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suivi sa pente, il se trouve que, selon le mot de
Gide
, c’est en la remontant. Du fait que Goethe a résisté à l’élément germ
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incertitude où pareil livre entraîne le jugement.
Gide
a tant répété : Ne jugez pas ! qu’il a fini par se rendre lui-même «
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ide la cause des plus étranges contradictions que
Gide
subit ou entretient. (Jusqu’à masquer parfois de vraies fenêtres par
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pèce d’intérêt que l’on prend à lire le Journal d’
André Gide
. Il est probable que, du seul point de vue de l’art, cet intérêt deme
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ne existence. Malgré les pages plus élaborées que
Gide
a groupées çà et là sous des titres particuliers (Feuillets, Numquid
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ici se pose le problème de la vérité du portrait.
Gide
note lui-même dès 1924 : « Si plus tard on publie mon journal, je cra
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ne idée fausse », c’est bien ce que devait éviter
Gide
, plus jalousement qu’aucun autre. Est-ce vraiment pour le diminuer qu
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pour une pose raffinée. J’imaginerais plutôt que
Gide
est fasciné par l’obstacle qu’il veut éviter. Son horreur du malenten
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Et par exemple, les choses tues dans ce recueil —
Gide
a marqué qu’une grave lacune mutile l’image qu’il nous y livre de lui
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aime ? Ainsi l’on se peint plus rosse que nature.
Gide
lui-même, à ce jeu, ne s’est pas épargné : « Je ne suis qu’un petit g
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i, crée ce qu’il cherche… » Or, en écrivant cela,
Gide
n’a-t-il point cédé à la tentation qu’il décrit ? Cercle vicieux de l
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es, oubliant ce qui va de soi : l’autoportrait de
Gide
est aussi ressemblant. On l’y retrouve aussi au naturel, avec toutes
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qué jusqu’à quel point « l’antichristianisme » de
Gide
est chrétien dans ses déterminations ? Je crois qu’on s’est trop lais
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nécessairement, à la sollicitude des catholiques.
Gide
fut élevé dans un milieu calviniste où la religion paraissait se rédu
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ues : libre examen et moralisme. Du libre examen,
Gide
a conservé son exigence de vérité et de véracité « advienne que pourr
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soi, cette réaction gauchit certains jugements de
Gide
sur la Réforme : il la confond souvent, je crois, avec l’image couran
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manichéen. L’évangélisme anticonfessionnel, que
Gide
retient de cette première éducation chrétienne, l’a mis en garde cont
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savons ! ») Ceci explique que le souci central de
Gide
ait été de débarrasser son christianisme de toutes les adjonctions «
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sée, c’est l’Évangile. » Mais n’y a-t-il pas chez
Gide
à l’origine de ce refus de la visibilité de toute église (tant réform
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nce d’honnêteté qui rappelle parfois Kierkegaard.
Gide
répugne à paraître plus qu’il n’est, à affirmer plus qu’il ne croit.
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imait pas digne, et qu’il confessait par là même.
Gide
paraît surtout attentif à sa nature complexe et réticente. Or toute n
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re s’y ordonner. « Orthodoxie protestante — écrit
Gide
— ces mots n’ont pour moi aucun sens. Je ne reconnais point d’autorit
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onfrontons ces trois remarques : 1. Le Journal de
Gide
se présente comme une illustration de sa sincérité. Mais il nous donn
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éformée, faute de retouches « artificielles. » 2.
Gide
nous dit qu’il a supprimé de ses carnets les pages qu’il jugeait trop
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turelles. Or il est très curieux de remarquer que
Gide
adopte dans sa vie — telle que la révèle son Journal — la première co
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est dominée par la seconde. Toute l’esthétique de
Gide
— son style écrit — s’ordonne au choix le plus classique : concision,
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and message est qu’il faut se libérer des règles.
Gide
, à l’interviewer fictif qui lui demandait ce qu’est l’éthique, répond
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a jusqu’à la casuistique : l’intérêt passionné de
Gide
pour les détails les plus subtils de l’écriture est attesté par cent
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. Et si le puritain est un styliste de la morale,
Gide
reste un puritain du style. Peut-être tenons-nous ici le principe de
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re. Toutefois, j’ai dit la méfiance d’artiste que
Gide
nourrit à l’endroit des « idées ». C’est par là que je sens le mieux
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moins. À cet égard, il m’apparaît que la leçon de
Gide
, pour ceux de mon âge, est moins urgente dans l’ordre de l’éthique qu
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obe adversaire des orthodoxies orgueilleuses, que
Gide
, n’en doutons pas, restera jusqu’au bout. 68. Cf. Journal (Pléiade)