1 1924, Articles divers (1924–1930). M. de Montherlant, le sport et les jésuites (9 février 1924)
1 M. de Montherlant, le sport et les jésuites (9 février 1924)a M. de Montherlant est cons
2 M. de Montherlant, le sport et les jésuites (9 février 1924)a M. de Montherlant est considéré par plu
3 par plusieurs comme l’un des héritiers de Barrès. Le rapprochement est peut-être prématuré, tout au plus peut-on dire qu’à
4 ut-être prématuré, tout au plus peut-on dire qu’à l’ heure présente déjà, son œuvre, comme celle de Barrès, nous offre plus
5 u moins, cette inquiétude libératrice que produit la recherche de la vérité. Dès son premier livre, il s’est montré tout e
6 nquiétude libératrice que produit la recherche de la vérité. Dès son premier livre, il s’est montré tout entier, il a brav
7 out entier, il a bravement affirmé son unité. Car le temps n’est plus, où les jeunes gens se faisaient, avec sérieux, des
8 nt affirmé son unité. Car le temps n’est plus, où les jeunes gens se faisaient, avec sérieux, des âmes exceptionnellement c
9 langue plus compliquée encore et nuancée jusqu’à l’ ennui. La guerre a donné le coup de grâce à cet esthétisme énervant qu
10 lus compliquée encore et nuancée jusqu’à l’ennui. La guerre a donné le coup de grâce à cet esthétisme énervant qu’on appel
11 ore et nuancée jusqu’à l’ennui. La guerre a donné le coup de grâce à cet esthétisme énervant qu’on appelle symbolisme ; et
12 appelle symbolisme ; et elle a donné naissance à la doctrine de M. de Montherlant, qui en est sortie toute formée et casq
13 t, qui en est sortie toute formée et casquée pour la lutte de l’après-guerre. ⁂ Deux philosophies, affirme-t-il, se disput
14 t sortie toute formée et casquée pour la lutte de l’ après-guerre. ⁂ Deux philosophies, affirme-t-il, se disputent le monde
15 . ⁂ Deux philosophies, affirme-t-il, se disputent le monde. L’une vient de l’Orient, et insinue dans le monde romain les v
16 firme-t-il, se disputent le monde. L’une vient de l’ Orient, et insinue dans le monde romain les virus du christianisme, de
17 e monde. L’une vient de l’Orient, et insinue dans le monde romain les virus du christianisme, de la Réforme, de la Révolut
18 ient de l’Orient, et insinue dans le monde romain les virus du christianisme, de la Réforme, de la Révolution et du romanti
19 ns le monde romain les virus du christianisme, de la Réforme, de la Révolution et du romantisme, les concepts de liberté e
20 ain les virus du christianisme, de la Réforme, de la Révolution et du romantisme, les concepts de liberté et de progrès, l
21 de la Réforme, de la Révolution et du romantisme, les concepts de liberté et de progrès, l’humanitarisme, le bolchévisme. L
22 omantisme, les concepts de liberté et de progrès, l’ humanitarisme, le bolchévisme. L’autre philosophie est celle de l’anti
23 ncepts de liberté et de progrès, l’humanitarisme, le bolchévisme. L’autre philosophie est celle de l’antique Rome, qui a i
24 le bolchévisme. L’autre philosophie est celle de l’ antique Rome, qui a inspiré le catholicisme, la Renaissance, le tradit
25 sophie est celle de l’antique Rome, qui a inspiré le catholicisme, la Renaissance, le traditionnisme et le nationalisme. L
26 de l’antique Rome, qui a inspiré le catholicisme, la Renaissance, le traditionnisme et le nationalisme. L’Orient efféminé 
27 e, qui a inspiré le catholicisme, la Renaissance, le traditionnisme et le nationalisme. L’Orient efféminé ; — en face : l’
28 atholicisme, la Renaissance, le traditionnisme et le nationalisme. L’Orient efféminé ; — en face : l’Ordre romain. Or l’or
29 enaissance, le traditionnisme et le nationalisme. L’ Orient efféminé ; — en face : l’Ordre romain. Or l’ordre, pour M. de M
30 le nationalisme. L’Orient efféminé ; — en face : l’ Ordre romain. Or l’ordre, pour M. de Montherlant comme pour Maurras, e
31 ’Orient efféminé ; — en face : l’Ordre romain. Or l’ ordre, pour M. de Montherlant comme pour Maurras, est ce qu’il importe
32 u monde, qui n’est en rien différente de celle de l’ Action française ; remarquons toutefois cette séparation, que Maurras
33 franchement, du catholicisme et du christianisme, le christianisme étant dans le même camp que la Réforme. M. de Montherla
34 et du christianisme, le christianisme étant dans le même camp que la Réforme. M. de Montherlant n’est décidément pas phil
35 sme, le christianisme étant dans le même camp que la Réforme. M. de Montherlant n’est décidément pas philosophe. Peut-être
36 s philosophe. Peut-être ne lui a-t-il manqué pour le devenir que le temps de méditer : il a quitté le collège jésuite pour
37 eut-être ne lui a-t-il manqué pour le devenir que le temps de méditer : il a quitté le collège jésuite pour la tranchée, p
38 le devenir que le temps de méditer : il a quitté le collège jésuite pour la tranchée, puis « le sport l’a saisi aux patte
39 de méditer : il a quitté le collège jésuite pour la tranchée, puis « le sport l’a saisi aux pattes de la guerre encore co
40 uitté le collège jésuite pour la tranchée, puis «  le sport l’a saisi aux pattes de la guerre encore contus de huit coups d
41 collège jésuite pour la tranchée, puis « le sport l’ a saisi aux pattes de la guerre encore contus de huit coups de griffes
42 tranchée, puis « le sport l’a saisi aux pattes de la guerre encore contus de huit coups de griffes et chaud de l’étreinte
43 ncore contus de huit coups de griffes et chaud de l’ étreinte du fauve merveilleux ». Il n’a pas eu le temps de se ressaisi
44 l’étreinte du fauve merveilleux ». Il n’a pas eu le temps de se ressaisir, le sport prolongeant pour lui, d’une façon obs
45 illeux ». Il n’a pas eu le temps de se ressaisir, le sport prolongeant pour lui, d’une façon obsédante, le rythme de la gu
46 port prolongeant pour lui, d’une façon obsédante, le rythme de la guerre. Du moins a-t-il ainsi évité le choc fatal pour t
47 ant pour lui, d’une façon obsédante, le rythme de la guerre. Du moins a-t-il ainsi évité le choc fatal pour tant d’autres
48 rythme de la guerre. Du moins a-t-il ainsi évité le choc fatal pour tant d’autres du guerrier et du bourgeois. Dernièreme
49 rrier et du bourgeois. Dernièrement, il abandonna le stade et rentra dans le monde où nous vivons tous. Écœuré du désordre
50 ernièrement, il abandonna le stade et rentra dans le monde où nous vivons tous. Écœuré du désordre général, il cherche des
51 s, et nous tend les premiers qui lui tombent sous la main : le sport et la morale romaine. Dans sa hâte salvatrice, M. de
52 tend les premiers qui lui tombent sous la main : le sport et la morale romaine. Dans sa hâte salvatrice, M. de Montherlan
53 emiers qui lui tombent sous la main : le sport et la morale romaine. Dans sa hâte salvatrice, M. de Montherlant ne s’est m
54 ontrepoisons pouvaient être administrés ensemble. L’ opération faite, il a pourtant fallu la justifier, ce qui n’a pas été
55 ensemble. L’opération faite, il a pourtant fallu la justifier, ce qui n’a pas été sans quelques tours de passe-passe de l
56 n peu intimidantes. Toute une partie du Paradis à l’ ombre des épées 1, son dernier livre, est consacrée à « fondre dans un
57 consacrée à « fondre dans une unité supérieure » l’ antinomie de l’esprit catholique et de l’esprit sportif. « On se fait
58 fondre dans une unité supérieure » l’antinomie de l’ esprit catholique et de l’esprit sportif. « On se fait son unité comme
59 rieure » l’antinomie de l’esprit catholique et de l’ esprit sportif. « On se fait son unité comme on peut », avoue-t-il fra
60 radoxal de vouloir unir dans une même philosophie la morale jésuite, faite de règles et de contraintes imposées dans le bu
61 , faite de règles et de contraintes imposées dans le but de restreindre la liberté et l’initiative individuelles, et la mo
62 e contraintes imposées dans le but de restreindre la liberté et l’initiative individuelles, et la morale des sports anglai
63 imposées dans le but de restreindre la liberté et l’ initiative individuelles, et la morale des sports anglais, morale qui
64 ndre la liberté et l’initiative individuelles, et la morale des sports anglais, morale qui veut former des hommes maîtres
65 ment un des premiers Français qui ait compris que le but du sport n’est pas la performance, mais le style et la méthode, c
66 ais qui ait compris que le but du sport n’est pas la performance, mais le style et la méthode, c’est-à-dire la formation d
67 ue le but du sport n’est pas la performance, mais le style et la méthode, c’est-à-dire la formation du caractère, en défin
68 sport n’est pas la performance, mais le style et la méthode, c’est-à-dire la formation du caractère, en définitive. Mais
69 rmance, mais le style et la méthode, c’est-à-dire la formation du caractère, en définitive. Mais on peut oublier la partie
70 du caractère, en définitive. Mais on peut oublier la partie doctrinaire de cette œuvre, elle ne lui est pas indispensable 
71 « Ces simplifications valent ce que valent toutes les simplifications, qu’on les appelle ou non idées générales, et j’avoue
72 t ce que valent toutes les simplifications, qu’on les appelle ou non idées générales, et j’avoue bien volontiers qu’il n’es
73 e bien volontiers qu’il n’est pas une opinion sur le monde à laquelle je ne préfère le monde ». Je préfère à la dogmatique
74 une opinion sur le monde à laquelle je ne préfère le monde ». Je préfère à la dogmatique de M. de Montherlant son admirabl
75 à laquelle je ne préfère le monde ». Je préfère à la dogmatique de M. de Montherlant son admirable lyrisme de poète du sta
76 et calme » des « grands corps athlétiques ». Sur le stade au soleil se déploient les équipes, et l’équipier Montherlant l
77 thlétiques ». Sur le stade au soleil se déploient les équipes, et l’équipier Montherlant les contemple, ému de « cette ivre
78 r le stade au soleil se déploient les équipes, et l’ équipier Montherlant les contemple, ému de « cette ivresse qui naît de
79 déploient les équipes, et l’équipier Montherlant les contemple, ému de « cette ivresse qui naît de l’ordre », et aussi par
80 les contemple, ému de « cette ivresse qui naît de l’ ordre », et aussi parfois, de la pensée que « sur ces corps de l’entre
81 resse qui naît de l’ordre », et aussi parfois, de la pensée que « sur ces corps de l’entre-deux-guerres, … cinq sur dix so
82 ussi parfois, de la pensée que « sur ces corps de l’ entre-deux-guerres, … cinq sur dix sont désignés… ». Voici passer un c
83 Voici passer un coureur : « À peine a-t-il touché la piste d’herbe, c’est une allégresse héroïque qu’infuse à son corps la
84 est une allégresse héroïque qu’infuse à son corps la douce matière. L’air et le sol, dieux rivaux, se le disputent, et il
85 héroïque qu’infuse à son corps la douce matière. L’ air et le sol, dieux rivaux, se le disputent, et il oscille entre l’un
86 qu’infuse à son corps la douce matière. L’air et le sol, dieux rivaux, se le disputent, et il oscille entre l’un et l’aut
87 douce matière. L’air et le sol, dieux rivaux, se le disputent, et il oscille entre l’un et l’autre. Ainsi mon art, entre
88 lée, bondissante et posée, est pleine du désir de l’ air. Danse-t-il sur une musique que je n’entends pas ? » — Mais plus q
89 musique que je n’entends pas ? » — Mais plus que le corps en mouvement, c’est la domination de la raison sur ce corps qui
90  ? » — Mais plus que le corps en mouvement, c’est la domination de la raison sur ce corps qui est exaltante, et c’est cett
91 que le corps en mouvement, c’est la domination de la raison sur ce corps qui est exaltante, et c’est cette domination qui
92 est exaltante, et c’est cette domination qui est le but véritable du sport. On accepte une règle ; on l’assimile, à tel p
93 but véritable du sport. On accepte une règle ; on l’ assimile, à tel point qu’elle n’est plus une entrave à la violence ani
94 ile, à tel point qu’elle n’est plus une entrave à la violence animale déchaînée dans le corps du joueur à la vue de la pra
95 une entrave à la violence animale déchaînée dans le corps du joueur à la vue de la prairie rase où rebondit un ballon. Si
96 ale déchaînée dans le corps du joueur à la vue de la prairie rase où rebondit un ballon. Si l’on considère la vie sociale
97 vue de la prairie rase où rebondit un ballon. Si l’ on considère la vie sociale comme un jeu sérieux dont on respecte les
98 rie rase où rebondit un ballon. Si l’on considère la vie sociale comme un jeu sérieux dont on respecte les règles, non plu
99 vie sociale comme un jeu sérieux dont on respecte les règles, non plus comme une lutte sauvage et déloyale, la morale d’équ
100 es, non plus comme une lutte sauvage et déloyale, la morale d’équipe devient toute la morale, et les qualités indispensabl
101 age et déloyale, la morale d’équipe devient toute la morale, et les qualités indispensables au bon équipier deviennent les
102 e, la morale d’équipe devient toute la morale, et les qualités indispensables au bon équipier deviennent les qualités du pa
103 ualités indispensables au bon équipier deviennent les qualités du parfait citoyen : juste vision de la réalité, abnégation,
104 les qualités du parfait citoyen : juste vision de la réalité, abnégation, sentiment du devoir de chacun envers l’ensemble
105 abnégation, sentiment du devoir de chacun envers l’ ensemble (Montherlant insiste plutôt sur le sentiment des hiérarchies
106 envers l’ensemble (Montherlant insiste plutôt sur le sentiment des hiérarchies que sur celui de la solidarité, comme bien
107 sur le sentiment des hiérarchies que sur celui de la solidarité, comme bien l’on pense). Enfin, enseignement plus général
108 rchies que sur celui de la solidarité, comme bien l’ on pense). Enfin, enseignement plus général de la morale sportive : « 
109 l’on pense). Enfin, enseignement plus général de la morale sportive : « la règle de rester en dedans de son action, appli
110 seignement plus général de la morale sportive : «  la règle de rester en dedans de son action, application de l’immense axi
111 de rester en dedans de son action, application de l’ immense axiome formulé par Hésiode et qui gouverna le monde ancien : L
112 mmense axiome formulé par Hésiode et qui gouverna le monde ancien : La moitié est plus grande que le tout ». Le sport comm
113 ulé par Hésiode et qui gouverna le monde ancien : La moitié est plus grande que le tout ». Le sport comme un apprentissage
114 a le monde ancien : La moitié est plus grande que le tout ». Le sport comme un apprentissage de la vie : tout servira plus
115 ancien : La moitié est plus grande que le tout ». Le sport comme un apprentissage de la vie : tout servira plus tard : Ô
116 que le tout ». Le sport comme un apprentissage de la vie : tout servira plus tard : Ô garçons, il y a un brin du myrte ci
117 de laurier. Vous n’êtes pas couronnés d’olivier. La main connaît la main dans la prise du témoin. L’épaule connaît l’épau
118 s n’êtes pas couronnés d’olivier. La main connaît la main dans la prise du témoin. L’épaule connaît l’épaule dans le talon
119 couronnés d’olivier. La main connaît la main dans la prise du témoin. L’épaule connaît l’épaule dans le talonnage du ballo
120 La main connaît la main dans la prise du témoin. L’ épaule connaît l’épaule dans le talonnage du ballon. Le regard connaît
121 la main dans la prise du témoin. L’épaule connaît l’ épaule dans le talonnage du ballon. Le regard connaît le regard dans l
122 a prise du témoin. L’épaule connaît l’épaule dans le talonnage du ballon. Le regard connaît le regard dans la course d’équ
123 ule connaît l’épaule dans le talonnage du ballon. Le regard connaît le regard dans la course d’équipe. Le cœur connaît la
124 le dans le talonnage du ballon. Le regard connaît le regard dans la course d’équipe. Le cœur connaît la présence muette et
125 nnage du ballon. Le regard connaît le regard dans la course d’équipe. Le cœur connaît la présence muette et sûre. Toutes c
126 regard connaît le regard dans la course d’équipe. Le cœur connaît la présence muette et sûre. Toutes ces choses ne se font
127 e regard dans la course d’équipe. Le cœur connaît la présence muette et sûre. Toutes ces choses ne se font pas en vain. Le
128 t sûre. Toutes ces choses ne se font pas en vain. Le chef se dresse entre les dix qui sont à lui. Il dit : « Je ne demande
129 s ne se font pas en vain. Le chef se dresse entre les dix qui sont à lui. Il dit : « Je ne demande pas qu’on m’aime. Je dem
130 t purs courages, donnez-moi votre silence jusqu’à l’ heure. Que je taise votre mot de ralliement, paradis à l’ombre des épé
131 . Que je taise votre mot de ralliement, paradis à l’ ombre des épées. Rien de moins artificiellement moderne que ce lyrism
132 nt moderne que ce lyrisme sobre et prenant : « Si l’ on s’échauffe, s’échauffer sur de la précision. » On évitera ainsi tou
133 renant : « Si l’on s’échauffe, s’échauffer sur de la précision. » On évitera ainsi tout niais romantisme. Je sais bien ce
134 ais romantisme. Je sais bien ce qu’on objectera : le sport ainsi compris, plus que l’apprentissage de la vie, est l’appren
135 u’on objectera : le sport ainsi compris, plus que l’ apprentissage de la vie, est l’apprentissage de la guerre, dira-t-on.
136 sport ainsi compris, plus que l’apprentissage de la vie, est l’apprentissage de la guerre, dira-t-on. M. de Montherlant r
137 compris, plus que l’apprentissage de la vie, est l’ apprentissage de la guerre, dira-t-on. M. de Montherlant répondra : no
138 l’apprentissage de la vie, est l’apprentissage de la guerre, dira-t-on. M. de Montherlant répondra : non, car la faiblesse
139 dira-t-on. M. de Montherlant répondra : non, car la faiblesse est le péché capital pour le sportif. Or c’est la faiblesse
140 Montherlant répondra : non, car la faiblesse est le péché capital pour le sportif. Or c’est la faiblesse « qui fait lever
141 : non, car la faiblesse est le péché capital pour le sportif. Or c’est la faiblesse « qui fait lever la haine ». « La faib
142 se est le péché capital pour le sportif. Or c’est la faiblesse « qui fait lever la haine ». « La faiblesse est mère du com
143 e sportif. Or c’est la faiblesse « qui fait lever la haine ». « La faiblesse est mère du combat. » C’est donc à un lacédém
144 c’est la faiblesse « qui fait lever la haine ». «  La faiblesse est mère du combat. » C’est donc à un lacédémonisme renouve
145 mpérée de raison. Ce qu’on en peut retenir, c’est la méthode, car je crois qu’elle sert mieux la démocratie que l’Église r
146 c’est la méthode, car je crois qu’elle sert mieux la démocratie que l’Église romaine, quoi qu’en pense M. de Montherlant.
147 car je crois qu’elle sert mieux la démocratie que l’ Église romaine, quoi qu’en pense M. de Montherlant. Et voici, ô parado
148 Kant qui écrit : « C’est sur des maximes, non sur la discipline, qu’il faut fonder la conduite des jeunes gens : celle-ci
149 maximes, non sur la discipline, qu’il faut fonder la conduite des jeunes gens : celle-ci empêche les abus, mais celles-là
150 er la conduite des jeunes gens : celle-ci empêche les abus, mais celles-là forment l’esprit. » M. de Montherlant illustre s
151 celle-ci empêche les abus, mais celles-là forment l’ esprit. » M. de Montherlant illustre sa propre pensée de cette citatio
152 rait appeler une « morale constructive » : porter l’ effort sur ce qui doit être, et ce qui ne doit pas être tombera de soi
153 e qui ne doit pas être tombera de soi-même. Ainsi l’ athlète à l’entraînement ne s’épuise-t-il pas à combattre certaines fa
154 t pas être tombera de soi-même. Ainsi l’athlète à l’ entraînement ne s’épuise-t-il pas à combattre certaines faiblesses : i
155 certaines faiblesses : il développe ses qualités, le reste s’arrange de soi-même. ⁂ M. de Montherlant, qui a quitté le sta
156 ge de soi-même. ⁂ M. de Montherlant, qui a quitté le stade, se rendra mieux compte à distance de la contradiction sur laqu
157 té le stade, se rendra mieux compte à distance de la contradiction sur laquelle est bâtie son œuvre. L’intéressant sera de
158 a contradiction sur laquelle est bâtie son œuvre. L’ intéressant sera de voir ce qu’il sacrifiera, de la morale sportive ou
159 ’intéressant sera de voir ce qu’il sacrifiera, de la morale sportive ou de la morale jésuite. Mais enfin, voici un homme,
160 ce qu’il sacrifiera, de la morale sportive ou de la morale jésuite. Mais enfin, voici un homme, et non plus seulement un
161 me de lettres. Un homme en qui s’équilibrent déjà l’ enthousiasme d’une jeunesse saine et la retenue de l’âge mûr, cette « 
162 brent déjà l’enthousiasme d’une jeunesse saine et la retenue de l’âge mûr, cette « limitation » que lui ont enseigné le sp
163 nthousiasme d’une jeunesse saine et la retenue de l’ âge mûr, cette « limitation » que lui ont enseigné le sport et les anc
164 ge mûr, cette « limitation » que lui ont enseigné le sport et les anciens. J’admets que ses « idées générales » ne vaillen
165 e « limitation » que lui ont enseigné le sport et les anciens. J’admets que ses « idées générales » ne vaillent rien2 ; sa
166 morale virile nous est néanmoins plus proche que la sensualité vaguement chrétienne de tel autre écrivain catholique. Et
167 e. Et son lyrisme, encore un peu brutal, il saura le dompter, et atteindre au classicisme véritable. Voici un constructeur
168 ut lutter contre lui, nous savons qu’il observera les règles. Saluons-le donc du salut des équipes avant le match : « En l’
169 , nous savons qu’il observera les règles. Saluons- le donc du salut des équipes avant le match : « En l’honneur d’Henry de
170 ègles. Saluons-le donc du salut des équipes avant le match : « En l’honneur d’Henry de Montherlant, hip, hip, hurrah ! »
171 e donc du salut des équipes avant le match : « En l’ honneur d’Henry de Montherlant, hip, hip, hurrah ! » 1. Éditions Gra
172 hip, hurrah ! » 1. Éditions Grasset, Paris. 2. L’ attitude de M. de Montherlant légitime une telle « simplification ».
173 ont Denis de, « [Compte rendu] M. de Montherlant, le sport et les jésuites », La Semaine littéraire, Genève, 9 février 192
174 , « [Compte rendu] M. de Montherlant, le sport et les jésuites », La Semaine littéraire, Genève, 9 février 1924, p. 63-65.
175 u] M. de Montherlant, le sport et les jésuites », La Semaine littéraire, Genève, 9 février 1924, p. 63-65.
2 1924, Articles divers (1924–1930). Conférence de Conrad Meili sur « Les ismes dans la peinture moderne » (30 octobre 1924)
176 Conférence de Conrad Meili sur «  Les ismes dans la peinture moderne » (30 octobre 1924)b Lundi soir, da
177 Conférence de Conrad Meili sur « Les ismes dans la peinture moderne » (30 octobre 1924)b Lundi soir, dans la salle du
178 moderne » (30 octobre 1924)b Lundi soir, dans la salle du Lyceum, M. Conrad Meili parla des écoles qui représentent la
179 M. Conrad Meili parla des écoles qui représentent la peinture française, des débuts du xixe siècle à nos jours. Partis du
180 ours. Partis du classicisme de David et d’Ingres, les peintres français ont accompli, durant le xixe siècle, une explorati
181 ngres, les peintres français ont accompli, durant le xixe siècle, une exploration merveilleuse dans les domaines du roman
182 e xixe siècle, une exploration merveilleuse dans les domaines du romantisme, du naturalisme, de l’impressionnisme, pour ab
183 ns les domaines du romantisme, du naturalisme, de l’ impressionnisme, pour aboutir enfin dans ces impasses : cubisme et fut
184 r enfin dans ces impasses : cubisme et futurisme. Les voici revenus, après cent-vingt-cinq ans, à peu près à leur point de
185 r technique (contrairement à ce que pense souvent le public), ils préparent l’avènement d’un classicisme nouveau. M. Meili
186 à ce que pense souvent le public), ils préparent l’ avènement d’un classicisme nouveau. M. Meili a mis en évidence cette c
187 uveau. M. Meili a mis en évidence cette courbe de la peinture moderne avec une netteté et un relief remarquable. Les œuvre
188 oderne avec une netteté et un relief remarquable. Les œuvres de cet artiste, qu’on a pu voir à la Rose d’Or témoignaient de
189 ble. Les œuvres de cet artiste, qu’on a pu voir à la Rose d’Or témoignaient de ces mêmes qualités : car la façon de peindr
190 ose d’Or témoignaient de ces mêmes qualités : car la façon de peindre correspond à la façon de penser du peintre. Souhaito
191 s qualités : car la façon de peindre correspond à la façon de penser du peintre. Souhaitons d’entendre encore M. Meili. Es
192 endre encore M. Meili. Est-il besoin de souligner l’ importance de telles prises de contact entre artiste et public ? b.
3 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Henry de Montherlant, Chant funèbre pour les morts de Verdun (mars 1925)
193 Henry de Montherlant, Chant funèbre pour les morts de Verdun (mars 1925)a Henry de Montherlant, héritier d’une
194 leresque, mène sa vie comme une ardente aventure. Les épisodes s’appellent : collège, guerre, sport… la Relève du Matin, le
195 es épisodes s’appellent : collège, guerre, sport… la Relève du Matin, le Songe, les Olympiques. Et voici le Chant funèbre,
196 ent : collège, guerre, sport… la Relève du Matin, le Songe, les Olympiques. Et voici le Chant funèbre, adieu à la guerre e
197 ège, guerre, sport… la Relève du Matin, le Songe, les Olympiques. Et voici le Chant funèbre, adieu à la guerre et aux jeux,
198 lève du Matin, le Songe, les Olympiques. Et voici le Chant funèbre, adieu à la guerre et aux jeux, avant de partir pour de
199 es Olympiques. Et voici le Chant funèbre, adieu à la guerre et aux jeux, avant de partir pour de nouvelles conquêtes. Terr
200 r pour ses erreurs plus encore que pour celles de l’ adversaire, ce qui est beaucoup dire. Il y avait dans le Paradis je ne
201 rsaire, ce qui est beaucoup dire. Il y avait dans le Paradis je ne sais quel relent de barbarie, un assez malsain goût du
202 alsain goût du sang. Tout cela s’est purifié dans le Chant funèbre. Et une phrase telle que « … Nous sommes sûrs de ne pas
203 e, à notre place modeste, si peu que ce soit pour la paix », c’est une affirmation qui d’un coup condamne beaucoup d’antér
204 pour avoir contemplé Verdun, en tête à tête avec le génie de la mort. Mais alors, à quoi sert d’exalter, d’une si émouvan
205 contemplé Verdun, en tête à tête avec le génie de la mort. Mais alors, à quoi sert d’exalter, d’une si émouvante sorte, le
206 à quoi sert d’exalter, d’une si émouvante sorte, les soldats déjà légendaires de Verdun, et ce « haut ton de vie » qu’ils
207 justifie son livre : « Ranimons ces horreurs pour les vouloir éviter, et ces grandeurs pour n’en pas trop descendre ». N’es
208 ce pas une éclatante mise au point ? Et venant de l’ auteur du Songe, d’un de ces hommes qui « descendirent » du front dans
209 cette absence de haine ; cette épouvante, devant la guerre… proviennent de plus d’humanité ou de moins de santé ». À main
210 et repart. Vers quels buts ? On verra plus tard. L’ urgent c’est d’avancer. Et l’on atteindra peut-être ces régions élevée
211 On verra plus tard. L’urgent c’est d’avancer. Et l’ on atteindra peut-être ces régions élevées où les éléments contraires
212 t l’on atteindra peut-être ces régions élevées où les éléments contraires s’unissent dans la grandeur. La paix qu’il appell
213 levées où les éléments contraires s’unissent dans la grandeur. La paix qu’il appelle, c’est autre chose que l’absence de g
214 éléments contraires s’unissent dans la grandeur. La paix qu’il appelle, c’est autre chose que l’absence de guerre, c’est
215 eur. La paix qu’il appelle, c’est autre chose que l’ absence de guerre, c’est une paix que travaillerait le levain des vert
216 sence de guerre, c’est une paix que travaillerait le levain des vertus guerrières. « Il faut que la paix, ce soit vivre. »
217 it le levain des vertus guerrières. « Il faut que la paix, ce soit vivre. » Par tout un livre libéré de souvenirs héroïque
218 e souvenirs héroïques, peut-être trop grands pour la paix, c’est vers de plus sereines exaltations qu’il va porter son ard
219 ations qu’il va porter son ardeur. Il va chercher le souvenir de l’aventure antique, et dans ce qui fut Rome ou la Grèce,
220 porter son ardeur. Il va chercher le souvenir de l’ aventure antique, et dans ce qui fut Rome ou la Grèce, revivre sa trad
221 de l’aventure antique, et dans ce qui fut Rome ou la Grèce, revivre sa tradition. Toute son œuvre pourrait se définir : la
222 tradition. Toute son œuvre pourrait se définir : la lutte d’un tempérament avec la réalité. Tantôt c’est l’un qui veut pl
223 rrait se définir : la lutte d’un tempérament avec la réalité. Tantôt c’est l’un qui veut plier l’autre à sa violence — le
224 c’est l’un qui veut plier l’autre à sa violence — le Paradis —, tantôt c’est l’autre qui impose son absolu. Une soumission
225 rement consentie, voilà ce que nous admirons dans le Chant funèbre. Ce mot de grandeur revient souvent lorsqu’on parle de
226 rle de cette œuvre : je ne sais s’il faut en voir la raison dans la force de la personnalité révélée ou dans la noblesse d
227 vre : je ne sais s’il faut en voir la raison dans la force de la personnalité révélée ou dans la noblesse de sa soumission
228 sais s’il faut en voir la raison dans la force de la personnalité révélée ou dans la noblesse de sa soumission. Périlleuse
229 dans la force de la personnalité révélée ou dans la noblesse de sa soumission. Périlleuse carrière de la grandeur où Mont
230 noblesse de sa soumission. Périlleuse carrière de la grandeur où Montherlant est entré de plain-pied, en même temps que da
231 t est entré de plain-pied, en même temps que dans la guerre. Que de sacrifices ne lui devra-t-il pas offrir ainsi les roma
232 de sacrifices ne lui devra-t-il pas offrir ainsi les romans « intéressants » ou « curieux » ; le « grand lyrisme » à la Ch
233 insi les romans « intéressants » ou « curieux » ; le « grand lyrisme » à la Chateaubriand, voire à la Barrès, dont il est
234 essants » ou « curieux » ; le « grand lyrisme » à la Chateaubriand, voire à la Barrès, dont il est capable et qu’il lui fa
235 le « grand lyrisme » à la Chateaubriand, voire à la Barrès, dont il est capable et qu’il lui faudra livrer au « feu de vé
236 r, s’il veut rester digne de son rôle et vraiment le coryphée d’une génération casquée. Feu consumateur de toute faiblesse
237 en notre siècle, qu’elle paraît parfois, lorsque la tourmente humaine ne la moleste ni ne l’avive plus, cruelle et désolé
238 e paraît parfois, lorsque la tourmente humaine ne la moleste ni ne l’avive plus, cruelle et désolée comme cette « flamme p
239 lorsque la tourmente humaine ne la moleste ni ne l’ avive plus, cruelle et désolée comme cette « flamme pensante » dans l’
240 e et désolée comme cette « flamme pensante » dans l’ ossuaire de Douaumont. Puis la vie l’exalte de nouveau d’un large vent
241 mme pensante » dans l’ossuaire de Douaumont. Puis la vie l’exalte de nouveau d’un large vent de joie. a. Rougemont Deni
242 sante » dans l’ossuaire de Douaumont. Puis la vie l’ exalte de nouveau d’un large vent de joie. a. Rougemont Denis de, «
243 e rendu] Henry de Montherlant, Chant funèbre pour les morts de Verdun  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genè
4 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Breton, Manifeste du surréalisme (juin 1925)
244 isme (juin 1925)b Sous une « vague de rêves », la logique, dernier agent de liaison de nos esprits, va périr. C’est du
245 ns ce que proclame M. Breton en un manifeste dont la pseudo-nouveauté nous retiendra moins que la significative pauvreté i
246 dont la pseudo-nouveauté nous retiendra moins que la significative pauvreté idéologique et morale qu’il révèle. Le style b
247 tive pauvreté idéologique et morale qu’il révèle. Le style brillant et elliptique qui tend à devenir notre poncif moderne,
248 , — ne réussit pas toujours chez Breton à masquer la banalité de la pensée. D’autant plus que les rares passages où il exp
249 pas toujours chez Breton à masquer la banalité de la pensée. D’autant plus que les rares passages où il expose directement
250 squer la banalité de la pensée. D’autant plus que les rares passages où il expose directement les principes de sa « révolut
251 s que les rares passages où il expose directement les principes de sa « révolution » semblent au contraire tirés de quelque
252 ent, soit par écrit, soit de toute autre manière, le fonctionnement réel de la pensée. Dictée de la pensée en l’absence de
253 de toute autre manière, le fonctionnement réel de la pensée. Dictée de la pensée en l’absence de tout contrôle exercé par
254 e, le fonctionnement réel de la pensée. Dictée de la pensée en l’absence de tout contrôle exercé par la raison, en dehors
255 nnement réel de la pensée. Dictée de la pensée en l’ absence de tout contrôle exercé par la raison, en dehors de toute préo
256 a pensée en l’absence de tout contrôle exercé par la raison, en dehors de toute préoccupation esthétique ou morale. » (p. 
257 te préoccupation esthétique ou morale. » (p. 42). Le surréalisme ne serait-il donc qu’une sorte de méthode des textes géné
258 généralisée ? Point du tout ! Il paraît qu’il est la seule attitude littéraire aujourd’hui concevable. Mais par quelles tr
259 ou moins conscientes M. Breton peut-il préconiser l’ existence d’une littérature fondée sur de tels principes ? Le Rêve est
260 d’une littérature fondée sur de tels principes ? Le Rêve est la seule matière poétique. Dans le monde du Rêve autant de c
261 rature fondée sur de tels principes ? Le Rêve est la seule matière poétique. Dans le monde du Rêve autant de cellules isol
262 pes ? Le Rêve est la seule matière poétique. Dans le monde du Rêve autant de cellules isolées que de rêveurs. Toute poésie
263 que de rêveurs. Toute poésie est incommunicable, le poète étant un simple sténographe de ses rêves. Soit. De ces faits, j
264 oute poésie est incommunicable, le poète étant un simple sténographe de ses rêves. Soit. De ces faits, je tire cette conclusio
265 pratique : inutile de publier des poèmes. Éluard le comprenait, qui écrivit : « Quand les livres se liront-ils d’eux-même
266 èmes. Éluard le comprenait, qui écrivit : « Quand les livres se liront-ils d’eux-mêmes, sans le secours des lecteurs ? Quan
267  Quand les livres se liront-ils d’eux-mêmes, sans le secours des lecteurs ? Quand les hommes se comprendront-ils individue
268 d’eux-mêmes, sans le secours des lecteurs ? Quand les hommes se comprendront-ils individuellement ? » Que M. Breton donne d
269 our faire un poème » cette mystification est dans la logique de ses principes, mais je lui conteste le droit de faire suiv
270 la logique de ses principes, mais je lui conteste le droit de faire suivre son manifeste de proses — Poisson soluble — qui
271 uble — qui servent d’illustration à sa défense de la poésie pure. Les beautés que j’y vois ne me seraient-elles perceptibl
272 nt d’illustration à sa défense de la poésie pure. Les beautés que j’y vois ne me seraient-elles perceptibles que par le fai
273 ’y vois ne me seraient-elles perceptibles que par le fait d’une fortuite coïncidence entre l’univers du poète et le mien ?
274 que par le fait d’une fortuite coïncidence entre l’ univers du poète et le mien ? Je comprends trop de choses dans ces poè
275 e Rimbaud, entre encore pour une grande part dans l’ « alchimie du verbe » ; et je ne puis m’empêcher d’accuser Breton de p
276 cet appareil psychologique si scolaire ? À donner le change sur la pauvreté d’un art purement formel. Car c’est ici le tra
277 sychologique si scolaire ? À donner le change sur la pauvreté d’un art purement formel. Car c’est ici le tragique de cette
278 pauvreté d’un art purement formel. Car c’est ici le tragique de cette mystification : la plupart des surréalistes n’ont r
279 e leur impuissance. « Il n’y a pas de pensée hors les mots » (Aragon). Aussi se paient-ils de métaphores comme d’autres de
280 éclament imprudemment, — on sait ce que c’est que la « liberté » d’un esprit pur de tout finalisme ! Surréalisme S.A., ent
281 out finalisme ! Surréalisme S.A., entreprise pour l’ exploitation de matériaux de démolition abandonnés par Dada S.A. Ce n’
282 pas ainsi que nous sortirons d’une anarchie dont les causes semblent avant tout morales. Les tendances encore un peu vague
283 chie dont les causes semblent avant tout morales. Les tendances encore un peu vagues d’un groupe tel que Philosophies laiss
284 lus réelles. On souhaite qu’après faillite faite, les surréalistes trouvent à montrer leur talent en des jeux moins lassant
285 poir exaspéré, commandait une certaine sympathie. L’ agaçant, avec les surréalistes, c’est que — pour reprendre un mot de C
286 ommandait une certaine sympathie. L’agaçant, avec les surréalistes, c’est que — pour reprendre un mot de Cocteau — ils « em
287 octeau — ils « embaument de vieilles anarchies ». L’ ironie qui sauva Dada du ridicule le cède ici à un ton de mage qui ne
288 anarchies ». L’ironie qui sauva Dada du ridicule le cède ici à un ton de mage qui ne fera plus longtemps impression. C’es
289 us longtemps impression. C’est grand dommage pour les lettres françaises qui risquent d’y perdre au moins deux grands artis
290 ublier Breton, enchanteur des images qui peuplent les ténèbres. b. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] André Breton, Ma
5 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Paul Colin, Van Gogh (août 1925)
291 Paul Colin, Van Gogh (août 1925)c Le nouveau volume de la collection des « Maîtres de l’art moderne » est
292 in, Van Gogh (août 1925)c Le nouveau volume de la collection des « Maîtres de l’art moderne » est au moins le cinquième
293 nouveau volume de la collection des « Maîtres de l’ art moderne » est au moins le cinquième ouvrage publié en France sur V
294 s assez neuves. M. Colin s’est contenté de narrer les faits de la vie de Vincent, mais d’une telle manière que des conclusi
295 s. M. Colin s’est contenté de narrer les faits de la vie de Vincent, mais d’une telle manière que des conclusions critique
296 t avec évidence. Van Gogh fut une proie du génie. L’ homme tel que nous le peint Paul Colin, est peu intéressant. On en a c
297 Gogh fut une proie du génie. L’homme tel que nous le peint Paul Colin, est peu intéressant. On en a connu bien d’autres de
298 d’évangélisation, fondent des groupes dissidents. Le miracle, c’est que le plus sauvage génie ait choisi un être de cette
299 ent des groupes dissidents. Le miracle, c’est que le plus sauvage génie ait choisi un être de cette espèce pour le tourmen
300 age génie ait choisi un être de cette espèce pour le tourmenter et le transfigurer. Vincent s’en effraie lui-même : « Il y
301 isi un être de cette espèce pour le tourmenter et le transfigurer. Vincent s’en effraie lui-même : « Il y a quelque chose
302 es copies de Millet. Mais son manque de talent ne le rebute pas. Une divine violence le travaille. Elle jaillira enfin, da
303 e de talent ne le rebute pas. Une divine violence le travaille. Elle jaillira enfin, dans l’éblouissement d’Arles, jusqu’a
304 violence le travaille. Elle jaillira enfin, dans l’ éblouissement d’Arles, jusqu’au jour où cette consomption frénétique t
305 rrassant un corps minable, il ne restera plus que les flammes, les soleils et aussi les grimaces de douleur de ses tableaux
306 orps minable, il ne restera plus que les flammes, les soleils et aussi les grimaces de douleur de ses tableaux. Il faut lou
307 estera plus que les flammes, les soleils et aussi les grimaces de douleur de ses tableaux. Il faut louer Paul Colin de n’av
308 n’avoir rien caché des médiocrités de cette vie : les reproductions qui suivent sa courte biographie fournissent un meilleu
309 courte biographie fournissent un meilleur motif à l’ admiration que tout le lyrisme dont on a voulu charger la « vie héroïq
310 nissent un meilleur motif à l’admiration que tout le lyrisme dont on a voulu charger la « vie héroïque » de Vincent. M. Co
311 ation que tout le lyrisme dont on a voulu charger la « vie héroïque » de Vincent. M. Colin n’a pas cherché à expliquer ce
312 ce miracle. Il nous laisse à notre émotion devant le spectacle d’une œuvre qui ne dut rien à l’homme, d’une œuvre de pur g
313 devant le spectacle d’une œuvre qui ne dut rien à l’ homme, d’une œuvre de pur génie. Vincent Van Gogh, génie sans talent.
6 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Lucien Fabre, Le Tarramagnou (septembre 1925)
314 Lucien Fabre, Le Tarramagnou (septembre 1925)d Lucien Fabre, ingénieur, poète, chro
315 stein, des articles sur Valéry, St John Perse. On le vit naguère en province liquider des stocks américains. Et ses romans
316 ins. Et ses romans, c’est aussi une liquidation : les faits s’y pressent et s’y bousculent ; de temps à autre une notation
317 ou de psychologue se glisse dans leur flot. Voilà le lecteur entraîné, ébahi, passionné, contraint de suivre jusqu’au bout
318 bout un roman de 500 pages comme Rabevel. Car si la liquidation des questions traitées est rapide, elle est complète auss
319 n’est pas lui qui se refuserait à écrire — comme le fait son maître : « La marquise sortit à cinq heures ». Une telle pla
320 efuserait à écrire — comme le fait son maître : «  La marquise sortit à cinq heures ». Une telle platitude est presque indi
321 e indispensable, mais il s’en permet d’autres qui le sont moins. On n’écrit pas un roman en trois volumes sans y laisser d
322 on ne demande pas non plus au puissant boxeur sur le ring d’être bien peigné. Rabevel, c’était un portrait balzacien du b
323 ait un portrait balzacien du brasseur d’affaires. Le sujet du Tarramagnou, c’est « la nouvelle mise en servitude du peuple
324 seur d’affaires. Le sujet du Tarramagnou, c’est «  la nouvelle mise en servitude du peuple rustique de France ». En effet —
325 vitude du peuple rustique de France ». En effet — le phénomène n’est pas particulier à la France — les paysans sont en tra
326 . En effet — le phénomène n’est pas particulier à la France — les paysans sont en train de redevenir serfs, serfs des synd
327 le phénomène n’est pas particulier à la France — les paysans sont en train de redevenir serfs, serfs des syndicats et des
328 villes. Mais dans une de ces provinces du Midi où le souvenir des luttes religieuses encore vivace fait que les paysans ga
329 nir des luttes religieuses encore vivace fait que les paysans gardent une méfiance frondeuse vis-à-vis du gouvernement, le
330 une méfiance frondeuse vis-à-vis du gouvernement, le libérateur va se lever. C’est un descendant de Roland le Camisard, ce
331 Camisard, ce « Tarramagnou », ce « petit homme de la terre », qui va susciter un formidable mouvement de protestation cont
332 er un formidable mouvement de protestation contre les lois tyranniques. Le succès grandit rapidement, le gouvernement cède.
333 ment de protestation contre les lois tyranniques. Le succès grandit rapidement, le gouvernement cède. Mais la même inertie
334 s lois tyranniques. Le succès grandit rapidement, le gouvernement cède. Mais la même inertie du peuple qui donnait tant de
335 ès grandit rapidement, le gouvernement cède. Mais la même inertie du peuple qui donnait tant de mal lorsqu’il fallait l’év
336 peuple qui donnait tant de mal lorsqu’il fallait l’ éveiller, l’entraîne au-delà du but. Le Tarramagnou voit son œuvre sab
337 donnait tant de mal lorsqu’il fallait l’éveiller, l’ entraîne au-delà du but. Le Tarramagnou voit son œuvre sabotée par des
338 il fallait l’éveiller, l’entraîne au-delà du but. Le Tarramagnou voit son œuvre sabotée par des meneurs ; il tente en vain
339 e par des meneurs ; il tente en vain de ressaisir les foules : déjà elles huent sa modération. Alors il va se jeter au-deva
340 devant des troupes accourues, il meurt en clamant la paix. M. Fabre avait là les éléments d’un grand roman : autour d’un s
341 s, il meurt en clamant la paix. M. Fabre avait là les éléments d’un grand roman : autour d’un sujet de vaste envergure, et
342 es d’une belle richesse psychologique. En fermant le livre on a presque l’impression qu’il a réussi ce grand roman… Qu’y m
343 e psychologique. En fermant le livre on a presque l’ impression qu’il a réussi ce grand roman… Qu’y manque-t-il ? Un style 
344 ssi ce grand roman… Qu’y manque-t-il ? Un style ? L’ absence de style, n’est-ce pas le meilleur style pour un romancier ? C
345 -il ? Un style ? L’absence de style, n’est-ce pas le meilleur style pour un romancier ? C’est plutôt, je crois, une certai
346 ôt, je crois, une certaine harmonie générale dans le récit et le ton, surtout dans la première partie, qui est confuse. No
347 , une certaine harmonie générale dans le récit et le ton, surtout dans la première partie, qui est confuse. Non pas que le
348 la première partie, qui est confuse. Non pas que le roman soit mal construit, au contraire. Mais le tissu des faits se re
349 e le roman soit mal construit, au contraire. Mais le tissu des faits se relâche parfois, et les arêtes de la construction
350 e. Mais le tissu des faits se relâche parfois, et les arêtes de la construction apparaissent trop nues. Chef-d’œuvre ou pas
351 su des faits se relâche parfois, et les arêtes de la construction apparaissent trop nues. Chef-d’œuvre ou pas chef-d’œuvre
352 uvre ou pas chef-d’œuvre d’ailleurs, il reste que le Tarramagnou est un livre émouvant, d’une saine puissance. Il reste qu
353 ougemont Denis de, « [Compte rendu] Lucien Fabre, Le Tarramagnou  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève,
7 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Les Appels de l’Orient (septembre 1925)
354 Les Appels de l’Orient (septembre 1925)e Le xxe siècle s’annonce comm
355 Les Appels de l’ Orient (septembre 1925)e Le xxe siècle s’annonce comme le siècle d
356 Les Appels de l’Orient (septembre 1925)e Le xxe siècle s’annonce comme le siècle de la découverte du monde par l
357 eptembre 1925)e Le xxe siècle s’annonce comme le siècle de la découverte du monde par l’Europe intellectuelle. Grand s
358 )e Le xxe siècle s’annonce comme le siècle de la découverte du monde par l’Europe intellectuelle. Grand siècle de crit
359 nce comme le siècle de la découverte du monde par l’ Europe intellectuelle. Grand siècle de critique pour lequel nos contem
360 critique pour lequel nos contemporains accumulent les documents. La littérature de ces dernières années n’est qu’une forme
361 equel nos contemporains accumulent les documents. La littérature de ces dernières années n’est qu’une forme de reportage i
362 es n’est qu’une forme de reportage international. L’ Europe menant cette immense enquête manifeste son génie méthodique, so
363 selle et inépuisable curiosité. Mais, de même que la France interrogeant l’Europe du xviiie prenait surtout conscience de
364 riosité. Mais, de même que la France interrogeant l’ Europe du xviiie prenait surtout conscience de son propre génie, l’Eu
365 prenait surtout conscience de son propre génie, l’ Europe d’aujourd’hui semble chercher dans une confrontation avec l’Ori
366 d’hui semble chercher dans une confrontation avec l’ Orient, plutôt qu’une réelle connaissance de l’Orient, une conscience
367 ec l’Orient, plutôt qu’une réelle connaissance de l’ Orient, une conscience d’elle-même. C’est peut-être pour provoquer cet
368 né un péril oriental, car il semble bien que dans le domaine de la culture le péril n’existe que pour autant qu’on en parl
369 iental, car il semble bien que dans le domaine de la culture le péril n’existe que pour autant qu’on en parle, la vraie « 
370 il semble bien que dans le domaine de la culture le péril n’existe que pour autant qu’on en parle, la vraie « question as
371 le péril n’existe que pour autant qu’on en parle, la vraie « question asiatique » étant une question politique. On peut pr
372 nt une question politique. On peut prévoir que si le bouddhisme jouit un jour d’un renouveau, c’est à quelques savants eur
373 nouveau, c’est à quelques savants européens qu’il le devra, tandis que d’un mouvement inverse, le christianisme débarrassé
374 u’il le devra, tandis que d’un mouvement inverse, le christianisme débarrassé de son déguisement gréco-latin retournera ve
375 n retournera vers ses sources pour s’y retremper. Les appels de l’Orient, ce sont les Keyserling, les Guénon, qui les font
376 ers ses sources pour s’y retremper. Les appels de l’ Orient, ce sont les Keyserling, les Guénon, qui les font entendre, aut
377 ur s’y retremper. Les appels de l’Orient, ce sont les Keyserling, les Guénon, qui les font entendre, autant et plus que les
378 . Les appels de l’Orient, ce sont les Keyserling, les Guénon, qui les font entendre, autant et plus que les Tagore et les G
379 l’Orient, ce sont les Keyserling, les Guénon, qui les font entendre, autant et plus que les Tagore et les Gandhi, demi-euro
380 Guénon, qui les font entendre, autant et plus que les Tagore et les Gandhi, demi-européanisés. Ceci convenu, il faut reconn
381 s font entendre, autant et plus que les Tagore et les Gandhi, demi-européanisés. Ceci convenu, il faut reconnaître que l’en
382 ropéanisés. Ceci convenu, il faut reconnaître que l’ enquête des Cahiers du Mois donne un fort intéressant tableau des mult
383 rt intéressant tableau des multiples réactions de l’ Europe placée devant le dilemme Orient-Occident. Réactions qui, disons
384 des multiples réactions de l’Europe placée devant le dilemme Orient-Occident. Réactions qui, disons-le tout de suite, rens
385 le dilemme Orient-Occident. Réactions qui, disons- le tout de suite, renseignent mieux sur l’esprit occidental que sur l’or
386 i, disons-le tout de suite, renseignent mieux sur l’ esprit occidental que sur l’oriental, en sorte que cette enquête rejoi
387 renseignent mieux sur l’esprit occidental que sur l’ oriental, en sorte que cette enquête rejoint parfois celle qu’ouvrit l
388 que cette enquête rejoint parfois celle qu’ouvrit la Revue de Genève sur « l’Avenir de l’Europe. » (Cf. les deux réponse
389 arfois celle qu’ouvrit la Revue de Genève sur «  l’ Avenir de l’Europe. » (Cf. les deux réponses d’André Gide en particuli
390 qu’ouvrit la Revue de Genève sur « l’Avenir de l’ Europe. » (Cf. les deux réponses d’André Gide en particulier). Car la
391 vue de Genève sur « l’Avenir de l’Europe. » (Cf. les deux réponses d’André Gide en particulier). Car la plupart des enquêt
392 ticulier). Car la plupart des enquêtés se font de l’ Orient une représentation vague et poétique. « Orient…, toi qui n’as q
393 de cet Orient qu’il s’agit, et Jean Schlumberger le définit encore : « … tout ce qui est opposé à l’esprit occidental, to
394 le définit encore : « … tout ce qui est opposé à l’ esprit occidental, tout ce qui peut servir d’antidote à sa fièvre et à
395 ne dénomination qui n’a de sens que par rapport à l’ Europe. Il serait vain de tenter un classement parmi les réponses d’un
396 ope. Il serait vain de tenter un classement parmi les réponses d’une extraordinaire diversité — peut-être trop nombreuses —
397 e trop nombreuses — qui composent ce gros volume. Les points de vue sont si différents, si différentes même les conclusions
398 ts de vue sont si différents, si différentes même les conclusions tirées de points de vue semblables, qu’un esprit analytiq
399 t de jugements contradictoires, et de termes dont le sens change avec l’échelle de valeurs de l’écrivain. Énumérons pourta
400 adictoires, et de termes dont le sens change avec l’ échelle de valeurs de l’écrivain. Énumérons pourtant quelques-uns des
401 dont le sens change avec l’échelle de valeurs de l’ écrivain. Énumérons pourtant quelques-uns des points de vue les plus r
402 Énumérons pourtant quelques-uns des points de vue les plus riches ou les mieux définis. Pour Valéry, la supériorité de l’Eu
403 quelques-uns des points de vue les plus riches ou les mieux définis. Pour Valéry, la supériorité de l’Europe réside dans sa
404 es plus riches ou les mieux définis. Pour Valéry, la supériorité de l’Europe réside dans sa « puissance de choix », dans l
405 les mieux définis. Pour Valéry, la supériorité de l’ Europe réside dans sa « puissance de choix », dans le génie d’abstract
406 urope réside dans sa « puissance de choix », dans le génie d’abstraction qui a produit la géométrie grecque. D’autres attr
407 hoix », dans le génie d’abstraction qui a produit la géométrie grecque. D’autres attribuent cette supériorité au machinism
408 es attribuent cette supériorité au machinisme, et la déplorent. Plusieurs jeunes songent que dans une Europe vieillie, les
409 eurs jeunes songent que dans une Europe vieillie, les parfums puissants de l’Asie sauront encore éveiller de beaux rêves. I
410 ans une Europe vieillie, les parfums puissants de l’ Asie sauront encore éveiller de beaux rêves. Il y a ceux qui repoussen
411 orante du thomisme et ceux qui pensent inévitable le choc de deux mondes, et que seule une intime connaissance mutuelle l’
412 es, et que seule une intime connaissance mutuelle l’ adoucira. Il y a ceux qui à la suite de Claudel estiment que la questi
413 l y a ceux qui à la suite de Claudel estiment que la question ne se pose pas, puisque nous sommes chrétiens. (Mais le chri
414 se pose pas, puisque nous sommes chrétiens. (Mais le christianisme, religion missionnaire, ne peut nous donner qu’une supé
415 périorité provisoire et qui porte en son principe le germe de sa destruction.) Il y a enfin ceux qui refondent et combinen
416 point avoir, sincérité trop rare… Presque toutes les réponses, conclusions ou interrogations, ont le défaut de n’être pas
417 les réponses, conclusions ou interrogations, ont le défaut de n’être pas suffisamment motivées par des faits et des docum
418 es par des faits et des documents. Pour beaucoup, l’ Orient n’est qu’un prétexte à variations sur le thème favori. M. Massi
419 p, l’Orient n’est qu’un prétexte à variations sur le thème favori. M. Massis, par exemple, qui cependant produit un grand
420 livre pas moins à des déductions in abstracto qui le mènent à des conclusions de ce genre : si nous trouvons le moyen de «
421 à des conclusions de ce genre : si nous trouvons le moyen de « suppléer à l’éducation historique des peuples chrétiens qu
422 genre : si nous trouvons le moyen de « suppléer à l’ éducation historique des peuples chrétiens qui n’ont pas eu de Moyen Â
423 n’ont pas eu de Moyen Âge », nous pourrons amener l’ Asie à comprendre la religion romaine (ce christianisme méditerranéen
424 n Âge », nous pourrons amener l’Asie à comprendre la religion romaine (ce christianisme méditerranéen si étroitement parti
425 erranéen si étroitement particularisé pourtant, à l’ usage des Latins…). Quant aux orientalistes, qui, eux, apportent des d
426 onclure. Un écrivain grec, M. Embiricos, a trouvé la formule qui définit ce que les autres entendent vaguement par Orient 
427 Embiricos, a trouvé la formule qui définit ce que les autres entendent vaguement par Orient : l’Asie est le subconscient du
428 e que les autres entendent vaguement par Orient : l’ Asie est le subconscient du monde, formule qui, je pense, réunira tous
429 utres entendent vaguement par Orient : l’Asie est le subconscient du monde, formule qui, je pense, réunira tous les suffra
430 ent du monde, formule qui, je pense, réunira tous les suffrages. Et chacun d’en tirer de nouvelles raisons de maudire l’Ori
431 chacun d’en tirer de nouvelles raisons de maudire l’ Orient ou chercher la guérison de nos fièvres. Mais nous aurons entrev
432 nouvelles raisons de maudire l’Orient ou chercher la guérison de nos fièvres. Mais nous aurons entrevu peut-être pour la p
433 us aurons entrevu peut-être pour la première fois le rôle de l’Europe « conscience du monde », entre une Amérique affolée
434 ntrevu peut-être pour la première fois le rôle de l’ Europe « conscience du monde », entre une Amérique affolée de vitesse,
435 nelle. e. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Les Appels de l’Orient (n° 9-10 des Cahiers du Mois) », Bibliothèque univ
436 ougemont Denis de, « [Compte rendu] Les Appels de l’ Orient (n° 9-10 des Cahiers du Mois) », Bibliothèque universelle et Re
8 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jean Prévost, Tentative de solitude (septembre 1925)
437 que nous sommes seuls, nous sommes des fous. Oui, le contrôle de nous-mêmes ne joue que soutenu par le contrôle que les au
438 le contrôle de nous-mêmes ne joue que soutenu par le contrôle que les autres nous imposent », dit un héros de Mauriac. C’e
439 ous-mêmes ne joue que soutenu par le contrôle que les autres nous imposent », dit un héros de Mauriac. C’est un « homme seu
440 Mauriac. C’est un « homme seul » qu’a peint « par le dedans » M. Jean Prévost, en un saisissant raccourci psychologique. «
441 eut éliminer de soi tout ce qui est déterminé par l’ extérieur, — ce fou que nous portons tous en nous, — il l’a isolé, inc
442 eur, — ce fou que nous portons tous en nous, — il l’ a isolé, incarné, nommé : Revert. Puis il l’a poussé impitoyablement d
443 — il l’a isolé, incarné, nommé : Revert. Puis il l’ a poussé impitoyablement dans sa recherche d’un absolu qui se trouve ê
444 dans sa recherche d’un absolu qui se trouve être le néant. Pour finir il « l’écrabouille ». L’expérience est terminée. Ar
445 solu qui se trouve être le néant. Pour finir il «  l’ écrabouille ». L’expérience est terminée. Artificielle comme toute exp
446 e être le néant. Pour finir il « l’écrabouille ». L’ expérience est terminée. Artificielle comme toute expérience, elle n’e
447 assive d’un théorème de Spinoza. Une ironie dure, la densité du style révèlent seules l’écrivain ; et aussi quelques sente
448 ironie dure, la densité du style révèlent seules l’ écrivain ; et aussi quelques sentences : « C’est de la faiblesse de no
449 rivain ; et aussi quelques sentences : « C’est de la faiblesse de nos yeux que frissonnent les étoiles. » f. Rougemont
450 C’est de la faiblesse de nos yeux que frissonnent les étoiles. » f. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Jean Prévost, T
9 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Almanach 1925 (septembre 1925)
451 eptembre 1925)g En 1886, lors de sa fondation, la nouvelle maison d’édition Fischer passait pour « la centrale où l’on
452 nouvelle maison d’édition Fischer passait pour «  la centrale où l’on avait concentré la dynamite internationale qu’Ibsen
453 n d’édition Fischer passait pour « la centrale où l’ on avait concentré la dynamite internationale qu’Ibsen voulait placer
454 assait pour « la centrale où l’on avait concentré la dynamite internationale qu’Ibsen voulait placer sous les arches de la
455 amite internationale qu’Ibsen voulait placer sous les arches de la vieille société », pour reprendre la pittoresque définit
456 ionale qu’Ibsen voulait placer sous les arches de la vieille société », pour reprendre la pittoresque définition de M. A.
457 es arches de la vieille société », pour reprendre la pittoresque définition de M. A. Eloesser dans l’Almanach du 25e anniv
458 la pittoresque définition de M. A. Eloesser dans l’ Almanach du 25e anniversaire. Les révolutionnaires y faisaient pourtan
459 A. Eloesser dans l’Almanach du 25e anniversaire. Les révolutionnaires y faisaient pourtant bon ménage avec les derniers ch
460 lutionnaires y faisaient pourtant bon ménage avec les derniers champions du naturalisme puisqu’au début Fischer publia Zola
461 trouve au tableau des auteurs édités depuis lors les grands noms de la littérature européenne d’avant-guerre mêlés à ceux
462 des auteurs édités depuis lors les grands noms de la littérature européenne d’avant-guerre mêlés à ceux des maîtres du ren
463 aliste allemand et viennois, Hesse, Hofmannsthal… Les extraits de ces auteurs qui composent l’Almanach Fischer donnent une
464 nsthal… Les extraits de ces auteurs qui composent l’ Almanach Fischer donnent une juste idée de ce que fut la littérature d
465 nach Fischer donnent une juste idée de ce que fut la littérature d’avant-garde entre 1900 et 1910. Depuis, la maison paraî
466 érature d’avant-garde entre 1900 et 1910. Depuis, la maison paraît s’être un peu embourgeoisée… Disons plutôt que voici ve
467 n peu embourgeoisée… Disons plutôt que voici venu le temps de la moisson, — le temps des éditions d’œuvres complètes. g.
468 geoisée… Disons plutôt que voici venu le temps de la moisson, — le temps des éditions d’œuvres complètes. g. Rougemont
469 s plutôt que voici venu le temps de la moisson, —  le temps des éditions d’œuvres complètes. g. Rougemont Denis de, « [C
10 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Otto Flake, Der Gute Weg (septembre 1925)
470 tto Flake, Der Gute Weg (septembre 1925)h Dans l’ atmosphère trouble où s’agite l’Allemagne nouvelle — et peut-être parc
471 re 1925)h Dans l’atmosphère trouble où s’agite l’ Allemagne nouvelle — et peut-être parce qu’il sait en sortir parfois —
472 kei a gardé son bon sens et son sang-froid. Et si l’ on a pu reprocher à ses tableaux de l’Europe qu’il vient de parcourir
473 roid. Et si l’on a pu reprocher à ses tableaux de l’ Europe qu’il vient de parcourir quelque superficialité, du moins faut-
474 arcourir quelque superficialité, du moins faut-il le louer d’avoir conservé une vision générale de notre temps et un évide
475 bénéficie de cette vision. Je ne saurais résumer les nombreuses péripéties de son dernier roman sans exposer et discuter t
476 son dernier roman sans exposer et discuter toutes les idées qu’elles illustrent. Les personnages discutent certes, mais leu
477 et discuter toutes les idées qu’elles illustrent. Les personnages discutent certes, mais leurs actions sont les meilleurs a
478 onnages discutent certes, mais leurs actions sont les meilleurs arguments. Et peu à peu surgissent d’une accumulation de pe
479 près-guerre d’une étrange vérité. Aux prises avec les problèmes sociaux et le luxe le moins apaisant, tournés vers la Russi
480 vérité. Aux prises avec les problèmes sociaux et le luxe le moins apaisant, tournés vers la Russie, vers le passé, vers l
481 Aux prises avec les problèmes sociaux et le luxe le moins apaisant, tournés vers la Russie, vers le passé, vers l’Orient,
482 ociaux et le luxe le moins apaisant, tournés vers la Russie, vers le passé, vers l’Orient, tentant des amours nouvelles et
483 e le moins apaisant, tournés vers la Russie, vers le passé, vers l’Orient, tentant des amours nouvelles et les fuites les
484 sant, tournés vers la Russie, vers le passé, vers l’ Orient, tentant des amours nouvelles et les fuites les plus folles hor
485 é, vers l’Orient, tentant des amours nouvelles et les fuites les plus folles hors de la réalité, ils forment un cortège pit
486 rient, tentant des amours nouvelles et les fuites les plus folles hors de la réalité, ils forment un cortège pittoresque et
487 s nouvelles et les fuites les plus folles hors de la réalité, ils forment un cortège pittoresque et désolant à celui qui,
488 ge pittoresque et désolant à celui qui, revenu de l’ étranger dans le désordre de son pays, suivra obstinément le « bon che
489 t désolant à celui qui, revenu de l’étranger dans le désordre de son pays, suivra obstinément le « bon chemin » de la sant
490 dans le désordre de son pays, suivra obstinément le « bon chemin » de la santé et de la raison. C’est à lui que va la sym
491 son pays, suivra obstinément le « bon chemin » de la santé et de la raison. C’est à lui que va la sympathie de l’auteur et
492 a obstinément le « bon chemin » de la santé et de la raison. C’est à lui que va la sympathie de l’auteur et la nôtre. h.
493 » de la santé et de la raison. C’est à lui que va la sympathie de l’auteur et la nôtre. h. Rougemont Denis de, « [Compt
494 de la raison. C’est à lui que va la sympathie de l’ auteur et la nôtre. h. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Otto Fl
495 n. C’est à lui que va la sympathie de l’auteur et la nôtre. h. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Otto Flake, Der Gut
496 1163. i. Orthographié « Flasce » par erreur dans l’ original.
11 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Miguel de Unamuno, Trois nouvelles exemplaires et un prologue (septembre 1925)
497 opéenne », croyez-vous qu’il aille s’abandonner à l’ émotion communicative de qui découvre un sommet ? Point. Précision, mo
498 vre un sommet ? Point. Précision, modération dans le jugement, humour léger, notation suggestive, telles sont les vertus d
499 t, humour léger, notation suggestive, telles sont les vertus de sa critique. Ce n’est que dans sa discrétion à louer une gr
500 iscrétion à louer une grande œuvre qu’on trouvera la mesure de son admiration et le gage de sa légitimité. Nul doute que l
501 vre qu’on trouvera la mesure de son admiration et le gage de sa légitimité. Nul doute que les Trois nouvelles exemplaires
502 ration et le gage de sa légitimité. Nul doute que les Trois nouvelles exemplaires ne suscitent un intérêt très profond : el
503 de préoccupations des plus modernes, problème de la réalité littéraire, problème de la personnalité. Leur Prologue pourra
504 s, problème de la réalité littéraire, problème de la personnalité. Leur Prologue pourrait presque aussi bien être celui d’
505 d’une pièce de Pirandello. N’annonce-t-il pas que les personnages des trois nouvelles « sont réels, très réels, de la réali
506 des trois nouvelles « sont réels, très réels, de la réalité la plus intime, de celle qu’ils se donnent eux-mêmes dans leu
507 nouvelles « sont réels, très réels, de la réalité la plus intime, de celle qu’ils se donnent eux-mêmes dans leur pure volo
508 ur pure volonté d’être ou de ne pas être… ». Mais les héros de Pirandello, s’ils veulent être, subissent, une fois qu’ils s
509 ls veulent être, subissent, une fois qu’ils sont, le grand malentendu de la personnalité. Tandis que chez Unamuno une volo
510 ent, une fois qu’ils sont, le grand malentendu de la personnalité. Tandis que chez Unamuno une volonté d’action les possèd
511 ité. Tandis que chez Unamuno une volonté d’action les possède, les exalte, les affole. Les plus beaux types créés par Unamu
512 ue chez Unamuno une volonté d’action les possède, les exalte, les affole. Les plus beaux types créés par Unamuno sont ces f
513 uno une volonté d’action les possède, les exalte, les affole. Les plus beaux types créés par Unamuno sont ces femmes dures
514 nté d’action les possède, les exalte, les affole. Les plus beaux types créés par Unamuno sont ces femmes dures et passionné
515 us dépouillé de détail extérieur ou d’enjolivure. La lecture de ces trois tragédies, d’une classique sobriété mais d’une b
516 une brutalité et d’une ironie romantiques, laisse la même impression de grandeur désolée qu’un Greco. Mais il n’y a pas le
517 e grandeur désolée qu’un Greco. Mais il n’y a pas les couleurs, ni l’amère volupté des formes. Une sensation de barre d’aci
518 e qu’un Greco. Mais il n’y a pas les couleurs, ni l’ amère volupté des formes. Une sensation de barre d’acier sur la nuque.
519 té des formes. Une sensation de barre d’acier sur la nuque. j. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Miguel de Unamuno,
12 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Ernest Seillière, Alexandre Vinet, historien de la pensée française (octobre 1925)
520 Ernest Seillière, Alexandre Vinet, historien de la pensée française (octobre 1925)k Peut-être n’est-il pas trop tard
521 pitre qu’il vient d’ajouter à sa grande étude sur les rapports du christianisme et du romantisme. M. Seillière cherchait da
522 sme et du romantisme. M. Seillière cherchait dans l’ époque romantique un témoin dont le jugement eut « l’autorité d’un ver
523 cherchait dans l’époque romantique un témoin dont le jugement eut « l’autorité d’un verdict essentiellement chrétien sur l
524 poque romantique un témoin dont le jugement eut «  l’ autorité d’un verdict essentiellement chrétien sur le mysticisme natur
525 utorité d’un verdict essentiellement chrétien sur le mysticisme naturiste ». Il ne pouvait trouver mieux que Vinet. Et j’i
526 net. Et j’imagine son étonnement à découvrir dans l’ œuvre du penseur vaudois la substance originale de la plupart des idée
527 ement à découvrir dans l’œuvre du penseur vaudois la substance originale de la plupart des idées dont lui-même s’est fait
528 de la plupart des idées dont lui-même s’est fait le moderne champion. Pour ce qui concerne le Vinet juge des romantiques,
529 st fait le moderne champion. Pour ce qui concerne le Vinet juge des romantiques, il n’a pas eu trop de peine à l’annexer à
530 ge des romantiques, il n’a pas eu trop de peine à l’ annexer à son propre corps de doctrines critiques. Dirai-je pourtant q
531 , et presque inconsciemment, à gauchir légèrement la pensée de Vinet pour lui ajuster sa terminologie particulière ? Mais
532 ie particulière ? Mais par ailleurs Vinet déborde le « sellièrisme » de tout son mysticisme protestant. Et cela n’est pas
533 eillière. C’est peut-être pourquoi il insiste sur le fait que Vinet se déclarait « un chrétien sans épithète ». Croit-il é
534 n chrétien sans épithète ». Croit-il éluder ainsi le protestantisme de Vinet ? Ne voit-il pas que rien n’est plus protesta
535 e ? Mais ces réserves sont de peu d’importance si l’ on songe au service que M. Seillière nous rend en réintroduisant dans
536 que M. Seillière nous rend en réintroduisant dans l’ actualité la plus brûlante les richesses intellectuelles et morales du
537 ière nous rend en réintroduisant dans l’actualité la plus brûlante les richesses intellectuelles et morales du grand vaudo
538 réintroduisant dans l’actualité la plus brûlante les richesses intellectuelles et morales du grand vaudois. Vraiment, tout
539 raiment, tout ce qui semble viable et humain dans la critique moderne du romantisme, Vinet l’avait trouvé. Mais sa positio
540 ain dans la critique moderne du romantisme, Vinet l’ avait trouvé. Mais sa position purement chrétienne — un mysticisme de
541 ] Ernest Seillière, Alexandre Vinet, historien de la pensée française  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Gen
13 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jules Supervielle, Gravitations (décembre 1925)
542 st celui-là qui s’avance » avec ce visage d’entre la vie et la mort « où se reflète le passage incessant d’oiseaux de la m
543 à qui s’avance » avec ce visage d’entre la vie et la mort « où se reflète le passage incessant d’oiseaux de la mer ? » « Q
544 visage d’entre la vie et la mort « où se reflète le passage incessant d’oiseaux de la mer ? » « Quel est cet homme dont l
545 « où se reflète le passage incessant d’oiseaux de la mer ? » « Quel est cet homme dont l’âme fait des signes solennels ? »
546 d’oiseaux de la mer ? » « Quel est cet homme dont l’ âme fait des signes solennels ? » Une voix lente aux méandres songeurs
547 ne simplicité qui n’est pas familière. C’est bien la poésie d’une époque tourmentée dans sa profondeur, mais qui se penche
548 abîmes. Simplicité de notre temps ! Au-dessus de la trépidation immense des machines, un Saint-John-Perse, un Supervielle
549 rse, un Supervielle parlent avec des mots de tous les jours aux vivants et aux morts : Mère, je sais très mal comme l’on ch
550 vants et aux morts : Mère, je sais très mal comme l’ on cherche les morts… « … Cette chose haute à la voix grave qu’on appe
551 morts : Mère, je sais très mal comme l’on cherche les morts… « … Cette chose haute à la voix grave qu’on appelle un père da
552 e l’on cherche les morts… « … Cette chose haute à la voix grave qu’on appelle un père dans les maisons. » Comme Valéry, ce
553 haute à la voix grave qu’on appelle un père dans les maisons. » Comme Valéry, ce poète sait « des complicités étranges pou
554 s’est créé. Jamais banal, il est parfois facile : la description du monde qu’il invente nous lasse quand elle ne l’étonne
555 n du monde qu’il invente nous lasse quand elle ne l’ étonne plus assez lui-même (pourtant l’autel et le surréalisme l’ont e
556 nd elle ne l’étonne plus assez lui-même (pourtant l’ autel et le surréalisme l’ont enrichie d’images…). Je cite des noms :
557 l’étonne plus assez lui-même (pourtant l’autel et le surréalisme l’ont enrichie d’images…). Je cite des noms : y a-t-il in
558 ssez lui-même (pourtant l’autel et le surréalisme l’ ont enrichie d’images…). Je cite des noms : y a-t-il influence ou seul
559 rtent des cafés littéraires, nos poètes respirent le même air du temps. Leur originalité se retrouve dans la manière dont
560 e air du temps. Leur originalité se retrouve dans la manière dont ils tentent de fuir l’inquiétude où ils baignent. Celui-
561 retrouve dans la manière dont ils tentent de fuir l’ inquiétude où ils baignent. Celui-ci vient à peine de quitter l’air du
562 ù ils baignent. Celui-ci vient à peine de quitter l’ air dur des pampas. « Le voilà qui s’avance, foulant les hautes herbes
563 vient à peine de quitter l’air dur des pampas. «  Le voilà qui s’avance, foulant les hautes herbes du ciel. » Le gaucho a
564 dur des pampas. « Le voilà qui s’avance, foulant les hautes herbes du ciel. » Le gaucho a dompté Pégase et caracole dans l
565 ui s’avance, foulant les hautes herbes du ciel. » Le gaucho a dompté Pégase et caracole dans les étoiles. J’avoue que l’un
566 iel. » Le gaucho a dompté Pégase et caracole dans les étoiles. J’avoue que l’univers intérieur où il lui arrive de graviter
567 Pégase et caracole dans les étoiles. J’avoue que l’ univers intérieur où il lui arrive de graviter me trouble mieux que so
568 eux que son lyrisme cosmique. On est plus près de l’ infini au fond de soi qu’au fond du ciel. l. Rougemont Denis de, « 
14 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Simone Téry, L’Île des bardes (décembre 1925)
569 Simone Téry, L’ Île des bardes (décembre 1925)m L’Irlande contemporaine offre un sp
570 Simone Téry, L’Île des bardes (décembre 1925)m L’ Irlande contemporaine offre un spectacle bien passionnant : celui de l
571 ne offre un spectacle bien passionnant : celui de la renaissance d’une littérature nationale à la fois cause et effet de l
572 littérature nationale à la fois cause et effet de la libération politique. Cause, puisque pour mener à chef cette libérati
573 es, ont su payer de leur personne. Effet, puisque l’ héroïsme d’une révolution en faveur du passé, révolution tout de même,
574 lle Simone Téry ne fait pas. Car elle veut éviter l’ emballement et conserver dans l’admiration son sens critique de Parisi
575 elle veut éviter l’emballement et conserver dans l’ admiration son sens critique de Parisienne. C’est une sympathie malici
576 commentaires parfois un peu copieux ; mais elle a la vertu de rendre contagieuse la curiosité de l’auteur à l’endroit de c
577 ieux ; mais elle a la vertu de rendre contagieuse la curiosité de l’auteur à l’endroit de cette âme irlandaise en laquelle
578 a la vertu de rendre contagieuse la curiosité de l’ auteur à l’endroit de cette âme irlandaise en laquelle s’allient une f
579 Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Simone Téry, L’ Île des bardes  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève
15 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Hugh Walpole, La Cité secrète (décembre 1925)
580 Hugh Walpole, La Cité secrète (décembre 1925)n La Révolution russe va-t-elle usurpe
581 Hugh Walpole, La Cité secrète (décembre 1925)n La Révolution russe va-t-elle usurper dans le roman d’aventures le rôle
582 5)n La Révolution russe va-t-elle usurper dans le roman d’aventures le rôle de la mer Océane avec ses écumeurs ? Déjà u
583 russe va-t-elle usurper dans le roman d’aventures le rôle de la mer Océane avec ses écumeurs ? Déjà un Mac Orlan, un Kesse
584 elle usurper dans le roman d’aventures le rôle de la mer Océane avec ses écumeurs ? Déjà un Mac Orlan, un Kessel ont donné
585 t donné de beaux exemples du parti que peut tirer le nouveau romantisme de ce chaos. Salmon a même tenté d’en écrire l’épo
586 isme de ce chaos. Salmon a même tenté d’en écrire l’ épopée dans Prikaz, cette traduction française de l’énorme cri de déli
587 épopée dans Prikaz, cette traduction française de l’ énorme cri de délivrance du peuple fou. Belles étincelles échappées d’
588 u. Belles étincelles échappées d’un brasier. Pour les causes de l’incendie, voir Dostoïevski. M. Walpole, lui, commence son
589 celles échappées d’un brasier. Pour les causes de l’ incendie, voir Dostoïevski. M. Walpole, lui, commence son roman quelqu
590 mmence son roman quelques mois avant que n’éclate le sinistre, et s’arrête au moment où l’on est sûr que ça brûle bien. Qu
591 ue n’éclate le sinistre, et s’arrête au moment où l’ on est sûr que ça brûle bien. Quel sujet plus riche pouvait-on rêver p
592 lus riche pouvait-on rêver pour un psychologue de la puissance de Walpole, que l’âme russe — cette âme russe qui pour le P
593 ur un psychologue de la puissance de Walpole, que l’ âme russe — cette âme russe qui pour le Parisien restera toujours « in
594 lpole, que l’âme russe — cette âme russe qui pour le Parisien restera toujours « indéfinissable ». M. Walpole, dont nous c
595 mençons aujourd’hui un roman bien différent, a vu la Révolution sans romantisme, dans le détail de la vie d’une ville. Il
596 fférent, a vu la Révolution sans romantisme, dans le détail de la vie d’une ville. Il sait qu’un grand mouvement est la ré
597 la Révolution sans romantisme, dans le détail de la vie d’une ville. Il sait qu’un grand mouvement est la résultante de m
598 ie d’une ville. Il sait qu’un grand mouvement est la résultante de millions de petits. Voici naître la révolution dans un
599 la résultante de millions de petits. Voici naître la révolution dans un cœur, puis dans une famille. Et une fois le grand
600 dans un cœur, puis dans une famille. Et une fois le grand bouleversement accompli dans la « Cité secrète » de la vie priv
601 Et une fois le grand bouleversement accompli dans la « Cité secrète » de la vie privée, quelques regards sur la foule suff
602 uleversement accompli dans la « Cité secrète » de la vie privée, quelques regards sur la foule suffisent pour en préciser
603 secrète » de la vie privée, quelques regards sur la foule suffisent pour en préciser les conséquences. C’est ainsi qu’int
604 s regards sur la foule suffisent pour en préciser les conséquences. C’est ainsi qu’interviennent les trois Anglais mêlés au
605 er les conséquences. C’est ainsi qu’interviennent les trois Anglais mêlés au drame. M. Walpole leur a dévolu le soin d’entr
606 Anglais mêlés au drame. M. Walpole leur a dévolu le soin d’entrer tantôt dans un foyer, tantôt dans une église, pour cons
607 foyer, tantôt dans une église, pour constater que la foule ne réagit pas autrement que les individus. L’auteur, qui est l’
608 onstater que la foule ne réagit pas autrement que les individus. L’auteur, qui est l’un de ces Anglais, tombe malade avec à
609 foule ne réagit pas autrement que les individus. L’ auteur, qui est l’un de ces Anglais, tombe malade avec à-propos et per
610 vec à-propos et perd connaissance chaque fois que le récit doit sauter quelques semaines. Qu’on veuille bien ne voir autre
611 « procédés », d’ailleurs assez peu choquants, que le revers de grandes qualités de réalisation d’idées en faits ou en situ
612 ts ou en situations dramatiques. Je donnerai tous les essais de M. de Voguë sur l’âme slave pour deux ou trois scènes de La
613 s. Je donnerai tous les essais de M. de Voguë sur l’ âme slave pour deux ou trois scènes de La Cité secrète. Pour celle-ci
614 oguë sur l’âme slave pour deux ou trois scènes de La Cité secrète. Pour celle-ci par exemple (caché dans un réduit, Markov
615 ci par exemple (caché dans un réduit, Markovitch, l’ idéaliste, surprend sa femme, la vertueuse Véra avec un des Anglais) :
616 duit, Markovitch, l’idéaliste, surprend sa femme, la vertueuse Véra avec un des Anglais) : Ils s’embrassaient comme des g
617 ébucher et de faire du bruit. Il songea : — C’est la fin pour moi. Puis : — Quelle imprudence ! Avec la lumière et peut-êt
618 a fin pour moi. Puis : — Quelle imprudence ! Avec la lumière et peut-être du monde dans l’appartement. Il avait si froid q
619 ence ! Avec la lumière et peut-être du monde dans l’ appartement. Il avait si froid que ses dents claquaient. Il quitta sa
620 aquaient. Il quitta sa fenêtre, se traîna jusqu’à l’ angle le plus éloigné du réduit, et se blottit là, sur le sol, les yeu
621 . Il quitta sa fenêtre, se traîna jusqu’à l’angle le plus éloigné du réduit, et se blottit là, sur le sol, les yeux grands
622 le plus éloigné du réduit, et se blottit là, sur le sol, les yeux grands ouverts dans le vide, sans rien voir. Ainsi le
623 éloigné du réduit, et se blottit là, sur le sol, les yeux grands ouverts dans le vide, sans rien voir. Ainsi le moujik de
624 ttit là, sur le sol, les yeux grands ouverts dans le vide, sans rien voir. Ainsi le moujik devant le bolchévique violant
625 ands ouverts dans le vide, sans rien voir. Ainsi le moujik devant le bolchévique violant sa patrie. Une effroyable accept
626 le vide, sans rien voir. Ainsi le moujik devant le bolchévique violant sa patrie. Une effroyable acceptation, mais elle
627 ment en révolte. Aucun cadre logique ne détermine l’ avenir le plus proche. Il n’y a pas même des forces endormies dans l’â
628 évolte. Aucun cadre logique ne détermine l’avenir le plus proche. Il n’y a pas même des forces endormies dans l’âme russe 
629 oche. Il n’y a pas même des forces endormies dans l’ âme russe : mais des possibilités, à chaque instant, d’explosion. Le g
630 des possibilités, à chaque instant, d’explosion. Le géant russe est un enfant : va-t-il rire, va-t-il pleurer ? m’embrass
631 me tuer ? Il sent autour de lui quelque chose qui le gêne. C’est l’empire. Il le renverse, pour voir. Pendant qu’il est en
632 nt autour de lui quelque chose qui le gêne. C’est l’ empire. Il le renverse, pour voir. Pendant qu’il est encore ébahi du f
633 lui quelque chose qui le gêne. C’est l’empire. Il le renverse, pour voir. Pendant qu’il est encore ébahi du fracas, le jui
634 r voir. Pendant qu’il est encore ébahi du fracas, le juif survient avec une méthode simplifiée pour l’exploitation des rui
635 le juif survient avec une méthode simplifiée pour l’ exploitation des ruines. On sait le reste. Tout cela, Walpole ne le di
636 implifiée pour l’exploitation des ruines. On sait le reste. Tout cela, Walpole ne le dit pas. Mais ses personnages le sugg
637 s ruines. On sait le reste. Tout cela, Walpole ne le dit pas. Mais ses personnages le suggèrent de toute la force du troub
638 cela, Walpole ne le dit pas. Mais ses personnages le suggèrent de toute la force du trouble qu’ils créent en nous : Markov
639 t pas. Mais ses personnages le suggèrent de toute la force du trouble qu’ils créent en nous : Markovitch par exemple, ou S
640 ougemont Denis de, « [Compte rendu] Hugh Walpole, La Cité secrète  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève,
16 1926, Articles divers (1924–1930). Conférence de René Guisan « Sur le Saint » (2 février 1926)
641 Conférence de René Guisan « Sur le Saint » (2 février 1926)c M. René Guisan, professeur de théologie
642 rofesseur de théologie à Lausanne et directeur de la Revue de théologie et de philosophie, inaugura lundi soir à l’aula, d
643 héologie et de philosophie, inaugura lundi soir à l’ aula, devant un très nombreux public, la série des conférences que nou
644 di soir à l’aula, devant un très nombreux public, la série des conférences que nous promet le groupe neuchâtelois des « Am
645 public, la série des conférences que nous promet le groupe neuchâtelois des « Amis de la pensée protestante ». M. Guisan
646 nous promet le groupe neuchâtelois des « Amis de la pensée protestante ». M. Guisan avait choisi un sujet qui permet de f
647 et qui permet de façon particulièrement frappante la comparaison des points de vue catholique et protestant : la notion de
648 ison des points de vue catholique et protestant : la notion de « Saint » et son évolution au cours des siècles. Primitivem
649 on évolution au cours des siècles. Primitivement, le Saint est un homme que Dieu a mis à part par grâce pour qu’il serve.
650 r grâce pour qu’il serve. Mais très vite on étend l’ appellation de saint à ceux qui par leur élévation morale ou leurs sou
651 ation morale ou leurs souffrances semblent s’être le plus rapprochés du Christ ; et dans l’Église persécutée, le martyre d
652 ent s’être le plus rapprochés du Christ ; et dans l’ Église persécutée, le martyre devient le signe par excellence de la sa
653 pprochés du Christ ; et dans l’Église persécutée, le martyre devient le signe par excellence de la sainteté. Le peuple, en
654 ; et dans l’Église persécutée, le martyre devient le signe par excellence de la sainteté. Le peuple, encore païen, voit da
655 ée, le martyre devient le signe par excellence de la sainteté. Le peuple, encore païen, voit dans la vénération des pèleri
656 e devient le signe par excellence de la sainteté. Le peuple, encore païen, voit dans la vénération des pèlerins pour les t
657 e la sainteté. Le peuple, encore païen, voit dans la vénération des pèlerins pour les tombes de leurs saints une forme d’a
658 païen, voit dans la vénération des pèlerins pour les tombes de leurs saints une forme d’adoration de dieux protecteurs. Ce
659 tecteurs. Cette croyance se répand, favorisée par la souplesse dont fait preuve l’Église d’alors quand il s’agit d’adapter
660 pand, favorisée par la souplesse dont fait preuve l’ Église d’alors quand il s’agit d’adapter des traditions antiques au do
661 ions antiques au dogme en formation. Au Moyen Âge l’ évolution se continue dans le même sens. On spécialise les « compétenc
662 mation. Au Moyen Âge l’évolution se continue dans le même sens. On spécialise les « compétences » des saints, ou de leurs
663 tion se continue dans le même sens. On spécialise les « compétences » des saints, ou de leurs reliques qui se multiplient p
664 qui se multiplient prodigieusement. Alors éclate la protestation de la Réforme. Honorons les saints pour l’exemple de leu
665 prodigieusement. Alors éclate la protestation de la Réforme. Honorons les saints pour l’exemple de leur vie : mais Christ
666 rs éclate la protestation de la Réforme. Honorons les saints pour l’exemple de leur vie : mais Christ est le seul médiateur
667 testation de la Réforme. Honorons les saints pour l’ exemple de leur vie : mais Christ est le seul médiateur à qui doit s’a
668 ints pour l’exemple de leur vie : mais Christ est le seul médiateur à qui doit s’adresser le culte, en son cœur, du croyan
669 hrist est le seul médiateur à qui doit s’adresser le culte, en son cœur, du croyant. Le centre de gravité religieux est re
670 oit s’adresser le culte, en son cœur, du croyant. Le centre de gravité religieux est replacé en Christ. — Comment l’Église
671 ravité religieux est replacé en Christ. — Comment l’ Église catholique réagit-elle ? En codifiant l’état de choses antérieu
672 nt l’Église catholique réagit-elle ? En codifiant l’ état de choses antérieur. Donc l’Église continue à faire des saints, t
673 e ? En codifiant l’état de choses antérieur. Donc l’ Église continue à faire des saints, tandis que ce terme n’a plus qu’un
674 tif pour nous protestants. Est-ce là nous juger ? Les catholiques nous reprochent d’avoir méconnu l’élément de grandeur mor
675 ? Les catholiques nous reprochent d’avoir méconnu l’ élément de grandeur morale que les saints maintiennent dans l’Église.
676 d’avoir méconnu l’élément de grandeur morale que les saints maintiennent dans l’Église. M. Guisan va très loin dans ses co
677 grandeur morale que les saints maintiennent dans l’ Église. M. Guisan va très loin dans ses concessions à de telles critiq
678 avec d’autant plus de force que « en situant tout le devoir chrétien dans l’accomplissement scrupuleux, joyeux et fidèle d
679 rce que « en situant tout le devoir chrétien dans l’ accomplissement scrupuleux, joyeux et fidèle de la vocation, le protes
680 l’accomplissement scrupuleux, joyeux et fidèle de la vocation, le protestantisme affirme qu’il existe divers ordres de sai
681 ment scrupuleux, joyeux et fidèle de la vocation, le protestantisme affirme qu’il existe divers ordres de sainteté ». Cett
682 de saints protestants, il existe des saints dans le protestantisme. Mais il n’est pas de fin aux œuvres de Dieu. La saint
683 sme. Mais il n’est pas de fin aux œuvres de Dieu. La sainteté parfaite ne commence qu’aux limites les plus hautes de la ve
684 . La sainteté parfaite ne commence qu’aux limites les plus hautes de la vertu. Dans ce sens, il ne peut exister de saint vé
685 ite ne commence qu’aux limites les plus hautes de la vertu. Dans ce sens, il ne peut exister de saint véritable. Il n’y a
686 pas de saints, mais il faut être parfait. Tel est l’ enseignement de Jésus, telle est la pensée qu’a voulu restaurer le pro
687 rfait. Tel est l’enseignement de Jésus, telle est la pensée qu’a voulu restaurer le protestantisme. La place nous manque p
688 e Jésus, telle est la pensée qu’a voulu restaurer le protestantisme. La place nous manque pour louer comme il conviendrait
689 la pensée qu’a voulu restaurer le protestantisme. La place nous manque pour louer comme il conviendrait la clarté d’un exp
690 lace nous manque pour louer comme il conviendrait la clarté d’un exposé solidement documenté, et le scrupule d’historien e
691 it la clarté d’un exposé solidement documenté, et le scrupule d’historien et de chrétien qui permet à M. Guisan de montrer
692 et de chrétien qui permet à M. Guisan de montrer le point de vue adverse avec autant de compréhension et de sympathie que
693 rillant appareil dialectique ne sait produire que l’ illusion. C’est la revanche du fameux scrupule protestant, qui ne peut
694 ialectique ne sait produire que l’illusion. C’est la revanche du fameux scrupule protestant, qui ne peut être un danger lo
695 ut être un danger lorsqu’il n’est, comme ici, que la loyauté d’un esprit animé par une foi agissante. c. Rougemont Deni
17 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Adieu, beau désordre… (mars 1926)
696 Adieu, beau désordre… (mars 1926)o L’ époque s’en va très vite vers on ne sait quoi. On a mis le bonheur dev
697 s’en va très vite vers on ne sait quoi. On a mis le bonheur devant soi, dans un progrès mal défini, et l’on court après s
698 onheur devant soi, dans un progrès mal défini, et l’ on court après sans fin. Même ceux qui ont perdu la croyance en un bon
699 ’on court après sans fin. Même ceux qui ont perdu la croyance en un bonheur possible ou désirable subissent cette rage dés
700 essives lassitudes ou faim de violences — on sent l’ approche de quelque chose, catastrophe ou révélation, brusque échappée
701 hoisir encore entre un ressaisissement profond et la ruine. Mais certes, il est temps qu’une lueur de conscience inquiète
702 iété affolée et ridiculement opportuniste où mène la pente de notre civilisation. Meneurs et chefs : des économistes, des
703 s, des financiers, des industriels. Il y a encore les hommes politiques, mais on a si souvent l’impression qu’ils battent l
704 ncore les hommes politiques, mais on a si souvent l’ impression qu’ils battent la mesure devant un orchestre qui, sans eux,
705 mais on a si souvent l’impression qu’ils battent la mesure devant un orchestre qui, sans eux, jouerait aussi bien, aussi
706 erait aussi bien, aussi mal. Quant aux meneurs de l’ opinion publique, il est trop tard pour les éduquer, il faudrait balay
707 eurs de l’opinion publique, il est trop tard pour les éduquer, il faudrait balayer. Je parle en général, sachant bien qu’un
708 Romier, un Bainville, quelques autres, sont parmi les plus conscients de ce temps ; mais si l’on songe aux bataillons de pâ
709 t parmi les plus conscients de ce temps ; mais si l’ on songe aux bataillons de pâles opportunistes sans culture qui se cha
710 portunistes sans culture qui se chargent de gaver les masses du pain quotidien de la bêtise de tous les partis, on comprend
711 chargent de gaver les masses du pain quotidien de la bêtise de tous les partis, on comprendra ce que je veux dire. Il faud
712 les masses du pain quotidien de la bêtise de tous les partis, on comprendra ce que je veux dire. Il faudrait balayer, — et
713 veux dire. Il faudrait balayer, — et mettre qui à la place ? Nos penseurs, nos écrivains ont perdu le sens social. Cela de
714 la place ? Nos penseurs, nos écrivains ont perdu le sens social. Cela devient frappant dans les générations nouvelles. To
715 perdu le sens social. Cela devient frappant dans les générations nouvelles. Toute la jeune littérature décrit un type d’ho
716 nt frappant dans les générations nouvelles. Toute la jeune littérature décrit un type d’homme profondément antisocial, glo
717 rale résolument anarchiste. Ceux qui s’essaient à l’ action, c’est encore pour cultiver leur moi. Ils y cherchent un fortif
718 Il leur manque une certitude foncière, une foi en la valeur de l’action. C’est pourquoi ils ne peuvent prétendre à l’actio
719 e une certitude foncière, une foi en la valeur de l’ action. C’est pourquoi ils ne peuvent prétendre à l’action sociale que
720 action. C’est pourquoi ils ne peuvent prétendre à l’ action sociale que l’époque réclame 1. C’est aussi pourquoi l’on ne sa
721 i ils ne peuvent prétendre à l’action sociale que l’ époque réclame 1. C’est aussi pourquoi l’on ne saurait accorder trop d
722 iale que l’époque réclame 1. C’est aussi pourquoi l’ on ne saurait accorder trop d’importance à leurs tentatives morales, s
723 tives morales, si singulières soient-elles — dont le grand public reste le témoin souvent sceptique ou railleur. Au cœur d
724 ulières soient-elles — dont le grand public reste le témoin souvent sceptique ou railleur. Au cœur de la crise de notre ci
725 témoin souvent sceptique ou railleur. Au cœur de la crise de notre civilisation, il y a un problème de morale à résoudre,
726 nce individuelle à recréer. Nous y employer, pour l’ heure, c’est la seule façon efficace de servir. ⁂ On se complaît à rép
727 e à recréer. Nous y employer, pour l’heure, c’est la seule façon efficace de servir. ⁂ On se complaît à répéter que nous v
728 . ⁂ On se complaît à répéter que nous vivons dans le chaos des idées et des doctrines, et qu’il n’existe pas d’esprit du s
729 le, hors un certain « confusionnisme ». Mais sous les épaves de tous les vieux bateaux, il y a une seule mer. Nos agitation
730 « confusionnisme ». Mais sous les épaves de tous les vieux bateaux, il y a une seule mer. Nos agitations contradictoires s
731 comme des vagues soulevées par une même tempête. L’ unité de notre temps est en profondeur : c’est une unité d’inquiétude.
732 it des édifices très différents de style, et dont les façades s’opposent avec hostilité. Dans l’intérieur des deux maisons
733 dont les façades s’opposent avec hostilité. Dans l’ intérieur des deux maisons pourtant se débattent les mêmes brouilles d
734 ’intérieur des deux maisons pourtant se débattent les mêmes brouilles de famille entre Art et Morale, Pensée et Action… Ces
735 , Pensée et Action… Ces deux moralistes adonnés à la culture et à la libération du moi paraissent bien les ancêtres des no
736 on… Ces deux moralistes adonnés à la culture et à la libération du moi paraissent bien les ancêtres des nouvelles générati
737 culture et à la libération du moi paraissent bien les ancêtres des nouvelles générations de héros de roman, lesquels sont t
738 rtu. Ce qui n’a rien d’étonnant : ils ne sont que les projections du moi de leurs auteurs. Or l’égoïsme est vertu cardinale
739 t que les projections du moi de leurs auteurs. Or l’ égoïsme est vertu cardinale pour le créateur. Mais quel est ce besoin
740 rs auteurs. Or l’égoïsme est vertu cardinale pour le créateur. Mais quel est ce besoin si général de s’incarner, dans le h
741 quel est ce besoin si général de s’incarner, dans le héros de son roman, de se voir vivre, dans son œuvre ? C’est ici la c
742 man, de se voir vivre, dans son œuvre ? C’est ici la conception même de la littérature, telle qu’elle apparaît chez les ém
743 dans son œuvre ? C’est ici la conception même de la littérature, telle qu’elle apparaît chez les émules de Barrès comme c
744 me de la littérature, telle qu’elle apparaît chez les émules de Barrès comme chez ceux de Gide, qu’il faut préciser. L’éthi
745 rès comme chez ceux de Gide, qu’il faut préciser. L’ éthique et l’esthétique convergent dans la littérature d’aujourd’hui,
746 z ceux de Gide, qu’il faut préciser. L’éthique et l’ esthétique convergent dans la littérature d’aujourd’hui, et plusieurs
747 éciser. L’éthique et l’esthétique convergent dans la littérature d’aujourd’hui, et plusieurs déjà reconnaissent ne pas pou
748 i, et plusieurs déjà reconnaissent ne pas pouvoir les séparer. On n’écrit plus pour s’amuser : ni pour amuser un public. Un
749 lic. Un livre est une action, une expérience. Et, le plus souvent, sur soi-même. On écrit pour cultiver son moi, pour l’ép
750 ur soi-même. On écrit pour cultiver son moi, pour l’ éprouver et le prémunir, pour y découvrir des possibilités neuves, — p
751 n écrit pour cultiver son moi, pour l’éprouver et le prémunir, pour y découvrir des possibilités neuves, — pour le libérer
752 pour y découvrir des possibilités neuves, — pour le libérer. Il n’est pas question de rechercher ici les origines histori
753 libérer. Il n’est pas question de rechercher ici les origines historiques d’une conception qui, de plus en plus, se révèle
754 ’une conception qui, de plus en plus, se révèle à la base de tous les problèmes modernes en littérature. Jacques Rivière s
755 qui, de plus en plus, se révèle à la base de tous les problèmes modernes en littérature. Jacques Rivière s’y appliqua dans
756 erniers articles2. Il rendait responsable de tout le « mal », le romantisme — et c’est plus que probable. Mais il en tirai
757 cles2. Il rendait responsable de tout le « mal », le romantisme — et c’est plus que probable. Mais il en tirait une raison
758 robable. Mais il en tirait une raison nouvelle de le condamner, et nous ne pouvons le suivre jusque-là : il est vain de di
759 ison nouvelle de le condamner, et nous ne pouvons le suivre jusque-là : il est vain de dire qu’une époque s’est trompée, p
760 ne époque s’est trompée, puisqu’elle seule permet la suivante qui peut-être retrouvera une nouvelle face de la vérité. Bor
761 nte qui peut-être retrouvera une nouvelle face de la vérité. Bornons-nous à noter le phénomène, puis à en suivre quelques
762 nouvelle face de la vérité. Bornons-nous à noter le phénomène, puis à en suivre quelques conséquences. Connaissance inté
763 ance intégrale et culture de soi, telle peut être l’ épigraphe de toute la littérature moderne. Il n’a pas fallu longtemps
764 ture de soi, telle peut être l’épigraphe de toute la littérature moderne. Il n’a pas fallu longtemps aux Français pour pou
765 fallu longtemps aux Français pour pousser à bout l’ expérience3. Ingénieux équilibres entre la raison et les sens, entre l
766 à bout l’expérience3. Ingénieux équilibres entre la raison et les sens, entre le moi et le monde : l’ennui est venu avant
767 érience3. Ingénieux équilibres entre la raison et les sens, entre le moi et le monde : l’ennui est venu avant l’épuisement
768 eux équilibres entre la raison et les sens, entre le moi et le monde : l’ennui est venu avant l’épuisement des combinaison
769 bres entre la raison et les sens, entre le moi et le monde : l’ennui est venu avant l’épuisement des combinaisons possible
770 la raison et les sens, entre le moi et le monde : l’ ennui est venu avant l’épuisement des combinaisons possibles. Exaltati
771 entre le moi et le monde : l’ennui est venu avant l’ épuisement des combinaisons possibles. Exaltation méthodique de nos fa
772 cultiver certaines douleurs, plaisirs rares ; et les dissonances les plus aiguës prennent la place d’honneur dans des esth
773 nes douleurs, plaisirs rares ; et les dissonances les plus aiguës prennent la place d’honneur dans des esthétiques construi
774 res ; et les dissonances les plus aiguës prennent la place d’honneur dans des esthétiques construites en hâte à l’usage de
775 onneur dans des esthétiques construites en hâte à l’ usage de sensibilités surmenées. Dégoût, parce que tout a été essayé.
776 se, contre soi, contre une difficulté.) Dégoût de la vie, dégoût du bonheur, dégoût de soi, — on l’étend vite à la société
777 de la vie, dégoût du bonheur, dégoût de soi, — on l’ étend vite à la société entière. Dégoût d’une civilisation qui aboutit
778 ût du bonheur, dégoût de soi, — on l’étend vite à la société entière. Dégoût d’une civilisation qui aboutit logiquement à
779 ogiquement à cet épuisant et forcené gaspillage : la guerre. Certains s’en tiennent à leur dégoût et l’exploitent. Ainsi s
780 a guerre. Certains s’en tiennent à leur dégoût et l’ exploitent. Ainsi se légitime le surréalisme, qui vomit le monde entie
781 à leur dégoût et l’exploitent. Ainsi se légitime le surréalisme, qui vomit le monde entier et la raison avec. « Révolutio
782 tent. Ainsi se légitime le surréalisme, qui vomit le monde entier et la raison avec. « Révolution d’abord. Révolution touj
783 time le surréalisme, qui vomit le monde entier et la raison avec. « Révolution d’abord. Révolution toujours ». « Pour nous
784 tion d’abord. Révolution toujours ». « Pour nous, le salut n’est nulle part… » « Je comprends la révolte des autres et que
785 nous, le salut n’est nulle part… » « Je comprends la révolte des autres et quelles prières cela fait à Dieu », disait Drie
786 n dégoût, un Montherlant s’abandonne au salut par la violence. Une sensualité moins énervée lui permet de brutaliser quelq
787 oins énervée lui permet de brutaliser quelque peu les « grands problèmes », et le voilà reparti dans un égoïsme triomphant,
788 utaliser quelque peu les « grands problèmes », et le voilà reparti dans un égoïsme triomphant, pur du désir d’action qui e
789 ’action qui empêtrait Barrès dans des dilemmes où l’ art trouvait mal sa nourriture. Drieu la Rochelle tente la même fuite.
790 ouvait mal sa nourriture. Drieu la Rochelle tente la même fuite. Mais trop lucide, hésite, trébuche, oscille entre la viol
791 Mais trop lucide, hésite, trébuche, oscille entre la violence et le désespoir (c’est l’amour), et, déchiré de contradictio
792 e, hésite, trébuche, oscille entre la violence et le désespoir (c’est l’amour), et, déchiré de contradictions, tire du dés
793 oscille entre la violence et le désespoir (c’est l’ amour), et, déchiré de contradictions, tire du désordre de ses certitu
794 tire du désordre de ses certitudes fragmentaires la matière de quelques pamphlets par quoi il se raccroche au monde. Mais
795 au monde. Mais il a touché certains bas-fonds de l’ âme où s’éveille un désenchantement qui l’amène au besoin d’une mystiq
796 onds de l’âme où s’éveille un désenchantement qui l’ amène au besoin d’une mystique. Et pour finir, l’un des derniers venus
797 nus, Marcel Arland, — plus jeune, il n’a pas fait la guerre — c’est le même désenchantement précoce, sans la brusquerie de
798 , — plus jeune, il n’a pas fait la guerre — c’est le même désenchantement précoce, sans la brusquerie de ses aînés. Encore
799 rre — c’est le même désenchantement précoce, sans la brusquerie de ses aînés. Encore un qui s’est complu dans son dégoût ;
800 voir comme un appel du Dieu perdu. Il avoue enfin la cause secrète des inquiétudes modernes : la perte d’une foi. Il a bes
801 enfin la cause secrète des inquiétudes modernes : la perte d’une foi. Il a besoin de Dieu, mais il attend en vain sa Révél
802 on : « C’est peut-être que je suis médiocre entre les hommes ». C’est plutôt qu’il est trop attaché encore à se regarder ch
803 on dessein. ⁂ Décidément nous sommes malades dans les profondeurs. Et le mal est si cruellement isolé, commenté par ceux qu
804 ment nous sommes malades dans les profondeurs. Et le mal est si cruellement isolé, commenté par ceux qui le portent en eux
805 l est si cruellement isolé, commenté par ceux qui le portent en eux qu’il en paraît plus incurable. Ces jeunes gens n’en f
806 indre leur déséquilibre. Il serait temps de faire la critique des méthodes et des façons de vivre autant que de penser qui
807 s et des façons de vivre autant que de penser qui les ont amenés aux positions qu’on vient d’esquisser. Mais on trouve tout
808 qu’on vient d’esquisser. Mais on trouve tout dans les livres des jeunes, dites-vous, le pire et le meilleur, toutes les vie
809 ouve tout dans les livres des jeunes, dites-vous, le pire et le meilleur, toutes les vieilleries morales et immorales, tou
810 ans les livres des jeunes, dites-vous, le pire et le meilleur, toutes les vieilleries morales et immorales, tous les parad
811 eunes, dites-vous, le pire et le meilleur, toutes les vieilleries morales et immorales, tous les paradoxes, le chaos, etc.
812 toutes les vieilleries morales et immorales, tous les paradoxes, le chaos, etc. — Certes, aucune époque ne fut à la fois pl
813 lleries morales et immorales, tous les paradoxes, le chaos, etc. — Certes, aucune époque ne fut à la fois plus morale et p
814 u’aucune ne s’est autant attachée à chercher dans le seul moi les fondements d’une éthique. Presque tous sont hantés par l
815 s’est autant attachée à chercher dans le seul moi les fondements d’une éthique. Presque tous sont hantés par la peur d’une
816 ments d’une éthique. Presque tous sont hantés par la peur d’une morale qui « déforme », qui mutile une tendance naturelle,
817 e naturelle, qui élague, qui opère un choix parmi les éléments mêlés de la personnalité. Toute tendance qu’ils découvrent e
818 e, qui opère un choix parmi les éléments mêlés de la personnalité. Toute tendance qu’ils découvrent en eux est non seuleme
819 oi ordre et désordre, raison et folie, etc. Si je les cultive simultanément il est clair que les tendances négatives l’empo
820 Si je les cultive simultanément il est clair que les tendances négatives l’emportent, il est plus facile et plus enivrant
821 tanément il est clair que les tendances négatives l’ emportent, il est plus facile et plus enivrant de se laisser glisser q
822 vrant de se laisser glisser que de construire. Et l’ on y prend vite goût. Cela tourne alors en passion de détruire, en ha
823 t de quoi se glorifient ses tenants, ils y voient la suprême liberté. Le désir se précisait en moi de commettre enfin l’ac
824 ent ses tenants, ils y voient la suprême liberté. Le désir se précisait en moi de commettre enfin l’acte vraiment indéfend
825 . Le désir se précisait en moi de commettre enfin l’ acte vraiment indéfendable de tout point de vue… J’avais goûté à l’alc
826 ndéfendable de tout point de vue… J’avais goûté à l’ alcool singulièrement perfide de perdre ce que nous chérissons… Nous a
827 ce que nous chérissons… Nous apprîmes à mépriser les longues vies heureuses que nous avions jusqu’alors enviées, et une nu
828 ions jusqu’alors enviées, et une nuit, nous fîmes le procès de toutes les jouissances humaines. L’espèce de sincérité terr
829 iées, et une nuit, nous fîmes le procès de toutes les jouissances humaines. L’espèce de sincérité terroriste dans laquelle
830 mes le procès de toutes les jouissances humaines. L’ espèce de sincérité terroriste dans laquelle nous nous obstinions nous
831 nous niions toute vérité, nous étions dominés par le sens d’une réalité morale absolue que certains d’entre nous eussent a
832 illeurs admirable4, de Louis Aragon, pour marquer l’ aboutissement d’une évolution qui a son origine dans l’œuvre de Gide.
833 utissement d’une évolution qui a son origine dans l’ œuvre de Gide. Entre les Nourritures terrestres, les Caves du Vatican
834 ion qui a son origine dans l’œuvre de Gide. Entre les Nourritures terrestres, les Caves du Vatican et Dada, il y a place po
835 ’œuvre de Gide. Entre les Nourritures terrestres, les Caves du Vatican et Dada, il y a place pour tous les chaînons d’inqui
836 Caves du Vatican et Dada, il y a place pour tous les chaînons d’inquiétude, de malaises, de révoltes plus ou moins complèt
837 plus ou moins complètes au gré des tempéraments. Le geste de Lafcadio généralisé : c’est le surréalisme. De l’acte gratui
838 éraments. Le geste de Lafcadio généralisé : c’est le surréalisme. De l’acte gratuit commis par un héros de roman, à la vie
839 de Lafcadio généralisé : c’est le surréalisme. De l’ acte gratuit commis par un héros de roman, à la vie gratuite que préte
840 De l’acte gratuit commis par un héros de roman, à la vie gratuite que prétendent mener les surréalistes, il n’a fallu que
841 de roman, à la vie gratuite que prétendent mener les surréalistes, il n’a fallu que le temps pour une folie de s’emballer.
842 étendent mener les surréalistes, il n’a fallu que le temps pour une folie de s’emballer. La plupart des romans de jeunes q
843 qui se situent entre Gide et Aragon nous montrent le même personnage : un être sans foi, à qui une sorte de « sincérité »
844 nné parce que ce serait fausser quelque chose ; à la merci des circonstances extérieures qu’il méprise toutes également ;
845 e juger5. Il y a véritablement une littérature de l’ acte gratuit, qui restera caractéristique de notre époque. Mais Gide
846 méthode de culture de soi, « d’intensification de la vie », et qui consiste à pousser à l’extrême certaines « vertus », le
847 fication de la vie », et qui consiste à pousser à l’ extrême certaines « vertus », les pousser jusqu’à l’absurde. Surenchèr
848 siste à pousser à l’extrême certaines « vertus », les pousser jusqu’à l’absurde. Surenchère morale dont le début de la Tent
849 extrême certaines « vertus », les pousser jusqu’à l’ absurde. Surenchère morale dont le début de la Tentative amoureuse off
850 pousser jusqu’à l’absurde. Surenchère morale dont le début de la Tentative amoureuse offrait déjà une singulière préfigura
851 u’à l’absurde. Surenchère morale dont le début de la Tentative amoureuse offrait déjà une singulière préfiguration : Certe
852 singulière préfiguration : Certes ce ne seront ni les lois importunes des hommes, ni les craintes, ni la pudeur, ni le remo
853 e ne seront ni les lois importunes des hommes, ni les craintes, ni la pudeur, ni le remords, ni le respect de moi ni de mes
854 s lois importunes des hommes, ni les craintes, ni la pudeur, ni le remords, ni le respect de moi ni de mes rêves, ni toi,
855 nes des hommes, ni les craintes, ni la pudeur, ni le remords, ni le respect de moi ni de mes rêves, ni toi, triste mort, n
856 ni les craintes, ni la pudeur, ni le remords, ni le respect de moi ni de mes rêves, ni toi, triste mort, ni l’effroi d’ap
857 t de moi ni de mes rêves, ni toi, triste mort, ni l’ effroi d’après-tombe qui m’empêcheront de joindre ce que je désire ; n
858 de joindre ce que je désire ; ni rien — rien que l’ orgueil, sachant une chose si forte, de me sentir plus fort encore et
859 ose si forte, de me sentir plus fort encore et de la vaincre. — Mais la joie d’une si haute victoire — n’est pas si douce
860 sentir plus fort encore et de la vaincre. — Mais la joie d’une si haute victoire — n’est pas si douce encore, n’est pas s
861 à quel genre de sophismes conduit ce mouvement de l’ esprit qui n’utilise une borne que pour sauter plus loin. Ainsi, c’est
862 loin. Ainsi, c’est par humilité qu’on renoncera à la vertu, sous prétexte qu’elle pousse à l’orgueil ; c’est par sincérité
863 oncera à la vertu, sous prétexte qu’elle pousse à l’ orgueil ; c’est par sincérité qu’on mentira, puisque parfois nous somm
864 llement à considérer un certain immoralisme comme la seule vertu digne d’une élite. Tel est l’état d’esprit de la plupart
865 e comme la seule vertu digne d’une élite. Tel est l’ état d’esprit de la plupart de nos jeunes moralistes. Le mot de parado
866 d’esprit de la plupart de nos jeunes moralistes. Le mot de paradoxe serait bien pauvre pour expliquer ce besoin de porter
867 chose, au-delà de toutes limites. « Il n’y a que les excès qui méritent notre enthousiasme ». Mais « cette fureur qui le s
868 ent notre enthousiasme ». Mais « cette fureur qui le soulevait contre lui-même, qui lui faisait mépriser son propre intérê
869 mépriser son propre intérêt6… » c’est proprement la perversion d’une vertu qui se brûle elle-même. Je ne vais point nier
870 rtu qui se brûle elle-même. Je ne vais point nier la fécondité psychologique d’une attitude par ailleurs si proche de cert
871 es dernières conséquences suppose qu’on ait perdu le sens des ensembles rationnels. Nous ne pensons plus par ensembles7 :
872 pas d’une fatigue immense. Nous voyons se fausser le rythme des jours et des nuits à mesure que se développe une civilisat
873 que se développe une civilisation mécanicienne. ( Les machines n’ont pas besoin de sommeil.) La fatigue devient un des élém
874 enne. (Les machines n’ont pas besoin de sommeil.) La fatigue devient un des éléments les plus importants de notre psycholo
875 n de sommeil.) La fatigue devient un des éléments les plus importants de notre psychologie. Images des surréalistes — ils l
876 notre psychologie. Images des surréalistes — ils l’ indiquent eux-mêmes —, calembours, expression métaphorique et symboliq
877 embours, expression métaphorique et symbolique de la pensée : la littérature d’avant-garde est fille de la fatigue. La Mus
878 ression métaphorique et symbolique de la pensée : la littérature d’avant-garde est fille de la fatigue. La Muse a trop vei
879 ensée : la littérature d’avant-garde est fille de la fatigue. La Muse a trop veillé. L’amour moderne, nerveux, saugrenu ju
880 ittérature d’avant-garde est fille de la fatigue. La Muse a trop veillé. L’amour moderne, nerveux, saugrenu jusqu’au sadis
881 e est fille de la fatigue. La Muse a trop veillé. L’ amour moderne, nerveux, saugrenu jusqu’au sadisme, trop lucide, est un
882 u sadisme, trop lucide, est un amour de fatigués ( Les Nuits, l’Europe galante, de Morand). La lucidité aiguë de nos psychol
883 trop lucide, est un amour de fatigués (Les Nuits, l’ Europe galante, de Morand). La lucidité aiguë de nos psychologues est
884 atigués (Les Nuits, l’Europe galante, de Morand). La lucidité aiguë de nos psychologues est cet état presque inhumain de c
885 ie, à ses sensations, à ses automatismes. En art, la fatigue est un des états les plus riches de visions nouvelles, et qui
886 automatismes. En art, la fatigue est un des états les plus riches de visions nouvelles, et qui résiste le mieux à l’analyse
887 plus riches de visions nouvelles, et qui résiste le mieux à l’analyse. Seulement nous y perdons graduellement l’intellige
888 s de visions nouvelles, et qui résiste le mieux à l’ analyse. Seulement nous y perdons graduellement l’intelligence de nos
889 l’analyse. Seulement nous y perdons graduellement l’ intelligence de nos instincts, la conscience de nos limites naturelles
890 ns graduellement l’intelligence de nos instincts, la conscience de nos limites naturelles, tout ce qui servirait de frein
891 ⁂ Recréer une conscience individuelle ; retrouver le sens social, le sens des ensembles et des proportions ; rééduquer les
892 nscience individuelle ; retrouver le sens social, le sens des ensembles et des proportions ; rééduquer les instincts du co
893 sens des ensembles et des proportions ; rééduquer les instincts du corps et de l’âme ; vouloir une foi… La morale de demain
894 portions ; rééduquer les instincts du corps et de l’ âme ; vouloir une foi… La morale de demain sera en réaction complète c
895 instincts du corps et de l’âme ; vouloir une foi… La morale de demain sera en réaction complète contre celle d’aujourd’hui
896 out. Il ne s’agit pas, encore une fois, de renier l’ immense effort pour se libérer de l’universelle hypocrisie accompli pa
897 is, de renier l’immense effort pour se libérer de l’ universelle hypocrisie accompli par des générations qui ne lèguent aux
898 hons au contraire profiter des démonstrations par l’ absurde de quelques problèmes moraux et littéraires 8, à quoi beaucoup
899 t agir, ou bien être agi. Donner une conscience à l’ époque, ou se défaire avec elle et dériver vers un Orient d’oubli — (m
900 hies, quels Niagaras 9 !) Quelques jeunes hommes l’ ont compris. Ils sont modestes — ne s’isolant pas de la Société ; ils
901 compris. Ils sont modestes — ne s’isolant pas de la Société ; ils savent que pour lutter il faut des armes et ne méprisen
902 pour lutter il faut des armes et ne méprisent pas la culture ; sans autre parti pris que celui de vivre, c’est-à-dire de c
903 ttie à son objet, qu’il n’y a de liberté que dans la soumission aux lois naturelles ; et leur effort est de retrouver ces
904 gnent pas de choisir parmi leurs instincts, ni de les améliorer 10. Tout ceci est assez nouveau. (Après tant de cocktails,
905 ouveau. (Après tant de cocktails, quelle saveur a l’ eau claire !) Quelques autres se recueillent encore dans l’attente ang
906 ire !) Quelques autres se recueillent encore dans l’ attente angoissée d’une révélation et dans la connaissance de leur mis
907 dans l’attente angoissée d’une révélation et dans la connaissance de leur misère. Pareils à ceux dont Vinet disait qu’ils
908 ont Vinet disait qu’ils s’en vont « épiant toutes les émotions de l’âme, et lui multipliant ses douleurs en les lui nommant
909 qu’ils s’en vont « épiant toutes les émotions de l’ âme, et lui multipliant ses douleurs en les lui nommant », ils décrive
910 ions de l’âme, et lui multipliant ses douleurs en les lui nommant », ils décrivent le tourment dont sortira peut-être une f
911 ses douleurs en les lui nommant », ils décrivent le tourment dont sortira peut-être une foi nouvelle ; mais qu’ils sachen
912 foi nouvelle ; mais qu’ils sachent, quand viendra le moment, détourner les yeux de leur recherche pour contempler un absol
913 u’ils sachent, quand viendra le moment, détourner les yeux de leur recherche pour contempler un absolu ; qu’ils osent se fa
914 u’ils osent se faire violence pour se hisser dans la lumière. « Il vaut mieux, dit encore Vinet, ne voir d’abord que les g
915 vaut mieux, dit encore Vinet, ne voir d’abord que les grands traits de sa nature, ne connaître que les grands mots de la la
916 les grands traits de sa nature, ne connaître que les grands mots de la langue morale, suivre à l’égard de soi-même la méth
917 de sa nature, ne connaître que les grands mots de la langue morale, suivre à l’égard de soi-même la méthode de l’Évangile
918 de la langue morale, suivre à l’égard de soi-même la méthode de l’Évangile qui, prenant à plein poing toutes ces petites m
919 orale, suivre à l’égard de soi-même la méthode de l’ Évangile qui, prenant à plein poing toutes ces petites misères, en com
920 civiques. Mais que nos moralistes — presque tous les jeunes écrivains — se souviennent de penser en fonction du temps prés
921 temps présent, soit qu’ils veuillent en améliorer les conditions, ou les transformer totalement. — Alors, vous croyez à l’a
922 qu’ils veuillent en améliorer les conditions, ou les transformer totalement. — Alors, vous croyez à l’action sociale des é
923 es transformer totalement. — Alors, vous croyez à l’ action sociale des écrivains ? Peut-être. En tout cas je vois bien le
924 s écrivains ? Peut-être. En tout cas je vois bien le mal qu’ils ont fait et qu’au fond, leur refus d’agir sur l’époque, c’
925 ils ont fait et qu’au fond, leur refus d’agir sur l’ époque, c’est une manière d’agir contre elle. 2. « La crise du concep
926 oque, c’est une manière d’agir contre elle. 2. «  La crise du concept de littérature », NRF, 1923. 3. « Il s’était dévelo
927 « Il s’était développé en nous un goût furieux de l’ expérience humaine. » (Aragon) 4. « Lorsque tout est fini » dans Libe
928 Libertinage. (NRF) 5. Détours de René Crevel ; les romans de Philippe Soupault ; l’Incertain de Maurice Betz ; certains
929 e René Crevel ; les romans de Philippe Soupault ; l’ Incertain de Maurice Betz ; certains personnages d’Arland, de Louis Ar
930 ouis Aragon, de Drieu la Rochelle. Je ne cite que les plus significatifs. 6. Aragon, loc. cit. 7. Le « goût du désastre 
931 es plus significatifs. 6. Aragon, loc. cit. 7. Le « goût du désastre » qui est au fond du romantisme moderne nous empêc
932 ement de construire et de nous construire. Jamais l’ on ne fut plus loin de l’idéal goethéen : au lieu de tout composer en
933 nous construire. Jamais l’on ne fut plus loin de l’ idéal goethéen : au lieu de tout composer en soi, on veut tout cultive
934 omposer en soi, on veut tout cultiver, et en fait l’ on se contente d’une violence, d’un vice, d’une inquiétude. 8. « Cert
935 réelles » (Marcel Arland). 9. Ce serait au moins la liberté ! crieront les surréalistes. Voire. On est moins libre à Mosc
936 nd). 9. Ce serait au moins la liberté ! crieront les surréalistes. Voire. On est moins libre à Moscou qu’à Montparnasse. D
937 D’ailleurs leurs théories nous ramèneraient vite l’ âge de la pierre, à la condition d’homme la plus nue ; la plus éloigné
938 rs leurs théories nous ramèneraient vite l’âge de la pierre, à la condition d’homme la plus nue ; la plus éloignée de cell
939 ries nous ramèneraient vite l’âge de la pierre, à la condition d’homme la plus nue ; la plus éloignée de celle qui permet
940 t vite l’âge de la pierre, à la condition d’homme la plus nue ; la plus éloignée de celle qui permet le surréalisme. 10.
941 e la pierre, à la condition d’homme la plus nue ; la plus éloignée de celle qui permet le surréalisme. 10. Une équipe d’h
942 a plus nue ; la plus éloignée de celle qui permet le surréalisme. 10. Une équipe d’hommes solides suffirait à restaurer u
943 mont Denis de, « Adieu, beau désordre… (Notes sur la jeune littérature et la morale) », Bibliothèque universelle et Revue
944 beau désordre… (Notes sur la jeune littérature et la morale) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mars
18 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Pierre Jean Jouve, Paulina 1880 (avril 1926)
945 )p Au creux des couleurs assourdies d’un divan le soir, tandis que les fenêtres s’ouvraient vers le ciel de Florence… «
946 ouleurs assourdies d’un divan le soir, tandis que les fenêtres s’ouvraient vers le ciel de Florence… « Du sang, de la volup
947 le soir, tandis que les fenêtres s’ouvraient vers le ciel de Florence… « Du sang, de la volupté et de la mort », un titre
948 ouvraient vers le ciel de Florence… « Du sang, de la volupté et de la mort », un titre s’effaçait dans l’ombre. Jouve a rê
949 ciel de Florence… « Du sang, de la volupté et de la mort », un titre s’effaçait dans l’ombre. Jouve a rêvé une histoire d
950 volupté et de la mort », un titre s’effaçait dans l’ ombre. Jouve a rêvé une histoire de passion mystique et de crime, inte
951 t d’autres, comme chaque soir un nouveau ciel. Il l’ a transcrite en brèves notations lyriques suivant le rythme d’un songe
952 a transcrite en brèves notations lyriques suivant le rythme d’un songe, sans cesse brisé par les élans alternés ou confond
953 uivant le rythme d’un songe, sans cesse brisé par les élans alternés ou confondus du désir et de la prière. On sort lenteme
954 ar les élans alternés ou confondus du désir et de la prière. On sort lentement d’une chambre bleue qui est le mystère même
955 re. On sort lentement d’une chambre bleue qui est le mystère même, pour suivre la naissance et l’embrasement de la passion
956 hambre bleue qui est le mystère même, pour suivre la naissance et l’embrasement de la passion de Paulina. Le Péché ; le Co
957 est le mystère même, pour suivre la naissance et l’ embrasement de la passion de Paulina. Le Péché ; le Couvent ; la rechu
958 ême, pour suivre la naissance et l’embrasement de la passion de Paulina. Le Péché ; le Couvent ; la rechute et le crime ;
959 ssance et l’embrasement de la passion de Paulina. Le Péché ; le Couvent ; la rechute et le crime ; et l’étrange apaisement
960 ’embrasement de la passion de Paulina. Le Péché ; le Couvent ; la rechute et le crime ; et l’étrange apaisement d’une viei
961 de la passion de Paulina. Le Péché ; le Couvent ; la rechute et le crime ; et l’étrange apaisement d’une vieillesse au sol
962 de Paulina. Le Péché ; le Couvent ; la rechute et le crime ; et l’étrange apaisement d’une vieillesse au soleil. Jouve sem
963 Péché ; le Couvent ; la rechute et le crime ; et l’ étrange apaisement d’une vieillesse au soleil. Jouve semble avoir hési
964 servation psychologique ironique et minutieuse, à la Stendhal, succède à des effusions haletantes ou à une relation cinéma
965 ion cinématographique. Mais tout cela baigne dans le même lyrisme et s’agite sur un fond sombre et riche de passions incon
966 iche de passions inconscientes qui donnent à tous les actes une signification plus profonde. (Il serait aisé de montrer que
967 de poétique où il paraît inconvenant d’introduire le jargon de la science moderne.) Si nous reconnaissons à la base de cet
968 ù il paraît inconvenant d’introduire le jargon de la science moderne.) Si nous reconnaissons à la base de cette œuvre inég
969 n de la science moderne.) Si nous reconnaissons à la base de cette œuvre inégale des idées vieilles comme Rousseau sur les
970 vre inégale des idées vieilles comme Rousseau sur les droits de la passion, — et dans sa trame quelques chapitres inspirés
971 s idées vieilles comme Rousseau sur les droits de la passion, — et dans sa trame quelques chapitres inspirés presque litté
972 anecdote italienne de Stendhal ; si d’autre part l’ évolution mystique de Paulina semble parfois un peu trop « classique »
973 mble parfois un peu trop « classique » et prévue, l’ originalité foncière du roman de Jouve reste indéniable : c’est son mo
974 nes proses mystiques de Paulina au couvent valent les meilleurs poèmes de l’auteur de Tragiques et de Vous êtes des hommes.
975 Paulina au couvent valent les meilleurs poèmes de l’ auteur de Tragiques et de Vous êtes des hommes. p. Rougemont Denis
19 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Alix de Watteville, La Folie de l’espace (avril 1926)
976 Alix de Watteville, La Folie de l’espace (avril 1926)q Un artiste de grand talent à qui l
977 Alix de Watteville, La Folie de l’ espace (avril 1926)q Un artiste de grand talent à qui la guerre a f
978 (avril 1926)q Un artiste de grand talent à qui la guerre a fait perdre le goût des théories d’écoles et de quelques aut
979 ste de grand talent à qui la guerre a fait perdre le goût des théories d’écoles et de quelques autres plaisirs pour civils
980 de quelques autres plaisirs pour civils : mettez- le aux prises avec une petite cité patricienne dont il devra portraiture
981 etite cité patricienne dont il devra portraiturer les gentilshommes archéologiques et les vieilles dames à principes. Voilà
982 portraiturer les gentilshommes archéologiques et les vieilles dames à principes. Voilà, n’est-ce pas, un amusant sujet de
983 al, avec ses personnages un peu conventionnels et l’ invraisemblance assez piquante de ses péripéties. Quel dommage que l’a
984 ssez piquante de ses péripéties. Quel dommage que l’ auteur l’ait alourdi d’une idéologie, souvent plus généreuse que neuve
985 ante de ses péripéties. Quel dommage que l’auteur l’ ait alourdi d’une idéologie, souvent plus généreuse que neuve, et qui
986 à être mise en action plutôt qu’en commentaires. Le talent de Mme de Watteville paraît mieux à l’aise dans la description
987 es. Le talent de Mme de Watteville paraît mieux à l’ aise dans la description du milieu patricien que dans la création d’un
988 t de Mme de Watteville paraît mieux à l’aise dans la description du milieu patricien que dans la création d’un caractère d
989 dans la description du milieu patricien que dans la création d’un caractère de grand peintre. Pourtant, malgré des longue
990 ongueurs, on ne lira pas sans plaisir ce livre où l’ on voit un homme appeler en vain le vent du large, parmi des gens qui
991 ir ce livre où l’on voit un homme appeler en vain le vent du large, parmi des gens qui craignent de s’enrhumer. q. Roug
992 nt Denis de, « [Compte rendu] Alix de Watteville, La Folie de l’espace  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Ge
993 « [Compte rendu] Alix de Watteville, La Folie de l’ espace  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, avril
20 1926, Articles divers (1924–1930). Conférences d’Aubonne (7 avril 1926)
994 il 1926)d e Pour la première fois cette année, les conférences de l’Association chrétienne d’étudiants eurent lieu au pr
995 la première fois cette année, les conférences de l’ Association chrétienne d’étudiants eurent lieu au printemps, et non pl
996 ne. Un plein succès a répondu à cette innovation. Le sujet de la première partie des conférences, les Objections des intel
997 . Le sujet de la première partie des conférences, les Objections des intellectuels au Dieu chrétien, fut introduit par M. R
998 istingué, qui se fit avec beaucoup d’intelligence l’ avocat du diable, en montrant que tous les faits religieux admettent à
999 lligence l’avocat du diable, en montrant que tous les faits religieux admettent à côté de l’explication mystique une explic
1000 que tous les faits religieux admettent à côté de l’ explication mystique une explication scientifique. C’est donc à la seu
1001 stique une explication scientifique. C’est donc à la seule volonté de choisir. M. le pasteur Bertrand de Lyon, répondit en
1002 que. C’est donc à la seule volonté de choisir. M. le pasteur Bertrand de Lyon, répondit en exposant les exigences de l’Éva
1003 le pasteur Bertrand de Lyon, répondit en exposant les exigences de l’Évangile en face de la pensée moderne, et fut impressi
1004 nd de Lyon, répondit en exposant les exigences de l’ Évangile en face de la pensée moderne, et fut impressionnant de vigueu
1005 n exposant les exigences de l’Évangile en face de la pensée moderne, et fut impressionnant de vigueur dialectique et de la
1006 que et de largeur d’idées. Une soirée consacrée à la fédération vint interrompre les discussions philosophiques provoquées
1007 soirée consacrée à la fédération vint interrompre les discussions philosophiques provoquées par ces deux travaux. Avec la c
1008 losophiques provoquées par ces deux travaux. Avec la conférence de M. Jean Cadier, un jeune pasteur français, on descendit
1009 ier, un jeune pasteur français, on descendit — ou l’ on monta suivant M. A. Léo — du domaine de la pensée pure dans celui d
1010 — ou l’on monta suivant M. A. Léo — du domaine de la pensée pure dans celui de l’action. M. Cadier montra le conflit de la
1011 Léo — du domaine de la pensée pure dans celui de l’ action. M. Cadier montra le conflit de la théologie moderne avec l’act
1012 sée pure dans celui de l’action. M. Cadier montra le conflit de la théologie moderne avec l’action religieuse en s’appuyan
1013 celui de l’action. M. Cadier montra le conflit de la théologie moderne avec l’action religieuse en s’appuyant sur des expé
1014 er montra le conflit de la théologie moderne avec l’ action religieuse en s’appuyant sur des expériences faites pendant le
1015 en s’appuyant sur des expériences faites pendant le réveil de la Drôme, dont il est l’un des artisans les plus actifs. Po
1016 t sur des expériences faites pendant le réveil de la Drôme, dont il est l’un des artisans les plus actifs. Pour remplacer
1017 réveil de la Drôme, dont il est l’un des artisans les plus actifs. Pour remplacer un travail promis par M. A. Reymond malhe
1018 é, M. Pierre Maury fit une causerie émouvante sur l’ Évolution religieuse de Jacques Rivière, qui se trouva préciser bien d
1019 nts laissés en suspens dans la première partie de la conférence. Puis M. A. Brémond, étudiant en théologie, présenta deux
1020 riers de Paris, Clerville et Janson, dont il a eu l’ occasion de partager les conditions de vie et qui nous parlèrent l’un
1021 le et Janson, dont il a eu l’occasion de partager les conditions de vie et qui nous parlèrent l’un de la Réalité prolétarie
1022 s conditions de vie et qui nous parlèrent l’un de la Réalité prolétarienne, l’autre de la Mentalité prolétarienne. Brémond
1023 rent l’un de la Réalité prolétarienne, l’autre de la Mentalité prolétarienne. Brémond conclut en montrant la nécessité et
1024 talité prolétarienne. Brémond conclut en montrant la nécessité et les difficultés d’une action missionnaire dans ces milie
1025 enne. Brémond conclut en montrant la nécessité et les difficultés d’une action missionnaire dans ces milieux, comme M. Terr
1026 missionnaire dans ces milieux, comme M. Terrisse l’ avait fait le soir avant pour les milieux d’ouvriers noirs au Cap. San
1027 dans ces milieux, comme M. Terrisse l’avait fait le soir avant pour les milieux d’ouvriers noirs au Cap. Sans toucher à d
1028 comme M. Terrisse l’avait fait le soir avant pour les milieux d’ouvriers noirs au Cap. Sans toucher à des questions de part
1029 cher leurs auditeurs de leur lit de préjugés pour les placer véritablement en face de la « réalité prolétarienne ». « Cercl
1030 préjugés pour les placer véritablement en face de la « réalité prolétarienne ». « Cercles vicieux que nos syndicats. Cercl
1031 ercles vicieux que nos syndicats. Cercle vicieux, l’ augmentation des salaires. Ce que nous voulons, c’est élever l’homme a
1032 n des salaires. Ce que nous voulons, c’est élever l’ homme au-dessus de la plus dégradante condition, et nous n’y arriveron
1033 e nous voulons, c’est élever l’homme au-dessus de la plus dégradante condition, et nous n’y arriverons que par un travail
1034 , cela peut paraître excessif à qui n’a pas connu l’ atmosphère particulière à ces rencontres. Rien de plus aéré, au moral
1035 l pense sans se préoccuper d’être bien pensant et les Romands recouvrent l’usage de la parole, puis on va se dégourdir sur
1036 per d’être bien pensant et les Romands recouvrent l’ usage de la parole, puis on va se dégourdir sur un ballon ou bien l’on
1037 bien pensant et les Romands recouvrent l’usage de la parole, puis on va se dégourdir sur un ballon ou bien l’on poursuit h
1038 le, puis on va se dégourdir sur un ballon ou bien l’ on poursuit hors du village une discussion toujours trop courte. Et le
1039 u village une discussion toujours trop courte. Et les repas réunissent tout le monde dans la gaieté la plus charmante. On y
1040 ourte. Et les repas réunissent tout le monde dans la gaieté la plus charmante. On y vit un ouvrier en maillot rouge assis
1041 les repas réunissent tout le monde dans la gaieté la plus charmante. On y vit un ouvrier en maillot rouge assis entre un b
1042 rançais. Miracle qui nous fit croire un instant à la fameuse devise de la Révolution. d. Rougemont Denis de, « Conféren
1043 nous fit croire un instant à la fameuse devise de la Révolution. d. Rougemont Denis de, « Conférences d’Aubonne », Suis
21 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Wilfred Chopard, Spicilège ironique (mai 1926)
1044 ilège ironique (mai 1926)r Un léger flirt avec la muse, parce que c’est dimanche, parce qu’il pleut et qu’on s’ennuie.
1045 dimanche, parce qu’il pleut et qu’on s’ennuie. Si la vie est bête à pleurer, sourire est moins fatigant. « Le paon dédaign
1046 est bête à pleurer, sourire est moins fatigant. «  Le paon dédaigne encor mais ne fait plus sa roue. » Ce poète — qui fut a
1047 ne fait plus sa roue. » Ce poète — qui fut aussi le prosateur charmant du Pédagogue et l’Amour — sourit avec une grâce un
1048 i fut aussi le prosateur charmant du Pédagogue et l’ Amour — sourit avec une grâce un peu frileuse et se permet de bâiller
1049 use et se permet de bâiller en public. On connaît le danger… r. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Wilfred Chopard, S
22 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Cécile-Claire Rivier, L’Athée (mai 1926)
1050 Cécile-Claire Rivier, L’ Athée (mai 1926)s C’est le récit de la découverte de Dieu par une j
1051 écile-Claire Rivier, L’Athée (mai 1926)s C’est le récit de la découverte de Dieu par une jeune fille élevée dans l’athé
1052 Rivier, L’Athée (mai 1926)s C’est le récit de la découverte de Dieu par une jeune fille élevée dans l’athéisme. Invrai
1053 écouverte de Dieu par une jeune fille élevée dans l’ athéisme. Invraisemblablement ignorante de toute religion jusqu’à 20 a
1054 e religion jusqu’à 20 ans, Denise s’abandonne à «  la vie », laquelle — un peu aidée par l’auteur — lui révèlera peu à peu
1055 andonne à « la vie », laquelle — un peu aidée par l’ auteur — lui révèlera peu à peu le sens divin de la destinée. Ce livre
1056 n peu aidée par l’auteur — lui révèlera peu à peu le sens divin de la destinée. Ce livre à thèse est plutôt une argumentat
1057 ’auteur — lui révèlera peu à peu le sens divin de la destinée. Ce livre à thèse est plutôt une argumentation à coups d’exe
1058 à coups d’exemples vivants qu’un véritable roman. La profusion souvent facile des incidents et le style volontairement sec
1059 man. La profusion souvent facile des incidents et le style volontairement sec permettent de suivre sans passion ni fatigue
1060 sec permettent de suivre sans passion ni fatigue le développement un peu théorique mais intelligent d’un problème que l’o
1061 peu théorique mais intelligent d’un problème que l’ on pressent trop complètement résolu dès les premières pages, mais qu’
1062 Rivier d’avoir posé courageusement. Dirai-je que l’ abus des points d’exclamation — trait commun à presque toutes les femm
1063 nts d’exclamation — trait commun à presque toutes les femmes auteur, et qui plaît aux lectrices — m’agace un peu ? C’est un
1064 Denis de, « [Compte rendu] Cécile-Claire Rivier, L’ Athée  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mai 192
23 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jean Cocteau, Rappel à l’ordre (mai 1926)
1065 Jean Cocteau, Rappel à l’ ordre (mai 1926)t Sous ce titre, le plus étonnant peut-être qu’il a
1066 u, Rappel à l’ordre (mai 1926)t Sous ce titre, le plus étonnant peut-être qu’il ait trouvé, Jean Cocteau a réuni ce qui
1067 ait trouvé, Jean Cocteau a réuni ce qui me paraît le meilleur de son œuvre : ses récits de critique et d’esthétique (Le Co
1068 n œuvre : ses récits de critique et d’esthétique ( Le Coq et l’Arlequin, la Noce massacrée, le Secret professionnel, etc.)
1069 ses récits de critique et d’esthétique (Le Coq et l’ Arlequin, la Noce massacrée, le Secret professionnel, etc.) Sans doute
1070 e critique et d’esthétique (Le Coq et l’Arlequin, la Noce massacrée, le Secret professionnel, etc.) Sans doute faudrait-il
1071 hétique (Le Coq et l’Arlequin, la Noce massacrée, le Secret professionnel, etc.) Sans doute faudrait-il préciser ce qu’il
1072 ’il entend par ordre, et montrer que si cet ordre l’ écarte de Dada, il ne le conduit pas pour autant à l’Académie. Disons
1073 montrer que si cet ordre l’écarte de Dada, il ne le conduit pas pour autant à l’Académie. Disons pour aller vite que sa r
1074 carte de Dada, il ne le conduit pas pour autant à l’ Académie. Disons pour aller vite que sa recherche de l’ordre révèle si
1075 démie. Disons pour aller vite que sa recherche de l’ ordre révèle simplement une volonté de construire jusque dans le grabu
1076 simplement une volonté de construire jusque dans le grabuge, qu’il aime pour les matériaux qu’on en peut tirer. L[e] malh
1077 onstruire jusque dans le grabuge, qu’il aime pour les matériaux qu’on en peut tirer. L[e] malheur de Cocteau est qu’il se v
1078 heur de Cocteau est qu’il se veuille poète. Il ne l’ est jamais moins qu’en vers. Sa plus incontestable réussite à ce jour
1079 ers. Sa plus incontestable réussite à ce jour est le Secret professionnel, petit catéchisme cubiste qui dépasse de beaucou
1080 petit catéchisme cubiste qui dépasse de beaucoup les limites de cette école, et qu’il eut le tort à notre sens de vouloir
1081 beaucoup les limites de cette école, et qu’il eut le tort à notre sens de vouloir illustrer de pédants exercices poétiques
1082 ices poétiques. Mais quelle intelligence, et dont l’ audace est de se vouloir plus juste que bizarre. Il sait bien d’ailleu
1083 us juste que bizarre. Il sait bien d’ailleurs que les miracles les plus étonnants sont ceux de la lumière. « Le mystère se
1084 bizarre. Il sait bien d’ailleurs que les miracles les plus étonnants sont ceux de la lumière. « Le mystère se passe en plei
1085 que les miracles les plus étonnants sont ceux de la lumière. « Le mystère se passe en plein jour et à toute vitesse. » Te
1086 les les plus étonnants sont ceux de la lumière. «  Le mystère se passe en plein jour et à toute vitesse. » Telle est bien l
1087 n plein jour et à toute vitesse. » Telle est bien la nouveauté de son théâtre et de l’art qu’il défend en peinture, en mus
1088 Telle est bien la nouveauté de son théâtre et de l’ art qu’il défend en peinture, en musique. Suppression du clair-obscur
1089 re, en musique. Suppression du clair-obscur et de la pénombre. Ôter la pédale à la poésie. (« Le poète ne rêve pas, il com
1090 ppression du clair-obscur et de la pénombre. Ôter la pédale à la poésie. (« Le poète ne rêve pas, il compte. ») Six projec
1091 clair-obscur et de la pénombre. Ôter la pédale à la poésie. (« Le poète ne rêve pas, il compte. ») Six projecteurs conver
1092 et de la pénombre. Ôter la pédale à la poésie. («  Le poète ne rêve pas, il compte. ») Six projecteurs convergent sur une m
1093 convergent sur une machine luisante et tournante. L’ esprit de Cocteau est une arme admirable de précision, d’élégance méca
1094 de rapidité. Il lassera, parce que c’est toujours le même déclic. Cocteau le sait, et pour varier il tire tantôt à gauche
1095 parce que c’est toujours le même déclic. Cocteau le sait, et pour varier il tire tantôt à gauche tantôt à droite, sur Bar
1096 ur Barrès, sur Wagner, sur quelques fantômes, sur le public. (Bientôt sur lui-même je le crains, pour renaître catholique.
1097 fantômes, sur le public. (Bientôt sur lui-même je le crains, pour renaître catholique.) Certes, il bannit le charme et tou
1098 ins, pour renaître catholique.) Certes, il bannit le charme et toute grâce vaporeuse. Mais ses fleurs de cristal, si elles
1099 Denis de, « [Compte rendu] Jean Cocteau, Rappel à l’ ordre  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mai 192
24 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). René Crevel, Mon corps et moi (mai 1926)
1100 René Crevel, Mon corps et moi (mai 1926)u Les témoignages ne manquent pas sur la détresse morale de la génération s
1101 mai 1926)u Les témoignages ne manquent pas sur la détresse morale de la génération surréaliste. Mais tandis que la plup
1102 ignages ne manquent pas sur la détresse morale de la génération surréaliste. Mais tandis que la plupart en sont encore à d
1103 ls en disent, « artistiqués », — ils n’osent plus le mensonge de l’art, et pas encore la vérité pure — Crevel décrit sans
1104  artistiqués », — ils n’osent plus le mensonge de l’ art, et pas encore la vérité pure — Crevel décrit sans aucune transpos
1105 n’osent plus le mensonge de l’art, et pas encore la vérité pure — Crevel décrit sans aucune transposition romanesque le t
1106 revel décrit sans aucune transposition romanesque le trouble caractéristique de sa génération. Terrible aveu d’impuissance
1107 on. Terrible aveu d’impuissance, il n’a plus même la force de l’hypocrisie. Isolé dans un hôtel perdu, avec son corps qui
1108 aveu d’impuissance, il n’a plus même la force de l’ hypocrisie. Isolé dans un hôtel perdu, avec son corps qui se souvient
1109 erdu, avec son corps qui se souvient — « mémoire, l’ ennemie » — avec une intelligence dont la triste profession est de dét
1110 mémoire, l’ennemie » — avec une intelligence dont la triste profession est de détruire le désir qu’elle excite par curiosi
1111 ligence dont la triste profession est de détruire le désir qu’elle excite par curiosité passagère, il monologue. « Oui, je
1112 par curiosité passagère, il monologue. « Oui, je le redirai, tous mes essais furent prétextes à me dissoudre, à me perdre
1113 prétextes à me dissoudre, à me perdre. » Vouloir la vérité pure sur soi, c’est se refuser à l’élan vital qui nous crée sa
1114 ouloir la vérité pure sur soi, c’est se refuser à l’ élan vital qui nous crée sans cesse : l’analyse de sa solitude le lais
1115 refuser à l’élan vital qui nous crée sans cesse : l’ analyse de sa solitude le laisse en face de quelques réactions physiol
1116 i nous crée sans cesse : l’analyse de sa solitude le laisse en face de quelques réactions physiologiques dont la pauvreté
1117 en face de quelques réactions physiologiques dont la pauvreté le rejette dans une angoisse qu’il nomme « élan mortel ». Ce
1118 uelques réactions physiologiques dont la pauvreté le rejette dans une angoisse qu’il nomme « élan mortel ». Cette inversio
1119 e qui est constructif et créateur, voilà je pense le véritable désordre. Une intelligence parvenue au point où elle « ne s
1120 ocès », une intelligence qui se dégoûte, tel est le spectacle que nous dévoile cyniquement René Crevel. Il en est peu de
1121 u de plus effrayants. Ah ! Seigneur, donnez-nous la force et le courage de contempler nos corps et nos cœurs sans dégoût
1122 frayants. Ah ! Seigneur, donnez-nous la force et le courage de contempler nos corps et nos cœurs sans dégoût implorait B
1123 ans dégoût implorait Baudelaire. Encore avait-il le courage de prier… u. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] René Cre
25 1926, Articles divers (1924–1930). L’atmosphère d’Aubonne : 22-25 mars 1926 (mai 1926)
1124 L’ atmosphère d’Aubonne : 22-25 mars 1926 (mai 1926)f Cette conférence
1125 qu’on peut bien dire du diable et se termina sous le plus beau soleil de printemps. Libre à qui veut d’y voir un symbole.
1126 veut d’y voir un symbole. On ne saurait exagérer l’ importance des conditions météorologiques du succès d’une telle rencon
1127 e rencontre : tout alla froidement jusqu’à ce que la bise tombée permît à « l’atmosphère » de s’établir. Alors le miracle
1128 oidement jusqu’à ce que la bise tombée permît à «  l’ atmosphère » de s’établir. Alors le miracle apparut, grandit. Le mirac
1129 bée permît à « l’atmosphère » de s’établir. Alors le miracle apparut, grandit. Le miracle, c’est l’esprit d’Aubonne. C’est
1130 de s’établir. Alors le miracle apparut, grandit. Le miracle, c’est l’esprit d’Aubonne. C’est ce miracle tout ce qu’il y a
1131 rs le miracle apparut, grandit. Le miracle, c’est l’ esprit d’Aubonne. C’est ce miracle tout ce qu’il y a de plus protestan
1132 e se produire ailleurs qu’en terre romande. C’est l’ esprit de liberté, tout simplement. Mais précisons : c’est bien plus q
1133 simplement. Mais précisons : c’est bien plus que la liberté de défendre sa petite hérésie personnelle et de s’affirmer au
1134 lle et de s’affirmer aux dépens d’autrui, — c’est la liberté dans la recherche. Chose plus rare qu’on ne pense, à Aubonne
1135 rmer aux dépens d’autrui, — c’est la liberté dans la recherche. Chose plus rare qu’on ne pense, à Aubonne on se sent prêt
1136 ient moins à convaincre qu’à se convaincre. Après les exposés de Janson, de Brémond, j’en sais plusieurs qui ont ainsi « lâ
1137 Mais ce qui est peut-être plus important, on eut l’ impression, durant les discussions entre de Saussure et Bertrand, que
1138 -être plus important, on eut l’impression, durant les discussions entre de Saussure et Bertrand, que les orateurs exprimaie
1139 es discussions entre de Saussure et Bertrand, que les orateurs exprimaient tour à tour les objections que chacun se faisait
1140 ertrand, que les orateurs exprimaient tour à tour les objections que chacun se faisait à part soi, qu’ils incarnaient les v
1141 chacun se faisait à part soi, qu’ils incarnaient les voix contradictoires d’un débat que tous menaient en eux-mêmes loyale
1142 chose de définitif à la fois et d’intelligent, je le mesure aussi à l’émotion qui accueillit l’étude de Maury sur Jacques
1143 à la fois et d’intelligent, je le mesure aussi à l’ émotion qui accueillit l’étude de Maury sur Jacques Rivière : combien
1144 nt, je le mesure aussi à l’émotion qui accueillit l’ étude de Maury sur Jacques Rivière : combien reconnurent dans le tourm
1145 ry sur Jacques Rivière : combien reconnurent dans le tourment de cette âme leur propre recherche, — et dans ses lumineuses
1146 recherche, — et dans ses lumineuses conquêtes sur le doute, le modèle des réponses désirées. Tout cela, c’est l’atmosphère
1147 — et dans ses lumineuses conquêtes sur le doute, le modèle des réponses désirées. Tout cela, c’est l’atmosphère de la cha
1148 le modèle des réponses désirées. Tout cela, c’est l’ atmosphère de la chapelle où ont lieu travaux et méditations. Dehors,
1149 ponses désirées. Tout cela, c’est l’atmosphère de la chapelle où ont lieu travaux et méditations. Dehors, on honore la lib
1150 nt lieu travaux et méditations. Dehors, on honore la liberté d’un culte moins platonique : n’est-ce pas Léo qui prétendit
1151 ’est-ce pas Léo qui prétendit qu’on ne peut juger les Associations qu’à leur façon de jouer le volley-ball ? Le Casino offr
1152 t juger les Associations qu’à leur façon de jouer le volley-ball ? Le Casino offrit pendant quelques nuits la vision étran
1153 iations qu’à leur façon de jouer le volley-ball ? Le Casino offrit pendant quelques nuits la vision étrange d’une salle où
1154 ey-ball ? Le Casino offrit pendant quelques nuits la vision étrange d’une salle où les spectateurs étendus en pyjamas sur
1155 t quelques nuits la vision étrange d’une salle où les spectateurs étendus en pyjamas sur des paillasses attendraient en vai
1156 n pyjamas sur des paillasses attendraient en vain le lever d’un rideau sur une pièce inexistante. Enfin le dernier soir, l
1157 sur une pièce inexistante. Enfin le dernier soir, l’ on vit apparaître un fakir… Il y eut aussi une assemblée délibérative
1158 eut pas trop de toute sa souplesse pour maintenir l’ équilibre des discussions et de sa propre personne. Et il y eut encore
1159 encore un dîner très démocratique pendant lequel le philosophe Abauzit chanta « les Crapauds » avec âme, appuyé d’une mai
1160 que pendant lequel le philosophe Abauzit chanta «  les Crapauds » avec âme, appuyé d’une main sur l’épaule de Janson, et de
1161 « les Crapauds » avec âme, appuyé d’une main sur l’ épaule de Janson, et de l’autre dessinant dans l’air des phrases music
1162 l’épaule de Janson, et de l’autre dessinant dans l’ air des phrases musicales. Après quoi Richardot, entrant par la fenêtr
1163 ases musicales. Après quoi Richardot, entrant par la fenêtre, vint annoncer qu’on était libre — comme si on l’avait attend
1164 re, vint annoncer qu’on était libre — comme si on l’ avait attendu pour le manifester ! — et qu’il suffisait de souscrire à
1165 on était libre — comme si on l’avait attendu pour le manifester ! — et qu’il suffisait de souscrire à la brochure de la co
1166 manifester ! — et qu’il suffisait de souscrire à la brochure de la conférence3 pour savoir tout ce que je n’ai pas dit da
1167  et qu’il suffisait de souscrire à la brochure de la conférence3 pour savoir tout ce que je n’ai pas dit dans ces quelques
1168 2.50, nom et adresse. f. Rougemont Denis de, «  L’ atmosphère d’Aubonne : 22-25 mars 1926 », Lux et Vita : nouvelles de l
1169 e : 22-25 mars 1926 », Lux et Vita : nouvelles de l’ Association chrétienne suisse d’étudiants, Lausanne, mai 1926, p. 44-4
26 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Le Corbusier, Urbanisme (juin 1926)
1170 Le Corbusier, Urbanisme (juin 1926)v Nous disons adieu aux charmes tr
1171 disons adieu aux charmes troubles et inhumains de la nature. Il s’agit de créer à notre vie moderne un décor utile et beau
1172 à notre vie moderne un décor utile et beau. Or «  la grande ville, phénomène de force en mouvement, est aujourd’hui une ca
1173 astrophe menaçante pour n’avoir pas été animée de l’ esprit de géométrie… Elle use et conduit lentement l’usure des millier
1174 sprit de géométrie… Elle use et conduit lentement l’ usure des milliers d’êtres humains ». Elle n’est plus adaptée aux cond
1175 de travail ou de repos, ni dans son plan ni dans le détail des rues. Congestion : « un cheval arrête 1000 chevaux-vapeurs
1176 eval arrête 1000 chevaux-vapeurs ». Et pourtant «  la ville est une image puissante qui actionne notre esprit » après avoir
1177 e esprit » après avoir été créée par lui, — comme la poésie. C’est ainsi que le problème de l’Urbanisme se place au croise
1178 créée par lui, — comme la poésie. C’est ainsi que le problème de l’Urbanisme se place au croisement des préoccupations est
1179 — comme la poésie. C’est ainsi que le problème de l’ Urbanisme se place au croisement des préoccupations esthétiques et soc
1180 hétiques et sociales d’aujourd’hui. Pour résoudre la crise de notre civilisation sous cet aspect comme sous les autres, il
1181 de notre civilisation sous cet aspect comme sous les autres, il nous faut mieux que des dictateurs : des Architectes, de l
1182 ut mieux que des dictateurs : des Architectes, de l’ esprit et de la matière. Si Le Corbusier réalise son plan, ce sera plu
1183 s dictateurs : des Architectes, de l’esprit et de la matière. Si Le Corbusier réalise son plan, ce sera plus fort que Muss
1184 des Architectes, de l’esprit et de la matière. Si Le Corbusier réalise son plan, ce sera plus fort que Mussolini (lequel s
1185 nisme est une étude technique et un pamphlet dont l’ argumentation serrée éclate parfois en boutades mordantes, en brèves f
1186 lyrisme. C’est d’une verve puissante jusque dans la statistique. On en sort convaincu ou bouleversé, enthousiasmé d’avoir
1187 vaincu ou bouleversé, enthousiasmé d’avoir trouvé la formule même de tant d’aspirations modernes. Voici sans aucun doute u
1188 ns modernes. Voici sans aucun doute un des livres les plus représentatifs de l’époque de Lénine, du fascisme, du ciment arm
1189 un doute un des livres les plus représentatifs de l’ époque de Lénine, du fascisme, du ciment armé. « Notre monde comme un
1190 poques mortes. Une tâche nous incombe, construire le cadre de notre existence… construire les villes de notre temps ». Et
1191 onstruire le cadre de notre existence… construire les villes de notre temps ». Et je déplie ce plan d’une « ville contempor
1192 verre et de ciment blanc, flamboyantes au soleil. Les vingt-quatre gratte-ciel de la cité, au centre, s’espacent autour d’u
1193 yantes au soleil. Les vingt-quatre gratte-ciel de la cité, au centre, s’espacent autour d’un aérodrome-gare circulaire, pr
1194 un aérodrome-gare circulaire, prismes perdus dans le silence de l’azur au-dessus des rumeurs de la ville. Puis s’étendent
1195 are circulaire, prismes perdus dans le silence de l’ azur au-dessus des rumeurs de la ville. Puis s’étendent les quartiers
1196 ans le silence de l’azur au-dessus des rumeurs de la ville. Puis s’étendent les quartiers de résidence ; les jardins suspe
1197 u-dessus des rumeurs de la ville. Puis s’étendent les quartiers de résidence ; les jardins suspendus à tous les étages soul
1198 lle. Puis s’étendent les quartiers de résidence ; les jardins suspendus à tous les étages soulignent de verdure l’horizonta
1199 tiers de résidence ; les jardins suspendus à tous les étages soulignent de verdure l’horizontale des toitures en terrasses.
1200 suspendus à tous les étages soulignent de verdure l’ horizontale des toitures en terrasses. Des perspectives régulières rec
1201 ives régulières recoupées à 200 et 400 mètres par les plans fuyants des rues immenses livrées au 100 à l’heure des autos. L
1202 plans fuyants des rues immenses livrées au 100 à l’ heure des autos. Les maisons habitées ne sont plus que des enceintes t
1203 rues immenses livrées au 100 à l’heure des autos. Les maisons habitées ne sont plus que des enceintes transparentes, et min
1204 es « redents » des terrains de jeux et des parcs, la nature annexée à la ville. « C’est un spectacle organisé par l’Archit
1205 errains de jeux et des parcs, la nature annexée à la ville. « C’est un spectacle organisé par l’Architecture avec les ress
1206 xée à la ville. « C’est un spectacle organisé par l’ Architecture avec les ressources de la plastique qui est le jeu de for
1207 est un spectacle organisé par l’Architecture avec les ressources de la plastique qui est le jeu de formes sous la lumière »
1208 rganisé par l’Architecture avec les ressources de la plastique qui est le jeu de formes sous la lumière ». Cristallisation
1209 cture avec les ressources de la plastique qui est le jeu de formes sous la lumière ». Cristallisation d’un rêve de joie et
1210 ces de la plastique qui est le jeu de formes sous la lumière ». Cristallisation d’un rêve de joie et de raison où de grand
1211 iels formidables des ensembles soumis aux lois de l’ esprit et de la vie sociale, non plus à un opportunisme anarchique. Ti
1212 s des ensembles soumis aux lois de l’esprit et de la vie sociale, non plus à un opportunisme anarchique. Tirer des lignes
1213 tunisme anarchique. Tirer des lignes droites, est le propre de l’homme. Toutes les civilisations fortes l’ont osé. Créer u
1214 hique. Tirer des lignes droites, est le propre de l’ homme. Toutes les civilisations fortes l’ont osé. Créer un espace arch
1215 lignes droites, est le propre de l’homme. Toutes les civilisations fortes l’ont osé. Créer un espace architectural lumineu
1216 ropre de l’homme. Toutes les civilisations fortes l’ ont osé. Créer un espace architectural lumineux à la place de nos cité
1217 ution. Déjà des ingénieurs se sont mis à calculer la réalisation de ce phénomène de haute poésie — la « ville contemporain
1218 la réalisation de ce phénomène de haute poésie — la « ville contemporaine ». Un labeur précis et anonyme concourt obscuré
1219 rément à cette parfaite expression du triomphe de l’ homme sur la Nature. Architecture : « tout ce qui est au-delà du calcu
1220 te parfaite expression du triomphe de l’homme sur la Nature. Architecture : « tout ce qui est au-delà du calcul… Ce sera l
1221 re : « tout ce qui est au-delà du calcul… Ce sera la passion du siècle ». v. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Le Co
1222 cle ». v. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Le Corbusier, Urbanisme  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
27 1926, Articles divers (1924–1930). Confession tendancieuse (mai 1926)
1223 mprenons que nos œuvres, si elles furent faites à l’ image de notre esprit, le lui rendent bien dans la suite ; c’est peut-
1224 si elles furent faites à l’image de notre esprit, le lui rendent bien dans la suite ; c’est peut-être pourquoi nous accord
1225 l’image de notre esprit, le lui rendent bien dans la suite ; c’est peut-être pourquoi nous accordons voix dans le débat d’
1226 c’est peut-être pourquoi nous accordons voix dans le débat d’écrire, aux forces les plus secrètes de notre être comme aux
1227 accordons voix dans le débat d’écrire, aux forces les plus secrètes de notre être comme aux calculs les plus rusés. Nous ch
1228 les plus secrètes de notre être comme aux calculs les plus rusés. Nous choisissons les idées comme on choisit un amour dont
1229 omme aux calculs les plus rusés. Nous choisissons les idées comme on choisit un amour dont on est anxieux de prévoir l’infl
1230 n choisit un amour dont on est anxieux de prévoir l’ influence, avant de s’y jeter, et dont on craint de ressortir trop dif
1231 e réticences dont nous ne comprenons pas toujours l’ objet. Peur de perdre le fil de la conscience de soi, peur de subir l’
1232 e comprenons pas toujours l’objet. Peur de perdre le fil de la conscience de soi, peur de subir l’empreinte imprévisible d
1233 ns pas toujours l’objet. Peur de perdre le fil de la conscience de soi, peur de subir l’empreinte imprévisible des choses.
1234 dre le fil de la conscience de soi, peur de subir l’ empreinte imprévisible des choses. Amour de soi… Mais moi, qui suis-je
1235 is moi, qui suis-je ? Par ces trois mots commence le drame de toute vie. Ha ! Qui je suis ? Mais je le sens très bien ! je
1236 le drame de toute vie. Ha ! Qui je suis ? Mais je le sens très bien ! je sens très bien cette force — ici, je tape du pied
1237 r. Vous me direz qui je suis, mes amis ; quel est le vrai ? — Ils me proposent vingt visages que je puis à peine reconnaît
1238 gt visages que je puis à peine reconnaître. Reste le monde, — les choses, les faits, la vie, comme ils disent. Je me suis
1239 ue je puis à peine reconnaître. Reste le monde, —  les choses, les faits, la vie, comme ils disent. Je me suis abandonné au
1240 peine reconnaître. Reste le monde, — les choses, les faits, la vie, comme ils disent. Je me suis abandonné au jeu du hasar
1241 nnaître. Reste le monde, — les choses, les faits, la vie, comme ils disent. Je me suis abandonné au jeu du hasard, jusqu’a
1242 suis abandonné au jeu du hasard, jusqu’au jour où l’ on me fit comprendre qu’il n’est que le jeu de sauter follement d’une
1243 au jour où l’on me fit comprendre qu’il n’est que le jeu de sauter follement d’une habitude dans une autre. Il ne me resta
1244 repue, — tous paraissaient détenir un secret très simple , et un peu narquois ils me considéraient avec une pitié curieuse : je
1245 supportables, si cruellement présentes et dures ? La cause de cette inadaptation, je la soupçonnais si grave, si fondament
1246 tes et dures ? La cause de cette inadaptation, je la soupçonnais si grave, si fondamentale que je préférais me leurrer à c
1247 e des imperfections de détail dont je m’exagérais l’ importance. Et c’est ainsi par feintes que je progressais, jusqu’au jo
1248 mmer peur de rire. Cette amertume au fond de tous les plaisirs, cette envie de rire quand il m’arrivait un ennui, cette inc
1249 à pleurer sur mes déboires, ce malaise seul liait les personnages auxquels je me prêtais. Mais en même temps que je le déco
1250 auxquels je me prêtais. Mais en même temps que je le découvrais, dans tout mon être une force aveugle de violence s’était
1251 nce s’était levée. Ce fut elle qui m’entraîna sur les stades où je connus quelle confiance sourde aux contradictions intime
1252 our de cette brutalité s’organisaient brusquement les éléments désaccordés de ce moi que j’avais tant choyé. « Maintenant,
1253 e — c’était un des premiers jours du printemps —, l’ heure est venue de la violence. Jeunes tempêtes, lavez, bousculez ! La
1254 emiers jours du printemps —, l’heure est venue de la violence. Jeunes tempêtes, lavez, bousculez ! La parole est aux insti
1255 la violence. Jeunes tempêtes, lavez, bousculez ! La parole est aux instincts combatifs et dominateurs par quoi l’homme ne
1256 t aux instincts combatifs et dominateurs par quoi l’ homme ne se distingue plus de l’animal. Louée soit ma force et tout ce
1257 inateurs par quoi l’homme ne se distingue plus de l’ animal. Louée soit ma force et tout ce qui l’exalte, et tout ce qui la
1258 s de l’animal. Louée soit ma force et tout ce qui l’ exalte, et tout ce qui la dompte, tout ce qui sourd en moi de trop gra
1259 ma force et tout ce qui l’exalte, et tout ce qui la dompte, tout ce qui sourd en moi de trop grand pour ma vie — toute ma
1260 ’allais plier des résistances à mon gré, agir sur les choses… Vers le soir, l’ardeur tombe : agir ? dans quel sens ? Provis
1261 résistances à mon gré, agir sur les choses… Vers le soir, l’ardeur tombe : agir ? dans quel sens ? Provisoirement j’étais
1262 ces à mon gré, agir sur les choses… Vers le soir, l’ ardeur tombe : agir ? dans quel sens ? Provisoirement j’étais sauvé d’
1263 s ? Provisoirement j’étais sauvé d’un désordre où l’ on glisse vers la mort. L’important, c’est de ne pas se défaire. Mais
1264 t j’étais sauvé d’un désordre où l’on glisse vers la mort. L’important, c’est de ne pas se défaire. Mais rien n’était réso
1265 sauvé d’un désordre où l’on glisse vers la mort. L’ important, c’est de ne pas se défaire. Mais rien n’était résolu. Me vo
1266 nt je sais qu’il est absolument vain de prétendre les résoudre, mais que je dois feindre d’avoir résolus : c’est ce qui s’a
1267 c’est ce qui s’appelle vivre. Problème de Dieu, à la base. J’aurai garde de m’y perdre au début d’une recherche qui n’a qu
1268 riant, je m’arrête parfois, heureux : « J’ai donc la foi ? » Mais c’est encore une question… Je crois qu’il ne faut pas at
1269 dans sa prière, qu’une révélation vienne chercher l’ âme qui se sent misérable. Je ne recevrai pas une foi, mais peut-être
1270 cevrai pas une foi, mais peut-être arriverai-je à la vouloir, et c’est le tout. S’il est une révélation, c’est en me renda
1271 ais peut-être arriverai-je à la vouloir, et c’est le tout. S’il est une révélation, c’est en me rendant plus parfait que j
1272 en me rendant plus parfait que je lui préparerai les voies. Agir ? Sur moi d’abord. Il ne faut plus que je respecte tout e
1273 nir. Se perfectionner : cela consiste à retrouver l’ instinct le plus profond de l’homme, la vertu conservatrice qui ne peu
1274 fectionner : cela consiste à retrouver l’instinct le plus profond de l’homme, la vertu conservatrice qui ne peut dicter qu
1275 onsiste à retrouver l’instinct le plus profond de l’ homme, la vertu conservatrice qui ne peut dicter que les gestes les pl
1276 retrouver l’instinct le plus profond de l’homme, la vertu conservatrice qui ne peut dicter que les gestes les plus favora
1277 me, la vertu conservatrice qui ne peut dicter que les gestes les plus favorables. J’ai d’autres instincts et je n’entends p
1278 u conservatrice qui ne peut dicter que les gestes les plus favorables. J’ai d’autres instincts et je n’entends pas tous les
1279 J’ai d’autres instincts et je n’entends pas tous les cultiver pour cela seul qu’ils sont naturels : la nature est un champ
1280 es cultiver pour cela seul qu’ils sont naturels : la nature est un champ de luttes, de tendances vers la destruction et ve
1281 nature est un champ de luttes, de tendances vers la destruction et vers la construction ; c’est un mélange à doses égales
1282 luttes, de tendances vers la destruction et vers la construction ; c’est un mélange à doses égales de mort et de vie. Et
1283 ange à doses égales de mort et de vie. Et c’est à l’ intelligence de faire primer la vie, puisque n’est pas encore parfait
1284 de vie. Et c’est à l’intelligence de faire primer la vie, puisque n’est pas encore parfait cet instinct qui est la Vertu.
1285 que n’est pas encore parfait cet instinct qui est la Vertu. Ma vertu est de chercher cette Vertu ; de me replacer dans le
1286 est de chercher cette Vertu ; de me replacer dans le sens de ma vie ; de rendre toutes mes forces complices de mon destin.
1287 in. D’abord donc, choisir Mes instincts, ensuite, les éduquer, selon des lois établies par le concours de l’expérience et d
1288 ensuite, les éduquer, selon des lois établies par le concours de l’expérience et d’un sentiment de convenance en quoi se c
1289 uquer, selon des lois établies par le concours de l’ expérience et d’un sentiment de convenance en quoi se composent le pla
1290 d’un sentiment de convenance en quoi se composent le plaisir et la conscience de Mes limites. Je m’attache particulièremen
1291 de convenance en quoi se composent le plaisir et la conscience de Mes limites. Je m’attache particulièrement à retrouver
1292 ttache particulièrement à retrouver ces limites : la vie moderne, mécanique, nous les fait oublier, d’où cette fatigue gén
1293 ver ces limites : la vie moderne, mécanique, nous les fait oublier, d’où cette fatigue générale qui fausse tout, et qui s’o
1294 usse tout, et qui s’oppose au perfectionnement de l’ esprit, puisqu’elle ne permet que des associations suivant les directi
1295 uisqu’elle ne permet que des associations suivant les directions de moindre résistance. Mais je ne m’emprisonnerai pas dans
1296 isonnerai pas dans ces limites. Ma liberté est de les porter plus loin sans cesse, de battre mes propres records. De ce len
1297 une certaine méfiance vis-à-vis de ma sincérité. La sincérité m’apparaît parfois comme un arrêt artificiel dans ma vie, u
1298 re dangereuse. (On donne corps à une faiblesse en la nommant ; or je ne veux plus de faiblesses4.) Et demain peut-être, ag
1299 s de faiblesses4.) Et demain peut-être, agir dans le monde, si je m’en suis d’abord rendu digne. L’époque nous veut, comme
1300 ns le monde, si je m’en suis d’abord rendu digne. L’ époque nous veut, comme elle veut une conscience. Je fais partie d’un
1301 ence. Je fais partie d’un ensemble social et dans la mesure où j’en dépends, je me dois de m’employer à sa sauvegarde ou à
1302 ormation. Mais il y faut une doctrine, me dit-on. L’ avouerai-je, quand je médite sur une doctrine possible, sur une systém
1303 sation de mes petites certitudes5, j’éprouve vite le sentiment d’être dans un débat étranger à ce véritable débat de ma vi
1304 alaise sans cesse renaissant, comment m’adapter à l’ existence que m’imposent mon corps et les lois du monde, et comment au
1305 adapter à l’existence que m’imposent mon corps et les lois du monde, et comment augmenter ma puissance de jouir, en même te
1306 agir. Que tout cela s’agite sur fond de néant, je le comprends par éclairs, mais une secrète espérance m’emporte de nouvea
1307 orte de nouveau, premier gage du divin… Reprendre l’ offensive — au soir, je m’amuserai à mettre des étiquettes sur mes act
1308 un peu mes lèvres, et s’affirmer à mesure que je le décris. Mais comme un écho profond, une attirance aussi d’anciennes f
1309 ie, dégoût, lueurs éteintes dans une nuit froide. Les notes d’un chant qui voudrait s’élever. Puis enfin la marée de mes dé
1310 otes d’un chant qui voudrait s’élever. Puis enfin la marée de mes désirs. Qu’ils viennent battre ce corps triste, qu’ils l
1311 s. Qu’ils viennent battre ce corps triste, qu’ils l’ emportent d’un flot fou ! Revenez, mes joies du large !… Tiens, j’écou
1312  ! Revenez, mes joies du large !… Tiens, j’écoute le vent ; je pense au monde. Chant des horizons, images qui s’éclairent…
1313 er son plaisir ? Je reste candidat au salut. 4. La sincérité absolue, « scientifique » me paraît aller contre fin. Une a
1314 e et soutenue modifie son objet vivant. Pour moi, la sincérité ne peut être que spontanée. Et spontanément je suis porté à
1315 périences ratées on puisse encore se persuader de la vérité d’un système, hors la religion. Un système n’est pas vrai, il
1316 core se persuader de la vérité d’un système, hors la religion. Un système n’est pas vrai, il est utile. C’est pourquoi je
1317 l est utile. C’est pourquoi je ne puis comprendre les excommunications et les intransigeances. Toutes les aspirations me pa
1318 uoi je ne puis comprendre les excommunications et les intransigeances. Toutes les aspirations me paraissent légitimes chez
1319 s excommunications et les intransigeances. Toutes les aspirations me paraissent légitimes chez d’autres, même celles que je
1320 Rougemont Denis de, « Confession tendancieuse », Les Cahiers du mois, Paris, juin 1926, p. 144-148.
28 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Ramon Fernandez, Messages (juillet 1926)
1321 e construction et de synthèse qui se dessine chez les jeunes écrivains d’aujourd’hui. La « critique philosophique » qu’il v
1322 dessine chez les jeunes écrivains d’aujourd’hui. La « critique philosophique » qu’il voudrait inaugurer « ne se contenter
1323 rait inaugurer « ne se contenterait pas d’étudier les œuvres pour elles-mêmes dans leur signification historique ou techniq
1324 historique ou technique, mais tâcherait d’épouser le dynamisme spirituel qu’elle révèle, puis de les situer dans l’univers
1325 er le dynamisme spirituel qu’elle révèle, puis de les situer dans l’univers humain ». M. Fernandez a tout le talent qu’il f
1326 spirituel qu’elle révèle, puis de les situer dans l’ univers humain ». M. Fernandez a tout le talent qu’il faut pour lui fa
1327 tuer dans l’univers humain ». M. Fernandez a tout le talent qu’il faut pour lui faire acquérir droit de cité. Voici enfin
1328 eçon constructive des expériences entreprises par les générations précédentes. Parce qu’elles se sont souvent enlisées dans
1329 ont souvent enlisées dans leurs recherches, il ne les condamne pas d’un « Jugement » sans issue sinon vers le passé catholi
1330 damne pas d’un « Jugement » sans issue sinon vers le passé catholique ; mais tenant compte de leur effort, il puise dans l
1331 mais tenant compte de leur effort, il puise dans l’ échec même de leurs analyses les éléments de sa synthèse, qui se trouv
1332 ort, il puise dans l’échec même de leurs analyses les éléments de sa synthèse, qui se trouve ainsi continuer leur œuvre, co
1333 verte couronne une série d’expériences négatives. La critique de ces expériences négatives est contenue surtout dans ses e
1334 st, Pater et Stendhal. Certes, il était temps que l’ on dénonce la confusion romantique de l’art avec la vie, qui empoisonn
1335 Stendhal. Certes, il était temps que l’on dénonce la confusion romantique de l’art avec la vie, qui empoisonne et la moral
1336 temps que l’on dénonce la confusion romantique de l’ art avec la vie, qui empoisonne et la morale et l’esthétique modernes.
1337 ’on dénonce la confusion romantique de l’art avec la vie, qui empoisonne et la morale et l’esthétique modernes. Et à ce pr
1338 omantique de l’art avec la vie, qui empoisonne et la morale et l’esthétique modernes. Et à ce propos, il faut souhaiter qu
1339 l’art avec la vie, qui empoisonne et la morale et l’ esthétique modernes. Et à ce propos, il faut souhaiter que M. Fernande
1340 ut souhaiter que M. Fernandez aborde par ce biais l’ œuvre de Gide, qui plus qu’aucune autre me paraît liée à cette confusi
1341 à cette confusion. Mais s’il est bien établi que les lois de la vie sont essentiellement différentes des lois de l’œuvre d
1342 fusion. Mais s’il est bien établi que les lois de la vie sont essentiellement différentes des lois de l’œuvre d’art, il ne
1343 vie sont essentiellement différentes des lois de l’ œuvre d’art, il ne s’en suit pas forcément que l’on doit nier toute co
1344 l’œuvre d’art, il ne s’en suit pas forcément que l’ on doit nier toute communication directe entre l’œuvre et le moi, comm
1345 l’on doit nier toute communication directe entre l’ œuvre et le moi, comme le fait M. Fernandez dans un essai sur l’Autobi
1346 nier toute communication directe entre l’œuvre et le moi, comme le fait M. Fernandez dans un essai sur l’Autobiographie e
1347 munication directe entre l’œuvre et le moi, comme le fait M. Fernandez dans un essai sur l’Autobiographie et le Roman, do
1348 moi, comme le fait M. Fernandez dans un essai sur l’ Autobiographie et le Roman, dont pour ma part je suis loin d’admettre
1349 Fernandez dans un essai sur l’Autobiographie et le Roman, dont pour ma part je suis loin d’admettre plusieurs thèses bea
1350 es. M. Fernandez tente de prouver par exemple que l’ œuvre d’art ne peut être un moyen de connaissance personnelle. Après q
1351 voir se concevoir et s’essayer. » Fort bien, mais l’ œuvre n’est-elle pas une façon particulière de s’essayer ? Je ne puis
1352 e discussion de ces thèses subtiles, d’autant que la position de l’auteur dans cet essai me paraît encore ambiguë : on peu
1353 ces thèses subtiles, d’autant que la position de l’ auteur dans cet essai me paraît encore ambiguë : on peut se demander s
1354 e ambiguë : on peut se demander s’il nie vraiment l’ interaction de la vie et de l’art, ou s’il la condamne plutôt, à cause
1355 ut se demander s’il nie vraiment l’interaction de la vie et de l’art, ou s’il la condamne plutôt, à cause des confusions q
1356 r s’il nie vraiment l’interaction de la vie et de l’ art, ou s’il la condamne plutôt, à cause des confusions qu’il y décèle
1357 ment l’interaction de la vie et de l’art, ou s’il la condamne plutôt, à cause des confusions qu’il y décèle. Le meilleur m
1358 ne plutôt, à cause des confusions qu’il y décèle. Le meilleur morceau du livre est l’essai sur Proust et sa théorie des « 
1359 qu’il y décèle. Le meilleur morceau du livre est l’ essai sur Proust et sa théorie des « intermittences du cœur » dont Fer
1360 que décisive. Et c’est justement par opposition à la conception proustienne de la personnalité — « mosaïque de sensations
1361 ent par opposition à la conception proustienne de la personnalité — « mosaïque de sensations juxtaposées » — qu’il définit
1362 uxtaposées » — qu’il définit sa propre théorie de la « garantie des sentiments », où l’on est en droit de voir le germe d’
1363 pre théorie de la « garantie des sentiments », où l’ on est en droit de voir le germe d’un moralisme nouveau qui se fondera
1364 ie des sentiments », où l’on est en droit de voir le germe d’un moralisme nouveau qui se fonderait solidement sur les donn
1365 moralisme nouveau qui se fonderait solidement sur les données modernes de la psychologie et de la philosophie. Pour nous pr
1366 fonderait solidement sur les données modernes de la psychologie et de la philosophie. Pour nous prémunir contre le pouvoi
1367 sur les données modernes de la psychologie et de la philosophie. Pour nous prémunir contre le pouvoir d’analyse — une ana
1368 e et de la philosophie. Pour nous prémunir contre le pouvoir d’analyse — une analyse qui retient les éléments de la person
1369 re le pouvoir d’analyse — une analyse qui retient les éléments de la personnalité moins le « principe unificateur » — que l
1370 analyse — une analyse qui retient les éléments de la personnalité moins le « principe unificateur » — que la psychologie f
1371 qui retient les éléments de la personnalité moins le « principe unificateur » — que la psychologie freudienne et proustien
1372 sonnalité moins le « principe unificateur » — que la psychologie freudienne et proustienne a porté à un point si dangereux
1373 a porté à un point si dangereux, il nous propose l’ expérience d’un Newman, les exemples d’un Meredith et d’un Stendhal, q
1374 gereux, il nous propose l’expérience d’un Newman, les exemples d’un Meredith et d’un Stendhal, qui ont su « penser dans le
1375 redith et d’un Stendhal, qui ont su « penser dans le train de l’action, faire de la psychologie à la volée », et donc conn
1376 un Stendhal, qui ont su « penser dans le train de l’ action, faire de la psychologie à la volée », et donc connaître l’homm
1377 t su « penser dans le train de l’action, faire de la psychologie à la volée », et donc connaître l’homme dans l’élan qui f
1378 s le train de l’action, faire de la psychologie à la volée », et donc connaître l’homme dans l’élan qui fait sa véritable
1379 de la psychologie à la volée », et donc connaître l’ homme dans l’élan qui fait sa véritable unité. Je me borne à signaler
1380 ogie à la volée », et donc connaître l’homme dans l’ élan qui fait sa véritable unité. Je me borne à signaler encore un thè
1381 thème qui revient dans la plupart de ces essais : l’ esthétique du roman. Fernandez en formule une théorie assez proche du
1382 téraire, et qu’il serait bien utile d’adopter, si l’ on veut éviter les confusions qui sont en train d’ôter sa valeur litté
1383 serait bien utile d’adopter, si l’on veut éviter les confusions qui sont en train d’ôter sa valeur littéraire au genre le
1384 ont en train d’ôter sa valeur littéraire au genre le plus encombré et le plus impur qui soit. On n’a pas ménagé les critiq
1385 sa valeur littéraire au genre le plus encombré et le plus impur qui soit. On n’a pas ménagé les critiques à cette œuvre. C
1386 mbré et le plus impur qui soit. On n’a pas ménagé les critiques à cette œuvre. Cela tient surtout à sa forme : il est parfo
1387 forme : il est parfois agaçant de pressentir sous l’ expression trop technique ou obscure, une richesse d’idées neuves et f
1388 Périlleuse situation que la sienne, en effet, où l’ on court le double risque de paraître trop littéraire aux philosophes,
1389 situation que la sienne, en effet, où l’on court le double risque de paraître trop littéraire aux philosophes, et trop ph
1390 ndez un certain recul par rapport à ses idées, on le sent un peu gauche encore dans les positions conquises. Il n’empêche
1391 à ses idées, on le sent un peu gauche encore dans les positions conquises. Il n’empêche que son livre manifeste une belle u
1392 uvre comme Plaisir des Sports de Jean Prévost, et les essais politiques de Drieu la Rochelle, les Messages de Fernandez son
1393 t, et les essais politiques de Drieu la Rochelle, les Messages de Fernandez sont les premières contributions à l’établissem
1394 s de Fernandez sont les premières contributions à l’ établissement d’une éthique adaptée aux besoins modernes. w. Rougem
29 1926, Articles divers (1924–1930). Les Bestiaires, par Henry de Montherlant (10 juillet 1926)
1395 Les Bestiaires, par Henry de Montherlant (10 juillet 1926)h Je ferme l
1396 nry de Montherlant (10 juillet 1926)h Je ferme les Bestiaires, et me tirant hors de ce « long songe de violence et de vo
1397 ffées par des forces qui se lèvent. Car telle est la vertu de ce livre, qu’on l’éprouve d’abord trop vivement pour le juge
1398 lèvent. Car telle est la vertu de ce livre, qu’on l’ éprouve d’abord trop vivement pour le juger. L’auteur l’appelle un « p
1399 livre, qu’on l’éprouve d’abord trop vivement pour le juger. L’auteur l’appelle un « poème solaire », l’éditeur un roman, p
1400 on l’éprouve d’abord trop vivement pour le juger. L’ auteur l’appelle un « poème solaire », l’éditeur un roman, parce que ç
1401 uve d’abord trop vivement pour le juger. L’auteur l’ appelle un « poème solaire », l’éditeur un roman, parce que ça se vend
1402 e juger. L’auteur l’appelle un « poème solaire », l’ éditeur un roman, parce que ça se vend mieux. Ce récit des premiers co
1403 e, sans cette orchestration de thèmes qui faisait la richesse du Songe, mais d’une ligne plus ferme, d’une unité plus pure
1404 ne ligne plus ferme, d’une unité plus pure aussi. Le sujet était périlleux : si particulier, il prêtait à des abus de pitt
1405 n’a pas toujours échappé, mais qu’il domine dans l’ ensemble et entraîne dans l’allure puissante à la fois et désinvolte d
1406 ais qu’il domine dans l’ensemble et entraîne dans l’ allure puissante à la fois et désinvolte de son récit. On a souvent pa
1407 emiers ouvrages de Montherlant. Cette fois-ci, on le traite de naturaliste. Mais comment montrer des taureaux sans que cel
1408 t montrer des taureaux sans que cela sente un peu l’ étable ? L’étonnant, c’est de voir à quel point Montherlant reste poèt
1409 es taureaux sans que cela sente un peu l’étable ? L’ étonnant, c’est de voir à quel point Montherlant reste poète jusque da
1410 à quel point Montherlant reste poète jusque dans la description la plus réaliste de la vie animale. Et n’est-ce pas juste
1411 ontherlant reste poète jusque dans la description la plus réaliste de la vie animale. Et n’est-ce pas justement parce qu’i
1412 te jusque dans la description la plus réaliste de la vie animale. Et n’est-ce pas justement parce qu’il est poète qu’il pe
1413 out rôdent des présences animales. Tandis que sur la plaine s’élève le long beuglement des taureaux et le ohéohéohé des bo
1414 sences animales. Tandis que sur la plaine s’élève le long beuglement des taureaux et le ohéohéohé des bouviers « comme un
1415 plaine s’élève le long beuglement des taureaux et le ohéohéohé des bouviers « comme un chant mystérieux entendu au-dessus
1416 « comme un chant mystérieux entendu au-dessus de la mer », il y a toujours dans un coin du tableau des ruades, des chevau
1417 u des ruades, des chevaux qui partent tout droit, la tête dressée, des vachettes qui se mordillent et se frôlent amoureuse
1418 bêtes de désir ». Une intelligence si profonde de la vie animale suppose entre l’homme et la bête une sympathie que Monthe
1419 gence si profonde de la vie animale suppose entre l’ homme et la bête une sympathie que Montherlant note à plusieurs repris
1420 ofonde de la vie animale suppose entre l’homme et la bête une sympathie que Montherlant note à plusieurs reprises. C’est «
1421 ontherlant note à plusieurs reprises. C’est « par la divination de cet amour qu’Alban (le jeune héros du récit) sent ce qu
1422 C’est « par la divination de cet amour qu’Alban ( le jeune héros du récit) sent ce que sent la bête en même temps qu’elle.
1423 ’Alban (le jeune héros du récit) sent ce que sent la bête en même temps qu’elle. Et parce qu’il sait ce qu’elle va faire,
1424 Et parce qu’il sait ce qu’elle va faire, il peut la dominer… : on ne vainc vraiment que ce qu’on aime, et les victorieux
1425 ner… : on ne vainc vraiment que ce qu’on aime, et les victorieux sont d’immenses amants »6. Mais envers les taureaux cet am
1426 victorieux sont d’immenses amants »6. Mais envers les taureaux cet amour tourne en adoration ou en une véritable horreur sa
1427 Voici Alban devant une bête qu’il devra combattre le lendemain : « Salaud, cochon, saligaud ! » Il l’apostrophait ainsi t
1428 le lendemain : « Salaud, cochon, saligaud ! » Il l’ apostrophait ainsi tout bas, sur un ton révérenciel, et comme on dérou
1429 évérenciel, et comme on déroule une litanie. Sous les grands cils brillants, lustrés par la lumière descendante, les prunel
1430 anie. Sous les grands cils brillants, lustrés par la lumière descendante, les prunelles laiteuses du dieu avaient un refle
1431 ls brillants, lustrés par la lumière descendante, les prunelles laiteuses du dieu avaient un reflet bleu clair, soudain inq
1432 avaient un reflet bleu clair, soudain inquiètes à l’ approche de l’inconnu. Nulle part mieux que dans la description des t
1433 let bleu clair, soudain inquiètes à l’approche de l’ inconnu. Nulle part mieux que dans la description des taureaux ne se
1434 approche de l’inconnu. Nulle part mieux que dans la description des taureaux ne se manifeste ce passage du réalisme le pl
1435 s taureaux ne se manifeste ce passage du réalisme le plus hardi à un lyrisme plein de simple grandeur. Voici la mort du ta
1436 e du réalisme le plus hardi à un lyrisme plein de simple grandeur. Voici la mort du taureau dit « le Mauvais Ange » : La bête
1437 ardi à un lyrisme plein de simple grandeur. Voici la mort du taureau dit « le Mauvais Ange » : La bête chancela de l’arri
1438 e simple grandeur. Voici la mort du taureau dit «  le Mauvais Ange » : La bête chancela de l’arrière-train, tenta de se ra
1439 ici la mort du taureau dit « le Mauvais Ange » : La bête chancela de l’arrière-train, tenta de se raidir, enfin croula su
1440 au dit « le Mauvais Ange » : La bête chancela de l’ arrière-train, tenta de se raidir, enfin croula sur le flanc, accompli
1441 rière-train, tenta de se raidir, enfin croula sur le flanc, accomplissant sa destinée. Quelques secondes encore elle clign
1442 rent peu à peu, comme un corps qu’on gonflerait à la pompe, tandis que dans cet agrandissement les articulations grinçaien
1443 it à la pompe, tandis que dans cet agrandissement les articulations grinçaient, avec le bruit d’un câble de navire qu’on se
1444 agrandissement les articulations grinçaient, avec le bruit d’un câble de navire qu’on serre sur un treuil. Elle arriva ave
1445 n serre sur un treuil. Elle arriva avec emphase à la cime de son spasme, comme l’homme à la cime de son plaisir, et comme
1446 rriva avec emphase à la cime de son spasme, comme l’ homme à la cime de son plaisir, et comme lui, elle y resta immobile. E
1447 emphase à la cime de son spasme, comme l’homme à la cime de son plaisir, et comme lui, elle y resta immobile. Et son âme
1448 t son âme divine s’échappa, pleurant ses jeux, et les génisses, et la chère plaine. De tels passages qui abondent dans les
1449 s’échappa, pleurant ses jeux, et les génisses, et la chère plaine. De tels passages qui abondent dans les Bestiaires font
1450 chère plaine. De tels passages qui abondent dans les Bestiaires font pardonner bien d’autres pages de vrais délires taurol
1451 utres pages de vrais délires taurologiques. Quand le lyrisme de Montherlant décolle de la réalité, c’est tout de suite une
1452 iques. Quand le lyrisme de Montherlant décolle de la réalité, c’est tout de suite une orgie d’évocations antiques, de rapp
1453 ents superstitieux, de grands symboles païens, et l’ on se perd dans un syncrétisme effarant, où Mithra, Jésus, les taureau
1454 d dans un syncrétisme effarant, où Mithra, Jésus, les taureaux et Alban confondent leurs génies dans une sorte de cauchemar
1455 e qu’on veut de ce paganisme exalté, tout ivre de la fumée des sacrifices sanglants. Pour ma part, je le trouve assez peu
1456 fumée des sacrifices sanglants. Pour ma part, je le trouve assez peu humain et comme obsédé par une idée de violence toni
1457 s donnons ? » ⁂ Il est impossible de ne voir dans les Bestiaires qu’une évocation de l’Espagne et du génie taurin. Ce qui p
1458 e ne voir dans les Bestiaires qu’une évocation de l’ Espagne et du génie taurin. Ce qui perce à chaque page, ce qui peu à p
1459 perce à chaque page, ce qui peu à peu obsède dans l’ inflexion des phrases, ce qui s’élève en fin de compte de tous ces tab
1460 ous ces tableaux de violence et de passion, c’est la présence d’un tempérament. À l’inverse de tant d’autres qui s’analyse
1461 de passion, c’est la présence d’un tempérament. À l’ inverse de tant d’autres qui s’analysent sans fin, avant que d’être, M
1462 soulève directement aucun des grands problèmes de l’ heure. La violence même qui sourd dans son être intime l’en empêche, l
1463 irectement aucun des grands problèmes de l’heure. La violence même qui sourd dans son être intime l’en empêche, le préserv
1464 . La violence même qui sourd dans son être intime l’ en empêche, le préserve des états d’incertitude douloureux, où ces pro
1465 même qui sourd dans son être intime l’en empêche, le préserve des états d’incertitude douloureux, où ces problèmes viennen
1466 douloureux, où ces problèmes viennent se poser à l’ esprit, profitant de son désaccord avec la vie. Ni métaphysicien, ni l
1467 poser à l’esprit, profitant de son désaccord avec la vie. Ni métaphysicien, ni logicien, dit-il d’Alban — (de lui-même) —
1468 pas à ce qui est triste ou ennuyeux, que ce soit l’ idée de la mort ou les soucis politiques, sociaux, etc., et il ne met
1469 qui est triste ou ennuyeux, que ce soit l’idée de la mort ou les soucis politiques, sociaux, etc., et il ne met de la grav
1470 ste ou ennuyeux, que ce soit l’idée de la mort ou les soucis politiques, sociaux, etc., et il ne met de la gravité que dans
1471 soucis politiques, sociaux, etc., et il ne met de la gravité que dans les choses voluptueuses, je n’ai pas dit les choses
1472 ociaux, etc., et il ne met de la gravité que dans les choses voluptueuses, je n’ai pas dit les choses sentimentales. Le tra
1473 que dans les choses voluptueuses, je n’ai pas dit les choses sentimentales. Le tragique de la vie ne lui échappe pas. Il en
1474 ueuses, je n’ai pas dit les choses sentimentales. Le tragique de la vie ne lui échappe pas. Il en parle, il le chante avec
1475 pas dit les choses sentimentales. Le tragique de la vie ne lui échappe pas. Il en parle, il le chante avec pathétique. Ma
1476 que de la vie ne lui échappe pas. Il en parle, il le chante avec pathétique. Mais c’est parce qu’il est poète : le chant f
1477 ec pathétique. Mais c’est parce qu’il est poète : le chant fini, il n’y pense plus. On comprend qu’une telle attitude agac
1478 se soucient avant tout de trouver des réponses de l’ intelligence ou de la foi aux inquiétudes profondes de leurs âmes sépa
1479 t de trouver des réponses de l’intelligence ou de la foi aux inquiétudes profondes de leurs âmes séparées de Dieu. Monther
1480 é dont il manifeste avec une magnifique insolence les forces créatrices, ne vaut-elle pas d’être élevée en témoignage pour
1481 levée en témoignage pour notre exaltation ? Comme la vue des athlètes en action, un tel livre communique une puissance phy
1482 munique une puissance physique, un mouvement vers la vie ardente qui peut entraîner l’âme dans un élan de grandeur. N’est-
1483 mouvement vers la vie ardente qui peut entraîner l’ âme dans un élan de grandeur. N’est-ce point une solution aussi ? Plut
1484 ois à ces forces obscures qui nous replacent dans l’ intelligence de l’instinct universel et nous élèvent à une vie plus âp
1485 bscures qui nous replacent dans l’intelligence de l’ instinct universel et nous élèvent à une vie plus âpre et violemment c
1486 à une vie plus âpre et violemment contractée, par la grâce de l’éternel Désir ? 6. Il est curieux de noter que de tels p
1487 us âpre et violemment contractée, par la grâce de l’ éternel Désir ? 6. Il est curieux de noter que de tels passages vien
1488 noter que de tels passages viennent à l’appui de la théorie de l’instinct de Bergson. Bergson suppose aussi entre le sphe
1489 tels passages viennent à l’appui de la théorie de l’ instinct de Bergson. Bergson suppose aussi entre le sphex qui pique un
1490 ’instinct de Bergson. Bergson suppose aussi entre le sphex qui pique une chenille précisément aux trois-centres nerveux, e
1491 « une sympathie (au sens étymologique du mot) qui la renseigne du dedans, pour ainsi dire, sur la vulnérabilité de la chen
1492 qui la renseigne du dedans, pour ainsi dire, sur la vulnérabilité de la chenille. » (Évolution créatrice, p. 188) Je n’ai
1493 dedans, pour ainsi dire, sur la vulnérabilité de la chenille. » (Évolution créatrice, p. 188) Je n’ai pas la place de cit
1494 ille. » (Évolution créatrice, p. 188) Je n’ai pas la place de citer ici plusieurs autres passages qui préciseraient ce par
1495 Denis de, « [Compte rendu] Henry de Montherlant, Les Bestiaires  », La Semaine littéraire, Genève, 10 juillet 1926, p. 335
1496 e rendu] Henry de Montherlant, Les Bestiaires  », La Semaine littéraire, Genève, 10 juillet 1926, p. 335.
30 1926, Journal de Genève, articles (1926–1982). Le Dépaysement oriental (16 juillet 1926)
1497 Le Dépaysement oriental (16 juillet 1926)a Il y a dans le monde intel
1498 sement oriental (16 juillet 1926)a Il y a dans le monde intellectuel une « Question d’Orient » dont on ne peut plus méc
1499 stion d’Orient » dont on ne peut plus méconnaître l’ urgence. Des prophètes — hindous à demi-européanisés ou germains désil
1500 nisés ou germains désillusionnés — nous annoncent le « crépuscule du monde occidental », et, au-dessus des ruines prochain
1501 chaines de nos cités mécaniciennes, ils rallument le mirage d’un Orient paradisiaque d’où nous viendraient une fois de plu
1502 radisiaque d’où nous viendraient une fois de plus la sagesse et la lumière. De récentes enquêtes ont dénoncé certaines des
1503 ù nous viendraient une fois de plus la sagesse et la lumière. De récentes enquêtes ont dénoncé certaines des confusions su
1504 inaires. Beaucoup pourtant subsistent encore. Or, le nouveau livre de M. de Traz1, par les précisions importantes qu’il ap
1505 encore. Or, le nouveau livre de M. de Traz1, par les précisions importantes qu’il apporte sur les rapports de l’Orient et
1506 par les précisions importantes qu’il apporte sur les rapports de l’Orient et de l’Europe, me paraît destiné à lever plusie
1507 ons importantes qu’il apporte sur les rapports de l’ Orient et de l’Europe, me paraît destiné à lever plusieurs des plus te
1508 qu’il apporte sur les rapports de l’Orient et de l’ Europe, me paraît destiné à lever plusieurs des plus tenaces de ces co
1509 us tenaces de ces confusions. M. de Traz a visité l’ Égypte, ses habitants, ses tombeaux et son passé, en curieux avide du
1510 avec une sorte d’acharnement, comme seul il sait l’ être aujourd’hui sans que cela nuise en rien à un don de sympathie qui
1511 ise en rien à un don de sympathie qui est parfois la plus subtile de ses ruses de psychologue. C’est parce que son livre,
1512 hevés, n’est ni un album de vues pittoresques, ni le journal plus ou moins lyrique auquel nous ont habitués les voyageurs
1513 al plus ou moins lyrique auquel nous ont habitués les voyageurs en Orient, mais une suite de coups d’œil aigus sur l’âme or
1514 n Orient, mais une suite de coups d’œil aigus sur l’ âme orientale de l’islam, que nous l’avons lu avec un intérêt si soute
1515 suite de coups d’œil aigus sur l’âme orientale de l’ islam, que nous l’avons lu avec un intérêt si soutenu et parfois — je
1516 il aigus sur l’âme orientale de l’islam, que nous l’ avons lu avec un intérêt si soutenu et parfois — je pense à certaines
1517 tie orientale de lui-même, comme c’est si souvent le cas, mais bien sur l’Orient. Encore faut-il s’entendre : les meilleur
1518 ême, comme c’est si souvent le cas, mais bien sur l’ Orient. Encore faut-il s’entendre : les meilleurs documents sur l’Orie
1519 is bien sur l’Orient. Encore faut-il s’entendre : les meilleurs documents sur l’Orient sont les œuvres des Orientaux. L’int
1520 faut-il s’entendre : les meilleurs documents sur l’ Orient sont les œuvres des Orientaux. L’intérêt d’un livre comme celui
1521 endre : les meilleurs documents sur l’Orient sont les œuvres des Orientaux. L’intérêt d’un livre comme celui-ci est plus da
1522 ments sur l’Orient sont les œuvres des Orientaux. L’ intérêt d’un livre comme celui-ci est plus dans l’opposition des deux
1523 L’intérêt d’un livre comme celui-ci est plus dans l’ opposition des deux mondes que dans la peinture elle-même de l’Orient.
1524 t plus dans l’opposition des deux mondes que dans la peinture elle-même de l’Orient. Tandis que s’accumulent les traits qu
1525 des deux mondes que dans la peinture elle-même de l’ Orient. Tandis que s’accumulent les traits qui composent le portrait m
1526 re elle-même de l’Orient. Tandis que s’accumulent les traits qui composent le portrait moral de l’Oriental, celui de l’Euro
1527 Tandis que s’accumulent les traits qui composent le portrait moral de l’Oriental, celui de l’Européen se précise dans la
1528 ent les traits qui composent le portrait moral de l’ Oriental, celui de l’Européen se précise dans la même mesure, — et aus
1529 mposent le portrait moral de l’Oriental, celui de l’ Européen se précise dans la même mesure, — et aussi la figure de l’aut
1530 e l’Oriental, celui de l’Européen se précise dans la même mesure, — et aussi la figure de l’auteur : car il n’est guère de
1531 ropéen se précise dans la même mesure, — et aussi la figure de l’auteur : car il n’est guère de comparaison valable qu’ent
1532 cise dans la même mesure, — et aussi la figure de l’ auteur : car il n’est guère de comparaison valable qu’entre individus,
1533 er mieux que lui-même. S’il dit des Égyptiens : «  Le mensonge, autant qu’une politesse, leur paraît une beauté », c’est po
1534 par contraste une « préférence irréductible pour le vrai ». Ce qui lui permet de voir profond dans cet islam qu’il qualif
1535 cet islam qu’il qualifie de « religion du fil de l’ eau », ou de « prodigieux stupéfiant », tandis que « l’attrait du chri
1536  », ou de « prodigieux stupéfiant », tandis que «  l’ attrait du christianisme est dans l’inquiétude qu’il nous inflige ». «
1537 tandis que « l’attrait du christianisme est dans l’ inquiétude qu’il nous inflige ». « Ils mettent leur âme en veilleuse,
1538 i de soi-même nous avons fait une vertu. Eux, ils l’ ont rendu facile et en ont fait un plaisir. » Et encore ceci que je tr
1539 re ceci que je trouve si juste : « Ce qui définit le plus profondément l’Occidental, c’est peut-être la fidélité. » Ses re
1540 si juste : « Ce qui définit le plus profondément l’ Occidental, c’est peut-être la fidélité. » Ses remarques sur la psycho
1541 e plus profondément l’Occidental, c’est peut-être la fidélité. » Ses remarques sur la psychologie de l’Égyptien ne sont pa
1542 c’est peut-être la fidélité. » Ses remarques sur la psychologie de l’Égyptien ne sont pas moins subtiles et le mènent à c
1543 a fidélité. » Ses remarques sur la psychologie de l’ Égyptien ne sont pas moins subtiles et le mènent à cette constatation
1544 logie de l’Égyptien ne sont pas moins subtiles et le mènent à cette constatation fondamentale que « notre intelligence et
1545 fondamentale que « notre intelligence et celle de l’ Oriental ne sont pas superposables ». Dès lors, comment collaborer, co
1546 si c’est impossible, pourra-t-on du moins éviter le conflit que certains prétendent menaçant ? Malgré l’« anxiété mélanco
1547 conflit que certains prétendent menaçant ? Malgré l’ « anxiété mélancolique » qu’il éprouve à se sentir si loin de l’Orient
1548 lancolique » qu’il éprouve à se sentir si loin de l’ Oriental, les conclusions de M. de Traz — si tant est qu’on peut concl
1549 qu’il éprouve à se sentir si loin de l’Oriental, les conclusions de M. de Traz — si tant est qu’on peut conclure en une ma
1550 t que nous ayons à chercher là-bas notre salut. «  La seule leçon à attendre des musulmans, c’est que le spectacle de leur
1551 a seule leçon à attendre des musulmans, c’est que le spectacle de leur décadence nous enseigne comment éviter la nôtre. »
1552 le de leur décadence nous enseigne comment éviter la nôtre. » La place me manque pour parler comme j’aurais voulu le faire
1553 écadence nous enseigne comment éviter la nôtre. » La place me manque pour parler comme j’aurais voulu le faire des deux au
1554 place me manque pour parler comme j’aurais voulu le faire des deux autres parties du volume, d’une importance moins actue
1555 e, mais d’une qualité d’art peut-être supérieure. Les méditations sur les ruines de la Haute-Égypte révèlent en de Traz un
1556 é d’art peut-être supérieure. Les méditations sur les ruines de la Haute-Égypte révèlent en de Traz un philosophe de l’hist
1557 tre supérieure. Les méditations sur les ruines de la Haute-Égypte révèlent en de Traz un philosophe de l’histoire aux vues
1558 Haute-Égypte révèlent en de Traz un philosophe de l’ histoire aux vues larges et pourtant réalistes, aux hypothèses hardies
1559 t pourtant réalistes, aux hypothèses hardies — de la hardiesse de ce bon sens qui est le plus éloigné du sens commun — mai
1560 hardies — de la hardiesse de ce bon sens qui est le plus éloigné du sens commun — mais qui reste trop méfiant de tout rom
1561 nt de tout romantisme pour édifier aucun système. Le livre se termine par un voyage à Jérusalem : le christianisme n’est-i
1562 . Le livre se termine par un voyage à Jérusalem : le christianisme n’est-il pas le plus beau don de l’Orient à l’Europe ?
1563 oyage à Jérusalem : le christianisme n’est-il pas le plus beau don de l’Orient à l’Europe ? Il y a là des pages d’un accen
1564 le christianisme n’est-il pas le plus beau don de l’ Orient à l’Europe ? Il y a là des pages d’un accent très noble et cour
1565 nisme n’est-il pas le plus beau don de l’Orient à l’ Europe ? Il y a là des pages d’un accent très noble et courageux mêlé,
1566 rfois, d’une certaine amertume, où de Traz quitte le ton mesuré qu’il s’impose d’ordinaire. Mais j’avoue que m’a parfois u
1567 oue que m’a parfois un peu gêné cette présence de la mort qu’il fait sentir partout aux lieux mêmes où naquit la religion
1568 ’il fait sentir partout aux lieux mêmes où naquit la religion du « Prince de la vie »… Qu’on ne croie pas, d’ailleurs, que
1569 lieux mêmes où naquit la religion du « Prince de la vie »… Qu’on ne croie pas, d’ailleurs, que l’attitude presque constam
1570 de la vie »… Qu’on ne croie pas, d’ailleurs, que l’ attitude presque constamment critique de M. de Traz diminue l’intérêt
1571 resque constamment critique de M. de Traz diminue l’ intérêt vivant de son livre : cette impartialité même, cette façon de
1572 es, révèle sa personnalité peut-être mieux que ne le feraient une suite de pages lyriques toujours un peu stylisées. Il ap
1573 oujours un peu stylisées. Il apparaît, ici, comme le type du voyageur intelligent, qui n’accepte d’être séduit que pour « 
1574 arer et, parfois, juger ; préférant obstinément à la légende le vrai, même amer, non par défaut d’un sens artistique dont
1575 rfois, juger ; préférant obstinément à la légende le vrai, même amer, non par défaut d’un sens artistique dont plusieurs d
1576 tistique dont plusieurs de ses morceaux attestent la délicatesse, mais parce qu’il sait y trouver les seuls motifs réels d
1577 t la délicatesse, mais parce qu’il sait y trouver les seuls motifs réels d’exaltation. 1. Le Dépaysement oriental, chez
1578 rouver les seuls motifs réels d’exaltation. 1. Le Dépaysement oriental, chez Grasset, Paris. a. Rougemont Denis de, «
1579 gemont Denis de, « [Compte rendu] Robert de Traz, Le Dépaysement oriental  », Journal de Genève, Genève, 16 juillet 1926,
31 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Henry de Montherlant, Les Bestiaires (septembre 1926)
1580 Henry de Montherlant, Les Bestiaires (septembre 1926)x J’éprouve quelque gêne à porter un ju
1581 Montherlant : dans ce récit plus encore que dans les œuvres précédentes, on voit beaucoup moins l’œuvre d’art que l’auteur
1582 ns les œuvres précédentes, on voit beaucoup moins l’ œuvre d’art que l’auteur ; dans ce portrait de Montherlant toréador, à
1583 édentes, on voit beaucoup moins l’œuvre d’art que l’ auteur ; dans ce portrait de Montherlant toréador, à 16 ans, c’est sur
1584 de Montherlant toréador, à 16 ans, c’est surtout le Montherlant actuel que l’on sent. C’est dire que le livre vaut par so
1585 à 16 ans, c’est surtout le Montherlant actuel que l’ on sent. C’est dire que le livre vaut par son allure plus que par des
1586 Montherlant actuel que l’on sent. C’est dire que le livre vaut par son allure plus que par des qualités de composition ou
1587 savante sensualité, pour ces insolences jolies et les subites violences, qui composent la séduction de cet « homme de la Re
1588 es jolies et les subites violences, qui composent la séduction de cet « homme de la Renaissance », pour quelques descripti
1589 ces, qui composent la séduction de cet « homme de la Renaissance », pour quelques descriptions des prairies espagnoles ple
1590 s descriptions des prairies espagnoles pleines de simple grandeur, j’ai supporté mille fastidieux détails techniques et des dé
1591 ur communier, il faudrait sans doute être né sous le signe du Taureau. Mais il sera pardonné à Montherlant beaucoup de déf
1592 a souveraine désinvolture. Elle est tonique comme le spectacle des athlètes. Et c’est elle avant tout que j’admire dans ce
1593 ets d’esprit ! Qu’ils paissent éternellement dans les prairies célestes, pour avoir donné une grande gloire aux jeunes homm
1594 s ! » Mais ce jeune homme qui écrivit naguère sur les Fontaines du désir certaines pages magnifiques et sobres, jetées de h
1595 pages magnifiques et sobres, jetées de haut avec la nonchalance des vrais puissants, je compte qu’il saura fonder sa gloi
1596 Denis de, « [Compte rendu] Henry de Montherlant, Les Bestiaires  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, s
32 1926, Articles divers (1924–1930). Soir de Florence (13 novembre 1926)
1597 ce (13 novembre 1926)i Des cris mouraient vers les berges du fleuve jaune, entre les deux façades longues que la ville p
1598 mouraient vers les berges du fleuve jaune, entre les deux façades longues que la ville présente au couchant, dans ce corri
1599 fleuve jaune, entre les deux façades longues que la ville présente au couchant, dans ce corridor de lumière où elle accue
1600 nt, dans ce corridor de lumière où elle accueille le ciel — et derrière, elle devient plus secrète. Vers l’est, des collin
1601 el — et derrière, elle devient plus secrète. Vers l’ est, des collines fluides et roses. De l’autre côté, c’est le vide, où
1602 collines fluides et roses. De l’autre côté, c’est le vide, où s’en vont lentement les eaux et les lueurs, vers la mer. Sur
1603 autre côté, c’est le vide, où s’en vont lentement les eaux et les lueurs, vers la mer. Sur le Lungarno trop vaste et nu, le
1604 c’est le vide, où s’en vont lentement les eaux et les lueurs, vers la mer. Sur le Lungarno trop vaste et nu, les voitures r
1605 s’en vont lentement les eaux et les lueurs, vers la mer. Sur le Lungarno trop vaste et nu, les voitures revenaient au pas
1606 entement les eaux et les lueurs, vers la mer. Sur le Lungarno trop vaste et nu, les voitures revenaient au pas des Cascine
1607 s, vers la mer. Sur le Lungarno trop vaste et nu, les voitures revenaient au pas des Cascine. Vers sept heures, il n’y en e
1608 il n’y en eut presque plus. Nous étions seuls sur le pavé qui exhalait sa chaleur, au long des quais sans bancs pour notre
1609 s’éloignait derrière nous qui suivions maintenant le sentier du bord du fleuve, plus bas que la Promenade désertée. Sur le
1610 tenant le sentier du bord du fleuve, plus bas que la Promenade désertée. Sur les eaux, comme immobiles, des nuages rouges
1611 u fleuve, plus bas que la Promenade désertée. Sur les eaux, comme immobiles, des nuages rouges et le vert dur des berges :
1612 r les eaux, comme immobiles, des nuages rouges et le vert dur des berges : un malaise montait dans l’air plus frais, avec
1613 le vert dur des berges : un malaise montait dans l’ air plus frais, avec l’odeur du limon. Nous marchions vers ces hauts a
1614  : un malaise montait dans l’air plus frais, avec l’ odeur du limon. Nous marchions vers ces hauts arbres clairs, au tourna
1615 hauts arbres clairs, au tournant du fleuve, parmi les dissonances mélancoliques des lumières et des odeurs, espérant entrer
1616 Seule une maison blanche est arrêtée tout près de l’ eau. Mais ce n’est pas d’elle que vient cette chanson jamais entendue
1617 entendue qui nous accompagne depuis un moment sur le chemin de l’autre rive. Il y a un homme debout à l’avant d’un char ti
1618 chemin de l’autre rive. Il y a un homme debout à l’ avant d’un char tiré par des bœufs blancs. Comme une apparition. (Tu p
1619 de triste volupté emplit notre monde à ce chant. L’ odeur du fleuve est son parfum, le soleil rouge sa douleur. Les bœufs
1620 nde à ce chant. L’odeur du fleuve est son parfum, le soleil rouge sa douleur. Les bœufs blancs, les roues peintes du char,
1621 leuve est son parfum, le soleil rouge sa douleur. Les bœufs blancs, les roues peintes du char, l’Italie des poètes… Mais ce
1622 um, le soleil rouge sa douleur. Les bœufs blancs, les roues peintes du char, l’Italie des poètes… Mais ce pays tout entier
1623 eur. Les bœufs blancs, les roues peintes du char, l’ Italie des poètes… Mais ce pays tout entier pâmé dans une beauté que s
1624 nt tant de souvenirs n’a d’autre nom que celui de l’ instant, ô mélodieuse lassitude. Vivre ainsi simplement. Sans pensée,
1625 , perdus dans un soir de n’importe où, un soir de la Nature… L’homme chante une plainte inouïe de pureté. Deux phrases rap
1626 ns un soir de n’importe où, un soir de la Nature… L’ homme chante une plainte inouïe de pureté. Deux phrases rapides ondule
1627 uïe de pureté. Deux phrases rapides ondulent dans l’ air lourd. Le chant descend très doucement la berge, les bœufs s’engag
1628 . Deux phrases rapides ondulent dans l’air lourd. Le chant descend très doucement la berge, les bœufs s’engagent dans le m
1629 dans l’air lourd. Le chant descend très doucement la berge, les bœufs s’engagent dans le marais, cherchant le gué. Plus pr
1630 lourd. Le chant descend très doucement la berge, les bœufs s’engagent dans le marais, cherchant le gué. Plus proches, les
1631 rès doucement la berge, les bœufs s’engagent dans le marais, cherchant le gué. Plus proches, les syllabes nous parviennent
1632 e, les bœufs s’engagent dans le marais, cherchant le gué. Plus proches, les syllabes nous parviennent au ras du fleuve som
1633 t dans le marais, cherchant le gué. Plus proches, les syllabes nous parviennent au ras du fleuve sombre. Nul désir en nous
1634 mbre. Nul désir en nous de comprendre ce lamento. Le ciel est un silence qui s’impose à nos pensées. Ici la vie n’a presqu
1635 el est un silence qui s’impose à nos pensées. Ici la vie n’a presque plus de sens, comme le fleuve. Elle n’est qu’odeurs,
1636 nsées. Ici la vie n’a presque plus de sens, comme le fleuve. Elle n’est qu’odeurs, formes mouvantes, remous dans l’air et
1637 le n’est qu’odeurs, formes mouvantes, remous dans l’ air et musiques sourdes. Penser serait sacrilège, comme une barre droi
1638 n tableau. Nos yeux ont regardé longtemps — où va l’ âme durant ces minutes ? — jusqu’à ce que les bœufs ruisselants remont
1639 où va l’âme durant ces minutes ? — jusqu’à ce que les bœufs ruisselants remontent sur notre rive. Fraîcheur humide, parfums
1640 ement vague des roseaux aux feuilles sèches… Puis la brume est venue comme une envie de sommeil. Une lampe dans la maison
1641 venue comme une envie de sommeil. Une lampe dans la maison blanche nous a révélé proche la nuit. Nous nous sommes retourn
1642 lampe dans la maison blanche nous a révélé proche la nuit. Nous nous sommes retournés vers la ville. Fleurs de lumières s
1643 é proche la nuit. Nous nous sommes retournés vers la ville. Fleurs de lumières sur les champs sombres du ciel de l’est, e
1644 retournés vers la ville. Fleurs de lumières sur les champs sombres du ciel de l’est, et une façade parfaite répond encore
1645 urs de lumières sur les champs sombres du ciel de l’ est, et une façade parfaite répond encore au couchant. San Miniato sur
1646 chant. San Miniato sur sa colline. Derrière nous, les arbres se brouillent dans une buée sans couleurs, nous quittons un my
1647 us quittons un mystère à jamais impénétrable pour l’ homme, nous fuyons ces bords où conspirent des ombres informes et des
1648 nous laisse gourds et faibles, caressant en nous la lâche volupté de sentir l’esprit se défaire et couler sans fin vers u
1649 les, caressant en nous la lâche volupté de sentir l’ esprit se défaire et couler sans fin vers un sommeil à l’odeur fade de
1650 t se défaire et couler sans fin vers un sommeil à l’ odeur fade de fleuve, un sommeil de plante vaguement heureuse d’être p
1651 nous enivrait, promettant à nos sens, fatigués de l’ esprit qui les exerce, des voluptés plus faciles — pour infuser dans n
1652 , promettant à nos sens, fatigués de l’esprit qui les exerce, des voluptés plus faciles — pour infuser dans nos corps charm
1653 dont on ne voudrait plus guérir… Mais nous voyons la ville debout dans ses lumières. Architectures ! langage des dieux, ô
1654 s qu’épousent nos ferveurs, angles purs, repos de l’ esprit qui s’appuie sur son œuvre ! La sérénité de cette façade élevée
1655 s, repos de l’esprit qui s’appuie sur son œuvre ! La sérénité de cette façade élevée lumineuse sur le ciel fut le signe d’
1656 La sérénité de cette façade élevée lumineuse sur le ciel fut le signe d’un équilibre retrouvé. Un grand pont de fer, près
1657 de cette façade élevée lumineuse sur le ciel fut le signe d’un équilibre retrouvé. Un grand pont de fer, près de nous, ér
1658 uvé. Un grand pont de fer, près de nous, érigeait l’ image de la lutte et des forces humaines, et rendait sous des coups un
1659 nd pont de fer, près de nous, érigeait l’image de la lutte et des forces humaines, et rendait sous des coups un son qui no
1660 et rendait sous des coups un son qui nous évoqua les rumeurs de villes d’usines. Il y avait la vie des hommes pour demain,
1661 évoqua les rumeurs de villes d’usines. Il y avait la vie des hommes pour demain, et il était beau d’y songer un peu avant
1662 beau d’y songer un peu avant de nous abandonner à l’ oubli luxueux des rues. Le long de l’Arno, les façades sont jaunes et
1663 abandonner à l’oubli luxueux des rues. Le long de l’ Arno, les façades sont jaunes et roses près de l’eau, puis perdent dan
1664 er à l’oubli luxueux des rues. Le long de l’Arno, les façades sont jaunes et roses près de l’eau, puis perdent dans la nuit
1665 l’Arno, les façades sont jaunes et roses près de l’ eau, puis perdent dans la nuit leurs lignes graves. Toutes ces formes
1666 jaunes et roses près de l’eau, puis perdent dans la nuit leurs lignes graves. Toutes ces formes devinées dans l’espace no
1667 rs lignes graves. Toutes ces formes devinées dans l’ espace nous environnent d’une obscure confiance. Livrons-nous aux jeux
1668 ons-nous aux jeux des hommes-qui-font-des-gestes. Les autos répètent sans fin les notes mêlées d’une symphonie qui va peut-
1669 -qui-font-des-gestes. Les autos répètent sans fin les notes mêlées d’une symphonie qui va peut-être composer tous les bruit
1670 es d’une symphonie qui va peut-être composer tous les bruits de la ville en un chant immense. Il passe une possibilité de b
1671 onie qui va peut-être composer tous les bruits de la ville en un chant immense. Il passe une possibilité de bonheur par pe
1672 passe une possibilité de bonheur par personne et les devantures ne cherchent qu’à vous plaire. Chaque ruelle croisée propo
1673 oublie pour celui des regards étrangers. Et voici la place régulière, les galeries, les cafés, les musiques, Donizetti qui
1674 s regards étrangers. Et voici la place régulière, les galeries, les cafés, les musiques, Donizetti qui pleure délicieusemen
1675 ngers. Et voici la place régulière, les galeries, les cafés, les musiques, Donizetti qui pleure délicieusement jusque dans
1676 oici la place régulière, les galeries, les cafés, les musiques, Donizetti qui pleure délicieusement jusque dans les gestes
1677 , Donizetti qui pleure délicieusement jusque dans les gestes des passantes. Sous cette agitation aimable et monotone nous a
1678 ation aimable et monotone nous allons voir courir l’ arabesque des sentiments et le mouvement perpétuel de l’amour. Plaisir
1679 allons voir courir l’arabesque des sentiments et le mouvement perpétuel de l’amour. Plaisir de se sentir engagé dans un s
1680 esque des sentiments et le mouvement perpétuel de l’ amour. Plaisir de se sentir engagé dans un système d’ondes de forces q
1681 ngagé dans un système d’ondes de forces qui tisse la nuit vibrante, intérêts, politesses, politiques, regards, musiques —
1682 musiques — cette vie rapide dans un décor qui est le rêve éternisé des plus voluptueuses intelligences — tous les tableaux
1683 ernisé des plus voluptueuses intelligences — tous les tableaux dans le noir des musées ! — et si tu veux soudain le son gra
1684 luptueuses intelligences — tous les tableaux dans le noir des musées ! — et si tu veux soudain le son grave de l’infini, p
1685 dans le noir des musées ! — et si tu veux soudain le son grave de l’infini, pour être seul parmi la foule, lève les yeux,
1686 musées ! — et si tu veux soudain le son grave de l’ infini, pour être seul parmi la foule, lève les yeux, au plus beau cie
1687 in le son grave de l’infini, pour être seul parmi la foule, lève les yeux, au plus beau ciel du monde. i. Rougemont Den
1688 de l’infini, pour être seul parmi la foule, lève les yeux, au plus beau ciel du monde. i. Rougemont Denis de, « Soir de
1689 . i. Rougemont Denis de, « Soir de Florence », La Semaine littéraire, Genève, 13 novembre 1926, p. 547-548.
33 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jacques Spitz, La Croisière indécise (décembre 1926)
1690 Jacques Spitz, La Croisière indécise (décembre 1926)y L’auteur veut amuser en nous q
1691 Spitz, La Croisière indécise (décembre 1926)y L’ auteur veut amuser en nous quelques idées graves en leur présentant le
1692 en nous quelques idées graves en leur présentant les miroirs de personnages cocasses à souhait, qui manifestent, avec un c
1693 manque de conviction et des poses de mannequins, les tendances contradictoires d’un individu. C’est pour traiter ce sujet
1694 sière de vacances, qui finit par un naufrage dans la littérature, le navire succombant sous les allégories. L’étonnant, c’
1695 s, qui finit par un naufrage dans la littérature, le navire succombant sous les allégories. L’étonnant, c’est que le livre
1696 ge dans la littérature, le navire succombant sous les allégories. L’étonnant, c’est que le livre soit réellement amusant, e
1697 rature, le navire succombant sous les allégories. L’ étonnant, c’est que le livre soit réellement amusant, et qu’il trouve
1698 ombant sous les allégories. L’étonnant, c’est que le livre soit réellement amusant, et qu’il trouve une sorte d’unité viva
1699 t, et qu’il trouve une sorte d’unité vivante dans le rythme des désirs jamais simultanés de ses petits héros. M. Spitz che
1700 etits héros. M. Spitz cherche à faire sourire, on le sent ; pourtant l’on sourit : il faut bien croire qu’il y a là un tal
1701 tz cherche à faire sourire, on le sent ; pourtant l’ on sourit : il faut bien croire qu’il y a là un talent, charmant, glac
1702 ugemont Denis de, « [Compte rendu] Jacques Spitz, La Croisière indécise  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, G
34 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Alfred Colling, L’Iroquois (décembre 1926)
1703 Alfred Colling, L’ Iroquois (décembre 1926)z Ce roman a le charme d’un automne, une am
1704 olling, L’Iroquois (décembre 1926)z Ce roman a le charme d’un automne, une amertume enveloppée, une atmosphère trop cla
1705 mertume enveloppée, une atmosphère trop claire où les cris se font un peu aigres et les couleurs fluides. Toute la tendress
1706 trop claire où les cris se font un peu aigres et les couleurs fluides. Toute la tendresse que ranime un soleil lointain va
1707 font un peu aigres et les couleurs fluides. Toute la tendresse que ranime un soleil lointain va tourner en cruelle mélanco
1708 e mélancolie. Pourquoi, Henri de Closain, quitter le domaine enchanté où des amis très fins, précieux poètes, dissertent s
1709 e sait plus de quels souvenirs ; jusqu’au soir où la douleur nette d’un amour réveillé l’envahit. Et Closain rencontre, da
1710 u’au soir où la douleur nette d’un amour réveillé l’ envahit. Et Closain rencontre, dans l’inévitable bar, le couple de jui
1711 ur réveillé l’envahit. Et Closain rencontre, dans l’ inévitable bar, le couple de juifs espagnols qui va l’entraîner avec s
1712 hit. Et Closain rencontre, dans l’inévitable bar, le couple de juifs espagnols qui va l’entraîner avec son mauvais cœur, d
1713 évitable bar, le couple de juifs espagnols qui va l’ entraîner avec son mauvais cœur, dans une aventure incertaine et doulo
1714 taine et douloureuse ; enfin Orpha, sa maîtresse, le fuit, parce que son silence devient insupportable : « Orpha ne compre
1715 rir et ne plus aimer ». Closain se tue pour finir le livre. Livre charmant et bizarre, où la sentimentalité moderne trouve
1716 our finir le livre. Livre charmant et bizarre, où la sentimentalité moderne trouve l’expression ironique qui lui convient,
1717 t et bizarre, où la sentimentalité moderne trouve l’ expression ironique qui lui convient, mais ici mêlée à une émotion plu
1718 ui transparaît parfois et nous fait regretter que l’ auteur ne se soit pas mieux abandonné à son sujet, d’un pathétique ass
1719 gemont Denis de, « [Compte rendu] Alfred Colling, L’ Iroquois  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, déce
35 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Malraux, La Tentation de l’Occident (décembre 1926)
1720 André Malraux, La Tentation de l’Occident (décembre 1926)aa Un Chinois écrit d’Europ
1721 André Malraux, La Tentation de l’ Occident (décembre 1926)aa Un Chinois écrit d’Europe à un Français
1722 e. Nous sommes loin du ton des Lettres persanes : le Chinois s’étonne non sans quelque aigreur, et critique avec un mépris
1723 aigreur, et critique avec un mépris tranquille ; le Français riposte sans conviction, et sous sa défense on devine une dé
1724 n devine une détresse. C’est encore une vision de l’ Occident qui naît de ce petit livre si dense, si inquiétant. Le Chinoi
1725 i naît de ce petit livre si dense, si inquiétant. Le Chinois voit dans l’Europe « une barbarie attentivement ordonnée, où
1726 vre si dense, si inquiétant. Le Chinois voit dans l’ Europe « une barbarie attentivement ordonnée, où l’idée de la civilisa
1727 ’Europe « une barbarie attentivement ordonnée, où l’ idée de la civilisation et celle de l’ordre sont chaque jour confondue
1728 une barbarie attentivement ordonnée, où l’idée de la civilisation et celle de l’ordre sont chaque jour confondues ». Nous
1729 rdonnée, où l’idée de la civilisation et celle de l’ ordre sont chaque jour confondues ». Nous cherchons à conquérir non le
1730 jour confondues ». Nous cherchons à conquérir non le monde, mais son ordre. Nous humilions sans trêve notre sensibilité au
1731 e « mythe cohérent » vers quoi tend notre esprit. La passion apparaît dans notre ordre social « comme une adroite fêlure »
1732 ure ». Notre morale est entièrement subordonnée à l’ action ; notre individualisme en naît logiquement, et toutes nos catég
1733 nos catégories artificielles et nécessaires. Mais le monde échappe toujours à nos cadres — perpétuel conflit du réel avec
1734 réel avec nos rêves de puissance : notre ambition la plus haute échoue. La tristesse règne sur nos villes. (Neurasthénie,
1735 puissance : notre ambition la plus haute échoue. La tristesse règne sur nos villes. (Neurasthénie, ce mal de l’Occident.)
1736 se règne sur nos villes. (Neurasthénie, ce mal de l’ Occident.) Et notre vertu suprême, aussi, est douloureuse : le sacrifi
1737 Et notre vertu suprême, aussi, est douloureuse : le sacrifice. Sans doute, cette « absurdité essentielle » que le Chinois
1738 . Sans doute, cette « absurdité essentielle » que le Chinois distingue au cœur de la vie occidentale apparaît mieux par la
1739 essentielle » que le Chinois distingue au cœur de la vie occidentale apparaît mieux par la comparaison de l’idéal asiatiqu
1740 au cœur de la vie occidentale apparaît mieux par la comparaison de l’idéal asiatique avec le nôtre. Mais je crois que tou
1741 occidentale apparaît mieux par la comparaison de l’ idéal asiatique avec le nôtre. Mais je crois que toute intelligence eu
1742 fait parler son Chinois de telle façon qu’ils ne le paraissent point. Et alors le relativisme angoissant qui semblait dev
1743 lle façon qu’ils ne le paraissent point. Et alors le relativisme angoissant qui semblait devoir résulter de cette confront
1744 nouit : c’est bien plutôt une unité supérieure de l’ esprit humain que nous découvrons, et qui nous permettra de juger à no
1745 er à notre tour certaines démences qui enfièvrent l’ Europe. Tandis que M. Ford expose victorieusement sa méthode pour « r
1746 prenons chaque jour une conscience plus claire de la vanité de nos buts, « capables d’agir jusqu’au sacrifice, mais pleins
1747 jusqu’au sacrifice, mais pleins de dégoût devant la volonté d’action qui tord aujourd’hui notre race… ». Et peut-être n’e
1748 laisser subsister en nous qu’un « étrange goût de la destruction et de l’anarchie, exempt de passion, divertissement suprê
1749 nous qu’un « étrange goût de la destruction et de l’ anarchie, exempt de passion, divertissement suprême de l’incertitude… 
1750 hie, exempt de passion, divertissement suprême de l’ incertitude… » aa. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] André Malra
1751 ugemont Denis de, « [Compte rendu] André Malraux, La Tentation de l’Occident  », Bibliothèque universelle et Revue de Genè
1752 , « [Compte rendu] André Malraux, La Tentation de l’ Occident  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, déce
36 1926, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Avant-propos (décembre 1926)
1753 e 1926)a b Une mauvaise humeur qui flotte dans l’ air nous proposerait de débuter par l’inévitable discours sur les diff
1754 flotte dans l’air nous proposerait de débuter par l’ inévitable discours sur les difficultés du temps, en général, et sur c
1755 poserait de débuter par l’inévitable discours sur les difficultés du temps, en général, et sur celles en particulier qu’imp
1756 général, et sur celles en particulier qu’implique la publication de notre revue. Mais nous savons, tout comme M. Coué, que
1757 oué, nous nous persuadons que tout ira très bien. Les circonstances l’exigent, d’ailleurs, plus que jamais, et plus que jam
1758 suadons que tout ira très bien. Les circonstances l’ exigent, d’ailleurs, plus que jamais, et plus que jamais, nous semble-
1759 nous semble-t-il, notre revue a sa raison d’être. La vie d’aujourd’hui, on le sait, nous oblige à nous affirmer ou à refus
1760 evue a sa raison d’être. La vie d’aujourd’hui, on le sait, nous oblige à nous affirmer ou à refuser de nous affirmer avec
1761 i a pu paraître parfois quelque peu impertinente. Le fait est que nous éprouvons irrésistiblement l’obligation d’être nous
1762 . Le fait est que nous éprouvons irrésistiblement l’ obligation d’être nous-mêmes. Et, disons-le tout de suite, c’est en ce
1763 lement l’obligation d’être nous-mêmes. Et, disons- le tout de suite, c’est en cela uniquement — être nous-mêmes — que consi
1764 mes — que consistera notre programme. Sans doute, les différences s’accusent : mais n’est-ce pas la meilleure raison pour n
1765 e, les différences s’accusent : mais n’est-ce pas la meilleure raison pour nos aînés de chercher plus patiemment encore à
1766 elle nous ne saurions aller, et qui, nous voulons l’ espérer, ne sera pas sans leur donner quelque bénéfice en retour. Cert
1767 nt d’autres, avant tant d’autres. « Amis, ce sont les jeunes qui passent… » Pas question de les saluer ni d’emboîter le pas
1768 ce sont les jeunes qui passent… » Pas question de les saluer ni d’emboîter le pas, mais seulement de retenir sa place au sp
1769 ssent… » Pas question de les saluer ni d’emboîter le pas, mais seulement de retenir sa place au spectacle qu’ils offrent e
1770 etenir sa place au spectacle qu’ils offrent et de les considérer avec sympathie. Il est bien facile de s’écrier : « Après m
1771 ie. Il est bien facile de s’écrier : « Après moi, le déluge ! », et de se détourner de ce qu’on a coutume d’appeler notre
1772 ’appeler notre « désordre ». Mais on est toujours le fils de quelqu’un… Et, peut-être, la considération du « déluge » peut
1773 est toujours le fils de quelqu’un… Et, peut-être, la considération du « déluge » peut-elle faire réfléchir utilement sur s
1774 Par contre, nous nous empressons de vous laisser le soin de juger si nous avons de quoi faire les modestes…   Être nous-m
1775 sser le soin de juger si nous avons de quoi faire les modestes…   Être nous-mêmes, avons-nous dit, c’est à la fois notre bu
1776 littéraire de plus » ; nous ne voulons pas être «  l’ expression de la jeunesse romande ». Nous sommes autre chose. (Belles-
1777 us » ; nous ne voulons pas être « l’expression de la jeunesse romande ». Nous sommes autre chose. (Belles-Lettres est touj
1778 nemment peu bellettrienne. Que sommes-nous donc ? Le plus qu’on puisse dire, c’est que vous le saurez un peu mieux quand v
1779 donc ? Le plus qu’on puisse dire, c’est que vous le saurez un peu mieux quand vous aurez lu nos huit numéros. Il faut que
1780 vergentes, mais qu’un ruban rouge et vert lie par la grâce d’une volonté sans doute divine… a. Rougemont Denis de, « Av
1781 nève-Fribourg, décembre 1926, p. 3-5. b. Signé : Le Comité central.
37 1926, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Paradoxe de la sincérité (décembre 1926)
1782 Paradoxe de la sincérité (décembre 1926)c Nous voyons un mythe prendre corps parm
1783 926)c Nous voyons un mythe prendre corps parmi les ruines de ce temps. Il fallait bien tirer quelque vertu d’une anarchi
1784 essaire — provisoirement — que satisfaisante pour l’ esprit. C’est ainsi que nous trompant nous-mêmes, sous le prétexte tou
1785 t. C’est ainsi que nous trompant nous-mêmes, sous le prétexte toujours de probité intellectuelle ou de courage moral, nous
1786 lectuelle ou de courage moral, nous avons élevé à la hauteur d’une vertu première — et qui légitime tous les dénis de mora
1787 uteur d’une vertu première — et qui légitime tous les dénis de morale à quoi nous obligeaient en réalité on sait quel dégoû
1788 et certains désirs de grabuge moins avouables, —  la sincérité, masque fier et un peu douloureux des défaitismes les plus
1789 masque fier et un peu douloureux des défaitismes les plus subtils comme des plus pures et loyales inquiétudes. Sincérité,
1790 des plus pures et loyales inquiétudes. Sincérité, le mal du siècle. Tout le monde en parle, et chacun s’en autorise pour e
1791 excuser sa petite faiblesse originale : tant qu’à la fin la notion concrète de sincérité s’évanouit en mille définitions t
1792 sa petite faiblesse originale : tant qu’à la fin la notion concrète de sincérité s’évanouit en mille définitions tendanci
1793 doctrine acceptée ; envers votre idéal ou envers les fluctuations de votre moi ? Votre sincérité est-elle consentement imm
1794 fois curieuse et désintéressée, de naturaliste de l’ âme ? Heureusement que M. Brémond ne s’est pas encore mêlé de l’affair
1795 sement que M. Brémond ne s’est pas encore mêlé de l’ affaire. Au reste, on n’a pas attendu les éclaircissements du subtil a
1796 e mêlé de l’affaire. Au reste, on n’a pas attendu les éclaircissements du subtil abbé pour n’y plus rien comprendre. ⁂ Qu’o
1797 mettre à décrire ce qu’il voit autour de lui — et l’ étonnement indigné du spectateur. Pour parler avec un peu de clairvoya
1798 déduction passablement sèche pourrait nous donner l’ illusion et peut-être certains bénéfices de cette opération idéale. En
1799 néfices de cette opération idéale. En même temps, la froideur d’une telle méthode atténuerait dans une certaine mesure — p
1800 que nécessaire — ce qu’il y a de déplaisant dans l’ effort d’un esprit pour se dégager de confusions aussi perfides et si
1801 ntures. Sincérité et spontanéité « Nos actes les plus sincères sont aussi les moins calculés », écrit Gide. D’où l’on
1802 néité « Nos actes les plus sincères sont aussi les moins calculés », écrit Gide. D’où l’on peut tirer par une sorte de p
1803 sont aussi les moins calculés », écrit Gide. D’où l’ on peut tirer par une sorte de passage à la limite que les faits justi
1804 . D’où l’on peut tirer par une sorte de passage à la limite que les faits justifient : sincérité = spontanéité. Mais la mo
1805 ut tirer par une sorte de passage à la limite que les faits justifient : sincérité = spontanéité. Mais la morale est ce qui
1806 faits justifient : sincérité = spontanéité. Mais la morale est ce qui s’oppose en premier lieu à la spontanéité. C’est po
1807 s la morale est ce qui s’oppose en premier lieu à la spontanéité. C’est pourquoi Gide écrit ailleurs : « En chaque être, l
1808 pourquoi Gide écrit ailleurs : « En chaque être, le pire instinct me paraissait le plus sincère. » La sincérité spontanée
1809 « En chaque être, le pire instinct me paraissait le plus sincère. » La sincérité spontanée, vertu moderne en qui renaît u
1810 le pire instinct me paraissait le plus sincère. » La sincérité spontanée, vertu moderne en qui renaît un mythe rousseauist
1811 usseauiste, inspire, explique un vaste domaine de la littérature contemporaine. Cette sorte-là de sincérité, on la nomme g
1812 re contemporaine. Cette sorte-là de sincérité, on la nomme gratuité. Lafcadio poussant Fleurissoire « pour rien » ne songe
1813 rien » ne songeait pas qu’il allait faire école. Le fait est que ce geste symbolique a déclenché tout un mouvement littér
1814 -là même qui aboutit naguère au surréalisme. Tous les héros de roman se sont mis à gesticuler « gratuitement ». Et les crit
1815 man se sont mis à gesticuler « gratuitement ». Et les critiques d’abord de s’indigner. Aujourd’hui, on les voit assez encha
1816 critiques d’abord de s’indigner. Aujourd’hui, on les voit assez enchantés de l’affaire : « Gratuit ! », déclarent-ils chaq
1817 gner. Aujourd’hui, on les voit assez enchantés de l’ affaire : « Gratuit ! », déclarent-ils chaque fois qu’ils ne comprenne
1818 endre. Et, ici encore, prenons garde de confondre le plan littéraire avec le plan moral. Telle action peut paraître gratui
1819 renons garde de confondre le plan littéraire avec le plan moral. Telle action peut paraître gratuite au lecteur parce qu’i
1820 tuite au lecteur parce qu’il ne sait pas tout sur le personnage. Mais quant à l’auteur, il n’y a pas de gratuité. Le geste
1821 ne sait pas tout sur le personnage. Mais quant à l’ auteur, il n’y a pas de gratuité. Le geste le plus incongru du héros n
1822 Mais quant à l’auteur, il n’y a pas de gratuité. Le geste le plus incongru du héros n’est jamais que le résultat d’un méc
1823 nt à l’auteur, il n’y a pas de gratuité. Le geste le plus incongru du héros n’est jamais que le résultat d’un mécanisme in
1824 geste le plus incongru du héros n’est jamais que le résultat d’un mécanisme inconscient, aussi révélateur du personnage q
1825 t, aussi révélateur du personnage que ses actions les mieux concertées. Rien n’est gratuit que relativement à un système re
1826 s. Il résulte de semblables considérations, dans le domaine de la morale, que le meilleur moyen de se livrer à ses déterm
1827 de semblables considérations, dans le domaine de la morale, que le meilleur moyen de se livrer à ses déterminants, c’est
1828 considérations, dans le domaine de la morale, que le meilleur moyen de se livrer à ses déterminants, c’est de mener la vie
1829 n de se livrer à ses déterminants, c’est de mener la vie gratuite que réclament les surréalistes. Le contraire de la liber
1830 nts, c’est de mener la vie gratuite que réclament les surréalistes. Le contraire de la liberté. D’autre part, on veut donne
1831 r la vie gratuite que réclament les surréalistes. Le contraire de la liberté. D’autre part, on veut donner à l’acte gratui
1832 e que réclament les surréalistes. Le contraire de la liberté. D’autre part, on veut donner à l’acte gratuit une valeur mor
1833 ire de la liberté. D’autre part, on veut donner à l’ acte gratuit une valeur morale en disant qu’il révèle ce qu’il y a de
1834 ant qu’il révèle ce qu’il y a de plus secret dans la personnalité. Ce serait un moyen de connaissance plus intégrale de so
1835 pittoresque et plus « entachée d’utilitarisme », la décision réfléchie, aussi peu gratuite que possible, d’un Julien Sore
1836 ins révélatrice du fond de l’âme humaine ? Que si l’ on s’étonne de me voir donner ici la préférence à l’acte volontaire, o
1837 aine ? Que si l’on s’étonne de me voir donner ici la préférence à l’acte volontaire, ou mieux : intéressé, tandis qu’en li
1838 on s’étonne de me voir donner ici la préférence à l’ acte volontaire, ou mieux : intéressé, tandis qu’en littérature je déf
1839  : intéressé, tandis qu’en littérature je défends l’ acte gratuit, je réponds que la littérature remplirait déjà suffisamme
1840 érature je défends l’acte gratuit, je réponds que la littérature remplirait déjà suffisamment son rôle en se bornant à nou
1841 onnaissance plus intense et plus émouvante ; mais la morale, plutôt que de nous constater, doit nous construire — selon le
1842 e de nous constater, doit nous construire — selon le mode le plus libre, le plus conscient à la fois et le plus voluptueux
1843 s constater, doit nous construire — selon le mode le plus libre, le plus conscient à la fois et le plus voluptueux. Sin
1844 it nous construire — selon le mode le plus libre, le plus conscient à la fois et le plus voluptueux. Sincérité envers s
1845 ode le plus libre, le plus conscient à la fois et le plus voluptueux. Sincérité envers soi-même Noli me tangere.
1846 vers certain but précis. Ou bien j’aurais juste le temps de le noter avant de partir. Ou bien je me mettrai à l’analyser
1847 n but précis. Ou bien j’aurais juste le temps de le noter avant de partir. Ou bien je me mettrai à l’analyser plus longue
1848 le noter avant de partir. Ou bien je me mettrai à l’ analyser plus longuement. Mais alors je le fausse, puisque je le prive
1849 ttrai à l’analyser plus longuement. Mais alors je le fausse, puisque je le prive de la puissance de se délivrer en gestes,
1850 s longuement. Mais alors je le fausse, puisque je le prive de la puissance de se délivrer en gestes, en conséquences matér
1851 . Mais alors je le fausse, puisque je le prive de la puissance de se délivrer en gestes, en conséquences matérielles. Ce n
1852 estes, en conséquences matérielles. Ce n’est plus l’ élan pur que je décris : c’est un élan freiné dans mon esprit, c’est l
1853 ris : c’est un élan freiné dans mon esprit, c’est le frein lui-même, bientôt — par un mouvement normal de l’attention — et
1854 in lui-même, bientôt — par un mouvement normal de l’ attention — et fatalement c’est à la découverte d’une faiblesse que j’
1855 ent normal de l’attention — et fatalement c’est à la découverte d’une faiblesse que j’aboutis : ce quelque chose qui m’a r
1856 e quelque chose qui m’a retenu d’accomplir ce que l’ élan appelait.   Second exemple. — J’éprouve le besoin de faire le po
1857 e l’élan appelait.   Second exemple. — J’éprouve le besoin de faire le point : à quoi en suis-je, qui suis-je ? Je revois
1858   Second exemple. — J’éprouve le besoin de faire le point : à quoi en suis-je, qui suis-je ? Je revois des actes accompli
1859 cher du soleil, des phares d’automobiles étoilent le brouillard, les visages se cachent dans des fourrures, personne ne sa
1860 des phares d’automobiles étoilent le brouillard, les visages se cachent dans des fourrures, personne ne sait la richesse d
1861 s se cachent dans des fourrures, personne ne sait la richesse de ta vie…). J’écris ces choses. Puis, dans un ancien carnet
1862 arnet de notes, je retrouve un être si différent. Les gestes et les sentiments qui se proposaient à mon souvenir ont été pa
1863 , je retrouve un être si différent. Les gestes et les sentiments qui se proposaient à mon souvenir ont été passés au crible
1864 saient à mon souvenir ont été passés au crible de la minute où je me penchais sur mon passé. Ou, pour user d’une image plu
1865 ueur de tristesse ou de sérénité qui métamorphose le paysage du passé. Ainsi de certains décors modernes : vous changez l’
1866 Ainsi de certains décors modernes : vous changez l’ éclairage, et la chaumière devient palais. C’est l’objection classique
1867 ns décors modernes : vous changez l’éclairage, et la chaumière devient palais. C’est l’objection classique et irréfutable
1868 ’éclairage, et la chaumière devient palais. C’est l’ objection classique et irréfutable à toute introspection : ce daltonis
1869 m’apprendre quelque chose, c’est bien le second. La qualité des souvenirs qu’il me livre me renseigne assez exactement, n
1870 gne assez exactement, non sur mon passé, mais sur le moment que je vis1. Il est bien clair qu’on ne saurait atteindre « la
1871 1. Il est bien clair qu’on ne saurait atteindre «  la vérité sur soi » en se servant de la méthode indiquée dans le premier
1872 atteindre « la vérité sur soi » en se servant de la méthode indiquée dans le premier exemple. C’est un cas-limite, j’en c
1873 cas-limite, j’en conviens. Pourtant, n’est-ce pas le schéma de tout un genre littéraire moderne, cette espèce de confessio
1874 moderne, cette espèce de confession romancée dont les livres de Bopp, d’Arland, de Soupault et surtout de René Crevel ont d
1875 , de Soupault et surtout de René Crevel ont donné les exemples les plus récents et significatifs ? Tous ces livres évoquent
1876 et surtout de René Crevel ont donné les exemples les plus récents et significatifs ? Tous ces livres évoquent assez précis
1877 tifs ? Tous ces livres évoquent assez précisément la forme d’un entonnoir. La vie serait le liquide tourbillonnant à l’int
1878 oquent assez précisément la forme d’un entonnoir. La vie serait le liquide tourbillonnant à l’intérieur. Un arrêt (l’auteu
1879 récisément la forme d’un entonnoir. La vie serait le liquide tourbillonnant à l’intérieur. Un arrêt (l’auteur se met à se
1880 onnoir. La vie serait le liquide tourbillonnant à l’ intérieur. Un arrêt (l’auteur se met à se regarder vivre, le personnag
1881 e liquide tourbillonnant à l’intérieur. Un arrêt ( l’ auteur se met à se regarder vivre, le personnage à douter du sens de s
1882 r. Un arrêt (l’auteur se met à se regarder vivre, le personnage à douter du sens de sa vie) et les forces centripètes l’em
1883 vre, le personnage à douter du sens de sa vie) et les forces centripètes l’emportent peu à peu, une aspiration vers le bas
1884 uter du sens de sa vie) et les forces centripètes l’ emportent peu à peu, une aspiration vers le bas produit une agitation
1885 ipètes l’emportent peu à peu, une aspiration vers le bas produit une agitation accélérée et folle, puis tout finit dans un
1886 , puis tout finit dans un râle, brusquement c’est le vide. Centre de soi, l’aspiration du néant. J’ai revu à l’envers le f
1887 n râle, brusquement c’est le vide. Centre de soi, l’ aspiration du néant. J’ai revu à l’envers le film de mon passé : ce qu
1888 Centre de soi, l’aspiration du néant. J’ai revu à l’ envers le film de mon passé : ce qui était élan devient recul, et l’év
1889 soi, l’aspiration du néant. J’ai revu à l’envers le film de mon passé : ce qui était élan devient recul, et l’évocation d
1890 e mon passé : ce qui était élan devient recul, et l’ évocation de mes désirs anciens ne me restitue qu’un dégoût. J’ai cru
1891 . En réalité, je n’assiste pas à moi-même, mais à la destruction de moi-même. Par les fissures, un instant, j’ai pu soupço
1892 moi-même, mais à la destruction de moi-même. Par les fissures, un instant, j’ai pu soupçonner des profondeurs ; mais déjà
1893 i pu soupçonner des profondeurs ; mais déjà c’est le chaos. Mon corps et moi, le livre si poignant de René Crevel, est la
1894 rs ; mais déjà c’est le chaos. Mon corps et moi, le livre si poignant de René Crevel, est la démonstration la plus cyniqu
1895 et moi, le livre si poignant de René Crevel, est la démonstration la plus cynique que je connaisse de ces ravages du sinc
1896 si poignant de René Crevel, est la démonstration la plus cynique que je connaisse de ces ravages du sincérisme. Dans la s
1897 e je connaisse de ces ravages du sincérisme. Dans la solitude qu’il s’acharne à approfondir — il était venu y chercher que
1898 rcher quelque raison de vivre, il voulait se voir le plus purement (« cette curiosité donnée comme raison d’une perpétuell
1899 mme raison d’une perpétuelle attente »), — ce que l’ auteur découvre c’est ce « merveilleux contraire » de l’élan vital qu’
1900 ur découvre c’est ce « merveilleux contraire » de l’ élan vital qu’il nomme élan mortel — générateur de l’incurable tristes
1901 lan vital qu’il nomme élan mortel — générateur de l’ incurable tristesse qui rôde dans certaine littérature d’aujourd’hui.
1902 é de faire mon autoportrait moral : je bouge tout le temps. Danger de faire mon autoportrait moral : je me compose plus la
1903 s laid que nature. Faut-il conclure avec Gide : «  L’ analyse psychologique a perdu pour moi tout intérêt du jour où je me s
1904 moi tout intérêt du jour où je me suis avisé que l’ homme éprouve ce qu’il imagine d’éprouver. » Non. Car à supposer que l
1905 ’il imagine d’éprouver. » Non. Car à supposer que l’ analyse nous crée, elle ne nous crée pas n’importe comment, mais selon
1906 u des remarques précédentes). Rivière définissait la sincérité comme « un perpétuel effort pour créer son âme telle qu’ell
1907 qu’elle est ». Il voyait dans cet effort sur soi le gage d’un enrichissement, d’une consolidation de l’individu mais avan
1908 gage d’un enrichissement, d’une consolidation de l’ individu mais avant tout un moyen de se connaître. Cependant, n’est-ce
1909 Cependant, n’est-ce pas lui-même qui ajoutait que l’ homme sincère « en vient à ne plus pouvoir même souhaiter d’être diffé
1910 oir même souhaiter d’être différent », ce qui est la négation de tout progrès moral. De la sincérité envisagée comme moyen
1911 ce qui est la négation de tout progrès moral. De la sincérité envisagée comme moyen de connaissance, le cas extrême d’un
1912 sincérité envisagée comme moyen de connaissance, le cas extrême d’un Crevel nous montre assez ce qu’il faut penser2. Il n
1913 limites assez étroites empiriquement fournies par le sens de son intérêt propre, une analyse sincère ne puisse faire décou
1914 es et ne serve parfois de contrôle efficace. Mais les bénéfices sont maigres en regard des dangers que la sincérité du noli
1915 bénéfices sont maigres en regard des dangers que la sincérité du noli me tangere fait courir, tant dans le domaine littér
1916 ncérité du noli me tangere fait courir, tant dans le domaine littéraire que dans celui de l’action. En littérature : refus
1917 tant dans le domaine littéraire que dans celui de l’ action. En littérature : refus de construire, de composer ; impuissanc
1918 sance à inventer. Car inventer, c’est se porter à l’ extrême pointe de soi, et, d’un élan, se dépasser ; c’est créer une di
1919 e dépasser ; c’est créer une différence. Pourquoi les romanciers modernes ont-ils tant de mal à créer des personnages ? C’e
1920 rsonnages ? C’est parce qu’une sorte de sincérité les retient d’imposer aux héros ce rythme volontaire par lequel un Balzac
1921 x héros ce rythme volontaire par lequel un Balzac les fait vivre. Ce serait fausser quelque chose à leurs yeux. Le cas des
1922 re. Ce serait fausser quelque chose à leurs yeux. Le cas des Faux-Monnayeurs le montre clairement. En morale : défaitisme
1923 ue chose à leurs yeux. Le cas des Faux-Monnayeurs le montre clairement. En morale : défaitisme quand il s’agit de gestes q
1924 cement. (Il faut, pour sauter, une confiance dans l’ élan qui échappe à toute analyse préalable et sans quoi le saut paraît
1925 ui échappe à toute analyse préalable et sans quoi le saut paraît impossible, absurde.) Enfin, désagrégation de la personna
1926 aît impossible, absurde.) Enfin, désagrégation de la personnalité, car l’analyse la plus savante, comme l’a fort bien dit
1927 de.) Enfin, désagrégation de la personnalité, car l’ analyse la plus savante, comme l’a fort bien dit Ramon Fernandez, « re
1928 , désagrégation de la personnalité, car l’analyse la plus savante, comme l’a fort bien dit Ramon Fernandez, « retient tous
1929 ersonnalité, car l’analyse la plus savante, comme l’ a fort bien dit Ramon Fernandez, « retient tous les éléments du moi, m
1930 l’a fort bien dit Ramon Fernandez, « retient tous les éléments du moi, moins le principe unificateur ». De quelques soph
1931 nandez, « retient tous les éléments du moi, moins le principe unificateur ». De quelques sophismes libérateurs La fo
1932 cateur ». De quelques sophismes libérateurs La fonction de l’homme est aussi bien de croire que de constater. F. Ra
1933 quelques sophismes libérateurs La fonction de l’ homme est aussi bien de croire que de constater. F. Raub. La sincér
1934 ussi bien de croire que de constater. F. Raub. La sincérité obstinée d’un Rivière n’a plus rien de spontané. En quoi es
1935 a plus rien de spontané. En quoi est-ce encore de la sincérité ? Trop sincère, pas sincère. Ou bien si l’on prétend que la
1936 sincérité ? Trop sincère, pas sincère. Ou bien si l’ on prétend que la sincérité est la recherche, puis l’acceptation de to
1937 sincère, pas sincère. Ou bien si l’on prétend que la sincérité est la recherche, puis l’acceptation de toute tendance du m
1938 ère. Ou bien si l’on prétend que la sincérité est la recherche, puis l’acceptation de toute tendance du moi, je réponds qu
1939 n prétend que la sincérité est la recherche, puis l’ acceptation de toute tendance du moi, je réponds que le mensonge est s
1940 eptation de toute tendance du moi, je réponds que le mensonge est sincère aussi, qui révèle mon besoin de mentir. Il devie
1941 ils vous aident3 — mais jamais au point d’oublier la vérité qu’on désirait qu’ils cachent pour un moment. « L’art est un m
1942 é qu’on désirait qu’ils cachent pour un moment. «  L’ art est un mensonge, mais un bon artiste n’est pas menteur », dit Max
1943 dit Max Jacob. « Être sincère, c’est avoir toutes les pensées » (Rivière). Mais on ne peut se maintenir dans cet état. Ce «
1944  mensonge », ce choix faux mais bon, nécessaire à la vie, n’est-ce pas être sincère aussi que de s’y prêter ? Or, il vous
1945 que de s’y prêter ? Or, il vous tire aussitôt de l’ indétermination violente qu’est la sincérité selon Rivière. La sincéri
1946 ire aussitôt de l’indétermination violente qu’est la sincérité selon Rivière. La sincérité véritable vous pousse à faire l
1947 ation violente qu’est la sincérité selon Rivière. La sincérité véritable vous pousse à faire le saut dans le vide qu’exige
1948 vière. La sincérité véritable vous pousse à faire le saut dans le vide qu’exige toute foi ; c’est la volonté de sincérité,
1949 cérité véritable vous pousse à faire le saut dans le vide qu’exige toute foi ; c’est la volonté de sincérité, c’est-à-dire
1950 e le saut dans le vide qu’exige toute foi ; c’est la volonté de sincérité, c’est-à-dire une sincérité tournée au vice, inv
1951 ncérité tournée au vice, invertie, qui retient de l’ oser. Petite anthologie ou que le « style » est de l’homme même
1952 ui retient de l’oser. Petite anthologie ou que le « style » est de l’homme même J’en étais à peu près à ce point de
1953 . Petite anthologie ou que le « style » est de l’ homme même J’en étais à peu près à ce point de mes notes — à ce poi
1954 ues lectures, je pris note des passages suivants ( les paraphraser serait d’une ingratitude insigne — ils marquent au reste
1955 atitude insigne — ils marquent au reste fort bien les jalons de cette recherche) : Puissiez-vous avouer moins de sincérité
1956 ropre témoin, intelligent mais immobile : ce sont les mêmes qui s’ignorent en tant que personnes. Comment se trouveraient-i
1957 eraient-ils, n’existant pas ? (François Mauriac.) La valeur morale de M. Godeau serait définie par l’aspect seul qu’il sou
1958 La valeur morale de M. Godeau serait définie par l’ aspect seul qu’il souffrirait de garder lui-même à son propre regard.
1959 ait de garder lui-même à son propre regard. Ainsi la valeur morale d’un homme équivalait-elle à l’illusion qu’il était cap
1960 nsi la valeur morale d’un homme équivalait-elle à l’ illusion qu’il était capable d’entretenir sur lui-même. (Marcel Jouhan
1961 lle qui est douée d’assez de force pour donner de la réalité à l’illusion. (Max Jacob.) Un rôle ? Oui. Mais si le personna
1962 ouée d’assez de force pour donner de la réalité à l’ illusion. (Max Jacob.) Un rôle ? Oui. Mais si le personnage est mainte
1963 à l’illusion. (Max Jacob.) Un rôle ? Oui. Mais si le personnage est maintenu jusqu’à la mort, il se confond avec l’homme m
1964 ? Oui. Mais si le personnage est maintenu jusqu’à la mort, il se confond avec l’homme même. (André Maurois.) (Quel effro
1965 est maintenu jusqu’à la mort, il se confond avec l’ homme même. (André Maurois.) (Quel effroi, ce jour de l’adolescence
1966 même. (André Maurois.) (Quel effroi, ce jour de l’ adolescence où l’on soupçonne pour la première fois que certains, peut
1967 ois.) (Quel effroi, ce jour de l’adolescence où l’ on soupçonne pour la première fois que certains, peut-être, jouent leu
1968 , jouent leur vie. Rien ne paraît plus sinistre à la sincérité presque pure de cet âge. Mais il le faut dépasser.)   Si j’
1969 e à la sincérité presque pure de cet âge. Mais il le faut dépasser.)   Si j’en crois l’intensité d’un sentiment intime, ce
1970 t âge. Mais il le faut dépasser.)   Si j’en crois l’ intensité d’un sentiment intime, ce moi idéal que j’appelle en chaque
1971 ’imaginait retenir. Dès lors, ce n’est pas lâcher la proie pour l’ombre que de tendre vers ce modèle. Dirais-je que c’est
1972 enir. Dès lors, ce n’est pas lâcher la proie pour l’ ombre que de tendre vers ce modèle. Dirais-je que c’est ma sincérité d
1973 e. Dirais-je que c’est ma sincérité d’y aller par les moyens les plus efficaces ? Mais on nommera cela de l’hypocrisie. Soi
1974 e que c’est ma sincérité d’y aller par les moyens les plus efficaces ? Mais on nommera cela de l’hypocrisie. Soit, j’accept
1975 yens les plus efficaces ? Mais on nommera cela de l’ hypocrisie. Soit, j’accepte. Et aussitôt j’annonce : Éloge de l’hyp
1976 t, j’accepte. Et aussitôt j’annonce : Éloge de l’ hypocrisie Non, non !… Debout dans l’ère successive ! Brisez, mon c
1977 Éloge de l’hypocrisie Non, non !… Debout dans l’ ère successive ! Brisez, mon corps, brisez cette forme pensive ! .....
1978 ................................................. Le vent se lève, il faut tenter de vivre. Paul Valéry. Certes, du sein
1979 is bien quelques voiles à mon dégoût d’un moi que la vie me montrait si désespérément vrai, tyrannique, insuffisant. Mais
1980 , un peu sceptique, quand mon esprit partait dans le rêve d’un idéal de fortune, idole naïve de ma jeune angoisse… Je t’ai
1981 alors qu’une symphonie de joies émanait de toute la vie : chaque chose proposait une ferveur nouvelle, et chaque être un
1982 en pût être privée. Alors, acquiesçant vivement à l’ invite que je soupçonnais la plus riche d’inconnu, je m’élançais sur l
1983 cquiesçant vivement à l’invite que je soupçonnais la plus riche d’inconnu, je m’élançais sur la voie qu’elle m’ouvrait, av
1984 onnais la plus riche d’inconnu, je m’élançais sur la voie qu’elle m’ouvrait, avec tant de rires amis, vers tout ce que mom
1985 je choisissais de laisser — et des baisers à tous les vents — qu’il eût été loisible d’attribuer comme objet à ma jubilatio
1986 st ainsi que fidèle à soi-même au plus profond de l’ être, on entretient comme une arrière-pensée sagace et obstinée l’assu
1987 tient comme une arrière-pensée sagace et obstinée l’ assurance d’une continuité entre ses actions et ses désirs, un quant-à
1988 ui ne gêne aucun geste, mais incline discrètement les décisions et les rend complices d’un dessein logique, peut-être loint
1989 geste, mais incline discrètement les décisions et les rend complices d’un dessein logique, peut-être lointain, en quoi cons
1990 ein logique, peut-être lointain, en quoi consiste l’ unité la plus réelle de l’individu — en dehors du corps. Et ce ne sont
1991 que, peut-être lointain, en quoi consiste l’unité la plus réelle de l’individu — en dehors du corps. Et ce ne sont point l
1992 ntain, en quoi consiste l’unité la plus réelle de l’ individu — en dehors du corps. Et ce ne sont point là jeux d’idées et
1993 dées et jongleries verbales. Regards au-dessus de l’ amour ! Voir l’heure à la pendule pendant l’étreinte d’un adieu et cal
1994 ies verbales. Regards au-dessus de l’amour ! Voir l’ heure à la pendule pendant l’étreinte d’un adieu et calculer rapidemen
1995 es. Regards au-dessus de l’amour ! Voir l’heure à la pendule pendant l’étreinte d’un adieu et calculer rapidement le retou
1996 us de l’amour ! Voir l’heure à la pendule pendant l’ étreinte d’un adieu et calculer rapidement le retour à une fidélité pl
1997 dant l’étreinte d’un adieu et calculer rapidement le retour à une fidélité plus profonde. Fidélité à sa loi individuelle,
1998 e honnêteté peut-être plus réelle que l’autre. Et l’ on conçoit que ce constant et secret assujettissement au moi idéal exi
1999 re que cette agilité offensive qu’on appelle dans la vie publique arrivisme, et séduction dans les salons. Constater une
2000 dans la vie publique arrivisme, et séduction dans les salons. Constater une faiblesse, c’est toujours un peu en prendre so
2001 esse, c’est toujours un peu en prendre son parti. La sincérité crée en nous un fait accompli. J’appelle hypocrisie envers
2002 ais ce que de toute mon âme je veux être !… 1. La véritable description de l’élan supposé dans le premier exemple, ce s
2003 je veux être !… 1. La véritable description de l’ élan supposé dans le premier exemple, ce serait le récit des gestes qu
2004 l’élan supposé dans le premier exemple, ce serait le récit des gestes qu’il m’aurait fait commettre. Manifester est plus s
2005 st plus sincère qu’analyser. 2. D’ailleurs toute la psychologie moderne souligne la quasi-impossibilité de traduire un dy
2006 D’ailleurs toute la psychologie moderne souligne la quasi-impossibilité de traduire un dynamisme directement dans notre l
2007 t certes quand il s’agit de parole ou d’écriture, l’ affirmation prouve moins une certitude qu’un désir de certitude né de
2008 né Crevel) c. Rougemont Denis de, « Paradoxe de la sincérité », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribo
38 1927, Articles divers (1924–1930). Dés ou la clef des champs (1927)
2009 Dés ou la clef des champs (1927)l « On sent l’absurdité d’un semblable syst
2010 Dés ou la clef des champs (1927)l « On sent l’ absurdité d’un semblable système. » Musset. Une rose et un journal o
2011 e. » Musset. Une rose et un journal oubliés sur le marbre vulgaire d’une table de café. Je venais de m’asseoir et de com
2012 ’habitude, un peu après six heures. J’étais seul. Le café est un lieu anonyme bien plus propice au rêve que ma chambre où
2013 ropice au rêve que ma chambre où m’attendent tous les soirs quand je rentre du bureau, les gages insupportablement familier
2014 tendent tous les soirs quand je rentre du bureau, les gages insupportablement familiers d’une vie honnête de type courant.
2015 une vie honnête de type courant. Pour dix sous et le prétexte d’un apéro, on entre ici dans le jardin des songeries les pl
2016 sous et le prétexte d’un apéro, on entre ici dans le jardin des songeries les plus étranges qu’appelle la musique. Je me g
2017 apéro, on entre ici dans le jardin des songeries les plus étranges qu’appelle la musique. Je me gardai donc d’ouvrir le jo
2018 jardin des songeries les plus étranges qu’appelle la musique. Je me gardai donc d’ouvrir le journal. Les Petites nouvelles
2019 qu’appelle la musique. Je me gardai donc d’ouvrir le journal. Les Petites nouvelles ont un pouvoir tyrannique sur mon espr
2020 a musique. Je me gardai donc d’ouvrir le journal. Les Petites nouvelles ont un pouvoir tyrannique sur mon esprit. Non que c
2021 ur mon esprit. Non que cela m’intéresse au fond : les faits-divers, rien de moins divers. Mais je suis pris dans l’absurde
2022 ers, rien de moins divers. Mais je suis pris dans l’ absurde réseau des lignes, et cette mécanique me restitue chaque fois
2023 tte rose oubliée me gênait : perdre une rose pour le plaisir ! (Et je ne pensais même pas, alors : une si belle rose.) Le
2024 ne pensais même pas, alors : une si belle rose.) Le tambour livra un homme élégant et tragique, qui se tint un moment imm
2025 igure aux joues mates, aux yeux clairs. Il déplia le journal et se mit à lire les pages d’annonces. On m’apporta une lique
2026 eux clairs. Il déplia le journal et se mit à lire les pages d’annonces. On m’apporta une liqueur. Et quand j’eus fini de bo
2027 es pensées plus rapides s’en allèrent un peu vers l’ avenir et j’osai quelques rêves. C’était, je m’en souviens, une petite
2028 souviens, une petite automobile qui roulait dans la banlieue printanière ; des soupers d’amis dans notre modeste salle à
2029 er ; des jaquettes de couleur pour ma femme… Mais l’ homme avait posé son journal. Soudain, portant la main à son gilet, il
2030 l’homme avait posé son journal. Soudain, portant la main à son gilet, il en retira trois dés qu’il jeta sur la table. Les
2031 son gilet, il en retira trois dés qu’il jeta sur la table. Les yeux brillants, il compta. Une indécision parut sur ses tr
2032 , il en retira trois dés qu’il jeta sur la table. Les yeux brillants, il compta. Une indécision parut sur ses traits. Puis
2033 e indécision parut sur ses traits. Puis il reprit les dés brusquement, et me fixant avec un léger sourire : — Jouez ! ordon
2034 t avec un léger sourire : — Jouez ! ordonna-t-il. La surprise vainquit ma timidité, je pris les dés et les jetai sans hési
2035 a-t-il. La surprise vainquit ma timidité, je pris les dés et les jetai sans hésiter. Il compta de nouveau, puis avec une lé
2036 surprise vainquit ma timidité, je pris les dés et les jetai sans hésiter. Il compta de nouveau, puis avec une légère exalta
2037 l saisit son journal. Il en parcourait rapidement les pages, la proie d’une agitation visible. Bientôt il m’offrit de jouer
2038 n journal. Il en parcourait rapidement les pages, la proie d’une agitation visible. Bientôt il m’offrit de jouer un moment
2039 nsommations. Je gagnai. Il demanda des portos. Je les gagnai et je les bus. D’autres encore. Ma tête commençait à osciller
2040 agnai. Il demanda des portos. Je les gagnai et je les bus. D’autres encore. Ma tête commençait à osciller vaguement. Les co
2041 encore. Ma tête commençait à osciller vaguement. Les couleurs du bar me remplissaient d’une joie inconnue. Et je me refusa
2042 uestions qu’en moi-même posait ma raison effarée. L’ étranger s’animait aussi : une fièvre faisait s’épanouir sur son visag
2043 e ne sais quel plaisir cruel. C’était un jeu très simple où l’esprit libre de calculs se tend ardemment vers la conclusion d’u
2044 quel plaisir cruel. C’était un jeu très simple où l’ esprit libre de calculs se tend ardemment vers la conclusion d’un hasa
2045 l’esprit libre de calculs se tend ardemment vers la conclusion d’un hasard qui opère au commandement de la main. Ce soir-
2046 nclusion d’un hasard qui opère au commandement de la main. Ce soir-là, une confiance me possédait, telle que je savais trè
2047 ais très clairement que je gagnerais à tout coup. L’ étranger se mit à discourir. Et dans mon ivresse, ses paroles peignaie
2048 je bouscule tous tes calculs, ha ! tu te disais : le voilà riche, le voilà classé, le voilà prêt à faire des bassesses pou
2049 tes calculs, ha ! tu te disais : le voilà riche, le voilà classé, le voilà prêt à faire des bassesses pour durer, et tu t
2050 ! tu te disais : le voilà riche, le voilà classé, le voilà prêt à faire des bassesses pour durer, et tu te réjouissais, pa
2051 omplètement démodées et d’intrigues usées jusqu’à la corde, jusqu’à la corde pour les pendre, ha ha ha ! Tu pensais que j’
2052 es et d’intrigues usées jusqu’à la corde, jusqu’à la corde pour les pendre, ha ha ha ! Tu pensais que j’allais me cramponn
2053 ues usées jusqu’à la corde, jusqu’à la corde pour les pendre, ha ha ha ! Tu pensais que j’allais me cramponner à cette espè
2054 er à cette espèce de bonheur qu’ils croient lié à la possession, et que j’allais vivre aussi sur le dogme l’argent-fait-le
2055 à la possession, et que j’allais vivre aussi sur le dogme l’argent-fait-le-bonheur. En somme, tu croyais que j’allais adh
2056 session, et que j’allais vivre aussi sur le dogme l’ argent-fait-le-bonheur. En somme, tu croyais que j’allais adhérer à l’
2057 heur. En somme, tu croyais que j’allais adhérer à l’ idéologie socialiste, gros farceur, va. Quand je songe à tous ces gens
2058 d je songe à tous ces gens qui perdent leur vie à la gagner9, et leur façon inexplicable de lier des valeurs morales aux c
2059  » comme ils disent dans leurs manuels scolaires. Les voler, pour leur apprendre. Et leur manie aussi de situer le paradis
2060 our leur apprendre. Et leur manie aussi de situer le paradis dans la classe d’impôts immédiatement supérieure à la leur. I
2061 re. Et leur manie aussi de situer le paradis dans la classe d’impôts immédiatement supérieure à la leur. Ils voudraient qu
2062 ans la classe d’impôts immédiatement supérieure à la leur. Ils voudraient que leur vie garantît un 5 % régulier de plaisir
2063 ertige sans prix du lâchez-tout ! Ils ont inventé les caisses d’épargne, monuments d’une bassesse morale inconcevable, temp
2064 onheur que celui qu’ils ont reçu de papa-maman et l’ Habitude, leur marraine aux dents jaunes. Ah ! perdre, perdre ; et c’e
2065 stinée dans l’autre, de douleurs en ivresses avec la même joie, mon cheval fou, mon beau Désir s’ébroue et part sitôt que
2066 bousse, ils n’y comprendront jamais rien, écoutez- les , comme ils me jugent et leurs cris indignés qui couvrent une angoisse
2067 leurs cris indignés qui couvrent une angoisse. Ça les dérange terriblement, sauf un ou deux qui s’imaginent gagner à mes dé
2068 in ce brave homme qui est en train de me soutirer les quelque billets de mille dont je venais de régler le sort, puisque de
2069 quelque billets de mille dont je venais de régler le sort, puisque demain dès l’aube, j’irai tenter la misère aux yeux las
2070 t je venais de régler le sort, puisque demain dès l’ aube, j’irai tenter la misère aux yeux las pleins de rêves, la misère
2071 le sort, puisque demain dès l’aube, j’irai tenter la misère aux yeux las pleins de rêves, la misère qui fait des soirs si
2072 ai tenter la misère aux yeux las pleins de rêves, la misère qui fait des soirs si doux aux amants quand ils n’ont plus que
2073 ls n’ont plus que des baisers au goût d’adieu, et l’ avenir où se mêlent incertaines, une tendresse éperdue et la mort. » I
2074 ù se mêlent incertaines, une tendresse éperdue et la mort. » Il ferma les yeux sur des visions. Les lustres doraient un br
2075 nes, une tendresse éperdue et la mort. » Il ferma les yeux sur des visions. Les lustres doraient un brouillard de fumée, et
2076 et la mort. » Il ferma les yeux sur des visions. Les lustres doraient un brouillard de fumée, et la musique noyait mes pen
2077 . Les lustres doraient un brouillard de fumée, et la musique noyait mes pensées. Je vis qu’une femme était assise à notre
2078 , en robe rouge, et très fardée. Elle jouait avec la rose. Les dés roulèrent, pour un dernier enjeu. Alors la femme lança
2079 rouge, et très fardée. Elle jouait avec la rose. Les dés roulèrent, pour un dernier enjeu. Alors la femme lança sur la tab
2080 . Les dés roulèrent, pour un dernier enjeu. Alors la femme lança sur la table cette rose qui s’effeuilla sur les dés, et p
2081 , pour un dernier enjeu. Alors la femme lança sur la table cette rose qui s’effeuilla sur les dés, et partit d’un long rir
2082 lança sur la table cette rose qui s’effeuilla sur les dés, et partit d’un long rire. Elle me regardait et l’étranger aussi
2083 s, et partit d’un long rire. Elle me regardait et l’ étranger aussi se mit à me regarder bizarrement et j’étais possédé de
2084 joies et de peurs. Il fallut se lever, traverser le café dans la musique et la rumeur des clients. Dehors les réclames lu
2085 peurs. Il fallut se lever, traverser le café dans la musique et la rumeur des clients. Dehors les réclames lumineuses dial
2086 ut se lever, traverser le café dans la musique et la rumeur des clients. Dehors les réclames lumineuses dialoguaient folle
2087 dans la musique et la rumeur des clients. Dehors les réclames lumineuses dialoguaient follement au-dessus des rues parcour
2088 main je n’avais plus un sou). Je n’ai jamais revu l’ étranger. Quelquefois je songe à ses paroles — ou peut-être n’étaient-
2089 inquiétude, parce que je ne suis plus tout à fait le même. Puis elle me laisse, parce que le lait va monter. Alors, dans m
2090 ut à fait le même. Puis elle me laisse, parce que le lait va monter. Alors, dans ma chambre, avant d’aller souper, je m’ab
2091 re, avant d’aller souper, je m’abats sur mon lit, les cheveux dans les mains. Et je voudrais pouvoir pleurer sur ma lâcheté
2092 souper, je m’abats sur mon lit, les cheveux dans les mains. Et je voudrais pouvoir pleurer sur ma lâcheté. Et je t’apostro
2093 haïr… 9. Calembour sur une idée juste. (Note de l’ éd.) l. Rougemont Denis de, « Dés ou la clef des champs », Neuchâtel
2094 (Note de l’éd.) l. Rougemont Denis de, « Dés ou la clef des champs », Neuchâtel 1928 : beaux-arts, arts appliqués, archi
39 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Louis Aragon, Le Paysan de Paris (janvier 1927)
2095 Louis Aragon, Le Paysan de Paris (janvier 1927)ab « Je n’admets pas qu’on reprenne
2096 n’admets pas qu’on reprenne mes paroles, qu’on me les oppose. Ce ne sont pas les termes d’un traité de paix. Entre moi et v
2097 mes paroles, qu’on me les oppose. Ce ne sont pas les termes d’un traité de paix. Entre moi et vous, c’est la guerre. » Voi
2098 mes d’un traité de paix. Entre moi et vous, c’est la guerre. » Voilà pour les critiques, « punaises glabres et poux barbus
2099 Entre moi et vous, c’est la guerre. » Voilà pour les critiques, « punaises glabres et poux barbus », qui perdraient leur t
2100 ux barbus », qui perdraient leur temps à recenser les incohérences pittoresques de ce petit livre. Quant à ceux que certain
2101 une kyrielle d’injures qui ne font pas honneur à l’ imagination d’autres fois si prestigieuse du poète : « Ils m’ont suivi
2102 ois si prestigieuse du poète : « Ils m’ont suivi, les imbéciles », ricane-t-il ; et sans rire : « À mort ceux qui paraphras
2103 ce que je dis ». Il y a chez Aragon une folie de la persécution, qui se cherche partout des prétextes, et une passion far
2104 rtout des prétextes, et une passion farouche pour la liberté, qui font de cet ombrageux personnage une manière de Rousseau
2105 tense désespoir, on songe au Frank de La Coupe et les Lèvres, à qui ses compagnons criaient : « Te fais-tu le bouffon de ta
2106 res, à qui ses compagnons criaient : « Te fais-tu le bouffon de ta propre détresse ? » Tant d’insistance dans le mauvais g
2107 de ta propre détresse ? » Tant d’insistance dans le mauvais goût ne m’empêchera pas de le dire, Aragon possède le tempéra
2108 stance dans le mauvais goût ne m’empêchera pas de le dire, Aragon possède le tempérament le plus hardi et le plus original
2109 oût ne m’empêchera pas de le dire, Aragon possède le tempérament le plus hardi et le plus original de la jeune littérature
2110 era pas de le dire, Aragon possède le tempérament le plus hardi et le plus original de la jeune littérature française. Il
2111 e, Aragon possède le tempérament le plus hardi et le plus original de la jeune littérature française. Il le proclame « J’a
2112 tempérament le plus hardi et le plus original de la jeune littérature française. Il le proclame « J’appartiens à la grand
2113 us original de la jeune littérature française. Il le proclame « J’appartiens à la grande race des torrents ». Génie inégal
2114 rature française. Il le proclame « J’appartiens à la grande race des torrents ». Génie inégal s’il en fut, voici parmi tro
2115 littérature pour trouver semblable domination de la langue. Et parmi les modernes, il bat tous les records de l’image, ce
2116 ouver semblable domination de la langue. Et parmi les modernes, il bat tous les records de l’image, ce qui nous vaut avec d
2117 de la langue. Et parmi les modernes, il bat tous les records de l’image, ce qui nous vaut avec des bizarreries fatigantes
2118 Et parmi les modernes, il bat tous les records de l’ image, ce qui nous vaut avec des bizarreries fatigantes et quelques so
2119 ne se croie pas tenu de justifier ses visions par le moyen d’une métaphysique aussi prétentieuse qu’incertaine. Son affair
2120 si prétentieuse qu’incertaine. Son affaire, c’est l’ amour, et certain désespoir vaste et profond comme l’époque. « Voulez-
2121 mour, et certain désespoir vaste et profond comme l’ époque. « Voulez-vous des douleurs, la mort ou des chansons ? » On a l
2122 ofond comme l’époque. « Voulez-vous des douleurs, la mort ou des chansons ? » On a l’hallucination du décor des capitales,
2123 us des douleurs, la mort ou des chansons ? » On a l’ hallucination du décor des capitales, créatrice d’un merveilleux de ch
2124 instant, d’une véritable « mythologie moderne ». Le Paysan de Paris est une suite de promenades dont la composition n’est
2125 Paysan de Paris est une suite de promenades dont la composition n’est pas sans rappeler celle des Nuits d’octobre de Nerv
2126 es Nuits d’octobre de Nerval ; forme qui permet à l’ auteur de divaguer de la philosophie au lyrisme le plus échevelé en pa
2127 rval ; forme qui permet à l’auteur de divaguer de la philosophie au lyrisme le plus échevelé en passant par la description
2128 l’auteur de divaguer de la philosophie au lyrisme le plus échevelé en passant par la description réaliste ou imaginée d’un
2129 sophie au lyrisme le plus échevelé en passant par la description réaliste ou imaginée d’une boîte de nuit, d’une devanture
2130 , d’une devanture, d’un parc public. Ce n’est pas le meilleur livre de l’auteur d’Anicet. C’est pourtant un des plus signi
2131 un parc public. Ce n’est pas le meilleur livre de l’ auteur d’Anicet. C’est pourtant un des plus significatifs du romantism
2132 ougemont Denis de, « [Compte rendu] Louis Aragon, Le Paysan de Paris  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genè
40 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Billets aigres-doux (janvier 1927)
2133 riet V. A.-W. Poste aux amours perdues Sur le mont gris pâlissants Des bouquets de vagues brumes. Insulter ta beaut
2134 sses, ô col roide, En souffrance mes baisers. L’ amour est un alibi Nos lèvres sitôt que jointes, Ô dernier mensong
2135 vers d’autres rêves Où sourient quels anges fous. L’ horaire dicte un adieu, La mode qu’on rie des pleurs, Lors je baise vo
2136 rient quels anges fous. L’horaire dicte un adieu, La mode qu’on rie des pleurs, Lors je baise votre main Comme on signe d’
41 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Conte métaphysique : L’individu atteint de strabisme (janvier 1927)
2137 Conte métaphysique : L’ individu atteint de strabisme (janvier 1927)f g Comme le démiurge v
2138 u atteint de strabisme (janvier 1927)f g Comme le démiurge venait de peser sur le commutateur des étoiles… l’une, se dé
2139 1927)f g Comme le démiurge venait de peser sur le commutateur des étoiles… l’une, se décrochant sans plus d’hésitation,
2140 sans plus d’hésitation, se mit à pérégriner dans les régions de chasse gardée du ci-devant soleil. C’est là qu’Urbain, pre
2141 par qui ? elle était anticléricale, on ne saurait le taire, — Urbain dormait. L’étoile, jeune fille, roulait gentiment sur
2142 ricale, on ne saurait le taire, — Urbain dormait. L’ étoile, jeune fille, roulait gentiment sur ses pointes, tout scintille
2143 heure, elle éclaira d’une rose caresse lumineuse la chevelure rouge d’Urbain, et son nez, lequel, par ses dimensions rema
2144 dimensions remarquablement exagérées, lui valait le surnom de Bin-Bin. Urbain ouvrit les yeux et ne vit rien. On rappelle
2145 s, lui valait le surnom de Bin-Bin. Urbain ouvrit les yeux et ne vit rien. On rappelle que les étoiles s’étaient décrochées
2146 n ouvrit les yeux et ne vit rien. On rappelle que les étoiles s’étaient décrochées de leur poste dans l’éternité. « Éternit
2147 s étoiles s’étaient décrochées de leur poste dans l’ éternité. « Éternité désaffectée, c’est bien dommage, dit-il en s’étir
2148 fectée, c’est bien dommage, dit-il en s’étirant ; le printemps désormais rendra le ciel plus pâle, et nous irons chercher
2149 t-il en s’étirant ; le printemps désormais rendra le ciel plus pâle, et nous irons chercher dans le souvenir les vent-coul
2150 ra le ciel plus pâle, et nous irons chercher dans le souvenir les vent-coulis de la mort. Garçon, un café, un ! » Mais l’é
2151 lus pâle, et nous irons chercher dans le souvenir les vent-coulis de la mort. Garçon, un café, un ! » Mais l’étoile chantai
2152 rons chercher dans le souvenir les vent-coulis de la mort. Garçon, un café, un ! » Mais l’étoile chantait dans l’axe de sa
2153 t-coulis de la mort. Garçon, un café, un ! » Mais l’ étoile chantait dans l’axe de sa vie normale et s’approchait en faisan
2154 rçon, un café, un ! » Mais l’étoile chantait dans l’ axe de sa vie normale et s’approchait en faisant la roue — celle à qui
2155 ’axe de sa vie normale et s’approchait en faisant la roue — celle à qui sourit la Fortune. Urbain, fort d’une hérédité jud
2156 pprochait en faisant la roue — celle à qui sourit la Fortune. Urbain, fort d’une hérédité judiciaire et française, dédaign
2157 judiciaire et française, dédaigna des avances que la perte de son sens de l’éternel rendait pourtant considérables, au sen
2158 dédaigna des avances que la perte de son sens de l’ éternel rendait pourtant considérables, au sens étymologique du terme.
2159 es, au sens étymologique du terme. Il loucha vers le néant, retourna ses poches, ôta ses gants qu’il jeta, puis, après un
2160 u’il jeta, puis, après un grand coup de pied dans le vide symbolique des systèmes, sortit, c’est-à-dire qu’il fit un pas d
2161 e qu’il fit un pas dans une direction quelconque. L’ étoile pleurait, sentimentale. f. Rougemont Denis de, « L’individu
2162 eurait, sentimentale. f. Rougemont Denis de, «  L’ individu atteint de strabisme. Conte métaphysique », Revue de Belles-L
42 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Dans le Style (janvier 1927)
2163 Dans le Style (janvier 1927)h Nous recevons d’un bellettrien facétieux cet
2164 pour Paul Morand, auteur de « Lewis et Irène » L’ auteur de maint roman de caractère gras quitte Charing-Cross, songeant
2165 au cerveau du poète qui meurt de sommeil naturel. Le tunnel sous la Manche escamoté, le train dépose des complets rigides
2166 oète qui meurt de sommeil naturel. Le tunnel sous la Manche escamoté, le train dépose des complets rigides contenant des A
2167 mmeil naturel. Le tunnel sous la Manche escamoté, le train dépose des complets rigides contenant des Anglais fragiles. L’a
2168 complets rigides contenant des Anglais fragiles. L’ aube tire un écran de pluies sur le paysage commercial. Terminus : Mor
2169 lais fragiles. L’aube tire un écran de pluies sur le paysage commercial. Terminus : Morand, s’éveillant en français, termi
2170 s, termine : … Irène. (Grasset, 1924… … y compris la Suède et la Norvège.) On lit dans les Nouvelles littéraires , du 8
2171 … Irène. (Grasset, 1924… … y compris la Suède et la Norvège.) On lit dans les Nouvelles littéraires , du 8 janvier 192
2172 y compris la Suède et la Norvège.) On lit dans les Nouvelles littéraires , du 8 janvier 1927, l’information suivante :
2173 s les Nouvelles littéraires , du 8 janvier 1927, l’ information suivante : Mardi dernier a été célébré en l’église grecque
2174 rmation suivante : Mardi dernier a été célébré en l’ église grecque de la rue Georges Bizet le mariage de M. Paul Morand av
2175 ardi dernier a été célébré en l’église grecque de la rue Georges Bizet le mariage de M. Paul Morand avec la princesse Hélè
2176 lébré en l’église grecque de la rue Georges Bizet le mariage de M. Paul Morand avec la princesse Hélène-C. Soutzo. Les tém
2177 e Georges Bizet le mariage de M. Paul Morand avec la princesse Hélène-C. Soutzo. Les témoins étaient pour le marié : M. Ph
2178 . Paul Morand avec la princesse Hélène-C. Soutzo. Les témoins étaient pour le marié : M. Philippe Berthelot, secrétaire gén
2179 ncesse Hélène-C. Soutzo. Les témoins étaient pour le marié : M. Philippe Berthelot, secrétaire général du ministre des Aff
2180 ral du ministre des Affaires étrangères ; et pour la mariée : Son Excellence M. Diamanty, ministre de Roumanie à Paris. C’
2181 stre de Roumanie à Paris. C’est encore mieux dans le style. h. Rougemont Denis de, « Dans le style », Revue de Belles-L
2182 x dans le style. h. Rougemont Denis de, « Dans le style », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg,
43 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Bernard Barbey, La Maladère (février 1927)
2183 Bernard Barbey, La Maladère (février 1927)ac « Quel admirable sujet de roman, écrit G
2184 out de quinze ans, de vingt ans de vie conjugale, la décristallisation progressive et réciproque des conjoints. » On sait
2185 èvre d’imagination qui orne de beautés illusoires l’ objet de l’amour. Mais les jeunes gens de ce temps ne cultivent point
2186 ination qui orne de beautés illusoires l’objet de l’ amour. Mais les jeunes gens de ce temps ne cultivent point cette fièvr
2187 ne de beautés illusoires l’objet de l’amour. Mais les jeunes gens de ce temps ne cultivent point cette fièvre. Et comme la
2188 e temps ne cultivent point cette fièvre. Et comme la morale ne sait plus leur imposer de feindre encore ce que le cœur ne
2189 e sait plus leur imposer de feindre encore ce que le cœur ne ressent plus, il suffit de quelques mois aux jeunes époux de
2190 s, il suffit de quelques mois aux jeunes époux de la Maladère pour se déprendre de leurs rêves. Un malentendu grandit entr
2191 x dans leur isolement, inexplicable et mal avoué. L’ on songe à une fatalité intérieure qui les ferait se meurtrir l’un l’a
2192 l avoué. L’on songe à une fatalité intérieure qui les ferait se meurtrir l’un l’autre. Pourtant, jusqu’au bout, il semble q
2193 u’un mot, un geste décisif, ou certaine amitié de la saison suffirait à dissiper le charme perfide qui les tourmente. Mais
2194 certaine amitié de la saison suffirait à dissiper le charme perfide qui les tourmente. Mais il faudrait d’abord qu’ils se
2195 saison suffirait à dissiper le charme perfide qui les tourmente. Mais il faudrait d’abord qu’ils se soient délivrés d’eux-m
2196 , soient possibles. C’est d’Armande surtout qu’on les attendrait, plus franche d’allure. On ne sait ce qui la retient : son
2197 endrait, plus franche d’allure. On ne sait ce qui la retient : son amour ? son manque d’amour ? Pour Jacques, il souffre d
2198 able adolescence, d’un défaitisme sentimental qui l’ empêtre de réticences, et le fait jouer bien maladroitement son rôle d
2199 tisme sentimental qui l’empêtre de réticences, et le fait jouer bien maladroitement son rôle d’homme… « Captif de sa propr
2200 e trahit Barbey : son art est justement de voiler les intentions du récit et de les exprimer seulement par un geste, une nu
2201 justement de voiler les intentions du récit et de les exprimer seulement par un geste, une nuance du paysage, une image qu’
2202 sentiment. Ce n’est qu’à force de discrétion dans les moyens qu’il parvient à une certaine puissance de l’effet, aux derniè
2203 moyens qu’il parvient à une certaine puissance de l’ effet, aux dernières pages. Il règne dans la Maladère une étrange harm
2204 ce de l’effet, aux dernières pages. Il règne dans la Maladère une étrange harmonie entre le climat des sentiments et celui
2205 règne dans la Maladère une étrange harmonie entre le climat des sentiments et celui des campagnes désolées où ils se dével
2206 ristes et sans violence, autour de ces êtres dont la détresse est d’autant plus cruelle qu’elle est contenue sous des deho
2207 ntenue sous des dehors trop polis. Une fois fermé le livre de Barbey, on oublie la justesse de son analyse pour n’évoquer
2208 lis. Une fois fermé le livre de Barbey, on oublie la justesse de son analyse pour n’évoquer plus que des visions où se con
2209 our n’évoquer plus que des visions où se condense le sentiment du récit. Dans le Cœur gros, c’était un parc avant l’orage,
2210 isions où se condense le sentiment du récit. Dans le Cœur gros, c’était un parc avant l’orage, le rose sombre d’une joue b
2211 u récit. Dans le Cœur gros, c’était un parc avant l’ orage, le rose sombre d’une joue brûlante et fraîche dans le vent. Et
2212 Dans le Cœur gros, c’était un parc avant l’orage, le rose sombre d’une joue brûlante et fraîche dans le vent. Et dans la M
2213 e rose sombre d’une joue brûlante et fraîche dans le vent. Et dans la Maladère, un arbre coupé découvrant le manoir perdu,
2214 ne joue brûlante et fraîche dans le vent. Et dans la Maladère, un arbre coupé découvrant le manoir perdu, des fumées sur u
2215 t. Et dans la Maladère, un arbre coupé découvrant le manoir perdu, des fumées sur un paysage d’hiver et soudain sous la lu
2216 des fumées sur un paysage d’hiver et soudain sous la lueur d’un incendie, deux visages tordus de passion. Cette fin est ad
2217 tordus de passion. Cette fin est admirable, dont la brutalité si longtemps désirée délivre Jacques d’un passé obsédant, d
2218 gemont Denis de, « [Compte rendu] Bernard Barbey, La Maladère  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, fév
44 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Guy de Pourtalès, Montclar (février 1927)
2219 Guy de Pourtalès, Montclar (février 1927)ad L’ on aime que, pour certains hommes, écrire ne soit que le recensement p
2220 ime que, pour certains hommes, écrire ne soit que le recensement passionné de leur vie, ou l’aveu déguisé d’une insatisfac
2221 soit que le recensement passionné de leur vie, ou l’ aveu déguisé d’une insatisfaction qu’elle leur laisse. Montclar est l’
2222 insatisfaction qu’elle leur laisse. Montclar est l’ auteur de vers de jeunesse auxquels il ne tient guère, et l’on compren
2223 e vers de jeunesse auxquels il ne tient guère, et l’ on comprend que ce journal bientôt les rejoindra dans l’armoire aux so
2224 nt guère, et l’on comprend que ce journal bientôt les rejoindra dans l’armoire aux souvenirs. Cette façon de ne pas y tenir
2225 omprend que ce journal bientôt les rejoindra dans l’ armoire aux souvenirs. Cette façon de ne pas y tenir, qu’il manifeste
2226 oute occasion de sa vie est peut-être ce qui nous le rend le plus sympathique. « Officiellement comblé, et par dedans… com
2227 asion de sa vie est peut-être ce qui nous le rend le plus sympathique. « Officiellement comblé, et par dedans… comment bie
2228 ui, comme pour Barnabooth, il s’agit de « déjouer le complot de la commodité ». Mais plus voluptueux que philosophe, c’est
2229 Barnabooth, il s’agit de « déjouer le complot de la commodité ». Mais plus voluptueux que philosophe, c’est à l’amour qu’
2230 é ». Mais plus voluptueux que philosophe, c’est à l’ amour qu’il ira demander la souffrance indispensable au perfectionneme
2231 ue philosophe, c’est à l’amour qu’il ira demander la souffrance indispensable au perfectionnement de son âme. Et qu’import
2232 au perfectionnement de son âme. Et qu’importe si les Allemands qui, fréquente sontae, pour notre plaisir, un peu plus vien
2233 rle de choses d’art comme on fait dans Proust, si les passions qu’il nous peint sont ici tant soit peu russes, et là, gidie
2234 se connaît assez pour savoir ce qui est en lui de l’ homme même, ou de l’amateur distingué, — et ne peut pas nous tromper l
2235 r savoir ce qui est en lui de l’homme même, ou de l’ amateur distingué, — et ne peut pas nous tromper là-dessus. Il se conn
2236 sus. Il se connaît avec une sorte de froideur que l’ on dirait désintéressée si elle n’avait pour effet de souligner, plus
2237 he secrètement, parce que de ces « ratages » naît le perpétuel besoin d’évasion qui est la condition de son progrès moral.
2238 ages » naît le perpétuel besoin d’évasion qui est la condition de son progrès moral. C’est ainsi qu’il consent, non sans u
2239 consent, non sans une imperceptible satisfaction, l’ aveu d’une fondamentale indifférence du cœur qui contraste avec une vi
2240 meline, un amour se noue, qui commence où souvent l’ on finit. Et peut-être l’amour n’est-il possible qu’entre deux cœurs q
2241 qui commence où souvent l’on finit. Et peut-être l’ amour n’est-il possible qu’entre deux cœurs que l’épreuve du plaisir n
2242 l’amour n’est-il possible qu’entre deux cœurs que l’ épreuve du plaisir n’a pas exténués. Mais alors quelle avidité cruelle
2243 amour, à force de petites blessures. Ce n’est pas le moins troublant d’une telle vie, cette sagesse un peu sombre qui s’en
2244 ’en dégage, sagesse qui veut « que nous appelions les âmes à la vie après seulement toutes les morts du plaisir », car elle
2245 sagesse qui veut « que nous appelions les âmes à la vie après seulement toutes les morts du plaisir », car elle sait « qu
2246 ppelions les âmes à la vie après seulement toutes les morts du plaisir », car elle sait « qu’entre les êtres, le bonheur es
2247 les morts du plaisir », car elle sait « qu’entre les êtres, le bonheur est un lien sans durée. Seules la souffrance ou de
2248 du plaisir », car elle sait « qu’entre les êtres, le bonheur est un lien sans durée. Seules la souffrance ou de secrètes a
2249 êtres, le bonheur est un lien sans durée. Seules la souffrance ou de secrètes anomalies ont un pouvoir d’éternité. » Il e
2250 e, ce me semble, d’insister sur ce qui forme dans le récit de cette vie comme une arrière-pensée inquiète et un peu hautai
2251 e arrière-pensée inquiète et un peu hautaine. Que la composition de cette réminiscence soit assez facile et « artiste » on
2252 le et « artiste » on hésite à en faire reproche à l’ auteur. Cette espèce de modestie de l’allure est rare autant que sympa
2253 reproche à l’auteur. Cette espèce de modestie de l’ allure est rare autant que sympathique, dans le temps que sévit l’infl
2254 de l’allure est rare autant que sympathique, dans le temps que sévit l’inflation littéraire la plus ridicule. Pourtant, qu
2255 e autant que sympathique, dans le temps que sévit l’ inflation littéraire la plus ridicule. Pourtant, qu’elle ne laisse poi
2256 e, dans le temps que sévit l’inflation littéraire la plus ridicule. Pourtant, qu’elle ne laisse point oublier que ce livre
2257 e. Il manque sans doute un morceau de phrase dans l’ édition originale.
45 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Lettre du survivant (février 1927)
2258 ant (février 1927)i j « Triste, mais vrai. » ( Les journaux.) Mademoiselle, Il faut d’abord que je m’excuse : c’est un
2259 vous dise qu’il fait très froid dans ma chambre : le feu n’a pas pris, et d’ailleurs cela n’en vaut plus la peine. (Veuill
2260 u n’a pas pris, et d’ailleurs cela n’en vaut plus la peine. (Veuillez ne pas voir dans cette phrase quelque allusion de ma
2261 dit, sans doute parce que c’est là que se nouent les douleurs les plus atrocement inutiles. La première fois, au théâtre.
2262 ute parce que c’est là que se nouent les douleurs les plus atrocement inutiles. La première fois, au théâtre. Dans l’ombre,
2263 ment inutiles. La première fois, au théâtre. Dans l’ ombre, j’ai suivi le drame sur vos traits seulement ; l’écho n’en fut
2264 emière fois, au théâtre. Dans l’ombre, j’ai suivi le drame sur vos traits seulement ; l’écho n’en fut que plus douloureux
2265 e, j’ai suivi le drame sur vos traits seulement ; l’ écho n’en fut que plus douloureux dans mon cœur. Puis je vous ai oubli
2266 ous voir si entourée… D’autres fois… je n’ai plus le courage de les dire. Enfin, avant-hier, à ce bal. J’avais demandé à
2267 tourée… D’autres fois… je n’ai plus le courage de les dire. Enfin, avant-hier, à ce bal. J’avais demandé à un de mes amis,
2268 us connaît4, de me présenter. Il m’en avait donné la promesse. Vos regards rencontrèrent les miens plus d’une fois pendant
2269 pendant une danse qu’il fit avec vous, mais vous les détourniez soudain comme pour vous arracher à une obsession secrèteme
2270 session secrètement attirante ; et je pensais que la force de mon désir était telle que vous en éprouviez vaguement la men
2271 désir était telle que vous en éprouviez vaguement la menace. Je dis menace, parce que mes airs sombres vous effrayaient sa
2272 seule leur prêtait quelque intention. Quand enfin l’ orchestre s’arrêta, je me trouvais tout près de vous. Mon ami me fit u
2273 mon du malheur me paralysa. Je venais d’entrevoir l’ image d’un couple heureux et banal, votre sourire répondant au mien, c
2274 aires et sur des cartes postales illustrées. Déjà la foule des danseurs nous séparait, mon ami se détournait, un peu vexé 
2275 s une invincible lassitude me saisir et m’assis à l’ écart. On me demandait, en passant, si j’étais malade. Je désignais d’
2276 s bouteilles de champagne vides ; car on pardonne l’ ivresse, mais non certaines douleurs. Même, je fus obligé de confier à
2277 bligé de confier à un ami que j’en avais repris … Les archets jouaient sur mes nerfs. Le jazz martelait mon désespoir. Dése
2278 vais repris … Les archets jouaient sur mes nerfs. Le jazz martelait mon désespoir. Désespoir étroit, ces œillères géantes
2279 sespoir étroit, ces œillères géantes aux pensées, le ciel trop bas d’un rêve sans issue, pesant comme l’envie d’un sommeil
2280 ciel trop bas d’un rêve sans issue, pesant comme l’ envie d’un sommeil sans fin… J’avais soif, mais la seule vue d’un liqu
2281 l’envie d’un sommeil sans fin… J’avais soif, mais la seule vue d’un liquide me soulevait le cœur. L’aube parut. On éteigni
2282 soif, mais la seule vue d’un liquide me soulevait le cœur. L’aube parut. On éteignit toutes les lampes, et les couples cha
2283 s la seule vue d’un liquide me soulevait le cœur. L’ aube parut. On éteignit toutes les lampes, et les couples charlestonna
2284 ulevait le cœur. L’aube parut. On éteignit toutes les lampes, et les couples charlestonnaient plus furieusement dans l’ombr
2285 . L’aube parut. On éteignit toutes les lampes, et les couples charlestonnaient plus furieusement dans l’ombre livide, aux c
2286 s couples charlestonnaient plus furieusement dans l’ ombre livide, aux cris fêlés et déchirants des saxophones. Sortie dans
2287 s. Sortie dans un matin sourd, frileux, qui avait la nausée. Je rentrai seul. Voici quelques mots que j’écrivis à ma table
2288 œillet, pauvre gentillesse d’une autre femme dont le seul défaut fut de m’aimer… (Froid aux genoux, odeur de vieille fumée
2289 umée, et ce refus au sommeil qui meurtrit jusqu’à l’ âme.) Convulsions d’oriflammes sur l’orchestre pensif. Ton regard est
2290 trit jusqu’à l’âme.) Convulsions d’oriflammes sur l’ orchestre pensif. Ton regard est plus grand que le chant des violons.
2291 l’orchestre pensif. Ton regard est plus grand que le chant des violons. Aube dure ! En ma tête rôde ton souvenir, comme un
2292 es heures, d’un sommeil triste, tout enfiévré par la crainte du réveil. Puis je suis revenu dans ces rues où je vous renco
2293 n rendez-vous au thé du Printemps. J’ai rôdé dans la joie féminine des grands magasins, n’osant pas repasser trop souvent
2294 agasins, n’osant pas repasser trop souvent devant les ascenseurs. « Vers 4 heures, me disais-je elle y entrera, et, me glis
2295 tage… » Je délirais, bien sûr. Je m’imaginais que les vendeuses me dévisageaient de plus en plus impudemment : je devais pa
2296 qu’un paquet de dix personnes s’engouffrait dans la cage rouge et or et s’élevait, j’éprouvais un petit arrachement, comm
2297 ais encore : Si je prends cet ascenseur et que je la croise en route dans l’ascenseur descendant… Il aurait fallu monter,
2298 s cet ascenseur et que je la croise en route dans l’ ascenseur descendant… Il aurait fallu monter, mais l’idée de vous trou
2299 scenseur descendant… Il aurait fallu monter, mais l’ idée de vous trouver peut-être assise en face de votre bel ami laqué,
2300 je suis sorti. Il y avait beaucoup de monde dans les rues, sous la pluie. Les autobus passaient par groupes. Plusieurs foi
2301 Il y avait beaucoup de monde dans les rues, sous la pluie. Les autobus passaient par groupes. Plusieurs fois, j’ai cru vo
2302 t beaucoup de monde dans les rues, sous la pluie. Les autobus passaient par groupes. Plusieurs fois, j’ai cru vous reconnaî
2303 s. Plusieurs fois, j’ai cru vous reconnaître dans la foule qui se précipitait, mais je n’avais pas pris de numéro, je ne p
2304 llu courir après celle-là qui venait de tourner à l’ angle de cette rue et qui avait votre démarche. Mais, pendant ce temps
2305 désir surmené vous appelait encore, haletant. Et le temps passait, à la fois si lent — jusqu’à l’arrivée du prochain métr
2306 Et le temps passait, à la fois si lent — jusqu’à l’ arrivée du prochain métro, du prochain autobus, — si rapide : déjà les
2307 in métro, du prochain autobus, — si rapide : déjà les lumières des boulevards glissaient des reflets sur l’asphalte mouillé
2308 umières des boulevards glissaient des reflets sur l’ asphalte mouillé. Les pieds dans l’eau, les jambes fatiguées, les paup
2309 ds glissaient des reflets sur l’asphalte mouillé. Les pieds dans l’eau, les jambes fatiguées, les paupières lourdes, et ce
2310 es reflets sur l’asphalte mouillé. Les pieds dans l’ eau, les jambes fatiguées, les paupières lourdes, et ce chant désespér
2311 ets sur l’asphalte mouillé. Les pieds dans l’eau, les jambes fatiguées, les paupières lourdes, et ce chant désespéré qui vo
2312 illé. Les pieds dans l’eau, les jambes fatiguées, les paupières lourdes, et ce chant désespéré qui vous appelait, assourdis
2313 était arrêté tout près de moi. Je vis un visage à l’ intérieur se pencher vers la vitre… Je montai. Il n’y avait que des da
2314 i. Je vis un visage à l’intérieur se pencher vers la vitre… Je montai. Il n’y avait que des dames. Personne ne parlait. La
2315 Il n’y avait que des dames. Personne ne parlait. La jeune femme qui s’était penchée vous ressemblait tant. Mais je n’osai
2316 ous ressemblait tant. Mais je n’osais presque pas la regarder, à cause d’une incertitude qui redonnait tout son empire à m
2317 . Peut-être était-ce vous. Je ne saurai jamais. À l’ arrêt de la Place Saint-Michel, elle sortit, en me frôlant, sans me re
2318 était-ce vous. Je ne saurai jamais. À l’arrêt de la Place Saint-Michel, elle sortit, en me frôlant, sans me regarder. Je
2319 derrière elle. Mais tout de suite des parapluies la dérobèrent à mes yeux. Une bouche de métro m’attira. Les rames s’arrê
2320 obèrent à mes yeux. Une bouche de métro m’attira. Les rames s’arrêtaient avec un sifflement particulièrement doux pour ma f
2321 gue, et ces gens pressés et songeurs respectaient la folie douloureuse qui devait contracter mon visage. Je promenais sur
2322 egards angoissés, avides, implorants. Oh ! toutes les femmes que j’ai fait souffrir cette nuit d’un long regard de damné. À
2323 je mêlais à mes pensées des fragments de rêves et les personnages des affiches, tout en marchant sans fin dans les couloirs
2324 ages des affiches, tout en marchant sans fin dans les couloirs implacablement brillants, je me pris à parler à haute voix,
2325 ases incohérentes. Je voyais avec une sombre joie les employés et les voyageurs s’inquiéter. Bientôt on m’entraîna de force
2326 s. Je voyais avec une sombre joie les employés et les voyageurs s’inquiéter. Bientôt on m’entraîna de force sur un trottoir
2327 force sur un trottoir roulant qui me remonta dans la rue. La fraîcheur de la brume m’apaisa. Sur la promesse que je fis qu
2328 r un trottoir roulant qui me remonta dans la rue. La fraîcheur de la brume m’apaisa. Sur la promesse que je fis que je me
2329 ulant qui me remonta dans la rue. La fraîcheur de la brume m’apaisa. Sur la promesse que je fis que je me sentais mieux, o
2330 ns la rue. La fraîcheur de la brume m’apaisa. Sur la promesse que je fis que je me sentais mieux, on me laissa rentrer seu
2331 t 5 heures du matin. Premiers appels d’autos dans la ville, mais il me semble que toutes choses s’éloignent de moi vertigi
2332 à rien dans mon esprit. Peut-être que j’ai perdu la notion du temps. Je ne me souviens plus que de cette déception insupp
2333 tout ce qui me navre au plus intime de mon être… Le revolver est chargé, sur cette table. (Je le caresse, entre deux phra
2334 tre… Le revolver est chargé, sur cette table. (Je le caresse, entre deux phrases.) Mais voici que ce geste de ma mort auss
2335 ais voici que ce geste de ma mort aussi me lasse, l’ image que je m’en forme… Je ne comprends plus pourquoi je devrais me t
2336 is me tuer, pourquoi je souffre, ce que c’est que la souffrance, ce que c’est que ma vie, ma mort. Mon Dieu, il n’y a plus
46 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Orphée sans charme (février 1927)
2337 février 1927)k « Cet âge est sans pitié. » «  Le véritable symbole n’est jamais prévu par l’auteur », écrivait Cocteau
2338  » « Le véritable symbole n’est jamais prévu par l’ auteur », écrivait Cocteau dans la préface des Mariés de la tour Eiffe
2339 amais prévu par l’auteur », écrivait Cocteau dans la préface des Mariés de la tour Eiffel. Et une note d’Orphée précise :
2340 », écrivait Cocteau dans la préface des Mariés de la tour Eiffel. Et une note d’Orphée précise : « Inutile de dire qu’il n
2341 tile de dire qu’il n’y a pas un seul symbole dans la pièce. » Ce qui me gêne pourtant, c’est d’y découvrir possibles deux
2342 au d’en avoir plus ou moins consciemment concerté la possibilité. Orphée, par exemple, serait un poète surréaliste. « Il f
2343 dale. Il faut un de ces orages qui rafraîchissent l’ air. » Il prétend « traquer l’inconnu ». Sa femme l’accuse de « vouloi
2344 qui rafraîchissent l’air. » Il prétend « traquer l’ inconnu ». Sa femme l’accuse de « vouloir faire admettre que la poésie
2345 air. » Il prétend « traquer l’inconnu ». Sa femme l’ accuse de « vouloir faire admettre que la poésie consiste à écrire une
2346 Sa femme l’accuse de « vouloir faire admettre que la poésie consiste à écrire une phrase ». Et cette phrase, c’est un chev
2347 se ». Et cette phrase, c’est un cheval savant qui la lui a dictée : « Madame Eurydice Reviendra Des Enfers. » — « Ce n’est
2348 un poème, un poème du rêve, une fleur du fond de la mort. » Or, on découvre à la fin de la pièce que c’est une anagramme
2349 une fleur du fond de la mort. » Or, on découvre à la fin de la pièce que c’est une anagramme un peu ordurière. Ainsi les r
2350 du fond de la mort. » Or, on découvre à la fin de la pièce que c’est une anagramme un peu ordurière. Ainsi les rêves publi
2351 e que c’est une anagramme un peu ordurière. Ainsi les rêves publiés par les surréalistes, donnés à la fois comme poèmes et
2352 mme un peu ordurière. Ainsi les rêves publiés par les surréalistes, donnés à la fois comme poèmes et comme dictées de l’inc
2353 donnés à la fois comme poèmes et comme dictées de l’ inconscient, au fond desquels on a si vite fait de distinguer les quel
2354 au fond desquels on a si vite fait de distinguer les quelques préoccupations assez simples dont l’étude charme le psychana
2355 t de distinguer les quelques préoccupations assez simples dont l’étude charme le psychanalyste. Je pourrais poursuivre le jeu.
2356 er les quelques préoccupations assez simples dont l’ étude charme le psychanalyste. Je pourrais poursuivre le jeu. Et puis,
2357 préoccupations assez simples dont l’étude charme le psychanalyste. Je pourrais poursuivre le jeu. Et puis, il y a aussi d
2358 e charme le psychanalyste. Je pourrais poursuivre le jeu. Et puis, il y a aussi des sortes de calembours… Art chrétien, a
2359 crivit certains vers qu’on peut lire plus haut : Les anges véritables qui connaissent les signes Sont moins bons acrobates
2360 plus haut : Les anges véritables qui connaissent les signes Sont moins bons acrobates… (etc.)… Cocteau s’est trop exercé
2361 Cocteau s’est trop exercé avant de se lancer sur la corde raide. Je suis sûr qu’il ne tombera pas. J’admire sans émoi. ⁂
2362 ’il ne tombera pas. J’admire sans émoi. ⁂ Certes, les qualités scéniques de cette pièce sont grandes. Je ne saurais même in
2363 e indiquer aucun endroit par où elle pèche contre les principes chers à l’auteur du Secret professionnel et de la préface d
2364 it par où elle pèche contre les principes chers à l’ auteur du Secret professionnel et de la préface des Mariés — principes
2365 es chers à l’auteur du Secret professionnel et de la préface des Mariés — principes dont l’énoncé brillant et définitif re
2366 nnel et de la préface des Mariés — principes dont l’ énoncé brillant et définitif restera l’un des titres les plus authenti
2367 ncé brillant et définitif restera l’un des titres les plus authentiques de Cocteau. Précision et relief du dialogue, ingéni
2368 liques ; enfin, un style parfaitement pauvre dans le détail, un vrai style de théâtre, d’une netteté qui pourtant n’est pa
2369 as maigre, d’une familiarité dramatique qui cerne le mystère d’un trait pur. Il semble que Cocteau ait réalisé là exacteme
2370 ble machine ne m’inquiète guère : je sais qu’elle le conduira où il veut, sans surprises. « Puisque ces mystères me dépass
2371 que ces mystères me dépassent, feignons d’en être l’ organisateur », disait le photographe des Mariés. Dans Orphée, le myst
2372 sent, feignons d’en être l’organisateur », disait le photographe des Mariés. Dans Orphée, le mystère ne peut plus dépasser
2373 », disait le photographe des Mariés. Dans Orphée, le mystère ne peut plus dépasser l’auteur : il l’a trop bien organisé. E
2374 és. Dans Orphée, le mystère ne peut plus dépasser l’ auteur : il l’a trop bien organisé. En somme, ce qu’il faut reprocher
2375 e, le mystère ne peut plus dépasser l’auteur : il l’ a trop bien organisé. En somme, ce qu’il faut reprocher à Cocteau, c’e
2376 lètement une pièce, prouvant une fois de plus que l’ atmosphère de l’« art pur » n’est pas respirable. Il ne manque rien à
2377 ce, prouvant une fois de plus que l’atmosphère de l’ « art pur » n’est pas respirable. Il ne manque rien à Orphée, sinon pe
2378 art de Dieu » — comme dit Gide — qui serait aussi la part de l’humain, l’imperfection secrète qui fait naître l’amour. Par
2379  » — comme dit Gide — qui serait aussi la part de l’ humain, l’imperfection secrète qui fait naître l’amour. Parce que la c
2380 dit Gide — qui serait aussi la part de l’humain, l’ imperfection secrète qui fait naître l’amour. Parce que la création es
2381 l’humain, l’imperfection secrète qui fait naître l’ amour. Parce que la création est venue après la théorie. Parce qu’une
2382 ection secrète qui fait naître l’amour. Parce que la création est venue après la théorie. Parce qu’une fois de plus, Cocte
2383 re l’amour. Parce que la création est venue après la théorie. Parce qu’une fois de plus, Cocteau a comprimé des pétales de
2384 les de roses dans du cristal taillé, selon toutes les règles de l’art, mais que l’essence obtenue, si elle est de rose, est
2385 ans du cristal taillé, selon toutes les règles de l’ art, mais que l’essence obtenue, si elle est de rose, est sans parfum.
2386 aillé, selon toutes les règles de l’art, mais que l’ essence obtenue, si elle est de rose, est sans parfum.   (Tout de même
2387  : j’en verrais une preuve, pour mon compte, dans le fait que je ne sais parler de lui autrement que par métaphores.) 5.
2388 trement que par métaphores.) 5. M. Zimmer, dans la Gazette de Lausanne . Et même il appelait Orphée « une tragédie de l
2389 ne . Et même il appelait Orphée « une tragédie de l’ amour conjugal ». Vraiment, nous n’en demandions pas tant… k. Rougem
47 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). L’autre œil (février 1927)
2390 L’autre œil (février 1927)l m Décembre L’ époque s’ouvre où l’on attend un miracle pour la fin de la semaine. « 
2391 ier 1927)l m Décembre L’époque s’ouvre où l’ on attend un miracle pour la fin de la semaine. « Messieurs, disait Da
2392 L’époque s’ouvre où l’on attend un miracle pour la fin de la semaine. « Messieurs, disait Dardel, y a pas à tortiller, i
2393 s’ouvre où l’on attend un miracle pour la fin de la semaine. « Messieurs, disait Dardel, y a pas à tortiller, il faut fai
2394 ça semble idiot. Il y a des soirs où une idée de la responsabilité s’empare de nous. Et nous calculons qu’il s’agit de dé
2395 de déranger 5000 personnes en huit soirées, et de les occuper quatre heures durant… Mais la vision, rapidement entrevue par
2396 ées, et de les occuper quatre heures durant… Mais la vision, rapidement entrevue par chacun dans son for le plus intérieur
2397 sion, rapidement entrevue par chacun dans son for le plus intérieur, d’une fuite en auto, nous rassure provisoirement…
2398 ment… Prosopopée, à propos d’une apparition La vieille Monture 6 un soir nous apparut, lugubrement fardée, l’haleine
2399 nture 6 un soir nous apparut, lugubrement fardée, l’ haleine mauvaise, édentée et tâchant à prendre un accent anglais d’un
2400 nt d’un doigt impitoyable son flanc déjà meurtri, la suivaient en hurlant : « Bas-toi là, bas-toi là ! »… Est-il plus atro
2401 onçant de séniles calembours… Pénétrés d’horreur, les bellettriens avaient fui. Au détour d’une ivresse, ils rencontrèrent
2402 t une créature évadée d’anciens rêves qui hantait les limbes depuis un an déjà. Ils ne tardèrent pas à reconnaître Cinémato
2403 tre. Ils se réunissent parfois autour d’un feu et le contemplent un certain temps en silence. « Well ! », dit enfin Dardel
2404 n temps en silence. « Well ! », dit enfin Dardel. Les autres n’en pensent pas moins. Quelquefois, Mossoul amène un scénario
2405 et à deux faces. Lugin, qui est théologien, et de la Tchaux, n’a pas la foi. Topin, Mahomet désabusé, constate que jamais
2406 gin, qui est théologien, et de la Tchaux, n’a pas la foi. Topin, Mahomet désabusé, constate que jamais « la Montagne » ne
2407 i. Topin, Mahomet désabusé, constate que jamais «  la Montagne » ne saura venir au prophète, même s’il se nomme Mossoul. Po
2408 énie vint s’asseoir certaine nuit. Elle parla par la bouche de Lugin, sa langue dans la langue de Lugin : « Le rideau se l
2409 Elle parla par la bouche de Lugin, sa langue dans la langue de Lugin : « Le rideau se lève sur un miroir qui occupe toute
2410 e de Lugin, sa langue dans la langue de Lugin : «  Le rideau se lève sur un miroir qui occupe toute la largeur de la scène.
2411  Le rideau se lève sur un miroir qui occupe toute la largeur de la scène. Titre : Socrate et Narcisse, un acte à grande fi
2412 lève sur un miroir qui occupe toute la largeur de la scène. Titre : Socrate et Narcisse, un acte à grande figuration. » En
2413 et Narcisse, un acte à grande figuration. » Enfin l’ on joua aux petits dés le sort de notre parade — et l’on gagna. Enthou
2414 ande figuration. » Enfin l’on joua aux petits dés le sort de notre parade — et l’on gagna. Enthousiasmé, « Mimosa » partit
2415 joua aux petits dés le sort de notre parade — et l’ on gagna. Enthousiasmé, « Mimosa » partit pour la Riviera afin de négo
2416 l’on gagna. Enthousiasmé, « Mimosa » partit pour la Riviera afin de négocier la vente de cette martingale avec des surréa
2417  Mimosa » partit pour la Riviera afin de négocier la vente de cette martingale avec des surréalistes hétérodoxes. Il revin
2418 érodoxes. Il revint juste à temps pour assister à la cérémonie de la pose du point final de « Cinématoma ou les épanchemen
2419 int juste à temps pour assister à la cérémonie de la pose du point final de « Cinématoma ou les épanchements de la jeune S
2420 onie de la pose du point final de « Cinématoma ou les épanchements de la jeune Synovie », parade « née du mariage de nos ve
2421 oint final de « Cinématoma ou les épanchements de la jeune Synovie », parade « née du mariage de nos veilles et de nos rêv
2422 riage de nos veilles et de nos rêves », ainsi que le disait si poétiquement le programme. Un peu d’histoire (erratum de la
2423 nos rêves », ainsi que le disait si poétiquement le programme. Un peu d’histoire (erratum de la chronique de Mossoul). Be
2424 ement le programme. Un peu d’histoire (erratum de la chronique de Mossoul). Belles-Lettres joua l’Inspecteur de Gogol à l’
2425 de la chronique de Mossoul). Belles-Lettres joua l’ Inspecteur de Gogol à l’époque où le Cuirassé Potemkine était interdit
2426 oul). Belles-Lettres joua l’Inspecteur de Gogol à l’ époque où le Cuirassé Potemkine était interdit à l’écran. Pitoëff avai
2427 -Lettres joua l’Inspecteur de Gogol à l’époque où le Cuirassé Potemkine était interdit à l’écran. Pitoëff avait prêté un a
2428 ’époque où le Cuirassé Potemkine était interdit à l’ écran. Pitoëff avait prêté un accent, Mme d’Assilva deux actrices, M.
2429 re dans des jupons autrement que par métaphore. À La Chaux-de-Fonds, il y eut trente membres et cent doigts dans deux lits
2430 cela fait-il de pieds et d’oreillles ? À signaler la fuite de Bec-de-Gaz, lequel s’éteignit dans les neiges. Un jour, on s
2431 er la fuite de Bec-de-Gaz, lequel s’éteignit dans les neiges. Un jour, on s’aperçut que cette chose avait recommencé, qu’on
2432 mmencé, qu’on appelle, sans doute par antiphrase, la vie. 6. Revue ou prologue. l. Rougemont Denis de, « L’autre œil 
48 1927, Articles divers (1924–1930). Conférence d’Edmond Esmonin sur « La révocation de l’édit de Nantes » (16 février 1927)
2433 Conférence d’Edmond Esmonin sur «  La révocation de l’édit de Nantes » (16 février 1927)j Le sujet que M
2434 onférence d’Edmond Esmonin sur « La révocation de l’ édit de Nantes » (16 février 1927)j Le sujet que M. Esmonin, profes
2435 ation de l’édit de Nantes » (16 février 1927)j Le sujet que M. Esmonin, professeur à la Faculté des lettres de Grenoble
2436 r 1927)j Le sujet que M. Esmonin, professeur à la Faculté des lettres de Grenoble, traita mardi soir à la Grande salle
2437 ulté des lettres de Grenoble, traita mardi soir à la Grande salle des Conférences, devant un très bel auditoire, est un de
2438 des plus passionnants et des plus controversés de l’ histoire. L’un de ceux, aussi, où il est le plus difficile de rester i
2439 sés de l’histoire. L’un de ceux, aussi, où il est le plus difficile de rester impartial. M. Lombard, recteur de l’Universi
2440 icile de rester impartial. M. Lombard, recteur de l’ Université, en introduisant le conférencier, a fait allusion aux diver
2441 Lombard, recteur de l’Université, en introduisant le conférencier, a fait allusion aux divers points de vue auxquels on a
2442 ints de vue auxquels on a pu se placer pour juger la révocation. M. Esmonin, lui, se place au point de vue de l’historien
2443 ion. M. Esmonin, lui, se place au point de vue de l’ historien scrupuleux, qui juge d’après les textes, les causes et les e
2444 e vue de l’historien scrupuleux, qui juge d’après les textes, les causes et les effets vérifiables, et non d’après un systè
2445 istorien scrupuleux, qui juge d’après les textes, les causes et les effets vérifiables, et non d’après un système préconçu.
2446 uleux, qui juge d’après les textes, les causes et les effets vérifiables, et non d’après un système préconçu. (Cette attitu
2447 préconçu. (Cette attitude est plus rare qu’on ne le croit, de nos jours.) M. Esmonin montra avec beaucoup de clarté comme
2448 c beaucoup de clarté comment, entre 1578, date de la proclamation de l’édit, et 1685, date de la révocation, la France pas
2449 é comment, entre 1578, date de la proclamation de l’ édit, et 1685, date de la révocation, la France passa de la plus grand
2450 te de la proclamation de l’édit, et 1685, date de la révocation, la France passa de la plus grande liberté à la plus grand
2451 mation de l’édit, et 1685, date de la révocation, la France passa de la plus grande liberté à la plus grande tyrannie. En
2452 t 1685, date de la révocation, la France passa de la plus grande liberté à la plus grande tyrannie. En proclamant la liber
2453 tion, la France passa de la plus grande liberté à la plus grande tyrannie. En proclamant la liberté religieuse, Henry IV m
2454 liberté à la plus grande tyrannie. En proclamant la liberté religieuse, Henry IV mettait le royaume à la tête de la civil
2455 roclamant la liberté religieuse, Henry IV mettait le royaume à la tête de la civilisation ; en interdisant aux réformés d’
2456 liberté religieuse, Henry IV mettait le royaume à la tête de la civilisation ; en interdisant aux réformés d’exercer leur
2457 igieuse, Henry IV mettait le royaume à la tête de la civilisation ; en interdisant aux réformés d’exercer leur religion, m
2458 rcer leur religion, mais en même temps de quitter le pays, Louis XIV commit un des actes les plus vexatoires que l’histoir
2459 de quitter le pays, Louis XIV commit un des actes les plus vexatoires que l’histoire ait enregistrés. Après avoir fait un t
2460 s XIV commit un des actes les plus vexatoires que l’ histoire ait enregistrés. Après avoir fait un tableau de la France de
2461 e ait enregistrés. Après avoir fait un tableau de la France de l’édit, victorieuse dans la guerre de Trente Ans, l’orateur
2462 trés. Après avoir fait un tableau de la France de l’ édit, victorieuse dans la guerre de Trente Ans, l’orateur expose comme
2463 tableau de la France de l’édit, victorieuse dans la guerre de Trente Ans, l’orateur expose comment on en vint à la révoca
2464 l’édit, victorieuse dans la guerre de Trente Ans, l’ orateur expose comment on en vint à la révocation. C’est d’abord l’inf
2465 Trente Ans, l’orateur expose comment on en vint à la révocation. C’est d’abord l’influence du clergé, jaloux de ses droits
2466 comment on en vint à la révocation. C’est d’abord l’ influence du clergé, jaloux de ses droits considérables encore ; puis
2467 de ses droits considérables encore ; puis ce sont les conseillers intimes du roi, un jésuite, le père Lachaise, un archevêq
2468 sont les conseillers intimes du roi, un jésuite, le père Lachaise, un archevêque libertin, Harlay de Champvallon, et surt
2469 n leurs intérêts immédiats à leur désir de gagner le ciel, persuadent Louis XIV que la révocation serait une œuvre digne d
2470 désir de gagner le ciel, persuadent Louis XIV que la révocation serait une œuvre digne du Roi-Soleil et capable de lui fai
2471 e du Roi-Soleil et capable de lui faire pardonner les erreurs de sa jeunesse. Le roi, « un niais en matière religieuse » au
2472 e lui faire pardonner les erreurs de sa jeunesse. Le roi, « un niais en matière religieuse » au dire de sa belle-sœur, la
2473 en matière religieuse » au dire de sa belle-sœur, la princesse palatine, se laisse facilement convaincre. D’ailleurs, les
2474 ine, se laisse facilement convaincre. D’ailleurs, les jésuites ont déjà réussi à « tourner » l’édit par mille arguties juri
2475 leurs, les jésuites ont déjà réussi à « tourner » l’ édit par mille arguties juridiques. Et les statistiques faussées peuve
2476 ourner » l’édit par mille arguties juridiques. Et les statistiques faussées peuvent faire croire à une très forte diminutio
2477 s. Aussi ne s’effraye-t-on pas trop, au début, de l’ émigration des fidèles qui suivent leurs pasteurs proscrits. On espère
2478 rtir de gré ou de force tous ceux qui resteront «  Les enfants seront du moins catholiques, si les pères sont hypocrites »,
2479 ont « Les enfants seront du moins catholiques, si les pères sont hypocrites », écrit Madame de Maintenon. Mais bientôt l’on
2480 crites », écrit Madame de Maintenon. Mais bientôt l’ on voit la France se dépeupler ; des industries sont presque anéanties
2481 écrit Madame de Maintenon. Mais bientôt l’on voit la France se dépeupler ; des industries sont presque anéanties ; les con
2482 peupler ; des industries sont presque anéanties ; les conséquences funestes de l’acte de révocation commencent à se révéler
2483 presque anéanties ; les conséquences funestes de l’ acte de révocation commencent à se révéler politiques (guerre de la co
2484 ion commencent à se révéler politiques (guerre de la confession d’Augsbourg) et surtout morales : car malgré des félicitat
2485 es félicitations arrachées par Louis XIV au pape, les catholiques sont loin d’être unanimes à louer la révocation. L’un d’e
2486 les catholiques sont loin d’être unanimes à louer la révocation. L’un d’eux s’indigne, dans une lettre à Louvois, de ce qu
2487 s’indigne, dans une lettre à Louvois, de ce que «  les dragons ont été les meilleurs prédicateurs de notre Évangile ». Et le
2488 lettre à Louvois, de ce que « les dragons ont été les meilleurs prédicateurs de notre Évangile ». Et les persécutions contr
2489 es meilleurs prédicateurs de notre Évangile ». Et les persécutions contre ceux qui n’ont commis d’autre crime que de « dépl
2490  déplaire au roi » vont reprendre de plus belle : la guerre civile succède aux dragonnades. M. Esmonin s’abstient d’en fai
2491 ent d’en faire un tableau qu’il suppose présent à l’ esprit de ses auditeurs. Il termine en citant le jugement d’Albert Sor
2492 à l’esprit de ses auditeurs. Il termine en citant le jugement d’Albert Sorel, selon qui la date du 16 octobre 1685 marque
2493 e en citant le jugement d’Albert Sorel, selon qui la date du 16 octobre 1685 marque une déviation dans l’histoire de la Fr
2494 date du 16 octobre 1685 marque une déviation dans l’ histoire de la France. Déviation telle, en effet, que nous en sentons
2495 obre 1685 marque une déviation dans l’histoire de la France. Déviation telle, en effet, que nous en sentons les conséquenc
2496 e. Déviation telle, en effet, que nous en sentons les conséquences de nos jours encore, ajoute M. Esmonin. Et nous ne pouvo
2497 ouvons que nous réjouir de retrouver bientôt dans l’ ouvrage qu’il va consacrer à Louis XIV l’exposé si dénué de parti pris
2498 tôt dans l’ouvrage qu’il va consacrer à Louis XIV l’ exposé si dénué de parti pris, si libre et d’une si élégante science d
2499 ofesseur de Grenoble. j. Rougemont Denis de, «  La révocation de l’édit de Nantes », Feuille d’avis de Neuchâtel, Neuchâ
2500 ble. j. Rougemont Denis de, « La révocation de l’ édit de Nantes », Feuille d’avis de Neuchâtel, Neuchâtel, 16 février 1
49 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Edmond Jaloux, Ô toi que j’eusse aimée… (mars 1927)
2501 se aimée… (mars 1927)af M. Edmond Jaloux offre l’ exemple rare d’un homme que son évolution naturelle a rapproché, dans
2502 sa maturité, des jeunes générations, en sorte que l’ espèce de romantisme à la Nerval auquel il aboutit coïncide avec un mo
2503 énérations, en sorte que l’espèce de romantisme à la Nerval auquel il aboutit coïncide avec un mouvement dont lui-même s’e
2504 ec un mouvement dont lui-même s’est plu à relever les indices chez ses jeunes contemporains, et qu’il vient appuyer de son
2505 éjà riche de romancier. Son regard se promène sur le même monde où se plaisent nos jeunes poètes cosmopolites, mais il gar
2506 Giraudoux, j’y vois un signe charmant d’amitié de l’ aîné au plus jeune, lequel envoie l’un de ses personnages pour remerci
2507 ’un René Dubardeau pour cette ambassade). Parfois l’ on se demande si l’Auber de Jean Cassou ne va pas s’attabler au café e
2508 pour cette ambassade). Parfois l’on se demande si l’ Auber de Jean Cassou ne va pas s’attabler au café en face des personna
2509 face des personnages de Jaloux. Et peut-être que la comtesse Rezzovitch a rencontré M. Paul Morand, mais elle a dû le tro
2510 ovitch a rencontré M. Paul Morand, mais elle a dû le trouver un peu froid, n’aura pas été tentée de lui faire ces confiden
2511 confiant et secrètement incertain de ce roman. À la veille de se marier, Jérôme Parseval, journaliste parisien, rencontre
2512 carne aussitôt à ses yeux tout ce qu’il attend de l’ amour. Une confidence, un baiser, et il ne la reverra jamais. Il aime
2513 d de l’amour. Une confidence, un baiser, et il ne la reverra jamais. Il aime encore sa femme, « mais comme on aime une pet
2514 d on a failli hériter de Chenonceaux ». Peu à peu l’ image d’Irène Rezzovitch s’idéalise et gagne la puissance d’une mervei
2515 eu l’image d’Irène Rezzovitch s’idéalise et gagne la puissance d’une merveilleuse obsession. Il lui écrit de longues lettr
2516 obsession. Il lui écrit de longues lettres, sans les envoyer. Il apprend sa mort, et qu’elle l’aurait peut-être aimé. Enfi
2517 sans les envoyer. Il apprend sa mort, et qu’elle l’ aurait peut-être aimé. Enfin, divorcé, seul, il la revoit dans une vis
2518 l’aurait peut-être aimé. Enfin, divorcé, seul, il la revoit dans une vision prestigieuse et désolée… M. Jaloux a trouvé là
2519 nt aujourd’hui un réalisme discret mais précis et le sens de ce qu’il y a en nous d’essentiel, de ce qui détermine nos act
2520 ssentiel, de ce qui détermine nos actes avant que la raison n’intervienne, mouvements de nos passions à nous-mêmes inavoué
2521 système de valeurs lyriques et sentimentales que la raison ignore ou tyrannise aveuglément, car « nous avons dressé notre
2522 manque guère à ce devoir sacré ». M. Jaloux évite le péril d’un réalisme trop amer et celui du roman lyrique, par l’équili
2523 réalisme trop amer et celui du roman lyrique, par l’ équilibre qu’il maintient entre ces deux inconscients : l’époque et l’
2524 bre qu’il maintient entre ces deux inconscients : l’ époque et l’être secret du héros. Il sait mieux que quiconque aujourd’
2525 intient entre ces deux inconscients : l’époque et l’ être secret du héros. Il sait mieux que quiconque aujourd’hui faire éc
2526 rsonne, pas même eux ». Dans ce roman, comme dans l’ Âge d’or, un désenchantement profond prend le masque d’une aimable mél
2527 dans l’Âge d’or, un désenchantement profond prend le masque d’une aimable mélancolie. C’est la sourde tristesse des choses
2528 d prend le masque d’une aimable mélancolie. C’est la sourde tristesse des choses qui vous échappent, des amours impossible
2529 rs impossibles, des histoires dont on ne sait pas la fin ni le sens véritable, mais seulement qu’elles ont fait souffrir.
2530 bles, des histoires dont on ne sait pas la fin ni le sens véritable, mais seulement qu’elles ont fait souffrir. Rendez-vou
2531 compris, et peut-être, un quiproquo de destinées… Le tragique du peut-être ; (comme dans l’une des dernières phrases de Sy
2532 ’une des dernières phrases de Sylvie : « Là était le bonheur, peut-être… »). Mais le ton reste si léger, spirituel, fantai
2533 lvie : « Là était le bonheur, peut-être… »). Mais le ton reste si léger, spirituel, fantaisiste (cette touche pour peindre
2534 eindre un personnage épisodique : « Il confondait la rose et la pivoine, l’orange et l’ananas… »). Une telle œuvre, dense,
2535 ersonnage épisodique : « Il confondait la rose et la pivoine, l’orange et l’ananas… »). Une telle œuvre, dense, sans obscu
2536 isodique : « Il confondait la rose et la pivoine, l’ orange et l’ananas… »). Une telle œuvre, dense, sans obscurité, riche
2537  Il confondait la rose et la pivoine, l’orange et l’ ananas… »). Une telle œuvre, dense, sans obscurité, riche et décantée,
50 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Entr’acte de René Clair, ou L’éloge du Miracle (mars 1927)
2538 Entr’acte de René Clair, ou L’ éloge du Miracle (mars 1927)n Surprendre est peu de chose, il faut
2539 se, il faut transplanter. Max Jacob. Ce soir-là, le programme comprenait : un film d’avant-guerre ; un film japonais ; En
2540 d’avant-guerre ; un film japonais ; Entr’acte et le Voyage imaginaire, de René Clair. La Mort de Phèdre (environ 1905) :
2541 ntr’acte et le Voyage imaginaire, de René Clair. La Mort de Phèdre (environ 1905) : quelques acteurs d’une troupe de prov
2542 ent dans un décor très pauvre, légèrement coloré. Le principe est simple : « Je vous aime » se traduit par trois ou quatre
2543 r très pauvre, légèrement coloré. Le principe est simple  : « Je vous aime » se traduit par trois ou quatre claques sur la poit
2544 aime » se traduit par trois ou quatre claques sur la poitrine ; et une crise intérieure par un court accès de danse de Sai
2545 ourt accès de danse de Saint-Guy. Art classique : la mort d’Hyppolite se passe en coulisse. Mais Phèdre avoue tout « devan
2546 asse en coulisse. Mais Phèdre avoue tout « devant le cadavre encore tout chaud ». Affreux. Aussi : « Elle mourut. » On voi
2547 ourut. » On voit que cette bande est antérieure à l’ époque du long baiser de conclusion. Le film japonais : une historiett
2548 térieure à l’époque du long baiser de conclusion. Le film japonais : une historiette un peu plus banale que nature, très b
2549 banale que nature, très bien photographiée. C’est le film du type « Jeux de soleil dans les jardins, complets variés, ça f
2550 hiée. C’est le film du type « Jeux de soleil dans les jardins, complets variés, ça fait toujours plaisir de voir des gens b
2551 Soudain éclate Entr’acte (1925). « Une étude sur le Monde des Rêves ». Rondes de cheminées dans le ciel où des pressentim
2552 ur le Monde des Rêves ». Rondes de cheminées dans le ciel où des pressentiments clignent de l’œil. Des poupées en baudruch
2553 es dans le ciel où des pressentiments clignent de l’ œil. Des poupées en baudruche gonflent leur tête jusqu’à éclater, tand
2554 ne colonnade, puis un jeu d’échec serré, mais sur la corniche d’un gratte-ciel, d’où se met à descendre un petit bateau de
2555 bateau de papier, sur fond de boulevards et parmi les toits flottants, c’est assez tragique. Mitrailleuse de phares d’auto,
2556 st assez tragique. Mitrailleuse de phares d’auto, les 100 000 yeux de la nuit. Des imprécisions rapides. Un chasseur, toujo
2557 itrailleuse de phares d’auto, les 100 000 yeux de la nuit. Des imprécisions rapides. Un chasseur, toujours sur son toit ;
2558 Un chasseur, toujours sur son toit ; il tire sur l’ œuf d’où naît une colombe. Chasse. Mais un papillon éclatant qui batta
2559 Chasse. Mais un papillon éclatant qui battait de l’ aile un dixième de seconde, par intermittences, se pose enfin sur l’éc
2560 de seconde, par intermittences, se pose enfin sur l’ écran : une danseuse sur une plaque de verre, vue par-dessous. Quelque
2561 s qui suivent sont embrumés dans mon souvenir par le rayonnement de la robe, fleur qui s’ouvre pour dégager le mouvement o
2562 embrumés dans mon souvenir par le rayonnement de la robe, fleur qui s’ouvre pour dégager le mouvement obsédant de deux ja
2563 nement de la robe, fleur qui s’ouvre pour dégager le mouvement obsédant de deux jambes, l’harmonie de leurs arabesques à t
2564 our dégager le mouvement obsédant de deux jambes, l’ harmonie de leurs arabesques à trois dimensions mêlées avec une lenteu
2565 une perfection dont une brève vue verticale donne la clé… Un enterrement bourgeois, mais le corbillard est traîné par un d
2566 cale donne la clé… Un enterrement bourgeois, mais le corbillard est traîné par un dromadaire, d’ailleurs dételé. Les amis
2567 est traîné par un dromadaire, d’ailleurs dételé. Les amis affligés mangent les couronnes et suivent à grands sauts lents,
2568 ire, d’ailleurs dételé. Les amis affligés mangent les couronnes et suivent à grands sauts lents, solennels. Ils revoient la
2569 ent à grands sauts lents, solennels. Ils revoient la danseuse, font une ronde autour d’une tour Eiffel de bois de la taill
2570 ont une ronde autour d’une tour Eiffel de bois de la taille de l’Obélisque de la Concorde, puis enfilent les Champs-Élysée
2571 autour d’une tour Eiffel de bois de la taille de l’ Obélisque de la Concorde, puis enfilent les Champs-Élysées à une allur
2572 our Eiffel de bois de la taille de l’Obélisque de la Concorde, puis enfilent les Champs-Élysées à une allure grandissante,
2573 ille de l’Obélisque de la Concorde, puis enfilent les Champs-Élysées à une allure grandissante, bientôt vertigineuse, pours
2574 e grandissante, bientôt vertigineuse, poursuivant le corbillard. Aspects du paysage urbain vu par les poursuivants, arbres
2575 t le corbillard. Aspects du paysage urbain vu par les poursuivants, arbres au ciel renversé, maisons obliques, montagnes ru
2576 . (J’ai regretté que René Clair ne nous donne pas la vision du mort.) Enfin le cercueil roule dans les marguerites, il en
2577 Clair ne nous donne pas la vision du mort.) Enfin le cercueil roule dans les marguerites, il en sort un chef d’orchestre d
2578 la vision du mort.) Enfin le cercueil roule dans les marguerites, il en sort un chef d’orchestre dont la baguette éteint t
2579 marguerites, il en sort un chef d’orchestre dont la baguette éteint tous les personnages et lui-même. ⁂ Le tout ne dure p
2580 un chef d’orchestre dont la baguette éteint tous les personnages et lui-même. ⁂ Le tout ne dure pas 20 minutes. Et c’est h
2581 guette éteint tous les personnages et lui-même. ⁂ Le tout ne dure pas 20 minutes. Et c’est heureux. Nous manquons d’entraî
2582 c’est heureux. Nous manquons d’entraînement dans le domaine du merveilleux moderne. Un peu plus et nous demandions grâce
2583 e de trop de plaisir. Mais je ne suis pas sûr que le plaisir du public fût de même essence que le nôtre. Les gens rient à
2584 aisir du public fût de même essence que le nôtre. Les gens rient à l’enterrement au ralenti, à l’éclatement des têtes de po
2585 ût de même essence que le nôtre. Les gens rient à l’ enterrement au ralenti, à l’éclatement des têtes de poupées, à la conc
2586 tre. Les gens rient à l’enterrement au ralenti, à l’ éclatement des têtes de poupées, à la conclusion. Ce n’est pas le bon
2587 u ralenti, à l’éclatement des têtes de poupées, à la conclusion. Ce n’est pas le bon rire de cinéma. Quand la danseuse par
2588 s têtes de poupées, à la conclusion. Ce n’est pas le bon rire de cinéma. Quand la danseuse paraît, ils n’attendent que le
2589 lusion. Ce n’est pas le bon rire de cinéma. Quand la danseuse paraît, ils n’attendent que le moment où ils pourront se pou
2590 ma. Quand la danseuse paraît, ils n’attendent que le moment où ils pourront se pousser en disant : « C’que c’est cochon ! 
2591 pousser en disant : « C’que c’est cochon ! » Mais le moment ne vient pas, ils sont déçus. Enfin, mon voisin, un agent, mur
2592 emple, où nous ne pouvons nous empêcher d’admirer l’ utilisation artistique ingénieuse et précise de certaines théories sur
2593 e ingénieuse et précise de certaines théories sur le rêve, le peuple, qui n’a pas vu ces dessous mais accueille le résulta
2594 use et précise de certaines théories sur le rêve, le peuple, qui n’a pas vu ces dessous mais accueille le résultat avec la
2595 peuple, qui n’a pas vu ces dessous mais accueille le résultat avec la naïveté qu’il faut, approuve et dit : « C’est bien ç
2596 as vu ces dessous mais accueille le résultat avec la naïveté qu’il faut, approuve et dit : « C’est bien ça, c’est comme qu
2597 uand on rêve. » Un des défauts d’Entr’acte, c’est la fantaisie recherchée de certaines scènes (l’enterrement). Cela fait b
2598 ’est la fantaisie recherchée de certaines scènes ( l’ enterrement). Cela fait bizarre. Or, dans le monde où le cinéma doit n
2599 ènes (l’enterrement). Cela fait bizarre. Or, dans le monde où le cinéma doit nous « transplanter », un certain naturel est
2600 rrement). Cela fait bizarre. Or, dans le monde où le cinéma doit nous « transplanter », un certain naturel est de rigueur 
2601 nsi qualifié : c’est peut-être le premier film où l’ on a fait du ciné avec des moyens proprement cinégraphiques. Ici le ge
2602 né avec des moyens proprement cinégraphiques. Ici le geste pictural remplace le geste de l’acteur. Un mouvement ne soulign
2603 nt cinégraphiques. Ici le geste pictural remplace le geste de l’acteur. Un mouvement ne souligne pas, il exprime, et se su
2604 iques. Ici le geste pictural remplace le geste de l’ acteur. Un mouvement ne souligne pas, il exprime, et se suffit. Mais c
2605 ne pas, il exprime, et se suffit. Mais comme pour le film 1905, on a sans cesse envie de crier : « Trop de gestes ! » C’es
2606 C’est une question d’épuration des moyens. Rendre le plus par le moins, c’est le fait d’un art à sa maturité. Mais ce sont
2607 estion d’épuration des moyens. Rendre le plus par le moins, c’est le fait d’un art à sa maturité. Mais ce sont là critique
2608 on des moyens. Rendre le plus par le moins, c’est le fait d’un art à sa maturité. Mais ce sont là critiques de style. D’or
2609 es de style. D’ores et déjà, il faut admirer dans les films de René Clair un sens du miracle assez bouleversant. Et je ne p
2610 ne parle pas du miracle genre conte de fée, comme le Voyage imaginaire en montre (beaucoup trop à mon gré). Qu’une sorcièr
2611 chien, cela n’a rien d’étonnant au cinéma. C’est la photographie d’une chose qui ne serait étonnante que dans le réel ; c
2612 phie d’une chose qui ne serait étonnante que dans le réel ; ce n’est pas encore un miracle de ciné. Et les fées paraissent
2613 réel ; ce n’est pas encore un miracle de ciné. Et les fées paraissent vieux jeu avec leur baguette, pour moi qui chaque soi
2614 soir crée ma chambre en tournant un commutateur. Le vrai miracle du cinéma, c’est, par exemple, l’éclosion d’une rose, un
2615 r. Le vrai miracle du cinéma, c’est, par exemple, l’ éclosion d’une rose, un homme qui court au ralenti, certaines coïncide
2616 ’est une réalité quotidienne dans une lumière qui la métamorphose ; c’est un temps nouveau, et l’espace en relation se mod
2617 qui la métamorphose ; c’est un temps nouveau, et l’ espace en relation se modifie pour maintenir je ne sais quelle harmoni
2618 elle dont nous avons convenu et que nous pensions la seule possible. Le monde « normal » nous apparaît alors comme l’une s
2619 s convenu et que nous pensions la seule possible. Le monde « normal » nous apparaît alors comme l’une seulement des mille
2620 nécessités sociales — nous empêchent de découvrir la richesse immédiate. Surréel qui n’est pas synonyme d’incompréhensible
2621 on Madame, car alors quoi de plus surréaliste que le film 1905. Ce n’est peut-être qu’une question d’imagination ; il rest
2622 gineuses, et nous en sommes encore à nous frotter les yeux… Peut-être, quand nos regards plus assurés sauront enfin gagner
2623 ards plus assurés sauront enfin gagner de vitesse les prodiges que déclenche René Clair, verrons-nous, pris par surprise da
2624 René Clair, verrons-nous, pris par surprise dans l’ exploration ivre d’un projecteur, des signes fatidiques, le visage d’u
2625 tion ivre d’un projecteur, des signes fatidiques, le visage d’un ange. n. Rougemont Denis de, «  Entr’acte de René Clai
2626 ougemont Denis de, «  Entr’acte de René Clair, ou L’ éloge du Miracle », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève
51 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Daniel-Rops, Notre inquiétude (avril 1927)
2627 927)ag Il faut souhaiter que ce témoignage sur les générations nouvelles et leurs maîtres soit lu par tous ceux qui cher
2628 lu par tous ceux qui cherchent à s’orienter dans la crise moderne. M. Daniel-Rops unit en lui à l’état de velléités contr
2629 ns la crise moderne. M. Daniel-Rops unit en lui à l’ état de velléités contradictoires que son intelligence très nuancée ma
2630 ncée maintient en une sorte d’instable équilibre, les tendances que ses contemporains ont poussées à l’extrême avec moins d
2631 es tendances que ses contemporains ont poussées à l’ extrême avec moins de prudence mais aussi de lucidité. Séduit par Gide
2632 lucidité. Séduit par Gide ; admirant Maurras sans l’ aimer ; saluant en Valéry une réussite unique mais presque inhumaine ;
2633 e mais presque inhumaine ; secrètement attiré par les thèses extrémistes mais non dépourvues d’une sombre grandeur, des sur
2634 et en même temps par cette solution universelle, la foi, il résume en lui cette inquiétude qui fait la grandeur et la mis
2635 a foi, il résume en lui cette inquiétude qui fait la grandeur et la misère de l’époque — et qu’il avoue préférer à une cer
2636 e en lui cette inquiétude qui fait la grandeur et la misère de l’époque — et qu’il avoue préférer à une certitude trop vit
2637 e inquiétude qui fait la grandeur et la misère de l’ époque — et qu’il avoue préférer à une certitude trop vite atteinte, o
2638 jeunesse ne verrait qu’une abdication. Il décrit la « génération nouvelle » avec une intelligente sympathie et un sens ra
2639 amlétisme », pouvoir aigu d’analyse qui conduit à la dispersion autant qu’à l’approfondissement du moi, soif de tout et po
2640 d’analyse qui conduit à la dispersion autant qu’à l’ approfondissement du moi, soif de tout et pourtant mépris de tout, pro
2641 t pourtant mépris de tout, procédant d’un goût de l’ absolu à la fois mystique et anarchique : ce sont bien les grands trai
2642 u à la fois mystique et anarchique : ce sont bien les grands traits de notre inquiétude. (Mais peut-être M. Rops a-t-il tro
2643 tude. (Mais peut-être M. Rops a-t-il trop négligé le rôle extérieur, que je crois décisif, des conditions de la vie modern
2644 xtérieur, que je crois décisif, des conditions de la vie moderne.) Après avoir défini quelques « positions en face de l’in
2645 près avoir défini quelques « positions en face de l’ inquiétude », M. Rops considère les deux solutions les plus parfaites
2646 ions en face de l’inquiétude », M. Rops considère les deux solutions les plus parfaites qui s’offrent aux jeunes gens d’auj
2647 nquiétude », M. Rops considère les deux solutions les plus parfaites qui s’offrent aux jeunes gens d’aujourd’hui. Il consta
2648 qu’en y substituant ce qui ne vient que de Dieu : la Foi ». Acculée à la rigueur d’un choix presque impossible, notre ince
2649 ce qui ne vient que de Dieu : la Foi ». Acculée à la rigueur d’un choix presque impossible, notre incertitude paraît sans
2650 de. Mais, ici, M. Daniel-Rops n’a-t-il pas cédé à la tentation de créer des dilemmes irréductibles, suprême et inconscient
2651 uprême et inconsciente ruse d’un inquiet qui veut le rester ? Ces deux solutions peuvent se résumer en deux mots : inquiét
2652 : inquiétude ou foi. Dès lors sont-elles vraiment les deux termes d’un dilemme, l’une n’étant que le chemin qui mène à l’au
2653 t les deux termes d’un dilemme, l’une n’étant que le chemin qui mène à l’autre ? Car la foi naît de l’inquiétude autant qu
2654 ne n’étant que le chemin qui mène à l’autre ? Car la foi naît de l’inquiétude autant que de la grâce, et régénère sans ces
2655 le chemin qui mène à l’autre ? Car la foi naît de l’ inquiétude autant que de la grâce, et régénère sans cesse l’inquiétude
2656 e ? Car la foi naît de l’inquiétude autant que de la grâce, et régénère sans cesse l’inquiétude autant que la sérénité… Au
2657 de autant que de la grâce, et régénère sans cesse l’ inquiétude autant que la sérénité… Au reste, n’est-elle pas de M. Rops
2658 e, et régénère sans cesse l’inquiétude autant que la sérénité… Au reste, n’est-elle pas de M. Rops lui-même, cette phrase
2659 lui-même, cette phrase qui formule admirablement les exigences conjointes de l’inquiétude et de la foi : « Si tu as trouvé
2660 formule admirablement les exigences conjointes de l’ inquiétude et de la foi : « Si tu as trouvé Dieu, il te reste à le che
2661 nt les exigences conjointes de l’inquiétude et de la foi : « Si tu as trouvé Dieu, il te reste à le chercher encore… » a
2662 de la foi : « Si tu as trouvé Dieu, il te reste à le chercher encore… » ag. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Daniel
52 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Louis Aragon, le beau prétexte (avril 1927)
2663 Louis Aragon, le beau prétexte (avril 1927)o Ah ! je sens qu’une puissance étrangè
2664 ce étrangère s’est emparée de mon être et a saisi les cordes les plus secrètes de mon âme, qu’elle peut faire désormais vib
2665 e s’est emparée de mon être et a saisi les cordes les plus secrètes de mon âme, qu’elle peut faire désormais vibrer à sa fa
2666 en décembre 1925, au sortir d’une conférence sur le Salut de l’humanité.)   Ce soir en moi trépigne une rage. Sur quelles
2667 1925, au sortir d’une conférence sur le Salut de l’ humanité.)   Ce soir en moi trépigne une rage. Sur quelles épaules jet
2668 es jeter ce manteau de flammes, puis à qui dédier l’ ennui de ma révolte ? Aragon sarcastique se tient là-bas dans un rayon
2669 — auxquels je crois encore, et pas seulement pour le pittoresque. — Attrape !   Il n’existe pas de théorie du salut. Il n’
2670 ’existe que des systèmes pour faire taire en nous l’ appel vertigineux du Silence. On nous montre des Dieux, mais c’est pou
2671 ourner nos regards de cela qu’il faut bien nommer le Vide. Tant de séductions nous ont en vain tentés, ô tortures fascinan
2672 ous ont en vain tentés, ô tortures fascinantes de la sainteté, seules vous nous appelez encore hors de cette voix de l’inf
2673 es vous nous appelez encore hors de cette voix de l’ infini où chancellent parmi les éclairs nos premiers pas. Aragon, dans
2674 rs de cette voix de l’infini où chancellent parmi les éclairs nos premiers pas. Aragon, dans ces tempêtes de nuits filantes
2675 ilantes où s’enfuient, souffles à peine parfumés, les vices enlacés aux vertus, c’est un ricanement splendide comme un écla
2676 de comme un éclat de rire de condamné à mort et à l’ éternité. Le diable avait pris des avocats dont les plaidoyers, tissus
2677 éclat de rire de condamné à mort et à l’éternité. Le diable avait pris des avocats dont les plaidoyers, tissus des mensong
2678 l’éternité. Le diable avait pris des avocats dont les plaidoyers, tissus des mensonges les plus beaux et des plus mélodieus
2679 avocats dont les plaidoyers, tissus des mensonges les plus beaux et des plus mélodieuses palinodies, font encore rêver les
2680 es plus mélodieuses palinodies, font encore rêver les anges écœurés d’azur. Alors un juron mélodramatique, d’une voix tortu
2681 ble un anathème sanglant. Louis Aragon, avocat de l’ infini, annonce l’entrée de l’éternelle anarchiste, la Poésie.   On di
2682 nglant. Louis Aragon, avocat de l’infini, annonce l’ entrée de l’éternelle anarchiste, la Poésie.   On dit : « Des mots ! »
2683 s Aragon, avocat de l’infini, annonce l’entrée de l’ éternelle anarchiste, la Poésie.   On dit : « Des mots ! » au lieu de
2684 fini, annonce l’entrée de l’éternelle anarchiste, la Poésie.   On dit : « Des mots ! » au lieu de « Je ne comprends pas ».
2685 rends pas ». On dit : « Je ne comprends pas », et l’ on pense : « C’est donc incompréhensible ». On dit : « C’est incompréh
2686 ble ». On dit : « C’est incompréhensible ! » — et l’ on est enfin rassuré. C’est incompréhensible !, trois mots dont l’un
2687 vos glandes salivaires, pourtant si éprouvées par le repas dont vous sortez, que ces trois mots où se résume la défense de
2688 dont vous sortez, que ces trois mots où se résume la défense de la loi sociale, patriotique, religieuse (?) et ci-devant m
2689 ez, que ces trois mots où se résume la défense de la loi sociale, patriotique, religieuse (?) et ci-devant morale qui prot
2690 rallumez votre cigare. Vous vous êtes assuré que la porte ferme bien sur l’infini. Rien à craindre de ce côté. Retournez
2691 Vous vous êtes assuré que la porte ferme bien sur l’ infini. Rien à craindre de ce côté. Retournez à vos amours. ..........
2692 ........ Solitude, antichambre du ciel. À travers l’ amour ou la poésie — et d’autres, à travers les déserts de la sainteté
2693 litude, antichambre du ciel. À travers l’amour ou la poésie — et d’autres, à travers les déserts de la sainteté que hanten
2694 ers l’amour ou la poésie — et d’autres, à travers les déserts de la sainteté que hantent les fantômes adorables du désir, —
2695 la poésie — et d’autres, à travers les déserts de la sainteté que hantent les fantômes adorables du désir, — quelques homm
2696 à travers les déserts de la sainteté que hantent les fantômes adorables du désir, — quelques hommes y pénètrent, et le goû
2697 ables du désir, — quelques hommes y pénètrent, et le goût de s’amuser ne renaîtra plus en eux. Ni même celui de souffrir.
2698 elui de souffrir. Le dernier rire d’Aragon, c’est l’ éclat de sa joie brusque d’être seul sur un faux sommet vers quoi des
2699 s’efforcent — mais déjà c’est de plus loin qu’il les nargue. Il connaît enfin une solitude défendue de tous côtés par ses
2700 quelques « goujateries » affectées par mépris de l’ honneur, le mot de Cambronne prodigué et des phrases d’un fascinant éc
2701  goujateries » affectées par mépris de l’honneur, le mot de Cambronne prodigué et des phrases d’un fascinant éclat : « Ô g
2702 quitte plus, attiré par les premiers sophismes de l’ aurore, ces corniches de craie où t’accoudant tu mêles tes traits purs
2703 t’accoudant tu mêles tes traits purs et labiles à l’ immobilité miraculeuse des statues7. » Il s’agit bien de critique litt
2704 ci en présence d’une des tentatives de libération les plus violentes et belles — malgré tant de maladresses dédaigneuses, d
2705 ravades et de faciles tricheries8 — qu’ait connue l’ esprit humain. Sens de l’Absolu, sens de la pureté ou fanatisme de l’e
2706 cheries8 — qu’ait connue l’esprit humain. Sens de l’ Absolu, sens de la pureté ou fanatisme de l’esprit. Jusqu’au-boutisme
2707 connue l’esprit humain. Sens de l’Absolu, sens de la pureté ou fanatisme de l’esprit. Jusqu’au-boutisme désespéré. « Il s’
2708 ns de l’Absolu, sens de la pureté ou fanatisme de l’ esprit. Jusqu’au-boutisme désespéré. « Il s’agit de rendre impraticabl
2709 rtie » ou compromis :   « Nous étions dominés par le sens d’une réalité morale absolue que certains d’entre nous eussent a
2710 martyre… Nos jugements se rendaient sans cesse à l’ échelle de l’infini, et cet infini nous écrasait. Comment aurions-nous
2711 jugements se rendaient sans cesse à l’échelle de l’ infini, et cet infini nous écrasait. Comment aurions-nous accepté le s
2712 nfini nous écrasait. Comment aurions-nous accepté le sort communément heureux de nos contemporains qui ont puisé dans Augu
2713 omte cette tranquillité de rejeter définitivement les problèmes métaphysiques ? »   Nous naissons à quelque chose qui imite
2714 ues ? »   Nous naissons à quelque chose qui imite la vie dans une époque d’inconcevables compromissions où triomphe sous t
2715 nconcevables compromissions où triomphe sous tous les déguisements, de Ford à Clément Vautel, le matérialisme le plus pauvr
2716 tous les déguisements, de Ford à Clément Vautel, le matérialisme le plus pauvre auquel se soit jamais abaissée une civili
2717 ements, de Ford à Clément Vautel, le matérialisme le plus pauvre auquel se soit jamais abaissée une civilisation. Mais nou
2718 rniers atouts sur notre salut. Nous courons enfin l’ Aventure. « Le salut pour nous n’est nulle part9 ». Ultime affirmation
2719 sur notre salut. Nous courons enfin l’Aventure. «  Le salut pour nous n’est nulle part9 ». Ultime affirmation d’une foi que
2720 rien ne peut duper. Depuis certaines paroles sur la Croix, il n’y a peut-être pas eu d’expression plus haute de l’angoiss
2721 n’y a peut-être pas eu d’expression plus haute de l’ angoisse humaine, et vous aurez beau rire, pharisiens, et dire qu’elle
2722 et vous, dubitatives barbes. Je viens d’entendre la voix d’un mystique. Que si l’on vient nous empêtrer de dogmes basseme
2723 Je viens d’entendre la voix d’un mystique. Que si l’ on vient nous empêtrer de dogmes bassement ingénieux : « Si j’essaie u
2724 ngénieux : « Si j’essaie un instant de m’élever à la notion de Dieu, répond Aragon, je me révolte qu’elle puisse en aucun
2725 nts ! Jouant tout sur une révélation possible, ou la naissance d’un prophète qui rapprenne comment aimer un Dieu. Ce n’est
2726 eût un sens, il faudrait être sûr de n’avoir pas la tête en bas par rapport au soleil. Quelques gestes encore, intercepta
2727 t au soleil. Quelques gestes encore, interceptant les messages égarés de l’infini… Un tel homme, — est-ce encore Aragon, s
2728 estes encore, interceptant les messages égarés de l’ infini… Un tel homme, — est-ce encore Aragon, sinon qui ? — sa grande
2729 pages écrites il y a un an, tel soir de colère où le thermomètre eût indiqué 39° selon toute vraisemblance. Et voici Arago
2730 erait sans doute un peu ridicule. C’est ainsi que l’ on arrive à croire, pour un autre, que c’est arrivé, ajoutant foi, dan
2731 autre, que c’est arrivé, ajoutant foi, dans tous les sens qu’admet ce terme, à des exaltations que leur lyrisme rendait se
2732 ules contagieuses. Comment, en effet, ne pas voir la part de littérature que renferme cette œuvre, et qui fait, en dépit d
2733 fait, en dépit des prétentions désobligeantes de l’ auteur, son incontestable « séduction ». Pour un peu, je découvrais un
2734 un brin janséniste chez ce poète. Aujourd’hui, je le verrais plutôt comme un Musset10 plus véritablement désespéré. Un Mus
2735 ynisme verbeux 1830, une théorie du scandale pour le scandale qui a le mérite de n’être pas qu’un jeu littéraire. Mais enf
2736 0, une théorie du scandale pour le scandale qui a le mérite de n’être pas qu’un jeu littéraire. Mais enfin, c’est encore u
2737 ment vif, insolent et ombrageux. « J’appartiens à la grande race des torrents. » Une belle phrase, n’est-ce pas ? Je ne sa
2738 e pas ? Je ne sais qu’un Montherlant qui pourrait l’ oser dire comme Aragon sans ridicule. Et ce que je prenais pour le ton
2739 e Aragon sans ridicule. Et ce que je prenais pour le ton prophétique, ne serait-ce pas plutôt une sorte de donquichottisme
2740 une sorte de donquichottisme assez fréquent dans les cafés littéraires et dont il serait le premier à s’amuser ?   Février
2741 user ?   Février 1927. Relu Une vague de rêves et la préface de Libertinage. Sous une certaine rhétorique — mais la plus b
2742 Libertinage. Sous une certaine rhétorique — mais la plus belle, — ce qui tressaille et m’atteint au vif, c’est tout de mê
2743 en quoi je ne vais pas m’empêcher de reconnaître la voix secrète de notre mal de vivre. Désespoir métaphysique. Je me sou
2744 de Vinet — laissons s’esclaffer du rapprochement les auteurs de manuels de littérature — : « Un mysticisme creux et affamé
2745 ttérature — : « Un mysticisme creux et affamé est le contrecoup du christianisme dans les âmes profondes ou délicates qui
2746 et affamé est le contrecoup du christianisme dans les âmes profondes ou délicates qui ne sont pas devenues chrétiennes. » «
2747 licates qui ne sont pas devenues chrétiennes. » «  Le salut pour nous n’est nulle part. » Nulle part, pensais-je : le salut
2748 nous n’est nulle part. » Nulle part, pensais-je : le salut n’est pas là, ou là, à Rome, à Athènes, à Moscou, dans cette do
2749 droite, à gauche, — nulle part sur cette terre où l’ orgueil des hommes croit pouvoir nous le désigner, veut nous l’imposer
2750 terre où l’orgueil des hommes croit pouvoir nous le désigner, veut nous l’imposer pour quelles fins assez basses, nous le
2751 hommes croit pouvoir nous le désigner, veut nous l’ imposer pour quelles fins assez basses, nous le savons… Mais pour Arag
2752 us l’imposer pour quelles fins assez basses, nous le savons… Mais pour Aragon, ce n’est point façon de parler. Son « nulle
2753 e « globe d’attente » comme dit Crevel. Pourtant, le plus irrévocable désespoir n’est encore qu’un appel à la foi la plus
2754 irrévocable désespoir n’est encore qu’un appel à la foi la plus haute.   1er mai 1927. Mieux vaut pécher par ridicule qu
2755 cable désespoir n’est encore qu’un appel à la foi la plus haute.   1er mai 1927. Mieux vaut pécher par ridicule que par s
2756 e que par scepticisme ; par excès que par défaut. L’ enthousiasme trompe moins que le bon sens. Don Quichotte est tout de m
2757 s que par défaut. L’enthousiasme trompe moins que le bon sens. Don Quichotte est tout de même moins misérable que Clément
2758 lle n’a pas mérité du premier coup qu’on se donne la peine de l’écraser, — c’est qu’il symbolise tout cet état d’esprit « 
2759 mérité du premier coup qu’on se donne la peine de l’ écraser, — c’est qu’il symbolise tout cet état d’esprit « bien Parisie
2760 de récentes statistiques de librairie montrèrent les ravages bien plus étendus qu’on n’osait le craindre11. Si dans un ess
2761 èrent les ravages bien plus étendus qu’on n’osait le craindre11. Si dans un essai sur la sincérité j’ai soutenu qu’une int
2762 qu’on n’osait le craindre11. Si dans un essai sur la sincérité j’ai soutenu qu’une introspection immobile ne retient rien
2763 qu’une introspection immobile ne retient rien de la réalité vivante ; si je dénie à des incrédules le droit à parler des
2764 la réalité vivante ; si je dénie à des incrédules le droit à parler des choses de la foi comme étant d’un ordre qui leur é
2765 à des incrédules le droit à parler des choses de la foi comme étant d’un ordre qui leur échappe ; de même je récuse ici c
2766 critique dont on voudrait que soient justiciables les œuvres d’un écrivain, les démarches de sa pensée, ses délires, ses vi
2767 que soient justiciables les œuvres d’un écrivain, les démarches de sa pensée, ses délires, ses visions. Un critique qui n’é
2768 élires, ses visions. Un critique qui n’épouse pas le rythme d’une œuvre, mais s’avance à sa rencontre armé de l’appareil à
2769 d’une œuvre, mais s’avance à sa rencontre armé de l’ appareil à frigorifier de sa raison, est destiné à dire des bêtises. C
2770 présenter… d’ailleurs une ancienne connaissance… le Sens Critique. Moi (gêné)… Rougemont. Le Sens Critique. — Il y a un
2771 sance… le Sens Critique. Moi (gêné)… Rougemont. Le Sens Critique. — Il y a un certain temps déjà que nous ne nous sommes
2772 t. Seulement, mon cher Monsieur, nous n’avons pas le temps ces jours-ci, beaucoup trop à faire, beaucoup trop d’êtres et d
2773 suppose. Comprenez-moi : submergés, absolument… Le Sens Critique. — Justement j’aurais en quelque manière la prétention…
2774 Critique. — Justement j’aurais en quelque manière la prétention… Moi. — Que voilà un singulier impertinent de votre part.
2775 ue voilà un singulier impertinent de votre part. ( Le reconduisant :) Croyez, Monsieur, à mon estime la plus vive. Mais déc
2776 Le reconduisant :) Croyez, Monsieur, à mon estime la plus vive. Mais décidément nous sommes débordés, voyez vous-même, pas
2777 ut rien faire sans vous. Mais n’oubliez pas que «  l’ artiste serait peu de chose s’il ne spéculait sur l’incertain », c’est
2778 artiste serait peu de chose s’il ne spéculait sur l’ incertain », c’est un académicien qui l’a dit. Voulez-vous me faire qu
2779 ulait sur l’incertain », c’est un académicien qui l’ a dit. Voulez-vous me faire quelque chose là-dessus pour la Revue ? Ma
2780 Voulez-vous me faire quelque chose là-dessus pour la Revue ? Mais plus tard, plus tard. Tenez, voici un traité de métaphys
2781 ndant. Très bien fait. Excellente méthode ! (Sort le Sens Critique, un peu bousculé.) Moi. — Vous disiez, ma vie ? La Mu
2782 un peu bousculé.) Moi. — Vous disiez, ma vie ? La Muse (mais oui, la Muse, sortant de derrière un rideau). — J’attends
2783 Moi. — Vous disiez, ma vie ? La Muse (mais oui, la Muse, sortant de derrière un rideau). — J’attends votre plaisir… I
2784 qui croient avoir tout dit quand ils ont montré à l’ origine de telle doctrine mystique une exaltation nerveuse ou des trou
2785 oubles organiques. Ils opposent à ces « délires » les thèses rassurantes de la « saine raison », sans se demander jamais si
2786 osent à ces « délires » les thèses rassurantes de la « saine raison », sans se demander jamais si cela ne condamne pas et
2787 ans se demander jamais si cela ne condamne pas et la santé et la raison. Il s’est trouvé des Maurras et autres « héritiers
2788 der jamais si cela ne condamne pas et la santé et la raison. Il s’est trouvé des Maurras et autres « héritiers de la grand
2789 s’est trouvé des Maurras et autres « héritiers de la grande tradition gréco-latine » pour assigner à Minerve le bassin de
2790 tradition gréco-latine » pour assigner à Minerve le bassin de la Méditerranée comme promenoir, avec défense sous peine de
2791 éco-latine » pour assigner à Minerve le bassin de la Méditerranée comme promenoir, avec défense sous peine de mort de s’en
2792 naire. Vous tracez des frontières géographiques à la raison ? Eh bien, c’est vous qui l’aurez voulu, mais tant pis, nous s
2793 ographiques à la raison ? Eh bien, c’est vous qui l’ aurez voulu, mais tant pis, nous serons du Nord. Nous serons romantiqu
2794 rdonnés, brumeux, absurdes, vivants, libres. Avec la poésie contre vos principes. Avec l’esprit contre votre raison. Et av
2795 libres. Avec la poésie contre vos principes. Avec l’ esprit contre votre raison. Et avec Aragon lorsqu’il vous crie : « À b
2796 son. Et avec Aragon lorsqu’il vous crie : « À bas le clair génie français. » Alors la voix de Rimbardp à la cantonade : Q
2797 s crie : « À bas le clair génie français. » Alors la voix de Rimbardp à la cantonade : Qu’il vienne, qu’il vienne Le temp
2798 air génie français. » Alors la voix de Rimbardp à la cantonade : Qu’il vienne, qu’il vienne Le temps dont on s’éprenne !
2799 ardp à la cantonade : Qu’il vienne, qu’il vienne Le temps dont on s’éprenne ! Les œuvres les plus significatives de ce
2800 enne, qu’il vienne Le temps dont on s’éprenne ! Les œuvres les plus significatives de ce siècle sont écrites en haine de
2801 vienne Le temps dont on s’éprenne ! Les œuvres les plus significatives de ce siècle sont écrites en haine de l’époque12.
2802 nificatives de ce siècle sont écrites en haine de l’ époque12. Le reproche d’obscurité que l’on fait à la littérature moder
2803 de ce siècle sont écrites en haine de l’époque12. Le reproche d’obscurité que l’on fait à la littérature moderne n’est qu’
2804 haine de l’époque12. Le reproche d’obscurité que l’ on fait à la littérature moderne n’est qu’une manifestation de ce divo
2805 époque12. Le reproche d’obscurité que l’on fait à la littérature moderne n’est qu’une manifestation de ce divorce radical
2806 qu’une manifestation de ce divorce radical entre l’ époque et les quelques centaines (?) d’individus pour qui l’esprit est
2807 festation de ce divorce radical entre l’époque et les quelques centaines (?) d’individus pour qui l’esprit est la seule réa
2808 t les quelques centaines (?) d’individus pour qui l’ esprit est la seule réalité. C’est pourquoi nous ne pourrons plus sépa
2809 s centaines (?) d’individus pour qui l’esprit est la seule réalité. C’est pourquoi nous ne pourrons plus séparer du concep
2810 rquoi nous ne pourrons plus séparer du concept de l’ esprit celui de Révolution. Et j’entends ce mot dans son sens le plus
2811 de Révolution. Et j’entends ce mot dans son sens le plus vaste. Il y a eu quatre-vingt-treize, la Réforme, Karl Marx, la
2812 ens le plus vaste. Il y a eu quatre-vingt-treize, la Réforme, Karl Marx, la préface de Cromwell. Mais il ne s’agit pas de
2813 a eu quatre-vingt-treize, la Réforme, Karl Marx, la préface de Cromwell. Mais il ne s’agit pas de refaire notre petite ré
2814 ltaire, etc., et tout ce qui leur correspond dans l’ ordre politique par exemple. Parce que c’est très beau, ridiculement,
2815 ne dites pas aussi merde pour Marx ou Lénine, je le dirai pour vous. Quand on a entrepris la Révolution au nom de l’espri
2816 nine, je le dirai pour vous. Quand on a entrepris la Révolution au nom de l’esprit, on ne va pas s’acoquiner avec des gens
2817 ous. Quand on a entrepris la Révolution au nom de l’ esprit, on ne va pas s’acoquiner avec des gens qui ont fait, il y a 10
2818 ne pouvez vous libérer de cette manie française, la politique, et ne voyez-vous pas que c’est faire le jeu de vos ennemis
2819 a politique, et ne voyez-vous pas que c’est faire le jeu de vos ennemis de discuter avec eux dans leur langue et de crier
2820 avec eux dans leur langue et de crier rouge pour la simple raison qu’ils ont dit blanc ? Pensez-vous combattre cet esprit
2821 ec eux dans leur langue et de crier rouge pour la simple raison qu’ils ont dit blanc ? Pensez-vous combattre cet esprit « bien
2822 socie à tant d’objets de votre mépris, en prenant le contre-pied de tout ce qu’il inspire ? Alors que cette réaction même
2823 leurs… Mais non, il y aurait trop à dire, et puis l’ on croirait encore que je suis avec ceux qui traitent Aragon, Breton e
2824 arceurs, de chacals, de déments. Et puis surtout, l’ heure est venue de clore des discussions énervantes où s’épuise vainem
2825 vantes où s’épuise vainement une dialectique dont l’ objet fuit sans cesse par la quatrième dimension. Aragon et les surréa
2826 sans cesse par la quatrième dimension. Aragon et les surréalistes auront raison même encore s’ils ont tort, envers et cont
2827 me encore s’ils ont tort, envers et contre toutes les critiques qu’on pourrait leur adresser, parce que ces « maudits » ont
2828 rait leur adresser, parce que ces « maudits » ont la grâce, parce qu’ils sont la vie, même quand ils appellent la mort, pa
2829 e ces « maudits » ont la grâce, parce qu’ils sont la vie, même quand ils appellent la mort, parce qu’ils ont la passion et
2830 arce qu’ils sont la vie, même quand ils appellent la mort, parce qu’ils ont la passion et l’incommunicable secret de l’inv
2831 ême quand ils appellent la mort, parce qu’ils ont la passion et l’incommunicable secret de l’invention.   Il nous faut des
2832 appellent la mort, parce qu’ils ont la passion et l’ incommunicable secret de l’invention.   Il nous faut des entrepreneurs
2833 ’ils ont la passion et l’incommunicable secret de l’ invention.   Il nous faut des entrepreneurs de tempêtes. Un grand pri
2834 à nos mœurs. … et nous portant dans nos actions à la limite de nos forces, notre joie parmi vous fut une très grande joie.
2835 ons acquises, sièges faits, autorités fondées sur la gloire et la sénilité, etc., etc. Et certes ce n’étaient pas des être
2836 sièges faits, autorités fondées sur la gloire et la sénilité, etc., etc. Et certes ce n’étaient pas des êtres, mais leurs
2837 ine morale ne venait-elle pas de ce qu’en son nom l’ on mesurait odieusement une sympathie humaine pour nous sans prix ? Ma
2838 lus grandes que nous. Nous nous connaissions dans les coins et nous mourions d’ennui avec les aspects irrévocablement prévu
2839 ions dans les coins et nous mourions d’ennui avec les aspects irrévocablement prévus de nous-mêmes que faisaient paraître l
2840 ement prévus de nous-mêmes que faisaient paraître les petits faits de nos longues journées. Nous aimions la révolution comm
2841 etits faits de nos longues journées. Nous aimions la révolution comme on aime l’amour. Nous n’aimions pas telle révolution
2842 ournées. Nous aimions la révolution comme on aime l’ amour. Nous n’aimions pas telle révolution — la russe, par exemple — p
2843 me l’amour. Nous n’aimions pas telle révolution — la russe, par exemple — parce que ce n’est pas encore assez révolution ;
2844 asseoir et que son siège était fait. Nous aimions la Révolution qui nous perdrait corps et biens dans sa grandeur comme un
2845 emme merveilleuse nous perdrait corps et âme dans l’ ivresse amoureuse ; nous cherchions cette Révolution de toutes nos for
2846 ns, comme on cherche cette femme à travers toutes les femmes. C’était un vice, la révolution-vice. Mais on ne vit, on ne me
2847 mme à travers toutes les femmes. C’était un vice, la révolution-vice. Mais on ne vit, on ne meurt que de vices. ⁂ Ici le
2848 Mais on ne vit, on ne meurt que de vices. ⁂ Ici le lecteur se rassure. « Il s’y retrouve. » Il pense que c’est bien jeun
2849 que c’est bien jeune. Et : encore un qui rue dans les brancards, c’est très bellettrien. Un disque de gramo comme par hasar
2850 us fait ça Plus ou moins, n’est-ce pas ? Et puis l’ aiguille divague vers des souvenirs, quand nous allions tous deux, ces
2851 ort des suites. Quand cesserez-vous de nous faire la jambe, pardon escuses, avec ce thème à condamnations par contumace. I
2852 ns par contumace. Il y a encore des gens pour qui les limites de l’anarchie sont : chanter l’Internationale dans les rues,
2853 e. Il y a encore des gens pour qui les limites de l’ anarchie sont : chanter l’Internationale dans les rues, faire la noce,
2854 pour qui les limites de l’anarchie sont : chanter l’ Internationale dans les rues, faire la noce, écrire un livre de tendan
2855 e l’anarchie sont : chanter l’Internationale dans les rues, faire la noce, écrire un livre de tendances très modernes. Et d
2856 t : chanter l’Internationale dans les rues, faire la noce, écrire un livre de tendances très modernes. Et des gens pour se
2857 us écrivons Révolution, et nous offrir un billet ( simple course) pour Moscou, ou encore pour demander à qui, enfin, à quoi nou
2858 i nous en voulons, et finalement nous écraser par l’ évidence définitive de notre absurdité. Car l’homme « s’est fait une v
2859 par l’évidence définitive de notre absurdité. Car l’ homme « s’est fait une vérité changeante et toujours évidente, de laqu
2860 est plus détruire, ce n’est plus combattre, c’est l’ épanouissement violent d’une immense fleur palpitante au parfum de pas
2861 es dangereux. Un orage de tendresse va crever sur le monde. Aigles d’amours, oiseaux doux et cruels, nous parlerons vos la
2862 ue des valeurs de passion. Balayez ces douanes de l’ esprit, proclamez le grand Libre-Échange, voici déjà s’avancer des pro
2863 ssion. Balayez ces douanes de l’esprit, proclamez le grand Libre-Échange, voici déjà s’avancer des prodiges à cette invite
2864 voici déjà s’avancer des prodiges à cette invite la plus persuasive : nous sommes prêts à les accueillir. 7. Une vague
2865 e invite la plus persuasive : nous sommes prêts à les accueillir. 7. Une vague de rêves (dans Commerce). 8. Et malgré c
2866 perficielles et hâtives, comme cette prétention à la libération par le Rêve. « La liberté commence où naît le merveilleux.
2867 tives, comme cette prétention à la libération par le Rêve. « La liberté commence où naît le merveilleux. » Au vrai, et sur
2868 e cette prétention à la libération par le Rêve. «  La liberté commence où naît le merveilleux. » Au vrai, et surtout pour u
2869 ration par le Rêve. « La liberté commence où naît le merveilleux. » Au vrai, et surtout pour un homme qui élit Freud « pré
2870 rtout pour un homme qui élit Freud « président de la République du Rêve » – c’est presque un non-sens de chercher l’absolu
2871 du Rêve » – c’est presque un non-sens de chercher l’ absolue liberté dans le rêve. Le rêve, c’est la tyrannie des souvenirs
2872 ue un non-sens de chercher l’absolue liberté dans le rêve. Le rêve, c’est la tyrannie des souvenirs ; et ce n’est pas se l
2873 -sens de chercher l’absolue liberté dans le rêve. Le rêve, c’est la tyrannie des souvenirs ; et ce n’est pas se libérer qu
2874 er l’absolue liberté dans le rêve. Le rêve, c’est la tyrannie des souvenirs ; et ce n’est pas se libérer que de brasser ce
2875 onores. 9. Lettre à Paul Claudel. 10. Musset de La coupe et les lèvres. Mais oui, c’est paradoxal. 11. Les livres les p
2876 Lettre à Paul Claudel. 10. Musset de La coupe et les lèvres. Mais oui, c’est paradoxal. 11. Les livres les plus répandus
2877 pe et les lèvres. Mais oui, c’est paradoxal. 11. Les livres les plus répandus à Genève sont Ma vie et mon œuvre de Ford et
2878 èvres. Mais oui, c’est paradoxal. 11. Les livres les plus répandus à Genève sont Ma vie et mon œuvre de Ford et Mon curé c
2879 sont Ma vie et mon œuvre de Ford et Mon curé chez les riches. Très loin derrière viennent des France et des Bordeaux. 12.
2880 lus étroit, quelques esthètes du machinisme. 13. Le Paysan de Paris. o. Rougemont Denis de, « Louis Aragon, le beau pré
2881 e Paris. o. Rougemont Denis de, « Louis Aragon, le beau prétexte », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-F
2882 ibourg, avril 1927, p. 131-144. p. On a conservé la graphie de l’original, sans doute voulue par l’auteur.
2883 1927, p. 131-144. p. On a conservé la graphie de l’ original, sans doute voulue par l’auteur.
2884 é la graphie de l’original, sans doute voulue par l’ auteur.
53 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Quatre incidents (avril 1927)
2885 Quatre incidents (avril 1927)q r La maîtresse d’École Au printemps pur comme une joue, École errait, É
2886 joue, École errait, École suivait une femme dans les rues tant soit peu métaphysiques d’une capitale de mes songes. On exi
2887 t évanouis des arcs-en-ciel de névroses dans tous les poèmes où détresse rimait avec maîtresse. École savait le mythe du vo
2888 s où détresse rimait avec maîtresse. École savait le mythe du voyage, et qu’on ne manque pas le train bleu d’un désir. Ell
2889 savait le mythe du voyage, et qu’on ne manque pas le train bleu d’un désir. Elle était donc venue. Il la suivait entre les
2890 train bleu d’un désir. Elle était donc venue. Il la suivait entre les devantures qui se passaient de l’une à l’autre deux
2891 désir. Elle était donc venue. Il la suivait entre les devantures qui se passaient de l’une à l’autre deux séries de profils
2892 qu’au soleil toujours de face. Il ne vit plus que la foule des yeux bleus, son éblouissement. Soudain la voici, elle desce
2893 foule des yeux bleus, son éblouissement. Soudain la voici, elle descend à sa rencontre parmi les éclairs d’un luxe mécani
2894 udain la voici, elle descend à sa rencontre parmi les éclairs d’un luxe mécanique, le visage dans sa fourrure. Elle découvr
2895 rencontre parmi les éclairs d’un luxe mécanique, le visage dans sa fourrure. Elle découvre en passant près de lui le sour
2896 sa fourrure. Elle découvre en passant près de lui le sourire d’amitié mortel de tout ce qui n’arrive jamais. Il s’est trom
2897 Il pensa que c’était un ange, de ceux qui vont à la recherche des âmes. Aussitôt il téléphone à ceux du paradis : « Qui v
2898 sitôt il téléphone à ceux du paradis : « Qui va à la chasse perd sa place, nous nous comprenons. » On lui offrit immédiate
2899 À Max-Marc-Jean Jacob Reymond. Une étoile à la boutonnière, le marquis pénétra dans le salon de la duchesse, lui bai
2900 ean Jacob Reymond. Une étoile à la boutonnière, le marquis pénétra dans le salon de la duchesse, lui baisa la main et l’
2901 étoile à la boutonnière, le marquis pénétra dans le salon de la duchesse, lui baisa la main et l’abattit d’un coup de rev
2902 boutonnière, le marquis pénétra dans le salon de la duchesse, lui baisa la main et l’abattit d’un coup de revolver. Puis
2903 s pénétra dans le salon de la duchesse, lui baisa la main et l’abattit d’un coup de revolver. Puis s’en fut avec un tact e
2904 ans le salon de la duchesse, lui baisa la main et l’ abattit d’un coup de revolver. Puis s’en fut avec un tact exquis, qui
2905 n fut avec un tact exquis, qui fut très remarqué. Le duc riait sous une table, complètement ivre, et Bettina lui disait à
2906 table, complètement ivre, et Bettina lui disait à l’ oreille : « Mon chéri, si j’aime la comtesse ? Mais tu es si laid que
2907 a lui disait à l’oreille : « Mon chéri, si j’aime la comtesse ? Mais tu es si laid que cela me donne encore plus de plaisi
2908 laid que cela me donne encore plus de plaisir. » Le duc paya et s’enfuit en disant que ce n’était pas lui. L’enterrement
2909 aya et s’enfuit en disant que ce n’était pas lui. L’ enterrement aura lieu sans suite. Suicide du Marquis Salomon le
2910 lieu sans suite. Suicide du Marquis Salomon le danseur triste baisa cette main cruelle… et quitta le bal au matin. I
2911 anseur triste baisa cette main cruelle… et quitta le bal au matin. Il neigeait dans les rues sourdes comme un songe de son
2912 elle… et quitta le bal au matin. Il neigeait dans les rues sourdes comme un songe de son enfance. Aux fenêtres du palais s’
2913 e. Aux fenêtres du palais s’étoilèrent des halos. Le jour tendre paraissait sous l’égide de la mort. Il vit des fleurs de
2914 ilèrent des halos. Le jour tendre paraissait sous l’ égide de la mort. Il vit des fleurs de son enfance, une églantine, que
2915 halos. Le jour tendre paraissait sous l’égide de la mort. Il vit des fleurs de son enfance, une églantine, quelques roses
2916 e églantine, quelques roses, un sourire qui perce le cœur sur les glaces du passé. Cet abandon aux fuyantes chansons, et d
2917 quelques roses, un sourire qui perce le cœur sur les glaces du passé. Cet abandon aux fuyantes chansons, et des violons dé
2918 ons, et des violons déchirants dans sa tête… Mais le sommeil s’évaporait aux caresses des flocons, plus perfides que des m
2919 perfides que des murmures d’adieu. Il tomba parmi les statues, dans l’amitié pensive des jardins. Une fenêtre s’était ouver
2920 urmures d’adieu. Il tomba parmi les statues, dans l’ amitié pensive des jardins. Une fenêtre s’était ouverte et des accords
2921 ’était ouverte et des accords échappés tombaient, les ailes coupées. Puis le silence se reprit à ses songes désolés. Aut
2922 cords échappés tombaient, les ailes coupées. Puis le silence se reprit à ses songes désolés. Autre suicide ou la promen
2923 reprit à ses songes désolés. Autre suicide ou la promenade en bateau À Grego More. Il disait : « Je suis né pour
2924 À Grego More. Il disait : « Je suis né pour la mort. » Il fait assez beau pour que s’ouvre ce cœur de l’après-midi,
2925  » Il fait assez beau pour que s’ouvre ce cœur de l’ après-midi, comme un camélia de tendre orgueil. Il respire déjà l’odeu
2926 mme un camélia de tendre orgueil. Il respire déjà l’ odeur merveilleuse des objets et des êtres véritables. Un bateau ne gl
2927 bles. Un bateau ne glisse pas plus doucement vers le soleil du haut-lac. Justement, voici que tout va s’ouvrir, qu’un mond
2928 s’ouvrir, qu’un monde s’est ouvert devant lui. Et l’ eau n’est pas moins somptueuse. Et bien sûr, je n’ai pas bougé. C’est
2929 me rendre seul et sans argent. Je ne voulais pas le retenir, Je ne pouvais pas le suivre. On dit de ces phrases. Même, on
2930 . Je ne voulais pas le retenir, Je ne pouvais pas le suivre. On dit de ces phrases. Même, on en pleure. q. Rougemont D
54 1927, Articles divers (1924–1930). Jeunes artistes neuchâtelois (avril 1927)
2931 is (avril 1927)k Neuchâtel va-t-elle redevenir le centre artistique qu’elle fut au siècle passé ? Allons-nous assister
2932 ster à un regroupement de ses forces créatrices ? La question est peut-être prématurée. Mais le seul fait qu’elle se pose
2933 ices ? La question est peut-être prématurée. Mais le seul fait qu’elle se pose me paraît indiquer que l’un au moins des de
2934 artistes, en effet, n’ignorent rien des courants les plus modernes, et sont bien situés pour n’en prendre que le meilleur 
2935 dernes, et sont bien situés pour n’en prendre que le meilleur ; mais l’émulation, l’atmosphère de combat nécessaire au dév
2936 n situés pour n’en prendre que le meilleur ; mais l’ émulation, l’atmosphère de combat nécessaire au développement de certa
2937 n’en prendre que le meilleur ; mais l’émulation, l’ atmosphère de combat nécessaire au développement de certains jeunes te
2938 ertains jeunes tempéraments leur fait défaut dans la même mesure. Ainsi risquent de s’établir autour d’eux des mœurs un pe
2939 œurs un peu bourgeoises dont je ne vais pas faire le procès, mais qui expliquent, me semble-t-il, pour une part, la disper
2940 is qui expliquent, me semble-t-il, pour une part, la dispersion des efforts artistiques. Tout ce monde d’amateurs de décou
2941 aux, de critiques d’avant-garde, ce monde où tous les extrémismes sont prônés comme vertus cardinales, et qui forme ailleur
2942 r public des jeunes artistes, n’existant pas ici, le peintre se trouve placé d’emblée en face de ce qu’on nomme le gros pu
2943 e trouve placé d’emblée en face de ce qu’on nomme le gros public. L’épreuve est pénible, énervante, souvent fatale aux nov
2944 ’emblée en face de ce qu’on nomme le gros public. L’ épreuve est pénible, énervante, souvent fatale aux novateurs. Alors il
2945 le d’une consécration étrangère. Un jour en effet l’ on apprend que tel tableau de jeune est « coté » chez un gros marchand
2946 une est « coté » chez un gros marchand. Aussitôt, les feuilles locales retentissent de touchants échos : « C’est avec un lé
2947 bien méritée du talent d’un de ses enfants… » Car le fils prodigue, s’il rentre au foyer dans une Rolls-Royce et fortune f
2948 ttendait pas moins du fils d’un tel père. « Voilà le train du monde… » Je ne pense pas qu’il en faille gémir. Une certaine
2949 . Une certaine résistance est nécessaire pour que la force se développe. N’était certain petit plaisir d’impertinence, je
2950 une actualité toujours vive. D’ailleurs, sachons le reconnaître, il y a moins de malice que de paresse dans les jugements
2951 aître, il y a moins de malice que de paresse dans les jugements du public, et moins d’incompréhension que de timidité. ⁂ On
2952 ans, jusqu’à André Evard, qui en a près de 50, si les peintres dont nous allons parler méritent d’être appelés jeunes, c’es
2953 leurs œuvres avant tout. D’autre part je préfère la légende à l’histoire comme la peinture à la photographie. Une œuvre d
2954 avant tout. D’autre part je préfère la légende à l’ histoire comme la peinture à la photographie. Une œuvre d’art est un m
2955 tre part je préfère la légende à l’histoire comme la peinture à la photographie. Une œuvre d’art est un merveilleux foyer
2956 éfère la légende à l’histoire comme la peinture à la photographie. Une œuvre d’art est un merveilleux foyer de contagion c
2957 agion contre lequel je ne saurais me prémunir par le moyen d’aucun de ces appareils à jugements garantis qui posent un cri
2958 t un critique d’art diplômé. Premier péché contre l’ histoire : au seuil d’un article consacré aux jeunes artistes neuchâte
2959 t entre trente pareilles, aux cactus qui ornaient les fenêtres, dans une chambre peinte en bleu vif et ornée de surprenants
2960 straites. De cette époque datent des toiles comme le Souvenir de l’Évêché. Décors et personnages semblent d’une matière id
2961 tte époque datent des toiles comme le Souvenir de l’ Évêché. Décors et personnages semblent d’une matière idéale. Tout est
2962 fait seulement. Il manque à ces recompositions de la nature, à ces natures remises à neuf, l’imperfection humaine qui touc
2963 tions de la nature, à ces natures remises à neuf, l’ imperfection humaine qui touche. Mais l’atmosphère pure de ces espaces
2964 s à neuf, l’imperfection humaine qui touche. Mais l’ atmosphère pure de ces espaces définis par quelques plans ne tue pas u
2965 ailleurs… Qu’il sorte enfin et se mette à graver les scènes qu’il voit dans la petite cité ouvrière, et c’est merveille de
2966 n et se mette à graver les scènes qu’il voit dans la petite cité ouvrière, et c’est merveille de constater combien l’épura
2967 ouvrière, et c’est merveille de constater combien l’ épuration rigoriste de sa technique sert une vision aigüe de la vie. L
2968 igoriste de sa technique sert une vision aigüe de la vie. La série de gravures sur bois colorées qu’il intitule la cité es
2969 de sa technique sert une vision aigüe de la vie. La série de gravures sur bois colorées qu’il intitule la cité est un pet
2970 érie de gravures sur bois colorées qu’il intitule la cité est un petit chef-d’œuvre de réalisme stylisé. C’est d’un art tr
2971 , qui connaît ses ressources et sait en user avec la sobriété qui produit le maximum d’expression. Cette « simplicité préc
2972 rces et sait en user avec la sobriété qui produit le maximum d’expression. Cette « simplicité précieuse », il sait la conf
2973 pression. Cette « simplicité précieuse », il sait la conférer à tout ce qu’il touche, qu’il décore une bannière, fabrique
2974 e un peu bizarre qu’il glisse si souvent là où on l’ attend le moins. Conrad Meili apporte chez nous une inspiration neuve,
2975 bizarre qu’il glisse si souvent là où on l’attend le moins. Conrad Meili apporte chez nous une inspiration neuve, d’origin
2976 e germanique, mais qui a choisi de s’astreindre à la voluptueuse rigueur latine, et qui tout en s’épurant dans des formes
2977 ui tout en s’épurant dans des formes claires a su les renouveler. Il nous apporte aussi cet élément de vitalité combative q
2978 ’il casse des vitres, ce n’est pas seulement pour le plaisir, mais plutôt par amour du courant d’air. Cela dérange toujour
2979 air. Cela dérange toujours quelques frileux, mais les autres sont soulagés. Et ne fût-ce qu’en prenant une initiative comme
2980 uchâtel 1927 7 il aura bien mérité sa place parmi les artistes neuchâtelois. Actuellement, Meili achève la décoration d’une
2981 artistes neuchâtelois. Actuellement, Meili achève la décoration d’une salle d’hôtel en collaboration avec Paul Donzé. Qui
2982 ssionniste s’astreindrait jamais aux exigences de la technique décorative ! Voilà qui laisse espérer parmi nos artistes bi
2983 oins paradoxaux. Donzé n’est pas de ceux pour qui la peinture consiste à habiller une idée. Voyez son portrait de Meili :
2984 ée. Voyez son portrait de Meili : il ne prend pas le sujet par l’intérieur, mais il taille ce visage dans une pâte riche e
2985 portrait de Meili : il ne prend pas le sujet par l’ intérieur, mais il taille ce visage dans une pâte riche et un peu lour
2986 dans une pâte riche et un peu lourde, son pinceau la palpe, la presse, la réduit à la forme qu’il voit. Il y a de la sensu
2987 âte riche et un peu lourde, son pinceau la palpe, la presse, la réduit à la forme qu’il voit. Il y a de la sensualité dans
2988 t un peu lourde, son pinceau la palpe, la presse, la réduit à la forme qu’il voit. Il y a de la sensualité dans l’écraseme
2989 rde, son pinceau la palpe, la presse, la réduit à la forme qu’il voit. Il y a de la sensualité dans l’écrasement de ses co
2990 resse, la réduit à la forme qu’il voit. Il y a de la sensualité dans l’écrasement de ses couleurs, une sensualité qui sait
2991 la forme qu’il voit. Il y a de la sensualité dans l’ écrasement de ses couleurs, une sensualité qui sait se faire délicate
2992 avec des roses et des jaunes jamais mièvres, sous l’ œil méfiant des fascistes qui le prennent pour un agitateur russe, à c
2993 ais mièvres, sous l’œil méfiant des fascistes qui le prennent pour un agitateur russe, à cause de sa chevelure, sans doute
2994 e tromper plus. ⁂ À vrai dire j’en vois peu parmi les jeunes qui vouent tout leur amour à la peinture pure. Je crois même q
2995 peu parmi les jeunes qui vouent tout leur amour à la peinture pure. Je crois même que, Paul Donzé touché à son tour par la
2996 crois même que, Paul Donzé touché à son tour par la grâce décorative, il n’en reste qu’un, du moins à Neuchâtel même : Eu
2997 vier. Ce garçon aux allures discrètes promène sur le monde des yeux de Japonais d’une ironie mélancolique et qui voient pl
2998 ient plus loin qu’on ne croit, mais il a toujours l’ air de songer à la Hollande, sa seconde patrie si la peinture est sa p
2999 on ne croit, mais il a toujours l’air de songer à la Hollande, sa seconde patrie si la peinture est sa première et Neuchât
3000 air de songer à la Hollande, sa seconde patrie si la peinture est sa première et Neuchâtel la troisième… Il y a par Eugène
3001 par Eugène Bouvier quelque chose de nouveau dans la peinture neuchâteloise : un lyrisme un peu amer, d’une tristesse qui
3002 y a une sorte d’aristocratique dissimulation dans l’ œuvre de Bouvier. Sa technique qui paraît au premier abord masquer ses
3003 premier abord masquer ses intentions, en réalité les exprime par ses défauts mêmes ou ses fausses négligences ; mais il fa
3004 oujours une sorte de dissonance, un défaut par où l’ on va peut-être se glisser dans l’atmosphère de l’œuvre ; que l’on con
3005 n défaut par où l’on va peut-être se glisser dans l’ atmosphère de l’œuvre ; que l’on consente en effet à telle déformation
3006 l’on va peut-être se glisser dans l’atmosphère de l’ œuvre ; que l’on consente en effet à telle déformation, et tout devien
3007 tre se glisser dans l’atmosphère de l’œuvre ; que l’ on consente en effet à telle déformation, et tout devient satisfaisant
3008 ère que Louis de Meuron, parmi ses aînés, dont on le puisse rapprocher, parce qu’il est un des rares peintres de ce pays p
3009 ’il est un des rares peintres de ce pays pour qui la couleur existe avant tout. Mais la nostalgie de Bouvier l’entraîne à
3010 pays pour qui la couleur existe avant tout. Mais la nostalgie de Bouvier l’entraîne à mille lieues des jardins de sourire
3011 r existe avant tout. Mais la nostalgie de Bouvier l’ entraîne à mille lieues des jardins de sourires qui s’épanouissent sur
3012 es des jardins de sourires qui s’épanouissent sur les toiles de Meuron. Il semble toujours qu’il peigne entre deux pluies.
3013 onde se mêlent, et sait rendre mieux que personne la liquidité d’un lac, certaines atmosphères délavées et sourdes. « Temp
3014 couvert, calme, légères précipitations » annonce le bulletin. Tiens, me dis-je, Bouvier va peindre. Comme peintre religie
3015 re religieux, il se cherche encore. On a pourtant l’ impression, à voir ses dernières toiles, d’une plus grande certitude i
3016 s toiles, d’une plus grande certitude intérieure. Les visages sont plus calmes, les couleurs s’avivent, le soleil est sur l
3017 rtitude intérieure. Les visages sont plus calmes, les couleurs s’avivent, le soleil est sur le point de reparaître… Charle
3018 visages sont plus calmes, les couleurs s’avivent, le soleil est sur le point de reparaître… Charles Humbert ou comment on
3019 nq ans de Baudelaire à Rubens. Il fut un temps où l’ on put craindre que Charles Humbert ne devînt le chef d’une école du g
3020 ù l’on put craindre que Charles Humbert ne devînt le chef d’une école du gris-noir neurasthénique. Il peignait des natures
3021 ue. Il peignait des natures mortes qui décidément l’ étaient, à faire froid dans le dos ; ou bien des scènes d’une bizarre
3022 rtes qui décidément l’étaient, à faire froid dans le dos ; ou bien des scènes d’une bizarre fantaisie, un mélange de Rops
3023 g, G. H. Dessoulavy)… Mais déjà paraissaient dans les Voix (cette courageuse revue qu’il avait fondée avec J. P. Zimmermann
3024 un tempérament très rassurant. C’était, je crois, le vrai Humbert qui commençait à s’affirmer. Puis il y eut une période i
3025 onies funèbres, comme un qui n’attendrait pas que l’ enterrement s’éloigne pour entonner une chanson à boire. Et sa techniq
3026 nt maigre se faisait trop lâche. Mais aujourd’hui la mue semble s’être opérée. Humbert est rendu à lui-même. Il atteint so
3027 son équilibre et sa maîtrise avec une toile comme le Potier. Si la couleur n’est pas encore aussi plantureuse que les form
3028 et sa maîtrise avec une toile comme le Potier. Si la couleur n’est pas encore aussi plantureuse que les formes, il y a une
3029 la couleur n’est pas encore aussi plantureuse que les formes, il y a une belle richesse de lueurs sur une matière traitée l
3030 possibilités imprévues. Il y a un côté « homme de la Renaissance » chez un Charles Humbert livré à sa fougue originale. Il
3031 plus encore chez un Aurèle Barraud. Il suffit de le voir peint par lui-même pour s’en assurer. La tête large, aux yeux cl
3032 de le voir peint par lui-même pour s’en assurer. La tête large, aux yeux clairs et assurés, le cou robuste, les mains d’u
3033 surer. La tête large, aux yeux clairs et assurés, le cou robuste, les mains d’un si beau dessin, qui ont du poids et nulle
3034 arge, aux yeux clairs et assurés, le cou robuste, les mains d’un si beau dessin, qui ont du poids et nulle lourdeur, tout c
3035 nce domptée et qui semble se faire une volupté de la discipline qu’elle s’impose. Et voilà qui fait encore plus « Renaissa
3036 . Et voilà qui fait encore plus « Renaissance » : le costume est drapé avec un soin minutieux, mais une grande mèche insol
3037 x, mais une grande mèche insolente retombe devant le visage. Aurèle tient un livre ouvert, et ce n’est pas je pense qu’il
3038 t un livre ouvert, et ce n’est pas je pense qu’il le lise, mais il aime caresser la reliure qu’il doit avoir faite lui-mêm
3039 pas je pense qu’il le lise, mais il aime caresser la reliure qu’il doit avoir faite lui-même. Car il est artisan, dans le
3040 it avoir faite lui-même. Car il est artisan, dans le beau sens ancien du terme, tout comme son frère Charles Barraud, qui
3041 s, à encadrer des glaces. Et plaise aux dieux que les visages qui s’y reflèteront soient aussi beaux que ceux qu’il peint o
3042 oient aussi beaux que ceux qu’il peint ou modèle, le soir, à la lampe, en compagnie de sa femme (elle peint aussi, d’un œi
3043 beaux que ceux qu’il peint ou modèle, le soir, à la lampe, en compagnie de sa femme (elle peint aussi, d’un œil regardant
3044 de sa femme (elle peint aussi, d’un œil regardant le sujet, de l’autre ce qu’en fait son mari). Et puis voici François Bar
3045 n fait son mari). Et puis voici François Barraud, le plus jeune des frères. Il vient apporter des dessins qui ressemblent
3046 ns qui ressemblent beaucoup aux petites huiles de Charles , moins intensément réalistes, plus fins, mais tout aussi habiles dans
3047 éalistes, plus fins, mais tout aussi habiles dans l’ utilisation du clair-obscur qui simplifie et renforce l’expression. Dé
3048 isation du clair-obscur qui simplifie et renforce l’ expression. Décidément ces trois frères sont une école. Délaissant un
3049 ons désormais retrouver, allons errer un peu dans le royaume d’Utopie. André Evard va nous y introduire, et nous ne saurio
3050 es années d’avance sur ses contemporains. Un jour les jeunes le rattrapent. Salutations, présentations : « André Evard. — L
3051 ’avance sur ses contemporains. Un jour les jeunes le rattrapent. Salutations, présentations : « André Evard. — Les jeunes
3052 nt. Salutations, présentations : « André Evard. —  Les jeunes peintres. — Vous suivez la même route que nous ? À la bonne he
3053 André Evard. — Les jeunes peintres. — Vous suivez la même route que nous ? À la bonne heure ! ». Et l’on repart bras dessu
3054 eintres. — Vous suivez la même route que nous ? À la bonne heure ! ». Et l’on repart bras dessus, bras dessous. Et l’on ap
3055 la même route que nous ? À la bonne heure ! ». Et l’ on repart bras dessus, bras dessous. Et l’on apprend peu à peu des cho
3056 ! ». Et l’on repart bras dessus, bras dessous. Et l’ on apprend peu à peu des choses bien curieuses sur son compte. Il a fa
3057 hoses bien curieuses sur son compte. Il a fait de la pâtisserie, mais on m’assure qu’il se nourrit de noix et d’oranges. I
3058 cles où sous un éclairage très net, mais inusité, l’ objet le plus banal se charge de mystère. Que va-t-il se passer là-ded
3059 sous un éclairage très net, mais inusité, l’objet le plus banal se charge de mystère. Que va-t-il se passer là-dedans ? Et
3060 e va-t-il se passer là-dedans ? Et ces roses sont le signe de quel occulte prodige ? Intrigué, vous reprenez ce que vous p
3061 qui s’incarne dans ces motifs géométriques, pour le plaisir de la perfection exercée par jeu. Mais quel support à de nouv
3062 dans ces motifs géométriques, pour le plaisir de la perfection exercée par jeu. Mais quel support à de nouvelles songerie
3063 rd n’aille trouver une de ces machines à explorer l’ au-delà. En vérité il faut être sorcier ou artiste pour changer en ins
3064 métaphysiques ces bonnes montres de précision de La Chaux-de-Fonds… Avant de quitter les peintres, rappelons le souvenir
3065 précision de La Chaux-de-Fonds… Avant de quitter les peintres, rappelons le souvenir de Charles Harder, qui est mort jeune
3066 e-Fonds… Avant de quitter les peintres, rappelons le souvenir de Charles Harder, qui est mort jeune, sans avoir pu donner
3067 r qui saura s’imposer. Léon Perrin a compris tout le parti qu’on pouvait tirer des principes cubistes dans un art dont la
3068 ait tirer des principes cubistes dans un art dont la genèse même est cubiste en quelque sorte, supposant une décomposition
3069 y avait quelque lourdeur dans des morceaux comme le Joueur de rugby. C’était le poids de la pierre, plus que celui du cor
3070 ns des morceaux comme le Joueur de rugby. C’était le poids de la pierre, plus que celui du corps de l’athlète ; l’œuvre n’
3071 aux comme le Joueur de rugby. C’était le poids de la pierre, plus que celui du corps de l’athlète ; l’œuvre n’atteignait p
3072 le poids de la pierre, plus que celui du corps de l’ athlète ; l’œuvre n’atteignait pas encore pleinement sa vie propre. De
3073 la pierre, plus que celui du corps de l’athlète ; l’ œuvre n’atteignait pas encore pleinement sa vie propre. Depuis, Léon P
3074 du BIT où se manifeste un heureux équilibre entre le réalisme imposé par les sujets et un style qui sait rester ample, d’u
3075 un heureux équilibre entre le réalisme imposé par les sujets et un style qui sait rester ample, d’une simplicité non dépour
3076 cité non dépourvue de puissance. Une fois de plus l’ on peut admirer la salutaire leçon de style donnée par le cubisme aux
3077 de puissance. Une fois de plus l’on peut admirer la salutaire leçon de style donnée par le cubisme aux artistes qui ont s
3078 ut admirer la salutaire leçon de style donnée par le cubisme aux artistes qui ont su se dégager de son outrance théorique.
3079 se dégager de son outrance théorique. C’est dans la manière cubiste encore que Perrin décora naguère fort plaisamment une
3080 e n’est certes pas complète. Mais elle a du moins l’ avantage de grouper des artistes qui, par le fait des circonstances pe
3081 moins l’avantage de grouper des artistes qui, par le fait des circonstances peut-être plus que par de naturelles affinités
3082 ns décoratives qui pourraient aboutir peut-être à la formation d’un groupe dont l’activité serait féconde en ce pays. D’au
3083 aboutir peut-être à la formation d’un groupe dont l’ activité serait féconde en ce pays. D’autre part, des œuvres aussi dif
3084 t, des œuvres aussi différentes par leur objet et le domaine où elles se réalisent que celles de Le Corbusier8, Meili, Eva
3085 et le domaine où elles se réalisent que celles de Le Corbusier8, Meili, Evard, Perrin, manifestent toutes une recherche de
3086 vard, Perrin, manifestent toutes une recherche de la simplicité savante et de la perfection du métier, un goût pour la con
3087 utes une recherche de la simplicité savante et de la perfection du métier, un goût pour la construction rigoureuse qui son
3088 vante et de la perfection du métier, un goût pour la construction rigoureuse qui sont des éléments peut-être insuffisants
3089 nérale vers une sorte de classicisme moderne dont les frères Barraud ne seraient pas très éloignés par d’autres côtés. Un a
3090 samment atteint si nous n’avions fait qu’affirmer l’ existence et la vitalité d’une jeune peinture originale dans un pays q
3091 si nous n’avions fait qu’affirmer l’existence et la vitalité d’une jeune peinture originale dans un pays qu’on s’est trop
3092 ue et d’une maigre végétation artistique. Pays où l’ on préfère la netteté utile à l’harmonie des lignes ; où la lumière éc
3093 aigre végétation artistique. Pays où l’on préfère la netteté utile à l’harmonie des lignes ; où la lumière éclaire plus qu
3094 tistique. Pays où l’on préfère la netteté utile à l’ harmonie des lignes ; où la lumière éclaire plus qu’elle ne caresse ;
3095 ère la netteté utile à l’harmonie des lignes ; où la lumière éclaire plus qu’elle ne caresse ; où pourtant les hivers les
3096 ère éclaire plus qu’elle ne caresse ; où pourtant les hivers les plus durs réservent des douceurs secrètes. 7. Publicatio
3097 plus qu’elle ne caresse ; où pourtant les hivers les plus durs réservent des douceurs secrètes. 7. Publication dont cett
3098 n vrai nom Ch. E. Jeanneret, un article paru dans le numéro de février de cette revue. k. Rougemont Denis de, « Jeunes a
55 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Bernard Lecache, Jacob (mai 1927)
3099 hoquer et s’imposer pourtant. M. Lecache présente le problème juif avec une obstination à ne rien cacher qui le mène profo
3100 me juif avec une obstination à ne rien cacher qui le mène profond. Une famille juive dans le Marais. Le père est un taille
3101 acher qui le mène profond. Une famille juive dans le Marais. Le père est un tailleur, biblique, austère et probe, qui n’a
3102 e mène profond. Une famille juive dans le Marais. Le père est un tailleur, biblique, austère et probe, qui n’a d’ambition
3103 , qui n’a d’ambition que pour ses enfants. Jacob, l’ aîné se révolte. Sensualité, intelligence, brutalité : les caractères
3104 se révolte. Sensualité, intelligence, brutalité : les caractères se résument dans son avidité de puissance. C’est par l’arg
3105 résument dans son avidité de puissance. C’est par l’ argent qu’on domine notre âge : il devient grand industriel, assure sa
3106 au prix du peu cynique reniement de ses origines. Le vieux père s’effondre de honte et de douleur. « On vend de l’étoffe…
3107 e s’effondre de honte et de douleur. « On vend de l’ étoffe… eux ils se vendent ! » Mais Jacob a renié ses parents, non leu
3108 ents, non leurs ambitions. Surmontant son dégoût, le père ajoute : « Notre sang sera vainqueur… Qu’ils m’oublient, qu’ils
3109 ueur… Qu’ils m’oublient, qu’ils me méprisent ! Je les vois régner. Je salue leur Loi. » Le récit grassement pittoresque dan
3110 risent ! Je les vois régner. Je salue leur Loi. » Le récit grassement pittoresque dans la description du milieu juif, pren
3111 leur Loi. » Le récit grassement pittoresque dans la description du milieu juif, prend une âpre rapidité avec l’ascension
3112 tion du milieu juif, prend une âpre rapidité avec l’ ascension de Jacob et ses luttes. On pardonne bon nombre de platitudes
3113 ne bon nombre de platitudes et de vulgarités pour les derniers chapitres, denses, violents, et dont le profond ricanement s
3114 les derniers chapitres, denses, violents, et dont le profond ricanement se prolonge en nous. Je crois entendre Jacob qui s
3115 fort que cette bourgeoisie fatiguée, et de suivre le destin que vous m’avez assigné à force de m’humilier et de me craindr
56 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). René Crevel, La Mort difficile (mai 1927)
3116 René Crevel, La Mort difficile (mai 1927)ai Le jeu de tout dire est une des plus t
3117 René Crevel, La Mort difficile (mai 1927)ai Le jeu de tout dire est une des plus tragiques inventions de l’inquiétud
3118 out dire est une des plus tragiques inventions de l’ inquiétude actuelle. Sous couleur de démasquer l’humain, et par l’acha
3119 l’inquiétude actuelle. Sous couleur de démasquer l’ humain, et par l’acharnement angoissé qu’on y apporte, l’on en vient à
3120 uelle. Sous couleur de démasquer l’humain, et par l’ acharnement angoissé qu’on y apporte, l’on en vient à une conception d
3121 n, et par l’acharnement angoissé qu’on y apporte, l’ on en vient à une conception de la sincérité qui me paraît proprement
3122 u’on y apporte, l’on en vient à une conception de la sincérité qui me paraît proprement inhumaine. Tout dire, vraiment ? C
3123 proprement inhumaine. Tout dire, vraiment ? C’est l’ exigence d’une détresse cachée ; elle fait bientôt considérer toute jo
3124 ôt considérer toute joie comme illusoire et livre l’ individu pieds et poings liés à l’obsession qu’il voulait avouer pour
3125 usoire et livre l’individu pieds et poings liés à l’ obsession qu’il voulait avouer pour s’en délivrer peut-être. Cette sin
3126 re. Cette sincérité ne serait-elle à son tour que le masque d’un goût du malheur ? Le sujet profond de ce roman, où l’on v
3127 e à son tour que le masque d’un goût du malheur ? Le sujet profond de ce roman, où l’on voit comment Pierre en vient à sac
3128 oût du malheur ? Le sujet profond de ce roman, où l’ on voit comment Pierre en vient à sacrifier Diane, son apaisement, pou
3129 sement, pour Arthur, sa « maladie », c’est encore l’ « élan mortel » que décrivait Mon Corps et Moi. Quand l’analyse féroce
3130 an mortel » que décrivait Mon Corps et Moi. Quand l’ analyse féroce de Crevel fouille les pensées de Pierre ou de Diane, le
3131 et Moi. Quand l’analyse féroce de Crevel fouille les pensées de Pierre ou de Diane, les gestes d’Arthur, le roman vit et n
3132 Crevel fouille les pensées de Pierre ou de Diane, les gestes d’Arthur, le roman vit et nous touche par la force de ce tourm
3133 nsées de Pierre ou de Diane, les gestes d’Arthur, le roman vit et nous touche par la force de ce tourment ou de ce sauvage
3134 gestes d’Arthur, le roman vit et nous touche par la force de ce tourment ou de ce sauvage égoïsme ; mais qu’elle s’acharn
3135 e ce sauvage égoïsme ; mais qu’elle s’acharne sur le détail dégoûtant et mesquin de certain milieu bourgeois, et l’on voit
3136 oûtant et mesquin de certain milieu bourgeois, et l’ on voit bien que l’auteur n’est pas encore détaché de la matière pour
3137 e certain milieu bourgeois, et l’on voit bien que l’ auteur n’est pas encore détaché de la matière pour en tirer une œuvre
3138 oit bien que l’auteur n’est pas encore détaché de la matière pour en tirer une œuvre d’art. La sincérité audacieuse mais s
3139 aché de la matière pour en tirer une œuvre d’art. La sincérité audacieuse mais sans bravade qui donne à ce livre sa valeur
3140 trahissent une écriture hâtive. Mais il y a dans l’ œuvre de René Crevel un sens de la douleur et un sérieux humain qui fo
3141 ais il y a dans l’œuvre de René Crevel un sens de la douleur et un sérieux humain qui forcent la sympathie. ai. Rougemo
3142 ns de la douleur et un sérieux humain qui forcent la sympathie. ai. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] René Crevel, L
3143 Rougemont Denis de, « [Compte rendu] René Crevel,  La Mort difficile  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genèv
57 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Paul Éluard, Capitale de la douleur (mai 1927)
3144 Paul Éluard, Capitale de la douleur (mai 1927)aj Nocturnes aux caresses coupantes comme certai
3145 ses coupantes comme certaines herbes. Capitale de la douleurak, ce sont de belles syllabes sereines, et dans cette ville,
3146 yllabes sereines, et dans cette ville, Éluard est le plus séduisant, le plus dangereusement gracieux des noctambules. Rêve
3147 t dans cette ville, Éluard est le plus séduisant, le plus dangereusement gracieux des noctambules. Rêves éveillés, entre d
3148 lixir dont il voudrait bien nous faire croire que le diable est l’auteur. Beaucoup d’oiseaux volètent, se balancent au bor
3149 voudrait bien nous faire croire que le diable est l’ auteur. Beaucoup d’oiseaux volètent, se balancent au bord des verres,
3150 t, se balancent au bord des verres, se posent sur les cordes d’une lyre dont ils font grésiller l’accord, une patte en l’ai
3151 sur les cordes d’une lyre dont ils font grésiller l’ accord, une patte en l’air, becquètent le cœur d’une femme qui va les
3152 re dont ils font grésiller l’accord, une patte en l’ air, becquètent le cœur d’une femme qui va les étrangler doucement. Ce
3153 résiller l’accord, une patte en l’air, becquètent le cœur d’une femme qui va les étrangler doucement. Ces vers sont de jol
3154 e en l’air, becquètent le cœur d’une femme qui va les étrangler doucement. Ces vers sont de jolies flèches empoisonnées. Qu
3155 e, de laqué, d’élégant, de « bien français » ; et le mot sang n’évoque ici qu’une tache de couleur, plus sentimental que c
3156 he de couleur, plus sentimental que cruel. « J’ai la beauté facile et c’est heureux. » Il y a aussi un certain tragique, m
3157 nis de, « [Compte rendu] Paul Éluard, Capitale de la douleur  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mai
3158 Genève, mai 1927, p. 693-694. ak. En romain dans l’ édition originale.
58 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Pierre Drieu la Rochelle, La Suite dans les idées (mai 1927)
3159 Pierre Drieu la Rochelle, La Suite dans les idées (mai 1927)al « De quoi s’agit-il ? de détruir
3160 Pierre Drieu la Rochelle, La Suite dans les idées (mai 1927)al « De quoi s’agit-il ? de détruire ou de rafisto
3161 Drieu s’examine. Encore un ? Non, enfin un. Tous les autres y ont apporté de secrètes complaisances, ou une arrière-pensée
3162 esoin d’être aimés qui faussaient leurs voix pour les rendre plus touchantes. Celui-ci bat sa coulpe avec une saine rudesse
3163 té corrompu et infect et adonné à mal » (Calvin). Le tableau n’est pas beau, mais on y sent une « patte » qui révèle encor
3164 is on y sent une « patte » qui révèle encore dans le fond quelque chose de solide, d’authentique. J’aime cette violence de
3165 redressement où je distingue bien autre chose que les « éclats de l’impuissance ». Un plus délicat eut compris que certains
3166 je distingue bien autre chose que les « éclats de l’ impuissance ». Un plus délicat eut compris que certains des morceaux t
3167 fection, s’il ne peut encore s’en tirer, du moins l’ avoue-t-il avec une franchise qui la rend sympathique. Et puis, tout d
3168 rer, du moins l’avoue-t-il avec une franchise qui la rend sympathique. Et puis, tout de même, on est bien heureux de renco
3169 t de même, on est bien heureux de rencontrer chez les jeunes écrivains français un homme qui ait à ce point le sens de l’ép
3170 es écrivains français un homme qui ait à ce point le sens de l’époque, une vision si claire et si tragique de la civilisat
3171 s français un homme qui ait à ce point le sens de l’ époque, une vision si claire et si tragique de la civilisation d’Occid
3172 l’époque, une vision si claire et si tragique de la civilisation d’Occident. Les questions capitales posées ailleurs depu
3173 ire et si tragique de la civilisation d’Occident. Les questions capitales posées ailleurs depuis longtemps par des maîtres
3174 ir échappé au surréalisme en tant qu’il n’est que le triomphe de la littérature sur la vie, mais d’avoir su en garder une
3175 urréalisme en tant qu’il n’est que le triomphe de la littérature sur la vie, mais d’avoir su en garder une passion pour la
3176 qu’il n’est que le triomphe de la littérature sur la vie, mais d’avoir su en garder une passion pour la pureté, un « jusqu
3177 a vie, mais d’avoir su en garder une passion pour la pureté, un « jusqu’au boutisine » qui seul peut redonner quelque vita
3178 ourd’hui, presque sans pose, et décidé à mépriser le bluff. al. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Pierre Drieu la Ro
3179 is de, « [Compte rendu] Pierre Drieu la Rochelle, La Suite dans les idées  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
3180 te rendu] Pierre Drieu la Rochelle, La Suite dans les idées  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mai 19
59 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Récit du pickpocket (fragment) (mai 1927)
3181 mmerce, qu’on m’a appris à voler. Aristophane («  Les Chevaliers »). Dès qu’on eut déposé devant Isidore un malaga et une
3182 inérale devant son étrange convive, celui-ci prit la parole sans plus de cérémonie : « La jeunesse, Monsieur…, la jeunesse
3183 elui-ci prit la parole sans plus de cérémonie : «  La jeunesse, Monsieur…, la jeunesse est l’âge où l’on atteint la vie. On
3184 ans plus de cérémonie : « La jeunesse, Monsieur…, la jeunesse est l’âge où l’on atteint la vie. On s’y maintient cinq ans,
3185 monie : « La jeunesse, Monsieur…, la jeunesse est l’ âge où l’on atteint la vie. On s’y maintient cinq ans, dix ans au plus
3186  La jeunesse, Monsieur…, la jeunesse est l’âge où l’ on atteint la vie. On s’y maintient cinq ans, dix ans au plus. Après,
3187 Monsieur…, la jeunesse est l’âge où l’on atteint la vie. On s’y maintient cinq ans, dix ans au plus. Après, c’est un long
3188 s, dix ans au plus. Après, c’est un long adieu et le corps se fige à mesure que l’esprit s’établit sur ses positions. Or d
3189 st un long adieu et le corps se fige à mesure que l’ esprit s’établit sur ses positions. Or donc, j’avais vingt ans. Je viv
3190 diverti. J’étais bon, Monsieur, normalement bon. L’ idée, par exemple, d’étrangler un chat pour le plaisir me répugnait. J
3191 on. L’idée, par exemple, d’étrangler un chat pour le plaisir me répugnait. Je détestais de peiner quelque être, même ennem
3192 iner quelque être, même ennemi, — car celui-là je le méprisais trop sincèrement. » Vers cette époque, une femme me regarda
3193 ment. » Mes parents me savaient vierge et c’était la joie de leur vie, car ils aimaient en moi par-dessus tout la vertu qu
3194 leur vie, car ils aimaient en moi par-dessus tout la vertu que je leur devais. Pourtant, je ne détournai pas mes yeux des
3195 frît à cause de moi. Un soir qu’elle pleurait, je l’ embrassai si fort… En un quart d’heure, je connaissais l’amour dans ce
3196 ssai si fort… En un quart d’heure, je connaissais l’ amour dans ce qu’il a de plus étrangement prosaïque à la fois et bêtem
3197 angement prosaïque à la fois et bêtement heureux. Le lendemain était le premier jour du printemps. Les rues riaient. Le ci
3198 Le lendemain était le premier jour du printemps. Les rues riaient. Le ciel descendait dans la ville, on marchait dans le b
3199 t le premier jour du printemps. Les rues riaient. Le ciel descendait dans la ville, on marchait dans le bleu. Je sortis av
3200 ntemps. Les rues riaient. Le ciel descendait dans la ville, on marchait dans le bleu. Je sortis avec cette femme, qui m’ai
3201 e ciel descendait dans la ville, on marchait dans le bleu. Je sortis avec cette femme, qui m’aimait, et nous étions très j
3202 tions très jolis de bonheur et d’insouciance dans le bonheur de la saison. — Au soir, mon père savait tout. Il effleura mo
3203 is de bonheur et d’insouciance dans le bonheur de la saison. — Au soir, mon père savait tout. Il effleura mon front de ses
3204 èvres sans une parole quand je vins lui souhaiter le bonsoir. Le lendemain, ses cheveux avaient légèrement blanchi. Il me
3205 ne parole quand je vins lui souhaiter le bonsoir. Le lendemain, ses cheveux avaient légèrement blanchi. Il me regardait av
3206 un sourire de mon amie quand il voulut m’adresser la parole après un silence vertigineux. Il vit mon sourire et pleura. Al
3207 mon corps tout entier, je criai un juron, claquai la porte et courus dans ma chambre. Une demi-heure plus tard, j’étais à
3208 s ma chambre. Une demi-heure plus tard, j’étais à la gare, j’écrivais un mot d’adieu à ma maîtresse d’une nuit et je parta
3209 rection quelconque. Il advint que ce fut celle de l’ Italie. La lumière, mon pays natal ! — Je vécus d’articles sur la mode
3210 elconque. Il advint que ce fut celle de l’Italie. La lumière, mon pays natal ! — Je vécus d’articles sur la mode et la pol
3211 mière, mon pays natal ! — Je vécus d’articles sur la mode et la politique, que j’envoyais à divers journaux. Un jour, parc
3212 pays natal ! — Je vécus d’articles sur la mode et la politique, que j’envoyais à divers journaux. Un jour, parcourant un q
3213 pier, je lus mon nom en grosses lettres : c’était l’ annonce du décès de mon père. » J’étais assis à la terrasse ensoleillé
3214 l’annonce du décès de mon père. » J’étais assis à la terrasse ensoleillée d’un café ; une brise passa, et une femme en rob
3215 doucement… Je me levai sans payer, je partis par les rues, une joie violente commençait à m’envahir, contre laquelle je lu
3216 chaque tour du tambour des bouffées de musique. » La femme en bleu dansait en regardant au plafond. Après deux tangos, nou
3217 ous montions ensemble dans une chambre d’hôtel où l’ on ne voyait d’abord qu’un bouquet transfiguré par la lumière et que r
3218 n ne voyait d’abord qu’un bouquet transfiguré par la lumière et que reflétaient de nombreuses glaces. Les fenêtres que j’o
3219 lumière et que reflétaient de nombreuses glaces. Les fenêtres que j’ouvris firent tourner des soleils sur les parois clair
3220 êtres que j’ouvris firent tourner des soleils sur les parois claires. Du balcon, on voyait la mer, des bateaux, des nuages,
3221 eils sur les parois claires. Du balcon, on voyait la mer, des bateaux, des nuages, une avenue et ses autos rouges, tout un
3222 s autos rouges, tout un couchant de grand port de la Méditerranée. Nous nous aimâmes en sifflotant encore par instants l’a
3223 us nous aimâmes en sifflotant encore par instants l’ air de la dernière danse, mais nous avions aussi envie de pleurer, à c
3224 thousiasme juvénile, c’est-à-dire cynique, toutes les offres du hasard, ce poète immoral et malicieux. » Je ne sais dans qu
3225 al et malicieux. » Je ne sais dans quel rapide de l’ Europe centrale — région où l’on est forcé de prendre conscience de so
3226 dans quel rapide de l’Europe centrale — région où l’ on est forcé de prendre conscience de soi-même — je découvris une nuit
3227 t en moi reniait obscurément. Je sentais bien que le ressort secret de la vertu dans laquelle on m’avait emprisonné c’étai
3228 urément. Je sentais bien que le ressort secret de la vertu dans laquelle on m’avait emprisonné c’était un bas opportunisme
3229 ocial, résultante des paresses accumulées de tous les cerveaux bourgeois incapables de concevoir un monde sans vieilles fil
3230 ns gendarmes. Je sais bien ce que vous me direz : Les millions que je pourrais leur soustraire ne compenseront jamais cette
3231 eront jamais cette escroquerie morale dont je fus la victime, ce vol de quelques joies parfaites de ma jeunesse… Mais il e
3232 … Mais il est trop tard, Monsieur, pour critiquer les modalités de ma vengeance. Veuillez ne voir dans la confusion où je p
3233 modalités de ma vengeance. Veuillez ne voir dans la confusion où je parais être engagé, du plan moral avec l’économique,
3234 sion où je parais être engagé, du plan moral avec l’ économique, qu’une expression nouvelle, et non dénuée d’ironie, de mon
3235 on mépris pour ce qu’ils appellent, ridiculement, les fondements mêmes de la société. » C’est avec le produit du vol d’un t
3236 appellent, ridiculement, les fondements mêmes de la société. » C’est avec le produit du vol d’un tronc de chapelle que j’
3237 les fondements mêmes de la société. » C’est avec le produit du vol d’un tronc de chapelle que j’édifiai à mes parents un
3238 au sur lequel je fis graver : Prêté — rendu, pour la gloire de l’Église. (Ici, il but une gorgée et prit un temps.) » Je v
3239 je fis graver : Prêté — rendu, pour la gloire de l’ Église. (Ici, il but une gorgée et prit un temps.) » Je vous fais grâc
3240 n temps.) » Je vous fais grâce, poursuivit-il, de la chronique de ma vie de rat d’hôtel et de sleepings ; encore que… Bref
3241 e… Bref, depuis quelques mois, je m’amuse à jouer le pickpocket. Cela permet, avec un minimum d’adresse, de découvrir cert
3242 s auparavant, et pas toujours défavorable, croyez- le bien… Le goût de la propriété étant à mon sens l’un des plus vulgaire
3243 ant, et pas toujours défavorable, croyez-le bien… Le goût de la propriété étant à mon sens l’un des plus vulgaires et des
3244 toujours défavorable, croyez-le bien… Le goût de la propriété étant à mon sens l’un des plus vulgaires et des plus généra
3245 ndus, j’ai vite fait de classer mon monde d’après les quelques réactions élémentaires qui ne manquent jamais de succéder au
3246 au moindre vol. » J’ajouterai, cher Monsieur, que l’ analyse psychologique n’est pas mon fort. Je me contente de quelques o
3247 oriques que je tiens pour vraies, et j’en vérifie les manifestations vivantes avec une prodigalité d’épreuves, contre-épreu
3248 tre-épreuves, variantes et enjolivures où je vois le véritable intérêt de ma vie. C’est vous dire que seule une certaine c
3249 C’est vous dire que seule une certaine caresse de l’ événement naissant peut encore m’émouvoir. C’est un plaisir de chaque
3250 sir de chaque minute auquel succède immédiatement le sommeil. Je rêve beaucoup. Cela explique, m’a-t-on dit, le peu de goû
3251 l. Je rêve beaucoup. Cela explique, m’a-t-on dit, le peu de goût que j’ai pour la poésie imprimée. » J’allais oublier de v
3252 lique, m’a-t-on dit, le peu de goût que j’ai pour la poésie imprimée. » J’allais oublier de vous dire qu’on me nomme Saint
3253 n me nomme Saint-Julien. Vous n’ignorez point que l’ on considère ce saint comme le patron des voyageurs… » Saint-Julien pa
3254 n’ignorez point que l’on considère ce saint comme le patron des voyageurs… » Saint-Julien parut satisfait de cette dernièr
3255 gorgées d’eau minérale. Isidore sentit alors que la bienséance l’obligeait à émettre une opinion, même la plus générale e
3256 minérale. Isidore sentit alors que la bienséance l’ obligeait à émettre une opinion, même la plus générale et la moins com
3257 ienséance l’obligeait à émettre une opinion, même la plus générale et la moins compromettante, sur cette vie dont le récit
3258 t à émettre une opinion, même la plus générale et la moins compromettante, sur cette vie dont le récit n’avait pas laissé
3259 le et la moins compromettante, sur cette vie dont le récit n’avait pas laissé que de l’agacer en maint endroit. « Une chos
3260 cette vie dont le récit n’avait pas laissé que de l’ agacer en maint endroit. « Une chose avant tout me frappe — dit-il, lâ
3261 iments, ce qui est de mauvaise politique, — c’est l’ extraordinaire netteté de votre vie. Elle est sans bavures, sans rétic
3262 herche ce qu’on est convenu d’appeler — pardonnez la lourdeur de l’expression — une règle de vie. Mais, je vous l’avouerai
3263 est convenu d’appeler — pardonnez la lourdeur de l’ expression — une règle de vie. Mais, je vous l’avouerai, ce qui me ret
3264 de l’expression — une règle de vie. Mais, je vous l’ avouerai, ce qui me retient de tirer de votre conduite les conclusions
3265 rai, ce qui me retient de tirer de votre conduite les conclusions morales qu’elle paraît impliquer, c’est ce caractère de,
3266 conscience ! qui s’attache à vos faits et gestes. L’ on croirait ouïr parfois le récit de quelqu’une de ces farces d’étudia
3267 à vos faits et gestes. L’on croirait ouïr parfois le récit de quelqu’une de ces farces d’étudiants qui ne sont que la trad
3268 lqu’une de ces farces d’étudiants qui ne sont que la traduction en actes de jeux de mots plus ou moins cruels… » — Je vous
3269 rrompit Saint-Julien, par pitié pour Isidore dont la sincérité tournait vite à l’agressif — effet d’une timidité naturelle
3270 ié pour Isidore dont la sincérité tournait vite à l’ agressif — effet d’une timidité naturelle dont il paraissait lui-même
3271 né. En deux mots, vous ne me trouvez pas sérieux. Le reproche est grave. Je ne saurais y répondre. Je pourrais vous dire q
3272 ez un peu potache, il n’est pas prouvé par là que le potache n’ait point raison. Mais justement je n’éprouve aucun désir d
3273 conque est aussi profondément persuadé que moi de l’ absurdité radicale de notre vie, la moindre farce, le moindre geste co
3274 adé que moi de l’absurdité radicale de notre vie, la moindre farce, le moindre geste convenu dans le genre « révolté » pre
3275 bsurdité radicale de notre vie, la moindre farce, le moindre geste convenu dans le genre « révolté » prend une saveur de r
3276 , la moindre farce, le moindre geste convenu dans le genre « révolté » prend une saveur de raillerie assez amère. Et peut-
3277 découvrir derrière certaines de mes plaisanteries la dérision secrète qu’elles masquent par caprice. .....................
3278  180-185. t. Une note de bas de page indique : «  La rédaction rappelle que les idées émises dans la Revue de Belles-Lettr
3279 bas de page indique : « La rédaction rappelle que les idées émises dans la Revue de Belles-Lettres sont propres à leur aute
3280 « La rédaction rappelle que les idées émises dans la Revue de Belles-Lettres sont propres à leur auteur et qu’elles n’enga
60 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Conseils à la jeunesse (mai 1927)
3281 Conseils à la jeunesse (mai 1927)u « On a reproché bien des choses aux romantiqu
3282 « On a reproché bien des choses aux romantiques : le goût du suicide, l’habitude de boire et de fumer excessivement, leurs
3283 des choses aux romantiques : le goût du suicide, l’ habitude de boire et de fumer excessivement, leurs amours, l’égoïsme,
3284 de boire et de fumer excessivement, leurs amours, l’ égoïsme, le mépris de la réalité, l’exaltation maladive de l’imaginati
3285 de fumer excessivement, leurs amours, l’égoïsme, le mépris de la réalité, l’exaltation maladive de l’imagination et de la
3286 essivement, leurs amours, l’égoïsme, le mépris de la réalité, l’exaltation maladive de l’imagination et de la sensibilité,
3287 leurs amours, l’égoïsme, le mépris de la réalité, l’ exaltation maladive de l’imagination et de la sensibilité, l’atrophie
3288 le mépris de la réalité, l’exaltation maladive de l’ imagination et de la sensibilité, l’atrophie du sens critique sous tou
3289 ité, l’exaltation maladive de l’imagination et de la sensibilité, l’atrophie du sens critique sous toutes ses formes : rai
3290 n maladive de l’imagination et de la sensibilité, l’ atrophie du sens critique sous toutes ses formes : raison, jugement, s
3291 itique sous toutes ses formes : raison, jugement, simple bon sens, et l’ignorance systématique, le mépris enfin de tous les pr
3292 es formes : raison, jugement, simple bon sens, et l’ ignorance systématique, le mépris enfin de tous les principes qui sont
3293 nt, simple bon sens, et l’ignorance systématique, le mépris enfin de tous les principes qui sont à la base de la société m
3294 l’ignorance systématique, le mépris enfin de tous les principes qui sont à la base de la société même. »   Ceci est tiré d’
3295 le mépris enfin de tous les principes qui sont à la base de la société même. »   Ceci est tiré d’un livre récent sur Aloy
3296 enfin de tous les principes qui sont à la base de la société même. »   Ceci est tiré d’un livre récent sur Aloysius Bertra
3297 proches s’adressent, ou bien plutôt — vous alliez le dire — aux surréalistes ?   Si le mal du siècle consistait véritablem
3298 t — vous alliez le dire — aux surréalistes ?   Si le mal du siècle consistait véritablement dans ces quelques effets, nous
3299 ans un petit article du Journal de Genève sur «  La maladie du siècle », écrit : « Plante des pommes de terre, jeune homm
3300 de terre, jeune homme ! Quand tu seras au bout de la 20e ligne de 200 mètres, ce qui représente quatre kilomètres de plant
3301 e qui représente quatre kilomètres de plantation, le siècle ne sera plus malade, les temps seront guéris de leur crise, le
3302 res de plantation, le siècle ne sera plus malade, les temps seront guéris de leur crise, les valeurs auront retrouvé leur s
3303 us malade, les temps seront guéris de leur crise, les valeurs auront retrouvé leur stabilité, et comme M. Albert Muret dont
3304 uvé leur stabilité, et comme M. Albert Muret dont le Journal de Genève parlait naguère, tu mangeras avec appétit une pou
3305 ent chez des jeunes « et qui pensent » ce goût de l’ évasion caractéristique de tous les « vices romantiques ». — Citez-m’e
3306 nt » ce goût de l’évasion caractéristique de tous les « vices romantiques ». — Citez-m’en de ces phénomènes ! — Mon Dieu, q
3307 Il y aurait, par exemple, ce fait du triomphe de la Machine ; ce fait de la révolution russe… cet autre fait de la guerre
3308 e, ce fait du triomphe de la Machine ; ce fait de la révolution russe… cet autre fait de la guerre… et puis, tenez ! ce fa
3309 ce fait de la révolution russe… cet autre fait de la guerre… et puis, tenez ! ce fait surtout de la sacro-sainte Raison ut
3310 de la guerre… et puis, tenez ! ce fait surtout de la sacro-sainte Raison utilitaire au service des sacro-saints Principes
3311 desquels tout se ligue aujourd’hui pour anéantir la seule chose qui reste à nos yeux sacro-sainte : la liberté. Alors n’e
3312 a seule chose qui reste à nos yeux sacro-sainte : la liberté. Alors n’est-ce pas, merci du conseil, Monsieur Y. Z., de ce
3313 ches pour enseigner cette méthode à leurs petits. Le « satisfait » est un être inadmissible aujourd’hui. À plus forte rais
3314 re inadmissible aujourd’hui. À plus forte raison, le satisfait artificiel. u. Rougemont Denis de, « Conseils à la jeune
3315 rtificiel. u. Rougemont Denis de, « Conseils à la jeunesse », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribou
61 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Pierre Girard, Connaissez mieux le cœur des femmes (juillet 1927)
3316 Pierre Girard, Connaissez mieux le cœur des femmes (juillet 1927)am Quand vous avez fermé ce petit li
3317 fermé ce petit livre, vous partez en chantonnant le titre sur un air sentimental, bien décidé au fond, à retrouver Patsy,
3318 timental, bien décidé au fond, à retrouver Patsy, l’ Irlandaise perdue par cet improbable et sympathique Paterne. Sous le f
3319 e par cet improbable et sympathique Paterne. Sous le fallacieux prétexte d’une flânerie de saison, vous vous attardez aux
3320 Justement, voici Pierre Girard : lui seul connaît l’ adresse de Patsy, mais il ne veut pas vous la donner. Alors pour vous
3321 naît l’adresse de Patsy, mais il ne veut pas vous la donner. Alors pour vous venger, vous lui dites que, « d’abord », son
3322 re n’est pas sérieux. Il sourit. Vous ajoutez que le lyrisme des noms géographiques vous fatigue ; que c’est une vraie man
3323 lobe dans son voyage « est arrivé à un endroit de l’ éther où il y a du bonheur ». Vous reconnaissez que Pierre Girard est
3324 son aisance. Vous accordez que s’il force un peu la dose de fantaisie, c’est plutôt par excès de facilité que par recherc
3325 ilité que par recherche. Vous voilà même tenté de l’ en féliciter. Bien plus, vous découvrez dans ses fantoches une malicie
3326 nous seraient épargnés si nous ne regardions que les jambes des femmes », dit-il, pour vous apprendre ! — sans se douter q
3327 un devoir de ce plaisir. Un devoir !… Car hélas, l’ on n’est pas impunément concitoyen de cet oncle Abraham qui interdit à
3328 Abraham qui interdit à Paterne son neveu de fumer le matin, de sortir la nuit, et qui lui fait jurer sur la Bible de ne pa
3329 à Paterne son neveu de fumer le matin, de sortir la nuit, et qui lui fait jurer sur la Bible de ne pas entrer dans les ca
3330 tin, de sortir la nuit, et qui lui fait jurer sur la Bible de ne pas entrer dans les cafés. Et puis, c’est égal, ce soir,
3331 lui fait jurer sur la Bible de ne pas entrer dans les cafés. Et puis, c’est égal, ce soir, tout cela est sans importance, c
3332 soir, tout cela est sans importance, car voici «  l’ heure des petits arbres pourpres, l’heure où dans les bibliothèques dé
3333 , car voici « l’heure des petits arbres pourpres, l’ heure où dans les bibliothèques désertes glisse un grand souffle obliq
3334 heure des petits arbres pourpres, l’heure où dans les bibliothèques désertes glisse un grand souffle oblique plein de fraîc
3335 « [Compte rendu] Pierre Girard, Connaissez mieux le cœur des femmes  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genè
62 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). La part du feu. Lettres sur le mépris de la littérature (juillet 1927)
3336 La part du feu. Lettres sur le mépris de la littérature (juillet 1927)v
3337 La part du feu. Lettres sur le mépris de la littérature (juillet 1927)v I Parler littérature
3338 La part du feu. Lettres sur le mépris de la littérature (juillet 1927)v I Parler littérature Si je pronon
3339 927)v I Parler littérature Si je prononce le nom de tel de vos confrères, si je dis : « Avez-vous lu… », vous voil
3340 « Avez-vous lu… », vous voilà rouge ; et sur moi les foudres de votre paradis poétique. Si je cite tel auteur dont nous fî
3341 mes notre nourriture une saison de naguère, voilà le rictus de votre bouche, une injure de pythie. Vous dites de ce conte 
3342 n goût qu’on aurait pour Nietzsche : que c’est de la littérature. Alors, quelque paysan du Danube survenant : — Je vous cr
3343 écrivain ? — Hélas ! soupirez-vous. Mais j’ai tué la littérature en moi, n’en parlez plus, j’en sors, je l’abandonne… Mais
3344 ttérature en moi, n’en parlez plus, j’en sors, je l’ abandonne… Mais notre paysan, rusé : — Vous l’abandonnez ? Pour quoi ?
3345 je l’abandonne… Mais notre paysan, rusé : — Vous l’ abandonnez ? Pour quoi ? — Pour la vie ! Or je pense, à part moi : j’a
3346 , rusé : — Vous l’abandonnez ? Pour quoi ? — Pour la vie ! Or je pense, à part moi : j’ai lu ça quelque part. Voyez ma fra
3347 ennent soin que leurs sincérités gardent au moins l’ excuse d’une audace qu’ils escomptent scandaleuse. Mais voici un bar o
3348 in de mépris pour Paul Morand par qui découvrîtes le charme de ces lieux. Vous composez un cocktail en guise de métaphore,
3349 jour au Grand Écart… », dit quelqu’un. À ce coup, l’ évocation de Cocteau fait fleurir sur vos lèvres le mot de Cambronne :
3350 ’évocation de Cocteau fait fleurir sur vos lèvres le mot de Cambronne : hommage à Louis Aragon. Ce cristal est une citatio
3351 Et des phrases, des cris, des mots. Au défaut de l’ ivresse naissante se glisse un poème où vous aimiez à la folie votre d
3352 sse naissante se glisse un poème où vous aimiez à la folie votre douleur. Narcisse se contemple au miroir de son monocle.
3353 il se noie dans un verre à liqueur. Poisson dans l’ eau, plumes dans le vent, poète au bar, le paradis n’est pas si cher.
3354 verre à liqueur. Poisson dans l’eau, plumes dans le vent, poète au bar, le paradis n’est pas si cher. Il y en a aussi qui
3355 on dans l’eau, plumes dans le vent, poète au bar, le paradis n’est pas si cher. Il y en a aussi qui posent pour le diable
3356 ’est pas si cher. Il y en a aussi qui posent pour le diable et ne se baignent que dans des bénitiers : on voit trop qu’ils
3357 : on voit trop qu’ils trouvent ça pittoresque. Et le plaisir d’être nu devant un public supposé dévot, et qui n’ose en cro
3358 n’ose en croire sa pudeur, et qui doute enfin de l’ impossibilité des miracles ! Quelles voluptés plus subtiles et plus ai
3359 e bois pour en faire des poèmes. Alors je cherche les raisons de votre indignation, quand il m’échappe une citation. Seraie
3360 ion, quand il m’échappe une citation. Seraient-ce les guillemets qui vous choquent ?   La vie ! — proclamiez-vous… Soit. Ma
3361 Seraient-ce les guillemets qui vous choquent ?   La vie ! — proclamiez-vous… Soit. Mais maintenant je vais me fâcher chaq
3362 « hallucinant » ou « purement gratuit ». C’est de la littérature. À force d’avoir mérité ces épithètes, pour nous laudati
3363 nous laudatives, vous vous étonnez aujourd’hui de la simplicité. Littérateur, va ! qui ne pouvez pas même admettre que la
3364 érateur, va ! qui ne pouvez pas même admettre que la simplicité est simple simplement. La bouche brûlée d’alcools, vous dé
3365 ne pouvez pas même admettre que la simplicité est simple simplement. La bouche brûlée d’alcools, vous découvrez à l’eau un goû
3366 admettre que la simplicité est simple simplement. La bouche brûlée d’alcools, vous découvrez à l’eau un goût étrange. L’ea
3367 ent. La bouche brûlée d’alcools, vous découvrez à l’ eau un goût étrange. L’eau est incolore, inodore et sans saveur. Mais
3368 ’alcools, vous découvrez à l’eau un goût étrange. L’ eau est incolore, inodore et sans saveur. Mais fraîche. Ainsi, jusque
3369 ais fraîche. Ainsi, jusque dans votre mépris pour le pittoresque, vous témoignez d’un goût du bizarre qui révèle le littér
3370 e, vous témoignez d’un goût du bizarre qui révèle le littérateur. Nous ne pouvons pas faire que nous n’ayons rien lu. Vous
3371 lu. Vous refusez de compter avec cette réalité de la littérature qui est en nous (dangereuse tant que vous voudrez). Mais
3372 une ingratitude salutaire, c’est refus de limiter le mal. Je vous vois envahi par des démons que vous prétendez m’interdir
3373 ensées des autres, je vous ai mis un collier avec le nom du propriétaire ; tirez un peu sur la laisse, que j’éprouve la fe
3374 er avec le nom du propriétaire ; tirez un peu sur la laisse, que j’éprouve la fermeté de ma main. Je vous tiens. Je sais o
3375 taire ; tirez un peu sur la laisse, que j’éprouve la fermeté de ma main. Je vous tiens. Je sais où vous êtes. Vous n’allez
3376 n vante, — j’ai tué un amour naissant, à force de le crier sur les toits. Ainsi, parler littérature, c’est faire la part d
3377 ai tué un amour naissant, à force de le crier sur les toits. Ainsi, parler littérature, c’est faire la part du feu. Je dis
3378 les toits. Ainsi, parler littérature, c’est faire la part du feu. Je dis ces noms, ces opinions, ces titres de livres : to
3379 choque, s’annule. Poussière. Ma vie est ailleurs. L’ addition, s’il vous plaît. Il est temps de sortir de ce café et de ces
3380 afé et de ces jeux, simulacres de vie, qui sont à la vraie vie ce que le flirt est à l’amour. II Sur l’insuffisance de
3381 simulacres de vie, qui sont à la vraie vie ce que le flirt est à l’amour. II Sur l’insuffisance de la littérature On
3382 ie, qui sont à la vraie vie ce que le flirt est à l’ amour. II Sur l’insuffisance de la littérature On reconnaît un é
3383 raie vie ce que le flirt est à l’amour. II Sur l’ insuffisance de la littérature On reconnaît un écrivain, aujourd’hu
3384 flirt est à l’amour. II Sur l’insuffisance de la littérature On reconnaît un écrivain, aujourd’hui, à ce qu’il ne t
3385 e sournoises déclarations d’amour. Tel qui raille l’ Église et les curés, c’est qu’il se fait une très haute idée de la rel
3386 déclarations d’amour. Tel qui raille l’Église et les curés, c’est qu’il se fait une très haute idée de la religion. Ainsi,
3387 curés, c’est qu’il se fait une très haute idée de la religion. Ainsi, de la littérature : votre mépris pour ses réalisatio
3388 ait une très haute idée de la religion. Ainsi, de la littérature : votre mépris pour ses réalisations actuelles donne la m
3389 otre mépris pour ses réalisations actuelles donne la mesure de ce que vous attendez d’elle. Pour dire le fond de ma pensée
3390 mesure de ce que vous attendez d’elle. Pour dire le fond de ma pensée, je crois ce mépris et cette attente également exag
3391 ous savez bien que nous cherchons autre chose que la littérature. Que la littérature nous est un moyen seulement d’atteind
3392 ous cherchons autre chose que la littérature. Que la littérature nous est un moyen seulement d’atteindre et de préparer d’
3393 . Des choses dures, amères comme un destin, comme le goût d’une pierre rêche sur ta langue et grinçante sous ta dent. Des
3394 intenses que tout se fond catastrophiquement dans l’ infini de la seconde. Des peurs sans cause, plus vides que la mort. To
3395 la seconde. Des peurs sans cause, plus vides que la mort. Toutes ces choses mystiques, c’est-à-dire réelles, c’est-à-dire
3396 nous importe véritablement n’est dicible. (Depuis le temps qu’on sait que la lettre tue ce qu’elle prétend exprimer ; depu
3397 nt n’est dicible. (Depuis le temps qu’on sait que la lettre tue ce qu’elle prétend exprimer ; depuis le temps qu’on l’oubl
3398 a lettre tue ce qu’elle prétend exprimer ; depuis le temps qu’on l’oublie.) Vous me direz que la poésie, l’état poétique,
3399 qu’elle prétend exprimer ; depuis le temps qu’on l’ oublie.) Vous me direz que la poésie, l’état poétique, est notre seul
3400 epuis le temps qu’on l’oublie.) Vous me direz que la poésie, l’état poétique, est notre seul moyen de connaissance concrèt
3401 mps qu’on l’oublie.) Vous me direz que la poésie, l’ état poétique, est notre seul moyen de connaissance concrète du monde.
3402 oncrète du monde. Mais c’est à condition qu’on ne l’ écrive pas, même en pensée. La poésie pure écrite est inconcevable : c
3403 condition qu’on ne l’écrive pas, même en pensée. La poésie pure écrite est inconcevable : cela consisterait dans l’expres
3404 écrite est inconcevable : cela consisterait dans l’ expression directe de la réalité individuelle. Elle serait tellement i
3405  : cela consisterait dans l’expression directe de la réalité individuelle. Elle serait tellement incommunicable qu’il devi
3406 ement incommunicable qu’il deviendrait inutile de la publier. Et même, en passant à la limite, on peut imaginer que si ell
3407 rait inutile de la publier. Et même, en passant à la limite, on peut imaginer que si elle était réalisée, on ne s’en aperc
3408 ercevrait pas. Je pressens encore dans vos poèmes les plus obscurs des allusions furtives à certains états de la réalité. M
3409 bscurs des allusions furtives à certains états de la réalité. Mais plus les mots se plient à des exigences sémantiques — d
3410 urtives à certains états de la réalité. Mais plus les mots se plient à des exigences sémantiques — dont on connaît la porté
3411 ent à des exigences sémantiques — dont on connaît la portée sociale, — mariant l’utile à l’agréable selon les rites d’une
3412 es — dont on connaît la portée sociale, — mariant l’ utile à l’agréable selon les rites d’une esthétique ou d’une autre, pl
3413 on connaît la portée sociale, — mariant l’utile à l’ agréable selon les rites d’une esthétique ou d’une autre, plus ils per
3414 tée sociale, — mariant l’utile à l’agréable selon les rites d’une esthétique ou d’une autre, plus ils perdent leur pouvoir
3415 autre, plus ils perdent leur pouvoir de signifier les choses qui nous importent. Vous le savez. Alors vous les lâchez en li
3416 de signifier les choses qui nous importent. Vous le savez. Alors vous les lâchez en liberté, par haine de cette esthétiqu
3417 ses qui nous importent. Vous le savez. Alors vous les lâchez en liberté, par haine de cette esthétique ou de ce sens social
3418 de ce sens social, — et voilà qu’ils perdent même la problématique utilité de liaison qui était leur excuse dernière. Avou
3419 e liaison qui était leur excuse dernière. Avouons- le  : rien de ce qu’on peut exprimer n’a d’importance véritable. Alors, c
3420 cessons de nous battre contre des moulins à vent. La littérature, considérée du point de vue de la psychologie de l’écriva
3421 nt. La littérature, considérée du point de vue de la psychologie de l’écrivain, est un besoin organique, un peu anormal, q
3422 , considérée du point de vue de la psychologie de l’ écrivain, est un besoin organique, un peu anormal, que l’on satisfait
3423 ain, est un besoin organique, un peu anormal, que l’ on satisfait dans certains états de crise afin de retrouver son équili
3424 rarement, de quoi se payer un petit voyage. C’est l’ aveu d’une faiblesse secrète. Et c’est une réaction de défense. On che
3425 he un mot, une phrase, pour tuer une réalité dont la connaissance devient douloureuse et troublante. Ainsi la conscience t
3426 aissance devient douloureuse et troublante. Ainsi la conscience tue la connaissance. (« Connaissance » étant pris avec son
3427 ouloureuse et troublante. Ainsi la conscience tue la connaissance. (« Connaissance » étant pris avec son sens le plus prof
3428 sance. (« Connaissance » étant pris avec son sens le plus profond, qui est proche du sens biblique. Il ne s’agit pas de la
3429 est proche du sens biblique. Il ne s’agit pas de la connaissance abstraite et rationnelle dont le monde moderne se conten
3430 de la connaissance abstraite et rationnelle dont le monde moderne se contente, et qui tend à remplacer, grâce à la mental
3431 rne se contente, et qui tend à remplacer, grâce à la mentalité scolaire et primaire en particulier, toute connaissance vér
3432 ice ? Peut-être. Ou une maladie ? Ce n’est pas en l’ ignorant par attitude que vous la guérirez. Au contraire, il s’agit de
3433 Ce n’est pas en l’ignorant par attitude que vous la guérirez. Au contraire, il s’agit de l’envisager sans fièvre, pour en
3434 que vous la guérirez. Au contraire, il s’agit de l’ envisager sans fièvre, pour en circonscrire les effets. J’avoue prendr
3435 de l’envisager sans fièvre, pour en circonscrire les effets. J’avoue prendre à cette étude un intérêt bien vif. Et cela fo
3436 en n’est plus facile que d’y échapper. III Sur l’ utilité de la littérature Montherlant me paraît être le moins « lit
3437 facile que d’y échapper. III Sur l’utilité de la littérature Montherlant me paraît être le moins « littératuré » de
3438 é de la littérature Montherlant me paraît être le moins « littératuré » des écrivains d’aujourd’hui. Quand il parle lit
3439 rd’hui. Quand il parle littérature, il a toujours l’ air de mettre un peu les pieds dans le plat, de dire de ces choses qu’
3440 littérature, il a toujours l’air de mettre un peu les pieds dans le plat, de dire de ces choses qu’entre gens du métier l’o
3441 a toujours l’air de mettre un peu les pieds dans le plat, de dire de ces choses qu’entre gens du métier l’on a convenu de
3442 at, de dire de ces choses qu’entre gens du métier l’ on a convenu de passer sous silence. C’est assez drôle de voir le mala
3443 de passer sous silence. C’est assez drôle de voir le malaise des chers confrères. Ils ne pardonnent pas à ce toréador ses
3444 une Muse qu’ils n’ont pas coutume d’aborder sans le mot de passe de la dernière mode ou de savantes séductions. On sait b
3445 tes séductions. On sait bien, d’ailleurs, qu’elle les entretient. Bande de gigolos de la littérature ! Qu’on puisse vivre d
3446 eurs, qu’elle les entretient. Bande de gigolos de la littérature ! Qu’on puisse vivre de ça, je ne l’ai pas encore avalé.
3447 la littérature ! Qu’on puisse vivre de ça, je ne l’ ai pas encore avalé. On m’affirme que je n’y échapperai pas plus qu’un
3448 is, pour sûr, jamais vivre pour écrire16. De tous les prétextes que l’on a pu avancer pour légitimer l’activité littéraire,
3449 is vivre pour écrire16. De tous les prétextes que l’ on a pu avancer pour légitimer l’activité littéraire, le plus satisfai
3450 es prétextes que l’on a pu avancer pour légitimer l’ activité littéraire, le plus satisfaisant, celui qui rend le mieux com
3451 pu avancer pour légitimer l’activité littéraire, le plus satisfaisant, celui qui rend le mieux compte de la réalité, c’es
3452 littéraire, le plus satisfaisant, celui qui rend le mieux compte de la réalité, c’est André Breton qui l’a exprimé : « On
3453 s satisfaisant, celui qui rend le mieux compte de la réalité, c’est André Breton qui l’a exprimé : « On publie pour cherch
3454 ieux compte de la réalité, c’est André Breton qui l’ a exprimé : « On publie pour chercher des hommes, et rien de plus. » C
3455 pas tant, n’est-ce pas, à poursuivre une quête de l’ esprit. Et vous savez ce qu’elle nous vaut : les mépris, les haines do
3456 de l’esprit. Et vous savez ce qu’elle nous vaut : les mépris, les haines douloureuses ou grossières de tous ceux qui ne peu
3457 Et vous savez ce qu’elle nous vaut : les mépris, les haines douloureuses ou grossières de tous ceux qui ne peuvent ou ne v
3458 ous voyez bien que votre attitude méprisante pour la littérature vous ferait bientôt renier le signe le plus certain par l
3459 te pour la littérature vous ferait bientôt renier le signe le plus certain par lequel ces « quelques-uns » peuvent encore
3460 a littérature vous ferait bientôt renier le signe le plus certain par lequel ces « quelques-uns » peuvent encore se reconn
3461 e elle n’aurait plus d’autre excuse que celle-là, la littérature mériterait d’exister : qu’elle soit le langage chiffré de
3462 a littérature mériterait d’exister : qu’elle soit le langage chiffré de notre inquiétude et de nos naissantes certitudes,
3463 notre inquiétude et de nos naissantes certitudes, le seul langage peut-être qui nous permette d’échanger les signaux de l’
3464 ul langage peut-être qui nous permette d’échanger les signaux de l’angoisse sur quoi se fondent, en ces temps, nos amitiés
3465 -être qui nous permette d’échanger les signaux de l’ angoisse sur quoi se fondent, en ces temps, nos amitiés miraculeuses.
3466 ces temps, nos amitiés miraculeuses.   Voici donc les seules révélations que j’attende de la littérature : que celle des au
3467 oici donc les seules révélations que j’attende de la littérature : que celle des autres m’aide à prendre conscience de moi
3468 e la mienne m’aide à découvrir quelques êtres par le monde… Il ne s’agit plus de mépris ni d’adoration. J’ai défini une « 
3469 ont je parviens à tirer quelque bien pour ma vie. Le jour où les soins qu’elle exige me coûteront des sacrifices plus gran
3470 iens à tirer quelque bien pour ma vie. Le jour où les soins qu’elle exige me coûteront des sacrifices plus grands que les b
3471 exige me coûteront des sacrifices plus grands que les bienfaits que j’en escompte, il sera temps de songer sérieusement à m
3472 . 14. Paul Morand, auteur d’Ouvert et de Fermé la nuit, titres également scandaleux. Le Grand Écart, roman de M. Coctea
3473 et de Fermé la nuit, titres également scandaleux. Le Grand Écart, roman de M. Cocteau, a donné son nom à un établissement
3474 e lettres et poètes surréalistes. Paul Valéry, de l’ Académie française. Narcisse, personnage mythologique. — Là ! [NdE] Le
3475 . Narcisse, personnage mythologique. — Là ! [NdE] Le texte publié place également un appel de note plus bas dans le paragr
3476 ié place également un appel de note plus bas dans le paragraphe, après « Narcisse », sans qu’on sache s’il s’agit d’une er
3477 ache s’il s’agit d’une erreur ou d’une volonté de l’ auteur. 15. Variante : des puissances d’action. 16. J’en vois certai
3478 et ils en sont tout fiers : « Il n’y a plus qu’à les écrire ». v. Rougemont Denis de, « La part du feu. Lettres sur le m
3479 lus qu’à les écrire ». v. Rougemont Denis de, «  La part du feu. Lettres sur le mépris de la littérature », Revue de Bell
3480 Rougemont Denis de, « La part du feu. Lettres sur le mépris de la littérature », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchât
3481 is de, « La part du feu. Lettres sur le mépris de la littérature », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fri
63 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Les derniers jours (juillet 1927)
3482 Les derniers jours (juillet 1927)w Ces « cahiers politiques et littéra
3483 r Drieu la Rochelle et Emmanuel Berl, sont — avec la Revue de Belles-Lettres — la seule revue de langue française où l’o
3484 Berl, sont — avec la Revue de Belles-Lettres — la seule revue de langue française où l’on dise la vérité librement et p
3485 -Lettres — la seule revue de langue française où l’ on dise la vérité librement et pour elle-même. Nous regrettons de n’en
3486 — la seule revue de langue française où l’on dise la vérité librement et pour elle-même. Nous regrettons de n’en pouvoir c
3487 s phrases de Drieu : « On voit déjà éclater dans les singuliers mouvements de sympathie qu’a provoqués l’infortune de l’Ac
3488 singuliers mouvements de sympathie qu’a provoqués l’ infortune de l’Action française la fraternité qui existe, en dépit des
3489 ements de sympathie qu’a provoqués l’infortune de l’ Action française la fraternité qui existe, en dépit des protestations
3490 qu’a provoqués l’infortune de l’Action française la fraternité qui existe, en dépit des protestations de haine, entre les
3491 xiste, en dépit des protestations de haine, entre les athées de l’antidémocratisme et les athées du Capitalisme quand il es
3492 t des protestations de haine, entre les athées de l’ antidémocratisme et les athées du Capitalisme quand il est conscient d
3493 haine, entre les athées de l’antidémocratisme et les athées du Capitalisme quand il est conscient de soi-même, et les athé
3494 apitalisme quand il est conscient de soi-même, et les athées du Socialisme et du Communisme. Tous ceux-là travaillent à l’a
3495 isme et du Communisme. Tous ceux-là travaillent à l’ achèvement d’un certain monde moderne, merveilleuse mécanique sévère e
3496 use mécanique sévère et dénuée de tout secours de l’ Esprit. Mais un jour viendra où les hommes se révolteront contre le jo
3497 tout secours de l’Esprit. Mais un jour viendra où les hommes se révolteront contre le joug atrocement positiviste des Maurr
3498 jour viendra où les hommes se révolteront contre le joug atrocement positiviste des Maurras et des Mussolini, des Lénine
3499 s et des Mussolini, des Lénine et des Ford. Alors les hommes hurleront un affreux besoin mystique. Vous réveillerez-vous po
3500 freux besoin mystique. Vous réveillerez-vous pour les désaltérer, dieux de l’Orient et de l’Occident ? » Certains cris qui
3501 us réveillerez-vous pour les désaltérer, dieux de l’ Orient et de l’Occident ? » Certains cris qui nous échappèrent n’avai
3502 vous pour les désaltérer, dieux de l’Orient et de l’ Occident ? » Certains cris qui nous échappèrent n’avaient pas d’autre
3503 e Chalgrin, Paris 16e. w. Rougemont Denis de, «  Les derniers jours », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-
64 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Adieu au lecteur (juillet 1927)
3504 Adieu au lecteur (juillet 1927)x Nous passons la main au central de Genève, fidèles à la tradition — en ceci au moins.
3505 s passons la main au central de Genève, fidèles à la tradition — en ceci au moins. Nous nous retirons : et ce n’est pas qu
3506 ue nous ayons brûlé toutes nos cartouches. Ni que l’ indignation provoquée sur tous les bancs par certains de nos articles
3507 rtouches. Ni que l’indignation provoquée sur tous les bancs par certains de nos articles nous épouvante. Notre retraite est
3508 nte. Notre retraite est toute « statutaire » — si l’ on ose dire. Elle nous permet donc de considérer la situation sans fiè
3509 ’on ose dire. Elle nous permet donc de considérer la situation sans fièvre, sans lamentations d’adieu.   On nous a parfois
3510 tés de fous (avec ou sans sourire). Nous sommes à l’ âge de nous en réjouir. On s’est beaucoup étonné de nous voir « si dif
3511 s voir « si différents » de nos aînés. Nous avons l’ énorme candeur de trouver ça naturel. On nous a fait des reproches con
3512 n nous a fait des reproches contradictoires. Nous les additionnons : ils s’annulent. Il reste à dire deux mots sur la parad
3513 s : ils s’annulent. Il reste à dire deux mots sur la paradoxale situation intellectuelle d’une revue d’étudiants comme la
3514 tion intellectuelle d’une revue d’étudiants comme la nôtre. D’un côté, en effet, on s’accorde pour trouver légèrement ridi
3515 ridicule un jeune homme qui recherche activement la Sagesse (« Ça n’est pas de votre âge ! ») ; de l’autre, on se scandal
3516 rces — ou bien de ces affirmations dont en vérité l’ on n’a pas à se préoccuper de prévoir les conséquences, puisqu’il n’en
3517 en vérité l’on n’a pas à se préoccuper de prévoir les conséquences, puisqu’il n’en est aucune qui ne soit connue d’avance e
3518 une qui ne soit connue d’avance et stérilisée par la loi, les mœurs et l’habitude. Nous n’avons aucun remords d’avoir déçu
3519 ne soit connue d’avance et stérilisée par la loi, les mœurs et l’habitude. Nous n’avons aucun remords d’avoir déçu cette ca
3520 e d’avance et stérilisée par la loi, les mœurs et l’ habitude. Nous n’avons aucun remords d’avoir déçu cette catégorie de l
3521 t pas encore admis que jeunesse = révolution Tous les malentendus viennent de là. Nous sommes assez sages et assez fous pou
3522 sez fous pour ne pas en gémir et pour en accepter les conséquences. Et puis, de temps à autre, voici que nous parvient un s
3523 quelques découvertes qui nous consolèrent de tout le reste.   Et maintenant voici Genève et son mystère. Car chaque année,
3524 année, renaissant des décombres où s’anéantirent l’ honneur et la fortune de ses derniers rédacteurs, notre Revue-phénix s
3525 ssant des décombres où s’anéantirent l’honneur et la fortune de ses derniers rédacteurs, notre Revue-phénix s’élance avec
3526 ction absolument imprévisible. Que nous apportera le Central de Genève ? Tout est possible : la guerre et la paix, la trad
3527 ortera le Central de Genève ? Tout est possible : la guerre et la paix, la tradition, l’anarchie, l’ironie, le sentiment,
3528 tral de Genève ? Tout est possible : la guerre et la paix, la tradition, l’anarchie, l’ironie, le sentiment, un réveil des
3529 enève ? Tout est possible : la guerre et la paix, la tradition, l’anarchie, l’ironie, le sentiment, un réveil des vieux, M
3530 st possible : la guerre et la paix, la tradition, l’ anarchie, l’ironie, le sentiment, un réveil des vieux, Maurras, Lounat
3531 : la guerre et la paix, la tradition, l’anarchie, l’ ironie, le sentiment, un réveil des vieux, Maurras, Lounatcharsky, la
3532 e et la paix, la tradition, l’anarchie, l’ironie, le sentiment, un réveil des vieux, Maurras, Lounatcharsky, la SDN, et mê
3533 ent, un réveil des vieux, Maurras, Lounatcharsky, la SDN, et même Edmond Gillard, et même, et surtout, un miracle. Et puis
3534 eureux Jean… Et puis, en voilà assez pour ranimer la curiosité des plus blasés. Lecteur, fais confiance au Central de Genè
3535 s confiance au Central de Genève. Souviens-toi de la grandeur de ses traditions et ne va pas ajouter à cette lourde charge
3536 itions et ne va pas ajouter à cette lourde charge le poids de nos péchés. Ils sont bien nôtres. Et nous y tenons, ah ! com
65 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jean-Louis Vaudoyer, Premières amours (août 1927)
3537 s nouvelles n’ont guère de commun entre elles que la forme : ce sont de lentes réminiscences, des évocations intérieures,
3538 iniscences, des évocations intérieures, — et dans l’ abandon de leurs méandres, peu à peu, se précisent les circonstances d
3539 bandon de leurs méandres, peu à peu, se précisent les circonstances d’une aventure ancienne. Entre hier et demain : Une fe
3540 suicidé pour une femme qu’ils ont aimé tous deux ( L’ Amie du Mort.) Ou bien c’est le récit d’un été de vacances, quand les
3541 nt aimé tous deux (L’Amie du Mort.) Ou bien c’est le récit d’un été de vacances, quand les premières inquiétudes du désir
3542 rieure aux deux autres, est une réussite rare par la justesse de l’observation autant que par la sympathie de l’auteur pou
3543 autres, est une réussite rare par la justesse de l’ observation autant que par la sympathie de l’auteur pour ses héros. In
3544 e par la justesse de l’observation autant que par la sympathie de l’auteur pour ses héros. Indulgence et regrets, un ton q
3545 e de l’observation autant que par la sympathie de l’ auteur pour ses héros. Indulgence et regrets, un ton qui permet le tac
3546 s héros. Indulgence et regrets, un ton qui permet le tact dans la hardiesse. On reste ravi de tant d’adresse sous un air d
3547 lgence et regrets, un ton qui permet le tact dans la hardiesse. On reste ravi de tant d’adresse sous un air de facilité qu
3548 sse sous un air de facilité qui serait presque de la nonchalance. M. Vaudoyer ressuscite ces adolescences avec une tendre
3549 objet qu’il en saisit sans mièvrerie ni vulgarité la grâce un peu trouble et l’insidieuse mélancolie. Un détail piqué adro
3550 mièvrerie ni vulgarité la grâce un peu trouble et l’ insidieuse mélancolie. Un détail piqué adroitement, papillon dont frém
3551 iqué adroitement, papillon dont frémissent encore les ailes intactes ; l’évocation toute nervalienne en sa nostalgie, de la
3552 illon dont frémissent encore les ailes intactes ; l’ évocation toute nervalienne en sa nostalgie, de la jeune étrangère don
3553 l’évocation toute nervalienne en sa nostalgie, de la jeune étrangère dont on rêve à 15 ans ; et voici ce je ne sais quoi,
3554 oici ce je ne sais quoi, ce délice furtif, ce que l’ auteur lui-même appelle « cette vague poésie involontaire, intermitten
3555 à ces œuvrettes une si exquise humanité : par lui le « charme » reprend quelques droits. an. Rougemont Denis de, « [Com
66 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Edmond Jaloux, Rainer Maria Rilke (décembre 1927)
3556 ériser tout lyrisme germanique, il faudra opposer l’ excellent petit livre d’Edmond Jaloux. C’est un recueil de divers arti
3557 eil de divers articles et essais, dont certains — le Message de Rilke — sont du meilleur Jaloux, de ce Jaloux qui sait par
3558 qu’il partage avec eux ce goût du rêve préféré à la vie, — à ce qu’on appelle la vie. Jaloux, qui a rencontré plusieurs f
3559 ût du rêve préféré à la vie, — à ce qu’on appelle la vie. Jaloux, qui a rencontré plusieurs fois Rilke, trace de lui un po
3560 hotographie morale, mais une sorte de synthèse de l’ homme et de l’homme dans son œuvre, qui est peut-être plus vraie que l
3561 rale, mais une sorte de synthèse de l’homme et de l’ homme dans son œuvre, qui est peut-être plus vraie que le vrai, je veu
3562 dans son œuvre, qui est peut-être plus vraie que le vrai, je veux dire, plus rilkienne que ne fut Rilke. Rilke y apparaît
3563 telles qu’on en découvre chez certaines femmes et l’ on y voit une préciosité sentimentale qui touche à la névrose ou bien
3564 n y voit une préciosité sentimentale qui touche à la névrose ou bien simplement une clairvoyance exceptionnelle, suivant q
3565 ment une clairvoyance exceptionnelle, suivant que l’ on juge au nom d’une science ou au nom de l’esprit. « Pour moi qui aim
3566 t que l’on juge au nom d’une science ou au nom de l’ esprit. « Pour moi qui aime plus que tout la poésie, écrit Jaloux, aus
3567 om de l’esprit. « Pour moi qui aime plus que tout la poésie, écrit Jaloux, aussitôt que je vis Rilke, je compris que cet u
3568 arce qu’ils possèdent déjà, au moins obscurément, le sens des réalités sur lesquelles s’opère l’expérience. On ne prouve l
3569 ment, le sens des réalités sur lesquelles s’opère l’ expérience. On ne prouve la religion qu’aux convertis — qui n’ont plus
3570 sur lesquelles s’opère l’expérience. On ne prouve la religion qu’aux convertis — qui n’ont plus besoin de preuves. Il rest
3571 celui-ci tend un merveilleux piège sentimental à la raison raisonnante. Et qu’il nous mène un peu plus loin que la sempit
3572 sonnante. Et qu’il nous mène un peu plus loin que la sempiternelle « stratégie littéraire », de gazetiers ; au cœur de ces
3573 s sujets qui paraît-il, ne sont pas d’actualité : la solitude, la maladie, la peur. ao. Rougemont Denis de, « [Compte r
3574 paraît-il, ne sont pas d’actualité : la solitude, la maladie, la peur. ao. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Edmond
3575 e sont pas d’actualité : la solitude, la maladie, la peur. ao. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Edmond Jaloux, Rain
67 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Léon Bopp, Interférences (décembre 1927)
3576 ment il a écrit, sur commande, une Promenade dans le Midi. Récit alerte et familier (un brin pédant et un brin vulgaire pa
3577 nt une création littéraire. Bien sûr, c’est cela, le malaise d’écrire. Bopp est très intelligent. Et plein de verve, et pa
3578 une effusion « lyrique », histoire de n’avoir pas l’ air dupe. Mais il a des façons parfois bien désobligeantes de voir jus
3579 scientifique, vis-à-vis du phénomène littéraire. La « Promenade » du héros de Bopp est une sorte de pensum. Cela rend peu
3580 oins convaincantes certaines de ses remarques sur l’ inspiration. D’autre part la simplicité de l’objet était nécessaire à
3581 de ses remarques sur l’inspiration. D’autre part la simplicité de l’objet était nécessaire à la sécurité de cette sorte d
3582 sur l’inspiration. D’autre part la simplicité de l’ objet était nécessaire à la sécurité de cette sorte d’analyse, — encor
3583 part la simplicité de l’objet était nécessaire à la sécurité de cette sorte d’analyse, — encore que Bopp ait prouvé dans
3584 facilité même est une réussite. Léon Bopp, c’est le combat d’un tempérament avec l’esprit de géométrie. Un scientisme ass
3585 Léon Bopp, c’est le combat d’un tempérament avec l’ esprit de géométrie. Un scientisme assez insolent et les joyeuses révo
3586 rit de géométrie. Un scientisme assez insolent et les joyeuses révoltes de sa verve « interfèrent » en lui. Et aussi (presq
68 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Princesse Bibesco, Catherine-Paris (janvier 1928)
3587 928)aq C’est un livre sympathique ; et il vaut la peine de le dire car la chose n’est pas si fréquente dans la producti
3588 est un livre sympathique ; et il vaut la peine de le dire car la chose n’est pas si fréquente dans la production actuelle.
3589 sympathique ; et il vaut la peine de le dire car la chose n’est pas si fréquente dans la production actuelle. On retrouve
3590 le dire car la chose n’est pas si fréquente dans la production actuelle. On retrouve aux premiers chapitres de Catherine-
3591 -Paris cette magie des sensations et des rêves de l’ enfance et cette féminité du sentiment, du tour de pensée même, qui fa
3592 opos. Mais dans ce roman, il n’y a plus seulement la femme, avec le miracle perpétuel de sa sensibilité. Il y a encore la
3593 ce roman, il n’y a plus seulement la femme, avec le miracle perpétuel de sa sensibilité. Il y a encore la princesse, le t
3594 iracle perpétuel de sa sensibilité. Il y a encore la princesse, le témoin intelligent et un peu ironique des cours d’Europ
3595 el de sa sensibilité. Il y a encore la princesse, le témoin intelligent et un peu ironique des cours d’Europe à la veille
3596 telligent et un peu ironique des cours d’Europe à la veille de la guerre. De cette espèce de collaboration résultent à la
3597 un peu ironique des cours d’Europe à la veille de la guerre. De cette espèce de collaboration résultent à la fois le défau
3598 cette espèce de collaboration résultent à la fois le défaut de composition du livre et sa richesse. L’enfance de Catherine
3599 le défaut de composition du livre et sa richesse. L’ enfance de Catherine à Paris est du roman pur ; la tournée des cours d
3600 L’enfance de Catherine à Paris est du roman pur ; la tournée des cours de l’Europe centrale, qu’elle subit comme jeune épo
3601 Paris est du roman pur ; la tournée des cours de l’ Europe centrale, qu’elle subit comme jeune épouse d’un comte polonais,
3602 i étonnent de la part d’une femme aussi femme que l’ auteur du Perroquet Vert. Mais là-dessus, le roman repart dans une tro
3603 e que l’auteur du Perroquet Vert. Mais là-dessus, le roman repart dans une troisième action (l’amour de Catherine pour un
3604 essus, le roman repart dans une troisième action ( l’ amour de Catherine pour un aviateur français) assez peu intéressante à
3605 téressante à vrai dire, parce qu’elle n’est pas à l’ échelle de ce qui la précède. Ces défaillances de la technique du roma
3606 re, parce qu’elle n’est pas à l’échelle de ce qui la précède. Ces défaillances de la technique du roman sont sauvées par u
3607 échelle de ce qui la précède. Ces défaillances de la technique du roman sont sauvées par un style brillant, plein de trouv
3608 mémoires. Mais si son début permet de croire que le Perroquet Vert ne restera pas une réussite isolée dans l’œuvre pureme
3609 quet Vert ne restera pas une réussite isolée dans l’ œuvre purement romanesque de la princesse Bibesco, Catherine-Paris ann
3610 ussite isolée dans l’œuvre purement romanesque de la princesse Bibesco, Catherine-Paris annonce par ailleurs un mémorialis
3611 once par ailleurs un mémorialiste captivant, dans la tradition d’un Ligne par exemple. aq. Rougemont Denis de, « [Compt
69 1928, Foi et Vie, articles (1928–1977). Le péril Ford (février 1928)
3612 Le péril Ford (février 1928)a On a trop dit que notre époque est chao
3613 e est chaotique. Je crois bien, au contraire, que l’ histoire n’a pas connu de période où les directions d’une civilisation
3614 raire, que l’histoire n’a pas connu de période où les directions d’une civilisation apparaissent plus nettement. Un certain
3615 ou, pour mieux dire, une organisation générale de la vie mondiale. Toutes les forces du temps y concourent obscurément ; e
3616 organisation générale de la vie mondiale. Toutes les forces du temps y concourent obscurément ; et, pour peu que cela cont
3617 nt ; et, pour peu que cela continue, pour peu que la bourgeoisie intellectuelle persiste à jouer l’autruche aux yeux clos,
3618 ue la bourgeoisie intellectuelle persiste à jouer l’ autruche aux yeux clos, l’avènement de cette organisation toute-puissa
3619 tuelle persiste à jouer l’autruche aux yeux clos, l’ avènement de cette organisation toute-puissante n’est plus qu’une ques
3620 s encore. Ici et là, quelques cris s’élèvent dans le désert d’une époque déjà presque abandonnée par l’Esprit. À l’heure d
3621 e désert d’une époque déjà presque abandonnée par l’ Esprit. À l’heure de toucher aux buts que sa civilisation poursuit dep
3622 ne époque déjà presque abandonnée par l’Esprit. À l’ heure de toucher aux buts que sa civilisation poursuit depuis près de
3623 ivilisation poursuit depuis près de deux siècles, l’ Occidental est saisi d’un étrange malaise. Il soupçonne, par éclairs,
3624 ut-être dans ces buts une absurdité fondamentale. L’ infaillible progrès aurait-il fait fausse route ? Est-il temps encore
3625 ait-il fait fausse route ? Est-il temps encore de le détourner du désastre spirituel vers lequel il entraîne l’Occident ?
3626 ner du désastre spirituel vers lequel il entraîne l’ Occident ? Cris dans le désert. Déserts des villes fiévreuses où le fr
3627 el vers lequel il entraîne l’Occident ? Cris dans le désert. Déserts des villes fiévreuses où le fracas des machines couvr
3628 dans le désert. Déserts des villes fiévreuses où le fracas des machines couvre déjà la plainte humaine. Il y a ceux qui p
3629 fiévreuses où le fracas des machines couvre déjà la plainte humaine. Il y a ceux qui pleurent le passé et ceux qui prophé
3630 déjà la plainte humaine. Il y a ceux qui pleurent le passé et ceux qui prophétisent, ceux qui jettent une imprécation stér
3631 tent une imprécation stérile et magnifique contre l’ époque et ceux qui cherchent à l’oublier dans le rêve, dans l’utopie,
3632 agnifique contre l’époque et ceux qui cherchent à l’ oublier dans le rêve, dans l’utopie, dans une belle doctrine… Il faudr
3633 e l’époque et ceux qui cherchent à l’oublier dans le rêve, dans l’utopie, dans une belle doctrine… Il faudrait d’abord pre
3634 ceux qui cherchent à l’oublier dans le rêve, dans l’ utopie, dans une belle doctrine… Il faudrait d’abord prendre conscienc
3635 ous, dans cette complaisance générale à proclamer le désordre du temps. On a peur de certaines évidences, on préfère affir
3636 n préfère affirmer que tout est incompréhensible. L’ homme moderne recule devant l’évidence de la banqueroute prochaine de
3637 t incompréhensible. L’homme moderne recule devant l’ évidence de la banqueroute prochaine de sa civilisation. Il répugne à
3638 ible. L’homme moderne recule devant l’évidence de la banqueroute prochaine de sa civilisation. Il répugne à admettre qu’un
3639 rder autour de nous et d’en croire nos yeux. I. L’ homme qui a réussi Je prends Henry Ford comme un symbole du monde m
3640 Henry Ford comme un symbole du monde moderne, et le meilleur, parce que personne ne s’est approché plus que lui du type i
3641 e ne s’est approché plus que lui du type idéal de l’ industriel et du capitaliste. Le succès immense de ses livres1, sa pop
3642 du type idéal de l’industriel et du capitaliste. Le succès immense de ses livres1, sa popularité universelle sont signes
3643 ivres1, sa popularité universelle sont signes que l’ époque a senti en lui son incarnation la plus parfaite. Qu’on ne m’acc
3644 ignes que l’époque a senti en lui son incarnation la plus parfaite. Qu’on ne m’accuse donc pas de caricaturer l’objet de m
3645 rfaite. Qu’on ne m’accuse donc pas de caricaturer l’ objet de ma critique pour faciliter l’accusation : je prends pour la j
3646 caricaturer l’objet de ma critique pour faciliter l’ accusation : je prends pour la juger ce que l’époque m’offre de mieux
3647 ique pour faciliter l’accusation : je prends pour la juger ce que l’époque m’offre de mieux réussi. Voici la vie de Ford,
3648 ter l’accusation : je prends pour la juger ce que l’ époque m’offre de mieux réussi. Voici la vie de Ford, telle qu’il la r
3649 er ce que l’époque m’offre de mieux réussi. Voici la vie de Ford, telle qu’il la raconte dans Ma vie et mon œuvre. Il naît
3650 e mieux réussi. Voici la vie de Ford, telle qu’il la raconte dans Ma vie et mon œuvre. Il naît fils de paysan. Il passe so
3651 des outils qu’il joue encore à présent », dit‑il. Le plus mémorable événement de ces années de jeunesse, son « chemin de D
3652 che au juste quelle dose d’« humour » il met dans l’ expression), c’est la rencontre d’une locomotive routière. « Depuis l’
3653 ose d’« humour » il met dans l’expression), c’est la rencontre d’une locomotive routière. « Depuis l’instant où, enfant de
3654 la rencontre d’une locomotive routière. « Depuis l’ instant où, enfant de 12 ans, j’aperçus cette machine de route, jusqu’
3655 a été de construire une bonne machine routière. » Les étapes de sa jeunesse sont : la construction d’un moteur à vapeur, pu
3656 hine routière. » Les étapes de sa jeunesse sont : la construction d’un moteur à vapeur, puis d’un moteur à explosion, enfi
3657 omobile fabriquée, à temps perdu, alors qu’il est simple mécanicien chez Edison. Il fonde tôt après la Société des automobiles
3658 simple mécanicien chez Edison. Il fonde tôt après la Société des automobiles Ford, « et commence à réaliser son rêve, le t
3659 omobiles Ford, « et commence à réaliser son rêve, le type unique d’automobile utilitaire »2. Dès lors, c’est une suite de
3660 . Dès lors, c’est une suite de chiffres indiquant le progrès de sa production, d’année en année. On pourrait ajouter à ces
3661 ur lui qu’un résultat secondaire de son activité. Le but de sa vie n’a jamais été de s’enrichir. Son « rêve » était autre,
3662 s été de s’enrichir. Son « rêve » était autre, il l’ a réalisé comme il est donné à peu d’hommes de le faire : 7000 voiture
3663 l’a réalisé comme il est donné à peu d’hommes de le faire : 7000 voitures par jour, et la possibilité d’augmenter encore
3664 d’hommes de le faire : 7000 voitures par jour, et la possibilité d’augmenter encore cette production. Ford est le plus pui
3665 ité d’augmenter encore cette production. Ford est le plus puissant industriel du monde ; le plus riche, au point qu’il peu
3666 . Ford est le plus puissant industriel du monde ; le plus riche, au point qu’il peut parler d’égal à égal avec beaucoup d’
3667 peut parler d’égal à égal avec beaucoup d’États ; le plus parfait aussi. Son succès sans précédent le met à l’abri de tout
3668 le plus parfait aussi. Son succès sans précédent le met à l’abri de toutes les attaques, du point de vue technique. L’org
3669 parfait aussi. Son succès sans précédent le met à l’ abri de toutes les attaques, du point de vue technique. L’organisation
3670 n succès sans précédent le met à l’abri de toutes les attaques, du point de vue technique. L’organisation de ses usines, de
3671 e toutes les attaques, du point de vue technique. L’ organisation de ses usines, des salaires, des conditions de travail et
3672 et du paupérisme. C’est un résultat qu’on n’a pas le droit humainement de sous-estimer. Les griefs que les socialistes fon
3673 ’on n’a pas le droit humainement de sous-estimer. Les griefs que les socialistes font aux capitalistes européens ne sauraie
3674 droit humainement de sous-estimer. Les griefs que les socialistes font aux capitalistes européens ne sauraient l’atteindre.
3675 stes font aux capitalistes européens ne sauraient l’ atteindre. Au contraire, il a résolu la question sociale d’une façon q
3676 sauraient l’atteindre. Au contraire, il a résolu la question sociale d’une façon qui ne devrait pas déplaire aux doctrina
3677 mplète du monde, seule méthode capable d’empêcher les abus des capitalistes. Du même coup, en supprimant l’esclavage financ
3678 bus des capitalistes. Du même coup, en supprimant l’ esclavage financier de l’ouvrier, il supprime la principale cause avou
3679 même coup, en supprimant l’esclavage financier de l’ ouvrier, il supprime la principale cause avouée de la lutte des classe
3680 t l’esclavage financier de l’ouvrier, il supprime la principale cause avouée de la lutte des classes. Il se dégage de la l
3681 uvrier, il supprime la principale cause avouée de la lutte des classes. Il se dégage de la lecture de Ma vie et mon œuvre
3682 e avouée de la lutte des classes. Il se dégage de la lecture de Ma vie et mon œuvre une impression de netteté, de solidité
3683 pression de netteté, de solidité, de propreté. Si l’ on ajoute à cela le plaisir qu’on éprouve toujours au récit de succès
3684 , de solidité, de propreté. Si l’on ajoute à cela le plaisir qu’on éprouve toujours au récit de succès mirobolants, et le
3685 rouve toujours au récit de succès mirobolants, et le charme un peu facile mais fort goûté du grand public, de l’humour amé
3686 un peu facile mais fort goûté du grand public, de l’ humour américain, l’on comprendra sans peine la popularité mondiale de
3687 ort goûté du grand public, de l’humour américain, l’ on comprendra sans peine la popularité mondiale des « idées » d’Henry
3688 de l’humour américain, l’on comprendra sans peine la popularité mondiale des « idées » d’Henry Ford et des livres qui les
3689 iale des « idées » d’Henry Ford et des livres qui les répandent. L’on ne pourra qu’y applaudir, semble-t-il, en souhaitant
3690 s » d’Henry Ford et des livres qui les répandent. L’ on ne pourra qu’y applaudir, semble-t-il, en souhaitant que les indust
3691 ra qu’y applaudir, semble-t-il, en souhaitant que les industriels européens s’en inspirent toujours plus. Ford leur montre
3692 ns s’en inspirent toujours plus. Ford leur montre le chemin qu’ils seront bien obligés de prendre tôt ou tard. Il est préf
3693 e quelques chances encore de régler pacifiquement le conflit du capital et du travail. « Se fordiser ou mourir », écrivait
3694 vait récemment un économiste. Ford, perfection de l’ industriel, offre au monde moderne le premier exemple de son achèvemen
3695 exemple de son achèvement intégral. Il a atteint l’ objectif de la moderne civilisation occidentale. Voici donc venue l’he
3696 n achèvement intégral. Il a atteint l’objectif de la moderne civilisation occidentale. Voici donc venue l’heure de la juge
3697 oderne civilisation occidentale. Voici donc venue l’ heure de la juger. Le héros de l’époque, c’est l’homme qui a réussi. M
3698 lisation occidentale. Voici donc venue l’heure de la juger. Le héros de l’époque, c’est l’homme qui a réussi. Mais à quoi 
3699 ccidentale. Voici donc venue l’heure de la juger. Le héros de l’époque, c’est l’homme qui a réussi. Mais à quoi ? C’est la
3700 Voici donc venue l’heure de la juger. Le héros de l’ époque, c’est l’homme qui a réussi. Mais à quoi ? C’est la plus grave
3701 l’heure de la juger. Le héros de l’époque, c’est l’ homme qui a réussi. Mais à quoi ? C’est la plus grave question qu’on p
3702 , c’est l’homme qui a réussi. Mais à quoi ? C’est la plus grave question qu’on puisse poser à notre temps. II. M. Ford
3703 ser à notre temps. II. M. Ford a ses idées, ou la philosophie de ceux qui n’en veulent pas Nous avons dit tout à l’h
3704 eux qui n’en veulent pas Nous avons dit tout à l’ heure quel fut le but de la vie de Ford, sa « grande et constante ambi
3705 ent pas Nous avons dit tout à l’heure quel fut le but de la vie de Ford, sa « grande et constante ambition ». Il semble
3706 Nous avons dit tout à l’heure quel fut le but de la vie de Ford, sa « grande et constante ambition ». Il semble que toute
3707 éthode, technique — soit conditionnée jusque dans le détail par une idée fixe primitive. Considérons-la sous cet angle. Il
3708 e détail par une idée fixe primitive. Considérons- la sous cet angle. Il y a d’abord la vision de l’auto routière : naissan
3709 ve. Considérons-la sous cet angle. Il y a d’abord la vision de l’auto routière : naissance de sa passion froide et tenace.
3710 ns-la sous cet angle. Il y a d’abord la vision de l’ auto routière : naissance de sa passion froide et tenace. Il s’efforce
3711 sion froide et tenace. Il s’efforce d’en réaliser l’ objet par ses propres moyens, à un exemplaire ; puis, il fonde une usi
3712 plaire ; puis, il fonde une usine pour multiplier les réalisations. Bientôt, élargissant son ambition, il conçoit ce mythe
3713 on, il conçoit ce mythe extravagant du bonheur de l’ humanité par la possession d’automobiles Ford. Et, comme il est très i
3714 ce mythe extravagant du bonheur de l’humanité par la possession d’automobiles Ford. Et, comme il est très intelligent, il
3715 l est très intelligent, il a vite fait de démêler les conditions les plus rationnelles de la production, avec cette netteté
3716 lligent, il a vite fait de démêler les conditions les plus rationnelles de la production, avec cette netteté et cette décis
3717 e démêler les conditions les plus rationnelles de la production, avec cette netteté et cette décision qu’une passion conte
3718 te décision qu’une passion contenue peut donner à l’ homme d’action. Enfin, le voici en mesure de produire des quantités én
3719 n contenue peut donner à l’homme d’action. Enfin, le voici en mesure de produire des quantités énormes d’autos. Seulement,
3720 nt, pour pouvoir continuer, il faut vendre ; dans l’ intérêt de la production, il faut créer la consommation. La réclame s’
3721 oir continuer, il faut vendre ; dans l’intérêt de la production, il faut créer la consommation. La réclame s’en charge. Pa
3722  ; dans l’intérêt de la production, il faut créer la consommation. La réclame s’en charge. Par le procédé très simple de l
3723 de la production, il faut créer la consommation. La réclame s’en charge. Par le procédé très simple de la répétition, on
3724 réer la consommation. La réclame s’en charge. Par le procédé très simple de la répétition, on fait croire aux gens qu’ils
3725 tion. La réclame s’en charge. Par le procédé très simple de la répétition, on fait croire aux gens qu’ils ne peuvent plus vivr
3726 éclame s’en charge. Par le procédé très simple de la répétition, on fait croire aux gens qu’ils ne peuvent plus vivre heur
3727 ls ne peuvent plus vivre heureux sans auto. Voilà l’ affaire lancée. La passion de Ford se donne libre cours. Il ne s’agit
3728 vivre heureux sans auto. Voilà l’affaire lancée. La passion de Ford se donne libre cours. Il ne s’agit plus maintenant qu
3729 À chaque page de ses livres, on pourrait relever les sophismes plus ou moins conscients par lesquels il prétend ramener le
3730 moins conscients par lesquels il prétend ramener le bénéfice de la production à celui du consommateur. Prenons cette peti
3731 ts par lesquels il prétend ramener le bénéfice de la production à celui du consommateur. Prenons cette petite phrase qui n
3732 i n’a l’air de rien : « Nul ne contestera que, si l’ on abaisse suffisamment les prix, on ne trouve toujours des clients, q
3733 l ne contestera que, si l’on abaisse suffisamment les prix, on ne trouve toujours des clients, quel que soit l’état du marc
3734 on ne trouve toujours des clients, quel que soit l’ état du marché. » Il semble que cela soit tout à l’avantage du client.
3735 ’état du marché. » Il semble que cela soit tout à l’ avantage du client. Mais cherchons un peu les causes réelles de cet ab
3736 out à l’avantage du client. Mais cherchons un peu les causes réelles de cet abaissement de prix — la concurrence n’étant bi
3737 u les causes réelles de cet abaissement de prix — la concurrence n’étant bien entendu qu’une cause accessoire. Dire que l’
3738 nt bien entendu qu’une cause accessoire. Dire que l’ état du marché est tel que le client n’achète plus, cela signifie parf
3739 accessoire. Dire que l’état du marché est tel que le client n’achète plus, cela signifie parfois que la marchandise est mo
3740 e client n’achète plus, cela signifie parfois que la marchandise est momentanément trop chère ; mais surtout que le besoin
3741 e est momentanément trop chère ; mais surtout que le besoin qu’on a de tel objet est satisfait ou a disparu. Il semble alo
3742 t est satisfait ou a disparu. Il semble alors que l’ industriel n’ait plus qu’à plier bagage. Mais c’est ici que Ford montr
3743 qu’à plier bagage. Mais c’est ici que Ford montre le bout de l’oreille, et que son but réel est la production pour elle-mê
3744 bagage. Mais c’est ici que Ford montre le bout de l’ oreille, et que son but réel est la production pour elle-même, non pas
3745 tre le bout de l’oreille, et que son but réel est la production pour elle-même, non pas le plaisir ou l’intérêt véritable
3746 ut réel est la production pour elle-même, non pas le plaisir ou l’intérêt véritable du client. Le besoin ayant disparu, la
3747 production pour elle-même, non pas le plaisir ou l’ intérêt véritable du client. Le besoin ayant disparu, la production de
3748 pas le plaisir ou l’intérêt véritable du client. Le besoin ayant disparu, la production devant se maintenir, il n’y a qu’
3749 rêt véritable du client. Le besoin ayant disparu, la production devant se maintenir, il n’y a qu’une solution : recréer le
3750 se maintenir, il n’y a qu’une solution : recréer le besoin. Pour cela, on abaisse les prix. Le client fait la comparaison
3751 lution : recréer le besoin. Pour cela, on abaisse les prix. Le client fait la comparaison. Il est impressionné par la baiss
3752 ecréer le besoin. Pour cela, on abaisse les prix. Le client fait la comparaison. Il est impressionné par la baisse, au poi
3753 n. Pour cela, on abaisse les prix. Le client fait la comparaison. Il est impressionné par la baisse, au point qu’il en oub
3754 ient fait la comparaison. Il est impressionné par la baisse, au point qu’il en oublie que cela ne l’intéresse plus réellem
3755 r la baisse, au point qu’il en oublie que cela ne l’ intéresse plus réellement. Il croit qu’il va gagner 5 francs en acheta
3756 acheté du tout. Autrement dit, il est trompé par la baisse. L’industriel comptait. La tromperie est préméditée. Et le sca
3757 tout. Autrement dit, il est trompé par la baisse. L’ industriel comptait. La tromperie est préméditée. Et le scandale, à mo
3758 est trompé par la baisse. L’industriel comptait. La tromperie est préméditée. Et le scandale, à mon sens, n’est pas que l
3759 ustriel comptait. La tromperie est préméditée. Et le scandale, à mon sens, n’est pas que l’industriel ait forcé (psycholog
3760 éditée. Et le scandale, à mon sens, n’est pas que l’ industriel ait forcé (psychologiquement) le client à faire une dépense
3761 as que l’industriel ait forcé (psychologiquement) le client à faire une dépense superflue ; le scandale est qu’il l’ait tr
3762 uement) le client à faire une dépense superflue ; le scandale est qu’il l’ait trompé sur ses véritables besoins. Car cela
3763 ire une dépense superflue ; le scandale est qu’il l’ ait trompé sur ses véritables besoins. Car cela va bien plus profond,
3764 régulation et d’alternances. Tel est ce sophisme, le paradoxe du bon marché. Celui de la réclame a même but, mêmes effets.
3765 ce sophisme, le paradoxe du bon marché. Celui de la réclame a même but, mêmes effets. Mais le plus grave est peut-être le
3766 elui de la réclame a même but, mêmes effets. Mais le plus grave est peut-être le sophisme du loisir. M. Guglielmo Ferrero
3767 t, mêmes effets. Mais le plus grave est peut-être le sophisme du loisir. M. Guglielmo Ferrero a fort bien montré, dans un
3768 ro a fort bien montré, dans un article intitulé «  Le grand paradoxe du monde moderne »3, ce qu’il y a de profondément anti
3769  »3, ce qu’il y a de profondément antihumain dans la conception fordienne de l’oisiveté. Ford a créé un second dimanche da
3770 dément antihumain dans la conception fordienne de l’ oisiveté. Ford a créé un second dimanche dans la semaine, « retouché l
3771 e l’oisiveté. Ford a créé un second dimanche dans la semaine, « retouché l’œuvre de la Création », comme dit Ferrero. Le b
3772 éé un second dimanche dans la semaine, « retouché l’ œuvre de la Création », comme dit Ferrero. Le bon peuple s’extasie. Il
3773 d dimanche dans la semaine, « retouché l’œuvre de la Création », comme dit Ferrero. Le bon peuple s’extasie. Il ne peut vo
3774 uché l’œuvre de la Création », comme dit Ferrero. Le bon peuple s’extasie. Il ne peut voir la duperie : ce jeu du chat et
3775 Ferrero. Le bon peuple s’extasie. Il ne peut voir la duperie : ce jeu du chat et de la souris ; si Ford relâche les ouvrie
3776 Il ne peut voir la duperie : ce jeu du chat et de la souris ; si Ford relâche les ouvriers et leur donne une apparence de
3777 ce jeu du chat et de la souris ; si Ford relâche les ouvriers et leur donne une apparence de liberté, c’est pour mieux les
3778 donne une apparence de liberté, c’est pour mieux les prendre dans son engrenage. L’emploi de leurs loisirs est prévu. Il e
3779 c’est pour mieux les prendre dans son engrenage. L’ emploi de leurs loisirs est prévu. Il est déterminé par la réclame, le
3780 de leurs loisirs est prévu. Il est déterminé par la réclame, les produits Ford qu’il faut user, etc. Il a pour but vérita
3781 isirs est prévu. Il est déterminé par la réclame, les produits Ford qu’il faut user, etc. Il a pour but véritable d’augment
3782 ut user, etc. Il a pour but véritable d’augmenter la consommation. Il rend plus complet l’esclavage de l’ouvrier, puisqu’i
3783 d’augmenter la consommation. Il rend plus complet l’ esclavage de l’ouvrier, puisqu’il englobe jusqu’à son repos dans le cy
3784 consommation. Il rend plus complet l’esclavage de l’ ouvrier, puisqu’il englobe jusqu’à son repos dans le cycle de la produ
3785 ouvrier, puisqu’il englobe jusqu’à son repos dans le cycle de la production. Cercle vicieux : plus la production s’intensi
3786 squ’il englobe jusqu’à son repos dans le cycle de la production. Cercle vicieux : plus la production s’intensifie, plus il
3787 le cycle de la production. Cercle vicieux : plus la production s’intensifie, plus il faut créer de besoins et de loisirs.
3788 plus il faut créer de besoins et de loisirs. Or, l’ industrie ne peut subsister qu’en progressant. Mais la nature humaine
3789 dustrie ne peut subsister qu’en progressant. Mais la nature humaine a des limites. Et le temps approche où elles seront at
3790 ressant. Mais la nature humaine a des limites. Et le temps approche où elles seront atteintes. On peut se demander jusqu’à
3791 qu’à quel point Ford est conscient des buts et de l’ avenir de son effort. Pour mon compte, je crois que l’idée fixe de pro
3792 enir de son effort. Pour mon compte, je crois que l’ idée fixe de produire peut très bien envahir un cerveau moderne au poi
3793 n’empêche pas notre industriel de philosopher sur les sujets les plus divers. Les aphorismes sont assez révélateurs de la m
3794 as notre industriel de philosopher sur les sujets les plus divers. Les aphorismes sont assez révélateurs de la mentalité ca
3795 el de philosopher sur les sujets les plus divers. Les aphorismes sont assez révélateurs de la mentalité capitaliste américa
3796 divers. Les aphorismes sont assez révélateurs de la mentalité capitaliste américaine. Voici, par exemple, une définition
3797 américaine. Voici, par exemple, une définition de la liberté : La liberté consiste à travailler pendant le temps convenab
3798 ici, par exemple, une définition de la liberté : La liberté consiste à travailler pendant le temps convenable et à gagner
3799 berté : La liberté consiste à travailler pendant le temps convenable et à gagner, par ce moyen, de quoi vivre convenablem
3800 ement tout en restant maître de régler à sa guise le détail de sa vie privée. Cette liberté particulière, et cent autres p
3801 e, et cent autres pareilles, composent, au total, la grande Liberté idéale et mettent de l’huile dans les rouages de la vi
3802 au total, la grande Liberté idéale et mettent de l’ huile dans les rouages de la vie quotidienne. Cette Liberté idéale ré
3803 grande Liberté idéale et mettent de l’huile dans les rouages de la vie quotidienne. Cette Liberté idéale réduite au rôle
3804 idéale et mettent de l’huile dans les rouages de la vie quotidienne. Cette Liberté idéale réduite au rôle d’huile dans l
3805 Cette Liberté idéale réduite au rôle d’huile dans les rouages, n’est-ce pas charmant et prometteur ? Et que dire de cette a
3806 ette admirable simplification : « Sur quoi repose la société ? Sur les hommes et les moyens grâce auxquels on cultive, on
3807 mplification : « Sur quoi repose la société ? Sur les hommes et les moyens grâce auxquels on cultive, on fabrique, on trans
3808 « Sur quoi repose la société ? Sur les hommes et les moyens grâce auxquels on cultive, on fabrique, on transporte. » « Tou
3809  » « Toute notre gloire est dans nos œuvres, dans le prix que nous payons à la terre la satisfaction de nos besoins. » — F
3810 t dans nos œuvres, dans le prix que nous payons à la terre la satisfaction de nos besoins. » — Ford se moque de la philoso
3811 s œuvres, dans le prix que nous payons à la terre la satisfaction de nos besoins. » — Ford se moque de la philosophie. Il
3812 satisfaction de nos besoins. » — Ford se moque de la philosophie. Il ne peut empêcher que son attitude ne porte un nom phi
3813 ations plus nettes encore : « Je ne considère pas les machines Ford simplement comme des machines. J’y vois la réalisation
3814 ines Ford simplement comme des machines. J’y vois la réalisation concrète d’une théorie qui tend à faire de ce monde un sé
3815 tend à faire de ce monde un séjour meilleur pour les hommes. » C’est le bonheur, le salut par l’auto. Philosophie réclame.
3816 monde un séjour meilleur pour les hommes. » C’est le bonheur, le salut par l’auto. Philosophie réclame. « Ce que j’ai à cœ
3817 our meilleur pour les hommes. » C’est le bonheur, le salut par l’auto. Philosophie réclame. « Ce que j’ai à cœur, aujourd’
3818 pour les hommes. » C’est le bonheur, le salut par l’ auto. Philosophie réclame. « Ce que j’ai à cœur, aujourd’hui, c’est de
3819 j’ai à cœur, aujourd’hui, c’est de démontrer que les idées mises en pratique chez nous ne concernent pas particulièrement
3820 ique chez nous ne concernent pas particulièrement les autos et les tracteurs, mais composent en quelque manière, un code un
3821 s ne concernent pas particulièrement les autos et les tracteurs, mais composent en quelque manière, un code universel ! » R
3822 e matérialiste ? Un seul doute effleure Ford vers la fin de son livre : Le problème de la production a été brillamment ré
3823 l doute effleure Ford vers la fin de son livre : Le problème de la production a été brillamment résolu… Mais nous nous ab
3824 e Ford vers la fin de son livre : Le problème de la production a été brillamment résolu… Mais nous nous absorbons trop da
3825 e pensons pas assez aux raisons que nous avons de le faire. Tout notre système de concurrence, tout notre effort de créati
3826 concurrence, tout notre effort de création, tout le jeu de nos facultés semblent dirigés uniquement vers la production ma
3827 de nos facultés semblent dirigés uniquement vers la production matérielle et vers la richesse qui en est le fruit. On ne
3828 uniquement vers la production matérielle et vers la richesse qui en est le fruit. On ne saurait mieux dire. Mais il faud
3829 duction matérielle et vers la richesse qui en est le fruit. On ne saurait mieux dire. Mais il faudrait en tirer des consé
3830 de technique. Il n’a pas senti qu’il touchait là le nœud vital du problème moderne. D’ailleurs, les idées générales de ce
3831 là le nœud vital du problème moderne. D’ailleurs, les idées générales de cette sorte sont rares dans son livre. En général,
3832 èmes techniques où son triomphe est facile. C’est le technicien parfait qui combat les techniciens imparfaits. Il ne se de
3833 st facile. C’est le technicien parfait qui combat les techniciens imparfaits. Il ne se demande jamais si la technique même
3834 echniciens imparfaits. Il ne se demande jamais si la technique même la plus perfectionnée mérite les sacrifices qu’elle ex
3835 its. Il ne se demande jamais si la technique même la plus perfectionnée mérite les sacrifices qu’elle exige de l’homme mod
3836 si la technique même la plus perfectionnée mérite les sacrifices qu’elle exige de l’homme moderne. Paradoxes plus ou moins
3837 fectionnée mérite les sacrifices qu’elle exige de l’ homme moderne. Paradoxes plus ou moins intéressés, optimisme d’homme à
3838 imisme d’homme à qui tout réussit, messianisme de la machine, méconnaissance glorieuse des forces spirituelles, le tout ag
3839 méconnaissance glorieuse des forces spirituelles, le tout agrémenté d’humour et exposé avec un simplisme qui emporte à cou
3840 t exposé avec un simplisme qui emporte à coup sûr l’ adhésion du gros public : telle est l’idéologie de celui que M. Cambon
3841 à coup sûr l’adhésion du gros public : telle est l’ idéologie de celui que M. Cambon, dans sa préface, égale aux plus gran
3842 sa préface, égale aux plus grands esprits de tous les temps. On me dira que Ford a mieux à faire que de philosopher. Je le
3843 a que Ford a mieux à faire que de philosopher. Je le veux. Mais si j’insiste un peu sur ses « idées », c’est pour souligne
3844 idées », c’est pour souligner ce hiatus étrange : l’ homme qu’on pourrait appeler le plus actif du monde, l’un de ceux qui
3845 e hiatus étrange : l’homme qu’on pourrait appeler le plus actif du monde, l’un de ceux qui influent le plus sur notre civi
3846 le plus actif du monde, l’un de ceux qui influent le plus sur notre civilisation, possède la philosophie la plus rudimenta
3847 influent le plus sur notre civilisation, possède la philosophie la plus rudimentaire. Le phénomène n’est pas nouveau en O
3848 us sur notre civilisation, possède la philosophie la plus rudimentaire. Le phénomène n’est pas nouveau en Occident, mais i
3849 ion, possède la philosophie la plus rudimentaire. Le phénomène n’est pas nouveau en Occident, mais il est ici tragiquement
3850 bien que notre temps ait prononcé définitivement le divorce de l’esprit et de l’action. III. Le fordisme contre l’Espr
3851 e temps ait prononcé définitivement le divorce de l’ esprit et de l’action. III. Le fordisme contre l’Esprit La formi
3852 noncé définitivement le divorce de l’esprit et de l’ action. III. Le fordisme contre l’Esprit La formidable erreur de
3853 nt le divorce de l’esprit et de l’action. III. Le fordisme contre l’Esprit La formidable erreur de la bourgeoisie mo
3854 esprit et de l’action. III. Le fordisme contre l’ Esprit La formidable erreur de la bourgeoisie moderne c’est de croi
3855 l’action. III. Le fordisme contre l’Esprit La formidable erreur de la bourgeoisie moderne c’est de croire que les c
3856 rdisme contre l’Esprit La formidable erreur de la bourgeoisie moderne c’est de croire que les choses pourront aller ain
3857 eur de la bourgeoisie moderne c’est de croire que les choses pourront aller ainsi longtemps encore. On se refuse à l’idée d
3858 ront aller ainsi longtemps encore. On se refuse à l’ idée d’une catastrophe, pourtant plus que probable, par crainte de se
3859 lus que probable, par crainte de se voir obligé à la révision des valeurs, la plus difficile et la plus grave : celle qu’o
3860 inte de se voir obligé à la révision des valeurs, la plus difficile et la plus grave : celle qu’on ne peut faire qu’au nom
3861 é à la révision des valeurs, la plus difficile et la plus grave : celle qu’on ne peut faire qu’au nom de l’Esprit et de se
3862 us grave : celle qu’on ne peut faire qu’au nom de l’ Esprit et de ses exigences. Mais le « rien de nouveau sous le soleil »
3863 e qu’au nom de l’Esprit et de ses exigences. Mais le « rien de nouveau sous le soleil » derrière lequel on se réfugie avec
3864 de ses exigences. Mais le « rien de nouveau sous le soleil » derrière lequel on se réfugie avec une paresse et une légère
3865 e avec une paresse et une légèreté inouïes, c’est le signe d’une complicité avec un état de choses funeste pour l’Esprit.
3866 ne complicité avec un état de choses funeste pour l’ Esprit. Si l’Esprit nous abandonne, c’est que nous avons voulu tenter
3867 avec un état de choses funeste pour l’Esprit. Si l’ Esprit nous abandonne, c’est que nous avons voulu tenter sans lui une
3868 e que nous pensions gratuite : nous avons cherché le bonheur dans le développement matériel, avec l’arrière-pensée sournoi
3869 ons gratuite : nous avons cherché le bonheur dans le développement matériel, avec l’arrière-pensée sournoise que, si cela
3870 é le bonheur dans le développement matériel, avec l’ arrière-pensée sournoise que, si cela ratait, on gardait toutes les au
3871 sournoise que, si cela ratait, on gardait toutes les autres chances. J’accorderai que le progrès matériel n’est pas mauvai
3872 rdait toutes les autres chances. J’accorderai que le progrès matériel n’est pas mauvais en soi. Mais par l’importance qu’i
3873 ogrès matériel n’est pas mauvais en soi. Mais par l’ importance qu’il a prise dans notre vie, il détourne la civilisation d
3874 ortance qu’il a prise dans notre vie, il détourne la civilisation de son but véritable : aller à l’Esprit, y conduire les
3875 ne la civilisation de son but véritable : aller à l’ Esprit, y conduire les peuples. Ainsi, détournant de l’essentiel une g
3876 son but véritable : aller à l’Esprit, y conduire les peuples. Ainsi, détournant de l’essentiel une grande part des forces
3877 rit, y conduire les peuples. Ainsi, détournant de l’ essentiel une grande part des forces humaines, il travaille contre l’E
3878 nde part des forces humaines, il travaille contre l’ Esprit. Rien n’est gratuit. Nous payons notre passion de posséder la m
3879 st gratuit. Nous payons notre passion de posséder la matière du prix de la seule possession véritable, la connaissance de
3880 s notre passion de posséder la matière du prix de la seule possession véritable, la connaissance de l’Esprit. C’est déjà u
3881 matière du prix de la seule possession véritable, la connaissance de l’Esprit. C’est déjà un fait d’expérience. Et qui n’e
3882 la seule possession véritable, la connaissance de l’ Esprit. C’est déjà un fait d’expérience. Et qui n’en pourrait citer un
3883 ple individuel ? Nous savons assez en quel mépris l’ homme d’affaires à l’américaine tient les choses de l’Esprit. Dans le
3884 savons assez en quel mépris l’homme d’affaires à l’ américaine tient les choses de l’Esprit. Dans le cas le plus favorable
3885 el mépris l’homme d’affaires à l’américaine tient les choses de l’Esprit. Dans le cas le plus favorable, « il se passera bi
3886 mme d’affaires à l’américaine tient les choses de l’ Esprit. Dans le cas le plus favorable, « il se passera bien de cette l
3887 à l’américaine tient les choses de l’Esprit. Dans le cas le plus favorable, « il se passera bien de cette littérature ». P
3888 ricaine tient les choses de l’Esprit. Dans le cas le plus favorable, « il se passera bien de cette littérature ». Plus tar
3889 symphonies, ou autres œuvres destinées à charmer les loisirs de personnes oisives et raffinées, réunies pour admirer mutue
3890 ement leur culture », dit Ford. Et tout est dit ! Le simplisme arrogant avec lequel, de nos jours, on tranche les grandes
3891 me arrogant avec lequel, de nos jours, on tranche les grandes questions humaines est une des manifestations les plus frappa
3892 des questions humaines est une des manifestations les plus frappantes de notre régression. Cette perte du sens de l’âme se
3893 antes de notre régression. Cette perte du sens de l’ âme se nomme bon sens américain. On en fait quelque chose de jovial et
3894 ophie. Mais, sans qu’on s’en doute, cela en prend la place. Les facultés de l’âme, inutilisées, s’atrophient. Pourvu, dit-
3895 s, sans qu’on s’en doute, cela en prend la place. Les facultés de l’âme, inutilisées, s’atrophient. Pourvu, dit-on, que sub
3896 en doute, cela en prend la place. Les facultés de l’ âme, inutilisées, s’atrophient. Pourvu, dit-on, que subsiste le peu de
3897 isées, s’atrophient. Pourvu, dit-on, que subsiste le peu de morale nécessaire aux affaires, tout ira bien. (On pense que l
3898 ssaire aux affaires, tout ira bien. (On pense que les formes de la morale peuvent exister sans leur substance religieuse.)
3899 aires, tout ira bien. (On pense que les formes de la morale peuvent exister sans leur substance religieuse.) L’homme moder
3900 peuvent exister sans leur substance religieuse.) L’ homme moderne manie les choses de l’âme avec une maladresse de barbare
3901 leur substance religieuse.) L’homme moderne manie les choses de l’âme avec une maladresse de barbare. IV. « En être » ou
3902 religieuse.) L’homme moderne manie les choses de l’ âme avec une maladresse de barbare. IV. « En être » ou ne pas en êt
3903 en être Une fois qu’on a compris à quel point le fordisme et l’Esprit sont incompatibles, le monde moderne impose ce d
3904 fois qu’on a compris à quel point le fordisme et l’ Esprit sont incompatibles, le monde moderne impose ce dilemme : « en ê
3905 point le fordisme et l’Esprit sont incompatibles, le monde moderne impose ce dilemme : « en être » ou ne pas en être, c’es
3906  » ou ne pas en être, c’est-à-dire se soumettre à la technique et s’abrutir spirituellement — ou se soumettre à l’Esprit,
3907 et s’abrutir spirituellement — ou se soumettre à l’ Esprit, et tomber presque fatalement dans un anarchisme stérile. 1° Ac
3908 atalement dans un anarchisme stérile. 1° Accepter la technique et ses conditions. Dans cette mécanique bien huilée, au mou
3909 nt si régulier qu’il en devient insensible et que la fatigue semble disparaître, l’homme s’abandonne à des lois géométriqu
3910 insensible et que la fatigue semble disparaître, l’ homme s’abandonne à des lois géométriques. Un jeu de chiffres d’horlog
3911 une fois pour toutes et qu’il sent immuable comme la mort le restitue au monde vers 5 heures du soir, dans la détresse des
3912 pour toutes et qu’il sent immuable comme la mort le restitue au monde vers 5 heures du soir, dans la détresse des dernièr
3913 le restitue au monde vers 5 heures du soir, dans la détresse des dernières sirènes. Au monde, c’est-à-dire à une nature d
3914 sirènes. Au monde, c’est-à-dire à une nature dont l’ usine lui a fait oublier jusqu’à l’existence, et à une liberté qu’il s
3915 ne nature dont l’usine lui a fait oublier jusqu’à l’ existence, et à une liberté qu’il s’empresse d’aliéner au profit de pl
3916 vec ses désirs réels, et dont il subit docilement l’ abstraite et commerciale nécessité. Ennui, fatigue, sommeil sans prièr
3917 il sans prière. Cela s’appelle encore vivre. Mais l’ homme qui était un membre vivant dans le corps de la Nature, lié par l
3918 vre. Mais l’homme qui était un membre vivant dans le corps de la Nature, lié par les liens les plus subtils et les plus pr
3919 homme qui était un membre vivant dans le corps de la Nature, lié par les liens les plus subtils et les plus profonds à tou
3920 membre vivant dans le corps de la Nature, lié par les liens les plus subtils et les plus profonds à tous les autres membres
3921 ant dans le corps de la Nature, lié par les liens les plus subtils et les plus profonds à tous les autres membres de la Nat
3922 la Nature, lié par les liens les plus subtils et les plus profonds à tous les autres membres de la Nature, choses, bêtes e
3923 iens les plus subtils et les plus profonds à tous les autres membres de la Nature, choses, bêtes et anges, — le voici deven
3924 et les plus profonds à tous les autres membres de la Nature, choses, bêtes et anges, — le voici devenu sourd à cette harmo
3925 s membres de la Nature, choses, bêtes et anges, —  le voici devenu sourd à cette harmonie universelle, incapable d’en compr
3926 e harmonie universelle, incapable d’en comprendre les correspondances divines et humaines, insensible même à sa déchéance,
3927 ines, insensible même à sa déchéance, abandonné à la lutte tragique et absurde des lois économiques et des exigences les p
3928 et absurde des lois économiques et des exigences les plus rudimentaires de son corps. Il a perdu le contact avec les chose
3929 s les plus rudimentaires de son corps. Il a perdu le contact avec les choses naturelles, et par là même, avec les surnatur
3930 entaires de son corps. Il a perdu le contact avec les choses naturelles, et par là même, avec les surnaturelles. Il en ress
3931 avec les choses naturelles, et par là même, avec les surnaturelles. Il en ressent une vague et intermittente détresse, — q
3932 ntermittente détresse, — qu’il met d’ailleurs sur le compte de sa fatigue. Neurasthénie. La conquête du confort matériel l
3933 lleurs sur le compte de sa fatigue. Neurasthénie. La conquête du confort matériel l’a laissé oublier les valeurs de l’espr
3934 ue. Neurasthénie. La conquête du confort matériel l’ a laissé oublier les valeurs de l’esprit au point qu’il n’éprouve plus
3935 a conquête du confort matériel l’a laissé oublier les valeurs de l’esprit au point qu’il n’éprouve plus même cette carence 
3936 onfort matériel l’a laissé oublier les valeurs de l’ esprit au point qu’il n’éprouve plus même cette carence ; seulement, p
3937 térielles, il a laissé se détendre, ou il a cassé les ressorts de sa joie : l’effort libre et généreux, le sentiment d’avoi
3938 détendre, ou il a cassé les ressorts de sa joie : l’ effort libre et généreux, le sentiment d’avoir inventé ou compris par
3939 ressorts de sa joie : l’effort libre et généreux, le sentiment d’avoir inventé ou compris par soi-même, la liberté et une
3940 entiment d’avoir inventé ou compris par soi-même, la liberté et une certaine durée normale et capricieuse dans le plaisir,
3941 et une certaine durée normale et capricieuse dans le plaisir, la conscience de ses besoins et de ses buts propres, humains
3942 ine durée normale et capricieuse dans le plaisir, la conscience de ses besoins et de ses buts propres, humains et divins.
3943 s loisirs. Ford lui a donné une auto pour admirer la nature entre 17 et 19 heures : vraiment, il ne lui manque plus rien —
3944 ures : vraiment, il ne lui manque plus rien — que l’ envie. Mauvais travail. Il a perdu le sens religieux, cosmique, de l’e
3945 s rien — que l’envie. Mauvais travail. Il a perdu le sens religieux, cosmique, de l’effort humain. Il ne peut plus situer
3946 avail. Il a perdu le sens religieux, cosmique, de l’ effort humain. Il ne peut plus situer son effort individuel dans le mo
3947 Il ne peut plus situer son effort individuel dans le monde, lui attribuer sa véritable valeur. Il sent obscurément que son
3948 t obscurément que son travail est antinaturel. Il le méprise ou le subit, mais, jusque dans son repos, il en est l’esclave
3949 que son travail est antinaturel. Il le méprise ou le subit, mais, jusque dans son repos, il en est l’esclave. Pour s’être
3950 le subit, mais, jusque dans son repos, il en est l’ esclave. Pour s’être exclu lui-même de l’ordre de la nature, il est co
3951 l en est l’esclave. Pour s’être exclu lui-même de l’ ordre de la nature, il est condamné à ne plus saisir que des rapports
3952 esclave. Pour s’être exclu lui-même de l’ordre de la nature, il est condamné à ne plus saisir que des rapports abstraits e
3953 à ne plus saisir que des rapports abstraits entre les choses. Il ne comprend presque plus rien à l’Univers. Par la techniqu
3954 re les choses. Il ne comprend presque plus rien à l’ Univers. Par la technique, l’Occidental a prétendu maîtriser la matièr
3955 Il ne comprend presque plus rien à l’Univers. Par la technique, l’Occidental a prétendu maîtriser la matière et parvenir à
3956 presque plus rien à l’Univers. Par la technique, l’ Occidental a prétendu maîtriser la matière et parvenir à une liberté p
3957 r la technique, l’Occidental a prétendu maîtriser la matière et parvenir à une liberté plus haute. Or, la technique a révé
3958 matière et parvenir à une liberté plus haute. Or, la technique a révélé des exigences telles que l’Esprit ne peut les supp
3959 r, la technique a révélé des exigences telles que l’ Esprit ne peut les supporter. Il abandonne donc la place, mais c’est p
3960 révélé des exigences telles que l’Esprit ne peut les supporter. Il abandonne donc la place, mais c’est pourtant lui seul q
3961 l’Esprit ne peut les supporter. Il abandonne donc la place, mais c’est pourtant lui seul qui nous permettrait de jouir de
3962 l qui nous permettrait de jouir de notre liberté. La victoire mécanicienne est une victoire à la Pyrrhus. Elle nous donne
3963 erté. La victoire mécanicienne est une victoire à la Pyrrhus. Elle nous donne une liberté dont nous ne sommes plus dignes.
3964 dont nous ne sommes plus dignes. Nous perdons, en l’ acquérant, par l’effort de l’acquérir, les forces mêmes qui nous la fi
3965 es plus dignes. Nous perdons, en l’acquérant, par l’ effort de l’acquérir, les forces mêmes qui nous la firent désirer. 2°
3966 es. Nous perdons, en l’acquérant, par l’effort de l’ acquérir, les forces mêmes qui nous la firent désirer. 2° Accepter l’
3967 dons, en l’acquérant, par l’effort de l’acquérir, les forces mêmes qui nous la firent désirer. 2° Accepter l’esprit, et se
3968 l’effort de l’acquérir, les forces mêmes qui nous la firent désirer. 2° Accepter l’esprit, et ses conditions. Je dis que
3969 es mêmes qui nous la firent désirer. 2° Accepter l’ esprit, et ses conditions. Je dis que les êtres encore doués de quelqu
3970 Accepter l’esprit, et ses conditions. Je dis que les êtres encore doués de quelque sensibilité spirituelle deviennent par
3971 de quelque sensibilité spirituelle deviennent par le seul fait de rester eux-mêmes dans un monde fordisé, des anarchistes.
3972 mêmes dans un monde fordisé, des anarchistes. Car l’ Esprit n’est pas un luxe, n’est pas une faculté destinée à amuser nos
3973 s exigences sont en contradiction avec celles que le développement de la technique impose au monde moderne. Ces êtres, d’u
3974 contradiction avec celles que le développement de la technique impose au monde moderne. Ces êtres, d’une espèce de plus en
3975 en plus rare, qui savent encore quelque chose de la vie profonde, qui voient encore des vérités invisibles, qui gardent,
3976 t considèrent comme un « cas » très spécial, — on les écarte des engrenages où ils risqueraient de faire grain de sable. Il
3977 . Ils se réfugient dans ce qu’on pourrait appeler les classes privilégiées de l’esprit : fortunes oisives ou misères sans e
3978 u’on pourrait appeler les classes privilégiées de l’ esprit : fortunes oisives ou misères sans espoir. On en rencontre enco
3979 misères sans espoir. On en rencontre encore parmi les jeunes gens, jusqu’au jour où, comme on dit, sans doute par ironie, «
3980 u jour où, comme on dit, sans doute par ironie, «  la vie les prend ». Irréguliers aux yeux du monde ; la proie d’on ne sai
3981 où, comme on dit, sans doute par ironie, « la vie les prend ». Irréguliers aux yeux du monde ; la proie d’on ne sait quelle
3982 vie les prend ». Irréguliers aux yeux du monde ; la proie d’on ne sait quelles forces occultes sans doute dangereuses, pu
3983 ces occultes sans doute dangereuses, puisqu’elles les rendent inutilisables dans les rouages de la vie moderne. Le triomphe
3984 uses, puisqu’elles les rendent inutilisables dans les rouages de la vie moderne. Le triomphe de Ford réduira l’Esprit à dev
3985 les les rendent inutilisables dans les rouages de la vie moderne. Le triomphe de Ford réduira l’Esprit à devenir l’apanage
3986 inutilisables dans les rouages de la vie moderne. Le triomphe de Ford réduira l’Esprit à devenir l’apanage d’une sorte de
3987 es de la vie moderne. Le triomphe de Ford réduira l’ Esprit à devenir l’apanage d’une sorte de franc-maçonnerie de quelques
3988 e. Le triomphe de Ford réduira l’Esprit à devenir l’ apanage d’une sorte de franc-maçonnerie de quelques centaines d’indivi
3989 a bientôt traquée avec la dernière rigueur : avec la rigueur de la nécessité — puisqu’elle est inutile au grand dessein ma
3990 uée avec la dernière rigueur : avec la rigueur de la nécessité — puisqu’elle est inutile au grand dessein matérialiste de
3991 elle est inutile au grand dessein matérialiste de l’ Occident. La logique, parlant par la bouche de Ford : « Inutile, donc
3992 tile au grand dessein matérialiste de l’Occident. La logique, parlant par la bouche de Ford : « Inutile, donc à détruire. 
3993 térialiste de l’Occident. La logique, parlant par la bouche de Ford : « Inutile, donc à détruire. » Ford a raison, une foi
3994 e ? « Vous ne pouvez servir Dieu et Mammon », dit l’ Écriture. ⁂ Je ne pense pas qu’une attitude réactionnaire qui consist
3995 tionnaire qui consisterait à vouloir en revenir à la période préindustrielle soit autre chose qu’une échappatoire utopique
3996 uts — si bas soient-ils — d’une civilisation sous le poids de laquelle nous risquons de périr. Il se prépare déjà des révo
3997 isme exaspéré, devenu presque fou dans sa prison. Les intellectuels d’aujourd’hui ont une tâche pressante : chercher s’il e
3998 le d’échapper au fatal dilemme. Premiers pas vers la solution : l’existence du dilemme. Second pas : en poser les termes a
3999 au fatal dilemme. Premiers pas vers la solution : l’ existence du dilemme. Second pas : en poser les termes avec netteté et
4000 n : l’existence du dilemme. Second pas : en poser les termes avec netteté et courage. Pour le reste, je pense que c’est une
4001 en poser les termes avec netteté et courage. Pour le reste, je pense que c’est une question de foi. 1. Une enquête fait
4002 oi. 1. Une enquête faite à Genève a révélé que les livres les plus lus du grand public sont Ma vie et mon œuvre, de Ford
4003 ne enquête faite à Genève a révélé que les livres les plus lus du grand public sont Ma vie et mon œuvre, de Ford et Mon cur
4004 ont Ma vie et mon œuvre, de Ford et Mon curé chez les riches, de Clément Vautel. Dans les pays de langue allemande, son suc
4005 Mon curé chez les riches, de Clément Vautel. Dans les pays de langue allemande, son succès est encore plus grand, et de mei
4006 rand, et de meilleure qualité. Je ne parle pas de l’ Amérique. 2. Victor Cambon, préface à Henry Ford, Ma vie et mon œuvre
4007 rd, Ma vie et mon œuvre, Paris, Payot, 1925. 3. L’ Illustration, 20 novembre 1926. 4. Ici et là, la révolte perce : « Ju
4008 L’Illustration, 20 novembre 1926. 4. Ici et là, la révolte perce : « Jugendbewegung » en Allemagne ; surréalisme en Fran
4009 ée mystique en Russie. a. Rougemont Denis de, «  Le péril Ford », Foi et Vie, Paris, février 1928, p. 189-202.
70 1928, Articles divers (1924–1930). Un soir à Vienne avec Gérard (24 mars 1928)
4010 n étoile nervalienne. Je vins à Vienne pour fuir l’ Amérique. Mais les Viennois avaient fui dans les opérettes de Strauss,
4011 nne. Je vins à Vienne pour fuir l’Amérique. Mais les Viennois avaient fui dans les opérettes de Strauss, qu’on ne trouve p
4012 ir l’Amérique. Mais les Viennois avaient fui dans les opérettes de Strauss, qu’on ne trouve plus nulle part. Dans les danci
4013 de Strauss, qu’on ne trouve plus nulle part. Dans les dancings, un peuple de fêtards modérés, Juifs et ressortissants de la
4014 le de fêtards modérés, Juifs et ressortissants de la Petite-Entente, applaudissait chaque soir entre deux airs anglais Le
4015 applaudissait chaque soir entre deux airs anglais Le Beau Danube bleu, en commémoration polie d’un passé imaginaire, ou pe
4016 ntissait cette Vienne tout occupée à ressembler à l’ idée qu’on s’en fait. Le Ring, trop large, ouvert au vent glacial, cré
4017 ut occupée à ressembler à l’idée qu’on s’en fait. Le Ring, trop large, ouvert au vent glacial, crée autour du centre de la
4018 ouvert au vent glacial, crée autour du centre de la ville une insécurité qui fait songer à la Russie et au sifflement des
4019 ntre de la ville une insécurité qui fait songer à la Russie et au sifflement des balles perdues d’une révolution. Sept heu
4020 s perdues d’une révolution. Sept heures du soir : le moment était venu d’arrêter le plan de la soirée, et cette promenade
4021 t heures du soir : le moment était venu d’arrêter le plan de la soirée, et cette promenade où il y avait juste assez de pa
4022 soir : le moment était venu d’arrêter le plan de la soirée, et cette promenade où il y avait juste assez de passants pour
4023 où il y avait juste assez de passants pour qu’on la sentît déserte ne me proposait qu’une frileuse nostalgie. Mais qui fa
4024 d’intensité, un état d’âme crée une situation qui l’ exprime — bien qu’on pense généralement le contraire. Il est très vrai
4025 ion qui l’exprime — bien qu’on pense généralement le contraire. Il est très vrai que les notions réaliste et idéaliste du
4026 e généralement le contraire. Il est très vrai que les notions réaliste et idéaliste du monde ne sont séparées que par un lé
4027 e ne sont séparées que par un léger décalage dans la chronologie de nos sentiments et de nos actes. Donc, n’ayant pas reno
4028 onduit, par une sorte de compromis sentimental, à l’ Opéra où l’on donnait les Contes d’Hoffmann. Je comprends aujourd’hui
4029 une sorte de compromis sentimental, à l’Opéra où l’ on donnait les Contes d’Hoffmann. Je comprends aujourd’hui le lien qui
4030 compromis sentimental, à l’Opéra où l’on donnait les Contes d’Hoffmann. Je comprends aujourd’hui le lien qui unissait dans
4031 t les Contes d’Hoffmann. Je comprends aujourd’hui le lien qui unissait dans mon esprit Vienne et Hoffmann : c’était le sou
4032 sait dans mon esprit Vienne et Hoffmann : c’était le souvenir de Gérard de Nerval. Mais je pense que je n’avais même pas p
4033 ncé intérieurement ce nom lorsque je m’assis dans l’ ombre du théâtre, en retard, un peu ennuyé de me trouver à côté d’une
4034 eu ennuyé de me trouver à côté d’une place vide : la jolie femme qu’on attend dans ces circonstances, une fois de plus man
4035 dans ces circonstances, une fois de plus manquait le rendez-vous que j’avais demandé au hasard d’arranger. Mais le thème d
4036 us que j’avais demandé au hasard d’arranger. Mais le thème de la Barcarolle s’empare de tout mon être — ainsi d’autres dev
4037 is demandé au hasard d’arranger. Mais le thème de la Barcarolle s’empare de tout mon être — ainsi d’autres deviennent patr
4038 eul peut-être cette plainte heureuse des violons. Le diable sort des parois, noir et blanc, la ravissante héroïne est à so
4039 iolons. Le diable sort des parois, noir et blanc, la ravissante héroïne est à son piano, c’est un duo des ténèbres et de l
4040 est à son piano, c’est un duo des ténèbres et de la pureté où vibrent par instants les accords d’une harmonie surnaturell
4041 ténèbres et de la pureté où vibrent par instants les accords d’une harmonie surnaturelle. Et tout cela chanté dans une lan
4042 p plus loin que moi, il n’entend pas ma question. L’ envie me prend d’aller le rejoindre. Me voici tout abandonné à l’évoca
4043 ’entend pas ma question. L’envie me prend d’aller le rejoindre. Me voici tout abandonné à l’évocation d’un amour tragiquem
4044 d d’aller le rejoindre. Me voici tout abandonné à l’ évocation d’un amour tragiquement mêlé à des forces inconnues et menaç
4045 t mêlé à des forces inconnues et menaçantes. Mais la musique est si légère, la voix de la jeune fille si transparente : la
4046 ues et menaçantes. Mais la musique est si légère, la voix de la jeune fille si transparente : la mort même en devient moin
4047 çantes. Mais la musique est si légère, la voix de la jeune fille si transparente : la mort même en devient moins brutale.
4048 gère, la voix de la jeune fille si transparente : la mort même en devient moins brutale. Elle rôde ici comme une tristesse
4049 omme une tristesse amoureuse. Elle n’est plus que l’ approche d’une grandeur où se perdraient nos amours terrestres dans d’
4050 rrestres dans d’imprévisibles transfigurations, —  l’ heure anxieuse et mélancolique où l’on quitte ce visage aimé pour d’au
4051 igurations, — l’heure anxieuse et mélancolique où l’ on quitte ce visage aimé pour d’autres plus beaux peut-être, mais inco
4052 es plus beaux peut-être, mais inconnus. Voilà que la forme blanche, sous un brusque faisceau de lumière m’apparaît avec le
4053 us un brusque faisceau de lumière m’apparaît avec le visage même de mon amour. Je me sens voluptueusement perdre pied. Ver
4054 ix, à côté de moi, c’est une chose singulière que le pouvoir de cette musique. Voici que vous êtes tout près de comprendre
4055 ourtant ne se détournait. Comment pouvais-je être le seul à l’avoir entendu ? — C’est, me répondit-il, que seul vous venez
4056 se détournait. Comment pouvais-je être le seul à l’ avoir entendu ? — C’est, me répondit-il, que seul vous venez d’atteind
4057 renez certaines choses par votre souffrance… Mais le temps approche où vous n’aurez plus besoin de souffrir pour comprendr
4058 n’aurez plus besoin de souffrir pour comprendre. Le faisceau de lumière quitta la scène, un reflet balaya le parterre, le
4059 ir pour comprendre. Le faisceau de lumière quitta la scène, un reflet balaya le parterre, le visage de mon voisin m’apparu
4060 ceau de lumière quitta la scène, un reflet balaya le parterre, le visage de mon voisin m’apparut, pâle dans son collier de
4061 re quitta la scène, un reflet balaya le parterre, le visage de mon voisin m’apparut, pâle dans son collier de barbe noire.
4062 dans son collier de barbe noire. Je sentis que je l’ avais déjà reconnu. Il portait une cape bleu sombre, à la mode de 1830
4063 déjà reconnu. Il portait une cape bleu sombre, à la mode de 1830, qui, à la rigueur, pouvait passer pour une élégance trè
4064 t une cape bleu sombre, à la mode de 1830, qui, à la rigueur, pouvait passer pour une élégance très moderne. Il n’y avait
4065 e rien de positivement démodé ; je n’eus même pas le sentiment de quoi que ce soit d’immatériel. D’ailleurs le trouble où
4066 ment de quoi que ce soit d’immatériel. D’ailleurs le trouble où m’avait jeté la première reconnaissance empêcha ma raison
4067 connaissance empêcha ma raison d’intervenir entre la réalité de ma vision et mon cerveau pris au défaut de sa carapace de
4068 rincipes et d’évidences opaques. Nous sortîmes de l’ Opéra, Gérard de Nerval et moi, sans nous être rien dit d’autre, comme
4069 un échange tacite suffit aux petites décisions de la vie quotidienne. Gérard tenait en laisse le fameux homard enrubanné.
4070 ns de la vie quotidienne. Gérard tenait en laisse le fameux homard enrubanné. « Cela vexe les Viennois, me dit-il, parce q
4071 en laisse le fameux homard enrubanné. « Cela vexe les Viennois, me dit-il, parce qu’ils y voient une façon de me moquer de
4072 n suis pas fâché. » Il y avait peu de monde dans les rues. Des jeunes gens avec une femme à chaque bras, l’air de ne pas t
4073 es. Des jeunes gens avec une femme à chaque bras, l’ air de ne pas trop s’amuser. — Ceci du moins n’a guère changé, dis-je,
4074 ours de Vienne. — Certes, répondit Gérard, malgré les apparences, cette vie sentimentale est une des seules réalités qui co
4075 ne des seules réalités qui correspondent encore à l’ image classique de Vienne. Sentimentalisme capricieux d’ailleurs, dépo
4076 t. Cette ville, qui est toute caresses, a peur de l’ étreinte… C’est d’ailleurs une chose que je comprends assez bien, ajou
4077 s traversions une rue sillonnée de taxis rapides, le homard refusa obstinément de progresser. Gérard dut le prendre sous l
4078 mard refusa obstinément de progresser. Gérard dut le prendre sous le bras, et les paires de pinces s’accrochèrent désespér
4079 inément de progresser. Gérard dut le prendre sous le bras, et les paires de pinces s’accrochèrent désespérément à ses manc
4080 rogresser. Gérard dut le prendre sous le bras, et les paires de pinces s’accrochèrent désespérément à ses manches. De terre
4081 ochèrent désespérément à ses manches. De terreur, le homard avait rougi : il conserva toute la nuit une magnifique couleur
4082 erreur, le homard avait rougi : il conserva toute la nuit une magnifique couleur orangée. Gérard semblait habitué à ces so
4083 ait habitué à ces sortes de scènes. On reparla de l’ inconstance viennoise. Gérard l’attribuait à une certaine anémie des s
4084 es. On reparla de l’inconstance viennoise. Gérard l’ attribuait à une certaine anémie des sentiments, à un manque de caract
4085 e des sentiments, à un manque de caractère aussi. La fidélité véritable est une œuvre d’art qui demande un long effort, et
4086 st une œuvre d’art qui demande un long effort, et les Viennois sont, par nature et par attitude, des gens fatigués. — Pour
4087 s gens fatigués. — Pour moi, dit Gérard, je situe l’ amour dans un monde où la question fidélité ou inconstance ne se pose
4088 oi, dit Gérard, je situe l’amour dans un monde où la question fidélité ou inconstance ne se pose plus. Vous le savez, je n
4089 ion fidélité ou inconstance ne se pose plus. Vous le savez, je n’ai aimé qu’une femme — au plus deux, en y réfléchissant b
4090 en y réfléchissant bien, mais peut-être était-ce la même sous deux attributs différents. Toutes les femmes qui m’ont rete
4091 ce la même sous deux attributs différents. Toutes les femmes qui m’ont retenu un instant, c’était parce qu’elles évoquaient
4092 raissaient purement mystiques… Mais vous savez, «  les autres » n’y comprennent jamais rien, dès qu’on aime… Oh ! cette femm
4093 ard, un certain regard, mais j’ai su en retrouver la sensation jusque dans les choses — et c’est cela seul qui donna un se
4094 ais j’ai su en retrouver la sensation jusque dans les choses — et c’est cela seul qui donna un sens au monde. — Mais je bav
4095 mps. Livrons-nous plutôt à une petite malice dont l’ idée me vient à la vue de cette vendeuse de fleurs. C’était la petite
4096 ent à la vue de cette vendeuse de fleurs. C’était la petite bossue qui vend des roses et des œillets dans la rue de Carint
4097 ite bossue qui vend des roses et des œillets dans la rue de Carinthie. Gérard lui paya quelques œillets rouges en lui expl
4098 s œillets rouges en lui expliquant qu’elle devait les donner à la première jolie femme qui passerait seule. Nous nous arrêt
4099 vanture de robes de soie, nous amusant à imaginer les corps précieux qui les revêtiraient. Vint à pas pressés une jeune fem
4100 e, nous amusant à imaginer les corps précieux qui les revêtiraient. Vint à pas pressés une jeune femme, chapeau rouge et ma
4101 e qui se passa fut, hélas, non moins inévitable : la jeune femme refusa d’abord les fleurs pour se donner le temps de rega
4102 moins inévitable : la jeune femme refusa d’abord les fleurs pour se donner le temps de regarder autour d’elle ; l’intérêt
4103 ne femme refusa d’abord les fleurs pour se donner le temps de regarder autour d’elle ; l’intérêt que nous ne sûmes pas dis
4104 ur se donner le temps de regarder autour d’elle ; l’ intérêt que nous ne sûmes pas dissimuler nous trahit ; elle finit donc
4105 r accepter et vint à nous avec un sourire du type le plus courant : « Vous êtes bien gentils, messieurs ! » Il n’y avait p
4106 ard attendait évidemment quelque chose d’imprévu, la seule chose contraire à la coutume viennoise. L’enfant était charmant
4107 elque chose d’imprévu, la seule chose contraire à la coutume viennoise. L’enfant était charmante, comme elles le sont pres
4108 la seule chose contraire à la coutume viennoise. L’ enfant était charmante, comme elles le sont presque toutes dans cette
4109 viennoise. L’enfant était charmante, comme elles le sont presque toutes dans cette ville, — du type que Gérard et Théo no
4110 and bruit de saxophones et de cors anglais jouant la Marche de Tannhäuser en tango, un Balkanique très lisse nous délivra
4111 ue très lisse nous délivra de notre conquête pour la durée des danses. Gérard bâillait : « Voilà ce que c’est que de prend
4112 leure qualité : car c’est une pauvre illusion que le plaisir qu’on vient chercher ici avec le premier être venu. — Certes,
4113 le premier être venu. — Certes, je comprends que l’ Europe est en décadence quand je la regarde s’amuser. Je vois se perdr
4114 comprends que l’Europe est en décadence quand je la regarde s’amuser. Je vois se perdre ce sens des correspondances secrè
4115 ules faisaient sa dignité humaine, parce qu’elles le rattachaient aux buts les plus hauts de notre vie. Ces citadins blasé
4116 humaine, parce qu’elles le rattachaient aux buts les plus hauts de notre vie. Ces citadins blasés s’amusent plus grossière
4117 é, avec des femmes qui élargissent des sourires à la mesure de votre générosité. Vos boîtes de nuit sont des sortes de dis
4118 automatiques de plaisir. Autant dire que ceux qui les fréquentent ne savent plus ce que c’est que le plaisir. Ils prennent
4119 i les fréquentent ne savent plus ce que c’est que le plaisir. Ils prennent au hasard des liqueurs qui n’ont pas été prépar
4120 été préparées pour leur soif. Ils ne savent plus les signes ni les ressemblances. Aussi l’ennui règne-t-il bruyamment dans
4121 pour leur soif. Ils ne savent plus les signes ni les ressemblances. Aussi l’ennui règne-t-il bruyamment dans ces lieux : c
4122 avent plus les signes ni les ressemblances. Aussi l’ ennui règne-t-il bruyamment dans ces lieux : cet orchestre triomphant
4123 élémentaires : Ce sont vos contemporains livrés à la démocratie des plaisirs achetés au détail dans une foire éclatante de
4124 au détail dans une foire éclatante de faux luxe. La misère est de voir ici des femmes aussi ravissantes que celle-là qui
4125 nt de gravité et de détachement. Je viens souvent la regarder, à cause de la noblesse de sa danse. Je la nomme Clarissa, p
4126 chement. Je viens souvent la regarder, à cause de la noblesse de sa danse. Je la nomme Clarissa, parce que cela lui va. Ma
4127 regarder, à cause de la noblesse de sa danse. Je la nomme Clarissa, parce que cela lui va. Mais comme c’est odieux qu’une
4128 x qu’une créature aussi parfaite soit touchée par les mains outrageusement baguées de ces courtiers alourdis de “Knödl”. En
4129 n’approcherait qu’avec un sentiment religieux de la beauté. Mais je crois que l’Orient est devenu fou. Il ne comprend plu
4130 ntiment religieux de la beauté. Mais je crois que l’ Orient est devenu fou. Il ne comprend plus rien. » Des bugles agonisai
4131 scandalisée par cette atteinte aux lois du genre le plus conventionnel qui soit. Gérard la regarda avec une certaine piti
4132 s du genre le plus conventionnel qui soit. Gérard la regarda avec une certaine pitié : « Chère enfant, dit-il doucement, p
4133 s de ressemblance, et c’est ce qui vous perdra. » La pauvre fille ne comprenant pas, il y eut un moment pénible, comme tou
4134 n moment pénible, comme toujours lorsqu’un peu de simple humanité vient interrompre une comédie aux attitudes convenues et don
4135 pre une comédie aux attitudes convenues et donner l’ air bête aux acteurs. Puis Gérard embrassa paternellement la belle eff
4136 aux acteurs. Puis Gérard embrassa paternellement la belle effarée, et nous sortîmes, après avoir délivré le homard qui, l
4137 le effarée, et nous sortîmes, après avoir délivré le homard qui, laissé au vestiaire, y était l’objet de vexations diverse
4138 livré le homard qui, laissé au vestiaire, y était l’ objet de vexations diverses et de curiosités grossières de la part des
4139 s garçons. « Encore une proie inutile lâchée pour l’ ombre, dit Gérard d’un ton rêveur et malicieux. Mais l’ombre de cette
4140 re, dit Gérard d’un ton rêveur et malicieux. Mais l’ ombre de cette ville illusoire est la plus douce à mes vagabondages sa
4141 icieux. Mais l’ombre de cette ville illusoire est la plus douce à mes vagabondages sans but. Vous savez, je lance mes file
4142 es sans but. Vous savez, je lance mes filets dans l’ eau des nuits, et quelquefois j’en ramène des animaux aux yeux bizarre
4143 ène des animaux aux yeux bizarres où je sais lire les signes. » Comme je ne répondais rien : « Avez-vous sommeil ? demanda-
4144 ’endormir. » Se penchant vers moi il prononça : «  La nuit sera noire et blanche. » Je ressentis quelque émotion à l’ouïe d
4145 oire et blanche. » Je ressentis quelque émotion à l’ ouïe de cette phrase célèbre. Ensuite, je pensai qu’il arrive aux meil
4146 de se répéter, et que c’était la première fois de la soirée que Gérard « faisait du Gérard ». Les cocktails du Moulin-Roug
4147 is de la soirée que Gérard « faisait du Gérard ». Les cocktails du Moulin-Rouge avaient peu à peu envahi notre sang. Nos pe
4148 Nos pensées devenaient légères comme des ballons. La rumeur de Vienne baignait nos corps fatigués jusqu’à l’insensibilité
4149 eur de Vienne baignait nos corps fatigués jusqu’à l’ insensibilité et l’Illusion étendait sur toutes choses une aile d’ombr
4150 ait nos corps fatigués jusqu’à l’insensibilité et l’ Illusion étendait sur toutes choses une aile d’ombre flatteuse aux cap
4151 des oiseaux nous parlèrent, bientôt dissous dans le vent. Tout était reflet, passages, allusions. Plus tard, dans un peti
4152 mi-hauteur, puis couvert de glaces qui, reflétant le plafond à caissons dorés, l’étendent indéfiniment — c’est un ciel sus
4153 laces qui, reflétant le plafond à caissons dorés, l’ étendent indéfiniment — c’est un ciel suspendu assez bas sur nos têtes
4154 ché sur cet aquarium de rêves, discourt et décrit les images qu’il y découvre. Il y a les ailes du Moulin-Rouge, qui sont l
4155 urt et décrit les images qu’il y découvre. Il y a les ailes du Moulin-Rouge, qui sont les bras de Clarissa dans sa danse, e
4156 ouvre. Il y a les ailes du Moulin-Rouge, qui sont les bras de Clarissa dans sa danse, et Clarissa c’est aussi l’Anglaise au
4157 e Clarissa dans sa danse, et Clarissa c’est aussi l’ Anglaise aux citrons de Pompéi, l’Octavie du golfe de Marseille, ou bi
4158 ssa c’est aussi l’Anglaise aux citrons de Pompéi, l’ Octavie du golfe de Marseille, ou bien plutôt, par je ne sais quelle e
4159 ar je ne sais quelle erreur d’images, — ce serait la gravité énigmatique d’Adrienne, mais dans le lointain, Aurélia lui ré
4160 rait la gravité énigmatique d’Adrienne, mais dans le lointain, Aurélia lui répond d’un regard pareil. Des visages naissent
4161 es naissent comme des étoiles dans un halo, comme les couleurs sous les paupières, s’élargissent, se fondent, se superposen
4162 des étoiles dans un halo, comme les couleurs sous les paupières, s’élargissent, se fondent, se superposent. Cinéma des sent
4163 t. Cinéma des sentiments qui montre vivantes dans la même minute toutes les incarnations d’un amour dont l’être éternel ap
4164 ts qui montre vivantes dans la même minute toutes les incarnations d’un amour dont l’être éternel apparaît peu à peu, à tra
4165 me minute toutes les incarnations d’un amour dont l’ être éternel apparaît peu à peu, à travers la simultanéité de ses mani
4166 dont l’être éternel apparaît peu à peu, à travers la simultanéité de ses manifestations. Gérard parle avec une liberté mag
4167 erté magnifique et angoissante. Il mêle tout dans le temps et l’espace. Cent années et tous les visages aimés revivent dan
4168 que et angoissante. Il mêle tout dans le temps et l’ espace. Cent années et tous les visages aimés revivent dans cette coup
4169 ut dans le temps et l’espace. Cent années et tous les visages aimés revivent dans cette coupe de songes avec toutes leurs i
4170 réelles, illusions des reflets qui ne livrent que le côté terrestre des choses dont l’autre moitié sera toujours cachée, a
4171 s dont l’autre moitié sera toujours cachée, ainsi la Lune et sa moitié d’ombre. Et parce que tout revit en un instant dans
4172 en un instant dans cette vision, il connaît enfin la substance véritable et unique de toutes ses amours, il communie avec
4173 s, il communie avec quelque chose d’éternel. Tous les drames du monde ne sont que décors mouvants dans la lueur bariolée de
4174 drames du monde ne sont que décors mouvants dans la lueur bariolée des sentiments, ils ne sont que reflets, épisodes, sym
4175 ts, ils ne sont que reflets, épisodes, symboles : le vrai drame de son destin est ailleurs. Il se met à m’expliquer des si
4176 sent aux pierres précieuses en passant par toutes les formes animales. Pour lui, les choses n’ont d’intérêt que par les rap
4177 passant par toutes les formes animales. Pour lui, les choses n’ont d’intérêt que par les rapports qu’il leur devine avec la
4178 les. Pour lui, les choses n’ont d’intérêt que par les rapports qu’il leur devine avec la réalité extra-terrestre. Il m’ense
4179 térêt que par les rapports qu’il leur devine avec la réalité extra-terrestre. Il m’enseigne que la passion seule, par la s
4180 vec la réalité extra-terrestre. Il m’enseigne que la passion seule, par la souffrance qu’elle entraîne, nous révèle le sen
4181 errestre. Il m’enseigne que la passion seule, par la souffrance qu’elle entraîne, nous révèle le sens réel de nos vies, et
4182 , par la souffrance qu’elle entraîne, nous révèle le sens réel de nos vies, et peu à peu, de leurs moindres coïncidences.
4183 es, et peu à peu, de leurs moindres coïncidences. La fatigue calme son lyrisme et son exaltation. Il semble se rapprocher
4184 ne barbarie spirituelle. Il plaisante. Il dit que la vie ressemble surtout à un film où les épisodes s’appellent par le si
4185 Il dit que la vie ressemble surtout à un film où les épisodes s’appellent par le simple jeu des images, se voient par tran
4186 surtout à un film où les épisodes s’appellent par le simple jeu des images, se voient par transparence au travers de l’aut
4187 tout à un film où les épisodes s’appellent par le simple jeu des images, se voient par transparence au travers de l’autre. Il
4188 vers de l’autre. Il dit : « Pour celui qui saisit les correspondances, chaque geste, chaque minute d’une vie résume cette v
4189 entière et fait allusion à tout ce qu’il y a sous le soleil, et même ailleurs. Croyez-moi, ce qu’il faudrait écrire, c’est
4190 mes. Seules des trompes d’autos s’appelaient dans la nuit froide. Gérard ne disait presque plus rien ; à peine, de temps e
4191 , qui semblait d’ailleurs endormi. En passant par la Freyung, nous vîmes un palais aux fenêtres illuminées. Des autos atte
4192 fenêtres illuminées. Des autos attendaient devant le porche grand ouvert. Les chauffeurs faisaient les cent pas dans la ne
4193 autos attendaient devant le porche grand ouvert. Les chauffeurs faisaient les cent pas dans la neige fraîche ou s’accoudai
4194 le porche grand ouvert. Les chauffeurs faisaient les cent pas dans la neige fraîche ou s’accoudaient à la banquette d’une
4195 uvert. Les chauffeurs faisaient les cent pas dans la neige fraîche ou s’accoudaient à la banquette d’une boutique à « Würs
4196 cent pas dans la neige fraîche ou s’accoudaient à la banquette d’une boutique à « Würstel » où nous nous arrêtâmes. Au lég
4197 fflement du bec de gaz sans manchon qui éclairait la boutique, et que le vent menaçait d’éteindre à chaque instant, le hom
4198 az sans manchon qui éclairait la boutique, et que le vent menaçait d’éteindre à chaque instant, le homard se réveilla. Gér
4199 que le vent menaçait d’éteindre à chaque instant, le homard se réveilla. Gérard m’expliqua qu’il en était ainsi chaque nui
4200 m’expliqua qu’il en était ainsi chaque nuit, que l’ animal devenait nerveux et que depuis quelques semaines, il avait dû l
4201 veux et que depuis quelques semaines, il avait dû le mettre au caviar. Il en demanda donc une petite portion et la fit pre
4202 caviar. Il en demanda donc une petite portion et la fit prendre au homard avec toutes sortes de soins. Les chauffeurs reg
4203 it prendre au homard avec toutes sortes de soins. Les chauffeurs regardaient d’un œil las, trop las pour s’étonner. Transi,
4204 si, je me balançais d’un pied sur l’autre dans de la neige fondante, tout en croquant une de ces saucisses à la moutarde q
4205 fondante, tout en croquant une de ces saucisses à la moutarde qu’on appelle ici « Frankfurter » et ailleurs « Wienerli ».
4206 « Frankfurter » et ailleurs « Wienerli ». Soudain les autos se mirent à ronfler. Par le grand escalier, au fond de la cour
4207 rli ». Soudain les autos se mirent à ronfler. Par le grand escalier, au fond de la cour du palais, descendaient les invité
4208 rent à ronfler. Par le grand escalier, au fond de la cour du palais, descendaient les invités du bal. Des femmes sans chap
4209 alier, au fond de la cour du palais, descendaient les invités du bal. Des femmes sans chapeau couraient vers les voitures,
4210 és du bal. Des femmes sans chapeau couraient vers les voitures, les hommes s’inclinaient pour des baise-mains silencieux et
4211 femmes sans chapeau couraient vers les voitures, les hommes s’inclinaient pour des baise-mains silencieux et mécaniques. J
4212 à d’anciens Habsbourg, des comtes athlétiques et la silhouette échassière de la jeune duchesse de Clam-Clamannsfeld dont
4213 comtes athlétiques et la silhouette échassière de la jeune duchesse de Clam-Clamannsfeld dont le manteau de velours rose l
4214 re de la jeune duchesse de Clam-Clamannsfeld dont le manteau de velours rose laissait découvertes des jambes extrêmement h
4215 ndis que sa tête frisée jetait des insolences sur les chapeaux noirs de ses cavaliers. Tout cela s’empila dans des autos ;
4216 autos ; en dix minutes, il n’y eut plus personne, la place s’éteignit. Mais Gérard ? Ses yeux s’étaient fixés intensément,
4217 Gérard ? Ses yeux s’étaient fixés intensément, à la sortie des invités, sur une femme qui s’en allait toute seule vers un
4218 femme qui s’en allait toute seule vers une auto à l’ écart des autres. Une femme aux cheveux noirs en bandeaux, au teint pâ
4219 mme aux cheveux noirs en bandeaux, au teint pâle, l’ air d’autrefois. Il avait murmuré : Marie Pleyel. Quand la place se fu
4220 autrefois. Il avait murmuré : Marie Pleyel. Quand la place se fut apaisée, je m’aperçus que j’étais seul. Une dernière aut
4221 olument silencieuse fila devant moi ; je reconnus la voiture de la femme aux bandeaux noirs. Mais les rideaux étaient bais
4222 ieuse fila devant moi ; je reconnus la voiture de la femme aux bandeaux noirs. Mais les rideaux étaient baissés. Déjà on c
4223 s la voiture de la femme aux bandeaux noirs. Mais les rideaux étaient baissés. Déjà on criait les journaux du matin, des tr
4224 Mais les rideaux étaient baissés. Déjà on criait les journaux du matin, des triporteurs passèrent à toute vitesse, m’éclab
4225 emont Denis de, « Un soir à Vienne avec Gérard », La Nouvelle Semaine artistique et littéraire, Neuchâtel, 24 mars 1928, p
71 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Marguerite Allotte de la Fuye, Jules Verne, sa vie, son œuvre (juin 1928)
4226 nt pour tous ceux que Jules Verne passionne. Pour les autres, divertissant et spirituel. Pourquoi ne veut-on voir en Jules
4227 un précurseur ? Jules Verne est un créateur, dont les inventions se suffisent et suffisent à notre joie. Ce ne sont pas les
4228 ffisent et suffisent à notre joie. Ce ne sont pas les savants qui sont prophètes, mais les poètes. Or Jules Verne fut poète
4229 ne sont pas les savants qui sont prophètes, mais les poètes. Or Jules Verne fut poète avant tout — et ce livre le fera bie
4230 Or Jules Verne fut poète avant tout — et ce livre le fera bien voir aux sceptiques. Il a aimé la science parce qu’elle ouv
4231 livre le fera bien voir aux sceptiques. Il a aimé la science parce qu’elle ouvre des perspectives d’évasion — où seuls les
4232 ’elle ouvre des perspectives d’évasion — où seuls les poètes savent se perdre. Et c’est bien sa plus grande ruse que d’avoi
4233 est bien sa plus grande ruse que d’avoir emprunté le véhicule à la mode pour conduire des millions de lecteurs dans un mon
4234 us grande ruse que d’avoir emprunté le véhicule à la mode pour conduire des millions de lecteurs dans un monde purement fa
4235 de lecteurs dans un monde purement fantaisiste où les équations tyranniques deviennent de merveilleux calembours, où les sa
4236 anniques deviennent de merveilleux calembours, où les savants sont réellement dans la lune, ou bien descendent au fond des
4237 x calembours, où les savants sont réellement dans la lune, ou bien descendent au fond des mers adorer la Liberté et jouer
4238 lune, ou bien descendent au fond des mers adorer la Liberté et jouer de l’orgue sous les yeux de poulpes géants. Jules Ve
4239 nt au fond des mers adorer la Liberté et jouer de l’ orgue sous les yeux de poulpes géants. Jules Verne a véritablement sou
4240 oulpes géants. Jules Verne a véritablement soumis la science à la poésie. Et l’on ne veut voir que jolis livres d’étrennes
4241 . Jules Verne a véritablement soumis la science à la poésie. Et l’on ne veut voir que jolis livres d’étrennes dans les œuv
4242 a véritablement soumis la science à la poésie. Et l’ on ne veut voir que jolis livres d’étrennes dans les œuvres du plus gr
4243 ’on ne veut voir que jolis livres d’étrennes dans les œuvres du plus grand créateur de mythes modernes, du seul écrivain do
4244 réateur de mythes modernes, du seul écrivain dont l’ influence soit comparable à celle du cinéma ! Claretie raconte que les
4245 mparable à celle du cinéma ! Claretie raconte que les détenus des maisons de correction se jetaient sur ces volumes « au tr
4246 ces volumes « au travers desquels ils respiraient l’ air du monde ». N’en ferons-nous pas autant, emprisonnés que nous somm
4247 que nous sommes dans une civilisation qui, selon l’ expression de Jules Verne désabusé « emprunte l’aspect d’une nécessité
4248 n l’expression de Jules Verne désabusé « emprunte l’ aspect d’une nécessité » (et dans la bouche de ce libertaire, cela con
4249 sé « emprunte l’aspect d’une nécessité » (et dans la bouche de ce libertaire, cela constituait un jugement !) Serons-nous
4250 s-nous longtemps encore dupes d’une conception de la littérature si pédante qu’elle exclut un de nos plus grands conteurs
4251 us Jules Verne aux enfants ? J’allais oublier que la littérature enfantine est le dernier bateau. Pour ce coup, voilà qui
4252 bord, je soupçonne que ce bateau n’est autre que La Liberté. ar. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Marguerite Allot
72 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Aragon, Traité du style (août 1928)
4253 on, Traité du style (août 1928)as Ce n’est pas le seul talent de M. Aragon qui le rendrait digne à mes yeux, de considé
4254 s Ce n’est pas le seul talent de M. Aragon qui le rendrait digne à mes yeux, de considération. J’admire autant le talen
4255 gne à mes yeux, de considération. J’admire autant le talent de celui qui mène 60 parties d’échecs simultanément, et c’est
4256 x écrivains que des révélations, ou mieux, qu’ils les favorisent par leurs écrits. Aragon, qui a le sens de l’amour, a dit
4257 ls les favorisent par leurs écrits. Aragon, qui a le sens de l’amour, a dit conséquemment beaucoup de choses vraies (belle
4258 risent par leurs écrits. Aragon, qui a le sens de l’ amour, a dit conséquemment beaucoup de choses vraies (belles). Il est
4259 ies (belles). Il est même un des très rares parmi les jeunes qui ait vraiment donné quelque chose. C’est pourquoi j’ai lu c
4260 econde partie du livre est admirable ; il suffit. Le titre ne ment pas ; ce livre traite du style, à coups d’exemples qui
4261 aite du style, à coups d’exemples qui méritent de l’ être. Et l’on voit bien ici qu’Aragon dépasse ces surréalistes, ces or
4262 le, à coups d’exemples qui méritent de l’être. Et l’ on voit bien ici qu’Aragon dépasse ces surréalistes, ces orthodoxes de
4263 ragon dépasse ces surréalistes, ces orthodoxes de l’ absurde confondu avec le poétique, ou ces disciples de Rimbaud, ou enf
4264 listes, ces orthodoxes de l’absurde confondu avec le poétique, ou ces disciples de Rimbaud, ou enfin ces littérateurs anti
4265 ces littérateurs antilittéraires, ces « Messieurs les Nymphes ». Mais donner l’air bête à ceux qui le sont en créant une be
4266 aires, ces « Messieurs les Nymphes ». Mais donner l’ air bête à ceux qui le sont en créant une belle œuvre serait, par exem
4267 les Nymphes ». Mais donner l’air bête à ceux qui le sont en créant une belle œuvre serait, par exemple, plus efficace. Ar
4268 e voix du troupeau. C’est sans doute son rôle. Il le tient magnifiquement. Mais qu’on nous laisse chercher plus loin, dans
4269 ous laisse chercher plus loin, dans ce silence où l’ on accède à des objets qui enfin valent le respect. as. Rougemont D
4270 ence où l’on accède à des objets qui enfin valent le respect. as. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Aragon, Traité d
73 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Pierre Naville, La Révolution et les intellectuels (novembre 1928)
4271 Pierre Naville, La Révolution et les intellectuels (novembre 1928)at Les derniers écr
4272 Pierre Naville, La Révolution et les intellectuels (novembre 1928)at Les derniers écrits des surréalist
4273 olution et les intellectuels (novembre 1928)at Les derniers écrits des surréalistes débattent la question de savoir s’il
4274 Les derniers écrits des surréalistes débattent la question de savoir s’ils vont se taire ou non. Mais leur silence ne d
4275 ux-mêmes. Ils se tournent donc naturellement vers l’ action, c’est-à-dire — nous sommes en France — vers la politique. Or c
4276 tion, c’est-à-dire — nous sommes en France — vers la politique. Or ces ennemis de toute littérature voient leurs avances d
4277 e littérature voient leurs avances dédaignées par les communistes, gens d’action à jugements simples, qui les trouvent trop
4278 es par les communistes, gens d’action à jugements simples , qui les trouvent trop littérateurs. Rien d’étonnant à cela dans une
4279 mmunistes, gens d’action à jugements simples, qui les trouvent trop littérateurs. Rien d’étonnant à cela dans une époque où
4280 ateurs. Rien d’étonnant à cela dans une époque où les valeurs de l’esprit sont en pratique universellement méprisées. Mais
4281 étonnant à cela dans une époque où les valeurs de l’ esprit sont en pratique universellement méprisées. Mais les surréalist
4282 sont en pratique universellement méprisées. Mais les surréalistes ont leur responsabilité là-dedans ; leur défense de l’es
4283 t leur responsabilité là-dedans ; leur défense de l’ esprit s’est bornée jusqu’ici à une rhétorique très brillante contre u
4284 détesté, mais dont ils participent plus qu’ils ne le croient. Certes il était urgent de faire la critique de « cette réali
4285 ls ne le croient. Certes il était urgent de faire la critique de « cette réalité de premier plan qui nous empêche de bouge
4286 s cette réalité. Il est certain que s’ils avaient le courage de se soumettre au concret de l’esprit, ils comprendraient qu
4287 avaient le courage de se soumettre au concret de l’ esprit, ils comprendraient que le « service dans le temple » s’accommo
4288 re au concret de l’esprit, ils comprendraient que le « service dans le temple » s’accommode mal de tant de gesticulations,
4289 ’esprit, ils comprendraient que le « service dans le temple » s’accommode mal de tant de gesticulations, de gros mots et d
4290 d dont ils n’ont pas encore renoncé à chatouiller le snobisme. at. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Pierre Naville,
4291 gemont Denis de, « [Compte rendu] Pierre Naville, La Révolution et les intellectuels  », Bibliothèque universelle et Revue
4292 « [Compte rendu] Pierre Naville, La Révolution et les intellectuels  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève
74 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Malraux, Les Conquérants (décembre 1928)
4293 André Malraux, Les Conquérants (décembre 1928)au Ce récit de la révolution cantonaise
4294 Les Conquérants (décembre 1928)au Ce récit de la révolution cantonaise en 1925 nous place au nœud du monde moderne : o
4295 on y voit s’affronter en quelques hommes d’action les forces caractéristiques du temps — argent, races — et ses rares passi
4296 — argent, races — et ses rares passions, qui sont la domination et la démolition, l’organisation et le sabotage. On y déco
4297 et ses rares passions, qui sont la domination et la démolition, l’organisation et le sabotage. On y découvre le jeu des t
4298 assions, qui sont la domination et la démolition, l’ organisation et le sabotage. On y découvre le jeu des tempéraments qui
4299 la domination et la démolition, l’organisation et le sabotage. On y découvre le jeu des tempéraments qui fait opter ces ch
4300 ion, l’organisation et le sabotage. On y découvre le jeu des tempéraments qui fait opter ces chefs pour l’une ou l’autre d
4301 ires : elles représentent deux manières de sentir l’ unité d’une époque obsédée d’action.) Autour de ces individus — Chinoi
4302 mentateurs, Juifs russes méthodiques — s’émeuvent les masses de coolies, d’ouvriers armés, toute cette Chine qui s’éveille
4303 , toute cette Chine qui s’éveille au sein même de la lutte qui met aux prises l’Europe et le monde du Pacifique. On retrou
4304 eille au sein même de la lutte qui met aux prises l’ Europe et le monde du Pacifique. On retrouvera ici beaucoup des idées
4305 n même de la lutte qui met aux prises l’Europe et le monde du Pacifique. On retrouvera ici beaucoup des idées que la Tenta
4306 cifique. On retrouvera ici beaucoup des idées que la Tentation de l’Occident exprimait sous une forme abstraite et poétiqu
4307 ouvera ici beaucoup des idées que la Tentation de l’ Occident exprimait sous une forme abstraite et poétique. Mais cette fo
4308 en hommes, en meurtres, en décrets. Qu’il décrive la vie intense et instable des acteurs du drame, l’aspect quotidien et m
4309 la vie intense et instable des acteurs du drame, l’ aspect quotidien et mystérieux d’une révolution de rues, ou la palpita
4310 tidien et mystérieux d’une révolution de rues, ou la palpitation inquiétante des villes chinoises, Malraux fait preuve d’u
4311 lraux fait preuve d’un art du détail où se révèle le vrai romancier. On serait parfois tenté de le rapprocher de Morand, m
4312 èle le vrai romancier. On serait parfois tenté de le rapprocher de Morand, mais il est plus nerveux, sans doute aussi plus
4313 de faits, une discussion d’idées. Il est surtout la description d’une angoisse que le nihilisme de M. Malraux veut sans i
4314 Il est surtout la description d’une angoisse que le nihilisme de M. Malraux veut sans issues : l’angoisse que fait naître
4315 que le nihilisme de M. Malraux veut sans issues : l’ angoisse que fait naître au cœur du monde contemporain l’absurdité de
4316 sse que fait naître au cœur du monde contemporain l’ absurdité de ses ambitions. Écoutons Garine, l’un de ces chefs (c’est
4317 l’un de ces chefs (c’est lui qui parle au nom de l’ auteur, je pense) : « Il me semble que je lutte contre l’absurde humai
4318 r, je pense) : « Il me semble que je lutte contre l’ absurde humain, en faisant ce que je fais ici… » L’évasion dans l’acti
4319 ’absurde humain, en faisant ce que je fais ici… » L’ évasion dans l’action — révolutionnaire ou autre — rêvée par tant de j
4320 , en faisant ce que je fais ici… » L’évasion dans l’ action — révolutionnaire ou autre — rêvée par tant de jeunes hommes de
4321 ire ou autre — rêvée par tant de jeunes hommes de l’ après-guerre, Malraux l’a vécue, avant de la décrire ; et cet aveu de
4322 tant de jeunes hommes de l’après-guerre, Malraux l’ a vécue, avant de la décrire ; et cet aveu de Garine est décisif : « L
4323 es de l’après-guerre, Malraux l’a vécue, avant de la décrire ; et cet aveu de Garine est décisif : « La Révolution… tout c
4324 a décrire ; et cet aveu de Garine est décisif : «  La Révolution… tout ce qui n’est pas elle est pire qu’elle… » Expérience
4325 st pas elle est pire qu’elle… » Expérience faite, l’ absurde retrouve ses droits. C’est ainsi que, masqué par l’enchaînemen
4326 retrouve ses droits. C’est ainsi que, masqué par l’ enchaînement passionnant de l’action, il se dégage de ce roman un dése
4327 nsi que, masqué par l’enchaînement passionnant de l’ action, il se dégage de ce roman un désespoir sec, sans grimace. Cette
4328 angereux. Mais qu’elles s’appliquent à distinguer les forces déterminantes de l’heure, à les exprimer en un tel drame, et v
4329 pliquent à distinguer les forces déterminantes de l’ heure, à les exprimer en un tel drame, et voici André Malraux au premi
4330 distinguer les forces déterminantes de l’heure, à les exprimer en un tel drame, et voici André Malraux au premier rang des
4331 ugemont Denis de, « [Compte rendu] André Malraux, Les Conquérants  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève,
75 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Guy de Pourtalès, Louis II de Bavière ou Hamlet-Roi (décembre 1928)
4332 II de Bavière ou Hamlet-Roi (décembre 1928)av L’ histoire de Louis II exalte et déçoit l’imagination. On comprend que c
4333 928)av L’histoire de Louis II exalte et déçoit l’ imagination. On comprend que ce doux-amer ait séduit Barrès, mais ne l
4334 prend que ce doux-amer ait séduit Barrès, mais ne l’ ait point trompé : « Avec son beau regard de rêve, — lit-on dans l’Enn
4335 é : « Avec son beau regard de rêve, — lit-on dans l’ Ennemi des Lois — son expression amoureuse du silence et cet ensemble
4336 s ses châteaux en Espagne lamentablement réalisés les témoignages de l’éthique de cet « illustre réfractaire ». N’est-ce po
4337 spagne lamentablement réalisés les témoignages de l’ éthique de cet « illustre réfractaire ». N’est-ce point trop demander
4338 lès n’hésite pas à baptiser son héros « prince de l’ illusion et de la solitude ». Mais un prince rêveur n’est pas forcémen
4339 à baptiser son héros « prince de l’illusion et de la solitude ». Mais un prince rêveur n’est pas forcément prince du rêve 
4340 ince du rêve ; et par ailleurs ce livre sait bien le laisser voir. La qualité de l’illusion dont se nourrit Louis II n’est
4341 par ailleurs ce livre sait bien le laisser voir. La qualité de l’illusion dont se nourrit Louis II n’est ni aussi pure ni
4342 ce livre sait bien le laisser voir. La qualité de l’ illusion dont se nourrit Louis II n’est ni aussi pure ni aussi rare qu
4343 n’est ni aussi pure ni aussi rare qu’on voudrait l’ imaginer. Il reste qu’il a voulu la vivre et qu’il l’a pu, étant roi.
4344 qu’on voudrait l’imaginer. Il reste qu’il a voulu la vivre et qu’il l’a pu, étant roi. Il offre ainsi l’image d’un romanti
4345 maginer. Il reste qu’il a voulu la vivre et qu’il l’ a pu, étant roi. Il offre ainsi l’image d’un romantisme assez morose ;
4346 vivre et qu’il l’a pu, étant roi. Il offre ainsi l’ image d’un romantisme assez morose ; mais à grande échelle. M. de Pour
4347 à grande échelle. M. de Pourtalès a su rehausser le tableau avec beaucoup d’adresse et de charme : Wagner et Nietzsche lu
4348 t Nietzsche lui fournissent deux tons fermes dont le jeu donne aux nuances assez troubles du personnage central une résona
4349 it par hasard de moyens d’action puissants : s’il les a gâchés, c’est qu’il a eu peur, et s’il a eu peur c’est qu’il n’a pa
4350 , et s’il a eu peur c’est qu’il n’a pas su aimer. Le sujet de Liszt et de Chopin, c’était l’amour, donc la douleur ; ici,
4351 su aimer. Le sujet de Liszt et de Chopin, c’était l’ amour, donc la douleur ; ici, c’est l’absence d’amour, par refus de so
4352 ujet de Liszt et de Chopin, c’était l’amour, donc la douleur ; ici, c’est l’absence d’amour, par refus de souffrir. Mais c
4353 in, c’était l’amour, donc la douleur ; ici, c’est l’ absence d’amour, par refus de souffrir. Mais chez un être raffiné, la
4354 par refus de souffrir. Mais chez un être raffiné, la peur d’étreindre aboutit à l’amour de soi dans « l’illusion ». Sachon
4355 ez un être raffiné, la peur d’étreindre aboutit à l’ amour de soi dans « l’illusion ». Sachons gré à M. de Pourtalès de ce
4356 peur d’étreindre aboutit à l’amour de soi dans «  l’ illusion ». Sachons gré à M. de Pourtalès de ce qu’il préfère parler d
4357 oseraient de moins jolis mots ; mais ce n’est pas la moindre habileté du biographe. D’ailleurs, réussir un livre attrayant
4358 e n’était pas un problème aisé : Guy de Pourtalès l’ a résolu d’une façon fort adroite mais non moins franche. av. Rouge
76 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Daniel-Rops, Le Prince menteur (décembre 1928)
4359 Daniel-Rops, Le Prince menteur (décembre 1928)aw Au hasard d’une rencontre, l’aute
4360 r (décembre 1928)aw Au hasard d’une rencontre, l’ auteur de ce récit se lie avec un inconnu qui se dit prince russe et e
4361 e dit prince russe et entretient autour de sa vie le plus grand mystère. Cependant il aime à raconter certaines scènes ter
4362 aime à raconter certaines scènes terrifiantes de la révolution : il a été condamné à mort, il s’est évadé, on le traque à
4363 on : il a été condamné à mort, il s’est évadé, on le traque à Paris même… Il subjugue le jeune Français par ces évocations
4364 est évadé, on le traque à Paris même… Il subjugue le jeune Français par ces évocations et l’espèce de fièvre qu’il y appor
4365 subjugue le jeune Français par ces évocations et l’ espèce de fièvre qu’il y apporte. Mais plusieurs incidents éveillent l
4366 ’il y apporte. Mais plusieurs incidents éveillent les soupçons du « petit-bourgeois » qu’il a choisi comme public, et brusq
4367 ois » qu’il a choisi comme public, et brusquement le mot éclate : menteur. Feintes et esquives adroites du « prince » qui
4368 es du « prince » qui disparaît, néanmoins. Enfin, le Français reçoit une lettre trouvée sur le corps de son ami suicidé, p
4369 Enfin, le Français reçoit une lettre trouvée sur le corps de son ami suicidé, pathétique confession qui doit expliquer sa
4370 oit expliquer sa mort et qui est aussi fausse que le reste. Ce mensonge qui va jusqu’à la mort, inclusivement, n’étonnera
4371 i fausse que le reste. Ce mensonge qui va jusqu’à la mort, inclusivement, n’étonnera pas ceux qui ont connu de semblables
4372 pas ceux qui ont connu de semblables mythomanes. Le cas méritait d’être exposé. Je regrette seulement que Daniel-Rops se
4373 courte nouvelle, d’ailleurs assez dense, et dont le mérite est d’être simple et précise dans l’exposé, sans rien simplifi
4374 illeurs assez dense, et dont le mérite est d’être simple et précise dans l’exposé, sans rien simplifier ni préciser à l’excès
4375 dont le mérite est d’être simple et précise dans l’ exposé, sans rien simplifier ni préciser à l’excès dans le caractère.
4376 dans l’exposé, sans rien simplifier ni préciser à l’ excès dans le caractère. Daniel-Rops voit bien que l’épithète de mytho
4377 , sans rien simplifier ni préciser à l’excès dans le caractère. Daniel-Rops voit bien que l’épithète de mythomane n’épuise
4378 xcès dans le caractère. Daniel-Rops voit bien que l’ épithète de mythomane n’épuise pas une question dont l’importance dépa
4379 thète de mythomane n’épuise pas une question dont l’ importance dépasse celle du cas pathologique. Il y a dans ce culte de
4380 elle du cas pathologique. Il y a dans ce culte de la mythomanie qu’on a vu sévir parmi certains milieux d’avant-garde une
4381 , parce qu’elle constitue une tentation pour tous les poètes. Le désir de « plus vrai que le vrai » surexcité par l’insolen
4382 lle constitue une tentation pour tous les poètes. Le désir de « plus vrai que le vrai » surexcité par l’insolence d’une ps
4383 pour tous les poètes. Le désir de « plus vrai que le vrai » surexcité par l’insolence d’une psychologie qui rabaisse tout,
4384 désir de « plus vrai que le vrai » surexcité par l’ insolence d’une psychologie qui rabaisse tout, peut conduire à préfére
4385 as, qu’une déformation de cette réalité détestée. Le mythomane brouille les cartes mais reste dans le jeu. Jusque dans la
4386 de cette réalité détestée. Le mythomane brouille les cartes mais reste dans le jeu. Jusque dans la ruse que ses mensonges
4387 Le mythomane brouille les cartes mais reste dans le jeu. Jusque dans la ruse que ses mensonges exigent, il se reconnaît t
4388 le les cartes mais reste dans le jeu. Jusque dans la ruse que ses mensonges exigent, il se reconnaît tributaire de la « vé
4389 mensonges exigent, il se reconnaît tributaire de la « vérité trop évidente » ; alors qu’il la faudrait, sans rien fausser
4390 aire de la « vérité trop évidente » ; alors qu’il la faudrait, sans rien fausser, transcender… aw. Rougemont Denis de,
4391 Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Daniel-Rops, Le Prince menteur  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genèv
77 1928, Articles divers (1924–1930). Miroirs, ou Comment on perd Eurydice et soi-même » (décembre 1928)
4392 » Paul Valéry. Stéphane est maniaque, comme tous les jeunes gens de sa génération. Seulement chez lui, cela ne s’est pas p
4393 . Seulement chez lui, cela ne s’est pas porté sur les autos. Il préfère s’intéresser aux divers types humains. Mais on lui
4394 ord ; accepte d’attendre comme un enfant sage que le monde lui donne, en son temps, sa petite part. On lui a expliqué qu’i
4395 , sa petite part. On lui a expliqué qu’il fallait la mériter et tâcher de devenir quelqu’un. En d’autres termes, on lui co
4396  » comme parle un de nos classiques. Repoussé par le monde parce qu’il n’est pas encore quelqu’un, Stéphane cherche à savo
4397 r un moi qui feint toujours de se cacher derrière le feuillet suivant, entraîne le lecteur par ruse jusqu’à la dernière pa
4398 se cacher derrière le feuillet suivant, entraîne le lecteur par ruse jusqu’à la dernière page, et là déclare froidement n
4399 roidement ne pas exister. Non : il a remarqué que l’ époque peut être définie par l’abondance des autobiographies, mais aus
4400 il a remarqué que l’époque peut être définie par l’ abondance des autobiographies, mais aussi bien par celle des miroirs.
4401 hane passe des heures entières à se regarder dans les yeux. Il varie sur son visage les jeux de lumière et de sentiments. I
4402 e regarder dans les yeux. Il varie sur son visage les jeux de lumière et de sentiments. Il découvre une sorte de rire au co
4403 ouvre une sorte de rire au coin de sa bouche dans les moments de pire découragement ; et beaucoup d’autres hiatus de ce gen
4404 nt ; et beaucoup d’autres hiatus de ce genre, qui l’ intriguent à n’en pas finir. Quand il est très fatigué, il veut voir e
4405 é sur lui-même il se perd en méditations éléates. Le sommeil l’en délivre. Au matin il court se voir : il est laid. Lâchem
4406 ême il se perd en méditations éléates. Le sommeil l’ en délivre. Au matin il court se voir : il est laid. Lâchement il se p
4407 l se prend en pitié. Ces séances lui font du mal, l’ énervent, mais l’aveu qu’il en consent l’attache plus secrètement à so
4408 ié. Ces séances lui font du mal, l’énervent, mais l’ aveu qu’il en consent l’attache plus secrètement à son aventure. Nous
4409 du mal, l’énervent, mais l’aveu qu’il en consent l’ attache plus secrètement à son aventure. Nous vivons dans un décor fl
4410 ne sa tête, son portrait en pied. Il se voit dans l’ acte de se raser, de se baigner ; son image descend en face de lui par
4411 se baigner ; son image descend en face de lui par l’ ascenseur, elle le suit au long des trottoirs, il l’aperçoit entre des
4412 mage descend en face de lui par l’ascenseur, elle le suit au long des trottoirs, il l’aperçoit entre des souliers, des éti
4413 ascenseur, elle le suit au long des trottoirs, il l’ aperçoit entre des souliers, des étiquettes, des poupées ; elle le pré
4414 des souliers, des étiquettes, des poupées ; elle le précède au restaurant, le nargue brièvement au passage des autos, le
4415 tes, des poupées ; elle le précède au restaurant, le nargue brièvement au passage des autos, le ridiculise chez le coiffeu
4416 urant, le nargue brièvement au passage des autos, le ridiculise chez le coiffeur. Déjà, c’est avec une sorte d’angoisse qu
4417 ièvement au passage des autos, le ridiculise chez le coiffeur. Déjà, c’est avec une sorte d’angoisse qu’il la recherche. I
4418 feur. Déjà, c’est avec une sorte d’angoisse qu’il la recherche. Il veut se voir tel qu’il est parmi les autres. Mais s’il
4419 la recherche. Il veut se voir tel qu’il est parmi les autres. Mais s’il lui arrive de prendre son image pour celle de n’imp
4420 t de cette apparence, qu’il doute de sa réalité. Le mystère de voir ses yeux l’épouvante. Il y cherche une révélation et
4421 doute de sa réalité. Le mystère de voir ses yeux l’ épouvante. Il y cherche une révélation et n’y trouve que le désir d’un
4422 te. Il y cherche une révélation et n’y trouve que le désir d’une révélation. Peut-on s’hypnotiser avec son propre regard ?
4423 te incantation à soi-même qui pourrait lui rendre la certitude d’être. Mais il s’épuise dans une perspective de reflets qu
4424 reflets qui vont en diminuant vertigineusement et l’ égarent dans sa nuit. Je saute quelques délires et pas mal de supersti
4425 al de superstitions. Enfin cette expérience folle le mène à une découverte sur les sept sens de laquelle il convient de mé
4426 tte expérience folle le mène à une découverte sur les sept sens de laquelle il convient de méditer : la personne se dissout
4427 es sept sens de laquelle il convient de méditer : la personne se dissout dans l’eau des miroirs. Stéphane est en train de
4428 convient de méditer : la personne se dissout dans l’ eau des miroirs. Stéphane est en train de se perdre pour avoir voulu
4429 il faut sortir de soi pour se voir ? Il y a dans l’ homme moderne un besoin de vérifier qui n’est plus légitime dès l’inst
4430 un besoin de vérifier qui n’est plus légitime dès l’ instant qu’il se traduit par la négation de l’invérifiable. Stéphane n
4431 plus légitime dès l’instant qu’il se traduit par la négation de l’invérifiable. Stéphane n’a pas eu confiance. Or la pers
4432 dès l’instant qu’il se traduit par la négation de l’ invérifiable. Stéphane n’a pas eu confiance. Or la personnalité est un
4433 l’invérifiable. Stéphane n’a pas eu confiance. Or la personnalité est un acte de foi : Stéphane ne sait plus ce qu’il est.
4434 oire idiote, d’ailleurs vraie, se borne à décrire l’ aspect psychologique d’une aventure qui en a bien d’autres, d’aspects.
4435 qui en a bien d’autres, d’aspects. Il est bon que le lecteur dérisoirement troublé par la crainte de n’avoir pas saisi le
4436 est bon que le lecteur dérisoirement troublé par la crainte de n’avoir pas saisi le sens véritable d’un texte, trouve par
4437 ement troublé par la crainte de n’avoir pas saisi le sens véritable d’un texte, trouve parfois de cette incompréhension de
4438 e cette incompréhension des marques certaines. Si le rapport intime qui unit la phrase suivante aux considérations précéde
4439 marques certaines. Si le rapport intime qui unit la phrase suivante aux considérations précédentes lui échappe, qu’il y v
4440 dique, par besoin de définir, par défiance envers les dieux. À chaque regard dans notre miroir, nous perdons une Eurydice.
4441 ard dans notre miroir, nous perdons une Eurydice. Les miroirs sont peut-être la mort. La mort absolue, celle qui n’est pas
4442 perdons une Eurydice. Les miroirs sont peut-être la mort. La mort absolue, celle qui n’est pas une vie nouvelle. La mort
4443 une Eurydice. Les miroirs sont peut-être la mort. La mort absolue, celle qui n’est pas une vie nouvelle. La mort dans la t
4444 rt absolue, celle qui n’est pas une vie nouvelle. La mort dans la transparence glaciale de l’évidence. Un jour, à propos
4445 elle qui n’est pas une vie nouvelle. La mort dans la transparence glaciale de l’évidence. Un jour, à propos de rien, Stép
4446 ouvelle. La mort dans la transparence glaciale de l’ évidence. Un jour, à propos de rien, Stéphane pense avec fièvre : « I
4447 ane pense avec fièvre : « Il faudrait briser tous les miroirs. Alors tu te verrais en vérité. Peut-être te reconnaîtrais-tu
4448 t ? » C’est un premier filet d’eau vive qui perce le sol aride : mais Stéphane n’entend pas encore gronder les eaux profon
4449 aride : mais Stéphane n’entend pas encore gronder les eaux profondes. Le désir de s’hypnotiser l’irrite toujours vaguement.
4450 e n’entend pas encore gronder les eaux profondes. Le désir de s’hypnotiser l’irrite toujours vaguement. Mais il fuit son p
4451 nder les eaux profondes. Le désir de s’hypnotiser l’ irrite toujours vaguement. Mais il fuit son propre regard, il se cherc
4452 te, il croit saisir dans un regard de cette femme l’ écho de ce qui serait lui. Déjà il se perd dans ces yeux, mais comme o
4453 omme on meurt dans une naissance. Stéphane naît à l’ amour et à lui-même conjointement. Plusieurs ivresses l’ont envahi bru
4454 r et à lui-même conjointement. Plusieurs ivresses l’ ont envahi bruyamment, bâillonnent sa raison, l’empêchent de protester
4455 s l’ont envahi bruyamment, bâillonnent sa raison, l’ empêchent de protester contre le miracle. Parmi tous ses mots fous, no
4456 onnent sa raison, l’empêchent de protester contre le miracle. Parmi tous ses mots fous, noms, baisers, appels qui reçoiven
4457 s tard, ce fut un jour de grand soleil sur toutes les verreries de la capitale. Les fenêtres battaient. Le soleil et « la m
4458 jour de grand soleil sur toutes les verreries de la capitale. Les fenêtres battaient. Le soleil et « la mort » se conjura
4459 d soleil sur toutes les verreries de la capitale. Les fenêtres battaient. Le soleil et « la mort » se conjuraient pour abai
4460 verreries de la capitale. Les fenêtres battaient. Le soleil et « la mort » se conjuraient pour abaisser tous les regards.
4461 capitale. Les fenêtres battaient. Le soleil et «  la mort » se conjuraient pour abaisser tous les regards. Stéphane rendu
4462 et « la mort » se conjuraient pour abaisser tous les regards. Stéphane rendu à la santé écrivait : « Ton visage me cache t
4463 pour abaisser tous les regards. Stéphane rendu à la santé écrivait : « Ton visage me cache tous les miroirs » — à une fem
4464 à la santé écrivait : « Ton visage me cache tous les miroirs » — à une femme qu’il aimait. n. Rougemont Denis de, « Mir
4465 omment on perd Eurydice et soi-même », Cahiers de l’ Anglore, Genève, décembre 1928, p. 37-42.
78 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Sherwood Anderson, Mon père et moi et Je suis un homme (janvier 1929)
4466 re et moi et Je suis un homme (janvier 1929)ax Le critique se sent désarmé et légèrement absurde en face d’un récit com
4467 vec une émouvante simplicité et il faudrait avoir la grossièreté de lui répondre d’un air connaisseur que c’est bien compo
4468 bien étonné du passage où il rappelle qu’il écrit la vie d’un homme de lettres. En réalité, on ne le voit pas encore appar
4469 t la vie d’un homme de lettres. En réalité, on ne le voit pas encore apparaître sous cet aspect dans ces deux premiers tom
4470 s de son enfance et de sa jeunesse comme ouvrier. L’ art d’Anderson est étonnant d’apparente simplicité. Le récit s’avance
4471 t d’Anderson est étonnant d’apparente simplicité. Le récit s’avance à une allure libre et tranquille, anglo-saxonne et peu
4472 et là s’ouvrent des perspectives saisissantes sur l’ époque. Anderson est avant tout un poète, un homme qui aime inventer e
4473 es nécessités modernes, dégradantes. Cet amour de l’ invention romanesque considérée comme une revanche de la poésie — mais
4474 ntion romanesque considérée comme une revanche de la poésie — mais à Chicago on doit appeler ça du bluff — fait de lui san
4475 doit appeler ça du bluff — fait de lui sans doute le plus méridional des conteurs américains. Avec cela, un réalisme, plei
4476 uvent d’amertume. Mais là où d’autres placeraient le couplet humanitariste, lui s’en va dans un rêve, ou dans un autre sou
4477 est un Américain qui viennent nous rapprendre que les sources de la poésie sont dans notre maison. Voici un de ces passages
4478 n qui viennent nous rapprendre que les sources de la poésie sont dans notre maison. Voici un de ces passages où il sait êt
4479 ouvant : « À cette époque je croyais fortement en l’ existence d’une espèce de secrète et à peu près universelle conspirati
4480 u près universelle conspiration pour insister sur la laideur. “C’est une frasque de gosses à laquelle nous nous livrons, v
4481 à laquelle nous nous livrons, voilà tout, moi et les autres”, me disais-je parfois, et il y avait des moments où j’arrivai
4482 s, bras dessous en riant de nous-mêmes et de tout le reste, nous amusant comme des fous ». Mais non, on ne le secouera pas
4483 e, nous amusant comme des fous ». Mais non, on ne le secouera pas, ce cauchemar, ce monde moderne, ce monde de fous qui n’
4484 fous qui n’ont plus que leur raison, ce monde où l’ on ne sait plus créer avec joie des formes belles, ce monde qui devien
4485 quer un personnage précis pour lui faire endosser le blâme, mais comme l’homme nommé Ford, de Détroit, a contribué davanta
4486 écis pour lui faire endosser le blâme, mais comme l’ homme nommé Ford, de Détroit, a contribué davantage que n’importe quel
4487 n’importe quel autre de mon temps à faire aboutir la standardization à sa fin logique, ne pourrait-il pas être considéré u
4488 , ne pourrait-il pas être considéré un jour comme le grand tueur de son époque ? Rendre impuissant c’est à coup sûr tuer.
4489 impuissant c’est à coup sûr tuer. Or on parle de l’ élever à la présidence de la République. Qu’un tel acte serait adéquat
4490 c’est à coup sûr tuer. Or on parle de l’élever à la présidence de la République. Qu’un tel acte serait adéquat ! Tamerlan
4491 tuer. Or on parle de l’élever à la présidence de la République. Qu’un tel acte serait adéquat ! Tamerlan, dont la spécial
4492 e. Qu’un tel acte serait adéquat ! Tamerlan, dont la spécialité était l’assassinat du corps humain, mais qui raconte dans
4493 rait adéquat ! Tamerlan, dont la spécialité était l’ assassinat du corps humain, mais qui raconte dans son autobiographie q
4494 obiographie que son désir constant était que tous les hommes vivant sous lui conservassent la virilité et le respect de soi
4495 que tous les hommes vivant sous lui conservassent la virilité et le respect de soi était de son temps le souverain du mond
4496 mmes vivant sous lui conservassent la virilité et le respect de soi était de son temps le souverain du monde. Tamerlan pou
4497 virilité et le respect de soi était de son temps le souverain du monde. Tamerlan pour les anciens. Ford pour les modernes
4498 de son temps le souverain du monde. Tamerlan pour les anciens. Ford pour les modernes. Quelle décadence ! ax. Rougemont
4499 in du monde. Tamerlan pour les anciens. Ford pour les modernes. Quelle décadence ! ax. Rougemont Denis de, « [Compte re
79 1929, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). « Belles-Lettres, c’est la clé des champs… » (janvier 1929)
4500 « Belles-Lettres, c’est la clé des champs… » (janvier 1929)y 1. Belles-Lettres, c’est la clef
4501 ps… » (janvier 1929)y 1. Belles-Lettres, c’est la clef des champs. 2. L’essence de Belles-Lettres, c’est de l’alcool à
4502 1. Belles-Lettres, c’est la clef des champs. 2. L’ essence de Belles-Lettres, c’est de l’alcool à brûler les cervelles et
4503 champs. 2. L’essence de Belles-Lettres, c’est de l’ alcool à brûler les cervelles et les réputations. 3. Belles-Lettres n
4504 nce de Belles-Lettres, c’est de l’alcool à brûler les cervelles et les réputations. 3. Belles-Lettres n’est compréhensible
4505 tres, c’est de l’alcool à brûler les cervelles et les réputations. 3. Belles-Lettres n’est compréhensible et légitime que
4506 Lettres n’est compréhensible et légitime que dans la mesure où la poésie est compréhensible et légitime. 4. Je suis de san
4507 compréhensible et légitime que dans la mesure où la poésie est compréhensible et légitime. 4. Je suis de sang-froid, je d
4508 esse ; autrement que par des cris. 5. Avec toutes les erreurs et turpitudes que cela comporte, Belles-Lettres est une liber
4509 trer en religion : rond de cuir ou poète (au sens le plus large de ces mots.) (Mais je tiens à le leur dire ici : les anci
4510 sens le plus large de ces mots.) (Mais je tiens à le leur dire ici : les anciens bellettriens qui ont perdu toute foi ne c
4511 de ces mots.) (Mais je tiens à le leur dire ici : les anciens bellettriens qui ont perdu toute foi ne connaîtront pas de pa
4512 sont foncièrement mauvais.) 6. Peu de choses dans le monde moderne ont encore une « essence ». Celle de Belles-Lettres est
4513 . Celle de Belles-Lettres est en agréable odeur à l’ Éternel et à Satan pareillement. Et ceux qu’elle enivre entrent en éta
4514 y. Rougemont Denis de, « Belles-Lettres, c’est la clef des champs… », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genèv
80 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. Avant-propos
4515 Avant-propos Le dire une bonne fois. Il ne faut pas songer à décrire en quarante peti
4516 s songer à décrire en quarante petites pages tous les méfaits de l’instruction publique. C’est à peine assez pour indiquer
4517 ire en quarante petites pages tous les méfaits de l’ instruction publique. C’est à peine assez pour indiquer leur ordre de
4518 e grandeur ; à quoi je me bornerai. Il a paru sur le sujet de l’instruction publique deux petits livres1 excellents dont j
4519 à quoi je me bornerai. Il a paru sur le sujet de l’ instruction publique deux petits livres1 excellents dont je considère
4520 deux petits livres1 excellents dont je considère les thèses comme acquises : L’Éloge de l’ignorance, de M. Abel Bonnard, e
4521 nts dont je considère les thèses comme acquises : L’ Éloge de l’ignorance, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas l
4522 considère les thèses comme acquises : L’Éloge de l’ ignorance, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas les enfants,
4523  : L’Éloge de l’ignorance, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas les enfants, d’Henri Roorda. Le premier montre q
4524 e, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas les enfants, d’Henri Roorda. Le premier montre que la science apprise à l
4525 es enfants, d’Henri Roorda. Le premier montre que la science apprise à l’école appauvrit l’homme de tout ce que son ignora
4526 oorda. Le premier montre que la science apprise à l’ école appauvrit l’homme de tout ce que son ignorance respectait, et ne
4527 montre que la science apprise à l’école appauvrit l’ homme de tout ce que son ignorance respectait, et ne lui donne à la pl
4528 e que son ignorance respectait, et ne lui donne à la place que des laideurs et de la prétention. L’autre, avec l’ironie tr
4529 et ne lui donne à la place que des laideurs et de la prétention. L’autre, avec l’ironie tranquille du bon sens bafoué et q
4530 e des laideurs et de la prétention. L’autre, avec l’ ironie tranquille du bon sens bafoué et qui s’en moque, décrit la stup
4531 ille du bon sens bafoué et qui s’en moque, décrit la stupidité de l’enseignement tel qu’il est pratiqué dans nos collèges.
4532 bafoué et qui s’en moque, décrit la stupidité de l’ enseignement tel qu’il est pratiqué dans nos collèges. Mon dessein est
4533 e réaction de tempérament. Je marque d’autre part la nécessité de tout cela qui me blesse, la liaison fatale avec la démoc
4534 tre part la nécessité de tout cela qui me blesse, la liaison fatale avec la démocratie, de tout ce qui moleste ma liberté
4535 e tout cela qui me blesse, la liaison fatale avec la démocratie, de tout ce qui moleste ma liberté et sans doute celle de
4536 ocialiste qui a été établi par coup de force, que les libéraux ont admis, conformément à leurs maximes, et toléré malgré le
4537 humeur. Ce régime de punaises jaunâtres aboutit à l’ instruction publique et grâce à elle prolonge abusivement sa terne exi
4538 elle prolonge abusivement sa terne existence. Je l’ ai subi ; l’on va voir comment. De pareils souvenirs légitiment toutes
4539 ge abusivement sa terne existence. Je l’ai subi ; l’ on va voir comment. De pareils souvenirs légitiment toutes les haines.
4540 r comment. De pareils souvenirs légitiment toutes les haines. Je serai méchant, parce que j’en ai gros sur le cœur. D’aill
4541 nes. Je serai méchant, parce que j’en ai gros sur le cœur. D’ailleurs, ce petit écrit ne peut servir à rien. — Alors ? —
4542 apper : celui de naïveté. Définition du naïf dans le monde moderne : individu qui soutient des idées qui ne rapportent rie
4543 r au nom de ma génération, ne m’étant pas livré à l’ enquête préalable qui seule eût pu, à la rigueur, me donner ce droit b
4544 s livré à l’enquête préalable qui seule eût pu, à la rigueur, me donner ce droit bien inutile. Pourtant je sais qu’à droi
4545 e comme à gauche, ils sont plus nombreux qu’on ne le pense, ceux qui refusent d’être complices dans cet attentat à l’intég
4546 qui refusent d’être complices dans cet attentat à l’ intégrité humaine qu’est en fait l’esprit démocratique. Là-dessus, ces
4547 cet attentat à l’intégrité humaine qu’est en fait l’ esprit démocratique. Là-dessus, ces messieurs se lamentent, la jeuness
4548 ocratique. Là-dessus, ces messieurs se lamentent, la jeunesse d’aujourd’hui, etc. Évidemment. Mais il y a les jérémiades e
4549 nesse d’aujourd’hui, etc. Évidemment. Mais il y a les jérémiades et il y a les raisons. Hors le domaine de l’amour, où tout
4550 Évidemment. Mais il y a les jérémiades et il y a les raisons. Hors le domaine de l’amour, où tout se confond miraculeuseme
4551 il y a les jérémiades et il y a les raisons. Hors le domaine de l’amour, où tout se confond miraculeusement, gémir n’est p
4552 émiades et il y a les raisons. Hors le domaine de l’ amour, où tout se confond miraculeusement, gémir n’est pas un argument
4553 eusement, gémir n’est pas un argument. Je demande le droit de démolir. Et me l’accorde aussitôt. Sans conditions. Mon rôle
4554 n argument. Je demande le droit de démolir. Et me l’ accorde aussitôt. Sans conditions. Mon rôle n’est pas de proposer une
4555 de vitupérer ce que je vois, qui est laid. Quand la soupe est brûlée, on la renvoie, même si l’on n’est pas capable d’en
4556 vois, qui est laid. Quand la soupe est brûlée, on la renvoie, même si l’on n’est pas capable d’en faire soi-même une meill
4557 Quand la soupe est brûlée, on la renvoie, même si l’ on n’est pas capable d’en faire soi-même une meilleure. Mais j’aperçoi
4558 Mais j’aperçois là-bas, vautré derrière son bock, le Citoyen conscient et organisé pour la discussion. Il retrousse ses ma
4559 e son bock, le Citoyen conscient et organisé pour la discussion. Il retrousse ses manches. Il s’apprête à cracher sur ce q
4560 Oh ! oh ! oh ! il va parler, de grâce mettez-lui les mains sur la bouche ! Donnez-lui sa choucroute, tapez-lui dans le dos
4561 ! il va parler, de grâce mettez-lui les mains sur la bouche ! Donnez-lui sa choucroute, tapez-lui dans le dos, amenez-lui
4562 bouche ! Donnez-lui sa choucroute, tapez-lui dans le dos, amenez-lui le Guguss, des bretzels, sa petite amie, au secours !
4563 sa choucroute, tapez-lui dans le dos, amenez-lui le Guguss, des bretzels, sa petite amie, au secours ! Car j’ai encore de
4564 ire. Dès qu’une voix s’élève pour mettre en doute l’ excellence du principe de l’instruction publique, on crie sur tous les
4565 pour mettre en doute l’excellence du principe de l’ instruction publique, on crie sur tous les bancs : « Alors, vous êtes
4566 ncipe de l’instruction publique, on crie sur tous les bancs : « Alors, vous êtes pour un retour à la barbarie ? » Si ce réf
4567 s les bancs : « Alors, vous êtes pour un retour à la barbarie ? » Si ce réflexe indique un mépris vraiment exagéré pour la
4568 e réflexe indique un mépris vraiment exagéré pour la jugeote de l’adversaire ou s’il traduit simplement cette mauvaise foi
4569 que un mépris vraiment exagéré pour la jugeote de l’ adversaire ou s’il traduit simplement cette mauvaise foi pas même cons
4570 ise foi pas même consciente, cette lâcheté devant la discussion précise de leurs principes par quoi se signalent bien souv
4571 à cent « réponses » de cette sorte. Et je tiens à les classer par avance en deux catégories dont je vais régler le compte s
4572 par avance en deux catégories dont je vais régler le compte sommairement. Cela n’empêchera personne de me resservir ces ar
4573 A. Réponses du type : on ne peut pas aller contre l’ époque, vous êtes un pauvre utopiste, etc. Ce sont les positivistes qu
4574 poque, vous êtes un pauvre utopiste, etc. Ce sont les positivistes qui parlent ainsi, ceux qui croient aux faits. Je leur r
4575 Je leur réponds : 1° qu’ils ne peuvent me dénier le droit de juger ces faits ; 2° qu’ils ne peuvent, en vertu même de leu
4576 euvent, en vertu même de leur scepticisme quant à la valeur réformatrice des idées, m’accuser de faire une critique danger
4577 critique dangereuse. 3° que néanmoins je crois à l’ efficace de certaines utopies. (Les religions, la découverte de l’Amér
4578 oins je crois à l’efficace de certaines utopies. ( Les religions, la découverte de l’Amérique par Christophe Colomb, l’Europ
4579 l’efficace de certaines utopies. (Les religions, la découverte de l’Amérique par Christophe Colomb, l’Europe napoléonienn
4580 rtaines utopies. (Les religions, la découverte de l’ Amérique par Christophe Colomb, l’Europe napoléonienne, la Russie d’ap
4581 a découverte de l’Amérique par Christophe Colomb, l’ Europe napoléonienne, la Russie d’après Karl Marx, le vol des frères W
4582 ue par Christophe Colomb, l’Europe napoléonienne, la Russie d’après Karl Marx, le vol des frères Wright, et tout bêtement,
4583 urope napoléonienne, la Russie d’après Karl Marx, le vol des frères Wright, et tout bêtement, c’est le cas de le dire : l’
4584 le vol des frères Wright, et tout bêtement, c’est le cas de le dire : l’instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d
4585 frères Wright, et tout bêtement, c’est le cas de le dire : l’instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d’aller con
4586 ight, et tout bêtement, c’est le cas de le dire : l’ instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d’aller contre l’époq
4587 dire : l’instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d’aller contre l’époque, et on le peut efficacement. 2° Rira bi
4588 blique.) Résumé : 1° On a le droit d’aller contre l’ époque, et on le peut efficacement. 2° Rira bien qui rira le dernier.
4589 : 1° On a le droit d’aller contre l’époque, et on le peut efficacement. 2° Rira bien qui rira le dernier. B. Réponses du t
4590 rétrograde, un infâme réactionnaire, etc. Ce sont les partisans d’une démocratie progressiste et tolérante qui se livrent à
4591 lérante qui se livrent à ces excès de langage, je les renvoie en corps au chapitre 5 où je traiterai de cet aspect du probl
4592 e 5 où je traiterai de cet aspect du problème que l’ on peut appeler la question de droit. Certains, en effet, tirent toute
4593 i de cet aspect du problème que l’on peut appeler la question de droit. Certains, en effet, tirent toute leur force dans l
4594 Certains, en effet, tirent toute leur force dans les discussions de la tranquillité avec laquelle ils brouillent les faits
4595 , tirent toute leur force dans les discussions de la tranquillité avec laquelle ils brouillent les faits et les principes.
4596 s de la tranquillité avec laquelle ils brouillent les faits et les principes. Tourmentés par les scrupules de leur conscien
4597 uillité avec laquelle ils brouillent les faits et les principes. Tourmentés par les scrupules de leur conscience libérale,
4598 illent les faits et les principes. Tourmentés par les scrupules de leur conscience libérale, ils fuient la rigueur jusque d
4599 scrupules de leur conscience libérale, ils fuient la rigueur jusque dans leurs raisonnements. Pour moi qui cherche à démêl
4600 urs raisonnements. Pour moi qui cherche à démêler la vérité sans égard aux dérangements, même violents, que cela ne manque
4601 jamais de provoquer, je me propose de marquer ici la distinction classique du fait et du droit ; et c’est pourquoi je cons
4602 droit ; et c’est pourquoi je considérerai d’abord l’ instruction publique dans ses réalisations actuelles, puis au terme de
4603 d’outrages au bon sens peuvent être légitimés par le but final de notre institution-tabou. 1. Je ne puis naturellement p
4604 1. Je ne puis naturellement pas mentionner tous les ouvrages scientifiques. Les meilleurs sortent de l’Institut Rousseau.
4605 t pas mentionner tous les ouvrages scientifiques. Les meilleurs sortent de l’Institut Rousseau.
4606 ouvrages scientifiques. Les meilleurs sortent de l’ Institut Rousseau.
81 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 1. Mes prisons
4607 ssent sur leurs souvenirs de classe. C’est qu’ils les confondent avec ceux de leur enfance et les font indûment participer
4608 u’ils les confondent avec ceux de leur enfance et les font indûment participer de la même grâce. Voyez Péguy, quand il essa
4609 e leur enfance et les font indûment participer de la même grâce. Voyez Péguy, quand il essaie de nous faire croire qu’« il
4610 us faire croire qu’« il n’y a rien au-dessus » de la tâche des instituteurs : Faire de ces belles analyses logiques, et g
4611 ithmétique où il fallait si soigneusement séparer les calculs du raisonnement, par une barre verticale, et où il y avait to
4612 t pour emplir ou pour vider un bassin (et souvent les deux), (pour emplir et vider ensemble), (drôle d’occupation), (après
4613 urs des appartements à meubler. Et on multipliait le tapissier par le prix du mètre courant. Encore que je prenne les sen
4614 nts à meubler. Et on multipliait le tapissier par le prix du mètre courant. Encore que je prenne les sentiments trop au s
4615 r le prix du mètre courant. Encore que je prenne les sentiments trop au sérieux pour faire ici du sentiment, je suis sensi
4616 sie. Mais ce qui fait très bien dans un Cahier de la quinzaine, ça faisait de mauvaises notes dans nos carnets hebdomadair
4617 ournée d’enfance gâtée. Et d’ailleurs, multiplier le tapissier par le prix du mètre courant n’est pas une fantaisie pour c
4618 gâtée. Et d’ailleurs, multiplier le tapissier par le prix du mètre courant n’est pas une fantaisie pour ce petit être qui
4619 e pour ce petit être qui s’énerve, qui embrouille les règles, qui a sommeil, qui a peur de faire faux, parce que les autres
4620 ui a sommeil, qui a peur de faire faux, parce que les autres auront fait juste, et qui voudrait bien pleurer, et qui recomm
4621 rdoise où sèchent des traînées de craie grise, où les chiffres trop gros s’emmêlent… Et c’est cela l’enfance insouciante ?
4622 les chiffres trop gros s’emmêlent… Et c’est cela l’ enfance insouciante ? Qu’est-ce qui ressemble plus au souci quotidien
4623 s au souci quotidien des grandes personnes ? Mais l’ enfance est ailleurs. Je revois ce fond de jardin où l’on trouve des c
4624 ance est ailleurs. Je revois ce fond de jardin où l’ on trouve des cloportes dans la toile mouillée d’une tente d’Indiens,
4625 fond de jardin où l’on trouve des cloportes dans la toile mouillée d’une tente d’Indiens, des petites guerres mystérieuse
4626 , des matins de dimanche sonores et tout propres, la cuiller d’huile de foie de morue avant le repas, et le monsieur qui r
4627 ropres, la cuiller d’huile de foie de morue avant le repas, et le monsieur qui racontait gravement des choses qu’on ne com
4628 iller d’huile de foie de morue avant le repas, et le monsieur qui racontait gravement des choses qu’on ne comprend pas, la
4629 ntait gravement des choses qu’on ne comprend pas, la prière du soir pour qu’il fasse beau demain, Michel Strogoff et Rémy
4630 main, Michel Strogoff et Rémy un fils de vaincus, les tours de carrousel, les chemins dans la forêt en automne, des jeux, d
4631 Rémy un fils de vaincus, les tours de carrousel, les chemins dans la forêt en automne, des jeux, des feuillages, des rêver
4632 vaincus, les tours de carrousel, les chemins dans la forêt en automne, des jeux, des feuillages, des rêveries, des recoins
4633 peu divine, baignée d’une très vague angoisse que l’ on fuyait avec des bonheurs fous dans les bras maternels, ou bien ces
4634 oisse que l’on fuyait avec des bonheurs fous dans les bras maternels, ou bien ces promenades en tenant la forte main du pèr
4635 bras maternels, ou bien ces promenades en tenant la forte main du père qui fait de longs pas réguliers… L’École, dans ce
4636 rte main du père qui fait de longs pas réguliers… L’ École, dans ce concert de souvenirs, n’est qu’une dissonance douloureu
4637 uloureuse2. Deux angoisses dominent mon enfance : les séances chez le dentiste et l’horaire des leçons. Ce malaise inavouab
4638 angoisses dominent mon enfance : les séances chez le dentiste et l’horaire des leçons. Ce malaise inavouable, cette règle
4639 ent mon enfance : les séances chez le dentiste et l’ horaire des leçons. Ce malaise inavouable, cette règle méchante, ce so
4640 appris à lire, en cachette, avec une sœur aînée. L’ année suivante, on me mit à l’école, parce que c’est la loi. La premiè
4641 vec une sœur aînée. L’année suivante, on me mit à l’ école, parce que c’est la loi. La première classe fut agréable : j’ali
4642 ée suivante, on me mit à l’école, parce que c’est la loi. La première classe fut agréable : j’alignais des bâtons en rêvan
4643 e pensais pas devoir suivre syllabe après syllabe les ânonnements des élèves qui déchiffraient les premières phrases exempl
4644 hrases exemplaires. (J’aimais pourtant Zoé lave à la fontaine, à cause du nom.) Quand venait mon tour, je savais rarement
4645 om.) Quand venait mon tour, je savais rarement où l’ on en était. Cela m’attira des reproches acides, et naturellement, la
4646 m’attira des reproches acides, et naturellement, la phrase sacrée : « Il faut que tous fassent la même chose, ici ! » Dan
4647 nt, la phrase sacrée : « Il faut que tous fassent la même chose, ici ! » Dans la suite, on se chargea d’illustrer par d’in
4648 faut que tous fassent la même chose, ici ! » Dans la suite, on se chargea d’illustrer par d’innombrables exemples cet axio
4649 par d’innombrables exemples cet axiome qui devint la formule de mes premières douleurs morales. Après six ans de ce régime
4650 rentrée, ma colère n’en fut que plus malfaisante. L’ école me rendit au monde, vers l’âge de 18 ans, crispé et méfiant, san
4651 lus malfaisante. L’école me rendit au monde, vers l’ âge de 18 ans, crispé et méfiant, sans cesse en garde contre moi-même
4652 ait pas différer, profondément hypocrite donc, et le cerveau saturé d’évidences du type 2 et 2 font 4, ou : tous les homme
4653 turé d’évidences du type 2 et 2 font 4, ou : tous les hommes doivent être égaux en tout. Deux fois deux quatre, c’est stéri
4654 s de citer, je découvris un jour qu’elle contient la cause déterminante de notre malaise. Il me fallut un certain temps po
4655 ue je me posai la question : est-ce vrai que tous les hommes doivent être égaux en tout ? Et la première réponse fut : Il f
4656 réponse fut : Il faut que ce soit vrai, pour que la démocratie prospère et étende ses conquêtes. C’était découvrir notre
4657 dignations de nos maîtres quand ils dénonçaient «  la marque indélébile de l’éducation jésuite ». Nous étions marqués par N
4658 s quand ils dénonçaient « la marque indélébile de l’ éducation jésuite ». Nous étions marqués par Numa Droz et les manuels
4659 n jésuite ». Nous étions marqués par Numa Droz et les manuels des Frères ∴, par l’esprit petit-bourgeois, qui est une génér
4660 és par Numa Droz et les manuels des Frères ∴, par l’ esprit petit-bourgeois, qui est une généralisation de l’avarice, et pa
4661 it petit-bourgeois, qui est une généralisation de l’ avarice, et par les dogmes démocratiques, qui sont une généralisation
4662 , qui est une généralisation de l’avarice, et par les dogmes démocratiques, qui sont une généralisation de la règle de troi
4663 mes démocratiques, qui sont une généralisation de la règle de trois, aussi profondément certes qu’un Voltaire le fut par l
4664 e trois, aussi profondément certes qu’un Voltaire le fut par les jésuites : du moins ceux-ci lui laissèrent-ils assez de v
4665 ssi profondément certes qu’un Voltaire le fut par les jésuites : du moins ceux-ci lui laissèrent-ils assez de verdeur d’esp
4666 pire. Mais on avait brisé en nous ces ressorts de la révolte et de la libération d’une personnalité : l’imagination, le se
4667 it brisé en nous ces ressorts de la révolte et de la libération d’une personnalité : l’imagination, le sens de l’arbitrair
4668 révolte et de la libération d’une personnalité : l’ imagination, le sens de l’arbitraire et le sens de la relativité des d
4669 la libération d’une personnalité : l’imagination, le sens de l’arbitraire et le sens de la relativité des décrets humains.
4670 on d’une personnalité : l’imagination, le sens de l’ arbitraire et le sens de la relativité des décrets humains. Le prix de
4671 alité : l’imagination, le sens de l’arbitraire et le sens de la relativité des décrets humains. Le prix de mes souffrances
4672 magination, le sens de l’arbitraire et le sens de la relativité des décrets humains. Le prix de mes souffrances était donc
4673 et le sens de la relativité des décrets humains. Le prix de mes souffrances était donc ce conformisme indispensable aux «
4674 principes ». Je n’allai pas tout de suite jusqu’à les mettre en doute : mais un jour je compris que ce n’étaient que des pr
4675 les d’une arithmétique élémentaire, ce monde dont la Démocratie apparaissait comme l’achèvement idéal et nécessaire — et q
4676 e, ce monde dont la Démocratie apparaissait comme l’ achèvement idéal et nécessaire — et qui était le seul pour lequel on n
4677 e l’achèvement idéal et nécessaire — et qui était le seul pour lequel on nous préparait —, c’était un système d’abstractio
4678 tait un système d’abstractions primaires, c’était le rêve raisonnablement organisé des esprits moyens, prosaïques et rassi
4679 s, prosaïques et rassis3 qui tiennent aujourd’hui les charges de l’État, piliers d’un régime dont ils sont les seuls à s’ac
4680 t rassis3 qui tiennent aujourd’hui les charges de l’ État, piliers d’un régime dont ils sont les seuls à s’accommoder parce
4681 rges de l’État, piliers d’un régime dont ils sont les seuls à s’accommoder parce qu’ils l’ont établi à la mesure exacte de
4682 nt ils sont les seuls à s’accommoder parce qu’ils l’ ont établi à la mesure exacte de leurs besoins. Nous ne croyions plus
4683 seuls à s’accommoder parce qu’ils l’ont établi à la mesure exacte de leurs besoins. Nous ne croyions plus aux démons, mai
4684 besoins. Nous ne croyions plus aux démons, mais à la Commission scolaire. Nous n’avions plus de « superstitions grossières
4685 stitions grossières » comme celles qui touchent à l’ action des étoiles par exemple. Mais nous avions acquis le respect des
4686 des étoiles par exemple. Mais nous avions acquis le respect des statistiques. Nous savions que les miracles ne trompent q
4687 uis le respect des statistiques. Nous savions que les miracles ne trompent que les illettrés, mais qu’il convient de s’incl
4688 es. Nous savions que les miracles ne trompent que les illettrés, mais qu’il convient de s’incliner devant les miracles de l
4689 lettrés, mais qu’il convient de s’incliner devant les miracles de la science appliquée. On nous faisait voir tout au long d
4690 ’il convient de s’incliner devant les miracles de la science appliquée. On nous faisait voir tout au long de notre histoir
4691 nous faisait voir tout au long de notre histoire le Progrès constant de l’humanité vers les lumières, l’incrédulité et le
4692 au long de notre histoire le Progrès constant de l’ humanité vers les lumières, l’incrédulité et le bien-être matériel. No
4693 e histoire le Progrès constant de l’humanité vers les lumières, l’incrédulité et le bien-être matériel. Nous savions qu’un
4694 Progrès constant de l’humanité vers les lumières, l’ incrédulité et le bien-être matériel. Nous savions qu’un fils d’ouvrie
4695 de l’humanité vers les lumières, l’incrédulité et le bien-être matériel. Nous savions qu’un fils d’ouvrier est l’égal d’un
4696 e matériel. Nous savions qu’un fils d’ouvrier est l’ égal d’un petit Dauphin — et même nous ne pouvions nous empêcher de cr
4697 même nous ne pouvions nous empêcher de croire que le petit ouvrier est bien plus malin. Nous savions un tas de choses doul
4698 e choses douloureusement ennuyeuses qui sont dans les livres — et nulle part ailleurs. Maigre nourriture pour nos rêves. No
4699 re nourriture pour nos rêves. Nous arrivions dans la vie avec des mentions honorables et une inconcevable gaucherie, c’est
4700 et une honte secrète qui exaspérait ce mépris et le rendait agressif. Mais moi, j’avais trop souffert de cette compressio
4701 riellement délivré, en supporter longtemps encore l’ action. Je n’eus pas plus tôt découvert et nommé cet asservissement de
4702 plus tôt découvert et nommé cet asservissement de l’ esprit et ces mythes stériles, que je les rendis responsables de ma pe
4703 sement de l’esprit et ces mythes stériles, que je les rendis responsables de ma perte de contact avec les réalités les plus
4704 s rendis responsables de ma perte de contact avec les réalités les plus élémentaires de la vie. 2. Dans le cas le plus fa
4705 onsables de ma perte de contact avec les réalités les plus élémentaires de la vie. 2. Dans le cas le plus favorable, c’es
4706 ontact avec les réalités les plus élémentaires de la vie. 2. Dans le cas le plus favorable, c’est un silence, un vide. C
4707 alités les plus élémentaires de la vie. 2. Dans le cas le plus favorable, c’est un silence, un vide. C’était en dehors d
4708 les plus élémentaires de la vie. 2. Dans le cas le plus favorable, c’est un silence, un vide. C’était en dehors de la vi
4709 , c’est un silence, un vide. C’était en dehors de la vie. 3. du pain rassis.
82 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 2. Description du monstre
4710 2. Description du monstre Le service militaire me permit de retrouver quelques-unes de ces réalité
4711 Car ces différences sont les premières marques de la vie vécue et l’on aime à y découvrir la seule fraternité véritable. M
4712 ces sont les premières marques de la vie vécue et l’ on aime à y découvrir la seule fraternité véritable. Mais c’est en cas
4713 arques de la vie vécue et l’on aime à y découvrir la seule fraternité véritable. Mais c’est en caserne aussi que je devais
4714 is c’est en caserne aussi que je devais retrouver les instituteurs. Ceux-là n’avaient pas bougé. Et pour cause : ils n’étai
4715 é. Et pour cause : ils n’étaient jamais sortis de l’ école. Rien ne ressemble plus à un bon élève qu’un instituteur : de l’
4716 à l’autre il n’y a pas de solution de continuité, la différence n’étant qu’une question d’âge, non d’expérience vécue. Ce
4717 grand nombre de cas, mais pourquoi ai-je envie de le dire ? L’instituteur sous l’uniforme peut être défini par son incompr
4718 re de cas, mais pourquoi ai-je envie de le dire ? L’ instituteur sous l’uniforme peut être défini par son incompréhension m
4719 rquoi ai-je envie de le dire ? L’instituteur sous l’ uniforme peut être défini par son incompréhension méthodique des homme
4720 éhension méthodique des hommes et son mépris pour les paysans. Qu’il soit officier ou troupier, on le reconnaît à une façon
4721 les paysans. Qu’il soit officier ou troupier, on le reconnaît à une façon pédante d’être consciencieux, à une façon bless
4722 être supérieur, à une façon livresque d’expliquer les choses, à une façon théorique de juger les êtres. Ces distributeurs a
4723 liquer les choses, à une façon théorique de juger les êtres. Ces distributeurs automatiques (brevetés par le gouvernement)
4724 res. Ces distributeurs automatiques (brevetés par le gouvernement) de la manne égalitaire — ne se prennent pas pour de la
4725 rs automatiques (brevetés par le gouvernement) de la manne égalitaire — ne se prennent pas pour de la petite bière. Ils on
4726 la manne égalitaire — ne se prennent pas pour de la petite bière. Ils ont conscience d’appartenir à une élite responsable
4727 ce ridicule n’échappe pas à ceux qu’ils méprisent le plus, et ils auraient souvent l’occasion de s’en douter s’ils étaient
4728 qu’ils méprisent le plus, et ils auraient souvent l’ occasion de s’en douter s’ils étaient sensibles aux finesses de l’iron
4729 en douter s’ils étaient sensibles aux finesses de l’ ironie paysanne. Mais je n’en dirai pas plus, de peur de m’échauffer
4730 pas plus, de peur de m’échauffer inutilement. Si l’ on me poussait un peu, je crois que je m’oublierais au point d’insinue
4731 crois que je m’oublierais au point d’insinuer que les instituteurs galonnés causent autant de tort à l’armée que les instit
4732 es instituteurs galonnés causent autant de tort à l’ armée que les instituteurs antimilitaristes qui signent des manifestes
4733 urs galonnés causent autant de tort à l’armée que les instituteurs antimilitaristes qui signent des manifestes en mauvais f
4734 manifestes en mauvais français — et je ferais de la peine à d’excellents garçons. Revenons au civil. Au village, quand on
4735 es farces où ils sont drôles, mais non point dans la vie courante où ils le sont beaucoup moins. Le Messieu fait sans dout
4736 rôles, mais non point dans la vie courante où ils le sont beaucoup moins. Le Messieu fait sans doute des vers sur la viole
4737 ns la vie courante où ils le sont beaucoup moins. Le Messieu fait sans doute des vers sur la violette, périodiquement, com
4738 up moins. Le Messieu fait sans doute des vers sur la violette, périodiquement, comme on fait… un rhume de cerveau. Il joue
4739 lque instrument. Il a des idées modernes sur tous les sujets, espécialement sur la pédagogie. Ce mot revient souvent dans s
4740 s modernes sur tous les sujets, espécialement sur la pédagogie. Ce mot revient souvent dans sa conversation ; il le pronon
4741 Ce mot revient souvent dans sa conversation ; il le prononce avec un inimitable sérieux, avec un P majuscule. On sent que
4742 st là son affaire : Monsieur en un mot est M’sieu l’ Instituteur. Signes particuliers : cheveux longs, regard profond voilé
4743 eveux longs, regard profond voilé de douceur. Car le type populaire du poète romantique s’est dégradé en deux sous-types p
4744 ique s’est dégradé en deux sous-types posthumes : l’ artiste photographe et le régent. J’ai fait allusion au lieutenant-ins
4745 x sous-types posthumes : l’artiste photographe et le régent. J’ai fait allusion au lieutenant-instituteur qui veut faire d
4746 usion au lieutenant-instituteur qui veut faire de la pédagogie avec sa section. L’instituteur-lieutenant qui veut traiter
4747 r qui veut faire de la pédagogie avec sa section. L’ instituteur-lieutenant qui veut traiter militairement ses élèves témoi
4748 veut traiter militairement ses élèves témoigne de la même maladresse professionnelle. J’en connaissais un qui avait coutum
4749 de garçons de 10 à 11 ans : « J’ai bien su mater les quarante hommes de ma section, je saurai aussi vous mater. » On imagi
4750 aussi vous mater. » On imagine à quoi peut mener l’ enseignement donné par des êtres qui brouillent à ce point les méthode
4751 ent donné par des êtres qui brouillent à ce point les méthodes. Simple remarque pendant que nous en sommes aux instituteurs
4752 des êtres qui brouillent à ce point les méthodes. Simple remarque pendant que nous en sommes aux instituteurs : ils sortent to
4753 en sommes aux instituteurs : ils sortent tous de la même classe sociale, de la petite bourgeoisie. Est-ce que l’esprit pe
4754  : ils sortent tous de la même classe sociale, de la petite bourgeoisie. Est-ce que l’esprit petit-bourgeois qui imprègne
4755 sse sociale, de la petite bourgeoisie. Est-ce que l’ esprit petit-bourgeois qui imprègne l’enseignement primaire constitue
4756 Est-ce que l’esprit petit-bourgeois qui imprègne l’ enseignement primaire constitue l’apport des instituteurs, ou bien pré
4757 is qui imprègne l’enseignement primaire constitue l’ apport des instituteurs, ou bien préexiste-t-il dans les principes mêm
4758 ort des instituteurs, ou bien préexiste-t-il dans les principes mêmes de l’École, et attire-t-il les petits bourgeois comme
4759 u bien préexiste-t-il dans les principes mêmes de l’ École, et attire-t-il les petits bourgeois comme le portrait de Numa D
4760 ns les principes mêmes de l’École, et attire-t-il les petits bourgeois comme le portrait de Numa Droz attirait les mouches 
4761 ’École, et attire-t-il les petits bourgeois comme le portrait de Numa Droz attirait les mouches ? (Le verre en était toujo
4762 bourgeois comme le portrait de Numa Droz attirait les mouches ? (Le verre en était toujours jaune.) Je n’ai ni le droit ni
4763 le portrait de Numa Droz attirait les mouches ? ( Le verre en était toujours jaune.) Je n’ai ni le droit ni l’envie de dir
4764  ? (Le verre en était toujours jaune.) Je n’ai ni le droit ni l’envie de dire du mal des petits bourgeois. Ils sont au moi
4765 en était toujours jaune.) Je n’ai ni le droit ni l’ envie de dire du mal des petits bourgeois. Ils sont au moins aussi sym
4766 sympathiques que n’importe quelle autre classe de la société. Mais l’esprit petit-bourgeois pris abstraitement et tel qu’i
4767 n’importe quelle autre classe de la société. Mais l’ esprit petit-bourgeois pris abstraitement et tel qu’il se manifeste da
4768 pris abstraitement et tel qu’il se manifeste dans l’ école primaire est un véritable virus de mesquinerie, et devrait être
4769 les ». Je reviendrai peut-être sur ce point. Pour l’ instant je ne veux que décrire l’école telle qu’on la voit. Après les
4770 r ce point. Pour l’instant je ne veux que décrire l’ école telle qu’on la voit. Après les personnes, le décor. La laideur d
4771 nstant je ne veux que décrire l’école telle qu’on la voit. Après les personnes, le décor. La laideur des collèges n’est pa
4772 ux que décrire l’école telle qu’on la voit. Après les personnes, le décor. La laideur des collèges n’est pas accidentelle.
4773 l’école telle qu’on la voit. Après les personnes, le décor. La laideur des collèges n’est pas accidentelle. C’est celle mê
4774 lle qu’on la voit. Après les personnes, le décor. La laideur des collèges n’est pas accidentelle. C’est celle même du régi
4775 est pas accidentelle. C’est celle même du régime. l’ architecture de nos « palais scolaires ». symbolise d’une façon frappa
4776 e ce qu’il y a de schématique et de monotone dans la conception démocratique du monde. Entrons, c’est pire encore. Beaucou
4777 ants ont un frisson de dégoût au moment de passer la porte, au son de la cloche : l’odeur de goudron et d’urinoirs qui imp
4778 de dégoût au moment de passer la porte, au son de la cloche : l’odeur de goudron et d’urinoirs qui imprègne les corridors
4779 moment de passer la porte, au son de la cloche : l’ odeur de goudron et d’urinoirs qui imprègne les corridors et les habit
4780 e : l’odeur de goudron et d’urinoirs qui imprègne les corridors et les habits des écoliers empeste encore mes souvenirs. Et
4781 udron et d’urinoirs qui imprègne les corridors et les habits des écoliers empeste encore mes souvenirs. Et la poussière dan
4782 its des écoliers empeste encore mes souvenirs. Et la poussière dans l’air, l’encre sur les tables — c’était pourtant un re
4783 mpeste encore mes souvenirs. Et la poussière dans l’ air, l’encre sur les tables — c’était pourtant un refuge pour l’imagin
4784 encore mes souvenirs. Et la poussière dans l’air, l’ encre sur les tables — c’était pourtant un refuge pour l’imagination q
4785 ouvenirs. Et la poussière dans l’air, l’encre sur les tables — c’était pourtant un refuge pour l’imagination que ces initia
4786 sur les tables — c’était pourtant un refuge pour l’ imagination que ces initiales, ces signes, ces devises… —, les estampe
4787 on que ces initiales, ces signes, ces devises… —, les estampes piquées, Numa Droz et ses crottes de mouches… Dans ce décor
4788 s ! Et vous pensez que c’est un grand progrès sur la Nature. Quelle peut bien être la vertu éducatrice d’un tel milieu, mo
4789 rand progrès sur la Nature. Quelle peut bien être la vertu éducatrice d’un tel milieu, moral et matériel ? L’école publiqu
4790 u éducatrice d’un tel milieu, moral et matériel ? L’ école publique, telle que nous la voyons est semblable à tous ces monu
4791 al et matériel ? L’école publique, telle que nous la voyons est semblable à tous ces monuments « de la mauvaise époque » q
4792 la voyons est semblable à tous ces monuments « de la mauvaise époque » qui sont dans nos villes l’apport du xixe siècle.
4793  de la mauvaise époque » qui sont dans nos villes l’ apport du xixe siècle. Ils ne parviennent ni à la beauté ni à l’utili
4794 l’apport du xixe siècle. Ils ne parviennent ni à la beauté ni à l’utilité, et ils sont déjà démodés. On dit que le style
4795 e siècle. Ils ne parviennent ni à la beauté ni à l’ utilité, et ils sont déjà démodés. On dit que le style 1880 n’en est p
4796 à l’utilité, et ils sont déjà démodés. On dit que le style 1880 n’en est pas un : mais l’absence de style est encore un st
4797 . On dit que le style 1880 n’en est pas un : mais l’ absence de style est encore un style ; c’est même le pire.
4798 absence de style est encore un style ; c’est même le pire.
83 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 3. Anatomie du monstre
4799 pour quelles raisons j’ai entrepris de combattre l’ instruction publique — on ne me contestera pas ces raisons puisqu’elle
4800 s me sont absolument personnelles et qu’elles ont la valeur d’un témoignage, ni plus ni moins — il est temps que je fasse
4801 cœur non compris ». Aux yeux de beaucoup de gens, la passion est aveuglante : cela tient pour une bonne part à ce que ces
4802 nt pour une bonne part à ce que ces personnes ont les yeux faibles. Il serait plus juste de dire que la passion n’a qu’une
4803 es yeux faibles. Il serait plus juste de dire que la passion n’a qu’une clairvoyance intéressée : mais celles-là sont les
4804 une clairvoyance intéressée : mais celles-là sont les plus vives. Enfin, je tiens à reconnaître qu’ici je ne cherche point
4805 je tiens à reconnaître qu’ici je ne cherche point l’ équité. Pas plus que vous qui défendez de parti pris ce que j’attaque.
4806 vous qui défendez de parti pris ce que j’attaque. L’ esprit d’équité, avec son préjugé pacifiste n’est pas toujours l’espri
4807 té, avec son préjugé pacifiste n’est pas toujours l’ esprit de vérité, il s’en faut. Or je ne suis pas de ceux qui subordon
4808 faut. Or je ne suis pas de ceux qui subordonnent la vérité à la tranquillité bourgeoise. Je tiens le « gain de paix » pou
4809 ne suis pas de ceux qui subordonnent la vérité à la tranquillité bourgeoise. Je tiens le « gain de paix » pour illusoire 
4810 la vérité à la tranquillité bourgeoise. Je tiens le « gain de paix » pour illusoire : il consiste à repousser la difficul
4811 e paix » pour illusoire : il consiste à repousser la difficulté dans l’avenir, d’une ou deux générations. Pendant ce temps
4812 oire : il consiste à repousser la difficulté dans l’ avenir, d’une ou deux générations. Pendant ce temps elle s’aggrave, et
4813 ndant ce temps elle s’aggrave, et nous voici avec l’ héritage de cinquante ans de radicalisme sur les bras. L’écheveau est
4814 ec l’héritage de cinquante ans de radicalisme sur les bras. L’écheveau est tellement embrouillé que déjà plusieurs proposen
4815 age de cinquante ans de radicalisme sur les bras. L’ écheveau est tellement embrouillé que déjà plusieurs proposent de tran
4816 brouillé que déjà plusieurs proposent de trancher le nœud. Je me bornerai à l’examen des caractères les plus généraux de l
4817 s proposent de trancher le nœud. Je me bornerai à l’ examen des caractères les plus généraux de l’instruction publique, ceu
4818 le nœud. Je me bornerai à l’examen des caractères les plus généraux de l’instruction publique, ceux que n’atteignent dans l
4819 ai à l’examen des caractères les plus généraux de l’ instruction publique, ceux que n’atteignent dans leur principe ni les
4820 ique, ceux que n’atteignent dans leur principe ni les réformes de détail ni les modalités locales de réalisations pratiques
4821 t dans leur principe ni les réformes de détail ni les modalités locales de réalisations pratiques. Le programme a) l’h
4822 es modalités locales de réalisations pratiques. Le programme a) l’horaire : c’est un cadre, ou plutôt un moule, dans
4823 s de réalisations pratiques. Le programme a) l’ horaire : c’est un cadre, ou plutôt un moule, dans lequel on verse les
4824 n cadre, ou plutôt un moule, dans lequel on verse les matières les plus hétéroclites, sans égard à leurs qualités propres.
4825 lutôt un moule, dans lequel on verse les matières les plus hétéroclites, sans égard à leurs qualités propres. De 8 à 9 arit
4826 uit, de manière à prévenir toute concentration de l’ esprit. b) plan d’études. On a divisé l’enseignement en branches bien
4827 ration de l’esprit. b) plan d’études. On a divisé l’ enseignement en branches bien distinctes. On attribue à chacune un cer
4828 s’arrange à faire tenir dans cette classification le plus possible de « connaissances » qui dès lors deviennent obligatoir
4829 aissances » qui dès lors deviennent obligatoires. La somme et l’arrangement des parties doivent être identiques pour tous
4830 qui dès lors deviennent obligatoires. La somme et l’ arrangement des parties doivent être identiques pour tous les écoliers
4831 ent des parties doivent être identiques pour tous les écoliers. Ce plan régit les huit années réglementaires de la scolarit
4832 identiques pour tous les écoliers. Ce plan régit les huit années réglementaires de la scolarité, et englobe la totalité de
4833 . Ce plan régit les huit années réglementaires de la scolarité, et englobe la totalité de la science nécessaire à tout cit
4834 années réglementaires de la scolarité, et englobe la totalité de la science nécessaire à tout citoyen, dans une vue aussi
4835 taires de la scolarité, et englobe la totalité de la science nécessaire à tout citoyen, dans une vue aussi large que simpl
4836 papier, d’un crayon et d’une règle (pour diviser la page en casiers rectangulaires, bien proprement.) Évidemment, il est
4837 t.) Évidemment, il est préférable de savoir aussi les noms des sciences élémentaires. Mais il n’est en aucune façon nécessa
4838 il n’est en aucune façon nécessaire de connaître la psychologie des enfants, ni même le contenu des sciences dont on écri
4839 de connaître la psychologie des enfants, ni même le contenu des sciences dont on écrit les noms dans les casiers. Est-ce
4840 ts, ni même le contenu des sciences dont on écrit les noms dans les casiers. Est-ce que l’étude du trapézoïde est particuli
4841 contenu des sciences dont on écrit les noms dans les casiers. Est-ce que l’étude du trapézoïde est particulièrement indiqu
4842 nt on écrit les noms dans les casiers. Est-ce que l’ étude du trapézoïde est particulièrement indiquée pour préparer les él
4843 zoïde est particulièrement indiquée pour préparer les élèves à une composition française ? Question oiseuse et saugrenue, —
4844 ançaise ? Question oiseuse et saugrenue, — naïve. Le bon sens voudrait que l’on tînt compte des possibilités d’adaptation
4845 e et saugrenue, — naïve. Le bon sens voudrait que l’ on tînt compte des possibilités d’adaptation de l’enfant ; de la valeu
4846 l’on tînt compte des possibilités d’adaptation de l’ enfant ; de la valeur fort inégale de ces disciplines ; de la diversit
4847 te des possibilités d’adaptation de l’enfant ; de la valeur fort inégale de ces disciplines ; de la diversité des besoins 
4848 de la valeur fort inégale de ces disciplines ; de la diversité des besoins ; enfin des rythmes naturels de l’esprit humain
4849 rsité des besoins ; enfin des rythmes naturels de l’ esprit humain, qu’il se trouve que le Créateur n’a point accordés à l’
4850 naturels de l’esprit humain, qu’il se trouve que le Créateur n’a point accordés à l’actuelle division horaire des journée
4851 il se trouve que le Créateur n’a point accordés à l’ actuelle division horaire des journées… Monsieur, répondent les foncti
4852 ivision horaire des journées… Monsieur, répondent les fonctionnaires responsables, vous savez par expérience que nous ne co
4853 s savez par expérience que nous ne comprenons pas la plaisanterie et que notre temps est précieux. D’ailleurs, les enfants
4854 erie et que notre temps est précieux. D’ailleurs, les enfants ne se plaignent pas, de quoi vous plaignez-vous, vous ? — Mai
4855 quoi vous plaignez-vous, vous ? — Mais on fausse l’ esprit de ces enfants… — Mais on nous paye, et ils n’en meurent pas.
4856 — Mais on nous paye, et ils n’en meurent pas. Les examens Ce sont en principe des « contrôles » comparables à ceux q
4857 principe des « contrôles » comparables à ceux que l’ on établit lors des grandes épreuves cyclistes. Les participants du To
4858 l’on établit lors des grandes épreuves cyclistes. Les participants du Tour de Science doivent s’inscrire au terme de chaque
4859 erme de chaque trimestre. Ceux qui arrivent après la clôture ont à refaire l’étape. On obtient par ce moyen un peloton hom
4860 Ceux qui arrivent après la clôture ont à refaire l’ étape. On obtient par ce moyen un peloton homogène, facile à surveille
4861 e, facile à surveiller. Mais en matière de sport, la tricherie est difficile, tandis qu’à l’école elle est de règle. Car l
4862 de sport, la tricherie est difficile, tandis qu’à l’ école elle est de règle. Car la qualité et la quantité des réponses « 
4863 icile, tandis qu’à l’école elle est de règle. Car la qualité et la quantité des réponses « fournies » par le prévenu (l’él
4864 qu’à l’école elle est de règle. Car la qualité et la quantité des réponses « fournies » par le prévenu (l’élève examiné) n
4865 lité et la quantité des réponses « fournies » par le prévenu (l’élève examiné) n’a qu’un lointain rapport avec la qualité
4866 uantité des réponses « fournies » par le prévenu ( l’ élève examiné) n’a qu’un lointain rapport avec la qualité et la quanti
4867 (l’élève examiné) n’a qu’un lointain rapport avec la qualité et la quantité des efforts « fournis » au cours du trimestre.
4868 né) n’a qu’un lointain rapport avec la qualité et la quantité des efforts « fournis » au cours du trimestre. Ce phénomène
4869 ant s’explique justement par cette psychologie de l’ enfant dont je disais tout à l’heure que la connaissance n’est pas exi
4870 tte psychologie de l’enfant dont je disais tout à l’ heure que la connaissance n’est pas exigée de ceux qui établissent les
4871 gie de l’enfant dont je disais tout à l’heure que la connaissance n’est pas exigée de ceux qui établissent les programmes
4872 aissance n’est pas exigée de ceux qui établissent les programmes et les examens. « Les examens faussent complètement l’espr
4873 exigée de ceux qui établissent les programmes et les examens. « Les examens faussent complètement l’esprit de l’enseigneme
4874 qui établissent les programmes et les examens. «  Les examens faussent complètement l’esprit de l’enseignement », lit-on ju
4875 les examens. « Les examens faussent complètement l’ esprit de l’enseignement », lit-on jusque sous la plume de divers maît
4876 . « Les examens faussent complètement l’esprit de l’ enseignement », lit-on jusque sous la plume de divers maîtres primaire
4877 s et secondaires. Ils n’en sont pas moins devenus le but même de l’instruction ; la fin qui justifie les moyens et à quoi
4878 s. Ils n’en sont pas moins devenus le but même de l’ instruction ; la fin qui justifie les moyens et à quoi l’on subordonne
4879 pas moins devenus le but même de l’instruction ; la fin qui justifie les moyens et à quoi l’on subordonne tout, plaisir,
4880 e but même de l’instruction ; la fin qui justifie les moyens et à quoi l’on subordonne tout, plaisir, goût au travail, qual
4881 uction ; la fin qui justifie les moyens et à quoi l’ on subordonne tout, plaisir, goût au travail, qualité du travail, sant
4882 vail, qualité du travail, santé, liberté, sens de la justice et autres balivernes, instruction véritable et autres plaisan
4883 le et autres plaisanteries de gros calibre, car à la vérité ce n’est pas d’enseigner qu’il s’agit, mais de soumettre les e
4884 t pas d’enseigner qu’il s’agit, mais de soumettre les esprits au contrôle de l’État, voyons donc, — n’avez-vous pas honte d
4885 git, mais de soumettre les esprits au contrôle de l’ État, voyons donc, — n’avez-vous pas honte de vous faire rappeler sans
4886 ler sans cesse des vérités aussi élémentaires. L’ égalitarisme des connaissances De l’existence des programmes, qui e
4887 taires. L’égalitarisme des connaissances De l’ existence des programmes, qui est un fait, et de l’existence de la Dém
4888 ’existence des programmes, qui est un fait, et de l’ existence de la Démocratie, qui est une prétention (réservons le mot d
4889 programmes, qui est un fait, et de l’existence de la Démocratie, qui est une prétention (réservons le mot d’idéal), découl
4890 la Démocratie, qui est une prétention (réservons le mot d’idéal), découle cette exigence théorique : tous les enfants doi
4891 d’idéal), découle cette exigence théorique : tous les enfants doivent à tout instant être en mesure 1° d’ingurgiter la même
4892 ent à tout instant être en mesure 1° d’ingurgiter la même quantité de « matière » ; 2° d’en rendre compte de la même façon
4893 uantité de « matière » ; 2° d’en rendre compte de la même façon, dans le même temps. Contentons-nous de remarquer que ce p
4894  » ; 2° d’en rendre compte de la même façon, dans le même temps. Contentons-nous de remarquer que ce principe est à la bas
4895 ontentons-nous de remarquer que ce principe est à la base du système ; qui repose donc sur une tranquille méconnaissance d
4896 repose donc sur une tranquille méconnaissance de la nature humaine. L’histoire enregistre bien une ou deux autres bêtises
4897 e tranquille méconnaissance de la nature humaine. L’ histoire enregistre bien une ou deux autres bêtises de cette épaisseur
4898 xtension universelle et un caractère obligatoire. L’ école exige donc que les meilleurs ralentissent et que les plus faible
4899 un caractère obligatoire. L’école exige donc que les meilleurs ralentissent et que les plus faibles se forcent. Elle ne co
4900 exige donc que les meilleurs ralentissent et que les plus faibles se forcent. Elle ne convient qu’aux médiocres, dont elle
4901 le ne convient qu’aux médiocres, dont elle assure le triomphe. L’école s’attaque impitoyablement aux natures d’exception,
4902 t qu’aux médiocres, dont elle assure le triomphe. L’ école s’attaque impitoyablement aux natures d’exception, et les réduit
4903 taque impitoyablement aux natures d’exception, et les réduit avec acharnement à son commun dénominateur4. Nos bourgeois ass
4904 s ils se fâchent tout rouge quand on leur dit que la Suisse est caractérisée, aux yeux de l’étranger impartial, par sa cul
4905 r dit que la Suisse est caractérisée, aux yeux de l’ étranger impartial, par sa culture intensive et extensive des veaux et
4906 nsive et extensive des veaux et des médiocres. Le gavage Moyen de réaliser les précédents. Plus ou moins rationalisé
4907 des médiocres. Le gavage Moyen de réaliser les précédents. Plus ou moins rationalisé. Son instrument le plus parfait
4908 édents. Plus ou moins rationalisé. Son instrument le plus parfait s’appelle le manuel. Un bon manuel est un résumé clair e
4909 onalisé. Son instrument le plus parfait s’appelle le manuel. Un bon manuel est un résumé clair et portatif des résultats a
4910 et portatif des résultats actuels d’une science. Le bon sens voudrait qu’on étudie d’abord la science dans sa réalité, pu
4911 cience. Le bon sens voudrait qu’on étudie d’abord la science dans sa réalité, puis qu’on se réfère au résumé comme à un ai
4912 se réfère au résumé comme à un aide-mémoire. Mais l’ école veut qu’on commence par apprendre le résumé. D’ailleurs elle s’a
4913 e. Mais l’école veut qu’on commence par apprendre le résumé. D’ailleurs elle s’arrête là. Les manuels ne correspondent à a
4914 apprendre le résumé. D’ailleurs elle s’arrête là. Les manuels ne correspondent à aucune réalité. Ils ne renferment rien qui
4915 , rien qui soit authentique. Ils négligent toutes les particularités, toutes les « prises » où pourrait s’accrocher l’intér
4916 . Ils négligent toutes les particularités, toutes les « prises » où pourrait s’accrocher l’intérêt. Ils dispensent de tout
4917 és, toutes les « prises » où pourrait s’accrocher l’ intérêt. Ils dispensent de tout contact direct avec ce dont ils traite
4918 tout contact direct avec ce dont ils traitent. Or la valeur éducative des choses n’apparaît qu’à celui qui entre en commer
4919 e de mille, dit un sage oriental dont j’ai oublié le nom. Une autre conséquence du gavage, c’est qu’on ne peut laisser aux
4920 du gavage, c’est qu’on ne peut laisser aux élèves le temps qu’il faut pour assimiler ce qu’ils apprennent. Ils sont forcés
4921 n’est pas modèle, il est absurde. Mais où sont à l’ école les modèles de ce qu’on nommait autrefois la belle ouvrage ? On
4922 as modèle, il est absurde. Mais où sont à l’école les modèles de ce qu’on nommait autrefois la belle ouvrage ? On va suppri
4923 l’école les modèles de ce qu’on nommait autrefois la belle ouvrage ? On va supprimer les leçons de calligraphie. La dis
4924 mait autrefois la belle ouvrage ? On va supprimer les leçons de calligraphie. La discipline On conçoit que la réalisa
4925  ? On va supprimer les leçons de calligraphie. La discipline On conçoit que la réalisation d’un programme entièremen
4926 calligraphie. La discipline On conçoit que la réalisation d’un programme entièrement contre nature exige une discip
4927 ne sévère. D’où notre conception pénitentiaire de l’ école. Mais, s’il est des disciplines qui renforcent, il en est d’aut
4928 renforcent, il en est d’autres qui amoindrissent. La discipline scolaire consiste à faire tenir les enfants immobiles et m
4929 nt. La discipline scolaire consiste à faire tenir les enfants immobiles et muets 6 heures par jour durant 8 ans. Il paraît
4930 ar jour durant 8 ans. Il paraît que cela facilite le travail du maître. Il se peut. Tout dépend de ce qu’on attend de ce t
4931 ravail. Je doute qu’il soit de nature à légitimer l’ énormité de l’effort qu’on demande à ces petits. Là encore il y a une
4932 te qu’il soit de nature à légitimer l’énormité de l’ effort qu’on demande à ces petits. Là encore il y a une exagération ab
4933 énéralisation si schématique et superficielle que la discipline perd tout son sens éducatif et n’est plus qu’une entrave é
4934 chez un peuple qui vraiment ne péchait point par l’ excès de cette vertu. La discipline primaire forme des gobeurs et des
4935 ment ne péchait point par l’excès de cette vertu. La discipline primaire forme des gobeurs et des inertes, fournit des mou
4936 tes, fournit des moutons aux partis et prédispose les citoyens suisses à prendre au sérieux les innombrables défense de, pe
4937 dispose les citoyens suisses à prendre au sérieux les innombrables défense de, petites crottes noires et blanches qui marqu
4938 es noires et blanches qui marquent un peu partout le passage de l’État, et dont la vue permet à ceux qui tombent du ciel s
4939 lanches qui marquent un peu partout le passage de l’ État, et dont la vue permet à ceux qui tombent du ciel sur notre sol d
4940 uent un peu partout le passage de l’État, et dont la vue permet à ceux qui tombent du ciel sur notre sol de s’écrier sans
4941 berté, liberté chérie, voilà bien ta patrie. » La préparation civique Tous les pontifes de l’instruction publique so
4942 en ta patrie. » La préparation civique Tous les pontifes de l’instruction publique sont d’accord sur ce point : l’éco
4943 La préparation civique Tous les pontifes de l’ instruction publique sont d’accord sur ce point : l’école primaire doi
4944 instruction publique sont d’accord sur ce point : l’ école primaire doit être une école de Démocratie. Ils insistent sur le
4945 t être une école de Démocratie. Ils insistent sur le fait que les leçons d’instruction civique sont insuffisantes pour for
4946 cole de Démocratie. Ils insistent sur le fait que les leçons d’instruction civique sont insuffisantes pour former le petit
4947 nstruction civique sont insuffisantes pour former le petit citoyen : il faut que l’enseignement tout entier soit occasion
4948 santes pour former le petit citoyen : il faut que l’ enseignement tout entier soit occasion de développer les vertus social
4949 eignement tout entier soit occasion de développer les vertus sociales de l’élève. « Une classe est une société en miniature
4950 oit occasion de développer les vertus sociales de l’ élève. « Une classe est une société en miniature. » Ceci est une énorm
4951 une énorme bourde. Juxtaposez trente enfants sur les bancs d’une salle d’école, vous n’aurez rien qui ressemble en quoi qu
4952 état social existant. Ce qui est vrai, c’est que le fait, absolument nouveau dans l’Histoire, que l’on oblige les enfants
4953 vrai, c’est que le fait, absolument nouveau dans l’ Histoire, que l’on oblige les enfants à vivre ensemble dès l’âge de 6
4954 le fait, absolument nouveau dans l’Histoire, que l’ on oblige les enfants à vivre ensemble dès l’âge de 6 ans, favorise le
4955 solument nouveau dans l’Histoire, que l’on oblige les enfants à vivre ensemble dès l’âge de 6 ans, favorise le développemen
4956 que l’on oblige les enfants à vivre ensemble dès l’ âge de 6 ans, favorise le développement de leurs penchants les plus « 
4957 nts à vivre ensemble dès l’âge de 6 ans, favorise le développement de leurs penchants les plus « communs » : jalousie, van
4958 ans, favorise le développement de leurs penchants les plus « communs » : jalousie, vanité, panurgisme, concurrence sournois
4959 e, esprit de parti, arrivisme et parlementarisme. La culture de l’esprit démocratique telle qu’elle est comprise par les i
4960 arti, arrivisme et parlementarisme. La culture de l’ esprit démocratique telle qu’elle est comprise par les instituteurs — 
4961 sprit démocratique telle qu’elle est comprise par les instituteurs — et elle ne peut être comprise autrement — est essentie
4962 nière que ce soit, voudraient « se distinguer ». ( Le mépris que notre peuple met dans cette expression !) Pour moi ce que
4963 expérience scolaire, c’est une grosse vérité que le bon sens m’eût par ailleurs fait voir : il n’y a pas d’égalité réelle
4964 : il n’y a pas d’égalité réelle possible tant que la loi est la même pour tous. Je ne parle pas des manuels d’histoire, do
4965 pas d’égalité réelle possible tant que la loi est la même pour tous. Je ne parle pas des manuels d’histoire, dont il est a
4966 i démontré qu’ils donnent une image mensongère de l’ ancienne Suisse, à l’usage du peuple souverain qui ne manque pas d’en
4967 nent une image mensongère de l’ancienne Suisse, à l’ usage du peuple souverain qui ne manque pas d’en être flatté. Et puis,
4968 e flatté. Et puis, quelle est cette préparation à la vie qui commence par nous soustraire à l’influence de la vie ? Quelle
4969 ation à la vie qui commence par nous soustraire à l’ influence de la vie ? Quelle est cette éducation sociale qui enlève l’
4970 qui commence par nous soustraire à l’influence de la vie ? Quelle est cette éducation sociale qui enlève l’enfant à la fam
4971 e ? Quelle est cette éducation sociale qui enlève l’ enfant à la famille ?5 Quel est cet instrument de perfectionnement civ
4972 est cette éducation sociale qui enlève l’enfant à la famille ?5 Quel est cet instrument de perfectionnement civique qui as
4973 instrument de perfectionnement civique qui assure l’ écrasement des plus délicats par les plus vulgaires ? L’idéal du bo
4974 que qui assure l’écrasement des plus délicats par les plus vulgaires ? L’idéal du bon élève Le bon sens voudrait que
4975 ent des plus délicats par les plus vulgaires ? L’ idéal du bon élève Le bon sens voudrait que le bon élève soit celui
4976 r les plus vulgaires ? L’idéal du bon élève Le bon sens voudrait que le bon élève soit celui qui sait utiliser pour
4977 L’idéal du bon élève Le bon sens voudrait que le bon élève soit celui qui sait utiliser pour son profit humain la peti
4978 it celui qui sait utiliser pour son profit humain la petite somme de connaissances indispensables qu’on lui donne à l’écol
4979 de connaissances indispensables qu’on lui donne à l’ école. (Cet argent de poche, ni plus ni moins.) Ou encore : que le bon
4980 gent de poche, ni plus ni moins.) Ou encore : que le bon élève soit celui qui supporte le mieux le traitement scolaire ; c
4981 encore : que le bon élève soit celui qui supporte le mieux le traitement scolaire ; celui dont la valeur humaine subsiste
4982 que le bon élève soit celui qui supporte le mieux le traitement scolaire ; celui dont la valeur humaine subsiste intacte a
4983 orte le mieux le traitement scolaire ; celui dont la valeur humaine subsiste intacte au milieu des conditions anormales cr
4984 cte au milieu des conditions anormales créées par l’ école publique. Mais l’idéal de l’école est autre ; il est même tout c
4985 tions anormales créées par l’école publique. Mais l’ idéal de l’école est autre ; il est même tout contraire. On ne peut pa
4986 ales créées par l’école publique. Mais l’idéal de l’ école est autre ; il est même tout contraire. On ne peut pas exiger qu
4987 té que je ne puis m’empêcher de trouver suspecte. Le bon élève est celui qui a de bons points. Or les bons points vont aux
4988 . Le bon élève est celui qui a de bons points. Or les bons points vont aux parfaits imitateurs. Oyez-moi tous ces petits ph
4989 phonographes…ographes…graphes…graphes… Enfoncés, les perroquets. Dans une composition sur La Neige, Victoria X, 10 ans, éc
4990 nfoncés, les perroquets. Dans une composition sur La Neige, Victoria X, 10 ans, écrit : « C’est l’hiver. Déjà la terre a r
4991 sur La Neige, Victoria X, 10 ans, écrit : « C’est l’ hiver. Déjà la terre a revêtu son blanc manteau. » Elle aura 10 sur 10
4992 Victoria X, 10 ans, écrit : « C’est l’hiver. Déjà la terre a revêtu son blanc manteau. » Elle aura 10 sur 10. Mais on donn
4993 évident que Sylvie est supérieure à Victoria dans la mesure où l’invention est supérieure à l’imitation. Mais Victoria mon
4994 ylvie est supérieure à Victoria dans la mesure où l’ invention est supérieure à l’imitation. Mais Victoria montre une âme d
4995 ia dans la mesure où l’invention est supérieure à l’ imitation. Mais Victoria montre une âme docile, un rassurant défaut d’
4996 que, tandis que Sylvie appartient manifestement à la race dangereuse de ceux qui voient avec leurs yeux. Le bon élève est
4997 ce dangereuse de ceux qui voient avec leurs yeux. Le bon élève est aussi l’élève discipliné. L’école veut que partout la v
4998 ui voient avec leurs yeux. Le bon élève est aussi l’ élève discipliné. L’école veut que partout la valeur cède le pas à la
4999 yeux. Le bon élève est aussi l’élève discipliné. L’ école veut que partout la valeur cède le pas à la règle. Elle cherche
5000 ussi l’élève discipliné. L’école veut que partout la valeur cède le pas à la règle. Elle cherche à développer chez nos pet
5001 scipliné. L’école veut que partout la valeur cède le pas à la règle. Elle cherche à développer chez nos petits Helvètes un
5002 L’école veut que partout la valeur cède le pas à la règle. Elle cherche à développer chez nos petits Helvètes un légalism
5003 u d’impuissants, qui d’ailleurs ne peut être qu’à l’ avantage des gens en place, vieille histoire. On m’objectera sans dout
5004 ex-forts-en-thème, voire par d’ex-instituteurs. À la vérité, il s’agit de réussites qui, pour avoir enivré l’espoir et enf
5005 té, il s’agit de réussites qui, pour avoir enivré l’ espoir et enflammé l’ambition d’un grand nombre de régents, ne laissen
5006 sites qui, pour avoir enivré l’espoir et enflammé l’ ambition d’un grand nombre de régents, ne laissent pas que d’être asse
5007 ires » (témoignage suffisant de leurs aptitudes à la compromission sociale établie) et cueilli au passage un grade univers
5008 nombreux banquets de cercles locaux où se fondent les réputations, où se « baptisent » les hommes d’avenir. Un jour on voit
5009 ù se fondent les réputations, où se « baptisent » les hommes d’avenir. Un jour on voit s’étaler en première page des illust
5010 r on voit s’étaler en première page des illustrés la face épanouie quoique énergique d’un de ces coqs de village qu’on vie
5011 de ces coqs de village qu’on vient de jucher sur la flèche de l’édifice administratif. Et c’est ce qui s’appelle une bell
5012 de village qu’on vient de jucher sur la flèche de l’ édifice administratif. Et c’est ce qui s’appelle une belle carrière. M
5013 n, par ailleurs fort grande. Tous ceux qui ont eu l’ occasion de comparer les bons élèves de diverses classes d’un collège
5014 ande. Tous ceux qui ont eu l’occasion de comparer les bons élèves de diverses classes d’un collège ont été frappés de const
5015 ses d’un collège ont été frappés de constater que la force et l’originalité de leur jugement sont en raison inverse du nom
5016 lège ont été frappés de constater que la force et l’ originalité de leur jugement sont en raison inverse du nombre d’années
5017 nées d’instruction publique qu’ils ont subies. Le dilemme J’ai indiqué que les principes de l’instruction publique n
5018 ils ont subies. Le dilemme J’ai indiqué que les principes de l’instruction publique ne coïncident qu’accidentellement
5019 Le dilemme J’ai indiqué que les principes de l’ instruction publique ne coïncident qu’accidentellement avec ceux du bo
5020 ls constituent une inversion méthodique de toutes les lois divines et humaines. C’est-à-dire : une méthode d’abâtardissemen
5021 . C’est-à-dire : une méthode d’abâtardissement de la race. D’autre part, il est aisé de voir que tous ces principes dérive
5022 ces principes dérivent nécessairement du fait que l’ école est publique, obligatoire, et soumise au contrôle de l’État. Al
5023 publique, obligatoire, et soumise au contrôle de l’ État. Alors ? Ou bien vous acceptez le régime — mais aussi ses conséq
5024 ontrôle de l’État. Alors ? Ou bien vous acceptez le régime — mais aussi ses conséquences absurdes et fatales, par exemple
5025 ses conséquences absurdes et fatales, par exemple l’ instruction publique. Ou bien vous combattez l’instruction publique — 
5026 le l’instruction publique. Ou bien vous combattez l’ instruction publique — mais vous êtes, de ce fait, contre le régime. I
5027 ion publique — mais vous êtes, de ce fait, contre le régime. Il y a là, dirait M. Prudhomme, un bien grave dilemme. 4.
5028 ien grave dilemme. 4. Ce ne sont pas seulement les meilleurs qui sont sacrifiés. Voici ce que M. E. Duvillard dit des en
5029 ue M. E. Duvillard dit des enfants peu doués pour les disciplines scolaires : « Les épaves scolaires, faute d’un traitement
5030 ants peu doués pour les disciplines scolaires : «  Les épaves scolaires, faute d’un traitement pédagogique approprié, tomben
5031 prié, tombent dans une apathie intellectuelle qui les conduit souvent à l’imbécillité et au vice. » Emmanuel Duvillard, L’É
5032 apathie intellectuelle qui les conduit souvent à l’ imbécillité et au vice. » Emmanuel Duvillard, L’École de demain, Genèv
5033 à l’imbécillité et au vice. » Emmanuel Duvillard, L’ École de demain, Genève, Kündig, 1918, p. 12. 5. Il est peut-être ava
5034 t-être avantageux dans certains cas de soustraire l’ enfant à l’influence d’une famille anormale. Mais d’abord c’est sancti
5035 tageux dans certains cas de soustraire l’enfant à l’ influence d’une famille anormale. Mais d’abord c’est sanctionner cet é
5036 (il y aurait sans doute d’autres moyens de sauver l’ enfant dans sa famille). Ensuite, pourquoi fait-on en réalité, comme s
5037 ite, pourquoi fait-on en réalité, comme si toutes les familles constituaient un milieu délétère ? 6. Justice démocratique,
5038 6. Justice démocratique, égalité, légalité, sont les meilleures armes de la bassesse contre toute valeur réelle, absolue.
5039 , égalité, légalité, sont les meilleures armes de la bassesse contre toute valeur réelle, absolue.
84 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 4. L’illusion réformiste
5040 4. L’ illusion réformiste Bien entendu, tout cela a été dit. (Un peu autre
5041 tion. Il suffit pour s’en convaincre de parcourir l’ abondante littérature publiée sur le « problème de l’école nouvelle ».
5042 de parcourir l’abondante littérature publiée sur le « problème de l’école nouvelle ». On appelle école nouvelle tout étab
5043 bondante littérature publiée sur le « problème de l’ école nouvelle ». On appelle école nouvelle tout établissement où l’on
5044 . On appelle école nouvelle tout établissement où l’ on s’efforce d’enseigner selon des principes tirés de l’observation de
5045 ’efforce d’enseigner selon des principes tirés de l’ observation des enfants, c’est-à-dire : en contradiction sur toute la
5046 nfants, c’est-à-dire : en contradiction sur toute la ligne avec l’enseignement officiel. Les promoteurs de ces mouvements
5047 à-dire : en contradiction sur toute la ligne avec l’ enseignement officiel. Les promoteurs de ces mouvements tentent la gag
5048 sur toute la ligne avec l’enseignement officiel. Les promoteurs de ces mouvements tentent la gageure de réformer l’école p
5049 fficiel. Les promoteurs de ces mouvements tentent la gageure de réformer l’école primaire sans toucher au principe de l’in
5050 de ces mouvements tentent la gageure de réformer l’ école primaire sans toucher au principe de l’instruction publique. Les
5051 rmer l’école primaire sans toucher au principe de l’ instruction publique. Les réformes qu’ils ont proposées jusqu’ici sont
5052 ns toucher au principe de l’instruction publique. Les réformes qu’ils ont proposées jusqu’ici sont en général judicieuses,
5053 usqu’ici sont en général judicieuses, dictées par le bon sens7 et retouchées par le pédantisme inhérent à toute science. O
5054 euses, dictées par le bon sens7 et retouchées par le pédantisme inhérent à toute science. On a constaté que l’école actuel
5055 tisme inhérent à toute science. On a constaté que l’ école actuelle est fondée sur une remarquable ignorance de la psycholo
5056 uelle est fondée sur une remarquable ignorance de la psychologie infantile. Où il y avait non-science, on a voulu apporter
5057 Où il y avait non-science, on a voulu apporter de la science. Mais c’est un art qu’il faudrait. Sinon l’on retombera dans
5058 science. Mais c’est un art qu’il faudrait. Sinon l’ on retombera dans des absurdités. On a créé par exemple des « jardins
5059 n a créé par exemple des « jardins d’enfants » où l’ on apprend à des élèves âgés de 3 à 4 ans à lacer leurs souliers ; et
5060 ans à lacer leurs souliers ; et cela s’appelle de l’ école pratique. Plus tard on fait apprendre à ces mêmes enfants, et ré
5061 mêmes enfants, et réciter par cœur et à rebours, les noms des rues et places de leur ville, comme s’ils étaient tous desti
5062 e leur ville, comme s’ils étaient tous destinés à la profession de chauffeurs de taxi. Si cette conception du pratique pré
5063 eption du pratique prévaut, il est à craindre que l’ école nouvelle n’apporte bientôt sa méthode rationnelle pour apprendre
5064 ur apprendre aux bambins à marcher en décomposant les mouvements avec l’aide d’un métronome pédagogique. De même, sous le l
5065 bins à marcher en décomposant les mouvements avec l’ aide d’un métronome pédagogique. De même, sous le louable prétexte d’é
5066 l’aide d’un métronome pédagogique. De même, sous le louable prétexte d’école active, on prétend faire apprendre la gramma
5067 étexte d’école active, on prétend faire apprendre la grammaire par le moyen de gesticulations appropriées : foin de ces an
5068 tive, on prétend faire apprendre la grammaire par le moyen de gesticulations appropriées : foin de ces analyses de textes
5069 iées : foin de ces analyses de textes absurdes où l’ on soulignait en rouge tous les mots en « al », tous les verbes dépone
5070 textes absurdes où l’on soulignait en rouge tous les mots en « al », tous les verbes déponents ; désormais l’étude des ver
5071 soulignait en rouge tous les mots en « al », tous les verbes déponents ; désormais l’étude des verbes actifs sera aussi act
5072 en « al », tous les verbes déponents ; désormais l’ étude des verbes actifs sera aussi active, un élève se mettra à marche
5073 a aussi active, un élève se mettra à marcher dans le couloir en s’écriant : je marche, ou : j’arpente ; un autre restera a
5074 is, en affirmant : je siège ; un troisième lèvera la main, et dira : je lève la main, — au lieu de demander ce qu’on croit
5075  ; un troisième lèvera la main, et dira : je lève la main, — au lieu de demander ce qu’on croit. Tout porte à craindre qu’
5076 mander ce qu’on croit. Tout porte à craindre qu’à la faveur du tumulte l’un ou l’autre proclamant : je sors ! ne traduise
5077 be en action et ne disparaisse à tout jamais dans les campagnes, tirant le meilleur parti possible de l’exercice ; car il n
5078 paraisse à tout jamais dans les campagnes, tirant le meilleur parti possible de l’exercice ; car il ne manque à ce système
5079 s campagnes, tirant le meilleur parti possible de l’ exercice ; car il ne manque à ce système, avouez-le, que juste la spon
5080 ’exercice ; car il ne manque à ce système, avouez- le , que juste la spontanéité nécessaire pour que ça ne soit pas une lour
5081 r il ne manque à ce système, avouez-le, que juste la spontanéité nécessaire pour que ça ne soit pas une lourde farce. Ces
5082 ce qu’elles sont comiques précisément. Je ferai à l’ école nouvelle un reproche d’une autre nature. Elle prétend donner plu
5083 onner plus de liberté aux enfants en leur rendant le travail amusant, en leur laissant la possibilité de trouver par eux-m
5084 leur rendant le travail amusant, en leur laissant la possibilité de trouver par eux-mêmes ce qu’ils doivent apprendre. Mai
5085 té, cet amusement a pour seul but de faire avaler la pilule amère des connaissances. On songe à M. Ford, qui donne à ses o
5086 ment deux fois plus de machines. Jeu du chat avec la souris. On n’impose plus des résultats, on les fait trouver. Notez qu
5087 vec la souris. On n’impose plus des résultats, on les fait trouver. Notez que cela revient au même, sauf que par la méthode
5088 ver. Notez que cela revient au même, sauf que par la méthode nouvelle on atteint l’enfant plus profondément, on se glisse
5089 même, sauf que par la méthode nouvelle on atteint l’ enfant plus profondément, on se glisse à l’intérieur de son esprit, là
5090 élabore son invention ; on capte scientifiquement les sources mêmes de sa liberté. « Instruire en amusant » peut être la fo
5091 de sa liberté. « Instruire en amusant » peut être la formule d’une tromperie subtile et plus grave que la brutalité primai
5092 formule d’une tromperie subtile et plus grave que la brutalité primaire, parce qu’elle n’excite pas de réaction vive de la
5093 t des écoliers. Enfin, je n’aime pas qu’on traite le gosse comme un organisme dont il s’agit d’obtenir le rendement le plu
5094 gosse comme un organisme dont il s’agit d’obtenir le rendement le plus élevé. On cultive les petits d’hommes comme des pla
5095 n organisme dont il s’agit d’obtenir le rendement le plus élevé. On cultive les petits d’hommes comme des plantes de serre
5096 d’obtenir le rendement le plus élevé. On cultive les petits d’hommes comme des plantes de serre dans ces jardins d’enfants
5097 serre dans ces jardins d’enfants. On y parle de «  l’ enfant » comme on parle d’un produit chimique : On remarque chez l’enf
5098 on parle d’un produit chimique : On remarque chez l’ enfant… Dans ce milieu l’enfant ne tarde pas à se développer… Prenez u
5099 mique : On remarque chez l’enfant… Dans ce milieu l’ enfant ne tarde pas à se développer… Prenez un enfant de 6 ans… Mettez
5100 … Mettez ensemble trois enfants… Je reconnais que les buts de l’école nouvelle sont honnêtement scientifiques, et désintére
5101 emble trois enfants… Je reconnais que les buts de l’ école nouvelle sont honnêtement scientifiques, et désintéressés. Mais
5102 honnêtement scientifiques, et désintéressés. Mais l’ enfant-cobaye vaut l’enfant-citoyen. Moi je voudrais l’enfant tout cou
5103 ques, et désintéressés. Mais l’enfant-cobaye vaut l’ enfant-citoyen. Moi je voudrais l’enfant tout court. Or il paraît que
5104 ant-cobaye vaut l’enfant-citoyen. Moi je voudrais l’ enfant tout court. Or il paraît que c’est très dangereux. Néanmoins je
5105 ent du système officiel qui pourrait bien un jour l’ atteindre au cœur, et je vois tout ce que cela entraînerait, dans une
5106 înerait, dans une ruine d’où renaîtrait peut-être l’ humanité… Je songe à un enseignement sans école. Je songe au maître an
5107 ans école. Je songe au maître antique, dont toute la personne était un enseignement, et qui n’avait pas des élèves, mais d
5108 lèves, mais des disciples. Celui-là seul favorise le développement des individus, qui ne cherche pas un rendement mais qui
5109 salue ces jeunes gens qui appliquent avec ferveur les principes de l’école libre, qui se moquent des programmes, et dont le
5110 gens qui appliquent avec ferveur les principes de l’ école libre, qui se moquent des programmes, et dont les classes joyeus
5111 ole libre, qui se moquent des programmes, et dont les classes joyeuses sont de vraies foires : ils ont toute mon amitié. Ce
5112 marquer d’autant plus librement qu’ils trahissent le dessein profond de l’instruction publique, qu’ils trahissent leur mis
5113 librement qu’ils trahissent le dessein profond de l’ instruction publique, qu’ils trahissent leur mission officielle. Ils é
5114 bravo ! Mais ce qu’on leur avait confié, c’était la fabrication en série de petits démocrates conscients et organisés. Je
5115 ment trop gros pour échapper plus longtemps à MM. les Inspecteurs des Écoles. Je le crains, dis-je ; car le monde ne progre
5116 us longtemps à MM. les Inspecteurs des Écoles. Je le crains, dis-je ; car le monde ne progresse qu’à la faveur de malenten
5117 nspecteurs des Écoles. Je le crains, dis-je ; car le monde ne progresse qu’à la faveur de malentendus (si tant est qu’il p
5118 e crains, dis-je ; car le monde ne progresse qu’à la faveur de malentendus (si tant est qu’il progresse). L’école nouvelle
5119 eur de malentendus (si tant est qu’il progresse). L’ école nouvelle n’échappe à l’absurdité primaire qu’à la faveur d’une é
5120 st qu’il progresse). L’école nouvelle n’échappe à l’ absurdité primaire qu’à la faveur d’une équivoque. Cette équivoque fra
5121 le nouvelle n’échappe à l’absurdité primaire qu’à la faveur d’une équivoque. Cette équivoque frappe tout essai de réforme.
5122 ndant une possibilité pratique d’en sortir, je ne le nie pas. Mais du point de vue de la vérité, force nous est de reconna
5123 sortir, je ne le nie pas. Mais du point de vue de la vérité, force nous est de reconnaître que notre dilemme subsiste dans
5124 Ou des appareils qui en tiennent lieu. 8. Voir à l’ appendice le sens que je donne à ce mot.
5125 eils qui en tiennent lieu. 8. Voir à l’appendice le sens que je donne à ce mot.
85 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 5. La machine à fabriquer des électeurs
5126 5. La machine à fabriquer des électeurs Je crois à l’absurdité de fait de
5127 La machine à fabriquer des électeurs Je crois à l’ absurdité de fait de l’instruction publique. Je crois aussi qu’on ne p
5128 des électeurs Je crois à l’absurdité de fait de l’ instruction publique. Je crois aussi qu’on ne peut réformer l’absurde.
5129 n publique. Je crois aussi qu’on ne peut réformer l’ absurde. Je demande seulement qu’on m’explique pourquoi il triomphe et
5130 he et se perpétue ; de quel droit il nous écrase. La réponse est simple, terriblement simple : du droit de la Démocratie.
5131 ue ; de quel droit il nous écrase. La réponse est simple , terriblement simple : du droit de la Démocratie. L’instruction publi
5132 nous écrase. La réponse est simple, terriblement simple  : du droit de la Démocratie. L’instruction publique et la Démocratie
5133 nse est simple, terriblement simple : du droit de la Démocratie. L’instruction publique et la Démocratie sont sœurs siamoi
5134 terriblement simple : du droit de la Démocratie. L’ instruction publique et la Démocratie sont sœurs siamoises. Elles sont
5135 droit de la Démocratie. L’instruction publique et la Démocratie sont sœurs siamoises. Elles sont nées en même temps. Elles
5136 ste pas cette thèse. Elle est glorifiée dans tous les banquets officiels par des orateurs émus et il y aurait une insigne h
5137 urait une insigne hypocrisie à feindre de ne plus la reconnaître, une fois dissipée la fumée des civets, des cigares et de
5138 ndre de ne plus la reconnaître, une fois dissipée la fumée des civets, des cigares et des idéologies enivrées. D’ailleurs,
5139 ologies enivrées. D’ailleurs, cette idée que j’ai l’ honneur de partager avec mes adversaires se trouve correspondre à des
5140 res se trouve correspondre à des faits patents et simples  ; il serait vraiment dommage de priver ces Messieurs d’une aubaine po
5141 Messieurs d’une aubaine pour eux si rare. Un fait simple , par exemple, c’est que la Démocratie sans l’instruction publique est
5142 x si rare. Un fait simple, par exemple, c’est que la Démocratie sans l’instruction publique est pratiquement irréalisable.
5143 simple, par exemple, c’est que la Démocratie sans l’ instruction publique est pratiquement irréalisable. Ici, je demanderai
5144 nt au lecteur de vouloir bien ne point trop faire la bête, sinon je me verrai contraint de lui expliquer un certain nombre
5145 faut pouvoir lire, écrire et compter pour suivre la campagne électorale, voter et truquer légalement les votes. Ensuite,
5146 campagne électorale, voter et truquer légalement les votes. Ensuite, il faut de l’histoire, et de l’instruction civique, p
5147 truquer légalement les votes. Ensuite, il faut de l’ histoire, et de l’instruction civique, pour qu’on sache à quoi cela ri
5148 les votes. Ensuite, il faut de l’histoire, et de l’ instruction civique, pour qu’on sache à quoi cela rime. Ensuite, il fa
5149 rime. Ensuite, il faut une discipline sévère dès l’ enfance pour façonner des contribuables inoffensifs. Enfin, il faut un
5150 fin, il faut un nombre considérable de leçons, et le plus longtemps possible, pour qu’on n’ait pas le temps de se rendre c
5151 le plus longtemps possible, pour qu’on n’ait pas le temps de se rendre compte que tout cela est absurde. Pour qu’on n’ait
5152 e que tout cela est absurde. Pour qu’on n’ait pas le temps d’écouter la nature qui répète par toutes ses voix, d’un millia
5153 absurde. Pour qu’on n’ait pas le temps d’écouter la nature qui répète par toutes ses voix, d’un milliard de façons, que c
5154 e façons, que c’est absurde. Pour qu’on n’ait pas le temps de découvrir la Liberté9, parce que celui qui l’a embrassée une
5155 surde. Pour qu’on n’ait pas le temps de découvrir la Liberté9, parce que celui qui l’a embrassée une fois, une seule fois,
5156 mps de découvrir la Liberté9, parce que celui qui l’ a embrassée une fois, une seule fois, sait bien que tout le reste est
5157 ssée une fois, une seule fois, sait bien que tout le reste est absurde. Et voilà pour les sœurs siamoises. Continuons. La
5158 bien que tout le reste est absurde. Et voilà pour les sœurs siamoises. Continuons. La démocratie doit à l’École de vivre en
5159 e. Et voilà pour les sœurs siamoises. Continuons. La démocratie doit à l’École de vivre encore. Mais ce n’est de la part d
5160 sœurs siamoises. Continuons. La démocratie doit à l’ École de vivre encore. Mais ce n’est de la part de notre Institutrice
5161 et mal dissimulée. Certes, je ne prétends pas que les créateurs de l’instruction publique aient eu pleine conscience de ce
5162 . Certes, je ne prétends pas que les créateurs de l’ instruction publique aient eu pleine conscience de ce qu’ils faisaient
5163 pleine conscience de ce qu’ils faisaient — et je les excuse pour autant10. Je dis simplement ceci : leur œuvre n’a été pos
5164 ible que parce qu’elle était liée aux intérêts de la démocratie. Car il faut bien se représenter qu’elle n’était encore au
5165 qu’on répande universellement et obligatoirement l’ art du saxophone ou de la balalaïka. Soyez certains qu’il ne manque à
5166 ement et obligatoirement l’art du saxophone ou de la balalaïka. Soyez certains qu’il ne manque à cette plaisanterie, pour
5167 que à cette plaisanterie, pour prendre corps, que l’ appui intéressé d’un groupement politico-financier. Et il y aurait bie
5168 t il y aurait bien vite des députés pour célébrer les bienfaits sociaux, que dis-je, la valeur hautement moralisatrice de c
5169 pour célébrer les bienfaits sociaux, que dis-je, la valeur hautement moralisatrice de ces glapissants entonnoirs. D’aill
5170 oirs. D’ailleurs cette complicité, si évidente à l’ origine de l’institution, se manifeste encore de nos jours, et d’une f
5171 eurs cette complicité, si évidente à l’origine de l’ institution, se manifeste encore de nos jours, et d’une façon non moin
5172 tes normales. Je n’en veux pas d’autre preuve que l’ état grotesquement arriéré de notre instrument de progrès par excellen
5173 ’une explication vraisemblable de cette incurie : l’ école, sous sa forme actuelle, remplit suffisamment son rôle politique
5174 dessin humoristique publié en 1914, représentant l’ œuvre de Kitchener : une machine qui absorbait des gentlemen et rendai
5175 i absorbait des gentlemen et rendait des tommies. La machine scolaire, elle, dévore des enfants tout vifs et rend des cito
5176 vore des enfants tout vifs et rend des citoyens à l’ œil torve. Durant l’opération, tous les crânes ont été décervelés et d
5177 t vifs et rend des citoyens à l’œil torve. Durant l’ opération, tous les crânes ont été décervelés et dotés d’une petite mé
5178 citoyens à l’œil torve. Durant l’opération, tous les crânes ont été décervelés et dotés d’une petite mécanique à quatre so
5179 nique à quatre sous qui suffit à régler désormais l’ automatisme de la vie civique. Le cerveau standard du type fédéral ne
5180 us qui suffit à régler désormais l’automatisme de la vie civique. Le cerveau standard du type fédéral ne laisse craindre a
5181 régler désormais l’automatisme de la vie civique. Le cerveau standard du type fédéral ne laisse craindre aucun imprévu dan
5182 on fonctionnement. Cet avantage inappréciable sur le cerveau naturel explique que les autorités compétentes n’aient point
5183 inappréciable sur le cerveau naturel explique que les autorités compétentes n’aient point hésité à l’adopter, malgré ses ra
5184 les autorités compétentes n’aient point hésité à l’ adopter, malgré ses ratés assez fréquents. Maintenant je vous demande
5185 e un peu quel intérêt il y aurait à perfectionner l’ instrument, à l’adapter aux particularités psychologiques, voire aux b
5186 térêt il y aurait à perfectionner l’instrument, à l’ adapter aux particularités psychologiques, voire aux besoins purement
5187 purement sentimentaux qui peuvent apparaître chez les enfants ? Ce serait de l’art pour l’art. On ne peut pas en demander t
5188 euvent apparaître chez les enfants ? Ce serait de l’ art pour l’art. On ne peut pas en demander tant aux gouvernements. La
5189 raître chez les enfants ? Ce serait de l’art pour l’ art. On ne peut pas en demander tant aux gouvernements. La réforme sco
5190 n ne peut pas en demander tant aux gouvernements. La réforme scolaire, politiquement, n’est pas rentable. Il est clair que
5191 iquement, n’est pas rentable. Il est clair que si le but principal de l’instruction publique était d’éduquer le peuple d’u
5192 rentable. Il est clair que si le but principal de l’ instruction publique était d’éduquer le peuple d’une façon désintéress
5193 incipal de l’instruction publique était d’éduquer le peuple d’une façon désintéressée, les gouvernements seraient un peu p
5194 it d’éduquer le peuple d’une façon désintéressée, les gouvernements seraient un peu plus fous qu’on n’ose les imaginer de n
5195 uvernements seraient un peu plus fous qu’on n’ose les imaginer de ne pas entreprendre sur l’heure une véritable révolution
5196 ’on n’ose les imaginer de ne pas entreprendre sur l’ heure une véritable révolution scolaire ; car il ne faudrait pas moins
5197 scolaire ; car il ne faudrait pas moins pour que l’ école rattrape l’époque… Mais les gouvernements savent ce qu’ils font.
5198 l ne faudrait pas moins pour que l’école rattrape l’ époque… Mais les gouvernements savent ce qu’ils font. Tout se tient, c
5199 as moins pour que l’école rattrape l’époque… Mais les gouvernements savent ce qu’ils font. Tout se tient, comme vous dites,
5200 e tient, comme vous dites, sans doute pour m’ôter l’ envie de bousculer quoi que ce soit. J’aime les tremblements de terre,
5201 ter l’envie de bousculer quoi que ce soit. J’aime les tremblements de terre, vous tombez mal. J’appartiens à cette espèce d
5202 ne révolte de ma sensibilité qui me dresse contre l’ École. Mes arguments ne se mettent en branle qu’après coup. Et quand v
5203 se mettent en branle qu’après coup. Et quand vous les démoliriez tous, ma rage n’en serait pas moins légitime. Je lui donne
5204 aison par définition. Après tout, peu m’importent les idéologies politiques, et peu m’importerait que l’École soit une mach
5205 s idéologies politiques, et peu m’importerait que l’ École soit une machine à fabriquer de la démocratie — si je ne sentais
5206 erait que l’École soit une machine à fabriquer de la démocratie — si je ne sentais menacées dans cette aventure des valeur
5207 e auxquelles je tiens plus qu’à tout. Ma haine de la démocratie est l’aboutissement de l’évolution dont je viens de décrir
5208 ens plus qu’à tout. Ma haine de la démocratie est l’ aboutissement de l’évolution dont je viens de décrire la marche nécess
5209 Ma haine de la démocratie est l’aboutissement de l’ évolution dont je viens de décrire la marche nécessaire11. On ne manqu
5210 tissement de l’évolution dont je viens de décrire la marche nécessaire11. On ne manquera pas d’insinuer qu’à l’origine de
5211 nécessaire11. On ne manquera pas d’insinuer qu’à l’ origine de tout ceci il y a surtout de la nervosité, de petites douleu
5212 uer qu’à l’origine de tout ceci il y a surtout de la nervosité, de petites douleurs de jeunes bourgeois. Essayer de venir
5213 , n’est-ce pas, mes agneaux. C’est justement dans la mesure où je participais de l’écœurant optimisme bourgeois que je m’a
5214 est justement dans la mesure où je participais de l’ écœurant optimisme bourgeois que je m’accommodais d’un régime nocif po
5215 l y a d’authentiquement noble en chaque homme. Si les fils du peuple souffrent moins d’un tel régime, c’est qu’ils n’ont pa
5216 ussi sensible. Ils ignorent ce qu’étiolent en eux les droits de l’homme. Mais attendez, si quelques-uns allaient se réveill
5217 Il suffit d’un peu de chaleur d’âme pour amorcer le dégel de ces principes, et ce peut être le signal de la grande débâcl
5218 morcer le dégel de ces principes, et ce peut être le signal de la grande débâcle printanière. Il n’y a de révolution vérit
5219 el de ces principes, et ce peut être le signal de la grande débâcle printanière. Il n’y a de révolution véritable que de l
5220 ntanière. Il n’y a de révolution véritable que de la sensibilité. (Le jour où l’on culbutera ces Messieurs de leurs sièges
5221 a de révolution véritable que de la sensibilité. ( Le jour où l’on culbutera ces Messieurs de leurs sièges, ils comprendron
5222 tion véritable que de la sensibilité. (Le jour où l’ on culbutera ces Messieurs de leurs sièges, ils comprendront le sens d
5223 a ces Messieurs de leurs sièges, ils comprendront le sens des images.) 9. J’emploie ce mot au sens fort, au sens enivran
5224 pçonné ce que cela représente. 10. Voir note A à la fin du cahier. 11. Est-il besoin de déclarer formellement qu’une tel
5225 elle attitude n’est en aucune façon tributaire de l’ idéologie réactionnaire à la mode. Mais que deux critiques de la Démoc
5226 e façon tributaire de l’idéologie réactionnaire à la mode. Mais que deux critiques de la Démocratie partant de points de v
5227 actionnaire à la mode. Mais que deux critiques de la Démocratie partant de points de vue presque opposés coïncident en tan
86 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 6. La trahison de l’instruction publique
5228 6. La trahison de l’instruction publique (Ici, le procureur prit un ton p
5229 6. La trahison de l’ instruction publique (Ici, le procureur prit un ton plus grave.) L’é
5230 6. La trahison de l’instruction publique (Ici, le procureur prit un ton plus grave.) L’école s’est vendue à des intérêt
5231 que (Ici, le procureur prit un ton plus grave.) L’ école s’est vendue à des intérêts politiques. C’était là, nous venons
5232 s intérêts politiques. C’était là, nous venons de le voir, son unique moyen de parvenir. Elle participe donc sur une vaste
5233 n Benda. Notre époque paiera cher ce crime contre la civilisation. Elle ne croit plus qu’au péché contre les lois sociales
5234 vilisation. Elle ne croit plus qu’au péché contre les lois sociales, eh bien ! elle apprendra que le seul péché qui n’a pas
5235 e les lois sociales, eh bien ! elle apprendra que le seul péché qui n’a pas de pardon c’est le péché contre l’Esprit. Aujo
5236 dra que le seul péché qui n’a pas de pardon c’est le péché contre l’Esprit. Aujourd’hui qu’il suffit d’un peu de bon sens
5237 péché qui n’a pas de pardon c’est le péché contre l’ Esprit. Aujourd’hui qu’il suffit d’un peu de bon sens et d’information
5238 trop laid ».) À peine capable de nous instruire, l’ École prétend ouvertement nous éduquer. D’ailleurs elle y est obligée
5239 nous éduquer. D’ailleurs elle y est obligée dans la mesure où elle réalise son ambition : soustraire les enfants à l’Égli
5240 mesure où elle réalise son ambition : soustraire les enfants à l’Église et à la famille. L’Église donnait des valeurs idéa
5241 e réalise son ambition : soustraire les enfants à l’ Église et à la famille. L’Église donnait des valeurs idéalistes, la fa
5242 ambition : soustraire les enfants à l’Église et à la famille. L’Église donnait des valeurs idéalistes, la famille des vale
5243 oustraire les enfants à l’Église et à la famille. L’ Église donnait des valeurs idéalistes, la famille des valeurs réaliste
5244 famille. L’Église donnait des valeurs idéalistes, la famille des valeurs réalistes, sans lesquelles le monde s’enfonce de
5245 la famille des valeurs réalistes, sans lesquelles le monde s’enfonce de son propre poids dans l’abrutissement ou se laisse
5246 elles le monde s’enfonce de son propre poids dans l’ abrutissement ou se laisse prendre à des théories non point fumeuses c
5247 e prendre à des théories non point fumeuses comme le veut le cliché, mais schématiques. Or l’École radicale ne peut pas êt
5248 e à des théories non point fumeuses comme le veut le cliché, mais schématiques. Or l’École radicale ne peut pas être idéal
5249 es comme le veut le cliché, mais schématiques. Or l’ École radicale ne peut pas être idéaliste : car elle deviendrait un da
5250 e idéaliste : car elle deviendrait un danger pour le désordre établi. L’idéalisme est forcément révolutionnaire dans un mo
5251 le deviendrait un danger pour le désordre établi. L’ idéalisme est forcément révolutionnaire dans un monde organisé pour la
5252 ément révolutionnaire dans un monde organisé pour la production. Le culte des valeurs désintéressées ne peut que diminuer
5253 nnaire dans un monde organisé pour la production. Le culte des valeurs désintéressées ne peut que diminuer le « rendement 
5254 e des valeurs désintéressées ne peut que diminuer le « rendement » quantitatif de ceux qui s’y livrent. Je ne veux pas me
5255 « lumières », et qui pourtant s’indignent de voir la morale actuelle s’attaquer, voyez-vous ça, à la famille, « cette cell
5256 r la morale actuelle s’attaquer, voyez-vous ça, à la famille, « cette cellule sociale ». Et je les traite de mauvais plais
5257 a, à la famille, « cette cellule sociale ». Et je les traite de mauvais plaisants. Admirez mon extrême modération. Ceci fai
5258 ême modération. Ceci fait, constatez avec moi que la famille était encore un milieu naturel, donc normatif. Le collège au
5259 le était encore un milieu naturel, donc normatif. Le collège au contraire est un milieu antinaturel, et les normes sociale
5260 ollège au contraire est un milieu antinaturel, et les normes sociales qu’on prétend y substituer à celles de la famille son
5261 s sociales qu’on prétend y substituer à celles de la famille sont falsifiées. Non seulement l’École ne constitue pas le pô
5262 lles de la famille sont falsifiées. Non seulement l’ École ne constitue pas le pôle idéaliste nécessaire à l’équilibre d’un
5263 alsifiées. Non seulement l’École ne constitue pas le pôle idéaliste nécessaire à l’équilibre d’une civilisation — et c’est
5264 e ne constitue pas le pôle idéaliste nécessaire à l’ équilibre d’une civilisation — et c’est l’aspect négatif de sa trahiso
5265 saire à l’équilibre d’une civilisation — et c’est l’ aspect négatif de sa trahison —, mais encore elle tend à développer to
5266 ut ce qu’il y a de spécifiquement malfaisant dans l’ esprit moderne. C’est sa façon à elle de répondre aux besoins de l’épo
5267 C’est sa façon à elle de répondre aux besoins de l’ époque. Pauvre époque ! On parle sans cesse de ses besoins. Il est vra
5268 du matérialisme. Et quand on m’aura démontré que les besoins de l’époque exigent une organisation à outrance du monde, je
5269 e. Et quand on m’aura démontré que les besoins de l’ époque exigent une organisation à outrance du monde, je répondrai que
5270 sation à outrance du monde, je répondrai que dans la mesure où cette exigence est satisfaite naît un nouveau besoin qui es
5271 e bien que nous en soyons-là, s’il faut en croire les signes de révolte qui apparaissent de toutes parts. Mais l’école empo
5272 de révolte qui apparaissent de toutes parts. Mais l’ école empoisonne les germes d’une renaissance de l’esprit dont elle de
5273 raissent de toutes parts. Mais l’école empoisonne les germes d’une renaissance de l’esprit dont elle devrait être la mère.
5274 ’école empoisonne les germes d’une renaissance de l’ esprit dont elle devrait être la mère. Elle favorise le culte exclusif
5275 ne renaissance de l’esprit dont elle devrait être la mère. Elle favorise le culte exclusif de l’utile, l’incompréhension b
5276 rit dont elle devrait être la mère. Elle favorise le culte exclusif de l’utile, l’incompréhension brutale de la nature, la
5277 être la mère. Elle favorise le culte exclusif de l’ utile, l’incompréhension brutale de la nature, la haine des supériorit
5278 mère. Elle favorise le culte exclusif de l’utile, l’ incompréhension brutale de la nature, la haine des supériorités nature
5279 exclusif de l’utile, l’incompréhension brutale de la nature, la haine des supériorités naturelles, l’habitude de l’ersatz
5280 l’utile, l’incompréhension brutale de la nature, la haine des supériorités naturelles, l’habitude de l’ersatz et du trava
5281 la nature, la haine des supériorités naturelles, l’ habitude de l’ersatz et du travail bâclé. Elle apprend à lire les jour
5282 haine des supériorités naturelles, l’habitude de l’ ersatz et du travail bâclé. Elle apprend à lire les journaux, mais en
5283 l’ersatz et du travail bâclé. Elle apprend à lire les journaux, mais en même temps que cette drogue, elle devrait fournir s
5284 ves du mot. Il est clair, par exemple, que seules les victimes de l’instruction helvétique sont capables d’absorber sans fo
5285 st clair, par exemple, que seules les victimes de l’ instruction helvétique sont capables d’absorber sans fou rire les disc
5286 helvétique sont capables d’absorber sans fou rire les discours de tirs fédéraux. On a comparé le monde moderne à un vaste é
5287 rire les discours de tirs fédéraux. On a comparé le monde moderne à un vaste établissement de travaux forcés. L’école don
5288 derne à un vaste établissement de travaux forcés. L’ école donne à l’enfant ce qu’il faut pour se résigner à l’état de cito
5289 établissement de travaux forcés. L’école donne à l’ enfant ce qu’il faut pour se résigner à l’état de citoyen bagnard auqu
5290 donne à l’enfant ce qu’il faut pour se résigner à l’ état de citoyen bagnard auquel il est promis. Mais elle tue tout ce qu
5291 t promis. Mais elle tue tout ce qui lui donnerait l’ envie de se libérer — et peut-être les moyens. Vaste distillerie d’enn
5292 ui donnerait l’envie de se libérer — et peut-être les moyens. Vaste distillerie d’ennui, c’est-à-dire de démoralisation — q
5293 ’ennui, c’est-à-dire de démoralisation — qu’on se le dise ! —, puissance de crétinisation lente, standardisation de toutes
5294 de crétinisation lente, standardisation de toutes les mesquineries naturelles (je ne fais le procès de la bêtise humaine qu
5295 de toutes les mesquineries naturelles (je ne fais le procès de la bêtise humaine qu’en tant qu’elle est cultivée par l’Éta
5296 mesquineries naturelles (je ne fais le procès de la bêtise humaine qu’en tant qu’elle est cultivée par l’État), l’École,
5297 êtise humaine qu’en tant qu’elle est cultivée par l’ État), l’École, après avoir entraîné l’âme moderne dans ses collèges,
5298 aine qu’en tant qu’elle est cultivée par l’État), l’ École, après avoir entraîné l’âme moderne dans ses collèges, l’y enfer
5299 ltivée par l’État), l’École, après avoir entraîné l’ âme moderne dans ses collèges, l’y enferme et l’y laisse crever de fai
5300 s avoir entraîné l’âme moderne dans ses collèges, l’ y enferme et l’y laisse crever de faim. Par ce qu’elle enseigne à igno
5301 é l’âme moderne dans ses collèges, l’y enferme et l’ y laisse crever de faim. Par ce qu’elle enseigne à ignorer bien plus q
5302 r ce qu’elle enseigne à connaître, elle constitue la plus grande force antireligieuse de ce temps. L’instruction religieus
5303 la plus grande force antireligieuse de ce temps. L’ instruction religieuse qui prend les enfants au sortir de l’école prim
5304 e de ce temps. L’instruction religieuse qui prend les enfants au sortir de l’école primaire, arrive trop tard. Le pasteur s
5305 ion religieuse qui prend les enfants au sortir de l’ école primaire, arrive trop tard. Le pasteur sème dans un terrain que
5306 au sortir de l’école primaire, arrive trop tard. Le pasteur sème dans un terrain que l’instituteur a méthodiquement dessé
5307 ve trop tard. Le pasteur sème dans un terrain que l’ instituteur a méthodiquement desséché.
87 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 7. L’Instruction publique contre le progrès
5308 7. L’ Instruction publique contre le progrès Un beau titre. Et qui a meill
5309 7. L’Instruction publique contre le progrès Un beau titre. Et qui a meilleure façon que le reste, pense
5310 rès Un beau titre. Et qui a meilleure façon que le reste, pensez-vous. Il faut avouer qu’avec ce je ne sais quoi de décl
5311 démocratique, hé ! hé !… et d’ailleurs vous aimez les idées généreuses, n’est-ce pas ? J’en étais sûr. Cependant j’ai peur
5312 ès ne soit pas le vôtre, et même que sa nature ne l’ entraîne dans une direction tout opposée. C’est très malin d’avoir inv
5313 inventé un instrument de progrès : encore faut-il le mettre en marche. Et où le conduire ? Il y a beaucoup de routes, mais
5314 ogrès : encore faut-il le mettre en marche. Et où le conduire ? Il y a beaucoup de routes, mais vous n’aimez pas le risque
5315 Il y a beaucoup de routes, mais vous n’aimez pas le risque, vous préférez le sur-place. Ainsi l’instruction publique s’es
5316 s, mais vous n’aimez pas le risque, vous préférez le sur-place. Ainsi l’instruction publique s’est arrêtée aux environs de
5317 pas le risque, vous préférez le sur-place. Ainsi l’ instruction publique s’est arrêtée aux environs de 1880 et depuis lors
5318 environs de 1880 et depuis lors n’a guère bougé. Le moteur n’en continue pas moins de consommer, de ronfler et de tout em
5319 mer, de ronfler et de tout empester. Et peu à peu le public s’aperçoit que « l’instrument de progrès » n’est qu’un camoufl
5320 empester. Et peu à peu le public s’aperçoit que «  l’ instrument de progrès » n’est qu’un camouflage à l’abri duquel on dist
5321 ’instrument de progrès » n’est qu’un camouflage à l’ abri duquel on distille du radicalisme intégral. On me fera observer q
5322 On me fera observer que beaucoup des servants de la machine sont socialistes : voilà qui ne change pas le rendement, j’im
5323 achine sont socialistes : voilà qui ne change pas le rendement, j’imagine, ni la nature des produits excrétés. On forme no
5324 ilà qui ne change pas le rendement, j’imagine, ni la nature des produits excrétés. On forme nos gosses, dès l’âge de 6 ans
5325 e des produits excrétés. On forme nos gosses, dès l’ âge de 6 ans, à ne se point poser de questions dont ils n’aient appris
5326 ser de questions dont ils n’aient appris par cœur la réponse. Regardez un écolier préparer ses devoirs, c’est frappant : i
5327 préparer ses devoirs, c’est frappant : il apprend les questions aussi bien que les réponses. J’avoue que je trouve ça très
5328 rappant : il apprend les questions aussi bien que les réponses. J’avoue que je trouve ça très fort : avoir obtenu un confor
5329 uve ça très fort : avoir obtenu un conformisme de la curiosité. Il est vrai qu’il ne fallait pas moins pour assurer la séc
5330 est vrai qu’il ne fallait pas moins pour assurer la sécurité d’un régime établi dans des fauteuils ; car un peuple d’élec
5331 de trouver bien bonne celle-ci : je prétends que l’ instruction publique est une puissance conservatrice. — Pas moins ! El
5332 . — Pas moins ! Elle est destinée à légitimer par la force de l’inertie et à perpétuer mécaniquement tout ce qui est depui
5333 s ! Elle est destinée à légitimer par la force de l’ inertie et à perpétuer mécaniquement tout ce qui est depuis Numa Droz.
5334 ice, et non pas réactionnaire, non, même pas. Car les forces de réaction collaborent à leur manière au progrès, elles corri
5335 u progrès, elles corrigent, stimulent, vivifient. L’ École se contente d’être figée. Est-ce un frein ? Même pas. C’est plut
5336 t une vase où s’enlise notre civilisation ; et où la Démocratie peut se conserver des siècles encore… Or si je dis que l’É
5337 se conserver des siècles encore… Or si je dis que l’ École est contre le progrès, c’est que le progrès consiste à dépasser
5338 ècles encore… Or si je dis que l’École est contre le progrès, c’est que le progrès consiste à dépasser la Démocratie. Et c
5339 dis que l’École est contre le progrès, c’est que le progrès consiste à dépasser la Démocratie. Et cette thèse ne va pas à
5340 progrès, c’est que le progrès consiste à dépasser la Démocratie. Et cette thèse ne va pas à l’encontre de l’évolution norm
5341 ocratie. Et cette thèse ne va pas à l’encontre de l’ évolution normale de l’humanité, comme vous ne manquerez cependant poi
5342 ne va pas à l’encontre de l’évolution normale de l’ humanité, comme vous ne manquerez cependant point de le dire, avec ce
5343 anité, comme vous ne manquerez cependant point de le dire, avec ce sens exquis du cliché qui est un hommage à vos maîtres
5344 liché qui est un hommage à vos maîtres respectés. La Démocratie, par le moyen de l’instruction publique, limite l’homme au
5345 mmage à vos maîtres respectés. La Démocratie, par le moyen de l’instruction publique, limite l’homme au citoyen. Il s’agit
5346 maîtres respectés. La Démocratie, par le moyen de l’ instruction publique, limite l’homme au citoyen. Il s’agit donc de dép
5347 e, par le moyen de l’instruction publique, limite l’ homme au citoyen. Il s’agit donc de dépasser le citoyen, de retrouver
5348 te l’homme au citoyen. Il s’agit donc de dépasser le citoyen, de retrouver l’homme tout entier. Je distingue dans cette op
5349 s’agit donc de dépasser le citoyen, de retrouver l’ homme tout entier. Je distingue dans cette opération deux temps : d’ab
5350 n deux temps : d’abord critiquer ce qui est — par la comparaison avec ce qui fut, ou ce qui devrait être ; ensuite, prépar
5351 i fut, ou ce qui devrait être ; ensuite, préparer le terrain pour les jeux nouveaux que l’humanité de demain ne peut manqu
5352 devrait être ; ensuite, préparer le terrain pour les jeux nouveaux que l’humanité de demain ne peut manquer d’inventer. Je
5353 e, préparer le terrain pour les jeux nouveaux que l’ humanité de demain ne peut manquer d’inventer. Je ne puis m’empêcher d
5354 ir une intention providentielle dans cet amour de la destruction et de l’anarchie que les génies directeurs de ce temps on
5355 identielle dans cet amour de la destruction et de l’ anarchie que les génies directeurs de ce temps ont inspiré à beaucoup
5356 cet amour de la destruction et de l’anarchie que les génies directeurs de ce temps ont inspiré à beaucoup d’entre nous — e
5357 inspiré à beaucoup d’entre nous — encore que peu l’ avouent. Car détruire, déblayer, et faire des signes dans le vide à de
5358 Car détruire, déblayer, et faire des signes dans le vide à des hasards gros de dangers, c’est peut-être à quoi notre géné
5359 t peut-être à quoi notre génération devra limiter l’ efficacité de ses efforts. Critiquer le présent au nom du passé ne sig
5360 ra limiter l’efficacité de ses efforts. Critiquer le présent au nom du passé ne signifie pas que l’on désire un retour au
5361 er le présent au nom du passé ne signifie pas que l’ on désire un retour au passé. Mais la considération de régimes anciens
5362 ifie pas que l’on désire un retour au passé. Mais la considération de régimes anciens peut nous amener à constater, sans p
5363 r exemple, est-ce un progrès que d’avoir remplacé les hiérarchies de tradition, avec tout le vaste arrière-fond de poésie e
5364 remplacé les hiérarchies de tradition, avec tout le vaste arrière-fond de poésie et de grandeur que ce mot comporte — que
5365 ce mot comporte — quelles qu’en soient d’ailleurs les réalisations —, par des hiérarchies rond-de-cuiresques dont l’origine
5366 ns —, par des hiérarchies rond-de-cuiresques dont l’ origine est un pis-aller, dont la méthode est le tirage au flanc lucra
5367 -cuiresques dont l’origine est un pis-aller, dont la méthode est le tirage au flanc lucratif, dont l’esprit est la jalousi
5368 t l’origine est un pis-aller, dont la méthode est le tirage au flanc lucratif, dont l’esprit est la jalousie rancie armée
5369 la méthode est le tirage au flanc lucratif, dont l’ esprit est la jalousie rancie armée de pédantisme, et je ne parle pas
5370 st le tirage au flanc lucratif, dont l’esprit est la jalousie rancie armée de pédantisme, et je ne parle pas du décor, des
5371 isme, et je ne parle pas du décor, des odeurs, de la poussière, des petites habitudes sordides et de cette matière raremen
5372 arement « hygiénique » et qui définit notre âge : la paperasse ? Réponse ? Petits étourdis. Réponse non, c’est un recul. C
5373 l. Cette critique du fonctionnarisme, vous alliez le dire, est un ramassis de lieux communs. Mais il s’en faut, hélas, de
5374 ommuns. Mais il s’en faut, hélas, de beaucoup que la majorité des électeurs les considèrent comme tels. Et je ne me tiendr
5375 hélas, de beaucoup que la majorité des électeurs les considèrent comme tels. Et je ne me tiendrai pas pour battu quand on
5376 nt, maintenant, je vais m’y prendre pour préparer les temps nouveaux. Énorme question. Aurai-je la naïveté non moins énorme
5377 rer les temps nouveaux. Énorme question. Aurai-je la naïveté non moins énorme d’esquisser ici la réponse que je lui réserv
5378 ai-je la naïveté non moins énorme d’esquisser ici la réponse que je lui réserve ? L’instruction publique est la forme la
5379 d’esquisser ici la réponse que je lui réserve ? L’ instruction publique est la forme la plus commune de la peste rational
5380 que je lui réserve ? L’instruction publique est la forme la plus commune de la peste rationaliste qui sévit dans le mond
5381 ui réserve ? L’instruction publique est la forme la plus commune de la peste rationaliste qui sévit dans le monde depuis
5382 truction publique est la forme la plus commune de la peste rationaliste qui sévit dans le monde depuis le xviiie (depuis
5383 s commune de la peste rationaliste qui sévit dans le monde depuis le xviiie (depuis les dernières pestes noires). Si vous
5384 peste rationaliste qui sévit dans le monde depuis le xviiie (depuis les dernières pestes noires). Si vous creusez un peu
5385 qui sévit dans le monde depuis le xviiie (depuis les dernières pestes noires). Si vous creusez un peu la notion de démocra
5386 dernières pestes noires). Si vous creusez un peu la notion de démocratie, vous trouvez bien vite qu’elle repose sur des p
5387 mentalité. Elle s’est développée au xviiie dans l’ aristocratie qui n’y voyait qu’un jeu. Durant tout le xixe elle est d
5388 ristocratie qui n’y voyait qu’un jeu. Durant tout le xixe elle est descendue dans la bourgeoisie et dans le peuple ; elle
5389 jeu. Durant tout le xixe elle est descendue dans la bourgeoisie et dans le peuple ; elle y est devenue une tyrannie. Avan
5390 e elle est descendue dans la bourgeoisie et dans le peuple ; elle y est devenue une tyrannie. Avant il y avait la Raison
5391 elle y est devenue une tyrannie. Avant il y avait la Raison et les sentiments. Maintenant il y a le rationalisme12 et la s
5392 venue une tyrannie. Avant il y avait la Raison et les sentiments. Maintenant il y a le rationalisme12 et la sentimentalité.
5393 it la Raison et les sentiments. Maintenant il y a le rationalisme12 et la sentimentalité. Ce rationalisme-là triomphe non
5394 entiments. Maintenant il y a le rationalisme12 et la sentimentalité. Ce rationalisme-là triomphe non seulement dans les pr
5395 é. Ce rationalisme-là triomphe non seulement dans les principes démocratiques, et dans ceux de l’École, mais encore dans to
5396 dans les principes démocratiques, et dans ceux de l’ École, mais encore dans toute la conduite moderne de la vie. C’est not
5397 , et dans ceux de l’École, mais encore dans toute la conduite moderne de la vie. C’est notre américanisme et c’est notre s
5398 le, mais encore dans toute la conduite moderne de la vie. C’est notre américanisme et c’est notre sécheresse sentimentale.
5399 et c’est notre sécheresse sentimentale. Et c’est le grand empêchement intérieur dont souffre notre imagination créatrice 
5400 réatrice ; c’est lui qui stérilise nos utopies et les empêche de devenir autre chose que des utopies. Il s’agit donc en pre
5401 ue des utopies. Il s’agit donc en premier lieu de le démasquer et de le pourchasser dans toutes les démarches de notre vie
5402 s’agit donc en premier lieu de le démasquer et de le pourchasser dans toutes les démarches de notre vie. Mais cette premiè
5403 de le démasquer et de le pourchasser dans toutes les démarches de notre vie. Mais cette première tâche constitue un progra
5404 nce négative qui aura duré deux siècles au moins. L’ évolution de l’humanité paraît conforme à la dialectique hégélienne ;
5405 i aura duré deux siècles au moins. L’évolution de l’ humanité paraît conforme à la dialectique hégélienne ; on y retrouve f
5406 oins. L’évolution de l’humanité paraît conforme à la dialectique hégélienne ; on y retrouve facilement les triades : être
5407 dialectique hégélienne ; on y retrouve facilement les triades : être —négation de l’être — nouvel être. Notre époque serait
5408 trouve facilement les triades : être —négation de l’ être — nouvel être. Notre époque serait le deuxième temps d’une de ces
5409 temps d’une de ces triades. Son rationalisme nie l’ être sous toutes ses formes, traduit tout en relations et veut rendre
5410 -à-dire, pour lui, calculables, chiffrables. Dans la mesure où il y parvient, il tue les existences particulières, ou bien
5411 ffrables. Dans la mesure où il y parvient, il tue les existences particulières, ou bien c’est qu’elles sont déjà mortes. Ma
5412 es, ou bien c’est qu’elles sont déjà mortes. Mais le temps vient où elles renaîtront à une vie nouvelle et plus complète,
5413 cience, si je puis dire. Alors ce sera au tour de l’ instinct d’intégrer la raison. Je crois que nous approchons de ce temp
5414 e. Alors ce sera au tour de l’instinct d’intégrer la raison. Je crois que nous approchons de ce temps. Et que le véritable
5415 Je crois que nous approchons de ce temps. Et que le véritable progrès veut qu’on s’attaque à tout ce qui entrave cet avèn
5416 entrave cet avènement. C’est pourquoi je réclame l’ expulsion de la congrégation radicale des instituteurs. On me demande
5417 ènement. C’est pourquoi je réclame l’expulsion de la congrégation radicale des instituteurs. On me demande encore ce que j
5418 uteurs. On me demande encore ce que je mettrais à la place. Et parce que je ne propose rien de bien précis, on triomphe gr
5419 jet de Louis XIV ce qu’il concevait à la place de la royauté absolue. Il eût fallu certes une imagination prodigieuse au d
5420 e civilisation. Et même Diderot, même Rousseau, à la veille de la Révolution, soupçonnaient-ils que la république qu’ils a
5421 n. Et même Diderot, même Rousseau, à la veille de la Révolution, soupçonnaient-ils que la république qu’ils appelaient ser
5422 la veille de la Révolution, soupçonnaient-ils que la république qu’ils appelaient serait livrée cent ans plus tard à peine
5423 laient serait livrée cent ans plus tard à peine à la folie démocratique, à cette danse de Saint-Guy politique dont rien de
5424 litique dont rien de leur temps ne pouvait offrir la moindre préfiguration ? Eh bien ! induisez de cette similitude les po
5425 guration ? Eh bien ! induisez de cette similitude les possibilités formidables que nous réserve le siècle à venir, et vous
5426 ude les possibilités formidables que nous réserve le siècle à venir, et vous commencerez à comprendre que votre scepticism
5427 à comprendre que votre scepticisme à l’endroit de la forme sociale que nous appelons sans la connaître et qui s’élabore dé
5428 ndroit de la forme sociale que nous appelons sans la connaître et qui s’élabore déjà secrètement, que ce mépris et ce scep
5429 , sous lequel vous ne tarderez pas à périr. 12. La Raison de Spinoza ou de Descartes n’a que de lointains rapports de pa
5430 ommé Rationalisme, produit d’une mésalliance avec l’ Avarice bourgeoise — et qui sans cesse déroge.
88 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. Appendice. Utopie
5431 Appendice. Utopie Un os à la meute. (Et figurez-vous que j’ai la ferme intention de vous faire rig
5432 pie Un os à la meute. (Et figurez-vous que j’ai la ferme intention de vous faire rigoler, si cela peut vous rassurer qua
5433 ela peut vous rassurer quant à ma santé mentale.) La question est de savoir si nous serons des hommes de chair et d’esprit
5434 d’esprit, ou des pantins articulés. (Qui tiendra les ficelles, peu importe.) Les économistes (mot stupide) et les philosop
5435 ticulés. (Qui tiendra les ficelles, peu importe.) Les économistes (mot stupide) et les philosophes13 les mieux informés de
5436 s, peu importe.) Les économistes (mot stupide) et les philosophes13 les mieux informés de ce temps s’accordent sur un point
5437 es économistes (mot stupide) et les philosophes13 les mieux informés de ce temps s’accordent sur un point : le salut de l’E
5438 x informés de ce temps s’accordent sur un point : le salut de l’Europe est lié à la naissance d’une nouvelle attitude de l
5439 e ce temps s’accordent sur un point : le salut de l’ Europe est lié à la naissance d’une nouvelle attitude de l’âme. Ceci r
5440 ent sur un point : le salut de l’Europe est lié à la naissance d’une nouvelle attitude de l’âme. Ceci revient à dire que s
5441 est lié à la naissance d’une nouvelle attitude de l’ âme. Ceci revient à dire que seule une grande vague de l’imagination c
5442 Ceci revient à dire que seule une grande vague de l’ imagination collective peut désensabler le vieux bateau occidental. Un
5443 ague de l’imagination collective peut désensabler le vieux bateau occidental. Un nouvel état d’esprit : voilà bien ce que
5444 ntal. Un nouvel état d’esprit : voilà bien ce que l’ École empêche même de concevoir Elle cultive ce qu’il y a d’anti-irrat
5445 Elle cultive ce qu’il y a d’anti-irrationnel dans la nature de l’homme. Elle punit froidement la spontanéité et l’inventio
5446 ce qu’il y a d’anti-irrationnel dans la nature de l’ homme. Elle punit froidement la spontanéité et l’invention. Elle dénat
5447 dans la nature de l’homme. Elle punit froidement la spontanéité et l’invention. Elle dénature le sens de la liberté. Elle
5448 l’homme. Elle punit froidement la spontanéité et l’ invention. Elle dénature le sens de la liberté. Elle détruit tout ce q
5449 ment la spontanéité et l’invention. Elle dénature le sens de la liberté. Elle détruit tout ce qui permettrait d’échapper à
5450 ntanéité et l’invention. Elle dénature le sens de la liberté. Elle détruit tout ce qui permettrait d’échapper à la mécaniq
5451 Elle détruit tout ce qui permettrait d’échapper à la mécanique. Bref, elle perpétue ce manque d’imagination dont les consé
5452 Bref, elle perpétue ce manque d’imagination dont les conséquences seront matériellement catastrophiques pour peu que cela
5453 peu que cela continue. Qu’on ne s’y trompe pas : le sens technique qui tient lieu d’imagination à l’homme moderne n’est p
5454 le sens technique qui tient lieu d’imagination à l’ homme moderne n’est pas créateur d’êtres spirituellement vivants, ni d
5455 lement vivants, ni d’aucune grandeur supérieure à la somme de ses éléments. Il n’engendre pas, il ajuste. Quand nous auron
5456 e pas, il ajuste. Quand nous aurons épuisé toutes les combinaisons de vitesse et d’ennui à quoi présentement nous usons le
5457 vitesse et d’ennui à quoi présentement nous usons le plus clair de nos forces, — le Poète dira un mot, ou bien fera un act
5458 ntement nous usons le plus clair de nos forces, —  le Poète dira un mot, ou bien fera un acte, et ces peuples de somnambule
5459 ples de somnambules s’éveilleront du cauchemar où les plongent toutes vos drogues : presse, ciné, faux-luxe, suffrage unive
5460 e équipe d’idéalistes pratiques d’en faire sortir le beau miracle d’une civilisation aux ordres de l’Esprit. Mais il faudr
5461 le beau miracle d’une civilisation aux ordres de l’ Esprit. Mais il faudrait que dès maintenant se constituent ces élites,
5462 constituent ces élites, et cela ne se peut que si les tenants de l’ordre spirituel retrouvent le courage d’être, malgré les
5463 élites, et cela ne se peut que si les tenants de l’ ordre spirituel retrouvent le courage d’être, malgré les mots14, des a
5464 ue si les tenants de l’ordre spirituel retrouvent le courage d’être, malgré les mots14, des anarchistes et des utopistes.
5465 re spirituel retrouvent le courage d’être, malgré les mots14, des anarchistes et des utopistes. J’appelle anarchiste, tout
5466 ut ce qui est violemment et intégralement humain. L’ anarchie est un degré d’intensité dans la vie, non pas un parti. Tout
5467 humain. L’anarchie est un degré d’intensité dans la vie, non pas un parti. Tout extrémiste, de droite comme de gauche, se
5468 de toutes ses forces. Mais c’est un anarchiste de la mauvaise espèce, un anarchiste embrigadé. L’anarchiste que j’aime est
5469 e de la mauvaise espèce, un anarchiste embrigadé. L’ anarchiste que j’aime est simplement un homme libre qui a une foi (ou
5470 e savez pas ce que c’est que libre, ou consacré.) L’ utopiste, c’est l’inventeur. Les sots vont répétant que c’est un être
5471 c’est que libre, ou consacré.) L’utopiste, c’est l’ inventeur. Les sots vont répétant que c’est un être qui ignore le réel
5472 bre, ou consacré.) L’utopiste, c’est l’inventeur. Les sots vont répétant que c’est un être qui ignore le réel. C’est justem
5473 s sots vont répétant que c’est un être qui ignore le réel. C’est justement parce qu’il le connaît mieux qu’eux qu’il y a v
5474 e qui ignore le réel. C’est justement parce qu’il le connaît mieux qu’eux qu’il y a vu des fissures et des possibilités no
5475 u réel ne signifie pas s’y soumettre sans combat. L’ utopiste est celui qui ne se résigne à aucun état de choses. Il est po
5476 ne se résigne à aucun état de choses. Il est pour le « mieux » contre le « bien ». Sans lui l’humanité s’avachirait totale
5477 n état de choses. Il est pour le « mieux » contre le « bien ». Sans lui l’humanité s’avachirait totalement. Mais il est da
5478 st pour le « mieux » contre le « bien ». Sans lui l’ humanité s’avachirait totalement. Mais il est dans l’ordre qu’elle beu
5479 umanité s’avachirait totalement. Mais il est dans l’ ordre qu’elle beugle longuement tout en le suivant. Que faire, diront
5480 st dans l’ordre qu’elle beugle longuement tout en le suivant. Que faire, diront les gens de bonne volonté dont mon imagina
5481 longuement tout en le suivant. Que faire, diront les gens de bonne volonté dont mon imagination romantique suppose l’exist
5482 e volonté dont mon imagination romantique suppose l’ existence. Que faire ? Voir et penser juste d’abord. Simplement. Ensui
5483 rd. Simplement. Ensuite, soutenir cette opinion : les effets suivront infailliblement. Par exemple, je vous demande une foi
5484 els d’histoire et de géographie bien connus, pour l’ esprit le plus dangereusement plat qui soit. (Il est plus que plat : i
5485 toire et de géographie bien connus, pour l’esprit le plus dangereusement plat qui soit. (Il est plus que plat : il est cre
5486 i, cela finira par créer un courant d’opinion. Et l’ opinion publique mène le monde, paraît-il. À ce propos : que les journ
5487 un courant d’opinion. Et l’opinion publique mène le monde, paraît-il. À ce propos : que les journalistes s’engagent désor
5488 lique mène le monde, paraît-il. À ce propos : que les journalistes s’engagent désormais à ne publier plus un seul article d
5489 seul article de fond où ne perce leur mépris pour l’ instruction publique. Ils peuvent dire ce qu’ils veulent à propos de n
5490 n’importe quoi, comme on sait, et ils auraient là l’ occasion de racheter bien des choses. Ce n’est rien de moins qu’une ré
5491 dit pour éviter ce malentendu : je ne crois pas à la possibilité d’une réforme suffisante. C’est une révolution qu’il faut
5492 C’est une révolution qu’il faut. Alors, supprimer les écoles, raser les collèges, renvoyer les instituteurs aux pommes de t
5493 on qu’il faut. Alors, supprimer les écoles, raser les collèges, renvoyer les instituteurs aux pommes de terre ? Impossible.
5494 upprimer les écoles, raser les collèges, renvoyer les instituteurs aux pommes de terre ? Impossible. Le peuple qui déteste
5495 es instituteurs aux pommes de terre ? Impossible. Le peuple qui déteste l’école a pourtant faim d’instruction15, et se cro
5496 mmes de terre ? Impossible. Le peuple qui déteste l’ école a pourtant faim d’instruction15, et se croirait lésé dans un de
5497 croirait lésé dans un de ses droits fondamentaux. Le peuple veut s’instruire et on lui bourre le crâne pour l’en empêcher.
5498 taux. Le peuple veut s’instruire et on lui bourre le crâne pour l’en empêcher. Il s’agit de lui faire comprendre que l’éco
5499 e veut s’instruire et on lui bourre le crâne pour l’ en empêcher. Il s’agit de lui faire comprendre que l’école est le plus
5500 n empêcher. Il s’agit de lui faire comprendre que l’ école est le plus gros obstacle à sa culture. Et c’est cela, préparer
5501 Il s’agit de lui faire comprendre que l’école est le plus gros obstacle à sa culture. Et c’est cela, préparer le terrain.
5502 os obstacle à sa culture. Et c’est cela, préparer le terrain. D’autre part, il faut partir de ce qui est. Mais comment ret
5503 rtir de ce qui est. Mais comment retourner contre l’ ennemi ses propres batteries ? Autrement dit : quel emploi utopique de
5504 tteries ? Autrement dit : quel emploi utopique de l’ organisation existante peut-on imaginer ? L’école devrait donner à l’e
5505 ue de l’organisation existante peut-on imaginer ? L’ école devrait donner à l’enfant ce que son entourage ne peut plus lui
5506 tante peut-on imaginer ? L’école devrait donner à l’ enfant ce que son entourage ne peut plus lui donner : des modèles de p
5507 onner : des modèles de pensée. Un entraînement de l’ esprit, au lieu d’une somme de connaissances mortes. Une technique spi
5508 ituelle. Et puis, qu’il en fasse ce qu’il voudra. Les Orientaux appellent yoga cette culture des facultés physiques, intell
5509 ystiques. Toute leur force vient du yoga. Et tout le yoga repose sur la concentration. En vérité, toute force résulte d’un
5510 r force vient du yoga. Et tout le yoga repose sur la concentration. En vérité, toute force résulte d’une concentration, da
5511 ncentration, dans quelque domaine que ce soit. Si l’ Occident comprenait cette vérité élémentaire et en tirait des conclusi
5512 il serait sauvé du désastre, mais il recouvrerait la domination du monde16 et non plus en barbare cette fois-ci. Ce qui l’
5513 de16 et non plus en barbare cette fois-ci. Ce qui l’ empêche de comprendre, ici encore, c’est la peur scolaire des mots. Ce
5514 Ce qui l’empêche de comprendre, ici encore, c’est la peur scolaire des mots. Ce terme hindou agace, trouble ou fait sourir
5515 s. Ce terme hindou agace, trouble ou fait sourire les étriqués. On croit devoir se défendre : on se moque. On me dit : vous
5516 ez tout de même pas une classe de gamins répétant la syllabe sacrée Aûm ou se livrant à des exercices de contrôle de la re
5517 Aûm ou se livrant à des exercices de contrôle de la respiration. Il ne s’agit nullement de cela. Nous ne sommes pas aux I
5518 s aux Indes, je vous jure que je m’en doute. Mais l’ Occidental aussi pratique son yoga à lui : toutes les fois qu’il veut
5519 n minimum de moyens. J’en citerai deux exemples : la discipline jésuite et le drill militaire. Le drill correspond remarqu
5520 citerai deux exemples : la discipline jésuite et le drill militaire. Le drill correspond remarquablement dans le plan phy
5521 es : la discipline jésuite et le drill militaire. Le drill correspond remarquablement dans le plan physique, aux exercices
5522 litaire. Le drill correspond remarquablement dans le plan physique, aux exercices élémentaires que l’on exige d’un initié.
5523 le plan physique, aux exercices élémentaires que l’ on exige d’un initié. Le fameux arrêt de la pensée dont on sait l’impo
5524 xercices élémentaires que l’on exige d’un initié. Le fameux arrêt de la pensée dont on sait l’importance primordiale dans
5525 es que l’on exige d’un initié. Le fameux arrêt de la pensée dont on sait l’importance primordiale dans le yoga correspond
5526 initié. Le fameux arrêt de la pensée dont on sait l’ importance primordiale dans le yoga correspond au garde-à-vous ! par q
5527 pensée dont on sait l’importance primordiale dans le yoga correspond au garde-à-vous ! par quoi l’on impose au corps une i
5528 ans le yoga correspond au garde-à-vous ! par quoi l’ on impose au corps une immobilité absolue. L’un et l’autre de ces exer
5529 ue. L’un et l’autre de ces exercices montrent que le candidat possède une énergie suffisante pour aller plus loin, — et en
5530 temps constituent des sources d’énergie nouvelle. Le parallèle peut être poussé dans les détails. Il s’agit bien d’un gest
5531 rgie nouvelle. Le parallèle peut être poussé dans les détails. Il s’agit bien d’un geste identique, exécuté dans deux plans
5532 te identique, exécuté dans deux plans différents. Le drill est un yoga corporel, le yoga est un drill de l’esprit. Je sais
5533 plans différents. Le drill est un yoga corporel, le yoga est un drill de l’esprit. Je sais que ces deux mots sont bien da
5534 ill est un yoga corporel, le yoga est un drill de l’ esprit. Je sais que ces deux mots sont bien dangereux et impopulaires.
5535 nt pas séparer une méthode des fins auxquelles on l’ applique généralement. Ces gens-là diront que je veux militariser l’en
5536 ement. Ces gens-là diront que je veux militariser l’ enseignement ou transformer les collèges en couvents. Tant pis. Le dri
5537 je veux militariser l’enseignement ou transformer les collèges en couvents. Tant pis. Le drill offre un exemple d’éducation
5538 u transformer les collèges en couvents. Tant pis. Le drill offre un exemple d’éducation efficace. L’armée de milices suiss
5539 . Le drill offre un exemple d’éducation efficace. L’ armée de milices suisses fait des soldats en moins de trois mois. Si l
5540 isses fait des soldats en moins de trois mois. Si l’ école appliquait en les transposant des méthodes de concentration anal
5541 en moins de trois mois. Si l’école appliquait en les transposant des méthodes de concentration analogues, même dans la mes
5542 es méthodes de concentration analogues, même dans la mesure sans doute faible où la nature des enfants le supporte, on éco
5543 alogues, même dans la mesure sans doute faible où la nature des enfants le supporte, on économiserait plusieurs semestres
5544 mesure sans doute faible où la nature des enfants le supporte, on économiserait plusieurs semestres de travail. Si chaque
5545 t plusieurs semestres de travail. Si chaque matin l’ enfant parvenait à mettre sa pensée au garde-à-vous durant quelques in
5546 aucoup de choses qui restent cachées aux agités ; la nature par exemple. Je ne demande pas qu’on nous enseigne le goût de
5547 ar exemple. Je ne demande pas qu’on nous enseigne le goût de la nature. Mais qu’on nous laisse le temps de la regarder. De
5548 Je ne demande pas qu’on nous enseigne le goût de la nature. Mais qu’on nous laisse le temps de la regarder. De faire conn
5549 igne le goût de la nature. Mais qu’on nous laisse le temps de la regarder. De faire connaissance. Je ne sais s’il est très
5550 de la nature. Mais qu’on nous laisse le temps de la regarder. De faire connaissance. Je ne sais s’il est très exagéré de
5551 er ces facultés atrophiées que devrait s’employer l’ école. Nous avons vu qu’elle préfère les étouffer. Cependant, je ne cr
5552 s’employer l’école. Nous avons vu qu’elle préfère les étouffer. Cependant, je ne crois pas qu’il soit bon que tous progress
5553 crois pas qu’il soit bon que tous progressent de la même manière. Dans un système de culture spirituelle, les différences
5554 manière. Dans un système de culture spirituelle, les différences s’accuseraient, mais se légitimeraient du même coup ; car
5555 coup ; car sur ce plan elles ne font que traduire la diversité des besoins individuels. Méditez un peu ces truismes : On a
5556 . Une minute de concentration intense dégage dans l’ individu plus d’énergie que des heures d’exercices gémissants. De même
5557 e que des heures d’exercices gémissants. De même, le bien supérieur de quelques-uns est plus utile à tous que le bien médi
5558 périeur de quelques-uns est plus utile à tous que le bien médiocre de beaucoup. La valeur vaut mieux que le nombre parce q
5559 us utile à tous que le bien médiocre de beaucoup. La valeur vaut mieux que le nombre parce qu’elle le contient en puissanc
5560 en médiocre de beaucoup. La valeur vaut mieux que le nombre parce qu’elle le contient en puissance. Et c’est pourquoi l’ar
5561 La valeur vaut mieux que le nombre parce qu’elle le contient en puissance. Et c’est pourquoi l’aristocratie de l’esprit e
5562 ’elle le contient en puissance. Et c’est pourquoi l’ aristocratie de l’esprit est nécessaire au bien public. Certains propo
5563 en puissance. Et c’est pourquoi l’aristocratie de l’ esprit est nécessaire au bien public. Certains proposent en rougissant
5564 rougissant de leur hardiesse quelque chose comme l’ instruction privée : et moi je la voudrais secrète. Vous verrez bien.
5565 lque chose comme l’instruction privée : et moi je la voudrais secrète. Vous verrez bien. Cela se fera sans vous. Déjà revi
5566 verrez bien. Cela se fera sans vous. Déjà revient le temps des mages : ils comprennent les théories d’Einstein, ils compos
5567 Déjà revient le temps des mages : ils comprennent les théories d’Einstein, ils composent de la poésie pure, ils mesurent de
5568 rennent les théories d’Einstein, ils composent de la poésie pure, ils mesurent des sensibilités secondes et tout un arc-en
5569 econdes et tout un arc-en-ciel de sentiments dont les accords imitent la blancheur éclatante de l’amour… Que dirons-nous ?…
5570 rc-en-ciel de sentiments dont les accords imitent la blancheur éclatante de l’amour… Que dirons-nous ?… Par la force des c
5571 ont les accords imitent la blancheur éclatante de l’ amour… Que dirons-nous ?… Par la force des choses et de l’Esprit, l’ho
5572 heur éclatante de l’amour… Que dirons-nous ?… Par la force des choses et de l’Esprit, l’homme sera-t-il sauvé de sa folie
5573 Que dirons-nous ?… Par la force des choses et de l’ Esprit, l’homme sera-t-il sauvé de sa folie démocratique ?   Areuse,
5574 s-nous ?… Par la force des choses et de l’Esprit, l’ homme sera-t-il sauvé de sa folie démocratique ?   Areuse, 26 décembr
5575 Ce travers a été développé jusqu’au ridicule par la démocratie. Les journaux, les cercles, les coulisses de parlements et
5576 té développé jusqu’au ridicule par la démocratie. Les journaux, les cercles, les coulisses de parlements et autres potinièr
5577 usqu’au ridicule par la démocratie. Les journaux, les cercles, les coulisses de parlements et autres potinières ne vivent q
5578 ule par la démocratie. Les journaux, les cercles, les coulisses de parlements et autres potinières ne vivent que de semblab
5579 er quelque saveur à ses jugements. C’est pourquoi l’ on ne peut plus attaquer un fonctionnaire dans son activité publique s
5580 un très brave homme, il fait partie du conseil de la paroisse, etc. » — Il semble qu’en attaquant ses idées et leurs réali
5581 es et leurs réalisations ont ait porté atteinte à la dignité morale de ce M. Machin, membre du conseil de paroisse. Je pré
5582 onseil de paroisse. Je préciserai donc : je tiens l’ École pour criminelle. Mais je ne tiens pas tous les instituteurs pour
5583 ’École pour criminelle. Mais je ne tiens pas tous les instituteurs pour gibier de potence. Ils font beaucoup de mal, mais i
5584 mières victimes du système qu’il propagent et qui les fait vivre. La question se complique dès que l’instituteur prend cons
5585 du système qu’il propagent et qui les fait vivre. La question se complique dès que l’instituteur prend conscience de la no
5586 les fait vivre. La question se complique dès que l’ instituteur prend conscience de la nocivité de son action… Ils sont co
5587 mplique dès que l’instituteur prend conscience de la nocivité de son action… Ils sont consciencieux, certes, mais sont-ils
5588 ls sont consciencieux, certes, mais sont-ils dans la même mesure conscients des fins qu’on assigne à leur activité ? Un pe
5589 assigne à leur activité ? Un peu de rigueur dans la pensée empêcherait souvent des catastrophes que beaucoup de rigueur m
5590 igueur morale ne saurait même pas prévoir. NOTE B La culture de notre sensibilité nous aiderait à retrouver l’accord avec
5591 re de notre sensibilité nous aiderait à retrouver l’ accord avec l’ordre naturel. La culture de notre force de pensée nous
5592 nsibilité nous aiderait à retrouver l’accord avec l’ ordre naturel. La culture de notre force de pensée nous rendrait une l
5593 derait à retrouver l’accord avec l’ordre naturel. La culture de notre force de pensée nous rendrait une liberté sans laque
5594 t vains pour instaurer cette nouvelle attitude de l’ âme. Mais ces méthodes ne prendraient tout leur sens et toute leur eff
5595 un système religieux. Pour quiconque a une foi et la conscience de cette foi, il n’est d’enseignement véritable que religi
5596 ’est d’enseignement véritable que religieux. Mais les questions confessionnelles enrayent et faussent tout. Imaginez une cu
5597 ltères et rester pacifiste. NOTE C Vous parlez de la grande vulgarité de mes attaques. Ce qui est vulgaire, au plein sens
5598 Ce qui est vulgaire, au plein sens du mot, c’est le genre distingué de la bourgeoisie qui se monte le cou. 13. Économis
5599 au plein sens du mot, c’est le genre distingué de la bourgeoisie qui se monte le cou. 13. Économistes et philosophes : c
5600 le genre distingué de la bourgeoisie qui se monte le cou. 13. Économistes et philosophes : ces Messieurs n’apparaissent
5601 ssieurs n’apparaissent ici que pour impressionner le public. Je n’ai pas besoin de leurs attendus pour juger. 14. Ces deu
5602 . Ces deux mots en effet, terrorisent à tel point les bourgeois qu’ils n’en distinguent plus même le sens. Ils les lancent
5603 t les bourgeois qu’ils n’en distinguent plus même le sens. Ils les lancent à la tête de tous ceux qui les dérangent, comme
5604 is qu’ils n’en distinguent plus même le sens. Ils les lancent à la tête de tous ceux qui les dérangent, comme des pavés, ou
5605 distinguent plus même le sens. Ils les lancent à la tête de tous ceux qui les dérangent, comme des pavés, ou plutôt des g
5606 sens. Ils les lancent à la tête de tous ceux qui les dérangent, comme des pavés, ou plutôt des grenades, avec la frousse q
5607 nt, comme des pavés, ou plutôt des grenades, avec la frousse que ça ne leur éclate dans la main. 15. Cf. ce que dit Tolst
5608 nades, avec la frousse que ça ne leur éclate dans la main. 15. Cf. ce que dit Tolstoï sur cette haine et sur ce besoin da
5609 les pédagogiques encore très actuels, du fait que l’ école n’a pas bougé depuis. 16. On promet des confitures à l’enfant,
5610 pas bougé depuis. 16. On promet des confitures à l’ enfant, s’il est sage. Moi je m’en moque. Je n’aime que la liberté.
5611 , s’il est sage. Moi je m’en moque. Je n’aime que la liberté.
89 1929, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Prison. Ailleurs. Étoile de jour (mars 1929)
5612 de jour (mars 1929)z Prison Prisonnier de la nuit mais plus libre qu’un ange prisonnier dans ta tête mais libre co
5613 me avant cette naissance aux lents vertiges Quand la nuit s’effeuille et se fane prisonnier d’une saison morte au tombeau
5614 d’une saison morte au tombeau des fleurs obscures les mains de l’absence se ferment sur le vide   Tu pleurerais Mais la gr
5615 morte au tombeau des fleurs obscures les mains de l’ absence se ferment sur le vide   Tu pleurerais Mais la grâce est faci
5616 rs obscures les mains de l’absence se ferment sur le vide   Tu pleurerais Mais la grâce est facile comme un matin d’été l
5617 ence se ferment sur le vide   Tu pleurerais Mais la grâce est facile comme un matin d’été la grâce tendrement dénouée de
5618 ais Mais la grâce est facile comme un matin d’été la grâce tendrement dénouée de ta vie comme de cette nuit le jour d’un g
5619 tendrement dénouée de ta vie comme de cette nuit le jour d’un grand été   qui consent… Ailleurs Colombes lumineuse
5620 yageuses ah ! que d’aucun retour vous ne laissiez le gage aux plaintes de mon cœur il est d’autres rivages où mieux qu’ici
5621 mon cœur il est d’autres rivages où mieux qu’ici l’ on meurt. Étoile de jour Il naissait à son destin des rayons g
5622 t à son destin des rayons glissent et rient c’est la caresse des anges parmi les formes de l’ombre C’était l’aube et le
5623 lissent et rient c’est la caresse des anges parmi les formes de l’ombre C’était l’aube et le sourire adorable de savoir l
5624 nt c’est la caresse des anges parmi les formes de l’ ombre C’était l’aube et le sourire adorable de savoir la dansante li
5625 e des anges parmi les formes de l’ombre C’était l’ aube et le sourire adorable de savoir la dansante liberté d’un désir à
5626 s parmi les formes de l’ombre C’était l’aube et le sourire adorable de savoir la dansante liberté d’un désir à sa naissa
5627 C’était l’aube et le sourire adorable de savoir la dansante liberté d’un désir à sa naissance L’étoile qui l’accueille
5628 r la dansante liberté d’un désir à sa naissance L’ étoile qui l’accueille au sommet ravi d’un silence c’est le miroir d’u
5629 liberté d’un désir à sa naissance L’étoile qui l’ accueille au sommet ravi d’un silence c’est le miroir d’une absence ma
5630 qui l’accueille au sommet ravi d’un silence c’est le miroir d’une absence mais le signe de sa grâce Dans l’or vert évano
5631 i d’un silence c’est le miroir d’une absence mais le signe de sa grâce Dans l’or vert évanouie au cœur éclatant du jour
5632 ir d’une absence mais le signe de sa grâce Dans l’ or vert évanouie au cœur éclatant du jour scintillera l’invisible gage
5633 ert évanouie au cœur éclatant du jour scintillera l’ invisible gage d’un amour perdu. z. Rougemont Denis de, « Prison
90 1929, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Souvenirs d’enfance et de jeunesse, par Philippe Godet (avril 1929)
5634 aa Quand avec un air fin mais un ton convaincu l’ on a répété dans une ballade fameuse « Que voulez-vous, je suis bourge
5635 fameuse « Que voulez-vous, je suis bourgeois ! », l’ on peut se permettre quelques malices, quelques jeux d’esprit ou de mé
5636 elques jeux d’esprit ou de méchanceté, assuré que l’ on est désormais d’être absous avec le sourire par la clientèle des li
5637 assuré que l’on est désormais d’être absous avec le sourire par la clientèle des librairies romandes, en mal de cadeaux d
5638 n est désormais d’être absous avec le sourire par la clientèle des librairies romandes, en mal de cadeaux de Noël ou de pr
5639 e cadeaux de Noël ou de première communion. Parmi les compatriotes d’Amiel, Godet restera l’un des rares qui ont réussi à s
5640 peu complexe et comme réduite à deux dimensions ; la conscience ne pouvait y tuer un lyrisme quasi inexistant, mais bien y
5641 xciter un esprit critique fort alerte. Jugez-en à la façon dont il parle de « ses quelques succès, si disproportionnés ave
5642 rtionnés avec son mérite ». Il ajoute : « j’ai eu la chance de discerner très jeune, avec une clairvoyance singulière, mes
5643 yance singulière, mes propres limites, et j’ai eu la sagesse de ne rien tenter au-delà ». C’est le comble de l’économie bo
5644 eu la sagesse de ne rien tenter au-delà ». C’est le comble de l’économie bourgeoise que cette administration exacte d’un
5645 e de ne rien tenter au-delà ». C’est le comble de l’ économie bourgeoise que cette administration exacte d’un petit capital
5646 e cette administration exacte d’un petit capital. Le contraire de la poésie, bien sûr. Mais on n’en demande pas tant dans
5647 ration exacte d’un petit capital. Le contraire de la poésie, bien sûr. Mais on n’en demande pas tant dans les familles. Et
5648 sie, bien sûr. Mais on n’en demande pas tant dans les familles. Et qu’importe si la perspective manque souvent à ces récits
5649 ande pas tant dans les familles. Et qu’importe si la perspective manque souvent à ces récits : ce n’est point un paysage d
5650 ’est point un paysage d’âme qu’on y cherche, mais l’ anecdote bien tournée, des noms connus. Tout est sur le même plan ; le
5651 cdote bien tournée, des noms connus. Tout est sur le même plan ; le dessin d’ailleurs est élégant. Mais comme tout cela ma
5652 née, des noms connus. Tout est sur le même plan ; le dessin d’ailleurs est élégant. Mais comme tout cela manque de chair.
91 1929, Journal de Genève, articles (1926–1982). Panorama de Budapest (23 mai 1929)
5653 press, changer totalement d’atmosphère, passer de la lassitude à la turbulence, d’une propreté joliette à un désordre pitt
5654 totalement d’atmosphère, passer de la lassitude à la turbulence, d’une propreté joliette à un désordre pittoresque, d’un s
5655 d’un scepticisme poli à une excitation agressive. La simple visite des cafés dans l’une et l’autre de ces capitales suffit
5656 n scepticisme poli à une excitation agressive. La simple visite des cafés dans l’une et l’autre de ces capitales suffit à vous
5657 l’autre de ces capitales suffit à vous en donner la sensation : ce que vous pourrez voir durant le reste de votre séjour
5658 er la sensation : ce que vous pourrez voir durant le reste de votre séjour ne fera que confirmer cette première impression
5659 mer cette première impression. Vienne : assis sur les banquettes rembourrées de profondes loges, les clients dégustent des
5660 ur les banquettes rembourrées de profondes loges, les clients dégustent des cafés débordants de crème, avec une apathie qu’
5661 troubler, aucune voix haute, aucune couleur vive. Les journaux qu’ils lisent annoncent chaque jour quelque catastrophe immi
5662 ur quelque catastrophe imminente, une révolution, le transfert de la SDN à la Hofburg… Mais les nouvelles de l’Opéra aussi
5663 trophe imminente, une révolution, le transfert de la SDN à la Hofburg… Mais les nouvelles de l’Opéra aussi sont en grosses
5664 minente, une révolution, le transfert de la SDN à la Hofburg… Mais les nouvelles de l’Opéra aussi sont en grosses lettres,
5665 lution, le transfert de la SDN à la Hofburg… Mais les nouvelles de l’Opéra aussi sont en grosses lettres, et tout cela fini
5666 ert de la SDN à la Hofburg… Mais les nouvelles de l’ Opéra aussi sont en grosses lettres, et tout cela finira bien par s’ar
5667 uple s’est résigné avec une facilité incroyable à la défaite, au marxisme, au chômage, lequel semble d’ailleurs correspond
5668 emble d’ailleurs correspondre à son état d’esprit le plus naturel. Mais de quoi vivent ces bourgeois aimables et insipides
5669 ipides, qui passent des après-midi entiers devant les deux verres d’eau que le garçon renouvelle de temps à autre, à lire d
5670 rès-midi entiers devant les deux verres d’eau que le garçon renouvelle de temps à autre, à lire des potins tout en essuyan
5671 t : une vague de musique tzigane vous emporte dès l’ entrée. Un violon vient vous siffler à l’oreille les notes les plus ai
5672 orte dès l’entrée. Un violon vient vous siffler à l’ oreille les notes les plus aiguës d’une chanson populaire, et à l’autr
5673 ’entrée. Un violon vient vous siffler à l’oreille les notes les plus aiguës d’une chanson populaire, et à l’autre extrémité
5674 n violon vient vous siffler à l’oreille les notes les plus aiguës d’une chanson populaire, et à l’autre extrémité de la sal
5675 ’une chanson populaire, et à l’autre extrémité de la salle, par-dessus la rumeur des clients, le violoncelle répond de sa
5676 e, et à l’autre extrémité de la salle, par-dessus la rumeur des clients, le violoncelle répond de sa voix profonde et pass
5677 té de la salle, par-dessus la rumeur des clients, le violoncelle répond de sa voix profonde et passionnée, sous les roulad
5678 le répond de sa voix profonde et passionnée, sous les roulades d’un cymbalum. Aux parois, la prière pour la résurrection de
5679 née, sous les roulades d’un cymbalum. Aux parois, la prière pour la résurrection de la Hongrie, des portraits de lord Roth
5680 oulades d’un cymbalum. Aux parois, la prière pour la résurrection de la Hongrie, des portraits de lord Rothermere, et sur
5681 um. Aux parois, la prière pour la résurrection de la Hongrie, des portraits de lord Rothermere, et sur toutes les portes l
5682 , des portraits de lord Rothermere, et sur toutes les portes le fameux : « Non ! non ! jamais ! » Officiers élégants, tout
5683 aits de lord Rothermere, et sur toutes les portes le fameux : « Non ! non ! jamais ! » Officiers élégants, tout de noir vê
5684 x curieux dessins noirs et blancs : il représente l’ ancienne Hongrie découpée en blanc sur fond noir et portant, en cœur n
5685 en blanc sur fond noir et portant, en cœur noir, la nouvelle… « Savez-vous qu’on nous a pris les deux tiers de notre pays
5686 noir, la nouvelle… « Savez-vous qu’on nous a pris les deux tiers de notre pays ?… Non, non, jamais ! » La rue est sale à ca
5687 deux tiers de notre pays ?… Non, non, jamais ! » La rue est sale à cause de la fonte de la neige (une boue ocre, épaisse,
5688 … Non, non, jamais ! » La rue est sale à cause de la fonte de la neige (une boue ocre, épaisse, on envie les bottes que po
5689 jamais ! » La rue est sale à cause de la fonte de la neige (une boue ocre, épaisse, on envie les bottes que portent les fe
5690 nte de la neige (une boue ocre, épaisse, on envie les bottes que portent les femmes), encombrée de piétons qui traversent e
5691 ue ocre, épaisse, on envie les bottes que portent les femmes), encombrée de piétons qui traversent en tous sens, évitant vi
5692 ons qui traversent en tous sens, évitant vivement les trams qui sonnent avec frénésie et les petits taxis rouges qui déferl
5693 t vivement les trams qui sonnent avec frénésie et les petits taxis rouges qui déferlent sur les boulevards comme une nuée d
5694 ésie et les petits taxis rouges qui déferlent sur les boulevards comme une nuée d’insectes affolés. Les maisons sont basses
5695 les boulevards comme une nuée d’insectes affolés. Les maisons sont basses, couvertes du haut en bas d’affiches rouges et ja
5696 rouges et jaunes et d’inscriptions cascadantes, à l’ orientale (on pense au mot bazar, qui sonne rouge et jaune aussi). Sou
5697 unichoises. Puis un palais gothique 1880, qui est le Parlement. Et voici la trouée du Danube, Bude solidement amarrée à Pe
5698 ais gothique 1880, qui est le Parlement. Et voici la trouée du Danube, Bude solidement amarrée à Pest par quatre énormes p
5699 en hiver, viennent se briser avec un fracas sourd les îlots de glace qui descendent lentement le fleuve. Au cœur de Prophèt
5700 sourd les îlots de glace qui descendent lentement le fleuve. Au cœur de Prophète chauve s’élève la montagne de pierre de S
5701 ent le fleuve. Au cœur de Prophète chauve s’élève la montagne de pierre de St-Gellert. Elle tombe en hautes falaises dans
5702 de St-Gellert. Elle tombe en hautes falaises dans le Danube, froide et nue, mais dans son flanc une grotte s’illumine, et
5703 ue, mais dans son flanc une grotte s’illumine, et la Vierge y sourit. Le château royal avec son amiral régent et ses garde
5704 anc une grotte s’illumine, et la Vierge y sourit. Le château royal avec son amiral régent et ses gardes blancs aux casques
5705 des crémeries aux idylles démodées… Rentrons dans la ville un soir qu’elle s’amuse. Vous avez dîné au paprika chez des gen
5706 usion de liqueurs légères facilite singulièrement les rapports sociaux. On vous mène au Théâtre, vous n’y comprenez rien, m
5707 us mène au Théâtre, vous n’y comprenez rien, mais le charme des voix hongroises féminines suffit à votre bonheur et vous v
5708 iste. Vous vous êtes levé, comme tout le monde, à l’ entrée d’un des archiducs. Car ce peuple, seul en Europe, attend le re
5709 archiducs. Car ce peuple, seul en Europe, attend le retour d’un roi. Et vous voici transporté dans un bal costumé, parmi
5710 ient et s’enivrent comme plus un Européen ne sait le faire, et dansent à tout propos de folles « czardas » qui deviennent
5711 ussins Rothermere et Grande Hongrie… Ivresse dans le malheur, passion et pauvreté, espoirs presque puérils et nostalgie de
5712 cela compose un visage romantique et ardent dont le voyageur s’éprend malgré lui, malgré tout, comme d’une passion poétiq
92 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jules Supervielle, Saisir (juin 1929)
5713 faut s’en approcher avec une douceur patiente, et le laisser créer en nous son silence particulier avant d’entendre les si
5714 en nous son silence particulier avant d’entendre les signes qu’il nous propose. Une telle poésie n’offre aux sens que peu
5715 e quelques « motifs », objets usuels et usés, sur la nuance mate d’un paravent chinois). Ce qu’elle décrit, ce sont des pe
5716 s). Ce qu’elle décrit, ce sont des perceptions de l’ âme plus que de l’esprit ou des sens. « Reste immobile et sache attend
5717 rit, ce sont des perceptions de l’âme plus que de l’ esprit ou des sens. « Reste immobile et sache attendre que ton cœur se
5718 cœur se détache de toi comme une lourde pierre. » Le corps, que l’âme quitte, redevient minéral, statue dans le silence « 
5719 e de toi comme une lourde pierre. » Le corps, que l’ âme quitte, redevient minéral, statue dans le silence « aux yeux gelés
5720 que l’âme quitte, redevient minéral, statue dans le silence « aux yeux gelés de rêverie », il se confond avec l’ombre du
5721 « aux yeux gelés de rêverie », il se confond avec l’ ombre du monde. Et l’âme peut enfin « saisir » dans leur réalité les c
5722 êverie », il se confond avec l’ombre du monde. Et l’ âme peut enfin « saisir » dans leur réalité les choses dont elle s’est
5723 Et l’âme peut enfin « saisir » dans leur réalité les choses dont elle s’est dégagée et qu’elle voit dans une autre lumière
5724 t semblait vivre au fond d’un insistant regard. » Le poète des Gravitations est ici descendu plus profond en soi-même ; so
5725 son art y gagne en densité, en émotion. Des mots simples , mais chacun dans sa mûre saveur ; une phrase naturellement grave ; u
5726  ; et quel beau titre ! « Saisir » n’est-ce point l’ acte essentiel de la poésie ? Toute poésie véritable n’est-elle pas pr
5727 e ! « Saisir » n’est-ce point l’acte essentiel de la poésie ? Toute poésie véritable n’est-elle pas proprement « saisissan
5728 n’est-elle pas proprement « saisissante » ? Mais le plus émouvant, c’est ici l’approche d’un silence partout pressenti, q
5729  saisissante » ? Mais le plus émouvant, c’est ici l’ approche d’un silence partout pressenti, qui s’impose, qui apaise le v
5730 lence partout pressenti, qui s’impose, qui apaise le vain débat de notre esprit : « Car l’on pense beaucoup trop haut, et
5731 qui apaise le vain débat de notre esprit : « Car l’ on pense beaucoup trop haut, et cela fait un vacarme terrible. » ay.
93 1929, Articles divers (1924–1930). La tour de Hölderlin (15 juillet 1929)
5732 La tour de Hölderlin (15 juillet 1929)o « Je lui ai raconté qu’il hab
5733 e une chaumière au bord d’un ruisseau, qu’il dort les portes ouvertes, et pendant des heures récite des odes grecques au mu
5734 des heures récite des odes grecques au murmure de l’ eau ; la Princesse de Homburg lui a fait cadeau d’un piano dont il a c
5735 es récite des odes grecques au murmure de l’eau ; la Princesse de Homburg lui a fait cadeau d’un piano dont il a coupé les
5736 burg lui a fait cadeau d’un piano dont il a coupé les cordes, mais pas toutes, en sorte que plusieurs touches sonnent encor
5737 lettre sur Hölderlin : « Ce piano dont il a cassé les cordes, c’est vraiment l’image de son âme ; j’ai voulu attirer là-des
5738 piano dont il a cassé les cordes, c’est vraiment l’ image de son âme ; j’ai voulu attirer là-dessus l’attention du médecin
5739 l’image de son âme ; j’ai voulu attirer là-dessus l’ attention du médecin, mais il est plus difficile de se faire comprendr
5740 se faire comprendre par un sot que par un fou. » L’ hiver dernier, m’occupant assez longuement d’un des poètes auxquels no
5741 t d’un des poètes auxquels notre temps doit vouer l’ attention la plus grave — car il vécut dans ces marches de l’esprit hu
5742 oètes auxquels notre temps doit vouer l’attention la plus grave — car il vécut dans ces marches de l’esprit humain qui con
5743 la plus grave — car il vécut dans ces marches de l’ esprit humain qui confinent peut-être à l’Esprit et dont certains des
5744 ches de l’esprit humain qui confinent peut-être à l’ Esprit et dont certains des plus purs d’entre nous se préparent à tent
5745 des plus purs d’entre nous se préparent à tenter le climat, — j’avais rêvé sur ce passage de l’émouvante Bettina, rêvé sa
5746 enter le climat, — j’avais rêvé sur ce passage de l’ émouvante Bettina, rêvé sans doute assez profondément pour qu’aujourd’
5747 sans doute assez profondément pour qu’aujourd’hui le hasard qui m’amène à Tubingue ne soit pas seulement un hasard… Hier,
5748 ue ne soit pas seulement un hasard… Hier, c’était la Pentecôte. La fête de la plus haute poésie. Mais dans ce siècle, où t
5749 seulement un hasard… Hier, c’était la Pentecôte. La fête de la plus haute poésie. Mais dans ce siècle, où tant de voix l’
5750 un hasard… Hier, c’était la Pentecôte. La fête de la plus haute poésie. Mais dans ce siècle, où tant de voix l’appellent,
5751 aute poésie. Mais dans ce siècle, où tant de voix l’ appellent, combien sont dignes de s’attendre au don du langage sacré ?
5752 angue de feu qui s’est posée sur Hölderlin et qui l’ a consumé… Digne ? — Un adolescent au visage de jeune fille qui rimait
5753 age de jeune fille qui rimait sagement des odes à la liberté… Et voici dans sa vie cette double venue de l’amour et du cha
5754 berté… Et voici dans sa vie cette double venue de l’ amour et du chant prophétique, confondant leurs flammes. Dix années da
5755 étique, confondant leurs flammes. Dix années dans le Grand Jeu. Dix années où le génie tourmente cet être faible, humilié
5756 mmes. Dix années dans le Grand Jeu. Dix années où le génie tourmente cet être faible, humilié par le monde. L’amour s’éloi
5757 ù le génie tourmente cet être faible, humilié par le monde. L’amour s’éloigne le premier, quand Hölderlin doit quitter la
5758 tourmente cet être faible, humilié par le monde. L’ amour s’éloigne le premier, quand Hölderlin doit quitter la maison de
5759 ’éloigne le premier, quand Hölderlin doit quitter la maison de Madame Gontard12, déchirement à peine sensible dans son œuv
5760 dans son œuvre. Car ce poète n’est peut-être que le lieu de sa poésie, — d’une poésie, l’on dirait, qui ne connaît pas so
5761 ut-être que le lieu de sa poésie, — d’une poésie, l’ on dirait, qui ne connaît pas son auteur. Qui parle par sa bouche ? Il
5762 ses Hymnes une sérénité presque effrayante. Vient le temps où le sens de son monologue entre terre et ciel lui échappe. Il
5763 ne sérénité presque effrayante. Vient le temps où le sens de son monologue entre terre et ciel lui échappe. Il jette encor
5764 rappelle — Ou bien envoie — un héros — Ou bien — la sagesse. » Mais le feu s’éteint — l’esprit souffle où il veut. Juin 1
5765 envoie — un héros — Ou bien — la sagesse. » Mais le feu s’éteint — l’esprit souffle où il veut. Juin 1802 : au moment où
5766 — Ou bien — la sagesse. » Mais le feu s’éteint — l’ esprit souffle où il veut. Juin 1802 : au moment où meurt Diotima, Höl
5767 meurt Diotima, Hölderlin errant loin d’elle (dans la région de Bordeaux croit-on), est frappé d’insolation ; sa folie d’un
5768 on), est frappé d’insolation ; sa folie d’un coup l’ envahit. C’est une sorte de vieillard qui reparaît en Allemagne. Et du
5769 ente années, ce pauvre corps abandonné vivra dans la petite tour de Tubingue, chez un charpentier — vivra très doucement,
5770 plicablement, une vie monotone de vieux maniaque. Le buisson ardent quitté par le feu se dessèche. Ce qui fut Hölderlin si
5771 e de vieux maniaque. Le buisson ardent quitté par le feu se dessèche. Ce qui fut Hölderlin signe maintenant Scardanelli de
5772 s qu’il donne aux visiteurs venus pour contempler la victime d’un miracle. — C’était l’époque des amateurs de ruines. Je s
5773 our contempler la victime d’un miracle. — C’était l’ époque des amateurs de ruines. Je suis descendu au bord de l’eau, un p
5774 s amateurs de ruines. Je suis descendu au bord de l’ eau, un peu au-dessous de la maison, en attendant l’heure d’ouverture.
5775 s descendu au bord de l’eau, un peu au-dessous de la maison, en attendant l’heure d’ouverture. Il y a là une station de ca
5776 eau, un peu au-dessous de la maison, en attendant l’ heure d’ouverture. Il y a là une station de canots de louage où j’ai v
5777 tzsche » à fond plat. Des saules se penchent vers l’ eau lente. Sur l’autre rive qui est celle d’une longue île, des étudia
5778 iants au crâne rasé se promènent un roman jaune à la main. L’un après l’autre, dans cette paresse de jour férié, les cloch
5779 après l’autre, dans cette paresse de jour férié, les clochers de la ville sonnent deux heures. Allons. Un de ces corridors
5780 dans cette paresse de jour férié, les clochers de la ville sonnent deux heures. Allons. Un de ces corridors de vieille mai
5781 ’étaient à demi encombrés d’armoires. Un couloir, la chambre. L’homme qui me conduit est le propriétaire actuel. « Monsieu
5782 emi encombrés d’armoires. Un couloir, la chambre. L’ homme qui me conduit est le propriétaire actuel. « Monsieur connaît Hö
5783 n couloir, la chambre. L’homme qui me conduit est le propriétaire actuel. « Monsieur connaît Hölderlin ? — questionne-t-il
5784 , ici à Francfort, écrivait Bettina, car aussitôt l’ on se met à raconter les choses les plus affreuses sur son compte, sim
5785 vait Bettina, car aussitôt l’on se met à raconter les choses les plus affreuses sur son compte, simplement parce qu’il a ai
5786 a, car aussitôt l’on se met à raconter les choses les plus affreuses sur son compte, simplement parce qu’il a aimé une femm
5787 l a aimé une femme, pour écrire Hypérion, et pour les gens d’ici, aimer, c’est seulement vouloir se marier… » — Et puis plu
5788 uloir se marier… » — Et puis plus tard on encadre les lettres des amants, on propose le couple à l’admiration des écoliers
5789 ard on encadre les lettres des amants, on propose le couple à l’admiration des écoliers en promenade, et le guide désigne
5790 re les lettres des amants, on propose le couple à l’ admiration des écoliers en promenade, et le guide désigne familièremen
5791 uple à l’admiration des écoliers en promenade, et le guide désigne familièrement l’image d’une femme par le nom qu’elle po
5792 s en promenade, et le guide désigne familièrement l’ image d’une femme par le nom qu’elle portait au mystère de l’amour… Tr
5793 ide désigne familièrement l’image d’une femme par le nom qu’elle portait au mystère de l’amour… Trois petites fenêtres orn
5794 ne femme par le nom qu’elle portait au mystère de l’ amour… Trois petites fenêtres ornées de cactus miséreux, une pipe qui
5795 rnées de cactus miséreux, une pipe qui traîne sur l’ appui ; le jardinet avec son banc et ses lilas fleuris qui trempent… T
5796 actus miséreux, une pipe qui traîne sur l’appui ; le jardinet avec son banc et ses lilas fleuris qui trempent… Tout est fa
5797 armotter. Vingt-sept ans dans cette chambre, avec le bruit de l’eau et cette complainte de malade épuisé après un grand ac
5798 ngt-sept ans dans cette chambre, avec le bruit de l’ eau et cette complainte de malade épuisé après un grand accès de fièvr
5799 de malade épuisé après un grand accès de fièvre… L’ agrément de ce monde, je l’ai vécu. Les joies de la jeunesse, voilà
5800 rand accès de fièvre… L’agrément de ce monde, je l’ ai vécu. Les joies de la jeunesse, voilà si longtemps, si longtemp
5801 fièvre… L’agrément de ce monde, je l’ai vécu. Les joies de la jeunesse, voilà si longtemps, si longtemps qu’elles ont
5802 grément de ce monde, je l’ai vécu. Les joies de la jeunesse, voilà si longtemps, si longtemps qu’elles ont fui. Avri
5803 . Il y avait encore plus de paix que maintenant. La grande allée sur l’île n’existait pas, en face, ni les maisons. Il vo
5804 plus de paix que maintenant. La grande allée sur l’ île n’existait pas, en face, ni les maisons. Il voyait des prairies et
5805 rande allée sur l’île n’existait pas, en face, ni les maisons. Il voyait des prairies et des collines basses, de l’autre cô
5806 airies et des collines basses, de l’autre côté de l’ eau jaune et verte… Quel est donc ce sommeil « dans la nuit de la vie 
5807 u jaune et verte… Quel est donc ce sommeil « dans la nuit de la vie » — et cet aveu mystérieux : « La perfection n’a pas d
5808 verte… Quel est donc ce sommeil « dans la nuit de la vie » — et cet aveu mystérieux : « La perfection n’a pas de plainte »
5809 la nuit de la vie » — et cet aveu mystérieux : «  La perfection n’a pas de plainte »… Vivait-il encore ? Ce lieu soudain m
5810 vait-il encore ? Ce lieu soudain m’angoisse. Mais le gardien : il y est comme chez lui. — Dormez-vous dans ce lit ? — Oh !
5811 — Oh ! répond-il, je pourrais aussi bien habiter la chambre. Il ne vient pas tant de visiteurs, et seulement de 2 à 4… Un
5812 4… Une rue étouffée entre des maisons pointues et les contreforts de l’Église du Chapitre : je vois s’y engager chaque jour
5813 entre des maisons pointues et les contreforts de l’ Église du Chapitre : je vois s’y engager chaque jour le fou au profil
5814 ise du Chapitre : je vois s’y engager chaque jour le fou au profil de vieille femme qui promène doucement dans cette calme
5815 e qui promène doucement dans cette calme Tubingue le secret d’une épouvantable mélancolie. Les étudiants le rencontrent, q
5816 Tubingue le secret d’une épouvantable mélancolie. Les étudiants le rencontrent, qui montent au Séminaire protestant : il le
5817 cret d’une épouvantable mélancolie. Les étudiants le rencontrent, qui montent au Séminaire protestant : il leur fait de gr
5818 protestant : il leur fait de grandes révérences… La rumeur et le cliquetis d’une grande terrasse de café au bord du Necka
5819 il leur fait de grandes révérences… La rumeur et le cliquetis d’une grande terrasse de café au bord du Neckar, sous les m
5820 e grande terrasse de café au bord du Neckar, sous les marronniers. À quatre heures, l’orchestre s’est mis à jouer des ringu
5821 du Neckar, sous les marronniers. À quatre heures, l’ orchestre s’est mis à jouer des ringues charmantes, jazz et clarinette
5822 charmantes, jazz et clarinette, chansons de mai. Les bateaux qui dérivent dans le voisinage se rapprochent, tournoyent len
5823 e, chansons de mai. Les bateaux qui dérivent dans le voisinage se rapprochent, tournoyent lentement dans la musique. Je n’
5824 isinage se rapprochent, tournoyent lentement dans la musique. Je n’aime pas les jeunes Doktors à lunettes, en costume de b
5825 urnoyent lentement dans la musique. Je n’aime pas les jeunes Doktors à lunettes, en costume de bain, qui pagayent vigoureus
5826 en costume de bain, qui pagayent vigoureusement, les dents serrées. (« Weg zur Kraft und Schönheit ! »). J’aime les bateau
5827 rées. (« Weg zur Kraft und Schönheit ! »). J’aime les bateaux plats et incertains, avec des Daphnés dedans, qui ne savent p
5828 bien ramer et qui lisent des magazines au fil de l’ eau, ce qui est le comble des vacances. À une table voisine, des adole
5829 lisent des magazines au fil de l’eau, ce qui est le comble des vacances. À une table voisine, des adolescents balafrés fo
5830 ues à une compagnie de cavaliers qui passe devant la statue d’Eberhard le Barbu. Des bourgeois se rient contre par-dessus
5831 sus leurs chopes. « Gemütlichkeit ». Évidemment : la vie normale. Il y a pourtant cette petite chambre… Est-ce que tout ce
5832 petite chambre… Est-ce que tout cela existe dans le même monde ? (Il est bon de poser parfois de ces grandes questions na
5833 a ne peut que mal finir. Ceux du bon sens hochent la tête et citent la phrase la plus malencontreuse de Pascal : le « Qui
5834 finir. Ceux du bon sens hochent la tête et citent la phrase la plus malencontreuse de Pascal : le « Qui veut faire l’ange…
5835 x du bon sens hochent la tête et citent la phrase la plus malencontreuse de Pascal : le « Qui veut faire l’ange… » a autor
5836 tent la phrase la plus malencontreuse de Pascal : le « Qui veut faire l’ange… » a autorisé des générations de « bourgeois
5837 us malencontreuse de Pascal : le « Qui veut faire l’ ange… » a autorisé des générations de « bourgeois cultivés » à faire l
5838 des générations de « bourgeois cultivés » à faire la bête dès qu’il s’agit de l’âme. Dans la bouche de certains, cela pren
5839 is cultivés » à faire la bête dès qu’il s’agit de l’ âme. Dans la bouche de certains, cela prend l’air de je ne sais quelle
5840 » à faire la bête dès qu’il s’agit de l’âme. Dans la bouche de certains, cela prend l’air de je ne sais quelle revanche du
5841 dont ils se sentent bénéficiaires. Ah ! vraiment les malins ! qui ont préféré faire tout de suite la bête : comme cela on
5842 les malins ! qui ont préféré faire tout de suite la bête : comme cela on est mieux pour donner le coup de pied de l’âne…
5843 ite la bête : comme cela on est mieux pour donner le coup de pied de l’âne… Écoutons plutôt Bettina — la vérité est plus h
5844 cela on est mieux pour donner le coup de pied de l’ âne… Écoutons plutôt Bettina — la vérité est plus humaine, est plus di
5845 coup de pied de l’âne… Écoutons plutôt Bettina — la vérité est plus humaine, est plus divine, quand c’est une telle femme
5846 est plus divine, quand c’est une telle femme qui la confesse : « Celui qui entre en commerce trop étroit avec le ciel, le
5847  : « Celui qui entre en commerce trop étroit avec le ciel, les dieux le vouent au malheur. » Ô cette chambre, où pénètre l
5848 i qui entre en commerce trop étroit avec le ciel, les dieux le vouent au malheur. » Ô cette chambre, où pénètre la facilité
5849 e en commerce trop étroit avec le ciel, les dieux le vouent au malheur. » Ô cette chambre, où pénètre la facilité atroce d
5850 vouent au malheur. » Ô cette chambre, où pénètre la facilité atroce de cette fin d’après-midi, ces musiquettes et ces par
5851 , de ces mondes à mes yeux soudain simultanés ?… Le tragique de la facilité, c’est qu’elle n’est qu’un oubli. Et pourtant
5852 à mes yeux soudain simultanés ?… Le tragique de la facilité, c’est qu’elle n’est qu’un oubli. Et pourtant, comme elle pa
5853 blie, triomphante, à beau fixe. Pourquoi troubler le miroir innocent de ces eaux, ces âmes indulgentes à leur banalité ? E
5854 amais rien ? Ou bien, peut-être, seulement, quand l’ amour leur donne une petite fièvre, — cette semaine de leur jeunesse o
5855 choses généreuses autour d’eux… Cela s’oublie. Et l’ amour, tout justement, nous fait comprendre, dans le temps même qu’il
5856 amour, tout justement, nous fait comprendre, dans le temps même qu’il nous entr’ouvre le ciel, qu’il est bon qu’il y ait l
5857 prendre, dans le temps même qu’il nous entr’ouvre le ciel, qu’il est bon qu’il y ait le monde… Mais que cette musique vulg
5858 ous entr’ouvre le ciel, qu’il est bon qu’il y ait le monde… Mais que cette musique vulgaire, par quel hasard, donne l’acco
5859 ue cette musique vulgaire, par quel hasard, donne l’ accord qui m’ouvre un vrai silence : déjà je leur échappe — je t’échap
5860 , transitoire, allusif. Tout se remet à signifier l’ absence. 11. Bettina von Arnim-Brentano : Die Günderode. 12. Où il
5861 . 12. Où il était précepteur. Madame Gontard est la Diotima de l’Hypérion et des poèmes. o. Rougemont Denis de, « La to
5862 ypérion et des poèmes. o. Rougemont Denis de, «  La tour de Hölderlin », La Quinzaine artistique et littéraire, Neuchâtel
5863 o. Rougemont Denis de, « La tour de Hölderlin », La Quinzaine artistique et littéraire, Neuchâtel, 15 juillet 1929, p. 35
94 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jean Cassou, La Clef des songes (août 1929)
5864 Jean Cassou, La Clef des songes (août 1929)az Après cet austère Pays qui n’est à p
5865 Après cet austère Pays qui n’est à personne paru l’ année dernière — un livre assez troublant et qu’on a trop peu remarqué
5866 evient à son romantisme, à notre cher romantisme. La Clef des songes est de nouveau une dérive fantaisiste dans ce monde u
5867 monde un peu plus léger, un peu plus profond que le vrai, où l’Éloge de la folie nous entraînait naguère. Jean Cassou vag
5868 u plus léger, un peu plus profond que le vrai, où l’ Éloge de la folie nous entraînait naguère. Jean Cassou vagabonde à tra
5869 r, un peu plus profond que le vrai, où l’Éloge de la folie nous entraînait naguère. Jean Cassou vagabonde à travers ses hi
5870 à travers ses histoires comme son Pierangelo dans la vie. Le hasard, complice des poètes, lui fait rencontrer des êtres bi
5871 s ses histoires comme son Pierangelo dans la vie. Le hasard, complice des poètes, lui fait rencontrer des êtres bizarres a
5872 s il n’hésite pas à faire un bout de chemin, Hans le gardeur d’oies, le gueux Joseph qui parle à son chien en mourant, une
5873 faire un bout de chemin, Hans le gardeur d’oies, le gueux Joseph qui parle à son chien en mourant, une fille qui chante e
5874 une fille qui chante et des enfants surtout, dès le début, puis plus tard encore, dans les songes des grandes personnes,
5875 urtout, dès le début, puis plus tard encore, dans les songes des grandes personnes, — puis tous se perdent, comme des souve
5876 , — puis tous se perdent, comme des souvenirs, et l’ on retrouve un peu plus loin d’autres souvenirs attristés par le temps
5877 un peu plus loin d’autres souvenirs attristés par le temps, des visages qui ne sont plus tout à fait les mêmes, des bonheu
5878 e temps, des visages qui ne sont plus tout à fait les mêmes, des bonheurs qui signifient plus de désespoir qu’ils ne s’en d
5879 pleurer. Quel dommage qu’il s’égare parfois dans les maisons des grands bourgeois, où tout, soudain, devient plus terne. M
5880 oésie nous replonge dans une atmosphère autre, où les personnages ont cet air un peu ivre et capable de n’importe quoi, cet
5881 te quoi, cet air dangereux et tendre que prennent les hommes en liberté. Mais ils ne sont jamais méchants, et seulement aux
5882 de liberté dont nous avons besoin pour croire que le monde actuel n’est pas un cas désespéré. Mais voici déjà dans l’œuvre
5883 n’est pas un cas désespéré. Mais voici déjà dans l’ œuvre de Jean Cassou, et singulièrement dans ce livre, beaucoup de ces
5884 rs assez de vérité dans une histoire où il y a de la poésie. az. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Jean Cassou, La C
5885 Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Jean Cassou, La Clef des songes  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genè
95 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Rolland de Renéville, Rimbaud le voyant (août 1929)
5886 André Rolland de Renéville, Rimbaud le voyant (août 1929)ba À lire ce petit livre et le parallèle qu’il é
5887 voyant (août 1929)ba À lire ce petit livre et le parallèle qu’il établit entre le yogabb telle que l’enseignaient les
5888 e petit livre et le parallèle qu’il établit entre le yogabb telle que l’enseignaient les upanishads et la tentative poétiq
5889 parallèle qu’il établit entre le yogabb telle que l’ enseignaient les upanishads et la tentative poétique de Rimbaud, l’on
5890 établit entre le yogabb telle que l’enseignaient les upanishads et la tentative poétique de Rimbaud, l’on s’étonne qu’il a
5891 yogabb telle que l’enseignaient les upanishads et la tentative poétique de Rimbaud, l’on s’étonne qu’il ait fallu plus d’u
5892 s upanishads et la tentative poétique de Rimbaud, l’ on s’étonne qu’il ait fallu plus d’un demi-siècle pour qu’une telle in
5893 demi-siècle pour qu’une telle interprétation voie le jour. Cela pourrait donner lieu à de mélancoliques réflexions sur le
5894 ait donner lieu à de mélancoliques réflexions sur le génie « poétique » français… Mais non, nous préférons voir ici l’un d
5895 gnes qui de toutes parts annoncent une rentrée de l’ âme dans la littérature la plus spirituelle du monde. La thèse que déf
5896 toutes parts annoncent une rentrée de l’âme dans la littérature la plus spirituelle du monde. La thèse que défend l’auteu
5897 nnoncent une rentrée de l’âme dans la littérature la plus spirituelle du monde. La thèse que défend l’auteur de cet essai
5898 dans la littérature la plus spirituelle du monde. La thèse que défend l’auteur de cet essai — la voyance de Rimbaud — est
5899 la plus spirituelle du monde. La thèse que défend l’ auteur de cet essai — la voyance de Rimbaud — est une de ces évidences
5900 onde. La thèse que défend l’auteur de cet essai — la voyance de Rimbaud — est une de ces évidences qu’il est bon de propos
5901 une de ces évidences qu’il est bon de proposer à la réflexion de notre temps, ne fût-ce que pour faite honte à ceux qui s
5902 telle honte, de leur indifférence à l’endroit de l’ être le plus monstrueusement pur qui se soit révélé par le truchement
5903 honte, de leur indifférence à l’endroit de l’être le plus monstrueusement pur qui se soit révélé par le truchement de la p
5904 e plus monstrueusement pur qui se soit révélé par le truchement de la poésie française. — Livre un peu didactique, trop at
5905 ement pur qui se soit révélé par le truchement de la poésie française. — Livre un peu didactique, trop attentif à sa propr
5906 s inspiré par cet enthousiasme sacré que requiert l’ œuvre de Rimbaud. Regrettons seulement qu’il n’élargisse pas plus une
5907 as plus une question aussi centrale — qui est, si l’ on veut, la question d’Orient-Occident. Et pourquoi cette hostilité de
5908 question aussi centrale — qui est, si l’on veut, la question d’Orient-Occident. Et pourquoi cette hostilité de sectaire c
5909 t. Et pourquoi cette hostilité de sectaire contre l’ interprétation proposée par Claudel et Isabelle Rimbaud ? Si Claudel s
5910 ontré partial en faisant de Rimbaud, « mystique à l’ état sauvage », un catholique qui s’ignore, il n’est pas plus admissib
5911 us admissible d’inférer du mépris de Rimbaud pour le catholicisme à son mépris pour la révélation évangélique. Je ne vois
5912 de Rimbaud pour le catholicisme à son mépris pour la révélation évangélique. Je ne vois là que l’indice d’une confusion bi
5913 pour la révélation évangélique. Je ne vois là que l’ indice d’une confusion bien française, hélas. ba. Rougemont Denis d
5914 Compte rendu] André Rolland de Renéville, Rimbaud le voyant  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, août
5915 ue de Genève, Genève, août 1929, p. 250-251. bb. Le féminin est ici conservé, conformément au texte original.
96 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Julien Benda, La Fin de l’Éternel (novembre 1929)
5916 Julien Benda, La Fin de l’Éternel (novembre 1929)bc Ce n’est plus l’heure de venir
5917 Julien Benda, La Fin de l’ Éternel (novembre 1929)bc Ce n’est plus l’heure de venir prendre po
5918 n de l’Éternel (novembre 1929)bc Ce n’est plus l’ heure de venir prendre position dans un débat où les voix les mieux éc
5919 ’heure de venir prendre position dans un débat où les voix les mieux écoutées ont dit ce qu’elles avaient à dire. Et d’autr
5920 venir prendre position dans un débat où les voix les mieux écoutées ont dit ce qu’elles avaient à dire. Et d’autre part, l
5921 dit ce qu’elles avaient à dire. Et d’autre part, les lecteurs de cette revue connaissent la thèse de la Trahison des Clerc
5922 tre part, les lecteurs de cette revue connaissent la thèse de la Trahison des Clercs 11, thèse dont la Fin de l’Éternel ne
5923 s lecteurs de cette revue connaissent la thèse de la Trahison des Clercs 11, thèse dont la Fin de l’Éternel ne fait que re
5924 la thèse de la Trahison des Clercs 11, thèse dont la Fin de l’Éternel ne fait que reprendre la défense contre ses adversai
5925 e la Trahison des Clercs 11, thèse dont la Fin de l’ Éternel ne fait que reprendre la défense contre ses adversaires de tou
5926 se dont la Fin de l’Éternel ne fait que reprendre la défense contre ses adversaires de tous bords. Je voudrais souligner s
5927 es de tous bords. Je voudrais souligner seulement la beauté de l’effort désintéressé de Julien Benda, et l’obligation où n
5928 rds. Je voudrais souligner seulement la beauté de l’ effort désintéressé de Julien Benda, et l’obligation où nous sommes to
5929 auté de l’effort désintéressé de Julien Benda, et l’ obligation où nous sommes tous désormais de répondre pour nous-mêmes à
5930 mise en demeure. Je suis loin de partager toutes les idées de M. Benda, sur le plan philosophique en particulier, où je me
5931 hèse de M. Marcel de ce qu’elle « mène loin… dans l’ ordre moral ». Et quand cela serait ! dirons-nous, — avec le Benda qui
5932 ral ». Et quand cela serait ! dirons-nous, — avec le Benda qui ne trahit pas.) D’autre part, de plus impertinents que moi
5933 s que moi ne manqueront pas de faire observer que la « fin de l’éternel », la chute de l’idée dans la matière, est un phén
5934 manqueront pas de faire observer que la « fin de l’ éternel », la chute de l’idée dans la matière, est un phénomène exacte
5935 as de faire observer que la « fin de l’éternel », la chute de l’idée dans la matière, est un phénomène exactement aussi vi
5936 observer que la « fin de l’éternel », la chute de l’ idée dans la matière, est un phénomène exactement aussi vieux que le m
5937 la « fin de l’éternel », la chute de l’idée dans la matière, est un phénomène exactement aussi vieux que le monde. Mais M
5938 ière, est un phénomène exactement aussi vieux que le monde. Mais M. Benda distinguera, et ils seront confondus. Car il y a
5939 un sophiste en M. Benda, un polémiste qui joue de la raison ratiocinante tout comme si elle n’était pas le contraire de la
5940 aison ratiocinante tout comme si elle n’était pas le contraire de la Raison de Spinoza. Nul mieux que lui ne s’entend défi
5941 te tout comme si elle n’était pas le contraire de la Raison de Spinoza. Nul mieux que lui ne s’entend définir et classer c
5942 lui permettent de triompher syllogistiquement de l’ adversaire, sinon de la difficulté elle-même. Mais pour gênante que so
5943 mpher syllogistiquement de l’adversaire, sinon de la difficulté elle-même. Mais pour gênante que soit souvent son adresse
5944 dresse de logicien, elle ne doit pas nous masquer l’ audace tranquille et admirable de son point de vue radicalement antimo
5945 n pic trop élevé pour qu’on y puisse vivre, c’est l’ impossible. Mais justement, la gloire de M. Benda sera d’avoir soutenu
5946 puisse vivre, c’est l’impossible. Mais justement, la gloire de M. Benda sera d’avoir soutenu que l’humanité a besoin qu’on
5947 t, la gloire de M. Benda sera d’avoir soutenu que l’ humanité a besoin qu’on lui demande l’impossible. Et quand bien même e
5948 soutenu que l’humanité a besoin qu’on lui demande l’ impossible. Et quand bien même elle croirait n’en avoir plus besoin. C
5949 roirait n’en avoir plus besoin. Cet extrémisme de la pensée intemporelle, en butte aux sarcasmes des extrémistes de droite
5950 ît que plus pur. « Noms de clowns qui me viennent l’ esprit : Julien Benda… », écrit Aragon. Et Daudet nous apprend que « l
5951 da… », écrit Aragon. Et Daudet nous apprend que «  le petit Benda est un fameux serin ». Mais ces affirmations sont exactem
5952 a pas disputer à M. Benda, c’est son dur amour de la vérité tout court. Celle-là même qui paraît anarchique dans un monde
5953 i que relativement à un rendement. Rien, pas même la religion. 11. Cf. l’article de M. Daniel Halévy (décembre 1927) et
5954 rendement. Rien, pas même la religion. 11. Cf. l’ article de M. Daniel Halévy (décembre 1927) et la réponse de M. Benda
5955 l’article de M. Daniel Halévy (décembre 1927) et la réponse de M. Benda (janvier 1928). bc. Rougemont Denis de, « [Comp
5956 ougemont Denis de, « [Compte rendu] Julien Benda, La Fin de l’Éternel  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Gen
5957 enis de, « [Compte rendu] Julien Benda, La Fin de l’ Éternel  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, novem
97 1929, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). L’ordre social. Le Libéralisme. L’inspiration (novembre 1929)
5958 L’ ordre social. Le Libéralisme. L’inspiration (novembre 1929)ab L’o
5959 L’ordre social. Le Libéralisme. L’inspiration (novembre 1929)ab L’ordre social I
5960 L’ordre social. Le Libéralisme. L’ inspiration (novembre 1929)ab L’ordre social Il y avait une fo
5961 Libéralisme. L’inspiration (novembre 1929)ab L’ ordre social Il y avait une fois un jeune homme comme les autres. S
5962 ocial Il y avait une fois un jeune homme comme les autres. Soudain il lui pousse des ailes, une grande paire d’ailes. Al
5963 ait-on s’émerveiller ? Mais déjà Freud expliquait le monstre, les chaires le dénonçaient, et les précieuses trouvaient cel
5964 rveiller ? Mais déjà Freud expliquait le monstre, les chaires le dénonçaient, et les précieuses trouvaient cela d’un romant
5965 ais déjà Freud expliquait le monstre, les chaires le dénonçaient, et les précieuses trouvaient cela d’un romantisme ! ma c
5966 iquait le monstre, les chaires le dénonçaient, et les précieuses trouvaient cela d’un romantisme ! ma chère, d’un mauvais g
5967 antisme ! ma chère, d’un mauvais goût ! Cependant le jeune homme agitait ses ailes non sans une ingénue fierté. Mais au co
5968 e ingénue fierté. Mais au courant d’air s’enrhuma le grand-papa. On craignit de le perdre. — « Eh ! quoi, — vinrent lui di
5969 ant d’air s’enrhuma le grand-papa. On craignit de le perdre. — « Eh ! quoi, — vinrent lui dire ses amis, — l’orgueil t’ave
5970 re. — « Eh ! quoi, — vinrent lui dire ses amis, —  l’ orgueil t’aveugle-t-il ? Veux-tu conserver, ô cruel, des ailes qui don
5971 ur, ô pervers, ô disciple de Nietzsche ! » — Sous le poids de cette accusation, comment ne point céder : il fit couper ses
5972 ment ne point céder : il fit couper ses ailes. On le félicita de son retour à l’état normal, qui est pédestre. Mais à part
5973 couper ses ailes. On le félicita de son retour à l’ état normal, qui est pédestre. Mais à partir de ce jour, on lui fit se
5974 ’en a pas sera méprisé parce qu’il n’en a pas. Le libéralisme Seigneur ! clamaient-ils, combien complexes sont les p
5975 Seigneur ! clamaient-ils, combien complexes sont les problèmes que vous proposez à notre bonne volonté gémissante ! Dieu,
5976 , leur envoya un ange porteur d’une solution fort simple qui d’ailleurs était la bonne, car le grand Remède, c’est un Simple.
5977 r d’une solution fort simple qui d’ailleurs était la bonne, car le grand Remède, c’est un Simple. Des hurlements de rage n
5978 on fort simple qui d’ailleurs était la bonne, car le grand Remède, c’est un Simple. Des hurlements de rage ne tardèrent po
5979 urs était la bonne, car le grand Remède, c’est un Simple . Des hurlements de rage ne tardèrent point à s’élever de toutes parts
5980 ge ne tardèrent point à s’élever de toutes parts. Les uns défendaient la Démocratie outragée, les autres disaient qu’il n’y
5981 t à s’élever de toutes parts. Les uns défendaient la Démocratie outragée, les autres disaient qu’il n’y a plus de morale,
5982 arts. Les uns défendaient la Démocratie outragée, les autres disaient qu’il n’y a plus de morale, et ces jeunes gens ont un
5983 ale, et ces jeunes gens ont une façon de trancher les questions qui vous désarme. Craignant qu’on ne lui fît un mauvais par
5984 rme. Craignant qu’on ne lui fît un mauvais parti, l’ ange trouva son salut dans un subterfuge : il insinua qu’il parlait au
5985 il parlait au nom d’une secte orientale. Aussitôt la discussion de reprendre, et l’on parla défense de l’Occident. L’ange
5986 rientale. Aussitôt la discussion de reprendre, et l’ on parla défense de l’Occident. L’ange s’enfuit par l’un des nombreux
5987 discussion de reprendre, et l’on parla défense de l’ Occident. L’ange s’enfuit par l’un des nombreux trous de leurs raisonn
5988 e reprendre, et l’on parla défense de l’Occident. L’ ange s’enfuit par l’un des nombreux trous de leurs raisonnements. L
5989 ’un des nombreux trous de leurs raisonnements. L’ inspiration Comme le poète terminait sa théorie sur la nature de l’
5990 de leurs raisonnements. L’inspiration Comme le poète terminait sa théorie sur la nature de l’inspiration, un doute l
5991 ration Comme le poète terminait sa théorie sur la nature de l’inspiration, un doute lui vint. Il alla au cinéma. On don
5992 me le poète terminait sa théorie sur la nature de l’ inspiration, un doute lui vint. Il alla au cinéma. On donnait un film
5993 au cinéma. On donnait un film voluptueux. Il aima l’ héroïne, mais sans espoir. Il lui écrivit, en sortant de là, dans une
5994 tant de là, dans une crèmerie pleine de couples à la mode. Mais en écrivant il pensait à une femme blonde assise près de l
5995 près de lui. Ayant demandé un timbre pour attirer l’ attention de la femme blonde — sans résultat —, il écrivit une adresse
5996 ant demandé un timbre pour attirer l’attention de la femme blonde — sans résultat —, il écrivit une adresse réelle, et mit
5997 résultat —, il écrivit une adresse réelle, et mit la lettre dans la première boîte venue. Le lendemain, il reçut une répon
5998 e, et mit la lettre dans la première boîte venue. Le lendemain, il reçut une réponse : « Vous avez commis une erreur, cher
5999 ma bénédiction, je suis votre amie Joséphine. » — Le poète reprit son manuscrit et conclut : « L’inspiration est le nom qu
6000  » — Le poète reprit son manuscrit et conclut : «  L’ inspiration est le nom qu’on donne en poésie à une suite de malentendu
6001 it son manuscrit et conclut : « L’inspiration est le nom qu’on donne en poésie à une suite de malentendus heureusement enc
6002 lui valut une Muse. ab. Rougemont Denis de, «  L’ ordre social. Le Libéralisme. L’inspiration », Revue de Belles-Lettres
6003 se. ab. Rougemont Denis de, « L’ordre social. Le Libéralisme. L’inspiration », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuch
6004 emont Denis de, « L’ordre social. Le Libéralisme. L’ inspiration », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Frib
98 1929, Les Méfaits de l’instruction publique (1972). Avant-propos
6005 Avant-propos Le dire une bonne fois.   Il ne faut pas songer à décrire en 50 petites
6006 aut pas songer à décrire en 50 petites pages tous les méfaits de l’instruction publique. C’est à peine assez pour indiquer
6007 à décrire en 50 petites pages tous les méfaits de l’ instruction publique. C’est à peine assez pour indiquer leur ordre de
6008 e grandeur ; à quoi je me bornerai. Il a paru sur le sujet de l’instruction publique deux petits livres1 excellents dont j
6009 à quoi je me bornerai. Il a paru sur le sujet de l’ instruction publique deux petits livres1 excellents dont je considère
6010 deux petits livres1 excellents dont je considère les thèses comme acquises : L’Éloge de l’ignorance, de M. Abel Bonnard, e
6011 nts dont je considère les thèses comme acquises : L’ Éloge de l’ignorance, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas l
6012 considère les thèses comme acquises : L’Éloge de l’ ignorance, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas les enfants,
6013  : L’Éloge de l’ignorance, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas les enfants, d’Henri Roorda. Le premier montre q
6014 e, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas les enfants, d’Henri Roorda. Le premier montre que la science apprise à l
6015 es enfants, d’Henri Roorda. Le premier montre que la science apprise à l’école appauvrit l’homme de tout ce que son ignora
6016 oorda. Le premier montre que la science apprise à l’ école appauvrit l’homme de tout ce que son ignorance respectait, et ne
6017 montre que la science apprise à l’école appauvrit l’ homme de tout ce que son ignorance respectait, et ne lui donne à la pl
6018 e que son ignorance respectait, et ne lui donne à la place que des laideurs et de la prétention. L’autre, avec l’ironie tr
6019 et ne lui donne à la place que des laideurs et de la prétention. L’autre, avec l’ironie tranquille du bon sens bafoué et q
6020 e des laideurs et de la prétention. L’autre, avec l’ ironie tranquille du bon sens bafoué et qui s’en moque, décrit la stup
6021 ille du bon sens bafoué et qui s’en moque, décrit la stupidité de l’enseignement tel qu’il est pratiqué dans nos collèges.
6022 bafoué et qui s’en moque, décrit la stupidité de l’ enseignement tel qu’il est pratiqué dans nos collèges. Mon dessein est
6023 e réaction de tempérament. Je marque d’autre part la nécessité de tout cela qui me blesse, la liaison fatale avec la démoc
6024 tre part la nécessité de tout cela qui me blesse, la liaison fatale avec la démocratie, de tout ce qui moleste ma liberté
6025 e tout cela qui me blesse, la liaison fatale avec la démocratie, de tout ce qui moleste ma liberté et sans doute celle de
6026 cialiste, qui a été établi par coup de force, que les libéraux ont admis, conformément à leurs maximes, et toléré malgré le
6027 humeur. Ce régime de punaises jaunâtres aboutit à l’ instruction publique et grâce à elle prolonge abusivement sa terne exi
6028 elle prolonge abusivement sa terne existence. Je l’ ai subi ; l’on va voir comment. De pareils souvenirs légitiment toutes
6029 ge abusivement sa terne existence. Je l’ai subi ; l’ on va voir comment. De pareils souvenirs légitiment toutes les haines.
6030 r comment. De pareils souvenirs légitiment toutes les haines. Je serai méchant, parce que j’en ai gros sur le cœur. D’aille
6031 nes. Je serai méchant, parce que j’en ai gros sur le cœur. D’ailleurs, ce petit écrit ne peut servir à rien. — Alors ? — J
6032 apper : celui de naïveté. Définition du naïf dans le monde moderne : individu qui soutient des idées qui ne rapportent rie
6033 r au nom de ma génération, ne m’étant pas livré à l’ enquête préalable qui seule eût pu, à la rigueur, me donner ce droit b
6034 s livré à l’enquête préalable qui seule eût pu, à la rigueur, me donner ce droit bien inutile. Pourtant je sais qu’à droit
6035 e comme à gauche, ils sont plus nombreux qu’on ne le pense, ceux qui refusent d’être complices dans cet attentat à l’intég
6036 qui refusent d’être complices dans cet attentat à l’ intégrité humaine qu’est en fait l’esprit démocratique. Là-dessus, ces
6037 cet attentat à l’intégrité humaine qu’est en fait l’ esprit démocratique. Là-dessus, ces messieurs se lamentent, la jeuness
6038 ocratique. Là-dessus, ces messieurs se lamentent, la jeunesse d’aujourd’hui, etc. Évidemment. Mais il y a les jérémiades e
6039 nesse d’aujourd’hui, etc. Évidemment. Mais il y a les jérémiades et il y a les raisons. Hors le domaine de l’amour, où tout
6040 Évidemment. Mais il y a les jérémiades et il y a les raisons. Hors le domaine de l’amour, où tout se confond miraculeuseme
6041 il y a les jérémiades et il y a les raisons. Hors le domaine de l’amour, où tout se confond miraculeusement, gémir n’est p
6042 émiades et il y a les raisons. Hors le domaine de l’ amour, où tout se confond miraculeusement, gémir n’est pas un argument
6043 eusement, gémir n’est pas un argument. Je demande le droit de démolir. Et me l’accorde aussitôt. Sans conditions. Mon rôle
6044 n argument. Je demande le droit de démolir. Et me l’ accorde aussitôt. Sans conditions. Mon rôle n’est pas de proposer une
6045 de vitupérer ce que je vois, qui est laid. Quand la soupe est brûlée, on la renvoie, même si l’on n’est pas capable d’en
6046 vois, qui est laid. Quand la soupe est brûlée, on la renvoie, même si l’on n’est pas capable d’en faire soi-même une meill
6047 Quand la soupe est brûlée, on la renvoie, même si l’ on n’est pas capable d’en faire soi-même une meilleure. Mais j’aperçoi
6048 Mais j’aperçois là-bas, vautré derrière son bock, le Citoyen conscient et organisé pour la discussion. Il retrousse ses ma
6049 e son bock, le Citoyen conscient et organisé pour la discussion. Il retrousse ses manches. Il s’apprête à cracher sur ce q
6050 Oh ! oh ! oh ! il va parler, de grâce mettez-lui les mains sur la bouche ! Donnez-lui sa choucroute, tapez-lui dans le dos
6051 ! il va parler, de grâce mettez-lui les mains sur la bouche ! Donnez-lui sa choucroute, tapez-lui dans le dos, amenez-lui
6052 bouche ! Donnez-lui sa choucroute, tapez-lui dans le dos, amenez-lui le Guguss 2, des bretzels, sa petite amie, au secours
6053 sa choucroute, tapez-lui dans le dos, amenez-lui le Guguss 2, des bretzels, sa petite amie, au secours ! Car j’ai encore
6054 ire. Dès qu’une voix s’élève pour mettre en doute l’ excellence du principe de l’instruction publique, on crie sur tous les
6055 pour mettre en doute l’excellence du principe de l’ instruction publique, on crie sur tous les bancs : « Alors, vous êtes
6056 ncipe de l’instruction publique, on crie sur tous les bancs : « Alors, vous êtes pour un retour à la barbarie ? » Si ce réf
6057 s les bancs : « Alors, vous êtes pour un retour à la barbarie ? » Si ce réflexe indique un mépris vraiment exagéré pour la
6058 e réflexe indique un mépris vraiment exagéré pour la jugeotte de l’adversaire ou s’il traduit simplement cette mauvaise fo
6059 ue un mépris vraiment exagéré pour la jugeotte de l’ adversaire ou s’il traduit simplement cette mauvaise foi pas même cons
6060 ise foi pas même consciente, cette lâcheté devant la discussion précise de leurs principes par quoi se signalent bien souv
6061 à cent « réponses » de cette sorte. Et je tiens à les classer par avance en deux catégories dont je vais régler le compte s
6062 par avance en deux catégories dont je vais régler le compte sommairement. Cela n’empêchera personne de me resservir ces ar
6063 A. Réponses du type : on ne peut pas aller contre l’ époque, vous êtes un pauvre utopiste, etc. Ce sont les positivistes qu
6064 poque, vous êtes un pauvre utopiste, etc. Ce sont les positivistes qui parlent ainsi, ceux qui croient aux faits. Je leur r
6065 Je leur réponds : 1° qu’ils ne peuvent me dénier le droit de juger ces faits ; 2° qu’ils ne peuvent, en vertu même de leu
6066 euvent, en vertu même de leur scepticisme quant à la valeur réformatrice des idées, m’accuser de faire une critique danger
6067 critique dangereuse ; 3° que néanmoins je crois à l’ efficace de certaines utopies. (Les religions, la découverte de l’Amér
6068 oins je crois à l’efficace de certaines utopies. ( Les religions, la découverte de l’Amérique par Christophe Colomb, l’Europ
6069 l’efficace de certaines utopies. (Les religions, la découverte de l’Amérique par Christophe Colomb, l’Europe napoléonienn
6070 rtaines utopies. (Les religions, la découverte de l’ Amérique par Christophe Colomb, l’Europe napoléonienne, la Russie d’ap
6071 a découverte de l’Amérique par Christophe Colomb, l’ Europe napoléonienne, la Russie d’après Karl Marx, le vol des frères W
6072 ue par Christophe Colomb, l’Europe napoléonienne, la Russie d’après Karl Marx, le vol des frères Wright, et tout bêtement,
6073 urope napoléonienne, la Russie d’après Karl Marx, le vol des frères Wright, et tout bêtement, c’est le cas de le dire : l’
6074 le vol des frères Wright, et tout bêtement, c’est le cas de le dire : l’instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d
6075 frères Wright, et tout bêtement, c’est le cas de le dire : l’instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d’aller con
6076 ight, et tout bêtement, c’est le cas de le dire : l’ instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d’aller contre l’époq
6077 dire : l’instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d’aller contre l’époque, et on le peut efficacement. 2° rira bi
6078 blique.) Résumé : 1° On a le droit d’aller contre l’ époque, et on le peut efficacement. 2° rira bien qui rira le dernier.
6079 : 1° On a le droit d’aller contre l’époque, et on le peut efficacement. 2° rira bien qui rira le dernier. B. Réponses du
6080 rétrograde, un infâme réactionnaire, etc. Ce sont les partisans d’une démocratie progressiste et tolérante qui se livrent à
6081 lérante qui se livrent à ces excès de langage. Je les renvoie en corps au chapitre 5 où je traiterai de cet aspect du probl
6082 e 5 où je traiterai de cet aspect du problème que l’ on peut appeler la question de droit. Certains, en effet, tirent toute
6083 i de cet aspect du problème que l’on peut appeler la question de droit. Certains, en effet, tirent toute leur force dans l
6084 Certains, en effet, tirent toute leur force dans les discussions de la tranquillité avec laquelle ils brouillent les faits
6085 , tirent toute leur force dans les discussions de la tranquillité avec laquelle ils brouillent les faits et les principes.
6086 s de la tranquillité avec laquelle ils brouillent les faits et les principes. Tourmentés par les scrupules de leur conscien
6087 uillité avec laquelle ils brouillent les faits et les principes. Tourmentés par les scrupules de leur conscience libérale,
6088 illent les faits et les principes. Tourmentés par les scrupules de leur conscience libérale, ils fuient la rigueur jusque d
6089 scrupules de leur conscience libérale, ils fuient la rigueur jusque dans leurs raisonnements. Pour moi qui cherche à démêl
6090 urs raisonnements. Pour moi qui cherche à démêler la vérité sans égards aux dérangements, même violents, que cela ne manqu
6091 jamais de provoquer, je me propose de marquer ici la distinction classique du fait et du droit ; et c’est pourquoi je cons
6092 droit ; et c’est pourquoi je considérerai d’abord l’ instruction publique dans ses réalisations actuelles, puis au terme de
6093 d’outrages au bon sens peuvent être légitimés par le but final de notre institution-tabou.   1. Je ne puis naturellement
6094 1. Je ne puis naturellement pas mentionner tous les ouvrages scientifiques. Les meilleurs sortent de l’Institut Rousseau.
6095 t pas mentionner tous les ouvrages scientifiques. Les meilleurs sortent de l’Institut Rousseau. 2. Guguss, journal comiqu
6096 ouvrages scientifiques. Les meilleurs sortent de l’ Institut Rousseau. 2. Guguss, journal comique d’une grande vulgarité
6097 l comique d’une grande vulgarité qui jouait alors le rôle de nos bandes dessinées.
99 1929, Les Méfaits de l’instruction publique (1972). 1. Mes prisons
6098 ssent sur leurs souvenirs de classe. C’est qu’ils les confondent avec ceux de leur enfance et les font indûment participer
6099 u’ils les confondent avec ceux de leur enfance et les font indûment participer de la même grâce. Voyez Péguy, quand il essa
6100 e leur enfance et les font indûment participer de la même grâce. Voyez Péguy, quand il essaie de nous faire croire qu’ « i
6101 s faire croire qu’ « il n’y a rien au-dessus » de la tâche des instituteurs : Faire de ces belles analyses logiques, et g
6102 ithmétique où il fallait si soigneusement séparer les calculs du raisonnement, par une barre verticale, et où il y avait to
6103 t pour emplir ou pour vider un bassin (et souvent les deux), (pour emplir et vider ensemble), (drôle d’occupation), (après
6104 urs des appartements à meubler. Et on multipliait le tapissier par le prix du mètre courant. Encore que je prenne les sen
6105 nts à meubler. Et on multipliait le tapissier par le prix du mètre courant. Encore que je prenne les sentiments trop au s
6106 r le prix du mètre courant. Encore que je prenne les sentiments trop au sérieux pour faire ici du sentiment, je suis sensi
6107 sie. Mais ce qui fait très bien dans un Cahier de la quinzaine, ça faisait de mauvaises notes dans nos carnets hebdomadair
6108 journée d’enfant gâtée. Et d’ailleurs, multiplier le tapissier par le prix du mètre courant n’est pas une fantaisie pour c
6109 gâtée. Et d’ailleurs, multiplier le tapissier par le prix du mètre courant n’est pas une fantaisie pour ce petit être qui
6110 e pour ce petit être qui s’énerve, qui embrouille les règles, qui a sommeil, qui a peur de faire faux, parce que les autres
6111 ui a sommeil, qui a peur de faire faux, parce que les autres auront fait juste, et qui voudrait bien pleurer, et qui recomm
6112 rdoise où sèchent des traînées de craie grise, où les chiffres trop gros s’emmêlent… Et c’est cela l’enfance insouciante ?
6113 les chiffres trop gros s’emmêlent… Et c’est cela l’ enfance insouciante ? Qu’est-ce qui ressemble plus au souci quotidien
6114 s au souci quotidien des grandes personnes ? Mais l’ enfance est ailleurs. Je revois ce fond de jardin où l’on trouve des c
6115 ance est ailleurs. Je revois ce fond de jardin où l’ on trouve des cloportes dans la toile mouillée d’une tente d’Indiens,
6116 fond de jardin où l’on trouve des cloportes dans la toile mouillée d’une tente d’Indiens, des petites guerres mystérieuse
6117 , des matins de dimanche sonores et tout propres, la cuiller d’huile de foie de morue avant le repas, et le monsieur qui r
6118 ropres, la cuiller d’huile de foie de morue avant le repas, et le monsieur qui racontait gravement des choses qu’on ne com
6119 iller d’huile de foie de morue avant le repas, et le monsieur qui racontait gravement des choses qu’on ne comprend pas, la
6120 ntait gravement des choses qu’on ne comprend pas, la prière du soir pour qu’il fasse beau demain, Michel Strogoff et Rémy
6121 main, Michel Strogoff et Rémy un fils de vaincus, les tours de carrousel, les chemins dans la forêt en automne, des jeux, d
6122 Rémy un fils de vaincus, les tours de carrousel, les chemins dans la forêt en automne, des jeux, des feuillages, des rêver
6123 vaincus, les tours de carrousel, les chemins dans la forêt en automne, des jeux, des feuillages, des rêveries, des recoins
6124 peu divine, baignée d’une très vague angoisse que l’ on fuyait avec des bonheurs fous dans les bras maternels, ou bien dans
6125 oisse que l’on fuyait avec des bonheurs fous dans les bras maternels, ou bien dans ces promenades en tenant la forte main d
6126 maternels, ou bien dans ces promenades en tenant la forte main du père qui fait de longs pas réguliers… L’École, dans ce
6127 rte main du père qui fait de longs pas réguliers… L’ École, dans ce concert de souvenirs, n’est qu’une dissonance douloureu
6128 loureuse. 3 Deux angoisses dominent mon enfance : les séances chez le dentiste et l’horaire des leçons. Ce malaise inavouab
6129 angoisses dominent mon enfance : les séances chez le dentiste et l’horaire des leçons. Ce malaise inavouable, cette règle
6130 ent mon enfance : les séances chez le dentiste et l’ horaire des leçons. Ce malaise inavouable, cette règle méchante, ce so
6131 is appris à lire, en cachette avec ma sœur aînée. L’ année suivante, on me mit à l’école, parce que c’est la loi. La premiè
6132 avec ma sœur aînée. L’année suivante, on me mit à l’ école, parce que c’est la loi. La première classe fut agréable : j’ali
6133 ée suivante, on me mit à l’école, parce que c’est la loi. La première classe fut agréable : j’alignais des bâtons en rêvan
6134 e pensais pas devoir suivre syllabe après syllabe les ânonnements des élèves qui déchiffraient les premières phrases exempl
6135 hrases exemplaires. (J’aimais pourtant Zoé lave à la fontaine, à cause du nom.) Quand venait mon tour, je savais rarement
6136 om.) Quand venait mon tour, je savais rarement où l’ on en était. Cela m’attira des reproches acides, et naturellement, la
6137 m’attira des reproches acides, et naturellement, la phrase sacrée : « Il faut que tous fassent la même chose ici ! » Dans
6138 nt, la phrase sacrée : « Il faut que tous fassent la même chose ici ! » Dans la suite, on se chargea d’illustrer par d’inn
6139 faut que tous fassent la même chose ici ! » Dans la suite, on se chargea d’illustrer par d’innombrables exemples cet axio
6140 par d’innombrables exemples cet axiome qui devint la formule de mes premières douleurs morales. Après six ans de ce régime
6141 rentrée, ma colère n’en fut que plus malfaisante. L’ école me rendit au monde, vers l’âge de 18 ans, crispé et méfiant, san
6142 lus malfaisante. L’école me rendit au monde, vers l’ âge de 18 ans, crispé et méfiant, sans cesse en garde contre moi-même
6143 ait pas différer, profondément hypocrite donc, et le cerveau saturé d’évidences du type 2 et 2 font 4, ou : tous les homme
6144 turé d’évidences du type 2 et 2 font 4, ou : tous les hommes doivent être égaux en tout. Deux fois deux quatre, c’est stéri
6145 s de citer, je découvris un jour qu’elle contient la cause déterminante de notre malaise. Il me fallut un certain temps po
6146 e je me posais la question : est-ce vrai que tous les hommes doivent être égaux en tout ? Et la première réponse fut : Il f
6147 réponse fut : Il faut que ce soit vrai, pour que la démocratie prospère et étende ses conquêtes. C’était découvrir notre
6148 dignations de nos maîtres quand ils dénonçaient «  la marque indélébile de l’éducation jésuite ». Nous étions marqués par N
6149 s quand ils dénonçaient « la marque indélébile de l’ éducation jésuite ». Nous étions marqués par Numa Droz, par l’esprit p
6150 jésuite ». Nous étions marqués par Numa Droz, par l’ esprit petit-bourgeois, qui est une généralisation de l’avarice, et pa
6151 it petit-bourgeois, qui est une généralisation de l’ avarice, et par les dogmes démocratiques, qui sont une généralisation
6152 , qui est une généralisation de l’avarice, et par les dogmes démocratiques, qui sont une généralisation de la règle de troi
6153 mes démocratiques, qui sont une généralisation de la règle de trois, aussi profondément certes qu’un Voltaire le fut par l
6154 e trois, aussi profondément certes qu’un Voltaire le fut par les jésuites : du moins ceux-ci lui laissèrent-ils assez de v
6155 ssi profondément certes qu’un Voltaire le fut par les jésuites : du moins ceux-ci lui laissèrent-ils assez de verdeur d’esp
6156 pire. Mais on avait brisé en nous ces ressorts de la révolte et de la libération d’une personnalité : l’imagination, le se
6157 it brisé en nous ces ressorts de la révolte et de la libération d’une personnalité : l’imagination, le sens de l’arbitrair
6158 révolte et de la libération d’une personnalité : l’ imagination, le sens de l’arbitraire et le sens de la relativité des d
6159 la libération d’une personnalité : l’imagination, le sens de l’arbitraire et le sens de la relativité des décrets humains.
6160 on d’une personnalité : l’imagination, le sens de l’ arbitraire et le sens de la relativité des décrets humains. Le prix de
6161 alité : l’imagination, le sens de l’arbitraire et le sens de la relativité des décrets humains. Le prix de mes souffrances
6162 magination, le sens de l’arbitraire et le sens de la relativité des décrets humains. Le prix de mes souffrances était donc
6163 et le sens de la relativité des décrets humains. Le prix de mes souffrances était donc ce conformisme indispensable aux «
6164 principes ». Je n’allai pas tout de suite jusqu’à les mettre en doute : mais un jour je compris que ce n’étaient que des pr
6165 les d’une arithmétique élémentaire, ce monde dont la Démocratie apparaissait comme l’achèvement idéal et nécessaire — et q
6166 e, ce monde dont la Démocratie apparaissait comme l’ achèvement idéal et nécessaire — et qui était le seul pour lequel on n
6167 e l’achèvement idéal et nécessaire — et qui était le seul pour lequel on nous préparait — c’était un système d’abstraction
6168 tait un système d’abstractions primaires, c’était le rêve raisonnablement organisé des esprits moyens, prosaïques et rassi
6169 ns, prosaïques et rassis qui tiennent aujourd’hui les charges de l’État, piliers d’un régime dont ils sont les seuls à s’ac
6170 et rassis qui tiennent aujourd’hui les charges de l’ État, piliers d’un régime dont ils sont les seuls à s’accommoder parce
6171 rges de l’État, piliers d’un régime dont ils sont les seuls à s’accommoder parce qu’ils l’ont établi à la mesure exacte de
6172 nt ils sont les seuls à s’accommoder parce qu’ils l’ ont établi à la mesure exacte de leurs besoins. Nous ne croyions plus
6173 seuls à s’accommoder parce qu’ils l’ont établi à la mesure exacte de leurs besoins. Nous ne croyions plus aux démons, mai
6174 besoins. Nous ne croyions plus aux démons, mais à la Commission scolaire. Nous n’avions plus de « superstitions grossières
6175 stitions grossières » comme celles qui touchent à l’ action des étoiles par exemple. Mais nous avions acquis le respect des
6176 des étoiles par exemple. Mais nous avions acquis le respect des statistiques. Nous savions que les miracles ne trompent q
6177 uis le respect des statistiques. Nous savions que les miracles ne trompent que les illettrés, mais qu’il convient de s’incl
6178 es. Nous savions que les miracles ne trompent que les illettrés, mais qu’il convient de s’incliner devant les miracles de l
6179 lettrés, mais qu’il convient de s’incliner devant les miracles de la science appliquée. On nous faisait voir tout au long d
6180 ’il convient de s’incliner devant les miracles de la science appliquée. On nous faisait voir tout au long de notre histoir
6181 nous faisait voir tout au long de notre histoire le Progrès constant de l’humanité vers les lumières, l’incrédulité et le
6182 au long de notre histoire le Progrès constant de l’ humanité vers les lumières, l’incrédulité et le bien-être matériel. No
6183 e histoire le Progrès constant de l’humanité vers les lumières, l’incrédulité et le bien-être matériel. Nous savions qu’un
6184 Progrès constant de l’humanité vers les lumières, l’ incrédulité et le bien-être matériel. Nous savions qu’un fils d’ouvrie
6185 de l’humanité vers les lumières, l’incrédulité et le bien-être matériel. Nous savions qu’un fils d’ouvrier est l’égal d’un
6186 e matériel. Nous savions qu’un fils d’ouvrier est l’ égal d’un petit Dauphin — et même nous ne pouvions nous empêcher de cr
6187 même nous ne pouvions nous empêcher de croire que le petit ouvrier est bien plus malin. Nous savions un tas de choses doul
6188 e choses douloureusement ennuyeuses qui sont dans les livres — et nulle part ailleurs. Nous arrivions dans la vie avec des
6189 res — et nulle part ailleurs. Nous arrivions dans la vie avec des mentions honorables et une inconcevable gaucherie, c’est
6190 et une honte secrète qui exaspérait ce mépris et le rendait agressif. Mais moi, j’avais trop souffert de cette compressio
6191 riellement délivré, en supporter longtemps encore l’ action. Je n’eus pas plus tôt découvert et nommé cet asservissement de
6192 plus tôt découvert et nommé cet asservissement de l’ esprit et ces mythes stériles, que je les rendis responsables de ma pe
6193 sement de l’esprit et ces mythes stériles, que je les rendis responsables de ma perte de contact avec les réalités les plus
6194 s rendis responsables de ma perte de contact avec les réalités les plus élémentaires de la vie.   3. Dans le cas le plus
6195 onsables de ma perte de contact avec les réalités les plus élémentaires de la vie.   3. Dans le cas le plus favorable, c’
6196 ontact avec les réalités les plus élémentaires de la vie.   3. Dans le cas le plus favorable, c’est un silence, un vide.
6197 ités les plus élémentaires de la vie.   3. Dans le cas le plus favorable, c’est un silence, un vide. C’était en dehors d
6198 s plus élémentaires de la vie.   3. Dans le cas le plus favorable, c’est un silence, un vide. C’était en dehors de la vi
6199 , c’est un silence, un vide. C’était en dehors de la vie.
100 1929, Les Méfaits de l’instruction publique (1972). 2. Description du monstre
6200 2. Description du monstre Le service militaire me permit de retrouver quelques-unes de ces réalité
6201 Car ces différences sont les premières marques de la vie vécue et l’on aime à y découvrir la seule fraternité véritable. M
6202 ces sont les premières marques de la vie vécue et l’ on aime à y découvrir la seule fraternité véritable. Mais c’est en cas
6203 arques de la vie vécue et l’on aime à y découvrir la seule fraternité véritable. Mais c’est en caserne aussi que je devais
6204 is c’est en caserne aussi que je devais retrouver les instituteurs. Ceux-là n’avaient pas bougé. Et pour cause : ils n’étai
6205 é. Et pour cause : ils n’étaient jamais sortis de l’ école. Rien ne ressemble plus à un bon élève qu’un instituteur : de l’
6206 l’autre, il n’y a pas de solution de continuité, la différence n’était qu’une question d’âge, non d’expérience vécue. Ce
6207 grand nombre de cas, mais pourquoi ai-je envie de le dire ? L’instituteur sous l’uniforme peut être défini par son incompr
6208 re de cas, mais pourquoi ai-je envie de le dire ? L’ instituteur sous l’uniforme peut être défini par son incompréhension m
6209 rquoi ai-je envie de le dire ? L’instituteur sous l’ uniforme peut être défini par son incompréhension méthodique des homme
6210 éhension méthodique des hommes et son mépris pour les paysans. Qu’il soit officier ou troupier, on le reconnaît à une façon
6211 les paysans. Qu’il soit officier ou troupier, on le reconnaît à une façon pédante d’être consciencieux, à une façon bless
6212 être supérieur, à une façon livresque d’expliquer les choses, à une façon théorique de juger les êtres. Ces distributeurs a
6213 liquer les choses, à une façon théorique de juger les êtres. Ces distributeurs automatiques (brevetés par le gouvernement)
6214 res. Ces distributeurs automatiques (brevetés par le gouvernement) de la manne égalitaire — ne se prennent pas pour de la
6215 rs automatiques (brevetés par le gouvernement) de la manne égalitaire — ne se prennent pas pour de la petite bière. Ils on
6216 la manne égalitaire — ne se prennent pas pour de la petite bière. Ils ont conscience d’appartenir à une élite responsable
6217 ce ridicule n’échappe pas à ceux qu’ils méprisent le plus, et ils auraient souvent l’occasion de s’en douter s’ils étaient
6218 qu’ils méprisent le plus, et ils auraient souvent l’ occasion de s’en douter s’ils étaient sensibles aux finesses de l’iron
6219 en douter s’ils étaient sensibles aux finesses de l’ ironie paysanne. Mais je n’en dirai pas plus, de peur de m’échauffer i
6220 pas plus, de peur de m’échauffer inutilement. Si l’ on me poussait un peu, je crois que je m’oublierais au point d’insinue
6221 crois que je m’oublierais au point d’insinuer que les instituteurs galonnés causent autant de tort à l’armée que les instit
6222 es instituteurs galonnés causent autant de tort à l’ armée que les instituteurs antimilitaristes qui signent des manifestes
6223 urs galonnés causent autant de tort à l’armée que les instituteurs antimilitaristes qui signent des manifestes en mauvais f
6224 manifestes en mauvais français — et je ferais de la peine à d’excellents garçons. Revenons au civil. J’ai fait allusion a
6225 usion au lieutenant-instituteur qui veut faire de la pédagogie avec sa section. L’instituteur-lieutenant qui veut traiter
6226 r qui veut faire de la pédagogie avec sa section. L’ instituteur-lieutenant qui veut traiter militairement ses élèves témoi
6227 veut traiter militairement ses élèves témoigne de la même maladresse professionnelle. J’en connais un qui avait coutume de
6228 de garçons de 10 à 11 ans : « J’ai bien su mater les quarante hommes de ma section, je saurai aussi vous mater. » On imagi
6229 aussi vous mater. » On imagine à quoi peut mener l’ enseignement donné par des êtres qui brouillent à ce point les méthode
6230 ent donné par des êtres qui brouillent à ce point les méthodes. Simple remarque, pendant que nous en sommes aux instituteur
6231 des êtres qui brouillent à ce point les méthodes. Simple remarque, pendant que nous en sommes aux instituteurs : ils sortent t
6232 en sommes aux instituteurs : ils sortent tous de la même classe sociale, de la petite bourgeoisie. Est-ce que l’esprit pe
6233  : ils sortent tous de la même classe sociale, de la petite bourgeoisie. Est-ce que l’esprit petit-bourgeois qui imprègne
6234 sse sociale, de la petite bourgeoisie. Est-ce que l’ esprit petit-bourgeois qui imprègne l’enseignement primaire constitue
6235 Est-ce que l’esprit petit-bourgeois qui imprègne l’ enseignement primaire constitue l’apport des instituteurs, ou bien pré
6236 is qui imprègne l’enseignement primaire constitue l’ apport des instituteurs, ou bien préexiste-t-il dans les principes mêm
6237 ort des instituteurs, ou bien préexiste-t-il dans les principes mêmes de l’École, et attire-t-il les petits bourgeois comme
6238 u bien préexiste-t-il dans les principes mêmes de l’ École, et attire-t-il les petits bourgeois comme le portrait de Numa D
6239 ns les principes mêmes de l’École, et attire-t-il les petits bourgeois comme le portrait de Numa Droz attirait les mouches 
6240 ’École, et attire-t-il les petits bourgeois comme le portrait de Numa Droz attirait les mouches ? (Le verre en était toujo
6241 bourgeois comme le portrait de Numa Droz attirait les mouches ? (Le verre en était toujours jaune.) Je n’ai ni le droit ni
6242 le portrait de Numa Droz attirait les mouches ? ( Le verre en était toujours jaune.) Je n’ai ni le droit ni l’envie de dir
6243  ? (Le verre en était toujours jaune.) Je n’ai ni le droit ni l’envie de dire du mal des petits-bourgeois. Ils sont au moi
6244 en était toujours jaune.) Je n’ai ni le droit ni l’ envie de dire du mal des petits-bourgeois. Ils sont au moins aussi sym
6245 sympathiques que n’importe quelle autre classe de la société. Mais l’esprit petit-bourgeois pris abstraitement et tel qu’i
6246 n’importe quelle autre classe de la société. Mais l’ esprit petit-bourgeois pris abstraitement et tel qu’il se manifeste da
6247 pris abstraitement et tel qu’il se manifeste dans l’ école primaire est un véritable virus de mesquinerie, et devrait être
6248 les ». Je reviendrai peut-être sur ce point. Pour l’ instant je ne veux que décrire l’école telle qu’on la voit. Après les
6249 r ce point. Pour l’instant je ne veux que décrire l’ école telle qu’on la voit. Après les personnes, le décor. La laideur d
6250 nstant je ne veux que décrire l’école telle qu’on la voit. Après les personnes, le décor. La laideur des « collèges » n’es
6251 ux que décrire l’école telle qu’on la voit. Après les personnes, le décor. La laideur des « collèges » n’est pas accidentel
6252 l’école telle qu’on la voit. Après les personnes, le décor. La laideur des « collèges » n’est pas accidentelle. C’est cell
6253 lle qu’on la voit. Après les personnes, le décor. La laideur des « collèges » n’est pas accidentelle. C’est celle même du
6254 est pas accidentelle. C’est celle même du régime. L’ architecture de nos « palais scolaires » symbolise d’une façon frappan
6255 e ce qu’il y a de schématique et de monotone dans la conception démocratique du monde. Entrons, c’est pire encore. Beaucou
6256 ants ont un frisson de dégoût au moment de passer la porte, au son de la cloche : l’odeur de goudron et d’urinoirs qui imp
6257 de dégoût au moment de passer la porte, au son de la cloche : l’odeur de goudron et d’urinoirs qui imprègne les corridors
6258 moment de passer la porte, au son de la cloche : l’ odeur de goudron et d’urinoirs qui imprègne les corridors et les habit
6259 e : l’odeur de goudron et d’urinoirs qui imprègne les corridors et les habits des écoliers empeste encore mes souvenirs. Et
6260 udron et d’urinoirs qui imprègne les corridors et les habits des écoliers empeste encore mes souvenirs. Et la poussière dan
6261 its des écoliers empeste encore mes souvenirs. Et la poussière dans l’air, l’encre sur les tables — c’était pourtant un re
6262 mpeste encore mes souvenirs. Et la poussière dans l’ air, l’encre sur les tables — c’était pourtant un refuge pour l’imagin
6263 encore mes souvenirs. Et la poussière dans l’air, l’ encre sur les tables — c’était pourtant un refuge pour l’imagination q
6264 ouvenirs. Et la poussière dans l’air, l’encre sur les tables — c’était pourtant un refuge pour l’imagination que ces initia
6265 sur les tables — c’était pourtant un refuge pour l’ imagination que ces initiales, ces signes, ces devises… —, les estampe
6266 on que ces initiales, ces signes, ces devises… —, les estampes piquées, Numa Droz et ses crottes de mouches… Dans ce décor
6267 s ! Et vous pensez que c’est un grand progrès sur la Nature. Quelle peut bien être la vertu éducatrice d’un tel milieu, mo
6268 rand progrès sur la Nature. Quelle peut bien être la vertu éducatrice d’un tel milieu, moral et matériel ? L’école publiqu
6269 u éducatrice d’un tel milieu, moral et matériel ? L’ école publique, telle que nous la voyons est semblable à tous ces monu
6270 al et matériel ? L’école publique, telle que nous la voyons est semblable à tous ces monuments « de la mauvaise époque » q
6271 la voyons est semblable à tous ces monuments « de la mauvaise époque » qui sont dans nos villes l’apport du xixe siècle.
6272  de la mauvaise époque » qui sont dans nos villes l’ apport du xixe siècle. Ils ne parviennent ni à la beauté ni à l’utili
6273 l’apport du xixe siècle. Ils ne parviennent ni à la beauté ni à l’utilité, et ils sont déjà démodés. On dit que le style
6274 e siècle. Ils ne parviennent ni à la beauté ni à l’ utilité, et ils sont déjà démodés. On dit que le style 1880 n’en est p
6275 à l’utilité, et ils sont déjà démodés. On dit que le style 1880 n’en est pas un : mais l’absence de style est encore un st
6276 . On dit que le style 1880 n’en est pas un : mais l’ absence de style est encore un style : c’est même le pire.
6277 absence de style est encore un style : c’est même le pire.