans distinctions, comme semblait
871 ons, comme semblait le faire en 1939 un manifeste de l’Oxford Group, largement répandu en Europe, et qui s’intitulait non
872 le du démon dans nos passions ; dans notre besoin de sensations ; dans notre crainte des responsabilités ; dans notre iner
873 e ; dans notre lâcheté vis-à-vis du grand nombre, de ses modes et de ses slogans ; dans notre ignorance du prochain ; dans
874 âcheté vis-à-vis du grand nombre, de ses modes et de ses slogans ; dans notre ignorance du prochain ; dans notre refus enf
875 re ignorance du prochain ; dans notre refus enfin de tout Absolu qui transcende et qui juge nos intérêts « vitaux » (comme
876 ls le sont toujours…). Il est juste et nécessaire de dire que le diabolisme n’est pas seulement hitlérien, que l’hitlérism
877 dirai pas que je vais laisser courir le criminel d’ en face, pour mieux me livrer d’abord à ma réforme intérieure ! Je dir
878 me réformer et la lutte pour empêcher le criminel de poursuivre ses méfaits, sont une seule et même lutte. Que servirait d
879 aits, sont une seule et même lutte. Que servirait de gagner cette lutte en moi seulement, puisque le criminel risquerait d
880 en moi seulement, puisque le criminel risquerait de me supprimer ? Que servirait de la gagner hors de moi seulement, puis
881 iminel risquerait de me supprimer ? Que servirait de la gagner hors de moi seulement, puisque je risquerais de devenir à m
882 gner hors de moi seulement, puisque je risquerais de devenir à mon tour un autre criminel ? Il n’y a qu’un crime, en moi e
883 disent-ils, donc nous n’avons pas le droit moral de nous battre contre Hitler. » — Nous sommes tous coupables, certes, ma
884 e des pompiers et des gendarmes. Cela ne fait pas de nous des saints. Cela n’implique même pas que nous soyons meilleurs q
885 us précisément diaboliques chez Hitler — sa façon de localiser tout le mal à l’étranger, pour s’innocenter — nous sommes t
886 bés dans la même erreur que lui : nous avons fait d’ Hitler une image du démon tout extérieure à notre réalité. Et pendant
887 rogrès automatique. Devant les résultats présents de cette croyance quasi universelle dans les masses et l’élite, l’on est
888 e fataliste et réconfortante que tout s’arrangera de soi-même, dans l’ensemble et à la longue, alors le Progrès devient le
889 soporifiques, une véritable drogue du démon, l’un de ses nouveaux noms. Nous avons cru à la bonté foncière de l’homme. Par
890 nouveaux noms. Nous avons cru à la bonté foncière de l’homme. Par gentillesse pour les autres, évidemment… Mais c’est touj
891 tres, évidemment… Mais c’est toujours une manière de croire aussi à sa propre bonté. Et donc de s’aveugler sur le mal que
892 anière de croire aussi à sa propre bonté. Et donc de s’aveugler sur le mal que l’on porte en soi. Et donc de ne pas se sou
893 veugler sur le mal que l’on porte en soi. Et donc de ne pas se soucier de la présence active du démon. Et donc enfin de lu
894 e l’on porte en soi. Et donc de ne pas se soucier de la présence active du démon. Et donc enfin de lui laisser le champ li
895 ier de la présence active du démon. Et donc enfin de lui laisser le champ libre pour nous duper. Nous avons cru que le mal
896 l était relatif à l’ordre social, qu’il provenait d’ une mauvaise répartition des biens, d’une éducation mal comprise, de l
897 l provenait d’une mauvaise répartition des biens, d’ une éducation mal comprise, de lois inadéquates, ou de refoulements et
898 artition des biens, d’une éducation mal comprise, de lois inadéquates, ou de refoulements et d’injustices qui pouvaient êt
899 e éducation mal comprise, de lois inadéquates, ou de refoulements et d’injustices qui pouvaient être éliminés par des mesu
900 prise, de lois inadéquates, ou de refoulements et d’ injustices qui pouvaient être éliminés par des mesures adroites. Toute
901 rtie superstitieuses, ont eu pour principal effet de nous aveugler sur la nature de l’homme, c’est-à-dire sur la nature es
902 ur principal effet de nous aveugler sur la nature de l’homme, c’est-à-dire sur la nature essentielle du mal enraciné dans
903 nos données premières, et dans la définition même de l’homme en tant qu’il est humain. Nous avons été optimistes par princ
904 savoir-vivre, dirait-on, malgré tous les démentis de la réalité. Cet optimisme n’était pas la confiance naïve de l’enfant,
905 ité. Cet optimisme n’était pas la confiance naïve de l’enfant, mais une espèce de mensonge. Exactement : une fuite devant
906 s la confiance naïve de l’enfant, mais une espèce de mensonge. Exactement : une fuite devant le réel. Car dans le réel nou
907 s scandalise et nous effraie. Alors nous essayons de conjurer le mal en le niant : c’est encore la mentalité magique. Nous
908 Nous croyons qu’en avouant le mal, nous le créons d’ une certaine manière. Nous préférons ne pas insister. Nous refoulons,
909 ce mensonge inconscients, nous rendent incapables de comprendre ce qui se passe dans le monde, et nous livrent aux ruses l
910 ses les plus simples du Malin. Nous avons éliminé de notre existence bourgeoise le sens du tragique, pour nous tourner exc
911 ’il représenta. Autant que la compensation fatale de nos défauts, Hitler a été le négatif exact de nos idéaux optimistes,
912 ale de nos défauts, Hitler a été le négatif exact de nos idéaux optimistes, dans la mesure où ils étaient irréalistes, uto
913 ir médiocre, dilué et trop étendu (comme on étend d’ eau une solution concentrée) de divinisation prométhéenne. Nos vertus
914 du (comme on étend d’eau une solution concentrée) de divinisation prométhéenne. Nos vertus comme nos vices n’avaient plus
915 . Nos vertus comme nos vices n’avaient plus l’air de rien, et leur insignifiance était leur diabolisme. Il est trop clair
916 émocraties, en tant que telles, n’ont pas produit d’ exemples d’héroïsme et de vertu14 comparables en grandeur aux atrocité
917 en tant que telles, n’ont pas produit d’exemples d’ héroïsme et de vertu14 comparables en grandeur aux atrocités rigoureus
918 elles, n’ont pas produit d’exemples d’héroïsme et de vertu14 comparables en grandeur aux atrocités rigoureuses produites p
919 s par l’hitlérisme au nom d’Hitler. Ce qui a paru de grand, dans notre camp, n’a pas été le fait de la démocratie bourgeoi
920 ru de grand, dans notre camp, n’a pas été le fait de la démocratie bourgeoise, mais de chrétiens comme Niemöller, ou de ré
921 pas été le fait de la démocratie bourgeoise, mais de chrétiens comme Niemöller, ou de révolutionnaires mystiques. Après to
922 bourgeoise, mais de chrétiens comme Niemöller, ou de révolutionnaires mystiques. Après tout, dira-t-on, c’est normal, car
923 ime qui permet aux croyants comme aux incroyants, de se manifester sans être massacrés15. Oui, mais encore faut-il qu’il y
924 qu’il y ait des croyants ! Or nous étions devenus d’ incurables sceptiques. De même que nous disions, en présence d’un mira
925 la nous gênait. Nous l’écartions irrésistiblement de nos pensées… Car si ce « trop affreux » eût été vraiment vrai, il eût
926 ffreux » eût été vraiment vrai, il eût fallu agir d’ urgence et sans réserve ; et si nous nous étions mis à agir sans réser
927 mal avait des racines dans nos vies aussi, et que d’ une certaine manière, nous l’aimions ! Voilà le grand secret. Le diabl
928 plus que des armées. Elle oppose des conceptions de la vie. C’est une espèce de guerre civile mondiale. Elle sera perdue
929 ppose des conceptions de la vie. C’est une espèce de guerre civile mondiale. Elle sera perdue si nous perdons d’abord le s
930 Elle sera perdue si nous perdons d’abord le sens de la réalité morale. Et certaines simplifications le perdent à coup sûr
931 coup sûr. Je parle ici comme un Européen qui a vu de près des phénomènes bizarres de désintégration démocratique et de con
932 Européen qui a vu de près des phénomènes bizarres de désintégration démocratique et de conversion au fascisme. La France é
933 omènes bizarres de désintégration démocratique et de conversion au fascisme. La France était démocratique dans son ensembl
934 atique dans son ensemble en 1939 ; presque chacun de ses citoyens se disait sincèrement antinazi, et se croyait parfaiteme
935 ent antinazi, et se croyait parfaitement à l’abri de ce genre de tentation. Il avait sa bonne conscience de démocrate. Hit
936 , et se croyait parfaitement à l’abri de ce genre de tentation. Il avait sa bonne conscience de démocrate. Hitler est venu
937 genre de tentation. Il avait sa bonne conscience de démocrate. Hitler est venu, Pétain a capitulé, et aussitôt, certains
938 ertains ci-devant « intellectuels antifascistes » de Paris ont découvert qu’au fond, le nazisme n’était pas si mal que cel
939 lle aussi a cru que les nazis étaient des animaux d’ une tout autre race que les Américains. Elle aussi risque de découvrir
940 autre race que les Américains. Elle aussi risque de découvrir un jour qu’« après tout, ils sont des hommes comme nous ».
941 itain tenté et qui se fait une caricature du vice d’ autrui pour éviter de le reconnaître en lui-même. Je soupçonne une pro
942 fait une caricature du vice d’autrui pour éviter de le reconnaître en lui-même. Je soupçonne une profonde ambivalence dan
943 ivalence dans certaines dénonciations passionnées de l’hitlérisme : la violence du ton et le simplisme obstiné de certains
944 isme : la violence du ton et le simplisme obstiné de certains jugements trahissent une vague mauvaise conscience, une anxi
945 e pour leur propre cas ! —, je ne puis m’empêcher de penser qu’un jour ou l’autre, le pro qui sommeille dans un coin de le
946 our ou l’autre, le pro qui sommeille dans un coin de leur cœur se réveillera brusquement et les renversera. Nous avons vu
947 brusquement et les renversera. Nous avons vu trop de cas de ce genre, individuels ou collectifs. Nous avons vu la populati
948 ment et les renversera. Nous avons vu trop de cas de ce genre, individuels ou collectifs. Nous avons vu la population de l
949 iduels ou collectifs. Nous avons vu la population de la Sarre se jeter dans les bras du Reich en 1935. Nous avons vu la Vi
950 ienne sozialdemokrat se transformer dans l’espace de vingt-quatre heures en une Vienne délirante de passion hitlérienne. N
951 ce de vingt-quatre heures en une Vienne délirante de passion hitlérienne. Nous avons vu quelques-uns de nos amis « occupés
952 e passion hitlérienne. Nous avons vu quelques-uns de nos amis « occupés » découvrir subitement les « bons côtés » du systè
953 — Regardez le diable qui est parmi nous ! Cessez de croire qu’il ne peut ressembler qu’à Hitler ou à ses émules, car c’es
954 r le fait. Et alors seulement, vous serez en état de le dépister chez autrui, et de l’y combattre avec succès. Car alors s
955 vous serez en état de le dépister chez autrui, et de l’y combattre avec succès. Car alors seulement, vous serez guéris de
956 ec succès. Car alors seulement, vous serez guéris de votre naïveté invraisemblable devant le danger totalitaire. Vous pour
957 Vous pourrez échapper à l’hypnose. Nous manquions d’ une représentation moderne du démon. Nous avions donc cessé d’y croire
958 entation moderne du démon. Nous avions donc cessé d’ y croire. Puis nous avons imaginé que le diable était Hitler. Et le di
959 ant, plus amusant aussi, et finalement plus vrai, d’ essayer de nous représenter le diable sous les traits d’un playboy dyn
960 amusant aussi, et finalement plus vrai, d’essayer de nous représenter le diable sous les traits d’un playboy dynamique et
961 yer de nous représenter le diable sous les traits d’ un playboy dynamique et optimiste vierge de toute pensée. Ou, si nous
962 traits d’un playboy dynamique et optimiste vierge de toute pensée. Ou, si nous sommes par hasard des intellectuels libérau
963 asard des intellectuels libéraux, sous les traits d’ un intellectuel libéral qui ne croit pas au diable… 28. L’Humour e
964 8. L’Humour et la démocratie Il faut se moquer de la démocratie. D’abord parce qu’elle est le seul régime qui tolère un
965 uile et sans jeu entre ses parties. C’est le sens de l’humour qui sauve les hommes vivant dans un État démocratique. Et de
966 e les hommes vivant dans un État démocratique. Et de quoi les sauve-t-il ? De l’asphyxie par la proximité, qui serait le r
967 un État démocratique. Et de quoi les sauve-t-il ? De l’asphyxie par la proximité, qui serait le résultat fatal de notre de
968 ie par la proximité, qui serait le résultat fatal de notre destruction des hiérarchies. Grâce au sens de l’humour, une dis
969 notre destruction des hiérarchies. Grâce au sens de l’humour, une distance respirable et respectable peut être rétablie e
970 mes, ou entre fonctionnaires et victimes normales de l’État. Prenez en effet une démocratie quelconque. Supprimez toute es
971 une démocratie quelconque. Supprimez toute espèce d’ humour aussi bien dans sa vie quotidienne — rouspétance du citoyen — q
972 — farce des partis — et vous obtiendrez au terme de l’opération, si elle est énergiquement poussée, l’État totalitaire da
973 at totalitaire dans sa splendeur native. L’auteur de ce livre étant intimement persuadé que la démocratie dépérit sans cri
974 que la démocratie dépérit sans critique, dénonce d’ avance comme totalitaires ceux qui verront dans les prochains chapitre
975 verront dans les prochains chapitres les marques d’ un esprit totalitaire. Qu’ils se reconnaissent eux-mêmes à ce signe !
976 s principaux démons que le diable délègue au soin de faire de nos démocraties ses colonies-modèles. 29. Le démon de la
977 aux démons que le diable délègue au soin de faire de nos démocraties ses colonies-modèles. 29. Le démon de la Liberté
978 démocraties ses colonies-modèles. 29. Le démon de la Liberté Pourquoi n’a-t-on jamais aimé et célébré la Liberté aut
979 de mes contemporains, la liberté, c’est le droit de ne pas obéir. Quand on le leur laisse, ils s’ennuient, et bientôt ils
980 un tyran. Mais dès que le tyran sévit, leur amour de la liberté les pousse aux sommets du courage. Et ainsi de suite : ce
981 berté les pousse aux sommets du courage. Et ainsi de suite : ce jeu de coquetterie profonde conditionne en partie l’Histoi
982 ux sommets du courage. Et ainsi de suite : ce jeu de coquetterie profonde conditionne en partie l’Histoire. C’est dire que
983 . C’est dire que fonder un régime sur le beau mot de Liberté équivaut à substituer à la politique de puissance telle que l
984 t de Liberté équivaut à substituer à la politique de puissance telle que la formula Machiavel, une politique du romanesque
985 itique du romanesque collectif. (Ainsi le mariage d’ amour sentimental a pris la place du mariage de raison conclu par les
986 ge d’amour sentimental a pris la place du mariage de raison conclu par les parents et les notaires ; et c’est sans doute a
987 ctionne pas sans illusions, compensées par autant de déceptions automatiques. La liberté pour laquelle nous mourons n’est
988 grand malentendu que symbolise la déesse du port de New York, en éclairant sans condition tous les humains. Regardez-la :
989 ige vers le vide non sans grandiloquence. Combien de milliers de réfugiés ont pleuré en passant devant elle ! Sa seule pré
990 vide non sans grandiloquence. Combien de milliers de réfugiés ont pleuré en passant devant elle ! Sa seule présence était
991 ant devant elle ! Sa seule présence était le gage d’ une aisance de pensée et de vie qu’ils venaient de perdre en Europe po
992 e ! Sa seule présence était le gage d’une aisance de pensée et de vie qu’ils venaient de perdre en Europe pour en avoir ab
993 présence était le gage d’une aisance de pensée et de vie qu’ils venaient de perdre en Europe pour en avoir abusé sans plai
994 our en avoir abusé sans plaisir. On s’en voudrait de commenter une situation où l’émotion la plus compréhensible couvrait
995 tion où l’émotion la plus compréhensible couvrait d’ aussi étranges confusions. À dire le vrai, contre l’époque entière, l
996 — même pas dans le domaine politique, malgré tant d’ éloquence et de vrais sacrifices. Cette liberté non qualifiée ne saura
997 le domaine politique, malgré tant d’éloquence et de vrais sacrifices. Cette liberté non qualifiée ne saurait proprement d
998 qualifiée ne saurait proprement désigner l’objet d’ une revendication, car elle est le signe primordial de notre condition
999 e revendication, car elle est le signe primordial de notre condition humaine. L’homme est libre, et cela signifie qu’il es
1000  pour rien », sans condition ni but, soyez libres de faire ce qu’il vous plaît, et vous ferez probablement ce qui plaît au
1001 blement ce qui plaît au diable. Mais soyez libres de rejoindre et d’accomplir la vocation que Dieu vous donne, alors vous
1002 laît au diable. Mais soyez libres de rejoindre et d’ accomplir la vocation que Dieu vous donne, alors vous échapperez au cy
1003 on seulement, étant ce qu’elle est, il serait fou de la revendiquer, mais encore il est de sa nature qu’elle se perde auss
1004 serait fou de la revendiquer, mais encore il est de sa nature qu’elle se perde aussitôt qu’utilisée, soit vers le mal, so
1005 c un risque neuf. Mais nous parlions, dites-vous, de liberté politique. J’y viendrai donc. Ce qui est en cause dans ce pla
1006 , mais c’est le droit que l’État laisse à l’homme d’ obéir à sa vocation. Si l’homme ne se reconnaît point de vocation, la
1007 r à sa vocation. Si l’homme ne se reconnaît point de vocation, la liberté qu’il revendique est vide ; le diable s’y mettra
1008 se reconnaît une vocation, il ne demandera point d’ autre droit que celui de s’y conformer. Que l’État lui refuse ce droit
1009 on, il ne demandera point d’autre droit que celui de s’y conformer. Que l’État lui refuse ce droit, le citoyen peut librem
1010 e conduire soit au martyre soit au rétablissement de lois humaines : dans ces deux cas il reste libre, non pas au nom de l
1011 , laissant sévir les lois contraires à l’exercice de sa foi, il perdra par sa faute la liberté du choix, qui était toute s
1012 e la liberté du choix, qui était toute sa dignité d’ homme. Alors sans doute, il entrera dans la masse anonyme des esclaves
1013 affirmée, préférant à leur vie les vraies raisons de vivre. La liberté sans condition est un fantôme, annonciateur des pir
1014 res tyrannies. J’en nommerai une. 30. Le démon de la Police Le voyageur et l’émigré, qui défilent en rade de New Yor
1015 Le voyageur et l’émigré, qui défilent en rade de New York devant le symbole dressé sur un ciel commercial de la Libert
1016 k devant le symbole dressé sur un ciel commercial de la Liberté aux yeux vides17, ne tardent pas à recevoir un rappel aux
1017 ment les fonctionnaires des douanes et du Service d’ immigration pour monter à bord du navire : nous approchons d’Ellis Isl
1018 on pour monter à bord du navire : nous approchons d’ Ellis Island. En Europe et dans les deux Amériques, j’ai traversé dura
1019 i traversé durant cette guerre une bonne douzaine de frontières, et j’ai rempli quelques centaines de questionnaires, dont
1020 de frontières, et j’ai rempli quelques centaines de questionnaires, dont l’un au moins comportait 32 pages. Ces confessio
1021 ons générales m’ont valu, je dois le dire, autant d’ absolutions. Mais loin de me procurer le sentiment d’une bonne conscie
1022 bsolutions. Mais loin de me procurer le sentiment d’ une bonne conscience civique brevetée par l’État, elles me laissaient
1023 u plus incertain quant à l’identité que je venais d’ établir. De l’un à l’autre de ces questionnaires, un personnage conven
1024 rtain quant à l’identité que je venais d’établir. De l’un à l’autre de ces questionnaires, un personnage conventionnel se
1025 a cohérence, plus s’estompait en moi la sensation d’ être identique à mes données légales. C’était chaque fois un procès à
1026 i sur mon propre compte. Sourde aux protestations d’ un moi réel, mais qui ne pourrait produire ses preuves dans le langage
1027 la seule question. Et le succès pouvait dépendre d’ un caprice de la Destinée, d’une humeur de ce Monsieur tout-puissant q
1028 stion. Et le succès pouvait dépendre d’un caprice de la Destinée, d’une humeur de ce Monsieur tout-puissant qui m’attendai
1029 cès pouvait dépendre d’un caprice de la Destinée, d’ une humeur de ce Monsieur tout-puissant qui m’attendait, le chapeau su
1030 épendre d’un caprice de la Destinée, d’une humeur de ce Monsieur tout-puissant qui m’attendait, le chapeau sur la tête, de
1031 e chapeau sur la tête, derrière une table chargée de tampons. Bien entendu, ces procédures sont justifiables en temps de g
1032 ntendu, ces procédures sont justifiables en temps de guerre. Une société démocratique doit se protéger comme les autres. E
1033 ra même s’organiser mieux que les autres en temps de paix, non seulement pour sa sécurité mais aussi pour le bien commun.
1034  ; vous serez pisté dans le passé jusqu’au ventre de votre mère, affublé d’un numéro d’ordre et privé du droit d’avoir fai
1035 s le passé jusqu’au ventre de votre mère, affublé d’ un numéro d’ordre et privé du droit d’avoir faim. Ce qui me trouble da
1036 usqu’au ventre de votre mère, affublé d’un numéro d’ ordre et privé du droit d’avoir faim. Ce qui me trouble dans toutes ce
1037 re, affublé d’un numéro d’ordre et privé du droit d’ avoir faim. Ce qui me trouble dans toutes ces machines policières et p
1038 sont que trop visibles — c’est l’irresponsabilité de leurs agents. Supposez qu’on pourchasse les Rouges. Personne ne sait
1039 ui d’ailleurs demeure inaccessible ; ni les chefs de service, qui s’occupent du service ; ni les exécutants qui se content
1040 du service ; ni les exécutants qui se contentent d’ exécuter leurs consignes à la lettre. Votre coefficient signifie Rouge
1041 à qui rend votre cas pire encore. Il n’y aura pas de pétitions dans les journaux. Vous serez un rebut social. Vous rappele
1042 ale du Wilhelm Meister ? Goethe conduit son héros d’ épreuves en surprises, par une volonté mystérieuse qui est celle du ch
1043 par une volonté mystérieuse qui est celle du chef d’ une société secrète. On veut amener Wilhelm à son salut, par les voies
1044 on salut, par les voies plus ou moins maçonniques d’ une secte rosicrucienne. C’était alors comme une figuration de la Prov
1045 rosicrucienne. C’était alors comme une figuration de la Providence. C’en est une aujourd’hui de la Police. À cette différe
1046 ration de la Providence. C’en est une aujourd’hui de la Police. À cette différence près, toutefois, que l’intention spirit
1047 ez pas plus qu’aujourd’hui le droit ou le pouvoir de protester. Le vrai mythe de notre Police a été formulé par Kafka. Dan
1048 e droit ou le pouvoir de protester. Le vrai mythe de notre Police a été formulé par Kafka. Dans son Procès, il nous conte
1049 Kafka. Dans son Procès, il nous conte l’histoire d’ un employé de banque qui se voit inculpé d’une faute indéterminée, et
1050 son Procès, il nous conte l’histoire d’un employé de banque qui se voit inculpé d’une faute indéterminée, et qui s’épuise
1051 stoire d’un employé de banque qui se voit inculpé d’ une faute indéterminée, et qui s’épuise en vains efforts pour atteindr
1052 le condamne à mort, sans recours, malgré l’appui d’ un avocat marron, sorte de prêtre, qui prétend connaître le Juge et n’
1053 recours, malgré l’appui d’un avocat marron, sorte de prêtre, qui prétend connaître le Juge et n’est pas mieux en cour que
1054 client. Je dis que le diable a toutes les chances de mener le jeu partout où le sens s’évanouit, quand l’organisation perd
1055 s que personne n’y puisse plus rien. Présentation de la police moderne. 31. Le démon de la Sécurité Lorsque l’homme
1056 résentation de la police moderne. 31. Le démon de la Sécurité Lorsque l’homme se trouve confronté avec un des périls
1057 me se trouve confronté avec un des périls normaux de l’existence, deux possibilités s’offrent à lui : ou bien il cherche à
1058 tre choix est fait dès longtemps : c’est le désir de supprimer le péril plutôt que de le dominer, qui définit l’attitude b
1059 : c’est le désir de supprimer le péril plutôt que de le dominer, qui définit l’attitude bourgeoise et l’esprit général de
1060 définit l’attitude bourgeoise et l’esprit général de nos démocraties. À les prendre dans leur ensemble et leur intention g
1061 fessionnelle (assurances) ; soit dans l’éducation de la jeunesse ; soit dans la médecine ; soit dans la politique internat
1062 n de pousser à fond une expérience sans précédent d’ asepsie généralisée et d’extinction des risques avant terme. Morale de
1063 xpérience sans précédent d’asepsie généralisée et d’ extinction des risques avant terme. Morale des assurances-contre-tous-
1064 vise à autre chose qu’à la suppression méthodique de toute morale poétique, embrassant à la fois le risque et la confiance
1065 ispirituelle, car aucune ne s’est tant préoccupée d’ éliminer le mal à moindre prix, au lieu de le compenser par un bien su
1066 par un bien supérieur. Nous avons oublié la règle d’ or des stratèges, qui veut que la meilleure défense soit dans l’attaqu
1067 nt les magies protectrices, négligeant les forces de l’âme, nous cherchons le salut dans la fuite. L’assurance-vie remplac
1068 la mort. J’imagine volontiers le diable en agent d’ assurances générales. Il comprend tout et il a tout prévu. Il connaît
1069 l connaît l’homme dans sa vulgarité, et se flatte de savoir l’y réduire. Il vous explique votre Bien. Il sait mieux que vo
1070 , statistiques. Il vous promet enfin ce pur néant de l’âme : santé — bonheur — prospérité — jovialité et vérité viagère. V
1071 lus. Ou si peu. Sans rien perdre… 32. Le démon de l’insignifiance … neither having the accent of Christians, nor the
1072 eur, gouverner devient un plaisir, qu’il s’agisse de conduire un peuple ou nos passions. Sur cette croyance repose le mond
1073 on. Tout cela peut diminuer la somme des malheurs de l’humanité, mais non pas y éteindre le mal, si le mal est au premier
1074 e le mal, si le mal est au premier chef l’absence de vertus créatrices. Dans une passion violente et dans un conflit décla
1075 Grand Vizir qui rencontre la Mort dans un jardin de Téhéran. Elle lui fait un petit signe énigmatique. Épouvanté, le Vizi
1076 achant qu’il se révèle trop aisément à l’occasion de nos malheurs, de nos crimes et de nos drames, il préfère gouverner so
1077 évèle trop aisément à l’occasion de nos malheurs, de nos crimes et de nos drames, il préfère gouverner sous le couvert de
1078 nt à l’occasion de nos malheurs, de nos crimes et de nos drames, il préfère gouverner sous le couvert de la correction des
1079 nos drames, il préfère gouverner sous le couvert de la correction des manières. Je ne plaide pas ici pour le manque de te
1080 des manières. Je ne plaide pas ici pour le manque de tenue, ni pour le culte des « belles brutes », ni pour la guerre. Mai
1081 correction des mœurs devient un idéal, la verdeur de langage passe pour une inconvenance, la franchise des passions fait q
1082 nce, la franchise des passions fait qu’on appelle d’ urgence un spécialiste des troubles nerveux. On ne pense plus qu’à évi
1083 ense plus qu’à éviter les conflits qui poseraient de vraies questions, les éclats qui rendraient manifestes la vérité du c
1084 qu’elle paye un prix exorbitant : la saveur même de la vie. Nous avons institué le culte de ce qui ne tire pas à conséque
1085 veur même de la vie. Nous avons institué le culte de ce qui ne tire pas à conséquence. Il règne sur nos mœurs et sur notre
1086 nion publique18. Nous oublions que la conséquence de ce culte n’est autre que l’insignifiance de nos vertus autant que de
1087 uence de ce culte n’est autre que l’insignifiance de nos vertus autant que de nos vices. Or les vertus insignifiantes, pri
1088 utre que l’insignifiance de nos vertus autant que de nos vices. Or les vertus insignifiantes, privées de sens et qui n’ont
1089 nos vices. Or les vertus insignifiantes, privées de sens et qui n’ont l’air de rien, sont en réalité le Royaume du Rien.
1090 nsignifiantes, privées de sens et qui n’ont l’air de rien, sont en réalité le Royaume du Rien. Elles ne s’acquièrent qu’au
1091 encore le mesurer ?) Et l’on n’en peut donner que de petits exemples, qui paraîtront naturellement insignifiants… Quand vo
1092 en gentille dame et ses charmants amis l’écoutent d’ une oreille, poliment, disant lorsque c’est terminé : « So lovely, rea
1093 nt lorsque c’est terminé : « So lovely, really… » d’ un air indifférent, cela n’est rien, vous vous êtes trompé, servez un
1094 trompé, servez un drink. Mais il est juste aussi de remarquer qu’une qualité vient de se perdre quelque part. Ces gens ne
1095 l leur manque simplement un sens. Mais l’entropie de l’univers augmente : or il n’est rien de plus catastrophique au monde
1096 s « passez » là, vous passerez aussi avec l’image de ce monde. Mais si vous acceptez le ridicule de ne point passer sur un
1097 ge de ce monde. Mais si vous acceptez le ridicule de ne point passer sur une si petite chose — un rien vraiment — vous y g
1098 vraiment — vous y gagnerez peut-être votre droit de cité dans l’univers paradisiaque dont un Bach vous aura donné le resp
1099 essentiment qui suffit à vous rendre contemporain de son éternité. Le diable est insignifiant, au sens propre du mot, et
1100 sa plus grande victoire dans notre époque, c’est d’ avoir privé de sens presque tous nos usages, coutumes et costumes, art
1101 e victoire dans notre époque, c’est d’avoir privé de sens presque tous nos usages, coutumes et costumes, arts, travaux et
1102 n moderne en lui demandant quel peut être le sens de son nom, des formes et des couleurs dont il s’entoure, des phrases qu
1103 s dont il s’entoure, des phrases qu’il répète, ou de l’argent qu’il gagne. On l’étonne par la seule supposition que toutes
1104 nsemble spirituel. Je dis que tout ce qui n’a pas de sens appartient de droit au démon ; que tout ce qui porte un sens com
1105 Je dis que tout ce qui n’a pas de sens appartient de droit au démon ; que tout ce qui porte un sens comporte quelque bien,
1106 hés. Quant à l’absurde pur19, c’est une catégorie de la foi ou du mal absolu. Ce qui paraît absurde aux yeux de la raison,
1107 raison, la foi l’accepte comme étant la position d’ une réalité éternelle dans le temps : ainsi l’Incarnation et le miracl
1108 le diable, l’absurde est au contraire la fixation d’ une réalité temporelle dans l’infini ou dans l’inquestionnable : l’idé
1109 dans l’infini ou dans l’inquestionnable : l’idée de succès en soi, de puissance ou de richesse en soi. L’Enfer est là. Ma
1110 dans l’inquestionnable : l’idée de succès en soi, de puissance ou de richesse en soi. L’Enfer est là. Mais je voudrais don
1111 nnable : l’idée de succès en soi, de puissance ou de richesse en soi. L’Enfer est là. Mais je voudrais donner un autre exe
1112 s je voudrais donner un autre exemple des méfaits de l’insignifiance, créatrice de névroses dans la vie d’aujourd’hui.
1113 exemple des méfaits de l’insignifiance, créatrice de névroses dans la vie d’aujourd’hui. 33. Brève histoire d’un couple
1114 ’insignifiance, créatrice de névroses dans la vie d’ aujourd’hui. 33. Brève histoire d’un couple correct Monsieur et
1115 dans la vie d’aujourd’hui. 33. Brève histoire d’ un couple correct Monsieur et Madame sont parfaitement corrects et
1116 Scrupuleusement, ils entretiennent une atmosphère de paix dans le foyer. On n’injurie jamais les bonnes, d’ailleurs elles
1117 rrait leur donner des complexes. Jamais une scène de ménage à table, jamais une faute de tenue, un mot plus haut qu’un aut
1118 devant les enfants. Non, docteur, ne cherchez pas de ce côté. Si ma petite Mary est folle, vraiment, ce n’est pas qu’elle
1119 est folle, vraiment, ce n’est pas qu’elle souffre de l’atmosphère familiale. Mais je vais vous dire : du côté de mon mari,
1120 pas toujours été très équilibré. Entre nous, une de ses tantes est morte à l’asile. Cela se sent parfois chez lui. Hier e
1121 mbre, il entre en fureur parce que je lui demande d’ éteindre une lampe qui me faisait mal aux yeux. Il la lance à terre et
1122 mal aux yeux. Il la lance à terre et me fait une de ces scènes ! J’ai pleuré toute la nuit, sur un canapé du salon… » — «
1123 tite Mary n’est pas folle, mais comment les nerfs d’ un enfant supporteraient-ils le bruit et la fureur qui se déchaînent d
1124 sauf quand une lampe s’éteint ? » 34. Le démon de la popularité De toutes les créatures qui aient jamais existé, le
1125 s’éteint ? » 34. Le démon de la popularité De toutes les créatures qui aient jamais existé, le diable est celle qui
1126 uoi la démocratie moderne est spécialement tentée d’ écouter ses conseils. Le pouvoir d’un régime fondé sur le grand nombre
1127 alement tentée d’écouter ses conseils. Le pouvoir d’ un régime fondé sur le grand nombre dépend des caprices féminins de l’
1128 sur le grand nombre dépend des caprices féminins de l’Opinion. Il en résulte fatalement que le problème majeur des dirige
1129 lement que le problème majeur des dirigeants sera de rendre populaires, plutôt que justes ou efficaces, les mesures gouver
1130 ces, les mesures gouvernementales. Cette tendance de la vie politique à son tour va contaminer la vie privée, comme il arr
1131 e quel régime. C’est ainsi que jadis les coutumes de la Cour réglaient la politesse à tous les degrés de la société. Elles
1132 la Cour réglaient la politesse à tous les degrés de la société. Elles offraient des modèles dans l’art de courtiser un su
1133 a société. Elles offraient des modèles dans l’art de courtiser un supérieur, de dominer un inférieur, et d’observer partou
1134 des modèles dans l’art de courtiser un supérieur, de dominer un inférieur, et d’observer partout les distances convenables
1135 urtiser un supérieur, de dominer un inférieur, et d’ observer partout les distances convenables. La coutume de nos parlemen
1136 ver partout les distances convenables. La coutume de nos parlements, de nos partis et de leurs chefs, paraît aujourd’hui t
1137 tances convenables. La coutume de nos parlements, de nos partis et de leurs chefs, paraît aujourd’hui toute contraire : il
1138 s. La coutume de nos parlements, de nos partis et de leurs chefs, paraît aujourd’hui toute contraire : il s’agit de courti
1139 s, paraît aujourd’hui toute contraire : il s’agit de courtiser les masses, puisque c’est elles qui donnent le pouvoir ; de
1140 ses, puisque c’est elles qui donnent le pouvoir ; de se concilier les inférieurs en les flattant, puisqu’il n’est plus per
1141 eurs en les flattant, puisqu’il n’est plus permis de les dominer ; enfin d’appeler par leur prénom le plus grand nombre po
1142 uisqu’il n’est plus permis de les dominer ; enfin d’ appeler par leur prénom le plus grand nombre possible d’électeurs, de
1143 ler par leur prénom le plus grand nombre possible d’ électeurs, de clients et de chefs de service, la marque du prestige dé
1144 prénom le plus grand nombre possible d’électeurs, de clients et de chefs de service, la marque du prestige démocratique n’
1145 grand nombre possible d’électeurs, de clients et de chefs de service, la marque du prestige démocratique n’étant plus la
1146 mbre possible d’électeurs, de clients et de chefs de service, la marque du prestige démocratique n’étant plus la hauteur d
1147 du prestige démocratique n’étant plus la hauteur d’ allure, mais au contraire la familiarité. Il serait amusant de compare
1148 is au contraire la familiarité. Il serait amusant de comparer sous ce rapport le fameux livre de Mr. Dale Carnegie et l’Ho
1149 usant de comparer sous ce rapport le fameux livre de Mr. Dale Carnegie et l’Homme de Cour de Balthazar Gracián. Ce jésuite
1150 t le fameux livre de Mr. Dale Carnegie et l’Homme de Cour de Balthazar Gracián. Ce jésuite avait mis en manuel les maximes
1151 eux livre de Mr. Dale Carnegie et l’Homme de Cour de Balthazar Gracián. Ce jésuite avait mis en manuel les maximes de l’as
1152 acián. Ce jésuite avait mis en manuel les maximes de l’astuce sociale sous la monarchie absolue. Mr. Dale Carnegie nous ap
1153 nous apprend pour sa part comment gagner non pas de vrais amis, bien sûr, mais des clients, des électeurs possibles, des
1154 utes fins utiles : c’est une version démocratique de l’Homme de Cour, que l’on pourrait intituler l’Homme de l’Antichambre
1155 tiles : c’est une version démocratique de l’Homme de Cour, que l’on pourrait intituler l’Homme de l’Antichambre. Notons d’
1156 omme de Cour, que l’on pourrait intituler l’Homme de l’Antichambre. Notons d’abord que du jésuite à notre expert en popula
1157 bord que du jésuite à notre expert en popularité, d’ immenses progrès semblent s’être opérés au point de vue de la moralité
1158 es progrès semblent s’être opérés au point de vue de la moralité. Gracián vous apprend à tromper, à ruser, à mentir, à tri
1159 r, à tricher, et tous ces procédés lui paraissent de bonne guerre s’ils vous assurent le prestige personnel et la faveur i
1160 éressée des grands. Mr. Carnegie au contraire est d’ une irréprochable correction morale. Il estime en effet que la Règle d
1161 orrection morale. Il estime en effet que la Règle d’ or des relations humaines, dans tous les ordres, fut donnée par cette
1162 dans tous les ordres, fut donnée par cette phrase de l’Évangile : « Faites aux autres ce que vous voudriez qu’ils vous fis
1163 vous fissent ». Exemple : Le plus profond besoin de l’homme, selon le professeur Dewey, étant de se sentir important, ne
1164 soin de l’homme, selon le professeur Dewey, étant de se sentir important, ne perdez pas une occasion de faire sentir à vot
1165 e se sentir important, ne perdez pas une occasion de faire sentir à votre prochain toute l’importance que vous lui accorde
1166 . C’est le bon sens même. Mais c’est le contraire de l’Évangile, qui voulait faire de nous des humbles et nous donner l’es
1167 est le contraire de l’Évangile, qui voulait faire de nous des humbles et nous donner l’esprit de Pauvreté. L’idéal de Mr.
1168 faire de nous des humbles et nous donner l’esprit de Pauvreté. L’idéal de Mr. Carnegie, c’est un bavard perpétuellement so
1169 bles et nous donner l’esprit de Pauvreté. L’idéal de Mr. Carnegie, c’est un bavard perpétuellement souriant, flatteur pour
1170 tteur pour qu’on le flatte, rompu aux stratagèmes de la fausse modestie la plus intéressée et d’une sympathie méthodique i
1171 gèmes de la fausse modestie la plus intéressée et d’ une sympathie méthodique inlassablement déversée sur tout voisin qui p
1172 préceptes du Christ. Il avait la franchise féroce de l’immoralité donnée pour telle, respectant les catégories et défiant
1173 par l’affront. Il gardait, dans le vice, un style de l’âme. Le contraste qu’on vient d’esquisser peut nous faire mesurer t
1174 vice, un style de l’âme. Le contraste qu’on vient d’ esquisser peut nous faire mesurer toute la déperdition d’énergie propr
1175 sser peut nous faire mesurer toute la déperdition d’ énergie proprement spirituelle que représente notre « progrès moral ».
1176 affaires, sous le prétexte allégué et je cite, «  d’ entretenir des contacts faciles et agréables. » Serait-ce que j’ai l’e
1177 antisocial, et nuisible aux affaires ? Que le sel de la terre est malsain ? Et que la sagesse démocratique se résume dans
1178 er le monde — et perdre son âme ? 35. Paradoxe de la démocratie Avec beaucoup d’intelligence les totalitaires ont mi
1179 35. Paradoxe de la démocratie Avec beaucoup d’ intelligence les totalitaires ont mis la bêtise de leur côté. Sous leu
1180 d’intelligence les totalitaires ont mis la bêtise de leur côté. Sous leur régime, les imbéciles n’ont rien à perdre. Les â
1181 t, le régime totalitaire n’est que la forme basse de la démocratie. Déchaînez parmi nous les démons que je viens de décrir
1182 es régimes totalitaires que par un certain manque de rigueur, un désordre plus apparent, une phraséologie moins entraînant
1183 ’est, comme la santé, qu’une utopie. Je l’imagine de la manière suivante : l’intelligence n’aurait rien à y perdre, les âm
1184 duquées, les âmes moyennes s’y sentiraient gênées d’ être moyennes et de faire nombre. On y verrait des élites dures, aux d
1185 oyennes s’y sentiraient gênées d’être moyennes et de faire nombre. On y verrait des élites dures, aux disciplines prestigi
1186 mme complet, si l’on y réfléchit : il serait aisé d’ en développer les conséquences sur tous les plans, pour l’économie, la
1187 ! Revenons au diable. 36. La cinquième colonne de tous les temps J’ai dit du mal de tout le monde, des totalitaires,
1188 ième colonne de tous les temps J’ai dit du mal de tout le monde, des totalitaires, et des démocrates, des autres, de no
1189 des totalitaires, et des démocrates, des autres, de nous, et donc de moi aussi. Mais si le diable est partout, sa figure
1190 , et des démocrates, des autres, de nous, et donc de moi aussi. Mais si le diable est partout, sa figure se brouille. Et l
1191 ndre une image nette et facilement reconnaissable de la personne de Satan ? C’est que le diable, par nature, ne sera jamai
1192 nette et facilement reconnaissable de la personne de Satan ? C’est que le diable, par nature, ne sera jamais clairement et
1193 pour être à la fois juge et partie dans le procès de sa définition. Paradoxal par essence, il existe, bien sûr, mais il es
1194 néant, ce qui souhaite secrètement la destruction de l’existence, — celle des autres, ou la sienne propre. Sa qualité de n
1195 celle des autres, ou la sienne propre. Sa qualité de n’être pas ceci ou cela de positif lui donne une liberté indéfinie d’
1196 nne propre. Sa qualité de n’être pas ceci ou cela de positif lui donne une liberté indéfinie d’action, d’incognito et d’al
1197 u cela de positif lui donne une liberté indéfinie d’ action, d’incognito et d’alibis à perte de vue. Vulgaire et séduisant
1198 positif lui donne une liberté indéfinie d’action, d’ incognito et d’alibis à perte de vue. Vulgaire et séduisant, pharisie
1199 ne une liberté indéfinie d’action, d’incognito et d’ alibis à perte de vue. Vulgaire et séduisant, pharisien et voyou, hyp
1200 nt que le mal doit toujours être laid ; et il est d’ une laideur irrésistiblement attirante aux yeux des désabusés ou des r
1201 notre raison. On sait assez que le procédé favori de la Cinquième Colonne consistait à semer la confusion dans le camp de
1202 onne consistait à semer la confusion dans le camp de l’adversaire en y répandant alternativement de vraies et de fausses n
1203 mp de l’adversaire en y répandant alternativement de vraies et de fausses nouvelles. Voilà le diable à l’œuvre dans nos vi
1204 saire en y répandant alternativement de vraies et de fausses nouvelles. Voilà le diable à l’œuvre dans nos vies : le maîtr
1205 aître du confusionnisme dirigé ! Hitler fut l’âme de la cinquième colonne du siècle, mais Satan reste l’essence même de la
1206 olonne du siècle, mais Satan reste l’essence même de la Cinquième Colonne au siècle des siècles. Enfin — et ceci doit me r
1207 re qui, lorsqu’une dénonciation le fait déguerpir de sa cachette, va se loger de préférence chez celui qui l’a dénoncé, et
1208 ion le fait déguerpir de sa cachette, va se loger de préférence chez celui qui l’a dénoncé, et qui se tient pour assuré da
1209 Expression empruntée à l’Évangile par une erreur de traduction. Le texte véritable ne dit pas « Paix sur la terre aux hom
1210 ritable ne dit pas « Paix sur la terre aux hommes de bonne volonté » mais « Paix sur la terre, et bonne volonté (de Dieu)
1211 nté » mais « Paix sur la terre, et bonne volonté ( de Dieu) envers les hommes ». Ce qui est complètement différent. 14. Je
1212 ètement différent. 14. Je ne parle pas des héros de la guerre, mais de la paix. 15. Est-ce un si grand bien ? Pour le gr
1213 14. Je ne parle pas des héros de la guerre, mais de la paix. 15. Est-ce un si grand bien ? Pour le grand nombre, oui, pr
1214 . Je pense à Mein Kampf, aux deux premiers livres de Rauschning, à d’innombrables documentaires, publiés sur les mœurs tot
1215 Kampf, aux deux premiers livres de Rauschning, à d’ innombrables documentaires, publiés sur les mœurs totalitaires. Notre
1216 ité bourgeoise a été l’une des meilleures chances d’ Hitler. 17. Dans sa tête on tient des banquets. 18. Celle-ci le comp
5 1942, La Part du diable (1982). Quatrième partie. Le diable dans nos Dieux et dans nos maladies
1217 seulement surent connaître le Christ dans le fils de Joseph, charpentier de village. Mais l’incognito et l’alibi du diable
1218 tre le Christ dans le fils de Joseph, charpentier de village. Mais l’incognito et l’alibi du diable sont exactement invers
1219 ble sont exactement inverses : c’est dans l’image de nos dieux qu’il va se dissimuler, au cœur même de nos idéaux et de no
1220 de nos dieux qu’il va se dissimuler, au cœur même de nos idéaux et de nos vérités trop humaines, dans les religions que no
1221 l va se dissimuler, au cœur même de nos idéaux et de nos vérités trop humaines, dans les religions que nous confabulons en
1222 dehors de la foi révélée. Le diable nous empêche de reconnaître Dieu dans Jésus-Christ, mais à l’inverse, il nous empêche
1223 s-Christ, mais à l’inverse, il nous empêche aussi de nous reconnaître dans nos idoles. Voici comment les hommes s’enchaîne
1224  Dieu » qui était le moi conscient ou inconscient de ses croyants. Une image de leur impérialisme, ou une compensation rêv
1225 nscient ou inconscient de ses croyants. Une image de leur impérialisme, ou une compensation rêvée de leurs défauts. Et ce
1226 e de leur impérialisme, ou une compensation rêvée de leurs défauts. Et ce fut le Dieu de la Raison pour les tempéraments r
1227 éraments rationalistes, le Dieu de l’Instinct, et de la Passion pour les hypercivilisés, le Dieu du Succès pour les robust
1228 isé qu’en un nous. Et ces trois entités ont ceci de commun : elles ne sont responsables de rien devant personne, s’étant
1229 s ont ceci de commun : elles ne sont responsables de rien devant personne, s’étant faites elles-mêmes les critères de tout
1230 personne, s’étant faites elles-mêmes les critères de toute vérité purement humaine, et décrétant qu’il n’est plus d’autre
1231 é purement humaine, et décrétant qu’il n’est plus d’ autre vérité. Or aux yeux de ceux qui les servent, l’homme n’existe qu
1232 obéissons, nous ne sommes donc plus responsables de nos actes, mais elles le sont à notre place. Et comme elles-mêmes n’o
1233 ace. Et comme elles-mêmes n’ont à répondre auprès d’ aucune instance supérieure, il n’y a plus de responsabilité nulle part
1234 uprès d’aucune instance supérieure, il n’y a plus de responsabilité nulle part. Mais s’il apparaît, à l’inverse, que nous
1235 s avec l’entité divinisée — parce que nous sommes d’ une autre race, d’une autre classe, ou d’une autre génération physique
1236 vinisée — parce que nous sommes d’une autre race, d’ une autre classe, ou d’une autre génération physique et mentale que ce
1237 s sommes d’une autre race, d’une autre classe, ou d’ une autre génération physique et mentale que celle qui détient le pouv
1238 urs évidemment méchants, que dans les sanctuaires de la foi qui devait mettre à genoux les dictateurs avant que les armées
1239 dans l’Église Un jour l’Église a été qualifiée de « Satan » par Jésus lui-même. Ce fut quelques minutes après sa fondat
1240 utes après sa fondation, et dans la personne même de celui sur lequel Jésus venait de la fonder : l’apôtre Pierre. Jésus a
1241  Simon Pierre répondit : Tu es le Christ, le Fils de Dieu vivant. Jésus, reprenant la parole, lui dit : Tu es heureux, Sim
1242 t la parole, lui dit : Tu es heureux, Simon, fils de Jonas ; car ce ne sont pas la chair et le sang qui t’ont révélé cela,
1243 i est dans les deux » (Matthieu 16). Sur cet acte de foi, Jésus fonde l’Église : « Et moi, je te dis que tu es Pierre, et
1244 e premier pape se fait dire par Jésus : « Arrière de moi Satan ! Tu m’es en scandale ; car tes pensées ne sont pas les pen
1245 candale ; car tes pensées ne sont pas les pensées de Dieu mais celles des hommes. » Qu’est-il donc arrivé ? Comment cette
1246 t cette « pierre » sur qui l’Église vient à peine d’ être posée est-elle déjà devenue pierre d’achoppement ? Pourquoi cet h
1247 à peine d’être posée est-elle déjà devenue pierre d’ achoppement ? Pourquoi cet homme, auquel le Christ vient de dire qu’il
1248 , parle-t-il maintenant selon le diable ? Ce coup de théâtre, l’un des plus stupéfiants de l’Évangile et de la vie spiritu
1249 e ? Ce coup de théâtre, l’un des plus stupéfiants de l’Évangile et de la vie spirituelle, s’explique sans la moindre équiv
1250 éâtre, l’un des plus stupéfiants de l’Évangile et de la vie spirituelle, s’explique sans la moindre équivoque : Jésus aprè
1251 a pas ! » À peine fondée, l’Église en la personne de Pierre, son chef terrestre, a voulu s’assurer de son chef céleste afi
1252 de Pierre, son chef terrestre, a voulu s’assurer de son chef céleste afin de garantir l’institution nouvelle contre les r
1253 arantir l’institution nouvelle contre les risques de l’esprit, tout en se prévalant déjà d’un Nom qu’elle renie pourtant d
1254 es risques de l’esprit, tout en se prévalant déjà d’ un Nom qu’elle renie pourtant du même souffle : « À Dieu ne plaise ! »
1255 il plaisait à Dieu… En quelques lignes, l’auteur de l’Évangile a décrit toute l’histoire de l’Église. À chaque instant da
1256 l’auteur de l’Évangile a décrit toute l’histoire de l’Église. À chaque instant dans tous les siècles, le même drame va se
1257 t l’Église. (Tout homme qui croit, dans l’instant de la foi devient Pierre à son tour, et fondement de l’Église.) Mais lor
1258 de la foi devient Pierre à son tour, et fondement de l’Église.) Mais lorsque Pierre se croit le possesseur du bien dont il
1259 plaît, non pas comme il plaisait au Créateur même de ce bien. Il ne va pas courir des risques fous, il a déjà sa belle pru
1260 s clés.) La justice et le droit, non pas la folie de l’esprit ni les extravagances de l’amour. La vie certes, mais non la
1261 non pas la folie de l’esprit ni les extravagances de l’amour. La vie certes, mais non la mort dont elle naîtrait. Le résul
1262 ultat, mais sans la condition… Car notre rôle est de durer, et nos responsabilités sont écrasantes, et nous n’allons pas j
1263 é avec le trésor spirituel que Dieu nous a chargé d’ administrer, nous son indigne serviteur… C’est Satan qui a soufflé le
1264 e serviteur… C’est Satan qui a soufflé le conseil de prudence. Car vouloir conserver ce bien, c’est le sûr moyen de le per
1265 Car vouloir conserver ce bien, c’est le sûr moyen de le perdre. Accomplir sagement cette mission de folie, c’est le sûr mo
1266 en de le perdre. Accomplir sagement cette mission de folie, c’est le sûr moyen de la trahir. Ce n’était pas la vie du mond
1267 gement cette mission de folie, c’est le sûr moyen de la trahir. Ce n’était pas la vie du monde, ni l’ordre ou la justice,
1268 ique du sacrifice, le sens du risque spirituel et de la catastrophe salutaire. Si Jésus n’est pas supplicié, il ne ressusc
1269 lus. L’Église n’aura plus rien à dire, le pouvoir de Pierre sera vide. L’Église est posée dans l’Histoire pour y représent
1270 ermanent rappel au drame fondamental du cosmos et de l’esprit : il faut mourir pour naître de nouveau. Étrange institution
1271 nouveau. Étrange institution dont le seul but est de planter au sein du monde un principe de bouleversement, de scandale e
1272 l but est de planter au sein du monde un principe de bouleversement, de scandale et de tragédie ! Car tout le sens du chri
1273 r au sein du monde un principe de bouleversement, de scandale et de tragédie ! Car tout le sens du christianisme tient en
1274 nde un principe de bouleversement, de scandale et de tragédie ! Car tout le sens du christianisme tient en trois actes ess
1275 en pureté. Ce drame est figuré dans le sacrement de la communion. Il est rappelé dans le Credo. Mais peut-on dire qu’il e
1276 r ensemble ? En fait, nous les voyons préoccupées de se maintenir dans le monde, au lieu d’y allumer des foyers éclatants
1277 e monde, au lieu d’y allumer des foyers éclatants de purification. Elles sont devenues des forces de conservation, s’oppos
1278 s de purification. Elles sont devenues des forces de conservation, s’opposant par leur esprit même au processus de mort et
1279 ion, s’opposant par leur esprit même au processus de mort et de résurrection quelles avaient pour mission d’animer. Or dan
1280 sant par leur esprit même au processus de mort et de résurrection quelles avaient pour mission d’animer. Or dans toute la
1281 t et de résurrection quelles avaient pour mission d’ animer. Or dans toute la mesure où une Église s’en tient à de pieuses
1282 r dans toute la mesure où une Église s’en tient à de pieuses prudences, sous prétexte de sauvegarder quelques « valeurs sp
1283 ais sur le Pierre auquel Jésus disait : « Arrière de moi Satan ! Car tu m’es en scandale. » 40. Le diable théologien
1284 le théologien Mais tout cela, dira-t-on, c’est de la théologie. Je connais peu d’occupations plus décriées dans notre s
1285 dira-t-on, c’est de la théologie. Je connais peu d’ occupations plus décriées dans notre siècle, peu de mots qui gardent m
1286 dans notre siècle, peu de mots qui gardent moins d’ appel pour nos contemporains, et je ne parle pas des incultes mais de
1287 ntemporains, et je ne parle pas des incultes mais de l’élite intellectuelle. Vous rencontrez de grands savants, des philos
1288 s mais de l’élite intellectuelle. Vous rencontrez de grands savants, des philosophes, des moralistes, des écrivains connus
1289 s le monde entier : neuf fois sur dix ces maîtres de la pensée moderne vous avouent sans la moindre rougeur, légèrement ét
1290 ouent sans la moindre rougeur, légèrement étonnés de la question, qu’ils n’ont pas lu de leur vie un seul traité théologiq
1291 ement étonnés de la question, qu’ils n’ont pas lu de leur vie un seul traité théologique. On les étonnerait davantage en l
1292 ent pas bien le rapport. Je pense qu’il s’agit là d’ une attitude rétrograde, plus inquiétante pour la culture que les méfa
1293 e que les méfaits des hordes fascistes. La pensée de l’Occident et son vocabulaire sont nés des grands débats théologiques
1294 nt nés des grands débats théologiques aux siècles de la primitive Église. Notre musique, notre sculpture, notre peinture s
1295 et Marx, qui n’aient été, à l’origine, des prises de position théologiques. Ignorer la théologie, c’est rompre avec la tra
1296 e, c’est rompre avec la tradition la plus féconde de la culture occidentale. C’est donc se condamner à refaire sans le sav
1297 couvertes spirituelles mises en forme depuis plus de quinze cents ans par les Pères de l’Église et les grands hérétiques.
1298 et les grands hérétiques. La naïveté théologique de notre siècle est l’un des avantages les plus considérables de la nouv
1299 cle est l’un des avantages les plus considérables de la nouvelle barbarie. Je ne puis la comparer qu’à une espèce de carie
1300 barbarie. Je ne puis la comparer qu’à une espèce de carie de l’intelligence, qui nous empêche de mastiquer et de digérer
1301 . Je ne puis la comparer qu’à une espèce de carie de l’intelligence, qui nous empêche de mastiquer et de digérer nos expér
1302 pèce de carie de l’intelligence, qui nous empêche de mastiquer et de digérer nos expériences spirituelles. Tout porte à cr
1303 l’intelligence, qui nous empêche de mastiquer et de digérer nos expériences spirituelles. Tout porte à croire que le diab
1304 utres temps, il pouvait nous surprendre au détour d’ un subtil argument sur la grâce, qu’il opposait à la loi, par exemple.
1305 opposait à la loi, par exemple. Mais un peu plus de belle et bonne théologie nous sauvait bientôt du sophisme, tandis qu’
1306 même l’existence du problème. Un certain nombre de tendances théologiques traditionnelles sont très probablement d’origi
1307 éologiques traditionnelles sont très probablement d’ origine satanique : le pélagianisme, par exemple, et les doctrines qu’
1308 les doctrines qu’on pourrait baptiser théologies de l’eritis sicut dii, créées par quelques-uns des mystiques les plus gr
1309 dans l’époque présente, qui les prend pour autant d’ innovations « excitantes » de l’avant-garde. Mais sans doute sont-elle
1310 es prend pour autant d’innovations « excitantes » de l’avant-garde. Mais sans doute sont-elles moins déprimantes que le pr
1311 doute sont-elles moins déprimantes que le préjugé de l’homme moderne, qui ne sait rien de la théologie, croit pouvoir s’en
1312 e le préjugé de l’homme moderne, qui ne sait rien de la théologie, croit pouvoir s’en passer, mais ne se prive point d’en
1313 croit pouvoir s’en passer, mais ne se prive point d’ en faire sans le savoir, et de la pire, quand il « adore Dieu dans la
1314 s ne se prive point d’en faire sans le savoir, et de la pire, quand il « adore Dieu dans la forêt mieux qu’à l’Église », q
1315 a raison » (aveuglément), ou quand il se contente de « faire du bien »… 41. Le diable et le philanthrope Un jour un
1316 me Avenue. Il avait la tête et les poches pleines de projets philanthropiques, propres à réformer l’humanité au-delà de to
1317 thropiques, propres à réformer l’humanité au-delà de tout ce que je désirerais même imaginer. Il venait d’allumer un cigar
1318 out ce que je désirerais même imaginer. Il venait d’ allumer un cigare de grand prix, dont la fumée montait comme un encens
1319 rais même imaginer. Il venait d’allumer un cigare de grand prix, dont la fumée montait comme un encens et devait être en b
1320 mètres, derrière lui, suivaient le diable et l’un de ses compères. Ils observaient le Philanthrope, d’un œil critique. Un
1321 de ses compères. Ils observaient le Philanthrope, d’ un œil critique. Un pauvre homme l’arrêta pour lui demander une cigare
1322 pour lui demander une cigarette, dans un anglais de réfugié. Le Philanthrope sans hésiter lui remit un dollar, et poursui
1323 plendissait comme un sou neuf. « Tu n’as pas peur de lui ? dit le compère au diable, il m’a l’air terriblement bon ! Et se
1324 épondit rien, il souriait, tout en lisant un bout de papier qu’il venait de ramasser sur le trottoir. Après quelques insta
1325 très bien ? Entre les gens du monde et le Prince de ce monde, les mots suggèrent, dans presque toutes nos langues, certai
1326 ré peut-être par les traditionnels avertissements de la chaire chrétienne, a toujours vu dans la mondanité quelque chose d
1327 ne, a toujours vu dans la mondanité quelque chose de vaguement satanique. Il imaginerait volontiers un diable en cravate b
1328 que l’on peut penser aussi des gens du monde, et de la sagesse mondaine en général. Elle a son charme et son utilité ; ma
1329 t vieille, elle est trop avertie, elle offre trop de recettes éprouvées : elle finit par ne plus croire au bien, ni au sér
1330 te insondable ruse des cœurs purs qui leur permet de passer au travers des cercles vicieux de la raison et de l’égoïsme « 
1331 r permet de passer au travers des cercles vicieux de la raison et de l’égoïsme « bien compris ». La fonction normale de la
1332 er au travers des cercles vicieux de la raison et de l’égoïsme « bien compris ». La fonction normale de la vie mondaine se
1333 e l’égoïsme « bien compris ». La fonction normale de la vie mondaine serait de maintenir et d’illustrer un certain nombre
1334  ». La fonction normale de la vie mondaine serait de maintenir et d’illustrer un certain nombre de devises d’élégance mora
1335 normale de la vie mondaine serait de maintenir et d’ illustrer un certain nombre de devises d’élégance morale et de sagesse
1336 ait de maintenir et d’illustrer un certain nombre de devises d’élégance morale et de sagesse pratique. Il n’y a rien là de
1337 tenir et d’illustrer un certain nombre de devises d’ élégance morale et de sagesse pratique. Il n’y a rien là de diabolique
1338 un certain nombre de devises d’élégance morale et de sagesse pratique. Il n’y a rien là de diabolique, tout au contraire.
1339 e morale et de sagesse pratique. Il n’y a rien là de diabolique, tout au contraire. Le jeu mondain, s’il est bien joué, mé
1340 Le jeu mondain, s’il est bien joué, ménage autant de liberté qu’il suppose, dit-on, d’hypocrisie. Il a le charme reposant
1341 , ménage autant de liberté qu’il suppose, dit-on, d’ hypocrisie. Il a le charme reposant des formes fixes. Mais le mondain
1342 s le mondain qui n’est que cela inspire une sorte d’ effroi furtif, révélateur d’une présence perverse au sein même de l’in
1343 ela inspire une sorte d’effroi furtif, révélateur d’ une présence perverse au sein même de l’insignifiance. L’exactitude im
1344 , révélateur d’une présence perverse au sein même de l’insignifiance. L’exactitude impitoyable de ses jugements, qui ne po
1345 même de l’insignifiance. L’exactitude impitoyable de ses jugements, qui ne portent d’ailleurs que sur les apparences ; sa
1346 t d’ailleurs que sur les apparences ; sa capacité d’ éliminer froidement ce qui n’est pas conforme aux goûts appris ; sa pr
1347 ris ; sa propension presque maniaque à n’attacher de l’importance qu’à un détail fortuit dans un être ou une œuvre ; tous
1348 tous ces traits qui pourraient dénoter l’exigence d’ un artiste véritable prennent soudain quelque chose de satanique, lors
1349 artiste véritable prennent soudain quelque chose de satanique, lorsque l’on s’aperçoit de la stérilité du personnage, et
1350 elque chose de satanique, lorsque l’on s’aperçoit de la stérilité du personnage, et des effets stérilisants qu’entraîne sa
1351 ation. Ce n’est pas le goût ni même le pédantisme de la forme qui est satanique, c’est le goût de la forme imitée. Le mili
1352 isme de la forme qui est satanique, c’est le goût de la forme imitée. Le milieu mondain le plus suavement correct et moral
1353 re préféré par le diable à ces milieux bohèmes et de mœurs relâchées qui se disent volontiers damnés. C’est, je crois, par
1354 nde le connaît. Mr. Time croit que le temps c’est de l’argent. Or il gagne beaucoup d’argent et pourtant il n’a jamais le
1355 le temps c’est de l’argent. Or il gagne beaucoup d’ argent et pourtant il n’a jamais le temps. Serait-ce qu’il n’a de temp
1356 rtant il n’a jamais le temps. Serait-ce qu’il n’a de temps que pour l’argent, ce Mr. Time ? Ou bien la réciproque du fameu
1357 ains prennent beaucoup de temps pour faire un peu d’ argent, tandis que d’autres font beaucoup d’argent en un rien de temps
1358 n peu d’argent, tandis que d’autres font beaucoup d’ argent en un rien de temps. Peu nous importe. Ce qui est frappant, c’e
1359 is que d’autres font beaucoup d’argent en un rien de temps. Peu nous importe. Ce qui est frappant, c’est que Mr. Time peut
1360 u contraire, ils ont tout le temps. Tout le temps de n’avoir pas d’argent ; ou d’en attendre ; et de n’en plus attendre, f
1361 s ont tout le temps. Tout le temps de n’avoir pas d’ argent ; ou d’en attendre ; et de n’en plus attendre, finalement. Peut
1362 temps. Tout le temps de n’avoir pas d’argent ; ou d’ en attendre ; et de n’en plus attendre, finalement. Peut-être à ce mom
1363 s de n’avoir pas d’argent ; ou d’en attendre ; et de n’en plus attendre, finalement. Peut-être à ce moment-là découvrent-i
1364 oment-là découvrent-ils quelque chose qui n’a pas de prix ? Mr. Time ne le verrait même pas, à supposer qu’on le lui montr
1365 u’on le lui montre du doigt, car il faut le temps de bien regarder ces choses pour qu’elles existent. Mr. Time n’aura jama
1366 là l’Éternité. 44. Le diable auteur « Point d’ œuvre sans la collaboration du démon », dit André Gide, l’un des rares
1367 t au diable et qui en parlent bien. La discussion de cette sentence inconfortable ne paraît que trop indiquée dans un livr
1368 ée dans un livre qui, plus que tout autre, menace d’ impliquer l’active complicité de son modèle. Jakob Boehme raconte qu’o
1369 out autre, menace d’impliquer l’active complicité de son modèle. Jakob Boehme raconte qu’on demandait à Satan : Pourquoi e
1370 éniale si nous considérons les divers sens du nom d’ auteur. L’Auteur de toutes choses est leur autorité. Il s’autorise à
1371 dérons les divers sens du nom d’auteur. L’Auteur de toutes choses est leur autorité. Il s’autorise à l’infini dans Sa Cré
1372 i-même sa grandeur « et l’étendue célèbre l’œuvre de ses mains ». Le diable a voulu faire aussi son propre Ouvrage. Mais i
1373 est là pour les guider. Et comment faire la part de son incitation ? Tout écrivain digne du nom, tout créateur en général
1374 hoisissant tel mot, tel rythme ou tel accent ; et de quel insondable imbroglio, cette petite phrase toute claire en appare
1375 t…) En vérité, la volonté, la création, le besoin d’ écrire, simplement, coïncide en sa profondeur avec la tentation lucifé
1376 es meilleurs se voient tentés plus que les autres d’ accepter les conseils de ce génial Souffleur. « C’est avec les beaux s
1377 entés plus que les autres d’accepter les conseils de ce génial Souffleur. « C’est avec les beaux sentiments qu’on fait de
1378 eur. « C’est avec les beaux sentiments qu’on fait de la mauvaise littérature », dit encore Gide. Et William Blake estimait
1379 l’on apporte à son appui l’exemple un peu facile d’ innombrables ouvrages édifiants. Non, ce n’est pas la vraie beauté des
1380 fausse beauté (donc leur laideur réelle) qui fait de la mauvaise littérature. Mais voilà bien la misère du vieux monde. Au
1381 sion. Nous ne savions plus concevoir et illustrer de vrais beaux sentiments, de vrais types de vie haute, de vrais idéaux
1382 concevoir et illustrer de vrais beaux sentiments, de vrais types de vie haute, de vrais idéaux qui propagent une énergie,
1383 lustrer de vrais beaux sentiments, de vrais types de vie haute, de vrais idéaux qui propagent une énergie, une force d’âme
1384 is beaux sentiments, de vrais types de vie haute, de vrais idéaux qui propagent une énergie, une force d’âme contagieuse.
1385 vrais idéaux qui propagent une énergie, une force d’ âme contagieuse. Presque toute la littérature immoraliste sécrétée par
1386 aliste sécrétée par la bourgeoisie est tributaire de la morale bourgeoise : elle reste hélas au niveau de l’ennemi. Sa con
1387 este hélas au niveau de l’ennemi. Sa condamnation de la morale participe de la légèreté, de l’arbitraire et de l’insignifi
1388 l’ennemi. Sa condamnation de la morale participe de la légèreté, de l’arbitraire et de l’insignifiance qui signalaient la
1389 ndamnation de la morale participe de la légèreté, de l’arbitraire et de l’insignifiance qui signalaient la morale bourgeoi
1390 rale participe de la légèreté, de l’arbitraire et de l’insignifiance qui signalaient la morale bourgeoise. Fermons cette p
1391 er l’apport du diable aux plus sublimes créations de l’esprit ? Je ne pense pas qu’aucun créateur puisse se faire d’illusi
1392 Je ne pense pas qu’aucun créateur puisse se faire d’ illusions là-dessus. Aux sources du poème et dans nos encriers, dans c
1393 ’est pas seul, mais il est là. La solution, c’est de le faire travailler autrement qu’il ne l’entendait. Ou disons mieux :
1394 e ce diable va devenir à son tour une des pierres de la cathédrale, la pierre d’angle grotesque, la chimère pétrifiée qui
1395 tour une des pierres de la cathédrale, la pierre d’ angle grotesque, la chimère pétrifiée qui regarde la plaine avec mélan
1396 le temps consacrés. Serait-ce un mystérieux écho de la rédemption dans son abîme d’ennui sans fin ? Un retour nostalgique
1397 n mystérieux écho de la rédemption dans son abîme d’ ennui sans fin ? Un retour nostalgique du bien qu’il aurait provoqué m
1398 ait provoqué malgré lui en ménageant ces vertiges d’ où l’âme parfois remonte fécondée ? Pourrons-nous un jour concevoir qu
1399 re Dante a-t-il raison lorsqu’il inscrit au seuil de son Enfer : Fecemi la divina potestate La somma sapienza e il primo
1400 ’est la fin seule qui justifie les moyens ambigus de l’art. Si le diable même y collabore, qu’importe : la dédicace est le
1401 labore, qu’importe : la dédicace est le vrai sens de l’œuvre, pour autant que l’homme peut en juger. Elle ravit au démon l
1402 me peut en juger. Elle ravit au démon le bénéfice de ses conseils intéressés. Elle nous donne la mesure absolue. Un écriva
1403 un but qu’il ignore ; car sa faiblesse unique est de ne pas croire au bien. 45. Le pacte avec le diable Peter Schlem
1404 au diable devint très riche, mais perdit le goût de vivre. C’est l’une des plus belles fables de ce monde, l’une des plus
1405 goût de vivre. C’est l’une des plus belles fables de ce monde, l’une des plus tristes dans sa fantaisie géniale, et peu so
1406 e géniale, et peu sont plus profondes avec autant de grâce. Que signifie cette ombre dans le conte ? Je pense que c’est la
1407 dans le conte ? Je pense que c’est la créativité de l’homme, sa liberté, c’est-à-dire son « âme ». (Et c’est pourquoi l’u
1408  ». (Et c’est pourquoi l’un des premiers malheurs de notre héros est de ne plus pouvoir aimer ni être aimé.) J’ai dit que
1409 uoi l’un des premiers malheurs de notre héros est de ne plus pouvoir aimer ni être aimé.) J’ai dit que la liberté de l’hom
1410 voir aimer ni être aimé.) J’ai dit que la liberté de l’homme réside dans son pouvoir unique au monde de suivre l’ordre — o
1411 e l’homme réside dans son pouvoir unique au monde de suivre l’ordre — ou de tricher. S’il suit l’ordre de la Création, sa
1412 on pouvoir unique au monde de suivre l’ordre — ou de tricher. S’il suit l’ordre de la Création, sa liberté s’accroît, et s
1413 suivre l’ordre — ou de tricher. S’il suit l’ordre de la Création, sa liberté s’accroît, et son pouvoir de choix porte sur
1414 la Création, sa liberté s’accroît, et son pouvoir de choix porte sur des enjeux toujours plus vastes. Mais s’il triche pou
1415 erté, sa proie le lie. « Que servirait à un homme de gagner le monde s’il perdait son âme ? », dit l’Évangile. Le Pacte av
1416 ctement à gagner le monde au prix de notre âme et de notre ombre, au prix de notre libre faculté de créer dans le réel — o
1417 et de notre ombre, au prix de notre libre faculté de créer dans le réel — ou à côté. Tant que vous faites effort pour vous
1418 dans la vérité, vous conservez la pleine faculté de dire le vrai ou de mentir. Mais une fois que vous avez menti, vous êt
1419 us conservez la pleine faculté de dire le vrai ou de mentir. Mais une fois que vous avez menti, vous êtes lié par le menso
1420 t, vous conservez la possibilité à chaque instant de monter ou de redescendre. Plus vous montez et plus l’effort devient p
1421 rvez la possibilité à chaque instant de monter ou de redescendre. Plus vous montez et plus l’effort devient pénible, et pl
1422 abîme vous tente, mais l’horizon s’étend. Si tout d’ un coup votre fatigue ou quelque vertige l’emporte, ou si votre pied g
1423 à rouler vers l’abîme ou simplement vers le fond de la vallée, où vit le commun des mortels. Vous êtes délivré de votre e
1424 , où vit le commun des mortels. Vous êtes délivré de votre effort, tout est facile, il n’y a qu’à se laisser aller. Vous «
1425 ches et populeux. Mais vous avez perdu la liberté de monter ou de descendre à votre choix. Vous êtes pris dans un mécanism
1426 eux. Mais vous avez perdu la liberté de monter ou de descendre à votre choix. Vous êtes pris dans un mécanisme à sens uniq
1427 nique, vous n’êtes qu’un corps abandonné aux lois de la gravitation et toutes vos gesticulations ne feront qu’accélérer la
1428 cela que résume et figure l’expression légendaire de pacte avec le diable. Nous sentons tous obscurément qu’un succès trop
1429 un succès trop rapide dans le monde doit provenir d’ une sorte de marché conclu avec le Prince de ce monde, et dont le prix
1430 op rapide dans le monde doit provenir d’une sorte de marché conclu avec le Prince de ce monde, et dont le prix est notre l
1431 venir d’une sorte de marché conclu avec le Prince de ce monde, et dont le prix est notre liberté. Et c’est pourquoi la mor
1432 dentition ! Comment cette belle humeur et ce goût de mieux vivre pourraient-ils être diaboliques ? Les démons, ce sont les
1433 iaboliques ? Les démons, ce sont les nazis, vêtus de noir, grinçant des dents, mal nourris et semant la mort. Mais quoi ?
1434 . Mais quoi ? Vous voulez gagner le monde à coups de dollars, et les méchants nazis veulent le gagner à coups de canon. Vo
1435 , et les méchants nazis veulent le gagner à coups de canon. Vous pensez que le premier système a l’avantage d’être plus hy
1436 . Vous pensez que le premier système a l’avantage d’ être plus hygiénique. C’est peut-être vrai. Mais je doute que ce soit
1437 étaient sûres ! Je ne vais pas prêcher une morale de l’échec. Succès ou insuccès ne signifient rien en soi, tout dépend du
1438 is il faut bien rappeler que le plus grand succès de toute l’Histoire, ce fut la mort ignominieuse du Christ en croix. Ce
1439 ’âme du monde, que nous avions vendue pour un peu de plaisir… 46. Le diable tire les cartes On pressent assez facile
1440 la fois la victime et le bénéficiaire. En échange de sa pureté d’âme, il se verrait doté de pouvoirs extraordinaires, dont
1441 ctime et le bénéficiaire. En échange de sa pureté d’ âme, il se verrait doté de pouvoirs extraordinaires, dont la source ne
1442 En échange de sa pureté d’âme, il se verrait doté de pouvoirs extraordinaires, dont la source ne saurait être — ainsi pens
1443 si pense-t-on communément — que dans les royaumes d’ en bas. C’est un hommage involontaire et l’on dirait presque instincti
1444 e instinctif que l’on rend à la science angélique de Satan. Il est vrai que sous le nom de Python, il représente le Devin,
1445 e angélique de Satan. Il est vrai que sous le nom de Python, il représente le Devin, et sous le vocable hébreu de ‘VB, l’e
1446 il représente le Devin, et sous le vocable hébreu de ‘VB, l’esprit de la lumière descendante, pouvoir prophétique et magiq
1447 Devin, et sous le vocable hébreu de ‘VB, l’esprit de la lumière descendante, pouvoir prophétique et magique. Mais l’assimi
1448 uvoir prophétique et magique. Mais l’assimilation de la clairvoyance en général avec cette puissance diabolique est une er
1449 ution tout en louant la volupté dans le plus beau de ses Cantiques. Dieu lui-même ne cesse d’envoyer des songes prophétiqu
1450 lus beau de ses Cantiques. Dieu lui-même ne cesse d’ envoyer des songes prophétiques à ceux qui l’aiment, de Daniel à Jean
1451 oyer des songes prophétiques à ceux qui l’aiment, de Daniel à Jean de Patmos. Et les premiers à découvrir et saluer le Chr
1452 ist naissant, ce furent les Mages. Il serait vain de nier les faits sous prétexte qu’ils sont encore inexplicables : les t
1453 ’est encore aujourd’hui que la science incertaine de découvrir l’avenir, craignons qu’elle devienne dans l’avenir une déco
1454 ons qu’elle devienne dans l’avenir une découverte de la science. Nous regretterons alors le temps des clins d’œil de la de
1455 ience. Nous regretterons alors le temps des clins d’ œil de la destinée, quand nous pouvions encore les accueillir avec une
1456 Nous regretterons alors le temps des clins d’œil de la destinée, quand nous pouvions encore les accueillir avec une amour
1457 ureuse astuce… Ceci dit, le diable a deux chances de se glisser en nous par la voie clandestine, lorsqu’il échoue par les
1458 ne, lorsqu’il échoue par les moyens plus raffinés de la raison et de la vertu. Sa première chance réside dans notre propen
1459 houe par les moyens plus raffinés de la raison et de la vertu. Sa première chance réside dans notre propension à réduire l
1460 , et ceux-ci à leur tour aux échecs et aux succès de la vie manifeste. Cette confusion de nos catégories morales sert admi
1461 t aux succès de la vie manifeste. Cette confusion de nos catégories morales sert admirablement les desseins du Malin. Elle
1462 ns du Malin. Elle empêche la victime du charlatan de comprendre que ses malheurs ne sont pas le Mal, ni même nécessairemen
1463 irement la guerre par exemple, mais l’utilisation de la guerre, pour stériliser notre foi, ou l’utilisation de la paix non
1464 erre, pour stériliser notre foi, ou l’utilisation de la paix non moins, et même à moindres risques pour Satan. Le mal et l
1465 raduits par les voyantes en termes d’obstacles ou de succès21 ne sauraient être définis en vérité que par rapport au but s
1466 définis en vérité que par rapport au but suprême d’ une existence, en termes d’attitudes intérieures. La seconde chance du
1467 udes intérieures. La seconde chance du diable est de flatter notre tendance à nous sentir irresponsables, par le moyen d’o
1468 ndance à nous sentir irresponsables, par le moyen d’ oracles prononcés au nom d’un destin sans appel. L’angoisse de l’homme
1469 ononcés au nom d’un destin sans appel. L’angoisse de l’homme moderne devant sa liberté peut se mesurer au nombre des tireu
1470 sa liberté peut se mesurer au nombre des tireuses de cartes et de leurs clients avides d’anesthésie morale. Nous touchons
1471 ut se mesurer au nombre des tireuses de cartes et de leurs clients avides d’anesthésie morale. Nous touchons ici au secret
1472 des tireuses de cartes et de leurs clients avides d’ anesthésie morale. Nous touchons ici au secret du véritable Mal du siè
1473 , l’auteur, et l’homme qui réussit, cette galerie de victimes est classique au point d’en être presque démodée. Car Satan
1474 cette galerie de victimes est classique au point d’ en être presque démodée. Car Satan marche avec son temps, et paraît se
1475 Satan marche avec son temps, et paraît se soucier de moins en moins de persuader l’individu, dans une époque où celui-ci n
1476 son temps, et paraît se soucier de moins en moins de persuader l’individu, dans une époque où celui-ci n’existe guère. Son
1477 eilleure interprétation des phénomènes collectifs d’ aujourd’hui fut donnée vers 1848 par l’écrivain danois Søren Kierkegaa
1478 vain danois Søren Kierkegaard, le penseur capital de notre ère. Voici ce que l’on peut lire dans son journal intime : En
1479 e et des époques qui discutaient sans fin les cas de possession, c’est-à-dire d’individus particuliers se livrant au mal,
1480 ient sans fin les cas de possession, c’est-à-dire d’ individus particuliers se livrant au mal, je voudrais écrire un livre
1481 ontrer comment l’humanité qui se donne au diable, de nos jours, le fait en masse. C’est pour cela que les gens se rassembl
1482 pour que l’hystérie naturelle et animale s’empare d’ eux, pour qu’ils se sentent stimulés, enflammés et hors d’eux-mêmes. L
1483 our qu’ils se sentent stimulés, enflammés et hors d’ eux-mêmes. Les scènes du Blocksberg sont le pendant exact de ces plais
1484 s. Les scènes du Blocksberg sont le pendant exact de ces plaisirs démoniaques, qui consistent à se perdre soi-même, à se l
1485 ne sait plus ce que l’on est en train de faire ou de dire, on ne sait plus ce qui parle à travers nous, tandis que le sang
1486 ue, et avant tous le principe diabolique créateur de la masse : fuir sa propre personne, n’être plus responsable, donc plu
1487 lus coupable, et devenir du même coup participant de la puissance divinisée de l’Anonyme. Or l’Anonyme a bien des chances
1488 u même coup participant de la puissance divinisée de l’Anonyme. Or l’Anonyme a bien des chances d’être celui qui aime à di
1489 sée de l’Anonyme. Or l’Anonyme a bien des chances d’ être celui qui aime à dire : Je ne suis Personne… La foule, c’est le
1490 e : Je ne suis Personne… La foule, c’est le lieu de rendez-vous des hommes qui se fuient, eux et leur vocation. Elle n’es
1491 eux et leur vocation. Elle n’est personne et tire de là son assurance dans le crime. Il ne s’est pas trouvé un seul solda
1492 ité. Mais trois ou quatre femmes, dans l’illusion d’ être une foule, et que personne peut-être ne saurait dire qui l’avait
1493  !… Car une foule est une abstraction qui n’a pas de mains, mais chaque homme isolé a, dans la règle, deux mains, et lorsq
1494 nt ses mains, non celles du voisin, et non celles de la foule qui n’a pas de mains.22 Reconnaissons ici la vieille tacti
1495 du voisin, et non celles de la foule qui n’a pas de mains.22 Reconnaissons ici la vieille tactique, la sempiternelle ta
1496 ci la vieille tactique, la sempiternelle tactique de Satan. Dès la première tentation en Eden, il a recours au même et uni
1497 omme qu’il n’est pas responsable, qu’il n’y a pas de Juge, que la Loi est douteuse, qu’on ne saura pas, et que d’ailleurs,
1498 e coup réussi, on sera Dieu soi-même, donc maître de fixer le Bien et le Mal à sa guise. Alors ils entendirent la voix de
1499 le Mal à sa guise. Alors ils entendirent la voix de l’Éternel Dieu, qui parcourait le jardin vers le soir, et l’homme et
1500 l’homme et sa femme se cachèrent loin de la face de l’Éternel Dieu, au milieu des arbres du jardin. Mais l’Éternel Dieu a
1501 t’a appris que tu es nu ? Est-ce que tu as mangé de l’arbre dont je t’avais défendu de manger ? L’homme répondit : La fem
1502 ue tu as mangé de l’arbre dont je t’avais défendu de manger ? L’homme répondit : La femme que tu as mise auprès de moi m’a
1503 : La femme que tu as mise auprès de moi m’a donné de l’arbre, et j’en ai mangé. Et l’Éternel Dieu dit à la femme : Pourquo
1504 ils disent que c’était l’autre. Ainsi les hommes de notre temps, poussés par leurs « complexes de culpabilité » et fuyant
1505 mes de notre temps, poussés par leurs « complexes de culpabilité » et fuyant devant l’aveu de leurs fautes, vont se cacher
1506 omplexes de culpabilité » et fuyant devant l’aveu de leurs fautes, vont se cacher dans les arbres, dans la foule. C’est-à-
1507 ù l’on est, à coup sûr, le plus « loin de la face de l’Éternel ». Pour qu’il n’y ait plus de responsabilité, il faut qu’il
1508 e la face de l’Éternel ». Pour qu’il n’y ait plus de responsabilité, il faut qu’il n’y ait plus personne. Or si j’appelle
1509 plus personne. Or si j’appelle et qu’il n’y a pas de réponse, je dis qu’il n’y a personne ; la personne est en nous ce qui
1510 personne ; la personne est en nous ce qui répond de nos actes, ce qui est « capable de réponse », ou responsable ; dans u
1511 ce qui répond de nos actes, ce qui est « capable de réponse », ou responsable ; dans une foule il n’y a plus de réponse i
1512  », ou responsable ; dans une foule il n’y a plus de réponse individuelle ; pour qu’il n’y ait plus de responsable, il suf
1513 de réponse individuelle ; pour qu’il n’y ait plus de responsable, il suffit qu’il y ait une masse. Satan va donc créer les
1514 donc créer les masses. Nous tenons ici le secret de sa grande stratégie : produire le péché en série et rationaliser la c
1515 l’évolution générale du temps, favorisent ce Plan de mille manières. Tout concourt, dans le cadre de nos vies, à nous priv
1516 n de mille manières. Tout concourt, dans le cadre de nos vies, à nous priver du sentiment d’être une personne responsable.
1517 le cadre de nos vies, à nous priver du sentiment d’ être une personne responsable. Nous vivons tous, de plus en plus, dans
1518 Nous vivons tous, de plus en plus, dans un monde de transe collective. Nous participons tous, de plus en plus, à des form
1519 s participons tous, de plus en plus, à des formes de vie étrangères à notre sort particulier et à nos aptitudes normales.
1520 par leurs chefs. Tout cela contribue à l’arracher de sa vie propre, où il ne se passerait jamais rien de semblable. Quant
1521 sa vie propre, où il ne se passerait jamais rien de semblable. Quant aux inconvénients et à l’ennui de cette vie propre,
1522 e semblable. Quant aux inconvénients et à l’ennui de cette vie propre, autrefois jugés normaux, ils apparaissent de plus e
1523 acceptables à mesure que se répandent les notions de Progrès indéfini, de confort à tout prix, de succès rapide, et à mesu
1524 que se répandent les notions de Progrès indéfini, de confort à tout prix, de succès rapide, et à mesure que s’efface la cr
1525 ions de Progrès indéfini, de confort à tout prix, de succès rapide, et à mesure que s’efface la croyance dans un au-delà q
1526 oyance dans un au-delà qui, autrefois, permettait de prendre ses maux en patience. D’une part, l’individu moderne est inci
1527 Elles poussent l’homme à rechercher les occasions d’ être dépossédé de soi. Elles font de chacun de nous un sujet prédispos
1528 homme à rechercher les occasions d’être dépossédé de soi. Elles font de chacun de nous un sujet prédisposé à l’hypnose col
1529 les occasions d’être dépossédé de soi. Elles font de chacun de nous un sujet prédisposé à l’hypnose collective, une victim
1530 ons d’être dépossédé de soi. Elles font de chacun de nous un sujet prédisposé à l’hypnose collective, une victime virtuell
1531 se collective, une victime virtuelle des passions de masse. Partout où un individu prend sa vie personnelle en dégoût, le
1532 sme trouve un candidat. Certes, il n’y aurait pas de masses possibles, au sens précis de concentration d’hommes, sans la r
1533 ’y aurait pas de masses possibles, au sens précis de concentration d’hommes, sans la radio, les haut-parleurs, la presse e
1534 masses possibles, au sens précis de concentration d’ hommes, sans la radio, les haut-parleurs, la presse et les transports
1535 rue seulement. Elle est dans la pensée des hommes de ce temps, elle a ses sources au plus intime des existences individuel
1536 seulement qu’on peut la dénoncer. 48. La tour de Babel Si la personne se perd dans le monde moderne, c’est que les
1537 uoi les avoir agrandis, depuis un siècle, au-delà de toute mesure ? Pourquoi veut-on du grand, du plus grand à tout prix ?
1538 x ? Sinon justement pour s’y perdre ! À l’origine de toutes ces choses trop vastes et trop complexes qui nous entourent sa
1539 niques, sociales et financières. Mais à l’origine de ces « nécessités » elles-mêmes, je pressens notre obscur désir de fui
1540 tés » elles-mêmes, je pressens notre obscur désir de fuite dans l’anonyme irresponsable, et la très vieille tentation de c
1541 onyme irresponsable, et la très vieille tentation de compenser nos inquiétudes par l’utopie de l’eritis sicut dii. Or qua
1542 ntation de compenser nos inquiétudes par l’utopie de l’eritis sicut dii. Or quand nous nous perdons, c’est le diable qui
1543 est le diable encore qui nous accueille au sommet de notre ascension. Comme le montre l’histoire de la tour de Babel qui e
1544 et de notre ascension. Comme le montre l’histoire de la tour de Babel qui est le grand mythe de notre temps. Bien qu’il ne
1545 ascension. Comme le montre l’histoire de la tour de Babel qui est le grand mythe de notre temps. Bien qu’il ne soit pas m
1546 stoire de la tour de Babel qui est le grand mythe de notre temps. Bien qu’il ne soit pas mentionné dans le récit du chapit
1547 soit pas mentionné dans le récit du chapitre onze de la Genèse, le diable est de toute évidence le principal Entrepreneur
1548 écit du chapitre onze de la Genèse, le diable est de toute évidence le principal Entrepreneur de la Tour primitive et de s
1549 e est de toute évidence le principal Entrepreneur de la Tour primitive et de ses répliques modernes. (Je ne fais pas allus
1550 le principal Entrepreneur de la Tour primitive et de ses répliques modernes. (Je ne fais pas allusion aux gratte-ciel, ces
1551 ioses et toujours un peu bêtes, mais à l’ensemble de nos entreprises économiques, politiques et urbaines.) Reprenons ce ré
1552 afin que nous ne soyons pas dispersés sur la face de toute la terre. » Vous reconnaissez Satan à ce doute qui les prend, à
1553 ute qui les prend, à ce besoin qu’ils ont soudain de s’assurer de leur bonheur, dans le cas présent, leur unité. Et c’est
1554 rend, à ce besoin qu’ils ont soudain de s’assurer de leur bonheur, dans le cas présent, leur unité. Et c’est pourquoi ils
1555 r voulu s’assurer qu’elle le suivait : par manque de foi. Vous reconnaissez cette idée romantique qu’il leur suggère : fai
1556 ers devait prévoir, sera nécessairement l’inverse de ce qu’ils voulaient. Si vous mangez la pomme vous ne mourrez pas dit
1557 ir de là que « l’Éternel les dispersa sur la face de toute la terre ». Cette déconvenue mémorable est attribuée par le ré
1558 e est attribuée par le récit biblique à la colère de l’Éternel, qui « descendit pour voir la ville et la tour que bâtissai
1559 ont entrepris ! » On dirait qu’il veut les punir d’ être aussi bêtes. Mais le Dante imagine qu’ils se seraient bien punis
1560 ’y avait qu’à les laisser aller ! Dans son Traité de l’éloquence vulgaire, il propose une explication fort naturelle du ph
1561 opose une explication fort naturelle du phénomène de confusion des langues. Si les hommes ne se sont plus entendus lors de
1562 ne se sont plus entendus lors de la construction de ce premier gratte-ciel, c’est que l’entreprise était trop vaste, simp
1563 lement. En effet, pour mener à chef l’édification de la tour, ils furent obligés de se diviser en équipes spécialisées. Il
1564 chef l’édification de la tour, ils furent obligés de se diviser en équipes spécialisées. Il y avait les architectes, les s
1565 orteurs par eau et par terre. Et les corporations d’ ouvriers. Les uns faisaient la brique qui leur servait de pierre, les
1566 ers. Les uns faisaient la brique qui leur servait de pierre, les autres le bitume qui leur servait de ciment ; d’autres en
1567 de pierre, les autres le bitume qui leur servait de ciment ; d’autres encore n’étaient chargés que de monter les matériau
1568 de ciment ; d’autres encore n’étaient chargés que de monter les matériaux, d’autres de bâtir les murs, de charpenter, ou d
1569 ent chargés que de monter les matériaux, d’autres de bâtir les murs, de charpenter, ou de crépir. À cause de l’énormité de
1570 monter les matériaux, d’autres de bâtir les murs, de charpenter, ou de crépir. À cause de l’énormité de l’entreprise, ces
1571 ux, d’autres de bâtir les murs, de charpenter, ou de crépir. À cause de l’énormité de l’entreprise, ces équipes spécialisé
1572 e charpenter, ou de crépir. À cause de l’énormité de l’entreprise, ces équipes spécialisées vivaient à part les unes des a
1573 lles se créèrent des langages techniques, jargons de métier, patois divers, tant qu’à la fin elles ne se comprirent plus.
1574 n sommes à peu près là. L’anarchie sans précédent de notre vocabulaire, en politique surtout, suffirait à trahir l’absence
1575 n politique surtout, suffirait à trahir l’absence de toute commune mesure dans notre siècle. Nous avons vu trop grand pour
1576 nos pouvoirs, nous avons perdu en chemin la règle d’ or, l’étalon-homme. Et pour avoir été trop vite en tout, nous avons pe
1577 our avoir été trop vite en tout, nous avons perdu de vue la mesure et le sens des fins dernières de l’œuvre humaine. L’ind
1578 du de vue la mesure et le sens des fins dernières de l’œuvre humaine. L’individu s’égare dans ces vastes rouages, il s’y s
1579 son préfabriquée avec une telle rapidité que l’un d’ eux resta pris dans la bâtisse, dont il fallut détruire toute une sect
1580 r mieux dire la babélisation des cadres matériels de notre vie. L’invention des machines a brusquement accru nos possibili
1581 des machines a brusquement accru nos possibilités d’ action sur la matière. L’industrie et le commerce ont provoqué la brus
1582 e et le commerce ont provoqué la brusque création de villes énormes, dix ou cent fois plus grandes que celles qu’on connai
1583 ent d’ailleurs toute l’instabilité. La population de l’Europe a plus que doublé en cent ans ; ses richesses ont été décupl
1584 tion industrielle centuplée. Et le concours enfin de tous ces éléments a provoqué la création d’armées considérables, agra
1585 enfin de tous ces éléments a provoqué la création d’ armées considérables, agrandissant le phénomène de la guerre, brusquem
1586 d’armées considérables, agrandissant le phénomène de la guerre, brusquement, aux proportions du continent. Ainsi, par une
1587 . Ainsi, par une mutation brusque, dans l’espace de cinquante à cent ans, la société est devenue trop gigantesque pour êt
1588 té est devenue trop gigantesque pour être dominée d’ un seul regard. Une seule intelligence ne peut plus en comprendre et e
1589 aux plus grossiers et aux plus ignorants le droit de voter et de dire leur mot sur tout : ce ne sera pas pire.) Alors le v
1590 ssiers et aux plus ignorants le droit de voter et de dire leur mot sur tout : ce ne sera pas pire.) Alors le vertige de Ba
1591 sur tout : ce ne sera pas pire.) Alors le vertige de Babel s’empare de l’esprit humain. Comme tout vertige, il naît de l’i
1592 era pas pire.) Alors le vertige de Babel s’empare de l’esprit humain. Comme tout vertige, il naît de l’incapacité de suppo
1593 e de l’esprit humain. Comme tout vertige, il naît de l’incapacité de supporter des altitudes ou des dimensions inhumaines.
1594 main. Comme tout vertige, il naît de l’incapacité de supporter des altitudes ou des dimensions inhumaines. Comme tout vert
1595 fut plus savant, et jamais il n’eut l’impression de comprendre aussi mal ce qui se passe dans son monde. Jamais avec plus
1596 ce qui se passe dans son monde. Jamais avec plus de ferveur il n’approcha des buts de son Progrès, jamais non plus sa bar
1597 amais avec plus de ferveur il n’approcha des buts de son Progrès, jamais non plus sa barbarie ne se montra mieux armée pou
1598 e, et soyez comme des dieux, oubliez votre mesure d’ hommes ! » Mais, plus on monte et mieux on tombe. Allez chercher maint
1599 it jamais rien, des gouvernants qui ont trop peur d’ elle pour l’informer, — une fuite universelle dans l’anonyme, une énor
1600 me cacophonie dominée par le bruit des bombes. Un de ces fous à la sagesse bavarde, comme on en trouve dans les cafés, ava
1601 comme on en trouve dans les cafés, avait coutume de me faire la théorie suivante : tout le mal vient des étages, inventio
1602 ent pour abriter les hommes. Il n’est pas naturel de lui ajouter des étages. Car en tombant du quatrième, par exemple, on
1603 ant qu’un sentiment nouveau, et comme indépendant de nos catégories, se manifeste dans l’époque moderne. Au-delà du bien e
1604 blissement ou l’extinction presque totale du sens de la vocation personnelle. Admettons que tout y concourt dans l’ère col
1605 alisée. Tout contribue au refoulement des raisons de vivre non prévues par les statistiques de l’État. Mais pourquoi deven
1606 raisons de vivre non prévues par les statistiques de l’État. Mais pourquoi devenons-nous collectivistes, si vraiment nous
1607 ent les prétextes que nous offrent les historiens de l’économie matérialiste. Nous nous réfugions dans l’Ennui plutôt que
1608 iste. Nous nous réfugions dans l’Ennui plutôt que d’ accepter le défi d’une vocation sans précédent, — elles le sont toutes
1609 ugions dans l’Ennui plutôt que d’accepter le défi d’ une vocation sans précédent, — elles le sont toutes. Allez demander a
1610 s le sont toutes. Allez demander aux jeunes gens d’ aujourd’hui quel est le sens de leur vie, le goût de leur existence. S
1611 er aux jeunes gens d’aujourd’hui quel est le sens de leur vie, le goût de leur existence. S’ils trouvent quelque emploi, c
1612 aujourd’hui quel est le sens de leur vie, le goût de leur existence. S’ils trouvent quelque emploi, c’est « un job » simpl
1613 sans qualification ni préférence intime. Le goût de l’argent — ou son besoin — obnubile chez le plus grand nombre un sent
1614 hez le plus grand nombre un sentiment fondamental d’ ennui, mais ce n’est encore qu’un camouflage. On fait cela pour faire
1615 a pour faire quelque chose, parce qu’il n’y a pas de raison de faire une chose plutôt qu’une autre… Lorsque j’entends bâil
1616 re quelque chose, parce qu’il n’y a pas de raison de faire une chose plutôt qu’une autre… Lorsque j’entends bâiller : « Qu
1617 r : « Que faut-il que je fasse, je ne trouve plus d’ intérêt à rien ? » il me vient à l’esprit ces phrases de Kierkegaard :
1618 rêt à rien ? » il me vient à l’esprit ces phrases de Kierkegaard : « Comment devenir chrétien ? prenez n’importe quelle rè
1619 devenir chrétien ? prenez n’importe quelle règle d’ action chrétienne. Essayez de l’appliquer. » Car il est clair que cet
1620 importe quelle règle d’action chrétienne. Essayez de l’appliquer. » Car il est clair que cet effort, s’il est sincère, va
1621 conflits se manifestent, où paraissent les lignes de force de la vie spirituelle ou morale, où le drame de la vocation se
1622 se manifestent, où paraissent les lignes de force de la vie spirituelle ou morale, où le drame de la vocation se précise i
1623 orce de la vie spirituelle ou morale, où le drame de la vocation se précise instantanément : plus une seconde d’ennui ne s
1624 tion se précise instantanément : plus une seconde d’ ennui ne sera possible. Et votre plainte sera de n’avoir qu’une seule
1625 e d’ennui ne sera possible. Et votre plainte sera de n’avoir qu’une seule vie. Ennui : chasse gardée du démon. Parce que
1626 l croie la science ou invoque le mystère, l’homme d’ aujourd’hui montre une constante et masochiste propension à se vouloir
1627 pension à se vouloir irresponsable. Tout lui sert d’ alibi, tout lui est bon pour prouver qu’il n’y était pas, que ce n’est
1628 sa passion lui dit : c’était vital, il n’y a pas de faute. Ceux de mes contemporains qui se représentent l’homme comme un
1629 dit : c’était vital, il n’y a pas de faute. Ceux de mes contemporains qui se représentent l’homme comme un complexe de gl
1630 ins qui se représentent l’homme comme un complexe de glandes endocrines, d’enzymes et de vitamines, ont de plus en plus de
1631 l’homme comme un complexe de glandes endocrines, d’ enzymes et de vitamines, ont de plus en plus de peine à concevoir que
1632 e un complexe de glandes endocrines, d’enzymes et de vitamines, ont de plus en plus de peine à concevoir que le jugement m
1633 s, d’enzymes et de vitamines, ont de plus en plus de peine à concevoir que le jugement moral garde un sens, et que la pers
1634  péché » ne sont plus, à leur vue, que les effets d’ un trouble temporaire ou chronique dans le régime des sécrétions inter
1635 que fois que nous découvrons un nouveau mécanisme de la vie, nous sommes aussitôt obsédés par l’idée que « cela explique t
1636 ’idée que « cela explique tout ». Étrange névrose de l’homme moderne ! Quoi de plus sot que de prétendre expliquer la cond
1637 névrose de l’homme moderne ! Quoi de plus sot que de prétendre expliquer la conduite et les décisions morales d’un tout pa
1638 re expliquer la conduite et les décisions morales d’ un tout par la description du fonctionnement de quelques-unes de ses p
1639 es d’un tout par la description du fonctionnement de quelques-unes de ses parties, les dernières analysées toujours ? Qui
1640 la description du fonctionnement de quelques-unes de ses parties, les dernières analysées toujours ? Qui vous prouve que v
1641 aussi bien. Qui a commencé ? Qui est responsable de cette méchante décision ? L’homme ou son foie ? Nous sommes bien trop
1642 que j’accorde à l’hypothèse matérialiste le droit de se dire objective. J’y vois trop facilement le coup de pouce du diabl
1643 dire objective. J’y vois trop facilement le coup de pouce du diable. Certes, je n’accuse pas la Science — rien de moins d
1644 diable. Certes, je n’accuse pas la Science — rien de moins diabolique qu’une observation juste — mais seulement les sophis
1645 ur justifier nos démissions morales. Mais en fait de prétextes, il en a de meilleurs que la science et que ses vulgarisati
1646 sions morales. Mais en fait de prétextes, il en a de meilleurs que la science et que ses vulgarisations imprudentes. L’adj
1647 it un mensonge, on sait qu’on ment, et l’on tâche de ne pas se faire prendre. Si l’on commet quelque mauvaise action, on e
1648 quelque mauvaise action, on essaie tout au moins de se disculper par rapport à une vérité et à un bien généralement admis
1649 admis. Mais notre époque a remplacé les critères de la vérité par des valeurs d’intensité, et le respect du bien par celu
1650 emplacé les critères de la vérité par des valeurs d’ intensité, et le respect du bien par celui de la « vie ». Tout ce qui
1651 eurs d’intensité, et le respect du bien par celui de la « vie ». Tout ce qui paraît suffisamment intense, désormais, cesse
1652 qui paraît suffisamment intense, désormais, cesse de relever de la vérité ou du mensonge. Il est admis, de nos jours, que
1653 suffisamment intense, désormais, cesse de relever de la vérité ou du mensonge. Il est admis, de nos jours, que la passion,
1654 elever de la vérité ou du mensonge. Il est admis, de nos jours, que la passion, l’émotion et l’hystérie même vous mettent
1655 assion, l’émotion et l’hystérie même vous mettent de droit au-delà du bien et du mal. Elles vous libèrent de toute obligat
1656 it au-delà du bien et du mal. Elles vous libèrent de toute obligation, elles n’ont plus à se justifier. J’avais juré d’êtr
1657 on, elles n’ont plus à se justifier. J’avais juré d’ être fidèle, dit un conjoint, mais je m’aperçois que c’est incompatibl
1658 i qui est nouveau : l’on s’en vante, avec l’appui de tous les romanciers, des journalistes, des philosophes et des doctrin
1659 litiques. Les tribunaux, naguère, avaient coutume d’ acquitter les crimes passionnels. Aux grandes époques on eût doublé la
1660 ornons-nous à le noter en passant : notre respect de la passion et de « la vie » sont des signes de décadence des passions
1661 noter en passant : notre respect de la passion et de « la vie » sont des signes de décadence des passions mêmes et de la v
1662 ct de la passion et de « la vie » sont des signes de décadence des passions mêmes et de la vraie vie. J’emprunte ici à And
1663 ont des signes de décadence des passions mêmes et de la vraie vie. J’emprunte ici à André Gide une pénétrante et minutieus
1664 dré Gide une pénétrante et minutieuse description de ce glissement du vrai vers le « vital » au secret d’une conscience mo
1665 ce glissement du vrai vers le « vital » au secret d’ une conscience moderne : Mais j’étais scrupuleux et, devant que je m’
1666 de force te viendrait, ajoutait-il, si plutôt que de t’user à lutter ainsi contre toi-même, tu ne luttais plus que contre
1667 ’empêchement du dehors… Va, sache triompher enfin de toi-même et de ta propre honnêteté »… Bref, il tirait argument et ava
1668 dehors… Va, sache triompher enfin de toi-même et de ta propre honnêteté »… Bref, il tirait argument et avantage de ce qu’
1669 honnêteté »… Bref, il tirait argument et avantage de ce qu’il m’en coûtait de céder à mon désir plutôt que de le brider en
1670 ait argument et avantage de ce qu’il m’en coûtait de céder à mon désir plutôt que de le brider encore… Il va sans dire que
1671 u’il m’en coûtait de céder à mon désir plutôt que de le brider encore… Il va sans dire que je ne compris que beaucoup plus
1672 us tard ce qu’il y avait, dans cette exhortation, de diabolique. Je croyais alors que j’étais le seul à parler et que ce d
1673 ue je ne le distinguais encore pas. Il avait fait de moi sa conquête ; je me croyais victorieux, oui : victorieux de moi-m
1674 uête ; je me croyais victorieux, oui : victorieux de moi-même parce que je me livrais à lui. Parce qu’il m’avait convaincu
1675 conscience individuelle, c’est le même, en chacun de ses détails, qu’Hitler a proposé au peuple allemand. Et cela s’appela
1676 au peuple allemand. Et cela s’appelait la théorie de l’espace vital. « Comment ce qui t’est nécessaire ne te serait-il pas
1677 oif ? Une grande force te viendrait si plutôt que de t’user à tenir tes engagements, tu ne luttais plus que contre l’étran
1678 t ce qui sert tes intérêts, qui sont les intérêts de la nation. N’est-ce pas ici le lieu de se demander au nom de quoi no
1679 intérêts de la nation. N’est-ce pas ici le lieu de se demander au nom de quoi nos moralistes de la passion pourraient co
1680 lieu de se demander au nom de quoi nos moralistes de la passion pourraient combattre les doctrines nationalistes ? 51.
1681 times of weakness. Francis Bacon. Il n’est pas de domaine où l’argument de l’espace vital, individuel cette fois-ci, ai
1682 is Bacon. Il n’est pas de domaine où l’argument de l’espace vital, individuel cette fois-ci, ait eu plus de succès que d
1683 pace vital, individuel cette fois-ci, ait eu plus de succès que dans l’amour tel qu’on le cultive en Occident. Depuis un s
1684 epuis un siècle, tous les romans illustrent, avec d’ autant moins d’art qu’ils y rencontrent plus de complaisance, la théor
1685 , tous les romans illustrent, avec d’autant moins d’ art qu’ils y rencontrent plus de complaisance, la théorie du droit de
1686 ec d’autant moins d’art qu’ils y rencontrent plus de complaisance, la théorie du droit de la passion : « Une femme apparti
1687 ontrent plus de complaisance, la théorie du droit de la passion : « Une femme appartient de droit à l’homme qui l’aime et
1688 e du droit de la passion : « Une femme appartient de droit à l’homme qui l’aime et quelle aime plus que la vie, et il n’y
1689 ’aime et quelle aime plus que la vie, et il n’y a d’ unions à jamais légitimes que celles qui sont commandées par la vraie
1690 permis quand on s’aime ». La première conséquence de cette grande permission est de faire sauter l’alliance du mariage. Da
1691 emière conséquence de cette grande permission est de faire sauter l’alliance du mariage. Dans la morale que pratiquent nos
1692 morale que pratiquent nos contemporains, la force de l’amour prime le droit du serment. Mais cette proposition ébranle le
1693 ion ébranle le monde. Car attaquer au plus intime de l’être le sens de l’alliance jurée, c’est faire le lit d’une éthique
1694 de. Car attaquer au plus intime de l’être le sens de l’alliance jurée, c’est faire le lit d’une éthique de barbares. Prend
1695 e le sens de l’alliance jurée, c’est faire le lit d’ une éthique de barbares. Prendre la femme du voisin ou ses terres parc
1696 ’alliance jurée, c’est faire le lit d’une éthique de barbares. Prendre la femme du voisin ou ses terres parce qu’on a déco
1697 ue les mêmes principes dont s’autorise l’anarchie de nos mœurs privées. Toutefois les partisans du romantisme maintiendron
1698 t on prétend qu’il permet tout, est véritablement de l’amour, ou s’il n’est pas plutôt quelque hantise abusivement parée d
1699 ’est pas plutôt quelque hantise abusivement parée de ce beau nom. Or chacun voit que « l’amour » moderne est une immense f
1700 l’amour » moderne est une immense faillite intime de notre civilisation. C’est une affaire si tragiquement confuse que le
1701 i tragiquement confuse que le diable seul est sûr de s’y retrouver. Niera-t-on qu’il s’en donne à cœur joie ? Mais il exis
1702 donne à cœur joie ? Mais il existe un moyen court de le dépister, ici encore. La part du diable dans « l’amour », c’est si
1703 l’amour », c’est simplement tout ce qui n’est pas de l’amour. C’est tout ce qui se glisse en nous sous le couvert du mot.
1704 ’aime pas qu’on aime, et dont tout le plaisir est d’ altérer nos vertus dans leur source. Vous le sentirez présent, dans sa
1705 ésent, dans sa force immobile, derrière le regard de l’être sans amour. Et partout où l’amour est contrefait, vous le reco
1706 , et si l’alliance primordiale du mariage n’a pas de pire ennemi que « l’amour » tel qu’on le parle, c’est que le plus bea
1707  » tel qu’on le parle, c’est que le plus beau mot de toutes les langues est pipé sur nos lèvres par Satan. Nulle époque n’
1708 èvres par Satan. Nulle époque n’a parlé davantage de l’amour, avec si peu d’exigence réelle. Le diable nous a fait nommer
1709 poque n’a parlé davantage de l’amour, avec si peu d’ exigence réelle. Le diable nous a fait nommer « amour » une vague obse
1710 , et dont les romans et les films sont les agents de diffusion. Cette obsession était devenue la grande affaire de notre c
1711 . Cette obsession était devenue la grande affaire de notre civilisation en temps de paix, — la religion de ceux qui n’en v
1712 la grande affaire de notre civilisation en temps de paix, — la religion de ceux qui n’en voulaient plus. Son empire s’est
1713 otre civilisation en temps de paix, — la religion de ceux qui n’en voulaient plus. Son empire s’est étendu sur les domaine
1714 brairie, sur la vente des parfums, sur l’activité de millions d’avocats et de médecins, sur les magazines illustrés, sur t
1715 la vente des parfums, sur l’activité de millions d’ avocats et de médecins, sur les magazines illustrés, sur tous les comm
1716 parfums, sur l’activité de millions d’avocats et de médecins, sur les magazines illustrés, sur tous les commerces de mode
1717 r les magazines illustrés, sur tous les commerces de modes. Sur beaucoup plus ! Car elle a modifié notre échelle des valeu
1718 chelle des valeurs. La surestimation extravagante de l’amour — j’entends bien de cette forme de hantise qui ressemble à l’
1719 timation extravagante de l’amour — j’entends bien de cette forme de hantise qui ressemble à l’amour véritable comme la vil
1720 agante de l’amour — j’entends bien de cette forme de hantise qui ressemble à l’amour véritable comme la ville de Lyon à un
1721 qui ressemble à l’amour véritable comme la ville de Lyon à un lion — a déprimé progressivement dans notre époque le sens
1722 ssivement dans notre époque le sens et le respect de la tenue morale, du sacrifice au bien commun, des vertus viriles et d
1723 bonheur individuel est devenu notre tabou : signe de décadence d’une civilisation. Auguste obligé de choisir entre le trôn
1724 iduel est devenu notre tabou : signe de décadence d’ une civilisation. Auguste obligé de choisir entre le trône et Bérénice
1725 e de décadence d’une civilisation. Auguste obligé de choisir entre le trône et Bérénice, renvoie la femme. Dans le même ca
1726 ique, avec l’approbation des foules. La décadence de la vertu est un thème millénaire de l’éloquence sacrée. Mais je signa
1727 La décadence de la vertu est un thème millénaire de l’éloquence sacrée. Mais je signale ici un trait plus inquiétant : la
1728 gnale ici un trait plus inquiétant : la décadence de la virtù dans notre siècle, sous l’effet de la publicité faite à l’am
1729 dence de la virtù dans notre siècle, sous l’effet de la publicité faite à l’amour vulgarisé. En toute époque, c’est à cert
1730 certaines nuances « modernes » des sentiments et de leurs modes que se révèle de la manière la plus précise l’œuvre du di
1731  » des sentiments et de leurs modes que se révèle de la manière la plus précise l’œuvre du diable. Ce qui distingue l’amou
1732 ce qui devrait disqualifier le très grand nombre de ceux qui s’en prévalent, c’est justement cette nuance d’obsession, et
1733 qui s’en prévalent, c’est justement cette nuance d’ obsession, et la facilité qu’on montre à y céder. C’est une sinistre a
1734 n d’autres temps, on se défendait, on avait honte de perdre le contrôle de soi. C’était tout perdre, ou pire : c’était mal
1735 e défendait, on avait honte de perdre le contrôle de soi. C’était tout perdre, ou pire : c’était mal vu. Aujourd’hui l’obs
1736 e, — et moins encore un ridicule. Certes l’amour, de tous les sentiments, est celui qui se prête le mieux à justifier l’ab
1737 ui qui se prête le mieux à justifier l’abdication de soi, puisqu’à son comble il nous porte à donner notre vie même pour c
1738 vie même pour ceux que nous aimons. Entre ce don de soi et l’abandon, Satan ménage plus d’une pente insensible. Il sait q
1739 tre ce don de soi et l’abandon, Satan ménage plus d’ une pente insensible. Il sait que l’amour est le domaine par excellenc
1740 mieux sur ses motifs et ne se paye plus aisément de sophismes cousus de fil blanc. Nulle part le masochisme et l’égoïsme
1741 s et ne se paye plus aisément de sophismes cousus de fil blanc. Nulle part le masochisme et l’égoïsme étroit ne revêtent a
1742 ochisme et l’égoïsme étroit ne revêtent avec plus de succès les apparences du sacrifice. D’ailleurs, l’un des premiers eff
1743 u sacrifice. D’ailleurs, l’un des premiers effets de la passion est de nous empêcher de nous sentir coupables dans l’insta
1744 leurs, l’un des premiers effets de la passion est de nous empêcher de nous sentir coupables dans l’instant même où nous sa
1745 remiers effets de la passion est de nous empêcher de nous sentir coupables dans l’instant même où nous savons le mieux que
1746 le mieux que nous le sommes. Voyez cette héroïne de Stendhal : « Je ne me fais plus aucune illusion, lui disait-elle, mêm
1747 ait à commettre. » C’est l’un des plus vieux cris de l’humanité, le plus terriblement sincère ! Si par colère, orgueil, en
1748 être, vous pouvez éprouver du remords et le désir de réparer la faute. Mais si c’est par « amour », rien ne vous arrête, e
1749 oit ! Or à ce point l’amour devient indiscernable de l’égoïsme ou même de la haine. Non seulement la lucidité y est plus r
1750 ’amour devient indiscernable de l’égoïsme ou même de la haine. Non seulement la lucidité y est plus rare et difficile qu’a
1751 u’au sein de toute autre passion, mais elle y est de surcroît parfaitement inutile. « Je vois bien le mal que je fais et l
1752 en faire quelque chose, l’appui sans restriction d’ une morale dure, d’une coutume intransigeante, ou d’une foi plus forte
1753 hose, l’appui sans restriction d’une morale dure, d’ une coutume intransigeante, ou d’une foi plus forte que la vie. Il fau
1754 une morale dure, d’une coutume intransigeante, ou d’ une foi plus forte que la vie. Il faudrait un critère permettant de qu
1755 rte que la vie. Il faudrait un critère permettant de qualifier d’égoïsme, de haine ou de maladie psychique tout amour dont
1756 e. Il faudrait un critère permettant de qualifier d’ égoïsme, de haine ou de maladie psychique tout amour dont les fruits s
1757 ait un critère permettant de qualifier d’égoïsme, de haine ou de maladie psychique tout amour dont les fruits sont amers,
1758 re permettant de qualifier d’égoïsme, de haine ou de maladie psychique tout amour dont les fruits sont amers, le privant a
1759 r dont les fruits sont amers, le privant aussitôt de ses droits absolus. Mais nous avons une morale romantique exaltant la
1760 ue exaltant la passion « fatale » : c’en est fait de la toute petite chance de liberté qui nous restait. Cette « fatalité 
1761 atale » : c’en est fait de la toute petite chance de liberté qui nous restait. Cette « fatalité » de la passion n’est qu’u
1762 e de liberté qui nous restait. Cette « fatalité » de la passion n’est qu’une manière de parler romanesque, mais combien d’
1763 e « fatalité » de la passion n’est qu’une manière de parler romanesque, mais combien d’amoureux s’en autorisent pour évite
1764 qu’une manière de parler romanesque, mais combien d’ amoureux s’en autorisent pour éviter d’avouer leurs vraies raisons, le
1765 is combien d’amoureux s’en autorisent pour éviter d’ avouer leurs vraies raisons, leurs complaisances, leurs volontés secrè
1766 le diable a substitué dans nos esprits le respect de la sincérité au respect — même distant et théorique — du bien de l’au
1767 au respect — même distant et théorique — du bien de l’autre et de la foi jurée. Sublime astuce, car cette sincérité garde
1768 même distant et théorique — du bien de l’autre et de la foi jurée. Sublime astuce, car cette sincérité garde encore le nom
1769 e astuce, car cette sincérité garde encore le nom d’ une vertu. Mais voici comment elle agit dans un monde où elle ne sert
1770 t la loi ou devant Dieu, vous prenez l’engagement d’ être fidèle « dans les bons et les mauvais jours » quoi qu’il advienne
1771 notre fidélité, quand elle s’oppose à la loi même de la Vie ? Est-il “sincère” de s’y cramponner ? J’ai juré, soit, mais j
1772 oppose à la loi même de la Vie ? Est-il “sincère” de s’y cramponner ? J’ai juré, soit, mais je ne suis plus le même. Et dè
1773 r malheur, ce beau raisonnement détruit les bases de tout traité, de toute parole donnée ou échangée, enfin du langage mêm
1774 au raisonnement détruit les bases de tout traité, de toute parole donnée ou échangée, enfin du langage même et de la possi
1775 role donnée ou échangée, enfin du langage même et de la possibilité de s’entendre sur quoi que ce soit. Car pourquoi fait-
1776 angée, enfin du langage même et de la possibilité de s’entendre sur quoi que ce soit. Car pourquoi fait-on des serments ?
1777 al. Mais si l’on pense qu’il est plus « sincère » de suivre son instinct que de garder parole, que le bonheur vaut mieux q
1778 l est plus « sincère » de suivre son instinct que de garder parole, que le bonheur vaut mieux que la vérité, et que l’inté
1779 vérité, et que l’intérêt « vital » ne connaît pas de loi, alors on entre dans un monde où l’hitlérisme est justifié. L’ord
1780 ’en vertu d’un effort constant contre ce genre-là de « sincérité » ; qu’en vertu d’une constante « hypocrisie » s’efforçan
1781 vertu d’une constante « hypocrisie » s’efforçant de subordonner nos petit bonheurs à la justice, nos désirs à l’amour du
1782 la tête ce qui unit les hommes — la compréhension de l’utilité et du préjudice général — et dans le cœur ce qui sépare — l
1783 r que le diable nous a pris. Certes, ce n’est pas d’ hier qu’on trompe sa femme, et qu’on trahit ses serments par amour. « 
1784 la faute qui me paraît nouvelle, c’est la manière de l’accepter au nom de la Vie et de la Sincérité, — devises de faibles.
1785 ’est la manière de l’accepter au nom de la Vie et de la Sincérité, — devises de faibles. ⁂ L’amour moderne, si j’en crois
1786 er au nom de la Vie et de la Sincérité, — devises de faibles. ⁂ L’amour moderne, si j’en crois nos romanciers et les stati
1787 si j’en crois nos romanciers et les statistiques de divorce, atteint un degré de complexité inégalé dans toute l’Histoire
1788 et les statistiques de divorce, atteint un degré de complexité inégalé dans toute l’Histoire : trouble mélange de pathéti
1789 é inégalé dans toute l’Histoire : trouble mélange de pathétique sentimental, de freudisme mal digéré, d’égoïste sincérité,
1790 oire : trouble mélange de pathétique sentimental, de freudisme mal digéré, d’égoïste sincérité, d’idées sur le droit au bo
1791 pathétique sentimental, de freudisme mal digéré, d’ égoïste sincérité, d’idées sur le droit au bonheur, d’intensité nerveu
1792 al, de freudisme mal digéré, d’égoïste sincérité, d’ idées sur le droit au bonheur, d’intensité nerveuse et de faiblesse de
1793 oïste sincérité, d’idées sur le droit au bonheur, d’ intensité nerveuse et de faiblesse de caractère. Au cinéma, c’est plus
1794 sur le droit au bonheur, d’intensité nerveuse et de faiblesse de caractère. Au cinéma, c’est plus aimable et moins ressem
1795 au bonheur, d’intensité nerveuse et de faiblesse de caractère. Au cinéma, c’est plus aimable et moins ressemblant. Dans l
1796 t. Dans la vie — regardez dans vos vies —, il y a de tout bien sûr, il y a de bons ménages et des sentiments authentiques,
1797 dans vos vies —, il y a de tout bien sûr, il y a de bons ménages et des sentiments authentiques, mais il y a ce que décri
1798 t certainement, il y a bien pire. Surtout, il y a de moins en moins de passions fortes, simplement parce que nous cherchon
1799 y a bien pire. Surtout, il y a de moins en moins de passions fortes, simplement parce que nous cherchons la passion pour
1800 ui d’abord leur résistent. L’importance démesurée de « l’amour » dans nos mœurs, moins comme réalité que comme arrière-pen
1801 erpétuelle et nostalgique, révèle toute l’étendue de notre ennui, le dégoût de l’homme moyen pour sa vie quotidienne, l’ab
1802 révèle toute l’étendue de notre ennui, le dégoût de l’homme moyen pour sa vie quotidienne, l’absence de buts et d’intérêt
1803 l’homme moyen pour sa vie quotidienne, l’absence de buts et d’intérêts puissants capables d’absorber nos rêves. Ce culte
1804 yen pour sa vie quotidienne, l’absence de buts et d’ intérêts puissants capables d’absorber nos rêves. Ce culte de la passi
1805 ’absence de buts et d’intérêts puissants capables d’ absorber nos rêves. Ce culte de la passion toujours fuyante, j’y vois
1806 puissants capables d’absorber nos rêves. Ce culte de la passion toujours fuyante, j’y vois le signe d’une espèce de névros
1807 de la passion toujours fuyante, j’y vois le signe d’ une espèce de névrose ou de vertige épidémique : le besoin d’être dépo
1808 toujours fuyante, j’y vois le signe d’une espèce de névrose ou de vertige épidémique : le besoin d’être dépossédé de soi,
1809 nte, j’y vois le signe d’une espèce de névrose ou de vertige épidémique : le besoin d’être dépossédé de soi, donc possédé
1810 e de névrose ou de vertige épidémique : le besoin d’ être dépossédé de soi, donc possédé par l’extérieur ou l’étranger, par
1811 e vertige épidémique : le besoin d’être dépossédé de soi, donc possédé par l’extérieur ou l’étranger, par une chose, par u
1812 les faiblesses qu’il autorise, il est grand temps de le disqualifier au nom et pour l’amour de l’amour même. Il est temps
1813 d temps de le disqualifier au nom et pour l’amour de l’amour même. Il est temps de décourager les innombrables amateurs sa
1814 nom et pour l’amour de l’amour même. Il est temps de décourager les innombrables amateurs sans vocation qui l’apprennent p
1815 uctures qui nous protégeaient contre les paniques de l’instinct. La morale bourgeoise est trop faible. Quand les romancier
1816 r aux valeurs dures et rationnelles. Elle se doit de restaurer d’urgence des interdits drastiques, des préjugés solides — 
1817 dures et rationnelles. Elle se doit de restaurer d’ urgence des interdits drastiques, des préjugés solides — même si le di
1818 haîner la tyrannie, bientôt sanglante, des démons de la jungle intérieure. Telle est la leçon de notre crise. C’est une qu
1819 émons de la jungle intérieure. Telle est la leçon de notre crise. C’est une question de physique sociale plus que de vertu
1820 e est la leçon de notre crise. C’est une question de physique sociale plus que de vertu, une question de vie ou de mort po
1821 . C’est une question de physique sociale plus que de vertu, une question de vie ou de mort pour notre civilisation et pour
1822 physique sociale plus que de vertu, une question de vie ou de mort pour notre civilisation et pour tout ordre, quel qu’il
1823 sociale plus que de vertu, une question de vie ou de mort pour notre civilisation et pour tout ordre, quel qu’il soit, qui
1824 out ordre, quel qu’il soit, qui mérite l’épithète d’ humain. 52. La passion Je parlerai maintenant de l’amour même, n
1825 main. 52. La passion Je parlerai maintenant de l’amour même, non plus de ses contrefaçons. Je parlerai de la passion
1826 Je parlerai maintenant de l’amour même, non plus de ses contrefaçons. Je parlerai de la passion dans son éclat. L’amour-p
1827 r même, non plus de ses contrefaçons. Je parlerai de la passion dans son éclat. L’amour-passion, signe particulier de la p
1828 ans son éclat. L’amour-passion, signe particulier de la psyché occidentale, est né d’un retour de flamme du christianisme
1829 igne particulier de la psyché occidentale, est né d’ un retour de flamme du christianisme dans les marges de l’hérésie. Inc
1830 lier de la psyché occidentale, est né d’un retour de flamme du christianisme dans les marges de l’hérésie. Inconnu de l’An
1831 retour de flamme du christianisme dans les marges de l’hérésie. Inconnu de l’Antiquité et de l’Orient, il ne peut exister
1832 ristianisme dans les marges de l’hérésie. Inconnu de l’Antiquité et de l’Orient, il ne peut exister que dans une civilisat
1833 es marges de l’hérésie. Inconnu de l’Antiquité et de l’Orient, il ne peut exister que dans une civilisation marquée par la
1834 ation marquée par la croyance en la valeur unique de chaque être. Il suppose un objet irremplaçable, et comme prédestiné p
1835 enne à l’origine, et dont cette phrase du Mystère de Jésus nous donne peut-être l’expression la plus poignante : « Je pens
1836 is à toi dans mon agonie, j’ai versé telle goutte de sang pour toi. » Mais l’idée du divin dans un être, source et objet d
1837 ais l’idée du divin dans un être, source et objet de tout amour profond, va faire naître l’idolâtrie pour peu que l’élan q
1838 isse et s’arrête à l’image créée. Le désir infini de l’âme souffre alors des limitations d’un objet qui résiste et qui bie
1839 sir infini de l’âme souffre alors des limitations d’ un objet qui résiste et qui bientôt l’embrase. Secrètement déçu, mais
1840 ’indistinction. Et finalement, passant les bornes de la réalité disqualifiée et de la vie jamais assez vivante, il se jett
1841 passant les bornes de la réalité disqualifiée et de la vie jamais assez vivante, il se jette avec lui dans la mort. Extas
1842 c lui dans la mort. Extase des derniers instants, de Tristan et d’Isolde, ou des amants de Vérone. La contradiction tortur
1843 mort. Extase des derniers instants, de Tristan et d’ Isolde, ou des amants de Vérone. La contradiction torturante que souff
1844 s instants, de Tristan et d’Isolde, ou des amants de Vérone. La contradiction torturante que souffre l’infini désir, sédui
1845 origine et cette catastrophe ne cesseront jamais d’ être instantes au cœur secret de la passion occidentale. L’une, ignoré
1846 cesseront jamais d’être instantes au cœur secret de la passion occidentale. L’une, ignorée ou reniée, demeure à l’arrière
1847 lan lointain, l’autre, voilée, attend à l’horizon de tout amour digne du nom de passion. C’est pourquoi la passion peut bi
1848 ée, attend à l’horizon de tout amour digne du nom de passion. C’est pourquoi la passion peut bien être le lieu de la plus
1849 C’est pourquoi la passion peut bien être le lieu de la plus grande intensité vitale, en même temps qu’elle se fait l’agen
1850 véritable, car elle suppose une très grande force d’ imagination créatrice ; des dispositions spirituelles à la fois délica
1851 vé leur véritable objet ; un pouvoir exceptionnel de concentration, c’est-à-dire de fidélité ; enfin le mépris des biens t
1852 uvoir exceptionnel de concentration, c’est-à-dire de fidélité ; enfin le mépris des biens terrestres et du bonheur. Ce com
1853 it croire. Je mets en fait qu’il n’y a guère plus de grands amants que de vrais mystiques, la passion étant au sentimental
1854 fait qu’il n’y a guère plus de grands amants que de vrais mystiques, la passion étant au sentimentalisme normal ce que la
1855 n moyenne. Mais la passion comme la mystique sont de ces attitudes capitales dont les très rares moments de pureté suffise
1856 s attitudes capitales dont les très rares moments de pureté suffisent à déterminer l’atmosphère d’un ensemble humain comme
1857 nts de pureté suffisent à déterminer l’atmosphère d’ un ensemble humain comme celui que l’on nomme Occident. Et les minimes
1858 à cet ensemble. Or tout ce que l’on vient de dire de la passion suffit à laisser voir les chances extraordinaires qu’elle
1859 tabilité des états et des jugements, qui changent de signe en un instant, jointe à l’extrême intensité des sensations parf
1860 rême intensité des sensations parfois simultanées de présence et d’absence infinie, créent chez tout être passionné l’illu
1861 des sensations parfois simultanées de présence et d’ absence infinie, créent chez tout être passionné l’illusion d’un trans
1862 finie, créent chez tout être passionné l’illusion d’ un transport mystique dans l’au-delà du bien et du mal. Une vraie pass
1863 nt « légitimes » ou non. Passer outre est le fait de la passion. Mais sacrifie-t-on l’autre ou soi ? Et dans soi, le meill
1864 u, il donne ce qu’il n’a pas en soi mais qui naît de l’exaltation, il donne enfin ce qu’il est, sans réserve. Mais à ce po
1865 ui, il s’y était accoutumé, établissant une sorte d’ équilibre du microbe et de la maladie. Mais s’il le communique à un êt
1866 , établissant une sorte d’équilibre du microbe et de la maladie. Mais s’il le communique à un être plus faible, ou plus pu
1867 n’est pas armé pour composer avec cette espèce-là de mal, il risque d’altérer ou de détruire l’objet de sa tendresse et l’
1868 r composer avec cette espèce-là de mal, il risque d’ altérer ou de détruire l’objet de sa tendresse et l’amour même. Ces se
1869 ec cette espèce-là de mal, il risque d’altérer ou de détruire l’objet de sa tendresse et l’amour même. Ces secrets monstru
1870 e mal, il risque d’altérer ou de détruire l’objet de sa tendresse et l’amour même. Ces secrets monstrueux, ignorés de nous
1871 et l’amour même. Ces secrets monstrueux, ignorés de nous-mêmes, que notre passion livre à l’être aimé dans la contagion d
1872 délire, voici qu’ils apparaissent comme des dons de la haine. Il est rare que l’amour ne soit pas criminel, d’une manière
1873 ne. Il est rare que l’amour ne soit pas criminel, d’ une manière invisible peut-être, quand il dépasse les bornes d’une sob
1874 invisible peut-être, quand il dépasse les bornes d’ une sobriété d’ailleurs presque impossible à définir. Et toute passion
1875 le viol spirituel. Et si l’on veut tout posséder d’ un être, on risque bien d’en faire un possédé. Où donc le diable est-i
1876 l’on veut tout posséder d’un être, on risque bien d’ en faire un possédé. Où donc le diable est-il intervenu ? Ce Désir qui
1877 ’indicible Vérité, comme un élan vers la guérison de l’être blessé, vers la plénitude et vers la rédemption, voici qu’il s
1878 s la rédemption, voici qu’il se fait l’instrument de nos plus épuisantes tortures. À quel moment l’amour est-il devenu sou
1879 ’amour est-il devenu souffrance ? Dans le langage de la théologie, il est aisé de définir le point : c’est à l’instant où
1880 ce ? Dans le langage de la théologie, il est aisé de définir le point : c’est à l’instant où la passion transgresse les li
1881 à l’instant où la passion transgresse les limites de la créature et s’emporte à la diviniser, que le Tentateur a parlé. « 
1882 tout vous est permis… » Mais encore, ce mouvement de l’orgueil fantastique, comment le distinguer d’une sensation de grâce
1883 t de l’orgueil fantastique, comment le distinguer d’ une sensation de grâce inséparable de toute vraie passion — et la grâc
1884 antastique, comment le distinguer d’une sensation de grâce inséparable de toute vraie passion — et la grâce nous délivre d
1885 e distinguer d’une sensation de grâce inséparable de toute vraie passion — et la grâce nous délivre de la loi… Poursuivons
1886 de toute vraie passion — et la grâce nous délivre de la loi… Poursuivons cette analogie. Le coup de foudre est le reflet d
1887 s cette analogie. Le coup de foudre est le reflet d’ une conversion. Il ne se discute pas davantage. Vous êtes élu « parce
1888 est elle ». L’amour accepte avec joie ce mystère, d’ une « injustice » aussi flagrante, cependant, que celle que l’on repro
1889 lle que l’on reproche à la doctrine augustinienne de l’élection. Pour la passion, tout est destin, rien n’est mérite, et l
1890 est destin, rien n’est mérite, et le « scandale » de la double prédestination, au salut ou à la damnation, se reproduit da
1891 ueille ou que l’on rejette un être, dans le temps d’ un premier regard. Voici l’accueil, et l’on entre en passion comme on
1892 ue. On renonce au monde, on s’enclot avec l’image de l’objet aimé. Mais le diable est assis dans un coin de la cellule. Il
1893 objet aimé. Mais le diable est assis dans un coin de la cellule. Il ne fait rien, il vous attend. Il connaît la logique de
1894 fait rien, il vous attend. Il connaît la logique de la passion. Il attend votre pire souffrance, son seul baume. Il a ces
1895 votre pire souffrance, son seul baume. Il a cessé de sourire, il est à son affaire, guettant les premiers plis de la paniq
1896 il est à son affaire, guettant les premiers plis de la panique à votre front. Que va devenir votre bonheur ? Pourquoi l’ê
1897 e aimé vous manque-t-il ? Pourquoi s’éloigne-t-il de l’image adorée ? S’il reste libre, ne va-t-il pas vous échapper ? Et
1898 t-être bientôt vous haïr ? Alors vous l’accuserez d’ une injustice dont il n’est pas plus responsable que vous ne l’étiez d
1899 il n’est pas plus responsable que vous ne l’étiez de votre choix. Qu’il se détourne de vous pour un temps, voici le monde
1900 vous ne l’étiez de votre choix. Qu’il se détourne de vous pour un temps, voici le monde dépeuplé. Qu’il vous repousse, et
1901 é. Qu’il vous repousse, et vous voici comme exclu de la réalité. Mais il y a pire. La passion la plus forte est celle qui
1902 La passion la plus forte est celle qui se nourrit d’ obstacles, et qui bientôt les crée s’ils viennent à faire défaut. Cet
1903 ils viennent à faire défaut. Cet usage mystifiant de la réalité, qu’elle soit sociale, morale ou naturelle, entraîne un me
1904 r. Certes, le passionné affecte souvent une sorte de respect méticuleux de la vérité, dans toutes les occasions où il le p
1905 é affecte souvent une sorte de respect méticuleux de la vérité, dans toutes les occasions où il le peut sans compromettre
1906 licence absolue qu’il s’accorde dès qu’il s’agit de satisfaire ou de préserver sa passion. Madame Guyon rapporte qu’elle
1907 qu’il s’accorde dès qu’il s’agit de satisfaire ou de préserver sa passion. Madame Guyon rapporte qu’elle dut mentir un jou
1908 ulait pas que ses laquais fussent mis dans le cas de répéter ce même mensonge, car, dit-elle avec naïveté, « j’avais moi-m
1909 ême pour le mensonge ». Jalousie, injustice, état de mensonge constant, perte du sens des devoirs immédiats, faiblesses ex
1910 ration, — c’est peu dire, car les vrais tourments de la passion sont indicibles par essence, ou ne trouveraient à s’exprim
1911 finit par voir dans ses souffrances le signe même de l’authenticité de sa passion. Alors il ne voit plus qu’il aime peut-ê
1912 s ses souffrances le signe même de l’authenticité de sa passion. Alors il ne voit plus qu’il aime peut-être comme on hait,
1913 de tyrannise ou méprise, que ses dons sont autant de violences intimes, et qu’il en vient à souffrir davantage par l’absen
1914 qu’il en vient à souffrir davantage par l’absence de l’être aimé qu’il n’a de joie par sa présence. Dans ce dédale de nos
1915 davantage par l’absence de l’être aimé qu’il n’a de joie par sa présence. Dans ce dédale de nos enfers privés, quel talis
1916 qu’il n’a de joie par sa présence. Dans ce dédale de nos enfers privés, quel talisman pourrions-nous emporter pour déjouer
1917 ns réjouir le diable ou susciter les plus subtils de ses démons. Il faudrait une abnégation dont les plus grands mystiques
1918 capables. Il faudrait surtout conserver la règle d’ or de l’amour du prochain, de l’Agapè qui seul peut brider notre Éros
1919 bles. Il faudrait surtout conserver la règle d’or de l’amour du prochain, de l’Agapè qui seul peut brider notre Éros et le
1920 t conserver la règle d’or de l’amour du prochain, de l’Agapè qui seul peut brider notre Éros et le sauver de ses propres f
1921 gapè qui seul peut brider notre Éros et le sauver de ses propres fureurs. Rien de moins ne saurait composer les exigences
1922 re Éros et le sauver de ses propres fureurs. Rien de moins ne saurait composer les exigences d’une passion avec celles de
1923 . Rien de moins ne saurait composer les exigences d’ une passion avec celles de la déficiente réalité, avec la liberté de l
1924 composer les exigences d’une passion avec celles de la déficiente réalité, avec la liberté de l’être aimé et le respect d
1925 celles de la déficiente réalité, avec la liberté de l’être aimé et le respect de son mystère. Rien de moins ne suffirait
1926 ité, avec la liberté de l’être aimé et le respect de son mystère. Rien de moins ne suffirait pour construire ce chef-d’œuv
1927 de l’être aimé et le respect de son mystère. Rien de moins ne suffirait pour construire ce chef-d’œuvre de l’amour vrai :
1928 oins ne suffirait pour construire ce chef-d’œuvre de l’amour vrai : l’alliance de deux êtres qui s’acceptent, qui ne sont
1929 uire ce chef-d’œuvre de l’amour vrai : l’alliance de deux êtres qui s’acceptent, qui ne sont plus l’un pour l’autre des pr
1930 sexe Le jeune lecteur qui parcourt le sommaire de ce livre se rue sur le chapitre 53. Voilà le point ! pense-t-il. Quel
1931 e réside dans la sexualité. L’illusion s’aperçoit d’ une manière assez simple : la sexualité est le domaine des tentations
1932 es plus sensibles et les plus communes. Assez peu d’ hommes sont réellement tentés de voler le portefeuille du voisin, mais
1933 mmunes. Assez peu d’hommes sont réellement tentés de voler le portefeuille du voisin, mais presque tout homme s’est vu ten
1934 du voisin, mais presque tout homme s’est vu tenté de prendre la femme du voisin, soit en recourant aux raisons pathétiques
1935 st vital ! » — soit en se persuadant « ça n’a pas d’ importance » ; ou les deux ensemble. En vérité, la sexualité en soi n’
1936 originel fut l’acte sexuel, dont la consommation de la pomme serait le symbole, c’est parce qu’ils assimilent le péché en
1937 e que l’on croit, notez que ce n’est pas le geste de manger une pomme qui était mauvais aux yeux de l’Éternel, ni la pomme
1938 en soi (au contraire), mais seulement la révolte d’ Ève et son désir de se diviniser à sa façon. Si la sexualité pouvait r
1939 re), mais seulement la révolte d’Ève et son désir de se diviniser à sa façon. Si la sexualité pouvait rester pure, c’est-à
1940 elle va se pervertir et devenir à son tour source de perversion. La paillardise joyeuse est certainement l’une des formes
1941 s diaboliques du péché. Je n’en dirais pas autant de certaines amours pseudo-mystiques, nœuds de sophismes spirituels où l
1942 utant de certaines amours pseudo-mystiques, nœuds de sophismes spirituels où le serpent se love avec délices. La sexualité
1943 autres fonctions naturelles par un certain manque de nécessité. Il est nécessaire de manger et de respirer, et il est néce
1944 un certain manque de nécessité. Il est nécessaire de manger et de respirer, et il est nécessaire que le sang circule, mais
1945 nque de nécessité. Il est nécessaire de manger et de respirer, et il est nécessaire que le sang circule, mais on peut vivr
1946 nscient. D’autre part, il est lié à la créativité de l’homme, il en est l’aspect corporel, le symbole ou le signe physique
1947 est libre, c’est-à-dire parce qu’il peut choisir de créer selon l’ordre divin, ou au contraire selon ses propres utopies.
1948 res utopies. C’est donc en tant qu’elle participe de notre libre créativité, comme le langage et les activités de l’esprit
1949 bre créativité, comme le langage et les activités de l’esprit, que la sexualité donne prise au diable. Et certes il ne s’y
1950 i rend un culte obsédé. L’idéalisation romantique de l’amour dans l’époque victorienne, entraînant une pruderie morbide du
1951 tout expliquer » par les censures et refoulements de la morale en vigueur dans son milieu, et de son temps. D’où l’on devr
1952 ments de la morale en vigueur dans son milieu, et de son temps. D’où l’on devrait déduire que le meilleur moyen de préveni
1953 rale en vigueur dans son milieu, et de son temps. D’ où l’on devrait déduire que le meilleur moyen de prévenir les états de
1954 . D’où l’on devrait déduire que le meilleur moyen de prévenir les états de possession satanique et les névroses nées de tr
1955 duire que le meilleur moyen de prévenir les états de possession satanique et les névroses nées de troubles sexuels serait
1956 tats de possession satanique et les névroses nées de troubles sexuels serait simplement la franchise, non pas « scientifiq
1957 e en proposant une licence absolue. Or, l’absence de contraintes choisies rend la sexualité insignifiante, et déprime secr
1958 insignifiante, et déprime secrètement l’humanité de l’homme. Le sexe n’est pas plus divin qu’il n’est honteux, mais il es
1959 st lié intimement aux fonctions les plus humaines de l’homme, à ses pouvoirs de création dans tous les ordres, à ses jugem
1960 ions les plus humaines de l’homme, à ses pouvoirs de création dans tous les ordres, à ses jugements esthétiques ou moraux,
1961 , à tout ce qui qualifie l’individu et lui permet de se posséder en tant que personne responsable. L’indifférence croissan
1962 nterdits qui prêtaient à l’acte sexuel la gravité d’ un engagement, cette espèce d’insouciance morale se traduit moins par
1963 e sexuel la gravité d’un engagement, cette espèce d’ insouciance morale se traduit moins par une libération que par une fla
1964 présence de cet affadissement, l’on serait tenté de regretter le temps où Satan proposait des combats plus féconds. 54
1965 ais le diable y trouve l’occasion la plus commune de nous faire abuser de notre liberté. Reste la femme, dont l’homme ne
1966 e l’occasion la plus commune de nous faire abuser de notre liberté. Reste la femme, dont l’homme ne se lassera jamais de
1967 Reste la femme, dont l’homme ne se lassera jamais de faire un ange ou un démon. « Instrument dont use le diable pour possé
1968 t Cyprien, et Tertullien plus énergique : « Porte de l’Enfer ! » Mais Goethe et tous les romantiques la divinisent. Souven
1969 tous les romantiques la divinisent. Souvenez-vous de l’exaltation finale du Second Faust : « L’Éternel féminin nous entraî
1970 s les hauteurs »… En vérité, la femme n’est porte de l’Enfer que pour ceux qui se laissent aller à voir en elle une porte
1971 el. Montaigne le dit bien, contre les romantiques de tous les temps : « Entre nous, ce sont choses que j’ai toujours vues
1972 Entre nous, ce sont choses que j’ai toujours vues de singulier accord : les opinions supercélestes et les mœurs souterrain
1973 les mœurs souterraines. » S’il y a quelque chose de démoniaque dans la femme, c’est sans doute moins dans sa nature que d
1974 ns doute moins dans sa nature que dans sa faculté d’ oublier cette nature, de se tromper sur elle, ou de laisser les autres
1975 ature que dans sa faculté d’oublier cette nature, de se tromper sur elle, ou de laisser les autres s’y tromper. Quelle soi
1976 ’oublier cette nature, de se tromper sur elle, ou de laisser les autres s’y tromper. Quelle soit moins bien armée que l’ho
1977 mme contre Satan, c’est ce que fait voir le récit de la Chute. Croyez bien que ce n’est point par politesse que le serpent
1978 jamais rien sans calcul. Mais voilà ce romantique d’ Adam qui s’y laisse prendre. Il s’imagine que la belle Ève, grâce à so
1979 « Das ewig weibliche zieht uns hinan ! », dit-il d’ un air ému, et il mord dans la pomme. C’est à ce moment que le mal est
1980 mais plus facilement égarée, parce qu’elle manque d’ objectivité, de sécheresse dans l’appréciation, de distance par rappor
1981 ement égarée, parce qu’elle manque d’objectivité, de sécheresse dans l’appréciation, de distance par rapport au réel, ou e
1982 d’objectivité, de sécheresse dans l’appréciation, de distance par rapport au réel, ou en un mot : de rhétorique. Elle met
1983 , de distance par rapport au réel, ou en un mot : de rhétorique. Elle met trop peu de raison dans l’exercice ému de sa cha
1984 . Elle met trop peu de raison dans l’exercice ému de sa charité, et trop peu d’ironie dans l’exercice pédagogique de sa ra
1985 on dans l’exercice ému de sa charité, et trop peu d’ ironie dans l’exercice pédagogique de sa raison. Elle manque de forme,
1986 et trop peu d’ironie dans l’exercice pédagogique de sa raison. Elle manque de forme, et c’est à l’homme de lui en donner.
1987 l’exercice pédagogique de sa raison. Elle manque de forme, et c’est à l’homme de lui en donner. Mais si l’homme au contra
1988 raison. Elle manque de forme, et c’est à l’homme de lui en donner. Mais si l’homme au contraire se met à l’adorer, à rend
1989 un culte aux valeurs féminines, il prive la femme de ses appuis et transforme la tentation dans laquelle elle glissait en
1990 ble. C’est Ève qui a commencé. Mais c’est à cause d’ Adam que les choses ont si mal tourné. Saint Paul dit que le mari est
1991 al tourné. Saint Paul dit que le mari est le chef de la femme, et que la femme sans l’homme ne peut être sauvée. C’est une
1992 scription. (Saint Paul est le plus grand réaliste de tous les temps.) Mais le culte romantique de la femme a inverti cet o
1993 iste de tous les temps.) Mais le culte romantique de la femme a inverti cet ordre naturel. Trop d’abus de pouvoir masculin
1994 que de la femme a inverti cet ordre naturel. Trop d’ abus de pouvoir masculins, et trop d’abdications aussi, l’ont fait par
1995 la femme a inverti cet ordre naturel. Trop d’abus de pouvoir masculins, et trop d’abdications aussi, l’ont fait paraître t
1996 aturel. Trop d’abus de pouvoir masculins, et trop d’ abdications aussi, l’ont fait paraître tyrannique. Et toute l’évolutio
1997 nsensiblement, l’homme renonce à exercer son rôle de chef. La femme l’a persuadé qu’elle était opprimée. Il la croit, par
1998 tait opprimée. Il la croit, par fatigue, par gain de paix, ou par idéalisme mal placé. Tous ces facteurs ont créé dans nos
1999 dans nos mœurs un malaise fondamental. Une espèce de révolte sourde anime la femme contre sa condition. Dans cette liberté
2000 voici livrée à elle-même. Le jeu ou la complicité de l’égoïsme masculin et de l’astuce féminine en panique, multiplient de
2001 Le jeu ou la complicité de l’égoïsme masculin et de l’astuce féminine en panique, multiplient des conflits inextricables.
2002 t les relations sociales des deux sexes, à partir d’ un mensonge à la nature ? L’expérience millénaire du couple permet d’i
2003 nature ? L’expérience millénaire du couple permet d’ imaginer ce qui va se passer à l’échelle de la société. La femme qui n
2004 permet d’imaginer ce qui va se passer à l’échelle de la société. La femme qui n’est plus dominée par l’homme — que la faut
2005 elle ne conçoit sa « liberté » que sous la forme d’ une passion pure, indépendante de tout objet, méprisant, sans toujours
2006 ue sous la forme d’une passion pure, indépendante de tout objet, méprisant, sans toujours se l’avouer, celui qui s’offre à
2007 s se l’avouer, celui qui s’offre à la fixer, — et d’ autant plus qu’il y parvient. Vis-à-vis d’elle-même et d’autrui, sa pr
2008 r, — et d’autant plus qu’il y parvient. Vis-à-vis d’ elle-même et d’autrui, sa première défense est de dire « qu’elle ne sa
2009 t plus qu’il y parvient. Vis-à-vis d’elle-même et d’ autrui, sa première défense est de dire « qu’elle ne sait pas ce qui l
2010 d’elle-même et d’autrui, sa première défense est de dire « qu’elle ne sait pas ce qui lui arrive. » C’est une feinte, un
2011 elle. Chez l’homme qui se laisse aller à ce genre d’ argument, c’est une lâcheté plus naïvement sincère… Mais il en fait, h
2012 l’opinion courante du temps, qui voient le signe de la vraie passion dans le cri « c’est plus fort que moi ! » l’on voudr
2013 rait dire cette chose très simple : — Cessez donc d’ aimer « malgré vous » et sachez un peu ce que vous faites, c’est une q
2014 hez un peu ce que vous faites, c’est une question de tenue morale, et c’est la condition d’un amour authentique. N’imitez
2015 e question de tenue morale, et c’est la condition d’ un amour authentique. N’imitez pas le mensonge féminin, sinon les femm
2016 animé) Ils s’aimaient tant qu’ils ne cessaient de dire : Comment peut-on s’aimer autant ? Un beau soir, elle se mit à l
2017 le battre, et le laissa pour mort sur la descente de lit. Puis elle s’endormit, fatiguée. Le lendemain, il vivait encore.
2018 ts avant qu’ils aient quitté sa langue. Il essaya de dire : — Je t’aime, et prononça quelque chose comme : — Putain. Alors
2019 e te battrai encore. Dis-moi pourquoi j’ai besoin de te battre ? Mais lui pense dans, sa tristesse : — Si je lui dis qu’el
2020 s, elle le croira. Si je lui dis : — « Cesse donc d’ être méchante », elle me demandera pourquoi elle est méchante. Or je l
2021 veux pas qu’elle soit désespérée. Le mieux serait de la quitter. Mais alors nous ne saurons jamais. Il se tait. « Cet homm
2022 L’histoire que l’on vient de lire peut être celle d’ un couple, mais aussi, d’une certaine manière, celle des relations de
2023 de lire peut être celle d’un couple, mais aussi, d’ une certaine manière, celle des relations de l’Allemagne et de l’Europ
2024 ussi, d’une certaine manière, celle des relations de l’Allemagne et de l’Europe, ou d’une masse quelconque et du Prince. O
2025 ne manière, celle des relations de l’Allemagne et de l’Europe, ou d’une masse quelconque et du Prince. Ou encore, elle fig
2026 e des relations de l’Allemagne et de l’Europe, ou d’ une masse quelconque et du Prince. Ou encore, elle figure le conflit p
2027 re, elle figure le conflit permanent dans le cœur d’ un individu, entre le besoin d’anarchie et le besoin de conservation.
2028 anent dans le cœur d’un individu, entre le besoin d’ anarchie et le besoin de conservation. Parabole de la démission des pu
2029 individu, entre le besoin d’anarchie et le besoin de conservation. Parabole de la démission des puissances d’ordre dans le
2030 d’anarchie et le besoin de conservation. Parabole de la démission des puissances d’ordre dans le monde moderne. Même histo
2031 ervation. Parabole de la démission des puissances d’ ordre dans le monde moderne. Même histoire, mêmes conflits sur tous le
2032 parce qu’elle a les mêmes sources, avec la crise de nos vies privées. Nous sommes au centre de tout le mal dès que nous l
2033 crise de nos vies privées. Nous sommes au centre de tout le mal dès que nous l’atteignons dans notre cœur. Lorsque nos ci
2034 point faillir, il eût fallu l’héroïque vigilance d’ un saint. Ah ! mais jamais un saint ne se fût laissé tomber dans une s
2035 dernier cercle : dans cet enfer né du vertige et de l’effroi sinistre de l’orgueil, l’enfer de la passion qui n’a pas d’a
2036 s cet enfer né du vertige et de l’effroi sinistre de l’orgueil, l’enfer de la passion qui n’a pas d’autre objet que le mal
2037 ige et de l’effroi sinistre de l’orgueil, l’enfer de la passion qui n’a pas d’autre objet que le malheur qu’elle va créer,
2038 e de l’orgueil, l’enfer de la passion qui n’a pas d’ autre objet que le malheur qu’elle va créer, en vertu de sa logique fo
2039 Évidemment, je n’aurais pas dû entrer. On fait de ces bêtises, par négligence, croit-on. Bref, je suis entré, c’était t
2040 ouges, comme lorsqu’on choisit une couleur au jeu de cartes, rouge ou noir. J’arrive à la salle de lecture. Il n’y avait q
2041 jeu de cartes, rouge ou noir. J’arrive à la salle de lecture. Il n’y avait que des feuilles de papier blanc sur les tables
2042 a salle de lecture. Il n’y avait que des feuilles de papier blanc sur les tables, et tout le monde lisait. Je dis : — Est-
2043 e ici ? quelqu’un l’a-t-il vue ? Ils me regardent d’ un air vexé. Un valet s’approche rapidement et me dit à voix basse : —
2044 vais dit que Fine day to day, c’eût été une sorte de question ou de réponse. Je pensais que le mieux serait de m’en aller
2045 ne day to day, c’eût été une sorte de question ou de réponse. Je pensais que le mieux serait de m’en aller sans bruit. Mai
2046 ion ou de réponse. Je pensais que le mieux serait de m’en aller sans bruit. Mais vous connaissez ces couloirs. Et je ne vo
2047  ? C’était la question par excellence ! Le résumé de toutes mes erreurs, si vous voulez. Je trouve la porte du bureau dire
2048 t par-derrière, je ne puis l’expliquer autrement. D’ une certaine manière, c’était mon propre regard qui traversait ses yeu
2049 Nous étions couchés chez nous. Je ne sais combien de temps cela va durer. Elle délire et j’ai cette balle dans le cœur. Et
2050 r. Et voici que maintenant, je ne puis plus poser de question. Car si vous me dites que c’est une vraie balle que j’ai dan
2051 es questions possibles, et donc toute possibilité de réponse à quoi que ce soit. Laissez-moi donc seul. C’est mon ordre. E
2052 le cri même du désespoir, et c’est l’autosadisme de ce siècle. Tout est faux mais tout est réel. Puisqu’on en meurt de pl
2053 mar mais sans réveil possible. C’est le cauchemar de la réalité. La guerre existe autour de nous, elle est fausse, impossi
2054 ugmentent l’amertume. Elles nous suggèrent l’idée d’ une possession… Est-ce nous vraiment qui avons laissé les choses en ve
2055 es choses en venir là ? Si ce n’est pas nous, qui d’ Autre ? Ah, nous sommes tous complices ! Mais alors pourquoi mourrons-
2056 é que nous n’avons pas aimé assez pour l’empêcher de se perdre ? Pour un avenir que nous devinons à peine et savons encore
2057 us valable que la vie ? Et si nous ne voulons pas de foi, pour quelle vie plus valable que la foi ? C’est couru, notre mon
2058 ant. Cela paraît absurde et révoltant. Il est dur de se défaire de l’idée qu’on était né pour vivre heureux. Jadis la trag
2059 ît absurde et révoltant. Il est dur de se défaire de l’idée qu’on était né pour vivre heureux. Jadis la tragédie n’était q
2060 utres, et dans les livres ; et la voilà substance de nos vies. Encore un navire torpillé et comme le dit l’Amirauté : « Th
2061 victimes ont été informées. (Grand développement de l’information dans notre siècle !) Qu’on nous informe donc, une fois
2062 donc, une fois pour toutes, que nous sommes tous de la famille, et que nous sommes aussi les victimes. « Vous êtes tous m
2063 e temps nous sommes tous dans le bateau qui vient d’ envoyer la torpille. Ce n’est pas une image, hélas, c’est simplement u
2064 st pas une image, hélas, c’est simplement une vue d’ ensemble. (Tôt et tard confondus, ou plutôt embrassés d’un seul regard
2065 mble. (Tôt et tard confondus, ou plutôt embrassés d’ un seul regard.) Que faudra-t-il encore pour que nous comprenions l’ét
2066 a-t-il encore pour que nous comprenions l’étendue de la catastrophe, et qu’elle est vraiment sans limites ? Et qu’il n’y a
2067 t. » Je sais, nous sommes en guerre, et il s’agit de gagner. Mais à quel Bien et à quel Mal avons-nous cru, pour montrer t
2068 n et à quel Mal avons-nous cru, pour montrer tout d’ un coup tant d’assurance ? Se faire tuer pour la liberté d’avoir ses p
2069 avons-nous cru, pour montrer tout d’un coup tant d’ assurance ? Se faire tuer pour la liberté d’avoir ses propres opinions
2070 tant d’assurance ? Se faire tuer pour la liberté d’ avoir ses propres opinions, c’est magnifique, mais c’est aussi mettre
2071 le grabuge où nous sombrons ? J’ai décrit l’œuvre de Satan, et cela finit dans un cauchemar qui ressemble à s’y méprendre
2072 illé, c’est-à-dire dévêtu des oripeaux tout-faits de l’illusion — c’est peut-être sa cruauté. Mais si l’époque est sans is
2073 le cauchemar est vrai cette fois, s’il n’est plus de réveil possible, pourquoi le dire et troubler davantage ? « Ôter ses
2074 r attristé »26… ⁂ Mais j’entendais un chant plein de force et de grâce, quelque part au secret de la vie, quand la clameur
2075 26… ⁂ Mais j’entendais un chant plein de force et de grâce, quelque part au secret de la vie, quand la clameur du néant s’
2076 lein de force et de grâce, quelque part au secret de la vie, quand la clameur du néant s’abaissait, quelque part au-dessus
2077 meur du néant s’abaissait, quelque part au-dessus de la mort, comme une grande fugue puissante et soutenue, quand tout sem
2078 n, mais il est plus dur que la mort et le mutisme de la mort, il est plus pur que nos douleurs, je l’ai nommé : cantique a
2079 ans l’Amérique contemporaine, est une laïcisation de l’hérésie des puritains, qui déformèrent le calvinisme au point de lu
2080 puritains, qui déformèrent le calvinisme au point de lui faire dire que le succès matériel est une marque d’élection. Il s
2081 faire dire que le succès matériel est une marque d’ élection. Il se peut que les grandes fortunes puritaines soient nées d
2082 t que les grandes fortunes puritaines soient nées d’ un pacte avec le diable, béni et enregistré par les pasteurs. Mais san
2083 puritains, il y avait sans doute, plus que l’idée de gain, l’idée « catholique » au sens large, du rachat de la création p
2084 n, l’idée « catholique » au sens large, du rachat de la création par le travail et la vertu. 21. À cet égard, Hitler aura
2085 À cet égard, Hitler aura été le plus grand diseur de bonne aventure du siècle. 22. Kierkegaard. 23. Genèse 3, 8-13. 24.
2086 8-13. 24. Stendhal. 25. Selon cette conception de la sincérité il serait hypocrite de dire la vérité quand on a fort en
2087 te conception de la sincérité il serait hypocrite de dire la vérité quand on a fort envie de mentir. 26. Proverbes, 15-20
2088 hypocrite de dire la vérité quand on a fort envie de mentir. 26. Proverbes, 15-20.
6 1942, La Part du diable (1982). Cinquième partie. Le Bleu du Ciel
2089 ble Ne réponds pas à l’insensé selon sa folie De peur que tu ne lui ressembles toi-même. Réponds à l’insensé selon sa
2090 u combat contre le mal en général, qu’il s’agisse de la résistance d’une âme au diable, ou de la guerre des démocraties co
2091 e mal en général, qu’il s’agisse de la résistance d’ une âme au diable, ou de la guerre des démocraties contre les dictatur
2092 s’agisse de la résistance d’une âme au diable, ou de la guerre des démocraties contre les dictatures totalitaires. Si vous
2093 , l’ironie et l’intelligence froide, vous risquez de devenir méchants, c’est-à-dire que plus vous cherchez à être forts à
2094 orts à la manière du diable, plus vous lui donnez d’ avantages, son but étant de vous rendre semblables à lui. Mais si vous
2095 , plus vous lui donnez d’avantages, son but étant de vous rendre semblables à lui. Mais si vous ne le faites pas, vous ser
2096 es opposent aux dictateurs des tanks, des avions, de la propagande démagogique et une discipline de fer, elles risquent de
2097 s, de la propagande démagogique et une discipline de fer, elles risquent de devenir totalitaires, c’est-à-dire que plus el
2098 agogique et une discipline de fer, elles risquent de devenir totalitaires, c’est-à-dire que plus elles cherchent à être fo
2099 er pour l’ordre. Tout sera perdu. La solution est de répondre à l’insensé à la fois selon sa folie et selon la sagesse qui
2100 us, nous ne deviendrons pas fous. La solution est de résister au diable par la ruse et la subtilité, par l’ironie et l’int
2101 ce froide, et en même temps, par toutes les armes de la foi, de l’espérance et de la charité, dont il ignore la puissance.
2102 et en même temps, par toutes les armes de la foi, de l’espérance et de la charité, dont il ignore la puissance. Car ainsi
2103 par toutes les armes de la foi, de l’espérance et de la charité, dont il ignore la puissance. Car ainsi nous ne serons pas
2104 s les trois grandes Vertus sauront nous préserver de l’abus des vertus mineures, par où le diable pourrait nous asservir.
2105 le diable pourrait nous asservir. La solution est d’ attaquer le tyran — puisqu’il nous attaque — avec des tanks, des avion
2106 squ’il nous attaque — avec des tanks, des avions, de la propagande massive, et une discipline de fer, — et en même temps d
2107 ions, de la propagande massive, et une discipline de fer, — et en même temps de l’attaquer avec un nouvel idéal. Car ainsi
2108 ive, et une discipline de fer, — et en même temps de l’attaquer avec un nouvel idéal. Car ainsi nous ne serons pas annexés
2109 as non plus par l’intérieur. J’ai tenté jusqu’ici de dénoncer l’action du diable, en me servant parfois de ses propres arm
2110 énoncer l’action du diable, en me servant parfois de ses propres armes. Et pendant que j’écris, la Russie oppose au fascis
2111 stapo. Occupons-nous maintenant du deuxième temps de l’attaque. Il y faut des hommes réveillés. Deutschland erwache ! — A
2112 même où il plongeait son peuple dans le cauchemar de l’hypnose collective. Procédé constant du démon ! Le tonnerre des bom
2113 , et tous ceux parmi nous qui ont cédé au vertige de l’Abîme politique ou moral ? Pour dissiper l’hypnose, le médecin parf
2114 sur le visage du patient. Ce n’est peut-être que d’ un souffle de l’Esprit, passant sur le visage torturé du siècle, que n
2115 e du patient. Ce n’est peut-être que d’un souffle de l’Esprit, passant sur le visage torturé du siècle, que nous devons at
2116 est, disait Sénèque : conter le rêve est le fait de l’homme qui ne dort plus. C’est un écho lointain du grand cri de sain
2117 ne dort plus. C’est un écho lointain du grand cri de saint Paul : « J’ai cru, c’est pourquoi j’ai parlé ! » Qu’ai-je donc
2118 ’ai parlé ! » Qu’ai-je donc cru, qui m’ait permis d’ articuler ce peu que j’ai pu dire de nos maux ? Et quelle est la visio
2119 m’ait permis d’articuler ce peu que j’ai pu dire de nos maux ? Et quelle est la vision qui m’éveille ? Je m’essaierai à l
2120 ordre céleste, aussi nommé spirituel Le secret de la seule confiance qui ne soit pas une illusion réside dans la simple
2121 ne sommes pas Dieu. Car alors, tout ne dépend pas de nous ! Le principe et la fin de l’Ordre, la sommation, le sens final,
2122 out ne dépend pas de nous ! Le principe et la fin de l’Ordre, la sommation, le sens final, sont dans la main de Dieu, qui
2123 e, la sommation, le sens final, sont dans la main de Dieu, qui est le Bien. Si au contraire, tout était dans nos mains, co
2124 ut était dans nos mains, comme le serpent tentait de nous en persuader, tout serait bientôt gâché et dans les mains du dia
2125 ble. Si nous étions des dieux, il n’y aurait plus d’ espoir : la catastrophe présente étant notre œuvre à tous, l’échec des
2126 ité démontrée sans recours. C’est pourquoi l’aide de l’archange Michel, chef suprême des milices célestes, est la plus gra
2127 int Michel irrésistiblement triomphe par l’énoncé de son nom seul, par le seul cri de son nom qui veut dire : Quis sicut D
2128 phe par l’énoncé de son nom seul, par le seul cri de son nom qui veut dire : Quis sicut Deus ? « Qui est comme Dieu ? » Et
2129 ait : « Vous serez comme des dieux. » Le nom même de Michel formule et définit l’ordre céleste, le gage inaliénable de tou
2130 e et définit l’ordre céleste, le gage inaliénable de toute confiance humaine. L’imagerie populaire de l’archange peut pass
2131 de toute confiance humaine. L’imagerie populaire de l’archange peut passer pour une histoire pieuse, une mythologie médié
2132 masque plus longtemps le moment décisif du drame de notre histoire, le principe même de toute victoire sur le Malin ! Aux
2133 isif du drame de notre histoire, le principe même de toute victoire sur le Malin ! Aux grandes époques de notre évolution,
2134 toute victoire sur le Malin ! Aux grandes époques de notre évolution, c’est l’événement lui-même qui répercute le cri de g
2135 , c’est l’événement lui-même qui répercute le cri de guerre de l’archange lumineux. Avez-vous des oreilles pour l’entendre
2136 événement lui-même qui répercute le cri de guerre de l’archange lumineux. Avez-vous des oreilles pour l’entendre ? Le malh
2137 ez-vous des oreilles pour l’entendre ? Le malheur de ce temps les ouvrira. C’est ici que nous apparaît dans sa grandeur le
2138 démocraties capitalistes et commerçantes : Fils de l’homme, dis au prince de Tyr : Ainsi parle le Seigneur, l’Éternel. T
2139 as dit : Je suis Dieu, Je suis assis sur le siège de Dieu au sein des mers ! Toi tu es homme, et non Dieu. Par ta sagesse
2140 ligence Tu t’es acquis des richesses Tu as amassé de l’or et de l’argent Dans tes coffres-forts ; Par ta grande sagesse et
2141 t’es acquis des richesses Tu as amassé de l’or et de l’argent Dans tes coffres-forts ; Par ta grande sagesse et par ton co
2142  : Parce que tu prends ta volonté pour la volonté de Dieu, Voici, je ferai venir contre toi des étrangers, Les plus violen
2143 fosse Et tu mourras comme ceux qui tombent percés de coups Au milieu des mers. En face de ton meurtrier, diras-tu : Je sui
2144 s Dieu ? Tu seras homme, et non Dieu Sous la main de celui qui te tuera. Face aux Tyrans tout devient clair et décisif. À
2145 onnaître, par la plus évidente analogie, l’action de Satan dans nos vies et le mensonge de l’éternelle Tentation. C’est dé
2146 e, l’action de Satan dans nos vies et le mensonge de l’éternelle Tentation. C’est déjà la moitié de la victoire. Ah ! pour
2147 ge de l’éternelle Tentation. C’est déjà la moitié de la victoire. Ah ! pour tout l’or du monde je ne souhaiterais pas d’êt
2148  ! pour tout l’or du monde je ne souhaiterais pas d’ être né dans un autre temps ! Tout signifie, autour de nous, tout s’am
2149 e, autour de nous, tout s’amplifie aux dimensions de la plus vaste poésie ! Tout ce qui m’est arrivé ces jours-ci est à l’
2150 ut ce qui m’est arrivé ces jours-ci est à l’image de l’histoire mondiale. Jamais nos objectifs ne furent plus manifestes.
2151 reflète sa « grande stratégie » dans la confusion de nos mœurs. À nous l’effort, à Dieu l’issue et le jugement. Si nous pe
2152 . Si nous perdons toutes nos batailles, le destin de Satan n’en est pas moins scellé. Tout ce qui nous est demandé, c’est
2153 moins scellé. Tout ce qui nous est demandé, c’est de coïncider avec l’esprit de cette victoire finale. Là gît le secret de
2154 ous est demandé, c’est de coïncider avec l’esprit de cette victoire finale. Là gît le secret de la plus grande liberté d’a
2155 esprit de cette victoire finale. Là gît le secret de la plus grande liberté d’action et d’imagination. Car aussitôt nous v
2156 inale. Là gît le secret de la plus grande liberté d’ action et d’imagination. Car aussitôt nous voici délivrés du souci mon
2157 t le secret de la plus grande liberté d’action et d’ imagination. Car aussitôt nous voici délivrés du souci monstrueux des
2158 i délivrés du souci monstrueux des fins dernières de notre destinée, du souci même de notre orgueil, qui nous accable inco
2159 s fins dernières de notre destinée, du souci même de notre orgueil, qui nous accable inconsciemment. Quoi qu’il arrive, le
2160 , — le bleu du ciel n’est pas terni par les nuées de notre angoisse. Et voyez : le jugement final lui-même ne nous apparti
2161 ême ne nous appartient pas, non plus que le souci de la victoire décisive. Car ainsi qu’on le lit dans l’Épître de Jude, é
2162 re décisive. Car ainsi qu’on le lit dans l’Épître de Jude, étonnante explosion de lyrisme vengeur : L’archange Michel, lor
2163 le lit dans l’Épître de Jude, étonnante explosion de lyrisme vengeur : L’archange Michel, lorsqu’il contestait avec le dia
2164 ntestait avec le diable et lui disputait le corps de Moïse, n’osa pas porter contre lui un jugement injurieux, mais il dit
2165 gneur te réprime ! Eux, au contraire, ils parlent d’ une manière injurieuse de ce qu’ils ignorent, et ils se corrompent dan
2166 u contraire, ils parlent d’une manière injurieuse de ce qu’ils ignorent, et ils se corrompent dans ce qu’ils savent nature
2167 ées sans eau, poussées par les vents ; des arbres d’ automne sans fruits, deux fois morts, déracinés ; des vagues furieuses
2168 deux fois morts, déracinés ; des vagues furieuses de la mer, rejetant l’écume de leurs impuretés ; des astres errants, aux
2169 des vagues furieuses de la mer, rejetant l’écume de leurs impuretés ; des astres errants, auxquels l’obscurité des ténèbr
2170 des ténèbres est réservée pour l’éternité. » Mais de qui parle-t-il ainsi ? Il tient à nous que ce ne soit pas de nous…
2171 e-t-il ainsi ? Il tient à nous que ce ne soit pas de nous… 61. L’exorcisme, ou l’ordre personnel Le diable et sa col
2172 , ou l’ordre personnel Le diable et sa colonne d’ anges noirs « qui n’ont pas conservé leur dignité, mais qui ont désert
2173 erté leur propre demeure » sont déjà dans l’étang de feu. Du point de vue de l’éternité, c’en est fait, la partie est gagn
2174  » sont déjà dans l’étang de feu. Du point de vue de l’éternité, c’en est fait, la partie est gagnée. Mais ce qui nous imp
2175 e. Mais ce qui nous importe dans ce siècle, c’est de nous rendre immédiatement participants de cette victoire. Un des prop
2176 , c’est de nous rendre immédiatement participants de cette victoire. Un des prophètes mineurs de l’ère moderne, Joseph de
2177 pants de cette victoire. Un des prophètes mineurs de l’ère moderne, Joseph de Maistre, écrivait sous Napoléon : Lorsqu’un
2178 op prépondérante épouvante l’univers, on s’irrite de ne trouver aucun moyen pour l’arrêter ; on se répand en reproches ame
2179 l’immoralité des gouvernements, qui les empêchent de se réunir pour conjurer le danger commun. Mais dans le fond, ces plai
2180 alition entre souverains, faite sur les principes d’ une morale pure et désintéressée, serait un miracle. Dieu, qui ne doit
2181 sintéressée, serait un miracle. Dieu, qui ne doit de miracle à personne et qui n’en fait point d’inutiles, emploie pour ré
2182 doit de miracle à personne et qui n’en fait point d’ inutiles, emploie pour rétablir l’équilibre deux moyens plus simples :
2183  ; comme un faible roseau, arrêté dans le courant d’ un fleuve, produit à la fin un amoncellement de terre qui le détourne.
2184 nt d’un fleuve, produit à la fin un amoncellement de terre qui le détourne. Je dis que nous pouvons participer à cette vi
2185  » qui arrête le courant. Je dis que la condition de cette victoire, c’est que nous devenions, chacun pour notre compte, u
2186 c’est le Saint. Seul un saint serait à la hauteur de cette espèce d’héroïsme dans le mal que déploie de nos jours l’advers
2187 Seul un saint serait à la hauteur de cette espèce d’ héroïsme dans le mal que déploie de nos jours l’adversaire. Voilà la v
2188 e cette espèce d’héroïsme dans le mal que déploie de nos jours l’adversaire. Voilà la vérité qui nous éclaire, mais nous c
2189 Et qui donc oserait même, sérieusement, souhaiter d’ en devenir un ? Mais pour devenir ou pour rester des hommes, simplemen
2190 t-ce que se sanctifier ? L’action du diable étant d’ obnubiler en nous le sentiment de la culpabilité, et de nous faire cro
2191 du diable étant d’obnubiler en nous le sentiment de la culpabilité, et de nous faire croire que c’est l’autre toujours, l
2192 ubiler en nous le sentiment de la culpabilité, et de nous faire croire que c’est l’autre toujours, la force des choses ou
2193 vraie sanctification consiste dans l’augmentation de notre sentiment d’être complices de tout le mal qui se fait dans le m
2194 n consiste dans l’augmentation de notre sentiment d’ être complices de tout le mal qui se fait dans le monde. Dans la Confe
2195 ’augmentation de notre sentiment d’être complices de tout le mal qui se fait dans le monde. Dans la Confession des Péchés
2196 fait dans le monde. Dans la Confession des Péchés de Théodore de Bèze, ces mots : « reconnaissant de plus en plus nos faut
2197 du seul progrès humain non équivoque28. Le sommet de la sainteté n’est pas dans la certitude illusoire d’être sans péché.
2198 la sainteté n’est pas dans la certitude illusoire d’ être sans péché. Il nous est au contraire révélé par le Christ lorsqu’
2199 contraire révélé par le Christ lorsqu’il accepte de mourir en assumant tout le péché du monde. Le monde est plein de démo
2200 sumant tout le péché du monde. Le monde est plein de démons, ils sévissent par millions, et nous n’arriverons pas à les ch
2201 ne pas qu’il n’en ait point trouvé. Le vrai moyen de rencontrer un homme, c’est d’en devenir un soi-même. (Si ce n’est pas
2202 ouvé. Le vrai moyen de rencontrer un homme, c’est d’ en devenir un soi-même. (Si ce n’est pas le seul moyen, c’est assuréme
2203 faite absolue et sans recours, un élément premier de l’ordre impérissable. Or cet élément personnel doit s’encadrer dans u
2204 étant à donner ; le premier figurant la condition de possibilité de tout ordre personnel, le second sa condition de fécond
2205 ; le premier figurant la condition de possibilité de tout ordre personnel, le second sa condition de fécondité. 62. L’o
2206 é de tout ordre personnel, le second sa condition de fécondité. 62. L’ordre cosmique Le développement aberrant de no
2207 62. L’ordre cosmique Le développement aberrant de nos techniques et par elles de notre impérialisme rationnel, nous a f
2208 loppement aberrant de nos techniques et par elles de notre impérialisme rationnel, nous a fait perdre, depuis quelques siè
2209 ns cosmique, c’est-à-dire la conscience immédiate de nos liens avec l’ensemble de l’Univers, ses lois connues et ses mystè
2210 conscience immédiate de nos liens avec l’ensemble de l’Univers, ses lois connues et ses mystères. Dans le même temps le dé
2211 res. Dans le même temps le développement aberrant de nos morales rationalistes, puis individualistes, puis irrationalistes
2212 élémentaire, c’est-à-dire la conscience immédiate d’ un absolu qui serait, hors de nous, le gage universel du bien et du ma
2213 et du mal. Et nous voici coupés des deux sources de l’Ordre, qui sont les lois ordonnées de la Création et les interventi
2214 x sources de l’Ordre, qui sont les lois ordonnées de la Création et les interventions ordonnatrices du Créateur. Nous avon
2215 du Créateur. Nous avons cru pouvoir nous libérer de l’interdépendance de toutes les choses créées, et de notre dépendance
2216 ons cru pouvoir nous libérer de l’interdépendance de toutes les choses créées, et de notre dépendance de Dieu. Alors nous
2217 l’interdépendance de toutes les choses créées, et de notre dépendance de Dieu. Alors nous sommes entrés dans le monde de l
2218 toutes les choses créées, et de notre dépendance de Dieu. Alors nous sommes entrés dans le monde de l’arbitraire, où l’Ar
2219 e de Dieu. Alors nous sommes entrés dans le monde de l’arbitraire, où l’Arbitre tricheur nous affole à plaisir. Nietzsche
2220 à plaisir. Nietzsche a bien vu que la philosophie de ce monde-là ne pouvait être que le nihilisme. Et tôt après, son peupl
2221 e que je sente admirable au-delà des fascinations de ma plus secrète utopie. Nous avons à redécouvrir la catholicité fonda
2222 éterminée et révélée par Dieu comme étant l’ordre de sa Création. Et nous avons à redécouvrir l’absolu d’un bien et d’un m
2223 sa Création. Et nous avons à redécouvrir l’absolu d’ un bien et d’un mal non relatifs à nos idées morales, aux suggestions
2224 Et nous avons à redécouvrir l’absolu d’un bien et d’ un mal non relatifs à nos idées morales, aux suggestions parfois aveug
2225 dées morales, aux suggestions parfois aveuglantes de l’instinct ou aux pressions de l’intérêt momentané ; l’absolu d’un bi
2226 arfois aveuglantes de l’instinct ou aux pressions de l’intérêt momentané ; l’absolu d’un bien et d’un mal déterminés et ré
2227 u aux pressions de l’intérêt momentané ; l’absolu d’ un bien et d’un mal déterminés et révélés par Dieu comme étant l’ordre
2228 ns de l’intérêt momentané ; l’absolu d’un bien et d’ un mal déterminés et révélés par Dieu comme étant l’ordre de sa Volont
2229 éterminés et révélés par Dieu comme étant l’ordre de sa Volonté. Toute ma confiance repose dans la certitude que nos méfa
2230 aits et ceux du diable ne changent rien à l’Ordre de ce monde, où le hasard n’existe pas, simple illusion d’une impatience
2231 monde, où le hasard n’existe pas, simple illusion d’ une impatience oblitérant nos sens spirituels, mais qui ne peut empêch
2232 ns spirituels, mais qui ne peut empêcher l’Esprit d’ agir plus qu’elle ne peut influencer le cours des astres. Nous pouvons
2233 tion poétique qui sonde les abîmes microscopiques de la matière, la grande dynamique sidérale, et les correspondances de l
2234 grande dynamique sidérale, et les correspondances de la vie organique, à tel point qu’un savant, un peintre, un visionnair
2235 savant, un peintre, un visionnaire, sont capables de réinventer le « réel » à sa ressemblance ; mais nous ne pouvons préve
2236 ; mais nous ne pouvons prévenir toutes ces choses d’ exister, de graviter, de naître, de mourir, et de porter leurs justes
2237 ne pouvons prévenir toutes ces choses d’exister, de graviter, de naître, de mourir, et de porter leurs justes conséquence
2238 révenir toutes ces choses d’exister, de graviter, de naître, de mourir, et de porter leurs justes conséquences jusqu’au te
2239 tes ces choses d’exister, de graviter, de naître, de mourir, et de porter leurs justes conséquences jusqu’au terme des cyc
2240 d’exister, de graviter, de naître, de mourir, et de porter leurs justes conséquences jusqu’au terme des cycles possibles.
2241 nces jusqu’au terme des cycles possibles. Du fond d’ un cœur aux bornes du cosmos, une résonance universelle émeut tout l’e
2242 rselle émeut tout l’existant à la quête éternelle d’ un accord qui sera le nom secret de Dieu. Ah ! nous pouvons mentir, tu
2243 uête éternelle d’un accord qui sera le nom secret de Dieu. Ah ! nous pouvons mentir, tuer, et nous exclure, nous pouvons f
2244 mentir, tuer, et nous exclure, nous pouvons faire de pitoyables fautes d’orgueil, de négligence ou de calcul, mais nous ne
2245 exclure, nous pouvons faire de pitoyables fautes d’ orgueil, de négligence ou de calcul, mais nous ne pouvons rien, à jama
2246 ous pouvons faire de pitoyables fautes d’orgueil, de négligence ou de calcul, mais nous ne pouvons rien, à jamais, sur le
2247 de pitoyables fautes d’orgueil, de négligence ou de calcul, mais nous ne pouvons rien, à jamais, sur le miracle perpétuel
2248 der la justice et la joie, les pures spéculations de la mathématique et les structures du monde matériel, l’amour et l’obj
2249 structures du monde matériel, l’amour et l’objet de l’amour, la prière et le vœu divin. Si moi, petit individu, erreur in
2250 insignifiante, parole articulée dans le discours de toutes les créatures, je prétends m’isoler ou m’abstraire du cosmos,
2251 u plan providentiel. Mais si je réponds à l’appel de mon nom, si j’assume la vocation qui me distingue et rend vraie ma pa
2252 et rend vraie ma parole, si je m’efforce au moins de converger avec l’ordre cosmique et le vouloir divin, tout indigne enc
2253 c’est toujours aux déserts qu’il habite, déserts de sables, d’eaux amères ou de rochers, déserts des foules, ou ceux que
2254 ours aux déserts qu’il habite, déserts de sables, d’ eaux amères ou de rochers, déserts des foules, ou ceux que porte un cœ
2255 qu’il habite, déserts de sables, d’eaux amères ou de rochers, déserts des foules, ou ceux que porte un cœur dénué d’amour
2256 serts des foules, ou ceux que porte un cœur dénué d’ amour et d’espérance. Il n’est pas bon que l’homme soit seul. Il n’est
2257 oules, ou ceux que porte un cœur dénué d’amour et d’ espérance. Il n’est pas bon que l’homme soit seul. Il n’est pas bon no
2258 repose sur le voisinage vécu, qui est la relation de prochain à prochain30. Sans voisinage réel, vous n’êtes plus responsa
2259 Sans voisinage réel, vous n’êtes plus responsable de rien ni de personne. Mais sans le sentiment de la responsabilité de c
2260 age réel, vous n’êtes plus responsable de rien ni de personne. Mais sans le sentiment de la responsabilité de chacun enver
2261 le de rien ni de personne. Mais sans le sentiment de la responsabilité de chacun envers autrui, il n’est point de liberté
2262 onne. Mais sans le sentiment de la responsabilité de chacun envers autrui, il n’est point de liberté civique possible : la
2263 nsabilité de chacun envers autrui, il n’est point de liberté civique possible : la dictature devient inévitable dans toute
2264 xime est le « chacun pour soi et Dieu pour tous » de ceux qui ne croient pas en Dieu. C’est ce que nous voyons se produire
2265 e nous voyons se produire dans les États atteints de gigantisme, où les relations humaines, du fait des grandes distances,
2266 nes, du fait des grandes distances, des masses et de l’anonymat, ne sont plus que d’abstraites contraintes, qui d’ailleurs
2267 es, des masses et de l’anonymat, ne sont plus que d’ abstraites contraintes, qui d’ailleurs ne contraignent bientôt qu’à la
2268 à-dire que l’abstraite contrainte doit se doubler d’ une contrainte physique, seule efficace désormais : la police. Mais ce
2269 r est en réalité le souverain désordre. Il n’y a d’ ordre vrai que dans la liberté. Il n’y a de liberté que chez les homme
2270 n’y a d’ordre vrai que dans la liberté. Il n’y a de liberté que chez les hommes qui réalisent leur vocation et qui la ser
2271 l’homme libre est le seul qui respecte la liberté de ses semblables. Tout cela se tient. Sens du prochain, responsabilité,
2272 ien longtemps l’une sans l’autre. Et l’ordre naît de leur alliance. Ceux qui n’ont pas encore compris que la liberté est l
2273 re compris que la liberté est le fondement vivant de l’ordre ; qu’elle ne peut être donnée à personne, mais seulement assu
2274 tible avec l’égoïsme, l’insignifiance et l’esprit de combine, l’arrivisme, l’opportunisme et la fuite devant les responsab
2275 esponsabilités, la bêtise vaniteuse et la paresse de pensée, le respect de l’argent, le ton hâbleur, le bluff et le sentim
2276 ise vaniteuse et la paresse de pensée, le respect de l’argent, le ton hâbleur, le bluff et le sentimentalisme qui font tou
2277 : tout ce qui caractérise les mœurs politiciennes de nos pseudo-démocraties et les goûts de leur « grand public » tels que
2278 iticiennes de nos pseudo-démocraties et les goûts de leur « grand public » tels que les entretiennent et les exploitent le
2279 qu’ils l’ont compris — ceux-là n’ont aucun droit de se dire démocrates, ils ne méritent rien de mieux qu’un dictateur. Ce
2280 droit de se dire démocrates, ils ne méritent rien de mieux qu’un dictateur. Ceux qui n’ont pas encore compris que liberté
2281 é égale responsabilité, ceux-là n’ont aucun droit de revendiquer une liberté dont ils ne sauraient rien tirer s’ils la rec
2282 vaient les conditions. Mais il serait insuffisant de démasquer l’hypocrisie, et Dieu sait si les mots démocratie et libert
2283 ont une, pitoyable ou scandaleuse, dans la bouche de milliers de nigauds ou de cyniques qui s’en prévalent. Ce serait insu
2284 oyable ou scandaleuse, dans la bouche de milliers de nigauds ou de cyniques qui s’en prévalent. Ce serait insuffisant et m
2285 daleuse, dans la bouche de milliers de nigauds ou de cyniques qui s’en prévalent. Ce serait insuffisant et même dangereux.
2286 rter vers une définition intransigeante et claire de l’idéal qui seul justifie notre lutte ; et vers la recherche de moyen
2287 seul justifie notre lutte ; et vers la recherche de moyens d’incorporer cet idéal, qui ne soient point eux-mêmes des trah
2288 ifie notre lutte ; et vers la recherche de moyens d’ incorporer cet idéal, qui ne soient point eux-mêmes des trahisons de l
2289 déal, qui ne soient point eux-mêmes des trahisons de leur fin. Il faut aider les hommes si faibles d’aujourd’hui à devenir
2290 de leur fin. Il faut aider les hommes si faibles d’ aujourd’hui à devenir un peu plus responsables, un peu plus dignes d’ê
2291 enir un peu plus responsables, un peu plus dignes d’ être libres, un peu plus dignes de se faire tuer ou de tuer, nous en s
2292 peu plus dignes d’être libres, un peu plus dignes de se faire tuer ou de tuer, nous en sommes là, au nom de la liberté et
2293 re libres, un peu plus dignes de se faire tuer ou de tuer, nous en sommes là, au nom de la liberté et de la démocratie. Ce
2294 tuer, nous en sommes là, au nom de la liberté et de la démocratie. Cet « un peu » représente une énorme ambition, si l’on
2295 éal et ma vision ? Mon horreur des programmes n’a d’ égale que l’étendue de mon scepticisme quant aux objurgations de la pr
2296 horreur des programmes n’a d’égale que l’étendue de mon scepticisme quant aux objurgations de la propagande. Aussi bien,
2297 étendue de mon scepticisme quant aux objurgations de la propagande. Aussi bien, je ne prêche pas : je vais dire simplement
2298 ement les conclusions qui m’apparaissent résulter de notre état. Je crois à la vertu de l’élucidation, qui dit le vrai en
2299 ssent résulter de notre état. Je crois à la vertu de l’élucidation, qui dit le vrai en baissant le ton, sans nul effort de
2300 i dit le vrai en baissant le ton, sans nul effort de persuader. Je me tiens l’argument suivant : le gigantisme moderne pri
2301 suivant : le gigantisme moderne prive les hommes de la possibilité d’être et de se sentir responsables dans la société et
2302 ntisme moderne prive les hommes de la possibilité d’ être et de se sentir responsables dans la société et dans la politique
2303 erne prive les hommes de la possibilité d’être et de se sentir responsables dans la société et dans la politique, donc d’ê
2304 sables dans la société et dans la politique, donc d’ être libres ; cette irresponsabilité anxieuse appelle la dictature par
2305 r, et nous rend impuissants contre les dictatures de l’extérieur ; notre désordre intime nous livre donc nécessairement et
2306 taires ; si nous n’aimons pas ça, il faut changer de méthodes ou d’attitude ; mais quelles sont les méthodes et l’attitude
2307 s n’aimons pas ça, il faut changer de méthodes ou d’ attitude ; mais quelles sont les méthodes et l’attitude contraires au
2308 t l’attitude contraires au gigantisme et capables de le prévenir ? Je réponds qu’il n’y a d’ordre solide et libéral que da
2309 capables de le prévenir ? Je réponds qu’il n’y a d’ ordre solide et libéral que dans les petites communautés, dans les cit
2310 tenus par le citoyen, en connaissance de cause et de personnes. Je réponds que ces petites communautés ne pourront subsist
2311 eurs ressources matérielles, afin de préserver et de développer leur autonomie spirituelle. Je réponds que cette « utopie 
2312 e fédéralisme, est la seule qui permette aux mots de liberté, d’ordre, d’humanité et de démocratie de signifier quelque ch
2313 e, est la seule qui permette aux mots de liberté, d’ ordre, d’humanité et de démocratie de signifier quelque chose qui m’ém
2314 seule qui permette aux mots de liberté, d’ordre, d’ humanité et de démocratie de signifier quelque chose qui m’émeuve. Qua
2315 mette aux mots de liberté, d’ordre, d’humanité et de démocratie de signifier quelque chose qui m’émeuve. Quant à ceux qui
2316 de liberté, d’ordre, d’humanité et de démocratie de signifier quelque chose qui m’émeuve. Quant à ceux qui disent : « Je
2317 ce qu’ils estiment possible, hors de la guerre et de l’État totalitaire, qui n’est rien d’autre que l’état de guerre en pe
2318 a guerre et de l’État totalitaire, qui n’est rien d’ autre que l’état de guerre en permanence ? Beaucoup de choses impossib
2319 at totalitaire, qui n’est rien d’autre que l’état de guerre en permanence ? Beaucoup de choses impossibles nous arrivent.
2320 lles sont là, malgré nous. Ne serait-il pas temps de vouloir ce qui arrive, de vouloir l’impossible favorable, c’est-à-dir
2321 Ne serait-il pas temps de vouloir ce qui arrive, de vouloir l’impossible favorable, c’est-à-dire de créer un ordre, et de
2322 , de vouloir l’impossible favorable, c’est-à-dire de créer un ordre, et de passer à l’offensive ? 64. Le sens des mots
2323 ble favorable, c’est-à-dire de créer un ordre, et de passer à l’offensive ? 64. Le sens des mots Mais l’offensive su
2324 . Un plan commun, clairement déterminé et compris de la même manière par tous ceux qui devront l’exécuter. Un plan qui s’e
2325 exprime par des mots, et par des mots qui mettent de l’ordre dans nos volontés égarées : tous les mots clairs sont des mot
2326 s. Il semble même que l’on se batte pour eux avec d’ autant plus de passion que l’on sait moins clairement ce qu’ils signif
2327 ême que l’on se batte pour eux avec d’autant plus de passion que l’on sait moins clairement ce qu’ils signifient. J’ai dit
2328 J’ai dit que l’ordre véritable suppose la liberté de l’homme responsable. Mais combien de bourgeois apeurés s’obstinèrent
2329 e la liberté de l’homme responsable. Mais combien de bourgeois apeurés s’obstinèrent à voir dans Hitler, cet homme des mas
2330 dans Hitler, cet homme des masses, « le rempart » de leur ordre contre le bolchévisme ? D’autres se battaient au nom de le
2331 ens que l’on pût déclarer sans hésiter. Si chacun de vous savait ce qu’il défend. (Car se faire tuer ne prouve rien : nos
2332 ils ont un sens défini. Et ce qui définit le sens d’ un mot, c’est sa correspondance indiscutable à certaines choses, à cer
2333 ement des actes. Or cette correspondance ne cesse d’ être arbitraire qu’en vertu d’un accord unanime. C’est dire qu’elle ne
2334 lle ne peut se produire qu’au sein d’un groupe ou d’ une communauté vivante. Une tradition, un droit, une foi et une autori
2335 oi et une autorité communes, sont seules capables de définir le sens de ce qu’on appelle les mots courants. Mais toutes ce
2336 communes, sont seules capables de définir le sens de ce qu’on appelle les mots courants. Mais toutes ces choses ont dispar
2337 siècle apparaîtra dans l’avenir comme une espèce de cauchemar verbal, de cacophonie délirante. On y parlait plus qu’on n’
2338 ns l’avenir comme une espèce de cauchemar verbal, de cacophonie délirante. On y parlait plus qu’on n’avait jamais parlé :
2339 qu’on n’avait jamais parlé : imaginez ces postes de radio qui ne peuvent plus se taire ni nuit ni jour, où la parole est
2340 ù les mots s’usaient plus vite qu’en aucun siècle de l’Histoire, temps de la grande prostitution de cette parole qui devai
2341 plus vite qu’en aucun siècle de l’Histoire, temps de la grande prostitution de cette parole qui devait être la mesure du v
2342 le de l’Histoire, temps de la grande prostitution de cette parole qui devait être la mesure du vrai, et dont l’Évangile di
2343 lumière des hommes » ! Hélas, qu’avons-nous fait de la parole ! Elle ne saurait plus même mentir dans certaines bouches,
2344 le ronron du style officiel, le gâtisme des fins de banquet ; et quand nous sommes abêtis de discours, lui, le romantique
2345 des fins de banquet ; et quand nous sommes abêtis de discours, lui, le romantique qui nous suggère que l’indicible est peu
2346 es structures sociales, il précipite la confusion de notre langage. Il sait que les hommes ne peuvent s’engager que par de
2347 primant le sens des mots, il détruit la base même de nos fidélités. Il sait que partout où l’on appelle un chat un chat, l
2348 on appelle un chat un chat, le mal recule et perd de ses prestiges ; c’est pourquoi il a inventé la langue des diplomates
2349 n, qu’elle achèvera mieux que les pires tyrannies d’ ahurir notre sens moral… J’allais écrire que le seul remède serait de
2350 moral… J’allais écrire que le seul remède serait de lui opposer la sémantique, qui est la science des significations, du
2351 étymologies. Un ministère du Sens des mots, doté de pouvoirs discrétionnaires, voilà ce qu’il faut à la Démocratie, puisq
2352 . (Ce ministère était jadis l’Église. Une analyse de nos vocabulaires montrerait que le peu de sens commun qu’ils conserve
2353 liturgiques.) Je pourrais indiquer vingt remèdes de ce genre : mais je sais trop qu’ils seront sans vertu dans le monde i
2354 e détruire et les mots, justement, trop dépourvus de prises pour qu’un conseil soit encore entendu. Mais voici la confianc
2355 t le silence adorant : nous ne sommes pas maîtres de détruire la vraie Parole ! Tous les mensonges du diable, et tous nos
2356 ssent dès que l’Esprit nous parle, par une phrase de la Bible ou de nos liturgies, par un mot que dit un passant, par une
2357 ’Esprit nous parle, par une phrase de la Bible ou de nos liturgies, par un mot que dit un passant, par une prière née dans
2358 par une prière née dans un cœur. Il ne dépend pas de nous que ces syllabes vivent : tout d’un coup elles nous ont parlé. (
2359 dépend pas de nous que ces syllabes vivent : tout d’ un coup elles nous ont parlé. (La naissance d’un poème ou d’un rythme
2360 out d’un coup elles nous ont parlé. (La naissance d’ un poème ou d’un rythme de phrase, quelque part en nous-mêmes, nous do
2361 elles nous ont parlé. (La naissance d’un poème ou d’ un rythme de phrase, quelque part en nous-mêmes, nous donne une faible
2362 nt parlé. (La naissance d’un poème ou d’un rythme de phrase, quelque part en nous-mêmes, nous donne une faible idée de ces
2363 ue part en nous-mêmes, nous donne une faible idée de ces surprises.) Si le langage nous appartenait, il y a longtemps qu’o
2364 Mais si deux êtres communiquent, si ces mots tout d’ un coup me mettent en mouvement, si cet accent suffit à me rendre à ma
2365 ils ne pourront rien sur le mystère qui fait qu’à de certains moments, certains mots nous parlent, et non d’autres, fût-ce
2366 , et non d’autres, fût-ce à voix basse, au secret d’ un cachot. Ils pourront réduire au silence les bavards et les grands o
2367 la souffrance et la honte ne nous permettent plus d’ articuler même une plainte intelligible, — c’est elle à présent qui no
2368 le ! 65. Vertus J’ai désigné les dimensions de l’Ordre indestructible au sein duquel le drame de nos destins s’encad
2369 de l’Ordre indestructible au sein duquel le drame de nos destins s’encadre. Ainsi armés et appuyés, nous pouvons porter su
2370 et les fait parfois s’évanouir avec un dégagement de fumée noire qui obscurcit le ciel pour un temps, et peut-être nous fa
2371 u diable des injures, qu’il prendrait pour autant d’ hommages. Détournons-nous et regardons le Bien. Armons-nous de cette g
2372 Détournons-nous et regardons le Bien. Armons-nous de cette grande confiance qui survit à la catastrophe, parce qu’en ayant
2373 la joie, ni la grandeur et ni l’amour ne cessent d’ attendre, intacts et souverains, notre désir. Il nous suffit de retrou
2374 ntacts et souverains, notre désir. Il nous suffit de retrouver le courage d’être vertueux. Il nous suffit de rendre à la v
2375 tre désir. Il nous suffit de retrouver le courage d’ être vertueux. Il nous suffit de rendre à la vertu sa gloire. Certes,
2376 rouver le courage d’être vertueux. Il nous suffit de rendre à la vertu sa gloire. Certes, nous avions fait de la vertu si
2377 e à la vertu sa gloire. Certes, nous avions fait de la vertu si triste chose qu’il paraissait mesquin de s’y tenir. Perso
2378 la vertu si triste chose qu’il paraissait mesquin de s’y tenir. Personne n’osait plus en parler : elle n’était plus que la
2379 au mot même, qui avait électrisé jadis les héros de la Révolution. La morale était ennuyeuse, et le gangster plein de pre
2380 . La morale était ennuyeuse, et le gangster plein de prestige. Le bon ton consistait en somme à préférer le mauvais genre.
2381 èglement des critères32 a toujours annoncé la fin d’ une cité et de sa culture. À l’orgueil et à la brutalité proclamés com
2382 ritères32 a toujours annoncé la fin d’une cité et de sa culture. À l’orgueil et à la brutalité proclamés comme vertus par
2383 âches, et cela s’appelait du réalisme. À l’esprit de vengeance et de ressentiment, elles ne surent opposer que leurs inqui
2384 ’appelait du réalisme. À l’esprit de vengeance et de ressentiment, elles ne surent opposer que leurs inquiétudes de propri
2385 nt, elles ne surent opposer que leurs inquiétudes de propriétaires fatigués, et cela s’appelait défense de l’ordre. À la g
2386 a confusion spirituelle, et cela s’appelait droit de libre critique. Tout cela s’explique et des générations de romanciers
2387 critique. Tout cela s’explique et des générations de romanciers nous ont montré d’une manière convaincante que l’homme « m
2388 et des générations de romanciers nous ont montré d’ une manière convaincante que l’homme « moral » n’était qu’un hypocrite
2389 s montre autre chose. Quand une démocratie rougit de ses vertus, sur quelle force peut-elle compter ? Et quand l’élite d’u
2390 quelle force peut-elle compter ? Et quand l’élite d’ une société n’attache plus que du ridicule aux disciplines qui l’ont f
2391 musent le plus grand nombre et rapportent le plus d’ argent, quand elle rend un culte à des stars d’une intolérable sottise
2392 us d’argent, quand elle rend un culte à des stars d’ une intolérable sottise, quand tout cela paraît naturel, et le contrai
2393 poser aux barbares ? La barbarie débile et bébête de nos foules, la démission sans élégance de nos élites, est-ce que c’es
2394 bébête de nos foules, la démission sans élégance de nos élites, est-ce que c’est cela qu’il faut sauver au prix de sa vie
2395 inexorable : rien au monde ne saurait l’empêcher de se détruire. Et si l’on tue ce qui était déjà mort, je n’y vois pas d
2396 l’on tue ce qui était déjà mort, je n’y vois pas d’ inconvénient. Tout cela ne m’empêchera pas d’avoir confiance ! Le malh
2397 pas d’inconvénient. Tout cela ne m’empêchera pas d’ avoir confiance ! Le malheur nous rend au sérieux. Il nous apprend à o
2398 rend à opposer au mal le bien, et non le demi-mal de petites perversions. Il nous rend le courage d’opposer à cet orgueil
2399 l de petites perversions. Il nous rend le courage d’ opposer à cet orgueil prôné par les totalitaires, l’humilité et non la
2400 et non pas des calculs « réalistes » ; à la soif de vengeance et au ressentiment, à la grossièreté spirituelle, la justic
2401 a justice à double tranchant et l’austère rigueur de pensée, non pas cette hystérie sentimentale et cette panique de possé
2402 pas cette hystérie sentimentale et cette panique de possédants taxés. Je voudrais dire ces choses plus simplement encore,
2403 me ciel ramène un printemps pur sur les décombres de la vie. Je suppose une cité parvenue au dernier terme de sa corruptio
2404 ie. Je suppose une cité parvenue au dernier terme de sa corruption. « Je demande à tout homme qui pense de me montrer ce q
2405 a corruption. « Je demande à tout homme qui pense de me montrer ce qui subsiste de la vie. »34 Et je réponds : le grand or
2406 out homme qui pense de me montrer ce qui subsiste de la vie. »34 Et je réponds : le grand ordre de vivre et d’assumer un d
2407 ste de la vie. »34 Et je réponds : le grand ordre de vivre et d’assumer un destin neuf. La vertu n’est plus ennuyeuse quan
2408 e. »34 Et je réponds : le grand ordre de vivre et d’ assumer un destin neuf. La vertu n’est plus ennuyeuse quand les vertue
2409 relles où nous nous attardions. Il ne s’agit plus de leur morale qui mourut sur la défensive, et qu’ils ont si mal défendu
2410 qu’ils ont si mal défendue. Il s’agit simplement de la grandeur que nous saurons imaginer, et d’une vision nouvelle de la
2411 ment de la grandeur que nous saurons imaginer, et d’ une vision nouvelle de la force. Assis sur nos ruines, j’esquisse… Je
2412 e nous saurons imaginer, et d’une vision nouvelle de la force. Assis sur nos ruines, j’esquisse… Je me plais à inscrire ce
2413 plus beau jeu ! Je me plais à copier des phrases de ce ton : « L’égoïsme a aussi sa niaiserie, il n’est pas moins ignoran
2414 . » « Pour connaître les hommes, il ne suffit pas de les mépriser. »35 « Les personnes faibles ne peuvent être sincères. »
2415 faibles ne peuvent être sincères. »36 Et je rêve d’ une anthologie de ces maximes d’une fierté sans jactance… J’imagine qu
2416 nt être sincères. »36 Et je rêve d’une anthologie de ces maximes d’une fierté sans jactance… J’imagine que l’humilité pass
2417 s. »36 Et je rêve d’une anthologie de ces maximes d’ une fierté sans jactance… J’imagine que l’humilité passe à travers les
2418 J’imagine que l’humilité passe à travers les murs de la cellule que bâtissaient nos craintes et nos vanités faibles, et qu
2419 es et nos vanités faibles, et qu’elle nous permet d’ être libres comme ceux qui n’ont plus rien à perdre. Je pense à cette
2420 le pécheur, puisqu’il réveille en lui le courage de l’amour. Je pense que le malheur nous rendra sobres, et que l’empire
2421 aciturnes par l’éducation du danger et la coutume de la mort, plus absurde et plus simple que jamais. J’élève ces vertus d
2422 e ces vertus devant mes yeux non comme une utopie de lendemains meilleurs, car l’Ecclésiaste avait raison, « les hommes ne
2423 que l’époque nous rappelle, je vois notre chance de grandeur : elle nous rend à la réalité. Les vraies vertus ne vont pas
2424 s ne vont pas à un happy ending, mais à la gloire de la Vérité. J’imagine, je ne rêve pas : Je me prépare à marcher. Je se
2425 jà ce livre, et les quelques accords que je viens d’ essayer me donnent le ton d’une harmonie nouvelle, d’un style de vie p
2426 accords que je viens d’essayer me donnent le ton d’ une harmonie nouvelle, d’un style de vie plus dur et plus joyeux… J’ap
2427 ssayer me donnent le ton d’une harmonie nouvelle, d’ un style de vie plus dur et plus joyeux… J’appelle et je pressens — c’
2428 onnent le ton d’une harmonie nouvelle, d’un style de vie plus dur et plus joyeux… J’appelle et je pressens — c’est une phr
2429 yeux… J’appelle et je pressens — c’est une phrase de Poe qui depuis quelque temps me fascine — « une certaine énergie calm
2430 et indomptable, telle que nous pouvons l’imaginer d’ un large fleuve d’or fondu »… O da quod jubes, domine ! 37 66.
2431 lle que nous pouvons l’imaginer d’un large fleuve d’ or fondu »… O da quod jubes, domine ! 37 66. Le Bleu du Ciel
2432 la vertu et la splendeur. Je lui oppose les gages d’ une confiance que n’atteindra jamais sa ruse. Je lui oppose les hiérar
2433 dra jamais sa ruse. Je lui oppose les hiérarchies de l’Ordre : l’ordre céleste et le cri de guerre de l’Ange blanc, l’ordr
2434 iérarchies de l’Ordre : l’ordre céleste et le cri de guerre de l’Ange blanc, l’ordre intérieur de la sainteté, l’ordre cos
2435 de l’Ordre : l’ordre céleste et le cri de guerre de l’Ange blanc, l’ordre intérieur de la sainteté, l’ordre cosmique et s
2436 cri de guerre de l’Ange blanc, l’ordre intérieur de la sainteté, l’ordre cosmique et son discours immense, l’ordre des lo
2437 se, l’ordre des lois jurées dans la cité, l’ordre de la parole et l’ordre des vertus. Je lui oppose l’Esprit, l’Eau et le
2438 le Pain et le Vin. Je lui oppose aussi les œuvres d’ hommes où sa part a été consumée. Je lui oppose le bleu du ciel. Le bl
2439 Le bleu des ciels que j’ai aimés. Le bleu du ciel de l’Île-de-France, la douceur de l’art et des âges, et le sourire d’une
2440 s. Le bleu du ciel de l’Île-de-France, la douceur de l’art et des âges, et le sourire d’une femme à l’amour fidèle et gai.
2441 e, la douceur de l’art et des âges, et le sourire d’ une femme à l’amour fidèle et gai. Le bleu du ciel de Manhattan, fusan
2442 ne femme à l’amour fidèle et gai. Le bleu du ciel de Manhattan, fusant comme une inexorable joie entre les verticalités ar
2443 des gratte-ciel. Le bleu du ciel des Alpes moiré d’ éclatante noirceur, à midi, sur la tranche des glaciers. Que ces image
2444 e du malheur ; et qu’elles réfutent les sophismes de l’Abîme comme une aube d’été évapore les brumes ! On dit que le démon
2445 réfutent les sophismes de l’Abîme comme une aube d’ été évapore les brumes ! On dit que le démon aime l’heure de minuit. A
2446 ore les brumes ! On dit que le démon aime l’heure de minuit. Ah ! tournons-nous, le visage levé, vers le symbole universel
2447 s-nous, le visage levé, vers le symbole universel de la rigueur et de la paix profonde du pardon, et baignons un regard au
2448 levé, vers le symbole universel de la rigueur et de la paix profonde du pardon, et baignons un regard aux étendues de pur
2449 nde du pardon, et baignons un regard aux étendues de pureté ardente et dure du bleu du ciel au cœur du jour ! 1942 et 194
2450 une virile clairvoyance, c’est la vraie guérison de nos fameux « complexes de culpabilité ». 29. Daniel Defoe. 30. Je p
2451 c’est la vraie guérison de nos fameux « complexes de culpabilité ». 29. Daniel Defoe. 30. Je prends le mot prochain au s
2452 in. — Qui est mon prochain ? — Celui qui a besoin de ton aide, ou celui qui t’en donne. Ce peut être n’importe quel homme,
2453 st plus que mensonge dirigé. 32. Je ne parle pas de l’immoralité, j’ignore si elle était plus grande qu’en d’autres temps
2454 eulement qu’on n’avait même plus « l’hypocrisie » de la condamner comme telle. 33. J’emploie le terme italien célébré par
2455 ar Burckhardt et par Nietzsche à propos des héros de la Renaissance. On pourrait le traduire à peu près par énergie de l’â
2456 e. On pourrait le traduire à peu près par énergie de l’âme, audace maîtrisée. 34. Baudelaire encore, en plein xixe siècl
7 1982, La Part du diable (1982). Postface après quarante ans
2457 bien, pour moi du moins, le cadre et l’atmosphère de mon travail : 5 West 16th Street, New York Fin décembre 1941 Trouvé
2458 petit atelier, près de Greenwich Village, au haut d’ une vieille maison de pierre brune, et quitté non sans soulagement mon
2459 e Greenwich Village, au haut d’une vieille maison de pierre brune, et quitté non sans soulagement mon hôtel. Un plancher b
2460 ement mon hôtel. Un plancher bleu foncé, les murs d’ un blanc rosé, et la moitié du plafond incliné est en vitrage, noir la
2461 afond incliné est en vitrage, noir la nuit, strié de joints blancs. Deux larges et basses fenêtres sur la cour. Juste en f
2462 tres sur la cour. Juste en face, le haut building d’ une imprimerie. Plus à droite, je domine le toit plat, formant terrass
2463 droite, je domine le toit plat, formant terrasse, d’ une maison de trois étages qui est un couvent. Les nonnes deux par deu
2464 mine le toit plat, formant terrasse, d’une maison de trois étages qui est un couvent. Les nonnes deux par deux vont et vie
2465 iennent sur ce toit en lisant. Comme il n’y a pas de barrière, il faut craindre à chaque fois qu’elles fassent un pas de t
2466 ut craindre à chaque fois qu’elles fassent un pas de trop et tombent dans le vide, pour peu que leur lecture les passionne
2467 s Cendres, 18 février Depuis des mois, j’essayais de m’y mettre39. Mais je fuyais partout, dans la rue, dans le monde, au
2468 able — les deux bras du fauteuil touchant le bord de la table — devant un bloc de papier blanc. Des heures ont passé, immo
2469 uil touchant le bord de la table — devant un bloc de papier blanc. Des heures ont passé, immobiles. Le téléphone a sonné p
2470 s que je bouge. J’ai lentement relu ma conférence de Buenos Aires40, des notes éparses. À sept heures, je me suis mis à éc
2471 ia du coin. 22 février Après trois jours et nuits de travail acharné, j’ai tenté hier soir une sortie. Deux signes m’ont p
2472 vé que jusqu’à nouvel ordre je suis le prisonnier de mon livre et ferais bien de ne plus m’en échapper. Je devais aller ch
2473 je suis le prisonnier de mon livre et ferais bien de ne plus m’en échapper. Je devais aller chez des amis après le dîner.
2474 sur le seuil : va-t-on me servir encore ? Au fond de la salle, deux hommes et une femme attablés causent et boivent. L’un
2475 Ils se retournent à demi et rient. J’ai fui. Pas d’ autre restaurant dans ce quartier. Je suis monté sans dîner chez mes a
2476 salon. Rentré tôt, mais n’ai rien fait qui vaille de toute la nuit. Voilà qui est clair : ou écrire, ou sortir. 26 février
2477 ussi vibrants que les cordes du clavecin, combien de fois cette mathématique vierge et vivace comme la sainteté même ne m’
2478 t l’émotion me fait dormir. Je suis sorti pénétré d’ une ivresse dont j’imagine qu’elle est l’état normal des anges, et déc
2479 mencer. Je ne puis entendre Bach sans avoir honte d’ écrire. Comment frapper les mots d’une touche aussi allègre ? Comment
2480 ns avoir honte d’écrire. Comment frapper les mots d’ une touche aussi allègre ? Comment les faire danser de cette joie de d
2481 e touche aussi allègre ? Comment les faire danser de cette joie de dire vrai ? Et comment les séduire au rythme sans défau
2482 allègre ? Comment les faire danser de cette joie de dire vrai ? Et comment les séduire au rythme sans défaut, sans relâch
2483 ythme sans défaut, sans relâche et sans repentir, d’ une pensée qui soit digne encore d’être pensée, d’être reçue, dans le
2484 sans repentir, d’une pensée qui soit digne encore d’ être pensée, d’être reçue, dans le monde établi par une seule fugue de
2485 d’une pensée qui soit digne encore d’être pensée, d’ être reçue, dans le monde établi par une seule fugue de Bach ? 1er mar
2486 e reçue, dans le monde établi par une seule fugue de Bach ? 1er mars Je constate que de quarante-huit heures je n’ai pas d
2487 ne seule fugue de Bach ? 1er mars Je constate que de quarante-huit heures je n’ai pas dit un mot à âme qui vive. (À la caf
2488 mot à âme qui vive. (À la cafétéria, il me suffit de désigner les plats d’un geste.) Cela ne se peut que dans une très gra
2489 la cafétéria, il me suffit de désigner les plats d’ un geste.) Cela ne se peut que dans une très grande ville. Travail noc
2490 Je dors un peu le matin ou l’après-midi. La femme de ménage n’est plus venue. Suie sur les meubles, dans les tasses. 5 mar
2491 on dit : je me réveille, et qu’il s’agit vraiment d’ un verbe réfléchi. 7 mars Donné à taper les cinquante premières pages.
2492 hant là où elles s’ouvrent sur le ciel. Suffit-il d’ un vent doux, d’un peu d’or au lointain, d’un beau ciel de nuées atlan
2493 s’ouvrent sur le ciel. Suffit-il d’un vent doux, d’ un peu d’or au lointain, d’un beau ciel de nuées atlantiques, pour que
2494 t sur le ciel. Suffit-il d’un vent doux, d’un peu d’ or au lointain, d’un beau ciel de nuées atlantiques, pour que le monde
2495 fit-il d’un vent doux, d’un peu d’or au lointain, d’ un beau ciel de nuées atlantiques, pour que le monde soit de nouveau p
2496 t doux, d’un peu d’or au lointain, d’un beau ciel de nuées atlantiques, pour que le monde soit de nouveau plus grand que l
2497 u plus grand que la guerre, et le cœur plus libre d’ aimer ? Oui, ce soir. 14 mars Promenade autour d’un square terne et bo
2498 d’aimer ? Oui, ce soir. 14 mars Promenade autour d’ un square terne et boueux du bas de la ville, avec Ernst Erich Noth, r
2499 omenade autour d’un square terne et boueux du bas de la ville, avec Ernst Erich Noth, romancier allemand. Je lui parlais d
2500 st Erich Noth, romancier allemand. Je lui parlais de mon livre en train. « Comment, me dit-il, vous pouvez encore vous pas
2501 oppe grise pliée en V derrière la porte sans jour de la boîte métallique. J’ai passé ma robe de chambre et suis descendu l
2502 la, l’enveloppe grise est là, pliée. (Une facture de blanchisseur !) Il me semble que la chose ne m’était plus arrivée dep
2503 is douze ou treize ans, depuis Calw41. Ma faculté de petite voyance (voyance de détails sans intérêt) ne m’a jamais servi
2504 uis Calw41. Ma faculté de petite voyance (voyance de détails sans intérêt) ne m’a jamais servi à rien, sinon à vérifier pr
2505 e se manifestait, que j’étais déconnecté du monde de l’utile. 20 mars Pluie torrentielle et fonte des neiges. Les nonnes n
2506 t-être tombées dans la cour. Des gouttes chargées de suie s’écrasent sur mon papier, la verrière doit être fendue ou mal j
2507 fendue ou mal jointe. Raccommodé avec un ligament de ficelle verte le pied cassé de mon petit fauteuil. Bonheur d’écrire e
2508 é avec un ligament de ficelle verte le pied cassé de mon petit fauteuil. Bonheur d’écrire et de me sentir libre nuit et jo
2509 erte le pied cassé de mon petit fauteuil. Bonheur d’ écrire et de me sentir libre nuit et jour. 21 mars Terminé le chapitre
2510 cassé de mon petit fauteuil. Bonheur d’écrire et de me sentir libre nuit et jour. 21 mars Terminé le chapitre sur saint M
2511 paraîtra délirant aux « intellectuels libéraux » de New York. Premier jour de printemps, annoncé par un fort coup de tonn
2512 ntellectuels libéraux » de New York. Premier jour de printemps, annoncé par un fort coup de tonnerre à cinq heures du mati
2513 emier jour de printemps, annoncé par un fort coup de tonnerre à cinq heures du matin. José Bergamin assure que le printemp
2514 devant le vieux prêtre anglican, dans une crypte de pierre nue. Exorciser en moi la part du diable, celle qu’il a sans do
2515 ’ai si vite bouclé ce livre, c’était pour essayer de le prendre de vitesse. À ces notes de 1941, il me plaît d’ajouter le
2516 uclé ce livre, c’était pour essayer de le prendre de vitesse. À ces notes de 1941, il me plaît d’ajouter le récit d’une s
2517 ur essayer de le prendre de vitesse. À ces notes de 1941, il me plaît d’ajouter le récit d’une soirée où nous fûmes « vis
2518 dre de vitesse. À ces notes de 1941, il me plaît d’ ajouter le récit d’une soirée où nous fûmes « visités », dans notre ma
2519 ces notes de 1941, il me plaît d’ajouter le récit d’ une soirée où nous fûmes « visités », dans notre maison de Ferney, le
2520 irée où nous fûmes « visités », dans notre maison de Ferney, le 29 juin 1954. Après le dîner, sentant l’atmosphère favorab
2521 ix, l’un ses questions, et l’autre ses réponses. De cette soirée, je retiens trois échanges remarquables. Il y avait là J
2522 n de la culture, et que j’ai appelé, au lendemain de sa mort prématurée en 1957, « le seul grand poète luthérien de langue
2523 ématurée en 1957, « le seul grand poète luthérien de langue française ». L’une des questions était : « Qu’arriverait-il si
2524 amène à rappeler ici cette soirée mémorable. L’un de nous avait écrit : « Qu’arriverait-il si le diable entrait dans cette
2525 e resituer aujourd’hui par rapport à ce texte âgé d’ un quart de siècle, la première question que je me pose est celle de s
2526 aujourd’hui par rapport à ce texte âgé d’un quart de siècle, la première question que je me pose est celle de son sujet et
2527 le, la première question que je me pose est celle de son sujet et de sa réalité. Est-ce que je crois encore à l’existence
2528 question que je me pose est celle de son sujet et de sa réalité. Est-ce que je crois encore à l’existence du diable ? Je c
2529 s encore à l’existence du diable ? Je crains bien de ne pouvoir donner à cette question directe une réponse sans détour, e
2530 le, c’est qu’il m’a eu, selon le premier chapitre de ce livre ; et s’il m’a eu, c’est qu’il agit ; or rien ne peut agir sa
2531 ntit42. Mon scepticisme, ainsi, serait une preuve de l’existence précisément qu’il met en doute ? En revanche, si je dis q
2532 preuve qu’il existe, ou qu’il n’ait plus ni rien de moi ni rien en moi. Par où l’on voit qu’il est presque impossible de
2533 oi. Par où l’on voit qu’il est presque impossible de parler de lui d’une manière innocente ou détachée, ni sans une sorte
2534 l’on voit qu’il est presque impossible de parler de lui d’une manière innocente ou détachée, ni sans une sorte d’indirect
2535 oit qu’il est presque impossible de parler de lui d’ une manière innocente ou détachée, ni sans une sorte d’indirect acte d
2536 manière innocente ou détachée, ni sans une sorte d’ indirect acte de foi ou d’athéisme. J’essaierai cependant de m’expliqu
2537 te ou détachée, ni sans une sorte d’indirect acte de foi ou d’athéisme. J’essaierai cependant de m’expliquer à moi-même et
2538 chée, ni sans une sorte d’indirect acte de foi ou d’ athéisme. J’essaierai cependant de m’expliquer à moi-même et de dire a
2539 acte de foi ou d’athéisme. J’essaierai cependant de m’expliquer à moi-même et de dire aux lecteurs de cette réédition, ce
2540 ’essaierai cependant de m’expliquer à moi-même et de dire aux lecteurs de cette réédition, ce que le diable signifie pour
2541 de m’expliquer à moi-même et de dire aux lecteurs de cette réédition, ce que le diable signifie pour moi dans la conjonctu
2542 st que l’expression mythique des terreurs intimes d’ hommes simples et qui n’ont pas lu Freud. Ainsi le diable ne serait ri
2543 consultez l’excellent Vocabulaire psychanalytique de J. Laplanche et J.-B. Pontalis : vous y lirez à la page 348 : Deux a
2544 s : vous y lirez à la page 348 : Deux acceptions de la projection : a) Dans un sens comparable au sens cinématographique 
2545 matographique : le sujet envoie au-dehors l’image de ce qui existe en lui de façon inconsciente. Ici la projection se défi
2546 envoie au-dehors l’image de ce qui existe en lui de façon inconsciente. Ici la projection se définit comme un mode de méc
2547 iente. Ici la projection se définit comme un mode de méconnaissance, avec, en contrepartie, la connaissance en autrui de c
2548 avec, en contrepartie, la connaissance en autrui de ce qui, précisément, est méconnu dans le sujet. b) Comme un processus
2549 est méconnu dans le sujet. b) Comme un processus d’ expulsion quasi réelle : le sujet jette hors de lui ce dont il ne veut
2550 , mais bien peu qui surpassent en précision celui de Jean de Roma, dominicain, chargé dès 1528, comme « inquisiteur de la
2551 dominicain, chargé dès 1528, comme « inquisiteur de la foi », de procéder contre les luthériens et les vaudois de la Prov
2552 chargé dès 1528, comme « inquisiteur de la foi », de procéder contre les luthériens et les vaudois de la Provence. Un text
2553 de procéder contre les luthériens et les vaudois de la Provence. Un texte de l’époque fournit quelques détails sur ses mé
2554 uthériens et les vaudois de la Provence. Un texte de l’époque fournit quelques détails sur ses méthodes : Le dit de Roma
2555 urnit quelques détails sur ses méthodes : Le dit de Roma fit prendre prisonnier un nommé Jehan Gignoulx et, parce que ce
2556 it à l’aide et toujours disait qu’il n’était rien de tout cela. Par quoi le dit Roma le mit cinq fois sur le feu, et fut l
2557 rfs qu’il avait brûlés.43 Un disciple orthodoxe de Freud aura raison de traiter d’« illusion » cette projection : car il
2558 s.43 Un disciple orthodoxe de Freud aura raison de traiter d’« illusion » cette projection : car il est clair que le moi
2559 isciple orthodoxe de Freud aura raison de traiter d’ « illusion » cette projection : car il est clair que le moine se tromp
2560 plus encore que sur sa victime et sur la location de Lucifer. Mais ce serait une illusion au second degré que de croire qu
2561 . Mais ce serait une illusion au second degré que de croire que le diable n’est rien parce que Jean de Roma se trompait, a
2562 -là opère ; elle est, par suite, réalité… Réalité de quoi, sinon de ce qui n’est pas ? Réalité du diable, donc. Quant à la
2563 e est, par suite, réalité… Réalité de quoi, sinon de ce qui n’est pas ? Réalité du diable, donc. Quant à la seconde forme
2564 Réalité du diable, donc. Quant à la seconde forme de projection, on ne peut dire qu’elle soit trompeuse : elle n’est pas i
2565 sur moi-même mais action, elle est refus délibéré de ce que mon vrai moi désavoue tout en sachant que c’est réel et que c’
2566 et que c’est en moi. Que le mal est en nous, non de nous, voilà ce qu’implique la croyance au diable. Il est à l’œuvre da
2567 Il est à l’œuvre dans l’intimité la mieux gardée de mon individu, mais non pas dans le libre projet de ma personne — proj
2568 e mon individu, mais non pas dans le libre projet de ma personne — projet qui me permet de prendre mes distances avec mon
2569 ibre projet de ma personne — projet qui me permet de prendre mes distances avec mon être naturel, de le juger, et d’abord
2570 t de prendre mes distances avec mon être naturel, de le juger, et d’abord de le voir. Je me vois mauvais, qu’est-ce à dire
2571 es avec mon être naturel, de le juger, et d’abord de le voir. Je me vois mauvais, qu’est-ce à dire ? Sinon que le mal que
2572 fuse qu’il me possède. Il ne s’agit donc plus ici de « méconnaissance » : je sais très bien que le diable est en moi et qu
2573 là que je puis l’attraper. Il s’agit encore moins d’ un « refoulement » mais au contraire d’une volonté on ne peut plus con
2574 core moins d’un « refoulement » mais au contraire d’ une volonté on ne peut plus consciente de rejet, à proprement parler d
2575 ontraire d’une volonté on ne peut plus consciente de rejet, à proprement parler d’un vomissement, c’est-à-dire d’une actio
2576 eut plus consciente de rejet, à proprement parler d’ un vomissement, c’est-à-dire d’une action curative. Baptiser projectio
2577 proprement parler d’un vomissement, c’est-à-dire d’ une action curative. Baptiser projection le mécanisme de cette conjura
2578 action curative. Baptiser projection le mécanisme de cette conjuration du mal qui est en moi, n’autorise pas à nier la réa
2579 mais ne suffit pas davantage à établir la réalité de l’être spirituel qui en serait le fauteur. Un processus psychologique
2580 sus psychologique ne prouve rien que l’efficacité de sa structure. Mais il n’en est pas moins indispensable à toute saisie
2581 l n’en est pas moins indispensable à toute saisie d’ une éventuelle transcendance. En d’autres termes : — Un être spirituel
2582 ranscendance, il restera pour moi un nom dépourvu d’ intérêt et qui ne m’importe en rien, si je n’ai jamais pu produire en
2583 n moi sa forme. — Il faut avoir fait l’expérience de sa présence et du style spécifique de son action pour le reconnaître
2584 ’expérience de sa présence et du style spécifique de son action pour le reconnaître dans ses avatars les plus divers, mais
2585 nce vécue ne prouve pas l’existence « objective » d’ une entité correspondante : elle est seulement la condition sine qua n
2586 te : elle est seulement la condition sine qua non d’ une ouverture à sa réalité hypothétique. — Je n’ai donc nullement étab
2587 « objective » du diable en décrivant le mécanisme de la projection, mais j’ai montré comment peut se manifester « le Lucif
2588 isteraient pour nous si nous n’avions aucun moyen de les faire exister subjectivement en nous, d’en vivre ou pour le moins
2589 oyen de les faire exister subjectivement en nous, d’ en vivre ou pour le moins d’en mimer l’expérience — même « négative »
2590 bjectivement en nous, d’en vivre ou pour le moins d’ en mimer l’expérience — même « négative » dans le désert mystique. — L
2591 négative » dans le désert mystique. — La question de l’existence du diable (ou de l’existence de Dieu) n’est donc pas une
2592 tique. — La question de l’existence du diable (ou de l’existence de Dieu) n’est donc pas une question détachée, détachable
2593 stion de l’existence du diable (ou de l’existence de Dieu) n’est donc pas une question détachée, détachable d’une expérien
2594 n’est donc pas une question détachée, détachable d’ une expérience, fût-elle l’éclair de la Révélation. — Mais jamais l’ex
2595 e, détachable d’une expérience, fût-elle l’éclair de la Révélation. — Mais jamais l’expérience n’a tranché la question qui
2596 une méthode négative peut aider : je vais tenter de dire ce qui m’étonne, m’inquiète, me choque ou me paraît inexact dans
2597 ait plus facile, ou moins radicalement impossible de connaître le diable que Dieu. Comme si j’étais donc dans l’idée que n
2598 ence plus concrète et plus convaincante du mal et de l’erreur que du bien et de la vérité. Ceci n’est guère défendable en
2599 convaincante du mal et de l’erreur que du bien et de la vérité. Ceci n’est guère défendable en logique, mais correspond à
2600 à quelque chose que le mot illusion ou le signal d’ erreur ne suffisent pas à rendre nulle à mes yeux. Est-ce la logique q
2601 logique qui est insuffisante ? Ou disposerais-je d’ une connaissance du Bien assez immunisée contre le « péché » pour me f
2602 » pour me faire concevoir et même dire, sans trop de crainte d’en être atteint, ce qui pèche ? Or je sais que l’homme n’es
2603 aire concevoir et même dire, sans trop de crainte d’ en être atteint, ce qui pèche ? Or je sais que l’homme n’est pas bon.
2604 mpromise par l’activité divergente ou antagoniste de 1010_ 1 combinaisons réalisées et réalisables : ce nombre représentan
2605 iable est Légion.) Mal est ce qui empêche le bien de s’épanouir. Je me forme ainsi une connaissance virtuelle et négative
2606 du mal, aussitôt exemplifiée par les conséquences de n’importe quel geste, comme de peser sur le bouton de mon transistor.
2607 r les conséquences de n’importe quel geste, comme de peser sur le bouton de mon transistor. L’homme a peu de chances contr
2608 ’importe quel geste, comme de peser sur le bouton de mon transistor. L’homme a peu de chances contre le diable. L’interven
2609 a peu de chances contre le diable. L’intervention d’ un agent différent (qu’on appelle transcendance, en théologie) paraît
2610 ute la mesure où il est cohérent et ne traite que de son sujet. C’est le plus grave reproche qu’on puisse lui faire, et je
2611 r une statue du diable Créateur. C’est une espèce de Prométhée. J’ai cru voir la même à Catane, au pied de l’Etna : mais j
2612 rométhée. J’ai cru voir la même à Catane, au pied de l’Etna : mais j’avais l’esprit plein d’Empédocle, qui, dit-on, se jet
2613 , au pied de l’Etna : mais j’avais l’esprit plein d’ Empédocle, qui, dit-on, se jeta dans le volcan pour se prouver qu’il é
2614 r qu’il était dieu et n’en revint pas. Je parlais d’ un ordre du monde, voulu par Dieu, auquel le diable nous incite à cont
2615 n lui, dans son cadre, mais pour lui, comme agent de son évolution — soit vers une progressive transfiguration, ou vers un
2616 le en tant que dénonciateur, contestateur, semeur de doute et négateur, censeur et juge ? (Étant maintenu que cette effica
2617 e inspire les techniques, c’est-à-dire les moyens de changer la Création pour la mieux adapter à nos désirs de liberté ou
2618 er la Création pour la mieux adapter à nos désirs de liberté ou de puissance, pour la mieux asservir à nos passions. Non s
2619 pour la mieux adapter à nos désirs de liberté ou de puissance, pour la mieux asservir à nos passions. Non seulement l’inf
2620 diable, mais aussi tous les remèdes, instruments de chirurgie, avions, lasers, high-fi, organes artificiels, moyens de fa
2621 ons, lasers, high-fi, organes artificiels, moyens de faire tomber la pluie ou d’aller en week-end sur la Lune. De proche e
2622 s artificiels, moyens de faire tomber la pluie ou d’ aller en week-end sur la Lune. De proche en proche, il devient manifes
2623 mber la pluie ou d’aller en week-end sur la Lune. De proche en proche, il devient manifeste que presque tout, dans la vie
2624 que presque tout, dans la vie culturelle, dépend de Lui, de la poésie pure au journalisme, en passant par les arts et la
2625 sque tout, dans la vie culturelle, dépend de Lui, de la poésie pure au journalisme, en passant par les arts et la philosop
2626 sciences et les sciences humaines. Presque aucune de leurs œuvres, affirmations, formulations ou certitudes provisoires qu
2627 lations ou certitudes provisoires qui ne soit née de la mise en question, voire de la négation de celles qui précédaient.
2628 res qui ne soit née de la mise en question, voire de la négation de celles qui précédaient. Le doute est le premier temps
2629 née de la mise en question, voire de la négation de celles qui précédaient. Le doute est le premier temps de toute recher
2630 es qui précédaient. Le doute est le premier temps de toute recherche, la première condition de l’invention — la seconde ét
2631 r temps de toute recherche, la première condition de l’invention — la seconde étant la passion de s’exposer à l’inconnu —
2632 tion de l’invention — la seconde étant la passion de s’exposer à l’inconnu — comme un film s’expose à la lumière, mais aus
2633 e aux balles. Mais cette passion qui anime le jeu de massacre qu’est la vie intellectuelle, c’est celle d’un meilleur bien
2634 assacre qu’est la vie intellectuelle, c’est celle d’ un meilleur bien, d’une qualité plus forte, obscurément appelés et pre
2635 e intellectuelle, c’est celle d’un meilleur bien, d’ une qualité plus forte, obscurément appelés et pressentis. En fin de c
2636 n de compte, le Négateur, ayant tué nos illusions de vérité, nous laissera nus devant la Vérité. Cela se passe dans chacun
2637 nus devant la Vérité. Cela se passe dans chacune de nos vies, quoique à doses infinitésimales, et cela se verra dans la F
2638 ref chapitre au diable bureaucrate, fonctionnaire de l’État, impeccable jusqu’au sadisme. Cette omission, qui m’étonne auj
2639 ais ce livre aux USA, où seuls les fonctionnaires de douanes en uniforme m’ont paru dignes de leurs confrères européens et
2640 onnaires de douanes en uniforme m’ont paru dignes de leurs confrères européens et leurs émules dans le zèle imbécile. Mais
2641 t alors introduit celui que méritait déjà le Sens de l’Histoire, qui allait devenir si cher aux suiveurs du marxisme, en F
2642  » en URSS les génocides que l’on sait. Le Prince de ce monde, traduit en tribunal, affirme qu’il n’a rien fait d’autre qu
2643 traduit en tribunal, affirme qu’il n’a rien fait d’ autre qu’obéir aux ordres d’En Haut : il n’était qu’un exécutant, qu’u
2644 e qu’il n’a rien fait d’autre qu’obéir aux ordres d’ En Haut : il n’était qu’un exécutant, qu’un fonctionnaire, qu’un admin
2645 sont les seules qu’il admette), un agent du Sens de l’Histoire et de ses catastrophes moralisantes. C’est le rôle qu’il t
2646 qu’il admette), un agent du Sens de l’Histoire et de ses catastrophes moralisantes. C’est le rôle qu’il tenait déjà dans l
2647 ans ce livre, c’est qu’il n’essaie pas un instant de faire peur ni d’évoquer les terreurs de l’Enfer, le rictus effrayant
2648 st qu’il n’essaie pas un instant de faire peur ni d’ évoquer les terreurs de l’Enfer, le rictus effrayant du démon, et les
2649 n instant de faire peur ni d’évoquer les terreurs de l’Enfer, le rictus effrayant du démon, et les horreurs du péché rendu
2650 « bien intellectuel »… Mais ma seule crainte est d’ avoir laissé croire qu’il pourrait être, s’il existe, autre chose qu’u
2651 intellectuel, et j’entends bien, un intellectuel d’ opposition ! (Ils le sont tous, en tant que tels, même s’ils servent o
2652 ocial-fascisme.) L’action du diable est le modèle de l’action des intellectuels : ils n’ont jamais le pouvoir, mais ils l’
2653 is par définition. Que servirait à une opposition de gagner le pouvoir, si elle y perdait sa raison d’être, qui est d’être
2654 de gagner le pouvoir, si elle y perdait sa raison d’ être, qui est d’être contre ? C’est sa manière à elle de le créer. (Ou
2655 voir, si elle y perdait sa raison d’être, qui est d’ être contre ? C’est sa manière à elle de le créer. (Ou tout au moins d
2656 , qui est d’être contre ? C’est sa manière à elle de le créer. (Ou tout au moins d’y contribuer.) Prédictions. — Quand j’
2657 sa manière à elle de le créer. (Ou tout au moins d’ y contribuer.) Prédictions. — Quand j’écrivais en 1942 que l’avenir p
2658 olitique, pour des siècles, aurait toutes chances d’ être déterminé par le camp qui avait le plus d’avions, j’oubliais sans
2659 es d’être déterminé par le camp qui avait le plus d’ avions, j’oubliais sans doute que Hegel avait cru pouvoir démontrer qu
2660 ’Histoire, parce qu’il avait le plus grand nombre de canons. Trois ans plus tard, la Bombe pulvérisait Hiroshima et les pr
2661 , la Bombe pulvérisait Hiroshima et les prophètes de mon espèce. Aujourd’hui que chacun la possède et cherche les moyens d
2662 d’hui que chacun la possède et cherche les moyens de ne pas s’en servir, l’humanité se conduit dans l’ensemble avec une in
2663 avec une incroyable balourdise. Cet affrontement de géants imbéciles et plus qu’à demi paralysés déprime tout sens simple
2664 ersévère dans sa ligne actuelle » (p. 77) est une de ces erreurs inévitables quand on veut illustrer des prévisions d’ense
2665 névitables quand on veut illustrer des prévisions d’ ensemble sur le mouvement d’une société, ici l’Europe ou le monde occi
2666 ustrer des prévisions d’ensemble sur le mouvement d’ une société, ici l’Europe ou le monde occidental : on a recours à l’im
2667 n point : je prévoyais la venue, « après Hitler » d’ une « ère des religions aberrantes ». Si l’on me dit qu’elle n’est pas
2668 r : « L’Ère des religions s’ouvre à nous, chargée de promesses équivoques. » Par suite des reculs apparents du christianis
2669 parents du christianisme en Occident, sans parler de sa quasi-interdiction en URSS, de sa suppression en Chine, et en dépi
2670 nt, sans parler de sa quasi-interdiction en URSS, de sa suppression en Chine, et en dépit de Vatican II et des progrès de
2671 n Chine, et en dépit de Vatican II et des progrès de l’œcuménisme, il est patent que les Églises organisées ont perdu le c
2672 rustratrices. Je songe aux stupéfiantes épidémies de ferveur et d’austérité qui se multiplient avec les sectes des USA ou
2673 Je songe aux stupéfiantes épidémies de ferveur et d’ austérité qui se multiplient avec les sectes des USA ou du Brésil, du
2674 avec les sectes des USA ou du Brésil, du Chili ou de la Sicile, au retour massif du fétichisme en Afrique noire, aux provo
2675 t et se croyait si méticuleusement athée… Au-delà de ces symptômes, je persiste à prévoir l’universelle mais souterraine p
2676 révoir l’universelle mais souterraine propagation de toutes espèces de religions gnostiques, dont la fonction sera de libé
2677 le mais souterraine propagation de toutes espèces de religions gnostiques, dont la fonction sera de libérer l’esprit des h
2678 es de religions gnostiques, dont la fonction sera de libérer l’esprit des horaires de travail et des loisirs conditionnés.
2679 la fonction sera de libérer l’esprit des horaires de travail et des loisirs conditionnés. « L’ennui naquit un jour de l’un
2680 es loisirs conditionnés. « L’ennui naquit un jour de l’uniformité », mais c’est la multiplicité des distractions qui l’ent
2681 rend immuable. L’ennui sera le produit principal de la régulation de nos vies par l’État. Il sera la mesure morale de l’a
2682 ’ennui sera le produit principal de la régulation de nos vies par l’État. Il sera la mesure morale de l’accroissement de l
2683 de nos vies par l’État. Il sera la mesure morale de l’accroissement de l’entropie sur la planète. Les religions qui vienn
2684 État. Il sera la mesure morale de l’accroissement de l’entropie sur la planète. Les religions qui viennent seront donc sub
2685 unistes, elles déclencheront des formes nouvelles de la chasse aux sorcières et de l’exorcisme. On n’enverra plus au bûche
2686 es formes nouvelles de la chasse aux sorcières et de l’exorcisme. On n’enverra plus au bûcher mais à l’usine de lavage des
2687 cisme. On n’enverra plus au bûcher mais à l’usine de lavage des cerveaux, et pour les riches, le divan remplacera le lit d
2688 x, et pour les riches, le divan remplacera le lit de torture. Mais le diable sera, comme avant, chez les Inquisiteurs et n
2689 leurs victimes — ces « névrosés » qui sont le sel de la Terre ! Très curieuse omission. — À l’époque où j’écrivais ce liv
2690 s ce livre, on parlait déjà beaucoup de la « mort de Dieu », on en parlait depuis un peu plus d’un demi-siècle. Malraux av
2691  mort de Dieu », on en parlait depuis un peu plus d’ un demi-siècle. Malraux avait repris le thème de Nietzsche, Sartre all
2692 s d’un demi-siècle. Malraux avait repris le thème de Nietzsche, Sartre allait lui emboîter le pas. Mais personne n’a parlé
2693 e pas. Mais personne n’a parlé — même pas moi ! —  de la mort du diable. Et pourquoi cette étrange omission ? Parce que le
2694 longtemps déjà, et qu’on n’avait même plus l’idée de le rappeler ? Ou parce qu’il avait réussi mieux que jamais, s’était f
2695 iste chez tout le monde : champ libre à la faveur de pareilles projections ! Il n’empêche que je me sens honteux de n’avoi
2696 projections ! Il n’empêche que je me sens honteux de n’avoir pas été le premier à proclamer : « Le diable est mort ! » Ou
2697 t mort ! » Ou bien devrais-je m’en féliciter ? Et d’ avoir été le premier à dire que c’eût été son triomphe majeur ? Se ga
2698 re que c’eût été son triomphe majeur ? Se garder de haïr le diable. — La plus grave, peut-être, des critiques que je me f
2699 e, peut-être, des critiques que je me fais, c’est d’ avoir pu donner l’impression que je me croyais radicalement contre le
2700 communiste le bourgeois, l’un étant le cauchemar de l’autre, c’est-à-dire une projection de la part honteuse de lui-même,
2701 cauchemar de l’autre, c’est-à-dire une projection de la part honteuse de lui-même, celle qui lui fait d’autant plus peur q
2702 , c’est-à-dire une projection de la part honteuse de lui-même, celle qui lui fait d’autant plus peur qu’il n’a osé ni l’as
2703 la part honteuse de lui-même, celle qui lui fait d’ autant plus peur qu’il n’a osé ni l’assumer ni l’écarter de soi en con
2704 plus peur qu’il n’a osé ni l’assumer ni l’écarter de soi en connaissance de cause. Or, en dépit du grand précepte évangéli
2705 it du grand précepte évangélique qui nous ordonne d’ aimer nos ennemis, dont il est sans conteste le premier — Satan signif
2706 excellence —, je me sens incapable non seulement de souhaiter son pardon et son salut, mais encore d’éprouver pour lui ce
2707 de souhaiter son pardon et son salut, mais encore d’ éprouver pour lui cette sorte d’attrait qui peut tourner en haine. Per
2708 alut, mais encore d’éprouver pour lui cette sorte d’ attrait qui peut tourner en haine. Personnification du mal que je récu
2709 ’imagine ou crée, je me sens plus près de lui que de la plupart des saints, plus en complicité native qu’en guerre ouverte
2710 ité native qu’en guerre ouverte, et s’il m’arrive d’ admirer sa technique, je n’ai jamais pu mépriser foncièrement que ses
2711 re plus parfaite encore en la tenant en éveil par de vaines insultes au lieu de songer plutôt aux moyens de l’endormir, co
2712 ines insultes au lieu de songer plutôt aux moyens de l’endormir, comme par exemple de mettre au point une tactique de la v
2713 lutôt aux moyens de l’endormir, comme par exemple de mettre au point une tactique de la vérité habile et libérale sur laqu
2714 comme par exemple de mettre au point une tactique de la vérité habile et libérale sur laquelle il perde ses prises, ou enc
2715 érale sur laquelle il perde ses prises, ou encore d’ ordonner notre morale personnelle à un but qu’il ne puisse concevoir.
2716 t qu’il ne puisse concevoir. Non moins futile que de se fouetter pour le haïr serait de condamner ce diable sans lequel no
2717 ins futile que de se fouetter pour le haïr serait de condamner ce diable sans lequel nous n’irions pas loin. Car en fait n
2718 ant que le monde est ce qu’il est — et n’est rien d’ autre — le diable en est le Prince inéluctable. Une longue patience et
2719 patience et une maîtrise intime des sources mêmes de la révolte contre le mensonge peuvent nous faire concevoir une tactiq
2720 ensonge peuvent nous faire concevoir une tactique d’ espérance ; mais il faut accepter qu’elle paraisse tendre asymptotique
2721 e : elle escompte l’extinction finale des raisons d’ être du démon par l’effet de sa propre action. Par la dégradation des
2722 on finale des raisons d’être du démon par l’effet de sa propre action. Par la dégradation des énergies qu’il stimule et qu
2723 entraîne irréversiblement vers ce plus bas niveau d’ indifférenciation, d’insignifiance et d’inertie finale où les déchets
2724 ment vers ce plus bas niveau d’indifférenciation, d’ insignifiance et d’inertie finale où les déchets de l’être lentement s
2725 as niveau d’indifférenciation, d’insignifiance et d’ inertie finale où les déchets de l’être lentement se consument — dans
2726 ’insignifiance et d’inertie finale où les déchets de l’être lentement se consument — dans ce ravin de la Géhenne dont nous
2727 de l’être lentement se consument — dans ce ravin de la Géhenne dont nous parlent les évangiles, et qui était en réalité l
2728 nt les évangiles, et qui était en réalité le lieu de la décharge municipale aux portes de Jérusalem. Gé-Hinnom ou val de
2729 cipale aux portes de Jérusalem. Gé-Hinnom ou val de Hinnom était en effet le nom de l’une des trois vallées qui entourent
2730 Gé-Hinnom ou val de Hinnom était en effet le nom de l’une des trois vallées qui entourent Jérusalem. En exécration de ce
2731 is vallées qui entourent Jérusalem. En exécration de ce lieu jadis voué au culte de Moloch, le roi Josias ordonna de le so
2732 lem. En exécration de ce lieu jadis voué au culte de Moloch, le roi Josias ordonna de le souiller, et l’on en fit dès lors
2733 is voué au culte de Moloch, le roi Josias ordonna de le souiller, et l’on en fit dès lors le dépôt des ordures et des char
2734 eu qui ne s’éteint point », devenu le feu éternel de l’Enfer, au Moyen Âge. Dans la Géhenne on ne brûlait que des cadavres
2735 s s’entretient Dante ! Mais par cette action même de consumer les ambitions qu’il ne cesse d’attiser, et nos égoïsmes avec
2736 ion même de consumer les ambitions qu’il ne cesse d’ attiser, et nos égoïsmes avec elles, il contribue à notre ultime déliv
2737 épuisante et qui l’aura trompé à la consommation de tous les temps, il nous libérera des tentations qu’il a pour fonction
2738 ous libérera des tentations qu’il a pour fonction d’ entretenir, c’est-à-dire du défi créateur dont nous vivons, nous et to
2739 teindront enfin dans la grâce — et Satan oubliera d’ exister ! III Je n’ai pas encore répondu… Mais je me suis repri
2740 is au jeu, on vient de le voir : dès que j’essaie de serrer de plus près son action supposée dans ma vie — fût-ce dans l’i
2741 action supposée dans ma vie — fût-ce dans l’idée de la « démystifier » —, l’Hypothèse reprend consistance. Henri Matisse
2742  Oui, quand je travaille. Je répondrai maintenant d’ une manière analogue : oui, je suis bien forcé de croire au diable qua
2743 d’une manière analogue : oui, je suis bien forcé de croire au diable quand j’éprouve son action dans la nôtre et que j’en
2744 re même. (Mais sans lui, l’eussè-je entreprise ?) De quoi je donnerai deux exemples, développant des indications qui étaie
2745 on que le diable, selon l’Évangile, est « le père de son propre mensonge ». Et j’ajoutais : « Par ici nous entrons au myst
2746 nsonge, par essence, n’est pas ! C’est une espèce de décréation. C’est le trompe-l’œil et le sonne-creux-de l’invention bâ
2747 l’œil et le sonne-creux-de l’invention bâtarde et de l’art inauthentique. » (Chapitre IX.) Comme le livre venait de paraî
2748 ir, avec sa véhémence coutumière, me fit reproche d’ avoir jeté ce mot « décréation » sans commentaires ni développement :
2749 s ni développement : j’avais touché quelque chose d’ important, disait-il, sans faire le moindre effort pour étayer et expl
2750 nt bluff impardonnable ! Je ne suis plus très sûr de ce que je lui répondis, mais comme nos entretiens de New York — entre
2751 ce que je lui répondis, mais comme nos entretiens de New York — entrecoupés de parties d’échecs — roulaient souvent sur de
2752 is comme nos entretiens de New York — entrecoupés de parties d’échecs — roulaient souvent sur des thèmes scientifiques, je
2753 s entretiens de New York — entrecoupés de parties d’ échecs — roulaient souvent sur des thèmes scientifiques, je suppose qu
2754 es temps lointains, soudain proches… Par le terme de « décréation », je tentais d’évoquer conjointement, d’un seul mot, pl
2755 oches… Par le terme de « décréation », je tentais d’ évoquer conjointement, d’un seul mot, plusieurs opérations de l’esprit
2756 décréation », je tentais d’évoquer conjointement, d’ un seul mot, plusieurs opérations de l’esprit opposées et complémentai
2757 onjointement, d’un seul mot, plusieurs opérations de l’esprit opposées et complémentaires, telles qu’invention et négation
2758 : records locaux et usure générale, condensations d’ énergies acquises au prix de l’uniformisation du milieu et de l’accroi
2759 acquises au prix de l’uniformisation du milieu et de l’accroissement des déchets ; et enfin un certain état du dosage des
2760 contraires toujours mobilisées par l’acte unique de création, à savoir : la prédominance, ici morbide, du nécessaire prin
2761 prédominance, ici morbide, du nécessaire principe de négation. « Décréation » signifiait donc pour moi : prolifération des
2762 u encore, en langage psychologique : prédominance de l’agressivité et de l’instinct de mort sur le désir et sur l’instinct
2763 psychologique : prédominance de l’agressivité et de l’instinct de mort sur le désir et sur l’instinct vital. Freud avait
2764  : prédominance de l’agressivité et de l’instinct de mort sur le désir et sur l’instinct vital. Freud avait publié quelqu
2765 s années plus tôt (1930) son étude sur Le Malaise de la civilisation, où il arrivait à la conclusion « qu’à côté de l’inst
2766 rrivait à la conclusion « qu’à côté de l’instinct de conservation de la substance vivante qui tend à la composer en unités
2767 clusion « qu’à côté de l’instinct de conservation de la substance vivante qui tend à la composer en unités toujours plus g
2768 e. Autrement dit : avec Éros coexiste un instinct de mort. Le phénomène de la vie peut être expliqué par la convergence ou
2769 c Éros coexiste un instinct de mort. Le phénomène de la vie peut être expliqué par la convergence ou par l’action antinomi
2770 ué par la convergence ou par l’action antinomique de ces deux instincts ». Ici, Freud citait des vers du Faust de Goethe d
2771 aint et bon, mais c’est le pouvoir qu’a la Nature de créer, de multiplier le vivant : Car toutes choses tirées du Vide Mé
2772 n, mais c’est le pouvoir qu’a la Nature de créer, de multiplier le vivant : Car toutes choses tirées du Vide Méritent d’ê
2773 vant : Car toutes choses tirées du Vide Méritent d’ être détruites… Et tout ce que vous nommez péché — Destruction — bref,
2774 en propre ?45 Tout cela éveille, dans l’esprit d’ un usager de la civilisation scientifico-technique en ce dernier tiers
2775 45 Tout cela éveille, dans l’esprit d’un usager de la civilisation scientifico-technique en ce dernier tiers du xxe siè
2776 n’invoquait que la biologie.) Le Second principe de la Thermodynamique ou Principe de Carnot formule la loi de la dégrada
2777 Second principe de la Thermodynamique ou Principe de Carnot formule la loi de la dégradation irréversible de l’énergie, et
2778 rmodynamique ou Principe de Carnot formule la loi de la dégradation irréversible de l’énergie, et Clausius nommera entropi
2779 not formule la loi de la dégradation irréversible de l’énergie, et Clausius nommera entropie ce qui permet de mesurer l’au
2780 ergie, et Clausius nommera entropie ce qui permet de mesurer l’augmentation du degré de dissolution, désorganisation, déso
2781 ce qui permet de mesurer l’augmentation du degré de dissolution, désorganisation, désordre et uniformité finale dans un s
2782 ns un système indépendant. Les formes supérieures de l’énergie — lumineuse, nucléaire, électrique — évoluent fatalement ve
2783 ue — évoluent fatalement vers la forme inférieure de l’énergie calorifique. Eddington, dans les années 1930, avait calculé
2784 s 1930, avait calculé la venue de « la mort tiède de l’Univers ». Ainsi trouvons-nous établi, dans l’esprit de l’homme d’a
2785 vers ». Ainsi trouvons-nous établi, dans l’esprit de l’homme d’aujourd’hui, un principe qu’on ne peut aimer ni accepter, m
2786 si trouvons-nous établi, dans l’esprit de l’homme d’ aujourd’hui, un principe qu’on ne peut aimer ni accepter, mais qu’il n
2787 aimer ni accepter, mais qu’il n’est pas question de ne point subir : l’instinct de mort, qui n’est sans doute que l’aspec
2788 n’est pas question de ne point subir : l’instinct de mort, qui n’est sans doute que l’aspect psycho-somatique de l’entropi
2789 ui n’est sans doute que l’aspect psycho-somatique de l’entropie. Il nous mène d’une main sûre à notre perte, celle des per
2790 pect psycho-somatique de l’entropie. Il nous mène d’ une main sûre à notre perte, celle des personnes, celle de l’espèce. L
2791 in sûre à notre perte, celle des personnes, celle de l’espèce. Le diable est là. On craignait l’incendie, on attendait l’é
2792 ectaculaire, et l’on a l’insensible accroissement d’ un concept négatif, lentement déprimant. Non pas le crime, qui passion
2793 ni l’hérésie. L’action finale, à très long terme, de l’entropie aussi bien spirituelle que physique conduit en toute rigue
2794 sique conduit en toute rigueur à l’anéantissement de la personne humaine dotée d’une vocation — autant dire de la liberté,
2795 r à l’anéantissement de la personne humaine dotée d’ une vocation — autant dire de la liberté, d’un homme ou de toute une c
2796 rsonne humaine dotée d’une vocation — autant dire de la liberté, d’un homme ou de toute une cité. Vous me direz que ce dia
2797 dotée d’une vocation — autant dire de la liberté, d’ un homme ou de toute une cité. Vous me direz que ce diable-là devient
2798 cation — autant dire de la liberté, d’un homme ou de toute une cité. Vous me direz que ce diable-là devient étrangement fu
2799 bien que vous pensez que j’en ai fait une espèce d’ abstraction. Mais ce sont là ses voies et ses déguisements. Il ne lais
2800 à ses voies et ses déguisements. Il ne laisse pas d’ empreintes, de traces d’un pied fourchu, mais seulement une sorte de d
2801 ses déguisements. Il ne laisse pas d’empreintes, de traces d’un pied fourchu, mais seulement une sorte de dévastation plu
2802 sements. Il ne laisse pas d’empreintes, de traces d’ un pied fourchu, mais seulement une sorte de dévastation plus sensible
2803 races d’un pied fourchu, mais seulement une sorte de dévastation plus sensible que mesurable, un principe de mort lente et
2804 astation plus sensible que mesurable, un principe de mort lente et sûre au plus intime de la vie, quelque chose d’impercep
2805 un principe de mort lente et sûre au plus intime de la vie, quelque chose d’imperceptiblement irrémédiable. Saint August
2806 e et sûre au plus intime de la vie, quelque chose d’ imperceptiblement irrémédiable. Saint Augustin croyait que le Mal n’e
2807 , le méphistophélique est négateur. Dans le Livre de Job, il est bavard, un peu rhéteur à l’athénienne. Mais l’important,
2808 ait tenté la Parole même — en vain — dans l’idée de la dénaturer. Par où l’on voit que l’entropie n’est pas seulement la
2809 que l’entropie n’est pas seulement la dégradation de l’énergie, mais la disqualification de la vertu, de la vérité et de l
2810 égradation de l’énergie, mais la disqualification de la vertu, de la vérité et de la vie. Le diable est le Néantissant, le
2811 l’énergie, mais la disqualification de la vertu, de la vérité et de la vie. Le diable est le Néantissant, le devenir du R
2812 la disqualification de la vertu, de la vérité et de la vie. Le diable est le Néantissant, le devenir du Rien, pôle d’anti
2813 able est le Néantissant, le devenir du Rien, pôle d’ anti-Esprit. Dieu sujet pur personnalise, le diable dépersonnalise, ag
2814 pur personnalise, le diable dépersonnalise, agent de la dissolution des structures créatrices, donc de l’établissement de
2815 de la dissolution des structures créatrices, donc de l’établissement de cette vaste unité — uniformité imposée à la limite
2816 es structures créatrices, donc de l’établissement de cette vaste unité — uniformité imposée à la limite de la trituration
2817 ette vaste unité — uniformité imposée à la limite de la trituration des formes — que Baudelaire prévoyait « immense comme
2818 t ». Comment lutter contre cet authentique « sens de l’Histoire », cette flèche du temps que toute la science de naguère v
2819 ire », cette flèche du temps que toute la science de naguère voulait nous démontrer irréversible ? trois procédures se pro
2820 r l’entropie. L’amour actif et créateur46, l’élan d’ admiration, la position d’une métaphore affective, sont facteurs d’org
2821 f et créateur46, l’élan d’admiration, la position d’ une métaphore affective, sont facteurs d’organisation aux niveaux les
2822 position d’une métaphore affective, sont facteurs d’ organisation aux niveaux les plus élevés et au prix d’une dépense d’én
2823 ganisation aux niveaux les plus élevés et au prix d’ une dépense d’énergie négligeable. Donc facteurs de néguentropie. Rie
2824 niveaux les plus élevés et au prix d’une dépense d’ énergie négligeable. Donc facteurs de néguentropie. Rien de moins dia
2825 ’une dépense d’énergie négligeable. Donc facteurs de néguentropie. Rien de moins diabolique que la désignation, la spécif
2826 négligeable. Donc facteurs de néguentropie. Rien de moins diabolique que la désignation, la spécification du mal et sa fi
2827 e anthropométrique. Le mal décrit comme tel cesse d’ être diabolique. Il peut encore détruire, tuer ou torturer, mais il ne
2828 connaître et du même coup, il a perdu son pouvoir de séduire et de dénaturer le mouvement même de toute création, qui est
2829 u même coup, il a perdu son pouvoir de séduire et de dénaturer le mouvement même de toute création, qui est amour. Le diab
2830 voir de séduire et de dénaturer le mouvement même de toute création, qui est amour. Le diable se retire du crime admis pou
2831 e leur instrument pour exténuer les vices à force d’ y céder. L’orgie leur tenait lieu d’ascèse et la communauté des femmes
2832 vices à force d’y céder. L’orgie leur tenait lieu d’ ascèse et la communauté des femmes de remède contre l’adultère. Jean
2833 tenait lieu d’ascèse et la communauté des femmes de remède contre l’adultère. Jean Paulhan, préfacier d’une Justine de S
2834 emède contre l’adultère. Jean Paulhan, préfacier d’ une Justine de Sade, m’écrivait dans sa dédicace : « Le pire est l’enn
2835 re que sa date), soutient la thèse du salut final de Lucifer. Je n’ai rien contre cela, qui est généreux et se trouvait êt
2836 se trouvait être scandaleux aux yeux de l’Église d’ alors, qui condamna le livre. Mais enfin, pour pouvoir être sauvé, le
2837 ne fonction relative à l’homme. En tant que force de néantisation de ce qui existe, et pas seulement d’inspirateur d’actio
2838 tive à l’homme. En tant que force de néantisation de ce qui existe, et pas seulement d’inspirateur d’actions néfastes au r
2839 e néantisation de ce qui existe, et pas seulement d’ inspirateur d’actions néfastes au regard de l’ordre établi, il ne peut
2840 de ce qui existe, et pas seulement d’inspirateur d’ actions néfastes au regard de l’ordre établi, il ne peut que s’anéanti
2841 antir avec tout ce qui choisit le Néant en chacun de nous, et l’on ne voit pas comment sa salvation ne serait pas ipso fac
2842 a toute une théorie sur la position géographique de l’Enfer. C’est sa position psychologique qui seule importe à l’homme
2843 osition psychologique qui seule importe à l’homme de notre siècle. Et peut-être, un peu plus sérieusement, sa position spi
2844 un instant, aujourd’hui, à l’Enfer cave centrale de la planète Terre, sinon celui qui pourrait croire encore au Dieu barb
2845 on celui qui pourrait croire encore au Dieu barbu de la Sixtine, flottant dans l’espace intersidéral. Mais j’ai rappelé ce
2846 t Jésus parle à mainte reprise. Je ne connais pas de meilleure définition de l’Enfer : le lieu de la permanente réduction
2847 eprise. Je ne connais pas de meilleure définition de l’Enfer : le lieu de la permanente réduction des déchets de ce qui n’
2848 pas de meilleure définition de l’Enfer : le lieu de la permanente réduction des déchets de ce qui n’a plus de raison d’êt
2849  : le lieu de la permanente réduction des déchets de ce qui n’a plus de raison d’être. L’homme qui n’a pas de vocation — c
2850 rmanente réduction des déchets de ce qui n’a plus de raison d’être. L’homme qui n’a pas de vocation — c’est-à-dire qui ref
2851 éduction des déchets de ce qui n’a plus de raison d’ être. L’homme qui n’a pas de vocation — c’est-à-dire qui refuse de che
2852 ui n’a plus de raison d’être. L’homme qui n’a pas de vocation — c’est-à-dire qui refuse de chercher, de découvrir et d’ass
2853 qui n’a pas de vocation — c’est-à-dire qui refuse de chercher, de découvrir et d’assumer celle qu’il peut recevoir, et qu’
2854 e vocation — c’est-à-dire qui refuse de chercher, de découvrir et d’assumer celle qu’il peut recevoir, et qu’il a peut-êtr
2855 st-à-dire qui refuse de chercher, de découvrir et d’ assumer celle qu’il peut recevoir, et qu’il a peut-être reçue —, sa pu
2856 qu’il a peut-être reçue —, sa punition sera donc d’ être jeté « là où le feu ne s’éteint point ». Le néant retourne au néa
2857 néant. Plutôt qu’une punition, c’est l’apurement d’ un compte, une « constatation objective ». Conception satanique, me di
2858 ive du pardon. Mais comment pardonner à l’absence d’ être ? Le mal est ce qui m’empêche de voir ma fin, de distinguer ma vo
2859 à l’absence d’être ? Le mal est ce qui m’empêche de voir ma fin, de distinguer ma vocation, et d’y tendre de toutes mes v
2860 tre ? Le mal est ce qui m’empêche de voir ma fin, de distinguer ma vocation, et d’y tendre de toutes mes vraies forces. Le
2861 che de voir ma fin, de distinguer ma vocation, et d’ y tendre de toutes mes vraies forces. Le mal est ce qui s’oppose à mon
2862 ma fin, de distinguer ma vocation, et d’y tendre de toutes mes vraies forces. Le mal est ce qui s’oppose à mon utilité en
2863 du ravin Gé-Hinnom, où se consument les détritus de la ville sainte. « Deviens ce que tu es ! » dit la parole orphique ré
2864 pratique, par l’humilité devant Dieu et la fierté de la personne devant l’espèce et l’uniforme. Mais le diable nous dit :
2865 iable nous dit : Et d’abord qui es-tu ? Es-tu sûr d’ être ? Vas-tu passer ta vie trop courte à te chercher dans l’inconnu q
2866 ourte à te chercher dans l’inconnu quand il n’y a de certain que les pouvoirs d’un homme sur d’autres hommes, ou sur la na
2867 nconnu quand il n’y a de certain que les pouvoirs d’ un homme sur d’autres hommes, ou sur la nature et le temps ? Laisse to
2868 , cette fumée si elle existe, libère-toi du souci d’ être en soi et d’être toi, possiblement… (Rien n’est moins sûr.) Tu au
2869 elle existe, libère-toi du souci d’être en soi et d’ être toi, possiblement… (Rien n’est moins sûr.) Tu auras en échange la
2870 amatique, condensée en un seul événement décisif, d’ un phénomène qui se produit et se reproduit à tout moment au long d’un
2871 se produit et se reproduit à tout moment au long d’ une vie : le fameux « pacte avec le diable ». Chaque fois que m’échoit
2872 s que m’échoit un « succès » qui ne répond à rien de ce qu’attendait ma vocation, l’avantage immédiat et concret n’est qu’
2873 u’une prime publicitaire destinée à me convaincre de signer avec celui qui dit que l’avoir est tout : je gagne ce qui n’es
2874 tout : je gagne ce qui n’est pas moi. Le pouvoir d’ asservir autrui m’asservirait, comme toute richesse non méritée, non e
2875 même rejetterait comme une greffe. Le désir même de traiter avec le diable dans l’espoir mal dissimulé de le rouler, trad
2876 raiter avec le diable dans l’espoir mal dissimulé de le rouler, traduit toujours une certaine jobardise comme l’a très bie
2877 ur breton dont l’histoire vraie devint la légende de Barbe-Bleue, avait eu recours aux bons offices d’un jeune et beau sor
2878 de Barbe-Bleue, avait eu recours aux bons offices d’ un jeune et beau sorcier venu d’Italie pour évoquer le diable et trait
2879 aux bons offices d’un jeune et beau sorcier venu d’ Italie pour évoquer le diable et traiter avec lui. Il se flattait d’ob
2880 uer le diable et traiter avec lui. Il se flattait d’ obtenir du démon la puissance absolue et les moyens de refaire son imm
2881 tenir du démon la puissance absolue et les moyens de refaire son immense fortune dilapidée, tout en « réservant pour Dieu
2882 nce du Docteur ne suffit pas à le mettre à l’abri de la fascination qu’exerce Méphisto à coups de promesses impossibles. T
2883 abri de la fascination qu’exerce Méphisto à coups de promesses impossibles. Tous ces calculs sont faux, quoi qu’il advienn
2884 es amours, à des richesses qui me sont attribuées de l’extérieur par quelque hasard du destin. Mais si je refuse d’accorde
2885 r par quelque hasard du destin. Mais si je refuse d’ accorder mon âme au don accidentel qui m’échoit, si je la garde pour m
2886 ration grâce aux héros auxquels il m’est possible de m’identifier le temps de mon rêve, sans qu’aucun pacte m’interdise de
2887 xquels il m’est possible de m’identifier le temps de mon rêve, sans qu’aucun pacte m’interdise de me reprendre quand il me
2888 emps de mon rêve, sans qu’aucun pacte m’interdise de me reprendre quand il me plaira. Mais si mon « âme » est ce qui m’est
2889 t, si elle est en moi ce qui relève immédiatement de ma vocation, et si le « péché » est cela qui me détourne de l’œuvre e
2890 tion, et si le « péché » est cela qui me détourne de l’œuvre essentielle qu’est ma vie, tout ce qui vient me tenter d’acce
2891 tielle qu’est ma vie, tout ce qui vient me tenter d’ accepter du tout-fait — us et coutumes, décrets et modes, dogmes et ri
2892 t modes, dogmes et rites —, comment me garder pur de toute aliénation sans perdre du même coup mes moyens de vivre ? On vo
2893 te aliénation sans perdre du même coup mes moyens de vivre ? On voit ici que le pacte avec le diable est non seulement iné
2894 iable est non seulement inévitable mais vital, et de fait, presque universel. Une part de chacune de nos vies est nécessai
2895 is vital, et de fait, presque universel. Une part de chacune de nos vies est nécessairement aliénée, et c’est tout ce qu’i
2896 t de fait, presque universel. Une part de chacune de nos vies est nécessairement aliénée, et c’est tout ce qu’il faut fair
2897 ce qu’il faut faire pour un salaire au détriment d’ une vocation ; ou pour gagner sa vie au prix de ses raisons d’être ; t
2898 on ; ou pour gagner sa vie au prix de ses raisons d’ être ; tout ce qui est induit en nous par la publicité, la mode, l’imi
2899 bon gré mal gré à ce que l’on nomme la « société de consommation » — inaugurée par Ève lorsqu’elle croqua la Pomme. C’est
2900 elon Rousseau, dans toute la mesure où il se doit de demeurer coercitif par crainte (après tout légitime) du jeu de l’Éros
2901 oercitif par crainte (après tout légitime) du jeu de l’Éros impérialiste. Le pacte avec le diable résume en un seul acte u
2902 perpétuel, qui semble continu, mais qui est fait de milliards de retraits presque imperceptibles à l’œil nu dans nos exis
2903 ui semble continu, mais qui est fait de milliards de retraits presque imperceptibles à l’œil nu dans nos existences quotid
2904 bles à l’œil nu dans nos existences quotidiennes, de milliards de « péchés » microscopiques, de trahisons infinitésimales
2905 nu dans nos existences quotidiennes, de milliards de « péchés » microscopiques, de trahisons infinitésimales de notre aven
2906 ennes, de milliards de « péchés » microscopiques, de trahisons infinitésimales de notre aventure singulière. Procès tout à
2907 és » microscopiques, de trahisons infinitésimales de notre aventure singulière. Procès tout à fait comparable à l’accroiss
2908 . Procès tout à fait comparable à l’accroissement de l’entropie qui travaille toutes nos vies et la société même : déperdi
2909 ciété même : déperdition, dégradation continuelle de l’énergie produite en nous par les visions instantanées du But ultime
2910 par les visions instantanées du But ultime, cause de l’Attrait universel. L’irréductible part du diable est en fin de comp
2911 uctible part du diable est en fin de compte celle de la dure nécessité de prolonger dans le temps nos existences — « persé
2912 e est en fin de compte celle de la dure nécessité de prolonger dans le temps nos existences — « persévérer est diabolique 
2913 nos existences — « persévérer est diabolique » — de regarder l’élan des forces qui, par grâce, nous soulèvent et nous por
2914 ent et nous portent vers l’ultime transfiguration de notre individu en personne pure, telle que la foi, par éclairs, l’ant
2915 La néguentropie, c’est l’amour Après un tiers de siècle, une relecture sévère, et ces gloses, repentirs et contre-atta
2916 able à l’œuvre dans nos créations — c’est la part de « l’esprit qui toujours nie » et sans lequel nous serions comme les s
2917 rtés défaillantes. Je l’ai montré nous détournant de nos raisons de vivre et de leur quête sans fin, par l’offre de mieux
2918 es. Je l’ai montré nous détournant de nos raisons de vivre et de leur quête sans fin, par l’offre de mieux vivre selon le
2919 montré nous détournant de nos raisons de vivre et de leur quête sans fin, par l’offre de mieux vivre selon le monde : dans
2920 s de vivre et de leur quête sans fin, par l’offre de mieux vivre selon le monde : dans la série, l’imitation, la mode ; da
2921 l’imitation, la mode ; dans le vent, dans le sens de l’Histoire (mais faite par d’autres), dans le tout-fait et le prêt-à-
2922 des énergies humaines qui s’accomplit à la faveur d’ un Progrès matériel incontestable, de la Démocratie de jouissance qu’i
2923 à la faveur d’un Progrès matériel incontestable, de la Démocratie de jouissance qu’il permet, et des régimes totalitaires
2924 Progrès matériel incontestable, de la Démocratie de jouissance qu’il permet, et des régimes totalitaires qui en résultent
2925 les transférer au Cosmos — illimité-fini interdit d’ au-delà, voué à l’autarcie, et donc à l’accroissement de l’entropie ju
2926 elà, voué à l’autarcie, et donc à l’accroissement de l’entropie jusqu’à l’évanouissement final de tout attrait. Mais le D
2927 ment de l’entropie jusqu’à l’évanouissement final de tout attrait. Mais le Dieu que l’on prie en vérité est celui qui s’e
2928 intégrer ni réfuter. Et c’est la seule définition de Dieu donnée par sa révélation en Jésus-Christ : « Dieu est Amour. »
2929 us-Christ : « Dieu est Amour. » 39. Il s’agit de La Part du diable , qui devait paraître à New York à la fin de 1942,
2930 diable , qui devait paraître à New York à la fin de 1942, dans une première version. La seconde version, élargie, date de
2931 emière version. La seconde version, élargie, date de 1944. C’est elle qui a paru en Suisse en 1946, puis à Paris en 1947.
2932 ble au xxe siècle, août 1941. 41. Voir Journal d’ une époque, Gallimard, 1968, p. 79 et 80. 42. « Das Nichts nichtet »
2933 ns des Vaudois luthériens du Comtat Venaissien et de la Provence, Paris, 1891. 44. Baudelaire, dans l’Art romantique. Dan
2934 e sens, Nietzsche : « Nous ne sommes pas non plus de ceux qui nient que la foi « sauve » : mais pour cette raison même nou
2935 ns que la foi prouve quelque chose. » (Généalogie de la Morale, III, 24.) 45. Cf. The World of Love, George Braziller, Ne
2936 , qui se dégrade en chaleur, est un accroissement de l’entropie (voir là-dessus mon Amour et l’Occident ). 47. Karpokrac
2937 47. Karpokraces, selon une légende, fut le fils d’ Épiphane et d’Alexandrie, c’est-à-dire d’un génial hérétique communist
2938 ces, selon une légende, fut le fils d’Épiphane et d’ Alexandrie, c’est-à-dire d’un génial hérétique communiste mort à 17 an
2939 le fils d’Épiphane et d’Alexandrie, c’est-à-dire d’ un génial hérétique communiste mort à 17 ans, et d’une ville qui est r
2940 ’un génial hérétique communiste mort à 17 ans, et d’ une ville qui est restée le symbole de la grande civilisation hellénis
2941 17 ans, et d’une ville qui est restée le symbole de la grande civilisation hellénistique. (Cf. Hans Leisegang, Die Gnosis