1
« L’heure est venue. Allons-y » [préface
d’
Alexandre Marc] Und solang Du es nicht hast Dieses : Stirb und Werd
2
yen du monde, Denis de Rougemont n’a jamais cessé
de
manifester son attachement à la Suisse. Plusieurs ouvrages et de nomb
3
on attachement à la Suisse. Plusieurs ouvrages et
de
nombreux articles témoignent de cette fidélité exemplaire, ainsi que
4
ieurs ouvrages et de nombreux articles témoignent
de
cette fidélité exemplaire, ainsi que de l’importance qu’il accordait
5
émoignent de cette fidélité exemplaire, ainsi que
de
l’importance qu’il accordait au rôle historique de son pays. Contrair
6
e l’importance qu’il accordait au rôle historique
de
son pays. Contrairement à un préjugé soigneusement entretenu par les
7
helvétique, qui ne saurait prétendre à la dignité
d’
État national, n’en a pas moins contribué à l’enrichissement de la cul
8
al, n’en a pas moins contribué à l’enrichissement
de
la culture européenne ; car, n’en déplaise aux stato-nationalistes, c
9
dinaire essor du génie européen. Mais il convient
de
préciser tout de suite que ce qui est authentiquement national débord
10
ut et par le bas. C’est pourquoi il serait erroné
de
parler de culture suisse : « par la langue, l’ethnie, la confession [
11
le bas. C’est pourquoi il serait erroné de parler
de
culture suisse : « par la langue, l’ethnie, la confession […], les ca
12
confession […], les cantons fédérés […] relèvent
d’
ensembles très divers et très variablement combinés »1. Comme l’observ
13
l’illusion — propagée par l’école pour le compte
de
l’État […] — selon laquelle l’Europe serait une addition de « culture
14
[…] — selon laquelle l’Europe serait une addition
de
« cultures nationales » coïncidant, comme par miracle, avec les front
15
ice Nobel — c’est-à-dire le nombre des prix Nobel
de
sciences par million d’habitants — s’établissait, vers 1960, comme su
16
le nombre des prix Nobel de sciences par million
d’
habitants — s’établissait, vers 1960, comme suit : 1° Suisse 2,62 ; 2°
17
ni 0,67 ; 8° USA 0,41 ; 9° France 0,40 ; et ainsi
de
suite, jusqu’à 19° URSS 0,03 ! Curieusement, ce sont les petits pays
18
nt se plaisait à rappeler que depuis la fondation
de
l’abbaye de Saint-Gall et celle de l’Université de Bâle, l’apport de
19
it à rappeler que depuis la fondation de l’abbaye
de
Saint-Gall et celle de l’Université de Bâle, l’apport de la Suisse à
20
s la fondation de l’abbaye de Saint-Gall et celle
de
l’Université de Bâle, l’apport de la Suisse à la culture, compte tenu
21
e l’abbaye de Saint-Gall et celle de l’Université
de
Bâle, l’apport de la Suisse à la culture, compte tenu de ses dimensio
22
t-Gall et celle de l’Université de Bâle, l’apport
de
la Suisse à la culture, compte tenu de ses dimensions géodémographiqu
23
, l’apport de la Suisse à la culture, compte tenu
de
ses dimensions géodémographiques, a été supérieur à celui de ses vois
24
nsions géodémographiques, a été supérieur à celui
de
ses voisins. Au xxe siècle encore, n’est-ce pas en Suisse qu’un déno
25
en Suisse qu’un dénommé Einstein, devenu citoyen
de
ce pays, avait posé les bases de la relativité ? — que Karl Barth, re
26
, devenu citoyen de ce pays, avait posé les bases
de
la relativité ? — que Karl Barth, rejeté d’Allemagne par la vague hit
27
bases de la relativité ? — que Karl Barth, rejeté
d’
Allemagne par la vague hitlérienne, renouvelait la théologie (et pas s
28
? — que Jean Piaget révolutionnait la psychologie
de
l’enfant et, plus tard, élaborait l’épistémologie génétique ? Ces nom
29
cours, et dans ses entretiens. Il nous appartient
d’
ajouter à la liste, ainsi esquissée, le sien. Qui est appelé du reste
30
. Denis de Rougemont ne se posait point en homme
de
lettres, et pourtant, Albert Béguin l’avait noté dès la fin des année
31
é dès la fin des années 1930, c’était un écrivain
de
race. Totalement étranger au microcosme politique, il n’en a pas moin
32
au sens le plus élevé du terme. Il s’est efforcé
d’
apaiser les angoisses et les obsessions de notre temps, sans en méconn
33
efforcé d’apaiser les angoisses et les obsessions
de
notre temps, sans en méconnaître les grandes potentialités, ni jouer
34
rer, avec une belle maîtrise, Vingt-huit siècles
d’
Europe et découvrir les lignes de force de L’Aventure occidentale de
35
gt-huit siècles d’Europe et découvrir les lignes
de
force de L’Aventure occidentale de l’homme . Écologiste avant la let
36
iècles d’Europe et découvrir les lignes de force
de
L’Aventure occidentale de l’homme . Écologiste avant la lettre — ne
37
ir les lignes de force de L’Aventure occidentale
de
l’homme . Écologiste avant la lettre — ne devions-nous pas rédiger en
38
les villes ? —, il n’a pas hésité, même à la fin
de
sa vie, à inspirer, guider et illustrer, l’action des verts, sans en
39
e du déséquilibre maîtrisé. Il était trop pénétré
de
dialectique (non hégélienne) pour ignorer que le et – et (sowohl als
40
u – ou (entweder oder) et que la vieille maxime :
de
deux choses l’une, doit abdiquer parfois au bénéfice d’une plus sage
41
x choses l’une, doit abdiquer parfois au bénéfice
d’
une plus sage folie : de deux choses l’autre. Ce disant, l’on touche s
42
iquer parfois au bénéfice d’une plus sage folie :
de
deux choses l’autre. Ce disant, l’on touche sans doute aux ressorts l
43
n touche sans doute aux ressorts les plus secrets
de
la pensée et de l’action de Denis de Rougemont. À ma connaissance, il
44
ute aux ressorts les plus secrets de la pensée et
de
l’action de Denis de Rougemont. À ma connaissance, il n’a jamais prét
45
orts les plus secrets de la pensée et de l’action
de
Denis de Rougemont. À ma connaissance, il n’a jamais prétendu au titr
46
ma connaissance, il n’a jamais prétendu au titre
de
théologien. Et pourtant, si l’on ne se laisse pas arrêter par les app
47
apparences, que découvre-t-on, au plus profond et
de
son action, et de sa pensée, sinon des émergences théologiques ! Bart
48
couvre-t-on, au plus profond et de son action, et
de
sa pensée, sinon des émergences théologiques ! Barthien de la premièr
49
sée, sinon des émergences théologiques ! Barthien
de
la première heure — que l’on relise la revue Hic et nunc —, il est
50
delà des exclusives et des interdits, à l’échelle
d’
un œcuménisme exigeant, aussi éloigné des compromis que des anathèmes.
51
des compromis que des anathèmes. Écrivain, homme
d’
action, Denis de Rougemont a été aussi un enseignant. Dans les cours p
52
peu partout, notamment à l’Institut universitaire
d’
études européennes (Genève), fondé et dirigé par lui, et au Collège un
53
dé et dirigé par lui, et au Collège universitaire
d’
études fédéralistes (Aoste), fondé par le Centre international de form
54
listes (Aoste), fondé par le Centre international
de
formation européenne (dont Denis de Rougemont a été, pendant longtemp
55
ant longtemps, l’un des présidents), il n’a cessé
de
dispenser les trésors de sa vaste érudition ; de cette vivante unité
56
résidents), il n’a cessé de dispenser les trésors
de
sa vaste érudition ; de cette vivante unité d’une culture antiunitair
57
de dispenser les trésors de sa vaste érudition ;
de
cette vivante unité d’une culture antiunitaire qui, à ses yeux, const
58
rs de sa vaste érudition ; de cette vivante unité
d’
une culture antiunitaire qui, à ses yeux, constituait la principale ri
59
i, à ses yeux, constituait la principale richesse
de
l’Europe. Dans les années à venir, les notes prises par ses étudiants
60
it moderne. Réflexions qui ont constitué le point
de
départ d’un examen de conscience radical dont est né, au début des an
61
. Réflexions qui ont constitué le point de départ
d’
un examen de conscience radical dont est né, au début des années 1930,
62
qui ont constitué le point de départ d’un examen
de
conscience radical dont est né, au début des années 1930, le groupe d
63
dont est né, au début des années 1930, le groupe
de
l’Ordre nouveau. Si j’ai pu y attirer et y attacher des hommes aussi
64
Henri Daniel-Rops, Jean Jardin — sans même parler
de
ceux qui s’y sont agrégés ensuite —, c’est que les uns et les autres,
65
t été frappés par une révélation, encore confuse,
de
la gravité de la crise à laquelle nous serions inexorablement confron
66
par une révélation, encore confuse, de la gravité
de
la crise à laquelle nous serions inexorablement confrontés. Ignorer c
67
rions inexorablement confrontés. Ignorer ce point
de
départ, c’est rendre par avance impossible la compréhension de ce féd
68
est rendre par avance impossible la compréhension
de
ce fédéralisme global auquel, pendant plus d’un demi-siècle, Denis de
69
ion de ce fédéralisme global auquel, pendant plus
d’
un demi-siècle, Denis de Rougemont a consacré le plus clair de son tem
70
ècle, Denis de Rougemont a consacré le plus clair
de
son temps et de ses forces. De même que les arbres cachent parfois la
71
ougemont a consacré le plus clair de son temps et
de
ses forces. De même que les arbres cachent parfois la forêt, de même
72
entre des difficultés que l’on pourrait qualifier
de
ponctuelles, pour ne pas voir la Crise, dont la vague les recouvre pr
73
vague les recouvre progressivement, en attendant
de
les engloutir. Toute société étant conflictuelle, l’histoire de l’hum
74
ir. Toute société étant conflictuelle, l’histoire
de
l’humanité est faite de tensions subies ou maîtrisées, fécondes ou de
75
conflictuelle, l’histoire de l’humanité est faite
de
tensions subies ou maîtrisées, fécondes ou destructrices. Prétendre q
76
st sacrifier à l’utopie. Le grand saut du royaume
de
la nécessité dans celui de la liberté — annoncé triomphalement par En
77
grand saut du royaume de la nécessité dans celui
de
la liberté — annoncé triomphalement par Engels — ne permet d’atterrir
78
é — annoncé triomphalement par Engels — ne permet
d’
atterrir que dans l’Archipel du Goulag. Une cité non tensionnelle ne p
79
on tensionnelle ne peut être qu’une préfiguration
de
l’enfer. Si l’homme a une chance d’y échapper, ce n’est point en méco
80
préfiguration de l’enfer. Si l’homme a une chance
d’
y échapper, ce n’est point en méconnaissant les contradictions de l’ex
81
e n’est point en méconnaissant les contradictions
de
l’existence, mais bien en les affrontant, en les assumant, en se fais
82
en dégage, alimentent, pour ainsi dire, le moteur
de
l’histoire humaine. Mais la Crise qui nous menace aujourd’hui est d’u
83
ne. Mais la Crise qui nous menace aujourd’hui est
d’
une autre nature. Elle met tout en question ; elle atteint simultanéme
84
e atteint simultanément notre être et nos raisons
d’
être ; elle vise tous les secteurs et toutes les dimensions de la vie
85
e vise tous les secteurs et toutes les dimensions
de
la vie sociétale : elle contraint ainsi à l’Umwertung aller Werte, à
86
à l’Umwertung aller Werte, à la révision générale
de
toutes les valeurs. Or, Denis de Rougemont le découvre avec Arnaud Da
87
c Arnaud Dandieu, avec l’Ordre nouveau — « l’acte
de
réévaluation de toutes les valeurs » s’appelle Révolution. Comme tous
88
, avec l’Ordre nouveau — « l’acte de réévaluation
de
toutes les valeurs » s’appelle Révolution. Comme tous les mots qui on
89
me tous les mots qui ont beaucoup servi, le terme
de
révolution est trompeur. Les révoltes, les émeutes, les combats de ru
90
trompeur. Les révoltes, les émeutes, les combats
de
rue, les barricades, la guillotine, la terreur n’ont rien de spécifiq
91
barricades, la guillotine, la terreur n’ont rien
de
spécifiquement révolutionnaire, pas plus que les complots de palais,
92
uement révolutionnaire, pas plus que les complots
de
palais, les coups d’État ou les prises de pouvoir. Ainsi qu’il a été
93
e, pas plus que les complots de palais, les coups
d’
État ou les prises de pouvoir. Ainsi qu’il a été déjà observé, Denis d
94
omplots de palais, les coups d’État ou les prises
de
pouvoir. Ainsi qu’il a été déjà observé, Denis de Rougemont a volonti
95
rs à des références théologiques. Pour ce qui est
de
la révolution, son essence ne se laisse saisir qu’à la lumière du con
96
ce ne se laisse saisir qu’à la lumière du concept
de
conversion : « la révolution est une traduction collective de la conv
97
n : « la révolution est une traduction collective
de
la conversion chrétienne », sa projection sur le plan temporel. Pour
98
es, esthétiques ou morales —, et le re-tournement
de
l’homme vers son Créateur, d’autre part, un rapport d’analogie. Conna
99
homme vers son Créateur, d’autre part, un rapport
d’
analogie. Connaissant de longue date la méfiance de Karl Barth à l’éga
100
d’autre part, un rapport d’analogie. Connaissant
de
longue date la méfiance de Karl Barth à l’égard de ce terme, j’avais
101
’analogie. Connaissant de longue date la méfiance
de
Karl Barth à l’égard de ce terme, j’avais suggéré timidement de lui s
102
à l’égard de ce terme, j’avais suggéré timidement
de
lui substituer celui d’analectique, mais jusqu’à preuve du contraire,
103
’avais suggéré timidement de lui substituer celui
d’
analectique, mais jusqu’à preuve du contraire, je ne crois pas que Den
104
saisir d’emblée la thèse selon laquelle il n’y a
d’
authentique révolution que créatrice d’ordre : c’est en rejetant « l’o
105
e il n’y a d’authentique révolution que créatrice
d’
ordre : c’est en rejetant « l’ordre traditionnel, périmé, trop étroit,
106
eligieuses, politiques et civiques se réordonnent
d’
une manière plus significative… Mais changer de centre, c’est aussi ch
107
nt d’une manière plus significative… Mais changer
de
centre, c’est aussi changer de valeurs, de critères, de hiérarchie. C
108
tive… Mais changer de centre, c’est aussi changer
de
valeurs, de critères, de hiérarchie. C’est tout changer. » Toutefois
109
hanger de centre, c’est aussi changer de valeurs,
de
critères, de hiérarchie. C’est tout changer. » Toutefois, que l’on n
110
tre, c’est aussi changer de valeurs, de critères,
de
hiérarchie. C’est tout changer. » Toutefois, que l’on ne s’y trompe
111
lus encore que par son ampleur, par son caractère
de
globalité, de totalisation, l’authenticité d’une révolution se mesure
112
par son ampleur, par son caractère de globalité,
de
totalisation, l’authenticité d’une révolution se mesure par sa capaci
113
ère de globalité, de totalisation, l’authenticité
d’
une révolution se mesure par sa capacité d’arracher l’homme à la pesan
114
ticité d’une révolution se mesure par sa capacité
d’
arracher l’homme à la pesanteur des déterminismes, d’ouvrir devant lui
115
rracher l’homme à la pesanteur des déterminismes,
d’
ouvrir devant lui des espaces nouveaux de liberté. Qui ne comprend que
116
inismes, d’ouvrir devant lui des espaces nouveaux
de
liberté. Qui ne comprend que cette manière de voir les choses oblige
117
aux de liberté. Qui ne comprend que cette manière
de
voir les choses oblige à une révision critique de l’histoire, notamme
118
de voir les choses oblige à une révision critique
de
l’histoire, notamment de notre passé. Depuis la fin du xve siècle, l
119
à une révision critique de l’histoire, notamment
de
notre passé. Depuis la fin du xve siècle, l’Occident est entré dans
120
u xve siècle, l’Occident est entré dans une zone
de
turbulences révolutionnaires : Royaume-Uni, Amérique, France, et ains
121
nnaires : Royaume-Uni, Amérique, France, et ainsi
de
suite, jusqu’à la grande explosion d’octobre 1917 et toutes celles qu
122
e, et ainsi de suite, jusqu’à la grande explosion
d’
octobre 1917 et toutes celles qui lui ont succédé. Or, si l’on soumet
123
n sévère, si on les mesure à l’aune des exigences
de
l’homme libre et responsable, autrement dit de la personne, leur véri
124
es de l’homme libre et responsable, autrement dit
de
la personne, leur véritable valeur révolutionnaire paraît le plus sou
125
vraiment nouveau, a-t-elle multiplié les espaces
de
liberté, ou s’est-elle contentée de parfaire l’effort de centralisati
126
é les espaces de liberté, ou s’est-elle contentée
de
parfaire l’effort de centralisation, homogénéisation, nivellement, am
127
rté, ou s’est-elle contentée de parfaire l’effort
de
centralisation, homogénéisation, nivellement, amorcé de longue date ?
128
tralisation, homogénéisation, nivellement, amorcé
de
longue date ? Tout bien considéré, n’a-t-elle pas été l’un des maillo
129
n considéré, n’a-t-elle pas été l’un des maillons
d’
une longue chaîne, dont les étapes se déroulent, sans véritable ruptur
130
t les étapes se déroulent, sans véritable rupture
de
continuité, depuis la naissance, au xvie siècle, de petits États mon
131
continuité, depuis la naissance, au xvie siècle,
de
petits États mono-archiques et jusqu’à l’avènement, au xxe siècle, d
132
archiques et jusqu’à l’avènement, au xxe siècle,
de
l’État totalitaire ? Ordre régalien, monarchie absolue, colbertisme,
133
pour être plus précis, une seule et même absence
de
réalité ? C’est contre cet irréalisme, destructeur de l’humain, que
134
alité ? C’est contre cet irréalisme, destructeur
de
l’humain, que Denis de Rougemont engagea, dès sa jeunesse, un combat
135
potentiels, du désordre établi, il eut vite fait
de
comprendre que, dans un combat d’une telle envergure et d’une telle v
136
l eut vite fait de comprendre que, dans un combat
d’
une telle envergure et d’une telle violence, l’on n’avait une petite c
137
ndre que, dans un combat d’une telle envergure et
d’
une telle violence, l’on n’avait une petite chance d’échapper à la déf
138
ne telle violence, l’on n’avait une petite chance
d’
échapper à la défaite finale qu’en s’appuyant sur la plus réelle des r
139
plus réelle des réalités : la personne. L’œuvre
de
Denis de Rougemont est si riche, si variée que, pour la caractériser,
140
mot ne saurait suffire. À l’exception, peut-être,
de
celui de personnalisme qu’il a grandement contribué à illustrer. Dans
141
urait suffire. À l’exception, peut-être, de celui
de
personnalisme qu’il a grandement contribué à illustrer. Dans notre gé
142
si ma mémoire ne m’abuse, à un modeste philosophe
d’
outre-Rhin, William Stern. Mais ce vocable, un peu pédant, ne s’est im
143
, ne s’est imposé que grâce aux efforts conjugués
d’
une petite avant-garde — Emmanuel Mounier, Arnaud Dandieu, Henri Danie
144
ui lui était cher : republier toute la collection
de
la revue de L’Ordre nouveau (mai 1933-septembre 1938). « Comme le b
145
cher : republier toute la collection de la revue
de
L’Ordre nouveau (mai 1933-septembre 1938). « Comme le bon vin », di
146
-septembre 1938). « Comme le bon vin », disait-il
d’
une voix déjà légèrement voilée, « nos idées, anticipations et proposi
147
tenir à la perspective philosophique, il convient
d’
insister sans cesse sur les dangers que recèle la confusion entre indi
148
reconnaître qu’elle a résisté à tous les assauts
de
ceux que l’on a surnommés les non-conformistes des années 1930 : sans
149
ement inconcevable. À quel niveau situer le terme
d’
individu ? Un texte des plus significatifs qui tend à dévaluer les idé
150
tifs qui tend à dévaluer les idées personnalistes
de
Karol Wojtyla, publié par les Archives de philosophie, nous apprend q
151
alistes de Karol Wojtyla, publié par les Archives
de
philosophie, nous apprend que « … tout ce qu’on peut […] concéder à K
152
, c’est que plus grande est la perfection ontique
d’
une espèce, plus grandes sont aussi les différences distinguant entre
153
t, la lavande et l’espèce canine alignent, à tour
de
rôle, ses individus, « uniques et non réitérables ». Pourquoi pas ? D
154
fé ? Denis de Rougemont préfère réserver le terme
d’
individu à l’être humain qui s’arrache à la pesanteur de la masse, de
155
vidu à l’être humain qui s’arrache à la pesanteur
de
la masse, de la tribu ; à l’homme capable, par rapport au collectif,
156
humain qui s’arrache à la pesanteur de la masse,
de
la tribu ; à l’homme capable, par rapport au collectif, de différenci
157
bu ; à l’homme capable, par rapport au collectif,
de
différenciation et de distanciation. En simplifiant les données de l’
158
, par rapport au collectif, de différenciation et
de
distanciation. En simplifiant les données de l’histoire humaine, en l
159
n et de distanciation. En simplifiant les données
de
l’histoire humaine, en les schématisant d’une manière que les histori
160
onnées de l’histoire humaine, en les schématisant
d’
une manière que les historiens universitaires qualifieront sans doute
161
historiens universitaires qualifieront sans doute
d’
abusive, ne pourrait-on pas lier symboliquement la naissance de l’indi
162
pourrait-on pas lier symboliquement la naissance
de
l’individu à celle des cités grecques, au cours du dernier millénaire
163
les personnalistes sont convaincus qu’il importe
de
distinguer individu et personne, autant ils ne mettent nullement en d
164
utôt synchronique que diachronique du déploiement
de
la personne par rapport à celui de l’individu. Ce n’est qu’en accepta
165
du déploiement de la personne par rapport à celui
de
l’individu. Ce n’est qu’en acceptant pleinement cette réserve méthodo
166
méthodologique que l’on a le droit, semble-t-il,
de
construire l’éclairant et significatif schéma historique : cités grec
167
– personne. Quelle que soit la valeur historique
de
ce schéma, il s’impose, d’une certaine manière, dans la perspective o
168
t la valeur historique de ce schéma, il s’impose,
d’
une certaine manière, dans la perspective ontique. Tout homme est à la
169
la fois individu et personne (le citoyen relevant
d’
une autre intersériation). Deux dimensions — ou vecteurs — d’une même
170
intersériation). Deux dimensions — ou vecteurs —
d’
une même réalité, ils ne peuvent être distingués que pour être unis. E
171
e, c’est au modeste adverbe plutôt qu’il convient
d’
avoir recours : l’individu est plutôt donné, la personne reste plutôt
172
t plutôt un état, être personne un acte. Et ainsi
de
suite. L’essentiel est de ne jamais perdre de vue l’unité concrète, u
173
sonne un acte. Et ainsi de suite. L’essentiel est
de
ne jamais perdre de vue l’unité concrète, unique et non réitérable, d
174
nsi de suite. L’essentiel est de ne jamais perdre
de
vue l’unité concrète, unique et non réitérable, de tout être humain.
175
e vue l’unité concrète, unique et non réitérable,
de
tout être humain. C’est du reste le seul concret véritable — l’autre
176
concret véritable — l’autre n’étant qu’un concret
de
départ —, le seul qui participe de l’être en tant qu’être ; le seul d
177
qu’un concret de départ —, le seul qui participe
de
l’être en tant qu’être ; le seul dont l’émergence signifie dépassemen
178
trice ; le seul qui puisse prétendre à la dignité
d’
un fait incontestable, projeté toutefois au-delà de toute facticité. S
179
’un fait incontestable, projeté toutefois au-delà
de
toute facticité. Sans déboucher sur cette perspective, primordiale au
180
u’il parle (dans Qui est moi aujourd’hui, p. 268)
de
la « factualité transcendantale, concept clé peu remarqué de Husserl
181
tualité transcendantale, concept clé peu remarqué
de
Husserl », et qu’il interprète cette archifactualité en précisant que
182
ait du sujet que dans du JE, du JE que pour moi,
de
sens que pour moi… » Malgré la dangereuse pente monadique (et donc pl
183
e pente monadique (et donc plutôt individualiste)
de
ce propos, il est permis de croire qu’il n’aurait point déplu à Denis
184
lutôt individualiste) de ce propos, il est permis
de
croire qu’il n’aurait point déplu à Denis de Rougemont. N’a-t-il pas
185
, à plusieurs reprises, que c’est par sa capacité
de
dire JE que, de la chrysalide originelle que représente l’individu, s
186
prises, que c’est par sa capacité de dire JE que,
de
la chrysalide originelle que représente l’individu, se dégage la pers
187
, afin d’entreprendre son envol ? Mais le concept
de
personne, pour lui, était indissolublement lié au mystère du Dieu un
188
n article publié récemment dans le numéro spécial
de
Cadmos , consacré à Denis de Rougemont, je n’insisterai pas ici — bi
189
ici — bien que certain que sa pensée risque ainsi
d’
être mutilée ou, tout au moins, appauvrie — sur l’importance de cette
190
e ou, tout au moins, appauvrie — sur l’importance
de
cette liaison onto-lectique. Non pas que le personnalisme soit déduct
191
que. Non pas que le personnalisme soit déductible
d’
une théologie, quelle qu’elle soit. Les non-conformistes des années 19
192
rgée, semble-t-il, par Emmanuel Mounter, au cours
d’
un entretien avec Denis de Rougemont, ils s’enrichissaient de leurs di
193
ien avec Denis de Rougemont, ils s’enrichissaient
de
leurs différences. Et plus que quiconque, Denis de Rougemont paraissa
194
r Proudhon et Barth, pensée et politique, rigueur
de
la foi et philosophie de l’acte. Si j’ai utilisé un vocable — articul
195
ée et politique, rigueur de la foi et philosophie
de
l’acte. Si j’ai utilisé un vocable — articuler — philosophiquement in
196
rrence, toute certitude terminologique risquerait
d’
être trompeuse. On ne peut dé-finir, en rigueur de terme, ce qui échap
197
d’être trompeuse. On ne peut dé-finir, en rigueur
de
terme, ce qui échappe précisément à la finitude. Ce n’est qu’à partir
198
voile l’œuvre — à la fois le penser et le faire —
de
l’auteur de Politique de la personne et de Penser avec les mains .
199
e — à la fois le penser et le faire — de l’auteur
de
Politique de la personne et de Penser avec les mains . Œuvre si di
200
le penser et le faire — de l’auteur de Politique
de
la personne et de Penser avec les mains . Œuvre si diverse et si ab
201
re — de l’auteur de Politique de la personne et
de
Penser avec les mains . Œuvre si diverse et si abondante qu’il faudr
202
n hégélienne, s’entend), inévitablement précaire,
d’
un cheminement difficile, aventureux et créateur ; d’une vie bien remp
203
n cheminement difficile, aventureux et créateur ;
d’
une vie bien remplie ; d’un destin. Sans avoir aucunement une telle pr
204
aventureux et créateur ; d’une vie bien remplie ;
d’
un destin. Sans avoir aucunement une telle prétention, il me paraît so
205
nt une telle prétention, il me paraît souhaitable
de
rappeler, pour conclure, que ses préoccupations philosophiques, voire
206
upations philosophiques, voire théologiques, loin
d’
écarter Denis de Rougemont du réel quotidien, l’ont incité sans cesse,
207
ulement la connaissance, mais l’action. Conscient
de
son grand talent proprement littéraire — Jean-Paul Sartre, quelque pe
208
e — Jean-Paul Sartre, quelque peu jaloux, parlait
de
« l’habileté précise du style » —, il répugnait parfois à sacrifier u
209
il répugnait parfois à sacrifier une large partie
de
son temps à l’interminable combat européen. Mais il savait, même lors
210
i qui a été, avec Dandieu et ses amis, le chantre
de
la diversité libératrice, pouvait-il faire semblant d’ignorer que l’E
211
diversité libératrice, pouvait-il faire semblant
d’
ignorer que l’Europe, sans qu’elle le mérite, reste aujourd’hui, pour
212
reste aujourd’hui, pour l’homme, l’ultime chance
de
la plurappartenance libératrice, un autre des mots-clés de sa pensée
213
rappartenance libératrice, un autre des mots-clés
de
sa pensée ! Il convient d’insister in fine sur ce point, ne fût-ce qu
214
un autre des mots-clés de sa pensée ! Il convient
d’
insister in fine sur ce point, ne fût-ce que pour dénoncer les terribl
215
nsi qu’aux valeurs nationales — approche concrète
de
l’universel —, mais de toutes les fibres de son être, il refusait le
216
onales — approche concrète de l’universel —, mais
de
toutes les fibres de son être, il refusait le stato-nationalisme au f
217
crète de l’universel —, mais de toutes les fibres
de
son être, il refusait le stato-nationalisme au front bas. L’Europe po
218
t bas. L’Europe pour laquelle il n’a jamais cessé
de
militer n’était pas celle du cosmopolitisme, mais non plus celle des
219
t que telle, on l’a déjà vu, ne saurait dépendre,
de
quelque manière que ce soit, ni de l’histoire, ni de la géographie, t
220
rait dépendre, de quelque manière que ce soit, ni
de
l’histoire, ni de la géographie, tout en étant façonnée par elles. Ma
221
quelque manière que ce soit, ni de l’histoire, ni
de
la géographie, tout en étant façonnée par elles. Mais quelque chose s
222
ue chose s’est accompli, dans la petite péninsule
de
l’Asie, secouée par des affrontements inexpiables, ravagée par des gu
223
avagée par des guerres incessantes, quelque chose
d’
ineffaçable qu’il n’est pas interdit de rapprocher d’une prise de cons
224
lque chose d’ineffaçable qu’il n’est pas interdit
de
rapprocher d’une prise de conscience de la personne par elle-même. À
225
neffaçable qu’il n’est pas interdit de rapprocher
d’
une prise de conscience de la personne par elle-même. À cette prise de
226
interdit de rapprocher d’une prise de conscience
de
la personne par elle-même. À cette prise de conscience — dont on peut
227
le a rendu les révolutions possibles : en rigueur
de
termes, toutes les révolutions se sont déroulées en Europe ou ont été
228
de Rougemont disait, avec une ironique modestie,
de
l’exploration de notre planète : ce n’est vraiment pas notre faute si
229
ait, avec une ironique modestie, de l’exploration
de
notre planète : ce n’est vraiment pas notre faute si c’est l’Europe q
230
nvinciblement une phrase des deux dernières pages
de
La Révolution nécessaire (Robert Aron et Arnaud Dandieu), pages dont
231
n est un — qui exprimait les convictions communes
de
toute l’équipe de l’Ordre nouveau servît aussi de conclusion à un cho
232
rimait les convictions communes de toute l’équipe
de
l’Ordre nouveau servît aussi de conclusion à un choix de textes dont
233
de toute l’équipe de l’Ordre nouveau servît aussi
de
conclusion à un choix de textes dont nous sommes redevables à deux de
234
dre nouveau servît aussi de conclusion à un choix
de
textes dont nous sommes redevables à deux de ses anciens étudiants —
235
hoix de textes dont nous sommes redevables à deux
de
ses anciens étudiants — grâce leur en soit rendue : Appuyé sur la t
236
diffuser, mais non dominer, […] le vieil étatisme
de
la décadence et de l’Asie, toutes les sottises racistes, matérialiste
237
dominer, […] le vieil étatisme de la décadence et
de
l’Asie, toutes les sottises racistes, matérialistes et théocratiques,
238
montent sous l’armure du rationalisme, à l’assaut
de
la vieille Europe étouffée sous ses forteresses pourries… Lentement,
239
, la destruction tyrannique s’avance, […] cortège
de
massacres et de démagogie… L’Europe s’engourdit dans une agonie qui n
240
tyrannique s’avance, […] cortège de massacres et
de
démagogie… L’Europe s’engourdit dans une agonie qui n’est même pas gr
241
la mort. Ce qui est grandiose, c’est la victoire
de
l’homme. Le long des côtes de la Méditerranée et de la mer du Nord, [
242
, c’est la victoire de l’homme. Le long des côtes
de
la Méditerranée et de la mer du Nord, […] s’avance l’antique ennemi d
243
l’homme. Le long des côtes de la Méditerranée et
de
la mer du Nord, […] s’avance l’antique ennemi de l’homme. On l’appell
244
de la mer du Nord, […] s’avance l’antique ennemi
de
l’homme. On l’appellera État, matérialisme, racisme ou tyrannie ; mai
245
[…] nous appuyer sur la France. Il ne s’agit pas
de
défendre une cité. Il ne s’agit pas de défense. Mais de choix, d’affi
246
s’agit pas de défendre une cité. Il ne s’agit pas
de
défense. Mais de choix, d’affirmation, de création, de Révolution. No
247
endre une cité. Il ne s’agit pas de défense. Mais
de
choix, d’affirmation, de création, de Révolution. Nous sommes sur la
248
cité. Il ne s’agit pas de défense. Mais de choix,
d’
affirmation, de création, de Révolution. Nous sommes sur la terre déci
249
git pas de défense. Mais de choix, d’affirmation,
de
création, de Révolution. Nous sommes sur la terre décisive. L’heure e
250
fense. Mais de choix, d’affirmation, de création,
de
Révolution. Nous sommes sur la terre décisive. L’heure est venue. All
251
ns-y. Arnaud Dandieu nous a quittés, il y a plus
d’
un demi-siècle. Robert Aron n’est plus. Après beaucoup d’autres compag
252
gement, que l’on relise donc les dernières lignes
de
La Révolution nécessaire, où chaque mot porte, où chaque phrase éveil
253
ues… On se demandera alors — s’inspirant des vers
de
Goethe qui ont servi d’exergue à cette préface — si tous ces pères fo
254
rs — s’inspirant des vers de Goethe qui ont servi
d’
exergue à cette préface — si tous ces pères fondateurs, ces précurseur
255
b und Werde, ne sont pas sur le point de devenir.
De
devenir vraiment ce qu’ils sont. Ils ont labouré et ensemencé la terr
256
t labouré et ensemencé la terre décisive. L’heure
de
la moisson est venue. Allons-y. Alexandre Marc 1. Sauf indication c
257
ation contraire, les textes entre guillemets sont
de
Denis de Rougemont.
258
n Mantzouranis] Le présent ouvrage est le fruit
d’
un travail effectué sur les cours, professés entre 1963 et 1978 à l’In
259
sés entre 1963 et 1978 à l’Institut universitaire
d’
études européennes de Genève, par son fondateur et directeur d’alors,
260
8 à l’Institut universitaire d’études européennes
de
Genève, par son fondateur et directeur d’alors, Denis de Rougemont. C
261
péennes de Genève, par son fondateur et directeur
d’
alors, Denis de Rougemont. Celui-ci disparu, il reste une œuvre, à la
262
disparu, il reste une œuvre, à la fois empreinte
d’
une réflexion fondamentale et profondément engagée dans son époque, qu
263
Denis de Rougemont avait, au suprême degré, l’art
de
remonter aux sources de la culture européenne pour nourrir l’intellig
264
, au suprême degré, l’art de remonter aux sources
de
la culture européenne pour nourrir l’intelligence du présent et éclai
265
our nourrir l’intelligence du présent et éclairer
de
manière décisive les enjeux les plus cruciaux qui se poseront encore
266
elle, et c’est souligner combien elle mériterait
d’
être mieux connue. Certains textes importants ne sont plus aisément ac
267
and public2. De plus, il manque encore une vision
d’
ensemble des éléments essentiels de cette œuvre gigantesque, étalée su
268
ore une vision d’ensemble des éléments essentiels
de
cette œuvre gigantesque, étalée sur plus d’un demi-siècle. C’est dans
269
tiels de cette œuvre gigantesque, étalée sur plus
d’
un demi-siècle. C’est dans cet esprit que ce travail a été effectué, d
270
s spécialement les traits philosophico-politiques
de
sa pensée. Un cours n’est pas souvent représentatif de son auteur, c
271
pensée. Un cours n’est pas souvent représentatif
de
son auteur, car il est nécessairement didactique et descriptif : il y
272
s’en tenir là. Tout notre problème a été en fait
de
repérer les instants, parfois très brefs, où s’exprimait la pensée or
273
is très brefs, où s’exprimait la pensée originale
de
l’auteur par-delà la quantité de références dont elle se nourrit. Ceu
274
pensée originale de l’auteur par-delà la quantité
de
références dont elle se nourrit. Ceux qui ont assisté à ses cours pou
275
u’il savait. Il y avait non seulement l’érudition
d’
un homme, mais aussi sa position par rapport à cette érudition-là. Den
276
ion que tous les étudiants ne peuvent pas manquer
de
se poser un jour ou l’autre : à quoi sert-il de connaître tout cela ?
277
r de se poser un jour ou l’autre : à quoi sert-il
de
connaître tout cela ? En bref, tous ceux qui ont été marqués par son
278
re l’homme et ce qu’il exposait, qui n’était rien
d’
autre que l’ensemble de la culture européenne, dans laquelle il se sit
279
exposait, qui n’était rien d’autre que l’ensemble
de
la culture européenne, dans laquelle il se situait et sur laquelle il
280
mais des personnes conscientes des contradictions
de
notre culture et de notre vie, sachant les assumer sans jamais les dé
281
onscientes des contradictions de notre culture et
de
notre vie, sachant les assumer sans jamais les détruire. On connaît D
282
e penseur, philosophe, essayiste, écrivain, homme
d’
action, mais on le connaît encore mal en tant qu’enseignant dispensant
283
Tel devrait être, à notre sens, une des fonctions
de
cet ouvrage, que d’en garder la trace et d’en diffuser l’acquis. Les
284
notre sens, une des fonctions de cet ouvrage, que
d’
en garder la trace et d’en diffuser l’acquis. Les fragments qui ont ét
285
tions de cet ouvrage, que d’en garder la trace et
d’
en diffuser l’acquis. Les fragments qui ont été sélectionnés font appa
286
té sélectionnés font apparaître un certain nombre
de
thèmes qui ont été distribués en autant de chapitres. Cette classific
287
nombre de thèmes qui ont été distribués en autant
de
chapitres. Cette classification, édifiée pour des besoins de clarté,
288
s. Cette classification, édifiée pour des besoins
de
clarté, recèle une part d’arbitraire que nous assumons, dans la mesur
289
ifiée pour des besoins de clarté, recèle une part
d’
arbitraire que nous assumons, dans la mesure où la pensée de Denis de
290
re que nous assumons, dans la mesure où la pensée
de
Denis de Rougemont forme un tout. Aussi, chacun des chapitres renvoie
291
chapitres renvoie à tous les autres et la lecture
de
cet ouvrage, si elle se veut profitable, ne pourra être qu’une lectur
292
croisée. Il nous semble, par exemple, impossible
de
ne pas lier le fédéralisme à l’Europe, aux communautés, aux régions,
293
dernière instance, à la personne. Dans la pensée
de
Denis de Rougemont en effet, le pôle « personnel » (plutôt qu’« indiv
294
, deux mois avant sa mort. Il put nous faire part
de
sa satisfaction, mais il n’eut pas le temps de revoir le style des fr
295
rt de sa satisfaction, mais il n’eut pas le temps
de
revoir le style des fragments que nous avions sélectionnés. Établis à
296
lectionnés. Établis à partir de notes abrégées ou
de
bandes magnétiques, ceux-ci nécessitaient, en effet, un travail de mi
297
ques, ceux-ci nécessitaient, en effet, un travail
de
mise en forme pour pouvoir être publiés sous forme écrite. Cela ne po
298
et envisagé plusieurs hypothèses (y compris celle
de
ne pas publier des fragments dont la forme — mais non le fond — lui e
299
fond — lui eût semblé imparfaite), nous décidâmes
de
nous en tenir à des corrections minimales, nous contentant d’éliminer
300
enir à des corrections minimales, nous contentant
d’
éliminer les redites et les tournures les plus marquées par le discour
301
ours oral. Le « texte » ainsi issu garde la trace
de
la voix même de Denis de Rougemont, parlant à ses étudiants. Nous sav
302
texte » ainsi issu garde la trace de la voix même
de
Denis de Rougemont, parlant à ses étudiants. Nous savons très bien qu
303
st pourquoi nous assumons toute la responsabilité
d’
une transcription que Denis de Rougemont eût effectuée bien mieux que
304
ue le style ici consigné aura su saisir l’instant
d’
une pensée vivante, et à travers elle, l’homme qui l’exprimait. Jean M
305
Saint-Ouen 2. Citons, par exemple : Politique
de
la personne , L’Aventure occidentale de l’homme , Vingt-huit siècle
306
olitique de la personne , L’Aventure occidentale
de
l’homme , Vingt-huit siècles d’Europe , L’Avenir est notre affaire
307
ture occidentale de l’homme , Vingt-huit siècles
d’
Europe , L’Avenir est notre affaire , tous épuisés. 3. Cette facette
308
t notre affaire , tous épuisés. 3. Cette facette
de
la pensée de Denis de Rougemont est illustrée notamment par L’Amour
309
re , tous épuisés. 3. Cette facette de la pensée
de
Denis de Rougemont est illustrée notamment par L’Amour et l’Occident
310
Communautés, communesa 1. Les sources
de
l’idée de commune 20 février 1970 La commune urbaine ou cité-État
311
munautés, communesa 1. Les sources de l’idée
de
commune 20 février 1970 La commune urbaine ou cité-État qui se man
312
sprits des hommes malgré tous les bouleversements
de
la fin de l’Empire d’Alexandre, de la fin de l’Empire romain et des i
313
hommes malgré tous les bouleversements de la fin
de
l’Empire d’Alexandre, de la fin de l’Empire romain et des invasions b
314
ré tous les bouleversements de la fin de l’Empire
d’
Alexandre, de la fin de l’Empire romain et des invasions barbares ; le
315
ouleversements de la fin de l’Empire d’Alexandre,
de
la fin de l’Empire romain et des invasions barbares ; les mouvements
316
ents de la fin de l’Empire d’Alexandre, de la fin
de
l’Empire romain et des invasions barbares ; les mouvements de balanci
317
romain et des invasions barbares ; les mouvements
de
balancier qui font passer du sacralisme de la tribu à l’individualism
318
ements de balancier qui font passer du sacralisme
de
la tribu à l’individualisme, les individus se retrouvant ensuite dans
319
ns une cité, où ils subissent bientôt la tyrannie
d’
une collectivité, ce qui amène un nouvel éclatement de l’individualism
320
e collectivité, ce qui amène un nouvel éclatement
de
l’individualisme, et ainsi de suite ; le point d’équilibre, ou moment
321
n nouvel éclatement de l’individualisme, et ainsi
de
suite ; le point d’équilibre, ou moment civique, ou personnalisme, ét
322
de l’individualisme, et ainsi de suite ; le point
d’
équilibre, ou moment civique, ou personnalisme, étant réalisé au momen
323
idéal, mais qui apparaissent à certaines périodes
d’
équilibre politique. À ces sources antiques, il faut ajouter la source
324
a source chrétienne. La cité du Moyen Âge résulte
d’
une combinaison de la civitas antique et de la paroisse chrétienne. La
325
e. La cité du Moyen Âge résulte d’une combinaison
de
la civitas antique et de la paroisse chrétienne. La troisième catégor
326
ésulte d’une combinaison de la civitas antique et
de
la paroisse chrétienne. La troisième catégorie de sources est germani
327
de la paroisse chrétienne. La troisième catégorie
de
sources est germanique. Elle se manifeste dans la cité du Moyen Âge p
328
nel), les particularismes locaux, le grand nombre
d’
autorités différentes qui se recouvrent et se complètent, et le besoin
329
qui se recouvrent et se complètent, et le besoin
de
souveraineté. 14 janvier 1977 Une des racines des communautés de form
330
. 14 janvier 1977 Une des racines des communautés
de
forme spécifiquement européenne qui se sont formées au Moyen Âge est
331
que, civitas romaine, qui est une réalité non pas
de
sang, de consanguinité ni de race, mais de droit. Une troisième sourc
332
tas romaine, qui est une réalité non pas de sang,
de
consanguinité ni de race, mais de droit. Une troisième source de comm
333
une réalité non pas de sang, de consanguinité ni
de
race, mais de droit. Une troisième source de communauté, qui est intr
334
on pas de sang, de consanguinité ni de race, mais
de
droit. Une troisième source de communauté, qui est introduite, elle,
335
é ni de race, mais de droit. Une troisième source
de
communauté, qui est introduite, elle, par le christianisme, par l’Égl
336
l’origine spirituelle, la communauté spirituelle
de
la paroisse, de l’Église. Donc on peut dire que convergent pour forme
337
tuelle, la communauté spirituelle de la paroisse,
de
l’Église. Donc on peut dire que convergent pour former ces communauté
338
a société et l’esprit. Dans la version germanique
de
la communauté, l’homme est défini par sa force et par son rang. Dans
339
communes germaniques, c’est d’une part la volonté
de
se gouverner soi-même, ce qu’on appelle aujourd’hui l’autogestion, le
340
on, le gouvernement local indépendant, la volonté
de
se gouverner par un collège de prud’hommes, non par un seul chef qui
341
endant, la volonté de se gouverner par un collège
de
prud’hommes, non par un seul chef qui serait tout de suite un tyran,
342
rt un certain esprit frondeur contre toute espèce
de
pouvoir personnel, que ce soit donc celui d’un dictateur ou celui d’u
343
pèce de pouvoir personnel, que ce soit donc celui
d’
un dictateur ou celui d’un seigneur voisin, qui serait tenté de faire
344
l, que ce soit donc celui d’un dictateur ou celui
d’
un seigneur voisin, qui serait tenté de faire main basse sur la cité,
345
r ou celui d’un seigneur voisin, qui serait tenté
de
faire main basse sur la cité, sur la commune. C’est aussi un esprit h
346
l’esprit des communes, c’est d’abord une volonté
de
se gouverner soi-même. C’est donc un esprit frondeur contre toute esp
347
C’est donc un esprit frondeur contre toute espèce
de
pouvoir personnel, mais néanmoins pas un esprit démocratique : des hi
348
maniques, et d’autre part, dans l’état économique
de
l’époque : les commerçants tiennent le haut du pavé. 27 janvier 1967
349
l’appeler l’époque des communes, des communautés
de
manière plus générale. Toute la vie de l’homme du Moyen Âge est faite
350
ommunautés de manière plus générale. Toute la vie
de
l’homme du Moyen Âge est faite dans et par des communautés, dont la m
351
ur desquelles se sont recréés toutes les branches
de
la culture en Europe et même, à en croire certains historiens et soci
352
les linéaments du parlementarisme, des conseils,
de
la manière de débattre des affaires publiques en collèges ; — les cor
353
s du parlementarisme, des conseils, de la manière
de
débattre des affaires publiques en collèges ; — les corporations et,
354
ur un plan déjà plus profane, quoiqu’étant coloré
de
sacré, les ordres de chevalerie ; — la Table ronde, connue par les ro
355
profane, quoiqu’étant coloré de sacré, les ordres
de
chevalerie ; — la Table ronde, connue par les romans bretons, qui est
356
s ont partout remarqué que chaque tribu se targue
de
supériorité sur toutes les autres, quand elle ne va pas jusqu’à dénie
357
ne va pas jusqu’à dénier aux étrangers la qualité
d’
hommes véritables. 2. communes, communautés, universités 20 févr
358
nautés, universités 20 février 1970 Deux types
de
communautés sont très typiques du Moyen Âge : les universités et les
359
les universités sont des communautés dans l’ordre
de
la liberté plus que dans l’ordre de la discipline ou de l’efficacité.
360
dans l’ordre de la liberté plus que dans l’ordre
de
la discipline ou de l’efficacité. Les universités apparaissent en Eur
361
liberté plus que dans l’ordre de la discipline ou
de
l’efficacité. Les universités apparaissent en Europe au xiie siècle.
362
ropre police, et qui ne relèvent pas du prince ou
de
l’évêque voisin, mais uniquement, dans les pays d’empire, de l’empere
363
e l’évêque voisin, mais uniquement, dans les pays
d’
empire, de l’empereur, et dans les pays hors de l’empire, du pape. Ell
364
voisin, mais uniquement, dans les pays d’empire,
de
l’empereur, et dans les pays hors de l’empire, du pape. Elles sont do
365
r la souveraineté, l’exterritorialité et le droit
de
s’administrer. La forme de ces unités autonomes correspond aux abbaye
366
itorialité et le droit de s’administrer. La forme
de
ces unités autonomes correspond aux abbayes d’une part, et aux commun
367
ersitas ne désignera plus n’importe quelle espèce
de
communauté, mais surtout, et finalement exclusivement, les communauté
368
out, et finalement exclusivement, les communautés
d’
études supérieures. 2 décembre 1966 La naissance des universités se pl
369
ope. Cette naissance est absolument contemporaine
de
la naissance des communes et des corporations au Moyen Âge ; ce n’est
370
leur autonomie en se faisant donner des « lettres
d’
immédiateté impériale ». C’est exactement le même mouvement qui a amen
371
vier 1967 Les universités sont un modèle communal
de
deux manières : d’abord historiquement puisqu’elles ont été de vraies
372
res : d’abord historiquement puisqu’elles ont été
de
vraies communes ; ensuite, il se trouve qu’elles pourraient être le l
373
qui se posent aux communes aujourd’hui, problèmes
de
dimensions, problèmes de participation, problèmes de multiplication d
374
s aujourd’hui, problèmes de dimensions, problèmes
de
participation, problèmes de multiplication des compétences, sont les
375
dimensions, problèmes de participation, problèmes
de
multiplication des compétences, sont les problèmes qui se posent spéc
376
vent être, ce que leur nom indique, ce serait une
de
leurs tâches privilégiées que de les étudier et d’essayer d’y trouver
377
e, ce serait une de leurs tâches privilégiées que
de
les étudier et d’essayer d’y trouver des solutions à leur étage. 9 dé
378
e leurs tâches privilégiées que de les étudier et
d’
essayer d’y trouver des solutions à leur étage. 9 décembre 1966 On par
379
ches privilégiées que de les étudier et d’essayer
d’
y trouver des solutions à leur étage. 9 décembre 1966 On parle beaucou
380
mes à peu près semblables : on cherche un optimum
de
dimension, du nombre des étudiants et des professeurs dans les univer
381
universités. Dans ce cas-là, je n’ai qu’un remède
de
bonne femme, mais j’y crois dur comme fer ; je crois à la vertu des c
382
niversitaires. Cela me paraît être une des règles
d’
or de la culture européenne qui a toujours été — depuis la Grèce — de
383
sitaires. Cela me paraît être une des règles d’or
de
la culture européenne qui a toujours été — depuis la Grèce — de cherc
384
européenne qui a toujours été — depuis la Grèce —
de
chercher une certaine mesure, de ne pas dépasser certaines dimensions
385
epuis la Grèce — de chercher une certaine mesure,
de
ne pas dépasser certaines dimensions, au-delà desquelles les problème
386
nsions, au-delà desquelles les problèmes changent
de
nature, même qualitative. Donc, la solution pour répondre à cet accro
387
tesque des effectifs universitaires ne serait pas
de
gonfler à l’infini les universités existantes, ce qu’on est en train
388
lème casse-tête du maire, du syndic, du président
de
conseil municipal d’une commune d’aujourd’hui, est aussi difficile qu
389
ire, du syndic, du président de conseil municipal
d’
une commune d’aujourd’hui, est aussi difficile que celui d’un homme cu
390
, du président de conseil municipal d’une commune
d’
aujourd’hui, est aussi difficile que celui d’un homme cultivé qui voud
391
mune d’aujourd’hui, est aussi difficile que celui
d’
un homme cultivé qui voudrait se rendre compte de toutes les spécialit
392
d’un homme cultivé qui voudrait se rendre compte
de
toutes les spécialités à la fois. Il est obligé de prendre des décisi
393
e toutes les spécialités à la fois. Il est obligé
de
prendre des décisions, l’un dans le domaine de la culture ou de la cr
394
gé de prendre des décisions, l’un dans le domaine
de
la culture ou de la création, l’autre dans le domaine de l’administra
395
décisions, l’un dans le domaine de la culture ou
de
la création, l’autre dans le domaine de l’administration, qu’il ne pe
396
ulture ou de la création, l’autre dans le domaine
de
l’administration, qu’il ne peut pas prendre à cause de cette explosio
397
lisations. Aux difficultés pour l’homme qui pense
de
comprendre le monde dans lequel nous vivons aujourd’hui — le cosmos,
398
s — correspondent les difficultés pour le citoyen
de
participer aux décisions civiques qui vont influencer, à travers la v
399
ns civiques qui vont influencer, à travers la vie
de
la cité et de la nation, sa vie personnelle. On peut voir donc des co
400
i vont influencer, à travers la vie de la cité et
de
la nation, sa vie personnelle. On peut voir donc des correspondances
401
s entre le problème des dimensions et le problème
de
la participation. 3. Démocratie et petites communautés 17 juin
402
omment l’a-t-elle créée ? Par les théories tirées
de
Rousseau, moyennant le malentendu fondamental que je vais indiquer. L
403
nérale, chez Rousseau, ne devait s’appliquer qu’à
de
petites communautés, de petites cités — petites communautés rurales,
404
e devait s’appliquer qu’à de petites communautés,
de
petites cités — petites communautés rurales, comme au centre de la Su
405
és — petites communautés rurales, comme au centre
de
la Suisse, ou petites cités, comme Genève — puis ensuite, tout d’un c
406
petites cités, comme Genève — puis ensuite, tout
d’
un coup, par les jacobins et les théoriciens de la Révolution français
407
ut d’un coup, par les jacobins et les théoriciens
de
la Révolution française, elle a été appliquée à un grand pays de ving
408
n française, elle a été appliquée à un grand pays
de
vingt-trois-millions d’habitants. 27 juin 1969 Rousseau vient ajouter
409
appliquée à un grand pays de vingt-trois-millions
d’
habitants. 27 juin 1969 Rousseau vient ajouter quelque chose de très i
410
27 juin 1969 Rousseau vient ajouter quelque chose
de
très important, en introduisant le concept de volonté générale. Il pr
411
ose de très important, en introduisant le concept
de
volonté générale. Il prépare la Révolution française, qui s’empare de
412
a Révolution française, qui s’empare des concepts
de
Rousseau sans se douter qu’elle les dénature complètement. En effet,
413
En effet, pour Rousseau, il ne pouvait s’agir que
d’
une cité très petite, telle celle de Genève. Les inspirateurs de la Co
414
it s’agir que d’une cité très petite, telle celle
de
Genève. Les inspirateurs de la Convention n’ont pas fait attention à
415
s petite, telle celle de Genève. Les inspirateurs
de
la Convention n’ont pas fait attention à toutes les mises en garde pr
416
C’est pourquoi on a pu parfois, par erreur, faire
de
Rousseau l’ancêtre des totalitaires du xxe siècle. 15 novembre 1968
417
s du xxe siècle. 15 novembre 1968 Rousseau parle
de
la volonté générale du peuple en ayant toujours à l’esprit quelque ch
418
peuple en ayant toujours à l’esprit quelque chose
de
très concret et qu’il connaît bien, c’est la Landsgemeinde de la Suis
419
és sur la place du village — ou tous les citoyens
de
Genève — assemblés dans la cathédrale. C’est cela, le « souverain » d
420
te sur la place. Dès qu’on dépasse ces dimensions
de
la réunion de tous les citoyens dans une enceinte, on ne peut plus vo
421
e. Dès qu’on dépasse ces dimensions de la réunion
de
tous les citoyens dans une enceinte, on ne peut plus voir le peuple,
422
plus voir le peuple, on ne peut donc plus parler
de
l’expression d’une volonté générale et on tombe dans tous les sophism
423
uple, on ne peut donc plus parler de l’expression
d’
une volonté générale et on tombe dans tous les sophismes qui conduisen
424
ictature se prétend l’expression seule admissible
de
la volonté générale. 17 février 1967 Il s’agit de recréer des possibi
425
de la volonté générale. 17 février 1967 Il s’agit
de
recréer des possibilités de communauté humaine définie maintenant, no
426
évrier 1967 Il s’agit de recréer des possibilités
de
communauté humaine définie maintenant, non plus comme la nation ancie
427
s sociaux électifs, c’est-à-dire dans les groupes
de
communautés auxquels il pourra librement adhérer, communautés qui, da
428
argement la petite cellule sociale qu’est l’unité
d’
habitation ou la cité-satellite. Ces groupes sociaux électifs sont don
429
qui est très sensible, c’est que chacun a besoin
de
tous, et que tous ont besoin de chacun, tous ont besoin de responsabl
430
e chacun a besoin de tous, et que tous ont besoin
de
chacun, tous ont besoin de responsables individuels, il s’agit vraime
431
et que tous ont besoin de chacun, tous ont besoin
de
responsables individuels, il s’agit vraiment d’une équipe et non d’un
432
n de responsables individuels, il s’agit vraiment
d’
une équipe et non d’un troupeau. La définition de cet état de choses e
433
dividuels, il s’agit vraiment d’une équipe et non
d’
un troupeau. La définition de cet état de choses est devenue la devise
434
d’une équipe et non d’un troupeau. La définition
de
cet état de choses est devenue la devise des Suisses dès le Moyen Âge
435
aduit exactement cela. 4. Civisme et dimension
de
la cité 3 décembre 1976 Si la cité est mesurée, l’homme peut s’y m
436
onsable, l’un étant le complément et la condition
de
l’autre. Si la cité devient trop grande, il n’y a plus que des indivi
437
vier 1967 1. Dans la petite cité grecque, le type
d’
homme qui correspond aux dimensions « petite cité » est le citoyen act
438
ctif, libre et responsable. 2. Puis vient l’étape
de
la cité hellénistique, la cité de l’époque d’Alexandre, puis de ses s
439
s vient l’étape de la cité hellénistique, la cité
de
l’époque d’Alexandre, puis de ses successeurs, la multiplication des
440
ape de la cité hellénistique, la cité de l’époque
d’
Alexandre, puis de ses successeurs, la multiplication des grandes vill
441
lénistique, la cité de l’époque d’Alexandre, puis
de
ses successeurs, la multiplication des grandes villes, là où il n’y a
442
les, là où il n’y avait rien. C’était une période
de
création artificielle de cités qui n’avaient pas les mesures traditio
443
ien. C’était une période de création artificielle
de
cités qui n’avaient pas les mesures traditionnelles des petites cités
444
ues, qui étaient bâties en damier — selon le plan
de
Milet — avec de grandes avenues en croix, puis de plus petites avenue
445
bâties en damier — selon le plan de Milet — avec
de
grandes avenues en croix, puis de plus petites avenues qui achevaient
446
des dimensions telles qu’il n’était plus question
de
réunir toute la population sur l’agora, de sorte que la population se
447
er des commerçants, etc. Spécialisation et manque
d’
intérêt pour les choses civiques, par éloignement. Le type d’individu
448
our les choses civiques, par éloignement. Le type
d’
individu qui correspond à cette cité est donc l’individu civiquement p
449
vidu civiquement passif. Cette décadence civique
de
la cité, suivant immédiatement l’agrandissement de ses dimensions, se
450
e la cité, suivant immédiatement l’agrandissement
de
ses dimensions, se produit très vite : entre le ive et le iiie sièc
451
ive et le iiie siècle. On arrive à un tel degré
de
passivité des citoyens, qu’on peut dire que la devise de ces villes e
452
ivité des citoyens, qu’on peut dire que la devise
de
ces villes est « un tyran pour tous et chacun pour soi ». 26 novembre
453
à être gouvernés au lieu de se gouverner. L’homme
de
la polis se gouvernait. L’homme de la grande ville est gouverné de l’
454
erner. L’homme de la polis se gouvernait. L’homme
de
la grande ville est gouverné de l’extérieur, d’une manière passive, i
455
uvernait. L’homme de la grande ville est gouverné
de
l’extérieur, d’une manière passive, il assiste aux luttes entre les c
456
e de la grande ville est gouverné de l’extérieur,
d’
une manière passive, il assiste aux luttes entre les chefs de partis,
457
re passive, il assiste aux luttes entre les chefs
de
partis, beaucoup plus qu’il n’y prend sa part ; il est là vraiment en
458
jouer le rôle de public devant les grands ténors
de
la politique. Il est passionné parfois, mais lui-même ne joue pas, c’
459
évident que personne ne peut participer à la vie
d’
une commune comme celle de New York, qui groupe huit à neuf millions d
460
eut participer à la vie d’une commune comme celle
de
New York, qui groupe huit à neuf millions d’habitants, c’est de la fo
461
elle de New York, qui groupe huit à neuf millions
d’
habitants, c’est de la folie pure. On a dépassé complètement toute pos
462
ui groupe huit à neuf millions d’habitants, c’est
de
la folie pure. On a dépassé complètement toute possibilité de concevo
463
pure. On a dépassé complètement toute possibilité
de
concevoir l’ensemble civique dans lequel on pourrait agir. À partir d
464
lequel on pourrait agir. À partir de cet extrême
de
la mégalopole — on ne peut pas aller beaucoup plus loin —, il faudra
465
loin —, il faudra voir comment retrouver l’unité
de
base, la cellule, l’unité d’usage et de participation civique. 5.
466
nt retrouver l’unité de base, la cellule, l’unité
d’
usage et de participation civique. 5. Dimension politique et fédéra
467
r l’unité de base, la cellule, l’unité d’usage et
de
participation civique. 5. Dimension politique et fédéralisme 10
468
sme 10 février 1967 Megalopolis est une sorte
de
limite, qu’on est en train d’atteindre, au-delà de laquelle on ne pou
469
e limite, qu’on est en train d’atteindre, au-delà
de
laquelle on ne pourra plus aller. C’est la fin d’une évolution, dont
470
de laquelle on ne pourra plus aller. C’est la fin
d’
une évolution, dont le début était la Grèce. C’est la destruction de l
471
ont le début était la Grèce. C’est la destruction
de
la possibilité humaine de participer à l’administration des choses pu
472
e. C’est la destruction de la possibilité humaine
de
participer à l’administration des choses publiques, c’est la destruct
473
puisque polis était la ville en grec — s’occuper
de
politique signifiait s’occuper des affaires de la commune. Étymologiq
474
er de politique signifiait s’occuper des affaires
de
la commune. Étymologiquement, dépolitisation veut dire : désintérêt d
475
épolitisation veut dire : désintérêt des affaires
de
la cité et de la commune. 15 novembre 1968 Dans la première cité grec
476
veut dire : désintérêt des affaires de la cité et
de
la commune. 15 novembre 1968 Dans la première cité grecque, dans les
477
n pays est très petit, il y a pratiquement autant
de
magistrats que de citoyens. Quand le pays s’agrandit, la proportion d
478
tit, il y a pratiquement autant de magistrats que
de
citoyens. Quand le pays s’agrandit, la proportion des magistrats par
479
ire comme quelqu’un qui ne jouit pas des produits
de
son travail, n’en voit que les morceaux, on peut dire que l’homme des
480
écanismes qui échappent complètement à ses prises
de
décision. Cette ruine des bases de tout fédéralisme, de l’autonomie e
481
t à ses prises de décision. Cette ruine des bases
de
tout fédéralisme, de l’autonomie et de la participation, ce triomphe
482
ision. Cette ruine des bases de tout fédéralisme,
de
l’autonomie et de la participation, ce triomphe de l’impérialisme, ce
483
des bases de tout fédéralisme, de l’autonomie et
de
la participation, ce triomphe de l’impérialisme, ce fut en même temps
484
e l’autonomie et de la participation, ce triomphe
de
l’impérialisme, ce fut en même temps la ruine de la civilisation, de
485
de l’impérialisme, ce fut en même temps la ruine
de
la civilisation, de la culture grecque. Et de même que l’hégémonie ét
486
ce fut en même temps la ruine de la civilisation,
de
la culture grecque. Et de même que l’hégémonie était à la fois cause
487
que l’hégémonie était à la fois cause et résultat
de
la faiblesse politique des ligues, de même cet état de prolétarisatio
488
faiblesse politique des ligues, de même cet état
de
prolétarisation politique, d’individualisme atomisé, cette faiblesse
489
s, de même cet état de prolétarisation politique,
d’
individualisme atomisé, cette faiblesse intime du citoyen, ce vide soc
490
res militaires qui se multiplieront après la mort
d’
Alexandre. Car là où l’homme n’est plus total, ne veut plus être total
491
n’importe quel chiffre, pourvu qu’on trouve assez
d’
argent, assez de matières premières, et l’on ne se rend pas compte, ce
492
hiffre, pourvu qu’on trouve assez d’argent, assez
de
matières premières, et l’on ne se rend pas compte, ce faisant, qu’on
493
ce faisant, qu’on déforme complètement l’utilité
de
la chose, sa nature même. Voilà donc le problème principal, posé par
494
le problème principal, posé par les Grecs, celui
de
la dimension optimale entre deux maxima contradictoires : celui de la
495
ptimale entre deux maxima contradictoires : celui
de
la force qu’on voudrait obtenir par la fédération ou par l’accumulati
496
l’accumulation quantitative d’une part, et celui
de
la vitalité qu’on ne peut obtenir qu’en favorisant la participation e
497
965 La santé du fédéralisme dépend des dimensions
de
la cité, par quoi je ne veux pas dire nécessairement la petitesse en
498
aphiques et physiques d’une part, et des systèmes
de
distribution des pouvoirs de décision, d’autre part. 27 janvier 1967
499
art, et des systèmes de distribution des pouvoirs
de
décision, d’autre part. 27 janvier 1967 On ne peut pas empêcher l’ext
500
recréer dans chaque université des petites unités
de
recherche ou d’enseignement qui soient vivables et vivantes. C’est do
501
que université des petites unités de recherche ou
d’
enseignement qui soient vivables et vivantes. C’est donc le problème,
502
ntes. C’est donc le problème, posé par les Grecs,
de
la dimension optimale entre les deux maxima contradictoires de la pui
503
on optimale entre les deux maxima contradictoires
de
la puissance qu’on obtient par l’accumulation quantitative, et du bie
504
l’accumulation quantitative, et du bien-être ; ou
de
la grandeur, et de la participation et des libertés civiques. Sur la
505
titative, et du bien-être ; ou de la grandeur, et
de
la participation et des libertés civiques. Sur la participation, j’ai
506
grecques primitives permettaient à chaque citoyen
d’
exercer pleinement ses droits et ses devoirs civiques. 26 novembre 197
507
evoirs civiques. 26 novembre 1976 Dans le passage
de
la cité-État à l’empire trop vaste, à travers la fédération manquée d
508
nquée des cités-États grecques, il y a le passage
de
la cité à mesure d’homme, tel que Platon et Aristote (son maîtreb) l’
509
s grecques, il y a le passage de la cité à mesure
d’
homme, tel que Platon et Aristote (son maîtreb) l’avaient définie, à u
510
s hellénistiques qui se multiplient dans l’Empire
d’
Alexandre et dans les royaumes successeurs. Des cités qui, loin de s’a
511
à une croissance exponentielle, comme l’économie
de
l’époque. Ce problème des dimensions est absolument fondamental pour
512
dent que la banlieue n’a plus aucun des avantages
de
la campagne — on y détruit les arbres, le sol, les champs, et la fumé
513
ou la pierre — et n’a pas non plus les avantages
de
la ville, c’est-à-dire de la rencontre, de la vie commune. Dans les b
514
non plus les avantages de la ville, c’est-à-dire
de
la rencontre, de la vie commune. Dans les banlieues, chacun vit pour
515
ntages de la ville, c’est-à-dire de la rencontre,
de
la vie commune. Dans les banlieues, chacun vit pour soi, dans son coi
516
nlieues, chacun vit pour soi, dans son coin, dans
de
grandes habitations, il n’y a pas de centre des quartiers de banlieue
517
n coin, dans de grandes habitations, il n’y a pas
de
centre des quartiers de banlieue, bien entendu. C’est donc une espèce
518
habitations, il n’y a pas de centre des quartiers
de
banlieue, bien entendu. C’est donc une espèce de lèpre de pierre et d
519
de banlieue, bien entendu. C’est donc une espèce
de
lèpre de pierre et de fer, qui se répand autour des grandes villes, e
520
eue, bien entendu. C’est donc une espèce de lèpre
de
pierre et de fer, qui se répand autour des grandes villes, et à laque
521
endu. C’est donc une espèce de lèpre de pierre et
de
fer, qui se répand autour des grandes villes, et à laquelle on n’a su
522
ands parallélépipèdes, ou ces énormes alignements
de
maisons toutes pareilles qui ne sont rien d’autre que la rationalisat
523
ents de maisons toutes pareilles qui ne sont rien
d’
autre que la rationalisation du chaos social, du taudis, et qui ne son
524
os social, du taudis, et qui ne sont pas vraiment
de
nouvelles communes ajoutées aux anciennes villes, mais de simples ent
525
lles communes ajoutées aux anciennes villes, mais
de
simples entassements de solitudes, où vous ne trouvez ni la vie commu
526
ux anciennes villes, mais de simples entassements
de
solitudes, où vous ne trouvez ni la vie communautaire des petites cit
527
23 janvier 1970 Autour de la place et dans la rue
de
la polis primitive sont nées toutes les catégories de la vie politiqu
528
a polis primitive sont nées toutes les catégories
de
la vie politique qui sont encore les nôtres. Autour de l’agora se dre
529
iments importants qui symbolisent les composantes
de
la vie publique. L’agora est généralement un espace rectangulaire, au
530
geront dans le Sénat. La place est donc le centre
de
la vie politique, c’est là que se forme l’opinion et que se font les
531
e se forme l’opinion et que se font les décisions
de
l’assemblée. La question est de savoir si dans les villes d’aujourd’h
532
ont les décisions de l’assemblée. La question est
de
savoir si dans les villes d’aujourd’hui, qui sont devenues trop grand
533
lée. La question est de savoir si dans les villes
d’
aujourd’hui, qui sont devenues trop grandes, on peut parler de démocra
534
i, qui sont devenues trop grandes, on peut parler
de
démocratie réelle, de participation du citoyen à la vie des instituti
535
rop grandes, on peut parler de démocratie réelle,
de
participation du citoyen à la vie des institutions, alors que la plac
536
x, on pouvait trouver les tensions qui permettent
de
reconstruire au fond toute notre civilisation. Prenez, par exemple, l
537
nnellement en opposition, dans les pays où il y a
de
l’anticléricalisme ; entre l’église et la mairie, qui sont toutes les
538
tes les deux sur la place du bourg, du village ou
de
la petite ville, vous avez cette tension qui reproduit à l’échelle co
539
s ; en tout cas, dans toute la partie méridionale
de
l’Europe, c’est dans les cafés que toutes les oppositions se forment
540
x. C’est encore devant les cafés et les terrasses
de
cafés que vous avez, aujourd’hui, les kiosques à journaux. C’est auss
541
nom depuis deux et demi à trois millénaires. Lieu
de
rencontre donc, lieu de discussion, lieu de vente et d’achat, lieu de
542
à trois millénaires. Lieu de rencontre donc, lieu
de
discussion, lieu de vente et d’achat, lieu de flirt (indiquent tous l
543
Lieu de rencontre donc, lieu de discussion, lieu
de
vente et d’achat, lieu de flirt (indiquent tous les auteurs anciens),
544
contre donc, lieu de discussion, lieu de vente et
d’
achat, lieu de flirt (indiquent tous les auteurs anciens), rôle import
545
ieu de discussion, lieu de vente et d’achat, lieu
de
flirt (indiquent tous les auteurs anciens), rôle important dans la vi
546
dans la vie des cités grecques et romaines, lieu
de
conversations politiques, de création de partis, lieu de procès et au
547
es et romaines, lieu de conversations politiques,
de
création de partis, lieu de procès et aussi de théâtre, aux origines,
548
es, lieu de conversations politiques, de création
de
partis, lieu de procès et aussi de théâtre, aux origines, surtout en
549
ersations politiques, de création de partis, lieu
de
procès et aussi de théâtre, aux origines, surtout en Grèce, l’agora a
550
s, de création de partis, lieu de procès et aussi
de
théâtre, aux origines, surtout en Grèce, l’agora a en plus donné nais
551
ments modernes. Elle est vraiment la cellule mère
de
notre civilisation occidentale, et nous pouvons y repérer tous les él
552
tale, et nous pouvons y repérer tous les éléments
de
la chaîne chromosomique qui déterminera les formes de notre existence
553
a chaîne chromosomique qui déterminera les formes
de
notre existence politique. 19 février 1976 Quand une ville devient tr
554
ace des communes, qui était la manifestation même
de
la démocratie, devient tout à fait autre chose : un espace géométriqu
555
ts publics représentant les différentes fonctions
de
la société et les tensions qui l’animent. Dans la grande ville modern
556
ations éventuelles ou à leurs réunions au conseil
de
la ville. 10 février 1967 Ce qui est frappant dans la plupart des ouv
557
plupart des ouvrages sur l’urbanisme, sur la cité
de
demain, voire sur l’aménagement du territoire en général, c’est à que
558
int le problème civique, c’est-à-dire le problème
de
la participation de l’homme et de la femme, en état de s’en occuper,
559
que, c’est-à-dire le problème de la participation
de
l’homme et de la femme, en état de s’en occuper, aux affaires publiqu
560
ire le problème de la participation de l’homme et
de
la femme, en état de s’en occuper, aux affaires publiques, n’est pas
561
participation de l’homme et de la femme, en état
de
s’en occuper, aux affaires publiques, n’est pas pris en compte par le
562
ec invoque Zeus, pour qu’il garantisse les droits
de
la cité. Les lois de la cité sont une sorte de conquête sur ces petit
563
qu’il garantisse les droits de la cité. Les lois
de
la cité sont une sorte de conquête sur ces petits génies têtus et myo
564
ts de la cité. Les lois de la cité sont une sorte
de
conquête sur ces petits génies têtus et myopes qu’étaient les petits
565
ours des dieux méchants. Désormais, avec les lois
de
la cité, les hommes pourront casser les décrets arbitraires de ces di
566
es hommes pourront casser les décrets arbitraires
de
ces dieux qui représentaient le destin implacable. Ainsi, l’invocatio
567
ble. Ainsi, l’invocation à Zeus devient une sorte
d’
appel au transcendant, c’est-à-dire à tout ce qui dépasse tous les pet
568
elle est, trop souvent à mon gré, revendiquée par
de
grandes associations comme le Conseil des communes d’Europe, ou l’Uni
569
randes associations comme le Conseil des communes
d’
Europe, ou l’Union des villes et des pouvoirs locaux, qui me semblent
570
vouloir trop s’en tenir à ce modèle du village ou
de
la petite cité que nous avons hérité du Moyen Âge, où cela remplissai
571
ssait parfaitement sa fonction. Pour une quantité
de
services, les tâches des communes sont déjà régionales, dépassent les
572
munes sont déjà régionales, dépassent les limites
de
la commune. Pensez à l’eau : il est très rare qu’une commune puisse a
573
général, elle vient d’ailleurs, car des questions
de
canalisation, de distribution d’eau, d’épuration d’eau obligent les c
574
nt d’ailleurs, car des questions de canalisation,
de
distribution d’eau, d’épuration d’eau obligent les communes à coopére
575
ar des questions de canalisation, de distribution
d’
eau, d’épuration d’eau obligent les communes à coopérer. Les questions
576
questions de canalisation, de distribution d’eau,
d’
épuration d’eau obligent les communes à coopérer. Les questions d’élec
577
canalisation, de distribution d’eau, d’épuration
d’
eau obligent les communes à coopérer. Les questions d’électricité, la
578
u obligent les communes à coopérer. Les questions
d’
électricité, la vie culturelle, la vie des écoles supérieures, la form
579
une commune, et il demande la mise en coopérative
de
plusieurs communes. Une des choses principales qui manquent aujourd’h
580
nt aujourd’hui à la commune, c’est la possibilité
de
prévision : toutes les études de prospective, qui ne peuvent pas être
581
t la possibilité de prévision : toutes les études
de
prospective, qui ne peuvent pas être faites à l’échelle d’un maire de
582
ctive, qui ne peuvent pas être faites à l’échelle
d’
un maire de village paysan, fût-il un très bon agronome. Tous ces serv
583
ne peuvent pas être faites à l’échelle d’un maire
de
village paysan, fût-il un très bon agronome. Tous ces services débord
584
gronome. Tous ces services débordent la dimension
de
la commune, et on ne peut rien y faire. Le cadre communal est dépassé
585
faire. Le cadre communal est dépassé en fait, et
d’
une manière irréversible. On en vient à la notion de groupement de com
586
une manière irréversible. On en vient à la notion
de
groupement de communes : quelque chose d’assez grand pour la liberté
587
réversible. On en vient à la notion de groupement
de
communes : quelque chose d’assez grand pour la liberté culturelle et
588
notion de groupement de communes : quelque chose
d’
assez grand pour la liberté culturelle et quelque chose d’assez petit
589
grand pour la liberté culturelle et quelque chose
d’
assez petit pour l’engagement civique ne peut être obtenu qu’en groupa
590
s petites communes. 3 février 1967 Les variations
de
dimensions et de formes des cités correspondent exactement à des vari
591
s. 3 février 1967 Les variations de dimensions et
de
formes des cités correspondent exactement à des variations dans la pa
592
articipation civique des personnes, dans le degré
de
liberté des communautés locales, les cellules de base qui sont indisp
593
de liberté des communautés locales, les cellules
de
base qui sont indispensables si on veut faire une société fédéraliste
594
ée des villes, correspond exactement la décadence
de
la vie communale et l’extension d’un étatisme toujours plus rigide, t
595
t la décadence de la vie communale et l’extension
d’
un étatisme toujours plus rigide, toujours plus onéreux et de moins en
596
me toujours plus rigide, toujours plus onéreux et
de
moins en moins efficace. 24 avril 1970 La réponse à la contestation d
597
icace. 24 avril 1970 La réponse à la contestation
de
la jeunesse, dans le monde entier, ne relève pas de l’économie, et en
598
la jeunesse, dans le monde entier, ne relève pas
de
l’économie, et encore moins de la politique au sens étroit et partisa
599
ier, ne relève pas de l’économie, et encore moins
de
la politique au sens étroit et partisan du terme. Elle exige la recré
600
it et partisan du terme. Elle exige la recréation
de
communautés véritables. Et la Cité européenne — Res publica europea —
601
i l’on me dit maintenant que c’est une utopie que
de
vouloir dépasser l’État-nation, je réponds que c’est au contraire la
602
que c’est au contraire la grande tâche politique
de
notre temps. a. Avec l’introduction suivante des éditeurs : « Les
603
t constitué un élément particulièrement important
de
l’histoire européenne. Elles sont la base de tout essai de constructi
604
tant de l’histoire européenne. Elles sont la base
de
tout essai de construction fédérale pour maintenant et pour l’avenir.
605
oire européenne. Elles sont la base de tout essai
de
construction fédérale pour maintenant et pour l’avenir. Les communes
606
s avec la civitas (fondée sur la notion juridique
de
civis ou citoyen), chrétiens (la paroisse), germaniques (fondés sur l
607
e : c’est un esprit frondeur basé sur une volonté
de
se gouverner soi-même en s’affranchissant de la domination des seigne
608
onté de se gouverner soi-même en s’affranchissant
de
la domination des seigneurs territoriaux. La création des universités
609
à cette époque procède du même esprit, un esprit
de
communauté autonome traduit par le terme universitas qui s’applique a
610
nelles basées sur la naissance (sens étymologique
de
“nation”) et définies par un territoire situé à l’intérieur de fronti
611
prié à l’épanouissement et à l’engagement concret
de
la liberté et de la responsabilité des citoyens. Cela pose notamment
612
sement et à l’engagement concret de la liberté et
de
la responsabilité des citoyens. Cela pose notamment un problème de di
613
ité des citoyens. Cela pose notamment un problème
de
dimensions. Si la cité est trop grande, à l’instar des mégalopoles he
614
oles hellénistiques, le citoyen perd le sentiment
de
sa responsabilité civique, s’habitue à être gouverné. Sa liberté se r
615
gouverné. Sa liberté se retranche dans la sphère
de
sa vie privée, suivant une tendance individualiste qui laisse la plac
616
e citoyen n’embrasse plus l’ensemble des affaires
de
la cité et devient ainsi, selon le mot de Denis de Rougemont, un “pro
617
ffaires de la cité et devient ainsi, selon le mot
de
Denis de Rougemont, un “prolétaire politique”. C’est sur une telle dé
618
talitaire ; et là seulement”. Dans une communauté
de
dimension restreinte, au contraire, le citoyen peut participer active
619
aient pour décider sur l’agora. Ainsi, l’exercice
de
la volonté générale, contrairement à l’application que la Révolution
620
que la Révolution française a faite des théories
de
Rousseau, ne peut être effectif que dans une petite dimension. Le poi
621
effectif que dans une petite dimension. Le point
d’
équilibre se trouve autour de l’idée d’un optimum de participation ent
622
. Le point d’équilibre se trouve autour de l’idée
d’
un optimum de participation entre deux maxima contradictoires : la pui
623
équilibre se trouve autour de l’idée d’un optimum
de
participation entre deux maxima contradictoires : la puissance (apana
624
ux maxima contradictoires : la puissance (apanage
de
la grande dimension), la liberté (apanage de la petite dimension). C’
625
nage de la grande dimension), la liberté (apanage
de
la petite dimension). C’est précisément tout le problème du fédéralis
626
C’est précisément tout le problème du fédéralisme
de
chercher une formule alliant la liberté et la puissance, à travers de
627
iberté et la puissance, à travers des groupements
de
communes qui se fédèrent volontairement pour réaliser en commun des t
628
ffectuer seule. De même, c’est la force résultant
de
l’union fédérale qui permet de garantir les libertés des entités fédé
629
la force résultant de l’union fédérale qui permet
de
garantir les libertés des entités fédérées. » b. Il y a ici une conf
630
a ici une confusion, car Aristote fut le disciple
de
Platon et non l’inverse.
631
que l’on a quelques chances, qui sont les chances
de
la création, de déboucher sur le général, sur l’universel. Ceci me ra
632
ues chances, qui sont les chances de la création,
de
déboucher sur le général, sur l’universel. Ceci me rappelle une phras
633
ral, sur l’universel. Ceci me rappelle une phrase
de
Spinoza, dans son Éthique, qui m’avait toujours beaucoup frappé dans
634
ue je me suis toujours rappelé ; un des théorèmes
de
l’Éthique de Spinoza dit : « d’autant plus nous connaissons les chose
635
toujours rappelé ; un des théorèmes de l’Éthique
de
Spinoza dit : « d’autant plus nous connaissons les choses particulièr
636
un des théorèmes de l’Éthique de Spinoza dit : «
d’
autant plus nous connaissons les choses particulières, d’autant plus n
637
t plus nous connaissons les choses particulières,
d’
autant plus nous connaissons Dieu », ce qui voulait dire pour Spinoza
638
issons Dieu », ce qui voulait dire pour Spinoza :
d’
autant plus nous connaissons le tout, la généralité de l’univers. 4 fé
639
tant plus nous connaissons le tout, la généralité
de
l’univers. 4 février 1972 Aux xvie , xviie et xviiie siècles vont s
640
ité romaine impériale, qui aboutira, avec l’appui
de
la raison révolutionnaire, au culte de l’État-nation absolutisé à par
641
ec l’appui de la raison révolutionnaire, au culte
de
l’État-nation absolutisé à partir de la Révolution française. La fina
642
à partir de la Révolution française. La finalité
de
la raison autonome et suffisante s’institue avec Descartes et Spinoza
643
Descartes et Spinoza, se nourrit de plus en plus
de
la finalité scientifique, et va se développer sous une forme subversi
644
ez Marx non seulement une reprise du rationalisme
de
Hegel, mais une réaction profonde et comme intuitive à cet intellectu
645
u réel par la raison, l’intellect, la dialectique
de
l’esprit pur. Il leur oppose les conditions économiques concrètes de
646
leur oppose les conditions économiques concrètes
de
l’homme, qui déterminent les rapports sociaux. Et certes, il exagère
647
s rapports sociaux. Et certes, il exagère au-delà
de
toute raison l’importance des aspects matériels négligés par Hegel et
648
re. Il est l’un des premiers à dénoncer les tours
de
passe-passe de la raison pure. Avant lui, Søren Kierkegaard (1813-185
649
des premiers à dénoncer les tours de passe-passe
de
la raison pure. Avant lui, Søren Kierkegaard (1813-1855) avait attaqu
650
ué la dialectique hégélienne, non pas au seul nom
de
l’économie, mais au nom de l’existence concrète, physique, morale, sp
651
existence concrète, physique, morale, spirituelle
de
l’homme. C’est chez Kierkegaard qu’on voit naître l’existentialisme,
652
lité concrète ». Alors commence l’ère du soupçon,
de
la méfiance à l’égard des idéaux officiels et de l’establishment phil
653
de la méfiance à l’égard des idéaux officiels et
de
l’establishment philosophique. Un troisième larron va surgir en fin d
654
ilosophique. Un troisième larron va surgir en fin
de
siècle : Freud. L’immense succès de Marx et de Freud au xxe siècle s
655
surgir en fin de siècle : Freud. L’immense succès
de
Marx et de Freud au xxe siècle s’explique par un phénomène psycholog
656
in de siècle : Freud. L’immense succès de Marx et
de
Freud au xxe siècle s’explique par un phénomène psychologique très s
657
que très simple : en ramenant toute l’explication
de
la société et des motifs humains, soit à l’argent, soit au sexe, Marx
658
soit au sexe, Marx et Freud ont produit un effet
d’
illumination sur les bourgeois élevés au xixe siècle dans l’idée qu’i
659
au xixe siècle dans l’idée qu’il était malséant
de
parler d’argent ou de parler de sexe : ces deux sujets étaient tabous
660
siècle dans l’idée qu’il était malséant de parler
d’
argent ou de parler de sexe : ces deux sujets étaient tabous. 11 févri
661
l’idée qu’il était malséant de parler d’argent ou
de
parler de sexe : ces deux sujets étaient tabous. 11 février 1972 Aujo
662
il était malséant de parler d’argent ou de parler
de
sexe : ces deux sujets étaient tabous. 11 février 1972 Aujourd’hui, l
663
rd’hui, la prétention scientifique à la direction
de
la société n’est plus le fait d’usurpateurs et de doctrinaires délira
664
e à la direction de la société n’est plus le fait
d’
usurpateurs et de doctrinaires délirants ; même pas des savants eux-mê
665
de la société n’est plus le fait d’usurpateurs et
de
doctrinaires délirants ; même pas des savants eux-mêmes. Mais d’une c
666
délirants ; même pas des savants eux-mêmes. Mais
d’
une croyance généralisée dans tout l’Occident, dans toutes les couches
667
sée dans tout l’Occident, dans toutes les couches
de
la population, et qui donne à « la Science » le rôle et l’autorité qu
668
té que le Moyen Âge donnait à la théologie. 2.
De
la spécialisation à la synthèse créatrice 9 décembre 1966 Dans l’u
669
s fait s’éloigner augmente. C’est donc une espèce
d’
univers en expansion que nous avons dans le savoir et dans l’universit
670
e nous avons dans le savoir et dans l’université.
D’
où résultent deux conséquences qui définissent exactement le phénomène
671
séquences qui définissent exactement le phénomène
de
la tour de Babel, tel que Dante l’écrit : c’est la disparition rapide
672
ui définissent exactement le phénomène de la tour
de
Babel, tel que Dante l’écrit : c’est la disparition rapide de tout la
673
l que Dante l’écrit : c’est la disparition rapide
de
tout langage commun, remplacé par une quantité de langages spéciaux,
674
de tout langage commun, remplacé par une quantité
de
langages spéciaux, de moins en moins traduisibles l’un dans l’autre ;
675
, remplacé par une quantité de langages spéciaux,
de
moins en moins traduisibles l’un dans l’autre ; et d’autre part, l’év
676
dans l’autre ; et d’autre part, l’évanouissement
de
la conscience du but commun, des fins dernières de l’entreprise humai
677
e la conscience du but commun, des fins dernières
de
l’entreprise humaine, qui se perdent dans les nuées de l’inconcevable
678
entreprise humaine, qui se perdent dans les nuées
de
l’inconcevable. Cependant, si on dit que le langage commun se perd en
679
avoir, cela veut dire aussi que la commune mesure
de
notre civilisation est en train de se perdre. J’entends par commune m
680
mmune mesure, par exemple, une conception commune
de
l’homme, de ce qu’il devrait être dans la société, de l’homme univers
681
, par exemple, une conception commune de l’homme,
de
ce qu’il devrait être dans la société, de l’homme universel, idéal ca
682
’homme, de ce qu’il devrait être dans la société,
de
l’homme universel, idéal capable d’inspirer à la fois la pensée et l’
683
s la société, de l’homme universel, idéal capable
d’
inspirer à la fois la pensée et l’action, le sentiment et l’action, et
684
asses, pour la jeunesse, et aussi pour les hommes
d’
outre-mer qui viennent souvent en Europe, aux sources vives de la cult
685
qui viennent souvent en Europe, aux sources vives
de
la culture qui maintenant est devenue mondiale ; ils viennent apprend
686
êmes les ont oubliés. 9 décembre 1966 Le monopole
de
l’État est devenu de plus en plus grand pendant tout le xixe siècle
687
ités : l’unité locale, l’unité par le cadre, soit
de
la nation, soit de la cité, soit du canton en Suisse. La réalité même
688
le, l’unité par le cadre, soit de la nation, soit
de
la cité, soit du canton en Suisse. La réalité même de l’enseignement,
689
a cité, soit du canton en Suisse. La réalité même
de
l’enseignement, tel qu’il était conçu au début, a disparu, c’est-à-di
690
t des disciples, qui était la première définition
de
l’université, mais aussi de l’ensemble des disciplines. Si on veut ré
691
a première définition de l’université, mais aussi
de
l’ensemble des disciplines. Si on veut résumer cette évolution, on po
692
ie : le pape, le Saint-Siège ; tandis qu’au terme
de
cette évolution, de cette dégradation, on a une division complète du
693
nt-Siège ; tandis qu’au terme de cette évolution,
de
cette dégradation, on a une division complète du savoir, une désintég
694
par une unité purement locale, presque une unité
de
locaux, de bâtiments : les différentes branches du savoir sont réunie
695
ité purement locale, presque une unité de locaux,
de
bâtiments : les différentes branches du savoir sont réunies en une sé
696
ntes branches du savoir sont réunies en une série
de
bâtiments, qu’on appelle l’université. Ce sont une localité, une auto
697
tration. Donc, au lieu d’unité interne, une sorte
d’
uniformité extérieure. À partir de ce moment, il n’y a plus d’universi
698
extérieure. À partir de ce moment, il n’y a plus
d’
université à proprement parler, il n’y a plus que des écoles professio
699
es. Or, quand on en est au point où il n’y a plus
d’
universalité, il n’y a pas non plus d’université, et on est exactement
700
n’y a plus d’universalité, il n’y a pas non plus
d’
université, et on est exactement dans la situation de la tour de Babel
701
niversité, et on est exactement dans la situation
de
la tour de Babel. 9 décembre 1966 L’œuvre de synthèse qu’exige l’état
702
et on est exactement dans la situation de la tour
de
Babel. 9 décembre 1966 L’œuvre de synthèse qu’exige l’état présent, l
703
tion de la tour de Babel. 9 décembre 1966 L’œuvre
de
synthèse qu’exige l’état présent, l’état babélique de notre culture e
704
ynthèse qu’exige l’état présent, l’état babélique
de
notre culture et de nos universités, devrait être confiée à des group
705
tat présent, l’état babélique de notre culture et
de
nos universités, devrait être confiée à des groupes de chercheurs, qu
706
s universités, devrait être confiée à des groupes
de
chercheurs, qui représenteraient des disciplines diverses, et qui cré
707
diverses, et qui créeraient ainsi ces carrefours
de
vérités hétérogènes, desquels on a quelques chances de voir surgir l’
708
rités hétérogènes, desquels on a quelques chances
de
voir surgir l’éclair de synthèse créatrice. Il faudrait donc des homm
709
els on a quelques chances de voir surgir l’éclair
de
synthèse créatrice. Il faudrait donc des hommes de synthèse, un type
710
e synthèse créatrice. Il faudrait donc des hommes
de
synthèse, un type nouveau d’homme, de pensée, qui ait une sorte de co
711
rait donc des hommes de synthèse, un type nouveau
d’
homme, de pensée, qui ait une sorte de conscience de la conjoncture in
712
des hommes de synthèse, un type nouveau d’homme,
de
pensée, qui ait une sorte de conscience de la conjoncture intellectue
713
ype nouveau d’homme, de pensée, qui ait une sorte
de
conscience de la conjoncture intellectuelle, du savoir — comme on par
714
homme, de pensée, qui ait une sorte de conscience
de
la conjoncture intellectuelle, du savoir — comme on parle de conjonct
715
ncture intellectuelle, du savoir — comme on parle
de
conjoncture en économie —, qui ait au moins le souci de se faire un t
716
joncture en économie —, qui ait au moins le souci
de
se faire un tableau conjoncturel de l’état du savoir et des corrélati
717
oins le souci de se faire un tableau conjoncturel
de
l’état du savoir et des corrélations virtuelles qui pourraient s’étab
718
uraient poussé assez loin pour prendre conscience
de
l’insuffisance d’une spécialisation et de la nécessité d’aller au-del
719
ez loin pour prendre conscience de l’insuffisance
d’
une spécialisation et de la nécessité d’aller au-delà. 9 décembre 1966
720
science de l’insuffisance d’une spécialisation et
de
la nécessité d’aller au-delà. 9 décembre 1966 Il existe des chaires d
721
uffisance d’une spécialisation et de la nécessité
d’
aller au-delà. 9 décembre 1966 Il existe des chaires d’indianisme, d’a
722
er au-delà. 9 décembre 1966 Il existe des chaires
d’
indianisme, d’arabisme, de civilisations précolombiennes dans toutes l
723
décembre 1966 Il existe des chaires d’indianisme,
d’
arabisme, de civilisations précolombiennes dans toutes les grandes uni
724
6 Il existe des chaires d’indianisme, d’arabisme,
de
civilisations précolombiennes dans toutes les grandes universités d’O
725
écolombiennes dans toutes les grandes universités
d’
Occident, mais vous ne trouvez pas de chaire d’européologie dans les u
726
universités d’Occident, mais vous ne trouvez pas
de
chaire d’européologie dans les universités de l’Asie, par exemple, et
727
és d’Occident, mais vous ne trouvez pas de chaire
d’
européologie dans les universités de l’Asie, par exemple, et même pas
728
pas de chaire d’européologie dans les universités
de
l’Asie, par exemple, et même pas dans les universités d’Europe. Vous
729
ie, par exemple, et même pas dans les universités
d’
Europe. Vous avez des chaires dites européennes dans beaucoup d’univer
730
avez des chaires dites européennes dans beaucoup
d’
universités, depuis une dizaine d’années surtout, mais elles consisten
731
s dans beaucoup d’universités, depuis une dizaine
d’
années surtout, mais elles consistent à étudier les mécanismes du Marc
732
tent à étudier les mécanismes du Marché commun ou
de
l’AELE, les mécanismes du droit communautaire ; c’est une sorte de de
733
canismes du droit communautaire ; c’est une sorte
de
description de l’histoire qui est en train de se faire, c’est très te
734
it communautaire ; c’est une sorte de description
de
l’histoire qui est en train de se faire, c’est très technique et ne t
735
technique et ne touche pas du tout les fondements
de
la latitude européenne et de la culture européenne. Ce qui nous manqu
736
tout les fondements de la latitude européenne et
de
la culture européenne. Ce qui nous manque, c’est une étude ethnograph
737
e qui nous manque, c’est une étude ethnographique
de
l’homme européen. 3. Initiation et esprit d’initiative 18 novem
738
e de l’homme européen. 3. Initiation et esprit
d’
initiative 18 novembre 1966 On voit se préciser un parallélisme com
739
le fédéralisme. Il s’agira, dans une fédération,
d’
éduquer, de former un type d’homme qui soit une personne. C’est le pro
740
isme. Il s’agira, dans une fédération, d’éduquer,
de
former un type d’homme qui soit une personne. C’est le problème de l’
741
dans une fédération, d’éduquer, de former un type
d’
homme qui soit une personne. C’est le problème de l’éducation d’une ma
742
d’homme qui soit une personne. C’est le problème
de
l’éducation d’une manière tout à fait générale ; dans tous les régime
743
it une personne. C’est le problème de l’éducation
d’
une manière tout à fait générale ; dans tous les régimes, il s’agit de
744
fait générale ; dans tous les régimes, il s’agit
de
former un certain type d’homme, qui corresponde au régime en question
745
les régimes, il s’agit de former un certain type
d’
homme, qui corresponde au régime en question ; cela vaut aussi pour le
746
nt durer, doivent former des petits totalitaires,
de
petits soldats politiques. 18 novembre 1966 Au lieu d’initiation, on
747
deux termes marquent le début et la fin, le but,
d’
une évolution millénaire, qui va du sacré au profane, du collectif rel
748
collectif religieux et social à l’individualisme,
de
l’autorité indiscutée à la liberté toujours aventureuse. Le vrai sens
749
e à la liberté toujours aventureuse. Le vrai sens
de
l’action d’éduquer, dans notre ère moderne, devient conforme au sens
750
té toujours aventureuse. Le vrai sens de l’action
d’
éduquer, dans notre ère moderne, devient conforme au sens étymologique
751
r le conduire au-dehors. C’est aussi le contraire
de
l’initiation qui était conduire dedans, faire entrer dans une certain
752
e certaine structure. On veut conduire l’individu
de
l’ignorance au savoir, de l’instinct à la raison critique, du royaume
753
eut conduire l’individu de l’ignorance au savoir,
de
l’instinct à la raison critique, du royaume du sacré indiscutable et
754
al en vigueur, et par la seconde, on veut essayer
de
l’en libérer. Dans l’idéal de l’éducation européenne, ces deux tendan
755
de, on veut essayer de l’en libérer. Dans l’idéal
de
l’éducation européenne, ces deux tendances antinomiques doivent être
756
combinées. On ne peut pas exclure l’une au profit
de
l’autre. Il y a un optimum à trouver entre ces deux maxima contradict
757
contradictoires. C’est ce que j’appelle la règle
d’
or de l’éducation européenne : conduire l’élève à l’autonomie personne
758
radictoires. C’est ce que j’appelle la règle d’or
de
l’éducation européenne : conduire l’élève à l’autonomie personnelle a
759
ait acquérir tout ce que l’on peut par les moyens
de
l’initiation, le conduire à trouver sa vocation personnelle originale
760
ntraire faire sortir le jeune homme des fatalités
de
son ascendance ou des rites, lui apprendre à se débrouiller tout seul
761
nitiative, qui sont assez radicalement contraires
d’
intentions ; bien entendu, dans chaque éducation doivent être présente
762
ntes. 4. Alignement des esprits ou réalisation
de
la personne ? 11 novembre 1966 Si on pense que le but de la vie d’
763
onne ? 11 novembre 1966 Si on pense que le but
de
la vie d’un homme est de participer à la puissance et à la grandeur d
764
11 novembre 1966 Si on pense que le but de la vie
d’
un homme est de participer à la puissance et à la grandeur de sa natio
765
6 Si on pense que le but de la vie d’un homme est
de
participer à la puissance et à la grandeur de sa nation (et je ne fai
766
est de participer à la puissance et à la grandeur
de
sa nation (et je ne fais pas une supposition dans le vide, car c’est
767
mécaniques, qui règlent de plus en plus le détail
de
l’existence. À la limite, nous avons l’idéal du régime totalitaire qu
768
et action. Si on pense, au contraire, que le but
de
la société est d’offrir à chacun de courir sa chance, de s’exprimer,
769
pense, au contraire, que le but de la société est
d’
offrir à chacun de courir sa chance, de s’exprimer, de « se réaliser »
770
e, que le but de la société est d’offrir à chacun
de
courir sa chance, de s’exprimer, de « se réaliser » au maximum, alors
771
ociété est d’offrir à chacun de courir sa chance,
de
s’exprimer, de « se réaliser » au maximum, alors on est porté à voulo
772
frir à chacun de courir sa chance, de s’exprimer,
de
« se réaliser » au maximum, alors on est porté à vouloir et à promouv
773
e, qui ménage les complexités du réel, qui ménage
de
l’imprévu dans l’existence ; un régime dont la limite idéale — de mêm
774
e, l’anarchie au sens étymologique : la privation
d’
autorité. 20 mai 1977 L’instruction publique a été le principal moyen
775
7 L’instruction publique a été le principal moyen
d’
aligner les esprits, et ensuite, il y a eu la presse pour aligner les
776
n du fin ! La presse est, en effet, le seul moyen
d’
entrer jusque dans l’esprit des gens, par leur curiosité. Cette presse
777
riosité. Cette presse est nourrie par les agences
de
presse, qui sont toutes des agences d’État ; au xixe siècle, il y av
778
es agences de presse, qui sont toutes des agences
d’
État ; au xixe siècle, il y avait les grandes agences que tout le mon
779
nce, Reuter pour l’Angleterre, toutes des agences
d’
État, c’étaient elles qui choisissaient les faits, qui décidaient parm
780
ent les faits, qui décidaient parmi les milliards
de
choses qui se passent dans le monde, des faits dont elles allaient no
781
ge les esprits comme on veut, quand on est maître
de
dire « voilà les faits importants d’hier » et qu’on ne choisit que ce
782
n est maître de dire « voilà les faits importants
d’
hier » et qu’on ne choisit que ceux qui intéressent le gouvernement, q
783
ie toujours ça : qu’il est fabriqué. Il n’y a pas
de
fait en soi. 24 janvier 1969 L’irréalité de ce siècle provient de cec
784
a pas de fait en soi. 24 janvier 1969 L’irréalité
de
ce siècle provient de ceci que la « réalité » à laquelle nous croyons
785
24 janvier 1969 L’irréalité de ce siècle provient
de
ceci que la « réalité » à laquelle nous croyons chaque matin n’est fa
786
sables. Je ne soupçonne pas la presse occidentale
de
suivre une politique quelconque, loin de là ! Elle n’a d’autre souci
787
e une politique quelconque, loin de là ! Elle n’a
d’
autre souci que celui de son tirage. Mais elle décide elle-même, sans
788
ue, loin de là ! Elle n’a d’autre souci que celui
de
son tirage. Mais elle décide elle-même, sans nulle enquête sérieuse,
789
le décide elle-même, sans nulle enquête sérieuse,
de
ce qui sera vendable ou non. Elle ne se trompe qu’une fois sur deux.
790
olitique, sans rien y perdre. Réformer la presse
d’
information me paraît impossible ou dangereux. En revanche, développer
791
u’on institue dans les écoles publiques des cours
de
lecture des journaux. Proposition toute naturelle d’ailleurs, si l’on
792
. 17 janvier 1969 Les deux instruments principaux
de
la vie politique nationale en France, sous la IIIe République, sont d
793
point que l’on a pu soutenir que le véritable but
de
l’école, sous la IIIe République, c’était de former des lecteurs pour
794
but de l’école, sous la IIIe République, c’était
de
former des lecteurs pour les journaux, qui à leur tour formeraient de
795
meraient des électeurs. Le but dernier étant donc
de
servir l’État et la nation, et pas du tout de servir les personnes. 1
796
onc de servir l’État et la nation, et pas du tout
de
servir les personnes. 17 janvier 1969 Pour Napoléon, l’école ne devai
797
léonienne, pourrait-on dire d’après la même forme
de
pensée, n’est pas là pour les élèves, mais les élèves y sont pour la
798
ion réelle, établie en force, et qui a des moyens
de
répression qui sont l’armée et la police — ce que n’ont plus les autr
799
ot « nation » signifiait au Moyen Âge : un groupe
de
gens parlant la même langue, par exemple les groupes d’étudiants parl
800
s parlant la même langue, par exemple les groupes
d’
étudiants parlant une même langue, la langue de l’université étant le
801
es d’étudiants parlant une même langue, la langue
de
l’université étant le latin ; on appelait aussi « nations » les châte
802
les châteaux réservés aux chevaliers dans l’ordre
de
Rhodes qui parlaient la même langue. Cependant, à la Renaissance, il
803
un changement dans la conscience que les gens ont
de
la langue. La langue devient subitement le phénomène culturel le plus
804
urel le plus important, à la suite de l’invention
de
l’imprimerie et du recul du latin. On peut dire qu’avec l’invention d
805
recul du latin. On peut dire qu’avec l’invention
de
l’imprimerie, la civilisation européenne subit une véritable mutation
806
it une véritable mutation ; elle passe du domaine
de
l’auditif-imaginatif (la culture née de l’Église : liturgie, sermons,
807
u domaine de l’auditif-imaginatif (la culture née
de
l’Église : liturgie, sermons, vitraux — on a souvent dit que les vitr
808
ent le catéchisme du Moyen Âge ; avec l’invention
de
l’imprimerie, le catéchisme devient un petit livre) au visuel-abstrai
809
etit livre) au visuel-abstrait (les petits signes
de
l’imprimerie mis en lignes). La langue devient alors un phénomène en
810
États commencent alors à comprendre l’importance
de
la langue comme moyen d’unifier leurs sujets et comme moyen de les go
811
comprendre l’importance de la langue comme moyen
d’
unifier leurs sujets et comme moyen de les gouverner. « Parler à un ho
812
comme moyen d’unifier leurs sujets et comme moyen
de
les gouverner. « Parler à un homme, dit Paul Valéry, c’est prendre po
813
re pouvoir sur lui. » 7 novembre 1969 L’invention
de
la lettre — qui peut se combiner avec d’autres pour former un mot — a
814
ot — a joué un rôle décisif dans le développement
de
la diffusion des secrets. Cela a amené une sorte de prise de pouvoir
815
la diffusion des secrets. Cela a amené une sorte
de
prise de pouvoir de l’homme sur la nature. 6. L’idée d’empire, sym
816
sion des secrets. Cela a amené une sorte de prise
de
pouvoir de l’homme sur la nature. 6. L’idée d’empire, symbole d’un
817
crets. Cela a amené une sorte de prise de pouvoir
de
l’homme sur la nature. 6. L’idée d’empire, symbole d’universalité
818
de pouvoir de l’homme sur la nature. 6. L’idée
d’
empire, symbole d’universalité 25 octobre 1968 La principale condit
819
mme sur la nature. 6. L’idée d’empire, symbole
d’
universalité 25 octobre 1968 La principale condition d’agrégation d
820
salité 25 octobre 1968 La principale condition
d’
agrégation d’un peuple à l’empire est celle-ci : ce peuple doit rendre
821
octobre 1968 La principale condition d’agrégation
d’
un peuple à l’empire est celle-ci : ce peuple doit rendre hommage au d
822
qui régit l’histoire et qui est le principe vital
de
l’empire. Il en allait ainsi en Akkad, nous le savons par beaucoup d’
823
llait ainsi en Akkad, nous le savons par beaucoup
d’
inscriptions, en Égypte, chez les Incas ; mais aussi, mutatis mutandis
824
cas ; mais aussi, mutatis mutandis, dans l’Empire
d’
Alexandre et à Rome : Alexandre s’est déifié de son vivant, César est
825
re d’Alexandre et à Rome : Alexandre s’est déifié
de
son vivant, César est devenu Auguste. C’est parce que les premiers ch
826
chrétiens avaient compris ce caractère religieux
d’
Auguste, qu’ils refusaient d’adorer César en tant qu’Auguste, qu’ils o
827
caractère religieux d’Auguste, qu’ils refusaient
d’
adorer César en tant qu’Auguste, qu’ils ont été persécutés. 25 octobre
828
ont été persécutés. 25 octobre 1968 Pour les gens
d’
Akkad, pour les Égyptiens, pour Alexandre le Grand, l’empire, c’est la
829
ipe du pouvoir mystique comme le chef rassembleur
de
tribus. Il est l’intermédiaire entre le dieu et l’homme qui vit dans
830
e entre le dieu et l’homme qui vit dans l’empire.
D’
où l’adoration dont les empereurs ont toujours fait l’objet. On n’ador
831
en tant qu’individu, mais son symbole, une sorte
de
prêtrise qu’il représentait, la figure visible, et terrestre, du dieu
832
s, Alexandre, les empereurs romains. Ce caractère
de
vénération s’est étendu aussi à Charlemagne, et surtout aux empereurs
833
e 1968 Le caractère mystique, mondial et cosmique
de
l’empereur recule un peu, du fait qu’il y a plusieurs empires connus.
834
il y a plusieurs empires connus. Il est difficile
de
maintenir cette mythologie, quand on sait qu’en fait, il existe d’aut
835
ait, il existe d’autres empires. La justification
de
la globalité de l’empire devient alors de plus en plus symbolique. C’
836
’autres empires. La justification de la globalité
de
l’empire devient alors de plus en plus symbolique. C’est à ce moment
837
mbolique. C’est à ce moment que se situe le début
de
la crise de l’empire, les nations vont en profiter pour se développer
838
est à ce moment que se situe le début de la crise
de
l’empire, les nations vont en profiter pour se développer contre lui
839
lui et contre la papauté qui est l’autre symbole
d’
universalisme au Moyen Âge. 1er novembre 1968 Pendant des siècles, l’É
840
siècles, l’Église s’est vue exercer toutes sortes
de
fonctions : état civil (baptêmes, mariages), taxes et impôts, banque.
841
n est donc exercée par l’Église. L’empire n’a pas
d’
État à sa disposition. Les seules institutions impériales connues étai
842
institutions impériales connues étaient la Diète
d’
Empire, qui ne se réunissait guère que pour élire un nouvel empereur.
843
le xve siècle pour que soit proposée la création
d’
un conseil d’empire, sans que l’on sache quelles auraient été ses attr
844
e pour que soit proposée la création d’un conseil
d’
empire, sans que l’on sache quelles auraient été ses attributions. Cet
845
ttributions. Cette proposition n’a pas été suivie
d’
effets réels. L’empire ne disposait pas d’appareil étatique. L’empereu
846
suivie d’effets réels. L’empire ne disposait pas
d’
appareil étatique. L’empereur n’avait pas de trésor important. Il étai
847
t pas d’appareil étatique. L’empereur n’avait pas
de
trésor important. Il était souvent moins riche que ses vassaux. Il ét
848
e vivant. Il garantissait dans sa personne l’idée
d’
unité, d’harmonie, de paix religieuse et universelle. Il maintenait l’
849
Il garantissait dans sa personne l’idée d’unité,
d’
harmonie, de paix religieuse et universelle. Il maintenait l’idée de d
850
sait dans sa personne l’idée d’unité, d’harmonie,
de
paix religieuse et universelle. Il maintenait l’idée de droit, de lég
851
x religieuse et universelle. Il maintenait l’idée
de
droit, de légitimité du pouvoir. 7. Les sources principales de la
852
se et universelle. Il maintenait l’idée de droit,
de
légitimité du pouvoir. 7. Les sources principales de la culture eu
853
itimité du pouvoir. 7. Les sources principales
de
la culture européenne 25 octobre 1968 Le principe religieux sacral
854
ibu se fixe. C’est donc la tribu qui donne le nom
de
son totem à son territoire, et non l’inverse. La souveraineté territo
855
souveraineté territoriale se substitue, au début
de
l’époque néolithique, à la souveraineté religieuse du totem. C’est ce
856
, etc. 13 décembre 1968 Ce qui m’intéresse, c’est
d’
évaluer ce que la Rome impériale a légué à l’existence et aux concepts
857
ts politiques des Européens : retenons les termes
d’
État, de loi, d’institutions, et le mythe de l’empire ordonnateur et p
858
iques des Européens : retenons les termes d’État,
de
loi, d’institutions, et le mythe de l’empire ordonnateur et pacificat
859
s Européens : retenons les termes d’État, de loi,
d’
institutions, et le mythe de l’empire ordonnateur et pacificateur, qui
860
ermes d’État, de loi, d’institutions, et le mythe
de
l’empire ordonnateur et pacificateur, qui va jouer un rôle considérab
861
qu’à nos jours. 27 février 1970 Le dernier groupe
de
valeurs de base de la civilisation occidentale sont les valeurs celte
862
urs. 27 février 1970 Le dernier groupe de valeurs
de
base de la civilisation occidentale sont les valeurs celtes, qu’il co
863
février 1970 Le dernier groupe de valeurs de base
de
la civilisation occidentale sont les valeurs celtes, qu’il convient d
864
tale sont les valeurs celtes, qu’il convient donc
d’
ajouter aux valeurs grecques, romaines, chrétiennes et germaniques. (I
865
a Grèce a donné la polis, le citoyen et la notion
d’
individu ; Rome, les institutions, l’État ; le monde germanique, les c
866
e, les communautés ; le monde chrétien, la notion
de
personne et d’un autre type de communauté interpersonnelle ; enfin, l
867
tés ; le monde chrétien, la notion de personne et
d’
un autre type de communauté interpersonnelle ; enfin, le monde celtiqu
868
hrétien, la notion de personne et d’un autre type
de
communauté interpersonnelle ; enfin, le monde celtique, le mythe. Le
869
. On peut dire que toutes les valeurs affectives
de
l’Europe sont déterminées par cette origine celtique, ainsi que les v
870
ine celtique, ainsi que les valeurs individuelles
de
la quête spirituelle. Le triomphe des Celtes, dans leur échec, a été
871
e. Le triomphe des Celtes, dans leur échec, a été
de
parvenir à intérioriser le sens de l’aventure, là où les Grecs et les
872
r échec, a été de parvenir à intérioriser le sens
de
l’aventure, là où les Grecs et les Romains n’avaient jamais vu que de
873
les Romains n’avaient jamais vu que des paraboles
de
succès politique et social. 8. Les antinomies constitutives de la
874
que et social. 8. Les antinomies constitutives
de
la culture européenne 16 janvier 1969 « L’union n’a pas supprimé l
875
ées »… « Sans confusion ni séparation »… La forme
de
pensée qui s’exprime durant les conciles aura des conséquences incroy
876
ine politique. Les mêmes termes, les mêmes formes
de
pensée se retrouveront quand il s’agira de formuler les relations ent
877
formes de pensée se retrouveront quand il s’agira
de
formuler les relations entre États ou groupes autonomes réunis en féd
878
ie (ce qui est à peu près impossible logiquement)
de
penser ensemble des réalités qui sont, aux yeux de la raison, antinom
879
69 C’est dans l’amour du prochain, vrai fondement
de
la communauté nouvelle — amour du prochain qui n’est pas un sentiment
880
chain qui n’est pas un sentiment, mais une action
de
solidarité envers les autres — que saint Paul découvre la règle nouve
881
utres — que saint Paul découvre la règle nouvelle
de
l’harmonie entre les hommes, cette harmonie des libertés humaines qui
882
s grands penseurs grecs et aussi des stoïciens et
de
Marc-Aurèle. Le génie de saint Paul est d’avoir pu résumer tout cela
883
t aussi des stoïciens et de Marc-Aurèle. Le génie
de
saint Paul est d’avoir pu résumer tout cela dans l’antithèse la plus
884
ens et de Marc-Aurèle. Le génie de saint Paul est
d’
avoir pu résumer tout cela dans l’antithèse la plus frappante et la pl
885
rappante et la plus simple, l’opposition du règne
de
la foi au règne de la loi, c’est-à-dire croyance intime à règle sacré
886
simple, l’opposition du règne de la foi au règne
de
la loi, c’est-à-dire croyance intime à règle sacrée, sociale. 24 avri
887
ociale. 24 avril 1970 Je pense qu’il est possible
d’
unir nos pays pour cette raison littéralement fondamentale qu’une unit
888
te raison littéralement fondamentale qu’une unité
de
base existe, sur laquelle fonder cette union. Il s’agit de l’unité d’
889
xiste, sur laquelle fonder cette union. Il s’agit
de
l’unité d’une culture, de laquelle participent tous les Européens, qu
890
laquelle fonder cette union. Il s’agit de l’unité
d’
une culture, de laquelle participent tous les Européens, qu’ils soient
891
cette union. Il s’agit de l’unité d’une culture,
de
laquelle participent tous les Européens, qu’ils soient d’ailleurs « c
892
d’ailleurs « cultivés » ou non, conscients ou non
de
ce qu’ils doivent, en fait, à la culture. Unité non pas homogène et q
893
ure. Unité non pas homogène et qui ne résulte pas
d’
un processus forcé d’uniformisation, de nivellement et d’exclusion de
894
mogène et qui ne résulte pas d’un processus forcé
d’
uniformisation, de nivellement et d’exclusion de ce qui diffère, mais
895
ésulte pas d’un processus forcé d’uniformisation,
de
nivellement et d’exclusion de ce qui diffère, mais qui, au contraire,
896
ocessus forcé d’uniformisation, de nivellement et
d’
exclusion de ce qui diffère, mais qui, au contraire, englobe, et compo
897
é d’uniformisation, de nivellement et d’exclusion
de
ce qui diffère, mais qui, au contraire, englobe, et compose largement
898
des valeurs bien souvent antinomiques, provenant
d’
origines multiples, dont les contrastes et les combinaisons entretienn
899
. 24 avril 1970 Avec les trois sources classiques
de
la culture européenne, Athènes, Rome et Jérusalem, viennent confluer
900
droit communautaire et personnel, et les valeurs
d’
honneur et de fidélité, la seconde apportant le sens du rêve et le gra
901
autaire et personnel, et les valeurs d’honneur et
de
fidélité, la seconde apportant le sens du rêve et le grand thème de l
902
conde apportant le sens du rêve et le grand thème
de
la quête aventureuse d’un Lancelot et d’un Perceval, symbole mystique
903
du rêve et le grand thème de la quête aventureuse
d’
un Lancelot et d’un Perceval, symbole mystique. Faut-il enfin rappeler
904
nd thème de la quête aventureuse d’un Lancelot et
d’
un Perceval, symbole mystique. Faut-il enfin rappeler l’apport arabe,
905
mbres, mais qui est l’une des sources principales
de
la poésie amoureuse, donc de l’amour tel qu’on le parle et qu’on croi
906
sources principales de la poésie amoureuse, donc
de
l’amour tel qu’on le parle et qu’on croit le sentir en Occident ; l’a
907
xxe siècle ? Tout cela dure, agit et vit en nous
de
mille manières. Tout cela se combine en figures et en structures vari
908
variées à l’infini, mais dont la plus fréquente,
de
très loin, est le couple d’antinomies inséparables : autorité et libe
909
nt la plus fréquente, de très loin, est le couple
d’
antinomies inséparables : autorité et liberté, individualisme et colle
910
ence, hérésie créatrice et saine doctrine, besoin
de
sécurité et goût du risque, conformité qui maintient les valeurs, ori
911
ns. Enfin, tout cela dénote l’Europe comme patrie
de
la diversité. 12 décembre 1969 L’individualisme et le collectivisme s
912
tout le xixe siècle. Tout y pousse : les effets
de
l’industrialisation, qui déracine les hommes des campagnes et les jet
913
sés en véritables communautés, ils n’offrent plus
de
résistance à l’alignement des esprits qui est le phénomène dominant d
914
ècle triompheront au xxe siècle, grâce à l’appui
de
la technique nouvellement développée. La seule protestation personnal
915
testation personnaliste du xixe siècle est celle
de
quelques grands hommes aberrants, comme Kierkegaard, Nietzsche, Proud
916
n, Baudelaire, Rimbaud, qui sentent monter autour
d’
eux cet énorme mouvement de mise en ordre géométrique de l’homme et qu
917
sentent monter autour d’eux cet énorme mouvement
de
mise en ordre géométrique de l’homme et qui essaient de protester, ch
918
cet énorme mouvement de mise en ordre géométrique
de
l’homme et qui essaient de protester, chacun à sa manière, par des cr
919
e en ordre géométrique de l’homme et qui essaient
de
protester, chacun à sa manière, par des cris d’autant plus perçants q
920
t de protester, chacun à sa manière, par des cris
d’
autant plus perçants qu’ils ont l’impression de n’être pas entendus. 1
921
is d’autant plus perçants qu’ils ont l’impression
de
n’être pas entendus. 15 mai 1970 L’homme de la Renaissance, c’est l’i
922
ssion de n’être pas entendus. 15 mai 1970 L’homme
de
la Renaissance, c’est l’individu au sens nouveau. Il ressemble à cert
923
sens nouveau. Il ressemble à certains types grecs
de
l’individu, mais est plus franchement prométhéen, démesuré, qui veut
924
urs aller plus loin. C’est la nouvelle conception
de
la liberté : le dépassement de toutes les limites. Pour l’homme de la
925
ouvelle conception de la liberté : le dépassement
de
toutes les limites. Pour l’homme de la Renaissance, l’ici-bas n’est p
926
e dépassement de toutes les limites. Pour l’homme
de
la Renaissance, l’ici-bas n’est plus, comme pour l’homme du Moyen Âge
927
st plus, comme pour l’homme du Moyen Âge, un lieu
d’
attente. C’est ici et maintenant que tout se passe. Toutes les valeurs
928
a été exaltée par Nietzsche ; l’individu porteur
de
toutes les valeurs, l’individu « évaluateur ». C’est une sorte d’impé
929
leurs, l’individu « évaluateur ». C’est une sorte
d’
impérialisme individuel, qui est créateur chez un artiste ou chez un h
930
qui est créateur chez un artiste ou chez un homme
de
science, qui deviendra très dangereux quand ce sera l’impérialisme in
931
dangereux quand ce sera l’impérialisme individuel
d’
un prince, d’un général ou d’un homme d’État. 12 décembre 1969 La Révo
932
nd ce sera l’impérialisme individuel d’un prince,
d’
un général ou d’un homme d’État. 12 décembre 1969 La Révolution frança
933
érialisme individuel d’un prince, d’un général ou
d’
un homme d’État. 12 décembre 1969 La Révolution française, dans un sen
934
ir de la Révolution française que le rationalisme
de
Descartes va pouvoir développer tous ses effets sociaux, politiques e
935
toujours plus grande des valeurs individualistes
d’
un côté, collectivistes de l’autre, avec un écart toujours plus grand
936
valeurs individualistes d’un côté, collectivistes
de
l’autre, avec un écart toujours plus grand entre les deux branches de
937
écart toujours plus grand entre les deux branches
de
cette dialectique. D’un côté, l’État s’empare de tout ce qui avant ét
938
and entre les deux branches de cette dialectique.
D’
un côté, l’État s’empare de tout ce qui avant était activité responsab
939
de cette dialectique. D’un côté, l’État s’empare
de
tout ce qui avant était activité responsable de la personne : la souv
940
e de tout ce qui avant était activité responsable
de
la personne : la souveraineté de la personne est déléguée à l’État. S
941
vité responsable de la personne : la souveraineté
de
la personne est déléguée à l’État. Si bien que l’homme ainsi créé dev
942
nt de plus en plus un individu détaché, qui offre
de
moins en moins de résistance aux mesures géométriques et générales dé
943
un individu détaché, qui offre de moins en moins
de
résistance aux mesures géométriques et générales décrétées par l’État
944
ccidents, et alors la ville était livrée au règne
de
la force et non au règne de la raison. En faisant cette coupure, cett
945
était livrée au règne de la force et non au règne
de
la raison. En faisant cette coupure, cette dichotomie de l’homme, on
946
aison. En faisant cette coupure, cette dichotomie
de
l’homme, on peut dire que Descartes a introduit une espèce de schizop
947
on peut dire que Descartes a introduit une espèce
de
schizophrénie dans la conception de l’homme, qui a été fort utile à l
948
it une espèce de schizophrénie dans la conception
de
l’homme, qui a été fort utile à la technique. Cette dichotomie a perm
949
t utile à la technique. Cette dichotomie a permis
de
se livrer à la technique d’une manière qui n’aurait pas été possible
950
e dichotomie a permis de se livrer à la technique
d’
une manière qui n’aurait pas été possible auparavant. Avant lui, on fa
951
ant lui, on faisait toujours attention à un total
de
l’homme, et aux réactions d’une chose sur l’autre. Descartes a donné
952
attention à un total de l’homme, et aux réactions
d’
une chose sur l’autre. Descartes a donné champ libre à des expérimenta
953
s les peuples du continent ; et les foyers locaux
de
création, d’enseignement, d’invention. J’exclus totalement la troisiè
954
du continent ; et les foyers locaux de création,
d’
enseignement, d’invention. J’exclus totalement la troisième base, qui
955
et les foyers locaux de création, d’enseignement,
d’
invention. J’exclus totalement la troisième base, qui est celle qu’on
956
térature, n’a jamais coïncidé avec les frontières
d’
une nation. Cela a été ou bien des grands courants comme l’art gothiqu
957
ique ou le surréalisme, ou bien des petits foyers
de
création, comme Padoue, Mantoue, Bruges, Gand, etc. 9. Unité, dive
958
sité, fédéralisme 26 novembre 1976 Les sources
de
la culture européenne sont très différenciées et nombreuses, la sourc
959
bes et plus tard slaves… Cela fait un joli paquet
de
contradictions et d’éléments qui ne sont pas près de s’harmoniser, ma
960
es… Cela fait un joli paquet de contradictions et
d’
éléments qui ne sont pas près de s’harmoniser, mais qui font la riches
961
qui font la richesse et les tensions intérieures
de
l’Europe. Mais derrière tout cela, beaucoup d’éléments d’unité ; les
962
es de l’Europe. Mais derrière tout cela, beaucoup
d’
éléments d’unité ; les mêmes mythologies, par exemple. Quand on parle
963
ope. Mais derrière tout cela, beaucoup d’éléments
d’
unité ; les mêmes mythologies, par exemple. Quand on parle de la mytho
964
es mêmes mythologies, par exemple. Quand on parle
de
la mythologie grecque, tout le monde, à peu près, sait de quoi il s’a
965
thologie grecque, tout le monde, à peu près, sait
de
quoi il s’agit en Europe, et cela peut même définir l’esprit européen
966
ale. 8 mai 1970 Les grandes découvertes ont posé,
de
manière concrète, le problème fondamental de toutes les sciences : la
967
osé, de manière concrète, le problème fondamental
de
toutes les sciences : la comparaison. Grâce aux découvertes géographi
968
urope a été amenée à admettre, peu à peu, le fait
d’
une très grande diversité des hommes, selon les continents, et à remet
969
e qui, auparavant, allait de soi. C’est l’origine
de
la contestation, c’est l’acte originel qui crée les sciences : étonne
970
nement et comparaison. Grâce aux voyages, l’homme
de
la Renaissance découvre la pluralité des peuples, des ethnies et des
971
s races, et ainsi se trouvent posés les principes
de
ce qui sera l’ethnographie, l’anthropologie. Cela posera aussi les pr
972
l’anthropologie. Cela posera aussi les problèmes
de
la philologie, de la sociologie comparée. 19 novembre 1976 Le fondeme
973
Cela posera aussi les problèmes de la philologie,
de
la sociologie comparée. 19 novembre 1976 Le fondement culturel, diron
974
sentiel pour définir, par exemple, la possibilité
d’
une fédération européenne. On ne peut penser à une fédération, à une u
975
union des Européens que parce qu’il y a une unité
de
base, qui est une unité culturelle, sur laquelle on peut bâtir une un
976
n, c’est quelque chose que l’on fait, qui résulte
d’
une action délibérée. 24 avril 1970 Si l’on me demande comment on peut
977
, en termes de structures politiques, cette unité
de
culture non unitaire et si hautement diversifiée qu’est la culture eu
978
ent par l’union dans la diversité, et cette forme
d’
union porte un nom bien connu dans l’histoire des régimes politiques,
979
nu dans l’histoire des régimes politiques, c’est,
de
toute évidence : fédéralisme. Je ne vois pas d’autre forme d’union qu
980
, de toute évidence : fédéralisme. Je ne vois pas
d’
autre forme d’union qui réponde à la double exigence du respect des di
981
dence : fédéralisme. Je ne vois pas d’autre forme
d’
union qui réponde à la double exigence du respect des diversités et de
982
à la double exigence du respect des diversités et
de
l’instauration d’une force suffisante pour garantir leur concurrence
983
ce du respect des diversités et de l’instauration
d’
une force suffisante pour garantir leur concurrence féconde, dans la p
984
concurrence féconde, dans la paix. Je ne vois pas
d’
autre réponse imaginable au défi que l’histoire nous pose dans les ter
985
échappatoire possible désormais : s’unir, au-delà
de
nos fausses souverainetés, pour préserver nos vraies diversités — cré
986
tés — créer un pouvoir fédéral pour la sauvegarde
de
nos autonomies. Car ces autonomies seront perdues une à une, si nous
987
qui fait toute ma thèse : étant donné que la base
de
notre unité est une culture pluraliste, on ne peut fonder sur elle qu
988
peut se fonder une union européenne. Aux apports
d’
Athènes, de Rome, de Jérusalem soulignés par Paul Valéry, Denis de Rou
989
nder une union européenne. Aux apports d’Athènes,
de
Rome, de Jérusalem soulignés par Paul Valéry, Denis de Rougemont ajou
990
union européenne. Aux apports d’Athènes, de Rome,
de
Jérusalem soulignés par Paul Valéry, Denis de Rougemont ajoute ceux d
991
rands conciles dont les débats inaugurent un mode
de
pensée caractéristique de la culture européenne : l’idée d’union sans
992
bats inaugurent un mode de pensée caractéristique
de
la culture européenne : l’idée d’union sans fusion ni séparation, la
993
caractéristique de la culture européenne : l’idée
d’
union sans fusion ni séparation, la dialectique toujours ouverte de l’
994
on ni séparation, la dialectique toujours ouverte
de
l’Un et du Divers, dont le fédéralisme est la transposition politique
995
édéralisme est la transposition politique. L’idée
d’
empire est un autre produit marquant de la culture et de l’histoire eu
996
ue. L’idée d’empire est un autre produit marquant
de
la culture et de l’histoire européennes : pendant des siècles, dépour
997
re est un autre produit marquant de la culture et
de
l’histoire européennes : pendant des siècles, dépourvu de bureaucrati
998
toire européennes : pendant des siècles, dépourvu
de
bureaucratie et d’appareil étatique, le Saint-Empire (dont l’Empire n
999
pendant des siècles, dépourvu de bureaucratie et
d’
appareil étatique, le Saint-Empire (dont l’Empire napoléonien est tout
1000
mement diverses sous la seule autorité symbolique
de
l’empereur. La culture constitue l’unité de base sur laquelle peut se
1001
lique de l’empereur. La culture constitue l’unité
de
base sur laquelle peut se fonder l’union des Européens dans leur dive
1002
ulture, une, est aussi plurale. Alors que l’unité
de
la culture nous est donnée, l’union est de l’ordre du faire, de la tâ
1003
’unité de la culture nous est donnée, l’union est
de
l’ordre du faire, de la tâche à accomplir. Le fédéralisme correspond
1004
nous est donnée, l’union est de l’ordre du faire,
de
la tâche à accomplir. Le fédéralisme correspond à cet objectif, puisq
1005
bjectif, puisqu’il transcrit en actes le paradoxe
de
la culture européenne une et diverse : l’union y est conçue non pour
1006
qui tendent à disjoindre les antinomies typiques
de
la culture européenne ont un caractère réducteur et néfaste. Ainsi, l
1007
s, en fait et malgré ce que les États prétendent,
de
cultures nationales en Europe, seulement des diversités locales, régi
1008
des diversités locales, régionales, sur une trame
d’
unité d’ensemble. Aujourd’hui, l’autorité de la “Science” équivaut à c
1009
rsités locales, régionales, sur une trame d’unité
d’
ensemble. Aujourd’hui, l’autorité de la “Science” équivaut à celle qu’
1010
trame d’unité d’ensemble. Aujourd’hui, l’autorité
de
la “Science” équivaut à celle qu’avait la théologie au Moyen Âge. Mai
1011
ne perte du langage commun et, au-delà, une perte
de
conscience des finalités par rapport à une conception de l’homme dans
1012
cience des finalités par rapport à une conception
de
l’homme dans la société. Dans cette perspective, l’éducation a un rôl
1013
imentés grâce aux dépêches des agences nationales
de
presse. L’éducation doit plutôt, selon Denis de Rougemont, tendre ver
1014
nitiation et l’initiative, entre la socialisation
de
l’individu et la promotion de l’autonomie personnelle, entre l’appren
1015
re la socialisation de l’individu et la promotion
de
l’autonomie personnelle, entre l’apprentissage de la responsabilité e
1016
de l’autonomie personnelle, entre l’apprentissage
de
la responsabilité et l’exercice de la liberté. »
1017
’apprentissage de la responsabilité et l’exercice
de
la liberté. »
1018
it reconnu par l’historiographie et la sociologie
de
langue française. L’État-nation, c’est la mainmise d’un appareil état
1019
angue française. L’État-nation, c’est la mainmise
d’
un appareil étatique sur des réalités dites nationales, qui sont d’ord
1020
tique sur des réalités dites nationales, qui sont
d’
ordre culturel, spirituel, ethnique, moral, des réalités de but commun
1021
ulturel, spirituel, ethnique, moral, des réalités
de
but commun, ou parfois des réalités d’origine commune. La nation est
1022
s réalités de but commun, ou parfois des réalités
d’
origine commune. La nation est beaucoup plus vague, et pas nécessairem
1023
à partir de la Révolution française, et notamment
de
sa période jacobine, et ne s’est véritablement réalisée pour la premi
1024
t réalisée pour la première fois que par l’action
de
Napoléon. 24 avril 1970 Qu’est-ce, en somme, qu’instituer un État-nat
1025
t soumettre toute une nation aux pouvoirs absolus
de
l’État. C’est vouloir faire coïncider sur un même territoire, défini
1026
sort des guerres et aussitôt baptisé « sol sacré
de
la patrie », des réalités absolument hétérogènes qui n’ont aucune rai
1027
és absolument hétérogènes qui n’ont aucune raison
d’
avoir les mêmes frontières, comme la langue et l’économie, l’état civi
1028
encore, les idéologies et les religions, sommées
de
s’arrêter sur une ligne de barbelés électrifiés. C’est livrer, sans r
1029
les religions, sommées de s’arrêter sur une ligne
de
barbelés électrifiés. C’est livrer, sans recours, toute l’existence h
1030
s, toute l’existence humaine aux seules décisions
de
bureaux installés dans une seule capitale, et interdire toute allégea
1031
volution française, c’est l’État qui s’est emparé
de
la nation unitaire, produite par la dissolution des anciennes provinc
1032
ion des anciennes provinces. C’est donc une sorte
de
nationalisation de l’État, ou d’étatisation de la nation, ou encore l
1033
rovinces. C’est donc une sorte de nationalisation
de
l’État, ou d’étatisation de la nation, ou encore la confiscation d’un
1034
t donc une sorte de nationalisation de l’État, ou
d’
étatisation de la nation, ou encore la confiscation d’une mystique — l
1035
te de nationalisation de l’État, ou d’étatisation
de
la nation, ou encore la confiscation d’une mystique — la mystique nat
1036
atisation de la nation, ou encore la confiscation
d’
une mystique — la mystique nationale, libertaire — par un appareil adm
1037
’État-nation moderne. 27 mai 1966 L’État des rois
de
France, d’une part, et d’autre part, l’État auquel amènent les progrè
1038
vinces-Unies de Hollande surtout, ces deux formes
d’
État ne sont pas identiques. L’État imposé par les rois sera de plus e
1039
dis que l’État composé librement par des cités ou
de
petites communautés en fédérations restera toujours un moyen, au serv
1040
des citoyens, des libertés individuelles. L’État
de
type royal, français, repose sur le droit de la force, et l’autre rep
1041
État de type royal, français, repose sur le droit
de
la force, et l’autre repose sur la force des pactes uniquement. Il y
1042
a force des pactes uniquement. Il y a donc l’État
de
type préfédéral qui est un État instrumental, simplement, qui s’oppos
1043
9 novembre 1968 On peut réduire toute la doctrine
de
Hegel à un syllogisme : chaque nation incarne, à un moment de l’histo
1044
n syllogisme : chaque nation incarne, à un moment
de
l’histoire, une mission dominante, or, c’est l’État qui seul peut réa
1045
avec Hegel, qui, au fond, théorise la nation née
de
la Révolution française, contre Napoléon, mais exactement dans les mê
1046
exactement dans les mêmes catégories, à une sorte
de
transfert de l’idée de vocation personnelle au niveau collectif de la
1047
ns les mêmes catégories, à une sorte de transfert
de
l’idée de vocation personnelle au niveau collectif de la nation, de l
1048
es catégories, à une sorte de transfert de l’idée
de
vocation personnelle au niveau collectif de la nation, de l’État ; l’
1049
’idée de vocation personnelle au niveau collectif
de
la nation, de l’État ; l’État considéré comme un individu, comme une
1050
ion personnelle au niveau collectif de la nation,
de
l’État ; l’État considéré comme un individu, comme une personne, qui
1051
fait élire consul à vie, prend, en 1804, le titre
d’
empereur. C’est beaucoup plus un titre d’imperator qu’un titre d’emper
1052
le titre d’empereur. C’est beaucoup plus un titre
d’
imperator qu’un titre d’empereur au sens du Saint-Empire ou de Charlem
1053
st beaucoup plus un titre d’imperator qu’un titre
d’
empereur au sens du Saint-Empire ou de Charlemagne ou d’Alexandre. C’e
1054
qu’un titre d’empereur au sens du Saint-Empire ou
de
Charlemagne ou d’Alexandre. C’est un titre militaire. Napoléon a prét
1055
reur au sens du Saint-Empire ou de Charlemagne ou
d’
Alexandre. C’est un titre militaire. Napoléon a prétendu fonder un vér
1056
se tourner vers l’Asie et reprendre les ambitions
d’
Alexandre le Grand. Mais ce qu’il a effectivement créé en 1804 est un
1057
l a effectivement créé en 1804 est un État-nation
de
type nouveau, réalisant les ambitions de la Révolution française. Ce
1058
t-nation de type nouveau, réalisant les ambitions
de
la Révolution française. Ce n’est pas un empire, puisqu’on ne trouve
1059
universalité, qui sont les caractères distinctifs
d’
un empire. 22 novembre 1968 L’État-nation de Napoléon se compose d’un
1060
ovembre 1968 L’État-nation de Napoléon se compose
d’
un État copié sur l’Empire romain et d’une nation telle que venait de
1061
se compose d’un État copié sur l’Empire romain et
d’
une nation telle que venait de la créer la Révolution française. Ou en
1062
réer la Révolution française. Ou encore, l’Empire
de
Napoléon, c’est une nation révolutionnaire et un imperium romain. 11
1063
le roi, pour l’État absolu, il n’est pas question
de
dire que le but de la société c’est que les hommes vivent bien et soi
1064
absolu, il n’est pas question de dire que le but
de
la société c’est que les hommes vivent bien et soient heureux, il est
1065
es vivent bien et soient heureux, il est question
de
dire que le but de l’État, c’est l’État, c’est la puissance, du roi o
1066
oient heureux, il est question de dire que le but
de
l’État, c’est l’État, c’est la puissance, du roi ou de l’État qui pre
1067
État, c’est l’État, c’est la puissance, du roi ou
de
l’État qui prendra sa place plus tard, de l’État-nation qui prendra e
1068
roi ou de l’État qui prendra sa place plus tard,
de
l’État-nation qui prendra exactement la place du roi absolu d’autrefo
1069
ion qui prendra exactement la place du roi absolu
d’
autrefois. 20 mai 1977 Au total, on peut dire que la Révolution frança
1070
volution française, c’est l’État qui s’est emparé
de
la nation unitaire produite par la dissolution des anciennes communau
1071
lution des anciennes communautés, donc, une sorte
de
nationalisation de l’État, ou bien d’étatisation de la nation. Aujour
1072
s communautés, donc, une sorte de nationalisation
de
l’État, ou bien d’étatisation de la nation. Aujourd’hui, les partis s
1073
, une sorte de nationalisation de l’État, ou bien
d’
étatisation de la nation. Aujourd’hui, les partis socialistes, et surt
1074
nationalisation de l’État, ou bien d’étatisation
de
la nation. Aujourd’hui, les partis socialistes, et surtout communiste
1075
socialistes, et surtout communistes, se défendent
de
vouloir étatiser en nationalisant les industries, or, pour moi, il n’
1076
vrier 1968 Nous avons vu à propos de la langue et
de
la religion, que ce ne sont pas des facteurs décisifs, surtout pas su
1077
cteur principal — sinon décisif à lui tout seul —
de
la formation des différentes nations au sens moderne ? Je pense que c
1078
ui est l’organisation territoriale : la formation
de
territoires, plus ou moins unifiés par une dynastie en général, en at
1079
unifiés par une dynastie en général, en attendant
de
l’être, dès la Révolution française, par l’appareil administratif de
1080
évolution française, par l’appareil administratif
de
l’État. 21 janvier 1966 On peut à la fois faire un très grand éloge d
1081
1966 On peut à la fois faire un très grand éloge
de
l’Empire romain, et on l’a fait. Les jacobins, par exemple, ont estim
1082
bins, par exemple, ont estimé que c’est le sommet
de
l’histoire humaine. Ou on peut aussi lui faire les reproches les plus
1083
es plus virulents, ce que l’on est beaucoup tenté
de
faire dans notre siècle. Bien entendu, les deux choses sont vraies, e
1084
raies, elles ne sont pas du tout exclusives l’une
de
l’autre. Ce qui m’intéresse dans cette recherche, c’est de voir ce qu
1085
e. Ce qui m’intéresse dans cette recherche, c’est
de
voir ce que Rome a légué à l’existence politique, à l’existence civiq
1086
ue, à l’existence civique des Européens : ce sens
de
l’État et de la loi, des institutions, de la légalité, qui, laissé se
1087
ence civique des Européens : ce sens de l’État et
de
la loi, des institutions, de la légalité, qui, laissé seul, ne donne
1088
ce sens de l’État et de la loi, des institutions,
de
la légalité, qui, laissé seul, ne donne qu’un État, l’État moderne ou
1089
mais sans lequel il ne saurait y avoir plus tard
de
fédération. C’est un élément, si vous voulez, nécessaire, mais non su
1090
gérer irrésistiblement qu’elles sont les origines
de
nos nations modernes. Voici une liste des traits caractéristiques des
1091
s : 1. La tribu est une totalité. 2. Son principe
d’
union est d’abord religieux. 3. Son territoire est considéré comme le
1092
est un acte religieux. Ces sept caractéristiques
de
la tribu méritent d’être examinées de plus près, car elles correspond
1093
x. Ces sept caractéristiques de la tribu méritent
d’
être examinées de plus près, car elles correspondent toutes à nos nati
1094
aut dans le passé, mais on ne trouve pas le terme
de
nation avant le xiiie siècle. Avant, les nations étaient les empires
1095
nt, les nations étaient les empires, qui sont nés
de
la réunion — plus ou moins forcée — de plusieurs tribus réunies par l
1096
i sont nés de la réunion — plus ou moins forcée —
de
plusieurs tribus réunies par le chef de l’une de ces tribus, ou domin
1097
forcée — de plusieurs tribus réunies par le chef
de
l’une de ces tribus, ou dominées par les dieux d’une de ces tribus, a
1098
de plusieurs tribus réunies par le chef de l’une
de
ces tribus, ou dominées par les dieux d’une de ces tribus, auxquels l
1099
de l’une de ces tribus, ou dominées par les dieux
d’
une de ces tribus, auxquels les autres tribus adhèrent peu à peu. Troi
1100
ne de ces tribus, ou dominées par les dieux d’une
de
ces tribus, auxquels les autres tribus adhèrent peu à peu. Trois gran
1101
ngue vie latente dans l’empire, se sont pénétrées
de
l’idée qu’elles avaient chacune une vocation universelle. Ces prétent
1102
rétentions impériales usurpées vont se multiplier
de
la Renaissance jusqu’à nos jours. 25 octobre 1968 Littéralement, chaq
1103
i est le nombril du monde. Ce n’est pas une façon
de
parler : l’omphalos (nombril) désignait la capitale, le centre. On tr
1104
yloniens, les Égyptiens, les Hindous, les Pygmées
d’
Afrique, les mages de la Perse zoroastrique, ou les mystiques de l’isl
1105
ns, les Hindous, les Pygmées d’Afrique, les mages
de
la Perse zoroastrique, ou les mystiques de l’islam. On trouve cette m
1106
mages de la Perse zoroastrique, ou les mystiques
de
l’islam. On trouve cette même conviction chez tous les chauvinistes e
1107
ction chez tous les chauvinistes et nationalistes
de
nos nations modernes : ma nation est le centre du monde, c’est par là
1108
mence avec la Révolution française, l’avant-garde
de
la Révolution a beaucoup insisté sur les aspects religieux de la Révo
1109
tion a beaucoup insisté sur les aspects religieux
de
la Révolution — qu’elle voulait substituer au christianisme — et sur
1110
substituer au christianisme — et sur la nécessité
d’
avoir un centre sacré, qui était, pour les jacobins, la commune de Par
1111
e sacré, qui était, pour les jacobins, la commune
de
Paris (chez Anacharsis Cloots, par exemple). 25 octobre 1968 L’État-n
1112
t-nation est une combinaison relativement moderne
de
deux réalités, sociale et politique, beaucoup plus anciennes, d’origi
1113
s, sociale et politique, beaucoup plus anciennes,
d’
origines complètement différentes — l’une étant la nation, et l’autre
1114
t à partir de la Révolution française, et surtout
de
Napoléon qu’a été créé ce composé qui se proclame souverain absolu et
1115
eci en dépit de toute connaissance un peu précise
de
l’histoire : car, ainsi que l’écrivait vers 1880 Ernest Renan dans un
1116
ation ? : « Les nations ne sont pas quelque chose
d’
éternel. Elles ont commencé. Elles finiront. La confédération européen
1117
», est la phrase importante. Il s’agit pour nous
de
savoir quand et comment elles ont commencé, et comment elles se sont
1118
ment elles se sont développées ensuite. La notion
d’
État a une genèse que l’on peut retracer. Connaître la genèse de l’Éta
1119
enèse que l’on peut retracer. Connaître la genèse
de
l’État et de la nation, les lois de leur évolution, peut nous permett
1120
n peut retracer. Connaître la genèse de l’État et
de
la nation, les lois de leur évolution, peut nous permettre de mieux é
1121
tre la genèse de l’État et de la nation, les lois
de
leur évolution, peut nous permettre de mieux évaluer la réalité prése
1122
, les lois de leur évolution, peut nous permettre
de
mieux évaluer la réalité présente, et de prévoir parfois leurs transf
1123
ermettre de mieux évaluer la réalité présente, et
de
prévoir parfois leurs transformations futures. 25 octobre 1968 Que je
1124
fondamentale : je définis la nation comme un type
de
communauté humaine, un idéal ; tandis que je définis l’État comme un
1125
1967 Quant aux traditionalistes, l’autre famille
d’
esprit (avec les nationalistes) qui s’oppose ou croit devoir s’opposer
1126
’oppose ou croit devoir s’opposer à toute formule
d’
union, et surtout de fédération, je pense que leur opposition est moti
1127
oir s’opposer à toute formule d’union, et surtout
de
fédération, je pense que leur opposition est motivée par une confusio
1128
les nations. Vous voyez à quel point il est grave
de
confondre patrie et nation comme on le fait couramment. 29 avril 1967
1129
ns qui ont détruit l’attachement à la patrie sont
de
formation très récente. Elles ne remontent pas plus haut que la Révol
1130
iècle, à la suite de la Révolution et des guerres
de
l’Empire, l’ont fait contre les traditions des provinces, contre les
1131
omain germanique, et aussi contre l’unité vivante
de
l’Europe. Il est vrai que beaucoup des traditions qui ont été ainsi e
1132
été ainsi effacées par l’effort, par la violence
de
la Révolution française, étaient devenues sclérosées et auraient mené
1133
vue des traditionalistes, c’est une erreur totale
de
confondre nation et tradition. Les traditions que devrait défendre u
1134
ons que devrait défendre un traditionaliste digne
de
ce nom sont beaucoup plus anciennes que les nations, et ont été détru
1135
uites par les nations. Il est étrange à ce propos
de
constater que si tant de traditionalistes se rendent responsables de
1136
tant de traditionalistes se rendent responsables
de
cette confusion entre nation et patrie, c’est parce qu’ils manquent d
1137
tre nation et patrie, c’est parce qu’ils manquent
de
sens de l’histoire, ce qui est particulièrement grave pour des tradit
1138
on et patrie, c’est parce qu’ils manquent de sens
de
l’histoire, ce qui est particulièrement grave pour des traditionalist
1139
es, qui parlaient anglais, se sont-elles séparées
de
l’Angleterre ? Pourquoi les États-Unis et le Canada ne font-ils pas u
1140
seul pays ? Pourquoi s’est-on opposé aux volontés
d’
Anschluss proclamées par Hitler ? Au nom de la francophonie, la France
1141
ncophonie, la France pourrait réclamer l’annexion
de
la Belgique wallonne, de la Suisse romande, du Val d’Aoste. Mais au n
1142
rait réclamer l’annexion de la Belgique wallonne,
de
la Suisse romande, du Val d’Aoste. Mais au nom de la même théorie, il
1143
a Belgique wallonne, de la Suisse romande, du Val
d’
Aoste. Mais au nom de la même théorie, il faudrait que la France accep
1144
a même théorie, il faudrait que la France accepte
de
se diminuer des régions où on parle une autre langue que le français,
1145
e une autre langue que le français, en dépit de l’
édit
de Villers-Cotterêts : l’Alsace, les Flandres, la Bretagne, les régio
1146
autre langue que le français, en dépit de l’édit
de
Villers-Cotterêts : l’Alsace, les Flandres, la Bretagne, les régions
1147
a Corse. Il faudrait changer entièrement la carte
de
l’Europe, et notamment de la France que l’on croit à tort entièrement
1148
er entièrement la carte de l’Europe, et notamment
de
la France que l’on croit à tort entièrement uniformisée, si l’on voul
1149
ique des nationalités qui a présidé aux « traités
de
banlieue » qui ont partagé les États successeurs de l’Autriche-Hongri
1150
banlieue » qui ont partagé les États successeurs
de
l’Autriche-Hongrie, après la Première Guerre mondiale. 31 janvier 196
1151
rre mondiale. 31 janvier 1969 Les quatre éléments
d’
étatisation de l’existence humaine au xixe siècle étaient l’armée, l’
1152
31 janvier 1969 Les quatre éléments d’étatisation
de
l’existence humaine au xixe siècle étaient l’armée, l’école, la pres
1153
és dans les ouvrages historiques sur la formation
de
l’État et de la nation. Presque toutes les histoires (en tout cas cel
1154
uvrages historiques sur la formation de l’État et
de
la nation. Presque toutes les histoires (en tout cas celles écrites p
1155
s Européens de l’Est) sont fondées sur le critère
de
la langue. Cela correspond d’ailleurs à un sentiment très général, in
1156
esponde à une langue et inversement. Aux environs
de
1840-1848, on en parlait en effet beaucoup, plusieurs révolutions pop
1157
Née avec la Révolution et l’Empire, la confusion
de
l’État et de la nation — le premier s’emparant des forces vives de la
1158
Révolution et l’Empire, la confusion de l’État et
de
la nation — le premier s’emparant des forces vives de la seconde pour
1159
a nation — le premier s’emparant des forces vives
de
la seconde pour les tourner vers la guerre — va s’achever (prendre fi
1160
914 étant une charnière. Le xixe siècle, à dater
de
1815, s’achève en 1914. 25 octobre 1968 Le passage de la tribu totémi
1161
815, s’achève en 1914. 25 octobre 1968 Le passage
de
la tribu totémique aux empires s’est fait par l’impérialisme mystique
1162
rre, elle, favorise la concentration des pouvoirs
de
décision entre les mains d’un chef, elle oblige à mettre en commun to
1163
ntration des pouvoirs de décision entre les mains
d’
un chef, elle oblige à mettre en commun toutes les forces physiques, é
1164
a formation des empires, c’est l’élément mystique
de
l’extension de l’autorité des dieux d’une tribu sur les tribus voisin
1165
empires, c’est l’élément mystique de l’extension
de
l’autorité des dieux d’une tribu sur les tribus voisines qui joue. Si
1166
t mystique de l’extension de l’autorité des dieux
d’
une tribu sur les tribus voisines qui joue. Si l’État est une machine
1167
ibus voisines qui joue. Si l’État est une machine
de
guerre, on peut dire que l’empire est le résultat d’une croisade. C’e
1168
guerre, on peut dire que l’empire est le résultat
d’
une croisade. C’est une réalité spirituelle et mystique. 25 octobre 19
1169
s qui composent un empire qu’on trouve la formule
de
passage entre les tribus primitives et les nations au sens moderne. S
1170
nations au sens moderne. Si les empires sont nés
de
tribus englobées et fixées sur un territoire de plus en plus détermin
1171
e de plus en plus déterminé, les nations naîtront
de
la dissociation des empires, par relâchement du lien sacral impérial,
1172
lâchement du lien sacral impérial, et par le fait
de
mouvements d’opposition de la partie au tout. Ainsi, on trouve, dans
1173
ien sacral impérial, et par le fait de mouvements
d’
opposition de la partie au tout. Ainsi, on trouve, dans le second cara
1174
périal, et par le fait de mouvements d’opposition
de
la partie au tout. Ainsi, on trouve, dans le second caractère des emp
1175
ouve, dans le second caractère des empires, celui
de
vouloir former une totalité, la naissance d’un nouvel impérialisme :
1176
elui de vouloir former une totalité, la naissance
d’
un nouvel impérialisme : les nations modernes ont d’abord voulu s’extr
1177
27 juin 1969 L’étape importante pour la formation
de
l’État moderne, c’est le début du xive siècle, où nous voyons se for
1178
e siècle, où nous voyons se former quelque chose
de
tout à fait nouveau dans la France de Philippe le Bel : l’État nation
1179
ar ses légistes qu’il ne reconnaît rien au-dessus
de
lui. En disant cela, il s’adresse à l’empereur et au pape. D’autre pa
1180
nstaller à Avignon, sous sa protection. Ce modèle
de
l’État moderne, commencé par la France, sera reproduit avec différent
1181
d, par l’Espagne et par l’Angleterre. Cette forme
d’
État complètement neuve — qui ne ressemble en rien à l’État romain don
1182
romain dont elle n’a gardé que le droit et l’idée
d’
institutions — est liée au territoire, au domaine d’un roi et d’une dy
1183
institutions — est liée au territoire, au domaine
d’
un roi et d’une dynastie. Plus tard, à la Révolution française, cet Ét
1184
— est liée au territoire, au domaine d’un roi et
d’
une dynastie. Plus tard, à la Révolution française, cet État sera lié
1185
lution française, cet État sera lié au territoire
de
l’ensemble du pays, de la nation. Ce n’est plus l’administration d’u
1186
tat sera lié au territoire de l’ensemble du pays,
de
la nation. Ce n’est plus l’administration d’un domaine privé du roi,
1187
ys, de la nation. Ce n’est plus l’administration
d’
un domaine privé du roi, cela devient l’administration du domaine publ
1188
tration du domaine public du peuple, c’est-à-dire
de
la nation idéologique. L’idéologie devient très importante, et est im
1189
rès bien sous Napoléon. 1er novembre 1968 Le rôle
de
l’empereur est essentiellement celui de garant moral. Quand l’empereu
1190
8 Le rôle de l’empereur est essentiellement celui
de
garant moral. Quand l’empereur cessera d’être reconnu comme cette gar
1191
t celui de garant moral. Quand l’empereur cessera
d’
être reconnu comme cette garantie suprême, les nations commenceront à
1192
ceront à se manifester comme telles. Les légistes
de
Philippe le Bel l’ont exprimé ainsi : « Le Roy de France est empereur
1193
de Philippe le Bel l’ont exprimé ainsi : « Le Roy
de
France est empereur en son royaume. » Je date la naissance des nation
1194
n son royaume. » Je date la naissance des nations
de
ce moment précis, au début du xive siècle. Le roi de France se consi
1195
empereur, déclare donc qu’il n’est plus le vassal
de
personne, qu’il se suffit à lui-même comme seul un « tout » peut le f
1196
e. (Je rappelle qu’un des traits caractéristiques
de
l’empire est la totalité.) Dans le cas de la France, et plus tard de
1197
stiques de l’empire est la totalité.) Dans le cas
de
la France, et plus tard de l’Angleterre et de l’Espagne, la partie ve
1198
totalité.) Dans le cas de la France, et plus tard
de
l’Angleterre et de l’Espagne, la partie veut se faire aussi grande qu
1199
cas de la France, et plus tard de l’Angleterre et
de
l’Espagne, la partie veut se faire aussi grande que le tout. 1er nove
1200
ais en se définissant dans le cadre administratif
de
l’Église. Les provinces ecclésiastiques sont une préfiguration des fu
1201
ion des futures nations. L’héritage administratif
de
l’Empire romain a été repris par l’Église. 3. De l’individualisme
1202
l’Empire romain a été repris par l’Église. 3.
De
l’individualisme au totalitarisme 27 janvier 1967 Une des phrases
1203
nd ils sont vivants, on ne peut pas les organiser
d’
une manière géométrique. 29 mai 1970 Le Prince date de 1513, et tout
1204
manière géométrique. 29 mai 1970 Le Prince date
de
1513, et tout le xvie siècle va illustrer cette dialectique de l’ana
1205
ut le xvie siècle va illustrer cette dialectique
de
l’anarchie individualiste et de l’absolutisme étatique, l’un appelant
1206
cette dialectique de l’anarchie individualiste et
de
l’absolutisme étatique, l’un appelant l’autre — dialectique qui culmi
1207
la majesté de l’État. 22 novembre 1968 La volonté
d’
unification de Napoléon a fait un État-nation, certes, extrêmement sol
1208
l’État. 22 novembre 1968 La volonté d’unification
de
Napoléon a fait un État-nation, certes, extrêmement solide. Mais, dès
1209
religion, ou certaines grandes options politiques
de
base, cette centralisation a cessé d’être efficace ; elle est devenue
1210
politiques de base, cette centralisation a cessé
d’
être efficace ; elle est devenue une sorte de démence, elle a créé tou
1211
essé d’être efficace ; elle est devenue une sorte
de
démence, elle a créé toutes les données d’un totalitarisme oppressif
1212
sorte de démence, elle a créé toutes les données
d’
un totalitarisme oppressif à l’intérieur et impérialiste à l’extérieur
1213
e conduisant au-dedans, pour reprendre les termes
de
Benjamin Constant, à la « léthargie civique », et conduisant au-dehor
1214
rs à la guerre. 22 novembre 1968 Avec la création
de
l’Université de France, on touche à quelque chose de véritablement no
1215
22 novembre 1968 Avec la création de l’Université
de
France, on touche à quelque chose de véritablement nouveau : on veut
1216
l’Université de France, on touche à quelque chose
de
véritablement nouveau : on veut imposer l’uniformité des esprits. C’e
1217
’il exige l’adhésion sentimentale et enthousiaste
de
toute la nation. Et pour cela, il est fatal et nécessaire qu’il s’en
1218
iie siècle, a été dans tous les siècles la force
de
contestation par excellence. La contestation a été depuis le début le
1219
ce. La contestation a été depuis le début le mode
d’
enseignement et de discussion, le sic et non. 15 novembre 1968 L’idéol
1220
n a été depuis le début le mode d’enseignement et
de
discussion, le sic et non. 15 novembre 1968 L’idéologie jacobine — qu
1221
Cloots — va justifier les deux phénomènes majeurs
de
la Révolution française : la suppression de toutes les diversités rég
1222
jeurs de la Révolution française : la suppression
de
toutes les diversités régionales et la création d’un État centralisé
1223
e toutes les diversités régionales et la création
d’
un État centralisé ; l’impérialisme de fait de la Révolution française
1224
la création d’un État centralisé ; l’impérialisme
de
fait de la Révolution française, la chute de l’esprit missionnaire et
1225
ion d’un État centralisé ; l’impérialisme de fait
de
la Révolution française, la chute de l’esprit missionnaire et univers
1226
isme de fait de la Révolution française, la chute
de
l’esprit missionnaire et universel dans la défense de la patrie de la
1227
onnaire et universel dans la défense de la patrie
de
la Révolution, la France, ce qui conduira à un nouveau nationalisme,
1228
suppression des corps régionaux, la pulvérisation
de
la société, obligera les révolutionnaires à se demander qui va être l
1229
lutionnaires à se demander qui va être le porteur
de
la volonté générale de vingt-cinq-millions de Français. Ce sera évide
1230
der qui va être le porteur de la volonté générale
de
vingt-cinq-millions de Français. Ce sera évidemment l’État, qui appar
1231
eur de la volonté générale de vingt-cinq-millions
de
Français. Ce sera évidemment l’État, qui apparaît ainsi comme le comp
1232
t ainsi comme le complément concret et nécessaire
de
la nation, qui s’est presque évanouie dans l’abstrait. 12 juin 1970 L
1233
2 juin 1970 L’État-nation a été une des créations
de
l’Europe et doit nécessairement, par sa logique interne, devenir tota
1234
iques. L’Europe a failli, à deux reprises, mourir
de
l’application du système des États-nations et de leurs guerres fatale
1235
de l’application du système des États-nations et
de
leurs guerres fatales, en 1914-1918 et en 1939-1945. Ainsi a été démo
1236
t en 1939-1945. Ainsi a été démontrée la nocivité
de
cette valeur de l’État-nation. Mais cela ne l’empêche absolument pas
1237
Ainsi a été démontrée la nocivité de cette valeur
de
l’État-nation. Mais cela ne l’empêche absolument pas de continuer à r
1238
tat-nation. Mais cela ne l’empêche absolument pas
de
continuer à régner sur les esprits non seulement des Européens, mais
1239
sur les esprits non seulement des Européens, mais
de
tous les Occidentaux, et, de plus en plus, des gens du tiers-monde. 2
1240
oi les nationalistes s’opposent-ils à toute union
de
l’Europe, et notamment à la forme fédérale qu’ils tiennent pour un dé
1241
nnent pour un déguisement plus ou moins hypocrite
de
l’ambition unitariste ? Leur point de vue, et la réponse à la questio
1242
décembre 1966 par M. Michel Debré. À une question
d’
un journaliste qui lui demandait pourquoi il s’était opposé, par exemp
1243
tre — il répondait qu’il était contre des mesures
de
ce genre parce qu’elles tendaient « à réduire la France à l’état de s
1244
qu’elles tendaient « à réduire la France à l’état
de
simple province ». Si nous commentons la phrase de Debré, ceci revien
1245
e simple province ». Si nous commentons la phrase
de
Debré, ceci revient à dire que des nationalistes de son type d’esprit
1246
Debré, ceci revient à dire que des nationalistes
de
son type d’esprit redoutent que l’Europe fasse à la France ce que la
1247
revient à dire que des nationalistes de son type
d’
esprit redoutent que l’Europe fasse à la France ce que la France elle-
1248
moule, qu’elle a uniformisées, qu’elle a unifiées
de
force. Car ce type d’esprit, qui est en somme jacobin, ne peut rien i
1249
rmisées, qu’elle a unifiées de force. Car ce type
d’
esprit, qui est en somme jacobin, ne peut rien imaginer d’autre qu’une
1250
, qui est en somme jacobin, ne peut rien imaginer
d’
autre qu’une uniformisation autoritaire, ou alors il pense que ce n’es
1251
s et les autres — riches et à peu près équilibrés
d’
un côté, pauvres et en crise sociale de l’autre côté ? Ne convient-il
1252
équilibrés d’un côté, pauvres et en crise sociale
de
l’autre côté ? Ne convient-il donc pas d’opposer plutôt deux types d’
1253
sociale de l’autre côté ? Ne convient-il donc pas
d’
opposer plutôt deux types d’États-nations, les uns ayant été conduits
1254
convient-il donc pas d’opposer plutôt deux types
d’
États-nations, les uns ayant été conduits à la dictature par une crise
1255
pu éviter ce terme ultime du développement normal
de
l’État-nation grâce à leur position économique et sociale favorable ?
1256
25 octobre 1968 La souveraineté est religieuse,
de
religio, religare = relier. La religion, c’est ce qui relie. Cela se
1257
t ce qui relie. Cela se vérifie dans tous les cas
de
fondation d’empire, que ce soient les deux premiers empires d’Akkad e
1258
e. Cela se vérifie dans tous les cas de fondation
d’
empire, que ce soient les deux premiers empires d’Akkad et d’Égypte, o
1259
d’empire, que ce soient les deux premiers empires
d’
Akkad et d’Égypte, ou plus tard l’Empire de la Chine, plus tard encore
1260
ue ce soient les deux premiers empires d’Akkad et
d’
Égypte, ou plus tard l’Empire de la Chine, plus tard encore l’Empire d
1261
mpires d’Akkad et d’Égypte, ou plus tard l’Empire
de
la Chine, plus tard encore l’Empire des Incas, l’Empire persan, l’Emp
1262
ore l’Empire des Incas, l’Empire persan, l’Empire
d’
Alexandre le Grand, l’Empire romain, l’Empire de Byzance. 18 avril 196
1263
e d’Alexandre le Grand, l’Empire romain, l’Empire
de
Byzance. 18 avril 1969 Le dogme clé, qui est l’équivalent de celui de
1264
18 avril 1969 Le dogme clé, qui est l’équivalent
de
celui de la toute-puissance divine, c’est le dogme de la souveraineté
1265
1969 Le dogme clé, qui est l’équivalent de celui
de
la toute-puissance divine, c’est le dogme de la souveraineté absolue
1266
elui de la toute-puissance divine, c’est le dogme
de
la souveraineté absolue et illimitée de l’État, souveraineté s’exerça
1267
le dogme de la souveraineté absolue et illimitée
de
l’État, souveraineté s’exerçant d’abord sur la nation (les hommes éta
1268
ion (les hommes étant considérés comme les sujets
de
l’État) et aussi à l’égard des autres États. Cela correspond à la fam
1269
Cela correspond à la fameuse phrase des légistes
de
Philippe le Bel, selon lesquels le roi de France est souverain en son
1270
u monde qui soit supérieur au sien, ni le pouvoir
de
l’empereur, ni celui du pape. Ce dogme ruine dans le principe toute e
1271
ape. Ce dogme ruine dans le principe toute espèce
de
droit international, et, en fait, ôte toute efficacité à des contrats
1272
novembre 1968 De même que pour Bodin, au sommet
de
l’existence politique de la république, il y a la justice, dont l’int
1273
ue pour Bodin, au sommet de l’existence politique
de
la république, il y a la justice, dont l’interprète est le souverain,
1274
ins appelaient salus patriae, cela prime tout, et
de
cela je suis le seul juge ; deuxièmement, loin derrière, il y a les c
1275
secondaire, c’est même tertiaire. La hiérarchie
de
Bodin est exactement reproduite. Le chef de l’État est le seul juge,
1276
juge, le seul interprète des intérêts supérieurs
de
la nation ; mépris pour le juridisme, pour les règles du droit et la
1277
règles du droit et la constitution, cette manière
de
renvoyer le droit romain ; idée que la souveraineté ne saurait être l
1278
15 janvier 1965 Ce qui a déclenché donc la guerre
de
1939, ce sont au total, dans les très grandes lignes, les mêmes force
1279
les mêmes forces qui avaient déclenché la guerre
de
1914 : c’est-à-dire le dogme de la souveraineté nationale, qui ne tra
1280
clenché la guerre de 1914 : c’est-à-dire le dogme
de
la souveraineté nationale, qui ne transige jamais, parce que c’est un
1281
rincipe des nationalités aboutissant à un système
d’
enclaves, genre Dantzig et beaucoup d’autres — il y en avait des dizai
1282
amp des totalitaires poussé aux dernières limites
de
sa logique interne, c’est-à-dire à l’autarcie, c’est-à-dire à la reve
1283
c’est-à-dire à la revendication, pour une nation,
de
se suffire complètement à elle-même, et de se fermer à l’extérieur, s
1284
ation, de se suffire complètement à elle-même, et
de
se fermer à l’extérieur, selon la vieille utopie de Fichte. 19 novemb
1285
se fermer à l’extérieur, selon la vieille utopie
de
Fichte. 19 novembre 1976 La souveraineté jalouse et ombrageuse des Ét
1286
grand, l’obstacle constant, à travers les siècles
de
l’histoire de la Grèce ancienne, à la fédération. 29 avril 1967 En ré
1287
cle constant, à travers les siècles de l’histoire
de
la Grèce ancienne, à la fédération. 29 avril 1967 En réalité, la souv
1288
, la souveraineté est un concept devenu inopérant
de
nos jours. Il y a un exemple célèbre tout près de nous : la guerre de
1289
un exemple célèbre tout près de nous : la guerre
de
Suez. La première définition de la souveraineté nationale — avec le d
1290
nous : la guerre de Suez. La première définition
de
la souveraineté nationale — avec le droit de signer des traités — est
1291
tion de la souveraineté nationale — avec le droit
de
signer des traités — est que le gouvernement, l’État d’une nation sou
1292
ner des traités — est que le gouvernement, l’État
d’
une nation souveraine peut déclarer la guerre et conclure la paix quan
1293
et l’Angleterre, qui avaient jugé bon et opportun
de
déclencher la guerre de Suez, se sont vues stoppées brutalement — com
1294
ient jugé bon et opportun de déclencher la guerre
de
Suez, se sont vues stoppées brutalement — comme on stoppe des joueurs
1295
toppées brutalement — comme on stoppe des joueurs
de
rugby — par les deux grandes puissances, la Russie et les États-Unis,
1296
n l’invoquant que nos pays peuvent encore refuser
de
s’unir. 5. État-nation et guerre 3 juin 1966 Les États sont né
1297
tion et guerre 3 juin 1966 Les États sont nés
de
la guerre : voilà ce qu’ont très bien vu Machiavel et Bodin. Ils sont
1298
bien vu Machiavel et Bodin. Ils sont nés d’abord
de
la guerre de Cent Ans ; ils sont nés des guerres entre les deux premi
1299
iavel et Bodin. Ils sont nés d’abord de la guerre
de
Cent Ans ; ils sont nés des guerres entre les deux premiers États bie
1300
res États européens ont été causées par le besoin
de
les raffermir, de raffermir le pouvoir de l’État sur une nation, puis
1301
s ont été causées par le besoin de les raffermir,
de
raffermir le pouvoir de l’État sur une nation, puis, par leur expansi
1302
besoin de les raffermir, de raffermir le pouvoir
de
l’État sur une nation, puis, par leur expansion coloniale, impérialis
1303
expansion coloniale, impérialiste — cette espèce
de
piraterie légalisée —, tendant à renforcer chaque État, mais aussi di
1304
aient les croisades. 1er novembre 1968 Il importe
de
rappeler la manière réelle dont les nations modernes se sont constitu
1305
ées. Elles se sont constituées par l’impérialisme
d’
un petit État central, qui a, peu à peu, conquis les nations qui l’ent
1306
lles soient civiles ou étrangères, qu’il s’agisse
d’
une guerre « froide » comme on dira dans notre siècle ou d’une guerre
1307
rre « froide » comme on dira dans notre siècle ou
d’
une guerre déclarée, justifient le sacrifice, qu’on dit temporaire, de
1308
e, justifient le sacrifice, qu’on dit temporaire,
de
certaines libertés politiques à l’intérieur du pays. Or, on s’aperçoi
1309
ays. Or, on s’aperçoit qu’il n’est presque aucune
de
ces mesures d’urgence, d’union sacrée, prise par l’État, qui ait été
1310
perçoit qu’il n’est presque aucune de ces mesures
d’
urgence, d’union sacrée, prise par l’État, qui ait été rapportée une f
1311
il n’est presque aucune de ces mesures d’urgence,
d’
union sacrée, prise par l’État, qui ait été rapportée une fois que la
1312
fois que la paix est revenue. Ainsi, le mécanisme
de
l’État-nation conduit non seulement à la guerre, mais trouve dans la
1313
re, mais trouve dans la guerre, dans la poursuite
de
la guerre, les conditions du renforcement continuel de son pouvoir. 2
1314
guerre, les conditions du renforcement continuel
de
son pouvoir. 22 novembre 1968 La nation révolutionnaire est conçue dè
1315
but comme une religion missionnaire : il s’agit «
d’
imposer la liberté au genre humain tout entier », comme le disait Anac
1316
at va devenir impérialiste, en tant qu’instrument
de
la nation missionnaire. Et en retour, la guerre va renforcer l’État,
1317
étrangère — on suspend toujours un certain nombre
de
libertés, en affirmant que c’est temporaire, mais il est extrêmement
1318
moment où Napoléon prend le pouvoir, sous son nom
de
Bonaparte, on se rend compte que la nation, qui était une mystique qu
1319
État, va prendre le pouvoir sur tout, à la faveur
de
la guerre. J’ai souvent souligné ce mécanisme inévitable, cet engrena
1320
t souligné ce mécanisme inévitable, cet engrenage
de
la guerre qui renforce l’État pour sauver la nation, qui oblige à des
1321
à des mesures qui sont données comme des mesures
de
guerre, et qui ne sont jamais rapportées une fois la guerre finie. 27
1322
magne, pour des raisons différentes —, la logique
de
l’État-nation est portée à son comble de démence et cela donne l’État
1323
logique de l’État-nation est portée à son comble
de
démence et cela donne l’État totalitaire. La religion nationale y est
1324
e). L’État-nation aboutit logiquement à la guerre
de
1914. L’État totalitaire aboutira non moins logiquement à la guerre t
1325
aboutira non moins logiquement à la guerre totale
de
1939-1945. 27 juin 1969 Chacun va développer un nationalisme anti-que
1326
xixe siècle. Ceci mènera fatalement à la guerre
de
1914. Il a cependant fallu tout un travail d’incubation pour imposer
1327
rre de 1914. Il a cependant fallu tout un travail
d’
incubation pour imposer l’État-nation à l’ensemble des peuples europée
1328
cours du xixe siècle. Pendant ce siècle, qui va
de
1815 à 1914, quatre facteurs d’étatisation agiront : la conscription
1329
ce siècle, qui va de 1815 à 1914, quatre facteurs
d’
étatisation agiront : la conscription militaire universelle et obligat
1330
les curiosités) et la technique (horaires, voies
de
communication). On arrive ainsi à créer cette espèce d’unanimité qu’o
1331
munication). On arrive ainsi à créer cette espèce
d’
unanimité qu’on appellera l’âme nationale. Tout cela fleurit vers 1880
1332
xxe siècle, tout est prêt pour que les théories
de
Hegel puissent se manifester, pour que l’Allemagne puisse partir en g
1333
agne puisse partir en guerre au nom de sa mission
de
Kultur, tandis que la France part en guerre au nom de sa mission de c
1334
que la France part en guerre au nom de sa mission
de
civilisation. Chaque pays a ainsi sa mission et se donne une bonne co
1335
uis cent-cinquante ans. Ainsi, la véritable cause
de
la guerre de 1914 est le nationalisme, on pourrait même dire la relig
1336
uante ans. Ainsi, la véritable cause de la guerre
de
1914 est le nationalisme, on pourrait même dire la religion du nation
1337
s à la religion chrétienne. 16 mai 1969 La guerre
de
1914 a éclaté d’une façon légitime, c’est-à-dire en parfaite logique
1338
hrétienne. 16 mai 1969 La guerre de 1914 a éclaté
d’
une façon légitime, c’est-à-dire en parfaite logique avec les règles d
1339
onsolidées sans cesse pendant cent ans. La guerre
de
1914 a éclaté au point de convergence géométrique de toutes les force
1340
ant cent ans. La guerre de 1914 a éclaté au point
de
convergence géométrique de toutes les forces constitutives de l’État-
1341
1914 a éclaté au point de convergence géométrique
de
toutes les forces constitutives de l’État-nation né de la Révolution
1342
ce géométrique de toutes les forces constitutives
de
l’État-nation né de la Révolution et de l’Empire napoléonien, et comm
1343
utes les forces constitutives de l’État-nation né
de
la Révolution et de l’Empire napoléonien, et comme la conclusion logi
1344
titutives de l’État-nation né de la Révolution et
de
l’Empire napoléonien, et comme la conclusion logique de leur dialecti
1345
mpire napoléonien, et comme la conclusion logique
de
leur dialectique interne, s’imposant aux hommes d’État, quelle qu’ait
1346
t les ministres n’ont pas été les seules victimes
de
cette fatalité logique du régime nationaliste. Les peuples aussi, et
1347
’on le veuille ou non. À part certains dirigeants
de
l’Autriche-Hongrie, personne n’a voulu ce qui s’est passé. 20 juin 19
1348
Pour réaliser une autarcie — qui est le problème
de
base d’un État totalitaire —, il faut un gouvernement centralisé très
1349
aliser une autarcie — qui est le problème de base
d’
un État totalitaire —, il faut un gouvernement centralisé très fort, u
1350
ice, une idéologie uniforme. Rien ne permet mieux
de
réaliser tout cela que la menace de guerre et la préparation à la gue
1351
permet mieux de réaliser tout cela que la menace
de
guerre et la préparation à la guerre. J’avais ainsi écrit en 1934 : «
1352
crit en 1934 : « L’État totalitaire, c’est l’état
de
guerre. » 24 janvier 1969 Ce qui fait la grande force de l’État, c’es
1353
re. » 24 janvier 1969 Ce qui fait la grande force
de
l’État, c’est aussi la machine, parce que, à mesure que les machines
1354
ant la bombe atomique, qui est devenue le symbole
de
la puissance de l’État. 6. Dimension de l’état et problèmes des fr
1355
mique, qui est devenue le symbole de la puissance
de
l’État. 6. Dimension de l’état et problèmes des frontières 27 j
1356
ymbole de la puissance de l’État. 6. Dimension
de
l’état et problèmes des frontières 27 juin 1969 Bien que cette for
1357
Bien que cette formule ait donné lieu au massacre
de
38 millions d’hommes, l’État-nation garde encore assez de force pour
1358
formule ait donné lieu au massacre de 38 millions
d’
hommes, l’État-nation garde encore assez de force pour pouvoir s’oppos
1359
llions d’hommes, l’État-nation garde encore assez
de
force pour pouvoir s’opposer à l’union des pays européens. Aucun de n
1360
oir s’opposer à l’union des pays européens. Aucun
de
nos États-nations européens n’est assez grand pour jouer un rôle à l’
1361
à l’échelle internationale. En même temps, chacun
de
nos États-nations se révèle trop grand pour animer vraiment l’économi
1362
ur animer vraiment l’économie, la culture, la vie
de
ses régions. L’État-nation est donc, aujourd’hui, à la fois trop gran
1363
la France à étudier des formules nouvelles, celle
de
la régionalisation, par exemple. Ce mouvement se développe dans tous
1364
ple. Ce mouvement se développe dans tous les pays
d’
Europe. On en arrive donc, aujourd’hui, à concevoir que la formule de
1365
ive donc, aujourd’hui, à concevoir que la formule
de
l’État-nation — mise au point par Napoléon — a fait son temps, qu’ell
1366
politiques, ni économiques, encore moins sociales
de
la fin du xxe siècle. Mais qu’elle est encore assez solide pour rési
1367
core assez solide pour résister à d’autres formes
d’
union imaginables, notamment à la forme fédérale. 22 novembre 1968 Le
1368
forme fédérale. 22 novembre 1968 Le premier vice
de
cet État-nation centralisé napoléonien, nous l’avons déjà décelé en p
1369
us l’avons déjà décelé en parlant des jacobins et
de
leur fausse interprétation de la pensée de Rousseau : ils ont appliqu
1370
ant des jacobins et de leur fausse interprétation
de
la pensée de Rousseau : ils ont appliqué à des dimensions trop grande
1371
ins et de leur fausse interprétation de la pensée
de
Rousseau : ils ont appliqué à des dimensions trop grandes certaines r
1372
randes certaines réalités qui se trouvent changer
de
valeur quand on change d’échelle. Par exemple, comment exercer réelle
1373
qui se trouvent changer de valeur quand on change
d’
échelle. Par exemple, comment exercer réellement ses droits civiques d
1374
er réellement ses droits civiques dans une nation
de
25 millions d’habitants complètement unifiée, c’est-à-dire où il n’y
1375
es droits civiques dans une nation de 25 millions
d’
habitants complètement unifiée, c’est-à-dire où il n’y a plus aucun co
1376
par la Révolution et l’État central ? Un bulletin
de
vote tous les sept ans, ou tous les cinq ans, ce n’est pas l’exercice
1377
ns, ou tous les cinq ans, ce n’est pas l’exercice
d’
une vie civique. De même, on peut dire que l’université n’existe plus
1378
plus quand on en arrive à des chiffres comme ceux
de
Paris ce printemps, 160 000 étudiants. 29 mai 1970 Un excès d’individ
1379
rintemps, 160 000 étudiants. 29 mai 1970 Un excès
d’
individualisme conduit les hommes à une espèce de vertige ; cela les c
1380
d’individualisme conduit les hommes à une espèce
de
vertige ; cela les conduit à rechercher un cadre fixe et stable, donc
1381
est soumis à l’État, pas seulement les questions
d’
état civil, d’armée et d’impôts, mais aussi les questions religieuses
1382
l’État, pas seulement les questions d’état civil,
d’
armée et d’impôts, mais aussi les questions religieuses : c’est à ce m
1383
seulement les questions d’état civil, d’armée et
d’
impôts, mais aussi les questions religieuses : c’est à ce moment qu’on
1384
gio, ejus religio. Quand on a accepté cet extrême
de
l’absolutisation de l’État, qui commande même aux croyances les plus
1385
uand on a accepté cet extrême de l’absolutisation
de
l’État, qui commande même aux croyances les plus intimes et les plus
1386
l’État totalitaire est là en puissance. Le comble
de
la prétention absolutiste se manifeste donc dès le début de l’apparit
1387
ention absolutiste se manifeste donc dès le début
de
l’apparition de l’État moderne. Le véritable absolu pour l’homme mode
1388
te se manifeste donc dès le début de l’apparition
de
l’État moderne. Le véritable absolu pour l’homme moderne sera désorma
1389
moins mystique, qui se matérialise sous la forme
de
l’armée, de la police et de la justice. 14 janvier 1977 L’origine de
1390
que, qui se matérialise sous la forme de l’armée,
de
la police et de la justice. 14 janvier 1977 L’origine de ce qui sera
1391
rialise sous la forme de l’armée, de la police et
de
la justice. 14 janvier 1977 L’origine de ce qui sera la nation imposa
1392
olice et de la justice. 14 janvier 1977 L’origine
de
ce qui sera la nation imposant les mêmes frontières à toutes les facu
1393
utes les facultés humaines et à tous les domaines
de
l’activité humaine, que ce soit économie, état civil, culture, langue
1394
ue, religion ou idéologie, c’est la particularité
de
l’État moderne, de l’État-nation moderne, d’imposer la même frontière
1395
ologie, c’est la particularité de l’État moderne,
de
l’État-nation moderne, d’imposer la même frontière à toutes les chose
1396
rité de l’État moderne, de l’État-nation moderne,
d’
imposer la même frontière à toutes les choses qui sont, par nature, co
1397
, complètement différentes et n’ont aucune raison
de
coïncider sur un même territoire. Mais cette idée que tout ce que fai
1398
ans le même domaine, c’est féodal, c’est l’esprit
de
la féodalité, qui n’est absolument pas l’esprit de la fédération. 27
1399
e la féodalité, qui n’est absolument pas l’esprit
de
la fédération. 27 juin 1969 Après la guerre de 1914, on n’arrive pas
1400
it de la fédération. 27 juin 1969 Après la guerre
de
1914, on n’arrive pas à surmonter le nationalisme et la formule stato
1401
aire, on décide, avec l’aide du président Wilson,
de
pousser encore plus loin le découpage nationalitaire de l’Europe, d’a
1402
sser encore plus loin le découpage nationalitaire
de
l’Europe, d’après des critères du xviiie ou du xixe siècle romantiq
1403
sintégration des empires et le triomphe définitif
de
la formule stato-nationale sur les restes de la conception impériale,
1404
itif de la formule stato-nationale sur les restes
de
la conception impériale, qui avait été celle du Saint-Empire romain g
1405
’est opérée en 1919 et 1920, lors de la signature
d’
une série de traités de paix, appelés les « traités de banlieue ». Ces
1406
en 1919 et 1920, lors de la signature d’une série
de
traités de paix, appelés les « traités de banlieue ». Ces traités de
1407
1920, lors de la signature d’une série de traités
de
paix, appelés les « traités de banlieue ». Ces traités de banlieue on
1408
e série de traités de paix, appelés les « traités
de
banlieue ». Ces traités de banlieue ont été inspirés par toutes les t
1409
appelés les « traités de banlieue ». Ces traités
de
banlieue ont été inspirés par toutes les théories nationalitaires rom
1410
it aider : les échanges culturels, les mouvements
de
personnes, la concertation rationnelle des productions industrielles
1411
tre : les tempêtes et les épidémies, la pollution
de
l’air et des fleuves, les attaques aériennes, les ondes de la propaga
1412
et des fleuves, les attaques aériennes, les ondes
de
la propagande et les grandes contagions dites idéologiques. Ils empêc
1413
ions dites idéologiques. Ils empêchent simplement
de
bien traiter ces problèmes. Ce statut des frontières, doublement défi
1414
tières, doublement déficient, est caractéristique
de
tout ce qui touche à l’État-nation : néfaste dans la mesure où il est
1415
ance, l’Espagne, l’Italie, l’Allemagne — est loin
d’
être une chose qui a toujours existé et qui existera toujours, mais le
1416
rs existé et qui existera toujours, mais le fruit
d’
une évolution historique qui remonte à la rébellion de Philippe le Bel
1417
e évolution historique qui remonte à la rébellion
de
Philippe le Bel contre l’autorité de l’empereur et du pape, puis qui
1418
la rébellion de Philippe le Bel contre l’autorité
de
l’empereur et du pape, puis qui s’est développée sous sa forme actuel
1419
ançaise et des guerres napoléoniennes. Cette idée
de
“nation” correspond en fait à la mainmise d’un appareil étatique sur
1420
idée de “nation” correspond en fait à la mainmise
d’
un appareil étatique sur des réalités dites “nationales”. C’est pourqu
1421
tes des années 1930 ont baptisé ce système du nom
d’
État-nation. Ses caractéristiques sont une uniformisation, une central
1422
’intérieur des frontières “naturelles” ; le culte
de
l’indépendance, de la souveraineté sans atteintes, préparant la guerr
1423
tières “naturelles” ; le culte de l’indépendance,
de
la souveraineté sans atteintes, préparant la guerre et refusant l’uni
1424
rant la guerre et refusant l’union dans un esprit
de
clocher en somme très féodal. Par bien des aspects, le nationalisme o
1425
bu primitive assoit son identité. À la différence
de
l’État stato-national promu à la majesté d’une pseudo-divinité anthro
1426
rence de l’État stato-national promu à la majesté
d’
une pseudo-divinité anthropomorphique, l’État fédéral est conçu unique
1427
écisions, sans aller au-delà. Également distincte
de
l’idée d’État-nation (dont procède l’“Empire” napoléonien) est la not
1428
sans aller au-delà. Également distincte de l’idée
d’
État-nation (dont procède l’“Empire” napoléonien) est la notion d’empi
1429
ont procède l’“Empire” napoléonien) est la notion
d’
empire (dont l’exemple est le Saint-Empire) basée sur l’universalité e
1430
pluralisme symbolisés et garantis par la personne
de
l’empereur. Les moyens d’action de l’État stato-national sont princip
1431
arantis par la personne de l’empereur. Les moyens
d’
action de l’État stato-national sont principalement l’armée, l’école,
1432
ar la personne de l’empereur. Les moyens d’action
de
l’État stato-national sont principalement l’armée, l’école, l’informa
1433
at totalitaire fait son ciment. L’État se nourrit
de
l’individualisme des citoyens, et l’État-nation s’est développé en pu
1434
s hommes trouvaient leurs repères et leurs motifs
d’
agir. L’État-nation est un produit de l’histoire européenne dont l’Eur
1435
leurs motifs d’agir. L’État-nation est un produit
de
l’histoire européenne dont l’Europe a souvent pâti (les deux guerres
1436
vent pâti (les deux guerres mondiales, les échecs
de
la construction européenne à l’heure actuelle). De nos jours, la souv
1437
e la construction européenne à l’heure actuelle).
De
nos jours, la souveraineté nationale n’est plus qu’une fiction, car d
1438
es faits, aucun des États d’Europe n’a les moyens
d’
agir à sa guise même s’il le voulait, aucun n’est réellement indépenda
1439
nationale, trop grand pour promouvoir des espaces
de
participation civique, animer l’économie, la culture, la vie des régi
1440
cace que négativement, pour entraver les échanges
de
tous ordres, pour alimenter la pollution aux frontières, la course au
1441
nt rendue plus nécessaire encore par la situation
de
dépendance et d’impuissance dans laquelle se débat chacun de nos État
1442
cessaire encore par la situation de dépendance et
d’
impuissance dans laquelle se débat chacun de nos États. Il faut dire q
1443
ce et d’impuissance dans laquelle se débat chacun
de
nos États. Il faut dire que la vision stato-nationale empêche de pens
1444
l faut dire que la vision stato-nationale empêche
de
penser l’Europe unie autrement qu’en termes de pouvoir supranational,
1445
t qu’en termes de pouvoir supranational, qui sert
de
repoussoir, à juste titre, car il se trouve qu’aucun État-nation ne v
1446
es frontières. À cette supranationalité, synonyme
d’
uniformisation, s’oppose le fédéralisme basé sur l’union volontaire de
1447
Europee 1. Traits caractéristiques
de
la culture européenne 17 février 1964 Si l’Europe ne s’est pas uni
1448
peut dire à leurs dépens, toutes les possibilités
de
l’absolutisme, du nationalisme, de l’État unitaire royal ou jacobin,
1449
s possibilités de l’absolutisme, du nationalisme,
de
l’État unitaire royal ou jacobin, de l’anarchie des nations souverain
1450
ationalisme, de l’État unitaire royal ou jacobin,
de
l’anarchie des nations souveraines, finalement du totalitarisme qui e
1451
totalitarisme qui est, en quelque sorte, la somme
de
toutes ces folies. Les Européens ont été non seulement les créateurs
1452
été non seulement les créateurs et les inventeurs
de
tous ces systèmes, mais ils ont été leurs cobayes — tous ces systèmes
1453
propre paix et à leurs propres idéaux, chrétiens,
d’
humanité, de genre humain. On dirait qu’il y a une sorte de loi qui vo
1454
et à leurs propres idéaux, chrétiens, d’humanité,
de
genre humain. On dirait qu’il y a une sorte de loi qui voudrait que l
1455
é, de genre humain. On dirait qu’il y a une sorte
de
loi qui voudrait que la raison ne puisse pas s’imposer aux Européens
1456
s effets. 11 novembre 1966 En chemin vers l’idéal
de
puissance, vous trouvez, par exemple, le règne de Louis XIV, le stali
1457
de puissance, vous trouvez, par exemple, le règne
de
Louis XIV, le stalinisme, le marxisme-léninisme, les jacobins et leur
1458
nisme, les jacobins et leur idéal, et les devises
de
ces régimes. En chemin vers l’autre utopie, l’autre idéal, celui de l
1459
chemin vers l’autre utopie, l’autre idéal, celui
de
liberté, de pluralisme, vous trouvez, par exemple, le régime féodal d
1460
l’autre utopie, l’autre idéal, celui de liberté,
de
pluralisme, vous trouvez, par exemple, le régime féodal du haut Moyen
1461
sées au régime féodal, mais étaient le même genre
de
pluralisme de choses extrêmement complexes, plus ou moins mal articul
1462
féodal, mais étaient le même genre de pluralisme
de
choses extrêmement complexes, plus ou moins mal articulées ; vous tro
1463
premières expériences pas complètement réalisées
de
fédéralisme ; vous trouvez aussi l’idée primitive des soviets, avant
1464
si à les mettre au pas, c’est-à-dire les conseils
d’
usines, les conseils d’ouvriers et de paysans, qu’on dit avoir été ins
1465
c’est-à-dire les conseils d’usines, les conseils
d’
ouvriers et de paysans, qu’on dit avoir été inspirés à Lénine par l’ex
1466
les conseils d’usines, les conseils d’ouvriers et
de
paysans, qu’on dit avoir été inspirés à Lénine par l’exemple des comm
1467
soviets, où il voyait, à juste titre, un ferment
d’
anarchie, ou de liberté en tout cas. Il a tout fait pour réduire leur
1468
voyait, à juste titre, un ferment d’anarchie, ou
de
liberté en tout cas. Il a tout fait pour réduire leur pouvoir et les
1469
t fait pour réduire leur pouvoir et les organiser
d’
une manière quasi militaire. Vous trouvez aussi, dans cette même tradi
1470
re. Vous trouvez aussi, dans cette même tradition
de
régimes qui tendent à la liberté plutôt qu’à la puissance, les flambé
1471
la liberté plutôt qu’à la puissance, les flambées
de
communisme spirituel dans certaines villes allemandes, qu’on a appelé
1472
Réforme ; en partie aussi, l’anarcho-syndicalisme
d’
école espagnole ; enfin, le fédéralisme, ou les réalisations qu’on a e
1473
uissance ni une puissance pure sans aucun élément
de
liberté. L’Européen normal vit quelque part entre ces deux extrémités
1474
ais on remarque tout de même chez les initiateurs
de
mouvements de pensée et d’action politique certaines dispositions dom
1475
e tout de même chez les initiateurs de mouvements
de
pensée et d’action politique certaines dispositions dominantes qui dé
1476
e chez les initiateurs de mouvements de pensée et
d’
action politique certaines dispositions dominantes qui déterminent net
1477
traits, comme le fait qu’il choisit ses arguments
de
préférence dans le domaine mécanique ou dans la géométrie, tandis que
1478
Celui qui veut la puissance se préoccupe surtout
d’
imposer des cadres rigides et géométriques ; l’autre se préoccupe plut
1479
des et géométriques ; l’autre se préoccupe plutôt
d’
animer des forces vives, de les faire jouer, de les articuler plus ou
1480
re se préoccupe plutôt d’animer des forces vives,
de
les faire jouer, de les articuler plus ou moins entre elles. Celui qu
1481
ôt d’animer des forces vives, de les faire jouer,
de
les articuler plus ou moins entre elles. Celui qui veut la puissance
1482
es. Celui qui veut la puissance se soucie surtout
de
stabilité, d’ordre ; l’autre se soucie plutôt de souplesse, il fait c
1483
veut la puissance se soucie surtout de stabilité,
d’
ordre ; l’autre se soucie plutôt de souplesse, il fait confiance à des
1484
de stabilité, d’ordre ; l’autre se soucie plutôt
de
souplesse, il fait confiance à des règles d’action commune souples, t
1485
utôt de souplesse, il fait confiance à des règles
d’
action commune souples, tandis que l’un ne fait confiance qu’au règlem
1486
tout le continent et va bien au-delà, communauté
de
jugement, de valeurs morales, de conception de la vie, de sentiment d
1487
inent et va bien au-delà, communauté de jugement,
de
valeurs morales, de conception de la vie, de sentiment des choses, d’
1488
delà, communauté de jugement, de valeurs morales,
de
conception de la vie, de sentiment des choses, d’approche des situati
1489
té de jugement, de valeurs morales, de conception
de
la vie, de sentiment des choses, d’approche des situations. J’ai mont
1490
ent, de valeurs morales, de conception de la vie,
de
sentiment des choses, d’approche des situations. J’ai montré que les
1491
de conception de la vie, de sentiment des choses,
d’
approche des situations. J’ai montré que les sources de notre culture
1492
roche des situations. J’ai montré que les sources
de
notre culture commune sont nombreuses, souvent contradictoires entre
1493
ntradictoires entre elles, ce qui donne une unité
de
culture non unitaire. Paul Valéry disait qu’il appelait « européen »
1494
À ces trois sources, s’ajoutent la source celte (
d’
où viennent les romans, une grande partie de la littérature européenne
1495
elte (d’où viennent les romans, une grande partie
de
la littérature européenne, les idées de chevalerie, les doctrines de
1496
de partie de la littérature européenne, les idées
de
chevalerie, les doctrines de la passion), les valeurs germaniques, ex
1497
uropéenne, les idées de chevalerie, les doctrines
de
la passion), les valeurs germaniques, extrêmement importantes, puisqu
1498
ue les Germains ont recouvert la presque totalité
de
l’Empire romain, y compris l’Espagne, et enfin les valeurs arabes (la
1499
Espagne, et enfin les valeurs arabes (la conquête
de
l’Espagne par les Arabes a duré des siècles, les croisades ont égalem
1500
ècles, les croisades ont également été l’occasion
d’
échanges culturels entre le monde arabe et le monde chrétien) et l’app
1501
e, danse, peinture abstraite). Paradoxe : la base
d’
unité réelle de tous les Européens est leur culture ; cette culture es
1502
ure abstraite). Paradoxe : la base d’unité réelle
de
tous les Européens est leur culture ; cette culture est formée de sou
1503
péens est leur culture ; cette culture est formée
de
sources si diverses que beaucoup de ses valeurs se trouvent en contra
1504
ion. 17 décembre 1976 Si on veut se rendre compte
de
ce qu’est l’unité européenne dans sa diversité, il faut bien comprend
1505
re les différences entre les valeurs qui viennent
d’
Athènes, de Jérusalem, de la grande plaine du Nord, car elles sont par
1506
érences entre les valeurs qui viennent d’Athènes,
de
Jérusalem, de la grande plaine du Nord, car elles sont partiellement
1507
les valeurs qui viennent d’Athènes, de Jérusalem,
de
la grande plaine du Nord, car elles sont partiellement contradictoire
1508
s sont partiellement contradictoires, ce qui fait
de
l’homme européen un être profondément et essentiellement de conflit,
1509
européen un être profondément et essentiellement
de
conflit, de contradiction, de diversification considérable. 21 avril
1510
être profondément et essentiellement de conflit,
de
contradiction, de diversification considérable. 21 avril 1967 Le prem
1511
et essentiellement de conflit, de contradiction,
de
diversification considérable. 21 avril 1967 Le premier motif de résis
1512
tion considérable. 21 avril 1967 Le premier motif
de
résistance est la diversité telle qu’elle est donnée par une longue h
1513
telle qu’elle est donnée par une longue histoire
de
nos pays. Nous avons dit que cette diversité n’est pas seulement un o
1514
oi, et précieuse. Autant on peut dire que l’union
de
nos pays est nécessaire pour le salut de chacun d’eux et le salut de
1515
l’union de nos pays est nécessaire pour le salut
de
chacun d’eux et le salut de l’ensemble, autant il nous faut dire du m
1516
e nos pays est nécessaire pour le salut de chacun
d’
eux et le salut de l’ensemble, autant il nous faut dire du même souffl
1517
essaire pour le salut de chacun d’eux et le salut
de
l’ensemble, autant il nous faut dire du même souffle que la diversité
1518
que la diversité est la caractéristique profonde
de
l’Europe et qu’elle rend compte des richesses culturelles des Europée
1519
s culturelles des Européens, du très grand nombre
d’
écoles de pensée, d’art, qui s’y sont manifestées, de l’extrême riches
1520
lles des Européens, du très grand nombre d’écoles
de
pensée, d’art, qui s’y sont manifestées, de l’extrême richesse en ind
1521
ropéens, du très grand nombre d’écoles de pensée,
d’
art, qui s’y sont manifestées, de l’extrême richesse en individualités
1522
coles de pensée, d’art, qui s’y sont manifestées,
de
l’extrême richesse en individualités fortes, prononcées, originales,
1523
t la richesse culturelle et l’extrême rayonnement
de
la culture européenne, seule devenue à peu près mondiale dans toute l
1524
devenue à peu près mondiale dans toute l’histoire
de
l’humanité ; tout cela tient à la diversité que les Européens ont ent
1525
s, aboutit à des guerres effroyables qui risquent
de
ruiner l’ensemble européen, mais qui, quand on réussit à les empêcher
1526
on réussit à les empêcher, est la condition même
de
la richesse culturelle et des libertés des Européens. Il faut donc un
1527
on ne sauverait plus l’Europe, mais quelque chose
de
synthétique, qu’on pourrait appeler l’Europe, mais qui ne le serait p
1528
ble union politique, présente les deux conditions
de
base nécessaires à toute formation fédérale : des diversités irréduct
1529
: des diversités irréductibles après des siècles
d’
histoire, nationales et régionales, de langues et de formes de culture
1530
des siècles d’histoire, nationales et régionales,
de
langues et de formes de culture ; d’autre part, un besoin vital d’uni
1531
histoire, nationales et régionales, de langues et
de
formes de culture ; d’autre part, un besoin vital d’union, ne fût-ce
1532
nationales et régionales, de langues et de formes
de
culture ; d’autre part, un besoin vital d’union, ne fût-ce que pour s
1533
formes de culture ; d’autre part, un besoin vital
d’
union, ne fût-ce que pour sauver ces diversités, qui sont chacune trop
1534
du xxe siècle est sans discussion possible celui
de
l’union de l’Europe. Mais le principal obstacle à cette union est dan
1535
cle est sans discussion possible celui de l’union
de
l’Europe. Mais le principal obstacle à cette union est dans l’existen
1536
t des hommes politiques, des partis politiques et
de
l’opinion publique, à ce concept de nation souveraine, séparée de tou
1537
politiques et de l’opinion publique, à ce concept
de
nation souveraine, séparée de toutes les autres et qui a pour but plu
1538
lique, à ce concept de nation souveraine, séparée
de
toutes les autres et qui a pour but plus ou moins avoué de vivre, aut
1539
les autres et qui a pour but plus ou moins avoué
de
vivre, autant que possible, par elle-même (c’est ce qu’elle appelle ê
1540
avril 1970 Rien n’est plus hostile à toute espèce
d’
union, tant soit peu sérieuse ou sincère, que cet État-nation qui, par
1541
tat-nation qui, par ailleurs, se révèle incapable
de
répondre aux exigences concrètes de notre temps, puisqu’il est à la f
1542
èle incapable de répondre aux exigences concrètes
de
notre temps, puisqu’il est à la fois trop petit pour agir à l’échelle
1543
un projet rationnel. Or, voici l’ironie tragique
de
notre histoire : c’est sur la base de cet obstacle radical à toute un
1544
ie tragique de notre histoire : c’est sur la base
de
cet obstacle radical à toute union que l’on s’efforce, depuis vingt-c
1545
union que l’on s’efforce, depuis vingt-cinq ans,
d’
unir l’Europe ! Voilà qui explique suffisamment, je crois, pourquoi l’
1546
fisamment, je crois, pourquoi l’on n’a pas avancé
d’
un centimètre en direction de notre union politique. Entre l’union de
1547
l’on n’a pas avancé d’un centimètre en direction
de
notre union politique. Entre l’union de l’Europe et les États-nations
1548
direction de notre union politique. Entre l’union
de
l’Europe et les États-nations sacralisés, entre une nécessité humaine
1549
é humaine des plus concrètes et le culte prolongé
d’
un mythe, il faut choisir. 13 novembre 1970 Toute l’histoire de nos cr
1550
l faut choisir. 13 novembre 1970 Toute l’histoire
de
nos créations artistiques et intellectuelles me paraît devoir être re
1551
et intellectuelles me paraît devoir être refaite
de
fond en comble, sur cette double donnée : l’Europe n’a jamais été le
1552
uble donnée : l’Europe n’a jamais été le résultat
d’
une addition de cultures nationales ; la culture européenne est le rés
1553
’Europe n’a jamais été le résultat d’une addition
de
cultures nationales ; la culture européenne est le résultat de deux p
1554
ationales ; la culture européenne est le résultat
de
deux phénomènes : des grands courants et des foyers locaux de créatio
1555
omènes : des grands courants et des foyers locaux
de
création. Ces foyers locaux peuvent être de petites cités ou des régi
1556
ocaux de création. Ces foyers locaux peuvent être
de
petites cités ou des régions. Ils sont toujours plus petits que tous
1557
grands courants traversent toutes les frontières
de
nos États-nations. 10 juin 1966 Le refus de la formule fédéraliste, q
1558
ières de nos États-nations. 10 juin 1966 Le refus
de
la formule fédéraliste, qui veut des paliers, des communautés success
1559
ement articulées, ce refus jacobin qui veut, tout
d’
un coup, qu’on unifie tout, qu’on centralise tout, aboutit fatalement
1560
ux souverainetés nationales. Il y a là une espèce
de
dialectique fatale. Si on veut aller trop loin dans le sens du centra
1561
avons de plus commun en Europe, c’est notre goût
de
différer du voisin, et ceci nous différencie complètement des Russes
1562
ou des Américains, qui ont, au contraire, le goût
de
faire comme tout le monde. Le goût de différer est très typiquement e
1563
re, le goût de faire comme tout le monde. Le goût
de
différer est très typiquement européen. On peut dire, en continuant l
1564
ant le parallèle, que ce qui manque aux Européens
d’
aujourd’hui pour se fédérer, c’est exactement ce qui a manqué aux Grec
1565
ui a manqué aux Grecs, c’est-à-dire cette faculté
de
dépasser la prétention à la souveraineté locale, nationale, opposée a
1566
tres, comme un bloc. Ou peut-être aussi l’absence
de
perception de finalités communes, qui permettraient d’aller au-delà d
1567
bloc. Ou peut-être aussi l’absence de perception
de
finalités communes, qui permettraient d’aller au-delà de ces souverai
1568
rception de finalités communes, qui permettraient
d’
aller au-delà de ces souverainetés, de ces nationalismes locaux. 3.
1569
lités communes, qui permettraient d’aller au-delà
de
ces souverainetés, de ces nationalismes locaux. 3. Les étapes vers
1570
rmettraient d’aller au-delà de ces souverainetés,
de
ces nationalismes locaux. 3. Les étapes vers la fédération europée
1571
n vers la nation n’est pas seulement cette espèce
de
maladie que l’on dénonce aujourd’hui trop fréquemment chez les fédéra
1572
, au fond, l’évolution préparatoire vers la forme
de
fédération que nous souhaitons pour l’Europe. 1er novembre 1968 En Eu
1573
novembre 1968 En Europe, il y avait trois espèces
de
nations, définies par rapport au Saint-Empire : les nations qui faisa
1574
u Saint-Empire : les nations qui faisaient partie
de
l’empire ; les nations qui n’en faisaient pas partie, mais avaient fa
1575
en faisaient pas partie, mais avaient fait partie
de
l’Empire carolingien (France) ; les nations qui n’avaient jamais fait
1576
; les nations qui n’avaient jamais fait partie ni
de
l’un, ni de l’autre, mais seulement de l’Empire romain. Il est curieu
1577
s qui n’avaient jamais fait partie ni de l’un, ni
de
l’autre, mais seulement de l’Empire romain. Il est curieux de relever
1578
partie ni de l’un, ni de l’autre, mais seulement
de
l’Empire romain. Il est curieux de relever que ces distances entre le
1579
mais seulement de l’Empire romain. Il est curieux
de
relever que ces distances entre les royaumes et l’empire préfigurent
1580
tions et l’Europe unie. Les plus chauds partisans
de
la CEE — cinq sur six — sont des États dont les ancêtres faisaient pa
1581
-Unis d’Europe. Il avait les plus grandes chances
de
réussir. Il ne l’a jamais fait à cause de ce vieux réflexe anti-Saint
1582
ause de ce vieux réflexe anti-Saint-Empire romain
de
nations germaniques. À certains moments, il y avait pensé, il a fait
1583
naliste français a été plus fort que l’attraction
de
ce mythe. Je dois dire que, personnellement, je le regrette. Je n’ai
1584
regrette. Je n’ai pas beaucoup aimé la politique
de
de Gaulle en France, mais je crois qu’il aurait fait un très bon prés
1585
je crois qu’il aurait fait un très bon président
de
la première République européenne. Il avait la stature qu’il fallait
1586
il fallait pour ça, une compréhension assez large
de
l’histoire. S’il avait fallu vraiment nommer un président (on peut im
1587
et j’imagine pour ma part bien d’autres manières
de
faire l’Europe que d’élire un président, qui serait un empereur sans
1588
part bien d’autres manières de faire l’Europe que
d’
élire un président, qui serait un empereur sans couronne), le général
1589
27 juin 1969 Mon pronostic — qui est aussi celui
de
beaucoup d’observateurs — est que l’on essaiera plus ou moins sincère
1590
9 Mon pronostic — qui est aussi celui de beaucoup
d’
observateurs — est que l’on essaiera plus ou moins sincèrement de fair
1591
— est que l’on essaiera plus ou moins sincèrement
de
faire certaines alliances, que l’on nommera même peut-être confédérat
1592
temps, comme on y est amené par le développement
de
l’économie et de la technique, les régions vont se préciser, s’affirm
1593
y est amené par le développement de l’économie et
de
la technique, les régions vont se préciser, s’affirmer. Toutes sortes
1594
gions vont se préciser, s’affirmer. Toutes sortes
de
régions différentes vont s’organiser (régions économiques, régions te
1595
su qui sera plus fort que les liens entre chacune
de
ces régions et la capitale de l’ancien État-nation. Il y aura donc un
1596
liens entre chacune de ces régions et la capitale
de
l’ancien État-nation. Il y aura donc un dépérissement de l’État-natio
1597
cien État-nation. Il y aura donc un dépérissement
de
l’État-nation progressif, et le remplacement de cette carcasse vide d
1598
t de l’État-nation progressif, et le remplacement
de
cette carcasse vide de son contenu par un organisme neuf, qui sera ce
1599
ressif, et le remplacement de cette carcasse vide
de
son contenu par un organisme neuf, qui sera celui des régions et de l
1600
un organisme neuf, qui sera celui des régions et
de
leur tissu organisé à l’échelle européenne. 24 février 1967 Déjà part
1601
gionales minent et grignotent la notion classique
de
frontières, la vident par l’intérieur, tendent à la réduire à ce qu’e
1602
eut vraiment se fédérer, ce n’est pas sur la base
de
ses États-nations qu’elle devra établir ses structures nouvelles, mai
1603
tablir ses structures nouvelles, mais sur la base
de
ses régions ; parce que les frontières des États-nations, établies au
1604
ècle technique et électronique, et que les unités
de
base que sont les régions, sont, elles, les produits des réalités soc
1605
uits des réalités socioéconomiques et culturelles
de
la civilisation d’aujourd’hui. Et, en retour, il est clair qu’une Eur
1606
ocioéconomiques et culturelles de la civilisation
d’
aujourd’hui. Et, en retour, il est clair qu’une Europe fédérale dans l
1607
ce immédiate des régions, et une grande animation
de
leurs échanges. La politique d’union et la régionalisation sont liées
1608
grande animation de leurs échanges. La politique
d’
union et la régionalisation sont liées. 22 avril 1977 Ce qui est le pl
1609
1977 Ce qui est le plus probable dans l’évolution
de
la Grande-Bretagne actuelle, c’est que, avec les progrès de la devolu
1610
de-Bretagne actuelle, c’est que, avec les progrès
de
la devolution, c’est-à-dire de la décentralisation et de la remise de
1611
, avec les progrès de la devolution, c’est-à-dire
de
la décentralisation et de la remise des pouvoirs aux régions comme l’
1612
evolution, c’est-à-dire de la décentralisation et
de
la remise des pouvoirs aux régions comme l’Écosse, le pays de Galles,
1613
lles, ces dernières vont réclamer de plus en plus
de
droits et fourniront finalement une seconde chambre, une chambre haut
1614
chambre, une chambre haute qui sera la succession
de
la Chambre des lords, tombée plus ou moins en désuétude ; alors, nous
1615
ion du Sénat américain, avec représentation égale
de
toutes les communautés. C’est ce que l’on pourrait souhaiter aussi au
1616
qu’ils sont encore en place, seraient représentés
d’
une manière égale, tandis qu’il y aurait le parlement européen qui, lu
1617
ropéen qui, lui, serait élu au suffrage universel
d’
une manière proportionnelle aux populations. 29 octobre 1965 Il y a ce
1618
re 1965 Il y a ceux qui défendent le point de vue
de
la supranationalité, comme Jean Monnet, comme le professeur Hallstein
1619
Monnet, comme le professeur Hallstein, président
de
la Commission exécutive du Marché commun, qui entendent par supranati
1620
onalité ou pouvoir supranational, l’établissement
de
règles communes, mises au point par un groupe de spécialistes, d’expe
1621
de règles communes, mises au point par un groupe
de
spécialistes, d’experts. En face de cela, la conception gaullienne co
1622
es, mises au point par un groupe de spécialistes,
d’
experts. En face de cela, la conception gaullienne consiste à proposer
1623
lienne consiste à proposer simplement des mesures
de
coopération, un certain rapprochement des points de vue, voire des al
1624
nt intacte. Il est évident que ni l’un ni l’autre
de
ces points de vue ne va triompher dans un proche avenir, et probablem
1625
à l’état pur. Comment éviter d’une part le danger
de
tout mêler, de tout uniformiser, et comment éviter d’autre part le pé
1626
omment éviter d’une part le danger de tout mêler,
de
tout uniformiser, et comment éviter d’autre part le péril majeur que
1627
es identités diverses et par la solidité du pacte
d’
union qu’il propose. 4. Les finalités de la fédération européenne
1628
pacte d’union qu’il propose. 4. Les finalités
de
la fédération européenne 22 avril 1966 L’unité, c’est à la fois le
1629
L’unité, c’est à la fois le fond commun, la base
de
départ, et le but dernier, l’idéal à rejoindre. Pour les Européens, l
1630
ésent, l’un à titre de nostalgie, l’autre à titre
d’
espérance ; mais tous les deux sont moteurs. L’unité est toujours conç
1631
s. L’unité est toujours conçue comme la condition
de
la force, et en même temps comme la condition de la paix. On le retro
1632
de la force, et en même temps comme la condition
de
la paix. On le retrouve dans le langage proverbial de la politique co
1633
a paix. On le retrouve dans le langage proverbial
de
la politique courante en Europe, des proverbes comme « United we stan
1634
emps « vivez en paix ». 10 juin 1977 Au lendemain
de
la guerre, on espérait que le Parlement de Strasbourg, par exemple, q
1635
demain de la guerre, on espérait que le Parlement
de
Strasbourg, par exemple, qui a commencé en 1949, se donnerait des com
1636
e insisté sur la nécessité pour les États-nations
de
renoncer à leur souveraineté. C’était d’une extrême maladresse. Dans
1637
-nations de renoncer à leur souveraineté. C’était
d’
une extrême maladresse. Dans tous les congrès des fédéralistes, Montre
1638
leur acharnement à demander aux États souverains
de
renoncer à leur souveraineté ; c’était d’un irréalisme total. Nous au
1639
verains de renoncer à leur souveraineté ; c’était
d’
un irréalisme total. Nous aurions dû demander la création d’un pouvoir
1640
lisme total. Nous aurions dû demander la création
d’
un pouvoir européen, capable de garantir les souverainetés de nos État
1641
mander la création d’un pouvoir européen, capable
de
garantir les souverainetés de nos États, qui, actuellement, sont sans
1642
r européen, capable de garantir les souverainetés
de
nos États, qui, actuellement, sont sans défense contre l’extérieur, e
1643
ontre l’extérieur, et n’ont même pas la ressource
d’
une alliance automatique en cas d’attaque par l’étranger. 20 mai 1966
1644
as la ressource d’une alliance automatique en cas
d’
attaque par l’étranger. 20 mai 1966 On n’a jamais demandé aux cantons
1645
ai 1966 On n’a jamais demandé aux cantons suisses
de
renoncer à leur souveraineté, ils ne l’auraient pas fait. On leur a d
1646
transposition est tentante sur le niveau européen
d’
aujourd’hui, où on imagine mal un pays comme la France acceptant de re
1647
on imagine mal un pays comme la France acceptant
de
renoncer à sa souveraineté. Mais on l’imagine très bien acceptant d’e
1648
uveraineté. Mais on l’imagine très bien acceptant
d’
en déléguer une partie, à condition que l’organe auquel il la déléguer
1649
erait lui garantisse sa souveraineté. Dans le cas
de
petits pays comme la Suède ou la Norvège, ou le Danemark, il serait b
1650
u le Danemark, il serait bien agréable, pour eux,
d’
avoir leur souveraineté garantie par un organisme fédéral européen. Il
1651
l européen. Ils y perdraient, en fait, une partie
de
leur souveraineté, mais tout le reste leur serait garanti, alors que
1652
juin 1970 Si l’on me dit que c’est une utopie que
de
vouloir dépasser l’État-nation, je réponds que c’est au contraire la
1653
que c’est au contraire la grande tâche politique
de
notre temps, car à ce prix seulement nous ferons l’Europe, et nous la
1654
lus puissante ou la plus riche, mais bien ce coin
de
planète indispensable au monde de demain, où les hommes de toutes rac
1655
is bien ce coin de planète indispensable au monde
de
demain, où les hommes de toutes races pourront trouver non pas le plu
1656
e indispensable au monde de demain, où les hommes
de
toutes races pourront trouver non pas le plus de bonheur peut-être, m
1657
de toutes races pourront trouver non pas le plus
de
bonheur peut-être, mais le plus de saveur, le plus de sens à la vie.
1658
on pas le plus de bonheur peut-être, mais le plus
de
saveur, le plus de sens à la vie. 26 juin 1970 Donner comme but à la
1659
onheur peut-être, mais le plus de saveur, le plus
de
sens à la vie. 26 juin 1970 Donner comme but à la Cité européenne la
1660
un niveau de vie déterminé en termes quantitatifs
de
profit et de PNB, c’est passer du matérialisme capitaliste et communi
1661
vie déterminé en termes quantitatifs de profit et
de
PNB, c’est passer du matérialisme capitaliste et communiste à la mise
1662
et communiste à la mise en question du sens même
de
nos vies et des vrais buts de nos activités communautaires et personn
1663
estion du sens même de nos vies et des vrais buts
de
nos activités communautaires et personnelles. Si sérieux que soient l
1664
s entre économies étatiques ne peut pas entraîner
d’
adhésions enthousiastes. Les jeunes gens d’aujourd’hui ne seront pas c
1665
raîner d’adhésions enthousiastes. Les jeunes gens
d’
aujourd’hui ne seront pas convaincus par des avantages matériels. La v
1666
ges matériels. La vraie réponse à la contestation
de
la jeunesse d’aujourd’hui ne peut évidemment pas être trouvée au nive
1667
La vraie réponse à la contestation de la jeunesse
d’
aujourd’hui ne peut évidemment pas être trouvée au niveau économique,
1668
États-nations). Cette réponse exige la recréation
de
communautés véritables. Et la Cité européenne, fondée sur les commune
1669
21 avril 1967 Il est clair que l’absence actuelle
d’
union rend pratiquement impossible le plein développement économique d
1670
ment impossible le plein développement économique
de
l’ensemble de nos pays, leur indépendance, soit individuelle, soit gl
1671
e le plein développement économique de l’ensemble
de
nos pays, leur indépendance, soit individuelle, soit globale ; que l’
1672
, soit individuelle, soit globale ; que l’absence
d’
union empêche nos pays de jouer un rôle au plan mondial ; et qu’enfin
1673
globale ; que l’absence d’union empêche nos pays
de
jouer un rôle au plan mondial ; et qu’enfin elle condamne le continen
1674
on prolongée en deux zones qu’on pourrait appeler
de
satellisation par les deux Grands, dont nous risquons de devenir asse
1675
llisation par les deux Grands, dont nous risquons
de
devenir assez rapidement les sous-développés blancs, car la situation
1676
rapidement depuis deux ans, notamment sur le plan
de
la technique. Alors que, par une union des vingt-cinq pays à peu près
1677
aussi la plus démocratique par la pluralité même
de
ses coutumes, de ses différents droits, alliant le meilleur des tradi
1678
mocratique par la pluralité même de ses coutumes,
de
ses différents droits, alliant le meilleur des traditions au plus eff
1679
liant le meilleur des traditions au plus efficace
de
l’innovation technique. e. Avec l’introduction suivante des éditeu
1680
es éditeurs : « Selon Denis de Rougemont, la base
de
l’union des Européens n’est pas l’économie, comme le croyaient les fo
1681
L’Europe, en effet, se caractérise par une unité
de
culture non unitaire, c’est-à-dire recelant des valeurs et des modes
1682
e, c’est-à-dire recelant des valeurs et des modes
de
pensée hétérogènes, partiellement contradictoires, antinomiques, mais
1683
mais complémentaires. C’est pourquoi tout projet
d’
union qui sacrifierait les diversités au profit de l’uniformisation es
1684
d’union qui sacrifierait les diversités au profit
de
l’uniformisation est inconcevable : on arriverait alors à une entité
1685
n arriverait alors à une entité qui n’aurait plus
d’
européen que le nom. Ainsi, le problème européen de l’unité et de la d
1686
’européen que le nom. Ainsi, le problème européen
de
l’unité et de la diversité est typiquement un problème fédéraliste :
1687
le nom. Ainsi, le problème européen de l’unité et
de
la diversité est typiquement un problème fédéraliste : il s’agit d’un
1688
t typiquement un problème fédéraliste : il s’agit
d’
unir sans unifier. Actuellement, le principal obstacle à la réalisatio
1689
uellement, le principal obstacle à la réalisation
de
l’Europe est l’État-nation. L’échec de la construction européenne s’e
1690
éalisation de l’Europe est l’État-nation. L’échec
de
la construction européenne s’explique notamment par le fait qu’on a t
1691
ne s’explique notamment par le fait qu’on a tenté
d’
unir l’Europe sur la base des États-nations. Dans un tel schéma, il y
1692
, il y a deux alternatives, dont aucune ne permet
de
faire l’Europe : la supranationalité (création d’un super-État-nation
1693
de faire l’Europe : la supranationalité (création
d’
un super-État-nation européen niant les diversités sans lesquelles l’E
1694
onalisme (qui refuse l’union durable et n’accepte
de
coopérer que pour des raisons tactiques répondant à des vues strictem
1695
ntraire, dans un schéma fédéral, il ne s’agit pas
de
garder toute la souveraineté ou de l’abandonner complètement, il s’ag
1696
ne s’agit pas de garder toute la souveraineté ou
de
l’abandonner complètement, il s’agit d’en déléguer une part à l’autor
1697
aineté ou de l’abandonner complètement, il s’agit
d’
en déléguer une part à l’autorité fédérale, afin qu’elle puisse garant
1698
ouverainetés des pouvoirs fédérés, mieux qu’aucun
d’
eux isolément ne pourrait le faire. Comme dans tout système fédéral (e
1699
les États-Unis, la Suisse, la République fédérale
d’
Allemagne), on pourrait instituer un bicaméralisme au niveau européen,
1700
les peuples, et une autre les États (avec égalité
de
voix). On pourrait également élire un président des États-Unis d’Euro
1701
ope, dont l’importance serait symbolique. L’étape
de
l’État-nation est, pense Denis de Rougemont, en voie d’être peu à peu
1702
tat-nation est, pense Denis de Rougemont, en voie
d’
être peu à peu dépassée par les liens nombreux et les solidarités conc
1703
s frontières. Cette évolution se fait sans bruit,
de
manière sous-jacente mais néanmoins effective, bien qu’elle ne soit p
1704
ateurs. L’Europe des régions ne sera pas le fruit
d’
un acte spectaculaire, auquel les États-nations s’opposeraient de tout
1705
aculaire, auquel les États-nations s’opposeraient
de
toute façon, mais elle se fait lentement et apparaîtra peu à peu comm
1706
lentement et apparaîtra peu à peu comme le moyen
d’
exprimer tant les diversités que les solidarités entre Européens. »
1707
ons 22 avril 1966 Pour mériter le qualificatif
de
fédéraliste, un régime politique doit respecter, prévoir, et articule
1708
t articuler ces trois éléments au moins : l’unité
de
fond, les diversités des communautés, le pacte. Avec les trois termes
1709
des communautés, le pacte. Avec les trois termes
d’
unité, diversité et pacte, nous avons les trois éléments de base qui s
1710
diversité et pacte, nous avons les trois éléments
de
base qui sont indispensables à tout système fédéraliste pour qu’il pu
1711
à éliminer complètement l’autre, est donc obligé
de
composer avec lui. Pour que cette tension, cette composition, n’about
1712
te, qui n’est pas une synthèse (au sens hégélien)
de
l’unité et de la diversité. 19 novembre 1976 Pour résoudre l’antinomi
1713
pas une synthèse (au sens hégélien) de l’unité et
de
la diversité. 19 novembre 1976 Pour résoudre l’antinomie logique entr
1714
s large et très précis, a précédé comme pratique,
de
beaucoup, sa définition et sa prise de conscience, sa théorie en tout
1715
iiie siècle seulement, notamment dans les œuvres
de
Rousseau et un peu avant dans Montesquieu. Le mot est donc moderne, i
1716
antinomiques, mais également valables et vitales,
de
telle sorte que la solution du problème ne puisse pas être trouvée da
1717
me ne puisse pas être trouvée dans la suppression
d’
un des deux termes, ni dans la neutralisation d’un des deux pôles, mai
1718
n d’un des deux termes, ni dans la neutralisation
d’
un des deux pôles, mais seulement dans une création qui englobe, à un
1719
qui englobe, à un niveau supérieur, les exigences
de
l’un et de l’autre, en leur rendant justice au maximum. J’appelle ens
1720
, à un niveau supérieur, les exigences de l’un et
de
l’autre, en leur rendant justice au maximum. J’appelle ensuite soluti
1721
grité si possible, tout en assurant leur rapport,
de
telle manière que la résultante de leur tension soit positive. L’ense
1722
leur rapport, de telle manière que la résultante
de
leur tension soit positive. L’ensemble des problèmes et des solutions
1723
oblèmes et des solutions ainsi défini, étant donc
de
ce type bipolaire, constitue ce que j’appellerai maintenant la politi
1724
iste. Dans les deux cas, le problème est toujours
de
définir ce qui distingue et unit à la fois, qu’il s’agisse, comme au
1725
unit à la fois, qu’il s’agisse, comme au concile
de
Nicée, des deux natures du Christ, dans l’anthropologie, de l’âme et
1726
des deux natures du Christ, dans l’anthropologie,
de
l’âme et du corps de l’homme, ou bien, en politique, de l’autonomie d
1727
hrist, dans l’anthropologie, de l’âme et du corps
de
l’homme, ou bien, en politique, de l’autonomie d’un groupe et de l’un
1728
me et du corps de l’homme, ou bien, en politique,
de
l’autonomie d’un groupe et de l’union nécessaire pour sauver cette au
1729
de l’homme, ou bien, en politique, de l’autonomie
d’
un groupe et de l’union nécessaire pour sauver cette autonomie, de la
1730
bien, en politique, de l’autonomie d’un groupe et
de
l’union nécessaire pour sauver cette autonomie, de la liberté et de l
1731
e l’union nécessaire pour sauver cette autonomie,
de
la liberté et de la participation, l’une étant formellement contradic
1732
ire pour sauver cette autonomie, de la liberté et
de
la participation, l’une étant formellement contradictoire avec l’autr
1733
oire avec l’autre, mais pratiquement la condition
de
l’autre. 28 octobre 1966 Aux yeux de la plupart des auteurs contempor
1734
et les militants, le fédéralisme est une attitude
de
pensée et une méthode de conduite plus qu’une doctrine politique ou n
1735
ralisme est une attitude de pensée et une méthode
de
conduite plus qu’une doctrine politique ou notion juridique, une expé
1736
es simples et aux structures géométriques. Tenter
de
le définir d’entrée de jeu et une fois pour toutes serait donc s’expo
1737
aux structures géométriques. Tenter de le définir
d’
entrée de jeu et une fois pour toutes serait donc s’exposer à trahir m
1738
tures géométriques. Tenter de le définir d’entrée
de
jeu et une fois pour toutes serait donc s’exposer à trahir méthodique
1739
oi ce sont des adversaires qui éprouvent le moins
de
scrupules à en donner des caractéristiques brèves et simples. Et pour
1740
t système politique. 28 octobre 1966 Cette espèce
de
répugnance à se laisser définir que montre le fédéralisme est très no
1741
illogiques (qui ne se laissent pas faire à coups
de
définitions). Le fédéralisme, bien au contraire, est une manière d’ar
1742
e fédéralisme, bien au contraire, est une manière
d’
arranger les relations entre les groupes, les cités, les régions et le
1743
n une formule fédérative. C’est d’abord le besoin
de
sécurité, que l’on retrouvera toujours dans tous les exemples réussis
1744
pour se défendre seul. Deuxième motif : le besoin
d’
assurer l’autonomie ; le seul moyen d’éviter l’annexion par son voisin
1745
: le besoin d’assurer l’autonomie ; le seul moyen
d’
éviter l’annexion par son voisin et de continuer à vivre à sa manière,
1746
seul moyen d’éviter l’annexion par son voisin et
de
continuer à vivre à sa manière, c’est de mettre en commun certaines f
1747
oisin et de continuer à vivre à sa manière, c’est
de
mettre en commun certaines fonctions vitales, non seulement la défens
1748
un tyran. La fédération a cette utilité première
d’
assurer la sécurité de ses membres, et cette utilité seconde d’assurer
1749
on a cette utilité première d’assurer la sécurité
de
ses membres, et cette utilité seconde d’assurer la forme de gouvernem
1750
sécurité de ses membres, et cette utilité seconde
d’
assurer la forme de gouvernement libre, l’autonomie de chaque cité, co
1751
bres, et cette utilité seconde d’assurer la forme
de
gouvernement libre, l’autonomie de chaque cité, contre tout essai de
1752
surer la forme de gouvernement libre, l’autonomie
de
chaque cité, contre tout essai de prise de pouvoir par un dictateur,
1753
re, l’autonomie de chaque cité, contre tout essai
de
prise de pouvoir par un dictateur, chose qui serait impossible dans l
1754
onomie de chaque cité, contre tout essai de prise
de
pouvoir par un dictateur, chose qui serait impossible dans l’Europe d
1755
Grèce, mais surtout reste un besoin très profond
de
la vie politique et civique des Occidentaux. Le troisième motif, qu’o
1756
spérité matérielle. Car le Marché commun a laissé
de
côté les deux autres motifs, sécurité et autonomie. Il est important
1757
s motifs, sécurité et autonomie. Il est important
de
voir qu’aucun de ces motifs ne peut vraiment exister si les deux autr
1758
é et autonomie. Il est important de voir qu’aucun
de
ces motifs ne peut vraiment exister si les deux autres n’y sont pas,
1759
prospérité matérielle, ça ne marche pas… et ainsi
de
suite avec chacune de ces trois composantes : si elles ne sont pas là
1760
ça ne marche pas… et ainsi de suite avec chacune
de
ces trois composantes : si elles ne sont pas là simultanément, l’ense
1761
pas. 17 juin 1966 Il a fallu passer tout un cycle
d’
épreuves où s’est manifestée la dialectique individu-collectivité, pui
1762
t chacune prendre sur elle les caractères absolus
de
l’empire, alors qu’elles étaient plusieurs et qu’un empire, pour être
1763
e, les nations voulant aussi avoir les caractères
d’
une Église, c’est-à-dire être sacrées et avoir le droit de condamner l
1764
lise, c’est-à-dire être sacrées et avoir le droit
de
condamner les hérétiques. Il a fallu traverser toute cette longue et
1765
rd’hui, des moyens techniques qui nous permettent
d’
envisager des solutions fédéralistes dans toutes sortes de domaines, p
1766
ger des solutions fédéralistes dans toutes sortes
de
domaines, pas seulement celui des relations entre États, mais celui d
1767
us considérons, dans leur ensemble, deux exemples
d’
évolution de type fédératif, celui des Ligues suisses des environs de
1768
ns, dans leur ensemble, deux exemples d’évolution
de
type fédératif, celui des Ligues suisses des environs de 1300 jusqu’à
1769
fédératif, celui des Ligues suisses des environs
de
1300 jusqu’à 1798, et celui des Provinces-Unies de la fin du xvie si
1770
e 1300 jusqu’à 1798, et celui des Provinces-Unies
de
la fin du xvie siècle jusqu’à 1795, nous voyons dans les deux cas ré
1771
principales conditions nécessaires à la formation
d’
un régime de type fédéral : la volonté d’union, des diversités réelles
1772
conditions nécessaires à la formation d’un régime
de
type fédéral : la volonté d’union, des diversités réelles à sauvegard
1773
ormation d’un régime de type fédéral : la volonté
d’
union, des diversités réelles à sauvegarder, et un pacte juré libremen
1774
t mal équilibrés. À tel point qu’il est difficile
de
parler vraiment de fédération dans le cas des Ligues suisses, comme d
1775
tel point qu’il est difficile de parler vraiment
de
fédération dans le cas des Ligues suisses, comme dans le cas des Prov
1776
dans le cas des Provinces-Unies. Il s’agit plutôt
d’
efforts vers une fédération, d’une évolution tendant à une forme fédér
1777
. Il s’agit plutôt d’efforts vers une fédération,
d’
une évolution tendant à une forme fédérative. Ce qui a le plus manqué
1778
n institutionnelle du pacte juré. Je proposerais,
de
ces trois éléments et de leur dialectique, une sorte de représentatio
1779
te juré. Je proposerais, de ces trois éléments et
de
leur dialectique, une sorte de représentation graphique, en prenant c
1780
trois éléments et de leur dialectique, une sorte
de
représentation graphique, en prenant comme ligne horizontale la base
1781
hique, en prenant comme ligne horizontale la base
d’
unité et comme verticale, les diversités, et nous aurions à peu près c
1782
le cas des Provinces-Unies de Hollande, une base
d’
unité extrêmement large et un très petit axe de diversité ; dans ce ca
1783
se d’unité extrêmement large et un très petit axe
de
diversité ; dans ce cas, les diversités sont très solidement reliées
1784
t très solidement reliées à la base unitaire. Cas
de
la Suisse : une base d’unité assez faible et un axe de diversité très
1785
s à la base unitaire. Cas de la Suisse : une base
d’
unité assez faible et un axe de diversité très haut ; le pacte ou des
1786
Suisse : une base d’unité assez faible et un axe
de
diversité très haut ; le pacte ou des réseaux de pactes inégaux tenai
1787
de diversité très haut ; le pacte ou des réseaux
de
pactes inégaux tenaient ensemble les différentes pièces de ce mât, ma
1788
inégaux tenaient ensemble les différentes pièces
de
ce mât, mais le mât lui-même n’était pas arrimé, il n’y avait pas de
1789
mât lui-même n’était pas arrimé, il n’y avait pas
de
cordages représentant les liens institutionnels de l’État (c’est ains
1790
e cordages représentant les liens institutionnels
de
l’État (c’est ainsi que cela a été renversé assez facilement par le c
1791
ssez facilement par le choc des armées françaises
de
la Révolution). On pourrait dire, pour continuer ce même schéma, que
1792
our continuer ce même schéma, que la forme idéale
d’
une fédération serait un triangle équilatéral, base d’unité, axe de di
1793
e fédération serait un triangle équilatéral, base
d’
unité, axe de diversité solidement tenu par des institutions. 6 fév
1794
serait un triangle équilatéral, base d’unité, axe
de
diversité solidement tenu par des institutions. 6 février 1969 La
1795
s différents du fédéralisme. La première étape va
de
1789 à 1792. Durant celle-ci, le mot de fédération, de mouvement fédé
1796
étape va de 1789 à 1792. Durant celle-ci, le mot
de
fédération, de mouvement fédératif, est employé pour désigner le gran
1797
89 à 1792. Durant celle-ci, le mot de fédération,
de
mouvement fédératif, est employé pour désigner le grand mouvement uni
1798
e détruire les vieilles institutions provinciales
de
l’Ancien Régime, mais ne les a pas encore remplacées par de nouvelles
1799
n Régime, mais ne les a pas encore remplacées par
de
nouvelles. Donc, à ce moment-là, les provinces auraient peut-être pu
1800
« fédération », c’était le rassemblement nouveau
de
toutes les parties de la France. D’où les grandes fêtes qui se sont a
1801
it le rassemblement nouveau de toutes les parties
de
la France. D’où les grandes fêtes qui se sont appelées « Fêtes de la
1802
ement nouveau de toutes les parties de la France.
D’
où les grandes fêtes qui se sont appelées « Fêtes de la Fédération ».
1803
où les grandes fêtes qui se sont appelées « Fêtes
de
la Fédération ». C’était donc le sens unitaire, qu’il y a toujours da
1804
le sens unitaire, qu’il y a toujours dans le mot
de
fédéralisme. La célèbre Fête de la Fédération au Champ-de-Mars, près
1805
jours dans le mot de fédéralisme. La célèbre Fête
de
la Fédération au Champ-de-Mars, près de l’actuelle tour Eiffel, le 14
1806
90, qui réunit les délégués des gardes nationales
de
toutes les provinces françaises, est une fête exactement de l’unité,
1807
les provinces françaises, est une fête exactement
de
l’unité, plus même que de l’union. C’est la fête du mouvement unitair
1808
est une fête exactement de l’unité, plus même que
de
l’union. C’est la fête du mouvement unitaire français. À ce moment-là
1809
t où des conflits se multiplient entre la commune
de
Paris (où règne le Club des jacobins) et les provinces. La résistance
1810
ovinces. La résistance des provinces à la commune
de
Paris, aux extrémistes jacobins, prend le nom de « fédéralisme ». C’e
1811
de Paris, aux extrémistes jacobins, prend le nom
de
« fédéralisme ». C’est-à-dire que ce sont les jacobins qui accusent l
1812
girondins, défenseurs des libertés provinciales,
d’
être des fédéralistes dans le sens séparatiste ; donc, il y a eu un ch
1813
sens séparatiste ; donc, il y a eu un changement
de
signe. Et cela devient une accusation insultante. Voilà donc les deux
1814
66 Toute l’heureuse et créatrice première période
de
la Révolution est dominée par l’éloge de l’union fédérale, les projet
1815
période de la Révolution est dominée par l’éloge
de
l’union fédérale, les projets d’organisation fédérative de la France
1816
inée par l’éloge de l’union fédérale, les projets
d’
organisation fédérative de la France et même du genre humain, et les F
1817
n fédérale, les projets d’organisation fédérative
de
la France et même du genre humain, et les Fêtes de la Fédération. Mai
1818
e la France et même du genre humain, et les Fêtes
de
la Fédération. Mais dans la deuxième partie, ce sont les jacobins uni
1819
e, et dès lors, le terme sera affecté, en France,
d’
un arrière-goût de trahison nationale. 20 janvier 1967 En Suisse, le m
1820
terme sera affecté, en France, d’un arrière-goût
de
trahison nationale. 20 janvier 1967 En Suisse, le mot « fédéralisme »
1821
t « fédéralisme » a pris le sens presque exclusif
d’
autonomie locale, alors qu’en France — ou plus généralement en Europe
1822
ce — ou plus généralement en Europe — si on parle
de
fédération, on voit tout de suite un mouvement de convergence, bien e
1823
de fédération, on voit tout de suite un mouvement
de
convergence, bien entendu sur le plan européen, mais pas à l’intérieu
1824
r de la France, où on verrait plutôt un mouvement
de
dissociation, de décentralisation. 3. Fédéralisme et diversités
1825
ù on verrait plutôt un mouvement de dissociation,
de
décentralisation. 3. Fédéralisme et diversités 20 octobre 1965
1826
sister sur cette observation que c’est la volonté
d’
unifier par la force qui crée les divisions et les passions séparatist
1827
paratistes, bien loin de créer des fédérations ou
d’
être un élément fédérateur. Non seulement l’État hégémonique échoue da
1828
ulement l’État hégémonique échoue dans sa volonté
d’
unifier, mais encore il s’oppose toujours et nécessairement à toute vo
1829
oppose toujours et nécessairement à toute volonté
d’
unir. Je distingue bien unifier et unir, unifier étant l’acte impérial
1830
fédéraliste. 22 avril 1966 L’unité, c’est l’objet
de
la vision, de l’idéal, et c’est le fondement du sens commun ; la dive
1831
2 avril 1966 L’unité, c’est l’objet de la vision,
de
l’idéal, et c’est le fondement du sens commun ; la diversité, c’est l
1832
ment du sens commun ; la diversité, c’est l’objet
de
la prise directe, du réalisme, et c’est le fondement de la passion, d
1833
prise directe, du réalisme, et c’est le fondement
de
la passion, de l’amour créateur, irrationnel. Mais l’unité n’est pas
1834
du réalisme, et c’est le fondement de la passion,
de
l’amour créateur, irrationnel. Mais l’unité n’est pas vraiment réelle
1835
1977 Il y a complémentarité parfaite des notions
de
fédéralisme et de tolérance. Le principe de tolérance s’est trouvé ou
1836
émentarité parfaite des notions de fédéralisme et
de
tolérance. Le principe de tolérance s’est trouvé ouvrir la voie aux p
1837
tions de fédéralisme et de tolérance. Le principe
de
tolérance s’est trouvé ouvrir la voie aux premiers théoriciens du féd
1838
oriciens du fédéralisme, c’est-à-dire précisément
de
l’union dans la diversité, je dirais presque de l’union pour la diver
1839
t de l’union dans la diversité, je dirais presque
de
l’union pour la diversité. On dit trop facilement l’union dans la div
1840
formule qu’on emploie sans bien se rendre compte
de
ce qu’elle entraîne, et il me semble que si on dit l’union pour la di
1841
t l’union pour la diversité, on cerne la question
de
beaucoup plus près. 17 février 1964 La fédération est faite de tensio
1842
lus près. 17 février 1964 La fédération est faite
de
tensions, entre des diversités qui sont supposées maintenues, protégé
1843
s. C’est aussi l’ambition, sur le plan religieux,
de
l’œcuménisme moderne : non pas fusionner toutes les diversités, mais
1844
versités originelles. 28 janvier 1977 Le problème
de
toute fédération est le suivant : comment sauvegarder les autonomies
1845
locales, les diversités réelles, qu’elles soient
de
régimes, de langues, d’ethnies, de coutumes ou de conditions économiq
1846
s diversités réelles, qu’elles soient de régimes,
de
langues, d’ethnies, de coutumes ou de conditions économiques et comme
1847
réelles, qu’elles soient de régimes, de langues,
d’
ethnies, de coutumes ou de conditions économiques et comment, pour sau
1848
u’elles soient de régimes, de langues, d’ethnies,
de
coutumes ou de conditions économiques et comment, pour sauver ces aut
1849
de régimes, de langues, d’ethnies, de coutumes ou
de
conditions économiques et comment, pour sauver ces autonomies, est-il
1850
nt, pour sauver ces autonomies, est-il nécessaire
de
s’unir et d’arriver à une unité supérieure qui puisse intervenir dans
1851
er ces autonomies, est-il nécessaire de s’unir et
d’
arriver à une unité supérieure qui puisse intervenir dans le cas où un
1852
périeure qui puisse intervenir dans le cas où une
de
ces autonomies est menacée ? 4. Les finalités : puissance ou liber
1853
puissance ou liberté ? 11 février 1977 Le but
de
la fédération n’est pas la puissance, mais l’autonomie des groupes fé
1854
pes fédérés, c’est-à-dire la possibilité pour eux
de
s’autogouverner, de s’autogérer, et pour y parvenir (et c’est bien le
1855
-dire la possibilité pour eux de s’autogouverner,
de
s’autogérer, et pour y parvenir (et c’est bien le moyen d’un but, sim
1856
gérer, et pour y parvenir (et c’est bien le moyen
d’
un but, simplement), ils forment tous ensemble une ligue, une fédérati
1857
a puissance, la puissance est simplement le moyen
de
garantir l’autonomie de chacun des composants de la fédération. Le pr
1858
e est simplement le moyen de garantir l’autonomie
de
chacun des composants de la fédération. Le principe qui forme cette f
1859
de garantir l’autonomie de chacun des composants
de
la fédération. Le principe qui forme cette fédération, c’est le serme
1860
cipe qui forme cette fédération, c’est le serment
de
confiance réciproque, qui est seul capable d’assurer les libertés qu’
1861
ent de confiance réciproque, qui est seul capable
d’
assurer les libertés qu’on appelle aussi les privilèges qu’il faut mai
1862
és des composants qui sont fédérés. 24 avril 1970
D’
une façon plus précise, en Europe, il nous faut décider si notre union
1863
ous attribuons pour finalité à la Cité européenne
de
demain la puissance, c’est-à-dire la puissance industrielle et milita
1864
re la puissance industrielle et militaire massive
d’
une sorte de troisième Grand préoccupé principalement de tenir tête au
1865
nce industrielle et militaire massive d’une sorte
de
troisième Grand préoccupé principalement de tenir tête aux deux autre
1866
sorte de troisième Grand préoccupé principalement
de
tenir tête aux deux autres, alors il faut créer un super-État-nation
1867
t agressif, comme la France de Napoléon, et faire
de
nos États autant de départements. Il faut tout unifier par des lois i
1868
France de Napoléon, et faire de nos États autant
de
départements. Il faut tout unifier par des lois inflexibles, sans éga
1869
ttre la production industrielle au seul impératif
de
l’élévation perpétuelle du PNB — cette tour de Babel du xxe siècle !
1870
if de l’élévation perpétuelle du PNB — cette tour
de
Babel du xxe siècle ! Au contraire, si nous donnons pour finalité à
1871
berté, c’est-à-dire les plus grandes possibilités
d’
épanouissement des personnes, de participation des citoyens et d’auton
1872
ndes possibilités d’épanouissement des personnes,
de
participation des citoyens et d’autonomie des communautés (la product
1873
t des personnes, de participation des citoyens et
d’
autonomie des communautés (la production industrielle n’étant qu’un de
1874
production industrielle n’étant qu’un des moyens
de
ces libertés), alors il faut reconnaître que l’État-nation n’est pas
1875
ourd’hui, radicalement incompatible avec les fins
de
l’Europe et de la liberté. Il faut adopter sans délai les méthodes le
1876
alement incompatible avec les fins de l’Europe et
de
la liberté. Il faut adopter sans délai les méthodes les plus propres
1877
nalismes, et se consacrer sérieusement à la tâche
de
construire des modèles neufs, pour une cité rendue à l’usage de l’hom
1878
des modèles neufs, pour une cité rendue à l’usage
de
l’homme. Il faut mettre en commun, à l’échelle fédérale continentale,
1879
e qui est nécessaire pour garantir les autonomies
de
tous ordres, régionales, communales et personnelles, mais rien de plu
1880
uvoir sur autrui ; dans le fédéralisme, il s’agit
de
pouvoir sur soi-même, d’où liberté. Dans la mesure où le fédéralisme
1881
e fédéralisme, il s’agit de pouvoir sur soi-même,
d’
où liberté. Dans la mesure où le fédéralisme est authentique, c’est-à-
1882
’éclatement. L’État-nation, au contraire, du fait
de
la loi formulée par Hegel « L’État-nation cherche au-dehors par la gu
1883
rre ou à l’éclatement. 5. Moyens et stratégies
d’
une fédération 3 février 1972 Le lieu où la personne se forme en s’
1884
moment où il s’arrachait au clan). Mais beaucoup
d’
entreprises, de projets, de tâches, dépassent par leurs dimensions la
1885
’arrachait au clan). Mais beaucoup d’entreprises,
de
projets, de tâches, dépassent par leurs dimensions la commune et la p
1886
u clan). Mais beaucoup d’entreprises, de projets,
de
tâches, dépassent par leurs dimensions la commune et la petite entrep
1887
finies par leurs fonctions) puis aux associations
de
régions vers des fédérations continentales ouvertes sur le monde. Cet
1888
entales ouvertes sur le monde. Cette construction
de
bas en haut est proudhonienne certes, mais pas en vue de détruire l’É
1889
es, mais pas en vue de détruire l’État. Seulement
de
le répartir. 20 janvier 1967 La dimension d’une tâche indique à quel
1890
ment de le répartir. 20 janvier 1967 La dimension
d’
une tâche indique à quel niveau de compétence cette tâche doit être at
1891
67 La dimension d’une tâche indique à quel niveau
de
compétence cette tâche doit être attribuée : soit à la petite unité d
1892
âche doit être attribuée : soit à la petite unité
de
base, soit au groupement d’unités, soit encore à des groupements de g
1893
oit à la petite unité de base, soit au groupement
d’
unités, soit encore à des groupements de groupes d’unités, à l’échelle
1894
roupement d’unités, soit encore à des groupements
de
groupes d’unités, à l’échelle de l’État national d’aujourd’hui, puis,
1895
’unités, soit encore à des groupements de groupes
d’
unités, à l’échelle de l’État national d’aujourd’hui, puis, en continu
1896
des groupements de groupes d’unités, à l’échelle
de
l’État national d’aujourd’hui, puis, en continuant à monter, à des or
1897
groupes d’unités, à l’échelle de l’État national
d’
aujourd’hui, puis, en continuant à monter, à des organismes fédéraux,
1898
ent entre elles librement un pouvoir commun, doté
de
certaines compétences parfaitement délimitées, qui correspondent à la
1899
our assurer cette autonomie, pour créer une force
d’
ensemble, juste suffisante à assurer ces autonomies. 10 juin 1977 Une
1900
oires que sont l’autonomie des parties et l’unité
de
l’ensemble. Voilà ce qui est fondamental pour toute fédération digne
1901
te fédération digne du nom ; et son but n’est pas
de
créer une nouvelle puissance qui, finalement, s’exercerait aux dépens
1902
stituants en les uniformisant, c’est au contraire
d’
assurer l’autonomie de chacune des parties qui entrent en fédération,
1903
rmisant, c’est au contraire d’assurer l’autonomie
de
chacune des parties qui entrent en fédération, en ne donnant pour ce
1904
essaire et indispensable pour assurer la sécurité
de
chacun. 17 juin 1966 Nous disposons aujourd’hui de moyens assez subti
1905
e chacun. 17 juin 1966 Nous disposons aujourd’hui
de
moyens assez subtils, assez complexes, pour résoudre des problèmes à
1906
ni même au début du siècle. Lénine avait coutume
de
dire : « le communisme, ce sont les soviets plus l’électricité », moi
1907
er, sous nos yeux, et a finalement beaucoup moins
de
passé que d’avenir. 29 octobre 1965 Qu’est-ce que nous voyons dans ce
1908
yeux, et a finalement beaucoup moins de passé que
d’
avenir. 29 octobre 1965 Qu’est-ce que nous voyons dans ce monde modern
1909
plificateur qui perd ses prises sur la complexité
de
la vie moderne ! Tandis que le fédéralisme, avec son respect des dive
1910
ieux adapté ou adaptable aux conditions nouvelles
de
la société ; tandis que, d’autre part, les techniques modernes, techn
1911
d’autre part, les techniques modernes, techniques
d’
information, de transport accéléré, ou de calcul électronique, qui per
1912
es techniques modernes, techniques d’information,
de
transport accéléré, ou de calcul électronique, qui permettent de teni
1913
chniques d’information, de transport accéléré, ou
de
calcul électronique, qui permettent de tenir compte d’une foule de va
1914
céléré, ou de calcul électronique, qui permettent
de
tenir compte d’une foule de variables en même temps, c’est-à-dire de
1915
lcul électronique, qui permettent de tenir compte
d’
une foule de variables en même temps, c’est-à-dire de maîtriser des si
1916
nique, qui permettent de tenir compte d’une foule
de
variables en même temps, c’est-à-dire de maîtriser des situations d’u
1917
ne foule de variables en même temps, c’est-à-dire
de
maîtriser des situations d’une folle complexité, qui auraient été sim
1918
e temps, c’est-à-dire de maîtriser des situations
d’
une folle complexité, qui auraient été simplement impensables il y a s
1919
toutes ces conquêtes techniques vont dans le sens
d’
un fédéralisme moderne, c’est-à-dire d’un régime politique qui, loin d
1920
ns le sens d’un fédéralisme moderne, c’est-à-dire
d’
un régime politique qui, loin de vouloir effacer toutes ces complexité
1921
vec elles, informer les ordinateurs électroniques
de
toutes ces conditions locales, infiniment enchevêtrées, dont il faut
1922
9 novembre 1976 Si on ne réussit pas dans la voie
de
la fédération, on retombe facilement dans le système de l’hégémonie,
1923
fédération, on retombe facilement dans le système
de
l’hégémonie, de l’impérialisme. C’est à mon sens l’opposition de base
1924
etombe facilement dans le système de l’hégémonie,
de
l’impérialisme. C’est à mon sens l’opposition de base fondamentale, q
1925
de l’impérialisme. C’est à mon sens l’opposition
de
base fondamentale, qui permet d’expliquer l’histoire de l’Occident. M
1926
ens l’opposition de base fondamentale, qui permet
d’
expliquer l’histoire de l’Occident. Mais si l’on réussit la fédération
1927
e fondamentale, qui permet d’expliquer l’histoire
de
l’Occident. Mais si l’on réussit la fédération, alors se pose le prob
1928
peut pas la garder fermée. Il est très difficile
de
l’arrêter à un certain moment, sinon on devient une espèce d’hégémoni
1929
à un certain moment, sinon on devient une espèce
d’
hégémonie (aujourd’hui, on dirait État-nation) par rapport aux autres.
1930
e au dilemme puissance ou liberté comme finalités
de
l’union. Mais je ne crois pas qu’il y ait un tiers parti tenable. Je
1931
oquait le général de Gaulle, et qui serait formée
d’
États-nations conservant jalousement leurs prétentions à la souveraine
1932
amicale des misanthropes. Je crois à la nécessité
de
défaire nos États-nations. Ou plutôt, de les dépasser, de démystifier
1933
écessité de défaire nos États-nations. Ou plutôt,
de
les dépasser, de démystifier leur sacré, de percer leurs frontières c
1934
re nos États-nations. Ou plutôt, de les dépasser,
de
démystifier leur sacré, de percer leurs frontières comme des écumoire
1935
utôt, de les dépasser, de démystifier leur sacré,
de
percer leurs frontières comme des écumoires. f. Avec l’introductio
1936
fédéralisme est très ancienne et caractéristique
de
la culture européenne, bien que le terme lui-même soit relativement r
1937
urs à le faire, soit à l’unitarisme (la Fête dite
de
la “Fédération” en 1790), soit au séparatisme (l’accusation de “fédér
1938
tion” en 1790), soit au séparatisme (l’accusation
de
“fédéralisme” contre les girondins en 1792). Plus qu’une notion jurid
1939
en 1792). Plus qu’une notion juridique ou un mode
d’
organisation politique, le fédéralisme est une attitude, une manière d
1940
que, le fédéralisme est une attitude, une manière
d’
aborder les problèmes. Lorsqu’une question soulève des options contrad
1941
ponsabilité, liberté/puissance), il ne s’agit pas
d’
en éliminer un des termes ou de tenter de les fondre en une synthèse n
1942
, il ne s’agit pas d’en éliminer un des termes ou
de
tenter de les fondre en une synthèse nécessairement abstraite, il s’a
1943
agit pas d’en éliminer un des termes ou de tenter
de
les fondre en une synthèse nécessairement abstraite, il s’agit, au co
1944
écessairement abstraite, il s’agit, au contraire,
de
rechercher la meilleure formule d’union sauvegardant chacun des terme
1945
au contraire, de rechercher la meilleure formule
d’
union sauvegardant chacun des termes. Ainsi, le pacte fédéral est un a
1946
édéral est un acte volontaire, exprimant le souci
de
garantir, à la fois, la solidarité de l’ensemble et les libertés de c
1947
nt le souci de garantir, à la fois, la solidarité
de
l’ensemble et les libertés de chacun, leur autonomie. Il n’y a pas de
1948
fois, la solidarité de l’ensemble et les libertés
de
chacun, leur autonomie. Il n’y a pas de recette toute faite, ni de fé
1949
libertés de chacun, leur autonomie. Il n’y a pas
de
recette toute faite, ni de fédération idéale qu’il faudrait copier ;
1950
utonomie. Il n’y a pas de recette toute faite, ni
de
fédération idéale qu’il faudrait copier ; les solutions fédérales son
1951
… La construction européenne se résout à un choix
de
finalités. Si l’on choisit la puissance, on bâtira un super-État-nati
1952
rs une fédération dans laquelle chaque communauté
de
base ne délègue à l’instance supérieure que ce qui est étroitement né
1953
autonomie. Selon Denis de Rougemont, il n’y a pas
de
troisième voie possible du type “solution confédérale” prônée par nom
1954
du type “solution confédérale” prônée par nombre
d’
hommes politiques ; il n’y aura pas d’Europe fédérale basée sur les Ét
1955
par nombre d’hommes politiques ; il n’y aura pas
d’
Europe fédérale basée sur les États-nations, mais sur les communes et
1956
s et les régions. Dans une fédération, le critère
de
la répartition des compétences n’est pas la souveraineté, mais la dim
1957
elles technologies, la diversification des moyens
de
communication, par exemple, permettent aujourd’hui plus qu’hier la mi
1958
mettent aujourd’hui plus qu’hier la mise en œuvre
de
solutions fédéralistes. »
1959
omme n’était pas, ne pouvait pas être le créateur
de
son histoire, il n’était que le jouet, l’objet de lois fatales. Le ch
1960
de son histoire, il n’était que le jouet, l’objet
de
lois fatales. Le christianisme aura d’ailleurs besoin de près de quin
1961
fatales. Le christianisme aura d’ailleurs besoin
de
près de quinze siècles pour faire passer dans la réalité de la sociét
1962
quinze siècles pour faire passer dans la réalité
de
la société occidentale l’idée d’histoire linéaire contre la conceptio
1963
dans la réalité de la société occidentale l’idée
d’
histoire linéaire contre la conception cyclique ; l’idée de progrès po
1964
e linéaire contre la conception cyclique ; l’idée
de
progrès possible contre celle de décadence inévitable ; l’idée de cha
1965
yclique ; l’idée de progrès possible contre celle
de
décadence inévitable ; l’idée de changement instantané de tous, qui é
1966
ble contre celle de décadence inévitable ; l’idée
de
changement instantané de tous, qui était pour la personne la conversi
1967
ence inévitable ; l’idée de changement instantané
de
tous, qui était pour la personne la conversion, qui sera pour la soci
1968
ociété la révolution, contre le refus fondamental
de
toute espèce de nouveauté, refus qui caractérise toutes les religions
1969
tion, contre le refus fondamental de toute espèce
de
nouveauté, refus qui caractérise toutes les religions et civilisation
1970
1977 Marx et tous les penseurs marxistes dérivent
de
Hegel, ont repris à Hegel sa fameuse dialectique thèse-antithèse-synt
1971
l dans ses conversations avec Marx. Marx a essayé
d’
expliquer la doctrine de Hegel à Proudhon, qui a été séduit au début,
1972
avec Marx. Marx a essayé d’expliquer la doctrine
de
Hegel à Proudhon, qui a été séduit au début, et qui a cru pendant lon
1973
en. Il n’avait pas fait attention à quelque chose
de
radicalement différent dans la pensée de Hegel et dans la sienne, qui
1974
ue chose de radicalement différent dans la pensée
de
Hegel et dans la sienne, qui refusait la synthèse. Il s’en tenait à u
1975
r lui, il n’était pas question par des acrobaties
de
langage ou de logique, d’arriver à synthétiser tout, de manière que l
1976
ait pas question par des acrobaties de langage ou
de
logique, d’arriver à synthétiser tout, de manière que la machine cont
1977
tion par des acrobaties de langage ou de logique,
d’
arriver à synthétiser tout, de manière que la machine continue à roule
1978
gage ou de logique, d’arriver à synthétiser tout,
de
manière que la machine continue à rouler indéfiniment de révolution e
1979
ère que la machine continue à rouler indéfiniment
de
révolution en révolution. Pour lui, la réalité était antithétique, an
1980
rnaire, thèse-antithèse-synthèse ; elle est faite
d’
une pluralité d’éléments irréductibles l’un à l’autre, antagonistes, e
1981
tithèse-synthèse ; elle est faite d’une pluralité
d’
éléments irréductibles l’un à l’autre, antagonistes, et c’est de la co
1982
éductibles l’un à l’autre, antagonistes, et c’est
de
la contradiction de ces éléments que résultent la vie et le mouvement
1983
autre, antagonistes, et c’est de la contradiction
de
ces éléments que résultent la vie et le mouvement de l’univers. 9 nov
1984
ces éléments que résultent la vie et le mouvement
de
l’univers. 9 novembre 1970 Les falsifications coïncident avec les déb
1985
970 Les falsifications coïncident avec les débuts
de
l’histoire comme science, au xixe siècle, en même temps que l’enseig
1986
seignement étatique dans les écoles : les manuels
d’
histoire fournissent quantité d’exemples. Le principe de ces falsifica
1987
les : les manuels d’histoire fournissent quantité
d’
exemples. Le principe de ces falsifications repose sur le fait qu’on s
1988
oire fournissent quantité d’exemples. Le principe
de
ces falsifications repose sur le fait qu’on s’est mis à interpréter l
1989
is à interpréter le passé en termes anachroniques
de
projection des nations telles qu’elles étaient devenues au xixe sièc
1990
encore été conquis par les Français. On oubliait
de
dire que la nation n’avait pas toujours existé sous la forme qu’elle
1991
s nations modernes. On était, par exemple, obligé
de
dire que certaines parties de la France actuelle n’avaient pas toujou
1992
par exemple, obligé de dire que certaines parties
de
la France actuelle n’avaient pas toujours été françaises ; mais on se
1993
C’est la méthode appelée l’essentialisme : sorte
d’
idée platonicienne des nations, telles qu’elles devaient devenir pour
1994
que l’Italie s’unisse, etc. On y voyait une sorte
d’
intention providentielle, qui aurait animé les hommes d’action de l’ép
1995
ntion providentielle, qui aurait animé les hommes
d’
action de l’époque et orienté leurs actions dans le sens de l’unificat
1996
videntielle, qui aurait animé les hommes d’action
de
l’époque et orienté leurs actions dans le sens de l’unification inévi
1997
de l’époque et orienté leurs actions dans le sens
de
l’unification inévitable. 9 novembre 1970 « La France ne peut être la
1998
ette phrase définit tout l’esprit qui a été celui
de
la politique étrangère du général de Gaulle de 1958 à 1969, avec les
1999
ui de la politique étrangère du général de Gaulle
de
1958 à 1969, avec les conséquences considérables que l’on sait pour l
2000
our l’Europe, notamment le ralentissement complet
de
la construction européenne. Personnification de la France, puis divin
2001
t de la construction européenne. Personnification
de
la France, puis divinisation (comparaison avec la Madone, mère de Die
2002
sables des bêtises que le pays a pu faire. L’idée
de
la patrie est intacte, immortelle, inaccessible. C’est le comble de l
2003
ntacte, immortelle, inaccessible. C’est le comble
de
l’enseignement de l’histoire par la méthode essentialiste. L’Allemagn
2004
, inaccessible. C’est le comble de l’enseignement
de
l’histoire par la méthode essentialiste. L’Allemagne a dit la même ch
2005
nt supérieurs à tous les autres. 17 décembre 1976
De
la notion d’association libre, de la notion de souveraineté territori
2006
à tous les autres. 17 décembre 1976 De la notion
d’
association libre, de la notion de souveraineté territoriale correspon
2007
7 décembre 1976 De la notion d’association libre,
de
la notion de souveraineté territoriale correspondant à une associatio
2008
76 De la notion d’association libre, de la notion
de
souveraineté territoriale correspondant à une association, et de la n
2009
territoriale correspondant à une association, et
de
la notion de liberté, ont résulté au cours des siècles — mettons le i
2010
correspondant à une association, et de la notion
de
liberté, ont résulté au cours des siècles — mettons le ive , ve sièc
2011
iècle et le milieu du Moyen Âge — toute une série
de
réalités sociales que nous connaissons bien aujourd’hui ; les unes ét
2012
r pendant le début du Moyen Âge, les corporations
de
métiers, et finalement la féodalité, qui est sortie de là. La féodali
2013
tiers, et finalement la féodalité, qui est sortie
de
là. La féodalité, c’est-à-dire l’ensemble des liens personnels. Mais
2014
urd’hui au fédéralisme, c’est-à-dire la formation
de
l’État national, au sens moderne, et la combinaison stricte d’une eth
2015
ional, au sens moderne, et la combinaison stricte
d’
une ethnie et d’un territoire, d’une tribu primitive et d’institutions
2016
oderne, et la combinaison stricte d’une ethnie et
d’
un territoire, d’une tribu primitive et d’institutions objectives. D’u
2017
binaison stricte d’une ethnie et d’un territoire,
d’
une tribu primitive et d’institutions objectives. D’une part donc, on
2018
hnie et d’un territoire, d’une tribu primitive et
d’
institutions objectives. D’une part donc, on peut dire que les Germain
2019
peut dire que les Germains apportent les valeurs
de
base du fédéralisme, d’autre part, ils apportent quelque chose qui se
2020
portent quelque chose qui sera l’ennemi numéro un
de
tout fédéralisme. 14 janvier 1972 Le moment révolutionnaire du christ
2021
volutionnaire du christianisme n’est qu’un aspect
de
l’influence de l’Évangile et des communautés chrétiennes primitives s
2022
u christianisme n’est qu’un aspect de l’influence
de
l’Évangile et des communautés chrétiennes primitives sur la civilisat
2023
itable, sera aspect institutionnel. L’Église naît
de
la Rome impériale. Elle en revêt les structures, en revendique l’auto
2024
utorité. L’Église est du côté de ce qui dure, non
de
ce qui change ; organe de tradition, non d’innovation, de stabilité,
2025
ôté de ce qui dure, non de ce qui change ; organe
de
tradition, non d’innovation, de stabilité, non de finalité. Celle-ci
2026
, non de ce qui change ; organe de tradition, non
d’
innovation, de stabilité, non de finalité. Celle-ci n’est jamais absen
2027
i change ; organe de tradition, non d’innovation,
de
stabilité, non de finalité. Celle-ci n’est jamais absente, certes, ma
2028
de tradition, non d’innovation, de stabilité, non
de
finalité. Celle-ci n’est jamais absente, certes, mais tend à devenir
2029
perpétuellement reportée, sortie du temps concret
de
l’histoire, projetée dans le temps mythique du retour éternel, de l’o
2030
rojetée dans le temps mythique du retour éternel,
de
l’ordo mundi, ordre du monde. 20 mai 1966 On dit souvent qu’il a fall
2031
pas faire une fédération et arriver à cette chute
de
leur première Ligue en 1798, puis à ces anarchies dites de la Restaur
2032
remière Ligue en 1798, puis à ces anarchies dites
de
la Restauration ; ensuite il leur a fallu neuf mois pour se fédérer.
2033
s éditeurs : « Il existe deux approches linéaires
de
l’histoire. L’une, abstraite, élimine le rôle de l’homme et les contr
2034
de l’histoire. L’une, abstraite, élimine le rôle
de
l’homme et les contradictions du réel au profit d’une synthèse logiqu
2035
e l’homme et les contradictions du réel au profit
d’
une synthèse logique et mécanique : c’est celle de Hegel et de Marx. L
2036
d’une synthèse logique et mécanique : c’est celle
de
Hegel et de Marx. L’histoire, ainsi conçue, est la réalisation progre
2037
se logique et mécanique : c’est celle de Hegel et
de
Marx. L’histoire, ainsi conçue, est la réalisation progressive d’une
2038
ire, ainsi conçue, est la réalisation progressive
d’
une idée d’essence supérieure, telle que la nation. L’autre approche,
2039
conçue, est la réalisation progressive d’une idée
d’
essence supérieure, telle que la nation. L’autre approche, celle de Pr
2040
ure, telle que la nation. L’autre approche, celle
de
Proudhon par exemple, refuse la synthèse et voit dans la contradictio
2041
dans la contradiction toujours ouverte, le moteur
de
la vie et du mouvement. Les livres d’histoire nationale projettent su
2042
, le moteur de la vie et du mouvement. Les livres
d’
histoire nationale projettent sur les réalités passées (qui lui sont b
2043
ait été autrement. C’est ainsi qu’on peut parler
de
frontières “naturelles” qui n’ont de naturel que la valeur mythique q
2044
peut parler de frontières “naturelles” qui n’ont
de
naturel que la valeur mythique qu’on leur accorde au service de l’idé
2045
la valeur mythique qu’on leur accorde au service
de
l’idée d’une “nation” éternelle. À l’inverse, il faut considérer que
2046
mythique qu’on leur accorde au service de l’idée
d’
une “nation” éternelle. À l’inverse, il faut considérer que l’homme es
2047
erse, il faut considérer que l’homme est créateur
de
son histoire, qu’il n’est pas soumis à des “lois” historiques ou des
2048
liberté. La tradition est l’institutionnalisation
d’
un ordre de valeurs, tandis que la révolution est la remise en cause d
2049
tradition est l’institutionnalisation d’un ordre
de
valeurs, tandis que la révolution est la remise en cause de toutes le
2050
, tandis que la révolution est la remise en cause
de
toutes les valeurs, une façon radicalement nouvelle de voir les chose
2051
utes les valeurs, une façon radicalement nouvelle
de
voir les choses. De cette manière, le fédéralisme est révolutionnaire
2052
e façon radicalement nouvelle de voir les choses.
De
cette manière, le fédéralisme est révolutionnaire par rapport à l’ord
2053
et les visions qui en procèdent, qu’elles soient
de
“gauche” ou de “droite”, capitalistes ou communistes. »
2054
qui en procèdent, qu’elles soient de “gauche” ou
de
“droite”, capitalistes ou communistes. »
2055
est libre, peut vraiment aimer, être responsable
d’
aimer son prochain. Ceci jouera un très grand rôle dans toutes les loi
2056
ns toutes les lois ensuite, dans toute l’histoire
de
l’Occident, où on dira que si un homme est reconnu irresponsable, il
2057
u irresponsable, il ne peut être condamné pour un
de
ses actes. Il faut qu’il l’ait commis librement pour être responsable
2058
non pas qui s’opposent. 21 novembre 1969 La santé
de
l’individu, c’est qu’à la liberté qu’il prend en sortant de la tribu
2059
idu, c’est qu’à la liberté qu’il prend en sortant
de
la tribu correspondent des responsabilités qu’il reçoit dans la cité.
2060
esponsabilités. Il n’est pas vraiment responsable
de
ce qu’il fait s’il ne le fait pas librement. Il faut voir liberté et
2061
eux pôles qui représentent la tension du citoyen,
de
l’individu sain. À partir de là, on peut imaginer toute une dialectiq
2062
p fort, la liberté disparaît, et on a cette sorte
de
cité que l’on appelle aujourd’hui la fourmilière, la cité des robots,
2063
ts, où tout est complètement réglé. Il n’y a plus
de
tension entre l’individu et la communauté. À l’autre extrême, si le p
2064
t complètement détaché et ne peut plus rien faire
de
sa liberté, c’est le stade de l’anarchie. La cité en santé est un bon
2065
eut plus rien faire de sa liberté, c’est le stade
de
l’anarchie. La cité en santé est un bon équilibre en tension entre li
2066
coure son risque, devienne non plus l’instrument
d’
une action collective, mais le vrai sujet de son action (au sens philo
2067
ument d’une action collective, mais le vrai sujet
de
son action (au sens philosophique), l’agent libre de son propre desti
2068
son action (au sens philosophique), l’agent libre
de
son propre destin. Vouloir la liberté n’est qu’une phrase démagogique
2069
uloir des hommes libres, donc des hommes capables
de
choisir d’une manière nécessairement imprévisible — c’est eux qui cho
2070
ommes libres, donc des hommes capables de choisir
d’
une manière nécessairement imprévisible — c’est eux qui choisiront, et
2071
est eux qui choisiront, et pas l’État pour eux —,
d’
une manière qui peut être mauvaise pour les intérêts de la cité, de la
2072
manière qui peut être mauvaise pour les intérêts
de
la cité, de la nation, ou de l’État : ce risque, ce danger, doit être
2073
peut être mauvaise pour les intérêts de la cité,
de
la nation, ou de l’État : ce risque, ce danger, doit être admis d’ava
2074
se pour les intérêts de la cité, de la nation, ou
de
l’État : ce risque, ce danger, doit être admis d’avance ; donc des ho
2075
de l’État : ce risque, ce danger, doit être admis
d’
avance ; donc des hommes créateurs de conflits virtuels dans la sociét
2076
t être admis d’avance ; donc des hommes créateurs
de
conflits virtuels dans la société, et qui sont eux-mêmes le siège de
2077
s dans la société, et qui sont eux-mêmes le siège
de
conflits. En effet, pour être libre, l’homme doit être responsable. S
2078
la preuve. 29 octobre 1965 Il ne peut pas y avoir
de
participation civique ou fédérale s’il n’y a pas d’autonomie, soit pe
2079
participation civique ou fédérale s’il n’y a pas
d’
autonomie, soit personnelle, soit de la cité, de la petite patrie ; po
2080
’il n’y a pas d’autonomie, soit personnelle, soit
de
la cité, de la petite patrie ; pour la même raison qu’on ne peut pas
2081
s d’autonomie, soit personnelle, soit de la cité,
de
la petite patrie ; pour la même raison qu’on ne peut pas être respons
2082
choses les plus communes et les plus importantes
de
la vie allaient de soi, c’est-à-dire ne posaient pas de problèmes fon
2083
vie allaient de soi, c’est-à-dire ne posaient pas
de
problèmes fondamentaux, angoissants. Mais avec l’avènement de la civi
2084
fondamentaux, angoissants. Mais avec l’avènement
de
la civilisation industrielle, la consommation, l’abondance, la dissoc
2085
la dissociation des liens familiaux, des coutumes
de
classe, des traditions religieuses dans la vie sociale, la démocratis
2086
oix libre dans la plupart des domaines importants
de
la vie. 9 février 1968 C’est à nous, c’est-à-dire que c’est à tous et
2087
à nous, c’est-à-dire que c’est à tous et à chacun
d’
assumer notre rôle libre et responsable et de choisir concrètement ent
2088
acun d’assumer notre rôle libre et responsable et
de
choisir concrètement entre les finalités antinomiques que nous poursu
2089
théorie. C’est ce que j’appelle le grand dilemme
d’
aujourd’hui, le grand dilemme auquel aucune des recettes valables pour
2090
es recettes valables pour tous les autres risques
de
la liberté n’est applicable. C’est toujours le même, mais qui se pose
2091
des termes un peu différents, toujours par paires
d’
antinomies. Par exemple : exploiter à mort la nature ou conclure un no
2092
te, un nouveau concordat avec elle. Voilà le type
de
ce grand dilemme. Ou bien produire toujours plus ou vivre mieux, c’es
2093
améliorer le mode de vie qualitatif. Autre forme
de
dilemme : augmenter les richesses ou bien chercher plus de sens à la
2094
e : augmenter les richesses ou bien chercher plus
de
sens à la vie. Ou encore : vouloir la puissance de l’État-nation ou l
2095
e sens à la vie. Ou encore : vouloir la puissance
de
l’État-nation ou la fécondité des échanges. Réunir toutes les conditi
2096
ondité des échanges. Réunir toutes les conditions
d’
hégémonie pour un État-nation ou essayer de se rendre utile, voire ind
2097
itions d’hégémonie pour un État-nation ou essayer
de
se rendre utile, voire indispensable aux voisins. Se préparer à gagne
2098
peut être uniformisé à l’intérieur des frontières
d’
un pays ou au contraire unir les diversités, donc, broyer toutes les d
2099
a puissance ou choisir la liberté. 2. Autorité
de
l’État et liberté 13 décembre 1968 La réaction romaine de plus en
2100
plus typique à mesure qu’on va vers la décadence
de
l’Empire, c’est d’invoquer « la majesté de l’État » contre la réalité
2101
ure qu’on va vers la décadence de l’Empire, c’est
d’
invoquer « la majesté de l’État » contre la réalité des problèmes, c’e
2102
e l’État » contre la réalité des problèmes, c’est
de
recourir à l’autorité contre la libre discussion des pour et des cont
2103
seul coup le grand effort entrepris par les rois
de
France à partir de Philippe le Bel, et surtout sous Louis XI et Louis
2104
ent été gênés par la parole qu’ils avaient donnée
de
respecter les chartes de franchises, « la Révolution va tout balayer
2105
le qu’ils avaient donnée de respecter les chartes
de
franchises, « la Révolution va tout balayer d’un seul coup » comme l’
2106
6 En Europe, nous devrions tenir compte à la fois
de
la liberté et de l’autorité. Nous sommes très souvent, en réalité, un
2107
devrions tenir compte à la fois de la liberté et
de
l’autorité. Nous sommes très souvent, en réalité, un mauvais mélange
2108
mmes très souvent, en réalité, un mauvais mélange
d’
éléments autoritaires et libertaires, jusqu’à en être anarchiques. Nos
2109
res, jusqu’à en être anarchiques. Nos démocraties
de
l’Ouest peuvent être décrites comme un mélange d’anarchie dans certai
2110
de l’Ouest peuvent être décrites comme un mélange
d’
anarchie dans certains domaines et de tyrannie dans d’autres. La voie
2111
e un mélange d’anarchie dans certains domaines et
de
tyrannie dans d’autres. La voie idéale que devrait poursuivre l’Europ
2112
re l’Europe serait une mise en tension productive
de
l’autorité et de la liberté. h. Avec l’introduction suivante des é
2113
t une mise en tension productive de l’autorité et
de
la liberté. h. Avec l’introduction suivante des éditeurs : « Voulo
2114
abstraite, c’est vouloir que l’homme soit l’agent
de
son propre destin. Ce n’est pas un pur désir utopique, mais bien une
2115
sité à notre époque où — à l’inverse des sociétés
d’
hier dans lesquelles le comportement était dicté par les valeurs, les
2116
trouve désormais en mesure, et donc en position,
de
choisir ce que sera sa vie. Cela pose, au niveau individuel et au niv
2117
au individuel et au niveau collectif, un problème
de
finalités à travers nos actes les plus quotidiens. Ce que nous faison
2118
puissance (c’est-à-dire l’organisation militaire
de
l’État-nation, la compétition pour la croissance économique à la rech
2119
B le plus élevé) ou la liberté (modèle alternatif
de
la fédération au niveau politique, et de l’écologie au niveau économi
2120
ternatif de la fédération au niveau politique, et
de
l’écologie au niveau économique) ? Le problème, c’est qu’il n’y a pas
2121
économique) ? Le problème, c’est qu’il n’y a pas
de
liberté, autre qu’illusoire et par là même dangereuse, sans responsab
2122
xcluent ni ne s’abolissent en concept synthétique
d’
essence supérieure. Il faut composer entre ces deux extrêmes que sont
2123
ne doit pas être absolutisée, qu’elle doit aller
de
pair avec une participation du citoyen dans la cité, et des cités dan
2124
onc le fédéralisme, à la fois garant des libertés
de
chacun et fondé sur l’engagement de tous. L’État-nation promet la Lib
2125
des libertés de chacun et fondé sur l’engagement
de
tous. L’État-nation promet la Liberté, mais une Liberté abstraite qui
2126
iberté, mais une Liberté abstraite qui lui permet
d’
éliminer les libertés réelles au nom de ce principe (comme la Révoluti
2127
ui compte, en dernière instance, c’est l’autorité
de
l’État plutôt que les libertés des citoyens. Les démocraties occident
2128
bertés des citoyens. Les démocraties occidentales
d’
aujourd’hui oscillent entre les deux pôles contraires mais irréductibl
2129
contraires mais irréductibles que sont l’autorité
de
l’État et la liberté concrète de chacun. Ainsi, elles se situent entr
2130
sont l’autorité de l’État et la liberté concrète
de
chacun. Ainsi, elles se situent entre la tyrannie (autorité sans répl
2131
. Elle doit être préservée, contre toute tendance
d’
en éliminer un des deux termes ou de les confondre dans la recherche d
2132
oute tendance d’en éliminer un des deux termes ou
de
les confondre dans la recherche d’une illusoire synthèse, par un syst
2133
deux termes ou de les confondre dans la recherche
d’
une illusoire synthèse, par un système fédéraliste où l’autorité de l’
2134
ynthèse, par un système fédéraliste où l’autorité
de
l’État a précisément pour but de garantir les libertés des personnes
2135
te où l’autorité de l’État a précisément pour but
de
garantir les libertés des personnes et des communautés. »
2136
Moyens et finsi 1. Problèmes
de
la liberté de choisir son destin 7 novembre 1969 La crise actuelle
2137
Moyens et finsi 1. Problèmes de la liberté
de
choisir son destin 7 novembre 1969 La crise actuelle nous amène à
2138
ène à poser pour la première fois dans l’histoire
de
l’humanité les questions fondamentales de la destinée du genre humain
2139
istoire de l’humanité les questions fondamentales
de
la destinée du genre humain. Quel genre de communautés faut-il créer
2140
ntales de la destinée du genre humain. Quel genre
de
communautés faut-il créer ? sur quel type d’homme les fonder ? selon
2141
enre de communautés faut-il créer ? sur quel type
d’
homme les fonder ? selon quelles valeurs régler ces communautés, leur
2142
our quelle fin ultime les faire marcher ? Ce sont
d’
énormes questions, qui caractérisent le paradoxe fondamental de l’évol
2143
stions, qui caractérisent le paradoxe fondamental
de
l’évolution de notre temps : pour la première fois dans toute l’histo
2144
actérisent le paradoxe fondamental de l’évolution
de
notre temps : pour la première fois dans toute l’histoire — depuis qu
2145
depuis que l’humanité a pris une vague conscience
d’
elle-même —, les hommes se voient contraints de choisir leur avenir, d
2146
ce d’elle-même —, les hommes se voient contraints
de
choisir leur avenir, de choisir l’avenir de l’espèce humaine, et voil
2147
mmes se voient contraints de choisir leur avenir,
de
choisir l’avenir de l’espèce humaine, et voilà le paradoxe : pour la
2148
aints de choisir leur avenir, de choisir l’avenir
de
l’espèce humaine, et voilà le paradoxe : pour la première fois dans l
2149
e fois dans l’histoire, l’humanité est contrainte
de
choisir librement son avenir. 26 novembre 1971 Autrefois, tout était
2150
ir. 26 novembre 1971 Autrefois, tout était tracé
d’
avance. Hier, un nouveau code de déterminismes commençait à se dessine
2151
tout était tracé d’avance. Hier, un nouveau code
de
déterminismes commençait à se dessiner, prenant le relais des contrai
2152
raintes coutumières : la majorité des jeunes gens
de
ma génération me paraissent avoir choisi le métier qui était à la foi
2153
si le métier qui était à la fois le moins éloigné
de
leurs goûts (dans la mesure où ils avaient la chance de les connaître
2154
rs goûts (dans la mesure où ils avaient la chance
de
les connaître) et le plus près de leur idée d’une carrière intéressan
2155
ce de les connaître) et le plus près de leur idée
d’
une carrière intéressante, au sens financier de l’adjectif. Aujourd’hu
2156
ée d’une carrière intéressante, au sens financier
de
l’adjectif. Aujourd’hui, quelque chose de nouveau s’est produit. Au l
2157
nt au Moyen Âge, au lieu des goûts individuels et
de
la soif de profit matériel libérés par la Renaissance, qui dominaient
2158
Âge, au lieu des goûts individuels et de la soif
de
profit matériel libérés par la Renaissance, qui dominaient hier encor
2159
sance, qui dominaient hier encore le comportement
de
la plupart des Occidentaux, je vois paraître une motivation aussi dif
2160
je vois paraître une motivation aussi différente
de
la coutume que du profit : celle du sens de ma vie, du sens de la soc
2161
rente de la coutume que du profit : celle du sens
de
ma vie, du sens de la société, et du sens de ma participation — ou no
2162
que du profit : celle du sens de ma vie, du sens
de
la société, et du sens de ma participation — ou non — à cette société
2163
sens de ma vie, du sens de la société, et du sens
de
ma participation — ou non — à cette société. Mais cela pose de grande
2164
pation — ou non — à cette société. Mais cela pose
de
grandes et graves questions. Prenons l’exemple de l’ingénieur. Hier,
2165
de grandes et graves questions. Prenons l’exemple
de
l’ingénieur. Hier, il était ingénieur pour produire, pour bâtir et or
2166
ominer la nature et l’exploiter au maximum en vue
d’
une prospérité matérielle toujours croissante. Aujourd’hui, il constat
2167
te. Aujourd’hui, il constate que la nature risque
de
succomber à l’industrie qui la pille sans le moindre scrupule, puis l
2168
’empoisonne par le moyen des produits transformés
de
ce pillage. Et l’idée se fait jour en lui que ce n’est plus aux seuls
2169
jour en lui que ce n’est plus aux seuls « besoins
de
l’économie » qu’il s’agit désormais de répondre (ils ne sont trop sou
2170
« besoins de l’économie » qu’il s’agit désormais
de
répondre (ils ne sont trop souvent que le profit des firmes et de leu
2171
ne sont trop souvent que le profit des firmes et
de
leurs actionnaires), mais plutôt aux besoins de la société humaine, d
2172
t de leurs actionnaires), mais plutôt aux besoins
de
la société humaine, de la communauté humaine sous toutes ses formes :
2173
), mais plutôt aux besoins de la société humaine,
de
la communauté humaine sous toutes ses formes : municipale, régionale,
2174
erspectives combien plus vastes et significatives
de
la cité, de la nature, et de la nécessité vitale désormais de nouer e
2175
combien plus vastes et significatives de la cité,
de
la nature, et de la nécessité vitale désormais de nouer entre elles u
2176
es et significatives de la cité, de la nature, et
de
la nécessité vitale désormais de nouer entre elles un nouveau pacte.
2177
de la nature, et de la nécessité vitale désormais
de
nouer entre elles un nouveau pacte. 26 juin 1970 C’est le succès cont
2178
ent aux hommes le nécessaire vital, et permettent
d’
attendre un développement continu, à l’infini, l’homme se voit libéré
2179
ement continu, à l’infini, l’homme se voit libéré
de
la nécessité pure, il se voit capable de choisir l’avenir de sa civil
2180
t libéré de la nécessité pure, il se voit capable
de
choisir l’avenir de sa civilisation, les buts de cette civilisation.
2181
sité pure, il se voit capable de choisir l’avenir
de
sa civilisation, les buts de cette civilisation. Jusqu’ici, l’effort
2182
de choisir l’avenir de sa civilisation, les buts
de
cette civilisation. Jusqu’ici, l’effort absorbait le plus clair des é
2183
acun fonçait droit devant soi en pensant : il y a
de
la place et des ressources pour tous… On se laissait entraîner sans r
2184
, à la nature qui arrangerait tout… Or, une série
de
choix s’impose aujourd’hui de la manière la plus concrète et urgente
2185
tout… Or, une série de choix s’impose aujourd’hui
de
la manière la plus concrète et urgente : puissance ou liberté ? progr
2186
itatif ? croissance ou équilibre ? PNB ou qualité
de
vie ? etc. Et nous voyons bien que les premiers termes sont collectif
2187
que tout était réglé par la société, la question
de
ses fins dernières était rarement posée ; on n’en prenait pas nécessa
2188
t est libre, mais tout devient problème, occasion
de
doute, d’anxiété. Tout oblige à avoir conscience de ce qu’on veut en
2189
e, mais tout devient problème, occasion de doute,
d’
anxiété. Tout oblige à avoir conscience de ce qu’on veut en fin de com
2190
doute, d’anxiété. Tout oblige à avoir conscience
de
ce qu’on veut en fin de compte, c’est-à-dire de ce qu’on veut avoir c
2191
e de ce qu’on veut en fin de compte, c’est-à-dire
de
ce qu’on veut avoir comme politique ! C’est cela, la liberté. Et cela
2192
a liberté. Et cela pèse ! Et on comprend que tant
d’
hommes aujourd’hui la fuient, devant les risques et les obligations qu
2193
ation, les doutes devant un étalage trop abondant
d’
objets ou de produits), ou les divers conformismes moraux ou politique
2194
outes devant un étalage trop abondant d’objets ou
de
produits), ou les divers conformismes moraux ou politiques qu’on bapt
2195
s moraux ou politiques qu’on baptise « discipline
de
parti » ou « sens de l’histoire », et qui donnent au jeune homme ou à
2196
s qu’on baptise « discipline de parti » ou « sens
de
l’histoire », et qui donnent au jeune homme ou à la jeune fille l’imp
2197
rs qu’il n’est qu’embrigadé, qu’il s’est déchargé
de
la peine de réfléchir et de choisir sur le parti ou la mode, ou même,
2198
st qu’embrigadé, qu’il s’est déchargé de la peine
de
réfléchir et de choisir sur le parti ou la mode, ou même, dans le mei
2199
qu’il s’est déchargé de la peine de réfléchir et
de
choisir sur le parti ou la mode, ou même, dans le meilleur des cas, s
2200
même, dans le meilleur des cas, sur un directeur
de
conscience laïque, chef de cellule ou chef de gang, chef de parti ou
2201
cas, sur un directeur de conscience laïque, chef
de
cellule ou chef de gang, chef de parti ou dictateur. Modes, publicité
2202
eur de conscience laïque, chef de cellule ou chef
de
gang, chef de parti ou dictateur. Modes, publicités, conformismes, di
2203
nce laïque, chef de cellule ou chef de gang, chef
de
parti ou dictateur. Modes, publicités, conformismes, disciplines de p
2204
eur. Modes, publicités, conformismes, disciplines
de
parti, chauvinismes, fanatismes de jeunesses fascistes ou nazies, ou
2205
s, disciplines de parti, chauvinismes, fanatismes
de
jeunesses fascistes ou nazies, ou communistes, ou phalangistes, ou ga
2206
istes, ou phalangistes, ou gardes rouges : autant
de
remèdes contre la liberté, autant de fuites devant la liberté et le v
2207
ges : autant de remèdes contre la liberté, autant
de
fuites devant la liberté et le vertige, et devant les questions derni
2208
es finalités assumées. 5 novembre 1971 La formule
de
toute hypocrisie sociale, c’est la négation, le refoulement des final
2209
se pas réellement. 11 novembre 1966 Le seul moyen
d’
évaluer, d’apprécier, de critiquer en connaissance de cause un régime
2210
lement. 11 novembre 1966 Le seul moyen d’évaluer,
d’
apprécier, de critiquer en connaissance de cause un régime et, plus gé
2211
vembre 1966 Le seul moyen d’évaluer, d’apprécier,
de
critiquer en connaissance de cause un régime et, plus généralement, u
2212
t, plus généralement, une politique donnée, c’est
de
savoir d’abord quels étaient ou quels sont ses buts humains — sont-il
2213
ls bons ou mauvais en tant que tels ? — et après,
de
se poser la question de l’efficacité de la politique proposée, c’est-
2214
nt que tels ? — et après, de se poser la question
de
l’efficacité de la politique proposée, c’est-à-dire de comparer les r
2215
et après, de se poser la question de l’efficacité
de
la politique proposée, c’est-à-dire de comparer les réalisations effe
2216
efficacité de la politique proposée, c’est-à-dire
de
comparer les réalisations effectuées aux buts déclarés ou réels de ce
2217
éalisations effectuées aux buts déclarés ou réels
de
cette politique. 3 décembre 1971 Il y a les finalités réelles et les
2218
olitiques ce qu’on pourrait appeler les mensonges
de
routine : expliquer pourquoi il n’y aura pas de dévaluation deux jour
2219
s de routine : expliquer pourquoi il n’y aura pas
de
dévaluation deux jours avant qu’on la fasse, et expliquer une semaine
2220
mer, si on déclare la guerre, que c’est par amour
de
la paix, hélas unilatéral. Ou quand on refuse une augmentation de sal
2221
s unilatéral. Ou quand on refuse une augmentation
de
salaire dans une branche de l’industrie, que c’est par impossibilité
2222
fuse une augmentation de salaire dans une branche
de
l’industrie, que c’est par impossibilité matérielle — pourtant on fin
2223
ités. La plupart ne déclarent que ce qu’on attend
d’
eux, dans les masses du pays, au parlement, ou dans les chancelleries
2224
du pays, au parlement, ou dans les chancelleries
de
l’étranger. Les finalités réelles ne se manifestent d’une manière cer
2225
étranger. Les finalités réelles ne se manifestent
d’
une manière certaine et vérifiable qu’à l’occasion de la cérémonie ann
2226
ne manière certaine et vérifiable qu’à l’occasion
de
la cérémonie annuelle qui justifie les conseils de direction et les p
2227
e la cérémonie annuelle qui justifie les conseils
de
direction et les parlements dont elle était, à l’origine, la principa
2228
udget. Car le budget est la traduction financière
d’
une politique, c’est-à-dire la manière dont on entend ordonner les moy
2229
si on apprend à les lire. Pour cela, le principe
de
base, c’est de croire les chiffres plutôt que les justifications de c
2230
à les lire. Pour cela, le principe de base, c’est
de
croire les chiffres plutôt que les justifications de ces chiffres. Pa
2231
croire les chiffres plutôt que les justifications
de
ces chiffres. Par exemple, quand on dit : la commune de x n’a pas aut
2232
chiffres. Par exemple, quand on dit : la commune
de
x n’a pas autant de moyens financiers que la petite commune de y pour
2233
le, quand on dit : la commune de x n’a pas autant
de
moyens financiers que la petite commune de y pour l’hygiène mentale d
2234
autant de moyens financiers que la petite commune
de
y pour l’hygiène mentale des enfants des écoles, on dit en réalité :
2235
nfants des écoles, on dit en réalité : la commune
de
x, quoique plus riche que celle de y, n’a pas les mêmes objectifs ou
2236
é : la commune de x, quoique plus riche que celle
de
y, n’a pas les mêmes objectifs ou doit tenir compte d’autres problème
2237
autres problèmes jugés plus importants. On essaie
de
faire croire que la politique que l’on adopte est « dictée par le bud
2238
question pure, béante, qui ne se posait du temps
de
ma jeunesse qu’à quelques-uns, et qui a subitement éclaté dans les un
2239
, et qui a subitement éclaté dans les universités
de
tout l’Occident et dans les rues de toutes nos grandes villes au mois
2240
s universités de tout l’Occident et dans les rues
de
toutes nos grandes villes au mois de mai 1968 : Que faisons-nous là ?
2241
ans les rues de toutes nos grandes villes au mois
de
mai 1968 : Que faisons-nous là ? Quel est le sens de cette société, q
2242
mai 1968 : Que faisons-nous là ? Quel est le sens
de
cette société, quel est le sens de ma vie dans cette société qui n’en
2243
el est le sens de cette société, quel est le sens
de
ma vie dans cette société qui n’en est pas une, qui n’est pas une com
2244
es, aux techniciens, aux urbanistes qu’il incombe
de
chercher et de trouver d’urgence les moyens de restaurer ce qui fut c
2245
iens, aux urbanistes qu’il incombe de chercher et
de
trouver d’urgence les moyens de restaurer ce qui fut compromis par le
2246
rbanistes qu’il incombe de chercher et de trouver
d’
urgence les moyens de restaurer ce qui fut compromis par le génie civi
2247
be de chercher et de trouver d’urgence les moyens
de
restaurer ce qui fut compromis par le génie civil et militaire, j’ent
2248
le génie civil et militaire, j’entends les moyens
de
prévenir les désastres sociaux, biologiques et physiques qu’annonce l
2249
exaltante pour l’ingénieur ? Une nouvelle manière
d’
assumer ses droits et ses devoirs civiques et culturels, et de passer
2250
s droits et ses devoirs civiques et culturels, et
de
passer du rôle d’expert non concerné, voire de simple servant d’un sy
2251
voirs civiques et culturels, et de passer du rôle
d’
expert non concerné, voire de simple servant d’un système de profit, a
2252
et de passer du rôle d’expert non concerné, voire
de
simple servant d’un système de profit, au rôle de créateur voisin de
2253
le d’expert non concerné, voire de simple servant
d’
un système de profit, au rôle de créateur voisin de celui de l’artiste
2254
on concerné, voire de simple servant d’un système
de
profit, au rôle de créateur voisin de celui de l’artiste, responsable
2255
de simple servant d’un système de profit, au rôle
de
créateur voisin de celui de l’artiste, responsable d’une cité neuve e
2256
’un système de profit, au rôle de créateur voisin
de
celui de l’artiste, responsable d’une cité neuve et d’un nouveau cont
2257
me de profit, au rôle de créateur voisin de celui
de
l’artiste, responsable d’une cité neuve et d’un nouveau contrat socia
2258
réateur voisin de celui de l’artiste, responsable
d’
une cité neuve et d’un nouveau contrat social ? Au spécialiste « isolé
2259
lui de l’artiste, responsable d’une cité neuve et
d’
un nouveau contrat social ? Au spécialiste « isolé » (comme un fil éle
2260
ouvons et nous devons opposer aujourd’hui un type
d’
homme de technique et de science réintégré dans la communauté, relié à
2261
t nous devons opposer aujourd’hui un type d’homme
de
technique et de science réintégré dans la communauté, relié à l’ensem
2262
poser aujourd’hui un type d’homme de technique et
de
science réintégré dans la communauté, relié à l’ensemble social par l
2263
l’ensemble social par le souci des fins dernières
de
la cité et de la personne dans la communauté. 9 février 1968 Il faut
2264
ial par le souci des fins dernières de la cité et
de
la personne dans la communauté. 9 février 1968 Il faut s’habituer à p
2265
l y a des antinomies, et ne pas essayer follement
d’
éliminer un des deux termes. On n’y arriverait pas. Prenons par exempl
2266
ait pas. Prenons par exemple le profit, la notion
de
profit. Je pense que le vice fondamental et mortel de notre société o
2267
rofit. Je pense que le vice fondamental et mortel
de
notre société occidentale, c’est que tout est réglé en fonction du pr
2268
du profit, que le profit, le recours à la notion
de
profit tranche toujours en dernier ressort. Admettons cela en tout ca
2269
ement éliminé ? qu’il faut y renoncer ? au profit
de
théories des partis de gauche, mettons, et au détriment des capitalis
2270
aut y renoncer ? au profit de théories des partis
de
gauche, mettons, et au détriment des capitalistes ? Eh bien, ce serai
2271
Eh bien, ce serait une vision irréaliste et naïve
de
la société. Dire que la priorité de fait donnée au motif du profit es
2272
iste et naïve de la société. Dire que la priorité
de
fait donnée au motif du profit est la cause des maux les plus graves
2273
f du profit est la cause des maux les plus graves
de
nos sociétés n’équivaut pas du tout à dire qu’il faut supprimer le pr
2274
jusqu’à ces dernières années, au nom du profit ou
de
la rentabilité, et pas de la vie. 12 novembre 1971 Aux problèmes vita
2275
es, au nom du profit ou de la rentabilité, et pas
de
la vie. 12 novembre 1971 Aux problèmes vitaux que posent l’épuisement
2276
1971 Aux problèmes vitaux que posent l’épuisement
de
l’oxygène, la pollution des océans, les barrages fluviaux, s’ajoute c
2277
barrages fluviaux, s’ajoute celui des villes nées
de
l’industrie au xixe siècle et de la technique au xxe siècle. Je cro
2278
des villes nées de l’industrie au xixe siècle et
de
la technique au xxe siècle. Je crois qu’elles nous offrent l’exemple
2279
t l’exemple le plus visible, tangible, plastique,
de
l’absence de finalités communautaires, si caractéristique de notre so
2280
e plus visible, tangible, plastique, de l’absence
de
finalités communautaires, si caractéristique de notre société. Leur c
2281
e de finalités communautaires, si caractéristique
de
notre société. Leur chaos architectural de géométries bêtes ou folles
2282
stique de notre société. Leur chaos architectural
de
géométries bêtes ou folles, leur taille démesurée, leur envahissement
2283
tes, c’est la représentation exacte non seulement
de
l’absence de finalités communes et créatrices de communautés structur
2284
représentation exacte non seulement de l’absence
de
finalités communes et créatrices de communautés structurées, mais de
2285
de l’absence de finalités communes et créatrices
de
communautés structurées, mais de la mise en œuvre, hautement efficace
2286
es et créatrices de communautés structurées, mais
de
la mise en œuvre, hautement efficace cette fois-ci, d’une seule final
2287
mise en œuvre, hautement efficace cette fois-ci,
d’
une seule finalité : le profit à court terme. 3 décembre 1971 C’est le
2288
suit. Voilà le lieu bien délimité, le champ clos
de
la bataille proprement politique. Or, des choix de cet ordre, de plus
2289
e la bataille proprement politique. Or, des choix
de
cet ordre, de plus en plus, nous devrons les faire dans l’industrie.
2290
c’est entendu. La question sera, de plus en plus,
de
savoir si la finalité dernière que l’on sert est un certain équilibre
2291
ou calculé aussi en bonheur, en santé, en qualité
de
vie et en justice sociale ou communautaire. 29 octobre 1971 L’écart e
2292
ser le dire ! — n’a aucune possibilité matérielle
de
rejoindre jamais notre niveau de vie. Pour y arriver, en effet, on a
2293
usqu’à nous : le charbon et le pétrole s’épuisent
d’
une manière calculable. Selon certains experts, même si l’on découvre
2294
n découvre dans les déserts et les mers le double
de
pétrole qu’on exploite aujourd’hui, avec l’augmentation de la populat
2295
e qu’on exploite aujourd’hui, avec l’augmentation
de
la population et de la consommation, tout le pétrole de la terre semb
2296
ourd’hui, avec l’augmentation de la population et
de
la consommation, tout le pétrole de la terre semble devoir être brûlé
2297
population et de la consommation, tout le pétrole
de
la terre semble devoir être brûlé d’ici trente ans. On trouvera autre
2298
L’épuisement des forêts, bien pire : l’épuisement
de
l’eau potable, pire encore : de l’air respirable, de l’oxygène même,
2299
re : l’épuisement de l’eau potable, pire encore :
de
l’air respirable, de l’oxygène même, suite à la mort des forêts et de
2300
l’eau potable, pire encore : de l’air respirable,
de
l’oxygène même, suite à la mort des forêts et des océans, c’est ce qu
2301
êts et des océans, c’est ce qui menace l’ensemble
de
l’humanité. Tout cela peut sembler délirant. Mais tout cela est impit
2302
ues et européens. 3. Fins et moyens au service
de
la personne 23 janvier 1970 Une communauté des personnes n’est pas
2303
970 Une communauté des personnes n’est pas la fin
de
l’homme, mais un moyen pour les personnes de se réaliser. Le but fina
2304
fin de l’homme, mais un moyen pour les personnes
de
se réaliser. Le but final n’est pas une plus grande puissance de la c
2305
Le but final n’est pas une plus grande puissance
de
la communauté, mais une plus grande liberté, une meilleure réalisatio
2306
ne plus grande liberté, une meilleure réalisation
de
chacun. La communauté est donc le lieu de dépassement des égoïsmes in
2307
isation de chacun. La communauté est donc le lieu
de
dépassement des égoïsmes individuels, alors que le nationalisme voudr
2308
e voudrait nous faire croire qu’elle est la somme
de
tous ces égoïsmes additionnés en un super-égoïsme collectif. Finaleme
2309
er-égoïsme collectif. Finalement, il faut répéter
de
la personne ce qu’en disait Kant : la personne, c’est ce qui, dans l’
2310
. Les idéalistes, au contraire, ne s’occupent que
de
la pureté absolue des fins, seuls objets dignes de la réflexion d’un
2311
e la pureté absolue des fins, seuls objets dignes
de
la réflexion d’un guide des hommes ; ils supposent que les moyens ser
2312
lue des fins, seuls objets dignes de la réflexion
d’
un guide des hommes ; ils supposent que les moyens seront donnés et so
2313
yens seront donnés et souvent oublient finalement
d’
en parler. À d’autres de les rechercher. Les points de réalisation dan
2314
uvent oublient finalement d’en parler. À d’autres
de
les rechercher. Les points de réalisation dans l’histoire, il me semb
2315
parler. À d’autres de les rechercher. Les points
de
réalisation dans l’histoire, il me semble, les points où il y a réali
2316
e, il me semble, les points où il y a réalisation
de
quelque chose, se situent toujours à l’intersection de ces deux tenda
2317
elque chose, se situent toujours à l’intersection
de
ces deux tendances, lorsque les fins, les buts, clairement conçus et
2318
s loin dans la critique des utopies et dire ceci,
d’
une manière peut-être paradoxale : la plupart des utopies ont le tort
2319
e paradoxale : la plupart des utopies ont le tort
de
n’être pas assez nouvelles, pas assez neuves. C’est-à-dire qu’elles s
2320
s, qu’elles prolongent simplement quelques traits
de
notre vie actuelle. Or, les changements qui se produiront d’ici vingt
2321
istes. L’histoire réelle fera certainement preuve
de
beaucoup plus d’imagination que le plus grand utopiste d’aujourd’hui.
2322
réelle fera certainement preuve de beaucoup plus
d’
imagination que le plus grand utopiste d’aujourd’hui. L’histoire réell
2323
oup plus d’imagination que le plus grand utopiste
d’
aujourd’hui. L’histoire réelle aura une imagination beaucoup plus fert
2324
urprises, en innovations totalement imprévisibles
de
nos jours, aussi imprévisibles par exemple que la bombe atomique l’ét
2325
es terrifiantes pour détruire presque un quartier
de
ville, ou même encore beaucoup plus imprévisibles que la bombe ne l’é
2326
iques. Mais il y a d’autres conceptions possibles
de
l’utopie, des conceptions qui ne sont pas négatives, qui ne sont pas
2327
plus une évasion devant les conditions pratiques
de
l’action, mais au contraire qui sont des descriptions d’un nouvel ord
2328
tion, mais au contraire qui sont des descriptions
d’
un nouvel ordre à établir, d’une société plus cohérente, mieux ordonné
2329
ont des descriptions d’un nouvel ordre à établir,
d’
une société plus cohérente, mieux ordonnée au bien, c’est-à-dire au ty
2330
nte, mieux ordonnée au bien, c’est-à-dire au type
d’
homme que l’on considère comme idéal, des utopies conçues non pas à pa
2331
comme idéal, des utopies conçues non pas à partir
d’
aujourd’hui, mais à partir de ce but cohérent. Ce sont des description
2332
, c’est-à-dire sur le lieu où tous les événements
de
l’histoire prennent leur source. Il n’y aurait pas d’histoire, s’il n
2333
’histoire prennent leur source. Il n’y aurait pas
d’
histoire, s’il n’y avait pas, à l’origine de ce qu’on appelle l’événem
2334
t pas d’histoire, s’il n’y avait pas, à l’origine
de
ce qu’on appelle l’événement, quelque chose qui se passe dans l’espri
2335
énement, quelque chose qui se passe dans l’esprit
d’
un homme — c’est toujours là que l’histoire commence, tous ces événeme
2336
nements, à l’exception peut-être des tremblements
de
terre. i. Avec l’introduction suivante des éditeurs : « Autrefois,
2337
une corporation, à une classe, par les impératifs
d’
ordre matériel. Actuellement, c’est beaucoup moins le cas dans les soc
2338
p moins le cas dans les sociétés occidentales où,
de
surcroît, l’homme se voit libéré de la nécessité pure, grâce aux prog
2339
identales où, de surcroît, l’homme se voit libéré
de
la nécessité pure, grâce aux progrès de la technologie. Mais cette li
2340
it libéré de la nécessité pure, grâce aux progrès
de
la technologie. Mais cette libération contraint paradoxalement l’huma
2341
tion contraint paradoxalement l’humanité au choix
de
son avenir, au travers de finalités qu’elle doit se découvrir. Cela p
2342
e nouvelle et lancinante question : celle du sens
de
la vie, du sens de la société dans laquelle on vit, du sens de la par
2343
nante question : celle du sens de la vie, du sens
de
la société dans laquelle on vit, du sens de la part de chacun aux cho
2344
t de chacun aux choix qui y sont faits. La notion
de
communauté doit être réhabilitée comme moyen pour la personne de se r
2345
oit être réhabilitée comme moyen pour la personne
de
se réaliser, c’est-à-dire d’atteindre ses buts vis-à-vis d’elle-même
2346
yen pour la personne de se réaliser, c’est-à-dire
d’
atteindre ses buts vis-à-vis d’elle-même et vis-à-vis d’autrui. On voi
2347
iser, c’est-à-dire d’atteindre ses buts vis-à-vis
d’
elle-même et vis-à-vis d’autrui. On voit, ainsi, la nécessité de promo
2348
indre ses buts vis-à-vis d’elle-même et vis-à-vis
d’
autrui. On voit, ainsi, la nécessité de promouvoir l’idée d’un nouveau
2349
vis-à-vis d’autrui. On voit, ainsi, la nécessité
de
promouvoir l’idée d’un nouveau pacte entre l’homme, la cité, la natur
2350
On voit, ainsi, la nécessité de promouvoir l’idée
d’
un nouveau pacte entre l’homme, la cité, la nature. Il conviendrait, p
2351
la cité, la nature. Il conviendrait, par exemple,
de
réinsérer le savant dans la communauté, afin de contrebalancer l’hype
2352
ion actuelle qui ne lui donne plus la possibilité
de
s’interroger sur les finalités que son travail met en jeu. Sans élimi
2353
jeu. Sans éliminer purement et simplement l’idée
de
profit, il faudrait que celui-ci cesse d’être la seule finalité effec
2354
l’idée de profit, il faudrait que celui-ci cesse
d’
être la seule finalité effectivement déterminante : la destruction pro
2355
ivement déterminante : la destruction progressive
de
l’environnement est au cœur de ce problème, tout comme la destruction
2356
uction progressive de l’environnement est au cœur
de
ce problème, tout comme la destruction instantanée qui résulterait de
2357
comme la destruction instantanée qui résulterait
de
la course aux armements. Un régime quel qu’il soit se juge d’après se
2358
dget des États que l’on peut découvrir les ordres
de
priorité réels orientant leur action. Ce sont les finalités effective
2359
vement poursuivies qui déterminent le vrai visage
d’
une politique : loin de se cantonner à la vie politicienne, les choix
2360
les choix politiques sont globalement une affaire
d’
adéquation de moyens et de fins, aussi bien aux niveaux économique, in
2361
itiques sont globalement une affaire d’adéquation
de
moyens et de fins, aussi bien aux niveaux économique, industriel, éne
2362
globalement une affaire d’adéquation de moyens et
de
fins, aussi bien aux niveaux économique, industriel, énergétique, mil
2363
ment, ou recherche-t-on un modèle plus qualitatif
de
croissance ? En fait, on peut discerner deux tendances opposées dans
2364
ent préoccupés des fins sans se donner les moyens
de
les réaliser, tandis que les “réalistes” agiront sans trop se poser l
2365
itable se situe entre les deux : la détermination
de
buts clairs suscitant des moyens appropriés pour les réaliser, telle
2366
iés pour les réaliser, telle serait la définition
de
la meilleure politique. On a souvent qualifié Denis de Rougemont d’ut
2367
litique. On a souvent qualifié Denis de Rougemont
d’
utopiste, et il revendique cette qualité, mais en lui donnant un sens
2368
extrapolation. Pour Denis de Rougemont, ce genre
d’
utopie couramment répandu n’est “pas assez utopique”. L’utopie qu’il r
2369
s du génie occidental 24 avril 1970 Dès l’aube
de
la philosophie occidentale, dans l’une de ces cités d’Ionie où prit n
2370
l’aube de la philosophie occidentale, dans l’une
de
ces cités d’Ionie où prit naissance la dialectique de notre histoire,
2371
philosophie occidentale, dans l’une de ces cités
d’
Ionie où prit naissance la dialectique de notre histoire, Héraclite éc
2372
es cités d’Ionie où prit naissance la dialectique
de
notre histoire, Héraclite écrivait cette phrase décisive, qu’il faut
2373
e décisive, qu’il faut tenir pour la formule même
de
l’unité européenne : « Ce qui s’oppose coopère, et de la lutte des co
2374
’unité européenne : « Ce qui s’oppose coopère, et
de
la lutte des contraires procède la plus belle harmonie. » De ce temps
2375
des contraires procède la plus belle harmonie. »
De
ce temps jusqu’au nôtre, tout concourt à nourrir ce paradoxe qui para
2376
paradoxe qui paraît bien être la loi constitutive
de
notre histoire et le ressort de notre pensée : l’antinomie de l’Un et
2377
loi constitutive de notre histoire et le ressort
de
notre pensée : l’antinomie de l’Un et du Divers, l’unité dans la dive
2378
toire et le ressort de notre pensée : l’antinomie
de
l’Un et du Divers, l’unité dans la diversité, et la coexistence fécon
2379
vrier 1966 L’Occident, dans les meilleurs moments
de
sa tradition intellectuelle, ne cesse d’en appeler à ce qu’on a appel
2380
moments de sa tradition intellectuelle, ne cesse
d’
en appeler à ce qu’on a appelé les « droits imprescriptibles de la per
2381
à ce qu’on a appelé les « droits imprescriptibles
de
la personne humaine » ; c’est une phrase qui revient dans tous les gr
2382
tes les déclarations philosophiques ou politiques
de
base. Comme si, en tout cas en théorie, idéalement, la personne était
2383
étant là pour le service des personnes, le moyen
de
la réalisation des personnes. La personne est donc le but de la socié
2384
sation des personnes. La personne est donc le but
de
la société, pour cette tradition constante européenne qui vient de la
2385
s civiques et politiques. Or, tous ces caractères
de
la personne, ce caractère paradoxal, vous le retrouvez terme à terme
2386
llective. Donc nous avons exactement le même type
de
paradoxe, d’union de deux choses que la logique juge incompatibles. I
2387
c nous avons exactement le même type de paradoxe,
d’
union de deux choses que la logique juge incompatibles. Il y a donc un
2388
vons exactement le même type de paradoxe, d’union
de
deux choses que la logique juge incompatibles. Il y a donc une espèce
2389
ogique juge incompatibles. Il y a donc une espèce
de
rencontre, de convenance essentielle, entre personne et fédéralisme ;
2390
compatibles. Il y a donc une espèce de rencontre,
de
convenance essentielle, entre personne et fédéralisme ; il semble que
2391
onne et fédéralisme ; il semble que la définition
de
l’homme comme personne soit précisément la définition de l’homme qu’i
2392
mme comme personne soit précisément la définition
de
l’homme qu’il faut à un système fédéraliste. 7 novembre 1969 Quand l’
2393
évoir, à avoir sa politique à lui, est née l’idée
de
recherche à tout prix et de progrès. Voilà qui distingue complètement
2394
à lui, est née l’idée de recherche à tout prix et
de
progrès. Voilà qui distingue complètement, dès les origines de notre
2395
oilà qui distingue complètement, dès les origines
de
notre culture, l’Occident de l’Orient. L’esprit oriental est, avant t
2396
nt, dès les origines de notre culture, l’Occident
de
l’Orient. L’esprit oriental est, avant tout, un esprit qui accepte le
2397
qui cherche simplement à s’inscrire dans l’ordre
de
ces lois, et qui n’imagine pas qu’on puisse s’opposer à un ordre pres
2398
ne pas qu’on puisse s’opposer à un ordre prescrit
de
toute éternité : il faut s’incliner sans discussion devant les comman
2399
vec la Grèce, on voit se manifester quelque chose
de
tout à fait nouveau. La révolution grecque consiste, au début, à mett
2400
début, à mettre à la place des mages, des prêtres
de
Sumer, de l’Égypte et de toutes les civilisations asiatiques, une esp
2401
ettre à la place des mages, des prêtres de Sumer,
de
l’Égypte et de toutes les civilisations asiatiques, une espèce d’homm
2402
e des mages, des prêtres de Sumer, de l’Égypte et
de
toutes les civilisations asiatiques, une espèce d’homme nouvelle qu’o
2403
e toutes les civilisations asiatiques, une espèce
d’
homme nouvelle qu’on appellera plus tard le savant, qu’on appelait en
2404
pelait en Grèce le philosophe. 2. La naissance
de
l’individu 14 novembre 1969 On peut dire que « conscience » et « i
2405
du terme. 21 novembre 1969 Imaginons qu’un membre
d’
une tribu se mette à raisonner : il se met à douter, il se demande s’i
2406
il se met à douter, il se demande s’il n’y a pas
de
possibilité que les choses soient autrement, il ne comprend plus ce q
2407
et à vouloir vivre pour lui-même, c’est une façon
d’
échapper à la terreur primitive et sacrée. Il voudrait échapper aux li
2408
oudrait échapper aux liens du groupe, au principe
de
tyrannie qui est très fort dans la tribu. Mais il a aussitôt besoin d
2409
rès fort dans la tribu. Mais il a aussitôt besoin
d’
une nouvelle protection. Et voilà par quoi on rejoint la nécessité de
2410
ection. Et voilà par quoi on rejoint la nécessité
de
la cité. L’homme qui a fui sa tribu doit se regrouper avec d’autres,
2411
egrouper avec d’autres, pour qu’il ait le courage
de
continuer à courir son aventure. La Grèce naît donc de cet arrachemen
2412
ntinuer à courir son aventure. La Grèce naît donc
de
cet arrachement au sacré sombre, elle se détache sur ce fond indistin
2413
ré sombre, elle se détache sur ce fond indistinct
de
tribus qui recouvraient toute l’Asie, le Proche-Orient et une bonne p
2414
oute l’Asie, le Proche-Orient et une bonne partie
de
ce qui deviendra plus tard l’Europe. L’Europe — par la Grèce — sera l
2415
en détacher, après que la civilisation minoenne —
de
Crète — ait été transmise à Mycènes, dans le Péloponnèse. Le mythe de
2416
ransmise à Mycènes, dans le Péloponnèse. Le mythe
de
l’enlèvement d’Europe représente très exactement cette transmission d
2417
es, dans le Péloponnèse. Le mythe de l’enlèvement
d’
Europe représente très exactement cette transmission des valeurs de la
2418
te très exactement cette transmission des valeurs
de
la culture syrienne et égyptienne, qui se concrétise par le développe
2419
gyptienne, qui se concrétise par le développement
de
l’alphabet à Sidon et Tyr. Europe est enlevée à Tyr. Elle est emmenée
2420
-chemin entre l’Orient et ce qui sera l’Occident.
De
Crète, la civilisation se transmet à Mycènes. Sociologiquement, ce p
2421
n seulement sous la forme psychologique du doute,
de
la réflexion, mais souvent sous la forme d’un crime ou d’un accident
2422
oute, de la réflexion, mais souvent sous la forme
d’
un crime ou d’un accident qui font qu’un homme est chassé de la tribu
2423
flexion, mais souvent sous la forme d’un crime ou
d’
un accident qui font qu’un homme est chassé de la tribu et devient une
2424
ou d’un accident qui font qu’un homme est chassé
de
la tribu et devient une espèce de paria. Il se réunit alors avec d’au
2425
omme est chassé de la tribu et devient une espèce
de
paria. Il se réunit alors avec d’autres pour former des sociétés qui,
2426
mbre 1969 L’invention majeure des Grecs est celle
de
l’individu, qui va être le support des valeurs et en même temps la me
2427
le support des valeurs et en même temps la mesure
de
ces valeurs, comme si on le prenait comme unité de base des nouvelles
2428
e ces valeurs, comme si on le prenait comme unité
de
base des nouvelles communautés. Il sera, comme le dit Protagoras, con
2429
omme le dit Protagoras, considéré comme la mesure
de
toute chose, donc la base même de toutes les valeurs occidentales. 7
2430
comme la mesure de toute chose, donc la base même
de
toutes les valeurs occidentales. 7 novembre 1969 Il semble que le myt
2431
identales. 7 novembre 1969 Il semble que le mythe
de
Prométhée soit digne d’être le grand mythe à l’origine de la civilisa
2432
69 Il semble que le mythe de Prométhée soit digne
d’
être le grand mythe à l’origine de la civilisation occidentale et euro
2433
thée soit digne d’être le grand mythe à l’origine
de
la civilisation occidentale et européenne au sens étroit du terme, ca
2434
sens étroit du terme, car Prométhée est le héros
de
la révolte : c’est l’homme en révolte contre tous les tabous et tous
2435
s les interdits qu’on attribuait aux dieux jaloux
de
leurs pouvoirs, qui symbolisaient les craintes de l’humanité primitiv
2436
de leurs pouvoirs, qui symbolisaient les craintes
de
l’humanité primitive devant les forces aveugles de la nature, qu’elle
2437
e l’humanité primitive devant les forces aveugles
de
la nature, qu’elle n’avait pas pu interpréter ni calculer. Prométhée,
2438
nterpréter ni calculer. Prométhée, c’est le héros
de
l’esprit de curiosité et de l’esprit d’aventure qui vont être si cara
2439
i calculer. Prométhée, c’est le héros de l’esprit
de
curiosité et de l’esprit d’aventure qui vont être si caractéristiques
2440
éthée, c’est le héros de l’esprit de curiosité et
de
l’esprit d’aventure qui vont être si caractéristiques des débuts de l
2441
le héros de l’esprit de curiosité et de l’esprit
d’
aventure qui vont être si caractéristiques des débuts de la Grèce, que
2442
ture qui vont être si caractéristiques des débuts
de
la Grèce, que l’on retrouve si bien décrits dans les œuvres d’Homère,
2443
que l’on retrouve si bien décrits dans les œuvres
d’
Homère, par exemple, avec surtout les aventures d’Ulysse, héros de la
2444
d’Homère, par exemple, avec surtout les aventures
d’
Ulysse, héros de la curiosité : il préfère l’enquête, les aventures de
2445
emple, avec surtout les aventures d’Ulysse, héros
de
la curiosité : il préfère l’enquête, les aventures de son voyage, au
2446
a curiosité : il préfère l’enquête, les aventures
de
son voyage, au repos final et au bonheur dans Ithaque. Ulysse est le
2447
onheur dans Ithaque. Ulysse est le deuxième mythe
de
la tradition occidentale. 3. L’apport chrétien 16 janvier 1969
2448
iècles, a consisté à fixer les grandes catégories
de
la personne, de la communauté des personnes, de l’universalité et de
2449
té à fixer les grandes catégories de la personne,
de
la communauté des personnes, de l’universalité et de la diversité des
2450
s de la personne, de la communauté des personnes,
de
l’universalité et de la diversité des fonctions. Et non seulement ell
2451
la communauté des personnes, de l’universalité et
de
la diversité des fonctions. Et non seulement elle a défini ces grande
2452
-dire des interprétations différentes, des formes
de
pensée différentes, caractéristiques, et que nous allons retrouver dé
2453
que nous allons retrouver désormais tout au long
de
l’histoire sociale et politique de l’Occident. Ainsi, ces grandes cat
2454
s tout au long de l’histoire sociale et politique
de
l’Occident. Ainsi, ces grandes catégories sont définies théologiqueme
2455
ment, mais plus tard, au Moyen Âge, par le détour
de
la philosophie scolastique, elles vont pénétrer les formes sociales,
2456
au xixe ou xxe siècle, les diverses conceptions
de
l’homme chrétien vont développer peu à peu leurs conséquences politiq
2457
ns d’autres termes. 11 février 1966 À partir de l’
édit
de Milan en 313, le facteur spirituel est devenu décisif pour la soci
2458
autres termes. 11 février 1966 À partir de l’édit
de
Milan en 313, le facteur spirituel est devenu décisif pour la société
2459
oncrètement, à partir de ce moment-là, la formule
de
la nouvelle communauté humaine va être donnée non plus par les cadres
2460
par les fonctions sociales, mais par une réalité
d’
ordre religieux qui est la personne, la nouvelle définition de l’homme
2461
gieux qui est la personne, la nouvelle définition
de
l’homme, de l’homme en relation. C’est donc ici ce que j’appellerai
2462
t la personne, la nouvelle définition de l’homme,
de
l’homme en relation. C’est donc ici ce que j’appellerai le moment th
2463
éologique dans l’évolution occidentale, le moment
de
l’histoire où réellement tout a dépendu de quelques définitions théol
2464
moment de l’histoire où réellement tout a dépendu
de
quelques définitions théologiques énoncées sous la forme de dogmes. 1
2465
s définitions théologiques énoncées sous la forme
de
dogmes. 16 janvier 1969 Ces mises au point tout à fait cruciales, ces
2466
rrait dire symphoniques — du divin par l’homme et
de
l’homme par le divin, ce prodigieux remue-ménage de concepts qui s’es
2467
l’homme par le divin, ce prodigieux remue-ménage
de
concepts qui s’est produit dans l’Église pendant ses premiers siècles
2468
our la conduite quotidienne, politique et civique
de
tous les Occidentaux, croyants ou non, pendant les deux millénaires q
2469
toire depuis l’Antiquité. L’Occident s’est pourvu
de
caractéristiques culturelles qui le distinguent notamment de l’Orient
2470
istiques culturelles qui le distinguent notamment
de
l’Orient : il est des mythes spécifiquement occidentaux tels que Prom
2471
révolte contre les tabous sacrés), Ulysse (esprit
de
curiosité et d’aventure), l’enlèvement d’Europe (symbole du passage d
2472
es tabous sacrés), Ulysse (esprit de curiosité et
d’
aventure), l’enlèvement d’Europe (symbole du passage de l’Orient à l’O
2473
(esprit de curiosité et d’aventure), l’enlèvement
d’
Europe (symbole du passage de l’Orient à l’Occident et des liens qui e
2474
nture), l’enlèvement d’Europe (symbole du passage
de
l’Orient à l’Occident et des liens qui existent entre eux). C’est en
2475
st en Grèce que se sont constitués les fondements
de
l’évolution occidentale. C’est en Grèce, en effet, qu’apparaît l’indi
2476
dividu, homme seul, en rupture avec l’ordre sacré
de
la tribu et du clan, qui, pour continuer de vivre, doit s’unir à d’au
2477
sacré de la tribu et du clan, qui, pour continuer
de
vivre, doit s’unir à d’autres hommes dans la même situation par des l
2478
utres hommes dans la même situation par des liens
d’
engagement réciproque : ces associations d’individus détachés des clan
2479
liens d’engagement réciproque : ces associations
d’
individus détachés des clans seront à la base des cités ayant leurs pr
2480
moment important dans l’évolution occidentale est
d’
origine théologique : c’est la formulation de la notion de personne, f
2481
est d’origine théologique : c’est la formulation
de
la notion de personne, fruit des débats des grands conciles (ive , ve
2482
e théologique : c’est la formulation de la notion
de
personne, fruit des débats des grands conciles (ive , ve , vie siècl
2483
ive , ve , vie siècles). Ces débats vont trouver
de
multiples prolongements dans l’ordre social : ils auront des conséque
2484
ues apparaissent souvent comme des transpositions
de
ces débats théologiques fondamentaux pour la culture occidentale. L’u
2485
fondamentaux pour la culture occidentale. L’unité
de
l’évolution occidentale depuis les grands conciles se définit en rais
2486
ivers : en Occident, il existe une grande variété
de
communautés qui, loin d’être des fins en soi, sont autant d’instrumen
2487
xiste une grande variété de communautés qui, loin
d’
être des fins en soi, sont autant d’instruments de réalisation de cet
2488
tés qui, loin d’être des fins en soi, sont autant
d’
instruments de réalisation de cet idéal commun que constitue la person
2489
d’être des fins en soi, sont autant d’instruments
de
réalisation de cet idéal commun que constitue la personne. Ainsi, par
2490
en soi, sont autant d’instruments de réalisation
de
cet idéal commun que constitue la personne. Ainsi, par-delà toutes le
2491
rs les éléments qui ont contribué à la définition
de
la personne. »
2492
personne, dans l’individu humain, c’est la partie
de
nous-mêmes qui peut dire « je », qui prend conscience. 23 janvier 197
2493
cience. 23 janvier 1970 La personne est distincte
de
l’individu, mais ne peut pas exister sans lui. L’individu n’est pas l
2494
ister sans lui. L’individu n’est pas le contraire
de
la personne, c’est plutôt la condition nécessaire. Enfin, la personne
2495
me qui fait des fugues, un adolescent qui a envie
d’
aller ailleurs. Tous ces gens qui quittent le sein maternel de la trib
2496
eurs. Tous ces gens qui quittent le sein maternel
de
la tribu primitive et l’abri des tombeaux deviendront les premiers in
2497
emiers atomes qui partent en liberté, qui sortent
de
la molécule et de leur combinaison. Ce sont eux qui vont créer les pr
2498
partent en liberté, qui sortent de la molécule et
de
leur combinaison. Ce sont eux qui vont créer les premières cités, les
2499
s nouveaux. Les autres étaient des liens du sang,
de
la naissance. Ils se donneront des lois, des liens délibérés, qu’ils
2500
à ensuite les imposer à d’autres. Ils deviennent,
de
ce fait, des hommes à la fois libres — ils sont libérés des liens du
2501
fois libres — ils sont libérés des liens du sang,
de
la tribu — et responsables, puisqu’ils sont ceux qui, réunis dans les
2502
rigent la cité. Le deuxième stade est, comme idée
de
l’homme, comme formule de l’homme, le citoyen. Ensuite, les cités s’
2503
e stade est, comme idée de l’homme, comme formule
de
l’homme, le citoyen. Ensuite, les cités s’agrandissent. C’est la pér
2504
est la période hellénistique, après les conquêtes
d’
Alexandre, quand les cités deviennent beaucoup trop grandes pour que l
2505
deviennent beaucoup trop grandes pour que la voix
d’
un citoyen sur l’agora puisse porter jusqu’aux limites de la ville — c
2506
toyen sur l’agora puisse porter jusqu’aux limites
de
la ville — comme le voulait Aristote — et beaucoup trop grandes pour
2507
issent garder une notion concrète du gouvernement
de
la ville. Alors, ils le délèguent à un certain nombre de gens, dans t
2508
ille. Alors, ils le délèguent à un certain nombre
de
gens, dans tous les quartiers, où ils se groupent d’après des profess
2509
deviennent des individus passifs. C’est le règne
de
l’individualisme, presque au sens moderne du mot ; c’est aussi le règ
2510
que au sens moderne du mot ; c’est aussi le règne
de
la démagogie, parce que les membres du conseil responsable qui siège
2511
doivent se faire élire ou tiennent à un semblant
d’
élection ; ils veulent en tout cas avoir un parti, donc ils se mettent
2512
t cas avoir un parti, donc ils se mettent à faire
de
la démagogie et mènent très vite à la tyrannie. Cela devient surtout
2513
ela devient surtout ce que j’appelle un sentiment
de
vide social. L’individu qui est trop loin du pouvoir est devenu passi
2514
op loin du pouvoir est devenu passif, il n’a plus
de
responsabilités, il se sent devant une sorte de vide. C’est un sentim
2515
s de responsabilités, il se sent devant une sorte
de
vide. C’est un sentiment que beaucoup connaissent aujourd’hui dans no
2516
et nos États beaucoup trop grands. C’est l’Empire
de
Rome qui est venu remettre de l’ordre dans toutes ces cités qui se dé
2517
nds. C’est l’Empire de Rome qui est venu remettre
de
l’ordre dans toutes ces cités qui se défaisaient par leur individuali
2518
cités qui se défaisaient par leur individualisme
de
l’Empire d’Alexandre. Rome vient avec sa règle extrêmement fruste, mi
2519
e défaisaient par leur individualisme de l’Empire
d’
Alexandre. Rome vient avec sa règle extrêmement fruste, militaire, ali
2520
tout son monde, et créera une nouvelle conception
de
l’homme citoyen ; non pas le citoyen qui décide librement en conseil
2521
décide librement en conseil des graves questions
d’
État, mais le citoyen qui est au service du despote, de l’empereur et
2522
t, mais le citoyen qui est au service du despote,
de
l’empereur et de sa machine étatique (autrement dit le fonctionnaire)
2523
n qui est au service du despote, de l’empereur et
de
sa machine étatique (autrement dit le fonctionnaire), l’homme défini
2524
e défini par sa fonction dans la cité. Il n’a pas
de
valeur en lui-même, c’est uniquement celle que lui délègue l’État qui
2525
pplique-t-on alors au citoyen romain cette notion
de
persona ? C’est justement parce qu’il est défini uniquement par sa fo
2526
uement par sa fonction, son rôle, au sens du rôle
d’
un acteur dans une pièce. Il devient persona dans la mesure où il est
2527
, il est un servus, un esclave ; et un des adages
de
base du droit romain est que l’esclave n’est pas une personne (servus
2528
r l’empereur. 25 février 1966 À la notion grecque
d’
individu a correspondu chez eux la notion sociale de polis, de cité, a
2529
individu a correspondu chez eux la notion sociale
de
polis, de cité, a correspondu aussi une notion du civisme, de la vie
2530
correspondu chez eux la notion sociale de polis,
de
cité, a correspondu aussi une notion du civisme, de la vie politique,
2531
cité, a correspondu aussi une notion du civisme,
de
la vie politique, de la vie commune, qui traduisait bien cette notion
2532
aussi une notion du civisme, de la vie politique,
de
la vie commune, qui traduisait bien cette notion de l’individu. Dans
2533
la vie commune, qui traduisait bien cette notion
de
l’individu. Dans le monde romain, la notion humaine qui est apparue c
2534
e qui est apparue comme nouveauté était la notion
de
citoyen, d’homme défini par ses liens sociaux, et la notion qui lui a
2535
parue comme nouveauté était la notion de citoyen,
d’
homme défini par ses liens sociaux, et la notion qui lui a correspondu
2536
et la notion qui lui a correspondu était le règne
de
la loi réglant les relations entre les hommes au niveau de la cité, p
2537
tions entre les hommes au niveau de la cité, puis
de
l’empire. Nous voyons maintenant la révolution que l’on pourrait appe
2538
rait appeler judéo-chrétienne, qui crée la notion
de
« personne », d’homme défini par sa vocation transcendante, notion qu
2539
o-chrétienne, qui crée la notion de « personne »,
d’
homme défini par sa vocation transcendante, notion qui synthétise en q
2540
qui synthétise en quelque sorte la notion grecque
d’
individu et la notion romaine de citoyen, puisque la personne chrétien
2541
la notion grecque d’individu et la notion romaine
de
citoyen, puisque la personne chrétienne est à la fois l’homme unique,
2542
lidaire. 28 janvier 1966 On peut dire que l’homme
de
la tribu, du clan primitif, avait une seule dimension existentielle,
2543
de en lui-même, et qui ensuite détermine son mode
de
relations avec autrui dans la cité, selon les lois. Avec le christian
2544
qui relie l’individu non plus seulement aux lois
de
la cité impersonnelle, ou à la morale sacrée, mais au transcendant et
2545
rale sacrée, mais au transcendant et, par l’ordre
d’
aimer son prochain, à une nouvelle communauté. Donc, cet homme — imagi
2546
ons un chrétien idéalement conforme à la doctrine
de
saint Paul — se trouve mieux distingué du magma originel que l’indivi
2547
n’est pas engagé seulement au service impersonnel
de
l’empereur ou des lois de la cité, mais au service concret du prochai
2548
au service impersonnel de l’empereur ou des lois
de
la cité, mais au service concret du prochain. Cet homme qui est à la
2549
J’ai défini et situé jusqu’ici un certain nombre
de
couples d’antinomies logiques, qui se trouvent être des complémentair
2550
i et situé jusqu’ici un certain nombre de couples
d’
antinomies logiques, qui se trouvent être des complémentaires réels :
2551
re des complémentaires réels : dans la conception
de
l’homme européen, le couple vocation personnelle et engagement commun
2552
e, ou liberté et responsabilité ; dans le domaine
de
l’éducation, le couple initiation et initiative, ou encore dressage e
2553
e et éducation pour l’autonomie ; dans le domaine
de
la vie intellectuelle, de la culture et des universités, les couples
2554
nomie ; dans le domaine de la vie intellectuelle,
de
la culture et des universités, les couples étaient culture générale e
2555
riginale — par sens commun, j’entends lieu commun
d’
une civilisation —, ou encore vue d’ensemble qui fasse sens et connais
2556
s lieu commun d’une civilisation —, ou encore vue
d’
ensemble qui fasse sens et connaissance spécialisée qui soit efficace.
2557
outer maintenant, au niveau de la cité, une série
de
couples nouveaux, celui que forment la vie personnelle, ou familiale,
2558
ncore, l’agrandissement inévitable des dimensions
de
la cité et la participation à la vie civique des habitants de cette c
2559
t la participation à la vie civique des habitants
de
cette cité. 3 février 1972 Dans la plupart des définitions de la pers
2560
t un même caractère dialectique, une même formule
de
coexistence ou coaction de réalités antinomiques, correspondant au pr
2561
ique, une même formule de coexistence ou coaction
de
réalités antinomiques, correspondant au principe même du mouvement et
2562
s, correspondant au principe même du mouvement et
de
la plus belle harmonie selon Héraclite, principe même de la vie biolo
2563
lus belle harmonie selon Héraclite, principe même
de
la vie biologique qui, de la cellule à l’organe et des organes au cor
2564
éraclite, principe même de la vie biologique qui,
de
la cellule à l’organe et des organes au corps, est faite de tensions
2565
ule à l’organe et des organes au corps, est faite
de
tensions en équilibre mouvant. 18 février 1966 La personne se définit
2566
ois autonome et participante ; elle est maîtresse
d’
elle-même, mais elle est en relation avec autrui ; elle est définie pa
2567
entre l’autonomie et la responsabilité vis-à-vis
d’
autrui, c’est-à-dire la solidarité. La vocation que reçoit un individu
2568
un individu le distingue plus que n’importe quoi
de
tous les autres, et en même temps l’exercice de cette vocation le met
2569
i de tous les autres, et en même temps l’exercice
de
cette vocation le met en communication avec autrui. 18 novembre 1966
2570
rsonne ou la fédération ne sont pas des synthèses
de
deux termes, ni des solutions qu’on obtiendrait par un sacrifice de c
2571
des solutions qu’on obtiendrait par un sacrifice
de
chaque côté, où on se rencontrerait finalement à mi-chemin. J’insiste
2572
à mi-chemin. Elles supposent l’existence complète
de
ces deux pôles et leur mise en tension. Il y a l’exemple de la dialec
2573
x pôles et leur mise en tension. Il y a l’exemple
de
la dialectique de Hegel : la thèse, qui est niée ensuite par l’antith
2574
se en tension. Il y a l’exemple de la dialectique
de
Hegel : la thèse, qui est niée ensuite par l’antithèse, et les deux s
2575
ut être une chose unique ; il n’est plus question
de
tension. Dans le fédéralisme ou dans la notion de la personne, c’est
2576
de tension. Dans le fédéralisme ou dans la notion
de
la personne, c’est tout à fait différent, puisque chacun des deux élé
2577
devient même encore plus lui-même, il est chargé
d’
une énergie du fait de sa mise en tension. L’individu se trouve précis
2578
lus lui-même, il est chargé d’une énergie du fait
de
sa mise en tension. L’individu se trouve précisé, dessiné, et on pour
2579
sion avec le milieu social ; et c’est sur le fond
de
ce milieu social que son originalité va se manifester. Prenons le cas
2580
s’agit pas, pour faire une fédération européenne,
de
mélanger toutes les langues, d’arriver à une espèce d’esperanto ; il
2581
ation européenne, de mélanger toutes les langues,
d’
arriver à une espèce d’esperanto ; il s’agit de s’arranger avec des la
2582
langer toutes les langues, d’arriver à une espèce
d’
esperanto ; il s’agit de s’arranger avec des langues différentes, chac
2583
s, d’arriver à une espèce d’esperanto ; il s’agit
de
s’arranger avec des langues différentes, chacun tâchant de parler de
2584
nger avec des langues différentes, chacun tâchant
de
parler de son mieux sa propre langue. Il ne s’agit pas non plus de cr
2585
des langues différentes, chacun tâchant de parler
de
son mieux sa propre langue. Il ne s’agit pas non plus de créer un con
2586
mieux sa propre langue. Il ne s’agit pas non plus
de
créer un conformisme général ou de fonctionnalisation ; il s’agit au
2587
t pas non plus de créer un conformisme général ou
de
fonctionnalisation ; il s’agit au contraire que chacun assume ses res
2588
assume ses responsabilités, ses risques, et tâche
de
les faire valoir, sans faire la guerre ou vouloir la mort de l’autre,
2589
e valoir, sans faire la guerre ou vouloir la mort
de
l’autre, mais en arrivant à des accords où chacun reste autant que po
2590
lesquels sont en même temps garantis par le fait
de
la fédération. Chaque canton suisse se trouve être lui-même, du fait
2591
du son individualité. Donc, on ne lui demande pas
de
céder à moitié sur son caractère pour rencontrer l’autre à mi-chemin.
2592
contrer l’autre à mi-chemin. 3. Manifestations
de
la personne 5 décembre 1969 L’histoire de la personne humaine pren
2593
ions de la personne 5 décembre 1969 L’histoire
de
la personne humaine prend son départ seulement au vie siècle, au mom
2594
qui a produit, comme un précipité, cette doctrine
de
la personne. Il est évident que le fait que l’on croie ou que l’on ne
2595
l’on ne croie pas à la Trinité et à la définition
de
la personne de Jésus-Christ n’est pas important. Il est indéniable qu
2596
as à la Trinité et à la définition de la personne
de
Jésus-Christ n’est pas important. Il est indéniable que cela définit
2597
st indéniable que cela définit une certaine forme
de
pensée, qui veut que les choses sont à la fois en mouvement et obéiss
2598
mme autrefois en Ionie, s’est illustrée une forme
d’
esprit — l’esprit occidental — qui sera très importante pour toute déf
2599
— qui sera très importante pour toute définition
de
l’Europe et qui trouve ici une de ses étymologies. 12 décembre 1969 P
2600
oute définition de l’Europe et qui trouve ici une
de
ses étymologies. 12 décembre 1969 Pour les réformateurs, le nouvel ho
2601
éfinissait la scolastique, transformé par l’appel
de
l’esprit. La personne, c’est donc la vocation qui transforme tel ou t
2602
transforme tel ou tel individu en son instrument
de
réalisation. 29 novembre 1968 On assiste chez Hegel au transfert du c
2603
968 On assiste chez Hegel au transfert du concept
de
vocation ou de mission à une communauté — peuple, État ou nation. Jus
2604
chez Hegel au transfert du concept de vocation ou
de
mission à une communauté — peuple, État ou nation. Jusqu’alors, une m
2605
le à jouer dans la communauté, l’oblige à changer
de
direction (la conversion) et à changer le principe même de ses action
2606
ion (la conversion) et à changer le principe même
de
ses actions, c’est-à-dire à passer de l’égoïsme de l’individu naturel
2607
incipe même de ses actions, c’est-à-dire à passer
de
l’égoïsme de l’individu naturel à une existence pour Dieu et pour le
2608
e ses actions, c’est-à-dire à passer de l’égoïsme
de
l’individu naturel à une existence pour Dieu et pour le prochain, c’e
2609
En passant au niveau de la communauté, ce concept
de
vocation change radicalement de valeur. La mission collective que se
2610
nauté, ce concept de vocation change radicalement
de
valeur. La mission collective que se découvre une communauté n’oblige
2611
mmunauté n’oblige la communauté qu’à s’affirmer —
de
préférence de manière agressive — contre les autres. 28 janvier 1966
2612
ige la communauté qu’à s’affirmer — de préférence
de
manière agressive — contre les autres. 28 janvier 1966 Le chrétien do
2613
lleurs, qui est transcendant. Il est donc citoyen
de
deux mondes différents. Le monde de l’au-delà, le monde divin, dont i
2614
donc citoyen de deux mondes différents. Le monde
de
l’au-delà, le monde divin, dont il relève en premier lieu, mais qui l
2615
ndant tout le Moyen Âge ; ce n’est pas un au-delà
de
la voûte céleste, ce n’est même pas un tout là-haut vers les étoiles,
2616
n nous que très loin. 23 janvier 1970 La doctrine
de
la personne implique une morale et une politique. On peut dire que la
2617
rale et une politique. On peut dire que la morale
de
la personne, c’est ce qui découlera de sa vocation et de l’exercice d
2618
la morale de la personne, c’est ce qui découlera
de
sa vocation et de l’exercice de cette vocation dans la communauté. De
2619
ersonne, c’est ce qui découlera de sa vocation et
de
l’exercice de cette vocation dans la communauté. De même, on peut dir
2620
ce qui découlera de sa vocation et de l’exercice
de
cette vocation dans la communauté. De même, on peut dire que la polit
2621
ommunauté. De même, on peut dire que la politique
de
la personne découlera des buts de toute communauté et de ses conditio
2622
ue la politique de la personne découlera des buts
de
toute communauté et de ses conditions de formation et de fonctionneme
2623
ersonne découlera des buts de toute communauté et
de
ses conditions de formation et de fonctionnement. Les termes étant éq
2624
des buts de toute communauté et de ses conditions
de
formation et de fonctionnement. Les termes étant équivalents, on peut
2625
e communauté et de ses conditions de formation et
de
fonctionnement. Les termes étant équivalents, on peut dire que la mor
2626
nts, on peut dire que la morale est une politique
de
la personne, tandis que la politique est une morale de la communauté.
2627
personne, tandis que la politique est une morale
de
la communauté. 3 février 1972 L’écologie et la personne ont les mêmes
2628
mes ennemis : le culte du profit sans scrupule et
de
l’uniformisation ; la religion de la croissance et du PNB, de la puis
2629
ans scrupule et de l’uniformisation ; la religion
de
la croissance et du PNB, de la puissance nationale et des disciplines
2630
isation ; la religion de la croissance et du PNB,
de
la puissance nationale et des disciplines que tout cela implique, qui
2631
exigences : l’équilibre en tension (formule même
de
la vie), par opposition à des cadres contraignants et des géométries
2632
actualisantes. 30 janvier 1970 Ces deux maladies
de
la cité que sont l’individualisme et la collectivisation, corresponde
2633
a collectivisation, correspondent à deux maladies
de
la personne et les traduisent dans l’histoire. L’individualisme s’est
2634
de hellénistique dissocié, la restauration forcée
de
la notion de citoyen réduite à celle de rôle social que l’on valorise
2635
que dissocié, la restauration forcée de la notion
de
citoyen réduite à celle de rôle social que l’on valorise à l’extrême,
2636
on forcée de la notion de citoyen réduite à celle
de
rôle social que l’on valorise à l’extrême, aux dépens de la liberté i
2637
aux dépens de la liberté individuelle et du sens
de
l’identité personnelle. 12 décembre 1969 Les deux maladies mortelles
2638
lle. 12 décembre 1969 Les deux maladies mortelles
de
toute société sont la bureaucratie et l’ennui, c’est-à-dire le manque
2639
a bureaucratie et l’ennui, c’est-à-dire le manque
de
sens général pour la vie des hommes. 4. De la personne à la fédéra
2640
que de sens général pour la vie des hommes. 4.
De
la personne à la fédération 4 mars 1977 Le trait le plus frappant
2641
dération 4 mars 1977 Le trait le plus frappant
de
la théorie d’Althusius, c’est que, pour lui, le citoyen ne l’est pas
2642
mars 1977 Le trait le plus frappant de la théorie
d’
Althusius, c’est que, pour lui, le citoyen ne l’est pas en tant qu’ind
2643
dans une cellule sociale, qu’il dépasse le niveau
de
l’individu isolé, qu’il devient réellement un citoyen ; on dirait mêm
2644
onne. Ce n’est donc pas un simple homme, individu
de
l’espèce, mais un compagnon, un associé. Le citoyen althusien se rapp
2645
itoyen althusien se rapproche beaucoup du citoyen
de
la polis grecque ou de la civitas romaine, mais aussi de ce que l’Éco
2646
proche beaucoup du citoyen de la polis grecque ou
de
la civitas romaine, mais aussi de ce que l’École française du xxe si
2647
olis grecque ou de la civitas romaine, mais aussi
de
ce que l’École française du xxe siècle appellera « la personne » ; c
2648
ans la communauté. 23 janvier 1970 Si l’invention
de
la cité est l’invention majeure de la civilisation européenne, la per
2649
Si l’invention de la cité est l’invention majeure
de
la civilisation européenne, la personne est l’invention majeure de la
2650
n européenne, la personne est l’invention majeure
de
la culture européenne, la civilisation étant l’application des valeur
2651
, la civilisation étant l’application des valeurs
de
la culture. La différence est donc du même genre qu’entre technique e
2652
i on comprend bien la personne, qui est la valeur
de
base, on comprendra du même coup les formes politiques qui traduisent
2653
iques qui traduisent cette valeur. La dialectique
de
la personne se retrouvera dans la cité. La personne est donc l’indivi
2654
ellent une vocation et les non-chrétiens un appel
de
l’inconscient : quelque chose qui transcende la raison, oriente l’ind
2655
cende la raison, oriente l’individu, le distingue
de
la tribu, de sa famille et de sa tradition et en même temps le met en
2656
on, oriente l’individu, le distingue de la tribu,
de
sa famille et de sa tradition et en même temps le met en contact avec
2657
ividu, le distingue de la tribu, de sa famille et
de
sa tradition et en même temps le met en contact avec la communauté et
2658
le met en contact avec la communauté et le charge
de
responsabilités. La définition la plus simple de la personne est que
2659
de responsabilités. La définition la plus simple
de
la personne est que c’est l’individu libre et responsable. 20 janvier
2660
ue je l’ai définie, est pour moi la participation
de
tout l’homme à un sens général de la vie, l’acquisition de structures
2661
a participation de tout l’homme à un sens général
de
la vie, l’acquisition de structures mentales résultant de connexions
2662
’homme à un sens général de la vie, l’acquisition
de
structures mentales résultant de connexions établies entre les savoir
2663
e, l’acquisition de structures mentales résultant
de
connexions établies entre les savoirs spécialisés. De même, la partic
2664
ipation dans la vie civique sera la participation
de
la personne complète — individu plus vocation, ou individu fois vocat
2665
ation, ou individu fois vocation — à la puissance
de
la cité, considérée comme la somme et le produit de toutes les activi
2666
la cité, considérée comme la somme et le produit
de
toutes les activités économiques, intellectuelles, politiques et mora
2667
des citoyens. 25 novembre 1966 L’idéal directeur
d’
une éducation spécifiquement européenne ou fédéraliste serait donc de
2668
cifiquement européenne ou fédéraliste serait donc
de
former et de promouvoir des hommes à la fois libres et responsables,
2669
uropéenne ou fédéraliste serait donc de former et
de
promouvoir des hommes à la fois libres et responsables, c’est-à-dire
2670
t responsables, c’est-à-dire conscients à la fois
de
ce qu’ils se doivent en tant qu’individus à la recherche de leur voca
2671
ls se doivent en tant qu’individus à la recherche
de
leur vocation, et de ce qu’ils doivent à la communauté dans laquelle
2672
qu’individus à la recherche de leur vocation, et
de
ce qu’ils doivent à la communauté dans laquelle ils se trouvent engag
2673
uelle ils se trouvent engagés. C’est donc ce type
d’
homme en équilibre dynamique que j’appelle personne et qui est le modu
2674
mique que j’appelle personne et qui est le module
de
tout régime fédéraliste. 4 février 1966 C’est au Moyen Âge, vers les
2675
iècles et beaucoup plus tard encore, que le terme
de
personne a joué un rôle dans la vie civique et dans la vie politique,
2676
qu’il représente est devenue l’un des fondements
de
la forme de pensée et d’aménagement public qu’est le fédéralisme. 18
2677
sente est devenue l’un des fondements de la forme
de
pensée et d’aménagement public qu’est le fédéralisme. 18 novembre 196
2678
enue l’un des fondements de la forme de pensée et
d’
aménagement public qu’est le fédéralisme. 18 novembre 1966 Après Boèce
2679
novembre 1966 Après Boèce, il y eut toutes sortes
d’
écoles de penseurs, de moines, de grands intellectuels du Moyen Âge ju
2680
1966 Après Boèce, il y eut toutes sortes d’écoles
de
penseurs, de moines, de grands intellectuels du Moyen Âge jusqu’à sai
2681
èce, il y eut toutes sortes d’écoles de penseurs,
de
moines, de grands intellectuels du Moyen Âge jusqu’à saint Thomas, qu
2682
ut toutes sortes d’écoles de penseurs, de moines,
de
grands intellectuels du Moyen Âge jusqu’à saint Thomas, qui ont fait
2683
Âge jusqu’à saint Thomas, qui ont fait la théorie
de
la personne humaine — c’est de là qu’on répète encore souvent aujourd
2684
nt fait la théorie de la personne humaine — c’est
de
là qu’on répète encore souvent aujourd’hui « la personne humaine », c
2685
jourd’hui « la personne humaine », ce qui a l’air
d’
un pléonasme, parce qu’il n’existe pas de personne animale, mais on do
2686
a l’air d’un pléonasme, parce qu’il n’existe pas
de
personne animale, mais on donne cette précision, puisque, au début, l
2687
ue les Personnes divines. Baignant dans le milieu
de
l’Église qui reprend toutes les structures sociales et administrative
2688
toutes les structures sociales et administratives
de
l’Empire romain, se reforment, au Moyen Âge, les cités, communes et c
2689
e, les cités, communes et communautés, où ce type
d’
homme nouveau, bipolaire, se manifeste. Ce n’est plus tout à fait le c
2690
cités grecques, ce n’est pas non plus la persona
de
l’Empire romain, car c’est un homme qui est à la fois défini par la f
2691
st à la fois défini par la fonction qu’il a reçue
de
l’Église ou de l’Esprit — sa vocation — et par son rôle plus physique
2692
fini par la fonction qu’il a reçue de l’Église ou
de
l’Esprit — sa vocation — et par son rôle plus physique, plus matériel
2693
l’Église, Dieu ou le pape d’autre part. Il a plus
de
substance en lui-même que l’homme romain, qui était défini uniquement
2694
lié que l’individu grec. 11 novembre 1966 Le type
d’
homme idéal, qui correspondrait au type de régime bien articulé que j’
2695
Le type d’homme idéal, qui correspondrait au type
de
régime bien articulé que j’appelle le fédéralisme, est ce que toute u
2696
ppelle le fédéralisme, est ce que toute une école
de
philosophes de la vie politique entre les deux guerres mondiales a dé
2697
alisme, est ce que toute une école de philosophes
de
la vie politique entre les deux guerres mondiales a défini comme étan
2698
ntinomique, qui vit dans la tension entre le pôle
de
la liberté individuelle et le pôle de la responsabilité communautaire
2699
tre le pôle de la liberté individuelle et le pôle
de
la responsabilité communautaire, reflétant ainsi en lui-même la natur
2700
, reflétant ainsi en lui-même la nature bipolaire
de
tout régime, de tout problème, de toute solution de type fédéraliste.
2701
i en lui-même la nature bipolaire de tout régime,
de
tout problème, de toute solution de type fédéraliste. Cet homme doit
2702
ature bipolaire de tout régime, de tout problème,
de
toute solution de type fédéraliste. Cet homme doit être en fait conti
2703
tout régime, de tout problème, de toute solution
de
type fédéraliste. Cet homme doit être en fait continuellement en gard
2704
e vers le pôle individualiste, quand il est tenté
de
renier ses responsabilités communautaires, ou l’autre, inverse, vers
2705
collectivisme, quand il recule devant les risques
de
sa vocation individuelle. À ce moment-là, il s’offre à la tyrannie, q
2706
là, il s’offre à la tyrannie, qui peut être celle
de
la mode, celle des routines ou celle imposée par un parti unique ou u
2707
deux réalités bipolaires, les mêmes possibilités
de
double déviation permanente dont on a passablement d’exemples. Dans l
2708
ouble déviation permanente dont on a passablement
d’
exemples. Dans la personne, elles s’exercent d’une part vers l’individ
2709
sa vocation, on ne veut plus assumer les risques
de
sa liberté). Ceci correspond exactement au double danger de déviation
2710
rté). Ceci correspond exactement au double danger
de
déviation qui menace en permanence tout régime fédéral. Correspondant
2711
tout régime fédéral. Correspondant à la déviation
de
la personne vers l’individualisme, on a la déviation d’un régime fédé
2712
personne vers l’individualisme, on a la déviation
d’
un régime fédéral vers le séparatisme, quand un des éléments ne veut p
2713
n ne veut plus assumer les risques et les charges
de
son autonomie locale, et on s’en remet complètement au pouvoir centra
2714
’introduction suivante des éditeurs : « La notion
de
personne est primordiale chez Denis de Rougemont et conditionne chacu
2715
de Rougemont et conditionne chacune des facettes
de
sa pensée et de son action. Ses prises de position, son engagement in
2716
conditionne chacune des facettes de sa pensée et
de
son action. Ses prises de position, son engagement intellectuel en fa
2717
acettes de sa pensée et de son action. Ses prises
de
position, son engagement intellectuel en faveur du fédéralisme, des r
2718
tellectuel en faveur du fédéralisme, des régions,
de
l’écologie, contre l’État-nation, la destruction de l’environnement,
2719
l’écologie, contre l’État-nation, la destruction
de
l’environnement, la course aux armements, tout cela est la traduction
2720
s, tout cela est la traduction, en termes variés,
d’
une même préoccupation : la personne. La personne suppose l’existence
2721
on : la personne. La personne suppose l’existence
d’
un individu, mais ne s’y réduit pas. Elle n’est pas une notion arbitra
2722
abstraite, mais un produit typique du cheminement
de
la culture occidentale. Son essor a connu plusieurs étapes cruciales
2723
urs étapes cruciales : la Grèce voit l’apparition
de
l’individu et la formation des cités, Rome introduit la notion de cit
2724
la formation des cités, Rome introduit la notion
de
citoyen défini par son statut social, le christianisme (à travers not
2725
amment les débats des grands conciles et l’apport
de
la Réforme) clarifie l’aspect individuel et l’aspect communautaire, e
2726
ne ne peut s’épanouir dans n’importe quelle forme
de
communauté. Selon Denis de Rougemont, c’est le fédéralisme qui se tro
2727
éralisme qui se trouve favoriser le mieux l’essor
de
la personne. En effet, comme la personne, le fédéralisme est le produ
2728
comme la personne, le fédéralisme est le produit
d’
une tension entre deux pôles antinomiques et irréductibles : les pouvo
2729
tique est considérée par Rousseau comme l’affaire
de
tous et de chacun, alors que chez les auteurs précédents, il s’agissa
2730
onsidérée par Rousseau comme l’affaire de tous et
de
chacun, alors que chez les auteurs précédents, il s’agissait toujours
2731
ez les auteurs précédents, il s’agissait toujours
de
prendre les choses publiques par en haut, du point de vue du gouverne
2732
ns en tant qu’ils participent réellement à la vie
de
la cité et en tant que la politique est soumise à une certaine morale
2733
omme chez Machiavel et jusqu’à Montesquieu, l’art
de
gouverner. 19 juin 1969 La personne, c’est l’individu à la fois libre
2734
nouissement des personnes, non pas à la puissance
de
l’État-nation. Voilà le principe fondamental de toute théorie du fédé
2735
e de l’État-nation. Voilà le principe fondamental
de
toute théorie du fédéralisme. Il s’ensuit que le problème politique r
2736
ions correspondant aux exigences du développement
de
la personne. 29 octobre 1971 La politique, c’est la prévision des moy
2737
des fins souhaitées, c’est traduire les finalités
d’
une société en mesures politiques bien calculées. Si l’on ignore les f
2738
les enseigner dans les écoles, on se trouve hors
d’
état d’établir une politique, des plans d’avenir, un système de prévis
2739
seigner dans les écoles, on se trouve hors d’état
d’
établir une politique, des plans d’avenir, un système de prévision, un
2740
ve hors d’état d’établir une politique, des plans
d’
avenir, un système de prévision, une prospective. On se met hors d’éta
2741
lir une politique, des plans d’avenir, un système
de
prévision, une prospective. On se met hors d’état de gouverner, puisq
2742
ème de prévision, une prospective. On se met hors
d’
état de gouverner, puisque « gouverner c’est prévoir ». 12 novembre 19
2743
prévision, une prospective. On se met hors d’état
de
gouverner, puisque « gouverner c’est prévoir ». 12 novembre 1971 Les
2744
entale — et posés par son action — nous ramènent,
de
tous côtés, à des choix politiques au sens propre et originel du term
2745
sens propre et originel du terme : à la nécessité
de
décider librement notre avenir commun dans la cité, de le prévoir en
2746
cider librement notre avenir commun dans la cité,
de
le prévoir en fonction de finalités déclarées, dont il s’agit mainten
2747
de finalités déclarées, dont il s’agit maintenant
d’
assumer les moyens. 21 janvier 1966 Les deux termes, « politique » et
2748
e », sont absolument équivalents, l’un étant tiré
de
la racine grecque du mot qui désigne « ville », l’autre de la racine
2749
ine grecque du mot qui désigne « ville », l’autre
de
la racine latine. 8 novembre 1968 La définition la plus simple de la
2750
ine. 8 novembre 1968 La définition la plus simple
de
la souveraineté chez Hobbes, c’est l’usage par un seul homme de la fo
2751
neté chez Hobbes, c’est l’usage par un seul homme
de
la force du Léviathan. Le roi, dit Hobbes, revêt la personne du Lévia
2752
ennent ses sujets. Il ne s’agit donc pas pour eux
d’
être des citoyens. 21 novembre 1969 Civisme et politique désignent les
2753
une cité. Pendant les premiers siècles classiques
de
la Grèce, c’est en effet la polis, la cité, qui détermine — qui délim
2754
qui détermine — qui délimite aussi — les libertés
d’
un homme. Au début donc, la politique est simplement l’art d’aménager
2755
Au début donc, la politique est simplement l’art
d’
aménager les rapports entre les hommes dans la cité. 2. Formes 3
2756
cembre 1976 La majesté des institutions, c’est un
de
ces termes qui reviendra très souvent, tout au long de l’histoire pol
2757
s termes qui reviendra très souvent, tout au long
de
l’histoire politique de l’Europe, le règne de la loi, rule of law, et
2758
rès souvent, tout au long de l’histoire politique
de
l’Europe, le règne de la loi, rule of law, et la majesté, majestas, d
2759
ong de l’histoire politique de l’Europe, le règne
de
la loi, rule of law, et la majesté, majestas, des institutions, qui e
2760
est transférée à n’importe quelle administration
d’
État, c’est-à-dire l’ensemble des structures et des mécanismes, qui co
2761
constituent l’État, ou plus exactement l’appareil
de
l’État, donc le concret de l’État. Quand on dit « l’État », c’est enc
2762
exactement l’appareil de l’État, donc le concret
de
l’État. Quand on dit « l’État », c’est encore un terme assez mytholog
2763
, c’est encore un terme assez mythologique pourvu
d’
une sorte d’aura qu’il a prise avec le temps. Alors qu’en réalité, l’É
2764
re un terme assez mythologique pourvu d’une sorte
d’
aura qu’il a prise avec le temps. Alors qu’en réalité, l’État, c’est d
2765
c’est des gens, des fonctionnaires, il n’y a pas
de
mystère, ce sont des fonctionnaires qui sont désignés par les plus fo
2766
ntimental et mystique selon les cas, en attendant
de
devenir, avec la Révolution française, un phénomène idéologique et pa
2767
el. 25 octobre 1968 Les empires ont été au nombre
d’
une quinzaine. On peut mettre au rang des empires, aujourd’hui, l’URSS
2768
ui, l’URSS, qui répond exactement à la définition
d’
un empire, dont les deux traits principaux sont : la pluralité des élé
2769
uralité des éléments constitutifs et le caractère
d’
universalité. 11 novembre 1966 L’homme que nous connaissons en réalité
2770
est ordinairement un mélange impur, non seulement
de
revendication de libertés, de responsabilités individuelles, mais aus
2771
un mélange impur, non seulement de revendication
de
libertés, de responsabilités individuelles, mais aussi de fuite devan
2772
mpur, non seulement de revendication de libertés,
de
responsabilités individuelles, mais aussi de fuite devant la liberté,
2773
tés, de responsabilités individuelles, mais aussi
de
fuite devant la liberté, la vocation et les responsabilités. Cet homm
2774
s d’autres, ce qui est une assez bonne définition
de
nos démocraties de l’Europe de l’Ouest, un mélange tolérable et varia
2775
est une assez bonne définition de nos démocraties
de
l’Europe de l’Ouest, un mélange tolérable et variable d’anarchie et d
2776
rope de l’Ouest, un mélange tolérable et variable
d’
anarchie et de tyrannie. 10 juin 1966 La volonté générale est interpré
2777
t, un mélange tolérable et variable d’anarchie et
de
tyrannie. 10 juin 1966 La volonté générale est interprétée par les ja
2778
erprétée par les jacobins uniquement dans le sens
de
l’unanimité, de l’unanimité exigée de tous les patriotes ; les sociét
2779
jacobins uniquement dans le sens de l’unanimité,
de
l’unanimité exigée de tous les patriotes ; les sociétés partielles ou
2780
ans le sens de l’unanimité, de l’unanimité exigée
de
tous les patriotes ; les sociétés partielles ou les sectes politiques
2781
tiques sont impitoyablement liquidées et accusées
de
trahison ; les jacobins n’admettent absolument pas le droit à la vari
2782
l faut se demander si Rousseau a voulu qu’on tire
de
sa théorie la pratique qu’en ont tirée les jacobins. Est-ce qu’on peu
2783
ousseau à juste titre — comme l’ont fait beaucoup
d’
auteurs modernes — comme le véritable ancêtre de l’État totalitaire ?
2784
p d’auteurs modernes — comme le véritable ancêtre
de
l’État totalitaire ? Je réponds absolument non. Car Rousseau n’a pas
2785
ar Rousseau n’a pas cessé, dans tous ses ouvrages
de
doctrine politique, de mettre en garde précisément contre cette inter
2786
sé, dans tous ses ouvrages de doctrine politique,
de
mettre en garde précisément contre cette interprétation, et de rappel
2787
garde précisément contre cette interprétation, et
de
rappeler que la première condition d’application de ses théories, c’e
2788
étation, et de rappeler que la première condition
d’
application de ses théories, c’est la petitesse d’un pays. 3. Idéol
2789
rappeler que la première condition d’application
de
ses théories, c’est la petitesse d’un pays. 3. Idéologie et religi
2790
d’application de ses théories, c’est la petitesse
d’
un pays. 3. Idéologie et religion 8 novembre 1968 La doctrine de
2791
ologie et religion 8 novembre 1968 La doctrine
de
la souveraineté est ce qui sépare le plus nettement deux groupes de p
2792
est ce qui sépare le plus nettement deux groupes
de
pays européens : les pays du Centre et de l’Est, et les pays de l’Oue
2793
groupes de pays européens : les pays du Centre et
de
l’Est, et les pays de l’Ouest : des cités-États, des principautés, de
2794
ens : les pays du Centre et de l’Est, et les pays
de
l’Ouest : des cités-États, des principautés, des royaumes et le Saint
2795
, qui vivent sans doctrine politique bien définie
de
la souveraineté. Le type même de l’écrivain politique qui y correspon
2796
que bien définie de la souveraineté. Le type même
de
l’écrivain politique qui y correspond est Machiavel, qui donne des de
2797
des vertus et des vices qui contribuent au succès
d’
un prince. Dans cette partie de l’Europe, une sorte d’empirisme domine
2798
tribuent au succès d’un prince. Dans cette partie
de
l’Europe, une sorte d’empirisme dominera avec insistance. Tandis que
2799
prince. Dans cette partie de l’Europe, une sorte
d’
empirisme dominera avec insistance. Tandis que dans l’Europe de l’Oues
2800
théorie, puisqu’on voulait imposer l’unification
de
réalités diverses par nature. Dans ces trois nations, on observera le
2801
s ces trois nations, on observera le même passage
de
« l’anarchie féodale » à l’absolutisme monarchique qui s’établit dès
2802
e, nous retrouverons des transpositions imprévues
de
ces catégories théologiques dans les catégories de base du fédéralism
2803
e ces catégories théologiques dans les catégories
de
base du fédéralisme. 2 février 1968 La Révolution française marque un
2804
lution française marque un seuil dans l’évolution
de
la nation, elle marque ce moment de crise où le sacré se déplace d’un
2805
s l’évolution de la nation, elle marque ce moment
de
crise où le sacré se déplace d’un seul coup, visiblement. Il n’est pl
2806
st dans l’idéologie. 15 novembre 1968 Cette sorte
de
pulvérisation de la population française nommée nation ne comprend pa
2807
ie. 15 novembre 1968 Cette sorte de pulvérisation
de
la population française nommée nation ne comprend pas l’unanimité des
2808
ologie que l’on veut faire aboutir. Dès le début
de
la réunion des états généraux à Paris, le tiers état s’était proclamé
2809
tait proclamé Assemblée nationale — à l’exclusion
de
l’ordre de la noblesse et de l’ordre du clergé. Le tiers état seul, d
2810
mé Assemblée nationale — à l’exclusion de l’ordre
de
la noblesse et de l’ordre du clergé. Le tiers état seul, dès ce momen
2811
nale — à l’exclusion de l’ordre de la noblesse et
de
l’ordre du clergé. Le tiers état seul, dès ce moment-là, représentait
2812
à ce moment qu’on voit se préciser la définition
de
la nation non pas comme communauté naturelle, mais comme communauté i
2813
ière tâche du parti qui incarne la nation, l’idée
de
nation, consiste à centraliser tous les éléments du pouvoir, à efface
2814
à transformer la justice elle-même en instrument
de
l’idéologie. Le tout au nom de cette espèce de religion laïque qu’est
2815
nt de l’idéologie. Le tout au nom de cette espèce
de
religion laïque qu’est la nation. Ce parti au pouvoir confond dans un
2816
ir. 4. Liberté et puissance 5 novembre 1971
D’
un coup, dans le monde occidental industrialisé (l’Europe, les États-U
2817
non seulement nous nous voyons assurés des moyens
de
résister aux menaces nationales, de dominer les pénuries et de nous l
2818
és des moyens de résister aux menaces nationales,
de
dominer les pénuries et de nous libérer des contraintes extérieures,
2819
ux menaces nationales, de dominer les pénuries et
de
nous libérer des contraintes extérieures, mais nous nous voyons dotés
2820
traintes extérieures, mais nous nous voyons dotés
de
moyens de produire cent et mille fois plus que nos pères, et en même
2821
xtérieures, mais nous nous voyons dotés de moyens
de
produire cent et mille fois plus que nos pères, et en même temps de d
2822
t mille fois plus que nos pères, et en même temps
de
détruire les équilibres entre les processus physiques et chimiques du
2823
e végétal et animal, entre l’homme et son milieu,
de
polluer, d’irradier, de brûler, d’épuiser sans retour… Alors, devant
2824
animal, entre l’homme et son milieu, de polluer,
d’
irradier, de brûler, d’épuiser sans retour… Alors, devant l’évidence d
2825
re l’homme et son milieu, de polluer, d’irradier,
de
brûler, d’épuiser sans retour… Alors, devant l’évidence de ce double
2826
et son milieu, de polluer, d’irradier, de brûler,
d’
épuiser sans retour… Alors, devant l’évidence de ce double pouvoir, po
2827
, d’épuiser sans retour… Alors, devant l’évidence
de
ce double pouvoir, pour le meilleur et pour le pire, nous nous découv
2828
our le pire, nous nous découvrons soudain obligés
de
choisir, c’est-à-dire nous nous voyons acculés à la nécessité d’une p
2829
st-à-dire nous nous voyons acculés à la nécessité
d’
une politique. Nous nous sommes libérés de la nature, mais nous sommes
2830
cessité d’une politique. Nous nous sommes libérés
de
la nature, mais nous sommes condamnés désormais à assumer, en toute c
2831
lités. 11 novembre 1966 Si on apporte un peu plus
d’
exigence dans la recherche des buts réels que suit une politique, qui
2832
x grands critères qui me paraissent, après examen
de
tous les autres possibles et réduction de nombreuses autres possibili
2833
examen de tous les autres possibles et réduction
de
nombreuses autres possibilités, être simplement la puissance, ou bien
2834
. Ce sont au fond les deux passions fondamentales
de
l’homme occidental. Il veut, ou bien être puissant, ou bien être libr
2835
dividuelles, exercées par un citoyen ou un groupe
de
citoyens, une cité ; on peut aller jusqu’à parler de libertés exercée
2836
citoyens, une cité ; on peut aller jusqu’à parler
de
libertés exercées par une région ou par un groupe de régions ou de ci
2837
libertés exercées par une région ou par un groupe
de
régions ou de cités, dans le cas d’une fédération. 4 mars 1977 Il fau
2838
ées par une région ou par un groupe de régions ou
de
cités, dans le cas d’une fédération. 4 mars 1977 Il faut bien s’enten
2839
par un groupe de régions ou de cités, dans le cas
d’
une fédération. 4 mars 1977 Il faut bien s’entendre sur le sens de « p
2840
. 4 mars 1977 Il faut bien s’entendre sur le sens
de
« politique » : si on désigne par politique, par activité politique o
2841
olitique ou pensée politique, l’art ou la science
de
l’aménagement des relations humaines dans la cité, conformément à une
2842
es dans la cité, conformément à une certaine idée
de
la vie humaine et de la destination de l’homme, on voit qu’il y a eu,
2843
ormément à une certaine idée de la vie humaine et
de
la destination de l’homme, on voit qu’il y a eu, qu’il y a encore et
2844
taine idée de la vie humaine et de la destination
de
l’homme, on voit qu’il y a eu, qu’il y a encore et probablement qu’il
2845
utre que j’appelle fédéralisme, la vraie finalité
de
la société, c’est l’homme, c’est la liberté des personnes, obtenue pa
2846
ut constater que toutes les expériences réalisées
de
fédération ont correspondu à une politique de liberté par l’union, ta
2847
ées de fédération ont correspondu à une politique
de
liberté par l’union, tandis que toutes les réalisations étatiques, na
2848
et États totalitaires, obéissent à une politique
de
puissance, par unification forcée, ce qu’on appelle depuis Hitler par
2849
ppelle depuis Hitler par « mise au pas ». Chacune
de
ces deux politiques ou de ces passions (on pourrait dire passions fon
2850
mise au pas ». Chacune de ces deux politiques ou
de
ces passions (on pourrait dire passions fondamentales) correspond à u
2851
ons fondamentales) correspond à un certain nombre
de
traits de caractère, de formes de pensée, de structures mentales et s
2852
entales) correspond à un certain nombre de traits
de
caractère, de formes de pensée, de structures mentales et sociales, q
2853
spond à un certain nombre de traits de caractère,
de
formes de pensée, de structures mentales et sociales, qui se trouvent
2854
certain nombre de traits de caractère, de formes
de
pensée, de structures mentales et sociales, qui se trouvent être à la
2855
mbre de traits de caractère, de formes de pensée,
de
structures mentales et sociales, qui se trouvent être à la fois les c
2856
es, qui se trouvent être à la fois les conditions
de
réalisation et les résultats de l’application de cette politique, soi
2857
is les conditions de réalisation et les résultats
de
l’application de cette politique, soit de puissance, soit de liberté.
2858
de réalisation et les résultats de l’application
de
cette politique, soit de puissance, soit de liberté. Par exemple, che
2859
sultats de l’application de cette politique, soit
de
puissance, soit de liberté. Par exemple, chez tous les penseurs de la
2860
ation de cette politique, soit de puissance, soit
de
liberté. Par exemple, chez tous les penseurs de la tradition unitaire
2861
t de liberté. Par exemple, chez tous les penseurs
de
la tradition unitaire, on retrouvera exactement les mêmes principes :
2862
era exactement les mêmes principes : l’exaltation
de
l’unité obtenue par un pouvoir fort et uniformisant, donc centralisé,
2863
ersités considérées comme des gênes, l’exaltation
de
la grandeur, le dogme de la souveraineté absolue de l’État à l’intéri
2864
des gênes, l’exaltation de la grandeur, le dogme
de
la souveraineté absolue de l’État à l’intérieur de ses frontières, et
2865
la grandeur, le dogme de la souveraineté absolue
de
l’État à l’intérieur de ses frontières, et enfin le culte (car c’est
2866
ige national. En revanche, chez tous les penseurs
de
la tradition fédéraliste, on retrouvera les principes exactement inve
2867
es citoyens au lieu que ceux-ci soient au service
de
l’État. 9 février 1968 La puissance et la liberté sont évidemment ant
2868
dont la politique consiste à rechercher l’optimum
de
combinaisons en tension. La recherche des conditions optimales entre
2869
nce. 29 avril 1967 Il y a ainsi un certain nombre
de
familles d’esprit qui sont réfractaires congénitalement à une bonne c
2870
l 1967 Il y a ainsi un certain nombre de familles
d’
esprit qui sont réfractaires congénitalement à une bonne compréhension
2871
ompréhension du fédéralisme. Ce sont les familles
d’
esprit nationalistes, traditionalistes et communistes. 22 mai 1969 On
2872
nt deux tendances antinomiques et contradictoires
de
la mentalité occidentale : celle qui privilégie la cité, l’État, cell
2873
ce, celle qui vise la liberté. Ce sont les formes
de
pensée unitaire et dialectique, insistant sur l’unité ou sur la diver
2874
ité des parties égalisées Contemporains : —
de
la fondation de la polis Héraclite Parménide — de la polis organis
2875
égalisées Contemporains : — de la fondation
de
la polis Héraclite Parménide — de la polis organisée Aristote Plat
2876
la fondation de la polis Héraclite Parménide —
de
la polis organisée Aristote Platon — du conflit empereur-pape Dante
2877
ante Gilles de Rome, Pierre Dubois — des débuts
de
l’absolutisme du prince Anabaptistes Calvin Machiavel, Hobbes — de
2878
prince Anabaptistes Calvin Machiavel, Hobbes —
de
l’absolutisme Althusius Bodin — de la centralisation monarchique pu
2879
, Hobbes — de l’absolutisme Althusius Bodin —
de
la centralisation monarchique puis révolutionnaire Rousseau jacobins,
2880
s-nations Tocqueville Proudhon Bakounine Marx —
de
l’opposition fédéralisme / totalitarisme Fédéralistes personnalistes,
2881
onnalistes, intégraux et européens Totalitarismes
de
toutes couleurs 5. Autorité et pouvoir 4 février 1966 Il faut
2882
re l’autorité (force morale) et le pouvoir (force
de
police) sans oublier que, à certains moments, même le préfet de polic
2883
s oublier que, à certains moments, même le préfet
de
police, s’il perd l’autorité, ou s’il cesse d’être le délégué de l’au
2884
et de police, s’il perd l’autorité, ou s’il cesse
d’
être le délégué de l’autorité, si les agents ne lui obéissent pas, lui
2885
perd l’autorité, ou s’il cesse d’être le délégué
de
l’autorité, si les agents ne lui obéissent pas, lui ne peut rien fair
2886
; c’est-à-dire que le pouvoir, finalement, dépend
de
l’autorité ; un pouvoir sans autorité ne peut même plus s’exercer. 14
2887
ion assez spontanée qu’est le Saint-Empire romain
de
nations germaniques, c’est que cela existe par la force du raisonneme
2888
isonnement, par la force du désir qu’ont les gens
d’
un empire, par la force du mythe, mais pas autrement. On pourrait dire
2889
i que l’empereur a l’autorité, mais qu’il n’a pas
de
pouvoir et que beaucoup de gens qui sont ses vassaux tirent de lui l’
2890
que beaucoup de gens qui sont ses vassaux tirent
de
lui l’autorité nécessaire à l’exercice de leur pouvoir. Car il faut b
2891
tirent de lui l’autorité nécessaire à l’exercice
de
leur pouvoir. Car il faut bien se dire les deux choses : l’autorité s
2892
ational-socialisme, qui était parti pour un règne
de
mille ans, comme le répétait toujours Hitler ; il s’est instauré en 1
2893
e a donc duré douze ans et est un des plus courts
de
l’histoire. Le régime fasciste italien a duré un peu plus longtemps :
2894
e fasciste italien a duré un peu plus longtemps :
de
1922 à 1945, c’est-à-dire 23 ans. Quant au communisme russe, il est t
2895
Quant au communisme russe, il est très difficile
de
dire sa durée, parce qu’il a tellement changé. Il s’est instauré en 1
2896
hangé. Il s’est instauré en 1917 ; jusqu’au règne
de
Staline y compris, il a eu une première période où il devenait de plu
2897
e et on ne saura pas si on célèbre l’anniversaire
d’
un même régime, ou s’il n’a pas changé subrepticement. 18 novembre 196
2898
1966 Nous dirons qu’il y a une double descendance
de
la Révolution française : d’un côté, on a la tradition jacobine qui,
2899
e double descendance de la Révolution française :
d’
un côté, on a la tradition jacobine qui, à beaucoup d’égards, est la s
2900
côté, on a la tradition jacobine qui, à beaucoup
d’
égards, est la suite de l’absolutisme centralisateur ; elle représente
2901
n jacobine qui, à beaucoup d’égards, est la suite
de
l’absolutisme centralisateur ; elle représente la même forme d’esprit
2902
me centralisateur ; elle représente la même forme
d’
esprit. Dans le courant du xixe siècle, le jacobinisme donnera le nat
2903
donnera le nationalisme — je parle naturellement
de
familles d’esprit, de types de pensée — lequel nationalisme aboutira,
2904
nationalisme — je parle naturellement de familles
d’
esprit, de types de pensée — lequel nationalisme aboutira, au xxe siè
2905
me — je parle naturellement de familles d’esprit,
de
types de pensée — lequel nationalisme aboutira, au xxe siècle, au to
2906
arle naturellement de familles d’esprit, de types
de
pensée — lequel nationalisme aboutira, au xxe siècle, au totalitaris
2907
adre veut qu’il soit : idéal. L’autre descendance
de
la Révolution française est la « démocratie », le jacobinisme étant p
2908
mocratie », le jacobinisme étant plutôt une forme
de
despotisme, de tyrannie, même s’il prend souvent l’étiquette de démoc
2909
jacobinisme étant plutôt une forme de despotisme,
de
tyrannie, même s’il prend souvent l’étiquette de démocratie. La démoc
2910
de tyrannie, même s’il prend souvent l’étiquette
de
démocratie. La démocratie est définie par le pluralisme des partis et
2911
partis et leur lutte, ce qui permet la naissance
de
fédérations, ou de régimes tendant vers le fédéralisme — car pluralis
2912
te, ce qui permet la naissance de fédérations, ou
de
régimes tendant vers le fédéralisme — car pluralisme va, bien entendu
2913
sme va avec militarisme et totalitarisme. Le type
d’
homme qui correspond à la démocratie pluraliste et aux fédérations est
2914
e la philosophie des mouvements personnalistes et
de
penseurs très différents, aussi différents que Maritain, du côté cath
2915
agnostiques, mais qui reprennent ces mêmes cadres
de
pensée pour les appliquer à la personne. 7. Utopie, langage, polit
2916
, politique 10 février 1964 Le politicien part
de
l’idée que la politique est l’art du possible. L’utopiste, dans le me
2917
L’utopiste, dans le meilleur sens du terme, part
de
l’idée que la politique, c’est l’art de rendre possible ce qui est né
2918
rme, part de l’idée que la politique, c’est l’art
de
rendre possible ce qui est nécessaire ; les plus grands sont ceux qui
2919
ux qui ont réussi à susciter les moyens pratiques
de
leur but idéal, de leur projection lointaine d’un idéal cohérent. 29
2920
susciter les moyens pratiques de leur but idéal,
de
leur projection lointaine d’un idéal cohérent. 29 octobre 1965 Toute
2921
s de leur but idéal, de leur projection lointaine
d’
un idéal cohérent. 29 octobre 1965 Toute parole met en marche quelque
2922
is je pense que dans la vie publique et politique
d’
aujourd’hui, c’est plus vrai que jamais. Le rôle de la parole est infi
2923
’aujourd’hui, c’est plus vrai que jamais. Le rôle
de
la parole est infiniment plus grand au xxe siècle, et notamment dans
2924
itique à coup de discours. Ils étaient des hommes
de
peu de mots, c’est souvent comme cela qu’on les décrit dans les épopé
2925
, qui prenaient une décision, mais pas des hommes
de
discours, pas des hommes de doctrines et d’idéologies qui n’existaien
2926
, mais pas des hommes de discours, pas des hommes
de
doctrines et d’idéologies qui n’existaient pas. Plus près de nous, si
2927
ommes de discours, pas des hommes de doctrines et
d’
idéologies qui n’existaient pas. Plus près de nous, si nous prenons un
2928
a France ; je ne me rappelle pas un seul discours
de
Louis XIV, que l’on cite, que l’on fasse apprendre aux enfants des éc
2929
x enfants des écoles en France ; ce que l’on sait
de
Louis XIV et de son règne, ce sont les guerres qu’il a faites, les tr
2930
oles en France ; ce que l’on sait de Louis XIV et
de
son règne, ce sont les guerres qu’il a faites, les traités, les const
2931
65 Si on examine le vocabulaire du débat européen
d’
aujourd’hui, on s’aperçoit qu’on utilise à peu près au petit bonheur d
2932
tre martel en tête pour savoir lequel on a décidé
d’
employer aux dépens des autres. Il est extrêmement rare qu’un homme d’
2933
extrêmement rare qu’un homme d’État se préoccupe
d’
opposer nommément, expressément, deux étiquettes de l’union, comme sup
2934
’opposer nommément, expressément, deux étiquettes
de
l’union, comme supranationalité et fédération ou simplement coopérati
2935
ération ou simplement coopération. Qu’il le fasse
d’
une manière exacte, c’est une autre question, mais en tout cas, il le
2936
lez-vous établir, adopter, discuter une politique
d’
union, si vous n’êtes pas capable de lui donner un nom ; un nom qui la
2937
une politique d’union, si vous n’êtes pas capable
de
lui donner un nom ; un nom qui la distingue d’autres politiques, qui
2938
avec le nationalisme à l’extérieur ; illustration
de
cette combinaison : Charles Maurras et toutes ses théories politiques
2939
e interne. À gauche, on voit se développer l’idée
d’
un fédéralisme externe contre la souveraineté absolue des États, et on
2940
que cela se combine très bien avec une conception
de
l’État unitaire, planifié, de la nation même jacobine. Exemple de cet
2941
avec une conception de l’État unitaire, planifié,
de
la nation même jacobine. Exemple de cette combinaison qui répond poin
2942
re, planifié, de la nation même jacobine. Exemple
de
cette combinaison qui répond point par point, mais qui est l’inverse
2943
ui répond point par point, mais qui est l’inverse
de
la précédente : un homme comme Jean Monnet, qui est un socialiste pla
2944
te planificateur, qui ne se préoccupe pas du tout
de
fédéralisme interne en France, mais qui se préoccupe fortement de lut
2945
nterne en France, mais qui se préoccupe fortement
de
lutter contre le nationalisme à l’extérieur ; il veut donc une nation
2946
r fédération à cause de la résistance acharnée et
de
l’idolâtrie des États-nations, on ne peut plus imaginer qu’une espèce
2947
s-nations, on ne peut plus imaginer qu’une espèce
de
lente et inexorable colonisation économique par l’Ouest et politico-m
2948
co-militaire par l’Est, qui sera la rançon fatale
de
nos attachements maniaques aux fictions de l’indépendance nationale a
2949
fatale de nos attachements maniaques aux fictions
de
l’indépendance nationale absolue, de la souveraineté nationale sans l
2950
aux fictions de l’indépendance nationale absolue,
de
la souveraineté nationale sans limites, fictions sacrées, qui peuvent
2951
épaulent mutuellement : si la politique est l’art
de
choisir entre plusieurs alternatives, l’utopie est l’art de rendre po
2952
entre plusieurs alternatives, l’utopie est l’art
de
rendre possible telle ou telle option souhaitable. Ainsi, l’utopie au
2953
e finalités déclarées et assumées. Plutôt qu’“art
de
gouverner”, la politique est l’affaire de tous. En l’absence de civis
2954
qu’“art de gouverner”, la politique est l’affaire
de
tous. En l’absence de civisme en effet, les citoyens ne sont plus que
2955
la politique est l’affaire de tous. En l’absence
de
civisme en effet, les citoyens ne sont plus que des sujets passifs d’
2956
les citoyens ne sont plus que des sujets passifs
d’
un pouvoir souverain. La politique étant fondée sur l’engagement de to
2957
erain. La politique étant fondée sur l’engagement
de
tous, elle ne peut être exercée réellement qu’à l’intérieur de commun
2958
blir des institutions favorisant le développement
de
la personne. Ainsi, une telle “politique de la personne” libre et res
2959
ement de la personne. Ainsi, une telle “politique
de
la personne” libre et responsable débouche sur le fédéralisme par ass
2960
che sur le fédéralisme par association volontaire
de
ces communautés de base entre elles. Comme Proudhon l’avait discerné,
2961
sme par association volontaire de ces communautés
de
base entre elles. Comme Proudhon l’avait discerné, ce sont des fédéra
2962
roudhon l’avait discerné, ce sont des fédérations
de
communes, puis de régions, qui constitueront la fédération européenne
2963
scerné, ce sont des fédérations de communes, puis
de
régions, qui constitueront la fédération européenne dans un mouvement
2964
ueront la fédération européenne dans un mouvement
de
bas en haut qui est le meilleur moyen de garantir les libertés et les
2965
ouvement de bas en haut qui est le meilleur moyen
de
garantir les libertés et les diversités de chacun. Mais qu’en est-il
2966
moyen de garantir les libertés et les diversités
de
chacun. Mais qu’en est-il de l’État, qu’on fait trop souvent l’agent
2967
és et les diversités de chacun. Mais qu’en est-il
de
l’État, qu’on fait trop souvent l’agent exclusif de toute politique ?
2968
l’État, qu’on fait trop souvent l’agent exclusif
de
toute politique ? Considéré objectivement, c’est-à-dire débarrassé de
2969
Considéré objectivement, c’est-à-dire débarrassé
de
son aura sacrée, celui-ci n’est guère plus qu’un instrument concret,
2970
guère plus qu’un instrument concret, un ensemble
de
fonctionnaires chargés d’exécuter les choix politiques définis par la
2971
nt concret, un ensemble de fonctionnaires chargés
d’
exécuter les choix politiques définis par la communauté. L’État n’a qu
2972
, c’est la communauté qui a l’autorité, condition
d’
exercice du pouvoir. Les idéologies politiques modernes ont déplacé le
2973
nes ont déplacé le sacré du religieux au profane,
de
l’Église à la nation. La nation est devenue un nouveau dogme en vertu
2974
La nation idéologique moderne se distingue ainsi
de
l’idée originelle : la communauté de naissance. La pensée occidentale
2975
tingue ainsi de l’idée originelle : la communauté
de
naissance. La pensée occidentale est marquée par des antinomies irréd
2976
les. Toute politique se voit notamment contrainte
de
rechercher le meilleur équilibre possible entre puissance et liberté,
2977
édéralisme, soldat politique et citoyen. Le choix
de
la puissance est un choix collectif : c’est celui de l’État-nation. L
2978
la puissance est un choix collectif : c’est celui
de
l’État-nation. Le choix de la liberté est un choix individuel et comm
2979
ollectif : c’est celui de l’État-nation. Le choix
de
la liberté est un choix individuel et communautaire : c’est celui du
2980
car les unions volontaires supposent l’existence
de
différences entre les parties et sont conclues pour les garantir. Le
2981
amment toute discussion sérieuse sur les formules
d’
union européenne et montre l’utilité d’établir un lexique des termes p
2982
s formules d’union européenne et montre l’utilité
d’
établir un lexique des termes politiques clarifiant, en particulier, c
2983
ens ancien). La région est définie par la densité
de
population, l’accroissement de la production, la vie intellectuelle,
2984
nie par la densité de population, l’accroissement
de
la production, la vie intellectuelle, l’intensité du rayonnement. C’e
2985
ns). La région est la vraie unité socioéconomique
de
l’Europe d’aujourd’hui ; on l’étudie surtout sous l’angle économique,
2986
on est la vraie unité socioéconomique de l’Europe
d’
aujourd’hui ; on l’étudie surtout sous l’angle économique, mais on peu
2987
lturelle, elle peut devenir une réalité politique
de
base de l’Europe de demain. 24 février 1967 Les régions sont, en puis
2988
, elle peut devenir une réalité politique de base
de
l’Europe de demain. 24 février 1967 Les régions sont, en puissance, l
2989
devenir une réalité politique de base de l’Europe
de
demain. 24 février 1967 Les régions sont, en puissance, les vraies au
2990
régions sont, en puissance, les vraies autonomies
de
la fin du xxe et du xxie siècle. La notion d’auto-nomie a subi des
2991
s de la fin du xxe et du xxie siècle. La notion
d’
auto-nomie a subi des modifications profondes au cours de l’histoire e
2992
régionales sont inexistantes : simple délégation
de
pouvoirs du centre.) Au xxe siècle, on s’aperçoit que les États-nati
2993
e civisme en vidant les communes et les provinces
de
leur vie propre, autonome). Elle est trop petite pour les tâches inte
2994
internationales. Alors, où trouver des autonomies
d’
un type nouveau, aptes à coopérer entre elles d’une part, aptes à perm
2995
part ? Les régions vont être ces nouvelles unités
d’
autonomie. 6 novembre 1970 La participation réelle aux affaires publiq
2996
que dans le cadre communal et régional, l’avenir
de
la démocratie se confond avec celui des régions. Toute instruction ci
2997
mencera donc par définir les conditions concrètes
d’
exercice du civisme, les dimensions variées des tâches publiques et de
2998
espondent : commune et entreprise, région, groupe
de
régions (national ou sectoriel), fédération. Et, loin de se borner à
2999
Et, loin de se borner à décrire les institutions
de
la capitale, elle fera voir les problèmes concrets de la vie publique
3000
a capitale, elle fera voir les problèmes concrets
de
la vie publique et les moyens d’y participer à tous les étages décisi
3001
oblèmes concrets de la vie publique et les moyens
d’
y participer à tous les étages décisionnels. 13 novembre 1970 Il est é
3002
eu du xixe siècle, Tocqueville écrit que l’école
de
la liberté, c’est la commune. On a oublié tout cela jusque très récem
3003
Il est par exemple indispensable que j’aie traité
de
la genèse, de l’essor et de la crise de l’État-nation avant de traite
3004
mple indispensable que j’aie traité de la genèse,
de
l’essor et de la crise de l’État-nation avant de traiter des régions,
3005
able que j’aie traité de la genèse, de l’essor et
de
la crise de l’État-nation avant de traiter des régions, car les régio
3006
ie traité de la genèse, de l’essor et de la crise
de
l’État-nation avant de traiter des régions, car les régions se défini
3007
ns. De même, la culture européenne, qui est faite
de
sources très différentes et de valeurs souvent très antinomiques — où
3008
nne, qui est faite de sources très différentes et
de
valeurs souvent très antinomiques — où, donc, la diversité joue un rô
3009
des membres qui s’unissent. Le thème des projets
d’
union de l’Europe vient également converger avec tous les autres dans
3010
bres qui s’unissent. Le thème des projets d’union
de
l’Europe vient également converger avec tous les autres dans le trait
3011
tribuer et répartir l’État aux différents niveaux
de
décision où il peut servir une entité vivante, civique, économique ou
3012
rôlé par l’usager, distribuer et répartir l’État,
de
la commune et de l’entreprise à la région et aux groupements de régio
3013
, distribuer et répartir l’État, de la commune et
de
l’entreprise à la région et aux groupements de régions jusqu’au nivea
3014
et de l’entreprise à la région et aux groupements
de
régions jusqu’au niveau européen ; là, des agences fédérales, du type
3015
eau européen ; là, des agences fédérales, du type
de
la Communauté de Bruxelles, seront chargées de la concertation des gr
3016
, des agences fédérales, du type de la Communauté
de
Bruxelles, seront chargées de la concertation des grandes tâches d’in
3017
pe de la Communauté de Bruxelles, seront chargées
de
la concertation des grandes tâches d’intérêt public, tâches politique
3018
nt chargées de la concertation des grandes tâches
d’
intérêt public, tâches politiques au sens originel du mot : l’économie
3019
continentales. Voilà donc le modèle fédéraliste
de
la Cité européenne : la complexité des régions rendra justice à ses f
3020
a justice à ses fécondes diversités, et l’ampleur
de
la fédération exprimera l’unité millénaire de sa culture. 27 juin 196
3021
eur de la fédération exprimera l’unité millénaire
de
sa culture. 27 juin 1969 Pour prévenir des malentendus fréquents, je
3022
iatures. Les régions nouvelles seront distribuées
de
toutes sortes de manières, en toutes sortes de réseaux qui se recouvr
3023
ons nouvelles seront distribuées de toutes sortes
de
manières, en toutes sortes de réseaux qui se recouvriront de différen
3024
es de toutes sortes de manières, en toutes sortes
de
réseaux qui se recouvriront de différentes façons dans l’ensemble de
3025
, en toutes sortes de réseaux qui se recouvriront
de
différentes façons dans l’ensemble de l’Europe. Ce ne seront pas des
3026
ecouvriront de différentes façons dans l’ensemble
de
l’Europe. Ce ne seront pas des mini-États-nations enfermant toutes so
3027
as des mini-États-nations enfermant toutes sortes
de
réalités hétéroclites dans les mêmes frontières. Ce schéma paraît com
3028
qui m’amène, pour définir la fédération possible
de
l’Europe sur la base des régions, à reprendre la formule de Lénine, q
3029
e sur la base des régions, à reprendre la formule
de
Lénine, qui disait que la Russie soviétique, c’était le marxisme plus
3030
é ; je dirais volontiers que la fédération future
de
l’Europe, ce sera le fédéralisme plus les ordinateurs. 30 mai 1969 Le
3031
t linguistiques sont fluctuantes : il est absurde
de
vouloir les fixer par des frontières. De plus, il est rare que ces fr
3032
économiques, ce qui conduit à des conflits autour
d’
une ville ou d’une région pour des raisons économiques. C’est ainsi qu
3033
qui conduit à des conflits autour d’une ville ou
d’
une région pour des raisons économiques. C’est ainsi que, comme le dir
3034
dira plus tard Coudenhove-Kalergi, les « traités
de
banlieue » ont créé une bonne douzaine d’Alsace-Lorraine en Europe. O
3035
traités de banlieue » ont créé une bonne douzaine
d’
Alsace-Lorraine en Europe. On peut donc dire que les gens qui ont fait
3036
donc dire que les gens qui ont fait les « traités
de
banlieue » n’avaient pas su tirer les leçons de la guerre de 1914. Il
3037
s de banlieue » n’avaient pas su tirer les leçons
de
la guerre de 1914. Ils n’avaient pas du tout compris que la guerre de
3038
» n’avaient pas su tirer les leçons de la guerre
de
1914. Ils n’avaient pas du tout compris que la guerre de 1914 était l
3039
. Ils n’avaient pas du tout compris que la guerre
de
1914 était l’éclatement de l’Europe des États-nations, éclatement log
3040
compris que la guerre de 1914 était l’éclatement
de
l’Europe des États-nations, éclatement logique résultant d’une longue
3041
e des États-nations, éclatement logique résultant
d’
une longue préparation. Ils n’ont pas vu que le véritable responsable
3042
on. Ils n’ont pas vu que le véritable responsable
de
la guerre était le stato-nationalisme. 30 octobre 1970 Passer aux rég
3043
0 Passer aux régions, ce serait passer des mythes
de
la souveraineté nationale absolue aux réalités que les régions peuven
3044
et plus variées. L’étude des régions en Europe et
de
toutes leurs formules variées — régions économiques, régions ethnique
3045
les, régions écologiques, qui n’ont aucune raison
d’
avoir la même extension, toutes ces régions n’étant pas définies par l
3046
iplines traditionnelles, et cela aux trois degrés
de
l’enseignement. 3. Fédération des régions 30 octobre 1970 Pour
3047
s 30 octobre 1970 Pour une quantité croissante
d’
historiens, de sociologues, d’économistes, et surtout de gens qui comb
3048
e 1970 Pour une quantité croissante d’historiens,
de
sociologues, d’économistes, et surtout de gens qui combinent ces diff
3049
quantité croissante d’historiens, de sociologues,
d’
économistes, et surtout de gens qui combinent ces différentes discipli
3050
oriens, de sociologues, d’économistes, et surtout
de
gens qui combinent ces différentes disciplines avec encore bien d’aut
3051
la région est aujourd’hui l’unité opérationnelle
de
base du fédéralisme européen, et à ce titre, elle va devenir le thème
3052
ulement la méthode, mais les conditions concrètes
d’
un grand nombre d’activités culturelles en Europe. En effet, les mala
3053
, mais les conditions concrètes d’un grand nombre
d’
activités culturelles en Europe. En effet, les maladies et dysfonctio
3054
n Europe. En effet, les maladies et dysfonctions
de
la culture européenne au xxe siècle ont presque toutes pour origine
3055
s du stato-nationalisme tel qu’il s’est constitué
de
Napoléon à Hitler : régime anémiant des « cultures nationales », obst
3056
s « cultures nationales », obstacles aux échanges
de
tous ordres, persécution des minorités et conformisme idéologique imp
3057
ive, terme à terme, au stato-nationalisme fauteur
de
cloisonnements moraux ou douaniers qui ne protègent que la médiocrité
3058
t. Au-delà des systèmes hypocrites et inefficaces
d’
alliances entre États-nations souverains qui n’admettent aucun droit s
3059
eur intérêt, la fédération représente le principe
de
la vraie communauté, libre association conclue au nom d’un idéal comm
3060
ctobre 1970 L’université n’est qu’une des malades
de
la société européenne du xxe siècle. Ces maladies se rapportent tout
3061
tent toutes au découpage arbitraire et artificiel
de
l’ensemble européen en États-nations : obstacles aux échanges de tous
3062
uropéen en États-nations : obstacles aux échanges
de
tous ordres causés par les frontières, par les visas, par les quotas,
3063
les ; conformisme idéologique imposé par le moyen
de
l’école primaire, de l’école secondaire, mais très souvent aussi des
3064
ologique imposé par le moyen de l’école primaire,
de
l’école secondaire, mais très souvent aussi des universités ; budgets
3065
tionnaires sur l’université dans beaucoup de pays
d’
Europe. Un fédéralisme basé sur les régions paraît de nature à fournir
3066
urope. Un fédéralisme basé sur les régions paraît
de
nature à fournir l’alternative à la plupart de ces maux nés du centra
3067
t de ces maux nés du centralisme, du nationalisme
de
la culture. Une redistribution des richesses de l’Europe autour de fo
3068
e de la culture. Une redistribution des richesses
de
l’Europe autour de foyers, de métropoles rayonnantes, non plus séparé
3069
ution des richesses de l’Europe autour de foyers,
de
métropoles rayonnantes, non plus séparées par des frontières, mais dé
3070
par des frontières, mais définies par leur force
de
rayonnement, paraît seule propre à surmonter tous les maux nés du clo
3071
à nos échanges culturels. Toute culture est faite
d’
échanges, et tout obstacle à ces échanges est un affaiblissement pour
3072
pour la culture. Donc, la diminution progressive
de
l’emprise nationale sur l’enseignement est le remède à proposer à la
3073
des régions. Tout dépendra alors du gouvernement
de
Madrid : s’il favorise l’autonomie des régions, on arrivera peut-être
3074
rché depuis des siècles ; si cela ne se passe pas
de
cette manière raisonnable — ce serait une nouveauté complète dans l’h
3075
l’histoire espagnole que quelque chose s’y passe
de
manière raisonnable ! — il y aura des mouvements séparatistes de plus
3076
qu’il arrive, en Espagne comme dans d’autres pays
d’
Europe, le problème régional va prendre de plus en plus d’importance.
3077
, le problème régional va prendre de plus en plus
d’
importance. n. Avec l’introduction suivante des éditeurs : « La rég
3078
phiques : c’est pourquoi Denis de Rougemont parle
de
“région à géométrie variable”. Ainsi définie, elle constitue, au-delà
3079
variable”. Ainsi définie, elle constitue, au-delà
de
la commune, le cadre de participation civique le plus adapté à l’exer
3080
, elle constitue, au-delà de la commune, le cadre
de
participation civique le plus adapté à l’exercice de la démocratie. L
3081
participation civique le plus adapté à l’exercice
de
la démocratie. Les régions ne sauraient rester elles-mêmes si elles s
3082
Au contraire, elles contribueront au dépassement
de
l’État-nation par le bas et favoriseront son dépassement par le haut
3083
dérant. L’Europe n’a jamais pu s’unir sur la base
d’
États-nations égoïstes et jaloux de leurs prérogatives souveraines ; a
3084
ir sur la base d’États-nations égoïstes et jaloux
de
leurs prérogatives souveraines ; aujourd’hui, elle a la chance de le
3085
tives souveraines ; aujourd’hui, elle a la chance
de
le faire sur la base des régions, car le passage des mythes nationaux
3086
ge des mythes nationaux aux réalités concrètes va
de
pair avec le passage de l’État-nation aux régions. Refusant en effet
3087
aux réalités concrètes va de pair avec le passage
de
l’État-nation aux régions. Refusant en effet l’alignement artificiel
3088
égions. Refusant en effet l’alignement artificiel
de
réalités hétérogènes à l’intérieur de frontières sacralisées et rigid
3089
diversités, stimuleront entre elles des processus
d’
unions volontaires, consenties précisément pour garantir les autonomie
3090
as démenti, si l’on considère les étapes récentes
de
la “régionalisation” en Espagne et en Italie, de la “décentralisation
3091
de la “régionalisation” en Espagne et en Italie,
de
la “décentralisation” en France, de la “devolution” dans le Royaume-U
3092
et en Italie, de la “décentralisation” en France,
de
la “devolution” dans le Royaume-Uni, qui apparaissent comme autant de
3093
ans le Royaume-Uni, qui apparaissent comme autant
de
confirmations. À tel point que de plus en plus, on parle, au niveau e
3094
ue de plus en plus, on parle, au niveau européen,
de
l’établissement d’un “Sénat” des régions (idée lancée par Denis de Ro
3095
on parle, au niveau européen, de l’établissement
d’
un “Sénat” des régions (idée lancée par Denis de Rougemont en 1970). C
3096
la prémisse la plus favorable à l’avènement futur
d’
une Europe fédérale. »
3097
olution est essentiellement mouvement. Le concept
de
révolution évoque tout de suite deux choses : explosion et mouvement.
3098
: explosion et mouvement. C’est la relativisation
de
toutes choses. L’État, par ses excès, a amené la révolution politique
3099
nturière, et surtout, elle provoque un changement
de
centre et un changement de hiérarchie des valeurs conséquemment. 12 j
3100
provoque un changement de centre et un changement
de
hiérarchie des valeurs conséquemment. 12 juin 1970 Si l’État-nation s
3101
n 1970 Si l’État-nation se veut porteur et garant
de
toutes les valeurs, la révolution est au contraire un acte de réévalu
3102
s valeurs, la révolution est au contraire un acte
de
réévaluation de toutes les valeurs. Tout ce qui dépend de l’État tend
3103
volution est au contraire un acte de réévaluation
de
toutes les valeurs. Tout ce qui dépend de l’État tend à la stabilité,
3104
luation de toutes les valeurs. Tout ce qui dépend
de
l’État tend à la stabilité, et c’est le besoin de stabilité, de sécur
3105
de l’État tend à la stabilité, et c’est le besoin
de
stabilité, de sécurité, qui explique son triomphe (État : status, sta
3106
à la stabilité, et c’est le besoin de stabilité,
de
sécurité, qui explique son triomphe (État : status, stare, stabilité,
3107
, poids et mesures, police). La révolution relève
de
l’ensemble de concepts contraires : mouvement, changement, innovation
3108
ures, police). La révolution relève de l’ensemble
de
concepts contraires : mouvement, changement, innovation, relativisati
3109
mouvement, changement, innovation, relativisation
de
toutes choses. L’État s’est institué en Europe en réaction au vertige
3110
écentration, à la déstabilisation caractéristique
de
la Renaissance. Il a été rassurant, sécurisant, ordonnateur, cadre fi
3111
vement explosif, expansif, innovateur, aventurier
de
la Renaissance, mais surtout traduit une décentration du monde — un c
3112
traduit une décentration du monde — un changement
de
centre, un regroupement des planètes autour du Soleil, du cosmos auto
3113
tion » n’a eu qu’un sens astronomique : mouvement
de
la terre et des planètes autour du Soleil. Mais cela est symbolique d
3114
anètes autour du Soleil. Mais cela est symbolique
de
toutes les autres transformations : Galilée, qui est le véritable hér
3115
sformations : Galilée, qui est le véritable héros
de
ce qu’on nomme la « révolution copernicienne », est le symbole de l’h
3116
e la « révolution copernicienne », est le symbole
de
l’homme découvrant un nouvel ordre, un centre plus « vrai » autour du
3117
eligieuses, politiques et civiques se réordonnent
d’
une manière plus significative, laissant tomber l’ordre traditionnel,
3118
mé, trop étroit, mal ajusté au réel. Mais changer
de
centre, c’est aussi changer de valeurs, de critères, de hiérarchie. C
3119
réel. Mais changer de centre, c’est aussi changer
de
valeurs, de critères, de hiérarchie. C’est tout changer. Cela renvoie
3120
hanger de centre, c’est aussi changer de valeurs,
de
critères, de hiérarchie. C’est tout changer. Cela renvoie à un concep
3121
tre, c’est aussi changer de valeurs, de critères,
de
hiérarchie. C’est tout changer. Cela renvoie à un concept bien plus a
3122
ien plus ancien que Copernic : c’est l’équivalent
de
la conversion des chrétiens. 26 juin 1970 La révolution est une tradu
3123
1970 La révolution est une traduction collective
de
la conversion chrétienne, avec les mêmes caractéristiques : soudainet
3124
ieure, et explosion, ainsi que changement complet
de
hiérarchie. Cela peut réussir pour un individu, mais il est difficile
3125
t réussir pour un individu, mais il est difficile
de
faire changer complètement toute la hiérarchie des valeurs, d’une man
3126
ger complètement toute la hiérarchie des valeurs,
d’
une manière instantanée, pour une société. Une société est beaucoup tr
3127
été. Une société est beaucoup trop lourde, formée
de
trop d’inerties, pour être retournée d’un seul coup — sauf s’il y a u
3128
société est beaucoup trop lourde, formée de trop
d’
inerties, pour être retournée d’un seul coup — sauf s’il y a une très
3129
s le cas dans une révolution. À cause de ce poids
d’
inertie que la société oppose à une volonté de changement révolutionna
3130
ids d’inertie que la société oppose à une volonté
de
changement révolutionnaire, la révolution est violente. Elle traduit
3131
ution est violente. Elle traduit ainsi son manque
de
maturation. D’où l’échec de toutes les révolutions connues. 19 juin 1
3132
nte. Elle traduit ainsi son manque de maturation.
D’
où l’échec de toutes les révolutions connues. 19 juin 1970 L’élément d
3133
duit ainsi son manque de maturation. D’où l’échec
de
toutes les révolutions connues. 19 juin 1970 L’élément de soudaineté
3134
s les révolutions connues. 19 juin 1970 L’élément
de
soudaineté et de violence dans la conversion individuelle transposé a
3135
connues. 19 juin 1970 L’élément de soudaineté et
de
violence dans la conversion individuelle transposé au niveau collecti
3136
une longue préparation intime dans la psychologie
de
l’individu. Mais une société, c’est une quantité énorme d’inerties, d
3137
vidu. Mais une société, c’est une quantité énorme
d’
inerties, de choses lourdes à mouvoir ; poids et lourdeur auxquels se
3138
ne société, c’est une quantité énorme d’inerties,
de
choses lourdes à mouvoir ; poids et lourdeur auxquels se heurte l’idé
3139
que l’on n’a pas suffisamment préparé le milieu.
De
là viennent les échecs constants de toutes les révolutions politiques
3140
ré le milieu. De là viennent les échecs constants
de
toutes les révolutions politiques en Europe. Il n’y a pas d’exemple d
3141
es révolutions politiques en Europe. Il n’y a pas
d’
exemple d’une révolution qui ait réussi ce qu’elle voulait faire. Aucu
3142
ions politiques en Europe. Il n’y a pas d’exemple
d’
une révolution qui ait réussi ce qu’elle voulait faire. Aucune n’a abo
3143
e qu’elle voulait faire. Aucune n’a abouti à plus
de
liberté à court ou à moyen terme. Ces échecs réguliers des révolution
3144
violences qui ne pouvaient aboutir qu’au triomphe
de
l’armée et de la police. 28 février 1969 Les libertaires (ceux de l’E
3145
ne pouvaient aboutir qu’au triomphe de l’armée et
de
la police. 28 février 1969 Les libertaires (ceux de l’Europe de l’Est
3146
la police. 28 février 1969 Les libertaires (ceux
de
l’Europe de l’Est, comme Kossuth ou Mickiewicz) ou les nationalistes
3147
on — car j’appelle « révolution » la substitution
d’
un ordre nouveau à un désordre établi. 1848 a surtout été de l’agitati
3148
nouveau à un désordre établi. 1848 a surtout été
de
l’agitation négative ou une reprise d’idées un peu anciennes, celles
3149
urtout été de l’agitation négative ou une reprise
d’
idées un peu anciennes, celles des romantiques, ce qui explique l’éche
3150
taculaire du nationalisme. 14 janvier 1972 L’idée
de
révolution est née du christianisme, et l’on peut vérifier qu’elle a
3151
ue la foi chrétienne — je veux dire : que la zone
d’
influence du christianisme, de ses Églises, de ses théologies, de sa m
3152
dire : que la zone d’influence du christianisme,
de
ses Églises, de ses théologies, de sa morale sociale. La révolution e
3153
one d’influence du christianisme, de ses Églises,
de
ses théologies, de sa morale sociale. La révolution est la transposit
3154
christianisme, de ses Églises, de ses théologies,
de
sa morale sociale. La révolution est la transposition au plan social
3155
La révolution est la transposition au plan social
de
la conversion individuelle. Elle gardera de cette origine le caractèr
3156
ocial de la conversion individuelle. Elle gardera
de
cette origine le caractère de soudaineté, donc d’effroi (ou terreur)
3157
uelle. Elle gardera de cette origine le caractère
de
soudaineté, donc d’effroi (ou terreur) — violence signifiant d’abord,
3158
de cette origine le caractère de soudaineté, donc
d’
effroi (ou terreur) — violence signifiant d’abord, sur le plan spiritu
3159
ctif, et c’est là qu’apparaîtra enfin la finalité
d’
une civilisation, d’une société, liée aux idées d’histoire, de progrès
3160
’apparaîtra enfin la finalité d’une civilisation,
d’
une société, liée aux idées d’histoire, de progrès, de révolution. Il
3161
d’une civilisation, d’une société, liée aux idées
d’
histoire, de progrès, de révolution. Il y a finalité déclarée dès que
3162
sation, d’une société, liée aux idées d’histoire,
de
progrès, de révolution. Il y a finalité déclarée dès que l’homme cher
3163
e société, liée aux idées d’histoire, de progrès,
de
révolution. Il y a finalité déclarée dès que l’homme cherche le progr
3164
’obéissance méticuleuse aux rites, ou aux décrets
de
la puissance du roi (prêtre), ou aux lois constituant l’ordre du mond
3165
s individuels, valeurs chrétiennes liées à l’idée
de
vocation personnelle. 19 juin 1970 Le progrès est intimement lié à la
3166
e sens que c’est une version étalée dans le temps
de
la révolution — ce qui se dit : évolution. La différence étant donc u
3167
donc uniquement le facteur temps, le remplacement
de
la soudaineté, de l’instantanéité de la conversion par la durée — d’o
3168
facteur temps, le remplacement de la soudaineté,
de
l’instantanéité de la conversion par la durée — d’où la substitution
3169
remplacement de la soudaineté, de l’instantanéité
de
la conversion par la durée — d’où la substitution d’un effort prolong
3170
e l’instantanéité de la conversion par la durée —
d’
où la substitution d’un effort prolongé à la violence — qui rend l’évo
3171
la conversion par la durée — d’où la substitution
d’
un effort prolongé à la violence — qui rend l’évolution moins populair
3172
olution et État-nation 12 juin 1970 Le concept
de
révolution, profondément important, typique de l’ensemble culturel eu
3173
pt de révolution, profondément important, typique
de
l’ensemble culturel européen, s’oppose au concept d’État-nation. L’Ét
3174
l’ensemble culturel européen, s’oppose au concept
d’
État-nation. L’État-nation voulait être le porteur et le garant de tou
3175
’État-nation voulait être le porteur et le garant
de
toutes les valeurs. Il y a donc dans l’État une idée de stabilisation
3176
tes les valeurs. Il y a donc dans l’État une idée
de
stabilisation. Au contraire, la révolution est un acte de « réévaluat
3177
lisation. Au contraire, la révolution est un acte
de
« réévaluation » de toutes les valeurs (formule de Nietzsche). Tout c
3178
re, la révolution est un acte de « réévaluation »
de
toutes les valeurs (formule de Nietzsche). Tout ce qui dépend de l’Ét
3179
e « réévaluation » de toutes les valeurs (formule
de
Nietzsche). Tout ce qui dépend de l’État tend à la stabilité, mais le
3180
aleurs (formule de Nietzsche). Tout ce qui dépend
de
l’État tend à la stabilité, mais les excès, l’absolutisation de l’Éta
3181
à la stabilité, mais les excès, l’absolutisation
de
l’État, ont provoqué le système de valeurs contraires qu’est la révol
3182
absolutisation de l’État, ont provoqué le système
de
valeurs contraires qu’est la révolution. 27 mai 1977 Pendant huit siè
3183
Avec la Révolution française, avec le fameux cri
de
Valmy « Vive la nation » qui a au fond donné la victoire aux troupes
3184
elait les sans-culottes et qui étaient d’ailleurs
de
bons bourgeois de Paris, vaincre les meilleures troupes d’Europe qui
3185
ottes et qui étaient d’ailleurs de bons bourgeois
de
Paris, vaincre les meilleures troupes d’Europe qui étaient celles de
3186
ourgeois de Paris, vaincre les meilleures troupes
d’
Europe qui étaient celles de Brunswick, par ce cri et par cette manièr
3187
es meilleures troupes d’Europe qui étaient celles
de
Brunswick, par ce cri et par cette manière absolument non conformiste
3188
i et par cette manière absolument non conformiste
de
livrer une bataille ! Goethe, qui était témoin, a été si stupéfait qu
3189
it qu’il a noté dans son carnet, le même soir : «
De
ce jour, de ce lieu une ère nouvelle va naître. » « Vive la nation »,
3190
oté dans son carnet, le même soir : « De ce jour,
de
ce lieu une ère nouvelle va naître. » « Vive la nation », ça ne voula
3191
France » ; ça voulait dire : Vive ce nouveau type
de
communauté qui instaure la révolution. C’était exactement l’équivalen
3192
évolution. C’était exactement l’équivalent du cri
de
« soviets partout » en 1917 et 1918, lequel ne voulait pas du tout di
3193
out ». Avant cela, il y avait eu un autre exemple
de
ce genre de slogans, c’était le cri de « Ligua, Ligua » qu’on poussai
3194
cela, il y avait eu un autre exemple de ce genre
de
slogans, c’était le cri de « Ligua, Ligua » qu’on poussait dans les c
3195
re exemple de ce genre de slogans, c’était le cri
de
« Ligua, Ligua » qu’on poussait dans les cités italiennes qui devenai
3196
il désignait, comme le mot « nation », une espèce
de
symbole de la nouvelle communauté que l’on recherchait. Avec la Révol
3197
t, comme le mot « nation », une espèce de symbole
de
la nouvelle communauté que l’on recherchait. Avec la Révolution franç
3198
se à tous les esprits la notion du pouvoir absolu
de
l’État, de la « majesté de l’État », de sa toute-puissance sur la vie
3199
es esprits la notion du pouvoir absolu de l’État,
de
la « majesté de l’État », de sa toute-puissance sur la vie quotidienn
3200
ir absolu de l’État, de la « majesté de l’État »,
de
sa toute-puissance sur la vie quotidienne de chaque sujet du royaume,
3201
t », de sa toute-puissance sur la vie quotidienne
de
chaque sujet du royaume, non seulement la vie sociale, mais la vie pr
3202
la conscience (comme le démontrent la révocation
de
l’édit de Nantes et les persécutions religieuses dans toute l’Europe)
3203
religieuses dans toute l’Europe). La conséquence
de
cette croyance générale et superstitieuse en la toute-puissance du po
3204
. En effet, si l’État peut tout, et si on souffre
de
son pouvoir, comme il est absolu et qu’il n’y a pas de recours possib
3205
n pouvoir, comme il est absolu et qu’il n’y a pas
de
recours possible contre lui, il faudra donc s’en emparer par la force
3206
tout ce qu’on désire. S’emparer du pouvoir royal,
de
l’État, voilà qui a dominé en fait l’action des députés aux états gén
3207
osition, la réaction, les « factions » ; on parle
de
trahison, on exclut, on épure, on décapite, on veut toujours plus de
3208
lut, on épure, on décapite, on veut toujours plus
de
rigueur, de pureté. 3. De la révolution personnaliste à la révolut
3209
e, on décapite, on veut toujours plus de rigueur,
de
pureté. 3. De la révolution personnaliste à la révolution aujourd’
3210
n veut toujours plus de rigueur, de pureté. 3.
De
la révolution personnaliste à la révolution aujourd’hui 15 janvier
3211
ion aujourd’hui 15 janvier 1965 Les mouvements
d’
Esprit et de l’Ordre nouveau se proclamaient révolutionnaires, en préc
3212
hui 15 janvier 1965 Les mouvements d’Esprit et
de
l’Ordre nouveau se proclamaient révolutionnaires, en précisant que la
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nticapitaliste et antitotalitaire, qu’il s’agisse
de
totalitarisme communiste, fasciste ou nazi. Ce qu’ils voulaient, en r
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nazi. Ce qu’ils voulaient, en revanche, selon un
de
leurs slogans, c’était une société « à hauteur d’homme », des institu
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de leurs slogans, c’était une société « à hauteur
d’
homme », des institutions « à hauteur d’homme », dont le module serait
3216
à hauteur d’homme », des institutions « à hauteur
d’
homme », dont le module serait la personne, le module et le but final.
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le, et que critiquaient d’autre part des penseurs
de
droite comme Maurras, ils étaient contre cet individualisme « atomisé
3218
lus aucune liberté, qui était purement au service
de
la collectivité ; tandis que l’individualiste de nos démocraties de l
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de la collectivité ; tandis que l’individualiste
de
nos démocraties de l’Ouest était, lui, trop libre, engagé dans rien d
3220
; tandis que l’individualiste de nos démocraties
de
l’Ouest était, lui, trop libre, engagé dans rien du tout. Ces groupes
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re. 19 juin 1970 Je pense qu’il n’y a qu’un point
d’
application à une véritable révolution aujourd’hui, c’est le dépasseme
3222
able révolution aujourd’hui, c’est le dépassement
de
l’État-nation. Tant que l’État-nation persistera, toute une série de
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ant que l’État-nation persistera, toute une série
de
changements souhaitables ne pourra pas être réalisée. On ne pourra pa
3224
e les États-nations, créer des régions en dessous
de
l’État-nation et des fédérations continentales au-dessus. Sur un plan
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au-dessus. Sur un plan plus moral, un changement
de
la hiérarchie des valeurs consisterait à dire : est-il vrai que le bu
3226
eurs consisterait à dire : est-il vrai que le but
de
l’humanité consiste à élever continuellement le niveau de vie du plus
3227
nt le niveau de vie du plus grand nombre possible
de
gens (PNB, taux de croissance, qui sont le sacré des hommes politique
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du plus grand nombre possible de gens (PNB, taux
de
croissance, qui sont le sacré des hommes politiques d’aujourd’hui) ?
3229
oissance, qui sont le sacré des hommes politiques
d’
aujourd’hui) ? L’attitude révolutionnaire serait de mettre le niveau d
3230
’aujourd’hui) ? L’attitude révolutionnaire serait
de
mettre le niveau de vie en question et de lui opposer le mode de vie.
3231
serait de mettre le niveau de vie en question et
de
lui opposer le mode de vie. S’il se trouvait soudain une majorité de
3232
ode de vie. S’il se trouvait soudain une majorité
de
gens pour penser que, dans les cas où il y a conflit entre le niveau
3233
s éditeurs : « La révolution est “la substitution
d’
un ordre nouveau à un désordre établi”. Elle se caractérise par un déc
3234
n et souvent violent. Elle vise à la réévaluation
de
toutes les valeurs dont l’État cherche à garantir la stabilité. Ainsi
3235
lutionnaires viseront en premier lieu à s’emparer
de
lui, et s’ils réussissent, une révolution ainsi faite, au lieu d’amen
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une révolution ainsi faite, au lieu d’amener plus
de
libertés, aura pour conséquences plus probables un renforcement de l’
3237
pour conséquences plus probables un renforcement
de
l’appareil répressif de l’État (armée, police, etc.) : c’est ce qui s
3238
probables un renforcement de l’appareil répressif
de
l’État (armée, police, etc.) : c’est ce qui s’est passé, par exemple,
3239
r la Révolution russe. En fait, la transformation
de
toutes les valeurs d’une société est un objectif difficile à atteindr
3240
En fait, la transformation de toutes les valeurs
d’
une société est un objectif difficile à atteindre. Il réclame en tout
3241
teindre. Il réclame en tout cas un long processus
de
maturation au niveau individuel, puis au niveau collectif. Au niveau
3242
niveau individuel, la révolution est l’équivalent
de
la conversion chrétienne : le converti rejette l’ordre ancien, la Loi
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velle, et cette foi l’engage dans la construction
d’
un nouvel ordre qui assure sa pérennité à travers de nouvelles institu
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un nouvel ordre qui assure sa pérennité à travers
de
nouvelles institutions. Tout projet révolutionnaire part donc d’une r
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stitutions. Tout projet révolutionnaire part donc
d’
une réflexion au niveau individuel qui se poursuit naturellement par u
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une remise en question des finalités sociales et
de
l’ordre social. Pour Denis de Rougemont et les personnalistes des ann
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personnalistes des années 1930, c’est l’avènement
de
la personne libre et responsable qui mettra fin au “désordre établi”
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, moral, politique…), et permettra l’instauration
d’
un nouvel ordre, fédéraliste, basé sur ces communautés favorisant l’en
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sur ces communautés favorisant l’engagement réel
de
la liberté et de la responsabilité du citoyen que sont les communes e
3250
tés favorisant l’engagement réel de la liberté et
de
la responsabilité du citoyen que sont les communes et les régions. »