1 1952, Arts, articles (1952-1965). Appel à ceux qui osent être différents (22 mai 1952)
1 se encore le régime des échanges de tout ordre en Europe , le nationalisme fut une création d’écrivains, de poètes, hélas ! et
2 1960, Arts, articles (1952-1965). Remise en question par l’Afrique et l’Asie, la civilisation occidentale n’a pas encore de successeur (21 septembre 1960)
2 ur (21 septembre 1960)c La civilisation née en Europe a dominé le monde pendant des siècles. Elle est encore, à notre époqu
3 se à tout. Nous, au contraire, en Occident, et en Europe bien plus qu’en Amérique, nous souffrons d’une espèce d’inquiétude es
4 n puisse l’éliminer ou l’oublier. Admettons que l’ Europe , en la formant, ait « infecté » le monde entier : le monde ne s’en gu
5 ment disposées à refuser les dons ambigus. Mais l’ Europe , responsable de l’idée du Progrès, est responsable aussi de sa rectif
6 « hérésies du Progrès » sont bel et bien nées en Europe , encore qu’elles n’aient vraiment déployé leurs effets que dans les g
7 s posées en partie par des excès contraires. Si l’ Europe d’aujourd’hui s’effraye de constater ce que l’Amérique a fait de cert
8 e faire du nationalisme — j’y vois le signe que l’ Europe détient encore le sens d’un équilibre intime : si ce sens n’était pas
9 s cette erreur ne peut être la nôtre. Qu’a fait l’ Europe du xve siècle jusqu’à nos jours ? Elle a non seulement rayonné sur l
10 r un principe transcendant, dont un C. G. Jung en Europe , ou un Aurobindo en Inde, a tenté d’entrevoir la nature. Au stade pré
3 1961, Arts, articles (1952-1965). L’Amour en cause (1er février 1961)
11 cet ensemble infiniment varié de phénomènes que l’ Europe seule a désigné par le seul et même terme d’amour, considérons les ra
12 it développer toutes ses complexités que dans une Europe travaillée par la doctrine et la morale chrétiennes, séculairement au
13 esse mieux codifiées par les casuistes), dans une Europe formée par l’Église ou contre elle, et longtemps confondue avec « la
14 yrisme, l’érotisme et la mystique déchaînés sur l’ Europe entière, et parlant une même langue nouvelle, rénovant d’un seul coup
15 on et ceux qui en subissent les effets. Prenez un Européen cultivé — homme ou femme — formé par la morale bourgeoise, d’ailleurs
16 uritaines ont su nous imposer dès les débuts de l’ Europe , il n’y aurait rien de plus dans notre civilisation que dans celles d
4 1962, Arts, articles (1952-1965). Sartre contre l’Europe (17 janvier 1962)
17 Sartre contre l’ Europe (17 janvier 1962)f Je viens de passer deux mois aux États-Unis. On
18 mois aux États-Unis. On n’y parle que du miracle européen . Journaux, hebdos, revues, gros livres, milieux universitaires et mil
19 lieux dirigeants de Washington ; ils découvrent l’ Europe unie. À les entendre, on croirait qu’elle est faite. La candidature a
20 t Jean Monnet qui a vu juste. Donc il faut voir l’ Europe comme il l’a vue d’avance : première étape d’une organisation mondial
21 ’animation et l’organe d’équilibre. Je reviens en Europe , « notre patrie » — comme disait Æneas Sivius au xve siècle. Qu’est-
22 , dans toutes nos langues, sur l’intégration de l’ Europe et sur les relations nouvelles à établir entre une Europe unie et le
23 t sur les relations nouvelles à établir entre une Europe unie et le tiers-monde. Pleins d’idées et de chiffres, d’un optimisme
24 edit brutalement tout le reste. Il proclame que l’ Europe est « foutue », qu’elle est « en grand danger de crever », qu’elle « 
25 tous ses états. Il le préface et il exhorte « les Européens  » à le lire, au nom du raisonnement suivant : tous les Européens sont
26 e lire, au nom du raisonnement suivant : tous les Européens sont complices du colonialisme criminel ; donc cette lecture leur fer
27 lais et autres Balubas qui « massacrent à vue les Européens  ». Car, ce faisant, « ils font l’histoire de l’homme », et nous seron
28 humanitaire qui nous offre « un moyen de guérir l’ Europe  » en nous faisant tous passer dans le camp de ses ennemis. Ceux-ci n’
29 qu’au nom d’une prétendue aventure spirituelle l’ Europe étouffe la quasi-totalité de l’humanité. » Cette phrase résume la thè
30 tante étant tout simplement un état de fait que l’ Europe n’avait pas créé, et qui, loin de résulter de la colonisation, comme
31 lité ou de continuelle décadence. Qu’est-ce que l’ Europe a « étouffé » dans le tiers-monde colonisé ? (Qui est fort loin de re
32 la période considérée.) La culture de l’Inde ? L’ Europe l’a sauvée. L’industrie africaine ? Elle l’a fondée. La démocratie de
33 nations récemment libérées de « l’exploitation » européenne  : le Dahomey. Les premiers contacts du Dahomey avec la civilisation e
34 premiers contacts du Dahomey avec la civilisation européenne remontent à 1729, lorsque le roi Agadja et son régiment de femmes, ay
35 ides puis par les sultans marocains, mais par les Européens , lesquels n’ont occupé, plusieurs siècles plus tard et pendant soixan
36 ion veut la mort du pécheur, qui est uniquement l’ Européen , comme chacun sait. La vérité, selon les faits et dans la perspective
37 leurs États. Quant aux nations colonialistes de l’ Europe — sept sur vingt-six à la fin de la guerre — presque ruinées à deux r
38 près l’autre, « décroché ». Qu’est-il advenu de l’ Europe considérée dans son ensemble ? « L’Europe est littéralement la créati
39 nu de l’Europe considérée dans son ensemble ? « L’ Europe est littéralement la création du tiers-monde », écrit Fanon. Ses rich
40 ient ?). Sartre renchérit : c’est avec cela que l’ Europe a fait non seulement ses capitales industrielles, mais ses cathédrale
41 (lisez-le pour y croire : p. 23). D’ailleurs, « l’ Européen n’a pu se faire homme qu’en fabriquant des esclaves » (eh quoi ! n’ét
42 le xvie siècle ?) En quittant le tiers-monde, l’ Europe aurait donc signé son arrêt de mort économique et de rapide déshumani
43 sme auraient donc été les avocats du suicide de l’ Europe  ? Mais au nom de quelles valeurs plus chères que leur vie même ? De l
44 plus chères que leur vie même ? De leurs valeurs européennes « pourries » ou de quelles autres ? Laissons là ces divagations. Reve
45 ux faits. Les faits nous montrent que les nations européennes , à peine libérées de la charge écrasante de leurs colonies, ont comme
46 nte de leurs colonies, ont commencé à découvrir l’ Europe et la nécessité de son union. Et que, de leur union naissante — le Ma
47 té presque aussitôt une prospérité stupéfiante. L’ Europe n’est pas « finie », n’en déplaise à nos furieux, mais elle commence
48 r Fanon et son marxisme — d’ailleurs emprunté à l’ Europe . Mais qu’en est-il de Sartre en cette lugubre affaire ? Il nous faut
49 dans un village intellectuel et projette sur l’«  Europe  » des hargnes provinciales. Quand il écrit Europe, il ne pense que Fr
50 Europe » des hargnes provinciales. Quand il écrit Europe , il ne pense que France, et quand il pense France, il ne voit que le
51 ’état naissant, et qui le firent non pas contre l’ Europe , mais au nom des valeurs européennes : Voltaire, Rousseau, Herder, Fi
52 non pas contre l’Europe, mais au nom des valeurs européennes  : Voltaire, Rousseau, Herder, Fichte, Bentham. À l’encontre de Hegel,
53 hte, Bentham. À l’encontre de Hegel, qui tenait l’ Europe pour « la vraie fin de l’Histoire », et d’Auguste Comte qui voyait en
54 équences pratiques, pour le tiers-monde et pour l’ Europe qui doit l’aider. Nous n’avons pas le droit de frustrer la jeunesse s
55 e l’histoire, ce seront ceux qui auront dit que l’ Europe est finie, quand il s’agissait de la faire. f. « Sartre contre l’Eu
56 il s’agissait de la faire. f. « Sartre contre l’ Europe  », Arts, Paris, n° 852, 17 janvier 1962, p. 1 et 4.
5 1962, Arts, articles (1952-1965). Le miracle européen a créé le monde civilisé (6 juin 1962)
57 Le miracle européen a créé le monde civilisé (6 juin 1962)g L’avenir de l’Europe est u
58 le monde civilisé (6 juin 1962)g L’avenir de l’ Europe est une aventure décisive pour l’humanité tout entière. L’Europe est
59 aventure décisive pour l’humanité tout entière. L’ Europe est cette partie-là du monde qui a fait « le Monde », ayant été le fo
60 tié du xxe siècle, en sorte que les chances de l’ Europe dans l’avenir se confondent pratiquement, désormais, avec celles de l
61 ablir cette thèse centrale, cette définition de l’ Europe par sa fonction mondialisante. Car cela revient en somme à définir le
62 Car cela revient en somme à définir le phénomène européen par ses effets, alors qu’on s’est toujours efforcé jusqu’ici de l’exp
63 ou démographiques. Ce que j’appelle le phénomène européen se signale, dans l’histoire du monde, par quelques traits absolument
64 dont je donne tout de suite trois exemples : 1. L’ Europe a découvert la terre entière, et personne n’est jamais venu la découv
65 et personne n’est jamais venu la découvrir. 2. L’ Europe a dominé sur tous les continents successivement, et n’a jamais été do
66 squ’ici par une seule puissance d’outre-mer. 3. L’ Europe a produit une civilisation que le monde entier est en train d’imiter,
67 sent les avoir négligées jusqu’ici — ce phénomène européen sans précédent et sans parallèle dans l’histoire, nous n’arriverons j
68 e siècle avant J.-C. explique la supériorité des Européens sur les Asiatiques par le fait que les Asiatiques vivaient dans un cl
69 s vivaient dans un climat trop égal, tandis qu’en Europe , dit-il, « les passages rapides d’un extrême à l’autre stimulent les
70 attribue au contraire cette même supériorité des Européens au climat tempéré qui — je le cite — « semble avoir tout fait pour hâ
71 et Brun, publiée à Paris en 1816, reconnaît que l’ Europe historique n’est pas née de sa géographie. Je me plais à citer sa des
72 ographie. Je me plais à citer sa description de l’ Europe , dont Valéry me paraît bien s’être inspiré dans le passage fameux où
73 e inspiré dans le passage fameux où il parle de l’ Europe comme « d’une sorte de cap du vieux continent, d’un appendice occiden
74 faudrait aller demander le secret de l’expansion européenne  ? Un coup d’œil sur la carte des densités de peuplement de la terre n
75 privilégiées à cet égard : la Chine, l’Inde et l’ Europe , lesquelles comptent chacune, au xxe siècle, entre 500 et 600 millio
76 une décadence millénaire, dans le temps même où l’ Europe faisait le tour du monde et dominait sur la plupart des nations de l’
77 urelles ne pouvant rendre compte des destins de l’ Europe , faudra-t-il leur chercher des causes spirituelles ? L’Europe serait-
78 ra-t-il leur chercher des causes spirituelles ? L’ Europe serait-elle, par exemple, une création du christianisme, comme le sou
79 odote, Platon et Aristote nous parlent déjà d’une Europe et la contrastent même avec l’Asie, mais cette Europe ne connaît pas
80 pe et la contrastent même avec l’Asie, mais cette Europe ne connaît pas encore le christianisme. L’expansion missionnaire des
81 st une expansion chrétienne et non spécifiquement européenne . En revanche l’expansion colonialiste, du xviiie au xxe siècle, a é
82 e au xxe siècle, a été, de toute évidence, plus européenne que chrétienne. Assimiler l’Europe au christianisme, comme voulut le
83 ence, plus européenne que chrétienne. Assimiler l’ Europe au christianisme, comme voulut le faire Novalis dans son célèbre essa
84 son célèbre essai intitulé Die Christenheit oder Europa , c’est faire tort à la prétention universelle du christianisme, et ce
85 selle du christianisme, et ce n’est pas définir l’ Europe , puisque ce serait la définir par une vérité éternelle, qu’elle n’a p
86 anisme a très puissamment contribué à la synthèse européenne . Notre idée de la science en dérive, comme l’a montré Jaspers, commen
87 doute été décisifs dans l’aventure mondiale de l’ Europe . Retenons donc, de cette rapide enquête sur la genèse du phénomène Eu
88 e cette rapide enquête sur la genèse du phénomène Europe , le christianisme. Mais non sans nous poser cette question difficile
89 e que je vais laisser sans réponse : — Pourquoi l’ Europe a-t-elle été la seule ou la première partie du monde qui ait adopté c
90 non d’elle-même ? Existait-il une prédisposition européenne au christianisme ? Ceci nous laisse en plein mystère. Et les autres e
91 mystère. Et les autres explications du phénomène européen par des données physiques et matérielles nous laissent en pleine ambi
92 us oblige à constater : la fonction mondiale de l’ Europe . Décrivons donc maintenant ce phénomène tel qu’il apparaît dans les f
93 e, dans son mythe. Or, ce mouvement créateur de l’ Europe , je le trouve d’abord et déjà dans la légende originelle de l’Enlèvem
94 déjà dans la légende originelle de l’Enlèvement d’ Europe par Zeus. C’est dans un bond vers l’ouest, la mer et l’aventure que l
95 un bond vers l’ouest, la mer et l’aventure que l’ Europe légendaire prend son départ. Le mythe de l’enlèvement d’une princesse
96 transformé en taureau, traduit l’Histoire : notre Europe est effectivement venue du Proche-Orient. Après la disparition presqu
97 s peintures rupestres de Lascaux et d’Altamira, l’ Europe a été lentement repeuplée par des colons venus d’une part de l’Asie M
98 icie et de là transférés en Crète d’abord — où la princesse Europe engendra une dynastie, les Minoens — puis, par la mer Égée en Grèce,
99 s nomment Ereb, très probable étymologie du nom d’ Europe . Plus tard, sa religion dominante lui viendra du pays le plus proche
100 apt créateur, la suite du mythe de l’enlèvement d’ Europe , à laquelle j’attache, pour ma part, la plus grande importance symbol
101 ur ma part, la plus grande importance symbolique. Europe était la fille d’Agénor, roi de Tyr. Celui-ci donna l’ordre à ses cin
102 , il alla demander à l’oracle de Delphes : Où est Europe  ? « Tu ne la trouveras pas, répondit la Pythie. Suis plutôt une vache
103 irer : c’est en poursuivant l’image mythique de l’ Europe que les navigateurs phéniciens découvrirent sa réalité géographique.
104 abuleux, il semble difficile de savoir « où est l’ Europe  », si l’on entend seulement la ramener un beau jour toute faite et do
105 ’est sa quête elle-même qui la crée. Rechercher l’ Europe , c’est la faire ! Elle existe dans sa recherche à l’infini, et c’est
106 à Sem, l’Asie et la vie spirituelle ; à Japhet, l’ Europe et les armes, et la promesse d’une expansion indéfinie : dilatatio, l
107 ents de la science, tout est venu de l’Est vers l’ Europe , tout s’est lentement concentré dans cette sorte d’impasse au-delà de
108 du haut Moyen Âge, sous Charlemagne, la péninsule européenne est donc devenue le lieu de rencontre de sept ou huit traditions diff
109 forces en conflit latent ou en guerre ouverte. L’ Europe et sa culture résulteront de cette fusion jamais achevée, toujours in
110 sé à l’Est, barrant les routes vers l’Orient. Les Européens se voient coupés de toutes communications régulières avec les civilis
111 e l’Océan. C’est ici que l’aventure mondiale de l’ Europe prend son départ, au matin de Palos de Moguer, sur les petites carave
112 découvertes fut une sorte d’explosion du composé Europe , macéré depuis près de mille ans dans les limites du cap occidental,
113 semble illustrer les traits fondamentaux de notre Europe , légendaire, historique, physique, païenne et chrétienne à la fois :
114 tour, toutes les autres. L’aventure mondiale de l’ Europe se déroule, à partir de Colomb, sur un rythme assez comparable à celu
115 apes de la conquête de l’espace terrestre par les Européens , c’est d’abord le premier tour du monde, accompli par Magellan, puis
116 l’ouverture de l’Extrême-Orient à la civilisation européenne au milieu du xixe siècle, enfin la colonisation de l’Afrique noire à
117 Au début de notre xxe siècle, on peut dire que l’ Europe a placé sur orbite sa civilisation. Mais les étages de la fusée porte
118 siècle, les continents découverts et régis par l’ Europe se sont libérés de sa tutelle. L’Amérique du Nord la première, dès la
119 ndiale, puis presque toute l’Afrique vers 1960. L’ Europe avait commencé par mettre en relation toutes les parties de la terre
120 humain — genus humanum — sont des créations de l’ Europe gréco-romaine, puis de l’Europe chrétienne, puis de l’Europe technici
121 es créations de l’Europe gréco-romaine, puis de l’ Europe chrétienne, puis de l’Europe technicienne. Dans ce sens, on peut dire
122 o-romaine, puis de l’Europe chrétienne, puis de l’ Europe technicienne. Dans ce sens, on peut dire que l’Europe « a fait le mon
123 pe technicienne. Dans ce sens, on peut dire que l’ Europe « a fait le monde ». Mais une fois le monde fait par elle, elle l’a p
124 Troyens préfigure les expéditions militaires des Européens sur les quatre autres continents. Cela, c’est l’Iliade, « poème de la
125 de l’Orient métaphysique. g. « L’aventure de l’ Europe commence : le miracle européen a créé le monde civilisé », Arts, Pari
126 g. « L’aventure de l’Europe commence : le miracle européen a créé le monde civilisé », Arts, Paris, n° 872, 6 juin 1962, p. 1-2.
6 1962, Arts, articles (1952-1965). L’Europe détient les secrets de l’avenir, mais a-t-elle la volonté de vivre ? (13 juin 1962)
127 L’ Europe détient les secrets de l’avenir, mais a-t-elle la volonté de vivre ?
128 pe : c’est que le pôle de cet hémisphère tombe en Europe , exactement au sud de Nantes. Ainsi, d’un point choisi au zénith de N
129 dépend ni de notre orgueil ni de notre humilité d’ Européens , un fait aisément vérifiable et dont les données objectives se lisent
130 tographiées par quelque satellite artificiel : L’ Europe est bel et bien le centre du monde humain, le lieu géométrique, le ca
131 nt, comme en graphique, la fonction mondiale de l’ Europe . Et voilà qui est déterminant, pour qui suppute les chances futures d
132 les chances futures de l’Occident et de l’esprit européen , constater que l’Europe actuelle, amputée des plaines russes, tiendra
133 Occident et de l’esprit européen, constater que l’ Europe actuelle, amputée des plaines russes, tiendrait près de neuf fois dan
134 En proportion de sa surface, n’oublions pas que l’ Europe a les plus longues côtes (7 000 km de plus que l’Afrique), les ports
135 t aussi concentrées. Anciens villages et villes d’ Europe , vous n’en trouverez pas deux dont les plans soient superposables. S’
136 de l’unité paradoxale qui permettra de définir l’ Europe . Une unité non point faite d’uniformité, mais au contraire de variété
137 ou s’égrènent le long de la berge d’un fleuve. L’ Europe seule présente un réseau de communautés bien ancrées, bien nettement
138 œil. Car autour de la place d’un simple village d’ Europe vous trouvez l’église et la mairie, souvent l’école et les cafés, et
139 es secrets (pour nous trop évidents) du dynamisme européen . C’est-à-dire : la communauté spirituelle, le règne de la loi, le res
140 iples, entrecroisées. Esquissons ce portrait de l’ Europe telle que chacun de nous peut la voir, ce portrait composé non point
141 guère été mises en pratique et qu’il s’agit d’une Europe idéale, qu’on refuse de reconnaître, qui est celle des autres, de l’a
142 bles et tangibles, qui sont le cadre de nos vies. Europe présentée non point par sa philosophie mais bien par sa morphologie.
143 utres continents. Essayons donc de reconstruire l’ Europe en partant de la place communale. Nos villes et nos villages ne sont
144 ensif — qui a marqué et manifesté l’accession des Européens à la réalité communautaire, fondement de notre civilisation. On sent
145 s médiévales. Il n’est pas de démocratie, au sens européen du terme, qui ne repose sur la libre discussion, sur le libre jeu des
146 anifestent par la Presse, dans l’ère moderne de l’ Europe  ; et la presse, dès le début, fut étroitement liée à cet autre élémen
147 les fameuses gazettes françaises diffusées dans l’ Europe entière, en dépit des censures de l’absolutisme, et qui préparent le
148 llement polyphonique et dialectique qui définit l’ Europe , sa grandeur et son drame. Il serait tentant, partant de là, de recon
149 ourni la désinence symbolique de toute l’économie européenne jusqu’à nos jours. (Même après que le port eut pris plus d’importance
150 puis entre la région et la nation, la nation et l’ Europe , l’Europe et le monde ; tout se ramenant, en somme, à la tension entr
151 la région et la nation, la nation et l’Europe, l’ Europe et le monde ; tout se ramenant, en somme, à la tension entre le parti
152 indiscutés. Voici donc définie par ses formes une Europe pluraliste et non pas unitaire dans son principe comme le furent les
153 ent les créations les plus typiques de la culture européenne , non seulement dans les arts, mais dans la société. On les dirait for
154 ique irrésistible. Tel est le secret du dynamisme européen et des périodes de diastole planétaire de notre civilisation. Sommes-
155 e période ? Ou au contraire, l’état de santé de l’ Europe est-il aussi mauvais que le proclament une bonne partie de nos intell
156 eur d’une doctrine et d’une vie spirituelle que l’ Europe a mieux su maintenir face à l’État et face aux modes du jour. Les Amé
157 erme, pour ne pas dire autoritaire, si bien que l’ Europe redevient le modèle d’un meilleur équilibre, si relatif soit-il, entr
158 oche, dans cette mesure du moins, de nos formules européennes . Passons à la mairie, symbole de la commune, qui est le cadre concret
159 se prononce chaque année plus nettement. Au plan européen , le Conseil des communes d’Europe, l’Union des villes et des pouvoirs
160 ment. Au plan européen, le Conseil des communes d’ Europe , l’Union des villes et des pouvoirs locaux, apparus depuis la dernièr
161 inégaux d’importance mais très typiques de notre Europe , restent des signes peu trompeurs de la vitalité d’une culture modern
162 t de l’homme à la nature, résume les secrets de l’ Europe . L’Europe sans sa culture n’est qu’un cap de l’Asie, assez pauvre en
163 me à la nature, résume les secrets de l’Europe. L’ Europe sans sa culture n’est qu’un cap de l’Asie, assez pauvre en richesses
164 puissance économique sans précédent, c’est cela l’ Europe , c’est cela qui a fait le monde. L’Europe, c’est très peu de choses p
165 cela l’Europe, c’est cela qui a fait le monde. L’ Europe , c’est très peu de choses plus une culture. Cette définition simple m
166 nspose terme à terme en désignant naturellement l’ Europe par E, sa petite masse physique par m, et sa culture par c. E = mc2 s
167 culture par c. E = mc2 se lit alors comme suit : Europe égal cap de l’Asie multiplié par culture intensive (c au carré). (Je
168 ours ouverte entre tradition et innovation, que l’ Europe s’est montrée capable d’intégrer un peu mieux que d’autres la techniq
169 ésistances sérieuses, et comme sur table rase. En Europe , elle est née dans un contexte serré de principes vénérés et de droit
170 et de l’usine transparente entourée de verdure, l’ Europe n’a pas seulement rapproché la technique de sa vraie fin, qui est de
171 re. Si l’on ausculte les organes du patient nommé Europe l’un après l’autre, et si l’on détermine son métabolisme, il y a tout
172 rnières guerres ? 7. Voir Arts n° 872. h. « L’ Europe détient les secrets de l’avenir, mais a-t-elle la volonté de vivre ? 
7 1962, Arts, articles (1952-1965). Le monde entier irrite l’Europe et la méprise autant qu’il la jalouse ! (20 juin 1962)
173 Le monde entier irrite l’ Europe et la méprise autant qu’il la jalouse ! (20 juin 1962)i L’appel du
174 ppel du monde, provoqué par nos œuvres, atteint l’ Europe dans une situation qui me paraît définie par trois grands faits dont
175 squelles nos États ont perdu leurs empires, que l’ Europe s’est mise à s’unir. Les dates de la décolonisation successive du Pr
176 l’expansion coloniale comme un péché mortel de l’ Europe , en ce sens qu’il devait aggraver la dissolution du corps européen en
177 ens qu’il devait aggraver la dissolution du corps européen en nations rivales. Et de fait, la nécessité alléguée par les États c
178 e part, ces mêmes guerres ont fait comprendre aux Européens qu’il était temps de juguler leurs sanglants chauvinismes, et cela de
179 pas sans intérêt de souligner que les défaitistes européens , nationalistes ou marxistes, qui soutenaient depuis cinquante ans que
180 istes, qui soutenaient depuis cinquante ans que l’ Europe n’était riche que de l’exploitation des colonies, disaient les uns, d
181 s. Ce premier fait, définissant les rapports de l’ Europe avec le monde actuel, je me l’explique, en résumé, comme suit : L’exp
182 és par nous. Quant aux nations colonialistes de l’ Europe , presque ruinées à deux reprises par le délire nationaliste, obligées
183 eur union. Elles ont perdu le monde et retrouvé l’ Europe . Mais voici le deuxième grand fait, non moins paradoxal, qui domine n
184 omine notre situation : le retrait politique de l’ Europe coïncide avec l’adoption accélérée de notre civilisation par le tiers
185 érée de notre civilisation par le tiers-monde. L’ Europe a fait le monde, et cela non seulement parce qu’elle a découvert la T
186 ales, politiques, ou simplement aventurières, les Européens , en désordre, et sans le moindre plan d’ensemble, du xvie au xixe s
187 ruites ou dénaturées. Mais alors, le retrait de l’ Europe qu’on nomme décolonisation, ne va-t-il pas entraîner l’effacement pro
188 ire, récemment libérée, la culture et les langues européennes font des progrès spectaculaires. Je cite le directeur des affaires cu
189 ministrateurs ne sont partis qu’en vertu d’idéaux européens adoptés par l’élite indigène. Ces idéaux, on les retourne contre nous
190 r la décolonisation, bien au contraire ! Jamais l’ Europe , jamais l’Occident tout entier n’ont autant progressé dans l’âme et d
191 es qui risquent d’être aussi fâcheuses pour nous, Européens , que pour les peuples du tiers-monde. Fâcheuses pour nous d’abord. Ca
192 auvaise conscience qui étaient le fait des élites européennes pendant les derniers temps de la colonisation et le respect des cultu
193 nseignant à Oxford, lors d’un tout récent congrès européen , entendait se faire l’écho des ressentiments du tiers-monde à l’égard
194 ce qu’a fait l’Occident, ce professeur rendait l’ Europe responsable de tous les maux qui en résultent, et de la reviviscence,
195 onceptions partielles ou discréditées de l’esprit européen  ». Il en donnait l’impressionnante liste que voici : L’évangile du p
196 ésentants, les plus conscients des vraies valeurs européennes , que nous envoyons outre-mer, mais des agents de nos États et de nos
197 ieu où ils vont agir, et moins encore de ce que l’ Europe peut signifier dans son ensemble et vue de loin, des agitateurs polit
198 ur la nôtre. Telle est la situation concrète de l’ Europe dans le monde actuel. Je la résume : la décolonisation, loin de nous
199 question qui se pose est dès lors la suivante : l’ Europe va-t-elle être évincée par ses produits les plus vendables, par ses s
200 riels et moraux ? i. « Le monde entier irrite l’ Europe et la méprise autant qu’il la jalouse ! », Arts, Paris, n° 874, 20 ju
201 vant, très probablement écrit par Rougemont : « L’ Europe est en train de s’unir, pour des raisons à la fois séculaires et mode
8 1962, Arts, articles (1952-1965). L’Europe est un colosse qui s’ignore (encore) (27 juin 1962)
202 L’ Europe est un colosse qui s’ignore (encore) (27 juin 1962)j Un certain dé
203 (encore) (27 juin 1962)j Un certain défaitisme européen , de Spengler à Toynbee et de Sorel à Sartre, semble avoir persuadé no
204 avoir persuadé nos élites comme nos masses que l’ Europe est une pauvre chose écrasée entre deux colosses. Cette conviction, o
205 ’est barbare encore, mais c’est grand… La vieille Europe aura à compter avec cette jeunesse. L’autre jeunesse, c’est l’Amériqu
206 fin de la dernière guerre, et au plan mondial. L’ Europe se sentait écrasée entre deux colosses à venir. Ils sont là. Mesurons
207 gnifie ce rectangle du milieu ? Réponse : C’est l’ Europe entre les « deux grands ». Chaque carré représente un million d’habit
208 Chaque carré représente un million d’habitants. L’ Europe à l’ouest du rideau de fer en compte 335 millions ; les sept États eu
209 au de fer en compte 335 millions ; les sept États européens actuellement soumis à l’URSS, 95 millions ; total 430 millions. Tandi
210 quantité démographique les qualités humaines de l’ Européen , qui est encore le meilleur ouvrier, le meilleur philosophe et le mei
211 — vous avouerez qu’il est au moins curieux que l’ Europe se sente écrasée entre deux colosses plus petits qu’elle, qui n’attei
212 . Mais vous me direz que la puissance réelle de l’ Europe n’est pas en proportion de sa population. C’est exact en ce sens que,
213 a production américaine dépasse encore celle de l’ Europe . Mais le rythme d’accroissement est beaucoup plus rapide en Europe qu
214 ythme d’accroissement est beaucoup plus rapide en Europe qu’aux États-Unis. Et quant aux chiffres absolus, l’Europe occupe le
215 ’aux États-Unis. Et quant aux chiffres absolus, l’ Europe occupe le premier rang pour la production de l’acier, de la fonte, de
216 millions d’habitants (en comptant les satellites européens de l’URSS), mais seulement le citoyen d’un petit État de 10 ou de 50
217 st plus à l’échelle du monde nouveau. C’est que l’ Europe unie n’est pas faite et qu’il nous faut donc absolument la faire, pou
218 s les statistiques, mais dans notre conscience. L’ Europe a tout ce qu’il faut pour être encore la première puissance de la Ter
219 vocation à l’Occident, tel que le représentent l’ Europe en train de s’unir et les États-Unis. Il est courant d’entendre que l
220 éologiques et politiques qui définissent l’esprit européen au xixe siècle. Ce sont donc des valeurs qui nous sont propres que l
221 aire, que les peuples nouveaux se tournent vers l’ Europe , même quand ils l’injurient en la copiant. Pour le dire en une phrase
222 que — laquelle est, après tout, une création de l’ Europe  ! Le cycle se referme, nous ramenant à l’Europe. Où trouver, dans tou
223 l’Europe ! Le cycle se referme, nous ramenant à l’ Europe . Où trouver, dans tout cela, nos successeurs ? Je ne vois que des imi
224 facile que l’action. Les vertus et les vices de l’ Europe , son passé et son expérience, la rendent doublement responsable — au
225 araissent posséder les moyens de se charger, si l’ Europe s’y dérobe. Cette vocation, ou cette fonction mondiale, si l’on préfè
226 nges de biens matériels cela va de soi, puisque l’ Europe les a créés, ces échanges, les a institués au lendemain des grandes d
227 a su inventer sont en mesure de les entretenir. L’ Europe reste le cœur de tout système d’échanges mondiaux et cela, non seulem
228 x fois celui de l’URSS. La vocation mondiale de l’ Europe est inscrite dans des faits de ce genre : Nos exportations représente
229 leur produit national. Le monde est vital pour l’ Europe , il ne l’est guère pour les États-Unis, bien moins encore pour la Rus
230 anges culturels, voire spirituels, tout désigne l’ Europe pour les mettre en mouvement et pour les orienter vers un dialogue fé
231 ntes des nôtres : ce n’est point par hasard que l’ Europe a créé l’ethnographie et l’archéologie, et la science des religions c
232 puissante, mais les initiatives sont venues de l’ Europe , et c’est vers elle, naturellement, que je vois se tourner les élites
233 ner les élites du tiers-monde : c’est à travers l’ Europe qu’elles conçoivent la nécessité et les moyens de dialoguer, non seul
234 humaines est le second aspect de la vocation de l’ Europe . Équilibrer technique et tradition, par exemple. C’est en Allemagne,
235 ard du tiers-monde comme de lui-même. Car c’est l’ Europe qui a répandu dans le monde entier le virus du nationalisme, dont ell
236 opient puérilement ses tares les plus visibles. L’ Europe se doit donc de produire, d’attester et de diffuser les anticorps de
237 lui seul, dans le monde actuel. La vocation de l’ Europe , aujourd’hui pour demain, c’est donc offrir au monde nouveau l’exempl
238 s pourrons voir cela, dans cette génération, si l’ Europe , d’où le mal est venu, réussit à s’unir librement, achevant ainsi son
239 idéal que réclame la jeunesse, il est là, dans l’ Europe fédérée, modèle mondial. Le temps n’est plus de douter sans vergogne
240 r, qu’il s’agit de ne pas frustrer. L’avenir de l’ Europe est gagé sur de grands faits géoéconomiques d’une portée désormais mo
241 de moitié du xxe siècle. Les vraies chances de l’ Europe ne dépendent pas d’une juste prévision de ce que d’autres feront. Ell
242 ns de la Baconnière et chez Albin Michel. j. « L’ Europe est un colosse qui s’ignore (encore) », Arts, Paris, n° 875, 27 juin
9 1965, Arts, articles (1952-1965). Le déferlement de l’érotisme : pour une nouvelle théologie (5-11 mai 1965)
243 s morales seront une bizarrerie du passé culturel européen , de même que la faim et la peur ne sont plus, dans nos pays riches, d
244 ident comment le mythe de l’amour s’est formé en Europe au Moyen Âge et a distingué dans Comme toi-même tout ce qui sépare