1
Introduction
Le
sentiment de l’Europe centrale Un accord sans résolution Il ar
2
Introduction Le sentiment
de
l’Europe centrale Un accord sans résolution Il arrive qu’au so
3
Introduction Le sentiment de
l’
Europe centrale Un accord sans résolution Il arrive qu’au sorti
4
ans résolution Il arrive qu’au sortir de Paris
le
train de banlieue qui emmène son chargement de somnambules énervés de
5
ution Il arrive qu’au sortir de Paris le train
de
banlieue qui emmène son chargement de somnambules énervés de fumée et
6
is le train de banlieue qui emmène son chargement
de
somnambules énervés de fumée et qui se cachent dans les journaux du s
7
qui emmène son chargement de somnambules énervés
de
fumée et qui se cachent dans les journaux du soir, soit lentement dou
8
mnambules énervés de fumée et qui se cachent dans
les
journaux du soir, soit lentement doublé par le rapide de Bretagne. Ce
9
s les journaux du soir, soit lentement doublé par
le
rapide de Bretagne. Ce long passage lumineux des vacances, traînée d’
10
naux du soir, soit lentement doublé par le rapide
de
Bretagne. Ce long passage lumineux des vacances, traînée d’espoirs dé
11
e. Ce long passage lumineux des vacances, traînée
d’
espoirs délivrés qui nous frôle, éveille chez ceux qui restent un sent
12
éveille chez ceux qui restent un sentiment confus
d’
exil et de plaisir dont souvent j’ai cru distinguer la contagion dans
13
ez ceux qui restent un sentiment confus d’exil et
de
plaisir dont souvent j’ai cru distinguer la contagion dans le regard
14
il et de plaisir dont souvent j’ai cru distinguer
la
contagion dans le regard de mes voisins. Ainsi d’autres fois j’ai vib
15
ont souvent j’ai cru distinguer la contagion dans
le
regard de mes voisins. Ainsi d’autres fois j’ai vibré au passage des
16
t j’ai cru distinguer la contagion dans le regard
de
mes voisins. Ainsi d’autres fois j’ai vibré au passage des rapides de
17
i d’autres fois j’ai vibré au passage des rapides
de
l’Europe centrale ; non pas de cette jubilation nostalgique, mais d’u
18
’autres fois j’ai vibré au passage des rapides de
l’
Europe centrale ; non pas de cette jubilation nostalgique, mais d’une
19
assage des rapides de l’Europe centrale ; non pas
de
cette jubilation nostalgique, mais d’une fièvre brève qui révélait la
20
e ; non pas de cette jubilation nostalgique, mais
d’
une fièvre brève qui révélait la trouble densité de l’atmosphère. La r
21
nostalgique, mais d’une fièvre brève qui révélait
la
trouble densité de l’atmosphère. La rumeur de l’express Mitropa dans
22
’une fièvre brève qui révélait la trouble densité
de
l’atmosphère. La rumeur de l’express Mitropa dans la vallée d’Innsbru
23
e fièvre brève qui révélait la trouble densité de
l’
atmosphère. La rumeur de l’express Mitropa dans la vallée d’Innsbruck
24
qui révélait la trouble densité de l’atmosphère.
La
rumeur de l’express Mitropa dans la vallée d’Innsbruck figure dans me
25
ait la trouble densité de l’atmosphère. La rumeur
de
l’express Mitropa dans la vallée d’Innsbruck figure dans mes songerie
26
la trouble densité de l’atmosphère. La rumeur de
l’
express Mitropa dans la vallée d’Innsbruck figure dans mes songeries l
27
l’atmosphère. La rumeur de l’express Mitropa dans
la
vallée d’Innsbruck figure dans mes songeries le passage du « Sturm an
28
re. La rumeur de l’express Mitropa dans la vallée
d’
Innsbruck figure dans mes songeries le passage du « Sturm and Drang »
29
s la vallée d’Innsbruck figure dans mes songeries
le
passage du « Sturm and Drang » à 100 kilomètres à l’heure. ⁂ L’Europe
30
passage du « Sturm and Drang » à 100 kilomètres à
l’
heure. ⁂ L’Europe centrale est une de ces réalités qu’on reconnaît d’a
31
« Sturm and Drang » à 100 kilomètres à l’heure. ⁂
L’
Europe centrale est une de ces réalités qu’on reconnaît d’abord par le
32
kilomètres à l’heure. ⁂ L’Europe centrale est une
de
ces réalités qu’on reconnaît d’abord par leur frisson particulier. Ma
33
iculier. Mais il n’en faut pas plus pour ébranler
le
souvenir. Naissent alors des images champêtres, les toits pointus d’u
34
e souvenir. Naissent alors des images champêtres,
les
toits pointus d’un bourg au sein d’une vallée de verdure et de verger
35
nt alors des images champêtres, les toits pointus
d’
un bourg au sein d’une vallée de verdure et de vergers — c’est la Soua
36
les toits pointus d’un bourg au sein d’une vallée
de
verdure et de vergers — c’est la Souabe, la Thuringe, la vie bourgeoi
37
tus d’un bourg au sein d’une vallée de verdure et
de
vergers — c’est la Souabe, la Thuringe, la vie bourgeoise ; — puis le
38
ein d’une vallée de verdure et de vergers — c’est
la
Souabe, la Thuringe, la vie bourgeoise ; — puis le contraste d’un mas
39
allée de verdure et de vergers — c’est la Souabe,
la
Thuringe, la vie bourgeoise ; — puis le contraste d’un massif central
40
ure et de vergers — c’est la Souabe, la Thuringe,
la
vie bourgeoise ; — puis le contraste d’un massif central de sapins et
41
a Souabe, la Thuringe, la vie bourgeoise ; — puis
le
contraste d’un massif central de sapins et de lacs secrets, cœur noir
42
Thuringe, la vie bourgeoise ; — puis le contraste
d’
un massif central de sapins et de lacs secrets, cœur noir et tourmenté
43
rgeoise ; — puis le contraste d’un massif central
de
sapins et de lacs secrets, cœur noir et tourmenté du continent, — cet
44
uis le contraste d’un massif central de sapins et
de
lacs secrets, cœur noir et tourmenté du continent, — cette région esc
45
rpée entre Munich, Salzbourg et Prague, qui forme
le
décor voluptueux et lugubre de tant de drames nourris de solitude ; e
46
Prague, qui forme le décor voluptueux et lugubre
de
tant de drames nourris de solitude ; et puis des plaines qui se perde
47
r voluptueux et lugubre de tant de drames nourris
de
solitude ; et puis des plaines qui se perdent en steppes — démesure e
48
ntement dans ces campagnes qui ne sont nulle part
la
« province ». Elles condensent la vie de leur contrée, en donnent la
49
sont nulle part la « province ». Elles condensent
la
vie de leur contrée, en donnent la visible formule, petites capitales
50
lle part la « province ». Elles condensent la vie
de
leur contrée, en donnent la visible formule, petites capitales enraci
51
les condensent la vie de leur contrée, en donnent
la
visible formule, petites capitales enracinées. Il advint pourtant que
52
racinées. Il advint pourtant que certaines, selon
l’
égarement du temps, tentèrent de vivre par elles-mêmes. Elles retirent
53
certaines, selon l’égarement du temps, tentèrent
de
vivre par elles-mêmes. Elles retirent les parcs qui les alliaient à l
54
entèrent de vivre par elles-mêmes. Elles retirent
les
parcs qui les alliaient à la campagne, se ceinturent d’usines, et pre
55
vre par elles-mêmes. Elles retirent les parcs qui
les
alliaient à la campagne, se ceinturent d’usines, et prennent aussitôt
56
mes. Elles retirent les parcs qui les alliaient à
la
campagne, se ceinturent d’usines, et prennent aussitôt cette fièvre c
57
cs qui les alliaient à la campagne, se ceinturent
d’
usines, et prennent aussitôt cette fièvre caractéristique des organism
58
vre caractéristique des organismes humains isolés
de
la vie végétale. C’est ainsi que Berlin réglemente la circulation de
59
caractéristique des organismes humains isolés de
la
vie végétale. C’est ainsi que Berlin réglemente la circulation de ses
60
a vie végétale. C’est ainsi que Berlin réglemente
la
circulation de ses ferments de tristesses intellectuelles, sur une pe
61
C’est ainsi que Berlin réglemente la circulation
de
ses ferments de tristesses intellectuelles, sur une petite superficie
62
Berlin réglemente la circulation de ses ferments
de
tristesses intellectuelles, sur une petite superficie minérale où la
63
lectuelles, sur une petite superficie minérale où
la
vie se décompose avec virulence. Mais Stuttgart, plus moderne, plante
64
sur ses collines, s’aère et redevient une ville à
la
campagne ; du même coup, un centre spirituel. Diversités naissant, vi
65
un centre spirituel. Diversités naissant, vivant
les
unes des autres, contrastes qui jamais ne s’équilibrent, violence et
66
uilibrent, violence et mélancolie, paysages-états
d’
âme imposant tour à tour le cynisme ou la bonhomie, tout cela baigne d
67
ncolie, paysages-états d’âme imposant tour à tour
le
cynisme ou la bonhomie, tout cela baigne dans une inguérissable nosta
68
es-états d’âme imposant tour à tour le cynisme ou
la
bonhomie, tout cela baigne dans une inguérissable nostalgie, celle d’
69
la baigne dans une inguérissable nostalgie, celle
d’
un grand accord complexe qui chercherait en vain sa résolution. ⁂ M’at
70
e géographie sentimentale, j’avais un temps conçu
l’
idée d’établir une Carte du Tendre de la nouvelle Europe centrale. Il
71
aphie sentimentale, j’avais un temps conçu l’idée
d’
établir une Carte du Tendre de la nouvelle Europe centrale. Il semblai
72
temps conçu l’idée d’établir une Carte du Tendre
de
la nouvelle Europe centrale. Il semblait que les noms des traités de
73
mps conçu l’idée d’établir une Carte du Tendre de
la
nouvelle Europe centrale. Il semblait que les noms des traités de 19,
74
e de la nouvelle Europe centrale. Il semblait que
les
noms des traités de 19, Versailles, Trianon, convenaient mieux au roc
75
pe centrale. Il semblait que les noms des traités
de
19, Versailles, Trianon, convenaient mieux au rococo des sentiments q
76
, convenaient mieux au rococo des sentiments qu’à
l’
hypocrite gravité des politiques. Ce projet, d’autre part, flattait un
77
re part, flattait un certain goût du graphique et
de
l’imagerie stylisée qu’à la réflexion je trouvai trop spécifiquement
78
part, flattait un certain goût du graphique et de
l’
imagerie stylisée qu’à la réflexion je trouvai trop spécifiquement fra
79
goût du graphique et de l’imagerie stylisée qu’à
la
réflexion je trouvai trop spécifiquement français pour rendre compte
80
i trop spécifiquement français pour rendre compte
d’
une réalité qui, justement, m’attirait comme une étrangère. Néanmoins,
81
étrangère. Néanmoins, j’eusse un beau jour cédé à
la
tentation du pittoresque et défini, au goût du temps, les frontières
82
ation du pittoresque et défini, au goût du temps,
les
frontières de certains pays dont on venait à peine de reconnaître l’e
83
esque et défini, au goût du temps, les frontières
de
certains pays dont on venait à peine de reconnaître l’existence légal
84
rtains pays dont on venait à peine de reconnaître
l’
existence légale… Je préférai soudain monter dans un express. Pour gué
85
férai soudain monter dans un express. Pour guérir
de
Descartes, il n’est que d’aimer en voyage : l’on découvre bientôt que
86
n express. Pour guérir de Descartes, il n’est que
d’
aimer en voyage : l’on découvre bientôt que rien n’est comparable. Que
87
ir de Descartes, il n’est que d’aimer en voyage :
l’
on découvre bientôt que rien n’est comparable. Quel était ce besoin de
88
t que rien n’est comparable. Quel était ce besoin
de
fixer, de cerner, de localiser dans l’espace des sentiments ou des dé
89
n’est comparable. Quel était ce besoin de fixer,
de
cerner, de localiser dans l’espace des sentiments ou des désirs sans
90
arable. Quel était ce besoin de fixer, de cerner,
de
localiser dans l’espace des sentiments ou des désirs sans fins, et qu
91
ce besoin de fixer, de cerner, de localiser dans
l’
espace des sentiments ou des désirs sans fins, et qui n’ont de réalité
92
sentiments ou des désirs sans fins, et qui n’ont
de
réalité qu’en un cœur, lorsqu’il aime1 ? Tout devenait incompréhensib
93
ime1 ? Tout devenait incompréhensible et certain,
l’
amour n’existait pas ailleurs que dans mes bras, et nul chemin, nulle
94
chemin, nulle distance mesurable, ne conduisaient
de
Tendre-sur-Noblesse à Saint-Masoch-en-Démonie, mais tout se mêlait gl
95
glorieusement dans un humour inénarrable et dans
les
pleurs… J’étais jeune. Le titanisme et la métamorphose « Métamo
96
inénarrable et dans les pleurs… J’étais jeune.
Le
titanisme et la métamorphose « Métamorphose » et « paradoxe », tel
97
ans les pleurs… J’étais jeune. Le titanisme et
la
métamorphose « Métamorphose » et « paradoxe », tels sont peut-être
98
tamorphose » et « paradoxe », tels sont peut-être
les
mots-clés de l’Europe sentimentale. Pourquoi faut-il que notre langue
99
t « paradoxe », tels sont peut-être les mots-clés
de
l’Europe sentimentale. Pourquoi faut-il que notre langue les traduise
100
paradoxe », tels sont peut-être les mots-clés de
l’
Europe sentimentale. Pourquoi faut-il que notre langue les traduise, e
101
e sentimentale. Pourquoi faut-il que notre langue
les
traduise, en vertu d’une convention qu’il serait temps de réviser, pa
102
ise, en vertu d’une convention qu’il serait temps
de
réviser, par « démesure » et « confusion » ? Car il est trop certain
103
» et « confusion » ? Car il est trop certain que
le
mot démesure désigne dans l’esprit d’un bourgeois cartésien quelque c
104
est trop certain que le mot démesure désigne dans
l’
esprit d’un bourgeois cartésien quelque chose dont il convient de se g
105
certain que le mot démesure désigne dans l’esprit
d’
un bourgeois cartésien quelque chose dont il convient de se gausser sa
106
ourgeois cartésien quelque chose dont il convient
de
se gausser sans examen. Mais une exacte traduction ne servirait au fo
107
cte traduction ne servirait au fond qu’à déplacer
le
prétexte d’un malentendu plus tenace. Lorsqu’on parle de paradoxe, Ta
108
on ne servirait au fond qu’à déplacer le prétexte
d’
un malentendu plus tenace. Lorsqu’on parle de paradoxe, Tartempion se
109
exte d’un malentendu plus tenace. Lorsqu’on parle
de
paradoxe, Tartempion se souvient du café du Commerce, tandis que le p
110
andis que le premier des Doktor phil. venu évoque
le
concept d’ironie selon Jean-Paul, la dialectique selon Hegel, et peut
111
e premier des Doktor phil. venu évoque le concept
d’
ironie selon Jean-Paul, la dialectique selon Hegel, et peut-être la pa
112
venu évoque le concept d’ironie selon Jean-Paul,
la
dialectique selon Hegel, et peut-être la passion de Kierkegaard. Mais
113
an-Paul, la dialectique selon Hegel, et peut-être
la
passion de Kierkegaard. Mais alors M. Truc parle des « brumes nordiqu
114
dialectique selon Hegel, et peut-être la passion
de
Kierkegaard. Mais alors M. Truc parle des « brumes nordiques » ! Car
115
lors M. Truc parle des « brumes nordiques » ! Car
la
métamorphose a pour effet certain de rendre tout légalisme inefficace
116
ques » ! Car la métamorphose a pour effet certain
de
rendre tout légalisme inefficace — il n’y a jugement possible que du
117
ce — il n’y a jugement possible que du même —, et
le
paradoxe apparaît aux yeux de ceux pour qui la religion n’est qu’assu
118
et le paradoxe apparaît aux yeux de ceux pour qui
la
religion n’est qu’assurance, comme une dérision désespérée. Malentend
119
sse renaissant au contact des éléments inférieurs
de
deux mondes dont la synthèse constituerait la gloire de ce temps, et,
120
ntact des éléments inférieurs de deux mondes dont
la
synthèse constituerait la gloire de ce temps, et, accessoirement, not
121
urs de deux mondes dont la synthèse constituerait
la
gloire de ce temps, et, accessoirement, notre salut. Parmi les traits
122
x mondes dont la synthèse constituerait la gloire
de
ce temps, et, accessoirement, notre salut. Parmi les traits tout quot
123
ce temps, et, accessoirement, notre salut. Parmi
les
traits tout quotidiens de la mentalité germanique, les plus frappants
124
nt, notre salut. Parmi les traits tout quotidiens
de
la mentalité germanique, les plus frappants apparaissent déterminés p
125
notre salut. Parmi les traits tout quotidiens de
la
mentalité germanique, les plus frappants apparaissent déterminés par
126
raits tout quotidiens de la mentalité germanique,
les
plus frappants apparaissent déterminés par la morale du titanisme. Or
127
e, les plus frappants apparaissent déterminés par
la
morale du titanisme. Or elle implique la réalité de la métamorphose.
128
inés par la morale du titanisme. Or elle implique
la
réalité de la métamorphose. Les autres traits relèvent d’un sentiment
129
morale du titanisme. Or elle implique la réalité
de
la métamorphose. Les autres traits relèvent d’un sentimentalisme part
130
rale du titanisme. Or elle implique la réalité de
la
métamorphose. Les autres traits relèvent d’un sentimentalisme particu
131
. Or elle implique la réalité de la métamorphose.
Les
autres traits relèvent d’un sentimentalisme particulier, synthèse « p
132
té de la métamorphose. Les autres traits relèvent
d’
un sentimentalisme particulier, synthèse « paradoxale » et jamais suff
133
arguments sanglants. Et s’il est des domaines où
de
nos jours, l’on peut réclamer à bon droit l’économie de nuances vaine
134
glants. Et s’il est des domaines où de nos jours,
l’
on peut réclamer à bon droit l’économie de nuances vaines et la décisi
135
s où de nos jours, l’on peut réclamer à bon droit
l’
économie de nuances vaines et la décision, même brutale, l’on ne saura
136
jours, l’on peut réclamer à bon droit l’économie
de
nuances vaines et la décision, même brutale, l’on ne saurait ici serr
137
lamer à bon droit l’économie de nuances vaines et
la
décision, même brutale, l’on ne saurait ici serrer de trop près les o
138
e de nuances vaines et la décision, même brutale,
l’
on ne saurait ici serrer de trop près les origines secrètes d’un phéno
139
écision, même brutale, l’on ne saurait ici serrer
de
trop près les origines secrètes d’un phénomène qui produit ses effets
140
brutale, l’on ne saurait ici serrer de trop près
les
origines secrètes d’un phénomène qui produit ses effets sur tous les
141
ait ici serrer de trop près les origines secrètes
d’
un phénomène qui produit ses effets sur tous les plans, celui de la gu
142
es d’un phénomène qui produit ses effets sur tous
les
plans, celui de la guerre y compris. Mais il est bon de préciser, fût
143
qui produit ses effets sur tous les plans, celui
de
la guerre y compris. Mais il est bon de préciser, fût-ce à l’aide d’u
144
i produit ses effets sur tous les plans, celui de
la
guerre y compris. Mais il est bon de préciser, fût-ce à l’aide d’un s
145
ns, celui de la guerre y compris. Mais il est bon
de
préciser, fût-ce à l’aide d’un seul exemple. L’Allemand, dit-on, est
146
y compris. Mais il est bon de préciser, fût-ce à
l’
aide d’un seul exemple. L’Allemand, dit-on, est brutal ; le Français m
147
ris. Mais il est bon de préciser, fût-ce à l’aide
d’
un seul exemple. L’Allemand, dit-on, est brutal ; le Français malin. D
148
n de préciser, fût-ce à l’aide d’un seul exemple.
L’
Allemand, dit-on, est brutal ; le Français malin. Deux traits de carac
149
un seul exemple. L’Allemand, dit-on, est brutal ;
le
Français malin. Deux traits de caractère dont les manifestations quot
150
t-on, est brutal ; le Français malin. Deux traits
de
caractère dont les manifestations quotidiennes, dans le domaine du se
151
le Français malin. Deux traits de caractère dont
les
manifestations quotidiennes, dans le domaine du sentiment et des rapp
152
actère dont les manifestations quotidiennes, dans
le
domaine du sentiment et des rapports sociaux, sont agaçantes à l’extr
153
ntiment et des rapports sociaux, sont agaçantes à
l’
extrême pour l’autre. Agacement que l’on traduit en s’accusant récipro
154
agaçantes à l’extrême pour l’autre. Agacement que
l’
on traduit en s’accusant réciproquement de mensonge chronique. Et de f
155
ent que l’on traduit en s’accusant réciproquement
de
mensonge chronique. Et de fait, la brutalité paraît fausse, parce qu’
156
accusant réciproquement de mensonge chronique. Et
de
fait, la brutalité paraît fausse, parce qu’elle impose un ordre arbit
157
réciproquement de mensonge chronique. Et de fait,
la
brutalité paraît fausse, parce qu’elle impose un ordre arbitraire au
158
parce qu’elle impose un ordre arbitraire au prix
d’
un désordre. Mais à l’Allemand, cette sorte-là de mensonge n’est guère
159
un ordre arbitraire au prix d’un désordre. Mais à
l’
Allemand, cette sorte-là de mensonge n’est guère sensible : la vérité
160
d’un désordre. Mais à l’Allemand, cette sorte-là
de
mensonge n’est guère sensible : la vérité pour lui étant ce qui s’imp
161
cette sorte-là de mensonge n’est guère sensible :
la
vérité pour lui étant ce qui s’impose, il la confond assez naturellem
162
le : la vérité pour lui étant ce qui s’impose, il
la
confond assez naturellement avec ce qu’il impose. Confusion liée au m
163
avec ce qu’il impose. Confusion liée au mouvement
le
plus profond de l’âme allemande, qui la porte à la création volontair
164
pose. Confusion liée au mouvement le plus profond
de
l’âme allemande, qui la porte à la création volontaire, titanique, du
165
e. Confusion liée au mouvement le plus profond de
l’
âme allemande, qui la porte à la création volontaire, titanique, du ré
166
mouvement le plus profond de l’âme allemande, qui
la
porte à la création volontaire, titanique, du réel. Son mensonge devi
167
e plus profond de l’âme allemande, qui la porte à
la
création volontaire, titanique, du réel. Son mensonge devient vérité
168
du réel. Son mensonge devient vérité dès qu’elle
le
veut assez puissamment. Mais en revanche, l’habileté paraît fausse, p
169
elle le veut assez puissamment. Mais en revanche,
l’
habileté paraît fausse, parce qu’elle se sert du mensonge comme d’une
170
t fausse, parce qu’elle se sert du mensonge comme
d’
une arme normale. La brutalité du moins est loyale jusque dans ses exc
171
lle se sert du mensonge comme d’une arme normale.
La
brutalité du moins est loyale jusque dans ses excès. L’habileté, elle
172
talité du moins est loyale jusque dans ses excès.
L’
habileté, elle, masque et renie ses mensonges. Mais pour le Français,
173
é, elle, masque et renie ses mensonges. Mais pour
le
Français, cela ne saurait présenter que des inconvénients tout pratiq
174
convénients tout pratiques, strictement limités à
la
victime. Car il reste sous-entendu et bien entendu, qu’en soi, la vér
175
il reste sous-entendu et bien entendu, qu’en soi,
la
vérité est immuable, qu’elle n’est nullement atteinte par un mensonge
176
n définitive, ne change rien. En d’autres termes,
le
mensonge français n’est pas mythique. Il ne crée ni ne fausse rien d’
177
n’est pas mythique. Il ne crée ni ne fausse rien
d’
essentiel à la réalité. Le système D n’est pas un système philosophiqu
178
hique. Il ne crée ni ne fausse rien d’essentiel à
la
réalité. Le système D n’est pas un système philosophique. Ainsi se de
179
crée ni ne fausse rien d’essentiel à la réalité.
Le
système D n’est pas un système philosophique. Ainsi se dessineraient,
180
phique. Ainsi se dessineraient, si nous étendions
l’
analyse, deux « natures » fondamentales divergentes, dont il serait fa
181
fondamentales divergentes, dont il serait facile
de
suivre les manifestations dans les domaines les plus variés de l’être
182
ales divergentes, dont il serait facile de suivre
les
manifestations dans les domaines les plus variés de l’être. Qu’on ne
183
l serait facile de suivre les manifestations dans
les
domaines les plus variés de l’être. Qu’on ne voie pas ici quelque fac
184
le de suivre les manifestations dans les domaines
les
plus variés de l’être. Qu’on ne voie pas ici quelque facile généralis
185
manifestations dans les domaines les plus variés
de
l’être. Qu’on ne voie pas ici quelque facile généralisation, mais bie
186
nifestations dans les domaines les plus variés de
l’
être. Qu’on ne voie pas ici quelque facile généralisation, mais bien p
187
facile généralisation, mais bien plutôt un essai
de
spécification. Je pense, comme vous, qu’il existe quantité d’Allemand
188
tion. Je pense, comme vous, qu’il existe quantité
d’
Allemands et de Français pour lesquels la distinction que l’on vient d
189
comme vous, qu’il existe quantité d’Allemands et
de
Français pour lesquels la distinction que l’on vient d’établir ne vau
190
quantité d’Allemands et de Français pour lesquels
la
distinction que l’on vient d’établir ne vaut rien : il est même proba
191
s et de Français pour lesquels la distinction que
l’
on vient d’établir ne vaut rien : il est même probable qu’ils forment
192
nçais pour lesquels la distinction que l’on vient
d’
établir ne vaut rien : il est même probable qu’ils forment la majorité
193
e vaut rien : il est même probable qu’ils forment
la
majorité, car peu de gens sont typiques de quoi que ce soit. Il reste
194
orment la majorité, car peu de gens sont typiques
de
quoi que ce soit. Il reste que certains tours de pensée ne sont vérit
195
de quoi que ce soit. Il reste que certains tours
de
pensée ne sont véritablement réalisables qu’au sein d’un ensemble org
196
nt réalisables qu’au sein d’un ensemble organique
de
mœurs, de climat et d’ambitions collectives, ensemble que, tout indép
197
bles qu’au sein d’un ensemble organique de mœurs,
de
climat et d’ambitions collectives, ensemble que, tout indépendamment
198
in d’un ensemble organique de mœurs, de climat et
d’
ambitions collectives, ensemble que, tout indépendamment des réalités
199
endamment des réalités économiques et politiques,
l’
on peut nommer ici Allemagne, et là, France. Il reste qu’un Empédocle,
200
ançais qui, le premier, conçut, pour s’en vanter,
l’
idée qu’il était né malin. Paradoxe du sentiment Une rumeur loin
201
ntiment Une rumeur lointaine et continue, nous
l’
entendons seulement lorsqu’elle cesse, ou bien lorsqu’elle grandit sou
202
cesse, ou bien lorsqu’elle grandit soudain. Ainsi
de
la rumeur en nous du sang qui court ; ainsi de la respiration. Il n’y
203
se, ou bien lorsqu’elle grandit soudain. Ainsi de
la
rumeur en nous du sang qui court ; ainsi de la respiration. Il n’y a
204
si de la rumeur en nous du sang qui court ; ainsi
de
la respiration. Il n’y a conscience que du discontinu. Il n’y a senti
205
de la rumeur en nous du sang qui court ; ainsi de
la
respiration. Il n’y a conscience que du discontinu. Il n’y a sentimen
206
science que du discontinu. Il n’y a sentiment que
de
ce qui nous quitte, ou nous surprend, ou bien encore au fond de l’êtr
207
quitte, ou nous surprend, ou bien encore au fond
de
l’être nous déchire et nous ressuscite. À la naissance du sentiment,
208
itte, ou nous surprend, ou bien encore au fond de
l’
être nous déchire et nous ressuscite. À la naissance du sentiment, nou
209
fond de l’être nous déchire et nous ressuscite. À
la
naissance du sentiment, nous trouvons invariablement une contradictio
210
est un appel, et qui crée sa réponse — en vain.
Le
sentiment mesure une défaillance de l’être. Mais ici, deux interpréta
211
e — en vain. Le sentiment mesure une défaillance
de
l’être. Mais ici, deux interprétations deviennent possibles. Selon l’
212
en vain. Le sentiment mesure une défaillance de
l’
être. Mais ici, deux interprétations deviennent possibles. Selon l’une
213
est inhérente à toute réalité humaine ; elle est
la
marque même de sa validité, la preuve d’humanité pourrait-on dire. (O
214
à toute réalité humaine ; elle est la marque même
de
sa validité, la preuve d’humanité pourrait-on dire. (On appelle inhum
215
humaine ; elle est la marque même de sa validité,
la
preuve d’humanité pourrait-on dire. (On appelle inhumain l’être qui n
216
elle est la marque même de sa validité, la preuve
d’
humanité pourrait-on dire. (On appelle inhumain l’être qui ne sent rie
217
d’humanité pourrait-on dire. (On appelle inhumain
l’
être qui ne sent rien.) Selon l’autre, elle indique seulement un défau
218
, elle indique seulement un défaut qu’il convient
de
guérir par des moyens appropriés, par une politique ou par une morale
219
, par une politique ou par une morale. D’une part
l’
on tient la déficience pour essentielle ; de l’autre elle apparaît un
220
olitique ou par une morale. D’une part l’on tient
la
déficience pour essentielle ; de l’autre elle apparaît un accident fâ
221
part l’on tient la déficience pour essentielle ;
de
l’autre elle apparaît un accident fâcheux. Telles, peut-être, se déli
222
ccident fâcheux. Telles, peut-être, se délimitent
la
notion chrétienne et la notion antique de l’homme ; telles dans une c
223
peut-être, se délimitent la notion chrétienne et
la
notion antique de l’homme ; telles dans une certaine mesure, la notio
224
imitent la notion chrétienne et la notion antique
de
l’homme ; telles dans une certaine mesure, la notion germanique et la
225
tent la notion chrétienne et la notion antique de
l’
homme ; telles dans une certaine mesure, la notion germanique et la no
226
que de l’homme ; telles dans une certaine mesure,
la
notion germanique et la notion latine. Le paradoxe humain revêt aux y
227
dans une certaine mesure, la notion germanique et
la
notion latine. Le paradoxe humain revêt aux yeux du philosophe modern
228
mesure, la notion germanique et la notion latine.
Le
paradoxe humain revêt aux yeux du philosophe moderne une valeur métap
229
ne une valeur métaphysique alors qu’il garde pour
le
moraliste latin la signification d’un accident social réductible à l’
230
hysique alors qu’il garde pour le moraliste latin
la
signification d’un accident social réductible à l’ordre imposé. Passa
231
il garde pour le moraliste latin la signification
d’
un accident social réductible à l’ordre imposé. Passant à la limite du
232
a signification d’un accident social réductible à
l’
ordre imposé. Passant à la limite du sentiment, là où il prend une val
233
ent social réductible à l’ordre imposé. Passant à
la
limite du sentiment, là où il prend une valeur d’acte ou de jugement,
234
la limite du sentiment, là où il prend une valeur
d’
acte ou de jugement, l’on peut symboliser l’opposition des deux vision
235
du sentiment, là où il prend une valeur d’acte ou
de
jugement, l’on peut symboliser l’opposition des deux visions du monde
236
là où il prend une valeur d’acte ou de jugement,
l’
on peut symboliser l’opposition des deux visions du monde dans celle,
237
aleur d’acte ou de jugement, l’on peut symboliser
l’
opposition des deux visions du monde dans celle, plus précise, de deux
238
s deux visions du monde dans celle, plus précise,
de
deux notions du tragique. Le monde latin connaît un tragique aux arêt
239
celle, plus précise, de deux notions du tragique.
Le
monde latin connaît un tragique aux arêtes de pierre taillée : confli
240
ue. Le monde latin connaît un tragique aux arêtes
de
pierre taillée : conflits d’actes, de faits ou de droits ; l’Europe c
241
tragique aux arêtes de pierre taillée : conflits
d’
actes, de faits ou de droits ; l’Europe centrale, de ces choses « déch
242
aux arêtes de pierre taillée : conflits d’actes,
de
faits ou de droits ; l’Europe centrale, de ces choses « déchirantes »
243
de pierre taillée : conflits d’actes, de faits ou
de
droits ; l’Europe centrale, de ces choses « déchirantes » et sans nom
244
illée : conflits d’actes, de faits ou de droits ;
l’
Europe centrale, de ces choses « déchirantes » et sans nom qui font da
245
actes, de faits ou de droits ; l’Europe centrale,
de
ces choses « déchirantes » et sans nom qui font dans l’âme un bruit d
246
choses « déchirantes » et sans nom qui font dans
l’
âme un bruit de vent mortel et caressant ; une qualité métaphysique et
247
rantes » et sans nom qui font dans l’âme un bruit
de
vent mortel et caressant ; une qualité métaphysique et passionnée de
248
aressant ; une qualité métaphysique et passionnée
de
l’ « impossible », — qui dans ce sens, vraiment, n’est pas un mot fra
249
ssant ; une qualité métaphysique et passionnée de
l’
« impossible », — qui dans ce sens, vraiment, n’est pas un mot frança
250
ns, vraiment, n’est pas un mot français. En ceci,
le
monde de l’Europe centrale est plus chrétien que le monde latin — si
251
ent, n’est pas un mot français. En ceci, le monde
de
l’Europe centrale est plus chrétien que le monde latin — si l’on cons
252
, n’est pas un mot français. En ceci, le monde de
l’
Europe centrale est plus chrétien que le monde latin — si l’on considè
253
monde de l’Europe centrale est plus chrétien que
le
monde latin — si l’on considère ses manières de sentir et de penser —
254
entrale est plus chrétien que le monde latin — si
l’
on considère ses manières de sentir et de penser — qu’il est essentiel
255
e le monde latin — si l’on considère ses manières
de
sentir et de penser — qu’il est essentiellement antithétique, déchiré
256
tin — si l’on considère ses manières de sentir et
de
penser — qu’il est essentiellement antithétique, déchiré (« déchirant
257
déchiré (« déchirant ») et fondé sur cette vision
de
la réalité humaine : la vie est manque et compensation de ce manque ;
258
hiré (« déchirant ») et fondé sur cette vision de
la
réalité humaine : la vie est manque et compensation de ce manque ; co
259
et fondé sur cette vision de la réalité humaine :
la
vie est manque et compensation de ce manque ; contradictions et dépas
260
alité humaine : la vie est manque et compensation
de
ce manque ; contradictions et dépassement de ces contradictions2. Le
261
tion de ce manque ; contradictions et dépassement
de
ces contradictions2. Le monde latin, en tant que latin, étant un mond
262
radictions et dépassement de ces contradictions2.
Le
monde latin, en tant que latin, étant un monde de l’unité (en vérité
263
Le monde latin, en tant que latin, étant un monde
de
l’unité (en vérité de l’unification à tout prix) est un monde « sécul
264
monde latin, en tant que latin, étant un monde de
l’
unité (en vérité de l’unification à tout prix) est un monde « séculari
265
t que latin, étant un monde de l’unité (en vérité
de
l’unification à tout prix) est un monde « sécularisé » jusque dans se
266
ue latin, étant un monde de l’unité (en vérité de
l’
unification à tout prix) est un monde « sécularisé » jusque dans ses m
267
est un monde « sécularisé » jusque dans ses modes
les
plus intimes de souffrir. Car il n’accepte pas la souffrance comme un
268
cularisé » jusque dans ses modes les plus intimes
de
souffrir. Car il n’accepte pas la souffrance comme une condition de l
269
es plus intimes de souffrir. Car il n’accepte pas
la
souffrance comme une condition de la conscience du réel, mais la repo
270
l n’accepte pas la souffrance comme une condition
de
la conscience du réel, mais la repousse comme le signe d’un manque à
271
’accepte pas la souffrance comme une condition de
la
conscience du réel, mais la repousse comme le signe d’un manque à la
272
omme une condition de la conscience du réel, mais
la
repousse comme le signe d’un manque à la loi. Il y a une contrepartie
273
de la conscience du réel, mais la repousse comme
le
signe d’un manque à la loi. Il y a une contrepartie. Celui que hante
274
nscience du réel, mais la repousse comme le signe
d’
un manque à la loi. Il y a une contrepartie. Celui que hante le sens d
275
el, mais la repousse comme le signe d’un manque à
la
loi. Il y a une contrepartie. Celui que hante le sens du péché — c’es
276
la loi. Il y a une contrepartie. Celui que hante
le
sens du péché — c’est-à-dire de la réalité humaine — celui-là résiste
277
. Celui que hante le sens du péché — c’est-à-dire
de
la réalité humaine — celui-là résiste rarement à la tentation de cult
278
elui que hante le sens du péché — c’est-à-dire de
la
réalité humaine — celui-là résiste rarement à la tentation de cultive
279
la réalité humaine — celui-là résiste rarement à
la
tentation de cultiver le péché. Car de la sorte, il s’imagine que sa
280
umaine — celui-là résiste rarement à la tentation
de
cultiver le péché. Car de la sorte, il s’imagine que sa réalité spiri
281
ui-là résiste rarement à la tentation de cultiver
le
péché. Car de la sorte, il s’imagine que sa réalité spirituelle sera
282
rarement à la tentation de cultiver le péché. Car
de
la sorte, il s’imagine que sa réalité spirituelle sera plus vive, son
283
ement à la tentation de cultiver le péché. Car de
la
sorte, il s’imagine que sa réalité spirituelle sera plus vive, son âm
284
ra plus vive, son âme plus fortement engagée dans
le
tragique essentiel. Calcul faux, comme tous les calculs de l’âme : le
285
ns le tragique essentiel. Calcul faux, comme tous
les
calculs de l’âme : le péché n’est réel que pour celui qui veut s’en a
286
ue essentiel. Calcul faux, comme tous les calculs
de
l’âme : le péché n’est réel que pour celui qui veut s’en arracher. To
287
essentiel. Calcul faux, comme tous les calculs de
l’
âme : le péché n’est réel que pour celui qui veut s’en arracher. Toute
288
l. Calcul faux, comme tous les calculs de l’âme :
le
péché n’est réel que pour celui qui veut s’en arracher. Toute délecta
289
détruit jusqu’aux sens sur lesquels elle régnait.
Le
sentimentalisme, dès qu’il devient délectation des sentiments, donne
290
, donne naissance à une lâcheté singulière devant
la
vie. Né d’un retard dans l’actualisation, il peut tourner alors en un
291
ssance à une lâcheté singulière devant la vie. Né
d’
un retard dans l’actualisation, il peut tourner alors en un refus chro
292
eté singulière devant la vie. Né d’un retard dans
l’
actualisation, il peut tourner alors en un refus chronique. Et c’est e
293
ner alors en un refus chronique. Et c’est en quoi
le
monde latin, monde de la spontanéité, est à son tour plus audacieux,
294
chronique. Et c’est en quoi le monde latin, monde
de
la spontanéité, est à son tour plus audacieux, et pour tout dire plus
295
onique. Et c’est en quoi le monde latin, monde de
la
spontanéité, est à son tour plus audacieux, et pour tout dire plus ch
296
us audacieux, et pour tout dire plus chrétien que
le
monde de l’Europe centrale. L’intelligence est sentimentale Le
297
eux, et pour tout dire plus chrétien que le monde
de
l’Europe centrale. L’intelligence est sentimentale Le sentiment
298
, et pour tout dire plus chrétien que le monde de
l’
Europe centrale. L’intelligence est sentimentale Le sentiment :
299
us chrétien que le monde de l’Europe centrale.
L’
intelligence est sentimentale Le sentiment : un retard, un regret.
300
e centrale. L’intelligence est sentimentale
Le
sentiment : un retard, un regret. Mais c’est aussi un retour amoureux
301
egard qui s’appuie sur soi-même : et voici naître
la
conscience, c’est-à-dire, un état d’intensité mortelle de la vie. Car
302
voici naître la conscience, c’est-à-dire, un état
d’
intensité mortelle de la vie. Car la conscience de vivre implique une
303
ience, c’est-à-dire, un état d’intensité mortelle
de
la vie. Car la conscience de vivre implique une réflexion concrète qu
304
ce, c’est-à-dire, un état d’intensité mortelle de
la
vie. Car la conscience de vivre implique une réflexion concrète qui e
305
dire, un état d’intensité mortelle de la vie. Car
la
conscience de vivre implique une réflexion concrète qui exalte la vie
306
d’intensité mortelle de la vie. Car la conscience
de
vivre implique une réflexion concrète qui exalte la vie ; et dans le
307
vivre implique une réflexion concrète qui exalte
la
vie ; et dans le même temps, un jugement abstrait, qui la tue. Le sen
308
ne réflexion concrète qui exalte la vie ; et dans
le
même temps, un jugement abstrait, qui la tue. Le sentimentalisme n’es
309
et dans le même temps, un jugement abstrait, qui
la
tue. Le sentimentalisme n’est pas du tout le contraire du rationalism
310
le même temps, un jugement abstrait, qui la tue.
Le
sentimentalisme n’est pas du tout le contraire du rationalisme (mais
311
qui la tue. Le sentimentalisme n’est pas du tout
le
contraire du rationalisme (mais nous vivons sur des distinctions de m
312
tionalisme (mais nous vivons sur des distinctions
de
manuels). Il est même étonnant de constater combien exactement ces at
313
es distinctions de manuels). Il est même étonnant
de
constater combien exactement ces attitudes de l’esprit sont parallèle
314
ant de constater combien exactement ces attitudes
de
l’esprit sont parallèles. Toutes deux ont leur origine dans un perpét
315
de constater combien exactement ces attitudes de
l’
esprit sont parallèles. Toutes deux ont leur origine dans un perpétuel
316
leur origine dans un perpétuel et anxieux besoin
de
dire les choses, comme pour s’en assurer à la fois et s’en délecter3.
317
igine dans un perpétuel et anxieux besoin de dire
les
choses, comme pour s’en assurer à la fois et s’en délecter3. À cette
318
à la fois et s’en délecter3. À cette disposition
l’
on pourrait opposer, plutôt que la taciturne réflexion romaine, la tou
319
tte disposition l’on pourrait opposer, plutôt que
la
taciturne réflexion romaine, la tournure d’esprit sentencieuse et syn
320
poser, plutôt que la taciturne réflexion romaine,
la
tournure d’esprit sentencieuse et synthétique de l’esprit hindou. Et
321
t que la taciturne réflexion romaine, la tournure
d’
esprit sentencieuse et synthétique de l’esprit hindou. Et cela n’est p
322
la tournure d’esprit sentencieuse et synthétique
de
l’esprit hindou. Et cela n’est point trop théorique. Que l’on considè
323
tournure d’esprit sentencieuse et synthétique de
l’
esprit hindou. Et cela n’est point trop théorique. Que l’on considère
324
t hindou. Et cela n’est point trop théorique. Que
l’
on considère en effet le devenir dialectique de la pensée allemande de
325
point trop théorique. Que l’on considère en effet
le
devenir dialectique de la pensée allemande depuis Goethe : c’est à l’
326
ue l’on considère en effet le devenir dialectique
de
la pensée allemande depuis Goethe : c’est à l’Orient, d’instinct, que
327
l’on considère en effet le devenir dialectique de
la
pensée allemande depuis Goethe : c’est à l’Orient, d’instinct, que ce
328
ue de la pensée allemande depuis Goethe : c’est à
l’
Orient, d’instinct, que cette pensée va demander non point seulement s
329
ensée allemande depuis Goethe : c’est à l’Orient,
d’
instinct, que cette pensée va demander non point seulement sa revanche
330
evenir. Ne pourrait-on pas voir une autre preuve
de
cette identité formelle dans l’observation suivante : au sortir de l’
331
une autre preuve de cette identité formelle dans
l’
observation suivante : au sortir de l’adolescence, l’homme devient à l
332
rmelle dans l’observation suivante : au sortir de
l’
adolescence, l’homme devient à la fois moins abstrait et moins sentime
333
bservation suivante : au sortir de l’adolescence,
l’
homme devient à la fois moins abstrait et moins sentimental ; cela se
334
t moins porté à généraliser, et borne son désir à
l’
immédiat. À la limite de la puissance, c’est la réaction goethéenne. G
335
à généraliser, et borne son désir à l’immédiat. À
la
limite de la puissance, c’est la réaction goethéenne. Goethe en ce se
336
ser, et borne son désir à l’immédiat. À la limite
de
la puissance, c’est la réaction goethéenne. Goethe en ce sens est bie
337
, et borne son désir à l’immédiat. À la limite de
la
puissance, c’est la réaction goethéenne. Goethe en ce sens est bien l
338
à l’immédiat. À la limite de la puissance, c’est
la
réaction goethéenne. Goethe en ce sens est bien l’antiallemand, ou en
339
a réaction goethéenne. Goethe en ce sens est bien
l’
antiallemand, ou encore comme le disait Curtius, le premier classique
340
ce sens est bien l’antiallemand, ou encore comme
le
disait Curtius, le premier classique allemand. Bien plus que Nietzsch
341
plus que Nietzsche, type du déchiré, qui glorifie
l’
instinct perdu, en véritable sentimental. L’instinct mène au plaisir p
342
rifie l’instinct perdu, en véritable sentimental.
L’
instinct mène au plaisir par l’acte ; le sentiment à la mélancolie, pa
343
table sentimental. L’instinct mène au plaisir par
l’
acte ; le sentiment à la mélancolie, par le refus de l’acte. Il en rés
344
timental. L’instinct mène au plaisir par l’acte ;
le
sentiment à la mélancolie, par le refus de l’acte. Il en résulte que
345
tinct mène au plaisir par l’acte ; le sentiment à
la
mélancolie, par le refus de l’acte. Il en résulte que la sensualité g
346
ir par l’acte ; le sentiment à la mélancolie, par
le
refus de l’acte. Il en résulte que la sensualité germanique est plus
347
acte ; le sentiment à la mélancolie, par le refus
de
l’acte. Il en résulte que la sensualité germanique est plus conscient
348
e ; le sentiment à la mélancolie, par le refus de
l’
acte. Il en résulte que la sensualité germanique est plus consciente (
349
ncolie, par le refus de l’acte. Il en résulte que
la
sensualité germanique est plus consciente (c’est-à-dire à la fois plu
350
dire à la fois plus morose et plus débauchée) que
la
latine. Elle tourne en sentiments dans la mesure où elle refuse de s’
351
ée) que la latine. Elle tourne en sentiments dans
la
mesure où elle refuse de s’accomplir pleinement. L’Italien fait l’amo
352
ourne en sentiments dans la mesure où elle refuse
de
s’accomplir pleinement. L’Italien fait l’amour et n’épilogue pas. L’A
353
mesure où elle refuse de s’accomplir pleinement.
L’
Italien fait l’amour et n’épilogue pas. L’Allemand ne fait pas l’amour
354
refuse de s’accomplir pleinement. L’Italien fait
l’
amour et n’épilogue pas. L’Allemand ne fait pas l’amour et en tire une
355
nement. L’Italien fait l’amour et n’épilogue pas.
L’
Allemand ne fait pas l’amour et en tire une métaphysique. Le plaisir e
356
l’amour et n’épilogue pas. L’Allemand ne fait pas
l’
amour et en tire une métaphysique. Le plaisir est pour lui rareté, fri
357
ne fait pas l’amour et en tire une métaphysique.
Le
plaisir est pour lui rareté, friandise, et devient tout de suite une
358
déchirante et délicieuse comme les secondes voix
de
Schumann. Mais la crainte me prend qu’on aille chercher en ces remarq
359
icieuse comme les secondes voix de Schumann. Mais
la
crainte me prend qu’on aille chercher en ces remarques je ne sais que
360
ercher en ces remarques je ne sais quelle défense
d’
un Occident latin dont justement nous récusons l’idéal d’orgueilleuse
361
d’un Occident latin dont justement nous récusons
l’
idéal d’orgueilleuse et stérilisante perfection. L’intelligence latine
362
cident latin dont justement nous récusons l’idéal
d’
orgueilleuse et stérilisante perfection. L’intelligence latine aurait
363
’idéal d’orgueilleuse et stérilisante perfection.
L’
intelligence latine aurait tout à gagner à se laisser berner et houspi
364
dées, trop soumises par leur nature et dépourvues
de
coquetteries. À force de se craindre dupe, elle a perdu le goût de se
365
teries. À force de se craindre dupe, elle a perdu
le
goût de se risquer, de découvrir. Et l’impuissance qui déjà la frappe
366
À force de se craindre dupe, elle a perdu le goût
de
se risquer, de découvrir. Et l’impuissance qui déjà la frappe n’est p
367
raindre dupe, elle a perdu le goût de se risquer,
de
découvrir. Et l’impuissance qui déjà la frappe n’est pas même compens
368
e a perdu le goût de se risquer, de découvrir. Et
l’
impuissance qui déjà la frappe n’est pas même compensée par une réelle
369
risquer, de découvrir. Et l’impuissance qui déjà
la
frappe n’est pas même compensée par une réelle prise de conscience. C
370
ar une réelle prise de conscience. Car voici bien
le
triomphe du sentiment : c’est qu’en définitive il détient plus de réa
371
entiment : c’est qu’en définitive il détient plus
de
réalité que la sensation4. Le désir et le regret sont plus certains q
372
t qu’en définitive il détient plus de réalité que
la
sensation4. Le désir et le regret sont plus certains que le plaisir.
373
ive il détient plus de réalité que la sensation4.
Le
désir et le regret sont plus certains que le plaisir. Seuls ils suppo
374
nt plus de réalité que la sensation4. Le désir et
le
regret sont plus certains que le plaisir. Seuls ils supportent dans l
375
on4. Le désir et le regret sont plus certains que
le
plaisir. Seuls ils supportent dans leur sein la réflexion. Bien plus,
376
e le plaisir. Seuls ils supportent dans leur sein
la
réflexion. Bien plus, ils la provoquent, l’animent et la rendent rayo
377
rtent dans leur sein la réflexion. Bien plus, ils
la
provoquent, l’animent et la rendent rayonnante, au lieu que le plaisi
378
sein la réflexion. Bien plus, ils la provoquent,
l’
animent et la rendent rayonnante, au lieu que le plaisir ou la fuit, o
379
exion. Bien plus, ils la provoquent, l’animent et
la
rendent rayonnante, au lieu que le plaisir ou la fuit, ou la tue. La
380
, l’animent et la rendent rayonnante, au lieu que
le
plaisir ou la fuit, ou la tue. La sensualité adore la bêtise. Mais l’
381
la rendent rayonnante, au lieu que le plaisir ou
la
fuit, ou la tue. La sensualité adore la bêtise. Mais l’intelligence v
382
rayonnante, au lieu que le plaisir ou la fuit, ou
la
tue. La sensualité adore la bêtise. Mais l’intelligence véritable est
383
te, au lieu que le plaisir ou la fuit, ou la tue.
La
sensualité adore la bêtise. Mais l’intelligence véritable est toujour
384
laisir ou la fuit, ou la tue. La sensualité adore
la
bêtise. Mais l’intelligence véritable est toujours sentimentale. ⁂ Eu
385
t, ou la tue. La sensualité adore la bêtise. Mais
l’
intelligence véritable est toujours sentimentale. ⁂ Europe du sentimen
386
jours sentimentale. ⁂ Europe du sentiment, patrie
de
la lenteur, — encore un paradis perdu ! C’était bien notre dernier lu
387
rs sentimentale. ⁂ Europe du sentiment, patrie de
la
lenteur, — encore un paradis perdu ! C’était bien notre dernier luxe,
388
vie. Mais ils s’achètent des Bugatti pour brûler
les
étapes d’un destin qu’ils pressentent absurde. Rien désormais ne pour
389
ils s’achètent des Bugatti pour brûler les étapes
d’
un destin qu’ils pressentent absurde. Rien désormais ne pourra plus no
390
bsurde. Rien désormais ne pourra plus nous rendre
le
silence et la lenteur des choses. Derniers refuges, vastes auberges d
391
ésormais ne pourra plus nous rendre le silence et
la
lenteur des choses. Derniers refuges, vastes auberges de la Souabe où
392
eur des choses. Derniers refuges, vastes auberges
de
la Souabe où l’on chantait les chœurs de Schubert après boire — et le
393
des choses. Derniers refuges, vastes auberges de
la
Souabe où l’on chantait les chœurs de Schubert après boire — et les h
394
Derniers refuges, vastes auberges de la Souabe où
l’
on chantait les chœurs de Schubert après boire — et les hommes parlaie
395
es, vastes auberges de la Souabe où l’on chantait
les
chœurs de Schubert après boire — et les hommes parlaient lentement, p
396
auberges de la Souabe où l’on chantait les chœurs
de
Schubert après boire — et les hommes parlaient lentement, parlaient p
397
chantait les chœurs de Schubert après boire — et
les
hommes parlaient lentement, parlaient peu, — c’est le secret de votre
398
ommes parlaient lentement, parlaient peu, — c’est
le
secret de votre bienveillance que je voudrais rechercher maintenant.
399
aient lentement, parlaient peu, — c’est le secret
de
votre bienveillance que je voudrais rechercher maintenant. Bienveilla
400
escence encore « marche, s’arrête et marche, avec
le
col penché »… Contribution à l’archéologie des états d’âme. L’Europe
401
e et marche, avec le col penché »… Contribution à
l’
archéologie des états d’âme. L’Europe du sentiment, c’est notre Europe
402
penché »… Contribution à l’archéologie des états
d’
âme. L’Europe du sentiment, c’est notre Europe des adieux. Elle ne vit
403
»… Contribution à l’archéologie des états d’âme.
L’
Europe du sentiment, c’est notre Europe des adieux. Elle ne vit plus q
404
es adieux. Elle ne vit plus qu’en nous déjà, nous
la
portons encore comme le souvenir d’un soir d’adolescence sur la prair
405
lus qu’en nous déjà, nous la portons encore comme
le
souvenir d’un soir d’adolescence sur la prairie où des filles s’éloig
406
us déjà, nous la portons encore comme le souvenir
d’
un soir d’adolescence sur la prairie où des filles s’éloignent en chan
407
ous la portons encore comme le souvenir d’un soir
d’
adolescence sur la prairie où des filles s’éloignent en chantant. Voic
408
ore comme le souvenir d’un soir d’adolescence sur
la
prairie où des filles s’éloignent en chantant. Voici la nuit du souve
409
irie où des filles s’éloignent en chantant. Voici
la
nuit du souvenir, brève nuit d’août et souvenirs de nos enfances. Ce
410
n chantant. Voici la nuit du souvenir, brève nuit
d’
août et souvenirs de nos enfances. Ce « soir des signes » où des renar
411
nuit du souvenir, brève nuit d’août et souvenirs
de
nos enfances. Ce « soir des signes » où des renards sortirent à la li
412
Ce « soir des signes » où des renards sortirent à
la
lisière de la forêt, des renards qu’on n’avait jamais vus, l’orage s’
413
es signes » où des renards sortirent à la lisière
de
la forêt, des renards qu’on n’avait jamais vus, l’orage s’amassait. M
414
signes » où des renards sortirent à la lisière de
la
forêt, des renards qu’on n’avait jamais vus, l’orage s’amassait. Ma m
415
e la forêt, des renards qu’on n’avait jamais vus,
l’
orage s’amassait. Ma mère me dit : « Il va y avoir une averse. Cours à
416
mère me dit : « Il va y avoir une averse. Cours à
la
rencontre de ton père et donne-lui cette pèlerine. » Et quand je le r
417
« Il va y avoir une averse. Cours à la rencontre
de
ton père et donne-lui cette pèlerine. » Et quand je le rejoignis dans
418
n père et donne-lui cette pèlerine. » Et quand je
le
rejoignis dans l’obscurité tombante, il m’embrassa. Les premières gou
419
i cette pèlerine. » Et quand je le rejoignis dans
l’
obscurité tombante, il m’embrassa. Les premières gouttes tombaient et
420
il m’embrassa. Les premières gouttes tombaient et
le
tonnerre roulait au loin mais je n’avais plus peur. Pourtant je vis d
421
Pourtant je vis des larmes dans ses yeux, c’était
la
guerre. Brève nuit d’août, le temps d’un peu se souvenir. Et bientôt
422
rmes dans ses yeux, c’était la guerre. Brève nuit
d’
août, le temps d’un peu se souvenir. Et bientôt paraîtra l’aube dure.
423
s ses yeux, c’était la guerre. Brève nuit d’août,
le
temps d’un peu se souvenir. Et bientôt paraîtra l’aube dure. Alors no
424
x, c’était la guerre. Brève nuit d’août, le temps
d’
un peu se souvenir. Et bientôt paraîtra l’aube dure. Alors nous entrer
425
e temps d’un peu se souvenir. Et bientôt paraîtra
l’
aube dure. Alors nous entrerons dans cette joie sauvage du Grand Jour,
426
u Grand Jour, où nous irons avec ce qu’il restera
de
bonté dans notre cœur, plus inutile que jamais, dominatrice et bafoué
427
du sentimentalisme subjectif que rend impossible
la
conception toute classique, objective, latine, spatiale et statique,
428
tine, spatiale et statique, qui présida au dessin
de
la Carte du Tendre. C’est le cri d’un poète français, non d’un França
429
e, spatiale et statique, qui présida au dessin de
la
Carte du Tendre. C’est le cri d’un poète français, non d’un Français.
430
ui présida au dessin de la Carte du Tendre. C’est
le
cri d’un poète français, non d’un Français. 2. Hegel serait le philo
431
ida au dessin de la Carte du Tendre. C’est le cri
d’
un poète français, non d’un Français. 2. Hegel serait le philosophe p
432
du Tendre. C’est le cri d’un poète français, non
d’
un Français. 2. Hegel serait le philosophe par excellence de l’Europe
433
ète français, non d’un Français. 2. Hegel serait
le
philosophe par excellence de l’Europe centrale. Ce qu’il a tenté d’ét
434
is. 2. Hegel serait le philosophe par excellence
de
l’Europe centrale. Ce qu’il a tenté d’étaler dans l’Histoire, c’est l
435
2. Hegel serait le philosophe par excellence de
l’
Europe centrale. Ce qu’il a tenté d’étaler dans l’Histoire, c’est l’éq
436
excellence de l’Europe centrale. Ce qu’il a tenté
d’
étaler dans l’Histoire, c’est l’équation d’existence de l’âme allemand
437
l’Europe centrale. Ce qu’il a tenté d’étaler dans
l’
Histoire, c’est l’équation d’existence de l’âme allemande. Mais il a v
438
Ce qu’il a tenté d’étaler dans l’Histoire, c’est
l’
équation d’existence de l’âme allemande. Mais il a voulu que ses momen
439
tenté d’étaler dans l’Histoire, c’est l’équation
d’
existence de l’âme allemande. Mais il a voulu que ses moments fussent
440
ler dans l’Histoire, c’est l’équation d’existence
de
l’âme allemande. Mais il a voulu que ses moments fussent successifs :
441
dans l’Histoire, c’est l’équation d’existence de
l’
âme allemande. Mais il a voulu que ses moments fussent successifs : c’
442
ses moments fussent successifs : c’était un moyen
de
la résoudre. Et c’est justement cette « résolution » que combattra Ki
443
moments fussent successifs : c’était un moyen de
la
résoudre. Et c’est justement cette « résolution » que combattra Kierk
444
on » que combattra Kierkegaard. Chez Kierkegaard,
la
dialectique redevient simultanée, irréductible, vivante… 3. Que l’on
445
evient simultanée, irréductible, vivante… 3. Que
l’
on pense aux expansions verbeuses de Jean-Paul ou du Hölderlin d’Hypér
446
ante… 3. Que l’on pense aux expansions verbeuses
de
Jean-Paul ou du Hölderlin d’Hypérion ; et d’autre part, à la manie d’
447
l ou du Hölderlin d’Hypérion ; et d’autre part, à
la
manie d’exposition systématique et statistique des professeurs allema
448
ölderlin d’Hypérion ; et d’autre part, à la manie
d’
exposition systématique et statistique des professeurs allemands. Autr
449
e des professeurs allemands. Autre exemple : tous
les
romantiques allemands sont nourris de théorèmes de Spinoza. 4. Seule
450
ple : tous les romantiques allemands sont nourris
de
théorèmes de Spinoza. 4. Seule réalité vivante prise en considératio
451
s romantiques allemands sont nourris de théorèmes
de
Spinoza. 4. Seule réalité vivante prise en considération par l’intel
452
Seule réalité vivante prise en considération par
l’
intelligence rationaliste.
453
Une « tasse
de
thé » au palais C…5 Il fait fausse route, celui qui considère la
454
C…5 Il fait fausse route, celui qui considère
la
chose mondaine autrement que comme symbolique. Hugo von Hofmannsthal.
455
e symbolique. Hugo von Hofmannsthal. Un aquarium
de
lumière rose où nagent des phoques à ventre blanc qui sont des minist
456
ènes en lamé qui sont presque des dames, et aussi
de
vrais messieurs et de vraies dames : ils montent et descendent de tou
457
presque des dames, et aussi de vrais messieurs et
de
vraies dames : ils montent et descendent de toutes parts, du haut des
458
iers que décorent trois opulents Tiepolo, du fond
d’
un hall périlleux, pressés, poliment bousculés de salon en salon ; et,
459
d’un hall périlleux, pressés, poliment bousculés
de
salon en salon ; et, plus loin que la rumeur des voix, orchestre du g
460
t bousculés de salon en salon ; et, plus loin que
la
rumeur des voix, orchestre du grand monde qui accorde, s’égarent parf
461
parfois dans un silence qui s’approfondit au long
de
corridors capitonnés d’amarante, du côté des collections de vieux Ven
462
qui s’approfondit au long de corridors capitonnés
d’
amarante, du côté des collections de vieux Venise, jusqu’au petit salo
463
rs capitonnés d’amarante, du côté des collections
de
vieux Venise, jusqu’au petit salon où il y a deux Bellini. Et que dir
464
dissimulées derrières des cardinaux du xviiie , —
de
cet air mystérieux qu’on prend ici à rester seul. Il faudrait se cac
465
nd ici à rester seul. Il faudrait se cacher dans
les
plis de ces hauts rideaux dorés, pour écouter Mozart et attendre, qui
466
rester seul. Il faudrait se cacher dans les plis
de
ces hauts rideaux dorés, pour écouter Mozart et attendre, qui sait ?
467
iqueurs transfigurantes, — il faudrait un miracle
d’
amour qui fasse pousser un grand cri à un homme qu’on verrait alors s’
468
ns un silence impressionnant et rester longtemps,
les
yeux agrandis, aux pieds d’une femme qui ne le regarderait pas, qui a
469
et rester longtemps, les yeux agrandis, aux pieds
d’
une femme qui ne le regarderait pas, qui aurait l’air seulement d’écou
470
, les yeux agrandis, aux pieds d’une femme qui ne
le
regarderait pas, qui aurait l’air seulement d’écouter autre chose… En
471
ne le regarderait pas, qui aurait l’air seulement
d’
écouter autre chose… En vérité le monde propose à l’imagination de bie
472
l’air seulement d’écouter autre chose… En vérité
le
monde propose à l’imagination de bien étranges spectacles ; pourquoi
473
écouter autre chose… En vérité le monde propose à
l’
imagination de bien étranges spectacles ; pourquoi veut-il qu’on les i
474
chose… En vérité le monde propose à l’imagination
de
bien étranges spectacles ; pourquoi veut-il qu’on les ignore ou qu’on
475
bien étranges spectacles ; pourquoi veut-il qu’on
les
ignore ou qu’on le feigne ? D’un balcon, entre deux hautes colonnes,
476
cles ; pourquoi veut-il qu’on les ignore ou qu’on
le
feigne ? D’un balcon, entre deux hautes colonnes, je vois des jardins
477
uoi veut-il qu’on les ignore ou qu’on le feigne ?
D’
un balcon, entre deux hautes colonnes, je vois des jardins florentins
478
irés par dedans. Côté jardin, côté « cour »… Mais
de
quoi s’agit-il dans cette intrigue monotone et serrée, et dont se per
479
otone et serrée, et dont se perd à chaque instant
le
fil ? Ils improvisent tous un rôle, mais le ton seul est convenu ; et
480
stant le fil ? Ils improvisent tous un rôle, mais
le
ton seul est convenu ; et l’on en reste indéfiniment à la présentatio
481
t tous un rôle, mais le ton seul est convenu ; et
l’
on en reste indéfiniment à la présentation des acteurs. Ah ! Jeter tou
482
eul est convenu ; et l’on en reste indéfiniment à
la
présentation des acteurs. Ah ! Jeter tout cela dans quelque vaudevill
483
eville dont une poésie insolente et ivre tirerait
les
ficelles ! Quelle figuration pour une satire à grand spectacle de not
484
elle figuration pour une satire à grand spectacle
de
notre civilisation finissante ! (Vous souriez ? Vous mourrez avec ell
485
souriez ? Vous mourrez avec elle.) Cependant, que
de
belles personnes — en vain ! Et quelle tenue. Ici, plus qu’ailleurs,
486
en vain ! Et quelle tenue. Ici, plus qu’ailleurs,
l’
originalité est signe de sang mêlé. Ici comme ailleurs, il faut être c
487
e. Ici, plus qu’ailleurs, l’originalité est signe
de
sang mêlé. Ici comme ailleurs, il faut être conforme, au moins en app
488
en apparence. Mais ce n’est pas à une routine que
l’
on sacrifie, à une morale, à je ne sais quel profit : c’est à une para
489
ontestablement vaine. Il y a peu de mensonge dans
le
grand monde : plutôt des règles de jeu, et personne n’a l’idée d’y cr
490
mensonge dans le grand monde : plutôt des règles
de
jeu, et personne n’a l’idée d’y croire. Le pire mensonge est dans la
491
monde : plutôt des règles de jeu, et personne n’a
l’
idée d’y croire. Le pire mensonge est dans la vie réputée pratique, pa
492
plutôt des règles de jeu, et personne n’a l’idée
d’
y croire. Le pire mensonge est dans la vie réputée pratique, parce qu’
493
règles de jeu, et personne n’a l’idée d’y croire.
Le
pire mensonge est dans la vie réputée pratique, parce qu’il n’y est p
494
n’a l’idée d’y croire. Le pire mensonge est dans
la
vie réputée pratique, parce qu’il n’y est pas avoué. — Ce que je me d
495
e je me dis là, c’est un truisme. Truisme a l’air
d’
être le nom d’une de ces sirènes un peu volumineuses qui déambulent en
496
dis là, c’est un truisme. Truisme a l’air d’être
le
nom d’une de ces sirènes un peu volumineuses qui déambulent en souria
497
, c’est un truisme. Truisme a l’air d’être le nom
d’
une de ces sirènes un peu volumineuses qui déambulent en souriant de f
498
t un truisme. Truisme a l’air d’être le nom d’une
de
ces sirènes un peu volumineuses qui déambulent en souriant de fauteui
499
es un peu volumineuses qui déambulent en souriant
de
fauteuil en divan, portant de petits animaux au museau pointu sur leu
500
mbulent en souriant de fauteuil en divan, portant
de
petits animaux au museau pointu sur leurs épaules naguère divines. Je
501
intu sur leurs épaules naguère divines. Je pars à
l’
aventure. Bientôt je parviens à un immense salon où beaucoup de gens d
502
x, regardent quelque chose qui se passe au centre
de
la pièce. Il y a là dans un espace vide un piano à l’aile levée, et d
503
regardent quelque chose qui se passe au centre de
la
pièce. Il y a là dans un espace vide un piano à l’aile levée, et deva
504
a pièce. Il y a là dans un espace vide un piano à
l’
aile levée, et devant le piano, assis sur un tabouret bas — le pan de
505
un espace vide un piano à l’aile levée, et devant
le
piano, assis sur un tabouret bas — le pan de l’habit repose sur le pa
506
, et devant le piano, assis sur un tabouret bas —
le
pan de l’habit repose sur le parquet — quelqu’un qui ressemble à Rich
507
vant le piano, assis sur un tabouret bas — le pan
de
l’habit repose sur le parquet — quelqu’un qui ressemble à Richard Str
508
t le piano, assis sur un tabouret bas — le pan de
l’
habit repose sur le parquet — quelqu’un qui ressemble à Richard Straus
509
ur un tabouret bas — le pan de l’habit repose sur
le
parquet — quelqu’un qui ressemble à Richard Strauss, et qui est Richa
510
est Richard Strauss. Il touche quelques accords,
l’
acteur Moissi tourne les pages et secoue ses mèches, Elizabeth Schuman
511
l touche quelques accords, l’acteur Moissi tourne
les
pages et secoue ses mèches, Elizabeth Schumann, adossée au piano, cha
512
plaisir… C’est bouleversant et presque ridicule.
Le
corps diplomatique, debout en cercle, écoute dans un recueillement st
513
llement stupide, applaudit, poliment enivré. Mais
le
miracle se poursuit. C’est maintenant Hugo von Hofmannsthal qui appar
514
apparaît comme ses œuvres naissent : au carrefour
de
la célébrité, de l’élégance et d’une musique de Strauss. Il lit des v
515
araît comme ses œuvres naissent : au carrefour de
la
célébrité, de l’élégance et d’une musique de Strauss. Il lit des vers
516
s œuvres naissent : au carrefour de la célébrité,
de
l’élégance et d’une musique de Strauss. Il lit des vers sur le vent d
517
uvres naissent : au carrefour de la célébrité, de
l’
élégance et d’une musique de Strauss. Il lit des vers sur le vent de p
518
: au carrefour de la célébrité, de l’élégance et
d’
une musique de Strauss. Il lit des vers sur le vent de printemps : la
519
r de la célébrité, de l’élégance et d’une musique
de
Strauss. Il lit des vers sur le vent de printemps : la poésie est dan
520
et d’une musique de Strauss. Il lit des vers sur
le
vent de printemps : la poésie est dans toutes les anthologies, l’habi
521
e musique de Strauss. Il lit des vers sur le vent
de
printemps : la poésie est dans toutes les anthologies, l’habit classi
522
rauss. Il lit des vers sur le vent de printemps :
la
poésie est dans toutes les anthologies, l’habit classique, l’accent p
523
le vent de printemps : la poésie est dans toutes
les
anthologies, l’habit classique, l’accent profond et nasillard d’origi
524
emps : la poésie est dans toutes les anthologies,
l’
habit classique, l’accent profond et nasillard d’origine juive ; une m
525
t dans toutes les anthologies, l’habit classique,
l’
accent profond et nasillard d’origine juive ; une main pend sur l’ébèn
526
l’habit classique, l’accent profond et nasillard
d’
origine juive ; une main pend sur l’ébène, succombant à ses bagues. On
527
et nasillard d’origine juive ; une main pend sur
l’
ébène, succombant à ses bagues. On voudrait que cela dure longtemps, o
528
mps, on voudrait comprendre ce qui se passe… Mais
le
poète referme son livre, plie ses lunettes, baise la main de la maîtr
529
poète referme son livre, plie ses lunettes, baise
la
main de la maîtresse de maison qui lui offre son bras et l’entraîne d
530
ferme son livre, plie ses lunettes, baise la main
de
la maîtresse de maison qui lui offre son bras et l’entraîne dans le b
531
me son livre, plie ses lunettes, baise la main de
la
maîtresse de maison qui lui offre son bras et l’entraîne dans le bal.
532
la maîtresse de maison qui lui offre son bras et
l’
entraîne dans le bal. Vit-on jamais plus courtoise dérision du génie.
533
maison qui lui offre son bras et l’entraîne dans
le
bal. Vit-on jamais plus courtoise dérision du génie. Spectacle en vér
534
e. Spectacle en vérité terriblement intéressant !
Le
xxe siècle européen offre ici de lui-même l’image la plus flattée :
535
t intéressant ! Le xxe siècle européen offre ici
de
lui-même l’image la plus flattée : un très grand musicien, des écriva
536
t ! Le xxe siècle européen offre ici de lui-même
l’
image la plus flattée : un très grand musicien, des écrivains célèbres
537
xe siècle européen offre ici de lui-même l’image
la
plus flattée : un très grand musicien, des écrivains célèbres, des ca
538
paraît son étrange impuissance : tous ces accords
de
gloire et de génie ne font qu’une rumeur informe, insignifiante. Tout
539
range impuissance : tous ces accords de gloire et
de
génie ne font qu’une rumeur informe, insignifiante. Tout se dégrade e
540
Tout se dégrade en amabilités. N’oublions pas que
l’
on a réuni tant de richesses de tous les ordres — pour rien. Exactemen
541
N’oublions pas que l’on a réuni tant de richesses
de
tous les ordres — pour rien. Exactement. Ni plaisir ni profits. Voilà
542
ns pas que l’on a réuni tant de richesses de tous
les
ordres — pour rien. Exactement. Ni plaisir ni profits. Voilà bien à q
543
profits. Voilà bien à quels jeux aboutissent tant
d’
ambition et le sérieux dans les affaires : une civilisation qui se don
544
bien à quels jeux aboutissent tant d’ambition et
le
sérieux dans les affaires : une civilisation qui se donne à elle-même
545
ux aboutissent tant d’ambition et le sérieux dans
les
affaires : une civilisation qui se donne à elle-même un défilé de man
546
e civilisation qui se donne à elle-même un défilé
de
mannequins. Comme tout ce qui n’a pas de raison, voilà qui est plein
547
n défilé de mannequins. Comme tout ce qui n’a pas
de
raison, voilà qui est plein de significations troublantes. Cela donne
548
out ce qui n’a pas de raison, voilà qui est plein
de
significations troublantes. Cela donne à penser, prête à rire, mais j
549
penser, prête à rire, mais je réserve pour demain
les
conclusions du philosophe, on m’entraîne par le bras vers les jardins
550
les conclusions du philosophe, on m’entraîne par
le
bras vers les jardins. Des ballerines de l’opéra dansent autour d’une
551
ons du philosophe, on m’entraîne par le bras vers
les
jardins. Des ballerines de l’opéra dansent autour d’une vasque, dans
552
aîne par le bras vers les jardins. Des ballerines
de
l’opéra dansent autour d’une vasque, dans un théâtre de grands buis t
553
e par le bras vers les jardins. Des ballerines de
l’
opéra dansent autour d’une vasque, dans un théâtre de grands buis tail
554
jardins. Des ballerines de l’opéra dansent autour
d’
une vasque, dans un théâtre de grands buis taillés à l’italienne. Un p
555
péra dansent autour d’une vasque, dans un théâtre
de
grands buis taillés à l’italienne. Un projecteur balaie les gazons, l
556
vasque, dans un théâtre de grands buis taillés à
l’
italienne. Un projecteur balaie les gazons, les terrasses, des amateur
557
buis taillés à l’italienne. Un projecteur balaie
les
gazons, les terrasses, des amateurs de baisers dans l’ombre et des fu
558
s à l’italienne. Un projecteur balaie les gazons,
les
terrasses, des amateurs de baisers dans l’ombre et des fumeurs isolés
559
ur balaie les gazons, les terrasses, des amateurs
de
baisers dans l’ombre et des fumeurs isolés qui ont fait le tour de bi
560
zons, les terrasses, des amateurs de baisers dans
l’
ombre et des fumeurs isolés qui ont fait le tour de bien des choses, H
561
s dans l’ombre et des fumeurs isolés qui ont fait
le
tour de bien des choses, Hofmannsthal enfin, serré dans un petit mant
562
’ombre et des fumeurs isolés qui ont fait le tour
de
bien des choses, Hofmannsthal enfin, serré dans un petit manteau, vis
563
au, visiblement aux prises une fois de plus, avec
le
dilemme hamlétique, — celui pourtant, depuis trente ans, qu’il résout
564
lui pourtant, depuis trente ans, qu’il résout par
l’
acte d’écrire… Moi je suis dans les buis, près des basses du petit orc
565
rtant, depuis trente ans, qu’il résout par l’acte
d’
écrire… Moi je suis dans les buis, près des basses du petit orchestre,
566
u’il résout par l’acte d’écrire… Moi je suis dans
les
buis, près des basses du petit orchestre, avec une écharpe et du sent
567
orchestre, avec une écharpe et du sentiment. (Vu
de
près, le sourire éperdu des ballerines est émouvant, masque plus vrai
568
e, avec une écharpe et du sentiment. (Vu de près,
le
sourire éperdu des ballerines est émouvant, masque plus vrai que leur
569
ai que leurs visages.) On éteint. Et c’est alors,
d’
un balcon qui domine les groupes, une voix qui descend avec un tremble
570
On éteint. Et c’est alors, d’un balcon qui domine
les
groupes, une voix qui descend avec un tremblement d’étoile. Richard S
571
groupes, une voix qui descend avec un tremblement
d’
étoile. Richard Strauss a levé la tête, il reçoit sur son bon visage o
572
c un tremblement d’étoile. Richard Strauss a levé
la
tête, il reçoit sur son bon visage où cette rosée divine fait perler
573
sage où cette rosée divine fait perler une larme,
la
bénédiction de sa musique. Les petites baronnes ont froid, veulent re
574
osée divine fait perler une larme, la bénédiction
de
sa musique. Les petites baronnes ont froid, veulent rentrer, car elle
575
t perler une larme, la bénédiction de sa musique.
Les
petites baronnes ont froid, veulent rentrer, car elles sont sages. Da
576
roid, veulent rentrer, car elles sont sages. Dans
les
salons désertés du rez-de-chaussée, elles me désignent un des rêves d
577
rez-de-chaussée, elles me désignent un des rêves
de
mon adolescence : sur un canapé d’angle, drapée dans une robe longue,
578
t un des rêves de mon adolescence : sur un canapé
d’
angle, drapée dans une robe longue, grise et argent, Henny Porten immo
579
, grise et argent, Henny Porten immobile présente
de
profil son visage un peu plus grand que nature. À 17 ans, du fond d’u
580
e un peu plus grand que nature. À 17 ans, du fond
d’
un cinéma, l’ai-je aimée ? — Je lui sais gré de rester là muette, asse
581
grand que nature. À 17 ans, du fond d’un cinéma,
l’
ai-je aimée ? — Je lui sais gré de rester là muette, assez absente enc
582
nd d’un cinéma, l’ai-je aimée ? — Je lui sais gré
de
rester là muette, assez absente encore pour ressembler vraiment à son
583
Tout est lumière dans cet espace, jeu silencieux
de
lustres, de glaces et d’acajous polis. On entend le rythme assourdi,
584
mière dans cet espace, jeu silencieux de lustres,
de
glaces et d’acajous polis. On entend le rythme assourdi, mais non la
585
t espace, jeu silencieux de lustres, de glaces et
d’
acajous polis. On entend le rythme assourdi, mais non la mélodie d’une
586
lustres, de glaces et d’acajous polis. On entend
le
rythme assourdi, mais non la mélodie d’une danse, au-dessus, et des v
587
ous polis. On entend le rythme assourdi, mais non
la
mélodie d’une danse, au-dessus, et des voix qui passent. Allées et ve
588
On entend le rythme assourdi, mais non la mélodie
d’
une danse, au-dessus, et des voix qui passent. Allées et venues dans l
589
s, et des voix qui passent. Allées et venues dans
la
fête invisible qui m’environne, ah ! que n’êtes-vous celles des désir
590
environne, ah ! que n’êtes-vous celles des désirs
de
l’amour ! La traîne d’une robe tournoie, éclair de roses sur un seuil
591
ironne, ah ! que n’êtes-vous celles des désirs de
l’
amour ! La traîne d’une robe tournoie, éclair de roses sur un seuil. C
592
! que n’êtes-vous celles des désirs de l’amour !
La
traîne d’une robe tournoie, éclair de roses sur un seuil. C’était la
593
tes-vous celles des désirs de l’amour ! La traîne
d’
une robe tournoie, éclair de roses sur un seuil. C’était la voix de la
594
e l’amour ! La traîne d’une robe tournoie, éclair
de
roses sur un seuil. C’était la voix de la comtesse Adélaïde, — je la
595
e tournoie, éclair de roses sur un seuil. C’était
la
voix de la comtesse Adélaïde, — je la connais à cet écho de joie dans
596
ie, éclair de roses sur un seuil. C’était la voix
de
la comtesse Adélaïde, — je la connais à cet écho de joie dans mes pen
597
éclair de roses sur un seuil. C’était la voix de
la
comtesse Adélaïde, — je la connais à cet écho de joie dans mes pensée
598
il. C’était la voix de la comtesse Adélaïde, — je
la
connais à cet écho de joie dans mes pensées. Mais quelle approche me
599
la comtesse Adélaïde, — je la connais à cet écho
de
joie dans mes pensées. Mais quelle approche me saisit ? Parfois, au c
600
? Parfois, au cœur des grandes fêtes, une sphère
de
silence descend, s’arrête quelques secondes, et ceux qu’elle baigne d
601
’arrête quelques secondes, et ceux qu’elle baigne
d’
une grâce furtive sont pris du désir d’adorer. Du sein de tant de cont
602
lle baigne d’une grâce furtive sont pris du désir
d’
adorer. Du sein de tant de contraintes polies et dans la pose la plus
603
râce furtive sont pris du désir d’adorer. Du sein
de
tant de contraintes polies et dans la pose la plus naturellement élég
604
er. Du sein de tant de contraintes polies et dans
la
pose la plus naturellement élégante, j’ai vu des yeux lever vers moi
605
ein de tant de contraintes polies et dans la pose
la
plus naturellement élégante, j’ai vu des yeux lever vers moi un regar
606
égante, j’ai vu des yeux lever vers moi un regard
d’
ardente confiance qui était tout ce qu’on ne pouvait dire, — qui était
607
pouvait dire, — qui était, dans un suprême délice
de
libération, une prière pour que l’amour soit bien-aimé… Oh ! qu’il y
608
suprême délice de libération, une prière pour que
l’
amour soit bien-aimé… Oh ! qu’il y ait eu cette joie par un regard de
609
imé… Oh ! qu’il y ait eu cette joie par un regard
de
jeune fille ! Tout peut encore être sauvé… Un accord brusque de rumeu
610
! Tout peut encore être sauvé… Un accord brusque
de
rumeurs à travers une porte qui s’ouvre ramène le bal dans mes désert
611
de rumeurs à travers une porte qui s’ouvre ramène
le
bal dans mes déserts. (Elle est partie. — Des rires en cape de velour
612
es déserts. (Elle est partie. — Des rires en cape
de
velours s’enfuient vers les jardins.) Qu’il y ait eu ce regard, et qu
613
e. — Des rires en cape de velours s’enfuient vers
les
jardins.) Qu’il y ait eu ce regard, et que personne ne l’ait vu ! Ils
614
ns.) Qu’il y ait eu ce regard, et que personne ne
l’
ait vu ! Ils ne savent plus que l’amour seul eût mérité ces fastes ; l
615
que personne ne l’ait vu ! Ils ne savent plus que
l’
amour seul eût mérité ces fastes ; l’usage de leurs politesses imite d
616
ent plus que l’amour seul eût mérité ces fastes ;
l’
usage de leurs politesses imite dérisoirement la gravité sacrée et l’a
617
que l’amour seul eût mérité ces fastes ; l’usage
de
leurs politesses imite dérisoirement la gravité sacrée et l’ascèse ad
618
; l’usage de leurs politesses imite dérisoirement
la
gravité sacrée et l’ascèse adorable que seule invente la passion. Ils
619
litesses imite dérisoirement la gravité sacrée et
l’
ascèse adorable que seule invente la passion. Ils reviennent. Tombé de
620
ité sacrée et l’ascèse adorable que seule invente
la
passion. Ils reviennent. Tombé de mon silence parmi les bavardages, o
621
e seule invente la passion. Ils reviennent. Tombé
de
mon silence parmi les bavardages, où irai-je avec peut-être un air de
622
ssion. Ils reviennent. Tombé de mon silence parmi
les
bavardages, où irai-je avec peut-être un air de dégoût, par mégarde…
623
les bavardages, où irai-je avec peut-être un air
de
dégoût, par mégarde… On se presse au bar assourdissant et les visages
624
par mégarde… On se presse au bar assourdissant et
les
visages se prennent à vivre, dangereusement. Ô fête d’une époque où t
625
sages se prennent à vivre, dangereusement. Ô fête
d’
une époque où tout ce qui vaut qu’on aime oscille entre l’ivresse et l
626
oque où tout ce qui vaut qu’on aime oscille entre
l’
ivresse et la neurasthénie, avec parfois des cris admirables ou des ca
627
ce qui vaut qu’on aime oscille entre l’ivresse et
la
neurasthénie, avec parfois des cris admirables ou des caresses déchir
628
dmirables ou des caresses déchirantes, — mais ici
l’
on aime que tout soit exprimé en symboles gantés de blanc. Nous sommes
629
’on aime que tout soit exprimé en symboles gantés
de
blanc. Nous sommes fous, mais il y a la manière. Presque tous les tru
630
es gantés de blanc. Nous sommes fous, mais il y a
la
manière. Presque tous les truismes se sont évanouis ; restent les par
631
sommes fous, mais il y a la manière. Presque tous
les
truismes se sont évanouis ; restent les paradoxes : peut-être vont-il
632
sque tous les truismes se sont évanouis ; restent
les
paradoxes : peut-être vont-ils se mettre à rêver à voix haute ? Ébran
633
à rêver à voix haute ? Ébranle un peu ces lambris
d’
or, tu vois bien que tout cède aux regards de l’ivresse. Un coude nu s
634
bris d’or, tu vois bien que tout cède aux regards
de
l’ivresse. Un coude nu s’appuie à mon épaule, je brise des pailles su
635
s d’or, tu vois bien que tout cède aux regards de
l’
ivresse. Un coude nu s’appuie à mon épaule, je brise des pailles sur u
636
épaule, je brise des pailles sur une perle verte,
l’
orchestre russe emmêle des arabesques de danseurs et déjà quelques-uns
637
le verte, l’orchestre russe emmêle des arabesques
de
danseurs et déjà quelques-uns de ces hôtes diaphanes du petit jour. J
638
e des arabesques de danseurs et déjà quelques-uns
de
ces hôtes diaphanes du petit jour. J’en ai vu deux, chaussés d’escarp
639
iaphanes du petit jour. J’en ai vu deux, chaussés
d’
escarpins fins courant comme des reflets sur le parquet, venir par une
640
és d’escarpins fins courant comme des reflets sur
le
parquet, venir par une salle vide où pénètre le ciel pâli. Transparen
641
r le parquet, venir par une salle vide où pénètre
le
ciel pâli. Transparents sous les lumières qui déjà retirent leurs plu
642
e vide où pénètre le ciel pâli. Transparents sous
les
lumières qui déjà retirent leurs plus longs rayons, ils ont encore de
643
s ont encore des lèvres pour me dire une phrase à
l’
oreille, de leur voix trop naturelle, voix de jour. Paroles aussitôt o
644
e des lèvres pour me dire une phrase à l’oreille,
de
leur voix trop naturelle, voix de jour. Paroles aussitôt oubliées, ma
645
se à l’oreille, de leur voix trop naturelle, voix
de
jour. Paroles aussitôt oubliées, mais je sais que la nuit va s’éteind
646
jour. Paroles aussitôt oubliées, mais je sais que
la
nuit va s’éteindre. L’un m’a soufflé quelque chose dans la tête par l
647
a s’éteindre. L’un m’a soufflé quelque chose dans
la
tête par la paille que je suçais : me voici sourd à la musique mais d
648
. L’un m’a soufflé quelque chose dans la tête par
la
paille que je suçais : me voici sourd à la musique mais des sonorités
649
te par la paille que je suçais : me voici sourd à
la
musique mais des sonorités glacées naissent en moi. Cependant que l’a
650
e, trop vite pour que j’ai pu bouger, a baisé sur
les
lèvres une femme qui devient pâle et s’adosse à une colonne, — me reg
651
oujours plus ivres. Rosette Anday levant sa coupe
de
champagne rit et déchaîne des opéras. — « Comme elle est laide, mais
652
« Comme elle est laide, mais une voix à faire mal
de
bonheur, mais laide !… ah ! magnifique ! », dit quelqu’un près de moi
653
quelqu’un près de moi. Ma tête cède, vient contre
la
colonne, paupières fermées, et c’est soudain une déchirure assourdiss
654
mphante, et des vaisseaux qui ramènent Iseut dans
le
silence d’un midi d’été nordique, à l’heure de mourir dans une légère
655
des vaisseaux qui ramènent Iseut dans le silence
d’
un midi d’été nordique, à l’heure de mourir dans une légèreté éperdue…
656
eaux qui ramènent Iseut dans le silence d’un midi
d’
été nordique, à l’heure de mourir dans une légèreté éperdue… Mais une
657
Iseut dans le silence d’un midi d’été nordique, à
l’
heure de mourir dans une légèreté éperdue… Mais une main de femme au b
658
ns le silence d’un midi d’été nordique, à l’heure
de
mourir dans une légèreté éperdue… Mais une main de femme au bord du s
659
e mourir dans une légèreté éperdue… Mais une main
de
femme au bord du sommeil saisie me ramène aux regards. Que sont tous
660
gestes rythmés ? Anday chante. Ils me voient dans
la
nudité du rêve, oh ! je les hais de me voir ! Je tiens la main d’une
661
te. Ils me voient dans la nudité du rêve, oh ! je
les
hais de me voir ! Je tiens la main d’une femme qui tremble… Comtesse
662
e voient dans la nudité du rêve, oh ! je les hais
de
me voir ! Je tiens la main d’une femme qui tremble… Comtesse Adélaïde
663
é du rêve, oh ! je les hais de me voir ! Je tiens
la
main d’une femme qui tremble… Comtesse Adélaïde en soie d’aurore, voi
664
e, oh ! je les hais de me voir ! Je tiens la main
d’
une femme qui tremble… Comtesse Adélaïde en soie d’aurore, voici l’heu
665
’une femme qui tremble… Comtesse Adélaïde en soie
d’
aurore, voici l’heure que nous attendions. Les escaliers s’abaissent d
666
remble… Comtesse Adélaïde en soie d’aurore, voici
l’
heure que nous attendions. Les escaliers s’abaissent dans le silence n
667
soie d’aurore, voici l’heure que nous attendions.
Les
escaliers s’abaissent dans le silence nouveau, nous entendons nos pas
668
e nous attendions. Les escaliers s’abaissent dans
le
silence nouveau, nous entendons nos pas jusqu’aux jardins tendus en t
669
pas jusqu’aux jardins tendus en tapisserie entre
les
arcades d’un péristyle sombre. Le bleu glacé du petit jour noie les b
670
ux jardins tendus en tapisserie entre les arcades
d’
un péristyle sombre. Le bleu glacé du petit jour noie les buis qui s’é
671
pisserie entre les arcades d’un péristyle sombre.
Le
bleu glacé du petit jour noie les buis qui s’éteignent par degrés. Un
672
éristyle sombre. Le bleu glacé du petit jour noie
les
buis qui s’éteignent par degrés. Un peu de nuage flotte sur le bassin
673
’éteignent par degrés. Un peu de nuage flotte sur
le
bassin, grand œil vide où paraît le vertige. Voici que cèdent les ama
674
ge flotte sur le bassin, grand œil vide où paraît
le
vertige. Voici que cèdent les amarres des pelouses, tout le jardin mo
675
d œil vide où paraît le vertige. Voici que cèdent
les
amarres des pelouses, tout le jardin monte sans fin dans le frisson d
676
. Voici que cèdent les amarres des pelouses, tout
le
jardin monte sans fin dans le frisson désespéré de l’aube, — et nous,
677
des pelouses, tout le jardin monte sans fin dans
le
frisson désespéré de l’aube, — et nous, au bord du péristyle arrêtés,
678
e jardin monte sans fin dans le frisson désespéré
de
l’aube, — et nous, au bord du péristyle arrêtés, au bord de la nuit q
679
ardin monte sans fin dans le frisson désespéré de
l’
aube, — et nous, au bord du péristyle arrêtés, au bord de la nuit qui
680
et nous, au bord du péristyle arrêtés, au bord de
la
nuit qui nous possède encore, nous assistons au miracle hostile. Elle
681
. Alors je me tourne vers ce visage très blanc où
les
yeux d’un bleu nocturne se refusent… Quelle tendresse, auprès de cet
682
e me tourne vers ce visage très blanc où les yeux
d’
un bleu nocturne se refusent… Quelle tendresse, auprès de cet être sec
683
et être secret, inaccessible et pourtant complice
d’
une angoisse plus bouleversante que l’amour, à la minute où l’on voit
684
nt complice d’une angoisse plus bouleversante que
l’
amour, à la minute où l’on voit de très près, entre la nuit qui s’évap
685
d’une angoisse plus bouleversante que l’amour, à
la
minute où l’on voit de très près, entre la nuit qui s’évapore et l’au
686
se plus bouleversante que l’amour, à la minute où
l’
on voit de très près, entre la nuit qui s’évapore et l’aube encore vac
687
uleversante que l’amour, à la minute où l’on voit
de
très près, entre la nuit qui s’évapore et l’aube encore vacillante, l
688
our, à la minute où l’on voit de très près, entre
la
nuit qui s’évapore et l’aube encore vacillante, le vide absurde où s’
689
voit de très près, entre la nuit qui s’évapore et
l’
aube encore vacillante, le vide absurde où s’en vont nos plaisirs et d
690
a nuit qui s’évapore et l’aube encore vacillante,
le
vide absurde où s’en vont nos plaisirs et d’où remonte notre peine. A
691
nte, le vide absurde où s’en vont nos plaisirs et
d’
où remonte notre peine. Ah ! surprendre sur un visage décontenancé, et
692
rendre sur un visage décontenancé, et jusque dans
le
rythme d’une respiration, l’envahissement de cette dure connaissance
693
un visage décontenancé, et jusque dans le rythme
d’
une respiration, l’envahissement de cette dure connaissance ! Elle se
694
ancé, et jusque dans le rythme d’une respiration,
l’
envahissement de cette dure connaissance ! Elle se tait, plus seule qu
695
dans le rythme d’une respiration, l’envahissement
de
cette dure connaissance ! Elle se tait, plus seule que moi. Le jour q
696
connaissance ! Elle se tait, plus seule que moi.
Le
jour qui déjà me saisit va-t-il ainsi nous séparer ? Ce corps de femm
697
à me saisit va-t-il ainsi nous séparer ? Ce corps
de
femme défend encore sa nuit, si nu pourtant dans la soie et le velour
698
femme défend encore sa nuit, si nu pourtant dans
la
soie et le velours, dans la lumière froide et la fatigue qui le fléch
699
nd encore sa nuit, si nu pourtant dans la soie et
le
velours, dans la lumière froide et la fatigue qui le fléchit un peu.
700
, si nu pourtant dans la soie et le velours, dans
la
lumière froide et la fatigue qui le fléchit un peu. Toucher, — guérir
701
la soie et le velours, dans la lumière froide et
la
fatigue qui le fléchit un peu. Toucher, — guérir de l’écœurement de r
702
velours, dans la lumière froide et la fatigue qui
le
fléchit un peu. Toucher, — guérir de l’écœurement de revivre — touche
703
fatigue qui le fléchit un peu. Toucher, — guérir
de
l’écœurement de revivre — toucher un corps livré à la violence immobi
704
tigue qui le fléchit un peu. Toucher, — guérir de
l’
écœurement de revivre — toucher un corps livré à la violence immobile
705
fléchit un peu. Toucher, — guérir de l’écœurement
de
revivre — toucher un corps livré à la violence immobile de son âme… M
706
’écœurement de revivre — toucher un corps livré à
la
violence immobile de son âme… Mais les jeunes filles sont parfois tro
707
e — toucher un corps livré à la violence immobile
de
son âme… Mais les jeunes filles sont parfois trop émouvantes pour qu’
708
rps livré à la violence immobile de son âme… Mais
les
jeunes filles sont parfois trop émouvantes pour qu’on ose les embrass
709
illes sont parfois trop émouvantes pour qu’on ose
les
embrasser. — Je tenais sa main, — ho ! qui l’a retirée des miennes ?
710
se les embrasser. — Je tenais sa main, — ho ! qui
l’
a retirée des miennes ? … Sans se retourner, avec cette décision qu’el
711
ume encore une cigarette entre mes lèvres sèches.
Le
hall s’éclaire d’un jour de balayage, il reste deux chapeaux melons a
712
arette entre mes lèvres sèches. Le hall s’éclaire
d’
un jour de balayage, il reste deux chapeaux melons au vestiaire, et qu
713
re mes lèvres sèches. Le hall s’éclaire d’un jour
de
balayage, il reste deux chapeaux melons au vestiaire, et quelques val
714
au vestiaire, et quelques valets gris. Une corde
de
violon saute dans sa boîte. Je crois que dans ma tête aussi, des chos
715
-coups. Je vais marcher au long des trottoirs que
le
soleil lave à grande eau, et me laisser aller un peu à mes idées. Le
716
ande eau, et me laisser aller un peu à mes idées.
Le
commerce du monde mène plus loin qu’il n’y paraît, mène parfois bien
717
loin qu’il n’y paraît, mène parfois bien près de
la
réalité — et d’un mouvement non dépourvu d’élégance, j’entends : par
718
paraît, mène parfois bien près de la réalité — et
d’
un mouvement non dépourvu d’élégance, j’entends : par une certaine qua
719
ès de la réalité — et d’un mouvement non dépourvu
d’
élégance, j’entends : par une certaine qualité de déception, qu’il nou
720
d’élégance, j’entends : par une certaine qualité
de
déception, qu’il nous propose. La joie du jour, hélas, la plus forte…
721
ertaine qualité de déception, qu’il nous propose.
La
joie du jour, hélas, la plus forte… Vienne, 1928. 5. C’est ainsi qu
722
tion, qu’il nous propose. La joie du jour, hélas,
la
plus forte… Vienne, 1928. 5. C’est ainsi qu’était formulée l’invita
723
Vienne, 1928. 5. C’est ainsi qu’était formulée
l’
invitation au bal du célèbre banquier Castiglioni.
724
Voyage en Hongrie à Albert Gyergyai.
Le
dormeur au fil de l’eau Où s’asseoir ? Le pont est encombré de jam
725
ongrie à Albert Gyergyai. Le dormeur au fil
de
l’eau Où s’asseoir ? Le pont est encombré de jambes de dormeuses ;
726
rie à Albert Gyergyai. Le dormeur au fil de
l’
eau Où s’asseoir ? Le pont est encombré de jambes de dormeuses ; il
727
. Le dormeur au fil de l’eau Où s’asseoir ?
Le
pont est encombré de jambes de dormeuses ; il faudrait réveiller tant
728
l de l’eau Où s’asseoir ? Le pont est encombré
de
jambes de dormeuses ; il faudrait réveiller tant de beautés redoutabl
729
Où s’asseoir ? Le pont est encombré de jambes
de
dormeuses ; il faudrait réveiller tant de beautés redoutables pour at
730
ernière chaise libre. En bas, il y a juste autant
de
vieilles dames et de ministres en retraite que de fauteuils. Et on me
731
En bas, il y a juste autant de vieilles dames et
de
ministres en retraite que de fauteuils. Et on me regarde. J’ai beau f
732
de vieilles dames et de ministres en retraite que
de
fauteuils. Et on me regarde. J’ai beau feindre l’intérêt le plus sing
733
de fauteuils. Et on me regarde. J’ai beau feindre
l’
intérêt le plus singulier pour ce château sur la rive, ils en ont tant
734
ls. Et on me regarde. J’ai beau feindre l’intérêt
le
plus singulier pour ce château sur la rive, ils en ont tant vu ! Ils
735
e l’intérêt le plus singulier pour ce château sur
la
rive, ils en ont tant vu ! Ils aiment mieux me faire honte de mon vis
736
en ont tant vu ! Ils aiment mieux me faire honte
de
mon visage gris ; leurs yeux stupides me demandent où je n’ai pas dor
737
yeux stupides me demandent où je n’ai pas dormi.
Le
seul refuge est à l’avant, parmi des cordages, des chaînes, sur un ba
738
andent où je n’ai pas dormi. Le seul refuge est à
l’
avant, parmi des cordages, des chaînes, sur un banc humide, — juste de
739
ordages, des chaînes, sur un banc humide, — juste
de
quoi s’étendre, et regarder jaillir sans fin contre soi l’eau de ce b
740
’étendre, et regarder jaillir sans fin contre soi
l’
eau de ce beau Danube jaune qui est le plus inodore des fleuves. Dormi
741
re, et regarder jaillir sans fin contre soi l’eau
de
ce beau Danube jaune qui est le plus inodore des fleuves. Dormir. San
742
contre soi l’eau de ce beau Danube jaune qui est
le
plus inodore des fleuves. Dormir. Sans avoir pu retrouver cette mélod
743
. Sans avoir pu retrouver cette mélodie descendue
d’
un balcon où chantait la Schumann ; sans avoir pu retrouver le nom de
744
r cette mélodie descendue d’un balcon où chantait
la
Schumann ; sans avoir pu retrouver le nom de qui l’on a reconduit à s
745
où chantait la Schumann ; sans avoir pu retrouver
le
nom de qui l’on a reconduit à sa villa, vers cinq heures à travers ce
746
tait la Schumann ; sans avoir pu retrouver le nom
de
qui l’on a reconduit à sa villa, vers cinq heures à travers ces quart
747
Schumann ; sans avoir pu retrouver le nom de qui
l’
on a reconduit à sa villa, vers cinq heures à travers ces quartiers si
748
à travers ces quartiers si clairs, arbres et jets
d’
eau ; sans avoir pu retrouver, des conversations de ce bal, autre chos
749
’eau ; sans avoir pu retrouver, des conversations
de
ce bal, autre chose que la phrase, l’unique phrase que Richard Straus
750
ver, des conversations de ce bal, autre chose que
la
phrase, l’unique phrase que Richard Strauss m’aura jamais adressée en
751
nversations de ce bal, autre chose que la phrase,
l’
unique phrase que Richard Strauss m’aura jamais adressée en cette vie
752
t… » C’était au vestiaire, il enfilait une manche
de
pardessus, me donnait l’autre à serrer, la main n’étant pas encore so
753
manche de pardessus, me donnait l’autre à serrer,
la
main n’étant pas encore sortie… Dormir au fil de l’eau, entre l’étran
754
la main n’étant pas encore sortie… Dormir au fil
de
l’eau, entre l’étrange nuit du bal et cette perspective invraisemblab
755
main n’étant pas encore sortie… Dormir au fil de
l’
eau, entre l’étrange nuit du bal et cette perspective invraisemblable
756
pas encore sortie… Dormir au fil de l’eau, entre
l’
étrange nuit du bal et cette perspective invraisemblable d’un voyage a
757
nuit du bal et cette perspective invraisemblable
d’
un voyage au hasard commencé dans l’insomnie — vrai voyage à dormir de
758
vraisemblable d’un voyage au hasard commencé dans
l’
insomnie — vrai voyage à dormir debout… ⁂ Le monde renaît dans des acc
759
dans l’insomnie — vrai voyage à dormir debout… ⁂
Le
monde renaît dans des accords. Une mélodie hongroise éveille un vagab
760
, il reconnaît son rêve. Huit heures aux clochers
de
la capitale qui s’avance dans la lumière fauve d’un soir chaud sur la
761
l reconnaît son rêve. Huit heures aux clochers de
la
capitale qui s’avance dans la lumière fauve d’un soir chaud sur la pl
762
res aux clochers de la capitale qui s’avance dans
la
lumière fauve d’un soir chaud sur la plaine, avec ses dômes et ses fa
763
de la capitale qui s’avance dans la lumière fauve
d’
un soir chaud sur la plaine, avec ses dômes et ses façades exubérantes
764
’avance dans la lumière fauve d’un soir chaud sur
la
plaine, avec ses dômes et ses façades exubérantes de reflets, — et dé
765
plaine, avec ses dômes et ses façades exubérantes
de
reflets, — et déjà nous passons sous de hauts ponts sonores, au long
766
ubérantes de reflets, — et déjà nous passons sous
de
hauts ponts sonores, au long d’un quai tout fleuri de terrasses ; on
767
nous passons sous de hauts ponts sonores, au long
d’
un quai tout fleuri de terrasses ; on nous déverse dans cette foule et
768
auts ponts sonores, au long d’un quai tout fleuri
de
terrasses ; on nous déverse dans cette foule et ces musiques, deux vi
769
es qui font des signes pour demain, présentations
de
mes Espoirs aux jeunes Promesses nationales (on n’a pas compris les n
770
x jeunes Promesses nationales (on n’a pas compris
les
noms, on échange, à la dérobée, des coups d’œil, dans le léger étourd
771
nales (on n’a pas compris les noms, on échange, à
la
dérobée, des coups d’œil, dans le léger étourdissement de l’amitié pr
772
, on échange, à la dérobée, des coups d’œil, dans
le
léger étourdissement de l’amitié prochaine). Et la générosité des lum
773
ée, des coups d’œil, dans le léger étourdissement
de
l’amitié prochaine). Et la générosité des lumières d’avant le soir, —
774
des coups d’œil, dans le léger étourdissement de
l’
amitié prochaine). Et la générosité des lumières d’avant le soir, — et
775
e léger étourdissement de l’amitié prochaine). Et
la
générosité des lumières d’avant le soir, — et cette espèce de tendres
776
’amitié prochaine). Et la générosité des lumières
d’
avant le soir, — et cette espèce de tendresse pour tous les possibles,
777
prochaine). Et la générosité des lumières d’avant
le
soir, — et cette espèce de tendresse pour tous les possibles, qu’on a
778
é des lumières d’avant le soir, — et cette espèce
de
tendresse pour tous les possibles, qu’on appelle, je crois bien, jeun
779
le soir, — et cette espèce de tendresse pour tous
les
possibles, qu’on appelle, je crois bien, jeunesse… Je me suis endormi
780
ux voûtes sombres, qui est un Collège célèbre.
La
recherche de l’Objet inconnu Personne n’a mon adresse, je n’attend
781
bres, qui est un Collège célèbre. La recherche
de
l’Objet inconnu Personne n’a mon adresse, je n’attends rien d’aill
782
s, qui est un Collège célèbre. La recherche de
l’
Objet inconnu Personne n’a mon adresse, je n’attends rien d’ailleur
783
en ce premier réveil — délivré. Chez moi je suis
la
proie de l’angoisse du courrier. J’attends la lettre, j’attends je ne
784
emier réveil — délivré. Chez moi je suis la proie
de
l’angoisse du courrier. J’attends la lettre, j’attends je ne sais quo
785
er réveil — délivré. Chez moi je suis la proie de
l’
angoisse du courrier. J’attends la lettre, j’attends je ne sais quoi d
786
uis la proie de l’angoisse du courrier. J’attends
la
lettre, j’attends je ne sais quoi de très important… Trois déceptions
787
r. J’attends la lettre, j’attends je ne sais quoi
de
très important… Trois déceptions par jour ne peuvent qu’énerver le dé
788
… Trois déceptions par jour ne peuvent qu’énerver
le
désir. Parfois j’imagine que le facteur va m’apporter ce Paquet inouï
789
euvent qu’énerver le désir. Parfois j’imagine que
le
facteur va m’apporter ce Paquet inouï, cadeau annonciateur d’une mira
790
a m’apporter ce Paquet inouï, cadeau annonciateur
d’
une miraculeuse et royale Venue. Dans le silence de l’adoration comblé
791
onciateur d’une miraculeuse et royale Venue. Dans
le
silence de l’adoration comblée, j’en sortirais de ces objets sans nom
792
’une miraculeuse et royale Venue. Dans le silence
de
l’adoration comblée, j’en sortirais de ces objets sans nom, inutilisa
793
e miraculeuse et royale Venue. Dans le silence de
l’
adoration comblée, j’en sortirais de ces objets sans nom, inutilisable
794
le silence de l’adoration comblée, j’en sortirais
de
ces objets sans nom, inutilisables, bouleversants de perfection, gage
795
ces objets sans nom, inutilisables, bouleversants
de
perfection, gages d’un monde que les poètes essaient de décrire sans
796
inutilisables, bouleversants de perfection, gages
d’
un monde que les poètes essaient de décrire sans l’avoir vu, et dont n
797
bouleversants de perfection, gages d’un monde que
les
poètes essaient de décrire sans l’avoir vu, et dont nous savons seule
798
fection, gages d’un monde que les poètes essaient
de
décrire sans l’avoir vu, et dont nous savons seulement que tout y a s
799
’un monde que les poètes essaient de décrire sans
l’
avoir vu, et dont nous savons seulement que tout y a son écho le plus
800
dont nous savons seulement que tout y a son écho
le
plus pur. Le voyage trompe un temps cette angoisse. J’irai chercher m
801
vons seulement que tout y a son écho le plus pur.
Le
voyage trompe un temps cette angoisse. J’irai chercher moi-même, me s
802
hercher moi-même, me suis-je dit, je ferai toutes
les
avances, les plus exténuantes, et qui sait si tant d’erreurs ne compo
803
ême, me suis-je dit, je ferai toutes les avances,
les
plus exténuantes, et qui sait si tant d’erreurs ne composeront pas un
804
vances, les plus exténuantes, et qui sait si tant
d’
erreurs ne composeront pas un jour une sorte d’incantation capable d’i
805
nt d’erreurs ne composeront pas un jour une sorte
d’
incantation capable d’incliner le Hasard ? Ô décevantes chasses dans l
806
eront pas un jour une sorte d’incantation capable
d’
incliner le Hasard ? Ô décevantes chasses dans les bazars, aux étalage
807
n jour une sorte d’incantation capable d’incliner
le
Hasard ? Ô décevantes chasses dans les bazars, aux étalages des fêtes
808
d’incliner le Hasard ? Ô décevantes chasses dans
les
bazars, aux étalages des fêtes populaires, au fond des boutiques de v
809
lages des fêtes populaires, au fond des boutiques
de
vieux en province, dans les combles d’un château prussien où tissaien
810
au fond des boutiques de vieux en province, dans
les
combles d’un château prussien où tissaient d’incroyables araignées, p
811
boutiques de vieux en province, dans les combles
d’
un château prussien où tissaient d’incroyables araignées, partout où l
812
ns les combles d’un château prussien où tissaient
d’
incroyables araignées, partout où le désordre naturel des choses pouva
813
où tissaient d’incroyables araignées, partout où
le
désordre naturel des choses pouvait offrir asile à l’objet inconnu qu
814
ésordre naturel des choses pouvait offrir asile à
l’
objet inconnu que je chercherai sans doute jusqu’à la fin des fins… Ma
815
bjet inconnu que je chercherai sans doute jusqu’à
la
fin des fins… Mais voici mes amis. Et la question terrible, tout de s
816
jusqu’à la fin des fins… Mais voici mes amis. Et
la
question terrible, tout de suite : « Mais qui, mais qu’êtes-vous venu
817
her jusque chez nous ? » (En Hongrie, à 20 heures
d’
express, on dit « jusque chez nous », ce qu’on ne dit pas en Amérique.
818
qu’on ne dit pas en Amérique.) Grands dieux ! je
le
vois bien, à tout prix il vous faut un prétexte avouable… On me deman
819
demandera donc toujours des passeports ? Dussè-je
les
inventer… Ah ! l’embarras de voyager n’est rien auprès de celui d’exp
820
ours des passeports ? Dussè-je les inventer… Ah !
l’
embarras de voyager n’est rien auprès de celui d’expliquer pourquoi l’
821
sseports ? Dussè-je les inventer… Ah ! l’embarras
de
voyager n’est rien auprès de celui d’expliquer pourquoi l’on est part
822
l’embarras de voyager n’est rien auprès de celui
d’
expliquer pourquoi l’on est parti. Cependant, mes regards errant sur u
823
r n’est rien auprès de celui d’expliquer pourquoi
l’
on est parti. Cependant, mes regards errant sur une bibliothèque, je c
824
in de s’user, ne tarde pas à devenir notre raison
de
vivre. Mais combien votre sort, ô grands empêtrés ! me paraît enviabl
825
u ! — Ô Destin sans repos et qui me voue à toutes
les
magies ! Les désirs les plus incompréhensibles s’emparent de moi comm
826
n sans repos et qui me voue à toutes les magies !
Les
désirs les plus incompréhensibles s’emparent de moi comme des superst
827
s et qui me voue à toutes les magies ! Les désirs
les
plus incompréhensibles s’emparent de moi comme des superstitions. Tou
828
Les désirs les plus incompréhensibles s’emparent
de
moi comme des superstitions. Tout mon avoir se fond dans une loterie
829
ir se fond dans une loterie qui peut-être n’a pas
de
gros lot, et jamais, je crains bien, jamais je ne parviendrai à le re
830
amais, je crains bien, jamais je ne parviendrai à
le
regretter… » L’ironie indulgente et cette pitié à peine jalouse que l
831
bien, jamais je ne parviendrai à le regretter… »
L’
ironie indulgente et cette pitié à peine jalouse que l’on réserve aux
832
nie indulgente et cette pitié à peine jalouse que
l’
on réserve aux égarements d’une jeunesse démodée se peignirent sur les
833
é à peine jalouse que l’on réserve aux égarements
d’
une jeunesse démodée se peignirent sur les traits de mes auditeurs. —
834
arements d’une jeunesse démodée se peignirent sur
les
traits de mes auditeurs. — Vous êtes, me dit-on, un amateur de troubl
835
une jeunesse démodée se peignirent sur les traits
de
mes auditeurs. — Vous êtes, me dit-on, un amateur de troubles disting
836
mes auditeurs. — Vous êtes, me dit-on, un amateur
de
troubles distingués. Peu de sens du réel. Mais nous vous montrerons n
837
rie, ou tout au moins ce qu’il en reste. Sur quoi
l’
on m’entraîna dans un musée sans sièges. Le Musée de Budapest enferme
838
r quoi l’on m’entraîna dans un musée sans sièges.
Le
Musée de Budapest enferme quelques paysages romantiques aux ciels ple
839
on m’entraîna dans un musée sans sièges. Le Musée
de
Budapest enferme quelques paysages romantiques aux ciels pleins de dé
840
me quelques paysages romantiques aux ciels pleins
de
démesure. Et, de Giorgione, ce « Portrait d’un homme » devant lequel
841
ges romantiques aux ciels pleins de démesure. Et,
de
Giorgione, ce « Portrait d’un homme » devant lequel il faut se taire
842
eins de démesure. Et, de Giorgione, ce « Portrait
d’
un homme » devant lequel il faut se taire pour écouter ce qu’il entend
843
taire pour écouter ce qu’il entend. Au tombeau
de
Gül Baba Dans Bude il y a des ruelles qui sentent encore le Turc.
844
Dans Bude il y a des ruelles qui sentent encore
le
Turc. Tandis que nous y rôdions, un soir étouffant, vous m’avez montr
845
brunis qui rougeoyaient au sommet du Rozsadomb —
la
Colline des roses. Une ancienne mosquée, disiez-vous, le tombeau du p
846
ine des roses. Une ancienne mosquée, disiez-vous,
le
tombeau du prophète Gül Baba. Puis, comme le soleil se couchait, nous
847
ous, le tombeau du prophète Gül Baba. Puis, comme
le
soleil se couchait, nous avons repassé un grand pont vibrant et nous
848
nt vibrant et nous sommes rentrés en Europe. Mais
le
lendemain, m’échappant d’un programme admirable, nourrissant et offic
849
rentrés en Europe. Mais le lendemain, m’échappant
d’
un programme admirable, nourrissant et officiel, il a bien fallu que j
850
ant et officiel, il a bien fallu que je recherche
le
chemin du Rozsadomb. « Vous n’y verrez, m’avait-on dit, qu’une paire
851
. « Vous n’y verrez, m’avait-on dit, qu’une paire
de
babouches dans une mosquée vide que personne n’a plus l’idée de visit
852
uches dans une mosquée vide que personne n’a plus
l’
idée de visiter. » Mais comment ne pas voir qu’un lieu qui porte un no
853
ans une mosquée vide que personne n’a plus l’idée
de
visiter. » Mais comment ne pas voir qu’un lieu qui porte un nom parei
854
là même extraordinaire. Celui qui ne croit pas à
la
vertu des noms reste prisonnier de ses sens ; mais celui-là est vérit
855
ne croit pas à la vertu des noms reste prisonnier
de
ses sens ; mais celui-là est véritablement voyageur qui n’a pas renon
856
blement voyageur qui n’a pas renoncé à convaincre
le
réel de mystère. Montant au Rozsadomb par ce matin brûlant, je savais
857
voyageur qui n’a pas renoncé à convaincre le réel
de
mystère. Montant au Rozsadomb par ce matin brûlant, je savais bien qu
858
pellent une conduite magique. Or il est délicieux
de
réaliser une idée fixe injustifiable : c’est le plaisir même de l’enf
859
x de réaliser une idée fixe injustifiable : c’est
le
plaisir même de l’enfance. Je portais donc ma vision d’Orient et je g
860
e idée fixe injustifiable : c’est le plaisir même
de
l’enfance. Je portais donc ma vision d’Orient et je grimpais gravemen
861
dée fixe injustifiable : c’est le plaisir même de
l’
enfance. Je portais donc ma vision d’Orient et je grimpais gravement c
862
isir même de l’enfance. Je portais donc ma vision
d’
Orient et je grimpais gravement comme je ferai, je pense, au jour de m
863
mpais gravement comme je ferai, je pense, au jour
de
mon pèlerinage au Temple de l’Objet inconnu. Voici ce que j’ai vu. On
864
ai, je pense, au jour de mon pèlerinage au Temple
de
l’Objet inconnu. Voici ce que j’ai vu. On passe une barrière, une cou
865
je pense, au jour de mon pèlerinage au Temple de
l’
Objet inconnu. Voici ce que j’ai vu. On passe une barrière, une cour v
866
. On passe une barrière, une cour vide ; on prend
le
sentier qui monte en zigzag à travers des jardins dont les arbustes s
867
er qui monte en zigzag à travers des jardins dont
les
arbustes sèchent, vers une espèce de grande villa ou palais baroque a
868
ardins dont les arbustes sèchent, vers une espèce
de
grande villa ou palais baroque assez décrépit, un décor en pierre bru
869
répit, un décor en pierre brune peu solide, rongé
de
roses crimson. On longe une galerie couverte, on tourne dans un escal
870
n tourne dans un escalier compliqué : c’est plein
de
colonnettes et de statues dégradées et charmantes. (Vue sur des maiso
871
scalier compliqué : c’est plein de colonnettes et
de
statues dégradées et charmantes. (Vue sur des maisons pauvres un peu
872
ntre des murs assez hauts dont l’un est peut-être
la
façade d’une chapelle ; mais la porte est fermée. Par une ouverture é
873
urs assez hauts dont l’un est peut-être la façade
d’
une chapelle ; mais la porte est fermée. Par une ouverture étroite on
874
’un est peut-être la façade d’une chapelle ; mais
la
porte est fermée. Par une ouverture étroite on passe ensuite à une se
875
vaste, où il y a quelques arbres devant une sorte
de
tour peu élevée, à demi recouverte de rosiers, et qu’il paraît imposs
876
t une sorte de tour peu élevée, à demi recouverte
de
rosiers, et qu’il paraît impossible de situer dans l’ensemble des con
877
recouverte de rosiers, et qu’il paraît impossible
de
situer dans l’ensemble des constructions. C’est là qu’on entre. Murs
878
osiers, et qu’il paraît impossible de situer dans
l’
ensemble des constructions. C’est là qu’on entre. Murs nus. Un catafa
879
s. C’est là qu’on entre. Murs nus. Un catafalque
de
bois, au milieu, recouvert d’un très beau tapis mince, ou bannière, a
880
nus. Un catafalque de bois, au milieu, recouvert
d’
un très beau tapis mince, ou bannière, avec des caractères turcs brodé
881
bannière, avec des caractères turcs brodés en or.
L’
histoire de Gül Baba est racontée sur un papier jauni encadré et fixé
882
vec des caractères turcs brodés en or. L’histoire
de
Gül Baba est racontée sur un papier jauni encadré et fixé au mur. Gül
883
est le dernier héros musulman qui ait fait parler
de
lui en Hongrie. Il s’appelait en vérité Kehl Baba, ce qui signifie le
884
l s’appelait en vérité Kehl Baba, ce qui signifie
le
Prophète chauve. Les Hongrois, par erreur, en ont fait Gül Baba, ce q
885
té Kehl Baba, ce qui signifie le Prophète chauve.
Les
Hongrois, par erreur, en ont fait Gül Baba, ce qui signifie le Père d
886
par erreur, en ont fait Gül Baba, ce qui signifie
le
Père des roses. Moyennant cette naturalisation il continue de protége
887
roses. Moyennant cette naturalisation il continue
de
protéger la ville (en collaboration avec saint Gellert, dont la statu
888
nant cette naturalisation il continue de protéger
la
ville (en collaboration avec saint Gellert, dont la statue colossale,
889
ville (en collaboration avec saint Gellert, dont
la
statue colossale, sur un rocher, les bras levés, dirige la circulatio
890
Gellert, dont la statue colossale, sur un rocher,
les
bras levés, dirige la circulation de Pest. Gül Baba est moins théâtra
891
colossale, sur un rocher, les bras levés, dirige
la
circulation de Pest. Gül Baba est moins théâtral). D’ailleurs le tomb
892
un rocher, les bras levés, dirige la circulation
de
Pest. Gül Baba est moins théâtral). D’ailleurs le tombeau est vide. E
893
de Pest. Gül Baba est moins théâtral). D’ailleurs
le
tombeau est vide. Et les babouches ? Pas de babouches. Je sais bien q
894
ins théâtral). D’ailleurs le tombeau est vide. Et
les
babouches ? Pas de babouches. Je sais bien que ce n’est pas l’heure d
895
leurs le tombeau est vide. Et les babouches ? Pas
de
babouches. Je sais bien que ce n’est pas l’heure de visiter : le Père
896
? Pas de babouches. Je sais bien que ce n’est pas
l’
heure de visiter : le Père des roses est peut-être allé se promener. D
897
babouches. Je sais bien que ce n’est pas l’heure
de
visiter : le Père des roses est peut-être allé se promener. Dehors, l
898
e sais bien que ce n’est pas l’heure de visiter :
le
Père des roses est peut-être allé se promener. Dehors, les roses crim
899
des roses est peut-être allé se promener. Dehors,
les
roses crimson sentent le soufre. Trente degrés à l’ombre. Ce sanctuai
900
lé se promener. Dehors, les roses crimson sentent
le
soufre. Trente degrés à l’ombre. Ce sanctuaire indigent est plutôt in
901
roses crimson sentent le soufre. Trente degrés à
l’
ombre. Ce sanctuaire indigent est plutôt inexplicable que mystérieux.
902
nt est plutôt inexplicable que mystérieux. Aussi,
la
confusion des noms ne comporte aucun symbole à développer noblement.
903
un symbole à développer noblement. Une chute dans
le
quotidien. Car, en somme, le Prophète Chauve est devenu le jardinier
904
ment. Une chute dans le quotidien. Car, en somme,
le
Prophète Chauve est devenu le jardinier du Rozsadomb… Mais qu’eussè-j
905
ien. Car, en somme, le Prophète Chauve est devenu
le
jardinier du Rozsadomb… Mais qu’eussè-je pu contempler de plus « obje
906
bjectivement » étrange que ce lieu — inquiétant à
la
façon de certains regards lucides qu’il arrive qu’on porte sur la vie
907
ent » étrange que ce lieu — inquiétant à la façon
de
certains regards lucides qu’il arrive qu’on porte sur la vie, tout d’
908
ains regards lucides qu’il arrive qu’on porte sur
la
vie, tout d’un coup, à trois heures de l’après-midi par exemple, — no
909
lucides qu’il arrive qu’on porte sur la vie, tout
d’
un coup, à trois heures de l’après-midi par exemple, — non sans angois
910
porte sur la vie, tout d’un coup, à trois heures
de
l’après-midi par exemple, — non sans angoisse. Café amer En Hon
911
rte sur la vie, tout d’un coup, à trois heures de
l’
après-midi par exemple, — non sans angoisse. Café amer En Hongri
912
, — non sans angoisse. Café amer En Hongrie
l’
on est assailli par le pittoresque, mais il s’agit de le déjouer au mo
913
Café amer En Hongrie l’on est assailli par
le
pittoresque, mais il s’agit de le déjouer au moyen de toutes sortes d
914
n est assailli par le pittoresque, mais il s’agit
de
le déjouer au moyen de toutes sortes de ruses et de scepticismes, don
915
st assailli par le pittoresque, mais il s’agit de
le
déjouer au moyen de toutes sortes de ruses et de scepticismes, dont l
916
il s’agit de le déjouer au moyen de toutes sortes
de
ruses et de scepticismes, dont le plus simple consiste à traduire ce
917
le déjouer au moyen de toutes sortes de ruses et
de
scepticismes, dont le plus simple consiste à traduire ce que l’on voi
918
e toutes sortes de ruses et de scepticismes, dont
le
plus simple consiste à traduire ce que l’on voit. Cette banque à la f
919
s, dont le plus simple consiste à traduire ce que
l’
on voit. Cette banque à la façade violette, or et bleue aux grandes li
920
siste à traduire ce que l’on voit. Cette banque à
la
façade violette, or et bleue aux grandes lignes verticales peinturlur
921
s lignes verticales peinturlurées — elle n’a rien
d’
étrange, si l’on songe que nous sommes en Hongrie. Et ce n’est pas que
922
cales peinturlurées — elle n’a rien d’étrange, si
l’
on songe que nous sommes en Hongrie. Et ce n’est pas que je trouve ce
923
e n’est qu’amour jaloux du merveilleux, avec quoi
l’
on est trop souvent tenté de confondre l’excès de bizarrerie. C’est le
924
erveilleux, avec quoi l’on est trop souvent tenté
de
confondre l’excès de bizarrerie. C’est le faux merveilleux qui a disc
925
vec quoi l’on est trop souvent tenté de confondre
l’
excès de bizarrerie. C’est le faux merveilleux qui a discrédité le vra
926
l’on est trop souvent tenté de confondre l’excès
de
bizarrerie. C’est le faux merveilleux qui a discrédité le vrai, leque
927
t tenté de confondre l’excès de bizarrerie. C’est
le
faux merveilleux qui a discrédité le vrai, lequel est quotidien, circ
928
rerie. C’est le faux merveilleux qui a discrédité
le
vrai, lequel est quotidien, circonspect, souvent microscopique, moral
929
opique, moralement microscopique. (Il a tellement
l’
air de rien que nous sommes presque excusables de ne le point apercevo
930
, moralement microscopique. (Il a tellement l’air
de
rien que nous sommes presque excusables de ne le point apercevoir.) J
931
l’air de rien que nous sommes presque excusables
de
ne le point apercevoir.) Je vais cependant dire quelque chose d’une s
932
de rien que nous sommes presque excusables de ne
le
point apercevoir.) Je vais cependant dire quelque chose d’une scène p
933
apercevoir.) Je vais cependant dire quelque chose
d’
une scène pittoresque. Mais c’est une autre fois que je l’ai vue, à Pe
934
ène pittoresque. Mais c’est une autre fois que je
l’
ai vue, à Pest, lors d’un autre séjour, dans la semaine qui suit Noël,
935
’est une autre fois que je l’ai vue, à Pest, lors
d’
un autre séjour, dans la semaine qui suit Noël, — la plus sombre de l’
936
je l’ai vue, à Pest, lors d’un autre séjour, dans
la
semaine qui suit Noël, — la plus sombre de l’année par les rues vides
937
un autre séjour, dans la semaine qui suit Noël, —
la
plus sombre de l’année par les rues vides sous la pluie étrangère. Un
938
, dans la semaine qui suit Noël, — la plus sombre
de
l’année par les rues vides sous la pluie étrangère. Une porte basse s
939
ans la semaine qui suit Noël, — la plus sombre de
l’
année par les rues vides sous la pluie étrangère. Une porte basse s’ou
940
ne qui suit Noël, — la plus sombre de l’année par
les
rues vides sous la pluie étrangère. Une porte basse s’ouvre sur un lo
941
la plus sombre de l’année par les rues vides sous
la
pluie étrangère. Une porte basse s’ouvre sur un long corridor hanté d
942
ne porte basse s’ouvre sur un long corridor hanté
d’
ombres drapées, qui ne sont pas des nonnes, bien que les voûtes soient
943
res drapées, qui ne sont pas des nonnes, bien que
les
voûtes soient celles d’un ancien couvent. Nous pénétrons dans une gra
944
pas des nonnes, bien que les voûtes soient celles
d’
un ancien couvent. Nous pénétrons dans une grande salle vivement éclai
945
le vivement éclairée. Murs chaulés, et de nouveau
de
hautes voûtes. Une banquette longe trois des parois, la quatrième est
946
es parois, la quatrième est occupée en partie par
le
comptoir (un écriteau porte simplement ce tarif : 5 pengö), en partie
947
verres et bouteilles sont placées au hasard dans
l’
espace où tourne la fumée des cigares. Assis sur la banquette, quelque
948
es sont placées au hasard dans l’espace où tourne
la
fumée des cigares. Assis sur la banquette, quelques bougres isolés pr
949
’espace où tourne la fumée des cigares. Assis sur
la
banquette, quelques bougres isolés produisent en silence cette fumée,
950
bougres isolés produisent en silence cette fumée,
les
yeux à terre, dans l’attente. Nous sommes assis autour d’une table et
951
nt en silence cette fumée, les yeux à terre, dans
l’
attente. Nous sommes assis autour d’une table et nous voyons, au milie
952
à terre, dans l’attente. Nous sommes assis autour
d’
une table et nous voyons, au milieu de la salle, un arbre de Noël aux
953
s autour d’une table et nous voyons, au milieu de
la
salle, un arbre de Noël aux amples branches rayonnantes, dans une glo
954
e et nous voyons, au milieu de la salle, un arbre
de
Noël aux amples branches rayonnantes, dans une gloire de dorures, — e
955
aux amples branches rayonnantes, dans une gloire
de
dorures, — et massées tout autour, frileuses dans leurs dessous roses
956
tout autour, frileuses dans leurs dessous roses,
les
filles qui chantent une chanson populaire et regardent tristement les
957
ent une chanson populaire et regardent tristement
les
lumières. Il y en a aussi qui se réchauffent sur les degrés du poêle,
958
lumières. Il y en a aussi qui se réchauffent sur
les
degrés du poêle, celles-là ne chantant pas. Parmi elles, des Tziganes
959
gnoir noir et blanc… Je ne puis avaler mon verre
de
ce café trop amer qui pince la gorge. Dehors, nous ne parlons pas : l
960
s avaler mon verre de ce café trop amer qui pince
la
gorge. Dehors, nous ne parlons pas : le froid paralyse la mâchoire.
961
qui pince la gorge. Dehors, nous ne parlons pas :
le
froid paralyse la mâchoire. Les magnats en taxis La place Saint
962
. Dehors, nous ne parlons pas : le froid paralyse
la
mâchoire. Les magnats en taxis La place Saint-Georges, à Bude,
963
e parlons pas : le froid paralyse la mâchoire.
Les
magnats en taxis La place Saint-Georges, à Bude, est une place vra
964
paralyse la mâchoire. Les magnats en taxis
La
place Saint-Georges, à Bude, est une place vraiment royale. Vide, ell
965
e prend toute sa hauteur. Silencieuse, solennelle
de
nudité, entre le Palais du Régent et celui d’un des archiducs, quel d
966
hauteur. Silencieuse, solennelle de nudité, entre
le
Palais du Régent et celui d’un des archiducs, quel décor à rêver le c
967
lle de nudité, entre le Palais du Régent et celui
d’
un des archiducs, quel décor à rêver le cortège d’un sacre ! J’y ai vu
968
t et celui d’un des archiducs, quel décor à rêver
le
cortège d’un sacre ! J’y ai vu défiler la Chambre des Magnats, le jou
969
d’un des archiducs, quel décor à rêver le cortège
d’
un sacre ! J’y ai vu défiler la Chambre des Magnats, le jour de l’élec
970
à rêver le cortège d’un sacre ! J’y ai vu défiler
la
Chambre des Magnats, le jour de l’élection d’un des quatre gardiens d
971
sacre ! J’y ai vu défiler la Chambre des Magnats,
le
jour de l’élection d’un des quatre gardiens de la Couronne de saint É
972
J’y ai vu défiler la Chambre des Magnats, le jour
de
l’élection d’un des quatre gardiens de la Couronne de saint Étienne.
973
ai vu défiler la Chambre des Magnats, le jour de
l’
élection d’un des quatre gardiens de la Couronne de saint Étienne. Aup
974
ler la Chambre des Magnats, le jour de l’élection
d’
un des quatre gardiens de la Couronne de saint Étienne. Auprès du porc
975
s, le jour de l’élection d’un des quatre gardiens
de
la Couronne de saint Étienne. Auprès du porche du Palais, ils n’étaie
976
le jour de l’élection d’un des quatre gardiens de
la
Couronne de saint Étienne. Auprès du porche du Palais, ils n’étaient
977
’élection d’un des quatre gardiens de la Couronne
de
saint Étienne. Auprès du porche du Palais, ils n’étaient guère qu’une
978
he du Palais, ils n’étaient guère qu’une centaine
de
curieux, et quelques gardes. Traversant dans sa longueur toute l’imme
979
uelques gardes. Traversant dans sa longueur toute
l’
immense place, les automobiles passèrent lentement, l’une après l’autr
980
raversant dans sa longueur toute l’immense place,
les
automobiles passèrent lentement, l’une après l’autre, durant une demi
981
e après l’autre, durant une demi-heure, saluées à
l’
entrée du Palais par les gardes présentant les armes. À ce salut, les
982
une demi-heure, saluées à l’entrée du Palais par
les
gardes présentant les armes. À ce salut, les quelques députés bourgeo
983
es à l’entrée du Palais par les gardes présentant
les
armes. À ce salut, les quelques députés bourgeois en redingote ne rép
984
par les gardes présentant les armes. À ce salut,
les
quelques députés bourgeois en redingote ne répondent que du bout des
985
dent que du bout des doigts, crainte, sans doute,
de
troubler l’équilibre toujours instable des huit reflets de leur digni
986
bout des doigts, crainte, sans doute, de troubler
l’
équilibre toujours instable des huit reflets de leur dignité. Mais je
987
er l’équilibre toujours instable des huit reflets
de
leur dignité. Mais je n’oublierai pas le sourire de ce vieux prince :
988
reflets de leur dignité. Mais je n’oublierai pas
le
sourire de ce vieux prince : un vrai sourire, adressé personnellement
989
leur dignité. Mais je n’oublierai pas le sourire
de
ce vieux prince : un vrai sourire, adressé personnellement à l’homme,
990
ince : un vrai sourire, adressé personnellement à
l’
homme, — et le mot « affable » reprend ici sa noblesse. Mon voisin qui
991
sourire, adressé personnellement à l’homme, — et
le
mot « affable » reprend ici sa noblesse. Mon voisin qui a la tête de
992
fable » reprend ici sa noblesse. Mon voisin qui a
la
tête de François-Joseph, dont il fut peut-être valet, nomme à leur pa
993
reprend ici sa noblesse. Mon voisin qui a la tête
de
François-Joseph, dont il fut peut-être valet, nomme à leur passage le
994
dont il fut peut-être valet, nomme à leur passage
les
Karolyi, les Festetic, les Esterhazy, et ces comtes Szechenyi qui con
995
eut-être valet, nomme à leur passage les Karolyi,
les
Festetic, les Esterhazy, et ces comtes Szechenyi qui construisirent l
996
, nomme à leur passage les Karolyi, les Festetic,
les
Esterhazy, et ces comtes Szechenyi qui construisirent le premier pont
997
Szechenyi qui construisirent le premier pont sur
le
Danube, auteurs ainsi du trait d’union de Buda-Pest. Il y a trois sem
998
remier pont sur le Danube, auteurs ainsi du trait
d’
union de Buda-Pest. Il y a trois semaines, à Freudenau, lors du Derby
999
ont sur le Danube, auteurs ainsi du trait d’union
de
Buda-Pest. Il y a trois semaines, à Freudenau, lors du Derby viennois
1000
semaines, à Freudenau, lors du Derby viennois, je
les
ai vus portant cylindre gris à la terrasse du Jockey-Club. Maintenant
1001
y viennois, je les ai vus portant cylindre gris à
la
terrasse du Jockey-Club. Maintenant dans leurs limousines armoriées —
1002
s limousines armoriées — couronnes princières sur
le
bouchon du radiateur — les voici, pères et fils, revêtus des couleurs
1003
ouronnes princières sur le bouchon du radiateur —
les
voici, pères et fils, revêtus des couleurs familiales. Ils se tiennen
1004
se tiennent très droits, appuyés sur leurs sabres
d’
or recourbés dont les poignées entre leurs doigts gantés étincellent.
1005
its, appuyés sur leurs sabres d’or recourbés dont
les
poignées entre leurs doigts gantés étincellent. Parfois un collier de
1006
urs doigts gantés étincellent. Parfois un collier
de
la Toison d’Or, sur la fourrure du dolman rouge ou jaune, laisse pend
1007
doigts gantés étincellent. Parfois un collier de
la
Toison d’Or, sur la fourrure du dolman rouge ou jaune, laisse pendre
1008
ntés étincellent. Parfois un collier de la Toison
d’
Or, sur la fourrure du dolman rouge ou jaune, laisse pendre son petit
1009
ellent. Parfois un collier de la Toison d’Or, sur
la
fourrure du dolman rouge ou jaune, laisse pendre son petit mouton. Ai
1010
Mais, ô pathétique dissonance, tangible absurdité
de
notre époque, beaucoup ont dû louer des taxis démodés, au tarif infér
1011
odés, au tarif inférieur. Des chauffeurs vautrés,
la
casquette de travers sur leurs idées sociales, pareils aux chauffeurs
1012
f inférieur. Des chauffeurs vautrés, la casquette
de
travers sur leurs idées sociales, pareils aux chauffeurs de toutes le
1013
sur leurs idées sociales, pareils aux chauffeurs
de
toutes les villes, conduisent dans la cour d’honneur ces reliques inc
1014
idées sociales, pareils aux chauffeurs de toutes
les
villes, conduisent dans la cour d’honneur ces reliques incroyables et
1015
chauffeurs de toutes les villes, conduisent dans
la
cour d’honneur ces reliques incroyables et les encensent à la benzine
1016
urs de toutes les villes, conduisent dans la cour
d’
honneur ces reliques incroyables et les encensent à la benzine industr
1017
ans la cour d’honneur ces reliques incroyables et
les
encensent à la benzine industrielle. Mais quelle gravité parmi les sp
1018
nneur ces reliques incroyables et les encensent à
la
benzine industrielle. Mais quelle gravité parmi les spectateurs. Reli
1019
a benzine industrielle. Mais quelle gravité parmi
les
spectateurs. Reliques ? Elles conservent du moins toute leur efficace
1020
es conservent du moins toute leur efficace. Voici
le
Prince Primat, les doigts levés. On se signe. Et voici venir à pied d
1021
oins toute leur efficace. Voici le Prince Primat,
les
doigts levés. On se signe. Et voici venir à pied de son palais proche
1022
doigts levés. On se signe. Et voici venir à pied
de
son palais proche, tout seul, un archiduc. On salue profondément, en
1023
e profondément, en silence (cliquetis des rangées
de
décorations sur l’uniforme kaki, et du sabre balancé). Une auto encor
1024
silence (cliquetis des rangées de décorations sur
l’
uniforme kaki, et du sabre balancé). Une auto encore, en retard : le p
1025
t du sabre balancé). Une auto encore, en retard :
le
président du Conseil, maigre, jaune et rigide dans son costume noir e
1026
, jaune et rigide dans son costume noir et or. Si
le
comte Bethlen venait à la SDN en tenue de magnat, beaucoup de gens co
1027
costume noir et or. Si le comte Bethlen venait à
la
SDN en tenue de magnat, beaucoup de gens comprendraient mieux sa poli
1028
or. Si le comte Bethlen venait à la SDN en tenue
de
magnat, beaucoup de gens comprendraient mieux sa politique. Les co
1029
oup de gens comprendraient mieux sa politique.
Les
coussins Rothermere Le nationalisme de la plupart des États de l’E
1030
mieux sa politique. Les coussins Rothermere
Le
nationalisme de la plupart des États de l’Europe se formule en revend
1031
ue. Les coussins Rothermere Le nationalisme
de
la plupart des États de l’Europe se formule en revendications d’homme
1032
es États de l’Europe se formule en revendications
d’
hommes d’affaires. Ce qu’on prétend défendre, c’est son droit, ses int
1033
de l’Europe se formule en revendications d’hommes
d’
affaires. Ce qu’on prétend défendre, c’est son droit, ses intérêts. Ma
1034
c’est son droit, ses intérêts. Mais, en Hongrie,
le
nationalisme est une passion toute nue, qui exprime l’être profond de
1035
tionalisme est une passion toute nue, qui exprime
l’
être profond de la race. On ne discute pas cet amour, on ne réfute pas
1036
une passion toute nue, qui exprime l’être profond
de
la race. On ne discute pas cet amour, on ne réfute pas cette haine. I
1037
passion toute nue, qui exprime l’être profond de
la
race. On ne discute pas cet amour, on ne réfute pas cette haine. Ici,
1038
pas cet amour, on ne réfute pas cette haine. Ici,
la
sympathie est un devoir de politesse. Comment la mesurer sans mauvais
1039
pas cette haine. Ici, la sympathie est un devoir
de
politesse. Comment la mesurer sans mauvaise grâce à qui vous a reçu c
1040
la sympathie est un devoir de politesse. Comment
la
mesurer sans mauvaise grâce à qui vous a reçu comme un cadeau de Dieu
1041
mauvaise grâce à qui vous a reçu comme un cadeau
de
Dieu. (« C’est Dieu qui vous envoie », dit la formule traditionnelle.
1042
eau de Dieu. (« C’est Dieu qui vous envoie », dit
la
formule traditionnelle.) La liqueur de pêche rend démonstratif, dont
1043
ui vous envoie », dit la formule traditionnelle.)
La
liqueur de pêche rend démonstratif, dont on vide trois verres d’un tr
1044
oie », dit la formule traditionnelle.) La liqueur
de
pêche rend démonstratif, dont on vide trois verres d’un trait en guis
1045
êche rend démonstratif, dont on vide trois verres
d’
un trait en guise de salut. C’est alors que se déplient les cartes de
1046
it en guise de salut. C’est alors que se déplient
les
cartes de la « Hongrie mutilée ». — « Savez-vous qu’on nous a volé le
1047
de salut. C’est alors que se déplient les cartes
de
la « Hongrie mutilée ». — « Savez-vous qu’on nous a volé les deux tie
1048
salut. C’est alors que se déplient les cartes de
la
« Hongrie mutilée ». — « Savez-vous qu’on nous a volé les deux tiers
1049
ngrie mutilée ». — « Savez-vous qu’on nous a volé
les
deux tiers de notre patrie ? » — Ah ! ce n’est pas vous, maintenant,
1050
. — « Savez-vous qu’on nous a volé les deux tiers
de
notre patrie ? » — Ah ! ce n’est pas vous, maintenant, qui allez dema
1051
maintenant, qui allez demander raison à vos hôtes
de
la façon dont ils traitaient, au temps de leur puissance, les allogèn
1052
ntenant, qui allez demander raison à vos hôtes de
la
façon dont ils traitaient, au temps de leur puissance, les allogènes
1053
dont ils traitaient, au temps de leur puissance,
les
allogènes infiltrés dans certaines régions jusqu’à y former la majori
1054
infiltrés dans certaines régions jusqu’à y former
la
majorité. Pourtant, vous les obligeriez à vous répondre que les nombr
1055
ions jusqu’à y former la majorité. Pourtant, vous
les
obligeriez à vous répondre que les nombres ont tort au regard de l’an
1056
Pourtant, vous les obligeriez à vous répondre que
les
nombres ont tort au regard de l’antiquité d’une civilisation ; qu’il
1057
us répondre que les nombres ont tort au regard de
l’
antiquité d’une civilisation ; qu’il s’agit ici de valeurs ; que si le
1058
que les nombres ont tort au regard de l’antiquité
d’
une civilisation ; qu’il s’agit ici de valeurs ; que si les population
1059
l’antiquité d’une civilisation ; qu’il s’agit ici
de
valeurs ; que si les populations des régions perdues étaient parfois
1060
vilisation ; qu’il s’agit ici de valeurs ; que si
les
populations des régions perdues étaient parfois en majorité roumaines
1061
aient parfois en majorité roumaines ou slovaques,
la
minorité hongroise y comptait cependant pour plus ; elle était seule
1062
pour plus ; elle était seule active et créatrice.
Le
reste : des porteurs d’eau… Dans l’inextricable confusion d’injustice
1063
eule active et créatrice. Le reste : des porteurs
d’
eau… Dans l’inextricable confusion d’injustices à quoi devait mener le
1064
et créatrice. Le reste : des porteurs d’eau… Dans
l’
inextricable confusion d’injustices à quoi devait mener le wilsonisme
1065
des porteurs d’eau… Dans l’inextricable confusion
d’
injustices à quoi devait mener le wilsonisme schématique qui traça les
1066
icable confusion d’injustices à quoi devait mener
le
wilsonisme schématique qui traça les frontières actuelles, dans ce re
1067
devait mener le wilsonisme schématique qui traça
les
frontières actuelles, dans ce renversement des rôles, l’oppresseur de
1068
tières actuelles, dans ce renversement des rôles,
l’
oppresseur devenant l’opprimé sans y perdre le sentiment de sa supério
1069
ce renversement des rôles, l’oppresseur devenant
l’
opprimé sans y perdre le sentiment de sa supériorité de race — sa véri
1070
es, l’oppresseur devenant l’opprimé sans y perdre
le
sentiment de sa supériorité de race — sa véritable légitimité — on co
1071
eur devenant l’opprimé sans y perdre le sentiment
de
sa supériorité de race — sa véritable légitimité — on comprend que le
1072
rimé sans y perdre le sentiment de sa supériorité
de
race — sa véritable légitimité — on comprend que le Hongrois n’ait po
1073
race — sa véritable légitimité — on comprend que
le
Hongrois n’ait point conservé une extrême sensibilité aux arguments d
1074
nt conservé une extrême sensibilité aux arguments
de
« droit » qui autorisèrent ce chaos. Il lui reste sa foi en la grande
1075
qui autorisèrent ce chaos. Il lui reste sa foi en
la
grandeur éternelle de la Hongrie — intemporelle, n’ayant cure des sta
1076
aos. Il lui reste sa foi en la grandeur éternelle
de
la Hongrie — intemporelle, n’ayant cure des statistiques — et sa doul
1077
. Il lui reste sa foi en la grandeur éternelle de
la
Hongrie — intemporelle, n’ayant cure des statistiques — et sa douleur
1078
e des statistiques — et sa douleur aussi, douleur
d’
orgueil blessé, mais qui emporte la sympathie : car l’orgueil hongrois
1079
aussi, douleur d’orgueil blessé, mais qui emporte
la
sympathie : car l’orgueil hongrois n’est point de ce que l’on gagne s
1080
gueil blessé, mais qui emporte la sympathie : car
l’
orgueil hongrois n’est point de ce que l’on gagne sur autrui, mais de
1081
la sympathie : car l’orgueil hongrois n’est point
de
ce que l’on gagne sur autrui, mais de ce que l’on est ; non point d’u
1082
ie : car l’orgueil hongrois n’est point de ce que
l’
on gagne sur autrui, mais de ce que l’on est ; non point d’un parvenu,
1083
n’est point de ce que l’on gagne sur autrui, mais
de
ce que l’on est ; non point d’un parvenu, mais d’un aristocrate. Tous
1084
t de ce que l’on gagne sur autrui, mais de ce que
l’
on est ; non point d’un parvenu, mais d’un aristocrate. Tous dangers é
1085
e sur autrui, mais de ce que l’on est ; non point
d’
un parvenu, mais d’un aristocrate. Tous dangers égaux d’ailleurs, préf
1086
de ce que l’on est ; non point d’un parvenu, mais
d’
un aristocrate. Tous dangers égaux d’ailleurs, préférons cet impériali
1087
gers égaux d’ailleurs, préférons cet impérialisme
de
l’âme à l’impérialisme de la surproduction des machines et des enfant
1088
s égaux d’ailleurs, préférons cet impérialisme de
l’
âme à l’impérialisme de la surproduction des machines et des enfants.
1089
d’ailleurs, préférons cet impérialisme de l’âme à
l’
impérialisme de la surproduction des machines et des enfants. C’est pa
1090
férons cet impérialisme de l’âme à l’impérialisme
de
la surproduction des machines et des enfants. C’est parce que les Hon
1091
ons cet impérialisme de l’âme à l’impérialisme de
la
surproduction des machines et des enfants. C’est parce que les Hongro
1092
tion des machines et des enfants. C’est parce que
les
Hongrois n’ont pas perdu le sentiment qu’ils sont en scandale au mond
1093
nts. C’est parce que les Hongrois n’ont pas perdu
le
sentiment qu’ils sont en scandale au monde moderne. Voilà ce qu’on ne
1094
au monde moderne. Voilà ce qu’on ne dit pas dans
les
dépêches d’agence : les journalistes, une fois de plus, passent à côt
1095
erne. Voilà ce qu’on ne dit pas dans les dépêches
d’
agence : les journalistes, une fois de plus, passent à côté de l’essen
1096
ce qu’on ne dit pas dans les dépêches d’agence :
les
journalistes, une fois de plus, passent à côté de l’essentiel. Rien n
1097
journalistes, une fois de plus, passent à côté de
l’
essentiel. Rien n’est grave, que le sentiment, — en politique comme ai
1098
sent à côté de l’essentiel. Rien n’est grave, que
le
sentiment, — en politique comme ailleurs. Songez à ce qui forme l’opi
1099
n politique comme ailleurs. Songez à ce qui forme
l’
opinion, cet ensemble de mythes sentimentaux qui gouverne les argument
1100
rs. Songez à ce qui forme l’opinion, cet ensemble
de
mythes sentimentaux qui gouverne les arguments. Songez combien souven
1101
cet ensemble de mythes sentimentaux qui gouverne
les
arguments. Songez combien souvent les raisons qu’on allègue masquent
1102
ui gouverne les arguments. Songez combien souvent
les
raisons qu’on allègue masquent les causes qui agissent. Ici je rentre
1103
ombien souvent les raisons qu’on allègue masquent
les
causes qui agissent. Ici je rentre dans mes chasses et rembouche mon
1104
et rembouche mon cor. Macrocosme et microcosme :
la
politique des peuples ressemble à celle des individus, pour ce qui es
1105
à celle des individus, pour ce qui est du moins,
de
mentir à soi-même. Mais les Hongrois ne renient pas leur romantisme.
1106
r ce qui est du moins, de mentir à soi-même. Mais
les
Hongrois ne renient pas leur romantisme. Quelle revanche prendrait la
1107
nt pas leur romantisme. Quelle revanche prendrait
la
Hongrie, sur une Carte du Tendre d’après le traité de Trianon ! Ces c
1108
drait la Hongrie, sur une Carte du Tendre d’après
le
traité de Trianon ! Ces choses, je les ai rêvées sur un divan, à caus
1109
ongrie, sur une Carte du Tendre d’après le traité
de
Trianon ! Ces choses, je les ai rêvées sur un divan, à cause d’un cou
1110
dre d’après le traité de Trianon ! Ces choses, je
les
ai rêvées sur un divan, à cause d’un coussin où s’étalait le sourire
1111
es choses, je les ai rêvées sur un divan, à cause
d’
un coussin où s’étalait le sourire optimiste de Lord Rothermere, en so
1112
s sur un divan, à cause d’un coussin où s’étalait
le
sourire optimiste de Lord Rothermere, en soie blanche sur fond noir.
1113
se d’un coussin où s’étalait le sourire optimiste
de
Lord Rothermere, en soie blanche sur fond noir. Quelques articles fav
1114
che sur fond noir. Quelques articles favorables à
la
Hongrie, au moment où l’Europe semblait abandonner à son malheur ce p
1115
es articles favorables à la Hongrie, au moment où
l’
Europe semblait abandonner à son malheur ce peuple turbulent et déchu,
1116
r ce peuple turbulent et déchu, suffirent à faire
d’
un affairiste anglais l’idole du nationalisme magyar. Son portrait aff
1117
déchu, suffirent à faire d’un affairiste anglais
l’
idole du nationalisme magyar. Son portrait affiché dans tous les cafés
1118
tionalisme magyar. Son portrait affiché dans tous
les
cafés, dans les halls universitaires, brodé aux devantures des magasi
1119
r. Son portrait affiché dans tous les cafés, dans
les
halls universitaires, brodé aux devantures des magasins de mode, et s
1120
universitaires, brodé aux devantures des magasins
de
mode, et son nom en lettres géantes sur une montagne chauve, voisine
1121
lettres géantes sur une montagne chauve, voisine
de
Budapest, témoignent des espérances démesurées qu’il sut entretenir a
1122
espérances démesurées qu’il sut entretenir autour
d’
une action certes méritoire, mais plus symbolique qu’efficace. Et sans
1123
Et sans lendemain. Ce mélange, en toutes choses,
d’
enfantillage et de grandeur, d’imaginations absurdes et de souffrances
1124
. Ce mélange, en toutes choses, d’enfantillage et
de
grandeur, d’imaginations absurdes et de souffrances vraies, n’est-ce
1125
en toutes choses, d’enfantillage et de grandeur,
d’
imaginations absurdes et de souffrances vraies, n’est-ce point le clim
1126
illage et de grandeur, d’imaginations absurdes et
de
souffrances vraies, n’est-ce point le climat de la passion ? — C’est
1127
absurdes et de souffrances vraies, n’est-ce point
le
climat de la passion ? — C’est celui de la Hongrie.6 Une lettre d
1128
t de souffrances vraies, n’est-ce point le climat
de
la passion ? — C’est celui de la Hongrie.6 Une lettre de Matthias
1129
e souffrances vraies, n’est-ce point le climat de
la
passion ? — C’est celui de la Hongrie.6 Une lettre de Matthias Co
1130
-ce point le climat de la passion ? — C’est celui
de
la Hongrie.6 Une lettre de Matthias Corvin « Matthias, par la
1131
point le climat de la passion ? — C’est celui de
la
Hongrie.6 Une lettre de Matthias Corvin « Matthias, par la grâ
1132
on ? — C’est celui de la Hongrie.6 Une lettre
de
Matthias Corvin « Matthias, par la grâce de Dieu roi de Hongrie. B
1133
Une lettre de Matthias Corvin « Matthias, par
la
grâce de Dieu roi de Hongrie. Bonjour, citoyens ! Si vous ne venez pa
1134
re de Matthias Corvin « Matthias, par la grâce
de
Dieu roi de Hongrie. Bonjour, citoyens ! Si vous ne venez pas tous vo
1135
as Corvin « Matthias, par la grâce de Dieu roi
de
Hongrie. Bonjour, citoyens ! Si vous ne venez pas tous vous présenter
1136
enez pas tous vous présenter au roi, vous perdrez
la
tête. Donné à Bude. Le roi. » Visite à Babits Personne, à ma co
1137
enter au roi, vous perdrez la tête. Donné à Bude.
Le
roi. » Visite à Babits Personne, à ma connaissance, ne se plain
1138
bits Personne, à ma connaissance, ne se plaint
de
ce qu’il y ait peu de poètes par le monde. C’est dans l’ordre des cho
1139
ne se plaint de ce qu’il y ait peu de poètes par
le
monde. C’est dans l’ordre des choses, et l’on sait qu’il suffit de tr
1140
u’il y ait peu de poètes par le monde. C’est dans
l’
ordre des choses, et l’on sait qu’il suffit de très peu de sel pour re
1141
s par le monde. C’est dans l’ordre des choses, et
l’
on sait qu’il suffit de très peu de sel pour rendre mangeable beaucoup
1142
ans l’ordre des choses, et l’on sait qu’il suffit
de
très peu de sel pour rendre mangeable beaucoup de nouilles. Mais voic
1143
ais voici, par exemple, ce qu’il faudrait essayer
d’
obtenir : que la grande majorité des gens ne deviennent pas enragés dè
1144
xemple, ce qu’il faudrait essayer d’obtenir : que
la
grande majorité des gens ne deviennent pas enragés dès qu’ils perçoiv
1145
s ne deviennent pas enragés dès qu’ils perçoivent
de
la poésie dans l’air. Espoir sans doute chimérique, mais qu’on peut c
1146
e deviennent pas enragés dès qu’ils perçoivent de
la
poésie dans l’air. Espoir sans doute chimérique, mais qu’on peut croi
1147
s enragés dès qu’ils perçoivent de la poésie dans
l’
air. Espoir sans doute chimérique, mais qu’on peut croire bien près d’
1148
oute chimérique, mais qu’on peut croire bien près
d’
être comblé dans ce pays où les courtiers ne donnent pas encore le ton
1149
ut croire bien près d’être comblé dans ce pays où
les
courtiers ne donnent pas encore le ton. La littérature hongroise n’es
1150
ns ce pays où les courtiers ne donnent pas encore
le
ton. La littérature hongroise n’est guère connue à l’étranger que par
1151
ys où les courtiers ne donnent pas encore le ton.
La
littérature hongroise n’est guère connue à l’étranger que par quelque
1152
on. La littérature hongroise n’est guère connue à
l’
étranger que par quelques pièces légères de Molnar, qui n’ont de hongr
1153
nnue à l’étranger que par quelques pièces légères
de
Molnar, qui n’ont de hongrois que l’auteur, d’ailleurs israélite. Il
1154
par quelques pièces légères de Molnar, qui n’ont
de
hongrois que l’auteur, d’ailleurs israélite. Il y a, bien entendu, un
1155
èces légères de Molnar, qui n’ont de hongrois que
l’
auteur, d’ailleurs israélite. Il y a, bien entendu, une littérature of
1156
du, une littérature officielle destinée à remplir
les
revues bien pensantes. Elle traite de sujets « bien hongrois » dans u
1157
à remplir les revues bien pensantes. Elle traite
de
sujets « bien hongrois » dans un style académique qui me paraît être
1158
ois » dans un style académique qui me paraît être
le
contraire du style hongrois. Il y a aussi une extrême gauche, et sa r
1159
extrême gauche, et sa revue Documentum (une sorte
d’
Esprit nouveau troublé de surréalisme), groupée autour de Louis Kassak
1160
ue Documentum (une sorte d’Esprit nouveau troublé
de
surréalisme), groupée autour de Louis Kassak, nettement international
1161
tour de Louis Kassak, nettement internationaliste
de
doctrine, au lyrisme neuf et parfois sauvage, social ou futuriste, et
1162
et parfois sauvage, social ou futuriste, et dont
la
« furia » serait assez hongroise… Mais l’expression la plus libre et
1163
et dont la « furia » serait assez hongroise… Mais
l’
expression la plus libre et la plus vivante du génie littéraire de cet
1164
furia » serait assez hongroise… Mais l’expression
la
plus libre et la plus vivante du génie littéraire de cette race me pa
1165
sez hongroise… Mais l’expression la plus libre et
la
plus vivante du génie littéraire de cette race me paraît bien avoir é
1166
plus libre et la plus vivante du génie littéraire
de
cette race me paraît bien avoir été donnée par le groupe important du
1167
de cette race me paraît bien avoir été donnée par
le
groupe important du Nyugât (l’Occident), revue fondée par ces deux gr
1168
oir été donnée par le groupe important du Nyugât (
l’
Occident), revue fondée par ces deux grands poètes : André Ady et Mich
1169
grands poètes : André Ady et Michel Babits. Ady,
le
sombre et pathétique, est mort à 35 ans, mais sa ferveur anime encore
1170
r anime encore ces écrivains profondément magyars
de
sensibilité, bien que souvent européens de goûts et de curiosités, et
1171
agyars de sensibilité, bien que souvent européens
de
goûts et de curiosités, et dont Michel Babits est aujourd’hui le chef
1172
nsibilité, bien que souvent européens de goûts et
de
curiosités, et dont Michel Babits est aujourd’hui le chef de file. De
1173
curiosités, et dont Michel Babits est aujourd’hui
le
chef de file. Des amis m’emmènent le voir à Esztergom, où il passe se
1174
és, et dont Michel Babits est aujourd’hui le chef
de
file. Des amis m’emmènent le voir à Esztergom, où il passe ses étés.
1175
aujourd’hui le chef de file. Des amis m’emmènent
le
voir à Esztergom, où il passe ses étés. Esztergom est la plus vieille
1176
à Esztergom, où il passe ses étés. Esztergom est
la
plus vieille capitale de la Hongrie. Attila, me dit-on, y régna. Aujo
1177
ses étés. Esztergom est la plus vieille capitale
de
la Hongrie. Attila, me dit-on, y régna. Aujourd’hui c’est la résidenc
1178
s étés. Esztergom est la plus vieille capitale de
la
Hongrie. Attila, me dit-on, y régna. Aujourd’hui c’est la résidence d
1179
ie. Attila, me dit-on, y régna. Aujourd’hui c’est
la
résidence du Prince Primat. Au-dessus du palais de l’archevêché, sur
1180
a résidence du Prince Primat. Au-dessus du palais
de
l’archevêché, sur une colline que le Danube contourne, la Basilique é
1181
ésidence du Prince Primat. Au-dessus du palais de
l’
archevêché, sur une colline que le Danube contourne, la Basilique élèv
1182
us du palais de l’archevêché, sur une colline que
le
Danube contourne, la Basilique élève une coupole d’ocre éclatant, imm
1183
hevêché, sur une colline que le Danube contourne,
la
Basilique élève une coupole d’ocre éclatant, immense et froide, domin
1184
Danube contourne, la Basilique élève une coupole
d’
ocre éclatant, immense et froide, dominant cette plaine onduleuse dont
1185
e et froide, dominant cette plaine onduleuse dont
les
vagues se perdent dans une poussière violacée à l’horizon — chez les
1186
s vagues se perdent dans une poussière violacée à
l’
horizon — chez les Tchèques déjà. Nous allons aux bains, car c’est dan
1187
nt dans une poussière violacée à l’horizon — chez
les
Tchèques déjà. Nous allons aux bains, car c’est dans la piscine que n
1188
èques déjà. Nous allons aux bains, car c’est dans
la
piscine que nous devons rencontrer le poète. Cheveux noirs d’aigle co
1189
c’est dans la piscine que nous devons rencontrer
le
poète. Cheveux noirs d’aigle collés sur son large front, belle carrur
1190
ue nous devons rencontrer le poète. Cheveux noirs
d’
aigle collés sur son large front, belle carrure ruisselante, il nous s
1191
, belle carrure ruisselante, il nous sourit, dans
l’
eau jusqu’à mi-corps, mythologique. Nous sortons ensemble de la petite
1192
u’à mi-corps, mythologique. Nous sortons ensemble
de
la petite ville aux rues de terre brûlante, aux maisons jaunes basses
1193
mi-corps, mythologique. Nous sortons ensemble de
la
petite ville aux rues de terre brûlante, aux maisons jaunes basses, v
1194
Nous sortons ensemble de la petite ville aux rues
de
terre brûlante, aux maisons jaunes basses, ville sans ombre, sans arb
1195
lle sans ombre, sans arbres, et nous montons vers
la
maison du poète, sur un coteau de vignes. Trois chambres boisées ento
1196
us montons vers la maison du poète, sur un coteau
de
vignes. Trois chambres boisées entourées d’une large galerie d’où l’o
1197
oteau de vignes. Trois chambres boisées entourées
d’
une large galerie d’où l’on voit le Danube gris-jaune, brillant, sans
1198
is chambres boisées entourées d’une large galerie
d’
où l’on voit le Danube gris-jaune, brillant, sans rides, la petite vil
1199
ambres boisées entourées d’une large galerie d’où
l’
on voit le Danube gris-jaune, brillant, sans rides, la petite ville ju
1200
sées entourées d’une large galerie d’où l’on voit
le
Danube gris-jaune, brillant, sans rides, la petite ville juste au-des
1201
voit le Danube gris-jaune, brillant, sans rides,
la
petite ville juste au-dessous de soi, et la Basilique sur son rocher.
1202
ides, la petite ville juste au-dessous de soi, et
la
Basilique sur son rocher. Fraîches, sentant bon, avec des livres sur
1203
vans aux riches couleurs, des boissons préparées,
l’
ombre bourdonnante, — trois petites chambres et un pan de toit par-des
1204
bourdonnante, — trois petites chambres et un pan
de
toit par-dessus, cela fait une baraque à peine visible dans les vigne
1205
essus, cela fait une baraque à peine visible dans
les
vignes, à peine détachée du flanc de la colline pour que les vents ne
1206
isible dans les vignes, à peine détachée du flanc
de
la colline pour que les vents ne l’emportent pas, un beau nid de poèt
1207
ble dans les vignes, à peine détachée du flanc de
la
colline pour que les vents ne l’emportent pas, un beau nid de poète :
1208
à peine détachée du flanc de la colline pour que
les
vents ne l’emportent pas, un beau nid de poète : car demeurer ici, c’
1209
chée du flanc de la colline pour que les vents ne
l’
emportent pas, un beau nid de poète : car demeurer ici, c’est demeurer
1210
our que les vents ne l’emportent pas, un beau nid
de
poète : car demeurer ici, c’est demeurer vraiment en « pleine nature
1211
r vraiment en « pleine nature », un peu au-dessus
de
la plaine, pas tout à fait dans le ciel, là où doivent vivre ceux qui
1212
raiment en « pleine nature », un peu au-dessus de
la
plaine, pas tout à fait dans le ciel, là où doivent vivre ceux qui «
1213
peu au-dessus de la plaine, pas tout à fait dans
le
ciel, là où doivent vivre ceux qui « chantent ». L’après-midi est imm
1214
ciel, là où doivent vivre ceux qui « chantent ».
L’
après-midi est immense. Nous buvons des vins dorés et doux que nous ve
1215
s belle), nous inscrivons nos noms au charbon sur
le
mur chaulé, Gachot prend des photos, Gyergyai fouille la plaine à la
1216
chaulé, Gachot prend des photos, Gyergyai fouille
la
plaine à la longue-vue et rêve qu’il y est, je grimpe au cerisier sau
1217
ot prend des photos, Gyergyai fouille la plaine à
la
longue-vue et rêve qu’il y est, je grimpe au cerisier sauvage, derriè
1218
il y est, je grimpe au cerisier sauvage, derrière
la
maison, un peintre tout en blanc arrive par les vignes, ah ! qu’il fa
1219
re la maison, un peintre tout en blanc arrive par
les
vignes, ah ! qu’il fait beau temps, l’horizon est aussi lointain qu’o
1220
rrive par les vignes, ah ! qu’il fait beau temps,
l’
horizon est aussi lointain qu’on l’imagine, tout a de belles couleurs,
1221
it beau temps, l’horizon est aussi lointain qu’on
l’
imagine, tout a de belles couleurs, le poète sourit en lui-même, il y
1222
orizon est aussi lointain qu’on l’imagine, tout a
de
belles couleurs, le poète sourit en lui-même, il y a une enfance dans
1223
ntain qu’on l’imagine, tout a de belles couleurs,
le
poète sourit en lui-même, il y a une enfance dans l’air… Le retour
1224
poète sourit en lui-même, il y a une enfance dans
l’
air… Le retour d’Esztergom Il faut se pencher aux portières et l
1225
it en lui-même, il y a une enfance dans l’air…
Le
retour d’Esztergom Il faut se pencher aux portières et laisser l’a
1226
même, il y a une enfance dans l’air… Le retour
d’
Esztergom Il faut se pencher aux portières et laisser l’air furieux
1227
om Il faut se pencher aux portières et laisser
l’
air furieux emmêler les cheveux, glacer le masque et appuyer au front
1228
er aux portières et laisser l’air furieux emmêler
les
cheveux, glacer le masque et appuyer au front comme une caresse indéf
1229
laisser l’air furieux emmêler les cheveux, glacer
le
masque et appuyer au front comme une caresse indéfinie de la puissanc
1230
e et appuyer au front comme une caresse indéfinie
de
la puissance. Soir de voyage, tout enfiévré d’orgueil errant, de conq
1231
t appuyer au front comme une caresse indéfinie de
la
puissance. Soir de voyage, tout enfiévré d’orgueil errant, de conquêt
1232
comme une caresse indéfinie de la puissance. Soir
de
voyage, tout enfiévré d’orgueil errant, de conquêtes vagues… Tout ce
1233
ie de la puissance. Soir de voyage, tout enfiévré
d’
orgueil errant, de conquêtes vagues… Tout ce qui est de la terre renon
1234
. Soir de voyage, tout enfiévré d’orgueil errant,
de
conquêtes vagues… Tout ce qui est de la terre renonce à s’affirmer en
1235
ueil errant, de conquêtes vagues… Tout ce qui est
de
la terre renonce à s’affirmer en détail précis, se masse dans une con
1236
l errant, de conquêtes vagues… Tout ce qui est de
la
terre renonce à s’affirmer en détail précis, se masse dans une confus
1237
mer en détail précis, se masse dans une confusion
de
violet sombre, et par la seule ligne dure de l’horizon s’oppose au ci
1238
masse dans une confusion de violet sombre, et par
la
seule ligne dure de l’horizon s’oppose au ciel qui retire ses lueurs.
1239
sion de violet sombre, et par la seule ligne dure
de
l’horizon s’oppose au ciel qui retire ses lueurs. Ciel blanc, où très
1240
n de violet sombre, et par la seule ligne dure de
l’
horizon s’oppose au ciel qui retire ses lueurs. Ciel blanc, où très pe
1241
el qui retire ses lueurs. Ciel blanc, où très peu
d’
or rose s’évanouit… Le train serpente dans un de ces paysages de nulle
1242
rs. Ciel blanc, où très peu d’or rose s’évanouit…
Le
train serpente dans un de ces paysages de nulle part qui sont les plu
1243
u d’or rose s’évanouit… Le train serpente dans un
de
ces paysages de nulle part qui sont les plus émouvants, entre des col
1244
anouit… Le train serpente dans un de ces paysages
de
nulle part qui sont les plus émouvants, entre des collines basses gra
1245
te dans un de ces paysages de nulle part qui sont
les
plus émouvants, entre des collines basses grattées par les vents, aux
1246
émouvants, entre des collines basses grattées par
les
vents, aux arbres rares, mais aux replis si doucement intimes qu’à ce
1247
e heure on sent bien que poursuivre est une sorte
d’
enivrant péché. — Nous aurions une maison dans ce désert aux formes te
1248
désert aux formes tendres et déjà familières, et
le
passage des trains chaque soir nous redirait un adieu bref, — chaque
1249
adieu bref, — chaque soir plus infime, à cause de
l’
éloignement en nous-mêmes. À l’entrée d’un tunnel tu vois que la veill
1250
infime, à cause de l’éloignement en nous-mêmes. À
l’
entrée d’un tunnel tu vois que la veilleuse brûle toujours — et moi, p
1251
cause de l’éloignement en nous-mêmes. À l’entrée
d’
un tunnel tu vois que la veilleuse brûle toujours — et moi, parmi les
1252
en nous-mêmes. À l’entrée d’un tunnel tu vois que
la
veilleuse brûle toujours — et moi, parmi les reflets fuyants de toute
1253
s que la veilleuse brûle toujours — et moi, parmi
les
reflets fuyants de toutes sortes de faces et de paysages soudainement
1254
rûle toujours — et moi, parmi les reflets fuyants
de
toutes sortes de faces et de paysages soudainement invisibles, je dis
1255
t moi, parmi les reflets fuyants de toutes sortes
de
faces et de paysages soudainement invisibles, je distingue le doux fe
1256
les reflets fuyants de toutes sortes de faces et
de
paysages soudainement invisibles, je distingue le doux feu bleu de mo
1257
de paysages soudainement invisibles, je distingue
le
doux feu bleu de mon obsession. L’Objet inconnu, — quand je pense à c
1258
inement invisibles, je distingue le doux feu bleu
de
mon obsession. L’Objet inconnu, — quand je pense à ce qu’en imaginera
1259
, je distingue le doux feu bleu de mon obsession.
L’
Objet inconnu, — quand je pense à ce qu’en imagineraient les autres, s
1260
nconnu, — quand je pense à ce qu’en imagineraient
les
autres, si je leur en parlais… Il leur suffirait de l’image d’un bibe
1261
autres, si je leur en parlais… Il leur suffirait
de
l’image d’un bibelot d’une sorte bizarre. Alors que c’est plutôt un c
1262
tres, si je leur en parlais… Il leur suffirait de
l’
image d’un bibelot d’une sorte bizarre. Alors que c’est plutôt un cert
1263
je leur en parlais… Il leur suffirait de l’image
d’
un bibelot d’une sorte bizarre. Alors que c’est plutôt un certain arra
1264
arlais… Il leur suffirait de l’image d’un bibelot
d’
une sorte bizarre. Alors que c’est plutôt un certain arrangement des c
1265
oses qui rende un certain son spirituel… Un objet
de
musique et de couleurs, mais aussi une forme symbolique de tout… Enfi
1266
un certain son spirituel… Un objet de musique et
de
couleurs, mais aussi une forme symbolique de tout… Enfin, tellement i
1267
e et de couleurs, mais aussi une forme symbolique
de
tout… Enfin, tellement inconnu et tellement fascinant à la fois, qu’i
1268
tellement fascinant à la fois, qu’il me préserve
de
tout amour pour quelque bien particulier où je serais tenté de me com
1269
pour quelque bien particulier où je serais tenté
de
me complaire. Oh ! je sais ! — Je ne sais plus. — Le train s’attarde
1270
me complaire. Oh ! je sais ! — Je ne sais plus. —
Le
train s’attarde dans sa fumée, on respire une lourde obscurité qui se
1271
a fumée, on respire une lourde obscurité qui sent
l’
enfer. Je ne pense plus qu’« au souffle »… Mais alors tout s’allume et
1272
« au souffle »… Mais alors tout s’allume et voici
la
nuit des faubourgs de Pest, au-dessous de nous. Un bal, ou de l’iv
1273
lors tout s’allume et voici la nuit des faubourgs
de
Pest, au-dessous de nous. Un bal, ou de l’ivresse considérée comme
1274
bourgs de Pest, au-dessous de nous. Un bal, ou
de
l’ivresse considérée comme un des beaux-arts Ils n’ont plus de nom
1275
rgs de Pest, au-dessous de nous. Un bal, ou de
l’
ivresse considérée comme un des beaux-arts Ils n’ont plus de noms,
1276
sidérée comme un des beaux-arts Ils n’ont plus
de
noms, ils ne sont qu’une ivresse aux cent visages, lorsque j’entre da
1277
ne ivresse aux cent visages, lorsque j’entre dans
l’
atelier du peintre. Je ne tarde pas à oublier ce qui est lent ou fixe
1278
ou bassement mélancoliques. Souvent laids — sauf
les
demi-juifs — mais laids comme des paysans, beaux hommes aux traits lo
1279
des paysans, beaux hommes aux traits lourds. Dans
l’
ivresse, leurs yeux s’agrandissent. Dans la danse, ils incarnent l’all
1280
. Dans l’ivresse, leurs yeux s’agrandissent. Dans
la
danse, ils incarnent l’allégresse rythmique. Je les vois frapper le s
1281
yeux s’agrandissent. Dans la danse, ils incarnent
l’
allégresse rythmique. Je les vois frapper le sol du talon en levant un
1282
a danse, ils incarnent l’allégresse rythmique. Je
les
vois frapper le sol du talon en levant un bras, la main à la nuque ;
1283
rnent l’allégresse rythmique. Je les vois frapper
le
sol du talon en levant un bras, la main à la nuque ; frapper le sol d
1284
s vois frapper le sol du talon en levant un bras,
la
main à la nuque ; frapper le sol de l’autre talon en changeant de mai
1285
pper le sol du talon en levant un bras, la main à
la
nuque ; frapper le sol de l’autre talon en changeant de main ; saisir
1286
n en levant un bras, la main à la nuque ; frapper
le
sol de l’autre talon en changeant de main ; saisir la danseuse sous l
1287
vant un bras, la main à la nuque ; frapper le sol
de
l’autre talon en changeant de main ; saisir la danseuse sous le bras
1288
ue ; frapper le sol de l’autre talon en changeant
de
main ; saisir la danseuse sous le bras (elle pose alors ses mains sur
1289
ol de l’autre talon en changeant de main ; saisir
la
danseuse sous le bras (elle pose alors ses mains sur les épaules du c
1290
on en changeant de main ; saisir la danseuse sous
le
bras (elle pose alors ses mains sur les épaules du cavalier) et la fa
1291
seuse sous le bras (elle pose alors ses mains sur
les
épaules du cavalier) et la faire pirouetter un quart de tour à droite
1292
e alors ses mains sur les épaules du cavalier) et
la
faire pirouetter un quart de tour à droite, un quart de tour à gauche
1293
ules du cavalier) et la faire pirouetter un quart
de
tour à droite, un quart de tour à gauche ; pirouetter seuls sur place
1294
re pirouetter un quart de tour à droite, un quart
de
tour à gauche ; pirouetter seuls sur place ; de nouveau frapper le so
1295
; pirouetter seuls sur place ; de nouveau frapper
le
sol des talons, alternativement ; saisir la danseuse, tourbillonner,
1296
apper le sol des talons, alternativement ; saisir
la
danseuse, tourbillonner, pousser de grands cris ; tourbillonner en se
1297
ment ; saisir la danseuse, tourbillonner, pousser
de
grands cris ; tourbillonner en sens inverse ; frapper des talons touj
1298
; frapper des talons toujours plus vite, mains à
la
nuque, mains à la hanche, mains à la danseuse ; partir en martelant l
1299
ons toujours plus vite, mains à la nuque, mains à
la
hanche, mains à la danseuse ; partir en martelant le parquet jusqu’à
1300
ite, mains à la nuque, mains à la hanche, mains à
la
danseuse ; partir en martelant le parquet jusqu’à produire un rouleme
1301
hanche, mains à la danseuse ; partir en martelant
le
parquet jusqu’à produire un roulement continu, marteler encore plus v
1302
illonnant, choir enfin dans une vaste culbute sur
les
divans où l’ivresse les lâche, affalés, tandis que les danseuses seco
1303
ir enfin dans une vaste culbute sur les divans où
l’
ivresse les lâche, affalés, tandis que les danseuses secouent leurs ch
1304
ans une vaste culbute sur les divans où l’ivresse
les
lâche, affalés, tandis que les danseuses secouent leurs cheveux et te
1305
ivans où l’ivresse les lâche, affalés, tandis que
les
danseuses secouent leurs cheveux et tendent les bras en riant pour qu
1306
e les danseuses secouent leurs cheveux et tendent
les
bras en riant pour qu’on les relève. Elles : des Vénitiennes aux yeux
1307
s cheveux et tendent les bras en riant pour qu’on
les
relève. Elles : des Vénitiennes aux yeux de plaine, comme les autres
1308
Elles : des Vénitiennes aux yeux de plaine, comme
les
autres ont des yeux de mer. Des grâces d’amazones avec un coup de tal
1309
aux yeux de plaine, comme les autres ont des yeux
de
mer. Des grâces d’amazones avec un coup de talon qui les secoue jusqu
1310
comme les autres ont des yeux de mer. Des grâces
d’
amazones avec un coup de talon qui les secoue jusqu’à la chevelure. Gr
1311
s yeux de mer. Des grâces d’amazones avec un coup
de
talon qui les secoue jusqu’à la chevelure. Graves entre leurs éclats
1312
. Des grâces d’amazones avec un coup de talon qui
les
secoue jusqu’à la chevelure. Graves entre leurs éclats de rire tourno
1313
ones avec un coup de talon qui les secoue jusqu’à
la
chevelure. Graves entre leurs éclats de rire tournoyants mais non pas
1314
des gestes tendres des bras en balançant vivement
la
tête. Quand elles parlent, la voix un peu rauque, voluptueuse ; quand
1315
balançant vivement la tête. Quand elles parlent,
la
voix un peu rauque, voluptueuse ; quand elles chantent, les moires et
1316
n peu rauque, voluptueuse ; quand elles chantent,
les
moires et l’ondulation des rubans de vents chauds sur la plaine, avec
1317
voluptueuse ; quand elles chantent, les moires et
l’
ondulation des rubans de vents chauds sur la plaine, avec des éloignem
1318
s chantent, les moires et l’ondulation des rubans
de
vents chauds sur la plaine, avec des éloignements et des retours, des
1319
es et l’ondulation des rubans de vents chauds sur
la
plaine, avec des éloignements et des retours, des enroulements et dér
1320
soutenues par un long souffle vif. J’observe que
les
paroles autant que les gestes sont gouvernées par la seule logique d’
1321
souffle vif. J’observe que les paroles autant que
les
gestes sont gouvernées par la seule logique d’un rythme constamment i
1322
paroles autant que les gestes sont gouvernées par
la
seule logique d’un rythme constamment imprévu. Il s’agit moins de com
1323
e les gestes sont gouvernées par la seule logique
d’
un rythme constamment imprévu. Il s’agit moins de comprendre que de s’
1324
d’un rythme constamment imprévu. Il s’agit moins
de
comprendre que de s’abandonner d’une certaine manière. En France, cha
1325
amment imprévu. Il s’agit moins de comprendre que
de
s’abandonner d’une certaine manière. En France, chacun parle pour son
1326
Il s’agit moins de comprendre que de s’abandonner
d’
une certaine manière. En France, chacun parle pour son compte, paraphe
1327
aphe son épigramme, jette son petit caillou. Ici,
le
sens des mots et des choses est celui d’un courant musical qui domine
1328
ou. Ici, le sens des mots et des choses est celui
d’
un courant musical qui domine l’ensemble et le compose selon les lois
1329
choses est celui d’un courant musical qui domine
l’
ensemble et le compose selon les lois d’une plastique exubérante. Quan
1330
lui d’un courant musical qui domine l’ensemble et
le
compose selon les lois d’une plastique exubérante. Quand je dis que j
1331
musical qui domine l’ensemble et le compose selon
les
lois d’une plastique exubérante. Quand je dis que j’observe, je n’obs
1332
ui domine l’ensemble et le compose selon les lois
d’
une plastique exubérante. Quand je dis que j’observe, je n’observe rie
1333
rien. Il y a des femmes si belles qu’on en ferme
les
yeux. Quel style dans la liberté ! Il n’y a plus qu’ici qu’on aime l’
1334
i belles qu’on en ferme les yeux. Quel style dans
la
liberté ! Il n’y a plus qu’ici qu’on aime l’ivresse comme un art. Et
1335
dans la liberté ! Il n’y a plus qu’ici qu’on aime
l’
ivresse comme un art. Et qu’on soigne sa mise en scène, qu’on sauvegar
1336
on sauvegarde sa qualité. Ailleurs, chez nous, on
la
laisse traîner dans la sciure ou dans le gâtisme. On trouve que ça n’
1337
é. Ailleurs, chez nous, on la laisse traîner dans
la
sciure ou dans le gâtisme. On trouve que ça n’est pas distingué, et e
1338
nous, on la laisse traîner dans la sciure ou dans
le
gâtisme. On trouve que ça n’est pas distingué, et en effet, que serai
1339
rait un lyrisme distingué ? Il faut choisir entre
les
bonnes manières et les belles manières. Et quant à ceux qui n’ont pas
1340
ué ? Il faut choisir entre les bonnes manières et
les
belles manières. Et quant à ceux qui n’ont pas le pouvoir de s’enivre
1341
es belles manières. Et quant à ceux qui n’ont pas
le
pouvoir de s’enivrer, ils auront toujours raison, mais n’auront que c
1342
anières. Et quant à ceux qui n’ont pas le pouvoir
de
s’enivrer, ils auront toujours raison, mais n’auront que cela, car c’
1343
oujours raison, mais n’auront que cela, car c’est
l’
ivresse7 seulement qui permet à l’esprit de passer d’une forme dans l’
1344
cela, car c’est l’ivresse7 seulement qui permet à
l’
esprit de passer d’une forme dans l’autre, — et c’est même en ce passa
1345
c’est l’ivresse7 seulement qui permet à l’esprit
de
passer d’une forme dans l’autre, — et c’est même en ce passage qu’ell
1346
vresse7 seulement qui permet à l’esprit de passer
d’
une forme dans l’autre, — et c’est même en ce passage qu’elle consiste
1347
e passage qu’elle consiste — ô Danses ! avènement
de
l’âme aux gestes ! Vous voici, longs coups d’ailes en silence au-dess
1348
assage qu’elle consiste — ô Danses ! avènement de
l’
âme aux gestes ! Vous voici, longs coups d’ailes en silence au-dessus
1349
ent de l’âme aux gestes ! Vous voici, longs coups
d’
ailes en silence au-dessus du gouffre. Je vole sur place, mais tout se
1350
hais » un instant, toutes choses disparaîtraient…
Le
vertige (la peur et l’amour du vertige). Qu’est-ce qu’il y aurait de
1351
stant, toutes choses disparaîtraient… Le vertige (
la
peur et l’amour du vertige). Qu’est-ce qu’il y aurait de l’autre côté
1352
es choses disparaîtraient… Le vertige (la peur et
l’
amour du vertige). Qu’est-ce qu’il y aurait de l’autre côté ? Se laiss
1353
et l’amour du vertige). Qu’est-ce qu’il y aurait
de
l’autre côté ? Se laisser choir dans le Gris ? Rejoindre ?… Derrière
1354
y aurait de l’autre côté ? Se laisser choir dans
le
Gris ? Rejoindre ?… Derrière mes paupières, dans ce désordre lumineux
1355
errière mes paupières, dans ce désordre lumineux,
le
verrai-je naître à mon désir ? Rejoindre ! Mais vous, derrière ma têt
1356
encore pour cette fois. Chansons hongroises
Les
Suisses chantent immobiles, les yeux fixes, le visage impassible. Mai
1357
ons hongroises Les Suisses chantent immobiles,
les
yeux fixes, le visage impassible. Mais rien dans la chanson hongroise
1358
Les Suisses chantent immobiles, les yeux fixes,
le
visage impassible. Mais rien dans la chanson hongroise ne rappelle la
1359
yeux fixes, le visage impassible. Mais rien dans
la
chanson hongroise ne rappelle la nostalgie traînante des lieder de l’
1360
. Mais rien dans la chanson hongroise ne rappelle
la
nostalgie traînante des lieder de l’Oberland : ici la mélancolie même
1361
ise ne rappelle la nostalgie traînante des lieder
de
l’Oberland : ici la mélancolie même est passionnée. Elles chantent av
1362
ne rappelle la nostalgie traînante des lieder de
l’
Oberland : ici la mélancolie même est passionnée. Elles chantent avec
1363
ostalgie traînante des lieder de l’Oberland : ici
la
mélancolie même est passionnée. Elles chantent avec le corps entier —
1364
lancolie même est passionnée. Elles chantent avec
le
corps entier — non pas avec les bras, comme on chante du Verdi —, ell
1365
lles chantent avec le corps entier — non pas avec
les
bras, comme on chante du Verdi —, elles ont des mouvements vifs du bu
1366
es mouvements vifs du buste, et des mains pleines
de
drôleries ou de supplication. Je ne sais ce que disent les paroles. J
1367
fs du buste, et des mains pleines de drôleries ou
de
supplication. Je ne sais ce que disent les paroles. Je vois des cheva
1368
ries ou de supplication. Je ne sais ce que disent
les
paroles. Je vois des chevauchées sous le soleil, des campements noctu
1369
disent les paroles. Je vois des chevauchées sous
le
soleil, des campements nocturnes où le souvenir des pays désertés enf
1370
chées sous le soleil, des campements nocturnes où
le
souvenir des pays désertés enfièvre encore un désir de perdition illi
1371
uvenir des pays désertés enfièvre encore un désir
de
perdition illimitée… Les Hongrois se sont arrêtés dans cette plaine.
1372
enfièvre encore un désir de perdition illimitée…
Les
Hongrois se sont arrêtés dans cette plaine. Mais c’est le soir au cam
1373
ois se sont arrêtés dans cette plaine. Mais c’est
le
soir au camp, perpétuel. Une lassitude de steppe brûlante, des ondula
1374
s c’est le soir au camp, perpétuel. Une lassitude
de
steppe brûlante, des ondulations longues… Mais un cheval se cabre ; e
1375
tions longues… Mais un cheval se cabre ; et c’est
la
danse qui se lève, et des tambours et des cris modulés, et toute la f
1376
ve, et des tambours et des cris modulés, et toute
la
frénésie d’un grand souffle qui se serait mis à tourbillonner sur pla
1377
ambours et des cris modulés, et toute la frénésie
d’
un grand souffle qui se serait mis à tourbillonner sur place. L’amo
1378
e qui se serait mis à tourbillonner sur place.
L’
amour en Hongrie (généralités) Les Allemands aiment les femmes comm
1379
sur place. L’amour en Hongrie (généralités)
Les
Allemands aiment les femmes comme ils aiment les saucisses ou les cat
1380
en Hongrie (généralités) Les Allemands aiment
les
femmes comme ils aiment les saucisses ou les catastrophes, selon qu’i
1381
Les Allemands aiment les femmes comme ils aiment
les
saucisses ou les catastrophes, selon qu’ils sont techniciens ou intel
1382
ment les femmes comme ils aiment les saucisses ou
les
catastrophes, selon qu’ils sont techniciens ou intellectuels. Les Fra
1383
, selon qu’ils sont techniciens ou intellectuels.
Les
Français aiment par goût du bavardage. Les Suisses aiment avec une bo
1384
tuels. Les Français aiment par goût du bavardage.
Les
Suisses aiment avec une bonne ou une mauvaise conscience. À Vienne on
1385
être à la fois cocasses et fades. En Italie… Mais
l’
amour hongrois t’emportera dans une inénarrable confusion de sentiment
1386
ngrois t’emportera dans une inénarrable confusion
de
sentimentalisme et de passion, et c’est là son miracle. Si tu n’as pa
1387
s une inénarrable confusion de sentimentalisme et
de
passion, et c’est là son miracle. Si tu n’as pas le sens de la musiqu
1388
passion, et c’est là son miracle. Si tu n’as pas
le
sens de la musique, conserve quelque espoir de t’en tirer. Sinon… je
1389
, et c’est là son miracle. Si tu n’as pas le sens
de
la musique, conserve quelque espoir de t’en tirer. Sinon… je t’envier
1390
t c’est là son miracle. Si tu n’as pas le sens de
la
musique, conserve quelque espoir de t’en tirer. Sinon… je t’envierais
1391
as le sens de la musique, conserve quelque espoir
de
t’en tirer. Sinon… je t’envierais presque. Celui qui part pour la Ho
1392
non… je t’envierais presque. Celui qui part pour
la
Hongrie sans talisman, s’il a du cœur, n’en revient plus. La plain
1393
s talisman, s’il a du cœur, n’en revient plus.
La
plaine et la musique L’ouverture de Stravinsky exécutée par l’expr
1394
’il a du cœur, n’en revient plus. La plaine et
la
musique L’ouverture de Stravinsky exécutée par l’express de Transy
1395
n’en revient plus. La plaine et la musique
L’
ouverture de Stravinsky exécutée par l’express de Transylvanie au sort
1396
t plus. La plaine et la musique L’ouverture
de
Stravinsky exécutée par l’express de Transylvanie au sortir de la gar
1397
musique L’ouverture de Stravinsky exécutée par
l’
express de Transylvanie au sortir de la gare de Budapest, devient avec
1398
L’ouverture de Stravinsky exécutée par l’express
de
Transylvanie au sortir de la gare de Budapest, devient avec la plaine
1399
écutée par l’express de Transylvanie au sortir de
la
gare de Budapest, devient avec la plaine une Symphonie-Dichtung borod
1400
ar l’express de Transylvanie au sortir de la gare
de
Budapest, devient avec la plaine une Symphonie-Dichtung borodinesque,
1401
ie au sortir de la gare de Budapest, devient avec
la
plaine une Symphonie-Dichtung borodinesque, mais l’erreur n’est imput
1402
plaine une Symphonie-Dichtung borodinesque, mais
l’
erreur n’est imputable qu’à mon instabilité rythmique. (Trop souvent c
1403
ouvent ce que je vois traverse ce que j’entends.)
La
plaine hongroise n’est pas monotone, parce qu’elle est d’un seul tena
1404
e hongroise n’est pas monotone, parce qu’elle est
d’
un seul tenant. Rien qui fasse répétition. C’est ici le premier pays q
1405
. C’est ici le premier pays que je n’ai pas envie
d’
élaguer ; dont je ne me compose pas de morceaux choisis8. Il y a une g
1406
i pas envie d’élaguer ; dont je ne me compose pas
de
morceaux choisis8. Il y a une grande ville, un grand lac, une plaine
1407
ille, un grand lac, une plaine et une seule vigne
de
véritable Tokay. Et point de ces endroits déprimants, à plusieurs mil
1408
e et une seule vigne de véritable Tokay. Et point
de
ces endroits déprimants, à plusieurs milliers d’exemplaires, tels que
1409
de ces endroits déprimants, à plusieurs milliers
d’
exemplaires, tels que : banlieue française, village suisse, gare allem
1410
çaise, village suisse, gare allemande grouillante
de
questions sociales. La Puszta est une terre vierge, je veux dire que
1411
gare allemande grouillante de questions sociales.
La
Puszta est une terre vierge, je veux dire que la bourgeoisie ne s’y e
1412
La Puszta est une terre vierge, je veux dire que
la
bourgeoisie ne s’y est pas encore répandue. Il y a peu de bourgeois e
1413
andue. Il y a peu de bourgeois en Hongrie. Il y a
de
petits nobles déclassés, des juifs, des paysans, des communistes, de
1414
classés, des juifs, des paysans, des communistes,
de
grands nobles, et des Tziganes. D’ailleurs, le bourgeois supporterait
1415
s, de grands nobles, et des Tziganes. D’ailleurs,
le
bourgeois supporterait difficilement l’ampleur qu’ont ici toutes chos
1416
ailleurs, le bourgeois supporterait difficilement
l’
ampleur qu’ont ici toutes choses, cette atmosphère de nomadisme, et ce
1417
mpleur qu’ont ici toutes choses, cette atmosphère
de
nomadisme, et ces vents vastes ; et cette passion de vivre « au-dessu
1418
nomadisme, et ces vents vastes ; et cette passion
de
vivre « au-dessus de ses moyens » — c’est-à-dire au-dessus du Moyen —
1419
ts vastes ; et cette passion de vivre « au-dessus
de
ses moyens » — c’est-à-dire au-dessus du Moyen — qui est caractéristi
1420
rgement ? » demande certaine hargne à cet artiste
de
la prodigalité. — « Ah ! répond-il, j’aimerais bien pouvoir vivre com
1421
ment ? » demande certaine hargne à cet artiste de
la
prodigalité. — « Ah ! répond-il, j’aimerais bien pouvoir vivre comme
1422
merais bien pouvoir vivre comme je vis ! » Voici
les
cigognes, dont Andersen assure qu’elles parlent en égyptien, « car c’
1423
assure qu’elles parlent en égyptien, « car c’est
la
langue qu’elles apprennent de leurs mères ». Combien j’aime ces sœurs
1424
yptien, « car c’est la langue qu’elles apprennent
de
leurs mères ». Combien j’aime ces sœurs des Tziganes ! Les Tziganes v
1425
mères ». Combien j’aime ces sœurs des Tziganes !
Les
Tziganes vinrent en Europe conduits par le noir Duc d’Égypte ; aussi
1426
nes ! Les Tziganes vinrent en Europe conduits par
le
noir Duc d’Égypte ; aussi les nomma-t-on gipsys. Pour leur nom allema
1427
Europe conduits par le noir Duc d’Égypte ; aussi
les
nomma-t-on gipsys. Pour leur nom allemand, c’est : Zigeuner ; hongroi
1428
gyptiens venaient des Indes, qui nous apportèrent
le
tarot et la roulotte, dont descendent le bridge et la bohème, c’est-à
1429
aient des Indes, qui nous apportèrent le tarot et
la
roulotte, dont descendent le bridge et la bohème, c’est-à-dire un sym
1430
ortèrent le tarot et la roulotte, dont descendent
le
bridge et la bohème, c’est-à-dire un symbole de la servitude et un sy
1431
arot et la roulotte, dont descendent le bridge et
la
bohème, c’est-à-dire un symbole de la servitude et un symbole de la l
1432
t le bridge et la bohème, c’est-à-dire un symbole
de
la servitude et un symbole de la liberté. Si la Hongrie tout de même
1433
e bridge et la bohème, c’est-à-dire un symbole de
la
servitude et un symbole de la liberté. Si la Hongrie tout de même a q
1434
t-à-dire un symbole de la servitude et un symbole
de
la liberté. Si la Hongrie tout de même a quelque chose de « moderne »
1435
-dire un symbole de la servitude et un symbole de
la
liberté. Si la Hongrie tout de même a quelque chose de « moderne », d
1436
e de la servitude et un symbole de la liberté. Si
la
Hongrie tout de même a quelque chose de « moderne », dans un sens vas
1437
berté. Si la Hongrie tout de même a quelque chose
de
« moderne », dans un sens vaste et mystique, elle le doit au charme é
1438
« moderne », dans un sens vaste et mystique, elle
le
doit au charme égyptien du peuple errant qui lui donna sa musique nat
1439
euple errant qui lui donna sa musique nationale9.
Les
signes parlent, et certains sages : nous entrons dans une ère égyptie
1440
ns une ère égyptienne. Mais que dire des pouvoirs
de
la plaine qui s’agrandit pendant des heures ? — Ce qu’en raconte la m
1441
une ère égyptienne. Mais que dire des pouvoirs de
la
plaine qui s’agrandit pendant des heures ? — Ce qu’en raconte la musi
1442
’agrandit pendant des heures ? — Ce qu’en raconte
la
musique — tu vas l’entendre à toutes les terrasses de Debrecen. Debre
1443
s heures ? — Ce qu’en raconte la musique — tu vas
l’
entendre à toutes les terrasses de Debrecen. Debrecen est une sorte de
1444
n raconte la musique — tu vas l’entendre à toutes
les
terrasses de Debrecen. Debrecen est une sorte de grande ville indescr
1445
usique — tu vas l’entendre à toutes les terrasses
de
Debrecen. Debrecen est une sorte de grande ville indescriptible, à de
1446
les terrasses de Debrecen. Debrecen est une sorte
de
grande ville indescriptible, à demi mêlée aux sables de la plaine de
1447
nde ville indescriptible, à demi mêlée aux sables
de
la plaine de Hortobágy, aux longues maisons jaunes immensément aligné
1448
ville indescriptible, à demi mêlée aux sables de
la
plaine de Hortobágy, aux longues maisons jaunes immensément alignées,
1449
escriptible, à demi mêlée aux sables de la plaine
de
Hortobágy, aux longues maisons jaunes immensément alignées, autour d’
1450
ngues maisons jaunes immensément alignées, autour
d’
une place rectangulaire qui ressemble à un jardin public, flanquée d’u
1451
ulaire qui ressemble à un jardin public, flanquée
d’
un temple blanc à deux clochers baroques, d’hôtels modernes, de statue
1452
nquée d’un temple blanc à deux clochers baroques,
d’
hôtels modernes, de statues, de pylônes plantés dans un grand désordre
1453
lanc à deux clochers baroques, d’hôtels modernes,
de
statues, de pylônes plantés dans un grand désordre de piétons et de c
1454
clochers baroques, d’hôtels modernes, de statues,
de
pylônes plantés dans un grand désordre de piétons et de chars à bœufs
1455
tatues, de pylônes plantés dans un grand désordre
de
piétons et de chars à bœufs parmi les trams. Les habitants de Debrece
1456
ônes plantés dans un grand désordre de piétons et
de
chars à bœufs parmi les trams. Les habitants de Debrecen se plaignent
1457
and désordre de piétons et de chars à bœufs parmi
les
trams. Les habitants de Debrecen se plaignent de n’avoir pas ce faux
1458
e de piétons et de chars à bœufs parmi les trams.
Les
habitants de Debrecen se plaignent de n’avoir pas ce faux confort que
1459
t de chars à bœufs parmi les trams. Les habitants
de
Debrecen se plaignent de n’avoir pas ce faux confort que nous n’avons
1460
les trams. Les habitants de Debrecen se plaignent
de
n’avoir pas ce faux confort que nous n’avons qu’au prix de tout ce qu
1461
e tout ce qu’à Debrecen je viens admirer. On aime
les
Hongrois comme on aime l’enfance : or le rêve de l’enfant, c’est de d
1462
viens admirer. On aime les Hongrois comme on aime
l’
enfance : or le rêve de l’enfant, c’est de devenir une grande personne
1463
On aime les Hongrois comme on aime l’enfance : or
le
rêve de l’enfant, c’est de devenir une grande personne. On me l’a dit
1464
les Hongrois comme on aime l’enfance : or le rêve
de
l’enfant, c’est de devenir une grande personne. On me l’a dit, c’est
1465
Hongrois comme on aime l’enfance : or le rêve de
l’
enfant, c’est de devenir une grande personne. On me l’a dit, c’est vra
1466
on aime l’enfance : or le rêve de l’enfant, c’est
de
devenir une grande personne. On me l’a dit, c’est vrai : cette ville
1467
fant, c’est de devenir une grande personne. On me
l’
a dit, c’est vrai : cette ville historique est aussi l’autre « Rome pr
1468
ique est aussi l’autre « Rome protestante ». Mais
d’
avoir vu ses profondes bibliothèques et son quartier universitaire tou
1469
euni dans des jardins luisants ne n’empêchera pas
de
m’y sentir au bout d’un monde, au bord extrême de l’Europe. Je ne sai
1470
de m’y sentir au bout d’un monde, au bord extrême
de
l’Europe. Je ne sais quel hasard a voulu que j’y entende, un soir, un
1471
m’y sentir au bout d’un monde, au bord extrême de
l’
Europe. Je ne sais quel hasard a voulu que j’y entende, un soir, une a
1472
rd a voulu que j’y entende, un soir, une audition
de
musiques hongroises, turques et chinoises, commentées et comparées pa
1473
simples, tragiques, à peine modulées, qui donnent
le
vertige, et dont soudain se cabre le rythme, avant la chute stridente
1474
qui donnent le vertige, et dont soudain se cabre
le
rythme, avant la chute stridente et basse, prolongée. Peut-être ce so
1475
ertige, et dont soudain se cabre le rythme, avant
la
chute stridente et basse, prolongée. Peut-être ce soir-là, ai-je comp
1476
e, prolongée. Peut-être ce soir-là, ai-je compris
la
Grande Plaine, et que par sa musique j’étais aux marches de l’Asie. E
1477
Plaine, et que par sa musique j’étais aux marches
de
l’Asie. En sortant du concert, j’ai erré aux terrasses des hôtels, da
1478
ine, et que par sa musique j’étais aux marches de
l’
Asie. En sortant du concert, j’ai erré aux terrasses des hôtels, dans
1479
concert, j’ai erré aux terrasses des hôtels, dans
le
grandiose bavardage des Tziganes. Qu’est-ce qu’ils regardent en jouan
1480
ent en jouant ? Qu’est-ce qu’ils écoutent au-delà
de
leur musique — car aussitôt donnée la phrase, voici qu’une autre vien
1481
ent au-delà de leur musique — car aussitôt donnée
la
phrase, voici qu’une autre vient d’ailleurs, entraînée par je ne sais
1482
rs, entraînée par je ne sais quel vent sonore qui
l’
étire et l’égare, et l’enroule et d’un coup la subtilise, ne laissant
1483
ée par je ne sais quel vent sonore qui l’étire et
l’
égare, et l’enroule et d’un coup la subtilise, ne laissant plus qu’un
1484
sais quel vent sonore qui l’étire et l’égare, et
l’
enroule et d’un coup la subtilise, ne laissant plus qu’un long silence
1485
nt sonore qui l’étire et l’égare, et l’enroule et
d’
un coup la subtilise, ne laissant plus qu’un long silence soutenu, com
1486
qui l’étire et l’égare, et l’enroule et d’un coup
la
subtilise, ne laissant plus qu’un long silence soutenu, comme un appe
1487
plus qu’un long silence soutenu, comme un appel à
la
rafale dont l’approche déjà fait grésiller les notes basses du cymbal
1488
silence soutenu, comme un appel à la rafale dont
l’
approche déjà fait grésiller les notes basses du cymbalum —, et mainte
1489
l à la rafale dont l’approche déjà fait grésiller
les
notes basses du cymbalum —, et maintenant ferme les yeux sous la vagu
1490
s notes basses du cymbalum —, et maintenant ferme
les
yeux sous la vague toujours un peu plus haute que profonde ne fut l’a
1491
du cymbalum —, et maintenant ferme les yeux sous
la
vague toujours un peu plus haute que profonde ne fut l’attente, et lâ
1492
ue toujours un peu plus haute que profonde ne fut
l’
attente, et lâche tout. C’est l’âme qui joue aux montagnes russes, mai
1493
e profonde ne fut l’attente, et lâche tout. C’est
l’
âme qui joue aux montagnes russes, mais voici que le petit train en ru
1494
âme qui joue aux montagnes russes, mais voici que
le
petit train en rumeur depuis un moment ne redescend plus : il gouvern
1495
: il gouverne avec une vertigineuse docilité dans
les
voies d’un amour ineffable et se perd avec lui vers le désert et ses
1496
rne avec une vertigineuse docilité dans les voies
d’
un amour ineffable et se perd avec lui vers le désert et ses mirages.
1497
ies d’un amour ineffable et se perd avec lui vers
le
désert et ses mirages. On ne sait d’où tu viens, tu ne sais où tu vas
1498
vec lui vers le désert et ses mirages. On ne sait
d’
où tu viens, tu ne sais où tu vas, peuple de perdition, Peuple inconnu
1499
sait d’où tu viens, tu ne sais où tu vas, peuple
de
perdition, Peuple inconnu, — mais c’est toi, c’est toi qui l’as caché
1500
, Peuple inconnu, — mais c’est toi, c’est toi qui
l’
as caché dans une roulotte sous des chiffons bariolés et des secrets q
1501
eur aux femmes, cet objet dont parfois, au comble
de
la turbulence de tes jeux, un violon décrit vite quelque chose, d’une
1502
aux femmes, cet objet dont parfois, au comble de
la
turbulence de tes jeux, un violon décrit vite quelque chose, d’une li
1503
et objet dont parfois, au comble de la turbulence
de
tes jeux, un violon décrit vite quelque chose, d’une ligne nette, ins
1504
de tes jeux, un violon décrit vite quelque chose,
d’
une ligne nette, insaisissable, déjà perdue (comme le rêve pendant que
1505
ne ligne nette, insaisissable, déjà perdue (comme
le
rêve pendant que bat la paupière lourde de celui qui succombe à l’exc
1506
sable, déjà perdue (comme le rêve pendant que bat
la
paupière lourde de celui qui succombe à l’excès du sommeil) — et me v
1507
(comme le rêve pendant que bat la paupière lourde
de
celui qui succombe à l’excès du sommeil) — et me voici plus seul, ave
1508
ue bat la paupière lourde de celui qui succombe à
l’
excès du sommeil) — et me voici plus seul, avec une nostalgie qui ne v
1509
ici plus seul, avec une nostalgie qui ne veut pas
de
la romance à mon oreille de violoneux qui me croit triste. Ils l’ont
1510
plus seul, avec une nostalgie qui ne veut pas de
la
romance à mon oreille de violoneux qui me croit triste. Ils l’ont ame
1511
algie qui ne veut pas de la romance à mon oreille
de
violoneux qui me croit triste. Ils l’ont amené du fond d’une Inde. Il
1512
mon oreille de violoneux qui me croit triste. Ils
l’
ont amené du fond d’une Inde. Ils l’ont égaré, comme ils égarent tout
1513
neux qui me croit triste. Ils l’ont amené du fond
d’
une Inde. Ils l’ont égaré, comme ils égarent tout d’un monde où si peu
1514
t triste. Ils l’ont amené du fond d’une Inde. Ils
l’
ont égaré, comme ils égarent tout d’un monde où si peu vaut qu’on le c
1515
une Inde. Ils l’ont égaré, comme ils égarent tout
d’
un monde où si peu vaut qu’on le conserve, au long d’un chemin effacé
1516
ils égarent tout d’un monde où si peu vaut qu’on
le
conserve, au long d’un chemin effacé par le vent sur la plaine… Ils l
1517
n monde où si peu vaut qu’on le conserve, au long
d’
un chemin effacé par le vent sur la plaine… Ils l’ont perdu comme un r
1518
qu’on le conserve, au long d’un chemin effacé par
le
vent sur la plaine… Ils l’ont perdu comme un rêve au matin s’élude, —
1519
serve, au long d’un chemin effacé par le vent sur
la
plaine… Ils l’ont perdu comme un rêve au matin s’élude, — et leur mus
1520
d’un chemin effacé par le vent sur la plaine… Ils
l’
ont perdu comme un rêve au matin s’élude, — et leur musique seule s’en
1521
Trésor si pur qu’on ne doit même pas savoir qu’on
le
possède… Tout près d’ici, peut-être, mais invisible. Lève-toi, pars,
1522
sans vider ton verre — il n’y a pure ivresse que
de
l’abandon —, car voici qu’à son tour il s’égare au bras d’une erreur
1523
ns vider ton verre — il n’y a pure ivresse que de
l’
abandon —, car voici qu’à son tour il s’égare au bras d’une erreur inc
1524
don —, car voici qu’à son tour il s’égare au bras
d’
une erreur inconnue, ton fantôme éternel, ton « Désir désiré ». Les
1525
ue, ton fantôme éternel, ton « Désir désiré ».
Les
eaux fades du Balaton Deux jours après, dégrisé, je nageais dans l
1526
ton Deux jours après, dégrisé, je nageais dans
les
eaux fades du Balaton. Ces eaux, je crois, s’en vont à la mer Noire,
1527
fades du Balaton. Ces eaux, je crois, s’en vont à
la
mer Noire, et je n’en connais pas les fées, c’est pourquoi je nageais
1528
s’en vont à la mer Noire, et je n’en connais pas
les
fées, c’est pourquoi je nageais à brasses prudentes avec aux jambes l
1529
oi je nageais à brasses prudentes avec aux jambes
l’
imperceptible angoisse de rencontrer une onde trop légère. Mais pour c
1530
rudentes avec aux jambes l’imperceptible angoisse
de
rencontrer une onde trop légère. Mais pour connaître un lac, il faut
1531
ger ; et ensuite, s’il vous a paru beau, en faire
le
tour, mais voilà qui est affaire de pur caprice, tandis que s’y baign
1532
eau, en faire le tour, mais voilà qui est affaire
de
pur caprice, tandis que s’y baigner est une règle de savoir-vivre ave
1533
pur caprice, tandis que s’y baigner est une règle
de
savoir-vivre avec la Nature. Lac doré, horizon de collines pointues,
1534
ue s’y baigner est une règle de savoir-vivre avec
la
Nature. Lac doré, horizon de collines pointues, rives basses, verdoya
1535
de savoir-vivre avec la Nature. Lac doré, horizon
de
collines pointues, rives basses, verdoyantes, toutes fraîches de musi
1536
ntues, rives basses, verdoyantes, toutes fraîches
de
musiquettes et de baigneuses ; quais de Balaton-Füred aux élégances b
1537
s, verdoyantes, toutes fraîches de musiquettes et
de
baigneuses ; quais de Balaton-Füred aux élégances bourgeoises et mili
1538
fraîches de musiquettes et de baigneuses ; quais
de
Balaton-Füred aux élégances bourgeoises et militaires, idylles de jar
1539
aux élégances bourgeoises et militaires, idylles
de
jardins publics à l’écart d’un concert du samedi soir, petits profess
1540
oises et militaires, idylles de jardins publics à
l’
écart d’un concert du samedi soir, petits professeurs entourés de leur
1541
militaires, idylles de jardins publics à l’écart
d’
un concert du samedi soir, petits professeurs entourés de leur famille
1542
ncert du samedi soir, petits professeurs entourés
de
leur famille, et toutes ces Magda, toutes ces Maritza rieuses et déjà
1543
r quelques jours ? On ferait connaissance à table
d’
hôte, on irait ensemble à Tihany — elle a l’air d’être en Italie sur s
1544
d’hôte, on irait ensemble à Tihany — elle a l’air
d’
être en Italie sur sa presqu’île — par cet instable bateau-mouche qui
1545
cet instable bateau-mouche qui naguère emportait
l’
infortuné roi Charles. Non, non, plutôt emmener ce désir, comme un ten
1546
plutôt emmener ce désir, comme un tendre souvenir
de
voyage, et partir en croyant qu’ici la vie a parfois moins de hargne,
1547
e souvenir de voyage, et partir en croyant qu’ici
la
vie a parfois moins de hargne, et les petites gens plus de bonté… Déj
1548
t partir en croyant qu’ici la vie a parfois moins
de
hargne, et les petites gens plus de bonté… Déjà je suis repris par le
1549
oyant qu’ici la vie a parfois moins de hargne, et
les
petites gens plus de bonté… Déjà je suis repris par le malaise que m’
1550
parfois moins de hargne, et les petites gens plus
de
bonté… Déjà je suis repris par le malaise que m’infligent les lieux f
1551
tites gens plus de bonté… Déjà je suis repris par
le
malaise que m’infligent les lieux faciles. Ô tristesse des crémeries
1552
éjà je suis repris par le malaise que m’infligent
les
lieux faciles. Ô tristesse des crémeries et des jardins ! C’est devan
1553
! C’est devant une glace panachée qu’il m’arrive
de
douter de la vie, comme d’autres aux approches du mal de mer. À la nu
1554
evant une glace panachée qu’il m’arrive de douter
de
la vie, comme d’autres aux approches du mal de mer. À la nuit, j’ai r
1555
nt une glace panachée qu’il m’arrive de douter de
la
vie, comme d’autres aux approches du mal de mer. À la nuit, j’ai rôdé
1556
er de la vie, comme d’autres aux approches du mal
de
mer. À la nuit, j’ai rôdé dans la campagne aux collines basses, d’app
1557
ie, comme d’autres aux approches du mal de mer. À
la
nuit, j’ai rôdé dans la campagne aux collines basses, d’apparence roc
1558
pproches du mal de mer. À la nuit, j’ai rôdé dans
la
campagne aux collines basses, d’apparence rocheuse — ce sont des rest
1559
, j’ai rôdé dans la campagne aux collines basses,
d’
apparence rocheuse — ce sont des restes de volcans — blanches sous la
1560
basses, d’apparence rocheuse — ce sont des restes
de
volcans — blanches sous la Lune et toutes lustrées de rêches végétati
1561
e — ce sont des restes de volcans — blanches sous
la
Lune et toutes lustrées de rêches végétations. J’ai traversé l’angois
1562
olcans — blanches sous la Lune et toutes lustrées
de
rêches végétations. J’ai traversé l’angoisse lunaire des villages vid
1563
tes lustrées de rêches végétations. J’ai traversé
l’
angoisse lunaire des villages vides aux portes aveugles (j’avais peur
1564
vides aux portes aveugles (j’avais peur du bruit
de
mes pas). Au hasard, j’ai suivi des sentiers dans les champs de maïs,
1565
mes pas). Au hasard, j’ai suivi des sentiers dans
les
champs de maïs, épiant la venue d’une joie inconnue. Joie d’être n’im
1566
u hasard, j’ai suivi des sentiers dans les champs
de
maïs, épiant la venue d’une joie inconnue. Joie d’être n’importe où…
1567
uivi des sentiers dans les champs de maïs, épiant
la
venue d’une joie inconnue. Joie d’être n’importe où… évadé ? Mais sou
1568
sentiers dans les champs de maïs, épiant la venue
d’
une joie inconnue. Joie d’être n’importe où… évadé ? Mais soudain, c’e
1569
e maïs, épiant la venue d’une joie inconnue. Joie
d’
être n’importe où… évadé ? Mais soudain, c’est au silence que je me he
1570
au silence que je me heurte, comme réveillé dans
l’
absurdité d’être n’importe où. Une panique balaye la nuit déserte jusq
1571
que je me heurte, comme réveillé dans l’absurdité
d’
être n’importe où. Une panique balaye la nuit déserte jusqu’à l’horizo
1572
absurdité d’être n’importe où. Une panique balaye
la
nuit déserte jusqu’à l’horizon. Où vas-tu, les mains vides, faiblemen
1573
te où. Une panique balaye la nuit déserte jusqu’à
l’
horizon. Où vas-tu, les mains vides, faiblement ? Ah ! toutes les acti
1574
aye la nuit déserte jusqu’à l’horizon. Où vas-tu,
les
mains vides, faiblement ? Ah ! toutes les actions précises et courage
1575
vas-tu, les mains vides, faiblement ? Ah ! toutes
les
actions précises et courageuses, tout ce qui t’appelle là-bas, mainte
1576
maintenant, maintenant, où tu n’es pas — et tant
d’
amour perdu… Un train dormait devant la gare campagnarde. Je me suis é
1577
— et tant d’amour perdu… Un train dormait devant
la
gare campagnarde. Je me suis étendu dans un compartiment obscur, stor
1578
du dans un compartiment obscur, stores baissés, à
l’
abri de la lune. Le contrôleur a dû jouer un rôle dans mes cauchemars.
1579
un compartiment obscur, stores baissés, à l’abri
de
la lune. Le contrôleur a dû jouer un rôle dans mes cauchemars. L’aube
1580
compartiment obscur, stores baissés, à l’abri de
la
lune. Le contrôleur a dû jouer un rôle dans mes cauchemars. L’aube m’
1581
ment obscur, stores baissés, à l’abri de la lune.
Le
contrôleur a dû jouer un rôle dans mes cauchemars. L’aube m’éveille d
1582
ontrôleur a dû jouer un rôle dans mes cauchemars.
L’
aube m’éveille dans le faubourg de Budapest, cheveux en désordre, pant
1583
n rôle dans mes cauchemars. L’aube m’éveille dans
le
faubourg de Budapest, cheveux en désordre, pantalon plissé, et cet ab
1584
eveux en désordre, pantalon plissé, et cet abruti
de
contrôleur qui rit et me dit je ne sais quoi, — alors que justement j
1585
rs que justement j’allais rattraper, comme un pan
de
la nuit fuyante, un songe où j’ai dû voir l’objet pour la première fo
1586
que justement j’allais rattraper, comme un pan de
la
nuit fuyante, un songe où j’ai dû voir l’objet pour la première fois
1587
pan de la nuit fuyante, un songe où j’ai dû voir
l’
objet pour la première fois — ou bien était-ce un être ? Insomnie
1588
ien était-ce un être ? Insomnie J’éteignais
la
lampe et la veilleuse me rendait compagnon d’une momie bleuâtre, mais
1589
un être ? Insomnie J’éteignais la lampe et
la
veilleuse me rendait compagnon d’une momie bleuâtre, mais peut-on se
1590
ais la lampe et la veilleuse me rendait compagnon
d’
une momie bleuâtre, mais peut-on se reposer vraiment à 100 km/h. Par-d
1591
ut-on se reposer vraiment à 100 km/h. Par-dessous
le
store, je voyais la Lune faire des bonds courts sur la plaine inondée
1592
iment à 100 km/h. Par-dessous le store, je voyais
la
Lune faire des bonds courts sur la plaine inondée de nuit. J’essayais
1593
ore, je voyais la Lune faire des bonds courts sur
la
plaine inondée de nuit. J’essayais de penser par-dessous le rythme ob
1594
Lune faire des bonds courts sur la plaine inondée
de
nuit. J’essayais de penser par-dessous le rythme obstiné de cette hur
1595
courts sur la plaine inondée de nuit. J’essayais
de
penser par-dessous le rythme obstiné de cette hurlante bousculade sur
1596
inondée de nuit. J’essayais de penser par-dessous
le
rythme obstiné de cette hurlante bousculade sur place qu’est un voyag
1597
’essayais de penser par-dessous le rythme obstiné
de
cette hurlante bousculade sur place qu’est un voyage en express. Mais
1598
est un voyage en express. Mais je ne trouvais pas
la
pente de mon esprit, et tout en le parcourant avec une soif qui annon
1599
yage en express. Mais je ne trouvais pas la pente
de
mon esprit, et tout en le parcourant avec une soif qui annonçait le d
1600
e trouvais pas la pente de mon esprit, et tout en
le
parcourant avec une soif qui annonçait le désert, je traçais des plan
1601
tout en le parcourant avec une soif qui annonçait
le
désert, je traçais des plans d’œuvres sablonneuses. Je composais un t
1602
oif qui annonçait le désert, je traçais des plans
d’
œuvres sablonneuses. Je composais un traité des voyages : les titres e
1603
ablonneuses. Je composais un traité des voyages :
les
titres en étaient de Sénèque ou de Swift, et je voyais très bien ce q
1604
ais un traité des voyages : les titres en étaient
de
Sénèque ou de Swift, et je voyais très bien ce qu’en eussent tiré Ste
1605
des voyages : les titres en étaient de Sénèque ou
de
Swift, et je voyais très bien ce qu’en eussent tiré Sterne ou Goethe,
1606
e à Gérard de Nerval, je sentais qu’il s’agissait
d’
autre chose. — Il s’agit toujours d’autre chose que de ce qu’on dit. (
1607
il s’agissait d’autre chose. — Il s’agit toujours
d’
autre chose que de ce qu’on dit. (L’imprudence que de penser dans l’in
1608
tre chose. — Il s’agit toujours d’autre chose que
de
ce qu’on dit. (L’imprudence que de penser dans l’insomnie ! Cela tour
1609
agit toujours d’autre chose que de ce qu’on dit. (
L’
imprudence que de penser dans l’insomnie ! Cela tourne tout de suite à
1610
utre chose que de ce qu’on dit. (L’imprudence que
de
penser dans l’insomnie ! Cela tourne tout de suite à la débauche. Not
1611
de ce qu’on dit. (L’imprudence que de penser dans
l’
insomnie ! Cela tourne tout de suite à la débauche. Notre liberté de p
1612
ser dans l’insomnie ! Cela tourne tout de suite à
la
débauche. Notre liberté de penser est absurde au regard des contraint
1613
tourne tout de suite à la débauche. Notre liberté
de
penser est absurde au regard des contraintes que subissent nos gestes
1614
giner ce qui se produirait, si par quelque Décret
l’
on élevait la Morale du domaine des actions à celui de la pensée, de l
1615
se produirait, si par quelque Décret l’on élevait
la
Morale du domaine des actions à celui de la pensée, de l’Apparence à
1616
élevait la Morale du domaine des actions à celui
de
la pensée, de l’Apparence à l’Essence. D’un coup, tous les refoulés q
1617
evait la Morale du domaine des actions à celui de
la
pensée, de l’Apparence à l’Essence. D’un coup, tous les refoulés qui
1618
rale du domaine des actions à celui de la pensée,
de
l’Apparence à l’Essence. D’un coup, tous les refoulés qui explosent,
1619
e du domaine des actions à celui de la pensée, de
l’
Apparence à l’Essence. D’un coup, tous les refoulés qui explosent, le
1620
es actions à celui de la pensée, de l’Apparence à
l’
Essence. D’un coup, tous les refoulés qui explosent, le chômage dans l
1621
à celui de la pensée, de l’Apparence à l’Essence.
D’
un coup, tous les refoulés qui explosent, le chômage dans la gendarmer
1622
nsée, de l’Apparence à l’Essence. D’un coup, tous
les
refoulés qui explosent, le chômage dans la gendarmerie et les fakirs
1623
ence. D’un coup, tous les refoulés qui explosent,
le
chômage dans la gendarmerie et les fakirs débordés. L’hypocrisie s’en
1624
tous les refoulés qui explosent, le chômage dans
la
gendarmerie et les fakirs débordés. L’hypocrisie s’en tire avec une v
1625
qui explosent, le chômage dans la gendarmerie et
les
fakirs débordés. L’hypocrisie s’en tire avec une volte-face.) Quelle
1626
ômage dans la gendarmerie et les fakirs débordés.
L’
hypocrisie s’en tire avec une volte-face.) Quelle heure est-il ? La Lu
1627
tire avec une volte-face.) Quelle heure est-il ?
La
Lune se tient assez bien depuis un moment, c’est que la ligne est dro
1628
e se tient assez bien depuis un moment, c’est que
la
ligne est droite. Je ne sais plus dans quel sens je roule. J’aime ces
1629
l sens je roule. J’aime ces heures désorientées ;
le
sentiment du « non-sens » de la vie n’est-il pas comparable à ce que
1630
eures désorientées ; le sentiment du « non-sens »
de
la vie n’est-il pas comparable à ce que les mystiques appellent leur
1631
es désorientées ; le sentiment du « non-sens » de
la
vie n’est-il pas comparable à ce que les mystiques appellent leur dés
1632
sens » de la vie n’est-il pas comparable à ce que
les
mystiques appellent leur désert, — cette zone vide qu’il faut travers
1633
one vide qu’il faut traverser avant de parvenir à
la
Réalité. Entre « déjà plus » et « pas encore »… Bon point de vue pour
1634
Entre « déjà plus » et « pas encore »… Bon point
de
vue pour déconsidérer nos raisons de vivre. La maladie aussi. Rien ne
1635
»… Bon point de vue pour déconsidérer nos raisons
de
vivre. La maladie aussi. Rien ne ressemble au voyage comme la maladie
1636
nt de vue pour déconsidérer nos raisons de vivre.
La
maladie aussi. Rien ne ressemble au voyage comme la maladie. C’est l
1637
maladie aussi. Rien ne ressemble au voyage comme
la
maladie. C’est la même angoisse au départ, le même dépaysement au re
1638
n ne ressemble au voyage comme la maladie. C’est
la
même angoisse au départ, le même dépaysement au retour. « Il revient
1639
me la maladie. C’est la même angoisse au départ,
le
même dépaysement au retour. « Il revient de loin » signifie : qu’il v
1640
part, le même dépaysement au retour. « Il revient
de
loin » signifie : qu’il vient d’être très malade. Si dans ta chambre,
1641
ur. « Il revient de loin » signifie : qu’il vient
d’
être très malade. Si dans ta chambre, en plein jour, tu t’endors, et q
1642
chambre, en plein jour, tu t’endors, et que, vers
le
soir, tu t’éveilles dans une lueur jaune, ne sachant plus en quel end
1643
le que tu es parti. Voyager — serait-ce brouiller
les
horaires ? Le voyage est un état d’âme et non pas une question de tra
1644
rti. Voyager — serait-ce brouiller les horaires ?
Le
voyage est un état d’âme et non pas une question de transport. Un vra
1645
voyage est un état d’âme et non pas une question
de
transport. Un vrai voyage, on ne sait jamais où cela mène, c’est une
1646
amais où cela mène, c’est une aventure qui relève
de
la métaphysique plus que de la psychologie. — Une vaste licence poéti
1647
is où cela mène, c’est une aventure qui relève de
la
métaphysique plus que de la psychologie. — Une vaste licence poétique
1648
e aventure qui relève de la métaphysique plus que
de
la psychologie. — Une vaste licence poétique… (Voici bien la fatigue
1649
venture qui relève de la métaphysique plus que de
la
psychologie. — Une vaste licence poétique… (Voici bien la fatigue ave
1650
ologie. — Une vaste licence poétique… (Voici bien
la
fatigue avec son jeu des définitions)… Pas de but. — C’est vous qui l
1651
ien la fatigue avec son jeu des définitions)… Pas
de
but. — C’est vous qui le dites ! — Vous, naturellement… (Encore un qu
1652
eu des définitions)… Pas de but. — C’est vous qui
le
dites ! — Vous, naturellement… (Encore un qui se réveille dans la têt
1653
s, naturellement… (Encore un qui se réveille dans
la
tête.) — On ne voyage jamais que dans son propre sens ! — Mais il fau
1654
tu n’étais prêt à voir ? — Mais il fallait aller
le
voir ! — La vie est presque partout la même… — Mais en voyage on la r
1655
prêt à voir ? — Mais il fallait aller le voir ! —
La
vie est presque partout la même… — Mais en voyage on la regarde mieux
1656
lait aller le voir ! — La vie est presque partout
la
même… — Mais en voyage on la regarde mieux. — La vie… (une sorte de c
1657
est presque partout la même… — Mais en voyage on
la
regarde mieux. — La vie… (une sorte de cauchemar pensé, qui ne peut p
1658
la même… — Mais en voyage on la regarde mieux. —
La
vie… (une sorte de cauchemar pensé, qui ne peut plus s’arrêter de pen
1659
voyage on la regarde mieux. — La vie… (une sorte
de
cauchemar pensé, qui ne peut plus s’arrêter de penser). Se peut-il qu
1660
te de cauchemar pensé, qui ne peut plus s’arrêter
de
penser). Se peut-il qu’on cherche le sens de la vie ! Je sais seuleme
1661
us s’arrêter de penser). Se peut-il qu’on cherche
le
sens de la vie ! Je sais seulement que ma vie a un but. M’approcher d
1662
êter de penser). Se peut-il qu’on cherche le sens
de
la vie ! Je sais seulement que ma vie a un but. M’approcher de mon êt
1663
r de penser). Se peut-il qu’on cherche le sens de
la
vie ! Je sais seulement que ma vie a un but. M’approcher de mon être
1664
e sais seulement que ma vie a un but. M’approcher
de
mon être véritable. Seul au milieu des miens, j’oubliais ma race, j’a
1665
au milieu des miens, j’oubliais ma race, j’avais
l’
illusion de n’être rien que… moi-même. Identique à mon centre. Ici, co
1666
des miens, j’oubliais ma race, j’avais l’illusion
de
n’être rien que… moi-même. Identique à mon centre. Ici, comparé à tan
1667
resque infiniment variable, indéterminé. Et c’est
le
voyage qui me fixe. Je rayonnais, on me dessine. Mais en même temps,
1668
Mais en même temps, j’ai découvert mes puissances
d’
évasion intérieure. Et souvent je pressens qu’il existe une clef : dél
1669
uvent je pressens qu’il existe une clef : délivré
de
moi-même j’entrerais en plein Moi… Une clef ? Plutôt « cela » qui me
1670
oi… Une clef ? Plutôt « cela » qui me permettrait
de
combler l’écart entre moi et Moi qui est la seule réalité absolument
1671
f ? Plutôt « cela » qui me permettrait de combler
l’
écart entre moi et Moi qui est la seule réalité absolument tragique… U
1672
trait de combler l’écart entre moi et Moi qui est
la
seule réalité absolument tragique… Une chose ? Un être ? L’Objet ? —
1673
éalité absolument tragique… Une chose ? Un être ?
L’
Objet ? — Est-ce que je dors dans mes pensées ? La veilleuse fleurit s
1674
L’Objet ? — Est-ce que je dors dans mes pensées ?
La
veilleuse fleurit soudain d’un éclat bleu douloureux, le train ralent
1675
s dans mes pensées ? La veilleuse fleurit soudain
d’
un éclat bleu douloureux, le train ralentit. Hegyeshalom, petite gare
1676
leuse fleurit soudain d’un éclat bleu douloureux,
le
train ralentit. Hegyeshalom, petite gare frontière arrêtée au milieu
1677
halom, petite gare frontière arrêtée au milieu de
la
plaine à l’heure A, — l’heure des arrivées et des adieux… Il y a dans
1678
e gare frontière arrêtée au milieu de la plaine à
l’
heure A, — l’heure des arrivées et des adieux… Il y a dans tous les ré
1679
ère arrêtée au milieu de la plaine à l’heure A, —
l’
heure des arrivées et des adieux… Il y a dans tous les réveils une dét
1680
eure des arrivées et des adieux… Il y a dans tous
les
réveils une détresse et une délivrance étrangement mêlées. Les cle
1681
détresse et une délivrance étrangement mêlées.
Les
clefs perdues Il faudrait sortir à l’air frais, mais chaque porte
1682
ées. Les clefs perdues Il faudrait sortir à
l’
air frais, mais chaque porte est obstruée par un douanier, tant qu’à l
1683
que porte est obstruée par un douanier, tant qu’à
la
fin on me refoule dans mon compartiment. Est-ce encore un rêve ? Je c
1684
it ouvrir ces valises, mais j’ai perdu mes clefs.
L’
œil du douanier conseille des aveux complets. J’ai le feu à la tête ma
1685
il du douanier conseille des aveux complets. J’ai
le
feu à la tête mais je suis innocent : puisqu’enfin il n’est pas dans
1686
anier conseille des aveux complets. J’ai le feu à
la
tête mais je suis innocent : puisqu’enfin il n’est pas dans ma valise
1687
Cependant, « rien à déclarer » après des semaines
de
voyage ? Cela va paraître improbable. On a dû voir sur moi que je le
1688
paraître improbable. On a dû voir sur moi que je
le
cherche, c’est pourquoi l’œil est implacable… Pas de clefs dans mes o
1689
dû voir sur moi que je le cherche, c’est pourquoi
l’
œil est implacable… Pas de clefs dans mes onze poches. Seulement ce pa
1690
cherche, c’est pourquoi l’œil est implacable… Pas
de
clefs dans mes onze poches. Seulement ce papier timbré d’un ministère
1691
dans mes onze poches. Seulement ce papier timbré
d’
un ministère… mais déjà l’œil s’éteint, le corps se plie, fait demi-to
1692
lement ce papier timbré d’un ministère… mais déjà
l’
œil s’éteint, le corps se plie, fait demi-tour et puis s’en va. Rien,
1693
timbré d’un ministère… mais déjà l’œil s’éteint,
le
corps se plie, fait demi-tour et puis s’en va. Rien, rien à déclarer,
1694
tristesse. Mais qu’a-t-on jamais pu « déclarer »
d’
important ? Je ne sais pas parler en vers et la prose n’indique que le
1695
» d’important ? Je ne sais pas parler en vers et
la
prose n’indique que les choses les plus évidentes. C’est bien pourquo
1696
sais pas parler en vers et la prose n’indique que
les
choses les plus évidentes. C’est bien pourquoi l’Objet n’a pas de nom
1697
rler en vers et la prose n’indique que les choses
les
plus évidentes. C’est bien pourquoi l’Objet n’a pas de nom. Parfois j
1698
es choses les plus évidentes. C’est bien pourquoi
l’
Objet n’a pas de nom. Parfois je me suis demandé s’il n’était pas une
1699
us évidentes. C’est bien pourquoi l’Objet n’a pas
de
nom. Parfois je me suis demandé s’il n’était pas une sorte de pierre
1700
ois je me suis demandé s’il n’était pas une sorte
de
pierre philosophale. Peut-être ces deux mots suffiraient-ils à l’indi
1701
ophale. Peut-être ces deux mots suffiraient-ils à
l’
indiquer quand je m’en parle ? Tout en donnant le change à celles de m
1702
l’indiquer quand je m’en parle ? Tout en donnant
le
change à celles de mes pensées qui exigent des apparences positives.
1703
e m’en parle ? Tout en donnant le change à celles
de
mes pensées qui exigent des apparences positives. Ainsi donc j’ai che
1704
des apparences positives. Ainsi donc j’ai cherché
la
Pierre des Philosophes. D’autres aussi, peut-être, la cherchent. Et q
1705
ierre des Philosophes. D’autres aussi, peut-être,
la
cherchent. Et qui sait si vraiment elle n’existe plus, l’Hermétique S
1706
hent. Et qui sait si vraiment elle n’existe plus,
l’
Hermétique Société10 de ceux qui ne désespèrent pas encore du Grand’Œu
1707
aiment elle n’existe plus, l’Hermétique Société10
de
ceux qui ne désespèrent pas encore du Grand’Œuvre ? Cela seul est cer
1708
u’il existe des signes. Peut-être faut-il d’abord
les
découvrir tous par soi-même. Et c’est alors seulement qu’aux yeux de
1709
seulement qu’aux yeux de ceux qui surent désirer
de
la voir, apparaît la « Loge invisible ». J’attends quelqu’un qui vien
1710
ulement qu’aux yeux de ceux qui surent désirer de
la
voir, apparaît la « Loge invisible ». J’attends quelqu’un qui vienne
1711
x de ceux qui surent désirer de la voir, apparaît
la
« Loge invisible ». J’attends quelqu’un qui vienne me prendre par la
1712
». J’attends quelqu’un qui vienne me prendre par
la
main. Ainsi je quitte la Hongrie. Serait-ce là tout ce qu’elle m’a do
1713
ui vienne me prendre par la main. Ainsi je quitte
la
Hongrie. Serait-ce là tout ce qu’elle m’a donné ? Cette notion plus v
1714
out ce qu’elle m’a donné ? Cette notion plus vive
d’
un univers où la présence de l’Objet deviendrait plus probable ? Ou bi
1715
’a donné ? Cette notion plus vive d’un univers où
la
présence de l’Objet deviendrait plus probable ? Ou bien n’ai-je su vo
1716
ette notion plus vive d’un univers où la présence
de
l’Objet deviendrait plus probable ? Ou bien n’ai-je su voir autre cho
1717
e notion plus vive d’un univers où la présence de
l’
Objet deviendrait plus probable ? Ou bien n’ai-je su voir autre chose
1718
robable ? Ou bien n’ai-je su voir autre chose que
la
Hongrie de mes rêves, ma Hongrie intérieure ? Il est vrai que l’on co
1719
u bien n’ai-je su voir autre chose que la Hongrie
de
mes rêves, ma Hongrie intérieure ? Il est vrai que l’on connaît depui
1720
es rêves, ma Hongrie intérieure ? Il est vrai que
l’
on connaît depuis toujours ce qu’une fois l’on aimera. Et les uns dise
1721
i que l’on connaît depuis toujours ce qu’une fois
l’
on aimera. Et les uns disent qu’il faut connaître pour aimer ; les aut
1722
ît depuis toujours ce qu’une fois l’on aimera. Et
les
uns disent qu’il faut connaître pour aimer ; les autres, aimer pour c
1723
les uns disent qu’il faut connaître pour aimer ;
les
autres, aimer pour connaître. Débat qui se résout dans une synthèse,
1724
sout dans une synthèse, comme toujours : au point
de
perfection, aimer et connaître sont un seul et même acte. Peut-être l
1725
et connaître sont un seul et même acte. Peut-être
l’
ai-je aimée d’un amour égoïste, comme un être dont on a besoin et de q
1726
ont un seul et même acte. Peut-être l’ai-je aimée
d’
un amour égoïste, comme un être dont on a besoin et de qui l’on chérit
1727
amour égoïste, comme un être dont on a besoin et
de
qui l’on chérit surtout ce dont on manque : touchantes annexions, pie
1728
égoïste, comme un être dont on a besoin et de qui
l’
on chérit surtout ce dont on manque : touchantes annexions, pieux mens
1729
amour est un amour mineur. Mais qui saura jamais
la
vérité sur aucun être ? Et s’il fallait attendre pour aimer ! Je me s
1730
s’il fallait attendre pour aimer ! Je me souviens
de
ces terrains de sable noir, piqués de petits arbres et d’un désordre
1731
endre pour aimer ! Je me souviens de ces terrains
de
sable noir, piqués de petits arbres et d’un désordre de maisons basse
1732
me souviens de ces terrains de sable noir, piqués
de
petits arbres et d’un désordre de maisons basses, les dernières de la
1733
errains de sable noir, piqués de petits arbres et
d’
un désordre de maisons basses, les dernières de la ville de Debrecen,
1734
le noir, piqués de petits arbres et d’un désordre
de
maisons basses, les dernières de la ville de Debrecen, au bord de la
1735
petits arbres et d’un désordre de maisons basses,
les
dernières de la ville de Debrecen, au bord de la Grande Plaine encore
1736
et d’un désordre de maisons basses, les dernières
de
la ville de Debrecen, au bord de la Grande Plaine encore rougeâtre de
1737
d’un désordre de maisons basses, les dernières de
la
ville de Debrecen, au bord de la Grande Plaine encore rougeâtre de so
1738
rdre de maisons basses, les dernières de la ville
de
Debrecen, au bord de la Grande Plaine encore rougeâtre de soleil couc
1739
les dernières de la ville de Debrecen, au bord de
la
Grande Plaine encore rougeâtre de soleil couchant. J’y suis venu par
1740
cen, au bord de la Grande Plaine encore rougeâtre
de
soleil couchant. J’y suis venu par hasard, en flânant ; je me suis sa
1741
ent j’ai peine à m’imaginer que jamais plus je ne
la
reverrai, cette lumière en ce lieu, secrète et familière. Songeant à
1742
autres semblables, en voyage, je me dis que c’est
de
là que j’ai tiré le sentiment d’absurdité foncière qu’il m’arrive d’é
1743
n voyage, je me dis que c’est de là que j’ai tiré
le
sentiment d’absurdité foncière qu’il m’arrive d’éprouver en face d’un
1744
me dis que c’est de là que j’ai tiré le sentiment
d’
absurdité foncière qu’il m’arrive d’éprouver en face d’une action pure
1745
le sentiment d’absurdité foncière qu’il m’arrive
d’
éprouver en face d’une action purement raisonnable. Ah ! quelle raison
1746
le. Ah ! quelle raison ici t’attirait donc, sinon
l’
espoir bien fou d’y retrouver l’émotion d’un miracle imminent. Ou moin
1747
ison ici t’attirait donc, sinon l’espoir bien fou
d’
y retrouver l’émotion d’un miracle imminent. Ou moins encore : l’image
1748
irait donc, sinon l’espoir bien fou d’y retrouver
l’
émotion d’un miracle imminent. Ou moins encore : l’image née en rêve d
1749
, sinon l’espoir bien fou d’y retrouver l’émotion
d’
un miracle imminent. Ou moins encore : l’image née en rêve d’une plain
1750
’émotion d’un miracle imminent. Ou moins encore :
l’
image née en rêve d’une plaine, d’un couchant plus grandiose au ciel e
1751
e imminent. Ou moins encore : l’image née en rêve
d’
une plaine, d’un couchant plus grandiose au ciel et sur la terre plus
1752
moins encore : l’image née en rêve d’une plaine,
d’
un couchant plus grandiose au ciel et sur la terre plus secret que dan
1753
aine, d’un couchant plus grandiose au ciel et sur
la
terre plus secret que dans ton pays. Tu attendais une révélation, non
1754
ton pays. Tu attendais une révélation, non point
de
cet endroit, ni même par lui, — mais à cet endroit, en ce temps. Qui
1755
ais à cet endroit, en ce temps. Qui sait si tu ne
l’
as pas reçue ? Une qualité, une tendresse, quelque similitude… Oh ! si
1756
Mais qu’est-ce que ce voyage, si tu songes à tous
les
espaces à parcourir encore dans ce monde et dans d’autres, dans cette
1757
s cette vie et dans d’autres vies, pour approcher
de
tous côtés un But dont tu ne sais rien d’autre que sa fuite : n’est-i
1758
procher de tous côtés un But dont tu ne sais rien
d’
autre que sa fuite : n’est-il pas cet objet qui n’ait rien de commun a
1759
sa fuite : n’est-il pas cet objet qui n’ait rien
de
commun avec que ce que tu sais de toi-même en cette vie ? Mais le voi
1760
qui n’ait rien de commun avec que ce que tu sais
de
toi-même en cette vie ? Mais le voir, ce serait mourir dans la totali
1761
ue ce que tu sais de toi-même en cette vie ? Mais
le
voir, ce serait mourir dans la totalité du monde, effacer ta dernière
1762
n cette vie ? Mais le voir, ce serait mourir dans
la
totalité du monde, effacer ta dernière différence, — car on ne voit q
1763
nière différence, — car on ne voit que ce qui est
de
soi-même, et conscient. Et c’est à cause d’un pari peut-être fou, et
1764
i est de soi-même, et conscient. Et c’est à cause
d’
un pari peut-être fou, et qui porte sur des sentiments indéfinis, à ca
1765
nts indéfinis, à cause de ce pari dont tu n’as vu
l’
enjeu qu’un seul instant — nos rêves sont instantanés — que tu es part
1766
tu t’intéresses, tu serres des mains, — tu perds
les
clefs de tes valises… (Cela encore : m’arrêter à Vienne à cause des s
1767
resses, tu serres des mains, — tu perds les clefs
de
tes valises… (Cela encore : m’arrêter à Vienne à cause des serrures.
1768
s serrures. Peut-être y passer une nuit — rôder à
la
recherche de Gérard par les rues noires aux palais vides mais hantés,
1769
eut-être y passer une nuit — rôder à la recherche
de
Gérard par les rues noires aux palais vides mais hantés, et dans les
1770
ser une nuit — rôder à la recherche de Gérard par
les
rues noires aux palais vides mais hantés, et dans les grands cafés du
1771
rues noires aux palais vides mais hantés, et dans
les
grands cafés du centre. Quelle autre rencontre espérer — maintenant ?
1772
enant ?) « Tous ceux qui quittent ce monde vont à
la
Lune — lit-on dans les upanishads. — Or si un homme n’est pas satisfa
1773
ui quittent ce monde vont à la Lune — lit-on dans
les
upanishads. — Or si un homme n’est pas satisfait dans la lune, celle-
1774
ishads. — Or si un homme n’est pas satisfait dans
la
lune, celle-ci le libère (le laisse aller chez Brahma) ; mais si un h
1775
homme n’est pas satisfait dans la lune, celle-ci
le
libère (le laisse aller chez Brahma) ; mais si un homme y est satisfa
1776
t pas satisfait dans la lune, celle-ci le libère (
le
laisse aller chez Brahma) ; mais si un homme y est satisfait, la Lune
1777
chez Brahma) ; mais si un homme y est satisfait,
la
Lune le renvoie sur terre en forme de pluie. » Si je trouvais un jour
1778
ahma) ; mais si un homme y est satisfait, la Lune
le
renvoie sur terre en forme de pluie. » Si je trouvais un jour l’Objet
1779
terre en forme de pluie. » Si je trouvais un jour
l’
Objet, il ne me resterait qu’à le détruire. (Aussitôt je commence à co
1780
trouvais un jour l’Objet, il ne me resterait qu’à
le
détruire. (Aussitôt je commence à comprendre ce qu’il est : cela qui
1781
ce qu’il trouve. 1929. 6. Parce que j’« exalte
les
valeurs de passion » — pour parler comme le seul clerc qui n’ait pas
1782
uve. 1929. 6. Parce que j’« exalte les valeurs
de
passion » — pour parler comme le seul clerc qui n’ait pas trahi — qui
1783
alte les valeurs de passion » — pour parler comme
le
seul clerc qui n’ait pas trahi — qui me paraissent être la grandeur d
1784
lerc qui n’ait pas trahi — qui me paraissent être
la
grandeur de la Hongrie, on m’expliquera que je suis pour la guerre, p
1785
it pas trahi — qui me paraissent être la grandeur
de
la Hongrie, on m’expliquera que je suis pour la guerre, puisque enfin
1786
pas trahi — qui me paraissent être la grandeur de
la
Hongrie, on m’expliquera que je suis pour la guerre, puisque enfin ce
1787
r de la Hongrie, on m’expliquera que je suis pour
la
guerre, puisque enfin cet état d’esprit que j’admire est, entre autre
1788
belliqueux. Or je suis pacifiste. Comment ne pas
l’
être ! Mais je crois que les pacifistes qui veulent assurer la paix pa
1789
ifiste. Comment ne pas l’être ! Mais je crois que
les
pacifistes qui veulent assurer la paix par la mutilation des passions
1790
s je crois que les pacifistes qui veulent assurer
la
paix par la mutilation des passions sont disciples d’Origène. Il doit
1791
ue les pacifistes qui veulent assurer la paix par
la
mutilation des passions sont disciples d’Origène. Il doit y avoir d’a
1792
aix par la mutilation des passions sont disciples
d’
Origène. Il doit y avoir d’autres solutions… [NdE] Cette note avait di
1793
autres solutions… [NdE] Cette note avait disparue
de
la version publiée en 1968 dans le Journal d’une époque , base de ce
1794
res solutions… [NdE] Cette note avait disparue de
la
version publiée en 1968 dans le Journal d’une époque , base de cette
1795
avait disparue de la version publiée en 1968 dans
le
Journal d’une époque , base de cette édition numérique. Elle a été m
1796
ue de la version publiée en 1968 dans le Journal
d’
une époque , base de cette édition numérique. Elle a été manifestement
1797
liée en 1968 dans le Journal d’une époque , base
de
cette édition numérique. Elle a été manifestement réintégrée par Deni
1798
ement réintégrée par Denis de Rougemont en vue de
l’
édition de 1982. 7. Toute l’échelle des ivresses : ivresses de la fai
1799
tégrée par Denis de Rougemont en vue de l’édition
de
1982. 7. Toute l’échelle des ivresses : ivresses de la faim, de l’al
1800
Rougemont en vue de l’édition de 1982. 7. Toute
l’
échelle des ivresses : ivresses de la faim, de l’alcool, de la foule,
1801
1982. 7. Toute l’échelle des ivresses : ivresses
de
la faim, de l’alcool, de la foule, de la solitude, de l’extase. 8. E
1802
2. 7. Toute l’échelle des ivresses : ivresses de
la
faim, de l’alcool, de la foule, de la solitude, de l’extase. 8. Expr
1803
ute l’échelle des ivresses : ivresses de la faim,
de
l’alcool, de la foule, de la solitude, de l’extase. 8. Expression où
1804
l’échelle des ivresses : ivresses de la faim, de
l’
alcool, de la foule, de la solitude, de l’extase. 8. Expression où va
1805
des ivresses : ivresses de la faim, de l’alcool,
de
la foule, de la solitude, de l’extase. 8. Expression où va se réfugi
1806
s ivresses : ivresses de la faim, de l’alcool, de
la
foule, de la solitude, de l’extase. 8. Expression où va se réfugier
1807
: ivresses de la faim, de l’alcool, de la foule,
de
la solitude, de l’extase. 8. Expression où va se réfugier le dernier
1808
ivresses de la faim, de l’alcool, de la foule, de
la
solitude, de l’extase. 8. Expression où va se réfugier le dernier ve
1809
a faim, de l’alcool, de la foule, de la solitude,
de
l’extase. 8. Expression où va se réfugier le dernier vestige de la s
1810
aim, de l’alcool, de la foule, de la solitude, de
l’
extase. 8. Expression où va se réfugier le dernier vestige de la sens
1811
. Expression où va se réfugier le dernier vestige
de
la sensualité des érudits. 9. La fameuse marche de Rakoczy est l’œuv
1812
xpression où va se réfugier le dernier vestige de
la
sensualité des érudits. 9. La fameuse marche de Rakoczy est l’œuvre
1813
dernier vestige de la sensualité des érudits. 9.
La
fameuse marche de Rakoczy est l’œuvre d’une Tzigane. 10. L’or n’étai
1814
la sensualité des érudits. 9. La fameuse marche
de
Rakoczy est l’œuvre d’une Tzigane. 10. L’or n’était qu’un prétexte.
1815
des érudits. 9. La fameuse marche de Rakoczy est
l’
œuvre d’une Tzigane. 10. L’or n’était qu’un prétexte. Encore une blag
1816
its. 9. La fameuse marche de Rakoczy est l’œuvre
d’
une Tzigane. 10. L’or n’était qu’un prétexte. Encore une blague de pa
1817
marche de Rakoczy est l’œuvre d’une Tzigane. 10.
L’
or n’était qu’un prétexte. Encore une blague de passeport.
1818
0. L’or n’était qu’un prétexte. Encore une blague
de
passeport.
1819
Le
balcon sur l’eau Tu es appuyée debout contre moi, et nous regardons
1820
Le balcon sur
l’
eau Tu es appuyée debout contre moi, et nous regardons à nos pieds l
1821
debout contre moi, et nous regardons à nos pieds
l’
eau vivante. La brume est proche. Une haute muraille derrière nous fer
1822
moi, et nous regardons à nos pieds l’eau vivante.
La
brume est proche. Une haute muraille derrière nous ferme le monde. Tu
1823
st proche. Une haute muraille derrière nous ferme
le
monde. Tu ne trembles plus, tu t’appuies. Nos reflets ondulent très p
1824
’appuies. Nos reflets ondulent très peu, gris sur
le
blanc doucement luisant de la surface ; mais le silence a des vagues
1825
ent très peu, gris sur le blanc doucement luisant
de
la surface ; mais le silence a des vagues profondes. L’eau clapote av
1826
très peu, gris sur le blanc doucement luisant de
la
surface ; mais le silence a des vagues profondes. L’eau clapote avec
1827
r le blanc doucement luisant de la surface ; mais
le
silence a des vagues profondes. L’eau clapote avec tendresse, et se r
1828
surface ; mais le silence a des vagues profondes.
L’
eau clapote avec tendresse, et se retient… Et l’air chargé d’attente.
1829
. L’eau clapote avec tendresse, et se retient… Et
l’
air chargé d’attente. Nos têtes immobiles sont près de se toucher, nos
1830
te avec tendresse, et se retient… Et l’air chargé
d’
attente. Nos têtes immobiles sont près de se toucher, nos regards s’en
1831
sont près de se toucher, nos regards s’en vont à
la
rencontre de ce qui est voilé. Retiens ton souffle, retiens ton envie
1832
se toucher, nos regards s’en vont à la rencontre
de
ce qui est voilé. Retiens ton souffle, retiens ton envie de fermer le
1833
est voilé. Retiens ton souffle, retiens ton envie
de
fermer les yeux contre une épaule, attends encore un peu plus fort, é
1834
Retiens ton souffle, retiens ton envie de fermer
les
yeux contre une épaule, attends encore un peu plus fort, écoute encor
1835
autour de nous : il y a une grande lenteur. C’est
l’
avenir ou l’éternité qui ouvre la bouche pour dire quelque chose, écou
1836
us : il y a une grande lenteur. C’est l’avenir ou
l’
éternité qui ouvre la bouche pour dire quelque chose, écoute, attends…
1837
e lenteur. C’est l’avenir ou l’éternité qui ouvre
la
bouche pour dire quelque chose, écoute, attends… Peut-être que déjà l
1838
uelque chose, écoute, attends… Peut-être que déjà
la
parole fut dite et reçue quelque part en nous-mêmes, dans la brume où
1839
ut dite et reçue quelque part en nous-mêmes, dans
la
brume où nous sommes perdus avec ce clapotis d’une eau étrangement vi
1840
s la brume où nous sommes perdus avec ce clapotis
d’
une eau étrangement vivante et qui rêve ; et rien que nos yeux qui bri
1841
qui rêve ; et rien que nos yeux qui brillent dans
l’
étendue où nos deux formes confondent leur ombre et leur songe… Odeur
1842
formes confondent leur ombre et leur songe… Odeur
de
l’eau, — pour toute la vie. Bogliaco, lac de Garde, 1928.
1843
mes confondent leur ombre et leur songe… Odeur de
l’
eau, — pour toute la vie. Bogliaco, lac de Garde, 1928.
1844
ombre et leur songe… Odeur de l’eau, — pour toute
la
vie. Bogliaco, lac de Garde, 1928.
1845
deur de l’eau, — pour toute la vie. Bogliaco, lac
de
Garde, 1928.
1846
usse Au loin passaient des voiles claires parmi
les
blés violents ; le ciel paraissait plus grand que la terre. Des bois
1847
ient des voiles claires parmi les blés violents ;
le
ciel paraissait plus grand que la terre. Des bois de pins s’approchai
1848
blés violents ; le ciel paraissait plus grand que
la
terre. Des bois de pins s’approchaient, s’écartaient, livrant passage
1849
ciel paraissait plus grand que la terre. Des bois
de
pins s’approchaient, s’écartaient, livrant passage à la chaussée impé
1850
s s’approchaient, s’écartaient, livrant passage à
la
chaussée impériale dont brillaient les grandes portées blanches sur l
1851
t passage à la chaussée impériale dont brillaient
les
grandes portées blanches sur les ondulations sablonneuses de la plain
1852
dont brillaient les grandes portées blanches sur
les
ondulations sablonneuses de la plaine. Des prairies doucement soulevé
1853
portées blanches sur les ondulations sablonneuses
de
la plaine. Des prairies doucement soulevées s’arrêtaient au bord du c
1854
tées blanches sur les ondulations sablonneuses de
la
plaine. Des prairies doucement soulevées s’arrêtaient au bord du ciel
1855
nt soulevées s’arrêtaient au bord du ciel, devant
la
lumière maritime ; puis cédaient de l’épaule et l’on voyait le golfe
1856
ciel, devant la lumière maritime ; puis cédaient
de
l’épaule et l’on voyait le golfe violacé écumer sous la masse du sole
1857
el, devant la lumière maritime ; puis cédaient de
l’
épaule et l’on voyait le golfe violacé écumer sous la masse du soleil.
1858
a lumière maritime ; puis cédaient de l’épaule et
l’
on voyait le golfe violacé écumer sous la masse du soleil. Une lisière
1859
ritime ; puis cédaient de l’épaule et l’on voyait
le
golfe violacé écumer sous la masse du soleil. Une lisière qui nous ac
1860
paule et l’on voyait le golfe violacé écumer sous
la
masse du soleil. Une lisière qui nous accompagnait vira largement, no
1861
, nous fit front, et il n’y eut plus qu’une piste
de
terre entre les sapins noirs, la rumeur du rivage et du soleil derriè
1862
t, et il n’y eut plus qu’une piste de terre entre
les
sapins noirs, la rumeur du rivage et du soleil derrière nous décroiss
1863
lus qu’une piste de terre entre les sapins noirs,
la
rumeur du rivage et du soleil derrière nous décroissant, tumulte d’un
1864
e et du soleil derrière nous décroissant, tumulte
d’
un matin d’été. Maintenant une odeur fine de benzine traverse les odeu
1865
eil derrière nous décroissant, tumulte d’un matin
d’
été. Maintenant une odeur fine de benzine traverse les odeurs de la fo
1866
multe d’un matin d’été. Maintenant une odeur fine
de
benzine traverse les odeurs de la forêt, et le moteur halète au ralen
1867
té. Maintenant une odeur fine de benzine traverse
les
odeurs de la forêt, et le moteur halète au ralenti, dans la fraîcheur
1868
ant une odeur fine de benzine traverse les odeurs
de
la forêt, et le moteur halète au ralenti, dans la fraîcheur sobre. L’
1869
une odeur fine de benzine traverse les odeurs de
la
forêt, et le moteur halète au ralenti, dans la fraîcheur sobre. L’on
1870
ne de benzine traverse les odeurs de la forêt, et
le
moteur halète au ralenti, dans la fraîcheur sobre. L’on s’éveille enf
1871
de la forêt, et le moteur halète au ralenti, dans
la
fraîcheur sobre. L’on s’éveille enfin du long voyage nocturne, les ye
1872
oteur halète au ralenti, dans la fraîcheur sobre.
L’
on s’éveille enfin du long voyage nocturne, les yeux cessent de cligne
1873
re. L’on s’éveille enfin du long voyage nocturne,
les
yeux cessent de cligner, le corps se détend. Là devant, un chauffeur
1874
e enfin du long voyage nocturne, les yeux cessent
de
cligner, le corps se détend. Là devant, un chauffeur immobile guette
1875
ong voyage nocturne, les yeux cessent de cligner,
le
corps se détend. Là devant, un chauffeur immobile guette les ornières
1876
e détend. Là devant, un chauffeur immobile guette
les
ornières profondes où les roues s’enfoncent parfois avec un cahot mou
1877
auffeur immobile guette les ornières profondes où
les
roues s’enfoncent parfois avec un cahot mou. Le silence grandit ; cri
1878
les roues s’enfoncent parfois avec un cahot mou.
Le
silence grandit ; cris de pics, vibration basse des cylindres. On voi
1879
fois avec un cahot mou. Le silence grandit ; cris
de
pics, vibration basse des cylindres. On voit paraître de plus hauts a
1880
et bientôt un vaste portail, aux piles couronnées
de
grands cerfs de bronze. La piste se fait plane, la forêt s’ordonne. É
1881
ste portail, aux piles couronnées de grands cerfs
de
bronze. La piste se fait plane, la forêt s’ordonne. Échappée sur des
1882
, aux piles couronnées de grands cerfs de bronze.
La
piste se fait plane, la forêt s’ordonne. Échappée sur des étangs couv
1883
e grands cerfs de bronze. La piste se fait plane,
la
forêt s’ordonne. Échappée sur des étangs couverts de mousse jaune. (T
1884
forêt s’ordonne. Échappée sur des étangs couverts
de
mousse jaune. (Tout à fait réveillé et attentif, maintenant.) Jardin
1885
res rouges, piquées au loin de massifs éclatants,
le
gravier d’une allée fait son bruit luxueux, tout s’éclaire : cent fen
1886
piquées au loin de massifs éclatants, le gravier
d’
une allée fait son bruit luxueux, tout s’éclaire : cent fenêtres, sur
1887
ruit luxueux, tout s’éclaire : cent fenêtres, sur
la
gauche, dans une façade de grès Louis XV. Nous la longeons, nous mont
1888
e : cent fenêtres, sur la gauche, dans une façade
de
grès Louis XV. Nous la longeons, nous montons une rampe pavée qui s’e
1889
la gauche, dans une façade de grès Louis XV. Nous
la
longeons, nous montons une rampe pavée qui s’engage sous un porche co
1890
sous un porche couvert aux colonnes enguirlandées
de
roses. Toute une famille de géants, debout sur un seuil solennel, me
1891
olonnes enguirlandées de roses. Toute une famille
de
géants, debout sur un seuil solennel, me regarde piquer du nez à l’ar
1892
sur un seuil solennel, me regarde piquer du nez à
l’
arrêt brusque. Ici règne le plus ancien, mais le dernier « burgrave et
1893
egarde piquer du nez à l’arrêt brusque. Ici règne
le
plus ancien, mais le dernier « burgrave et comte » de la Prusse-Orien
1894
lus ancien, mais le dernier « burgrave et comte »
de
la Prusse-Orientale. Journées À huit heures, tout le monde se ré
1895
ancien, mais le dernier « burgrave et comte » de
la
Prusse-Orientale. Journées À huit heures, tout le monde se réuni
1896
t heures, tout le monde se réunit en silence dans
la
grande salle du château. Une douzaine de domestiques, hommes et femme
1897
nce dans la grande salle du château. Une douzaine
de
domestiques, hommes et femmes, pénètrent par le fond, s’alignent debo
1898
e de domestiques, hommes et femmes, pénètrent par
le
fond, s’alignent debout. Les enfants sur un long canapé ; les hôtes d
1899
femmes, pénètrent par le fond, s’alignent debout.
Les
enfants sur un long canapé ; les hôtes dans leurs fauteuils ; la comt
1900
alignent debout. Les enfants sur un long canapé ;
les
hôtes dans leurs fauteuils ; la comtesse est à l’harmonium ; le comte
1901
un long canapé ; les hôtes dans leurs fauteuils ;
la
comtesse est à l’harmonium ; le comte en face d’elle lit l’Écriture.
1902
es hôtes dans leurs fauteuils ; la comtesse est à
l’
harmonium ; le comte en face d’elle lit l’Écriture. Puis on chante et
1903
leurs fauteuils ; la comtesse est à l’harmonium ;
le
comte en face d’elle lit l’Écriture. Puis on chante et ce sont parfoi
1904
e est à l’harmonium ; le comte en face d’elle lit
l’
Écriture. Puis on chante et ce sont parfois des strophes de Novalis, d
1905
e. Puis on chante et ce sont parfois des strophes
de
Novalis, des mélodies de Bach. Après le Notre Père, chacun s’en va, s
1906
ont parfois des strophes de Novalis, des mélodies
de
Bach. Après le Notre Père, chacun s’en va, sérieux, de son côté. Le r
1907
strophes de Novalis, des mélodies de Bach. Après
le
Notre Père, chacun s’en va, sérieux, de son côté. Le reste de la mati
1908
ch. Après le Notre Père, chacun s’en va, sérieux,
de
son côté. Le reste de la matinée se passe à cheval au bord de la mer.
1909
Notre Père, chacun s’en va, sérieux, de son côté.
Le
reste de la matinée se passe à cheval au bord de la mer. Jeux du riva
1910
e, chacun s’en va, sérieux, de son côté. Le reste
de
la matinée se passe à cheval au bord de la mer. Jeux du rivage : sur
1911
chacun s’en va, sérieux, de son côté. Le reste de
la
matinée se passe à cheval au bord de la mer. Jeux du rivage : sur les
1912
reste de la matinée se passe à cheval au bord de
la
mer. Jeux du rivage : sur les montures à poil on s’élance au galop da
1913
à cheval au bord de la mer. Jeux du rivage : sur
les
montures à poil on s’élance au galop dans les flots. Un formidable so
1914
sur les montures à poil on s’élance au galop dans
les
flots. Un formidable soleil fait resplendir les dunes éblouissantes,
1915
s les flots. Un formidable soleil fait resplendir
les
dunes éblouissantes, autour du « Haff »11 coloré de traînées d’algues
1916
dunes éblouissantes, autour du « Haff »11 coloré
de
traînées d’algues pourpres. Les chevaux ruisselants s’échappent de no
1917
issantes, autour du « Haff »11 coloré de traînées
d’
algues pourpres. Les chevaux ruisselants s’échappent de nos bras, et n
1918
« Haff »11 coloré de traînées d’algues pourpres.
Les
chevaux ruisselants s’échappent de nos bras, et nous les poursuivons,
1919
ues pourpres. Les chevaux ruisselants s’échappent
de
nos bras, et nous les poursuivons, le long des grèves, dans les blés.
1920
vaux ruisselants s’échappent de nos bras, et nous
les
poursuivons, le long des grèves, dans les blés. Midi. Au haut de l’es
1921
et nous les poursuivons, le long des grèves, dans
les
blés. Midi. Au haut de l’escalier monumental — une armature de fer fo
1922
le long des grèves, dans les blés. Midi. Au haut
de
l’escalier monumental — une armature de fer forgé supportant des marc
1923
long des grèves, dans les blés. Midi. Au haut de
l’
escalier monumental — une armature de fer forgé supportant des marches
1924
. Au haut de l’escalier monumental — une armature
de
fer forgé supportant des marches de marbre —, un cortège se forme. La
1925
une armature de fer forgé supportant des marches
de
marbre —, un cortège se forme. La porte de la salle à manger s’ouvre
1926
ant des marches de marbre —, un cortège se forme.
La
porte de la salle à manger s’ouvre à deux battants et le comte entre
1927
arches de marbre —, un cortège se forme. La porte
de
la salle à manger s’ouvre à deux battants et le comte entre le premie
1928
hes de marbre —, un cortège se forme. La porte de
la
salle à manger s’ouvre à deux battants et le comte entre le premier,
1929
e de la salle à manger s’ouvre à deux battants et
le
comte entre le premier, à grands pas, suivi par toute la famille et p
1930
e entre le premier, à grands pas, suivi par toute
la
famille et par les hôtes qui se précipitent pour atteindre leur place
1931
, à grands pas, suivi par toute la famille et par
les
hôtes qui se précipitent pour atteindre leur place en même temps que
1932
itent pour atteindre leur place en même temps que
le
maître la sienne : car à peine arrivé il crie le nom d’un des enfants
1933
le maître la sienne : car à peine arrivé il crie
le
nom d’un des enfants et celui-ci récite une courte prière, durant laq
1934
tre la sienne : car à peine arrivé il crie le nom
d’
un des enfants et celui-ci récite une courte prière, durant laquelle i
1935
te prière, durant laquelle il n’est plus question
de
bouger. La table immense est chargée des produits du domaine. On boit
1936
durant laquelle il n’est plus question de bouger.
La
table immense est chargée des produits du domaine. On boit un peu de
1937
un peu de bière, mais surtout du lait froid dans
de
grands verres : il n’est pas de boisson plus rafraîchissante, ni qui
1938
u lait froid dans de grands verres : il n’est pas
de
boisson plus rafraîchissante, ni qui se marie mieux avec le goût du c
1939
plus rafraîchissante, ni qui se marie mieux avec
le
goût du chevreuil, dont on mange presque chaque jour. L’après-midi es
1940
du chevreuil, dont on mange presque chaque jour.
L’
après-midi est consacré à l’inspection des terres. Chaque jour nous pa
1941
presque chaque jour. L’après-midi est consacré à
l’
inspection des terres. Chaque jour nous partons en break à deux chevau
1942
graviat. Par des chemins à peine tracés au ras de
la
plaine sablonneuse — et parfois hors des pistes, à travers la forêt —
1943
blonneuse — et parfois hors des pistes, à travers
la
forêt —, nous gagnons la maison de l’inspecteur. On la distingue de l
1944
rs des pistes, à travers la forêt —, nous gagnons
la
maison de l’inspecteur. On la distingue de loin, seule bâtisse de pie
1945
tes, à travers la forêt —, nous gagnons la maison
de
l’inspecteur. On la distingue de loin, seule bâtisse de pierre parmi
1946
, à travers la forêt —, nous gagnons la maison de
l’
inspecteur. On la distingue de loin, seule bâtisse de pierre parmi les
1947
rêt —, nous gagnons la maison de l’inspecteur. On
la
distingue de loin, seule bâtisse de pierre parmi les fermes de brique
1948
agnons la maison de l’inspecteur. On la distingue
de
loin, seule bâtisse de pierre parmi les fermes de brique au toit de c
1949
nspecteur. On la distingue de loin, seule bâtisse
de
pierre parmi les fermes de brique au toit de chaume. Un appel : l’ins
1950
distingue de loin, seule bâtisse de pierre parmi
les
fermes de brique au toit de chaume. Un appel : l’inspecteur paraît su
1951
de loin, seule bâtisse de pierre parmi les fermes
de
brique au toit de chaume. Un appel : l’inspecteur paraît sur son seui
1952
isse de pierre parmi les fermes de brique au toit
de
chaume. Un appel : l’inspecteur paraît sur son seuil au garde à vous,
1953
es fermes de brique au toit de chaume. Un appel :
l’
inspecteur paraît sur son seuil au garde à vous, et débite son rapport
1954
. Une cordialité militaire, sans nulle gêne, unit
le
maître et les subordonnés. Le travail aux champs se fait par équipes
1955
ité militaire, sans nulle gêne, unit le maître et
les
subordonnés. Le travail aux champs se fait par équipes très nombreuse
1956
ns nulle gêne, unit le maître et les subordonnés.
Le
travail aux champs se fait par équipes très nombreuses, à grand renfo
1957
uipes très nombreuses, à grand renfort de chevaux
de
trait, car la nature marécageuse du sol rend les transports malaisés.
1958
breuses, à grand renfort de chevaux de trait, car
la
nature marécageuse du sol rend les transports malaisés. Souvent, aprè
1959
x de trait, car la nature marécageuse du sol rend
les
transports malaisés. Souvent, après dîner, l’on repart en voiture ouv
1960
nd les transports malaisés. Souvent, après dîner,
l’
on repart en voiture ouverte à travers les prairies ou le long des lis
1961
s dîner, l’on repart en voiture ouverte à travers
les
prairies ou le long des lisières surprendre les chevreuils et repérer
1962
s les prairies ou le long des lisières surprendre
les
chevreuils et repérer un « Bock » mal encorné. Le fusil déposé sur no
1963
es chevreuils et repérer un « Bock » mal encorné.
Le
fusil déposé sur nos genoux, par habitude, ce sera pour tirer un chat
1964
de, ce sera pour tirer un chat qui rôde autour de
la
faisanderie. Les couchers de soleil à cette saison se prolongent jusq
1965
tirer un chat qui rôde autour de la faisanderie.
Les
couchers de soleil à cette saison se prolongent jusque vers onze heur
1966
t qui rôde autour de la faisanderie. Les couchers
de
soleil à cette saison se prolongent jusque vers onze heures, en des j
1967
jusque vers onze heures, en des jeux infinis sur
les
vastes ondulations des terres. À l’horizon, des ailes de moulin tourn
1968
infinis sur les vastes ondulations des terres. À
l’
horizon, des ailes de moulin tournent, ou scintille une mer dorée. Tou
1969
es ondulations des terres. À l’horizon, des ailes
de
moulin tournent, ou scintille une mer dorée. Tout impose un silence h
1970
le une mer dorée. Tout impose un silence heureux.
Les
plus proches voisins habitent à 40 km, plus loin vers la Russie, dans
1971
proches voisins habitent à 40 km, plus loin vers
la
Russie, dans un pays de lacs, de forêts maigres et de pâturages à per
1972
t à 40 km, plus loin vers la Russie, dans un pays
de
lacs, de forêts maigres et de pâturages à perte de vue. Nous sommes p
1973
, plus loin vers la Russie, dans un pays de lacs,
de
forêts maigres et de pâturages à perte de vue. Nous sommes pour trois
1974
ussie, dans un pays de lacs, de forêts maigres et
de
pâturages à perte de vue. Nous sommes pour trois jours les hôtes d’un
1975
ages à perte de vue. Nous sommes pour trois jours
les
hôtes d’une immense demeure en briques roses et jaunes, entourée de p
1976
te de vue. Nous sommes pour trois jours les hôtes
d’
une immense demeure en briques roses et jaunes, entourée de prairies a
1977
ense demeure en briques roses et jaunes, entourée
de
prairies aux bosquets vaporeux. Des parterres de fleurs descendent ju
1978
de prairies aux bosquets vaporeux. Des parterres
de
fleurs descendent jusqu’à la rivière immobile, élargie en un lac sinu
1979
oreux. Des parterres de fleurs descendent jusqu’à
la
rivière immobile, élargie en un lac sinueux. Un paysage peint à l’aqu
1980
le, élargie en un lac sinueux. Un paysage peint à
l’
aquarelle. Le château, salmigondis de styles, résume, si l’on peut dir
1981
n un lac sinueux. Un paysage peint à l’aquarelle.
Le
château, salmigondis de styles, résume, si l’on peut dire, une enquêt
1982
sage peint à l’aquarelle. Le château, salmigondis
de
styles, résume, si l’on peut dire, une enquête que poursuivit son con
1983
le. Le château, salmigondis de styles, résume, si
l’
on peut dire, une enquête que poursuivit son constructeur parmi les gr
1984
une enquête que poursuivit son constructeur parmi
les
grandes demeures seigneuriales d’Europe, aux fins de réunir les éléme
1985
tructeur parmi les grandes demeures seigneuriales
d’
Europe, aux fins de réunir les éléments les plus comfortable des diver
1986
meures seigneuriales d’Europe, aux fins de réunir
les
éléments les plus comfortable des diverses architectures. Un château
1987
uriales d’Europe, aux fins de réunir les éléments
les
plus comfortable des diverses architectures. Un château construit sur
1988
diverses architectures. Un château construit sur
la
seule notion du confort : voilà sans doute la figuration la plus conc
1989
sur la seule notion du confort : voilà sans doute
la
figuration la plus concrète de l’égarement des esprits au siècle dern
1990
otion du confort : voilà sans doute la figuration
la
plus concrète de l’égarement des esprits au siècle dernier. Qui dit s
1991
: voilà sans doute la figuration la plus concrète
de
l’égarement des esprits au siècle dernier. Qui dit style d’abord dit
1992
oilà sans doute la figuration la plus concrète de
l’
égarement des esprits au siècle dernier. Qui dit style d’abord dit sac
1993
er. Qui dit style d’abord dit sacrifice à une vue
de
l’esprit. Qui dit confort d’abord dit refus de tout style. Cette mais
1994
Qui dit style d’abord dit sacrifice à une vue de
l’
esprit. Qui dit confort d’abord dit refus de tout style. Cette maison
1995
ue de l’esprit. Qui dit confort d’abord dit refus
de
tout style. Cette maison qui offre les commodités du plus luxueux hom
1996
d dit refus de tout style. Cette maison qui offre
les
commodités du plus luxueux home anglais, est monstrueuse jusqu’à l’im
1997
lus luxueux home anglais, est monstrueuse jusqu’à
l’
impudeur. Apparemment, l’on est ici plus à la page que chez mes burgra
1998
est monstrueuse jusqu’à l’impudeur. Apparemment,
l’
on est ici plus à la page que chez mes burgraves. Les maîtres du lieu
1999
qu’à l’impudeur. Apparemment, l’on est ici plus à
la
page que chez mes burgraves. Les maîtres du lieu sourient un peu de «
2000
on est ici plus à la page que chez mes burgraves.
Les
maîtres du lieu sourient un peu de « ceux de W. qui ne boivent que du
2001
es. Les maîtres du lieu sourient un peu de « ceux
de
W. qui ne boivent que du lait ». Et nous servent du thé bouillant où
2002
s servent du thé bouillant où nagent des morceaux
de
glace. À ces détails près, le même train de vie bottée. Les écuries r
2003
nagent des morceaux de glace. À ces détails près,
le
même train de vie bottée. Les écuries résonnent sous les coups de pie
2004
ceaux de glace. À ces détails près, le même train
de
vie bottée. Les écuries résonnent sous les coups de pied des étalons
2005
À ces détails près, le même train de vie bottée.
Les
écuries résonnent sous les coups de pied des étalons de course, géant
2006
e train de vie bottée. Les écuries résonnent sous
les
coups de pied des étalons de course, géants aux longs fessiers noirs
2007
ries résonnent sous les coups de pied des étalons
de
course, géants aux longs fessiers noirs luisants. Sur la plaine éblou
2008
se, géants aux longs fessiers noirs luisants. Sur
la
plaine éblouissante, des troupeaux de chevaux pâturent en liberté. Le
2009
isants. Sur la plaine éblouissante, des troupeaux
de
chevaux pâturent en liberté. Le meuglement des bœufs ne s’apaise pas
2010
te, des troupeaux de chevaux pâturent en liberté.
Le
meuglement des bœufs ne s’apaise pas sous le soleil et nous entoure d
2011
rté. Le meuglement des bœufs ne s’apaise pas sous
le
soleil et nous entoure d’une rumeur animale tenace comme toutes ces o
2012
fs ne s’apaise pas sous le soleil et nous entoure
d’
une rumeur animale tenace comme toutes ces odeurs de la terre, des her
2013
une rumeur animale tenace comme toutes ces odeurs
de
la terre, des herbes et des bêtes. Parfois souffle le vent marin ; et
2014
rumeur animale tenace comme toutes ces odeurs de
la
terre, des herbes et des bêtes. Parfois souffle le vent marin ; et de
2015
a terre, des herbes et des bêtes. Parfois souffle
le
vent marin ; et des cigognes filent sur nos têtes, tirant leurs patte
2016
ilent sur nos têtes, tirant leurs pattes roses. À
l’
horizon toujours passent des voiles, mais on ne voit pas la mer. Dans
2017
toujours passent des voiles, mais on ne voit pas
la
mer. Dans la bibliothèque de Waldburg, qui sent encore le cuir, la ch
2018
sent des voiles, mais on ne voit pas la mer. Dans
la
bibliothèque de Waldburg, qui sent encore le cuir, la chasse, j’ai tr
2019
mais on ne voit pas la mer. Dans la bibliothèque
de
Waldburg, qui sent encore le cuir, la chasse, j’ai trouvé tous les cl
2020
Dans la bibliothèque de Waldburg, qui sent encore
le
cuir, la chasse, j’ai trouvé tous les classiques français, et l’Encyc
2021
ibliothèque de Waldburg, qui sent encore le cuir,
la
chasse, j’ai trouvé tous les classiques français, et l’Encyclopédie.
2022
sent encore le cuir, la chasse, j’ai trouvé tous
les
classiques français, et l’Encyclopédie. Même, un petit Voltaire dépar
2023
sse, j’ai trouvé tous les classiques français, et
l’
Encyclopédie. Même, un petit Voltaire dépareillé, « ex-libris de la Ma
2024
. Même, un petit Voltaire dépareillé, « ex-libris
de
la Malmaison ». (Une négligence sans doute, on l’aura retrouvé dans l
2025
ême, un petit Voltaire dépareillé, « ex-libris de
la
Malmaison ». (Une négligence sans doute, on l’aura retrouvé dans les
2026
de la Malmaison ». (Une négligence sans doute, on
l’
aura retrouvé dans les poches d’un uniforme au retour de la campagne d
2027
ne négligence sans doute, on l’aura retrouvé dans
les
poches d’un uniforme au retour de la campagne de France.) Les mémoire
2028
ce sans doute, on l’aura retrouvé dans les poches
d’
un uniforme au retour de la campagne de France.) Les mémoires, en fran
2029
retrouvé dans les poches d’un uniforme au retour
de
la campagne de France.) Les mémoires, en français, d’un des burgraves
2030
trouvé dans les poches d’un uniforme au retour de
la
campagne de France.) Les mémoires, en français, d’un des burgraves zu
2031
les poches d’un uniforme au retour de la campagne
de
France.) Les mémoires, en français, d’un des burgraves zu D. qui fut
2032
’un uniforme au retour de la campagne de France.)
Les
mémoires, en français, d’un des burgraves zu D. qui fut gouverneur d’
2033
a campagne de France.) Les mémoires, en français,
d’
un des burgraves zu D. qui fut gouverneur d’Orange, et eut pour précep
2034
çais, d’un des burgraves zu D. qui fut gouverneur
d’
Orange, et eut pour précepteur Pierre Bayle en personne, dont il se mo
2035
onvient. Ensuite, tout Schleiermacher, un protégé
de
la famille. Mais à partir de cette date, il n’y a plus que les Gothas
2036
ient. Ensuite, tout Schleiermacher, un protégé de
la
famille. Mais à partir de cette date, il n’y a plus que les Gothas. L
2037
e. Mais à partir de cette date, il n’y a plus que
les
Gothas. Les modernes sont fous et ridicules. Ils ont mis un sellier à
2038
rtir de cette date, il n’y a plus que les Gothas.
Les
modernes sont fous et ridicules. Ils ont mis un sellier à la tête du
2039
sont fous et ridicules. Ils ont mis un sellier à
la
tête du Reich, et seuls les insensés voudraient lire ce qu’ils publie
2040
s ont mis un sellier à la tête du Reich, et seuls
les
insensés voudraient lire ce qu’ils publient. Éducation L’obéiss
2041
udraient lire ce qu’ils publient. Éducation
L’
obéissance militaire aux parents, que l’on exige des jeunes Prussiens,
2042
cation L’obéissance militaire aux parents, que
l’
on exige des jeunes Prussiens, ferait hurler nos pédagogues. Mais elle
2043
rler nos pédagogues. Mais elle s’unit à un régime
de
responsabilités concrètes qui sauvegarde l’initiative personnelle plu
2044
égime de responsabilités concrètes qui sauvegarde
l’
initiative personnelle plus réellement que ne le fait l’éducation libé
2045
e l’initiative personnelle plus réellement que ne
le
fait l’éducation libérale et bourgeoise. Ici le risque et la violence
2046
iative personnelle plus réellement que ne le fait
l’
éducation libérale et bourgeoise. Ici le risque et la violence physiqu
2047
e le fait l’éducation libérale et bourgeoise. Ici
le
risque et la violence physique jouent dans la vie de chaque jour leur
2048
ducation libérale et bourgeoise. Ici le risque et
la
violence physique jouent dans la vie de chaque jour leur rôle naturel
2049
Ici le risque et la violence physique jouent dans
la
vie de chaque jour leur rôle naturel et tonique. On lâche les garçons
2050
risque et la violence physique jouent dans la vie
de
chaque jour leur rôle naturel et tonique. On lâche les garçons à chev
2051
haque jour leur rôle naturel et tonique. On lâche
les
garçons à cheval dès 6 ans ; plus tard on leur confie des poulains à
2052
des poulains à dresser — et ce n’est pas commode
de
se trouver devant une bête en liberté qu’on doit saisir d’abord, puis
2053
ompter. Ou bien ce sont des tâches précises, dans
l’
organisation des domaines ou des chasses ; des commandements, des déci
2054
des commandements, des décisions pratiques, tout
l’
apprentissage de la conduite des hommes, des animaux et des éléments n
2055
ts, des décisions pratiques, tout l’apprentissage
de
la conduite des hommes, des animaux et des éléments naturels. Pour no
2056
des décisions pratiques, tout l’apprentissage de
la
conduite des hommes, des animaux et des éléments naturels. Pour nous,
2057
Pour nous, nous développons un sens plutôt fictif
de
la responsabilité. Nous développons au vrai un hamlétisme. Notre prép
2058
r nous, nous développons un sens plutôt fictif de
la
responsabilité. Nous développons au vrai un hamlétisme. Notre prépara
2059
oppons au vrai un hamlétisme. Notre préparation à
l’
autonomie de l’individu demeure théorique, et son application est indé
2060
ai un hamlétisme. Notre préparation à l’autonomie
de
l’individu demeure théorique, et son application est indéfiniment ret
2061
un hamlétisme. Notre préparation à l’autonomie de
l’
individu demeure théorique, et son application est indéfiniment retard
2062
et par toute notre ambiance éducatrice, un organe
de
l’autonomie qui ne trouve nulle part où s’exercer : d’où les conflits
2063
par toute notre ambiance éducatrice, un organe de
l’
autonomie qui ne trouve nulle part où s’exercer : d’où les conflits pu
2064
autonomie qui ne trouve nulle part où s’exercer :
d’
où les conflits purement « moraux » qui nous empêtrent, jusqu’au-delà
2065
omie qui ne trouve nulle part où s’exercer : d’où
les
conflits purement « moraux » qui nous empêtrent, jusqu’au-delà de nos
2066
ment « moraux » qui nous empêtrent, jusqu’au-delà
de
nos adolescences. Jeux des enfants prussiens : s’asseoir à six ou sep
2067
genoux plient. Dresser des étalons en liberté, et
les
monter à poil. Jouer à football avec les hérissons du parc. Capturer
2068
erté, et les monter à poil. Jouer à football avec
les
hérissons du parc. Capturer des canards sauvages et leur faire subir
2069
rminablement à table. — Cruauté franche est signe
de
santéa. Ebo, l’aîné des fils, 19 ans, joue de l’accordéon dans sa cha
2070
able. — Cruauté franche est signe de santéa. Ebo,
l’
aîné des fils, 19 ans, joue de l’accordéon dans sa chambre à côté de l
2071
gne de santéa. Ebo, l’aîné des fils, 19 ans, joue
de
l’accordéon dans sa chambre à côté de la mienne. Tout à l’heure, une
2072
de santéa. Ebo, l’aîné des fils, 19 ans, joue de
l’
accordéon dans sa chambre à côté de la mienne. Tout à l’heure, une étr
2073
rdéon dans sa chambre à côté de la mienne. Tout à
l’
heure, une étrange mélodie, lente et pesante, est revenue avec insista
2074
ente et pesante, est revenue avec insistance : il
la
joue chaque soir, plusieurs fois. Je suis allé lui demander ce que c’
2075
fois. Je suis allé lui demander ce que c’était. «
L’
hymne d’un mouvement clandestin, dont le chef est en prison depuis que
2076
suis allé lui demander ce que c’était. « L’hymne
d’
un mouvement clandestin, dont le chef est en prison depuis quelques an
2077
’était. « L’hymne d’un mouvement clandestin, dont
le
chef est en prison depuis quelques années. Il veut la renaissance du
2078
hef est en prison depuis quelques années. Il veut
la
renaissance du Reich allemand. Ça s’appelle le Horst Wessel Lied. Sur
2079
ut la renaissance du Reich allemand. Ça s’appelle
le
Horst Wessel Lied. Surtout ne dis rien à mes parents ! » Ebo a un aut
2080
o a un autre secret : il sait que l’un des frères
de
sa mère complote avec l’ex-kronprinz pour une restauration de l’Empir
2081
sait que l’un des frères de sa mère complote avec
l’
ex-kronprinz pour une restauration de l’Empire. Voilà qui serait presq
2082
omplote avec l’ex-kronprinz pour une restauration
de
l’Empire. Voilà qui serait presque aussi mal vu de l’excellent burgra
2083
lote avec l’ex-kronprinz pour une restauration de
l’
Empire. Voilà qui serait presque aussi mal vu de l’excellent burgrave,
2084
e l’Empire. Voilà qui serait presque aussi mal vu
de
l’excellent burgrave, lequel me disait en me montrant les armoiries d
2085
’Empire. Voilà qui serait presque aussi mal vu de
l’
excellent burgrave, lequel me disait en me montrant les armoiries des
2086
cellent burgrave, lequel me disait en me montrant
les
armoiries des Hohenzollern-Hechingen, couplées avec celles de sa gran
2087
des Hohenzollern-Hechingen, couplées avec celles
de
sa grand-mère Waldburg au plafond à caissons du grand salon : « Une m
2088
and salon : « Une mésalliance ! » Il est vrai que
les
princes, burgraves et comtes zu Dohna-Schlobitten auf Waldburg toucha
2089
n auf Waldburg touchaient encore en 1914 un droit
de
péage sur le grand pont de Dresde que leurs ancêtres avaient fait con
2090
g touchaient encore en 1914 un droit de péage sur
le
grand pont de Dresde que leurs ancêtres avaient fait construire vers
2091
ncore en 1914 un droit de péage sur le grand pont
de
Dresde que leurs ancêtres avaient fait construire vers l’an 950, cepe
2092
e que leurs ancêtres avaient fait construire vers
l’
an 950, cependant que les Hohenzollern, prétend-il, datent à peine du
2093
ient fait construire vers l’an 950, cependant que
les
Hohenzollern, prétend-il, datent à peine du xive siècle, — ces parve
2094
xive siècle, — ces parvenus. Tacite prétend que
l’
élan est un animal aux jambes dépourvues d’articulations, en sorte qu’
2095
nd que l’élan est un animal aux jambes dépourvues
d’
articulations, en sorte qu’il ne peut se coucher et doit dormir appuyé
2096
se coucher et doit dormir appuyé aux arbres. Pour
le
capturer, les indigènes scient à moitié les troncs, et lorsque l’élan
2097
doit dormir appuyé aux arbres. Pour le capturer,
les
indigènes scient à moitié les troncs, et lorsque l’élan s’appuie, l’a
2098
. Pour le capturer, les indigènes scient à moitié
les
troncs, et lorsque l’élan s’appuie, l’arbre cède et la bête se trouve
2099
indigènes scient à moitié les troncs, et lorsque
l’
élan s’appuie, l’arbre cède et la bête se trouve sans défense. Tacite
2100
à moitié les troncs, et lorsque l’élan s’appuie,
l’
arbre cède et la bête se trouve sans défense. Tacite n’a jamais vu d’é
2101
oncs, et lorsque l’élan s’appuie, l’arbre cède et
la
bête se trouve sans défense. Tacite n’a jamais vu d’élan. Ces animaux
2102
bête se trouve sans défense. Tacite n’a jamais vu
d’
élan. Ces animaux d’allure fantastique déambulent à la tombée de la nu
2103
défense. Tacite n’a jamais vu d’élan. Ces animaux
d’
allure fantastique déambulent à la tombée de la nuit dans les clairièr
2104
an. Ces animaux d’allure fantastique déambulent à
la
tombée de la nuit dans les clairières, comme des arbres qui se mettra
2105
imaux d’allure fantastique déambulent à la tombée
de
la nuit dans les clairières, comme des arbres qui se mettraient en ma
2106
ux d’allure fantastique déambulent à la tombée de
la
nuit dans les clairières, comme des arbres qui se mettraient en march
2107
antastique déambulent à la tombée de la nuit dans
les
clairières, comme des arbres qui se mettraient en marche, et sont tel
2108
membres ne se déboîtent. On a vu des élans gagner
de
vitesse les automobiles le long de la chaussée de Königsberg. Combien
2109
se déboîtent. On a vu des élans gagner de vitesse
les
automobiles le long de la chaussée de Königsberg. Combien j’aime ces
2110
lans gagner de vitesse les automobiles le long de
la
chaussée de Königsberg. Combien j’aime ces randonnées interminables d
2111
de vitesse les automobiles le long de la chaussée
de
Königsberg. Combien j’aime ces randonnées interminables dans les forê
2112
Combien j’aime ces randonnées interminables dans
les
forêts de chasse, l’arme en ballant, durant des heures sans dire un m
2113
aime ces randonnées interminables dans les forêts
de
chasse, l’arme en ballant, durant des heures sans dire un mot, — car
2114
ndonnées interminables dans les forêts de chasse,
l’
arme en ballant, durant des heures sans dire un mot, — car il ne faut
2115
s sans dire un mot, — car il ne faut pas effrayer
le
gibier sensible au moindre son de voix humaine. (Tout cela pour prépa
2116
ut pas effrayer le gibier sensible au moindre son
de
voix humaine. (Tout cela pour préparer quelque battue prochaine.) Vis
2117
ils trouvent leur plaisir dans ces longs mutismes
de
guetteurs, dont on ressort ivre et comme possédé par les génies du mo
2118
tteurs, dont on ressort ivre et comme possédé par
les
génies du monde végétal. Il y a une sorte de violence aussi dans ces
2119
par les génies du monde végétal. Il y a une sorte
de
violence aussi dans ces bains de silence forestier. Qui peut en calcu
2120
Il y a une sorte de violence aussi dans ces bains
de
silence forestier. Qui peut en calculer le bienfait d’énergie ? Les j
2121
bains de silence forestier. Qui peut en calculer
le
bienfait d’énergie ? Les journées, même de vacances, baignent ici dan
2122
lence forestier. Qui peut en calculer le bienfait
d’
énergie ? Les journées, même de vacances, baignent ici dans une atmosp
2123
ier. Qui peut en calculer le bienfait d’énergie ?
Les
journées, même de vacances, baignent ici dans une atmosphère goethéen
2124
lculer le bienfait d’énergie ? Les journées, même
de
vacances, baignent ici dans une atmosphère goethéenne d’utilité, — au
2125
nces, baignent ici dans une atmosphère goethéenne
d’
utilité, — au sens élevé et civilisateur du terme. La notion moderne d
2126
tilité, — au sens élevé et civilisateur du terme.
La
notion moderne de superflu, qui donne aux plaisirs mondains l’aspect
2127
élevé et civilisateur du terme. La notion moderne
de
superflu, qui donne aux plaisirs mondains l’aspect absurde que nous l
2128
erne de superflu, qui donne aux plaisirs mondains
l’
aspect absurde que nous leur connaissons, cette superstition ne leur e
2129
ontredisent pas leurs travaux et n’en figurent ni
la
revanche ni l’évasion : mais ils s’ordonnent tranquillement dans une
2130
leurs travaux et n’en figurent ni la revanche ni
l’
évasion : mais ils s’ordonnent tranquillement dans une activité qui ti
2131
ent dans une activité qui tire son unité foncière
de
la nature même des choses. Le rythme perpétuellement syncopé du trava
2132
dans une activité qui tire son unité foncière de
la
nature même des choses. Le rythme perpétuellement syncopé du travail
2133
son unité foncière de la nature même des choses.
Le
rythme perpétuellement syncopé du travail et du loisir, créé par l’éc
2134
llement syncopé du travail et du loisir, créé par
l’
économie citadine, ici s’apaise et laisse percevoir les rythmes nature
2135
onomie citadine, ici s’apaise et laisse percevoir
les
rythmes naturels, l’ample respiration élémentaire. Je ne défendrai
2136
’apaise et laisse percevoir les rythmes naturels,
l’
ample respiration élémentaire. Je ne défendrai pas les junkers…
2137
e respiration élémentaire. Je ne défendrai pas
les
junkers… J’entends les gens de villes : « Ça ne doit pas être bien
2138
Je ne défendrai pas les junkers… J’entends
les
gens de villes : « Ça ne doit pas être bien drôle à la longue ! » Ave
2139
défendrai pas les junkers… J’entends les gens
de
villes : « Ça ne doit pas être bien drôle à la longue ! » Avec cela q
2140
» Avec cela que vos plaisirs vous amusent tant !
La
neurasthénie n’est-elle pas une de vos inventions ? Et toute votre li
2141
amusent tant ! La neurasthénie n’est-elle pas une
de
vos inventions ? Et toute votre littérature est occupée à décrire vos
2142
vos satiétés, quand elle ne se met pas au service
d’
un régime de surenchère désespérée des sensations de luxe, dont elle c
2143
, quand elle ne se met pas au service d’un régime
de
surenchère désespérée des sensations de luxe, dont elle constitue la
2144
un régime de surenchère désespérée des sensations
de
luxe, dont elle constitue la publicité. Mais il s’agit bien de plaisi
2145
pérée des sensations de luxe, dont elle constitue
la
publicité. Mais il s’agit bien de plaisirs ! Il s’agirait plutôt du s
2146
elle constitue la publicité. Mais il s’agit bien
de
plaisirs ! Il s’agirait plutôt du seul plaisir de vivre. Que demander
2147
de plaisirs ! Il s’agirait plutôt du seul plaisir
de
vivre. Que demander à un milieu social ? Qu’il vous laisse la franchi
2148
e demander à un milieu social ? Qu’il vous laisse
la
franchise du cœur. Ici, l’on vous aime plus naïvement qu’ailleurs. On
2149
al ? Qu’il vous laisse la franchise du cœur. Ici,
l’
on vous aime plus naïvement qu’ailleurs. On ne vous cache pas, pour de
2150
naïvement qu’ailleurs. On ne vous cache pas, pour
de
ténébreuses habiletés salonnardes, l’intérêt et la sympathie qu’on a
2151
e pas, pour de ténébreuses habiletés salonnardes,
l’
intérêt et la sympathie qu’on a pour vous, ou qu’on n’a pas. Nulle gên
2152
e ténébreuses habiletés salonnardes, l’intérêt et
la
sympathie qu’on a pour vous, ou qu’on n’a pas. Nulle gêne d’aucune so
2153
e qu’on a pour vous, ou qu’on n’a pas. Nulle gêne
d’
aucune sorte. Le confort véritable de vivre, comment le concevoir aill
2154
ous, ou qu’on n’a pas. Nulle gêne d’aucune sorte.
Le
confort véritable de vivre, comment le concevoir ailleurs qu’au sein
2155
. Nulle gêne d’aucune sorte. Le confort véritable
de
vivre, comment le concevoir ailleurs qu’au sein d’une nature qui, san
2156
une sorte. Le confort véritable de vivre, comment
le
concevoir ailleurs qu’au sein d’une nature qui, sans cesse exige de l
2157
urs qu’au sein d’une nature qui, sans cesse exige
de
l’homme la maîtrise et le déploiement de ses instincts ? Ici, pas d’a
2158
qu’au sein d’une nature qui, sans cesse exige de
l’
homme la maîtrise et le déploiement de ses instincts ? Ici, pas d’autr
2159
ein d’une nature qui, sans cesse exige de l’homme
la
maîtrise et le déploiement de ses instincts ? Ici, pas d’autres empêc
2160
e qui, sans cesse exige de l’homme la maîtrise et
le
déploiement de ses instincts ? Ici, pas d’autres empêchements que ceu
2161
se exige de l’homme la maîtrise et le déploiement
de
ses instincts ? Ici, pas d’autres empêchements que ceux-là justement
2162
ments que ceux-là justement qui donnent sa raison
d’
être au labeur des journées. Nous voici délivrés de la grande bourgeoi
2163
’être au labeur des journées. Nous voici délivrés
de
la grande bourgeoisie, de ces gens qui croient devoir, ou se devoir.
2164
re au labeur des journées. Nous voici délivrés de
la
grande bourgeoisie, de ces gens qui croient devoir, ou se devoir. De
2165
es. Nous voici délivrés de la grande bourgeoisie,
de
ces gens qui croient devoir, ou se devoir. De ces gens grossièrement
2166
ie, de ces gens qui croient devoir, ou se devoir.
De
ces gens grossièrement distingués qui ne vous ont pas vu, qui détourn
2167
distingués qui ne vous ont pas vu, qui détournent
la
tête avec une expression méprisable de gêne et de morgue. Et dire que
2168
détournent la tête avec une expression méprisable
de
gêne et de morgue. Et dire que ce sont ces gens-là — cette tourbe — q
2169
la tête avec une expression méprisable de gêne et
de
morgue. Et dire que ce sont ces gens-là — cette tourbe — qui se perme
2170
nt ces gens-là — cette tourbe — qui se permettent
de
juger la noblesse terrienne. Dire que ce sont ces bourgeois-là, basse
2171
ns-là — cette tourbe — qui se permettent de juger
la
noblesse terrienne. Dire que ce sont ces bourgeois-là, bassement inca
2172
ue ce sont ces bourgeois-là, bassement incapables
de
brutalité ou d’orgueil physiques, en revanche hérissés de vanités mor
2173
ourgeois-là, bassement incapables de brutalité ou
d’
orgueil physiques, en revanche hérissés de vanités morales et de provo
2174
lité ou d’orgueil physiques, en revanche hérissés
de
vanités morales et de provocantes civilités, qui viennent vous dire,
2175
iques, en revanche hérissés de vanités morales et
de
provocantes civilités, qui viennent vous dire, entre deux bridges, qu
2176
, qui viennent vous dire, entre deux bridges, que
les
« terreux » sont démodés. Bien joli quand ils ne leur reprochent pas
2177
modés. Bien joli quand ils ne leur reprochent pas
d’
ignorer Proust. Mais quoi, je ne défendrai pas les junkers, dont le no
2178
d’ignorer Proust. Mais quoi, je ne défendrai pas
les
junkers, dont le nom seul est une injure dans tant de bouches, — une
2179
Mais quoi, je ne défendrai pas les junkers, dont
le
nom seul est une injure dans tant de bouches, — une injure dans le vi
2180
ne injure dans tant de bouches, — une injure dans
le
vide, d’ailleurs, car ceux qui l’utilisent ignorent ce qu’elle désign
2181
une injure dans le vide, d’ailleurs, car ceux qui
l’
utilisent ignorent ce qu’elle désigne12. Un tel milieu ne sollicite gu
2182
’elle désigne12. Un tel milieu ne sollicite guère
de
l’étranger je ne sais quelle admiration sentimentale ou esthétique. Q
2183
le désigne12. Un tel milieu ne sollicite guère de
l’
étranger je ne sais quelle admiration sentimentale ou esthétique. Que
2184
tion sentimentale ou esthétique. Que feraient-ils
de
mes éloges, même sincères ? Ils n’ont jamais mis en question la néces
2185
même sincères ? Ils n’ont jamais mis en question
la
nécessité de leur genre de vie, et verraient une sorte d’inconvenance
2186
s ? Ils n’ont jamais mis en question la nécessité
de
leur genre de vie, et verraient une sorte d’inconvenance dans l’appro
2187
jamais mis en question la nécessité de leur genre
de
vie, et verraient une sorte d’inconvenance dans l’approbation que je
2188
sité de leur genre de vie, et verraient une sorte
d’
inconvenance dans l’approbation que je pourrais leur en témoigner. Bon
2189
e vie, et verraient une sorte d’inconvenance dans
l’
approbation que je pourrais leur en témoigner. Bon pour les gens des v
2190
ation que je pourrais leur en témoigner. Bon pour
les
gens des villes, toujours inquiets, toujours doutant de leurs raisons
2191
s des villes, toujours inquiets, toujours doutant
de
leurs raisons d’être et de leur actualité, de quêter chez autrui des
2192
jours inquiets, toujours doutant de leurs raisons
d’
être et de leur actualité, de quêter chez autrui des confirmations, de
2193
iets, toujours doutant de leurs raisons d’être et
de
leur actualité, de quêter chez autrui des confirmations, des flatteri
2194
ant de leurs raisons d’être et de leur actualité,
de
quêter chez autrui des confirmations, des flatteries, toutes choses q
2195
ons, des flatteries, toutes choses qui impliquent
la
possibilité d’un doute. Il n’y a d’aristocratie qu’inévitable. On pou
2196
ries, toutes choses qui impliquent la possibilité
d’
un doute. Il n’y a d’aristocratie qu’inévitable. On pourrait dire : de
2197
ui impliquent la possibilité d’un doute. Il n’y a
d’
aristocratie qu’inévitable. On pourrait dire : de droit divin, c’est e
2198
d’aristocratie qu’inévitable. On pourrait dire :
de
droit divin, c’est encore à dire : du droit des choses telles que Die
2199
core à dire : du droit des choses telles que Dieu
les
a créées. Aristocratie de l’être et de la fonction, non de la considé
2200
choses telles que Dieu les a créées. Aristocratie
de
l’être et de la fonction, non de la considération. Et tout le reste d
2201
ses telles que Dieu les a créées. Aristocratie de
l’
être et de la fonction, non de la considération. Et tout le reste de l
2202
que Dieu les a créées. Aristocratie de l’être et
de
la fonction, non de la considération. Et tout le reste de l’Europe bo
2203
e Dieu les a créées. Aristocratie de l’être et de
la
fonction, non de la considération. Et tout le reste de l’Europe bourg
2204
es. Aristocratie de l’être et de la fonction, non
de
la considération. Et tout le reste de l’Europe bourgeoise fait nouvea
2205
Aristocratie de l’être et de la fonction, non de
la
considération. Et tout le reste de l’Europe bourgeoise fait nouveau r
2206
de la fonction, non de la considération. Et tout
le
reste de l’Europe bourgeoise fait nouveau riche, en regard de cette s
2207
nction, non de la considération. Et tout le reste
de
l’Europe bourgeoise fait nouveau riche, en regard de cette seule clas
2208
ion, non de la considération. Et tout le reste de
l’
Europe bourgeoise fait nouveau riche, en regard de cette seule classe
2209
n regard de cette seule classe qui ne doit rien à
l’
opinion. Non, je ne peux rien voir dans la « féodalité » de ces junker
2210
rien à l’opinion. Non, je ne peux rien voir dans
la
« féodalité » de ces junkers, qui soit plus répugnant pour notre huma
2211
. Non, je ne peux rien voir dans la « féodalité »
de
ces junkers, qui soit plus répugnant pour notre humanité que tant de
2212
ur notre humanité que tant de systèmes prônés par
les
partisans du progrès, — le taylorisme par exemple. J’y vois, au contr
2213
e systèmes prônés par les partisans du progrès, —
le
taylorisme par exemple. J’y vois, au contraire, des avantages « humai
2214
ains » peu contestables : des rapports personnels
de
maître à serviteur, des rapports personnels de l’homme à la nature so
2215
ls de maître à serviteur, des rapports personnels
de
l’homme à la nature sous toutes ses formes, animales, végétales, dome
2216
de maître à serviteur, des rapports personnels de
l’
homme à la nature sous toutes ses formes, animales, végétales, domesti
2217
à serviteur, des rapports personnels de l’homme à
la
nature sous toutes ses formes, animales, végétales, domestiquées ou c
2218
Je suis scandalisé quand je vois se croiser dans
la
rue sans se connaître un patron d’usine et l’un de ses mécanos. Ou en
2219
e croiser dans la rue sans se connaître un patron
d’
usine et l’un de ses mécanos. Ou encore, quand le patron salue avec ce
2220
a rue sans se connaître un patron d’usine et l’un
de
ses mécanos. Ou encore, quand le patron salue avec ce mélange de haut
2221
d’usine et l’un de ses mécanos. Ou encore, quand
le
patron salue avec ce mélange de hauteur, de méfiance et de gêne auque
2222
Ou encore, quand le patron salue avec ce mélange
de
hauteur, de méfiance et de gêne auquel répond chez l’inférieur un mél
2223
quand le patron salue avec ce mélange de hauteur,
de
méfiance et de gêne auquel répond chez l’inférieur un mélange de crai
2224
salue avec ce mélange de hauteur, de méfiance et
de
gêne auquel répond chez l’inférieur un mélange de crainte, de colère
2225
auteur, de méfiance et de gêne auquel répond chez
l’
inférieur un mélange de crainte, de colère et de gêne guère moins igno
2226
de gêne auquel répond chez l’inférieur un mélange
de
crainte, de colère et de gêne guère moins ignoble. Mais je ne suis pa
2227
el répond chez l’inférieur un mélange de crainte,
de
colère et de gêne guère moins ignoble. Mais je ne suis pas scandalisé
2228
z l’inférieur un mélange de crainte, de colère et
de
gêne guère moins ignoble. Mais je ne suis pas scandalisé quand le bur
2229
ins ignoble. Mais je ne suis pas scandalisé quand
le
burgrave salue cordialement et franchement des paysans qui s’inclinen
2230
i s’inclinent sans contrainte. Est-ce là dire que
le
« retour » à tel état soit souhaitable ? La question me paraît, au co
2231
e que le « retour » à tel état soit souhaitable ?
La
question me paraît, au concret, dépourvue de sens. Mais au nom de la
2232
le ? La question me paraît, au concret, dépourvue
de
sens. Mais au nom de la dignité humaine, je demande que les journalis
2233
ît, au concret, dépourvue de sens. Mais au nom de
la
dignité humaine, je demande que les journalistes cessent de déverser
2234
Mais au nom de la dignité humaine, je demande que
les
journalistes cessent de déverser sur une classe qu’ils ne peuvent con
2235
humaine, je demande que les journalistes cessent
de
déverser sur une classe qu’ils ne peuvent connaître une haine convent
2236
onnelle et bassement démagogique. C’est ainsi que
les
frères Tharaud dénonçaient récemment encore, dans un grand quotidien
2237
nçaient récemment encore, dans un grand quotidien
de
Paris, ces junkers qui, d’après eux, constituent la fraction d’humani
2238
Paris, ces junkers qui, d’après eux, constituent
la
fraction d’humanité la plus dangereuse pour la paix du monde. Quoi !
2239
junkers qui, d’après eux, constituent la fraction
d’
humanité la plus dangereuse pour la paix du monde. Quoi ! cette centai
2240
, d’après eux, constituent la fraction d’humanité
la
plus dangereuse pour la paix du monde. Quoi ! cette centaine de famil
2241
nt la fraction d’humanité la plus dangereuse pour
la
paix du monde. Quoi ! cette centaine de familles écartées du pouvoir
2242
euse pour la paix du monde. Quoi ! cette centaine
de
familles écartées du pouvoir dans leur propre patrie depuis la chute
2243
cartées du pouvoir dans leur propre patrie depuis
la
chute de Bismarck, coupées de tous liens politiques avec une Europe b
2244
u pouvoir dans leur propre patrie depuis la chute
de
Bismarck, coupées de tous liens politiques avec une Europe bourgeoise
2245
ropre patrie depuis la chute de Bismarck, coupées
de
tous liens politiques avec une Europe bourgeoise, résignée à « laisse
2246
eur — cette race désarmée qui ne subsiste que par
la
force d’une vertu sans égale, sans espoir —, péril pour le monde ! Fa
2247
te race désarmée qui ne subsiste que par la force
d’
une vertu sans égale, sans espoir —, péril pour le monde ! Fable énorm
2248
d’une vertu sans égale, sans espoir —, péril pour
le
monde ! Fable énorme et qui étonne de la part d’écrivains d’ordinaire
2249
Fable énorme et qui étonne de la part d’écrivains
d’
ordinaire consciencieux. Les canons de Shanghai, qui rapportèrent tant
2250
de la part d’écrivains d’ordinaire consciencieux.
Les
canons de Shanghai, qui rapportèrent tant d’argent aux propriétaires
2251
d’écrivains d’ordinaire consciencieux. Les canons
de
Shanghai, qui rapportèrent tant d’argent aux propriétaires de la pres
2252
ux. Les canons de Shanghai, qui rapportèrent tant
d’
argent aux propriétaires de la presse qui publie ces articles, me para
2253
qui rapportèrent tant d’argent aux propriétaires
de
la presse qui publie ces articles, me paraissaient en ce temps-là plu
2254
i rapportèrent tant d’argent aux propriétaires de
la
presse qui publie ces articles, me paraissaient en ce temps-là plus i
2255
paraissaient en ce temps-là plus inquiétants que
le
fusil de chasse de mes hôtes prussiens. Quant à savoir si cette class
2256
ient en ce temps-là plus inquiétants que le fusil
de
chasse de mes hôtes prussiens. Quant à savoir si cette classe justifi
2257
temps-là plus inquiétants que le fusil de chasse
de
mes hôtes prussiens. Quant à savoir si cette classe justifie sa fonct
2258
savoir si cette classe justifie sa fonction dans
le
monde actuel, je répondrai que cela dépend après tout des possibilité
2259
t des possibilités qu’on lui en laisse. On, c’est
le
pouvoir. Or, le pouvoir se fait de plus en plus l’instrument des foli
2260
és qu’on lui en laisse. On, c’est le pouvoir. Or,
le
pouvoir se fait de plus en plus l’instrument des folies citadines. C’
2261
e pouvoir. Or, le pouvoir se fait de plus en plus
l’
instrument des folies citadines. C’est dans les villes qu’on parle des
2262
lus l’instrument des folies citadines. C’est dans
les
villes qu’on parle des temps nouveaux. Et l’on voit bien pourquoi les
2263
ans les villes qu’on parle des temps nouveaux. Et
l’
on voit bien pourquoi les intellectuels, les ouvriers, les exploités o
2264
le des temps nouveaux. Et l’on voit bien pourquoi
les
intellectuels, les ouvriers, les exploités ont besoin de tels mythes.
2265
ux. Et l’on voit bien pourquoi les intellectuels,
les
ouvriers, les exploités ont besoin de tels mythes. Mais au regard de
2266
it bien pourquoi les intellectuels, les ouvriers,
les
exploités ont besoin de tels mythes. Mais au regard de la nature, cel
2267
llectuels, les ouvriers, les exploités ont besoin
de
tels mythes. Mais au regard de la nature, cela n’a point de sens. Ou
2268
ités ont besoin de tels mythes. Mais au regard de
la
nature, cela n’a point de sens. Ou bien alors : cela désigne une nou
2269
thes. Mais au regard de la nature, cela n’a point
de
sens. Ou bien alors : cela désigne une nouvelle répartition des terr
2270
une nouvelle répartition des terres. Question que
la
nature du sol résoudra seule durablement. Les landes de la Prusse-Ori
2271
que la nature du sol résoudra seule durablement.
Les
landes de la Prusse-Orientale sont très irrégulièrement fertiles ; se
2272
ure du sol résoudra seule durablement. Les landes
de
la Prusse-Orientale sont très irrégulièrement fertiles ; seules les g
2273
du sol résoudra seule durablement. Les landes de
la
Prusse-Orientale sont très irrégulièrement fertiles ; seules les gran
2274
ntale sont très irrégulièrement fertiles ; seules
les
grandes entreprises « tiennent le coup » lors d’une inondation ou d’u
2275
tiles ; seules les grandes entreprises « tiennent
le
coup » lors d’une inondation ou d’une sécheresse partielle. J’ai vu s
2276
les grandes entreprises « tiennent le coup » lors
d’
une inondation ou d’une sécheresse partielle. J’ai vu sur les terres d
2277
ses « tiennent le coup » lors d’une inondation ou
d’
une sécheresse partielle. J’ai vu sur les terres de Waldburg un villag
2278
dation ou d’une sécheresse partielle. J’ai vu sur
les
terres de Waldburg un village que le burgrave a de son propre chef «
2279
’une sécheresse partielle. J’ai vu sur les terres
de
Waldburg un village que le burgrave a de son propre chef « libéré ».
2280
J’ai vu sur les terres de Waldburg un village que
le
burgrave a de son propre chef « libéré ». C’est de tous le plus misér
2281
s terres de Waldburg un village que le burgrave a
de
son propre chef « libéré ». C’est de tous le plus misérable. Le morce
2282
e burgrave a de son propre chef « libéré ». C’est
de
tous le plus misérable. Le morcellement des terres, le stade démocrat
2283
ve a de son propre chef « libéré ». C’est de tous
le
plus misérable. Le morcellement des terres, le stade démocratique, es
2284
chef « libéré ». C’est de tous le plus misérable.
Le
morcellement des terres, le stade démocratique, est ici plus visiblem
2285
us le plus misérable. Le morcellement des terres,
le
stade démocratique, est ici plus visiblement qu’ailleurs une utopie.
2286
us visiblement qu’ailleurs une utopie. Impossible
de
passer du latifundium au pavillon de banlieue. Au « majorat » succéde
2287
. Impossible de passer du latifundium au pavillon
de
banlieue. Au « majorat » succédera sans doute un organisme du type de
2288
s son ensemble, reste étrangère au capital. Comme
les
autres ils ont été ruinés par la guerre, c’est-à-dire qu’ils n’ont pl
2289
capital. Comme les autres ils ont été ruinés par
la
guerre, c’est-à-dire qu’ils n’ont plus de monnaie : cela n’a rien cha
2290
nés par la guerre, c’est-à-dire qu’ils n’ont plus
de
monnaie : cela n’a rien changé à l’organisation de leur vie sociale.
2291
ls n’ont plus de monnaie : cela n’a rien changé à
l’
organisation de leur vie sociale. Ils vivent en paysans de leurs produ
2292
e monnaie : cela n’a rien changé à l’organisation
de
leur vie sociale. Ils vivent en paysans de leurs produits. Ils consom
2293
sation de leur vie sociale. Ils vivent en paysans
de
leurs produits. Ils consomment fort peu d’idéologies importées. Les c
2294
aysans de leurs produits. Ils consomment fort peu
d’
idéologies importées. Les cadets de famille, ceux qu’on envoyait à l’a
2295
. Ils consomment fort peu d’idéologies importées.
Les
cadets de famille, ceux qu’on envoyait à l’armée, font parfois de la
2296
mment fort peu d’idéologies importées. Les cadets
de
famille, ceux qu’on envoyait à l’armée, font parfois de la politique
2297
ées. Les cadets de famille, ceux qu’on envoyait à
l’
armée, font parfois de la politique : Hitler essaie de les flatterb ma
2298
ille, ceux qu’on envoyait à l’armée, font parfois
de
la politique : Hitler essaie de les flatterb mais ne vainc pas souven
2299
e, ceux qu’on envoyait à l’armée, font parfois de
la
politique : Hitler essaie de les flatterb mais ne vainc pas souvent l
2300
mée, font parfois de la politique : Hitler essaie
de
les flatterb mais ne vainc pas souvent leurs méfiances. Certains se s
2301
, font parfois de la politique : Hitler essaie de
les
flatterb mais ne vainc pas souvent leurs méfiances. Certains se sont
2302
ces. Certains se sont faits communistes, par goût
de
l’énergie peut-être. J’ai vu des membres d’un parti national-marxiste
2303
. Certains se sont faits communistes, par goût de
l’
énergie peut-être. J’ai vu des membres d’un parti national-marxiste do
2304
goût de l’énergie peut-être. J’ai vu des membres
d’
un parti national-marxiste dont le rêve est de restaurer la Prusse du
2305
vu des membres d’un parti national-marxiste dont
le
rêve est de restaurer la Prusse du grand Frédéric par les méthodes de
2306
res d’un parti national-marxiste dont le rêve est
de
restaurer la Prusse du grand Frédéric par les méthodes de Lénine… Rac
2307
i national-marxiste dont le rêve est de restaurer
la
Prusse du grand Frédéric par les méthodes de Lénine… Race de colonisa
2308
est de restaurer la Prusse du grand Frédéric par
les
méthodes de Lénine… Race de colonisateurs, dominant sur ces marches d
2309
urer la Prusse du grand Frédéric par les méthodes
de
Lénine… Race de colonisateurs, dominant sur ces marches de l’Europe d
2310
u grand Frédéric par les méthodes de Lénine… Race
de
colonisateurs, dominant sur ces marches de l’Europe depuis des siècle
2311
… Race de colonisateurs, dominant sur ces marches
de
l’Europe depuis des siècles, mais séculairement menacés par l’Asie :
2312
ace de colonisateurs, dominant sur ces marches de
l’
Europe depuis des siècles, mais séculairement menacés par l’Asie : ils
2313
epuis des siècles, mais séculairement menacés par
l’
Asie : ils lui résistent par leur pauvreté. Les magnats de Hongrie son
2314
par l’Asie : ils lui résistent par leur pauvreté.
Les
magnats de Hongrie sont déjà des pachas, et l’Occident ne peut rien e
2315
ils lui résistent par leur pauvreté. Les magnats
de
Hongrie sont déjà des pachas, et l’Occident ne peut rien en attendre,
2316
. Les magnats de Hongrie sont déjà des pachas, et
l’
Occident ne peut rien en attendre, qu’un corps de janissaires tout au
2317
l’Occident ne peut rien en attendre, qu’un corps
de
janissaires tout au plus. Mais ces hommes durs, silencieux, servants
2318
rs, silencieux, servants des terres conquises par
les
chevaliers teutoniques, qui sait s’ils n’auront pas demain leur comma
2319
mandement dans cet Ordre du Sacrifice auquel rêve
l’
Europe, qu’elle redoute encore, mais qui forge sa loi au secret de son
2320
e redoute encore, mais qui forge sa loi au secret
de
son désespoir… Bastions de l’Occident ? — Duquel ? Ou bien race liée
2321
forge sa loi au secret de son désespoir… Bastions
de
l’Occident ? — Duquel ? Ou bien race liée au seul goût de sa puissanc
2322
ge sa loi au secret de son désespoir… Bastions de
l’
Occident ? — Duquel ? Ou bien race liée au seul goût de sa puissance ?
2323
ident ? — Duquel ? Ou bien race liée au seul goût
de
sa puissance ? Il y a plus qu’un passé d’héroïsme dans ces châteaux p
2324
ul goût de sa puissance ? Il y a plus qu’un passé
d’
héroïsme dans ces châteaux perdus, dans ce Waldburg gardien de quels s
2325
ans ces châteaux perdus, dans ce Waldburg gardien
de
quels secrets longuement, lentement fortifiés… La nuit, les moustique
2326
de quels secrets longuement, lentement fortifiés…
La
nuit, les moustiques tissent une rumeur dans l’obscurité profonde. De
2327
secrets longuement, lentement fortifiés… La nuit,
les
moustiques tissent une rumeur dans l’obscurité profonde. Des cris de
2328
… La nuit, les moustiques tissent une rumeur dans
l’
obscurité profonde. Des cris de chouettes se poursuivent, s’éloignent,
2329
nt une rumeur dans l’obscurité profonde. Des cris
de
chouettes se poursuivent, s’éloignent, reprennent tout proches. Les é
2330
oursuivent, s’éloignent, reprennent tout proches.
Les
élans dorment agenouillés, aussi hauts que les jeunes arbres de la la
2331
s. Les élans dorment agenouillés, aussi hauts que
les
jeunes arbres de la lande. Et la mer respire fort contre les grèves,
2332
nt agenouillés, aussi hauts que les jeunes arbres
de
la lande. Et la mer respire fort contre les grèves, soulagée de la pe
2333
agenouillés, aussi hauts que les jeunes arbres de
la
lande. Et la mer respire fort contre les grèves, soulagée de la pesan
2334
aussi hauts que les jeunes arbres de la lande. Et
la
mer respire fort contre les grèves, soulagée de la pesante lumière. M
2335
arbres de la lande. Et la mer respire fort contre
les
grèves, soulagée de la pesante lumière. Mais dans cette chambre élevé
2336
t la mer respire fort contre les grèves, soulagée
de
la pesante lumière. Mais dans cette chambre élevée du château, l’air
2337
a mer respire fort contre les grèves, soulagée de
la
pesante lumière. Mais dans cette chambre élevée du château, l’air dem
2338
mière. Mais dans cette chambre élevée du château,
l’
air demeure étouffant et parfois l’odeur des étangs vient se mêler à c
2339
ée du château, l’air demeure étouffant et parfois
l’
odeur des étangs vient se mêler à celle des vieilles boiseries. Envelo
2340
e mêler à celle des vieilles boiseries. Enveloppé
de
gaze je sors sur mon balcon, je me penche sur le parc incertain. Palp
2341
de gaze je sors sur mon balcon, je me penche sur
le
parc incertain. Palpitation lointaine et animale du silence. Le long
2342
ation lointaine et animale du silence. Le long de
la
crête des forêts, une rougissante lueur avance de l’Occident vers l’O
2343
la crête des forêts, une rougissante lueur avance
de
l’Occident vers l’Orient. 1927c. En 1945, tous les châteaux de la Pru
2344
crête des forêts, une rougissante lueur avance de
l’
Occident vers l’Orient. 1927c. En 1945, tous les châteaux de la Prusse
2345
, une rougissante lueur avance de l’Occident vers
l’
Orient. 1927c. En 1945, tous les châteaux de la Prusse-Orientale ont é
2346
de l’Occident vers l’Orient. 1927c. En 1945, tous
les
châteaux de la Prusse-Orientale ont été rasés par les Russes, sous pr
2347
vers l’Orient. 1927c. En 1945, tous les châteaux
de
la Prusse-Orientale ont été rasés par les Russes, sous prétexte de co
2348
rs l’Orient. 1927c. En 1945, tous les châteaux de
la
Prusse-Orientale ont été rasés par les Russes, sous prétexte de commu
2349
châteaux de la Prusse-Orientale ont été rasés par
les
Russes, sous prétexte de communisme. Personne n’a dénoncé ce crime, n
2350
ce crime, nul n’en ayant tiré profit. 11. Bras
de
mer intérieur qui s’avance jusqu’à Königsberg. 12. Je m’étonne d’avo
2351
qui s’avance jusqu’à Königsberg. 12. Je m’étonne
d’
avoir commis moi-même une erreur moins pardonnable que celle que je dé
2352
désigner qu’un propriétaire terrien, un hobereau
de
petite ou de nulle noblesse, pas un instant les grandes familles de l
2353
un propriétaire terrien, un hobereau de petite ou
de
nulle noblesse, pas un instant les grandes familles de la « noblesse
2354
au de petite ou de nulle noblesse, pas un instant
les
grandes familles de la « noblesse primitive » (Uradel) d’avant 1350 s
2355
lle noblesse, pas un instant les grandes familles
de
la « noblesse primitive » (Uradel) d’avant 1350 selon le Gotha. a. L
2356
noblesse, pas un instant les grandes familles de
la
« noblesse primitive » (Uradel) d’avant 1350 selon le Gotha. a. La v
2357
es familles de la « noblesse primitive » (Uradel)
d’
avant 1350 selon le Gotha. a. La version parue en 1968 dans le Journa
2358
noblesse primitive » (Uradel) d’avant 1350 selon
le
Gotha. a. La version parue en 1968 dans le Journal d’une époque, sur
2359
itive » (Uradel) d’avant 1350 selon le Gotha. a.
La
version parue en 1968 dans le Journal d’une époque, sur laquelle se f
2360
selon le Gotha. a. La version parue en 1968 dans
le
Journal d’une époque, sur laquelle se fonde pour l’essentiel cette pu
2361
tha. a. La version parue en 1968 dans le Journal
d’
une époque, sur laquelle se fonde pour l’essentiel cette publication,
2362
Journal d’une époque, sur laquelle se fonde pour
l’
essentiel cette publication, termine ainsi la phrase : « Cruauté franc
2363
pour l’essentiel cette publication, termine ainsi
la
phrase : « Cruauté franche est signe de santé, dirait Nietzsche ». No
2364
ine ainsi la phrase : « Cruauté franche est signe
de
santé, dirait Nietzsche ». Nous signalons l’écart, probablement une v
2365
igne de santé, dirait Nietzsche ». Nous signalons
l’
écart, probablement une volonté de l’auteur pour la présente édition.
2366
Nous signalons l’écart, probablement une volonté
de
l’auteur pour la présente édition. b. La version parue en 1968 dans
2367
us signalons l’écart, probablement une volonté de
l’
auteur pour la présente édition. b. La version parue en 1968 dans le
2368
’écart, probablement une volonté de l’auteur pour
la
présente édition. b. La version parue en 1968 dans le Journal d’une
2369
olonté de l’auteur pour la présente édition. b.
La
version parue en 1968 dans le Journal d’une époque indique : « Le mou
2370
sente édition. b. La version parue en 1968 dans
le
Journal d’une époque indique : « Le mouvement national-socialiste les
2371
on. b. La version parue en 1968 dans le Journal
d’
une époque indique : « Le mouvement national-socialiste les flatte ».
2372
en 1968 dans le Journal d’une époque indique : «
Le
mouvement national-socialiste les flatte ». La version du Paysan du D
2373
oque indique : « Le mouvement national-socialiste
les
flatte ». La version du Paysan du Danube indique quant à elle : « Hit
2374
« Le mouvement national-socialiste les flatte ».
La
version du Paysan du Danube indique quant à elle : « Hitler les flatt
2375
Paysan du Danube indique quant à elle : « Hitler
les
flatte ». Nous signalons l’écart, probablement une volonté de l’auteu
2376
nt à elle : « Hitler les flatte ». Nous signalons
l’
écart, probablement une volonté de l’auteur pour la présente édition.
2377
Nous signalons l’écart, probablement une volonté
de
l’auteur pour la présente édition. c. La version parue en 1968 dans
2378
us signalons l’écart, probablement une volonté de
l’
auteur pour la présente édition. c. La version parue en 1968 dans le
2379
’écart, probablement une volonté de l’auteur pour
la
présente édition. c. La version parue en 1968 dans le Journal d’une
2380
volonté de l’auteur pour la présente édition. c.
La
version parue en 1968 dans le Journal d’une époque indique « 1926 ».
2381
ésente édition. c. La version parue en 1968 dans
le
Journal d’une époque indique « 1926 ». Nous signalons l’écart, probab
2382
ion. c. La version parue en 1968 dans le Journal
d’
une époque indique « 1926 ». Nous signalons l’écart, probablement une
2383
nal d’une époque indique « 1926 ». Nous signalons
l’
écart, probablement une volonté de l’auteur pour la présente édition.
2384
Nous signalons l’écart, probablement une volonté
de
l’auteur pour la présente édition.
2385
us signalons l’écart, probablement une volonté de
l’
auteur pour la présente édition.
2386
’écart, probablement une volonté de l’auteur pour
la
présente édition.
2387
La
tour de Hölderlin « Je lui ai raconté qu’il habite une chaumière au
2388
La tour
de
Hölderlin « Je lui ai raconté qu’il habite une chaumière au bord d’
2389
e une chaumière au bord d’un ruisseau, qu’il dort
les
portes ouvertes, et pendant des heures récite des odes grecques au mu
2390
nt des heures récite des odes grecques au murmure
de
l’eau ; la princesse de Homburg lui a fait cadeau d’un piano dont il
2391
des heures récite des odes grecques au murmure de
l’
eau ; la princesse de Homburg lui a fait cadeau d’un piano dont il a c
2392
es récite des odes grecques au murmure de l’eau ;
la
princesse de Homburg lui a fait cadeau d’un piano dont il a coupé les
2393
l’eau ; la princesse de Homburg lui a fait cadeau
d’
un piano dont il a coupé les cordes, mais pas toutes, en sorte que plu
2394
burg lui a fait cadeau d’un piano dont il a coupé
les
cordes, mais pas toutes, en sorte que plusieurs touches sonnent encor
2395
lettre sur Hölderlin : « Ce piano dont il a cassé
les
cordes, c’est vraiment l’image de son âme ; j’ai voulu attirer là-des
2396
piano dont il a cassé les cordes, c’est vraiment
l’
image de son âme ; j’ai voulu attirer là-dessus l’attention du médecin
2397
ont il a cassé les cordes, c’est vraiment l’image
de
son âme ; j’ai voulu attirer là-dessus l’attention du médecin, mais i
2398
l’image de son âme ; j’ai voulu attirer là-dessus
l’
attention du médecin, mais il est plus difficile de se faire comprendr
2399
’attention du médecin, mais il est plus difficile
de
se faire comprendre par un sot que par un fou. » L’hiver dernier, m’o
2400
se faire comprendre par un sot que par un fou. »
L’
hiver dernier, m’occupant assez longuement d’un des poètes auxquels no
2401
u. » L’hiver dernier, m’occupant assez longuement
d’
un des poètes auxquels notre temps doit vouer l’attention la plus grav
2402
t d’un des poètes auxquels notre temps doit vouer
l’
attention la plus grave — car il vécut dans ces marches de l’esprit hu
2403
oètes auxquels notre temps doit vouer l’attention
la
plus grave — car il vécut dans ces marches de l’esprit humain qui con
2404
ion la plus grave — car il vécut dans ces marches
de
l’esprit humain qui confinent peut-être à l’Esprit et dont certains d
2405
la plus grave — car il vécut dans ces marches de
l’
esprit humain qui confinent peut-être à l’Esprit et dont certains des
2406
ches de l’esprit humain qui confinent peut-être à
l’
Esprit et dont certains des plus purs d’entre nous ont voulu tenter le
2407
tains des plus purs d’entre nous ont voulu tenter
le
climat, — j’avais rêvé sur ce passage de l’émouvante Bettina, rêvé sa
2408
u tenter le climat, — j’avais rêvé sur ce passage
de
l’émouvante Bettina, rêvé sans doute assez profondément pour qu’aujou
2409
enter le climat, — j’avais rêvé sur ce passage de
l’
émouvante Bettina, rêvé sans doute assez profondément pour qu’aujourd’
2410
sans doute assez profondément pour qu’aujourd’hui
le
hasard qui m’amène à Tubingue ne soit pas seulement un hasard… Hier,
2411
ue ne soit pas seulement un hasard… Hier, c’était
la
Pentecôte. La fête de la plus haute poésie. Mais dans ce siècle, où t
2412
seulement un hasard… Hier, c’était la Pentecôte.
La
fête de la plus haute poésie. Mais dans ce siècle, où tant de voix l’
2413
nt un hasard… Hier, c’était la Pentecôte. La fête
de
la plus haute poésie. Mais dans ce siècle, où tant de voix l’appellen
2414
un hasard… Hier, c’était la Pentecôte. La fête de
la
plus haute poésie. Mais dans ce siècle, où tant de voix l’appellent,
2415
aute poésie. Mais dans ce siècle, où tant de voix
l’
appellent, combien sont dignes de s’attendre au don du langage sacré ?
2416
où tant de voix l’appellent, combien sont dignes
de
s’attendre au don du langage sacré ? Cette langue de feu qui s’est po
2417
s’attendre au don du langage sacré ? Cette langue
de
feu qui s’est posée sur Hölderlin et qui l’a consumé… Digne ? — Un ad
2418
angue de feu qui s’est posée sur Hölderlin et qui
l’
a consumé… Digne ? — Un adolescent au visage de jeune fille qui rimait
2419
ui l’a consumé… Digne ? — Un adolescent au visage
de
jeune fille qui rimait sagement des odes à la liberté… Et voici dans
2420
age de jeune fille qui rimait sagement des odes à
la
liberté… Et voici dans sa vie cette double venue de l’amour et du cha
2421
berté… Et voici dans sa vie cette double venue de
l’
amour et du chant prophétique, confondant leurs flammes. Dix années da
2422
étique, confondant leurs flammes. Dix années dans
le
Grand Jeu. Dix années où le génie tourmente cet être faible, humilié
2423
mmes. Dix années dans le Grand Jeu. Dix années où
le
génie tourmente cet être faible, humilié par le monde. L’amour s’éloi
2424
ù le génie tourmente cet être faible, humilié par
le
monde. L’amour s’éloigne le premier, quand Hölderlin doit quitter la
2425
tourmente cet être faible, humilié par le monde.
L’
amour s’éloigne le premier, quand Hölderlin doit quitter la maison de
2426
’éloigne le premier, quand Hölderlin doit quitter
la
maison de Mme Gontard14, déchirement à peine sensible dans son œuvre.
2427
e premier, quand Hölderlin doit quitter la maison
de
Mme Gontard14, déchirement à peine sensible dans son œuvre. Car ce po
2428
dans son œuvre. Car ce poète n’est peut-être que
le
lieu de sa poésie, — d’une poésie, l’on dirait, qui ne connaît pas so
2429
n œuvre. Car ce poète n’est peut-être que le lieu
de
sa poésie, — d’une poésie, l’on dirait, qui ne connaît pas son auteur
2430
poète n’est peut-être que le lieu de sa poésie, —
d’
une poésie, l’on dirait, qui ne connaît pas son auteur. Qui parle par
2431
ut-être que le lieu de sa poésie, — d’une poésie,
l’
on dirait, qui ne connaît pas son auteur. Qui parle par sa bouche ? Il
2432
ses Hymnes une sérénité presque effrayante. Vient
le
temps où le sens de son monologue entre terre et ciel lui échappe. Il
2433
ne sérénité presque effrayante. Vient le temps où
le
sens de son monologue entre terre et ciel lui échappe. Il jette encor
2434
ité presque effrayante. Vient le temps où le sens
de
son monologue entre terre et ciel lui échappe. Il jette encore quelqu
2435
rappelle — ou bien envoie — un héros — Ou bien —
la
sagesse. » Mais le feu s’éteint — l’esprit souffle où il veut. Juin 1
2436
envoie — un héros — Ou bien — la sagesse. » Mais
le
feu s’éteint — l’esprit souffle où il veut. Juin 1802 : au moment où
2437
— Ou bien — la sagesse. » Mais le feu s’éteint —
l’
esprit souffle où il veut. Juin 1802 : au moment où meurt Diotima, Höl
2438
au moment où meurt Diotima, Hölderlin errant loin
d’
elle (dans la région de Bordeaux croit-on) est frappé d’insolation ; s
2439
meurt Diotima, Hölderlin errant loin d’elle (dans
la
région de Bordeaux croit-on) est frappé d’insolation ; sa folie d’un
2440
ima, Hölderlin errant loin d’elle (dans la région
de
Bordeaux croit-on) est frappé d’insolation ; sa folie d’un coup l’env
2441
(dans la région de Bordeaux croit-on) est frappé
d’
insolation ; sa folie d’un coup l’envahit. C’est une sorte de vieillar
2442
eaux croit-on) est frappé d’insolation ; sa folie
d’
un coup l’envahit. C’est une sorte de vieillard qui reparaît en Allema
2443
-on) est frappé d’insolation ; sa folie d’un coup
l’
envahit. C’est une sorte de vieillard qui reparaît en Allemagne. Et du
2444
n ; sa folie d’un coup l’envahit. C’est une sorte
de
vieillard qui reparaît en Allemagne. Et durant trente années, ce pauv
2445
ente années, ce pauvre corps abandonné vivra dans
la
petite tour de Tubingue, chez un charpentier — vivra très doucement,
2446
pauvre corps abandonné vivra dans la petite tour
de
Tubingue, chez un charpentier — vivra très doucement, inexplicablemen
2447
rès doucement, inexplicablement, une vie monotone
de
vieux maniaque. Le buisson ardent quitté par le feu se dessèche. Ce q
2448
plicablement, une vie monotone de vieux maniaque.
Le
buisson ardent quitté par le feu se dessèche. Ce qui fut Hölderlin si
2449
e de vieux maniaque. Le buisson ardent quitté par
le
feu se dessèche. Ce qui fut Hölderlin signe maintenant Scardanelli de
2450
s qu’il donne aux visiteurs venus pour contempler
la
victime d’un miracle. — C’était l’époque des amateurs de ruines. Je s
2451
ne aux visiteurs venus pour contempler la victime
d’
un miracle. — C’était l’époque des amateurs de ruines. Je suis descend
2452
our contempler la victime d’un miracle. — C’était
l’
époque des amateurs de ruines. Je suis descendu au bord de l’eau, un p
2453
ime d’un miracle. — C’était l’époque des amateurs
de
ruines. Je suis descendu au bord de l’eau, un peu au-dessous de la ma
2454
s amateurs de ruines. Je suis descendu au bord de
l’
eau, un peu au-dessous de la maison, en attendant l’heure d’ouverture.
2455
s descendu au bord de l’eau, un peu au-dessous de
la
maison, en attendant l’heure d’ouverture. Il y a là une station de ca
2456
eau, un peu au-dessous de la maison, en attendant
l’
heure d’ouverture. Il y a là une station de canots de louage où j’ai v
2457
peu au-dessous de la maison, en attendant l’heure
d’
ouverture. Il y a là une station de canots de louage où j’ai vite déco
2458
endant l’heure d’ouverture. Il y a là une station
de
canots de louage où j’ai vite découvert un « Friedrich Hölderlin » à
2459
eure d’ouverture. Il y a là une station de canots
de
louage où j’ai vite découvert un « Friedrich Hölderlin » à côté d’un
2460
vite découvert un « Friedrich Hölderlin » à côté
d’
un « Hypérion ». En cherchant, je trouverais bien aussi un « Nietzsche
2461
tzsche » à fond plat. Des saules se penchent vers
l’
eau lente. Sur l’autre rive qui est celle d’une longue île, des étudia
2462
vers l’eau lente. Sur l’autre rive qui est celle
d’
une longue île, des étudiants au crâne rasé se promènent un roman jaun
2463
iants au crâne rasé se promènent un roman jaune à
la
main. L’un après l’autre, dans cette paresse de jour férié, les cloch
2464
à la main. L’un après l’autre, dans cette paresse
de
jour férié, les clochers de la ville sonnent deux heures. Allons. Un
2465
après l’autre, dans cette paresse de jour férié,
les
clochers de la ville sonnent deux heures. Allons. Un de ces corridors
2466
e, dans cette paresse de jour férié, les clochers
de
la ville sonnent deux heures. Allons. Un de ces corridors de vieille
2467
dans cette paresse de jour férié, les clochers de
la
ville sonnent deux heures. Allons. Un de ces corridors de vieille mai
2468
chers de la ville sonnent deux heures. Allons. Un
de
ces corridors de vieille maison souabe, hauts et sombres, qui paraîtr
2469
sonnent deux heures. Allons. Un de ces corridors
de
vieille maison souabe, hauts et sombres, qui paraîtraient immenses s’
2470
traient immenses s’ils n’étaient à demi encombrés
d’
armoires. Un couloir, la chambre. L’homme qui me conduit est le propri
2471
’étaient à demi encombrés d’armoires. Un couloir,
la
chambre. L’homme qui me conduit est le propriétaire. « Monsieur conna
2472
emi encombrés d’armoires. Un couloir, la chambre.
L’
homme qui me conduit est le propriétaire. « Monsieur connaît Hölderlin
2473
n couloir, la chambre. L’homme qui me conduit est
le
propriétaire. « Monsieur connaît Hölderlin ? questionne-t-il, méfiant
2474
? — (et comme je considère un ravissant médaillon
de
marbre) — Ça, c’est Diotima ». On rougirait à moins. — « Je ne puis p
2475
. On rougirait à moins. — « Je ne puis pas parler
de
lui, ici à Francfort, écrivait Bettina, car aussitôt l’on se met à ra
2476
, ici à Francfort, écrivait Bettina, car aussitôt
l’
on se met à raconter les choses les plus affreuses sur son compte, sim
2477
vait Bettina, car aussitôt l’on se met à raconter
les
choses les plus affreuses sur son compte, simplement parce qu’il a ai
2478
a, car aussitôt l’on se met à raconter les choses
les
plus affreuses sur son compte, simplement parce qu’il a aimé une femm
2479
l a aimé une femme, pour écrire Hypérion, et pour
les
gens d’ici, aimer, c’est seulement vouloir se marier… » — Et puis plu
2480
uloir se marier… » — Et puis plus tard on encadre
les
lettres des amants, on propose le couple à l’admiration des écoliers
2481
ard on encadre les lettres des amants, on propose
le
couple à l’admiration des écoliers en promenade, et le guide désigne
2482
re les lettres des amants, on propose le couple à
l’
admiration des écoliers en promenade, et le guide désigne familièremen
2483
uple à l’admiration des écoliers en promenade, et
le
guide désigne familièrement l’image d’une femme par le nom qu’elle po
2484
s en promenade, et le guide désigne familièrement
l’
image d’une femme par le nom qu’elle portait au mystère de l’amour. Tr
2485
menade, et le guide désigne familièrement l’image
d’
une femme par le nom qu’elle portait au mystère de l’amour. Trois peti
2486
ide désigne familièrement l’image d’une femme par
le
nom qu’elle portait au mystère de l’amour. Trois petites fenêtres orn
2487
d’une femme par le nom qu’elle portait au mystère
de
l’amour. Trois petites fenêtres ornées de cactus miséreux, une pipe q
2488
ne femme par le nom qu’elle portait au mystère de
l’
amour. Trois petites fenêtres ornées de cactus miséreux, une pipe qui
2489
mystère de l’amour. Trois petites fenêtres ornées
de
cactus miséreux, une pipe qui traîne sur l’appui ; le jardinet avec s
2490
rnées de cactus miséreux, une pipe qui traîne sur
l’
appui ; le jardinet avec son banc et ses lilas fleuris qui trempent. T
2491
actus miséreux, une pipe qui traîne sur l’appui ;
le
jardinet avec son banc et ses lilas fleuris qui trempent. Tout est fa
2492
rmotter. Trente-sept ans dans cette chambre, avec
le
bruit de l’eau et cette complainte de malade épuisé après un grand ac
2493
Trente-sept ans dans cette chambre, avec le bruit
de
l’eau et cette complainte de malade épuisé après un grand accès de fi
2494
nte-sept ans dans cette chambre, avec le bruit de
l’
eau et cette complainte de malade épuisé après un grand accès de fièvr
2495
ambre, avec le bruit de l’eau et cette complainte
de
malade épuisé après un grand accès de fièvre… L’agrément de ce mond
2496
complainte de malade épuisé après un grand accès
de
fièvre… L’agrément de ce monde, je l’ai vécu. Les joies de la jeune
2497
e malade épuisé après un grand accès de fièvre…
L’
agrément de ce monde, je l’ai vécu. Les joies de la jeunesse, voilà si
2498
uisé après un grand accès de fièvre… L’agrément
de
ce monde, je l’ai vécu. Les joies de la jeunesse, voilà si longtemps,
2499
and accès de fièvre… L’agrément de ce monde, je
l’
ai vécu. Les joies de la jeunesse, voilà si longtemps, si longtemps qu
2500
e fièvre… L’agrément de ce monde, je l’ai vécu.
Les
joies de la jeunesse, voilà si longtemps, si longtemps qu’elles ont f
2501
L’agrément de ce monde, je l’ai vécu. Les joies
de
la jeunesse, voilà si longtemps, si longtemps qu’elles ont fui. Avril
2502
’agrément de ce monde, je l’ai vécu. Les joies de
la
jeunesse, voilà si longtemps, si longtemps qu’elles ont fui. Avril et
2503
en, je n’aime plus vivre. Il y avait encore plus
de
paix que maintenant. La grande allée sur l’île n’existait pas, en fac
2504
. Il y avait encore plus de paix que maintenant.
La
grande allée sur l’île n’existait pas, en face, ni les maisons. Il vo
2505
plus de paix que maintenant. La grande allée sur
l’
île n’existait pas, en face, ni les maisons. Il voyait des prairies et
2506
rande allée sur l’île n’existait pas, en face, ni
les
maisons. Il voyait des prairies et des collines basses, de l’autre cô
2507
s. Il voyait des prairies et des collines basses,
de
l’autre côté de l’eau jaune et verte… Quel est donc ce sommeil « dans
2508
prairies et des collines basses, de l’autre côté
de
l’eau jaune et verte… Quel est donc ce sommeil « dans la nuit de la v
2509
airies et des collines basses, de l’autre côté de
l’
eau jaune et verte… Quel est donc ce sommeil « dans la nuit de la vie
2510
u jaune et verte… Quel est donc ce sommeil « dans
la
nuit de la vie » — et cet aveu mystérieux : « …la perfection n’a pas
2511
et verte… Quel est donc ce sommeil « dans la nuit
de
la vie » — et cet aveu mystérieux : « …la perfection n’a pas de plain
2512
verte… Quel est donc ce sommeil « dans la nuit de
la
vie » — et cet aveu mystérieux : « …la perfection n’a pas de plainte…
2513
et cet aveu mystérieux : « …la perfection n’a pas
de
plainte… » Vivait-il encore ? Ce lieu soudain m’angoisse. Mais le gar
2514
vait-il encore ? Ce lieu soudain m’angoisse. Mais
le
gardien : il y est comme chez lui. — Dormez-vous dans ce lit ? — Oh !
2515
— Oh ! répond-il, je pourrais aussi bien habiter
la
chambre. Il ne vient pas tant de visiteurs, et seulement de 2 à 4. Un
2516
. Il ne vient pas tant de visiteurs, et seulement
de
2 à 4. Une rue étouffée entre des maisons pointues et les contreforts
2517
4. Une rue étouffée entre des maisons pointues et
les
contreforts de l’Église du Chapitre : je vois s’y engager chaque jour
2518
fée entre des maisons pointues et les contreforts
de
l’Église du Chapitre : je vois s’y engager chaque jour le fou au prof
2519
entre des maisons pointues et les contreforts de
l’
Église du Chapitre : je vois s’y engager chaque jour le fou au profil
2520
ise du Chapitre : je vois s’y engager chaque jour
le
fou au profil de vieille femme qui promène doucement dans cette calme
2521
je vois s’y engager chaque jour le fou au profil
de
vieille femme qui promène doucement dans cette calme Tubingue le secr
2522
e qui promène doucement dans cette calme Tubingue
le
secret d’une épouvantable mélancolie. Les étudiants le rencontrent, q
2523
ène doucement dans cette calme Tubingue le secret
d’
une épouvantable mélancolie. Les étudiants le rencontrent, qui montent
2524
Tubingue le secret d’une épouvantable mélancolie.
Les
étudiants le rencontrent, qui montent au Séminaire protestant : il le
2525
cret d’une épouvantable mélancolie. Les étudiants
le
rencontrent, qui montent au Séminaire protestant : il leur fait de pr
2526
ui montent au Séminaire protestant : il leur fait
de
profondes révérences… La rumeur et le cliquetis d’une grande terrasse
2527
rotestant : il leur fait de profondes révérences…
La
rumeur et le cliquetis d’une grande terrasse de café au bord du Necka
2528
l leur fait de profondes révérences… La rumeur et
le
cliquetis d’une grande terrasse de café au bord du Neckar, sous les m
2529
e profondes révérences… La rumeur et le cliquetis
d’
une grande terrasse de café au bord du Neckar, sous les marronniers. À
2530
… La rumeur et le cliquetis d’une grande terrasse
de
café au bord du Neckar, sous les marronniers. À quatre heures, l’orch
2531
e grande terrasse de café au bord du Neckar, sous
les
marronniers. À quatre heures, l’orchestre s’est mis à jouer des mélod
2532
du Neckar, sous les marronniers. À quatre heures,
l’
orchestre s’est mis à jouer des mélodies charmantes, jazz et clarinett
2533
mélodies charmantes, jazz et clarinette, chansons
de
mai. Les bateaux qui dérivent dans le voisinage se rapprochent, tourn
2534
charmantes, jazz et clarinette, chansons de mai.
Les
bateaux qui dérivent dans le voisinage se rapprochent, tournoient len
2535
e, chansons de mai. Les bateaux qui dérivent dans
le
voisinage se rapprochent, tournoient lentement dans la musique. Je n’
2536
isinage se rapprochent, tournoient lentement dans
la
musique. Je n’aime pas les jeunes Doktors à lunettes, en costume de b
2537
urnoient lentement dans la musique. Je n’aime pas
les
jeunes Doktors à lunettes, en costume de bain, qui pagayent vigoureus
2538
ime pas les jeunes Doktors à lunettes, en costume
de
bain, qui pagayent vigoureusement, les dents serrées. « Weg zur Kraft
2539
en costume de bain, qui pagayent vigoureusement,
les
dents serrées. « Weg zur Kraft und Schönheit ! » J’aime les bateaux p
2540
serrées. « Weg zur Kraft und Schönheit ! » J’aime
les
bateaux plats et incertains, avec des Daphnés dedans, qui ne savent p
2541
pas bien ramer et qui lisent des magazines au fil
de
l’onde, au comble des vacances. D’une table voisine, des adolescents
2542
bien ramer et qui lisent des magazines au fil de
l’
onde, au comble des vacances. D’une table voisine, des adolescents bal
2543
gazines au fil de l’onde, au comble des vacances.
D’
une table voisine, des adolescents balafrés font des signes énergiques
2544
lafrés font des signes énergiques à une compagnie
de
cavaliers qui passe sur le pont devant la statue d’Eberhard-en-Barbe.
2545
giques à une compagnie de cavaliers qui passe sur
le
pont devant la statue d’Eberhard-en-Barbe. Des bourgeois se rient con
2546
mpagnie de cavaliers qui passe sur le pont devant
la
statue d’Eberhard-en-Barbe. Des bourgeois se rient contre par-dessus
2547
cavaliers qui passe sur le pont devant la statue
d’
Eberhard-en-Barbe. Des bourgeois se rient contre par-dessus leurs chop
2548
sus leurs chopes. « Gemütlichkeit. » Évidemment :
la
vie normale. Il y a pourtant cette petite chambre… Est-ce que tout ce
2549
petite chambre… Est-ce que tout cela existe dans
le
même monde ? (Il est bon de poser parfois de ces grandes questions na
2550
tout cela existe dans le même monde ? (Il est bon
de
poser parfois de ces grandes questions naïves.) Lui aussi a vécu dans
2551
dans le même monde ? (Il est bon de poser parfois
de
ces grandes questions naïves.) Lui aussi a vécu dans cette ville, tou
2552
t seuls… Et puis, il lui est arrivé quelque chose
de
terrible, où il a perdu son âme. Et puis il n’est revenu qu’un vieux
2553
out le monde s’accorde à trouver malsain ce genre
de
tentatives : cela ne peut que mal finir. Ceux du bon sens hochent la
2554
a ne peut que mal finir. Ceux du bon sens hochent
la
tête et citent la phrase la plus malencontreuse de Pascal : le « Qui
2555
finir. Ceux du bon sens hochent la tête et citent
la
phrase la plus malencontreuse de Pascal : le « Qui veut faire l’ange…
2556
x du bon sens hochent la tête et citent la phrase
la
plus malencontreuse de Pascal : le « Qui veut faire l’ange… » a autor
2557
a tête et citent la phrase la plus malencontreuse
de
Pascal : le « Qui veut faire l’ange… » a autorisé des générations de
2558
tent la phrase la plus malencontreuse de Pascal :
le
« Qui veut faire l’ange… » a autorisé des générations de bourgeois cu
2559
us malencontreuse de Pascal : le « Qui veut faire
l’
ange… » a autorisé des générations de bourgeois cultivés à faire la bê
2560
i veut faire l’ange… » a autorisé des générations
de
bourgeois cultivés à faire la bête dès qu’il s’agit de l’âme. Dans la
2561
isé des générations de bourgeois cultivés à faire
la
bête dès qu’il s’agit de l’âme. Dans la bouche de certains, cela pren
2562
urgeois cultivés à faire la bête dès qu’il s’agit
de
l’âme. Dans la bouche de certains, cela prend l’air de je ne sais que
2563
eois cultivés à faire la bête dès qu’il s’agit de
l’
âme. Dans la bouche de certains, cela prend l’air de je ne sais quelle
2564
s à faire la bête dès qu’il s’agit de l’âme. Dans
la
bouche de certains, cela prend l’air de je ne sais quelle revanche du
2565
la bête dès qu’il s’agit de l’âme. Dans la bouche
de
certains, cela prend l’air de je ne sais quelle revanche du médiocre
2566
âme. Dans la bouche de certains, cela prend l’air
de
je ne sais quelle revanche du médiocre dont ils se sentent bénéficiai
2567
dont ils se sentent bénéficiaires. Ah ! vraiment
les
malins ! qui ont préféré faire tout de suite la bête : comme cela on
2568
les malins ! qui ont préféré faire tout de suite
la
bête : comme cela on est mieux pour donner le coup de pied de l’âne…
2569
ite la bête : comme cela on est mieux pour donner
le
coup de pied de l’âne… Écoutons plutôt Bettina — la vérité est plus h
2570
mme cela on est mieux pour donner le coup de pied
de
l’âne… Écoutons plutôt Bettina — la vérité est plus humaine, est plus
2571
cela on est mieux pour donner le coup de pied de
l’
âne… Écoutons plutôt Bettina — la vérité est plus humaine, est plus di
2572
coup de pied de l’âne… Écoutons plutôt Bettina —
la
vérité est plus humaine, est plus divine quand c’est une telle femme
2573
, est plus divine quand c’est une telle femme qui
la
confesse : « Celui qui entre en commerce trop étroit avec le ciel, le
2574
: « Celui qui entre en commerce trop étroit avec
le
ciel, les dieux le vouent au malheur. » O cette chambre, où pénètre l
2575
i qui entre en commerce trop étroit avec le ciel,
les
dieux le vouent au malheur. » O cette chambre, où pénètre la facilité
2576
e en commerce trop étroit avec le ciel, les dieux
le
vouent au malheur. » O cette chambre, où pénètre la facilité atroce d
2577
vouent au malheur. » O cette chambre, où pénètre
la
facilité atroce de la fin d’un après-midi, ces musiquettes et ces par
2578
» O cette chambre, où pénètre la facilité atroce
de
la fin d’un après-midi, ces musiquettes et ces parfums de fleurs et d
2579
O cette chambre, où pénètre la facilité atroce de
la
fin d’un après-midi, ces musiquettes et ces parfums de fleurs et d’ea
2580
chambre, où pénètre la facilité atroce de la fin
d’
un après-midi, ces musiquettes et ces parfums de fleurs et d’eau… elle
2581
n d’un après-midi, ces musiquettes et ces parfums
de
fleurs et d’eau… elle est tellement d’ailleurs… Faut-il donc que l’un
2582
midi, ces musiquettes et ces parfums de fleurs et
d’
eau… elle est tellement d’ailleurs… Faut-il donc que l’un des deux soi
2583
urs… Faut-il donc que l’un des deux soit absurde,
de
ces mondes à mes yeux soudain simultanés ?… Le tragique de la facilit
2584
e, de ces mondes à mes yeux soudain simultanés ?…
Le
tragique de la facilité, c’est qu’elle n’est qu’un oubli. Et pourtant
2585
ndes à mes yeux soudain simultanés ?… Le tragique
de
la facilité, c’est qu’elle n’est qu’un oubli. Et pourtant, comme elle
2586
s à mes yeux soudain simultanés ?… Le tragique de
la
facilité, c’est qu’elle n’est qu’un oubli. Et pourtant, comme elle pa
2587
blie, triomphante, à beau fixe. Pourquoi troubler
le
miroir innocent de ces eaux, ces âmes indulgentes à leur banalité ? E
2588
à beau fixe. Pourquoi troubler le miroir innocent
de
ces eaux, ces âmes indulgentes à leur banalité ? Est-ce qu’ils ne sou
2589
amais rien ? Ou bien, peut-être, seulement, quand
l’
amour leur donne une petite fièvre, — cette semaine de leur jeunesse o
2590
our leur donne une petite fièvre, — cette semaine
de
leur jeunesse où ils ont cru pressentir de grandes choses généreuses
2591
emaine de leur jeunesse où ils ont cru pressentir
de
grandes choses généreuses autour d’eux… Cela s’oublie. Et l’amour, to
2592
ru pressentir de grandes choses généreuses autour
d’
eux… Cela s’oublie. Et l’amour, tout justement, nous fait comprendre,
2593
choses généreuses autour d’eux… Cela s’oublie. Et
l’
amour, tout justement, nous fait comprendre, dans le temps même qu’il
2594
amour, tout justement, nous fait comprendre, dans
le
temps même qu’il nous entr’ouvre le ciel, qu’il est bon qu’il y ait l
2595
prendre, dans le temps même qu’il nous entr’ouvre
le
ciel, qu’il est bon qu’il y ait la terre… Mais que cette musique vulg
2596
ous entr’ouvre le ciel, qu’il est bon qu’il y ait
la
terre… Mais que cette musique vulgaire, par quel hasard, donne l’acco
2597
ue cette musique vulgaire, par quel hasard, donne
l’
accord qui m’ouvre un vrai silence : déjà je leur échappe — je t’échap
2598
e : déjà je leur échappe — je t’échappe ô douceur
de
vivre ! Tout redevient autour de moi insuffisant, transitoire, allusi
2599
, transitoire, allusif. Tout se remet à signifier
l’
absence. 1929. 13. Bettina von Arnim-Brentano : Die Günderode. 14.
2600
ode. 14. Où il était précepteur. Mme Gontard est
la
Diotima de l’Hypérion et des poèmes.
2601
Petit journal
de
Souabe À la tombée d’une nuit froide, en avril, le voyageur descend
2602
Petit journal de Souabe À
la
tombée d’une nuit froide, en avril, le voyageur descend dans un vieux
2603
Petit journal de Souabe À la tombée
d’
une nuit froide, en avril, le voyageur descend dans un vieux bourg de
2604
Souabe À la tombée d’une nuit froide, en avril,
le
voyageur descend dans un vieux bourg de Souabe, — quelques lumières a
2605
en avril, le voyageur descend dans un vieux bourg
de
Souabe, — quelques lumières au milieu d’une étroite vallée où le trai
2606
elques lumières au milieu d’une étroite vallée où
le
train longtemps côtoya une rivière, des forêts. Les rues sont vides j
2607
e train longtemps côtoya une rivière, des forêts.
Les
rues sont vides jusqu’au cœur de la ville, où l’attend une ample deme
2608
re, des forêts. Les rues sont vides jusqu’au cœur
de
la ville, où l’attend une ample demeure. Et maintenant le chien s’est
2609
des forêts. Les rues sont vides jusqu’au cœur de
la
ville, où l’attend une ample demeure. Et maintenant le chien s’est tu
2610
Les rues sont vides jusqu’au cœur de la ville, où
l’
attend une ample demeure. Et maintenant le chien s’est tu ; des pas s’
2611
lle, où l’attend une ample demeure. Et maintenant
le
chien s’est tu ; des pas s’éloignent. Un trait de lumière sous la por
2612
le chien s’est tu ; des pas s’éloignent. Un trait
de
lumière sous la porte disparaît. Il aime sentir autour de lui vivre l
2613
u ; des pas s’éloignent. Un trait de lumière sous
la
porte disparaît. Il aime sentir autour de lui vivre la grande maisonn
2614
rte disparaît. Il aime sentir autour de lui vivre
la
grande maisonnée, cet espace cloisonné de murailles respectables, ple
2615
i vivre la grande maisonnée, cet espace cloisonné
de
murailles respectables, plein de présences et d’absences, — la chambr
2616
espace cloisonné de murailles respectables, plein
de
présences et d’absences, — la chambre principale où une lampe arrose
2617
de murailles respectables, plein de présences et
d’
absences, — la chambre principale où une lampe arrose la pesante nappe
2618
respectables, plein de présences et d’absences, —
la
chambre principale où une lampe arrose la pesante nappe aux dessins b
2619
nces, — la chambre principale où une lampe arrose
la
pesante nappe aux dessins brodés, des verres, des coudes et des pipes
2620
ssins brodés, des verres, des coudes et des pipes
de
méditation, — des pièces vides où la Lune avance comme un chat sur le
2621
et des pipes de méditation, — des pièces vides où
la
Lune avance comme un chat sur le lit conjugal, un salon glacé dont le
2622
pièces vides où la Lune avance comme un chat sur
le
lit conjugal, un salon glacé dont le parquet craque sans que nul pied
2623
un chat sur le lit conjugal, un salon glacé dont
le
parquet craque sans que nul pied jamais ne s’y pose, et tous ces corr
2624
is ne s’y pose, et tous ces corridors si hauts où
l’
on devine à tâtons des armoires monumentales. Dans une chambre froide
2625
ide il s’est couché en grelottant. Mais à travers
l’
ombre il distingue les masses confortables de meubles volumineux, le p
2626
n grelottant. Mais à travers l’ombre il distingue
les
masses confortables de meubles volumineux, le poêle blanc à chapiteau
2627
vers l’ombre il distingue les masses confortables
de
meubles volumineux, le poêle blanc à chapiteau rococo et ce lit énorm
2628
ue les masses confortables de meubles volumineux,
le
poêle blanc à chapiteau rococo et ce lit énorme aux édredons rebondis
2629
rococo et ce lit énorme aux édredons rebondis où
l’
on s’enfouit comme s’il était le sommeil même. Le bruit de la rivière
2630
edons rebondis où l’on s’enfouit comme s’il était
le
sommeil même. Le bruit de la rivière et de l’écluse proche, — ce sera
2631
l’on s’enfouit comme s’il était le sommeil même.
Le
bruit de la rivière et de l’écluse proche, — ce sera sa première habi
2632
nfouit comme s’il était le sommeil même. Le bruit
de
la rivière et de l’écluse proche, — ce sera sa première habitude. 2
2633
uit comme s’il était le sommeil même. Le bruit de
la
rivière et de l’écluse proche, — ce sera sa première habitude. 22 a
2634
était le sommeil même. Le bruit de la rivière et
de
l’écluse proche, — ce sera sa première habitude. 22 avril 1929 M
2635
ait le sommeil même. Le bruit de la rivière et de
l’
écluse proche, — ce sera sa première habitude. 22 avril 1929 Mes
2636
tude. 22 avril 1929 Mes fenêtres donnent sur
la
rivière. En m’y penchant je puis me voir dans l’eau plate, élargie en
2637
la rivière. En m’y penchant je puis me voir dans
l’
eau plate, élargie en cet endroit, avant l’écluse qui la prend de biai
2638
r dans l’eau plate, élargie en cet endroit, avant
l’
écluse qui la prend de biais sur la droite. Un nageur passe à travers
2639
plate, élargie en cet endroit, avant l’écluse qui
la
prend de biais sur la droite. Un nageur passe à travers les reflets j
2640
argie en cet endroit, avant l’écluse qui la prend
de
biais sur la droite. Un nageur passe à travers les reflets jaunes, ro
2641
endroit, avant l’écluse qui la prend de biais sur
la
droite. Un nageur passe à travers les reflets jaunes, roses, verts, d
2642
de biais sur la droite. Un nageur passe à travers
les
reflets jaunes, roses, verts, des maisons à façades triangulaires. Co
2643
ts, des maisons à façades triangulaires. Couleurs
d’
un crépuscule de pluie. Plus près, des reflets d’arbres ; plus près en
2644
à façades triangulaires. Couleurs d’un crépuscule
de
pluie. Plus près, des reflets d’arbres ; plus près encore, des nuages
2645
d’un crépuscule de pluie. Plus près, des reflets
d’
arbres ; plus près encore, des nuages troués de petits poissons. À gau
2646
ts d’arbres ; plus près encore, des nuages troués
de
petits poissons. À gauche je domine un pesant pont de pierre rougeâtr
2647
etits poissons. À gauche je domine un pesant pont
de
pierre rougeâtre, trois arches dont les piles s’avancent en éperons.
2648
esant pont de pierre rougeâtre, trois arches dont
les
piles s’avancent en éperons. Encastrée dans le parapet, une petite ch
2649
t les piles s’avancent en éperons. Encastrée dans
le
parapet, une petite chapelle bossue, nourrie de poussière depuis le M
2650
s le parapet, une petite chapelle bossue, nourrie
de
poussière depuis le Moyen Âge, propose humblement son anachronisme de
2651
tite chapelle bossue, nourrie de poussière depuis
le
Moyen Âge, propose humblement son anachronisme de plain-pied avec les
2652
le Moyen Âge, propose humblement son anachronisme
de
plain-pied avec les passants, les voitures. (Ils l’aiment bien, — ne
2653
se humblement son anachronisme de plain-pied avec
les
passants, les voitures. (Ils l’aiment bien, — ne la voient plus.) La
2654
son anachronisme de plain-pied avec les passants,
les
voitures. (Ils l’aiment bien, — ne la voient plus.) La vie du pont m’
2655
plain-pied avec les passants, les voitures. (Ils
l’
aiment bien, — ne la voient plus.) La vie du pont m’occupe, comme les
2656
passants, les voitures. (Ils l’aiment bien, — ne
la
voient plus.) La vie du pont m’occupe, comme les remous dans l’eau. U
2657
itures. (Ils l’aiment bien, — ne la voient plus.)
La
vie du pont m’occupe, comme les remous dans l’eau. Un char traverse l
2658
e la voient plus.) La vie du pont m’occupe, comme
les
remous dans l’eau. Un char traverse lentement. Une belle auto derrièr
2659
.) La vie du pont m’occupe, comme les remous dans
l’
eau. Un char traverse lentement. Une belle auto derrière s’impatiente,
2660
Une belle auto derrière s’impatiente, tandis que
les
collégiens vont flairer sa marque, méprisant les occupants à lunettes
2661
les collégiens vont flairer sa marque, méprisant
les
occupants à lunettes. Viennent deux filles sans chapeau qui se promèn
2662
hapeau qui se promènent pour montrer leurs robes.
Le
nageur les intéresse, elles s’accoudent au parapet, tout près d’ici.
2663
se promènent pour montrer leurs robes. Le nageur
les
intéresse, elles s’accoudent au parapet, tout près d’ici. Vont-elles
2664
arapet, tout près d’ici. Vont-elles sentir que je
les
regarde ? Vraiment la plus petite est jolie, très brune, avec un gros
2665
. Vont-elles sentir que je les regarde ? Vraiment
la
plus petite est jolie, très brune, avec un gros collier de verre bleu
2666
etite est jolie, très brune, avec un gros collier
de
verre bleu… Elle lève les yeux tout droit vers moi, une seconde, parl
2667
ne, avec un gros collier de verre bleu… Elle lève
les
yeux tout droit vers moi, une seconde, parle vite à sa compagne, roug
2668
ent et s’en vont, et avant de disparaître au coin
d’
une maison jaune, se retournent. Ce petit monde enclos par le pont et
2669
n jaune, se retournent. Ce petit monde enclos par
le
pont et l’écluse, je m’en contenterai doucement. Comme si j’avais pre
2670
retournent. Ce petit monde enclos par le pont et
l’
écluse, je m’en contenterai doucement. Comme si j’avais presque oublié
2671
— « Seul et séparé », ces deux mots que rythmait
le
train, est-ce qu’ils font encore vraiment mal ? 24 avril 1929 L
2672
ls font encore vraiment mal ? 24 avril 1929
Les
habitants de la maison me paraissent peu nombreux, mais sait-on d’où
2673
vraiment mal ? 24 avril 1929 Les habitants
de
la maison me paraissent peu nombreux, mais sait-on d’où il peut en so
2674
aiment mal ? 24 avril 1929 Les habitants de
la
maison me paraissent peu nombreux, mais sait-on d’où il peut en sorti
2675
a maison me paraissent peu nombreux, mais sait-on
d’
où il peut en sortir encore — sans compter les fantômes, probables ? L
2676
t-on d’où il peut en sortir encore — sans compter
les
fantômes, probables ? Le père Reinecke, un barberousse aux yeux perça
2677
r encore — sans compter les fantômes, probables ?
Le
père Reinecke, un barberousse aux yeux perçants, ex-nouveau riche rui
2678
sse aux yeux perçants, ex-nouveau riche ruiné par
l’
inflation, partage sa vie entre la vente des articles de sport et les
2679
riche ruiné par l’inflation, partage sa vie entre
la
vente des articles de sport et les joies de l’esprit. Quand le négoce
2680
ation, partage sa vie entre la vente des articles
de
sport et les joies de l’esprit. Quand le négoce installé au rez-de-ch
2681
ge sa vie entre la vente des articles de sport et
les
joies de l’esprit. Quand le négoce installé au rez-de-chaussée de sa
2682
entre la vente des articles de sport et les joies
de
l’esprit. Quand le négoce installé au rez-de-chaussée de sa demeure p
2683
re la vente des articles de sport et les joies de
l’
esprit. Quand le négoce installé au rez-de-chaussée de sa demeure patr
2684
articles de sport et les joies de l’esprit. Quand
le
négoce installé au rez-de-chaussée de sa demeure patricienne souffre
2685
prit. Quand le négoce installé au rez-de-chaussée
de
sa demeure patricienne souffre par le fait des menées impérialistes d
2686
de-chaussée de sa demeure patricienne souffre par
le
fait des menées impérialistes de la France, il cherche une revanche s
2687
enne souffre par le fait des menées impérialistes
de
la France, il cherche une revanche sournoise et désintéressée dans l’
2688
e souffre par le fait des menées impérialistes de
la
France, il cherche une revanche sournoise et désintéressée dans l’act
2689
rche une revanche sournoise et désintéressée dans
l’
activité d’un jugement qui domine la médiocrité du monde. Le père Rein
2690
vanche sournoise et désintéressée dans l’activité
d’
un jugement qui domine la médiocrité du monde. Le père Reinecke est un
2691
téressée dans l’activité d’un jugement qui domine
la
médiocrité du monde. Le père Reinecke est un esprit « caustique » — i
2692
d’un jugement qui domine la médiocrité du monde.
Le
père Reinecke est un esprit « caustique » — il aime à me le répéter e
2693
inecke est un esprit « caustique » — il aime à me
le
répéter en français —, et je le verrai bien, assure-t-il, le jour où
2694
» — il aime à me le répéter en français —, et je
le
verrai bien, assure-t-il, le jour où il me confiera quelques fragment
2695
en français —, et je le verrai bien, assure-t-il,
le
jour où il me confiera quelques fragments du « livre de sa vie », don
2696
r où il me confiera quelques fragments du « livre
de
sa vie », dont il compose chaque matin deux pages à la machine. Il y
2697
vie », dont il compose chaque matin deux pages à
la
machine. Il y juge du monde en général, de la religion, des mœurs, de
2698
ages à la machine. Il y juge du monde en général,
de
la religion, des mœurs, de l’histoire, et de ses voisins en particuli
2699
s à la machine. Il y juge du monde en général, de
la
religion, des mœurs, de l’histoire, et de ses voisins en particulier.
2700
e du monde en général, de la religion, des mœurs,
de
l’histoire, et de ses voisins en particulier. La « Gnädige » fait ave
2701
u monde en général, de la religion, des mœurs, de
l’
histoire, et de ses voisins en particulier. La « Gnädige » fait avec b
2702
ral, de la religion, des mœurs, de l’histoire, et
de
ses voisins en particulier. La « Gnädige » fait avec bonne humeur la
2703
de l’histoire, et de ses voisins en particulier.
La
« Gnädige » fait avec bonne humeur la meilleure cuisine possible au W
2704
articulier. La « Gnädige » fait avec bonne humeur
la
meilleure cuisine possible au Wurtemberg, et de ces gâteaux compliqué
2705
r la meilleure cuisine possible au Wurtemberg, et
de
ces gâteaux compliqués qu’elle orne d’un quatrain de bienvenue. Elle
2706
emberg, et de ces gâteaux compliqués qu’elle orne
d’
un quatrain de bienvenue. Elle me confie qu’il lui arrive de rêver en
2707
ces gâteaux compliqués qu’elle orne d’un quatrain
de
bienvenue. Elle me confie qu’il lui arrive de rêver en vers. Chacun s
2708
ain de bienvenue. Elle me confie qu’il lui arrive
de
rêver en vers. Chacun son petit talent dans la famille. Le gros Fritz
2709
ve de rêver en vers. Chacun son petit talent dans
la
famille. Le gros Fritz est un blond géant de 25 ans, qui rit avec bon
2710
en vers. Chacun son petit talent dans la famille.
Le
gros Fritz est un blond géant de 25 ans, qui rit avec bonté et se dis
2711
dans la famille. Le gros Fritz est un blond géant
de
25 ans, qui rit avec bonté et se distingue dans les concours de gymna
2712
e 25 ans, qui rit avec bonté et se distingue dans
les
concours de gymnastes. La domestique a cet air de victime attristée q
2713
rit avec bonté et se distingue dans les concours
de
gymnastes. La domestique a cet air de victime attristée que prennent
2714
é et se distingue dans les concours de gymnastes.
La
domestique a cet air de victime attristée que prennent souvent les se
2715
es concours de gymnastes. La domestique a cet air
de
victime attristée que prennent souvent les servantes de la bourgeoisi
2716
cet air de victime attristée que prennent souvent
les
servantes de la bourgeoisie. Quant au chien, de l’espèce dite « schna
2717
time attristée que prennent souvent les servantes
de
la bourgeoisie. Quant au chien, de l’espèce dite « schnauzer », il mo
2718
e attristée que prennent souvent les servantes de
la
bourgeoisie. Quant au chien, de l’espèce dite « schnauzer », il montr
2719
les servantes de la bourgeoisie. Quant au chien,
de
l’espèce dite « schnauzer », il montre un poil de couleur neutre, et
2720
s servantes de la bourgeoisie. Quant au chien, de
l’
espèce dite « schnauzer », il montre un poil de couleur neutre, et que
2721
de l’espèce dite « schnauzer », il montre un poil
de
couleur neutre, et quelque bienveillance lorsqu’il a compris. Est-ce
2722
lorsqu’il a compris. Est-ce tout ? Il y a encore
l’
absence de la fille, élément considérable dans l’atmosphère et dans l’
2723
a compris. Est-ce tout ? Il y a encore l’absence
de
la fille, élément considérable dans l’atmosphère et dans l’économie d
2724
compris. Est-ce tout ? Il y a encore l’absence de
la
fille, élément considérable dans l’atmosphère et dans l’économie du l
2725
l’absence de la fille, élément considérable dans
l’
atmosphère et dans l’économie du lieu. On l’a mise en pension en Baviè
2726
e, élément considérable dans l’atmosphère et dans
l’
économie du lieu. On l’a mise en pension en Bavière, et les galants qu
2727
dans l’atmosphère et dans l’économie du lieu. On
l’
a mise en pension en Bavière, et les galants qui passent sans avoir l’
2728
ie du lieu. On l’a mise en pension en Bavière, et
les
galants qui passent sans avoir l’air de rien sur le pont Saint-Nikola
2729
ière, et les galants qui passent sans avoir l’air
de
rien sur le pont Saint-Nikolaus sont bien capots de voir à sa fenêtre
2730
galants qui passent sans avoir l’air de rien sur
le
pont Saint-Nikolaus sont bien capots de voir à sa fenêtre la silhouet
2731
rien sur le pont Saint-Nikolaus sont bien capots
de
voir à sa fenêtre la silhouette de l’Étranger. On a laissé sa photo d
2732
nt-Nikolaus sont bien capots de voir à sa fenêtre
la
silhouette de l’Étranger. On a laissé sa photo dans ma chambre, « pou
2733
nt bien capots de voir à sa fenêtre la silhouette
de
l’Étranger. On a laissé sa photo dans ma chambre, « pour que vous aye
2734
bien capots de voir à sa fenêtre la silhouette de
l’
Étranger. On a laissé sa photo dans ma chambre, « pour que vous ayez u
2735
elée, qui rit, — et qui doit savoir se défendre à
l’
occasion, mais comme elles font, pas trop tôt. 28 avril 1929 Ils
2736
s font, pas trop tôt. 28 avril 1929 Ils ont
de
la peine à comprendre pourquoi je suis venu vivre dans ce bourg, chez
2737
ont, pas trop tôt. 28 avril 1929 Ils ont de
la
peine à comprendre pourquoi je suis venu vivre dans ce bourg, chez eu
2738
et paisiblement habité ? Cette ville est pour eux
la
moins quelconque du monde. Je prétexte des écritures — qui se réduise
2739
se réduisent d’ailleurs à ce journal — pour avoir
la
paix dans ma chambre ; aussi, une ancienne fatigue à guérir pour qu’o
2740
fatigue à guérir pour qu’on me laisse errer dans
la
campagne. La petite ville au crépuscule, couchée en rond entre les co
2741
érir pour qu’on me laisse errer dans la campagne.
La
petite ville au crépuscule, couchée en rond entre les collines, secrè
2742
petite ville au crépuscule, couchée en rond entre
les
collines, secrète sous un voile de brume bleue, dans une grande paix.
2743
en rond entre les collines, secrète sous un voile
de
brume bleue, dans une grande paix. Vue de la hauteur, sous un ciel pâ
2744
n voile de brume bleue, dans une grande paix. Vue
de
la hauteur, sous un ciel pâle avec des nuages blancs qui s’en vont. U
2745
oile de brume bleue, dans une grande paix. Vue de
la
hauteur, sous un ciel pâle avec des nuages blancs qui s’en vont. Un v
2746
ent froid, mais quelques douceurs aux abris, près
d’
une de ces maisons isolées où je ne l’amènerai jamais, à cette heure q
2747
oid, mais quelques douceurs aux abris, près d’une
de
ces maisons isolées où je ne l’amènerai jamais, à cette heure qui ser
2748
abris, près d’une de ces maisons isolées où je ne
l’
amènerai jamais, à cette heure qui serait celle de rentrer chez nous s
2749
l’amènerai jamais, à cette heure qui serait celle
de
rentrer chez nous s’asseoir auprès d’un feu… — Mais non. 7 mai 192
2750
erait celle de rentrer chez nous s’asseoir auprès
d’
un feu… — Mais non. 7 mai 1929 « J’ai mes brouillards et mon bea
2751
de moi », remarque Pascal, asservi au seul climat
de
l’âme. Pour moi, c’est ma jeunesse et ma vieillesse que je porte ains
2752
moi », remarque Pascal, asservi au seul climat de
l’
âme. Pour moi, c’est ma jeunesse et ma vieillesse que je porte ainsi t
2753
vieillesse que je porte ainsi tour à tour. Entre
l’
âge de mes humeurs et le chiffre de mes années, « peu de liaison ». C’
2754
lesse que je porte ainsi tour à tour. Entre l’âge
de
mes humeurs et le chiffre de mes années, « peu de liaison ». C’est à
2755
ainsi tour à tour. Entre l’âge de mes humeurs et
le
chiffre de mes années, « peu de liaison ». C’est à l’intimité de mon
2756
à tour. Entre l’âge de mes humeurs et le chiffre
de
mes années, « peu de liaison ». C’est à l’intimité de mon regard avec
2757
hiffre de mes années, « peu de liaison ». C’est à
l’
intimité de mon regard avec les choses que je mesure ma jeunesse : dan
2758
es années, « peu de liaison ». C’est à l’intimité
de
mon regard avec les choses que je mesure ma jeunesse : dans ces campa
2759
liaison ». C’est à l’intimité de mon regard avec
les
choses que je mesure ma jeunesse : dans ces campagnes solitaires, je
2760
pagnes solitaires, je promène un adolescent. Tout
l’
après-midi j’ai rôdé, marchant, m’arrêtant pour écouter et respirer lo
2761
choisissant parfois pour y sommeiller une lisière
d’
où l’on voie de lointains horizons, puis de nouveau m’enfonçant au has
2762
issant parfois pour y sommeiller une lisière d’où
l’
on voie de lointains horizons, puis de nouveau m’enfonçant au hasard d
2763
fois pour y sommeiller une lisière d’où l’on voie
de
lointains horizons, puis de nouveau m’enfonçant au hasard dans la for
2764
izons, puis de nouveau m’enfonçant au hasard dans
la
forêt. Vers le soir, j’étais bien perdu. La lumière montait vers la c
2765
nouveau m’enfonçant au hasard dans la forêt. Vers
le
soir, j’étais bien perdu. La lumière montait vers la cime des arbres,
2766
dans la forêt. Vers le soir, j’étais bien perdu.
La
lumière montait vers la cime des arbres, aux lisières d’une forêt de
2767
soir, j’étais bien perdu. La lumière montait vers
la
cime des arbres, aux lisières d’une forêt de Parsifal, et les plus ha
2768
ère montait vers la cime des arbres, aux lisières
d’
une forêt de Parsifal, et les plus hauts feuillages exultaient de clar
2769
vers la cime des arbres, aux lisières d’une forêt
de
Parsifal, et les plus hauts feuillages exultaient de clarté devant le
2770
arbres, aux lisières d’une forêt de Parsifal, et
les
plus hauts feuillages exultaient de clarté devant le ciel pâli. Tout
2771
Parsifal, et les plus hauts feuillages exultaient
de
clarté devant le ciel pâli. Tout vivait autour de moi dans une sorte
2772
plus hauts feuillages exultaient de clarté devant
le
ciel pâli. Tout vivait autour de moi dans une sorte d’ivresse lente e
2773
el pâli. Tout vivait autour de moi dans une sorte
d’
ivresse lente et majestueuse, et bientôt je me pris à composer des phr
2774
ser des phrases, tout en allant comme en rêve sur
l’
herbe où s’étouffait tout bruit. « Ô crépuscule adolescent, disais-je,
2775
e, chasseur au cœur battant, que poursuis-tu dans
le
mystère des orées d’ombre ? » Et l’on me répondait : « Ici, la jeune
2776
attant, que poursuis-tu dans le mystère des orées
d’
ombre ? » Et l’on me répondait : « Ici, la jeune fille Aurore a surpri
2777
rsuis-tu dans le mystère des orées d’ombre ? » Et
l’
on me répondait : « Ici, la jeune fille Aurore a surpris la licorne pu
2778
s orées d’ombre ? » Et l’on me répondait : « Ici,
la
jeune fille Aurore a surpris la licorne pure… » (Je croyais voir un é
2779
épondait : « Ici, la jeune fille Aurore a surpris
la
licorne pure… » (Je croyais voir un éclair blanc sous la futaie.) J’a
2780
rne pure… » (Je croyais voir un éclair blanc sous
la
futaie.) J’avançais à travers une nature de divagation. Les lisières
2781
sous la futaie.) J’avançais à travers une nature
de
divagation. Les lisières sont des lieux de l’esprit où circulent des
2782
.) J’avançais à travers une nature de divagation.
Les
lisières sont des lieux de l’esprit où circulent des bêtes nées du rê
2783
nature de divagation. Les lisières sont des lieux
de
l’esprit où circulent des bêtes nées du rêve. Et l’Archer vierge y co
2784
ure de divagation. Les lisières sont des lieux de
l’
esprit où circulent des bêtes nées du rêve. Et l’Archer vierge y court
2785
l’esprit où circulent des bêtes nées du rêve. Et
l’
Archer vierge y court en vain sur la trace des figures de son désir. (
2786
s du rêve. Et l’Archer vierge y court en vain sur
la
trace des figures de son désir. (« Oh ! qu’il garde ses flèches, il n
2787
r vierge y court en vain sur la trace des figures
de
son désir. (« Oh ! qu’il garde ses flèches, il ne tuerait qu’un songe
2788
garde ses flèches, il ne tuerait qu’un songe. »)
La
nuit fraîche m’a réveillé. Mais tandis qu’ici j’écris, je me sens tou
2789
dis qu’ici j’écris, je me sens tout baigné encore
de
cette fièvre amoureuse ; et tout est mythe de nouveau. Mythes de l’om
2790
amoureuse ; et tout est mythe de nouveau. Mythes
de
l’ombre et des frontières, sortis de la forêt occidentale : je retrou
2791
oureuse ; et tout est mythe de nouveau. Mythes de
l’
ombre et des frontières, sortis de la forêt occidentale : je retrouve
2792
veau. Mythes de l’ombre et des frontières, sortis
de
la forêt occidentale : je retrouve en eux mon enfance entourée de pré
2793
u. Mythes de l’ombre et des frontières, sortis de
la
forêt occidentale : je retrouve en eux mon enfance entourée de présen
2794
dentale : je retrouve en eux mon enfance entourée
de
présences obscures, mon enfance, cette foi anxieuse en je ne sais que
2795
eut un instant merveilleux que je veux noter ici.
Le
ciel est encore plus blanc, et la prairie s’embrume. Soudain, à dix p
2796
veux noter ici. Le ciel est encore plus blanc, et
la
prairie s’embrume. Soudain, à dix pas devant moi, une biche dresse la
2797
. Soudain, à dix pas devant moi, une biche dresse
la
tête au ras des herbes, se lève, saute sur place, — n’est plus là. —J
2798
place, — n’est plus là. —J’ai poursuivi longtemps
le
reflet rouge de ses yeux parmi les troncs qui luisaient, faiblement,
2799
lus là. —J’ai poursuivi longtemps le reflet rouge
de
ses yeux parmi les troncs qui luisaient, faiblement, vers le cœur pro
2800
suivi longtemps le reflet rouge de ses yeux parmi
les
troncs qui luisaient, faiblement, vers le cœur profond du bois. Et je
2801
parmi les troncs qui luisaient, faiblement, vers
le
cœur profond du bois. Et je croyais m’enfoncer et me perdre dans le s
2802
bois. Et je croyais m’enfoncer et me perdre dans
le
silence d’une mémoire bienheureuse. 17 mai 1929 Rentré hier de
2803
e croyais m’enfoncer et me perdre dans le silence
d’
une mémoire bienheureuse. 17 mai 1929 Rentré hier de Tubingue. (
2804
moire bienheureuse. 17 mai 1929 Rentré hier
de
Tubingue. (La tour de Hölderlin.) Dès demain, discipline de travail.
2805
euse. 17 mai 1929 Rentré hier de Tubingue. (
La
tour de Hölderlin.) Dès demain, discipline de travail. Lire. 21 ma
2806
17 mai 1929 Rentré hier de Tubingue. (La tour
de
Hölderlin.) Dès demain, discipline de travail. Lire. 21 mai 1929
2807
e. (La tour de Hölderlin.) Dès demain, discipline
de
travail. Lire. 21 mai 1929 Matinées végétales, depuis trois jou
2808
e lève à 7 h, rassemble quelques papiers, un tome
de
Meister, un paquet de tabac, le tout dans une couverture sous mon bra
2809
e quelques papiers, un tome de Meister, un paquet
de
tabac, le tout dans une couverture sous mon bras. La ville s’éveille
2810
papiers, un tome de Meister, un paquet de tabac,
le
tout dans une couverture sous mon bras. La ville s’éveille et s’aère.
2811
tabac, le tout dans une couverture sous mon bras.
La
ville s’éveille et s’aère. Je me mets à gravir la colline parmi le bo
2812
La ville s’éveille et s’aère. Je me mets à gravir
la
colline parmi le bourdonnement des buissons qui surplombent un sentie
2813
e et s’aère. Je me mets à gravir la colline parmi
le
bourdonnement des buissons qui surplombent un sentier rapide. Il faut
2814
i surplombent un sentier rapide. Il faut enjamber
le
portail rouillé, redescendre quelques marches enfouies sous les branc
2815
uillé, redescendre quelques marches enfouies sous
les
branches folles : le jardin est abandonné depuis des années, sur ses
2816
lques marches enfouies sous les branches folles :
le
jardin est abandonné depuis des années, sur ses terrasses étroites, d
2817
asses étroites, déjà brûlantes au matin, dominant
la
ville, ses bruits de chars, ses cris d’enfants. Je traverse l’odeur d
2818
brûlantes au matin, dominant la ville, ses bruits
de
chars, ses cris d’enfants. Je traverse l’odeur des groseilliers, écar
2819
dominant la ville, ses bruits de chars, ses cris
d’
enfants. Je traverse l’odeur des groseilliers, écarte des ronces, et v
2820
bruits de chars, ses cris d’enfants. Je traverse
l’
odeur des groseilliers, écarte des ronces, et voici sous une voûte de
2821
liers, écarte des ronces, et voici sous une voûte
de
feuillage, la table de pierre et son banc en demi-cercle. L’air est e
2822
des ronces, et voici sous une voûte de feuillage,
la
table de pierre et son banc en demi-cercle. L’air est encore humide d
2823
s, et voici sous une voûte de feuillage, la table
de
pierre et son banc en demi-cercle. L’air est encore humide dans cette
2824
e, la table de pierre et son banc en demi-cercle.
L’
air est encore humide dans cette grotte d’ombre. Sur le banc froid j’é
2825
cercle. L’air est encore humide dans cette grotte
d’
ombre. Sur le banc froid j’étale ma couverture, et mes papiers sur la
2826
est encore humide dans cette grotte d’ombre. Sur
le
banc froid j’étale ma couverture, et mes papiers sur la table où s’av
2827
c froid j’étale ma couverture, et mes papiers sur
la
table où s’aventurent des cloportes. Je bourre une pipe. Et alors je
2828
urre une pipe. Et alors je ris, je ris du plaisir
de
la matinée vide devant moi. Merveille de penser au fil du désordre le
2829
e une pipe. Et alors je ris, je ris du plaisir de
la
matinée vide devant moi. Merveille de penser au fil du désordre lent
2830
plaisir de la matinée vide devant moi. Merveille
de
penser au fil du désordre lent de la vie d’un jardin, dans l’odeur de
2831
moi. Merveille de penser au fil du désordre lent
de
la vie d’un jardin, dans l’odeur des feuilles vivantes, de la terre n
2832
i. Merveille de penser au fil du désordre lent de
la
vie d’un jardin, dans l’odeur des feuilles vivantes, de la terre noir
2833
eille de penser au fil du désordre lent de la vie
d’
un jardin, dans l’odeur des feuilles vivantes, de la terre noire, des
2834
fil du désordre lent de la vie d’un jardin, dans
l’
odeur des feuilles vivantes, de la terre noire, des mousses. Des fils
2835
d’un jardin, dans l’odeur des feuilles vivantes,
de
la terre noire, des mousses. Des fils d’araignée luisent et des brind
2836
un jardin, dans l’odeur des feuilles vivantes, de
la
terre noire, des mousses. Des fils d’araignée luisent et des brindill
2837
ivantes, de la terre noire, des mousses. Des fils
d’
araignée luisent et des brindilles tombent sur mes mains, écorces, che
2838
nt sur mes mains, écorces, chenilles. Une bouffée
de
pipe enveloppe une guêpe qui rôde autour de ma tête. La volupté de te
2839
e enveloppe une guêpe qui rôde autour de ma tête.
La
volupté de telles heures consiste à n’écrire que quatre ou cinq phras
2840
une guêpe qui rôde autour de ma tête. La volupté
de
telles heures consiste à n’écrire que quatre ou cinq phrases mais en
2841
que quatre ou cinq phrases mais en tenant compte
de
tout ce qui bouge. Il importe de s’arrêter longuement sous tous les p
2842
en tenant compte de tout ce qui bouge. Il importe
de
s’arrêter longuement sous tous les prétextes, de secouer sa pipe quan
2843
uge. Il importe de s’arrêter longuement sous tous
les
prétextes, de secouer sa pipe quand les dernières bouffées deviennent
2844
de s’arrêter longuement sous tous les prétextes,
de
secouer sa pipe quand les dernières bouffées deviennent écœurantes, d
2845
sous tous les prétextes, de secouer sa pipe quand
les
dernières bouffées deviennent écœurantes, de s’étirer alors et de con
2846
and les dernières bouffées deviennent écœurantes,
de
s’étirer alors et de considérer les flaques de soleil sur la table. J
2847
ffées deviennent écœurantes, de s’étirer alors et
de
considérer les flaques de soleil sur la table. Je somnole dans une mé
2848
nt écœurantes, de s’étirer alors et de considérer
les
flaques de soleil sur la table. Je somnole dans une méditation à la f
2849
s, de s’étirer alors et de considérer les flaques
de
soleil sur la table. Je somnole dans une méditation à la fois distrai
2850
alors et de considérer les flaques de soleil sur
la
table. Je somnole dans une méditation à la fois distraite et nourrie
2851
distraite et nourrie par tout ce qui flotte dans
l’
air, rampe, gratte le sol, pique, bruisse exquisement au vent. Ainsi s
2852
par tout ce qui flotte dans l’air, rampe, gratte
le
sol, pique, bruisse exquisement au vent. Ainsi se créent peu à peu da
2853
quisement au vent. Ainsi se créent peu à peu dans
l’
esprit ces formes végétales, ces cheminements brisés et délicats d’ins
2854
es végétales, ces cheminements brisés et délicats
d’
insectes rampants ou volants, ces formes et ces voies qui sont celles
2855
formes et ces voies qui sont celles mêmes par où
la
pensée entre en contact avec tout le mobile et l’ineffable du monde.
2856
mêmes par où la pensée entre en contact avec tout
le
mobile et l’ineffable du monde. Cure de sommeil, de rêves et de feuil
2857
la pensée entre en contact avec tout le mobile et
l’
ineffable du monde. Cure de sommeil, de rêves et de feuillages — et tr
2858
avec tout le mobile et l’ineffable du monde. Cure
de
sommeil, de rêves et de feuillages — et trois heures de tennis chaque
2859
mobile et l’ineffable du monde. Cure de sommeil,
de
rêves et de feuillages — et trois heures de tennis chaque après-midi
2860
’ineffable du monde. Cure de sommeil, de rêves et
de
feuillages — et trois heures de tennis chaque après-midi — cure vraim
2861
meil, de rêves et de feuillages — et trois heures
de
tennis chaque après-midi — cure vraiment : il s’agit de dissoudre ces
2862
nis chaque après-midi — cure vraiment : il s’agit
de
dissoudre ces angles droits, ces symétries minérales qu’on instruisit
2863
erclus au milieu des métamorphoses. Il s’agit que
l’
esprit et l’espace vivant, de nouveau se répondent, se conviennent et
2864
lieu des métamorphoses. Il s’agit que l’esprit et
l’
espace vivant, de nouveau se répondent, se conviennent et soient signe
2865
e répondent, se conviennent et soient signes l’un
de
l’autre. Dans le bonheur de cette matinée, la pensée s’abandonne à la
2866
onviennent et soient signes l’un de l’autre. Dans
le
bonheur de cette matinée, la pensée s’abandonne à la séduction des ra
2867
et soient signes l’un de l’autre. Dans le bonheur
de
cette matinée, la pensée s’abandonne à la séduction des ramures, et v
2868
’un de l’autre. Dans le bonheur de cette matinée,
la
pensée s’abandonne à la séduction des ramures, et voici qu’elle appre
2869
bonheur de cette matinée, la pensée s’abandonne à
la
séduction des ramures, et voici qu’elle apprend à distinguer dans leu
2870
tinguer dans leur dessin des formes particulières
de
son activité. En même temps elle se peuple d’arbres, de germes lents,
2871
res de son activité. En même temps elle se peuple
d’
arbres, de germes lents, de passages ailés. Le vent qui glisse à trave
2872
activité. En même temps elle se peuple d’arbres,
de
germes lents, de passages ailés. Le vent qui glisse à travers ce jard
2873
e temps elle se peuple d’arbres, de germes lents,
de
passages ailés. Le vent qui glisse à travers ce jardin éveille en ell
2874
ple d’arbres, de germes lents, de passages ailés.
Le
vent qui glisse à travers ce jardin éveille en elle une allégresse se
2875
se semblable au frémissement des hautes branches.
L’
architecture, dit Goethe, est une musique glacée. Mais l’arborescence
2876
tecture, dit Goethe, est une musique glacée. Mais
l’
arborescence est une musique vivante, une musique infiniment lente. El
2877
iment lente. Elle fraie des pistes délicates dans
l’
esprit de qui sait l’entendre, et celui-là peut-être, si plus tard il
2878
te. Elle fraie des pistes délicates dans l’esprit
de
qui sait l’entendre, et celui-là peut-être, si plus tard il remonte j
2879
ie des pistes délicates dans l’esprit de qui sait
l’
entendre, et celui-là peut-être, si plus tard il remonte jusqu’à la vi
2880
lui-là peut-être, si plus tard il remonte jusqu’à
la
vision, distinguera des choses nouvelles dans l’espace. (Au poète de
2881
la vision, distinguera des choses nouvelles dans
l’
espace. (Au poète de les nommer.) 22 mai 1929 (Après avoir relu
2882
era des choses nouvelles dans l’espace. (Au poète
de
les nommer.) 22 mai 1929 (Après avoir relu ce que j’écrivais hi
2883
des choses nouvelles dans l’espace. (Au poète de
les
nommer.) 22 mai 1929 (Après avoir relu ce que j’écrivais hier.)
2884
u ce que j’écrivais hier.) Il s’agirait, au fond,
d’
amener la pensée à la plus insistante vénération du réel. Tel serait l
2885
j’écrivais hier.) Il s’agirait, au fond, d’amener
la
pensée à la plus insistante vénération du réel. Tel serait le fondeme
2886
ier.) Il s’agirait, au fond, d’amener la pensée à
la
plus insistante vénération du réel. Tel serait le fondement d’une mor
2887
la plus insistante vénération du réel. Tel serait
le
fondement d’une morale des idées « par-delà le logique et l’absurde »
2888
tante vénération du réel. Tel serait le fondement
d’
une morale des idées « par-delà le logique et l’absurde ». Ah bien ! j
2889
it le fondement d’une morale des idées « par-delà
le
logique et l’absurde ». Ah bien ! je connais quelques êtres entièreme
2890
t d’une morale des idées « par-delà le logique et
l’
absurde ». Ah bien ! je connais quelques êtres entièrement en substanc
2891
eux dit cela, — mauvais signe. J’ai pourtant dans
la
tête et dans la peau toute cette matinée d’air, l’odeur de hautes tig
2892
mauvais signe. J’ai pourtant dans la tête et dans
la
peau toute cette matinée d’air, l’odeur de hautes tiges croissantes e
2893
dans la tête et dans la peau toute cette matinée
d’
air, l’odeur de hautes tiges croissantes et de fourmis rouges. Dès 9 h
2894
a tête et dans la peau toute cette matinée d’air,
l’
odeur de hautes tiges croissantes et de fourmis rouges. Dès 9 heures j
2895
t dans la peau toute cette matinée d’air, l’odeur
de
hautes tiges croissantes et de fourmis rouges. Dès 9 heures j’ai pu t
2896
née d’air, l’odeur de hautes tiges croissantes et
de
fourmis rouges. Dès 9 heures j’ai pu travailler en costume de bain. B
2897
ouges. Dès 9 heures j’ai pu travailler en costume
de
bain. Buffon préférait les manchettes et le jabot. C’est bien l’un de
2898
u travailler en costume de bain. Buffon préférait
les
manchettes et le jabot. C’est bien l’un des auteurs les plus constamm
2899
stume de bain. Buffon préférait les manchettes et
le
jabot. C’est bien l’un des auteurs les plus constamment provoquants d
2900
nchettes et le jabot. C’est bien l’un des auteurs
les
plus constamment provoquants de son siècle, — il faudra s’y remettre.
2901
l’un des auteurs les plus constamment provoquants
de
son siècle, — il faudra s’y remettre. Mais ici je m’adonne aux seuls
2902
aniques. J’ai trouvé Swedenborg et Paracelse dans
l’
armoire sculptée du père Reinecke. (Il y a Goethe, Schiller, Lessing r
2903
vert bavarois, avec des médaillons en relief sur
la
couverture ; aussi Angélus Silesius ; un petit recueil des upanishad
2904
ecueil des upanishad ; quelques romans modernes.)
Le
pasteur suédois et le mage d’Einsiedeln représentent assez bien à eux
2905
quelques romans modernes.) Le pasteur suédois et
le
mage d’Einsiedeln représentent assez bien à eux deux, par un hasard q
2906
s romans modernes.) Le pasteur suédois et le mage
d’
Einsiedeln représentent assez bien à eux deux, par un hasard qui ne m’
2907
hasard qui ne m’étonne guère, ce double mouvement
de
matérialisation du spirituel et d’intellectualisation du physique qui
2908
uble mouvement de matérialisation du spirituel et
d’
intellectualisation du physique qui justement m’apparaît comme le thèm
2909
sation du physique qui justement m’apparaît comme
le
thème de mes songeries souabes. Mettons un peu cela au net. Paracelse
2910
physique qui justement m’apparaît comme le thème
de
mes songeries souabes. Mettons un peu cela au net. Paracelse s’occupa
2911
Mettons un peu cela au net. Paracelse s’occupait
d’
extraire l’ens des corps, tandis que Swedenborg se complaît à décrire
2912
peu cela au net. Paracelse s’occupait d’extraire
l’
ens des corps, tandis que Swedenborg se complaît à décrire le vêtement
2913
orps, tandis que Swedenborg se complaît à décrire
le
vêtement des anges. L’un découvre l’univers dans chaque organe de la
2914
ît à décrire le vêtement des anges. L’un découvre
l’
univers dans chaque organe de la machine humaine. L’autre enseigne que
2915
anges. L’un découvre l’univers dans chaque organe
de
la machine humaine. L’autre enseigne que chacun des anges est un miro
2916
es. L’un découvre l’univers dans chaque organe de
la
machine humaine. L’autre enseigne que chacun des anges est un miroir
2917
miroir du ciel entier. C’est parce qu’ils savent
les
correspondances que ce médecin parle avec mystère des objets que nous
2918
ets que nous touchons, — ce mystique avec naturel
de
ce qui nous est invisible. Tous deux orientent la réflexion vers le s
2919
de ce qui nous est invisible. Tous deux orientent
la
réflexion vers le sens et vers le symbole concret. N’est-ce point ce
2920
invisible. Tous deux orientent la réflexion vers
le
sens et vers le symbole concret. N’est-ce point ce genre de démarche
2921
deux orientent la réflexion vers le sens et vers
le
symbole concret. N’est-ce point ce genre de démarche que notre « cult
2922
vers le symbole concret. N’est-ce point ce genre
de
démarche que notre « culture » a le plus méprisé ? N’est-ce point à c
2923
oint ce genre de démarche que notre « culture » a
le
plus méprisé ? N’est-ce point à cause de ce mépris qu’elle a perdu le
2924
est-ce point à cause de ce mépris qu’elle a perdu
le
secret de l’humain ? Car voici bien le monde qu’on nous a fait. Tout
2925
nt à cause de ce mépris qu’elle a perdu le secret
de
l’humain ? Car voici bien le monde qu’on nous a fait. Tout encombré d
2926
à cause de ce mépris qu’elle a perdu le secret de
l’
humain ? Car voici bien le monde qu’on nous a fait. Tout encombré d’id
2927
le a perdu le secret de l’humain ? Car voici bien
le
monde qu’on nous a fait. Tout encombré d’idées sans corps, de corps s
2928
ci bien le monde qu’on nous a fait. Tout encombré
d’
idées sans corps, de corps stupides — de nihilistes et de boxeurs, si
2929
on nous a fait. Tout encombré d’idées sans corps,
de
corps stupides — de nihilistes et de boxeurs, si vous voulez —, tout
2930
encombré d’idées sans corps, de corps stupides —
de
nihilistes et de boxeurs, si vous voulez —, tout encombré de larves e
2931
sans corps, de corps stupides — de nihilistes et
de
boxeurs, si vous voulez —, tout encombré de larves et de systèmes qui
2932
es et de boxeurs, si vous voulez —, tout encombré
de
larves et de systèmes qui ne correspondent à rien ni dans le ciel ni
2933
urs, si vous voulez —, tout encombré de larves et
de
systèmes qui ne correspondent à rien ni dans le ciel ni sur la terre.
2934
t de systèmes qui ne correspondent à rien ni dans
le
ciel ni sur la terre. Car enfin, qu’est-ce que l’homme ? qu’est-ce do
2935
ui ne correspondent à rien ni dans le ciel ni sur
la
terre. Car enfin, qu’est-ce que l’homme ? qu’est-ce donc que ce parad
2936
le ciel ni sur la terre. Car enfin, qu’est-ce que
l’
homme ? qu’est-ce donc que ce paradoxal mélange de chair et d’âme ? Pa
2937
l’homme ? qu’est-ce donc que ce paradoxal mélange
de
chair et d’âme ? Paracelse et Swedenborg s’accorderaient, je le crois
2938
’est-ce donc que ce paradoxal mélange de chair et
d’
âme ? Paracelse et Swedenborg s’accorderaient, je le crois, pour répon
2939
âme ? Paracelse et Swedenborg s’accorderaient, je
le
crois, pour répondre. L’homme est un point de vue central et médiateu
2940
borg s’accorderaient, je le crois, pour répondre.
L’
homme est un point de vue central et médiateur entre les corps et les
2941
me est un point de vue central et médiateur entre
les
corps et les esprits. C’est en cela seulement que réside son original
2942
nt de vue central et médiateur entre les corps et
les
esprits. C’est en cela seulement que réside son originalité dans l’un
2943
en cela seulement que réside son originalité dans
l’
univers, son irremplaçable et divine originalité. Les anges eux-mêmes
2944
univers, son irremplaçable et divine originalité.
Les
anges eux-mêmes la lui envient, dit Swedenborg, puisque leur tentatio
2945
açable et divine originalité. Les anges eux-mêmes
la
lui envient, dit Swedenborg, puisque leur tentation, leur nostalgie,
2946
rg, puisque leur tentation, leur nostalgie, c’est
de
revêtir un corps humain. Or, pour l’être situé en un tel lieu — le l
2947
lgie, c’est de revêtir un corps humain. Or, pour
l’
être situé en un tel lieu — le lieu humain par excellence —, il devien
2948
s humain. Or, pour l’être situé en un tel lieu —
le
lieu humain par excellence —, il devient aussitôt patent que toute ré
2949
oute réalité spirituelle a sa correspondance dans
la
matière, ou bien n’est qu’une duperie. Correspondances à vrai dire te
2950
rt des êtres qui peuplent ces villes, là-bas, que
le
nom d’homme ne saurait plus les désigner sans fraude. Un bel assortim
2951
êtres qui peuplent ces villes, là-bas, que le nom
d’
homme ne saurait plus les désigner sans fraude. Un bel assortiment de
2952
illes, là-bas, que le nom d’homme ne saurait plus
les
désigner sans fraude. Un bel assortiment de monstres ! (J’ai lu le jo
2953
plus les désigner sans fraude. Un bel assortiment
de
monstres ! (J’ai lu le journal après dîner.) Et tous les accessoires
2954
fraude. Un bel assortiment de monstres ! (J’ai lu
le
journal après dîner.) Et tous les accessoires de leurs démences, depu
2955
stres ! (J’ai lu le journal après dîner.) Et tous
les
accessoires de leurs démences, depuis les petites ailes dans le dos j
2956
le journal après dîner.) Et tous les accessoires
de
leurs démences, depuis les petites ailes dans le dos jusqu’au groin a
2957
Et tous les accessoires de leurs démences, depuis
les
petites ailes dans le dos jusqu’au groin anti-gaz ! Ah ! Diogène, Dio
2958
de leurs démences, depuis les petites ailes dans
le
dos jusqu’au groin anti-gaz ! Ah ! Diogène, Diogène ! cesse de cherch
2959
au groin anti-gaz ! Ah ! Diogène, Diogène ! cesse
de
chercher un homme. Tâche plutôt d’en devenir un. — Parmi ces gens d’i
2960
iogène ! cesse de chercher un homme. Tâche plutôt
d’
en devenir un. — Parmi ces gens d’ici, qui prennent leur temps. Parmi
2961
26 mai 1929 Curieux comme ces lectures que
les
modernes ont fait passer pour abstraites ont au contraire le pouvoir
2962
ont fait passer pour abstraites ont au contraire
le
pouvoir de rendre à nos sens leur efficacité et leur étonnement. Je r
2963
asser pour abstraites ont au contraire le pouvoir
de
rendre à nos sens leur efficacité et leur étonnement. Je regarde les
2964
ns leur efficacité et leur étonnement. Je regarde
les
feuilles de ma salade d’un autre œil, depuis que je lis Paracelse, mé
2965
acité et leur étonnement. Je regarde les feuilles
de
ma salade d’un autre œil, depuis que je lis Paracelse, méditant avec
2966
étonnement. Je regarde les feuilles de ma salade
d’
un autre œil, depuis que je lis Paracelse, méditant avec appétit sur c
2967
e… Et j’ai copié dans Swedenborg des passages sur
l’
amour des anges et des humains, — l’amour, qui est le lieu des corresp
2968
passages sur l’amour des anges et des humains, —
l’
amour, qui est le lieu des correspondances, qui est le degré suprême d
2969
mour des anges et des humains, — l’amour, qui est
le
lieu des correspondances, qui est le degré suprême de la significatio
2970
our, qui est le lieu des correspondances, qui est
le
degré suprême de la signification. (L’état de l’âme et du corps où to
2971
ieu des correspondances, qui est le degré suprême
de
la signification. (L’état de l’âme et du corps où tout nous apparaît
2972
des correspondances, qui est le degré suprême de
la
signification. (L’état de l’âme et du corps où tout nous apparaît en
2973
s, qui est le degré suprême de la signification. (
L’
état de l’âme et du corps où tout nous apparaît en relations concrètes
2974
est le degré suprême de la signification. (L’état
de
l’âme et du corps où tout nous apparaît en relations concrètes.) 3
2975
le degré suprême de la signification. (L’état de
l’
âme et du corps où tout nous apparaît en relations concrètes.) 31 m
2976
.) 31 mai 1929 Personne n’a fabriqué autant
de
mots abstraits que les professeurs allemands, et cependant, par une a
2977
ersonne n’a fabriqué autant de mots abstraits que
les
professeurs allemands, et cependant, par une apparente contradiction,
2978
s, et cependant, par une apparente contradiction,
la
mentalité du bourgeois de ce pays est puissamment réaliste. J’en trou
2979
pparente contradiction, la mentalité du bourgeois
de
ce pays est puissamment réaliste. J’en trouve des marques bien curieu
2980
iste. J’en trouve des marques bien curieuses dans
les
« Considérations sur ma vie » du père Reinecke. Il y est beaucoup que
2981
ie » du père Reinecke. Il y est beaucoup question
de
la vie éternelle, et d’expériences vécues avec l’Ange gardien, mais c
2982
» du père Reinecke. Il y est beaucoup question de
la
vie éternelle, et d’expériences vécues avec l’Ange gardien, mais c’es
2983
l y est beaucoup question de la vie éternelle, et
d’
expériences vécues avec l’Ange gardien, mais c’est toujours en relatio
2984
de la vie éternelle, et d’expériences vécues avec
l’
Ange gardien, mais c’est toujours en relations pratiques avec le comme
2985
, mais c’est toujours en relations pratiques avec
le
commerce quotidien. J’en traduis cette page Sur la mort : « Mes funér
2986
e commerce quotidien. J’en traduis cette page Sur
la
mort : « Mes funérailles devront se dérouler dans le cadre de Jésus-S
2987
mort : « Mes funérailles devront se dérouler dans
le
cadre de Jésus-Sirach, 38, verset 16-24. Qu’on mange et qu’on boive f
2988
Mes funérailles devront se dérouler dans le cadre
de
Jésus-Sirach, 38, verset 16-24. Qu’on mange et qu’on boive ferme aprè
2989
erme après ma mort, tant que je serai encore dans
la
maison, et qu’on ne lésine pas. Il restera toujours assez, à l’époque
2990
qu’on ne lésine pas. Il restera toujours assez, à
l’
époque de ma mort, pour supporter ces frais ; à tout le moins les mill
2991
lésine pas. Il restera toujours assez, à l’époque
de
ma mort, pour supporter ces frais ; à tout le moins les mille marks q
2992
que de ma mort, pour supporter ces frais ; à tout
le
moins les mille marks que paie la Caisse de décès y suffiront. Il fau
2993
mort, pour supporter ces frais ; à tout le moins
les
mille marks que paie la Caisse de décès y suffiront. Il faut que chac
2994
frais ; à tout le moins les mille marks que paie
la
Caisse de décès y suffiront. Il faut que chacun des participants s’en
2995
tout le moins les mille marks que paie la Caisse
de
décès y suffiront. Il faut que chacun des participants s’en retourne
2996
rrement ! » Et de même, ceux qui auront pris soin
de
moi au moment de ma mort et tôt après devront être largement dédommag
2997
l ne sait si je ne flotterai pas encore au-dessus
de
vous, et si je n’éprouverai pas de l’amertume à voir que mes derniers
2998
core au-dessus de vous, et si je n’éprouverai pas
de
l’amertume à voir que mes derniers désirs mêmes ne sont pas accomplis
2999
e au-dessus de vous, et si je n’éprouverai pas de
l’
amertume à voir que mes derniers désirs mêmes ne sont pas accomplis. T
3000
sont pas accomplis. Tant que je serai étendu dans
la
maison, je veux que la lumière brille dans ma chambre et dans les cor
3001
t que je serai étendu dans la maison, je veux que
la
lumière brille dans ma chambre et dans les corridors, pendant toute l
3002
eux que la lumière brille dans ma chambre et dans
les
corridors, pendant toute la nuit, et qu’on n’y regarde pas à quelques
3003
s ma chambre et dans les corridors, pendant toute
la
nuit, et qu’on n’y regarde pas à quelques kilowatts. Je veux être mis
3004
owatts. Je veux être mis en bière dans mes habits
de
tous les jours, et peu importe si les coudes ou le fond de mon pantal
3005
Je veux être mis en bière dans mes habits de tous
les
jours, et peu importe si les coudes ou le fond de mon pantalon brille
3006
s mes habits de tous les jours, et peu importe si
les
coudes ou le fond de mon pantalon brillent. En aucun cas je ne veux ê
3007
e tous les jours, et peu importe si les coudes ou
le
fond de mon pantalon brillent. En aucun cas je ne veux être emballé d
3008
es jours, et peu importe si les coudes ou le fond
de
mon pantalon brillent. En aucun cas je ne veux être emballé dans une
3009
un cas je ne veux être emballé dans une serviette
de
papier. Je renonce aux couronnes mortuaires et à toute autre marque e
3010
nes mortuaires et à toute autre marque extérieure
de
deuil ; par contre je voudrais que l’on joue sur ma tombe : « Schon d
3011
extérieure de deuil ; par contre je voudrais que
l’
on joue sur ma tombe : « Schon dir Abendglocken klangen » et ensuite :
3012
, oh giesse du ! » 10 juin 1929 Tennis avec
la
jolie fille au collier de perles bleues. Après la partie, où l’on s’e
3013
uin 1929 Tennis avec la jolie fille au collier
de
perles bleues. Après la partie, où l’on s’est renvoyé autant de regar
3014
la jolie fille au collier de perles bleues. Après
la
partie, où l’on s’est renvoyé autant de regards que de balles : — « J
3015
au collier de perles bleues. Après la partie, où
l’
on s’est renvoyé autant de regards que de balles : — « Je vous ai bien
3016
es. Après la partie, où l’on s’est renvoyé autant
de
regards que de balles : — « Je vous ai bien vu, un jour à la fenêtre
3017
rtie, où l’on s’est renvoyé autant de regards que
de
balles : — « Je vous ai bien vu, un jour à la fenêtre de mon amie, vo
3018
que de balles : — « Je vous ai bien vu, un jour à
la
fenêtre de mon amie, vous étiez si melancholisch ! » — « À ma fenêtre
3019
es : — « Je vous ai bien vu, un jour à la fenêtre
de
mon amie, vous étiez si melancholisch ! » — « À ma fenêtre ? Je ne m’
3020
ouviens pas », dis-je, mentant. Une grosse averse
d’
orage nous a fait fuir sous la tonnelle du vestiaire. « N’est-ce pas,
3021
. Une grosse averse d’orage nous a fait fuir sous
la
tonnelle du vestiaire. « N’est-ce pas, les Français sont terribles av
3022
ir sous la tonnelle du vestiaire. « N’est-ce pas,
les
Français sont terribles avec les filles ? » (je pense : comme elles s
3023
« N’est-ce pas, les Français sont terribles avec
les
filles ? » (je pense : comme elles sont tout de suite en fuite, de to
3024
pense : comme elles sont tout de suite en fuite,
de
tout leur maintien, quand elles ne sont pas provocantes). Elle baisse
3025
quand elles ne sont pas provocantes). Elle baisse
les
yeux, rougit, respire. Elle a l’air de se moquer de moi et d’avoir su
3026
le baisse les yeux, rougit, respire. Elle a l’air
de
se moquer de moi et d’avoir subi une sorte d’affront, en même temps.
3027
yeux, rougit, respire. Elle a l’air de se moquer
de
moi et d’avoir subi une sorte d’affront, en même temps. — « Ne regard
3028
git, respire. Elle a l’air de se moquer de moi et
d’
avoir subi une sorte d’affront, en même temps. — « Ne regardez donc pa
3029
air de se moquer de moi et d’avoir subi une sorte
d’
affront, en même temps. — « Ne regardez donc pas mes mains, je dois fa
3030
— « Ne regardez donc pas mes mains, je dois faire
le
ménage ces jours, la peau devient toute sèche et je n’ai même pas pu
3031
pas mes mains, je dois faire le ménage ces jours,
la
peau devient toute sèche et je n’ai même pas pu me faire les ongles…
3032
vient toute sèche et je n’ai même pas pu me faire
les
ongles… ». Elle voudrait ressembler aux girls de son magazine, et me
3033
les ongles… ». Elle voudrait ressembler aux girls
de
son magazine, et me voit comme au cinéma. Moi, je crois entendre Gret
3034
au cinéma. Moi, je crois entendre Gretchen (dans
la
scène du jardin, du premier Faust. Presque les mêmes mots !). Doux ma
3035
ans la scène du jardin, du premier Faust. Presque
les
mêmes mots !). Doux malentendu qui nous rapproche sous la forme, resp
3036
mots !). Doux malentendu qui nous rapproche sous
la
forme, respectivement, d’une carte postale et d’une réminiscence litt
3037
qui nous rapproche sous la forme, respectivement,
d’
une carte postale et d’une réminiscence littéraire. Ses deux sœurs son
3038
la forme, respectivement, d’une carte postale et
d’
une réminiscence littéraire. Ses deux sœurs sont venues la chercher, e
3039
miniscence littéraire. Ses deux sœurs sont venues
la
chercher, et nous sommes rentrés sous le même parapluie, jusqu’à leur
3040
t venues la chercher, et nous sommes rentrés sous
le
même parapluie, jusqu’à leur petite maison couverte de roses Crimson.
3041
me parapluie, jusqu’à leur petite maison couverte
de
roses Crimson. Le père est un colonel en retraite qui déteste les Fra
3042
u’à leur petite maison couverte de roses Crimson.
Le
père est un colonel en retraite qui déteste les Franzosen. On ne me p
3043
n. Le père est un colonel en retraite qui déteste
les
Franzosen. On ne me permet pas d’entrer. 11 juin 1929 Au rebour
3044
te qui déteste les Franzosen. On ne me permet pas
d’
entrer. 11 juin 1929 Au rebours des classiques français, livrés
3045
9 Au rebours des classiques français, livrés à
l’
Enseignement, Goethe est profondément « populaire ». Non seulement l’a
3046
the est profondément « populaire ». Non seulement
l’
aubergiste d’en face cite ses vers en guise de proverbes à propos du t
3047
ndément « populaire ». Non seulement l’aubergiste
d’
en face cite ses vers en guise de proverbes à propos du temps ou des a
3048
à propos du temps ou des affaires locales ; mais
les
bourgeois de Meister parlent exactement comme mes hôtes, avec les mêm
3049
emps ou des affaires locales ; mais les bourgeois
de
Meister parlent exactement comme mes hôtes, avec les mêmes tours fami
3050
Meister parlent exactement comme mes hôtes, avec
les
mêmes tours familiers et sentencieux, qu’il s’agisse des choses du ci
3051
sentencieux, qu’il s’agisse des choses du ciel ou
de
l’ordonnance du ménage. Une fois de plus, je m’émerveille du réalisme
3052
tencieux, qu’il s’agisse des choses du ciel ou de
l’
ordonnance du ménage. Une fois de plus, je m’émerveille du réalisme de
3053
ge. Une fois de plus, je m’émerveille du réalisme
de
ce peuple de rêveurs. Dans les Affinités électives, au moment le plus
3054
de plus, je m’émerveille du réalisme de ce peuple
de
rêveurs. Dans les Affinités électives, au moment le plus dramatique,
3055
rveille du réalisme de ce peuple de rêveurs. Dans
les
Affinités électives, au moment le plus dramatique, celui de la noyade
3056
rêveurs. Dans les Affinités électives, au moment
le
plus dramatique, celui de la noyade pendant le feu d’artifice, souven
3057
és électives, au moment le plus dramatique, celui
de
la noyade pendant le feu d’artifice, souvenez-vous de la comtesse. Va
3058
électives, au moment le plus dramatique, celui de
la
noyade pendant le feu d’artifice, souvenez-vous de la comtesse. Va-t-
3059
nt le plus dramatique, celui de la noyade pendant
le
feu d’artifice, souvenez-vous de la comtesse. Va-t-elle apostropher l
3060
lus dramatique, celui de la noyade pendant le feu
d’
artifice, souvenez-vous de la comtesse. Va-t-elle apostropher le desti
3061
a noyade pendant le feu d’artifice, souvenez-vous
de
la comtesse. Va-t-elle apostropher le destin ou pousser de beaux cris
3062
oyade pendant le feu d’artifice, souvenez-vous de
la
comtesse. Va-t-elle apostropher le destin ou pousser de beaux cris ra
3063
uvenez-vous de la comtesse. Va-t-elle apostropher
le
destin ou pousser de beaux cris raciniens ? Elle envoie le capitaine
3064
tesse. Va-t-elle apostropher le destin ou pousser
de
beaux cris raciniens ? Elle envoie le capitaine au château puis songe
3065
ou pousser de beaux cris raciniens ? Elle envoie
le
capitaine au château puis songe qu’il a oublié la clef de l’armoire a
3066
le capitaine au château puis songe qu’il a oublié
la
clef de l’armoire aux confitures. (Je crois qu’il y a dans cette armo
3067
aine au château puis songe qu’il a oublié la clef
de
l’armoire aux confitures. (Je crois qu’il y a dans cette armoire un c
3068
e au château puis songe qu’il a oublié la clef de
l’
armoire aux confitures. (Je crois qu’il y a dans cette armoire un cord
3069
y a dans cette armoire un cordial tout indiqué en
l’
occurrence.) Ainsi vivait l’Allemagne d’hier — celle de cette provinc
3070
dial tout indiqué en l’occurrence.) Ainsi vivait
l’
Allemagne d’hier — celle de cette province encore — dans l’intimité vi
3071
diqué en l’occurrence.) Ainsi vivait l’Allemagne
d’
hier — celle de cette province encore — dans l’intimité vivante de ses
3072
rrence.) Ainsi vivait l’Allemagne d’hier — celle
de
cette province encore — dans l’intimité vivante de ses classiques. De
3073
ne d’hier — celle de cette province encore — dans
l’
intimité vivante de ses classiques. De là peut-être cette dignité conf
3074
e cette province encore — dans l’intimité vivante
de
ses classiques. De là peut-être cette dignité conférée à la vie bourg
3075
core — dans l’intimité vivante de ses classiques.
De
là peut-être cette dignité conférée à la vie bourgeoise, qui fait un
3076
ssiques. De là peut-être cette dignité conférée à
la
vie bourgeoise, qui fait un peu sourire, et qui est si réconfortante.
3077
Swedenborg : Goethe m’y ramène, dont je lis qu’il
les
prisait fort, ainsi que Boehme, dans sa jeunesse. Il m’y ramène par u
3078
unesse. Il m’y ramène par un tour moins imprudent
de
la réflexion, avec ce même « réalisme » exemplaire, que tout, ici, co
3079
sse. Il m’y ramène par un tour moins imprudent de
la
réflexion, avec ce même « réalisme » exemplaire, que tout, ici, consp
3080
it laisser aucun doute, fussions-nous même privés
de
certains témoignages oraux ou de quelques textes irréfutables. Cepend
3081
nous même privés de certains témoignages oraux ou
de
quelques textes irréfutables. Cependant il possède à un si haut degré
3082
futables. Cependant il possède à un si haut degré
le
sens de l’enrobement des vérités occultes, de leur symbolisme concret
3083
. Cependant il possède à un si haut degré le sens
de
l’enrobement des vérités occultes, de leur symbolisme concret, de leu
3084
ependant il possède à un si haut degré le sens de
l’
enrobement des vérités occultes, de leur symbolisme concret, de leur i
3085
gré le sens de l’enrobement des vérités occultes,
de
leur symbolisme concret, de leur incarnation, qu’il est possible de l
3086
des vérités occultes, de leur symbolisme concret,
de
leur incarnation, qu’il est possible de lire les Affinités « sans y r
3087
concret, de leur incarnation, qu’il est possible
de
lire les Affinités « sans y rien voir », comme on dit15. Mais lorsqu’
3088
, de leur incarnation, qu’il est possible de lire
les
Affinités « sans y rien voir », comme on dit15. Mais lorsqu’on « voit
3089
voit » soudain — quelle prise ! Et combien j’aime
le
paysage de cette œuvre, son climat, jusqu’aux détails de l’intendance
3090
ain — quelle prise ! Et combien j’aime le paysage
de
cette œuvre, son climat, jusqu’aux détails de l’intendance des domain
3091
age de cette œuvre, son climat, jusqu’aux détails
de
l’intendance des domaines. Là, toute démarche de la pensée s’accorde
3092
de cette œuvre, son climat, jusqu’aux détails de
l’
intendance des domaines. Là, toute démarche de la pensée s’accorde à d
3093
de l’intendance des domaines. Là, toute démarche
de
la pensée s’accorde à des pentes variées et réelles, aux collines thu
3094
l’intendance des domaines. Là, toute démarche de
la
pensée s’accorde à des pentes variées et réelles, aux collines thurin
3095
nnes sous un très grand ciel doux. Une atmosphère
de
réflexion confiante et substantielle… Qu’irai-je demander d’autre à c
3096
n confiante et substantielle… Qu’irai-je demander
d’
autre à cette « Germanie aimée16 » ? Ah ! les livres nous avaient bien
3097
ander d’autre à cette « Germanie aimée16 » ? Ah !
les
livres nous avaient bien trompés. Pas trace ici de « merveilleux ». T
3098
s livres nous avaient bien trompés. Pas trace ici
de
« merveilleux ». Tout ce qui, sous d’autres climats, fait effervescen
3099
s d’autres climats, fait effervescence et fuse en
l’
air, ici fermente en pleine pâte. Ainsi voudrais-je un jour décrire ma
3100
rais-je un jour décrire ma Souabe : comme un état
de
l’âme patiente. Une pensée sensuelle et lente, et qui jouit parfois d
3101
s-je un jour décrire ma Souabe : comme un état de
l’
âme patiente. Une pensée sensuelle et lente, et qui jouit parfois de s
3102
e pensée sensuelle et lente, et qui jouit parfois
de
son objet… 13 juin 1929 Werther. J’ai mis des feuilles de buva
3103
13 juin 1929 Werther. J’ai mis des feuilles
de
buvard entre les pages, à cause de toutes ces larmes. Maintenant, par
3104
Werther. J’ai mis des feuilles de buvard entre
les
pages, à cause de toutes ces larmes. Maintenant, parlez-moi du modern
3105
mes. Maintenant, parlez-moi du modernisme éternel
de
cette plainte. — Des Werthers aux yeux secs, voilà ce que nous sommes
3106
1929 Je suis assis en face du magazine que lit
le
père Reinecke. Ses grosses pattes et sa barbe rousse dépassent, et pa
3107
épassent, et parfois un œil égrillard. Impossible
de
lire Meister ce soir. Je ne sais pas ce qu’il y a, sinon que je dois
3108
, sinon que je dois retenir violemment une espèce
de
joie qui attrape la fièvre dans mon corps. Toute cette journée baigné
3109
retenir violemment une espèce de joie qui attrape
la
fièvre dans mon corps. Toute cette journée baignée de l’air des colli
3110
ièvre dans mon corps. Toute cette journée baignée
de
l’air des collines, il semble que mon sang ce soir la comprenne et lu
3111
re dans mon corps. Toute cette journée baignée de
l’
air des collines, il semble que mon sang ce soir la comprenne et lui r
3112
’air des collines, il semble que mon sang ce soir
la
comprenne et lui réponde sourdement. La nuit s’ouvre comme un jardin
3113
g ce soir la comprenne et lui réponde sourdement.
La
nuit s’ouvre comme un jardin aux allées aventureuses. Je sortirai dan
3114
jardin aux allées aventureuses. Je sortirai dans
les
rues vides, je monterai jusqu’au signal, voir le pays sous la lune, j
3115
les rues vides, je monterai jusqu’au signal, voir
le
pays sous la lune, je choisirai une maison isolée, la plus secrète da
3116
s, je monterai jusqu’au signal, voir le pays sous
la
lune, je choisirai une maison isolée, la plus secrète dans les arbres
3117
ays sous la lune, je choisirai une maison isolée,
la
plus secrète dans les arbres de son verger… pour… ? Le sais-je même ?
3118
choisirai une maison isolée, la plus secrète dans
les
arbres de son verger… pour… ? Le sais-je même ? La fille au collier b
3119
ne maison isolée, la plus secrète dans les arbres
de
son verger… pour… ? Le sais-je même ? La fille au collier bleu… Tout
3120
us secrète dans les arbres de son verger… pour… ?
Le
sais-je même ? La fille au collier bleu… Tout d’un coup le sommeil me
3121
s arbres de son verger… pour… ? Le sais-je même ?
La
fille au collier bleu… Tout d’un coup le sommeil me vide les jambes.
3122
Le sais-je même ? La fille au collier bleu… Tout
d’
un coup le sommeil me vide les jambes. La nuit se ferme à l’imaginatio
3123
e même ? La fille au collier bleu… Tout d’un coup
le
sommeil me vide les jambes. La nuit se ferme à l’imagination, cette n
3124
u collier bleu… Tout d’un coup le sommeil me vide
les
jambes. La nuit se ferme à l’imagination, cette nuit qu’il eût fallu
3125
eu… Tout d’un coup le sommeil me vide les jambes.
La
nuit se ferme à l’imagination, cette nuit qu’il eût fallu vivre tout
3126
le sommeil me vide les jambes. La nuit se ferme à
l’
imagination, cette nuit qu’il eût fallu vivre tout entière et qui n’es
3127
entre ce que je vois et ce que je pense, tournant
les
choses, les vidant, allant pincer le nerf Réalité avec un sourd gémis
3128
je vois et ce que je pense, tournant les choses,
les
vidant, allant pincer le nerf Réalité avec un sourd gémissement de la
3129
e, tournant les choses, les vidant, allant pincer
le
nerf Réalité avec un sourd gémissement de la pensée. J’ai vu la vie,
3130
pincer le nerf Réalité avec un sourd gémissement
de
la pensée. J’ai vu la vie, c’est fini, je rentre en moi ; n’ai pas bo
3131
ncer le nerf Réalité avec un sourd gémissement de
la
pensée. J’ai vu la vie, c’est fini, je rentre en moi ; n’ai pas bougé
3132
é avec un sourd gémissement de la pensée. J’ai vu
la
vie, c’est fini, je rentre en moi ; n’ai pas bougé. Le père Reinecke
3133
e, c’est fini, je rentre en moi ; n’ai pas bougé.
Le
père Reinecke ferme son magazine d’un coup, ôte ses lunettes, me rega
3134
ai pas bougé. Le père Reinecke ferme son magazine
d’
un coup, ôte ses lunettes, me regarde avec des yeux écarquillés. « Mai
3135
ec des yeux écarquillés. « Maintenant, dit-il (et
l’
on sent qu’il pense : maintenant que nous avons clos cette journée par
3136
voulons aller dormir. Ainsi, dormez bien, faites
de
doux rêves, — il cligne vers son magazine — pas trop doux, hein !… »
3137
s trop doux, hein !… » Tout cela est très juste ;
la
vie doit être ainsi : parfaitement compréhensible et d’une vulgarité
3138
doit être ainsi : parfaitement compréhensible et
d’
une vulgarité toute naturelle. Il faut aller dormir. Rose de Tannen
3139
. Il faut aller dormir. Rose de Tannenbourg
L’
esplanade du Brühl, un soir de fête, en juin. Il y a dans les marronni
3140
e de Tannenbourg L’esplanade du Brühl, un soir
de
fête, en juin. Il y a dans les marronniers noirs des lampions et des
3141
e du Brühl, un soir de fête, en juin. Il y a dans
les
marronniers noirs des lampions et des touffes de gamins qui regardent
3142
les marronniers noirs des lampions et des touffes
de
gamins qui regardent avec la bouche ce qui se passe à l’intérieur d’u
3143
pions et des touffes de gamins qui regardent avec
la
bouche ce qui se passe à l’intérieur d’une enceinte de toiles tendues
3144
ns qui regardent avec la bouche ce qui se passe à
l’
intérieur d’une enceinte de toiles tendues au-devant d’un petit théâtr
3145
dent avec la bouche ce qui se passe à l’intérieur
d’
une enceinte de toiles tendues au-devant d’un petit théâtre. La rampe
3146
uche ce qui se passe à l’intérieur d’une enceinte
de
toiles tendues au-devant d’un petit théâtre. La rampe a des feux stel
3147
érieur d’une enceinte de toiles tendues au-devant
d’
un petit théâtre. La rampe a des feux stellaires, couleur d’Aldébaran.
3148
e de toiles tendues au-devant d’un petit théâtre.
La
rampe a des feux stellaires, couleur d’Aldébaran. On joue Rose de Tan
3149
théâtre. La rampe a des feux stellaires, couleur
d’
Aldébaran. On joue Rose de Tannenbourg, drame en 15 tableaux, un prolo
3150
me en 15 tableaux, un prologue et une conclusion.
Le
carton des armures sonne sourdement sous les coups d’un Kühnrich à la
3151
sion. Le carton des armures sonne sourdement sous
les
coups d’un Kühnrich à la basse rugissante, plus traître que nature av
3152
arton des armures sonne sourdement sous les coups
d’
un Kühnrich à la basse rugissante, plus traître que nature avec sa lar
3153
s sonne sourdement sous les coups d’un Kühnrich à
la
basse rugissante, plus traître que nature avec sa large face mangée p
3154
e avec sa large face mangée par une barbe en crin
de
cheval du diable. L’héroïne est belle comme une ballade de Bürger, ta
3155
mangée par une barbe en crin de cheval du diable.
L’
héroïne est belle comme une ballade de Bürger, tandis qu’elle arrose d
3156
du diable. L’héroïne est belle comme une ballade
de
Bürger, tandis qu’elle arrose de ses larmes le seuil de la prison pat
3157
omme une ballade de Bürger, tandis qu’elle arrose
de
ses larmes le seuil de la prison paternelle, tout en coulant un clin
3158
de de Bürger, tandis qu’elle arrose de ses larmes
le
seuil de la prison paternelle, tout en coulant un clin d’œil assassin
3159
ger, tandis qu’elle arrose de ses larmes le seuil
de
la prison paternelle, tout en coulant un clin d’œil assassin vers le
3160
, tandis qu’elle arrose de ses larmes le seuil de
la
prison paternelle, tout en coulant un clin d’œil assassin vers le par
3161
elle, tout en coulant un clin d’œil assassin vers
le
parterre agité de passions contradictoires. Durant les entractes, une
3162
ant un clin d’œil assassin vers le parterre agité
de
passions contradictoires. Durant les entractes, une fanfare de paysan
3163
arterre agité de passions contradictoires. Durant
les
entractes, une fanfare de paysans bleu de roi joue sur un rythme impe
3164
ontradictoires. Durant les entractes, une fanfare
de
paysans bleu de roi joue sur un rythme impeccable, avec toujours les
3165
Durant les entractes, une fanfare de paysans bleu
de
roi joue sur un rythme impeccable, avec toujours les mêmes notes fêlé
3166
roi joue sur un rythme impeccable, avec toujours
les
mêmes notes fêlées et l’accompagnement dans les feuillages de voix fa
3167
peccable, avec toujours les mêmes notes fêlées et
l’
accompagnement dans les feuillages de voix fausses mais aériennes, des
3168
s les mêmes notes fêlées et l’accompagnement dans
les
feuillages de voix fausses mais aériennes, des chansons du Grand Duch
3169
es fêlées et l’accompagnement dans les feuillages
de
voix fausses mais aériennes, des chansons du Grand Duché de Bade qui
3170
usses mais aériennes, des chansons du Grand Duché
de
Bade qui sont ce que je connais de plus indiciblement nostalgique. U
3171
n, muss sie am Rheine Geboren sein… (Il faudrait
la
mélodie.) La fanfare s’éloigne. La nuit est chaude sur les collines.
3172
m Rheine Geboren sein… (Il faudrait la mélodie.)
La
fanfare s’éloigne. La nuit est chaude sur les collines. Un grand verr
3173
(Il faudrait la mélodie.) La fanfare s’éloigne.
La
nuit est chaude sur les collines. Un grand verre de bière à l’auberge
3174
ie.) La fanfare s’éloigne. La nuit est chaude sur
les
collines. Un grand verre de bière à l’auberge déserte, ma pipe et mon
3175
nuit est chaude sur les collines. Un grand verre
de
bière à l’auberge déserte, ma pipe et mon chien qui bougonne. La peti
3176
haude sur les collines. Un grand verre de bière à
l’
auberge déserte, ma pipe et mon chien qui bougonne. La petite maison d
3177
berge déserte, ma pipe et mon chien qui bougonne.
La
petite maison du colonel en retraite a des fenêtres basses, mais défe
3178
iers sauvages. Laquelle des trois filles est donc
la
plus jolie ? Sans doute celle qui dort dans la mansarde, et qui n’a p
3179
nc la plus jolie ? Sans doute celle qui dort dans
la
mansarde, et qui n’a pas peur… Mais c’est l’aînée que je préfère, et
3180
dans la mansarde, et qui n’a pas peur… Mais c’est
l’
aînée que je préfère, et qui m’attend peut-être, derrière ses volets m
3181
ué son collier à mon poignet : « pour que je rêve
d’
elle ». Son sérieux enfantin devant la vie. « Es ist doch Schicksal, e
3182
que je rêve d’elle ». Son sérieux enfantin devant
la
vie. « Es ist doch Schicksal, es ist alles Schicksal ! » Avec un soup
3183
et cela signifie d’ailleurs qu’il n’y a pas lieu
de
résister. 22 juin 1929 Rencontre avec la jeune fille tzigane.
3184
u de résister. 22 juin 1929 Rencontre avec
la
jeune fille tzigane. Le dirai-je ici comme un rêve ? ou comme quelque
3185
n 1929 Rencontre avec la jeune fille tzigane.
Le
dirai-je ici comme un rêve ? ou comme quelque chose de bien vrai et q
3186
rai-je ici comme un rêve ? ou comme quelque chose
de
bien vrai et qui s’est passé cette nuit ? Plusieurs choses sont douce
3187
ette nuit ? Plusieurs choses sont douces au désir
de
celui qui marche dans une campagne nocturne. Mais plus douce que tout
3188
e nocturne. Mais plus douce que toutes choses est
la
rencontre sous un arbre noir d’une femme abandonnée dans sa tristesse
3189
toutes choses est la rencontre sous un arbre noir
d’
une femme abandonnée dans sa tristesse. Par moments il y a la Lune et
3190
abandonnée dans sa tristesse. Par moments il y a
la
Lune et le visage blanc de la femme debout contre le tronc. (Pour moi
3191
dans sa tristesse. Par moments il y a la Lune et
le
visage blanc de la femme debout contre le tronc. (Pour moi je demeure
3192
se. Par moments il y a la Lune et le visage blanc
de
la femme debout contre le tronc. (Pour moi je demeure dans l’ombre.)
3193
Par moments il y a la Lune et le visage blanc de
la
femme debout contre le tronc. (Pour moi je demeure dans l’ombre.) Qua
3194
Lune et le visage blanc de la femme debout contre
le
tronc. (Pour moi je demeure dans l’ombre.) Quand la Lune s’en va, il
3195
debout contre le tronc. (Pour moi je demeure dans
l’
ombre.) Quand la Lune s’en va, il y a ce haut corps obscur qui vit tou
3196
tronc. (Pour moi je demeure dans l’ombre.) Quand
la
Lune s’en va, il y a ce haut corps obscur qui vit tout près de moi da
3197
vit tout près de moi dans son véritable silence,
les
yeux clos. L’arbre, en sa nuit vivante, rêve de nous. Plus tard, nous
3198
de moi dans son véritable silence, les yeux clos.
L’
arbre, en sa nuit vivante, rêve de nous. Plus tard, nous nous sommes r
3199
les yeux clos. L’arbre, en sa nuit vivante, rêve
de
nous. Plus tard, nous nous sommes regardés sans fin. (Ah ! comment di
3200
ette nuit.) Un vent léger écartait une branche et
la
Lune éclairait à longs traits nos visages. Je reconnus la jeune fille
3201
éclairait à longs traits nos visages. Je reconnus
la
jeune fille tzigane, ma Rose noire de Tannenbourg. La lumière délirai
3202
Je reconnus la jeune fille tzigane, ma Rose noire
de
Tannenbourg. La lumière délirait doucement, au sein du silence et du
3203
eune fille tzigane, ma Rose noire de Tannenbourg.
La
lumière délirait doucement, au sein du silence et du regard. Et nous
3204
egard. Et nous sommes demeurés des heures au-delà
de
ce que l’on ignore d’un être, dans le domaine sans frontière où l’on
3205
nous sommes demeurés des heures au-delà de ce que
l’
on ignore d’un être, dans le domaine sans frontière où l’on connaît pr
3206
demeurés des heures au-delà de ce que l’on ignore
d’
un être, dans le domaine sans frontière où l’on connaît profondément.
3207
res au-delà de ce que l’on ignore d’un être, dans
le
domaine sans frontière où l’on connaît profondément. Par les yeux d’u
3208
nore d’un être, dans le domaine sans frontière où
l’
on connaît profondément. Par les yeux d’une femme étrangère, mes yeux
3209
sans frontière où l’on connaît profondément. Par
les
yeux d’une femme étrangère, mes yeux possédaient sans mesure tout ce
3210
ntière où l’on connaît profondément. Par les yeux
d’
une femme étrangère, mes yeux possédaient sans mesure tout ce que l’an
3211
ère, mes yeux possédaient sans mesure tout ce que
l’
anxiété de la vie nous dérobe : la nudité, la plénitude et la violence
3212
eux possédaient sans mesure tout ce que l’anxiété
de
la vie nous dérobe : la nudité, la plénitude et la violence infinimen
3213
possédaient sans mesure tout ce que l’anxiété de
la
vie nous dérobe : la nudité, la plénitude et la violence infiniment c
3214
ure tout ce que l’anxiété de la vie nous dérobe :
la
nudité, la plénitude et la violence infiniment comblée. Oui, j’ai su
3215
que l’anxiété de la vie nous dérobe : la nudité,
la
plénitude et la violence infiniment comblée. Oui, j’ai su que l’échan
3216
e la vie nous dérobe : la nudité, la plénitude et
la
violence infiniment comblée. Oui, j’ai su que l’échange de deux regar
3217
la violence infiniment comblée. Oui, j’ai su que
l’
échange de deux regards est infini, est indéfiniment grandiose et musi
3218
ce infiniment comblée. Oui, j’ai su que l’échange
de
deux regards est infini, est indéfiniment grandiose et musical. Ainsi
3219
s touchées, lorsque au point du jour je vis pâlir
la
jeune femme. Elle comprit que j’allais parler et mit un doigt contre
3220
ai mes regards sur ses vêtements misérables et je
l’
accueillis dans mes bras. Elle rêvait, ses mains étaient très douces,
3221
u bien une prairie. (Je suis rentré sans éveiller
le
chien. Un chaud soleil pénétrait dans la grande maison fraîche. Maint
3222
éveiller le chien. Un chaud soleil pénétrait dans
la
grande maison fraîche. Maintenant la journée commence, avec les pas d
3223
nétrait dans la grande maison fraîche. Maintenant
la
journée commence, avec les pas de la servante au corridor.) 30 jui
3224
son fraîche. Maintenant la journée commence, avec
les
pas de la servante au corridor.) 30 juin 1929 Hier soir sur la
3225
che. Maintenant la journée commence, avec les pas
de
la servante au corridor.) 30 juin 1929 Hier soir sur la route d
3226
. Maintenant la journée commence, avec les pas de
la
servante au corridor.) 30 juin 1929 Hier soir sur la route des
3227
te au corridor.) 30 juin 1929 Hier soir sur
la
route des collines, pendant une promenade d’après dîner avec mes hôte
3228
enade d’après dîner avec mes hôtes, nous parlions
de
prémonitions, et je venais de raconter comment parfois j’ai su qui m’
3229
aconter comment parfois j’ai su qui m’attendait à
la
lisière de cette forêt tel soir d’été, quel sujet d’examen venait de
3230
ment parfois j’ai su qui m’attendait à la lisière
de
cette forêt tel soir d’été, quel sujet d’examen venait de m’être rése
3231
m’attendait à la lisière de cette forêt tel soir
d’
été, quel sujet d’examen venait de m’être réservé, ou quelles lettres
3232
lisière de cette forêt tel soir d’été, quel sujet
d’
examen venait de m’être réservé, ou quelles lettres j’allais recevoir
3233
tre réservé, ou quelles lettres j’allais recevoir
le
lendemain. Le soir montait autour de nous, des fenêtres s’allumaient
3234
u quelles lettres j’allais recevoir le lendemain.
Le
soir montait autour de nous, des fenêtres s’allumaient à nos pieds da
3235
nous, des fenêtres s’allumaient à nos pieds dans
le
bourg, et le père Reinecke refusait de croire à mes histoires. Soudai
3236
nêtres s’allumaient à nos pieds dans le bourg, et
le
père Reinecke refusait de croire à mes histoires. Soudain j’ai dit :
3237
pieds dans le bourg, et le père Reinecke refusait
de
croire à mes histoires. Soudain j’ai dit : « Voilà que ça me prend, t
3238
ent ! Attendez que je vous dise… Sur mon assiette
de
petit déjeuner, demain matin, il y a une grande enveloppe jaune, une
3239
lair, et une plus petite enveloppe blanche bordée
de
noir. » (Sentiment de certitude tranquille, ces objets vus dans une l
3240
te enveloppe blanche bordée de noir. » (Sentiment
de
certitude tranquille, ces objets vus dans une lumière sobre et mate.)
3241
ès nettement perçus, mais rien de plus, donc rien
d’
utilisable éventuellement. Ce matin, en trouvant les trois lettres sur
3242
’utilisable éventuellement. Ce matin, en trouvant
les
trois lettres sur mon assiette, j’ai dit : « C’est bien cela », sans
3243
siette, j’ai dit : « C’est bien cela », sans plus
d’
étonnement que les autres fois. Le père Reinecke, survenu peu après, n
3244
: « C’est bien cela », sans plus d’étonnement que
les
autres fois. Le père Reinecke, survenu peu après, n’est pas encore co
3245
la », sans plus d’étonnement que les autres fois.
Le
père Reinecke, survenu peu après, n’est pas encore convaincu. Il prét
3246
que je savais qui allait m’écrire, et que j’avais
d’
assez bonnes chances de deviner juste. Mais je n’ai rien deviné du tou
3247
t m’écrire, et que j’avais d’assez bonnes chances
de
deviner juste. Mais je n’ai rien deviné du tout, puisque j’ai vu ! C’
3248
n deviné du tout, puisque j’ai vu ! C’est là tout
l’
intérêt de l’affaire : cette perception soudaine, ce regard par mégard
3249
u tout, puisque j’ai vu ! C’est là tout l’intérêt
de
l’affaire : cette perception soudaine, ce regard par mégarde sur un p
3250
out, puisque j’ai vu ! C’est là tout l’intérêt de
l’
affaire : cette perception soudaine, ce regard par mégarde sur un peti
3251
t en soi, et qui n’est pas encore « arrivé » dans
le
temps. Les trois lettres sont timbrées d’hier, deux à Genève dans la
3252
et qui n’est pas encore « arrivé » dans le temps.
Les
trois lettres sont timbrées d’hier, deux à Genève dans la matinée, un
3253
» dans le temps. Les trois lettres sont timbrées
d’
hier, deux à Genève dans la matinée, une à Neuchâtel à sept heures du
3254
lettres sont timbrées d’hier, deux à Genève dans
la
matinée, une à Neuchâtel à sept heures du soir. Celle qui est bordée
3255
hâtel à sept heures du soir. Celle qui est bordée
de
noir est d’un ami aîné qui mentionne en passant la mort de sa belle-m
3256
heures du soir. Celle qui est bordée de noir est
d’
un ami aîné qui mentionne en passant la mort de sa belle-mère, survenu
3257
e noir est d’un ami aîné qui mentionne en passant
la
mort de sa belle-mère, survenue il y a quelques jours. La lettre bleu
3258
st d’un ami aîné qui mentionne en passant la mort
de
sa belle-mère, survenue il y a quelques jours. La lettre bleue est de
3259
de sa belle-mère, survenue il y a quelques jours.
La
lettre bleue est de Pierre Girard, personnage imprévisible s’il en fu
3260
rvenue il y a quelques jours. La lettre bleue est
de
Pierre Girard, personnage imprévisible s’il en fut, et je n’avais auc
3261
évisible s’il en fut, et je n’avais aucune raison
d’
attendre qu’il m’écrive. Quant à l’enveloppe jaune, elle contenait un
3262
aucune raison d’attendre qu’il m’écrive. Quant à
l’
enveloppe jaune, elle contenait un article où l’on revient sur mon pam
3263
à l’enveloppe jaune, elle contenait un article où
l’
on revient sur mon pamphlet de l’hiver dernier17. Lorsque j’ai vu ces
3264
enait un article où l’on revient sur mon pamphlet
de
l’hiver dernier17. Lorsque j’ai vu ces enveloppes hier soir, un peu a
3265
it un article où l’on revient sur mon pamphlet de
l’
hiver dernier17. Lorsque j’ai vu ces enveloppes hier soir, un peu aprè
3266
soir, un peu après neuf heures, sans rien deviner
de
leur contenu que je ne pouvais voir à travers l’enveloppe, ni de leur
3267
de leur contenu que je ne pouvais voir à travers
l’
enveloppe, ni de leur expéditeur (je n’ai pas vu l’écriture des adress
3268
que je ne pouvais voir à travers l’enveloppe, ni
de
leur expéditeur (je n’ai pas vu l’écriture des adresses), elles roula
3269
’enveloppe, ni de leur expéditeur (je n’ai pas vu
l’
écriture des adresses), elles roulaient donc déjà vers Calw, mais dans
3270
éjà vers Calw, mais dans différents sacs postaux.
Les
voir par anticipation ne pouvait exercer le moindre effet ni sur leur
3271
aux. Les voir par anticipation ne pouvait exercer
le
moindre effet ni sur leur rédaction, ni sur le moment de leur arrivée
3272
er le moindre effet ni sur leur rédaction, ni sur
le
moment de leur arrivée, ni sur ma conduite : la vision n’a « servi »
3273
dre effet ni sur leur rédaction, ni sur le moment
de
leur arrivée, ni sur ma conduite : la vision n’a « servi » exactement
3274
r le moment de leur arrivée, ni sur ma conduite :
la
vision n’a « servi » exactement à rien. (Était-ce là sa condition de
3275
vi » exactement à rien. (Était-ce là sa condition
de
possibilité ?) Mais elle m’est signe d’un certain état d’accueil aux
3276
condition de possibilité ?) Mais elle m’est signe
d’
un certain état d’accueil aux choses, d’une rupture des enchaînements
3277
bilité ?) Mais elle m’est signe d’un certain état
d’
accueil aux choses, d’une rupture des enchaînements utiles, d’une dist
3278
est signe d’un certain état d’accueil aux choses,
d’
une rupture des enchaînements utiles, d’une distraction des évidences
3279
x choses, d’une rupture des enchaînements utiles,
d’
une distraction des évidences rationnelles, à la faveur de quoi c’est
3280
, d’une distraction des évidences rationnelles, à
la
faveur de quoi c’est la « vraie vie » qui se laissera peut-être appro
3281
straction des évidences rationnelles, à la faveur
de
quoi c’est la « vraie vie » qui se laissera peut-être approcher. D
3282
évidences rationnelles, à la faveur de quoi c’est
la
« vraie vie » qui se laissera peut-être approcher. Début de juille
3283
e » qui se laissera peut-être approcher. Début
de
juillet 1929 « Écrivez donc une nouvelle allemande pleine de myoso
3284
9 « Écrivez donc une nouvelle allemande pleine
de
myosotis, de Gérard de Nerval, de victoria égarée dans la forêt, de c
3285
z donc une nouvelle allemande pleine de myosotis,
de
Gérard de Nerval, de victoria égarée dans la forêt, de chasseur à la
3286
llemande pleine de myosotis, de Gérard de Nerval,
de
victoria égarée dans la forêt, de chasseur à la redingote verte, de j
3287
tis, de Gérard de Nerval, de victoria égarée dans
la
forêt, de chasseur à la redingote verte, de jeunes filles qui jouent
3288
rard de Nerval, de victoria égarée dans la forêt,
de
chasseur à la redingote verte, de jeunes filles qui jouent du violon
3289
, de victoria égarée dans la forêt, de chasseur à
la
redingote verte, de jeunes filles qui jouent du violon dans les champ
3290
dans la forêt, de chasseur à la redingote verte,
de
jeunes filles qui jouent du violon dans les champs de myrtilles et d’
3291
verte, de jeunes filles qui jouent du violon dans
les
champs de myrtilles et d’impératrices qui prient dans des chapelles e
3292
eunes filles qui jouent du violon dans les champs
de
myrtilles et d’impératrices qui prient dans des chapelles envahies pa
3293
jouent du violon dans les champs de myrtilles et
d’
impératrices qui prient dans des chapelles envahies par les sapins. »
3294
trices qui prient dans des chapelles envahies par
les
sapins. » C’est une lettre de l’auteur de la Rose de Thuringe, Pierre
3295
elles envahies par les sapins. » C’est une lettre
de
l’auteur de la Rose de Thuringe, Pierre Girard. J’ai répondu : « Je n
3296
es envahies par les sapins. » C’est une lettre de
l’
auteur de la Rose de Thuringe, Pierre Girard. J’ai répondu : « Je ne s
3297
es par les sapins. » C’est une lettre de l’auteur
de
la Rose de Thuringe, Pierre Girard. J’ai répondu : « Je ne sais pas s
3298
par les sapins. » C’est une lettre de l’auteur de
la
Rose de Thuringe, Pierre Girard. J’ai répondu : « Je ne sais pas si v
3299
sais pas si vous avez connu ce contentement large
de
tout l’être devant un verre de vin allemand que l’on boit à petites g
3300
si vous avez connu ce contentement large de tout
l’
être devant un verre de vin allemand que l’on boit à petites gorgées,
3301
contentement large de tout l’être devant un verre
de
vin allemand que l’on boit à petites gorgées, entre des bouffées de p
3302
e tout l’être devant un verre de vin allemand que
l’
on boit à petites gorgées, entre des bouffées de pipe, à l’auberge. Le
3303
e l’on boit à petites gorgées, entre des bouffées
de
pipe, à l’auberge. Le charme se compose de voluptés du goût et de l’o
3304
à petites gorgées, entre des bouffées de pipe, à
l’
auberge. Le charme se compose de voluptés du goût et de l’odorat, de l
3305
gorgées, entre des bouffées de pipe, à l’auberge.
Le
charme se compose de voluptés du goût et de l’odorat, de lenteur et d
3306
uffées de pipe, à l’auberge. Le charme se compose
de
voluptés du goût et de l’odorat, de lenteur et d’une certaine puissan
3307
erge. Le charme se compose de voluptés du goût et
de
l’odorat, de lenteur et d’une certaine puissance de l’esprit qui se c
3308
e. Le charme se compose de voluptés du goût et de
l’
odorat, de lenteur et d’une certaine puissance de l’esprit qui se conc
3309
me se compose de voluptés du goût et de l’odorat,
de
lenteur et d’une certaine puissance de l’esprit qui se concentre dans
3310
de voluptés du goût et de l’odorat, de lenteur et
d’
une certaine puissance de l’esprit qui se concentre dans un désir ou d
3311
l’odorat, de lenteur et d’une certaine puissance
de
l’esprit qui se concentre dans un désir ou dans un rêve. Le vin de So
3312
odorat, de lenteur et d’une certaine puissance de
l’
esprit qui se concentre dans un désir ou dans un rêve. Le vin de Souab
3313
t qui se concentre dans un désir ou dans un rêve.
Le
vin de Souabe grise insensiblement, c’est plutôt qu’une fièvre une ju
3314
e concentre dans un désir ou dans un rêve. Le vin
de
Souabe grise insensiblement, c’est plutôt qu’une fièvre une jubilatio
3315
e fièvre une jubilation bonhomme qui commence par
le
cœur et se contente de ralentir doucement les idées. C’est un attendr
3316
bonhomme qui commence par le cœur et se contente
de
ralentir doucement les idées. C’est un attendrissement plein de force
3317
par le cœur et se contente de ralentir doucement
les
idées. C’est un attendrissement plein de force et de dignité. Alors s
3318
ucement les idées. C’est un attendrissement plein
de
force et de dignité. Alors si l’on est quelques-uns, on se met à chan
3319
idées. C’est un attendrissement plein de force et
de
dignité. Alors si l’on est quelques-uns, on se met à chanter des chos
3320
drissement plein de force et de dignité. Alors si
l’
on est quelques-uns, on se met à chanter des choses déchirantes qui pe
3321
imer cette euphorie. Quelques larmes font briller
les
yeux souriants et généreux. On se sent très près de ce qu’il y a de p
3322
e sent très près de ce qu’il y a de plus pur dans
la
nature et toutes sortes de sensualités et de gourmandises qui s’éveil
3323
l y a de plus pur dans la nature et toutes sortes
de
sensualités et de gourmandises qui s’éveillent, en sont comme sanctif
3324
dans la nature et toutes sortes de sensualités et
de
gourmandises qui s’éveillent, en sont comme sanctifiées. Mais c’est l
3325
’éveillent, en sont comme sanctifiées. Mais c’est
le
moment d’entamer le jambon et les cornichons que dépose sur la table
3326
, en sont comme sanctifiées. Mais c’est le moment
d’
entamer le jambon et les cornichons que dépose sur la table une servan
3327
comme sanctifiées. Mais c’est le moment d’entamer
le
jambon et les cornichons que dépose sur la table une servante respect
3328
iées. Mais c’est le moment d’entamer le jambon et
les
cornichons que dépose sur la table une servante respectueuse des plai
3329
ntamer le jambon et les cornichons que dépose sur
la
table une servante respectueuse des plaisirs des hommes, et peut-être
3330
ueuse des plaisirs des hommes, et peut-être aussi
de
leurs familiarités. » J’étais attablé ce soir-là dans l’Auberge du Ce
3331
s familiarités. » J’étais attablé ce soir-là dans
l’
Auberge du Cerf, au premier, les pieds contre mon schnauzer enfin calm
3332
lé ce soir-là dans l’Auberge du Cerf, au premier,
les
pieds contre mon schnauzer enfin calmé (il avait harcelé la servante
3333
ontre mon schnauzer enfin calmé (il avait harcelé
la
servante avec cette démesure qu’apportent dans leurs démonstrations l
3334
e démesure qu’apportent dans leurs démonstrations
les
chiens de tous les pays). Au bout d’un certain temps, et sans doute à
3335
qu’apportent dans leurs démonstrations les chiens
de
tous les pays). Au bout d’un certain temps, et sans doute à cause de
3336
tent dans leurs démonstrations les chiens de tous
les
pays). Au bout d’un certain temps, et sans doute à cause de ce que je
3337
temps, et sans doute à cause de ce que je venais
d’
écrire, la faim me prit et je demandai une paire de saucisses croquant
3338
sans doute à cause de ce que je venais d’écrire,
la
faim me prit et je demandai une paire de saucisses croquantes et de l
3339
’écrire, la faim me prit et je demandai une paire
de
saucisses croquantes et de la moutarde douce. Le journal local m’avai
3340
je demandai une paire de saucisses croquantes et
de
la moutarde douce. Le journal local m’avait apporté cette ration de b
3341
demandai une paire de saucisses croquantes et de
la
moutarde douce. Le journal local m’avait apporté cette ration de boul
3342
de saucisses croquantes et de la moutarde douce.
Le
journal local m’avait apporté cette ration de bouleversements, locaux
3343
ce. Le journal local m’avait apporté cette ration
de
bouleversements, locaux aussi à leur manière, et très éloignés, qui c
3344
peser des idées qui venaient se poser devant moi.
La
servante à l’autre coin de la pièce brodait, baillait, se sentait seu
3345
t se poser devant moi. La servante à l’autre coin
de
la pièce brodait, baillait, se sentait seule aussi. Ah ! pensai-je —
3346
e poser devant moi. La servante à l’autre coin de
la
pièce brodait, baillait, se sentait seule aussi. Ah ! pensai-je — et
3347
j’écris ici, c’était alors une soudaine virulence
de
ma pensée, un élan contenu de certitude et de tendre lucidité, — je s
3348
soudaine virulence de ma pensée, un élan contenu
de
certitude et de tendre lucidité, — je sais pourquoi je puis rester da
3349
nce de ma pensée, un élan contenu de certitude et
de
tendre lucidité, — je sais pourquoi je puis rester dans cette Souabe
3350
es jours, je crois, oui je crois bien que je sens
la
vie tout le temps… 15 juillet 1929 Le père Reinecke me félicite
3351
crois, oui je crois bien que je sens la vie tout
le
temps… 15 juillet 1929 Le père Reinecke me félicite sur ma bonn
3352
sens la vie tout le temps… 15 juillet 1929
Le
père Reinecke me félicite sur ma bonne mine, résultat selon lui de l’
3353
me félicite sur ma bonne mine, résultat selon lui
de
l’excellente cuisine que nous sert la Gnädige. Je n’aurais plus l’air
3354
félicite sur ma bonne mine, résultat selon lui de
l’
excellente cuisine que nous sert la Gnädige. Je n’aurais plus l’air ci
3355
t selon lui de l’excellente cuisine que nous sert
la
Gnädige. Je n’aurais plus l’air citadin. Allons bon, félicitons l’hôt
3356
uisine que nous sert la Gnädige. Je n’aurais plus
l’
air citadin. Allons bon, félicitons l’hôtesse. Au reste il s’agit bel
3357
aurais plus l’air citadin. Allons bon, félicitons
l’
hôtesse. Au reste il s’agit bel et bien d’une question de nourriture,
3358
icitons l’hôtesse. Au reste il s’agit bel et bien
d’
une question de nourriture, — la question fondamentale, et non point s
3359
se. Au reste il s’agit bel et bien d’une question
de
nourriture, — la question fondamentale, et non point seulement pour l
3360
’agit bel et bien d’une question de nourriture, —
la
question fondamentale, et non point seulement pour le corps. J’ai pen
3361
uestion fondamentale, et non point seulement pour
le
corps. J’ai pensé aux gens des villes, au décor de leur « vie ». J’ai
3362
e corps. J’ai pensé aux gens des villes, au décor
de
leur « vie ». J’ai vu clairement qu’ils sont en péril d’inanition spi
3363
« vie ». J’ai vu clairement qu’ils sont en péril
d’
inanition spirituelle. Ils ne dorment plus assez pour se rendre compte
3364
. Ils ne dorment plus assez pour se rendre compte
de
la décadence de leurs rêves et des possessions en rêve — ce signal d’
3365
ls ne dorment plus assez pour se rendre compte de
la
décadence de leurs rêves et des possessions en rêve — ce signal d’ala
3366
plus assez pour se rendre compte de la décadence
de
leurs rêves et des possessions en rêve — ce signal d’alarme —, et l’a
3367
eurs rêves et des possessions en rêve — ce signal
d’
alarme —, et l’amour qu’ils essaient encore le samedi soir n’est plus
3368
es possessions en rêve — ce signal d’alarme —, et
l’
amour qu’ils essaient encore le samedi soir n’est plus cet infini repo
3369
nal d’alarme —, et l’amour qu’ils essaient encore
le
samedi soir n’est plus cet infini repos dans la puissance et l’être,
3370
e le samedi soir n’est plus cet infini repos dans
la
puissance et l’être, mais seulement une usure des nerfs. Lampe vide,
3371
n’est plus cet infini repos dans la puissance et
l’
être, mais seulement une usure des nerfs. Lampe vide, la mèche se cons
3372
, mais seulement une usure des nerfs. Lampe vide,
la
mèche se consume. Bois du lait, perds du temps, bats les lisières du
3373
he se consume. Bois du lait, perds du temps, bats
les
lisières du sommeil. Ou bien descends les bras collés au corps dans l
3374
s, bats les lisières du sommeil. Ou bien descends
les
bras collés au corps dans l’onde apaisée du souvenir. Sois riche d’av
3375
l. Ou bien descends les bras collés au corps dans
l’
onde apaisée du souvenir. Sois riche d’avoir ce que tu es, comme ils s
3376
corps dans l’onde apaisée du souvenir. Sois riche
d’
avoir ce que tu es, comme ils sont pauvres de n’avoir que ce qu’ils on
3377
iche d’avoir ce que tu es, comme ils sont pauvres
de
n’avoir que ce qu’ils ont. 19 juillet 1929 Ces mois de Souabe m
3378
que ce qu’ils ont. 19 juillet 1929 Ces mois
de
Souabe m’apparaissent de plus en plus comme une retraite sensuelle. N
3379
plus comme une retraite sensuelle. N’est-ce point
de
cela que l’homme des villes a besoin de nos jours ? On parle toujours
3380
ne retraite sensuelle. N’est-ce point de cela que
l’
homme des villes a besoin de nos jours ? On parle toujours de son appé
3381
-ce point de cela que l’homme des villes a besoin
de
nos jours ? On parle toujours de son appétit de plaisir. C’est un cli
3382
villes a besoin de nos jours ? On parle toujours
de
son appétit de plaisir. C’est un cliché d’un autre âge, et trompeur.
3383
n de nos jours ? On parle toujours de son appétit
de
plaisir. C’est un cliché d’un autre âge, et trompeur. Car l’argent n’
3384
ujours de son appétit de plaisir. C’est un cliché
d’
un autre âge, et trompeur. Car l’argent n’est pas le plaisir et ne s’o
3385
C’est un cliché d’un autre âge, et trompeur. Car
l’
argent n’est pas le plaisir et ne s’obtient pas dans le plaisir. Les a
3386
un autre âge, et trompeur. Car l’argent n’est pas
le
plaisir et ne s’obtient pas dans le plaisir. Les affaires modernes vu
3387
ent n’est pas le plaisir et ne s’obtient pas dans
le
plaisir. Les affaires modernes vulgarisent en fait une ascèse inhumai
3388
s le plaisir et ne s’obtient pas dans le plaisir.
Les
affaires modernes vulgarisent en fait une ascèse inhumaine et sans bu
3389
scèse inhumaine et sans but divin. C’est pourquoi
l’
usage d’une sensualité consciente redevient une conquête de la sagesse
3390
humaine et sans but divin. C’est pourquoi l’usage
d’
une sensualité consciente redevient une conquête de la sagesse. Fin j
3391
’une sensualité consciente redevient une conquête
de
la sagesse. Fin juillet. Promenades sous la pluie, à la tombée du jo
3392
e sensualité consciente redevient une conquête de
la
sagesse. Fin juillet. Promenades sous la pluie, à la tombée du jour.
3393
uête de la sagesse. Fin juillet. Promenades sous
la
pluie, à la tombée du jour. L’esprit patient et fort trouve son repos
3394
agesse. Fin juillet. Promenades sous la pluie, à
la
tombée du jour. L’esprit patient et fort trouve son repos dans les fi
3395
t. Promenades sous la pluie, à la tombée du jour.
L’
esprit patient et fort trouve son repos dans les figures qu’il engendr
3396
r. L’esprit patient et fort trouve son repos dans
les
figures qu’il engendre. Il arrive aussi qu’il les aime et qu’il resse
3397
les figures qu’il engendre. Il arrive aussi qu’il
les
aime et qu’il ressente à leur égard les désirs qu’auparavant il dédia
3398
ssi qu’il les aime et qu’il ressente à leur égard
les
désirs qu’auparavant il dédiait à quelque amie de haut parage spiritu
3399
es désirs qu’auparavant il dédiait à quelque amie
de
haut parage spirituel. Le corps même y trouve sa part, car l’inventio
3400
dédiait à quelque amie de haut parage spirituel.
Le
corps même y trouve sa part, car l’invention favorise la circulation
3401
ge spirituel. Le corps même y trouve sa part, car
l’
invention favorise la circulation du sang, amplifie le rythme des maré
3402
s même y trouve sa part, car l’invention favorise
la
circulation du sang, amplifie le rythme des marées qui baignent nos m
3403
vention favorise la circulation du sang, amplifie
le
rythme des marées qui baignent nos membres. J’ai connu peu de joies p
3404
joies plus hautes que celle-ci : se promener dans
les
campagnes amies en conversant avec les pensées et les êtres nés de la
3405
mener dans les campagnes amies en conversant avec
les
pensées et les êtres nés de la marche et du bonheur de respirer. Comb
3406
campagnes amies en conversant avec les pensées et
les
êtres nés de la marche et du bonheur de respirer. Combien j’aime ces
3407
s en conversant avec les pensées et les êtres nés
de
la marche et du bonheur de respirer. Combien j’aime ces ciels bas et
3408
n conversant avec les pensées et les êtres nés de
la
marche et du bonheur de respirer. Combien j’aime ces ciels bas et tra
3409
nsées et les êtres nés de la marche et du bonheur
de
respirer. Combien j’aime ces ciels bas et traînants. Le beau temps n’
3410
pirer. Combien j’aime ces ciels bas et traînants.
Le
beau temps n’est pas toujours le bon, si l’expression veut qu’il figu
3411
as et traînants. Le beau temps n’est pas toujours
le
bon, si l’expression veut qu’il figure le contraire du « mauvais ». L
3412
ants. Le beau temps n’est pas toujours le bon, si
l’
expression veut qu’il figure le contraire du « mauvais ». Les jours de
3413
oujours le bon, si l’expression veut qu’il figure
le
contraire du « mauvais ». Les jours de pluie dans les campagnes ont u
3414
on veut qu’il figure le contraire du « mauvais ».
Les
jours de pluie dans les campagnes ont un charme consolant et secret q
3415
’il figure le contraire du « mauvais ». Les jours
de
pluie dans les campagnes ont un charme consolant et secret qui favori
3416
contraire du « mauvais ». Les jours de pluie dans
les
campagnes ont un charme consolant et secret qui favorise la vie intér
3417
es ont un charme consolant et secret qui favorise
la
vie intérieure. Longues randonnées sur les plateaux de la Souabe, vou
3418
avorise la vie intérieure. Longues randonnées sur
les
plateaux de la Souabe, vous resterez pour moi comme une introduction
3419
e intérieure. Longues randonnées sur les plateaux
de
la Souabe, vous resterez pour moi comme une introduction à la vie len
3420
ntérieure. Longues randonnées sur les plateaux de
la
Souabe, vous resterez pour moi comme une introduction à la vie lente
3421
, vous resterez pour moi comme une introduction à
la
vie lente — celle que mène l’esprit humain parmi les formes désirable
3422
une introduction à la vie lente — celle que mène
l’
esprit humain parmi les formes désirables du monde, lorsqu’il veut les
3423
vie lente — celle que mène l’esprit humain parmi
les
formes désirables du monde, lorsqu’il veut les connaître et les possé
3424
mi les formes désirables du monde, lorsqu’il veut
les
connaître et les posséder dans sa force. Car la lenteur est chose sou
3425
irables du monde, lorsqu’il veut les connaître et
les
posséder dans sa force. Car la lenteur est chose souveraine, — elle s
3426
les connaître et les posséder dans sa force. Car
la
lenteur est chose souveraine, — elle seule domine l’amour. Les plus g
3427
lenteur est chose souveraine, — elle seule domine
l’
amour. Les plus grands spectacles naturels sont des spectacles de lent
3428
st chose souveraine, — elle seule domine l’amour.
Les
plus grands spectacles naturels sont des spectacles de lenteur ou d’i
3429
us grands spectacles naturels sont des spectacles
de
lenteur ou d’immobilité dans le mouvement. Et c’est par là qu’ils pa
3430
tacles naturels sont des spectacles de lenteur ou
d’
immobilité dans le mouvement. Et c’est par là qu’ils parlent à notre
3431
nt des spectacles de lenteur ou d’immobilité dans
le
mouvement. Et c’est par là qu’ils parlent à notre âme et la retienne
3432
t. Et c’est par là qu’ils parlent à notre âme et
la
retiennent, la captivent. Fin juillet 1929 Vraiment la rapidité
3433
r là qu’ils parlent à notre âme et la retiennent,
la
captivent. Fin juillet 1929 Vraiment la rapidité ne saurait êtr
3434
nt, la captivent. Fin juillet 1929 Vraiment
la
rapidité ne saurait être le fait d’un esprit incarné, mais seulement
3435
llet 1929 Vraiment la rapidité ne saurait être
le
fait d’un esprit incarné, mais seulement de son imagination pervertie
3436
9 Vraiment la rapidité ne saurait être le fait
d’
un esprit incarné, mais seulement de son imagination pervertie. Les ef
3437
être le fait d’un esprit incarné, mais seulement
de
son imagination pervertie. Les effets de vitesse sont du domaine de l
3438
rné, mais seulement de son imagination pervertie.
Les
effets de vitesse sont du domaine de la matière abandonnée à sa manie
3439
eulement de son imagination pervertie. Les effets
de
vitesse sont du domaine de la matière abandonnée à sa manie de tomber
3440
pervertie. Les effets de vitesse sont du domaine
de
la matière abandonnée à sa manie de tomber. Dès que l’esprit entre da
3441
rvertie. Les effets de vitesse sont du domaine de
la
matière abandonnée à sa manie de tomber. Dès que l’esprit entre dans
3442
nt du domaine de la matière abandonnée à sa manie
de
tomber. Dès que l’esprit entre dans le jeu, il provoque des lenteurs
3443
matière abandonnée à sa manie de tomber. Dès que
l’
esprit entre dans le jeu, il provoque des lenteurs et des retards d’où
3444
à sa manie de tomber. Dès que l’esprit entre dans
le
jeu, il provoque des lenteurs et des retards d’où naissent le désir e
3445
s le jeu, il provoque des lenteurs et des retards
d’
où naissent le désir et la conscience. De là des pertes de temps ; mai
3446
rovoque des lenteurs et des retards d’où naissent
le
désir et la conscience. De là des pertes de temps ; mais de là aussi
3447
lenteurs et des retards d’où naissent le désir et
la
conscience. De là des pertes de temps ; mais de là aussi les inventio
3448
retards d’où naissent le désir et la conscience.
De
là des pertes de temps ; mais de là aussi les inventions destinées d’
3449
ssent le désir et la conscience. De là des pertes
de
temps ; mais de là aussi les inventions destinées d’abord à les combl
3450
t la conscience. De là des pertes de temps ; mais
de
là aussi les inventions destinées d’abord à les combler et qui toujou
3451
nce. De là des pertes de temps ; mais de là aussi
les
inventions destinées d’abord à les combler et qui toujours dépassent
3452
is de là aussi les inventions destinées d’abord à
les
combler et qui toujours dépassent le but. Et de la sorte, une ère de
3453
s d’abord à les combler et qui toujours dépassent
le
but. Et de la sorte, une ère de vitesse est une ère où la matière l’e
3454
les combler et qui toujours dépassent le but. Et
de
la sorte, une ère de vitesse est une ère où la matière l’emporte. Pro
3455
s combler et qui toujours dépassent le but. Et de
la
sorte, une ère de vitesse est une ère où la matière l’emporte. Provis
3456
oujours dépassent le but. Et de la sorte, une ère
de
vitesse est une ère où la matière l’emporte. Provisoirement ; car il
3457
Et de la sorte, une ère de vitesse est une ère où
la
matière l’emporte. Provisoirement ; car il se produit ceci d’étrange
3458
rte, une ère de vitesse est une ère où la matière
l’
emporte. Provisoirement ; car il se produit ceci d’étrange que la mati
3459
’emporte. Provisoirement ; car il se produit ceci
d’
étrange que la matière à certaines très grandes vitesses commence à se
3460
isoirement ; car il se produit ceci d’étrange que
la
matière à certaines très grandes vitesses commence à se spiritualiser
3461
s grandes vitesses commence à se spiritualiser. À
la
vitesse suprême, elle s’évanouit en lumière. C’est ainsi que dans le
3462
elle s’évanouit en lumière. C’est ainsi que dans
le
monde spirituel, l’ère de la vitesse préparerait l’ère des Illuminés…
3463
lumière. C’est ainsi que dans le monde spirituel,
l’
ère de la vitesse préparerait l’ère des Illuminés… L’extrême tension d
3464
e. C’est ainsi que dans le monde spirituel, l’ère
de
la vitesse préparerait l’ère des Illuminés… L’extrême tension de l’es
3465
C’est ainsi que dans le monde spirituel, l’ère de
la
vitesse préparerait l’ère des Illuminés… L’extrême tension de l’espri
3466
monde spirituel, l’ère de la vitesse préparerait
l’
ère des Illuminés… L’extrême tension de l’esprit peut aboutir à des ma
3467
re de la vitesse préparerait l’ère des Illuminés…
L’
extrême tension de l’esprit peut aboutir à des matérialisations, cepen
3468
réparerait l’ère des Illuminés… L’extrême tension
de
l’esprit peut aboutir à des matérialisations, cependant que l’extrême
3469
arerait l’ère des Illuminés… L’extrême tension de
l’
esprit peut aboutir à des matérialisations, cependant que l’extrême te
3470
eut aboutir à des matérialisations, cependant que
l’
extrême tension de la matière explose en subtilité. Double mouvement d
3471
matérialisations, cependant que l’extrême tension
de
la matière explose en subtilité. Double mouvement dont l’axe se nomme
3472
érialisations, cependant que l’extrême tension de
la
matière explose en subtilité. Double mouvement dont l’axe se nomme :
3473
tière explose en subtilité. Double mouvement dont
l’
axe se nomme : l’humain. 10 août 1929 Le retour en troisième cl
3474
subtilité. Double mouvement dont l’axe se nomme :
l’
humain. 10 août 1929 Le retour en troisième classe. Cinquième a
3475
nt l’axe se nomme : l’humain. 10 août 1929
Le
retour en troisième classe. Cinquième arrêt ! Il y en aura une douzai
3476
oit arriver vers huit heures. J’ai d’abord essayé
de
me confiner dans cette petite édition cartonnée d’Andersen, mais sans
3477
e me confiner dans cette petite édition cartonnée
d’
Andersen, mais sans cesse des hommes entrent, cherchent une place, ouv
3478
des hommes entrent, cherchent une place, ouvrent
la
fenêtre, ou bien c’est un contrôleur, ou bien c’est encore une gare e
3479
est encore une gare en géraniums, et il faut bien
la
regarder, la vivre un moment. Ce train paraît destiné à la réquisitio
3480
e gare en géraniums, et il faut bien la regarder,
la
vivre un moment. Ce train paraît destiné à la réquisition de l’élémen
3481
er, la vivre un moment. Ce train paraît destiné à
la
réquisition de l’élément minable des populations qu’il traverse. À ch
3482
moment. Ce train paraît destiné à la réquisition
de
l’élément minable des populations qu’il traverse. À chaque station no
3483
ment. Ce train paraît destiné à la réquisition de
l’
élément minable des populations qu’il traverse. À chaque station nous
3484
se. À chaque station nous débarquons un peu moins
de
paysans et de paniers ventrus, embarquons un peu plus d’ouvriers, cas
3485
tation nous débarquons un peu moins de paysans et
de
paniers ventrus, embarquons un peu plus d’ouvriers, casquettes et bou
3486
ans et de paniers ventrus, embarquons un peu plus
d’
ouvriers, casquettes et bouts de cigares. Des ouvrières aussi, au rega
3487
quons un peu plus d’ouvriers, casquettes et bouts
de
cigares. Des ouvrières aussi, au regard irrité. Deux d’entre elles on
3488
u regard irrité. Deux d’entre elles ont fait mine
de
s’asseoir, en face et à côté de moi, mais je n’ai pas retiré ma valis
3489
s retiré ma valise et ne me suis pas serré contre
la
fenêtre. Elles ont senti cette sourde résistance et se sont assises p
3490
stance et se sont assises plus loin en maugréant.
La
misère de tous ces regards me paralyse. Comment répondre à leur hosti
3491
se sont assises plus loin en maugréant. La misère
de
tous ces regards me paralyse. Comment répondre à leur hostilité, comm
3492
ité, comment accueillir avec un cœur viril et bon
le
spectacle de ces corps amaigris, énervés ? Un cœur viril et bon comme
3493
accueillir avec un cœur viril et bon le spectacle
de
ces corps amaigris, énervés ? Un cœur viril et bon comme celui d’Ande
3494
igris, énervés ? Un cœur viril et bon comme celui
d’
Andersen, un tel cœur ne se fermerait pas devant la haine qui sourd de
3495
’Andersen, un tel cœur ne se fermerait pas devant
la
haine qui sourd de tant d’anxiétés. J’aimerais échanger mon costume c
3496
œur ne se fermerait pas devant la haine qui sourd
de
tant d’anxiétés. J’aimerais échanger mon costume clair de voyage cont
3497
e fermerait pas devant la haine qui sourd de tant
d’
anxiétés. J’aimerais échanger mon costume clair de voyage contre leurs
3498
d’anxiétés. J’aimerais échanger mon costume clair
de
voyage contre leurs vêtements et leur casquette, me prouver que vraim
3499
asquette, me prouver que vraiment je n’aurais pas
d’
envie… Nouvel arrêt. Mais cette fois c’est une fée qui monte, une gran
3500
de jeune fille nette aux yeux bleu-vert, au teint
de
princesse d’Andersen. Oh ! qu’elle vienne s’asseoir ici ! Mais je n’o
3501
! Mais je n’ose plus lui faire place. Je sens que
les
deux ouvrières me regardent. Elle, sans doute, ne veut pas trop chois
3502
op choisir, ni surtout me choisir, — va s’asseoir
de
l’autre côté du couloir, tout au bord d’une banquette. Mais je la voi
3503
du couloir, tout au bord d’une banquette. Mais je
la
vois encore en regardant devant moi. J’ai honte. Comme nous sommes in
3504
ant moi. J’ai honte. Comme nous sommes incapables
de
nous libérer de barrières sociales ou de pudeurs qu’en pensée nous te
3505
nte. Comme nous sommes incapables de nous libérer
de
barrières sociales ou de pudeurs qu’en pensée nous tenions pour nulle
3506
capables de nous libérer de barrières sociales ou
de
pudeurs qu’en pensée nous tenions pour nulles. Si j’étais vraiment li
3507
deux ouvrières laides, sans méfiance, — ou bien à
la
jeune fille, sans fausse honte. Si j’étais vraiment libre, je lui par
3508
vraiment libre, je lui parlerais très doucement…
La
fumée des cigares lui fait peut-être mal au cœur, et aussi la curiosi
3509
cigares lui fait peut-être mal au cœur, et aussi
la
curiosité sournoise des ouvriers, des deux femmes qui examinent ses v
3510
femmes qui examinent ses vêtements. Elle a quitté
le
château endormi pour aller faire des courses en ville, probablement ;
3511
ourses en ville, probablement ; elle a dû prendre
le
train des ouvriers, et c’est à elle que va ma sympathie ?… Les hommes
3512
ouvriers, et c’est à elle que va ma sympathie ?…
Les
hommes parlent une langue brusque et de mauvaise humeur, les yeux mor
3513
athie ?… Les hommes parlent une langue brusque et
de
mauvaise humeur, les yeux mornes ou trop brillants ; ou lisent des fe
3514
parlent une langue brusque et de mauvaise humeur,
les
yeux mornes ou trop brillants ; ou lisent des feuilles communistes. L
3515
p brillants ; ou lisent des feuilles communistes.
Le
« Bummelzug », interminablement, crache sa fumée dans des gares de ba
3516
interminablement, crache sa fumée dans des gares
de
banlieue qui ne sont plus fleuries. Il règne dans ce wagon un malaise
3517
lavée — et cette robe verte seule pure —, et oh !
la
pauvre interrogation des visages devant l’atrocité de notre vie socia
3518
t oh ! la pauvre interrogation des visages devant
l’
atrocité de notre vie sociale ! Je baisse les yeux sur mon livre. « Et
3519
auvre interrogation des visages devant l’atrocité
de
notre vie sociale ! Je baisse les yeux sur mon livre. « Et la foule m
3520
evant l’atrocité de notre vie sociale ! Je baisse
les
yeux sur mon livre. « Et la foule menaçante se pressait autour du cha
3521
sociale ! Je baisse les yeux sur mon livre. « Et
la
foule menaçante se pressait autour du char de la princesse qu’on mena
3522
Et la foule menaçante se pressait autour du char
de
la princesse qu’on menait au bûcher. Alors vinrent d’un seul vol onze
3523
la foule menaçante se pressait autour du char de
la
princesse qu’on menait au bûcher. Alors vinrent d’un seul vol onze gr
3524
a princesse qu’on menait au bûcher. Alors vinrent
d’
un seul vol onze grands cygnes blancs. Ils se posèrent autour d’elle e
3525
onze grands cygnes blancs. Ils se posèrent autour
d’
elle et battirent de leurs grandes ailes. Et le peuple effrayé recula.
3526
lancs. Ils se posèrent autour d’elle et battirent
de
leurs grandes ailes. Et le peuple effrayé recula. » Mais la princesse
3527
ur d’elle et battirent de leurs grandes ailes. Et
le
peuple effrayé recula. » Mais la princesse jette sur eux les cottes d
3528
randes ailes. Et le peuple effrayé recula. » Mais
la
princesse jette sur eux les cottes d’orties qu’elle tissait de ses ma
3529
effrayé recula. » Mais la princesse jette sur eux
les
cottes d’orties qu’elle tissait de ses mains, et voici onze princes q
3530
ula. » Mais la princesse jette sur eux les cottes
d’
orties qu’elle tissait de ses mains, et voici onze princes qui se tien
3531
jette sur eux les cottes d’orties qu’elle tissait
de
ses mains, et voici onze princes qui se tiennent autour d’elle. « Ell
3532
ins, et voici onze princes qui se tiennent autour
d’
elle. « Elle est innocente ! » s’écrient-ils, et le peuple s’agenouill
3533
’elle. « Elle est innocente ! » s’écrient-ils, et
le
peuple s’agenouille comme devant une sainte. « Et pendant que l’aîné
3534
nouille comme devant une sainte. « Et pendant que
l’
aîné des frères racontait tout ce qui était arrivé, un parfum de milli
3535
res racontait tout ce qui était arrivé, un parfum
de
millions de roses se répandit dans les airs, tandis qu’au sommet du b
3536
t tout ce qui était arrivé, un parfum de millions
de
roses se répandit dans les airs, tandis qu’au sommet du bûcher parais
3537
, un parfum de millions de roses se répandit dans
les
airs, tandis qu’au sommet du bûcher paraissait une blanche et lumineu
3538
ssait comme une étoile. » Mais pourquoi détourner
la
tête vers la vitre sale, retenir des larmes ? Un soudain excès de l’a
3539
ne étoile. » Mais pourquoi détourner la tête vers
la
vitre sale, retenir des larmes ? Un soudain excès de l’amour s’est li
3540
vitre sale, retenir des larmes ? Un soudain excès
de
l’amour s’est libéré dans tout mon être et s’élance vers ces vies pro
3541
re sale, retenir des larmes ? Un soudain excès de
l’
amour s’est libéré dans tout mon être et s’élance vers ces vies proche
3542
ient, s’ils pouvaient seulement savoir ! Partager
la
consolation miraculeuse ! En cet instant du moins je les ai tous aimé
3543
solation miraculeuse ! En cet instant du moins je
les
ai tous aimés. Et j’ai compris que la grandeur du cœur humain, c’est
3544
u moins je les ai tous aimés. Et j’ai compris que
la
grandeur du cœur humain, c’est de donner sans mesure un amour dont no
3545
’ai compris que la grandeur du cœur humain, c’est
de
donner sans mesure un amour dont notre vie, peut-être, n’a que faire.
3546
amour dont notre vie, peut-être, n’a que faire. ⁂
Le
reste de la vie, c’est toujours entre deux voyages d’Allemagne. On pe
3547
t notre vie, peut-être, n’a que faire. ⁂ Le reste
de
la vie, c’est toujours entre deux voyages d’Allemagne. On peut s’épre
3548
otre vie, peut-être, n’a que faire. ⁂ Le reste de
la
vie, c’est toujours entre deux voyages d’Allemagne. On peut s’éprendr
3549
este de la vie, c’est toujours entre deux voyages
d’
Allemagne. On peut s’éprendre d’une telle absence, qui vient au lieu d
3550
ntre deux voyages d’Allemagne. On peut s’éprendre
d’
une telle absence, qui vient au lieu d’un temps étrange et plus pesant
3551
us pesant que nulle part. Me voici tout environné
de
ville. Où trouver ici la lenteur des choses ? Où le désir peut-il err
3552
Me voici tout environné de ville. Où trouver ici
la
lenteur des choses ? Où le désir peut-il errer, se retournant souvent
3553
ville. Où trouver ici la lenteur des choses ? Où
le
désir peut-il errer, se retournant souvent vers son passé, méditant s
3554
e retournant souvent vers son passé, méditant sur
l’
oubli jusqu’à ce qu’un souvenir bouge et s’émeuve… Où se perdre ? Où p
3555
e ? Où porter un regard amoureux du mystère, dans
la
puissante circonspection de l’attente ? Ô journées souabes, répandues
3556
reux du mystère, dans la puissante circonspection
de
l’attente ? Ô journées souabes, répandues dans la fraîcheur et l’âcre
3557
x du mystère, dans la puissante circonspection de
l’
attente ? Ô journées souabes, répandues dans la fraîcheur et l’âcreté
3558
de l’attente ? Ô journées souabes, répandues dans
la
fraîcheur et l’âcreté des arbres désirables, que ne vous ai-je donné
3559
journées souabes, répandues dans la fraîcheur et
l’
âcreté des arbres désirables, que ne vous ai-je donné ma vie ! Encore
3560
ma vie ! Encore un peu, qu’on me laisse au regret
de
vos paysages, de vos filles, qu’on me laisse au remords de vous avoir
3561
n peu, qu’on me laisse au regret de vos paysages,
de
vos filles, qu’on me laisse au remords de vous avoir quittées pour ce
3562
ysages, de vos filles, qu’on me laisse au remords
de
vous avoir quittées pour cette ville à présent sans relâche, où les o
3563
ttées pour cette ville à présent sans relâche, où
les
orages n’ont pas d’odeur, terrains morts où l’on n’a plus peur d’un a
3564
e à présent sans relâche, où les orages n’ont pas
d’
odeur, terrains morts où l’on n’a plus peur d’un arbre immense, ni des
3565
ù les orages n’ont pas d’odeur, terrains morts où
l’
on n’a plus peur d’un arbre immense, ni des femmes, mais de soi-même,
3566
pas d’odeur, terrains morts où l’on n’a plus peur
d’
un arbre immense, ni des femmes, mais de soi-même, sourdement, dans l’
3567
plus peur d’un arbre immense, ni des femmes, mais
de
soi-même, sourdement, dans l’insomnie du petit jour populeux… Avril-a
3568
ni des femmes, mais de soi-même, sourdement, dans
l’
insomnie du petit jour populeux… Avril-août 1929. Repris en 1932.d
3569
t bien, d’ailleurs, son dessein, qu’il avoue dans
les
entretiens recueillis par Biedermann. 16. Comme dit l’A. O. Barnaboo
3570
retiens recueillis par Biedermann. 16. Comme dit
l’
A. O. Barnabooth de M. Valéry Larbaud. 17. Il s’agit des Méfaits de
3571
par Biedermann. 16. Comme dit l’A. O. Barnabooth
de
M. Valéry Larbaud. 17. Il s’agit des Méfaits de l’instruction publi
3572
de M. Valéry Larbaud. 17. Il s’agit des Méfaits
de
l’instruction publique , petit ouvrage publié à tirage limité à Lausa
3573
M. Valéry Larbaud. 17. Il s’agit des Méfaits de
l’
instruction publique , petit ouvrage publié à tirage limité à Lausanne
3574
blié à tirage limité à Lausanne en mars 1929. d.
L’
édition de 1982 mentionnait par erreur 1931.
3575
age limité à Lausanne en mars 1929. d. L’édition
de
1982 mentionnait par erreur 1931.
3576
Quand je me souviens — C’est
l’
Europe Ces pages sont nées à des dates différentes d’un même état de
3577
ope Ces pages sont nées à des dates différentes
d’
un même état de sensibilité, dont j’ai remarqué qu’il se révèle en moi
3578
sont nées à des dates différentes d’un même état
de
sensibilité, dont j’ai remarqué qu’il se révèle en moi par une même a
3579
marqué qu’il se révèle en moi par une même allure
d’
écriture, toutes les fois que se trouve atteint le seuil de ce que j’a
3580
d’écriture, toutes les fois que se trouve atteint
le
seuil de ce que j’ai nommé le sentiment européen. Nom de code, mais a
3581
e, toutes les fois que se trouve atteint le seuil
de
ce que j’ai nommé le sentiment européen. Nom de code, mais aussi vrai
3582
e se trouve atteint le seuil de ce que j’ai nommé
le
sentiment européen. Nom de code, mais aussi vrai nom — par cela même
3583
l de ce que j’ai nommé le sentiment européen. Nom
de
code, mais aussi vrai nom — par cela même précisé — de mon Europe. Et
3584
de, mais aussi vrai nom — par cela même précisé —
de
mon Europe. Et vrai sujet, tout au moins manifeste, de cette suite d’
3585
n Europe. Et vrai sujet, tout au moins manifeste,
de
cette suite d’entrevisions des temps mêlés — « Ce présent que je vis
3586
ai sujet, tout au moins manifeste, de cette suite
d’
entrevisions des temps mêlés — « Ce présent que je vis déjà comme un p
3587
« Ce présent que je vis déjà comme un passé dans
le
futur que j’anticipe » — et qui devait me conduire à une action : cel
3588
e conduire à une action : celle que je n’ai cessé
de
mener depuis, pour l’avenir du sens de nos vies. Le bon vieux temps
3589
n : celle que je n’ai cessé de mener depuis, pour
l’
avenir du sens de nos vies. Le bon vieux temps présent 19 mars 1939
3590
n’ai cessé de mener depuis, pour l’avenir du sens
de
nos vies. Le bon vieux temps présent 19 mars 1939 « Le Führer a
3591
ener depuis, pour l’avenir du sens de nos vies.
Le
bon vieux temps présent 19 mars 1939 « Le Führer a passé la nuit a
3592
s. Le bon vieux temps présent 19 mars 1939 «
Le
Führer a passé la nuit au Hradschin. » Après Vienne, avec Prague, c’e
3593
temps présent 19 mars 1939 « Le Führer a passé
la
nuit au Hradschin. » Après Vienne, avec Prague, c’est une Europe qui
3594
qui vient de mourir. Europe du sentiment, patrie
de
nostalgie de tous ceux qu’a touchés le romantisme — encore un paradis
3595
mourir. Europe du sentiment, patrie de nostalgie
de
tous ceux qu’a touchés le romantisme — encore un paradis perdu ! Mais
3596
nt, patrie de nostalgie de tous ceux qu’a touchés
le
romantisme — encore un paradis perdu ! Mais les vrais paradis seront
3597
és le romantisme — encore un paradis perdu ! Mais
les
vrais paradis seront toujours perdus : ils naissent à l’heure où on l
3598
s paradis seront toujours perdus : ils naissent à
l’
heure où on les perd. Souvenirs de Salzbourg et de Prague, Mozart et R
3599
nt toujours perdus : ils naissent à l’heure où on
les
perd. Souvenirs de Salzbourg et de Prague, Mozart et Rilke, et la Vie
3600
ils naissent à l’heure où on les perd. Souvenirs
de
Salzbourg et de Prague, Mozart et Rilke, et la Vienne de Schubert — à
3601
l’heure où on les perd. Souvenirs de Salzbourg et
de
Prague, Mozart et Rilke, et la Vienne de Schubert — à l’heure où somb
3602
rs de Salzbourg et de Prague, Mozart et Rilke, et
la
Vienne de Schubert — à l’heure où sombrent des nations sous l’uniform
3603
ue, Mozart et Rilke, et la Vienne de Schubert — à
l’
heure où sombrent des nations sous l’uniforme barbarie — je les vois s
3604
Schubert — à l’heure où sombrent des nations sous
l’
uniforme barbarie — je les vois s’élever rayonnants dans la lueur éter
3605
ombrent des nations sous l’uniforme barbarie — je
les
vois s’élever rayonnants dans la lueur éternisée d’un soir d’été, apr
3606
e barbarie — je les vois s’élever rayonnants dans
la
lueur éternisée d’un soir d’été, après l’orage, avant la nuit, dans u
3607
vois s’élever rayonnants dans la lueur éternisée
d’
un soir d’été, après l’orage, avant la nuit, dans une gloire déchirant
3608
ever rayonnants dans la lueur éternisée d’un soir
d’
été, après l’orage, avant la nuit, dans une gloire déchirante et délic
3609
ts dans la lueur éternisée d’un soir d’été, après
l’
orage, avant la nuit, dans une gloire déchirante et délicieuse comme l
3610
r éternisée d’un soir d’été, après l’orage, avant
la
nuit, dans une gloire déchirante et délicieuse comme les secondes voi
3611
déchirante et délicieuse comme les secondes voix
de
Schumann. Un mythe nouveau prend son essor au sein même de la catastr
3612
nn. Un mythe nouveau prend son essor au sein même
de
la catastrophe. Tout un âge, un climat de musique, soudain se fixe en
3613
Un mythe nouveau prend son essor au sein même de
la
catastrophe. Tout un âge, un climat de musique, soudain se fixe en no
3614
in même de la catastrophe. Tout un âge, un climat
de
musique, soudain se fixe en nos mémoires, s’idéalise. Un « bon vieux
3615
n « bon vieux temps » de plus, tout près de nous…
Le
bon vieux temps, pour nos ancêtres, c’était très loin dans le passé,
3616
temps, pour nos ancêtres, c’était très loin dans
le
passé, dans la légende, si loin que nul, en vérité, ne l’avait vu. Ma
3617
s ancêtres, c’était très loin dans le passé, dans
la
légende, si loin que nul, en vérité, ne l’avait vu. Mais déjà, pour b
3618
, dans la légende, si loin que nul, en vérité, ne
l’
avait vu. Mais déjà, pour beaucoup d’entre nous, ce fut simplement l’a
3619
jà, pour beaucoup d’entre nous, ce fut simplement
l’
avant-guerre, les souvenirs de notre enfance. Et voici que ce Temps Pe
3620
p d’entre nous, ce fut simplement l’avant-guerre,
les
souvenirs de notre enfance. Et voici que ce Temps Perdu, tout d’un co
3621
, ce fut simplement l’avant-guerre, les souvenirs
de
notre enfance. Et voici que ce Temps Perdu, tout d’un coup, est encor
3622
notre enfance. Et voici que ce Temps Perdu, tout
d’
un coup, est encore plus proche : c’est l’an passé, c’est avant-hier,
3623
u, tout d’un coup, est encore plus proche : c’est
l’
an passé, c’est avant-hier, peut-être même est-ce — aujourd’hui ? Mais
3624
is oui, peut-être vivons-nous, ici, dans ce Paris
de
mars 1939, les derniers jours du bon vieux temps européen. Jours de s
3625
tre vivons-nous, ici, dans ce Paris de mars 1939,
les
derniers jours du bon vieux temps européen. Jours de sursis d’une lib
3626
derniers jours du bon vieux temps européen. Jours
de
sursis d’une liberté dont nous avions à peine conscience, parce qu’el
3627
ours du bon vieux temps européen. Jours de sursis
d’
une liberté dont nous avions à peine conscience, parce qu’elle était n
3628
parce qu’elle était notre manière toute naturelle
de
respirer et de penser, d’aller et venir, et d’entretenir nos soucis,
3629
tait notre manière toute naturelle de respirer et
de
penser, d’aller et venir, et d’entretenir nos soucis, nos plaisirs pe
3630
manière toute naturelle de respirer et de penser,
d’
aller et venir, et d’entretenir nos soucis, nos plaisirs personnels. C
3631
le de respirer et de penser, d’aller et venir, et
d’
entretenir nos soucis, nos plaisirs personnels. Combien de temps encor
3632
enir nos soucis, nos plaisirs personnels. Combien
de
temps encore, combien de semaines pourrons-nous goûter ce répit, et s
3633
sirs personnels. Combien de temps encore, combien
de
semaines pourrons-nous goûter ce répit, et sentir que nous prolongeon
3634
ns une existence que nos fils appelleront douceur
de
vivre ? Déjà nous éprouvons que le monde a glissé dans une ère étrang
3635
leront douceur de vivre ? Déjà nous éprouvons que
le
monde a glissé dans une ère étrange et brutale, où ces formes de vie
3636
sé dans une ère étrange et brutale, où ces formes
de
vie qui sont encore les nôtres ne peuvent plus apprivoiser le destin.
3637
ont encore les nôtres ne peuvent plus apprivoiser
le
destin. Soit que les tyrans nous accablent, soit qu’un sursaut nous d
3638
s ne peuvent plus apprivoiser le destin. Soit que
les
tyrans nous accablent, soit qu’un sursaut nous dresse à résister, il
3639
sursaut nous dresse à résister, il faudra changer
le
rythme et rectifier la tenue, bander tous les ressorts, mobiliser les
3640
ésister, il faudra changer le rythme et rectifier
la
tenue, bander tous les ressorts, mobiliser les cœurs… C’est le crime
3641
nger le rythme et rectifier la tenue, bander tous
les
ressorts, mobiliser les cœurs… C’est le crime des dictatures : elles
3642
ier la tenue, bander tous les ressorts, mobiliser
les
cœurs… C’est le crime des dictatures : elles ne tuent pas la liberté
3643
der tous les ressorts, mobiliser les cœurs… C’est
le
crime des dictatures : elles ne tuent pas la liberté dans les pays se
3644
’est le crime des dictatures : elles ne tuent pas
la
liberté dans les pays seulement où elles sévissent, mais aussi bien c
3645
s dictatures : elles ne tuent pas la liberté dans
les
pays seulement où elles sévissent, mais aussi bien chez les voisins q
3646
eulement où elles sévissent, mais aussi bien chez
les
voisins qu’elles secouent d’un défi grossier. La liberté ne peut surv
3647
ais aussi bien chez les voisins qu’elles secouent
d’
un défi grossier. La liberté ne peut survivre à de tels chocs. Car ell
3648
les voisins qu’elles secouent d’un défi grossier.
La
liberté ne peut survivre à de tels chocs. Car elle est vraiment comme
3649
d’un défi grossier. La liberté ne peut survivre à
de
tels chocs. Car elle est vraiment comme un rêve, un rêve heureux où l
3650
le est vraiment comme un rêve, un rêve heureux où
l’
on circule avec aisance, gardant parfois l’arrière-conscience d’un mir
3651
eux où l’on circule avec aisance, gardant parfois
l’
arrière-conscience d’un miracle. Elle est encore une œuvre d’art qui n
3652
vec aisance, gardant parfois l’arrière-conscience
d’
un miracle. Elle est encore une œuvre d’art qui n’agit que par l’atmos
3653
lle est encore une œuvre d’art qui n’agit que par
l’
atmosphère, par le charme qu’elle fait régner. Des lois adroites et hu
3654
œuvre d’art qui n’agit que par l’atmosphère, par
le
charme qu’elle fait régner. Des lois adroites et humaines ne suffiron
3655
s lois adroites et humaines ne suffiront jamais à
l’
assurer : il y faut ce climat sentimental, cette espèce de naturel qui
3656
r : il y faut ce climat sentimental, cette espèce
de
naturel qui naît d’une entente tacite, d’une confiance, presque d’une
3657
mat sentimental, cette espèce de naturel qui naît
d’
une entente tacite, d’une confiance, presque d’une insouciance… C’est
3658
espèce de naturel qui naît d’une entente tacite,
d’
une confiance, presque d’une insouciance… C’est tout cela que vient de
3659
ît d’une entente tacite, d’une confiance, presque
d’
une insouciance… C’est tout cela que vient de mettre en question l’usu
3660
… C’est tout cela que vient de mettre en question
l’
usurpateur du Hradschin. Et dès lors qu’il l’a mis en question et qu’i
3661
tion l’usurpateur du Hradschin. Et dès lors qu’il
l’
a mis en question et qu’il nous force au réalisme à sa manière, le cha
3662
ion et qu’il nous force au réalisme à sa manière,
le
charme est détruit dans nos vies. Nous sommes pareils à celui qui s’é
3663
i qui s’éveille et goûte encore quelques instants
les
délices d’un rêve inachevé. Mais il sait bien que c’est fini. Brève
3664
lle et goûte encore quelques instants les délices
d’
un rêve inachevé. Mais il sait bien que c’est fini. Brève dispense, l
3665
ais il sait bien que c’est fini. Brève dispense,
le
temps d’un peu se souvenir… Il faut se lever. Il faut entrer résolume
3666
it bien que c’est fini. Brève dispense, le temps
d’
un peu se souvenir… Il faut se lever. Il faut entrer résolument dans l
3667
Il faut se lever. Il faut entrer résolument dans
le
grand jour du siècle mécanique, accepter pour un temps sa loi, en pré
3668
réservant, s’il se peut, dans nos cœurs, ce droit
d’
aimer, cette bonté humaine, plus inutile que jamais, dominatrice et ba
3669
le que jamais, dominatrice et bafouée. Demain,
la
guerre ! Le soir du 28 août 1939, je finissais de dîner dans un hô
3670
dominatrice et bafouée. Demain, la guerre !
Le
soir du 28 août 1939, je finissais de dîner dans un hôtel de La Chaux
3671
guerre ! Le soir du 28 août 1939, je finissais
de
dîner dans un hôtel de La Chaux-de-Fonds, et comme je me préparais à
3672
Chaux-de-Fonds, et comme je me préparais à gagner
le
Conservatoire pour y assister à une répétition des chœurs de Nicolas
3673
toire pour y assister à une répétition des chœurs
de
Nicolas de Flue 18, la radio brusquement interrompit les conversati
3674
ne répétition des chœurs de Nicolas de Flue 18,
la
radio brusquement interrompit les conversations. Nous entendîmes la f
3675
las de Flue 18, la radio brusquement interrompit
les
conversations. Nous entendîmes la fin d’une phrase en italien, puis u
3676
nt interrompit les conversations. Nous entendîmes
la
fin d’une phrase en italien, puis une fanfare joua l’hymne national.
3677
rrompit les conversations. Nous entendîmes la fin
d’
une phrase en italien, puis une fanfare joua l’hymne national. Le spea
3678
in d’une phrase en italien, puis une fanfare joua
l’
hymne national. Le speaker répéta en français : convocation des Chambr
3679
italien, puis une fanfare joua l’hymne national.
Le
speaker répéta en français : convocation des Chambres fédérales pour
3680
convocation des Chambres fédérales pour désigner
le
général en chef, mobilisation immédiate des troupes de couverture-fro
3681
néral en chef, mobilisation immédiate des troupes
de
couverture-frontières. Au conservatoire, le grand chœur entonna le ré
3682
oupes de couverture-frontières. Au conservatoire,
le
grand chœur entonna le récitatif du troisième acte : Ô maintenant,
3683
ntières. Au conservatoire, le grand chœur entonna
le
récitatif du troisième acte : Ô maintenant, peuple des monts et des
3684
t, peuple des monts et des vallées — tremble dans
l’
attente orageuse — sous un ciel d’angoisse et de haine ! — Malheur sur
3685
— tremble dans l’attente orageuse — sous un ciel
d’
angoisse et de haine ! — Malheur sur nous ! Nuit lugubre, sans sommei
3686
s l’attente orageuse — sous un ciel d’angoisse et
de
haine ! — Malheur sur nous ! Nuit lugubre, sans sommeil — rythmée d’
3687
sur nous ! Nuit lugubre, sans sommeil — rythmée
d’
armes martelées — meute folle, meurtrière — ô rumeur irréparable — que
3688
e — ô rumeur irréparable — que dis-tu ? — Demain,
la
guerre ! Le directeur n’était pas satisfait de son ensemble. Une fem
3689
irréparable — que dis-tu ? — Demain, la guerre !
Le
directeur n’était pas satisfait de son ensemble. Une femme du chœur m
3690
, la guerre ! Le directeur n’était pas satisfait
de
son ensemble. Une femme du chœur me dit : « C’est difficile de chante
3691
le. Une femme du chœur me dit : « C’est difficile
de
chanter ça ce soir. Les mots vous restent dans la gorge… » Le drame n
3692
me dit : « C’est difficile de chanter ça ce soir.
Les
mots vous restent dans la gorge… » Le drame ne put être joué, la plup
3693
de chanter ça ce soir. Les mots vous restent dans
la
gorge… » Le drame ne put être joué, la plupart des acteurs et des cho
3694
a ce soir. Les mots vous restent dans la gorge… »
Le
drame ne put être joué, la plupart des acteurs et des choristes ayant
3695
yant été mobilisés cinq jours plus tard, comme je
le
fus. Cœur de l’Europe Berne, février 1940 Monté hier au Gothard
3696
és cinq jours plus tard, comme je le fus. Cœur
de
l’Europe Berne, février 1940 Monté hier au Gothard, pour affaire d
3697
cinq jours plus tard, comme je le fus. Cœur de
l’
Europe Berne, février 1940 Monté hier au Gothard, pour affaire de s
3698
vrier 1940 Monté hier au Gothard, pour affaire
de
service. Ce haut lieu de la Suisse, ce vrai cœur de l’Europe, je ne m
3699
au Gothard, pour affaire de service. Ce haut lieu
de
la Suisse, ce vrai cœur de l’Europe, je ne m’en suis jamais approché
3700
Gothard, pour affaire de service. Ce haut lieu de
la
Suisse, ce vrai cœur de l’Europe, je ne m’en suis jamais approché san
3701
service. Ce haut lieu de la Suisse, ce vrai cœur
de
l’Europe, je ne m’en suis jamais approché sans ressentir une émotion
3702
rvice. Ce haut lieu de la Suisse, ce vrai cœur de
l’
Europe, je ne m’en suis jamais approché sans ressentir une émotion que
3703
é sans ressentir une émotion que j’essaie en vain
de
qualifier ; elle ne ressemble à aucune autre. Je devais avoir 13 ou 1
3704
j’y vins pour la première fois, descendant à pied
d’
Andermatt et passant par le Pont du diable. Et ce qui me saisit ne fut
3705
ois, descendant à pied d’Andermatt et passant par
le
Pont du diable. Et ce qui me saisit ne fut pas la grandeur presque lu
3706
le Pont du diable. Et ce qui me saisit ne fut pas
la
grandeur presque lugubre du paysage, mais au fond de la vallée cet ex
3707
grandeur presque lugubre du paysage, mais au fond
de
la vallée cet express obstiné dans sa vitesse régulière, qui serpenta
3708
ndeur presque lugubre du paysage, mais au fond de
la
vallée cet express obstiné dans sa vitesse régulière, qui serpentait
3709
obstiné dans sa vitesse régulière, qui serpentait
d’
un flanc à l’autre, disparaissait, reparaissait, contournait la collin
3710
l’autre, disparaissait, reparaissait, contournait
la
colline de Wassen surmontée d’une église blanche, montait encore par
3711
sparaissait, reparaissait, contournait la colline
de
Wassen surmontée d’une église blanche, montait encore par des lacets
3712
ssait, contournait la colline de Wassen surmontée
d’
une église blanche, montait encore par des lacets immenses, passait en
3713
n à notre hauteur, puis courait s’engouffrer dans
les
rochers, à la base d’une paroi verticale, noircie d’eau. J’avais pu l
3714
ur, puis courait s’engouffrer dans les rochers, à
la
base d’une paroi verticale, noircie d’eau. J’avais pu lire sur les lo
3715
courait s’engouffrer dans les rochers, à la base
d’
une paroi verticale, noircie d’eau. J’avais pu lire sur les longs wago
3716
rochers, à la base d’une paroi verticale, noircie
d’
eau. J’avais pu lire sur les longs wagons bruns : Amsterdam-Basel-Mila
3717
roi verticale, noircie d’eau. J’avais pu lire sur
les
longs wagons bruns : Amsterdam-Basel-Milano-Zagreb-Bucuresti. Je me r
3718
is un poème. Pour la première fois, j’avais senti
l’
Europe. Hier, j’étais dans ce train. Il neigeait, on ne voyait guère q
3719
Il neigeait, on ne voyait guère que quelques pans
de
rochers sombres dans les déchirures de la brume. Mais de nouveau j’ai
3720
t guère que quelques pans de rochers sombres dans
les
déchirures de la brume. Mais de nouveau j’ai éprouvé la sensation de
3721
lques pans de rochers sombres dans les déchirures
de
la brume. Mais de nouveau j’ai éprouvé la sensation de pénétrer dans
3722
es pans de rochers sombres dans les déchirures de
la
brume. Mais de nouveau j’ai éprouvé la sensation de pénétrer dans une
3723
hirures de la brume. Mais de nouveau j’ai éprouvé
la
sensation de pénétrer dans une aire « sacrée », dans un territoire ré
3724
brume. Mais de nouveau j’ai éprouvé la sensation
de
pénétrer dans une aire « sacrée », dans un territoire réservé pour qu
3725
elle. Il est vrai qu’aujourd’hui, je sais pas mal
de
choses sur ce lieu et son rôle historique. (J’en ai même beaucoup écr
3726
J’en ai même beaucoup écrit.) Je sais que ce nœud
de
fleuves et de montagnes percé par le seul col qui relie d’un seul cou
3727
eaucoup écrit.) Je sais que ce nœud de fleuves et
de
montagnes percé par le seul col qui relie d’un seul coup le Nord et l
3728
que ce nœud de fleuves et de montagnes percé par
le
seul col qui relie d’un seul coup le Nord et le Midi du Continent à t
3729
es percé par le seul col qui relie d’un seul coup
le
Nord et le Midi du Continent à travers les deux chaînes des Alpes ici
3730
r le seul col qui relie d’un seul coup le Nord et
le
Midi du Continent à travers les deux chaînes des Alpes ici croisées,
3731
ul coup le Nord et le Midi du Continent à travers
les
deux chaînes des Alpes ici croisées, n’est pas seulement une position
3732
i croisées, n’est pas seulement une position clef
de
l’Europe, mais aussi, et pour cette raison même, l’origine très préci
3733
roisées, n’est pas seulement une position clef de
l’
Europe, mais aussi, et pour cette raison même, l’origine très précise
3734
l’Europe, mais aussi, et pour cette raison même,
l’
origine très précise de nos libertés suisses et de notre union fédéral
3735
et pour cette raison même, l’origine très précise
de
nos libertés suisses et de notre union fédérale. Quand je n’en saurai
3736
l’origine très précise de nos libertés suisses et
de
notre union fédérale. Quand je n’en saurais rien, j’ai lieu de suppos
3737
n fédérale. Quand je n’en saurais rien, j’ai lieu
de
supposer que l’impression ne serait pas moins forte. Toutes les sourc
3738
d je n’en saurais rien, j’ai lieu de supposer que
l’
impression ne serait pas moins forte. Toutes les sources détiennent un
3739
ue l’impression ne serait pas moins forte. Toutes
les
sources détiennent une puissance radiante, et c’est ici la source du
3740
s détiennent une puissance radiante, et c’est ici
la
source du Rhin, du Rhône, et des deux plus gros affluents du Danube e
3741
léments dits naturels entrent en composition dans
le
mystère qui pèse sur ce massif, qui en émane… Je me disais en redesce
3742
sif, qui en émane… Je me disais en redescendant :
les
Suisses sont-ils sensibles à cette qualité ? Savent-ils qu’ils ont au
3743
ieu non pas seulement un tunnel et des forts ?
Le
petit nuage Fin mars 1940 — Au mois d’août de l’année dernière, le
3744
ts ? Le petit nuage Fin mars 1940 — Au mois
d’
août de l’année dernière, le jour du pacte germano-soviétique, j’ai fa
3745
Le petit nuage Fin mars 1940 — Au mois d’août
de
l’année dernière, le jour du pacte germano-soviétique, j’ai fait deux
3746
petit nuage Fin mars 1940 — Au mois d’août de
l’
année dernière, le jour du pacte germano-soviétique, j’ai fait deux ch
3747
ars 1940 — Au mois d’août de l’année dernière,
le
jour du pacte germano-soviétique, j’ai fait deux choses. Primo j’ai b
3748
mes dossiers, lettres, et papiers personnels, je
les
ai mis en lieu sûr et j’ai sorti mes uniformes pour les aérer. Secund
3749
mis en lieu sûr et j’ai sorti mes uniformes pour
les
aérer. Secundo, j’ai envoyé à un certain nombre de mes amis la phrase
3750
s aérer. Secundo, j’ai envoyé à un certain nombre
de
mes amis la phrase suivante : « Au plus fort de la persécution entrep
3751
undo, j’ai envoyé à un certain nombre de mes amis
la
phrase suivante : « Au plus fort de la persécution entreprise par Jul
3752
e de mes amis la phrase suivante : « Au plus fort
de
la persécution entreprise par Julien l’Apostat contre les chrétiens,
3753
e mes amis la phrase suivante : « Au plus fort de
la
persécution entreprise par Julien l’Apostat contre les chrétiens, qua
3754
ersécution entreprise par Julien l’Apostat contre
les
chrétiens, quand tout espoir humain semblait perdu, tout horizon bouc
3755
e, il passera. » Je viens de recevoir une lettre
de
« quelque part dans le Proche-Orient » et une autre des États-Unis. L
3756
ens de recevoir une lettre de « quelque part dans
le
Proche-Orient » et une autre des États-Unis. La première me dit : « L
3757
une autre des États-Unis. La première me dit : «
Le
petit nuage n’est pas passé. Il passera, et nous serons encore une fo
3758
ns encore une fois assis au café des Deux Magots.
La
vie reprendra. Cela paraît irréel. » La seconde me dit : « Le petit n
3759
ndra. Cela paraît irréel. » La seconde me dit : «
Le
petit nuage passera, oui… et nous avec ! » Selon l’humeur du jour, je
3760
petit nuage passera, oui… et nous avec ! » Selon
l’
humeur du jour, je donne raison à l’une ou à l’autre de ces lettres. P
3761
e raison à l’une ou à l’autre de ces lettres. Pas
d’
importance. Ce qui est important, c’est la certitude « qu’il passera »
3762
es. Pas d’importance. Ce qui est important, c’est
la
certitude « qu’il passera ». Que sont nos petits accès de décourageme
3763
tude « qu’il passera ». Que sont nos petits accès
de
découragement, ces brumes qu’un léger vent d’avant-printemps suffit à
3764
cès de découragement, ces brumes qu’un léger vent
d’
avant-printemps suffit à dissiper en cinq minutes ? Qu’est-ce que cela
3765
en cinq minutes ? Qu’est-ce que cela au regard de
la
menace énorme qui domine l’Europe d’aujourd’hui ? Eh bien, cette mena
3766
que cela au regard de la menace énorme qui domine
l’
Europe d’aujourd’hui ? Eh bien, cette menace, à son tour, n’est qu’un
3767
au regard de la menace énorme qui domine l’Europe
d’
aujourd’hui ? Eh bien, cette menace, à son tour, n’est qu’un tout peti
3768
niversels que sera notre jugement au dernier jour
de
tous les temps. Karl Barth nous le disait l’autre jour à Tavannes où
3769
s que sera notre jugement au dernier jour de tous
les
temps. Karl Barth nous le disait l’autre jour à Tavannes où nous avio
3770
u dernier jour de tous les temps. Karl Barth nous
le
disait l’autre jour à Tavannes où nous avions donné deux conférences
3771
érences successives devant un vaste rassemblement
de
jeunes gens : « Comme chrétiens, nous n’avons à redouter que le Princ
3772
: « Comme chrétiens, nous n’avons à redouter que
le
Prince de tous les démons, et non pas tel ou tel démon qu’il nous dél
3773
chrétiens, nous n’avons à redouter que le Prince
de
tous les démons, et non pas tel ou tel démon qu’il nous délègue de te
3774
ns, nous n’avons à redouter que le Prince de tous
les
démons, et non pas tel ou tel démon qu’il nous délègue de temps à aut
3775
s, et non pas tel ou tel démon qu’il nous délègue
de
temps à autre. Le combat que nous devrons peut-être engager militaire
3776
ou tel démon qu’il nous délègue de temps à autre.
Le
combat que nous devrons peut-être engager militairement contre l’un d
3777
vrons peut-être engager militairement contre l’un
de
ces petits personnages, ce combat, si « total » qu’il soit, ne saurai
3778
e, une première escarmouche, un entraînement pour
le
« combat final » où le Christ seul pourra nous sauver, lorsque le Mal
3779
uche, un entraînement pour le « combat final » où
le
Christ seul pourra nous sauver, lorsque le Malin en personne nous acc
3780
l » où le Christ seul pourra nous sauver, lorsque
le
Malin en personne nous accusera au Jugement dernier. » Voilà les dime
3781
rsonne nous accusera au Jugement dernier. » Voilà
les
dimensions réelles qu’il faut oser envisager. Elles ne sont pas démes
3782
émesurées. Elles doivent au contraire nous donner
la
vraie mesure de nos soucis, de nos misérables cafards, de nos crainte
3783
doivent au contraire nous donner la vraie mesure
de
nos soucis, de nos misérables cafards, de nos craintes dérisoires et
3784
traire nous donner la vraie mesure de nos soucis,
de
nos misérables cafards, de nos craintes dérisoires et mesquines. « C’
3785
mesure de nos soucis, de nos misérables cafards,
de
nos craintes dérisoires et mesquines. « C’est un petit nuage, il pass
3786
n petit nuage, il passera. » Ce mot me fut parole
d’
Évangile quand je le lus l’année dernière. À cette heure où Paris…
3787
ssera. » Ce mot me fut parole d’Évangile quand je
le
lus l’année dernière. À cette heure où Paris… Berne, 15 juin 1940
3788
» Ce mot me fut parole d’Évangile quand je le lus
l’
année dernière. À cette heure où Paris… Berne, 15 juin 1940 « À
3789
« À cette heure où Paris exsangue voile sa face
d’
un nuage et se tait, que son deuil soit le deuil du monde ! Nous sento
3790
sa face d’un nuage et se tait, que son deuil soit
le
deuil du monde ! Nous sentons bien que nous sommes tous atteints. Que
3791
qu’un disait : Si Paris est détruit, j’en perdrai
le
goût d’être un Européen. La Ville Lumière n’est pas détruite : elle s
3792
sait : Si Paris est détruit, j’en perdrai le goût
d’
être un Européen. La Ville Lumière n’est pas détruite : elle s’est éte
3793
détruit, j’en perdrai le goût d’être un Européen.
La
Ville Lumière n’est pas détruite : elle s’est éteinte. Désert de haut
3794
e n’est pas détruite : elle s’est éteinte. Désert
de
hautes pierres sans âme, cimetière… L’envahisseur avait prophétisé :
3795
te. Désert de hautes pierres sans âme, cimetière…
L’
envahisseur avait prophétisé : le 15 juin j’entrerai dans Paris. Il y
3796
âme, cimetière… L’envahisseur avait prophétisé :
le
15 juin j’entrerai dans Paris. Il y entre, en effet, mais ce n’est pl
3797
aris. Et telle est sa défaite irrémédiable devant
l’
esprit, devant le sentiment, devant ce qui fait la valeur de la vie. J
3798
t sa défaite irrémédiable devant l’esprit, devant
le
sentiment, devant ce qui fait la valeur de la vie. Je songe au chef d
3799
l’esprit, devant le sentiment, devant ce qui fait
la
valeur de la vie. Je songe au chef de guerre qui traverse aujourd’hui
3800
devant le sentiment, devant ce qui fait la valeur
de
la vie. Je songe au chef de guerre qui traverse aujourd’hui ces rues
3801
ant le sentiment, devant ce qui fait la valeur de
la
vie. Je songe au chef de guerre qui traverse aujourd’hui ces rues les
3802
ce qui fait la valeur de la vie. Je songe au chef
de
guerre qui traverse aujourd’hui ces rues les plus émouvantes du monde
3803
chef de guerre qui traverse aujourd’hui ces rues
les
plus émouvantes du monde : il ne les connaîtra jamais. Il ne verra qu
3804
hui ces rues les plus émouvantes du monde : il ne
les
connaîtra jamais. Il ne verra que d’aveugles façades. Il s’est privé
3805
nde : il ne les connaîtra jamais. Il ne verra que
d’
aveugles façades. Il s’est privé à tout jamais de quelque chose d’irre
3806
d’aveugles façades. Il s’est privé à tout jamais
de
quelque chose d’irremplaçable, de quelque chose qu’on peut tuer, mais
3807
es. Il s’est privé à tout jamais de quelque chose
d’
irremplaçable, de quelque chose qu’on peut tuer, mais qu’on ne peut co
3808
é à tout jamais de quelque chose d’irremplaçable,
de
quelque chose qu’on peut tuer, mais qu’on ne peut conquérir par la fo
3809
qu’on peut tuer, mais qu’on ne peut conquérir par
la
force, et qui vaut plus, insondablement plus que tout ce que peuvent
3810
ablement plus que tout ce que peuvent rafler dans
le
monde entier les servants des « Panzerdivisionen ». Quelque chose d’i
3811
e tout ce que peuvent rafler dans le monde entier
les
servants des « Panzerdivisionen ». Quelque chose d’indéfinissable et
3812
servants des « Panzerdivisionen ». Quelque chose
d’
indéfinissable et que nous appelions Paris. C’est ici l’impuissance tr
3813
finissable et que nous appelions Paris. C’est ici
l’
impuissance tragique de ce conquérant victorieux : tout ce qu’il veut
3814
appelions Paris. C’est ici l’impuissance tragique
de
ce conquérant victorieux : tout ce qu’il veut saisir se change à son
3815
u’il veut saisir se change à son approche — Midas
de
l’ère prolétarienne — en fer tordu, en pierraille lépreuse. N’importe
3816
l veut saisir se change à son approche — Midas de
l’
ère prolétarienne — en fer tordu, en pierraille lépreuse. N’importe qu
3817
du, en pierraille lépreuse. N’importe quel badaud
d’
un soir de juin pouvait s’annexer pour toujours le bonheur d’un coucha
3818
rraille lépreuse. N’importe quel badaud d’un soir
de
juin pouvait s’annexer pour toujours le bonheur d’un couchant sur Ger
3819
d’un soir de juin pouvait s’annexer pour toujours
le
bonheur d’un couchant sur Germain-des-Prés, le grisant glissement de
3820
e juin pouvait s’annexer pour toujours le bonheur
d’
un couchant sur Germain-des-Prés, le grisant glissement de la foule de
3821
rs le bonheur d’un couchant sur Germain-des-Prés,
le
grisant glissement de la foule de l’Arc aux Chevaux de Marly, les siè
3822
chant sur Germain-des-Prés, le grisant glissement
de
la foule de l’Arc aux Chevaux de Marly, les siècles de grandeur, de m
3823
nt sur Germain-des-Prés, le grisant glissement de
la
foule de l’Arc aux Chevaux de Marly, les siècles de grandeur, de misè
3824
rmain-des-Prés, le grisant glissement de la foule
de
l’Arc aux Chevaux de Marly, les siècles de grandeur, de misère, de sa
3825
in-des-Prés, le grisant glissement de la foule de
l’
Arc aux Chevaux de Marly, les siècles de grandeur, de misère, de sages
3826
isant glissement de la foule de l’Arc aux Chevaux
de
Marly, les siècles de grandeur, de misère, de sagesse, dont le visage
3827
sement de la foule de l’Arc aux Chevaux de Marly,
les
siècles de grandeur, de misère, de sagesse, dont le visage de cette c
3828
foule de l’Arc aux Chevaux de Marly, les siècles
de
grandeur, de misère, de sagesse, dont le visage de cette capitale plu
3829
rc aux Chevaux de Marly, les siècles de grandeur,
de
misère, de sagesse, dont le visage de cette capitale plus douce et pl
3830
aux de Marly, les siècles de grandeur, de misère,
de
sagesse, dont le visage de cette capitale plus douce et plus fière qu
3831
siècles de grandeur, de misère, de sagesse, dont
le
visage de cette capitale plus douce et plus fière qu’aucune autre por
3832
e grandeur, de misère, de sagesse, dont le visage
de
cette capitale plus douce et plus fière qu’aucune autre portait les t
3833
plus douce et plus fière qu’aucune autre portait
les
traces pacifiées. N’importe quel badaud, mais pas un conquérant. La c
3834
s. N’importe quel badaud, mais pas un conquérant.
La
confrontation stupéfiante de cet homme et de cette ville était peut-ê
3835
s pas un conquérant. La confrontation stupéfiante
de
cet homme et de cette ville était peut-être nécessaire pour faire com
3836
ant. La confrontation stupéfiante de cet homme et
de
cette ville était peut-être nécessaire pour faire comprendre au monde
3837
s impossibles. On ne conquiert pas avec des chars
les
dons de l’âme et les raisons de vivre dont on manque. Qu’ils fassent
3838
bles. On ne conquiert pas avec des chars les dons
de
l’âme et les raisons de vivre dont on manque. Qu’ils fassent dix fois
3839
s. On ne conquiert pas avec des chars les dons de
l’
âme et les raisons de vivre dont on manque. Qu’ils fassent dix fois le
3840
conquiert pas avec des chars les dons de l’âme et
les
raisons de vivre dont on manque. Qu’ils fassent dix fois le tour du m
3841
s avec des chars les dons de l’âme et les raisons
de
vivre dont on manque. Qu’ils fassent dix fois le tour du monde ! Ils
3842
de vivre dont on manque. Qu’ils fassent dix fois
le
tour du monde ! Ils ne rencontreront partout que le fracas du néant m
3843
tour du monde ! Ils ne rencontreront partout que
le
fracas du néant mécanique. Jusqu’au jour bien plus terrifiant que le
3844
mécanique. Jusqu’au jour bien plus terrifiant que
le
jour de la pire vengeance où, s’arrêtant enfin, ils comprendront qu’a
3845
e. Jusqu’au jour bien plus terrifiant que le jour
de
la pire vengeance où, s’arrêtant enfin, ils comprendront qu’aucun tri
3846
Jusqu’au jour bien plus terrifiant que le jour de
la
pire vengeance où, s’arrêtant enfin, ils comprendront qu’aucun triomp
3847
s comprendront qu’aucun triomphe ne vaut pour eux
la
moindre des réalités humaines qu’ils ont tuées. “… car ils ne savent
3848
r ils ne savent ce qu’ils font.” » Ce texte parut
le
17 juin dans la Gazette de Lausanne , entre l’arrivée au pouvoir de
3849
ce qu’ils font.” » Ce texte parut le 17 juin dans
la
Gazette de Lausanne , entre l’arrivée au pouvoir de Pétain dans la n
3850
nt.” » Ce texte parut le 17 juin dans la Gazette
de
Lausanne , entre l’arrivée au pouvoir de Pétain dans la nuit du 16 ju
3851
t le 17 juin dans la Gazette de Lausanne , entre
l’
arrivée au pouvoir de Pétain dans la nuit du 16 juin, et l’appel de Lo
3852
Gazette de Lausanne , entre l’arrivée au pouvoir
de
Pétain dans la nuit du 16 juin, et l’appel de Londres lancé par de Ga
3853
sanne , entre l’arrivée au pouvoir de Pétain dans
la
nuit du 16 juin, et l’appel de Londres lancé par de Gaulle le 18 juin
3854
au pouvoir de Pétain dans la nuit du 16 juin, et
l’
appel de Londres lancé par de Gaulle le 18 juin. L’article me valut un
3855
oir de Pétain dans la nuit du 16 juin, et l’appel
de
Londres lancé par de Gaulle le 18 juin. L’article me valut une condam
3856
6 juin, et l’appel de Londres lancé par de Gaulle
le
18 juin. L’article me valut une condamnation à quinze jours de forter
3857
’appel de Londres lancé par de Gaulle le 18 juin.
L’
article me valut une condamnation à quinze jours de forteresse, au sec
3858
’article me valut une condamnation à quinze jours
de
forteresse, au secret, et « facilita » une mission que je reçus quelq
3859
mission que je reçus quelques semaines plus tard,
de
conférences sur la Suisse aux USA. Le 20 août, je quittais Genève pou
3860
s quelques semaines plus tard, de conférences sur
la
Suisse aux USA. Le 20 août, je quittais Genève pour l’Amérique. In
3861
plus tard, de conférences sur la Suisse aux USA.
Le
20 août, je quittais Genève pour l’Amérique. Intermède New York, f
3862
isse aux USA. Le 20 août, je quittais Genève pour
l’
Amérique. Intermède New York, fin 1942 … mais sachez-le : nous n
3863
Intermède New York, fin 1942 … mais sachez-
le
: nous n’étions pas absents de vous plus que de nous-mêmes. Vous étie
3864
2 … mais sachez-le : nous n’étions pas absents
de
vous plus que de nous-mêmes. Vous étiez « occupés », nous étions en e
3865
z-le : nous n’étions pas absents de vous plus que
de
nous-mêmes. Vous étiez « occupés », nous étions en exil, et les uns c
3866
. Vous étiez « occupés », nous étions en exil, et
les
uns comme les autres dans l’inaccepté, dans la dépossession profonde,
3867
occupés », nous étions en exil, et les uns comme
les
autres dans l’inaccepté, dans la dépossession profonde, dans une mise
3868
étions en exil, et les uns comme les autres dans
l’
inaccepté, dans la dépossession profonde, dans une mise en question gé
3869
t les uns comme les autres dans l’inaccepté, dans
la
dépossession profonde, dans une mise en question générale au pire mom
3870
s une mise en question générale au pire moment, à
l’
heure de moindre résistance. Notre angoisse était de penser : parleron
3871
se en question générale au pire moment, à l’heure
de
moindre résistance. Notre angoisse était de penser : parlerons-nous e
3872
heure de moindre résistance. Notre angoisse était
de
penser : parlerons-nous encore le même langage au jour de ce retour e
3873
angoisse était de penser : parlerons-nous encore
le
même langage au jour de ce retour en France, — dans quelle France, et
3874
r : parlerons-nous encore le même langage au jour
de
ce retour en France, — dans quelle France, et dans quelle Europe ? N
3875
ce, et dans quelle Europe ? Nous étions soumis à
l’
érosion de l’exil, moins brutale, certes, mais plus intime que celle d
3876
s quelle Europe ? Nous étions soumis à l’érosion
de
l’exil, moins brutale, certes, mais plus intime que celle de l’occupa
3877
uelle Europe ? Nous étions soumis à l’érosion de
l’
exil, moins brutale, certes, mais plus intime que celle de l’occupatio
3878
moins brutale, certes, mais plus intime que celle
de
l’occupation. Un conquérant n’occupe jamais que l’extérieur, mais l’é
3879
ns brutale, certes, mais plus intime que celle de
l’
occupation. Un conquérant n’occupe jamais que l’extérieur, mais l’étra
3880
e l’occupation. Un conquérant n’occupe jamais que
l’
extérieur, mais l’étranger s’infiltre au cœur de l’être. Comment lui r
3881
conquérant n’occupe jamais que l’extérieur, mais
l’
étranger s’infiltre au cœur de l’être. Comment lui résisterait-on ? C’
3882
e l’extérieur, mais l’étranger s’infiltre au cœur
de
l’être. Comment lui résisterait-on ? C’est un ami. Il vous a reçus d’
3883
’extérieur, mais l’étranger s’infiltre au cœur de
l’
être. Comment lui résisterait-on ? C’est un ami. Il vous a reçus d’abo
3884
us a proposé ses façons et usages qu’il convenait
d’
aimer. Bientôt, s’il voit que vous restez là, il change un peu : vous
3885
us restez là, il change un peu : vous n’êtes plus
l’
invité mais un client, et qui devrait s’arranger pour payer. Et quand
3886
s’arranger pour payer. Et quand vous n’avez plus
d’
argent, c’est tout d’un coup le monsieur qui ne tient pas à ce que vou
3887
r. Et quand vous n’avez plus d’argent, c’est tout
d’
un coup le monsieur qui ne tient pas à ce que vous lui causiez des enn
3888
d vous n’avez plus d’argent, c’est tout d’un coup
le
monsieur qui ne tient pas à ce que vous lui causiez des ennuis. Débro
3889
vous êtes trop nombreux, on ne peut pas s’occuper
de
chacun de vous. Et c’est bien vrai. Nous étions trop nombreux. En Fra
3890
trop nombreux, on ne peut pas s’occuper de chacun
de
vous. Et c’est bien vrai. Nous étions trop nombreux. En France, en Su
3891
trop nombreux. En France, en Suisse aussi, avant
la
guerre, déjà, on trouvait qu’il y avait trop de Juifs réfugiés. Des g
3892
t la guerre, déjà, on trouvait qu’il y avait trop
de
Juifs réfugiés. Des gens frappés par le malheur, où que ce soit, il y
3893
vait trop de Juifs réfugiés. Des gens frappés par
le
malheur, où que ce soit, il y en a toujours trop. Cependant notre sor
3894
tre sort vous paraissait enviable, à juste titre.
Les
pires tourments de l’esprit et du cœur ont toujours paru préférables
3895
sait enviable, à juste titre. Les pires tourments
de
l’esprit et du cœur ont toujours paru préférables à la torture physiq
3896
t enviable, à juste titre. Les pires tourments de
l’
esprit et du cœur ont toujours paru préférables à la torture physique,
3897
esprit et du cœur ont toujours paru préférables à
la
torture physique, ou même à sa menace. Autant dire qu’on les tient po
3898
physique, ou même à sa menace. Autant dire qu’on
les
tient pour moins sérieux. Nous étions mal placés pour discuter cela,
3899
s pour discuter cela, donc en somme pour défendre
l’
esprit, — qui était pourtant tout ce qu’il restait à défendre par nous
3900
t tout ce qu’il restait à défendre par nous, dans
l’
exil… Beekman Place New York, août 1943 Beekman Place est un de
3901
Place New York, août 1943 Beekman Place est un
de
ces lieux où l’exilé s’écrie : « Mais c’est l’Europe ! » parce qu’il
3902
août 1943 Beekman Place est un de ces lieux où
l’
exilé s’écrie : « Mais c’est l’Europe ! » parce qu’il y trouve un char
3903
un de ces lieux où l’exilé s’écrie : « Mais c’est
l’
Europe ! » parce qu’il y trouve un charme, simplement. Mais quand je l
3904
’il y trouve un charme, simplement. Mais quand je
la
vois du haut de mon douzième étage, en enfilade, petite tranchée d’as
3905
charme, simplement. Mais quand je la vois du haut
de
mon douzième étage, en enfilade, petite tranchée d’asphalte et de bri
3906
mon douzième étage, en enfilade, petite tranchée
d’
asphalte et de brique jaune et rose dans un chaos géométrique, c’est b
3907
étage, en enfilade, petite tranchée d’asphalte et
de
brique jaune et rose dans un chaos géométrique, c’est bien New York…
3908
… Si je me retourne un peu sur ma terrasse, voici
la
perspective de l’East River jusqu’à Brooklyn. Un paysage immense de m
3909
urne un peu sur ma terrasse, voici la perspective
de
l’East River jusqu’à Brooklyn. Un paysage immense de minéral et d’eau
3910
e un peu sur ma terrasse, voici la perspective de
l’
East River jusqu’à Brooklyn. Un paysage immense de minéral et d’eau. L
3911
l’East River jusqu’à Brooklyn. Un paysage immense
de
minéral et d’eau. La rivière sillonnée de remorqueurs toussotants, lu
3912
usqu’à Brooklyn. Un paysage immense de minéral et
d’
eau. La rivière sillonnée de remorqueurs toussotants, luit d’un éclat
3913
Brooklyn. Un paysage immense de minéral et d’eau.
La
rivière sillonnée de remorqueurs toussotants, luit d’un éclat d’étain
3914
immense de minéral et d’eau. La rivière sillonnée
de
remorqueurs toussotants, luit d’un éclat d’étain pâli. Les ponts imme
3915
ivière sillonnée de remorqueurs toussotants, luit
d’
un éclat d’étain pâli. Les ponts immenses, vers Brooklyn, font une den
3916
onnée de remorqueurs toussotants, luit d’un éclat
d’
étain pâli. Les ponts immenses, vers Brooklyn, font une dentelle d’un
3917
queurs toussotants, luit d’un éclat d’étain pâli.
Les
ponts immenses, vers Brooklyn, font une dentelle d’un kilomètre, tout
3918
ponts immenses, vers Brooklyn, font une dentelle
d’
un kilomètre, toute menue dans la distance. Cheminées, mâts, clochers,
3919
ont une dentelle d’un kilomètre, toute menue dans
la
distance. Cheminées, mâts, clochers, usines plates et réclames lumine
3920
ines plates et réclames lumineuses en plein jour.
Le
seul vestige de nature — car l’eau même est canalisée — ce sont ces t
3921
éclames lumineuses en plein jour. Le seul vestige
de
nature — car l’eau même est canalisée — ce sont ces trois îlots de gr
3922
es en plein jour. Le seul vestige de nature — car
l’
eau même est canalisée — ce sont ces trois îlots de granit noir couver
3923
’eau même est canalisée — ce sont ces trois îlots
de
granit noir couverts de mouettes, et signalés par deux petits phares
3924
— ce sont ces trois îlots de granit noir couverts
de
mouettes, et signalés par deux petits phares dont clignotent irréguli
3925
eux petits phares dont clignotent irrégulièrement
le
feu vert — cinq secondes de révolution — et le feu rouge — six ou sep
3926
otent irrégulièrement le feu vert — cinq secondes
de
révolution — et le feu rouge — six ou sept secondes. Tout ce qu’embra
3927
nt le feu vert — cinq secondes de révolution — et
le
feu rouge — six ou sept secondes. Tout ce qu’embrasse mon regard, tou
3928
es. Tout ce qu’embrasse mon regard, tout est fait
de
main d’homme, sauf les mouettes. Qu’on ne me parle plus des lois écon
3929
ce qu’embrasse mon regard, tout est fait de main
d’
homme, sauf les mouettes. Qu’on ne me parle plus des lois économiques
3930
e mon regard, tout est fait de main d’homme, sauf
les
mouettes. Qu’on ne me parle plus des lois économiques et de leurs fat
3931
s. Qu’on ne me parle plus des lois économiques et
de
leurs fatales réalités : car ce sont les réalités d’un monde tout art
3932
miques et de leurs fatales réalités : car ce sont
les
réalités d’un monde tout artificiel que nous, les hommes avons bâti s
3933
leurs fatales réalités : car ce sont les réalités
d’
un monde tout artificiel que nous, les hommes avons bâti selon nos cap
3934
les réalités d’un monde tout artificiel que nous,
les
hommes avons bâti selon nos caprices, nos passions et nos raisons fol
3935
et nos raisons folles. Si nous changions un jour
de
goûts et d’ambition, ce paysage se transformerait. Si je me tourne ve
3936
ons folles. Si nous changions un jour de goûts et
d’
ambition, ce paysage se transformerait. Si je me tourne vers le nord,
3937
e paysage se transformerait. Si je me tourne vers
le
nord, je vois un monde de terrasses, du deuxième au trentième étage d
3938
t. Si je me tourne vers le nord, je vois un monde
de
terrasses, du deuxième au trentième étage du River Club, où vivent de
3939
Et tout près, ces jardins suspendus où circulent
de
jeunes femmes en maillot de bain. L’une se penche sur ses géraniums,
3940
uspendus où circulent de jeunes femmes en maillot
de
bain. L’une se penche sur ses géraniums, l’autre ajuste des lunettes
3941
es… Quelques jeunes gens viennent boire un verre,
le
soir. Un violoniste s’escrime à vingt reprises sur le deuxième Concer
3942
artèlent ce Tchaïkovski qu’on entend siffler dans
la
rue… Je me souviens de ce que j’ai sous les yeux : je le vois déjà co
3943
qu’on entend siffler dans la rue… Je me souviens
de
ce que j’ai sous les yeux : je le vois déjà comme je me le rappellera
3944
r dans la rue… Je me souviens de ce que j’ai sous
les
yeux : je le vois déjà comme je me le rappellerai, une fois de retour
3945
Je me souviens de ce que j’ai sous les yeux : je
le
vois déjà comme je me le rappellerai, une fois de retour en Europe. J
3946
j’ai sous les yeux : je le vois déjà comme je me
le
rappellerai, une fois de retour en Europe. J’en connais par avance la
3947
le vois déjà comme je me le rappellerai, une fois
de
retour en Europe. J’en connais par avance la nostalgie. Le soir vient
3948
fois de retour en Europe. J’en connais par avance
la
nostalgie. Le soir vient dans un luxe américain d’ocres, de roses, d’
3949
en Europe. J’en connais par avance la nostalgie.
Le
soir vient dans un luxe américain d’ocres, de roses, d’argent et d’éc
3950
a nostalgie. Le soir vient dans un luxe américain
d’
ocres, de roses, d’argent et d’éclats d’or sur les fenêtres des usines
3951
ie. Le soir vient dans un luxe américain d’ocres,
de
roses, d’argent et d’éclats d’or sur les fenêtres des usines. Des fum
3952
r vient dans un luxe américain d’ocres, de roses,
d’
argent et d’éclats d’or sur les fenêtres des usines. Des fumées traîne
3953
un luxe américain d’ocres, de roses, d’argent et
d’
éclats d’or sur les fenêtres des usines. Des fumées traînent, les pont
3954
américain d’ocres, de roses, d’argent et d’éclats
d’
or sur les fenêtres des usines. Des fumées traînent, les ponts s’éteig
3955
d’ocres, de roses, d’argent et d’éclats d’or sur
les
fenêtres des usines. Des fumées traînent, les ponts s’éteignent, le s
3956
sur les fenêtres des usines. Des fumées traînent,
les
ponts s’éteignent, le sommet des gratte-ciel se met à luire sous la l
3957
ines. Des fumées traînent, les ponts s’éteignent,
le
sommet des gratte-ciel se met à luire sous la lune, au-dessus des pre
3958
nt, le sommet des gratte-ciel se met à luire sous
la
lune, au-dessus des premiers nuages. Une grande nuit s’ouvre au trava
3959
ges. Une grande nuit s’ouvre au travail paisible.
D’
heure en heure, je me lève et sors. Je me promène sur cette terrasse q
3960
t sors. Je me promène sur cette terrasse qui fait
le
tour de mes chambres blanches posées sur le onzième étage et festonné
3961
Je me promène sur cette terrasse qui fait le tour
de
mes chambres blanches posées sur le onzième étage et festonnées de tu
3962
lanches posées sur le onzième étage et festonnées
de
tuiles provençales. La brique est chaude encore sous mes pieds nus. À
3963
nzième étage et festonnées de tuiles provençales.
La
brique est chaude encore sous mes pieds nus. À ma hauteur, et un peu
3964
t un peu plus bas, et puis beaucoup plus bas dans
les
buildings voisins séparés de ma terrasse par un gouffre profond mais
3965
ucoup plus bas dans les buildings voisins séparés
de
ma terrasse par un gouffre profond mais étroit, je vois des couples e
3966
tinée en peignoir rose ouvre son frigidaire, sort
de
la glace, ôte enfin le peignoir, il fait trop chaud. Des rires vienne
3967
ée en peignoir rose ouvre son frigidaire, sort de
la
glace, ôte enfin le peignoir, il fait trop chaud. Des rires viennent
3968
ouvre son frigidaire, sort de la glace, ôte enfin
le
peignoir, il fait trop chaud. Des rires viennent d’une terrasse obscu
3969
peignoir, il fait trop chaud. Des rires viennent
d’
une terrasse obscure, un cliquetis de tiges de verre dans les highball
3970
res viennent d’une terrasse obscure, un cliquetis
de
tiges de verre dans les highballs. Je rentre et j’aligne mes mots. Pe
3971
ent d’une terrasse obscure, un cliquetis de tiges
de
verre dans les highballs. Je rentre et j’aligne mes mots. Petits mati
3972
asse obscure, un cliquetis de tiges de verre dans
les
highballs. Je rentre et j’aligne mes mots. Petits matins déjà doux de
3973
s. Petits matins déjà doux des terrasses, moments
les
plus aigus de la vie, au jour qui point, quand toutes choses et les s
3974
s déjà doux des terrasses, moments les plus aigus
de
la vie, au jour qui point, quand toutes choses et les souvenirs d’hie
3975
éjà doux des terrasses, moments les plus aigus de
la
vie, au jour qui point, quand toutes choses et les souvenirs d’hier c
3976
la vie, au jour qui point, quand toutes choses et
les
souvenirs d’hier changent de poids et de millésime, quand les mouette
3977
r qui point, quand toutes choses et les souvenirs
d’
hier changent de poids et de millésime, quand les mouettes éclosent du
3978
nd toutes choses et les souvenirs d’hier changent
de
poids et de millésime, quand les mouettes éclosent du rocher, quand l
3979
oses et les souvenirs d’hier changent de poids et
de
millésime, quand les mouettes éclosent du rocher, quand les premiers
3980
s d’hier changent de poids et de millésime, quand
les
mouettes éclosent du rocher, quand les premiers remorqueurs se metten
3981
miers remorqueurs se mettent à souffler fort dans
la
brume d’été flottant sur la rivière… Une langue de lumière orangée vi
3982
orqueurs se mettent à souffler fort dans la brume
d’
été flottant sur la rivière… Une langue de lumière orangée vient râper
3983
à souffler fort dans la brume d’été flottant sur
la
rivière… Une langue de lumière orangée vient râper doucement le crépi
3984
a brume d’été flottant sur la rivière… Une langue
de
lumière orangée vient râper doucement le crépi des murs bas, sur la t
3985
e langue de lumière orangée vient râper doucement
le
crépi des murs bas, sur la terrasse toute voisine. Un autre jour, le
3986
vient râper doucement le crépi des murs bas, sur
la
terrasse toute voisine. Un autre jour, le même amour, mais le cœur s’
3987
as, sur la terrasse toute voisine. Un autre jour,
le
même amour, mais le cœur s’ouvre — l’aube est l’heure du pardon déliv
3988
toute voisine. Un autre jour, le même amour, mais
le
cœur s’ouvre — l’aube est l’heure du pardon délivrant — et je me donn
3989
autre jour, le même amour, mais le cœur s’ouvre —
l’
aube est l’heure du pardon délivrant — et je me donne au jour américai
3990
le même amour, mais le cœur s’ouvre — l’aube est
l’
heure du pardon délivrant — et je me donne au jour américain ! Sur le
3991
élivrant — et je me donne au jour américain ! Sur
le
grand fond sonore à bouche fermée des usines de l’autre rive, les sir
3992
r le grand fond sonore à bouche fermée des usines
de
l’autre rive, les sirènes des ferry-boats poussaient leur solo de dés
3993
onore à bouche fermée des usines de l’autre rive,
les
sirènes des ferry-boats poussaient leur solo de désastre, de faux dés
3994
les sirènes des ferry-boats poussaient leur solo
de
désastre, de faux désastre et d’appel commercial, dans le matin strid
3995
des ferry-boats poussaient leur solo de désastre,
de
faux désastre et d’appel commercial, dans le matin strident de l’East
3996
saient leur solo de désastre, de faux désastre et
d’
appel commercial, dans le matin strident de l’East River. Un quadrimot
3997
tre, de faux désastre et d’appel commercial, dans
le
matin strident de l’East River. Un quadrimoteur argenté passait très
3998
tre et d’appel commercial, dans le matin strident
de
l’East River. Un quadrimoteur argenté passait très haut entre deux to
3999
et d’appel commercial, dans le matin strident de
l’
East River. Un quadrimoteur argenté passait très haut entre deux tours
4000
r arroser au tuyau ses arbustes. Soudain, passant
la
tranche ocrée d’un bâtiment de trente étages, à mi-hauteur, sur la ri
4001
u ses arbustes. Soudain, passant la tranche ocrée
d’
un bâtiment de trente étages, à mi-hauteur, sur la rivière, une proue
4002
. Soudain, passant la tranche ocrée d’un bâtiment
de
trente étages, à mi-hauteur, sur la rivière, une proue grise et ses c
4003
d’un bâtiment de trente étages, à mi-hauteur, sur
la
rivière, une proue grise et ses canons glissait sans bruit, un énorme
4004
ait sans bruit, un énorme croiseur défilait, tout
l’
équipage en fête saluant New York d’adieux, filant pavois au vent vers
4005
éfilait, tout l’équipage en fête saluant New York
d’
adieux, filant pavois au vent vers l’Europe et la guerre… Mémoire d
4006
ant New York d’adieux, filant pavois au vent vers
l’
Europe et la guerre… Mémoire de l’Europe New York, fin 1944 Je n
4007
d’adieux, filant pavois au vent vers l’Europe et
la
guerre… Mémoire de l’Europe New York, fin 1944 Je ne savais pas
4008
is au vent vers l’Europe et la guerre… Mémoire
de
l’Europe New York, fin 1944 Je ne savais pas que tout était si prè
4009
au vent vers l’Europe et la guerre… Mémoire de
l’
Europe New York, fin 1944 Je ne savais pas que tout était si près,
4010
étais baigné. J’étais fondé. Et je marchais parmi
les
signes. Sédiments séculaires, socles de nos patries ! Monuments que l
4011
is parmi les signes. Sédiments séculaires, socles
de
nos patries ! Monuments que l’on ne voit plus, mais qui renvoient l’é
4012
séculaires, socles de nos patries ! Monuments que
l’
on ne voit plus, mais qui renvoient l’écho familier de nos pas. Et ces
4013
numents que l’on ne voit plus, mais qui renvoient
l’
écho familier de nos pas. Et ces rues qui tournaient doucement vers un
4014
ne voit plus, mais qui renvoient l’écho familier
de
nos pas. Et ces rues qui tournaient doucement vers une place plantée
4015
s qui tournaient doucement vers une place plantée
d’
arbres et déserte, aux rendez-vous manqués où je me retrouvais… « Je t
4016
etrouvais… « Je t’aime. J’aime ! » J’ai tout dit.
L’
Europe était patrie d’amour. Le silence attendait, l’absence était pro
4017
. J’aime ! » J’ai tout dit. L’Europe était patrie
d’
amour. Le silence attendait, l’absence était profonde, et chaque être
4018
! » J’ai tout dit. L’Europe était patrie d’amour.
Le
silence attendait, l’absence était profonde, et chaque être présent q
4019
urope était patrie d’amour. Le silence attendait,
l’
absence était profonde, et chaque être présent questionnait, répondait
4020
, et chaque être présent questionnait, répondait.
La
force était au secret de nos vies, nouée parfois dans une rancune obs
4021
questionnait, répondait. La force était au secret
de
nos vies, nouée parfois dans une rancune obscure, ou bien dans la con
4022
ée parfois dans une rancune obscure, ou bien dans
la
contemplation jalouse d’un vieil arbre — il était vieux déjà du temps
4023
ne obscure, ou bien dans la contemplation jalouse
d’
un vieil arbre — il était vieux déjà du temps de notre enfance, et not
4024
e d’un vieil arbre — il était vieux déjà du temps
de
notre enfance, et notre possession la plus tenace, il nous réduisait
4025
jà du temps de notre enfance, et notre possession
la
plus tenace, il nous réduisait au silence. La force était chanson fre
4026
ion la plus tenace, il nous réduisait au silence.
La
force était chanson fredonnée sur le seuil, au matin d’une journée qu
4027
au silence. La force était chanson fredonnée sur
le
seuil, au matin d’une journée qui se liait aux autres… (Quand ta forc
4028
ce était chanson fredonnée sur le seuil, au matin
d’
une journée qui se liait aux autres… (Quand ta force devient visible,
4029
res… (Quand ta force devient visible, c’est comme
le
sang, c’est que tu es blessé, ta vie s’en va.) La force était mémoire
4030
le sang, c’est que tu es blessé, ta vie s’en va.)
La
force était mémoire et allusion. Elle était ce vieil arbre tenace. El
4031
ion. Elle était ce vieil arbre tenace. Elle était
la
douceur et la sagesse amère des adieux, ou la gaieté d’un mot dit en
4032
t ce vieil arbre tenace. Elle était la douceur et
la
sagesse amère des adieux, ou la gaieté d’un mot dit en passant. Elle
4033
ait la douceur et la sagesse amère des adieux, ou
la
gaieté d’un mot dit en passant. Elle avait les pudeurs de l’amour… Qu
4034
ceur et la sagesse amère des adieux, ou la gaieté
d’
un mot dit en passant. Elle avait les pudeurs de l’amour… Quand je me
4035
ou la gaieté d’un mot dit en passant. Elle avait
les
pudeurs de l’amour… Quand je me souviens — c’est l’Europe. Parce que
4036
é d’un mot dit en passant. Elle avait les pudeurs
de
l’amour… Quand je me souviens — c’est l’Europe. Parce que l’Europe e
4037
’un mot dit en passant. Elle avait les pudeurs de
l’
amour… Quand je me souviens — c’est l’Europe. Parce que l’Europe est
4038
pudeurs de l’amour… Quand je me souviens — c’est
l’
Europe. Parce que l’Europe est la mémoire du monde, parce qu’elle a s
4039
Quand je me souviens — c’est l’Europe. Parce que
l’
Europe est la mémoire du monde, parce qu’elle a su garder en vie tant
4040
ouviens — c’est l’Europe. Parce que l’Europe est
la
mémoire du monde, parce qu’elle a su garder en vie tant de passé, et
4041
n vie tant de passé, et garder tant de morts dans
la
présence, elle ne cessera pas d’engendrer. Elle a maîtrise d’avenir.
4042
nt de morts dans la présence, elle ne cessera pas
d’
engendrer. Elle a maîtrise d’avenir. Nostalgie anticipée Princeton,
4043
elle ne cessera pas d’engendrer. Elle a maîtrise
d’
avenir. Nostalgie anticipée Princeton, 27 mars 1946 Entre les d
4044
algie anticipée Princeton, 27 mars 1946 Entre
les
deux mondes. — L’avion partira dans trois jours. Déjà par l’imaginati
4045
nceton, 27 mars 1946 Entre les deux mondes. —
L’
avion partira dans trois jours. Déjà par l’imagination, j’habite l’Eur
4046
des. — L’avion partira dans trois jours. Déjà par
l’
imagination, j’habite l’Europe. Je circule quand je veux dans les haut
4047
ans trois jours. Déjà par l’imagination, j’habite
l’
Europe. Je circule quand je veux dans les hauts corridors et dans le v
4048
j’habite l’Europe. Je circule quand je veux dans
les
hauts corridors et dans le vestibule qui sent le fruit de notre ancie
4049
le quand je veux dans les hauts corridors et dans
le
vestibule qui sent le fruit de notre ancienne maison de campagne, et
4050
les hauts corridors et dans le vestibule qui sent
le
fruit de notre ancienne maison de campagne, et mon pied reconnaît cet
4051
corridors et dans le vestibule qui sent le fruit
de
notre ancienne maison de campagne, et mon pied reconnaît cette brique
4052
agne, et mon pied reconnaît cette brique, près de
l’
escalier, qui basculait un peu du temps de mon enfance. (On ne l’a don
4053
près de l’escalier, qui basculait un peu du temps
de
mon enfance. (On ne l’a donc jamais recimentée ?) Pourquoi faire ce v
4054
basculait un peu du temps de mon enfance. (On ne
l’
a donc jamais recimentée ?) Pourquoi faire ce voyage vers les lieux et
4055
amais recimentée ?) Pourquoi faire ce voyage vers
les
lieux et les choses que toujours et partout je porte en moi ? Mais il
4056
tée ?) Pourquoi faire ce voyage vers les lieux et
les
choses que toujours et partout je porte en moi ? Mais il faut aller v
4057
partout je porte en moi ? Mais il faut aller vers
les
êtres, car ce sont eux qui changent et qui s’éloignent. Un autre sent
4058
ui s’éloignent. Un autre sentiment que je connais
d’
avance et ne pourrai que retrouver là-bas, c’est celui de ma nostalgie
4059
e et ne pourrai que retrouver là-bas, c’est celui
de
ma nostalgie de l’Amérique. De ce présent que je vis déjà comme passé
4060
que retrouver là-bas, c’est celui de ma nostalgie
de
l’Amérique. De ce présent que je vis déjà comme passé dans le futur q
4061
retrouver là-bas, c’est celui de ma nostalgie de
l’
Amérique. De ce présent que je vis déjà comme passé dans le futur que
4062
à-bas, c’est celui de ma nostalgie de l’Amérique.
De
ce présent que je vis déjà comme passé dans le futur que j’anticipe.
4063
e. De ce présent que je vis déjà comme passé dans
le
futur que j’anticipe. Je me promène dans un New York déjà quitté, réc
4064
déjà quitté, récapitulant mes regrets… Nostalgie
de
cette avenue, à telle heure du jour ou de la nuit, j’y vais encore un
4065
stalgie de cette avenue, à telle heure du jour ou
de
la nuit, j’y vais encore une fois, pour la retrouver déjà… Que signif
4066
lgie de cette avenue, à telle heure du jour ou de
la
nuit, j’y vais encore une fois, pour la retrouver déjà… Que signifie
4067
our ou de la nuit, j’y vais encore une fois, pour
la
retrouver déjà… Que signifie tant de puérilité ? Le doute n’est plus
4068
retrouver déjà… Que signifie tant de puérilité ?
Le
doute n’est plus permis. J’aime l’Amérique. Ils me demanderont pourqu
4069
de puérilité ? Le doute n’est plus permis. J’aime
l’
Amérique. Ils me demanderont pourquoi, je ne saurai pas répondre. Sait
4070
e ne saurai pas répondre. Sait-on jamais pourquoi
l’
on aime un être ? Voici longtemps qu’on a cessé de penser qu’il est me
4071
l’on aime un être ? Voici longtemps qu’on a cessé
de
penser qu’il est meilleur ou plus beau que tout autre, mais avec lui
4072
illeur ou plus beau que tout autre, mais avec lui
l’
on se sent bien. Ses défauts crèvent les yeux, il vous a fait souffrir
4073
s avec lui l’on se sent bien. Ses défauts crèvent
les
yeux, il vous a fait souffrir, on vous démontrera qu’il n’est pas fai
4074
ne signifie rien sur sa valeur « en soi » ni sur
la
vôtre que personne ne peut mesurer. Mais dans cette relation, vous ex
4075
ls me diront encore : « Vous estimez vraiment que
l’
Amérique est si bien ? Vous préférez y vivre ? Vous reniez l’Europe ?
4076
est si bien ? Vous préférez y vivre ? Vous reniez
l’
Europe ? » Mais je ne sais pas du tout si l’Amérique est bien ou mal,
4077
eniez l’Europe ? » Mais je ne sais pas du tout si
l’
Amérique est bien ou mal, si elle vaut mieux que l’Europe, si j’y revi
4078
’Amérique est bien ou mal, si elle vaut mieux que
l’
Europe, si j’y reviendrai jamais ! Et l’homme est né pour circuler, no
4079
mieux que l’Europe, si j’y reviendrai jamais ! Et
l’
homme est né pour circuler, non pour s’enraciner comme une victime des
4080
sa mère, un autre comme sa femme, un autre comme
les
femmes, un autre enfin comme une passion. L’amour n’est pas encore ra
4081
mme les femmes, un autre enfin comme une passion.
L’
amour n’est pas encore rationné, que je sache ? Et s’il est vrai, s’il
4082
, que je sache ? Et s’il est vrai, s’il n’est pas
le
masque d’une haine, s’il m’ouvre à l’Être au lieu de me refermer sur
4083
ache ? Et s’il est vrai, s’il n’est pas le masque
d’
une haine, s’il m’ouvre à l’Être au lieu de me refermer sur quelque ob
4084
l n’est pas le masque d’une haine, s’il m’ouvre à
l’
Être au lieu de me refermer sur quelque obsession de l’Avoir, chaque a
4085
Être au lieu de me refermer sur quelque obsession
de
l’Avoir, chaque amour enrichit tout l’amour. Entre deux mondes aimés
4086
e au lieu de me refermer sur quelque obsession de
l’
Avoir, chaque amour enrichit tout l’amour. Entre deux mondes aimés dif
4087
obsession de l’Avoir, chaque amour enrichit tout
l’
amour. Entre deux mondes aimés différemment, que l’amour ne soit pas d
4088
’amour. Entre deux mondes aimés différemment, que
l’
amour ne soit pas déchiré ! Mais qu’il s’anime et vole et se réjouisse
4089
sse, et qu’il exige enfin sa pleine mesure, toute
la
Terre promise à tout l’homme ! Premier retour Paris, début avril 1
4090
n sa pleine mesure, toute la Terre promise à tout
l’
homme ! Premier retour Paris, début avril 1946 LaGuardia Field d
4091
ield dans une matinée bleue, c’était déjà presque
l’
été. Cinq heures plus tard, nous avons rejoint l’hiver, un ouragan de
4092
l’été. Cinq heures plus tard, nous avons rejoint
l’
hiver, un ouragan de neige horizontale sur le désert des forêts canadi
4093
plus tard, nous avons rejoint l’hiver, un ouragan
de
neige horizontale sur le désert des forêts canadiennes aux lacs gelés
4094
oint l’hiver, un ouragan de neige horizontale sur
le
désert des forêts canadiennes aux lacs gelés. Nous dûmes passer toute
4095
nadiennes aux lacs gelés. Nous dûmes passer toute
la
nuit dans les lugubres baraquements de la base de Gander, à Terre-Neu
4096
lacs gelés. Nous dûmes passer toute la nuit dans
les
lugubres baraquements de la base de Gander, à Terre-Neuve. Une aurore
4097
sser toute la nuit dans les lugubres baraquements
de
la base de Gander, à Terre-Neuve. Une aurore boréale nous avait arrêt
4098
r toute la nuit dans les lugubres baraquements de
la
base de Gander, à Terre-Neuve. Une aurore boréale nous avait arrêtés,
4099
la nuit dans les lugubres baraquements de la base
de
Gander, à Terre-Neuve. Une aurore boréale nous avait arrêtés, non poi
4100
quait des tempêtes magnétiques qui ont pour effet
d’
aveugler les avions aux appareils plus délicats que les sens de l’homm
4101
empêtes magnétiques qui ont pour effet d’aveugler
les
avions aux appareils plus délicats que les sens de l’homme. Cette bel
4102
eugler les avions aux appareils plus délicats que
les
sens de l’homme. Cette belle crise radio-poétique s’étant heureusemen
4103
s avions aux appareils plus délicats que les sens
de
l’homme. Cette belle crise radio-poétique s’étant heureusement dénoué
4104
vions aux appareils plus délicats que les sens de
l’
homme. Cette belle crise radio-poétique s’étant heureusement dénouée d
4105
radio-poétique s’étant heureusement dénouée dans
les
hauteurs du ciel arctique, nous montâmes en spirale à 5000 mètres, au
4106
nous montâmes en spirale à 5000 mètres, au-dessus
d’
une mer morte de glace. J’allais écrire : « L’avion s’élance pour fran
4107
spirale à 5000 mètres, au-dessus d’une mer morte
de
glace. J’allais écrire : « L’avion s’élance pour franchir l’Océan d’u
4108
sus d’une mer morte de glace. J’allais écrire : «
L’
avion s’élance pour franchir l’Océan d’un seul bond. Nous volons à tir
4109
’allais écrire : « L’avion s’élance pour franchir
l’
Océan d’un seul bond. Nous volons à tire-d’aile vers l’Irlande ». Mais
4110
écrire : « L’avion s’élance pour franchir l’Océan
d’
un seul bond. Nous volons à tire-d’aile vers l’Irlande ». Mais ce clic
4111
an d’un seul bond. Nous volons à tire-d’aile vers
l’
Irlande ». Mais ce cliché et ces jolies syllabes décrivent mal un voya
4112
st attendre. Non seulement attendre son tour dans
la
queue devant des guichets, mais encore, une fois installé dans le fau
4113
des guichets, mais encore, une fois installé dans
le
fauteuil profond de l’avion, attendre que la boule au-dessous de nous
4114
ncore, une fois installé dans le fauteuil profond
de
l’avion, attendre que la boule au-dessous de nous ait tourné jusqu’au
4115
re, une fois installé dans le fauteuil profond de
l’
avion, attendre que la boule au-dessous de nous ait tourné jusqu’au po
4116
dans le fauteuil profond de l’avion, attendre que
la
boule au-dessous de nous ait tourné jusqu’au point désiré, pour y des
4117
y descendre et s’y poser. Rien ne donne une idée
de
l’immobilité comme ce vol sans repères en plein ciel, à 150 mètres à
4118
descendre et s’y poser. Rien ne donne une idée de
l’
immobilité comme ce vol sans repères en plein ciel, à 150 mètres à la
4119
50 mètres à la seconde, sans vibration ni courant
d’
air, et sans nul signe apparent de mouvement. Les uns écrivent, d’autr
4120
tion ni courant d’air, et sans nul signe apparent
de
mouvement. Les uns écrivent, d’autres déjeunent. Je regarde par mon h
4121
t d’air, et sans nul signe apparent de mouvement.
Les
uns écrivent, d’autres déjeunent. Je regarde par mon hublot. La mer e
4122
t, d’autres déjeunent. Je regarde par mon hublot.
La
mer est blanche, un peu houleuse et cotonneuse. Mais tout d’un coup e
4123
blanche, un peu houleuse et cotonneuse. Mais tout
d’
un coup elle se déchire : ce n’était qu’une couche de nuages. Trois-mi
4124
n coup elle se déchire : ce n’était qu’une couche
de
nuages. Trois-mille mètres plus bas paraît une surface bleue, comme u
4125
une surface bleue, comme un papier grenu ponctué
de
défauts blancs. Un petit fuseau clair y traîne sa fumée, c’est un paq
4126
en trois heures. Nous sommes partis tout au début
de
la matinée. Voici déjà l’après-midi, voici le soir, nous volons contr
4127
trois heures. Nous sommes partis tout au début de
la
matinée. Voici déjà l’après-midi, voici le soir, nous volons contre l
4128
es partis tout au début de la matinée. Voici déjà
l’
après-midi, voici le soir, nous volons contre le soleil et le temps co
4129
but de la matinée. Voici déjà l’après-midi, voici
le
soir, nous volons contre le soleil et le temps coule deux fois plus v
4130
à l’après-midi, voici le soir, nous volons contre
le
soleil et le temps coule deux fois plus vite. La stratosphère se dore
4131
i, voici le soir, nous volons contre le soleil et
le
temps coule deux fois plus vite. La stratosphère se dore. Des cumulus
4132
le soleil et le temps coule deux fois plus vite.
La
stratosphère se dore. Des cumulus élèvent des tours et des créneaux d
4133
re. Des cumulus élèvent des tours et des créneaux
d’
un rose feu sur l’horizon follement lointain, tandis que nous survolon
4134
èvent des tours et des créneaux d’un rose feu sur
l’
horizon follement lointain, tandis que nous survolons des profondeurs
4135
s survolons des profondeurs multipliées, cavernes
d’
ombre et gonflements majestueux où la lumière fait ses grands jeux, de
4136
es, cavernes d’ombre et gonflements majestueux où
la
lumière fait ses grands jeux, de tous les rouges au bleu de plomb. Au
4137
ts majestueux où la lumière fait ses grands jeux,
de
tous les rouges au bleu de plomb. Aux approches de l’Irlande vient la
4138
tueux où la lumière fait ses grands jeux, de tous
les
rouges au bleu de plomb. Aux approches de l’Irlande vient la nuit. De
4139
fait ses grands jeux, de tous les rouges au bleu
de
plomb. Aux approches de l’Irlande vient la nuit. Derrière nous, tout
4140
e tous les rouges au bleu de plomb. Aux approches
de
l’Irlande vient la nuit. Derrière nous, tout est flamme et or. Mais u
4141
ous les rouges au bleu de plomb. Aux approches de
l’
Irlande vient la nuit. Derrière nous, tout est flamme et or. Mais un t
4142
u bleu de plomb. Aux approches de l’Irlande vient
la
nuit. Derrière nous, tout est flamme et or. Mais un toit d’ombre épai
4143
errière nous, tout est flamme et or. Mais un toit
d’
ombre épaisse descend obliquement, rejoint la mer, ferme le monde deva
4144
toit d’ombre épaisse descend obliquement, rejoint
la
mer, ferme le monde devant nous. En deux minutes nous sommes passés d
4145
paisse descend obliquement, rejoint la mer, ferme
le
monde devant nous. En deux minutes nous sommes passés de la gloire au
4146
e devant nous. En deux minutes nous sommes passés
de
la gloire aux ténèbres denses. Il n’y a plus, tout près sur nos têtes
4147
evant nous. En deux minutes nous sommes passés de
la
gloire aux ténèbres denses. Il n’y a plus, tout près sur nos têtes, q
4148
nses. Il n’y a plus, tout près sur nos têtes, que
les
lampes en veilleuses, et le ronron des moteurs. Une petite secousse,
4149
s sur nos têtes, que les lampes en veilleuses, et
le
ronron des moteurs. Une petite secousse, une longue promenade sur des
4150
une longue promenade sur des pistes en ciment. Et
l’
arrêt doux. Shannon, Irlande. Le restaurant ne manque pas d’élégance.
4151
tes en ciment. Et l’arrêt doux. Shannon, Irlande.
Le
restaurant ne manque pas d’élégance. Une dame qui vient de passer le
4152
ux. Shannon, Irlande. Le restaurant ne manque pas
d’
élégance. Une dame qui vient de passer le temps de la guerre en Amériq
4153
nque pas d’élégance. Une dame qui vient de passer
le
temps de la guerre en Amérique frémit de toutes ses fourrures et se r
4154
d’élégance. Une dame qui vient de passer le temps
de
la guerre en Amérique frémit de toutes ses fourrures et se récrie : «
4155
légance. Une dame qui vient de passer le temps de
la
guerre en Amérique frémit de toutes ses fourrures et se récrie : « Qu
4156
e passer le temps de la guerre en Amérique frémit
de
toutes ses fourrures et se récrie : « Quel goût ! Voilà l’Europe enfi
4157
ses fourrures et se récrie : « Quel goût ! Voilà
l’
Europe enfin ! Et des fleurs vraies ! Ah mon cher, ici tout est beau !
4158
i tout est beau !… — Mais tout ici a été fait par
les
Américains pendant la guerre… — Taisez-vous, me crie-t-elle, je retro
4159
is tout ici a été fait par les Américains pendant
la
guerre… — Taisez-vous, me crie-t-elle, je retrouve l’Europe ! Ce n’es
4160
uerre… — Taisez-vous, me crie-t-elle, je retrouve
l’
Europe ! Ce n’est pas le moment d’être objectif ! » Elle adore ces rid
4161
crie-t-elle, je retrouve l’Europe ! Ce n’est pas
le
moment d’être objectif ! » Elle adore ces rideaux rouges, ces meubles
4162
le, je retrouve l’Europe ! Ce n’est pas le moment
d’
être objectif ! » Elle adore ces rideaux rouges, ces meubles blancs, e
4163
ouges, ces meubles blancs, et ce grape-fruit. Ils
la
vengent, croit-elle, d’une Amérique « où tout est laid », mais d’où i
4164
s, et ce grape-fruit. Ils la vengent, croit-elle,
d’
une Amérique « où tout est laid », mais d’où ils viennent. 2 avril
4165
t-elle, d’une Amérique « où tout est laid », mais
d’
où ils viennent. 2 avril 1946 Les oiseaux de Paris. — Nous roul
4166
id », mais d’où ils viennent. 2 avril 1946
Les
oiseaux de Paris. — Nous roulons dans un petit autobus, du terrain d’
4167
’où ils viennent. 2 avril 1946 Les oiseaux
de
Paris. — Nous roulons dans un petit autobus, du terrain d’Orly vers P
4168
— Nous roulons dans un petit autobus, du terrain
d’
Orly vers Paris. Sept ans bientôt, depuis que je l’ai quitté… Par quel
4169
’Orly vers Paris. Sept ans bientôt, depuis que je
l’
ai quitté… Par quelle porte allons-nous entrer ? Je ne puis pas distin
4170
te allons-nous entrer ? Je ne puis pas distinguer
les
noms des rues sur ces maisons jaunes ou grises et si basses. Je cherc
4171
jaunes ou grises et si basses. Je cherche à voir,
le
nez contre la vitre, et tout d’un coup : rue Claude-Bernard, — en ple
4172
es et si basses. Je cherche à voir, le nez contre
la
vitre, et tout d’un coup : rue Claude-Bernard, — en plein cinquième a
4173
e cherche à voir, le nez contre la vitre, et tout
d’
un coup : rue Claude-Bernard, — en plein cinquième arrondissement : —
4174
rrondissement : — quand je me croyais encore dans
la
banlieue… Déjà nous descendons une rue déserte et provinciale. C’étai
4175
ons une rue déserte et provinciale. C’était cela,
le
boulevard Saint-Michel ? Mais sur les quais, où le car nous dépose, j
4176
’était cela, le boulevard Saint-Michel ? Mais sur
les
quais, où le car nous dépose, j’ai retrouvé les grandes mesures de Pa
4177
e boulevard Saint-Michel ? Mais sur les quais, où
le
car nous dépose, j’ai retrouvé les grandes mesures de Paris. Dans que
4178
r les quais, où le car nous dépose, j’ai retrouvé
les
grandes mesures de Paris. Dans quel silence, à quatre heures du matin
4179
ar nous dépose, j’ai retrouvé les grandes mesures
de
Paris. Dans quel silence, à quatre heures du matin. Trouverons-nous q
4180
du matin. Trouverons-nous quelques chambres pour
le
reste de la nuit ? Deux jeunes Américains du convoi m’interrogent. C
4181
. Trouverons-nous quelques chambres pour le reste
de
la nuit ? Deux jeunes Américains du convoi m’interrogent. Cet hôtel
4182
rouverons-nous quelques chambres pour le reste de
la
nuit ? Deux jeunes Américains du convoi m’interrogent. Cet hôtel ne
4183
rrogent. Cet hôtel ne leur plaît qu’à moitié. Je
les
décourage d’aller chercher ailleurs. Crise des logements. — Est-ce qu
4184
hôtel ne leur plaît qu’à moitié. Je les décourage
d’
aller chercher ailleurs. Crise des logements. — Est-ce que Paris a été
4185
sez des chambres libres, faites-moi signe. (Comme
les
Américains paraissent bizarres, ici. Comme ils se mettent immédiateme
4186
ls se mettent immédiatement à ressembler à ce que
l’
on pense d’eux en Europe.) Il y a des chambres et même des salles de b
4187
nt immédiatement à ressembler à ce que l’on pense
d’
eux en Europe.) Il y a des chambres et même des salles de bains. Mais
4188
n Europe.) Il y a des chambres et même des salles
de
bains. Mais comment dormirais-je cette nuit ? J’arrive au rendez-vous
4189
ive au rendez-vous après sept ans, furtivement, à
la
faveur d’une nuit déserte. Un rendez-vous dont j’avais bien souvent d
4190
dez-vous après sept ans, furtivement, à la faveur
d’
une nuit déserte. Un rendez-vous dont j’avais bien souvent désespéré,
4191
juin 1940, qui sonnait malgré moi comme un adieu…
Le
jour point derrière les rideaux. Je vais sortir sur mon balcon, je va
4192
malgré moi comme un adieu… Le jour point derrière
les
rideaux. Je vais sortir sur mon balcon, je vais la voir… Tout d’abord
4193
s rideaux. Je vais sortir sur mon balcon, je vais
la
voir… Tout d’abord je n’ai distingué qu’un paysage de toits bleus, mé
4194
oir… Tout d’abord je n’ai distingué qu’un paysage
de
toits bleus, médiéval. Et voici qu’une cloche très fine a sonné cinq
4195
eurs en écho. Je ne savais plus, après ces années
de
New York, qu’il y a des cloches qui sonnent les heures aux villes, et
4196
es de New York, qu’il y a des cloches qui sonnent
les
heures aux villes, et qui s’accordent à la suavité aiguë du petit jou
4197
nnent les heures aux villes, et qui s’accordent à
la
suavité aiguë du petit jour. Et cette rumeur soudain de cris menus et
4198
vité aiguë du petit jour. Et cette rumeur soudain
de
cris menus et de sifflets, de tous côtés, comme les premières gouttes
4199
it jour. Et cette rumeur soudain de cris menus et
de
sifflets, de tous côtés, comme les premières gouttes d’une averse, ce
4200
ette rumeur soudain de cris menus et de sifflets,
de
tous côtés, comme les premières gouttes d’une averse, ce sont bien de
4201
flets, de tous côtés, comme les premières gouttes
d’
une averse, ce sont bien des oiseaux ! Dans une ville ! Point d’autres
4202
e ne rêve pas : un coq qui crie, tout là-bas vers
les
Invalides. L’or pâle du dôme s’avive au-dessus des toits bleus, des t
4203
un coq qui crie, tout là-bas vers les Invalides.
L’
or pâle du dôme s’avive au-dessus des toits bleus, des toits roux et d
4204
et des murs couleur du temps, où quelques taches
de
rose clair ou de noir achèvent de composer une harmonie qui fait veni
4205
eur du temps, où quelques taches de rose clair ou
de
noir achèvent de composer une harmonie qui fait venir les larmes aux
4206
quelques taches de rose clair ou de noir achèvent
de
composer une harmonie qui fait venir les larmes aux yeux. Premier bru
4207
achèvent de composer une harmonie qui fait venir
les
larmes aux yeux. Premier bruit de pas dans la rue. Semelles de bois.
4208
qui fait venir les larmes aux yeux. Premier bruit
de
pas dans la rue. Semelles de bois. Une femme de ménage sort ses clés,
4209
ir les larmes aux yeux. Premier bruit de pas dans
la
rue. Semelles de bois. Une femme de ménage sort ses clés, ouvre une p
4210
yeux. Premier bruit de pas dans la rue. Semelles
de
bois. Une femme de ménage sort ses clés, ouvre une porte de service à
4211
t de pas dans la rue. Semelles de bois. Une femme
de
ménage sort ses clés, ouvre une porte de service à côté du portail d’
4212
ne femme de ménage sort ses clés, ouvre une porte
de
service à côté du portail d’un ministère. Un vieux monsieur très gran
4213
lés, ouvre une porte de service à côté du portail
d’
un ministère. Un vieux monsieur très grand, vêtu de noir, aux pantalon
4214
’un ministère. Un vieux monsieur très grand, vêtu
de
noir, aux pantalons étroits, aux longs souliers pointus, sort d’un xi
4215
ntalons étroits, aux longs souliers pointus, sort
d’
un xixe siècle d’illustrés de mon enfance. Des jeunes gens en chandai
4216
ux longs souliers pointus, sort d’un xixe siècle
d’
illustrés de mon enfance. Des jeunes gens en chandail, portant de gros
4217
liers pointus, sort d’un xixe siècle d’illustrés
de
mon enfance. Des jeunes gens en chandail, portant de grosses valises,
4218
mon enfance. Des jeunes gens en chandail, portant
de
grosses valises, se hâtent vers la gare d’Orsay. Paris a reculé d’un
4219
ndail, portant de grosses valises, se hâtent vers
la
gare d’Orsay. Paris a reculé d’un siècle, en direction d’une beauté o
4220
ortant de grosses valises, se hâtent vers la gare
d’
Orsay. Paris a reculé d’un siècle, en direction d’une beauté oubliée.
4221
s, se hâtent vers la gare d’Orsay. Paris a reculé
d’
un siècle, en direction d’une beauté oubliée. Plus Suisse que natur
4222
d’Orsay. Paris a reculé d’un siècle, en direction
d’
une beauté oubliée. Plus Suisse que nature 7 avril 1946 — Que la
4223
. Plus Suisse que nature 7 avril 1946 — Que
la
Suisse soit restée aussi suisse m’a paru proprement incroyable. Je ne
4224
isse m’a paru proprement incroyable. Je ne trouve
d’
autre sujet de m’étonner que de n’en point trouver justement. Tout est
4225
proprement incroyable. Je ne trouve d’autre sujet
de
m’étonner que de n’en point trouver justement. Tout est pareil à mes
4226
able. Je ne trouve d’autre sujet de m’étonner que
de
n’en point trouver justement. Tout est pareil à mes souvenirs, à pein
4227
à peine un peu plus ressemblant. Tout est intact.
La
brusquerie des employés intacte, quand on demande un petit renseignem
4228
quand on demande un petit renseignement et qu’on
les
voit s’identifier en un clin d’œil avec les règlements « pareils pour
4229
qu’on les voit s’identifier en un clin d’œil avec
les
règlements « pareils pour tous », non point avec votre situation d’us
4230
reils pour tous », non point avec votre situation
d’
usager perplexe ou anxieux. La bonhomie des mêmes employés intacte, un
4231
vec votre situation d’usager perplexe ou anxieux.
La
bonhomie des mêmes employés intacte, une fois qu’on leur a laissé le
4232
es employés intacte, une fois qu’on leur a laissé
le
temps de revenir à leur naturel. (Et ce n’est pas toujours au galop.)
4233
és intacte, une fois qu’on leur a laissé le temps
de
revenir à leur naturel. (Et ce n’est pas toujours au galop.) Les quar
4234
eur naturel. (Et ce n’est pas toujours au galop.)
Les
quartiers extérieurs des villes intacts, et si parfaits dans le propr
4235
xtérieurs des villes intacts, et si parfaits dans
le
propret-coquet-scolaire-1910 que l’imagination se rend sans condition
4236
parfaits dans le propret-coquet-scolaire-1910 que
l’
imagination se rend sans condition après la plus rapide reconnaissance
4237
10 que l’imagination se rend sans condition après
la
plus rapide reconnaissance des lieux. J’ai revu des amis intacts, et
4238
ce des lieux. J’ai revu des amis intacts, et dont
l’
amitié seule avait mûri comme un bon vin. Et j’ai feuilleté des éditio
4239
éditions si belles qu’on se demande quels talents
les
méritent. Ce qu’il y a de plus intact en Suisse, peut-être, c’est le
4240
il y a de plus intact en Suisse, peut-être, c’est
le
mythe helvétique par excellence d’une décence fondamentale. Il se peu
4241
ut-être, c’est le mythe helvétique par excellence
d’
une décence fondamentale. Il se peut que la Suisse ait seule gagné la
4242
llence d’une décence fondamentale. Il se peut que
la
Suisse ait seule gagné la guerre, et seule n’ait pas été contaminée p
4243
mentale. Il se peut que la Suisse ait seule gagné
la
guerre, et seule n’ait pas été contaminée par le gangstérisme à la mo
4244
la guerre, et seule n’ait pas été contaminée par
le
gangstérisme à la mode. C’est clair : le mal y est mal vu, tout simpl
4245
le n’ait pas été contaminée par le gangstérisme à
la
mode. C’est clair : le mal y est mal vu, tout simplement. On le tient
4246
inée par le gangstérisme à la mode. C’est clair :
le
mal y est mal vu, tout simplement. On le tient encore pour anormal. J
4247
clair : le mal y est mal vu, tout simplement. On
le
tient encore pour anormal. J’ai l’impression qu’on exagère un peu, à
4248
simplement. On le tient encore pour anormal. J’ai
l’
impression qu’on exagère un peu, à cet égard. Mais le reste du monde s
4249
mpression qu’on exagère un peu, à cet égard. Mais
le
reste du monde se charge bien de rétablir un équilibre « humain », su
4250
cet égard. Mais le reste du monde se charge bien
de
rétablir un équilibre « humain », sur les modèles récemment présentés
4251
rge bien de rétablir un équilibre « humain », sur
les
modèles récemment présentés par MM. Hitler et Staline. Je m’en tiens
4252
tiens là dans mes jugements. J’arrive à peine.
Le
mauvais temps qui vient Neuchâtel-Paris, décembre 1946 Souffrir, e
4253
mbre 1946 Souffrir, en soi, n’est pas toujours
l’
honneur qu’on pense, mais souvent un simple accident. Je vois des Suis
4254
cident. Je vois des Suisses qui se disent honteux
de
n’avoir pas souffert comme les autres, comme les Français, les Hollan
4255
i se disent honteux de n’avoir pas souffert comme
les
autres, comme les Français, les Hollandais, les Grecs, les Russes. Ma
4256
x de n’avoir pas souffert comme les autres, comme
les
Français, les Hollandais, les Grecs, les Russes. Mais les Allemands a
4257
as souffert comme les autres, comme les Français,
les
Hollandais, les Grecs, les Russes. Mais les Allemands aussi, finaleme
4258
e les autres, comme les Français, les Hollandais,
les
Grecs, les Russes. Mais les Allemands aussi, finalement, ont souffert
4259
s, comme les Français, les Hollandais, les Grecs,
les
Russes. Mais les Allemands aussi, finalement, ont souffert, se sont f
4260
çais, les Hollandais, les Grecs, les Russes. Mais
les
Allemands aussi, finalement, ont souffert, se sont fait tuer, ont été
4261
nt été envahis. Qu’est-ce que cela prouve ? Quand
l’
avalanche balaye tout un village sauf deux maisons, les rescapés sont-
4262
alanche balaye tout un village sauf deux maisons,
les
rescapés sont-ils honteux ? Il me semble que ces scrupules ne sont pa
4263
Il me semble que ces scrupules ne sont pas dignes
de
la tragédie moderne. Et tout d’abord, ils sont prématurés. Ils révèle
4264
me semble que ces scrupules ne sont pas dignes de
la
tragédie moderne. Et tout d’abord, ils sont prématurés. Ils révèlent
4265
, ils sont prématurés. Ils révèlent chez ceux qui
les
ont l’illusion que le drame est terminé et que le temps de faire des
4266
nt prématurés. Ils révèlent chez ceux qui les ont
l’
illusion que le drame est terminé et que le temps de faire des comptes
4267
Ils révèlent chez ceux qui les ont l’illusion que
le
drame est terminé et que le temps de faire des comptes est arrivé. Or
4268
es ont l’illusion que le drame est terminé et que
le
temps de faire des comptes est arrivé. Or le drame continue, c’est tr
4269
illusion que le drame est terminé et que le temps
de
faire des comptes est arrivé. Or le drame continue, c’est trop clair.
4270
que le temps de faire des comptes est arrivé. Or
le
drame continue, c’est trop clair. Le tour des Suisses viendra, qu’ils
4271
t arrivé. Or le drame continue, c’est trop clair.
Le
tour des Suisses viendra, qu’ils se rassurent ! Et s’ils ont constitu
4272
dra, qu’ils se rassurent ! Et s’ils ont constitué
la
réserve au cours du dernier épisode, on ne leur demande ni de s’en fé
4273
u cours du dernier épisode, on ne leur demande ni
de
s’en féliciter ni de s’en plaindre, mais de se préparer pour la suite
4274
isode, on ne leur demande ni de s’en féliciter ni
de
s’en plaindre, mais de se préparer pour la suite, pour l’heure où ils
4275
de ni de s’en féliciter ni de s’en plaindre, mais
de
se préparer pour la suite, pour l’heure où ils devront « donner ». Le
4276
ter ni de s’en plaindre, mais de se préparer pour
la
suite, pour l’heure où ils devront « donner ». Le premier devoir d’un
4277
plaindre, mais de se préparer pour la suite, pour
l’
heure où ils devront « donner ». Le premier devoir d’une réserve est d
4278
eure où ils devront « donner ». Le premier devoir
d’
une réserve est de maintenir ses forces intactes et alertées. Intacts
4279
t « donner ». Le premier devoir d’une réserve est
de
maintenir ses forces intactes et alertées. Intacts nous le sommes, re
4280
nir ses forces intactes et alertées. Intacts nous
le
sommes, relativement. Alertés, je n’en suis pas sûr. L’ennui, avec ce
4281
mes, relativement. Alertés, je n’en suis pas sûr.
L’
ennui, avec ce beau pays, ce n’est pas qu’il soit si propre et bien te
4282
soit si propre et bien tenu, trait dont s’égayent
les
étrangers de passage, un peu comme ces paysans qui se poussent du cou
4283
et bien tenu, trait dont s’égayent les étrangers
de
passage, un peu comme ces paysans qui se poussent du coude quand on l
4284
mme ces paysans qui se poussent du coude quand on
les
laisse entrer dans le hall du château. L’ennui n’est pas non plus que
4285
poussent du coude quand on les laisse entrer dans
le
hall du château. L’ennui n’est pas non plus que le matériel soit bon,
4286
and on les laisse entrer dans le hall du château.
L’
ennui n’est pas non plus que le matériel soit bon, l’or abondant, les
4287
e hall du château. L’ennui n’est pas non plus que
le
matériel soit bon, l’or abondant, les enfants bien nourris. Ni même q
4288
nnui n’est pas non plus que le matériel soit bon,
l’
or abondant, les enfants bien nourris. Ni même qu’on dise merci tout l
4289
non plus que le matériel soit bon, l’or abondant,
les
enfants bien nourris. Ni même qu’on dise merci tout le temps, à tout
4290
fants bien nourris. Ni même qu’on dise merci tout
le
temps, à tout propos, cinq ou six fois pendant l’achat d’un timbre, p
4291
le temps, à tout propos, cinq ou six fois pendant
l’
achat d’un timbre, par exemple, avec une gratitude émue qui dépasse cu
4292
, à tout propos, cinq ou six fois pendant l’achat
d’
un timbre, par exemple, avec une gratitude émue qui dépasse curieuseme
4293
avec une gratitude émue qui dépasse curieusement
l’
occasion, mais dont on sent que le surplus peut entretenir ce fond de
4294
se curieusement l’occasion, mais dont on sent que
le
surplus peut entretenir ce fond de bienveillance universelle dont l’e
4295
nt on sent que le surplus peut entretenir ce fond
de
bienveillance universelle dont l’existence rassure les Suisses… L’enn
4296
retenir ce fond de bienveillance universelle dont
l’
existence rassure les Suisses… L’ennui c’est qu’il n’y a pas du tout d
4297
ienveillance universelle dont l’existence rassure
les
Suisses… L’ennui c’est qu’il n’y a pas du tout de bienveillance unive
4298
universelle dont l’existence rassure les Suisses…
L’
ennui c’est qu’il n’y a pas du tout de bienveillance universelle. Et q
4299
es Suisses… L’ennui c’est qu’il n’y a pas du tout
de
bienveillance universelle. Et que la Suisse est mal préparée, par sa
4300
pas du tout de bienveillance universelle. Et que
la
Suisse est mal préparée, par sa probité même, à faire face aux gangst
4301
sa probité même, à faire face aux gangsters. Rien
de
moins suisse que le cynisme, honoré dans le reste du monde. Rien de p
4302
aire face aux gangsters. Rien de moins suisse que
le
cynisme, honoré dans le reste du monde. Rien de plus suisse que le ré
4303
Rien de moins suisse que le cynisme, honoré dans
le
reste du monde. Rien de plus suisse que le réflexe de critiquer sèche
4304
é dans le reste du monde. Rien de plus suisse que
le
réflexe de critiquer sèchement tout ce qui dépasse, alors que l’on to
4305
este du monde. Rien de plus suisse que le réflexe
de
critiquer sèchement tout ce qui dépasse, alors que l’on tolère très b
4306
ritiquer sèchement tout ce qui dépasse, alors que
l’
on tolère très bien ce qui n’atteint même pas le niveau moyen, et cela
4307
e l’on tolère très bien ce qui n’atteint même pas
le
niveau moyen, et cela dans la vie quotidienne autant que dans la poli
4308
n’atteint même pas le niveau moyen, et cela dans
la
vie quotidienne autant que dans la politique. Ces vertus, cette prude
4309
, et cela dans la vie quotidienne autant que dans
la
politique. Ces vertus, cette prudence avare, s’explique sans doute pa
4310
, cette prudence avare, s’explique sans doute par
les
dimensions du pays, mais ne suffisent plus à le protéger. Il est temp
4311
les dimensions du pays, mais ne suffisent plus à
le
protéger. Il est temps que les Suisses découvrent que pécher par défa
4312
ne suffisent plus à le protéger. Il est temps que
les
Suisses découvrent que pécher par défaut, dans ce temps dur, est plus
4313
rave que pécher par excès. On ne saurait exagérer
la
profondeur d’une telle révolution dans la patrie du moralisme à la fo
4314
r par excès. On ne saurait exagérer la profondeur
d’
une telle révolution dans la patrie du moralisme à la fois puritain et
4315
xagérer la profondeur d’une telle révolution dans
la
patrie du moralisme à la fois puritain et bourgeois. Et certes je sui
4316
Et certes je suis loin de proposer qu’on déchaîne
les
fous et les aventuriers, mais je voudrais pouvoir compter sur des hom
4317
suis loin de proposer qu’on déchaîne les fous et
les
aventuriers, mais je voudrais pouvoir compter sur des hommes prêts à
4318
pouvoir compter sur des hommes prêts à maîtriser
l’
aventure désormais probable, face à la démesure universelle. Le regard
4319
à maîtriser l’aventure désormais probable, face à
la
démesure universelle. Le regard intrépide et désillusionné du grand B
4320
sormais probable, face à la démesure universelle.
Le
regard intrépide et désillusionné du grand Burckhardt considérant l’h
4321
et désillusionné du grand Burckhardt considérant
l’
histoire du monde, et le rythme vital d’un Nicolas Manuel : c’est vers
4322
nd Burckhardt considérant l’histoire du monde, et
le
rythme vital d’un Nicolas Manuel : c’est vers quoi je reviens, après
4323
nsidérant l’histoire du monde, et le rythme vital
d’
un Nicolas Manuel : c’est vers quoi je reviens, après six ans, prendre
4324
quoi je reviens, après six ans, prendre une leçon
de
style de l’âme pour affronter les mauvais temps qui viennent. Ils le
4325
eviens, après six ans, prendre une leçon de style
de
l’âme pour affronter les mauvais temps qui viennent. Ils le savaient,
4326
ens, après six ans, prendre une leçon de style de
l’
âme pour affronter les mauvais temps qui viennent. Ils le savaient, il
4327
rendre une leçon de style de l’âme pour affronter
les
mauvais temps qui viennent. Ils le savaient, ils acceptaient ce fait,
4328
our affronter les mauvais temps qui viennent. Ils
le
savaient, ils acceptaient ce fait, et posaient l’ordre en face de lui
4329
le savaient, ils acceptaient ce fait, et posaient
l’
ordre en face de lui comme un défi manifestant la vocation de l’homme
4330
l’ordre en face de lui comme un défi manifestant
la
vocation de l’homme : le fond de la réalité n’est pas l’ordre mais le
4331
face de lui comme un défi manifestant la vocation
de
l’homme : le fond de la réalité n’est pas l’ordre mais le chaos. Voil
4332
e de lui comme un défi manifestant la vocation de
l’
homme : le fond de la réalité n’est pas l’ordre mais le chaos. Voilà q
4333
omme un défi manifestant la vocation de l’homme :
le
fond de la réalité n’est pas l’ordre mais le chaos. Voilà qui étonne
4334
défi manifestant la vocation de l’homme : le fond
de
la réalité n’est pas l’ordre mais le chaos. Voilà qui étonne encore t
4335
i manifestant la vocation de l’homme : le fond de
la
réalité n’est pas l’ordre mais le chaos. Voilà qui étonne encore trop
4336
tion de l’homme : le fond de la réalité n’est pas
l’
ordre mais le chaos. Voilà qui étonne encore trop de braves gens, nés
4337
me : le fond de la réalité n’est pas l’ordre mais
le
chaos. Voilà qui étonne encore trop de braves gens, nés dans un monde
4338
ordre mais le chaos. Voilà qui étonne encore trop
de
braves gens, nés dans un monde où presque tout allait de soi. Voilà q
4339
de soi. Voilà qui éclate aux yeux dès qu’on sort
de
l’île Suisse et qu’on navigue en pleine débâcle printanière des valeu
4340
soi. Voilà qui éclate aux yeux dès qu’on sort de
l’
île Suisse et qu’on navigue en pleine débâcle printanière des valeurs
4341
âcle printanière des valeurs civiques et morales.
L’
esprit d’Hitler encore, peut-être pour longtemps, tyrannise les Europé
4342
tanière des valeurs civiques et morales. L’esprit
d’
Hitler encore, peut-être pour longtemps, tyrannise les Européens, la p
4343
itler encore, peut-être pour longtemps, tyrannise
les
Européens, la police traque les hommes libres sans que personne ose d
4344
eut-être pour longtemps, tyrannise les Européens,
la
police traque les hommes libres sans que personne ose dire pour quoi
4345
gtemps, tyrannise les Européens, la police traque
les
hommes libres sans que personne ose dire pour quoi ni protester, et c
4346
n trouve encore des nourritures authentiques pour
les
corps et pour les esprits. Ne comptez plus sur vos épargnes, ni sur l
4347
s nourritures authentiques pour les corps et pour
les
esprits. Ne comptez plus sur vos épargnes, ni sur la seule valeur de
4348
esprits. Ne comptez plus sur vos épargnes, ni sur
la
seule valeur de l’inertie pour sauver ce qui tient encore debout. Cer
4349
tez plus sur vos épargnes, ni sur la seule valeur
de
l’inertie pour sauver ce qui tient encore debout. Certes, les apparen
4350
plus sur vos épargnes, ni sur la seule valeur de
l’
inertie pour sauver ce qui tient encore debout. Certes, les apparences
4351
e pour sauver ce qui tient encore debout. Certes,
les
apparences, les subsistances de l’ordre masquent à nos vues immédiate
4352
qui tient encore debout. Certes, les apparences,
les
subsistances de l’ordre masquent à nos vues immédiates toute l’ampleu
4353
debout. Certes, les apparences, les subsistances
de
l’ordre masquent à nos vues immédiates toute l’ampleur de la catastro
4354
bout. Certes, les apparences, les subsistances de
l’
ordre masquent à nos vues immédiates toute l’ampleur de la catastrophe
4355
s de l’ordre masquent à nos vues immédiates toute
l’
ampleur de la catastrophe. Il y a des trains qui marchent et qui arriv
4356
re masquent à nos vues immédiates toute l’ampleur
de
la catastrophe. Il y a des trains qui marchent et qui arrivent à l’he
4357
masquent à nos vues immédiates toute l’ampleur de
la
catastrophe. Il y a des trains qui marchent et qui arrivent à l’heure
4358
Il y a des trains qui marchent et qui arrivent à
l’
heure, il y a des dettes payées et des paroles tenues, la poste foncti
4359
, il y a des dettes payées et des paroles tenues,
la
poste fonctionne, on nous promet un peu plus de charbon pour cet hive
4360
, la poste fonctionne, on nous promet un peu plus
de
charbon pour cet hiver ; des millions de femmes ont été violées dans
4361
peu plus de charbon pour cet hiver ; des millions
de
femmes ont été violées dans toute l’Europe centrale et orientale, des
4362
des millions de femmes ont été violées dans toute
l’
Europe centrale et orientale, des millions séparées de leur mari penda
4363
rope centrale et orientale, des millions séparées
de
leur mari pendant cinq ans, mais le tabou de l’inceste, par exemple,
4364
ions séparées de leur mari pendant cinq ans, mais
le
tabou de l’inceste, par exemple, résiste encore ; les traités ne sont
4365
rées de leur mari pendant cinq ans, mais le tabou
de
l’inceste, par exemple, résiste encore ; les traités ne sont guère re
4366
s de leur mari pendant cinq ans, mais le tabou de
l’
inceste, par exemple, résiste encore ; les traités ne sont guère respe
4367
tabou de l’inceste, par exemple, résiste encore ;
les
traités ne sont guère respectés, mais on discute solennellement leurs
4368
e ; la plupart des acheteurs payent leurs achats,
les
clients appellent le garçon pour régler leurs consommations. C’est be
4369
eteurs payent leurs achats, les clients appellent
le
garçon pour régler leurs consommations. C’est beaucoup d’ordre encore
4370
n pour régler leurs consommations. C’est beaucoup
d’
ordre encore, si l’on y pense : mais le fait est que déjà l’on y pense
4371
consommations. C’est beaucoup d’ordre encore, si
l’
on y pense : mais le fait est que déjà l’on y pense, et je veux dire q
4372
t beaucoup d’ordre encore, si l’on y pense : mais
le
fait est que déjà l’on y pense, et je veux dire qu’on s’en étonne par
4373
core, si l’on y pense : mais le fait est que déjà
l’
on y pense, et je veux dire qu’on s’en étonne parfois… La couche est m
4374
pense, et je veux dire qu’on s’en étonne parfois…
La
couche est mince et partout déchirée qui nous sépare du désordre prof
4375
Suisse qu’on voit ces déchirures. J’ai donc pris
le
parti de circuler, malgré les résistances multipliées par une époque
4376
u’on voit ces déchirures. J’ai donc pris le parti
de
circuler, malgré les résistances multipliées par une époque qui sembl
4377
ures. J’ai donc pris le parti de circuler, malgré
les
résistances multipliées par une époque qui semble avoir peur qu’on la
4378
pliées par une époque qui semble avoir peur qu’on
la
voie. Il est un grand espoir, très vague encore, qui m’a paru se libé
4379
oup de consciences et beaucoup de pays, parfois à
la
faveur de la détresse des masses déracinées et déportées, parfois aus
4380
sciences et beaucoup de pays, parfois à la faveur
de
la détresse des masses déracinées et déportées, parfois aussi à la fa
4381
ences et beaucoup de pays, parfois à la faveur de
la
détresse des masses déracinées et déportées, parfois aussi à la faveu
4382
s masses déracinées et déportées, parfois aussi à
la
faveur d’un acte de raison, d’un accès de bon sens. C’est l’espoir d’
4383
éracinées et déportées, parfois aussi à la faveur
d’
un acte de raison, d’un accès de bon sens. C’est l’espoir d’une terre
4384
et déportées, parfois aussi à la faveur d’un acte
de
raison, d’un accès de bon sens. C’est l’espoir d’une terre unie, comm
4385
s, parfois aussi à la faveur d’un acte de raison,
d’
un accès de bon sens. C’est l’espoir d’une terre unie, comme contraint
4386
aussi à la faveur d’un acte de raison, d’un accès
de
bon sens. C’est l’espoir d’une terre unie, comme contrainte à se fédé
4387
’un acte de raison, d’un accès de bon sens. C’est
l’
espoir d’une terre unie, comme contrainte à se fédérer par la menace d
4388
de raison, d’un accès de bon sens. C’est l’espoir
d’
une terre unie, comme contrainte à se fédérer par la menace de la guer
4389
une terre unie, comme contrainte à se fédérer par
la
menace de la guerre atomique. On m’assure que le monde n’est pas prêt
4390
unie, comme contrainte à se fédérer par la menace
de
la guerre atomique. On m’assure que le monde n’est pas prêt pour cela
4391
e, comme contrainte à se fédérer par la menace de
la
guerre atomique. On m’assure que le monde n’est pas prêt pour cela. L
4392
la menace de la guerre atomique. On m’assure que
le
monde n’est pas prêt pour cela. Les chefs disent que les peuples n’en
4393
n m’assure que le monde n’est pas prêt pour cela.
Les
chefs disent que les peuples n’en veulent pas, les peuples disent que
4394
de n’est pas prêt pour cela. Les chefs disent que
les
peuples n’en veulent pas, les peuples disent que les chefs s’y oppose
4395
es chefs disent que les peuples n’en veulent pas,
les
peuples disent que les chefs s’y opposent. Faut-il croire qu’ils sont
4396
peuples n’en veulent pas, les peuples disent que
les
chefs s’y opposent. Faut-il croire qu’ils sont prêts à se faire tuer,
4397
et ronger jusqu’aux moelles ? Car telle est bien
l’
alternative. Et personne ne peut deviner si c’est le matin ou la nuit
4398
alternative. Et personne ne peut deviner si c’est
le
matin ou la nuit qui approche. Mais chacun peut à chaque instant choi
4399
Et personne ne peut deviner si c’est le matin ou
la
nuit qui approche. Mais chacun peut à chaque instant choisir, et s’ef
4400
acun peut à chaque instant choisir, et s’efforcer
de
mieux comprendre quelles sont les suites nécessaires de son choix, qu
4401
r, et s’efforcer de mieux comprendre quelles sont
les
suites nécessaires de son choix, quel est l’enjeu, ce qu’il implique…
4402
ux comprendre quelles sont les suites nécessaires
de
son choix, quel est l’enjeu, ce qu’il implique… Contre les risques qu
4403
ont les suites nécessaires de son choix, quel est
l’
enjeu, ce qu’il implique… Contre les risques qui se lèvent, l’esprit d
4404
hoix, quel est l’enjeu, ce qu’il implique… Contre
les
risques qui se lèvent, l’esprit de risque est la seule assurance. Les
4405
qu’il implique… Contre les risques qui se lèvent,
l’
esprit de risque est la seule assurance. Les valeurs de demain, s’il y
4406
lique… Contre les risques qui se lèvent, l’esprit
de
risque est la seule assurance. Les valeurs de demain, s’il y en a, se
4407
les risques qui se lèvent, l’esprit de risque est
la
seule assurance. Les valeurs de demain, s’il y en a, seront maintenue
4408
èvent, l’esprit de risque est la seule assurance.
Les
valeurs de demain, s’il y en a, seront maintenues ou reposées par les
4409
rit de risque est la seule assurance. Les valeurs
de
demain, s’il y en a, seront maintenues ou reposées par les hommes qui
4410
n, s’il y en a, seront maintenues ou reposées par
les
hommes qui auront su, pour leur compte, s’équilibrer dans le chaos, a
4411
ui auront su, pour leur compte, s’équilibrer dans
le
chaos, aussi loin d’ignorer son étendue que de céder à ses vertiges.
4412
ur compte, s’équilibrer dans le chaos, aussi loin
d’
ignorer son étendue que de céder à ses vertiges. 18. Il s’agit de l
4413
ns le chaos, aussi loin d’ignorer son étendue que
de
céder à ses vertiges. 18. Il s’agit de la pièce que m’avait comman
4414
due que de céder à ses vertiges. 18. Il s’agit
de
la pièce que m’avait commandée l’Institut neuchâtelois pour l’Exposit
4415
que de céder à ses vertiges. 18. Il s’agit de
la
pièce que m’avait commandée l’Institut neuchâtelois pour l’Exposition
4416
18. Il s’agit de la pièce que m’avait commandée
l’
Institut neuchâtelois pour l’Exposition nationale de Zurich, et dont A
4417
ue m’avait commandée l’Institut neuchâtelois pour
l’
Exposition nationale de Zurich, et dont Arthur Honegger écrivit la mus
4418
Institut neuchâtelois pour l’Exposition nationale
de
Zurich, et dont Arthur Honegger écrivit la musique au fur et à mesure
4419
ionale de Zurich, et dont Arthur Honegger écrivit
la
musique au fur et à mesure des textes que je lui apportais. Nous devi
4420
extes que je lui apportais. Nous devions en tirer
l’
oratorio que l’on joue aujourd’hui.
4421
i apportais. Nous devions en tirer l’oratorio que
l’
on joue aujourd’hui.
4422
On se trompe en croyant qu’un voyageur à longueur
de
chemin perd sa patrie : c’est souvent elle qu’il découvre le mieux qu
4423
erd sa patrie : c’est souvent elle qu’il découvre
le
mieux quand il parcourt le globe et vit chez l’étranger. Non qu’il y
4424
nt elle qu’il découvre le mieux quand il parcourt
le
globe et vit chez l’étranger. Non qu’il y pense toujours, mais les ho
4425
e le mieux quand il parcourt le globe et vit chez
l’
étranger. Non qu’il y pense toujours, mais les hommes qu’il fréquente
4426
chez l’étranger. Non qu’il y pense toujours, mais
les
hommes qu’il fréquente la voient en lui d’abord, l’en tiennent pour r
4427
y pense toujours, mais les hommes qu’il fréquente
la
voient en lui d’abord, l’en tiennent pour responsable, et par l’erreu
4428
hommes qu’il fréquente la voient en lui d’abord,
l’
en tiennent pour responsable, et par l’erreur la plus commune, l’en no
4429
i d’abord, l’en tiennent pour responsable, et par
l’
erreur la plus commune, l’en nomment si bien le représentant qu’il lui
4430
, l’en tiennent pour responsable, et par l’erreur
la
plus commune, l’en nomment si bien le représentant qu’il lui faut à l
4431
our responsable, et par l’erreur la plus commune,
l’
en nomment si bien le représentant qu’il lui faut à la fin se la repré
4432
ar l’erreur la plus commune, l’en nomment si bien
le
représentant qu’il lui faut à la fin se la représenter comme il n’eût
4433
nomment si bien le représentant qu’il lui faut à
la
fin se la représenter comme il n’eût jamais fait en y restant. Dans s
4434
i bien le représentant qu’il lui faut à la fin se
la
représenter comme il n’eût jamais fait en y restant. Dans sa cité, il
4435
jamais fait en y restant. Dans sa cité, il était
d’
une famille, et pour sa famille un prénom ; à l’étranger, il devient t
4436
t d’une famille, et pour sa famille un prénom ; à
l’
étranger, il devient toute une race. Serait-ce vrai ? se dit-il. Le vo
4437
vient toute une race. Serait-ce vrai ? se dit-il.
Le
voient-ils mieux que moi ? Mais que voient-ils, dont je n’ai pas cons
4438
et que je croyais bien quitté ? Il se retourne et
le
voilà tout étonné… Désormais, nul n’est plus curieux des apparences e
4439
n’est plus curieux des apparences et des secrets
de
son pays. Il songe : c’est là-bas que le mystère m’attend, et que ne
4440
secrets de son pays. Il songe : c’est là-bas que
le
mystère m’attend, et que ne vais-je pas y découvrir, à mon retour, qu
4441
? On lui dit : — Vous êtes Suisse ? Vous en avez
de
la chance ! Mais vous avez si peu l’air suisse. — C’est qu’il n’y a p
4442
On lui dit : — Vous êtes Suisse ? Vous en avez de
la
chance ! Mais vous avez si peu l’air suisse. — C’est qu’il n’y a pas
4443
Vous en avez de la chance ! Mais vous avez si peu
l’
air suisse. — C’est qu’il n’y a pas d’air suisse, ou qu’il en a vingt-
4444
avez si peu l’air suisse. — C’est qu’il n’y a pas
d’
air suisse, ou qu’il en a vingt-deux. — De quelle région de la Suisse
4445
y a pas d’air suisse, ou qu’il en a vingt-deux. —
De
quelle région de la Suisse êtes-vous ? De Neuchâtel ? Attendez, Neuch
4446
sse, ou qu’il en a vingt-deux. — De quelle région
de
la Suisse êtes-vous ? De Neuchâtel ? Attendez, Neuchâtel, rappelez-mo
4447
, ou qu’il en a vingt-deux. — De quelle région de
la
Suisse êtes-vous ? De Neuchâtel ? Attendez, Neuchâtel, rappelez-moi…
4448
deux. — De quelle région de la Suisse êtes-vous ?
De
Neuchâtel ? Attendez, Neuchâtel, rappelez-moi… Ainsi je me demandais
4449
moi… Ainsi je me demandais parfois ce qu’on sait
de
Neuchâtel dans le vaste monde. Je trouvais à peu près ceci : la Bible
4450
demandais parfois ce qu’on sait de Neuchâtel dans
le
vaste monde. Je trouvais à peu près ceci : la Bible d’Ostervald, le c
4451
ans le vaste monde. Je trouvais à peu près ceci :
la
Bible d’Ostervald, le chocolat Suchard, les montres, et le séjour de
4452
ste monde. Je trouvais à peu près ceci : la Bible
d’
Ostervald, le chocolat Suchard, les montres, et le séjour de Rousseau.
4453
trouvais à peu près ceci : la Bible d’Ostervald,
le
chocolat Suchard, les montres, et le séjour de Rousseau. Certains ont
4454
ceci : la Bible d’Ostervald, le chocolat Suchard,
les
montres, et le séjour de Rousseau. Certains ont entendu parler du jur
4455
d’Ostervald, le chocolat Suchard, les montres, et
le
séjour de Rousseau. Certains ont entendu parler du juriste Emer de Va
4456
d, le chocolat Suchard, les montres, et le séjour
de
Rousseau. Certains ont entendu parler du juriste Emer de Vattel, ou d
4457
parler du juriste Emer de Vattel, ou des travaux
de
Jean Piaget sur la psychologie de l’enfant. Le seul vin suisse qui se
4458
Emer de Vattel, ou des travaux de Jean Piaget sur
la
psychologie de l’enfant. Le seul vin suisse qui se vende à New York,
4459
ou des travaux de Jean Piaget sur la psychologie
de
l’enfant. Le seul vin suisse qui se vende à New York, mais à quel pri
4460
des travaux de Jean Piaget sur la psychologie de
l’
enfant. Le seul vin suisse qui se vende à New York, mais à quel prix !
4461
ux de Jean Piaget sur la psychologie de l’enfant.
Le
seul vin suisse qui se vende à New York, mais à quel prix ! c’est le
4462
qui se vende à New York, mais à quel prix ! c’est
le
Neuchâtel blanc. (On voit sur l’étiquette le Trou de Bourgogne et la
4463
uel prix ! c’est le Neuchâtel blanc. (On voit sur
l’
étiquette le Trou de Bourgogne et la descente des vignes vers le lac.
4464
’est le Neuchâtel blanc. (On voit sur l’étiquette
le
Trou de Bourgogne et la descente des vignes vers le lac. Je pouvais d
4465
Neuchâtel blanc. (On voit sur l’étiquette le Trou
de
Bourgogne et la descente des vignes vers le lac. Je pouvais dire à me
4466
(On voit sur l’étiquette le Trou de Bourgogne et
la
descente des vignes vers le lac. Je pouvais dire à mes amis : là, dan
4467
Trou de Bourgogne et la descente des vignes vers
le
lac. Je pouvais dire à mes amis : là, dans ces arbres, au pied de cet
4468
is dire à mes amis : là, dans ces arbres, au pied
de
cette colline, j’ai passé mon adolescence.) Voilà donc ce qui atteint
4469
olescence.) Voilà donc ce qui atteint chez nous à
la
« classe internationale » comme on dit dans le monde des sports. Ces
4470
à la « classe internationale » comme on dit dans
le
monde des sports. Ces quelques traits épars ne font pas un portrait.
4471
s épars ne font pas un portrait. Dès qu’on essaie
de
définir l’originalité de notre canton, tout devient si complexe et so
4472
font pas un portrait. Dès qu’on essaie de définir
l’
originalité de notre canton, tout devient si complexe et souvent si bi
4473
rtrait. Dès qu’on essaie de définir l’originalité
de
notre canton, tout devient si complexe et souvent si bizarre aux yeux
4474
raditions aristocratiques à peine éteintes (moins
de
cent ans) dans la plus vieille démocratie du monde19 ; tant de cultur
4475
atiques à peine éteintes (moins de cent ans) dans
la
plus vieille démocratie du monde19 ; tant de culture et peu de littér
4476
peu de littérature ; tant de bon sens professé et
de
fous à soigner ; tout un petit monde de contrastes intenses, entre l’
4477
ofessé et de fous à soigner ; tout un petit monde
de
contrastes intenses, entre l’austérité des montagnes au nord et les r
4478
tout un petit monde de contrastes intenses, entre
l’
austérité des montagnes au nord et les rives latines au midi, la Franc
4479
enses, entre l’austérité des montagnes au nord et
les
rives latines au midi, la France à l’ouest, l’Alémanie à l’est ; — to
4480
s montagnes au nord et les rives latines au midi,
la
France à l’ouest, l’Alémanie à l’est ; — tout un petit monde si bien
4481
au nord et les rives latines au midi, la France à
l’
ouest, l’Alémanie à l’est ; — tout un petit monde si bien cerné, si co
4482
t les rives latines au midi, la France à l’ouest,
l’
Alémanie à l’est ; — tout un petit monde si bien cerné, si conscient d
4483
atines au midi, la France à l’ouest, l’Alémanie à
l’
est ; — tout un petit monde si bien cerné, si conscient de lui-même, e
4484
— tout un petit monde si bien cerné, si conscient
de
lui-même, et si distinct… Je me disais qu’un jour je voudrais en écri
4485
il fallait d’abord rentrer. Je suis rentré, c’est
la
coutume des Suisses ; reparti, revenu, et ce n’est pas fini. Comment
4486
nature, peut-il produire tant de nomades ? C’est
le
secret du « Service étranger ». Ceux qui ont envie de se battre avec
4487
ecret du « Service étranger ». Ceux qui ont envie
de
se battre avec la vie s’en vont ailleurs brasser leur sang, plutôt qu
4488
étranger ». Ceux qui ont envie de se battre avec
la
vie s’en vont ailleurs brasser leur sang, plutôt que de troubler la p
4489
s’en vont ailleurs brasser leur sang, plutôt que
de
troubler la pax helvetica, merveille inaperçue du monde moderne. Le v
4490
illeurs brasser leur sang, plutôt que de troubler
la
pax helvetica, merveille inaperçue du monde moderne. Le voyage, quand
4491
helvetica, merveille inaperçue du monde moderne.
Le
voyage, quand j’étais enfant, c’était quitter Couvet pour Neuchâtel,
4492
is enfant, c’était quitter Couvet pour Neuchâtel,
le
« Vallon » pour le « Bas », l’école pour les vacances. C’était fuir e
4493
quitter Couvet pour Neuchâtel, le « Vallon » pour
le
« Bas », l’école pour les vacances. C’était fuir et trahir en son cœu
4494
et pour Neuchâtel, le « Vallon » pour le « Bas »,
l’
école pour les vacances. C’était fuir et trahir en son cœur le cirque
4495
âtel, le « Vallon » pour le « Bas », l’école pour
les
vacances. C’était fuir et trahir en son cœur le cirque proche des crê
4496
les vacances. C’était fuir et trahir en son cœur
le
cirque proche des crêtes dentées de sapins noirs, fermer les yeux pen
4497
r en son cœur le cirque proche des crêtes dentées
de
sapins noirs, fermer les yeux pendant les treize tunnels, dans le lon
4498
proche des crêtes dentées de sapins noirs, fermer
les
yeux pendant les treize tunnels, dans le long courant d’air des gorge
4499
dentées de sapins noirs, fermer les yeux pendant
les
treize tunnels, dans le long courant d’air des gorges, sentir qu’on d
4500
fermer les yeux pendant les treize tunnels, dans
le
long courant d’air des gorges, sentir qu’on descendait vers la lumièr
4501
pendant les treize tunnels, dans le long courant
d’
air des gorges, sentir qu’on descendait vers la lumière, vers le grand
4502
nt d’air des gorges, sentir qu’on descendait vers
la
lumière, vers le grand lac doublant soudain le ciel au sortir du trei
4503
es, sentir qu’on descendait vers la lumière, vers
le
grand lac doublant soudain le ciel au sortir du treizième tunnel, ver
4504
rs la lumière, vers le grand lac doublant soudain
le
ciel au sortir du treizième tunnel, vers des parcs somptueux et secre
4505
et secrets, vers tout un monde intimidant, peuplé
d’
angoisses et de facilités, vers le bonheur. Aujourd’hui, ce trajet d’a
4506
s tout un monde intimidant, peuplé d’angoisses et
de
facilités, vers le bonheur. Aujourd’hui, ce trajet d’aventure, sur le
4507
imidant, peuplé d’angoisses et de facilités, vers
le
bonheur. Aujourd’hui, ce trajet d’aventure, sur lequel je repasse en
4508
acilités, vers le bonheur. Aujourd’hui, ce trajet
d’
aventure, sur lequel je repasse en express, n’est plus que les quinze
4509
sur lequel je repasse en express, n’est plus que
les
quinze dernières minutes, la dernière cigarette d’une nuit mal dormie
4510
s quinze dernières minutes, la dernière cigarette
d’
une nuit mal dormie, le moment de refermer les valises entre deux coup
4511
tes, la dernière cigarette d’une nuit mal dormie,
le
moment de refermer les valises entre deux coups d’œil par la fenêtre.
4512
rnière cigarette d’une nuit mal dormie, le moment
de
refermer les valises entre deux coups d’œil par la fenêtre. Tout va t
4513
ette d’une nuit mal dormie, le moment de refermer
les
valises entre deux coups d’œil par la fenêtre. Tout va trop vite pour
4514
e refermer les valises entre deux coups d’œil par
la
fenêtre. Tout va trop vite pour le souvenir. Voici les toits, le cloc
4515
oups d’œil par la fenêtre. Tout va trop vite pour
le
souvenir. Voici les toits, le clocher de Couvet, la petite gare qu’on
4516
enêtre. Tout va trop vite pour le souvenir. Voici
les
toits, le clocher de Couvet, la petite gare qu’on traverse en trois s
4517
t va trop vite pour le souvenir. Voici les toits,
le
clocher de Couvet, la petite gare qu’on traverse en trois secondes —
4518
ite pour le souvenir. Voici les toits, le clocher
de
Couvet, la petite gare qu’on traverse en trois secondes — disparus sa
4519
souvenir. Voici les toits, le clocher de Couvet,
la
petite gare qu’on traverse en trois secondes — disparus sans laisser
4520
raverse en trois secondes — disparus sans laisser
de
traces, sans rejoindre en moi leur image. Un jour, il faudra s’arrête
4521
ans ce village où je suis né ; mesurer mon âge et
le
Temps. Mais la vie, mais ce train m’emportent. La parole est encore à
4522
où je suis né ; mesurer mon âge et le Temps. Mais
la
vie, mais ce train m’emportent. La parole est encore à ce qui vient.
4523
le Temps. Mais la vie, mais ce train m’emportent.
La
parole est encore à ce qui vient. Et voici les brumes sur le lac, les
4524
nt. La parole est encore à ce qui vient. Et voici
les
brumes sur le lac, les murs de vignes séculaires, et ce toit qui dema
4525
st encore à ce qui vient. Et voici les brumes sur
le
lac, les murs de vignes séculaires, et ce toit qui demande aux voyage
4526
e à ce qui vient. Et voici les brumes sur le lac,
les
murs de vignes séculaires, et ce toit qui demande aux voyageurs, en g
4527
i vient. Et voici les brumes sur le lac, les murs
de
vignes séculaires, et ce toit qui demande aux voyageurs, en grandes l
4528
oit qui demande aux voyageurs, en grandes lettres
de
tuiles blanches : êtes-vous sauvés du péché ? Tout de suite les quest
4529
nches : êtes-vous sauvés du péché ? Tout de suite
les
questions personnelles, et ce besoin de réformer le prochain… Est-ce
4530
de suite les questions personnelles, et ce besoin
de
réformer le prochain… Est-ce que ceux qui vivent sous ce toit sont te
4531
questions personnelles, et ce besoin de réformer
le
prochain… Est-ce que ceux qui vivent sous ce toit sont tellement sûrs
4532
ceux qui vivent sous ce toit sont tellement sûrs
de
leur affaire ? 19. La première charte des libertés civiques a été o
4533
re charte des libertés civiques a été obtenue par
les
bourgeois de Neuchâtel et signée par leur comte souverain en 1214.
4534
libertés civiques a été obtenue par les bourgeois
de
Neuchâtel et signée par leur comte souverain en 1214.
4535
II
L’
irruption du souvenir est aussi mystérieuse que celle de l’invention,
4536
ption du souvenir est aussi mystérieuse que celle
de
l’invention, dans notre esprit. Peu s’en faut, si j’y pense, que je n
4537
on du souvenir est aussi mystérieuse que celle de
l’
invention, dans notre esprit. Peu s’en faut, si j’y pense, que je ne l
4538
re esprit. Peu s’en faut, si j’y pense, que je ne
les
distingue plus. Tout se passe comme si la mémoire inventait soudain q
4539
je ne les distingue plus. Tout se passe comme si
la
mémoire inventait soudain quelque forme que vient emplir le flot de l
4540
inventait soudain quelque forme que vient emplir
le
flot de l’émotion, mais n’est-ce pas le même piège que posera l’inven
4541
it soudain quelque forme que vient emplir le flot
de
l’émotion, mais n’est-ce pas le même piège que posera l’invention, en
4542
soudain quelque forme que vient emplir le flot de
l’
émotion, mais n’est-ce pas le même piège que posera l’invention, en le
4543
nt emplir le flot de l’émotion, mais n’est-ce pas
le
même piège que posera l’invention, en le tournant dans l’autre sens,
4544
otion, mais n’est-ce pas le même piège que posera
l’
invention, en le tournant dans l’autre sens, comme pour se souvenir de
4545
t-ce pas le même piège que posera l’invention, en
le
tournant dans l’autre sens, comme pour se souvenir de ce qui vient ?
4546
ournant dans l’autre sens, comme pour se souvenir
de
ce qui vient ? D’où remontent ces rythmes de mots, cette épithète, ce
4547
re sens, comme pour se souvenir de ce qui vient ?
D’
où remontent ces rythmes de mots, cette épithète, ce nœud d’idées, où
4548
enir de ce qui vient ? D’où remontent ces rythmes
de
mots, cette épithète, ce nœud d’idées, où je ne reconnais rien de déj
4549
tent ces rythmes de mots, cette épithète, ce nœud
d’
idées, où je ne reconnais rien de déjà lu ? Et de quel ciel me tombent
4550
pithète, ce nœud d’idées, où je ne reconnais rien
de
déjà lu ? Et de quel ciel me tombent ces visions surprenantes, où je
4551
d’idées, où je ne reconnais rien de déjà lu ? Et
de
quel ciel me tombent ces visions surprenantes, où je reconnais bientô
4552
nais bientôt ce que j’ai déjà vécu ? Certes, dans
les
deux cas, c’est moi que je découvre, puisqu’il s’agit d’un souvenir,
4553
cas, c’est moi que je découvre, puisqu’il s’agit
d’
un souvenir, d’une invention, sans autre précédent que moi. Mais la vo
4554
que je découvre, puisqu’il s’agit d’un souvenir,
d’
une invention, sans autre précédent que moi. Mais la volonté n’y peut
4555
une invention, sans autre précédent que moi. Mais
la
volonté n’y peut rien. Pourquoi maintenant, à cet instant précis, et
4556
ment ai-je donc fait par mégarde, qui m’accorde à
la
longueur d’ondes d’un passé, d’un avenir toujours présents ? Proust a
4557
onc fait par mégarde, qui m’accorde à la longueur
d’
ondes d’un passé, d’un avenir toujours présents ? Proust a surpris le
4558
par mégarde, qui m’accorde à la longueur d’ondes
d’
un passé, d’un avenir toujours présents ? Proust a surpris le mécanism
4559
, qui m’accorde à la longueur d’ondes d’un passé,
d’
un avenir toujours présents ? Proust a surpris le mécanisme du souveni
4560
d’un avenir toujours présents ? Proust a surpris
le
mécanisme du souvenir conditionné. Il nous livre à l’accidentel, et s
4561
écanisme du souvenir conditionné. Il nous livre à
l’
accidentel, et ses accidents sont petits : une madeleine trempée dans
4562
ine trempée dans du thé, un pavé qui bascule sous
la
semelle. Mais les grands accidents de la vie raniment de tout autres
4563
du thé, un pavé qui bascule sous la semelle. Mais
les
grands accidents de la vie raniment de tout autres mystères. Ils nous
4564
ascule sous la semelle. Mais les grands accidents
de
la vie raniment de tout autres mystères. Ils nous font découvrir plus
4565
ule sous la semelle. Mais les grands accidents de
la
vie raniment de tout autres mystères. Ils nous font découvrir plus qu
4566
lle. Mais les grands accidents de la vie raniment
de
tout autres mystères. Ils nous font découvrir plus que nous-mêmes. J
4567
Ils nous font découvrir plus que nous-mêmes. Je
l’
ignorais encore quand on m’a proposé d’écrire ces pages sur mon pays n
4568
mêmes. Je l’ignorais encore quand on m’a proposé
d’
écrire ces pages sur mon pays natal. On insistait amicalement : je ven
4569
stait amicalement : je venais de rentrer, c’était
le
moment propice… Un bouquet pour le centenaire20, quelques paysages du
4570
ntrer, c’était le moment propice… Un bouquet pour
le
centenaire20, quelques paysages du souvenir… j’hésitais, j’allais me
4571
? me disais-je, mais je n’en suis pas là. (Ainsi
l’
on croit savoir où l’on se tient, quel âge on a, et vers quoi l’on che
4572
je n’en suis pas là. (Ainsi l’on croit savoir où
l’
on se tient, quel âge on a, et vers quoi l’on chemine. Mais au carrefo
4573
oir où l’on se tient, quel âge on a, et vers quoi
l’
on chemine. Mais au carrefour d’autres destins croisés, soudain le ryt
4574
is au carrefour d’autres destins croisés, soudain
le
rythme change en nous aussi, rompant la prévision, cette inertie.) Di
4575
, soudain le rythme change en nous aussi, rompant
la
prévision, cette inertie.) Dix jours plus tard mourait mon père. Et t
4576
tout en moi se tourne vers ses origines, au-delà
de
ma propre mémoire. Ces mouvements les plus profonds de l’être nous se
4577
nes, au-delà de ma propre mémoire. Ces mouvements
les
plus profonds de l’être nous semblent déclenchés par un destin absurd
4578
propre mémoire. Ces mouvements les plus profonds
de
l’être nous semblent déclenchés par un destin absurde, et nous les su
4579
opre mémoire. Ces mouvements les plus profonds de
l’
être nous semblent déclenchés par un destin absurde, et nous les subis
4580
emblent déclenchés par un destin absurde, et nous
les
subissons d’abord comme une force tout étrangère. Pourtant, ils nous
4581
lque chose en nous qui n’est pas moins intime que
la
conscience, mais qui lui est antérieur et qui lui survivra ; quelque
4582
antérieur et qui lui survivra ; quelque chose que
l’
on peut désigner d’un mot simple, et qui figure dans l’ordre naturel c
4583
i survivra ; quelque chose que l’on peut désigner
d’
un mot simple, et qui figure dans l’ordre naturel comme un reflet de l
4584
peut désigner d’un mot simple, et qui figure dans
l’
ordre naturel comme un reflet de la communion des saints : notre histo
4585
t qui figure dans l’ordre naturel comme un reflet
de
la communion des saints : notre histoire, le passé qui passe en chacu
4586
ui figure dans l’ordre naturel comme un reflet de
la
communion des saints : notre histoire, le passé qui passe en chacun d
4587
flet de la communion des saints : notre histoire,
le
passé qui passe en chacun de nous ; qui par nous, maintenant, se pass
4588
ts : notre histoire, le passé qui passe en chacun
de
nous ; qui par nous, maintenant, se passe, lié à toute l’histoire des
4589
; qui par nous, maintenant, se passe, lié à toute
l’
histoire des autres hommes ; et sans lequel il n’y aurait jamais de pl
4590
tres hommes ; et sans lequel il n’y aurait jamais
de
plénitude du présent. Dans le silence d’une vaste pièce où j’étais se
4591
l n’y aurait jamais de plénitude du présent. Dans
le
silence d’une vaste pièce où j’étais seul devant l’admirable visage,
4592
t jamais de plénitude du présent. Dans le silence
d’
une vaste pièce où j’étais seul devant l’admirable visage, debout au p
4593
silence d’une vaste pièce où j’étais seul devant
l’
admirable visage, debout au pied du lit, prolongeant le gisant, j’ai s
4594
irable visage, debout au pied du lit, prolongeant
le
gisant, j’ai su que j’étais d’une lignée. 20. Principauté souverain
4595
u lit, prolongeant le gisant, j’ai su que j’étais
d’
une lignée. 20. Principauté souveraine depuis le Moyen Âge, Neuchâte
4596
d’une lignée. 20. Principauté souveraine depuis
le
Moyen Âge, Neuchâtel a choisi de se confédérer avec la Suisse le 1er
4597
ouveraine depuis le Moyen Âge, Neuchâtel a choisi
de
se confédérer avec la Suisse le 1er mai 1848, après une brève révolut
4598
yen Âge, Neuchâtel a choisi de se confédérer avec
la
Suisse le 1er mai 1848, après une brève révolution qui renversa le ré
4599
euchâtel a choisi de se confédérer avec la Suisse
le
1er mai 1848, après une brève révolution qui renversa le régime monar
4600
mai 1848, après une brève révolution qui renversa
le
régime monarchique et aristocratique.
4601
III C’est l’un des traits
les
moins connus de notre pays que la continuité de ses familles, ailleur
4602
III C’est l’un des traits les moins connus
de
notre pays que la continuité de ses familles, ailleurs rompue par des
4603
’un des traits les moins connus de notre pays que
la
continuité de ses familles, ailleurs rompue par des révolutions ou de
4604
les moins connus de notre pays que la continuité
de
ses familles, ailleurs rompue par des révolutions ou de fréquents cha
4605
familles, ailleurs rompue par des révolutions ou
de
fréquents changements de condition sociale. Nos archives sont intacte
4606
e par des révolutions ou de fréquents changements
de
condition sociale. Nos archives sont intactes, minutieusement tenues
4607
archives sont intactes, minutieusement tenues par
les
communes les plus modestes, et tenues depuis plusieurs siècles pour u
4608
intactes, minutieusement tenues par les communes
les
plus modestes, et tenues depuis plusieurs siècles pour une beaucoup p
4609
siècles pour une beaucoup plus grande proportion
d’
habitants que dans d’autres nations de l’Europe. La plupart des citoye
4610
proportion d’habitants que dans d’autres nations
de
l’Europe. La plupart des citoyens suisses, qu’ils soient bourgeois, o
4611
oportion d’habitants que dans d’autres nations de
l’
Europe. La plupart des citoyens suisses, qu’ils soient bourgeois, ouvr
4612
es époques où n’atteignent, chez nos voisins, que
les
familles de la noblesse. La Suisse n’est pas démocratique pour avoir
4613
n’atteignent, chez nos voisins, que les familles
de
la noblesse. La Suisse n’est pas démocratique pour avoir tardivement
4614
atteignent, chez nos voisins, que les familles de
la
noblesse. La Suisse n’est pas démocratique pour avoir tardivement abo
4615
hez nos voisins, que les familles de la noblesse.
La
Suisse n’est pas démocratique pour avoir tardivement aboli ce que l’o
4616
démocratique pour avoir tardivement aboli ce que
l’
on nomme les privilèges, mais pour les avoir étendus, dès l’origine, a
4617
ue pour avoir tardivement aboli ce que l’on nomme
les
privilèges, mais pour les avoir étendus, dès l’origine, au plus grand
4618
aboli ce que l’on nomme les privilèges, mais pour
les
avoir étendus, dès l’origine, au plus grand nombre. Le « Rôle des Bou
4619
les privilèges, mais pour les avoir étendus, dès
l’
origine, au plus grand nombre. Le « Rôle des Bourgeois » de Neuchâtel
4620
oir étendus, dès l’origine, au plus grand nombre.
Le
« Rôle des Bourgeois » de Neuchâtel illustre cette continuité jusqu’a
4621
, au plus grand nombre. Le « Rôle des Bourgeois »
de
Neuchâtel illustre cette continuité jusqu’au xvie siècle. Au-delà to
4622
nge. Voyez plutôt ces noms relevés au hasard dans
le
rôle de 1353 : Malifer, Conoz Bazin, Rollin d’Orouse, Perrod Tornarre
4623
ez plutôt ces noms relevés au hasard dans le rôle
de
1353 : Malifer, Conoz Bazin, Rollin d’Orouse, Perrod Tornarre, Jeanni
4624
quyrily, Quicu… On dirait des injures en patois !
De
tous ces noms, tantôt si proches du latin populaire et tantôt du dial
4625
un seul subsistera cent ans plus tard, tandis que
la
grande majorité des patronymes de consonance moderne et francisée, qu
4626
ard, tandis que la grande majorité des patronymes
de
consonance moderne et francisée, qui figurent sur le rôle de 1580, on
4627
consonance moderne et francisée, qui figurent sur
le
rôle de 1580, ont subsisté jusqu’à nos jours. Beaucoup d’autres s’y s
4628
ce moderne et francisée, qui figurent sur le rôle
de
1580, ont subsisté jusqu’à nos jours. Beaucoup d’autres s’y sont ajou
4629
os jours. Beaucoup d’autres s’y sont ajoutés dans
le
cours du xixe siècle. Sur les trois-cent-soixante familles nouvellem
4630
y sont ajoutés dans le cours du xixe siècle. Sur
les
trois-cent-soixante familles nouvellement agrégées à notre bourgeoisi
4631
es nouvellement agrégées à notre bourgeoisie dans
les
douze ans précédant 1900, deux tiers portent des noms allemands. Elle
4632
apporté un dynamisme neuf, et un accent qui défie
la
pudeur… Le gouvernement et la structure sociale de la Principauté de
4633
dynamisme neuf, et un accent qui défie la pudeur…
Le
gouvernement et la structure sociale de la Principauté de Neuchâtel,
4634
un accent qui défie la pudeur… Le gouvernement et
la
structure sociale de la Principauté de Neuchâtel, du xve siècle jusq
4635
a pudeur… Le gouvernement et la structure sociale
de
la Principauté de Neuchâtel, du xve siècle jusqu’aux débuts du xixe
4636
udeur… Le gouvernement et la structure sociale de
la
Principauté de Neuchâtel, du xve siècle jusqu’aux débuts du xixe , n
4637
rnement et la structure sociale de la Principauté
de
Neuchâtel, du xve siècle jusqu’aux débuts du xixe , ne manquent pas
4638
siècle jusqu’aux débuts du xixe , ne manquent pas
d’
évoquer un mouvement d’horlogerie par leur extrême complication dans u
4639
du xixe , ne manquent pas d’évoquer un mouvement
d’
horlogerie par leur extrême complication dans un espace aussi réduit q
4640
possible. William Coxe, voyageur anglais, auteur
de
Lettres sur l’état politique, civil et naturel de la Suisse, écrit en
4641
iam Coxe, voyageur anglais, auteur de Lettres sur
l’
état politique, civil et naturel de la Suisse, écrit en 1776 : « La co
4642
de Lettres sur l’état politique, civil et naturel
de
la Suisse, écrit en 1776 : « La constitution de Neuchâtel est une mon
4643
Lettres sur l’état politique, civil et naturel de
la
Suisse, écrit en 1776 : « La constitution de Neuchâtel est une monarc
4644
civil et naturel de la Suisse, écrit en 1776 : «
La
constitution de Neuchâtel est une monarchie limitée, dont la machine
4645
l de la Suisse, écrit en 1776 : « La constitution
de
Neuchâtel est une monarchie limitée, dont la machine est mise en mouv
4646
tion de Neuchâtel est une monarchie limitée, dont
la
machine est mise en mouvement par des ressorts si déliés, et des roua
4647
et des rouages si compliqués, qu’il est difficile
de
distinguer avec quelque exactitude les prérogatives du Souverain des
4648
t difficile de distinguer avec quelque exactitude
les
prérogatives du Souverain des franchises du Peuple. » Voici ce qu’il
4649
» Voici ce qu’il a cru démêler, en une vingtaine
de
pages où perce l’étonnement. Le Prince se fait représenter en son ab
4650
a cru démêler, en une vingtaine de pages où perce
l’
étonnement. Le Prince se fait représenter en son absence [car en fait
4651
en une vingtaine de pages où perce l’étonnement.
Le
Prince se fait représenter en son absence [car en fait il vit à Berli
4652
fait il vit à Berlin] par un Gouverneur qui jouit
d’
une très-grande considération, et d’une très-petite autorité… Les Troi
4653
eur qui jouit d’une très-grande considération, et
d’
une très-petite autorité… Les Trois États de Neuchâtel sont le tribuna
4654
nde considération, et d’une très-petite autorité…
Les
Trois États de Neuchâtel sont le tribunal suprême du pays. Il est com
4655
etite autorité… Les Trois États de Neuchâtel sont
le
tribunal suprême du pays. Il est composé de douze Juges partagés en t
4656
sont le tribunal suprême du pays. Il est composé
de
douze Juges partagés en trois divisions… Les quatre conseillers d’Éta
4657
mposé de douze Juges partagés en trois divisions…
Les
quatre conseillers d’État les plus anciens forment la première divisi
4658
rtagés en trois divisions… Les quatre conseillers
d’
État les plus anciens forment la première division ; ces conseillers s
4659
en trois divisions… Les quatre conseillers d’État
les
plus anciens forment la première division ; ces conseillers sont nobl
4660
ces conseillers sont nobles. La seconde comprend
les
quatre Châtelains de Landeron, Boudry, Valtravers et Thielle… Enfin l
4661
nobles. La seconde comprend les quatre Châtelains
de
Landeron, Boudry, Valtravers et Thielle… Enfin la troisième division
4662
Thielle… Enfin la troisième division est composée
de
quatre conseillers de la ville de Neuchâtel. Ce Tribunal n’est, à par
4663
sième division est composée de quatre conseillers
de
la ville de Neuchâtel. Ce Tribunal n’est, à parler régulièrement, qu’
4664
me division est composée de quatre conseillers de
la
ville de Neuchâtel. Ce Tribunal n’est, à parler régulièrement, qu’une
4665
on est composée de quatre conseillers de la ville
de
Neuchâtel. Ce Tribunal n’est, à parler régulièrement, qu’une cour sup
4666
’est, à parler régulièrement, qu’une cour suprême
de
Justice… Le Conseil d’État saisi de l’administration ordinaire du go
4667
r régulièrement, qu’une cour suprême de Justice…
Le
Conseil d’État saisi de l’administration ordinaire du gouvernement, a
4668
ment, qu’une cour suprême de Justice… Le Conseil
d’
État saisi de l’administration ordinaire du gouvernement, a l’exercice
4669
cour suprême de Justice… Le Conseil d’État saisi
de
l’administration ordinaire du gouvernement, a l’exercice de la Puissa
4670
r suprême de Justice… Le Conseil d’État saisi de
l’
administration ordinaire du gouvernement, a l’exercice de la Puissance
4671
de l’administration ordinaire du gouvernement, a
l’
exercice de la Puissance exécutrice. Ses membres sont à la nomination
4672
istration ordinaire du gouvernement, a l’exercice
de
la Puissance exécutrice. Ses membres sont à la nomination du Prince…
4673
ration ordinaire du gouvernement, a l’exercice de
la
Puissance exécutrice. Ses membres sont à la nomination du Prince… Nul
4674
ce de la Puissance exécutrice. Ses membres sont à
la
nomination du Prince… Nulle ordonnance émanée de ce Conseil ne peut a
4675
la nomination du Prince… Nulle ordonnance émanée
de
ce Conseil ne peut acquérir force de loi, avant d’avoir été soumise à
4676
nance émanée de ce Conseil ne peut acquérir force
de
loi, avant d’avoir été soumise à l’examen d’un Comité composé du Cons
4677
e ce Conseil ne peut acquérir force de loi, avant
d’
avoir été soumise à l’examen d’un Comité composé du Conseil de Ville e
4678
cquérir force de loi, avant d’avoir été soumise à
l’
examen d’un Comité composé du Conseil de Ville et des Députés de Valle
4679
orce de loi, avant d’avoir été soumise à l’examen
d’
un Comité composé du Conseil de Ville et des Députés de Vallengin… La
4680
soumise à l’examen d’un Comité composé du Conseil
de
Ville et des Députés de Vallengin… La ville de Neuchâtel jouit de pri
4681
Comité composé du Conseil de Ville et des Députés
de
Vallengin… La ville de Neuchâtel jouit de privilèges très considérabl
4682
du Conseil de Ville et des Députés de Vallengin…
La
ville de Neuchâtel jouit de privilèges très considérables. Elle a la
4683
il de Ville et des Députés de Vallengin… La ville
de
Neuchâtel jouit de privilèges très considérables. Elle a la police de
4684
Députés de Vallengin… La ville de Neuchâtel jouit
de
privilèges très considérables. Elle a la police de son territoire, et
4685
el jouit de privilèges très considérables. Elle a
la
police de son territoire, et n’est gouvernée que par ses propres magi
4686
e privilèges très considérables. Elle a la police
de
son territoire, et n’est gouvernée que par ses propres magistrats, di
4687
cuperai point du détail des diverses subdivisions
de
ces deux Tribunaux, mais je ne puis m’empêcher de faire mention du co
4688
de ces deux Tribunaux, mais je ne puis m’empêcher
de
faire mention du corps des Ministraux qui forme le Tiers État toutes
4689
e faire mention du corps des Ministraux qui forme
le
Tiers État toutes les fois qu’il s’agit d’établir quelque loi nouvell
4690
forme le Tiers État toutes les fois qu’il s’agit
d’
établir quelque loi nouvelle, ou de faire des changements aux ancienne
4691
s qu’il s’agit d’établir quelque loi nouvelle, ou
de
faire des changements aux anciennes. Ce corps est une sorte de Comité
4692
changements aux anciennes. Ce corps est une sorte
de
Comité chargé de l’administration de la police, et dont les membres s
4693
nciennes. Ce corps est une sorte de Comité chargé
de
l’administration de la police, et dont les membres sont choisis dans
4694
ennes. Ce corps est une sorte de Comité chargé de
l’
administration de la police, et dont les membres sont choisis dans le
4695
st une sorte de Comité chargé de l’administration
de
la police, et dont les membres sont choisis dans le Conseil de Ville.
4696
une sorte de Comité chargé de l’administration de
la
police, et dont les membres sont choisis dans le Conseil de Ville. Il
4697
chargé de l’administration de la police, et dont
les
membres sont choisis dans le Conseil de Ville. Il est composé de deux
4698
la police, et dont les membres sont choisis dans
le
Conseil de Ville. Il est composé de deux présidents de ce conseil, de
4699
et dont les membres sont choisis dans le Conseil
de
Ville. Il est composé de deux présidents de ce conseil, de quatre Maî
4700
choisis dans le Conseil de Ville. Il est composé
de
deux présidents de ce conseil, de quatre Maîtres-Bourgeois fournis pa
4701
nseil de Ville. Il est composé de deux présidents
de
ce conseil, de quatre Maîtres-Bourgeois fournis par le petit Sénat, e
4702
Il est composé de deux présidents de ce conseil,
de
quatre Maîtres-Bourgeois fournis par le petit Sénat, et du Banneret o
4703
conseil, de quatre Maîtres-Bourgeois fournis par
le
petit Sénat, et du Banneret ou Gardien des libertés du Peuple… [Ce de
4704
des libertés du Peuple… [Ce dernier] est élu par
l’
assemblée générale des Citoyens, et demeure six ans en office. La Puis
4705
érale des Citoyens, et demeure six ans en office.
La
Puissance législative est divisée et répartie d’une manière si compli
4706
La Puissance législative est divisée et répartie
d’
une manière si compliquée qu’il serait très difficile de dire précisém
4707
manière si compliquée qu’il serait très difficile
de
dire précisément où elle réside. Le détail suivant… servira peut-être
4708
rès difficile de dire précisément où elle réside.
Le
détail suivant… servira peut-être à débrouiller ce chaos. Passons le
4709
ervira peut-être à débrouiller ce chaos. Passons
le
détail, qui tient deux pages. Coxe en conclut, non sans hésitation, q
4710
pages. Coxe en conclut, non sans hésitation, que
l’
autorité législative semble résider « à la fois dans le Prince, le Con
4711
orité législative semble résider « à la fois dans
le
Prince, le Conseil d’État, et la ville de Neuchâtel, conjointement co
4712
lative semble résider « à la fois dans le Prince,
le
Conseil d’État, et la ville de Neuchâtel, conjointement considérés ;
4713
le résider « à la fois dans le Prince, le Conseil
d’
État, et la ville de Neuchâtel, conjointement considérés ; que le Vall
4714
« à la fois dans le Prince, le Conseil d’État, et
la
ville de Neuchâtel, conjointement considérés ; que le Vallengin a une
4715
is dans le Prince, le Conseil d’État, et la ville
de
Neuchâtel, conjointement considérés ; que le Vallengin a une sorte de
4716
ille de Neuchâtel, conjointement considérés ; que
le
Vallengin a une sorte de voix négative ; et enfin, que c’est aux Troi
4717
ntement considérés ; que le Vallengin a une sorte
de
voix négative ; et enfin, que c’est aux Trois États qu’il appartient
4718
enfin, que c’est aux Trois États qu’il appartient
de
proposer et de promulguer une loi ». Quant à l’esprit des lois pénale
4719
t aux Trois États qu’il appartient de proposer et
de
promulguer une loi ». Quant à l’esprit des lois pénales, Coxe l’estim
4720
t de proposer et de promulguer une loi ». Quant à
l’
esprit des lois pénales, Coxe l’estime « d’une extrême douceur », et l
4721
ne loi ». Quant à l’esprit des lois pénales, Coxe
l’
estime « d’une extrême douceur », et les peines sont appliquées aux di
4722
uant à l’esprit des lois pénales, Coxe l’estime «
d’
une extrême douceur », et les peines sont appliquées aux différents dé
4723
ales, Coxe l’estime « d’une extrême douceur », et
les
peines sont appliquées aux différents délits avec une telle précision
4724
avec une telle précision « qu’il ne reste rien à
la
détermination des Juges… En un mot, et pour m’exprimer sur l’esprit d
4725
tion des Juges… En un mot, et pour m’exprimer sur
l’
esprit de cette législation dans les termes qui l’honorent le plus, je
4726
Juges… En un mot, et pour m’exprimer sur l’esprit
de
cette législation dans les termes qui l’honorent le plus, je vous dir
4727
m’exprimer sur l’esprit de cette législation dans
les
termes qui l’honorent le plus, je vous dirai que la liberté des indiv
4728
l’esprit de cette législation dans les termes qui
l’
honorent le plus, je vous dirai que la liberté des individus est proté
4729
cette législation dans les termes qui l’honorent
le
plus, je vous dirai que la liberté des individus est protégée par les
4730
termes qui l’honorent le plus, je vous dirai que
la
liberté des individus est protégée par les lois de ce pays avec autan
4731
rai que la liberté des individus est protégée par
les
lois de ce pays avec autant de sollicitude et d’efficacité que par ce
4732
a liberté des individus est protégée par les lois
de
ce pays avec autant de sollicitude et d’efficacité que par celles de
4733
est protégée par les lois de ce pays avec autant
de
sollicitude et d’efficacité que par celles de notre inestimable const
4734
les lois de ce pays avec autant de sollicitude et
d’
efficacité que par celles de notre inestimable constitution. » Qu’atte
4735
ant de sollicitude et d’efficacité que par celles
de
notre inestimable constitution. » Qu’attendre de plus d’un Anglais ?
4736
e inestimable constitution. » Qu’attendre de plus
d’
un Anglais ? N’oublions pas que les Trois États, le Conseil d’État, le
4737
ttendre de plus d’un Anglais ? N’oublions pas que
les
Trois États, le Conseil d’État, le Grand Conseil, le Petit Conseil, l
4738
’un Anglais ? N’oublions pas que les Trois États,
le
Conseil d’État, le Grand Conseil, le Petit Conseil, les Quatre-Minist
4739
? N’oublions pas que les Trois États, le Conseil
d’
État, le Grand Conseil, le Petit Conseil, les Quatre-Ministraux, les M
4740
lions pas que les Trois États, le Conseil d’État,
le
Grand Conseil, le Petit Conseil, les Quatre-Ministraux, les Maîtres-B
4741
Trois États, le Conseil d’État, le Grand Conseil,
le
Petit Conseil, les Quatre-Ministraux, les Maîtres-Bourgeois, le Banne
4742
nseil d’État, le Grand Conseil, le Petit Conseil,
les
Quatre-Ministraux, les Maîtres-Bourgeois, le Banneret, le Chancelier,
4743
Conseil, le Petit Conseil, les Quatre-Ministraux,
les
Maîtres-Bourgeois, le Banneret, le Chancelier, le Procureur Général e
4744
il, les Quatre-Ministraux, les Maîtres-Bourgeois,
le
Banneret, le Chancelier, le Procureur Général et le Gouverneur, « con
4745
e-Ministraux, les Maîtres-Bourgeois, le Banneret,
le
Chancelier, le Procureur Général et le Gouverneur, « conjointement co
4746
es Maîtres-Bourgeois, le Banneret, le Chancelier,
le
Procureur Général et le Gouverneur, « conjointement considérés » avec
4747
Banneret, le Chancelier, le Procureur Général et
le
Gouverneur, « conjointement considérés » avec les Trois États et les
4748
le Gouverneur, « conjointement considérés » avec
les
Trois États et les députés de Valangin, les vingt et une Cours de jus
4749
onjointement considérés » avec les Trois États et
les
députés de Valangin, les vingt et une Cours de justice locales, les C
4750
considérés » avec les Trois États et les députés
de
Valangin, les vingt et une Cours de justice locales, les Châtelains e
4751
avec les Trois États et les députés de Valangin,
les
vingt et une Cours de justice locales, les Châtelains et les Maires d
4752
t les députés de Valangin, les vingt et une Cours
de
justice locales, les Châtelains et les Maires de districts, et cent a
4753
angin, les vingt et une Cours de justice locales,
les
Châtelains et les Maires de districts, et cent autres emplois ou dign
4754
t une Cours de justice locales, les Châtelains et
les
Maires de districts, et cent autres emplois ou dignités, exerçaient l
4755
de justice locales, les Châtelains et les Maires
de
districts, et cent autres emplois ou dignités, exerçaient leurs pouvo
4756
rés mais jalousement distincts, dans une capitale
de
trois-mille habitants, un pays de quarante mille bons et fidèles suje
4757
ns une capitale de trois-mille habitants, un pays
de
quarante mille bons et fidèles sujets… « En 1818 déjà — écrit M. Arth
4758
rit M. Arthur Piaget dans sa remarquable Histoire
de
la révolution neuchâteloise — le Procureur général de Rougemont… cons
4759
M. Arthur Piaget dans sa remarquable Histoire de
la
révolution neuchâteloise — le Procureur général de Rougemont… considé
4760
rquable Histoire de la révolution neuchâteloise —
le
Procureur général de Rougemont… considérait la monarchie comme fatale
4761
— le Procureur général de Rougemont… considérait
la
monarchie comme fatalement condamnée » (II. 242). « Il jugeait ridicu
4762
e » (II. 242). « Il jugeait ridicule et dangereux
l’
esprit de caste et de famille qui régnait à Neuchâtel. Dieu nous prése
4763
242). « Il jugeait ridicule et dangereux l’esprit
de
caste et de famille qui régnait à Neuchâtel. Dieu nous préserve, écri
4764
ugeait ridicule et dangereux l’esprit de caste et
de
famille qui régnait à Neuchâtel. Dieu nous préserve, écrivait-il, des
4765
ous préserve, écrivait-il, des parvenus par droit
de
naissance et de fortune qui clabaudent contre ceux qui parviennent pa
4766
rivait-il, des parvenus par droit de naissance et
de
fortune qui clabaudent contre ceux qui parviennent par droits de tale
4767
clabaudent contre ceux qui parviennent par droits
de
talents et de vertus. Il estimait ces prétentions déplacées dans un p
4768
tre ceux qui parviennent par droits de talents et
de
vertus. Il estimait ces prétentions déplacées dans un pays où la plus
4769
stimait ces prétentions déplacées dans un pays où
la
plus ancienne noblesse n’est pas chapitrale, où les trois quarts de l
4770
a plus ancienne noblesse n’est pas chapitrale, où
les
trois quarts de la noblesse trouvent des paysans aux quatrième et cin
4771
oblesse n’est pas chapitrale, où les trois quarts
de
la noblesse trouvent des paysans aux quatrième et cinquième échelons
4772
esse n’est pas chapitrale, où les trois quarts de
la
noblesse trouvent des paysans aux quatrième et cinquième échelons en
4773
l’un des principaux artisans du « cantonnement »
de
Neuchâtel, c’est-à-dire de son inclusion, mais sans changer de régime
4774
ns du « cantonnement » de Neuchâtel, c’est-à-dire
de
son inclusion, mais sans changer de régime, dans le Corps helvétique.
4775
c’est-à-dire de son inclusion, mais sans changer
de
régime, dans le Corps helvétique. Dès la chute de Napoléon, et malgré
4776
son inclusion, mais sans changer de régime, dans
le
Corps helvétique. Dès la chute de Napoléon, et malgré la Restauration
4777
changer de régime, dans le Corps helvétique. Dès
la
chute de Napoléon, et malgré la Restauration, l’on s’aperçut que ce b
4778
de régime, dans le Corps helvétique. Dès la chute
de
Napoléon, et malgré la Restauration, l’on s’aperçut que ce beau mouve
4779
s helvétique. Dès la chute de Napoléon, et malgré
la
Restauration, l’on s’aperçut que ce beau mouvement d’horlogerie fine
4780
la chute de Napoléon, et malgré la Restauration,
l’
on s’aperçut que ce beau mouvement d’horlogerie fine retardait sans es
4781
estauration, l’on s’aperçut que ce beau mouvement
d’
horlogerie fine retardait sans espoir sur l’heure du siècle, avancée p
4782
ement d’horlogerie fine retardait sans espoir sur
l’
heure du siècle, avancée pour le reste de l’Europe par la Révolution,
4783
t sans espoir sur l’heure du siècle, avancée pour
le
reste de l’Europe par la Révolution, puis par l’Empire, dans le sens
4784
poir sur l’heure du siècle, avancée pour le reste
de
l’Europe par la Révolution, puis par l’Empire, dans le sens des droit
4785
r sur l’heure du siècle, avancée pour le reste de
l’
Europe par la Révolution, puis par l’Empire, dans le sens des droits i
4786
du siècle, avancée pour le reste de l’Europe par
la
Révolution, puis par l’Empire, dans le sens des droits individuels et
4787
le reste de l’Europe par la Révolution, puis par
l’
Empire, dans le sens des droits individuels et de la tyrannie collecti
4788
Europe par la Révolution, puis par l’Empire, dans
le
sens des droits individuels et de la tyrannie collective. La populati
4789
l’Empire, dans le sens des droits individuels et
de
la tyrannie collective. La population s’accroissait, le commerce pros
4790
Empire, dans le sens des droits individuels et de
la
tyrannie collective. La population s’accroissait, le commerce prospér
4791
droits individuels et de la tyrannie collective.
La
population s’accroissait, le commerce prospérait, l’industrie naissai
4792
tyrannie collective. La population s’accroissait,
le
commerce prospérait, l’industrie naissait, les radicaux triomphaient
4793
population s’accroissait, le commerce prospérait,
l’
industrie naissait, les radicaux triomphaient partout. Il était temps
4794
it, le commerce prospérait, l’industrie naissait,
les
radicaux triomphaient partout. Il était temps d’adopter l’heure de Be
4795
les radicaux triomphaient partout. Il était temps
d’
adopter l’heure de Berne. Et ce fut 1848.
4796
ux triomphaient partout. Il était temps d’adopter
l’
heure de Berne. Et ce fut 1848.
4797
phaient partout. Il était temps d’adopter l’heure
de
Berne. Et ce fut 1848.
4798
famille parmi d’autres, et qui n’a guère cherché
d’
illustration en dehors des limites de la communauté qu’elle a servie p
4799
uère cherché d’illustration en dehors des limites
de
la communauté qu’elle a servie pendant cinq siècles. Dans l’ascendanc
4800
e cherché d’illustration en dehors des limites de
la
communauté qu’elle a servie pendant cinq siècles. Dans l’ascendance d
4801
nauté qu’elle a servie pendant cinq siècles. Dans
l’
ascendance directe de mon père, je trouve d’abord, dès la Réforme, deu
4802
e pendant cinq siècles. Dans l’ascendance directe
de
mon père, je trouve d’abord, dès la Réforme, deux « ministres du sain
4803
dance directe de mon père, je trouve d’abord, dès
la
Réforme, deux « ministres du saint Évangile » et deux juges. À partir
4804
ngile » et deux juges. À partir du xviie siècle,
les
généalogies que j’ai pu consulter ne mentionnent plus que des charges
4805
des Assises, membres du Petit Conseil, conseiller
d’
État, enfin Procureur général de la Principauté. Puis survient la révo
4806
rocureur général de la Principauté. Puis survient
la
révolution dont nous allons célébrer le centenaire, et le dessaisisse
4807
survient la révolution dont nous allons célébrer
le
centenaire, et le dessaisissement du patriciat ; de là cette notice s
4808
ution dont nous allons célébrer le centenaire, et
le
dessaisissement du patriciat ; de là cette notice symbolique : Denis-
4809
centenaire, et le dessaisissement du patriciat ;
de
là cette notice symbolique : Denis-François-Henry, rentier. (Un renti
4810
hômeur riche.) Suivent mon grand-père, professeur
de
théologie, et mon père, pasteur. Cela fait, au début et à la fin, pas
4811
e, et mon père, pasteur. Cela fait, au début et à
la
fin, pas mal de robes et de rabats, soit de justice, soit d’église ;
4812
pasteur. Cela fait, au début et à la fin, pas mal
de
robes et de rabats, soit de justice, soit d’église ; et entre-temps p
4813
a fait, au début et à la fin, pas mal de robes et
de
rabats, soit de justice, soit d’église ; et entre-temps plus de deux
4814
et à la fin, pas mal de robes et de rabats, soit
de
justice, soit d’église ; et entre-temps plus de deux siècles de parti
4815
mal de robes et de rabats, soit de justice, soit
d’
église ; et entre-temps plus de deux siècles de participation continue
4816
t de justice, soit d’église ; et entre-temps plus
de
deux siècles de participation continuelle au gouvernement du pays. A
4817
it d’église ; et entre-temps plus de deux siècles
de
participation continuelle au gouvernement du pays. Au xixe siècle,
4818
du pays. Au xixe siècle, Neuchâtel ayant cessé
d’
être ce qu’il conviendrait de nommer une aristocratie républicaine au
4819
euchâtel ayant cessé d’être ce qu’il conviendrait
de
nommer une aristocratie républicaine au Prince lointain, cette dynast
4820
e républicaine au Prince lointain, cette dynastie
de
conseillers d’État se tourne vers la vie intellectuelle. D’où septant
4821
au Prince lointain, cette dynastie de conseillers
d’
État se tourne vers la vie intellectuelle. D’où septante-six ouvrages
4822
tte dynastie de conseillers d’État se tourne vers
la
vie intellectuelle. D’où septante-six ouvrages publiés par des Rougem
4823
lers d’État se tourne vers la vie intellectuelle.
D’
où septante-six ouvrages publiés par des Rougemont en Suisse, en Franc
4824
e et en Allemagne, entre 1830 et 1900. Et cela va
d’
un essai sur Socrate et Jésus-Christ jusqu’à des Observations sur l’or
4825
rate et Jésus-Christ jusqu’à des Observations sur
l’
organe détonant du Brachinus crepitans, en passant par un Précis de gé
4826
du Brachinus crepitans, en passant par un Précis
de
géographie comparée et Quelques mots sur les nombres rythmiques de la
4827
récis de géographie comparée et Quelques mots sur
les
nombres rythmiques de la prophétie… « L’ennui que j’aime à trouver au
4828
parée et Quelques mots sur les nombres rythmiques
de
la prophétie… « L’ennui que j’aime à trouver au fond de l’histoire n’
4829
ée et Quelques mots sur les nombres rythmiques de
la
prophétie… « L’ennui que j’aime à trouver au fond de l’histoire n’est
4830
ots sur les nombres rythmiques de la prophétie… «
L’
ennui que j’aime à trouver au fond de l’histoire n’est pas du goût de
4831
prophétie… « L’ennui que j’aime à trouver au fond
de
l’histoire n’est pas du goût de chacun », notait Chateaubriand dans s
4832
phétie… « L’ennui que j’aime à trouver au fond de
l’
histoire n’est pas du goût de chacun », notait Chateaubriand dans ses
4833
à trouver au fond de l’histoire n’est pas du goût
de
chacun », notait Chateaubriand dans ses Mémoires. Mais c’est par le d
4834
t Chateaubriand dans ses Mémoires. Mais c’est par
le
détail qu’on connaît une famille, par une famille l’histoire d’un pay
4835
détail qu’on connaît une famille, par une famille
l’
histoire d’un pays, et surtout d’un petit pays. Ainsi l’on répète volo
4836
n connaît une famille, par une famille l’histoire
d’
un pays, et surtout d’un petit pays. Ainsi l’on répète volontiers que
4837
par une famille l’histoire d’un pays, et surtout
d’
un petit pays. Ainsi l’on répète volontiers que la Suisse est le « car
4838
oire d’un pays, et surtout d’un petit pays. Ainsi
l’
on répète volontiers que la Suisse est le « carrefour de l’Europe ». P
4839
d’un petit pays. Ainsi l’on répète volontiers que
la
Suisse est le « carrefour de l’Europe ». Pour vérifier ce lieu commun
4840
s. Ainsi l’on répète volontiers que la Suisse est
le
« carrefour de l’Europe ». Pour vérifier ce lieu commun, examinons de
4841
épète volontiers que la Suisse est le « carrefour
de
l’Europe ». Pour vérifier ce lieu commun, examinons deux prises micro
4842
te volontiers que la Suisse est le « carrefour de
l’
Europe ». Pour vérifier ce lieu commun, examinons deux prises microsco
4843
aminons deux prises microscopiques prélevées dans
les
archives de ma famille. Sur les trente-deux ancêtres de mon père à la
4844
prises microscopiques prélevées dans les archives
de
ma famille. Sur les trente-deux ancêtres de mon père à la cinquième g
4845
es prélevées dans les archives de ma famille. Sur
les
trente-deux ancêtres de mon père à la cinquième génération, je compte
4846
hives de ma famille. Sur les trente-deux ancêtres
de
mon père à la cinquième génération, je compte quatorze Neuchâtelois,
4847
puis une Allemande. Et des trois autres branches
de
leur famille, au milieu du xviiie siècle, deux sont en train de deve
4848
e l’un des traits qu’ont en commun presque toutes
les
anciennes familles de ce pays manque à la mienne : très peu de milita
4849
t en commun presque toutes les anciennes familles
de
ce pays manque à la mienne : très peu de militaires parmi les ascenda
4850
manque à la mienne : très peu de militaires parmi
les
ascendants directs du nom de mon père. Par les femmes, on en trouve d
4851
de militaires parmi les ascendants directs du nom
de
mon père. Par les femmes, on en trouve davantage, mais là encore les
4852
mi les ascendants directs du nom de mon père. Par
les
femmes, on en trouve davantage, mais là encore les traditions intelle
4853
es femmes, on en trouve davantage, mais là encore
les
traditions intellectuelles et politiques restent les plus marquées. F
4854
traditions intellectuelles et politiques restent
les
plus marquées. François-Antoine III, mon quadrisaïeul, épouse Henriet
4855
ïeul, épouse Henriette de Montmollin : elle était
la
petite-fille du « Grand Ostervald », traducteur de la Bible admiré pa
4856
a petite-fille du « Grand Ostervald », traducteur
de
la Bible admiré par Fénelon, auteur de vingt traités sur la morale, l
4857
etite-fille du « Grand Ostervald », traducteur de
la
Bible admiré par Fénelon, auteur de vingt traités sur la morale, la l
4858
traducteur de la Bible admiré par Fénelon, auteur
de
vingt traités sur la morale, la liturgie et la théologie qui furent t
4859
e admiré par Fénelon, auteur de vingt traités sur
la
morale, la liturgie et la théologie qui furent traduits dans toute l’
4860
r Fénelon, auteur de vingt traités sur la morale,
la
liturgie et la théologie qui furent traduits dans toute l’Europe, et
4861
ur de vingt traités sur la morale, la liturgie et
la
théologie qui furent traduits dans toute l’Europe, et qui le firent a
4862
ie et la théologie qui furent traduits dans toute
l’
Europe, et qui le firent appeler par Newton « le plus chrétien de tous
4863
e qui furent traduits dans toute l’Europe, et qui
le
firent appeler par Newton « le plus chrétien de tous les hommes », vi
4864
e l’Europe, et qui le firent appeler par Newton «
le
plus chrétien de tous les hommes », vir omnium christianissimus. Mon
4865
i le firent appeler par Newton « le plus chrétien
de
tous les hommes », vir omnium christianissimus. Mon trisaïeul, le Pro
4866
ent appeler par Newton « le plus chrétien de tous
les
hommes », vir omnium christianissimus. Mon trisaïeul, le Procureur gé
4867
es », vir omnium christianissimus. Mon trisaïeul,
le
Procureur général, épouse Charlotte d’Ostervald, arrière-petite-fille
4868
pouse Charlotte d’Ostervald, arrière-petite-fille
de
l’illustre pasteur. Le fils du Procureur épouse Marie-Philippine du B
4869
se Charlotte d’Ostervald, arrière-petite-fille de
l’
illustre pasteur. Le fils du Procureur épouse Marie-Philippine du Buat
4870
vald, arrière-petite-fille de l’illustre pasteur.
Le
fils du Procureur épouse Marie-Philippine du Buat-Nançay, dans l’asce
4871
reur épouse Marie-Philippine du Buat-Nançay, dans
l’
ascendance de laquelle je trouve deux mathématiciens et ingénieurs, un
4872
arie-Philippine du Buat-Nançay, dans l’ascendance
de
laquelle je trouve deux mathématiciens et ingénieurs, un diplomate et
4873
urs, un diplomate et historien, une alliance avec
la
fille de Corneille, et plus haut, dès le xiie siècle, de fréquents d
4874
iplomate et historien, une alliance avec la fille
de
Corneille, et plus haut, dès le xiie siècle, de fréquents donateurs
4875
nce avec la fille de Corneille, et plus haut, dès
le
xiie siècle, de fréquents donateurs à l’Abbaye de la Trappe. « N’oub
4876
de Corneille, et plus haut, dès le xiie siècle,
de
fréquents donateurs à l’Abbaye de la Trappe. « N’oublie jamais », me
4877
ut, dès le xiie siècle, de fréquents donateurs à
l’
Abbaye de la Trappe. « N’oublie jamais », me disait un de mes oncles,
4878
e xiie siècle, de fréquents donateurs à l’Abbaye
de
la Trappe. « N’oublie jamais », me disait un de mes oncles, « que plu
4879
iie siècle, de fréquents donateurs à l’Abbaye de
la
Trappe. « N’oublie jamais », me disait un de mes oncles, « que plus l
4880
e de la Trappe. « N’oublie jamais », me disait un
de
mes oncles, « que plus l’ancêtre dont on se réclame est éloigné, moin
4881
jamais », me disait un de mes oncles, « que plus
l’
ancêtre dont on se réclame est éloigné, moins on a de chances de tenir
4882
ncêtre dont on se réclame est éloigné, moins on a
de
chances de tenir de lui ». Et que valent en effet ces noms, ces souve
4883
on se réclame est éloigné, moins on a de chances
de
tenir de lui ». Et que valent en effet ces noms, ces souvenirs, ces a
4884
clame est éloigné, moins on a de chances de tenir
de
lui ». Et que valent en effet ces noms, ces souvenirs, ces ascendance
4885
noms, ces souvenirs, ces ascendances ? Rien, dit
l’
époque, non sans irritation. Une science assez récente, mais déjà démo
4886
e assez récente, mais déjà démodée, pensa réduire
l’
orgueil humain en plaçant aux racines des arbres les plus nobles, au l
4887
’orgueil humain en plaçant aux racines des arbres
les
plus nobles, au lieu d’un demi-dieu, d’un héros ou d’un saint, un sin
4888
s arbres les plus nobles, au lieu d’un demi-dieu,
d’
un héros ou d’un saint, un singe au naturel, en guise d’armes parlante
4889
lus nobles, au lieu d’un demi-dieu, d’un héros ou
d’
un saint, un singe au naturel, en guise d’armes parlantes du beau myth
4890
naturel, en guise d’armes parlantes du beau mythe
de
l’Égalité… Et pourtant si le « grand Ostervald », si Corneille, si la
4891
urel, en guise d’armes parlantes du beau mythe de
l’
Égalité… Et pourtant si le « grand Ostervald », si Corneille, si la Tr
4892
lantes du beau mythe de l’Égalité… Et pourtant si
le
« grand Ostervald », si Corneille, si la Trappe sont bien loin — et i
4893
rtant si le « grand Ostervald », si Corneille, si
la
Trappe sont bien loin — et ils le sont — que dire du Singe ? Je me ré
4894
i Corneille, si la Trappe sont bien loin — et ils
le
sont — que dire du Singe ? Je me répète la phrase de mon oncle. En re
4895
et ils le sont — que dire du Singe ? Je me répète
la
phrase de mon oncle. En revanche, comment ne pas croire à l’influence
4896
sont — que dire du Singe ? Je me répète la phrase
de
mon oncle. En revanche, comment ne pas croire à l’influence des profe
4897
e mon oncle. En revanche, comment ne pas croire à
l’
influence des professions héréditaires, du rôle social tenu pendant de
4898
yeux, jusque dans ses fonctions ecclésiastiques,
l’
idée du serviteur de la cité, c’est qu’en lui durait toute une race co
4899
es fonctions ecclésiastiques, l’idée du serviteur
de
la cité, c’est qu’en lui durait toute une race consacrée à la chose p
4900
fonctions ecclésiastiques, l’idée du serviteur de
la
cité, c’est qu’en lui durait toute une race consacrée à la chose publ
4901
c’est qu’en lui durait toute une race consacrée à
la
chose publique, préférant la charge à l’honneur, l’autorité réelle au
4902
une race consacrée à la chose publique, préférant
la
charge à l’honneur, l’autorité réelle au bénéfice, et le respect des
4903
sacrée à la chose publique, préférant la charge à
l’
honneur, l’autorité réelle au bénéfice, et le respect des principes au
4904
chose publique, préférant la charge à l’honneur,
l’
autorité réelle au bénéfice, et le respect des principes aux intérêts.
4905
ge à l’honneur, l’autorité réelle au bénéfice, et
le
respect des principes aux intérêts. Si jamais la noblesse a valu quel
4906
le respect des principes aux intérêts. Si jamais
la
noblesse a valu quelque chose, c’est quand elle a dédaigné toutes les
4907
quelque chose, c’est quand elle a dédaigné toutes
les
« preuves » qui n’étaient pas celle de l’obligation. Je crois que tou
4908
né toutes les « preuves » qui n’étaient pas celle
de
l’obligation. Je crois que toute autre considération sur ce sujet sem
4909
toutes les « preuves » qui n’étaient pas celle de
l’
obligation. Je crois que toute autre considération sur ce sujet sembla
4910
ur ce sujet semblait aux yeux de mon père indigne
d’
une pensée. Et certes, il n’en parlait jamais. Le peu que j’en dis l’e
4911
d’une pensée. Et certes, il n’en parlait jamais.
Le
peu que j’en dis l’eût gêné. Mais ce sens naturel du service, il lui
4912
rtes, il n’en parlait jamais. Le peu que j’en dis
l’
eût gêné. Mais ce sens naturel du service, il lui fut donné de l’exerc
4913
Mais ce sens naturel du service, il lui fut donné
de
l’exercer dans d’autres dimensions humaines que celles du petit État
4914
s ce sens naturel du service, il lui fut donné de
l’
exercer dans d’autres dimensions humaines que celles du petit État de
4915
tres dimensions humaines que celles du petit État
de
ses aïeux, aussi riche en coutumes fort sages qu’en préjugés invétéré
4916
vétérés. Il trouvait dans son héritage des vertus
de
prudence, d’ordre et d’autorité, un goût marqué pour l’argumentation
4917
rouvait dans son héritage des vertus de prudence,
d’
ordre et d’autorité, un goût marqué pour l’argumentation et la dialect
4918
s son héritage des vertus de prudence, d’ordre et
d’
autorité, un goût marqué pour l’argumentation et la dialectique légali
4919
dence, d’ordre et d’autorité, un goût marqué pour
l’
argumentation et la dialectique légaliste, qui l’eussent conduit, en d
4920
’autorité, un goût marqué pour l’argumentation et
la
dialectique légaliste, qui l’eussent conduit, en d’autres temps, vers
4921
l’argumentation et la dialectique légaliste, qui
l’
eussent conduit, en d’autres temps, vers une carrière d’homme politiqu
4922
ent conduit, en d’autres temps, vers une carrière
d’
homme politique ou d’homme de loi, dans un style dignified à l’anglais
4923
res temps, vers une carrière d’homme politique ou
d’
homme de loi, dans un style dignified à l’anglaise. Le ministère pasto
4924
s, vers une carrière d’homme politique ou d’homme
de
loi, dans un style dignified à l’anglaise. Le ministère pastoral le c
4925
ique ou d’homme de loi, dans un style dignified à
l’
anglaise. Le ministère pastoral le conduisit vers de plus humbles tâch
4926
mme de loi, dans un style dignified à l’anglaise.
Le
ministère pastoral le conduisit vers de plus humbles tâches, en Dieu
4927
yle dignified à l’anglaise. Le ministère pastoral
le
conduisit vers de plus humbles tâches, en Dieu plus grandes, et vers
4928
lus humbles tâches, en Dieu plus grandes, et vers
la
liberté de l’esprit. Sa première allégeance était l’Église, et par là
4929
tâches, en Dieu plus grandes, et vers la liberté
de
l’esprit. Sa première allégeance était l’Église, et par là même l’uni
4930
ches, en Dieu plus grandes, et vers la liberté de
l’
esprit. Sa première allégeance était l’Église, et par là même l’univer
4931
liberté de l’esprit. Sa première allégeance était
l’
Église, et par là même l’universel, c’est-à-dire le prochain quel qu’i
4932
remière allégeance était l’Église, et par là même
l’
universel, c’est-à-dire le prochain quel qu’il soit, être souvent biza
4933
’Église, et par là même l’universel, c’est-à-dire
le
prochain quel qu’il soit, être souvent bizarre et mystérieux qu’il fa
4934
arre et mystérieux qu’il faut comprendre avant de
l’
aider, qu’il faut aimer si l’on veut le comprendre. Sa tradition, cepe
4935
comprendre avant de l’aider, qu’il faut aimer si
l’
on veut le comprendre. Sa tradition, cependant, était d’autorité, de j
4936
e avant de l’aider, qu’il faut aimer si l’on veut
le
comprendre. Sa tradition, cependant, était d’autorité, de justes prop
4937
eut le comprendre. Sa tradition, cependant, était
d’
autorité, de justes proportions et de raison gardée. Contradiction sec
4938
endre. Sa tradition, cependant, était d’autorité,
de
justes proportions et de raison gardée. Contradiction secrète de sa v
4939
ndant, était d’autorité, de justes proportions et
de
raison gardée. Contradiction secrète de sa vie et source de sa vraie
4940
rtions et de raison gardée. Contradiction secrète
de
sa vie et source de sa vraie richesse. De là sa modestie frappante, s
4941
gardée. Contradiction secrète de sa vie et source
de
sa vraie richesse. De là sa modestie frappante, sa tolérance acquise
4942
secrète de sa vie et source de sa vraie richesse.
De
là sa modestie frappante, sa tolérance acquise non sans luttes, mais
4943
nce acquise non sans luttes, mais sa fermeté dans
le
conseil ; son accueil aux idées nouvelles, mais ses convictions milit
4944
foncier, mais ses brusques indignations. Il avait
le
goût classique de la claire ordonnance, mais non moins de la justice
4945
brusques indignations. Il avait le goût classique
de
la claire ordonnance, mais non moins de la justice sociale, et quand
4946
sques indignations. Il avait le goût classique de
la
claire ordonnance, mais non moins de la justice sociale, et quand il
4947
classique de la claire ordonnance, mais non moins
de
la justice sociale, et quand il le fallait, de la protestation sobre,
4948
ssique de la claire ordonnance, mais non moins de
la
justice sociale, et quand il le fallait, de la protestation sobre, ef
4949
mais non moins de la justice sociale, et quand il
le
fallait, de la protestation sobre, efficace et désintéressée. Toujour
4950
ns de la justice sociale, et quand il le fallait,
de
la protestation sobre, efficace et désintéressée. Toujours saisi d’un
4951
de la justice sociale, et quand il le fallait, de
la
protestation sobre, efficace et désintéressée. Toujours saisi d’un mo
4952
sobre, efficace et désintéressée. Toujours saisi
d’
un mouvement de retrait devant une charge honorifique, jamais devant l
4953
e et désintéressée. Toujours saisi d’un mouvement
de
retrait devant une charge honorifique, jamais devant les risques et l
4954
rait devant une charge honorifique, jamais devant
les
risques et les déboires d’un témoignage vigilant ; père, citoyen, pas
4955
charge honorifique, jamais devant les risques et
les
déboires d’un témoignage vigilant ; père, citoyen, pasteur de ses tro
4956
ifique, jamais devant les risques et les déboires
d’
un témoignage vigilant ; père, citoyen, pasteur de ses troupeaux, et v
4957
d’un témoignage vigilant ; père, citoyen, pasteur
de
ses troupeaux, et vibrant défenseur de l’honneur protestant, il était
4958
n, pasteur de ses troupeaux, et vibrant défenseur
de
l’honneur protestant, il était au plein sens du mot l’homme engagé, c
4959
pasteur de ses troupeaux, et vibrant défenseur de
l’
honneur protestant, il était au plein sens du mot l’homme engagé, celu
4960
honneur protestant, il était au plein sens du mot
l’
homme engagé, celui qui ne revendique rien pour soi, tout pour « la Ca
4961
elui qui ne revendique rien pour soi, tout pour «
la
Cause », comme il aimait à dire. Quand il m’arrive de louer dans mes
4962
ause », comme il aimait à dire. Quand il m’arrive
de
louer dans mes ouvrages le civisme des protestants, c’est à l’exemple
4963
ire. Quand il m’arrive de louer dans mes ouvrages
le
civisme des protestants, c’est à l’exemple de mon père que j’ai pensé
4964
l’exemple de mon père que j’ai pensé ; et ce mot
d’
engagement, dont on abuse, d’où l’aurais-je pris si ce n’est de sa vie
4965
ai pensé ; et ce mot d’engagement, dont on abuse,
d’
où l’aurais-je pris si ce n’est de sa vie — l’une des très rares vies
4966
nsé ; et ce mot d’engagement, dont on abuse, d’où
l’
aurais-je pris si ce n’est de sa vie — l’une des très rares vies d’hom
4967
dont on abuse, d’où l’aurais-je pris si ce n’est
de
sa vie — l’une des très rares vies d’homme que j’ai connues de près,
4968
si ce n’est de sa vie — l’une des très rares vies
d’
homme que j’ai connues de près, qui commandât mon absolu respect. Au-d
4969
’une des très rares vies d’homme que j’ai connues
de
près, qui commandât mon absolu respect. Au-delà de l’exemple vivant d
4970
e près, qui commandât mon absolu respect. Au-delà
de
l’exemple vivant du destin vécu de mon père, qu’irais-je encore cherc
4971
rès, qui commandât mon absolu respect. Au-delà de
l’
exemple vivant du destin vécu de mon père, qu’irais-je encore chercher
4972
spect. Au-delà de l’exemple vivant du destin vécu
de
mon père, qu’irais-je encore chercher dans le passé ? Si j’y suis rem
4973
écu de mon père, qu’irais-je encore chercher dans
le
passé ? Si j’y suis remonté, c’était pour mieux saisir l’enseignement
4974
? Si j’y suis remonté, c’était pour mieux saisir
l’
enseignement d’une vie où s’est fondée ma vie. Sur le fond d’une tradi
4975
remonté, c’était pour mieux saisir l’enseignement
d’
une vie où s’est fondée ma vie. Sur le fond d’une tradition qui la rel
4976
nseignement d’une vie où s’est fondée ma vie. Sur
le
fond d’une tradition qui la reliait à notre histoire et à l’ancienne
4977
ent d’une vie où s’est fondée ma vie. Sur le fond
d’
une tradition qui la reliait à notre histoire et à l’ancienne communau
4978
st fondée ma vie. Sur le fond d’une tradition qui
la
reliait à notre histoire et à l’ancienne communauté, j’ai mieux disti
4979
ne tradition qui la reliait à notre histoire et à
l’
ancienne communauté, j’ai mieux distingué, par contraste, son humanité
4980
ontraste, son humanité singulière. Et maintenant,
la
fidélité même à cet exemple m’inciterait à ne point m’attarder. (J’en
4981
encore comme il disait jour après jour : « Aller
de
l’avant ! ») L’honneur à rendre au père, selon le Décalogue, n’est pa
4982
core comme il disait jour après jour : « Aller de
l’
avant ! ») L’honneur à rendre au père, selon le Décalogue, n’est pas u
4983
disait jour après jour : « Aller de l’avant ! »)
L’
honneur à rendre au père, selon le Décalogue, n’est pas un culte des a
4984
de l’avant ! ») L’honneur à rendre au père, selon
le
Décalogue, n’est pas un culte des ancêtres. Et pourtant, quelle est c
4985
ent : « …afin que tes jours soient prolongés dans
le
pays que Dieu te donne » ? Il me semble aujourd’hui que pour la premi
4986
r mourir centenaire !) Prolongés vers cet au-delà
de
la mémoire individuelle, le passé qui se passe en nous, et sans leque
4987
ourir centenaire !) Prolongés vers cet au-delà de
la
mémoire individuelle, le passé qui se passe en nous, et sans lequel i
4988
ngés vers cet au-delà de la mémoire individuelle,
le
passé qui se passe en nous, et sans lequel il n’y aurait jamais de pl
4989
asse en nous, et sans lequel il n’y aurait jamais
de
plénitude du présent. Jours prolongés comme un accord qui réveille au
4990
rs prolongés comme un accord qui réveille au loin
l’
harmonique et qui fait vibrer tous les temps, créant notre avenir auss
4991
ille au loin l’harmonique et qui fait vibrer tous
les
temps, créant notre avenir aussi, parce qu’il ouvre l’attente ardente
4992
mps, créant notre avenir aussi, parce qu’il ouvre
l’
attente ardente de sa résolution — de son pardon. Jours de nos vies, c
4993
avenir aussi, parce qu’il ouvre l’attente ardente
de
sa résolution — de son pardon. Jours de nos vies, comptés de toute ét
4994
qu’il ouvre l’attente ardente de sa résolution —
de
son pardon. Jours de nos vies, comptés de toute éternité, mais prolon
4995
e ardente de sa résolution — de son pardon. Jours
de
nos vies, comptés de toute éternité, mais prolongés par l’acte de pié
4996
ution — de son pardon. Jours de nos vies, comptés
de
toute éternité, mais prolongés par l’acte de piété à la durée des siè
4997
es, comptés de toute éternité, mais prolongés par
l’
acte de piété à la durée des siècles écoulés et futurs de ce « pays qu
4998
ptés de toute éternité, mais prolongés par l’acte
de
piété à la durée des siècles écoulés et futurs de ce « pays que Dieu
4999
te éternité, mais prolongés par l’acte de piété à
la
durée des siècles écoulés et futurs de ce « pays que Dieu nous donne
5000
de piété à la durée des siècles écoulés et futurs
de
ce « pays que Dieu nous donne ».
5001
V J’ai refermé
les
livres, les mémoires. L’année finit. J’écris sans hâte. Quel silence
5002
V J’ai refermé les livres,
les
mémoires. L’année finit. J’écris sans hâte. Quel silence ! Et je m’at
5003
V J’ai refermé les livres, les mémoires.
L’
année finit. J’écris sans hâte. Quel silence ! Et je m’attarde à suivr
5004
’attarde à suivre encore ces harmoniques, comme à
l’
écoute clandestine, l’oreille au son d’un passé qui faiblit mais qui n
5005
re ces harmoniques, comme à l’écoute clandestine,
l’
oreille au son d’un passé qui faiblit mais qui n’a pas terminé son mes
5006
s, comme à l’écoute clandestine, l’oreille au son
d’
un passé qui faiblit mais qui n’a pas terminé son message. Il me parle
5007
né son message. Il me parle ce soir de plus loin,
d’
au-delà de mon petit pays, dans l’espace et le temps d’une plus vaste
5008
sage. Il me parle ce soir de plus loin, d’au-delà
de
mon petit pays, dans l’espace et le temps d’une plus vaste patrie. Le
5009
r de plus loin, d’au-delà de mon petit pays, dans
l’
espace et le temps d’une plus vaste patrie. Les perspectives changent
5010
in, d’au-delà de mon petit pays, dans l’espace et
le
temps d’une plus vaste patrie. Les perspectives changent à vue, verti
5011
delà de mon petit pays, dans l’espace et le temps
d’
une plus vaste patrie. Les perspectives changent à vue, vertige et gri
5012
ans l’espace et le temps d’une plus vaste patrie.
Les
perspectives changent à vue, vertige et grisaille du temps. Une ligné
5013
temps. Une lignée, une famille parmi d’autres… Je
la
voyais dans son canton ; mais dans la Suisse, mais dans l’Europe, que
5014
’autres… Je la voyais dans son canton ; mais dans
la
Suisse, mais dans l’Europe, que devient ce fil rouge que je croyais t
5015
dans son canton ; mais dans la Suisse, mais dans
l’
Europe, que devient ce fil rouge que je croyais tenir ? Où vont se per
5016
il rouge que je croyais tenir ? Où vont se perdre
les
sentiers de la mémoire, ces voies ouvertes à l’imagination ? Il y a l
5017
je croyais tenir ? Où vont se perdre les sentiers
de
la mémoire, ces voies ouvertes à l’imagination ? Il y a la petite pat
5018
croyais tenir ? Où vont se perdre les sentiers de
la
mémoire, ces voies ouvertes à l’imagination ? Il y a la petite patrie
5019
les sentiers de la mémoire, ces voies ouvertes à
l’
imagination ? Il y a la petite patrie, la terre du père, celle qu’on p
5020
oire, ces voies ouvertes à l’imagination ? Il y a
la
petite patrie, la terre du père, celle qu’on peut parcourir en une jo
5021
vertes à l’imagination ? Il y a la petite patrie,
la
terre du père, celle qu’on peut parcourir en une journée et chaque jo
5022
u’on peut parcourir en une journée et chaque jour
de
la vie sans se lasser, celle qu’un regard embrasse et détaille à lois
5023
n peut parcourir en une journée et chaque jour de
la
vie sans se lasser, celle qu’un regard embrasse et détaille à loisir.
5024
’un regard embrasse et détaille à loisir. Au-delà
de
ses paysages et de sa proche histoire, il n’y a que l’imaginaire. Les
5025
et détaille à loisir. Au-delà de ses paysages et
de
sa proche histoire, il n’y a que l’imaginaire. Les nations, les plus
5026
s paysages et de sa proche histoire, il n’y a que
l’
imaginaire. Les nations, les plus vastes patries n’ont jamais été vues
5027
de sa proche histoire, il n’y a que l’imaginaire.
Les
nations, les plus vastes patries n’ont jamais été vues par personne :
5028
histoire, il n’y a que l’imaginaire. Les nations,
les
plus vastes patries n’ont jamais été vues par personne : c’est l’espr
5029
atries n’ont jamais été vues par personne : c’est
l’
esprit qui les croit comme il croit au passé, à la tradition, à l’aven
5030
jamais été vues par personne : c’est l’esprit qui
les
croit comme il croit au passé, à la tradition, à l’avenir. Plus tard,
5031
l’esprit qui les croit comme il croit au passé, à
la
tradition, à l’avenir. Plus tard, dans les archives et les voyages, d
5032
croit comme il croit au passé, à la tradition, à
l’
avenir. Plus tard, dans les archives et les voyages, dans l’aventure e
5033
assé, à la tradition, à l’avenir. Plus tard, dans
les
archives et les voyages, dans l’aventure et dans l’action, il ira vér
5034
tion, à l’avenir. Plus tard, dans les archives et
les
voyages, dans l’aventure et dans l’action, il ira vérifier ce qu’il r
5035
Plus tard, dans les archives et les voyages, dans
l’
aventure et dans l’action, il ira vérifier ce qu’il rêvait. Mais c’est
5036
archives et les voyages, dans l’aventure et dans
l’
action, il ira vérifier ce qu’il rêvait. Mais c’est en lui qu’est la r
5037
érifier ce qu’il rêvait. Mais c’est en lui qu’est
la
réalité sans laquelle il n’eût pas bougé. Ce qu’on touche — et ce qu’
5038
pas bougé. Ce qu’on touche — et ce qu’on imagine,
le
pays qui nous tient par les pieds, par le cœur, et le rassemblement d
5039
— et ce qu’on imagine, le pays qui nous tient par
les
pieds, par le cœur, et le rassemblement des nations invisibles, on no
5040
magine, le pays qui nous tient par les pieds, par
le
cœur, et le rassemblement des nations invisibles, on nous dit que tou
5041
ays qui nous tient par les pieds, par le cœur, et
le
rassemblement des nations invisibles, on nous dit que tout les oppose
5042
ment des nations invisibles, on nous dit que tout
les
oppose, qu’il faut choisir l’un contre l’autre, et qu’entre ces amour
5043
ntre l’autre, et qu’entre ces amours il n’est que
de
la haine. Comment un Suisse le croirait-il ? Si je me sens presque pa
5044
e l’autre, et qu’entre ces amours il n’est que de
la
haine. Comment un Suisse le croirait-il ? Si je me sens presque parto
5045
mours il n’est que de la haine. Comment un Suisse
le
croirait-il ? Si je me sens presque partout chez moi dans l’Europe fr
5046
-il ? Si je me sens presque partout chez moi dans
l’
Europe franco-germanique, c’est que d’abord je l’ai trouvée dans ma fa
5047
l’Europe franco-germanique, c’est que d’abord je
l’
ai trouvée dans ma famille, où tant de traditions se croisent et se ma
5048
Pour moi comme pour tant d’autres Suisses, passer
de
la petite patrie à la plus vaste, ce n’est pas infidélité à ma race,
5049
r moi comme pour tant d’autres Suisses, passer de
la
petite patrie à la plus vaste, ce n’est pas infidélité à ma race, à m
5050
nt d’autres Suisses, passer de la petite patrie à
la
plus vaste, ce n’est pas infidélité à ma race, à mon clos natal. C’es
5051
ace, à mon clos natal. C’est aimer plus loin dans
le
même sens. Ainsi, pour me sentir Européen, nul besoin de quitter ce s
5052
sens. Ainsi, pour me sentir Européen, nul besoin
de
quitter ce salon campagnard où je suis revenu m’asseoir : il me suffi
5053
agnard où je suis revenu m’asseoir : il me suffit
de
méditer sur ses images, de remonter par elles à des sources lointaine
5054
asseoir : il me suffit de méditer sur ses images,
de
remonter par elles à des sources lointaines. Grands portraits un peu
5055
, gravures piquées et daguerréotypes. Que sais-je
d’
eux, qui me regardent ? Cette aïeule au visage émacié, coiffé de longu
5056
regardent ? Cette aïeule au visage émacié, coiffé
de
longues boucles noires, j’ai lu ses lettres. Dernière d’une lignée tr
5057
ues boucles noires, j’ai lu ses lettres. Dernière
d’
une lignée très catholique, elle cachait ses messages au fiancé suisse
5058
, elle cachait ses messages au fiancé suisse dans
l’
écorce d’un arbre, au fond du parc, et devenait protestante en secret.
5059
chait ses messages au fiancé suisse dans l’écorce
d’
un arbre, au fond du parc, et devenait protestante en secret. J’ai lu
5060
devenait protestante en secret. J’ai lu ces pages
de
confidences pudiques, pleines d’idéal et de mélancolie, mais sans y r
5061
’ai lu ces pages de confidences pudiques, pleines
d’
idéal et de mélancolie, mais sans y retrouver la trace des larmes dont
5062
pages de confidences pudiques, pleines d’idéal et
de
mélancolie, mais sans y retrouver la trace des larmes dont elle écrit
5063
s d’idéal et de mélancolie, mais sans y retrouver
la
trace des larmes dont elle écrit souvent qu’elles furent baignées. L’
5064
dont elle écrit souvent qu’elles furent baignées.
L’
on était vers 1830. Portrait de son grand-père, un chevalier de Malte,
5065
s furent baignées. L’on était vers 1830. Portrait
de
son grand-père, un chevalier de Malte, membre correspondant de l’Inst
5066
rs 1830. Portrait de son grand-père, un chevalier
de
Malte, membre correspondant de l’Institut. L’un de ses fils fut décap
5067
père, un chevalier de Malte, membre correspondant
de
l’Institut. L’un de ses fils fut décapité au lendemain de l’affaire d
5068
e, un chevalier de Malte, membre correspondant de
l’
Institut. L’un de ses fils fut décapité au lendemain de l’affaire de Q
5069
e Malte, membre correspondant de l’Institut. L’un
de
ses fils fut décapité au lendemain de l’affaire de Quiberon, sous la
5070
titut. L’un de ses fils fut décapité au lendemain
de
l’affaire de Quiberon, sous la Terreur, deux ans après que sa petite
5071
ut. L’un de ses fils fut décapité au lendemain de
l’
affaire de Quiberon, sous la Terreur, deux ans après que sa petite cou
5072
e ses fils fut décapité au lendemain de l’affaire
de
Quiberon, sous la Terreur, deux ans après que sa petite cousine Charl
5073
apité au lendemain de l’affaire de Quiberon, sous
la
Terreur, deux ans après que sa petite cousine Charlotte ait cloué dan
5074
né à Boudry, tout près d’ici. Que sais-je encore
de
cette famille éteinte ? Du fond des âges et de la forêt normande, il
5075
re de cette famille éteinte ? Du fond des âges et
de
la forêt normande, il m’en revient un nom de Table ronde : Lucrèce d’
5076
de cette famille éteinte ? Du fond des âges et de
la
forêt normande, il m’en revient un nom de Table ronde : Lucrèce d’Aub
5077
s et de la forêt normande, il m’en revient un nom
de
Table ronde : Lucrèce d’Aubray, Dame de l’Aigle et du Lac… Cette aïeu
5078
te aïeule qui me sourit dans sa mantille, retenue
d’
une main sur la gorge opulente, vint de Béziers au temps des dragonnad
5079
e sourit dans sa mantille, retenue d’une main sur
la
gorge opulente, vint de Béziers au temps des dragonnades. Parmi ses a
5080
agonnades. Parmi ses ancêtres : Mirman, défenseur
de
la foi huguenote ; et plus haut des seigneurs dont certains furent ca
5081
nnades. Parmi ses ancêtres : Mirman, défenseur de
la
foi huguenote ; et plus haut des seigneurs dont certains furent catha
5082
nt cathares, Miramon, Cabrol et Vestric… Portrait
d’
un général de la Garde prussienne. Souvenirs des tantes de Dresde et d
5083
éral de la Garde prussienne. Souvenirs des tantes
de
Dresde et de Bavière… On se trompe en croyant qu’un voyageur, à longu
5084
rde prussienne. Souvenirs des tantes de Dresde et
de
Bavière… On se trompe en croyant qu’un voyageur, à longueur de chemin
5085
n se trompe en croyant qu’un voyageur, à longueur
de
chemin, perd ses ancêtres : c’est eux parfois qu’il s’en va visiter,
5086
parfois qu’il s’en va visiter, quand il parcourt
le
globe et vit chez l’étranger. Pourtant il s’interroge : comment l’eus
5087
a visiter, quand il parcourt le globe et vit chez
l’
étranger. Pourtant il s’interroge : comment l’eussent-ils reçu, gens d
5088
hez l’étranger. Pourtant il s’interroge : comment
l’
eussent-ils reçu, gens de leur terre, lui le nomade ? Qu’y a-t-il enco
5089
il s’interroge : comment l’eussent-ils reçu, gens
de
leur terre, lui le nomade ? Qu’y a-t-il encore entre eux et lui ? Peu
5090
mment l’eussent-ils reçu, gens de leur terre, lui
le
nomade ? Qu’y a-t-il encore entre eux et lui ? Peu de chose, ou rien
5091
ncore entre eux et lui ? Peu de chose, ou rien si
l’
on veut. Rien d’autre qu’un pouvoir sans doute fictif, et que peut-êtr
5092
et lui ? Peu de chose, ou rien si l’on veut. Rien
d’
autre qu’un pouvoir sans doute fictif, et que peut-être ils négligèren
5093
e fictif, et que peut-être ils négligèrent, celui
de
se sentir chez soi dans leurs légendes. Les forêts enchantées où chev
5094
celui de se sentir chez soi dans leurs légendes.
Les
forêts enchantées où chevauchait Lancelot, sous les ciels méditants d
5095
s forêts enchantées où chevauchait Lancelot, sous
les
ciels méditants de l’Ouest celtique ; le Midi sec et enfiévré des tro
5096
où chevauchait Lancelot, sous les ciels méditants
de
l’Ouest celtique ; le Midi sec et enfiévré des troubadours ; et de l’
5097
chevauchait Lancelot, sous les ciels méditants de
l’
Ouest celtique ; le Midi sec et enfiévré des troubadours ; et de l’aut
5098
t, sous les ciels méditants de l’Ouest celtique ;
le
Midi sec et enfiévré des troubadours ; et de l’autre côté de l’Europe
5099
ue ; le Midi sec et enfiévré des troubadours ; et
de
l’autre côté de l’Europe, aux marches slaves, ces burgs secrets de la
5100
et enfiévré des troubadours ; et de l’autre côté
de
l’Europe, aux marches slaves, ces burgs secrets de la Prusse-Oriental
5101
enfiévré des troubadours ; et de l’autre côté de
l’
Europe, aux marches slaves, ces burgs secrets de la Prusse-Orientale,
5102
e l’Europe, aux marches slaves, ces burgs secrets
de
la Prusse-Orientale, — tant de générations aux fortunes diverses ne m
5103
’Europe, aux marches slaves, ces burgs secrets de
la
Prusse-Orientale, — tant de générations aux fortunes diverses ne m’en
5104
qu’elles m’y lient ? Nous ne savons presque rien
de
l’hérédité. Mais quand on m’aura démontré que le sentiment d’obscure
5105
’elles m’y lient ? Nous ne savons presque rien de
l’
hérédité. Mais quand on m’aura démontré que le sentiment d’obscure rec
5106
de l’hérédité. Mais quand on m’aura démontré que
le
sentiment d’obscure reconnaissance qui m’a toujours saisi dans ces pr
5107
é. Mais quand on m’aura démontré que le sentiment
d’
obscure reconnaissance qui m’a toujours saisi dans ces provinces ne do
5108
mystères du sang, une idée chimérique ne cessera
de
me plaire : sur ces lieux où jadis des hommes dont je descends exercè
5109
s hommes dont je descends exercèrent leurs droits
de
seigneurs, je garde encore un droit de rêve, d’imaginaire intimité. V
5110
urs droits de seigneurs, je garde encore un droit
de
rêve, d’imaginaire intimité. Voilà un privilège qui ne peut gêner per
5111
s de seigneurs, je garde encore un droit de rêve,
d’
imaginaire intimité. Voilà un privilège qui ne peut gêner personne ! P
5112
ut gêner personne ! Pourquoi ceux qui vivent pour
l’
avenir et dans les voies de l’ambition jalouseraient-ils ceux qui parf
5113
! Pourquoi ceux qui vivent pour l’avenir et dans
les
voies de l’ambition jalouseraient-ils ceux qui parfois se plaisent à
5114
i ceux qui vivent pour l’avenir et dans les voies
de
l’ambition jalouseraient-ils ceux qui parfois se plaisent à remonter
5115
eux qui vivent pour l’avenir et dans les voies de
l’
ambition jalouseraient-ils ceux qui parfois se plaisent à remonter dan
5116
rfois se plaisent à remonter dans leur passé pour
l’
agrandir ? Leurs imaginations se valent.
5117
VI Ces retours sur
l’
histoire d’un pays, où je cherchais à mieux situer les miens, m’ont pr
5118
VI Ces retours sur l’histoire
d’
un pays, où je cherchais à mieux situer les miens, m’ont proposé chemi
5119
roposé chemin faisant quelques énigmes, et permis
d’
entrevoir quelques réponses. Voici pourtant un fait que je m’explique
5120
nt de culture, pour tant de livres lus, relus, et
de
bon choix, accumulés depuis des siècles dans les maisons publiques et
5121
t de bon choix, accumulés depuis des siècles dans
les
maisons publiques et privées ; pour tant de livres publiés, aussi, n’
5122
publiés, aussi, n’a rien produit qui marque dans
la
langue, à part la Bible d’Ostervald. Les ouvrages distingués ne manqu
5123
’a rien produit qui marque dans la langue, à part
la
Bible d’Ostervald. Les ouvrages distingués ne manquent pas. Mais les
5124
roduit qui marque dans la langue, à part la Bible
d’
Ostervald. Les ouvrages distingués ne manquent pas. Mais les seuls qui
5125
rque dans la langue, à part la Bible d’Ostervald.
Les
ouvrages distingués ne manquent pas. Mais les seuls qui aient franchi
5126
ld. Les ouvrages distingués ne manquent pas. Mais
les
seuls qui aient franchi nos limites sont ceux de nos théologiens, Ost
5127
les seuls qui aient franchi nos limites sont ceux
de
nos théologiens, Ostervald encore, puis Godet ; et le Droit des gens
5128
os théologiens, Ostervald encore, puis Godet ; et
le
Droit des gens de Vattel. Nous avons eu d’excellents historiens : l’a
5129
tervald encore, puis Godet ; et le Droit des gens
de
Vattel. Nous avons eu d’excellents historiens : l’auteur de la Chroni
5130
t ; et le Droit des gens de Vattel. Nous avons eu
d’
excellents historiens : l’auteur de la Chronique des Chanoines (apocry
5131
e Vattel. Nous avons eu d’excellents historiens :
l’
auteur de la Chronique des Chanoines (apocryphe), Chambrier pour l’anc
5132
Nous avons eu d’excellents historiens : l’auteur
de
la Chronique des Chanoines (apocryphe), Chambrier pour l’ancien régim
5133
us avons eu d’excellents historiens : l’auteur de
la
Chronique des Chanoines (apocryphe), Chambrier pour l’ancien régime,
5134
ronique des Chanoines (apocryphe), Chambrier pour
l’
ancien régime, Arthur Piaget pour la Révolution, Philippe Godet pour M
5135
hambrier pour l’ancien régime, Arthur Piaget pour
la
Révolution, Philippe Godet pour Madame de Charrière. Un moraliste au
5136
ste au style subtil et naturel, Félix Bovet. Mais
la
littérature au sens étroit du terme — le roman, le poème, l’essai, le
5137
et. Mais la littérature au sens étroit du terme —
le
roman, le poème, l’essai, le jeu d’idées — est restée chez nous pauvr
5138
a littérature au sens étroit du terme — le roman,
le
poème, l’essai, le jeu d’idées — est restée chez nous pauvre ou nulle
5139
ure au sens étroit du terme — le roman, le poème,
l’
essai, le jeu d’idées — est restée chez nous pauvre ou nulle. Nous n’a
5140
ns étroit du terme — le roman, le poème, l’essai,
le
jeu d’idées — est restée chez nous pauvre ou nulle. Nous n’avons rien
5141
it du terme — le roman, le poème, l’essai, le jeu
d’
idées — est restée chez nous pauvre ou nulle. Nous n’avons rien tiré d
5142
chez nous pauvre ou nulle. Nous n’avons rien tiré
de
grand ou d’émouvant d’une culture solide et variée, d’une nature cont
5143
uvre ou nulle. Nous n’avons rien tiré de grand ou
d’
émouvant d’une culture solide et variée, d’une nature contrastée de ch
5144
le. Nous n’avons rien tiré de grand ou d’émouvant
d’
une culture solide et variée, d’une nature contrastée de charme et de
5145
and ou d’émouvant d’une culture solide et variée,
d’
une nature contrastée de charme et de tristesse, ni même de la tension
5146
culture solide et variée, d’une nature contrastée
de
charme et de tristesse, ni même de la tension des contraintes morales
5147
e et variée, d’une nature contrastée de charme et
de
tristesse, ni même de la tension des contraintes morales, dont vécut
5148
ure contrastée de charme et de tristesse, ni même
de
la tension des contraintes morales, dont vécut le roman victorien. Fa
5149
contrastée de charme et de tristesse, ni même de
la
tension des contraintes morales, dont vécut le roman victorien. Faut-
5150
de la tension des contraintes morales, dont vécut
le
roman victorien. Faut-il penser que cette culture fut trop mêlée, cet
5151
isément tournées ? Je ne sais. Et tout cela, sauf
la
nature, est en train de changer rapidement. L’accent se gâte, la rhét
5152
uf la nature, est en train de changer rapidement.
L’
accent se gâte, la rhétorique n’est plus enseignée ni connue. L’histoi
5153
en train de changer rapidement. L’accent se gâte,
la
rhétorique n’est plus enseignée ni connue. L’histoire et la théologie
5154
te, la rhétorique n’est plus enseignée ni connue.
L’
histoire et la théologie fuient le discours, ignorent le style. Entend
5155
que n’est plus enseignée ni connue. L’histoire et
la
théologie fuient le discours, ignorent le style. Entendrons-nous un j
5156
gnée ni connue. L’histoire et la théologie fuient
le
discours, ignorent le style. Entendrons-nous un jour quelqu’un qui ch
5157
oire et la théologie fuient le discours, ignorent
le
style. Entendrons-nous un jour quelqu’un qui chante, ou crie, après d
5158
s ? J’ai vu percer quelques poètes à nos vitrines
de
libraires… Les Vaudois ont produit ou toléré Constant, Alexandre Vine
5159
rcer quelques poètes à nos vitrines de libraires…
Les
Vaudois ont produit ou toléré Constant, Alexandre Vinet, Ramuz ; les
5160
duit ou toléré Constant, Alexandre Vinet, Ramuz ;
les
Genevois Calvin, de Bèze, Rousseau, Madame de Staël, Töpffer, Amiel…
5161
nt, Alexandre Vinet, Ramuz ; les Genevois Calvin,
de
Bèze, Rousseau, Madame de Staël, Töpffer, Amiel… Je ne parle pas des
5162
e cite que ceux dont un homme cultivé, dans toute
l’
Europe, connaît au moins le nom. Nous n’avons rien de ce rang-là. Les
5163
me cultivé, dans toute l’Europe, connaît au moins
le
nom. Nous n’avons rien de ce rang-là. Les visiteurs de Lausanne, de C
5164
urope, connaît au moins le nom. Nous n’avons rien
de
ce rang-là. Les visiteurs de Lausanne, de Coppet, des coteaux de Colo
5165
au moins le nom. Nous n’avons rien de ce rang-là.
Les
visiteurs de Lausanne, de Coppet, des coteaux de Cologny ou de Montre
5166
m. Nous n’avons rien de ce rang-là. Les visiteurs
de
Lausanne, de Coppet, des coteaux de Cologny ou de Montreux, furent éc
5167
ns rien de ce rang-là. Les visiteurs de Lausanne,
de
Coppet, des coteaux de Cologny ou de Montreux, furent éclatants et pa
5168
Les visiteurs de Lausanne, de Coppet, des coteaux
de
Cologny ou de Montreux, furent éclatants et parfois scandaleux. Mais
5169
de Lausanne, de Coppet, des coteaux de Cologny ou
de
Montreux, furent éclatants et parfois scandaleux. Mais la « petite hi
5170
eux, furent éclatants et parfois scandaleux. Mais
la
« petite histoire » littéraire se borne à mentionner chez nous des re
5171
e se borne à mentionner chez nous des rendez-vous
de
voyageurs discrets, inaperçus et bientôt disparus. Un seul s’est fait
5172
est fait remarquer, ce fut le premier en date, et
les
gamins de Môtiers lui jetèrent des cailloux. Avertis par ce précédent
5173
marquer, ce fut le premier en date, et les gamins
de
Môtiers lui jetèrent des cailloux. Avertis par ce précédent, dont le
5174
rent des cailloux. Avertis par ce précédent, dont
le
bruit s’élargit à l’Europe, les successeurs de l’Arménien ne sont ven
5175
ertis par ce précédent, dont le bruit s’élargit à
l’
Europe, les successeurs de l’Arménien ne sont venus chez nous qu’à pas
5176
ce précédent, dont le bruit s’élargit à l’Europe,
les
successeurs de l’Arménien ne sont venus chez nous qu’à pas feutrés. C
5177
nt le bruit s’élargit à l’Europe, les successeurs
de
l’Arménien ne sont venus chez nous qu’à pas feutrés. Certains d’aille
5178
le bruit s’élargit à l’Europe, les successeurs de
l’
Arménien ne sont venus chez nous qu’à pas feutrés. Certains d’ailleurs
5179
ous qu’à pas feutrés. Certains d’ailleurs avaient
de
bonnes raisons de ne point publier leur séjour. Benjamin Constant s’e
5180
és. Certains d’ailleurs avaient de bonnes raisons
de
ne point publier leur séjour. Benjamin Constant s’enfermait dans le m
5181
r leur séjour. Benjamin Constant s’enfermait dans
le
manoir de Madame de Charrière, pour échapper aux cousines de Lausanne
5182
our. Benjamin Constant s’enfermait dans le manoir
de
Madame de Charrière, pour échapper aux cousines de Lausanne et à son
5183
e Madame de Charrière, pour échapper aux cousines
de
Lausanne et à son mariage en Allemagne. Chateaubriand, qui se souvena
5184
magne. Chateaubriand, qui se souvenait sans doute
d’
avoir été jadis, pour la police française, un dénommé « Lassagne, Neuc
5185
i se souvenait sans doute d’avoir été jadis, pour
la
police française, un dénommé « Lassagne, Neuchâtelois », vint s’enfer
5186
gne, Neuchâtelois », vint s’enfermer au lendemain
de
sa chute « dans une cabane au bord du lac ». Brève retraite, dont une
5187
c ». Brève retraite, dont une phrase des Mémoires
d’
outre-tombe lui suffit pour décrire l’ennui : « Un maigre chat noir, d
5188
es Mémoires d’outre-tombe lui suffit pour décrire
l’
ennui : « Un maigre chat noir, demi-sauvage, qui pêchait de petits poi
5189
« Un maigre chat noir, demi-sauvage, qui pêchait
de
petits poissons en plongeant sa patte dans un grand seau rempli de l’
5190
s en plongeant sa patte dans un grand seau rempli
de
l’eau du lac, était toute ma distraction. » Au même endroit de la vil
5191
n plongeant sa patte dans un grand seau rempli de
l’
eau du lac, était toute ma distraction. » Au même endroit de la ville,
5192
ac, était toute ma distraction. » Au même endroit
de
la ville, neuf ans plus tard, Balzac rencontrera cette inconnue qui v
5193
était toute ma distraction. » Au même endroit de
la
ville, neuf ans plus tard, Balzac rencontrera cette inconnue qui vien
5194
qui vient du fond des steppes vers son génie. Et
l’
on dit qu’Andersen écrivit quelques-uns de ses plus beaux contes penda
5195
nie. Et l’on dit qu’Andersen écrivit quelques-uns
de
ses plus beaux contes pendant le séjour qu’il fit au Locle, dans la n
5196
vit quelques-uns de ses plus beaux contes pendant
le
séjour qu’il fit au Locle, dans la neige… Neuchâtel semble se prêter
5197
contes pendant le séjour qu’il fit au Locle, dans
la
neige… Neuchâtel semble se prêter à ces parenthèses du sort, à ces co
5198
hèses du sort, à ces conjonctions clandestines, à
l’
incognito de la gloire. Je voudrais qu’on y élève un monument dédié à
5199
t, à ces conjonctions clandestines, à l’incognito
de
la gloire. Je voudrais qu’on y élève un monument dédié à l’Illustre I
5200
à ces conjonctions clandestines, à l’incognito de
la
gloire. Je voudrais qu’on y élève un monument dédié à l’Illustre Inco
5201
re. Je voudrais qu’on y élève un monument dédié à
l’
Illustre Inconnu. Il serait en forme de banc. Qui sait quel Balzac de
5202
Il serait en forme de banc. Qui sait quel Balzac
de
l’avenir, quelle Étrangère venue du bout du monde, ne seraient point
5203
serait en forme de banc. Qui sait quel Balzac de
l’
avenir, quelle Étrangère venue du bout du monde, ne seraient point ten
5204
venue du bout du monde, ne seraient point tentés
de
s’y asseoir un jour, pour quelques heures, en face du lac ? Et certes
5205
s, en face du lac ? Et certes, j’ai pensé à Gide,
le
plus fidèle de tous nos hôtes, en écrivant ces phrases sur le banc. J
5206
ac ? Et certes, j’ai pensé à Gide, le plus fidèle
de
tous nos hôtes, en écrivant ces phrases sur le banc. Je viens de repr
5207
le de tous nos hôtes, en écrivant ces phrases sur
le
banc. Je viens de reprendre son Journal, pour vérifier s’il y parlait
5208
prendre son Journal, pour vérifier s’il y parlait
de
Neuchâtel. Et je tombe sur ce court passage, à la date de 1913 : « Co
5209
de Neuchâtel. Et je tombe sur ce court passage, à
la
date de 1913 : « Combien j’aime ce lac tranquille aux rives basses, p
5210
âtel. Et je tombe sur ce court passage, à la date
de
1913 : « Combien j’aime ce lac tranquille aux rives basses, peuplé de
5211
j’aime ce lac tranquille aux rives basses, peuplé
de
mouettes, où mon regard ni ma pensée ne se heurte à rien d’accidentel
5212
s, où mon regard ni ma pensée ne se heurte à rien
d’
accidentel ou d’étranger. Comment, moi si frileux, n’éprouvai-je ce ma
5213
ni ma pensée ne se heurte à rien d’accidentel ou
d’
étranger. Comment, moi si frileux, n’éprouvai-je ce matin que bien-êtr
5214
à peine au-dessus du gel, n’ayant devant moi que
de
l’eau et de la brume ? J’habiterais ici volontiers. » Il a fallu le p
5215
peine au-dessus du gel, n’ayant devant moi que de
l’
eau et de la brume ? J’habiterais ici volontiers. » Il a fallu le prix
5216
dessus du gel, n’ayant devant moi que de l’eau et
de
la brume ? J’habiterais ici volontiers. » Il a fallu le prix Nobel po
5217
sus du gel, n’ayant devant moi que de l’eau et de
la
brume ? J’habiterais ici volontiers. » Il a fallu le prix Nobel pour
5218
brume ? J’habiterais ici volontiers. » Il a fallu
le
prix Nobel pour qu’on s’aperçût un beau jour qu’il était parmi nous,
5219
aché dans sa pèlerine. Une semaine plus tôt, chez
les
Heyd, nous avions joué au jeu des questions et réponses. L’un écrit t
5220
me temps trois réponses. Puis on lit à haute voix
les
deux papiers. Jeu de hasard, ou de télépathie. J’avais écrit, dernièr
5221
s. Puis on lit à haute voix les deux papiers. Jeu
de
hasard, ou de télépathie. J’avais écrit, dernière question : — Qu’est
5222
à haute voix les deux papiers. Jeu de hasard, ou
de
télépathie. J’avais écrit, dernière question : — Qu’est-ce que le sty
5223
’avais écrit, dernière question : — Qu’est-ce que
le
style ? Catherine, la fille de Gide, lut sa dernière réponse : — L’or
5224
question : — Qu’est-ce que le style ? Catherine,
la
fille de Gide, lut sa dernière réponse : — L’originalité de mon père.
5225
: — Qu’est-ce que le style ? Catherine, la fille
de
Gide, lut sa dernière réponse : — L’originalité de mon père. Gide s’é
5226
ne, la fille de Gide, lut sa dernière réponse : —
L’
originalité de mon père. Gide s’éclaircit la voix pour observer que le
5227
e Gide, lut sa dernière réponse : — L’originalité
de
mon père. Gide s’éclaircit la voix pour observer que le jeu devenait
5228
e : — L’originalité de mon père. Gide s’éclaircit
la
voix pour observer que le jeu devenait bien personnel, et proposa des
5229
père. Gide s’éclaircit la voix pour observer que
le
jeu devenait bien personnel, et proposa des bouts-rimés.
5230
ien j’aimai ce lac aux rives glauques ! sans rien
d’
alpestre, et dont les eaux, comme celles d’un marécage, longtemps se m
5231
ux rives glauques ! sans rien d’alpestre, et dont
les
eaux, comme celles d’un marécage, longtemps se mêlent à la terre et f
5232
s rien d’alpestre, et dont les eaux, comme celles
d’
un marécage, longtemps se mêlent à la terre et filtrent entre les rose
5233
comme celles d’un marécage, longtemps se mêlent à
la
terre et filtrent entre les roseaux. » (L’Immoraliste.) Près de ces e
5234
longtemps se mêlent à la terre et filtrent entre
les
roseaux. » (L’Immoraliste.) Près de ces eaux, ma vie sentimentale est
5235
lent à la terre et filtrent entre les roseaux. » (
L’
Immoraliste.) Près de ces eaux, ma vie sentimentale est née. Et depuis
5236
Et depuis lors elle est restée lacustre. « Odeur
de
l’eau — pour toute la vie », écrivait un Paysan du Danube, et vingt a
5237
depuis lors elle est restée lacustre. « Odeur de
l’
eau — pour toute la vie », écrivait un Paysan du Danube, et vingt ans
5238
st restée lacustre. « Odeur de l’eau — pour toute
la
vie », écrivait un Paysan du Danube, et vingt ans ne l’ont pas dément
5239
», écrivait un Paysan du Danube, et vingt ans ne
l’
ont pas démenti. Je dénombre mes lacs et ne puis retrouver que du bonh
5240
nheur à ces souvenirs. Non qu’ils me parlent tous
de
jours heureux, mais la mémoire des plus amers ou des plus seuls a gar
5241
Non qu’ils me parlent tous de jours heureux, mais
la
mémoire des plus amers ou des plus seuls a gardé le charme des eaux.
5242
mémoire des plus amers ou des plus seuls a gardé
le
charme des eaux. Faut-il penser que la souffrance au bord d’un lac n’
5243
ls a gardé le charme des eaux. Faut-il penser que
la
souffrance au bord d’un lac n’est jamais sans quelque douceur ? Cherc
5244
lac n’est jamais sans quelque douceur ? Cherchant
d’
où vient cet agrément, et pourquoi dans le monde lacustre on ressent l
5245
erchant d’où vient cet agrément, et pourquoi dans
le
monde lacustre on ressent la vie mieux qu’ailleurs, plus savoureuse e
5246
nt, et pourquoi dans le monde lacustre on ressent
la
vie mieux qu’ailleurs, plus savoureuse et plus présente, je me dis :
5247
un vrai lac est un univers clos, si grands soient
les
miroirs qu’il offre aux ciels changeants, et si profonds ses lointain
5248
ux ciels changeants, et si profonds ses lointains
de
lumière. La pente derrière moi, l’horizon des collines, sont le cadre
5249
ngeants, et si profonds ses lointains de lumière.
La
pente derrière moi, l’horizon des collines, sont le cadre qui donne a
5250
ses lointains de lumière. La pente derrière moi,
l’
horizon des collines, sont le cadre qui donne au tableau sa significat
5251
pente derrière moi, l’horizon des collines, sont
le
cadre qui donne au tableau sa signification privilégiée. Ici le cœur
5252
onne au tableau sa signification privilégiée. Ici
le
cœur et l’âme ont leur théâtre pur, où tout est sens, écho, dialogue
5253
leau sa signification privilégiée. Ici le cœur et
l’
âme ont leur théâtre pur, où tout est sens, écho, dialogue à l’infini.
5254
r théâtre pur, où tout est sens, écho, dialogue à
l’
infini. Ici la joie trouve un espace où se déployer sans se perdre, la
5255
où tout est sens, écho, dialogue à l’infini. Ici
la
joie trouve un espace où se déployer sans se perdre, la méditation de
5256
e trouve un espace où se déployer sans se perdre,
la
méditation des ciels bas, la passion des orages complets, et la peine
5257
oyer sans se perdre, la méditation des ciels bas,
la
passion des orages complets, et la peine une baie secrète, où les cri
5258
des ciels bas, la passion des orages complets, et
la
peine une baie secrète, où les cris des oiseaux dans la brume s’occup
5259
orages complets, et la peine une baie secrète, où
les
cris des oiseaux dans la brume s’occupent d’une vie bien différente…
5260
ne une baie secrète, où les cris des oiseaux dans
la
brume s’occupent d’une vie bien différente… Enfin la variété des obje
5261
où les cris des oiseaux dans la brume s’occupent
d’
une vie bien différente… Enfin la variété des objets, des lumières, de
5262
brume s’occupent d’une vie bien différente… Enfin
la
variété des objets, des lumières, des premiers plans et des éloigneme
5263
satisfait comme nul autre paysage ce goût profond
de
composer, de contraster, de voiler puis de découvrir, de plonger à l’
5264
me nul autre paysage ce goût profond de composer,
de
contraster, de voiler puis de découvrir, de plonger à l’abandonnée, d
5265
ysage ce goût profond de composer, de contraster,
de
voiler puis de découvrir, de plonger à l’abandonnée, de s’écarter, de
5266
rofond de composer, de contraster, de voiler puis
de
découvrir, de plonger à l’abandonnée, de s’écarter, de revenir, de bo
5267
oser, de contraster, de voiler puis de découvrir,
de
plonger à l’abandonnée, de s’écarter, de revenir, de boire des yeux,
5268
raster, de voiler puis de découvrir, de plonger à
l’
abandonnée, de s’écarter, de revenir, de boire des yeux, de comparer,
5269
ler puis de découvrir, de plonger à l’abandonnée,
de
s’écarter, de revenir, de boire des yeux, de comparer, de contempler
5270
couvrir, de plonger à l’abandonnée, de s’écarter,
de
revenir, de boire des yeux, de comparer, de contempler sans fin, où l
5271
plonger à l’abandonnée, de s’écarter, de revenir,
de
boire des yeux, de comparer, de contempler sans fin, où l’on a reconn
5272
née, de s’écarter, de revenir, de boire des yeux,
de
comparer, de contempler sans fin, où l’on a reconnu l’amour, comme il
5273
rter, de revenir, de boire des yeux, de comparer,
de
contempler sans fin, où l’on a reconnu l’amour, comme il aime à s’y r
5274
des yeux, de comparer, de contempler sans fin, où
l’
on a reconnu l’amour, comme il aime à s’y retrouver. Je nage à Baveno
5275
mparer, de contempler sans fin, où l’on a reconnu
l’
amour, comme il aime à s’y retrouver. Je nage à Baveno dans l’eau tièd
5276
me il aime à s’y retrouver. Je nage à Baveno dans
l’
eau tiède et dorée, c’est la fin de l’après-midi, devant la proue de l
5277
Je nage à Baveno dans l’eau tiède et dorée, c’est
la
fin de l’après-midi, devant la proue de l’Isola Bella, vaisseau de rê
5278
à Baveno dans l’eau tiède et dorée, c’est la fin
de
l’après-midi, devant la proue de l’Isola Bella, vaisseau de rêve aux
5279
Baveno dans l’eau tiède et dorée, c’est la fin de
l’
après-midi, devant la proue de l’Isola Bella, vaisseau de rêve aux nom
5280
de et dorée, c’est la fin de l’après-midi, devant
la
proue de l’Isola Bella, vaisseau de rêve aux nombreux ponts chargés d
5281
ée, c’est la fin de l’après-midi, devant la proue
de
l’Isola Bella, vaisseau de rêve aux nombreux ponts chargés de dieux,
5282
c’est la fin de l’après-midi, devant la proue de
l’
Isola Bella, vaisseau de rêve aux nombreux ponts chargés de dieux, pas
5283
-midi, devant la proue de l’Isola Bella, vaisseau
de
rêve aux nombreux ponts chargés de dieux, passagers immobiles, un bra
5284
ella, vaisseau de rêve aux nombreux ponts chargés
de
dieux, passagers immobiles, un bras levé… J’habite au lac de Garde un
5285
assagers immobiles, un bras levé… J’habite au lac
de
Garde un palais délabré, au-dessus de jardins en terrasses pleins de
5286
bite au lac de Garde un palais délabré, au-dessus
de
jardins en terrasses pleins de lucioles à la nuit, quand les violoneu
5287
délabré, au-dessus de jardins en terrasses pleins
de
lucioles à la nuit, quand les violoneux du village viennent donner la
5288
ssus de jardins en terrasses pleins de lucioles à
la
nuit, quand les violoneux du village viennent donner la sérénade. Et
5289
en terrasses pleins de lucioles à la nuit, quand
les
violoneux du village viennent donner la sérénade. Et nous montons à c
5290
t, quand les violoneux du village viennent donner
la
sérénade. Et nous montons à ce balcon sur l’eau, accroché aux très ha
5291
nner la sérénade. Et nous montons à ce balcon sur
l’
eau, accroché aux très hautes murailles qui sans raison, grandiloquent
5292
railles qui sans raison, grandiloquentes, bordent
la
rive. (Elles furent élevées, dit-on, par un ministre fou.) Cyprès au
5293
brusque sauvagerie des hautes pentes, échevelées
de
châtaigniers. Contre les flancs du noir Monte Baldo coiffé de neige,
5294
hautes pentes, échevelées de châtaigniers. Contre
les
flancs du noir Monte Baldo coiffé de neige, sur l’autre rive, un orag
5295
ers. Contre les flancs du noir Monte Baldo coiffé
de
neige, sur l’autre rive, un orage s’illumine par moments, et dans l’é
5296
re rive, un orage s’illumine par moments, et dans
l’
échappée vers la plaine, où l’eau rejoint presque le ciel, le petit ph
5297
e s’illumine par moments, et dans l’échappée vers
la
plaine, où l’eau rejoint presque le ciel, le petit phare de la baie d
5298
ar moments, et dans l’échappée vers la plaine, où
l’
eau rejoint presque le ciel, le petit phare de la baie de Sirmione… Su
5299
échappée vers la plaine, où l’eau rejoint presque
le
ciel, le petit phare de la baie de Sirmione… Sur les lacs sinueux de
5300
vers la plaine, où l’eau rejoint presque le ciel,
le
petit phare de la baie de Sirmione… Sur les lacs sinueux de la Prusse
5301
où l’eau rejoint presque le ciel, le petit phare
de
la baie de Sirmione… Sur les lacs sinueux de la Prusse-Orientale, nou
5302
l’eau rejoint presque le ciel, le petit phare de
la
baie de Sirmione… Sur les lacs sinueux de la Prusse-Orientale, nous a
5303
ciel, le petit phare de la baie de Sirmione… Sur
les
lacs sinueux de la Prusse-Orientale, nous allions ramer vers minuit,
5304
hare de la baie de Sirmione… Sur les lacs sinueux
de
la Prusse-Orientale, nous allions ramer vers minuit, heure où le crép
5305
e de la baie de Sirmione… Sur les lacs sinueux de
la
Prusse-Orientale, nous allions ramer vers minuit, heure où le crépusc
5306
ientale, nous allions ramer vers minuit, heure où
le
crépuscule enfin se meurt dans l’aube, à l’horizon des landes et de l
5307
inuit, heure où le crépuscule enfin se meurt dans
l’
aube, à l’horizon des landes et de la mer… Tyrol, et ce lac sombre au
5308
re où le crépuscule enfin se meurt dans l’aube, à
l’
horizon des landes et de la mer… Tyrol, et ce lac sombre au fond de la
5309
n se meurt dans l’aube, à l’horizon des landes et
de
la mer… Tyrol, et ce lac sombre au fond de la vallée, où tournoyaient
5310
e meurt dans l’aube, à l’horizon des landes et de
la
mer… Tyrol, et ce lac sombre au fond de la vallée, où tournoyaient de
5311
des et de la mer… Tyrol, et ce lac sombre au fond
de
la vallée, où tournoyaient des voiles inclinées… Balaton, lac de plai
5312
et de la mer… Tyrol, et ce lac sombre au fond de
la
vallée, où tournoyaient des voiles inclinées… Balaton, lac de plaine
5313
ù tournoyaient des voiles inclinées… Balaton, lac
de
plaine aux eaux fades, environné de collines pointues et de valses au
5314
Balaton, lac de plaine aux eaux fades, environné
de
collines pointues et de valses aux jardins publics — là j’étais seul…
5315
aux eaux fades, environné de collines pointues et
de
valses aux jardins publics — là j’étais seul… Rade de Genève par un b
5316
alses aux jardins publics — là j’étais seul… Rade
de
Genève par un beau temps cruel, qui faisait fête à des adieux… Petits
5317
es adieux… Petits déjeuners suisses sur un balcon
d’
hôtel à Vevey, à Montreux, patries du roman russe. Et le bleu de l’air
5318
l à Vevey, à Montreux, patries du roman russe. Et
le
bleu de l’air matinal, l’argent transparent des montagnes, le scintil
5319
y, à Montreux, patries du roman russe. Et le bleu
de
l’air matinal, l’argent transparent des montagnes, le scintillement d
5320
à Montreux, patries du roman russe. Et le bleu de
l’
air matinal, l’argent transparent des montagnes, le scintillement des
5321
ries du roman russe. Et le bleu de l’air matinal,
l’
argent transparent des montagnes, le scintillement des eaux sous la br
5322
’air matinal, l’argent transparent des montagnes,
le
scintillement des eaux sous la brume légère, tout était si pur et si
5323
ent des montagnes, le scintillement des eaux sous
la
brume légère, tout était si pur et si frais qu’il semblait que le mon
5324
tout était si pur et si frais qu’il semblait que
le
monde venait de s’éveiller, luisant et neuf, de la première nuit… Et
5325
e le monde venait de s’éveiller, luisant et neuf,
de
la première nuit… Et ces deux grands étés américains, dans les demeur
5326
re nuit… Et ces deux grands étés américains, dans
les
demeures trop vastes de Lake George, nommé jadis lac du Saint-Sacreme
5327
ds étés américains, dans les demeures trop vastes
de
Lake George, nommé jadis lac du Saint-Sacrement « pour la pureté lust
5328
George, nommé jadis lac du Saint-Sacrement « pour
la
pureté lustrale de ses eaux »… Il me rappelait un peu de tous mes aut
5329
lac du Saint-Sacrement « pour la pureté lustrale
de
ses eaux »… Il me rappelait un peu de tous mes autres lacs, mais il é
5330
tous mes autres lacs, mais il était surtout celui
d’
Œil de faucon et du dernier des Mohicans de mon enfance. Je le trouvai
5331
es autres lacs, mais il était surtout celui d’Œil
de
faucon et du dernier des Mohicans de mon enfance. Je le trouvais bien
5332
celui d’Œil de faucon et du dernier des Mohicans
de
mon enfance. Je le trouvais bien beau. Pourquoi l’ai-je quitté ? …Et
5333
con et du dernier des Mohicans de mon enfance. Je
le
trouvais bien beau. Pourquoi l’ai-je quitté ? …Et nous n’irons jamais
5334
e mon enfance. Je le trouvais bien beau. Pourquoi
l’
ai-je quitté ? …Et nous n’irons jamais au lac d’Amatitlán, au pied du
5335
i l’ai-je quitté ? …Et nous n’irons jamais au lac
d’
Amatitlán, au pied du fabuleux volcan de Sant’Anna, mais je l’emporte
5336
is au lac d’Amatitlán, au pied du fabuleux volcan
de
Sant’Anna, mais je l’emporte avec les autres sans remords, s’il est v
5337
au pied du fabuleux volcan de Sant’Anna, mais je
l’
emporte avec les autres sans remords, s’il est vrai que d’aucun je n’a
5338
uleux volcan de Sant’Anna, mais je l’emporte avec
les
autres sans remords, s’il est vrai que d’aucun je n’ai su tant d’hist
5339
e avec les autres sans remords, s’il est vrai que
d’
aucun je n’ai su tant d’histoires et qu’il détient certains de mes sec
5340
emords, s’il est vrai que d’aucun je n’ai su tant
d’
histoires et qu’il détient certains de mes secrets. Je dénombre mes la
5341
’ai su tant d’histoires et qu’il détient certains
de
mes secrets. Je dénombre mes lacs, et la mémoire encore investit du c
5342
certains de mes secrets. Je dénombre mes lacs, et
la
mémoire encore investit du charme des eaux l’adolescence même, aux ch
5343
et la mémoire encore investit du charme des eaux
l’
adolescence même, aux chagrins taciturnes. Souffrir auprès d’un lac n’
5344
ce même, aux chagrins taciturnes. Souffrir auprès
d’
un lac n’est jamais sans douceur. Je suis sur la jetée, près du hangar
5345
s d’un lac n’est jamais sans douceur. Je suis sur
la
jetée, près du hangar des trams, et l’eau n’est pas plus noire que mo
5346
e suis sur la jetée, près du hangar des trams, et
l’
eau n’est pas plus noire que mon cœur humilié. Dans ce « local » empua
5347
que mon cœur humilié. Dans ce « local » empuanti
de
tabac de pipes et de bière renversée, je viens de subir l’épreuve d’i
5348
cœur humilié. Dans ce « local » empuanti de tabac
de
pipes et de bière renversée, je viens de subir l’épreuve d’initiation
5349
. Dans ce « local » empuanti de tabac de pipes et
de
bière renversée, je viens de subir l’épreuve d’initiation d’une socié
5350
de pipes et de bière renversée, je viens de subir
l’
épreuve d’initiation d’une société de collégiens. J’ai refusé de racon
5351
t de bière renversée, je viens de subir l’épreuve
d’
initiation d’une société de collégiens. J’ai refusé de raconter devant
5352
nversée, je viens de subir l’épreuve d’initiation
d’
une société de collégiens. J’ai refusé de raconter devant tous, debout
5353
ens de subir l’épreuve d’initiation d’une société
de
collégiens. J’ai refusé de raconter devant tous, debout sur un tonnea
5354
itiation d’une société de collégiens. J’ai refusé
de
raconter devant tous, debout sur un tonneau comme le veut la coutume,
5355
raconter devant tous, debout sur un tonneau comme
le
veut la coutume, l’histoire de mes Premières Amours. On m’a conspué.
5356
devant tous, debout sur un tonneau comme le veut
la
coutume, l’histoire de mes Premières Amours. On m’a conspué. J’ai 16
5357
, debout sur un tonneau comme le veut la coutume,
l’
histoire de mes Premières Amours. On m’a conspué. J’ai 16 ans. C’est h
5358
r un tonneau comme le veut la coutume, l’histoire
de
mes Premières Amours. On m’a conspué. J’ai 16 ans. C’est horrible. Mo
5359
rrible. Mon seul amour doit rester mon secret. Je
la
guette à midi, quand elle descend dans le cortège des jeunes filles s
5360
ret. Je la guette à midi, quand elle descend dans
le
cortège des jeunes filles sortant de l’école des Terreaux. Nous, les
5361
descend dans le cortège des jeunes filles sortant
de
l’école des Terreaux. Nous, les garçons, tenons notre « colloque » su
5362
cend dans le cortège des jeunes filles sortant de
l’
école des Terreaux. Nous, les garçons, tenons notre « colloque » sur l
5363
nes filles sortant de l’école des Terreaux. Nous,
les
garçons, tenons notre « colloque » sur la place de l’Hôtel-de-Ville.
5364
Nous, les garçons, tenons notre « colloque » sur
la
place de l’Hôtel-de-Ville. Nous parlons entre nous d’un air grave, d’
5365
s garçons, tenons notre « colloque » sur la place
de
l’Hôtel-de-Ville. Nous parlons entre nous d’un air grave, d’un air de
5366
arçons, tenons notre « colloque » sur la place de
l’
Hôtel-de-Ville. Nous parlons entre nous d’un air grave, d’un air de ne
5367
lace de l’Hôtel-de-Ville. Nous parlons entre nous
d’
un air grave, d’un air de ne pas regarder les filles qui passent, mais
5368
de-Ville. Nous parlons entre nous d’un air grave,
d’
un air de ne pas regarder les filles qui passent, mais je la vois veni
5369
Nous parlons entre nous d’un air grave, d’un air
de
ne pas regarder les filles qui passent, mais je la vois venir de loin
5370
nous d’un air grave, d’un air de ne pas regarder
les
filles qui passent, mais je la vois venir de loin. Elle porte un gran
5371
e ne pas regarder les filles qui passent, mais je
la
vois venir de loin. Elle porte un grand chapeau flottant d’un rose so
5372
nir de loin. Elle porte un grand chapeau flottant
d’
un rose sombre. Tout la distingue infiniment du troupeau bavardant de
5373
un grand chapeau flottant d’un rose sombre. Tout
la
distingue infiniment du troupeau bavardant de ses compagnes. Si je re
5374
out la distingue infiniment du troupeau bavardant
de
ses compagnes. Si je rencontrais ses yeux, que deviendrais-je, et si
5375
-je, et si elle devinait mon sentiment ? Pourtant
la
semaine prochaine, l’épreuve recommencera. Odeur de l’eau qui dort, p
5376
it mon sentiment ? Pourtant la semaine prochaine,
l’
épreuve recommencera. Odeur de l’eau qui dort, pénétrante, amicale. Un
5377
semaine prochaine, l’épreuve recommencera. Odeur
de
l’eau qui dort, pénétrante, amicale. Un poisson saute et ride un mome
5378
maine prochaine, l’épreuve recommencera. Odeur de
l’
eau qui dort, pénétrante, amicale. Un poisson saute et ride un moment
5379
ante, amicale. Un poisson saute et ride un moment
le
miroir… Non, je ne vais pas me suicider. Je mentirai ! Je suis assis
5380
entirai ! Je suis assis sur un banc près du port,
la
promenade est déserte et mon cœur assoiffé. Personne ne passe jamais,
5381
on cœur assoiffé. Personne ne passe jamais, voilà
la
vie ! Mais si ce soir une femme venait à moi comme le miracle que j’a
5382
ie ! Mais si ce soir une femme venait à moi comme
le
miracle que j’attends, je lui dirais : c’est un malentendu. Je suis d
5383
passez Madame… J’ai 19 ans. Je n’aime encore que
la
nature, et ma solitude avec elle. Et vraiment, à cet âge, elle me l’a
5384
litude avec elle. Et vraiment, à cet âge, elle me
l’
a bien rendu. (Quand on revient la voir à deux, plus tard, aux mêmes l
5385
et âge, elle me l’a bien rendu. (Quand on revient
la
voir à deux, plus tard, aux mêmes lieux, elle se réserve… Elle ne ser
5386
out à fait comme avant.) Ce soir, elle est encore
d’
une présence envoûtante. Le soleil s’est caché derrière le Trou de Bou
5387
soir, elle est encore d’une présence envoûtante.
Le
soleil s’est caché derrière le Trou de Bourgogne. La grande rougeur d
5388
ésence envoûtante. Le soleil s’est caché derrière
le
Trou de Bourgogne. La grande rougeur du lac s’est retirée, de vague e
5389
nvoûtante. Le soleil s’est caché derrière le Trou
de
Bourgogne. La grande rougeur du lac s’est retirée, de vague en vague
5390
soleil s’est caché derrière le Trou de Bourgogne.
La
grande rougeur du lac s’est retirée, de vague en vague vers l’autre r
5391
ourgogne. La grande rougeur du lac s’est retirée,
de
vague en vague vers l’autre rive. Elle caresse en passant l’épaule de
5392
vague vers l’autre rive. Elle caresse en passant
l’
épaule des collines, elle monte, elle embrase longtemps d’une sereine
5393
des collines, elle monte, elle embrase longtemps
d’
une sereine incandescence les Alpes déployées au fond du ciel. Sommets
5394
lle embrase longtemps d’une sereine incandescence
les
Alpes déployées au fond du ciel. Sommets d’où l’on voit l’Italie… Et
5395
ence les Alpes déployées au fond du ciel. Sommets
d’
où l’on voit l’Italie… Et le rêve s’éteint, guirlande morte, un peu de
5396
les Alpes déployées au fond du ciel. Sommets d’où
l’
on voit l’Italie… Et le rêve s’éteint, guirlande morte, un peu de temp
5397
déployées au fond du ciel. Sommets d’où l’on voit
l’
Italie… Et le rêve s’éteint, guirlande morte, un peu de temps diaphane
5398
fond du ciel. Sommets d’où l’on voit l’Italie… Et
le
rêve s’éteint, guirlande morte, un peu de temps diaphane à l’horizon.
5399
eint, guirlande morte, un peu de temps diaphane à
l’
horizon. Paysage emphatique et sombre, tout cerné de prodiges sévères,
5400
horizon. Paysage emphatique et sombre, tout cerné
de
prodiges sévères, et l’œil ne s’en évade au bas du ciel — vers l’oues
5401
que et sombre, tout cerné de prodiges sévères, et
l’
œil ne s’en évade au bas du ciel — vers l’ouest — que par cet or loint
5402
res, et l’œil ne s’en évade au bas du ciel — vers
l’
ouest — que par cet or lointain que l’eau n’a point doublé, déjà prise
5403
ciel — vers l’ouest — que par cet or lointain que
l’
eau n’a point doublé, déjà prise de nuit, rêvant jusqu’à mes pieds. Pa
5404
r lointain que l’eau n’a point doublé, déjà prise
de
nuit, rêvant jusqu’à mes pieds. Par une chaude soirée du mois d’août
5405
jusqu’à mes pieds. Par une chaude soirée du mois
d’
août 192., un jeune homme, simplement vêtu d’un pantalon de flanelle g
5406
mois d’août 192., un jeune homme, simplement vêtu
d’
un pantalon de flanelle grise et d’un chandail au col roulé, pédale à
5407
2., un jeune homme, simplement vêtu d’un pantalon
de
flanelle grise et d’un chandail au col roulé, pédale à longues pesées
5408
implement vêtu d’un pantalon de flanelle grise et
d’
un chandail au col roulé, pédale à longues pesées sur le chemin de la
5409
handail au col roulé, pédale à longues pesées sur
le
chemin de la plaine, luttant contre un vent impétueux. L’orage est im
5410
col roulé, pédale à longues pesées sur le chemin
de
la plaine, luttant contre un vent impétueux. L’orage est imminent. No
5411
l roulé, pédale à longues pesées sur le chemin de
la
plaine, luttant contre un vent impétueux. L’orage est imminent. Notre
5412
n de la plaine, luttant contre un vent impétueux.
L’
orage est imminent. Notre héros, qui paraît âgé d’une vingtaine d’anné
5413
L’orage est imminent. Notre héros, qui paraît âgé
d’
une vingtaine d’années, se dirige vers le lac qu’on aperçoit entre les
5414
nent. Notre héros, qui paraît âgé d’une vingtaine
d’
années, se dirige vers le lac qu’on aperçoit entre les peupliers, et d
5415
raît âgé d’une vingtaine d’années, se dirige vers
le
lac qu’on aperçoit entre les peupliers, et dont les longues vagues li
5416
nnées, se dirige vers le lac qu’on aperçoit entre
les
peupliers, et dont les longues vagues limoneuses accablent sans relâc
5417
e lac qu’on aperçoit entre les peupliers, et dont
les
longues vagues limoneuses accablent sans relâche les roseaux de la ba
5418
longues vagues limoneuses accablent sans relâche
les
roseaux de la baie. Des nuées menaçantes courent très bas, tirant des
5419
ues limoneuses accablent sans relâche les roseaux
de
la baie. Des nuées menaçantes courent très bas, tirant des pluies au
5420
limoneuses accablent sans relâche les roseaux de
la
baie. Des nuées menaçantes courent très bas, tirant des pluies au lar
5421
courent très bas, tirant des pluies au large, et
le
cœur du jeune homme bondit dans sa poitrine, exalté par l’effort et l
5422
u jeune homme bondit dans sa poitrine, exalté par
l’
effort et la vitesse. Mais soudain la tempête a fait silence autour de
5423
e bondit dans sa poitrine, exalté par l’effort et
la
vitesse. Mais soudain la tempête a fait silence autour de lui, et seu
5424
, exalté par l’effort et la vitesse. Mais soudain
la
tempête a fait silence autour de lui, et seul reste distinct le bruit
5425
ait silence autour de lui, et seul reste distinct
le
bruit profond des vagues. Il roule maintenant dans l’ombre tiède et a
5426
ruit profond des vagues. Il roule maintenant dans
l’
ombre tiède et abritée d’un bois de pins. Que vient-il donc chercher s
5427
Il roule maintenant dans l’ombre tiède et abritée
d’
un bois de pins. Que vient-il donc chercher sur ces rivages désertés p
5428
aintenant dans l’ombre tiède et abritée d’un bois
de
pins. Que vient-il donc chercher sur ces rivages désertés par le crép
5429
ent-il donc chercher sur ces rivages désertés par
le
crépuscule ? Quelle est cette hâte inconnue, qu’il se flattait de n’é
5430
Quelle est cette hâte inconnue, qu’il se flattait
de
n’éprouver jamais, bien au contraire, avant un rendez-vous ? Cette en
5431
au contraire, avant un rendez-vous ? Cette envie
de
crier : « J’accours ! Attends !… » Ah ! mais qu’est-ce qu’il m’arrive
5432
t-ce qu’il m’arrive ? se dit-il. Il faut en avoir
le
cœur net. (Tout son orgueil réside en la maîtrise de soi, idéal de sp
5433
en avoir le cœur net. (Tout son orgueil réside en
la
maîtrise de soi, idéal de sportif plus que de puritain.) Il ralentit,
5434
cœur net. (Tout son orgueil réside en la maîtrise
de
soi, idéal de sportif plus que de puritain.) Il ralentit, pose un pie
5435
t son orgueil réside en la maîtrise de soi, idéal
de
sportif plus que de puritain.) Il ralentit, pose un pied sur le sol,
5436
en la maîtrise de soi, idéal de sportif plus que
de
puritain.) Il ralentit, pose un pied sur le sol, et s’appuie de la ma
5437
s que de puritain.) Il ralentit, pose un pied sur
le
sol, et s’appuie de la main au tronc d’un pin. Ce qui lui arrive est
5438
Il ralentit, pose un pied sur le sol, et s’appuie
de
la main au tronc d’un pin. Ce qui lui arrive est solennel, comme l’at
5439
ralentit, pose un pied sur le sol, et s’appuie de
la
main au tronc d’un pin. Ce qui lui arrive est solennel, comme l’atten
5440
pied sur le sol, et s’appuie de la main au tronc
d’
un pin. Ce qui lui arrive est solennel, comme l’attente du pays sous l
5441
c d’un pin. Ce qui lui arrive est solennel, comme
l’
attente du pays sous le ciel orageux. Oui, c’est bien cela qu’il sent,
5442
arrive est solennel, comme l’attente du pays sous
le
ciel orageux. Oui, c’est bien cela qu’il sent, il ne peut s’y tromper
5443
st bien cela qu’il sent, il ne peut s’y tromper :
la
brûlure douce au cœur, le sang plus vite, le soulèvement plus ample d
5444
l ne peut s’y tromper : la brûlure douce au cœur,
le
sang plus vite, le soulèvement plus ample de la respiration. Tout ce
5445
er : la brûlure douce au cœur, le sang plus vite,
le
soulèvement plus ample de la respiration. Tout ce que disent les poèt
5446
œur, le sang plus vite, le soulèvement plus ample
de
la respiration. Tout ce que disent les poètes qu’il dédaigne, tous le
5447
, le sang plus vite, le soulèvement plus ample de
la
respiration. Tout ce que disent les poètes qu’il dédaigne, tous leurs
5448
plus ample de la respiration. Tout ce que disent
les
poètes qu’il dédaigne, tous leurs clichés, c’était donc vrai ? Il ne
5449
hés, c’était donc vrai ? Il ne sait quelle ardeur
le
pénètre… Mais il sent qu’il va dire les grands mots impossibles, dans
5450
lle ardeur le pénètre… Mais il sent qu’il va dire
les
grands mots impossibles, dans un fol abandon, et ce sera vrai. Comme
5451
sera vrai. Comme tout est facile et violent quand
les
portes du cœur ont cédé ! Le lac était d’un bleu très sombre, le ciel
5452
le et violent quand les portes du cœur ont cédé !
Le
lac était d’un bleu très sombre, le ciel bas, des éclairs de chaleur
5453
quand les portes du cœur ont cédé ! Le lac était
d’
un bleu très sombre, le ciel bas, des éclairs de chaleur palpitaient d
5454
ur ont cédé ! Le lac était d’un bleu très sombre,
le
ciel bas, des éclairs de chaleur palpitaient dans la nue, et le jeune
5455
t d’un bleu très sombre, le ciel bas, des éclairs
de
chaleur palpitaient dans la nue, et le jeune homme savait en repartan
5456
ciel bas, des éclairs de chaleur palpitaient dans
la
nue, et le jeune homme savait en repartant sur les sentiers obscurs,
5457
es éclairs de chaleur palpitaient dans la nue, et
le
jeune homme savait en repartant sur les sentiers obscurs, vers les ro
5458
la nue, et le jeune homme savait en repartant sur
les
sentiers obscurs, vers les roseaux, qu’avant le rendez-vous ce qui l’
5459
avait en repartant sur les sentiers obscurs, vers
les
roseaux, qu’avant le rendez-vous ce qui l’avait rejoint, c’était cett
5460
les sentiers obscurs, vers les roseaux, qu’avant
le
rendez-vous ce qui l’avait rejoint, c’était cette chose absurde et ma
5461
vers les roseaux, qu’avant le rendez-vous ce qui
l’
avait rejoint, c’était cette chose absurde et magnifique, entre haut m
5462
ut mal et bien suprême, qu’on nomme si légèrement
l’
amour.
5463
VIII On peut écrire aussi contre
les
lacs, ces endormeurs, et porter sa louange à des lieux plus sévères.
5464
à des lieux plus sévères. Mais plutôt il convient
d’
alterner ces agréments et ces vertus. Qui nous parlera des forêts ? Po
5465
es forêts ? Pour ma part, j’ai trop peu vécu sous
les
sapins, dans les vallées du Jura. J’y suis né, certes, mais les vraie
5466
ma part, j’ai trop peu vécu sous les sapins, dans
les
vallées du Jura. J’y suis né, certes, mais les vraies patries sont ce
5467
ns les vallées du Jura. J’y suis né, certes, mais
les
vraies patries sont celles où l’on naît à l’amour. Un portrait de not
5468
é, certes, mais les vraies patries sont celles où
l’
on naît à l’amour. Un portrait de notre pays, peint de là-haut, ne res
5469
ais les vraies patries sont celles où l’on naît à
l’
amour. Un portrait de notre pays, peint de là-haut, ne ressemblerait g
5470
s sont celles où l’on naît à l’amour. Un portrait
de
notre pays, peint de là-haut, ne ressemblerait guère à mes esquisses.
5471
naît à l’amour. Un portrait de notre pays, peint
de
là-haut, ne ressemblerait guère à mes esquisses. Au lieu de la lumièr
5472
e ressemblerait guère à mes esquisses. Au lieu de
la
lumière souvent voilée du lac, on y verrait un éclairage cru, des omb
5473
cru, des ombres longues et givrées, des couchants
d’
incendie sur les menées moroses des hauts plateaux boisés de noir. Ils
5474
longues et givrées, des couchants d’incendie sur
les
menées moroses des hauts plateaux boisés de noir. Ils vont jusqu’au T
5475
sur les menées moroses des hauts plateaux boisés
de
noir. Ils vont jusqu’au Tibet, me disait un jour Ramuz (dont la géogr
5476
ont jusqu’au Tibet, me disait un jour Ramuz (dont
la
géographie se passait bien d’atlas). C’est la même civilisation, les
5477
un jour Ramuz (dont la géographie se passait bien
d’
atlas). C’est la même civilisation, les mêmes fumées sur les tourbière
5478
ont la géographie se passait bien d’atlas). C’est
la
même civilisation, les mêmes fumées sur les tourbières, les mêmes cha
5479
assait bien d’atlas). C’est la même civilisation,
les
mêmes fumées sur les tourbières, les mêmes chants tristes, la même vi
5480
C’est la même civilisation, les mêmes fumées sur
les
tourbières, les mêmes chants tristes, la même vie intérieure… Il me d
5481
ivilisation, les mêmes fumées sur les tourbières,
les
mêmes chants tristes, la même vie intérieure… Il me disait aussi que
5482
ées sur les tourbières, les mêmes chants tristes,
la
même vie intérieure… Il me disait aussi que les paysans huguenots des
5483
s, la même vie intérieure… Il me disait aussi que
les
paysans huguenots des Cévennes et du Languedoc sont en réalité des mu
5484
uedoc sont en réalité des musulmans, qu’il suffit
de
les voir, tout noirs dans leurs cuisines, fatalistes et irréductibles
5485
oc sont en réalité des musulmans, qu’il suffit de
les
voir, tout noirs dans leurs cuisines, fatalistes et irréductibles… J’
5486
qui ouvrent des voies. Je garde ma méfiance pour
l’
espèce de mensonge qui rend la vie plus petite que nature, sous prétex
5487
ent des voies. Je garde ma méfiance pour l’espèce
de
mensonge qui rend la vie plus petite que nature, sous prétexte d’exac
5488
de ma méfiance pour l’espèce de mensonge qui rend
la
vie plus petite que nature, sous prétexte d’exactitude. Pays des horl
5489
rend la vie plus petite que nature, sous prétexte
d’
exactitude. Pays des horlogers à domicile, des longues veillées, des i
5490
es longues veillées, des inventions pratiques, et
de
beaucoup de dignité cordiale dans le commerce quotidien, c’est le Nor
5491
ratiques, et de beaucoup de dignité cordiale dans
le
commerce quotidien, c’est le Nord du canton qui a gagné et nous a fai
5492
ignité cordiale dans le commerce quotidien, c’est
le
Nord du canton qui a gagné et nous a faits républicains, voilà cent a
5493
fugia Jean-Jacques, Bakounine présida, me dit-on,
les
réunions secrètes d’où devait sortir la Première Internationale, auss
5494
kounine présida, me dit-on, les réunions secrètes
d’
où devait sortir la Première Internationale, aussitôt confisquée par M
5495
ère Internationale, aussitôt confisquée par Marx.
De
cette enfance il me reste un cauchemar, l’école primaire, dont j’ai p
5496
Marx. De cette enfance il me reste un cauchemar,
l’
école primaire, dont j’ai parlé ailleurse ; l’idée que mon village ne
5497
ar, l’école primaire, dont j’ai parlé ailleurse ;
l’
idée que mon village ne ressemble à aucun autre ; une connaissance int
5498
ressemble à aucun autre ; une connaissance intime
de
la neige ; le désir des pays chauds ; et un petit lièvre. Je me souvi
5499
semble à aucun autre ; une connaissance intime de
la
neige ; le désir des pays chauds ; et un petit lièvre. Je me souviens
5500
cun autre ; une connaissance intime de la neige ;
le
désir des pays chauds ; et un petit lièvre. Je me souviens de ce reto
5501
pays chauds ; et un petit lièvre. Je me souviens
de
ce retour du Creux-du-Van, à travers les grands pâturages parsemés de
5502
souviens de ce retour du Creux-du-Van, à travers
les
grands pâturages parsemés de sapins majestueux et coupés çà et là de
5503
x-du-Van, à travers les grands pâturages parsemés
de
sapins majestueux et coupés çà et là de murs bas faits de grosses pie
5504
parsemés de sapins majestueux et coupés çà et là
de
murs bas faits de grosses pierres entassées avec art. Nous passions l
5505
s majestueux et coupés çà et là de murs bas faits
de
grosses pierres entassées avec art. Nous passions les clédars (beau m
5506
grosses pierres entassées avec art. Nous passions
les
clédars (beau mot celtique, l’un des rares qui subsistent chez nous)
5507
ique, l’un des rares qui subsistent chez nous) et
les
refermions avec soin, pour que les vaches n’aillent point changer de
5508
chez nous) et les refermions avec soin, pour que
les
vaches n’aillent point changer de propriétaire. Nous marchions à gran
5509
soin, pour que les vaches n’aillent point changer
de
propriétaire. Nous marchions à grandes enjambées, joyeux de sentir no
5510
taire. Nous marchions à grandes enjambées, joyeux
de
sentir nos gros talons cloutés mordre dans le sol élastique. Soudain
5511
eux de sentir nos gros talons cloutés mordre dans
le
sol élastique. Soudain je suspendis mon pas : au bout de mon pied, da
5512
ndis mon pas : au bout de mon pied, dans un creux
d’
herbe, un petit lièvre frémissait, immobile et terrorisé. Nous nous so
5513
t terrorisé. Nous nous sommes regardés un moment,
de
tout près. Un seul geste rapide eût suffi pour l’attraper par les ore
5514
de tout près. Un seul geste rapide eût suffi pour
l’
attraper par les oreilles. J’imaginai en une seconde la gloire que me
5515
n seul geste rapide eût suffi pour l’attraper par
les
oreilles. J’imaginai en une seconde la gloire que me vaudrait cette a
5516
raper par les oreilles. J’imaginai en une seconde
la
gloire que me vaudrait cette aventure, ma rentrée triomphale à la mai
5517
vaudrait cette aventure, ma rentrée triomphale à
la
maison. (Faut-il avouer que je la regrette encore ?) Mais je restais
5518
ée triomphale à la maison. (Faut-il avouer que je
la
regrette encore ?) Mais je restais là sans mouvement, fasciné par l’a
5519
?) Mais je restais là sans mouvement, fasciné par
l’
aubaine et plus encore ému par ce petit être tremblant. C’était trop b
5520
u par ce petit être tremblant. C’était trop beau…
Le
lièvre détala. Combien d’occasions merveilleuses ai-je laissées détal
5521
ant. C’était trop beau… Le lièvre détala. Combien
d’
occasions merveilleuses ai-je laissées détaler depuis ! Ce sont peut-ê
5522
taler depuis ! Ce sont peut-être celles qui m’ont
le
plus appris. Ma gloire ou mon plaisir en ont pâti, mais j’en tire une
5523
is j’en tire une satisfaction plus secrète et qui
les
vaut bien. Chaque fois qu’une chance offerte un instant fuit d’un bon
5524
Chaque fois qu’une chance offerte un instant fuit
d’
un bond, parce qu’un scrupule ou un respect, ou quelque obscure sagess
5525
ièvre ! et poursuis mon chemin plus léger. Si je
l’
avais attrapé, m’en souviendrais-je encore ? Je n’en parlerais pas ici
5526
ici. Des Montagnes au lac, cependant, malgré tous
les
contrastes qu’on a vus, c’est bien le même peuple et c’est le même ac
5527
algré tous les contrastes qu’on a vus, c’est bien
le
même peuple et c’est le même accent. J’entends les mêmes allures, le
5528
s qu’on a vus, c’est bien le même peuple et c’est
le
même accent. J’entends les mêmes allures, le même accent de l’âme, du
5529
le même peuple et c’est le même accent. J’entends
les
mêmes allures, le même accent de l’âme, du cœur et de la poignée de m
5530
’est le même accent. J’entends les mêmes allures,
le
même accent de l’âme, du cœur et de la poignée de main ; mais hélas !
5531
cent. J’entends les mêmes allures, le même accent
de
l’âme, du cœur et de la poignée de main ; mais hélas ! aussi du langa
5532
t. J’entends les mêmes allures, le même accent de
l’
âme, du cœur et de la poignée de main ; mais hélas ! aussi du langage.
5533
êmes allures, le même accent de l’âme, du cœur et
de
la poignée de main ; mais hélas ! aussi du langage. Et à ce propos… L
5534
s allures, le même accent de l’âme, du cœur et de
la
poignée de main ; mais hélas ! aussi du langage. Et à ce propos… L’op
5535
; mais hélas ! aussi du langage. Et à ce propos…
L’
opinion publique, de nos jours, veut que si l’on parle de son pays et
5536
i du langage. Et à ce propos… L’opinion publique,
de
nos jours, veut que si l’on parle de son pays et de son peuple on les
5537
os… L’opinion publique, de nos jours, veut que si
l’
on parle de son pays et de son peuple on les loue sans aucune retenue,
5538
on publique, de nos jours, veut que si l’on parle
de
son pays et de son peuple on les loue sans aucune retenue, et cette v
5539
nos jours, veut que si l’on parle de son pays et
de
son peuple on les loue sans aucune retenue, et cette vanité collectiv
5540
que si l’on parle de son pays et de son peuple on
les
loue sans aucune retenue, et cette vanité collective s’appelle, on ne
5541
e, on ne sait pourquoi, patriotisme ; mais que si
l’
on parle de soi, on confesse uniquement ses faiblesses, et cela s’appe
5542
it pourquoi, patriotisme ; mais que si l’on parle
de
soi, on confesse uniquement ses faiblesses, et cela s’appelle sincéri
5543
es, et cela s’appelle sincérité. (Quand il s’agit
de
la famille, ce moyen terme entre l’individu et la patrie, on ne sait
5544
et cela s’appelle sincérité. (Quand il s’agit de
la
famille, ce moyen terme entre l’individu et la patrie, on ne sait plu
5545
and il s’agit de la famille, ce moyen terme entre
l’
individu et la patrie, on ne sait plus sur quel pied danser.) Pour moi
5546
de la famille, ce moyen terme entre l’individu et
la
patrie, on ne sait plus sur quel pied danser.) Pour moi, j’ai pris le
5547
t plus sur quel pied danser.) Pour moi, j’ai pris
le
parti de laisser les étrangers vanter nos vertus bien connues et déco
5548
r quel pied danser.) Pour moi, j’ai pris le parti
de
laisser les étrangers vanter nos vertus bien connues et découvrir cel
5549
danser.) Pour moi, j’ai pris le parti de laisser
les
étrangers vanter nos vertus bien connues et découvrir celles que nous
5550
découvrir celles que nous ignorons. Je me borne à
l’
autocritique. Et par exemple, il est de mon devoir de citoyen conscien
5551
me borne à l’autocritique. Et par exemple, il est
de
mon devoir de citoyen conscient et responsable d’élever une solennell
5552
utocritique. Et par exemple, il est de mon devoir
de
citoyen conscient et responsable d’élever une solennelle protestation
5553
de mon devoir de citoyen conscient et responsable
d’
élever une solennelle protestation contre l’accent de mes compatriotes
5554
sable d’élever une solennelle protestation contre
l’
accent de mes compatriotes, celui qu’ils ont pris de nos jours et que
5555
lever une solennelle protestation contre l’accent
de
mes compatriotes, celui qu’ils ont pris de nos jours et que leurs pèr
5556
accent de mes compatriotes, celui qu’ils ont pris
de
nos jours et que leurs pères n’ont pas connu, l’accent le plus navran
5557
de nos jours et que leurs pères n’ont pas connu,
l’
accent le plus navrant de tout le domaine français, de Québec à Menton
5558
ours et que leurs pères n’ont pas connu, l’accent
le
plus navrant de tout le domaine français, de Québec à Menton, de Brux
5559
s pères n’ont pas connu, l’accent le plus navrant
de
tout le domaine français, de Québec à Menton, de Bruxelles à Port-Bou
5560
n’ont pas connu, l’accent le plus navrant de tout
le
domaine français, de Québec à Menton, de Bruxelles à Port-Bou. Je ne
5561
cent le plus navrant de tout le domaine français,
de
Québec à Menton, de Bruxelles à Port-Bou. Je ne vais pas m’occuper de
5562
de tout le domaine français, de Québec à Menton,
de
Bruxelles à Port-Bou. Je ne vais pas m’occuper de nos fautes de franç
5563
de Bruxelles à Port-Bou. Je ne vais pas m’occuper
de
nos fautes de français, elles sont moins graves, et je ne crois pas q
5564
Port-Bou. Je ne vais pas m’occuper de nos fautes
de
français, elles sont moins graves, et je ne crois pas que nous en com
5565
ois pas que nous en commettions beaucoup plus que
les
Parisiens : simplement à d’autres endroits. (Exercice pour enfants de
5566
cice pour enfants des écoles du canton : corrigez
le
verbe suivant : J’ai l’ennui, tu t’encoubles, il aurait meilleur temp
5567
oles du canton : corrigez le verbe suivant : J’ai
l’
ennui, tu t’encoubles, il aurait meilleur temps, on veut d’jà bien ça
5568
tu t’encoubles, il aurait meilleur temps, on veut
d’
jà bien ça faire, vous voyez pas jour, ils n’en peuvent rien ; dans le
5569
l s’encoubler est plaisant, meilleur temps utile,
le
reste mauvais ou atroce.) Mais l’accent, c’est bien autre chose. C’es
5570
ur temps utile, le reste mauvais ou atroce.) Mais
l’
accent, c’est bien autre chose. C’est à quoi l’étranger juge un peuple
5571
is l’accent, c’est bien autre chose. C’est à quoi
l’
étranger juge un peuple au passage, et l’estime sympathique ou non. To
5572
t à quoi l’étranger juge un peuple au passage, et
l’
estime sympathique ou non. Tout le monde aime les Vaudois, les Marseil
5573
t l’estime sympathique ou non. Tout le monde aime
les
Vaudois, les Marseillais, s’amuse des Canadiens, tolère les Belges, e
5574
mpathique ou non. Tout le monde aime les Vaudois,
les
Marseillais, s’amuse des Canadiens, tolère les Belges, et se moque à
5575
s, les Marseillais, s’amuse des Canadiens, tolère
les
Belges, et se moque à l’occasion des Auvergnats, mais grimace de doul
5576
e des Canadiens, tolère les Belges, et se moque à
l’
occasion des Auvergnats, mais grimace de douleur à nous entendre. Écou
5577
e moque à l’occasion des Auvergnats, mais grimace
de
douleur à nous entendre. Écoutez les jeunes gens dans la rue (« sur l
5578
mais grimace de douleur à nous entendre. Écoutez
les
jeunes gens dans la rue (« sur la rue » ou « en rue », diraient-ils).
5579
eur à nous entendre. Écoutez les jeunes gens dans
la
rue (« sur la rue » ou « en rue », diraient-ils). Ce n’est plus dire,
5580
endre. Écoutez les jeunes gens dans la rue (« sur
la
rue » ou « en rue », diraient-ils). Ce n’est plus dire, ce n’est plus
5581
er, mais patauger dans une bouillasse verbale, où
l’
on se traîne avec de lourdes brusqueries, pour s’enliser régulièrement
5582
ns une bouillasse verbale, où l’on se traîne avec
de
lourdes brusqueries, pour s’enliser régulièrement avant d’avoir attei
5583
s brusqueries, pour s’enliser régulièrement avant
d’
avoir atteint la fin d’une phrase. Je sais bien que l’influence du sui
5584
our s’enliser régulièrement avant d’avoir atteint
la
fin d’une phrase. Je sais bien que l’influence du suisse allemand y e
5585
nliser régulièrement avant d’avoir atteint la fin
d’
une phrase. Je sais bien que l’influence du suisse allemand y est pour
5586
oir atteint la fin d’une phrase. Je sais bien que
l’
influence du suisse allemand y est pour beaucoup, et qu’on ne peut pas
5587
est pour beaucoup, et qu’on ne peut pas déplacer
le
canton de Berne. Mais je me souviens aussi de l’état d’esprit qui ent
5588
beaucoup, et qu’on ne peut pas déplacer le canton
de
Berne. Mais je me souviens aussi de l’état d’esprit qui entretient ce
5589
cer le canton de Berne. Mais je me souviens aussi
de
l’état d’esprit qui entretient cet état de choses et qui ne cesse de
5590
le canton de Berne. Mais je me souviens aussi de
l’
état d’esprit qui entretient cet état de choses et qui ne cesse de l’a
5591
qui entretient cet état de choses et qui ne cesse
de
l’aggraver : c’est celui de l’école primaire et de la caserne, où l’o
5592
entretient cet état de choses et qui ne cesse de
l’
aggraver : c’est celui de l’école primaire et de la caserne, où l’on s
5593
hoses et qui ne cesse de l’aggraver : c’est celui
de
l’école primaire et de la caserne, où l’on se moque sans pitié des ga
5594
es et qui ne cesse de l’aggraver : c’est celui de
l’
école primaire et de la caserne, où l’on se moque sans pitié des garço
5595
e l’aggraver : c’est celui de l’école primaire et
de
la caserne, où l’on se moque sans pitié des garçons qui « raffinent »
5596
’aggraver : c’est celui de l’école primaire et de
la
caserne, où l’on se moque sans pitié des garçons qui « raffinent », c
5597
st celui de l’école primaire et de la caserne, où
l’
on se moque sans pitié des garçons qui « raffinent », c’est-à-dire par
5598
i « raffinent », c’est-à-dire parlent avec un peu
d’
aisance. Cette émulation par le bas pourrait être arrêtée par les inst
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arlent avec un peu d’aisance. Cette émulation par
le
bas pourrait être arrêtée par les instituteurs. Il suffirait de renve
5600
te émulation par le bas pourrait être arrêtée par
les
instituteurs. Il suffirait de renverser la mode, et de statuer qu’à p
5601
t être arrêtée par les instituteurs. Il suffirait
de
renverser la mode, et de statuer qu’à partir d’aujourd’hui l’on va se
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e par les instituteurs. Il suffirait de renverser
la
mode, et de statuer qu’à partir d’aujourd’hui l’on va se moquer douce
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stituteurs. Il suffirait de renverser la mode, et
de
statuer qu’à partir d’aujourd’hui l’on va se moquer doucement de ceux
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t de renverser la mode, et de statuer qu’à partir
d’
aujourd’hui l’on va se moquer doucement de ceux qui parlent mal, au li
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la mode, et de statuer qu’à partir d’aujourd’hui
l’
on va se moquer doucement de ceux qui parlent mal, au lieu de tourner
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partir d’aujourd’hui l’on va se moquer doucement
de
ceux qui parlent mal, au lieu de tourner en ridicule ceux qui essaien
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au lieu de tourner en ridicule ceux qui essaient
de
bien dire, d’articuler nettement, de maîtriser leurs moyens d’express
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urner en ridicule ceux qui essaient de bien dire,
d’
articuler nettement, de maîtriser leurs moyens d’expression. Le vers f
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qui essaient de bien dire, d’articuler nettement,
de
maîtriser leurs moyens d’expression. Le vers fameux de Valéry : « Hon
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d’articuler nettement, de maîtriser leurs moyens
d’
expression. Le vers fameux de Valéry : « Honneur des Hommes, Saint Lan
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ettement, de maîtriser leurs moyens d’expression.
Le
vers fameux de Valéry : « Honneur des Hommes, Saint Langage ! » serai
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îtriser leurs moyens d’expression. Le vers fameux
de
Valéry : « Honneur des Hommes, Saint Langage ! » serait la devise de
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: « Honneur des Hommes, Saint Langage ! » serait
la
devise de cette croisade, dont le succès embellirait notre existence
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ur des Hommes, Saint Langage ! » serait la devise
de
cette croisade, dont le succès embellirait notre existence mieux qu’u
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gage ! » serait la devise de cette croisade, dont
le
succès embellirait notre existence mieux qu’une « plage » ou qu’un mo
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erai ces remarques un peu vives si elles attirent
l’
attention de nos éducateurs sur une disgrâce que l’habitude risque de
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arques un peu vives si elles attirent l’attention
de
nos éducateurs sur une disgrâce que l’habitude risque de rendre insen
5618
’attention de nos éducateurs sur une disgrâce que
l’
habitude risque de rendre insensible à certains. Dans ce domaine, fair
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éducateurs sur une disgrâce que l’habitude risque
de
rendre insensible à certains. Dans ce domaine, faire attention suffir
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à prévenir et à guérir. Il convenait qu’au terme
de
ces pages j’apporte aussi ma petite contribution au centenaire que l’
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te aussi ma petite contribution au centenaire que
l’
on va célébrer. Voilà qui est fait selon mes moyens, qui sont ceux d’u
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oilà qui est fait selon mes moyens, qui sont ceux
d’
un monteur et ajusteur de mots, par métier soucieux de langage. Cadeau
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es moyens, qui sont ceux d’un monteur et ajusteur
de
mots, par métier soucieux de langage. Cadeau modeste mais peut-être u
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monteur et ajusteur de mots, par métier soucieux
de
langage. Cadeau modeste mais peut-être utile, si l’on songe que ce ce
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langage. Cadeau modeste mais peut-être utile, si
l’
on songe que ce centenaire est celui d’une libération, et qu’un peuple
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utile, si l’on songe que ce centenaire est celui
d’
une libération, et qu’un peuple n’est vraiment libre que s’il possède
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libre que s’il possède et maîtrise d’abord, dans
la
force et la grâce du terme, la liberté de l’expression. e. Voir Le
5628
’il possède et maîtrise d’abord, dans la force et
la
grâce du terme, la liberté de l’expression. e. Voir Les Méfaits de
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rise d’abord, dans la force et la grâce du terme,
la
liberté de l’expression. e. Voir Les Méfaits de l’instruction publ
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d, dans la force et la grâce du terme, la liberté
de
l’expression. e. Voir Les Méfaits de l’instruction publique .
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dans la force et la grâce du terme, la liberté de
l’
expression. e. Voir Les Méfaits de l’instruction publique .
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du terme, la liberté de l’expression. e. Voir
Les
Méfaits de l’instruction publique .
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a liberté de l’expression. e. Voir Les Méfaits
de
l’instruction publique .
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iberté de l’expression. e. Voir Les Méfaits de
l’
instruction publique .