1 1924, Articles divers (1924–1930). M. de Montherlant, le sport et les jésuites (9 février 1924)
1 M. de Montherlant, le sport et les jésuites (9 février 1924)a M. de Montherlant est cons
2 M. de Montherlant, le sport et les jésuites (9 février 1924)a M. de Montherlant est considéré par plu
3 par plusieurs comme l’un des héritiers de Barrès. Le rapprochement est peut-être prématuré, tout au plus peut-on dire qu’à
4 ut-être prématuré, tout au plus peut-on dire qu’à l’ heure présente déjà, son œuvre, comme celle de Barrès, nous offre plus
5 u moins, cette inquiétude libératrice que produit la recherche de la vérité. Dès son premier livre, il s’est montré tout e
6 nquiétude libératrice que produit la recherche de la vérité. Dès son premier livre, il s’est montré tout entier, il a brav
7 out entier, il a bravement affirmé son unité. Car le temps n’est plus, où les jeunes gens se faisaient, avec sérieux, des
8 nt affirmé son unité. Car le temps n’est plus, où les jeunes gens se faisaient, avec sérieux, des âmes exceptionnellement c
9 langue plus compliquée encore et nuancée jusqu’à l’ ennui. La guerre a donné le coup de grâce à cet esthétisme énervant qu
10 lus compliquée encore et nuancée jusqu’à l’ennui. La guerre a donné le coup de grâce à cet esthétisme énervant qu’on appel
11 ore et nuancée jusqu’à l’ennui. La guerre a donné le coup de grâce à cet esthétisme énervant qu’on appelle symbolisme ; et
12 appelle symbolisme ; et elle a donné naissance à la doctrine de M. de Montherlant, qui en est sortie toute formée et casq
13 t, qui en est sortie toute formée et casquée pour la lutte de l’après-guerre. ⁂ Deux philosophies, affirme-t-il, se disput
14 t sortie toute formée et casquée pour la lutte de l’ après-guerre. ⁂ Deux philosophies, affirme-t-il, se disputent le monde
15 . ⁂ Deux philosophies, affirme-t-il, se disputent le monde. L’une vient de l’Orient, et insinue dans le monde romain les v
16 firme-t-il, se disputent le monde. L’une vient de l’ Orient, et insinue dans le monde romain les virus du christianisme, de
17 e monde. L’une vient de l’Orient, et insinue dans le monde romain les virus du christianisme, de la Réforme, de la Révolut
18 ient de l’Orient, et insinue dans le monde romain les virus du christianisme, de la Réforme, de la Révolution et du romanti
19 ns le monde romain les virus du christianisme, de la Réforme, de la Révolution et du romantisme, les concepts de liberté e
20 ain les virus du christianisme, de la Réforme, de la Révolution et du romantisme, les concepts de liberté et de progrès, l
21 de la Réforme, de la Révolution et du romantisme, les concepts de liberté et de progrès, l’humanitarisme, le bolchévisme. L
22 omantisme, les concepts de liberté et de progrès, l’ humanitarisme, le bolchévisme. L’autre philosophie est celle de l’anti
23 ncepts de liberté et de progrès, l’humanitarisme, le bolchévisme. L’autre philosophie est celle de l’antique Rome, qui a i
24 le bolchévisme. L’autre philosophie est celle de l’ antique Rome, qui a inspiré le catholicisme, la Renaissance, le tradit
25 sophie est celle de l’antique Rome, qui a inspiré le catholicisme, la Renaissance, le traditionnisme et le nationalisme. L
26 de l’antique Rome, qui a inspiré le catholicisme, la Renaissance, le traditionnisme et le nationalisme. L’Orient efféminé 
27 e, qui a inspiré le catholicisme, la Renaissance, le traditionnisme et le nationalisme. L’Orient efféminé ; — en face : l’
28 atholicisme, la Renaissance, le traditionnisme et le nationalisme. L’Orient efféminé ; — en face : l’Ordre romain. Or l’or
29 enaissance, le traditionnisme et le nationalisme. L’ Orient efféminé ; — en face : l’Ordre romain. Or l’ordre, pour M. de M
30 le nationalisme. L’Orient efféminé ; — en face : l’ Ordre romain. Or l’ordre, pour M. de Montherlant comme pour Maurras, e
31 ’Orient efféminé ; — en face : l’Ordre romain. Or l’ ordre, pour M. de Montherlant comme pour Maurras, est ce qu’il importe
32 u monde, qui n’est en rien différente de celle de l’ Action française ; remarquons toutefois cette séparation, que Maurras
33 franchement, du catholicisme et du christianisme, le christianisme étant dans le même camp que la Réforme. M. de Montherla
34 et du christianisme, le christianisme étant dans le même camp que la Réforme. M. de Montherlant n’est décidément pas phil
35 sme, le christianisme étant dans le même camp que la Réforme. M. de Montherlant n’est décidément pas philosophe. Peut-être
36 s philosophe. Peut-être ne lui a-t-il manqué pour le devenir que le temps de méditer : il a quitté le collège jésuite pour
37 eut-être ne lui a-t-il manqué pour le devenir que le temps de méditer : il a quitté le collège jésuite pour la tranchée, p
38 le devenir que le temps de méditer : il a quitté le collège jésuite pour la tranchée, puis « le sport l’a saisi aux patte
39 de méditer : il a quitté le collège jésuite pour la tranchée, puis « le sport l’a saisi aux pattes de la guerre encore co
40 uitté le collège jésuite pour la tranchée, puis «  le sport l’a saisi aux pattes de la guerre encore contus de huit coups d
41 collège jésuite pour la tranchée, puis « le sport l’ a saisi aux pattes de la guerre encore contus de huit coups de griffes
42 tranchée, puis « le sport l’a saisi aux pattes de la guerre encore contus de huit coups de griffes et chaud de l’étreinte
43 ncore contus de huit coups de griffes et chaud de l’ étreinte du fauve merveilleux ». Il n’a pas eu le temps de se ressaisi
44 l’étreinte du fauve merveilleux ». Il n’a pas eu le temps de se ressaisir, le sport prolongeant pour lui, d’une façon obs
45 illeux ». Il n’a pas eu le temps de se ressaisir, le sport prolongeant pour lui, d’une façon obsédante, le rythme de la gu
46 port prolongeant pour lui, d’une façon obsédante, le rythme de la guerre. Du moins a-t-il ainsi évité le choc fatal pour t
47 ant pour lui, d’une façon obsédante, le rythme de la guerre. Du moins a-t-il ainsi évité le choc fatal pour tant d’autres
48 rythme de la guerre. Du moins a-t-il ainsi évité le choc fatal pour tant d’autres du guerrier et du bourgeois. Dernièreme
49 rrier et du bourgeois. Dernièrement, il abandonna le stade et rentra dans le monde où nous vivons tous. Écœuré du désordre
50 ernièrement, il abandonna le stade et rentra dans le monde où nous vivons tous. Écœuré du désordre général, il cherche des
51 s, et nous tend les premiers qui lui tombent sous la main : le sport et la morale romaine. Dans sa hâte salvatrice, M. de
52 tend les premiers qui lui tombent sous la main : le sport et la morale romaine. Dans sa hâte salvatrice, M. de Montherlan
53 emiers qui lui tombent sous la main : le sport et la morale romaine. Dans sa hâte salvatrice, M. de Montherlant ne s’est m
54 ontrepoisons pouvaient être administrés ensemble. L’ opération faite, il a pourtant fallu la justifier, ce qui n’a pas été
55 ensemble. L’opération faite, il a pourtant fallu la justifier, ce qui n’a pas été sans quelques tours de passe-passe de l
56 n peu intimidantes. Toute une partie du Paradis à l’ ombre des épées 1, son dernier livre, est consacrée à « fondre dans un
57 consacrée à « fondre dans une unité supérieure » l’ antinomie de l’esprit catholique et de l’esprit sportif. « On se fait
58 fondre dans une unité supérieure » l’antinomie de l’ esprit catholique et de l’esprit sportif. « On se fait son unité comme
59 rieure » l’antinomie de l’esprit catholique et de l’ esprit sportif. « On se fait son unité comme on peut », avoue-t-il fra
60 radoxal de vouloir unir dans une même philosophie la morale jésuite, faite de règles et de contraintes imposées dans le bu
61 , faite de règles et de contraintes imposées dans le but de restreindre la liberté et l’initiative individuelles, et la mo
62 e contraintes imposées dans le but de restreindre la liberté et l’initiative individuelles, et la morale des sports anglai
63 imposées dans le but de restreindre la liberté et l’ initiative individuelles, et la morale des sports anglais, morale qui
64 ndre la liberté et l’initiative individuelles, et la morale des sports anglais, morale qui veut former des hommes maîtres
65 ment un des premiers Français qui ait compris que le but du sport n’est pas la performance, mais le style et la méthode, c
66 ais qui ait compris que le but du sport n’est pas la performance, mais le style et la méthode, c’est-à-dire la formation d
67 ue le but du sport n’est pas la performance, mais le style et la méthode, c’est-à-dire la formation du caractère, en défin
68 sport n’est pas la performance, mais le style et la méthode, c’est-à-dire la formation du caractère, en définitive. Mais
69 rmance, mais le style et la méthode, c’est-à-dire la formation du caractère, en définitive. Mais on peut oublier la partie
70 du caractère, en définitive. Mais on peut oublier la partie doctrinaire de cette œuvre, elle ne lui est pas indispensable 
71 « Ces simplifications valent ce que valent toutes les simplifications, qu’on les appelle ou non idées générales, et j’avoue
72 t ce que valent toutes les simplifications, qu’on les appelle ou non idées générales, et j’avoue bien volontiers qu’il n’es
73 e bien volontiers qu’il n’est pas une opinion sur le monde à laquelle je ne préfère le monde ». Je préfère à la dogmatique
74 une opinion sur le monde à laquelle je ne préfère le monde ». Je préfère à la dogmatique de M. de Montherlant son admirabl
75 à laquelle je ne préfère le monde ». Je préfère à la dogmatique de M. de Montherlant son admirable lyrisme de poète du sta
76 et calme » des « grands corps athlétiques ». Sur le stade au soleil se déploient les équipes, et l’équipier Montherlant l
77 thlétiques ». Sur le stade au soleil se déploient les équipes, et l’équipier Montherlant les contemple, ému de « cette ivre
78 r le stade au soleil se déploient les équipes, et l’ équipier Montherlant les contemple, ému de « cette ivresse qui naît de
79 déploient les équipes, et l’équipier Montherlant les contemple, ému de « cette ivresse qui naît de l’ordre », et aussi par
80 les contemple, ému de « cette ivresse qui naît de l’ ordre », et aussi parfois, de la pensée que « sur ces corps de l’entre
81 resse qui naît de l’ordre », et aussi parfois, de la pensée que « sur ces corps de l’entre-deux-guerres, … cinq sur dix so
82 ussi parfois, de la pensée que « sur ces corps de l’ entre-deux-guerres, … cinq sur dix sont désignés… ». Voici passer un c
83 Voici passer un coureur : « À peine a-t-il touché la piste d’herbe, c’est une allégresse héroïque qu’infuse à son corps la
84 est une allégresse héroïque qu’infuse à son corps la douce matière. L’air et le sol, dieux rivaux, se le disputent, et il
85 héroïque qu’infuse à son corps la douce matière. L’ air et le sol, dieux rivaux, se le disputent, et il oscille entre l’un
86 qu’infuse à son corps la douce matière. L’air et le sol, dieux rivaux, se le disputent, et il oscille entre l’un et l’aut
87 douce matière. L’air et le sol, dieux rivaux, se le disputent, et il oscille entre l’un et l’autre. Ainsi mon art, entre
88 lée, bondissante et posée, est pleine du désir de l’ air. Danse-t-il sur une musique que je n’entends pas ? » — Mais plus q
89 musique que je n’entends pas ? » — Mais plus que le corps en mouvement, c’est la domination de la raison sur ce corps qui
90  ? » — Mais plus que le corps en mouvement, c’est la domination de la raison sur ce corps qui est exaltante, et c’est cett
91 que le corps en mouvement, c’est la domination de la raison sur ce corps qui est exaltante, et c’est cette domination qui
92 est exaltante, et c’est cette domination qui est le but véritable du sport. On accepte une règle ; on l’assimile, à tel p
93 but véritable du sport. On accepte une règle ; on l’ assimile, à tel point qu’elle n’est plus une entrave à la violence ani
94 ile, à tel point qu’elle n’est plus une entrave à la violence animale déchaînée dans le corps du joueur à la vue de la pra
95 une entrave à la violence animale déchaînée dans le corps du joueur à la vue de la prairie rase où rebondit un ballon. Si
96 ale déchaînée dans le corps du joueur à la vue de la prairie rase où rebondit un ballon. Si l’on considère la vie sociale
97 vue de la prairie rase où rebondit un ballon. Si l’ on considère la vie sociale comme un jeu sérieux dont on respecte les
98 rie rase où rebondit un ballon. Si l’on considère la vie sociale comme un jeu sérieux dont on respecte les règles, non plu
99 vie sociale comme un jeu sérieux dont on respecte les règles, non plus comme une lutte sauvage et déloyale, la morale d’équ
100 es, non plus comme une lutte sauvage et déloyale, la morale d’équipe devient toute la morale, et les qualités indispensabl
101 age et déloyale, la morale d’équipe devient toute la morale, et les qualités indispensables au bon équipier deviennent les
102 e, la morale d’équipe devient toute la morale, et les qualités indispensables au bon équipier deviennent les qualités du pa
103 ualités indispensables au bon équipier deviennent les qualités du parfait citoyen : juste vision de la réalité, abnégation,
104 les qualités du parfait citoyen : juste vision de la réalité, abnégation, sentiment du devoir de chacun envers l’ensemble
105 abnégation, sentiment du devoir de chacun envers l’ ensemble (Montherlant insiste plutôt sur le sentiment des hiérarchies
106 envers l’ensemble (Montherlant insiste plutôt sur le sentiment des hiérarchies que sur celui de la solidarité, comme bien
107 sur le sentiment des hiérarchies que sur celui de la solidarité, comme bien l’on pense). Enfin, enseignement plus général
108 rchies que sur celui de la solidarité, comme bien l’ on pense). Enfin, enseignement plus général de la morale sportive : « 
109 l’on pense). Enfin, enseignement plus général de la morale sportive : « la règle de rester en dedans de son action, appli
110 seignement plus général de la morale sportive : «  la règle de rester en dedans de son action, application de l’immense axi
111 de rester en dedans de son action, application de l’ immense axiome formulé par Hésiode et qui gouverna le monde ancien : L
112 mmense axiome formulé par Hésiode et qui gouverna le monde ancien : La moitié est plus grande que le tout ». Le sport comm
113 ulé par Hésiode et qui gouverna le monde ancien : La moitié est plus grande que le tout ». Le sport comme un apprentissage
114 a le monde ancien : La moitié est plus grande que le tout ». Le sport comme un apprentissage de la vie : tout servira plus
115 ancien : La moitié est plus grande que le tout ». Le sport comme un apprentissage de la vie : tout servira plus tard : Ô
116 que le tout ». Le sport comme un apprentissage de la vie : tout servira plus tard : Ô garçons, il y a un brin du myrte ci
117 de laurier. Vous n’êtes pas couronnés d’olivier. La main connaît la main dans la prise du témoin. L’épaule connaît l’épau
118 s n’êtes pas couronnés d’olivier. La main connaît la main dans la prise du témoin. L’épaule connaît l’épaule dans le talon
119 couronnés d’olivier. La main connaît la main dans la prise du témoin. L’épaule connaît l’épaule dans le talonnage du ballo
120 La main connaît la main dans la prise du témoin. L’ épaule connaît l’épaule dans le talonnage du ballon. Le regard connaît
121 la main dans la prise du témoin. L’épaule connaît l’ épaule dans le talonnage du ballon. Le regard connaît le regard dans l
122 a prise du témoin. L’épaule connaît l’épaule dans le talonnage du ballon. Le regard connaît le regard dans la course d’équ
123 ule connaît l’épaule dans le talonnage du ballon. Le regard connaît le regard dans la course d’équipe. Le cœur connaît la
124 le dans le talonnage du ballon. Le regard connaît le regard dans la course d’équipe. Le cœur connaît la présence muette et
125 nnage du ballon. Le regard connaît le regard dans la course d’équipe. Le cœur connaît la présence muette et sûre. Toutes c
126 regard connaît le regard dans la course d’équipe. Le cœur connaît la présence muette et sûre. Toutes ces choses ne se font
127 e regard dans la course d’équipe. Le cœur connaît la présence muette et sûre. Toutes ces choses ne se font pas en vain. Le
128 t sûre. Toutes ces choses ne se font pas en vain. Le chef se dresse entre les dix qui sont à lui. Il dit : « Je ne demande
129 s ne se font pas en vain. Le chef se dresse entre les dix qui sont à lui. Il dit : « Je ne demande pas qu’on m’aime. Je dem
130 t purs courages, donnez-moi votre silence jusqu’à l’ heure. Que je taise votre mot de ralliement, paradis à l’ombre des épé
131 . Que je taise votre mot de ralliement, paradis à l’ ombre des épées. Rien de moins artificiellement moderne que ce lyrism
132 nt moderne que ce lyrisme sobre et prenant : « Si l’ on s’échauffe, s’échauffer sur de la précision. » On évitera ainsi tou
133 renant : « Si l’on s’échauffe, s’échauffer sur de la précision. » On évitera ainsi tout niais romantisme. Je sais bien ce
134 ais romantisme. Je sais bien ce qu’on objectera : le sport ainsi compris, plus que l’apprentissage de la vie, est l’appren
135 u’on objectera : le sport ainsi compris, plus que l’ apprentissage de la vie, est l’apprentissage de la guerre, dira-t-on.
136 sport ainsi compris, plus que l’apprentissage de la vie, est l’apprentissage de la guerre, dira-t-on. M. de Montherlant r
137 compris, plus que l’apprentissage de la vie, est l’ apprentissage de la guerre, dira-t-on. M. de Montherlant répondra : no
138 l’apprentissage de la vie, est l’apprentissage de la guerre, dira-t-on. M. de Montherlant répondra : non, car la faiblesse
139 dira-t-on. M. de Montherlant répondra : non, car la faiblesse est le péché capital pour le sportif. Or c’est la faiblesse
140 Montherlant répondra : non, car la faiblesse est le péché capital pour le sportif. Or c’est la faiblesse « qui fait lever
141 : non, car la faiblesse est le péché capital pour le sportif. Or c’est la faiblesse « qui fait lever la haine ». « La faib
142 se est le péché capital pour le sportif. Or c’est la faiblesse « qui fait lever la haine ». « La faiblesse est mère du com
143 e sportif. Or c’est la faiblesse « qui fait lever la haine ». « La faiblesse est mère du combat. » C’est donc à un lacédém
144 c’est la faiblesse « qui fait lever la haine ». «  La faiblesse est mère du combat. » C’est donc à un lacédémonisme renouve
145 mpérée de raison. Ce qu’on en peut retenir, c’est la méthode, car je crois qu’elle sert mieux la démocratie que l’Église r
146 c’est la méthode, car je crois qu’elle sert mieux la démocratie que l’Église romaine, quoi qu’en pense M. de Montherlant.
147 car je crois qu’elle sert mieux la démocratie que l’ Église romaine, quoi qu’en pense M. de Montherlant. Et voici, ô parado
148 Kant qui écrit : « C’est sur des maximes, non sur la discipline, qu’il faut fonder la conduite des jeunes gens : celle-ci
149 maximes, non sur la discipline, qu’il faut fonder la conduite des jeunes gens : celle-ci empêche les abus, mais celles-là
150 er la conduite des jeunes gens : celle-ci empêche les abus, mais celles-là forment l’esprit. » M. de Montherlant illustre s
151 celle-ci empêche les abus, mais celles-là forment l’ esprit. » M. de Montherlant illustre sa propre pensée de cette citatio
152 rait appeler une « morale constructive » : porter l’ effort sur ce qui doit être, et ce qui ne doit pas être tombera de soi
153 e qui ne doit pas être tombera de soi-même. Ainsi l’ athlète à l’entraînement ne s’épuise-t-il pas à combattre certaines fa
154 t pas être tombera de soi-même. Ainsi l’athlète à l’ entraînement ne s’épuise-t-il pas à combattre certaines faiblesses : i
155 certaines faiblesses : il développe ses qualités, le reste s’arrange de soi-même. ⁂ M. de Montherlant, qui a quitté le sta
156 ge de soi-même. ⁂ M. de Montherlant, qui a quitté le stade, se rendra mieux compte à distance de la contradiction sur laqu
157 té le stade, se rendra mieux compte à distance de la contradiction sur laquelle est bâtie son œuvre. L’intéressant sera de
158 a contradiction sur laquelle est bâtie son œuvre. L’ intéressant sera de voir ce qu’il sacrifiera, de la morale sportive ou
159 ’intéressant sera de voir ce qu’il sacrifiera, de la morale sportive ou de la morale jésuite. Mais enfin, voici un homme,
160 ce qu’il sacrifiera, de la morale sportive ou de la morale jésuite. Mais enfin, voici un homme, et non plus seulement un
161 me de lettres. Un homme en qui s’équilibrent déjà l’ enthousiasme d’une jeunesse saine et la retenue de l’âge mûr, cette « 
162 brent déjà l’enthousiasme d’une jeunesse saine et la retenue de l’âge mûr, cette « limitation » que lui ont enseigné le sp
163 nthousiasme d’une jeunesse saine et la retenue de l’ âge mûr, cette « limitation » que lui ont enseigné le sport et les anc
164 ge mûr, cette « limitation » que lui ont enseigné le sport et les anciens. J’admets que ses « idées générales » ne vaillen
165 e « limitation » que lui ont enseigné le sport et les anciens. J’admets que ses « idées générales » ne vaillent rien2 ; sa
166 morale virile nous est néanmoins plus proche que la sensualité vaguement chrétienne de tel autre écrivain catholique. Et
167 e. Et son lyrisme, encore un peu brutal, il saura le dompter, et atteindre au classicisme véritable. Voici un constructeur
168 ut lutter contre lui, nous savons qu’il observera les règles. Saluons-le donc du salut des équipes avant le match : « En l’
169 , nous savons qu’il observera les règles. Saluons- le donc du salut des équipes avant le match : « En l’honneur d’Henry de
170 ègles. Saluons-le donc du salut des équipes avant le match : « En l’honneur d’Henry de Montherlant, hip, hip, hurrah ! »
171 e donc du salut des équipes avant le match : « En l’ honneur d’Henry de Montherlant, hip, hip, hurrah ! » 1. Éditions Gra
172 hip, hurrah ! » 1. Éditions Grasset, Paris. 2. L’ attitude de M. de Montherlant légitime une telle « simplification ».
173 ont Denis de, « [Compte rendu] M. de Montherlant, le sport et les jésuites », La Semaine littéraire, Genève, 9 février 192
174 , « [Compte rendu] M. de Montherlant, le sport et les jésuites », La Semaine littéraire, Genève, 9 février 1924, p. 63-65.
175 u] M. de Montherlant, le sport et les jésuites », La Semaine littéraire, Genève, 9 février 1924, p. 63-65.
176 e sport et les jésuites », La Semaine littéraire, Genève , 9 février 1924, p. 63-65.
2 1924, Articles divers (1924–1930). Conférence de Conrad Meili sur « Les ismes dans la peinture moderne » (30 octobre 1924)
177 Conférence de Conrad Meili sur «  Les ismes dans la peinture moderne » (30 octobre 1924)b Lundi soir, da
178 Conférence de Conrad Meili sur « Les ismes dans la peinture moderne » (30 octobre 1924)b Lundi soir, dans la salle du
179 moderne » (30 octobre 1924)b Lundi soir, dans la salle du Lyceum, M. Conrad Meili parla des écoles qui représentent la
180 M. Conrad Meili parla des écoles qui représentent la peinture française, des débuts du xixe siècle à nos jours. Partis du
181 ours. Partis du classicisme de David et d’Ingres, les peintres français ont accompli, durant le xixe siècle, une explorati
182 ngres, les peintres français ont accompli, durant le xixe siècle, une exploration merveilleuse dans les domaines du roman
183 e xixe siècle, une exploration merveilleuse dans les domaines du romantisme, du naturalisme, de l’impressionnisme, pour ab
184 ns les domaines du romantisme, du naturalisme, de l’ impressionnisme, pour aboutir enfin dans ces impasses : cubisme et fut
185 r enfin dans ces impasses : cubisme et futurisme. Les voici revenus, après cent-vingt-cinq ans, à peu près à leur point de
186 r technique (contrairement à ce que pense souvent le public), ils préparent l’avènement d’un classicisme nouveau. M. Meili
187 à ce que pense souvent le public), ils préparent l’ avènement d’un classicisme nouveau. M. Meili a mis en évidence cette c
188 uveau. M. Meili a mis en évidence cette courbe de la peinture moderne avec une netteté et un relief remarquable. Les œuvre
189 oderne avec une netteté et un relief remarquable. Les œuvres de cet artiste, qu’on a pu voir à la Rose d’Or témoignaient de
190 ble. Les œuvres de cet artiste, qu’on a pu voir à la Rose d’Or témoignaient de ces mêmes qualités : car la façon de peindr
191 ose d’Or témoignaient de ces mêmes qualités : car la façon de peindre correspond à la façon de penser du peintre. Souhaito
192 s qualités : car la façon de peindre correspond à la façon de penser du peintre. Souhaitons d’entendre encore M. Meili. Es
193 endre encore M. Meili. Est-il besoin de souligner l’ importance de telles prises de contact entre artiste et public ? b.
3 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Henry de Montherlant, Chant funèbre pour les morts de Verdun (mars 1925)
194 Henry de Montherlant, Chant funèbre pour les morts de Verdun (mars 1925)a Henry de Montherlant, héritier d’une
195 leresque, mène sa vie comme une ardente aventure. Les épisodes s’appellent : collège, guerre, sport… la Relève du Matin, le
196 es épisodes s’appellent : collège, guerre, sport… la Relève du Matin, le Songe, les Olympiques. Et voici le Chant funèbre,
197 ent : collège, guerre, sport… la Relève du Matin, le Songe, les Olympiques. Et voici le Chant funèbre, adieu à la guerre e
198 ège, guerre, sport… la Relève du Matin, le Songe, les Olympiques. Et voici le Chant funèbre, adieu à la guerre et aux jeux,
199 lève du Matin, le Songe, les Olympiques. Et voici le Chant funèbre, adieu à la guerre et aux jeux, avant de partir pour de
200 es Olympiques. Et voici le Chant funèbre, adieu à la guerre et aux jeux, avant de partir pour de nouvelles conquêtes. Terr
201 r pour ses erreurs plus encore que pour celles de l’ adversaire, ce qui est beaucoup dire. Il y avait dans le Paradis je ne
202 rsaire, ce qui est beaucoup dire. Il y avait dans le Paradis je ne sais quel relent de barbarie, un assez malsain goût du
203 alsain goût du sang. Tout cela s’est purifié dans le Chant funèbre. Et une phrase telle que « … Nous sommes sûrs de ne pas
204 e, à notre place modeste, si peu que ce soit pour la paix », c’est une affirmation qui d’un coup condamne beaucoup d’antér
205 pour avoir contemplé Verdun, en tête à tête avec le génie de la mort. Mais alors, à quoi sert d’exalter, d’une si émouvan
206 contemplé Verdun, en tête à tête avec le génie de la mort. Mais alors, à quoi sert d’exalter, d’une si émouvante sorte, le
207 à quoi sert d’exalter, d’une si émouvante sorte, les soldats déjà légendaires de Verdun, et ce « haut ton de vie » qu’ils
208 justifie son livre : « Ranimons ces horreurs pour les vouloir éviter, et ces grandeurs pour n’en pas trop descendre ». N’es
209 ce pas une éclatante mise au point ? Et venant de l’ auteur du Songe, d’un de ces hommes qui « descendirent » du front dans
210 cette absence de haine ; cette épouvante, devant la guerre… proviennent de plus d’humanité ou de moins de santé ». À main
211 et repart. Vers quels buts ? On verra plus tard. L’ urgent c’est d’avancer. Et l’on atteindra peut-être ces régions élevée
212 On verra plus tard. L’urgent c’est d’avancer. Et l’ on atteindra peut-être ces régions élevées où les éléments contraires
213 t l’on atteindra peut-être ces régions élevées où les éléments contraires s’unissent dans la grandeur. La paix qu’il appell
214 levées où les éléments contraires s’unissent dans la grandeur. La paix qu’il appelle, c’est autre chose que l’absence de g
215 éléments contraires s’unissent dans la grandeur. La paix qu’il appelle, c’est autre chose que l’absence de guerre, c’est
216 eur. La paix qu’il appelle, c’est autre chose que l’ absence de guerre, c’est une paix que travaillerait le levain des vert
217 sence de guerre, c’est une paix que travaillerait le levain des vertus guerrières. « Il faut que la paix, ce soit vivre. »
218 it le levain des vertus guerrières. « Il faut que la paix, ce soit vivre. » Par tout un livre libéré de souvenirs héroïque
219 e souvenirs héroïques, peut-être trop grands pour la paix, c’est vers de plus sereines exaltations qu’il va porter son ard
220 ations qu’il va porter son ardeur. Il va chercher le souvenir de l’aventure antique, et dans ce qui fut Rome ou la Grèce,
221 porter son ardeur. Il va chercher le souvenir de l’ aventure antique, et dans ce qui fut Rome ou la Grèce, revivre sa trad
222 de l’aventure antique, et dans ce qui fut Rome ou la Grèce, revivre sa tradition. Toute son œuvre pourrait se définir : la
223 tradition. Toute son œuvre pourrait se définir : la lutte d’un tempérament avec la réalité. Tantôt c’est l’un qui veut pl
224 rrait se définir : la lutte d’un tempérament avec la réalité. Tantôt c’est l’un qui veut plier l’autre à sa violence — le
225 c’est l’un qui veut plier l’autre à sa violence — le Paradis —, tantôt c’est l’autre qui impose son absolu. Une soumission
226 rement consentie, voilà ce que nous admirons dans le Chant funèbre. Ce mot de grandeur revient souvent lorsqu’on parle de
227 rle de cette œuvre : je ne sais s’il faut en voir la raison dans la force de la personnalité révélée ou dans la noblesse d
228 vre : je ne sais s’il faut en voir la raison dans la force de la personnalité révélée ou dans la noblesse de sa soumission
229 sais s’il faut en voir la raison dans la force de la personnalité révélée ou dans la noblesse de sa soumission. Périlleuse
230 dans la force de la personnalité révélée ou dans la noblesse de sa soumission. Périlleuse carrière de la grandeur où Mont
231 noblesse de sa soumission. Périlleuse carrière de la grandeur où Montherlant est entré de plain-pied, en même temps que da
232 t est entré de plain-pied, en même temps que dans la guerre. Que de sacrifices ne lui devra-t-il pas offrir ainsi les roma
233 de sacrifices ne lui devra-t-il pas offrir ainsi les romans « intéressants » ou « curieux » ; le « grand lyrisme » à la Ch
234 insi les romans « intéressants » ou « curieux » ; le « grand lyrisme » à la Chateaubriand, voire à la Barrès, dont il est
235 essants » ou « curieux » ; le « grand lyrisme » à la Chateaubriand, voire à la Barrès, dont il est capable et qu’il lui fa
236 le « grand lyrisme » à la Chateaubriand, voire à la Barrès, dont il est capable et qu’il lui faudra livrer au « feu de vé
237 r, s’il veut rester digne de son rôle et vraiment le coryphée d’une génération casquée. Feu consumateur de toute faiblesse
238 en notre siècle, qu’elle paraît parfois, lorsque la tourmente humaine ne la moleste ni ne l’avive plus, cruelle et désolé
239 e paraît parfois, lorsque la tourmente humaine ne la moleste ni ne l’avive plus, cruelle et désolée comme cette « flamme p
240 lorsque la tourmente humaine ne la moleste ni ne l’ avive plus, cruelle et désolée comme cette « flamme pensante » dans l’
241 e et désolée comme cette « flamme pensante » dans l’ ossuaire de Douaumont. Puis la vie l’exalte de nouveau d’un large vent
242 mme pensante » dans l’ossuaire de Douaumont. Puis la vie l’exalte de nouveau d’un large vent de joie. a. Rougemont Deni
243 sante » dans l’ossuaire de Douaumont. Puis la vie l’ exalte de nouveau d’un large vent de joie. a. Rougemont Denis de, «
244 e rendu] Henry de Montherlant, Chant funèbre pour les morts de Verdun  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genè
245 e Verdun  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, mars 1925, p. 380-382.
246  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , mars 1925, p. 380-382.
4 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Breton, Manifeste du surréalisme (juin 1925)
247 isme (juin 1925)b Sous une « vague de rêves », la logique, dernier agent de liaison de nos esprits, va périr. C’est du
248 ns ce que proclame M. Breton en un manifeste dont la pseudo-nouveauté nous retiendra moins que la significative pauvreté i
249 dont la pseudo-nouveauté nous retiendra moins que la significative pauvreté idéologique et morale qu’il révèle. Le style b
250 tive pauvreté idéologique et morale qu’il révèle. Le style brillant et elliptique qui tend à devenir notre poncif moderne,
251 , — ne réussit pas toujours chez Breton à masquer la banalité de la pensée. D’autant plus que les rares passages où il exp
252 pas toujours chez Breton à masquer la banalité de la pensée. D’autant plus que les rares passages où il expose directement
253 squer la banalité de la pensée. D’autant plus que les rares passages où il expose directement les principes de sa « révolut
254 s que les rares passages où il expose directement les principes de sa « révolution » semblent au contraire tirés de quelque
255 ent, soit par écrit, soit de toute autre manière, le fonctionnement réel de la pensée. Dictée de la pensée en l’absence de
256 de toute autre manière, le fonctionnement réel de la pensée. Dictée de la pensée en l’absence de tout contrôle exercé par
257 e, le fonctionnement réel de la pensée. Dictée de la pensée en l’absence de tout contrôle exercé par la raison, en dehors
258 nnement réel de la pensée. Dictée de la pensée en l’ absence de tout contrôle exercé par la raison, en dehors de toute préo
259 a pensée en l’absence de tout contrôle exercé par la raison, en dehors de toute préoccupation esthétique ou morale. » (p. 
260 te préoccupation esthétique ou morale. » (p. 42). Le surréalisme ne serait-il donc qu’une sorte de méthode des textes géné
261 généralisée ? Point du tout ! Il paraît qu’il est la seule attitude littéraire aujourd’hui concevable. Mais par quelles tr
262 ou moins conscientes M. Breton peut-il préconiser l’ existence d’une littérature fondée sur de tels principes ? Le Rêve est
263 d’une littérature fondée sur de tels principes ? Le Rêve est la seule matière poétique. Dans le monde du Rêve autant de c
264 rature fondée sur de tels principes ? Le Rêve est la seule matière poétique. Dans le monde du Rêve autant de cellules isol
265 pes ? Le Rêve est la seule matière poétique. Dans le monde du Rêve autant de cellules isolées que de rêveurs. Toute poésie
266 que de rêveurs. Toute poésie est incommunicable, le poète étant un simple sténographe de ses rêves. Soit. De ces faits, j
267 pratique : inutile de publier des poèmes. Éluard le comprenait, qui écrivit : « Quand les livres se liront-ils d’eux-même
268 èmes. Éluard le comprenait, qui écrivit : « Quand les livres se liront-ils d’eux-mêmes, sans le secours des lecteurs ? Quan
269  Quand les livres se liront-ils d’eux-mêmes, sans le secours des lecteurs ? Quand les hommes se comprendront-ils individue
270 d’eux-mêmes, sans le secours des lecteurs ? Quand les hommes se comprendront-ils individuellement ? » Que M. Breton donne d
271 our faire un poème » cette mystification est dans la logique de ses principes, mais je lui conteste le droit de faire suiv
272 la logique de ses principes, mais je lui conteste le droit de faire suivre son manifeste de proses — Poisson soluble — qui
273 uble — qui servent d’illustration à sa défense de la poésie pure. Les beautés que j’y vois ne me seraient-elles perceptibl
274 nt d’illustration à sa défense de la poésie pure. Les beautés que j’y vois ne me seraient-elles perceptibles que par le fai
275 ’y vois ne me seraient-elles perceptibles que par le fait d’une fortuite coïncidence entre l’univers du poète et le mien ?
276 que par le fait d’une fortuite coïncidence entre l’ univers du poète et le mien ? Je comprends trop de choses dans ces poè
277 e Rimbaud, entre encore pour une grande part dans l’ « alchimie du verbe » ; et je ne puis m’empêcher d’accuser Breton de p
278 cet appareil psychologique si scolaire ? À donner le change sur la pauvreté d’un art purement formel. Car c’est ici le tra
279 sychologique si scolaire ? À donner le change sur la pauvreté d’un art purement formel. Car c’est ici le tragique de cette
280 pauvreté d’un art purement formel. Car c’est ici le tragique de cette mystification : la plupart des surréalistes n’ont r
281 e leur impuissance. « Il n’y a pas de pensée hors les mots » (Aragon). Aussi se paient-ils de métaphores comme d’autres de
282 éclament imprudemment, — on sait ce que c’est que la « liberté » d’un esprit pur de tout finalisme ! Surréalisme S.A., ent
283 out finalisme ! Surréalisme S.A., entreprise pour l’ exploitation de matériaux de démolition abandonnés par Dada S.A. Ce n’
284 pas ainsi que nous sortirons d’une anarchie dont les causes semblent avant tout morales. Les tendances encore un peu vague
285 chie dont les causes semblent avant tout morales. Les tendances encore un peu vagues d’un groupe tel que Philosophies laiss
286 lus réelles. On souhaite qu’après faillite faite, les surréalistes trouvent à montrer leur talent en des jeux moins lassant
287 poir exaspéré, commandait une certaine sympathie. L’ agaçant, avec les surréalistes, c’est que — pour reprendre un mot de C
288 ommandait une certaine sympathie. L’agaçant, avec les surréalistes, c’est que — pour reprendre un mot de Cocteau — ils « em
289 octeau — ils « embaument de vieilles anarchies ». L’ ironie qui sauva Dada du ridicule le cède ici à un ton de mage qui ne
290 anarchies ». L’ironie qui sauva Dada du ridicule le cède ici à un ton de mage qui ne fera plus longtemps impression. C’es
291 us longtemps impression. C’est grand dommage pour les lettres françaises qui risquent d’y perdre au moins deux grands artis
292 ublier Breton, enchanteur des images qui peuplent les ténèbres. b. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] André Breton, Ma
293 réalisme  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, juin 1925, p. 775-776.
294  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , juin 1925, p. 775-776.
5 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Paul Colin, Van Gogh (août 1925)
295 Paul Colin, Van Gogh (août 1925)c Le nouveau volume de la collection des « Maîtres de l’art moderne » est
296 in, Van Gogh (août 1925)c Le nouveau volume de la collection des « Maîtres de l’art moderne » est au moins le cinquième
297 nouveau volume de la collection des « Maîtres de l’ art moderne » est au moins le cinquième ouvrage publié en France sur V
298 s assez neuves. M. Colin s’est contenté de narrer les faits de la vie de Vincent, mais d’une telle manière que des conclusi
299 s. M. Colin s’est contenté de narrer les faits de la vie de Vincent, mais d’une telle manière que des conclusions critique
300 t avec évidence. Van Gogh fut une proie du génie. L’ homme tel que nous le peint Paul Colin, est peu intéressant. On en a c
301 Gogh fut une proie du génie. L’homme tel que nous le peint Paul Colin, est peu intéressant. On en a connu bien d’autres de
302 d’évangélisation, fondent des groupes dissidents. Le miracle, c’est que le plus sauvage génie ait choisi un être de cette
303 ent des groupes dissidents. Le miracle, c’est que le plus sauvage génie ait choisi un être de cette espèce pour le tourmen
304 age génie ait choisi un être de cette espèce pour le tourmenter et le transfigurer. Vincent s’en effraie lui-même : « Il y
305 isi un être de cette espèce pour le tourmenter et le transfigurer. Vincent s’en effraie lui-même : « Il y a quelque chose
306 es copies de Millet. Mais son manque de talent ne le rebute pas. Une divine violence le travaille. Elle jaillira enfin, da
307 e de talent ne le rebute pas. Une divine violence le travaille. Elle jaillira enfin, dans l’éblouissement d’Arles, jusqu’a
308 violence le travaille. Elle jaillira enfin, dans l’ éblouissement d’Arles, jusqu’au jour où cette consomption frénétique t
309 rrassant un corps minable, il ne restera plus que les flammes, les soleils et aussi les grimaces de douleur de ses tableaux
310 orps minable, il ne restera plus que les flammes, les soleils et aussi les grimaces de douleur de ses tableaux. Il faut lou
311 estera plus que les flammes, les soleils et aussi les grimaces de douleur de ses tableaux. Il faut louer Paul Colin de n’av
312 n’avoir rien caché des médiocrités de cette vie : les reproductions qui suivent sa courte biographie fournissent un meilleu
313 courte biographie fournissent un meilleur motif à l’ admiration que tout le lyrisme dont on a voulu charger la « vie héroïq
314 nissent un meilleur motif à l’admiration que tout le lyrisme dont on a voulu charger la « vie héroïque » de Vincent. M. Co
315 ation que tout le lyrisme dont on a voulu charger la « vie héroïque » de Vincent. M. Colin n’a pas cherché à expliquer ce
316 ce miracle. Il nous laisse à notre émotion devant le spectacle d’une œuvre qui ne dut rien à l’homme, d’une œuvre de pur g
317 devant le spectacle d’une œuvre qui ne dut rien à l’ homme, d’une œuvre de pur génie. Vincent Van Gogh, génie sans talent.
318 Van Gogh  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, août 1925, p. 1033.
319  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , août 1925, p. 1033.
6 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Lucien Fabre, Le Tarramagnou (septembre 1925)
320 Lucien Fabre, Le Tarramagnou (septembre 1925)d Lucien Fabre, ingénieur, poète, chro
321 stein, des articles sur Valéry, St John Perse. On le vit naguère en province liquider des stocks américains. Et ses romans
322 ins. Et ses romans, c’est aussi une liquidation : les faits s’y pressent et s’y bousculent ; de temps à autre une notation
323 ou de psychologue se glisse dans leur flot. Voilà le lecteur entraîné, ébahi, passionné, contraint de suivre jusqu’au bout
324 bout un roman de 500 pages comme Rabevel. Car si la liquidation des questions traitées est rapide, elle est complète auss
325 n’est pas lui qui se refuserait à écrire — comme le fait son maître : « La marquise sortit à cinq heures ». Une telle pla
326 efuserait à écrire — comme le fait son maître : «  La marquise sortit à cinq heures ». Une telle platitude est presque indi
327 e indispensable, mais il s’en permet d’autres qui le sont moins. On n’écrit pas un roman en trois volumes sans y laisser d
328 on ne demande pas non plus au puissant boxeur sur le ring d’être bien peigné. Rabevel, c’était un portrait balzacien du b
329 ait un portrait balzacien du brasseur d’affaires. Le sujet du Tarramagnou, c’est « la nouvelle mise en servitude du peuple
330 seur d’affaires. Le sujet du Tarramagnou, c’est «  la nouvelle mise en servitude du peuple rustique de France ». En effet —
331 vitude du peuple rustique de France ». En effet — le phénomène n’est pas particulier à la France — les paysans sont en tra
332 . En effet — le phénomène n’est pas particulier à la France — les paysans sont en train de redevenir serfs, serfs des synd
333 le phénomène n’est pas particulier à la France — les paysans sont en train de redevenir serfs, serfs des syndicats et des
334 villes. Mais dans une de ces provinces du Midi où le souvenir des luttes religieuses encore vivace fait que les paysans ga
335 nir des luttes religieuses encore vivace fait que les paysans gardent une méfiance frondeuse vis-à-vis du gouvernement, le
336 une méfiance frondeuse vis-à-vis du gouvernement, le libérateur va se lever. C’est un descendant de Roland le Camisard, ce
337 Camisard, ce « Tarramagnou », ce « petit homme de la terre », qui va susciter un formidable mouvement de protestation cont
338 er un formidable mouvement de protestation contre les lois tyranniques. Le succès grandit rapidement, le gouvernement cède.
339 ment de protestation contre les lois tyranniques. Le succès grandit rapidement, le gouvernement cède. Mais la même inertie
340 s lois tyranniques. Le succès grandit rapidement, le gouvernement cède. Mais la même inertie du peuple qui donnait tant de
341 ès grandit rapidement, le gouvernement cède. Mais la même inertie du peuple qui donnait tant de mal lorsqu’il fallait l’év
342 peuple qui donnait tant de mal lorsqu’il fallait l’ éveiller, l’entraîne au-delà du but. Le Tarramagnou voit son œuvre sab
343 donnait tant de mal lorsqu’il fallait l’éveiller, l’ entraîne au-delà du but. Le Tarramagnou voit son œuvre sabotée par des
344 il fallait l’éveiller, l’entraîne au-delà du but. Le Tarramagnou voit son œuvre sabotée par des meneurs ; il tente en vain
345 e par des meneurs ; il tente en vain de ressaisir les foules : déjà elles huent sa modération. Alors il va se jeter au-deva
346 devant des troupes accourues, il meurt en clamant la paix. M. Fabre avait là les éléments d’un grand roman : autour d’un s
347 s, il meurt en clamant la paix. M. Fabre avait là les éléments d’un grand roman : autour d’un sujet de vaste envergure, et
348 es d’une belle richesse psychologique. En fermant le livre on a presque l’impression qu’il a réussi ce grand roman… Qu’y m
349 e psychologique. En fermant le livre on a presque l’ impression qu’il a réussi ce grand roman… Qu’y manque-t-il ? Un style 
350 ssi ce grand roman… Qu’y manque-t-il ? Un style ? L’ absence de style, n’est-ce pas le meilleur style pour un romancier ? C
351 -il ? Un style ? L’absence de style, n’est-ce pas le meilleur style pour un romancier ? C’est plutôt, je crois, une certai
352 ôt, je crois, une certaine harmonie générale dans le récit et le ton, surtout dans la première partie, qui est confuse. No
353 , une certaine harmonie générale dans le récit et le ton, surtout dans la première partie, qui est confuse. Non pas que le
354 la première partie, qui est confuse. Non pas que le roman soit mal construit, au contraire. Mais le tissu des faits se re
355 e le roman soit mal construit, au contraire. Mais le tissu des faits se relâche parfois, et les arêtes de la construction
356 e. Mais le tissu des faits se relâche parfois, et les arêtes de la construction apparaissent trop nues. Chef-d’œuvre ou pas
357 su des faits se relâche parfois, et les arêtes de la construction apparaissent trop nues. Chef-d’œuvre ou pas chef-d’œuvre
358 uvre ou pas chef-d’œuvre d’ailleurs, il reste que le Tarramagnou est un livre émouvant, d’une saine puissance. Il reste qu
359 ougemont Denis de, « [Compte rendu] Lucien Fabre, Le Tarramagnou  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève,
360 ramagnou  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, septembre 1925, p. 1151-1152.
361  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , septembre 1925, p. 1151-1152.
7 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Les Appels de l’Orient (septembre 1925)
362 Les Appels de l’Orient (septembre 1925)e Le xxe siècle s’annonce comm
363 Les Appels de l’ Orient (septembre 1925)e Le xxe siècle s’annonce comme le siècle d
364 Les Appels de l’Orient (septembre 1925)e Le xxe siècle s’annonce comme le siècle de la découverte du monde par l
365 eptembre 1925)e Le xxe siècle s’annonce comme le siècle de la découverte du monde par l’Europe intellectuelle. Grand s
366 )e Le xxe siècle s’annonce comme le siècle de la découverte du monde par l’Europe intellectuelle. Grand siècle de crit
367 nce comme le siècle de la découverte du monde par l’ Europe intellectuelle. Grand siècle de critique pour lequel nos contem
368 critique pour lequel nos contemporains accumulent les documents. La littérature de ces dernières années n’est qu’une forme
369 equel nos contemporains accumulent les documents. La littérature de ces dernières années n’est qu’une forme de reportage i
370 es n’est qu’une forme de reportage international. L’ Europe menant cette immense enquête manifeste son génie méthodique, so
371 selle et inépuisable curiosité. Mais, de même que la France interrogeant l’Europe du xviiie prenait surtout conscience de
372 riosité. Mais, de même que la France interrogeant l’ Europe du xviiie prenait surtout conscience de son propre génie, l’Eu
373 prenait surtout conscience de son propre génie, l’ Europe d’aujourd’hui semble chercher dans une confrontation avec l’Ori
374 d’hui semble chercher dans une confrontation avec l’ Orient, plutôt qu’une réelle connaissance de l’Orient, une conscience
375 ec l’Orient, plutôt qu’une réelle connaissance de l’ Orient, une conscience d’elle-même. C’est peut-être pour provoquer cet
376 né un péril oriental, car il semble bien que dans le domaine de la culture le péril n’existe que pour autant qu’on en parl
377 iental, car il semble bien que dans le domaine de la culture le péril n’existe que pour autant qu’on en parle, la vraie « 
378 il semble bien que dans le domaine de la culture le péril n’existe que pour autant qu’on en parle, la vraie « question as
379 le péril n’existe que pour autant qu’on en parle, la vraie « question asiatique » étant une question politique. On peut pr
380 nt une question politique. On peut prévoir que si le bouddhisme jouit un jour d’un renouveau, c’est à quelques savants eur
381 nouveau, c’est à quelques savants européens qu’il le devra, tandis que d’un mouvement inverse, le christianisme débarrassé
382 u’il le devra, tandis que d’un mouvement inverse, le christianisme débarrassé de son déguisement gréco-latin retournera ve
383 n retournera vers ses sources pour s’y retremper. Les appels de l’Orient, ce sont les Keyserling, les Guénon, qui les font
384 ers ses sources pour s’y retremper. Les appels de l’ Orient, ce sont les Keyserling, les Guénon, qui les font entendre, aut
385 ur s’y retremper. Les appels de l’Orient, ce sont les Keyserling, les Guénon, qui les font entendre, autant et plus que les
386 . Les appels de l’Orient, ce sont les Keyserling, les Guénon, qui les font entendre, autant et plus que les Tagore et les G
387 l’Orient, ce sont les Keyserling, les Guénon, qui les font entendre, autant et plus que les Tagore et les Gandhi, demi-euro
388 Guénon, qui les font entendre, autant et plus que les Tagore et les Gandhi, demi-européanisés. Ceci convenu, il faut reconn
389 s font entendre, autant et plus que les Tagore et les Gandhi, demi-européanisés. Ceci convenu, il faut reconnaître que l’en
390 ropéanisés. Ceci convenu, il faut reconnaître que l’ enquête des Cahiers du Mois donne un fort intéressant tableau des mult
391 rt intéressant tableau des multiples réactions de l’ Europe placée devant le dilemme Orient-Occident. Réactions qui, disons
392 des multiples réactions de l’Europe placée devant le dilemme Orient-Occident. Réactions qui, disons-le tout de suite, rens
393 le dilemme Orient-Occident. Réactions qui, disons- le tout de suite, renseignent mieux sur l’esprit occidental que sur l’or
394 i, disons-le tout de suite, renseignent mieux sur l’ esprit occidental que sur l’oriental, en sorte que cette enquête rejoi
395 renseignent mieux sur l’esprit occidental que sur l’ oriental, en sorte que cette enquête rejoint parfois celle qu’ouvrit l
396 que cette enquête rejoint parfois celle qu’ouvrit la Revue de Genève sur « l’Avenir de l’Europe. » (Cf. les deux réponse
397 uête rejoint parfois celle qu’ouvrit la Revue de Genève sur « l’Avenir de l’Europe. » (Cf. les deux réponses d’André Gide en
398 arfois celle qu’ouvrit la Revue de Genève sur «  l’ Avenir de l’Europe. » (Cf. les deux réponses d’André Gide en particuli
399 qu’ouvrit la Revue de Genève sur « l’Avenir de l’ Europe. » (Cf. les deux réponses d’André Gide en particulier). Car la
400 vue de Genève sur « l’Avenir de l’Europe. » (Cf. les deux réponses d’André Gide en particulier). Car la plupart des enquêt
401 ticulier). Car la plupart des enquêtés se font de l’ Orient une représentation vague et poétique. « Orient…, toi qui n’as q
402 de cet Orient qu’il s’agit, et Jean Schlumberger le définit encore : « … tout ce qui est opposé à l’esprit occidental, to
403 le définit encore : « … tout ce qui est opposé à l’ esprit occidental, tout ce qui peut servir d’antidote à sa fièvre et à
404 ne dénomination qui n’a de sens que par rapport à l’ Europe. Il serait vain de tenter un classement parmi les réponses d’un
405 ope. Il serait vain de tenter un classement parmi les réponses d’une extraordinaire diversité — peut-être trop nombreuses —
406 e trop nombreuses — qui composent ce gros volume. Les points de vue sont si différents, si différentes même les conclusions
407 ts de vue sont si différents, si différentes même les conclusions tirées de points de vue semblables, qu’un esprit analytiq
408 t de jugements contradictoires, et de termes dont le sens change avec l’échelle de valeurs de l’écrivain. Énumérons pourta
409 adictoires, et de termes dont le sens change avec l’ échelle de valeurs de l’écrivain. Énumérons pourtant quelques-uns des
410 dont le sens change avec l’échelle de valeurs de l’ écrivain. Énumérons pourtant quelques-uns des points de vue les plus r
411 Énumérons pourtant quelques-uns des points de vue les plus riches ou les mieux définis. Pour Valéry, la supériorité de l’Eu
412 quelques-uns des points de vue les plus riches ou les mieux définis. Pour Valéry, la supériorité de l’Europe réside dans sa
413 es plus riches ou les mieux définis. Pour Valéry, la supériorité de l’Europe réside dans sa « puissance de choix », dans l
414 les mieux définis. Pour Valéry, la supériorité de l’ Europe réside dans sa « puissance de choix », dans le génie d’abstract
415 urope réside dans sa « puissance de choix », dans le génie d’abstraction qui a produit la géométrie grecque. D’autres attr
416 hoix », dans le génie d’abstraction qui a produit la géométrie grecque. D’autres attribuent cette supériorité au machinism
417 es attribuent cette supériorité au machinisme, et la déplorent. Plusieurs jeunes songent que dans une Europe vieillie, les
418 eurs jeunes songent que dans une Europe vieillie, les parfums puissants de l’Asie sauront encore éveiller de beaux rêves. I
419 ans une Europe vieillie, les parfums puissants de l’ Asie sauront encore éveiller de beaux rêves. Il y a ceux qui repoussen
420 orante du thomisme et ceux qui pensent inévitable le choc de deux mondes, et que seule une intime connaissance mutuelle l’
421 es, et que seule une intime connaissance mutuelle l’ adoucira. Il y a ceux qui à la suite de Claudel estiment que la questi
422 l y a ceux qui à la suite de Claudel estiment que la question ne se pose pas, puisque nous sommes chrétiens. (Mais le chri
423 se pose pas, puisque nous sommes chrétiens. (Mais le christianisme, religion missionnaire, ne peut nous donner qu’une supé
424 périorité provisoire et qui porte en son principe le germe de sa destruction.) Il y a enfin ceux qui refondent et combinen
425 point avoir, sincérité trop rare… Presque toutes les réponses, conclusions ou interrogations, ont le défaut de n’être pas
426 les réponses, conclusions ou interrogations, ont le défaut de n’être pas suffisamment motivées par des faits et des docum
427 es par des faits et des documents. Pour beaucoup, l’ Orient n’est qu’un prétexte à variations sur le thème favori. M. Massi
428 p, l’Orient n’est qu’un prétexte à variations sur le thème favori. M. Massis, par exemple, qui cependant produit un grand
429 livre pas moins à des déductions in abstracto qui le mènent à des conclusions de ce genre : si nous trouvons le moyen de «
430 à des conclusions de ce genre : si nous trouvons le moyen de « suppléer à l’éducation historique des peuples chrétiens qu
431 genre : si nous trouvons le moyen de « suppléer à l’ éducation historique des peuples chrétiens qui n’ont pas eu de Moyen Â
432 n’ont pas eu de Moyen Âge », nous pourrons amener l’ Asie à comprendre la religion romaine (ce christianisme méditerranéen
433 n Âge », nous pourrons amener l’Asie à comprendre la religion romaine (ce christianisme méditerranéen si étroitement parti
434 erranéen si étroitement particularisé pourtant, à l’ usage des Latins…). Quant aux orientalistes, qui, eux, apportent des d
435 onclure. Un écrivain grec, M. Embiricos, a trouvé la formule qui définit ce que les autres entendent vaguement par Orient 
436 Embiricos, a trouvé la formule qui définit ce que les autres entendent vaguement par Orient : l’Asie est le subconscient du
437 e que les autres entendent vaguement par Orient : l’ Asie est le subconscient du monde, formule qui, je pense, réunira tous
438 utres entendent vaguement par Orient : l’Asie est le subconscient du monde, formule qui, je pense, réunira tous les suffra
439 ent du monde, formule qui, je pense, réunira tous les suffrages. Et chacun d’en tirer de nouvelles raisons de maudire l’Ori
440 chacun d’en tirer de nouvelles raisons de maudire l’ Orient ou chercher la guérison de nos fièvres. Mais nous aurons entrev
441 nouvelles raisons de maudire l’Orient ou chercher la guérison de nos fièvres. Mais nous aurons entrevu peut-être pour la p
442 us aurons entrevu peut-être pour la première fois le rôle de l’Europe « conscience du monde », entre une Amérique affolée
443 ntrevu peut-être pour la première fois le rôle de l’ Europe « conscience du monde », entre une Amérique affolée de vitesse,
444 nelle. e. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Les Appels de l’Orient (n° 9-10 des Cahiers du Mois) », Bibliothèque univ
445 ougemont Denis de, « [Compte rendu] Les Appels de l’ Orient (n° 9-10 des Cahiers du Mois) », Bibliothèque universelle et Re
446 du Mois) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, septembre 1925, p. 1152-1154.
447 ) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , septembre 1925, p. 1152-1154.
8 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jean Prévost, Tentative de solitude (septembre 1925)
448 que nous sommes seuls, nous sommes des fous. Oui, le contrôle de nous-mêmes ne joue que soutenu par le contrôle que les au
449 le contrôle de nous-mêmes ne joue que soutenu par le contrôle que les autres nous imposent », dit un héros de Mauriac. C’e
450 ous-mêmes ne joue que soutenu par le contrôle que les autres nous imposent », dit un héros de Mauriac. C’est un « homme seu
451 Mauriac. C’est un « homme seul » qu’a peint « par le dedans » M. Jean Prévost, en un saisissant raccourci psychologique. «
452 eut éliminer de soi tout ce qui est déterminé par l’ extérieur, — ce fou que nous portons tous en nous, — il l’a isolé, inc
453 eur, — ce fou que nous portons tous en nous, — il l’ a isolé, incarné, nommé : Revert. Puis il l’a poussé impitoyablement d
454 — il l’a isolé, incarné, nommé : Revert. Puis il l’ a poussé impitoyablement dans sa recherche d’un absolu qui se trouve ê
455 dans sa recherche d’un absolu qui se trouve être le néant. Pour finir il « l’écrabouille ». L’expérience est terminée. Ar
456 solu qui se trouve être le néant. Pour finir il «  l’ écrabouille ». L’expérience est terminée. Artificielle comme toute exp
457 e être le néant. Pour finir il « l’écrabouille ». L’ expérience est terminée. Artificielle comme toute expérience, elle n’e
458 assive d’un théorème de Spinoza. Une ironie dure, la densité du style révèlent seules l’écrivain ; et aussi quelques sente
459 ironie dure, la densité du style révèlent seules l’ écrivain ; et aussi quelques sentences : « C’est de la faiblesse de no
460 rivain ; et aussi quelques sentences : « C’est de la faiblesse de nos yeux que frissonnent les étoiles. » f. Rougemont
461 C’est de la faiblesse de nos yeux que frissonnent les étoiles. » f. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Jean Prévost, T
462 solitude  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, septembre 1925, p. 1156-1157.
463  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , septembre 1925, p. 1156-1157.
9 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Almanach 1925 (septembre 1925)
464 eptembre 1925)g En 1886, lors de sa fondation, la nouvelle maison d’édition Fischer passait pour « la centrale où l’on
465 nouvelle maison d’édition Fischer passait pour «  la centrale où l’on avait concentré la dynamite internationale qu’Ibsen
466 n d’édition Fischer passait pour « la centrale où l’ on avait concentré la dynamite internationale qu’Ibsen voulait placer
467 assait pour « la centrale où l’on avait concentré la dynamite internationale qu’Ibsen voulait placer sous les arches de la
468 amite internationale qu’Ibsen voulait placer sous les arches de la vieille société », pour reprendre la pittoresque définit
469 ionale qu’Ibsen voulait placer sous les arches de la vieille société », pour reprendre la pittoresque définition de M. A.
470 es arches de la vieille société », pour reprendre la pittoresque définition de M. A. Eloesser dans l’Almanach du 25e anniv
471 la pittoresque définition de M. A. Eloesser dans l’ Almanach du 25e anniversaire. Les révolutionnaires y faisaient pourtan
472 A. Eloesser dans l’Almanach du 25e anniversaire. Les révolutionnaires y faisaient pourtant bon ménage avec les derniers ch
473 lutionnaires y faisaient pourtant bon ménage avec les derniers champions du naturalisme puisqu’au début Fischer publia Zola
474 trouve au tableau des auteurs édités depuis lors les grands noms de la littérature européenne d’avant-guerre mêlés à ceux
475 des auteurs édités depuis lors les grands noms de la littérature européenne d’avant-guerre mêlés à ceux des maîtres du ren
476 aliste allemand et viennois, Hesse, Hofmannsthal… Les extraits de ces auteurs qui composent l’Almanach Fischer donnent une
477 nsthal… Les extraits de ces auteurs qui composent l’ Almanach Fischer donnent une juste idée de ce que fut la littérature d
478 nach Fischer donnent une juste idée de ce que fut la littérature d’avant-garde entre 1900 et 1910. Depuis, la maison paraî
479 érature d’avant-garde entre 1900 et 1910. Depuis, la maison paraît s’être un peu embourgeoisée… Disons plutôt que voici ve
480 n peu embourgeoisée… Disons plutôt que voici venu le temps de la moisson, — le temps des éditions d’œuvres complètes. g.
481 geoisée… Disons plutôt que voici venu le temps de la moisson, — le temps des éditions d’œuvres complètes. g. Rougemont
482 s plutôt que voici venu le temps de la moisson, —  le temps des éditions d’œuvres complètes. g. Rougemont Denis de, « [C
483 ach 1925  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, septembre 1925, p. 1162-1163.
484  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , septembre 1925, p. 1162-1163.
10 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Otto Flake, Der Gute Weg (septembre 1925)
485 tto Flake, Der Gute Weg (septembre 1925)h Dans l’ atmosphère trouble où s’agite l’Allemagne nouvelle — et peut-être parc
486 re 1925)h Dans l’atmosphère trouble où s’agite l’ Allemagne nouvelle — et peut-être parce qu’il sait en sortir parfois —
487 kei a gardé son bon sens et son sang-froid. Et si l’ on a pu reprocher à ses tableaux de l’Europe qu’il vient de parcourir
488 roid. Et si l’on a pu reprocher à ses tableaux de l’ Europe qu’il vient de parcourir quelque superficialité, du moins faut-
489 arcourir quelque superficialité, du moins faut-il le louer d’avoir conservé une vision générale de notre temps et un évide
490 bénéficie de cette vision. Je ne saurais résumer les nombreuses péripéties de son dernier roman sans exposer et discuter t
491 son dernier roman sans exposer et discuter toutes les idées qu’elles illustrent. Les personnages discutent certes, mais leu
492 et discuter toutes les idées qu’elles illustrent. Les personnages discutent certes, mais leurs actions sont les meilleurs a
493 onnages discutent certes, mais leurs actions sont les meilleurs arguments. Et peu à peu surgissent d’une accumulation de pe
494 près-guerre d’une étrange vérité. Aux prises avec les problèmes sociaux et le luxe le moins apaisant, tournés vers la Russi
495 vérité. Aux prises avec les problèmes sociaux et le luxe le moins apaisant, tournés vers la Russie, vers le passé, vers l
496 Aux prises avec les problèmes sociaux et le luxe le moins apaisant, tournés vers la Russie, vers le passé, vers l’Orient,
497 ociaux et le luxe le moins apaisant, tournés vers la Russie, vers le passé, vers l’Orient, tentant des amours nouvelles et
498 e le moins apaisant, tournés vers la Russie, vers le passé, vers l’Orient, tentant des amours nouvelles et les fuites les
499 sant, tournés vers la Russie, vers le passé, vers l’ Orient, tentant des amours nouvelles et les fuites les plus folles hor
500 é, vers l’Orient, tentant des amours nouvelles et les fuites les plus folles hors de la réalité, ils forment un cortège pit
501 rient, tentant des amours nouvelles et les fuites les plus folles hors de la réalité, ils forment un cortège pittoresque et
502 s nouvelles et les fuites les plus folles hors de la réalité, ils forment un cortège pittoresque et désolant à celui qui,
503 ge pittoresque et désolant à celui qui, revenu de l’ étranger dans le désordre de son pays, suivra obstinément le « bon che
504 t désolant à celui qui, revenu de l’étranger dans le désordre de son pays, suivra obstinément le « bon chemin » de la sant
505 dans le désordre de son pays, suivra obstinément le « bon chemin » de la santé et de la raison. C’est à lui que va la sym
506 son pays, suivra obstinément le « bon chemin » de la santé et de la raison. C’est à lui que va la sympathie de l’auteur et
507 a obstinément le « bon chemin » de la santé et de la raison. C’est à lui que va la sympathie de l’auteur et la nôtre. h.
508 » de la santé et de la raison. C’est à lui que va la sympathie de l’auteur et la nôtre. h. Rougemont Denis de, « [Compt
509 de la raison. C’est à lui que va la sympathie de l’ auteur et la nôtre. h. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Otto Fl
510 n. C’est à lui que va la sympathie de l’auteur et la nôtre. h. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Otto Flake, Der Gut
511 Gute Weg  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, septembre 1925, p. 1163. i. Orthographié « Flasce » par err
512  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , septembre 1925, p. 1163. i. Orthographié « Flasce » par erreur dans
513 1163. i. Orthographié « Flasce » par erreur dans l’ original.
11 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Miguel de Unamuno, Trois nouvelles exemplaires et un prologue (septembre 1925)
514 opéenne », croyez-vous qu’il aille s’abandonner à l’ émotion communicative de qui découvre un sommet ? Point. Précision, mo
515 vre un sommet ? Point. Précision, modération dans le jugement, humour léger, notation suggestive, telles sont les vertus d
516 t, humour léger, notation suggestive, telles sont les vertus de sa critique. Ce n’est que dans sa discrétion à louer une gr
517 iscrétion à louer une grande œuvre qu’on trouvera la mesure de son admiration et le gage de sa légitimité. Nul doute que l
518 vre qu’on trouvera la mesure de son admiration et le gage de sa légitimité. Nul doute que les Trois nouvelles exemplaires
519 ration et le gage de sa légitimité. Nul doute que les Trois nouvelles exemplaires ne suscitent un intérêt très profond : el
520 de préoccupations des plus modernes, problème de la réalité littéraire, problème de la personnalité. Leur Prologue pourra
521 s, problème de la réalité littéraire, problème de la personnalité. Leur Prologue pourrait presque aussi bien être celui d’
522 d’une pièce de Pirandello. N’annonce-t-il pas que les personnages des trois nouvelles « sont réels, très réels, de la réali
523 des trois nouvelles « sont réels, très réels, de la réalité la plus intime, de celle qu’ils se donnent eux-mêmes dans leu
524 nouvelles « sont réels, très réels, de la réalité la plus intime, de celle qu’ils se donnent eux-mêmes dans leur pure volo
525 ur pure volonté d’être ou de ne pas être… ». Mais les héros de Pirandello, s’ils veulent être, subissent, une fois qu’ils s
526 ls veulent être, subissent, une fois qu’ils sont, le grand malentendu de la personnalité. Tandis que chez Unamuno une volo
527 ent, une fois qu’ils sont, le grand malentendu de la personnalité. Tandis que chez Unamuno une volonté d’action les possèd
528 ité. Tandis que chez Unamuno une volonté d’action les possède, les exalte, les affole. Les plus beaux types créés par Unamu
529 ue chez Unamuno une volonté d’action les possède, les exalte, les affole. Les plus beaux types créés par Unamuno sont ces f
530 uno une volonté d’action les possède, les exalte, les affole. Les plus beaux types créés par Unamuno sont ces femmes dures
531 nté d’action les possède, les exalte, les affole. Les plus beaux types créés par Unamuno sont ces femmes dures et passionné
532 us dépouillé de détail extérieur ou d’enjolivure. La lecture de ces trois tragédies, d’une classique sobriété mais d’une b
533 une brutalité et d’une ironie romantiques, laisse la même impression de grandeur désolée qu’un Greco. Mais il n’y a pas le
534 e grandeur désolée qu’un Greco. Mais il n’y a pas les couleurs, ni l’amère volupté des formes. Une sensation de barre d’aci
535 e qu’un Greco. Mais il n’y a pas les couleurs, ni l’ amère volupté des formes. Une sensation de barre d’acier sur la nuque.
536 té des formes. Une sensation de barre d’acier sur la nuque. j. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Miguel de Unamuno,
537 prologue  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, septembre 1925, p. 1164.
538  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , septembre 1925, p. 1164.
12 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Ernest Seillière, Alexandre Vinet, historien de la pensée française (octobre 1925)
539 Ernest Seillière, Alexandre Vinet, historien de la pensée française (octobre 1925)k Peut-être n’est-il pas trop tard
540 pitre qu’il vient d’ajouter à sa grande étude sur les rapports du christianisme et du romantisme. M. Seillière cherchait da
541 sme et du romantisme. M. Seillière cherchait dans l’ époque romantique un témoin dont le jugement eut « l’autorité d’un ver
542 cherchait dans l’époque romantique un témoin dont le jugement eut « l’autorité d’un verdict essentiellement chrétien sur l
543 poque romantique un témoin dont le jugement eut «  l’ autorité d’un verdict essentiellement chrétien sur le mysticisme natur
544 utorité d’un verdict essentiellement chrétien sur le mysticisme naturiste ». Il ne pouvait trouver mieux que Vinet. Et j’i
545 net. Et j’imagine son étonnement à découvrir dans l’ œuvre du penseur vaudois la substance originale de la plupart des idée
546 ement à découvrir dans l’œuvre du penseur vaudois la substance originale de la plupart des idées dont lui-même s’est fait
547 de la plupart des idées dont lui-même s’est fait le moderne champion. Pour ce qui concerne le Vinet juge des romantiques,
548 st fait le moderne champion. Pour ce qui concerne le Vinet juge des romantiques, il n’a pas eu trop de peine à l’annexer à
549 ge des romantiques, il n’a pas eu trop de peine à l’ annexer à son propre corps de doctrines critiques. Dirai-je pourtant q
550 , et presque inconsciemment, à gauchir légèrement la pensée de Vinet pour lui ajuster sa terminologie particulière ? Mais
551 ie particulière ? Mais par ailleurs Vinet déborde le « sellièrisme » de tout son mysticisme protestant. Et cela n’est pas
552 eillière. C’est peut-être pourquoi il insiste sur le fait que Vinet se déclarait « un chrétien sans épithète ». Croit-il é
553 n chrétien sans épithète ». Croit-il éluder ainsi le protestantisme de Vinet ? Ne voit-il pas que rien n’est plus protesta
554 e ? Mais ces réserves sont de peu d’importance si l’ on songe au service que M. Seillière nous rend en réintroduisant dans
555 que M. Seillière nous rend en réintroduisant dans l’ actualité la plus brûlante les richesses intellectuelles et morales du
556 ière nous rend en réintroduisant dans l’actualité la plus brûlante les richesses intellectuelles et morales du grand vaudo
557 réintroduisant dans l’actualité la plus brûlante les richesses intellectuelles et morales du grand vaudois. Vraiment, tout
558 raiment, tout ce qui semble viable et humain dans la critique moderne du romantisme, Vinet l’avait trouvé. Mais sa positio
559 ain dans la critique moderne du romantisme, Vinet l’ avait trouvé. Mais sa position purement chrétienne — un mysticisme de
560 ] Ernest Seillière, Alexandre Vinet, historien de la pensée française  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Gen
561 rançaise  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, octobre 1925, p. 1797-1798.
562  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , octobre 1925, p. 1797-1798.
13 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jules Supervielle, Gravitations (décembre 1925)
563 st celui-là qui s’avance » avec ce visage d’entre la vie et la mort « où se reflète le passage incessant d’oiseaux de la m
564 à qui s’avance » avec ce visage d’entre la vie et la mort « où se reflète le passage incessant d’oiseaux de la mer ? » « Q
565 visage d’entre la vie et la mort « où se reflète le passage incessant d’oiseaux de la mer ? » « Quel est cet homme dont l
566 « où se reflète le passage incessant d’oiseaux de la mer ? » « Quel est cet homme dont l’âme fait des signes solennels ? »
567 d’oiseaux de la mer ? » « Quel est cet homme dont l’ âme fait des signes solennels ? » Une voix lente aux méandres songeurs
568 ne simplicité qui n’est pas familière. C’est bien la poésie d’une époque tourmentée dans sa profondeur, mais qui se penche
569 abîmes. Simplicité de notre temps ! Au-dessus de la trépidation immense des machines, un Saint-John-Perse, un Supervielle
570 rse, un Supervielle parlent avec des mots de tous les jours aux vivants et aux morts : Mère, je sais très mal comme l’on ch
571 vants et aux morts : Mère, je sais très mal comme l’ on cherche les morts… « … Cette chose haute à la voix grave qu’on appe
572 morts : Mère, je sais très mal comme l’on cherche les morts… « … Cette chose haute à la voix grave qu’on appelle un père da
573 e l’on cherche les morts… « … Cette chose haute à la voix grave qu’on appelle un père dans les maisons. » Comme Valéry, ce
574 haute à la voix grave qu’on appelle un père dans les maisons. » Comme Valéry, ce poète sait « des complicités étranges pou
575 s’est créé. Jamais banal, il est parfois facile : la description du monde qu’il invente nous lasse quand elle ne l’étonne
576 n du monde qu’il invente nous lasse quand elle ne l’ étonne plus assez lui-même (pourtant l’autel et le surréalisme l’ont e
577 nd elle ne l’étonne plus assez lui-même (pourtant l’ autel et le surréalisme l’ont enrichie d’images…). Je cite des noms :
578 l’étonne plus assez lui-même (pourtant l’autel et le surréalisme l’ont enrichie d’images…). Je cite des noms : y a-t-il in
579 ssez lui-même (pourtant l’autel et le surréalisme l’ ont enrichie d’images…). Je cite des noms : y a-t-il influence ou seul
580 rtent des cafés littéraires, nos poètes respirent le même air du temps. Leur originalité se retrouve dans la manière dont
581 e air du temps. Leur originalité se retrouve dans la manière dont ils tentent de fuir l’inquiétude où ils baignent. Celui-
582 retrouve dans la manière dont ils tentent de fuir l’ inquiétude où ils baignent. Celui-ci vient à peine de quitter l’air du
583 ù ils baignent. Celui-ci vient à peine de quitter l’ air dur des pampas. « Le voilà qui s’avance, foulant les hautes herbes
584 vient à peine de quitter l’air dur des pampas. «  Le voilà qui s’avance, foulant les hautes herbes du ciel. » Le gaucho a
585 dur des pampas. « Le voilà qui s’avance, foulant les hautes herbes du ciel. » Le gaucho a dompté Pégase et caracole dans l
586 ui s’avance, foulant les hautes herbes du ciel. » Le gaucho a dompté Pégase et caracole dans les étoiles. J’avoue que l’un
587 iel. » Le gaucho a dompté Pégase et caracole dans les étoiles. J’avoue que l’univers intérieur où il lui arrive de graviter
588 Pégase et caracole dans les étoiles. J’avoue que l’ univers intérieur où il lui arrive de graviter me trouble mieux que so
589 eux que son lyrisme cosmique. On est plus près de l’ infini au fond de soi qu’au fond du ciel. l. Rougemont Denis de, « 
590 itations  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, décembre 1925, p. 1560.
591  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , décembre 1925, p. 1560.
14 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Simone Téry, L’Île des bardes (décembre 1925)
592 Simone Téry, L’ Île des bardes (décembre 1925)m L’Irlande contemporaine offre un sp
593 Simone Téry, L’Île des bardes (décembre 1925)m L’ Irlande contemporaine offre un spectacle bien passionnant : celui de l
594 ne offre un spectacle bien passionnant : celui de la renaissance d’une littérature nationale à la fois cause et effet de l
595 littérature nationale à la fois cause et effet de la libération politique. Cause, puisque pour mener à chef cette libérati
596 es, ont su payer de leur personne. Effet, puisque l’ héroïsme d’une révolution en faveur du passé, révolution tout de même,
597 lle Simone Téry ne fait pas. Car elle veut éviter l’ emballement et conserver dans l’admiration son sens critique de Parisi
598 elle veut éviter l’emballement et conserver dans l’ admiration son sens critique de Parisienne. C’est une sympathie malici
599 commentaires parfois un peu copieux ; mais elle a la vertu de rendre contagieuse la curiosité de l’auteur à l’endroit de c
600 ieux ; mais elle a la vertu de rendre contagieuse la curiosité de l’auteur à l’endroit de cette âme irlandaise en laquelle
601 a la vertu de rendre contagieuse la curiosité de l’ auteur à l’endroit de cette âme irlandaise en laquelle s’allient une f
602 Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Simone Téry, L’ Île des bardes  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève
603 s bardes  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, décembre 1925, p. 1567.
604  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , décembre 1925, p. 1567.
15 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Hugh Walpole, La Cité secrète (décembre 1925)
605 Hugh Walpole, La Cité secrète (décembre 1925)n La Révolution russe va-t-elle usurpe
606 Hugh Walpole, La Cité secrète (décembre 1925)n La Révolution russe va-t-elle usurper dans le roman d’aventures le rôle
607 5)n La Révolution russe va-t-elle usurper dans le roman d’aventures le rôle de la mer Océane avec ses écumeurs ? Déjà u
608 russe va-t-elle usurper dans le roman d’aventures le rôle de la mer Océane avec ses écumeurs ? Déjà un Mac Orlan, un Kesse
609 elle usurper dans le roman d’aventures le rôle de la mer Océane avec ses écumeurs ? Déjà un Mac Orlan, un Kessel ont donné
610 t donné de beaux exemples du parti que peut tirer le nouveau romantisme de ce chaos. Salmon a même tenté d’en écrire l’épo
611 isme de ce chaos. Salmon a même tenté d’en écrire l’ épopée dans Prikaz, cette traduction française de l’énorme cri de déli
612 épopée dans Prikaz, cette traduction française de l’ énorme cri de délivrance du peuple fou. Belles étincelles échappées d’
613 u. Belles étincelles échappées d’un brasier. Pour les causes de l’incendie, voir Dostoïevski. M. Walpole, lui, commence son
614 celles échappées d’un brasier. Pour les causes de l’ incendie, voir Dostoïevski. M. Walpole, lui, commence son roman quelqu
615 mmence son roman quelques mois avant que n’éclate le sinistre, et s’arrête au moment où l’on est sûr que ça brûle bien. Qu
616 ue n’éclate le sinistre, et s’arrête au moment où l’ on est sûr que ça brûle bien. Quel sujet plus riche pouvait-on rêver p
617 lus riche pouvait-on rêver pour un psychologue de la puissance de Walpole, que l’âme russe — cette âme russe qui pour le P
618 ur un psychologue de la puissance de Walpole, que l’ âme russe — cette âme russe qui pour le Parisien restera toujours « in
619 lpole, que l’âme russe — cette âme russe qui pour le Parisien restera toujours « indéfinissable ». M. Walpole, dont nous c
620 mençons aujourd’hui un roman bien différent, a vu la Révolution sans romantisme, dans le détail de la vie d’une ville. Il
621 fférent, a vu la Révolution sans romantisme, dans le détail de la vie d’une ville. Il sait qu’un grand mouvement est la ré
622 la Révolution sans romantisme, dans le détail de la vie d’une ville. Il sait qu’un grand mouvement est la résultante de m
623 ie d’une ville. Il sait qu’un grand mouvement est la résultante de millions de petits. Voici naître la révolution dans un
624 la résultante de millions de petits. Voici naître la révolution dans un cœur, puis dans une famille. Et une fois le grand
625 dans un cœur, puis dans une famille. Et une fois le grand bouleversement accompli dans la « Cité secrète » de la vie priv
626 Et une fois le grand bouleversement accompli dans la « Cité secrète » de la vie privée, quelques regards sur la foule suff
627 uleversement accompli dans la « Cité secrète » de la vie privée, quelques regards sur la foule suffisent pour en préciser
628 secrète » de la vie privée, quelques regards sur la foule suffisent pour en préciser les conséquences. C’est ainsi qu’int
629 s regards sur la foule suffisent pour en préciser les conséquences. C’est ainsi qu’interviennent les trois Anglais mêlés au
630 er les conséquences. C’est ainsi qu’interviennent les trois Anglais mêlés au drame. M. Walpole leur a dévolu le soin d’entr
631 Anglais mêlés au drame. M. Walpole leur a dévolu le soin d’entrer tantôt dans un foyer, tantôt dans une église, pour cons
632 foyer, tantôt dans une église, pour constater que la foule ne réagit pas autrement que les individus. L’auteur, qui est l’
633 onstater que la foule ne réagit pas autrement que les individus. L’auteur, qui est l’un de ces Anglais, tombe malade avec à
634 foule ne réagit pas autrement que les individus. L’ auteur, qui est l’un de ces Anglais, tombe malade avec à-propos et per
635 vec à-propos et perd connaissance chaque fois que le récit doit sauter quelques semaines. Qu’on veuille bien ne voir autre
636 « procédés », d’ailleurs assez peu choquants, que le revers de grandes qualités de réalisation d’idées en faits ou en situ
637 ts ou en situations dramatiques. Je donnerai tous les essais de M. de Voguë sur l’âme slave pour deux ou trois scènes de La
638 s. Je donnerai tous les essais de M. de Voguë sur l’ âme slave pour deux ou trois scènes de La Cité secrète. Pour celle-ci
639 oguë sur l’âme slave pour deux ou trois scènes de La Cité secrète. Pour celle-ci par exemple (caché dans un réduit, Markov
640 ci par exemple (caché dans un réduit, Markovitch, l’ idéaliste, surprend sa femme, la vertueuse Véra avec un des Anglais) :
641 duit, Markovitch, l’idéaliste, surprend sa femme, la vertueuse Véra avec un des Anglais) : Ils s’embrassaient comme des g
642 ébucher et de faire du bruit. Il songea : — C’est la fin pour moi. Puis : — Quelle imprudence ! Avec la lumière et peut-êt
643 a fin pour moi. Puis : — Quelle imprudence ! Avec la lumière et peut-être du monde dans l’appartement. Il avait si froid q
644 ence ! Avec la lumière et peut-être du monde dans l’ appartement. Il avait si froid que ses dents claquaient. Il quitta sa
645 aquaient. Il quitta sa fenêtre, se traîna jusqu’à l’ angle le plus éloigné du réduit, et se blottit là, sur le sol, les yeu
646 . Il quitta sa fenêtre, se traîna jusqu’à l’angle le plus éloigné du réduit, et se blottit là, sur le sol, les yeux grands
647 le plus éloigné du réduit, et se blottit là, sur le sol, les yeux grands ouverts dans le vide, sans rien voir. Ainsi le
648 éloigné du réduit, et se blottit là, sur le sol, les yeux grands ouverts dans le vide, sans rien voir. Ainsi le moujik de
649 ttit là, sur le sol, les yeux grands ouverts dans le vide, sans rien voir. Ainsi le moujik devant le bolchévique violant
650 ands ouverts dans le vide, sans rien voir. Ainsi le moujik devant le bolchévique violant sa patrie. Une effroyable accept
651 le vide, sans rien voir. Ainsi le moujik devant le bolchévique violant sa patrie. Une effroyable acceptation, mais elle
652 ment en révolte. Aucun cadre logique ne détermine l’ avenir le plus proche. Il n’y a pas même des forces endormies dans l’â
653 évolte. Aucun cadre logique ne détermine l’avenir le plus proche. Il n’y a pas même des forces endormies dans l’âme russe 
654 oche. Il n’y a pas même des forces endormies dans l’ âme russe : mais des possibilités, à chaque instant, d’explosion. Le g
655 des possibilités, à chaque instant, d’explosion. Le géant russe est un enfant : va-t-il rire, va-t-il pleurer ? m’embrass
656 me tuer ? Il sent autour de lui quelque chose qui le gêne. C’est l’empire. Il le renverse, pour voir. Pendant qu’il est en
657 nt autour de lui quelque chose qui le gêne. C’est l’ empire. Il le renverse, pour voir. Pendant qu’il est encore ébahi du f
658 lui quelque chose qui le gêne. C’est l’empire. Il le renverse, pour voir. Pendant qu’il est encore ébahi du fracas, le jui
659 r voir. Pendant qu’il est encore ébahi du fracas, le juif survient avec une méthode simplifiée pour l’exploitation des rui
660 le juif survient avec une méthode simplifiée pour l’ exploitation des ruines. On sait le reste. Tout cela, Walpole ne le di
661 implifiée pour l’exploitation des ruines. On sait le reste. Tout cela, Walpole ne le dit pas. Mais ses personnages le sugg
662 s ruines. On sait le reste. Tout cela, Walpole ne le dit pas. Mais ses personnages le suggèrent de toute la force du troub
663 cela, Walpole ne le dit pas. Mais ses personnages le suggèrent de toute la force du trouble qu’ils créent en nous : Markov
664 t pas. Mais ses personnages le suggèrent de toute la force du trouble qu’ils créent en nous : Markovitch par exemple, ou S
665 ougemont Denis de, « [Compte rendu] Hugh Walpole, La Cité secrète  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève,
666 secrète  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, décembre 1925, p. 1567-1568.
667  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , décembre 1925, p. 1567-1568.
16 1926, Articles divers (1924–1930). Conférence de René Guisan « Sur le Saint » (2 février 1926)
668 Conférence de René Guisan « Sur le Saint » (2 février 1926)c M. René Guisan, professeur de théologie
669 rofesseur de théologie à Lausanne et directeur de la Revue de théologie et de philosophie, inaugura lundi soir à l’aula, d
670 héologie et de philosophie, inaugura lundi soir à l’ aula, devant un très nombreux public, la série des conférences que nou
671 di soir à l’aula, devant un très nombreux public, la série des conférences que nous promet le groupe neuchâtelois des « Am
672 public, la série des conférences que nous promet le groupe neuchâtelois des « Amis de la pensée protestante ». M. Guisan
673 nous promet le groupe neuchâtelois des « Amis de la pensée protestante ». M. Guisan avait choisi un sujet qui permet de f
674 et qui permet de façon particulièrement frappante la comparaison des points de vue catholique et protestant : la notion de
675 ison des points de vue catholique et protestant : la notion de « Saint » et son évolution au cours des siècles. Primitivem
676 on évolution au cours des siècles. Primitivement, le Saint est un homme que Dieu a mis à part par grâce pour qu’il serve.
677 r grâce pour qu’il serve. Mais très vite on étend l’ appellation de saint à ceux qui par leur élévation morale ou leurs sou
678 ation morale ou leurs souffrances semblent s’être le plus rapprochés du Christ ; et dans l’Église persécutée, le martyre d
679 ent s’être le plus rapprochés du Christ ; et dans l’ Église persécutée, le martyre devient le signe par excellence de la sa
680 pprochés du Christ ; et dans l’Église persécutée, le martyre devient le signe par excellence de la sainteté. Le peuple, en
681 ; et dans l’Église persécutée, le martyre devient le signe par excellence de la sainteté. Le peuple, encore païen, voit da
682 ée, le martyre devient le signe par excellence de la sainteté. Le peuple, encore païen, voit dans la vénération des pèleri
683 e devient le signe par excellence de la sainteté. Le peuple, encore païen, voit dans la vénération des pèlerins pour les t
684 e la sainteté. Le peuple, encore païen, voit dans la vénération des pèlerins pour les tombes de leurs saints une forme d’a
685 païen, voit dans la vénération des pèlerins pour les tombes de leurs saints une forme d’adoration de dieux protecteurs. Ce
686 tecteurs. Cette croyance se répand, favorisée par la souplesse dont fait preuve l’Église d’alors quand il s’agit d’adapter
687 pand, favorisée par la souplesse dont fait preuve l’ Église d’alors quand il s’agit d’adapter des traditions antiques au do
688 ions antiques au dogme en formation. Au Moyen Âge l’ évolution se continue dans le même sens. On spécialise les « compétenc
689 mation. Au Moyen Âge l’évolution se continue dans le même sens. On spécialise les « compétences » des saints, ou de leurs
690 tion se continue dans le même sens. On spécialise les « compétences » des saints, ou de leurs reliques qui se multiplient p
691 qui se multiplient prodigieusement. Alors éclate la protestation de la Réforme. Honorons les saints pour l’exemple de leu
692 prodigieusement. Alors éclate la protestation de la Réforme. Honorons les saints pour l’exemple de leur vie : mais Christ
693 rs éclate la protestation de la Réforme. Honorons les saints pour l’exemple de leur vie : mais Christ est le seul médiateur
694 testation de la Réforme. Honorons les saints pour l’ exemple de leur vie : mais Christ est le seul médiateur à qui doit s’a
695 ints pour l’exemple de leur vie : mais Christ est le seul médiateur à qui doit s’adresser le culte, en son cœur, du croyan
696 hrist est le seul médiateur à qui doit s’adresser le culte, en son cœur, du croyant. Le centre de gravité religieux est re
697 oit s’adresser le culte, en son cœur, du croyant. Le centre de gravité religieux est replacé en Christ. — Comment l’Église
698 ravité religieux est replacé en Christ. — Comment l’ Église catholique réagit-elle ? En codifiant l’état de choses antérieu
699 nt l’Église catholique réagit-elle ? En codifiant l’ état de choses antérieur. Donc l’Église continue à faire des saints, t
700 e ? En codifiant l’état de choses antérieur. Donc l’ Église continue à faire des saints, tandis que ce terme n’a plus qu’un
701 tif pour nous protestants. Est-ce là nous juger ? Les catholiques nous reprochent d’avoir méconnu l’élément de grandeur mor
702 ? Les catholiques nous reprochent d’avoir méconnu l’ élément de grandeur morale que les saints maintiennent dans l’Église.
703 d’avoir méconnu l’élément de grandeur morale que les saints maintiennent dans l’Église. M. Guisan va très loin dans ses co
704 grandeur morale que les saints maintiennent dans l’ Église. M. Guisan va très loin dans ses concessions à de telles critiq
705 avec d’autant plus de force que « en situant tout le devoir chrétien dans l’accomplissement scrupuleux, joyeux et fidèle d
706 rce que « en situant tout le devoir chrétien dans l’ accomplissement scrupuleux, joyeux et fidèle de la vocation, le protes
707 l’accomplissement scrupuleux, joyeux et fidèle de la vocation, le protestantisme affirme qu’il existe divers ordres de sai
708 ment scrupuleux, joyeux et fidèle de la vocation, le protestantisme affirme qu’il existe divers ordres de sainteté ». Cett
709 de saints protestants, il existe des saints dans le protestantisme. Mais il n’est pas de fin aux œuvres de Dieu. La saint
710 sme. Mais il n’est pas de fin aux œuvres de Dieu. La sainteté parfaite ne commence qu’aux limites les plus hautes de la ve
711 . La sainteté parfaite ne commence qu’aux limites les plus hautes de la vertu. Dans ce sens, il ne peut exister de saint vé
712 ite ne commence qu’aux limites les plus hautes de la vertu. Dans ce sens, il ne peut exister de saint véritable. Il n’y a
713 pas de saints, mais il faut être parfait. Tel est l’ enseignement de Jésus, telle est la pensée qu’a voulu restaurer le pro
714 rfait. Tel est l’enseignement de Jésus, telle est la pensée qu’a voulu restaurer le protestantisme. La place nous manque p
715 e Jésus, telle est la pensée qu’a voulu restaurer le protestantisme. La place nous manque pour louer comme il conviendrait
716 la pensée qu’a voulu restaurer le protestantisme. La place nous manque pour louer comme il conviendrait la clarté d’un exp
717 lace nous manque pour louer comme il conviendrait la clarté d’un exposé solidement documenté, et le scrupule d’historien e
718 it la clarté d’un exposé solidement documenté, et le scrupule d’historien et de chrétien qui permet à M. Guisan de montrer
719 et de chrétien qui permet à M. Guisan de montrer le point de vue adverse avec autant de compréhension et de sympathie que
720 rillant appareil dialectique ne sait produire que l’ illusion. C’est la revanche du fameux scrupule protestant, qui ne peut
721 ialectique ne sait produire que l’illusion. C’est la revanche du fameux scrupule protestant, qui ne peut être un danger lo
722 ut être un danger lorsqu’il n’est, comme ici, que la loyauté d’un esprit animé par une foi agissante. c. Rougemont Deni
17 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Adieu, beau désordre… (mars 1926)
723 Adieu, beau désordre… (mars 1926)o L’ époque s’en va très vite vers on ne sait quoi. On a mis le bonheur dev
724 s’en va très vite vers on ne sait quoi. On a mis le bonheur devant soi, dans un progrès mal défini, et l’on court après s
725 onheur devant soi, dans un progrès mal défini, et l’ on court après sans fin. Même ceux qui ont perdu la croyance en un bon
726 ’on court après sans fin. Même ceux qui ont perdu la croyance en un bonheur possible ou désirable subissent cette rage dés
727 essives lassitudes ou faim de violences — on sent l’ approche de quelque chose, catastrophe ou révélation, brusque échappée
728 hoisir encore entre un ressaisissement profond et la ruine. Mais certes, il est temps qu’une lueur de conscience inquiète
729 iété affolée et ridiculement opportuniste où mène la pente de notre civilisation. Meneurs et chefs : des économistes, des
730 s, des financiers, des industriels. Il y a encore les hommes politiques, mais on a si souvent l’impression qu’ils battent l
731 ncore les hommes politiques, mais on a si souvent l’ impression qu’ils battent la mesure devant un orchestre qui, sans eux,
732 mais on a si souvent l’impression qu’ils battent la mesure devant un orchestre qui, sans eux, jouerait aussi bien, aussi
733 erait aussi bien, aussi mal. Quant aux meneurs de l’ opinion publique, il est trop tard pour les éduquer, il faudrait balay
734 eurs de l’opinion publique, il est trop tard pour les éduquer, il faudrait balayer. Je parle en général, sachant bien qu’un
735 Romier, un Bainville, quelques autres, sont parmi les plus conscients de ce temps ; mais si l’on songe aux bataillons de pâ
736 t parmi les plus conscients de ce temps ; mais si l’ on songe aux bataillons de pâles opportunistes sans culture qui se cha
737 portunistes sans culture qui se chargent de gaver les masses du pain quotidien de la bêtise de tous les partis, on comprend
738 chargent de gaver les masses du pain quotidien de la bêtise de tous les partis, on comprendra ce que je veux dire. Il faud
739 les masses du pain quotidien de la bêtise de tous les partis, on comprendra ce que je veux dire. Il faudrait balayer, — et
740 veux dire. Il faudrait balayer, — et mettre qui à la place ? Nos penseurs, nos écrivains ont perdu le sens social. Cela de
741 la place ? Nos penseurs, nos écrivains ont perdu le sens social. Cela devient frappant dans les générations nouvelles. To
742 perdu le sens social. Cela devient frappant dans les générations nouvelles. Toute la jeune littérature décrit un type d’ho
743 nt frappant dans les générations nouvelles. Toute la jeune littérature décrit un type d’homme profondément antisocial, glo
744 rale résolument anarchiste. Ceux qui s’essaient à l’ action, c’est encore pour cultiver leur moi. Ils y cherchent un fortif
745 Il leur manque une certitude foncière, une foi en la valeur de l’action. C’est pourquoi ils ne peuvent prétendre à l’actio
746 e une certitude foncière, une foi en la valeur de l’ action. C’est pourquoi ils ne peuvent prétendre à l’action sociale que
747 action. C’est pourquoi ils ne peuvent prétendre à l’ action sociale que l’époque réclame 1. C’est aussi pourquoi l’on ne sa
748 i ils ne peuvent prétendre à l’action sociale que l’ époque réclame 1. C’est aussi pourquoi l’on ne saurait accorder trop d
749 iale que l’époque réclame 1. C’est aussi pourquoi l’ on ne saurait accorder trop d’importance à leurs tentatives morales, s
750 tives morales, si singulières soient-elles — dont le grand public reste le témoin souvent sceptique ou railleur. Au cœur d
751 ulières soient-elles — dont le grand public reste le témoin souvent sceptique ou railleur. Au cœur de la crise de notre ci
752 témoin souvent sceptique ou railleur. Au cœur de la crise de notre civilisation, il y a un problème de morale à résoudre,
753 nce individuelle à recréer. Nous y employer, pour l’ heure, c’est la seule façon efficace de servir. ⁂ On se complaît à rép
754 e à recréer. Nous y employer, pour l’heure, c’est la seule façon efficace de servir. ⁂ On se complaît à répéter que nous v
755 . ⁂ On se complaît à répéter que nous vivons dans le chaos des idées et des doctrines, et qu’il n’existe pas d’esprit du s
756 le, hors un certain « confusionnisme ». Mais sous les épaves de tous les vieux bateaux, il y a une seule mer. Nos agitation
757 « confusionnisme ». Mais sous les épaves de tous les vieux bateaux, il y a une seule mer. Nos agitations contradictoires s
758 comme des vagues soulevées par une même tempête. L’ unité de notre temps est en profondeur : c’est une unité d’inquiétude.
759 it des édifices très différents de style, et dont les façades s’opposent avec hostilité. Dans l’intérieur des deux maisons
760 dont les façades s’opposent avec hostilité. Dans l’ intérieur des deux maisons pourtant se débattent les mêmes brouilles d
761 ’intérieur des deux maisons pourtant se débattent les mêmes brouilles de famille entre Art et Morale, Pensée et Action… Ces
762 , Pensée et Action… Ces deux moralistes adonnés à la culture et à la libération du moi paraissent bien les ancêtres des no
763 on… Ces deux moralistes adonnés à la culture et à la libération du moi paraissent bien les ancêtres des nouvelles générati
764 culture et à la libération du moi paraissent bien les ancêtres des nouvelles générations de héros de roman, lesquels sont t
765 rtu. Ce qui n’a rien d’étonnant : ils ne sont que les projections du moi de leurs auteurs. Or l’égoïsme est vertu cardinale
766 t que les projections du moi de leurs auteurs. Or l’ égoïsme est vertu cardinale pour le créateur. Mais quel est ce besoin
767 rs auteurs. Or l’égoïsme est vertu cardinale pour le créateur. Mais quel est ce besoin si général de s’incarner, dans le h
768 quel est ce besoin si général de s’incarner, dans le héros de son roman, de se voir vivre, dans son œuvre ? C’est ici la c
769 man, de se voir vivre, dans son œuvre ? C’est ici la conception même de la littérature, telle qu’elle apparaît chez les ém
770 dans son œuvre ? C’est ici la conception même de la littérature, telle qu’elle apparaît chez les émules de Barrès comme c
771 me de la littérature, telle qu’elle apparaît chez les émules de Barrès comme chez ceux de Gide, qu’il faut préciser. L’éthi
772 rès comme chez ceux de Gide, qu’il faut préciser. L’ éthique et l’esthétique convergent dans la littérature d’aujourd’hui,
773 z ceux de Gide, qu’il faut préciser. L’éthique et l’ esthétique convergent dans la littérature d’aujourd’hui, et plusieurs
774 éciser. L’éthique et l’esthétique convergent dans la littérature d’aujourd’hui, et plusieurs déjà reconnaissent ne pas pou
775 i, et plusieurs déjà reconnaissent ne pas pouvoir les séparer. On n’écrit plus pour s’amuser : ni pour amuser un public. Un
776 lic. Un livre est une action, une expérience. Et, le plus souvent, sur soi-même. On écrit pour cultiver son moi, pour l’ép
777 ur soi-même. On écrit pour cultiver son moi, pour l’ éprouver et le prémunir, pour y découvrir des possibilités neuves, — p
778 n écrit pour cultiver son moi, pour l’éprouver et le prémunir, pour y découvrir des possibilités neuves, — pour le libérer
779 pour y découvrir des possibilités neuves, — pour le libérer. Il n’est pas question de rechercher ici les origines histori
780 libérer. Il n’est pas question de rechercher ici les origines historiques d’une conception qui, de plus en plus, se révèle
781 ’une conception qui, de plus en plus, se révèle à la base de tous les problèmes modernes en littérature. Jacques Rivière s
782 qui, de plus en plus, se révèle à la base de tous les problèmes modernes en littérature. Jacques Rivière s’y appliqua dans
783 erniers articles2. Il rendait responsable de tout le « mal », le romantisme — et c’est plus que probable. Mais il en tirai
784 cles2. Il rendait responsable de tout le « mal », le romantisme — et c’est plus que probable. Mais il en tirait une raison
785 robable. Mais il en tirait une raison nouvelle de le condamner, et nous ne pouvons le suivre jusque-là : il est vain de di
786 ison nouvelle de le condamner, et nous ne pouvons le suivre jusque-là : il est vain de dire qu’une époque s’est trompée, p
787 ne époque s’est trompée, puisqu’elle seule permet la suivante qui peut-être retrouvera une nouvelle face de la vérité. Bor
788 nte qui peut-être retrouvera une nouvelle face de la vérité. Bornons-nous à noter le phénomène, puis à en suivre quelques
789 nouvelle face de la vérité. Bornons-nous à noter le phénomène, puis à en suivre quelques conséquences. Connaissance inté
790 ance intégrale et culture de soi, telle peut être l’ épigraphe de toute la littérature moderne. Il n’a pas fallu longtemps
791 ture de soi, telle peut être l’épigraphe de toute la littérature moderne. Il n’a pas fallu longtemps aux Français pour pou
792 fallu longtemps aux Français pour pousser à bout l’ expérience3. Ingénieux équilibres entre la raison et les sens, entre l
793 à bout l’expérience3. Ingénieux équilibres entre la raison et les sens, entre le moi et le monde : l’ennui est venu avant
794 érience3. Ingénieux équilibres entre la raison et les sens, entre le moi et le monde : l’ennui est venu avant l’épuisement
795 eux équilibres entre la raison et les sens, entre le moi et le monde : l’ennui est venu avant l’épuisement des combinaison
796 bres entre la raison et les sens, entre le moi et le monde : l’ennui est venu avant l’épuisement des combinaisons possible
797 la raison et les sens, entre le moi et le monde : l’ ennui est venu avant l’épuisement des combinaisons possibles. Exaltati
798 entre le moi et le monde : l’ennui est venu avant l’ épuisement des combinaisons possibles. Exaltation méthodique de nos fa
799 cultiver certaines douleurs, plaisirs rares ; et les dissonances les plus aiguës prennent la place d’honneur dans des esth
800 nes douleurs, plaisirs rares ; et les dissonances les plus aiguës prennent la place d’honneur dans des esthétiques construi
801 res ; et les dissonances les plus aiguës prennent la place d’honneur dans des esthétiques construites en hâte à l’usage de
802 onneur dans des esthétiques construites en hâte à l’ usage de sensibilités surmenées. Dégoût, parce que tout a été essayé.
803 se, contre soi, contre une difficulté.) Dégoût de la vie, dégoût du bonheur, dégoût de soi, — on l’étend vite à la société
804 de la vie, dégoût du bonheur, dégoût de soi, — on l’ étend vite à la société entière. Dégoût d’une civilisation qui aboutit
805 ût du bonheur, dégoût de soi, — on l’étend vite à la société entière. Dégoût d’une civilisation qui aboutit logiquement à
806 ogiquement à cet épuisant et forcené gaspillage : la guerre. Certains s’en tiennent à leur dégoût et l’exploitent. Ainsi s
807 a guerre. Certains s’en tiennent à leur dégoût et l’ exploitent. Ainsi se légitime le surréalisme, qui vomit le monde entie
808 à leur dégoût et l’exploitent. Ainsi se légitime le surréalisme, qui vomit le monde entier et la raison avec. « Révolutio
809 tent. Ainsi se légitime le surréalisme, qui vomit le monde entier et la raison avec. « Révolution d’abord. Révolution touj
810 time le surréalisme, qui vomit le monde entier et la raison avec. « Révolution d’abord. Révolution toujours ». « Pour nous
811 tion d’abord. Révolution toujours ». « Pour nous, le salut n’est nulle part… » « Je comprends la révolte des autres et que
812 nous, le salut n’est nulle part… » « Je comprends la révolte des autres et quelles prières cela fait à Dieu », disait Drie
813 n dégoût, un Montherlant s’abandonne au salut par la violence. Une sensualité moins énervée lui permet de brutaliser quelq
814 oins énervée lui permet de brutaliser quelque peu les « grands problèmes », et le voilà reparti dans un égoïsme triomphant,
815 utaliser quelque peu les « grands problèmes », et le voilà reparti dans un égoïsme triomphant, pur du désir d’action qui e
816 ’action qui empêtrait Barrès dans des dilemmes où l’ art trouvait mal sa nourriture. Drieu la Rochelle tente la même fuite.
817 ouvait mal sa nourriture. Drieu la Rochelle tente la même fuite. Mais trop lucide, hésite, trébuche, oscille entre la viol
818 Mais trop lucide, hésite, trébuche, oscille entre la violence et le désespoir (c’est l’amour), et, déchiré de contradictio
819 e, hésite, trébuche, oscille entre la violence et le désespoir (c’est l’amour), et, déchiré de contradictions, tire du dés
820 oscille entre la violence et le désespoir (c’est l’ amour), et, déchiré de contradictions, tire du désordre de ses certitu
821 tire du désordre de ses certitudes fragmentaires la matière de quelques pamphlets par quoi il se raccroche au monde. Mais
822 au monde. Mais il a touché certains bas-fonds de l’ âme où s’éveille un désenchantement qui l’amène au besoin d’une mystiq
823 onds de l’âme où s’éveille un désenchantement qui l’ amène au besoin d’une mystique. Et pour finir, l’un des derniers venus
824 nus, Marcel Arland, — plus jeune, il n’a pas fait la guerre — c’est le même désenchantement précoce, sans la brusquerie de
825 , — plus jeune, il n’a pas fait la guerre — c’est le même désenchantement précoce, sans la brusquerie de ses aînés. Encore
826 rre — c’est le même désenchantement précoce, sans la brusquerie de ses aînés. Encore un qui s’est complu dans son dégoût ;
827 voir comme un appel du Dieu perdu. Il avoue enfin la cause secrète des inquiétudes modernes : la perte d’une foi. Il a bes
828 enfin la cause secrète des inquiétudes modernes : la perte d’une foi. Il a besoin de Dieu, mais il attend en vain sa Révél
829 on : « C’est peut-être que je suis médiocre entre les hommes ». C’est plutôt qu’il est trop attaché encore à se regarder ch
830 on dessein. ⁂ Décidément nous sommes malades dans les profondeurs. Et le mal est si cruellement isolé, commenté par ceux qu
831 ment nous sommes malades dans les profondeurs. Et le mal est si cruellement isolé, commenté par ceux qui le portent en eux
832 l est si cruellement isolé, commenté par ceux qui le portent en eux qu’il en paraît plus incurable. Ces jeunes gens n’en f
833 indre leur déséquilibre. Il serait temps de faire la critique des méthodes et des façons de vivre autant que de penser qui
834 s et des façons de vivre autant que de penser qui les ont amenés aux positions qu’on vient d’esquisser. Mais on trouve tout
835 qu’on vient d’esquisser. Mais on trouve tout dans les livres des jeunes, dites-vous, le pire et le meilleur, toutes les vie
836 ouve tout dans les livres des jeunes, dites-vous, le pire et le meilleur, toutes les vieilleries morales et immorales, tou
837 ans les livres des jeunes, dites-vous, le pire et le meilleur, toutes les vieilleries morales et immorales, tous les parad
838 eunes, dites-vous, le pire et le meilleur, toutes les vieilleries morales et immorales, tous les paradoxes, le chaos, etc.
839 toutes les vieilleries morales et immorales, tous les paradoxes, le chaos, etc. — Certes, aucune époque ne fut à la fois pl
840 lleries morales et immorales, tous les paradoxes, le chaos, etc. — Certes, aucune époque ne fut à la fois plus morale et p
841 u’aucune ne s’est autant attachée à chercher dans le seul moi les fondements d’une éthique. Presque tous sont hantés par l
842 s’est autant attachée à chercher dans le seul moi les fondements d’une éthique. Presque tous sont hantés par la peur d’une
843 ments d’une éthique. Presque tous sont hantés par la peur d’une morale qui « déforme », qui mutile une tendance naturelle,
844 e naturelle, qui élague, qui opère un choix parmi les éléments mêlés de la personnalité. Toute tendance qu’ils découvrent e
845 e, qui opère un choix parmi les éléments mêlés de la personnalité. Toute tendance qu’ils découvrent en eux est non seuleme
846 oi ordre et désordre, raison et folie, etc. Si je les cultive simultanément il est clair que les tendances négatives l’empo
847 Si je les cultive simultanément il est clair que les tendances négatives l’emportent, il est plus facile et plus enivrant
848 tanément il est clair que les tendances négatives l’ emportent, il est plus facile et plus enivrant de se laisser glisser q
849 vrant de se laisser glisser que de construire. Et l’ on y prend vite goût. Cela tourne alors en passion de détruire, en ha
850 t de quoi se glorifient ses tenants, ils y voient la suprême liberté. Le désir se précisait en moi de commettre enfin l’ac
851 ent ses tenants, ils y voient la suprême liberté. Le désir se précisait en moi de commettre enfin l’acte vraiment indéfend
852 . Le désir se précisait en moi de commettre enfin l’ acte vraiment indéfendable de tout point de vue… J’avais goûté à l’alc
853 ndéfendable de tout point de vue… J’avais goûté à l’ alcool singulièrement perfide de perdre ce que nous chérissons… Nous a
854 ce que nous chérissons… Nous apprîmes à mépriser les longues vies heureuses que nous avions jusqu’alors enviées, et une nu
855 ions jusqu’alors enviées, et une nuit, nous fîmes le procès de toutes les jouissances humaines. L’espèce de sincérité terr
856 iées, et une nuit, nous fîmes le procès de toutes les jouissances humaines. L’espèce de sincérité terroriste dans laquelle
857 mes le procès de toutes les jouissances humaines. L’ espèce de sincérité terroriste dans laquelle nous nous obstinions nous
858 nous niions toute vérité, nous étions dominés par le sens d’une réalité morale absolue que certains d’entre nous eussent a
859 illeurs admirable4, de Louis Aragon, pour marquer l’ aboutissement d’une évolution qui a son origine dans l’œuvre de Gide.
860 utissement d’une évolution qui a son origine dans l’ œuvre de Gide. Entre les Nourritures terrestres, les Caves du Vatican
861 ion qui a son origine dans l’œuvre de Gide. Entre les Nourritures terrestres, les Caves du Vatican et Dada, il y a place po
862 ’œuvre de Gide. Entre les Nourritures terrestres, les Caves du Vatican et Dada, il y a place pour tous les chaînons d’inqui
863 Caves du Vatican et Dada, il y a place pour tous les chaînons d’inquiétude, de malaises, de révoltes plus ou moins complèt
864 plus ou moins complètes au gré des tempéraments. Le geste de Lafcadio généralisé : c’est le surréalisme. De l’acte gratui
865 éraments. Le geste de Lafcadio généralisé : c’est le surréalisme. De l’acte gratuit commis par un héros de roman, à la vie
866 de Lafcadio généralisé : c’est le surréalisme. De l’ acte gratuit commis par un héros de roman, à la vie gratuite que préte
867 De l’acte gratuit commis par un héros de roman, à la vie gratuite que prétendent mener les surréalistes, il n’a fallu que
868 de roman, à la vie gratuite que prétendent mener les surréalistes, il n’a fallu que le temps pour une folie de s’emballer.
869 étendent mener les surréalistes, il n’a fallu que le temps pour une folie de s’emballer. La plupart des romans de jeunes q
870 qui se situent entre Gide et Aragon nous montrent le même personnage : un être sans foi, à qui une sorte de « sincérité »
871 nné parce que ce serait fausser quelque chose ; à la merci des circonstances extérieures qu’il méprise toutes également ;
872 e juger5. Il y a véritablement une littérature de l’ acte gratuit, qui restera caractéristique de notre époque. Mais Gide
873 méthode de culture de soi, « d’intensification de la vie », et qui consiste à pousser à l’extrême certaines « vertus », le
874 fication de la vie », et qui consiste à pousser à l’ extrême certaines « vertus », les pousser jusqu’à l’absurde. Surenchèr
875 siste à pousser à l’extrême certaines « vertus », les pousser jusqu’à l’absurde. Surenchère morale dont le début de la Tent
876 extrême certaines « vertus », les pousser jusqu’à l’ absurde. Surenchère morale dont le début de la Tentative amoureuse off
877 pousser jusqu’à l’absurde. Surenchère morale dont le début de la Tentative amoureuse offrait déjà une singulière préfigura
878 u’à l’absurde. Surenchère morale dont le début de la Tentative amoureuse offrait déjà une singulière préfiguration : Certe
879 singulière préfiguration : Certes ce ne seront ni les lois importunes des hommes, ni les craintes, ni la pudeur, ni le remo
880 e ne seront ni les lois importunes des hommes, ni les craintes, ni la pudeur, ni le remords, ni le respect de moi ni de mes
881 s lois importunes des hommes, ni les craintes, ni la pudeur, ni le remords, ni le respect de moi ni de mes rêves, ni toi,
882 nes des hommes, ni les craintes, ni la pudeur, ni le remords, ni le respect de moi ni de mes rêves, ni toi, triste mort, n
883 ni les craintes, ni la pudeur, ni le remords, ni le respect de moi ni de mes rêves, ni toi, triste mort, ni l’effroi d’ap
884 t de moi ni de mes rêves, ni toi, triste mort, ni l’ effroi d’après-tombe qui m’empêcheront de joindre ce que je désire ; n
885 de joindre ce que je désire ; ni rien — rien que l’ orgueil, sachant une chose si forte, de me sentir plus fort encore et
886 ose si forte, de me sentir plus fort encore et de la vaincre. — Mais la joie d’une si haute victoire — n’est pas si douce
887 sentir plus fort encore et de la vaincre. — Mais la joie d’une si haute victoire — n’est pas si douce encore, n’est pas s
888 à quel genre de sophismes conduit ce mouvement de l’ esprit qui n’utilise une borne que pour sauter plus loin. Ainsi, c’est
889 loin. Ainsi, c’est par humilité qu’on renoncera à la vertu, sous prétexte qu’elle pousse à l’orgueil ; c’est par sincérité
890 oncera à la vertu, sous prétexte qu’elle pousse à l’ orgueil ; c’est par sincérité qu’on mentira, puisque parfois nous somm
891 llement à considérer un certain immoralisme comme la seule vertu digne d’une élite. Tel est l’état d’esprit de la plupart
892 e comme la seule vertu digne d’une élite. Tel est l’ état d’esprit de la plupart de nos jeunes moralistes. Le mot de parado
893 d’esprit de la plupart de nos jeunes moralistes. Le mot de paradoxe serait bien pauvre pour expliquer ce besoin de porter
894 chose, au-delà de toutes limites. « Il n’y a que les excès qui méritent notre enthousiasme ». Mais « cette fureur qui le s
895 ent notre enthousiasme ». Mais « cette fureur qui le soulevait contre lui-même, qui lui faisait mépriser son propre intérê
896 mépriser son propre intérêt6… » c’est proprement la perversion d’une vertu qui se brûle elle-même. Je ne vais point nier
897 rtu qui se brûle elle-même. Je ne vais point nier la fécondité psychologique d’une attitude par ailleurs si proche de cert
898 es dernières conséquences suppose qu’on ait perdu le sens des ensembles rationnels. Nous ne pensons plus par ensembles7 :
899 pas d’une fatigue immense. Nous voyons se fausser le rythme des jours et des nuits à mesure que se développe une civilisat
900 que se développe une civilisation mécanicienne. ( Les machines n’ont pas besoin de sommeil.) La fatigue devient un des élém
901 enne. (Les machines n’ont pas besoin de sommeil.) La fatigue devient un des éléments les plus importants de notre psycholo
902 n de sommeil.) La fatigue devient un des éléments les plus importants de notre psychologie. Images des surréalistes — ils l
903 notre psychologie. Images des surréalistes — ils l’ indiquent eux-mêmes —, calembours, expression métaphorique et symboliq
904 embours, expression métaphorique et symbolique de la pensée : la littérature d’avant-garde est fille de la fatigue. La Mus
905 ression métaphorique et symbolique de la pensée : la littérature d’avant-garde est fille de la fatigue. La Muse a trop vei
906 ensée : la littérature d’avant-garde est fille de la fatigue. La Muse a trop veillé. L’amour moderne, nerveux, saugrenu ju
907 ittérature d’avant-garde est fille de la fatigue. La Muse a trop veillé. L’amour moderne, nerveux, saugrenu jusqu’au sadis
908 e est fille de la fatigue. La Muse a trop veillé. L’ amour moderne, nerveux, saugrenu jusqu’au sadisme, trop lucide, est un
909 u sadisme, trop lucide, est un amour de fatigués ( Les Nuits, l’Europe galante, de Morand). La lucidité aiguë de nos psychol
910 trop lucide, est un amour de fatigués (Les Nuits, l’ Europe galante, de Morand). La lucidité aiguë de nos psychologues est
911 atigués (Les Nuits, l’Europe galante, de Morand). La lucidité aiguë de nos psychologues est cet état presque inhumain de c
912 ie, à ses sensations, à ses automatismes. En art, la fatigue est un des états les plus riches de visions nouvelles, et qui
913 automatismes. En art, la fatigue est un des états les plus riches de visions nouvelles, et qui résiste le mieux à l’analyse
914 plus riches de visions nouvelles, et qui résiste le mieux à l’analyse. Seulement nous y perdons graduellement l’intellige
915 s de visions nouvelles, et qui résiste le mieux à l’ analyse. Seulement nous y perdons graduellement l’intelligence de nos
916 l’analyse. Seulement nous y perdons graduellement l’ intelligence de nos instincts, la conscience de nos limites naturelles
917 ns graduellement l’intelligence de nos instincts, la conscience de nos limites naturelles, tout ce qui servirait de frein
918 ⁂ Recréer une conscience individuelle ; retrouver le sens social, le sens des ensembles et des proportions ; rééduquer les
919 nscience individuelle ; retrouver le sens social, le sens des ensembles et des proportions ; rééduquer les instincts du co
920 sens des ensembles et des proportions ; rééduquer les instincts du corps et de l’âme ; vouloir une foi… La morale de demain
921 portions ; rééduquer les instincts du corps et de l’ âme ; vouloir une foi… La morale de demain sera en réaction complète c
922 instincts du corps et de l’âme ; vouloir une foi… La morale de demain sera en réaction complète contre celle d’aujourd’hui
923 out. Il ne s’agit pas, encore une fois, de renier l’ immense effort pour se libérer de l’universelle hypocrisie accompli pa
924 is, de renier l’immense effort pour se libérer de l’ universelle hypocrisie accompli par des générations qui ne lèguent aux
925 hons au contraire profiter des démonstrations par l’ absurde de quelques problèmes moraux et littéraires 8, à quoi beaucoup
926 t agir, ou bien être agi. Donner une conscience à l’ époque, ou se défaire avec elle et dériver vers un Orient d’oubli — (m
927 hies, quels Niagaras 9 !) Quelques jeunes hommes l’ ont compris. Ils sont modestes — ne s’isolant pas de la Société ; ils
928 compris. Ils sont modestes — ne s’isolant pas de la Société ; ils savent que pour lutter il faut des armes et ne méprisen
929 pour lutter il faut des armes et ne méprisent pas la culture ; sans autre parti pris que celui de vivre, c’est-à-dire de c
930 ttie à son objet, qu’il n’y a de liberté que dans la soumission aux lois naturelles ; et leur effort est de retrouver ces
931 gnent pas de choisir parmi leurs instincts, ni de les améliorer 10. Tout ceci est assez nouveau. (Après tant de cocktails,
932 ouveau. (Après tant de cocktails, quelle saveur a l’ eau claire !) Quelques autres se recueillent encore dans l’attente ang
933 ire !) Quelques autres se recueillent encore dans l’ attente angoissée d’une révélation et dans la connaissance de leur mis
934 dans l’attente angoissée d’une révélation et dans la connaissance de leur misère. Pareils à ceux dont Vinet disait qu’ils
935 ont Vinet disait qu’ils s’en vont « épiant toutes les émotions de l’âme, et lui multipliant ses douleurs en les lui nommant
936 qu’ils s’en vont « épiant toutes les émotions de l’ âme, et lui multipliant ses douleurs en les lui nommant », ils décrive
937 ions de l’âme, et lui multipliant ses douleurs en les lui nommant », ils décrivent le tourment dont sortira peut-être une f
938 ses douleurs en les lui nommant », ils décrivent le tourment dont sortira peut-être une foi nouvelle ; mais qu’ils sachen
939 foi nouvelle ; mais qu’ils sachent, quand viendra le moment, détourner les yeux de leur recherche pour contempler un absol
940 u’ils sachent, quand viendra le moment, détourner les yeux de leur recherche pour contempler un absolu ; qu’ils osent se fa
941 u’ils osent se faire violence pour se hisser dans la lumière. « Il vaut mieux, dit encore Vinet, ne voir d’abord que les g
942 vaut mieux, dit encore Vinet, ne voir d’abord que les grands traits de sa nature, ne connaître que les grands mots de la la
943 les grands traits de sa nature, ne connaître que les grands mots de la langue morale, suivre à l’égard de soi-même la méth
944 de sa nature, ne connaître que les grands mots de la langue morale, suivre à l’égard de soi-même la méthode de l’Évangile
945 de la langue morale, suivre à l’égard de soi-même la méthode de l’Évangile qui, prenant à plein poing toutes ces petites m
946 orale, suivre à l’égard de soi-même la méthode de l’ Évangile qui, prenant à plein poing toutes ces petites misères, en com
947 civiques. Mais que nos moralistes — presque tous les jeunes écrivains — se souviennent de penser en fonction du temps prés
948 temps présent, soit qu’ils veuillent en améliorer les conditions, ou les transformer totalement. — Alors, vous croyez à l’a
949 qu’ils veuillent en améliorer les conditions, ou les transformer totalement. — Alors, vous croyez à l’action sociale des é
950 es transformer totalement. — Alors, vous croyez à l’ action sociale des écrivains ? Peut-être. En tout cas je vois bien le
951 s écrivains ? Peut-être. En tout cas je vois bien le mal qu’ils ont fait et qu’au fond, leur refus d’agir sur l’époque, c’
952 ils ont fait et qu’au fond, leur refus d’agir sur l’ époque, c’est une manière d’agir contre elle. 2. « La crise du concep
953 oque, c’est une manière d’agir contre elle. 2. «  La crise du concept de littérature », NRF, 1923. 3. « Il s’était dévelo
954 « Il s’était développé en nous un goût furieux de l’ expérience humaine. » (Aragon) 4. « Lorsque tout est fini » dans Libe
955 Libertinage. (NRF) 5. Détours de René Crevel ; les romans de Philippe Soupault ; l’Incertain de Maurice Betz ; certains
956 e René Crevel ; les romans de Philippe Soupault ; l’ Incertain de Maurice Betz ; certains personnages d’Arland, de Louis Ar
957 ouis Aragon, de Drieu la Rochelle. Je ne cite que les plus significatifs. 6. Aragon, loc. cit. 7. Le « goût du désastre 
958 es plus significatifs. 6. Aragon, loc. cit. 7. Le « goût du désastre » qui est au fond du romantisme moderne nous empêc
959 ement de construire et de nous construire. Jamais l’ on ne fut plus loin de l’idéal goethéen : au lieu de tout composer en
960 nous construire. Jamais l’on ne fut plus loin de l’ idéal goethéen : au lieu de tout composer en soi, on veut tout cultive
961 omposer en soi, on veut tout cultiver, et en fait l’ on se contente d’une violence, d’un vice, d’une inquiétude. 8. « Cert
962 réelles » (Marcel Arland). 9. Ce serait au moins la liberté ! crieront les surréalistes. Voire. On est moins libre à Mosc
963 nd). 9. Ce serait au moins la liberté ! crieront les surréalistes. Voire. On est moins libre à Moscou qu’à Montparnasse. D
964 D’ailleurs leurs théories nous ramèneraient vite l’ âge de la pierre, à la condition d’homme la plus nue ; la plus éloigné
965 rs leurs théories nous ramèneraient vite l’âge de la pierre, à la condition d’homme la plus nue ; la plus éloignée de cell
966 ries nous ramèneraient vite l’âge de la pierre, à la condition d’homme la plus nue ; la plus éloignée de celle qui permet
967 t vite l’âge de la pierre, à la condition d’homme la plus nue ; la plus éloignée de celle qui permet le surréalisme. 10.
968 e la pierre, à la condition d’homme la plus nue ; la plus éloignée de celle qui permet le surréalisme. 10. Une équipe d’h
969 a plus nue ; la plus éloignée de celle qui permet le surréalisme. 10. Une équipe d’hommes solides suffirait à restaurer u
970 mont Denis de, « Adieu, beau désordre… (Notes sur la jeune littérature et la morale) », Bibliothèque universelle et Revue
971 beau désordre… (Notes sur la jeune littérature et la morale) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mars
972 a morale) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, mars 1926, p. 311-319.
973 ) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , mars 1926, p. 311-319.
18 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Pierre Jean Jouve, Paulina 1880 (avril 1926)
974 )p Au creux des couleurs assourdies d’un divan le soir, tandis que les fenêtres s’ouvraient vers le ciel de Florence… «
975 ouleurs assourdies d’un divan le soir, tandis que les fenêtres s’ouvraient vers le ciel de Florence… « Du sang, de la volup
976 le soir, tandis que les fenêtres s’ouvraient vers le ciel de Florence… « Du sang, de la volupté et de la mort », un titre
977 ouvraient vers le ciel de Florence… « Du sang, de la volupté et de la mort », un titre s’effaçait dans l’ombre. Jouve a rê
978 ciel de Florence… « Du sang, de la volupté et de la mort », un titre s’effaçait dans l’ombre. Jouve a rêvé une histoire d
979 volupté et de la mort », un titre s’effaçait dans l’ ombre. Jouve a rêvé une histoire de passion mystique et de crime, inte
980 t d’autres, comme chaque soir un nouveau ciel. Il l’ a transcrite en brèves notations lyriques suivant le rythme d’un songe
981 a transcrite en brèves notations lyriques suivant le rythme d’un songe, sans cesse brisé par les élans alternés ou confond
982 uivant le rythme d’un songe, sans cesse brisé par les élans alternés ou confondus du désir et de la prière. On sort lenteme
983 ar les élans alternés ou confondus du désir et de la prière. On sort lentement d’une chambre bleue qui est le mystère même
984 re. On sort lentement d’une chambre bleue qui est le mystère même, pour suivre la naissance et l’embrasement de la passion
985 hambre bleue qui est le mystère même, pour suivre la naissance et l’embrasement de la passion de Paulina. Le Péché ; le Co
986 est le mystère même, pour suivre la naissance et l’ embrasement de la passion de Paulina. Le Péché ; le Couvent ; la rechu
987 ême, pour suivre la naissance et l’embrasement de la passion de Paulina. Le Péché ; le Couvent ; la rechute et le crime ;
988 ssance et l’embrasement de la passion de Paulina. Le Péché ; le Couvent ; la rechute et le crime ; et l’étrange apaisement
989 ’embrasement de la passion de Paulina. Le Péché ; le Couvent ; la rechute et le crime ; et l’étrange apaisement d’une viei
990 de la passion de Paulina. Le Péché ; le Couvent ; la rechute et le crime ; et l’étrange apaisement d’une vieillesse au sol
991 de Paulina. Le Péché ; le Couvent ; la rechute et le crime ; et l’étrange apaisement d’une vieillesse au soleil. Jouve sem
992 Péché ; le Couvent ; la rechute et le crime ; et l’ étrange apaisement d’une vieillesse au soleil. Jouve semble avoir hési
993 servation psychologique ironique et minutieuse, à la Stendhal, succède à des effusions haletantes ou à une relation cinéma
994 ion cinématographique. Mais tout cela baigne dans le même lyrisme et s’agite sur un fond sombre et riche de passions incon
995 iche de passions inconscientes qui donnent à tous les actes une signification plus profonde. (Il serait aisé de montrer que
996 de poétique où il paraît inconvenant d’introduire le jargon de la science moderne.) Si nous reconnaissons à la base de cet
997 ù il paraît inconvenant d’introduire le jargon de la science moderne.) Si nous reconnaissons à la base de cette œuvre inég
998 n de la science moderne.) Si nous reconnaissons à la base de cette œuvre inégale des idées vieilles comme Rousseau sur les
999 vre inégale des idées vieilles comme Rousseau sur les droits de la passion, — et dans sa trame quelques chapitres inspirés
1000 s idées vieilles comme Rousseau sur les droits de la passion, — et dans sa trame quelques chapitres inspirés presque litté
1001 anecdote italienne de Stendhal ; si d’autre part l’ évolution mystique de Paulina semble parfois un peu trop « classique »
1002 mble parfois un peu trop « classique » et prévue, l’ originalité foncière du roman de Jouve reste indéniable : c’est son mo
1003 nes proses mystiques de Paulina au couvent valent les meilleurs poèmes de l’auteur de Tragiques et de Vous êtes des hommes.
1004 Paulina au couvent valent les meilleurs poèmes de l’ auteur de Tragiques et de Vous êtes des hommes. p. Rougemont Denis
1005 ina 1880  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, avril 1926, p. 530-531.
1006  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , avril 1926, p. 530-531.
19 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Alix de Watteville, La Folie de l’espace (avril 1926)
1007 Alix de Watteville, La Folie de l’espace (avril 1926)q Un artiste de grand talent à qui l
1008 Alix de Watteville, La Folie de l’ espace (avril 1926)q Un artiste de grand talent à qui la guerre a f
1009 (avril 1926)q Un artiste de grand talent à qui la guerre a fait perdre le goût des théories d’écoles et de quelques aut
1010 ste de grand talent à qui la guerre a fait perdre le goût des théories d’écoles et de quelques autres plaisirs pour civils
1011 de quelques autres plaisirs pour civils : mettez- le aux prises avec une petite cité patricienne dont il devra portraiture
1012 etite cité patricienne dont il devra portraiturer les gentilshommes archéologiques et les vieilles dames à principes. Voilà
1013 portraiturer les gentilshommes archéologiques et les vieilles dames à principes. Voilà, n’est-ce pas, un amusant sujet de
1014 al, avec ses personnages un peu conventionnels et l’ invraisemblance assez piquante de ses péripéties. Quel dommage que l’a
1015 ssez piquante de ses péripéties. Quel dommage que l’ auteur l’ait alourdi d’une idéologie, souvent plus généreuse que neuve
1016 ante de ses péripéties. Quel dommage que l’auteur l’ ait alourdi d’une idéologie, souvent plus généreuse que neuve, et qui
1017 à être mise en action plutôt qu’en commentaires. Le talent de Mme de Watteville paraît mieux à l’aise dans la description
1018 es. Le talent de Mme de Watteville paraît mieux à l’ aise dans la description du milieu patricien que dans la création d’un
1019 t de Mme de Watteville paraît mieux à l’aise dans la description du milieu patricien que dans la création d’un caractère d
1020 dans la description du milieu patricien que dans la création d’un caractère de grand peintre. Pourtant, malgré des longue
1021 ongueurs, on ne lira pas sans plaisir ce livre où l’ on voit un homme appeler en vain le vent du large, parmi des gens qui
1022 ir ce livre où l’on voit un homme appeler en vain le vent du large, parmi des gens qui craignent de s’enrhumer. q. Roug
1023 nt Denis de, « [Compte rendu] Alix de Watteville, La Folie de l’espace  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Ge
1024 « [Compte rendu] Alix de Watteville, La Folie de l’ espace  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, avril
1025 l’espace  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, avril 1926, p. 531.
1026  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , avril 1926, p. 531.
20 1926, Articles divers (1924–1930). Conférences d’Aubonne (7 avril 1926)
1027 il 1926)d e Pour la première fois cette année, les conférences de l’Association chrétienne d’étudiants eurent lieu au pr
1028 la première fois cette année, les conférences de l’ Association chrétienne d’étudiants eurent lieu au printemps, et non pl
1029 ne. Un plein succès a répondu à cette innovation. Le sujet de la première partie des conférences, les Objections des intel
1030 . Le sujet de la première partie des conférences, les Objections des intellectuels au Dieu chrétien, fut introduit par M. R
1031 istingué, qui se fit avec beaucoup d’intelligence l’ avocat du diable, en montrant que tous les faits religieux admettent à
1032 lligence l’avocat du diable, en montrant que tous les faits religieux admettent à côté de l’explication mystique une explic
1033 que tous les faits religieux admettent à côté de l’ explication mystique une explication scientifique. C’est donc à la seu
1034 stique une explication scientifique. C’est donc à la seule volonté de choisir. M. le pasteur Bertrand de Lyon, répondit en
1035 que. C’est donc à la seule volonté de choisir. M. le pasteur Bertrand de Lyon, répondit en exposant les exigences de l’Éva
1036 le pasteur Bertrand de Lyon, répondit en exposant les exigences de l’Évangile en face de la pensée moderne, et fut impressi
1037 nd de Lyon, répondit en exposant les exigences de l’ Évangile en face de la pensée moderne, et fut impressionnant de vigueu
1038 n exposant les exigences de l’Évangile en face de la pensée moderne, et fut impressionnant de vigueur dialectique et de la
1039 que et de largeur d’idées. Une soirée consacrée à la fédération vint interrompre les discussions philosophiques provoquées
1040 soirée consacrée à la fédération vint interrompre les discussions philosophiques provoquées par ces deux travaux. Avec la c
1041 losophiques provoquées par ces deux travaux. Avec la conférence de M. Jean Cadier, un jeune pasteur français, on descendit
1042 ier, un jeune pasteur français, on descendit — ou l’ on monta suivant M. A. Léo — du domaine de la pensée pure dans celui d
1043 — ou l’on monta suivant M. A. Léo — du domaine de la pensée pure dans celui de l’action. M. Cadier montra le conflit de la
1044 Léo — du domaine de la pensée pure dans celui de l’ action. M. Cadier montra le conflit de la théologie moderne avec l’act
1045 sée pure dans celui de l’action. M. Cadier montra le conflit de la théologie moderne avec l’action religieuse en s’appuyan
1046 celui de l’action. M. Cadier montra le conflit de la théologie moderne avec l’action religieuse en s’appuyant sur des expé
1047 er montra le conflit de la théologie moderne avec l’ action religieuse en s’appuyant sur des expériences faites pendant le
1048 en s’appuyant sur des expériences faites pendant le réveil de la Drôme, dont il est l’un des artisans les plus actifs. Po
1049 t sur des expériences faites pendant le réveil de la Drôme, dont il est l’un des artisans les plus actifs. Pour remplacer
1050 réveil de la Drôme, dont il est l’un des artisans les plus actifs. Pour remplacer un travail promis par M. A. Reymond malhe
1051 é, M. Pierre Maury fit une causerie émouvante sur l’ Évolution religieuse de Jacques Rivière, qui se trouva préciser bien d
1052 nts laissés en suspens dans la première partie de la conférence. Puis M. A. Brémond, étudiant en théologie, présenta deux
1053 riers de Paris, Clerville et Janson, dont il a eu l’ occasion de partager les conditions de vie et qui nous parlèrent l’un
1054 le et Janson, dont il a eu l’occasion de partager les conditions de vie et qui nous parlèrent l’un de la Réalité prolétarie
1055 s conditions de vie et qui nous parlèrent l’un de la Réalité prolétarienne, l’autre de la Mentalité prolétarienne. Brémond
1056 rent l’un de la Réalité prolétarienne, l’autre de la Mentalité prolétarienne. Brémond conclut en montrant la nécessité et
1057 talité prolétarienne. Brémond conclut en montrant la nécessité et les difficultés d’une action missionnaire dans ces milie
1058 enne. Brémond conclut en montrant la nécessité et les difficultés d’une action missionnaire dans ces milieux, comme M. Terr
1059 missionnaire dans ces milieux, comme M. Terrisse l’ avait fait le soir avant pour les milieux d’ouvriers noirs au Cap. San
1060 dans ces milieux, comme M. Terrisse l’avait fait le soir avant pour les milieux d’ouvriers noirs au Cap. Sans toucher à d
1061 comme M. Terrisse l’avait fait le soir avant pour les milieux d’ouvriers noirs au Cap. Sans toucher à des questions de part
1062 cher leurs auditeurs de leur lit de préjugés pour les placer véritablement en face de la « réalité prolétarienne ». « Cercl
1063 préjugés pour les placer véritablement en face de la « réalité prolétarienne ». « Cercles vicieux que nos syndicats. Cercl
1064 ercles vicieux que nos syndicats. Cercle vicieux, l’ augmentation des salaires. Ce que nous voulons, c’est élever l’homme a
1065 n des salaires. Ce que nous voulons, c’est élever l’ homme au-dessus de la plus dégradante condition, et nous n’y arriveron
1066 e nous voulons, c’est élever l’homme au-dessus de la plus dégradante condition, et nous n’y arriverons que par un travail
1067 , cela peut paraître excessif à qui n’a pas connu l’ atmosphère particulière à ces rencontres. Rien de plus aéré, au moral
1068 l pense sans se préoccuper d’être bien pensant et les Romands recouvrent l’usage de la parole, puis on va se dégourdir sur
1069 per d’être bien pensant et les Romands recouvrent l’ usage de la parole, puis on va se dégourdir sur un ballon ou bien l’on
1070 bien pensant et les Romands recouvrent l’usage de la parole, puis on va se dégourdir sur un ballon ou bien l’on poursuit h
1071 le, puis on va se dégourdir sur un ballon ou bien l’ on poursuit hors du village une discussion toujours trop courte. Et le
1072 u village une discussion toujours trop courte. Et les repas réunissent tout le monde dans la gaieté la plus charmante. On y
1073 ourte. Et les repas réunissent tout le monde dans la gaieté la plus charmante. On y vit un ouvrier en maillot rouge assis
1074 les repas réunissent tout le monde dans la gaieté la plus charmante. On y vit un ouvrier en maillot rouge assis entre un b
1075 rançais. Miracle qui nous fit croire un instant à la fameuse devise de la Révolution. d. Rougemont Denis de, « Conféren
1076 nous fit croire un instant à la fameuse devise de la Révolution. d. Rougemont Denis de, « Conférences d’Aubonne », Suis
21 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Wilfred Chopard, Spicilège ironique (mai 1926)
1077 ilège ironique (mai 1926)r Un léger flirt avec la muse, parce que c’est dimanche, parce qu’il pleut et qu’on s’ennuie.
1078 dimanche, parce qu’il pleut et qu’on s’ennuie. Si la vie est bête à pleurer, sourire est moins fatigant. « Le paon dédaign
1079 est bête à pleurer, sourire est moins fatigant. «  Le paon dédaigne encor mais ne fait plus sa roue. » Ce poète — qui fut a
1080 ne fait plus sa roue. » Ce poète — qui fut aussi le prosateur charmant du Pédagogue et l’Amour — sourit avec une grâce un
1081 i fut aussi le prosateur charmant du Pédagogue et l’ Amour — sourit avec une grâce un peu frileuse et se permet de bâiller
1082 use et se permet de bâiller en public. On connaît le danger… r. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Wilfred Chopard, S
1083 ironique  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, mai 1926, p. 661.
1084  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , mai 1926, p. 661.
22 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Cécile-Claire Rivier, L’Athée (mai 1926)
1085 Cécile-Claire Rivier, L’ Athée (mai 1926)s C’est le récit de la découverte de Dieu par une j
1086 écile-Claire Rivier, L’Athée (mai 1926)s C’est le récit de la découverte de Dieu par une jeune fille élevée dans l’athé
1087 Rivier, L’Athée (mai 1926)s C’est le récit de la découverte de Dieu par une jeune fille élevée dans l’athéisme. Invrai
1088 écouverte de Dieu par une jeune fille élevée dans l’ athéisme. Invraisemblablement ignorante de toute religion jusqu’à 20 a
1089 e religion jusqu’à 20 ans, Denise s’abandonne à «  la vie », laquelle — un peu aidée par l’auteur — lui révèlera peu à peu
1090 andonne à « la vie », laquelle — un peu aidée par l’ auteur — lui révèlera peu à peu le sens divin de la destinée. Ce livre
1091 n peu aidée par l’auteur — lui révèlera peu à peu le sens divin de la destinée. Ce livre à thèse est plutôt une argumentat
1092 ’auteur — lui révèlera peu à peu le sens divin de la destinée. Ce livre à thèse est plutôt une argumentation à coups d’exe
1093 à coups d’exemples vivants qu’un véritable roman. La profusion souvent facile des incidents et le style volontairement sec
1094 man. La profusion souvent facile des incidents et le style volontairement sec permettent de suivre sans passion ni fatigue
1095 sec permettent de suivre sans passion ni fatigue le développement un peu théorique mais intelligent d’un problème que l’o
1096 peu théorique mais intelligent d’un problème que l’ on pressent trop complètement résolu dès les premières pages, mais qu’
1097 Rivier d’avoir posé courageusement. Dirai-je que l’ abus des points d’exclamation — trait commun à presque toutes les femm
1098 nts d’exclamation — trait commun à presque toutes les femmes auteur, et qui plaît aux lectrices — m’agace un peu ? C’est un
1099 Denis de, « [Compte rendu] Cécile-Claire Rivier, L’ Athée  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mai 192
1100 L’Athée  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, mai 1926, p. 661.
1101  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , mai 1926, p. 661.
23 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jean Cocteau, Rappel à l’ordre (mai 1926)
1102 Jean Cocteau, Rappel à l’ ordre (mai 1926)t Sous ce titre, le plus étonnant peut-être qu’il a
1103 u, Rappel à l’ordre (mai 1926)t Sous ce titre, le plus étonnant peut-être qu’il ait trouvé, Jean Cocteau a réuni ce qui
1104 ait trouvé, Jean Cocteau a réuni ce qui me paraît le meilleur de son œuvre : ses récits de critique et d’esthétique (Le Co
1105 n œuvre : ses récits de critique et d’esthétique ( Le Coq et l’Arlequin, la Noce massacrée, le Secret professionnel, etc.)
1106 ses récits de critique et d’esthétique (Le Coq et l’ Arlequin, la Noce massacrée, le Secret professionnel, etc.) Sans doute
1107 e critique et d’esthétique (Le Coq et l’Arlequin, la Noce massacrée, le Secret professionnel, etc.) Sans doute faudrait-il
1108 hétique (Le Coq et l’Arlequin, la Noce massacrée, le Secret professionnel, etc.) Sans doute faudrait-il préciser ce qu’il
1109 ’il entend par ordre, et montrer que si cet ordre l’ écarte de Dada, il ne le conduit pas pour autant à l’Académie. Disons
1110 montrer que si cet ordre l’écarte de Dada, il ne le conduit pas pour autant à l’Académie. Disons pour aller vite que sa r
1111 carte de Dada, il ne le conduit pas pour autant à l’ Académie. Disons pour aller vite que sa recherche de l’ordre révèle si
1112 démie. Disons pour aller vite que sa recherche de l’ ordre révèle simplement une volonté de construire jusque dans le grabu
1113 simplement une volonté de construire jusque dans le grabuge, qu’il aime pour les matériaux qu’on en peut tirer. L[e] malh
1114 onstruire jusque dans le grabuge, qu’il aime pour les matériaux qu’on en peut tirer. L[e] malheur de Cocteau est qu’il se v
1115 heur de Cocteau est qu’il se veuille poète. Il ne l’ est jamais moins qu’en vers. Sa plus incontestable réussite à ce jour
1116 ers. Sa plus incontestable réussite à ce jour est le Secret professionnel, petit catéchisme cubiste qui dépasse de beaucou
1117 petit catéchisme cubiste qui dépasse de beaucoup les limites de cette école, et qu’il eut le tort à notre sens de vouloir
1118 beaucoup les limites de cette école, et qu’il eut le tort à notre sens de vouloir illustrer de pédants exercices poétiques
1119 ices poétiques. Mais quelle intelligence, et dont l’ audace est de se vouloir plus juste que bizarre. Il sait bien d’ailleu
1120 us juste que bizarre. Il sait bien d’ailleurs que les miracles les plus étonnants sont ceux de la lumière. « Le mystère se
1121 bizarre. Il sait bien d’ailleurs que les miracles les plus étonnants sont ceux de la lumière. « Le mystère se passe en plei
1122 que les miracles les plus étonnants sont ceux de la lumière. « Le mystère se passe en plein jour et à toute vitesse. » Te
1123 les les plus étonnants sont ceux de la lumière. «  Le mystère se passe en plein jour et à toute vitesse. » Telle est bien l
1124 n plein jour et à toute vitesse. » Telle est bien la nouveauté de son théâtre et de l’art qu’il défend en peinture, en mus
1125 Telle est bien la nouveauté de son théâtre et de l’ art qu’il défend en peinture, en musique. Suppression du clair-obscur
1126 re, en musique. Suppression du clair-obscur et de la pénombre. Ôter la pédale à la poésie. (« Le poète ne rêve pas, il com
1127 ppression du clair-obscur et de la pénombre. Ôter la pédale à la poésie. (« Le poète ne rêve pas, il compte. ») Six projec
1128 clair-obscur et de la pénombre. Ôter la pédale à la poésie. (« Le poète ne rêve pas, il compte. ») Six projecteurs conver
1129 et de la pénombre. Ôter la pédale à la poésie. («  Le poète ne rêve pas, il compte. ») Six projecteurs convergent sur une m
1130 convergent sur une machine luisante et tournante. L’ esprit de Cocteau est une arme admirable de précision, d’élégance méca
1131 de rapidité. Il lassera, parce que c’est toujours le même déclic. Cocteau le sait, et pour varier il tire tantôt à gauche
1132 parce que c’est toujours le même déclic. Cocteau le sait, et pour varier il tire tantôt à gauche tantôt à droite, sur Bar
1133 ur Barrès, sur Wagner, sur quelques fantômes, sur le public. (Bientôt sur lui-même je le crains, pour renaître catholique.
1134 fantômes, sur le public. (Bientôt sur lui-même je le crains, pour renaître catholique.) Certes, il bannit le charme et tou
1135 ins, pour renaître catholique.) Certes, il bannit le charme et toute grâce vaporeuse. Mais ses fleurs de cristal, si elles
1136 Denis de, « [Compte rendu] Jean Cocteau, Rappel à l’ ordre  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mai 192
1137 l’ordre  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, mai 1926, p. 661-662.
1138  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , mai 1926, p. 661-662.
24 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). René Crevel, Mon corps et moi (mai 1926)
1139 René Crevel, Mon corps et moi (mai 1926)u Les témoignages ne manquent pas sur la détresse morale de la génération s
1140 mai 1926)u Les témoignages ne manquent pas sur la détresse morale de la génération surréaliste. Mais tandis que la plup
1141 ignages ne manquent pas sur la détresse morale de la génération surréaliste. Mais tandis que la plupart en sont encore à d
1142 ls en disent, « artistiqués », — ils n’osent plus le mensonge de l’art, et pas encore la vérité pure — Crevel décrit sans
1143  artistiqués », — ils n’osent plus le mensonge de l’ art, et pas encore la vérité pure — Crevel décrit sans aucune transpos
1144 n’osent plus le mensonge de l’art, et pas encore la vérité pure — Crevel décrit sans aucune transposition romanesque le t
1145 revel décrit sans aucune transposition romanesque le trouble caractéristique de sa génération. Terrible aveu d’impuissance
1146 on. Terrible aveu d’impuissance, il n’a plus même la force de l’hypocrisie. Isolé dans un hôtel perdu, avec son corps qui
1147 aveu d’impuissance, il n’a plus même la force de l’ hypocrisie. Isolé dans un hôtel perdu, avec son corps qui se souvient
1148 erdu, avec son corps qui se souvient — « mémoire, l’ ennemie » — avec une intelligence dont la triste profession est de dét
1149 mémoire, l’ennemie » — avec une intelligence dont la triste profession est de détruire le désir qu’elle excite par curiosi
1150 ligence dont la triste profession est de détruire le désir qu’elle excite par curiosité passagère, il monologue. « Oui, je
1151 par curiosité passagère, il monologue. « Oui, je le redirai, tous mes essais furent prétextes à me dissoudre, à me perdre
1152 prétextes à me dissoudre, à me perdre. » Vouloir la vérité pure sur soi, c’est se refuser à l’élan vital qui nous crée sa
1153 ouloir la vérité pure sur soi, c’est se refuser à l’ élan vital qui nous crée sans cesse : l’analyse de sa solitude le lais
1154 refuser à l’élan vital qui nous crée sans cesse : l’ analyse de sa solitude le laisse en face de quelques réactions physiol
1155 i nous crée sans cesse : l’analyse de sa solitude le laisse en face de quelques réactions physiologiques dont la pauvreté
1156 en face de quelques réactions physiologiques dont la pauvreté le rejette dans une angoisse qu’il nomme « élan mortel ». Ce
1157 uelques réactions physiologiques dont la pauvreté le rejette dans une angoisse qu’il nomme « élan mortel ». Cette inversio
1158 e qui est constructif et créateur, voilà je pense le véritable désordre. Une intelligence parvenue au point où elle « ne s
1159 ocès », une intelligence qui se dégoûte, tel est le spectacle que nous dévoile cyniquement René Crevel. Il en est peu de
1160 u de plus effrayants. Ah ! Seigneur, donnez-nous la force et le courage de contempler nos corps et nos cœurs sans dégoût
1161 frayants. Ah ! Seigneur, donnez-nous la force et le courage de contempler nos corps et nos cœurs sans dégoût implorait B
1162 ans dégoût implorait Baudelaire. Encore avait-il le courage de prier… u. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] René Cre
1163 s et moi  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, mai 1926, p. 662-663.
1164  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , mai 1926, p. 662-663.
25 1926, Articles divers (1924–1930). L’atmosphère d’Aubonne : 22-25 mars 1926 (mai 1926)
1165 L’ atmosphère d’Aubonne : 22-25 mars 1926 (mai 1926)f Cette conférence
1166 qu’on peut bien dire du diable et se termina sous le plus beau soleil de printemps. Libre à qui veut d’y voir un symbole.
1167 veut d’y voir un symbole. On ne saurait exagérer l’ importance des conditions météorologiques du succès d’une telle rencon
1168 e rencontre : tout alla froidement jusqu’à ce que la bise tombée permît à « l’atmosphère » de s’établir. Alors le miracle
1169 oidement jusqu’à ce que la bise tombée permît à «  l’ atmosphère » de s’établir. Alors le miracle apparut, grandit. Le mirac
1170 bée permît à « l’atmosphère » de s’établir. Alors le miracle apparut, grandit. Le miracle, c’est l’esprit d’Aubonne. C’est
1171 de s’établir. Alors le miracle apparut, grandit. Le miracle, c’est l’esprit d’Aubonne. C’est ce miracle tout ce qu’il y a
1172 rs le miracle apparut, grandit. Le miracle, c’est l’ esprit d’Aubonne. C’est ce miracle tout ce qu’il y a de plus protestan
1173 e se produire ailleurs qu’en terre romande. C’est l’ esprit de liberté, tout simplement. Mais précisons : c’est bien plus q
1174 simplement. Mais précisons : c’est bien plus que la liberté de défendre sa petite hérésie personnelle et de s’affirmer au
1175 lle et de s’affirmer aux dépens d’autrui, — c’est la liberté dans la recherche. Chose plus rare qu’on ne pense, à Aubonne
1176 rmer aux dépens d’autrui, — c’est la liberté dans la recherche. Chose plus rare qu’on ne pense, à Aubonne on se sent prêt
1177 ient moins à convaincre qu’à se convaincre. Après les exposés de Janson, de Brémond, j’en sais plusieurs qui ont ainsi « lâ
1178 Mais ce qui est peut-être plus important, on eut l’ impression, durant les discussions entre de Saussure et Bertrand, que
1179 -être plus important, on eut l’impression, durant les discussions entre de Saussure et Bertrand, que les orateurs exprimaie
1180 es discussions entre de Saussure et Bertrand, que les orateurs exprimaient tour à tour les objections que chacun se faisait
1181 ertrand, que les orateurs exprimaient tour à tour les objections que chacun se faisait à part soi, qu’ils incarnaient les v
1182 chacun se faisait à part soi, qu’ils incarnaient les voix contradictoires d’un débat que tous menaient en eux-mêmes loyale
1183 chose de définitif à la fois et d’intelligent, je le mesure aussi à l’émotion qui accueillit l’étude de Maury sur Jacques
1184 à la fois et d’intelligent, je le mesure aussi à l’ émotion qui accueillit l’étude de Maury sur Jacques Rivière : combien
1185 nt, je le mesure aussi à l’émotion qui accueillit l’ étude de Maury sur Jacques Rivière : combien reconnurent dans le tourm
1186 ry sur Jacques Rivière : combien reconnurent dans le tourment de cette âme leur propre recherche, — et dans ses lumineuses
1187 recherche, — et dans ses lumineuses conquêtes sur le doute, le modèle des réponses désirées. Tout cela, c’est l’atmosphère
1188 — et dans ses lumineuses conquêtes sur le doute, le modèle des réponses désirées. Tout cela, c’est l’atmosphère de la cha
1189 le modèle des réponses désirées. Tout cela, c’est l’ atmosphère de la chapelle où ont lieu travaux et méditations. Dehors,
1190 ponses désirées. Tout cela, c’est l’atmosphère de la chapelle où ont lieu travaux et méditations. Dehors, on honore la lib
1191 nt lieu travaux et méditations. Dehors, on honore la liberté d’un culte moins platonique : n’est-ce pas Léo qui prétendit
1192 ’est-ce pas Léo qui prétendit qu’on ne peut juger les Associations qu’à leur façon de jouer le volley-ball ? Le Casino offr
1193 t juger les Associations qu’à leur façon de jouer le volley-ball ? Le Casino offrit pendant quelques nuits la vision étran
1194 iations qu’à leur façon de jouer le volley-ball ? Le Casino offrit pendant quelques nuits la vision étrange d’une salle où
1195 ey-ball ? Le Casino offrit pendant quelques nuits la vision étrange d’une salle où les spectateurs étendus en pyjamas sur
1196 t quelques nuits la vision étrange d’une salle où les spectateurs étendus en pyjamas sur des paillasses attendraient en vai
1197 n pyjamas sur des paillasses attendraient en vain le lever d’un rideau sur une pièce inexistante. Enfin le dernier soir, l
1198 sur une pièce inexistante. Enfin le dernier soir, l’ on vit apparaître un fakir… Il y eut aussi une assemblée délibérative
1199 eut pas trop de toute sa souplesse pour maintenir l’ équilibre des discussions et de sa propre personne. Et il y eut encore
1200 encore un dîner très démocratique pendant lequel le philosophe Abauzit chanta « les Crapauds » avec âme, appuyé d’une mai
1201 que pendant lequel le philosophe Abauzit chanta «  les Crapauds » avec âme, appuyé d’une main sur l’épaule de Janson, et de
1202 « les Crapauds » avec âme, appuyé d’une main sur l’ épaule de Janson, et de l’autre dessinant dans l’air des phrases music
1203 l’épaule de Janson, et de l’autre dessinant dans l’ air des phrases musicales. Après quoi Richardot, entrant par la fenêtr
1204 ases musicales. Après quoi Richardot, entrant par la fenêtre, vint annoncer qu’on était libre — comme si on l’avait attend
1205 re, vint annoncer qu’on était libre — comme si on l’ avait attendu pour le manifester ! — et qu’il suffisait de souscrire à
1206 on était libre — comme si on l’avait attendu pour le manifester ! — et qu’il suffisait de souscrire à la brochure de la co
1207 manifester ! — et qu’il suffisait de souscrire à la brochure de la conférence3 pour savoir tout ce que je n’ai pas dit da
1208  et qu’il suffisait de souscrire à la brochure de la conférence3 pour savoir tout ce que je n’ai pas dit dans ces quelques
1209 2.50, nom et adresse. f. Rougemont Denis de, «  L’ atmosphère d’Aubonne : 22-25 mars 1926 », Lux et Vita : nouvelles de l
1210 e : 22-25 mars 1926 », Lux et Vita : nouvelles de l’ Association chrétienne suisse d’étudiants, Lausanne, mai 1926, p. 44-4
26 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Le Corbusier, Urbanisme (juin 1926)
1211 Le Corbusier, Urbanisme (juin 1926)v Nous disons adieu aux charmes tr
1212 disons adieu aux charmes troubles et inhumains de la nature. Il s’agit de créer à notre vie moderne un décor utile et beau
1213 à notre vie moderne un décor utile et beau. Or «  la grande ville, phénomène de force en mouvement, est aujourd’hui une ca
1214 astrophe menaçante pour n’avoir pas été animée de l’ esprit de géométrie… Elle use et conduit lentement l’usure des millier
1215 sprit de géométrie… Elle use et conduit lentement l’ usure des milliers d’êtres humains ». Elle n’est plus adaptée aux cond
1216 de travail ou de repos, ni dans son plan ni dans le détail des rues. Congestion : « un cheval arrête 1000 chevaux-vapeurs
1217 eval arrête 1000 chevaux-vapeurs ». Et pourtant «  la ville est une image puissante qui actionne notre esprit » après avoir
1218 e esprit » après avoir été créée par lui, — comme la poésie. C’est ainsi que le problème de l’Urbanisme se place au croise
1219 créée par lui, — comme la poésie. C’est ainsi que le problème de l’Urbanisme se place au croisement des préoccupations est
1220 — comme la poésie. C’est ainsi que le problème de l’ Urbanisme se place au croisement des préoccupations esthétiques et soc
1221 hétiques et sociales d’aujourd’hui. Pour résoudre la crise de notre civilisation sous cet aspect comme sous les autres, il
1222 de notre civilisation sous cet aspect comme sous les autres, il nous faut mieux que des dictateurs : des Architectes, de l
1223 ut mieux que des dictateurs : des Architectes, de l’ esprit et de la matière. Si Le Corbusier réalise son plan, ce sera plu
1224 s dictateurs : des Architectes, de l’esprit et de la matière. Si Le Corbusier réalise son plan, ce sera plus fort que Muss
1225 des Architectes, de l’esprit et de la matière. Si Le Corbusier réalise son plan, ce sera plus fort que Mussolini (lequel s
1226 nisme est une étude technique et un pamphlet dont l’ argumentation serrée éclate parfois en boutades mordantes, en brèves f
1227 lyrisme. C’est d’une verve puissante jusque dans la statistique. On en sort convaincu ou bouleversé, enthousiasmé d’avoir
1228 vaincu ou bouleversé, enthousiasmé d’avoir trouvé la formule même de tant d’aspirations modernes. Voici sans aucun doute u
1229 ns modernes. Voici sans aucun doute un des livres les plus représentatifs de l’époque de Lénine, du fascisme, du ciment arm
1230 un doute un des livres les plus représentatifs de l’ époque de Lénine, du fascisme, du ciment armé. « Notre monde comme un
1231 poques mortes. Une tâche nous incombe, construire le cadre de notre existence… construire les villes de notre temps ». Et
1232 onstruire le cadre de notre existence… construire les villes de notre temps ». Et je déplie ce plan d’une « ville contempor
1233 verre et de ciment blanc, flamboyantes au soleil. Les vingt-quatre gratte-ciel de la cité, au centre, s’espacent autour d’u
1234 yantes au soleil. Les vingt-quatre gratte-ciel de la cité, au centre, s’espacent autour d’un aérodrome-gare circulaire, pr
1235 un aérodrome-gare circulaire, prismes perdus dans le silence de l’azur au-dessus des rumeurs de la ville. Puis s’étendent
1236 are circulaire, prismes perdus dans le silence de l’ azur au-dessus des rumeurs de la ville. Puis s’étendent les quartiers
1237 ans le silence de l’azur au-dessus des rumeurs de la ville. Puis s’étendent les quartiers de résidence ; les jardins suspe
1238 u-dessus des rumeurs de la ville. Puis s’étendent les quartiers de résidence ; les jardins suspendus à tous les étages soul
1239 lle. Puis s’étendent les quartiers de résidence ; les jardins suspendus à tous les étages soulignent de verdure l’horizonta
1240 tiers de résidence ; les jardins suspendus à tous les étages soulignent de verdure l’horizontale des toitures en terrasses.
1241 suspendus à tous les étages soulignent de verdure l’ horizontale des toitures en terrasses. Des perspectives régulières rec
1242 ives régulières recoupées à 200 et 400 mètres par les plans fuyants des rues immenses livrées au 100 à l’heure des autos. L
1243 plans fuyants des rues immenses livrées au 100 à l’ heure des autos. Les maisons habitées ne sont plus que des enceintes t
1244 rues immenses livrées au 100 à l’heure des autos. Les maisons habitées ne sont plus que des enceintes transparentes, et min
1245 es « redents » des terrains de jeux et des parcs, la nature annexée à la ville. « C’est un spectacle organisé par l’Archit
1246 errains de jeux et des parcs, la nature annexée à la ville. « C’est un spectacle organisé par l’Architecture avec les ress
1247 xée à la ville. « C’est un spectacle organisé par l’ Architecture avec les ressources de la plastique qui est le jeu de for
1248 est un spectacle organisé par l’Architecture avec les ressources de la plastique qui est le jeu de formes sous la lumière »
1249 rganisé par l’Architecture avec les ressources de la plastique qui est le jeu de formes sous la lumière ». Cristallisation
1250 cture avec les ressources de la plastique qui est le jeu de formes sous la lumière ». Cristallisation d’un rêve de joie et
1251 ces de la plastique qui est le jeu de formes sous la lumière ». Cristallisation d’un rêve de joie et de raison où de grand
1252 iels formidables des ensembles soumis aux lois de l’ esprit et de la vie sociale, non plus à un opportunisme anarchique. Ti
1253 s des ensembles soumis aux lois de l’esprit et de la vie sociale, non plus à un opportunisme anarchique. Tirer des lignes
1254 tunisme anarchique. Tirer des lignes droites, est le propre de l’homme. Toutes les civilisations fortes l’ont osé. Créer u
1255 hique. Tirer des lignes droites, est le propre de l’ homme. Toutes les civilisations fortes l’ont osé. Créer un espace arch
1256 lignes droites, est le propre de l’homme. Toutes les civilisations fortes l’ont osé. Créer un espace architectural lumineu
1257 ropre de l’homme. Toutes les civilisations fortes l’ ont osé. Créer un espace architectural lumineux à la place de nos cité
1258 ution. Déjà des ingénieurs se sont mis à calculer la réalisation de ce phénomène de haute poésie — la « ville contemporain
1259 la réalisation de ce phénomène de haute poésie — la « ville contemporaine ». Un labeur précis et anonyme concourt obscuré
1260 rément à cette parfaite expression du triomphe de l’ homme sur la Nature. Architecture : « tout ce qui est au-delà du calcu
1261 te parfaite expression du triomphe de l’homme sur la Nature. Architecture : « tout ce qui est au-delà du calcul… Ce sera l
1262 re : « tout ce qui est au-delà du calcul… Ce sera la passion du siècle ». v. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Le Co
1263 cle ». v. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Le Corbusier, Urbanisme  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
1264 rbanisme  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, juin 1926, p. 797-798.
1265  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , juin 1926, p. 797-798.
27 1926, Articles divers (1924–1930). Confession tendancieuse (mai 1926)
1266 mprenons que nos œuvres, si elles furent faites à l’ image de notre esprit, le lui rendent bien dans la suite ; c’est peut-
1267 si elles furent faites à l’image de notre esprit, le lui rendent bien dans la suite ; c’est peut-être pourquoi nous accord
1268 l’image de notre esprit, le lui rendent bien dans la suite ; c’est peut-être pourquoi nous accordons voix dans le débat d’
1269 c’est peut-être pourquoi nous accordons voix dans le débat d’écrire, aux forces les plus secrètes de notre être comme aux
1270 accordons voix dans le débat d’écrire, aux forces les plus secrètes de notre être comme aux calculs les plus rusés. Nous ch
1271 les plus secrètes de notre être comme aux calculs les plus rusés. Nous choisissons les idées comme on choisit un amour dont
1272 omme aux calculs les plus rusés. Nous choisissons les idées comme on choisit un amour dont on est anxieux de prévoir l’infl
1273 n choisit un amour dont on est anxieux de prévoir l’ influence, avant de s’y jeter, et dont on craint de ressortir trop dif
1274 e réticences dont nous ne comprenons pas toujours l’ objet. Peur de perdre le fil de la conscience de soi, peur de subir l’
1275 e comprenons pas toujours l’objet. Peur de perdre le fil de la conscience de soi, peur de subir l’empreinte imprévisible d
1276 ns pas toujours l’objet. Peur de perdre le fil de la conscience de soi, peur de subir l’empreinte imprévisible des choses.
1277 dre le fil de la conscience de soi, peur de subir l’ empreinte imprévisible des choses. Amour de soi… Mais moi, qui suis-je
1278 is moi, qui suis-je ? Par ces trois mots commence le drame de toute vie. Ha ! Qui je suis ? Mais je le sens très bien ! je
1279 le drame de toute vie. Ha ! Qui je suis ? Mais je le sens très bien ! je sens très bien cette force — ici, je tape du pied
1280 r. Vous me direz qui je suis, mes amis ; quel est le vrai ? — Ils me proposent vingt visages que je puis à peine reconnaît
1281 gt visages que je puis à peine reconnaître. Reste le monde, — les choses, les faits, la vie, comme ils disent. Je me suis
1282 ue je puis à peine reconnaître. Reste le monde, —  les choses, les faits, la vie, comme ils disent. Je me suis abandonné au
1283 peine reconnaître. Reste le monde, — les choses, les faits, la vie, comme ils disent. Je me suis abandonné au jeu du hasar
1284 nnaître. Reste le monde, — les choses, les faits, la vie, comme ils disent. Je me suis abandonné au jeu du hasard, jusqu’a
1285 suis abandonné au jeu du hasard, jusqu’au jour où l’ on me fit comprendre qu’il n’est que le jeu de sauter follement d’une
1286 au jour où l’on me fit comprendre qu’il n’est que le jeu de sauter follement d’une habitude dans une autre. Il ne me resta
1287 supportables, si cruellement présentes et dures ? La cause de cette inadaptation, je la soupçonnais si grave, si fondament
1288 tes et dures ? La cause de cette inadaptation, je la soupçonnais si grave, si fondamentale que je préférais me leurrer à c
1289 e des imperfections de détail dont je m’exagérais l’ importance. Et c’est ainsi par feintes que je progressais, jusqu’au jo
1290 mmer peur de rire. Cette amertume au fond de tous les plaisirs, cette envie de rire quand il m’arrivait un ennui, cette inc
1291 à pleurer sur mes déboires, ce malaise seul liait les personnages auxquels je me prêtais. Mais en même temps que je le déco
1292 auxquels je me prêtais. Mais en même temps que je le découvrais, dans tout mon être une force aveugle de violence s’était
1293 nce s’était levée. Ce fut elle qui m’entraîna sur les stades où je connus quelle confiance sourde aux contradictions intime
1294 our de cette brutalité s’organisaient brusquement les éléments désaccordés de ce moi que j’avais tant choyé. « Maintenant,
1295 e — c’était un des premiers jours du printemps —, l’ heure est venue de la violence. Jeunes tempêtes, lavez, bousculez ! La
1296 emiers jours du printemps —, l’heure est venue de la violence. Jeunes tempêtes, lavez, bousculez ! La parole est aux insti
1297 la violence. Jeunes tempêtes, lavez, bousculez ! La parole est aux instincts combatifs et dominateurs par quoi l’homme ne
1298 t aux instincts combatifs et dominateurs par quoi l’ homme ne se distingue plus de l’animal. Louée soit ma force et tout ce
1299 inateurs par quoi l’homme ne se distingue plus de l’ animal. Louée soit ma force et tout ce qui l’exalte, et tout ce qui la
1300 s de l’animal. Louée soit ma force et tout ce qui l’ exalte, et tout ce qui la dompte, tout ce qui sourd en moi de trop gra
1301 ma force et tout ce qui l’exalte, et tout ce qui la dompte, tout ce qui sourd en moi de trop grand pour ma vie — toute ma
1302 ’allais plier des résistances à mon gré, agir sur les choses… Vers le soir, l’ardeur tombe : agir ? dans quel sens ? Provis
1303 résistances à mon gré, agir sur les choses… Vers le soir, l’ardeur tombe : agir ? dans quel sens ? Provisoirement j’étais
1304 ces à mon gré, agir sur les choses… Vers le soir, l’ ardeur tombe : agir ? dans quel sens ? Provisoirement j’étais sauvé d’
1305 s ? Provisoirement j’étais sauvé d’un désordre où l’ on glisse vers la mort. L’important, c’est de ne pas se défaire. Mais
1306 t j’étais sauvé d’un désordre où l’on glisse vers la mort. L’important, c’est de ne pas se défaire. Mais rien n’était réso
1307 sauvé d’un désordre où l’on glisse vers la mort. L’ important, c’est de ne pas se défaire. Mais rien n’était résolu. Me vo
1308 nt je sais qu’il est absolument vain de prétendre les résoudre, mais que je dois feindre d’avoir résolus : c’est ce qui s’a
1309 c’est ce qui s’appelle vivre. Problème de Dieu, à la base. J’aurai garde de m’y perdre au début d’une recherche qui n’a qu
1310 riant, je m’arrête parfois, heureux : « J’ai donc la foi ? » Mais c’est encore une question… Je crois qu’il ne faut pas at
1311 dans sa prière, qu’une révélation vienne chercher l’ âme qui se sent misérable. Je ne recevrai pas une foi, mais peut-être
1312 cevrai pas une foi, mais peut-être arriverai-je à la vouloir, et c’est le tout. S’il est une révélation, c’est en me renda
1313 ais peut-être arriverai-je à la vouloir, et c’est le tout. S’il est une révélation, c’est en me rendant plus parfait que j
1314 en me rendant plus parfait que je lui préparerai les voies. Agir ? Sur moi d’abord. Il ne faut plus que je respecte tout e
1315 nir. Se perfectionner : cela consiste à retrouver l’ instinct le plus profond de l’homme, la vertu conservatrice qui ne peu
1316 fectionner : cela consiste à retrouver l’instinct le plus profond de l’homme, la vertu conservatrice qui ne peut dicter qu
1317 onsiste à retrouver l’instinct le plus profond de l’ homme, la vertu conservatrice qui ne peut dicter que les gestes les pl
1318 retrouver l’instinct le plus profond de l’homme, la vertu conservatrice qui ne peut dicter que les gestes les plus favora
1319 me, la vertu conservatrice qui ne peut dicter que les gestes les plus favorables. J’ai d’autres instincts et je n’entends p
1320 u conservatrice qui ne peut dicter que les gestes les plus favorables. J’ai d’autres instincts et je n’entends pas tous les
1321 J’ai d’autres instincts et je n’entends pas tous les cultiver pour cela seul qu’ils sont naturels : la nature est un champ
1322 es cultiver pour cela seul qu’ils sont naturels : la nature est un champ de luttes, de tendances vers la destruction et ve
1323 nature est un champ de luttes, de tendances vers la destruction et vers la construction ; c’est un mélange à doses égales
1324 luttes, de tendances vers la destruction et vers la construction ; c’est un mélange à doses égales de mort et de vie. Et
1325 ange à doses égales de mort et de vie. Et c’est à l’ intelligence de faire primer la vie, puisque n’est pas encore parfait
1326 de vie. Et c’est à l’intelligence de faire primer la vie, puisque n’est pas encore parfait cet instinct qui est la Vertu.
1327 que n’est pas encore parfait cet instinct qui est la Vertu. Ma vertu est de chercher cette Vertu ; de me replacer dans le
1328 est de chercher cette Vertu ; de me replacer dans le sens de ma vie ; de rendre toutes mes forces complices de mon destin.
1329 in. D’abord donc, choisir Mes instincts, ensuite, les éduquer, selon des lois établies par le concours de l’expérience et d
1330 ensuite, les éduquer, selon des lois établies par le concours de l’expérience et d’un sentiment de convenance en quoi se c
1331 uquer, selon des lois établies par le concours de l’ expérience et d’un sentiment de convenance en quoi se composent le pla
1332 d’un sentiment de convenance en quoi se composent le plaisir et la conscience de Mes limites. Je m’attache particulièremen
1333 de convenance en quoi se composent le plaisir et la conscience de Mes limites. Je m’attache particulièrement à retrouver
1334 ttache particulièrement à retrouver ces limites : la vie moderne, mécanique, nous les fait oublier, d’où cette fatigue gén
1335 ver ces limites : la vie moderne, mécanique, nous les fait oublier, d’où cette fatigue générale qui fausse tout, et qui s’o
1336 usse tout, et qui s’oppose au perfectionnement de l’ esprit, puisqu’elle ne permet que des associations suivant les directi
1337 uisqu’elle ne permet que des associations suivant les directions de moindre résistance. Mais je ne m’emprisonnerai pas dans
1338 isonnerai pas dans ces limites. Ma liberté est de les porter plus loin sans cesse, de battre mes propres records. De ce len
1339 une certaine méfiance vis-à-vis de ma sincérité. La sincérité m’apparaît parfois comme un arrêt artificiel dans ma vie, u
1340 re dangereuse. (On donne corps à une faiblesse en la nommant ; or je ne veux plus de faiblesses4.) Et demain peut-être, ag
1341 s de faiblesses4.) Et demain peut-être, agir dans le monde, si je m’en suis d’abord rendu digne. L’époque nous veut, comme
1342 ns le monde, si je m’en suis d’abord rendu digne. L’ époque nous veut, comme elle veut une conscience. Je fais partie d’un
1343 ence. Je fais partie d’un ensemble social et dans la mesure où j’en dépends, je me dois de m’employer à sa sauvegarde ou à
1344 ormation. Mais il y faut une doctrine, me dit-on. L’ avouerai-je, quand je médite sur une doctrine possible, sur une systém
1345 sation de mes petites certitudes5, j’éprouve vite le sentiment d’être dans un débat étranger à ce véritable débat de ma vi
1346 alaise sans cesse renaissant, comment m’adapter à l’ existence que m’imposent mon corps et les lois du monde, et comment au
1347 adapter à l’existence que m’imposent mon corps et les lois du monde, et comment augmenter ma puissance de jouir, en même te
1348 agir. Que tout cela s’agite sur fond de néant, je le comprends par éclairs, mais une secrète espérance m’emporte de nouvea
1349 orte de nouveau, premier gage du divin… Reprendre l’ offensive — au soir, je m’amuserai à mettre des étiquettes sur mes act
1350 un peu mes lèvres, et s’affirmer à mesure que je le décris. Mais comme un écho profond, une attirance aussi d’anciennes f
1351 ie, dégoût, lueurs éteintes dans une nuit froide. Les notes d’un chant qui voudrait s’élever. Puis enfin la marée de mes dé
1352 otes d’un chant qui voudrait s’élever. Puis enfin la marée de mes désirs. Qu’ils viennent battre ce corps triste, qu’ils l
1353 s. Qu’ils viennent battre ce corps triste, qu’ils l’ emportent d’un flot fou ! Revenez, mes joies du large !… Tiens, j’écou
1354  ! Revenez, mes joies du large !… Tiens, j’écoute le vent ; je pense au monde. Chant des horizons, images qui s’éclairent…
1355 er son plaisir ? Je reste candidat au salut. 4. La sincérité absolue, « scientifique » me paraît aller contre fin. Une a
1356 e et soutenue modifie son objet vivant. Pour moi, la sincérité ne peut être que spontanée. Et spontanément je suis porté à
1357 périences ratées on puisse encore se persuader de la vérité d’un système, hors la religion. Un système n’est pas vrai, il
1358 core se persuader de la vérité d’un système, hors la religion. Un système n’est pas vrai, il est utile. C’est pourquoi je
1359 l est utile. C’est pourquoi je ne puis comprendre les excommunications et les intransigeances. Toutes les aspirations me pa
1360 uoi je ne puis comprendre les excommunications et les intransigeances. Toutes les aspirations me paraissent légitimes chez
1361 s excommunications et les intransigeances. Toutes les aspirations me paraissent légitimes chez d’autres, même celles que je
1362 Rougemont Denis de, « Confession tendancieuse », Les Cahiers du mois, Paris, juin 1926, p. 144-148.
28 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Ramon Fernandez, Messages (juillet 1926)
1363 e construction et de synthèse qui se dessine chez les jeunes écrivains d’aujourd’hui. La « critique philosophique » qu’il v
1364 dessine chez les jeunes écrivains d’aujourd’hui. La « critique philosophique » qu’il voudrait inaugurer « ne se contenter
1365 rait inaugurer « ne se contenterait pas d’étudier les œuvres pour elles-mêmes dans leur signification historique ou techniq
1366 historique ou technique, mais tâcherait d’épouser le dynamisme spirituel qu’elle révèle, puis de les situer dans l’univers
1367 er le dynamisme spirituel qu’elle révèle, puis de les situer dans l’univers humain ». M. Fernandez a tout le talent qu’il f
1368 spirituel qu’elle révèle, puis de les situer dans l’ univers humain ». M. Fernandez a tout le talent qu’il faut pour lui fa
1369 tuer dans l’univers humain ». M. Fernandez a tout le talent qu’il faut pour lui faire acquérir droit de cité. Voici enfin
1370 eçon constructive des expériences entreprises par les générations précédentes. Parce qu’elles se sont souvent enlisées dans
1371 ont souvent enlisées dans leurs recherches, il ne les condamne pas d’un « Jugement » sans issue sinon vers le passé catholi
1372 damne pas d’un « Jugement » sans issue sinon vers le passé catholique ; mais tenant compte de leur effort, il puise dans l
1373 mais tenant compte de leur effort, il puise dans l’ échec même de leurs analyses les éléments de sa synthèse, qui se trouv
1374 ort, il puise dans l’échec même de leurs analyses les éléments de sa synthèse, qui se trouve ainsi continuer leur œuvre, co
1375 verte couronne une série d’expériences négatives. La critique de ces expériences négatives est contenue surtout dans ses e
1376 st, Pater et Stendhal. Certes, il était temps que l’ on dénonce la confusion romantique de l’art avec la vie, qui empoisonn
1377 Stendhal. Certes, il était temps que l’on dénonce la confusion romantique de l’art avec la vie, qui empoisonne et la moral
1378 temps que l’on dénonce la confusion romantique de l’ art avec la vie, qui empoisonne et la morale et l’esthétique modernes.
1379 ’on dénonce la confusion romantique de l’art avec la vie, qui empoisonne et la morale et l’esthétique modernes. Et à ce pr
1380 omantique de l’art avec la vie, qui empoisonne et la morale et l’esthétique modernes. Et à ce propos, il faut souhaiter qu
1381 l’art avec la vie, qui empoisonne et la morale et l’ esthétique modernes. Et à ce propos, il faut souhaiter que M. Fernande
1382 ut souhaiter que M. Fernandez aborde par ce biais l’ œuvre de Gide, qui plus qu’aucune autre me paraît liée à cette confusi
1383 à cette confusion. Mais s’il est bien établi que les lois de la vie sont essentiellement différentes des lois de l’œuvre d
1384 fusion. Mais s’il est bien établi que les lois de la vie sont essentiellement différentes des lois de l’œuvre d’art, il ne
1385 vie sont essentiellement différentes des lois de l’ œuvre d’art, il ne s’en suit pas forcément que l’on doit nier toute co
1386 l’œuvre d’art, il ne s’en suit pas forcément que l’ on doit nier toute communication directe entre l’œuvre et le moi, comm
1387 l’on doit nier toute communication directe entre l’ œuvre et le moi, comme le fait M. Fernandez dans un essai sur l’Autobi
1388 nier toute communication directe entre l’œuvre et le moi, comme le fait M. Fernandez dans un essai sur l’Autobiographie e
1389 munication directe entre l’œuvre et le moi, comme le fait M. Fernandez dans un essai sur l’Autobiographie et le Roman, do
1390 moi, comme le fait M. Fernandez dans un essai sur l’ Autobiographie et le Roman, dont pour ma part je suis loin d’admettre
1391 Fernandez dans un essai sur l’Autobiographie et le Roman, dont pour ma part je suis loin d’admettre plusieurs thèses bea
1392 es. M. Fernandez tente de prouver par exemple que l’ œuvre d’art ne peut être un moyen de connaissance personnelle. Après q
1393 voir se concevoir et s’essayer. » Fort bien, mais l’ œuvre n’est-elle pas une façon particulière de s’essayer ? Je ne puis
1394 e discussion de ces thèses subtiles, d’autant que la position de l’auteur dans cet essai me paraît encore ambiguë : on peu
1395 ces thèses subtiles, d’autant que la position de l’ auteur dans cet essai me paraît encore ambiguë : on peut se demander s
1396 e ambiguë : on peut se demander s’il nie vraiment l’ interaction de la vie et de l’art, ou s’il la condamne plutôt, à cause
1397 ut se demander s’il nie vraiment l’interaction de la vie et de l’art, ou s’il la condamne plutôt, à cause des confusions q
1398 r s’il nie vraiment l’interaction de la vie et de l’ art, ou s’il la condamne plutôt, à cause des confusions qu’il y décèle
1399 ment l’interaction de la vie et de l’art, ou s’il la condamne plutôt, à cause des confusions qu’il y décèle. Le meilleur m
1400 ne plutôt, à cause des confusions qu’il y décèle. Le meilleur morceau du livre est l’essai sur Proust et sa théorie des « 
1401 qu’il y décèle. Le meilleur morceau du livre est l’ essai sur Proust et sa théorie des « intermittences du cœur » dont Fer
1402 que décisive. Et c’est justement par opposition à la conception proustienne de la personnalité — « mosaïque de sensations
1403 ent par opposition à la conception proustienne de la personnalité — « mosaïque de sensations juxtaposées » — qu’il définit
1404 uxtaposées » — qu’il définit sa propre théorie de la « garantie des sentiments », où l’on est en droit de voir le germe d’
1405 pre théorie de la « garantie des sentiments », où l’ on est en droit de voir le germe d’un moralisme nouveau qui se fondera
1406 ie des sentiments », où l’on est en droit de voir le germe d’un moralisme nouveau qui se fonderait solidement sur les donn
1407 moralisme nouveau qui se fonderait solidement sur les données modernes de la psychologie et de la philosophie. Pour nous pr
1408 fonderait solidement sur les données modernes de la psychologie et de la philosophie. Pour nous prémunir contre le pouvoi
1409 sur les données modernes de la psychologie et de la philosophie. Pour nous prémunir contre le pouvoir d’analyse — une ana
1410 e et de la philosophie. Pour nous prémunir contre le pouvoir d’analyse — une analyse qui retient les éléments de la person
1411 re le pouvoir d’analyse — une analyse qui retient les éléments de la personnalité moins le « principe unificateur » — que l
1412 analyse — une analyse qui retient les éléments de la personnalité moins le « principe unificateur » — que la psychologie f
1413 qui retient les éléments de la personnalité moins le « principe unificateur » — que la psychologie freudienne et proustien
1414 sonnalité moins le « principe unificateur » — que la psychologie freudienne et proustienne a porté à un point si dangereux
1415 a porté à un point si dangereux, il nous propose l’ expérience d’un Newman, les exemples d’un Meredith et d’un Stendhal, q
1416 gereux, il nous propose l’expérience d’un Newman, les exemples d’un Meredith et d’un Stendhal, qui ont su « penser dans le
1417 redith et d’un Stendhal, qui ont su « penser dans le train de l’action, faire de la psychologie à la volée », et donc conn
1418 un Stendhal, qui ont su « penser dans le train de l’ action, faire de la psychologie à la volée », et donc connaître l’homm
1419 t su « penser dans le train de l’action, faire de la psychologie à la volée », et donc connaître l’homme dans l’élan qui f
1420 s le train de l’action, faire de la psychologie à la volée », et donc connaître l’homme dans l’élan qui fait sa véritable
1421 de la psychologie à la volée », et donc connaître l’ homme dans l’élan qui fait sa véritable unité. Je me borne à signaler
1422 ogie à la volée », et donc connaître l’homme dans l’ élan qui fait sa véritable unité. Je me borne à signaler encore un thè
1423 thème qui revient dans la plupart de ces essais : l’ esthétique du roman. Fernandez en formule une théorie assez proche du
1424 téraire, et qu’il serait bien utile d’adopter, si l’ on veut éviter les confusions qui sont en train d’ôter sa valeur litté
1425 serait bien utile d’adopter, si l’on veut éviter les confusions qui sont en train d’ôter sa valeur littéraire au genre le
1426 ont en train d’ôter sa valeur littéraire au genre le plus encombré et le plus impur qui soit. On n’a pas ménagé les critiq
1427 sa valeur littéraire au genre le plus encombré et le plus impur qui soit. On n’a pas ménagé les critiques à cette œuvre. C
1428 mbré et le plus impur qui soit. On n’a pas ménagé les critiques à cette œuvre. Cela tient surtout à sa forme : il est parfo
1429 forme : il est parfois agaçant de pressentir sous l’ expression trop technique ou obscure, une richesse d’idées neuves et f
1430 Périlleuse situation que la sienne, en effet, où l’ on court le double risque de paraître trop littéraire aux philosophes,
1431 situation que la sienne, en effet, où l’on court le double risque de paraître trop littéraire aux philosophes, et trop ph
1432 ndez un certain recul par rapport à ses idées, on le sent un peu gauche encore dans les positions conquises. Il n’empêche
1433 à ses idées, on le sent un peu gauche encore dans les positions conquises. Il n’empêche que son livre manifeste une belle u
1434 uvre comme Plaisir des Sports de Jean Prévost, et les essais politiques de Drieu la Rochelle, les Messages de Fernandez son
1435 t, et les essais politiques de Drieu la Rochelle, les Messages de Fernandez sont les premières contributions à l’établissem
1436 s de Fernandez sont les premières contributions à l’ établissement d’une éthique adaptée aux besoins modernes. w. Rougem
1437 Messages  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, juillet 1926, p. 124-125.
1438  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , juillet 1926, p. 124-125.
29 1926, Articles divers (1924–1930). Les Bestiaires, par Henry de Montherlant (10 juillet 1926)
1439 Les Bestiaires, par Henry de Montherlant (10 juillet 1926)h Je ferme l
1440 nry de Montherlant (10 juillet 1926)h Je ferme les Bestiaires, et me tirant hors de ce « long songe de violence et de vo
1441 ffées par des forces qui se lèvent. Car telle est la vertu de ce livre, qu’on l’éprouve d’abord trop vivement pour le juge
1442 lèvent. Car telle est la vertu de ce livre, qu’on l’ éprouve d’abord trop vivement pour le juger. L’auteur l’appelle un « p
1443 livre, qu’on l’éprouve d’abord trop vivement pour le juger. L’auteur l’appelle un « poème solaire », l’éditeur un roman, p
1444 on l’éprouve d’abord trop vivement pour le juger. L’ auteur l’appelle un « poème solaire », l’éditeur un roman, parce que ç
1445 uve d’abord trop vivement pour le juger. L’auteur l’ appelle un « poème solaire », l’éditeur un roman, parce que ça se vend
1446 e juger. L’auteur l’appelle un « poème solaire », l’ éditeur un roman, parce que ça se vend mieux. Ce récit des premiers co
1447 e, sans cette orchestration de thèmes qui faisait la richesse du Songe, mais d’une ligne plus ferme, d’une unité plus pure
1448 ne ligne plus ferme, d’une unité plus pure aussi. Le sujet était périlleux : si particulier, il prêtait à des abus de pitt
1449 n’a pas toujours échappé, mais qu’il domine dans l’ ensemble et entraîne dans l’allure puissante à la fois et désinvolte d
1450 ais qu’il domine dans l’ensemble et entraîne dans l’ allure puissante à la fois et désinvolte de son récit. On a souvent pa
1451 emiers ouvrages de Montherlant. Cette fois-ci, on le traite de naturaliste. Mais comment montrer des taureaux sans que cel
1452 t montrer des taureaux sans que cela sente un peu l’ étable ? L’étonnant, c’est de voir à quel point Montherlant reste poèt
1453 es taureaux sans que cela sente un peu l’étable ? L’ étonnant, c’est de voir à quel point Montherlant reste poète jusque da
1454 à quel point Montherlant reste poète jusque dans la description la plus réaliste de la vie animale. Et n’est-ce pas juste
1455 ontherlant reste poète jusque dans la description la plus réaliste de la vie animale. Et n’est-ce pas justement parce qu’i
1456 te jusque dans la description la plus réaliste de la vie animale. Et n’est-ce pas justement parce qu’il est poète qu’il pe
1457 out rôdent des présences animales. Tandis que sur la plaine s’élève le long beuglement des taureaux et le ohéohéohé des bo
1458 sences animales. Tandis que sur la plaine s’élève le long beuglement des taureaux et le ohéohéohé des bouviers « comme un
1459 plaine s’élève le long beuglement des taureaux et le ohéohéohé des bouviers « comme un chant mystérieux entendu au-dessus
1460 « comme un chant mystérieux entendu au-dessus de la mer », il y a toujours dans un coin du tableau des ruades, des chevau
1461 u des ruades, des chevaux qui partent tout droit, la tête dressée, des vachettes qui se mordillent et se frôlent amoureuse
1462 bêtes de désir ». Une intelligence si profonde de la vie animale suppose entre l’homme et la bête une sympathie que Monthe
1463 gence si profonde de la vie animale suppose entre l’ homme et la bête une sympathie que Montherlant note à plusieurs repris
1464 ofonde de la vie animale suppose entre l’homme et la bête une sympathie que Montherlant note à plusieurs reprises. C’est «
1465 ontherlant note à plusieurs reprises. C’est « par la divination de cet amour qu’Alban (le jeune héros du récit) sent ce qu
1466 C’est « par la divination de cet amour qu’Alban ( le jeune héros du récit) sent ce que sent la bête en même temps qu’elle.
1467 ’Alban (le jeune héros du récit) sent ce que sent la bête en même temps qu’elle. Et parce qu’il sait ce qu’elle va faire,
1468 Et parce qu’il sait ce qu’elle va faire, il peut la dominer… : on ne vainc vraiment que ce qu’on aime, et les victorieux
1469 ner… : on ne vainc vraiment que ce qu’on aime, et les victorieux sont d’immenses amants »6. Mais envers les taureaux cet am
1470 victorieux sont d’immenses amants »6. Mais envers les taureaux cet amour tourne en adoration ou en une véritable horreur sa
1471 Voici Alban devant une bête qu’il devra combattre le lendemain : « Salaud, cochon, saligaud ! » Il l’apostrophait ainsi t
1472 le lendemain : « Salaud, cochon, saligaud ! » Il l’ apostrophait ainsi tout bas, sur un ton révérenciel, et comme on dérou
1473 évérenciel, et comme on déroule une litanie. Sous les grands cils brillants, lustrés par la lumière descendante, les prunel
1474 anie. Sous les grands cils brillants, lustrés par la lumière descendante, les prunelles laiteuses du dieu avaient un refle
1475 ls brillants, lustrés par la lumière descendante, les prunelles laiteuses du dieu avaient un reflet bleu clair, soudain inq
1476 avaient un reflet bleu clair, soudain inquiètes à l’ approche de l’inconnu. Nulle part mieux que dans la description des t
1477 let bleu clair, soudain inquiètes à l’approche de l’ inconnu. Nulle part mieux que dans la description des taureaux ne se
1478 approche de l’inconnu. Nulle part mieux que dans la description des taureaux ne se manifeste ce passage du réalisme le pl
1479 s taureaux ne se manifeste ce passage du réalisme le plus hardi à un lyrisme plein de simple grandeur. Voici la mort du ta
1480 ardi à un lyrisme plein de simple grandeur. Voici la mort du taureau dit « le Mauvais Ange » : La bête chancela de l’arri
1481 e simple grandeur. Voici la mort du taureau dit «  le Mauvais Ange » : La bête chancela de l’arrière-train, tenta de se ra
1482 ici la mort du taureau dit « le Mauvais Ange » : La bête chancela de l’arrière-train, tenta de se raidir, enfin croula su
1483 au dit « le Mauvais Ange » : La bête chancela de l’ arrière-train, tenta de se raidir, enfin croula sur le flanc, accompli
1484 rière-train, tenta de se raidir, enfin croula sur le flanc, accomplissant sa destinée. Quelques secondes encore elle clign
1485 rent peu à peu, comme un corps qu’on gonflerait à la pompe, tandis que dans cet agrandissement les articulations grinçaien
1486 it à la pompe, tandis que dans cet agrandissement les articulations grinçaient, avec le bruit d’un câble de navire qu’on se
1487 agrandissement les articulations grinçaient, avec le bruit d’un câble de navire qu’on serre sur un treuil. Elle arriva ave
1488 n serre sur un treuil. Elle arriva avec emphase à la cime de son spasme, comme l’homme à la cime de son plaisir, et comme
1489 rriva avec emphase à la cime de son spasme, comme l’ homme à la cime de son plaisir, et comme lui, elle y resta immobile. E
1490 emphase à la cime de son spasme, comme l’homme à la cime de son plaisir, et comme lui, elle y resta immobile. Et son âme
1491 t son âme divine s’échappa, pleurant ses jeux, et les génisses, et la chère plaine. De tels passages qui abondent dans les
1492 s’échappa, pleurant ses jeux, et les génisses, et la chère plaine. De tels passages qui abondent dans les Bestiaires font
1493 chère plaine. De tels passages qui abondent dans les Bestiaires font pardonner bien d’autres pages de vrais délires taurol
1494 utres pages de vrais délires taurologiques. Quand le lyrisme de Montherlant décolle de la réalité, c’est tout de suite une
1495 iques. Quand le lyrisme de Montherlant décolle de la réalité, c’est tout de suite une orgie d’évocations antiques, de rapp
1496 ents superstitieux, de grands symboles païens, et l’ on se perd dans un syncrétisme effarant, où Mithra, Jésus, les taureau
1497 d dans un syncrétisme effarant, où Mithra, Jésus, les taureaux et Alban confondent leurs génies dans une sorte de cauchemar
1498 e qu’on veut de ce paganisme exalté, tout ivre de la fumée des sacrifices sanglants. Pour ma part, je le trouve assez peu
1499 fumée des sacrifices sanglants. Pour ma part, je le trouve assez peu humain et comme obsédé par une idée de violence toni
1500 s donnons ? » ⁂ Il est impossible de ne voir dans les Bestiaires qu’une évocation de l’Espagne et du génie taurin. Ce qui p
1501 e ne voir dans les Bestiaires qu’une évocation de l’ Espagne et du génie taurin. Ce qui perce à chaque page, ce qui peu à p
1502 perce à chaque page, ce qui peu à peu obsède dans l’ inflexion des phrases, ce qui s’élève en fin de compte de tous ces tab
1503 ous ces tableaux de violence et de passion, c’est la présence d’un tempérament. À l’inverse de tant d’autres qui s’analyse
1504 de passion, c’est la présence d’un tempérament. À l’ inverse de tant d’autres qui s’analysent sans fin, avant que d’être, M
1505 soulève directement aucun des grands problèmes de l’ heure. La violence même qui sourd dans son être intime l’en empêche, l
1506 irectement aucun des grands problèmes de l’heure. La violence même qui sourd dans son être intime l’en empêche, le préserv
1507 . La violence même qui sourd dans son être intime l’ en empêche, le préserve des états d’incertitude douloureux, où ces pro
1508 même qui sourd dans son être intime l’en empêche, le préserve des états d’incertitude douloureux, où ces problèmes viennen
1509 douloureux, où ces problèmes viennent se poser à l’ esprit, profitant de son désaccord avec la vie. Ni métaphysicien, ni l
1510 poser à l’esprit, profitant de son désaccord avec la vie. Ni métaphysicien, ni logicien, dit-il d’Alban — (de lui-même) —
1511 pas à ce qui est triste ou ennuyeux, que ce soit l’ idée de la mort ou les soucis politiques, sociaux, etc., et il ne met
1512 qui est triste ou ennuyeux, que ce soit l’idée de la mort ou les soucis politiques, sociaux, etc., et il ne met de la grav
1513 ste ou ennuyeux, que ce soit l’idée de la mort ou les soucis politiques, sociaux, etc., et il ne met de la gravité que dans
1514 soucis politiques, sociaux, etc., et il ne met de la gravité que dans les choses voluptueuses, je n’ai pas dit les choses
1515 ociaux, etc., et il ne met de la gravité que dans les choses voluptueuses, je n’ai pas dit les choses sentimentales. Le tra
1516 que dans les choses voluptueuses, je n’ai pas dit les choses sentimentales. Le tragique de la vie ne lui échappe pas. Il en
1517 ueuses, je n’ai pas dit les choses sentimentales. Le tragique de la vie ne lui échappe pas. Il en parle, il le chante avec
1518 pas dit les choses sentimentales. Le tragique de la vie ne lui échappe pas. Il en parle, il le chante avec pathétique. Ma
1519 que de la vie ne lui échappe pas. Il en parle, il le chante avec pathétique. Mais c’est parce qu’il est poète : le chant f
1520 ec pathétique. Mais c’est parce qu’il est poète : le chant fini, il n’y pense plus. On comprend qu’une telle attitude agac
1521 se soucient avant tout de trouver des réponses de l’ intelligence ou de la foi aux inquiétudes profondes de leurs âmes sépa
1522 t de trouver des réponses de l’intelligence ou de la foi aux inquiétudes profondes de leurs âmes séparées de Dieu. Monther
1523 é dont il manifeste avec une magnifique insolence les forces créatrices, ne vaut-elle pas d’être élevée en témoignage pour
1524 levée en témoignage pour notre exaltation ? Comme la vue des athlètes en action, un tel livre communique une puissance phy
1525 munique une puissance physique, un mouvement vers la vie ardente qui peut entraîner l’âme dans un élan de grandeur. N’est-
1526 mouvement vers la vie ardente qui peut entraîner l’ âme dans un élan de grandeur. N’est-ce point une solution aussi ? Plut
1527 ois à ces forces obscures qui nous replacent dans l’ intelligence de l’instinct universel et nous élèvent à une vie plus âp
1528 bscures qui nous replacent dans l’intelligence de l’ instinct universel et nous élèvent à une vie plus âpre et violemment c
1529 à une vie plus âpre et violemment contractée, par la grâce de l’éternel Désir ? 6. Il est curieux de noter que de tels p
1530 us âpre et violemment contractée, par la grâce de l’ éternel Désir ? 6. Il est curieux de noter que de tels passages vien
1531 noter que de tels passages viennent à l’appui de la théorie de l’instinct de Bergson. Bergson suppose aussi entre le sphe
1532 tels passages viennent à l’appui de la théorie de l’ instinct de Bergson. Bergson suppose aussi entre le sphex qui pique un
1533 ’instinct de Bergson. Bergson suppose aussi entre le sphex qui pique une chenille précisément aux trois-centres nerveux, e
1534 « une sympathie (au sens étymologique du mot) qui la renseigne du dedans, pour ainsi dire, sur la vulnérabilité de la chen
1535 qui la renseigne du dedans, pour ainsi dire, sur la vulnérabilité de la chenille. » (Évolution créatrice, p. 188) Je n’ai
1536 dedans, pour ainsi dire, sur la vulnérabilité de la chenille. » (Évolution créatrice, p. 188) Je n’ai pas la place de cit
1537 ille. » (Évolution créatrice, p. 188) Je n’ai pas la place de citer ici plusieurs autres passages qui préciseraient ce par
1538 Denis de, « [Compte rendu] Henry de Montherlant, Les Bestiaires  », La Semaine littéraire, Genève, 10 juillet 1926, p. 335
1539 e rendu] Henry de Montherlant, Les Bestiaires  », La Semaine littéraire, Genève, 10 juillet 1926, p. 335.
1540 erlant, Les Bestiaires  », La Semaine littéraire, Genève , 10 juillet 1926, p. 335.
30 1926, Journal de Genève, articles (1926–1982). Le Dépaysement oriental (16 juillet 1926)
1541 Le Dépaysement oriental (16 juillet 1926)a Il y a dans le monde intel
1542 sement oriental (16 juillet 1926)a Il y a dans le monde intellectuel une « Question d’Orient » dont on ne peut plus méc
1543 stion d’Orient » dont on ne peut plus méconnaître l’ urgence. Des prophètes — hindous à demi-européanisés ou germains désil
1544 nisés ou germains désillusionnés — nous annoncent le « crépuscule du monde occidental », et, au-dessus des ruines prochain
1545 chaines de nos cités mécaniciennes, ils rallument le mirage d’un Orient paradisiaque d’où nous viendraient une fois de plu
1546 radisiaque d’où nous viendraient une fois de plus la sagesse et la lumière. De récentes enquêtes ont dénoncé certaines des
1547 ù nous viendraient une fois de plus la sagesse et la lumière. De récentes enquêtes ont dénoncé certaines des confusions su
1548 inaires. Beaucoup pourtant subsistent encore. Or, le nouveau livre de M. de Traz1, par les précisions importantes qu’il ap
1549 encore. Or, le nouveau livre de M. de Traz1, par les précisions importantes qu’il apporte sur les rapports de l’Orient et
1550 par les précisions importantes qu’il apporte sur les rapports de l’Orient et de l’Europe, me paraît destiné à lever plusie
1551 ons importantes qu’il apporte sur les rapports de l’ Orient et de l’Europe, me paraît destiné à lever plusieurs des plus te
1552 qu’il apporte sur les rapports de l’Orient et de l’ Europe, me paraît destiné à lever plusieurs des plus tenaces de ces co
1553 us tenaces de ces confusions. M. de Traz a visité l’ Égypte, ses habitants, ses tombeaux et son passé, en curieux avide du
1554 avec une sorte d’acharnement, comme seul il sait l’ être aujourd’hui sans que cela nuise en rien à un don de sympathie qui
1555 ise en rien à un don de sympathie qui est parfois la plus subtile de ses ruses de psychologue. C’est parce que son livre,
1556 hevés, n’est ni un album de vues pittoresques, ni le journal plus ou moins lyrique auquel nous ont habitués les voyageurs
1557 al plus ou moins lyrique auquel nous ont habitués les voyageurs en Orient, mais une suite de coups d’œil aigus sur l’âme or
1558 n Orient, mais une suite de coups d’œil aigus sur l’ âme orientale de l’islam, que nous l’avons lu avec un intérêt si soute
1559 suite de coups d’œil aigus sur l’âme orientale de l’ islam, que nous l’avons lu avec un intérêt si soutenu et parfois — je
1560 il aigus sur l’âme orientale de l’islam, que nous l’ avons lu avec un intérêt si soutenu et parfois — je pense à certaines
1561 tie orientale de lui-même, comme c’est si souvent le cas, mais bien sur l’Orient. Encore faut-il s’entendre : les meilleur
1562 ême, comme c’est si souvent le cas, mais bien sur l’ Orient. Encore faut-il s’entendre : les meilleurs documents sur l’Orie
1563 is bien sur l’Orient. Encore faut-il s’entendre : les meilleurs documents sur l’Orient sont les œuvres des Orientaux. L’int
1564 faut-il s’entendre : les meilleurs documents sur l’ Orient sont les œuvres des Orientaux. L’intérêt d’un livre comme celui
1565 endre : les meilleurs documents sur l’Orient sont les œuvres des Orientaux. L’intérêt d’un livre comme celui-ci est plus da
1566 ments sur l’Orient sont les œuvres des Orientaux. L’ intérêt d’un livre comme celui-ci est plus dans l’opposition des deux
1567 L’intérêt d’un livre comme celui-ci est plus dans l’ opposition des deux mondes que dans la peinture elle-même de l’Orient.
1568 t plus dans l’opposition des deux mondes que dans la peinture elle-même de l’Orient. Tandis que s’accumulent les traits qu
1569 des deux mondes que dans la peinture elle-même de l’ Orient. Tandis que s’accumulent les traits qui composent le portrait m
1570 re elle-même de l’Orient. Tandis que s’accumulent les traits qui composent le portrait moral de l’Oriental, celui de l’Euro
1571 Tandis que s’accumulent les traits qui composent le portrait moral de l’Oriental, celui de l’Européen se précise dans la
1572 ent les traits qui composent le portrait moral de l’ Oriental, celui de l’Européen se précise dans la même mesure, — et aus
1573 mposent le portrait moral de l’Oriental, celui de l’ Européen se précise dans la même mesure, — et aussi la figure de l’aut
1574 e l’Oriental, celui de l’Européen se précise dans la même mesure, — et aussi la figure de l’auteur : car il n’est guère de
1575 ropéen se précise dans la même mesure, — et aussi la figure de l’auteur : car il n’est guère de comparaison valable qu’ent
1576 cise dans la même mesure, — et aussi la figure de l’ auteur : car il n’est guère de comparaison valable qu’entre individus,
1577 er mieux que lui-même. S’il dit des Égyptiens : «  Le mensonge, autant qu’une politesse, leur paraît une beauté », c’est po
1578 par contraste une « préférence irréductible pour le vrai ». Ce qui lui permet de voir profond dans cet islam qu’il qualif
1579 cet islam qu’il qualifie de « religion du fil de l’ eau », ou de « prodigieux stupéfiant », tandis que « l’attrait du chri
1580  », ou de « prodigieux stupéfiant », tandis que «  l’ attrait du christianisme est dans l’inquiétude qu’il nous inflige ». «
1581 tandis que « l’attrait du christianisme est dans l’ inquiétude qu’il nous inflige ». « Ils mettent leur âme en veilleuse,
1582 i de soi-même nous avons fait une vertu. Eux, ils l’ ont rendu facile et en ont fait un plaisir. » Et encore ceci que je tr
1583 re ceci que je trouve si juste : « Ce qui définit le plus profondément l’Occidental, c’est peut-être la fidélité. » Ses re
1584 si juste : « Ce qui définit le plus profondément l’ Occidental, c’est peut-être la fidélité. » Ses remarques sur la psycho
1585 e plus profondément l’Occidental, c’est peut-être la fidélité. » Ses remarques sur la psychologie de l’Égyptien ne sont pa
1586 c’est peut-être la fidélité. » Ses remarques sur la psychologie de l’Égyptien ne sont pas moins subtiles et le mènent à c
1587 a fidélité. » Ses remarques sur la psychologie de l’ Égyptien ne sont pas moins subtiles et le mènent à cette constatation
1588 logie de l’Égyptien ne sont pas moins subtiles et le mènent à cette constatation fondamentale que « notre intelligence et
1589 fondamentale que « notre intelligence et celle de l’ Oriental ne sont pas superposables ». Dès lors, comment collaborer, co
1590 si c’est impossible, pourra-t-on du moins éviter le conflit que certains prétendent menaçant ? Malgré l’« anxiété mélanco
1591 conflit que certains prétendent menaçant ? Malgré l’ « anxiété mélancolique » qu’il éprouve à se sentir si loin de l’Orient
1592 lancolique » qu’il éprouve à se sentir si loin de l’ Oriental, les conclusions de M. de Traz — si tant est qu’on peut concl
1593 qu’il éprouve à se sentir si loin de l’Oriental, les conclusions de M. de Traz — si tant est qu’on peut conclure en une ma
1594 t que nous ayons à chercher là-bas notre salut. «  La seule leçon à attendre des musulmans, c’est que le spectacle de leur
1595 a seule leçon à attendre des musulmans, c’est que le spectacle de leur décadence nous enseigne comment éviter la nôtre. »
1596 le de leur décadence nous enseigne comment éviter la nôtre. » La place me manque pour parler comme j’aurais voulu le faire
1597 écadence nous enseigne comment éviter la nôtre. » La place me manque pour parler comme j’aurais voulu le faire des deux au
1598 place me manque pour parler comme j’aurais voulu le faire des deux autres parties du volume, d’une importance moins actue
1599 e, mais d’une qualité d’art peut-être supérieure. Les méditations sur les ruines de la Haute-Égypte révèlent en de Traz un
1600 é d’art peut-être supérieure. Les méditations sur les ruines de la Haute-Égypte révèlent en de Traz un philosophe de l’hist
1601 tre supérieure. Les méditations sur les ruines de la Haute-Égypte révèlent en de Traz un philosophe de l’histoire aux vues
1602 Haute-Égypte révèlent en de Traz un philosophe de l’ histoire aux vues larges et pourtant réalistes, aux hypothèses hardies
1603 t pourtant réalistes, aux hypothèses hardies — de la hardiesse de ce bon sens qui est le plus éloigné du sens commun — mai
1604 hardies — de la hardiesse de ce bon sens qui est le plus éloigné du sens commun — mais qui reste trop méfiant de tout rom
1605 nt de tout romantisme pour édifier aucun système. Le livre se termine par un voyage à Jérusalem : le christianisme n’est-i
1606 . Le livre se termine par un voyage à Jérusalem : le christianisme n’est-il pas le plus beau don de l’Orient à l’Europe ?
1607 oyage à Jérusalem : le christianisme n’est-il pas le plus beau don de l’Orient à l’Europe ? Il y a là des pages d’un accen
1608 le christianisme n’est-il pas le plus beau don de l’ Orient à l’Europe ? Il y a là des pages d’un accent très noble et cour
1609 nisme n’est-il pas le plus beau don de l’Orient à l’ Europe ? Il y a là des pages d’un accent très noble et courageux mêlé,
1610 rfois, d’une certaine amertume, où de Traz quitte le ton mesuré qu’il s’impose d’ordinaire. Mais j’avoue que m’a parfois u
1611 oue que m’a parfois un peu gêné cette présence de la mort qu’il fait sentir partout aux lieux mêmes où naquit la religion
1612 ’il fait sentir partout aux lieux mêmes où naquit la religion du « Prince de la vie »… Qu’on ne croie pas, d’ailleurs, que
1613 lieux mêmes où naquit la religion du « Prince de la vie »… Qu’on ne croie pas, d’ailleurs, que l’attitude presque constam
1614 de la vie »… Qu’on ne croie pas, d’ailleurs, que l’ attitude presque constamment critique de M. de Traz diminue l’intérêt
1615 resque constamment critique de M. de Traz diminue l’ intérêt vivant de son livre : cette impartialité même, cette façon de
1616 es, révèle sa personnalité peut-être mieux que ne le feraient une suite de pages lyriques toujours un peu stylisées. Il ap
1617 oujours un peu stylisées. Il apparaît, ici, comme le type du voyageur intelligent, qui n’accepte d’être séduit que pour « 
1618 arer et, parfois, juger ; préférant obstinément à la légende le vrai, même amer, non par défaut d’un sens artistique dont
1619 rfois, juger ; préférant obstinément à la légende le vrai, même amer, non par défaut d’un sens artistique dont plusieurs d
1620 tistique dont plusieurs de ses morceaux attestent la délicatesse, mais parce qu’il sait y trouver les seuls motifs réels d
1621 t la délicatesse, mais parce qu’il sait y trouver les seuls motifs réels d’exaltation. 1. Le Dépaysement oriental, chez
1622 rouver les seuls motifs réels d’exaltation. 1. Le Dépaysement oriental, chez Grasset, Paris. a. Rougemont Denis de, «
1623 gemont Denis de, « [Compte rendu] Robert de Traz, Le Dépaysement oriental  », Journal de Genève, Genève, 16 juillet 1926,
1624 t de Traz, Le Dépaysement oriental  », Journal de Genève , Genève, 16 juillet 1926, p. 1.
1625 z, Le Dépaysement oriental  », Journal de Genève, Genève , 16 juillet 1926, p. 1.
31 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Henry de Montherlant, Les Bestiaires (septembre 1926)
1626 Henry de Montherlant, Les Bestiaires (septembre 1926)x J’éprouve quelque gêne à porter un ju
1627 Montherlant : dans ce récit plus encore que dans les œuvres précédentes, on voit beaucoup moins l’œuvre d’art que l’auteur
1628 ns les œuvres précédentes, on voit beaucoup moins l’ œuvre d’art que l’auteur ; dans ce portrait de Montherlant toréador, à
1629 édentes, on voit beaucoup moins l’œuvre d’art que l’ auteur ; dans ce portrait de Montherlant toréador, à 16 ans, c’est sur
1630 de Montherlant toréador, à 16 ans, c’est surtout le Montherlant actuel que l’on sent. C’est dire que le livre vaut par so
1631 à 16 ans, c’est surtout le Montherlant actuel que l’ on sent. C’est dire que le livre vaut par son allure plus que par des
1632 Montherlant actuel que l’on sent. C’est dire que le livre vaut par son allure plus que par des qualités de composition ou
1633 savante sensualité, pour ces insolences jolies et les subites violences, qui composent la séduction de cet « homme de la Re
1634 es jolies et les subites violences, qui composent la séduction de cet « homme de la Renaissance », pour quelques descripti
1635 ces, qui composent la séduction de cet « homme de la Renaissance », pour quelques descriptions des prairies espagnoles ple
1636 ur communier, il faudrait sans doute être né sous le signe du Taureau. Mais il sera pardonné à Montherlant beaucoup de déf
1637 a souveraine désinvolture. Elle est tonique comme le spectacle des athlètes. Et c’est elle avant tout que j’admire dans ce
1638 ets d’esprit ! Qu’ils paissent éternellement dans les prairies célestes, pour avoir donné une grande gloire aux jeunes homm
1639 s ! » Mais ce jeune homme qui écrivit naguère sur les Fontaines du désir certaines pages magnifiques et sobres, jetées de h
1640 pages magnifiques et sobres, jetées de haut avec la nonchalance des vrais puissants, je compte qu’il saura fonder sa gloi
1641 Denis de, « [Compte rendu] Henry de Montherlant, Les Bestiaires  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, s
1642 stiaires  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, septembre 1926, p. 397-398.
1643  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , septembre 1926, p. 397-398.
32 1926, Articles divers (1924–1930). Soir de Florence (13 novembre 1926)
1644 ce (13 novembre 1926)i Des cris mouraient vers les berges du fleuve jaune, entre les deux façades longues que la ville p
1645 mouraient vers les berges du fleuve jaune, entre les deux façades longues que la ville présente au couchant, dans ce corri
1646 fleuve jaune, entre les deux façades longues que la ville présente au couchant, dans ce corridor de lumière où elle accue
1647 nt, dans ce corridor de lumière où elle accueille le ciel — et derrière, elle devient plus secrète. Vers l’est, des collin
1648 el — et derrière, elle devient plus secrète. Vers l’ est, des collines fluides et roses. De l’autre côté, c’est le vide, où
1649 collines fluides et roses. De l’autre côté, c’est le vide, où s’en vont lentement les eaux et les lueurs, vers la mer. Sur
1650 autre côté, c’est le vide, où s’en vont lentement les eaux et les lueurs, vers la mer. Sur le Lungarno trop vaste et nu, le
1651 c’est le vide, où s’en vont lentement les eaux et les lueurs, vers la mer. Sur le Lungarno trop vaste et nu, les voitures r
1652 s’en vont lentement les eaux et les lueurs, vers la mer. Sur le Lungarno trop vaste et nu, les voitures revenaient au pas
1653 entement les eaux et les lueurs, vers la mer. Sur le Lungarno trop vaste et nu, les voitures revenaient au pas des Cascine
1654 s, vers la mer. Sur le Lungarno trop vaste et nu, les voitures revenaient au pas des Cascine. Vers sept heures, il n’y en e
1655 il n’y en eut presque plus. Nous étions seuls sur le pavé qui exhalait sa chaleur, au long des quais sans bancs pour notre
1656 s’éloignait derrière nous qui suivions maintenant le sentier du bord du fleuve, plus bas que la Promenade désertée. Sur le
1657 tenant le sentier du bord du fleuve, plus bas que la Promenade désertée. Sur les eaux, comme immobiles, des nuages rouges
1658 u fleuve, plus bas que la Promenade désertée. Sur les eaux, comme immobiles, des nuages rouges et le vert dur des berges :
1659 r les eaux, comme immobiles, des nuages rouges et le vert dur des berges : un malaise montait dans l’air plus frais, avec
1660 le vert dur des berges : un malaise montait dans l’ air plus frais, avec l’odeur du limon. Nous marchions vers ces hauts a
1661  : un malaise montait dans l’air plus frais, avec l’ odeur du limon. Nous marchions vers ces hauts arbres clairs, au tourna
1662 hauts arbres clairs, au tournant du fleuve, parmi les dissonances mélancoliques des lumières et des odeurs, espérant entrer
1663 Seule une maison blanche est arrêtée tout près de l’ eau. Mais ce n’est pas d’elle que vient cette chanson jamais entendue
1664 entendue qui nous accompagne depuis un moment sur le chemin de l’autre rive. Il y a un homme debout à l’avant d’un char ti
1665 chemin de l’autre rive. Il y a un homme debout à l’ avant d’un char tiré par des bœufs blancs. Comme une apparition. (Tu p
1666 de triste volupté emplit notre monde à ce chant. L’ odeur du fleuve est son parfum, le soleil rouge sa douleur. Les bœufs
1667 nde à ce chant. L’odeur du fleuve est son parfum, le soleil rouge sa douleur. Les bœufs blancs, les roues peintes du char,
1668 leuve est son parfum, le soleil rouge sa douleur. Les bœufs blancs, les roues peintes du char, l’Italie des poètes… Mais ce
1669 um, le soleil rouge sa douleur. Les bœufs blancs, les roues peintes du char, l’Italie des poètes… Mais ce pays tout entier
1670 eur. Les bœufs blancs, les roues peintes du char, l’ Italie des poètes… Mais ce pays tout entier pâmé dans une beauté que s
1671 nt tant de souvenirs n’a d’autre nom que celui de l’ instant, ô mélodieuse lassitude. Vivre ainsi simplement. Sans pensée,
1672 , perdus dans un soir de n’importe où, un soir de la Nature… L’homme chante une plainte inouïe de pureté. Deux phrases rap
1673 ns un soir de n’importe où, un soir de la Nature… L’ homme chante une plainte inouïe de pureté. Deux phrases rapides ondule
1674 uïe de pureté. Deux phrases rapides ondulent dans l’ air lourd. Le chant descend très doucement la berge, les bœufs s’engag
1675 . Deux phrases rapides ondulent dans l’air lourd. Le chant descend très doucement la berge, les bœufs s’engagent dans le m
1676 dans l’air lourd. Le chant descend très doucement la berge, les bœufs s’engagent dans le marais, cherchant le gué. Plus pr
1677 lourd. Le chant descend très doucement la berge, les bœufs s’engagent dans le marais, cherchant le gué. Plus proches, les
1678 rès doucement la berge, les bœufs s’engagent dans le marais, cherchant le gué. Plus proches, les syllabes nous parviennent
1679 e, les bœufs s’engagent dans le marais, cherchant le gué. Plus proches, les syllabes nous parviennent au ras du fleuve som
1680 t dans le marais, cherchant le gué. Plus proches, les syllabes nous parviennent au ras du fleuve sombre. Nul désir en nous
1681 mbre. Nul désir en nous de comprendre ce lamento. Le ciel est un silence qui s’impose à nos pensées. Ici la vie n’a presqu
1682 el est un silence qui s’impose à nos pensées. Ici la vie n’a presque plus de sens, comme le fleuve. Elle n’est qu’odeurs,
1683 nsées. Ici la vie n’a presque plus de sens, comme le fleuve. Elle n’est qu’odeurs, formes mouvantes, remous dans l’air et
1684 le n’est qu’odeurs, formes mouvantes, remous dans l’ air et musiques sourdes. Penser serait sacrilège, comme une barre droi
1685 n tableau. Nos yeux ont regardé longtemps — où va l’ âme durant ces minutes ? — jusqu’à ce que les bœufs ruisselants remont
1686 où va l’âme durant ces minutes ? — jusqu’à ce que les bœufs ruisselants remontent sur notre rive. Fraîcheur humide, parfums
1687 ement vague des roseaux aux feuilles sèches… Puis la brume est venue comme une envie de sommeil. Une lampe dans la maison
1688 venue comme une envie de sommeil. Une lampe dans la maison blanche nous a révélé proche la nuit. Nous nous sommes retourn
1689 lampe dans la maison blanche nous a révélé proche la nuit. Nous nous sommes retournés vers la ville. Fleurs de lumières s
1690 é proche la nuit. Nous nous sommes retournés vers la ville. Fleurs de lumières sur les champs sombres du ciel de l’est, e
1691 retournés vers la ville. Fleurs de lumières sur les champs sombres du ciel de l’est, et une façade parfaite répond encore
1692 urs de lumières sur les champs sombres du ciel de l’ est, et une façade parfaite répond encore au couchant. San Miniato sur
1693 chant. San Miniato sur sa colline. Derrière nous, les arbres se brouillent dans une buée sans couleurs, nous quittons un my
1694 us quittons un mystère à jamais impénétrable pour l’ homme, nous fuyons ces bords où conspirent des ombres informes et des
1695 nous laisse gourds et faibles, caressant en nous la lâche volupté de sentir l’esprit se défaire et couler sans fin vers u
1696 les, caressant en nous la lâche volupté de sentir l’ esprit se défaire et couler sans fin vers un sommeil à l’odeur fade de
1697 t se défaire et couler sans fin vers un sommeil à l’ odeur fade de fleuve, un sommeil de plante vaguement heureuse d’être p
1698 nous enivrait, promettant à nos sens, fatigués de l’ esprit qui les exerce, des voluptés plus faciles — pour infuser dans n
1699 , promettant à nos sens, fatigués de l’esprit qui les exerce, des voluptés plus faciles — pour infuser dans nos corps charm
1700 dont on ne voudrait plus guérir… Mais nous voyons la ville debout dans ses lumières. Architectures ! langage des dieux, ô
1701 s qu’épousent nos ferveurs, angles purs, repos de l’ esprit qui s’appuie sur son œuvre ! La sérénité de cette façade élevée
1702 s, repos de l’esprit qui s’appuie sur son œuvre ! La sérénité de cette façade élevée lumineuse sur le ciel fut le signe d’
1703 La sérénité de cette façade élevée lumineuse sur le ciel fut le signe d’un équilibre retrouvé. Un grand pont de fer, près
1704 de cette façade élevée lumineuse sur le ciel fut le signe d’un équilibre retrouvé. Un grand pont de fer, près de nous, ér
1705 uvé. Un grand pont de fer, près de nous, érigeait l’ image de la lutte et des forces humaines, et rendait sous des coups un
1706 nd pont de fer, près de nous, érigeait l’image de la lutte et des forces humaines, et rendait sous des coups un son qui no
1707 et rendait sous des coups un son qui nous évoqua les rumeurs de villes d’usines. Il y avait la vie des hommes pour demain,
1708 évoqua les rumeurs de villes d’usines. Il y avait la vie des hommes pour demain, et il était beau d’y songer un peu avant
1709 beau d’y songer un peu avant de nous abandonner à l’ oubli luxueux des rues. Le long de l’Arno, les façades sont jaunes et
1710 abandonner à l’oubli luxueux des rues. Le long de l’ Arno, les façades sont jaunes et roses près de l’eau, puis perdent dan
1711 er à l’oubli luxueux des rues. Le long de l’Arno, les façades sont jaunes et roses près de l’eau, puis perdent dans la nuit
1712 l’Arno, les façades sont jaunes et roses près de l’ eau, puis perdent dans la nuit leurs lignes graves. Toutes ces formes
1713 jaunes et roses près de l’eau, puis perdent dans la nuit leurs lignes graves. Toutes ces formes devinées dans l’espace no
1714 rs lignes graves. Toutes ces formes devinées dans l’ espace nous environnent d’une obscure confiance. Livrons-nous aux jeux
1715 ons-nous aux jeux des hommes-qui-font-des-gestes. Les autos répètent sans fin les notes mêlées d’une symphonie qui va peut-
1716 -qui-font-des-gestes. Les autos répètent sans fin les notes mêlées d’une symphonie qui va peut-être composer tous les bruit
1717 es d’une symphonie qui va peut-être composer tous les bruits de la ville en un chant immense. Il passe une possibilité de b
1718 onie qui va peut-être composer tous les bruits de la ville en un chant immense. Il passe une possibilité de bonheur par pe
1719 passe une possibilité de bonheur par personne et les devantures ne cherchent qu’à vous plaire. Chaque ruelle croisée propo
1720 oublie pour celui des regards étrangers. Et voici la place régulière, les galeries, les cafés, les musiques, Donizetti qui
1721 s regards étrangers. Et voici la place régulière, les galeries, les cafés, les musiques, Donizetti qui pleure délicieusemen
1722 ngers. Et voici la place régulière, les galeries, les cafés, les musiques, Donizetti qui pleure délicieusement jusque dans
1723 oici la place régulière, les galeries, les cafés, les musiques, Donizetti qui pleure délicieusement jusque dans les gestes
1724 , Donizetti qui pleure délicieusement jusque dans les gestes des passantes. Sous cette agitation aimable et monotone nous a
1725 ation aimable et monotone nous allons voir courir l’ arabesque des sentiments et le mouvement perpétuel de l’amour. Plaisir
1726 allons voir courir l’arabesque des sentiments et le mouvement perpétuel de l’amour. Plaisir de se sentir engagé dans un s
1727 esque des sentiments et le mouvement perpétuel de l’ amour. Plaisir de se sentir engagé dans un système d’ondes de forces q
1728 ngagé dans un système d’ondes de forces qui tisse la nuit vibrante, intérêts, politesses, politiques, regards, musiques —
1729 musiques — cette vie rapide dans un décor qui est le rêve éternisé des plus voluptueuses intelligences — tous les tableaux
1730 ernisé des plus voluptueuses intelligences — tous les tableaux dans le noir des musées ! — et si tu veux soudain le son gra
1731 luptueuses intelligences — tous les tableaux dans le noir des musées ! — et si tu veux soudain le son grave de l’infini, p
1732 dans le noir des musées ! — et si tu veux soudain le son grave de l’infini, pour être seul parmi la foule, lève les yeux,
1733 musées ! — et si tu veux soudain le son grave de l’ infini, pour être seul parmi la foule, lève les yeux, au plus beau cie
1734 in le son grave de l’infini, pour être seul parmi la foule, lève les yeux, au plus beau ciel du monde. i. Rougemont Den
1735 de l’infini, pour être seul parmi la foule, lève les yeux, au plus beau ciel du monde. i. Rougemont Denis de, « Soir de
1736 . i. Rougemont Denis de, « Soir de Florence », La Semaine littéraire, Genève, 13 novembre 1926, p. 547-548.
1737 de, « Soir de Florence », La Semaine littéraire, Genève , 13 novembre 1926, p. 547-548.
33 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jacques Spitz, La Croisière indécise (décembre 1926)
1738 Jacques Spitz, La Croisière indécise (décembre 1926)y L’auteur veut amuser en nous q
1739 Spitz, La Croisière indécise (décembre 1926)y L’ auteur veut amuser en nous quelques idées graves en leur présentant le
1740 en nous quelques idées graves en leur présentant les miroirs de personnages cocasses à souhait, qui manifestent, avec un c
1741 manque de conviction et des poses de mannequins, les tendances contradictoires d’un individu. C’est pour traiter ce sujet
1742 sière de vacances, qui finit par un naufrage dans la littérature, le navire succombant sous les allégories. L’étonnant, c’
1743 s, qui finit par un naufrage dans la littérature, le navire succombant sous les allégories. L’étonnant, c’est que le livre
1744 ge dans la littérature, le navire succombant sous les allégories. L’étonnant, c’est que le livre soit réellement amusant, e
1745 rature, le navire succombant sous les allégories. L’ étonnant, c’est que le livre soit réellement amusant, et qu’il trouve
1746 ombant sous les allégories. L’étonnant, c’est que le livre soit réellement amusant, et qu’il trouve une sorte d’unité viva
1747 t, et qu’il trouve une sorte d’unité vivante dans le rythme des désirs jamais simultanés de ses petits héros. M. Spitz che
1748 etits héros. M. Spitz cherche à faire sourire, on le sent ; pourtant l’on sourit : il faut bien croire qu’il y a là un tal
1749 tz cherche à faire sourire, on le sent ; pourtant l’ on sourit : il faut bien croire qu’il y a là un talent, charmant, glac
1750 ugemont Denis de, « [Compte rendu] Jacques Spitz, La Croisière indécise  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, G
1751 indécise  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, décembre 1926, p. 810.
1752  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , décembre 1926, p. 810.
34 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Alfred Colling, L’Iroquois (décembre 1926)
1753 Alfred Colling, L’ Iroquois (décembre 1926)z Ce roman a le charme d’un automne, une am
1754 olling, L’Iroquois (décembre 1926)z Ce roman a le charme d’un automne, une amertume enveloppée, une atmosphère trop cla
1755 mertume enveloppée, une atmosphère trop claire où les cris se font un peu aigres et les couleurs fluides. Toute la tendress
1756 trop claire où les cris se font un peu aigres et les couleurs fluides. Toute la tendresse que ranime un soleil lointain va
1757 font un peu aigres et les couleurs fluides. Toute la tendresse que ranime un soleil lointain va tourner en cruelle mélanco
1758 e mélancolie. Pourquoi, Henri de Closain, quitter le domaine enchanté où des amis très fins, précieux poètes, dissertent s
1759 e sait plus de quels souvenirs ; jusqu’au soir où la douleur nette d’un amour réveillé l’envahit. Et Closain rencontre, da
1760 u’au soir où la douleur nette d’un amour réveillé l’ envahit. Et Closain rencontre, dans l’inévitable bar, le couple de jui
1761 ur réveillé l’envahit. Et Closain rencontre, dans l’ inévitable bar, le couple de juifs espagnols qui va l’entraîner avec s
1762 hit. Et Closain rencontre, dans l’inévitable bar, le couple de juifs espagnols qui va l’entraîner avec son mauvais cœur, d
1763 évitable bar, le couple de juifs espagnols qui va l’ entraîner avec son mauvais cœur, dans une aventure incertaine et doulo
1764 taine et douloureuse ; enfin Orpha, sa maîtresse, le fuit, parce que son silence devient insupportable : « Orpha ne compre
1765 rir et ne plus aimer ». Closain se tue pour finir le livre. Livre charmant et bizarre, où la sentimentalité moderne trouve
1766 our finir le livre. Livre charmant et bizarre, où la sentimentalité moderne trouve l’expression ironique qui lui convient,
1767 t et bizarre, où la sentimentalité moderne trouve l’ expression ironique qui lui convient, mais ici mêlée à une émotion plu
1768 ui transparaît parfois et nous fait regretter que l’ auteur ne se soit pas mieux abandonné à son sujet, d’un pathétique ass
1769 gemont Denis de, « [Compte rendu] Alfred Colling, L’ Iroquois  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, déce
1770 Iroquois  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, décembre 1926, p. 810-811.
1771  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , décembre 1926, p. 810-811.
35 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Malraux, La Tentation de l’Occident (décembre 1926)
1772 André Malraux, La Tentation de l’Occident (décembre 1926)aa Un Chinois écrit d’Europ
1773 André Malraux, La Tentation de l’ Occident (décembre 1926)aa Un Chinois écrit d’Europe à un Français
1774 e. Nous sommes loin du ton des Lettres persanes : le Chinois s’étonne non sans quelque aigreur, et critique avec un mépris
1775 aigreur, et critique avec un mépris tranquille ; le Français riposte sans conviction, et sous sa défense on devine une dé
1776 n devine une détresse. C’est encore une vision de l’ Occident qui naît de ce petit livre si dense, si inquiétant. Le Chinoi
1777 i naît de ce petit livre si dense, si inquiétant. Le Chinois voit dans l’Europe « une barbarie attentivement ordonnée, où
1778 vre si dense, si inquiétant. Le Chinois voit dans l’ Europe « une barbarie attentivement ordonnée, où l’idée de la civilisa
1779 ’Europe « une barbarie attentivement ordonnée, où l’ idée de la civilisation et celle de l’ordre sont chaque jour confondue
1780 une barbarie attentivement ordonnée, où l’idée de la civilisation et celle de l’ordre sont chaque jour confondues ». Nous
1781 rdonnée, où l’idée de la civilisation et celle de l’ ordre sont chaque jour confondues ». Nous cherchons à conquérir non le
1782 jour confondues ». Nous cherchons à conquérir non le monde, mais son ordre. Nous humilions sans trêve notre sensibilité au
1783 e « mythe cohérent » vers quoi tend notre esprit. La passion apparaît dans notre ordre social « comme une adroite fêlure »
1784 ure ». Notre morale est entièrement subordonnée à l’ action ; notre individualisme en naît logiquement, et toutes nos catég
1785 nos catégories artificielles et nécessaires. Mais le monde échappe toujours à nos cadres — perpétuel conflit du réel avec
1786 réel avec nos rêves de puissance : notre ambition la plus haute échoue. La tristesse règne sur nos villes. (Neurasthénie,
1787 puissance : notre ambition la plus haute échoue. La tristesse règne sur nos villes. (Neurasthénie, ce mal de l’Occident.)
1788 se règne sur nos villes. (Neurasthénie, ce mal de l’ Occident.) Et notre vertu suprême, aussi, est douloureuse : le sacrifi
1789 Et notre vertu suprême, aussi, est douloureuse : le sacrifice. Sans doute, cette « absurdité essentielle » que le Chinois
1790 . Sans doute, cette « absurdité essentielle » que le Chinois distingue au cœur de la vie occidentale apparaît mieux par la
1791 essentielle » que le Chinois distingue au cœur de la vie occidentale apparaît mieux par la comparaison de l’idéal asiatiqu
1792 au cœur de la vie occidentale apparaît mieux par la comparaison de l’idéal asiatique avec le nôtre. Mais je crois que tou
1793 occidentale apparaît mieux par la comparaison de l’ idéal asiatique avec le nôtre. Mais je crois que toute intelligence eu
1794 fait parler son Chinois de telle façon qu’ils ne le paraissent point. Et alors le relativisme angoissant qui semblait dev
1795 lle façon qu’ils ne le paraissent point. Et alors le relativisme angoissant qui semblait devoir résulter de cette confront
1796 nouit : c’est bien plutôt une unité supérieure de l’ esprit humain que nous découvrons, et qui nous permettra de juger à no
1797 er à notre tour certaines démences qui enfièvrent l’ Europe. Tandis que M. Ford expose victorieusement sa méthode pour « r
1798 prenons chaque jour une conscience plus claire de la vanité de nos buts, « capables d’agir jusqu’au sacrifice, mais pleins
1799 jusqu’au sacrifice, mais pleins de dégoût devant la volonté d’action qui tord aujourd’hui notre race… ». Et peut-être n’e
1800 laisser subsister en nous qu’un « étrange goût de la destruction et de l’anarchie, exempt de passion, divertissement suprê
1801 nous qu’un « étrange goût de la destruction et de l’ anarchie, exempt de passion, divertissement suprême de l’incertitude… 
1802 hie, exempt de passion, divertissement suprême de l’ incertitude… » aa. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] André Malra
1803 ugemont Denis de, « [Compte rendu] André Malraux, La Tentation de l’Occident  », Bibliothèque universelle et Revue de Genè
1804 , « [Compte rendu] André Malraux, La Tentation de l’ Occident  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, déce
1805 Occident  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, décembre 1926, p. 811-812.
1806  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , décembre 1926, p. 811-812.
36 1926, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Avant-propos (décembre 1926)
1807 e 1926)a b Une mauvaise humeur qui flotte dans l’ air nous proposerait de débuter par l’inévitable discours sur les diff
1808 flotte dans l’air nous proposerait de débuter par l’ inévitable discours sur les difficultés du temps, en général, et sur c
1809 poserait de débuter par l’inévitable discours sur les difficultés du temps, en général, et sur celles en particulier qu’imp
1810 général, et sur celles en particulier qu’implique la publication de notre revue. Mais nous savons, tout comme M. Coué, que
1811 oué, nous nous persuadons que tout ira très bien. Les circonstances l’exigent, d’ailleurs, plus que jamais, et plus que jam
1812 suadons que tout ira très bien. Les circonstances l’ exigent, d’ailleurs, plus que jamais, et plus que jamais, nous semble-
1813 nous semble-t-il, notre revue a sa raison d’être. La vie d’aujourd’hui, on le sait, nous oblige à nous affirmer ou à refus
1814 evue a sa raison d’être. La vie d’aujourd’hui, on le sait, nous oblige à nous affirmer ou à refuser de nous affirmer avec
1815 i a pu paraître parfois quelque peu impertinente. Le fait est que nous éprouvons irrésistiblement l’obligation d’être nous
1816 . Le fait est que nous éprouvons irrésistiblement l’ obligation d’être nous-mêmes. Et, disons-le tout de suite, c’est en ce
1817 lement l’obligation d’être nous-mêmes. Et, disons- le tout de suite, c’est en cela uniquement — être nous-mêmes — que consi
1818 mes — que consistera notre programme. Sans doute, les différences s’accusent : mais n’est-ce pas la meilleure raison pour n
1819 e, les différences s’accusent : mais n’est-ce pas la meilleure raison pour nos aînés de chercher plus patiemment encore à
1820 elle nous ne saurions aller, et qui, nous voulons l’ espérer, ne sera pas sans leur donner quelque bénéfice en retour. Cert
1821 nt d’autres, avant tant d’autres. « Amis, ce sont les jeunes qui passent… » Pas question de les saluer ni d’emboîter le pas
1822 ce sont les jeunes qui passent… » Pas question de les saluer ni d’emboîter le pas, mais seulement de retenir sa place au sp
1823 ssent… » Pas question de les saluer ni d’emboîter le pas, mais seulement de retenir sa place au spectacle qu’ils offrent e
1824 etenir sa place au spectacle qu’ils offrent et de les considérer avec sympathie. Il est bien facile de s’écrier : « Après m
1825 ie. Il est bien facile de s’écrier : « Après moi, le déluge ! », et de se détourner de ce qu’on a coutume d’appeler notre
1826 ’appeler notre « désordre ». Mais on est toujours le fils de quelqu’un… Et, peut-être, la considération du « déluge » peut
1827 est toujours le fils de quelqu’un… Et, peut-être, la considération du « déluge » peut-elle faire réfléchir utilement sur s
1828 Par contre, nous nous empressons de vous laisser le soin de juger si nous avons de quoi faire les modestes…   Être nous-m
1829 sser le soin de juger si nous avons de quoi faire les modestes…   Être nous-mêmes, avons-nous dit, c’est à la fois notre bu
1830 littéraire de plus » ; nous ne voulons pas être «  l’ expression de la jeunesse romande ». Nous sommes autre chose. (Belles-
1831 us » ; nous ne voulons pas être « l’expression de la jeunesse romande ». Nous sommes autre chose. (Belles-Lettres est touj
1832 nemment peu bellettrienne. Que sommes-nous donc ? Le plus qu’on puisse dire, c’est que vous le saurez un peu mieux quand v
1833 donc ? Le plus qu’on puisse dire, c’est que vous le saurez un peu mieux quand vous aurez lu nos huit numéros. Il faut que
1834 vergentes, mais qu’un ruban rouge et vert lie par la grâce d’une volonté sans doute divine… a. Rougemont Denis de, « Av
1835 nève-Fribourg, décembre 1926, p. 3-5. b. Signé : Le Comité central.
37 1926, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Paradoxe de la sincérité (décembre 1926)
1836 Paradoxe de la sincérité (décembre 1926)c Nous voyons un mythe prendre corps parm
1837 926)c Nous voyons un mythe prendre corps parmi les ruines de ce temps. Il fallait bien tirer quelque vertu d’une anarchi
1838 essaire — provisoirement — que satisfaisante pour l’ esprit. C’est ainsi que nous trompant nous-mêmes, sous le prétexte tou
1839 t. C’est ainsi que nous trompant nous-mêmes, sous le prétexte toujours de probité intellectuelle ou de courage moral, nous
1840 lectuelle ou de courage moral, nous avons élevé à la hauteur d’une vertu première — et qui légitime tous les dénis de mora
1841 uteur d’une vertu première — et qui légitime tous les dénis de morale à quoi nous obligeaient en réalité on sait quel dégoû
1842 et certains désirs de grabuge moins avouables, —  la sincérité, masque fier et un peu douloureux des défaitismes les plus
1843 masque fier et un peu douloureux des défaitismes les plus subtils comme des plus pures et loyales inquiétudes. Sincérité,
1844 des plus pures et loyales inquiétudes. Sincérité, le mal du siècle. Tout le monde en parle, et chacun s’en autorise pour e
1845 excuser sa petite faiblesse originale : tant qu’à la fin la notion concrète de sincérité s’évanouit en mille définitions t
1846 sa petite faiblesse originale : tant qu’à la fin la notion concrète de sincérité s’évanouit en mille définitions tendanci
1847 doctrine acceptée ; envers votre idéal ou envers les fluctuations de votre moi ? Votre sincérité est-elle consentement imm
1848 fois curieuse et désintéressée, de naturaliste de l’ âme ? Heureusement que M. Brémond ne s’est pas encore mêlé de l’affair
1849 sement que M. Brémond ne s’est pas encore mêlé de l’ affaire. Au reste, on n’a pas attendu les éclaircissements du subtil a
1850 e mêlé de l’affaire. Au reste, on n’a pas attendu les éclaircissements du subtil abbé pour n’y plus rien comprendre. ⁂ Qu’o
1851 mettre à décrire ce qu’il voit autour de lui — et l’ étonnement indigné du spectateur. Pour parler avec un peu de clairvoya
1852 déduction passablement sèche pourrait nous donner l’ illusion et peut-être certains bénéfices de cette opération idéale. En
1853 néfices de cette opération idéale. En même temps, la froideur d’une telle méthode atténuerait dans une certaine mesure — p
1854 que nécessaire — ce qu’il y a de déplaisant dans l’ effort d’un esprit pour se dégager de confusions aussi perfides et si
1855 ntures. Sincérité et spontanéité « Nos actes les plus sincères sont aussi les moins calculés », écrit Gide. D’où l’on
1856 néité « Nos actes les plus sincères sont aussi les moins calculés », écrit Gide. D’où l’on peut tirer par une sorte de p
1857 sont aussi les moins calculés », écrit Gide. D’où l’ on peut tirer par une sorte de passage à la limite que les faits justi
1858 . D’où l’on peut tirer par une sorte de passage à la limite que les faits justifient : sincérité = spontanéité. Mais la mo
1859 ut tirer par une sorte de passage à la limite que les faits justifient : sincérité = spontanéité. Mais la morale est ce qui
1860 faits justifient : sincérité = spontanéité. Mais la morale est ce qui s’oppose en premier lieu à la spontanéité. C’est po
1861 s la morale est ce qui s’oppose en premier lieu à la spontanéité. C’est pourquoi Gide écrit ailleurs : « En chaque être, l
1862 pourquoi Gide écrit ailleurs : « En chaque être, le pire instinct me paraissait le plus sincère. » La sincérité spontanée
1863 « En chaque être, le pire instinct me paraissait le plus sincère. » La sincérité spontanée, vertu moderne en qui renaît u
1864 le pire instinct me paraissait le plus sincère. » La sincérité spontanée, vertu moderne en qui renaît un mythe rousseauist
1865 usseauiste, inspire, explique un vaste domaine de la littérature contemporaine. Cette sorte-là de sincérité, on la nomme g
1866 re contemporaine. Cette sorte-là de sincérité, on la nomme gratuité. Lafcadio poussant Fleurissoire « pour rien » ne songe
1867 rien » ne songeait pas qu’il allait faire école. Le fait est que ce geste symbolique a déclenché tout un mouvement littér
1868 -là même qui aboutit naguère au surréalisme. Tous les héros de roman se sont mis à gesticuler « gratuitement ». Et les crit
1869 man se sont mis à gesticuler « gratuitement ». Et les critiques d’abord de s’indigner. Aujourd’hui, on les voit assez encha
1870 critiques d’abord de s’indigner. Aujourd’hui, on les voit assez enchantés de l’affaire : « Gratuit ! », déclarent-ils chaq
1871 gner. Aujourd’hui, on les voit assez enchantés de l’ affaire : « Gratuit ! », déclarent-ils chaque fois qu’ils ne comprenne
1872 endre. Et, ici encore, prenons garde de confondre le plan littéraire avec le plan moral. Telle action peut paraître gratui
1873 renons garde de confondre le plan littéraire avec le plan moral. Telle action peut paraître gratuite au lecteur parce qu’i
1874 tuite au lecteur parce qu’il ne sait pas tout sur le personnage. Mais quant à l’auteur, il n’y a pas de gratuité. Le geste
1875 ne sait pas tout sur le personnage. Mais quant à l’ auteur, il n’y a pas de gratuité. Le geste le plus incongru du héros n
1876 Mais quant à l’auteur, il n’y a pas de gratuité. Le geste le plus incongru du héros n’est jamais que le résultat d’un méc
1877 nt à l’auteur, il n’y a pas de gratuité. Le geste le plus incongru du héros n’est jamais que le résultat d’un mécanisme in
1878 geste le plus incongru du héros n’est jamais que le résultat d’un mécanisme inconscient, aussi révélateur du personnage q
1879 t, aussi révélateur du personnage que ses actions les mieux concertées. Rien n’est gratuit que relativement à un système re
1880 s. Il résulte de semblables considérations, dans le domaine de la morale, que le meilleur moyen de se livrer à ses déterm
1881 de semblables considérations, dans le domaine de la morale, que le meilleur moyen de se livrer à ses déterminants, c’est
1882 considérations, dans le domaine de la morale, que le meilleur moyen de se livrer à ses déterminants, c’est de mener la vie
1883 n de se livrer à ses déterminants, c’est de mener la vie gratuite que réclament les surréalistes. Le contraire de la liber
1884 nts, c’est de mener la vie gratuite que réclament les surréalistes. Le contraire de la liberté. D’autre part, on veut donne
1885 r la vie gratuite que réclament les surréalistes. Le contraire de la liberté. D’autre part, on veut donner à l’acte gratui
1886 e que réclament les surréalistes. Le contraire de la liberté. D’autre part, on veut donner à l’acte gratuit une valeur mor
1887 ire de la liberté. D’autre part, on veut donner à l’ acte gratuit une valeur morale en disant qu’il révèle ce qu’il y a de
1888 ant qu’il révèle ce qu’il y a de plus secret dans la personnalité. Ce serait un moyen de connaissance plus intégrale de so
1889 pittoresque et plus « entachée d’utilitarisme », la décision réfléchie, aussi peu gratuite que possible, d’un Julien Sore
1890 ins révélatrice du fond de l’âme humaine ? Que si l’ on s’étonne de me voir donner ici la préférence à l’acte volontaire, o
1891 aine ? Que si l’on s’étonne de me voir donner ici la préférence à l’acte volontaire, ou mieux : intéressé, tandis qu’en li
1892 on s’étonne de me voir donner ici la préférence à l’ acte volontaire, ou mieux : intéressé, tandis qu’en littérature je déf
1893  : intéressé, tandis qu’en littérature je défends l’ acte gratuit, je réponds que la littérature remplirait déjà suffisamme
1894 érature je défends l’acte gratuit, je réponds que la littérature remplirait déjà suffisamment son rôle en se bornant à nou
1895 onnaissance plus intense et plus émouvante ; mais la morale, plutôt que de nous constater, doit nous construire — selon le
1896 e de nous constater, doit nous construire — selon le mode le plus libre, le plus conscient à la fois et le plus voluptueux
1897 s constater, doit nous construire — selon le mode le plus libre, le plus conscient à la fois et le plus voluptueux. Sin
1898 it nous construire — selon le mode le plus libre, le plus conscient à la fois et le plus voluptueux. Sincérité envers s
1899 ode le plus libre, le plus conscient à la fois et le plus voluptueux. Sincérité envers soi-même Noli me tangere.
1900 vers certain but précis. Ou bien j’aurais juste le temps de le noter avant de partir. Ou bien je me mettrai à l’analyser
1901 n but précis. Ou bien j’aurais juste le temps de le noter avant de partir. Ou bien je me mettrai à l’analyser plus longue
1902 le noter avant de partir. Ou bien je me mettrai à l’ analyser plus longuement. Mais alors je le fausse, puisque je le prive
1903 ttrai à l’analyser plus longuement. Mais alors je le fausse, puisque je le prive de la puissance de se délivrer en gestes,
1904 s longuement. Mais alors je le fausse, puisque je le prive de la puissance de se délivrer en gestes, en conséquences matér
1905 . Mais alors je le fausse, puisque je le prive de la puissance de se délivrer en gestes, en conséquences matérielles. Ce n
1906 estes, en conséquences matérielles. Ce n’est plus l’ élan pur que je décris : c’est un élan freiné dans mon esprit, c’est l
1907 ris : c’est un élan freiné dans mon esprit, c’est le frein lui-même, bientôt — par un mouvement normal de l’attention — et
1908 in lui-même, bientôt — par un mouvement normal de l’ attention — et fatalement c’est à la découverte d’une faiblesse que j’
1909 ent normal de l’attention — et fatalement c’est à la découverte d’une faiblesse que j’aboutis : ce quelque chose qui m’a r
1910 e quelque chose qui m’a retenu d’accomplir ce que l’ élan appelait.   Second exemple. — J’éprouve le besoin de faire le po
1911 e l’élan appelait.   Second exemple. — J’éprouve le besoin de faire le point : à quoi en suis-je, qui suis-je ? Je revois
1912   Second exemple. — J’éprouve le besoin de faire le point : à quoi en suis-je, qui suis-je ? Je revois des actes accompli
1913 cher du soleil, des phares d’automobiles étoilent le brouillard, les visages se cachent dans des fourrures, personne ne sa
1914 des phares d’automobiles étoilent le brouillard, les visages se cachent dans des fourrures, personne ne sait la richesse d
1915 s se cachent dans des fourrures, personne ne sait la richesse de ta vie…). J’écris ces choses. Puis, dans un ancien carnet
1916 arnet de notes, je retrouve un être si différent. Les gestes et les sentiments qui se proposaient à mon souvenir ont été pa
1917 , je retrouve un être si différent. Les gestes et les sentiments qui se proposaient à mon souvenir ont été passés au crible
1918 saient à mon souvenir ont été passés au crible de la minute où je me penchais sur mon passé. Ou, pour user d’une image plu
1919 ueur de tristesse ou de sérénité qui métamorphose le paysage du passé. Ainsi de certains décors modernes : vous changez l’
1920 Ainsi de certains décors modernes : vous changez l’ éclairage, et la chaumière devient palais. C’est l’objection classique
1921 ns décors modernes : vous changez l’éclairage, et la chaumière devient palais. C’est l’objection classique et irréfutable
1922 ’éclairage, et la chaumière devient palais. C’est l’ objection classique et irréfutable à toute introspection : ce daltonis
1923 m’apprendre quelque chose, c’est bien le second. La qualité des souvenirs qu’il me livre me renseigne assez exactement, n
1924 gne assez exactement, non sur mon passé, mais sur le moment que je vis1. Il est bien clair qu’on ne saurait atteindre « la
1925 1. Il est bien clair qu’on ne saurait atteindre «  la vérité sur soi » en se servant de la méthode indiquée dans le premier
1926 atteindre « la vérité sur soi » en se servant de la méthode indiquée dans le premier exemple. C’est un cas-limite, j’en c
1927 cas-limite, j’en conviens. Pourtant, n’est-ce pas le schéma de tout un genre littéraire moderne, cette espèce de confessio
1928 moderne, cette espèce de confession romancée dont les livres de Bopp, d’Arland, de Soupault et surtout de René Crevel ont d
1929 , de Soupault et surtout de René Crevel ont donné les exemples les plus récents et significatifs ? Tous ces livres évoquent
1930 et surtout de René Crevel ont donné les exemples les plus récents et significatifs ? Tous ces livres évoquent assez précis
1931 tifs ? Tous ces livres évoquent assez précisément la forme d’un entonnoir. La vie serait le liquide tourbillonnant à l’int
1932 oquent assez précisément la forme d’un entonnoir. La vie serait le liquide tourbillonnant à l’intérieur. Un arrêt (l’auteu
1933 récisément la forme d’un entonnoir. La vie serait le liquide tourbillonnant à l’intérieur. Un arrêt (l’auteur se met à se
1934 onnoir. La vie serait le liquide tourbillonnant à l’ intérieur. Un arrêt (l’auteur se met à se regarder vivre, le personnag
1935 e liquide tourbillonnant à l’intérieur. Un arrêt ( l’ auteur se met à se regarder vivre, le personnage à douter du sens de s
1936 r. Un arrêt (l’auteur se met à se regarder vivre, le personnage à douter du sens de sa vie) et les forces centripètes l’em
1937 vre, le personnage à douter du sens de sa vie) et les forces centripètes l’emportent peu à peu, une aspiration vers le bas
1938 uter du sens de sa vie) et les forces centripètes l’ emportent peu à peu, une aspiration vers le bas produit une agitation
1939 ipètes l’emportent peu à peu, une aspiration vers le bas produit une agitation accélérée et folle, puis tout finit dans un
1940 , puis tout finit dans un râle, brusquement c’est le vide. Centre de soi, l’aspiration du néant. J’ai revu à l’envers le f
1941 n râle, brusquement c’est le vide. Centre de soi, l’ aspiration du néant. J’ai revu à l’envers le film de mon passé : ce qu
1942 Centre de soi, l’aspiration du néant. J’ai revu à l’ envers le film de mon passé : ce qui était élan devient recul, et l’év
1943 soi, l’aspiration du néant. J’ai revu à l’envers le film de mon passé : ce qui était élan devient recul, et l’évocation d
1944 e mon passé : ce qui était élan devient recul, et l’ évocation de mes désirs anciens ne me restitue qu’un dégoût. J’ai cru
1945 . En réalité, je n’assiste pas à moi-même, mais à la destruction de moi-même. Par les fissures, un instant, j’ai pu soupço
1946 moi-même, mais à la destruction de moi-même. Par les fissures, un instant, j’ai pu soupçonner des profondeurs ; mais déjà
1947 i pu soupçonner des profondeurs ; mais déjà c’est le chaos. Mon corps et moi, le livre si poignant de René Crevel, est la
1948 rs ; mais déjà c’est le chaos. Mon corps et moi, le livre si poignant de René Crevel, est la démonstration la plus cyniqu
1949 et moi, le livre si poignant de René Crevel, est la démonstration la plus cynique que je connaisse de ces ravages du sinc
1950 si poignant de René Crevel, est la démonstration la plus cynique que je connaisse de ces ravages du sincérisme. Dans la s
1951 e je connaisse de ces ravages du sincérisme. Dans la solitude qu’il s’acharne à approfondir — il était venu y chercher que
1952 rcher quelque raison de vivre, il voulait se voir le plus purement (« cette curiosité donnée comme raison d’une perpétuell
1953 mme raison d’une perpétuelle attente »), — ce que l’ auteur découvre c’est ce « merveilleux contraire » de l’élan vital qu’
1954 ur découvre c’est ce « merveilleux contraire » de l’ élan vital qu’il nomme élan mortel — générateur de l’incurable tristes
1955 lan vital qu’il nomme élan mortel — générateur de l’ incurable tristesse qui rôde dans certaine littérature d’aujourd’hui.
1956 é de faire mon autoportrait moral : je bouge tout le temps. Danger de faire mon autoportrait moral : je me compose plus la
1957 s laid que nature. Faut-il conclure avec Gide : «  L’ analyse psychologique a perdu pour moi tout intérêt du jour où je me s
1958 moi tout intérêt du jour où je me suis avisé que l’ homme éprouve ce qu’il imagine d’éprouver. » Non. Car à supposer que l
1959 ’il imagine d’éprouver. » Non. Car à supposer que l’ analyse nous crée, elle ne nous crée pas n’importe comment, mais selon
1960 u des remarques précédentes). Rivière définissait la sincérité comme « un perpétuel effort pour créer son âme telle qu’ell
1961 qu’elle est ». Il voyait dans cet effort sur soi le gage d’un enrichissement, d’une consolidation de l’individu mais avan
1962 gage d’un enrichissement, d’une consolidation de l’ individu mais avant tout un moyen de se connaître. Cependant, n’est-ce
1963 Cependant, n’est-ce pas lui-même qui ajoutait que l’ homme sincère « en vient à ne plus pouvoir même souhaiter d’être diffé
1964 oir même souhaiter d’être différent », ce qui est la négation de tout progrès moral. De la sincérité envisagée comme moyen
1965 ce qui est la négation de tout progrès moral. De la sincérité envisagée comme moyen de connaissance, le cas extrême d’un
1966 sincérité envisagée comme moyen de connaissance, le cas extrême d’un Crevel nous montre assez ce qu’il faut penser2. Il n
1967 limites assez étroites empiriquement fournies par le sens de son intérêt propre, une analyse sincère ne puisse faire décou
1968 es et ne serve parfois de contrôle efficace. Mais les bénéfices sont maigres en regard des dangers que la sincérité du noli
1969 bénéfices sont maigres en regard des dangers que la sincérité du noli me tangere fait courir, tant dans le domaine littér
1970 ncérité du noli me tangere fait courir, tant dans le domaine littéraire que dans celui de l’action. En littérature : refus
1971 tant dans le domaine littéraire que dans celui de l’ action. En littérature : refus de construire, de composer ; impuissanc
1972 sance à inventer. Car inventer, c’est se porter à l’ extrême pointe de soi, et, d’un élan, se dépasser ; c’est créer une di
1973 e dépasser ; c’est créer une différence. Pourquoi les romanciers modernes ont-ils tant de mal à créer des personnages ? C’e
1974 rsonnages ? C’est parce qu’une sorte de sincérité les retient d’imposer aux héros ce rythme volontaire par lequel un Balzac
1975 x héros ce rythme volontaire par lequel un Balzac les fait vivre. Ce serait fausser quelque chose à leurs yeux. Le cas des
1976 re. Ce serait fausser quelque chose à leurs yeux. Le cas des Faux-Monnayeurs le montre clairement. En morale : défaitisme
1977 ue chose à leurs yeux. Le cas des Faux-Monnayeurs le montre clairement. En morale : défaitisme quand il s’agit de gestes q
1978 cement. (Il faut, pour sauter, une confiance dans l’ élan qui échappe à toute analyse préalable et sans quoi le saut paraît
1979 ui échappe à toute analyse préalable et sans quoi le saut paraît impossible, absurde.) Enfin, désagrégation de la personna
1980 aît impossible, absurde.) Enfin, désagrégation de la personnalité, car l’analyse la plus savante, comme l’a fort bien dit
1981 de.) Enfin, désagrégation de la personnalité, car l’ analyse la plus savante, comme l’a fort bien dit Ramon Fernandez, « re
1982 , désagrégation de la personnalité, car l’analyse la plus savante, comme l’a fort bien dit Ramon Fernandez, « retient tous
1983 ersonnalité, car l’analyse la plus savante, comme l’ a fort bien dit Ramon Fernandez, « retient tous les éléments du moi, m
1984 l’a fort bien dit Ramon Fernandez, « retient tous les éléments du moi, moins le principe unificateur ». De quelques soph
1985 nandez, « retient tous les éléments du moi, moins le principe unificateur ». De quelques sophismes libérateurs La fo
1986 cateur ». De quelques sophismes libérateurs La fonction de l’homme est aussi bien de croire que de constater. F. Ra
1987 quelques sophismes libérateurs La fonction de l’ homme est aussi bien de croire que de constater. F. Raub. La sincér
1988 ussi bien de croire que de constater. F. Raub. La sincérité obstinée d’un Rivière n’a plus rien de spontané. En quoi es
1989 a plus rien de spontané. En quoi est-ce encore de la sincérité ? Trop sincère, pas sincère. Ou bien si l’on prétend que la
1990 sincérité ? Trop sincère, pas sincère. Ou bien si l’ on prétend que la sincérité est la recherche, puis l’acceptation de to
1991 sincère, pas sincère. Ou bien si l’on prétend que la sincérité est la recherche, puis l’acceptation de toute tendance du m
1992 ère. Ou bien si l’on prétend que la sincérité est la recherche, puis l’acceptation de toute tendance du moi, je réponds qu
1993 n prétend que la sincérité est la recherche, puis l’ acceptation de toute tendance du moi, je réponds que le mensonge est s
1994 eptation de toute tendance du moi, je réponds que le mensonge est sincère aussi, qui révèle mon besoin de mentir. Il devie
1995 ils vous aident3 — mais jamais au point d’oublier la vérité qu’on désirait qu’ils cachent pour un moment. « L’art est un m
1996 é qu’on désirait qu’ils cachent pour un moment. «  L’ art est un mensonge, mais un bon artiste n’est pas menteur », dit Max
1997 dit Max Jacob. « Être sincère, c’est avoir toutes les pensées » (Rivière). Mais on ne peut se maintenir dans cet état. Ce «
1998  mensonge », ce choix faux mais bon, nécessaire à la vie, n’est-ce pas être sincère aussi que de s’y prêter ? Or, il vous
1999 que de s’y prêter ? Or, il vous tire aussitôt de l’ indétermination violente qu’est la sincérité selon Rivière. La sincéri
2000 ire aussitôt de l’indétermination violente qu’est la sincérité selon Rivière. La sincérité véritable vous pousse à faire l
2001 ation violente qu’est la sincérité selon Rivière. La sincérité véritable vous pousse à faire le saut dans le vide qu’exige
2002 vière. La sincérité véritable vous pousse à faire le saut dans le vide qu’exige toute foi ; c’est la volonté de sincérité,
2003 cérité véritable vous pousse à faire le saut dans le vide qu’exige toute foi ; c’est la volonté de sincérité, c’est-à-dire
2004 e le saut dans le vide qu’exige toute foi ; c’est la volonté de sincérité, c’est-à-dire une sincérité tournée au vice, inv
2005 ncérité tournée au vice, invertie, qui retient de l’ oser. Petite anthologie ou que le « style » est de l’homme même
2006 ui retient de l’oser. Petite anthologie ou que le « style » est de l’homme même J’en étais à peu près à ce point de
2007 . Petite anthologie ou que le « style » est de l’ homme même J’en étais à peu près à ce point de mes notes — à ce poi
2008 ues lectures, je pris note des passages suivants ( les paraphraser serait d’une ingratitude insigne — ils marquent au reste
2009 atitude insigne — ils marquent au reste fort bien les jalons de cette recherche) : Puissiez-vous avouer moins de sincérité
2010 ropre témoin, intelligent mais immobile : ce sont les mêmes qui s’ignorent en tant que personnes. Comment se trouveraient-i
2011 eraient-ils, n’existant pas ? (François Mauriac.) La valeur morale de M. Godeau serait définie par l’aspect seul qu’il sou
2012 La valeur morale de M. Godeau serait définie par l’ aspect seul qu’il souffrirait de garder lui-même à son propre regard.
2013 ait de garder lui-même à son propre regard. Ainsi la valeur morale d’un homme équivalait-elle à l’illusion qu’il était cap
2014 nsi la valeur morale d’un homme équivalait-elle à l’ illusion qu’il était capable d’entretenir sur lui-même. (Marcel Jouhan
2015 lle qui est douée d’assez de force pour donner de la réalité à l’illusion. (Max Jacob.) Un rôle ? Oui. Mais si le personna
2016 ouée d’assez de force pour donner de la réalité à l’ illusion. (Max Jacob.) Un rôle ? Oui. Mais si le personnage est mainte
2017 à l’illusion. (Max Jacob.) Un rôle ? Oui. Mais si le personnage est maintenu jusqu’à la mort, il se confond avec l’homme m
2018 ? Oui. Mais si le personnage est maintenu jusqu’à la mort, il se confond avec l’homme même. (André Maurois.) (Quel effro
2019 est maintenu jusqu’à la mort, il se confond avec l’ homme même. (André Maurois.) (Quel effroi, ce jour de l’adolescence
2020 même. (André Maurois.) (Quel effroi, ce jour de l’ adolescence où l’on soupçonne pour la première fois que certains, peut
2021 ois.) (Quel effroi, ce jour de l’adolescence où l’ on soupçonne pour la première fois que certains, peut-être, jouent leu
2022 , jouent leur vie. Rien ne paraît plus sinistre à la sincérité presque pure de cet âge. Mais il le faut dépasser.)   Si j’
2023 e à la sincérité presque pure de cet âge. Mais il le faut dépasser.)   Si j’en crois l’intensité d’un sentiment intime, ce
2024 t âge. Mais il le faut dépasser.)   Si j’en crois l’ intensité d’un sentiment intime, ce moi idéal que j’appelle en chaque
2025 ’imaginait retenir. Dès lors, ce n’est pas lâcher la proie pour l’ombre que de tendre vers ce modèle. Dirais-je que c’est
2026 enir. Dès lors, ce n’est pas lâcher la proie pour l’ ombre que de tendre vers ce modèle. Dirais-je que c’est ma sincérité d
2027 e. Dirais-je que c’est ma sincérité d’y aller par les moyens les plus efficaces ? Mais on nommera cela de l’hypocrisie. Soi
2028 e que c’est ma sincérité d’y aller par les moyens les plus efficaces ? Mais on nommera cela de l’hypocrisie. Soit, j’accept
2029 yens les plus efficaces ? Mais on nommera cela de l’ hypocrisie. Soit, j’accepte. Et aussitôt j’annonce : Éloge de l’hyp
2030 t, j’accepte. Et aussitôt j’annonce : Éloge de l’ hypocrisie Non, non !… Debout dans l’ère successive ! Brisez, mon c
2031 Éloge de l’hypocrisie Non, non !… Debout dans l’ ère successive ! Brisez, mon corps, brisez cette forme pensive ! .....
2032 ................................................. Le vent se lève, il faut tenter de vivre. Paul Valéry. Certes, du sein
2033 is bien quelques voiles à mon dégoût d’un moi que la vie me montrait si désespérément vrai, tyrannique, insuffisant. Mais
2034 , un peu sceptique, quand mon esprit partait dans le rêve d’un idéal de fortune, idole naïve de ma jeune angoisse… Je t’ai
2035 alors qu’une symphonie de joies émanait de toute la vie : chaque chose proposait une ferveur nouvelle, et chaque être un
2036 en pût être privée. Alors, acquiesçant vivement à l’ invite que je soupçonnais la plus riche d’inconnu, je m’élançais sur l
2037 cquiesçant vivement à l’invite que je soupçonnais la plus riche d’inconnu, je m’élançais sur la voie qu’elle m’ouvrait, av
2038 onnais la plus riche d’inconnu, je m’élançais sur la voie qu’elle m’ouvrait, avec tant de rires amis, vers tout ce que mom
2039 je choisissais de laisser — et des baisers à tous les vents — qu’il eût été loisible d’attribuer comme objet à ma jubilatio
2040 st ainsi que fidèle à soi-même au plus profond de l’ être, on entretient comme une arrière-pensée sagace et obstinée l’assu
2041 tient comme une arrière-pensée sagace et obstinée l’ assurance d’une continuité entre ses actions et ses désirs, un quant-à
2042 ui ne gêne aucun geste, mais incline discrètement les décisions et les rend complices d’un dessein logique, peut-être loint
2043 geste, mais incline discrètement les décisions et les rend complices d’un dessein logique, peut-être lointain, en quoi cons
2044 ein logique, peut-être lointain, en quoi consiste l’ unité la plus réelle de l’individu — en dehors du corps. Et ce ne sont
2045 que, peut-être lointain, en quoi consiste l’unité la plus réelle de l’individu — en dehors du corps. Et ce ne sont point l
2046 ntain, en quoi consiste l’unité la plus réelle de l’ individu — en dehors du corps. Et ce ne sont point là jeux d’idées et
2047 dées et jongleries verbales. Regards au-dessus de l’ amour ! Voir l’heure à la pendule pendant l’étreinte d’un adieu et cal
2048 ies verbales. Regards au-dessus de l’amour ! Voir l’ heure à la pendule pendant l’étreinte d’un adieu et calculer rapidemen
2049 es. Regards au-dessus de l’amour ! Voir l’heure à la pendule pendant l’étreinte d’un adieu et calculer rapidement le retou
2050 us de l’amour ! Voir l’heure à la pendule pendant l’ étreinte d’un adieu et calculer rapidement le retour à une fidélité pl
2051 dant l’étreinte d’un adieu et calculer rapidement le retour à une fidélité plus profonde. Fidélité à sa loi individuelle,
2052 e honnêteté peut-être plus réelle que l’autre. Et l’ on conçoit que ce constant et secret assujettissement au moi idéal exi
2053 re que cette agilité offensive qu’on appelle dans la vie publique arrivisme, et séduction dans les salons. Constater une
2054 dans la vie publique arrivisme, et séduction dans les salons. Constater une faiblesse, c’est toujours un peu en prendre so
2055 esse, c’est toujours un peu en prendre son parti. La sincérité crée en nous un fait accompli. J’appelle hypocrisie envers
2056 ais ce que de toute mon âme je veux être !… 1. La véritable description de l’élan supposé dans le premier exemple, ce s
2057 je veux être !… 1. La véritable description de l’ élan supposé dans le premier exemple, ce serait le récit des gestes qu
2058 l’élan supposé dans le premier exemple, ce serait le récit des gestes qu’il m’aurait fait commettre. Manifester est plus s
2059 st plus sincère qu’analyser. 2. D’ailleurs toute la psychologie moderne souligne la quasi-impossibilité de traduire un dy
2060 D’ailleurs toute la psychologie moderne souligne la quasi-impossibilité de traduire un dynamisme directement dans notre l
2061 t certes quand il s’agit de parole ou d’écriture, l’ affirmation prouve moins une certitude qu’un désir de certitude né de
2062 né Crevel) c. Rougemont Denis de, « Paradoxe de la sincérité », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribo
38 1927, Articles divers (1924–1930). Dés ou la clef des champs (1927)
2063 Dés ou la clef des champs (1927)l « On sent l’absurdité d’un semblable syst
2064 Dés ou la clef des champs (1927)l « On sent l’ absurdité d’un semblable système. » Musset. Une rose et un journal o
2065 e. » Musset. Une rose et un journal oubliés sur le marbre vulgaire d’une table de café. Je venais de m’asseoir et de com
2066 ’habitude, un peu après six heures. J’étais seul. Le café est un lieu anonyme bien plus propice au rêve que ma chambre où
2067 ropice au rêve que ma chambre où m’attendent tous les soirs quand je rentre du bureau, les gages insupportablement familier
2068 tendent tous les soirs quand je rentre du bureau, les gages insupportablement familiers d’une vie honnête de type courant.
2069 une vie honnête de type courant. Pour dix sous et le prétexte d’un apéro, on entre ici dans le jardin des songeries les pl
2070 sous et le prétexte d’un apéro, on entre ici dans le jardin des songeries les plus étranges qu’appelle la musique. Je me g
2071 apéro, on entre ici dans le jardin des songeries les plus étranges qu’appelle la musique. Je me gardai donc d’ouvrir le jo
2072 jardin des songeries les plus étranges qu’appelle la musique. Je me gardai donc d’ouvrir le journal. Les Petites nouvelles
2073 qu’appelle la musique. Je me gardai donc d’ouvrir le journal. Les Petites nouvelles ont un pouvoir tyrannique sur mon espr
2074 a musique. Je me gardai donc d’ouvrir le journal. Les Petites nouvelles ont un pouvoir tyrannique sur mon esprit. Non que c
2075 ur mon esprit. Non que cela m’intéresse au fond : les faits-divers, rien de moins divers. Mais je suis pris dans l’absurde
2076 ers, rien de moins divers. Mais je suis pris dans l’ absurde réseau des lignes, et cette mécanique me restitue chaque fois
2077 tte rose oubliée me gênait : perdre une rose pour le plaisir ! (Et je ne pensais même pas, alors : une si belle rose.) Le
2078 ne pensais même pas, alors : une si belle rose.) Le tambour livra un homme élégant et tragique, qui se tint un moment imm
2079 igure aux joues mates, aux yeux clairs. Il déplia le journal et se mit à lire les pages d’annonces. On m’apporta une lique
2080 eux clairs. Il déplia le journal et se mit à lire les pages d’annonces. On m’apporta une liqueur. Et quand j’eus fini de bo
2081 es pensées plus rapides s’en allèrent un peu vers l’ avenir et j’osai quelques rêves. C’était, je m’en souviens, une petite
2082 souviens, une petite automobile qui roulait dans la banlieue printanière ; des soupers d’amis dans notre modeste salle à
2083 er ; des jaquettes de couleur pour ma femme… Mais l’ homme avait posé son journal. Soudain, portant la main à son gilet, il
2084 l’homme avait posé son journal. Soudain, portant la main à son gilet, il en retira trois dés qu’il jeta sur la table. Les
2085 son gilet, il en retira trois dés qu’il jeta sur la table. Les yeux brillants, il compta. Une indécision parut sur ses tr
2086 , il en retira trois dés qu’il jeta sur la table. Les yeux brillants, il compta. Une indécision parut sur ses traits. Puis
2087 e indécision parut sur ses traits. Puis il reprit les dés brusquement, et me fixant avec un léger sourire : — Jouez ! ordon
2088 t avec un léger sourire : — Jouez ! ordonna-t-il. La surprise vainquit ma timidité, je pris les dés et les jetai sans hési
2089 a-t-il. La surprise vainquit ma timidité, je pris les dés et les jetai sans hésiter. Il compta de nouveau, puis avec une lé
2090 surprise vainquit ma timidité, je pris les dés et les jetai sans hésiter. Il compta de nouveau, puis avec une légère exalta
2091 l saisit son journal. Il en parcourait rapidement les pages, la proie d’une agitation visible. Bientôt il m’offrit de jouer
2092 n journal. Il en parcourait rapidement les pages, la proie d’une agitation visible. Bientôt il m’offrit de jouer un moment
2093 nsommations. Je gagnai. Il demanda des portos. Je les gagnai et je les bus. D’autres encore. Ma tête commençait à osciller
2094 agnai. Il demanda des portos. Je les gagnai et je les bus. D’autres encore. Ma tête commençait à osciller vaguement. Les co
2095 encore. Ma tête commençait à osciller vaguement. Les couleurs du bar me remplissaient d’une joie inconnue. Et je me refusa
2096 uestions qu’en moi-même posait ma raison effarée. L’ étranger s’animait aussi : une fièvre faisait s’épanouir sur son visag
2097 quel plaisir cruel. C’était un jeu très simple où l’ esprit libre de calculs se tend ardemment vers la conclusion d’un hasa
2098 l’esprit libre de calculs se tend ardemment vers la conclusion d’un hasard qui opère au commandement de la main. Ce soir-
2099 nclusion d’un hasard qui opère au commandement de la main. Ce soir-là, une confiance me possédait, telle que je savais trè
2100 ais très clairement que je gagnerais à tout coup. L’ étranger se mit à discourir. Et dans mon ivresse, ses paroles peignaie
2101 je bouscule tous tes calculs, ha ! tu te disais : le voilà riche, le voilà classé, le voilà prêt à faire des bassesses pou
2102 tes calculs, ha ! tu te disais : le voilà riche, le voilà classé, le voilà prêt à faire des bassesses pour durer, et tu t
2103 ! tu te disais : le voilà riche, le voilà classé, le voilà prêt à faire des bassesses pour durer, et tu te réjouissais, pa
2104 omplètement démodées et d’intrigues usées jusqu’à la corde, jusqu’à la corde pour les pendre, ha ha ha ! Tu pensais que j’
2105 es et d’intrigues usées jusqu’à la corde, jusqu’à la corde pour les pendre, ha ha ha ! Tu pensais que j’allais me cramponn
2106 ues usées jusqu’à la corde, jusqu’à la corde pour les pendre, ha ha ha ! Tu pensais que j’allais me cramponner à cette espè
2107 er à cette espèce de bonheur qu’ils croient lié à la possession, et que j’allais vivre aussi sur le dogme l’argent-fait-le
2108 à la possession, et que j’allais vivre aussi sur le dogme l’argent-fait-le-bonheur. En somme, tu croyais que j’allais adh
2109 session, et que j’allais vivre aussi sur le dogme l’ argent-fait-le-bonheur. En somme, tu croyais que j’allais adhérer à l’
2110 heur. En somme, tu croyais que j’allais adhérer à l’ idéologie socialiste, gros farceur, va. Quand je songe à tous ces gens
2111 d je songe à tous ces gens qui perdent leur vie à la gagner9, et leur façon inexplicable de lier des valeurs morales aux c
2112  » comme ils disent dans leurs manuels scolaires. Les voler, pour leur apprendre. Et leur manie aussi de situer le paradis
2113 our leur apprendre. Et leur manie aussi de situer le paradis dans la classe d’impôts immédiatement supérieure à la leur. I
2114 re. Et leur manie aussi de situer le paradis dans la classe d’impôts immédiatement supérieure à la leur. Ils voudraient qu
2115 ans la classe d’impôts immédiatement supérieure à la leur. Ils voudraient que leur vie garantît un 5 % régulier de plaisir
2116 ertige sans prix du lâchez-tout ! Ils ont inventé les caisses d’épargne, monuments d’une bassesse morale inconcevable, temp
2117 onheur que celui qu’ils ont reçu de papa-maman et l’ Habitude, leur marraine aux dents jaunes. Ah ! perdre, perdre ; et c’e
2118 stinée dans l’autre, de douleurs en ivresses avec la même joie, mon cheval fou, mon beau Désir s’ébroue et part sitôt que
2119 bousse, ils n’y comprendront jamais rien, écoutez- les , comme ils me jugent et leurs cris indignés qui couvrent une angoisse
2120 leurs cris indignés qui couvrent une angoisse. Ça les dérange terriblement, sauf un ou deux qui s’imaginent gagner à mes dé
2121 in ce brave homme qui est en train de me soutirer les quelque billets de mille dont je venais de régler le sort, puisque de
2122 quelque billets de mille dont je venais de régler le sort, puisque demain dès l’aube, j’irai tenter la misère aux yeux las
2123 t je venais de régler le sort, puisque demain dès l’ aube, j’irai tenter la misère aux yeux las pleins de rêves, la misère
2124 le sort, puisque demain dès l’aube, j’irai tenter la misère aux yeux las pleins de rêves, la misère qui fait des soirs si
2125 ai tenter la misère aux yeux las pleins de rêves, la misère qui fait des soirs si doux aux amants quand ils n’ont plus que
2126 ls n’ont plus que des baisers au goût d’adieu, et l’ avenir où se mêlent incertaines, une tendresse éperdue et la mort. » I
2127 ù se mêlent incertaines, une tendresse éperdue et la mort. » Il ferma les yeux sur des visions. Les lustres doraient un br
2128 nes, une tendresse éperdue et la mort. » Il ferma les yeux sur des visions. Les lustres doraient un brouillard de fumée, et
2129 et la mort. » Il ferma les yeux sur des visions. Les lustres doraient un brouillard de fumée, et la musique noyait mes pen
2130 . Les lustres doraient un brouillard de fumée, et la musique noyait mes pensées. Je vis qu’une femme était assise à notre
2131 , en robe rouge, et très fardée. Elle jouait avec la rose. Les dés roulèrent, pour un dernier enjeu. Alors la femme lança
2132 rouge, et très fardée. Elle jouait avec la rose. Les dés roulèrent, pour un dernier enjeu. Alors la femme lança sur la tab
2133 . Les dés roulèrent, pour un dernier enjeu. Alors la femme lança sur la table cette rose qui s’effeuilla sur les dés, et p
2134 , pour un dernier enjeu. Alors la femme lança sur la table cette rose qui s’effeuilla sur les dés, et partit d’un long rir
2135 lança sur la table cette rose qui s’effeuilla sur les dés, et partit d’un long rire. Elle me regardait et l’étranger aussi
2136 s, et partit d’un long rire. Elle me regardait et l’ étranger aussi se mit à me regarder bizarrement et j’étais possédé de
2137 joies et de peurs. Il fallut se lever, traverser le café dans la musique et la rumeur des clients. Dehors les réclames lu
2138 peurs. Il fallut se lever, traverser le café dans la musique et la rumeur des clients. Dehors les réclames lumineuses dial
2139 ut se lever, traverser le café dans la musique et la rumeur des clients. Dehors les réclames lumineuses dialoguaient folle
2140 dans la musique et la rumeur des clients. Dehors les réclames lumineuses dialoguaient follement au-dessus des rues parcour
2141 main je n’avais plus un sou). Je n’ai jamais revu l’ étranger. Quelquefois je songe à ses paroles — ou peut-être n’étaient-
2142 inquiétude, parce que je ne suis plus tout à fait le même. Puis elle me laisse, parce que le lait va monter. Alors, dans m
2143 ut à fait le même. Puis elle me laisse, parce que le lait va monter. Alors, dans ma chambre, avant d’aller souper, je m’ab
2144 re, avant d’aller souper, je m’abats sur mon lit, les cheveux dans les mains. Et je voudrais pouvoir pleurer sur ma lâcheté
2145 souper, je m’abats sur mon lit, les cheveux dans les mains. Et je voudrais pouvoir pleurer sur ma lâcheté. Et je t’apostro
2146 haïr… 9. Calembour sur une idée juste. (Note de l’ éd.) l. Rougemont Denis de, « Dés ou la clef des champs », Neuchâtel
2147 (Note de l’éd.) l. Rougemont Denis de, « Dés ou la clef des champs », Neuchâtel 1928 : beaux-arts, arts appliqués, archi
39 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Louis Aragon, Le Paysan de Paris (janvier 1927)
2148 Louis Aragon, Le Paysan de Paris (janvier 1927)ab « Je n’admets pas qu’on reprenne
2149 n’admets pas qu’on reprenne mes paroles, qu’on me les oppose. Ce ne sont pas les termes d’un traité de paix. Entre moi et v
2150 mes paroles, qu’on me les oppose. Ce ne sont pas les termes d’un traité de paix. Entre moi et vous, c’est la guerre. » Voi
2151 mes d’un traité de paix. Entre moi et vous, c’est la guerre. » Voilà pour les critiques, « punaises glabres et poux barbus
2152 Entre moi et vous, c’est la guerre. » Voilà pour les critiques, « punaises glabres et poux barbus », qui perdraient leur t
2153 ux barbus », qui perdraient leur temps à recenser les incohérences pittoresques de ce petit livre. Quant à ceux que certain
2154 une kyrielle d’injures qui ne font pas honneur à l’ imagination d’autres fois si prestigieuse du poète : « Ils m’ont suivi
2155 ois si prestigieuse du poète : « Ils m’ont suivi, les imbéciles », ricane-t-il ; et sans rire : « À mort ceux qui paraphras
2156 ce que je dis ». Il y a chez Aragon une folie de la persécution, qui se cherche partout des prétextes, et une passion far
2157 rtout des prétextes, et une passion farouche pour la liberté, qui font de cet ombrageux personnage une manière de Rousseau
2158 tense désespoir, on songe au Frank de La Coupe et les Lèvres, à qui ses compagnons criaient : « Te fais-tu le bouffon de ta
2159 res, à qui ses compagnons criaient : « Te fais-tu le bouffon de ta propre détresse ? » Tant d’insistance dans le mauvais g
2160 de ta propre détresse ? » Tant d’insistance dans le mauvais goût ne m’empêchera pas de le dire, Aragon possède le tempéra
2161 stance dans le mauvais goût ne m’empêchera pas de le dire, Aragon possède le tempérament le plus hardi et le plus original
2162 oût ne m’empêchera pas de le dire, Aragon possède le tempérament le plus hardi et le plus original de la jeune littérature
2163 era pas de le dire, Aragon possède le tempérament le plus hardi et le plus original de la jeune littérature française. Il
2164 e, Aragon possède le tempérament le plus hardi et le plus original de la jeune littérature française. Il le proclame « J’a
2165 tempérament le plus hardi et le plus original de la jeune littérature française. Il le proclame « J’appartiens à la grand
2166 us original de la jeune littérature française. Il le proclame « J’appartiens à la grande race des torrents ». Génie inégal
2167 rature française. Il le proclame « J’appartiens à la grande race des torrents ». Génie inégal s’il en fut, voici parmi tro
2168 littérature pour trouver semblable domination de la langue. Et parmi les modernes, il bat tous les records de l’image, ce
2169 ouver semblable domination de la langue. Et parmi les modernes, il bat tous les records de l’image, ce qui nous vaut avec d
2170 de la langue. Et parmi les modernes, il bat tous les records de l’image, ce qui nous vaut avec des bizarreries fatigantes
2171 Et parmi les modernes, il bat tous les records de l’ image, ce qui nous vaut avec des bizarreries fatigantes et quelques so
2172 ne se croie pas tenu de justifier ses visions par le moyen d’une métaphysique aussi prétentieuse qu’incertaine. Son affair
2173 si prétentieuse qu’incertaine. Son affaire, c’est l’ amour, et certain désespoir vaste et profond comme l’époque. « Voulez-
2174 mour, et certain désespoir vaste et profond comme l’ époque. « Voulez-vous des douleurs, la mort ou des chansons ? » On a l
2175 ofond comme l’époque. « Voulez-vous des douleurs, la mort ou des chansons ? » On a l’hallucination du décor des capitales,
2176 us des douleurs, la mort ou des chansons ? » On a l’ hallucination du décor des capitales, créatrice d’un merveilleux de ch
2177 instant, d’une véritable « mythologie moderne ». Le Paysan de Paris est une suite de promenades dont la composition n’est
2178 Paysan de Paris est une suite de promenades dont la composition n’est pas sans rappeler celle des Nuits d’octobre de Nerv
2179 es Nuits d’octobre de Nerval ; forme qui permet à l’ auteur de divaguer de la philosophie au lyrisme le plus échevelé en pa
2180 rval ; forme qui permet à l’auteur de divaguer de la philosophie au lyrisme le plus échevelé en passant par la description
2181 l’auteur de divaguer de la philosophie au lyrisme le plus échevelé en passant par la description réaliste ou imaginée d’un
2182 sophie au lyrisme le plus échevelé en passant par la description réaliste ou imaginée d’une boîte de nuit, d’une devanture
2183 , d’une devanture, d’un parc public. Ce n’est pas le meilleur livre de l’auteur d’Anicet. C’est pourtant un des plus signi
2184 un parc public. Ce n’est pas le meilleur livre de l’ auteur d’Anicet. C’est pourtant un des plus significatifs du romantism
2185 ougemont Denis de, « [Compte rendu] Louis Aragon, Le Paysan de Paris  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genè
2186 de Paris  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, janvier 1927, p. 123-124.
2187  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , janvier 1927, p. 123-124.
40 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Billets aigres-doux (janvier 1927)
2188 riet V. A.-W. Poste aux amours perdues Sur le mont gris pâlissants Des bouquets de vagues brumes. Insulter ta beaut
2189 sses, ô col roide, En souffrance mes baisers. L’ amour est un alibi Nos lèvres sitôt que jointes, Ô dernier mensong
2190 vers d’autres rêves Où sourient quels anges fous. L’ horaire dicte un adieu, La mode qu’on rie des pleurs, Lors je baise vo
2191 rient quels anges fous. L’horaire dicte un adieu, La mode qu’on rie des pleurs, Lors je baise votre main Comme on signe d’
41 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Conte métaphysique : L’individu atteint de strabisme (janvier 1927)
2192 Conte métaphysique : L’ individu atteint de strabisme (janvier 1927)f g Comme le démiurge v
2193 u atteint de strabisme (janvier 1927)f g Comme le démiurge venait de peser sur le commutateur des étoiles… l’une, se dé
2194 1927)f g Comme le démiurge venait de peser sur le commutateur des étoiles… l’une, se décrochant sans plus d’hésitation,
2195 sans plus d’hésitation, se mit à pérégriner dans les régions de chasse gardée du ci-devant soleil. C’est là qu’Urbain, pre
2196 par qui ? elle était anticléricale, on ne saurait le taire, — Urbain dormait. L’étoile, jeune fille, roulait gentiment sur
2197 ricale, on ne saurait le taire, — Urbain dormait. L’ étoile, jeune fille, roulait gentiment sur ses pointes, tout scintille
2198 heure, elle éclaira d’une rose caresse lumineuse la chevelure rouge d’Urbain, et son nez, lequel, par ses dimensions rema
2199 dimensions remarquablement exagérées, lui valait le surnom de Bin-Bin. Urbain ouvrit les yeux et ne vit rien. On rappelle
2200 s, lui valait le surnom de Bin-Bin. Urbain ouvrit les yeux et ne vit rien. On rappelle que les étoiles s’étaient décrochées
2201 n ouvrit les yeux et ne vit rien. On rappelle que les étoiles s’étaient décrochées de leur poste dans l’éternité. « Éternit
2202 s étoiles s’étaient décrochées de leur poste dans l’ éternité. « Éternité désaffectée, c’est bien dommage, dit-il en s’étir
2203 fectée, c’est bien dommage, dit-il en s’étirant ; le printemps désormais rendra le ciel plus pâle, et nous irons chercher
2204 t-il en s’étirant ; le printemps désormais rendra le ciel plus pâle, et nous irons chercher dans le souvenir les vent-coul
2205 ra le ciel plus pâle, et nous irons chercher dans le souvenir les vent-coulis de la mort. Garçon, un café, un ! » Mais l’é
2206 lus pâle, et nous irons chercher dans le souvenir les vent-coulis de la mort. Garçon, un café, un ! » Mais l’étoile chantai
2207 rons chercher dans le souvenir les vent-coulis de la mort. Garçon, un café, un ! » Mais l’étoile chantait dans l’axe de sa
2208 t-coulis de la mort. Garçon, un café, un ! » Mais l’ étoile chantait dans l’axe de sa vie normale et s’approchait en faisan
2209 rçon, un café, un ! » Mais l’étoile chantait dans l’ axe de sa vie normale et s’approchait en faisant la roue — celle à qui
2210 ’axe de sa vie normale et s’approchait en faisant la roue — celle à qui sourit la Fortune. Urbain, fort d’une hérédité jud
2211 pprochait en faisant la roue — celle à qui sourit la Fortune. Urbain, fort d’une hérédité judiciaire et française, dédaign
2212 judiciaire et française, dédaigna des avances que la perte de son sens de l’éternel rendait pourtant considérables, au sen
2213 dédaigna des avances que la perte de son sens de l’ éternel rendait pourtant considérables, au sens étymologique du terme.
2214 es, au sens étymologique du terme. Il loucha vers le néant, retourna ses poches, ôta ses gants qu’il jeta, puis, après un
2215 u’il jeta, puis, après un grand coup de pied dans le vide symbolique des systèmes, sortit, c’est-à-dire qu’il fit un pas d
2216 e qu’il fit un pas dans une direction quelconque. L’ étoile pleurait, sentimentale. f. Rougemont Denis de, « L’individu
2217 eurait, sentimentale. f. Rougemont Denis de, «  L’ individu atteint de strabisme. Conte métaphysique », Revue de Belles-L
42 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Dans le Style (janvier 1927)
2218 Dans le Style (janvier 1927)h Nous recevons d’un bellettrien facétieux cet
2219 pour Paul Morand, auteur de « Lewis et Irène » L’ auteur de maint roman de caractère gras quitte Charing-Cross, songeant
2220 au cerveau du poète qui meurt de sommeil naturel. Le tunnel sous la Manche escamoté, le train dépose des complets rigides
2221 oète qui meurt de sommeil naturel. Le tunnel sous la Manche escamoté, le train dépose des complets rigides contenant des A
2222 mmeil naturel. Le tunnel sous la Manche escamoté, le train dépose des complets rigides contenant des Anglais fragiles. L’a
2223 complets rigides contenant des Anglais fragiles. L’ aube tire un écran de pluies sur le paysage commercial. Terminus : Mor
2224 lais fragiles. L’aube tire un écran de pluies sur le paysage commercial. Terminus : Morand, s’éveillant en français, termi
2225 s, termine : … Irène. (Grasset, 1924… … y compris la Suède et la Norvège.) On lit dans les Nouvelles littéraires , du 8
2226 … Irène. (Grasset, 1924… … y compris la Suède et la Norvège.) On lit dans les Nouvelles littéraires , du 8 janvier 192
2227 y compris la Suède et la Norvège.) On lit dans les Nouvelles littéraires , du 8 janvier 1927, l’information suivante :
2228 s les Nouvelles littéraires , du 8 janvier 1927, l’ information suivante : Mardi dernier a été célébré en l’église grecque
2229 rmation suivante : Mardi dernier a été célébré en l’ église grecque de la rue Georges Bizet le mariage de M. Paul Morand av
2230 ardi dernier a été célébré en l’église grecque de la rue Georges Bizet le mariage de M. Paul Morand avec la princesse Hélè
2231 lébré en l’église grecque de la rue Georges Bizet le mariage de M. Paul Morand avec la princesse Hélène-C. Soutzo. Les tém
2232 e Georges Bizet le mariage de M. Paul Morand avec la princesse Hélène-C. Soutzo. Les témoins étaient pour le marié : M. Ph
2233 . Paul Morand avec la princesse Hélène-C. Soutzo. Les témoins étaient pour le marié : M. Philippe Berthelot, secrétaire gén
2234 ncesse Hélène-C. Soutzo. Les témoins étaient pour le marié : M. Philippe Berthelot, secrétaire général du ministre des Aff
2235 ral du ministre des Affaires étrangères ; et pour la mariée : Son Excellence M. Diamanty, ministre de Roumanie à Paris. C’
2236 stre de Roumanie à Paris. C’est encore mieux dans le style. h. Rougemont Denis de, « Dans le style », Revue de Belles-L
2237 x dans le style. h. Rougemont Denis de, « Dans le style », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg,
43 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Bernard Barbey, La Maladère (février 1927)
2238 Bernard Barbey, La Maladère (février 1927)ac « Quel admirable sujet de roman, écrit G
2239 out de quinze ans, de vingt ans de vie conjugale, la décristallisation progressive et réciproque des conjoints. » On sait
2240 èvre d’imagination qui orne de beautés illusoires l’ objet de l’amour. Mais les jeunes gens de ce temps ne cultivent point
2241 ination qui orne de beautés illusoires l’objet de l’ amour. Mais les jeunes gens de ce temps ne cultivent point cette fièvr
2242 ne de beautés illusoires l’objet de l’amour. Mais les jeunes gens de ce temps ne cultivent point cette fièvre. Et comme la
2243 e temps ne cultivent point cette fièvre. Et comme la morale ne sait plus leur imposer de feindre encore ce que le cœur ne
2244 e sait plus leur imposer de feindre encore ce que le cœur ne ressent plus, il suffit de quelques mois aux jeunes époux de
2245 s, il suffit de quelques mois aux jeunes époux de la Maladère pour se déprendre de leurs rêves. Un malentendu grandit entr
2246 x dans leur isolement, inexplicable et mal avoué. L’ on songe à une fatalité intérieure qui les ferait se meurtrir l’un l’a
2247 l avoué. L’on songe à une fatalité intérieure qui les ferait se meurtrir l’un l’autre. Pourtant, jusqu’au bout, il semble q
2248 u’un mot, un geste décisif, ou certaine amitié de la saison suffirait à dissiper le charme perfide qui les tourmente. Mais
2249 certaine amitié de la saison suffirait à dissiper le charme perfide qui les tourmente. Mais il faudrait d’abord qu’ils se
2250 saison suffirait à dissiper le charme perfide qui les tourmente. Mais il faudrait d’abord qu’ils se soient délivrés d’eux-m
2251 , soient possibles. C’est d’Armande surtout qu’on les attendrait, plus franche d’allure. On ne sait ce qui la retient : son
2252 endrait, plus franche d’allure. On ne sait ce qui la retient : son amour ? son manque d’amour ? Pour Jacques, il souffre d
2253 able adolescence, d’un défaitisme sentimental qui l’ empêtre de réticences, et le fait jouer bien maladroitement son rôle d
2254 tisme sentimental qui l’empêtre de réticences, et le fait jouer bien maladroitement son rôle d’homme… « Captif de sa propr
2255 e trahit Barbey : son art est justement de voiler les intentions du récit et de les exprimer seulement par un geste, une nu
2256 justement de voiler les intentions du récit et de les exprimer seulement par un geste, une nuance du paysage, une image qu’
2257 sentiment. Ce n’est qu’à force de discrétion dans les moyens qu’il parvient à une certaine puissance de l’effet, aux derniè
2258 moyens qu’il parvient à une certaine puissance de l’ effet, aux dernières pages. Il règne dans la Maladère une étrange harm
2259 ce de l’effet, aux dernières pages. Il règne dans la Maladère une étrange harmonie entre le climat des sentiments et celui
2260 règne dans la Maladère une étrange harmonie entre le climat des sentiments et celui des campagnes désolées où ils se dével
2261 ristes et sans violence, autour de ces êtres dont la détresse est d’autant plus cruelle qu’elle est contenue sous des deho
2262 ntenue sous des dehors trop polis. Une fois fermé le livre de Barbey, on oublie la justesse de son analyse pour n’évoquer
2263 lis. Une fois fermé le livre de Barbey, on oublie la justesse de son analyse pour n’évoquer plus que des visions où se con
2264 our n’évoquer plus que des visions où se condense le sentiment du récit. Dans le Cœur gros, c’était un parc avant l’orage,
2265 isions où se condense le sentiment du récit. Dans le Cœur gros, c’était un parc avant l’orage, le rose sombre d’une joue b
2266 u récit. Dans le Cœur gros, c’était un parc avant l’ orage, le rose sombre d’une joue brûlante et fraîche dans le vent. Et
2267 Dans le Cœur gros, c’était un parc avant l’orage, le rose sombre d’une joue brûlante et fraîche dans le vent. Et dans la M
2268 e rose sombre d’une joue brûlante et fraîche dans le vent. Et dans la Maladère, un arbre coupé découvrant le manoir perdu,
2269 ne joue brûlante et fraîche dans le vent. Et dans la Maladère, un arbre coupé découvrant le manoir perdu, des fumées sur u
2270 t. Et dans la Maladère, un arbre coupé découvrant le manoir perdu, des fumées sur un paysage d’hiver et soudain sous la lu
2271 des fumées sur un paysage d’hiver et soudain sous la lueur d’un incendie, deux visages tordus de passion. Cette fin est ad
2272 tordus de passion. Cette fin est admirable, dont la brutalité si longtemps désirée délivre Jacques d’un passé obsédant, d
2273 gemont Denis de, « [Compte rendu] Bernard Barbey, La Maladère  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, fév
2274 Maladère  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, février 1927, p. 256.
2275  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , février 1927, p. 256.
44 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Guy de Pourtalès, Montclar (février 1927)
2276 Guy de Pourtalès, Montclar (février 1927)ad L’ on aime que, pour certains hommes, écrire ne soit que le recensement p
2277 ime que, pour certains hommes, écrire ne soit que le recensement passionné de leur vie, ou l’aveu déguisé d’une insatisfac
2278 soit que le recensement passionné de leur vie, ou l’ aveu déguisé d’une insatisfaction qu’elle leur laisse. Montclar est l’
2279 insatisfaction qu’elle leur laisse. Montclar est l’ auteur de vers de jeunesse auxquels il ne tient guère, et l’on compren
2280 e vers de jeunesse auxquels il ne tient guère, et l’ on comprend que ce journal bientôt les rejoindra dans l’armoire aux so
2281 nt guère, et l’on comprend que ce journal bientôt les rejoindra dans l’armoire aux souvenirs. Cette façon de ne pas y tenir
2282 omprend que ce journal bientôt les rejoindra dans l’ armoire aux souvenirs. Cette façon de ne pas y tenir, qu’il manifeste
2283 oute occasion de sa vie est peut-être ce qui nous le rend le plus sympathique. « Officiellement comblé, et par dedans… com
2284 asion de sa vie est peut-être ce qui nous le rend le plus sympathique. « Officiellement comblé, et par dedans… comment bie
2285 ui, comme pour Barnabooth, il s’agit de « déjouer le complot de la commodité ». Mais plus voluptueux que philosophe, c’est
2286 Barnabooth, il s’agit de « déjouer le complot de la commodité ». Mais plus voluptueux que philosophe, c’est à l’amour qu’
2287 é ». Mais plus voluptueux que philosophe, c’est à l’ amour qu’il ira demander la souffrance indispensable au perfectionneme
2288 ue philosophe, c’est à l’amour qu’il ira demander la souffrance indispensable au perfectionnement de son âme. Et qu’import
2289 au perfectionnement de son âme. Et qu’importe si les Allemands qui, fréquente sontae, pour notre plaisir, un peu plus vien
2290 rle de choses d’art comme on fait dans Proust, si les passions qu’il nous peint sont ici tant soit peu russes, et là, gidie
2291 se connaît assez pour savoir ce qui est en lui de l’ homme même, ou de l’amateur distingué, — et ne peut pas nous tromper l
2292 r savoir ce qui est en lui de l’homme même, ou de l’ amateur distingué, — et ne peut pas nous tromper là-dessus. Il se conn
2293 sus. Il se connaît avec une sorte de froideur que l’ on dirait désintéressée si elle n’avait pour effet de souligner, plus
2294 he secrètement, parce que de ces « ratages » naît le perpétuel besoin d’évasion qui est la condition de son progrès moral.
2295 ages » naît le perpétuel besoin d’évasion qui est la condition de son progrès moral. C’est ainsi qu’il consent, non sans u
2296 consent, non sans une imperceptible satisfaction, l’ aveu d’une fondamentale indifférence du cœur qui contraste avec une vi
2297 meline, un amour se noue, qui commence où souvent l’ on finit. Et peut-être l’amour n’est-il possible qu’entre deux cœurs q
2298 qui commence où souvent l’on finit. Et peut-être l’ amour n’est-il possible qu’entre deux cœurs que l’épreuve du plaisir n
2299 l’amour n’est-il possible qu’entre deux cœurs que l’ épreuve du plaisir n’a pas exténués. Mais alors quelle avidité cruelle
2300 amour, à force de petites blessures. Ce n’est pas le moins troublant d’une telle vie, cette sagesse un peu sombre qui s’en
2301 ’en dégage, sagesse qui veut « que nous appelions les âmes à la vie après seulement toutes les morts du plaisir », car elle
2302 sagesse qui veut « que nous appelions les âmes à la vie après seulement toutes les morts du plaisir », car elle sait « qu
2303 ppelions les âmes à la vie après seulement toutes les morts du plaisir », car elle sait « qu’entre les êtres, le bonheur es
2304 les morts du plaisir », car elle sait « qu’entre les êtres, le bonheur est un lien sans durée. Seules la souffrance ou de
2305 du plaisir », car elle sait « qu’entre les êtres, le bonheur est un lien sans durée. Seules la souffrance ou de secrètes a
2306 êtres, le bonheur est un lien sans durée. Seules la souffrance ou de secrètes anomalies ont un pouvoir d’éternité. » Il e
2307 e, ce me semble, d’insister sur ce qui forme dans le récit de cette vie comme une arrière-pensée inquiète et un peu hautai
2308 e arrière-pensée inquiète et un peu hautaine. Que la composition de cette réminiscence soit assez facile et « artiste » on
2309 le et « artiste » on hésite à en faire reproche à l’ auteur. Cette espèce de modestie de l’allure est rare autant que sympa
2310 reproche à l’auteur. Cette espèce de modestie de l’ allure est rare autant que sympathique, dans le temps que sévit l’infl
2311 de l’allure est rare autant que sympathique, dans le temps que sévit l’inflation littéraire la plus ridicule. Pourtant, qu
2312 e autant que sympathique, dans le temps que sévit l’ inflation littéraire la plus ridicule. Pourtant, qu’elle ne laisse poi
2313 e, dans le temps que sévit l’inflation littéraire la plus ridicule. Pourtant, qu’elle ne laisse point oublier que ce livre
2314 Montclar  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, février 1927, p. 257. ae. Il manque sans doute un morceau d
2315  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , février 1927, p. 257. ae. Il manque sans doute un morceau de phrase
2316 e. Il manque sans doute un morceau de phrase dans l’ édition originale.
45 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Lettre du survivant (février 1927)
2317 ant (février 1927)i j « Triste, mais vrai. » ( Les journaux.) Mademoiselle, Il faut d’abord que je m’excuse : c’est un
2318 vous dise qu’il fait très froid dans ma chambre : le feu n’a pas pris, et d’ailleurs cela n’en vaut plus la peine. (Veuill
2319 u n’a pas pris, et d’ailleurs cela n’en vaut plus la peine. (Veuillez ne pas voir dans cette phrase quelque allusion de ma
2320 dit, sans doute parce que c’est là que se nouent les douleurs les plus atrocement inutiles. La première fois, au théâtre.
2321 ute parce que c’est là que se nouent les douleurs les plus atrocement inutiles. La première fois, au théâtre. Dans l’ombre,
2322 ment inutiles. La première fois, au théâtre. Dans l’ ombre, j’ai suivi le drame sur vos traits seulement ; l’écho n’en fut
2323 emière fois, au théâtre. Dans l’ombre, j’ai suivi le drame sur vos traits seulement ; l’écho n’en fut que plus douloureux
2324 e, j’ai suivi le drame sur vos traits seulement ; l’ écho n’en fut que plus douloureux dans mon cœur. Puis je vous ai oubli
2325 ous voir si entourée… D’autres fois… je n’ai plus le courage de les dire. Enfin, avant-hier, à ce bal. J’avais demandé à
2326 tourée… D’autres fois… je n’ai plus le courage de les dire. Enfin, avant-hier, à ce bal. J’avais demandé à un de mes amis,
2327 us connaît4, de me présenter. Il m’en avait donné la promesse. Vos regards rencontrèrent les miens plus d’une fois pendant
2328 pendant une danse qu’il fit avec vous, mais vous les détourniez soudain comme pour vous arracher à une obsession secrèteme
2329 session secrètement attirante ; et je pensais que la force de mon désir était telle que vous en éprouviez vaguement la men
2330 désir était telle que vous en éprouviez vaguement la menace. Je dis menace, parce que mes airs sombres vous effrayaient sa
2331 seule leur prêtait quelque intention. Quand enfin l’ orchestre s’arrêta, je me trouvais tout près de vous. Mon ami me fit u
2332 mon du malheur me paralysa. Je venais d’entrevoir l’ image d’un couple heureux et banal, votre sourire répondant au mien, c
2333 aires et sur des cartes postales illustrées. Déjà la foule des danseurs nous séparait, mon ami se détournait, un peu vexé 
2334 s une invincible lassitude me saisir et m’assis à l’ écart. On me demandait, en passant, si j’étais malade. Je désignais d’
2335 s bouteilles de champagne vides ; car on pardonne l’ ivresse, mais non certaines douleurs. Même, je fus obligé de confier à
2336 bligé de confier à un ami que j’en avais repris … Les archets jouaient sur mes nerfs. Le jazz martelait mon désespoir. Dése
2337 vais repris … Les archets jouaient sur mes nerfs. Le jazz martelait mon désespoir. Désespoir étroit, ces œillères géantes
2338 sespoir étroit, ces œillères géantes aux pensées, le ciel trop bas d’un rêve sans issue, pesant comme l’envie d’un sommeil
2339 ciel trop bas d’un rêve sans issue, pesant comme l’ envie d’un sommeil sans fin… J’avais soif, mais la seule vue d’un liqu
2340 l’envie d’un sommeil sans fin… J’avais soif, mais la seule vue d’un liquide me soulevait le cœur. L’aube parut. On éteigni
2341 soif, mais la seule vue d’un liquide me soulevait le cœur. L’aube parut. On éteignit toutes les lampes, et les couples cha
2342 s la seule vue d’un liquide me soulevait le cœur. L’ aube parut. On éteignit toutes les lampes, et les couples charlestonna
2343 ulevait le cœur. L’aube parut. On éteignit toutes les lampes, et les couples charlestonnaient plus furieusement dans l’ombr
2344 . L’aube parut. On éteignit toutes les lampes, et les couples charlestonnaient plus furieusement dans l’ombre livide, aux c
2345 s couples charlestonnaient plus furieusement dans l’ ombre livide, aux cris fêlés et déchirants des saxophones. Sortie dans
2346 s. Sortie dans un matin sourd, frileux, qui avait la nausée. Je rentrai seul. Voici quelques mots que j’écrivis à ma table
2347 œillet, pauvre gentillesse d’une autre femme dont le seul défaut fut de m’aimer… (Froid aux genoux, odeur de vieille fumée
2348 umée, et ce refus au sommeil qui meurtrit jusqu’à l’ âme.) Convulsions d’oriflammes sur l’orchestre pensif. Ton regard est
2349 trit jusqu’à l’âme.) Convulsions d’oriflammes sur l’ orchestre pensif. Ton regard est plus grand que le chant des violons.
2350 l’orchestre pensif. Ton regard est plus grand que le chant des violons. Aube dure ! En ma tête rôde ton souvenir, comme un
2351 es heures, d’un sommeil triste, tout enfiévré par la crainte du réveil. Puis je suis revenu dans ces rues où je vous renco
2352 n rendez-vous au thé du Printemps. J’ai rôdé dans la joie féminine des grands magasins, n’osant pas repasser trop souvent
2353 agasins, n’osant pas repasser trop souvent devant les ascenseurs. « Vers 4 heures, me disais-je elle y entrera, et, me glis
2354 tage… » Je délirais, bien sûr. Je m’imaginais que les vendeuses me dévisageaient de plus en plus impudemment : je devais pa
2355 qu’un paquet de dix personnes s’engouffrait dans la cage rouge et or et s’élevait, j’éprouvais un petit arrachement, comm
2356 ais encore : Si je prends cet ascenseur et que je la croise en route dans l’ascenseur descendant… Il aurait fallu monter,
2357 s cet ascenseur et que je la croise en route dans l’ ascenseur descendant… Il aurait fallu monter, mais l’idée de vous trou
2358 scenseur descendant… Il aurait fallu monter, mais l’ idée de vous trouver peut-être assise en face de votre bel ami laqué,
2359 je suis sorti. Il y avait beaucoup de monde dans les rues, sous la pluie. Les autobus passaient par groupes. Plusieurs foi
2360 Il y avait beaucoup de monde dans les rues, sous la pluie. Les autobus passaient par groupes. Plusieurs fois, j’ai cru vo
2361 t beaucoup de monde dans les rues, sous la pluie. Les autobus passaient par groupes. Plusieurs fois, j’ai cru vous reconnaî
2362 s. Plusieurs fois, j’ai cru vous reconnaître dans la foule qui se précipitait, mais je n’avais pas pris de numéro, je ne p
2363 llu courir après celle-là qui venait de tourner à l’ angle de cette rue et qui avait votre démarche. Mais, pendant ce temps
2364 désir surmené vous appelait encore, haletant. Et le temps passait, à la fois si lent — jusqu’à l’arrivée du prochain métr
2365 Et le temps passait, à la fois si lent — jusqu’à l’ arrivée du prochain métro, du prochain autobus, — si rapide : déjà les
2366 in métro, du prochain autobus, — si rapide : déjà les lumières des boulevards glissaient des reflets sur l’asphalte mouillé
2367 umières des boulevards glissaient des reflets sur l’ asphalte mouillé. Les pieds dans l’eau, les jambes fatiguées, les paup
2368 ds glissaient des reflets sur l’asphalte mouillé. Les pieds dans l’eau, les jambes fatiguées, les paupières lourdes, et ce
2369 es reflets sur l’asphalte mouillé. Les pieds dans l’ eau, les jambes fatiguées, les paupières lourdes, et ce chant désespér
2370 ets sur l’asphalte mouillé. Les pieds dans l’eau, les jambes fatiguées, les paupières lourdes, et ce chant désespéré qui vo
2371 illé. Les pieds dans l’eau, les jambes fatiguées, les paupières lourdes, et ce chant désespéré qui vous appelait, assourdis
2372 était arrêté tout près de moi. Je vis un visage à l’ intérieur se pencher vers la vitre… Je montai. Il n’y avait que des da
2373 i. Je vis un visage à l’intérieur se pencher vers la vitre… Je montai. Il n’y avait que des dames. Personne ne parlait. La
2374 Il n’y avait que des dames. Personne ne parlait. La jeune femme qui s’était penchée vous ressemblait tant. Mais je n’osai
2375 ous ressemblait tant. Mais je n’osais presque pas la regarder, à cause d’une incertitude qui redonnait tout son empire à m
2376 . Peut-être était-ce vous. Je ne saurai jamais. À l’ arrêt de la Place Saint-Michel, elle sortit, en me frôlant, sans me re
2377 était-ce vous. Je ne saurai jamais. À l’arrêt de la Place Saint-Michel, elle sortit, en me frôlant, sans me regarder. Je
2378 derrière elle. Mais tout de suite des parapluies la dérobèrent à mes yeux. Une bouche de métro m’attira. Les rames s’arrê
2379 obèrent à mes yeux. Une bouche de métro m’attira. Les rames s’arrêtaient avec un sifflement particulièrement doux pour ma f
2380 gue, et ces gens pressés et songeurs respectaient la folie douloureuse qui devait contracter mon visage. Je promenais sur
2381 egards angoissés, avides, implorants. Oh ! toutes les femmes que j’ai fait souffrir cette nuit d’un long regard de damné. À
2382 je mêlais à mes pensées des fragments de rêves et les personnages des affiches, tout en marchant sans fin dans les couloirs
2383 ages des affiches, tout en marchant sans fin dans les couloirs implacablement brillants, je me pris à parler à haute voix,
2384 ases incohérentes. Je voyais avec une sombre joie les employés et les voyageurs s’inquiéter. Bientôt on m’entraîna de force
2385 s. Je voyais avec une sombre joie les employés et les voyageurs s’inquiéter. Bientôt on m’entraîna de force sur un trottoir
2386 force sur un trottoir roulant qui me remonta dans la rue. La fraîcheur de la brume m’apaisa. Sur la promesse que je fis qu
2387 r un trottoir roulant qui me remonta dans la rue. La fraîcheur de la brume m’apaisa. Sur la promesse que je fis que je me
2388 ulant qui me remonta dans la rue. La fraîcheur de la brume m’apaisa. Sur la promesse que je fis que je me sentais mieux, o
2389 ns la rue. La fraîcheur de la brume m’apaisa. Sur la promesse que je fis que je me sentais mieux, on me laissa rentrer seu
2390 t 5 heures du matin. Premiers appels d’autos dans la ville, mais il me semble que toutes choses s’éloignent de moi vertigi
2391 à rien dans mon esprit. Peut-être que j’ai perdu la notion du temps. Je ne me souviens plus que de cette déception insupp
2392 tout ce qui me navre au plus intime de mon être… Le revolver est chargé, sur cette table. (Je le caresse, entre deux phra
2393 tre… Le revolver est chargé, sur cette table. (Je le caresse, entre deux phrases.) Mais voici que ce geste de ma mort auss
2394 ais voici que ce geste de ma mort aussi me lasse, l’ image que je m’en forme… Je ne comprends plus pourquoi je devrais me t
2395 is me tuer, pourquoi je souffre, ce que c’est que la souffrance, ce que c’est que ma vie, ma mort. Mon Dieu, il n’y a plus
46 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Orphée sans charme (février 1927)
2396 février 1927)k « Cet âge est sans pitié. » «  Le véritable symbole n’est jamais prévu par l’auteur », écrivait Cocteau
2397  » « Le véritable symbole n’est jamais prévu par l’ auteur », écrivait Cocteau dans la préface des Mariés de la tour Eiffe
2398 amais prévu par l’auteur », écrivait Cocteau dans la préface des Mariés de la tour Eiffel. Et une note d’Orphée précise :
2399 », écrivait Cocteau dans la préface des Mariés de la tour Eiffel. Et une note d’Orphée précise : « Inutile de dire qu’il n
2400 tile de dire qu’il n’y a pas un seul symbole dans la pièce. » Ce qui me gêne pourtant, c’est d’y découvrir possibles deux
2401 au d’en avoir plus ou moins consciemment concerté la possibilité. Orphée, par exemple, serait un poète surréaliste. « Il f
2402 dale. Il faut un de ces orages qui rafraîchissent l’ air. » Il prétend « traquer l’inconnu ». Sa femme l’accuse de « vouloi
2403 qui rafraîchissent l’air. » Il prétend « traquer l’ inconnu ». Sa femme l’accuse de « vouloir faire admettre que la poésie
2404 air. » Il prétend « traquer l’inconnu ». Sa femme l’ accuse de « vouloir faire admettre que la poésie consiste à écrire une
2405 Sa femme l’accuse de « vouloir faire admettre que la poésie consiste à écrire une phrase ». Et cette phrase, c’est un chev
2406 se ». Et cette phrase, c’est un cheval savant qui la lui a dictée : « Madame Eurydice Reviendra Des Enfers. » — « Ce n’est
2407 un poème, un poème du rêve, une fleur du fond de la mort. » Or, on découvre à la fin de la pièce que c’est une anagramme
2408 une fleur du fond de la mort. » Or, on découvre à la fin de la pièce que c’est une anagramme un peu ordurière. Ainsi les r
2409 du fond de la mort. » Or, on découvre à la fin de la pièce que c’est une anagramme un peu ordurière. Ainsi les rêves publi
2410 e que c’est une anagramme un peu ordurière. Ainsi les rêves publiés par les surréalistes, donnés à la fois comme poèmes et
2411 mme un peu ordurière. Ainsi les rêves publiés par les surréalistes, donnés à la fois comme poèmes et comme dictées de l’inc
2412 donnés à la fois comme poèmes et comme dictées de l’ inconscient, au fond desquels on a si vite fait de distinguer les quel
2413 au fond desquels on a si vite fait de distinguer les quelques préoccupations assez simples dont l’étude charme le psychana
2414 er les quelques préoccupations assez simples dont l’ étude charme le psychanalyste. Je pourrais poursuivre le jeu. Et puis,
2415 préoccupations assez simples dont l’étude charme le psychanalyste. Je pourrais poursuivre le jeu. Et puis, il y a aussi d
2416 e charme le psychanalyste. Je pourrais poursuivre le jeu. Et puis, il y a aussi des sortes de calembours… Art chrétien, a
2417 crivit certains vers qu’on peut lire plus haut : Les anges véritables qui connaissent les signes Sont moins bons acrobates
2418 plus haut : Les anges véritables qui connaissent les signes Sont moins bons acrobates… (etc.)… Cocteau s’est trop exercé
2419 Cocteau s’est trop exercé avant de se lancer sur la corde raide. Je suis sûr qu’il ne tombera pas. J’admire sans émoi. ⁂
2420 ’il ne tombera pas. J’admire sans émoi. ⁂ Certes, les qualités scéniques de cette pièce sont grandes. Je ne saurais même in
2421 e indiquer aucun endroit par où elle pèche contre les principes chers à l’auteur du Secret professionnel et de la préface d
2422 it par où elle pèche contre les principes chers à l’ auteur du Secret professionnel et de la préface des Mariés — principes
2423 es chers à l’auteur du Secret professionnel et de la préface des Mariés — principes dont l’énoncé brillant et définitif re
2424 nnel et de la préface des Mariés — principes dont l’ énoncé brillant et définitif restera l’un des titres les plus authenti
2425 ncé brillant et définitif restera l’un des titres les plus authentiques de Cocteau. Précision et relief du dialogue, ingéni
2426 liques ; enfin, un style parfaitement pauvre dans le détail, un vrai style de théâtre, d’une netteté qui pourtant n’est pa
2427 as maigre, d’une familiarité dramatique qui cerne le mystère d’un trait pur. Il semble que Cocteau ait réalisé là exacteme
2428 ble machine ne m’inquiète guère : je sais qu’elle le conduira où il veut, sans surprises. « Puisque ces mystères me dépass
2429 que ces mystères me dépassent, feignons d’en être l’ organisateur », disait le photographe des Mariés. Dans Orphée, le myst
2430 sent, feignons d’en être l’organisateur », disait le photographe des Mariés. Dans Orphée, le mystère ne peut plus dépasser
2431 », disait le photographe des Mariés. Dans Orphée, le mystère ne peut plus dépasser l’auteur : il l’a trop bien organisé. E
2432 és. Dans Orphée, le mystère ne peut plus dépasser l’ auteur : il l’a trop bien organisé. En somme, ce qu’il faut reprocher
2433 e, le mystère ne peut plus dépasser l’auteur : il l’ a trop bien organisé. En somme, ce qu’il faut reprocher à Cocteau, c’e
2434 lètement une pièce, prouvant une fois de plus que l’ atmosphère de l’« art pur » n’est pas respirable. Il ne manque rien à
2435 ce, prouvant une fois de plus que l’atmosphère de l’ « art pur » n’est pas respirable. Il ne manque rien à Orphée, sinon pe
2436 art de Dieu » — comme dit Gide — qui serait aussi la part de l’humain, l’imperfection secrète qui fait naître l’amour. Par
2437  » — comme dit Gide — qui serait aussi la part de l’ humain, l’imperfection secrète qui fait naître l’amour. Parce que la c
2438 dit Gide — qui serait aussi la part de l’humain, l’ imperfection secrète qui fait naître l’amour. Parce que la création es
2439 l’humain, l’imperfection secrète qui fait naître l’ amour. Parce que la création est venue après la théorie. Parce qu’une
2440 ection secrète qui fait naître l’amour. Parce que la création est venue après la théorie. Parce qu’une fois de plus, Cocte
2441 re l’amour. Parce que la création est venue après la théorie. Parce qu’une fois de plus, Cocteau a comprimé des pétales de
2442 les de roses dans du cristal taillé, selon toutes les règles de l’art, mais que l’essence obtenue, si elle est de rose, est
2443 ans du cristal taillé, selon toutes les règles de l’ art, mais que l’essence obtenue, si elle est de rose, est sans parfum.
2444 aillé, selon toutes les règles de l’art, mais que l’ essence obtenue, si elle est de rose, est sans parfum.   (Tout de même
2445  : j’en verrais une preuve, pour mon compte, dans le fait que je ne sais parler de lui autrement que par métaphores.) 5.
2446 trement que par métaphores.) 5. M. Zimmer, dans la Gazette de Lausanne . Et même il appelait Orphée « une tragédie de l
2447 ne . Et même il appelait Orphée « une tragédie de l’ amour conjugal ». Vraiment, nous n’en demandions pas tant… k. Rougem
47 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). L’autre œil (février 1927)
2448 L’autre œil (février 1927)l m Décembre L’ époque s’ouvre où l’on attend un miracle pour la fin de la semaine. « 
2449 ier 1927)l m Décembre L’époque s’ouvre où l’ on attend un miracle pour la fin de la semaine. « Messieurs, disait Da
2450 L’époque s’ouvre où l’on attend un miracle pour la fin de la semaine. « Messieurs, disait Dardel, y a pas à tortiller, i
2451 s’ouvre où l’on attend un miracle pour la fin de la semaine. « Messieurs, disait Dardel, y a pas à tortiller, il faut fai
2452 ça semble idiot. Il y a des soirs où une idée de la responsabilité s’empare de nous. Et nous calculons qu’il s’agit de dé
2453 de déranger 5000 personnes en huit soirées, et de les occuper quatre heures durant… Mais la vision, rapidement entrevue par
2454 ées, et de les occuper quatre heures durant… Mais la vision, rapidement entrevue par chacun dans son for le plus intérieur
2455 sion, rapidement entrevue par chacun dans son for le plus intérieur, d’une fuite en auto, nous rassure provisoirement…
2456 ment… Prosopopée, à propos d’une apparition La vieille Monture 6 un soir nous apparut, lugubrement fardée, l’haleine
2457 nture 6 un soir nous apparut, lugubrement fardée, l’ haleine mauvaise, édentée et tâchant à prendre un accent anglais d’un
2458 nt d’un doigt impitoyable son flanc déjà meurtri, la suivaient en hurlant : « Bas-toi là, bas-toi là ! »… Est-il plus atro
2459 onçant de séniles calembours… Pénétrés d’horreur, les bellettriens avaient fui. Au détour d’une ivresse, ils rencontrèrent
2460 t une créature évadée d’anciens rêves qui hantait les limbes depuis un an déjà. Ils ne tardèrent pas à reconnaître Cinémato
2461 tre. Ils se réunissent parfois autour d’un feu et le contemplent un certain temps en silence. « Well ! », dit enfin Dardel
2462 n temps en silence. « Well ! », dit enfin Dardel. Les autres n’en pensent pas moins. Quelquefois, Mossoul amène un scénario
2463 et à deux faces. Lugin, qui est théologien, et de la Tchaux, n’a pas la foi. Topin, Mahomet désabusé, constate que jamais
2464 gin, qui est théologien, et de la Tchaux, n’a pas la foi. Topin, Mahomet désabusé, constate que jamais « la Montagne » ne
2465 i. Topin, Mahomet désabusé, constate que jamais «  la Montagne » ne saura venir au prophète, même s’il se nomme Mossoul. Po
2466 énie vint s’asseoir certaine nuit. Elle parla par la bouche de Lugin, sa langue dans la langue de Lugin : « Le rideau se l
2467 Elle parla par la bouche de Lugin, sa langue dans la langue de Lugin : « Le rideau se lève sur un miroir qui occupe toute
2468 e de Lugin, sa langue dans la langue de Lugin : «  Le rideau se lève sur un miroir qui occupe toute la largeur de la scène.
2469  Le rideau se lève sur un miroir qui occupe toute la largeur de la scène. Titre : Socrate et Narcisse, un acte à grande fi
2470 lève sur un miroir qui occupe toute la largeur de la scène. Titre : Socrate et Narcisse, un acte à grande figuration. » En
2471 et Narcisse, un acte à grande figuration. » Enfin l’ on joua aux petits dés le sort de notre parade — et l’on gagna. Enthou
2472 ande figuration. » Enfin l’on joua aux petits dés le sort de notre parade — et l’on gagna. Enthousiasmé, « Mimosa » partit
2473 joua aux petits dés le sort de notre parade — et l’ on gagna. Enthousiasmé, « Mimosa » partit pour la Riviera afin de négo
2474 l’on gagna. Enthousiasmé, « Mimosa » partit pour la Riviera afin de négocier la vente de cette martingale avec des surréa
2475  Mimosa » partit pour la Riviera afin de négocier la vente de cette martingale avec des surréalistes hétérodoxes. Il revin
2476 érodoxes. Il revint juste à temps pour assister à la cérémonie de la pose du point final de « Cinématoma ou les épanchemen
2477 int juste à temps pour assister à la cérémonie de la pose du point final de « Cinématoma ou les épanchements de la jeune S
2478 onie de la pose du point final de « Cinématoma ou les épanchements de la jeune Synovie », parade « née du mariage de nos ve
2479 oint final de « Cinématoma ou les épanchements de la jeune Synovie », parade « née du mariage de nos veilles et de nos rêv
2480 riage de nos veilles et de nos rêves », ainsi que le disait si poétiquement le programme. Un peu d’histoire (erratum de la
2481 nos rêves », ainsi que le disait si poétiquement le programme. Un peu d’histoire (erratum de la chronique de Mossoul). Be
2482 ement le programme. Un peu d’histoire (erratum de la chronique de Mossoul). Belles-Lettres joua l’Inspecteur de Gogol à l’
2483 de la chronique de Mossoul). Belles-Lettres joua l’ Inspecteur de Gogol à l’époque où le Cuirassé Potemkine était interdit
2484 oul). Belles-Lettres joua l’Inspecteur de Gogol à l’ époque où le Cuirassé Potemkine était interdit à l’écran. Pitoëff avai
2485 -Lettres joua l’Inspecteur de Gogol à l’époque où le Cuirassé Potemkine était interdit à l’écran. Pitoëff avait prêté un a
2486 ’époque où le Cuirassé Potemkine était interdit à l’ écran. Pitoëff avait prêté un accent, Mme d’Assilva deux actrices, M.
2487 re dans des jupons autrement que par métaphore. À La Chaux-de-Fonds, il y eut trente membres et cent doigts dans deux lits
2488 cela fait-il de pieds et d’oreillles ? À signaler la fuite de Bec-de-Gaz, lequel s’éteignit dans les neiges. Un jour, on s
2489 er la fuite de Bec-de-Gaz, lequel s’éteignit dans les neiges. Un jour, on s’aperçut que cette chose avait recommencé, qu’on
2490 mmencé, qu’on appelle, sans doute par antiphrase, la vie. 6. Revue ou prologue. l. Rougemont Denis de, « L’autre œil 
48 1927, Articles divers (1924–1930). Conférence d’Edmond Esmonin sur « La révocation de l’édit de Nantes » (16 février 1927)
2491 Conférence d’Edmond Esmonin sur «  La révocation de l’édit de Nantes » (16 février 1927)j Le sujet que M
2492 onférence d’Edmond Esmonin sur « La révocation de l’ édit de Nantes » (16 février 1927)j Le sujet que M. Esmonin, profes
2493 ation de l’édit de Nantes » (16 février 1927)j Le sujet que M. Esmonin, professeur à la Faculté des lettres de Grenoble
2494 r 1927)j Le sujet que M. Esmonin, professeur à la Faculté des lettres de Grenoble, traita mardi soir à la Grande salle
2495 ulté des lettres de Grenoble, traita mardi soir à la Grande salle des Conférences, devant un très bel auditoire, est un de
2496 des plus passionnants et des plus controversés de l’ histoire. L’un de ceux, aussi, où il est le plus difficile de rester i
2497 sés de l’histoire. L’un de ceux, aussi, où il est le plus difficile de rester impartial. M. Lombard, recteur de l’Universi
2498 icile de rester impartial. M. Lombard, recteur de l’ Université, en introduisant le conférencier, a fait allusion aux diver
2499 Lombard, recteur de l’Université, en introduisant le conférencier, a fait allusion aux divers points de vue auxquels on a
2500 ints de vue auxquels on a pu se placer pour juger la révocation. M. Esmonin, lui, se place au point de vue de l’historien
2501 ion. M. Esmonin, lui, se place au point de vue de l’ historien scrupuleux, qui juge d’après les textes, les causes et les e
2502 e vue de l’historien scrupuleux, qui juge d’après les textes, les causes et les effets vérifiables, et non d’après un systè
2503 istorien scrupuleux, qui juge d’après les textes, les causes et les effets vérifiables, et non d’après un système préconçu.
2504 uleux, qui juge d’après les textes, les causes et les effets vérifiables, et non d’après un système préconçu. (Cette attitu
2505 préconçu. (Cette attitude est plus rare qu’on ne le croit, de nos jours.) M. Esmonin montra avec beaucoup de clarté comme
2506 c beaucoup de clarté comment, entre 1578, date de la proclamation de l’édit, et 1685, date de la révocation, la France pas
2507 é comment, entre 1578, date de la proclamation de l’ édit, et 1685, date de la révocation, la France passa de la plus grand
2508 te de la proclamation de l’édit, et 1685, date de la révocation, la France passa de la plus grande liberté à la plus grand
2509 mation de l’édit, et 1685, date de la révocation, la France passa de la plus grande liberté à la plus grande tyrannie. En
2510 t 1685, date de la révocation, la France passa de la plus grande liberté à la plus grande tyrannie. En proclamant la liber
2511 tion, la France passa de la plus grande liberté à la plus grande tyrannie. En proclamant la liberté religieuse, Henry IV m
2512 liberté à la plus grande tyrannie. En proclamant la liberté religieuse, Henry IV mettait le royaume à la tête de la civil
2513 roclamant la liberté religieuse, Henry IV mettait le royaume à la tête de la civilisation ; en interdisant aux réformés d’
2514 liberté religieuse, Henry IV mettait le royaume à la tête de la civilisation ; en interdisant aux réformés d’exercer leur
2515 igieuse, Henry IV mettait le royaume à la tête de la civilisation ; en interdisant aux réformés d’exercer leur religion, m
2516 rcer leur religion, mais en même temps de quitter le pays, Louis XIV commit un des actes les plus vexatoires que l’histoir
2517 de quitter le pays, Louis XIV commit un des actes les plus vexatoires que l’histoire ait enregistrés. Après avoir fait un t
2518 s XIV commit un des actes les plus vexatoires que l’ histoire ait enregistrés. Après avoir fait un tableau de la France de
2519 e ait enregistrés. Après avoir fait un tableau de la France de l’édit, victorieuse dans la guerre de Trente Ans, l’orateur
2520 trés. Après avoir fait un tableau de la France de l’ édit, victorieuse dans la guerre de Trente Ans, l’orateur expose comme
2521 tableau de la France de l’édit, victorieuse dans la guerre de Trente Ans, l’orateur expose comment on en vint à la révoca
2522 l’édit, victorieuse dans la guerre de Trente Ans, l’ orateur expose comment on en vint à la révocation. C’est d’abord l’inf
2523 Trente Ans, l’orateur expose comment on en vint à la révocation. C’est d’abord l’influence du clergé, jaloux de ses droits
2524 comment on en vint à la révocation. C’est d’abord l’ influence du clergé, jaloux de ses droits considérables encore ; puis
2525 de ses droits considérables encore ; puis ce sont les conseillers intimes du roi, un jésuite, le père Lachaise, un archevêq
2526 sont les conseillers intimes du roi, un jésuite, le père Lachaise, un archevêque libertin, Harlay de Champvallon, et surt
2527 n leurs intérêts immédiats à leur désir de gagner le ciel, persuadent Louis XIV que la révocation serait une œuvre digne d
2528 désir de gagner le ciel, persuadent Louis XIV que la révocation serait une œuvre digne du Roi-Soleil et capable de lui fai
2529 e du Roi-Soleil et capable de lui faire pardonner les erreurs de sa jeunesse. Le roi, « un niais en matière religieuse » au
2530 e lui faire pardonner les erreurs de sa jeunesse. Le roi, « un niais en matière religieuse » au dire de sa belle-sœur, la
2531 en matière religieuse » au dire de sa belle-sœur, la princesse palatine, se laisse facilement convaincre. D’ailleurs, les
2532 ine, se laisse facilement convaincre. D’ailleurs, les jésuites ont déjà réussi à « tourner » l’édit par mille arguties juri
2533 leurs, les jésuites ont déjà réussi à « tourner » l’ édit par mille arguties juridiques. Et les statistiques faussées peuve
2534 ourner » l’édit par mille arguties juridiques. Et les statistiques faussées peuvent faire croire à une très forte diminutio
2535 s. Aussi ne s’effraye-t-on pas trop, au début, de l’ émigration des fidèles qui suivent leurs pasteurs proscrits. On espère
2536 rtir de gré ou de force tous ceux qui resteront «  Les enfants seront du moins catholiques, si les pères sont hypocrites »,
2537 ont « Les enfants seront du moins catholiques, si les pères sont hypocrites », écrit Madame de Maintenon. Mais bientôt l’on
2538 crites », écrit Madame de Maintenon. Mais bientôt l’ on voit la France se dépeupler ; des industries sont presque anéanties
2539 écrit Madame de Maintenon. Mais bientôt l’on voit la France se dépeupler ; des industries sont presque anéanties ; les con
2540 peupler ; des industries sont presque anéanties ; les conséquences funestes de l’acte de révocation commencent à se révéler
2541 presque anéanties ; les conséquences funestes de l’ acte de révocation commencent à se révéler politiques (guerre de la co
2542 ion commencent à se révéler politiques (guerre de la confession d’Augsbourg) et surtout morales : car malgré des félicitat
2543 es félicitations arrachées par Louis XIV au pape, les catholiques sont loin d’être unanimes à louer la révocation. L’un d’e
2544 les catholiques sont loin d’être unanimes à louer la révocation. L’un d’eux s’indigne, dans une lettre à Louvois, de ce qu
2545 s’indigne, dans une lettre à Louvois, de ce que «  les dragons ont été les meilleurs prédicateurs de notre Évangile ». Et le
2546 lettre à Louvois, de ce que « les dragons ont été les meilleurs prédicateurs de notre Évangile ». Et les persécutions contr
2547 es meilleurs prédicateurs de notre Évangile ». Et les persécutions contre ceux qui n’ont commis d’autre crime que de « dépl
2548  déplaire au roi » vont reprendre de plus belle : la guerre civile succède aux dragonnades. M. Esmonin s’abstient d’en fai
2549 ent d’en faire un tableau qu’il suppose présent à l’ esprit de ses auditeurs. Il termine en citant le jugement d’Albert Sor
2550 à l’esprit de ses auditeurs. Il termine en citant le jugement d’Albert Sorel, selon qui la date du 16 octobre 1685 marque
2551 e en citant le jugement d’Albert Sorel, selon qui la date du 16 octobre 1685 marque une déviation dans l’histoire de la Fr
2552 date du 16 octobre 1685 marque une déviation dans l’ histoire de la France. Déviation telle, en effet, que nous en sentons
2553 obre 1685 marque une déviation dans l’histoire de la France. Déviation telle, en effet, que nous en sentons les conséquenc
2554 e. Déviation telle, en effet, que nous en sentons les conséquences de nos jours encore, ajoute M. Esmonin. Et nous ne pouvo
2555 ouvons que nous réjouir de retrouver bientôt dans l’ ouvrage qu’il va consacrer à Louis XIV l’exposé si dénué de parti pris
2556 tôt dans l’ouvrage qu’il va consacrer à Louis XIV l’ exposé si dénué de parti pris, si libre et d’une si élégante science d
2557 ofesseur de Grenoble. j. Rougemont Denis de, «  La révocation de l’édit de Nantes », Feuille d’avis de Neuchâtel, Neuchâ
2558 ble. j. Rougemont Denis de, « La révocation de l’ édit de Nantes », Feuille d’avis de Neuchâtel, Neuchâtel, 16 février 1
49 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Edmond Jaloux, Ô toi que j’eusse aimée… (mars 1927)
2559 se aimée… (mars 1927)af M. Edmond Jaloux offre l’ exemple rare d’un homme que son évolution naturelle a rapproché, dans
2560 sa maturité, des jeunes générations, en sorte que l’ espèce de romantisme à la Nerval auquel il aboutit coïncide avec un mo
2561 énérations, en sorte que l’espèce de romantisme à la Nerval auquel il aboutit coïncide avec un mouvement dont lui-même s’e
2562 ec un mouvement dont lui-même s’est plu à relever les indices chez ses jeunes contemporains, et qu’il vient appuyer de son
2563 éjà riche de romancier. Son regard se promène sur le même monde où se plaisent nos jeunes poètes cosmopolites, mais il gar
2564 Giraudoux, j’y vois un signe charmant d’amitié de l’ aîné au plus jeune, lequel envoie l’un de ses personnages pour remerci
2565 ’un René Dubardeau pour cette ambassade). Parfois l’ on se demande si l’Auber de Jean Cassou ne va pas s’attabler au café e
2566 pour cette ambassade). Parfois l’on se demande si l’ Auber de Jean Cassou ne va pas s’attabler au café en face des personna
2567 face des personnages de Jaloux. Et peut-être que la comtesse Rezzovitch a rencontré M. Paul Morand, mais elle a dû le tro
2568 ovitch a rencontré M. Paul Morand, mais elle a dû le trouver un peu froid, n’aura pas été tentée de lui faire ces confiden
2569 confiant et secrètement incertain de ce roman. À la veille de se marier, Jérôme Parseval, journaliste parisien, rencontre
2570 carne aussitôt à ses yeux tout ce qu’il attend de l’ amour. Une confidence, un baiser, et il ne la reverra jamais. Il aime
2571 d de l’amour. Une confidence, un baiser, et il ne la reverra jamais. Il aime encore sa femme, « mais comme on aime une pet
2572 d on a failli hériter de Chenonceaux ». Peu à peu l’ image d’Irène Rezzovitch s’idéalise et gagne la puissance d’une mervei
2573 eu l’image d’Irène Rezzovitch s’idéalise et gagne la puissance d’une merveilleuse obsession. Il lui écrit de longues lettr
2574 obsession. Il lui écrit de longues lettres, sans les envoyer. Il apprend sa mort, et qu’elle l’aurait peut-être aimé. Enfi
2575 sans les envoyer. Il apprend sa mort, et qu’elle l’ aurait peut-être aimé. Enfin, divorcé, seul, il la revoit dans une vis
2576 l’aurait peut-être aimé. Enfin, divorcé, seul, il la revoit dans une vision prestigieuse et désolée… M. Jaloux a trouvé là
2577 nt aujourd’hui un réalisme discret mais précis et le sens de ce qu’il y a en nous d’essentiel, de ce qui détermine nos act
2578 ssentiel, de ce qui détermine nos actes avant que la raison n’intervienne, mouvements de nos passions à nous-mêmes inavoué
2579 système de valeurs lyriques et sentimentales que la raison ignore ou tyrannise aveuglément, car « nous avons dressé notre
2580 manque guère à ce devoir sacré ». M. Jaloux évite le péril d’un réalisme trop amer et celui du roman lyrique, par l’équili
2581 réalisme trop amer et celui du roman lyrique, par l’ équilibre qu’il maintient entre ces deux inconscients : l’époque et l’
2582 bre qu’il maintient entre ces deux inconscients : l’ époque et l’être secret du héros. Il sait mieux que quiconque aujourd’
2583 intient entre ces deux inconscients : l’époque et l’ être secret du héros. Il sait mieux que quiconque aujourd’hui faire éc
2584 rsonne, pas même eux ». Dans ce roman, comme dans l’ Âge d’or, un désenchantement profond prend le masque d’une aimable mél
2585 dans l’Âge d’or, un désenchantement profond prend le masque d’une aimable mélancolie. C’est la sourde tristesse des choses
2586 d prend le masque d’une aimable mélancolie. C’est la sourde tristesse des choses qui vous échappent, des amours impossible
2587 rs impossibles, des histoires dont on ne sait pas la fin ni le sens véritable, mais seulement qu’elles ont fait souffrir.
2588 bles, des histoires dont on ne sait pas la fin ni le sens véritable, mais seulement qu’elles ont fait souffrir. Rendez-vou
2589 compris, et peut-être, un quiproquo de destinées… Le tragique du peut-être ; (comme dans l’une des dernières phrases de Sy
2590 ’une des dernières phrases de Sylvie : « Là était le bonheur, peut-être… »). Mais le ton reste si léger, spirituel, fantai
2591 lvie : « Là était le bonheur, peut-être… »). Mais le ton reste si léger, spirituel, fantaisiste (cette touche pour peindre
2592 eindre un personnage épisodique : « Il confondait la rose et la pivoine, l’orange et l’ananas… »). Une telle œuvre, dense,
2593 ersonnage épisodique : « Il confondait la rose et la pivoine, l’orange et l’ananas… »). Une telle œuvre, dense, sans obscu
2594 isodique : « Il confondait la rose et la pivoine, l’ orange et l’ananas… »). Une telle œuvre, dense, sans obscurité, riche
2595  Il confondait la rose et la pivoine, l’orange et l’ ananas… »). Une telle œuvre, dense, sans obscurité, riche et décantée,
2596 e aimée…  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, mars 1927, p. 387-388.
2597  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , mars 1927, p. 387-388.
50 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Entr’acte de René Clair, ou L’éloge du Miracle (mars 1927)
2598 Entr’acte de René Clair, ou L’ éloge du Miracle (mars 1927)n Surprendre est peu de chose, il faut
2599 se, il faut transplanter. Max Jacob. Ce soir-là, le programme comprenait : un film d’avant-guerre ; un film japonais ; En
2600 d’avant-guerre ; un film japonais ; Entr’acte et le Voyage imaginaire, de René Clair. La Mort de Phèdre (environ 1905) :
2601 ntr’acte et le Voyage imaginaire, de René Clair. La Mort de Phèdre (environ 1905) : quelques acteurs d’une troupe de prov
2602 ent dans un décor très pauvre, légèrement coloré. Le principe est simple : « Je vous aime » se traduit par trois ou quatre
2603 aime » se traduit par trois ou quatre claques sur la poitrine ; et une crise intérieure par un court accès de danse de Sai
2604 ourt accès de danse de Saint-Guy. Art classique : la mort d’Hyppolite se passe en coulisse. Mais Phèdre avoue tout « devan
2605 asse en coulisse. Mais Phèdre avoue tout « devant le cadavre encore tout chaud ». Affreux. Aussi : « Elle mourut. » On voi
2606 ourut. » On voit que cette bande est antérieure à l’ époque du long baiser de conclusion. Le film japonais : une historiett
2607 térieure à l’époque du long baiser de conclusion. Le film japonais : une historiette un peu plus banale que nature, très b
2608 banale que nature, très bien photographiée. C’est le film du type « Jeux de soleil dans les jardins, complets variés, ça f
2609 hiée. C’est le film du type « Jeux de soleil dans les jardins, complets variés, ça fait toujours plaisir de voir des gens b
2610 Soudain éclate Entr’acte (1925). « Une étude sur le Monde des Rêves ». Rondes de cheminées dans le ciel où des pressentim
2611 ur le Monde des Rêves ». Rondes de cheminées dans le ciel où des pressentiments clignent de l’œil. Des poupées en baudruch
2612 es dans le ciel où des pressentiments clignent de l’ œil. Des poupées en baudruche gonflent leur tête jusqu’à éclater, tand
2613 ne colonnade, puis un jeu d’échec serré, mais sur la corniche d’un gratte-ciel, d’où se met à descendre un petit bateau de
2614 bateau de papier, sur fond de boulevards et parmi les toits flottants, c’est assez tragique. Mitrailleuse de phares d’auto,
2615 st assez tragique. Mitrailleuse de phares d’auto, les 100 000 yeux de la nuit. Des imprécisions rapides. Un chasseur, toujo
2616 itrailleuse de phares d’auto, les 100 000 yeux de la nuit. Des imprécisions rapides. Un chasseur, toujours sur son toit ;
2617 Un chasseur, toujours sur son toit ; il tire sur l’ œuf d’où naît une colombe. Chasse. Mais un papillon éclatant qui batta
2618 Chasse. Mais un papillon éclatant qui battait de l’ aile un dixième de seconde, par intermittences, se pose enfin sur l’éc
2619 de seconde, par intermittences, se pose enfin sur l’ écran : une danseuse sur une plaque de verre, vue par-dessous. Quelque
2620 s qui suivent sont embrumés dans mon souvenir par le rayonnement de la robe, fleur qui s’ouvre pour dégager le mouvement o
2621 embrumés dans mon souvenir par le rayonnement de la robe, fleur qui s’ouvre pour dégager le mouvement obsédant de deux ja
2622 nement de la robe, fleur qui s’ouvre pour dégager le mouvement obsédant de deux jambes, l’harmonie de leurs arabesques à t
2623 our dégager le mouvement obsédant de deux jambes, l’ harmonie de leurs arabesques à trois dimensions mêlées avec une lenteu
2624 une perfection dont une brève vue verticale donne la clé… Un enterrement bourgeois, mais le corbillard est traîné par un d
2625 cale donne la clé… Un enterrement bourgeois, mais le corbillard est traîné par un dromadaire, d’ailleurs dételé. Les amis
2626 est traîné par un dromadaire, d’ailleurs dételé. Les amis affligés mangent les couronnes et suivent à grands sauts lents,
2627 ire, d’ailleurs dételé. Les amis affligés mangent les couronnes et suivent à grands sauts lents, solennels. Ils revoient la
2628 ent à grands sauts lents, solennels. Ils revoient la danseuse, font une ronde autour d’une tour Eiffel de bois de la taill
2629 ont une ronde autour d’une tour Eiffel de bois de la taille de l’Obélisque de la Concorde, puis enfilent les Champs-Élysée
2630 autour d’une tour Eiffel de bois de la taille de l’ Obélisque de la Concorde, puis enfilent les Champs-Élysées à une allur
2631 our Eiffel de bois de la taille de l’Obélisque de la Concorde, puis enfilent les Champs-Élysées à une allure grandissante,
2632 ille de l’Obélisque de la Concorde, puis enfilent les Champs-Élysées à une allure grandissante, bientôt vertigineuse, pours
2633 e grandissante, bientôt vertigineuse, poursuivant le corbillard. Aspects du paysage urbain vu par les poursuivants, arbres
2634 t le corbillard. Aspects du paysage urbain vu par les poursuivants, arbres au ciel renversé, maisons obliques, montagnes ru
2635 . (J’ai regretté que René Clair ne nous donne pas la vision du mort.) Enfin le cercueil roule dans les marguerites, il en
2636 Clair ne nous donne pas la vision du mort.) Enfin le cercueil roule dans les marguerites, il en sort un chef d’orchestre d
2637 la vision du mort.) Enfin le cercueil roule dans les marguerites, il en sort un chef d’orchestre dont la baguette éteint t
2638 marguerites, il en sort un chef d’orchestre dont la baguette éteint tous les personnages et lui-même. ⁂ Le tout ne dure p
2639 un chef d’orchestre dont la baguette éteint tous les personnages et lui-même. ⁂ Le tout ne dure pas 20 minutes. Et c’est h
2640 guette éteint tous les personnages et lui-même. ⁂ Le tout ne dure pas 20 minutes. Et c’est heureux. Nous manquons d’entraî
2641 c’est heureux. Nous manquons d’entraînement dans le domaine du merveilleux moderne. Un peu plus et nous demandions grâce
2642 e de trop de plaisir. Mais je ne suis pas sûr que le plaisir du public fût de même essence que le nôtre. Les gens rient à
2643 aisir du public fût de même essence que le nôtre. Les gens rient à l’enterrement au ralenti, à l’éclatement des têtes de po
2644 ût de même essence que le nôtre. Les gens rient à l’ enterrement au ralenti, à l’éclatement des têtes de poupées, à la conc
2645 tre. Les gens rient à l’enterrement au ralenti, à l’ éclatement des têtes de poupées, à la conclusion. Ce n’est pas le bon
2646 u ralenti, à l’éclatement des têtes de poupées, à la conclusion. Ce n’est pas le bon rire de cinéma. Quand la danseuse par
2647 s têtes de poupées, à la conclusion. Ce n’est pas le bon rire de cinéma. Quand la danseuse paraît, ils n’attendent que le
2648 lusion. Ce n’est pas le bon rire de cinéma. Quand la danseuse paraît, ils n’attendent que le moment où ils pourront se pou
2649 ma. Quand la danseuse paraît, ils n’attendent que le moment où ils pourront se pousser en disant : « C’que c’est cochon ! 
2650 pousser en disant : « C’que c’est cochon ! » Mais le moment ne vient pas, ils sont déçus. Enfin, mon voisin, un agent, mur
2651 emple, où nous ne pouvons nous empêcher d’admirer l’ utilisation artistique ingénieuse et précise de certaines théories sur
2652 e ingénieuse et précise de certaines théories sur le rêve, le peuple, qui n’a pas vu ces dessous mais accueille le résulta
2653 use et précise de certaines théories sur le rêve, le peuple, qui n’a pas vu ces dessous mais accueille le résultat avec la
2654 peuple, qui n’a pas vu ces dessous mais accueille le résultat avec la naïveté qu’il faut, approuve et dit : « C’est bien ç
2655 as vu ces dessous mais accueille le résultat avec la naïveté qu’il faut, approuve et dit : « C’est bien ça, c’est comme qu
2656 uand on rêve. » Un des défauts d’Entr’acte, c’est la fantaisie recherchée de certaines scènes (l’enterrement). Cela fait b
2657 ’est la fantaisie recherchée de certaines scènes ( l’ enterrement). Cela fait bizarre. Or, dans le monde où le cinéma doit n
2658 ènes (l’enterrement). Cela fait bizarre. Or, dans le monde où le cinéma doit nous « transplanter », un certain naturel est
2659 rrement). Cela fait bizarre. Or, dans le monde où le cinéma doit nous « transplanter », un certain naturel est de rigueur 
2660 nsi qualifié : c’est peut-être le premier film où l’ on a fait du ciné avec des moyens proprement cinégraphiques. Ici le ge
2661 né avec des moyens proprement cinégraphiques. Ici le geste pictural remplace le geste de l’acteur. Un mouvement ne soulign
2662 nt cinégraphiques. Ici le geste pictural remplace le geste de l’acteur. Un mouvement ne souligne pas, il exprime, et se su
2663 iques. Ici le geste pictural remplace le geste de l’ acteur. Un mouvement ne souligne pas, il exprime, et se suffit. Mais c
2664 ne pas, il exprime, et se suffit. Mais comme pour le film 1905, on a sans cesse envie de crier : « Trop de gestes ! » C’es
2665 C’est une question d’épuration des moyens. Rendre le plus par le moins, c’est le fait d’un art à sa maturité. Mais ce sont
2666 estion d’épuration des moyens. Rendre le plus par le moins, c’est le fait d’un art à sa maturité. Mais ce sont là critique
2667 on des moyens. Rendre le plus par le moins, c’est le fait d’un art à sa maturité. Mais ce sont là critiques de style. D’or
2668 es de style. D’ores et déjà, il faut admirer dans les films de René Clair un sens du miracle assez bouleversant. Et je ne p
2669 ne parle pas du miracle genre conte de fée, comme le Voyage imaginaire en montre (beaucoup trop à mon gré). Qu’une sorcièr
2670 chien, cela n’a rien d’étonnant au cinéma. C’est la photographie d’une chose qui ne serait étonnante que dans le réel ; c
2671 phie d’une chose qui ne serait étonnante que dans le réel ; ce n’est pas encore un miracle de ciné. Et les fées paraissent
2672 réel ; ce n’est pas encore un miracle de ciné. Et les fées paraissent vieux jeu avec leur baguette, pour moi qui chaque soi
2673 soir crée ma chambre en tournant un commutateur. Le vrai miracle du cinéma, c’est, par exemple, l’éclosion d’une rose, un
2674 r. Le vrai miracle du cinéma, c’est, par exemple, l’ éclosion d’une rose, un homme qui court au ralenti, certaines coïncide
2675 ’est une réalité quotidienne dans une lumière qui la métamorphose ; c’est un temps nouveau, et l’espace en relation se mod
2676 qui la métamorphose ; c’est un temps nouveau, et l’ espace en relation se modifie pour maintenir je ne sais quelle harmoni
2677 elle dont nous avons convenu et que nous pensions la seule possible. Le monde « normal » nous apparaît alors comme l’une s
2678 s convenu et que nous pensions la seule possible. Le monde « normal » nous apparaît alors comme l’une seulement des mille
2679 nécessités sociales — nous empêchent de découvrir la richesse immédiate. Surréel qui n’est pas synonyme d’incompréhensible
2680 on Madame, car alors quoi de plus surréaliste que le film 1905. Ce n’est peut-être qu’une question d’imagination ; il rest
2681 gineuses, et nous en sommes encore à nous frotter les yeux… Peut-être, quand nos regards plus assurés sauront enfin gagner
2682 ards plus assurés sauront enfin gagner de vitesse les prodiges que déclenche René Clair, verrons-nous, pris par surprise da
2683 René Clair, verrons-nous, pris par surprise dans l’ exploration ivre d’un projecteur, des signes fatidiques, le visage d’u
2684 tion ivre d’un projecteur, des signes fatidiques, le visage d’un ange. n. Rougemont Denis de, «  Entr’acte de René Clai
2685 ougemont Denis de, «  Entr’acte de René Clair, ou L’ éloge du Miracle », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève
51 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Daniel-Rops, Notre inquiétude (avril 1927)
2686 927)ag Il faut souhaiter que ce témoignage sur les générations nouvelles et leurs maîtres soit lu par tous ceux qui cher
2687 lu par tous ceux qui cherchent à s’orienter dans la crise moderne. M. Daniel-Rops unit en lui à l’état de velléités contr
2688 ns la crise moderne. M. Daniel-Rops unit en lui à l’ état de velléités contradictoires que son intelligence très nuancée ma
2689 ncée maintient en une sorte d’instable équilibre, les tendances que ses contemporains ont poussées à l’extrême avec moins d
2690 es tendances que ses contemporains ont poussées à l’ extrême avec moins de prudence mais aussi de lucidité. Séduit par Gide
2691 lucidité. Séduit par Gide ; admirant Maurras sans l’ aimer ; saluant en Valéry une réussite unique mais presque inhumaine ;
2692 e mais presque inhumaine ; secrètement attiré par les thèses extrémistes mais non dépourvues d’une sombre grandeur, des sur
2693 et en même temps par cette solution universelle, la foi, il résume en lui cette inquiétude qui fait la grandeur et la mis
2694 a foi, il résume en lui cette inquiétude qui fait la grandeur et la misère de l’époque — et qu’il avoue préférer à une cer
2695 e en lui cette inquiétude qui fait la grandeur et la misère de l’époque — et qu’il avoue préférer à une certitude trop vit
2696 e inquiétude qui fait la grandeur et la misère de l’ époque — et qu’il avoue préférer à une certitude trop vite atteinte, o
2697 jeunesse ne verrait qu’une abdication. Il décrit la « génération nouvelle » avec une intelligente sympathie et un sens ra
2698 amlétisme », pouvoir aigu d’analyse qui conduit à la dispersion autant qu’à l’approfondissement du moi, soif de tout et po
2699 d’analyse qui conduit à la dispersion autant qu’à l’ approfondissement du moi, soif de tout et pourtant mépris de tout, pro
2700 t pourtant mépris de tout, procédant d’un goût de l’ absolu à la fois mystique et anarchique : ce sont bien les grands trai
2701 u à la fois mystique et anarchique : ce sont bien les grands traits de notre inquiétude. (Mais peut-être M. Rops a-t-il tro
2702 tude. (Mais peut-être M. Rops a-t-il trop négligé le rôle extérieur, que je crois décisif, des conditions de la vie modern
2703 xtérieur, que je crois décisif, des conditions de la vie moderne.) Après avoir défini quelques « positions en face de l’in
2704 près avoir défini quelques « positions en face de l’ inquiétude », M. Rops considère les deux solutions les plus parfaites
2705 ions en face de l’inquiétude », M. Rops considère les deux solutions les plus parfaites qui s’offrent aux jeunes gens d’auj
2706 nquiétude », M. Rops considère les deux solutions les plus parfaites qui s’offrent aux jeunes gens d’aujourd’hui. Il consta
2707 qu’en y substituant ce qui ne vient que de Dieu : la Foi ». Acculée à la rigueur d’un choix presque impossible, notre ince
2708 ce qui ne vient que de Dieu : la Foi ». Acculée à la rigueur d’un choix presque impossible, notre incertitude paraît sans
2709 de. Mais, ici, M. Daniel-Rops n’a-t-il pas cédé à la tentation de créer des dilemmes irréductibles, suprême et inconscient
2710 uprême et inconsciente ruse d’un inquiet qui veut le rester ? Ces deux solutions peuvent se résumer en deux mots : inquiét
2711 : inquiétude ou foi. Dès lors sont-elles vraiment les deux termes d’un dilemme, l’une n’étant que le chemin qui mène à l’au
2712 t les deux termes d’un dilemme, l’une n’étant que le chemin qui mène à l’autre ? Car la foi naît de l’inquiétude autant qu
2713 ne n’étant que le chemin qui mène à l’autre ? Car la foi naît de l’inquiétude autant que de la grâce, et régénère sans ces
2714 le chemin qui mène à l’autre ? Car la foi naît de l’ inquiétude autant que de la grâce, et régénère sans cesse l’inquiétude
2715 e ? Car la foi naît de l’inquiétude autant que de la grâce, et régénère sans cesse l’inquiétude autant que la sérénité… Au
2716 de autant que de la grâce, et régénère sans cesse l’ inquiétude autant que la sérénité… Au reste, n’est-elle pas de M. Rops
2717 e, et régénère sans cesse l’inquiétude autant que la sérénité… Au reste, n’est-elle pas de M. Rops lui-même, cette phrase
2718 lui-même, cette phrase qui formule admirablement les exigences conjointes de l’inquiétude et de la foi : « Si tu as trouvé
2719 formule admirablement les exigences conjointes de l’ inquiétude et de la foi : « Si tu as trouvé Dieu, il te reste à le che
2720 nt les exigences conjointes de l’inquiétude et de la foi : « Si tu as trouvé Dieu, il te reste à le chercher encore… » a
2721 de la foi : « Si tu as trouvé Dieu, il te reste à le chercher encore… » ag. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Daniel
2722 quiétude  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, avril 1927, p. 563-564.
2723  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , avril 1927, p. 563-564.
52 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Louis Aragon, le beau prétexte (avril 1927)
2724 Louis Aragon, le beau prétexte (avril 1927)o Ah ! je sens qu’une puissance étrangè
2725 ce étrangère s’est emparée de mon être et a saisi les cordes les plus secrètes de mon âme, qu’elle peut faire désormais vib
2726 e s’est emparée de mon être et a saisi les cordes les plus secrètes de mon âme, qu’elle peut faire désormais vibrer à sa fa
2727 en décembre 1925, au sortir d’une conférence sur le Salut de l’humanité.)   Ce soir en moi trépigne une rage. Sur quelles
2728 1925, au sortir d’une conférence sur le Salut de l’ humanité.)   Ce soir en moi trépigne une rage. Sur quelles épaules jet
2729 es jeter ce manteau de flammes, puis à qui dédier l’ ennui de ma révolte ? Aragon sarcastique se tient là-bas dans un rayon
2730 — auxquels je crois encore, et pas seulement pour le pittoresque. — Attrape !   Il n’existe pas de théorie du salut. Il n’
2731 ’existe que des systèmes pour faire taire en nous l’ appel vertigineux du Silence. On nous montre des Dieux, mais c’est pou
2732 ourner nos regards de cela qu’il faut bien nommer le Vide. Tant de séductions nous ont en vain tentés, ô tortures fascinan
2733 ous ont en vain tentés, ô tortures fascinantes de la sainteté, seules vous nous appelez encore hors de cette voix de l’inf
2734 es vous nous appelez encore hors de cette voix de l’ infini où chancellent parmi les éclairs nos premiers pas. Aragon, dans
2735 rs de cette voix de l’infini où chancellent parmi les éclairs nos premiers pas. Aragon, dans ces tempêtes de nuits filantes
2736 ilantes où s’enfuient, souffles à peine parfumés, les vices enlacés aux vertus, c’est un ricanement splendide comme un écla
2737 de comme un éclat de rire de condamné à mort et à l’ éternité. Le diable avait pris des avocats dont les plaidoyers, tissus
2738 éclat de rire de condamné à mort et à l’éternité. Le diable avait pris des avocats dont les plaidoyers, tissus des mensong
2739 l’éternité. Le diable avait pris des avocats dont les plaidoyers, tissus des mensonges les plus beaux et des plus mélodieus
2740 avocats dont les plaidoyers, tissus des mensonges les plus beaux et des plus mélodieuses palinodies, font encore rêver les
2741 es plus mélodieuses palinodies, font encore rêver les anges écœurés d’azur. Alors un juron mélodramatique, d’une voix tortu
2742 ble un anathème sanglant. Louis Aragon, avocat de l’ infini, annonce l’entrée de l’éternelle anarchiste, la Poésie.   On di
2743 nglant. Louis Aragon, avocat de l’infini, annonce l’ entrée de l’éternelle anarchiste, la Poésie.   On dit : « Des mots ! »
2744 s Aragon, avocat de l’infini, annonce l’entrée de l’ éternelle anarchiste, la Poésie.   On dit : « Des mots ! » au lieu de
2745 fini, annonce l’entrée de l’éternelle anarchiste, la Poésie.   On dit : « Des mots ! » au lieu de « Je ne comprends pas ».
2746 rends pas ». On dit : « Je ne comprends pas », et l’ on pense : « C’est donc incompréhensible ». On dit : « C’est incompréh
2747 ble ». On dit : « C’est incompréhensible ! » — et l’ on est enfin rassuré. C’est incompréhensible !, trois mots dont l’un
2748 vos glandes salivaires, pourtant si éprouvées par le repas dont vous sortez, que ces trois mots où se résume la défense de
2749 dont vous sortez, que ces trois mots où se résume la défense de la loi sociale, patriotique, religieuse (?) et ci-devant m
2750 ez, que ces trois mots où se résume la défense de la loi sociale, patriotique, religieuse (?) et ci-devant morale qui prot
2751 rallumez votre cigare. Vous vous êtes assuré que la porte ferme bien sur l’infini. Rien à craindre de ce côté. Retournez
2752 Vous vous êtes assuré que la porte ferme bien sur l’ infini. Rien à craindre de ce côté. Retournez à vos amours. ..........
2753 ........ Solitude, antichambre du ciel. À travers l’ amour ou la poésie — et d’autres, à travers les déserts de la sainteté
2754 litude, antichambre du ciel. À travers l’amour ou la poésie — et d’autres, à travers les déserts de la sainteté que hanten
2755 ers l’amour ou la poésie — et d’autres, à travers les déserts de la sainteté que hantent les fantômes adorables du désir, —
2756 la poésie — et d’autres, à travers les déserts de la sainteté que hantent les fantômes adorables du désir, — quelques homm
2757 à travers les déserts de la sainteté que hantent les fantômes adorables du désir, — quelques hommes y pénètrent, et le goû
2758 ables du désir, — quelques hommes y pénètrent, et le goût de s’amuser ne renaîtra plus en eux. Ni même celui de souffrir.
2759 elui de souffrir. Le dernier rire d’Aragon, c’est l’ éclat de sa joie brusque d’être seul sur un faux sommet vers quoi des
2760 s’efforcent — mais déjà c’est de plus loin qu’il les nargue. Il connaît enfin une solitude défendue de tous côtés par ses
2761 quelques « goujateries » affectées par mépris de l’ honneur, le mot de Cambronne prodigué et des phrases d’un fascinant éc
2762  goujateries » affectées par mépris de l’honneur, le mot de Cambronne prodigué et des phrases d’un fascinant éclat : « Ô g
2763 quitte plus, attiré par les premiers sophismes de l’ aurore, ces corniches de craie où t’accoudant tu mêles tes traits purs
2764 t’accoudant tu mêles tes traits purs et labiles à l’ immobilité miraculeuse des statues7. » Il s’agit bien de critique litt
2765 ci en présence d’une des tentatives de libération les plus violentes et belles — malgré tant de maladresses dédaigneuses, d
2766 ravades et de faciles tricheries8 — qu’ait connue l’ esprit humain. Sens de l’Absolu, sens de la pureté ou fanatisme de l’e
2767 cheries8 — qu’ait connue l’esprit humain. Sens de l’ Absolu, sens de la pureté ou fanatisme de l’esprit. Jusqu’au-boutisme
2768 connue l’esprit humain. Sens de l’Absolu, sens de la pureté ou fanatisme de l’esprit. Jusqu’au-boutisme désespéré. « Il s’
2769 ns de l’Absolu, sens de la pureté ou fanatisme de l’ esprit. Jusqu’au-boutisme désespéré. « Il s’agit de rendre impraticabl
2770 rtie » ou compromis :   « Nous étions dominés par le sens d’une réalité morale absolue que certains d’entre nous eussent a
2771 martyre… Nos jugements se rendaient sans cesse à l’ échelle de l’infini, et cet infini nous écrasait. Comment aurions-nous
2772 jugements se rendaient sans cesse à l’échelle de l’ infini, et cet infini nous écrasait. Comment aurions-nous accepté le s
2773 nfini nous écrasait. Comment aurions-nous accepté le sort communément heureux de nos contemporains qui ont puisé dans Augu
2774 omte cette tranquillité de rejeter définitivement les problèmes métaphysiques ? »   Nous naissons à quelque chose qui imite
2775 ues ? »   Nous naissons à quelque chose qui imite la vie dans une époque d’inconcevables compromissions où triomphe sous t
2776 nconcevables compromissions où triomphe sous tous les déguisements, de Ford à Clément Vautel, le matérialisme le plus pauvr
2777 tous les déguisements, de Ford à Clément Vautel, le matérialisme le plus pauvre auquel se soit jamais abaissée une civili
2778 ements, de Ford à Clément Vautel, le matérialisme le plus pauvre auquel se soit jamais abaissée une civilisation. Mais nou
2779 rniers atouts sur notre salut. Nous courons enfin l’ Aventure. « Le salut pour nous n’est nulle part9 ». Ultime affirmation
2780 sur notre salut. Nous courons enfin l’Aventure. «  Le salut pour nous n’est nulle part9 ». Ultime affirmation d’une foi que
2781 rien ne peut duper. Depuis certaines paroles sur la Croix, il n’y a peut-être pas eu d’expression plus haute de l’angoiss
2782 n’y a peut-être pas eu d’expression plus haute de l’ angoisse humaine, et vous aurez beau rire, pharisiens, et dire qu’elle
2783 et vous, dubitatives barbes. Je viens d’entendre la voix d’un mystique. Que si l’on vient nous empêtrer de dogmes basseme
2784 Je viens d’entendre la voix d’un mystique. Que si l’ on vient nous empêtrer de dogmes bassement ingénieux : « Si j’essaie u
2785 ngénieux : « Si j’essaie un instant de m’élever à la notion de Dieu, répond Aragon, je me révolte qu’elle puisse en aucun
2786 nts ! Jouant tout sur une révélation possible, ou la naissance d’un prophète qui rapprenne comment aimer un Dieu. Ce n’est
2787 eût un sens, il faudrait être sûr de n’avoir pas la tête en bas par rapport au soleil. Quelques gestes encore, intercepta
2788 t au soleil. Quelques gestes encore, interceptant les messages égarés de l’infini… Un tel homme, — est-ce encore Aragon, s
2789 estes encore, interceptant les messages égarés de l’ infini… Un tel homme, — est-ce encore Aragon, sinon qui ? — sa grande
2790 pages écrites il y a un an, tel soir de colère où le thermomètre eût indiqué 39° selon toute vraisemblance. Et voici Arago
2791 erait sans doute un peu ridicule. C’est ainsi que l’ on arrive à croire, pour un autre, que c’est arrivé, ajoutant foi, dan
2792 autre, que c’est arrivé, ajoutant foi, dans tous les sens qu’admet ce terme, à des exaltations que leur lyrisme rendait se
2793 ules contagieuses. Comment, en effet, ne pas voir la part de littérature que renferme cette œuvre, et qui fait, en dépit d
2794 fait, en dépit des prétentions désobligeantes de l’ auteur, son incontestable « séduction ». Pour un peu, je découvrais un
2795 un brin janséniste chez ce poète. Aujourd’hui, je le verrais plutôt comme un Musset10 plus véritablement désespéré. Un Mus
2796 ynisme verbeux 1830, une théorie du scandale pour le scandale qui a le mérite de n’être pas qu’un jeu littéraire. Mais enf
2797 0, une théorie du scandale pour le scandale qui a le mérite de n’être pas qu’un jeu littéraire. Mais enfin, c’est encore u
2798 ment vif, insolent et ombrageux. « J’appartiens à la grande race des torrents. » Une belle phrase, n’est-ce pas ? Je ne sa
2799 e pas ? Je ne sais qu’un Montherlant qui pourrait l’ oser dire comme Aragon sans ridicule. Et ce que je prenais pour le ton
2800 e Aragon sans ridicule. Et ce que je prenais pour le ton prophétique, ne serait-ce pas plutôt une sorte de donquichottisme
2801 une sorte de donquichottisme assez fréquent dans les cafés littéraires et dont il serait le premier à s’amuser ?   Février
2802 user ?   Février 1927. Relu Une vague de rêves et la préface de Libertinage. Sous une certaine rhétorique — mais la plus b
2803 Libertinage. Sous une certaine rhétorique — mais la plus belle, — ce qui tressaille et m’atteint au vif, c’est tout de mê
2804 en quoi je ne vais pas m’empêcher de reconnaître la voix secrète de notre mal de vivre. Désespoir métaphysique. Je me sou
2805 de Vinet — laissons s’esclaffer du rapprochement les auteurs de manuels de littérature — : « Un mysticisme creux et affamé
2806 ttérature — : « Un mysticisme creux et affamé est le contrecoup du christianisme dans les âmes profondes ou délicates qui
2807 et affamé est le contrecoup du christianisme dans les âmes profondes ou délicates qui ne sont pas devenues chrétiennes. » «
2808 licates qui ne sont pas devenues chrétiennes. » «  Le salut pour nous n’est nulle part. » Nulle part, pensais-je : le salut
2809 nous n’est nulle part. » Nulle part, pensais-je : le salut n’est pas là, ou là, à Rome, à Athènes, à Moscou, dans cette do
2810 droite, à gauche, — nulle part sur cette terre où l’ orgueil des hommes croit pouvoir nous le désigner, veut nous l’imposer
2811 terre où l’orgueil des hommes croit pouvoir nous le désigner, veut nous l’imposer pour quelles fins assez basses, nous le
2812 hommes croit pouvoir nous le désigner, veut nous l’ imposer pour quelles fins assez basses, nous le savons… Mais pour Arag
2813 us l’imposer pour quelles fins assez basses, nous le savons… Mais pour Aragon, ce n’est point façon de parler. Son « nulle
2814 e « globe d’attente » comme dit Crevel. Pourtant, le plus irrévocable désespoir n’est encore qu’un appel à la foi la plus
2815 irrévocable désespoir n’est encore qu’un appel à la foi la plus haute.   1er mai 1927. Mieux vaut pécher par ridicule qu
2816 cable désespoir n’est encore qu’un appel à la foi la plus haute.   1er mai 1927. Mieux vaut pécher par ridicule que par s
2817 e que par scepticisme ; par excès que par défaut. L’ enthousiasme trompe moins que le bon sens. Don Quichotte est tout de m
2818 s que par défaut. L’enthousiasme trompe moins que le bon sens. Don Quichotte est tout de même moins misérable que Clément
2819 lle n’a pas mérité du premier coup qu’on se donne la peine de l’écraser, — c’est qu’il symbolise tout cet état d’esprit « 
2820 mérité du premier coup qu’on se donne la peine de l’ écraser, — c’est qu’il symbolise tout cet état d’esprit « bien Parisie
2821 de récentes statistiques de librairie montrèrent les ravages bien plus étendus qu’on n’osait le craindre11. Si dans un ess
2822 èrent les ravages bien plus étendus qu’on n’osait le craindre11. Si dans un essai sur la sincérité j’ai soutenu qu’une int
2823 qu’on n’osait le craindre11. Si dans un essai sur la sincérité j’ai soutenu qu’une introspection immobile ne retient rien
2824 qu’une introspection immobile ne retient rien de la réalité vivante ; si je dénie à des incrédules le droit à parler des
2825 la réalité vivante ; si je dénie à des incrédules le droit à parler des choses de la foi comme étant d’un ordre qui leur é
2826 à des incrédules le droit à parler des choses de la foi comme étant d’un ordre qui leur échappe ; de même je récuse ici c
2827 critique dont on voudrait que soient justiciables les œuvres d’un écrivain, les démarches de sa pensée, ses délires, ses vi
2828 que soient justiciables les œuvres d’un écrivain, les démarches de sa pensée, ses délires, ses visions. Un critique qui n’é
2829 élires, ses visions. Un critique qui n’épouse pas le rythme d’une œuvre, mais s’avance à sa rencontre armé de l’appareil à
2830 d’une œuvre, mais s’avance à sa rencontre armé de l’ appareil à frigorifier de sa raison, est destiné à dire des bêtises. C
2831 présenter… d’ailleurs une ancienne connaissance… le Sens Critique. Moi (gêné)… Rougemont. Le Sens Critique. — Il y a un
2832 sance… le Sens Critique. Moi (gêné)… Rougemont. Le Sens Critique. — Il y a un certain temps déjà que nous ne nous sommes
2833 t. Seulement, mon cher Monsieur, nous n’avons pas le temps ces jours-ci, beaucoup trop à faire, beaucoup trop d’êtres et d
2834 suppose. Comprenez-moi : submergés, absolument… Le Sens Critique. — Justement j’aurais en quelque manière la prétention…
2835 Critique. — Justement j’aurais en quelque manière la prétention… Moi. — Que voilà un singulier impertinent de votre part.
2836 ue voilà un singulier impertinent de votre part. ( Le reconduisant :) Croyez, Monsieur, à mon estime la plus vive. Mais déc
2837 Le reconduisant :) Croyez, Monsieur, à mon estime la plus vive. Mais décidément nous sommes débordés, voyez vous-même, pas
2838 ut rien faire sans vous. Mais n’oubliez pas que «  l’ artiste serait peu de chose s’il ne spéculait sur l’incertain », c’est
2839 artiste serait peu de chose s’il ne spéculait sur l’ incertain », c’est un académicien qui l’a dit. Voulez-vous me faire qu
2840 ulait sur l’incertain », c’est un académicien qui l’ a dit. Voulez-vous me faire quelque chose là-dessus pour la Revue ? Ma
2841 Voulez-vous me faire quelque chose là-dessus pour la Revue ? Mais plus tard, plus tard. Tenez, voici un traité de métaphys
2842 ndant. Très bien fait. Excellente méthode ! (Sort le Sens Critique, un peu bousculé.) Moi. — Vous disiez, ma vie ? La Mu
2843 un peu bousculé.) Moi. — Vous disiez, ma vie ? La Muse (mais oui, la Muse, sortant de derrière un rideau). — J’attends
2844 Moi. — Vous disiez, ma vie ? La Muse (mais oui, la Muse, sortant de derrière un rideau). — J’attends votre plaisir… I
2845 qui croient avoir tout dit quand ils ont montré à l’ origine de telle doctrine mystique une exaltation nerveuse ou des trou
2846 oubles organiques. Ils opposent à ces « délires » les thèses rassurantes de la « saine raison », sans se demander jamais si
2847 osent à ces « délires » les thèses rassurantes de la « saine raison », sans se demander jamais si cela ne condamne pas et
2848 ans se demander jamais si cela ne condamne pas et la santé et la raison. Il s’est trouvé des Maurras et autres « héritiers
2849 der jamais si cela ne condamne pas et la santé et la raison. Il s’est trouvé des Maurras et autres « héritiers de la grand
2850 s’est trouvé des Maurras et autres « héritiers de la grande tradition gréco-latine » pour assigner à Minerve le bassin de
2851 tradition gréco-latine » pour assigner à Minerve le bassin de la Méditerranée comme promenoir, avec défense sous peine de
2852 éco-latine » pour assigner à Minerve le bassin de la Méditerranée comme promenoir, avec défense sous peine de mort de s’en
2853 naire. Vous tracez des frontières géographiques à la raison ? Eh bien, c’est vous qui l’aurez voulu, mais tant pis, nous s
2854 ographiques à la raison ? Eh bien, c’est vous qui l’ aurez voulu, mais tant pis, nous serons du Nord. Nous serons romantiqu
2855 rdonnés, brumeux, absurdes, vivants, libres. Avec la poésie contre vos principes. Avec l’esprit contre votre raison. Et av
2856 libres. Avec la poésie contre vos principes. Avec l’ esprit contre votre raison. Et avec Aragon lorsqu’il vous crie : « À b
2857 son. Et avec Aragon lorsqu’il vous crie : « À bas le clair génie français. » Alors la voix de Rimbardp à la cantonade : Q
2858 s crie : « À bas le clair génie français. » Alors la voix de Rimbardp à la cantonade : Qu’il vienne, qu’il vienne Le temp
2859 air génie français. » Alors la voix de Rimbardp à la cantonade : Qu’il vienne, qu’il vienne Le temps dont on s’éprenne !
2860 ardp à la cantonade : Qu’il vienne, qu’il vienne Le temps dont on s’éprenne ! Les œuvres les plus significatives de ce
2861 enne, qu’il vienne Le temps dont on s’éprenne ! Les œuvres les plus significatives de ce siècle sont écrites en haine de
2862 vienne Le temps dont on s’éprenne ! Les œuvres les plus significatives de ce siècle sont écrites en haine de l’époque12.
2863 nificatives de ce siècle sont écrites en haine de l’ époque12. Le reproche d’obscurité que l’on fait à la littérature moder
2864 de ce siècle sont écrites en haine de l’époque12. Le reproche d’obscurité que l’on fait à la littérature moderne n’est qu’
2865 haine de l’époque12. Le reproche d’obscurité que l’ on fait à la littérature moderne n’est qu’une manifestation de ce divo
2866 époque12. Le reproche d’obscurité que l’on fait à la littérature moderne n’est qu’une manifestation de ce divorce radical
2867 qu’une manifestation de ce divorce radical entre l’ époque et les quelques centaines (?) d’individus pour qui l’esprit est
2868 festation de ce divorce radical entre l’époque et les quelques centaines (?) d’individus pour qui l’esprit est la seule réa
2869 t les quelques centaines (?) d’individus pour qui l’ esprit est la seule réalité. C’est pourquoi nous ne pourrons plus sépa
2870 s centaines (?) d’individus pour qui l’esprit est la seule réalité. C’est pourquoi nous ne pourrons plus séparer du concep
2871 rquoi nous ne pourrons plus séparer du concept de l’ esprit celui de Révolution. Et j’entends ce mot dans son sens le plus
2872 de Révolution. Et j’entends ce mot dans son sens le plus vaste. Il y a eu quatre-vingt-treize, la Réforme, Karl Marx, la
2873 ens le plus vaste. Il y a eu quatre-vingt-treize, la Réforme, Karl Marx, la préface de Cromwell. Mais il ne s’agit pas de
2874 a eu quatre-vingt-treize, la Réforme, Karl Marx, la préface de Cromwell. Mais il ne s’agit pas de refaire notre petite ré
2875 ltaire, etc., et tout ce qui leur correspond dans l’ ordre politique par exemple. Parce que c’est très beau, ridiculement,
2876 ne dites pas aussi merde pour Marx ou Lénine, je le dirai pour vous. Quand on a entrepris la Révolution au nom de l’espri
2877 nine, je le dirai pour vous. Quand on a entrepris la Révolution au nom de l’esprit, on ne va pas s’acoquiner avec des gens
2878 ous. Quand on a entrepris la Révolution au nom de l’ esprit, on ne va pas s’acoquiner avec des gens qui ont fait, il y a 10
2879 ne pouvez vous libérer de cette manie française, la politique, et ne voyez-vous pas que c’est faire le jeu de vos ennemis
2880 a politique, et ne voyez-vous pas que c’est faire le jeu de vos ennemis de discuter avec eux dans leur langue et de crier
2881 avec eux dans leur langue et de crier rouge pour la simple raison qu’ils ont dit blanc ? Pensez-vous combattre cet esprit
2882 socie à tant d’objets de votre mépris, en prenant le contre-pied de tout ce qu’il inspire ? Alors que cette réaction même
2883 leurs… Mais non, il y aurait trop à dire, et puis l’ on croirait encore que je suis avec ceux qui traitent Aragon, Breton e
2884 arceurs, de chacals, de déments. Et puis surtout, l’ heure est venue de clore des discussions énervantes où s’épuise vainem
2885 vantes où s’épuise vainement une dialectique dont l’ objet fuit sans cesse par la quatrième dimension. Aragon et les surréa
2886 sans cesse par la quatrième dimension. Aragon et les surréalistes auront raison même encore s’ils ont tort, envers et cont
2887 me encore s’ils ont tort, envers et contre toutes les critiques qu’on pourrait leur adresser, parce que ces « maudits » ont
2888 rait leur adresser, parce que ces « maudits » ont la grâce, parce qu’ils sont la vie, même quand ils appellent la mort, pa
2889 e ces « maudits » ont la grâce, parce qu’ils sont la vie, même quand ils appellent la mort, parce qu’ils ont la passion et
2890 arce qu’ils sont la vie, même quand ils appellent la mort, parce qu’ils ont la passion et l’incommunicable secret de l’inv
2891 ême quand ils appellent la mort, parce qu’ils ont la passion et l’incommunicable secret de l’invention.   Il nous faut des
2892 appellent la mort, parce qu’ils ont la passion et l’ incommunicable secret de l’invention.   Il nous faut des entrepreneurs
2893 ’ils ont la passion et l’incommunicable secret de l’ invention.   Il nous faut des entrepreneurs de tempêtes. Un grand pri
2894 à nos mœurs. … et nous portant dans nos actions à la limite de nos forces, notre joie parmi vous fut une très grande joie.
2895 ons acquises, sièges faits, autorités fondées sur la gloire et la sénilité, etc., etc. Et certes ce n’étaient pas des être
2896 sièges faits, autorités fondées sur la gloire et la sénilité, etc., etc. Et certes ce n’étaient pas des êtres, mais leurs
2897 ine morale ne venait-elle pas de ce qu’en son nom l’ on mesurait odieusement une sympathie humaine pour nous sans prix ? Ma
2898 lus grandes que nous. Nous nous connaissions dans les coins et nous mourions d’ennui avec les aspects irrévocablement prévu
2899 ions dans les coins et nous mourions d’ennui avec les aspects irrévocablement prévus de nous-mêmes que faisaient paraître l
2900 ement prévus de nous-mêmes que faisaient paraître les petits faits de nos longues journées. Nous aimions la révolution comm
2901 etits faits de nos longues journées. Nous aimions la révolution comme on aime l’amour. Nous n’aimions pas telle révolution
2902 ournées. Nous aimions la révolution comme on aime l’ amour. Nous n’aimions pas telle révolution — la russe, par exemple — p
2903 me l’amour. Nous n’aimions pas telle révolution — la russe, par exemple — parce que ce n’est pas encore assez révolution ;
2904 asseoir et que son siège était fait. Nous aimions la Révolution qui nous perdrait corps et biens dans sa grandeur comme un
2905 emme merveilleuse nous perdrait corps et âme dans l’ ivresse amoureuse ; nous cherchions cette Révolution de toutes nos for
2906 ns, comme on cherche cette femme à travers toutes les femmes. C’était un vice, la révolution-vice. Mais on ne vit, on ne me
2907 mme à travers toutes les femmes. C’était un vice, la révolution-vice. Mais on ne vit, on ne meurt que de vices. ⁂ Ici le
2908 Mais on ne vit, on ne meurt que de vices. ⁂ Ici le lecteur se rassure. « Il s’y retrouve. » Il pense que c’est bien jeun
2909 que c’est bien jeune. Et : encore un qui rue dans les brancards, c’est très bellettrien. Un disque de gramo comme par hasar
2910 us fait ça Plus ou moins, n’est-ce pas ? Et puis l’ aiguille divague vers des souvenirs, quand nous allions tous deux, ces
2911 ort des suites. Quand cesserez-vous de nous faire la jambe, pardon escuses, avec ce thème à condamnations par contumace. I
2912 ns par contumace. Il y a encore des gens pour qui les limites de l’anarchie sont : chanter l’Internationale dans les rues,
2913 e. Il y a encore des gens pour qui les limites de l’ anarchie sont : chanter l’Internationale dans les rues, faire la noce,
2914 pour qui les limites de l’anarchie sont : chanter l’ Internationale dans les rues, faire la noce, écrire un livre de tendan
2915 e l’anarchie sont : chanter l’Internationale dans les rues, faire la noce, écrire un livre de tendances très modernes. Et d
2916 t : chanter l’Internationale dans les rues, faire la noce, écrire un livre de tendances très modernes. Et des gens pour se
2917 i nous en voulons, et finalement nous écraser par l’ évidence définitive de notre absurdité. Car l’homme « s’est fait une v
2918 par l’évidence définitive de notre absurdité. Car l’ homme « s’est fait une vérité changeante et toujours évidente, de laqu
2919 est plus détruire, ce n’est plus combattre, c’est l’ épanouissement violent d’une immense fleur palpitante au parfum de pas
2920 es dangereux. Un orage de tendresse va crever sur le monde. Aigles d’amours, oiseaux doux et cruels, nous parlerons vos la
2921 ue des valeurs de passion. Balayez ces douanes de l’ esprit, proclamez le grand Libre-Échange, voici déjà s’avancer des pro
2922 ssion. Balayez ces douanes de l’esprit, proclamez le grand Libre-Échange, voici déjà s’avancer des prodiges à cette invite
2923 voici déjà s’avancer des prodiges à cette invite la plus persuasive : nous sommes prêts à les accueillir. 7. Une vague
2924 e invite la plus persuasive : nous sommes prêts à les accueillir. 7. Une vague de rêves (dans Commerce). 8. Et malgré c
2925 perficielles et hâtives, comme cette prétention à la libération par le Rêve. « La liberté commence où naît le merveilleux.
2926 tives, comme cette prétention à la libération par le Rêve. « La liberté commence où naît le merveilleux. » Au vrai, et sur
2927 e cette prétention à la libération par le Rêve. «  La liberté commence où naît le merveilleux. » Au vrai, et surtout pour u
2928 ration par le Rêve. « La liberté commence où naît le merveilleux. » Au vrai, et surtout pour un homme qui élit Freud « pré
2929 rtout pour un homme qui élit Freud « président de la République du Rêve » – c’est presque un non-sens de chercher l’absolu
2930 du Rêve » – c’est presque un non-sens de chercher l’ absolue liberté dans le rêve. Le rêve, c’est la tyrannie des souvenirs
2931 ue un non-sens de chercher l’absolue liberté dans le rêve. Le rêve, c’est la tyrannie des souvenirs ; et ce n’est pas se l
2932 -sens de chercher l’absolue liberté dans le rêve. Le rêve, c’est la tyrannie des souvenirs ; et ce n’est pas se libérer qu
2933 er l’absolue liberté dans le rêve. Le rêve, c’est la tyrannie des souvenirs ; et ce n’est pas se libérer que de brasser ce
2934 onores. 9. Lettre à Paul Claudel. 10. Musset de La coupe et les lèvres. Mais oui, c’est paradoxal. 11. Les livres les p
2935 Lettre à Paul Claudel. 10. Musset de La coupe et les lèvres. Mais oui, c’est paradoxal. 11. Les livres les plus répandus
2936 pe et les lèvres. Mais oui, c’est paradoxal. 11. Les livres les plus répandus à Genève sont Ma vie et mon œuvre de Ford et
2937 èvres. Mais oui, c’est paradoxal. 11. Les livres les plus répandus à Genève sont Ma vie et mon œuvre de Ford et Mon curé c
2938 st paradoxal. 11. Les livres les plus répandus à Genève sont Ma vie et mon œuvre de Ford et Mon curé chez les riches. Très lo
2939 sont Ma vie et mon œuvre de Ford et Mon curé chez les riches. Très loin derrière viennent des France et des Bordeaux. 12.
2940 lus étroit, quelques esthètes du machinisme. 13. Le Paysan de Paris. o. Rougemont Denis de, « Louis Aragon, le beau pré
2941 e Paris. o. Rougemont Denis de, « Louis Aragon, le beau prétexte », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-F
2942 ibourg, avril 1927, p. 131-144. p. On a conservé la graphie de l’original, sans doute voulue par l’auteur.
2943 1927, p. 131-144. p. On a conservé la graphie de l’ original, sans doute voulue par l’auteur.
2944 é la graphie de l’original, sans doute voulue par l’ auteur.
53 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Quatre incidents (avril 1927)
2945 Quatre incidents (avril 1927)q r La maîtresse d’École Au printemps pur comme une joue, École errait, É
2946 joue, École errait, École suivait une femme dans les rues tant soit peu métaphysiques d’une capitale de mes songes. On exi
2947 t évanouis des arcs-en-ciel de névroses dans tous les poèmes où détresse rimait avec maîtresse. École savait le mythe du vo
2948 s où détresse rimait avec maîtresse. École savait le mythe du voyage, et qu’on ne manque pas le train bleu d’un désir. Ell
2949 savait le mythe du voyage, et qu’on ne manque pas le train bleu d’un désir. Elle était donc venue. Il la suivait entre les
2950 train bleu d’un désir. Elle était donc venue. Il la suivait entre les devantures qui se passaient de l’une à l’autre deux
2951 désir. Elle était donc venue. Il la suivait entre les devantures qui se passaient de l’une à l’autre deux séries de profils
2952 qu’au soleil toujours de face. Il ne vit plus que la foule des yeux bleus, son éblouissement. Soudain la voici, elle desce
2953 foule des yeux bleus, son éblouissement. Soudain la voici, elle descend à sa rencontre parmi les éclairs d’un luxe mécani
2954 udain la voici, elle descend à sa rencontre parmi les éclairs d’un luxe mécanique, le visage dans sa fourrure. Elle découvr
2955 rencontre parmi les éclairs d’un luxe mécanique, le visage dans sa fourrure. Elle découvre en passant près de lui le sour
2956 sa fourrure. Elle découvre en passant près de lui le sourire d’amitié mortel de tout ce qui n’arrive jamais. Il s’est trom
2957 Il pensa que c’était un ange, de ceux qui vont à la recherche des âmes. Aussitôt il téléphone à ceux du paradis : « Qui v
2958 sitôt il téléphone à ceux du paradis : « Qui va à la chasse perd sa place, nous nous comprenons. » On lui offrit immédiate
2959 À Max-Marc-Jean Jacob Reymond. Une étoile à la boutonnière, le marquis pénétra dans le salon de la duchesse, lui bai
2960 ean Jacob Reymond. Une étoile à la boutonnière, le marquis pénétra dans le salon de la duchesse, lui baisa la main et l’
2961 étoile à la boutonnière, le marquis pénétra dans le salon de la duchesse, lui baisa la main et l’abattit d’un coup de rev
2962 boutonnière, le marquis pénétra dans le salon de la duchesse, lui baisa la main et l’abattit d’un coup de revolver. Puis
2963 s pénétra dans le salon de la duchesse, lui baisa la main et l’abattit d’un coup de revolver. Puis s’en fut avec un tact e
2964 ans le salon de la duchesse, lui baisa la main et l’ abattit d’un coup de revolver. Puis s’en fut avec un tact exquis, qui
2965 n fut avec un tact exquis, qui fut très remarqué. Le duc riait sous une table, complètement ivre, et Bettina lui disait à
2966 table, complètement ivre, et Bettina lui disait à l’ oreille : « Mon chéri, si j’aime la comtesse ? Mais tu es si laid que
2967 a lui disait à l’oreille : « Mon chéri, si j’aime la comtesse ? Mais tu es si laid que cela me donne encore plus de plaisi
2968 laid que cela me donne encore plus de plaisir. » Le duc paya et s’enfuit en disant que ce n’était pas lui. L’enterrement
2969 aya et s’enfuit en disant que ce n’était pas lui. L’ enterrement aura lieu sans suite. Suicide du Marquis Salomon le
2970 lieu sans suite. Suicide du Marquis Salomon le danseur triste baisa cette main cruelle… et quitta le bal au matin. I
2971 anseur triste baisa cette main cruelle… et quitta le bal au matin. Il neigeait dans les rues sourdes comme un songe de son
2972 elle… et quitta le bal au matin. Il neigeait dans les rues sourdes comme un songe de son enfance. Aux fenêtres du palais s’
2973 e. Aux fenêtres du palais s’étoilèrent des halos. Le jour tendre paraissait sous l’égide de la mort. Il vit des fleurs de
2974 ilèrent des halos. Le jour tendre paraissait sous l’ égide de la mort. Il vit des fleurs de son enfance, une églantine, que
2975 halos. Le jour tendre paraissait sous l’égide de la mort. Il vit des fleurs de son enfance, une églantine, quelques roses
2976 e églantine, quelques roses, un sourire qui perce le cœur sur les glaces du passé. Cet abandon aux fuyantes chansons, et d
2977 quelques roses, un sourire qui perce le cœur sur les glaces du passé. Cet abandon aux fuyantes chansons, et des violons dé
2978 ons, et des violons déchirants dans sa tête… Mais le sommeil s’évaporait aux caresses des flocons, plus perfides que des m
2979 perfides que des murmures d’adieu. Il tomba parmi les statues, dans l’amitié pensive des jardins. Une fenêtre s’était ouver
2980 urmures d’adieu. Il tomba parmi les statues, dans l’ amitié pensive des jardins. Une fenêtre s’était ouverte et des accords
2981 ’était ouverte et des accords échappés tombaient, les ailes coupées. Puis le silence se reprit à ses songes désolés. Aut
2982 cords échappés tombaient, les ailes coupées. Puis le silence se reprit à ses songes désolés. Autre suicide ou la promen
2983 reprit à ses songes désolés. Autre suicide ou la promenade en bateau À Grego More. Il disait : « Je suis né pour
2984 À Grego More. Il disait : « Je suis né pour la mort. » Il fait assez beau pour que s’ouvre ce cœur de l’après-midi,
2985  » Il fait assez beau pour que s’ouvre ce cœur de l’ après-midi, comme un camélia de tendre orgueil. Il respire déjà l’odeu
2986 mme un camélia de tendre orgueil. Il respire déjà l’ odeur merveilleuse des objets et des êtres véritables. Un bateau ne gl
2987 bles. Un bateau ne glisse pas plus doucement vers le soleil du haut-lac. Justement, voici que tout va s’ouvrir, qu’un mond
2988 s’ouvrir, qu’un monde s’est ouvert devant lui. Et l’ eau n’est pas moins somptueuse. Et bien sûr, je n’ai pas bougé. C’est
2989 me rendre seul et sans argent. Je ne voulais pas le retenir, Je ne pouvais pas le suivre. On dit de ces phrases. Même, on
2990 . Je ne voulais pas le retenir, Je ne pouvais pas le suivre. On dit de ces phrases. Même, on en pleure. q. Rougemont D
54 1927, Articles divers (1924–1930). Jeunes artistes neuchâtelois (avril 1927)
2991 is (avril 1927)k Neuchâtel va-t-elle redevenir le centre artistique qu’elle fut au siècle passé ? Allons-nous assister
2992 ster à un regroupement de ses forces créatrices ? La question est peut-être prématurée. Mais le seul fait qu’elle se pose
2993 ices ? La question est peut-être prématurée. Mais le seul fait qu’elle se pose me paraît indiquer que l’un au moins des de
2994 artistes, en effet, n’ignorent rien des courants les plus modernes, et sont bien situés pour n’en prendre que le meilleur 
2995 dernes, et sont bien situés pour n’en prendre que le meilleur ; mais l’émulation, l’atmosphère de combat nécessaire au dév
2996 n situés pour n’en prendre que le meilleur ; mais l’ émulation, l’atmosphère de combat nécessaire au développement de certa
2997 n’en prendre que le meilleur ; mais l’émulation, l’ atmosphère de combat nécessaire au développement de certains jeunes te
2998 ertains jeunes tempéraments leur fait défaut dans la même mesure. Ainsi risquent de s’établir autour d’eux des mœurs un pe
2999 œurs un peu bourgeoises dont je ne vais pas faire le procès, mais qui expliquent, me semble-t-il, pour une part, la disper
3000 is qui expliquent, me semble-t-il, pour une part, la dispersion des efforts artistiques. Tout ce monde d’amateurs de décou
3001 aux, de critiques d’avant-garde, ce monde où tous les extrémismes sont prônés comme vertus cardinales, et qui forme ailleur
3002 r public des jeunes artistes, n’existant pas ici, le peintre se trouve placé d’emblée en face de ce qu’on nomme le gros pu
3003 e trouve placé d’emblée en face de ce qu’on nomme le gros public. L’épreuve est pénible, énervante, souvent fatale aux nov
3004 ’emblée en face de ce qu’on nomme le gros public. L’ épreuve est pénible, énervante, souvent fatale aux novateurs. Alors il
3005 le d’une consécration étrangère. Un jour en effet l’ on apprend que tel tableau de jeune est « coté » chez un gros marchand
3006 une est « coté » chez un gros marchand. Aussitôt, les feuilles locales retentissent de touchants échos : « C’est avec un lé
3007 bien méritée du talent d’un de ses enfants… » Car le fils prodigue, s’il rentre au foyer dans une Rolls-Royce et fortune f
3008 ttendait pas moins du fils d’un tel père. « Voilà le train du monde… » Je ne pense pas qu’il en faille gémir. Une certaine
3009 . Une certaine résistance est nécessaire pour que la force se développe. N’était certain petit plaisir d’impertinence, je
3010 une actualité toujours vive. D’ailleurs, sachons le reconnaître, il y a moins de malice que de paresse dans les jugements
3011 aître, il y a moins de malice que de paresse dans les jugements du public, et moins d’incompréhension que de timidité. ⁂ On
3012 ans, jusqu’à André Evard, qui en a près de 50, si les peintres dont nous allons parler méritent d’être appelés jeunes, c’es
3013 leurs œuvres avant tout. D’autre part je préfère la légende à l’histoire comme la peinture à la photographie. Une œuvre d
3014 avant tout. D’autre part je préfère la légende à l’ histoire comme la peinture à la photographie. Une œuvre d’art est un m
3015 tre part je préfère la légende à l’histoire comme la peinture à la photographie. Une œuvre d’art est un merveilleux foyer
3016 éfère la légende à l’histoire comme la peinture à la photographie. Une œuvre d’art est un merveilleux foyer de contagion c
3017 agion contre lequel je ne saurais me prémunir par le moyen d’aucun de ces appareils à jugements garantis qui posent un cri
3018 t un critique d’art diplômé. Premier péché contre l’ histoire : au seuil d’un article consacré aux jeunes artistes neuchâte
3019 nte Conrad Meili, un Zurichois qui nous arriva de Genève il y a de cela cinq ou six ans. Il peignait alors des natures mortes,
3020 t entre trente pareilles, aux cactus qui ornaient les fenêtres, dans une chambre peinte en bleu vif et ornée de surprenants
3021 straites. De cette époque datent des toiles comme le Souvenir de l’Évêché. Décors et personnages semblent d’une matière id
3022 tte époque datent des toiles comme le Souvenir de l’ Évêché. Décors et personnages semblent d’une matière idéale. Tout est
3023 fait seulement. Il manque à ces recompositions de la nature, à ces natures remises à neuf, l’imperfection humaine qui touc
3024 tions de la nature, à ces natures remises à neuf, l’ imperfection humaine qui touche. Mais l’atmosphère pure de ces espaces
3025 s à neuf, l’imperfection humaine qui touche. Mais l’ atmosphère pure de ces espaces définis par quelques plans ne tue pas u
3026 ailleurs… Qu’il sorte enfin et se mette à graver les scènes qu’il voit dans la petite cité ouvrière, et c’est merveille de
3027 n et se mette à graver les scènes qu’il voit dans la petite cité ouvrière, et c’est merveille de constater combien l’épura
3028 ouvrière, et c’est merveille de constater combien l’ épuration rigoriste de sa technique sert une vision aigüe de la vie. L
3029 igoriste de sa technique sert une vision aigüe de la vie. La série de gravures sur bois colorées qu’il intitule la cité es
3030 de sa technique sert une vision aigüe de la vie. La série de gravures sur bois colorées qu’il intitule la cité est un pet
3031 érie de gravures sur bois colorées qu’il intitule la cité est un petit chef-d’œuvre de réalisme stylisé. C’est d’un art tr
3032 , qui connaît ses ressources et sait en user avec la sobriété qui produit le maximum d’expression. Cette « simplicité préc
3033 rces et sait en user avec la sobriété qui produit le maximum d’expression. Cette « simplicité précieuse », il sait la conf
3034 pression. Cette « simplicité précieuse », il sait la conférer à tout ce qu’il touche, qu’il décore une bannière, fabrique
3035 e un peu bizarre qu’il glisse si souvent là où on l’ attend le moins. Conrad Meili apporte chez nous une inspiration neuve,
3036 bizarre qu’il glisse si souvent là où on l’attend le moins. Conrad Meili apporte chez nous une inspiration neuve, d’origin
3037 e germanique, mais qui a choisi de s’astreindre à la voluptueuse rigueur latine, et qui tout en s’épurant dans des formes
3038 ui tout en s’épurant dans des formes claires a su les renouveler. Il nous apporte aussi cet élément de vitalité combative q
3039 ’il casse des vitres, ce n’est pas seulement pour le plaisir, mais plutôt par amour du courant d’air. Cela dérange toujour
3040 air. Cela dérange toujours quelques frileux, mais les autres sont soulagés. Et ne fût-ce qu’en prenant une initiative comme
3041 uchâtel 1927 7 il aura bien mérité sa place parmi les artistes neuchâtelois. Actuellement, Meili achève la décoration d’une
3042 artistes neuchâtelois. Actuellement, Meili achève la décoration d’une salle d’hôtel en collaboration avec Paul Donzé. Qui
3043 ssionniste s’astreindrait jamais aux exigences de la technique décorative ! Voilà qui laisse espérer parmi nos artistes bi
3044 oins paradoxaux. Donzé n’est pas de ceux pour qui la peinture consiste à habiller une idée. Voyez son portrait de Meili :
3045 ée. Voyez son portrait de Meili : il ne prend pas le sujet par l’intérieur, mais il taille ce visage dans une pâte riche e
3046 portrait de Meili : il ne prend pas le sujet par l’ intérieur, mais il taille ce visage dans une pâte riche et un peu lour
3047 dans une pâte riche et un peu lourde, son pinceau la palpe, la presse, la réduit à la forme qu’il voit. Il y a de la sensu
3048 âte riche et un peu lourde, son pinceau la palpe, la presse, la réduit à la forme qu’il voit. Il y a de la sensualité dans
3049 t un peu lourde, son pinceau la palpe, la presse, la réduit à la forme qu’il voit. Il y a de la sensualité dans l’écraseme
3050 rde, son pinceau la palpe, la presse, la réduit à la forme qu’il voit. Il y a de la sensualité dans l’écrasement de ses co
3051 resse, la réduit à la forme qu’il voit. Il y a de la sensualité dans l’écrasement de ses couleurs, une sensualité qui sait
3052 la forme qu’il voit. Il y a de la sensualité dans l’ écrasement de ses couleurs, une sensualité qui sait se faire délicate
3053 avec des roses et des jaunes jamais mièvres, sous l’ œil méfiant des fascistes qui le prennent pour un agitateur russe, à c
3054 ais mièvres, sous l’œil méfiant des fascistes qui le prennent pour un agitateur russe, à cause de sa chevelure, sans doute
3055 e tromper plus. ⁂ À vrai dire j’en vois peu parmi les jeunes qui vouent tout leur amour à la peinture pure. Je crois même q
3056 peu parmi les jeunes qui vouent tout leur amour à la peinture pure. Je crois même que, Paul Donzé touché à son tour par la
3057 crois même que, Paul Donzé touché à son tour par la grâce décorative, il n’en reste qu’un, du moins à Neuchâtel même : Eu
3058 vier. Ce garçon aux allures discrètes promène sur le monde des yeux de Japonais d’une ironie mélancolique et qui voient pl
3059 ient plus loin qu’on ne croit, mais il a toujours l’ air de songer à la Hollande, sa seconde patrie si la peinture est sa p
3060 on ne croit, mais il a toujours l’air de songer à la Hollande, sa seconde patrie si la peinture est sa première et Neuchât
3061 air de songer à la Hollande, sa seconde patrie si la peinture est sa première et Neuchâtel la troisième… Il y a par Eugène
3062 par Eugène Bouvier quelque chose de nouveau dans la peinture neuchâteloise : un lyrisme un peu amer, d’une tristesse qui
3063 y a une sorte d’aristocratique dissimulation dans l’ œuvre de Bouvier. Sa technique qui paraît au premier abord masquer ses
3064 premier abord masquer ses intentions, en réalité les exprime par ses défauts mêmes ou ses fausses négligences ; mais il fa
3065 oujours une sorte de dissonance, un défaut par où l’ on va peut-être se glisser dans l’atmosphère de l’œuvre ; que l’on con
3066 n défaut par où l’on va peut-être se glisser dans l’ atmosphère de l’œuvre ; que l’on consente en effet à telle déformation
3067 l’on va peut-être se glisser dans l’atmosphère de l’ œuvre ; que l’on consente en effet à telle déformation, et tout devien
3068 tre se glisser dans l’atmosphère de l’œuvre ; que l’ on consente en effet à telle déformation, et tout devient satisfaisant
3069 ère que Louis de Meuron, parmi ses aînés, dont on le puisse rapprocher, parce qu’il est un des rares peintres de ce pays p
3070 ’il est un des rares peintres de ce pays pour qui la couleur existe avant tout. Mais la nostalgie de Bouvier l’entraîne à
3071 pays pour qui la couleur existe avant tout. Mais la nostalgie de Bouvier l’entraîne à mille lieues des jardins de sourire
3072 r existe avant tout. Mais la nostalgie de Bouvier l’ entraîne à mille lieues des jardins de sourires qui s’épanouissent sur
3073 es des jardins de sourires qui s’épanouissent sur les toiles de Meuron. Il semble toujours qu’il peigne entre deux pluies.
3074 onde se mêlent, et sait rendre mieux que personne la liquidité d’un lac, certaines atmosphères délavées et sourdes. « Temp
3075 couvert, calme, légères précipitations » annonce le bulletin. Tiens, me dis-je, Bouvier va peindre. Comme peintre religie
3076 re religieux, il se cherche encore. On a pourtant l’ impression, à voir ses dernières toiles, d’une plus grande certitude i
3077 s toiles, d’une plus grande certitude intérieure. Les visages sont plus calmes, les couleurs s’avivent, le soleil est sur l
3078 rtitude intérieure. Les visages sont plus calmes, les couleurs s’avivent, le soleil est sur le point de reparaître… Charle
3079 visages sont plus calmes, les couleurs s’avivent, le soleil est sur le point de reparaître… Charles Humbert ou comment on
3080 nq ans de Baudelaire à Rubens. Il fut un temps où l’ on put craindre que Charles Humbert ne devînt le chef d’une école du g
3081 ù l’on put craindre que Charles Humbert ne devînt le chef d’une école du gris-noir neurasthénique. Il peignait des natures
3082 ue. Il peignait des natures mortes qui décidément l’ étaient, à faire froid dans le dos ; ou bien des scènes d’une bizarre
3083 rtes qui décidément l’étaient, à faire froid dans le dos ; ou bien des scènes d’une bizarre fantaisie, un mélange de Rops
3084 g, G. H. Dessoulavy)… Mais déjà paraissaient dans les Voix (cette courageuse revue qu’il avait fondée avec J. P. Zimmermann
3085 un tempérament très rassurant. C’était, je crois, le vrai Humbert qui commençait à s’affirmer. Puis il y eut une période i
3086 onies funèbres, comme un qui n’attendrait pas que l’ enterrement s’éloigne pour entonner une chanson à boire. Et sa techniq
3087 nt maigre se faisait trop lâche. Mais aujourd’hui la mue semble s’être opérée. Humbert est rendu à lui-même. Il atteint so
3088 son équilibre et sa maîtrise avec une toile comme le Potier. Si la couleur n’est pas encore aussi plantureuse que les form
3089 et sa maîtrise avec une toile comme le Potier. Si la couleur n’est pas encore aussi plantureuse que les formes, il y a une
3090 la couleur n’est pas encore aussi plantureuse que les formes, il y a une belle richesse de lueurs sur une matière traitée l
3091 possibilités imprévues. Il y a un côté « homme de la Renaissance » chez un Charles Humbert livré à sa fougue originale. Il
3092 plus encore chez un Aurèle Barraud. Il suffit de le voir peint par lui-même pour s’en assurer. La tête large, aux yeux cl
3093 de le voir peint par lui-même pour s’en assurer. La tête large, aux yeux clairs et assurés, le cou robuste, les mains d’u
3094 surer. La tête large, aux yeux clairs et assurés, le cou robuste, les mains d’un si beau dessin, qui ont du poids et nulle
3095 arge, aux yeux clairs et assurés, le cou robuste, les mains d’un si beau dessin, qui ont du poids et nulle lourdeur, tout c
3096 nce domptée et qui semble se faire une volupté de la discipline qu’elle s’impose. Et voilà qui fait encore plus « Renaissa
3097 . Et voilà qui fait encore plus « Renaissance » : le costume est drapé avec un soin minutieux, mais une grande mèche insol
3098 x, mais une grande mèche insolente retombe devant le visage. Aurèle tient un livre ouvert, et ce n’est pas je pense qu’il
3099 t un livre ouvert, et ce n’est pas je pense qu’il le lise, mais il aime caresser la reliure qu’il doit avoir faite lui-mêm
3100 pas je pense qu’il le lise, mais il aime caresser la reliure qu’il doit avoir faite lui-même. Car il est artisan, dans le
3101 it avoir faite lui-même. Car il est artisan, dans le beau sens ancien du terme, tout comme son frère Charles Barraud, qui
3102 s, à encadrer des glaces. Et plaise aux dieux que les visages qui s’y reflèteront soient aussi beaux que ceux qu’il peint o
3103 oient aussi beaux que ceux qu’il peint ou modèle, le soir, à la lampe, en compagnie de sa femme (elle peint aussi, d’un œi
3104 beaux que ceux qu’il peint ou modèle, le soir, à la lampe, en compagnie de sa femme (elle peint aussi, d’un œil regardant
3105 de sa femme (elle peint aussi, d’un œil regardant le sujet, de l’autre ce qu’en fait son mari). Et puis voici François Bar
3106 n fait son mari). Et puis voici François Barraud, le plus jeune des frères. Il vient apporter des dessins qui ressemblent
3107 éalistes, plus fins, mais tout aussi habiles dans l’ utilisation du clair-obscur qui simplifie et renforce l’expression. Dé
3108 isation du clair-obscur qui simplifie et renforce l’ expression. Décidément ces trois frères sont une école. Délaissant un
3109 ons désormais retrouver, allons errer un peu dans le royaume d’Utopie. André Evard va nous y introduire, et nous ne saurio
3110 es années d’avance sur ses contemporains. Un jour les jeunes le rattrapent. Salutations, présentations : « André Evard. — L
3111 ’avance sur ses contemporains. Un jour les jeunes le rattrapent. Salutations, présentations : « André Evard. — Les jeunes
3112 nt. Salutations, présentations : « André Evard. —  Les jeunes peintres. — Vous suivez la même route que nous ? À la bonne he
3113 André Evard. — Les jeunes peintres. — Vous suivez la même route que nous ? À la bonne heure ! ». Et l’on repart bras dessu
3114 eintres. — Vous suivez la même route que nous ? À la bonne heure ! ». Et l’on repart bras dessus, bras dessous. Et l’on ap
3115 la même route que nous ? À la bonne heure ! ». Et l’ on repart bras dessus, bras dessous. Et l’on apprend peu à peu des cho
3116 ! ». Et l’on repart bras dessus, bras dessous. Et l’ on apprend peu à peu des choses bien curieuses sur son compte. Il a fa
3117 hoses bien curieuses sur son compte. Il a fait de la pâtisserie, mais on m’assure qu’il se nourrit de noix et d’oranges. I
3118 cles où sous un éclairage très net, mais inusité, l’ objet le plus banal se charge de mystère. Que va-t-il se passer là-ded
3119 sous un éclairage très net, mais inusité, l’objet le plus banal se charge de mystère. Que va-t-il se passer là-dedans ? Et
3120 e va-t-il se passer là-dedans ? Et ces roses sont le signe de quel occulte prodige ? Intrigué, vous reprenez ce que vous p
3121 qui s’incarne dans ces motifs géométriques, pour le plaisir de la perfection exercée par jeu. Mais quel support à de nouv
3122 dans ces motifs géométriques, pour le plaisir de la perfection exercée par jeu. Mais quel support à de nouvelles songerie
3123 rd n’aille trouver une de ces machines à explorer l’ au-delà. En vérité il faut être sorcier ou artiste pour changer en ins
3124 métaphysiques ces bonnes montres de précision de La Chaux-de-Fonds… Avant de quitter les peintres, rappelons le souvenir
3125 précision de La Chaux-de-Fonds… Avant de quitter les peintres, rappelons le souvenir de Charles Harder, qui est mort jeune
3126 e-Fonds… Avant de quitter les peintres, rappelons le souvenir de Charles Harder, qui est mort jeune, sans avoir pu donner
3127 r qui saura s’imposer. Léon Perrin a compris tout le parti qu’on pouvait tirer des principes cubistes dans un art dont la
3128 ait tirer des principes cubistes dans un art dont la genèse même est cubiste en quelque sorte, supposant une décomposition
3129 y avait quelque lourdeur dans des morceaux comme le Joueur de rugby. C’était le poids de la pierre, plus que celui du cor
3130 ns des morceaux comme le Joueur de rugby. C’était le poids de la pierre, plus que celui du corps de l’athlète ; l’œuvre n’
3131 aux comme le Joueur de rugby. C’était le poids de la pierre, plus que celui du corps de l’athlète ; l’œuvre n’atteignait p
3132 le poids de la pierre, plus que celui du corps de l’ athlète ; l’œuvre n’atteignait pas encore pleinement sa vie propre. De
3133 la pierre, plus que celui du corps de l’athlète ; l’ œuvre n’atteignait pas encore pleinement sa vie propre. Depuis, Léon P
3134 du BIT où se manifeste un heureux équilibre entre le réalisme imposé par les sujets et un style qui sait rester ample, d’u
3135 un heureux équilibre entre le réalisme imposé par les sujets et un style qui sait rester ample, d’une simplicité non dépour
3136 cité non dépourvue de puissance. Une fois de plus l’ on peut admirer la salutaire leçon de style donnée par le cubisme aux
3137 de puissance. Une fois de plus l’on peut admirer la salutaire leçon de style donnée par le cubisme aux artistes qui ont s
3138 ut admirer la salutaire leçon de style donnée par le cubisme aux artistes qui ont su se dégager de son outrance théorique.
3139 se dégager de son outrance théorique. C’est dans la manière cubiste encore que Perrin décora naguère fort plaisamment une
3140 e n’est certes pas complète. Mais elle a du moins l’ avantage de grouper des artistes qui, par le fait des circonstances pe
3141 moins l’avantage de grouper des artistes qui, par le fait des circonstances peut-être plus que par de naturelles affinités
3142 ns décoratives qui pourraient aboutir peut-être à la formation d’un groupe dont l’activité serait féconde en ce pays. D’au
3143 aboutir peut-être à la formation d’un groupe dont l’ activité serait féconde en ce pays. D’autre part, des œuvres aussi dif
3144 t, des œuvres aussi différentes par leur objet et le domaine où elles se réalisent que celles de Le Corbusier8, Meili, Eva
3145 et le domaine où elles se réalisent que celles de Le Corbusier8, Meili, Evard, Perrin, manifestent toutes une recherche de
3146 vard, Perrin, manifestent toutes une recherche de la simplicité savante et de la perfection du métier, un goût pour la con
3147 utes une recherche de la simplicité savante et de la perfection du métier, un goût pour la construction rigoureuse qui son
3148 vante et de la perfection du métier, un goût pour la construction rigoureuse qui sont des éléments peut-être insuffisants
3149 nérale vers une sorte de classicisme moderne dont les frères Barraud ne seraient pas très éloignés par d’autres côtés. Un a
3150 samment atteint si nous n’avions fait qu’affirmer l’ existence et la vitalité d’une jeune peinture originale dans un pays q
3151 si nous n’avions fait qu’affirmer l’existence et la vitalité d’une jeune peinture originale dans un pays qu’on s’est trop
3152 ue et d’une maigre végétation artistique. Pays où l’ on préfère la netteté utile à l’harmonie des lignes ; où la lumière éc
3153 aigre végétation artistique. Pays où l’on préfère la netteté utile à l’harmonie des lignes ; où la lumière éclaire plus qu
3154 tistique. Pays où l’on préfère la netteté utile à l’ harmonie des lignes ; où la lumière éclaire plus qu’elle ne caresse ;
3155 ère la netteté utile à l’harmonie des lignes ; où la lumière éclaire plus qu’elle ne caresse ; où pourtant les hivers les
3156 ère éclaire plus qu’elle ne caresse ; où pourtant les hivers les plus durs réservent des douceurs secrètes. 7. Publicatio
3157 plus qu’elle ne caresse ; où pourtant les hivers les plus durs réservent des douceurs secrètes. 7. Publication dont cett
3158 n vrai nom Ch. E. Jeanneret, un article paru dans le numéro de février de cette revue. k. Rougemont Denis de, « Jeunes a
55 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Bernard Lecache, Jacob (mai 1927)
3159 hoquer et s’imposer pourtant. M. Lecache présente le problème juif avec une obstination à ne rien cacher qui le mène profo
3160 me juif avec une obstination à ne rien cacher qui le mène profond. Une famille juive dans le Marais. Le père est un taille
3161 acher qui le mène profond. Une famille juive dans le Marais. Le père est un tailleur, biblique, austère et probe, qui n’a
3162 e mène profond. Une famille juive dans le Marais. Le père est un tailleur, biblique, austère et probe, qui n’a d’ambition
3163 , qui n’a d’ambition que pour ses enfants. Jacob, l’ aîné se révolte. Sensualité, intelligence, brutalité : les caractères
3164 se révolte. Sensualité, intelligence, brutalité : les caractères se résument dans son avidité de puissance. C’est par l’arg
3165 résument dans son avidité de puissance. C’est par l’ argent qu’on domine notre âge : il devient grand industriel, assure sa
3166 au prix du peu cynique reniement de ses origines. Le vieux père s’effondre de honte et de douleur. « On vend de l’étoffe…
3167 e s’effondre de honte et de douleur. « On vend de l’ étoffe… eux ils se vendent ! » Mais Jacob a renié ses parents, non leu
3168 ents, non leurs ambitions. Surmontant son dégoût, le père ajoute : « Notre sang sera vainqueur… Qu’ils m’oublient, qu’ils
3169 ueur… Qu’ils m’oublient, qu’ils me méprisent ! Je les vois régner. Je salue leur Loi. » Le récit grassement pittoresque dan
3170 risent ! Je les vois régner. Je salue leur Loi. » Le récit grassement pittoresque dans la description du milieu juif, pren
3171 leur Loi. » Le récit grassement pittoresque dans la description du milieu juif, prend une âpre rapidité avec l’ascension
3172 tion du milieu juif, prend une âpre rapidité avec l’ ascension de Jacob et ses luttes. On pardonne bon nombre de platitudes
3173 ne bon nombre de platitudes et de vulgarités pour les derniers chapitres, denses, violents, et dont le profond ricanement s
3174 les derniers chapitres, denses, violents, et dont le profond ricanement se prolonge en nous. Je crois entendre Jacob qui s
3175 fort que cette bourgeoisie fatiguée, et de suivre le destin que vous m’avez assigné à force de m’humilier et de me craindr
3176 e, Jacob  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, mai 1927, p. 689-690.
3177  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , mai 1927, p. 689-690.
56 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). René Crevel, La Mort difficile (mai 1927)
3178 René Crevel, La Mort difficile (mai 1927)ai Le jeu de tout dire est une des plus t
3179 René Crevel, La Mort difficile (mai 1927)ai Le jeu de tout dire est une des plus tragiques inventions de l’inquiétud
3180 out dire est une des plus tragiques inventions de l’ inquiétude actuelle. Sous couleur de démasquer l’humain, et par l’acha
3181 l’inquiétude actuelle. Sous couleur de démasquer l’ humain, et par l’acharnement angoissé qu’on y apporte, l’on en vient à
3182 uelle. Sous couleur de démasquer l’humain, et par l’ acharnement angoissé qu’on y apporte, l’on en vient à une conception d
3183 n, et par l’acharnement angoissé qu’on y apporte, l’ on en vient à une conception de la sincérité qui me paraît proprement
3184 u’on y apporte, l’on en vient à une conception de la sincérité qui me paraît proprement inhumaine. Tout dire, vraiment ? C
3185 proprement inhumaine. Tout dire, vraiment ? C’est l’ exigence d’une détresse cachée ; elle fait bientôt considérer toute jo
3186 ôt considérer toute joie comme illusoire et livre l’ individu pieds et poings liés à l’obsession qu’il voulait avouer pour
3187 usoire et livre l’individu pieds et poings liés à l’ obsession qu’il voulait avouer pour s’en délivrer peut-être. Cette sin
3188 re. Cette sincérité ne serait-elle à son tour que le masque d’un goût du malheur ? Le sujet profond de ce roman, où l’on v
3189 e à son tour que le masque d’un goût du malheur ? Le sujet profond de ce roman, où l’on voit comment Pierre en vient à sac
3190 oût du malheur ? Le sujet profond de ce roman, où l’ on voit comment Pierre en vient à sacrifier Diane, son apaisement, pou
3191 sement, pour Arthur, sa « maladie », c’est encore l’ « élan mortel » que décrivait Mon Corps et Moi. Quand l’analyse féroce
3192 an mortel » que décrivait Mon Corps et Moi. Quand l’ analyse féroce de Crevel fouille les pensées de Pierre ou de Diane, le
3193 et Moi. Quand l’analyse féroce de Crevel fouille les pensées de Pierre ou de Diane, les gestes d’Arthur, le roman vit et n
3194 Crevel fouille les pensées de Pierre ou de Diane, les gestes d’Arthur, le roman vit et nous touche par la force de ce tourm
3195 nsées de Pierre ou de Diane, les gestes d’Arthur, le roman vit et nous touche par la force de ce tourment ou de ce sauvage
3196 gestes d’Arthur, le roman vit et nous touche par la force de ce tourment ou de ce sauvage égoïsme ; mais qu’elle s’acharn
3197 e ce sauvage égoïsme ; mais qu’elle s’acharne sur le détail dégoûtant et mesquin de certain milieu bourgeois, et l’on voit
3198 oûtant et mesquin de certain milieu bourgeois, et l’ on voit bien que l’auteur n’est pas encore détaché de la matière pour
3199 e certain milieu bourgeois, et l’on voit bien que l’ auteur n’est pas encore détaché de la matière pour en tirer une œuvre
3200 oit bien que l’auteur n’est pas encore détaché de la matière pour en tirer une œuvre d’art. La sincérité audacieuse mais s
3201 aché de la matière pour en tirer une œuvre d’art. La sincérité audacieuse mais sans bravade qui donne à ce livre sa valeur
3202 trahissent une écriture hâtive. Mais il y a dans l’ œuvre de René Crevel un sens de la douleur et un sérieux humain qui fo
3203 ais il y a dans l’œuvre de René Crevel un sens de la douleur et un sérieux humain qui forcent la sympathie. ai. Rougemo
3204 ns de la douleur et un sérieux humain qui forcent la sympathie. ai. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] René Crevel, L
3205 Rougemont Denis de, « [Compte rendu] René Crevel,  La Mort difficile  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genèv
3206 ifficile  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, mai 1927, p. 690.
3207  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , mai 1927, p. 690.
57 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Paul Éluard, Capitale de la douleur (mai 1927)
3208 Paul Éluard, Capitale de la douleur (mai 1927)aj Nocturnes aux caresses coupantes comme certai
3209 ses coupantes comme certaines herbes. Capitale de la douleurak, ce sont de belles syllabes sereines, et dans cette ville,
3210 yllabes sereines, et dans cette ville, Éluard est le plus séduisant, le plus dangereusement gracieux des noctambules. Rêve
3211 t dans cette ville, Éluard est le plus séduisant, le plus dangereusement gracieux des noctambules. Rêves éveillés, entre d
3212 lixir dont il voudrait bien nous faire croire que le diable est l’auteur. Beaucoup d’oiseaux volètent, se balancent au bor
3213 voudrait bien nous faire croire que le diable est l’ auteur. Beaucoup d’oiseaux volètent, se balancent au bord des verres,
3214 t, se balancent au bord des verres, se posent sur les cordes d’une lyre dont ils font grésiller l’accord, une patte en l’ai
3215 sur les cordes d’une lyre dont ils font grésiller l’ accord, une patte en l’air, becquètent le cœur d’une femme qui va les
3216 re dont ils font grésiller l’accord, une patte en l’ air, becquètent le cœur d’une femme qui va les étrangler doucement. Ce
3217 résiller l’accord, une patte en l’air, becquètent le cœur d’une femme qui va les étrangler doucement. Ces vers sont de jol
3218 e en l’air, becquètent le cœur d’une femme qui va les étrangler doucement. Ces vers sont de jolies flèches empoisonnées. Qu
3219 e, de laqué, d’élégant, de « bien français » ; et le mot sang n’évoque ici qu’une tache de couleur, plus sentimental que c
3220 he de couleur, plus sentimental que cruel. « J’ai la beauté facile et c’est heureux. » Il y a aussi un certain tragique, m
3221 nis de, « [Compte rendu] Paul Éluard, Capitale de la douleur  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mai
3222 douleur  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, mai 1927, p. 693-694. ak. En romain dans l’édition original
3223  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , mai 1927, p. 693-694. ak. En romain dans l’édition originale.
3224 Genève, mai 1927, p. 693-694. ak. En romain dans l’ édition originale.
58 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Pierre Drieu la Rochelle, La Suite dans les idées (mai 1927)
3225 Pierre Drieu la Rochelle, La Suite dans les idées (mai 1927)al « De quoi s’agit-il ? de détruir
3226 Pierre Drieu la Rochelle, La Suite dans les idées (mai 1927)al « De quoi s’agit-il ? de détruire ou de rafisto
3227 Drieu s’examine. Encore un ? Non, enfin un. Tous les autres y ont apporté de secrètes complaisances, ou une arrière-pensée
3228 esoin d’être aimés qui faussaient leurs voix pour les rendre plus touchantes. Celui-ci bat sa coulpe avec une saine rudesse
3229 té corrompu et infect et adonné à mal » (Calvin). Le tableau n’est pas beau, mais on y sent une « patte » qui révèle encor
3230 is on y sent une « patte » qui révèle encore dans le fond quelque chose de solide, d’authentique. J’aime cette violence de
3231 redressement où je distingue bien autre chose que les « éclats de l’impuissance ». Un plus délicat eut compris que certains
3232 je distingue bien autre chose que les « éclats de l’ impuissance ». Un plus délicat eut compris que certains des morceaux t
3233 fection, s’il ne peut encore s’en tirer, du moins l’ avoue-t-il avec une franchise qui la rend sympathique. Et puis, tout d
3234 rer, du moins l’avoue-t-il avec une franchise qui la rend sympathique. Et puis, tout de même, on est bien heureux de renco
3235 t de même, on est bien heureux de rencontrer chez les jeunes écrivains français un homme qui ait à ce point le sens de l’ép
3236 es écrivains français un homme qui ait à ce point le sens de l’époque, une vision si claire et si tragique de la civilisat
3237 s français un homme qui ait à ce point le sens de l’ époque, une vision si claire et si tragique de la civilisation d’Occid
3238 l’époque, une vision si claire et si tragique de la civilisation d’Occident. Les questions capitales posées ailleurs depu
3239 ire et si tragique de la civilisation d’Occident. Les questions capitales posées ailleurs depuis longtemps par des maîtres
3240 ir échappé au surréalisme en tant qu’il n’est que le triomphe de la littérature sur la vie, mais d’avoir su en garder une
3241 urréalisme en tant qu’il n’est que le triomphe de la littérature sur la vie, mais d’avoir su en garder une passion pour la
3242 qu’il n’est que le triomphe de la littérature sur la vie, mais d’avoir su en garder une passion pour la pureté, un « jusqu
3243 a vie, mais d’avoir su en garder une passion pour la pureté, un « jusqu’au boutisine » qui seul peut redonner quelque vita
3244 ourd’hui, presque sans pose, et décidé à mépriser le bluff. al. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Pierre Drieu la Ro
3245 is de, « [Compte rendu] Pierre Drieu la Rochelle, La Suite dans les idées  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
3246 te rendu] Pierre Drieu la Rochelle, La Suite dans les idées  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mai 19
3247 es idées  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, mai 1927, p. 694.
3248  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , mai 1927, p. 694.
59 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Récit du pickpocket (fragment) (mai 1927)
3249 mmerce, qu’on m’a appris à voler. Aristophane («  Les Chevaliers »). Dès qu’on eut déposé devant Isidore un malaga et une
3250 inérale devant son étrange convive, celui-ci prit la parole sans plus de cérémonie : « La jeunesse, Monsieur…, la jeunesse
3251 elui-ci prit la parole sans plus de cérémonie : «  La jeunesse, Monsieur…, la jeunesse est l’âge où l’on atteint la vie. On
3252 ans plus de cérémonie : « La jeunesse, Monsieur…, la jeunesse est l’âge où l’on atteint la vie. On s’y maintient cinq ans,
3253 monie : « La jeunesse, Monsieur…, la jeunesse est l’ âge où l’on atteint la vie. On s’y maintient cinq ans, dix ans au plus
3254  La jeunesse, Monsieur…, la jeunesse est l’âge où l’ on atteint la vie. On s’y maintient cinq ans, dix ans au plus. Après,
3255 Monsieur…, la jeunesse est l’âge où l’on atteint la vie. On s’y maintient cinq ans, dix ans au plus. Après, c’est un long
3256 s, dix ans au plus. Après, c’est un long adieu et le corps se fige à mesure que l’esprit s’établit sur ses positions. Or d
3257 st un long adieu et le corps se fige à mesure que l’ esprit s’établit sur ses positions. Or donc, j’avais vingt ans. Je viv
3258 diverti. J’étais bon, Monsieur, normalement bon. L’ idée, par exemple, d’étrangler un chat pour le plaisir me répugnait. J
3259 on. L’idée, par exemple, d’étrangler un chat pour le plaisir me répugnait. Je détestais de peiner quelque être, même ennem
3260 iner quelque être, même ennemi, — car celui-là je le méprisais trop sincèrement. » Vers cette époque, une femme me regarda
3261 ment. » Mes parents me savaient vierge et c’était la joie de leur vie, car ils aimaient en moi par-dessus tout la vertu qu
3262 leur vie, car ils aimaient en moi par-dessus tout la vertu que je leur devais. Pourtant, je ne détournai pas mes yeux des
3263 frît à cause de moi. Un soir qu’elle pleurait, je l’ embrassai si fort… En un quart d’heure, je connaissais l’amour dans ce
3264 ssai si fort… En un quart d’heure, je connaissais l’ amour dans ce qu’il a de plus étrangement prosaïque à la fois et bêtem
3265 angement prosaïque à la fois et bêtement heureux. Le lendemain était le premier jour du printemps. Les rues riaient. Le ci
3266 Le lendemain était le premier jour du printemps. Les rues riaient. Le ciel descendait dans la ville, on marchait dans le b
3267 t le premier jour du printemps. Les rues riaient. Le ciel descendait dans la ville, on marchait dans le bleu. Je sortis av
3268 ntemps. Les rues riaient. Le ciel descendait dans la ville, on marchait dans le bleu. Je sortis avec cette femme, qui m’ai
3269 e ciel descendait dans la ville, on marchait dans le bleu. Je sortis avec cette femme, qui m’aimait, et nous étions très j
3270 tions très jolis de bonheur et d’insouciance dans le bonheur de la saison. — Au soir, mon père savait tout. Il effleura mo
3271 is de bonheur et d’insouciance dans le bonheur de la saison. — Au soir, mon père savait tout. Il effleura mon front de ses
3272 èvres sans une parole quand je vins lui souhaiter le bonsoir. Le lendemain, ses cheveux avaient légèrement blanchi. Il me
3273 ne parole quand je vins lui souhaiter le bonsoir. Le lendemain, ses cheveux avaient légèrement blanchi. Il me regardait av
3274 un sourire de mon amie quand il voulut m’adresser la parole après un silence vertigineux. Il vit mon sourire et pleura. Al
3275 mon corps tout entier, je criai un juron, claquai la porte et courus dans ma chambre. Une demi-heure plus tard, j’étais à
3276 s ma chambre. Une demi-heure plus tard, j’étais à la gare, j’écrivais un mot d’adieu à ma maîtresse d’une nuit et je parta
3277 rection quelconque. Il advint que ce fut celle de l’ Italie. La lumière, mon pays natal ! — Je vécus d’articles sur la mode
3278 elconque. Il advint que ce fut celle de l’Italie. La lumière, mon pays natal ! — Je vécus d’articles sur la mode et la pol
3279 mière, mon pays natal ! — Je vécus d’articles sur la mode et la politique, que j’envoyais à divers journaux. Un jour, parc
3280 pays natal ! — Je vécus d’articles sur la mode et la politique, que j’envoyais à divers journaux. Un jour, parcourant un q
3281 pier, je lus mon nom en grosses lettres : c’était l’ annonce du décès de mon père. » J’étais assis à la terrasse ensoleillé
3282 l’annonce du décès de mon père. » J’étais assis à la terrasse ensoleillée d’un café ; une brise passa, et une femme en rob
3283 doucement… Je me levai sans payer, je partis par les rues, une joie violente commençait à m’envahir, contre laquelle je lu
3284 chaque tour du tambour des bouffées de musique. » La femme en bleu dansait en regardant au plafond. Après deux tangos, nou
3285 ous montions ensemble dans une chambre d’hôtel où l’ on ne voyait d’abord qu’un bouquet transfiguré par la lumière et que r
3286 n ne voyait d’abord qu’un bouquet transfiguré par la lumière et que reflétaient de nombreuses glaces. Les fenêtres que j’o
3287 lumière et que reflétaient de nombreuses glaces. Les fenêtres que j’ouvris firent tourner des soleils sur les parois clair
3288 êtres que j’ouvris firent tourner des soleils sur les parois claires. Du balcon, on voyait la mer, des bateaux, des nuages,
3289 eils sur les parois claires. Du balcon, on voyait la mer, des bateaux, des nuages, une avenue et ses autos rouges, tout un
3290 s autos rouges, tout un couchant de grand port de la Méditerranée. Nous nous aimâmes en sifflotant encore par instants l’a
3291 us nous aimâmes en sifflotant encore par instants l’ air de la dernière danse, mais nous avions aussi envie de pleurer, à c
3292 thousiasme juvénile, c’est-à-dire cynique, toutes les offres du hasard, ce poète immoral et malicieux. » Je ne sais dans qu
3293 al et malicieux. » Je ne sais dans quel rapide de l’ Europe centrale — région où l’on est forcé de prendre conscience de so
3294 dans quel rapide de l’Europe centrale — région où l’ on est forcé de prendre conscience de soi-même — je découvris une nuit
3295 t en moi reniait obscurément. Je sentais bien que le ressort secret de la vertu dans laquelle on m’avait emprisonné c’étai
3296 urément. Je sentais bien que le ressort secret de la vertu dans laquelle on m’avait emprisonné c’était un bas opportunisme
3297 ocial, résultante des paresses accumulées de tous les cerveaux bourgeois incapables de concevoir un monde sans vieilles fil
3298 ns gendarmes. Je sais bien ce que vous me direz : Les millions que je pourrais leur soustraire ne compenseront jamais cette
3299 eront jamais cette escroquerie morale dont je fus la victime, ce vol de quelques joies parfaites de ma jeunesse… Mais il e
3300 … Mais il est trop tard, Monsieur, pour critiquer les modalités de ma vengeance. Veuillez ne voir dans la confusion où je p
3301 modalités de ma vengeance. Veuillez ne voir dans la confusion où je parais être engagé, du plan moral avec l’économique,
3302 sion où je parais être engagé, du plan moral avec l’ économique, qu’une expression nouvelle, et non dénuée d’ironie, de mon
3303 on mépris pour ce qu’ils appellent, ridiculement, les fondements mêmes de la société. » C’est avec le produit du vol d’un t
3304 appellent, ridiculement, les fondements mêmes de la société. » C’est avec le produit du vol d’un tronc de chapelle que j’
3305 les fondements mêmes de la société. » C’est avec le produit du vol d’un tronc de chapelle que j’édifiai à mes parents un
3306 au sur lequel je fis graver : Prêté — rendu, pour la gloire de l’Église. (Ici, il but une gorgée et prit un temps.) » Je v
3307 je fis graver : Prêté — rendu, pour la gloire de l’ Église. (Ici, il but une gorgée et prit un temps.) » Je vous fais grâc
3308 n temps.) » Je vous fais grâce, poursuivit-il, de la chronique de ma vie de rat d’hôtel et de sleepings ; encore que… Bref
3309 e… Bref, depuis quelques mois, je m’amuse à jouer le pickpocket. Cela permet, avec un minimum d’adresse, de découvrir cert
3310 s auparavant, et pas toujours défavorable, croyez- le bien… Le goût de la propriété étant à mon sens l’un des plus vulgaire
3311 ant, et pas toujours défavorable, croyez-le bien… Le goût de la propriété étant à mon sens l’un des plus vulgaires et des
3312 toujours défavorable, croyez-le bien… Le goût de la propriété étant à mon sens l’un des plus vulgaires et des plus généra
3313 ndus, j’ai vite fait de classer mon monde d’après les quelques réactions élémentaires qui ne manquent jamais de succéder au
3314 au moindre vol. » J’ajouterai, cher Monsieur, que l’ analyse psychologique n’est pas mon fort. Je me contente de quelques o
3315 oriques que je tiens pour vraies, et j’en vérifie les manifestations vivantes avec une prodigalité d’épreuves, contre-épreu
3316 tre-épreuves, variantes et enjolivures où je vois le véritable intérêt de ma vie. C’est vous dire que seule une certaine c
3317 C’est vous dire que seule une certaine caresse de l’ événement naissant peut encore m’émouvoir. C’est un plaisir de chaque
3318 sir de chaque minute auquel succède immédiatement le sommeil. Je rêve beaucoup. Cela explique, m’a-t-on dit, le peu de goû
3319 l. Je rêve beaucoup. Cela explique, m’a-t-on dit, le peu de goût que j’ai pour la poésie imprimée. » J’allais oublier de v
3320 lique, m’a-t-on dit, le peu de goût que j’ai pour la poésie imprimée. » J’allais oublier de vous dire qu’on me nomme Saint
3321 n me nomme Saint-Julien. Vous n’ignorez point que l’ on considère ce saint comme le patron des voyageurs… » Saint-Julien pa
3322 n’ignorez point que l’on considère ce saint comme le patron des voyageurs… » Saint-Julien parut satisfait de cette dernièr
3323 gorgées d’eau minérale. Isidore sentit alors que la bienséance l’obligeait à émettre une opinion, même la plus générale e
3324 minérale. Isidore sentit alors que la bienséance l’ obligeait à émettre une opinion, même la plus générale et la moins com
3325 ienséance l’obligeait à émettre une opinion, même la plus générale et la moins compromettante, sur cette vie dont le récit
3326 t à émettre une opinion, même la plus générale et la moins compromettante, sur cette vie dont le récit n’avait pas laissé
3327 le et la moins compromettante, sur cette vie dont le récit n’avait pas laissé que de l’agacer en maint endroit. « Une chos
3328 cette vie dont le récit n’avait pas laissé que de l’ agacer en maint endroit. « Une chose avant tout me frappe — dit-il, lâ
3329 iments, ce qui est de mauvaise politique, — c’est l’ extraordinaire netteté de votre vie. Elle est sans bavures, sans rétic
3330 herche ce qu’on est convenu d’appeler — pardonnez la lourdeur de l’expression — une règle de vie. Mais, je vous l’avouerai
3331 est convenu d’appeler — pardonnez la lourdeur de l’ expression — une règle de vie. Mais, je vous l’avouerai, ce qui me ret
3332 de l’expression — une règle de vie. Mais, je vous l’ avouerai, ce qui me retient de tirer de votre conduite les conclusions
3333 rai, ce qui me retient de tirer de votre conduite les conclusions morales qu’elle paraît impliquer, c’est ce caractère de,
3334 conscience ! qui s’attache à vos faits et gestes. L’ on croirait ouïr parfois le récit de quelqu’une de ces farces d’étudia
3335 à vos faits et gestes. L’on croirait ouïr parfois le récit de quelqu’une de ces farces d’étudiants qui ne sont que la trad
3336 lqu’une de ces farces d’étudiants qui ne sont que la traduction en actes de jeux de mots plus ou moins cruels… » — Je vous
3337 rrompit Saint-Julien, par pitié pour Isidore dont la sincérité tournait vite à l’agressif — effet d’une timidité naturelle
3338 ié pour Isidore dont la sincérité tournait vite à l’ agressif — effet d’une timidité naturelle dont il paraissait lui-même
3339 né. En deux mots, vous ne me trouvez pas sérieux. Le reproche est grave. Je ne saurais y répondre. Je pourrais vous dire q
3340 ez un peu potache, il n’est pas prouvé par là que le potache n’ait point raison. Mais justement je n’éprouve aucun désir d
3341 conque est aussi profondément persuadé que moi de l’ absurdité radicale de notre vie, la moindre farce, le moindre geste co
3342 adé que moi de l’absurdité radicale de notre vie, la moindre farce, le moindre geste convenu dans le genre « révolté » pre
3343 bsurdité radicale de notre vie, la moindre farce, le moindre geste convenu dans le genre « révolté » prend une saveur de r
3344 , la moindre farce, le moindre geste convenu dans le genre « révolté » prend une saveur de raillerie assez amère. Et peut-
3345 découvrir derrière certaines de mes plaisanteries la dérision secrète qu’elles masquent par caprice. .....................
3346  180-185. t. Une note de bas de page indique : «  La rédaction rappelle que les idées émises dans la Revue de Belles-Lettr
3347 bas de page indique : « La rédaction rappelle que les idées émises dans la Revue de Belles-Lettres sont propres à leur aute
3348 « La rédaction rappelle que les idées émises dans la Revue de Belles-Lettres sont propres à leur auteur et qu’elles n’enga
60 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Conseils à la jeunesse (mai 1927)
3349 Conseils à la jeunesse (mai 1927)u « On a reproché bien des choses aux romantiqu
3350 « On a reproché bien des choses aux romantiques : le goût du suicide, l’habitude de boire et de fumer excessivement, leurs
3351 des choses aux romantiques : le goût du suicide, l’ habitude de boire et de fumer excessivement, leurs amours, l’égoïsme,
3352 de boire et de fumer excessivement, leurs amours, l’ égoïsme, le mépris de la réalité, l’exaltation maladive de l’imaginati
3353 de fumer excessivement, leurs amours, l’égoïsme, le mépris de la réalité, l’exaltation maladive de l’imagination et de la
3354 essivement, leurs amours, l’égoïsme, le mépris de la réalité, l’exaltation maladive de l’imagination et de la sensibilité,
3355 leurs amours, l’égoïsme, le mépris de la réalité, l’ exaltation maladive de l’imagination et de la sensibilité, l’atrophie
3356 le mépris de la réalité, l’exaltation maladive de l’ imagination et de la sensibilité, l’atrophie du sens critique sous tou
3357 ité, l’exaltation maladive de l’imagination et de la sensibilité, l’atrophie du sens critique sous toutes ses formes : rai
3358 n maladive de l’imagination et de la sensibilité, l’ atrophie du sens critique sous toutes ses formes : raison, jugement, s
3359 es formes : raison, jugement, simple bon sens, et l’ ignorance systématique, le mépris enfin de tous les principes qui sont
3360 nt, simple bon sens, et l’ignorance systématique, le mépris enfin de tous les principes qui sont à la base de la société m
3361 l’ignorance systématique, le mépris enfin de tous les principes qui sont à la base de la société même. »   Ceci est tiré d’
3362 le mépris enfin de tous les principes qui sont à la base de la société même. »   Ceci est tiré d’un livre récent sur Aloy
3363 enfin de tous les principes qui sont à la base de la société même. »   Ceci est tiré d’un livre récent sur Aloysius Bertra
3364 proches s’adressent, ou bien plutôt — vous alliez le dire — aux surréalistes ?   Si le mal du siècle consistait véritablem
3365 t — vous alliez le dire — aux surréalistes ?   Si le mal du siècle consistait véritablement dans ces quelques effets, nous
3366 Y. Z., qui, dans un petit article du Journal de Genève sur « La maladie du siècle », écrit : « Plante des pommes de terre,
3367 ans un petit article du Journal de Genève sur «  La maladie du siècle », écrit : « Plante des pommes de terre, jeune homm
3368 de terre, jeune homme ! Quand tu seras au bout de la 20e ligne de 200 mètres, ce qui représente quatre kilomètres de plant
3369 e qui représente quatre kilomètres de plantation, le siècle ne sera plus malade, les temps seront guéris de leur crise, le
3370 res de plantation, le siècle ne sera plus malade, les temps seront guéris de leur crise, les valeurs auront retrouvé leur s
3371 us malade, les temps seront guéris de leur crise, les valeurs auront retrouvé leur stabilité, et comme M. Albert Muret dont
3372 uvé leur stabilité, et comme M. Albert Muret dont le Journal de Genève parlait naguère, tu mangeras avec appétit une pou
3373 ité, et comme M. Albert Muret dont le Journal de Genève parlait naguère, tu mangeras avec appétit une poule au riz arrosée d
3374 ent chez des jeunes « et qui pensent » ce goût de l’ évasion caractéristique de tous les « vices romantiques ». — Citez-m’e
3375 nt » ce goût de l’évasion caractéristique de tous les « vices romantiques ». — Citez-m’en de ces phénomènes ! — Mon Dieu, q
3376 Il y aurait, par exemple, ce fait du triomphe de la Machine ; ce fait de la révolution russe… cet autre fait de la guerre
3377 e, ce fait du triomphe de la Machine ; ce fait de la révolution russe… cet autre fait de la guerre… et puis, tenez ! ce fa
3378 ce fait de la révolution russe… cet autre fait de la guerre… et puis, tenez ! ce fait surtout de la sacro-sainte Raison ut
3379 de la guerre… et puis, tenez ! ce fait surtout de la sacro-sainte Raison utilitaire au service des sacro-saints Principes
3380 desquels tout se ligue aujourd’hui pour anéantir la seule chose qui reste à nos yeux sacro-sainte : la liberté. Alors n’e
3381 a seule chose qui reste à nos yeux sacro-sainte : la liberté. Alors n’est-ce pas, merci du conseil, Monsieur Y. Z., de ce
3382 ches pour enseigner cette méthode à leurs petits. Le « satisfait » est un être inadmissible aujourd’hui. À plus forte rais
3383 re inadmissible aujourd’hui. À plus forte raison, le satisfait artificiel. u. Rougemont Denis de, « Conseils à la jeune
3384 rtificiel. u. Rougemont Denis de, « Conseils à la jeunesse », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribou
61 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Pierre Girard, Connaissez mieux le cœur des femmes (juillet 1927)
3385 Pierre Girard, Connaissez mieux le cœur des femmes (juillet 1927)am Quand vous avez fermé ce petit li
3386 fermé ce petit livre, vous partez en chantonnant le titre sur un air sentimental, bien décidé au fond, à retrouver Patsy,
3387 timental, bien décidé au fond, à retrouver Patsy, l’ Irlandaise perdue par cet improbable et sympathique Paterne. Sous le f
3388 e par cet improbable et sympathique Paterne. Sous le fallacieux prétexte d’une flânerie de saison, vous vous attardez aux
3389 Justement, voici Pierre Girard : lui seul connaît l’ adresse de Patsy, mais il ne veut pas vous la donner. Alors pour vous
3390 naît l’adresse de Patsy, mais il ne veut pas vous la donner. Alors pour vous venger, vous lui dites que, « d’abord », son
3391 re n’est pas sérieux. Il sourit. Vous ajoutez que le lyrisme des noms géographiques vous fatigue ; que c’est une vraie man
3392 lobe dans son voyage « est arrivé à un endroit de l’ éther où il y a du bonheur ». Vous reconnaissez que Pierre Girard est
3393 son aisance. Vous accordez que s’il force un peu la dose de fantaisie, c’est plutôt par excès de facilité que par recherc
3394 ilité que par recherche. Vous voilà même tenté de l’ en féliciter. Bien plus, vous découvrez dans ses fantoches une malicie
3395 nous seraient épargnés si nous ne regardions que les jambes des femmes », dit-il, pour vous apprendre ! — sans se douter q
3396 un devoir de ce plaisir. Un devoir !… Car hélas, l’ on n’est pas impunément concitoyen de cet oncle Abraham qui interdit à
3397 Abraham qui interdit à Paterne son neveu de fumer le matin, de sortir la nuit, et qui lui fait jurer sur la Bible de ne pa
3398 à Paterne son neveu de fumer le matin, de sortir la nuit, et qui lui fait jurer sur la Bible de ne pas entrer dans les ca
3399 tin, de sortir la nuit, et qui lui fait jurer sur la Bible de ne pas entrer dans les cafés. Et puis, c’est égal, ce soir,
3400 lui fait jurer sur la Bible de ne pas entrer dans les cafés. Et puis, c’est égal, ce soir, tout cela est sans importance, c
3401 soir, tout cela est sans importance, car voici «  l’ heure des petits arbres pourpres, l’heure où dans les bibliothèques dé
3402 , car voici « l’heure des petits arbres pourpres, l’ heure où dans les bibliothèques désertes glisse un grand souffle obliq
3403 heure des petits arbres pourpres, l’heure où dans les bibliothèques désertes glisse un grand souffle oblique plein de fraîc
3404 « [Compte rendu] Pierre Girard, Connaissez mieux le cœur des femmes  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genè
3405 s femmes  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, juillet 1927, p. 114-115.
3406  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , juillet 1927, p. 114-115.
62 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). La part du feu. Lettres sur le mépris de la littérature (juillet 1927)
3407 La part du feu. Lettres sur le mépris de la littérature (juillet 1927)v
3408 La part du feu. Lettres sur le mépris de la littérature (juillet 1927)v I Parler littérature
3409 La part du feu. Lettres sur le mépris de la littérature (juillet 1927)v I Parler littérature Si je pronon
3410 927)v I Parler littérature Si je prononce le nom de tel de vos confrères, si je dis : « Avez-vous lu… », vous voil
3411 « Avez-vous lu… », vous voilà rouge ; et sur moi les foudres de votre paradis poétique. Si je cite tel auteur dont nous fî
3412 mes notre nourriture une saison de naguère, voilà le rictus de votre bouche, une injure de pythie. Vous dites de ce conte 
3413 n goût qu’on aurait pour Nietzsche : que c’est de la littérature. Alors, quelque paysan du Danube survenant : — Je vous cr
3414 écrivain ? — Hélas ! soupirez-vous. Mais j’ai tué la littérature en moi, n’en parlez plus, j’en sors, je l’abandonne… Mais
3415 ttérature en moi, n’en parlez plus, j’en sors, je l’ abandonne… Mais notre paysan, rusé : — Vous l’abandonnez ? Pour quoi ?
3416 je l’abandonne… Mais notre paysan, rusé : — Vous l’ abandonnez ? Pour quoi ? — Pour la vie ! Or je pense, à part moi : j’a
3417 , rusé : — Vous l’abandonnez ? Pour quoi ? — Pour la vie ! Or je pense, à part moi : j’ai lu ça quelque part. Voyez ma fra
3418 ennent soin que leurs sincérités gardent au moins l’ excuse d’une audace qu’ils escomptent scandaleuse. Mais voici un bar o
3419 in de mépris pour Paul Morand par qui découvrîtes le charme de ces lieux. Vous composez un cocktail en guise de métaphore,
3420 jour au Grand Écart… », dit quelqu’un. À ce coup, l’ évocation de Cocteau fait fleurir sur vos lèvres le mot de Cambronne :
3421 ’évocation de Cocteau fait fleurir sur vos lèvres le mot de Cambronne : hommage à Louis Aragon. Ce cristal est une citatio
3422 Et des phrases, des cris, des mots. Au défaut de l’ ivresse naissante se glisse un poème où vous aimiez à la folie votre d
3423 sse naissante se glisse un poème où vous aimiez à la folie votre douleur. Narcisse se contemple au miroir de son monocle.
3424 il se noie dans un verre à liqueur. Poisson dans l’ eau, plumes dans le vent, poète au bar, le paradis n’est pas si cher.
3425 verre à liqueur. Poisson dans l’eau, plumes dans le vent, poète au bar, le paradis n’est pas si cher. Il y en a aussi qui
3426 on dans l’eau, plumes dans le vent, poète au bar, le paradis n’est pas si cher. Il y en a aussi qui posent pour le diable
3427 ’est pas si cher. Il y en a aussi qui posent pour le diable et ne se baignent que dans des bénitiers : on voit trop qu’ils
3428 : on voit trop qu’ils trouvent ça pittoresque. Et le plaisir d’être nu devant un public supposé dévot, et qui n’ose en cro
3429 n’ose en croire sa pudeur, et qui doute enfin de l’ impossibilité des miracles ! Quelles voluptés plus subtiles et plus ai
3430 e bois pour en faire des poèmes. Alors je cherche les raisons de votre indignation, quand il m’échappe une citation. Seraie
3431 ion, quand il m’échappe une citation. Seraient-ce les guillemets qui vous choquent ?   La vie ! — proclamiez-vous… Soit. Ma
3432 Seraient-ce les guillemets qui vous choquent ?   La vie ! — proclamiez-vous… Soit. Mais maintenant je vais me fâcher chaq
3433 « hallucinant » ou « purement gratuit ». C’est de la littérature. À force d’avoir mérité ces épithètes, pour nous laudati
3434 nous laudatives, vous vous étonnez aujourd’hui de la simplicité. Littérateur, va ! qui ne pouvez pas même admettre que la
3435 érateur, va ! qui ne pouvez pas même admettre que la simplicité est simple simplement. La bouche brûlée d’alcools, vous dé
3436 admettre que la simplicité est simple simplement. La bouche brûlée d’alcools, vous découvrez à l’eau un goût étrange. L’ea
3437 ent. La bouche brûlée d’alcools, vous découvrez à l’ eau un goût étrange. L’eau est incolore, inodore et sans saveur. Mais
3438 ’alcools, vous découvrez à l’eau un goût étrange. L’ eau est incolore, inodore et sans saveur. Mais fraîche. Ainsi, jusque
3439 ais fraîche. Ainsi, jusque dans votre mépris pour le pittoresque, vous témoignez d’un goût du bizarre qui révèle le littér
3440 e, vous témoignez d’un goût du bizarre qui révèle le littérateur. Nous ne pouvons pas faire que nous n’ayons rien lu. Vous
3441 lu. Vous refusez de compter avec cette réalité de la littérature qui est en nous (dangereuse tant que vous voudrez). Mais
3442 une ingratitude salutaire, c’est refus de limiter le mal. Je vous vois envahi par des démons que vous prétendez m’interdir
3443 ensées des autres, je vous ai mis un collier avec le nom du propriétaire ; tirez un peu sur la laisse, que j’éprouve la fe
3444 er avec le nom du propriétaire ; tirez un peu sur la laisse, que j’éprouve la fermeté de ma main. Je vous tiens. Je sais o
3445 taire ; tirez un peu sur la laisse, que j’éprouve la fermeté de ma main. Je vous tiens. Je sais où vous êtes. Vous n’allez
3446 n vante, — j’ai tué un amour naissant, à force de le crier sur les toits. Ainsi, parler littérature, c’est faire la part d
3447 ai tué un amour naissant, à force de le crier sur les toits. Ainsi, parler littérature, c’est faire la part du feu. Je dis
3448 les toits. Ainsi, parler littérature, c’est faire la part du feu. Je dis ces noms, ces opinions, ces titres de livres : to
3449 choque, s’annule. Poussière. Ma vie est ailleurs. L’ addition, s’il vous plaît. Il est temps de sortir de ce café et de ces
3450 afé et de ces jeux, simulacres de vie, qui sont à la vraie vie ce que le flirt est à l’amour. II Sur l’insuffisance de
3451 simulacres de vie, qui sont à la vraie vie ce que le flirt est à l’amour. II Sur l’insuffisance de la littérature On
3452 ie, qui sont à la vraie vie ce que le flirt est à l’ amour. II Sur l’insuffisance de la littérature On reconnaît un é
3453 raie vie ce que le flirt est à l’amour. II Sur l’ insuffisance de la littérature On reconnaît un écrivain, aujourd’hu
3454 flirt est à l’amour. II Sur l’insuffisance de la littérature On reconnaît un écrivain, aujourd’hui, à ce qu’il ne t
3455 e sournoises déclarations d’amour. Tel qui raille l’ Église et les curés, c’est qu’il se fait une très haute idée de la rel
3456 déclarations d’amour. Tel qui raille l’Église et les curés, c’est qu’il se fait une très haute idée de la religion. Ainsi,
3457 curés, c’est qu’il se fait une très haute idée de la religion. Ainsi, de la littérature : votre mépris pour ses réalisatio
3458 ait une très haute idée de la religion. Ainsi, de la littérature : votre mépris pour ses réalisations actuelles donne la m
3459 otre mépris pour ses réalisations actuelles donne la mesure de ce que vous attendez d’elle. Pour dire le fond de ma pensée
3460 mesure de ce que vous attendez d’elle. Pour dire le fond de ma pensée, je crois ce mépris et cette attente également exag
3461 ous savez bien que nous cherchons autre chose que la littérature. Que la littérature nous est un moyen seulement d’atteind
3462 ous cherchons autre chose que la littérature. Que la littérature nous est un moyen seulement d’atteindre et de préparer d’
3463 . Des choses dures, amères comme un destin, comme le goût d’une pierre rêche sur ta langue et grinçante sous ta dent. Des
3464 intenses que tout se fond catastrophiquement dans l’ infini de la seconde. Des peurs sans cause, plus vides que la mort. To
3465 la seconde. Des peurs sans cause, plus vides que la mort. Toutes ces choses mystiques, c’est-à-dire réelles, c’est-à-dire
3466 nous importe véritablement n’est dicible. (Depuis le temps qu’on sait que la lettre tue ce qu’elle prétend exprimer ; depu
3467 nt n’est dicible. (Depuis le temps qu’on sait que la lettre tue ce qu’elle prétend exprimer ; depuis le temps qu’on l’oubl
3468 a lettre tue ce qu’elle prétend exprimer ; depuis le temps qu’on l’oublie.) Vous me direz que la poésie, l’état poétique,
3469 qu’elle prétend exprimer ; depuis le temps qu’on l’ oublie.) Vous me direz que la poésie, l’état poétique, est notre seul
3470 epuis le temps qu’on l’oublie.) Vous me direz que la poésie, l’état poétique, est notre seul moyen de connaissance concrèt
3471 mps qu’on l’oublie.) Vous me direz que la poésie, l’ état poétique, est notre seul moyen de connaissance concrète du monde.
3472 oncrète du monde. Mais c’est à condition qu’on ne l’ écrive pas, même en pensée. La poésie pure écrite est inconcevable : c
3473 condition qu’on ne l’écrive pas, même en pensée. La poésie pure écrite est inconcevable : cela consisterait dans l’expres
3474 écrite est inconcevable : cela consisterait dans l’ expression directe de la réalité individuelle. Elle serait tellement i
3475  : cela consisterait dans l’expression directe de la réalité individuelle. Elle serait tellement incommunicable qu’il devi
3476 ement incommunicable qu’il deviendrait inutile de la publier. Et même, en passant à la limite, on peut imaginer que si ell
3477 rait inutile de la publier. Et même, en passant à la limite, on peut imaginer que si elle était réalisée, on ne s’en aperc
3478 ercevrait pas. Je pressens encore dans vos poèmes les plus obscurs des allusions furtives à certains états de la réalité. M
3479 bscurs des allusions furtives à certains états de la réalité. Mais plus les mots se plient à des exigences sémantiques — d
3480 urtives à certains états de la réalité. Mais plus les mots se plient à des exigences sémantiques — dont on connaît la porté
3481 ent à des exigences sémantiques — dont on connaît la portée sociale, — mariant l’utile à l’agréable selon les rites d’une
3482 es — dont on connaît la portée sociale, — mariant l’ utile à l’agréable selon les rites d’une esthétique ou d’une autre, pl
3483 on connaît la portée sociale, — mariant l’utile à l’ agréable selon les rites d’une esthétique ou d’une autre, plus ils per
3484 tée sociale, — mariant l’utile à l’agréable selon les rites d’une esthétique ou d’une autre, plus ils perdent leur pouvoir
3485 autre, plus ils perdent leur pouvoir de signifier les choses qui nous importent. Vous le savez. Alors vous les lâchez en li
3486 de signifier les choses qui nous importent. Vous le savez. Alors vous les lâchez en liberté, par haine de cette esthétiqu
3487 ses qui nous importent. Vous le savez. Alors vous les lâchez en liberté, par haine de cette esthétique ou de ce sens social
3488 de ce sens social, — et voilà qu’ils perdent même la problématique utilité de liaison qui était leur excuse dernière. Avou
3489 e liaison qui était leur excuse dernière. Avouons- le  : rien de ce qu’on peut exprimer n’a d’importance véritable. Alors, c
3490 cessons de nous battre contre des moulins à vent. La littérature, considérée du point de vue de la psychologie de l’écriva
3491 nt. La littérature, considérée du point de vue de la psychologie de l’écrivain, est un besoin organique, un peu anormal, q
3492 , considérée du point de vue de la psychologie de l’ écrivain, est un besoin organique, un peu anormal, que l’on satisfait
3493 ain, est un besoin organique, un peu anormal, que l’ on satisfait dans certains états de crise afin de retrouver son équili
3494 rarement, de quoi se payer un petit voyage. C’est l’ aveu d’une faiblesse secrète. Et c’est une réaction de défense. On che
3495 he un mot, une phrase, pour tuer une réalité dont la connaissance devient douloureuse et troublante. Ainsi la conscience t
3496 aissance devient douloureuse et troublante. Ainsi la conscience tue la connaissance. (« Connaissance » étant pris avec son
3497 ouloureuse et troublante. Ainsi la conscience tue la connaissance. (« Connaissance » étant pris avec son sens le plus prof
3498 sance. (« Connaissance » étant pris avec son sens le plus profond, qui est proche du sens biblique. Il ne s’agit pas de la
3499 est proche du sens biblique. Il ne s’agit pas de la connaissance abstraite et rationnelle dont le monde moderne se conten
3500 de la connaissance abstraite et rationnelle dont le monde moderne se contente, et qui tend à remplacer, grâce à la mental
3501 rne se contente, et qui tend à remplacer, grâce à la mentalité scolaire et primaire en particulier, toute connaissance vér
3502 ice ? Peut-être. Ou une maladie ? Ce n’est pas en l’ ignorant par attitude que vous la guérirez. Au contraire, il s’agit de
3503 Ce n’est pas en l’ignorant par attitude que vous la guérirez. Au contraire, il s’agit de l’envisager sans fièvre, pour en
3504 que vous la guérirez. Au contraire, il s’agit de l’ envisager sans fièvre, pour en circonscrire les effets. J’avoue prendr
3505 de l’envisager sans fièvre, pour en circonscrire les effets. J’avoue prendre à cette étude un intérêt bien vif. Et cela fo
3506 en n’est plus facile que d’y échapper. III Sur l’ utilité de la littérature Montherlant me paraît être le moins « lit
3507 facile que d’y échapper. III Sur l’utilité de la littérature Montherlant me paraît être le moins « littératuré » de
3508 é de la littérature Montherlant me paraît être le moins « littératuré » des écrivains d’aujourd’hui. Quand il parle lit
3509 rd’hui. Quand il parle littérature, il a toujours l’ air de mettre un peu les pieds dans le plat, de dire de ces choses qu’
3510 littérature, il a toujours l’air de mettre un peu les pieds dans le plat, de dire de ces choses qu’entre gens du métier l’o
3511 a toujours l’air de mettre un peu les pieds dans le plat, de dire de ces choses qu’entre gens du métier l’on a convenu de
3512 at, de dire de ces choses qu’entre gens du métier l’ on a convenu de passer sous silence. C’est assez drôle de voir le mala
3513 de passer sous silence. C’est assez drôle de voir le malaise des chers confrères. Ils ne pardonnent pas à ce toréador ses
3514 une Muse qu’ils n’ont pas coutume d’aborder sans le mot de passe de la dernière mode ou de savantes séductions. On sait b
3515 tes séductions. On sait bien, d’ailleurs, qu’elle les entretient. Bande de gigolos de la littérature ! Qu’on puisse vivre d
3516 eurs, qu’elle les entretient. Bande de gigolos de la littérature ! Qu’on puisse vivre de ça, je ne l’ai pas encore avalé.
3517 la littérature ! Qu’on puisse vivre de ça, je ne l’ ai pas encore avalé. On m’affirme que je n’y échapperai pas plus qu’un
3518 is, pour sûr, jamais vivre pour écrire16. De tous les prétextes que l’on a pu avancer pour légitimer l’activité littéraire,
3519 is vivre pour écrire16. De tous les prétextes que l’ on a pu avancer pour légitimer l’activité littéraire, le plus satisfai
3520 es prétextes que l’on a pu avancer pour légitimer l’ activité littéraire, le plus satisfaisant, celui qui rend le mieux com
3521 pu avancer pour légitimer l’activité littéraire, le plus satisfaisant, celui qui rend le mieux compte de la réalité, c’es
3522 littéraire, le plus satisfaisant, celui qui rend le mieux compte de la réalité, c’est André Breton qui l’a exprimé : « On
3523 s satisfaisant, celui qui rend le mieux compte de la réalité, c’est André Breton qui l’a exprimé : « On publie pour cherch
3524 ieux compte de la réalité, c’est André Breton qui l’ a exprimé : « On publie pour chercher des hommes, et rien de plus. » C
3525 pas tant, n’est-ce pas, à poursuivre une quête de l’ esprit. Et vous savez ce qu’elle nous vaut : les mépris, les haines do
3526 de l’esprit. Et vous savez ce qu’elle nous vaut : les mépris, les haines douloureuses ou grossières de tous ceux qui ne peu
3527 Et vous savez ce qu’elle nous vaut : les mépris, les haines douloureuses ou grossières de tous ceux qui ne peuvent ou ne v
3528 ous voyez bien que votre attitude méprisante pour la littérature vous ferait bientôt renier le signe le plus certain par l
3529 te pour la littérature vous ferait bientôt renier le signe le plus certain par lequel ces « quelques-uns » peuvent encore
3530 a littérature vous ferait bientôt renier le signe le plus certain par lequel ces « quelques-uns » peuvent encore se reconn
3531 e elle n’aurait plus d’autre excuse que celle-là, la littérature mériterait d’exister : qu’elle soit le langage chiffré de
3532 a littérature mériterait d’exister : qu’elle soit le langage chiffré de notre inquiétude et de nos naissantes certitudes,
3533 notre inquiétude et de nos naissantes certitudes, le seul langage peut-être qui nous permette d’échanger les signaux de l’
3534 ul langage peut-être qui nous permette d’échanger les signaux de l’angoisse sur quoi se fondent, en ces temps, nos amitiés
3535 -être qui nous permette d’échanger les signaux de l’ angoisse sur quoi se fondent, en ces temps, nos amitiés miraculeuses.
3536 ces temps, nos amitiés miraculeuses.   Voici donc les seules révélations que j’attende de la littérature : que celle des au
3537 oici donc les seules révélations que j’attende de la littérature : que celle des autres m’aide à prendre conscience de moi
3538 e la mienne m’aide à découvrir quelques êtres par le monde… Il ne s’agit plus de mépris ni d’adoration. J’ai défini une « 
3539 ont je parviens à tirer quelque bien pour ma vie. Le jour où les soins qu’elle exige me coûteront des sacrifices plus gran
3540 iens à tirer quelque bien pour ma vie. Le jour où les soins qu’elle exige me coûteront des sacrifices plus grands que les b
3541 exige me coûteront des sacrifices plus grands que les bienfaits que j’en escompte, il sera temps de songer sérieusement à m
3542 . 14. Paul Morand, auteur d’Ouvert et de Fermé la nuit, titres également scandaleux. Le Grand Écart, roman de M. Coctea
3543 et de Fermé la nuit, titres également scandaleux. Le Grand Écart, roman de M. Cocteau, a donné son nom à un établissement
3544 e lettres et poètes surréalistes. Paul Valéry, de l’ Académie française. Narcisse, personnage mythologique. — Là ! [NdE] Le
3545 . Narcisse, personnage mythologique. — Là ! [NdE] Le texte publié place également un appel de note plus bas dans le paragr
3546 ié place également un appel de note plus bas dans le paragraphe, après « Narcisse », sans qu’on sache s’il s’agit d’une er
3547 ache s’il s’agit d’une erreur ou d’une volonté de l’ auteur. 15. Variante : des puissances d’action. 16. J’en vois certai
3548 et ils en sont tout fiers : « Il n’y a plus qu’à les écrire ». v. Rougemont Denis de, « La part du feu. Lettres sur le m
3549 lus qu’à les écrire ». v. Rougemont Denis de, «  La part du feu. Lettres sur le mépris de la littérature », Revue de Bell
3550 Rougemont Denis de, « La part du feu. Lettres sur le mépris de la littérature », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchât
3551 is de, « La part du feu. Lettres sur le mépris de la littérature », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fri
63 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Les derniers jours (juillet 1927)
3552 Les derniers jours (juillet 1927)w Ces « cahiers politiques et littéra
3553 r Drieu la Rochelle et Emmanuel Berl, sont — avec la Revue de Belles-Lettres — la seule revue de langue française où l’o
3554 Berl, sont — avec la Revue de Belles-Lettres — la seule revue de langue française où l’on dise la vérité librement et p
3555 -Lettres — la seule revue de langue française où l’ on dise la vérité librement et pour elle-même. Nous regrettons de n’en
3556 — la seule revue de langue française où l’on dise la vérité librement et pour elle-même. Nous regrettons de n’en pouvoir c
3557 s phrases de Drieu : « On voit déjà éclater dans les singuliers mouvements de sympathie qu’a provoqués l’infortune de l’Ac
3558 singuliers mouvements de sympathie qu’a provoqués l’ infortune de l’Action française la fraternité qui existe, en dépit des
3559 ements de sympathie qu’a provoqués l’infortune de l’ Action française la fraternité qui existe, en dépit des protestations
3560 qu’a provoqués l’infortune de l’Action française la fraternité qui existe, en dépit des protestations de haine, entre les
3561 xiste, en dépit des protestations de haine, entre les athées de l’antidémocratisme et les athées du Capitalisme quand il es
3562 t des protestations de haine, entre les athées de l’ antidémocratisme et les athées du Capitalisme quand il est conscient d
3563 haine, entre les athées de l’antidémocratisme et les athées du Capitalisme quand il est conscient de soi-même, et les athé
3564 apitalisme quand il est conscient de soi-même, et les athées du Socialisme et du Communisme. Tous ceux-là travaillent à l’a
3565 isme et du Communisme. Tous ceux-là travaillent à l’ achèvement d’un certain monde moderne, merveilleuse mécanique sévère e
3566 use mécanique sévère et dénuée de tout secours de l’ Esprit. Mais un jour viendra où les hommes se révolteront contre le jo
3567 tout secours de l’Esprit. Mais un jour viendra où les hommes se révolteront contre le joug atrocement positiviste des Maurr
3568 jour viendra où les hommes se révolteront contre le joug atrocement positiviste des Maurras et des Mussolini, des Lénine
3569 s et des Mussolini, des Lénine et des Ford. Alors les hommes hurleront un affreux besoin mystique. Vous réveillerez-vous po
3570 freux besoin mystique. Vous réveillerez-vous pour les désaltérer, dieux de l’Orient et de l’Occident ? » Certains cris qui
3571 us réveillerez-vous pour les désaltérer, dieux de l’ Orient et de l’Occident ? » Certains cris qui nous échappèrent n’avai
3572 vous pour les désaltérer, dieux de l’Orient et de l’ Occident ? » Certains cris qui nous échappèrent n’avaient pas d’autre
3573 e Chalgrin, Paris 16e. w. Rougemont Denis de, «  Les derniers jours », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-
64 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Adieu au lecteur (juillet 1927)
3574 Adieu au lecteur (juillet 1927)x Nous passons la main au central de Genève, fidèles à la tradition — en ceci au moins.
3575 llet 1927)x Nous passons la main au central de Genève , fidèles à la tradition — en ceci au moins. Nous nous retirons : et c
3576 s passons la main au central de Genève, fidèles à la tradition — en ceci au moins. Nous nous retirons : et ce n’est pas qu
3577 ue nous ayons brûlé toutes nos cartouches. Ni que l’ indignation provoquée sur tous les bancs par certains de nos articles
3578 rtouches. Ni que l’indignation provoquée sur tous les bancs par certains de nos articles nous épouvante. Notre retraite est
3579 nte. Notre retraite est toute « statutaire » — si l’ on ose dire. Elle nous permet donc de considérer la situation sans fiè
3580 ’on ose dire. Elle nous permet donc de considérer la situation sans fièvre, sans lamentations d’adieu.   On nous a parfois
3581 tés de fous (avec ou sans sourire). Nous sommes à l’ âge de nous en réjouir. On s’est beaucoup étonné de nous voir « si dif
3582 s voir « si différents » de nos aînés. Nous avons l’ énorme candeur de trouver ça naturel. On nous a fait des reproches con
3583 n nous a fait des reproches contradictoires. Nous les additionnons : ils s’annulent. Il reste à dire deux mots sur la parad
3584 s : ils s’annulent. Il reste à dire deux mots sur la paradoxale situation intellectuelle d’une revue d’étudiants comme la
3585 tion intellectuelle d’une revue d’étudiants comme la nôtre. D’un côté, en effet, on s’accorde pour trouver légèrement ridi
3586 ridicule un jeune homme qui recherche activement la Sagesse (« Ça n’est pas de votre âge ! ») ; de l’autre, on se scandal
3587 rces — ou bien de ces affirmations dont en vérité l’ on n’a pas à se préoccuper de prévoir les conséquences, puisqu’il n’en
3588 en vérité l’on n’a pas à se préoccuper de prévoir les conséquences, puisqu’il n’en est aucune qui ne soit connue d’avance e
3589 une qui ne soit connue d’avance et stérilisée par la loi, les mœurs et l’habitude. Nous n’avons aucun remords d’avoir déçu
3590 ne soit connue d’avance et stérilisée par la loi, les mœurs et l’habitude. Nous n’avons aucun remords d’avoir déçu cette ca
3591 e d’avance et stérilisée par la loi, les mœurs et l’ habitude. Nous n’avons aucun remords d’avoir déçu cette catégorie de l
3592 t pas encore admis que jeunesse = révolution Tous les malentendus viennent de là. Nous sommes assez sages et assez fous pou
3593 sez fous pour ne pas en gémir et pour en accepter les conséquences. Et puis, de temps à autre, voici que nous parvient un s
3594 quelques découvertes qui nous consolèrent de tout le reste.   Et maintenant voici Genève et son mystère. Car chaque année,
3595 nsolèrent de tout le reste.   Et maintenant voici Genève et son mystère. Car chaque année, renaissant des décombres où s’anéan
3596 année, renaissant des décombres où s’anéantirent l’ honneur et la fortune de ses derniers rédacteurs, notre Revue-phénix s
3597 ssant des décombres où s’anéantirent l’honneur et la fortune de ses derniers rédacteurs, notre Revue-phénix s’élance avec
3598 ction absolument imprévisible. Que nous apportera le Central de Genève ? Tout est possible : la guerre et la paix, la trad
3599 nt imprévisible. Que nous apportera le Central de Genève  ? Tout est possible : la guerre et la paix, la tradition, l’anarchie,
3600 ortera le Central de Genève ? Tout est possible : la guerre et la paix, la tradition, l’anarchie, l’ironie, le sentiment,
3601 tral de Genève ? Tout est possible : la guerre et la paix, la tradition, l’anarchie, l’ironie, le sentiment, un réveil des
3602 enève ? Tout est possible : la guerre et la paix, la tradition, l’anarchie, l’ironie, le sentiment, un réveil des vieux, M
3603 st possible : la guerre et la paix, la tradition, l’ anarchie, l’ironie, le sentiment, un réveil des vieux, Maurras, Lounat
3604 : la guerre et la paix, la tradition, l’anarchie, l’ ironie, le sentiment, un réveil des vieux, Maurras, Lounatcharsky, la
3605 e et la paix, la tradition, l’anarchie, l’ironie, le sentiment, un réveil des vieux, Maurras, Lounatcharsky, la SDN, et mê
3606 ent, un réveil des vieux, Maurras, Lounatcharsky, la SDN, et même Edmond Gillard, et même, et surtout, un miracle. Et puis
3607 eureux Jean… Et puis, en voilà assez pour ranimer la curiosité des plus blasés. Lecteur, fais confiance au Central de Genè
3608 lus blasés. Lecteur, fais confiance au Central de Genève . Souviens-toi de la grandeur de ses traditions et ne va pas ajouter à
3609 s confiance au Central de Genève. Souviens-toi de la grandeur de ses traditions et ne va pas ajouter à cette lourde charge
3610 itions et ne va pas ajouter à cette lourde charge le poids de nos péchés. Ils sont bien nôtres. Et nous y tenons, ah ! com
65 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jean-Louis Vaudoyer, Premières amours (août 1927)
3611 s nouvelles n’ont guère de commun entre elles que la forme : ce sont de lentes réminiscences, des évocations intérieures,
3612 iniscences, des évocations intérieures, — et dans l’ abandon de leurs méandres, peu à peu, se précisent les circonstances d
3613 bandon de leurs méandres, peu à peu, se précisent les circonstances d’une aventure ancienne. Entre hier et demain : Une fe
3614 suicidé pour une femme qu’ils ont aimé tous deux ( L’ Amie du Mort.) Ou bien c’est le récit d’un été de vacances, quand les
3615 nt aimé tous deux (L’Amie du Mort.) Ou bien c’est le récit d’un été de vacances, quand les premières inquiétudes du désir
3616 rieure aux deux autres, est une réussite rare par la justesse de l’observation autant que par la sympathie de l’auteur pou
3617 autres, est une réussite rare par la justesse de l’ observation autant que par la sympathie de l’auteur pour ses héros. In
3618 e par la justesse de l’observation autant que par la sympathie de l’auteur pour ses héros. Indulgence et regrets, un ton q
3619 e de l’observation autant que par la sympathie de l’ auteur pour ses héros. Indulgence et regrets, un ton qui permet le tac
3620 s héros. Indulgence et regrets, un ton qui permet le tact dans la hardiesse. On reste ravi de tant d’adresse sous un air d
3621 lgence et regrets, un ton qui permet le tact dans la hardiesse. On reste ravi de tant d’adresse sous un air de facilité qu
3622 sse sous un air de facilité qui serait presque de la nonchalance. M. Vaudoyer ressuscite ces adolescences avec une tendre
3623 objet qu’il en saisit sans mièvrerie ni vulgarité la grâce un peu trouble et l’insidieuse mélancolie. Un détail piqué adro
3624 mièvrerie ni vulgarité la grâce un peu trouble et l’ insidieuse mélancolie. Un détail piqué adroitement, papillon dont frém
3625 iqué adroitement, papillon dont frémissent encore les ailes intactes ; l’évocation toute nervalienne en sa nostalgie, de la
3626 illon dont frémissent encore les ailes intactes ; l’ évocation toute nervalienne en sa nostalgie, de la jeune étrangère don
3627 l’évocation toute nervalienne en sa nostalgie, de la jeune étrangère dont on rêve à 15 ans ; et voici ce je ne sais quoi,
3628 oici ce je ne sais quoi, ce délice furtif, ce que l’ auteur lui-même appelle « cette vague poésie involontaire, intermitten
3629 à ces œuvrettes une si exquise humanité : par lui le « charme » reprend quelques droits. an. Rougemont Denis de, « [Com
3630 s amours  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, août 1927, p. 244-245.
3631  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , août 1927, p. 244-245.
66 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Edmond Jaloux, Rainer Maria Rilke (décembre 1927)
3632 ériser tout lyrisme germanique, il faudra opposer l’ excellent petit livre d’Edmond Jaloux. C’est un recueil de divers arti
3633 eil de divers articles et essais, dont certains — le Message de Rilke — sont du meilleur Jaloux, de ce Jaloux qui sait par
3634 qu’il partage avec eux ce goût du rêve préféré à la vie, — à ce qu’on appelle la vie. Jaloux, qui a rencontré plusieurs f
3635 ût du rêve préféré à la vie, — à ce qu’on appelle la vie. Jaloux, qui a rencontré plusieurs fois Rilke, trace de lui un po
3636 hotographie morale, mais une sorte de synthèse de l’ homme et de l’homme dans son œuvre, qui est peut-être plus vraie que l
3637 rale, mais une sorte de synthèse de l’homme et de l’ homme dans son œuvre, qui est peut-être plus vraie que le vrai, je veu
3638 dans son œuvre, qui est peut-être plus vraie que le vrai, je veux dire, plus rilkienne que ne fut Rilke. Rilke y apparaît
3639 telles qu’on en découvre chez certaines femmes et l’ on y voit une préciosité sentimentale qui touche à la névrose ou bien
3640 n y voit une préciosité sentimentale qui touche à la névrose ou bien simplement une clairvoyance exceptionnelle, suivant q
3641 ment une clairvoyance exceptionnelle, suivant que l’ on juge au nom d’une science ou au nom de l’esprit. « Pour moi qui aim
3642 t que l’on juge au nom d’une science ou au nom de l’ esprit. « Pour moi qui aime plus que tout la poésie, écrit Jaloux, aus
3643 om de l’esprit. « Pour moi qui aime plus que tout la poésie, écrit Jaloux, aussitôt que je vis Rilke, je compris que cet u
3644 arce qu’ils possèdent déjà, au moins obscurément, le sens des réalités sur lesquelles s’opère l’expérience. On ne prouve l
3645 ment, le sens des réalités sur lesquelles s’opère l’ expérience. On ne prouve la religion qu’aux convertis — qui n’ont plus
3646 sur lesquelles s’opère l’expérience. On ne prouve la religion qu’aux convertis — qui n’ont plus besoin de preuves. Il rest
3647 celui-ci tend un merveilleux piège sentimental à la raison raisonnante. Et qu’il nous mène un peu plus loin que la sempit
3648 sonnante. Et qu’il nous mène un peu plus loin que la sempiternelle « stratégie littéraire », de gazetiers ; au cœur de ces
3649 s sujets qui paraît-il, ne sont pas d’actualité : la solitude, la maladie, la peur. ao. Rougemont Denis de, « [Compte r
3650 paraît-il, ne sont pas d’actualité : la solitude, la maladie, la peur. ao. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Edmond
3651 e sont pas d’actualité : la solitude, la maladie, la peur. ao. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Edmond Jaloux, Rain
3652 ia Rilke  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, décembre 1927, p. 787-788.
3653  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , décembre 1927, p. 787-788.
67 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Léon Bopp, Interférences (décembre 1927)
3654 ment il a écrit, sur commande, une Promenade dans le Midi. Récit alerte et familier (un brin pédant et un brin vulgaire pa
3655 nt une création littéraire. Bien sûr, c’est cela, le malaise d’écrire. Bopp est très intelligent. Et plein de verve, et pa
3656 une effusion « lyrique », histoire de n’avoir pas l’ air dupe. Mais il a des façons parfois bien désobligeantes de voir jus
3657 scientifique, vis-à-vis du phénomène littéraire. La « Promenade » du héros de Bopp est une sorte de pensum. Cela rend peu
3658 oins convaincantes certaines de ses remarques sur l’ inspiration. D’autre part la simplicité de l’objet était nécessaire à
3659 de ses remarques sur l’inspiration. D’autre part la simplicité de l’objet était nécessaire à la sécurité de cette sorte d
3660 sur l’inspiration. D’autre part la simplicité de l’ objet était nécessaire à la sécurité de cette sorte d’analyse, — encor
3661 part la simplicité de l’objet était nécessaire à la sécurité de cette sorte d’analyse, — encore que Bopp ait prouvé dans
3662 facilité même est une réussite. Léon Bopp, c’est le combat d’un tempérament avec l’esprit de géométrie. Un scientisme ass
3663 Léon Bopp, c’est le combat d’un tempérament avec l’ esprit de géométrie. Un scientisme assez insolent et les joyeuses révo
3664 rit de géométrie. Un scientisme assez insolent et les joyeuses révoltes de sa verve « interfèrent » en lui. Et aussi (presq
3665 férences  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, décembre 1927, p. 791.
3666  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , décembre 1927, p. 791.
68 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Princesse Bibesco, Catherine-Paris (janvier 1928)
3667 928)aq C’est un livre sympathique ; et il vaut la peine de le dire car la chose n’est pas si fréquente dans la producti
3668 est un livre sympathique ; et il vaut la peine de le dire car la chose n’est pas si fréquente dans la production actuelle.
3669 sympathique ; et il vaut la peine de le dire car la chose n’est pas si fréquente dans la production actuelle. On retrouve
3670 le dire car la chose n’est pas si fréquente dans la production actuelle. On retrouve aux premiers chapitres de Catherine-
3671 -Paris cette magie des sensations et des rêves de l’ enfance et cette féminité du sentiment, du tour de pensée même, qui fa
3672 opos. Mais dans ce roman, il n’y a plus seulement la femme, avec le miracle perpétuel de sa sensibilité. Il y a encore la
3673 ce roman, il n’y a plus seulement la femme, avec le miracle perpétuel de sa sensibilité. Il y a encore la princesse, le t
3674 iracle perpétuel de sa sensibilité. Il y a encore la princesse, le témoin intelligent et un peu ironique des cours d’Europ
3675 el de sa sensibilité. Il y a encore la princesse, le témoin intelligent et un peu ironique des cours d’Europe à la veille
3676 telligent et un peu ironique des cours d’Europe à la veille de la guerre. De cette espèce de collaboration résultent à la
3677 un peu ironique des cours d’Europe à la veille de la guerre. De cette espèce de collaboration résultent à la fois le défau
3678 cette espèce de collaboration résultent à la fois le défaut de composition du livre et sa richesse. L’enfance de Catherine
3679 le défaut de composition du livre et sa richesse. L’ enfance de Catherine à Paris est du roman pur ; la tournée des cours d
3680 L’enfance de Catherine à Paris est du roman pur ; la tournée des cours de l’Europe centrale, qu’elle subit comme jeune épo
3681 Paris est du roman pur ; la tournée des cours de l’ Europe centrale, qu’elle subit comme jeune épouse d’un comte polonais,
3682 i étonnent de la part d’une femme aussi femme que l’ auteur du Perroquet Vert. Mais là-dessus, le roman repart dans une tro
3683 e que l’auteur du Perroquet Vert. Mais là-dessus, le roman repart dans une troisième action (l’amour de Catherine pour un
3684 essus, le roman repart dans une troisième action ( l’ amour de Catherine pour un aviateur français) assez peu intéressante à
3685 téressante à vrai dire, parce qu’elle n’est pas à l’ échelle de ce qui la précède. Ces défaillances de la technique du roma
3686 re, parce qu’elle n’est pas à l’échelle de ce qui la précède. Ces défaillances de la technique du roman sont sauvées par u
3687 échelle de ce qui la précède. Ces défaillances de la technique du roman sont sauvées par un style brillant, plein de trouv
3688 mémoires. Mais si son début permet de croire que le Perroquet Vert ne restera pas une réussite isolée dans l’œuvre pureme
3689 quet Vert ne restera pas une réussite isolée dans l’ œuvre purement romanesque de la princesse Bibesco, Catherine-Paris ann
3690 ussite isolée dans l’œuvre purement romanesque de la princesse Bibesco, Catherine-Paris annonce par ailleurs un mémorialis
3691 once par ailleurs un mémorialiste captivant, dans la tradition d’un Ligne par exemple. aq. Rougemont Denis de, « [Compt
3692 ne-Paris  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, janvier 1928, p. 121-122.
3693  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , janvier 1928, p. 121-122.
69 1928, Foi et Vie, articles (1928–1977). Le péril Ford (février 1928)
3694 Le péril Ford (février 1928)a On a trop dit que notre époque est chao
3695 e est chaotique. Je crois bien, au contraire, que l’ histoire n’a pas connu de période où les directions d’une civilisation
3696 raire, que l’histoire n’a pas connu de période où les directions d’une civilisation apparaissent plus nettement. Un certain
3697 ou, pour mieux dire, une organisation générale de la vie mondiale. Toutes les forces du temps y concourent obscurément ; e
3698 organisation générale de la vie mondiale. Toutes les forces du temps y concourent obscurément ; et, pour peu que cela cont
3699 nt ; et, pour peu que cela continue, pour peu que la bourgeoisie intellectuelle persiste à jouer l’autruche aux yeux clos,
3700 ue la bourgeoisie intellectuelle persiste à jouer l’ autruche aux yeux clos, l’avènement de cette organisation toute-puissa
3701 tuelle persiste à jouer l’autruche aux yeux clos, l’ avènement de cette organisation toute-puissante n’est plus qu’une ques
3702 s encore. Ici et là, quelques cris s’élèvent dans le désert d’une époque déjà presque abandonnée par l’Esprit. À l’heure d
3703 e désert d’une époque déjà presque abandonnée par l’ Esprit. À l’heure de toucher aux buts que sa civilisation poursuit dep
3704 ne époque déjà presque abandonnée par l’Esprit. À l’ heure de toucher aux buts que sa civilisation poursuit depuis près de
3705 ivilisation poursuit depuis près de deux siècles, l’ Occidental est saisi d’un étrange malaise. Il soupçonne, par éclairs,
3706 ut-être dans ces buts une absurdité fondamentale. L’ infaillible progrès aurait-il fait fausse route ? Est-il temps encore
3707 ait-il fait fausse route ? Est-il temps encore de le détourner du désastre spirituel vers lequel il entraîne l’Occident ?
3708 ner du désastre spirituel vers lequel il entraîne l’ Occident ? Cris dans le désert. Déserts des villes fiévreuses où le fr
3709 el vers lequel il entraîne l’Occident ? Cris dans le désert. Déserts des villes fiévreuses où le fracas des machines couvr
3710 dans le désert. Déserts des villes fiévreuses où le fracas des machines couvre déjà la plainte humaine. Il y a ceux qui p
3711 fiévreuses où le fracas des machines couvre déjà la plainte humaine. Il y a ceux qui pleurent le passé et ceux qui prophé
3712 déjà la plainte humaine. Il y a ceux qui pleurent le passé et ceux qui prophétisent, ceux qui jettent une imprécation stér
3713 tent une imprécation stérile et magnifique contre l’ époque et ceux qui cherchent à l’oublier dans le rêve, dans l’utopie,
3714 agnifique contre l’époque et ceux qui cherchent à l’ oublier dans le rêve, dans l’utopie, dans une belle doctrine… Il faudr
3715 e l’époque et ceux qui cherchent à l’oublier dans le rêve, dans l’utopie, dans une belle doctrine… Il faudrait d’abord pre
3716 ceux qui cherchent à l’oublier dans le rêve, dans l’ utopie, dans une belle doctrine… Il faudrait d’abord prendre conscienc
3717 ous, dans cette complaisance générale à proclamer le désordre du temps. On a peur de certaines évidences, on préfère affir
3718 n préfère affirmer que tout est incompréhensible. L’ homme moderne recule devant l’évidence de la banqueroute prochaine de
3719 t incompréhensible. L’homme moderne recule devant l’ évidence de la banqueroute prochaine de sa civilisation. Il répugne à
3720 ible. L’homme moderne recule devant l’évidence de la banqueroute prochaine de sa civilisation. Il répugne à admettre qu’un
3721 rder autour de nous et d’en croire nos yeux. I. L’ homme qui a réussi Je prends Henry Ford comme un symbole du monde m
3722 Henry Ford comme un symbole du monde moderne, et le meilleur, parce que personne ne s’est approché plus que lui du type i
3723 e ne s’est approché plus que lui du type idéal de l’ industriel et du capitaliste. Le succès immense de ses livres1, sa pop
3724 du type idéal de l’industriel et du capitaliste. Le succès immense de ses livres1, sa popularité universelle sont signes
3725 ivres1, sa popularité universelle sont signes que l’ époque a senti en lui son incarnation la plus parfaite. Qu’on ne m’acc
3726 ignes que l’époque a senti en lui son incarnation la plus parfaite. Qu’on ne m’accuse donc pas de caricaturer l’objet de m
3727 rfaite. Qu’on ne m’accuse donc pas de caricaturer l’ objet de ma critique pour faciliter l’accusation : je prends pour la j
3728 caricaturer l’objet de ma critique pour faciliter l’ accusation : je prends pour la juger ce que l’époque m’offre de mieux
3729 ique pour faciliter l’accusation : je prends pour la juger ce que l’époque m’offre de mieux réussi. Voici la vie de Ford,
3730 ter l’accusation : je prends pour la juger ce que l’ époque m’offre de mieux réussi. Voici la vie de Ford, telle qu’il la r
3731 er ce que l’époque m’offre de mieux réussi. Voici la vie de Ford, telle qu’il la raconte dans Ma vie et mon œuvre. Il naît
3732 e mieux réussi. Voici la vie de Ford, telle qu’il la raconte dans Ma vie et mon œuvre. Il naît fils de paysan. Il passe so
3733 des outils qu’il joue encore à présent », dit‑il. Le plus mémorable événement de ces années de jeunesse, son « chemin de D
3734 che au juste quelle dose d’« humour » il met dans l’ expression), c’est la rencontre d’une locomotive routière. « Depuis l’
3735 ose d’« humour » il met dans l’expression), c’est la rencontre d’une locomotive routière. « Depuis l’instant où, enfant de
3736 la rencontre d’une locomotive routière. « Depuis l’ instant où, enfant de 12 ans, j’aperçus cette machine de route, jusqu’
3737 a été de construire une bonne machine routière. » Les étapes de sa jeunesse sont : la construction d’un moteur à vapeur, pu
3738 hine routière. » Les étapes de sa jeunesse sont : la construction d’un moteur à vapeur, puis d’un moteur à explosion, enfi
3739 simple mécanicien chez Edison. Il fonde tôt après la Société des automobiles Ford, « et commence à réaliser son rêve, le t
3740 omobiles Ford, « et commence à réaliser son rêve, le type unique d’automobile utilitaire »2. Dès lors, c’est une suite de
3741 . Dès lors, c’est une suite de chiffres indiquant le progrès de sa production, d’année en année. On pourrait ajouter à ces
3742 ur lui qu’un résultat secondaire de son activité. Le but de sa vie n’a jamais été de s’enrichir. Son « rêve » était autre,
3743 s été de s’enrichir. Son « rêve » était autre, il l’ a réalisé comme il est donné à peu d’hommes de le faire : 7000 voiture
3744 l’a réalisé comme il est donné à peu d’hommes de le faire : 7000 voitures par jour, et la possibilité d’augmenter encore
3745 d’hommes de le faire : 7000 voitures par jour, et la possibilité d’augmenter encore cette production. Ford est le plus pui
3746 ité d’augmenter encore cette production. Ford est le plus puissant industriel du monde ; le plus riche, au point qu’il peu
3747 . Ford est le plus puissant industriel du monde ; le plus riche, au point qu’il peut parler d’égal à égal avec beaucoup d’
3748 peut parler d’égal à égal avec beaucoup d’États ; le plus parfait aussi. Son succès sans précédent le met à l’abri de tout
3749 le plus parfait aussi. Son succès sans précédent le met à l’abri de toutes les attaques, du point de vue technique. L’org
3750 parfait aussi. Son succès sans précédent le met à l’ abri de toutes les attaques, du point de vue technique. L’organisation
3751 n succès sans précédent le met à l’abri de toutes les attaques, du point de vue technique. L’organisation de ses usines, de
3752 e toutes les attaques, du point de vue technique. L’ organisation de ses usines, des salaires, des conditions de travail et
3753 et du paupérisme. C’est un résultat qu’on n’a pas le droit humainement de sous-estimer. Les griefs que les socialistes fon
3754 ’on n’a pas le droit humainement de sous-estimer. Les griefs que les socialistes font aux capitalistes européens ne sauraie
3755 droit humainement de sous-estimer. Les griefs que les socialistes font aux capitalistes européens ne sauraient l’atteindre.
3756 stes font aux capitalistes européens ne sauraient l’ atteindre. Au contraire, il a résolu la question sociale d’une façon q
3757 sauraient l’atteindre. Au contraire, il a résolu la question sociale d’une façon qui ne devrait pas déplaire aux doctrina
3758 mplète du monde, seule méthode capable d’empêcher les abus des capitalistes. Du même coup, en supprimant l’esclavage financ
3759 bus des capitalistes. Du même coup, en supprimant l’ esclavage financier de l’ouvrier, il supprime la principale cause avou
3760 même coup, en supprimant l’esclavage financier de l’ ouvrier, il supprime la principale cause avouée de la lutte des classe
3761 t l’esclavage financier de l’ouvrier, il supprime la principale cause avouée de la lutte des classes. Il se dégage de la l
3762 uvrier, il supprime la principale cause avouée de la lutte des classes. Il se dégage de la lecture de Ma vie et mon œuvre
3763 e avouée de la lutte des classes. Il se dégage de la lecture de Ma vie et mon œuvre une impression de netteté, de solidité
3764 pression de netteté, de solidité, de propreté. Si l’ on ajoute à cela le plaisir qu’on éprouve toujours au récit de succès
3765 , de solidité, de propreté. Si l’on ajoute à cela le plaisir qu’on éprouve toujours au récit de succès mirobolants, et le
3766 rouve toujours au récit de succès mirobolants, et le charme un peu facile mais fort goûté du grand public, de l’humour amé
3767 un peu facile mais fort goûté du grand public, de l’ humour américain, l’on comprendra sans peine la popularité mondiale de
3768 ort goûté du grand public, de l’humour américain, l’ on comprendra sans peine la popularité mondiale des « idées » d’Henry
3769 de l’humour américain, l’on comprendra sans peine la popularité mondiale des « idées » d’Henry Ford et des livres qui les
3770 iale des « idées » d’Henry Ford et des livres qui les répandent. L’on ne pourra qu’y applaudir, semble-t-il, en souhaitant
3771 s » d’Henry Ford et des livres qui les répandent. L’ on ne pourra qu’y applaudir, semble-t-il, en souhaitant que les indust
3772 ra qu’y applaudir, semble-t-il, en souhaitant que les industriels européens s’en inspirent toujours plus. Ford leur montre
3773 ns s’en inspirent toujours plus. Ford leur montre le chemin qu’ils seront bien obligés de prendre tôt ou tard. Il est préf
3774 e quelques chances encore de régler pacifiquement le conflit du capital et du travail. « Se fordiser ou mourir », écrivait
3775 vait récemment un économiste. Ford, perfection de l’ industriel, offre au monde moderne le premier exemple de son achèvemen
3776 exemple de son achèvement intégral. Il a atteint l’ objectif de la moderne civilisation occidentale. Voici donc venue l’he
3777 n achèvement intégral. Il a atteint l’objectif de la moderne civilisation occidentale. Voici donc venue l’heure de la juge
3778 oderne civilisation occidentale. Voici donc venue l’ heure de la juger. Le héros de l’époque, c’est l’homme qui a réussi. M
3779 lisation occidentale. Voici donc venue l’heure de la juger. Le héros de l’époque, c’est l’homme qui a réussi. Mais à quoi 
3780 ccidentale. Voici donc venue l’heure de la juger. Le héros de l’époque, c’est l’homme qui a réussi. Mais à quoi ? C’est la
3781 Voici donc venue l’heure de la juger. Le héros de l’ époque, c’est l’homme qui a réussi. Mais à quoi ? C’est la plus grave
3782 l’heure de la juger. Le héros de l’époque, c’est l’ homme qui a réussi. Mais à quoi ? C’est la plus grave question qu’on p
3783 , c’est l’homme qui a réussi. Mais à quoi ? C’est la plus grave question qu’on puisse poser à notre temps. II. M. Ford
3784 ser à notre temps. II. M. Ford a ses idées, ou la philosophie de ceux qui n’en veulent pas Nous avons dit tout à l’h
3785 eux qui n’en veulent pas Nous avons dit tout à l’ heure quel fut le but de la vie de Ford, sa « grande et constante ambi
3786 ent pas Nous avons dit tout à l’heure quel fut le but de la vie de Ford, sa « grande et constante ambition ». Il semble
3787 Nous avons dit tout à l’heure quel fut le but de la vie de Ford, sa « grande et constante ambition ». Il semble que toute
3788 éthode, technique — soit conditionnée jusque dans le détail par une idée fixe primitive. Considérons-la sous cet angle. Il
3789 e détail par une idée fixe primitive. Considérons- la sous cet angle. Il y a d’abord la vision de l’auto routière : naissan
3790 ve. Considérons-la sous cet angle. Il y a d’abord la vision de l’auto routière : naissance de sa passion froide et tenace.
3791 ns-la sous cet angle. Il y a d’abord la vision de l’ auto routière : naissance de sa passion froide et tenace. Il s’efforce
3792 sion froide et tenace. Il s’efforce d’en réaliser l’ objet par ses propres moyens, à un exemplaire ; puis, il fonde une usi
3793 plaire ; puis, il fonde une usine pour multiplier les réalisations. Bientôt, élargissant son ambition, il conçoit ce mythe
3794 on, il conçoit ce mythe extravagant du bonheur de l’ humanité par la possession d’automobiles Ford. Et, comme il est très i
3795 ce mythe extravagant du bonheur de l’humanité par la possession d’automobiles Ford. Et, comme il est très intelligent, il
3796 l est très intelligent, il a vite fait de démêler les conditions les plus rationnelles de la production, avec cette netteté
3797 lligent, il a vite fait de démêler les conditions les plus rationnelles de la production, avec cette netteté et cette décis
3798 e démêler les conditions les plus rationnelles de la production, avec cette netteté et cette décision qu’une passion conte
3799 te décision qu’une passion contenue peut donner à l’ homme d’action. Enfin, le voici en mesure de produire des quantités én
3800 n contenue peut donner à l’homme d’action. Enfin, le voici en mesure de produire des quantités énormes d’autos. Seulement,
3801 nt, pour pouvoir continuer, il faut vendre ; dans l’ intérêt de la production, il faut créer la consommation. La réclame s’
3802 oir continuer, il faut vendre ; dans l’intérêt de la production, il faut créer la consommation. La réclame s’en charge. Pa
3803  ; dans l’intérêt de la production, il faut créer la consommation. La réclame s’en charge. Par le procédé très simple de l
3804 de la production, il faut créer la consommation. La réclame s’en charge. Par le procédé très simple de la répétition, on
3805 réer la consommation. La réclame s’en charge. Par le procédé très simple de la répétition, on fait croire aux gens qu’ils
3806 éclame s’en charge. Par le procédé très simple de la répétition, on fait croire aux gens qu’ils ne peuvent plus vivre heur
3807 ls ne peuvent plus vivre heureux sans auto. Voilà l’ affaire lancée. La passion de Ford se donne libre cours. Il ne s’agit
3808 vivre heureux sans auto. Voilà l’affaire lancée. La passion de Ford se donne libre cours. Il ne s’agit plus maintenant qu
3809 À chaque page de ses livres, on pourrait relever les sophismes plus ou moins conscients par lesquels il prétend ramener le
3810 moins conscients par lesquels il prétend ramener le bénéfice de la production à celui du consommateur. Prenons cette peti
3811 ts par lesquels il prétend ramener le bénéfice de la production à celui du consommateur. Prenons cette petite phrase qui n
3812 i n’a l’air de rien : « Nul ne contestera que, si l’ on abaisse suffisamment les prix, on ne trouve toujours des clients, q
3813 l ne contestera que, si l’on abaisse suffisamment les prix, on ne trouve toujours des clients, quel que soit l’état du marc
3814 on ne trouve toujours des clients, quel que soit l’ état du marché. » Il semble que cela soit tout à l’avantage du client.
3815 ’état du marché. » Il semble que cela soit tout à l’ avantage du client. Mais cherchons un peu les causes réelles de cet ab
3816 out à l’avantage du client. Mais cherchons un peu les causes réelles de cet abaissement de prix — la concurrence n’étant bi
3817 u les causes réelles de cet abaissement de prix — la concurrence n’étant bien entendu qu’une cause accessoire. Dire que l’
3818 nt bien entendu qu’une cause accessoire. Dire que l’ état du marché est tel que le client n’achète plus, cela signifie parf
3819 accessoire. Dire que l’état du marché est tel que le client n’achète plus, cela signifie parfois que la marchandise est mo
3820 e client n’achète plus, cela signifie parfois que la marchandise est momentanément trop chère ; mais surtout que le besoin
3821 e est momentanément trop chère ; mais surtout que le besoin qu’on a de tel objet est satisfait ou a disparu. Il semble alo
3822 t est satisfait ou a disparu. Il semble alors que l’ industriel n’ait plus qu’à plier bagage. Mais c’est ici que Ford montr
3823 qu’à plier bagage. Mais c’est ici que Ford montre le bout de l’oreille, et que son but réel est la production pour elle-mê
3824 bagage. Mais c’est ici que Ford montre le bout de l’ oreille, et que son but réel est la production pour elle-même, non pas
3825 tre le bout de l’oreille, et que son but réel est la production pour elle-même, non pas le plaisir ou l’intérêt véritable
3826 ut réel est la production pour elle-même, non pas le plaisir ou l’intérêt véritable du client. Le besoin ayant disparu, la
3827 production pour elle-même, non pas le plaisir ou l’ intérêt véritable du client. Le besoin ayant disparu, la production de
3828 pas le plaisir ou l’intérêt véritable du client. Le besoin ayant disparu, la production devant se maintenir, il n’y a qu’
3829 rêt véritable du client. Le besoin ayant disparu, la production devant se maintenir, il n’y a qu’une solution : recréer le
3830 se maintenir, il n’y a qu’une solution : recréer le besoin. Pour cela, on abaisse les prix. Le client fait la comparaison
3831 lution : recréer le besoin. Pour cela, on abaisse les prix. Le client fait la comparaison. Il est impressionné par la baiss
3832 ecréer le besoin. Pour cela, on abaisse les prix. Le client fait la comparaison. Il est impressionné par la baisse, au poi
3833 n. Pour cela, on abaisse les prix. Le client fait la comparaison. Il est impressionné par la baisse, au point qu’il en oub
3834 ient fait la comparaison. Il est impressionné par la baisse, au point qu’il en oublie que cela ne l’intéresse plus réellem
3835 r la baisse, au point qu’il en oublie que cela ne l’ intéresse plus réellement. Il croit qu’il va gagner 5 francs en acheta
3836 acheté du tout. Autrement dit, il est trompé par la baisse. L’industriel comptait. La tromperie est préméditée. Et le sca
3837 tout. Autrement dit, il est trompé par la baisse. L’ industriel comptait. La tromperie est préméditée. Et le scandale, à mo
3838 est trompé par la baisse. L’industriel comptait. La tromperie est préméditée. Et le scandale, à mon sens, n’est pas que l
3839 ustriel comptait. La tromperie est préméditée. Et le scandale, à mon sens, n’est pas que l’industriel ait forcé (psycholog
3840 éditée. Et le scandale, à mon sens, n’est pas que l’ industriel ait forcé (psychologiquement) le client à faire une dépense
3841 as que l’industriel ait forcé (psychologiquement) le client à faire une dépense superflue ; le scandale est qu’il l’ait tr
3842 uement) le client à faire une dépense superflue ; le scandale est qu’il l’ait trompé sur ses véritables besoins. Car cela
3843 ire une dépense superflue ; le scandale est qu’il l’ ait trompé sur ses véritables besoins. Car cela va bien plus profond,
3844 régulation et d’alternances. Tel est ce sophisme, le paradoxe du bon marché. Celui de la réclame a même but, mêmes effets.
3845 ce sophisme, le paradoxe du bon marché. Celui de la réclame a même but, mêmes effets. Mais le plus grave est peut-être le
3846 elui de la réclame a même but, mêmes effets. Mais le plus grave est peut-être le sophisme du loisir. M. Guglielmo Ferrero
3847 t, mêmes effets. Mais le plus grave est peut-être le sophisme du loisir. M. Guglielmo Ferrero a fort bien montré, dans un
3848 ro a fort bien montré, dans un article intitulé «  Le grand paradoxe du monde moderne »3, ce qu’il y a de profondément anti
3849  »3, ce qu’il y a de profondément antihumain dans la conception fordienne de l’oisiveté. Ford a créé un second dimanche da
3850 dément antihumain dans la conception fordienne de l’ oisiveté. Ford a créé un second dimanche dans la semaine, « retouché l
3851 e l’oisiveté. Ford a créé un second dimanche dans la semaine, « retouché l’œuvre de la Création », comme dit Ferrero. Le b
3852 éé un second dimanche dans la semaine, « retouché l’ œuvre de la Création », comme dit Ferrero. Le bon peuple s’extasie. Il
3853 d dimanche dans la semaine, « retouché l’œuvre de la Création », comme dit Ferrero. Le bon peuple s’extasie. Il ne peut vo
3854 uché l’œuvre de la Création », comme dit Ferrero. Le bon peuple s’extasie. Il ne peut voir la duperie : ce jeu du chat et
3855 Ferrero. Le bon peuple s’extasie. Il ne peut voir la duperie : ce jeu du chat et de la souris ; si Ford relâche les ouvrie
3856 Il ne peut voir la duperie : ce jeu du chat et de la souris ; si Ford relâche les ouvriers et leur donne une apparence de
3857 ce jeu du chat et de la souris ; si Ford relâche les ouvriers et leur donne une apparence de liberté, c’est pour mieux les
3858 donne une apparence de liberté, c’est pour mieux les prendre dans son engrenage. L’emploi de leurs loisirs est prévu. Il e
3859 c’est pour mieux les prendre dans son engrenage. L’ emploi de leurs loisirs est prévu. Il est déterminé par la réclame, le
3860 de leurs loisirs est prévu. Il est déterminé par la réclame, les produits Ford qu’il faut user, etc. Il a pour but vérita
3861 isirs est prévu. Il est déterminé par la réclame, les produits Ford qu’il faut user, etc. Il a pour but véritable d’augment
3862 ut user, etc. Il a pour but véritable d’augmenter la consommation. Il rend plus complet l’esclavage de l’ouvrier, puisqu’i
3863 d’augmenter la consommation. Il rend plus complet l’ esclavage de l’ouvrier, puisqu’il englobe jusqu’à son repos dans le cy
3864 consommation. Il rend plus complet l’esclavage de l’ ouvrier, puisqu’il englobe jusqu’à son repos dans le cycle de la produ
3865 ouvrier, puisqu’il englobe jusqu’à son repos dans le cycle de la production. Cercle vicieux : plus la production s’intensi
3866 squ’il englobe jusqu’à son repos dans le cycle de la production. Cercle vicieux : plus la production s’intensifie, plus il
3867 le cycle de la production. Cercle vicieux : plus la production s’intensifie, plus il faut créer de besoins et de loisirs.
3868 plus il faut créer de besoins et de loisirs. Or, l’ industrie ne peut subsister qu’en progressant. Mais la nature humaine
3869 dustrie ne peut subsister qu’en progressant. Mais la nature humaine a des limites. Et le temps approche où elles seront at
3870 ressant. Mais la nature humaine a des limites. Et le temps approche où elles seront atteintes. On peut se demander jusqu’à
3871 qu’à quel point Ford est conscient des buts et de l’ avenir de son effort. Pour mon compte, je crois que l’idée fixe de pro
3872 enir de son effort. Pour mon compte, je crois que l’ idée fixe de produire peut très bien envahir un cerveau moderne au poi
3873 n’empêche pas notre industriel de philosopher sur les sujets les plus divers. Les aphorismes sont assez révélateurs de la m
3874 as notre industriel de philosopher sur les sujets les plus divers. Les aphorismes sont assez révélateurs de la mentalité ca
3875 el de philosopher sur les sujets les plus divers. Les aphorismes sont assez révélateurs de la mentalité capitaliste américa
3876 divers. Les aphorismes sont assez révélateurs de la mentalité capitaliste américaine. Voici, par exemple, une définition
3877 américaine. Voici, par exemple, une définition de la liberté : La liberté consiste à travailler pendant le temps convenab
3878 ici, par exemple, une définition de la liberté : La liberté consiste à travailler pendant le temps convenable et à gagner
3879 berté : La liberté consiste à travailler pendant le temps convenable et à gagner, par ce moyen, de quoi vivre convenablem
3880 ement tout en restant maître de régler à sa guise le détail de sa vie privée. Cette liberté particulière, et cent autres p
3881 e, et cent autres pareilles, composent, au total, la grande Liberté idéale et mettent de l’huile dans les rouages de la vi
3882 au total, la grande Liberté idéale et mettent de l’ huile dans les rouages de la vie quotidienne. Cette Liberté idéale ré
3883 grande Liberté idéale et mettent de l’huile dans les rouages de la vie quotidienne. Cette Liberté idéale réduite au rôle
3884 idéale et mettent de l’huile dans les rouages de la vie quotidienne. Cette Liberté idéale réduite au rôle d’huile dans l
3885 Cette Liberté idéale réduite au rôle d’huile dans les rouages, n’est-ce pas charmant et prometteur ? Et que dire de cette a
3886 ette admirable simplification : « Sur quoi repose la société ? Sur les hommes et les moyens grâce auxquels on cultive, on
3887 mplification : « Sur quoi repose la société ? Sur les hommes et les moyens grâce auxquels on cultive, on fabrique, on trans
3888 « Sur quoi repose la société ? Sur les hommes et les moyens grâce auxquels on cultive, on fabrique, on transporte. » « Tou
3889  » « Toute notre gloire est dans nos œuvres, dans le prix que nous payons à la terre la satisfaction de nos besoins. » — F
3890 t dans nos œuvres, dans le prix que nous payons à la terre la satisfaction de nos besoins. » — Ford se moque de la philoso
3891 s œuvres, dans le prix que nous payons à la terre la satisfaction de nos besoins. » — Ford se moque de la philosophie. Il
3892 satisfaction de nos besoins. » — Ford se moque de la philosophie. Il ne peut empêcher que son attitude ne porte un nom phi
3893 ations plus nettes encore : « Je ne considère pas les machines Ford simplement comme des machines. J’y vois la réalisation
3894 ines Ford simplement comme des machines. J’y vois la réalisation concrète d’une théorie qui tend à faire de ce monde un sé
3895 tend à faire de ce monde un séjour meilleur pour les hommes. » C’est le bonheur, le salut par l’auto. Philosophie réclame.
3896 monde un séjour meilleur pour les hommes. » C’est le bonheur, le salut par l’auto. Philosophie réclame. « Ce que j’ai à cœ
3897 our meilleur pour les hommes. » C’est le bonheur, le salut par l’auto. Philosophie réclame. « Ce que j’ai à cœur, aujourd’
3898 pour les hommes. » C’est le bonheur, le salut par l’ auto. Philosophie réclame. « Ce que j’ai à cœur, aujourd’hui, c’est de
3899 j’ai à cœur, aujourd’hui, c’est de démontrer que les idées mises en pratique chez nous ne concernent pas particulièrement
3900 ique chez nous ne concernent pas particulièrement les autos et les tracteurs, mais composent en quelque manière, un code un
3901 s ne concernent pas particulièrement les autos et les tracteurs, mais composent en quelque manière, un code universel ! » R
3902 e matérialiste ? Un seul doute effleure Ford vers la fin de son livre : Le problème de la production a été brillamment ré
3903 l doute effleure Ford vers la fin de son livre : Le problème de la production a été brillamment résolu… Mais nous nous ab
3904 e Ford vers la fin de son livre : Le problème de la production a été brillamment résolu… Mais nous nous absorbons trop da
3905 e pensons pas assez aux raisons que nous avons de le faire. Tout notre système de concurrence, tout notre effort de créati
3906 concurrence, tout notre effort de création, tout le jeu de nos facultés semblent dirigés uniquement vers la production ma
3907 de nos facultés semblent dirigés uniquement vers la production matérielle et vers la richesse qui en est le fruit. On ne
3908 uniquement vers la production matérielle et vers la richesse qui en est le fruit. On ne saurait mieux dire. Mais il faud
3909 duction matérielle et vers la richesse qui en est le fruit. On ne saurait mieux dire. Mais il faudrait en tirer des consé
3910 de technique. Il n’a pas senti qu’il touchait là le nœud vital du problème moderne. D’ailleurs, les idées générales de ce
3911 là le nœud vital du problème moderne. D’ailleurs, les idées générales de cette sorte sont rares dans son livre. En général,
3912 èmes techniques où son triomphe est facile. C’est le technicien parfait qui combat les techniciens imparfaits. Il ne se de
3913 st facile. C’est le technicien parfait qui combat les techniciens imparfaits. Il ne se demande jamais si la technique même
3914 echniciens imparfaits. Il ne se demande jamais si la technique même la plus perfectionnée mérite les sacrifices qu’elle ex
3915 its. Il ne se demande jamais si la technique même la plus perfectionnée mérite les sacrifices qu’elle exige de l’homme mod
3916 si la technique même la plus perfectionnée mérite les sacrifices qu’elle exige de l’homme moderne. Paradoxes plus ou moins
3917 fectionnée mérite les sacrifices qu’elle exige de l’ homme moderne. Paradoxes plus ou moins intéressés, optimisme d’homme à
3918 imisme d’homme à qui tout réussit, messianisme de la machine, méconnaissance glorieuse des forces spirituelles, le tout ag
3919 méconnaissance glorieuse des forces spirituelles, le tout agrémenté d’humour et exposé avec un simplisme qui emporte à cou
3920 t exposé avec un simplisme qui emporte à coup sûr l’ adhésion du gros public : telle est l’idéologie de celui que M. Cambon
3921 à coup sûr l’adhésion du gros public : telle est l’ idéologie de celui que M. Cambon, dans sa préface, égale aux plus gran
3922 sa préface, égale aux plus grands esprits de tous les temps. On me dira que Ford a mieux à faire que de philosopher. Je le
3923 a que Ford a mieux à faire que de philosopher. Je le veux. Mais si j’insiste un peu sur ses « idées », c’est pour souligne
3924 idées », c’est pour souligner ce hiatus étrange : l’ homme qu’on pourrait appeler le plus actif du monde, l’un de ceux qui
3925 e hiatus étrange : l’homme qu’on pourrait appeler le plus actif du monde, l’un de ceux qui influent le plus sur notre civi
3926 le plus actif du monde, l’un de ceux qui influent le plus sur notre civilisation, possède la philosophie la plus rudimenta
3927 influent le plus sur notre civilisation, possède la philosophie la plus rudimentaire. Le phénomène n’est pas nouveau en O
3928 us sur notre civilisation, possède la philosophie la plus rudimentaire. Le phénomène n’est pas nouveau en Occident, mais i
3929 ion, possède la philosophie la plus rudimentaire. Le phénomène n’est pas nouveau en Occident, mais il est ici tragiquement
3930 bien que notre temps ait prononcé définitivement le divorce de l’esprit et de l’action. III. Le fordisme contre l’Espr
3931 e temps ait prononcé définitivement le divorce de l’ esprit et de l’action. III. Le fordisme contre l’Esprit La formi
3932 noncé définitivement le divorce de l’esprit et de l’ action. III. Le fordisme contre l’Esprit La formidable erreur de
3933 nt le divorce de l’esprit et de l’action. III. Le fordisme contre l’Esprit La formidable erreur de la bourgeoisie mo
3934 esprit et de l’action. III. Le fordisme contre l’ Esprit La formidable erreur de la bourgeoisie moderne c’est de croi
3935 l’action. III. Le fordisme contre l’Esprit La formidable erreur de la bourgeoisie moderne c’est de croire que les c
3936 rdisme contre l’Esprit La formidable erreur de la bourgeoisie moderne c’est de croire que les choses pourront aller ain
3937 eur de la bourgeoisie moderne c’est de croire que les choses pourront aller ainsi longtemps encore. On se refuse à l’idée d
3938 ront aller ainsi longtemps encore. On se refuse à l’ idée d’une catastrophe, pourtant plus que probable, par crainte de se
3939 lus que probable, par crainte de se voir obligé à la révision des valeurs, la plus difficile et la plus grave : celle qu’o
3940 inte de se voir obligé à la révision des valeurs, la plus difficile et la plus grave : celle qu’on ne peut faire qu’au nom
3941 é à la révision des valeurs, la plus difficile et la plus grave : celle qu’on ne peut faire qu’au nom de l’Esprit et de se
3942 us grave : celle qu’on ne peut faire qu’au nom de l’ Esprit et de ses exigences. Mais le « rien de nouveau sous le soleil »
3943 e qu’au nom de l’Esprit et de ses exigences. Mais le « rien de nouveau sous le soleil » derrière lequel on se réfugie avec
3944 de ses exigences. Mais le « rien de nouveau sous le soleil » derrière lequel on se réfugie avec une paresse et une légère
3945 e avec une paresse et une légèreté inouïes, c’est le signe d’une complicité avec un état de choses funeste pour l’Esprit.
3946 ne complicité avec un état de choses funeste pour l’ Esprit. Si l’Esprit nous abandonne, c’est que nous avons voulu tenter
3947 avec un état de choses funeste pour l’Esprit. Si l’ Esprit nous abandonne, c’est que nous avons voulu tenter sans lui une
3948 e que nous pensions gratuite : nous avons cherché le bonheur dans le développement matériel, avec l’arrière-pensée sournoi
3949 ons gratuite : nous avons cherché le bonheur dans le développement matériel, avec l’arrière-pensée sournoise que, si cela
3950 é le bonheur dans le développement matériel, avec l’ arrière-pensée sournoise que, si cela ratait, on gardait toutes les au
3951 sournoise que, si cela ratait, on gardait toutes les autres chances. J’accorderai que le progrès matériel n’est pas mauvai
3952 rdait toutes les autres chances. J’accorderai que le progrès matériel n’est pas mauvais en soi. Mais par l’importance qu’i
3953 ogrès matériel n’est pas mauvais en soi. Mais par l’ importance qu’il a prise dans notre vie, il détourne la civilisation d
3954 ortance qu’il a prise dans notre vie, il détourne la civilisation de son but véritable : aller à l’Esprit, y conduire les
3955 ne la civilisation de son but véritable : aller à l’ Esprit, y conduire les peuples. Ainsi, détournant de l’essentiel une g
3956 son but véritable : aller à l’Esprit, y conduire les peuples. Ainsi, détournant de l’essentiel une grande part des forces
3957 rit, y conduire les peuples. Ainsi, détournant de l’ essentiel une grande part des forces humaines, il travaille contre l’E
3958 nde part des forces humaines, il travaille contre l’ Esprit. Rien n’est gratuit. Nous payons notre passion de posséder la m
3959 st gratuit. Nous payons notre passion de posséder la matière du prix de la seule possession véritable, la connaissance de
3960 s notre passion de posséder la matière du prix de la seule possession véritable, la connaissance de l’Esprit. C’est déjà u
3961 matière du prix de la seule possession véritable, la connaissance de l’Esprit. C’est déjà un fait d’expérience. Et qui n’e
3962 la seule possession véritable, la connaissance de l’ Esprit. C’est déjà un fait d’expérience. Et qui n’en pourrait citer un
3963 ple individuel ? Nous savons assez en quel mépris l’ homme d’affaires à l’américaine tient les choses de l’Esprit. Dans le
3964 savons assez en quel mépris l’homme d’affaires à l’ américaine tient les choses de l’Esprit. Dans le cas le plus favorable
3965 el mépris l’homme d’affaires à l’américaine tient les choses de l’Esprit. Dans le cas le plus favorable, « il se passera bi
3966 mme d’affaires à l’américaine tient les choses de l’ Esprit. Dans le cas le plus favorable, « il se passera bien de cette l
3967 à l’américaine tient les choses de l’Esprit. Dans le cas le plus favorable, « il se passera bien de cette littérature ». P
3968 ricaine tient les choses de l’Esprit. Dans le cas le plus favorable, « il se passera bien de cette littérature ». Plus tar
3969 symphonies, ou autres œuvres destinées à charmer les loisirs de personnes oisives et raffinées, réunies pour admirer mutue
3970 ement leur culture », dit Ford. Et tout est dit ! Le simplisme arrogant avec lequel, de nos jours, on tranche les grandes
3971 me arrogant avec lequel, de nos jours, on tranche les grandes questions humaines est une des manifestations les plus frappa
3972 des questions humaines est une des manifestations les plus frappantes de notre régression. Cette perte du sens de l’âme se
3973 antes de notre régression. Cette perte du sens de l’ âme se nomme bon sens américain. On en fait quelque chose de jovial et
3974 ophie. Mais, sans qu’on s’en doute, cela en prend la place. Les facultés de l’âme, inutilisées, s’atrophient. Pourvu, dit-
3975 s, sans qu’on s’en doute, cela en prend la place. Les facultés de l’âme, inutilisées, s’atrophient. Pourvu, dit-on, que sub
3976 en doute, cela en prend la place. Les facultés de l’ âme, inutilisées, s’atrophient. Pourvu, dit-on, que subsiste le peu de
3977 isées, s’atrophient. Pourvu, dit-on, que subsiste le peu de morale nécessaire aux affaires, tout ira bien. (On pense que l
3978 ssaire aux affaires, tout ira bien. (On pense que les formes de la morale peuvent exister sans leur substance religieuse.)
3979 aires, tout ira bien. (On pense que les formes de la morale peuvent exister sans leur substance religieuse.) L’homme moder
3980 peuvent exister sans leur substance religieuse.) L’ homme moderne manie les choses de l’âme avec une maladresse de barbare
3981 leur substance religieuse.) L’homme moderne manie les choses de l’âme avec une maladresse de barbare. IV. « En être » ou
3982 religieuse.) L’homme moderne manie les choses de l’ âme avec une maladresse de barbare. IV. « En être » ou ne pas en êt
3983 en être Une fois qu’on a compris à quel point le fordisme et l’Esprit sont incompatibles, le monde moderne impose ce d
3984 fois qu’on a compris à quel point le fordisme et l’ Esprit sont incompatibles, le monde moderne impose ce dilemme : « en ê
3985 point le fordisme et l’Esprit sont incompatibles, le monde moderne impose ce dilemme : « en être » ou ne pas en être, c’es
3986  » ou ne pas en être, c’est-à-dire se soumettre à la technique et s’abrutir spirituellement — ou se soumettre à l’Esprit,
3987 et s’abrutir spirituellement — ou se soumettre à l’ Esprit, et tomber presque fatalement dans un anarchisme stérile. 1° Ac
3988 atalement dans un anarchisme stérile. 1° Accepter la technique et ses conditions. Dans cette mécanique bien huilée, au mou
3989 nt si régulier qu’il en devient insensible et que la fatigue semble disparaître, l’homme s’abandonne à des lois géométriqu
3990 insensible et que la fatigue semble disparaître, l’ homme s’abandonne à des lois géométriques. Un jeu de chiffres d’horlog
3991 une fois pour toutes et qu’il sent immuable comme la mort le restitue au monde vers 5 heures du soir, dans la détresse des
3992 pour toutes et qu’il sent immuable comme la mort le restitue au monde vers 5 heures du soir, dans la détresse des dernièr
3993 le restitue au monde vers 5 heures du soir, dans la détresse des dernières sirènes. Au monde, c’est-à-dire à une nature d
3994 sirènes. Au monde, c’est-à-dire à une nature dont l’ usine lui a fait oublier jusqu’à l’existence, et à une liberté qu’il s
3995 ne nature dont l’usine lui a fait oublier jusqu’à l’ existence, et à une liberté qu’il s’empresse d’aliéner au profit de pl
3996 vec ses désirs réels, et dont il subit docilement l’ abstraite et commerciale nécessité. Ennui, fatigue, sommeil sans prièr
3997 il sans prière. Cela s’appelle encore vivre. Mais l’ homme qui était un membre vivant dans le corps de la Nature, lié par l
3998 vre. Mais l’homme qui était un membre vivant dans le corps de la Nature, lié par les liens les plus subtils et les plus pr
3999 homme qui était un membre vivant dans le corps de la Nature, lié par les liens les plus subtils et les plus profonds à tou
4000 membre vivant dans le corps de la Nature, lié par les liens les plus subtils et les plus profonds à tous les autres membres
4001 ant dans le corps de la Nature, lié par les liens les plus subtils et les plus profonds à tous les autres membres de la Nat
4002 la Nature, lié par les liens les plus subtils et les plus profonds à tous les autres membres de la Nature, choses, bêtes e
4003 iens les plus subtils et les plus profonds à tous les autres membres de la Nature, choses, bêtes et anges, — le voici deven
4004 et les plus profonds à tous les autres membres de la Nature, choses, bêtes et anges, — le voici devenu sourd à cette harmo
4005 s membres de la Nature, choses, bêtes et anges, —  le voici devenu sourd à cette harmonie universelle, incapable d’en compr
4006 e harmonie universelle, incapable d’en comprendre les correspondances divines et humaines, insensible même à sa déchéance,
4007 ines, insensible même à sa déchéance, abandonné à la lutte tragique et absurde des lois économiques et des exigences les p
4008 et absurde des lois économiques et des exigences les plus rudimentaires de son corps. Il a perdu le contact avec les chose
4009 s les plus rudimentaires de son corps. Il a perdu le contact avec les choses naturelles, et par là même, avec les surnatur
4010 entaires de son corps. Il a perdu le contact avec les choses naturelles, et par là même, avec les surnaturelles. Il en ress
4011 avec les choses naturelles, et par là même, avec les surnaturelles. Il en ressent une vague et intermittente détresse, — q
4012 ntermittente détresse, — qu’il met d’ailleurs sur le compte de sa fatigue. Neurasthénie. La conquête du confort matériel l
4013 lleurs sur le compte de sa fatigue. Neurasthénie. La conquête du confort matériel l’a laissé oublier les valeurs de l’espr
4014 ue. Neurasthénie. La conquête du confort matériel l’ a laissé oublier les valeurs de l’esprit au point qu’il n’éprouve plus
4015 a conquête du confort matériel l’a laissé oublier les valeurs de l’esprit au point qu’il n’éprouve plus même cette carence 
4016 onfort matériel l’a laissé oublier les valeurs de l’ esprit au point qu’il n’éprouve plus même cette carence ; seulement, p
4017 térielles, il a laissé se détendre, ou il a cassé les ressorts de sa joie : l’effort libre et généreux, le sentiment d’avoi
4018 détendre, ou il a cassé les ressorts de sa joie : l’ effort libre et généreux, le sentiment d’avoir inventé ou compris par
4019 ressorts de sa joie : l’effort libre et généreux, le sentiment d’avoir inventé ou compris par soi-même, la liberté et une
4020 entiment d’avoir inventé ou compris par soi-même, la liberté et une certaine durée normale et capricieuse dans le plaisir,
4021 et une certaine durée normale et capricieuse dans le plaisir, la conscience de ses besoins et de ses buts propres, humains
4022 ine durée normale et capricieuse dans le plaisir, la conscience de ses besoins et de ses buts propres, humains et divins.
4023 s loisirs. Ford lui a donné une auto pour admirer la nature entre 17 et 19 heures : vraiment, il ne lui manque plus rien —
4024 ures : vraiment, il ne lui manque plus rien — que l’ envie. Mauvais travail. Il a perdu le sens religieux, cosmique, de l’e
4025 s rien — que l’envie. Mauvais travail. Il a perdu le sens religieux, cosmique, de l’effort humain. Il ne peut plus situer
4026 avail. Il a perdu le sens religieux, cosmique, de l’ effort humain. Il ne peut plus situer son effort individuel dans le mo
4027 Il ne peut plus situer son effort individuel dans le monde, lui attribuer sa véritable valeur. Il sent obscurément que son
4028 t obscurément que son travail est antinaturel. Il le méprise ou le subit, mais, jusque dans son repos, il en est l’esclave
4029 que son travail est antinaturel. Il le méprise ou le subit, mais, jusque dans son repos, il en est l’esclave. Pour s’être
4030 le subit, mais, jusque dans son repos, il en est l’ esclave. Pour s’être exclu lui-même de l’ordre de la nature, il est co
4031 l en est l’esclave. Pour s’être exclu lui-même de l’ ordre de la nature, il est condamné à ne plus saisir que des rapports
4032 esclave. Pour s’être exclu lui-même de l’ordre de la nature, il est condamné à ne plus saisir que des rapports abstraits e
4033 à ne plus saisir que des rapports abstraits entre les choses. Il ne comprend presque plus rien à l’Univers. Par la techniqu
4034 re les choses. Il ne comprend presque plus rien à l’ Univers. Par la technique, l’Occidental a prétendu maîtriser la matièr
4035 Il ne comprend presque plus rien à l’Univers. Par la technique, l’Occidental a prétendu maîtriser la matière et parvenir à
4036 presque plus rien à l’Univers. Par la technique, l’ Occidental a prétendu maîtriser la matière et parvenir à une liberté p
4037 r la technique, l’Occidental a prétendu maîtriser la matière et parvenir à une liberté plus haute. Or, la technique a révé
4038 matière et parvenir à une liberté plus haute. Or, la technique a révélé des exigences telles que l’Esprit ne peut les supp
4039 r, la technique a révélé des exigences telles que l’ Esprit ne peut les supporter. Il abandonne donc la place, mais c’est p
4040 révélé des exigences telles que l’Esprit ne peut les supporter. Il abandonne donc la place, mais c’est pourtant lui seul q
4041 l’Esprit ne peut les supporter. Il abandonne donc la place, mais c’est pourtant lui seul qui nous permettrait de jouir de
4042 l qui nous permettrait de jouir de notre liberté. La victoire mécanicienne est une victoire à la Pyrrhus. Elle nous donne
4043 erté. La victoire mécanicienne est une victoire à la Pyrrhus. Elle nous donne une liberté dont nous ne sommes plus dignes.
4044 dont nous ne sommes plus dignes. Nous perdons, en l’ acquérant, par l’effort de l’acquérir, les forces mêmes qui nous la fi
4045 es plus dignes. Nous perdons, en l’acquérant, par l’ effort de l’acquérir, les forces mêmes qui nous la firent désirer. 2°
4046 es. Nous perdons, en l’acquérant, par l’effort de l’ acquérir, les forces mêmes qui nous la firent désirer. 2° Accepter l’
4047 dons, en l’acquérant, par l’effort de l’acquérir, les forces mêmes qui nous la firent désirer. 2° Accepter l’esprit, et se
4048 l’effort de l’acquérir, les forces mêmes qui nous la firent désirer. 2° Accepter l’esprit, et ses conditions. Je dis que
4049 es mêmes qui nous la firent désirer. 2° Accepter l’ esprit, et ses conditions. Je dis que les êtres encore doués de quelqu
4050 Accepter l’esprit, et ses conditions. Je dis que les êtres encore doués de quelque sensibilité spirituelle deviennent par
4051 de quelque sensibilité spirituelle deviennent par le seul fait de rester eux-mêmes dans un monde fordisé, des anarchistes.
4052 mêmes dans un monde fordisé, des anarchistes. Car l’ Esprit n’est pas un luxe, n’est pas une faculté destinée à amuser nos
4053 s exigences sont en contradiction avec celles que le développement de la technique impose au monde moderne. Ces êtres, d’u
4054 contradiction avec celles que le développement de la technique impose au monde moderne. Ces êtres, d’une espèce de plus en
4055 en plus rare, qui savent encore quelque chose de la vie profonde, qui voient encore des vérités invisibles, qui gardent,
4056 t considèrent comme un « cas » très spécial, — on les écarte des engrenages où ils risqueraient de faire grain de sable. Il
4057 . Ils se réfugient dans ce qu’on pourrait appeler les classes privilégiées de l’esprit : fortunes oisives ou misères sans e
4058 u’on pourrait appeler les classes privilégiées de l’ esprit : fortunes oisives ou misères sans espoir. On en rencontre enco
4059 misères sans espoir. On en rencontre encore parmi les jeunes gens, jusqu’au jour où, comme on dit, sans doute par ironie, «
4060 u jour où, comme on dit, sans doute par ironie, «  la vie les prend ». Irréguliers aux yeux du monde ; la proie d’on ne sai
4061 où, comme on dit, sans doute par ironie, « la vie les prend ». Irréguliers aux yeux du monde ; la proie d’on ne sait quelle
4062 vie les prend ». Irréguliers aux yeux du monde ; la proie d’on ne sait quelles forces occultes sans doute dangereuses, pu
4063 ces occultes sans doute dangereuses, puisqu’elles les rendent inutilisables dans les rouages de la vie moderne. Le triomphe
4064 uses, puisqu’elles les rendent inutilisables dans les rouages de la vie moderne. Le triomphe de Ford réduira l’Esprit à dev
4065 les les rendent inutilisables dans les rouages de la vie moderne. Le triomphe de Ford réduira l’Esprit à devenir l’apanage
4066 inutilisables dans les rouages de la vie moderne. Le triomphe de Ford réduira l’Esprit à devenir l’apanage d’une sorte de
4067 es de la vie moderne. Le triomphe de Ford réduira l’ Esprit à devenir l’apanage d’une sorte de franc-maçonnerie de quelques
4068 e. Le triomphe de Ford réduira l’Esprit à devenir l’ apanage d’une sorte de franc-maçonnerie de quelques centaines d’indivi
4069 a bientôt traquée avec la dernière rigueur : avec la rigueur de la nécessité — puisqu’elle est inutile au grand dessein ma
4070 uée avec la dernière rigueur : avec la rigueur de la nécessité — puisqu’elle est inutile au grand dessein matérialiste de
4071 elle est inutile au grand dessein matérialiste de l’ Occident. La logique, parlant par la bouche de Ford : « Inutile, donc
4072 tile au grand dessein matérialiste de l’Occident. La logique, parlant par la bouche de Ford : « Inutile, donc à détruire. 
4073 térialiste de l’Occident. La logique, parlant par la bouche de Ford : « Inutile, donc à détruire. » Ford a raison, une foi
4074 e ? « Vous ne pouvez servir Dieu et Mammon », dit l’ Écriture. ⁂ Je ne pense pas qu’une attitude réactionnaire qui consist
4075 tionnaire qui consisterait à vouloir en revenir à la période préindustrielle soit autre chose qu’une échappatoire utopique
4076 uts — si bas soient-ils — d’une civilisation sous le poids de laquelle nous risquons de périr. Il se prépare déjà des révo
4077 isme exaspéré, devenu presque fou dans sa prison. Les intellectuels d’aujourd’hui ont une tâche pressante : chercher s’il e
4078 le d’échapper au fatal dilemme. Premiers pas vers la solution : l’existence du dilemme. Second pas : en poser les termes a
4079 au fatal dilemme. Premiers pas vers la solution : l’ existence du dilemme. Second pas : en poser les termes avec netteté et
4080 n : l’existence du dilemme. Second pas : en poser les termes avec netteté et courage. Pour le reste, je pense que c’est une
4081 en poser les termes avec netteté et courage. Pour le reste, je pense que c’est une question de foi. 1. Une enquête fait
4082 st une question de foi. 1. Une enquête faite à Genève a révélé que les livres les plus lus du grand public sont Ma vie et m
4083 oi. 1. Une enquête faite à Genève a révélé que les livres les plus lus du grand public sont Ma vie et mon œuvre, de Ford
4084 ne enquête faite à Genève a révélé que les livres les plus lus du grand public sont Ma vie et mon œuvre, de Ford et Mon cur
4085 ont Ma vie et mon œuvre, de Ford et Mon curé chez les riches, de Clément Vautel. Dans les pays de langue allemande, son suc
4086 Mon curé chez les riches, de Clément Vautel. Dans les pays de langue allemande, son succès est encore plus grand, et de mei
4087 rand, et de meilleure qualité. Je ne parle pas de l’ Amérique. 2. Victor Cambon, préface à Henry Ford, Ma vie et mon œuvre
4088 rd, Ma vie et mon œuvre, Paris, Payot, 1925. 3. L’ Illustration, 20 novembre 1926. 4. Ici et là, la révolte perce : « Ju
4089 L’Illustration, 20 novembre 1926. 4. Ici et là, la révolte perce : « Jugendbewegung » en Allemagne ; surréalisme en Fran
4090 ée mystique en Russie. a. Rougemont Denis de, «  Le péril Ford », Foi et Vie, Paris, février 1928, p. 189-202.
70 1928, Articles divers (1924–1930). Un soir à Vienne avec Gérard (24 mars 1928)
4091 n étoile nervalienne. Je vins à Vienne pour fuir l’ Amérique. Mais les Viennois avaient fui dans les opérettes de Strauss,
4092 nne. Je vins à Vienne pour fuir l’Amérique. Mais les Viennois avaient fui dans les opérettes de Strauss, qu’on ne trouve p
4093 ir l’Amérique. Mais les Viennois avaient fui dans les opérettes de Strauss, qu’on ne trouve plus nulle part. Dans les danci
4094 de Strauss, qu’on ne trouve plus nulle part. Dans les dancings, un peuple de fêtards modérés, Juifs et ressortissants de la
4095 le de fêtards modérés, Juifs et ressortissants de la Petite-Entente, applaudissait chaque soir entre deux airs anglais Le
4096 applaudissait chaque soir entre deux airs anglais Le Beau Danube bleu, en commémoration polie d’un passé imaginaire, ou pe
4097 ntissait cette Vienne tout occupée à ressembler à l’ idée qu’on s’en fait. Le Ring, trop large, ouvert au vent glacial, cré
4098 ut occupée à ressembler à l’idée qu’on s’en fait. Le Ring, trop large, ouvert au vent glacial, crée autour du centre de la
4099 ouvert au vent glacial, crée autour du centre de la ville une insécurité qui fait songer à la Russie et au sifflement des
4100 ntre de la ville une insécurité qui fait songer à la Russie et au sifflement des balles perdues d’une révolution. Sept heu
4101 s perdues d’une révolution. Sept heures du soir : le moment était venu d’arrêter le plan de la soirée, et cette promenade
4102 t heures du soir : le moment était venu d’arrêter le plan de la soirée, et cette promenade où il y avait juste assez de pa
4103 soir : le moment était venu d’arrêter le plan de la soirée, et cette promenade où il y avait juste assez de passants pour
4104 où il y avait juste assez de passants pour qu’on la sentît déserte ne me proposait qu’une frileuse nostalgie. Mais qui fa
4105 d’intensité, un état d’âme crée une situation qui l’ exprime — bien qu’on pense généralement le contraire. Il est très vrai
4106 ion qui l’exprime — bien qu’on pense généralement le contraire. Il est très vrai que les notions réaliste et idéaliste du
4107 e généralement le contraire. Il est très vrai que les notions réaliste et idéaliste du monde ne sont séparées que par un lé
4108 e ne sont séparées que par un léger décalage dans la chronologie de nos sentiments et de nos actes. Donc, n’ayant pas reno
4109 onduit, par une sorte de compromis sentimental, à l’ Opéra où l’on donnait les Contes d’Hoffmann. Je comprends aujourd’hui
4110 une sorte de compromis sentimental, à l’Opéra où l’ on donnait les Contes d’Hoffmann. Je comprends aujourd’hui le lien qui
4111 compromis sentimental, à l’Opéra où l’on donnait les Contes d’Hoffmann. Je comprends aujourd’hui le lien qui unissait dans
4112 t les Contes d’Hoffmann. Je comprends aujourd’hui le lien qui unissait dans mon esprit Vienne et Hoffmann : c’était le sou
4113 sait dans mon esprit Vienne et Hoffmann : c’était le souvenir de Gérard de Nerval. Mais je pense que je n’avais même pas p
4114 ncé intérieurement ce nom lorsque je m’assis dans l’ ombre du théâtre, en retard, un peu ennuyé de me trouver à côté d’une
4115 eu ennuyé de me trouver à côté d’une place vide : la jolie femme qu’on attend dans ces circonstances, une fois de plus man
4116 dans ces circonstances, une fois de plus manquait le rendez-vous que j’avais demandé au hasard d’arranger. Mais le thème d
4117 us que j’avais demandé au hasard d’arranger. Mais le thème de la Barcarolle s’empare de tout mon être — ainsi d’autres dev
4118 is demandé au hasard d’arranger. Mais le thème de la Barcarolle s’empare de tout mon être — ainsi d’autres deviennent patr
4119 eul peut-être cette plainte heureuse des violons. Le diable sort des parois, noir et blanc, la ravissante héroïne est à so
4120 iolons. Le diable sort des parois, noir et blanc, la ravissante héroïne est à son piano, c’est un duo des ténèbres et de l
4121 est à son piano, c’est un duo des ténèbres et de la pureté où vibrent par instants les accords d’une harmonie surnaturell
4122 ténèbres et de la pureté où vibrent par instants les accords d’une harmonie surnaturelle. Et tout cela chanté dans une lan
4123 p plus loin que moi, il n’entend pas ma question. L’ envie me prend d’aller le rejoindre. Me voici tout abandonné à l’évoca
4124 ’entend pas ma question. L’envie me prend d’aller le rejoindre. Me voici tout abandonné à l’évocation d’un amour tragiquem
4125 d d’aller le rejoindre. Me voici tout abandonné à l’ évocation d’un amour tragiquement mêlé à des forces inconnues et menaç
4126 t mêlé à des forces inconnues et menaçantes. Mais la musique est si légère, la voix de la jeune fille si transparente : la
4127 ues et menaçantes. Mais la musique est si légère, la voix de la jeune fille si transparente : la mort même en devient moin
4128 çantes. Mais la musique est si légère, la voix de la jeune fille si transparente : la mort même en devient moins brutale.
4129 gère, la voix de la jeune fille si transparente : la mort même en devient moins brutale. Elle rôde ici comme une tristesse
4130 omme une tristesse amoureuse. Elle n’est plus que l’ approche d’une grandeur où se perdraient nos amours terrestres dans d’
4131 rrestres dans d’imprévisibles transfigurations, —  l’ heure anxieuse et mélancolique où l’on quitte ce visage aimé pour d’au
4132 igurations, — l’heure anxieuse et mélancolique où l’ on quitte ce visage aimé pour d’autres plus beaux peut-être, mais inco
4133 es plus beaux peut-être, mais inconnus. Voilà que la forme blanche, sous un brusque faisceau de lumière m’apparaît avec le
4134 us un brusque faisceau de lumière m’apparaît avec le visage même de mon amour. Je me sens voluptueusement perdre pied. Ver
4135 ix, à côté de moi, c’est une chose singulière que le pouvoir de cette musique. Voici que vous êtes tout près de comprendre
4136 ourtant ne se détournait. Comment pouvais-je être le seul à l’avoir entendu ? — C’est, me répondit-il, que seul vous venez
4137 se détournait. Comment pouvais-je être le seul à l’ avoir entendu ? — C’est, me répondit-il, que seul vous venez d’atteind
4138 renez certaines choses par votre souffrance… Mais le temps approche où vous n’aurez plus besoin de souffrir pour comprendr
4139 n’aurez plus besoin de souffrir pour comprendre. Le faisceau de lumière quitta la scène, un reflet balaya le parterre, le
4140 ir pour comprendre. Le faisceau de lumière quitta la scène, un reflet balaya le parterre, le visage de mon voisin m’apparu
4141 ceau de lumière quitta la scène, un reflet balaya le parterre, le visage de mon voisin m’apparut, pâle dans son collier de
4142 re quitta la scène, un reflet balaya le parterre, le visage de mon voisin m’apparut, pâle dans son collier de barbe noire.
4143 dans son collier de barbe noire. Je sentis que je l’ avais déjà reconnu. Il portait une cape bleu sombre, à la mode de 1830
4144 déjà reconnu. Il portait une cape bleu sombre, à la mode de 1830, qui, à la rigueur, pouvait passer pour une élégance trè
4145 t une cape bleu sombre, à la mode de 1830, qui, à la rigueur, pouvait passer pour une élégance très moderne. Il n’y avait
4146 e rien de positivement démodé ; je n’eus même pas le sentiment de quoi que ce soit d’immatériel. D’ailleurs le trouble où
4147 ment de quoi que ce soit d’immatériel. D’ailleurs le trouble où m’avait jeté la première reconnaissance empêcha ma raison
4148 connaissance empêcha ma raison d’intervenir entre la réalité de ma vision et mon cerveau pris au défaut de sa carapace de
4149 rincipes et d’évidences opaques. Nous sortîmes de l’ Opéra, Gérard de Nerval et moi, sans nous être rien dit d’autre, comme
4150 un échange tacite suffit aux petites décisions de la vie quotidienne. Gérard tenait en laisse le fameux homard enrubanné.
4151 ns de la vie quotidienne. Gérard tenait en laisse le fameux homard enrubanné. « Cela vexe les Viennois, me dit-il, parce q
4152 en laisse le fameux homard enrubanné. « Cela vexe les Viennois, me dit-il, parce qu’ils y voient une façon de me moquer de
4153 n suis pas fâché. » Il y avait peu de monde dans les rues. Des jeunes gens avec une femme à chaque bras, l’air de ne pas t
4154 es. Des jeunes gens avec une femme à chaque bras, l’ air de ne pas trop s’amuser. — Ceci du moins n’a guère changé, dis-je,
4155 ours de Vienne. — Certes, répondit Gérard, malgré les apparences, cette vie sentimentale est une des seules réalités qui co
4156 ne des seules réalités qui correspondent encore à l’ image classique de Vienne. Sentimentalisme capricieux d’ailleurs, dépo
4157 t. Cette ville, qui est toute caresses, a peur de l’ étreinte… C’est d’ailleurs une chose que je comprends assez bien, ajou
4158 s traversions une rue sillonnée de taxis rapides, le homard refusa obstinément de progresser. Gérard dut le prendre sous l
4159 mard refusa obstinément de progresser. Gérard dut le prendre sous le bras, et les paires de pinces s’accrochèrent désespér
4160 inément de progresser. Gérard dut le prendre sous le bras, et les paires de pinces s’accrochèrent désespérément à ses manc
4161 rogresser. Gérard dut le prendre sous le bras, et les paires de pinces s’accrochèrent désespérément à ses manches. De terre
4162 ochèrent désespérément à ses manches. De terreur, le homard avait rougi : il conserva toute la nuit une magnifique couleur
4163 erreur, le homard avait rougi : il conserva toute la nuit une magnifique couleur orangée. Gérard semblait habitué à ces so
4164 ait habitué à ces sortes de scènes. On reparla de l’ inconstance viennoise. Gérard l’attribuait à une certaine anémie des s
4165 es. On reparla de l’inconstance viennoise. Gérard l’ attribuait à une certaine anémie des sentiments, à un manque de caract
4166 e des sentiments, à un manque de caractère aussi. La fidélité véritable est une œuvre d’art qui demande un long effort, et
4167 st une œuvre d’art qui demande un long effort, et les Viennois sont, par nature et par attitude, des gens fatigués. — Pour
4168 s gens fatigués. — Pour moi, dit Gérard, je situe l’ amour dans un monde où la question fidélité ou inconstance ne se pose
4169 oi, dit Gérard, je situe l’amour dans un monde où la question fidélité ou inconstance ne se pose plus. Vous le savez, je n
4170 ion fidélité ou inconstance ne se pose plus. Vous le savez, je n’ai aimé qu’une femme — au plus deux, en y réfléchissant b
4171 en y réfléchissant bien, mais peut-être était-ce la même sous deux attributs différents. Toutes les femmes qui m’ont rete
4172 ce la même sous deux attributs différents. Toutes les femmes qui m’ont retenu un instant, c’était parce qu’elles évoquaient
4173 raissaient purement mystiques… Mais vous savez, «  les autres » n’y comprennent jamais rien, dès qu’on aime… Oh ! cette femm
4174 ard, un certain regard, mais j’ai su en retrouver la sensation jusque dans les choses — et c’est cela seul qui donna un se
4175 ais j’ai su en retrouver la sensation jusque dans les choses — et c’est cela seul qui donna un sens au monde. — Mais je bav
4176 mps. Livrons-nous plutôt à une petite malice dont l’ idée me vient à la vue de cette vendeuse de fleurs. C’était la petite
4177 ent à la vue de cette vendeuse de fleurs. C’était la petite bossue qui vend des roses et des œillets dans la rue de Carint
4178 ite bossue qui vend des roses et des œillets dans la rue de Carinthie. Gérard lui paya quelques œillets rouges en lui expl
4179 s œillets rouges en lui expliquant qu’elle devait les donner à la première jolie femme qui passerait seule. Nous nous arrêt
4180 vanture de robes de soie, nous amusant à imaginer les corps précieux qui les revêtiraient. Vint à pas pressés une jeune fem
4181 e, nous amusant à imaginer les corps précieux qui les revêtiraient. Vint à pas pressés une jeune femme, chapeau rouge et ma
4182 e qui se passa fut, hélas, non moins inévitable : la jeune femme refusa d’abord les fleurs pour se donner le temps de rega
4183 moins inévitable : la jeune femme refusa d’abord les fleurs pour se donner le temps de regarder autour d’elle ; l’intérêt
4184 ne femme refusa d’abord les fleurs pour se donner le temps de regarder autour d’elle ; l’intérêt que nous ne sûmes pas dis
4185 ur se donner le temps de regarder autour d’elle ; l’ intérêt que nous ne sûmes pas dissimuler nous trahit ; elle finit donc
4186 r accepter et vint à nous avec un sourire du type le plus courant : « Vous êtes bien gentils, messieurs ! » Il n’y avait p
4187 ard attendait évidemment quelque chose d’imprévu, la seule chose contraire à la coutume viennoise. L’enfant était charmant
4188 elque chose d’imprévu, la seule chose contraire à la coutume viennoise. L’enfant était charmante, comme elles le sont pres
4189 la seule chose contraire à la coutume viennoise. L’ enfant était charmante, comme elles le sont presque toutes dans cette
4190 viennoise. L’enfant était charmante, comme elles le sont presque toutes dans cette ville, — du type que Gérard et Théo no
4191 and bruit de saxophones et de cors anglais jouant la Marche de Tannhäuser en tango, un Balkanique très lisse nous délivra
4192 ue très lisse nous délivra de notre conquête pour la durée des danses. Gérard bâillait : « Voilà ce que c’est que de prend
4193 leure qualité : car c’est une pauvre illusion que le plaisir qu’on vient chercher ici avec le premier être venu. — Certes,
4194 le premier être venu. — Certes, je comprends que l’ Europe est en décadence quand je la regarde s’amuser. Je vois se perdr
4195 comprends que l’Europe est en décadence quand je la regarde s’amuser. Je vois se perdre ce sens des correspondances secrè
4196 ules faisaient sa dignité humaine, parce qu’elles le rattachaient aux buts les plus hauts de notre vie. Ces citadins blasé
4197 humaine, parce qu’elles le rattachaient aux buts les plus hauts de notre vie. Ces citadins blasés s’amusent plus grossière
4198 é, avec des femmes qui élargissent des sourires à la mesure de votre générosité. Vos boîtes de nuit sont des sortes de dis
4199 automatiques de plaisir. Autant dire que ceux qui les fréquentent ne savent plus ce que c’est que le plaisir. Ils prennent
4200 i les fréquentent ne savent plus ce que c’est que le plaisir. Ils prennent au hasard des liqueurs qui n’ont pas été prépar
4201 été préparées pour leur soif. Ils ne savent plus les signes ni les ressemblances. Aussi l’ennui règne-t-il bruyamment dans
4202 pour leur soif. Ils ne savent plus les signes ni les ressemblances. Aussi l’ennui règne-t-il bruyamment dans ces lieux : c
4203 avent plus les signes ni les ressemblances. Aussi l’ ennui règne-t-il bruyamment dans ces lieux : cet orchestre triomphant
4204 élémentaires : Ce sont vos contemporains livrés à la démocratie des plaisirs achetés au détail dans une foire éclatante de
4205 au détail dans une foire éclatante de faux luxe. La misère est de voir ici des femmes aussi ravissantes que celle-là qui
4206 nt de gravité et de détachement. Je viens souvent la regarder, à cause de la noblesse de sa danse. Je la nomme Clarissa, p
4207 chement. Je viens souvent la regarder, à cause de la noblesse de sa danse. Je la nomme Clarissa, parce que cela lui va. Ma
4208 regarder, à cause de la noblesse de sa danse. Je la nomme Clarissa, parce que cela lui va. Mais comme c’est odieux qu’une
4209 x qu’une créature aussi parfaite soit touchée par les mains outrageusement baguées de ces courtiers alourdis de “Knödl”. En
4210 n’approcherait qu’avec un sentiment religieux de la beauté. Mais je crois que l’Orient est devenu fou. Il ne comprend plu
4211 ntiment religieux de la beauté. Mais je crois que l’ Orient est devenu fou. Il ne comprend plus rien. » Des bugles agonisai
4212 scandalisée par cette atteinte aux lois du genre le plus conventionnel qui soit. Gérard la regarda avec une certaine piti
4213 s du genre le plus conventionnel qui soit. Gérard la regarda avec une certaine pitié : « Chère enfant, dit-il doucement, p
4214 s de ressemblance, et c’est ce qui vous perdra. » La pauvre fille ne comprenant pas, il y eut un moment pénible, comme tou
4215 pre une comédie aux attitudes convenues et donner l’ air bête aux acteurs. Puis Gérard embrassa paternellement la belle eff
4216 aux acteurs. Puis Gérard embrassa paternellement la belle effarée, et nous sortîmes, après avoir délivré le homard qui, l
4217 le effarée, et nous sortîmes, après avoir délivré le homard qui, laissé au vestiaire, y était l’objet de vexations diverse
4218 livré le homard qui, laissé au vestiaire, y était l’ objet de vexations diverses et de curiosités grossières de la part des
4219 s garçons. « Encore une proie inutile lâchée pour l’ ombre, dit Gérard d’un ton rêveur et malicieux. Mais l’ombre de cette
4220 re, dit Gérard d’un ton rêveur et malicieux. Mais l’ ombre de cette ville illusoire est la plus douce à mes vagabondages sa
4221 icieux. Mais l’ombre de cette ville illusoire est la plus douce à mes vagabondages sans but. Vous savez, je lance mes file
4222 es sans but. Vous savez, je lance mes filets dans l’ eau des nuits, et quelquefois j’en ramène des animaux aux yeux bizarre
4223 ène des animaux aux yeux bizarres où je sais lire les signes. » Comme je ne répondais rien : « Avez-vous sommeil ? demanda-
4224 ’endormir. » Se penchant vers moi il prononça : «  La nuit sera noire et blanche. » Je ressentis quelque émotion à l’ouïe d
4225 oire et blanche. » Je ressentis quelque émotion à l’ ouïe de cette phrase célèbre. Ensuite, je pensai qu’il arrive aux meil
4226 de se répéter, et que c’était la première fois de la soirée que Gérard « faisait du Gérard ». Les cocktails du Moulin-Roug
4227 is de la soirée que Gérard « faisait du Gérard ». Les cocktails du Moulin-Rouge avaient peu à peu envahi notre sang. Nos pe
4228 Nos pensées devenaient légères comme des ballons. La rumeur de Vienne baignait nos corps fatigués jusqu’à l’insensibilité
4229 eur de Vienne baignait nos corps fatigués jusqu’à l’ insensibilité et l’Illusion étendait sur toutes choses une aile d’ombr
4230 ait nos corps fatigués jusqu’à l’insensibilité et l’ Illusion étendait sur toutes choses une aile d’ombre flatteuse aux cap
4231 des oiseaux nous parlèrent, bientôt dissous dans le vent. Tout était reflet, passages, allusions. Plus tard, dans un peti
4232 mi-hauteur, puis couvert de glaces qui, reflétant le plafond à caissons dorés, l’étendent indéfiniment — c’est un ciel sus
4233 laces qui, reflétant le plafond à caissons dorés, l’ étendent indéfiniment — c’est un ciel suspendu assez bas sur nos têtes
4234 ché sur cet aquarium de rêves, discourt et décrit les images qu’il y découvre. Il y a les ailes du Moulin-Rouge, qui sont l
4235 urt et décrit les images qu’il y découvre. Il y a les ailes du Moulin-Rouge, qui sont les bras de Clarissa dans sa danse, e
4236 ouvre. Il y a les ailes du Moulin-Rouge, qui sont les bras de Clarissa dans sa danse, et Clarissa c’est aussi l’Anglaise au
4237 e Clarissa dans sa danse, et Clarissa c’est aussi l’ Anglaise aux citrons de Pompéi, l’Octavie du golfe de Marseille, ou bi
4238 ssa c’est aussi l’Anglaise aux citrons de Pompéi, l’ Octavie du golfe de Marseille, ou bien plutôt, par je ne sais quelle e
4239 ar je ne sais quelle erreur d’images, — ce serait la gravité énigmatique d’Adrienne, mais dans le lointain, Aurélia lui ré
4240 rait la gravité énigmatique d’Adrienne, mais dans le lointain, Aurélia lui répond d’un regard pareil. Des visages naissent
4241 es naissent comme des étoiles dans un halo, comme les couleurs sous les paupières, s’élargissent, se fondent, se superposen
4242 des étoiles dans un halo, comme les couleurs sous les paupières, s’élargissent, se fondent, se superposent. Cinéma des sent
4243 t. Cinéma des sentiments qui montre vivantes dans la même minute toutes les incarnations d’un amour dont l’être éternel ap
4244 ts qui montre vivantes dans la même minute toutes les incarnations d’un amour dont l’être éternel apparaît peu à peu, à tra
4245 me minute toutes les incarnations d’un amour dont l’ être éternel apparaît peu à peu, à travers la simultanéité de ses mani
4246 dont l’être éternel apparaît peu à peu, à travers la simultanéité de ses manifestations. Gérard parle avec une liberté mag
4247 erté magnifique et angoissante. Il mêle tout dans le temps et l’espace. Cent années et tous les visages aimés revivent dan
4248 que et angoissante. Il mêle tout dans le temps et l’ espace. Cent années et tous les visages aimés revivent dans cette coup
4249 ut dans le temps et l’espace. Cent années et tous les visages aimés revivent dans cette coupe de songes avec toutes leurs i
4250 réelles, illusions des reflets qui ne livrent que le côté terrestre des choses dont l’autre moitié sera toujours cachée, a
4251 s dont l’autre moitié sera toujours cachée, ainsi la Lune et sa moitié d’ombre. Et parce que tout revit en un instant dans
4252 en un instant dans cette vision, il connaît enfin la substance véritable et unique de toutes ses amours, il communie avec
4253 s, il communie avec quelque chose d’éternel. Tous les drames du monde ne sont que décors mouvants dans la lueur bariolée de
4254 drames du monde ne sont que décors mouvants dans la lueur bariolée des sentiments, ils ne sont que reflets, épisodes, sym
4255 ts, ils ne sont que reflets, épisodes, symboles : le vrai drame de son destin est ailleurs. Il se met à m’expliquer des si
4256 sent aux pierres précieuses en passant par toutes les formes animales. Pour lui, les choses n’ont d’intérêt que par les rap
4257 passant par toutes les formes animales. Pour lui, les choses n’ont d’intérêt que par les rapports qu’il leur devine avec la
4258 les. Pour lui, les choses n’ont d’intérêt que par les rapports qu’il leur devine avec la réalité extra-terrestre. Il m’ense
4259 térêt que par les rapports qu’il leur devine avec la réalité extra-terrestre. Il m’enseigne que la passion seule, par la s
4260 vec la réalité extra-terrestre. Il m’enseigne que la passion seule, par la souffrance qu’elle entraîne, nous révèle le sen
4261 errestre. Il m’enseigne que la passion seule, par la souffrance qu’elle entraîne, nous révèle le sens réel de nos vies, et
4262 , par la souffrance qu’elle entraîne, nous révèle le sens réel de nos vies, et peu à peu, de leurs moindres coïncidences.
4263 es, et peu à peu, de leurs moindres coïncidences. La fatigue calme son lyrisme et son exaltation. Il semble se rapprocher
4264 ne barbarie spirituelle. Il plaisante. Il dit que la vie ressemble surtout à un film où les épisodes s’appellent par le si
4265 Il dit que la vie ressemble surtout à un film où les épisodes s’appellent par le simple jeu des images, se voient par tran
4266 surtout à un film où les épisodes s’appellent par le simple jeu des images, se voient par transparence au travers de l’aut
4267 vers de l’autre. Il dit : « Pour celui qui saisit les correspondances, chaque geste, chaque minute d’une vie résume cette v
4268 entière et fait allusion à tout ce qu’il y a sous le soleil, et même ailleurs. Croyez-moi, ce qu’il faudrait écrire, c’est
4269 mes. Seules des trompes d’autos s’appelaient dans la nuit froide. Gérard ne disait presque plus rien ; à peine, de temps e
4270 , qui semblait d’ailleurs endormi. En passant par la Freyung, nous vîmes un palais aux fenêtres illuminées. Des autos atte
4271 fenêtres illuminées. Des autos attendaient devant le porche grand ouvert. Les chauffeurs faisaient les cent pas dans la ne
4272 autos attendaient devant le porche grand ouvert. Les chauffeurs faisaient les cent pas dans la neige fraîche ou s’accoudai
4273 le porche grand ouvert. Les chauffeurs faisaient les cent pas dans la neige fraîche ou s’accoudaient à la banquette d’une
4274 uvert. Les chauffeurs faisaient les cent pas dans la neige fraîche ou s’accoudaient à la banquette d’une boutique à « Würs
4275 cent pas dans la neige fraîche ou s’accoudaient à la banquette d’une boutique à « Würstel » où nous nous arrêtâmes. Au lég
4276 fflement du bec de gaz sans manchon qui éclairait la boutique, et que le vent menaçait d’éteindre à chaque instant, le hom
4277 az sans manchon qui éclairait la boutique, et que le vent menaçait d’éteindre à chaque instant, le homard se réveilla. Gér
4278 que le vent menaçait d’éteindre à chaque instant, le homard se réveilla. Gérard m’expliqua qu’il en était ainsi chaque nui
4279 m’expliqua qu’il en était ainsi chaque nuit, que l’ animal devenait nerveux et que depuis quelques semaines, il avait dû l
4280 veux et que depuis quelques semaines, il avait dû le mettre au caviar. Il en demanda donc une petite portion et la fit pre
4281 caviar. Il en demanda donc une petite portion et la fit prendre au homard avec toutes sortes de soins. Les chauffeurs reg
4282 it prendre au homard avec toutes sortes de soins. Les chauffeurs regardaient d’un œil las, trop las pour s’étonner. Transi,
4283 si, je me balançais d’un pied sur l’autre dans de la neige fondante, tout en croquant une de ces saucisses à la moutarde q
4284 fondante, tout en croquant une de ces saucisses à la moutarde qu’on appelle ici « Frankfurter » et ailleurs « Wienerli ».
4285 « Frankfurter » et ailleurs « Wienerli ». Soudain les autos se mirent à ronfler. Par le grand escalier, au fond de la cour
4286 rli ». Soudain les autos se mirent à ronfler. Par le grand escalier, au fond de la cour du palais, descendaient les invité
4287 rent à ronfler. Par le grand escalier, au fond de la cour du palais, descendaient les invités du bal. Des femmes sans chap
4288 alier, au fond de la cour du palais, descendaient les invités du bal. Des femmes sans chapeau couraient vers les voitures,
4289 és du bal. Des femmes sans chapeau couraient vers les voitures, les hommes s’inclinaient pour des baise-mains silencieux et
4290 femmes sans chapeau couraient vers les voitures, les hommes s’inclinaient pour des baise-mains silencieux et mécaniques. J
4291 à d’anciens Habsbourg, des comtes athlétiques et la silhouette échassière de la jeune duchesse de Clam-Clamannsfeld dont
4292 comtes athlétiques et la silhouette échassière de la jeune duchesse de Clam-Clamannsfeld dont le manteau de velours rose l
4293 re de la jeune duchesse de Clam-Clamannsfeld dont le manteau de velours rose laissait découvertes des jambes extrêmement h
4294 ndis que sa tête frisée jetait des insolences sur les chapeaux noirs de ses cavaliers. Tout cela s’empila dans des autos ;
4295 autos ; en dix minutes, il n’y eut plus personne, la place s’éteignit. Mais Gérard ? Ses yeux s’étaient fixés intensément,
4296 Gérard ? Ses yeux s’étaient fixés intensément, à la sortie des invités, sur une femme qui s’en allait toute seule vers un
4297 femme qui s’en allait toute seule vers une auto à l’ écart des autres. Une femme aux cheveux noirs en bandeaux, au teint pâ
4298 mme aux cheveux noirs en bandeaux, au teint pâle, l’ air d’autrefois. Il avait murmuré : Marie Pleyel. Quand la place se fu
4299 autrefois. Il avait murmuré : Marie Pleyel. Quand la place se fut apaisée, je m’aperçus que j’étais seul. Une dernière aut
4300 olument silencieuse fila devant moi ; je reconnus la voiture de la femme aux bandeaux noirs. Mais les rideaux étaient bais
4301 ieuse fila devant moi ; je reconnus la voiture de la femme aux bandeaux noirs. Mais les rideaux étaient baissés. Déjà on c
4302 s la voiture de la femme aux bandeaux noirs. Mais les rideaux étaient baissés. Déjà on criait les journaux du matin, des tr
4303 Mais les rideaux étaient baissés. Déjà on criait les journaux du matin, des triporteurs passèrent à toute vitesse, m’éclab
4304 emont Denis de, « Un soir à Vienne avec Gérard », La Nouvelle Semaine artistique et littéraire, Neuchâtel, 24 mars 1928, p
71 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Marguerite Allotte de la Fuye, Jules Verne, sa vie, son œuvre (juin 1928)
4305 nt pour tous ceux que Jules Verne passionne. Pour les autres, divertissant et spirituel. Pourquoi ne veut-on voir en Jules
4306 un précurseur ? Jules Verne est un créateur, dont les inventions se suffisent et suffisent à notre joie. Ce ne sont pas les
4307 ffisent et suffisent à notre joie. Ce ne sont pas les savants qui sont prophètes, mais les poètes. Or Jules Verne fut poète
4308 ne sont pas les savants qui sont prophètes, mais les poètes. Or Jules Verne fut poète avant tout — et ce livre le fera bie
4309 Or Jules Verne fut poète avant tout — et ce livre le fera bien voir aux sceptiques. Il a aimé la science parce qu’elle ouv
4310 livre le fera bien voir aux sceptiques. Il a aimé la science parce qu’elle ouvre des perspectives d’évasion — où seuls les
4311 ’elle ouvre des perspectives d’évasion — où seuls les poètes savent se perdre. Et c’est bien sa plus grande ruse que d’avoi
4312 est bien sa plus grande ruse que d’avoir emprunté le véhicule à la mode pour conduire des millions de lecteurs dans un mon
4313 us grande ruse que d’avoir emprunté le véhicule à la mode pour conduire des millions de lecteurs dans un monde purement fa
4314 de lecteurs dans un monde purement fantaisiste où les équations tyranniques deviennent de merveilleux calembours, où les sa
4315 anniques deviennent de merveilleux calembours, où les savants sont réellement dans la lune, ou bien descendent au fond des
4316 x calembours, où les savants sont réellement dans la lune, ou bien descendent au fond des mers adorer la Liberté et jouer
4317 lune, ou bien descendent au fond des mers adorer la Liberté et jouer de l’orgue sous les yeux de poulpes géants. Jules Ve
4318 nt au fond des mers adorer la Liberté et jouer de l’ orgue sous les yeux de poulpes géants. Jules Verne a véritablement sou
4319 oulpes géants. Jules Verne a véritablement soumis la science à la poésie. Et l’on ne veut voir que jolis livres d’étrennes
4320 . Jules Verne a véritablement soumis la science à la poésie. Et l’on ne veut voir que jolis livres d’étrennes dans les œuv
4321 a véritablement soumis la science à la poésie. Et l’ on ne veut voir que jolis livres d’étrennes dans les œuvres du plus gr
4322 ’on ne veut voir que jolis livres d’étrennes dans les œuvres du plus grand créateur de mythes modernes, du seul écrivain do
4323 réateur de mythes modernes, du seul écrivain dont l’ influence soit comparable à celle du cinéma ! Claretie raconte que les
4324 mparable à celle du cinéma ! Claretie raconte que les détenus des maisons de correction se jetaient sur ces volumes « au tr
4325 ces volumes « au travers desquels ils respiraient l’ air du monde ». N’en ferons-nous pas autant, emprisonnés que nous somm
4326 que nous sommes dans une civilisation qui, selon l’ expression de Jules Verne désabusé « emprunte l’aspect d’une nécessité
4327 n l’expression de Jules Verne désabusé « emprunte l’ aspect d’une nécessité » (et dans la bouche de ce libertaire, cela con
4328 sé « emprunte l’aspect d’une nécessité » (et dans la bouche de ce libertaire, cela constituait un jugement !) Serons-nous
4329 s-nous longtemps encore dupes d’une conception de la littérature si pédante qu’elle exclut un de nos plus grands conteurs
4330 us Jules Verne aux enfants ? J’allais oublier que la littérature enfantine est le dernier bateau. Pour ce coup, voilà qui
4331 bord, je soupçonne que ce bateau n’est autre que La Liberté. ar. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Marguerite Allot
4332 on œuvre  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, juin 1928, p. 768-769.
4333  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , juin 1928, p. 768-769.
72 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Aragon, Traité du style (août 1928)
4334 on, Traité du style (août 1928)as Ce n’est pas le seul talent de M. Aragon qui le rendrait digne à mes yeux, de considé
4335 s Ce n’est pas le seul talent de M. Aragon qui le rendrait digne à mes yeux, de considération. J’admire autant le talen
4336 gne à mes yeux, de considération. J’admire autant le talent de celui qui mène 60 parties d’échecs simultanément, et c’est
4337 x écrivains que des révélations, ou mieux, qu’ils les favorisent par leurs écrits. Aragon, qui a le sens de l’amour, a dit
4338 ls les favorisent par leurs écrits. Aragon, qui a le sens de l’amour, a dit conséquemment beaucoup de choses vraies (belle
4339 risent par leurs écrits. Aragon, qui a le sens de l’ amour, a dit conséquemment beaucoup de choses vraies (belles). Il est
4340 ies (belles). Il est même un des très rares parmi les jeunes qui ait vraiment donné quelque chose. C’est pourquoi j’ai lu c
4341 econde partie du livre est admirable ; il suffit. Le titre ne ment pas ; ce livre traite du style, à coups d’exemples qui
4342 aite du style, à coups d’exemples qui méritent de l’ être. Et l’on voit bien ici qu’Aragon dépasse ces surréalistes, ces or
4343 le, à coups d’exemples qui méritent de l’être. Et l’ on voit bien ici qu’Aragon dépasse ces surréalistes, ces orthodoxes de
4344 ragon dépasse ces surréalistes, ces orthodoxes de l’ absurde confondu avec le poétique, ou ces disciples de Rimbaud, ou enf
4345 listes, ces orthodoxes de l’absurde confondu avec le poétique, ou ces disciples de Rimbaud, ou enfin ces littérateurs anti
4346 ces littérateurs antilittéraires, ces « Messieurs les Nymphes ». Mais donner l’air bête à ceux qui le sont en créant une be
4347 aires, ces « Messieurs les Nymphes ». Mais donner l’ air bête à ceux qui le sont en créant une belle œuvre serait, par exem
4348 les Nymphes ». Mais donner l’air bête à ceux qui le sont en créant une belle œuvre serait, par exemple, plus efficace. Ar
4349 e voix du troupeau. C’est sans doute son rôle. Il le tient magnifiquement. Mais qu’on nous laisse chercher plus loin, dans
4350 ous laisse chercher plus loin, dans ce silence où l’ on accède à des objets qui enfin valent le respect. as. Rougemont D
4351 ence où l’on accède à des objets qui enfin valent le respect. as. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Aragon, Traité d
4352 du style  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, août 1928, p. 1034.
4353  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , août 1928, p. 1034.
73 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Pierre Naville, La Révolution et les intellectuels (novembre 1928)
4354 Pierre Naville, La Révolution et les intellectuels (novembre 1928)at Les derniers écr
4355 Pierre Naville, La Révolution et les intellectuels (novembre 1928)at Les derniers écrits des surréalist
4356 olution et les intellectuels (novembre 1928)at Les derniers écrits des surréalistes débattent la question de savoir s’il
4357 Les derniers écrits des surréalistes débattent la question de savoir s’ils vont se taire ou non. Mais leur silence ne d
4358 ux-mêmes. Ils se tournent donc naturellement vers l’ action, c’est-à-dire — nous sommes en France — vers la politique. Or c
4359 tion, c’est-à-dire — nous sommes en France — vers la politique. Or ces ennemis de toute littérature voient leurs avances d
4360 e littérature voient leurs avances dédaignées par les communistes, gens d’action à jugements simples, qui les trouvent trop
4361 mmunistes, gens d’action à jugements simples, qui les trouvent trop littérateurs. Rien d’étonnant à cela dans une époque où
4362 ateurs. Rien d’étonnant à cela dans une époque où les valeurs de l’esprit sont en pratique universellement méprisées. Mais
4363 étonnant à cela dans une époque où les valeurs de l’ esprit sont en pratique universellement méprisées. Mais les surréalist
4364 sont en pratique universellement méprisées. Mais les surréalistes ont leur responsabilité là-dedans ; leur défense de l’es
4365 t leur responsabilité là-dedans ; leur défense de l’ esprit s’est bornée jusqu’ici à une rhétorique très brillante contre u
4366 détesté, mais dont ils participent plus qu’ils ne le croient. Certes il était urgent de faire la critique de « cette réali
4367 ls ne le croient. Certes il était urgent de faire la critique de « cette réalité de premier plan qui nous empêche de bouge
4368 s cette réalité. Il est certain que s’ils avaient le courage de se soumettre au concret de l’esprit, ils comprendraient qu
4369 avaient le courage de se soumettre au concret de l’ esprit, ils comprendraient que le « service dans le temple » s’accommo
4370 re au concret de l’esprit, ils comprendraient que le « service dans le temple » s’accommode mal de tant de gesticulations,
4371 ’esprit, ils comprendraient que le « service dans le temple » s’accommode mal de tant de gesticulations, de gros mots et d
4372 d dont ils n’ont pas encore renoncé à chatouiller le snobisme. at. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Pierre Naville,
4373 gemont Denis de, « [Compte rendu] Pierre Naville, La Révolution et les intellectuels  », Bibliothèque universelle et Revue
4374 « [Compte rendu] Pierre Naville, La Révolution et les intellectuels  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève
4375 lectuels  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, novembre 1928, p. 1410.
4376  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , novembre 1928, p. 1410.
74 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Malraux, Les Conquérants (décembre 1928)
4377 André Malraux, Les Conquérants (décembre 1928)au Ce récit de la révolution cantonaise
4378 Les Conquérants (décembre 1928)au Ce récit de la révolution cantonaise en 1925 nous place au nœud du monde moderne : o
4379 on y voit s’affronter en quelques hommes d’action les forces caractéristiques du temps — argent, races — et ses rares passi
4380 — argent, races — et ses rares passions, qui sont la domination et la démolition, l’organisation et le sabotage. On y déco
4381 et ses rares passions, qui sont la domination et la démolition, l’organisation et le sabotage. On y découvre le jeu des t
4382 assions, qui sont la domination et la démolition, l’ organisation et le sabotage. On y découvre le jeu des tempéraments qui
4383 la domination et la démolition, l’organisation et le sabotage. On y découvre le jeu des tempéraments qui fait opter ces ch
4384 ion, l’organisation et le sabotage. On y découvre le jeu des tempéraments qui fait opter ces chefs pour l’une ou l’autre d
4385 ires : elles représentent deux manières de sentir l’ unité d’une époque obsédée d’action.) Autour de ces individus — Chinoi
4386 mentateurs, Juifs russes méthodiques — s’émeuvent les masses de coolies, d’ouvriers armés, toute cette Chine qui s’éveille
4387 , toute cette Chine qui s’éveille au sein même de la lutte qui met aux prises l’Europe et le monde du Pacifique. On retrou
4388 eille au sein même de la lutte qui met aux prises l’ Europe et le monde du Pacifique. On retrouvera ici beaucoup des idées
4389 n même de la lutte qui met aux prises l’Europe et le monde du Pacifique. On retrouvera ici beaucoup des idées que la Tenta
4390 cifique. On retrouvera ici beaucoup des idées que la Tentation de l’Occident exprimait sous une forme abstraite et poétiqu
4391 ouvera ici beaucoup des idées que la Tentation de l’ Occident exprimait sous une forme abstraite et poétique. Mais cette fo
4392 en hommes, en meurtres, en décrets. Qu’il décrive la vie intense et instable des acteurs du drame, l’aspect quotidien et m
4393 la vie intense et instable des acteurs du drame, l’ aspect quotidien et mystérieux d’une révolution de rues, ou la palpita
4394 tidien et mystérieux d’une révolution de rues, ou la palpitation inquiétante des villes chinoises, Malraux fait preuve d’u
4395 lraux fait preuve d’un art du détail où se révèle le vrai romancier. On serait parfois tenté de le rapprocher de Morand, m
4396 èle le vrai romancier. On serait parfois tenté de le rapprocher de Morand, mais il est plus nerveux, sans doute aussi plus
4397 de faits, une discussion d’idées. Il est surtout la description d’une angoisse que le nihilisme de M. Malraux veut sans i
4398 Il est surtout la description d’une angoisse que le nihilisme de M. Malraux veut sans issues : l’angoisse que fait naître
4399 que le nihilisme de M. Malraux veut sans issues : l’ angoisse que fait naître au cœur du monde contemporain l’absurdité de
4400 sse que fait naître au cœur du monde contemporain l’ absurdité de ses ambitions. Écoutons Garine, l’un de ces chefs (c’est
4401 l’un de ces chefs (c’est lui qui parle au nom de l’ auteur, je pense) : « Il me semble que je lutte contre l’absurde humai
4402 r, je pense) : « Il me semble que je lutte contre l’ absurde humain, en faisant ce que je fais ici… » L’évasion dans l’acti
4403 ’absurde humain, en faisant ce que je fais ici… » L’ évasion dans l’action — révolutionnaire ou autre — rêvée par tant de j
4404 , en faisant ce que je fais ici… » L’évasion dans l’ action — révolutionnaire ou autre — rêvée par tant de jeunes hommes de
4405 ire ou autre — rêvée par tant de jeunes hommes de l’ après-guerre, Malraux l’a vécue, avant de la décrire ; et cet aveu de
4406 tant de jeunes hommes de l’après-guerre, Malraux l’ a vécue, avant de la décrire ; et cet aveu de Garine est décisif : « L
4407 es de l’après-guerre, Malraux l’a vécue, avant de la décrire ; et cet aveu de Garine est décisif : « La Révolution… tout c
4408 a décrire ; et cet aveu de Garine est décisif : «  La Révolution… tout ce qui n’est pas elle est pire qu’elle… » Expérience
4409 st pas elle est pire qu’elle… » Expérience faite, l’ absurde retrouve ses droits. C’est ainsi que, masqué par l’enchaînemen
4410 retrouve ses droits. C’est ainsi que, masqué par l’ enchaînement passionnant de l’action, il se dégage de ce roman un dése
4411 nsi que, masqué par l’enchaînement passionnant de l’ action, il se dégage de ce roman un désespoir sec, sans grimace. Cette
4412 angereux. Mais qu’elles s’appliquent à distinguer les forces déterminantes de l’heure, à les exprimer en un tel drame, et v
4413 pliquent à distinguer les forces déterminantes de l’ heure, à les exprimer en un tel drame, et voici André Malraux au premi
4414 distinguer les forces déterminantes de l’heure, à les exprimer en un tel drame, et voici André Malraux au premier rang des
4415 ugemont Denis de, « [Compte rendu] André Malraux, Les Conquérants  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève,
4416 quérants  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, décembre 1928, p. 1547-1548.
4417  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , décembre 1928, p. 1547-1548.
75 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Guy de Pourtalès, Louis II de Bavière ou Hamlet-Roi (décembre 1928)
4418 II de Bavière ou Hamlet-Roi (décembre 1928)av L’ histoire de Louis II exalte et déçoit l’imagination. On comprend que c
4419 928)av L’histoire de Louis II exalte et déçoit l’ imagination. On comprend que ce doux-amer ait séduit Barrès, mais ne l
4420 prend que ce doux-amer ait séduit Barrès, mais ne l’ ait point trompé : « Avec son beau regard de rêve, — lit-on dans l’Enn
4421 é : « Avec son beau regard de rêve, — lit-on dans l’ Ennemi des Lois — son expression amoureuse du silence et cet ensemble
4422 s ses châteaux en Espagne lamentablement réalisés les témoignages de l’éthique de cet « illustre réfractaire ». N’est-ce po
4423 spagne lamentablement réalisés les témoignages de l’ éthique de cet « illustre réfractaire ». N’est-ce point trop demander
4424 lès n’hésite pas à baptiser son héros « prince de l’ illusion et de la solitude ». Mais un prince rêveur n’est pas forcémen
4425 à baptiser son héros « prince de l’illusion et de la solitude ». Mais un prince rêveur n’est pas forcément prince du rêve 
4426 ince du rêve ; et par ailleurs ce livre sait bien le laisser voir. La qualité de l’illusion dont se nourrit Louis II n’est
4427 par ailleurs ce livre sait bien le laisser voir. La qualité de l’illusion dont se nourrit Louis II n’est ni aussi pure ni
4428 ce livre sait bien le laisser voir. La qualité de l’ illusion dont se nourrit Louis II n’est ni aussi pure ni aussi rare qu
4429 n’est ni aussi pure ni aussi rare qu’on voudrait l’ imaginer. Il reste qu’il a voulu la vivre et qu’il l’a pu, étant roi.
4430 qu’on voudrait l’imaginer. Il reste qu’il a voulu la vivre et qu’il l’a pu, étant roi. Il offre ainsi l’image d’un romanti
4431 maginer. Il reste qu’il a voulu la vivre et qu’il l’ a pu, étant roi. Il offre ainsi l’image d’un romantisme assez morose ;
4432 vivre et qu’il l’a pu, étant roi. Il offre ainsi l’ image d’un romantisme assez morose ; mais à grande échelle. M. de Pour
4433 à grande échelle. M. de Pourtalès a su rehausser le tableau avec beaucoup d’adresse et de charme : Wagner et Nietzsche lu
4434 t Nietzsche lui fournissent deux tons fermes dont le jeu donne aux nuances assez troubles du personnage central une résona
4435 it par hasard de moyens d’action puissants : s’il les a gâchés, c’est qu’il a eu peur, et s’il a eu peur c’est qu’il n’a pa
4436 , et s’il a eu peur c’est qu’il n’a pas su aimer. Le sujet de Liszt et de Chopin, c’était l’amour, donc la douleur ; ici,
4437 su aimer. Le sujet de Liszt et de Chopin, c’était l’ amour, donc la douleur ; ici, c’est l’absence d’amour, par refus de so
4438 ujet de Liszt et de Chopin, c’était l’amour, donc la douleur ; ici, c’est l’absence d’amour, par refus de souffrir. Mais c
4439 in, c’était l’amour, donc la douleur ; ici, c’est l’ absence d’amour, par refus de souffrir. Mais chez un être raffiné, la
4440 par refus de souffrir. Mais chez un être raffiné, la peur d’étreindre aboutit à l’amour de soi dans « l’illusion ». Sachon
4441 ez un être raffiné, la peur d’étreindre aboutit à l’ amour de soi dans « l’illusion ». Sachons gré à M. de Pourtalès de ce
4442 peur d’étreindre aboutit à l’amour de soi dans «  l’ illusion ». Sachons gré à M. de Pourtalès de ce qu’il préfère parler d
4443 oseraient de moins jolis mots ; mais ce n’est pas la moindre habileté du biographe. D’ailleurs, réussir un livre attrayant
4444 e n’était pas un problème aisé : Guy de Pourtalès l’ a résolu d’une façon fort adroite mais non moins franche. av. Rouge
4445 mlet-Roi  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, décembre 1928, p. 1549.
4446  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , décembre 1928, p. 1549.
76 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Daniel-Rops, Le Prince menteur (décembre 1928)
4447 Daniel-Rops, Le Prince menteur (décembre 1928)aw Au hasard d’une rencontre, l’aute
4448 r (décembre 1928)aw Au hasard d’une rencontre, l’ auteur de ce récit se lie avec un inconnu qui se dit prince russe et e
4449 e dit prince russe et entretient autour de sa vie le plus grand mystère. Cependant il aime à raconter certaines scènes ter
4450 aime à raconter certaines scènes terrifiantes de la révolution : il a été condamné à mort, il s’est évadé, on le traque à
4451 on : il a été condamné à mort, il s’est évadé, on le traque à Paris même… Il subjugue le jeune Français par ces évocations
4452 est évadé, on le traque à Paris même… Il subjugue le jeune Français par ces évocations et l’espèce de fièvre qu’il y appor
4453 subjugue le jeune Français par ces évocations et l’ espèce de fièvre qu’il y apporte. Mais plusieurs incidents éveillent l
4454 ’il y apporte. Mais plusieurs incidents éveillent les soupçons du « petit-bourgeois » qu’il a choisi comme public, et brusq
4455 ois » qu’il a choisi comme public, et brusquement le mot éclate : menteur. Feintes et esquives adroites du « prince » qui
4456 es du « prince » qui disparaît, néanmoins. Enfin, le Français reçoit une lettre trouvée sur le corps de son ami suicidé, p
4457 Enfin, le Français reçoit une lettre trouvée sur le corps de son ami suicidé, pathétique confession qui doit expliquer sa
4458 oit expliquer sa mort et qui est aussi fausse que le reste. Ce mensonge qui va jusqu’à la mort, inclusivement, n’étonnera
4459 i fausse que le reste. Ce mensonge qui va jusqu’à la mort, inclusivement, n’étonnera pas ceux qui ont connu de semblables
4460 pas ceux qui ont connu de semblables mythomanes. Le cas méritait d’être exposé. Je regrette seulement que Daniel-Rops se
4461 courte nouvelle, d’ailleurs assez dense, et dont le mérite est d’être simple et précise dans l’exposé, sans rien simplifi
4462 dont le mérite est d’être simple et précise dans l’ exposé, sans rien simplifier ni préciser à l’excès dans le caractère.
4463 dans l’exposé, sans rien simplifier ni préciser à l’ excès dans le caractère. Daniel-Rops voit bien que l’épithète de mytho
4464 , sans rien simplifier ni préciser à l’excès dans le caractère. Daniel-Rops voit bien que l’épithète de mythomane n’épuise
4465 xcès dans le caractère. Daniel-Rops voit bien que l’ épithète de mythomane n’épuise pas une question dont l’importance dépa
4466 thète de mythomane n’épuise pas une question dont l’ importance dépasse celle du cas pathologique. Il y a dans ce culte de
4467 elle du cas pathologique. Il y a dans ce culte de la mythomanie qu’on a vu sévir parmi certains milieux d’avant-garde une
4468 , parce qu’elle constitue une tentation pour tous les poètes. Le désir de « plus vrai que le vrai » surexcité par l’insolen
4469 lle constitue une tentation pour tous les poètes. Le désir de « plus vrai que le vrai » surexcité par l’insolence d’une ps
4470 pour tous les poètes. Le désir de « plus vrai que le vrai » surexcité par l’insolence d’une psychologie qui rabaisse tout,
4471 désir de « plus vrai que le vrai » surexcité par l’ insolence d’une psychologie qui rabaisse tout, peut conduire à préfére
4472 as, qu’une déformation de cette réalité détestée. Le mythomane brouille les cartes mais reste dans le jeu. Jusque dans la
4473 de cette réalité détestée. Le mythomane brouille les cartes mais reste dans le jeu. Jusque dans la ruse que ses mensonges
4474 Le mythomane brouille les cartes mais reste dans le jeu. Jusque dans la ruse que ses mensonges exigent, il se reconnaît t
4475 le les cartes mais reste dans le jeu. Jusque dans la ruse que ses mensonges exigent, il se reconnaît tributaire de la « vé
4476 mensonges exigent, il se reconnaît tributaire de la « vérité trop évidente » ; alors qu’il la faudrait, sans rien fausser
4477 aire de la « vérité trop évidente » ; alors qu’il la faudrait, sans rien fausser, transcender… aw. Rougemont Denis de,
4478 Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Daniel-Rops, Le Prince menteur  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genèv
4479 menteur  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, décembre 1928, p. 1553.
4480  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , décembre 1928, p. 1553.
77 1928, Articles divers (1924–1930). Miroirs, ou Comment on perd Eurydice et soi-même » (décembre 1928)
4481 » Paul Valéry. Stéphane est maniaque, comme tous les jeunes gens de sa génération. Seulement chez lui, cela ne s’est pas p
4482 . Seulement chez lui, cela ne s’est pas porté sur les autos. Il préfère s’intéresser aux divers types humains. Mais on lui
4483 ord ; accepte d’attendre comme un enfant sage que le monde lui donne, en son temps, sa petite part. On lui a expliqué qu’i
4484 , sa petite part. On lui a expliqué qu’il fallait la mériter et tâcher de devenir quelqu’un. En d’autres termes, on lui co
4485  » comme parle un de nos classiques. Repoussé par le monde parce qu’il n’est pas encore quelqu’un, Stéphane cherche à savo
4486 r un moi qui feint toujours de se cacher derrière le feuillet suivant, entraîne le lecteur par ruse jusqu’à la dernière pa
4487 se cacher derrière le feuillet suivant, entraîne le lecteur par ruse jusqu’à la dernière page, et là déclare froidement n
4488 roidement ne pas exister. Non : il a remarqué que l’ époque peut être définie par l’abondance des autobiographies, mais aus
4489 il a remarqué que l’époque peut être définie par l’ abondance des autobiographies, mais aussi bien par celle des miroirs.
4490 hane passe des heures entières à se regarder dans les yeux. Il varie sur son visage les jeux de lumière et de sentiments. I
4491 e regarder dans les yeux. Il varie sur son visage les jeux de lumière et de sentiments. Il découvre une sorte de rire au co
4492 ouvre une sorte de rire au coin de sa bouche dans les moments de pire découragement ; et beaucoup d’autres hiatus de ce gen
4493 nt ; et beaucoup d’autres hiatus de ce genre, qui l’ intriguent à n’en pas finir. Quand il est très fatigué, il veut voir e
4494 é sur lui-même il se perd en méditations éléates. Le sommeil l’en délivre. Au matin il court se voir : il est laid. Lâchem
4495 ême il se perd en méditations éléates. Le sommeil l’ en délivre. Au matin il court se voir : il est laid. Lâchement il se p
4496 l se prend en pitié. Ces séances lui font du mal, l’ énervent, mais l’aveu qu’il en consent l’attache plus secrètement à so
4497 ié. Ces séances lui font du mal, l’énervent, mais l’ aveu qu’il en consent l’attache plus secrètement à son aventure. Nous
4498 du mal, l’énervent, mais l’aveu qu’il en consent l’ attache plus secrètement à son aventure. Nous vivons dans un décor fl
4499 ne sa tête, son portrait en pied. Il se voit dans l’ acte de se raser, de se baigner ; son image descend en face de lui par
4500 se baigner ; son image descend en face de lui par l’ ascenseur, elle le suit au long des trottoirs, il l’aperçoit entre des
4501 mage descend en face de lui par l’ascenseur, elle le suit au long des trottoirs, il l’aperçoit entre des souliers, des éti
4502 ascenseur, elle le suit au long des trottoirs, il l’ aperçoit entre des souliers, des étiquettes, des poupées ; elle le pré
4503 des souliers, des étiquettes, des poupées ; elle le précède au restaurant, le nargue brièvement au passage des autos, le
4504 tes, des poupées ; elle le précède au restaurant, le nargue brièvement au passage des autos, le ridiculise chez le coiffeu
4505 urant, le nargue brièvement au passage des autos, le ridiculise chez le coiffeur. Déjà, c’est avec une sorte d’angoisse qu
4506 ièvement au passage des autos, le ridiculise chez le coiffeur. Déjà, c’est avec une sorte d’angoisse qu’il la recherche. I
4507 feur. Déjà, c’est avec une sorte d’angoisse qu’il la recherche. Il veut se voir tel qu’il est parmi les autres. Mais s’il
4508 la recherche. Il veut se voir tel qu’il est parmi les autres. Mais s’il lui arrive de prendre son image pour celle de n’imp
4509 t de cette apparence, qu’il doute de sa réalité. Le mystère de voir ses yeux l’épouvante. Il y cherche une révélation et
4510 doute de sa réalité. Le mystère de voir ses yeux l’ épouvante. Il y cherche une révélation et n’y trouve que le désir d’un
4511 te. Il y cherche une révélation et n’y trouve que le désir d’une révélation. Peut-on s’hypnotiser avec son propre regard ?
4512 te incantation à soi-même qui pourrait lui rendre la certitude d’être. Mais il s’épuise dans une perspective de reflets qu
4513 reflets qui vont en diminuant vertigineusement et l’ égarent dans sa nuit. Je saute quelques délires et pas mal de supersti
4514 al de superstitions. Enfin cette expérience folle le mène à une découverte sur les sept sens de laquelle il convient de mé
4515 tte expérience folle le mène à une découverte sur les sept sens de laquelle il convient de méditer : la personne se dissout
4516 es sept sens de laquelle il convient de méditer : la personne se dissout dans l’eau des miroirs. Stéphane est en train de
4517 convient de méditer : la personne se dissout dans l’ eau des miroirs. Stéphane est en train de se perdre pour avoir voulu
4518 il faut sortir de soi pour se voir ? Il y a dans l’ homme moderne un besoin de vérifier qui n’est plus légitime dès l’inst
4519 un besoin de vérifier qui n’est plus légitime dès l’ instant qu’il se traduit par la négation de l’invérifiable. Stéphane n
4520 plus légitime dès l’instant qu’il se traduit par la négation de l’invérifiable. Stéphane n’a pas eu confiance. Or la pers
4521 dès l’instant qu’il se traduit par la négation de l’ invérifiable. Stéphane n’a pas eu confiance. Or la personnalité est un
4522 l’invérifiable. Stéphane n’a pas eu confiance. Or la personnalité est un acte de foi : Stéphane ne sait plus ce qu’il est.
4523 oire idiote, d’ailleurs vraie, se borne à décrire l’ aspect psychologique d’une aventure qui en a bien d’autres, d’aspects.
4524 qui en a bien d’autres, d’aspects. Il est bon que le lecteur dérisoirement troublé par la crainte de n’avoir pas saisi le
4525 est bon que le lecteur dérisoirement troublé par la crainte de n’avoir pas saisi le sens véritable d’un texte, trouve par
4526 ement troublé par la crainte de n’avoir pas saisi le sens véritable d’un texte, trouve parfois de cette incompréhension de
4527 e cette incompréhension des marques certaines. Si le rapport intime qui unit la phrase suivante aux considérations précéde
4528 marques certaines. Si le rapport intime qui unit la phrase suivante aux considérations précédentes lui échappe, qu’il y v
4529 dique, par besoin de définir, par défiance envers les dieux. À chaque regard dans notre miroir, nous perdons une Eurydice.
4530 ard dans notre miroir, nous perdons une Eurydice. Les miroirs sont peut-être la mort. La mort absolue, celle qui n’est pas
4531 perdons une Eurydice. Les miroirs sont peut-être la mort. La mort absolue, celle qui n’est pas une vie nouvelle. La mort
4532 une Eurydice. Les miroirs sont peut-être la mort. La mort absolue, celle qui n’est pas une vie nouvelle. La mort dans la t
4533 rt absolue, celle qui n’est pas une vie nouvelle. La mort dans la transparence glaciale de l’évidence. Un jour, à propos
4534 elle qui n’est pas une vie nouvelle. La mort dans la transparence glaciale de l’évidence. Un jour, à propos de rien, Stép
4535 ouvelle. La mort dans la transparence glaciale de l’ évidence. Un jour, à propos de rien, Stéphane pense avec fièvre : « I
4536 ane pense avec fièvre : « Il faudrait briser tous les miroirs. Alors tu te verrais en vérité. Peut-être te reconnaîtrais-tu
4537 t ? » C’est un premier filet d’eau vive qui perce le sol aride : mais Stéphane n’entend pas encore gronder les eaux profon
4538 aride : mais Stéphane n’entend pas encore gronder les eaux profondes. Le désir de s’hypnotiser l’irrite toujours vaguement.
4539 e n’entend pas encore gronder les eaux profondes. Le désir de s’hypnotiser l’irrite toujours vaguement. Mais il fuit son p
4540 nder les eaux profondes. Le désir de s’hypnotiser l’ irrite toujours vaguement. Mais il fuit son propre regard, il se cherc
4541 te, il croit saisir dans un regard de cette femme l’ écho de ce qui serait lui. Déjà il se perd dans ces yeux, mais comme o
4542 omme on meurt dans une naissance. Stéphane naît à l’ amour et à lui-même conjointement. Plusieurs ivresses l’ont envahi bru
4543 r et à lui-même conjointement. Plusieurs ivresses l’ ont envahi bruyamment, bâillonnent sa raison, l’empêchent de protester
4544 s l’ont envahi bruyamment, bâillonnent sa raison, l’ empêchent de protester contre le miracle. Parmi tous ses mots fous, no
4545 onnent sa raison, l’empêchent de protester contre le miracle. Parmi tous ses mots fous, noms, baisers, appels qui reçoiven
4546 s tard, ce fut un jour de grand soleil sur toutes les verreries de la capitale. Les fenêtres battaient. Le soleil et « la m
4547 jour de grand soleil sur toutes les verreries de la capitale. Les fenêtres battaient. Le soleil et « la mort » se conjura
4548 d soleil sur toutes les verreries de la capitale. Les fenêtres battaient. Le soleil et « la mort » se conjuraient pour abai
4549 verreries de la capitale. Les fenêtres battaient. Le soleil et « la mort » se conjuraient pour abaisser tous les regards.
4550 capitale. Les fenêtres battaient. Le soleil et «  la mort » se conjuraient pour abaisser tous les regards. Stéphane rendu
4551 et « la mort » se conjuraient pour abaisser tous les regards. Stéphane rendu à la santé écrivait : « Ton visage me cache t
4552 pour abaisser tous les regards. Stéphane rendu à la santé écrivait : « Ton visage me cache tous les miroirs » — à une fem
4553 à la santé écrivait : « Ton visage me cache tous les miroirs » — à une femme qu’il aimait. n. Rougemont Denis de, « Mir
4554 omment on perd Eurydice et soi-même », Cahiers de l’ Anglore, Genève, décembre 1928, p. 37-42.
4555 erd Eurydice et soi-même », Cahiers de l’Anglore, Genève , décembre 1928, p. 37-42.
78 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Sherwood Anderson, Mon père et moi et Je suis un homme (janvier 1929)
4556 re et moi et Je suis un homme (janvier 1929)ax Le critique se sent désarmé et légèrement absurde en face d’un récit com
4557 vec une émouvante simplicité et il faudrait avoir la grossièreté de lui répondre d’un air connaisseur que c’est bien compo
4558 bien étonné du passage où il rappelle qu’il écrit la vie d’un homme de lettres. En réalité, on ne le voit pas encore appar
4559 t la vie d’un homme de lettres. En réalité, on ne le voit pas encore apparaître sous cet aspect dans ces deux premiers tom
4560 s de son enfance et de sa jeunesse comme ouvrier. L’ art d’Anderson est étonnant d’apparente simplicité. Le récit s’avance
4561 t d’Anderson est étonnant d’apparente simplicité. Le récit s’avance à une allure libre et tranquille, anglo-saxonne et peu
4562 et là s’ouvrent des perspectives saisissantes sur l’ époque. Anderson est avant tout un poète, un homme qui aime inventer e
4563 es nécessités modernes, dégradantes. Cet amour de l’ invention romanesque considérée comme une revanche de la poésie — mais
4564 ntion romanesque considérée comme une revanche de la poésie — mais à Chicago on doit appeler ça du bluff — fait de lui san
4565 doit appeler ça du bluff — fait de lui sans doute le plus méridional des conteurs américains. Avec cela, un réalisme, plei
4566 uvent d’amertume. Mais là où d’autres placeraient le couplet humanitariste, lui s’en va dans un rêve, ou dans un autre sou
4567 est un Américain qui viennent nous rapprendre que les sources de la poésie sont dans notre maison. Voici un de ces passages
4568 n qui viennent nous rapprendre que les sources de la poésie sont dans notre maison. Voici un de ces passages où il sait êt
4569 ouvant : « À cette époque je croyais fortement en l’ existence d’une espèce de secrète et à peu près universelle conspirati
4570 u près universelle conspiration pour insister sur la laideur. “C’est une frasque de gosses à laquelle nous nous livrons, v
4571 à laquelle nous nous livrons, voilà tout, moi et les autres”, me disais-je parfois, et il y avait des moments où j’arrivai
4572 s, bras dessous en riant de nous-mêmes et de tout le reste, nous amusant comme des fous ». Mais non, on ne le secouera pas
4573 e, nous amusant comme des fous ». Mais non, on ne le secouera pas, ce cauchemar, ce monde moderne, ce monde de fous qui n’
4574 fous qui n’ont plus que leur raison, ce monde où l’ on ne sait plus créer avec joie des formes belles, ce monde qui devien
4575 quer un personnage précis pour lui faire endosser le blâme, mais comme l’homme nommé Ford, de Détroit, a contribué davanta
4576 écis pour lui faire endosser le blâme, mais comme l’ homme nommé Ford, de Détroit, a contribué davantage que n’importe quel
4577 n’importe quel autre de mon temps à faire aboutir la standardization à sa fin logique, ne pourrait-il pas être considéré u
4578 , ne pourrait-il pas être considéré un jour comme le grand tueur de son époque ? Rendre impuissant c’est à coup sûr tuer.
4579 impuissant c’est à coup sûr tuer. Or on parle de l’ élever à la présidence de la République. Qu’un tel acte serait adéquat
4580 c’est à coup sûr tuer. Or on parle de l’élever à la présidence de la République. Qu’un tel acte serait adéquat ! Tamerlan
4581 tuer. Or on parle de l’élever à la présidence de la République. Qu’un tel acte serait adéquat ! Tamerlan, dont la spécial
4582 e. Qu’un tel acte serait adéquat ! Tamerlan, dont la spécialité était l’assassinat du corps humain, mais qui raconte dans
4583 rait adéquat ! Tamerlan, dont la spécialité était l’ assassinat du corps humain, mais qui raconte dans son autobiographie q
4584 obiographie que son désir constant était que tous les hommes vivant sous lui conservassent la virilité et le respect de soi
4585 que tous les hommes vivant sous lui conservassent la virilité et le respect de soi était de son temps le souverain du mond
4586 mmes vivant sous lui conservassent la virilité et le respect de soi était de son temps le souverain du monde. Tamerlan pou
4587 virilité et le respect de soi était de son temps le souverain du monde. Tamerlan pour les anciens. Ford pour les modernes
4588 de son temps le souverain du monde. Tamerlan pour les anciens. Ford pour les modernes. Quelle décadence ! ax. Rougemont
4589 in du monde. Tamerlan pour les anciens. Ford pour les modernes. Quelle décadence ! ax. Rougemont Denis de, « [Compte re
4590 un homme  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, janvier 1929, p. 123-124.
4591  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , janvier 1929, p. 123-124.
79 1929, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). « Belles-Lettres, c’est la clé des champs… » (janvier 1929)
4592 « Belles-Lettres, c’est la clé des champs… » (janvier 1929)y 1. Belles-Lettres, c’est la clef
4593 ps… » (janvier 1929)y 1. Belles-Lettres, c’est la clef des champs. 2. L’essence de Belles-Lettres, c’est de l’alcool à
4594 1. Belles-Lettres, c’est la clef des champs. 2. L’ essence de Belles-Lettres, c’est de l’alcool à brûler les cervelles et
4595 champs. 2. L’essence de Belles-Lettres, c’est de l’ alcool à brûler les cervelles et les réputations. 3. Belles-Lettres n
4596 nce de Belles-Lettres, c’est de l’alcool à brûler les cervelles et les réputations. 3. Belles-Lettres n’est compréhensible
4597 tres, c’est de l’alcool à brûler les cervelles et les réputations. 3. Belles-Lettres n’est compréhensible et légitime que
4598 Lettres n’est compréhensible et légitime que dans la mesure où la poésie est compréhensible et légitime. 4. Je suis de san
4599 compréhensible et légitime que dans la mesure où la poésie est compréhensible et légitime. 4. Je suis de sang-froid, je d
4600 esse ; autrement que par des cris. 5. Avec toutes les erreurs et turpitudes que cela comporte, Belles-Lettres est une liber
4601 trer en religion : rond de cuir ou poète (au sens le plus large de ces mots.) (Mais je tiens à le leur dire ici : les anci
4602 sens le plus large de ces mots.) (Mais je tiens à le leur dire ici : les anciens bellettriens qui ont perdu toute foi ne c
4603 de ces mots.) (Mais je tiens à le leur dire ici : les anciens bellettriens qui ont perdu toute foi ne connaîtront pas de pa
4604 sont foncièrement mauvais.) 6. Peu de choses dans le monde moderne ont encore une « essence ». Celle de Belles-Lettres est
4605 . Celle de Belles-Lettres est en agréable odeur à l’ Éternel et à Satan pareillement. Et ceux qu’elle enivre entrent en éta
4606 y. Rougemont Denis de, « Belles-Lettres, c’est la clef des champs… », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genèv
80 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. Avant-propos
4607 Avant-propos Le dire une bonne fois. Il ne faut pas songer à décrire en quarante peti
4608 s songer à décrire en quarante petites pages tous les méfaits de l’instruction publique. C’est à peine assez pour indiquer
4609 ire en quarante petites pages tous les méfaits de l’ instruction publique. C’est à peine assez pour indiquer leur ordre de
4610 e grandeur ; à quoi je me bornerai. Il a paru sur le sujet de l’instruction publique deux petits livres1 excellents dont j
4611 à quoi je me bornerai. Il a paru sur le sujet de l’ instruction publique deux petits livres1 excellents dont je considère
4612 deux petits livres1 excellents dont je considère les thèses comme acquises : L’Éloge de l’ignorance, de M. Abel Bonnard, e
4613 nts dont je considère les thèses comme acquises : L’ Éloge de l’ignorance, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas l
4614 considère les thèses comme acquises : L’Éloge de l’ ignorance, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas les enfants,
4615  : L’Éloge de l’ignorance, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas les enfants, d’Henri Roorda. Le premier montre q
4616 e, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas les enfants, d’Henri Roorda. Le premier montre que la science apprise à l
4617 es enfants, d’Henri Roorda. Le premier montre que la science apprise à l’école appauvrit l’homme de tout ce que son ignora
4618 oorda. Le premier montre que la science apprise à l’ école appauvrit l’homme de tout ce que son ignorance respectait, et ne
4619 montre que la science apprise à l’école appauvrit l’ homme de tout ce que son ignorance respectait, et ne lui donne à la pl
4620 e que son ignorance respectait, et ne lui donne à la place que des laideurs et de la prétention. L’autre, avec l’ironie tr
4621 et ne lui donne à la place que des laideurs et de la prétention. L’autre, avec l’ironie tranquille du bon sens bafoué et q
4622 e des laideurs et de la prétention. L’autre, avec l’ ironie tranquille du bon sens bafoué et qui s’en moque, décrit la stup
4623 ille du bon sens bafoué et qui s’en moque, décrit la stupidité de l’enseignement tel qu’il est pratiqué dans nos collèges.
4624 bafoué et qui s’en moque, décrit la stupidité de l’ enseignement tel qu’il est pratiqué dans nos collèges. Mon dessein est
4625 e réaction de tempérament. Je marque d’autre part la nécessité de tout cela qui me blesse, la liaison fatale avec la démoc
4626 tre part la nécessité de tout cela qui me blesse, la liaison fatale avec la démocratie, de tout ce qui moleste ma liberté
4627 e tout cela qui me blesse, la liaison fatale avec la démocratie, de tout ce qui moleste ma liberté et sans doute celle de
4628 ocialiste qui a été établi par coup de force, que les libéraux ont admis, conformément à leurs maximes, et toléré malgré le
4629 humeur. Ce régime de punaises jaunâtres aboutit à l’ instruction publique et grâce à elle prolonge abusivement sa terne exi
4630 elle prolonge abusivement sa terne existence. Je l’ ai subi ; l’on va voir comment. De pareils souvenirs légitiment toutes
4631 ge abusivement sa terne existence. Je l’ai subi ; l’ on va voir comment. De pareils souvenirs légitiment toutes les haines.
4632 r comment. De pareils souvenirs légitiment toutes les haines. Je serai méchant, parce que j’en ai gros sur le cœur. D’aill
4633 nes. Je serai méchant, parce que j’en ai gros sur le cœur. D’ailleurs, ce petit écrit ne peut servir à rien. — Alors ? —
4634 apper : celui de naïveté. Définition du naïf dans le monde moderne : individu qui soutient des idées qui ne rapportent rie
4635 r au nom de ma génération, ne m’étant pas livré à l’ enquête préalable qui seule eût pu, à la rigueur, me donner ce droit b
4636 s livré à l’enquête préalable qui seule eût pu, à la rigueur, me donner ce droit bien inutile. Pourtant je sais qu’à droi
4637 e comme à gauche, ils sont plus nombreux qu’on ne le pense, ceux qui refusent d’être complices dans cet attentat à l’intég
4638 qui refusent d’être complices dans cet attentat à l’ intégrité humaine qu’est en fait l’esprit démocratique. Là-dessus, ces
4639 cet attentat à l’intégrité humaine qu’est en fait l’ esprit démocratique. Là-dessus, ces messieurs se lamentent, la jeuness
4640 ocratique. Là-dessus, ces messieurs se lamentent, la jeunesse d’aujourd’hui, etc. Évidemment. Mais il y a les jérémiades e
4641 nesse d’aujourd’hui, etc. Évidemment. Mais il y a les jérémiades et il y a les raisons. Hors le domaine de l’amour, où tout
4642 Évidemment. Mais il y a les jérémiades et il y a les raisons. Hors le domaine de l’amour, où tout se confond miraculeuseme
4643 il y a les jérémiades et il y a les raisons. Hors le domaine de l’amour, où tout se confond miraculeusement, gémir n’est p
4644 émiades et il y a les raisons. Hors le domaine de l’ amour, où tout se confond miraculeusement, gémir n’est pas un argument
4645 eusement, gémir n’est pas un argument. Je demande le droit de démolir. Et me l’accorde aussitôt. Sans conditions. Mon rôle
4646 n argument. Je demande le droit de démolir. Et me l’ accorde aussitôt. Sans conditions. Mon rôle n’est pas de proposer une
4647 de vitupérer ce que je vois, qui est laid. Quand la soupe est brûlée, on la renvoie, même si l’on n’est pas capable d’en
4648 vois, qui est laid. Quand la soupe est brûlée, on la renvoie, même si l’on n’est pas capable d’en faire soi-même une meill
4649 Quand la soupe est brûlée, on la renvoie, même si l’ on n’est pas capable d’en faire soi-même une meilleure. Mais j’aperçoi
4650 Mais j’aperçois là-bas, vautré derrière son bock, le Citoyen conscient et organisé pour la discussion. Il retrousse ses ma
4651 e son bock, le Citoyen conscient et organisé pour la discussion. Il retrousse ses manches. Il s’apprête à cracher sur ce q
4652 Oh ! oh ! oh ! il va parler, de grâce mettez-lui les mains sur la bouche ! Donnez-lui sa choucroute, tapez-lui dans le dos
4653 ! il va parler, de grâce mettez-lui les mains sur la bouche ! Donnez-lui sa choucroute, tapez-lui dans le dos, amenez-lui
4654 bouche ! Donnez-lui sa choucroute, tapez-lui dans le dos, amenez-lui le Guguss, des bretzels, sa petite amie, au secours !
4655 sa choucroute, tapez-lui dans le dos, amenez-lui le Guguss, des bretzels, sa petite amie, au secours ! Car j’ai encore de
4656 ire. Dès qu’une voix s’élève pour mettre en doute l’ excellence du principe de l’instruction publique, on crie sur tous les
4657 pour mettre en doute l’excellence du principe de l’ instruction publique, on crie sur tous les bancs : « Alors, vous êtes
4658 ncipe de l’instruction publique, on crie sur tous les bancs : « Alors, vous êtes pour un retour à la barbarie ? » Si ce réf
4659 s les bancs : « Alors, vous êtes pour un retour à la barbarie ? » Si ce réflexe indique un mépris vraiment exagéré pour la
4660 e réflexe indique un mépris vraiment exagéré pour la jugeote de l’adversaire ou s’il traduit simplement cette mauvaise foi
4661 que un mépris vraiment exagéré pour la jugeote de l’ adversaire ou s’il traduit simplement cette mauvaise foi pas même cons
4662 ise foi pas même consciente, cette lâcheté devant la discussion précise de leurs principes par quoi se signalent bien souv
4663 à cent « réponses » de cette sorte. Et je tiens à les classer par avance en deux catégories dont je vais régler le compte s
4664 par avance en deux catégories dont je vais régler le compte sommairement. Cela n’empêchera personne de me resservir ces ar
4665 A. Réponses du type : on ne peut pas aller contre l’ époque, vous êtes un pauvre utopiste, etc. Ce sont les positivistes qu
4666 poque, vous êtes un pauvre utopiste, etc. Ce sont les positivistes qui parlent ainsi, ceux qui croient aux faits. Je leur r
4667 Je leur réponds : 1° qu’ils ne peuvent me dénier le droit de juger ces faits ; 2° qu’ils ne peuvent, en vertu même de leu
4668 euvent, en vertu même de leur scepticisme quant à la valeur réformatrice des idées, m’accuser de faire une critique danger
4669 critique dangereuse. 3° que néanmoins je crois à l’ efficace de certaines utopies. (Les religions, la découverte de l’Amér
4670 oins je crois à l’efficace de certaines utopies. ( Les religions, la découverte de l’Amérique par Christophe Colomb, l’Europ
4671 l’efficace de certaines utopies. (Les religions, la découverte de l’Amérique par Christophe Colomb, l’Europe napoléonienn
4672 rtaines utopies. (Les religions, la découverte de l’ Amérique par Christophe Colomb, l’Europe napoléonienne, la Russie d’ap
4673 a découverte de l’Amérique par Christophe Colomb, l’ Europe napoléonienne, la Russie d’après Karl Marx, le vol des frères W
4674 ue par Christophe Colomb, l’Europe napoléonienne, la Russie d’après Karl Marx, le vol des frères Wright, et tout bêtement,
4675 urope napoléonienne, la Russie d’après Karl Marx, le vol des frères Wright, et tout bêtement, c’est le cas de le dire : l’
4676 le vol des frères Wright, et tout bêtement, c’est le cas de le dire : l’instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d
4677 frères Wright, et tout bêtement, c’est le cas de le dire : l’instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d’aller con
4678 ight, et tout bêtement, c’est le cas de le dire : l’ instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d’aller contre l’époq
4679 dire : l’instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d’aller contre l’époque, et on le peut efficacement. 2° Rira bi
4680 blique.) Résumé : 1° On a le droit d’aller contre l’ époque, et on le peut efficacement. 2° Rira bien qui rira le dernier.
4681 : 1° On a le droit d’aller contre l’époque, et on le peut efficacement. 2° Rira bien qui rira le dernier. B. Réponses du t
4682 rétrograde, un infâme réactionnaire, etc. Ce sont les partisans d’une démocratie progressiste et tolérante qui se livrent à
4683 lérante qui se livrent à ces excès de langage, je les renvoie en corps au chapitre 5 où je traiterai de cet aspect du probl
4684 e 5 où je traiterai de cet aspect du problème que l’ on peut appeler la question de droit. Certains, en effet, tirent toute
4685 i de cet aspect du problème que l’on peut appeler la question de droit. Certains, en effet, tirent toute leur force dans l
4686 Certains, en effet, tirent toute leur force dans les discussions de la tranquillité avec laquelle ils brouillent les faits
4687 , tirent toute leur force dans les discussions de la tranquillité avec laquelle ils brouillent les faits et les principes.
4688 s de la tranquillité avec laquelle ils brouillent les faits et les principes. Tourmentés par les scrupules de leur conscien
4689 uillité avec laquelle ils brouillent les faits et les principes. Tourmentés par les scrupules de leur conscience libérale,
4690 illent les faits et les principes. Tourmentés par les scrupules de leur conscience libérale, ils fuient la rigueur jusque d
4691 scrupules de leur conscience libérale, ils fuient la rigueur jusque dans leurs raisonnements. Pour moi qui cherche à démêl
4692 urs raisonnements. Pour moi qui cherche à démêler la vérité sans égard aux dérangements, même violents, que cela ne manque
4693 jamais de provoquer, je me propose de marquer ici la distinction classique du fait et du droit ; et c’est pourquoi je cons
4694 droit ; et c’est pourquoi je considérerai d’abord l’ instruction publique dans ses réalisations actuelles, puis au terme de
4695 d’outrages au bon sens peuvent être légitimés par le but final de notre institution-tabou. 1. Je ne puis naturellement p
4696 1. Je ne puis naturellement pas mentionner tous les ouvrages scientifiques. Les meilleurs sortent de l’Institut Rousseau.
4697 t pas mentionner tous les ouvrages scientifiques. Les meilleurs sortent de l’Institut Rousseau.
4698 ouvrages scientifiques. Les meilleurs sortent de l’ Institut Rousseau.
4699 uvrages scientifiques. Les meilleurs sortent de l’ Institut Rousseau.
81 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 1. Mes prisons
4700 ssent sur leurs souvenirs de classe. C’est qu’ils les confondent avec ceux de leur enfance et les font indûment participer
4701 u’ils les confondent avec ceux de leur enfance et les font indûment participer de la même grâce. Voyez Péguy, quand il essa
4702 e leur enfance et les font indûment participer de la même grâce. Voyez Péguy, quand il essaie de nous faire croire qu’« il
4703 us faire croire qu’« il n’y a rien au-dessus » de la tâche des instituteurs : Faire de ces belles analyses logiques, et g
4704 ithmétique où il fallait si soigneusement séparer les calculs du raisonnement, par une barre verticale, et où il y avait to
4705 t pour emplir ou pour vider un bassin (et souvent les deux), (pour emplir et vider ensemble), (drôle d’occupation), (après
4706 urs des appartements à meubler. Et on multipliait le tapissier par le prix du mètre courant. Encore que je prenne les sen
4707 nts à meubler. Et on multipliait le tapissier par le prix du mètre courant. Encore que je prenne les sentiments trop au s
4708 r le prix du mètre courant. Encore que je prenne les sentiments trop au sérieux pour faire ici du sentiment, je suis sensi
4709 sie. Mais ce qui fait très bien dans un Cahier de la quinzaine, ça faisait de mauvaises notes dans nos carnets hebdomadair
4710 ournée d’enfance gâtée. Et d’ailleurs, multiplier le tapissier par le prix du mètre courant n’est pas une fantaisie pour c
4711 gâtée. Et d’ailleurs, multiplier le tapissier par le prix du mètre courant n’est pas une fantaisie pour ce petit être qui
4712 e pour ce petit être qui s’énerve, qui embrouille les règles, qui a sommeil, qui a peur de faire faux, parce que les autres
4713 ui a sommeil, qui a peur de faire faux, parce que les autres auront fait juste, et qui voudrait bien pleurer, et qui recomm
4714 rdoise où sèchent des traînées de craie grise, où les chiffres trop gros s’emmêlent… Et c’est cela l’enfance insouciante ?
4715 les chiffres trop gros s’emmêlent… Et c’est cela l’ enfance insouciante ? Qu’est-ce qui ressemble plus au souci quotidien
4716 s au souci quotidien des grandes personnes ? Mais l’ enfance est ailleurs. Je revois ce fond de jardin où l’on trouve des c
4717 ance est ailleurs. Je revois ce fond de jardin où l’ on trouve des cloportes dans la toile mouillée d’une tente d’Indiens,
4718 fond de jardin où l’on trouve des cloportes dans la toile mouillée d’une tente d’Indiens, des petites guerres mystérieuse
4719 , des matins de dimanche sonores et tout propres, la cuiller d’huile de foie de morue avant le repas, et le monsieur qui r
4720 ropres, la cuiller d’huile de foie de morue avant le repas, et le monsieur qui racontait gravement des choses qu’on ne com
4721 iller d’huile de foie de morue avant le repas, et le monsieur qui racontait gravement des choses qu’on ne comprend pas, la
4722 ntait gravement des choses qu’on ne comprend pas, la prière du soir pour qu’il fasse beau demain, Michel Strogoff et Rémy
4723 main, Michel Strogoff et Rémy un fils de vaincus, les tours de carrousel, les chemins dans la forêt en automne, des jeux, d
4724 Rémy un fils de vaincus, les tours de carrousel, les chemins dans la forêt en automne, des jeux, des feuillages, des rêver
4725 vaincus, les tours de carrousel, les chemins dans la forêt en automne, des jeux, des feuillages, des rêveries, des recoins
4726 peu divine, baignée d’une très vague angoisse que l’ on fuyait avec des bonheurs fous dans les bras maternels, ou bien ces
4727 oisse que l’on fuyait avec des bonheurs fous dans les bras maternels, ou bien ces promenades en tenant la forte main du pèr
4728 bras maternels, ou bien ces promenades en tenant la forte main du père qui fait de longs pas réguliers… L’École, dans ce
4729 rte main du père qui fait de longs pas réguliers… L’ École, dans ce concert de souvenirs, n’est qu’une dissonance douloureu
4730 uloureuse2. Deux angoisses dominent mon enfance : les séances chez le dentiste et l’horaire des leçons. Ce malaise inavouab
4731 angoisses dominent mon enfance : les séances chez le dentiste et l’horaire des leçons. Ce malaise inavouable, cette règle
4732 ent mon enfance : les séances chez le dentiste et l’ horaire des leçons. Ce malaise inavouable, cette règle méchante, ce so
4733 appris à lire, en cachette, avec une sœur aînée. L’ année suivante, on me mit à l’école, parce que c’est la loi. La premiè
4734 vec une sœur aînée. L’année suivante, on me mit à l’ école, parce que c’est la loi. La première classe fut agréable : j’ali
4735 ée suivante, on me mit à l’école, parce que c’est la loi. La première classe fut agréable : j’alignais des bâtons en rêvan
4736 e pensais pas devoir suivre syllabe après syllabe les ânonnements des élèves qui déchiffraient les premières phrases exempl
4737 hrases exemplaires. (J’aimais pourtant Zoé lave à la fontaine, à cause du nom.) Quand venait mon tour, je savais rarement
4738 om.) Quand venait mon tour, je savais rarement où l’ on en était. Cela m’attira des reproches acides, et naturellement, la
4739 m’attira des reproches acides, et naturellement, la phrase sacrée : « Il faut que tous fassent la même chose, ici ! » Dan
4740 nt, la phrase sacrée : « Il faut que tous fassent la même chose, ici ! » Dans la suite, on se chargea d’illustrer par d’in
4741 faut que tous fassent la même chose, ici ! » Dans la suite, on se chargea d’illustrer par d’innombrables exemples cet axio
4742 par d’innombrables exemples cet axiome qui devint la formule de mes premières douleurs morales. Après six ans de ce régime
4743 rentrée, ma colère n’en fut que plus malfaisante. L’ école me rendit au monde, vers l’âge de 18 ans, crispé et méfiant, san
4744 lus malfaisante. L’école me rendit au monde, vers l’ âge de 18 ans, crispé et méfiant, sans cesse en garde contre moi-même
4745 ait pas différer, profondément hypocrite donc, et le cerveau saturé d’évidences du type 2 et 2 font 4, ou : tous les homme
4746 turé d’évidences du type 2 et 2 font 4, ou : tous les hommes doivent être égaux en tout. Deux fois deux quatre, c’est stéri
4747 s de citer, je découvris un jour qu’elle contient la cause déterminante de notre malaise. Il me fallut un certain temps po
4748 ue je me posai la question : est-ce vrai que tous les hommes doivent être égaux en tout ? Et la première réponse fut : Il f
4749 réponse fut : Il faut que ce soit vrai, pour que la démocratie prospère et étende ses conquêtes. C’était découvrir notre
4750 dignations de nos maîtres quand ils dénonçaient «  la marque indélébile de l’éducation jésuite ». Nous étions marqués par N
4751 s quand ils dénonçaient « la marque indélébile de l’ éducation jésuite ». Nous étions marqués par Numa Droz et les manuels
4752 n jésuite ». Nous étions marqués par Numa Droz et les manuels des Frères ∴, par l’esprit petit-bourgeois, qui est une génér
4753 és par Numa Droz et les manuels des Frères ∴, par l’ esprit petit-bourgeois, qui est une généralisation de l’avarice, et pa
4754 it petit-bourgeois, qui est une généralisation de l’ avarice, et par les dogmes démocratiques, qui sont une généralisation
4755 , qui est une généralisation de l’avarice, et par les dogmes démocratiques, qui sont une généralisation de la règle de troi
4756 mes démocratiques, qui sont une généralisation de la règle de trois, aussi profondément certes qu’un Voltaire le fut par l
4757 e trois, aussi profondément certes qu’un Voltaire le fut par les jésuites : du moins ceux-ci lui laissèrent-ils assez de v
4758 ssi profondément certes qu’un Voltaire le fut par les jésuites : du moins ceux-ci lui laissèrent-ils assez de verdeur d’esp
4759 pire. Mais on avait brisé en nous ces ressorts de la révolte et de la libération d’une personnalité : l’imagination, le se
4760 it brisé en nous ces ressorts de la révolte et de la libération d’une personnalité : l’imagination, le sens de l’arbitrair
4761 révolte et de la libération d’une personnalité : l’ imagination, le sens de l’arbitraire et le sens de la relativité des d
4762 la libération d’une personnalité : l’imagination, le sens de l’arbitraire et le sens de la relativité des décrets humains.
4763 on d’une personnalité : l’imagination, le sens de l’ arbitraire et le sens de la relativité des décrets humains. Le prix de
4764 alité : l’imagination, le sens de l’arbitraire et le sens de la relativité des décrets humains. Le prix de mes souffrances
4765 magination, le sens de l’arbitraire et le sens de la relativité des décrets humains. Le prix de mes souffrances était donc
4766 et le sens de la relativité des décrets humains. Le prix de mes souffrances était donc ce conformisme indispensable aux «
4767 principes ». Je n’allai pas tout de suite jusqu’à les mettre en doute : mais un jour je compris que ce n’étaient que des pr
4768 les d’une arithmétique élémentaire, ce monde dont la Démocratie apparaissait comme l’achèvement idéal et nécessaire — et q
4769 e, ce monde dont la Démocratie apparaissait comme l’ achèvement idéal et nécessaire — et qui était le seul pour lequel on n
4770 e l’achèvement idéal et nécessaire — et qui était le seul pour lequel on nous préparait —, c’était un système d’abstractio
4771 tait un système d’abstractions primaires, c’était le rêve raisonnablement organisé des esprits moyens, prosaïques et rassi
4772 s, prosaïques et rassis3 qui tiennent aujourd’hui les charges de l’État, piliers d’un régime dont ils sont les seuls à s’ac
4773 t rassis3 qui tiennent aujourd’hui les charges de l’ État, piliers d’un régime dont ils sont les seuls à s’accommoder parce
4774 rges de l’État, piliers d’un régime dont ils sont les seuls à s’accommoder parce qu’ils l’ont établi à la mesure exacte de
4775 nt ils sont les seuls à s’accommoder parce qu’ils l’ ont établi à la mesure exacte de leurs besoins. Nous ne croyions plus
4776 seuls à s’accommoder parce qu’ils l’ont établi à la mesure exacte de leurs besoins. Nous ne croyions plus aux démons, mai
4777 besoins. Nous ne croyions plus aux démons, mais à la Commission scolaire. Nous n’avions plus de « superstitions grossières
4778 stitions grossières » comme celles qui touchent à l’ action des étoiles par exemple. Mais nous avions acquis le respect des
4779 des étoiles par exemple. Mais nous avions acquis le respect des statistiques. Nous savions que les miracles ne trompent q
4780 uis le respect des statistiques. Nous savions que les miracles ne trompent que les illettrés, mais qu’il convient de s’incl
4781 es. Nous savions que les miracles ne trompent que les illettrés, mais qu’il convient de s’incliner devant les miracles de l
4782 lettrés, mais qu’il convient de s’incliner devant les miracles de la science appliquée. On nous faisait voir tout au long d
4783 ’il convient de s’incliner devant les miracles de la science appliquée. On nous faisait voir tout au long de notre histoir
4784 nous faisait voir tout au long de notre histoire le Progrès constant de l’humanité vers les lumières, l’incrédulité et le
4785 au long de notre histoire le Progrès constant de l’ humanité vers les lumières, l’incrédulité et le bien-être matériel. No
4786 e histoire le Progrès constant de l’humanité vers les lumières, l’incrédulité et le bien-être matériel. Nous savions qu’un
4787 Progrès constant de l’humanité vers les lumières, l’ incrédulité et le bien-être matériel. Nous savions qu’un fils d’ouvrie
4788 de l’humanité vers les lumières, l’incrédulité et le bien-être matériel. Nous savions qu’un fils d’ouvrier est l’égal d’un
4789 e matériel. Nous savions qu’un fils d’ouvrier est l’ égal d’un petit Dauphin — et même nous ne pouvions nous empêcher de cr
4790 même nous ne pouvions nous empêcher de croire que le petit ouvrier est bien plus malin. Nous savions un tas de choses doul
4791 e choses douloureusement ennuyeuses qui sont dans les livres — et nulle part ailleurs. Maigre nourriture pour nos rêves. No
4792 re nourriture pour nos rêves. Nous arrivions dans la vie avec des mentions honorables et une inconcevable gaucherie, c’est
4793 et une honte secrète qui exaspérait ce mépris et le rendait agressif. Mais moi, j’avais trop souffert de cette compressio
4794 riellement délivré, en supporter longtemps encore l’ action. Je n’eus pas plus tôt découvert et nommé cet asservissement de
4795 plus tôt découvert et nommé cet asservissement de l’ esprit et ces mythes stériles, que je les rendis responsables de ma pe
4796 sement de l’esprit et ces mythes stériles, que je les rendis responsables de ma perte de contact avec les réalités les plus
4797 s rendis responsables de ma perte de contact avec les réalités les plus élémentaires de la vie. 2. Dans le cas le plus fa
4798 onsables de ma perte de contact avec les réalités les plus élémentaires de la vie. 2. Dans le cas le plus favorable, c’es
4799 ontact avec les réalités les plus élémentaires de la vie. 2. Dans le cas le plus favorable, c’est un silence, un vide. C
4800 alités les plus élémentaires de la vie. 2. Dans le cas le plus favorable, c’est un silence, un vide. C’était en dehors d
4801 les plus élémentaires de la vie. 2. Dans le cas le plus favorable, c’est un silence, un vide. C’était en dehors de la vi
4802 , c’est un silence, un vide. C’était en dehors de la vie. 3. du pain rassis.
82 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 2. Description du monstre
4803 2. Description du monstre Le service militaire me permit de retrouver quelques-unes de ces réalité
4804 Car ces différences sont les premières marques de la vie vécue et l’on aime à y découvrir la seule fraternité véritable. M
4805 ces sont les premières marques de la vie vécue et l’ on aime à y découvrir la seule fraternité véritable. Mais c’est en cas
4806 arques de la vie vécue et l’on aime à y découvrir la seule fraternité véritable. Mais c’est en caserne aussi que je devais
4807 is c’est en caserne aussi que je devais retrouver les instituteurs. Ceux-là n’avaient pas bougé. Et pour cause : ils n’étai
4808 é. Et pour cause : ils n’étaient jamais sortis de l’ école. Rien ne ressemble plus à un bon élève qu’un instituteur : de l’
4809 à l’autre il n’y a pas de solution de continuité, la différence n’étant qu’une question d’âge, non d’expérience vécue. Ce
4810 grand nombre de cas, mais pourquoi ai-je envie de le dire ? L’instituteur sous l’uniforme peut être défini par son incompr
4811 re de cas, mais pourquoi ai-je envie de le dire ? L’ instituteur sous l’uniforme peut être défini par son incompréhension m
4812 rquoi ai-je envie de le dire ? L’instituteur sous l’ uniforme peut être défini par son incompréhension méthodique des homme
4813 éhension méthodique des hommes et son mépris pour les paysans. Qu’il soit officier ou troupier, on le reconnaît à une façon
4814 les paysans. Qu’il soit officier ou troupier, on le reconnaît à une façon pédante d’être consciencieux, à une façon bless
4815 être supérieur, à une façon livresque d’expliquer les choses, à une façon théorique de juger les êtres. Ces distributeurs a
4816 liquer les choses, à une façon théorique de juger les êtres. Ces distributeurs automatiques (brevetés par le gouvernement)
4817 res. Ces distributeurs automatiques (brevetés par le gouvernement) de la manne égalitaire — ne se prennent pas pour de la
4818 rs automatiques (brevetés par le gouvernement) de la manne égalitaire — ne se prennent pas pour de la petite bière. Ils on
4819 la manne égalitaire — ne se prennent pas pour de la petite bière. Ils ont conscience d’appartenir à une élite responsable
4820 ce ridicule n’échappe pas à ceux qu’ils méprisent le plus, et ils auraient souvent l’occasion de s’en douter s’ils étaient
4821 qu’ils méprisent le plus, et ils auraient souvent l’ occasion de s’en douter s’ils étaient sensibles aux finesses de l’iron
4822 en douter s’ils étaient sensibles aux finesses de l’ ironie paysanne. Mais je n’en dirai pas plus, de peur de m’échauffer
4823 pas plus, de peur de m’échauffer inutilement. Si l’ on me poussait un peu, je crois que je m’oublierais au point d’insinue
4824 crois que je m’oublierais au point d’insinuer que les instituteurs galonnés causent autant de tort à l’armée que les instit
4825 es instituteurs galonnés causent autant de tort à l’ armée que les instituteurs antimilitaristes qui signent des manifestes
4826 urs galonnés causent autant de tort à l’armée que les instituteurs antimilitaristes qui signent des manifestes en mauvais f
4827 manifestes en mauvais français — et je ferais de la peine à d’excellents garçons. Revenons au civil. Au village, quand on
4828 es farces où ils sont drôles, mais non point dans la vie courante où ils le sont beaucoup moins. Le Messieu fait sans dout
4829 rôles, mais non point dans la vie courante où ils le sont beaucoup moins. Le Messieu fait sans doute des vers sur la viole
4830 ns la vie courante où ils le sont beaucoup moins. Le Messieu fait sans doute des vers sur la violette, périodiquement, com
4831 up moins. Le Messieu fait sans doute des vers sur la violette, périodiquement, comme on fait… un rhume de cerveau. Il joue
4832 lque instrument. Il a des idées modernes sur tous les sujets, espécialement sur la pédagogie. Ce mot revient souvent dans s
4833 s modernes sur tous les sujets, espécialement sur la pédagogie. Ce mot revient souvent dans sa conversation ; il le pronon
4834 Ce mot revient souvent dans sa conversation ; il le prononce avec un inimitable sérieux, avec un P majuscule. On sent que
4835 st là son affaire : Monsieur en un mot est M’sieu l’ Instituteur. Signes particuliers : cheveux longs, regard profond voilé
4836 eveux longs, regard profond voilé de douceur. Car le type populaire du poète romantique s’est dégradé en deux sous-types p
4837 ique s’est dégradé en deux sous-types posthumes : l’ artiste photographe et le régent. J’ai fait allusion au lieutenant-ins
4838 x sous-types posthumes : l’artiste photographe et le régent. J’ai fait allusion au lieutenant-instituteur qui veut faire d
4839 usion au lieutenant-instituteur qui veut faire de la pédagogie avec sa section. L’instituteur-lieutenant qui veut traiter
4840 r qui veut faire de la pédagogie avec sa section. L’ instituteur-lieutenant qui veut traiter militairement ses élèves témoi
4841 veut traiter militairement ses élèves témoigne de la même maladresse professionnelle. J’en connaissais un qui avait coutum
4842 de garçons de 10 à 11 ans : « J’ai bien su mater les quarante hommes de ma section, je saurai aussi vous mater. » On imagi
4843 aussi vous mater. » On imagine à quoi peut mener l’ enseignement donné par des êtres qui brouillent à ce point les méthode
4844 ent donné par des êtres qui brouillent à ce point les méthodes. Simple remarque pendant que nous en sommes aux instituteurs
4845 en sommes aux instituteurs : ils sortent tous de la même classe sociale, de la petite bourgeoisie. Est-ce que l’esprit pe
4846  : ils sortent tous de la même classe sociale, de la petite bourgeoisie. Est-ce que l’esprit petit-bourgeois qui imprègne
4847 sse sociale, de la petite bourgeoisie. Est-ce que l’ esprit petit-bourgeois qui imprègne l’enseignement primaire constitue
4848 Est-ce que l’esprit petit-bourgeois qui imprègne l’ enseignement primaire constitue l’apport des instituteurs, ou bien pré
4849 is qui imprègne l’enseignement primaire constitue l’ apport des instituteurs, ou bien préexiste-t-il dans les principes mêm
4850 ort des instituteurs, ou bien préexiste-t-il dans les principes mêmes de l’École, et attire-t-il les petits bourgeois comme
4851 u bien préexiste-t-il dans les principes mêmes de l’ École, et attire-t-il les petits bourgeois comme le portrait de Numa D
4852 ns les principes mêmes de l’École, et attire-t-il les petits bourgeois comme le portrait de Numa Droz attirait les mouches 
4853 ’École, et attire-t-il les petits bourgeois comme le portrait de Numa Droz attirait les mouches ? (Le verre en était toujo
4854 bourgeois comme le portrait de Numa Droz attirait les mouches ? (Le verre en était toujours jaune.) Je n’ai ni le droit ni
4855 le portrait de Numa Droz attirait les mouches ? ( Le verre en était toujours jaune.) Je n’ai ni le droit ni l’envie de dir
4856  ? (Le verre en était toujours jaune.) Je n’ai ni le droit ni l’envie de dire du mal des petits bourgeois. Ils sont au moi
4857 en était toujours jaune.) Je n’ai ni le droit ni l’ envie de dire du mal des petits bourgeois. Ils sont au moins aussi sym
4858 sympathiques que n’importe quelle autre classe de la société. Mais l’esprit petit-bourgeois pris abstraitement et tel qu’i
4859 n’importe quelle autre classe de la société. Mais l’ esprit petit-bourgeois pris abstraitement et tel qu’il se manifeste da
4860 pris abstraitement et tel qu’il se manifeste dans l’ école primaire est un véritable virus de mesquinerie, et devrait être
4861 les ». Je reviendrai peut-être sur ce point. Pour l’ instant je ne veux que décrire l’école telle qu’on la voit. Après les
4862 r ce point. Pour l’instant je ne veux que décrire l’ école telle qu’on la voit. Après les personnes, le décor. La laideur d
4863 nstant je ne veux que décrire l’école telle qu’on la voit. Après les personnes, le décor. La laideur des collèges n’est pa
4864 ux que décrire l’école telle qu’on la voit. Après les personnes, le décor. La laideur des collèges n’est pas accidentelle.
4865 l’école telle qu’on la voit. Après les personnes, le décor. La laideur des collèges n’est pas accidentelle. C’est celle mê
4866 lle qu’on la voit. Après les personnes, le décor. La laideur des collèges n’est pas accidentelle. C’est celle même du régi
4867 est pas accidentelle. C’est celle même du régime. l’ architecture de nos « palais scolaires ». symbolise d’une façon frappa
4868 e ce qu’il y a de schématique et de monotone dans la conception démocratique du monde. Entrons, c’est pire encore. Beaucou
4869 ants ont un frisson de dégoût au moment de passer la porte, au son de la cloche : l’odeur de goudron et d’urinoirs qui imp
4870 de dégoût au moment de passer la porte, au son de la cloche : l’odeur de goudron et d’urinoirs qui imprègne les corridors
4871 moment de passer la porte, au son de la cloche : l’ odeur de goudron et d’urinoirs qui imprègne les corridors et les habit
4872 e : l’odeur de goudron et d’urinoirs qui imprègne les corridors et les habits des écoliers empeste encore mes souvenirs. Et
4873 udron et d’urinoirs qui imprègne les corridors et les habits des écoliers empeste encore mes souvenirs. Et la poussière dan
4874 its des écoliers empeste encore mes souvenirs. Et la poussière dans l’air, l’encre sur les tables — c’était pourtant un re
4875 mpeste encore mes souvenirs. Et la poussière dans l’ air, l’encre sur les tables — c’était pourtant un refuge pour l’imagin
4876 encore mes souvenirs. Et la poussière dans l’air, l’ encre sur les tables — c’était pourtant un refuge pour l’imagination q
4877 ouvenirs. Et la poussière dans l’air, l’encre sur les tables — c’était pourtant un refuge pour l’imagination que ces initia
4878 sur les tables — c’était pourtant un refuge pour l’ imagination que ces initiales, ces signes, ces devises… —, les estampe
4879 on que ces initiales, ces signes, ces devises… —, les estampes piquées, Numa Droz et ses crottes de mouches… Dans ce décor
4880 s ! Et vous pensez que c’est un grand progrès sur la Nature. Quelle peut bien être la vertu éducatrice d’un tel milieu, mo
4881 rand progrès sur la Nature. Quelle peut bien être la vertu éducatrice d’un tel milieu, moral et matériel ? L’école publiqu
4882 u éducatrice d’un tel milieu, moral et matériel ? L’ école publique, telle que nous la voyons est semblable à tous ces monu
4883 al et matériel ? L’école publique, telle que nous la voyons est semblable à tous ces monuments « de la mauvaise époque » q
4884 la voyons est semblable à tous ces monuments « de la mauvaise époque » qui sont dans nos villes l’apport du xixe siècle.
4885  de la mauvaise époque » qui sont dans nos villes l’ apport du xixe siècle. Ils ne parviennent ni à la beauté ni à l’utili
4886 l’apport du xixe siècle. Ils ne parviennent ni à la beauté ni à l’utilité, et ils sont déjà démodés. On dit que le style
4887 e siècle. Ils ne parviennent ni à la beauté ni à l’ utilité, et ils sont déjà démodés. On dit que le style 1880 n’en est p
4888 à l’utilité, et ils sont déjà démodés. On dit que le style 1880 n’en est pas un : mais l’absence de style est encore un st
4889 . On dit que le style 1880 n’en est pas un : mais l’ absence de style est encore un style ; c’est même le pire.
4890 absence de style est encore un style ; c’est même le pire.
83 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 3. Anatomie du monstre
4891 pour quelles raisons j’ai entrepris de combattre l’ instruction publique — on ne me contestera pas ces raisons puisqu’elle
4892 s me sont absolument personnelles et qu’elles ont la valeur d’un témoignage, ni plus ni moins — il est temps que je fasse
4893 cœur non compris ». Aux yeux de beaucoup de gens, la passion est aveuglante : cela tient pour une bonne part à ce que ces
4894 nt pour une bonne part à ce que ces personnes ont les yeux faibles. Il serait plus juste de dire que la passion n’a qu’une
4895 es yeux faibles. Il serait plus juste de dire que la passion n’a qu’une clairvoyance intéressée : mais celles-là sont les
4896 une clairvoyance intéressée : mais celles-là sont les plus vives. Enfin, je tiens à reconnaître qu’ici je ne cherche point
4897 je tiens à reconnaître qu’ici je ne cherche point l’ équité. Pas plus que vous qui défendez de parti pris ce que j’attaque.
4898 vous qui défendez de parti pris ce que j’attaque. L’ esprit d’équité, avec son préjugé pacifiste n’est pas toujours l’espri
4899 té, avec son préjugé pacifiste n’est pas toujours l’ esprit de vérité, il s’en faut. Or je ne suis pas de ceux qui subordon
4900 faut. Or je ne suis pas de ceux qui subordonnent la vérité à la tranquillité bourgeoise. Je tiens le « gain de paix » pou
4901 ne suis pas de ceux qui subordonnent la vérité à la tranquillité bourgeoise. Je tiens le « gain de paix » pour illusoire 
4902 la vérité à la tranquillité bourgeoise. Je tiens le « gain de paix » pour illusoire : il consiste à repousser la difficul
4903 e paix » pour illusoire : il consiste à repousser la difficulté dans l’avenir, d’une ou deux générations. Pendant ce temps
4904 oire : il consiste à repousser la difficulté dans l’ avenir, d’une ou deux générations. Pendant ce temps elle s’aggrave, et
4905 ndant ce temps elle s’aggrave, et nous voici avec l’ héritage de cinquante ans de radicalisme sur les bras. L’écheveau est
4906 ec l’héritage de cinquante ans de radicalisme sur les bras. L’écheveau est tellement embrouillé que déjà plusieurs proposen
4907 age de cinquante ans de radicalisme sur les bras. L’ écheveau est tellement embrouillé que déjà plusieurs proposent de tran
4908 brouillé que déjà plusieurs proposent de trancher le nœud. Je me bornerai à l’examen des caractères les plus généraux de l
4909 s proposent de trancher le nœud. Je me bornerai à l’ examen des caractères les plus généraux de l’instruction publique, ceu
4910 le nœud. Je me bornerai à l’examen des caractères les plus généraux de l’instruction publique, ceux que n’atteignent dans l
4911 ai à l’examen des caractères les plus généraux de l’ instruction publique, ceux que n’atteignent dans leur principe ni les
4912 ique, ceux que n’atteignent dans leur principe ni les réformes de détail ni les modalités locales de réalisations pratiques
4913 t dans leur principe ni les réformes de détail ni les modalités locales de réalisations pratiques. Le programme a) l’h
4914 es modalités locales de réalisations pratiques. Le programme a) l’horaire : c’est un cadre, ou plutôt un moule, dans
4915 s de réalisations pratiques. Le programme a) l’ horaire : c’est un cadre, ou plutôt un moule, dans lequel on verse les
4916 n cadre, ou plutôt un moule, dans lequel on verse les matières les plus hétéroclites, sans égard à leurs qualités propres.
4917 lutôt un moule, dans lequel on verse les matières les plus hétéroclites, sans égard à leurs qualités propres. De 8 à 9 arit
4918 uit, de manière à prévenir toute concentration de l’ esprit. b) plan d’études. On a divisé l’enseignement en branches bien
4919 ration de l’esprit. b) plan d’études. On a divisé l’ enseignement en branches bien distinctes. On attribue à chacune un cer
4920 s’arrange à faire tenir dans cette classification le plus possible de « connaissances » qui dès lors deviennent obligatoir
4921 aissances » qui dès lors deviennent obligatoires. La somme et l’arrangement des parties doivent être identiques pour tous
4922 qui dès lors deviennent obligatoires. La somme et l’ arrangement des parties doivent être identiques pour tous les écoliers
4923 ent des parties doivent être identiques pour tous les écoliers. Ce plan régit les huit années réglementaires de la scolarit
4924 identiques pour tous les écoliers. Ce plan régit les huit années réglementaires de la scolarité, et englobe la totalité de
4925 . Ce plan régit les huit années réglementaires de la scolarité, et englobe la totalité de la science nécessaire à tout cit
4926 années réglementaires de la scolarité, et englobe la totalité de la science nécessaire à tout citoyen, dans une vue aussi
4927 taires de la scolarité, et englobe la totalité de la science nécessaire à tout citoyen, dans une vue aussi large que simpl
4928 papier, d’un crayon et d’une règle (pour diviser la page en casiers rectangulaires, bien proprement.) Évidemment, il est
4929 t.) Évidemment, il est préférable de savoir aussi les noms des sciences élémentaires. Mais il n’est en aucune façon nécessa
4930 il n’est en aucune façon nécessaire de connaître la psychologie des enfants, ni même le contenu des sciences dont on écri
4931 de connaître la psychologie des enfants, ni même le contenu des sciences dont on écrit les noms dans les casiers. Est-ce
4932 ts, ni même le contenu des sciences dont on écrit les noms dans les casiers. Est-ce que l’étude du trapézoïde est particuli
4933 contenu des sciences dont on écrit les noms dans les casiers. Est-ce que l’étude du trapézoïde est particulièrement indiqu
4934 nt on écrit les noms dans les casiers. Est-ce que l’ étude du trapézoïde est particulièrement indiquée pour préparer les él
4935 zoïde est particulièrement indiquée pour préparer les élèves à une composition française ? Question oiseuse et saugrenue, —
4936 ançaise ? Question oiseuse et saugrenue, — naïve. Le bon sens voudrait que l’on tînt compte des possibilités d’adaptation
4937 e et saugrenue, — naïve. Le bon sens voudrait que l’ on tînt compte des possibilités d’adaptation de l’enfant ; de la valeu
4938 l’on tînt compte des possibilités d’adaptation de l’ enfant ; de la valeur fort inégale de ces disciplines ; de la diversit
4939 te des possibilités d’adaptation de l’enfant ; de la valeur fort inégale de ces disciplines ; de la diversité des besoins 
4940 de la valeur fort inégale de ces disciplines ; de la diversité des besoins ; enfin des rythmes naturels de l’esprit humain
4941 rsité des besoins ; enfin des rythmes naturels de l’ esprit humain, qu’il se trouve que le Créateur n’a point accordés à l’
4942 naturels de l’esprit humain, qu’il se trouve que le Créateur n’a point accordés à l’actuelle division horaire des journée
4943 il se trouve que le Créateur n’a point accordés à l’ actuelle division horaire des journées… Monsieur, répondent les foncti
4944 ivision horaire des journées… Monsieur, répondent les fonctionnaires responsables, vous savez par expérience que nous ne co
4945 s savez par expérience que nous ne comprenons pas la plaisanterie et que notre temps est précieux. D’ailleurs, les enfants
4946 erie et que notre temps est précieux. D’ailleurs, les enfants ne se plaignent pas, de quoi vous plaignez-vous, vous ? — Mai
4947 quoi vous plaignez-vous, vous ? — Mais on fausse l’ esprit de ces enfants… — Mais on nous paye, et ils n’en meurent pas.
4948 — Mais on nous paye, et ils n’en meurent pas. Les examens Ce sont en principe des « contrôles » comparables à ceux q
4949 principe des « contrôles » comparables à ceux que l’ on établit lors des grandes épreuves cyclistes. Les participants du To
4950 l’on établit lors des grandes épreuves cyclistes. Les participants du Tour de Science doivent s’inscrire au terme de chaque
4951 erme de chaque trimestre. Ceux qui arrivent après la clôture ont à refaire l’étape. On obtient par ce moyen un peloton hom
4952 Ceux qui arrivent après la clôture ont à refaire l’ étape. On obtient par ce moyen un peloton homogène, facile à surveille
4953 e, facile à surveiller. Mais en matière de sport, la tricherie est difficile, tandis qu’à l’école elle est de règle. Car l
4954 de sport, la tricherie est difficile, tandis qu’à l’ école elle est de règle. Car la qualité et la quantité des réponses « 
4955 icile, tandis qu’à l’école elle est de règle. Car la qualité et la quantité des réponses « fournies » par le prévenu (l’él
4956 qu’à l’école elle est de règle. Car la qualité et la quantité des réponses « fournies » par le prévenu (l’élève examiné) n
4957 lité et la quantité des réponses « fournies » par le prévenu (l’élève examiné) n’a qu’un lointain rapport avec la qualité
4958 uantité des réponses « fournies » par le prévenu ( l’ élève examiné) n’a qu’un lointain rapport avec la qualité et la quanti
4959 (l’élève examiné) n’a qu’un lointain rapport avec la qualité et la quantité des efforts « fournis » au cours du trimestre.
4960 né) n’a qu’un lointain rapport avec la qualité et la quantité des efforts « fournis » au cours du trimestre. Ce phénomène
4961 ant s’explique justement par cette psychologie de l’ enfant dont je disais tout à l’heure que la connaissance n’est pas exi
4962 tte psychologie de l’enfant dont je disais tout à l’ heure que la connaissance n’est pas exigée de ceux qui établissent les
4963 gie de l’enfant dont je disais tout à l’heure que la connaissance n’est pas exigée de ceux qui établissent les programmes
4964 aissance n’est pas exigée de ceux qui établissent les programmes et les examens. « Les examens faussent complètement l’espr
4965 exigée de ceux qui établissent les programmes et les examens. « Les examens faussent complètement l’esprit de l’enseigneme
4966 qui établissent les programmes et les examens. «  Les examens faussent complètement l’esprit de l’enseignement », lit-on ju
4967 les examens. « Les examens faussent complètement l’ esprit de l’enseignement », lit-on jusque sous la plume de divers maît
4968 . « Les examens faussent complètement l’esprit de l’ enseignement », lit-on jusque sous la plume de divers maîtres primaire
4969 s et secondaires. Ils n’en sont pas moins devenus le but même de l’instruction ; la fin qui justifie les moyens et à quoi
4970 s. Ils n’en sont pas moins devenus le but même de l’ instruction ; la fin qui justifie les moyens et à quoi l’on subordonne
4971 pas moins devenus le but même de l’instruction ; la fin qui justifie les moyens et à quoi l’on subordonne tout, plaisir,
4972 e but même de l’instruction ; la fin qui justifie les moyens et à quoi l’on subordonne tout, plaisir, goût au travail, qual
4973 uction ; la fin qui justifie les moyens et à quoi l’ on subordonne tout, plaisir, goût au travail, qualité du travail, sant
4974 vail, qualité du travail, santé, liberté, sens de la justice et autres balivernes, instruction véritable et autres plaisan
4975 le et autres plaisanteries de gros calibre, car à la vérité ce n’est pas d’enseigner qu’il s’agit, mais de soumettre les e
4976 t pas d’enseigner qu’il s’agit, mais de soumettre les esprits au contrôle de l’État, voyons donc, — n’avez-vous pas honte d
4977 git, mais de soumettre les esprits au contrôle de l’ État, voyons donc, — n’avez-vous pas honte de vous faire rappeler sans
4978 ler sans cesse des vérités aussi élémentaires. L’ égalitarisme des connaissances De l’existence des programmes, qui e
4979 taires. L’égalitarisme des connaissances De l’ existence des programmes, qui est un fait, et de l’existence de la Dém
4980 ’existence des programmes, qui est un fait, et de l’ existence de la Démocratie, qui est une prétention (réservons le mot d
4981 programmes, qui est un fait, et de l’existence de la Démocratie, qui est une prétention (réservons le mot d’idéal), découl
4982 la Démocratie, qui est une prétention (réservons le mot d’idéal), découle cette exigence théorique : tous les enfants doi
4983 d’idéal), découle cette exigence théorique : tous les enfants doivent à tout instant être en mesure 1° d’ingurgiter la même
4984 ent à tout instant être en mesure 1° d’ingurgiter la même quantité de « matière » ; 2° d’en rendre compte de la même façon
4985 uantité de « matière » ; 2° d’en rendre compte de la même façon, dans le même temps. Contentons-nous de remarquer que ce p
4986  » ; 2° d’en rendre compte de la même façon, dans le même temps. Contentons-nous de remarquer que ce principe est à la bas
4987 ontentons-nous de remarquer que ce principe est à la base du système ; qui repose donc sur une tranquille méconnaissance d
4988 repose donc sur une tranquille méconnaissance de la nature humaine. L’histoire enregistre bien une ou deux autres bêtises
4989 e tranquille méconnaissance de la nature humaine. L’ histoire enregistre bien une ou deux autres bêtises de cette épaisseur
4990 xtension universelle et un caractère obligatoire. L’ école exige donc que les meilleurs ralentissent et que les plus faible
4991 un caractère obligatoire. L’école exige donc que les meilleurs ralentissent et que les plus faibles se forcent. Elle ne co
4992 exige donc que les meilleurs ralentissent et que les plus faibles se forcent. Elle ne convient qu’aux médiocres, dont elle
4993 le ne convient qu’aux médiocres, dont elle assure le triomphe. L’école s’attaque impitoyablement aux natures d’exception,
4994 t qu’aux médiocres, dont elle assure le triomphe. L’ école s’attaque impitoyablement aux natures d’exception, et les réduit
4995 taque impitoyablement aux natures d’exception, et les réduit avec acharnement à son commun dénominateur4. Nos bourgeois ass
4996 s ils se fâchent tout rouge quand on leur dit que la Suisse est caractérisée, aux yeux de l’étranger impartial, par sa cul
4997 r dit que la Suisse est caractérisée, aux yeux de l’ étranger impartial, par sa culture intensive et extensive des veaux et
4998 nsive et extensive des veaux et des médiocres. Le gavage Moyen de réaliser les précédents. Plus ou moins rationalisé
4999 des médiocres. Le gavage Moyen de réaliser les précédents. Plus ou moins rationalisé. Son instrument le plus parfait
5000 édents. Plus ou moins rationalisé. Son instrument le plus parfait s’appelle le manuel. Un bon manuel est un résumé clair e
5001 onalisé. Son instrument le plus parfait s’appelle le manuel. Un bon manuel est un résumé clair et portatif des résultats a
5002 et portatif des résultats actuels d’une science. Le bon sens voudrait qu’on étudie d’abord la science dans sa réalité, pu
5003 cience. Le bon sens voudrait qu’on étudie d’abord la science dans sa réalité, puis qu’on se réfère au résumé comme à un ai
5004 se réfère au résumé comme à un aide-mémoire. Mais l’ école veut qu’on commence par apprendre le résumé. D’ailleurs elle s’a
5005 e. Mais l’école veut qu’on commence par apprendre le résumé. D’ailleurs elle s’arrête là. Les manuels ne correspondent à a
5006 apprendre le résumé. D’ailleurs elle s’arrête là. Les manuels ne correspondent à aucune réalité. Ils ne renferment rien qui
5007 , rien qui soit authentique. Ils négligent toutes les particularités, toutes les « prises » où pourrait s’accrocher l’intér
5008 . Ils négligent toutes les particularités, toutes les « prises » où pourrait s’accrocher l’intérêt. Ils dispensent de tout
5009 és, toutes les « prises » où pourrait s’accrocher l’ intérêt. Ils dispensent de tout contact direct avec ce dont ils traite
5010 tout contact direct avec ce dont ils traitent. Or la valeur éducative des choses n’apparaît qu’à celui qui entre en commer
5011 e de mille, dit un sage oriental dont j’ai oublié le nom. Une autre conséquence du gavage, c’est qu’on ne peut laisser aux
5012 du gavage, c’est qu’on ne peut laisser aux élèves le temps qu’il faut pour assimiler ce qu’ils apprennent. Ils sont forcés
5013 n’est pas modèle, il est absurde. Mais où sont à l’ école les modèles de ce qu’on nommait autrefois la belle ouvrage ? On
5014 as modèle, il est absurde. Mais où sont à l’école les modèles de ce qu’on nommait autrefois la belle ouvrage ? On va suppri
5015 l’école les modèles de ce qu’on nommait autrefois la belle ouvrage ? On va supprimer les leçons de calligraphie. La dis
5016 mait autrefois la belle ouvrage ? On va supprimer les leçons de calligraphie. La discipline On conçoit que la réalisa
5017  ? On va supprimer les leçons de calligraphie. La discipline On conçoit que la réalisation d’un programme entièremen
5018 calligraphie. La discipline On conçoit que la réalisation d’un programme entièrement contre nature exige une discip
5019 ne sévère. D’où notre conception pénitentiaire de l’ école. Mais, s’il est des disciplines qui renforcent, il en est d’aut
5020 renforcent, il en est d’autres qui amoindrissent. La discipline scolaire consiste à faire tenir les enfants immobiles et m
5021 nt. La discipline scolaire consiste à faire tenir les enfants immobiles et muets 6 heures par jour durant 8 ans. Il paraît
5022 ar jour durant 8 ans. Il paraît que cela facilite le travail du maître. Il se peut. Tout dépend de ce qu’on attend de ce t
5023 ravail. Je doute qu’il soit de nature à légitimer l’ énormité de l’effort qu’on demande à ces petits. Là encore il y a une
5024 te qu’il soit de nature à légitimer l’énormité de l’ effort qu’on demande à ces petits. Là encore il y a une exagération ab
5025 énéralisation si schématique et superficielle que la discipline perd tout son sens éducatif et n’est plus qu’une entrave é
5026 chez un peuple qui vraiment ne péchait point par l’ excès de cette vertu. La discipline primaire forme des gobeurs et des
5027 ment ne péchait point par l’excès de cette vertu. La discipline primaire forme des gobeurs et des inertes, fournit des mou
5028 tes, fournit des moutons aux partis et prédispose les citoyens suisses à prendre au sérieux les innombrables défense de, pe
5029 dispose les citoyens suisses à prendre au sérieux les innombrables défense de, petites crottes noires et blanches qui marqu
5030 es noires et blanches qui marquent un peu partout le passage de l’État, et dont la vue permet à ceux qui tombent du ciel s
5031 lanches qui marquent un peu partout le passage de l’ État, et dont la vue permet à ceux qui tombent du ciel sur notre sol d
5032 uent un peu partout le passage de l’État, et dont la vue permet à ceux qui tombent du ciel sur notre sol de s’écrier sans
5033 berté, liberté chérie, voilà bien ta patrie. » La préparation civique Tous les pontifes de l’instruction publique so
5034 en ta patrie. » La préparation civique Tous les pontifes de l’instruction publique sont d’accord sur ce point : l’éco
5035 La préparation civique Tous les pontifes de l’ instruction publique sont d’accord sur ce point : l’école primaire doi
5036 instruction publique sont d’accord sur ce point : l’ école primaire doit être une école de Démocratie. Ils insistent sur le
5037 t être une école de Démocratie. Ils insistent sur le fait que les leçons d’instruction civique sont insuffisantes pour for
5038 cole de Démocratie. Ils insistent sur le fait que les leçons d’instruction civique sont insuffisantes pour former le petit
5039 nstruction civique sont insuffisantes pour former le petit citoyen : il faut que l’enseignement tout entier soit occasion
5040 santes pour former le petit citoyen : il faut que l’ enseignement tout entier soit occasion de développer les vertus social
5041 eignement tout entier soit occasion de développer les vertus sociales de l’élève. « Une classe est une société en miniature
5042 oit occasion de développer les vertus sociales de l’ élève. « Une classe est une société en miniature. » Ceci est une énorm
5043 une énorme bourde. Juxtaposez trente enfants sur les bancs d’une salle d’école, vous n’aurez rien qui ressemble en quoi qu
5044 état social existant. Ce qui est vrai, c’est que le fait, absolument nouveau dans l’Histoire, que l’on oblige les enfants
5045 vrai, c’est que le fait, absolument nouveau dans l’ Histoire, que l’on oblige les enfants à vivre ensemble dès l’âge de 6
5046 le fait, absolument nouveau dans l’Histoire, que l’ on oblige les enfants à vivre ensemble dès l’âge de 6 ans, favorise le
5047 solument nouveau dans l’Histoire, que l’on oblige les enfants à vivre ensemble dès l’âge de 6 ans, favorise le développemen
5048 que l’on oblige les enfants à vivre ensemble dès l’ âge de 6 ans, favorise le développement de leurs penchants les plus « 
5049 nts à vivre ensemble dès l’âge de 6 ans, favorise le développement de leurs penchants les plus « communs » : jalousie, van
5050 ans, favorise le développement de leurs penchants les plus « communs » : jalousie, vanité, panurgisme, concurrence sournois
5051 e, esprit de parti, arrivisme et parlementarisme. La culture de l’esprit démocratique telle qu’elle est comprise par les i
5052 arti, arrivisme et parlementarisme. La culture de l’ esprit démocratique telle qu’elle est comprise par les instituteurs — 
5053 sprit démocratique telle qu’elle est comprise par les instituteurs — et elle ne peut être comprise autrement — est essentie
5054 nière que ce soit, voudraient « se distinguer ». ( Le mépris que notre peuple met dans cette expression !) Pour moi ce que
5055 expérience scolaire, c’est une grosse vérité que le bon sens m’eût par ailleurs fait voir : il n’y a pas d’égalité réelle
5056 : il n’y a pas d’égalité réelle possible tant que la loi est la même pour tous. Je ne parle pas des manuels d’histoire, do
5057 pas d’égalité réelle possible tant que la loi est la même pour tous. Je ne parle pas des manuels d’histoire, dont il est a
5058 i démontré qu’ils donnent une image mensongère de l’ ancienne Suisse, à l’usage du peuple souverain qui ne manque pas d’en
5059 nent une image mensongère de l’ancienne Suisse, à l’ usage du peuple souverain qui ne manque pas d’en être flatté. Et puis,
5060 e flatté. Et puis, quelle est cette préparation à la vie qui commence par nous soustraire à l’influence de la vie ? Quelle
5061 ation à la vie qui commence par nous soustraire à l’ influence de la vie ? Quelle est cette éducation sociale qui enlève l’
5062 qui commence par nous soustraire à l’influence de la vie ? Quelle est cette éducation sociale qui enlève l’enfant à la fam
5063 e ? Quelle est cette éducation sociale qui enlève l’ enfant à la famille ?5 Quel est cet instrument de perfectionnement civ
5064 est cette éducation sociale qui enlève l’enfant à la famille ?5 Quel est cet instrument de perfectionnement civique qui as
5065 instrument de perfectionnement civique qui assure l’ écrasement des plus délicats par les plus vulgaires ? L’idéal du bo
5066 que qui assure l’écrasement des plus délicats par les plus vulgaires ? L’idéal du bon élève Le bon sens voudrait que
5067 ent des plus délicats par les plus vulgaires ? L’ idéal du bon élève Le bon sens voudrait que le bon élève soit celui
5068 r les plus vulgaires ? L’idéal du bon élève Le bon sens voudrait que le bon élève soit celui qui sait utiliser pour
5069 L’idéal du bon élève Le bon sens voudrait que le bon élève soit celui qui sait utiliser pour son profit humain la peti
5070 it celui qui sait utiliser pour son profit humain la petite somme de connaissances indispensables qu’on lui donne à l’écol
5071 de connaissances indispensables qu’on lui donne à l’ école. (Cet argent de poche, ni plus ni moins.) Ou encore : que le bon
5072 gent de poche, ni plus ni moins.) Ou encore : que le bon élève soit celui qui supporte le mieux le traitement scolaire ; c
5073 encore : que le bon élève soit celui qui supporte le mieux le traitement scolaire ; celui dont la valeur humaine subsiste
5074 que le bon élève soit celui qui supporte le mieux le traitement scolaire ; celui dont la valeur humaine subsiste intacte a
5075 orte le mieux le traitement scolaire ; celui dont la valeur humaine subsiste intacte au milieu des conditions anormales cr
5076 cte au milieu des conditions anormales créées par l’ école publique. Mais l’idéal de l’école est autre ; il est même tout c
5077 tions anormales créées par l’école publique. Mais l’ idéal de l’école est autre ; il est même tout contraire. On ne peut pa
5078 ales créées par l’école publique. Mais l’idéal de l’ école est autre ; il est même tout contraire. On ne peut pas exiger qu
5079 té que je ne puis m’empêcher de trouver suspecte. Le bon élève est celui qui a de bons points. Or les bons points vont aux
5080 . Le bon élève est celui qui a de bons points. Or les bons points vont aux parfaits imitateurs. Oyez-moi tous ces petits ph
5081 phonographes…ographes…graphes…graphes… Enfoncés, les perroquets. Dans une composition sur La Neige, Victoria X, 10 ans, éc
5082 nfoncés, les perroquets. Dans une composition sur La Neige, Victoria X, 10 ans, écrit : « C’est l’hiver. Déjà la terre a r
5083 sur La Neige, Victoria X, 10 ans, écrit : « C’est l’ hiver. Déjà la terre a revêtu son blanc manteau. » Elle aura 10 sur 10
5084 Victoria X, 10 ans, écrit : « C’est l’hiver. Déjà la terre a revêtu son blanc manteau. » Elle aura 10 sur 10. Mais on donn
5085 évident que Sylvie est supérieure à Victoria dans la mesure où l’invention est supérieure à l’imitation. Mais Victoria mon
5086 ylvie est supérieure à Victoria dans la mesure où l’ invention est supérieure à l’imitation. Mais Victoria montre une âme d
5087 ia dans la mesure où l’invention est supérieure à l’ imitation. Mais Victoria montre une âme docile, un rassurant défaut d’
5088 que, tandis que Sylvie appartient manifestement à la race dangereuse de ceux qui voient avec leurs yeux. Le bon élève est
5089 ce dangereuse de ceux qui voient avec leurs yeux. Le bon élève est aussi l’élève discipliné. L’école veut que partout la v
5090 ui voient avec leurs yeux. Le bon élève est aussi l’ élève discipliné. L’école veut que partout la valeur cède le pas à la
5091 yeux. Le bon élève est aussi l’élève discipliné. L’ école veut que partout la valeur cède le pas à la règle. Elle cherche
5092 ussi l’élève discipliné. L’école veut que partout la valeur cède le pas à la règle. Elle cherche à développer chez nos pet
5093 scipliné. L’école veut que partout la valeur cède le pas à la règle. Elle cherche à développer chez nos petits Helvètes un
5094 L’école veut que partout la valeur cède le pas à la règle. Elle cherche à développer chez nos petits Helvètes un légalism
5095 u d’impuissants, qui d’ailleurs ne peut être qu’à l’ avantage des gens en place, vieille histoire. On m’objectera sans dout
5096 ex-forts-en-thème, voire par d’ex-instituteurs. À la vérité, il s’agit de réussites qui, pour avoir enivré l’espoir et enf
5097 té, il s’agit de réussites qui, pour avoir enivré l’ espoir et enflammé l’ambition d’un grand nombre de régents, ne laissen
5098 sites qui, pour avoir enivré l’espoir et enflammé l’ ambition d’un grand nombre de régents, ne laissent pas que d’être asse
5099 ires » (témoignage suffisant de leurs aptitudes à la compromission sociale établie) et cueilli au passage un grade univers
5100 nombreux banquets de cercles locaux où se fondent les réputations, où se « baptisent » les hommes d’avenir. Un jour on voit
5101 ù se fondent les réputations, où se « baptisent » les hommes d’avenir. Un jour on voit s’étaler en première page des illust
5102 r on voit s’étaler en première page des illustrés la face épanouie quoique énergique d’un de ces coqs de village qu’on vie
5103 de ces coqs de village qu’on vient de jucher sur la flèche de l’édifice administratif. Et c’est ce qui s’appelle une bell
5104 de village qu’on vient de jucher sur la flèche de l’ édifice administratif. Et c’est ce qui s’appelle une belle carrière. M
5105 n, par ailleurs fort grande. Tous ceux qui ont eu l’ occasion de comparer les bons élèves de diverses classes d’un collège
5106 ande. Tous ceux qui ont eu l’occasion de comparer les bons élèves de diverses classes d’un collège ont été frappés de const
5107 ses d’un collège ont été frappés de constater que la force et l’originalité de leur jugement sont en raison inverse du nom
5108 lège ont été frappés de constater que la force et l’ originalité de leur jugement sont en raison inverse du nombre d’années
5109 nées d’instruction publique qu’ils ont subies. Le dilemme J’ai indiqué que les principes de l’instruction publique n
5110 ils ont subies. Le dilemme J’ai indiqué que les principes de l’instruction publique ne coïncident qu’accidentellement
5111 Le dilemme J’ai indiqué que les principes de l’ instruction publique ne coïncident qu’accidentellement avec ceux du bo
5112 ls constituent une inversion méthodique de toutes les lois divines et humaines. C’est-à-dire : une méthode d’abâtardissemen
5113 . C’est-à-dire : une méthode d’abâtardissement de la race. D’autre part, il est aisé de voir que tous ces principes dérive
5114 ces principes dérivent nécessairement du fait que l’ école est publique, obligatoire, et soumise au contrôle de l’État. Al
5115 publique, obligatoire, et soumise au contrôle de l’ État. Alors ? Ou bien vous acceptez le régime — mais aussi ses conséq
5116 ontrôle de l’État. Alors ? Ou bien vous acceptez le régime — mais aussi ses conséquences absurdes et fatales, par exemple
5117 ses conséquences absurdes et fatales, par exemple l’ instruction publique. Ou bien vous combattez l’instruction publique — 
5118 le l’instruction publique. Ou bien vous combattez l’ instruction publique — mais vous êtes, de ce fait, contre le régime. I
5119 ion publique — mais vous êtes, de ce fait, contre le régime. Il y a là, dirait M. Prudhomme, un bien grave dilemme. 4.
5120 ien grave dilemme. 4. Ce ne sont pas seulement les meilleurs qui sont sacrifiés. Voici ce que M. E. Duvillard dit des en
5121 ue M. E. Duvillard dit des enfants peu doués pour les disciplines scolaires : « Les épaves scolaires, faute d’un traitement
5122 ants peu doués pour les disciplines scolaires : «  Les épaves scolaires, faute d’un traitement pédagogique approprié, tomben
5123 prié, tombent dans une apathie intellectuelle qui les conduit souvent à l’imbécillité et au vice. » Emmanuel Duvillard, L’É
5124 apathie intellectuelle qui les conduit souvent à l’ imbécillité et au vice. » Emmanuel Duvillard, L’École de demain, Genèv
5125 à l’imbécillité et au vice. » Emmanuel Duvillard, L’ École de demain, Genève, Kündig, 1918, p. 12. 5. Il est peut-être ava
5126 au vice. » Emmanuel Duvillard, L’École de demain, Genève , Kündig, 1918, p. 12. 5. Il est peut-être avantageux dans certains c
5127 t-être avantageux dans certains cas de soustraire l’ enfant à l’influence d’une famille anormale. Mais d’abord c’est sancti
5128 tageux dans certains cas de soustraire l’enfant à l’ influence d’une famille anormale. Mais d’abord c’est sanctionner cet é
5129 (il y aurait sans doute d’autres moyens de sauver l’ enfant dans sa famille). Ensuite, pourquoi fait-on en réalité, comme s
5130 ite, pourquoi fait-on en réalité, comme si toutes les familles constituaient un milieu délétère ? 6. Justice démocratique,
5131 6. Justice démocratique, égalité, légalité, sont les meilleures armes de la bassesse contre toute valeur réelle, absolue.
5132 , égalité, légalité, sont les meilleures armes de la bassesse contre toute valeur réelle, absolue.
84 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 4. L’illusion réformiste
5133 4. L’ illusion réformiste Bien entendu, tout cela a été dit. (Un peu autre
5134 tion. Il suffit pour s’en convaincre de parcourir l’ abondante littérature publiée sur le « problème de l’école nouvelle ».
5135 de parcourir l’abondante littérature publiée sur le « problème de l’école nouvelle ». On appelle école nouvelle tout étab
5136 bondante littérature publiée sur le « problème de l’ école nouvelle ». On appelle école nouvelle tout établissement où l’on
5137 . On appelle école nouvelle tout établissement où l’ on s’efforce d’enseigner selon des principes tirés de l’observation de
5138 ’efforce d’enseigner selon des principes tirés de l’ observation des enfants, c’est-à-dire : en contradiction sur toute la
5139 nfants, c’est-à-dire : en contradiction sur toute la ligne avec l’enseignement officiel. Les promoteurs de ces mouvements
5140 à-dire : en contradiction sur toute la ligne avec l’ enseignement officiel. Les promoteurs de ces mouvements tentent la gag
5141 sur toute la ligne avec l’enseignement officiel. Les promoteurs de ces mouvements tentent la gageure de réformer l’école p
5142 fficiel. Les promoteurs de ces mouvements tentent la gageure de réformer l’école primaire sans toucher au principe de l’in
5143 de ces mouvements tentent la gageure de réformer l’ école primaire sans toucher au principe de l’instruction publique. Les
5144 rmer l’école primaire sans toucher au principe de l’ instruction publique. Les réformes qu’ils ont proposées jusqu’ici sont
5145 ns toucher au principe de l’instruction publique. Les réformes qu’ils ont proposées jusqu’ici sont en général judicieuses,
5146 usqu’ici sont en général judicieuses, dictées par le bon sens7 et retouchées par le pédantisme inhérent à toute science. O
5147 euses, dictées par le bon sens7 et retouchées par le pédantisme inhérent à toute science. On a constaté que l’école actuel
5148 tisme inhérent à toute science. On a constaté que l’ école actuelle est fondée sur une remarquable ignorance de la psycholo
5149 uelle est fondée sur une remarquable ignorance de la psychologie infantile. Où il y avait non-science, on a voulu apporter
5150 Où il y avait non-science, on a voulu apporter de la science. Mais c’est un art qu’il faudrait. Sinon l’on retombera dans
5151 science. Mais c’est un art qu’il faudrait. Sinon l’ on retombera dans des absurdités. On a créé par exemple des « jardins
5152 n a créé par exemple des « jardins d’enfants » où l’ on apprend à des élèves âgés de 3 à 4 ans à lacer leurs souliers ; et
5153 ans à lacer leurs souliers ; et cela s’appelle de l’ école pratique. Plus tard on fait apprendre à ces mêmes enfants, et ré
5154 mêmes enfants, et réciter par cœur et à rebours, les noms des rues et places de leur ville, comme s’ils étaient tous desti
5155 e leur ville, comme s’ils étaient tous destinés à la profession de chauffeurs de taxi. Si cette conception du pratique pré
5156 eption du pratique prévaut, il est à craindre que l’ école nouvelle n’apporte bientôt sa méthode rationnelle pour apprendre
5157 ur apprendre aux bambins à marcher en décomposant les mouvements avec l’aide d’un métronome pédagogique. De même, sous le l
5158 bins à marcher en décomposant les mouvements avec l’ aide d’un métronome pédagogique. De même, sous le louable prétexte d’é
5159 l’aide d’un métronome pédagogique. De même, sous le louable prétexte d’école active, on prétend faire apprendre la gramma
5160 étexte d’école active, on prétend faire apprendre la grammaire par le moyen de gesticulations appropriées : foin de ces an
5161 tive, on prétend faire apprendre la grammaire par le moyen de gesticulations appropriées : foin de ces analyses de textes
5162 iées : foin de ces analyses de textes absurdes où l’ on soulignait en rouge tous les mots en « al », tous les verbes dépone
5163 textes absurdes où l’on soulignait en rouge tous les mots en « al », tous les verbes déponents ; désormais l’étude des ver
5164 soulignait en rouge tous les mots en « al », tous les verbes déponents ; désormais l’étude des verbes actifs sera aussi act
5165 en « al », tous les verbes déponents ; désormais l’ étude des verbes actifs sera aussi active, un élève se mettra à marche
5166 a aussi active, un élève se mettra à marcher dans le couloir en s’écriant : je marche, ou : j’arpente ; un autre restera a
5167 is, en affirmant : je siège ; un troisième lèvera la main, et dira : je lève la main, — au lieu de demander ce qu’on croit
5168  ; un troisième lèvera la main, et dira : je lève la main, — au lieu de demander ce qu’on croit. Tout porte à craindre qu’
5169 mander ce qu’on croit. Tout porte à craindre qu’à la faveur du tumulte l’un ou l’autre proclamant : je sors ! ne traduise
5170 be en action et ne disparaisse à tout jamais dans les campagnes, tirant le meilleur parti possible de l’exercice ; car il n
5171 paraisse à tout jamais dans les campagnes, tirant le meilleur parti possible de l’exercice ; car il ne manque à ce système
5172 s campagnes, tirant le meilleur parti possible de l’ exercice ; car il ne manque à ce système, avouez-le, que juste la spon
5173 ’exercice ; car il ne manque à ce système, avouez- le , que juste la spontanéité nécessaire pour que ça ne soit pas une lour
5174 r il ne manque à ce système, avouez-le, que juste la spontanéité nécessaire pour que ça ne soit pas une lourde farce. Ces
5175 ce qu’elles sont comiques précisément. Je ferai à l’ école nouvelle un reproche d’une autre nature. Elle prétend donner plu
5176 onner plus de liberté aux enfants en leur rendant le travail amusant, en leur laissant la possibilité de trouver par eux-m
5177 leur rendant le travail amusant, en leur laissant la possibilité de trouver par eux-mêmes ce qu’ils doivent apprendre. Mai
5178 té, cet amusement a pour seul but de faire avaler la pilule amère des connaissances. On songe à M. Ford, qui donne à ses o
5179 ment deux fois plus de machines. Jeu du chat avec la souris. On n’impose plus des résultats, on les fait trouver. Notez qu
5180 vec la souris. On n’impose plus des résultats, on les fait trouver. Notez que cela revient au même, sauf que par la méthode
5181 ver. Notez que cela revient au même, sauf que par la méthode nouvelle on atteint l’enfant plus profondément, on se glisse
5182 même, sauf que par la méthode nouvelle on atteint l’ enfant plus profondément, on se glisse à l’intérieur de son esprit, là
5183 élabore son invention ; on capte scientifiquement les sources mêmes de sa liberté. « Instruire en amusant » peut être la fo
5184 de sa liberté. « Instruire en amusant » peut être la formule d’une tromperie subtile et plus grave que la brutalité primai
5185 formule d’une tromperie subtile et plus grave que la brutalité primaire, parce qu’elle n’excite pas de réaction vive de la
5186 t des écoliers. Enfin, je n’aime pas qu’on traite le gosse comme un organisme dont il s’agit d’obtenir le rendement le plu
5187 gosse comme un organisme dont il s’agit d’obtenir le rendement le plus élevé. On cultive les petits d’hommes comme des pla
5188 n organisme dont il s’agit d’obtenir le rendement le plus élevé. On cultive les petits d’hommes comme des plantes de serre
5189 d’obtenir le rendement le plus élevé. On cultive les petits d’hommes comme des plantes de serre dans ces jardins d’enfants
5190 serre dans ces jardins d’enfants. On y parle de «  l’ enfant » comme on parle d’un produit chimique : On remarque chez l’enf
5191 on parle d’un produit chimique : On remarque chez l’ enfant… Dans ce milieu l’enfant ne tarde pas à se développer… Prenez u
5192 mique : On remarque chez l’enfant… Dans ce milieu l’ enfant ne tarde pas à se développer… Prenez un enfant de 6 ans… Mettez
5193 … Mettez ensemble trois enfants… Je reconnais que les buts de l’école nouvelle sont honnêtement scientifiques, et désintére
5194 emble trois enfants… Je reconnais que les buts de l’ école nouvelle sont honnêtement scientifiques, et désintéressés. Mais
5195 honnêtement scientifiques, et désintéressés. Mais l’ enfant-cobaye vaut l’enfant-citoyen. Moi je voudrais l’enfant tout cou
5196 ques, et désintéressés. Mais l’enfant-cobaye vaut l’ enfant-citoyen. Moi je voudrais l’enfant tout court. Or il paraît que
5197 ant-cobaye vaut l’enfant-citoyen. Moi je voudrais l’ enfant tout court. Or il paraît que c’est très dangereux. Néanmoins je
5198 ent du système officiel qui pourrait bien un jour l’ atteindre au cœur, et je vois tout ce que cela entraînerait, dans une
5199 înerait, dans une ruine d’où renaîtrait peut-être l’ humanité… Je songe à un enseignement sans école. Je songe au maître an
5200 ans école. Je songe au maître antique, dont toute la personne était un enseignement, et qui n’avait pas des élèves, mais d
5201 lèves, mais des disciples. Celui-là seul favorise le développement des individus, qui ne cherche pas un rendement mais qui
5202 salue ces jeunes gens qui appliquent avec ferveur les principes de l’école libre, qui se moquent des programmes, et dont le
5203 gens qui appliquent avec ferveur les principes de l’ école libre, qui se moquent des programmes, et dont les classes joyeus
5204 ole libre, qui se moquent des programmes, et dont les classes joyeuses sont de vraies foires : ils ont toute mon amitié. Ce
5205 marquer d’autant plus librement qu’ils trahissent le dessein profond de l’instruction publique, qu’ils trahissent leur mis
5206 librement qu’ils trahissent le dessein profond de l’ instruction publique, qu’ils trahissent leur mission officielle. Ils é
5207 bravo ! Mais ce qu’on leur avait confié, c’était la fabrication en série de petits démocrates conscients et organisés. Je
5208 ment trop gros pour échapper plus longtemps à MM. les Inspecteurs des Écoles. Je le crains, dis-je ; car le monde ne progre
5209 us longtemps à MM. les Inspecteurs des Écoles. Je le crains, dis-je ; car le monde ne progresse qu’à la faveur de malenten
5210 nspecteurs des Écoles. Je le crains, dis-je ; car le monde ne progresse qu’à la faveur de malentendus (si tant est qu’il p
5211 e crains, dis-je ; car le monde ne progresse qu’à la faveur de malentendus (si tant est qu’il progresse). L’école nouvelle
5212 eur de malentendus (si tant est qu’il progresse). L’ école nouvelle n’échappe à l’absurdité primaire qu’à la faveur d’une é
5213 st qu’il progresse). L’école nouvelle n’échappe à l’ absurdité primaire qu’à la faveur d’une équivoque. Cette équivoque fra
5214 le nouvelle n’échappe à l’absurdité primaire qu’à la faveur d’une équivoque. Cette équivoque frappe tout essai de réforme.
5215 ndant une possibilité pratique d’en sortir, je ne le nie pas. Mais du point de vue de la vérité, force nous est de reconna
5216 sortir, je ne le nie pas. Mais du point de vue de la vérité, force nous est de reconnaître que notre dilemme subsiste dans
5217 Ou des appareils qui en tiennent lieu. 8. Voir à l’ appendice le sens que je donne à ce mot.
5218 eils qui en tiennent lieu. 8. Voir à l’appendice le sens que je donne à ce mot.
85 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 5. La machine à fabriquer des électeurs
5219 5. La machine à fabriquer des électeurs Je crois à l’absurdité de fait de
5220 La machine à fabriquer des électeurs Je crois à l’ absurdité de fait de l’instruction publique. Je crois aussi qu’on ne p
5221 des électeurs Je crois à l’absurdité de fait de l’ instruction publique. Je crois aussi qu’on ne peut réformer l’absurde.
5222 n publique. Je crois aussi qu’on ne peut réformer l’ absurde. Je demande seulement qu’on m’explique pourquoi il triomphe et
5223 he et se perpétue ; de quel droit il nous écrase. La réponse est simple, terriblement simple : du droit de la Démocratie.
5224 nse est simple, terriblement simple : du droit de la Démocratie. L’instruction publique et la Démocratie sont sœurs siamoi
5225 terriblement simple : du droit de la Démocratie. L’ instruction publique et la Démocratie sont sœurs siamoises. Elles sont
5226 droit de la Démocratie. L’instruction publique et la Démocratie sont sœurs siamoises. Elles sont nées en même temps. Elles
5227 ste pas cette thèse. Elle est glorifiée dans tous les banquets officiels par des orateurs émus et il y aurait une insigne h
5228 urait une insigne hypocrisie à feindre de ne plus la reconnaître, une fois dissipée la fumée des civets, des cigares et de
5229 ndre de ne plus la reconnaître, une fois dissipée la fumée des civets, des cigares et des idéologies enivrées. D’ailleurs,
5230 ologies enivrées. D’ailleurs, cette idée que j’ai l’ honneur de partager avec mes adversaires se trouve correspondre à des
5231 x si rare. Un fait simple, par exemple, c’est que la Démocratie sans l’instruction publique est pratiquement irréalisable.
5232 simple, par exemple, c’est que la Démocratie sans l’ instruction publique est pratiquement irréalisable. Ici, je demanderai
5233 nt au lecteur de vouloir bien ne point trop faire la bête, sinon je me verrai contraint de lui expliquer un certain nombre
5234 faut pouvoir lire, écrire et compter pour suivre la campagne électorale, voter et truquer légalement les votes. Ensuite,
5235 campagne électorale, voter et truquer légalement les votes. Ensuite, il faut de l’histoire, et de l’instruction civique, p
5236 truquer légalement les votes. Ensuite, il faut de l’ histoire, et de l’instruction civique, pour qu’on sache à quoi cela ri
5237 les votes. Ensuite, il faut de l’histoire, et de l’ instruction civique, pour qu’on sache à quoi cela rime. Ensuite, il fa
5238 rime. Ensuite, il faut une discipline sévère dès l’ enfance pour façonner des contribuables inoffensifs. Enfin, il faut un
5239 fin, il faut un nombre considérable de leçons, et le plus longtemps possible, pour qu’on n’ait pas le temps de se rendre c
5240 le plus longtemps possible, pour qu’on n’ait pas le temps de se rendre compte que tout cela est absurde. Pour qu’on n’ait
5241 e que tout cela est absurde. Pour qu’on n’ait pas le temps d’écouter la nature qui répète par toutes ses voix, d’un millia
5242 absurde. Pour qu’on n’ait pas le temps d’écouter la nature qui répète par toutes ses voix, d’un milliard de façons, que c
5243 e façons, que c’est absurde. Pour qu’on n’ait pas le temps de découvrir la Liberté9, parce que celui qui l’a embrassée une
5244 surde. Pour qu’on n’ait pas le temps de découvrir la Liberté9, parce que celui qui l’a embrassée une fois, une seule fois,
5245 mps de découvrir la Liberté9, parce que celui qui l’ a embrassée une fois, une seule fois, sait bien que tout le reste est
5246 ssée une fois, une seule fois, sait bien que tout le reste est absurde. Et voilà pour les sœurs siamoises. Continuons. La
5247 bien que tout le reste est absurde. Et voilà pour les sœurs siamoises. Continuons. La démocratie doit à l’École de vivre en
5248 e. Et voilà pour les sœurs siamoises. Continuons. La démocratie doit à l’École de vivre encore. Mais ce n’est de la part d
5249 sœurs siamoises. Continuons. La démocratie doit à l’ École de vivre encore. Mais ce n’est de la part de notre Institutrice
5250 et mal dissimulée. Certes, je ne prétends pas que les créateurs de l’instruction publique aient eu pleine conscience de ce
5251 . Certes, je ne prétends pas que les créateurs de l’ instruction publique aient eu pleine conscience de ce qu’ils faisaient
5252 pleine conscience de ce qu’ils faisaient — et je les excuse pour autant10. Je dis simplement ceci : leur œuvre n’a été pos
5253 ible que parce qu’elle était liée aux intérêts de la démocratie. Car il faut bien se représenter qu’elle n’était encore au
5254 qu’on répande universellement et obligatoirement l’ art du saxophone ou de la balalaïka. Soyez certains qu’il ne manque à
5255 ement et obligatoirement l’art du saxophone ou de la balalaïka. Soyez certains qu’il ne manque à cette plaisanterie, pour
5256 que à cette plaisanterie, pour prendre corps, que l’ appui intéressé d’un groupement politico-financier. Et il y aurait bie
5257 t il y aurait bien vite des députés pour célébrer les bienfaits sociaux, que dis-je, la valeur hautement moralisatrice de c
5258 pour célébrer les bienfaits sociaux, que dis-je, la valeur hautement moralisatrice de ces glapissants entonnoirs. D’aill
5259 oirs. D’ailleurs cette complicité, si évidente à l’ origine de l’institution, se manifeste encore de nos jours, et d’une f
5260 eurs cette complicité, si évidente à l’origine de l’ institution, se manifeste encore de nos jours, et d’une façon non moin
5261 tes normales. Je n’en veux pas d’autre preuve que l’ état grotesquement arriéré de notre instrument de progrès par excellen
5262 ’une explication vraisemblable de cette incurie : l’ école, sous sa forme actuelle, remplit suffisamment son rôle politique
5263 dessin humoristique publié en 1914, représentant l’ œuvre de Kitchener : une machine qui absorbait des gentlemen et rendai
5264 i absorbait des gentlemen et rendait des tommies. La machine scolaire, elle, dévore des enfants tout vifs et rend des cito
5265 vore des enfants tout vifs et rend des citoyens à l’ œil torve. Durant l’opération, tous les crânes ont été décervelés et d
5266 t vifs et rend des citoyens à l’œil torve. Durant l’ opération, tous les crânes ont été décervelés et dotés d’une petite mé
5267 citoyens à l’œil torve. Durant l’opération, tous les crânes ont été décervelés et dotés d’une petite mécanique à quatre so
5268 nique à quatre sous qui suffit à régler désormais l’ automatisme de la vie civique. Le cerveau standard du type fédéral ne
5269 us qui suffit à régler désormais l’automatisme de la vie civique. Le cerveau standard du type fédéral ne laisse craindre a
5270 régler désormais l’automatisme de la vie civique. Le cerveau standard du type fédéral ne laisse craindre aucun imprévu dan
5271 on fonctionnement. Cet avantage inappréciable sur le cerveau naturel explique que les autorités compétentes n’aient point
5272 inappréciable sur le cerveau naturel explique que les autorités compétentes n’aient point hésité à l’adopter, malgré ses ra
5273 les autorités compétentes n’aient point hésité à l’ adopter, malgré ses ratés assez fréquents. Maintenant je vous demande
5274 e un peu quel intérêt il y aurait à perfectionner l’ instrument, à l’adapter aux particularités psychologiques, voire aux b
5275 térêt il y aurait à perfectionner l’instrument, à l’ adapter aux particularités psychologiques, voire aux besoins purement
5276 purement sentimentaux qui peuvent apparaître chez les enfants ? Ce serait de l’art pour l’art. On ne peut pas en demander t
5277 euvent apparaître chez les enfants ? Ce serait de l’ art pour l’art. On ne peut pas en demander tant aux gouvernements. La
5278 raître chez les enfants ? Ce serait de l’art pour l’ art. On ne peut pas en demander tant aux gouvernements. La réforme sco
5279 n ne peut pas en demander tant aux gouvernements. La réforme scolaire, politiquement, n’est pas rentable. Il est clair que
5280 iquement, n’est pas rentable. Il est clair que si le but principal de l’instruction publique était d’éduquer le peuple d’u
5281 rentable. Il est clair que si le but principal de l’ instruction publique était d’éduquer le peuple d’une façon désintéress
5282 incipal de l’instruction publique était d’éduquer le peuple d’une façon désintéressée, les gouvernements seraient un peu p
5283 it d’éduquer le peuple d’une façon désintéressée, les gouvernements seraient un peu plus fous qu’on n’ose les imaginer de n
5284 uvernements seraient un peu plus fous qu’on n’ose les imaginer de ne pas entreprendre sur l’heure une véritable révolution
5285 ’on n’ose les imaginer de ne pas entreprendre sur l’ heure une véritable révolution scolaire ; car il ne faudrait pas moins
5286 scolaire ; car il ne faudrait pas moins pour que l’ école rattrape l’époque… Mais les gouvernements savent ce qu’ils font.
5287 l ne faudrait pas moins pour que l’école rattrape l’ époque… Mais les gouvernements savent ce qu’ils font. Tout se tient, c
5288 as moins pour que l’école rattrape l’époque… Mais les gouvernements savent ce qu’ils font. Tout se tient, comme vous dites,
5289 e tient, comme vous dites, sans doute pour m’ôter l’ envie de bousculer quoi que ce soit. J’aime les tremblements de terre,
5290 ter l’envie de bousculer quoi que ce soit. J’aime les tremblements de terre, vous tombez mal. J’appartiens à cette espèce d
5291 ne révolte de ma sensibilité qui me dresse contre l’ École. Mes arguments ne se mettent en branle qu’après coup. Et quand v
5292 se mettent en branle qu’après coup. Et quand vous les démoliriez tous, ma rage n’en serait pas moins légitime. Je lui donne
5293 aison par définition. Après tout, peu m’importent les idéologies politiques, et peu m’importerait que l’École soit une mach
5294 s idéologies politiques, et peu m’importerait que l’ École soit une machine à fabriquer de la démocratie — si je ne sentais
5295 erait que l’École soit une machine à fabriquer de la démocratie — si je ne sentais menacées dans cette aventure des valeur
5296 e auxquelles je tiens plus qu’à tout. Ma haine de la démocratie est l’aboutissement de l’évolution dont je viens de décrir
5297 ens plus qu’à tout. Ma haine de la démocratie est l’ aboutissement de l’évolution dont je viens de décrire la marche nécess
5298 Ma haine de la démocratie est l’aboutissement de l’ évolution dont je viens de décrire la marche nécessaire11. On ne manqu
5299 tissement de l’évolution dont je viens de décrire la marche nécessaire11. On ne manquera pas d’insinuer qu’à l’origine de
5300 nécessaire11. On ne manquera pas d’insinuer qu’à l’ origine de tout ceci il y a surtout de la nervosité, de petites douleu
5301 uer qu’à l’origine de tout ceci il y a surtout de la nervosité, de petites douleurs de jeunes bourgeois. Essayer de venir
5302 , n’est-ce pas, mes agneaux. C’est justement dans la mesure où je participais de l’écœurant optimisme bourgeois que je m’a
5303 est justement dans la mesure où je participais de l’ écœurant optimisme bourgeois que je m’accommodais d’un régime nocif po
5304 l y a d’authentiquement noble en chaque homme. Si les fils du peuple souffrent moins d’un tel régime, c’est qu’ils n’ont pa
5305 ussi sensible. Ils ignorent ce qu’étiolent en eux les droits de l’homme. Mais attendez, si quelques-uns allaient se réveill
5306 Il suffit d’un peu de chaleur d’âme pour amorcer le dégel de ces principes, et ce peut être le signal de la grande débâcl
5307 morcer le dégel de ces principes, et ce peut être le signal de la grande débâcle printanière. Il n’y a de révolution vérit
5308 el de ces principes, et ce peut être le signal de la grande débâcle printanière. Il n’y a de révolution véritable que de l
5309 ntanière. Il n’y a de révolution véritable que de la sensibilité. (Le jour où l’on culbutera ces Messieurs de leurs sièges
5310 a de révolution véritable que de la sensibilité. ( Le jour où l’on culbutera ces Messieurs de leurs sièges, ils comprendron
5311 tion véritable que de la sensibilité. (Le jour où l’ on culbutera ces Messieurs de leurs sièges, ils comprendront le sens d
5312 a ces Messieurs de leurs sièges, ils comprendront le sens des images.) 9. J’emploie ce mot au sens fort, au sens enivran
5313 pçonné ce que cela représente. 10. Voir note A à la fin du cahier. 11. Est-il besoin de déclarer formellement qu’une tel
5314 elle attitude n’est en aucune façon tributaire de l’ idéologie réactionnaire à la mode. Mais que deux critiques de la Démoc
5315 e façon tributaire de l’idéologie réactionnaire à la mode. Mais que deux critiques de la Démocratie partant de points de v
5316 actionnaire à la mode. Mais que deux critiques de la Démocratie partant de points de vue presque opposés coïncident en tan
86 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 6. La trahison de l’instruction publique
5317 6. La trahison de l’instruction publique (Ici, le procureur prit un ton p
5318 6. La trahison de l’ instruction publique (Ici, le procureur prit un ton plus grave.) L’é
5319 6. La trahison de l’instruction publique (Ici, le procureur prit un ton plus grave.) L’école s’est vendue à des intérêt
5320 que (Ici, le procureur prit un ton plus grave.) L’ école s’est vendue à des intérêts politiques. C’était là, nous venons
5321 s intérêts politiques. C’était là, nous venons de le voir, son unique moyen de parvenir. Elle participe donc sur une vaste
5322 n Benda. Notre époque paiera cher ce crime contre la civilisation. Elle ne croit plus qu’au péché contre les lois sociales
5323 vilisation. Elle ne croit plus qu’au péché contre les lois sociales, eh bien ! elle apprendra que le seul péché qui n’a pas
5324 e les lois sociales, eh bien ! elle apprendra que le seul péché qui n’a pas de pardon c’est le péché contre l’Esprit. Aujo
5325 dra que le seul péché qui n’a pas de pardon c’est le péché contre l’Esprit. Aujourd’hui qu’il suffit d’un peu de bon sens
5326 péché qui n’a pas de pardon c’est le péché contre l’ Esprit. Aujourd’hui qu’il suffit d’un peu de bon sens et d’information
5327 trop laid ».) À peine capable de nous instruire, l’ École prétend ouvertement nous éduquer. D’ailleurs elle y est obligée
5328 nous éduquer. D’ailleurs elle y est obligée dans la mesure où elle réalise son ambition : soustraire les enfants à l’Égli
5329 mesure où elle réalise son ambition : soustraire les enfants à l’Église et à la famille. L’Église donnait des valeurs idéa
5330 e réalise son ambition : soustraire les enfants à l’ Église et à la famille. L’Église donnait des valeurs idéalistes, la fa
5331 ambition : soustraire les enfants à l’Église et à la famille. L’Église donnait des valeurs idéalistes, la famille des vale
5332 oustraire les enfants à l’Église et à la famille. L’ Église donnait des valeurs idéalistes, la famille des valeurs réaliste
5333 famille. L’Église donnait des valeurs idéalistes, la famille des valeurs réalistes, sans lesquelles le monde s’enfonce de
5334 la famille des valeurs réalistes, sans lesquelles le monde s’enfonce de son propre poids dans l’abrutissement ou se laisse
5335 elles le monde s’enfonce de son propre poids dans l’ abrutissement ou se laisse prendre à des théories non point fumeuses c
5336 e prendre à des théories non point fumeuses comme le veut le cliché, mais schématiques. Or l’École radicale ne peut pas êt
5337 e à des théories non point fumeuses comme le veut le cliché, mais schématiques. Or l’École radicale ne peut pas être idéal
5338 es comme le veut le cliché, mais schématiques. Or l’ École radicale ne peut pas être idéaliste : car elle deviendrait un da
5339 e idéaliste : car elle deviendrait un danger pour le désordre établi. L’idéalisme est forcément révolutionnaire dans un mo
5340 le deviendrait un danger pour le désordre établi. L’ idéalisme est forcément révolutionnaire dans un monde organisé pour la
5341 ément révolutionnaire dans un monde organisé pour la production. Le culte des valeurs désintéressées ne peut que diminuer
5342 nnaire dans un monde organisé pour la production. Le culte des valeurs désintéressées ne peut que diminuer le « rendement 
5343 e des valeurs désintéressées ne peut que diminuer le « rendement » quantitatif de ceux qui s’y livrent. Je ne veux pas me
5344 « lumières », et qui pourtant s’indignent de voir la morale actuelle s’attaquer, voyez-vous ça, à la famille, « cette cell
5345 r la morale actuelle s’attaquer, voyez-vous ça, à la famille, « cette cellule sociale ». Et je les traite de mauvais plais
5346 a, à la famille, « cette cellule sociale ». Et je les traite de mauvais plaisants. Admirez mon extrême modération. Ceci fai
5347 ême modération. Ceci fait, constatez avec moi que la famille était encore un milieu naturel, donc normatif. Le collège au
5348 le était encore un milieu naturel, donc normatif. Le collège au contraire est un milieu antinaturel, et les normes sociale
5349 ollège au contraire est un milieu antinaturel, et les normes sociales qu’on prétend y substituer à celles de la famille son
5350 s sociales qu’on prétend y substituer à celles de la famille sont falsifiées. Non seulement l’École ne constitue pas le pô
5351 lles de la famille sont falsifiées. Non seulement l’ École ne constitue pas le pôle idéaliste nécessaire à l’équilibre d’un
5352 alsifiées. Non seulement l’École ne constitue pas le pôle idéaliste nécessaire à l’équilibre d’une civilisation — et c’est
5353 e ne constitue pas le pôle idéaliste nécessaire à l’ équilibre d’une civilisation — et c’est l’aspect négatif de sa trahiso
5354 saire à l’équilibre d’une civilisation — et c’est l’ aspect négatif de sa trahison —, mais encore elle tend à développer to
5355 ut ce qu’il y a de spécifiquement malfaisant dans l’ esprit moderne. C’est sa façon à elle de répondre aux besoins de l’épo
5356 C’est sa façon à elle de répondre aux besoins de l’ époque. Pauvre époque ! On parle sans cesse de ses besoins. Il est vra
5357 du matérialisme. Et quand on m’aura démontré que les besoins de l’époque exigent une organisation à outrance du monde, je
5358 e. Et quand on m’aura démontré que les besoins de l’ époque exigent une organisation à outrance du monde, je répondrai que
5359 sation à outrance du monde, je répondrai que dans la mesure où cette exigence est satisfaite naît un nouveau besoin qui es
5360 e bien que nous en soyons-là, s’il faut en croire les signes de révolte qui apparaissent de toutes parts. Mais l’école empo
5361 de révolte qui apparaissent de toutes parts. Mais l’ école empoisonne les germes d’une renaissance de l’esprit dont elle de
5362 raissent de toutes parts. Mais l’école empoisonne les germes d’une renaissance de l’esprit dont elle devrait être la mère.
5363 ’école empoisonne les germes d’une renaissance de l’ esprit dont elle devrait être la mère. Elle favorise le culte exclusif
5364 ne renaissance de l’esprit dont elle devrait être la mère. Elle favorise le culte exclusif de l’utile, l’incompréhension b
5365 rit dont elle devrait être la mère. Elle favorise le culte exclusif de l’utile, l’incompréhension brutale de la nature, la
5366 être la mère. Elle favorise le culte exclusif de l’ utile, l’incompréhension brutale de la nature, la haine des supériorit
5367 mère. Elle favorise le culte exclusif de l’utile, l’ incompréhension brutale de la nature, la haine des supériorités nature
5368 exclusif de l’utile, l’incompréhension brutale de la nature, la haine des supériorités naturelles, l’habitude de l’ersatz
5369 l’utile, l’incompréhension brutale de la nature, la haine des supériorités naturelles, l’habitude de l’ersatz et du trava
5370 la nature, la haine des supériorités naturelles, l’ habitude de l’ersatz et du travail bâclé. Elle apprend à lire les jour
5371 haine des supériorités naturelles, l’habitude de l’ ersatz et du travail bâclé. Elle apprend à lire les journaux, mais en
5372 l’ersatz et du travail bâclé. Elle apprend à lire les journaux, mais en même temps que cette drogue, elle devrait fournir s
5373 ves du mot. Il est clair, par exemple, que seules les victimes de l’instruction helvétique sont capables d’absorber sans fo
5374 st clair, par exemple, que seules les victimes de l’ instruction helvétique sont capables d’absorber sans fou rire les disc
5375 helvétique sont capables d’absorber sans fou rire les discours de tirs fédéraux. On a comparé le monde moderne à un vaste é
5376 rire les discours de tirs fédéraux. On a comparé le monde moderne à un vaste établissement de travaux forcés. L’école don
5377 derne à un vaste établissement de travaux forcés. L’ école donne à l’enfant ce qu’il faut pour se résigner à l’état de cito
5378 établissement de travaux forcés. L’école donne à l’ enfant ce qu’il faut pour se résigner à l’état de citoyen bagnard auqu
5379 donne à l’enfant ce qu’il faut pour se résigner à l’ état de citoyen bagnard auquel il est promis. Mais elle tue tout ce qu
5380 t promis. Mais elle tue tout ce qui lui donnerait l’ envie de se libérer — et peut-être les moyens. Vaste distillerie d’enn
5381 ui donnerait l’envie de se libérer — et peut-être les moyens. Vaste distillerie d’ennui, c’est-à-dire de démoralisation — q
5382 ’ennui, c’est-à-dire de démoralisation — qu’on se le dise ! —, puissance de crétinisation lente, standardisation de toutes
5383 de crétinisation lente, standardisation de toutes les mesquineries naturelles (je ne fais le procès de la bêtise humaine qu
5384 de toutes les mesquineries naturelles (je ne fais le procès de la bêtise humaine qu’en tant qu’elle est cultivée par l’Éta
5385 mesquineries naturelles (je ne fais le procès de la bêtise humaine qu’en tant qu’elle est cultivée par l’État), l’École,
5386 êtise humaine qu’en tant qu’elle est cultivée par l’ État), l’École, après avoir entraîné l’âme moderne dans ses collèges,
5387 aine qu’en tant qu’elle est cultivée par l’État), l’ École, après avoir entraîné l’âme moderne dans ses collèges, l’y enfer
5388 ltivée par l’État), l’École, après avoir entraîné l’ âme moderne dans ses collèges, l’y enferme et l’y laisse crever de fai
5389 s avoir entraîné l’âme moderne dans ses collèges, l’ y enferme et l’y laisse crever de faim. Par ce qu’elle enseigne à igno
5390 é l’âme moderne dans ses collèges, l’y enferme et l’ y laisse crever de faim. Par ce qu’elle enseigne à ignorer bien plus q
5391 r ce qu’elle enseigne à connaître, elle constitue la plus grande force antireligieuse de ce temps. L’instruction religieus
5392 la plus grande force antireligieuse de ce temps. L’ instruction religieuse qui prend les enfants au sortir de l’école prim
5393 e de ce temps. L’instruction religieuse qui prend les enfants au sortir de l’école primaire, arrive trop tard. Le pasteur s
5394 ion religieuse qui prend les enfants au sortir de l’ école primaire, arrive trop tard. Le pasteur sème dans un terrain que
5395 au sortir de l’école primaire, arrive trop tard. Le pasteur sème dans un terrain que l’instituteur a méthodiquement dessé
5396 ve trop tard. Le pasteur sème dans un terrain que l’ instituteur a méthodiquement desséché.
87 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 7. L’Instruction publique contre le progrès
5397 7. L’ Instruction publique contre le progrès Un beau titre. Et qui a meill
5398 7. L’Instruction publique contre le progrès Un beau titre. Et qui a meilleure façon que le reste, pense
5399 rès Un beau titre. Et qui a meilleure façon que le reste, pensez-vous. Il faut avouer qu’avec ce je ne sais quoi de décl
5400 démocratique, hé ! hé !… et d’ailleurs vous aimez les idées généreuses, n’est-ce pas ? J’en étais sûr. Cependant j’ai peur
5401 ès ne soit pas le vôtre, et même que sa nature ne l’ entraîne dans une direction tout opposée. C’est très malin d’avoir inv
5402 inventé un instrument de progrès : encore faut-il le mettre en marche. Et où le conduire ? Il y a beaucoup de routes, mais
5403 ogrès : encore faut-il le mettre en marche. Et où le conduire ? Il y a beaucoup de routes, mais vous n’aimez pas le risque
5404 Il y a beaucoup de routes, mais vous n’aimez pas le risque, vous préférez le sur-place. Ainsi l’instruction publique s’es
5405 s, mais vous n’aimez pas le risque, vous préférez le sur-place. Ainsi l’instruction publique s’est arrêtée aux environs de
5406 pas le risque, vous préférez le sur-place. Ainsi l’ instruction publique s’est arrêtée aux environs de 1880 et depuis lors
5407 environs de 1880 et depuis lors n’a guère bougé. Le moteur n’en continue pas moins de consommer, de ronfler et de tout em
5408 mer, de ronfler et de tout empester. Et peu à peu le public s’aperçoit que « l’instrument de progrès » n’est qu’un camoufl
5409 empester. Et peu à peu le public s’aperçoit que «  l’ instrument de progrès » n’est qu’un camouflage à l’abri duquel on dist
5410 ’instrument de progrès » n’est qu’un camouflage à l’ abri duquel on distille du radicalisme intégral. On me fera observer q
5411 On me fera observer que beaucoup des servants de la machine sont socialistes : voilà qui ne change pas le rendement, j’im
5412 achine sont socialistes : voilà qui ne change pas le rendement, j’imagine, ni la nature des produits excrétés. On forme no
5413 ilà qui ne change pas le rendement, j’imagine, ni la nature des produits excrétés. On forme nos gosses, dès l’âge de 6 ans
5414 e des produits excrétés. On forme nos gosses, dès l’ âge de 6 ans, à ne se point poser de questions dont ils n’aient appris
5415 ser de questions dont ils n’aient appris par cœur la réponse. Regardez un écolier préparer ses devoirs, c’est frappant : i
5416 préparer ses devoirs, c’est frappant : il apprend les questions aussi bien que les réponses. J’avoue que je trouve ça très
5417 rappant : il apprend les questions aussi bien que les réponses. J’avoue que je trouve ça très fort : avoir obtenu un confor
5418 uve ça très fort : avoir obtenu un conformisme de la curiosité. Il est vrai qu’il ne fallait pas moins pour assurer la séc
5419 est vrai qu’il ne fallait pas moins pour assurer la sécurité d’un régime établi dans des fauteuils ; car un peuple d’élec
5420 de trouver bien bonne celle-ci : je prétends que l’ instruction publique est une puissance conservatrice. — Pas moins ! El
5421 . — Pas moins ! Elle est destinée à légitimer par la force de l’inertie et à perpétuer mécaniquement tout ce qui est depui
5422 s ! Elle est destinée à légitimer par la force de l’ inertie et à perpétuer mécaniquement tout ce qui est depuis Numa Droz.
5423 ice, et non pas réactionnaire, non, même pas. Car les forces de réaction collaborent à leur manière au progrès, elles corri
5424 u progrès, elles corrigent, stimulent, vivifient. L’ École se contente d’être figée. Est-ce un frein ? Même pas. C’est plut
5425 t une vase où s’enlise notre civilisation ; et où la Démocratie peut se conserver des siècles encore… Or si je dis que l’É
5426 se conserver des siècles encore… Or si je dis que l’ École est contre le progrès, c’est que le progrès consiste à dépasser
5427 ècles encore… Or si je dis que l’École est contre le progrès, c’est que le progrès consiste à dépasser la Démocratie. Et c
5428 dis que l’École est contre le progrès, c’est que le progrès consiste à dépasser la Démocratie. Et cette thèse ne va pas à
5429 progrès, c’est que le progrès consiste à dépasser la Démocratie. Et cette thèse ne va pas à l’encontre de l’évolution norm
5430 ocratie. Et cette thèse ne va pas à l’encontre de l’ évolution normale de l’humanité, comme vous ne manquerez cependant poi
5431 ne va pas à l’encontre de l’évolution normale de l’ humanité, comme vous ne manquerez cependant point de le dire, avec ce
5432 anité, comme vous ne manquerez cependant point de le dire, avec ce sens exquis du cliché qui est un hommage à vos maîtres
5433 liché qui est un hommage à vos maîtres respectés. La Démocratie, par le moyen de l’instruction publique, limite l’homme au
5434 mmage à vos maîtres respectés. La Démocratie, par le moyen de l’instruction publique, limite l’homme au citoyen. Il s’agit
5435 maîtres respectés. La Démocratie, par le moyen de l’ instruction publique, limite l’homme au citoyen. Il s’agit donc de dép
5436 e, par le moyen de l’instruction publique, limite l’ homme au citoyen. Il s’agit donc de dépasser le citoyen, de retrouver
5437 te l’homme au citoyen. Il s’agit donc de dépasser le citoyen, de retrouver l’homme tout entier. Je distingue dans cette op
5438 s’agit donc de dépasser le citoyen, de retrouver l’ homme tout entier. Je distingue dans cette opération deux temps : d’ab
5439 n deux temps : d’abord critiquer ce qui est — par la comparaison avec ce qui fut, ou ce qui devrait être ; ensuite, prépar
5440 i fut, ou ce qui devrait être ; ensuite, préparer le terrain pour les jeux nouveaux que l’humanité de demain ne peut manqu
5441 devrait être ; ensuite, préparer le terrain pour les jeux nouveaux que l’humanité de demain ne peut manquer d’inventer. Je
5442 e, préparer le terrain pour les jeux nouveaux que l’ humanité de demain ne peut manquer d’inventer. Je ne puis m’empêcher d
5443 ir une intention providentielle dans cet amour de la destruction et de l’anarchie que les génies directeurs de ce temps on
5444 identielle dans cet amour de la destruction et de l’ anarchie que les génies directeurs de ce temps ont inspiré à beaucoup
5445 cet amour de la destruction et de l’anarchie que les génies directeurs de ce temps ont inspiré à beaucoup d’entre nous — e
5446 inspiré à beaucoup d’entre nous — encore que peu l’ avouent. Car détruire, déblayer, et faire des signes dans le vide à de
5447 Car détruire, déblayer, et faire des signes dans le vide à des hasards gros de dangers, c’est peut-être à quoi notre géné
5448 t peut-être à quoi notre génération devra limiter l’ efficacité de ses efforts. Critiquer le présent au nom du passé ne sig
5449 ra limiter l’efficacité de ses efforts. Critiquer le présent au nom du passé ne signifie pas que l’on désire un retour au
5450 er le présent au nom du passé ne signifie pas que l’ on désire un retour au passé. Mais la considération de régimes anciens
5451 ifie pas que l’on désire un retour au passé. Mais la considération de régimes anciens peut nous amener à constater, sans p
5452 r exemple, est-ce un progrès que d’avoir remplacé les hiérarchies de tradition, avec tout le vaste arrière-fond de poésie e
5453 remplacé les hiérarchies de tradition, avec tout le vaste arrière-fond de poésie et de grandeur que ce mot comporte — que
5454 ce mot comporte — quelles qu’en soient d’ailleurs les réalisations —, par des hiérarchies rond-de-cuiresques dont l’origine
5455 ns —, par des hiérarchies rond-de-cuiresques dont l’ origine est un pis-aller, dont la méthode est le tirage au flanc lucra
5456 -cuiresques dont l’origine est un pis-aller, dont la méthode est le tirage au flanc lucratif, dont l’esprit est la jalousi
5457 t l’origine est un pis-aller, dont la méthode est le tirage au flanc lucratif, dont l’esprit est la jalousie rancie armée
5458 la méthode est le tirage au flanc lucratif, dont l’ esprit est la jalousie rancie armée de pédantisme, et je ne parle pas
5459 st le tirage au flanc lucratif, dont l’esprit est la jalousie rancie armée de pédantisme, et je ne parle pas du décor, des
5460 isme, et je ne parle pas du décor, des odeurs, de la poussière, des petites habitudes sordides et de cette matière raremen
5461 arement « hygiénique » et qui définit notre âge : la paperasse ? Réponse ? Petits étourdis. Réponse non, c’est un recul. C
5462 l. Cette critique du fonctionnarisme, vous alliez le dire, est un ramassis de lieux communs. Mais il s’en faut, hélas, de
5463 ommuns. Mais il s’en faut, hélas, de beaucoup que la majorité des électeurs les considèrent comme tels. Et je ne me tiendr
5464 hélas, de beaucoup que la majorité des électeurs les considèrent comme tels. Et je ne me tiendrai pas pour battu quand on
5465 nt, maintenant, je vais m’y prendre pour préparer les temps nouveaux. Énorme question. Aurai-je la naïveté non moins énorme
5466 rer les temps nouveaux. Énorme question. Aurai-je la naïveté non moins énorme d’esquisser ici la réponse que je lui réserv
5467 ai-je la naïveté non moins énorme d’esquisser ici la réponse que je lui réserve ? L’instruction publique est la forme la
5468 d’esquisser ici la réponse que je lui réserve ? L’ instruction publique est la forme la plus commune de la peste rational
5469 que je lui réserve ? L’instruction publique est la forme la plus commune de la peste rationaliste qui sévit dans le mond
5470 ui réserve ? L’instruction publique est la forme la plus commune de la peste rationaliste qui sévit dans le monde depuis
5471 truction publique est la forme la plus commune de la peste rationaliste qui sévit dans le monde depuis le xviiie (depuis
5472 s commune de la peste rationaliste qui sévit dans le monde depuis le xviiie (depuis les dernières pestes noires). Si vous
5473 peste rationaliste qui sévit dans le monde depuis le xviiie (depuis les dernières pestes noires). Si vous creusez un peu
5474 qui sévit dans le monde depuis le xviiie (depuis les dernières pestes noires). Si vous creusez un peu la notion de démocra
5475 dernières pestes noires). Si vous creusez un peu la notion de démocratie, vous trouvez bien vite qu’elle repose sur des p
5476 mentalité. Elle s’est développée au xviiie dans l’ aristocratie qui n’y voyait qu’un jeu. Durant tout le xixe elle est d
5477 ristocratie qui n’y voyait qu’un jeu. Durant tout le xixe elle est descendue dans la bourgeoisie et dans le peuple ; elle
5478 jeu. Durant tout le xixe elle est descendue dans la bourgeoisie et dans le peuple ; elle y est devenue une tyrannie. Avan
5479 e elle est descendue dans la bourgeoisie et dans le peuple ; elle y est devenue une tyrannie. Avant il y avait la Raison
5480 elle y est devenue une tyrannie. Avant il y avait la Raison et les sentiments. Maintenant il y a le rationalisme12 et la s
5481 venue une tyrannie. Avant il y avait la Raison et les sentiments. Maintenant il y a le rationalisme12 et la sentimentalité.
5482 it la Raison et les sentiments. Maintenant il y a le rationalisme12 et la sentimentalité. Ce rationalisme-là triomphe non
5483 entiments. Maintenant il y a le rationalisme12 et la sentimentalité. Ce rationalisme-là triomphe non seulement dans les pr
5484 é. Ce rationalisme-là triomphe non seulement dans les principes démocratiques, et dans ceux de l’École, mais encore dans to
5485 dans les principes démocratiques, et dans ceux de l’ École, mais encore dans toute la conduite moderne de la vie. C’est not
5486 , et dans ceux de l’École, mais encore dans toute la conduite moderne de la vie. C’est notre américanisme et c’est notre s
5487 le, mais encore dans toute la conduite moderne de la vie. C’est notre américanisme et c’est notre sécheresse sentimentale.
5488 et c’est notre sécheresse sentimentale. Et c’est le grand empêchement intérieur dont souffre notre imagination créatrice 
5489 réatrice ; c’est lui qui stérilise nos utopies et les empêche de devenir autre chose que des utopies. Il s’agit donc en pre
5490 ue des utopies. Il s’agit donc en premier lieu de le démasquer et de le pourchasser dans toutes les démarches de notre vie
5491 s’agit donc en premier lieu de le démasquer et de le pourchasser dans toutes les démarches de notre vie. Mais cette premiè
5492 de le démasquer et de le pourchasser dans toutes les démarches de notre vie. Mais cette première tâche constitue un progra
5493 nce négative qui aura duré deux siècles au moins. L’ évolution de l’humanité paraît conforme à la dialectique hégélienne ;
5494 i aura duré deux siècles au moins. L’évolution de l’ humanité paraît conforme à la dialectique hégélienne ; on y retrouve f
5495 oins. L’évolution de l’humanité paraît conforme à la dialectique hégélienne ; on y retrouve facilement les triades : être
5496 dialectique hégélienne ; on y retrouve facilement les triades : être —négation de l’être — nouvel être. Notre époque serait
5497 trouve facilement les triades : être —négation de l’ être — nouvel être. Notre époque serait le deuxième temps d’une de ces
5498 temps d’une de ces triades. Son rationalisme nie l’ être sous toutes ses formes, traduit tout en relations et veut rendre
5499 -à-dire, pour lui, calculables, chiffrables. Dans la mesure où il y parvient, il tue les existences particulières, ou bien
5500 ffrables. Dans la mesure où il y parvient, il tue les existences particulières, ou bien c’est qu’elles sont déjà mortes. Ma
5501 es, ou bien c’est qu’elles sont déjà mortes. Mais le temps vient où elles renaîtront à une vie nouvelle et plus complète,
5502 cience, si je puis dire. Alors ce sera au tour de l’ instinct d’intégrer la raison. Je crois que nous approchons de ce temp
5503 e. Alors ce sera au tour de l’instinct d’intégrer la raison. Je crois que nous approchons de ce temps. Et que le véritable
5504 Je crois que nous approchons de ce temps. Et que le véritable progrès veut qu’on s’attaque à tout ce qui entrave cet avèn
5505 entrave cet avènement. C’est pourquoi je réclame l’ expulsion de la congrégation radicale des instituteurs. On me demande
5506 ènement. C’est pourquoi je réclame l’expulsion de la congrégation radicale des instituteurs. On me demande encore ce que j
5507 uteurs. On me demande encore ce que je mettrais à la place. Et parce que je ne propose rien de bien précis, on triomphe gr
5508 jet de Louis XIV ce qu’il concevait à la place de la royauté absolue. Il eût fallu certes une imagination prodigieuse au d
5509 e civilisation. Et même Diderot, même Rousseau, à la veille de la Révolution, soupçonnaient-ils que la république qu’ils a
5510 n. Et même Diderot, même Rousseau, à la veille de la Révolution, soupçonnaient-ils que la république qu’ils appelaient ser
5511 la veille de la Révolution, soupçonnaient-ils que la république qu’ils appelaient serait livrée cent ans plus tard à peine
5512 laient serait livrée cent ans plus tard à peine à la folie démocratique, à cette danse de Saint-Guy politique dont rien de
5513 litique dont rien de leur temps ne pouvait offrir la moindre préfiguration ? Eh bien ! induisez de cette similitude les po
5514 guration ? Eh bien ! induisez de cette similitude les possibilités formidables que nous réserve le siècle à venir, et vous
5515 ude les possibilités formidables que nous réserve le siècle à venir, et vous commencerez à comprendre que votre scepticism
5516 à comprendre que votre scepticisme à l’endroit de la forme sociale que nous appelons sans la connaître et qui s’élabore dé
5517 ndroit de la forme sociale que nous appelons sans la connaître et qui s’élabore déjà secrètement, que ce mépris et ce scep
5518 , sous lequel vous ne tarderez pas à périr. 12. La Raison de Spinoza ou de Descartes n’a que de lointains rapports de pa
5519 ommé Rationalisme, produit d’une mésalliance avec l’ Avarice bourgeoise — et qui sans cesse déroge.
88 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. Appendice. Utopie
5520 Appendice. Utopie Un os à la meute. (Et figurez-vous que j’ai la ferme intention de vous faire rig
5521 pie Un os à la meute. (Et figurez-vous que j’ai la ferme intention de vous faire rigoler, si cela peut vous rassurer qua
5522 ela peut vous rassurer quant à ma santé mentale.) La question est de savoir si nous serons des hommes de chair et d’esprit
5523 d’esprit, ou des pantins articulés. (Qui tiendra les ficelles, peu importe.) Les économistes (mot stupide) et les philosop
5524 ticulés. (Qui tiendra les ficelles, peu importe.) Les économistes (mot stupide) et les philosophes13 les mieux informés de
5525 s, peu importe.) Les économistes (mot stupide) et les philosophes13 les mieux informés de ce temps s’accordent sur un point
5526 es économistes (mot stupide) et les philosophes13 les mieux informés de ce temps s’accordent sur un point : le salut de l’E
5527 x informés de ce temps s’accordent sur un point : le salut de l’Europe est lié à la naissance d’une nouvelle attitude de l
5528 e ce temps s’accordent sur un point : le salut de l’ Europe est lié à la naissance d’une nouvelle attitude de l’âme. Ceci r
5529 ent sur un point : le salut de l’Europe est lié à la naissance d’une nouvelle attitude de l’âme. Ceci revient à dire que s
5530 est lié à la naissance d’une nouvelle attitude de l’ âme. Ceci revient à dire que seule une grande vague de l’imagination c
5531 Ceci revient à dire que seule une grande vague de l’ imagination collective peut désensabler le vieux bateau occidental. Un
5532 ague de l’imagination collective peut désensabler le vieux bateau occidental. Un nouvel état d’esprit : voilà bien ce que
5533 ntal. Un nouvel état d’esprit : voilà bien ce que l’ École empêche même de concevoir Elle cultive ce qu’il y a d’anti-irrat
5534 Elle cultive ce qu’il y a d’anti-irrationnel dans la nature de l’homme. Elle punit froidement la spontanéité et l’inventio
5535 ce qu’il y a d’anti-irrationnel dans la nature de l’ homme. Elle punit froidement la spontanéité et l’invention. Elle dénat
5536 dans la nature de l’homme. Elle punit froidement la spontanéité et l’invention. Elle dénature le sens de la liberté. Elle
5537 l’homme. Elle punit froidement la spontanéité et l’ invention. Elle dénature le sens de la liberté. Elle détruit tout ce q
5538 ment la spontanéité et l’invention. Elle dénature le sens de la liberté. Elle détruit tout ce qui permettrait d’échapper à
5539 ntanéité et l’invention. Elle dénature le sens de la liberté. Elle détruit tout ce qui permettrait d’échapper à la mécaniq
5540 Elle détruit tout ce qui permettrait d’échapper à la mécanique. Bref, elle perpétue ce manque d’imagination dont les consé
5541 Bref, elle perpétue ce manque d’imagination dont les conséquences seront matériellement catastrophiques pour peu que cela
5542 peu que cela continue. Qu’on ne s’y trompe pas : le sens technique qui tient lieu d’imagination à l’homme moderne n’est p
5543 le sens technique qui tient lieu d’imagination à l’ homme moderne n’est pas créateur d’êtres spirituellement vivants, ni d
5544 lement vivants, ni d’aucune grandeur supérieure à la somme de ses éléments. Il n’engendre pas, il ajuste. Quand nous auron
5545 e pas, il ajuste. Quand nous aurons épuisé toutes les combinaisons de vitesse et d’ennui à quoi présentement nous usons le
5546 vitesse et d’ennui à quoi présentement nous usons le plus clair de nos forces, — le Poète dira un mot, ou bien fera un act
5547 ntement nous usons le plus clair de nos forces, —  le Poète dira un mot, ou bien fera un acte, et ces peuples de somnambule
5548 ples de somnambules s’éveilleront du cauchemar où les plongent toutes vos drogues : presse, ciné, faux-luxe, suffrage unive
5549 e équipe d’idéalistes pratiques d’en faire sortir le beau miracle d’une civilisation aux ordres de l’Esprit. Mais il faudr
5550 le beau miracle d’une civilisation aux ordres de l’ Esprit. Mais il faudrait que dès maintenant se constituent ces élites,
5551 constituent ces élites, et cela ne se peut que si les tenants de l’ordre spirituel retrouvent le courage d’être, malgré les
5552 élites, et cela ne se peut que si les tenants de l’ ordre spirituel retrouvent le courage d’être, malgré les mots14, des a
5553 ue si les tenants de l’ordre spirituel retrouvent le courage d’être, malgré les mots14, des anarchistes et des utopistes.
5554 re spirituel retrouvent le courage d’être, malgré les mots14, des anarchistes et des utopistes. J’appelle anarchiste, tout
5555 ut ce qui est violemment et intégralement humain. L’ anarchie est un degré d’intensité dans la vie, non pas un parti. Tout
5556 humain. L’anarchie est un degré d’intensité dans la vie, non pas un parti. Tout extrémiste, de droite comme de gauche, se
5557 de toutes ses forces. Mais c’est un anarchiste de la mauvaise espèce, un anarchiste embrigadé. L’anarchiste que j’aime est
5558 e de la mauvaise espèce, un anarchiste embrigadé. L’ anarchiste que j’aime est simplement un homme libre qui a une foi (ou
5559 e savez pas ce que c’est que libre, ou consacré.) L’ utopiste, c’est l’inventeur. Les sots vont répétant que c’est un être
5560 c’est que libre, ou consacré.) L’utopiste, c’est l’ inventeur. Les sots vont répétant que c’est un être qui ignore le réel
5561 bre, ou consacré.) L’utopiste, c’est l’inventeur. Les sots vont répétant que c’est un être qui ignore le réel. C’est justem
5562 s sots vont répétant que c’est un être qui ignore le réel. C’est justement parce qu’il le connaît mieux qu’eux qu’il y a v
5563 e qui ignore le réel. C’est justement parce qu’il le connaît mieux qu’eux qu’il y a vu des fissures et des possibilités no
5564 u réel ne signifie pas s’y soumettre sans combat. L’ utopiste est celui qui ne se résigne à aucun état de choses. Il est po
5565 ne se résigne à aucun état de choses. Il est pour le « mieux » contre le « bien ». Sans lui l’humanité s’avachirait totale
5566 n état de choses. Il est pour le « mieux » contre le « bien ». Sans lui l’humanité s’avachirait totalement. Mais il est da
5567 st pour le « mieux » contre le « bien ». Sans lui l’ humanité s’avachirait totalement. Mais il est dans l’ordre qu’elle beu
5568 umanité s’avachirait totalement. Mais il est dans l’ ordre qu’elle beugle longuement tout en le suivant. Que faire, diront
5569 st dans l’ordre qu’elle beugle longuement tout en le suivant. Que faire, diront les gens de bonne volonté dont mon imagina
5570 longuement tout en le suivant. Que faire, diront les gens de bonne volonté dont mon imagination romantique suppose l’exist
5571 e volonté dont mon imagination romantique suppose l’ existence. Que faire ? Voir et penser juste d’abord. Simplement. Ensui
5572 rd. Simplement. Ensuite, soutenir cette opinion : les effets suivront infailliblement. Par exemple, je vous demande une foi
5573 els d’histoire et de géographie bien connus, pour l’ esprit le plus dangereusement plat qui soit. (Il est plus que plat : i
5574 toire et de géographie bien connus, pour l’esprit le plus dangereusement plat qui soit. (Il est plus que plat : il est cre
5575 i, cela finira par créer un courant d’opinion. Et l’ opinion publique mène le monde, paraît-il. À ce propos : que les journ
5576 un courant d’opinion. Et l’opinion publique mène le monde, paraît-il. À ce propos : que les journalistes s’engagent désor
5577 lique mène le monde, paraît-il. À ce propos : que les journalistes s’engagent désormais à ne publier plus un seul article d
5578 seul article de fond où ne perce leur mépris pour l’ instruction publique. Ils peuvent dire ce qu’ils veulent à propos de n
5579 n’importe quoi, comme on sait, et ils auraient là l’ occasion de racheter bien des choses. Ce n’est rien de moins qu’une ré
5580 dit pour éviter ce malentendu : je ne crois pas à la possibilité d’une réforme suffisante. C’est une révolution qu’il faut
5581 C’est une révolution qu’il faut. Alors, supprimer les écoles, raser les collèges, renvoyer les instituteurs aux pommes de t
5582 on qu’il faut. Alors, supprimer les écoles, raser les collèges, renvoyer les instituteurs aux pommes de terre ? Impossible.
5583 upprimer les écoles, raser les collèges, renvoyer les instituteurs aux pommes de terre ? Impossible. Le peuple qui déteste
5584 es instituteurs aux pommes de terre ? Impossible. Le peuple qui déteste l’école a pourtant faim d’instruction15, et se cro
5585 mmes de terre ? Impossible. Le peuple qui déteste l’ école a pourtant faim d’instruction15, et se croirait lésé dans un de
5586 croirait lésé dans un de ses droits fondamentaux. Le peuple veut s’instruire et on lui bourre le crâne pour l’en empêcher.
5587 taux. Le peuple veut s’instruire et on lui bourre le crâne pour l’en empêcher. Il s’agit de lui faire comprendre que l’éco
5588 e veut s’instruire et on lui bourre le crâne pour l’ en empêcher. Il s’agit de lui faire comprendre que l’école est le plus
5589 n empêcher. Il s’agit de lui faire comprendre que l’ école est le plus gros obstacle à sa culture. Et c’est cela, préparer
5590 Il s’agit de lui faire comprendre que l’école est le plus gros obstacle à sa culture. Et c’est cela, préparer le terrain.
5591 os obstacle à sa culture. Et c’est cela, préparer le terrain. D’autre part, il faut partir de ce qui est. Mais comment ret
5592 rtir de ce qui est. Mais comment retourner contre l’ ennemi ses propres batteries ? Autrement dit : quel emploi utopique de
5593 tteries ? Autrement dit : quel emploi utopique de l’ organisation existante peut-on imaginer ? L’école devrait donner à l’e
5594 ue de l’organisation existante peut-on imaginer ? L’ école devrait donner à l’enfant ce que son entourage ne peut plus lui
5595 tante peut-on imaginer ? L’école devrait donner à l’ enfant ce que son entourage ne peut plus lui donner : des modèles de p
5596 onner : des modèles de pensée. Un entraînement de l’ esprit, au lieu d’une somme de connaissances mortes. Une technique spi
5597 ituelle. Et puis, qu’il en fasse ce qu’il voudra. Les Orientaux appellent yoga cette culture des facultés physiques, intell
5598 ystiques. Toute leur force vient du yoga. Et tout le yoga repose sur la concentration. En vérité, toute force résulte d’un
5599 r force vient du yoga. Et tout le yoga repose sur la concentration. En vérité, toute force résulte d’une concentration, da
5600 ncentration, dans quelque domaine que ce soit. Si l’ Occident comprenait cette vérité élémentaire et en tirait des conclusi
5601 il serait sauvé du désastre, mais il recouvrerait la domination du monde16 et non plus en barbare cette fois-ci. Ce qui l’
5602 de16 et non plus en barbare cette fois-ci. Ce qui l’ empêche de comprendre, ici encore, c’est la peur scolaire des mots. Ce
5603 Ce qui l’empêche de comprendre, ici encore, c’est la peur scolaire des mots. Ce terme hindou agace, trouble ou fait sourir
5604 s. Ce terme hindou agace, trouble ou fait sourire les étriqués. On croit devoir se défendre : on se moque. On me dit : vous
5605 ez tout de même pas une classe de gamins répétant la syllabe sacrée Aûm ou se livrant à des exercices de contrôle de la re
5606 Aûm ou se livrant à des exercices de contrôle de la respiration. Il ne s’agit nullement de cela. Nous ne sommes pas aux I
5607 s aux Indes, je vous jure que je m’en doute. Mais l’ Occidental aussi pratique son yoga à lui : toutes les fois qu’il veut
5608 n minimum de moyens. J’en citerai deux exemples : la discipline jésuite et le drill militaire. Le drill correspond remarqu
5609 citerai deux exemples : la discipline jésuite et le drill militaire. Le drill correspond remarquablement dans le plan phy
5610 es : la discipline jésuite et le drill militaire. Le drill correspond remarquablement dans le plan physique, aux exercices
5611 litaire. Le drill correspond remarquablement dans le plan physique, aux exercices élémentaires que l’on exige d’un initié.
5612 le plan physique, aux exercices élémentaires que l’ on exige d’un initié. Le fameux arrêt de la pensée dont on sait l’impo
5613 xercices élémentaires que l’on exige d’un initié. Le fameux arrêt de la pensée dont on sait l’importance primordiale dans
5614 es que l’on exige d’un initié. Le fameux arrêt de la pensée dont on sait l’importance primordiale dans le yoga correspond
5615 initié. Le fameux arrêt de la pensée dont on sait l’ importance primordiale dans le yoga correspond au garde-à-vous ! par q
5616 pensée dont on sait l’importance primordiale dans le yoga correspond au garde-à-vous ! par quoi l’on impose au corps une i
5617 ans le yoga correspond au garde-à-vous ! par quoi l’ on impose au corps une immobilité absolue. L’un et l’autre de ces exer
5618 ue. L’un et l’autre de ces exercices montrent que le candidat possède une énergie suffisante pour aller plus loin, — et en
5619 temps constituent des sources d’énergie nouvelle. Le parallèle peut être poussé dans les détails. Il s’agit bien d’un gest
5620 rgie nouvelle. Le parallèle peut être poussé dans les détails. Il s’agit bien d’un geste identique, exécuté dans deux plans
5621 te identique, exécuté dans deux plans différents. Le drill est un yoga corporel, le yoga est un drill de l’esprit. Je sais
5622 plans différents. Le drill est un yoga corporel, le yoga est un drill de l’esprit. Je sais que ces deux mots sont bien da
5623 ill est un yoga corporel, le yoga est un drill de l’ esprit. Je sais que ces deux mots sont bien dangereux et impopulaires.
5624 nt pas séparer une méthode des fins auxquelles on l’ applique généralement. Ces gens-là diront que je veux militariser l’en
5625 ement. Ces gens-là diront que je veux militariser l’ enseignement ou transformer les collèges en couvents. Tant pis. Le dri
5626 je veux militariser l’enseignement ou transformer les collèges en couvents. Tant pis. Le drill offre un exemple d’éducation
5627 u transformer les collèges en couvents. Tant pis. Le drill offre un exemple d’éducation efficace. L’armée de milices suiss
5628 . Le drill offre un exemple d’éducation efficace. L’ armée de milices suisses fait des soldats en moins de trois mois. Si l
5629 isses fait des soldats en moins de trois mois. Si l’ école appliquait en les transposant des méthodes de concentration anal
5630 en moins de trois mois. Si l’école appliquait en les transposant des méthodes de concentration analogues, même dans la mes
5631 es méthodes de concentration analogues, même dans la mesure sans doute faible où la nature des enfants le supporte, on éco
5632 alogues, même dans la mesure sans doute faible où la nature des enfants le supporte, on économiserait plusieurs semestres
5633 mesure sans doute faible où la nature des enfants le supporte, on économiserait plusieurs semestres de travail. Si chaque
5634 t plusieurs semestres de travail. Si chaque matin l’ enfant parvenait à mettre sa pensée au garde-à-vous durant quelques in
5635 aucoup de choses qui restent cachées aux agités ; la nature par exemple. Je ne demande pas qu’on nous enseigne le goût de
5636 ar exemple. Je ne demande pas qu’on nous enseigne le goût de la nature. Mais qu’on nous laisse le temps de la regarder. De
5637 Je ne demande pas qu’on nous enseigne le goût de la nature. Mais qu’on nous laisse le temps de la regarder. De faire conn
5638 igne le goût de la nature. Mais qu’on nous laisse le temps de la regarder. De faire connaissance. Je ne sais s’il est très
5639 de la nature. Mais qu’on nous laisse le temps de la regarder. De faire connaissance. Je ne sais s’il est très exagéré de
5640 er ces facultés atrophiées que devrait s’employer l’ école. Nous avons vu qu’elle préfère les étouffer. Cependant, je ne cr
5641 s’employer l’école. Nous avons vu qu’elle préfère les étouffer. Cependant, je ne crois pas qu’il soit bon que tous progress
5642 crois pas qu’il soit bon que tous progressent de la même manière. Dans un système de culture spirituelle, les différences
5643 manière. Dans un système de culture spirituelle, les différences s’accuseraient, mais se légitimeraient du même coup ; car
5644 coup ; car sur ce plan elles ne font que traduire la diversité des besoins individuels. Méditez un peu ces truismes : On a
5645 . Une minute de concentration intense dégage dans l’ individu plus d’énergie que des heures d’exercices gémissants. De même
5646 e que des heures d’exercices gémissants. De même, le bien supérieur de quelques-uns est plus utile à tous que le bien médi
5647 périeur de quelques-uns est plus utile à tous que le bien médiocre de beaucoup. La valeur vaut mieux que le nombre parce q
5648 us utile à tous que le bien médiocre de beaucoup. La valeur vaut mieux que le nombre parce qu’elle le contient en puissanc
5649 en médiocre de beaucoup. La valeur vaut mieux que le nombre parce qu’elle le contient en puissance. Et c’est pourquoi l’ar
5650 La valeur vaut mieux que le nombre parce qu’elle le contient en puissance. Et c’est pourquoi l’aristocratie de l’esprit e
5651 ’elle le contient en puissance. Et c’est pourquoi l’ aristocratie de l’esprit est nécessaire au bien public. Certains propo
5652 en puissance. Et c’est pourquoi l’aristocratie de l’ esprit est nécessaire au bien public. Certains proposent en rougissant
5653 rougissant de leur hardiesse quelque chose comme l’ instruction privée : et moi je la voudrais secrète. Vous verrez bien.
5654 lque chose comme l’instruction privée : et moi je la voudrais secrète. Vous verrez bien. Cela se fera sans vous. Déjà revi
5655 verrez bien. Cela se fera sans vous. Déjà revient le temps des mages : ils comprennent les théories d’Einstein, ils compos
5656 Déjà revient le temps des mages : ils comprennent les théories d’Einstein, ils composent de la poésie pure, ils mesurent de
5657 rennent les théories d’Einstein, ils composent de la poésie pure, ils mesurent des sensibilités secondes et tout un arc-en
5658 econdes et tout un arc-en-ciel de sentiments dont les accords imitent la blancheur éclatante de l’amour… Que dirons-nous ?…
5659 rc-en-ciel de sentiments dont les accords imitent la blancheur éclatante de l’amour… Que dirons-nous ?… Par la force des c
5660 ont les accords imitent la blancheur éclatante de l’ amour… Que dirons-nous ?… Par la force des choses et de l’Esprit, l’ho
5661 heur éclatante de l’amour… Que dirons-nous ?… Par la force des choses et de l’Esprit, l’homme sera-t-il sauvé de sa folie
5662 Que dirons-nous ?… Par la force des choses et de l’ Esprit, l’homme sera-t-il sauvé de sa folie démocratique ?   Areuse,
5663 s-nous ?… Par la force des choses et de l’Esprit, l’ homme sera-t-il sauvé de sa folie démocratique ?   Areuse, 26 décembr
5664 Ce travers a été développé jusqu’au ridicule par la démocratie. Les journaux, les cercles, les coulisses de parlements et
5665 té développé jusqu’au ridicule par la démocratie. Les journaux, les cercles, les coulisses de parlements et autres potinièr
5666 usqu’au ridicule par la démocratie. Les journaux, les cercles, les coulisses de parlements et autres potinières ne vivent q
5667 ule par la démocratie. Les journaux, les cercles, les coulisses de parlements et autres potinières ne vivent que de semblab
5668 er quelque saveur à ses jugements. C’est pourquoi l’ on ne peut plus attaquer un fonctionnaire dans son activité publique s
5669 un très brave homme, il fait partie du conseil de la paroisse, etc. » — Il semble qu’en attaquant ses idées et leurs réali
5670 es et leurs réalisations ont ait porté atteinte à la dignité morale de ce M. Machin, membre du conseil de paroisse. Je pré
5671 onseil de paroisse. Je préciserai donc : je tiens l’ École pour criminelle. Mais je ne tiens pas tous les instituteurs pour
5672 ’École pour criminelle. Mais je ne tiens pas tous les instituteurs pour gibier de potence. Ils font beaucoup de mal, mais i
5673 mières victimes du système qu’il propagent et qui les fait vivre. La question se complique dès que l’instituteur prend cons
5674 du système qu’il propagent et qui les fait vivre. La question se complique dès que l’instituteur prend conscience de la no
5675 les fait vivre. La question se complique dès que l’ instituteur prend conscience de la nocivité de son action… Ils sont co
5676 mplique dès que l’instituteur prend conscience de la nocivité de son action… Ils sont consciencieux, certes, mais sont-ils
5677 ls sont consciencieux, certes, mais sont-ils dans la même mesure conscients des fins qu’on assigne à leur activité ? Un pe
5678 assigne à leur activité ? Un peu de rigueur dans la pensée empêcherait souvent des catastrophes que beaucoup de rigueur m
5679 igueur morale ne saurait même pas prévoir. NOTE B La culture de notre sensibilité nous aiderait à retrouver l’accord avec
5680 re de notre sensibilité nous aiderait à retrouver l’ accord avec l’ordre naturel. La culture de notre force de pensée nous
5681 nsibilité nous aiderait à retrouver l’accord avec l’ ordre naturel. La culture de notre force de pensée nous rendrait une l
5682 derait à retrouver l’accord avec l’ordre naturel. La culture de notre force de pensée nous rendrait une liberté sans laque
5683 t vains pour instaurer cette nouvelle attitude de l’ âme. Mais ces méthodes ne prendraient tout leur sens et toute leur eff
5684 un système religieux. Pour quiconque a une foi et la conscience de cette foi, il n’est d’enseignement véritable que religi
5685 ’est d’enseignement véritable que religieux. Mais les questions confessionnelles enrayent et faussent tout. Imaginez une cu
5686 ltères et rester pacifiste. NOTE C Vous parlez de la grande vulgarité de mes attaques. Ce qui est vulgaire, au plein sens
5687 Ce qui est vulgaire, au plein sens du mot, c’est le genre distingué de la bourgeoisie qui se monte le cou. 13. Économis
5688 au plein sens du mot, c’est le genre distingué de la bourgeoisie qui se monte le cou. 13. Économistes et philosophes : c
5689 le genre distingué de la bourgeoisie qui se monte le cou. 13. Économistes et philosophes : ces Messieurs n’apparaissent
5690 ssieurs n’apparaissent ici que pour impressionner le public. Je n’ai pas besoin de leurs attendus pour juger. 14. Ces deu
5691 . Ces deux mots en effet, terrorisent à tel point les bourgeois qu’ils n’en distinguent plus même le sens. Ils les lancent
5692 t les bourgeois qu’ils n’en distinguent plus même le sens. Ils les lancent à la tête de tous ceux qui les dérangent, comme
5693 is qu’ils n’en distinguent plus même le sens. Ils les lancent à la tête de tous ceux qui les dérangent, comme des pavés, ou
5694 distinguent plus même le sens. Ils les lancent à la tête de tous ceux qui les dérangent, comme des pavés, ou plutôt des g
5695 sens. Ils les lancent à la tête de tous ceux qui les dérangent, comme des pavés, ou plutôt des grenades, avec la frousse q
5696 nt, comme des pavés, ou plutôt des grenades, avec la frousse que ça ne leur éclate dans la main. 15. Cf. ce que dit Tolst
5697 nades, avec la frousse que ça ne leur éclate dans la main. 15. Cf. ce que dit Tolstoï sur cette haine et sur ce besoin da
5698 les pédagogiques encore très actuels, du fait que l’ école n’a pas bougé depuis. 16. On promet des confitures à l’enfant,
5699 pas bougé depuis. 16. On promet des confitures à l’ enfant, s’il est sage. Moi je m’en moque. Je n’aime que la liberté.
5700 , s’il est sage. Moi je m’en moque. Je n’aime que la liberté.
89 1929, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Prison. Ailleurs. Étoile de jour (mars 1929)
5701 de jour (mars 1929)z Prison Prisonnier de la nuit mais plus libre qu’un ange prisonnier dans ta tête mais libre co
5702 me avant cette naissance aux lents vertiges Quand la nuit s’effeuille et se fane prisonnier d’une saison morte au tombeau
5703 d’une saison morte au tombeau des fleurs obscures les mains de l’absence se ferment sur le vide   Tu pleurerais Mais la gr
5704 morte au tombeau des fleurs obscures les mains de l’ absence se ferment sur le vide   Tu pleurerais Mais la grâce est faci
5705 rs obscures les mains de l’absence se ferment sur le vide   Tu pleurerais Mais la grâce est facile comme un matin d’été l
5706 ence se ferment sur le vide   Tu pleurerais Mais la grâce est facile comme un matin d’été la grâce tendrement dénouée de
5707 ais Mais la grâce est facile comme un matin d’été la grâce tendrement dénouée de ta vie comme de cette nuit le jour d’un g
5708 tendrement dénouée de ta vie comme de cette nuit le jour d’un grand été   qui consent… Ailleurs Colombes lumineuse
5709 yageuses ah ! que d’aucun retour vous ne laissiez le gage aux plaintes de mon cœur il est d’autres rivages où mieux qu’ici
5710 mon cœur il est d’autres rivages où mieux qu’ici l’ on meurt. Étoile de jour Il naissait à son destin des rayons g
5711 t à son destin des rayons glissent et rient c’est la caresse des anges parmi les formes de l’ombre C’était l’aube et le
5712 lissent et rient c’est la caresse des anges parmi les formes de l’ombre C’était l’aube et le sourire adorable de savoir l
5713 nt c’est la caresse des anges parmi les formes de l’ ombre C’était l’aube et le sourire adorable de savoir la dansante li
5714 e des anges parmi les formes de l’ombre C’était l’ aube et le sourire adorable de savoir la dansante liberté d’un désir à
5715 s parmi les formes de l’ombre C’était l’aube et le sourire adorable de savoir la dansante liberté d’un désir à sa naissa
5716 C’était l’aube et le sourire adorable de savoir la dansante liberté d’un désir à sa naissance L’étoile qui l’accueille
5717 r la dansante liberté d’un désir à sa naissance L’ étoile qui l’accueille au sommet ravi d’un silence c’est le miroir d’u
5718 liberté d’un désir à sa naissance L’étoile qui l’ accueille au sommet ravi d’un silence c’est le miroir d’une absence ma
5719 qui l’accueille au sommet ravi d’un silence c’est le miroir d’une absence mais le signe de sa grâce Dans l’or vert évano
5720 i d’un silence c’est le miroir d’une absence mais le signe de sa grâce Dans l’or vert évanouie au cœur éclatant du jour
5721 ir d’une absence mais le signe de sa grâce Dans l’ or vert évanouie au cœur éclatant du jour scintillera l’invisible gage
5722 ert évanouie au cœur éclatant du jour scintillera l’ invisible gage d’un amour perdu. z. Rougemont Denis de, « Prison
90 1929, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Souvenirs d’enfance et de jeunesse, par Philippe Godet (avril 1929)
5723 aa Quand avec un air fin mais un ton convaincu l’ on a répété dans une ballade fameuse « Que voulez-vous, je suis bourge
5724 fameuse « Que voulez-vous, je suis bourgeois ! », l’ on peut se permettre quelques malices, quelques jeux d’esprit ou de mé
5725 elques jeux d’esprit ou de méchanceté, assuré que l’ on est désormais d’être absous avec le sourire par la clientèle des li
5726 assuré que l’on est désormais d’être absous avec le sourire par la clientèle des librairies romandes, en mal de cadeaux d
5727 n est désormais d’être absous avec le sourire par la clientèle des librairies romandes, en mal de cadeaux de Noël ou de pr
5728 e cadeaux de Noël ou de première communion. Parmi les compatriotes d’Amiel, Godet restera l’un des rares qui ont réussi à s
5729 peu complexe et comme réduite à deux dimensions ; la conscience ne pouvait y tuer un lyrisme quasi inexistant, mais bien y
5730 xciter un esprit critique fort alerte. Jugez-en à la façon dont il parle de « ses quelques succès, si disproportionnés ave
5731 rtionnés avec son mérite ». Il ajoute : « j’ai eu la chance de discerner très jeune, avec une clairvoyance singulière, mes
5732 yance singulière, mes propres limites, et j’ai eu la sagesse de ne rien tenter au-delà ». C’est le comble de l’économie bo
5733 eu la sagesse de ne rien tenter au-delà ». C’est le comble de l’économie bourgeoise que cette administration exacte d’un
5734 e de ne rien tenter au-delà ». C’est le comble de l’ économie bourgeoise que cette administration exacte d’un petit capital
5735 e cette administration exacte d’un petit capital. Le contraire de la poésie, bien sûr. Mais on n’en demande pas tant dans
5736 ration exacte d’un petit capital. Le contraire de la poésie, bien sûr. Mais on n’en demande pas tant dans les familles. Et
5737 sie, bien sûr. Mais on n’en demande pas tant dans les familles. Et qu’importe si la perspective manque souvent à ces récits
5738 ande pas tant dans les familles. Et qu’importe si la perspective manque souvent à ces récits : ce n’est point un paysage d
5739 ’est point un paysage d’âme qu’on y cherche, mais l’ anecdote bien tournée, des noms connus. Tout est sur le même plan ; le
5740 cdote bien tournée, des noms connus. Tout est sur le même plan ; le dessin d’ailleurs est élégant. Mais comme tout cela ma
5741 née, des noms connus. Tout est sur le même plan ; le dessin d’ailleurs est élégant. Mais comme tout cela manque de chair.
91 1929, Journal de Genève, articles (1926–1982). Panorama de Budapest (23 mai 1929)
5742 press, changer totalement d’atmosphère, passer de la lassitude à la turbulence, d’une propreté joliette à un désordre pitt
5743 totalement d’atmosphère, passer de la lassitude à la turbulence, d’une propreté joliette à un désordre pittoresque, d’un s
5744 d’un scepticisme poli à une excitation agressive. La simple visite des cafés dans l’une et l’autre de ces capitales suffit
5745 l’autre de ces capitales suffit à vous en donner la sensation : ce que vous pourrez voir durant le reste de votre séjour
5746 er la sensation : ce que vous pourrez voir durant le reste de votre séjour ne fera que confirmer cette première impression
5747 mer cette première impression. Vienne : assis sur les banquettes rembourrées de profondes loges, les clients dégustent des
5748 ur les banquettes rembourrées de profondes loges, les clients dégustent des cafés débordants de crème, avec une apathie qu’
5749 troubler, aucune voix haute, aucune couleur vive. Les journaux qu’ils lisent annoncent chaque jour quelque catastrophe immi
5750 ur quelque catastrophe imminente, une révolution, le transfert de la SDN à la Hofburg… Mais les nouvelles de l’Opéra aussi
5751 trophe imminente, une révolution, le transfert de la SDN à la Hofburg… Mais les nouvelles de l’Opéra aussi sont en grosses
5752 minente, une révolution, le transfert de la SDN à la Hofburg… Mais les nouvelles de l’Opéra aussi sont en grosses lettres,
5753 lution, le transfert de la SDN à la Hofburg… Mais les nouvelles de l’Opéra aussi sont en grosses lettres, et tout cela fini
5754 ert de la SDN à la Hofburg… Mais les nouvelles de l’ Opéra aussi sont en grosses lettres, et tout cela finira bien par s’ar
5755 uple s’est résigné avec une facilité incroyable à la défaite, au marxisme, au chômage, lequel semble d’ailleurs correspond
5756 emble d’ailleurs correspondre à son état d’esprit le plus naturel. Mais de quoi vivent ces bourgeois aimables et insipides
5757 ipides, qui passent des après-midi entiers devant les deux verres d’eau que le garçon renouvelle de temps à autre, à lire d
5758 rès-midi entiers devant les deux verres d’eau que le garçon renouvelle de temps à autre, à lire des potins tout en essuyan
5759 t : une vague de musique tzigane vous emporte dès l’ entrée. Un violon vient vous siffler à l’oreille les notes les plus ai
5760 orte dès l’entrée. Un violon vient vous siffler à l’ oreille les notes les plus aiguës d’une chanson populaire, et à l’autr
5761 ’entrée. Un violon vient vous siffler à l’oreille les notes les plus aiguës d’une chanson populaire, et à l’autre extrémité
5762 n violon vient vous siffler à l’oreille les notes les plus aiguës d’une chanson populaire, et à l’autre extrémité de la sal
5763 ’une chanson populaire, et à l’autre extrémité de la salle, par-dessus la rumeur des clients, le violoncelle répond de sa
5764 e, et à l’autre extrémité de la salle, par-dessus la rumeur des clients, le violoncelle répond de sa voix profonde et pass
5765 té de la salle, par-dessus la rumeur des clients, le violoncelle répond de sa voix profonde et passionnée, sous les roulad
5766 le répond de sa voix profonde et passionnée, sous les roulades d’un cymbalum. Aux parois, la prière pour la résurrection de
5767 née, sous les roulades d’un cymbalum. Aux parois, la prière pour la résurrection de la Hongrie, des portraits de lord Roth
5768 oulades d’un cymbalum. Aux parois, la prière pour la résurrection de la Hongrie, des portraits de lord Rothermere, et sur
5769 um. Aux parois, la prière pour la résurrection de la Hongrie, des portraits de lord Rothermere, et sur toutes les portes l
5770 , des portraits de lord Rothermere, et sur toutes les portes le fameux : « Non ! non ! jamais ! » Officiers élégants, tout
5771 aits de lord Rothermere, et sur toutes les portes le fameux : « Non ! non ! jamais ! » Officiers élégants, tout de noir vê
5772 x curieux dessins noirs et blancs : il représente l’ ancienne Hongrie découpée en blanc sur fond noir et portant, en cœur n
5773 en blanc sur fond noir et portant, en cœur noir, la nouvelle… « Savez-vous qu’on nous a pris les deux tiers de notre pays
5774 noir, la nouvelle… « Savez-vous qu’on nous a pris les deux tiers de notre pays ?… Non, non, jamais ! » La rue est sale à ca
5775 deux tiers de notre pays ?… Non, non, jamais ! » La rue est sale à cause de la fonte de la neige (une boue ocre, épaisse,
5776 … Non, non, jamais ! » La rue est sale à cause de la fonte de la neige (une boue ocre, épaisse, on envie les bottes que po
5777 jamais ! » La rue est sale à cause de la fonte de la neige (une boue ocre, épaisse, on envie les bottes que portent les fe
5778 nte de la neige (une boue ocre, épaisse, on envie les bottes que portent les femmes), encombrée de piétons qui traversent e
5779 ue ocre, épaisse, on envie les bottes que portent les femmes), encombrée de piétons qui traversent en tous sens, évitant vi
5780 ons qui traversent en tous sens, évitant vivement les trams qui sonnent avec frénésie et les petits taxis rouges qui déferl
5781 t vivement les trams qui sonnent avec frénésie et les petits taxis rouges qui déferlent sur les boulevards comme une nuée d
5782 ésie et les petits taxis rouges qui déferlent sur les boulevards comme une nuée d’insectes affolés. Les maisons sont basses
5783 les boulevards comme une nuée d’insectes affolés. Les maisons sont basses, couvertes du haut en bas d’affiches rouges et ja
5784 rouges et jaunes et d’inscriptions cascadantes, à l’ orientale (on pense au mot bazar, qui sonne rouge et jaune aussi). Sou
5785 unichoises. Puis un palais gothique 1880, qui est le Parlement. Et voici la trouée du Danube, Bude solidement amarrée à Pe
5786 ais gothique 1880, qui est le Parlement. Et voici la trouée du Danube, Bude solidement amarrée à Pest par quatre énormes p
5787 en hiver, viennent se briser avec un fracas sourd les îlots de glace qui descendent lentement le fleuve. Au cœur de Prophèt
5788 sourd les îlots de glace qui descendent lentement le fleuve. Au cœur de Prophète chauve s’élève la montagne de pierre de S
5789 ent le fleuve. Au cœur de Prophète chauve s’élève la montagne de pierre de St-Gellert. Elle tombe en hautes falaises dans
5790 de St-Gellert. Elle tombe en hautes falaises dans le Danube, froide et nue, mais dans son flanc une grotte s’illumine, et
5791 ue, mais dans son flanc une grotte s’illumine, et la Vierge y sourit. Le château royal avec son amiral régent et ses garde
5792 anc une grotte s’illumine, et la Vierge y sourit. Le château royal avec son amiral régent et ses gardes blancs aux casques
5793 des crémeries aux idylles démodées… Rentrons dans la ville un soir qu’elle s’amuse. Vous avez dîné au paprika chez des gen
5794 usion de liqueurs légères facilite singulièrement les rapports sociaux. On vous mène au Théâtre, vous n’y comprenez rien, m
5795 us mène au Théâtre, vous n’y comprenez rien, mais le charme des voix hongroises féminines suffit à votre bonheur et vous v
5796 iste. Vous vous êtes levé, comme tout le monde, à l’ entrée d’un des archiducs. Car ce peuple, seul en Europe, attend le re
5797 archiducs. Car ce peuple, seul en Europe, attend le retour d’un roi. Et vous voici transporté dans un bal costumé, parmi
5798 ient et s’enivrent comme plus un Européen ne sait le faire, et dansent à tout propos de folles « czardas » qui deviennent
5799 ussins Rothermere et Grande Hongrie… Ivresse dans le malheur, passion et pauvreté, espoirs presque puérils et nostalgie de
5800 cela compose un visage romantique et ardent dont le voyageur s’éprend malgré lui, malgré tout, comme d’une passion poétiq
5801 nt Denis de, « Panorama de Budapest », Journal de Genève , Genève, 23 mai 1929, p. 1-2.
5802 de, « Panorama de Budapest », Journal de Genève, Genève , 23 mai 1929, p. 1-2.
92 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jules Supervielle, Saisir (juin 1929)
5803 faut s’en approcher avec une douceur patiente, et le laisser créer en nous son silence particulier avant d’entendre les si
5804 en nous son silence particulier avant d’entendre les signes qu’il nous propose. Une telle poésie n’offre aux sens que peu
5805 e quelques « motifs », objets usuels et usés, sur la nuance mate d’un paravent chinois). Ce qu’elle décrit, ce sont des pe
5806 s). Ce qu’elle décrit, ce sont des perceptions de l’ âme plus que de l’esprit ou des sens. « Reste immobile et sache attend
5807 rit, ce sont des perceptions de l’âme plus que de l’ esprit ou des sens. « Reste immobile et sache attendre que ton cœur se
5808 cœur se détache de toi comme une lourde pierre. » Le corps, que l’âme quitte, redevient minéral, statue dans le silence « 
5809 e de toi comme une lourde pierre. » Le corps, que l’ âme quitte, redevient minéral, statue dans le silence « aux yeux gelés
5810 que l’âme quitte, redevient minéral, statue dans le silence « aux yeux gelés de rêverie », il se confond avec l’ombre du
5811 « aux yeux gelés de rêverie », il se confond avec l’ ombre du monde. Et l’âme peut enfin « saisir » dans leur réalité les c
5812 êverie », il se confond avec l’ombre du monde. Et l’ âme peut enfin « saisir » dans leur réalité les choses dont elle s’est
5813 Et l’âme peut enfin « saisir » dans leur réalité les choses dont elle s’est dégagée et qu’elle voit dans une autre lumière
5814 t semblait vivre au fond d’un insistant regard. » Le poète des Gravitations est ici descendu plus profond en soi-même ; so
5815  ; et quel beau titre ! « Saisir » n’est-ce point l’ acte essentiel de la poésie ? Toute poésie véritable n’est-elle pas pr
5816 e ! « Saisir » n’est-ce point l’acte essentiel de la poésie ? Toute poésie véritable n’est-elle pas proprement « saisissan
5817 n’est-elle pas proprement « saisissante » ? Mais le plus émouvant, c’est ici l’approche d’un silence partout pressenti, q
5818  saisissante » ? Mais le plus émouvant, c’est ici l’ approche d’un silence partout pressenti, qui s’impose, qui apaise le v
5819 lence partout pressenti, qui s’impose, qui apaise le vain débat de notre esprit : « Car l’on pense beaucoup trop haut, et
5820 qui apaise le vain débat de notre esprit : « Car l’ on pense beaucoup trop haut, et cela fait un vacarme terrible. » ay.
5821 , Saisir  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, juin 1929, p. 762-763.
5822  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , juin 1929, p. 762-763.
93 1929, Articles divers (1924–1930). La tour de Hölderlin (15 juillet 1929)
5823 La tour de Hölderlin (15 juillet 1929)o « Je lui ai raconté qu’il hab
5824 e une chaumière au bord d’un ruisseau, qu’il dort les portes ouvertes, et pendant des heures récite des odes grecques au mu
5825 des heures récite des odes grecques au murmure de l’ eau ; la Princesse de Homburg lui a fait cadeau d’un piano dont il a c
5826 es récite des odes grecques au murmure de l’eau ; la Princesse de Homburg lui a fait cadeau d’un piano dont il a coupé les
5827 burg lui a fait cadeau d’un piano dont il a coupé les cordes, mais pas toutes, en sorte que plusieurs touches sonnent encor
5828 lettre sur Hölderlin : « Ce piano dont il a cassé les cordes, c’est vraiment l’image de son âme ; j’ai voulu attirer là-des
5829 piano dont il a cassé les cordes, c’est vraiment l’ image de son âme ; j’ai voulu attirer là-dessus l’attention du médecin
5830 l’image de son âme ; j’ai voulu attirer là-dessus l’ attention du médecin, mais il est plus difficile de se faire comprendr
5831 se faire comprendre par un sot que par un fou. » L’ hiver dernier, m’occupant assez longuement d’un des poètes auxquels no
5832 t d’un des poètes auxquels notre temps doit vouer l’ attention la plus grave — car il vécut dans ces marches de l’esprit hu
5833 oètes auxquels notre temps doit vouer l’attention la plus grave — car il vécut dans ces marches de l’esprit humain qui con
5834 la plus grave — car il vécut dans ces marches de l’ esprit humain qui confinent peut-être à l’Esprit et dont certains des
5835 ches de l’esprit humain qui confinent peut-être à l’ Esprit et dont certains des plus purs d’entre nous se préparent à tent
5836 des plus purs d’entre nous se préparent à tenter le climat, — j’avais rêvé sur ce passage de l’émouvante Bettina, rêvé sa
5837 enter le climat, — j’avais rêvé sur ce passage de l’ émouvante Bettina, rêvé sans doute assez profondément pour qu’aujourd’
5838 sans doute assez profondément pour qu’aujourd’hui le hasard qui m’amène à Tubingue ne soit pas seulement un hasard… Hier,
5839 ue ne soit pas seulement un hasard… Hier, c’était la Pentecôte. La fête de la plus haute poésie. Mais dans ce siècle, où t
5840 seulement un hasard… Hier, c’était la Pentecôte. La fête de la plus haute poésie. Mais dans ce siècle, où tant de voix l’
5841 un hasard… Hier, c’était la Pentecôte. La fête de la plus haute poésie. Mais dans ce siècle, où tant de voix l’appellent,
5842 aute poésie. Mais dans ce siècle, où tant de voix l’ appellent, combien sont dignes de s’attendre au don du langage sacré ?
5843 angue de feu qui s’est posée sur Hölderlin et qui l’ a consumé… Digne ? — Un adolescent au visage de jeune fille qui rimait
5844 age de jeune fille qui rimait sagement des odes à la liberté… Et voici dans sa vie cette double venue de l’amour et du cha
5845 berté… Et voici dans sa vie cette double venue de l’ amour et du chant prophétique, confondant leurs flammes. Dix années da
5846 étique, confondant leurs flammes. Dix années dans le Grand Jeu. Dix années où le génie tourmente cet être faible, humilié
5847 mmes. Dix années dans le Grand Jeu. Dix années où le génie tourmente cet être faible, humilié par le monde. L’amour s’éloi
5848 ù le génie tourmente cet être faible, humilié par le monde. L’amour s’éloigne le premier, quand Hölderlin doit quitter la
5849 tourmente cet être faible, humilié par le monde. L’ amour s’éloigne le premier, quand Hölderlin doit quitter la maison de
5850 ’éloigne le premier, quand Hölderlin doit quitter la maison de Madame Gontard12, déchirement à peine sensible dans son œuv
5851 dans son œuvre. Car ce poète n’est peut-être que le lieu de sa poésie, — d’une poésie, l’on dirait, qui ne connaît pas so
5852 ut-être que le lieu de sa poésie, — d’une poésie, l’ on dirait, qui ne connaît pas son auteur. Qui parle par sa bouche ? Il
5853 ses Hymnes une sérénité presque effrayante. Vient le temps où le sens de son monologue entre terre et ciel lui échappe. Il
5854 ne sérénité presque effrayante. Vient le temps où le sens de son monologue entre terre et ciel lui échappe. Il jette encor
5855 rappelle — Ou bien envoie — un héros — Ou bien — la sagesse. » Mais le feu s’éteint — l’esprit souffle où il veut. Juin 1
5856 envoie — un héros — Ou bien — la sagesse. » Mais le feu s’éteint — l’esprit souffle où il veut. Juin 1802 : au moment où
5857 — Ou bien — la sagesse. » Mais le feu s’éteint — l’ esprit souffle où il veut. Juin 1802 : au moment où meurt Diotima, Höl
5858 meurt Diotima, Hölderlin errant loin d’elle (dans la région de Bordeaux croit-on), est frappé d’insolation ; sa folie d’un
5859 on), est frappé d’insolation ; sa folie d’un coup l’ envahit. C’est une sorte de vieillard qui reparaît en Allemagne. Et du
5860 ente années, ce pauvre corps abandonné vivra dans la petite tour de Tubingue, chez un charpentier — vivra très doucement,
5861 plicablement, une vie monotone de vieux maniaque. Le buisson ardent quitté par le feu se dessèche. Ce qui fut Hölderlin si
5862 e de vieux maniaque. Le buisson ardent quitté par le feu se dessèche. Ce qui fut Hölderlin signe maintenant Scardanelli de
5863 s qu’il donne aux visiteurs venus pour contempler la victime d’un miracle. — C’était l’époque des amateurs de ruines. Je s
5864 our contempler la victime d’un miracle. — C’était l’ époque des amateurs de ruines. Je suis descendu au bord de l’eau, un p
5865 s amateurs de ruines. Je suis descendu au bord de l’ eau, un peu au-dessous de la maison, en attendant l’heure d’ouverture.
5866 s descendu au bord de l’eau, un peu au-dessous de la maison, en attendant l’heure d’ouverture. Il y a là une station de ca
5867 eau, un peu au-dessous de la maison, en attendant l’ heure d’ouverture. Il y a là une station de canots de louage où j’ai v
5868 tzsche » à fond plat. Des saules se penchent vers l’ eau lente. Sur l’autre rive qui est celle d’une longue île, des étudia
5869 iants au crâne rasé se promènent un roman jaune à la main. L’un après l’autre, dans cette paresse de jour férié, les cloch
5870 après l’autre, dans cette paresse de jour férié, les clochers de la ville sonnent deux heures. Allons. Un de ces corridors
5871 dans cette paresse de jour férié, les clochers de la ville sonnent deux heures. Allons. Un de ces corridors de vieille mai
5872 ’étaient à demi encombrés d’armoires. Un couloir, la chambre. L’homme qui me conduit est le propriétaire actuel. « Monsieu
5873 emi encombrés d’armoires. Un couloir, la chambre. L’ homme qui me conduit est le propriétaire actuel. « Monsieur connaît Hö
5874 n couloir, la chambre. L’homme qui me conduit est le propriétaire actuel. « Monsieur connaît Hölderlin ? — questionne-t-il
5875 , ici à Francfort, écrivait Bettina, car aussitôt l’ on se met à raconter les choses les plus affreuses sur son compte, sim
5876 vait Bettina, car aussitôt l’on se met à raconter les choses les plus affreuses sur son compte, simplement parce qu’il a ai
5877 a, car aussitôt l’on se met à raconter les choses les plus affreuses sur son compte, simplement parce qu’il a aimé une femm
5878 l a aimé une femme, pour écrire Hypérion, et pour les gens d’ici, aimer, c’est seulement vouloir se marier… » — Et puis plu
5879 uloir se marier… » — Et puis plus tard on encadre les lettres des amants, on propose le couple à l’admiration des écoliers
5880 ard on encadre les lettres des amants, on propose le couple à l’admiration des écoliers en promenade, et le guide désigne
5881 re les lettres des amants, on propose le couple à l’ admiration des écoliers en promenade, et le guide désigne familièremen
5882 uple à l’admiration des écoliers en promenade, et le guide désigne familièrement l’image d’une femme par le nom qu’elle po
5883 s en promenade, et le guide désigne familièrement l’ image d’une femme par le nom qu’elle portait au mystère de l’amour… Tr
5884 ide désigne familièrement l’image d’une femme par le nom qu’elle portait au mystère de l’amour… Trois petites fenêtres orn
5885 ne femme par le nom qu’elle portait au mystère de l’ amour… Trois petites fenêtres ornées de cactus miséreux, une pipe qui
5886 rnées de cactus miséreux, une pipe qui traîne sur l’ appui ; le jardinet avec son banc et ses lilas fleuris qui trempent… T
5887 actus miséreux, une pipe qui traîne sur l’appui ; le jardinet avec son banc et ses lilas fleuris qui trempent… Tout est fa
5888 armotter. Vingt-sept ans dans cette chambre, avec le bruit de l’eau et cette complainte de malade épuisé après un grand ac
5889 ngt-sept ans dans cette chambre, avec le bruit de l’ eau et cette complainte de malade épuisé après un grand accès de fièvr
5890 de malade épuisé après un grand accès de fièvre… L’ agrément de ce monde, je l’ai vécu. Les joies de la jeunesse, voilà
5891 rand accès de fièvre… L’agrément de ce monde, je l’ ai vécu. Les joies de la jeunesse, voilà si longtemps, si longtemp
5892 fièvre… L’agrément de ce monde, je l’ai vécu. Les joies de la jeunesse, voilà si longtemps, si longtemps qu’elles ont
5893 grément de ce monde, je l’ai vécu. Les joies de la jeunesse, voilà si longtemps, si longtemps qu’elles ont fui. Avri
5894 . Il y avait encore plus de paix que maintenant. La grande allée sur l’île n’existait pas, en face, ni les maisons. Il vo
5895 plus de paix que maintenant. La grande allée sur l’ île n’existait pas, en face, ni les maisons. Il voyait des prairies et
5896 rande allée sur l’île n’existait pas, en face, ni les maisons. Il voyait des prairies et des collines basses, de l’autre cô
5897 airies et des collines basses, de l’autre côté de l’ eau jaune et verte… Quel est donc ce sommeil « dans la nuit de la vie 
5898 u jaune et verte… Quel est donc ce sommeil « dans la nuit de la vie » — et cet aveu mystérieux : « La perfection n’a pas d
5899 verte… Quel est donc ce sommeil « dans la nuit de la vie » — et cet aveu mystérieux : « La perfection n’a pas de plainte »
5900 la nuit de la vie » — et cet aveu mystérieux : «  La perfection n’a pas de plainte »… Vivait-il encore ? Ce lieu soudain m
5901 vait-il encore ? Ce lieu soudain m’angoisse. Mais le gardien : il y est comme chez lui. — Dormez-vous dans ce lit ? — Oh !
5902 — Oh ! répond-il, je pourrais aussi bien habiter la chambre. Il ne vient pas tant de visiteurs, et seulement de 2 à 4… Un
5903 4… Une rue étouffée entre des maisons pointues et les contreforts de l’Église du Chapitre : je vois s’y engager chaque jour
5904 entre des maisons pointues et les contreforts de l’ Église du Chapitre : je vois s’y engager chaque jour le fou au profil
5905 ise du Chapitre : je vois s’y engager chaque jour le fou au profil de vieille femme qui promène doucement dans cette calme
5906 e qui promène doucement dans cette calme Tubingue le secret d’une épouvantable mélancolie. Les étudiants le rencontrent, q
5907 Tubingue le secret d’une épouvantable mélancolie. Les étudiants le rencontrent, qui montent au Séminaire protestant : il le
5908 cret d’une épouvantable mélancolie. Les étudiants le rencontrent, qui montent au Séminaire protestant : il leur fait de gr
5909 protestant : il leur fait de grandes révérences… La rumeur et le cliquetis d’une grande terrasse de café au bord du Necka
5910 il leur fait de grandes révérences… La rumeur et le cliquetis d’une grande terrasse de café au bord du Neckar, sous les m
5911 e grande terrasse de café au bord du Neckar, sous les marronniers. À quatre heures, l’orchestre s’est mis à jouer des ringu
5912 du Neckar, sous les marronniers. À quatre heures, l’ orchestre s’est mis à jouer des ringues charmantes, jazz et clarinette
5913 charmantes, jazz et clarinette, chansons de mai. Les bateaux qui dérivent dans le voisinage se rapprochent, tournoyent len
5914 e, chansons de mai. Les bateaux qui dérivent dans le voisinage se rapprochent, tournoyent lentement dans la musique. Je n’
5915 isinage se rapprochent, tournoyent lentement dans la musique. Je n’aime pas les jeunes Doktors à lunettes, en costume de b
5916 urnoyent lentement dans la musique. Je n’aime pas les jeunes Doktors à lunettes, en costume de bain, qui pagayent vigoureus
5917 en costume de bain, qui pagayent vigoureusement, les dents serrées. (« Weg zur Kraft und Schönheit ! »). J’aime les bateau
5918 rées. (« Weg zur Kraft und Schönheit ! »). J’aime les bateaux plats et incertains, avec des Daphnés dedans, qui ne savent p
5919 bien ramer et qui lisent des magazines au fil de l’ eau, ce qui est le comble des vacances. À une table voisine, des adole
5920 lisent des magazines au fil de l’eau, ce qui est le comble des vacances. À une table voisine, des adolescents balafrés fo
5921 ues à une compagnie de cavaliers qui passe devant la statue d’Eberhard le Barbu. Des bourgeois se rient contre par-dessus
5922 sus leurs chopes. « Gemütlichkeit ». Évidemment : la vie normale. Il y a pourtant cette petite chambre… Est-ce que tout ce
5923 petite chambre… Est-ce que tout cela existe dans le même monde ? (Il est bon de poser parfois de ces grandes questions na
5924 a ne peut que mal finir. Ceux du bon sens hochent la tête et citent la phrase la plus malencontreuse de Pascal : le « Qui
5925 finir. Ceux du bon sens hochent la tête et citent la phrase la plus malencontreuse de Pascal : le « Qui veut faire l’ange…
5926 x du bon sens hochent la tête et citent la phrase la plus malencontreuse de Pascal : le « Qui veut faire l’ange… » a autor
5927 tent la phrase la plus malencontreuse de Pascal : le « Qui veut faire l’ange… » a autorisé des générations de « bourgeois
5928 us malencontreuse de Pascal : le « Qui veut faire l’ ange… » a autorisé des générations de « bourgeois cultivés » à faire l
5929 des générations de « bourgeois cultivés » à faire la bête dès qu’il s’agit de l’âme. Dans la bouche de certains, cela pren
5930 is cultivés » à faire la bête dès qu’il s’agit de l’ âme. Dans la bouche de certains, cela prend l’air de je ne sais quelle
5931 » à faire la bête dès qu’il s’agit de l’âme. Dans la bouche de certains, cela prend l’air de je ne sais quelle revanche du
5932 dont ils se sentent bénéficiaires. Ah ! vraiment les malins ! qui ont préféré faire tout de suite la bête : comme cela on
5933 les malins ! qui ont préféré faire tout de suite la bête : comme cela on est mieux pour donner le coup de pied de l’âne…
5934 ite la bête : comme cela on est mieux pour donner le coup de pied de l’âne… Écoutons plutôt Bettina — la vérité est plus h
5935 cela on est mieux pour donner le coup de pied de l’ âne… Écoutons plutôt Bettina — la vérité est plus humaine, est plus di
5936 coup de pied de l’âne… Écoutons plutôt Bettina — la vérité est plus humaine, est plus divine, quand c’est une telle femme
5937 est plus divine, quand c’est une telle femme qui la confesse : « Celui qui entre en commerce trop étroit avec le ciel, le
5938  : « Celui qui entre en commerce trop étroit avec le ciel, les dieux le vouent au malheur. » Ô cette chambre, où pénètre l
5939 i qui entre en commerce trop étroit avec le ciel, les dieux le vouent au malheur. » Ô cette chambre, où pénètre la facilité
5940 e en commerce trop étroit avec le ciel, les dieux le vouent au malheur. » Ô cette chambre, où pénètre la facilité atroce d
5941 vouent au malheur. » Ô cette chambre, où pénètre la facilité atroce de cette fin d’après-midi, ces musiquettes et ces par
5942 , de ces mondes à mes yeux soudain simultanés ?… Le tragique de la facilité, c’est qu’elle n’est qu’un oubli. Et pourtant
5943 à mes yeux soudain simultanés ?… Le tragique de la facilité, c’est qu’elle n’est qu’un oubli. Et pourtant, comme elle pa
5944 blie, triomphante, à beau fixe. Pourquoi troubler le miroir innocent de ces eaux, ces âmes indulgentes à leur banalité ? E
5945 amais rien ? Ou bien, peut-être, seulement, quand l’ amour leur donne une petite fièvre, — cette semaine de leur jeunesse o
5946 choses généreuses autour d’eux… Cela s’oublie. Et l’ amour, tout justement, nous fait comprendre, dans le temps même qu’il
5947 amour, tout justement, nous fait comprendre, dans le temps même qu’il nous entr’ouvre le ciel, qu’il est bon qu’il y ait l
5948 prendre, dans le temps même qu’il nous entr’ouvre le ciel, qu’il est bon qu’il y ait le monde… Mais que cette musique vulg
5949 ous entr’ouvre le ciel, qu’il est bon qu’il y ait le monde… Mais que cette musique vulgaire, par quel hasard, donne l’acco
5950 ue cette musique vulgaire, par quel hasard, donne l’ accord qui m’ouvre un vrai silence : déjà je leur échappe — je t’échap
5951 , transitoire, allusif. Tout se remet à signifier l’ absence. 11. Bettina von Arnim-Brentano : Die Günderode. 12. Où il
5952 . 12. Où il était précepteur. Madame Gontard est la Diotima de l’Hypérion et des poèmes. o. Rougemont Denis de, « La to
5953 ypérion et des poèmes. o. Rougemont Denis de, «  La tour de Hölderlin », La Quinzaine artistique et littéraire, Neuchâtel
5954 o. Rougemont Denis de, « La tour de Hölderlin », La Quinzaine artistique et littéraire, Neuchâtel, 15 juillet 1929, p. 35
94 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jean Cassou, La Clef des songes (août 1929)
5955 Jean Cassou, La Clef des songes (août 1929)az Après cet austère Pays qui n’est à p
5956 Après cet austère Pays qui n’est à personne paru l’ année dernière — un livre assez troublant et qu’on a trop peu remarqué
5957 evient à son romantisme, à notre cher romantisme. La Clef des songes est de nouveau une dérive fantaisiste dans ce monde u
5958 monde un peu plus léger, un peu plus profond que le vrai, où l’Éloge de la folie nous entraînait naguère. Jean Cassou vag
5959 u plus léger, un peu plus profond que le vrai, où l’ Éloge de la folie nous entraînait naguère. Jean Cassou vagabonde à tra
5960 r, un peu plus profond que le vrai, où l’Éloge de la folie nous entraînait naguère. Jean Cassou vagabonde à travers ses hi
5961 à travers ses histoires comme son Pierangelo dans la vie. Le hasard, complice des poètes, lui fait rencontrer des êtres bi
5962 s ses histoires comme son Pierangelo dans la vie. Le hasard, complice des poètes, lui fait rencontrer des êtres bizarres a
5963 s il n’hésite pas à faire un bout de chemin, Hans le gardeur d’oies, le gueux Joseph qui parle à son chien en mourant, une
5964 faire un bout de chemin, Hans le gardeur d’oies, le gueux Joseph qui parle à son chien en mourant, une fille qui chante e
5965 une fille qui chante et des enfants surtout, dès le début, puis plus tard encore, dans les songes des grandes personnes,
5966 urtout, dès le début, puis plus tard encore, dans les songes des grandes personnes, — puis tous se perdent, comme des souve
5967 , — puis tous se perdent, comme des souvenirs, et l’ on retrouve un peu plus loin d’autres souvenirs attristés par le temps
5968 un peu plus loin d’autres souvenirs attristés par le temps, des visages qui ne sont plus tout à fait les mêmes, des bonheu
5969 e temps, des visages qui ne sont plus tout à fait les mêmes, des bonheurs qui signifient plus de désespoir qu’ils ne s’en d
5970 pleurer. Quel dommage qu’il s’égare parfois dans les maisons des grands bourgeois, où tout, soudain, devient plus terne. M
5971 oésie nous replonge dans une atmosphère autre, où les personnages ont cet air un peu ivre et capable de n’importe quoi, cet
5972 te quoi, cet air dangereux et tendre que prennent les hommes en liberté. Mais ils ne sont jamais méchants, et seulement aux
5973 de liberté dont nous avons besoin pour croire que le monde actuel n’est pas un cas désespéré. Mais voici déjà dans l’œuvre
5974 n’est pas un cas désespéré. Mais voici déjà dans l’ œuvre de Jean Cassou, et singulièrement dans ce livre, beaucoup de ces
5975 rs assez de vérité dans une histoire où il y a de la poésie. az. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Jean Cassou, La C
5976 Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Jean Cassou, La Clef des songes  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genè
5977 s songes  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, août 1929, p. 248-249.
5978  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , août 1929, p. 248-249.
95 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Rolland de Renéville, Rimbaud le voyant (août 1929)
5979 André Rolland de Renéville, Rimbaud le voyant (août 1929)ba À lire ce petit livre et le parallèle qu’il é
5980 voyant (août 1929)ba À lire ce petit livre et le parallèle qu’il établit entre le yogabb telle que l’enseignaient les
5981 e petit livre et le parallèle qu’il établit entre le yogabb telle que l’enseignaient les upanishads et la tentative poétiq
5982 parallèle qu’il établit entre le yogabb telle que l’ enseignaient les upanishads et la tentative poétique de Rimbaud, l’on
5983 établit entre le yogabb telle que l’enseignaient les upanishads et la tentative poétique de Rimbaud, l’on s’étonne qu’il a
5984 yogabb telle que l’enseignaient les upanishads et la tentative poétique de Rimbaud, l’on s’étonne qu’il ait fallu plus d’u
5985 s upanishads et la tentative poétique de Rimbaud, l’ on s’étonne qu’il ait fallu plus d’un demi-siècle pour qu’une telle in
5986 demi-siècle pour qu’une telle interprétation voie le jour. Cela pourrait donner lieu à de mélancoliques réflexions sur le
5987 ait donner lieu à de mélancoliques réflexions sur le génie « poétique » français… Mais non, nous préférons voir ici l’un d
5988 gnes qui de toutes parts annoncent une rentrée de l’ âme dans la littérature la plus spirituelle du monde. La thèse que déf
5989 toutes parts annoncent une rentrée de l’âme dans la littérature la plus spirituelle du monde. La thèse que défend l’auteu
5990 nnoncent une rentrée de l’âme dans la littérature la plus spirituelle du monde. La thèse que défend l’auteur de cet essai
5991 dans la littérature la plus spirituelle du monde. La thèse que défend l’auteur de cet essai — la voyance de Rimbaud — est
5992 la plus spirituelle du monde. La thèse que défend l’ auteur de cet essai — la voyance de Rimbaud — est une de ces évidences
5993 onde. La thèse que défend l’auteur de cet essai — la voyance de Rimbaud — est une de ces évidences qu’il est bon de propos
5994 une de ces évidences qu’il est bon de proposer à la réflexion de notre temps, ne fût-ce que pour faite honte à ceux qui s
5995 telle honte, de leur indifférence à l’endroit de l’ être le plus monstrueusement pur qui se soit révélé par le truchement
5996 honte, de leur indifférence à l’endroit de l’être le plus monstrueusement pur qui se soit révélé par le truchement de la p
5997 e plus monstrueusement pur qui se soit révélé par le truchement de la poésie française. — Livre un peu didactique, trop at
5998 ement pur qui se soit révélé par le truchement de la poésie française. — Livre un peu didactique, trop attentif à sa propr
5999 s inspiré par cet enthousiasme sacré que requiert l’ œuvre de Rimbaud. Regrettons seulement qu’il n’élargisse pas plus une
6000 as plus une question aussi centrale — qui est, si l’ on veut, la question d’Orient-Occident. Et pourquoi cette hostilité de
6001 question aussi centrale — qui est, si l’on veut, la question d’Orient-Occident. Et pourquoi cette hostilité de sectaire c
6002 t. Et pourquoi cette hostilité de sectaire contre l’ interprétation proposée par Claudel et Isabelle Rimbaud ? Si Claudel s
6003 ontré partial en faisant de Rimbaud, « mystique à l’ état sauvage », un catholique qui s’ignore, il n’est pas plus admissib
6004 us admissible d’inférer du mépris de Rimbaud pour le catholicisme à son mépris pour la révélation évangélique. Je ne vois
6005 de Rimbaud pour le catholicisme à son mépris pour la révélation évangélique. Je ne vois là que l’indice d’une confusion bi
6006 pour la révélation évangélique. Je ne vois là que l’ indice d’une confusion bien française, hélas. ba. Rougemont Denis d
6007 Compte rendu] André Rolland de Renéville, Rimbaud le voyant  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, août
6008 e voyant  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, août 1929, p. 250-251. bb. Le féminin est ici conservé, con
6009  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , août 1929, p. 250-251. bb. Le féminin est ici conservé, conformémen
6010 ue de Genève, Genève, août 1929, p. 250-251. bb. Le féminin est ici conservé, conformément au texte original.
96 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Julien Benda, La Fin de l’Éternel (novembre 1929)
6011 Julien Benda, La Fin de l’Éternel (novembre 1929)bc Ce n’est plus l’heure de venir
6012 Julien Benda, La Fin de l’ Éternel (novembre 1929)bc Ce n’est plus l’heure de venir prendre po
6013 n de l’Éternel (novembre 1929)bc Ce n’est plus l’ heure de venir prendre position dans un débat où les voix les mieux éc
6014 ’heure de venir prendre position dans un débat où les voix les mieux écoutées ont dit ce qu’elles avaient à dire. Et d’autr
6015 venir prendre position dans un débat où les voix les mieux écoutées ont dit ce qu’elles avaient à dire. Et d’autre part, l
6016 dit ce qu’elles avaient à dire. Et d’autre part, les lecteurs de cette revue connaissent la thèse de la Trahison des Clerc
6017 tre part, les lecteurs de cette revue connaissent la thèse de la Trahison des Clercs 11, thèse dont la Fin de l’Éternel ne
6018 s lecteurs de cette revue connaissent la thèse de la Trahison des Clercs 11, thèse dont la Fin de l’Éternel ne fait que re
6019 la thèse de la Trahison des Clercs 11, thèse dont la Fin de l’Éternel ne fait que reprendre la défense contre ses adversai
6020 e la Trahison des Clercs 11, thèse dont la Fin de l’ Éternel ne fait que reprendre la défense contre ses adversaires de tou
6021 se dont la Fin de l’Éternel ne fait que reprendre la défense contre ses adversaires de tous bords. Je voudrais souligner s
6022 es de tous bords. Je voudrais souligner seulement la beauté de l’effort désintéressé de Julien Benda, et l’obligation où n
6023 rds. Je voudrais souligner seulement la beauté de l’ effort désintéressé de Julien Benda, et l’obligation où nous sommes to
6024 auté de l’effort désintéressé de Julien Benda, et l’ obligation où nous sommes tous désormais de répondre pour nous-mêmes à
6025 mise en demeure. Je suis loin de partager toutes les idées de M. Benda, sur le plan philosophique en particulier, où je me
6026 hèse de M. Marcel de ce qu’elle « mène loin… dans l’ ordre moral ». Et quand cela serait ! dirons-nous, — avec le Benda qui
6027 ral ». Et quand cela serait ! dirons-nous, — avec le Benda qui ne trahit pas.) D’autre part, de plus impertinents que moi
6028 s que moi ne manqueront pas de faire observer que la « fin de l’éternel », la chute de l’idée dans la matière, est un phén
6029 manqueront pas de faire observer que la « fin de l’ éternel », la chute de l’idée dans la matière, est un phénomène exacte
6030 as de faire observer que la « fin de l’éternel », la chute de l’idée dans la matière, est un phénomène exactement aussi vi
6031 observer que la « fin de l’éternel », la chute de l’ idée dans la matière, est un phénomène exactement aussi vieux que le m
6032 la « fin de l’éternel », la chute de l’idée dans la matière, est un phénomène exactement aussi vieux que le monde. Mais M
6033 ière, est un phénomène exactement aussi vieux que le monde. Mais M. Benda distinguera, et ils seront confondus. Car il y a
6034 un sophiste en M. Benda, un polémiste qui joue de la raison ratiocinante tout comme si elle n’était pas le contraire de la
6035 aison ratiocinante tout comme si elle n’était pas le contraire de la Raison de Spinoza. Nul mieux que lui ne s’entend défi
6036 te tout comme si elle n’était pas le contraire de la Raison de Spinoza. Nul mieux que lui ne s’entend définir et classer c
6037 lui permettent de triompher syllogistiquement de l’ adversaire, sinon de la difficulté elle-même. Mais pour gênante que so
6038 mpher syllogistiquement de l’adversaire, sinon de la difficulté elle-même. Mais pour gênante que soit souvent son adresse
6039 dresse de logicien, elle ne doit pas nous masquer l’ audace tranquille et admirable de son point de vue radicalement antimo
6040 n pic trop élevé pour qu’on y puisse vivre, c’est l’ impossible. Mais justement, la gloire de M. Benda sera d’avoir soutenu
6041 puisse vivre, c’est l’impossible. Mais justement, la gloire de M. Benda sera d’avoir soutenu que l’humanité a besoin qu’on
6042 t, la gloire de M. Benda sera d’avoir soutenu que l’ humanité a besoin qu’on lui demande l’impossible. Et quand bien même e
6043 soutenu que l’humanité a besoin qu’on lui demande l’ impossible. Et quand bien même elle croirait n’en avoir plus besoin. C
6044 roirait n’en avoir plus besoin. Cet extrémisme de la pensée intemporelle, en butte aux sarcasmes des extrémistes de droite
6045 ît que plus pur. « Noms de clowns qui me viennent l’ esprit : Julien Benda… », écrit Aragon. Et Daudet nous apprend que « l
6046 da… », écrit Aragon. Et Daudet nous apprend que «  le petit Benda est un fameux serin ». Mais ces affirmations sont exactem
6047 a pas disputer à M. Benda, c’est son dur amour de la vérité tout court. Celle-là même qui paraît anarchique dans un monde
6048 i que relativement à un rendement. Rien, pas même la religion. 11. Cf. l’article de M. Daniel Halévy (décembre 1927) et
6049 rendement. Rien, pas même la religion. 11. Cf. l’ article de M. Daniel Halévy (décembre 1927) et la réponse de M. Benda
6050 l’article de M. Daniel Halévy (décembre 1927) et la réponse de M. Benda (janvier 1928). bc. Rougemont Denis de, « [Comp
6051 ougemont Denis de, « [Compte rendu] Julien Benda, La Fin de l’Éternel  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Gen
6052 enis de, « [Compte rendu] Julien Benda, La Fin de l’ Éternel  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, novem
6053 ’Éternel  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève , Genève, novembre 1929, p. 638-639.
6054  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève , novembre 1929, p. 638-639.
97 1929, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). L’ordre social. Le Libéralisme. L’inspiration (novembre 1929)
6055 L’ ordre social. Le Libéralisme. L’inspiration (novembre 1929)ab L’o
6056 L’ordre social. Le Libéralisme. L’inspiration (novembre 1929)ab L’ordre social I
6057 L’ordre social. Le Libéralisme. L’ inspiration (novembre 1929)ab L’ordre social Il y avait une fo
6058 Libéralisme. L’inspiration (novembre 1929)ab L’ ordre social Il y avait une fois un jeune homme comme les autres. S
6059 ocial Il y avait une fois un jeune homme comme les autres. Soudain il lui pousse des ailes, une grande paire d’ailes. Al
6060 ait-on s’émerveiller ? Mais déjà Freud expliquait le monstre, les chaires le dénonçaient, et les précieuses trouvaient cel
6061 rveiller ? Mais déjà Freud expliquait le monstre, les chaires le dénonçaient, et les précieuses trouvaient cela d’un romant
6062 ais déjà Freud expliquait le monstre, les chaires le dénonçaient, et les précieuses trouvaient cela d’un romantisme ! ma c
6063 iquait le monstre, les chaires le dénonçaient, et les précieuses trouvaient cela d’un romantisme ! ma chère, d’un mauvais g
6064 antisme ! ma chère, d’un mauvais goût ! Cependant le jeune homme agitait ses ailes non sans une ingénue fierté. Mais au co
6065 e ingénue fierté. Mais au courant d’air s’enrhuma le grand-papa. On craignit de le perdre. — « Eh ! quoi, — vinrent lui di
6066 ant d’air s’enrhuma le grand-papa. On craignit de le perdre. — « Eh ! quoi, — vinrent lui dire ses amis, — l’orgueil t’ave
6067 re. — « Eh ! quoi, — vinrent lui dire ses amis, —  l’ orgueil t’aveugle-t-il ? Veux-tu conserver, ô cruel, des ailes qui don
6068 ur, ô pervers, ô disciple de Nietzsche ! » — Sous le poids de cette accusation, comment ne point céder : il fit couper ses
6069 ment ne point céder : il fit couper ses ailes. On le félicita de son retour à l’état normal, qui est pédestre. Mais à part
6070 couper ses ailes. On le félicita de son retour à l’ état normal, qui est pédestre. Mais à partir de ce jour, on lui fit se
6071 ’en a pas sera méprisé parce qu’il n’en a pas. Le libéralisme Seigneur ! clamaient-ils, combien complexes sont les p
6072 Seigneur ! clamaient-ils, combien complexes sont les problèmes que vous proposez à notre bonne volonté gémissante ! Dieu,
6073 r d’une solution fort simple qui d’ailleurs était la bonne, car le grand Remède, c’est un Simple. Des hurlements de rage n
6074 on fort simple qui d’ailleurs était la bonne, car le grand Remède, c’est un Simple. Des hurlements de rage ne tardèrent po
6075 ge ne tardèrent point à s’élever de toutes parts. Les uns défendaient la Démocratie outragée, les autres disaient qu’il n’y
6076 t à s’élever de toutes parts. Les uns défendaient la Démocratie outragée, les autres disaient qu’il n’y a plus de morale,
6077 arts. Les uns défendaient la Démocratie outragée, les autres disaient qu’il n’y a plus de morale, et ces jeunes gens ont un
6078 ale, et ces jeunes gens ont une façon de trancher les questions qui vous désarme. Craignant qu’on ne lui fît un mauvais par
6079 rme. Craignant qu’on ne lui fît un mauvais parti, l’ ange trouva son salut dans un subterfuge : il insinua qu’il parlait au
6080 il parlait au nom d’une secte orientale. Aussitôt la discussion de reprendre, et l’on parla défense de l’Occident. L’ange
6081 rientale. Aussitôt la discussion de reprendre, et l’ on parla défense de l’Occident. L’ange s’enfuit par l’un des nombreux
6082 discussion de reprendre, et l’on parla défense de l’ Occident. L’ange s’enfuit par l’un des nombreux trous de leurs raisonn
6083 e reprendre, et l’on parla défense de l’Occident. L’ ange s’enfuit par l’un des nombreux trous de leurs raisonnements. L
6084 ’un des nombreux trous de leurs raisonnements. L’ inspiration Comme le poète terminait sa théorie sur la nature de l’
6085 de leurs raisonnements. L’inspiration Comme le poète terminait sa théorie sur la nature de l’inspiration, un doute l
6086 ration Comme le poète terminait sa théorie sur la nature de l’inspiration, un doute lui vint. Il alla au cinéma. On don
6087 me le poète terminait sa théorie sur la nature de l’ inspiration, un doute lui vint. Il alla au cinéma. On donnait un film
6088 au cinéma. On donnait un film voluptueux. Il aima l’ héroïne, mais sans espoir. Il lui écrivit, en sortant de là, dans une
6089 tant de là, dans une crèmerie pleine de couples à la mode. Mais en écrivant il pensait à une femme blonde assise près de l
6090 près de lui. Ayant demandé un timbre pour attirer l’ attention de la femme blonde — sans résultat —, il écrivit une adresse
6091 ant demandé un timbre pour attirer l’attention de la femme blonde — sans résultat —, il écrivit une adresse réelle, et mit
6092 résultat —, il écrivit une adresse réelle, et mit la lettre dans la première boîte venue. Le lendemain, il reçut une répon
6093 e, et mit la lettre dans la première boîte venue. Le lendemain, il reçut une réponse : « Vous avez commis une erreur, cher
6094 ma bénédiction, je suis votre amie Joséphine. » — Le poète reprit son manuscrit et conclut : « L’inspiration est le nom qu
6095  » — Le poète reprit son manuscrit et conclut : «  L’ inspiration est le nom qu’on donne en poésie à une suite de malentendu
6096 it son manuscrit et conclut : « L’inspiration est le nom qu’on donne en poésie à une suite de malentendus heureusement enc
6097 lui valut une Muse. ab. Rougemont Denis de, «  L’ ordre social. Le Libéralisme. L’inspiration », Revue de Belles-Lettres
6098 se. ab. Rougemont Denis de, « L’ordre social. Le Libéralisme. L’inspiration », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuch
6099 emont Denis de, « L’ordre social. Le Libéralisme. L’ inspiration », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Frib
98 1929, Les Méfaits de l’instruction publique (1972). Avant-propos
6100 Avant-propos Le dire une bonne fois.   Il ne faut pas songer à décrire en 50 petites
6101 aut pas songer à décrire en 50 petites pages tous les méfaits de l’instruction publique. C’est à peine assez pour indiquer
6102 à décrire en 50 petites pages tous les méfaits de l’ instruction publique. C’est à peine assez pour indiquer leur ordre de
6103 e grandeur ; à quoi je me bornerai. Il a paru sur le sujet de l’instruction publique deux petits livres1 excellents dont j
6104 à quoi je me bornerai. Il a paru sur le sujet de l’ instruction publique deux petits livres1 excellents dont je considère
6105 deux petits livres1 excellents dont je considère les thèses comme acquises : L’Éloge de l’ignorance, de M. Abel Bonnard, e
6106 nts dont je considère les thèses comme acquises : L’ Éloge de l’ignorance, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas l
6107 considère les thèses comme acquises : L’Éloge de l’ ignorance, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas les enfants,
6108  : L’Éloge de l’ignorance, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas les enfants, d’Henri Roorda. Le premier montre q
6109 e, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas les enfants, d’Henri Roorda. Le premier montre que la science apprise à l
6110 es enfants, d’Henri Roorda. Le premier montre que la science apprise à l’école appauvrit l’homme de tout ce que son ignora
6111 oorda. Le premier montre que la science apprise à l’ école appauvrit l’homme de tout ce que son ignorance respectait, et ne
6112 montre que la science apprise à l’école appauvrit l’ homme de tout ce que son ignorance respectait, et ne lui donne à la pl
6113 e que son ignorance respectait, et ne lui donne à la place que des laideurs et de la prétention. L’autre, avec l’ironie tr
6114 et ne lui donne à la place que des laideurs et de la prétention. L’autre, avec l’ironie tranquille du bon sens bafoué et q
6115 e des laideurs et de la prétention. L’autre, avec l’ ironie tranquille du bon sens bafoué et qui s’en moque, décrit la stup
6116 ille du bon sens bafoué et qui s’en moque, décrit la stupidité de l’enseignement tel qu’il est pratiqué dans nos collèges.
6117 bafoué et qui s’en moque, décrit la stupidité de l’ enseignement tel qu’il est pratiqué dans nos collèges. Mon dessein est
6118 e réaction de tempérament. Je marque d’autre part la nécessité de tout cela qui me blesse, la liaison fatale avec la démoc
6119 tre part la nécessité de tout cela qui me blesse, la liaison fatale avec la démocratie, de tout ce qui moleste ma liberté
6120 e tout cela qui me blesse, la liaison fatale avec la démocratie, de tout ce qui moleste ma liberté et sans doute celle de
6121 cialiste, qui a été établi par coup de force, que les libéraux ont admis, conformément à leurs maximes, et toléré malgré le
6122 humeur. Ce régime de punaises jaunâtres aboutit à l’ instruction publique et grâce à elle prolonge abusivement sa terne exi
6123 elle prolonge abusivement sa terne existence. Je l’ ai subi ; l’on va voir comment. De pareils souvenirs légitiment toutes
6124 ge abusivement sa terne existence. Je l’ai subi ; l’ on va voir comment. De pareils souvenirs légitiment toutes les haines.
6125 r comment. De pareils souvenirs légitiment toutes les haines. Je serai méchant, parce que j’en ai gros sur le cœur. D’aille
6126 nes. Je serai méchant, parce que j’en ai gros sur le cœur. D’ailleurs, ce petit écrit ne peut servir à rien. — Alors ? — J
6127 apper : celui de naïveté. Définition du naïf dans le monde moderne : individu qui soutient des idées qui ne rapportent rie
6128 r au nom de ma génération, ne m’étant pas livré à l’ enquête préalable qui seule eût pu, à la rigueur, me donner ce droit b
6129 s livré à l’enquête préalable qui seule eût pu, à la rigueur, me donner ce droit bien inutile. Pourtant je sais qu’à droit
6130 e comme à gauche, ils sont plus nombreux qu’on ne le pense, ceux qui refusent d’être complices dans cet attentat à l’intég
6131 qui refusent d’être complices dans cet attentat à l’ intégrité humaine qu’est en fait l’esprit démocratique. Là-dessus, ces
6132 cet attentat à l’intégrité humaine qu’est en fait l’ esprit démocratique. Là-dessus, ces messieurs se lamentent, la jeuness
6133 ocratique. Là-dessus, ces messieurs se lamentent, la jeunesse d’aujourd’hui, etc. Évidemment. Mais il y a les jérémiades e
6134 nesse d’aujourd’hui, etc. Évidemment. Mais il y a les jérémiades et il y a les raisons. Hors le domaine de l’amour, où tout
6135 Évidemment. Mais il y a les jérémiades et il y a les raisons. Hors le domaine de l’amour, où tout se confond miraculeuseme
6136 il y a les jérémiades et il y a les raisons. Hors le domaine de l’amour, où tout se confond miraculeusement, gémir n’est p
6137 émiades et il y a les raisons. Hors le domaine de l’ amour, où tout se confond miraculeusement, gémir n’est pas un argument
6138 eusement, gémir n’est pas un argument. Je demande le droit de démolir. Et me l’accorde aussitôt. Sans conditions. Mon rôle
6139 n argument. Je demande le droit de démolir. Et me l’ accorde aussitôt. Sans conditions. Mon rôle n’est pas de proposer une
6140 de vitupérer ce que je vois, qui est laid. Quand la soupe est brûlée, on la renvoie, même si l’on n’est pas capable d’en
6141 vois, qui est laid. Quand la soupe est brûlée, on la renvoie, même si l’on n’est pas capable d’en faire soi-même une meill
6142 Quand la soupe est brûlée, on la renvoie, même si l’ on n’est pas capable d’en faire soi-même une meilleure. Mais j’aperçoi
6143 Mais j’aperçois là-bas, vautré derrière son bock, le Citoyen conscient et organisé pour la discussion. Il retrousse ses ma
6144 e son bock, le Citoyen conscient et organisé pour la discussion. Il retrousse ses manches. Il s’apprête à cracher sur ce q
6145 Oh ! oh ! oh ! il va parler, de grâce mettez-lui les mains sur la bouche ! Donnez-lui sa choucroute, tapez-lui dans le dos
6146 ! il va parler, de grâce mettez-lui les mains sur la bouche ! Donnez-lui sa choucroute, tapez-lui dans le dos, amenez-lui
6147 bouche ! Donnez-lui sa choucroute, tapez-lui dans le dos, amenez-lui le Guguss 2, des bretzels, sa petite amie, au secours
6148 sa choucroute, tapez-lui dans le dos, amenez-lui le Guguss 2, des bretzels, sa petite amie, au secours ! Car j’ai encore
6149 ire. Dès qu’une voix s’élève pour mettre en doute l’ excellence du principe de l’instruction publique, on crie sur tous les
6150 pour mettre en doute l’excellence du principe de l’ instruction publique, on crie sur tous les bancs : « Alors, vous êtes
6151 ncipe de l’instruction publique, on crie sur tous les bancs : « Alors, vous êtes pour un retour à la barbarie ? » Si ce réf
6152 s les bancs : « Alors, vous êtes pour un retour à la barbarie ? » Si ce réflexe indique un mépris vraiment exagéré pour la
6153 e réflexe indique un mépris vraiment exagéré pour la jugeotte de l’adversaire ou s’il traduit simplement cette mauvaise fo
6154 ue un mépris vraiment exagéré pour la jugeotte de l’ adversaire ou s’il traduit simplement cette mauvaise foi pas même cons
6155 ise foi pas même consciente, cette lâcheté devant la discussion précise de leurs principes par quoi se signalent bien souv
6156 à cent « réponses » de cette sorte. Et je tiens à les classer par avance en deux catégories dont je vais régler le compte s
6157 par avance en deux catégories dont je vais régler le compte sommairement. Cela n’empêchera personne de me resservir ces ar
6158 A. Réponses du type : on ne peut pas aller contre l’ époque, vous êtes un pauvre utopiste, etc. Ce sont les positivistes qu
6159 poque, vous êtes un pauvre utopiste, etc. Ce sont les positivistes qui parlent ainsi, ceux qui croient aux faits. Je leur r
6160 Je leur réponds : 1° qu’ils ne peuvent me dénier le droit de juger ces faits ; 2° qu’ils ne peuvent, en vertu même de leu
6161 euvent, en vertu même de leur scepticisme quant à la valeur réformatrice des idées, m’accuser de faire une critique danger
6162 critique dangereuse ; 3° que néanmoins je crois à l’ efficace de certaines utopies. (Les religions, la découverte de l’Amér
6163 oins je crois à l’efficace de certaines utopies. ( Les religions, la découverte de l’Amérique par Christophe Colomb, l’Europ
6164 l’efficace de certaines utopies. (Les religions, la découverte de l’Amérique par Christophe Colomb, l’Europe napoléonienn
6165 rtaines utopies. (Les religions, la découverte de l’ Amérique par Christophe Colomb, l’Europe napoléonienne, la Russie d’ap
6166 a découverte de l’Amérique par Christophe Colomb, l’ Europe napoléonienne, la Russie d’après Karl Marx, le vol des frères W
6167 ue par Christophe Colomb, l’Europe napoléonienne, la Russie d’après Karl Marx, le vol des frères Wright, et tout bêtement,
6168 urope napoléonienne, la Russie d’après Karl Marx, le vol des frères Wright, et tout bêtement, c’est le cas de le dire : l’
6169 le vol des frères Wright, et tout bêtement, c’est le cas de le dire : l’instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d
6170 frères Wright, et tout bêtement, c’est le cas de le dire : l’instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d’aller con
6171 ight, et tout bêtement, c’est le cas de le dire : l’ instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d’aller contre l’époq
6172 dire : l’instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d’aller contre l’époque, et on le peut efficacement. 2° rira bi
6173 blique.) Résumé : 1° On a le droit d’aller contre l’ époque, et on le peut efficacement. 2° rira bien qui rira le dernier.
6174 : 1° On a le droit d’aller contre l’époque, et on le peut efficacement. 2° rira bien qui rira le dernier. B. Réponses du
6175 rétrograde, un infâme réactionnaire, etc. Ce sont les partisans d’une démocratie progressiste et tolérante qui se livrent à
6176 lérante qui se livrent à ces excès de langage. Je les renvoie en corps au chapitre 5 où je traiterai de cet aspect du probl
6177 e 5 où je traiterai de cet aspect du problème que l’ on peut appeler la question de droit. Certains, en effet, tirent toute
6178 i de cet aspect du problème que l’on peut appeler la question de droit. Certains, en effet, tirent toute leur force dans l
6179 Certains, en effet, tirent toute leur force dans les discussions de la tranquillité avec laquelle ils brouillent les faits
6180 , tirent toute leur force dans les discussions de la tranquillité avec laquelle ils brouillent les faits et les principes.
6181 s de la tranquillité avec laquelle ils brouillent les faits et les principes. Tourmentés par les scrupules de leur conscien
6182 uillité avec laquelle ils brouillent les faits et les principes. Tourmentés par les scrupules de leur conscience libérale,
6183 illent les faits et les principes. Tourmentés par les scrupules de leur conscience libérale, ils fuient la rigueur jusque d
6184 scrupules de leur conscience libérale, ils fuient la rigueur jusque dans leurs raisonnements. Pour moi qui cherche à démêl
6185 urs raisonnements. Pour moi qui cherche à démêler la vérité sans égards aux dérangements, même violents, que cela ne manqu
6186 jamais de provoquer, je me propose de marquer ici la distinction classique du fait et du droit ; et c’est pourquoi je cons
6187 droit ; et c’est pourquoi je considérerai d’abord l’ instruction publique dans ses réalisations actuelles, puis au terme de
6188 d’outrages au bon sens peuvent être légitimés par le but final de notre institution-tabou.   1. Je ne puis naturellement
6189 1. Je ne puis naturellement pas mentionner tous les ouvrages scientifiques. Les meilleurs sortent de l’Institut Rousseau.
6190 t pas mentionner tous les ouvrages scientifiques. Les meilleurs sortent de l’Institut Rousseau. 2. Guguss, journal comiqu
6191 ouvrages scientifiques. Les meilleurs sortent de l’ Institut Rousseau. 2. Guguss, journal comique d’une grande vulgarité
6192 uvrages scientifiques. Les meilleurs sortent de l’ Institut Rousseau. 2. Guguss, journal comique d’une grande vulgarité qui jou
6193 l comique d’une grande vulgarité qui jouait alors le rôle de nos bandes dessinées.
99 1929, Les Méfaits de l’instruction publique (1972). 1. Mes prisons
6194 ssent sur leurs souvenirs de classe. C’est qu’ils les confondent avec ceux de leur enfance et les font indûment participer
6195 u’ils les confondent avec ceux de leur enfance et les font indûment participer de la même grâce. Voyez Péguy, quand il essa
6196 e leur enfance et les font indûment participer de la même grâce. Voyez Péguy, quand il essaie de nous faire croire qu’ « i
6197 s faire croire qu’ « il n’y a rien au-dessus » de la tâche des instituteurs : Faire de ces belles analyses logiques, et g
6198 ithmétique où il fallait si soigneusement séparer les calculs du raisonnement, par une barre verticale, et où il y avait to
6199 t pour emplir ou pour vider un bassin (et souvent les deux), (pour emplir et vider ensemble), (drôle d’occupation), (après
6200 urs des appartements à meubler. Et on multipliait le tapissier par le prix du mètre courant. Encore que je prenne les sen
6201 nts à meubler. Et on multipliait le tapissier par le prix du mètre courant. Encore que je prenne les sentiments trop au s
6202 r le prix du mètre courant. Encore que je prenne les sentiments trop au sérieux pour faire ici du sentiment, je suis sensi
6203 sie. Mais ce qui fait très bien dans un Cahier de la quinzaine, ça faisait de mauvaises notes dans nos carnets hebdomadair
6204 journée d’enfant gâtée. Et d’ailleurs, multiplier le tapissier par le prix du mètre courant n’est pas une fantaisie pour c
6205 gâtée. Et d’ailleurs, multiplier le tapissier par le prix du mètre courant n’est pas une fantaisie pour ce petit être qui
6206 e pour ce petit être qui s’énerve, qui embrouille les règles, qui a sommeil, qui a peur de faire faux, parce que les autres
6207 ui a sommeil, qui a peur de faire faux, parce que les autres auront fait juste, et qui voudrait bien pleurer, et qui recomm
6208 rdoise où sèchent des traînées de craie grise, où les chiffres trop gros s’emmêlent… Et c’est cela l’enfance insouciante ?
6209 les chiffres trop gros s’emmêlent… Et c’est cela l’ enfance insouciante ? Qu’est-ce qui ressemble plus au souci quotidien
6210 s au souci quotidien des grandes personnes ? Mais l’ enfance est ailleurs. Je revois ce fond de jardin où l’on trouve des c
6211 ance est ailleurs. Je revois ce fond de jardin où l’ on trouve des cloportes dans la toile mouillée d’une tente d’Indiens,
6212 fond de jardin où l’on trouve des cloportes dans la toile mouillée d’une tente d’Indiens, des petites guerres mystérieuse
6213 , des matins de dimanche sonores et tout propres, la cuiller d’huile de foie de morue avant le repas, et le monsieur qui r
6214 ropres, la cuiller d’huile de foie de morue avant le repas, et le monsieur qui racontait gravement des choses qu’on ne com
6215 iller d’huile de foie de morue avant le repas, et le monsieur qui racontait gravement des choses qu’on ne comprend pas, la
6216 ntait gravement des choses qu’on ne comprend pas, la prière du soir pour qu’il fasse beau demain, Michel Strogoff et Rémy
6217 main, Michel Strogoff et Rémy un fils de vaincus, les tours de carrousel, les chemins dans la forêt en automne, des jeux, d
6218 Rémy un fils de vaincus, les tours de carrousel, les chemins dans la forêt en automne, des jeux, des feuillages, des rêver
6219 vaincus, les tours de carrousel, les chemins dans la forêt en automne, des jeux, des feuillages, des rêveries, des recoins
6220 peu divine, baignée d’une très vague angoisse que l’ on fuyait avec des bonheurs fous dans les bras maternels, ou bien dans
6221 oisse que l’on fuyait avec des bonheurs fous dans les bras maternels, ou bien dans ces promenades en tenant la forte main d
6222 maternels, ou bien dans ces promenades en tenant la forte main du père qui fait de longs pas réguliers… L’École, dans ce
6223 rte main du père qui fait de longs pas réguliers… L’ École, dans ce concert de souvenirs, n’est qu’une dissonance douloureu
6224 loureuse. 3 Deux angoisses dominent mon enfance : les séances chez le dentiste et l’horaire des leçons. Ce malaise inavouab
6225 angoisses dominent mon enfance : les séances chez le dentiste et l’horaire des leçons. Ce malaise inavouable, cette règle
6226 ent mon enfance : les séances chez le dentiste et l’ horaire des leçons. Ce malaise inavouable, cette règle méchante, ce so
6227 is appris à lire, en cachette avec ma sœur aînée. L’ année suivante, on me mit à l’école, parce que c’est la loi. La premiè
6228 avec ma sœur aînée. L’année suivante, on me mit à l’ école, parce que c’est la loi. La première classe fut agréable : j’ali
6229 ée suivante, on me mit à l’école, parce que c’est la loi. La première classe fut agréable : j’alignais des bâtons en rêvan
6230 e pensais pas devoir suivre syllabe après syllabe les ânonnements des élèves qui déchiffraient les premières phrases exempl
6231 hrases exemplaires. (J’aimais pourtant Zoé lave à la fontaine, à cause du nom.) Quand venait mon tour, je savais rarement
6232 om.) Quand venait mon tour, je savais rarement où l’ on en était. Cela m’attira des reproches acides, et naturellement, la
6233 m’attira des reproches acides, et naturellement, la phrase sacrée : « Il faut que tous fassent la même chose ici ! » Dans
6234 nt, la phrase sacrée : « Il faut que tous fassent la même chose ici ! » Dans la suite, on se chargea d’illustrer par d’inn
6235 faut que tous fassent la même chose ici ! » Dans la suite, on se chargea d’illustrer par d’innombrables exemples cet axio
6236 par d’innombrables exemples cet axiome qui devint la formule de mes premières douleurs morales. Après six ans de ce régime
6237 rentrée, ma colère n’en fut que plus malfaisante. L’ école me rendit au monde, vers l’âge de 18 ans, crispé et méfiant, san
6238 lus malfaisante. L’école me rendit au monde, vers l’ âge de 18 ans, crispé et méfiant, sans cesse en garde contre moi-même
6239 ait pas différer, profondément hypocrite donc, et le cerveau saturé d’évidences du type 2 et 2 font 4, ou : tous les homme
6240 turé d’évidences du type 2 et 2 font 4, ou : tous les hommes doivent être égaux en tout. Deux fois deux quatre, c’est stéri
6241 s de citer, je découvris un jour qu’elle contient la cause déterminante de notre malaise. Il me fallut un certain temps po
6242 e je me posais la question : est-ce vrai que tous les hommes doivent être égaux en tout ? Et la première réponse fut : Il f
6243 réponse fut : Il faut que ce soit vrai, pour que la démocratie prospère et étende ses conquêtes. C’était découvrir notre
6244 dignations de nos maîtres quand ils dénonçaient «  la marque indélébile de l’éducation jésuite ». Nous étions marqués par N
6245 s quand ils dénonçaient « la marque indélébile de l’ éducation jésuite ». Nous étions marqués par Numa Droz, par l’esprit p
6246 jésuite ». Nous étions marqués par Numa Droz, par l’ esprit petit-bourgeois, qui est une généralisation de l’avarice, et pa
6247 it petit-bourgeois, qui est une généralisation de l’ avarice, et par les dogmes démocratiques, qui sont une généralisation
6248 , qui est une généralisation de l’avarice, et par les dogmes démocratiques, qui sont une généralisation de la règle de troi
6249 mes démocratiques, qui sont une généralisation de la règle de trois, aussi profondément certes qu’un Voltaire le fut par l
6250 e trois, aussi profondément certes qu’un Voltaire le fut par les jésuites : du moins ceux-ci lui laissèrent-ils assez de v
6251 ssi profondément certes qu’un Voltaire le fut par les jésuites : du moins ceux-ci lui laissèrent-ils assez de verdeur d’esp
6252 pire. Mais on avait brisé en nous ces ressorts de la révolte et de la libération d’une personnalité : l’imagination, le se
6253 it brisé en nous ces ressorts de la révolte et de la libération d’une personnalité : l’imagination, le sens de l’arbitrair
6254 révolte et de la libération d’une personnalité : l’ imagination, le sens de l’arbitraire et le sens de la relativité des d
6255 la libération d’une personnalité : l’imagination, le sens de l’arbitraire et le sens de la relativité des décrets humains.
6256 on d’une personnalité : l’imagination, le sens de l’ arbitraire et le sens de la relativité des décrets humains. Le prix de
6257 alité : l’imagination, le sens de l’arbitraire et le sens de la relativité des décrets humains. Le prix de mes souffrances
6258 magination, le sens de l’arbitraire et le sens de la relativité des décrets humains. Le prix de mes souffrances était donc
6259 et le sens de la relativité des décrets humains. Le prix de mes souffrances était donc ce conformisme indispensable aux «
6260 principes ». Je n’allai pas tout de suite jusqu’à les mettre en doute : mais un jour je compris que ce n’étaient que des pr
6261 les d’une arithmétique élémentaire, ce monde dont la Démocratie apparaissait comme l’achèvement idéal et nécessaire — et q
6262 e, ce monde dont la Démocratie apparaissait comme l’ achèvement idéal et nécessaire — et qui était le seul pour lequel on n
6263 e l’achèvement idéal et nécessaire — et qui était le seul pour lequel on nous préparait — c’était un système d’abstraction
6264 tait un système d’abstractions primaires, c’était le rêve raisonnablement organisé des esprits moyens, prosaïques et rassi
6265 ns, prosaïques et rassis qui tiennent aujourd’hui les charges de l’État, piliers d’un régime dont ils sont les seuls à s’ac
6266 et rassis qui tiennent aujourd’hui les charges de l’ État, piliers d’un régime dont ils sont les seuls à s’accommoder parce
6267 rges de l’État, piliers d’un régime dont ils sont les seuls à s’accommoder parce qu’ils l’ont établi à la mesure exacte de
6268 nt ils sont les seuls à s’accommoder parce qu’ils l’ ont établi à la mesure exacte de leurs besoins. Nous ne croyions plus
6269 seuls à s’accommoder parce qu’ils l’ont établi à la mesure exacte de leurs besoins. Nous ne croyions plus aux démons, mai
6270 besoins. Nous ne croyions plus aux démons, mais à la Commission scolaire. Nous n’avions plus de « superstitions grossières
6271 stitions grossières » comme celles qui touchent à l’ action des étoiles par exemple. Mais nous avions acquis le respect des
6272 des étoiles par exemple. Mais nous avions acquis le respect des statistiques. Nous savions que les miracles ne trompent q
6273 uis le respect des statistiques. Nous savions que les miracles ne trompent que les illettrés, mais qu’il convient de s’incl
6274 es. Nous savions que les miracles ne trompent que les illettrés, mais qu’il convient de s’incliner devant les miracles de l
6275 lettrés, mais qu’il convient de s’incliner devant les miracles de la science appliquée. On nous faisait voir tout au long d
6276 ’il convient de s’incliner devant les miracles de la science appliquée. On nous faisait voir tout au long de notre histoir
6277 nous faisait voir tout au long de notre histoire le Progrès constant de l’humanité vers les lumières, l’incrédulité et le
6278 au long de notre histoire le Progrès constant de l’ humanité vers les lumières, l’incrédulité et le bien-être matériel. No
6279 e histoire le Progrès constant de l’humanité vers les lumières, l’incrédulité et le bien-être matériel. Nous savions qu’un
6280 Progrès constant de l’humanité vers les lumières, l’ incrédulité et le bien-être matériel. Nous savions qu’un fils d’ouvrie
6281 de l’humanité vers les lumières, l’incrédulité et le bien-être matériel. Nous savions qu’un fils d’ouvrier est l’égal d’un
6282 e matériel. Nous savions qu’un fils d’ouvrier est l’ égal d’un petit Dauphin — et même nous ne pouvions nous empêcher de cr
6283 même nous ne pouvions nous empêcher de croire que le petit ouvrier est bien plus malin. Nous savions un tas de choses doul
6284 e choses douloureusement ennuyeuses qui sont dans les livres — et nulle part ailleurs. Nous arrivions dans la vie avec des
6285 res — et nulle part ailleurs. Nous arrivions dans la vie avec des mentions honorables et une inconcevable gaucherie, c’est
6286 et une honte secrète qui exaspérait ce mépris et le rendait agressif. Mais moi, j’avais trop souffert de cette compressio
6287 riellement délivré, en supporter longtemps encore l’ action. Je n’eus pas plus tôt découvert et nommé cet asservissement de
6288 plus tôt découvert et nommé cet asservissement de l’ esprit et ces mythes stériles, que je les rendis responsables de ma pe
6289 sement de l’esprit et ces mythes stériles, que je les rendis responsables de ma perte de contact avec les réalités les plus
6290 s rendis responsables de ma perte de contact avec les réalités les plus élémentaires de la vie.   3. Dans le cas le plus
6291 onsables de ma perte de contact avec les réalités les plus élémentaires de la vie.   3. Dans le cas le plus favorable, c’
6292 ontact avec les réalités les plus élémentaires de la vie.   3. Dans le cas le plus favorable, c’est un silence, un vide.
6293 ités les plus élémentaires de la vie.   3. Dans le cas le plus favorable, c’est un silence, un vide. C’était en dehors d
6294 s plus élémentaires de la vie.   3. Dans le cas le plus favorable, c’est un silence, un vide. C’était en dehors de la vi
6295 , c’est un silence, un vide. C’était en dehors de la vie.
100 1929, Les Méfaits de l’instruction publique (1972). 2. Description du monstre
6296 2. Description du monstre Le service militaire me permit de retrouver quelques-unes de ces réalité
6297 Car ces différences sont les premières marques de la vie vécue et l’on aime à y découvrir la seule fraternité véritable. M
6298 ces sont les premières marques de la vie vécue et l’ on aime à y découvrir la seule fraternité véritable. Mais c’est en cas
6299 arques de la vie vécue et l’on aime à y découvrir la seule fraternité véritable. Mais c’est en caserne aussi que je devais
6300 is c’est en caserne aussi que je devais retrouver les instituteurs. Ceux-là n’avaient pas bougé. Et pour cause : ils n’étai
6301 é. Et pour cause : ils n’étaient jamais sortis de l’ école. Rien ne ressemble plus à un bon élève qu’un instituteur : de l’
6302 l’autre, il n’y a pas de solution de continuité, la différence n’était qu’une question d’âge, non d’expérience vécue. Ce
6303 grand nombre de cas, mais pourquoi ai-je envie de le dire ? L’instituteur sous l’uniforme peut être défini par son incompr
6304 re de cas, mais pourquoi ai-je envie de le dire ? L’ instituteur sous l’uniforme peut être défini par son incompréhension m
6305 rquoi ai-je envie de le dire ? L’instituteur sous l’ uniforme peut être défini par son incompréhension méthodique des homme
6306 éhension méthodique des hommes et son mépris pour les paysans. Qu’il soit officier ou troupier, on le reconnaît à une façon
6307 les paysans. Qu’il soit officier ou troupier, on le reconnaît à une façon pédante d’être consciencieux, à une façon bless
6308 être supérieur, à une façon livresque d’expliquer les choses, à une façon théorique de juger les êtres. Ces distributeurs a
6309 liquer les choses, à une façon théorique de juger les êtres. Ces distributeurs automatiques (brevetés par le gouvernement)
6310 res. Ces distributeurs automatiques (brevetés par le gouvernement) de la manne égalitaire — ne se prennent pas pour de la
6311 rs automatiques (brevetés par le gouvernement) de la manne égalitaire — ne se prennent pas pour de la petite bière. Ils on
6312 la manne égalitaire — ne se prennent pas pour de la petite bière. Ils ont conscience d’appartenir à une élite responsable
6313 ce ridicule n’échappe pas à ceux qu’ils méprisent le plus, et ils auraient souvent l’occasion de s’en douter s’ils étaient
6314 qu’ils méprisent le plus, et ils auraient souvent l’ occasion de s’en douter s’ils étaient sensibles aux finesses de l’iron
6315 en douter s’ils étaient sensibles aux finesses de l’ ironie paysanne. Mais je n’en dirai pas plus, de peur de m’échauffer i
6316 pas plus, de peur de m’échauffer inutilement. Si l’ on me poussait un peu, je crois que je m’oublierais au point d’insinue
6317 crois que je m’oublierais au point d’insinuer que les instituteurs galonnés causent autant de tort à l’armée que les instit
6318 es instituteurs galonnés causent autant de tort à l’ armée que les instituteurs antimilitaristes qui signent des manifestes
6319 urs galonnés causent autant de tort à l’armée que les instituteurs antimilitaristes qui signent des manifestes en mauvais f
6320 manifestes en mauvais français — et je ferais de la peine à d’excellents garçons. Revenons au civil. J’ai fait allusion a
6321 usion au lieutenant-instituteur qui veut faire de la pédagogie avec sa section. L’instituteur-lieutenant qui veut traiter
6322 r qui veut faire de la pédagogie avec sa section. L’ instituteur-lieutenant qui veut traiter militairement ses élèves témoi
6323 veut traiter militairement ses élèves témoigne de la même maladresse professionnelle. J’en connais un qui avait coutume de
6324 de garçons de 10 à 11 ans : « J’ai bien su mater les quarante hommes de ma section, je saurai aussi vous mater. » On imagi
6325 aussi vous mater. » On imagine à quoi peut mener l’ enseignement donné par des êtres qui brouillent à ce point les méthode
6326 ent donné par des êtres qui brouillent à ce point les méthodes. Simple remarque, pendant que nous en sommes aux instituteur
6327 en sommes aux instituteurs : ils sortent tous de la même classe sociale, de la petite bourgeoisie. Est-ce que l’esprit pe
6328  : ils sortent tous de la même classe sociale, de la petite bourgeoisie. Est-ce que l’esprit petit-bourgeois qui imprègne
6329 sse sociale, de la petite bourgeoisie. Est-ce que l’ esprit petit-bourgeois qui imprègne l’enseignement primaire constitue
6330 Est-ce que l’esprit petit-bourgeois qui imprègne l’ enseignement primaire constitue l’apport des instituteurs, ou bien pré
6331 is qui imprègne l’enseignement primaire constitue l’ apport des instituteurs, ou bien préexiste-t-il dans les principes mêm
6332 ort des instituteurs, ou bien préexiste-t-il dans les principes mêmes de l’École, et attire-t-il les petits bourgeois comme
6333 u bien préexiste-t-il dans les principes mêmes de l’ École, et attire-t-il les petits bourgeois comme le portrait de Numa D
6334 ns les principes mêmes de l’École, et attire-t-il les petits bourgeois comme le portrait de Numa Droz attirait les mouches 
6335 ’École, et attire-t-il les petits bourgeois comme le portrait de Numa Droz attirait les mouches ? (Le verre en était toujo
6336 bourgeois comme le portrait de Numa Droz attirait les mouches ? (Le verre en était toujours jaune.) Je n’ai ni le droit ni
6337 le portrait de Numa Droz attirait les mouches ? ( Le verre en était toujours jaune.) Je n’ai ni le droit ni l’envie de dir
6338  ? (Le verre en était toujours jaune.) Je n’ai ni le droit ni l’envie de dire du mal des petits-bourgeois. Ils sont au moi
6339 en était toujours jaune.) Je n’ai ni le droit ni l’ envie de dire du mal des petits-bourgeois. Ils sont au moins aussi sym
6340 sympathiques que n’importe quelle autre classe de la société. Mais l’esprit petit-bourgeois pris abstraitement et tel qu’i
6341 n’importe quelle autre classe de la société. Mais l’ esprit petit-bourgeois pris abstraitement et tel qu’il se manifeste da
6342 pris abstraitement et tel qu’il se manifeste dans l’ école primaire est un véritable virus de mesquinerie, et devrait être
6343 les ». Je reviendrai peut-être sur ce point. Pour l’ instant je ne veux que décrire l’école telle qu’on la voit. Après les
6344 r ce point. Pour l’instant je ne veux que décrire l’ école telle qu’on la voit. Après les personnes, le décor. La laideur d
6345 nstant je ne veux que décrire l’école telle qu’on la voit. Après les personnes, le décor. La laideur des « collèges » n’es
6346 ux que décrire l’école telle qu’on la voit. Après les personnes, le décor. La laideur des « collèges » n’est pas accidentel
6347 l’école telle qu’on la voit. Après les personnes, le décor. La laideur des « collèges » n’est pas accidentelle. C’est cell
6348 lle qu’on la voit. Après les personnes, le décor. La laideur des « collèges » n’est pas accidentelle. C’est celle même du
6349 est pas accidentelle. C’est celle même du régime. L’ architecture de nos « palais scolaires » symbolise d’une façon frappan
6350 e ce qu’il y a de schématique et de monotone dans la conception démocratique du monde. Entrons, c’est pire encore. Beaucou
6351 ants ont un frisson de dégoût au moment de passer la porte, au son de la cloche : l’odeur de goudron et d’urinoirs qui imp
6352 de dégoût au moment de passer la porte, au son de la cloche : l’odeur de goudron et d’urinoirs qui imprègne les corridors
6353 moment de passer la porte, au son de la cloche : l’ odeur de goudron et d’urinoirs qui imprègne les corridors et les habit
6354 e : l’odeur de goudron et d’urinoirs qui imprègne les corridors et les habits des écoliers empeste encore mes souvenirs. Et
6355 udron et d’urinoirs qui imprègne les corridors et les habits des écoliers empeste encore mes souvenirs. Et la poussière dan
6356 its des écoliers empeste encore mes souvenirs. Et la poussière dans l’air, l’encre sur les tables — c’était pourtant un re
6357 mpeste encore mes souvenirs. Et la poussière dans l’ air, l’encre sur les tables — c’était pourtant un refuge pour l’imagin
6358 encore mes souvenirs. Et la poussière dans l’air, l’ encre sur les tables — c’était pourtant un refuge pour l’imagination q
6359 ouvenirs. Et la poussière dans l’air, l’encre sur les tables — c’était pourtant un refuge pour l’imagination que ces initia
6360 sur les tables — c’était pourtant un refuge pour l’ imagination que ces initiales, ces signes, ces devises… —, les estampe
6361 on que ces initiales, ces signes, ces devises… —, les estampes piquées, Numa Droz et ses crottes de mouches… Dans ce décor
6362 s ! Et vous pensez que c’est un grand progrès sur la Nature. Quelle peut bien être la vertu éducatrice d’un tel milieu, mo
6363 rand progrès sur la Nature. Quelle peut bien être la vertu éducatrice d’un tel milieu, moral et matériel ? L’école publiqu
6364 u éducatrice d’un tel milieu, moral et matériel ? L’ école publique, telle que nous la voyons est semblable à tous ces monu
6365 al et matériel ? L’école publique, telle que nous la voyons est semblable à tous ces monuments « de la mauvaise époque » q
6366 la voyons est semblable à tous ces monuments « de la mauvaise époque » qui sont dans nos villes l’apport du xixe siècle.
6367  de la mauvaise époque » qui sont dans nos villes l’ apport du xixe siècle. Ils ne parviennent ni à la beauté ni à l’utili
6368 l’apport du xixe siècle. Ils ne parviennent ni à la beauté ni à l’utilité, et ils sont déjà démodés. On dit que le style
6369 e siècle. Ils ne parviennent ni à la beauté ni à l’ utilité, et ils sont déjà démodés. On dit que le style 1880 n’en est p
6370 à l’utilité, et ils sont déjà démodés. On dit que le style 1880 n’en est pas un : mais l’absence de style est encore un st
6371 . On dit que le style 1880 n’en est pas un : mais l’ absence de style est encore un style : c’est même le pire.
6372 absence de style est encore un style : c’est même le pire.