1 1944, Les Personnes du drame. Introduction
1 C’est ainsi que j’ai cherché dans les œuvres d’un Goethe , d’un Kierkegaard, ou d’un Luther, les données « personnelles » dont
2 t attestée dans Faust, — c’est cela que j’appelle Goethe . L’opposition de la forme du monde et de l’esprit qui la transforme ;
2 1944, Les Personnes du drame. Sagesse et folie de la personne — Le silence de Goethe
3 1.Le silence de Goethe « L’homme, dit Goethe, ne reconnaît et n’apprécie que ce qu’il est
4 1.Le silence de Goethe « L’homme, dit Goethe , ne reconnaît et n’apprécie que ce qu’il est lui-même en état de fair
5 oujours l’exemple de cette vie. Ceux qui traitent Goethe de bourgeois ne prouvent rien de plus que leur propre rationalisme, s
6 hez ceux qui vaticinent, ayant été moins loin que Goethe dans la domination des mystères. Ainsi se réclament-ils de Rimbaud. P
7 magiques » — puis renonce à la magie, et se tait. Goethe , initié dans sa jeunesse, commence à écrire vers ce temps, mais la fi
8 is un écrivain, ne se soucia jamais de l’être. Et Goethe ne fut qu’entre autres choses un écrivain. Ce n’est donc pas l’aspect
9 toutefois qu’un pareil rapprochement eût exaspéré Goethe autant peut-être que Rimbaud2, mais je crois, dans leur habitus indiv
10 une attitude humaine qui me paraît commune. ⁂ Que Goethe ait pratiqué « le devis des choses grandes et secrètes » (Jérôme Card
11 vers une plénitude, pour un esprit comme celui de Goethe . « On a peur que son feu ne le consume », écrit un de ses amis, vers
12 consume », écrit un de ses amis, vers ce temps. «  Goethe vit sur un perpétuel pied de guerre et de révolte psychique ». Et lui
13 ituel découvre sa forme véritable. Si, comme chez Goethe , c’est une forme mystique, celle du terrible « Meurs et deviens ! » e
14 t de quel « hasard » l’a-t-il donc provoquée chez Goethe  ? Il est un fait de sa jeunesse dont on ne saurait exagérer l’importa
15 storique et symbolique : les premiers contacts de Goethe avec le mysticisme précédèrent de très peu une grave maladie, dont il
16 e. Retenons ceci : au seuil de l’initiation, chez Goethe , il n’y a pas une révolte, il y a un péril conjuré. C’est contre ce q
17 urement « étrange » ont à peine enfiévré le jeune Goethe , que déjà la faiblesse du corps le ramène à l’aspect concret de notre
18 llement que la littérature prendra plus tard chez Goethe l’allure d’une discipline de l’âme. Un exercice, une activité organiq
19 rètement conditionnée. Dès ce moment, le choix de Goethe a trouvé sa forme. Il lui faudra maintenant le renouveler perpétuelle
20 nce n’est pas absence de mots. Il est encore chez Goethe une activité, et même à double effet. Quoi de plus agissant, dans une
21 eur » ? ⁂ Cette complexe dialectique de la magie, Goethe lui-même l’a stylisée en symboles concrets dans le Faust. Œuvre longu
22 l’œuvre qui s’avoue dans ce cri : chaque fois que Goethe invoque la catégorie pour lui sacrée de l’humain, comprenons qu’il y
23 , et son destin se joue d’un coup. La grandeur de Goethe est d’avoir su vieillir, celle de Rimbaud de s’y être refusé. Transp
24 ale, l’a condamnée, l’a dépassée, acceptant comme Goethe les conditions réelles et données de son effort particulier. Ce renon
25 tous deux de loin, d’un long abandon à l’erreur. Goethe n’a pas connu de tels déchirements. C’est lui qui a su vivre cette ma
26 imilitude de forme dans le cours de la magie chez Goethe et chez Rimbaud, et d’autre part le contraste des rythmes, vont se tr
27 l’on croirait tirée de quelque journal intime de Goethe des années ascétiques, à Weimar avant l’Italie. Et le passage fameux
28 i sourd du plus lucide héroïsme : « Et allons ! » Goethe seul est allé jusqu’à la délivrance consciente. Il y a dans tout dése
29 composantes dans l’aventure de Rimbaud. Mais chez Goethe , c’est la longueur du temps qui les dénoncera. Et cette fameuse sérén
30 d l’abandon de la poésie, alors qu’elle propose à Goethe , comme un exercice de choix, l’écriture, — cela n’a rien que de logiq
31 irmer sans trop de paradoxe que la littérature de Goethe est un des moyens de silence dont il dispose. Ni plus ni moins que l’
32 L’on découvre ici la source de l’étrange refus de Goethe , dès qu’il s’agit de faire état des choses premières, des fins derniè
33 per d’idées relatives à l’immortalité, poursuivit Goethe , cela convient aux gens du monde et surtout aux belles dames qui n’on
34 uel critère de jugement qui permettrait de placer Goethe « au-dessus » de Rimbaud. C’est la pureté démesurée de Rimbaud qui no
35 Rimbaud qui nous juge, et la grandeur humaine de Goethe . Et qui voudrait les opposer ? Que signifierait un choix dont l’opéra
36 e longue fidélité peut-être orgueilleuse, puisque Goethe tenait ses faiblesses pour des erreurs, non pour le péché, et d’autre
37 ésors patinés dans la haute demeure familiale des Goethe . Aujourd’hui… Un immense glissement de la réalité hors des cadres d’
38 uvement nous porte vers Rimbaud, nous détourne de Goethe . Mais prenons garde de tomber dans un conformisme à rebours, victimes
39 ’une voix volontairement assourdie. Le silence de Goethe n’est pas moins dangereux, pour qui sait l’entendre, que l’imprécatio
40 être absolument moderne. » 2. Rimbaud a-t-il lu Goethe  ? En mai 1873, il écrivit de Roche à son ami E. Delahaye : « Prochain
3 1944, Les Personnes du drame. Sagesse et folie de la personne — Goethe médiateur
41 n’existent pas de mesures. Mais où chercher, chez Goethe , les éléments de tension et les mesures ? Où, sinon en lui-même, je v
42 donné et ce qu’il sut tirer de ces données ? Car Goethe est en ceci un homme moderne, que ses mesures sont en lui-même et non
43 s l’homme moderne crée son destin dans l’inconnu. Goethe est grand par le rapport, pour nous visible, de sa vie et de son œuvr
44 e géant. Tout ici est organe, tout est nature. Et Goethe l’a su. Mais quand nous contemplons de loin cet arbre vénérable, aux
45 ique. ⁂ Constater que les données initiales, chez Goethe , sont allemandes, peut paraître une lapalissade. Rappelons cependant
46 composantes nordiques de la psychologie du jeune Goethe  : le romantisme, le goût de la magie, et cet élan qu’il nommera démon
47 ui s’exprime magnifiquement dans le Prométhée. Si Goethe avait cédé à ces penchants que l’on peut bien appeler nationaux, son
48 le qualificatif d’allemande. Or s’il est vrai que Goethe ait suivi sa pente, il se trouve que, selon le mot de Gide, c’est en
49 e mot de Gide, c’est en la remontant. Du fait que Goethe a résisté à l’élément germanique irréductible et irrationnel qui dema
50 facile de montrer ce qui, dans l’œuvre écrite de Goethe , n’est pas typiquement allemand, et peut être directement assimilable
51 llemande, même si, par son triomphe, elle conduit Goethe à être plus qu’allemand. En regard du Goethe de la vingt-sixième anné
52 duit Goethe à être plus qu’allemand. En regard du Goethe de la vingt-sixième année, du Goethe qui se détourne du romantisme, p
53 En regard du Goethe de la vingt-sixième année, du Goethe qui se détourne du romantisme, plaçons ce Hölderlin, qui vers le même
54 ous aurons une antithèse presque parfaite. Devant Goethe comme devant Hölderlin, s’ouvre à tel moment de la vie spirituelle un
55 nnées où, pour reprendre la comparaison du chêne, Goethe se fait un tronc, une écorce. En face du titanisme de Hölderlin — Höl
56 de Hölderlin — Hölderlin ou l’Allemand exaspéré — Goethe figure l’Allemand surmonté, l’Allemand guéri. Mais guéri par ses moye
57 serait très insuffisant de dire que le remède que Goethe s’applique est l’action. Nous sommes obligés, si nous voulons éviter
58 plus évidente que dans le cours de la Magie chez Goethe . Dans l’ordre des vérités occultes, Goethe choisit d’abord celle qui
59 e chez Goethe. Dans l’ordre des vérités occultes, Goethe choisit d’abord celle qui lui paraît susceptible d’application vivant
60 stes. Tel est peut-être l’Erlebnis qui fonde chez Goethe une conception qu’on dirait presque pragmatique de l’occultisme. Par
61 leurs, le problème de la magie ne se pose point à Goethe comme le problème technique d’une science qu’il s’agirait d’approfond
62 , en principe, résolu dès cette scène. Mais, pour Goethe jamais la solution de principe n’est une solution réelle, existentiel
63 anifester en actes, en activité, en effort. Ainsi Goethe , homme moderne, détache d’abord la magie des choses, sur lesquelles p
64 us une expérience intérieure, morale. La magie de Goethe se condense en paroles, en Zaubersprüche, qui deviennent tout naturel
65 ’allure si bourgeoise sont dirigés d’abord contre Goethe lui-même, contre son démonisme ; ils constituent la cure de cette seu
66 la cure de cette seule maladie morale à laquelle Goethe réduit toutes les autres maladies, de cette seule maladie qui tout en
67 dans une magie dominée. La magie est ainsi, pour Goethe , un remède dont il doit arriver à se délivrer. Personne moins que lui
68 anti-Goethe — ou mieux : c’est la « personne » de Goethe triomphant de son « individu ». ⁂ Telle est la sagesse de Faust : nou
69 nd dès lors facilement la raison du culte rendu à Goethe par les meilleurs Allemands. Goethe figure à leurs yeux la plus harmo
70 culte rendu à Goethe par les meilleurs Allemands. Goethe figure à leurs yeux la plus harmonieuse résolution des dissonances pr
71 us qu’en Allemagne cette grandeur particulière de Goethe ne peut être éprouvée avec plus de reconnaissance, nulle part elle ne
72 t être aussi tonique. Mais il y a plus. Parce que Goethe est un « Allemand surmonté » si j’ose dire — et à la manière allemand
73 st l’office de la seule grandeur. C’est parce que Goethe est grand — et nous venons de dire de quelle grandeur, nationale en s
74 out qu’il faut entendre le grand vers gnomique de Goethe  : Über allen Gipfeln ist Ruh.17 Les élites, en tant qu’élites, se
75 la confusion18. C’est pourquoi notre tâche — que Goethe eût approuvée — reste de fédérer des différences authentiques, et non
76 s nationales sont des vices de populace », disait Goethe . Je n’oublie pas, d’ailleurs, ce mot d’un bon observateur des choses
4 1944, Les Personnes du drame. Sagesse et folie de la personne — Kierkegaard
77 s dans la sagesse (on touche ici les limites d’un Goethe ), mais il y faut au moins cette imprudence sans laquelle on n’essaier
5 1944, Les Personnes du drame. Sagesse et folie de la personne — Franz Kafka, ou l’aveu de la réalité
78 ache non moins certainement à son admiration pour Goethe . Rien n’est plus suggestif que cette rencontre en un seul homme de de
79  » Entre la folie de Kierkegaard et la sagesse de Goethe Il semble bien que le Château, roman posthume, devait se terminer
80 t osciller, en toute conscience, de Kierkegaard à Goethe  ? Ces deux noms ne désignent-ils pas les pôles de la tension spiritue
81 né de vivre à un Occidental ? Oui, Kierkegaard et Goethe sont, à mes yeux, les plus géniales personnifications d’une éthique f
82 re humain qui nous autoriserait à distinguer chez Goethe , chez Kierkegaard et chez Kafka le rôle possible de la foi. Et certes
83 ns avoir pu donner l’équivalent des Entretiens de Goethe , ou de l’opuscule de Kierkegaard sur son activité d’auteur. Si donc n
84 reste beaucoup plus proche de Kierkegaard que de Goethe . 61. Et je ne parle même pas du philistin, incapable de soupçonner q
6 1944, Les Personnes du drame. Sincérité et authenticité — Le Journal d’André Gide
85 involontaire, je ne puis évoquer que l’exemple de Goethe , dont ce n’est pas telle œuvre ou telle action que j’aime, mais bien
86 aliste à la manière goethéenne, et musicien comme Goethe encore se voulait peintre. On l’y découvre enfin, et cela me paraît n
7 1944, Les Personnes du drame. Sincérité et authenticité — Vues sur Ramuz
87 énomènes : ils sont eux-mêmes enseignement », dit Goethe . Il n’y a rien à voir sous les apparences. Car rien n’existe, hors de
88 contact avec l’objet. » Mais on peut dire cela de Goethe aussi ? Et de bien d’autres réalistes de la forme ? De Goethe surtout
89  ? Et de bien d’autres réalistes de la forme ? De Goethe surtout. Il y a pourtant cette différence capitale que, chez Goethe,
90 y a pourtant cette différence capitale que, chez Goethe , le contact n’est jamais « aussi direct que possible ». Goethe sait m
91 ntact n’est jamais « aussi direct que possible ». Goethe sait mal le grec, et connaît les statues par l’estampe. Il lui faut l
92 nce là où tous les intermédiaires sont supprimés. Goethe cherche une économie des moyens, qui permette d’aller au-delà de ce q
93 ps. Les niveaux respectifs auxquels se placent un Goethe et un Ramuz déterminent deux formes d’expérience apparemment incompar
94 s n’est plus du tout ce qu’elle était au temps de Goethe . Plus encore que sa valeur, c’est sa fin qui est devenue contestable.
95 exemple. » Comment, ici encore, ne point songer à Goethe  ? Mais à sa seule leçon, à l’équation fondamentale de sa vie, non poi
96 e, tout cela qui échappe à nos prises. Ainsi fait Goethe  ; et telle est sa vertu. Mais notre siècle pose d’autres questions, d
8 1944, Les Personnes du drame. Une maladie de la personne — Le romantisme allemand
97 apacité de la plupart des jeunes contemporains de Goethe à donner des œuvres achevées. En effet le mouvement de ces poètes est