1 1948, L’Europe en jeu. Trois discours suivis de Documents de La Haye. I
1 s que l’on rassemble ici décrit la situation de l’ Europe au lendemain de sa libération. Le second propose une doctrine pour la
2 , vers 1932, je n’ai cessé d’appeler l’union de l’ Europe au nom de la doctrine fédéraliste. Je trouvais cette doctrine impliqu
3 ’occupation, la réclusion, l’obscurcissement de l’ Europe , pour que l’idée de la fédération du continent s’éveille un peu parto
4 ces textes, jusqu’aux résolutions du Congrès de l’ Europe , les mêmes idées reviennent, et parfois les mêmes phrases. Certaines
5 e coins du continent. Le sujet des débats était l’ Europe . Dans la conférence qu’on va lire, je m’efforçai de confronter ma « p
6 ine fédéraliste qui en résulte, avec les réalités européennes nées de la guerre et de la résistance. Les maladies de l’Europe
7 a guerre et de la résistance. Les maladies de l’ Europe On m’a prié de vous parler ce soir d’une Europe à laquelle je revi
8 urope On m’a prié de vous parler ce soir d’une Europe à laquelle je reviens après six ans d’absence, et certains événements
9 avez lu toute son histoire. Ainsi j’ai retrouvé l’ Europe . Sur son visage et dans son expression certains traits accusés et ten
10 e et le plus naturel. Je vais donc regarder notre Europe et j’éviterai de faire du sentiment puisque aussi bien tout se passe
11 maintenant, qu’allons-nous faire ensemble ? » ⁂ L’ Europe a mauvaise mine, il faut l’avouer. Avant même que l’on puisse détaill
12 c imposé son point de vue. Ainsi d’Hitler et de l’ Europe démocratique. Ce ne sont pas seulement les ruines et les désordres ma
13 t devant nous a réveillé ces forces parmi nous. L’ Europe a été façonnée par le judéo-christianisme, par la notion grecque d’in
14 de là, les progrès de la déchristianisation de l’ Europe . Commencée parmi les élites, au xviiie siècle, avec l’attaque des ra
15 ’une chrétienté identifiable avec le concept de l’ Europe , Die Christenheit oder Europa, selon le titre du fameux essai de Nov
16 ec le concept de l’Europe, Die Christenheit oder Europa , selon le titre du fameux essai de Novalis. Les masses comme les élit
17 u conformisme. Dans telles grandes capitales de l’ Europe , on voit des écrivains et des savants donner des gages d’apparente lo
18 cès de fixation, se révèlent à l’observateur de l’ Europe d’après-guerre. J’en mentionnerai quelques-uns rapidement. La Résista
19 ntionnerai quelques-uns rapidement. La Résistance européenne , admirable sursaut d’une liberté blessée qui se défendait, mais aussi
20 onalisme fait rage, cette maladie romantique de l’ Europe . Lui seul, sous le couvert de je ne sais quels prétextes parés du nom
21 etites occupations les aliénés. Si l’on se bat en Europe demain, ce sera au nom de la démocratie contre le peuple, au nom du p
22 ticisme lucide… ⁂ Il se peut que le portrait de l’ Europe que je viens d’esquisser devant vous pèche par excès de pessimisme, e
23 gnore pas que l’autodénigrement, chez nous autres Européens , se confond trop souvent avec le sens critique. Je n’ignore pas que l
24 ugements subjectifs : c’est que la situation de l’ Europe dans le monde s’est modifiée, qu’elle s’est même totalement renversée
25 s l’automne de 1939. Avant cette guerre, le nom d’ Europe évoquait un foyer intense dont le rayonnement s’élargissait sur tous
26 t s’élargissait sur tous les autres continents. L’ Europe nous semblait donc plus grande qu’elle n’était. D’où l’effet de choc
27 l’autre guerre, la phrase fameuse de Valéry sur l’ Europe « petit cap de l’Asie ». Aujourd’hui l’Europe, vue d’Amérique, et j’i
28 r l’Europe « petit cap de l’Asie ». Aujourd’hui l’ Europe , vue d’Amérique, et j’imagine aussi, vue de Russie, paraît plus petit
29 efermée sur elle-même. Il y a plus. Nous voyons l’ Europe comme vidée, au profit de ces deux empires, de certaines ambitions, d
30 s allusion tout à l’heure — semble avoir évacué l’ Europe pour émigrer vers l’Amérique et la Russie. C’est une notion qui s’éti
31 ansion irrésistible, impérialiste ou généreuse, l’ Europe a diffusé sur la planète, sans distinction, ses découvertes et ses ut
32 que, qui ont fait fortune en Amérique, venaient d’ Europe  ; comme en venaient le matérialisme dialectique, la technique révolut
33 u’à la morale, autrefois religieuse. Tout vient d’ Europe , tout cela fut nôtre à l’origine. Mais alors, comment et pourquoi ces
34 ne. Mais alors, comment et pourquoi ces créations européennes n’ont-elles pas connu en Europe leur plein succès ? Et comment et pou
35 es créations européennes n’ont-elles pas connu en Europe leur plein succès ? Et comment et pourquoi, hors d’Europe, ont-elles
36 eur plein succès ? Et comment et pourquoi, hors d’ Europe , ont-elles subi cette croissance gigantesque ? Pourquoi n’ont-elles p
37 ni tout leur bien, ni tout leur mal ? C’est qu’en Europe , elles se trouvaient toujours en état de composition, tandis qu’aille
38 adictions, définit l’équilibre humain qu’on nomme Europe . Il conditionne aussi notre culture. Et nous allons voir qu’il tradui
39 uit, et parfois aussi qu’il trahit, la conception européenne de l’homme. Toute la question est de savoir si nous saurons maintenir
40 Ces chances paraissent très faibles en vérité. L’ Europe a dominé le monde pendant des siècles par sa culture d’abord, dès le
41 ’efficacité. Or, il s’en faut de beaucoup que les Européens soient unanimes à tenir activement le parti de cette Europe, de ses c
42 ent unanimes à tenir activement le parti de cette Europe , de ses complexités vitales, de sa culture. Une analyse sociologique
43 tenir vitalement aux conceptions et aux coutumes européennes , que deux classes par ailleurs tout opposées : les intellectuels non
44 osition. Telle est, en gros, notre situation. Une Europe démoralisée par sa victoire douteuse sur Hitler, rétrécie et coincée
45 itime de s’obstiner, de parler d’une défense de l’ Europe , de nous cramponner à ses restes, et même d’appeler à son secours des
46 n vérité ? Cette même question, je sais plusieurs Européens qui se la posent en termes tout à fait urgents et familiers, quand il
47 s et familiers, quand ils se demandent si c’est l’ Europe ou l’Amérique qu’il leur faut souhaiter pour leurs enfants. Car nous
48 iter pour leurs enfants. Car nous pensons à notre Europe comme à un « Vaterland », pays des pères, mais l’Amérique, ou la Russ
49 e leurs espoirs à mes souvenirs ? En défendant l’ Europe , il s’agit donc de savoir si nous défendons plus et mieux que de bell
50 mêler à la vision de leur avenir la vision d’une Europe réduite à l’état de musée plus ou moins bien tenu, ou au contraire la
51 moins bien tenu, ou au contraire la vision d’une Europe qui aurait cédé aux tentations d’un bonheur étranger à son génie, une
52 tentations d’un bonheur étranger à son génie, une Europe américanisée — ce serait par goût — soviétisée — ce serait par contra
53 nisée. Un musée ou une colonie… autant dire : une Europe absente… Imaginons le monde heureux, prospère, et puissamment organis
54 mot, vague et poignant : c’est le mot « âme ». L’ Europe absente, démissionnaire, colonisée, c’est un certain sens de la vie,
55 t donc pas au nom de je ne sais quel nationalisme européen qu’il nous faut défendre l’Europe, mais au seul nom de l’humanité la
56 nationalisme européen qu’il nous faut défendre l’ Europe , mais au seul nom de l’humanité la plus consciente et la plus créatri
57 t l’autre jour, ici même, l’existence d’un esprit européen , et c’était un appel, nous l’avons tous compris. C’est un point de vu
58 l’on observe. Mais si maintenant nous regardons l’ Europe dans le monde, ce changement de point de vue va nous faire voir une t
59 s solide réalité spirituelle. S’il est vrai que l’ Europe , jusqu’à ce siècle, ne s’est guère sentie et conçue comme un tout, co
60 de l’homme. Esquissons cette comparaison entre l’ Europe et les nouveaux empires qui se désignent typiquement par des lettres
61 ine de la religion, de la culture et de la morale européennes , il y a l’idée de la contradiction, du déchirement fécond, du conflit
62 histoire, et sans drame. Il s’ensuit que le héros européen sera l’homme qui atteint, dramatiquement, le plus haut point de consc
63 aisons de vivre, même mortelles. Voilà pourquoi l’ Européen typique sera tantôt un révolutionnaire ou un apôtre, un amant passion
64 mal sont liés, inextricablement et vitalement. L’ Européen connaît donc la valeur essentielle des antagonismes, de l’opposition
65 ière un peu trop schématique et abstraite entre l’ Européen , d’une part, l’Américain et le Soviétique, de l’autre, je n’ai pas à
66 arge vérité ; que telle est bien la vocation de l’ Europe , et que l’Europe existe au plus haut point, comme entité spirituelle,
67 telle est bien la vocation de l’Europe, et que l’ Europe existe au plus haut point, comme entité spirituelle, dans les diversi
68 otre rencontre. Ainsi donc, la confrontation de l’ Europe et de ces deux filles parfois ingrates du plus grand Occident nous su
69 t nous suggère une formule de l’homme typiquement européen  : c’est l’homme de la contradiction, l’homme dialectique par excellen
70 i est pour un seul. Crucifié, dis-je, car l’homme européen , en tant que tel, n’accepte pas d’être réduit à l’un ou à l’autre de
71 de ces tensions, l’effort principal de l’esprit. Européenne sera donc, typiquement, la volonté de rapporter à l’homme, de mesurer
72 riserait trop facilement d’une certaine tradition européenne , non la meilleure. Je préfère emprunter, pour un moment, à nos voisin
73 ntenir et pour illustrer les valeurs propres de l’ Europe . Ce sera peut-être un bon moyen de les définir dans l’actuel. Sauver
74 bon moyen de les définir dans l’actuel. Sauver l’ Europe — c’est simple à dire vraiment — sauver l’Europe, c’est pratiquement,
75 ’Europe — c’est simple à dire vraiment — sauver l’ Europe , c’est pratiquement, et aujourd’hui, empêcher à tout prix la guerre.
76 aire les faire d’une manière non sanglante, car l’ Europe ne peut pas s’offrir des destructions supplémentaires.) Et je sais tr
77 vient de voir qu’elle est la condition de l’homme européen , la source vive de sa grandeur et de sa spiritualité. Voilà le drame.
78 re la liberté et l’engagement, dont s’honorent en Europe les pays dominés par l’influence protestante. Si nous nous demandons,
79 ous demandons, en effet, quels sont les pays de l’ Europe qui « marchent le mieux », nous constatons que ce sont sans contredit
80 nation unie, puis entre les nations diverses et l’ Europe  ; puis entre l’Europe et le monde. À tous les degrés, nous retrouvons
81 e les nations diverses et l’Europe ; puis entre l’ Europe et le monde. À tous les degrés, nous retrouvons les mêmes tentations
82 ant. La volonté qui possède Bonaparte d’unifier l’ Europe au mépris des diversités nationales provoquera, sous Napoléon, la nai
83 , qu’il faut voir dans le nationalisme la maladie européenne , l’anti-Europe par excellence. Je compare le nationalisme à une espèc
84 de la sorte, qui se conduit alors vis-à-vis de l’ Europe comme un groupe absolutisé, comme un vulgaire individu dont la préten
85 vertu de l’exemple vécu. Telle est la santé de l’ Europe , et telles sont ses deux maladies, contradictoires en apparence, mais
86 re de l’homme. Et c’est pourquoi la vocation de l’ Europe et des élites qui portent la conscience de cette Europe, m’apparaît d
87 et des élites qui portent la conscience de cette Europe , m’apparaît dans un double office de vigilance et d’invention. Le tré
88 ffice de vigilance et d’invention. Le trésor de l’ Europe , c’est son idée de l’homme. Mais c’est un trésor explosif, d’où la né
89 rder la liberté dans l’ordre. Après tout, c’est l’ Europe qui a sécrété ce contagieux nationalisme, c’est à elle d’inventer son
90 t messieurs, si les descriptions pessimistes de l’ Europe auxquelles je me suis livré en débutant sont exactes, il peut paraîtr
91 étrange de parler après cela d’une vocation de l’ Europe . Pour exercer une vocation, il faut d’abord être vivant, il faut surv
92 faut d’abord être vivant, il faut survivre. Or l’ Europe démoralisée, coincée entre deux grands empires, minée par son propre
93 ses vertus bien plus encore que par ses vices, l’ Europe a-t-elle des chances de vivre encore assez pour qu’il ne soit pas uto
94 tôt lorsqu’elle est accomplie. Or, notre vocation européenne me paraît encore loin d’être accomplie… Mais cette raison irrationnel
95 e raison toute physique, géographique d’abord : l’ Europe , cette Grèce agrandie, est un continent cloisonné, et par nature dive
96 , qui affecte une certaine part de nos esprits, l’ Europe garde encore l’apanage du scepticisme et de l’esprit critique. Les Ég
97 l’humaniser, et par là même de la rapprocher de l’ Europe . Je pense surtout à l’avenir de l’URSS. Que l’on soit sympathique ou
98 res, l’homme en soi — l’éternel résistant ! Or, l’ Europe , et c’est là sa grandeur, a justement vécu de toutes ces choses gênan
99 eux du moins leurs enfants. Un dernier trait : l’ Europe , surtout si on la compare aux deux empires séparés d’elle, et que je
100 que je nomme les deux empires sans précédent — l’ Europe est la patrie de la mémoire. Elle est même, pratiquement, la mémoire
101 intimité des relations humaines. Voilà pourquoi l’ Europe a toutes les chances de rester la patrie de l’invention — alors que l
102 e qui nous permet donc d’aller plus loin. Ainsi l’ Europe construit des églises modernes, en verre et en ciment armé, tandis qu
103 des églises en gothique neuf. C’est parce que l’ Europe est la mémoire du monde qu’elle ne cessera pas d’inventer. Elle reste
104 ir… oui, s’il est un avenir, non seulement pour l’ Europe , mais pour le monde. Dans une certaine mesure, qui est celle du réali
105 e atomique éclate, il n’y a plus de problème de l’ Europe , et d’une façon plus générale, il n’y a peut-être plus de problème de
106 ussi, l’avenir du monde dépend de l’attitude de l’ Europe , et de son pouvoir d’invention. Ici, point de malentendu ! Ne demando
107 Ne demandons pas l’instauration d’une fédération européenne pour que se crée un troisième bloc, un bloc-tampon, ou un bloc opposé
108 der, et obtenir, nous tous, c’est que les nations européennes s’ouvrent d’abord les unes aux autres, suppriment sur tous les plans
109 une attitude nouvelle, une confiance — ouvrant l’ Europe au monde, du même coup. Ce qu’il nous faut demander et obtenir — obte
110 nous-mêmes tout d’abord — c’est que le génie de l’ Europe découvre, et qu’il propage, les antitoxines des virus dont il a infes
111 a infesté le monde entier. Il n’y a de fédération européenne imaginable qu’en vue d’une fédération mondiale. Il n’y a de paix et d
112 ondial. Et le monde, pour ce faire, a besoin de l’ Europe , j’entends de son esprit critique autant que de son sens inventif. La
113 de son sens inventif. La pensée du monde, c’est l’ Europe . Et s’il s’agit vraiment de penser, que penser d’autre pour la paix,
114 ui doit ici nous inspirer, je dirai, songeant à l’ Europe et à sa vocation mondiale, et je vous invite à le dire avec moi : Je
115 ève marquèrent un premier réveil de la conscience européenne , au lendemain d’une victoire humiliée. L’Europe passait alors — 1946 
116 ropéenne, au lendemain d’une victoire humiliée. L’ Europe passait alors — 1946 — par une crise de découragement sans précédent
117 é je ne sais quel orgueil occidental, prônait une Europe neutre et cherchant son salut — mais quel salut ? — « dans son impuis
118 n ton presque posthume sur la « crise de l’esprit européen  » produisirent néanmoins cet effet principal de mettre en évidence, n
119 évidence, non sans éclat, l’existence d’un esprit européen , seule base sérieuse de la fédération dont quelques-uns se risquaient
120 suivirent les Rencontres, un débat général sur l’ Europe et sa situation, jugée désespérée. Cette époque de prise de conscienc
121 ussi celle du « double refus ». Il semblait que l’ Europe ne pût se concevoir qu’en s’opposant à ce qu’elle redoutait. Et, tand
122 tion. D’où le bref article qui suit. Choisir l’ Europe Les uns nous disent que le choix est fatal entre l’URSS et les USA
123 rait fatalement à la guerre. Pour les premiers, l’ Europe n’est plus rien par elle-même et devrait s’attacher au plus vite soit
124 . Autrement dit, l’URSS est présente dans toute l’ Europe aux élections et dans les parlements, elle a ses troupes disciplinées
125 est nullement une arme de combat. Par rapport à l’ Europe , les intentions des deux empires ne sont pas davantage comparables. O
126 ’oppose à toute tentative d’unir les nations de l’ Europe  : c’est qu’elle veut diviser pour régner. Les États-Unis, au contrair
127 s-Unis, au contraire, poussent à la collaboration européenne , et surtout sur le plan économique : ils nous veulent forts, donc aut
128 commune mesure entre le danger soviétique pour l’ Europe et le prétendu danger yankee. La Russie qui vise à l’autarcie totalit
129 quer ce fait brutal : la Russie ne veut pas d’une Europe forte, c’est-à-dire d’une Europe unie et autonome ; elle ne veut qu’u
130 e veut pas d’une Europe forte, c’est-à-dire d’une Europe unie et autonome ; elle ne veut qu’une Europe livrée à sa merci par l
131 une Europe unie et autonome ; elle ne veut qu’une Europe livrée à sa merci par les rivalités nationalistes et la misère. À ce
132 hoix qui nous reste ouvert, c’est donc celui de l’ Europe elle-même. La seule manière possible de défendre l’Europe, c’est de l
133 lle-même. La seule manière possible de défendre l’ Europe , c’est de la faire, donc de nous fédérer. 1. Voir L’Esprit europée
134 faire, donc de nous fédérer. 1. Voir L’Esprit européen , Neuchâtel, La Baconnière, 1947, p. 205.
2 1948, L’Europe en jeu. Trois discours suivis de Documents de La Haye. II
135 ontres internationales, par le congrès de l’Union européenne des fédéralistes. Les délégués d’une cinquantaine d’associations dive
136 ssociations diverses, venus de seize nations de l’ Europe , y témoignèrent de leur commune volonté de promouvoir l’union du cont
137 philosophe allemand Karl Jaspers déclarait que l’ Europe n’a plus de choix qu’entre la balkanisation et l’helvétisation. Je su
138 ntendait par balkanisation la désintégration de l’ Europe en nationalismes rivaux, et par helvétisation, au contraire, l’intégr
139 édéraliste ne projette pas devant elle une utopie européenne qu’il s’agirait simplement de rejoindre, ou des plans statiques qu’il
140 onne. Il est infiniment probable que, sur le plan européen , nous allons voir se dessiner deux tendances toutes semblables à cell
141 : ou se nier, ou triompher, mais sur le plan de l’ Europe entière. Le grand danger de l’heure présente, pour la Suisse, je le v
142 science de ses fins. De même pour le fédéralisme européen . Un sentiment commun se formait peu à peu, depuis la guerre de 1914-1
143 er. Brusquement, la question se pose de fédérer l’ Europe dès la paix rétablie. Mais parce qu’elle se pose brusquement, elle ri
144 licables, immédiatement, dans l’état présent de l’ Europe .   Premier principe. — La fédération ne peut naître que du renonceme
145 er, dans leurs tentatives pour faire l’unité de l’ Europe , sont des avertissements utiles. Ils nous confirment dans l’idée qu’o
146 éfendues et maintenues. De même, la richesse de l’ Europe et l’essence même de sa culture seraient perdues si l’on tentait d’un
147 tout y mélanger, et d’obtenir une sorte de nation européenne où Latins et Germains, Slaves et Anglo-Saxons, Scandinaves et Grecs,
148 n de ces groupes, et qui les brimerait tous. Si l’ Europe doit se fédérer, c’est pour que chacun de ses membres bénéficie de l’
149 le menacent. Chacune des nations qui composent l’ Europe y représente une fonction propre, irremplaçable, comme celle d’un org
150 armonie avec tous les autres. Si les nations de l’ Europe arrivaient à se concevoir dans ce rôle d’organes divers d’un même cor
151 le moyen des gouvernements. Je vois la fédération européenne se composer lentement, un peu partout, et de toutes sortes de manière
152 ui créent peu à peu des réseaux variés d’échanges européens . Rien de tout cela n’est inutile. Et tout cela, qui paraît si dispers
153 ope. Au-dessous et au-dessus des gouvernements, l’ Europe est beaucoup plus près de s’organiser qu’il ne le semble. Elle est dé
154 u l’ONU, que cela empêche de vivre. La fédération européenne ne sera pas l’œuvre des gouvernants chargés de défendre les intérêts
155 ces personnes qui formeront le gouvernement de l’ Europe . Il n’y a pas d’autre voie possible et praticable. Les USA ne sont pa
156 latif issus des peuples. Le jour où les peuples d’ Europe auront compris qu’ils sont en réalité beaucoup plus solidaires et plu
157 qu’à moitié gagnée. Messieurs les délégués, si l’ Europe doit durer, c’est aux fédéralistes qu’elle le devra, et à eux seuls.
158 lu. Et c’est l’agitation fédéraliste dans toute l’ Europe qui les poussera. De cette agitation, que je voudrais baptiser la nou
159 , que je voudrais baptiser la nouvelle Résistance européenne , nous nous déclarons responsables, par le seul fait que nous sommes i
160 d’utopistes, de généreux assembleurs de nuées ! L’ Europe unie, bien sûr, d’accord, mais c’est un plan prématuré. » Or, je vena
161 e sont aujourd’hui les saboteurs de la fédération européenne , staliniens et nationalistes, fascistes de tous les déguisements. Et
162 ées promises, par la Bombe, à l’évaporation. L’ Europe nécessaire On me dit encore : « Vous y croyez, à cette fédération
163 encore : « Vous y croyez, à cette fédération de l’ Europe  ? » Je réponds qu’il s’agit plutôt de la vouloir. « Mais pourquoi, me
164 ouloir ? » Je réponds qu’il n’y a qu’à regarder l’ Europe , qu’à dresser son bilan de misères, qu’à voir la place qu’elle tient
165 re s’en dégage. Quelques faits La fédération de l’ Europe est inscrite dans les faits les plus neufs de ce siècle, les uns tech
166 min de l’Amérique à la Russie ne passe plus par l’ Europe , mais par le pôle. La radio, l’aviation, l’économie, redistribuent no
167 n même temps qu’elles les rendent plus étroits. L’ Europe est plus petite que nous ne pensions, le monde plus grand. Nos descen
168 en que Valéry ait pu nous étonner en notant que l’ Europe n’est qu’un cap de l’Asie. À ces faits matériels vient s’ajouter le g
169 e et les démocraties : tout se passait entre nous Européens , nous sentions donc surtout nos divisions. Aujourd’hui, les Deux Gran
170 de la culture, elle y perdrait autant que nous. L’ Europe a dépassé le stade de l’individualisme économique. Son rôle est d’inv
171 mœurs, l’idée de l’homme commune aux peuples de l’ Europe  : ni l’individu sans devoirs, ni le soldat politique sans droits, mai
172 r tous et le tous pour un. Voilà la vocation de l’ Europe . Or il est clair qu’aucune de nos nations n’est en mesure de la réali
173 sition foncière. Qui oserait dire : « Je veux une Europe désunie ! Je veux que nos rivalités se perpétuent ! Je veux que nos p
174 qu’ils y ajoutent un troisième refus, celui de l’ Europe , jusqu’à ce qu’ils soient dûment colonisés ! » Personne n’ose dire ce
175 érente : « Vous y croyez, à cette fédération de l’ Europe  ?… » Derrière ce scepticisme en quête d’un sourire complice ou gêné (
176  ! Enfin le stalinisme a décrété que l’union de l’ Europe est antirusse, ce qui est la manière stalinienne de dire que la Russi
177 ne de dire que la Russie ne veut pas la paix de l’ Europe . Il n’y a donc plus qu’à faire l’Europe sans l’URSS. Les sceptiques r
178 paix de l’Europe. Il n’y a donc plus qu’à faire l’ Europe sans l’URSS. Les sceptiques rejoindront un jour, les défaitistes auro
179 uelle dès maintenant nous déclarons marcher : une Europe solidement fédérée, au service de la liberté et des droits de l’homme
180 droits de l’homme universels. Sur cette union, l’ Europe joue son destin, et chacun de nous, et le monde avec elle. Menacée, d
181 de avec elle. Menacée, déchirée, déjà diminuée, l’ Europe finit demain, si elle n’entend pas l’appel, ou ne sait y répondre ass
182 vocation, dans le monde des empires affrontés, l’ Europe commence demain, et la paix avec elle.
3 1948, L’Europe en jeu. Trois discours suivis de Documents de La Haye. III
183 emps de l’année suivante, des états généraux de l’ Europe . Les observateurs envoyés par le United Europe Committee déclarèrent
184 ntion de provoquer la réunion d’un congrès pour l’ Europe unie. Il ne s’agissait pas, dans son esprit, d’une entreprise « fédér
185 omité de coordination des mouvements pour l’Unité européenne dressait les plans de travail pour La Haye2. Trois commissions furent
186 e qu’appartient la conférence sur l’Aventure de l’ Europe prononcée à la Sorbonne le 22 avril 1948. Elle reflète la lutte entre
187 ntenant, bel et bien engagés : la fédération de l’ Europe . Il y a l’utopie de l’Europe, et il y a l’aventure de l’Europe. Cette
188 : la fédération de l’Europe. Il y a l’utopie de l’ Europe , et il y a l’aventure de l’Europe. Cette distinction fondamentale, vo
189 a l’utopie de l’Europe, et il y a l’aventure de l’ Europe . Cette distinction fondamentale, vous allez le voir, correspond à deu
190 l’Histoire. Le slogan de la peur : « Défense de l’ Europe  », définit aujourd’hui l’utopie. Telle qu’elle est, pessimiste et div
191 réussisse à paralyser la droite, ou l’inverse, l’ Europe est pratiquement indéfendable. Je m’explique. Tenter d’unir en une al
192 les armées. Je dis donc que vouloir l’union de l’ Europe sans rien changer dans sa structure économique et politique, c’est pr
193 loir, c’est l’utopie. Au contraire, transformer l’ Europe conformément à son génie, qui est celui de la liberté, et dans les co
194 sont celles de l’organisation ; rappeler à cette Europe qui se sent diminuée qu’elle compte encore près de trois-cents-millio
195 ues semaines, ou quelques mois, l’idée de l’union européenne a fait des progrès étonnants, sinon dans la réalité, du moins dans le
196 en septembre dernier, lors du congrès de l’Union européenne des fédéralistes : « Si l’Europe doit durer, c’est aux fédéralistes q
197 s de l’Union européenne des fédéralistes : « Si l’ Europe doit durer, c’est aux fédéralistes qu’elle le devra, et à eux seuls.
198 rendre dans quinze jours, aux états généraux de l’ Europe , convoqués à La Haye pour le 7 mai. Je ne puis anticiper sur les réso
199 s résolutions auxquelles aboutira ce congrès de l’ Europe . Le 19 juin de 1789, personne ne prévoyait le serment du Jeu de Paume
200 moins brève échéance. Nous avons aujourd’hui une Europe divisée et cloisonnée dans l’anarchie. Nous voulons une Europe organi
201 e et cloisonnée dans l’anarchie. Nous voulons une Europe organisée. Une Europe sans barrières ni visas, rendue dans toute son
202 ’anarchie. Nous voulons une Europe organisée. Une Europe sans barrières ni visas, rendue dans toute son étendue à la libre cir
203 tats, de toute urgence, un Conseil politique de l’ Europe . Nous voulons que ce Conseil soit contrôlé par un Parlement de l’Euro
204 ue ce Conseil soit contrôlé par un Parlement de l’ Europe . Nous voulons qu’un Conseil économique entreprenne la mise en commun
205 re donne une voix et une autorité à la conscience européenne . Par-dessus tout, dominant ces Conseils qui domineraient eux-mêmes le
206 parler de démocratie. Finalement, nous voulons l’ Europe , parce que sans elle le monde glisse à la guerre, et que l’alternativ
207 supérieurs à l’État, et sans lesquels, pour nous Européens , le bonheur même paraît inacceptable. Mesdames et messieurs, vous le
208 tous que les menaces qui pèsent aujourd’hui sur l’ Europe mettent en cause quelque chose de plus profond que nos systèmes écono
209 iberté, que symbolise depuis des siècles le nom d’ Europe . En les perdant, nous serions assurés de perdre du même coup ce qui f
210 e à terre qui militent en faveur d’une union de l’ Europe . On me dira que ces motifs immédiats sont d’ordre économique et polit
211 ue l’homme de la rue se fiche un peu de ma notion européenne de l’homme et de la liberté. Ce point de vue passe aux yeux de certai
212 a part d’utopiste. Je dis qu’il équivaut à nier l’ Europe telle qu’elle a tout de même existé. Si l’on prétend que la seule cho
213 manifestent, croyez-m’en, elles prouveront que l’ Européen tient, plus qu’à l’ordre, et plus qu’à la richesse, et plus qu’au pai
214 nt la Résistance. Je rappellerai ensuite que si l’ Europe , petit cap de l’Asie comme on sait, a été tout de même pendant plus d
215 dimensions, auxquelles on voudrait la réduire. L’ Europe est une culture, ou elle n’est pas grand-chose. J’emploie ici le mot
216 yeux du monde entier, notre existence. Pour nous, Européens , la culture véritable naît d’une prise de conscience de la vie. Se cu
217 t ce que la vie veulent dire. Il est typique de l’ Europe d’aujourd’hui que la culture y soit encore un but, une fin en soi et
218 t qui prescrivent son rôle, subordonné. Pour nous Européens , tout au contraire, c’est la culture qui exprime le sens humain de la
219 e la culture appartient donc à la définition de l’ Europe . En second lieu, il n’est pas moins typique de l’Europe, que son unit
220 . En second lieu, il n’est pas moins typique de l’ Europe , que son unité culturelle ou, pour mieux dire, son unité d’attitude v
221 on de l’homme et de sa liberté n’a jamais été, en Europe , l’apanage d’une doctrine unique, d’une nation ou d’une caste choisie
222 ce fut toujours, et ce sera, tant qu’il y aura l’ Europe , l’effet d’un dialogue permanent, bien souvent dramatique, parfois tr
223 s individuels : tous, ils ont contribué à faire l’ Europe et à modeler l’idée européenne de l’homme. Cette idée-là n’est donc p
224 nt contribué à faire l’Europe et à modeler l’idée européenne de l’homme. Cette idée-là n’est donc pas simple, mais dialectique ; e
225 es éléments, réside le risque original de l’homme européen , son aventure. Dans ce débat auquel chacun de nous participe plus ou
226 dental, et de l’inquiétude créatrice qui pousse l’ Européen à remettre en question, de siècle en siècle, ses rapports avec Dieu,
227 tuant son patrimoine, réside la chance, pour tout Européen , d’individualiser de plus en plus ses jugements et son mode de vie. E
228 ns la conscience qu’il a d’en être responsable, l’ Européen conçoit la liberté. Toute notre histoire illustre ce débat, qui se li
229 nt infidèle à lui-même et au génie formateur de l’ Europe , lorsqu’il cède à la tentation de supprimer l’un des termes du confli
230 obstacles au progrès immédiat vers la fédération européenne . Ce sont, pour parler très clairement : l’opposition de la Russie sov
231 ainte Russie ou les Soviets — dans une fédération européenne , la question, aujourd’hui, ne se pose pas. Que nous le voulions ou no
232 ou non, Dostoïevski ou non, il nous faut faire l’ Europe sans la Russie, sans cette Byzance électrifiée, standardisée, gouvern
233 Asiatiques, sous le couvert d’une doctrine née en Europe dans le cerveau puissant d’un Allemand, qui la destinait aux Anglais.
234 nait aux Anglais. Est-ce à dire que nous ferons l’ Europe contre les Russes ? C’est malheureusement leur point de vue. Tout ess
235 t leur point de vue. Tout essai de sauvetage de l’ Europe , c’est-à-dire pratiquement d’union de l’Europe, prend à leurs yeux, e
236 l’Europe, c’est-à-dire pratiquement d’union de l’ Europe , prend à leurs yeux, et sans autre examen, l’allure d’une manœuvre an
237 antirusse. Ils ont raison, dans le sens qu’unir l’ Europe c’est la mettre à l’abri de la misère et de l’anarchie nationaliste,
238 stes. On nous dit : — Vaut-il la peine de faire l’ Europe sans eux ? Réponse : l’absence de ceux de l’Est nous force à faire l’
239 : l’absence de ceux de l’Est nous force à faire l’ Europe beaucoup plus vite, et beaucoup plus résolument que s’ils étaient là.
240 ’espoir ou d’aventure… J’affirme donc que faire l’ Europe sans l’Est, loin d’être une solution de résignation, c’est le seul mo
241 e voir : les vrais obstacles à la fédération de l’ Europe ne sont pas d’abord à l’Est, mais d’abord parmi nous. Tout nous ramèn
242 aliste, et par suite décisive pour toute l’action européenne . Dans le cas des nations comme dans le cas des partis, il est urgent
243 nt, a fait pendant des siècles l’originalité de l’ Europe et la fécondité de sa culture. Et l’un des buts de la fédération, c’e
244 Tandis que les frontières étatiques cloisonnent l’ Europe verticalement, les idéologies et les partis la cloisonnent horizontal
245 ces partis n’est capable, à lui seul, de sauver l’ Europe , ni par suite son propre avenir. De même que les nations n’ont de cha
246 a stratégie générale d’une action de salut public européen . À ce propos, et sans sortir, je crois, du cadre de cette conférence,
247 t qui se révèle nécessaire. On a dit et écrit, en Europe , que le parti travailliste anglais boycottait le congrès de La Haye.
248 promis que les partis doivent s’unir pour faire l’ Europe . C’est sur la volonté de réaliser chacun leur vocation particulière.
249 cela suppose, implique, exige, la fédération de l’ Europe . Un socialiste qui, en tant que tel, n’est pas pour la fédération, pe
250 e qui mérite de l’être dans toutes nos traditions européennes suppose, implique, commande l’union de l’Europe. Un conservateur qui,
251 opéennes suppose, implique, commande l’union de l’ Europe . Un conservateur qui, par esprit nationaliste, refuserait à sa nation
252 , s’il est certain qu’ils ne représentent plus en Europe un parti politique important, il n’en reste pas moins que leur ambiti
253 réalité celle de l’immense majorité des citoyens européens , s’il est vrai que le mot libéral veut dire ami de la liberté, non pa
254 droit de querelle… ⁂ Mesdames et Messieurs, si l’ Europe , mère des nations et des partis, n’invente pas les moyens de surmonte
255 pitalisme et un étatisme absolu, tous deux nés en Europe pour émigrer plus tard sur des terres vierges où leurs excès sont man
256 açants, car leur conflit se déclare sans issue, l’ Europe se doit et doit au monde d’inaugurer la troisième voie, la voie des l
257 duire la proclamation solennelle de la fédération européenne . Il se passe quelque chose à l’Est. Il est temps qu’il se passe quelq
258 Est. Il est temps qu’il se passe quelque chose en Europe  ! Il est temps de réveiller l’espoir d’une moitié séparée du continen
259 de doubles négations et de demi-mesures, c’est l’ Europe rejoignant le xxe siècle, pour en prendre la tête et inventer l’aven
260 erre à rajeunir, à libérer de ses cloisons, notre Europe à reconquérir — pour tous ses peuples, pour tous ses partis, et, comm
261 hommes. Le congrès de La Haye ou la voix de l’ Europe Cette architecture de grandes poutres, chevrons et traverses sculp
262 this congress, is not only to raise the voice of Europe as a united home… We must here and now resolve that a European Assemb
263 d’un très vieux Parlement, mille personnes, mille Européens . Je reconnais dans la foule quelques têtes, la moustache d’Anthony Ed
264 … Mais pourquoi cet immense applaudissement ? « L’ Europe , vient de dire quelqu’un dans le micro, c’est la civilisation des non
265 stes ! » Je regarde le texte qu’on m’a remis. « L’ Europe , c’est la terre des hommes continuellement en lutte avec eux-mêmes, c
266 vantent de leur efficacité, mais c’est le climat européen seul qui rend la vie dangereuse, aventureuse, magnifique et tragique
267 iens ministres, deux-cents députés aux parlements européens , et six-cents autres délégués de vingt-cinq pays… Mais je me dis qu’e
268 ’engagement final du Congrès : « Nous voulons une Europe unie, rendue dans toute son étendue à la libre circulation des hommes
269 la phrase de Brugmans sur le « non-conformisme » européen , m’ont étonné plus que toute autre chose survenue au cours du Congrès
270 ait « non-conformiste », dans l’état présent de l’ Europe . Certes, il existe — et je crois la connaître — une doctrine orthodox
271 ance les résolutions adoptées. 1. Le Congrès de l’ Europe voulait produire un choc, voulait alerter l’opinion. Il l’a fait dans
272 sure qu’il méritait. Réveiller la conscience de l’ Europe , c’était son seul moyen d’action. Pour autant qu’il y soit parvenu, i
273 r autant qu’il y soit parvenu, il établit l’union européenne sur des bases qui manquent à l’ONU : la volonté consciente des groupe
274 ui compte, et le reste suivra. 2. Le Congrès de l’ Europe a permis de mettre en pleine lumière les vraies difficultés, et c’est
275 ourantes que peuvent élever contre une fédération européenne les sceptiques, les réactionnaires, les sectaires de la gauche ou du
276 se peut que la bataille la plus dure pour l’unité européenne ait été gagnée à La Haye, même si les conclusions les plus spectacula
277 nentale dans son ensemble a parlé du Congrès de l’ Europe comme d’un congrès « fédéraliste ». En réalité, les groupes fédéralis
278 tes — « une plus grande unité entre les pays de l’ Europe  ». Formule vague et peu convaincante. Unité de quel ordre ? Et plus g
279 ents ; un organisme économique commun ; un Centre européen de la culture4 . Et la plupart des principes généraux posés au congrè
280 te le point capital), mais aussi l’insertion de l’ Europe fédérée dans une fédération mondiale, l’urgence de « réaliser une syn
281 ntradictoires. Mais dans le cas précis de l’union européenne , la position des Britanniques est équivoque. Et, dans l’état d’urgenc
282 uivoque. Et, dans l’état d’urgence où se trouve l’ Europe , l’équivoque peut devenir fatale. Mais le fait est que cet état d’urg
283 s certain que cette méthode reste valable au plan européen . Et dans ce plan, il faut avouer que les Insulaires sont assez neufs.
284 s. Leur politique traditionnelle fut d’empêcher l’ Europe de s’unifier sous l’égide d’une nation menaçante. Le principe était j
285 le congrès devait donner l’impulsion. Pour que l’ Europe se fasse, il faut que les Anglais acceptent de penser dans le cadre d
286 es Anglais acceptent de penser dans le cadre de l’ Europe , et non plus en face d’elle et par-dessus la Manche, détail géographi
287 s de La Haye : — Pour nous, Continentaux, c’est l’ Europe qui est en jeu. Pour les Anglais, c’est tout d’abord l’Empire, et l’u
288 ais, c’est tout d’abord l’Empire, et l’union de l’ Europe pourrait sauver l’Empire, à condition de n’être pas trop ceci ou trop
289 lion d’habitants, une Assemblée constituante de l’ Europe . La motion recueillit neuf voix. Il y a beaucoup à dire sur cet échec
290  » Or rien n’est plus urgent qu’un Parlement de l’ Europe . Et la grande masse ne se lèvera pour l’Europe qu’au jour des électio
291 l’Europe. Et la grande masse ne se lèvera pour l’ Europe qu’au jour des élections européennes. Et faire appel aux masses n’est
292 se lèvera pour l’Europe qu’au jour des élections européennes . Et faire appel aux masses n’est pas démagogique, si c’est pour les s
293 nstitution de plusieurs pays ; enfin créerait une Europe unitaire, et non pas une fédération. » Et c’est ainsi que l’on vit t
294 s expériences… Le projet Reynaud triomphera, si l’ Europe doit se faire demain7 : car tout le monde est d’accord sur le princip
295 onde est d’accord sur le principe d’une Assemblée européenne . Mais il est fort étrange que personne n’ait songé à le compléter au
296 i d’un numérisme aveugle ? En transposant au plan européen le système de la Suisse et des États-Unis : qu’à la Chambre nommée pa
297 es perspectives de notre action. Le combat pour l’ Europe prouve la vie de l’Europe : mes adversaires y sont donc mes amis, car
298 ction. Le combat pour l’Europe prouve la vie de l’ Europe  : mes adversaires y sont donc mes amis, car le principe pour lequel j
299 cu d’un compagnon : ainsi le veut la passion de l’ Europe . Mais nous servons un idéal commun. Nous ne voulons l’Europe ni de dr
300 s nous servons un idéal commun. Nous ne voulons l’ Europe ni de droite ni de gauche, ni du centre, ni surtout sans partis : mai
301 s au contraire fédéraliste. Nous ne voulons pas l’ Europe française ou britannique, mais au contraire l’Europe « helvétisée »,
302 ope française ou britannique, mais au contraire l’ Europe « helvétisée », c’est-à-dire non point sans nations mais sans hégémon
303 ns nations mais sans hégémonie d’aucune nation. L’ Europe est un dialogue, un débat perpétuel. À ceux-là seuls qui prétendraien
304 tricheur, ou son rasoir au névrosé. Il faut que l’ Europe reste le lieu du monde où les pouvoirs composent avec leurs opposants
305 n groupait les quatre mouvements suivants : Union européenne des fédéralistes (président H. Brugmans) ; United Europe Committee (p
306 on Churchill) ; Ligue indépendante de coopération européenne (président Paul van Zeeland) ; Mouvement français pour l’Europe unie
307 ent Paul van Zeeland) ; Mouvement français pour l’ Europe unie (président Raoul Dautry). Les Nouvelles équipes internationales
308 équipes internationales et l’Union parlementaire européenne y adhérèrent quelques mois plus tard. 3. Ces mots sont de Winston Ch
4 1948, L’Europe en jeu. Trois discours suivis de Documents de La Haye. IV
309 e) Lors de la séance plénière du Congrès de l’ Europe consacrée aux problèmes de la culture, je terminai mon rôle de rappor
310 s gouvernements. Il parle au nom des peuples de l’ Europe — on n’avait jamais rien vu de pareil dans notre histoire — et il ent
311 hose que des vœux : quelque chose qui, pour nous, Européens , héritiers de la Rome antique, revêt un sens presque majestueux, je v
312 mes les plus éminents dans la vie culturelle de l’ Europe ont accepté de nous donner, depuis des mois, aux dépens de leur œuvre
313 r. Mais pourrons-nous la continuer longtemps si l’ Europe n’arrive pas à s’unir ? Pourra-t-on créer cette union autrement que t
314 ant les intellectuels d’une douzaine de pays de l’ Europe à faire partie de notre commission. La première, de T. S. Eliot : « I
315 érieuses que nous ayons de vouloir une union de l’ Europe sont d’un ordre plus terre à terre, sont des questions de politique c
316 ns pensent que la défense d’une notion proprement européenne de l’homme, de sa culture, de son sens de la vie, c’est quelque chose
317 Valéry, prévoyait le jour où le désir secret de l’ Europe serait de se laisser gouverner par une commission d’experts américain
318 n, sur la primauté de la culture dans le complexe européen . « Si notre commission — disais-je en conclusion — par le seul fait d
319 marqué une étape dans le réveil de la conscience européenne . » ⁂ La commission culturelle pour La Haye fut constituée au mois de
320 ce travail. Le Rapport culturel et le Message aux Européens ont été rédigés en plein accord avec le Comité de coordination du con
321 ional de coordination des mouvements pour l’unité européenne Préambule 1. L’union de l’Europe apparaît nécessaire pour la sécur
322 r l’unité européenne Préambule 1. L’union de l’ Europe apparaît nécessaire pour la sécurité de chacun de nos pays, mais auss
323 uistiques, religieuses, et politiques, une entité européenne bien vivante, un sentiment commun auquel il soit possible de faire ap
324 e patrie, nous sentons que la crise présente de l’ Europe met en cause quelque chose de plus profond que nos systèmes économiqu
325 , tels que les comprend l’Occident. La conception européenne de l’homme 4. S’il est vrai que les motifs immédiats de notre union s
326 ique, il n’est pas moins certain que l’unité de l’ Europe est essentiellement culturelle, si l’on prend le mot dans son sens le
327 omme sur les choses. Elle a fait la grandeur de l’ Europe . Car, du point de vue de la géographie, le continent européen n’est q
328 r, du point de vue de la géographie, le continent européen n’est qu’une péninsule de l’Asie. Si ce petit coin de terre n’en est
329 l’élaboration de la culture n’ont jamais été, en Europe , l’apanage d’une doctrine unique, d’une nation ou d’une caste choisie
330 antagonistes qui, toutes, ont contribué à faire l’ Europe et à modeler l’idée européenne de l’homme : antiquité et christianism
331 nt contribué à faire l’Europe et à modeler l’idée européenne de l’homme : antiquité et christianisme, Église et État, catholicisme
332 idental et de l’inquiétude créatrice qui pousse l’ Européen à remettre en question, de siècle en siècle, ses rapports avec Dieu,
333 ent infidèle à lui-même et au génie créateur de l’ Europe , lorsqu’il cède à la tentation de supprimer l’un des termes du confli
334 ologies 6. Cette description succincte de l’homme européen nous met en mesure de clarifier maintenant quelques-uns des problèmes
335 lques-uns des problèmes brûlants que pose l’union européenne . Tout d’abord, celui des nations. La diversité des nations, correspon
336 nt, a fait pendant des siècles l’originalité de l’ Europe et la fécondité de sa culture. Mais par suite de la collusion de la n
337 d’un parti du dedans. C’est pourquoi l’union de l’ Europe est devenue la seule garantie des autonomies nationales. Ce n’est qu’
338 Tandis que les frontières étatiques cloisonnent l’ Europe verticalement, les idéologies et les partis la cloisonnent horizontal
339 artis n’est donc capable, à lui seul, de sauver l’ Europe , ni par suite son propre avenir. De même que les nations n’ont de cha
340 a stratégie générale d’une action de salut public européen . La liberté et les droits de l’homme 8. Certains voudraient que cette
341 mpéraments nationaux que de prétendre imposer à l’ Europe une conception définitive et uniforme de la pratique démocratique. To
342 qu’il nous suffise de reconnaître ici que, dans l’ Europe contemporaine, pour l’écrasante majorité des citoyens, le mot démocra
343 libertés, et non des étiquettes que les peuples d’ Europe entendent sauvegarder. 9. Pour nous, Européens, la liberté consiste d
344 les d’Europe entendent sauvegarder. 9. Pour nous, Européens , la liberté consiste dans l’exercice des droits fondamentaux que poss
345 du régime que se donne librement tel peuple de l’ Europe , il trouvera sa place dans l’Union s’il respecte les droits humains q
346 ue s’ils sont approuvés et soutenus par l’opinion européenne . Celle-ci doit être désormais dotée de moyens d’expression réguliers.
347 plus en plus consciente de l’unité profonde de l’ Europe et de la richesse de ses diversités. 13. Pour développer parmi nos di
348 nations le sens de leur commune appartenance à l’ Europe et de leur commun attachement à la liberté de pensée, l’union europée
349 ommun attachement à la liberté de pensée, l’union européenne , dans le cadre de laquelle nous voulons travailler, a besoin d’organi
350 anismes qui donnent une voix à la conscience de l’ Europe et des peuples qui lui sont associés. Mais pour cette fin précise les
351 esure propre à promouvoir le sentiment de l’unité européenne  ; d’agir dans ce sens sur l’opinion, la presse, le film et la radio,
352 ls aucun pacte n’est possible. De plus, le Centre européen offrirait un lieu de rencontre aux porteurs et aux créateurs de la cu
353 e les grandes questions qui affectent la vie de l’ Europe , et s’exprimer à leur sujet par des appels à l’opinion publique. Conc
354 l’opinion publique. Conclusion : l’universalisme européen 14. Une fois rendue plus consciente d’elle-même, de ses ressources in
355 rces infiniment variées et de son idéal commun, l’ Europe pourra revenir avec une confiance neuve à sa vocation millénaire, qui
356 nité entière qu’au milieu de la crise actuelle, l’ Europe garde la mission de témoigner pour l’homme, d’inventer la synthèse, q
357 mondiale. Résolution proposée au Congrès de l’ Europe , le 9 mai 1948, par la commission culturelle Considérant que l’uni
358 commission culturelle Considérant que l’union européenne a cessé d’être une utopie pour devenir une nécessité, mais qu’elle ne
359 utenus et vivifiés par un réveil de la conscience européenne , que celle-ci doit être informée, stimulée, et dotée de moyens d’expr
360 te qu’il n’existe pratiquement aucune institution européenne capable d’accomplir les tâches ci-dessus définies ; Considérant que l
361 oques ou par tous autres moyens ; Le Congrès de l’ Europe propose : La création d’un organisme permanent qui aurait notamment p
362 ssion générale de donner une voix à la conscience européenne . Le Centre européen de la culture aurait pour tâches immédiates : 1.
363 s : 1. D’entretenir le sentiment de la communauté européenne par le moyen d’informations et d’initiatives, dans le domaine de la p
364 ’ils puissent exprimer un point de vue proprement européen sur les grandes questions intéressant la vie du continent, par voie d
365 nation des recherches sur la condition de l’homme européen au xxe siècle, en particulier dans les domaines de la pédagogie, de
366 s efforts tendant à la fédération des universités européennes , et à la garantie de leur indépendance par rapport aux États et aux p
367 les pays scandinaves ; En outre, le Congrès de l’ Europe  : Considérant que l’avenir de l’Europe repose sur sa Jeunesse ; Consi
368 ngrès de l’Europe : Considérant que l’avenir de l’ Europe repose sur sa Jeunesse ; Considérant que la formation physique, intel
369 t centres de culture ; B) que soit créé un Centre européen de l’enfance et de la jeunesse 1) pour coordonner les efforts commun
370 udier les mesures propres à résoudre, sur le plan européen , les problèmes actuels (alimentation des enfants — formation morale —
371 des). 2) pour favoriser les échanges entre jeunes Européens de toutes conditions sociales, par des facilités de change et d’accue
372 de l’homme est l’axe même de nos efforts vers une Europe unie ; Considérant qu’une Déclaration des droits est insuffisante et
373 ention conclue entre les États membres de l’union européenne  ; Considérant que l’établissement d’une institution supranationale te
374 sable à la garantie des droits ; Le Congrès de l’ Europe estime : Que la fédération européenne implique l’existence d’une Cour
375 Le Congrès de l’Europe estime : Que la fédération européenne implique l’existence d’une Cour suprême, instance supérieure aux État
376 uvre de la Déclaration des droits. Message aux Européens L’Europe est menacée, l’Europe est divisée, et la plus grave menac
377 aration des droits. Message aux Européens L’ Europe est menacée, l’Europe est divisée, et la plus grave menace vient de s
378 Message aux Européens L’Europe est menacée, l’ Europe est divisée, et la plus grave menace vient de ses divisions. Appauvri
379 er, mais qui ne sauraient plus la protéger, notre Europe désunie marche à sa fin. Aucun de nos pays ne peut prétendre, seul, à
380 péril et cette grande espérance la vocation de l’ Europe se définit clairement. Elle est d’unir ses peuples selon leur vrai gé
381 e humaine, dont, malgré toutes ses infidélités, l’ Europe demeure aux yeux du monde le grand témoin. La conquête suprême de l’E
382 u monde le grand témoin. La conquête suprême de l’ Europe s’appelle la dignité de l’homme, et sa vraie force est dans la libert
383 ons l’union de notre continent. Sur cette union l’ Europe joue son destin et celui de la paix du monde. Soit donc notoire à tou
384 paix du monde. Soit donc notoire à tous que nous, Européens , rassemblés pour donner une voix à tous les peuples de ce continent,
385 adoptées par notre Congrès : 1) Nous voulons une Europe unie, rendue dans toute son étendue à la libre circulation des hommes
386 espectée la Charte. 4) Nous voulons une Assemblée européenne , où soient représentées les forces vives de toutes nos nations. 5) Et
387 Quelques chiffres Je disais plus haut que l’ Europe d’aujourd’hui, entre les deux empires, « nous paraît plus petite que
388 si l’on se borne aux seules données physiques, l’ Europe ne représente que 4 % de la superficie mondiale. Mais voici d’autres
389 voici d’autres chiffres notables. Population de l’ Europe occidentale orientale Total 290 250 000 105 200 000 395 450 000
390 ,5 % de la population mondiale)   La fédération européenne (sans les États de l’Est, provisoirement) comprendrait donc deux fois
391 t que l’URSS et ses satellites réunis. De plus, l’ Europe occidentale à elle seule produit 26 % du charbon et 32,5 % de l’élect