1
M. de Montherlant,
le
sport et les jésuites (9 février 1924)a M. de Montherlant est cons
2
M. de Montherlant, le sport et
les
jésuites (9 février 1924)a M. de Montherlant est considéré par plu
3
par plusieurs comme l’un des héritiers de Barrès.
Le
rapprochement est peut-être prématuré, tout au plus peut-on dire qu’à
4
ut-être prématuré, tout au plus peut-on dire qu’à
l’
heure présente déjà, son œuvre, comme celle de Barrès, nous offre plus
5
u moins, cette inquiétude libératrice que produit
la
recherche de la vérité. Dès son premier livre, il s’est montré tout e
6
nquiétude libératrice que produit la recherche de
la
vérité. Dès son premier livre, il s’est montré tout entier, il a brav
7
out entier, il a bravement affirmé son unité. Car
le
temps n’est plus, où les jeunes gens se faisaient, avec sérieux, des
8
nt affirmé son unité. Car le temps n’est plus, où
les
jeunes gens se faisaient, avec sérieux, des âmes exceptionnellement c
9
langue plus compliquée encore et nuancée jusqu’à
l’
ennui. La guerre a donné le coup de grâce à cet esthétisme énervant qu
10
lus compliquée encore et nuancée jusqu’à l’ennui.
La
guerre a donné le coup de grâce à cet esthétisme énervant qu’on appel
11
ore et nuancée jusqu’à l’ennui. La guerre a donné
le
coup de grâce à cet esthétisme énervant qu’on appelle symbolisme ; et
12
appelle symbolisme ; et elle a donné naissance à
la
doctrine de M. de Montherlant, qui en est sortie toute formée et casq
13
t, qui en est sortie toute formée et casquée pour
la
lutte de l’après-guerre. ⁂ Deux philosophies, affirme-t-il, se disput
14
t sortie toute formée et casquée pour la lutte de
l’
après-guerre. ⁂ Deux philosophies, affirme-t-il, se disputent le monde
15
. ⁂ Deux philosophies, affirme-t-il, se disputent
le
monde. L’une vient de l’Orient, et insinue dans le monde romain les v
16
firme-t-il, se disputent le monde. L’une vient de
l’
Orient, et insinue dans le monde romain les virus du christianisme, de
17
e monde. L’une vient de l’Orient, et insinue dans
le
monde romain les virus du christianisme, de la Réforme, de la Révolut
18
ient de l’Orient, et insinue dans le monde romain
les
virus du christianisme, de la Réforme, de la Révolution et du romanti
19
ns le monde romain les virus du christianisme, de
la
Réforme, de la Révolution et du romantisme, les concepts de liberté e
20
ain les virus du christianisme, de la Réforme, de
la
Révolution et du romantisme, les concepts de liberté et de progrès, l
21
de la Réforme, de la Révolution et du romantisme,
les
concepts de liberté et de progrès, l’humanitarisme, le bolchévisme. L
22
omantisme, les concepts de liberté et de progrès,
l’
humanitarisme, le bolchévisme. L’autre philosophie est celle de l’anti
23
ncepts de liberté et de progrès, l’humanitarisme,
le
bolchévisme. L’autre philosophie est celle de l’antique Rome, qui a i
24
le bolchévisme. L’autre philosophie est celle de
l’
antique Rome, qui a inspiré le catholicisme, la Renaissance, le tradit
25
sophie est celle de l’antique Rome, qui a inspiré
le
catholicisme, la Renaissance, le traditionnisme et le nationalisme. L
26
de l’antique Rome, qui a inspiré le catholicisme,
la
Renaissance, le traditionnisme et le nationalisme. L’Orient efféminé
27
e, qui a inspiré le catholicisme, la Renaissance,
le
traditionnisme et le nationalisme. L’Orient efféminé ; — en face : l’
28
atholicisme, la Renaissance, le traditionnisme et
le
nationalisme. L’Orient efféminé ; — en face : l’Ordre romain. Or l’or
29
enaissance, le traditionnisme et le nationalisme.
L’
Orient efféminé ; — en face : l’Ordre romain. Or l’ordre, pour M. de M
30
le nationalisme. L’Orient efféminé ; — en face :
l’
Ordre romain. Or l’ordre, pour M. de Montherlant comme pour Maurras, e
31
’Orient efféminé ; — en face : l’Ordre romain. Or
l’
ordre, pour M. de Montherlant comme pour Maurras, est ce qu’il importe
32
u monde, qui n’est en rien différente de celle de
l’
Action française ; remarquons toutefois cette séparation, que Maurras
33
franchement, du catholicisme et du christianisme,
le
christianisme étant dans le même camp que la Réforme. M. de Montherla
34
et du christianisme, le christianisme étant dans
le
même camp que la Réforme. M. de Montherlant n’est décidément pas phil
35
sme, le christianisme étant dans le même camp que
la
Réforme. M. de Montherlant n’est décidément pas philosophe. Peut-être
36
s philosophe. Peut-être ne lui a-t-il manqué pour
le
devenir que le temps de méditer : il a quitté le collège jésuite pour
37
eut-être ne lui a-t-il manqué pour le devenir que
le
temps de méditer : il a quitté le collège jésuite pour la tranchée, p
38
le devenir que le temps de méditer : il a quitté
le
collège jésuite pour la tranchée, puis « le sport l’a saisi aux patte
39
de méditer : il a quitté le collège jésuite pour
la
tranchée, puis « le sport l’a saisi aux pattes de la guerre encore co
40
uitté le collège jésuite pour la tranchée, puis «
le
sport l’a saisi aux pattes de la guerre encore contus de huit coups d
41
collège jésuite pour la tranchée, puis « le sport
l’
a saisi aux pattes de la guerre encore contus de huit coups de griffes
42
tranchée, puis « le sport l’a saisi aux pattes de
la
guerre encore contus de huit coups de griffes et chaud de l’étreinte
43
ncore contus de huit coups de griffes et chaud de
l’
étreinte du fauve merveilleux ». Il n’a pas eu le temps de se ressaisi
44
l’étreinte du fauve merveilleux ». Il n’a pas eu
le
temps de se ressaisir, le sport prolongeant pour lui, d’une façon obs
45
illeux ». Il n’a pas eu le temps de se ressaisir,
le
sport prolongeant pour lui, d’une façon obsédante, le rythme de la gu
46
port prolongeant pour lui, d’une façon obsédante,
le
rythme de la guerre. Du moins a-t-il ainsi évité le choc fatal pour t
47
ant pour lui, d’une façon obsédante, le rythme de
la
guerre. Du moins a-t-il ainsi évité le choc fatal pour tant d’autres
48
rythme de la guerre. Du moins a-t-il ainsi évité
le
choc fatal pour tant d’autres du guerrier et du bourgeois. Dernièreme
49
rrier et du bourgeois. Dernièrement, il abandonna
le
stade et rentra dans le monde où nous vivons tous. Écœuré du désordre
50
ernièrement, il abandonna le stade et rentra dans
le
monde où nous vivons tous. Écœuré du désordre général, il cherche des
51
s, et nous tend les premiers qui lui tombent sous
la
main : le sport et la morale romaine. Dans sa hâte salvatrice, M. de
52
tend les premiers qui lui tombent sous la main :
le
sport et la morale romaine. Dans sa hâte salvatrice, M. de Montherlan
53
emiers qui lui tombent sous la main : le sport et
la
morale romaine. Dans sa hâte salvatrice, M. de Montherlant ne s’est m
54
ontrepoisons pouvaient être administrés ensemble.
L’
opération faite, il a pourtant fallu la justifier, ce qui n’a pas été
55
ensemble. L’opération faite, il a pourtant fallu
la
justifier, ce qui n’a pas été sans quelques tours de passe-passe de l
56
n peu intimidantes. Toute une partie du Paradis à
l’
ombre des épées 1, son dernier livre, est consacrée à « fondre dans un
57
consacrée à « fondre dans une unité supérieure »
l’
antinomie de l’esprit catholique et de l’esprit sportif. « On se fait
58
fondre dans une unité supérieure » l’antinomie de
l’
esprit catholique et de l’esprit sportif. « On se fait son unité comme
59
rieure » l’antinomie de l’esprit catholique et de
l’
esprit sportif. « On se fait son unité comme on peut », avoue-t-il fra
60
radoxal de vouloir unir dans une même philosophie
la
morale jésuite, faite de règles et de contraintes imposées dans le bu
61
, faite de règles et de contraintes imposées dans
le
but de restreindre la liberté et l’initiative individuelles, et la mo
62
e contraintes imposées dans le but de restreindre
la
liberté et l’initiative individuelles, et la morale des sports anglai
63
imposées dans le but de restreindre la liberté et
l’
initiative individuelles, et la morale des sports anglais, morale qui
64
ndre la liberté et l’initiative individuelles, et
la
morale des sports anglais, morale qui veut former des hommes maîtres
65
ment un des premiers Français qui ait compris que
le
but du sport n’est pas la performance, mais le style et la méthode, c
66
ais qui ait compris que le but du sport n’est pas
la
performance, mais le style et la méthode, c’est-à-dire la formation d
67
ue le but du sport n’est pas la performance, mais
le
style et la méthode, c’est-à-dire la formation du caractère, en défin
68
sport n’est pas la performance, mais le style et
la
méthode, c’est-à-dire la formation du caractère, en définitive. Mais
69
rmance, mais le style et la méthode, c’est-à-dire
la
formation du caractère, en définitive. Mais on peut oublier la partie
70
du caractère, en définitive. Mais on peut oublier
la
partie doctrinaire de cette œuvre, elle ne lui est pas indispensable
71
« Ces simplifications valent ce que valent toutes
les
simplifications, qu’on les appelle ou non idées générales, et j’avoue
72
t ce que valent toutes les simplifications, qu’on
les
appelle ou non idées générales, et j’avoue bien volontiers qu’il n’es
73
e bien volontiers qu’il n’est pas une opinion sur
le
monde à laquelle je ne préfère le monde ». Je préfère à la dogmatique
74
une opinion sur le monde à laquelle je ne préfère
le
monde ». Je préfère à la dogmatique de M. de Montherlant son admirabl
75
à laquelle je ne préfère le monde ». Je préfère à
la
dogmatique de M. de Montherlant son admirable lyrisme de poète du sta
76
chante cette « violence ordonnée et calme » des «
grands
corps athlétiques ». Sur le stade au soleil se déploient les équipes,
77
et calme » des « grands corps athlétiques ». Sur
le
stade au soleil se déploient les équipes, et l’équipier Montherlant l
78
thlétiques ». Sur le stade au soleil se déploient
les
équipes, et l’équipier Montherlant les contemple, ému de « cette ivre
79
r le stade au soleil se déploient les équipes, et
l’
équipier Montherlant les contemple, ému de « cette ivresse qui naît de
80
déploient les équipes, et l’équipier Montherlant
les
contemple, ému de « cette ivresse qui naît de l’ordre », et aussi par
81
les contemple, ému de « cette ivresse qui naît de
l’
ordre », et aussi parfois, de la pensée que « sur ces corps de l’entre
82
resse qui naît de l’ordre », et aussi parfois, de
la
pensée que « sur ces corps de l’entre-deux-guerres, … cinq sur dix so
83
ussi parfois, de la pensée que « sur ces corps de
l’
entre-deux-guerres, … cinq sur dix sont désignés… ». Voici passer un c
84
Voici passer un coureur : « À peine a-t-il touché
la
piste d’herbe, c’est une allégresse héroïque qu’infuse à son corps la
85
est une allégresse héroïque qu’infuse à son corps
la
douce matière. L’air et le sol, dieux rivaux, se le disputent, et il
86
héroïque qu’infuse à son corps la douce matière.
L’
air et le sol, dieux rivaux, se le disputent, et il oscille entre l’un
87
qu’infuse à son corps la douce matière. L’air et
le
sol, dieux rivaux, se le disputent, et il oscille entre l’un et l’aut
88
douce matière. L’air et le sol, dieux rivaux, se
le
disputent, et il oscille entre l’un et l’autre. Ainsi mon art, entre
89
lée, bondissante et posée, est pleine du désir de
l’
air. Danse-t-il sur une musique que je n’entends pas ? » — Mais plus q
90
musique que je n’entends pas ? » — Mais plus que
le
corps en mouvement, c’est la domination de la raison sur ce corps qui
91
? » — Mais plus que le corps en mouvement, c’est
la
domination de la raison sur ce corps qui est exaltante, et c’est cett
92
que le corps en mouvement, c’est la domination de
la
raison sur ce corps qui est exaltante, et c’est cette domination qui
93
est exaltante, et c’est cette domination qui est
le
but véritable du sport. On accepte une règle ; on l’assimile, à tel p
94
but véritable du sport. On accepte une règle ; on
l’
assimile, à tel point qu’elle n’est plus une entrave à la violence ani
95
ile, à tel point qu’elle n’est plus une entrave à
la
violence animale déchaînée dans le corps du joueur à la vue de la pra
96
une entrave à la violence animale déchaînée dans
le
corps du joueur à la vue de la prairie rase où rebondit un ballon. Si
97
ale déchaînée dans le corps du joueur à la vue de
la
prairie rase où rebondit un ballon. Si l’on considère la vie sociale
98
vue de la prairie rase où rebondit un ballon. Si
l’
on considère la vie sociale comme un jeu sérieux dont on respecte les
99
rie rase où rebondit un ballon. Si l’on considère
la
vie sociale comme un jeu sérieux dont on respecte les règles, non plu
100
vie sociale comme un jeu sérieux dont on respecte
les
règles, non plus comme une lutte sauvage et déloyale, la morale d’équ
101
es, non plus comme une lutte sauvage et déloyale,
la
morale d’équipe devient toute la morale, et les qualités indispensabl
102
age et déloyale, la morale d’équipe devient toute
la
morale, et les qualités indispensables au bon équipier deviennent les
103
e, la morale d’équipe devient toute la morale, et
les
qualités indispensables au bon équipier deviennent les qualités du pa
104
ualités indispensables au bon équipier deviennent
les
qualités du parfait citoyen : juste vision de la réalité, abnégation,
105
les qualités du parfait citoyen : juste vision de
la
réalité, abnégation, sentiment du devoir de chacun envers l’ensemble
106
abnégation, sentiment du devoir de chacun envers
l’
ensemble (Montherlant insiste plutôt sur le sentiment des hiérarchies
107
envers l’ensemble (Montherlant insiste plutôt sur
le
sentiment des hiérarchies que sur celui de la solidarité, comme bien
108
sur le sentiment des hiérarchies que sur celui de
la
solidarité, comme bien l’on pense). Enfin, enseignement plus général
109
rchies que sur celui de la solidarité, comme bien
l’
on pense). Enfin, enseignement plus général de la morale sportive : «
110
l’on pense). Enfin, enseignement plus général de
la
morale sportive : « la règle de rester en dedans de son action, appli
111
seignement plus général de la morale sportive : «
la
règle de rester en dedans de son action, application de l’immense axi
112
de rester en dedans de son action, application de
l’
immense axiome formulé par Hésiode et qui gouverna le monde ancien : L
113
mmense axiome formulé par Hésiode et qui gouverna
le
monde ancien : La moitié est plus grande que le tout ». Le sport comm
114
ulé par Hésiode et qui gouverna le monde ancien :
La
moitié est plus grande que le tout ». Le sport comme un apprentissage
115
qui gouverna le monde ancien : La moitié est plus
grande
que le tout ». Le sport comme un apprentissage de la vie : tout servi
116
a le monde ancien : La moitié est plus grande que
le
tout ». Le sport comme un apprentissage de la vie : tout servira plus
117
ancien : La moitié est plus grande que le tout ».
Le
sport comme un apprentissage de la vie : tout servira plus tard : Ô
118
que le tout ». Le sport comme un apprentissage de
la
vie : tout servira plus tard : Ô garçons, il y a un brin du myrte ci
119
de laurier. Vous n’êtes pas couronnés d’olivier.
La
main connaît la main dans la prise du témoin. L’épaule connaît l’épau
120
s n’êtes pas couronnés d’olivier. La main connaît
la
main dans la prise du témoin. L’épaule connaît l’épaule dans le talon
121
couronnés d’olivier. La main connaît la main dans
la
prise du témoin. L’épaule connaît l’épaule dans le talonnage du ballo
122
La main connaît la main dans la prise du témoin.
L’
épaule connaît l’épaule dans le talonnage du ballon. Le regard connaît
123
la main dans la prise du témoin. L’épaule connaît
l’
épaule dans le talonnage du ballon. Le regard connaît le regard dans l
124
a prise du témoin. L’épaule connaît l’épaule dans
le
talonnage du ballon. Le regard connaît le regard dans la course d’équ
125
ule connaît l’épaule dans le talonnage du ballon.
Le
regard connaît le regard dans la course d’équipe. Le cœur connaît la
126
le dans le talonnage du ballon. Le regard connaît
le
regard dans la course d’équipe. Le cœur connaît la présence muette et
127
nnage du ballon. Le regard connaît le regard dans
la
course d’équipe. Le cœur connaît la présence muette et sûre. Toutes c
128
regard connaît le regard dans la course d’équipe.
Le
cœur connaît la présence muette et sûre. Toutes ces choses ne se font
129
e regard dans la course d’équipe. Le cœur connaît
la
présence muette et sûre. Toutes ces choses ne se font pas en vain. Le
130
t sûre. Toutes ces choses ne se font pas en vain.
Le
chef se dresse entre les dix qui sont à lui. Il dit : « Je ne demande
131
s ne se font pas en vain. Le chef se dresse entre
les
dix qui sont à lui. Il dit : « Je ne demande pas qu’on m’aime. Je dem
132
t purs courages, donnez-moi votre silence jusqu’à
l’
heure. Que je taise votre mot de ralliement, paradis à l’ombre des épé
133
. Que je taise votre mot de ralliement, paradis à
l’
ombre des épées. Rien de moins artificiellement moderne que ce lyrism
134
nt moderne que ce lyrisme sobre et prenant : « Si
l’
on s’échauffe, s’échauffer sur de la précision. » On évitera ainsi tou
135
renant : « Si l’on s’échauffe, s’échauffer sur de
la
précision. » On évitera ainsi tout niais romantisme. Je sais bien ce
136
ais romantisme. Je sais bien ce qu’on objectera :
le
sport ainsi compris, plus que l’apprentissage de la vie, est l’appren
137
u’on objectera : le sport ainsi compris, plus que
l’
apprentissage de la vie, est l’apprentissage de la guerre, dira-t-on.
138
sport ainsi compris, plus que l’apprentissage de
la
vie, est l’apprentissage de la guerre, dira-t-on. M. de Montherlant r
139
compris, plus que l’apprentissage de la vie, est
l’
apprentissage de la guerre, dira-t-on. M. de Montherlant répondra : no
140
l’apprentissage de la vie, est l’apprentissage de
la
guerre, dira-t-on. M. de Montherlant répondra : non, car la faiblesse
141
dira-t-on. M. de Montherlant répondra : non, car
la
faiblesse est le péché capital pour le sportif. Or c’est la faiblesse
142
Montherlant répondra : non, car la faiblesse est
le
péché capital pour le sportif. Or c’est la faiblesse « qui fait lever
143
: non, car la faiblesse est le péché capital pour
le
sportif. Or c’est la faiblesse « qui fait lever la haine ». « La faib
144
se est le péché capital pour le sportif. Or c’est
la
faiblesse « qui fait lever la haine ». « La faiblesse est mère du com
145
e sportif. Or c’est la faiblesse « qui fait lever
la
haine ». « La faiblesse est mère du combat. » C’est donc à un lacédém
146
c’est la faiblesse « qui fait lever la haine ». «
La
faiblesse est mère du combat. » C’est donc à un lacédémonisme renouve
147
mpérée de raison. Ce qu’on en peut retenir, c’est
la
méthode, car je crois qu’elle sert mieux la démocratie que l’Église r
148
c’est la méthode, car je crois qu’elle sert mieux
la
démocratie que l’Église romaine, quoi qu’en pense M. de Montherlant.
149
car je crois qu’elle sert mieux la démocratie que
l’
Église romaine, quoi qu’en pense M. de Montherlant. Et voici, ô parado
150
Kant qui écrit : « C’est sur des maximes, non sur
la
discipline, qu’il faut fonder la conduite des jeunes gens : celle-ci
151
maximes, non sur la discipline, qu’il faut fonder
la
conduite des jeunes gens : celle-ci empêche les abus, mais celles-là
152
er la conduite des jeunes gens : celle-ci empêche
les
abus, mais celles-là forment l’esprit. » M. de Montherlant illustre s
153
celle-ci empêche les abus, mais celles-là forment
l’
esprit. » M. de Montherlant illustre sa propre pensée de cette citatio
154
rait appeler une « morale constructive » : porter
l’
effort sur ce qui doit être, et ce qui ne doit pas être tombera de soi
155
e qui ne doit pas être tombera de soi-même. Ainsi
l’
athlète à l’entraînement ne s’épuise-t-il pas à combattre certaines fa
156
t pas être tombera de soi-même. Ainsi l’athlète à
l’
entraînement ne s’épuise-t-il pas à combattre certaines faiblesses : i
157
certaines faiblesses : il développe ses qualités,
le
reste s’arrange de soi-même. ⁂ M. de Montherlant, qui a quitté le sta
158
ge de soi-même. ⁂ M. de Montherlant, qui a quitté
le
stade, se rendra mieux compte à distance de la contradiction sur laqu
159
té le stade, se rendra mieux compte à distance de
la
contradiction sur laquelle est bâtie son œuvre. L’intéressant sera de
160
a contradiction sur laquelle est bâtie son œuvre.
L’
intéressant sera de voir ce qu’il sacrifiera, de la morale sportive ou
161
’intéressant sera de voir ce qu’il sacrifiera, de
la
morale sportive ou de la morale jésuite. Mais enfin, voici un homme,
162
ce qu’il sacrifiera, de la morale sportive ou de
la
morale jésuite. Mais enfin, voici un homme, et non plus seulement un
163
me de lettres. Un homme en qui s’équilibrent déjà
l’
enthousiasme d’une jeunesse saine et la retenue de l’âge mûr, cette «
164
brent déjà l’enthousiasme d’une jeunesse saine et
la
retenue de l’âge mûr, cette « limitation » que lui ont enseigné le sp
165
nthousiasme d’une jeunesse saine et la retenue de
l’
âge mûr, cette « limitation » que lui ont enseigné le sport et les anc
166
ge mûr, cette « limitation » que lui ont enseigné
le
sport et les anciens. J’admets que ses « idées générales » ne vaillen
167
e « limitation » que lui ont enseigné le sport et
les
anciens. J’admets que ses « idées générales » ne vaillent rien2 ; sa
168
morale virile nous est néanmoins plus proche que
la
sensualité vaguement chrétienne de tel autre écrivain catholique. Et
169
e. Et son lyrisme, encore un peu brutal, il saura
le
dompter, et atteindre au classicisme véritable. Voici un constructeur
170
ut lutter contre lui, nous savons qu’il observera
les
règles. Saluons-le donc du salut des équipes avant le match : « En l’
171
, nous savons qu’il observera les règles. Saluons-
le
donc du salut des équipes avant le match : « En l’honneur d’Henry de
172
ègles. Saluons-le donc du salut des équipes avant
le
match : « En l’honneur d’Henry de Montherlant, hip, hip, hurrah ! »
173
e donc du salut des équipes avant le match : « En
l’
honneur d’Henry de Montherlant, hip, hip, hurrah ! » 1. Éditions Gra
174
hip, hurrah ! » 1. Éditions Grasset, Paris. 2.
L’
attitude de M. de Montherlant légitime une telle « simplification ».
175
ont Denis de, « [Compte rendu] M. de Montherlant,
le
sport et les jésuites », La Semaine littéraire, Genève, 9 février 192
176
, « [Compte rendu] M. de Montherlant, le sport et
les
jésuites », La Semaine littéraire, Genève, 9 février 1924, p. 63-65.
177
u] M. de Montherlant, le sport et les jésuites »,
La
Semaine littéraire, Genève, 9 février 1924, p. 63-65.
178
Conférence de Conrad Meili sur «
Les
ismes dans la peinture moderne » (30 octobre 1924)b Lundi soir, da
179
Conférence de Conrad Meili sur « Les ismes dans
la
peinture moderne » (30 octobre 1924)b Lundi soir, dans la salle du
180
moderne » (30 octobre 1924)b Lundi soir, dans
la
salle du Lyceum, M. Conrad Meili parla des écoles qui représentent la
181
M. Conrad Meili parla des écoles qui représentent
la
peinture française, des débuts du xixe siècle à nos jours. Partis du
182
ours. Partis du classicisme de David et d’Ingres,
les
peintres français ont accompli, durant le xixe siècle, une explorati
183
ngres, les peintres français ont accompli, durant
le
xixe siècle, une exploration merveilleuse dans les domaines du roman
184
e xixe siècle, une exploration merveilleuse dans
les
domaines du romantisme, du naturalisme, de l’impressionnisme, pour ab
185
ns les domaines du romantisme, du naturalisme, de
l’
impressionnisme, pour aboutir enfin dans ces impasses : cubisme et fut
186
r enfin dans ces impasses : cubisme et futurisme.
Les
voici revenus, après cent-vingt-cinq ans, à peu près à leur point de
187
r technique (contrairement à ce que pense souvent
le
public), ils préparent l’avènement d’un classicisme nouveau. M. Meili
188
à ce que pense souvent le public), ils préparent
l’
avènement d’un classicisme nouveau. M. Meili a mis en évidence cette c
189
uveau. M. Meili a mis en évidence cette courbe de
la
peinture moderne avec une netteté et un relief remarquable. Les œuvre
190
oderne avec une netteté et un relief remarquable.
Les
œuvres de cet artiste, qu’on a pu voir à la Rose d’Or témoignaient de
191
ble. Les œuvres de cet artiste, qu’on a pu voir à
la
Rose d’Or témoignaient de ces mêmes qualités : car la façon de peindr
192
ose d’Or témoignaient de ces mêmes qualités : car
la
façon de peindre correspond à la façon de penser du peintre. Souhaito
193
s qualités : car la façon de peindre correspond à
la
façon de penser du peintre. Souhaitons d’entendre encore M. Meili. Es
194
endre encore M. Meili. Est-il besoin de souligner
l’
importance de telles prises de contact entre artiste et public ? b.
195
Henry de Montherlant, Chant funèbre pour
les
morts de Verdun (mars 1925)a Henry de Montherlant, héritier d’une
196
leresque, mène sa vie comme une ardente aventure.
Les
épisodes s’appellent : collège, guerre, sport… la Relève du Matin, le
197
es épisodes s’appellent : collège, guerre, sport…
la
Relève du Matin, le Songe, les Olympiques. Et voici le Chant funèbre,
198
ent : collège, guerre, sport… la Relève du Matin,
le
Songe, les Olympiques. Et voici le Chant funèbre, adieu à la guerre e
199
ège, guerre, sport… la Relève du Matin, le Songe,
les
Olympiques. Et voici le Chant funèbre, adieu à la guerre et aux jeux,
200
lève du Matin, le Songe, les Olympiques. Et voici
le
Chant funèbre, adieu à la guerre et aux jeux, avant de partir pour de
201
es Olympiques. Et voici le Chant funèbre, adieu à
la
guerre et aux jeux, avant de partir pour de nouvelles conquêtes. Terr
202
r pour ses erreurs plus encore que pour celles de
l’
adversaire, ce qui est beaucoup dire. Il y avait dans le Paradis je ne
203
rsaire, ce qui est beaucoup dire. Il y avait dans
le
Paradis je ne sais quel relent de barbarie, un assez malsain goût du
204
alsain goût du sang. Tout cela s’est purifié dans
le
Chant funèbre. Et une phrase telle que « … Nous sommes sûrs de ne pas
205
e, à notre place modeste, si peu que ce soit pour
la
paix », c’est une affirmation qui d’un coup condamne beaucoup d’antér
206
pour avoir contemplé Verdun, en tête à tête avec
le
génie de la mort. Mais alors, à quoi sert d’exalter, d’une si émouvan
207
contemplé Verdun, en tête à tête avec le génie de
la
mort. Mais alors, à quoi sert d’exalter, d’une si émouvante sorte, le
208
à quoi sert d’exalter, d’une si émouvante sorte,
les
soldats déjà légendaires de Verdun, et ce « haut ton de vie » qu’ils
209
justifie son livre : « Ranimons ces horreurs pour
les
vouloir éviter, et ces grandeurs pour n’en pas trop descendre ». N’es
210
ce pas une éclatante mise au point ? Et venant de
l’
auteur du Songe, d’un de ces hommes qui « descendirent » du front dans
211
cette absence de haine ; cette épouvante, devant
la
guerre… proviennent de plus d’humanité ou de moins de santé ». À main
212
et repart. Vers quels buts ? On verra plus tard.
L’
urgent c’est d’avancer. Et l’on atteindra peut-être ces régions élevée
213
On verra plus tard. L’urgent c’est d’avancer. Et
l’
on atteindra peut-être ces régions élevées où les éléments contraires
214
t l’on atteindra peut-être ces régions élevées où
les
éléments contraires s’unissent dans la grandeur. La paix qu’il appell
215
levées où les éléments contraires s’unissent dans
la
grandeur. La paix qu’il appelle, c’est autre chose que l’absence de g
216
éléments contraires s’unissent dans la grandeur.
La
paix qu’il appelle, c’est autre chose que l’absence de guerre, c’est
217
eur. La paix qu’il appelle, c’est autre chose que
l’
absence de guerre, c’est une paix que travaillerait le levain des vert
218
sence de guerre, c’est une paix que travaillerait
le
levain des vertus guerrières. « Il faut que la paix, ce soit vivre. »
219
it le levain des vertus guerrières. « Il faut que
la
paix, ce soit vivre. » Par tout un livre libéré de souvenirs héroïque
220
vre libéré de souvenirs héroïques, peut-être trop
grands
pour la paix, c’est vers de plus sereines exaltations qu’il va porter
221
e souvenirs héroïques, peut-être trop grands pour
la
paix, c’est vers de plus sereines exaltations qu’il va porter son ard
222
ations qu’il va porter son ardeur. Il va chercher
le
souvenir de l’aventure antique, et dans ce qui fut Rome ou la Grèce,
223
porter son ardeur. Il va chercher le souvenir de
l’
aventure antique, et dans ce qui fut Rome ou la Grèce, revivre sa trad
224
de l’aventure antique, et dans ce qui fut Rome ou
la
Grèce, revivre sa tradition. Toute son œuvre pourrait se définir : la
225
tradition. Toute son œuvre pourrait se définir :
la
lutte d’un tempérament avec la réalité. Tantôt c’est l’un qui veut pl
226
rrait se définir : la lutte d’un tempérament avec
la
réalité. Tantôt c’est l’un qui veut plier l’autre à sa violence — le
227
c’est l’un qui veut plier l’autre à sa violence —
le
Paradis —, tantôt c’est l’autre qui impose son absolu. Une soumission
228
rement consentie, voilà ce que nous admirons dans
le
Chant funèbre. Ce mot de grandeur revient souvent lorsqu’on parle de
229
rle de cette œuvre : je ne sais s’il faut en voir
la
raison dans la force de la personnalité révélée ou dans la noblesse d
230
vre : je ne sais s’il faut en voir la raison dans
la
force de la personnalité révélée ou dans la noblesse de sa soumission
231
sais s’il faut en voir la raison dans la force de
la
personnalité révélée ou dans la noblesse de sa soumission. Périlleuse
232
dans la force de la personnalité révélée ou dans
la
noblesse de sa soumission. Périlleuse carrière de la grandeur où Mont
233
noblesse de sa soumission. Périlleuse carrière de
la
grandeur où Montherlant est entré de plain-pied, en même temps que da
234
t est entré de plain-pied, en même temps que dans
la
guerre. Que de sacrifices ne lui devra-t-il pas offrir ainsi les roma
235
de sacrifices ne lui devra-t-il pas offrir ainsi
les
romans « intéressants » ou « curieux » ; le « grand lyrisme » à la Ch
236
insi les romans « intéressants » ou « curieux » ;
le
« grand lyrisme » à la Chateaubriand, voire à la Barrès, dont il est
237
les romans « intéressants » ou « curieux » ; le «
grand
lyrisme » à la Chateaubriand, voire à la Barrès, dont il est capable
238
essants » ou « curieux » ; le « grand lyrisme » à
la
Chateaubriand, voire à la Barrès, dont il est capable et qu’il lui fa
239
le « grand lyrisme » à la Chateaubriand, voire à
la
Barrès, dont il est capable et qu’il lui faudra livrer au « feu de vé
240
r, s’il veut rester digne de son rôle et vraiment
le
coryphée d’une génération casquée. Feu consumateur de toute faiblesse
241
en notre siècle, qu’elle paraît parfois, lorsque
la
tourmente humaine ne la moleste ni ne l’avive plus, cruelle et désolé
242
e paraît parfois, lorsque la tourmente humaine ne
la
moleste ni ne l’avive plus, cruelle et désolée comme cette « flamme p
243
lorsque la tourmente humaine ne la moleste ni ne
l’
avive plus, cruelle et désolée comme cette « flamme pensante » dans l’
244
e et désolée comme cette « flamme pensante » dans
l’
ossuaire de Douaumont. Puis la vie l’exalte de nouveau d’un large vent
245
mme pensante » dans l’ossuaire de Douaumont. Puis
la
vie l’exalte de nouveau d’un large vent de joie. a. Rougemont Deni
246
sante » dans l’ossuaire de Douaumont. Puis la vie
l’
exalte de nouveau d’un large vent de joie. a. Rougemont Denis de, «
247
e rendu] Henry de Montherlant, Chant funèbre pour
les
morts de Verdun », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genè
248
isme (juin 1925)b Sous une « vague de rêves »,
la
logique, dernier agent de liaison de nos esprits, va périr. C’est du
249
ns ce que proclame M. Breton en un manifeste dont
la
pseudo-nouveauté nous retiendra moins que la significative pauvreté i
250
dont la pseudo-nouveauté nous retiendra moins que
la
significative pauvreté idéologique et morale qu’il révèle. Le style b
251
tive pauvreté idéologique et morale qu’il révèle.
Le
style brillant et elliptique qui tend à devenir notre poncif moderne,
252
, — ne réussit pas toujours chez Breton à masquer
la
banalité de la pensée. D’autant plus que les rares passages où il exp
253
pas toujours chez Breton à masquer la banalité de
la
pensée. D’autant plus que les rares passages où il expose directement
254
squer la banalité de la pensée. D’autant plus que
les
rares passages où il expose directement les principes de sa « révolut
255
s que les rares passages où il expose directement
les
principes de sa « révolution » semblent au contraire tirés de quelque
256
ent, soit par écrit, soit de toute autre manière,
le
fonctionnement réel de la pensée. Dictée de la pensée en l’absence de
257
de toute autre manière, le fonctionnement réel de
la
pensée. Dictée de la pensée en l’absence de tout contrôle exercé par
258
e, le fonctionnement réel de la pensée. Dictée de
la
pensée en l’absence de tout contrôle exercé par la raison, en dehors
259
nnement réel de la pensée. Dictée de la pensée en
l’
absence de tout contrôle exercé par la raison, en dehors de toute préo
260
a pensée en l’absence de tout contrôle exercé par
la
raison, en dehors de toute préoccupation esthétique ou morale. » (p.
261
te préoccupation esthétique ou morale. » (p. 42).
Le
surréalisme ne serait-il donc qu’une sorte de méthode des textes géné
262
généralisée ? Point du tout ! Il paraît qu’il est
la
seule attitude littéraire aujourd’hui concevable. Mais par quelles tr
263
ou moins conscientes M. Breton peut-il préconiser
l’
existence d’une littérature fondée sur de tels principes ? Le Rêve est
264
d’une littérature fondée sur de tels principes ?
Le
Rêve est la seule matière poétique. Dans le monde du Rêve autant de c
265
rature fondée sur de tels principes ? Le Rêve est
la
seule matière poétique. Dans le monde du Rêve autant de cellules isol
266
pes ? Le Rêve est la seule matière poétique. Dans
le
monde du Rêve autant de cellules isolées que de rêveurs. Toute poésie
267
que de rêveurs. Toute poésie est incommunicable,
le
poète étant un simple sténographe de ses rêves. Soit. De ces faits, j
268
pratique : inutile de publier des poèmes. Éluard
le
comprenait, qui écrivit : « Quand les livres se liront-ils d’eux-même
269
èmes. Éluard le comprenait, qui écrivit : « Quand
les
livres se liront-ils d’eux-mêmes, sans le secours des lecteurs ? Quan
270
Quand les livres se liront-ils d’eux-mêmes, sans
le
secours des lecteurs ? Quand les hommes se comprendront-ils individue
271
d’eux-mêmes, sans le secours des lecteurs ? Quand
les
hommes se comprendront-ils individuellement ? » Que M. Breton donne d
272
our faire un poème » cette mystification est dans
la
logique de ses principes, mais je lui conteste le droit de faire suiv
273
la logique de ses principes, mais je lui conteste
le
droit de faire suivre son manifeste de proses — Poisson soluble — qui
274
uble — qui servent d’illustration à sa défense de
la
poésie pure. Les beautés que j’y vois ne me seraient-elles perceptibl
275
nt d’illustration à sa défense de la poésie pure.
Les
beautés que j’y vois ne me seraient-elles perceptibles que par le fai
276
’y vois ne me seraient-elles perceptibles que par
le
fait d’une fortuite coïncidence entre l’univers du poète et le mien ?
277
que par le fait d’une fortuite coïncidence entre
l’
univers du poète et le mien ? Je comprends trop de choses dans ces poè
278
tique » qui, avoue Rimbaud, entre encore pour une
grande
part dans l’« alchimie du verbe » ; et je ne puis m’empêcher d’accuse
279
e Rimbaud, entre encore pour une grande part dans
l’
« alchimie du verbe » ; et je ne puis m’empêcher d’accuser Breton de p
280
cet appareil psychologique si scolaire ? À donner
le
change sur la pauvreté d’un art purement formel. Car c’est ici le tra
281
sychologique si scolaire ? À donner le change sur
la
pauvreté d’un art purement formel. Car c’est ici le tragique de cette
282
pauvreté d’un art purement formel. Car c’est ici
le
tragique de cette mystification : la plupart des surréalistes n’ont r
283
e leur impuissance. « Il n’y a pas de pensée hors
les
mots » (Aragon). Aussi se paient-ils de métaphores comme d’autres de
284
éclament imprudemment, — on sait ce que c’est que
la
« liberté » d’un esprit pur de tout finalisme ! Surréalisme S.A., ent
285
out finalisme ! Surréalisme S.A., entreprise pour
l’
exploitation de matériaux de démolition abandonnés par Dada S.A. Ce n’
286
pas ainsi que nous sortirons d’une anarchie dont
les
causes semblent avant tout morales. Les tendances encore un peu vague
287
chie dont les causes semblent avant tout morales.
Les
tendances encore un peu vagues d’un groupe tel que Philosophies laiss
288
lus réelles. On souhaite qu’après faillite faite,
les
surréalistes trouvent à montrer leur talent en des jeux moins lassant
289
poir exaspéré, commandait une certaine sympathie.
L’
agaçant, avec les surréalistes, c’est que — pour reprendre un mot de C
290
ommandait une certaine sympathie. L’agaçant, avec
les
surréalistes, c’est que — pour reprendre un mot de Cocteau — ils « em
291
octeau — ils « embaument de vieilles anarchies ».
L’
ironie qui sauva Dada du ridicule le cède ici à un ton de mage qui ne
292
anarchies ». L’ironie qui sauva Dada du ridicule
le
cède ici à un ton de mage qui ne fera plus longtemps impression. C’es
293
mage qui ne fera plus longtemps impression. C’est
grand
dommage pour les lettres françaises qui risquent d’y perdre au moins
294
us longtemps impression. C’est grand dommage pour
les
lettres françaises qui risquent d’y perdre au moins deux grands artis
295
françaises qui risquent d’y perdre au moins deux
grands
artistes : Aragon, Éluard. Sans oublier Breton, enchanteur des images
296
ublier Breton, enchanteur des images qui peuplent
les
ténèbres. b. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] André Breton, Ma
297
Paul Colin, Van Gogh (août 1925)c
Le
nouveau volume de la collection des « Maîtres de l’art moderne » est
298
in, Van Gogh (août 1925)c Le nouveau volume de
la
collection des « Maîtres de l’art moderne » est au moins le cinquième
299
nouveau volume de la collection des « Maîtres de
l’
art moderne » est au moins le cinquième ouvrage publié en France sur V
300
s assez neuves. M. Colin s’est contenté de narrer
les
faits de la vie de Vincent, mais d’une telle manière que des conclusi
301
s. M. Colin s’est contenté de narrer les faits de
la
vie de Vincent, mais d’une telle manière que des conclusions critique
302
t avec évidence. Van Gogh fut une proie du génie.
L’
homme tel que nous le peint Paul Colin, est peu intéressant. On en a c
303
Gogh fut une proie du génie. L’homme tel que nous
le
peint Paul Colin, est peu intéressant. On en a connu bien d’autres de
304
d’évangélisation, fondent des groupes dissidents.
Le
miracle, c’est que le plus sauvage génie ait choisi un être de cette
305
ent des groupes dissidents. Le miracle, c’est que
le
plus sauvage génie ait choisi un être de cette espèce pour le tourmen
306
age génie ait choisi un être de cette espèce pour
le
tourmenter et le transfigurer. Vincent s’en effraie lui-même : « Il y
307
isi un être de cette espèce pour le tourmenter et
le
transfigurer. Vincent s’en effraie lui-même : « Il y a quelque chose
308
es copies de Millet. Mais son manque de talent ne
le
rebute pas. Une divine violence le travaille. Elle jaillira enfin, da
309
e de talent ne le rebute pas. Une divine violence
le
travaille. Elle jaillira enfin, dans l’éblouissement d’Arles, jusqu’a
310
violence le travaille. Elle jaillira enfin, dans
l’
éblouissement d’Arles, jusqu’au jour où cette consomption frénétique t
311
rrassant un corps minable, il ne restera plus que
les
flammes, les soleils et aussi les grimaces de douleur de ses tableaux
312
orps minable, il ne restera plus que les flammes,
les
soleils et aussi les grimaces de douleur de ses tableaux. Il faut lou
313
estera plus que les flammes, les soleils et aussi
les
grimaces de douleur de ses tableaux. Il faut louer Paul Colin de n’av
314
n’avoir rien caché des médiocrités de cette vie :
les
reproductions qui suivent sa courte biographie fournissent un meilleu
315
courte biographie fournissent un meilleur motif à
l’
admiration que tout le lyrisme dont on a voulu charger la « vie héroïq
316
nissent un meilleur motif à l’admiration que tout
le
lyrisme dont on a voulu charger la « vie héroïque » de Vincent. M. Co
317
ation que tout le lyrisme dont on a voulu charger
la
« vie héroïque » de Vincent. M. Colin n’a pas cherché à expliquer ce
318
ce miracle. Il nous laisse à notre émotion devant
le
spectacle d’une œuvre qui ne dut rien à l’homme, d’une œuvre de pur g
319
devant le spectacle d’une œuvre qui ne dut rien à
l’
homme, d’une œuvre de pur génie. Vincent Van Gogh, génie sans talent.
320
Lucien Fabre,
Le
Tarramagnou (septembre 1925)d Lucien Fabre, ingénieur, poète, chro
321
stein, des articles sur Valéry, St John Perse. On
le
vit naguère en province liquider des stocks américains. Et ses romans
322
ins. Et ses romans, c’est aussi une liquidation :
les
faits s’y pressent et s’y bousculent ; de temps à autre une notation
323
ou de psychologue se glisse dans leur flot. Voilà
le
lecteur entraîné, ébahi, passionné, contraint de suivre jusqu’au bout
324
bout un roman de 500 pages comme Rabevel. Car si
la
liquidation des questions traitées est rapide, elle est complète auss
325
n’est pas lui qui se refuserait à écrire — comme
le
fait son maître : « La marquise sortit à cinq heures ». Une telle pla
326
efuserait à écrire — comme le fait son maître : «
La
marquise sortit à cinq heures ». Une telle platitude est presque indi
327
e indispensable, mais il s’en permet d’autres qui
le
sont moins. On n’écrit pas un roman en trois volumes sans y laisser d
328
on ne demande pas non plus au puissant boxeur sur
le
ring d’être bien peigné. Rabevel, c’était un portrait balzacien du b
329
ait un portrait balzacien du brasseur d’affaires.
Le
sujet du Tarramagnou, c’est « la nouvelle mise en servitude du peuple
330
seur d’affaires. Le sujet du Tarramagnou, c’est «
la
nouvelle mise en servitude du peuple rustique de France ». En effet —
331
vitude du peuple rustique de France ». En effet —
le
phénomène n’est pas particulier à la France — les paysans sont en tra
332
. En effet — le phénomène n’est pas particulier à
la
France — les paysans sont en train de redevenir serfs, serfs des synd
333
le phénomène n’est pas particulier à la France —
les
paysans sont en train de redevenir serfs, serfs des syndicats et des
334
villes. Mais dans une de ces provinces du Midi où
le
souvenir des luttes religieuses encore vivace fait que les paysans ga
335
nir des luttes religieuses encore vivace fait que
les
paysans gardent une méfiance frondeuse vis-à-vis du gouvernement, le
336
une méfiance frondeuse vis-à-vis du gouvernement,
le
libérateur va se lever. C’est un descendant de Roland le Camisard, ce
337
Camisard, ce « Tarramagnou », ce « petit homme de
la
terre », qui va susciter un formidable mouvement de protestation cont
338
er un formidable mouvement de protestation contre
les
lois tyranniques. Le succès grandit rapidement, le gouvernement cède.
339
ment de protestation contre les lois tyranniques.
Le
succès grandit rapidement, le gouvernement cède. Mais la même inertie
340
s lois tyranniques. Le succès grandit rapidement,
le
gouvernement cède. Mais la même inertie du peuple qui donnait tant de
341
ès grandit rapidement, le gouvernement cède. Mais
la
même inertie du peuple qui donnait tant de mal lorsqu’il fallait l’év
342
peuple qui donnait tant de mal lorsqu’il fallait
l’
éveiller, l’entraîne au-delà du but. Le Tarramagnou voit son œuvre sab
343
donnait tant de mal lorsqu’il fallait l’éveiller,
l’
entraîne au-delà du but. Le Tarramagnou voit son œuvre sabotée par des
344
il fallait l’éveiller, l’entraîne au-delà du but.
Le
Tarramagnou voit son œuvre sabotée par des meneurs ; il tente en vain
345
e par des meneurs ; il tente en vain de ressaisir
les
foules : déjà elles huent sa modération. Alors il va se jeter au-deva
346
devant des troupes accourues, il meurt en clamant
la
paix. M. Fabre avait là les éléments d’un grand roman : autour d’un s
347
s, il meurt en clamant la paix. M. Fabre avait là
les
éléments d’un grand roman : autour d’un sujet de vaste envergure, et
348
mant la paix. M. Fabre avait là les éléments d’un
grand
roman : autour d’un sujet de vaste envergure, et brûlant, une intrigu
349
es d’une belle richesse psychologique. En fermant
le
livre on a presque l’impression qu’il a réussi ce grand roman… Qu’y m
350
e psychologique. En fermant le livre on a presque
l’
impression qu’il a réussi ce grand roman… Qu’y manque-t-il ? Un style
351
livre on a presque l’impression qu’il a réussi ce
grand
roman… Qu’y manque-t-il ? Un style ? L’absence de style, n’est-ce pas
352
ssi ce grand roman… Qu’y manque-t-il ? Un style ?
L’
absence de style, n’est-ce pas le meilleur style pour un romancier ? C
353
-il ? Un style ? L’absence de style, n’est-ce pas
le
meilleur style pour un romancier ? C’est plutôt, je crois, une certai
354
ôt, je crois, une certaine harmonie générale dans
le
récit et le ton, surtout dans la première partie, qui est confuse. No
355
, une certaine harmonie générale dans le récit et
le
ton, surtout dans la première partie, qui est confuse. Non pas que le
356
la première partie, qui est confuse. Non pas que
le
roman soit mal construit, au contraire. Mais le tissu des faits se re
357
e le roman soit mal construit, au contraire. Mais
le
tissu des faits se relâche parfois, et les arêtes de la construction
358
e. Mais le tissu des faits se relâche parfois, et
les
arêtes de la construction apparaissent trop nues. Chef-d’œuvre ou pas
359
su des faits se relâche parfois, et les arêtes de
la
construction apparaissent trop nues. Chef-d’œuvre ou pas chef-d’œuvre
360
uvre ou pas chef-d’œuvre d’ailleurs, il reste que
le
Tarramagnou est un livre émouvant, d’une saine puissance. Il reste qu
361
ougemont Denis de, « [Compte rendu] Lucien Fabre,
Le
Tarramagnou », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève,
362
Les
Appels de l’Orient (septembre 1925)e Le xxe siècle s’annonce comm
363
Les Appels de
l’
Orient (septembre 1925)e Le xxe siècle s’annonce comme le siècle d
364
Les Appels de l’Orient (septembre 1925)e
Le
xxe siècle s’annonce comme le siècle de la découverte du monde par l
365
eptembre 1925)e Le xxe siècle s’annonce comme
le
siècle de la découverte du monde par l’Europe intellectuelle. Grand s
366
)e Le xxe siècle s’annonce comme le siècle de
la
découverte du monde par l’Europe intellectuelle. Grand siècle de crit
367
nce comme le siècle de la découverte du monde par
l’
Europe intellectuelle. Grand siècle de critique pour lequel nos contem
368
découverte du monde par l’Europe intellectuelle.
Grand
siècle de critique pour lequel nos contemporains accumulent les docum
369
critique pour lequel nos contemporains accumulent
les
documents. La littérature de ces dernières années n’est qu’une forme
370
equel nos contemporains accumulent les documents.
La
littérature de ces dernières années n’est qu’une forme de reportage i
371
es n’est qu’une forme de reportage international.
L’
Europe menant cette immense enquête manifeste son génie méthodique, so
372
selle et inépuisable curiosité. Mais, de même que
la
France interrogeant l’Europe du xviiie prenait surtout conscience de
373
riosité. Mais, de même que la France interrogeant
l’
Europe du xviiie prenait surtout conscience de son propre génie, l’Eu
374
prenait surtout conscience de son propre génie,
l’
Europe d’aujourd’hui semble chercher dans une confrontation avec l’Ori
375
d’hui semble chercher dans une confrontation avec
l’
Orient, plutôt qu’une réelle connaissance de l’Orient, une conscience
376
ec l’Orient, plutôt qu’une réelle connaissance de
l’
Orient, une conscience d’elle-même. C’est peut-être pour provoquer cet
377
né un péril oriental, car il semble bien que dans
le
domaine de la culture le péril n’existe que pour autant qu’on en parl
378
iental, car il semble bien que dans le domaine de
la
culture le péril n’existe que pour autant qu’on en parle, la vraie «
379
il semble bien que dans le domaine de la culture
le
péril n’existe que pour autant qu’on en parle, la vraie « question as
380
le péril n’existe que pour autant qu’on en parle,
la
vraie « question asiatique » étant une question politique. On peut pr
381
nt une question politique. On peut prévoir que si
le
bouddhisme jouit un jour d’un renouveau, c’est à quelques savants eur
382
nouveau, c’est à quelques savants européens qu’il
le
devra, tandis que d’un mouvement inverse, le christianisme débarrassé
383
u’il le devra, tandis que d’un mouvement inverse,
le
christianisme débarrassé de son déguisement gréco-latin retournera ve
384
n retournera vers ses sources pour s’y retremper.
Les
appels de l’Orient, ce sont les Keyserling, les Guénon, qui les font
385
ers ses sources pour s’y retremper. Les appels de
l’
Orient, ce sont les Keyserling, les Guénon, qui les font entendre, aut
386
ur s’y retremper. Les appels de l’Orient, ce sont
les
Keyserling, les Guénon, qui les font entendre, autant et plus que les
387
. Les appels de l’Orient, ce sont les Keyserling,
les
Guénon, qui les font entendre, autant et plus que les Tagore et les G
388
l’Orient, ce sont les Keyserling, les Guénon, qui
les
font entendre, autant et plus que les Tagore et les Gandhi, demi-euro
389
Guénon, qui les font entendre, autant et plus que
les
Tagore et les Gandhi, demi-européanisés. Ceci convenu, il faut reconn
390
s font entendre, autant et plus que les Tagore et
les
Gandhi, demi-européanisés. Ceci convenu, il faut reconnaître que l’en
391
ropéanisés. Ceci convenu, il faut reconnaître que
l’
enquête des Cahiers du Mois donne un fort intéressant tableau des mult
392
rt intéressant tableau des multiples réactions de
l’
Europe placée devant le dilemme Orient-Occident. Réactions qui, disons
393
des multiples réactions de l’Europe placée devant
le
dilemme Orient-Occident. Réactions qui, disons-le tout de suite, rens
394
le dilemme Orient-Occident. Réactions qui, disons-
le
tout de suite, renseignent mieux sur l’esprit occidental que sur l’or
395
i, disons-le tout de suite, renseignent mieux sur
l’
esprit occidental que sur l’oriental, en sorte que cette enquête rejoi
396
renseignent mieux sur l’esprit occidental que sur
l’
oriental, en sorte que cette enquête rejoint parfois celle qu’ouvrit l
397
que cette enquête rejoint parfois celle qu’ouvrit
la
Revue de Genève sur « l’Avenir de l’Europe. » (Cf. les deux réponse
398
arfois celle qu’ouvrit la Revue de Genève sur «
l’
Avenir de l’Europe. » (Cf. les deux réponses d’André Gide en particuli
399
qu’ouvrit la Revue de Genève sur « l’Avenir de
l’
Europe. » (Cf. les deux réponses d’André Gide en particulier). Car la
400
vue de Genève sur « l’Avenir de l’Europe. » (Cf.
les
deux réponses d’André Gide en particulier). Car la plupart des enquêt
401
ticulier). Car la plupart des enquêtés se font de
l’
Orient une représentation vague et poétique. « Orient…, toi qui n’as q
402
de cet Orient qu’il s’agit, et Jean Schlumberger
le
définit encore : « … tout ce qui est opposé à l’esprit occidental, to
403
le définit encore : « … tout ce qui est opposé à
l’
esprit occidental, tout ce qui peut servir d’antidote à sa fièvre et à
404
ne dénomination qui n’a de sens que par rapport à
l’
Europe. Il serait vain de tenter un classement parmi les réponses d’un
405
ope. Il serait vain de tenter un classement parmi
les
réponses d’une extraordinaire diversité — peut-être trop nombreuses —
406
e trop nombreuses — qui composent ce gros volume.
Les
points de vue sont si différents, si différentes même les conclusions
407
ts de vue sont si différents, si différentes même
les
conclusions tirées de points de vue semblables, qu’un esprit analytiq
408
t de jugements contradictoires, et de termes dont
le
sens change avec l’échelle de valeurs de l’écrivain. Énumérons pourta
409
adictoires, et de termes dont le sens change avec
l’
échelle de valeurs de l’écrivain. Énumérons pourtant quelques-uns des
410
dont le sens change avec l’échelle de valeurs de
l’
écrivain. Énumérons pourtant quelques-uns des points de vue les plus r
411
Énumérons pourtant quelques-uns des points de vue
les
plus riches ou les mieux définis. Pour Valéry, la supériorité de l’Eu
412
quelques-uns des points de vue les plus riches ou
les
mieux définis. Pour Valéry, la supériorité de l’Europe réside dans sa
413
es plus riches ou les mieux définis. Pour Valéry,
la
supériorité de l’Europe réside dans sa « puissance de choix », dans l
414
les mieux définis. Pour Valéry, la supériorité de
l’
Europe réside dans sa « puissance de choix », dans le génie d’abstract
415
urope réside dans sa « puissance de choix », dans
le
génie d’abstraction qui a produit la géométrie grecque. D’autres attr
416
hoix », dans le génie d’abstraction qui a produit
la
géométrie grecque. D’autres attribuent cette supériorité au machinism
417
es attribuent cette supériorité au machinisme, et
la
déplorent. Plusieurs jeunes songent que dans une Europe vieillie, les
418
eurs jeunes songent que dans une Europe vieillie,
les
parfums puissants de l’Asie sauront encore éveiller de beaux rêves. I
419
ans une Europe vieillie, les parfums puissants de
l’
Asie sauront encore éveiller de beaux rêves. Il y a ceux qui repoussen
420
orante du thomisme et ceux qui pensent inévitable
le
choc de deux mondes, et que seule une intime connaissance mutuelle l’
421
es, et que seule une intime connaissance mutuelle
l’
adoucira. Il y a ceux qui à la suite de Claudel estiment que la questi
422
l y a ceux qui à la suite de Claudel estiment que
la
question ne se pose pas, puisque nous sommes chrétiens. (Mais le chri
423
se pose pas, puisque nous sommes chrétiens. (Mais
le
christianisme, religion missionnaire, ne peut nous donner qu’une supé
424
périorité provisoire et qui porte en son principe
le
germe de sa destruction.) Il y a enfin ceux qui refondent et combinen
425
point avoir, sincérité trop rare… Presque toutes
les
réponses, conclusions ou interrogations, ont le défaut de n’être pas
426
les réponses, conclusions ou interrogations, ont
le
défaut de n’être pas suffisamment motivées par des faits et des docum
427
es par des faits et des documents. Pour beaucoup,
l’
Orient n’est qu’un prétexte à variations sur le thème favori. M. Massi
428
p, l’Orient n’est qu’un prétexte à variations sur
le
thème favori. M. Massis, par exemple, qui cependant produit un grand
429
M. Massis, par exemple, qui cependant produit un
grand
nombre de citations à l’appui de ses sophismes, ne se livre pas moins
430
livre pas moins à des déductions in abstracto qui
le
mènent à des conclusions de ce genre : si nous trouvons le moyen de «
431
à des conclusions de ce genre : si nous trouvons
le
moyen de « suppléer à l’éducation historique des peuples chrétiens qu
432
genre : si nous trouvons le moyen de « suppléer à
l’
éducation historique des peuples chrétiens qui n’ont pas eu de Moyen Â
433
n’ont pas eu de Moyen Âge », nous pourrons amener
l’
Asie à comprendre la religion romaine (ce christianisme méditerranéen
434
n Âge », nous pourrons amener l’Asie à comprendre
la
religion romaine (ce christianisme méditerranéen si étroitement parti
435
erranéen si étroitement particularisé pourtant, à
l’
usage des Latins…). Quant aux orientalistes, qui, eux, apportent des d
436
onclure. Un écrivain grec, M. Embiricos, a trouvé
la
formule qui définit ce que les autres entendent vaguement par Orient
437
Embiricos, a trouvé la formule qui définit ce que
les
autres entendent vaguement par Orient : l’Asie est le subconscient du
438
e que les autres entendent vaguement par Orient :
l’
Asie est le subconscient du monde, formule qui, je pense, réunira tous
439
utres entendent vaguement par Orient : l’Asie est
le
subconscient du monde, formule qui, je pense, réunira tous les suffra
440
ent du monde, formule qui, je pense, réunira tous
les
suffrages. Et chacun d’en tirer de nouvelles raisons de maudire l’Ori
441
chacun d’en tirer de nouvelles raisons de maudire
l’
Orient ou chercher la guérison de nos fièvres. Mais nous aurons entrev
442
nouvelles raisons de maudire l’Orient ou chercher
la
guérison de nos fièvres. Mais nous aurons entrevu peut-être pour la p
443
us aurons entrevu peut-être pour la première fois
le
rôle de l’Europe « conscience du monde », entre une Amérique affolée
444
ntrevu peut-être pour la première fois le rôle de
l’
Europe « conscience du monde », entre une Amérique affolée de vitesse,
445
nelle. e. Rougemont Denis de, « [Compte rendu]
Les
Appels de l’Orient (n° 9-10 des Cahiers du Mois) », Bibliothèque univ
446
ougemont Denis de, « [Compte rendu] Les Appels de
l’
Orient (n° 9-10 des Cahiers du Mois) », Bibliothèque universelle et Re
447
que nous sommes seuls, nous sommes des fous. Oui,
le
contrôle de nous-mêmes ne joue que soutenu par le contrôle que les au
448
le contrôle de nous-mêmes ne joue que soutenu par
le
contrôle que les autres nous imposent », dit un héros de Mauriac. C’e
449
ous-mêmes ne joue que soutenu par le contrôle que
les
autres nous imposent », dit un héros de Mauriac. C’est un « homme seu
450
Mauriac. C’est un « homme seul » qu’a peint « par
le
dedans » M. Jean Prévost, en un saisissant raccourci psychologique. «
451
eut éliminer de soi tout ce qui est déterminé par
l’
extérieur, — ce fou que nous portons tous en nous, — il l’a isolé, inc
452
eur, — ce fou que nous portons tous en nous, — il
l’
a isolé, incarné, nommé : Revert. Puis il l’a poussé impitoyablement d
453
— il l’a isolé, incarné, nommé : Revert. Puis il
l’
a poussé impitoyablement dans sa recherche d’un absolu qui se trouve ê
454
dans sa recherche d’un absolu qui se trouve être
le
néant. Pour finir il « l’écrabouille ». L’expérience est terminée. Ar
455
solu qui se trouve être le néant. Pour finir il «
l’
écrabouille ». L’expérience est terminée. Artificielle comme toute exp
456
e être le néant. Pour finir il « l’écrabouille ».
L’
expérience est terminée. Artificielle comme toute expérience, elle n’e
457
assive d’un théorème de Spinoza. Une ironie dure,
la
densité du style révèlent seules l’écrivain ; et aussi quelques sente
458
ironie dure, la densité du style révèlent seules
l’
écrivain ; et aussi quelques sentences : « C’est de la faiblesse de no
459
rivain ; et aussi quelques sentences : « C’est de
la
faiblesse de nos yeux que frissonnent les étoiles. » f. Rougemont
460
C’est de la faiblesse de nos yeux que frissonnent
les
étoiles. » f. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Jean Prévost, T
461
eptembre 1925)g En 1886, lors de sa fondation,
la
nouvelle maison d’édition Fischer passait pour « la centrale où l’on
462
nouvelle maison d’édition Fischer passait pour «
la
centrale où l’on avait concentré la dynamite internationale qu’Ibsen
463
n d’édition Fischer passait pour « la centrale où
l’
on avait concentré la dynamite internationale qu’Ibsen voulait placer
464
assait pour « la centrale où l’on avait concentré
la
dynamite internationale qu’Ibsen voulait placer sous les arches de la
465
amite internationale qu’Ibsen voulait placer sous
les
arches de la vieille société », pour reprendre la pittoresque définit
466
ionale qu’Ibsen voulait placer sous les arches de
la
vieille société », pour reprendre la pittoresque définition de M. A.
467
es arches de la vieille société », pour reprendre
la
pittoresque définition de M. A. Eloesser dans l’Almanach du 25e anniv
468
la pittoresque définition de M. A. Eloesser dans
l’
Almanach du 25e anniversaire. Les révolutionnaires y faisaient pourtan
469
A. Eloesser dans l’Almanach du 25e anniversaire.
Les
révolutionnaires y faisaient pourtant bon ménage avec les derniers ch
470
lutionnaires y faisaient pourtant bon ménage avec
les
derniers champions du naturalisme puisqu’au début Fischer publia Zola
471
trouve au tableau des auteurs édités depuis lors
les
grands noms de la littérature européenne d’avant-guerre mêlés à ceux
472
uve au tableau des auteurs édités depuis lors les
grands
noms de la littérature européenne d’avant-guerre mêlés à ceux des maî
473
des auteurs édités depuis lors les grands noms de
la
littérature européenne d’avant-guerre mêlés à ceux des maîtres du ren
474
aliste allemand et viennois, Hesse, Hofmannsthal…
Les
extraits de ces auteurs qui composent l’Almanach Fischer donnent une
475
nsthal… Les extraits de ces auteurs qui composent
l’
Almanach Fischer donnent une juste idée de ce que fut la littérature d
476
nach Fischer donnent une juste idée de ce que fut
la
littérature d’avant-garde entre 1900 et 1910. Depuis, la maison paraî
477
érature d’avant-garde entre 1900 et 1910. Depuis,
la
maison paraît s’être un peu embourgeoisée… Disons plutôt que voici ve
478
n peu embourgeoisée… Disons plutôt que voici venu
le
temps de la moisson, — le temps des éditions d’œuvres complètes. g.
479
geoisée… Disons plutôt que voici venu le temps de
la
moisson, — le temps des éditions d’œuvres complètes. g. Rougemont
480
s plutôt que voici venu le temps de la moisson, —
le
temps des éditions d’œuvres complètes. g. Rougemont Denis de, « [C
481
tto Flake, Der Gute Weg (septembre 1925)h Dans
l’
atmosphère trouble où s’agite l’Allemagne nouvelle — et peut-être parc
482
re 1925)h Dans l’atmosphère trouble où s’agite
l’
Allemagne nouvelle — et peut-être parce qu’il sait en sortir parfois —
483
kei a gardé son bon sens et son sang-froid. Et si
l’
on a pu reprocher à ses tableaux de l’Europe qu’il vient de parcourir
484
roid. Et si l’on a pu reprocher à ses tableaux de
l’
Europe qu’il vient de parcourir quelque superficialité, du moins faut-
485
arcourir quelque superficialité, du moins faut-il
le
louer d’avoir conservé une vision générale de notre temps et un évide
486
bénéficie de cette vision. Je ne saurais résumer
les
nombreuses péripéties de son dernier roman sans exposer et discuter t
487
son dernier roman sans exposer et discuter toutes
les
idées qu’elles illustrent. Les personnages discutent certes, mais leu
488
et discuter toutes les idées qu’elles illustrent.
Les
personnages discutent certes, mais leurs actions sont les meilleurs a
489
onnages discutent certes, mais leurs actions sont
les
meilleurs arguments. Et peu à peu surgissent d’une accumulation de pe
490
près-guerre d’une étrange vérité. Aux prises avec
les
problèmes sociaux et le luxe le moins apaisant, tournés vers la Russi
491
vérité. Aux prises avec les problèmes sociaux et
le
luxe le moins apaisant, tournés vers la Russie, vers le passé, vers l
492
Aux prises avec les problèmes sociaux et le luxe
le
moins apaisant, tournés vers la Russie, vers le passé, vers l’Orient,
493
ociaux et le luxe le moins apaisant, tournés vers
la
Russie, vers le passé, vers l’Orient, tentant des amours nouvelles et
494
e le moins apaisant, tournés vers la Russie, vers
le
passé, vers l’Orient, tentant des amours nouvelles et les fuites les
495
sant, tournés vers la Russie, vers le passé, vers
l’
Orient, tentant des amours nouvelles et les fuites les plus folles hor
496
é, vers l’Orient, tentant des amours nouvelles et
les
fuites les plus folles hors de la réalité, ils forment un cortège pit
497
rient, tentant des amours nouvelles et les fuites
les
plus folles hors de la réalité, ils forment un cortège pittoresque et
498
s nouvelles et les fuites les plus folles hors de
la
réalité, ils forment un cortège pittoresque et désolant à celui qui,
499
ge pittoresque et désolant à celui qui, revenu de
l’
étranger dans le désordre de son pays, suivra obstinément le « bon che
500
t désolant à celui qui, revenu de l’étranger dans
le
désordre de son pays, suivra obstinément le « bon chemin » de la sant
501
dans le désordre de son pays, suivra obstinément
le
« bon chemin » de la santé et de la raison. C’est à lui que va la sym
502
son pays, suivra obstinément le « bon chemin » de
la
santé et de la raison. C’est à lui que va la sympathie de l’auteur et
503
a obstinément le « bon chemin » de la santé et de
la
raison. C’est à lui que va la sympathie de l’auteur et la nôtre. h.
504
» de la santé et de la raison. C’est à lui que va
la
sympathie de l’auteur et la nôtre. h. Rougemont Denis de, « [Compt
505
de la raison. C’est à lui que va la sympathie de
l’
auteur et la nôtre. h. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Otto Fl
506
n. C’est à lui que va la sympathie de l’auteur et
la
nôtre. h. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Otto Flake, Der Gut
507
1163. i. Orthographié « Flasce » par erreur dans
l’
original.
508
opéenne », croyez-vous qu’il aille s’abandonner à
l’
émotion communicative de qui découvre un sommet ? Point. Précision, mo
509
vre un sommet ? Point. Précision, modération dans
le
jugement, humour léger, notation suggestive, telles sont les vertus d
510
t, humour léger, notation suggestive, telles sont
les
vertus de sa critique. Ce n’est que dans sa discrétion à louer une gr
511
ique. Ce n’est que dans sa discrétion à louer une
grande
œuvre qu’on trouvera la mesure de son admiration et le gage de sa lég
512
iscrétion à louer une grande œuvre qu’on trouvera
la
mesure de son admiration et le gage de sa légitimité. Nul doute que l
513
vre qu’on trouvera la mesure de son admiration et
le
gage de sa légitimité. Nul doute que les Trois nouvelles exemplaires
514
ration et le gage de sa légitimité. Nul doute que
les
Trois nouvelles exemplaires ne suscitent un intérêt très profond : el
515
de préoccupations des plus modernes, problème de
la
réalité littéraire, problème de la personnalité. Leur Prologue pourra
516
s, problème de la réalité littéraire, problème de
la
personnalité. Leur Prologue pourrait presque aussi bien être celui d’
517
d’une pièce de Pirandello. N’annonce-t-il pas que
les
personnages des trois nouvelles « sont réels, très réels, de la réali
518
des trois nouvelles « sont réels, très réels, de
la
réalité la plus intime, de celle qu’ils se donnent eux-mêmes dans leu
519
nouvelles « sont réels, très réels, de la réalité
la
plus intime, de celle qu’ils se donnent eux-mêmes dans leur pure volo
520
ur pure volonté d’être ou de ne pas être… ». Mais
les
héros de Pirandello, s’ils veulent être, subissent, une fois qu’ils s
521
ls veulent être, subissent, une fois qu’ils sont,
le
grand malentendu de la personnalité. Tandis que chez Unamuno une volo
522
veulent être, subissent, une fois qu’ils sont, le
grand
malentendu de la personnalité. Tandis que chez Unamuno une volonté d’
523
ent, une fois qu’ils sont, le grand malentendu de
la
personnalité. Tandis que chez Unamuno une volonté d’action les possèd
524
ité. Tandis que chez Unamuno une volonté d’action
les
possède, les exalte, les affole. Les plus beaux types créés par Unamu
525
ue chez Unamuno une volonté d’action les possède,
les
exalte, les affole. Les plus beaux types créés par Unamuno sont ces f
526
uno une volonté d’action les possède, les exalte,
les
affole. Les plus beaux types créés par Unamuno sont ces femmes dures
527
nté d’action les possède, les exalte, les affole.
Les
plus beaux types créés par Unamuno sont ces femmes dures et passionné
528
us dépouillé de détail extérieur ou d’enjolivure.
La
lecture de ces trois tragédies, d’une classique sobriété mais d’une b
529
une brutalité et d’une ironie romantiques, laisse
la
même impression de grandeur désolée qu’un Greco. Mais il n’y a pas le
530
e grandeur désolée qu’un Greco. Mais il n’y a pas
les
couleurs, ni l’amère volupté des formes. Une sensation de barre d’aci
531
e qu’un Greco. Mais il n’y a pas les couleurs, ni
l’
amère volupté des formes. Une sensation de barre d’acier sur la nuque.
532
té des formes. Une sensation de barre d’acier sur
la
nuque. j. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Miguel de Unamuno,
533
Ernest Seillière, Alexandre Vinet, historien de
la
pensée française (octobre 1925)k Peut-être n’est-il pas trop tard
534
de ce nouveau chapitre qu’il vient d’ajouter à sa
grande
étude sur les rapports du christianisme et du romantisme. M. Seillièr
535
pitre qu’il vient d’ajouter à sa grande étude sur
les
rapports du christianisme et du romantisme. M. Seillière cherchait da
536
sme et du romantisme. M. Seillière cherchait dans
l’
époque romantique un témoin dont le jugement eut « l’autorité d’un ver
537
cherchait dans l’époque romantique un témoin dont
le
jugement eut « l’autorité d’un verdict essentiellement chrétien sur l
538
poque romantique un témoin dont le jugement eut «
l’
autorité d’un verdict essentiellement chrétien sur le mysticisme natur
539
utorité d’un verdict essentiellement chrétien sur
le
mysticisme naturiste ». Il ne pouvait trouver mieux que Vinet. Et j’i
540
net. Et j’imagine son étonnement à découvrir dans
l’
œuvre du penseur vaudois la substance originale de la plupart des idée
541
ement à découvrir dans l’œuvre du penseur vaudois
la
substance originale de la plupart des idées dont lui-même s’est fait
542
de la plupart des idées dont lui-même s’est fait
le
moderne champion. Pour ce qui concerne le Vinet juge des romantiques,
543
st fait le moderne champion. Pour ce qui concerne
le
Vinet juge des romantiques, il n’a pas eu trop de peine à l’annexer à
544
ge des romantiques, il n’a pas eu trop de peine à
l’
annexer à son propre corps de doctrines critiques. Dirai-je pourtant q
545
, et presque inconsciemment, à gauchir légèrement
la
pensée de Vinet pour lui ajuster sa terminologie particulière ? Mais
546
ie particulière ? Mais par ailleurs Vinet déborde
le
« sellièrisme » de tout son mysticisme protestant. Et cela n’est pas
547
eillière. C’est peut-être pourquoi il insiste sur
le
fait que Vinet se déclarait « un chrétien sans épithète ». Croit-il é
548
n chrétien sans épithète ». Croit-il éluder ainsi
le
protestantisme de Vinet ? Ne voit-il pas que rien n’est plus protesta
549
e ? Mais ces réserves sont de peu d’importance si
l’
on songe au service que M. Seillière nous rend en réintroduisant dans
550
que M. Seillière nous rend en réintroduisant dans
l’
actualité la plus brûlante les richesses intellectuelles et morales du
551
ière nous rend en réintroduisant dans l’actualité
la
plus brûlante les richesses intellectuelles et morales du grand vaudo
552
réintroduisant dans l’actualité la plus brûlante
les
richesses intellectuelles et morales du grand vaudois. Vraiment, tout
553
lante les richesses intellectuelles et morales du
grand
vaudois. Vraiment, tout ce qui semble viable et humain dans la critiq
554
raiment, tout ce qui semble viable et humain dans
la
critique moderne du romantisme, Vinet l’avait trouvé. Mais sa positio
555
ain dans la critique moderne du romantisme, Vinet
l’
avait trouvé. Mais sa position purement chrétienne — un mysticisme de
556
] Ernest Seillière, Alexandre Vinet, historien de
la
pensée française », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Gen
557
st celui-là qui s’avance » avec ce visage d’entre
la
vie et la mort « où se reflète le passage incessant d’oiseaux de la m
558
à qui s’avance » avec ce visage d’entre la vie et
la
mort « où se reflète le passage incessant d’oiseaux de la mer ? » « Q
559
visage d’entre la vie et la mort « où se reflète
le
passage incessant d’oiseaux de la mer ? » « Quel est cet homme dont l
560
« où se reflète le passage incessant d’oiseaux de
la
mer ? » « Quel est cet homme dont l’âme fait des signes solennels ? »
561
d’oiseaux de la mer ? » « Quel est cet homme dont
l’
âme fait des signes solennels ? » Une voix lente aux méandres songeurs
562
ne simplicité qui n’est pas familière. C’est bien
la
poésie d’une époque tourmentée dans sa profondeur, mais qui se penche
563
abîmes. Simplicité de notre temps ! Au-dessus de
la
trépidation immense des machines, un Saint-John-Perse, un Supervielle
564
rse, un Supervielle parlent avec des mots de tous
les
jours aux vivants et aux morts : Mère, je sais très mal comme l’on ch
565
vants et aux morts : Mère, je sais très mal comme
l’
on cherche les morts… « … Cette chose haute à la voix grave qu’on appe
566
morts : Mère, je sais très mal comme l’on cherche
les
morts… « … Cette chose haute à la voix grave qu’on appelle un père da
567
e l’on cherche les morts… « … Cette chose haute à
la
voix grave qu’on appelle un père dans les maisons. » Comme Valéry, ce
568
haute à la voix grave qu’on appelle un père dans
les
maisons. » Comme Valéry, ce poète sait « des complicités étranges pou
569
s’est créé. Jamais banal, il est parfois facile :
la
description du monde qu’il invente nous lasse quand elle ne l’étonne
570
n du monde qu’il invente nous lasse quand elle ne
l’
étonne plus assez lui-même (pourtant l’autel et le surréalisme l’ont e
571
nd elle ne l’étonne plus assez lui-même (pourtant
l’
autel et le surréalisme l’ont enrichie d’images…). Je cite des noms :
572
l’étonne plus assez lui-même (pourtant l’autel et
le
surréalisme l’ont enrichie d’images…). Je cite des noms : y a-t-il in
573
ssez lui-même (pourtant l’autel et le surréalisme
l’
ont enrichie d’images…). Je cite des noms : y a-t-il influence ou seul
574
rtent des cafés littéraires, nos poètes respirent
le
même air du temps. Leur originalité se retrouve dans la manière dont
575
e air du temps. Leur originalité se retrouve dans
la
manière dont ils tentent de fuir l’inquiétude où ils baignent. Celui-
576
retrouve dans la manière dont ils tentent de fuir
l’
inquiétude où ils baignent. Celui-ci vient à peine de quitter l’air du
577
ù ils baignent. Celui-ci vient à peine de quitter
l’
air dur des pampas. « Le voilà qui s’avance, foulant les hautes herbes
578
vient à peine de quitter l’air dur des pampas. «
Le
voilà qui s’avance, foulant les hautes herbes du ciel. » Le gaucho a
579
dur des pampas. « Le voilà qui s’avance, foulant
les
hautes herbes du ciel. » Le gaucho a dompté Pégase et caracole dans l
580
ui s’avance, foulant les hautes herbes du ciel. »
Le
gaucho a dompté Pégase et caracole dans les étoiles. J’avoue que l’un
581
iel. » Le gaucho a dompté Pégase et caracole dans
les
étoiles. J’avoue que l’univers intérieur où il lui arrive de graviter
582
Pégase et caracole dans les étoiles. J’avoue que
l’
univers intérieur où il lui arrive de graviter me trouble mieux que so
583
eux que son lyrisme cosmique. On est plus près de
l’
infini au fond de soi qu’au fond du ciel. l. Rougemont Denis de, «
584
Simone Téry,
L’
Île des bardes (décembre 1925)m L’Irlande contemporaine offre un sp
585
Simone Téry, L’Île des bardes (décembre 1925)m
L’
Irlande contemporaine offre un spectacle bien passionnant : celui de l
586
ne offre un spectacle bien passionnant : celui de
la
renaissance d’une littérature nationale à la fois cause et effet de l
587
littérature nationale à la fois cause et effet de
la
libération politique. Cause, puisque pour mener à chef cette libérati
588
es, ont su payer de leur personne. Effet, puisque
l’
héroïsme d’une révolution en faveur du passé, révolution tout de même,
589
ois noms qui permettent, je crois, de parler d’un
grand
siècle littéraire irlandais ; ce que d’ailleurs Mlle Simone Téry ne f
590
lle Simone Téry ne fait pas. Car elle veut éviter
l’
emballement et conserver dans l’admiration son sens critique de Parisi
591
elle veut éviter l’emballement et conserver dans
l’
admiration son sens critique de Parisienne. C’est une sympathie malici
592
commentaires parfois un peu copieux ; mais elle a
la
vertu de rendre contagieuse la curiosité de l’auteur à l’endroit de c
593
ieux ; mais elle a la vertu de rendre contagieuse
la
curiosité de l’auteur à l’endroit de cette âme irlandaise en laquelle
594
a la vertu de rendre contagieuse la curiosité de
l’
auteur à l’endroit de cette âme irlandaise en laquelle s’allient une f
595
Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Simone Téry,
L’
Île des bardes », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève
596
Hugh Walpole,
La
Cité secrète (décembre 1925)n La Révolution russe va-t-elle usurpe
597
Hugh Walpole, La Cité secrète (décembre 1925)n
La
Révolution russe va-t-elle usurper dans le roman d’aventures le rôle
598
5)n La Révolution russe va-t-elle usurper dans
le
roman d’aventures le rôle de la mer Océane avec ses écumeurs ? Déjà u
599
russe va-t-elle usurper dans le roman d’aventures
le
rôle de la mer Océane avec ses écumeurs ? Déjà un Mac Orlan, un Kesse
600
elle usurper dans le roman d’aventures le rôle de
la
mer Océane avec ses écumeurs ? Déjà un Mac Orlan, un Kessel ont donné
601
t donné de beaux exemples du parti que peut tirer
le
nouveau romantisme de ce chaos. Salmon a même tenté d’en écrire l’épo
602
isme de ce chaos. Salmon a même tenté d’en écrire
l’
épopée dans Prikaz, cette traduction française de l’énorme cri de déli
603
épopée dans Prikaz, cette traduction française de
l’
énorme cri de délivrance du peuple fou. Belles étincelles échappées d’
604
u. Belles étincelles échappées d’un brasier. Pour
les
causes de l’incendie, voir Dostoïevski. M. Walpole, lui, commence son
605
celles échappées d’un brasier. Pour les causes de
l’
incendie, voir Dostoïevski. M. Walpole, lui, commence son roman quelqu
606
mmence son roman quelques mois avant que n’éclate
le
sinistre, et s’arrête au moment où l’on est sûr que ça brûle bien. Qu
607
ue n’éclate le sinistre, et s’arrête au moment où
l’
on est sûr que ça brûle bien. Quel sujet plus riche pouvait-on rêver p
608
lus riche pouvait-on rêver pour un psychologue de
la
puissance de Walpole, que l’âme russe — cette âme russe qui pour le P
609
ur un psychologue de la puissance de Walpole, que
l’
âme russe — cette âme russe qui pour le Parisien restera toujours « in
610
lpole, que l’âme russe — cette âme russe qui pour
le
Parisien restera toujours « indéfinissable ». M. Walpole, dont nous c
611
mençons aujourd’hui un roman bien différent, a vu
la
Révolution sans romantisme, dans le détail de la vie d’une ville. Il
612
fférent, a vu la Révolution sans romantisme, dans
le
détail de la vie d’une ville. Il sait qu’un grand mouvement est la ré
613
la Révolution sans romantisme, dans le détail de
la
vie d’une ville. Il sait qu’un grand mouvement est la résultante de m
614
ns le détail de la vie d’une ville. Il sait qu’un
grand
mouvement est la résultante de millions de petits. Voici naître la ré
615
ie d’une ville. Il sait qu’un grand mouvement est
la
résultante de millions de petits. Voici naître la révolution dans un
616
la résultante de millions de petits. Voici naître
la
révolution dans un cœur, puis dans une famille. Et une fois le grand
617
dans un cœur, puis dans une famille. Et une fois
le
grand bouleversement accompli dans la « Cité secrète » de la vie priv
618
ns un cœur, puis dans une famille. Et une fois le
grand
bouleversement accompli dans la « Cité secrète » de la vie privée, qu
619
Et une fois le grand bouleversement accompli dans
la
« Cité secrète » de la vie privée, quelques regards sur la foule suff
620
uleversement accompli dans la « Cité secrète » de
la
vie privée, quelques regards sur la foule suffisent pour en préciser
621
secrète » de la vie privée, quelques regards sur
la
foule suffisent pour en préciser les conséquences. C’est ainsi qu’int
622
s regards sur la foule suffisent pour en préciser
les
conséquences. C’est ainsi qu’interviennent les trois Anglais mêlés au
623
er les conséquences. C’est ainsi qu’interviennent
les
trois Anglais mêlés au drame. M. Walpole leur a dévolu le soin d’entr
624
Anglais mêlés au drame. M. Walpole leur a dévolu
le
soin d’entrer tantôt dans un foyer, tantôt dans une église, pour cons
625
foyer, tantôt dans une église, pour constater que
la
foule ne réagit pas autrement que les individus. L’auteur, qui est l’
626
onstater que la foule ne réagit pas autrement que
les
individus. L’auteur, qui est l’un de ces Anglais, tombe malade avec à
627
foule ne réagit pas autrement que les individus.
L’
auteur, qui est l’un de ces Anglais, tombe malade avec à-propos et per
628
vec à-propos et perd connaissance chaque fois que
le
récit doit sauter quelques semaines. Qu’on veuille bien ne voir autre
629
« procédés », d’ailleurs assez peu choquants, que
le
revers de grandes qualités de réalisation d’idées en faits ou en situ
630
d’ailleurs assez peu choquants, que le revers de
grandes
qualités de réalisation d’idées en faits ou en situations dramatiques
631
ts ou en situations dramatiques. Je donnerai tous
les
essais de M. de Voguë sur l’âme slave pour deux ou trois scènes de La
632
s. Je donnerai tous les essais de M. de Voguë sur
l’
âme slave pour deux ou trois scènes de La Cité secrète. Pour celle-ci
633
oguë sur l’âme slave pour deux ou trois scènes de
La
Cité secrète. Pour celle-ci par exemple (caché dans un réduit, Markov
634
ci par exemple (caché dans un réduit, Markovitch,
l’
idéaliste, surprend sa femme, la vertueuse Véra avec un des Anglais) :
635
duit, Markovitch, l’idéaliste, surprend sa femme,
la
vertueuse Véra avec un des Anglais) : Ils s’embrassaient comme des g
636
ébucher et de faire du bruit. Il songea : — C’est
la
fin pour moi. Puis : — Quelle imprudence ! Avec la lumière et peut-êt
637
a fin pour moi. Puis : — Quelle imprudence ! Avec
la
lumière et peut-être du monde dans l’appartement. Il avait si froid q
638
ence ! Avec la lumière et peut-être du monde dans
l’
appartement. Il avait si froid que ses dents claquaient. Il quitta sa
639
aquaient. Il quitta sa fenêtre, se traîna jusqu’à
l’
angle le plus éloigné du réduit, et se blottit là, sur le sol, les yeu
640
. Il quitta sa fenêtre, se traîna jusqu’à l’angle
le
plus éloigné du réduit, et se blottit là, sur le sol, les yeux grands
641
le plus éloigné du réduit, et se blottit là, sur
le
sol, les yeux grands ouverts dans le vide, sans rien voir. Ainsi le
642
éloigné du réduit, et se blottit là, sur le sol,
les
yeux grands ouverts dans le vide, sans rien voir. Ainsi le moujik de
643
du réduit, et se blottit là, sur le sol, les yeux
grands
ouverts dans le vide, sans rien voir. Ainsi le moujik devant le bolc
644
ttit là, sur le sol, les yeux grands ouverts dans
le
vide, sans rien voir. Ainsi le moujik devant le bolchévique violant
645
ands ouverts dans le vide, sans rien voir. Ainsi
le
moujik devant le bolchévique violant sa patrie. Une effroyable accept
646
le vide, sans rien voir. Ainsi le moujik devant
le
bolchévique violant sa patrie. Une effroyable acceptation, mais elle
647
ment en révolte. Aucun cadre logique ne détermine
l’
avenir le plus proche. Il n’y a pas même des forces endormies dans l’â
648
évolte. Aucun cadre logique ne détermine l’avenir
le
plus proche. Il n’y a pas même des forces endormies dans l’âme russe
649
oche. Il n’y a pas même des forces endormies dans
l’
âme russe : mais des possibilités, à chaque instant, d’explosion. Le g
650
des possibilités, à chaque instant, d’explosion.
Le
géant russe est un enfant : va-t-il rire, va-t-il pleurer ? m’embrass
651
me tuer ? Il sent autour de lui quelque chose qui
le
gêne. C’est l’empire. Il le renverse, pour voir. Pendant qu’il est en
652
nt autour de lui quelque chose qui le gêne. C’est
l’
empire. Il le renverse, pour voir. Pendant qu’il est encore ébahi du f
653
lui quelque chose qui le gêne. C’est l’empire. Il
le
renverse, pour voir. Pendant qu’il est encore ébahi du fracas, le jui
654
r voir. Pendant qu’il est encore ébahi du fracas,
le
juif survient avec une méthode simplifiée pour l’exploitation des rui
655
le juif survient avec une méthode simplifiée pour
l’
exploitation des ruines. On sait le reste. Tout cela, Walpole ne le di
656
implifiée pour l’exploitation des ruines. On sait
le
reste. Tout cela, Walpole ne le dit pas. Mais ses personnages le sugg
657
s ruines. On sait le reste. Tout cela, Walpole ne
le
dit pas. Mais ses personnages le suggèrent de toute la force du troub
658
cela, Walpole ne le dit pas. Mais ses personnages
le
suggèrent de toute la force du trouble qu’ils créent en nous : Markov
659
t pas. Mais ses personnages le suggèrent de toute
la
force du trouble qu’ils créent en nous : Markovitch par exemple, ou S
660
ougemont Denis de, « [Compte rendu] Hugh Walpole,
La
Cité secrète », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève,
661
Conférence de René Guisan « Sur
le
Saint » (2 février 1926)c M. René Guisan, professeur de théologie
662
rofesseur de théologie à Lausanne et directeur de
la
Revue de théologie et de philosophie, inaugura lundi soir à l’aula, d
663
héologie et de philosophie, inaugura lundi soir à
l’
aula, devant un très nombreux public, la série des conférences que nou
664
di soir à l’aula, devant un très nombreux public,
la
série des conférences que nous promet le groupe neuchâtelois des « Am
665
public, la série des conférences que nous promet
le
groupe neuchâtelois des « Amis de la pensée protestante ». M. Guisan
666
nous promet le groupe neuchâtelois des « Amis de
la
pensée protestante ». M. Guisan avait choisi un sujet qui permet de f
667
et qui permet de façon particulièrement frappante
la
comparaison des points de vue catholique et protestant : la notion de
668
ison des points de vue catholique et protestant :
la
notion de « Saint » et son évolution au cours des siècles. Primitivem
669
on évolution au cours des siècles. Primitivement,
le
Saint est un homme que Dieu a mis à part par grâce pour qu’il serve.
670
r grâce pour qu’il serve. Mais très vite on étend
l’
appellation de saint à ceux qui par leur élévation morale ou leurs sou
671
ation morale ou leurs souffrances semblent s’être
le
plus rapprochés du Christ ; et dans l’Église persécutée, le martyre d
672
ent s’être le plus rapprochés du Christ ; et dans
l’
Église persécutée, le martyre devient le signe par excellence de la sa
673
pprochés du Christ ; et dans l’Église persécutée,
le
martyre devient le signe par excellence de la sainteté. Le peuple, en
674
; et dans l’Église persécutée, le martyre devient
le
signe par excellence de la sainteté. Le peuple, encore païen, voit da
675
ée, le martyre devient le signe par excellence de
la
sainteté. Le peuple, encore païen, voit dans la vénération des pèleri
676
e devient le signe par excellence de la sainteté.
Le
peuple, encore païen, voit dans la vénération des pèlerins pour les t
677
e la sainteté. Le peuple, encore païen, voit dans
la
vénération des pèlerins pour les tombes de leurs saints une forme d’a
678
païen, voit dans la vénération des pèlerins pour
les
tombes de leurs saints une forme d’adoration de dieux protecteurs. Ce
679
tecteurs. Cette croyance se répand, favorisée par
la
souplesse dont fait preuve l’Église d’alors quand il s’agit d’adapter
680
pand, favorisée par la souplesse dont fait preuve
l’
Église d’alors quand il s’agit d’adapter des traditions antiques au do
681
ions antiques au dogme en formation. Au Moyen Âge
l’
évolution se continue dans le même sens. On spécialise les « compétenc
682
mation. Au Moyen Âge l’évolution se continue dans
le
même sens. On spécialise les « compétences » des saints, ou de leurs
683
tion se continue dans le même sens. On spécialise
les
« compétences » des saints, ou de leurs reliques qui se multiplient p
684
qui se multiplient prodigieusement. Alors éclate
la
protestation de la Réforme. Honorons les saints pour l’exemple de leu
685
prodigieusement. Alors éclate la protestation de
la
Réforme. Honorons les saints pour l’exemple de leur vie : mais Christ
686
rs éclate la protestation de la Réforme. Honorons
les
saints pour l’exemple de leur vie : mais Christ est le seul médiateur
687
testation de la Réforme. Honorons les saints pour
l’
exemple de leur vie : mais Christ est le seul médiateur à qui doit s’a
688
ints pour l’exemple de leur vie : mais Christ est
le
seul médiateur à qui doit s’adresser le culte, en son cœur, du croyan
689
hrist est le seul médiateur à qui doit s’adresser
le
culte, en son cœur, du croyant. Le centre de gravité religieux est re
690
oit s’adresser le culte, en son cœur, du croyant.
Le
centre de gravité religieux est replacé en Christ. — Comment l’Église
691
ravité religieux est replacé en Christ. — Comment
l’
Église catholique réagit-elle ? En codifiant l’état de choses antérieu
692
nt l’Église catholique réagit-elle ? En codifiant
l’
état de choses antérieur. Donc l’Église continue à faire des saints, t
693
e ? En codifiant l’état de choses antérieur. Donc
l’
Église continue à faire des saints, tandis que ce terme n’a plus qu’un
694
tif pour nous protestants. Est-ce là nous juger ?
Les
catholiques nous reprochent d’avoir méconnu l’élément de grandeur mor
695
? Les catholiques nous reprochent d’avoir méconnu
l’
élément de grandeur morale que les saints maintiennent dans l’Église.
696
d’avoir méconnu l’élément de grandeur morale que
les
saints maintiennent dans l’Église. M. Guisan va très loin dans ses co
697
grandeur morale que les saints maintiennent dans
l’
Église. M. Guisan va très loin dans ses concessions à de telles critiq
698
avec d’autant plus de force que « en situant tout
le
devoir chrétien dans l’accomplissement scrupuleux, joyeux et fidèle d
699
rce que « en situant tout le devoir chrétien dans
l’
accomplissement scrupuleux, joyeux et fidèle de la vocation, le protes
700
l’accomplissement scrupuleux, joyeux et fidèle de
la
vocation, le protestantisme affirme qu’il existe divers ordres de sai
701
ment scrupuleux, joyeux et fidèle de la vocation,
le
protestantisme affirme qu’il existe divers ordres de sainteté ». Cett
702
de saints protestants, il existe des saints dans
le
protestantisme. Mais il n’est pas de fin aux œuvres de Dieu. La saint
703
sme. Mais il n’est pas de fin aux œuvres de Dieu.
La
sainteté parfaite ne commence qu’aux limites les plus hautes de la ve
704
. La sainteté parfaite ne commence qu’aux limites
les
plus hautes de la vertu. Dans ce sens, il ne peut exister de saint vé
705
ite ne commence qu’aux limites les plus hautes de
la
vertu. Dans ce sens, il ne peut exister de saint véritable. Il n’y a
706
pas de saints, mais il faut être parfait. Tel est
l’
enseignement de Jésus, telle est la pensée qu’a voulu restaurer le pro
707
rfait. Tel est l’enseignement de Jésus, telle est
la
pensée qu’a voulu restaurer le protestantisme. La place nous manque p
708
e Jésus, telle est la pensée qu’a voulu restaurer
le
protestantisme. La place nous manque pour louer comme il conviendrait
709
la pensée qu’a voulu restaurer le protestantisme.
La
place nous manque pour louer comme il conviendrait la clarté d’un exp
710
lace nous manque pour louer comme il conviendrait
la
clarté d’un exposé solidement documenté, et le scrupule d’historien e
711
it la clarté d’un exposé solidement documenté, et
le
scrupule d’historien et de chrétien qui permet à M. Guisan de montrer
712
et de chrétien qui permet à M. Guisan de montrer
le
point de vue adverse avec autant de compréhension et de sympathie que
713
rillant appareil dialectique ne sait produire que
l’
illusion. C’est la revanche du fameux scrupule protestant, qui ne peut
714
ialectique ne sait produire que l’illusion. C’est
la
revanche du fameux scrupule protestant, qui ne peut être un danger lo
715
ut être un danger lorsqu’il n’est, comme ici, que
la
loyauté d’un esprit animé par une foi agissante. c. Rougemont Deni
716
Adieu, beau désordre… (mars 1926)o
L’
époque s’en va très vite vers on ne sait quoi. On a mis le bonheur dev
717
s’en va très vite vers on ne sait quoi. On a mis
le
bonheur devant soi, dans un progrès mal défini, et l’on court après s
718
onheur devant soi, dans un progrès mal défini, et
l’
on court après sans fin. Même ceux qui ont perdu la croyance en un bon
719
’on court après sans fin. Même ceux qui ont perdu
la
croyance en un bonheur possible ou désirable subissent cette rage dés
720
essives lassitudes ou faim de violences — on sent
l’
approche de quelque chose, catastrophe ou révélation, brusque échappée
721
hoisir encore entre un ressaisissement profond et
la
ruine. Mais certes, il est temps qu’une lueur de conscience inquiète
722
iété affolée et ridiculement opportuniste où mène
la
pente de notre civilisation. Meneurs et chefs : des économistes, des
723
s, des financiers, des industriels. Il y a encore
les
hommes politiques, mais on a si souvent l’impression qu’ils battent l
724
ncore les hommes politiques, mais on a si souvent
l’
impression qu’ils battent la mesure devant un orchestre qui, sans eux,
725
mais on a si souvent l’impression qu’ils battent
la
mesure devant un orchestre qui, sans eux, jouerait aussi bien, aussi
726
erait aussi bien, aussi mal. Quant aux meneurs de
l’
opinion publique, il est trop tard pour les éduquer, il faudrait balay
727
eurs de l’opinion publique, il est trop tard pour
les
éduquer, il faudrait balayer. Je parle en général, sachant bien qu’un
728
Romier, un Bainville, quelques autres, sont parmi
les
plus conscients de ce temps ; mais si l’on songe aux bataillons de pâ
729
t parmi les plus conscients de ce temps ; mais si
l’
on songe aux bataillons de pâles opportunistes sans culture qui se cha
730
portunistes sans culture qui se chargent de gaver
les
masses du pain quotidien de la bêtise de tous les partis, on comprend
731
chargent de gaver les masses du pain quotidien de
la
bêtise de tous les partis, on comprendra ce que je veux dire. Il faud
732
les masses du pain quotidien de la bêtise de tous
les
partis, on comprendra ce que je veux dire. Il faudrait balayer, — et
733
veux dire. Il faudrait balayer, — et mettre qui à
la
place ? Nos penseurs, nos écrivains ont perdu le sens social. Cela de
734
la place ? Nos penseurs, nos écrivains ont perdu
le
sens social. Cela devient frappant dans les générations nouvelles. To
735
perdu le sens social. Cela devient frappant dans
les
générations nouvelles. Toute la jeune littérature décrit un type d’ho
736
nt frappant dans les générations nouvelles. Toute
la
jeune littérature décrit un type d’homme profondément antisocial, glo
737
rale résolument anarchiste. Ceux qui s’essaient à
l’
action, c’est encore pour cultiver leur moi. Ils y cherchent un fortif
738
Il leur manque une certitude foncière, une foi en
la
valeur de l’action. C’est pourquoi ils ne peuvent prétendre à l’actio
739
e une certitude foncière, une foi en la valeur de
l’
action. C’est pourquoi ils ne peuvent prétendre à l’action sociale que
740
action. C’est pourquoi ils ne peuvent prétendre à
l’
action sociale que l’époque réclame 1. C’est aussi pourquoi l’on ne sa
741
i ils ne peuvent prétendre à l’action sociale que
l’
époque réclame 1. C’est aussi pourquoi l’on ne saurait accorder trop d
742
iale que l’époque réclame 1. C’est aussi pourquoi
l’
on ne saurait accorder trop d’importance à leurs tentatives morales, s
743
tives morales, si singulières soient-elles — dont
le
grand public reste le témoin souvent sceptique ou railleur. Au cœur d
744
es morales, si singulières soient-elles — dont le
grand
public reste le témoin souvent sceptique ou railleur. Au cœur de la c
745
ulières soient-elles — dont le grand public reste
le
témoin souvent sceptique ou railleur. Au cœur de la crise de notre ci
746
témoin souvent sceptique ou railleur. Au cœur de
la
crise de notre civilisation, il y a un problème de morale à résoudre,
747
nce individuelle à recréer. Nous y employer, pour
l’
heure, c’est la seule façon efficace de servir. ⁂ On se complaît à rép
748
e à recréer. Nous y employer, pour l’heure, c’est
la
seule façon efficace de servir. ⁂ On se complaît à répéter que nous v
749
. ⁂ On se complaît à répéter que nous vivons dans
le
chaos des idées et des doctrines, et qu’il n’existe pas d’esprit du s
750
le, hors un certain « confusionnisme ». Mais sous
les
épaves de tous les vieux bateaux, il y a une seule mer. Nos agitation
751
« confusionnisme ». Mais sous les épaves de tous
les
vieux bateaux, il y a une seule mer. Nos agitations contradictoires s
752
comme des vagues soulevées par une même tempête.
L’
unité de notre temps est en profondeur : c’est une unité d’inquiétude.
753
it des édifices très différents de style, et dont
les
façades s’opposent avec hostilité. Dans l’intérieur des deux maisons
754
dont les façades s’opposent avec hostilité. Dans
l’
intérieur des deux maisons pourtant se débattent les mêmes brouilles d
755
’intérieur des deux maisons pourtant se débattent
les
mêmes brouilles de famille entre Art et Morale, Pensée et Action… Ces
756
, Pensée et Action… Ces deux moralistes adonnés à
la
culture et à la libération du moi paraissent bien les ancêtres des no
757
on… Ces deux moralistes adonnés à la culture et à
la
libération du moi paraissent bien les ancêtres des nouvelles générati
758
culture et à la libération du moi paraissent bien
les
ancêtres des nouvelles générations de héros de roman, lesquels sont t
759
rtu. Ce qui n’a rien d’étonnant : ils ne sont que
les
projections du moi de leurs auteurs. Or l’égoïsme est vertu cardinale
760
t que les projections du moi de leurs auteurs. Or
l’
égoïsme est vertu cardinale pour le créateur. Mais quel est ce besoin
761
rs auteurs. Or l’égoïsme est vertu cardinale pour
le
créateur. Mais quel est ce besoin si général de s’incarner, dans le h
762
quel est ce besoin si général de s’incarner, dans
le
héros de son roman, de se voir vivre, dans son œuvre ? C’est ici la c
763
man, de se voir vivre, dans son œuvre ? C’est ici
la
conception même de la littérature, telle qu’elle apparaît chez les ém
764
dans son œuvre ? C’est ici la conception même de
la
littérature, telle qu’elle apparaît chez les émules de Barrès comme c
765
me de la littérature, telle qu’elle apparaît chez
les
émules de Barrès comme chez ceux de Gide, qu’il faut préciser. L’éthi
766
rès comme chez ceux de Gide, qu’il faut préciser.
L’
éthique et l’esthétique convergent dans la littérature d’aujourd’hui,
767
z ceux de Gide, qu’il faut préciser. L’éthique et
l’
esthétique convergent dans la littérature d’aujourd’hui, et plusieurs
768
éciser. L’éthique et l’esthétique convergent dans
la
littérature d’aujourd’hui, et plusieurs déjà reconnaissent ne pas pou
769
i, et plusieurs déjà reconnaissent ne pas pouvoir
les
séparer. On n’écrit plus pour s’amuser : ni pour amuser un public. Un
770
lic. Un livre est une action, une expérience. Et,
le
plus souvent, sur soi-même. On écrit pour cultiver son moi, pour l’ép
771
ur soi-même. On écrit pour cultiver son moi, pour
l’
éprouver et le prémunir, pour y découvrir des possibilités neuves, — p
772
n écrit pour cultiver son moi, pour l’éprouver et
le
prémunir, pour y découvrir des possibilités neuves, — pour le libérer
773
pour y découvrir des possibilités neuves, — pour
le
libérer. Il n’est pas question de rechercher ici les origines histori
774
libérer. Il n’est pas question de rechercher ici
les
origines historiques d’une conception qui, de plus en plus, se révèle
775
’une conception qui, de plus en plus, se révèle à
la
base de tous les problèmes modernes en littérature. Jacques Rivière s
776
qui, de plus en plus, se révèle à la base de tous
les
problèmes modernes en littérature. Jacques Rivière s’y appliqua dans
777
erniers articles2. Il rendait responsable de tout
le
« mal », le romantisme — et c’est plus que probable. Mais il en tirai
778
cles2. Il rendait responsable de tout le « mal »,
le
romantisme — et c’est plus que probable. Mais il en tirait une raison
779
robable. Mais il en tirait une raison nouvelle de
le
condamner, et nous ne pouvons le suivre jusque-là : il est vain de di
780
ison nouvelle de le condamner, et nous ne pouvons
le
suivre jusque-là : il est vain de dire qu’une époque s’est trompée, p
781
ne époque s’est trompée, puisqu’elle seule permet
la
suivante qui peut-être retrouvera une nouvelle face de la vérité. Bor
782
nte qui peut-être retrouvera une nouvelle face de
la
vérité. Bornons-nous à noter le phénomène, puis à en suivre quelques
783
nouvelle face de la vérité. Bornons-nous à noter
le
phénomène, puis à en suivre quelques conséquences. Connaissance inté
784
ance intégrale et culture de soi, telle peut être
l’
épigraphe de toute la littérature moderne. Il n’a pas fallu longtemps
785
ture de soi, telle peut être l’épigraphe de toute
la
littérature moderne. Il n’a pas fallu longtemps aux Français pour pou
786
fallu longtemps aux Français pour pousser à bout
l’
expérience3. Ingénieux équilibres entre la raison et les sens, entre l
787
à bout l’expérience3. Ingénieux équilibres entre
la
raison et les sens, entre le moi et le monde : l’ennui est venu avant
788
érience3. Ingénieux équilibres entre la raison et
les
sens, entre le moi et le monde : l’ennui est venu avant l’épuisement
789
eux équilibres entre la raison et les sens, entre
le
moi et le monde : l’ennui est venu avant l’épuisement des combinaison
790
bres entre la raison et les sens, entre le moi et
le
monde : l’ennui est venu avant l’épuisement des combinaisons possible
791
la raison et les sens, entre le moi et le monde :
l’
ennui est venu avant l’épuisement des combinaisons possibles. Exaltati
792
entre le moi et le monde : l’ennui est venu avant
l’
épuisement des combinaisons possibles. Exaltation méthodique de nos fa
793
cultiver certaines douleurs, plaisirs rares ; et
les
dissonances les plus aiguës prennent la place d’honneur dans des esth
794
nes douleurs, plaisirs rares ; et les dissonances
les
plus aiguës prennent la place d’honneur dans des esthétiques construi
795
res ; et les dissonances les plus aiguës prennent
la
place d’honneur dans des esthétiques construites en hâte à l’usage de
796
onneur dans des esthétiques construites en hâte à
l’
usage de sensibilités surmenées. Dégoût, parce que tout a été essayé.
797
se, contre soi, contre une difficulté.) Dégoût de
la
vie, dégoût du bonheur, dégoût de soi, — on l’étend vite à la société
798
de la vie, dégoût du bonheur, dégoût de soi, — on
l’
étend vite à la société entière. Dégoût d’une civilisation qui aboutit
799
ût du bonheur, dégoût de soi, — on l’étend vite à
la
société entière. Dégoût d’une civilisation qui aboutit logiquement à
800
ogiquement à cet épuisant et forcené gaspillage :
la
guerre. Certains s’en tiennent à leur dégoût et l’exploitent. Ainsi s
801
a guerre. Certains s’en tiennent à leur dégoût et
l’
exploitent. Ainsi se légitime le surréalisme, qui vomit le monde entie
802
à leur dégoût et l’exploitent. Ainsi se légitime
le
surréalisme, qui vomit le monde entier et la raison avec. « Révolutio
803
tent. Ainsi se légitime le surréalisme, qui vomit
le
monde entier et la raison avec. « Révolution d’abord. Révolution touj
804
time le surréalisme, qui vomit le monde entier et
la
raison avec. « Révolution d’abord. Révolution toujours ». « Pour nous
805
tion d’abord. Révolution toujours ». « Pour nous,
le
salut n’est nulle part… » « Je comprends la révolte des autres et que
806
nous, le salut n’est nulle part… » « Je comprends
la
révolte des autres et quelles prières cela fait à Dieu », disait Drie
807
n dégoût, un Montherlant s’abandonne au salut par
la
violence. Une sensualité moins énervée lui permet de brutaliser quelq
808
oins énervée lui permet de brutaliser quelque peu
les
« grands problèmes », et le voilà reparti dans un égoïsme triomphant,
809
nervée lui permet de brutaliser quelque peu les «
grands
problèmes », et le voilà reparti dans un égoïsme triomphant, pur du d
810
utaliser quelque peu les « grands problèmes », et
le
voilà reparti dans un égoïsme triomphant, pur du désir d’action qui e
811
’action qui empêtrait Barrès dans des dilemmes où
l’
art trouvait mal sa nourriture. Drieu la Rochelle tente la même fuite.
812
ouvait mal sa nourriture. Drieu la Rochelle tente
la
même fuite. Mais trop lucide, hésite, trébuche, oscille entre la viol
813
Mais trop lucide, hésite, trébuche, oscille entre
la
violence et le désespoir (c’est l’amour), et, déchiré de contradictio
814
e, hésite, trébuche, oscille entre la violence et
le
désespoir (c’est l’amour), et, déchiré de contradictions, tire du dés
815
oscille entre la violence et le désespoir (c’est
l’
amour), et, déchiré de contradictions, tire du désordre de ses certitu
816
tire du désordre de ses certitudes fragmentaires
la
matière de quelques pamphlets par quoi il se raccroche au monde. Mais
817
au monde. Mais il a touché certains bas-fonds de
l’
âme où s’éveille un désenchantement qui l’amène au besoin d’une mystiq
818
onds de l’âme où s’éveille un désenchantement qui
l’
amène au besoin d’une mystique. Et pour finir, l’un des derniers venus
819
nus, Marcel Arland, — plus jeune, il n’a pas fait
la
guerre — c’est le même désenchantement précoce, sans la brusquerie de
820
, — plus jeune, il n’a pas fait la guerre — c’est
le
même désenchantement précoce, sans la brusquerie de ses aînés. Encore
821
rre — c’est le même désenchantement précoce, sans
la
brusquerie de ses aînés. Encore un qui s’est complu dans son dégoût ;
822
voir comme un appel du Dieu perdu. Il avoue enfin
la
cause secrète des inquiétudes modernes : la perte d’une foi. Il a bes
823
enfin la cause secrète des inquiétudes modernes :
la
perte d’une foi. Il a besoin de Dieu, mais il attend en vain sa Révél
824
on : « C’est peut-être que je suis médiocre entre
les
hommes ». C’est plutôt qu’il est trop attaché encore à se regarder ch
825
on dessein. ⁂ Décidément nous sommes malades dans
les
profondeurs. Et le mal est si cruellement isolé, commenté par ceux qu
826
ment nous sommes malades dans les profondeurs. Et
le
mal est si cruellement isolé, commenté par ceux qui le portent en eux
827
l est si cruellement isolé, commenté par ceux qui
le
portent en eux qu’il en paraît plus incurable. Ces jeunes gens n’en f
828
indre leur déséquilibre. Il serait temps de faire
la
critique des méthodes et des façons de vivre autant que de penser qui
829
s et des façons de vivre autant que de penser qui
les
ont amenés aux positions qu’on vient d’esquisser. Mais on trouve tout
830
qu’on vient d’esquisser. Mais on trouve tout dans
les
livres des jeunes, dites-vous, le pire et le meilleur, toutes les vie
831
ouve tout dans les livres des jeunes, dites-vous,
le
pire et le meilleur, toutes les vieilleries morales et immorales, tou
832
ans les livres des jeunes, dites-vous, le pire et
le
meilleur, toutes les vieilleries morales et immorales, tous les parad
833
eunes, dites-vous, le pire et le meilleur, toutes
les
vieilleries morales et immorales, tous les paradoxes, le chaos, etc.
834
toutes les vieilleries morales et immorales, tous
les
paradoxes, le chaos, etc. — Certes, aucune époque ne fut à la fois pl
835
lleries morales et immorales, tous les paradoxes,
le
chaos, etc. — Certes, aucune époque ne fut à la fois plus morale et p
836
u’aucune ne s’est autant attachée à chercher dans
le
seul moi les fondements d’une éthique. Presque tous sont hantés par l
837
s’est autant attachée à chercher dans le seul moi
les
fondements d’une éthique. Presque tous sont hantés par la peur d’une
838
ments d’une éthique. Presque tous sont hantés par
la
peur d’une morale qui « déforme », qui mutile une tendance naturelle,
839
e naturelle, qui élague, qui opère un choix parmi
les
éléments mêlés de la personnalité. Toute tendance qu’ils découvrent e
840
e, qui opère un choix parmi les éléments mêlés de
la
personnalité. Toute tendance qu’ils découvrent en eux est non seuleme
841
oi ordre et désordre, raison et folie, etc. Si je
les
cultive simultanément il est clair que les tendances négatives l’empo
842
Si je les cultive simultanément il est clair que
les
tendances négatives l’emportent, il est plus facile et plus enivrant
843
tanément il est clair que les tendances négatives
l’
emportent, il est plus facile et plus enivrant de se laisser glisser q
844
vrant de se laisser glisser que de construire. Et
l’
on y prend vite goût. Cela tourne alors en passion de détruire, en ha
845
t de quoi se glorifient ses tenants, ils y voient
la
suprême liberté. Le désir se précisait en moi de commettre enfin l’ac
846
ent ses tenants, ils y voient la suprême liberté.
Le
désir se précisait en moi de commettre enfin l’acte vraiment indéfend
847
. Le désir se précisait en moi de commettre enfin
l’
acte vraiment indéfendable de tout point de vue… J’avais goûté à l’alc
848
ndéfendable de tout point de vue… J’avais goûté à
l’
alcool singulièrement perfide de perdre ce que nous chérissons… Nous a
849
ce que nous chérissons… Nous apprîmes à mépriser
les
longues vies heureuses que nous avions jusqu’alors enviées, et une nu
850
ions jusqu’alors enviées, et une nuit, nous fîmes
le
procès de toutes les jouissances humaines. L’espèce de sincérité terr
851
iées, et une nuit, nous fîmes le procès de toutes
les
jouissances humaines. L’espèce de sincérité terroriste dans laquelle
852
mes le procès de toutes les jouissances humaines.
L’
espèce de sincérité terroriste dans laquelle nous nous obstinions nous
853
nous niions toute vérité, nous étions dominés par
le
sens d’une réalité morale absolue que certains d’entre nous eussent a
854
illeurs admirable4, de Louis Aragon, pour marquer
l’
aboutissement d’une évolution qui a son origine dans l’œuvre de Gide.
855
utissement d’une évolution qui a son origine dans
l’
œuvre de Gide. Entre les Nourritures terrestres, les Caves du Vatican
856
ion qui a son origine dans l’œuvre de Gide. Entre
les
Nourritures terrestres, les Caves du Vatican et Dada, il y a place po
857
’œuvre de Gide. Entre les Nourritures terrestres,
les
Caves du Vatican et Dada, il y a place pour tous les chaînons d’inqui
858
Caves du Vatican et Dada, il y a place pour tous
les
chaînons d’inquiétude, de malaises, de révoltes plus ou moins complèt
859
plus ou moins complètes au gré des tempéraments.
Le
geste de Lafcadio généralisé : c’est le surréalisme. De l’acte gratui
860
éraments. Le geste de Lafcadio généralisé : c’est
le
surréalisme. De l’acte gratuit commis par un héros de roman, à la vie
861
de Lafcadio généralisé : c’est le surréalisme. De
l’
acte gratuit commis par un héros de roman, à la vie gratuite que préte
862
De l’acte gratuit commis par un héros de roman, à
la
vie gratuite que prétendent mener les surréalistes, il n’a fallu que
863
de roman, à la vie gratuite que prétendent mener
les
surréalistes, il n’a fallu que le temps pour une folie de s’emballer.
864
étendent mener les surréalistes, il n’a fallu que
le
temps pour une folie de s’emballer. La plupart des romans de jeunes q
865
qui se situent entre Gide et Aragon nous montrent
le
même personnage : un être sans foi, à qui une sorte de « sincérité »
866
nné parce que ce serait fausser quelque chose ; à
la
merci des circonstances extérieures qu’il méprise toutes également ;
867
e juger5. Il y a véritablement une littérature de
l’
acte gratuit, qui restera caractéristique de notre époque. Mais Gide
868
méthode de culture de soi, « d’intensification de
la
vie », et qui consiste à pousser à l’extrême certaines « vertus », le
869
fication de la vie », et qui consiste à pousser à
l’
extrême certaines « vertus », les pousser jusqu’à l’absurde. Surenchèr
870
siste à pousser à l’extrême certaines « vertus »,
les
pousser jusqu’à l’absurde. Surenchère morale dont le début de la Tent
871
extrême certaines « vertus », les pousser jusqu’à
l’
absurde. Surenchère morale dont le début de la Tentative amoureuse off
872
pousser jusqu’à l’absurde. Surenchère morale dont
le
début de la Tentative amoureuse offrait déjà une singulière préfigura
873
u’à l’absurde. Surenchère morale dont le début de
la
Tentative amoureuse offrait déjà une singulière préfiguration : Certe
874
singulière préfiguration : Certes ce ne seront ni
les
lois importunes des hommes, ni les craintes, ni la pudeur, ni le remo
875
e ne seront ni les lois importunes des hommes, ni
les
craintes, ni la pudeur, ni le remords, ni le respect de moi ni de mes
876
s lois importunes des hommes, ni les craintes, ni
la
pudeur, ni le remords, ni le respect de moi ni de mes rêves, ni toi,
877
nes des hommes, ni les craintes, ni la pudeur, ni
le
remords, ni le respect de moi ni de mes rêves, ni toi, triste mort, n
878
ni les craintes, ni la pudeur, ni le remords, ni
le
respect de moi ni de mes rêves, ni toi, triste mort, ni l’effroi d’ap
879
t de moi ni de mes rêves, ni toi, triste mort, ni
l’
effroi d’après-tombe qui m’empêcheront de joindre ce que je désire ; n
880
de joindre ce que je désire ; ni rien — rien que
l’
orgueil, sachant une chose si forte, de me sentir plus fort encore et
881
ose si forte, de me sentir plus fort encore et de
la
vaincre. — Mais la joie d’une si haute victoire — n’est pas si douce
882
sentir plus fort encore et de la vaincre. — Mais
la
joie d’une si haute victoire — n’est pas si douce encore, n’est pas s
883
à quel genre de sophismes conduit ce mouvement de
l’
esprit qui n’utilise une borne que pour sauter plus loin. Ainsi, c’est
884
loin. Ainsi, c’est par humilité qu’on renoncera à
la
vertu, sous prétexte qu’elle pousse à l’orgueil ; c’est par sincérité
885
oncera à la vertu, sous prétexte qu’elle pousse à
l’
orgueil ; c’est par sincérité qu’on mentira, puisque parfois nous somm
886
llement à considérer un certain immoralisme comme
la
seule vertu digne d’une élite. Tel est l’état d’esprit de la plupart
887
e comme la seule vertu digne d’une élite. Tel est
l’
état d’esprit de la plupart de nos jeunes moralistes. Le mot de parado
888
d’esprit de la plupart de nos jeunes moralistes.
Le
mot de paradoxe serait bien pauvre pour expliquer ce besoin de porter
889
chose, au-delà de toutes limites. « Il n’y a que
les
excès qui méritent notre enthousiasme ». Mais « cette fureur qui le s
890
ent notre enthousiasme ». Mais « cette fureur qui
le
soulevait contre lui-même, qui lui faisait mépriser son propre intérê
891
mépriser son propre intérêt6… » c’est proprement
la
perversion d’une vertu qui se brûle elle-même. Je ne vais point nier
892
rtu qui se brûle elle-même. Je ne vais point nier
la
fécondité psychologique d’une attitude par ailleurs si proche de cert
893
es dernières conséquences suppose qu’on ait perdu
le
sens des ensembles rationnels. Nous ne pensons plus par ensembles7 :
894
pas d’une fatigue immense. Nous voyons se fausser
le
rythme des jours et des nuits à mesure que se développe une civilisat
895
que se développe une civilisation mécanicienne. (
Les
machines n’ont pas besoin de sommeil.) La fatigue devient un des élém
896
enne. (Les machines n’ont pas besoin de sommeil.)
La
fatigue devient un des éléments les plus importants de notre psycholo
897
n de sommeil.) La fatigue devient un des éléments
les
plus importants de notre psychologie. Images des surréalistes — ils l
898
notre psychologie. Images des surréalistes — ils
l’
indiquent eux-mêmes —, calembours, expression métaphorique et symboliq
899
embours, expression métaphorique et symbolique de
la
pensée : la littérature d’avant-garde est fille de la fatigue. La Mus
900
ression métaphorique et symbolique de la pensée :
la
littérature d’avant-garde est fille de la fatigue. La Muse a trop vei
901
ensée : la littérature d’avant-garde est fille de
la
fatigue. La Muse a trop veillé. L’amour moderne, nerveux, saugrenu ju
902
ittérature d’avant-garde est fille de la fatigue.
La
Muse a trop veillé. L’amour moderne, nerveux, saugrenu jusqu’au sadis
903
e est fille de la fatigue. La Muse a trop veillé.
L’
amour moderne, nerveux, saugrenu jusqu’au sadisme, trop lucide, est un
904
u sadisme, trop lucide, est un amour de fatigués (
Les
Nuits, l’Europe galante, de Morand). La lucidité aiguë de nos psychol
905
trop lucide, est un amour de fatigués (Les Nuits,
l’
Europe galante, de Morand). La lucidité aiguë de nos psychologues est
906
atigués (Les Nuits, l’Europe galante, de Morand).
La
lucidité aiguë de nos psychologues est cet état presque inhumain de c
907
ie, à ses sensations, à ses automatismes. En art,
la
fatigue est un des états les plus riches de visions nouvelles, et qui
908
automatismes. En art, la fatigue est un des états
les
plus riches de visions nouvelles, et qui résiste le mieux à l’analyse
909
plus riches de visions nouvelles, et qui résiste
le
mieux à l’analyse. Seulement nous y perdons graduellement l’intellige
910
s de visions nouvelles, et qui résiste le mieux à
l’
analyse. Seulement nous y perdons graduellement l’intelligence de nos
911
l’analyse. Seulement nous y perdons graduellement
l’
intelligence de nos instincts, la conscience de nos limites naturelles
912
ns graduellement l’intelligence de nos instincts,
la
conscience de nos limites naturelles, tout ce qui servirait de frein
913
⁂ Recréer une conscience individuelle ; retrouver
le
sens social, le sens des ensembles et des proportions ; rééduquer les
914
nscience individuelle ; retrouver le sens social,
le
sens des ensembles et des proportions ; rééduquer les instincts du co
915
sens des ensembles et des proportions ; rééduquer
les
instincts du corps et de l’âme ; vouloir une foi… La morale de demain
916
portions ; rééduquer les instincts du corps et de
l’
âme ; vouloir une foi… La morale de demain sera en réaction complète c
917
instincts du corps et de l’âme ; vouloir une foi…
La
morale de demain sera en réaction complète contre celle d’aujourd’hui
918
out. Il ne s’agit pas, encore une fois, de renier
l’
immense effort pour se libérer de l’universelle hypocrisie accompli pa
919
is, de renier l’immense effort pour se libérer de
l’
universelle hypocrisie accompli par des générations qui ne lèguent aux
920
hons au contraire profiter des démonstrations par
l’
absurde de quelques problèmes moraux et littéraires 8, à quoi beaucoup
921
t agir, ou bien être agi. Donner une conscience à
l’
époque, ou se défaire avec elle et dériver vers un Orient d’oubli — (m
922
hies, quels Niagaras 9 !) Quelques jeunes hommes
l’
ont compris. Ils sont modestes — ne s’isolant pas de la Société ; ils
923
compris. Ils sont modestes — ne s’isolant pas de
la
Société ; ils savent que pour lutter il faut des armes et ne méprisen
924
pour lutter il faut des armes et ne méprisent pas
la
culture ; sans autre parti pris que celui de vivre, c’est-à-dire de c
925
ttie à son objet, qu’il n’y a de liberté que dans
la
soumission aux lois naturelles ; et leur effort est de retrouver ces
926
gnent pas de choisir parmi leurs instincts, ni de
les
améliorer 10. Tout ceci est assez nouveau. (Après tant de cocktails,
927
ouveau. (Après tant de cocktails, quelle saveur a
l’
eau claire !) Quelques autres se recueillent encore dans l’attente ang
928
ire !) Quelques autres se recueillent encore dans
l’
attente angoissée d’une révélation et dans la connaissance de leur mis
929
dans l’attente angoissée d’une révélation et dans
la
connaissance de leur misère. Pareils à ceux dont Vinet disait qu’ils
930
ont Vinet disait qu’ils s’en vont « épiant toutes
les
émotions de l’âme, et lui multipliant ses douleurs en les lui nommant
931
qu’ils s’en vont « épiant toutes les émotions de
l’
âme, et lui multipliant ses douleurs en les lui nommant », ils décrive
932
ions de l’âme, et lui multipliant ses douleurs en
les
lui nommant », ils décrivent le tourment dont sortira peut-être une f
933
ses douleurs en les lui nommant », ils décrivent
le
tourment dont sortira peut-être une foi nouvelle ; mais qu’ils sachen
934
foi nouvelle ; mais qu’ils sachent, quand viendra
le
moment, détourner les yeux de leur recherche pour contempler un absol
935
u’ils sachent, quand viendra le moment, détourner
les
yeux de leur recherche pour contempler un absolu ; qu’ils osent se fa
936
u’ils osent se faire violence pour se hisser dans
la
lumière. « Il vaut mieux, dit encore Vinet, ne voir d’abord que les g
937
vaut mieux, dit encore Vinet, ne voir d’abord que
les
grands traits de sa nature, ne connaître que les grands mots de la la
938
mieux, dit encore Vinet, ne voir d’abord que les
grands
traits de sa nature, ne connaître que les grands mots de la langue mo
939
les grands traits de sa nature, ne connaître que
les
grands mots de la langue morale, suivre à l’égard de soi-même la méth
940
grands traits de sa nature, ne connaître que les
grands
mots de la langue morale, suivre à l’égard de soi-même la méthode de
941
de sa nature, ne connaître que les grands mots de
la
langue morale, suivre à l’égard de soi-même la méthode de l’Évangile
942
de la langue morale, suivre à l’égard de soi-même
la
méthode de l’Évangile qui, prenant à plein poing toutes ces petites m
943
orale, suivre à l’égard de soi-même la méthode de
l’
Évangile qui, prenant à plein poing toutes ces petites misères, en com
944
es petites misères, en compose d’un seul coup une
grande
misère, et par ce moyen nous met tout d’abord en présence, non de nou
945
civiques. Mais que nos moralistes — presque tous
les
jeunes écrivains — se souviennent de penser en fonction du temps prés
946
temps présent, soit qu’ils veuillent en améliorer
les
conditions, ou les transformer totalement. — Alors, vous croyez à l’a
947
qu’ils veuillent en améliorer les conditions, ou
les
transformer totalement. — Alors, vous croyez à l’action sociale des é
948
es transformer totalement. — Alors, vous croyez à
l’
action sociale des écrivains ? Peut-être. En tout cas je vois bien le
949
s écrivains ? Peut-être. En tout cas je vois bien
le
mal qu’ils ont fait et qu’au fond, leur refus d’agir sur l’époque, c’
950
ils ont fait et qu’au fond, leur refus d’agir sur
l’
époque, c’est une manière d’agir contre elle. 2. « La crise du concep
951
oque, c’est une manière d’agir contre elle. 2. «
La
crise du concept de littérature », NRF, 1923. 3. « Il s’était dévelo
952
« Il s’était développé en nous un goût furieux de
l’
expérience humaine. » (Aragon) 4. « Lorsque tout est fini » dans Libe
953
Libertinage. (NRF) 5. Détours de René Crevel ;
les
romans de Philippe Soupault ; l’Incertain de Maurice Betz ; certains
954
e René Crevel ; les romans de Philippe Soupault ;
l’
Incertain de Maurice Betz ; certains personnages d’Arland, de Louis Ar
955
ouis Aragon, de Drieu la Rochelle. Je ne cite que
les
plus significatifs. 6. Aragon, loc. cit. 7. Le « goût du désastre
956
es plus significatifs. 6. Aragon, loc. cit. 7.
Le
« goût du désastre » qui est au fond du romantisme moderne nous empêc
957
ement de construire et de nous construire. Jamais
l’
on ne fut plus loin de l’idéal goethéen : au lieu de tout composer en
958
nous construire. Jamais l’on ne fut plus loin de
l’
idéal goethéen : au lieu de tout composer en soi, on veut tout cultive
959
omposer en soi, on veut tout cultiver, et en fait
l’
on se contente d’une violence, d’un vice, d’une inquiétude. 8. « Cert
960
réelles » (Marcel Arland). 9. Ce serait au moins
la
liberté ! crieront les surréalistes. Voire. On est moins libre à Mosc
961
nd). 9. Ce serait au moins la liberté ! crieront
les
surréalistes. Voire. On est moins libre à Moscou qu’à Montparnasse. D
962
D’ailleurs leurs théories nous ramèneraient vite
l’
âge de la pierre, à la condition d’homme la plus nue ; la plus éloigné
963
rs leurs théories nous ramèneraient vite l’âge de
la
pierre, à la condition d’homme la plus nue ; la plus éloignée de cell
964
ries nous ramèneraient vite l’âge de la pierre, à
la
condition d’homme la plus nue ; la plus éloignée de celle qui permet
965
t vite l’âge de la pierre, à la condition d’homme
la
plus nue ; la plus éloignée de celle qui permet le surréalisme. 10.
966
e la pierre, à la condition d’homme la plus nue ;
la
plus éloignée de celle qui permet le surréalisme. 10. Une équipe d’h
967
a plus nue ; la plus éloignée de celle qui permet
le
surréalisme. 10. Une équipe d’hommes solides suffirait à restaurer u
968
mont Denis de, « Adieu, beau désordre… (Notes sur
la
jeune littérature et la morale) », Bibliothèque universelle et Revue
969
beau désordre… (Notes sur la jeune littérature et
la
morale) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mars
970
)p Au creux des couleurs assourdies d’un divan
le
soir, tandis que les fenêtres s’ouvraient vers le ciel de Florence… «
971
ouleurs assourdies d’un divan le soir, tandis que
les
fenêtres s’ouvraient vers le ciel de Florence… « Du sang, de la volup
972
le soir, tandis que les fenêtres s’ouvraient vers
le
ciel de Florence… « Du sang, de la volupté et de la mort », un titre
973
ouvraient vers le ciel de Florence… « Du sang, de
la
volupté et de la mort », un titre s’effaçait dans l’ombre. Jouve a rê
974
ciel de Florence… « Du sang, de la volupté et de
la
mort », un titre s’effaçait dans l’ombre. Jouve a rêvé une histoire d
975
volupté et de la mort », un titre s’effaçait dans
l’
ombre. Jouve a rêvé une histoire de passion mystique et de crime, inte
976
t d’autres, comme chaque soir un nouveau ciel. Il
l’
a transcrite en brèves notations lyriques suivant le rythme d’un songe
977
a transcrite en brèves notations lyriques suivant
le
rythme d’un songe, sans cesse brisé par les élans alternés ou confond
978
uivant le rythme d’un songe, sans cesse brisé par
les
élans alternés ou confondus du désir et de la prière. On sort lenteme
979
ar les élans alternés ou confondus du désir et de
la
prière. On sort lentement d’une chambre bleue qui est le mystère même
980
re. On sort lentement d’une chambre bleue qui est
le
mystère même, pour suivre la naissance et l’embrasement de la passion
981
hambre bleue qui est le mystère même, pour suivre
la
naissance et l’embrasement de la passion de Paulina. Le Péché ; le Co
982
est le mystère même, pour suivre la naissance et
l’
embrasement de la passion de Paulina. Le Péché ; le Couvent ; la rechu
983
ême, pour suivre la naissance et l’embrasement de
la
passion de Paulina. Le Péché ; le Couvent ; la rechute et le crime ;
984
ssance et l’embrasement de la passion de Paulina.
Le
Péché ; le Couvent ; la rechute et le crime ; et l’étrange apaisement
985
’embrasement de la passion de Paulina. Le Péché ;
le
Couvent ; la rechute et le crime ; et l’étrange apaisement d’une viei
986
de la passion de Paulina. Le Péché ; le Couvent ;
la
rechute et le crime ; et l’étrange apaisement d’une vieillesse au sol
987
de Paulina. Le Péché ; le Couvent ; la rechute et
le
crime ; et l’étrange apaisement d’une vieillesse au soleil. Jouve sem
988
Péché ; le Couvent ; la rechute et le crime ; et
l’
étrange apaisement d’une vieillesse au soleil. Jouve semble avoir hési
989
servation psychologique ironique et minutieuse, à
la
Stendhal, succède à des effusions haletantes ou à une relation cinéma
990
ion cinématographique. Mais tout cela baigne dans
le
même lyrisme et s’agite sur un fond sombre et riche de passions incon
991
iche de passions inconscientes qui donnent à tous
les
actes une signification plus profonde. (Il serait aisé de montrer que
992
de poétique où il paraît inconvenant d’introduire
le
jargon de la science moderne.) Si nous reconnaissons à la base de cet
993
ù il paraît inconvenant d’introduire le jargon de
la
science moderne.) Si nous reconnaissons à la base de cette œuvre inég
994
n de la science moderne.) Si nous reconnaissons à
la
base de cette œuvre inégale des idées vieilles comme Rousseau sur les
995
vre inégale des idées vieilles comme Rousseau sur
les
droits de la passion, — et dans sa trame quelques chapitres inspirés
996
s idées vieilles comme Rousseau sur les droits de
la
passion, — et dans sa trame quelques chapitres inspirés presque litté
997
anecdote italienne de Stendhal ; si d’autre part
l’
évolution mystique de Paulina semble parfois un peu trop « classique »
998
mble parfois un peu trop « classique » et prévue,
l’
originalité foncière du roman de Jouve reste indéniable : c’est son mo
999
nes proses mystiques de Paulina au couvent valent
les
meilleurs poèmes de l’auteur de Tragiques et de Vous êtes des hommes.
1000
Paulina au couvent valent les meilleurs poèmes de
l’
auteur de Tragiques et de Vous êtes des hommes. p. Rougemont Denis
1001
Alix de Watteville,
La
Folie de l’espace (avril 1926)q Un artiste de grand talent à qui l
1002
Alix de Watteville, La Folie de
l’
espace (avril 1926)q Un artiste de grand talent à qui la guerre a f
1003
Folie de l’espace (avril 1926)q Un artiste de
grand
talent à qui la guerre a fait perdre le goût des théories d’écoles et
1004
(avril 1926)q Un artiste de grand talent à qui
la
guerre a fait perdre le goût des théories d’écoles et de quelques aut
1005
ste de grand talent à qui la guerre a fait perdre
le
goût des théories d’écoles et de quelques autres plaisirs pour civils
1006
de quelques autres plaisirs pour civils : mettez-
le
aux prises avec une petite cité patricienne dont il devra portraiture
1007
etite cité patricienne dont il devra portraiturer
les
gentilshommes archéologiques et les vieilles dames à principes. Voilà
1008
portraiturer les gentilshommes archéologiques et
les
vieilles dames à principes. Voilà, n’est-ce pas, un amusant sujet de
1009
al, avec ses personnages un peu conventionnels et
l’
invraisemblance assez piquante de ses péripéties. Quel dommage que l’a
1010
ssez piquante de ses péripéties. Quel dommage que
l’
auteur l’ait alourdi d’une idéologie, souvent plus généreuse que neuve
1011
ante de ses péripéties. Quel dommage que l’auteur
l’
ait alourdi d’une idéologie, souvent plus généreuse que neuve, et qui
1012
à être mise en action plutôt qu’en commentaires.
Le
talent de Mme de Watteville paraît mieux à l’aise dans la description
1013
es. Le talent de Mme de Watteville paraît mieux à
l’
aise dans la description du milieu patricien que dans la création d’un
1014
t de Mme de Watteville paraît mieux à l’aise dans
la
description du milieu patricien que dans la création d’un caractère d
1015
dans la description du milieu patricien que dans
la
création d’un caractère de grand peintre. Pourtant, malgré des longue
1016
patricien que dans la création d’un caractère de
grand
peintre. Pourtant, malgré des longueurs, on ne lira pas sans plaisir
1017
ongueurs, on ne lira pas sans plaisir ce livre où
l’
on voit un homme appeler en vain le vent du large, parmi des gens qui
1018
ir ce livre où l’on voit un homme appeler en vain
le
vent du large, parmi des gens qui craignent de s’enrhumer. q. Roug
1019
nt Denis de, « [Compte rendu] Alix de Watteville,
La
Folie de l’espace », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Ge
1020
« [Compte rendu] Alix de Watteville, La Folie de
l’
espace », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, avril
1021
il 1926)d e Pour la première fois cette année,
les
conférences de l’Association chrétienne d’étudiants eurent lieu au pr
1022
la première fois cette année, les conférences de
l’
Association chrétienne d’étudiants eurent lieu au printemps, et non pl
1023
ne. Un plein succès a répondu à cette innovation.
Le
sujet de la première partie des conférences, les Objections des intel
1024
. Le sujet de la première partie des conférences,
les
Objections des intellectuels au Dieu chrétien, fut introduit par M. R
1025
istingué, qui se fit avec beaucoup d’intelligence
l’
avocat du diable, en montrant que tous les faits religieux admettent à
1026
lligence l’avocat du diable, en montrant que tous
les
faits religieux admettent à côté de l’explication mystique une explic
1027
que tous les faits religieux admettent à côté de
l’
explication mystique une explication scientifique. C’est donc à la seu
1028
stique une explication scientifique. C’est donc à
la
seule volonté de choisir. M. le pasteur Bertrand de Lyon, répondit en
1029
que. C’est donc à la seule volonté de choisir. M.
le
pasteur Bertrand de Lyon, répondit en exposant les exigences de l’Éva
1030
le pasteur Bertrand de Lyon, répondit en exposant
les
exigences de l’Évangile en face de la pensée moderne, et fut impressi
1031
nd de Lyon, répondit en exposant les exigences de
l’
Évangile en face de la pensée moderne, et fut impressionnant de vigueu
1032
n exposant les exigences de l’Évangile en face de
la
pensée moderne, et fut impressionnant de vigueur dialectique et de la
1033
que et de largeur d’idées. Une soirée consacrée à
la
fédération vint interrompre les discussions philosophiques provoquées
1034
soirée consacrée à la fédération vint interrompre
les
discussions philosophiques provoquées par ces deux travaux. Avec la c
1035
losophiques provoquées par ces deux travaux. Avec
la
conférence de M. Jean Cadier, un jeune pasteur français, on descendit
1036
ier, un jeune pasteur français, on descendit — ou
l’
on monta suivant M. A. Léo — du domaine de la pensée pure dans celui d
1037
— ou l’on monta suivant M. A. Léo — du domaine de
la
pensée pure dans celui de l’action. M. Cadier montra le conflit de la
1038
Léo — du domaine de la pensée pure dans celui de
l’
action. M. Cadier montra le conflit de la théologie moderne avec l’act
1039
sée pure dans celui de l’action. M. Cadier montra
le
conflit de la théologie moderne avec l’action religieuse en s’appuyan
1040
celui de l’action. M. Cadier montra le conflit de
la
théologie moderne avec l’action religieuse en s’appuyant sur des expé
1041
er montra le conflit de la théologie moderne avec
l’
action religieuse en s’appuyant sur des expériences faites pendant le
1042
en s’appuyant sur des expériences faites pendant
le
réveil de la Drôme, dont il est l’un des artisans les plus actifs. Po
1043
t sur des expériences faites pendant le réveil de
la
Drôme, dont il est l’un des artisans les plus actifs. Pour remplacer
1044
réveil de la Drôme, dont il est l’un des artisans
les
plus actifs. Pour remplacer un travail promis par M. A. Reymond malhe
1045
é, M. Pierre Maury fit une causerie émouvante sur
l’
Évolution religieuse de Jacques Rivière, qui se trouva préciser bien d
1046
nts laissés en suspens dans la première partie de
la
conférence. Puis M. A. Brémond, étudiant en théologie, présenta deux
1047
riers de Paris, Clerville et Janson, dont il a eu
l’
occasion de partager les conditions de vie et qui nous parlèrent l’un
1048
le et Janson, dont il a eu l’occasion de partager
les
conditions de vie et qui nous parlèrent l’un de la Réalité prolétarie
1049
s conditions de vie et qui nous parlèrent l’un de
la
Réalité prolétarienne, l’autre de la Mentalité prolétarienne. Brémond
1050
rent l’un de la Réalité prolétarienne, l’autre de
la
Mentalité prolétarienne. Brémond conclut en montrant la nécessité et
1051
talité prolétarienne. Brémond conclut en montrant
la
nécessité et les difficultés d’une action missionnaire dans ces milie
1052
enne. Brémond conclut en montrant la nécessité et
les
difficultés d’une action missionnaire dans ces milieux, comme M. Terr
1053
missionnaire dans ces milieux, comme M. Terrisse
l’
avait fait le soir avant pour les milieux d’ouvriers noirs au Cap. San
1054
dans ces milieux, comme M. Terrisse l’avait fait
le
soir avant pour les milieux d’ouvriers noirs au Cap. Sans toucher à d
1055
comme M. Terrisse l’avait fait le soir avant pour
les
milieux d’ouvriers noirs au Cap. Sans toucher à des questions de part
1056
cher leurs auditeurs de leur lit de préjugés pour
les
placer véritablement en face de la « réalité prolétarienne ». « Cercl
1057
préjugés pour les placer véritablement en face de
la
« réalité prolétarienne ». « Cercles vicieux que nos syndicats. Cercl
1058
ercles vicieux que nos syndicats. Cercle vicieux,
l’
augmentation des salaires. Ce que nous voulons, c’est élever l’homme a
1059
n des salaires. Ce que nous voulons, c’est élever
l’
homme au-dessus de la plus dégradante condition, et nous n’y arriveron
1060
e nous voulons, c’est élever l’homme au-dessus de
la
plus dégradante condition, et nous n’y arriverons que par un travail
1061
, cela peut paraître excessif à qui n’a pas connu
l’
atmosphère particulière à ces rencontres. Rien de plus aéré, au moral
1062
l pense sans se préoccuper d’être bien pensant et
les
Romands recouvrent l’usage de la parole, puis on va se dégourdir sur
1063
per d’être bien pensant et les Romands recouvrent
l’
usage de la parole, puis on va se dégourdir sur un ballon ou bien l’on
1064
bien pensant et les Romands recouvrent l’usage de
la
parole, puis on va se dégourdir sur un ballon ou bien l’on poursuit h
1065
le, puis on va se dégourdir sur un ballon ou bien
l’
on poursuit hors du village une discussion toujours trop courte. Et le
1066
u village une discussion toujours trop courte. Et
les
repas réunissent tout le monde dans la gaieté la plus charmante. On y
1067
ourte. Et les repas réunissent tout le monde dans
la
gaieté la plus charmante. On y vit un ouvrier en maillot rouge assis
1068
les repas réunissent tout le monde dans la gaieté
la
plus charmante. On y vit un ouvrier en maillot rouge assis entre un b
1069
rançais. Miracle qui nous fit croire un instant à
la
fameuse devise de la Révolution. d. Rougemont Denis de, « Conféren
1070
nous fit croire un instant à la fameuse devise de
la
Révolution. d. Rougemont Denis de, « Conférences d’Aubonne », Suis
1071
ilège ironique (mai 1926)r Un léger flirt avec
la
muse, parce que c’est dimanche, parce qu’il pleut et qu’on s’ennuie.
1072
dimanche, parce qu’il pleut et qu’on s’ennuie. Si
la
vie est bête à pleurer, sourire est moins fatigant. « Le paon dédaign
1073
est bête à pleurer, sourire est moins fatigant. «
Le
paon dédaigne encor mais ne fait plus sa roue. » Ce poète — qui fut a
1074
ne fait plus sa roue. » Ce poète — qui fut aussi
le
prosateur charmant du Pédagogue et l’Amour — sourit avec une grâce un
1075
i fut aussi le prosateur charmant du Pédagogue et
l’
Amour — sourit avec une grâce un peu frileuse et se permet de bâiller
1076
use et se permet de bâiller en public. On connaît
le
danger… r. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Wilfred Chopard, S
1077
Cécile-Claire Rivier,
L’
Athée (mai 1926)s C’est le récit de la découverte de Dieu par une j
1078
écile-Claire Rivier, L’Athée (mai 1926)s C’est
le
récit de la découverte de Dieu par une jeune fille élevée dans l’athé
1079
Rivier, L’Athée (mai 1926)s C’est le récit de
la
découverte de Dieu par une jeune fille élevée dans l’athéisme. Invrai
1080
écouverte de Dieu par une jeune fille élevée dans
l’
athéisme. Invraisemblablement ignorante de toute religion jusqu’à 20 a
1081
e religion jusqu’à 20 ans, Denise s’abandonne à «
la
vie », laquelle — un peu aidée par l’auteur — lui révèlera peu à peu
1082
andonne à « la vie », laquelle — un peu aidée par
l’
auteur — lui révèlera peu à peu le sens divin de la destinée. Ce livre
1083
n peu aidée par l’auteur — lui révèlera peu à peu
le
sens divin de la destinée. Ce livre à thèse est plutôt une argumentat
1084
’auteur — lui révèlera peu à peu le sens divin de
la
destinée. Ce livre à thèse est plutôt une argumentation à coups d’exe
1085
à coups d’exemples vivants qu’un véritable roman.
La
profusion souvent facile des incidents et le style volontairement sec
1086
man. La profusion souvent facile des incidents et
le
style volontairement sec permettent de suivre sans passion ni fatigue
1087
sec permettent de suivre sans passion ni fatigue
le
développement un peu théorique mais intelligent d’un problème que l’o
1088
peu théorique mais intelligent d’un problème que
l’
on pressent trop complètement résolu dès les premières pages, mais qu’
1089
Rivier d’avoir posé courageusement. Dirai-je que
l’
abus des points d’exclamation — trait commun à presque toutes les femm
1090
nts d’exclamation — trait commun à presque toutes
les
femmes auteur, et qui plaît aux lectrices — m’agace un peu ? C’est un
1091
Denis de, « [Compte rendu] Cécile-Claire Rivier,
L’
Athée », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mai 192
1092
Jean Cocteau, Rappel à
l’
ordre (mai 1926)t Sous ce titre, le plus étonnant peut-être qu’il a
1093
u, Rappel à l’ordre (mai 1926)t Sous ce titre,
le
plus étonnant peut-être qu’il ait trouvé, Jean Cocteau a réuni ce qui
1094
ait trouvé, Jean Cocteau a réuni ce qui me paraît
le
meilleur de son œuvre : ses récits de critique et d’esthétique (Le Co
1095
n œuvre : ses récits de critique et d’esthétique (
Le
Coq et l’Arlequin, la Noce massacrée, le Secret professionnel, etc.)
1096
ses récits de critique et d’esthétique (Le Coq et
l’
Arlequin, la Noce massacrée, le Secret professionnel, etc.) Sans doute
1097
e critique et d’esthétique (Le Coq et l’Arlequin,
la
Noce massacrée, le Secret professionnel, etc.) Sans doute faudrait-il
1098
hétique (Le Coq et l’Arlequin, la Noce massacrée,
le
Secret professionnel, etc.) Sans doute faudrait-il préciser ce qu’il
1099
’il entend par ordre, et montrer que si cet ordre
l’
écarte de Dada, il ne le conduit pas pour autant à l’Académie. Disons
1100
montrer que si cet ordre l’écarte de Dada, il ne
le
conduit pas pour autant à l’Académie. Disons pour aller vite que sa r
1101
carte de Dada, il ne le conduit pas pour autant à
l’
Académie. Disons pour aller vite que sa recherche de l’ordre révèle si
1102
démie. Disons pour aller vite que sa recherche de
l’
ordre révèle simplement une volonté de construire jusque dans le grabu
1103
simplement une volonté de construire jusque dans
le
grabuge, qu’il aime pour les matériaux qu’on en peut tirer. L[e] malh
1104
onstruire jusque dans le grabuge, qu’il aime pour
les
matériaux qu’on en peut tirer. L[e] malheur de Cocteau est qu’il se v
1105
heur de Cocteau est qu’il se veuille poète. Il ne
l’
est jamais moins qu’en vers. Sa plus incontestable réussite à ce jour
1106
ers. Sa plus incontestable réussite à ce jour est
le
Secret professionnel, petit catéchisme cubiste qui dépasse de beaucou
1107
petit catéchisme cubiste qui dépasse de beaucoup
les
limites de cette école, et qu’il eut le tort à notre sens de vouloir
1108
beaucoup les limites de cette école, et qu’il eut
le
tort à notre sens de vouloir illustrer de pédants exercices poétiques
1109
ices poétiques. Mais quelle intelligence, et dont
l’
audace est de se vouloir plus juste que bizarre. Il sait bien d’ailleu
1110
us juste que bizarre. Il sait bien d’ailleurs que
les
miracles les plus étonnants sont ceux de la lumière. « Le mystère se
1111
bizarre. Il sait bien d’ailleurs que les miracles
les
plus étonnants sont ceux de la lumière. « Le mystère se passe en plei
1112
que les miracles les plus étonnants sont ceux de
la
lumière. « Le mystère se passe en plein jour et à toute vitesse. » Te
1113
les les plus étonnants sont ceux de la lumière. «
Le
mystère se passe en plein jour et à toute vitesse. » Telle est bien l
1114
n plein jour et à toute vitesse. » Telle est bien
la
nouveauté de son théâtre et de l’art qu’il défend en peinture, en mus
1115
Telle est bien la nouveauté de son théâtre et de
l’
art qu’il défend en peinture, en musique. Suppression du clair-obscur
1116
re, en musique. Suppression du clair-obscur et de
la
pénombre. Ôter la pédale à la poésie. (« Le poète ne rêve pas, il com
1117
ppression du clair-obscur et de la pénombre. Ôter
la
pédale à la poésie. (« Le poète ne rêve pas, il compte. ») Six projec
1118
clair-obscur et de la pénombre. Ôter la pédale à
la
poésie. (« Le poète ne rêve pas, il compte. ») Six projecteurs conver
1119
et de la pénombre. Ôter la pédale à la poésie. («
Le
poète ne rêve pas, il compte. ») Six projecteurs convergent sur une m
1120
convergent sur une machine luisante et tournante.
L’
esprit de Cocteau est une arme admirable de précision, d’élégance méca
1121
de rapidité. Il lassera, parce que c’est toujours
le
même déclic. Cocteau le sait, et pour varier il tire tantôt à gauche
1122
parce que c’est toujours le même déclic. Cocteau
le
sait, et pour varier il tire tantôt à gauche tantôt à droite, sur Bar
1123
ur Barrès, sur Wagner, sur quelques fantômes, sur
le
public. (Bientôt sur lui-même je le crains, pour renaître catholique.
1124
fantômes, sur le public. (Bientôt sur lui-même je
le
crains, pour renaître catholique.) Certes, il bannit le charme et tou
1125
ins, pour renaître catholique.) Certes, il bannit
le
charme et toute grâce vaporeuse. Mais ses fleurs de cristal, si elles
1126
Denis de, « [Compte rendu] Jean Cocteau, Rappel à
l’
ordre », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mai 192
1127
René Crevel, Mon corps et moi (mai 1926)u
Les
témoignages ne manquent pas sur la détresse morale de la génération s
1128
mai 1926)u Les témoignages ne manquent pas sur
la
détresse morale de la génération surréaliste. Mais tandis que la plup
1129
ignages ne manquent pas sur la détresse morale de
la
génération surréaliste. Mais tandis que la plupart en sont encore à d
1130
ls en disent, « artistiqués », — ils n’osent plus
le
mensonge de l’art, et pas encore la vérité pure — Crevel décrit sans
1131
artistiqués », — ils n’osent plus le mensonge de
l’
art, et pas encore la vérité pure — Crevel décrit sans aucune transpos
1132
n’osent plus le mensonge de l’art, et pas encore
la
vérité pure — Crevel décrit sans aucune transposition romanesque le t
1133
revel décrit sans aucune transposition romanesque
le
trouble caractéristique de sa génération. Terrible aveu d’impuissance
1134
on. Terrible aveu d’impuissance, il n’a plus même
la
force de l’hypocrisie. Isolé dans un hôtel perdu, avec son corps qui
1135
aveu d’impuissance, il n’a plus même la force de
l’
hypocrisie. Isolé dans un hôtel perdu, avec son corps qui se souvient
1136
erdu, avec son corps qui se souvient — « mémoire,
l’
ennemie » — avec une intelligence dont la triste profession est de dét
1137
mémoire, l’ennemie » — avec une intelligence dont
la
triste profession est de détruire le désir qu’elle excite par curiosi
1138
ligence dont la triste profession est de détruire
le
désir qu’elle excite par curiosité passagère, il monologue. « Oui, je
1139
par curiosité passagère, il monologue. « Oui, je
le
redirai, tous mes essais furent prétextes à me dissoudre, à me perdre
1140
prétextes à me dissoudre, à me perdre. » Vouloir
la
vérité pure sur soi, c’est se refuser à l’élan vital qui nous crée sa
1141
ouloir la vérité pure sur soi, c’est se refuser à
l’
élan vital qui nous crée sans cesse : l’analyse de sa solitude le lais
1142
refuser à l’élan vital qui nous crée sans cesse :
l’
analyse de sa solitude le laisse en face de quelques réactions physiol
1143
i nous crée sans cesse : l’analyse de sa solitude
le
laisse en face de quelques réactions physiologiques dont la pauvreté
1144
en face de quelques réactions physiologiques dont
la
pauvreté le rejette dans une angoisse qu’il nomme « élan mortel ». Ce
1145
uelques réactions physiologiques dont la pauvreté
le
rejette dans une angoisse qu’il nomme « élan mortel ». Cette inversio
1146
e qui est constructif et créateur, voilà je pense
le
véritable désordre. Une intelligence parvenue au point où elle « ne s
1147
ocès », une intelligence qui se dégoûte, tel est
le
spectacle que nous dévoile cyniquement René Crevel. Il en est peu de
1148
u de plus effrayants. Ah ! Seigneur, donnez-nous
la
force et le courage de contempler nos corps et nos cœurs sans dégoût
1149
frayants. Ah ! Seigneur, donnez-nous la force et
le
courage de contempler nos corps et nos cœurs sans dégoût implorait B
1150
ans dégoût implorait Baudelaire. Encore avait-il
le
courage de prier… u. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] René Cre
1151
L’
atmosphère d’Aubonne : 22-25 mars 1926 (mai 1926)f Cette conférence
1152
qu’on peut bien dire du diable et se termina sous
le
plus beau soleil de printemps. Libre à qui veut d’y voir un symbole.
1153
veut d’y voir un symbole. On ne saurait exagérer
l’
importance des conditions météorologiques du succès d’une telle rencon
1154
e rencontre : tout alla froidement jusqu’à ce que
la
bise tombée permît à « l’atmosphère » de s’établir. Alors le miracle
1155
oidement jusqu’à ce que la bise tombée permît à «
l’
atmosphère » de s’établir. Alors le miracle apparut, grandit. Le mirac
1156
bée permît à « l’atmosphère » de s’établir. Alors
le
miracle apparut, grandit. Le miracle, c’est l’esprit d’Aubonne. C’est
1157
de s’établir. Alors le miracle apparut, grandit.
Le
miracle, c’est l’esprit d’Aubonne. C’est ce miracle tout ce qu’il y a
1158
rs le miracle apparut, grandit. Le miracle, c’est
l’
esprit d’Aubonne. C’est ce miracle tout ce qu’il y a de plus protestan
1159
e se produire ailleurs qu’en terre romande. C’est
l’
esprit de liberté, tout simplement. Mais précisons : c’est bien plus q
1160
simplement. Mais précisons : c’est bien plus que
la
liberté de défendre sa petite hérésie personnelle et de s’affirmer au
1161
lle et de s’affirmer aux dépens d’autrui, — c’est
la
liberté dans la recherche. Chose plus rare qu’on ne pense, à Aubonne
1162
rmer aux dépens d’autrui, — c’est la liberté dans
la
recherche. Chose plus rare qu’on ne pense, à Aubonne on se sent prêt
1163
ient moins à convaincre qu’à se convaincre. Après
les
exposés de Janson, de Brémond, j’en sais plusieurs qui ont ainsi « lâ
1164
Mais ce qui est peut-être plus important, on eut
l’
impression, durant les discussions entre de Saussure et Bertrand, que
1165
-être plus important, on eut l’impression, durant
les
discussions entre de Saussure et Bertrand, que les orateurs exprimaie
1166
es discussions entre de Saussure et Bertrand, que
les
orateurs exprimaient tour à tour les objections que chacun se faisait
1167
ertrand, que les orateurs exprimaient tour à tour
les
objections que chacun se faisait à part soi, qu’ils incarnaient les v
1168
chacun se faisait à part soi, qu’ils incarnaient
les
voix contradictoires d’un débat que tous menaient en eux-mêmes loyale
1169
chose de définitif à la fois et d’intelligent, je
le
mesure aussi à l’émotion qui accueillit l’étude de Maury sur Jacques
1170
à la fois et d’intelligent, je le mesure aussi à
l’
émotion qui accueillit l’étude de Maury sur Jacques Rivière : combien
1171
nt, je le mesure aussi à l’émotion qui accueillit
l’
étude de Maury sur Jacques Rivière : combien reconnurent dans le tourm
1172
ry sur Jacques Rivière : combien reconnurent dans
le
tourment de cette âme leur propre recherche, — et dans ses lumineuses
1173
recherche, — et dans ses lumineuses conquêtes sur
le
doute, le modèle des réponses désirées. Tout cela, c’est l’atmosphère
1174
— et dans ses lumineuses conquêtes sur le doute,
le
modèle des réponses désirées. Tout cela, c’est l’atmosphère de la cha
1175
le modèle des réponses désirées. Tout cela, c’est
l’
atmosphère de la chapelle où ont lieu travaux et méditations. Dehors,
1176
ponses désirées. Tout cela, c’est l’atmosphère de
la
chapelle où ont lieu travaux et méditations. Dehors, on honore la lib
1177
nt lieu travaux et méditations. Dehors, on honore
la
liberté d’un culte moins platonique : n’est-ce pas Léo qui prétendit
1178
’est-ce pas Léo qui prétendit qu’on ne peut juger
les
Associations qu’à leur façon de jouer le volley-ball ? Le Casino offr
1179
t juger les Associations qu’à leur façon de jouer
le
volley-ball ? Le Casino offrit pendant quelques nuits la vision étran
1180
iations qu’à leur façon de jouer le volley-ball ?
Le
Casino offrit pendant quelques nuits la vision étrange d’une salle où
1181
ey-ball ? Le Casino offrit pendant quelques nuits
la
vision étrange d’une salle où les spectateurs étendus en pyjamas sur
1182
t quelques nuits la vision étrange d’une salle où
les
spectateurs étendus en pyjamas sur des paillasses attendraient en vai
1183
n pyjamas sur des paillasses attendraient en vain
le
lever d’un rideau sur une pièce inexistante. Enfin le dernier soir, l
1184
sur une pièce inexistante. Enfin le dernier soir,
l’
on vit apparaître un fakir… Il y eut aussi une assemblée délibérative
1185
eut pas trop de toute sa souplesse pour maintenir
l’
équilibre des discussions et de sa propre personne. Et il y eut encore
1186
encore un dîner très démocratique pendant lequel
le
philosophe Abauzit chanta « les Crapauds » avec âme, appuyé d’une mai
1187
que pendant lequel le philosophe Abauzit chanta «
les
Crapauds » avec âme, appuyé d’une main sur l’épaule de Janson, et de
1188
« les Crapauds » avec âme, appuyé d’une main sur
l’
épaule de Janson, et de l’autre dessinant dans l’air des phrases music
1189
l’épaule de Janson, et de l’autre dessinant dans
l’
air des phrases musicales. Après quoi Richardot, entrant par la fenêtr
1190
ases musicales. Après quoi Richardot, entrant par
la
fenêtre, vint annoncer qu’on était libre — comme si on l’avait attend
1191
re, vint annoncer qu’on était libre — comme si on
l’
avait attendu pour le manifester ! — et qu’il suffisait de souscrire à
1192
on était libre — comme si on l’avait attendu pour
le
manifester ! — et qu’il suffisait de souscrire à la brochure de la co
1193
manifester ! — et qu’il suffisait de souscrire à
la
brochure de la conférence3 pour savoir tout ce que je n’ai pas dit da
1194
et qu’il suffisait de souscrire à la brochure de
la
conférence3 pour savoir tout ce que je n’ai pas dit dans ces quelques
1195
2.50, nom et adresse. f. Rougemont Denis de, «
L’
atmosphère d’Aubonne : 22-25 mars 1926 », Lux et Vita : nouvelles de l
1196
e : 22-25 mars 1926 », Lux et Vita : nouvelles de
l’
Association chrétienne suisse d’étudiants, Lausanne, mai 1926, p. 44-4
1197
Le
Corbusier, Urbanisme (juin 1926)v Nous disons adieu aux charmes tr
1198
disons adieu aux charmes troubles et inhumains de
la
nature. Il s’agit de créer à notre vie moderne un décor utile et beau
1199
à notre vie moderne un décor utile et beau. Or «
la
grande ville, phénomène de force en mouvement, est aujourd’hui une ca
1200
notre vie moderne un décor utile et beau. Or « la
grande
ville, phénomène de force en mouvement, est aujourd’hui une catastrop
1201
astrophe menaçante pour n’avoir pas été animée de
l’
esprit de géométrie… Elle use et conduit lentement l’usure des millier
1202
sprit de géométrie… Elle use et conduit lentement
l’
usure des milliers d’êtres humains ». Elle n’est plus adaptée aux cond
1203
de travail ou de repos, ni dans son plan ni dans
le
détail des rues. Congestion : « un cheval arrête 1000 chevaux-vapeurs
1204
eval arrête 1000 chevaux-vapeurs ». Et pourtant «
la
ville est une image puissante qui actionne notre esprit » après avoir
1205
e esprit » après avoir été créée par lui, — comme
la
poésie. C’est ainsi que le problème de l’Urbanisme se place au croise
1206
créée par lui, — comme la poésie. C’est ainsi que
le
problème de l’Urbanisme se place au croisement des préoccupations est
1207
— comme la poésie. C’est ainsi que le problème de
l’
Urbanisme se place au croisement des préoccupations esthétiques et soc
1208
hétiques et sociales d’aujourd’hui. Pour résoudre
la
crise de notre civilisation sous cet aspect comme sous les autres, il
1209
de notre civilisation sous cet aspect comme sous
les
autres, il nous faut mieux que des dictateurs : des Architectes, de l
1210
ut mieux que des dictateurs : des Architectes, de
l’
esprit et de la matière. Si Le Corbusier réalise son plan, ce sera plu
1211
s dictateurs : des Architectes, de l’esprit et de
la
matière. Si Le Corbusier réalise son plan, ce sera plus fort que Muss
1212
des Architectes, de l’esprit et de la matière. Si
Le
Corbusier réalise son plan, ce sera plus fort que Mussolini (lequel s
1213
nisme est une étude technique et un pamphlet dont
l’
argumentation serrée éclate parfois en boutades mordantes, en brèves f
1214
lyrisme. C’est d’une verve puissante jusque dans
la
statistique. On en sort convaincu ou bouleversé, enthousiasmé d’avoir
1215
vaincu ou bouleversé, enthousiasmé d’avoir trouvé
la
formule même de tant d’aspirations modernes. Voici sans aucun doute u
1216
ns modernes. Voici sans aucun doute un des livres
les
plus représentatifs de l’époque de Lénine, du fascisme, du ciment arm
1217
un doute un des livres les plus représentatifs de
l’
époque de Lénine, du fascisme, du ciment armé. « Notre monde comme un
1218
poques mortes. Une tâche nous incombe, construire
le
cadre de notre existence… construire les villes de notre temps ». Et
1219
onstruire le cadre de notre existence… construire
les
villes de notre temps ». Et je déplie ce plan d’une « ville contempor
1220
verre et de ciment blanc, flamboyantes au soleil.
Les
vingt-quatre gratte-ciel de la cité, au centre, s’espacent autour d’u
1221
yantes au soleil. Les vingt-quatre gratte-ciel de
la
cité, au centre, s’espacent autour d’un aérodrome-gare circulaire, pr
1222
un aérodrome-gare circulaire, prismes perdus dans
le
silence de l’azur au-dessus des rumeurs de la ville. Puis s’étendent
1223
are circulaire, prismes perdus dans le silence de
l’
azur au-dessus des rumeurs de la ville. Puis s’étendent les quartiers
1224
ans le silence de l’azur au-dessus des rumeurs de
la
ville. Puis s’étendent les quartiers de résidence ; les jardins suspe
1225
u-dessus des rumeurs de la ville. Puis s’étendent
les
quartiers de résidence ; les jardins suspendus à tous les étages soul
1226
lle. Puis s’étendent les quartiers de résidence ;
les
jardins suspendus à tous les étages soulignent de verdure l’horizonta
1227
tiers de résidence ; les jardins suspendus à tous
les
étages soulignent de verdure l’horizontale des toitures en terrasses.
1228
suspendus à tous les étages soulignent de verdure
l’
horizontale des toitures en terrasses. Des perspectives régulières rec
1229
ives régulières recoupées à 200 et 400 mètres par
les
plans fuyants des rues immenses livrées au 100 à l’heure des autos. L
1230
plans fuyants des rues immenses livrées au 100 à
l’
heure des autos. Les maisons habitées ne sont plus que des enceintes t
1231
rues immenses livrées au 100 à l’heure des autos.
Les
maisons habitées ne sont plus que des enceintes transparentes, et min
1232
es « redents » des terrains de jeux et des parcs,
la
nature annexée à la ville. « C’est un spectacle organisé par l’Archit
1233
errains de jeux et des parcs, la nature annexée à
la
ville. « C’est un spectacle organisé par l’Architecture avec les ress
1234
xée à la ville. « C’est un spectacle organisé par
l’
Architecture avec les ressources de la plastique qui est le jeu de for
1235
est un spectacle organisé par l’Architecture avec
les
ressources de la plastique qui est le jeu de formes sous la lumière »
1236
rganisé par l’Architecture avec les ressources de
la
plastique qui est le jeu de formes sous la lumière ». Cristallisation
1237
cture avec les ressources de la plastique qui est
le
jeu de formes sous la lumière ». Cristallisation d’un rêve de joie et
1238
ces de la plastique qui est le jeu de formes sous
la
lumière ». Cristallisation d’un rêve de joie et de raison où de grand
1239
stallisation d’un rêve de joie et de raison où de
grandes
ordonnances élèvent leur chant. Utopie ! Oui, si notre civilisation s
1240
iels formidables des ensembles soumis aux lois de
l’
esprit et de la vie sociale, non plus à un opportunisme anarchique. Ti
1241
s des ensembles soumis aux lois de l’esprit et de
la
vie sociale, non plus à un opportunisme anarchique. Tirer des lignes
1242
tunisme anarchique. Tirer des lignes droites, est
le
propre de l’homme. Toutes les civilisations fortes l’ont osé. Créer u
1243
hique. Tirer des lignes droites, est le propre de
l’
homme. Toutes les civilisations fortes l’ont osé. Créer un espace arch
1244
lignes droites, est le propre de l’homme. Toutes
les
civilisations fortes l’ont osé. Créer un espace architectural lumineu
1245
ropre de l’homme. Toutes les civilisations fortes
l’
ont osé. Créer un espace architectural lumineux à la place de nos cité
1246
ution. Déjà des ingénieurs se sont mis à calculer
la
réalisation de ce phénomène de haute poésie — la « ville contemporain
1247
la réalisation de ce phénomène de haute poésie —
la
« ville contemporaine ». Un labeur précis et anonyme concourt obscuré
1248
rément à cette parfaite expression du triomphe de
l’
homme sur la Nature. Architecture : « tout ce qui est au-delà du calcu
1249
te parfaite expression du triomphe de l’homme sur
la
Nature. Architecture : « tout ce qui est au-delà du calcul… Ce sera l
1250
re : « tout ce qui est au-delà du calcul… Ce sera
la
passion du siècle ». v. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Le Co
1251
cle ». v. Rougemont Denis de, « [Compte rendu]
Le
Corbusier, Urbanisme », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
1252
mprenons que nos œuvres, si elles furent faites à
l’
image de notre esprit, le lui rendent bien dans la suite ; c’est peut-
1253
si elles furent faites à l’image de notre esprit,
le
lui rendent bien dans la suite ; c’est peut-être pourquoi nous accord
1254
l’image de notre esprit, le lui rendent bien dans
la
suite ; c’est peut-être pourquoi nous accordons voix dans le débat d’
1255
c’est peut-être pourquoi nous accordons voix dans
le
débat d’écrire, aux forces les plus secrètes de notre être comme aux
1256
accordons voix dans le débat d’écrire, aux forces
les
plus secrètes de notre être comme aux calculs les plus rusés. Nous ch
1257
les plus secrètes de notre être comme aux calculs
les
plus rusés. Nous choisissons les idées comme on choisit un amour dont
1258
omme aux calculs les plus rusés. Nous choisissons
les
idées comme on choisit un amour dont on est anxieux de prévoir l’infl
1259
n choisit un amour dont on est anxieux de prévoir
l’
influence, avant de s’y jeter, et dont on craint de ressortir trop dif
1260
e réticences dont nous ne comprenons pas toujours
l’
objet. Peur de perdre le fil de la conscience de soi, peur de subir l’
1261
e comprenons pas toujours l’objet. Peur de perdre
le
fil de la conscience de soi, peur de subir l’empreinte imprévisible d
1262
ns pas toujours l’objet. Peur de perdre le fil de
la
conscience de soi, peur de subir l’empreinte imprévisible des choses.
1263
dre le fil de la conscience de soi, peur de subir
l’
empreinte imprévisible des choses. Amour de soi… Mais moi, qui suis-je
1264
is moi, qui suis-je ? Par ces trois mots commence
le
drame de toute vie. Ha ! Qui je suis ? Mais je le sens très bien ! je
1265
le drame de toute vie. Ha ! Qui je suis ? Mais je
le
sens très bien ! je sens très bien cette force — ici, je tape du pied
1266
r. Vous me direz qui je suis, mes amis ; quel est
le
vrai ? — Ils me proposent vingt visages que je puis à peine reconnaît
1267
gt visages que je puis à peine reconnaître. Reste
le
monde, — les choses, les faits, la vie, comme ils disent. Je me suis
1268
ue je puis à peine reconnaître. Reste le monde, —
les
choses, les faits, la vie, comme ils disent. Je me suis abandonné au
1269
peine reconnaître. Reste le monde, — les choses,
les
faits, la vie, comme ils disent. Je me suis abandonné au jeu du hasar
1270
nnaître. Reste le monde, — les choses, les faits,
la
vie, comme ils disent. Je me suis abandonné au jeu du hasard, jusqu’a
1271
suis abandonné au jeu du hasard, jusqu’au jour où
l’
on me fit comprendre qu’il n’est que le jeu de sauter follement d’une
1272
au jour où l’on me fit comprendre qu’il n’est que
le
jeu de sauter follement d’une habitude dans une autre. Il ne me resta
1273
supportables, si cruellement présentes et dures ?
La
cause de cette inadaptation, je la soupçonnais si grave, si fondament
1274
tes et dures ? La cause de cette inadaptation, je
la
soupçonnais si grave, si fondamentale que je préférais me leurrer à c
1275
e des imperfections de détail dont je m’exagérais
l’
importance. Et c’est ainsi par feintes que je progressais, jusqu’au jo
1276
mmer peur de rire. Cette amertume au fond de tous
les
plaisirs, cette envie de rire quand il m’arrivait un ennui, cette inc
1277
à pleurer sur mes déboires, ce malaise seul liait
les
personnages auxquels je me prêtais. Mais en même temps que je le déco
1278
auxquels je me prêtais. Mais en même temps que je
le
découvrais, dans tout mon être une force aveugle de violence s’était
1279
nce s’était levée. Ce fut elle qui m’entraîna sur
les
stades où je connus quelle confiance sourde aux contradictions intime
1280
our de cette brutalité s’organisaient brusquement
les
éléments désaccordés de ce moi que j’avais tant choyé. « Maintenant,
1281
e — c’était un des premiers jours du printemps —,
l’
heure est venue de la violence. Jeunes tempêtes, lavez, bousculez ! La
1282
emiers jours du printemps —, l’heure est venue de
la
violence. Jeunes tempêtes, lavez, bousculez ! La parole est aux insti
1283
la violence. Jeunes tempêtes, lavez, bousculez !
La
parole est aux instincts combatifs et dominateurs par quoi l’homme ne
1284
t aux instincts combatifs et dominateurs par quoi
l’
homme ne se distingue plus de l’animal. Louée soit ma force et tout ce
1285
inateurs par quoi l’homme ne se distingue plus de
l’
animal. Louée soit ma force et tout ce qui l’exalte, et tout ce qui la
1286
s de l’animal. Louée soit ma force et tout ce qui
l’
exalte, et tout ce qui la dompte, tout ce qui sourd en moi de trop gra
1287
ma force et tout ce qui l’exalte, et tout ce qui
la
dompte, tout ce qui sourd en moi de trop grand pour ma vie — toute ma
1288
e qui la dompte, tout ce qui sourd en moi de trop
grand
pour ma vie — toute ma joie ! » Ce n’était plus une douleur rare que
1289
’allais plier des résistances à mon gré, agir sur
les
choses… Vers le soir, l’ardeur tombe : agir ? dans quel sens ? Provis
1290
résistances à mon gré, agir sur les choses… Vers
le
soir, l’ardeur tombe : agir ? dans quel sens ? Provisoirement j’étais
1291
ces à mon gré, agir sur les choses… Vers le soir,
l’
ardeur tombe : agir ? dans quel sens ? Provisoirement j’étais sauvé d’
1292
s ? Provisoirement j’étais sauvé d’un désordre où
l’
on glisse vers la mort. L’important, c’est de ne pas se défaire. Mais
1293
t j’étais sauvé d’un désordre où l’on glisse vers
la
mort. L’important, c’est de ne pas se défaire. Mais rien n’était réso
1294
sauvé d’un désordre où l’on glisse vers la mort.
L’
important, c’est de ne pas se défaire. Mais rien n’était résolu. Me vo
1295
nt je sais qu’il est absolument vain de prétendre
les
résoudre, mais que je dois feindre d’avoir résolus : c’est ce qui s’a
1296
c’est ce qui s’appelle vivre. Problème de Dieu, à
la
base. J’aurai garde de m’y perdre au début d’une recherche qui n’a qu
1297
riant, je m’arrête parfois, heureux : « J’ai donc
la
foi ? » Mais c’est encore une question… Je crois qu’il ne faut pas at
1298
dans sa prière, qu’une révélation vienne chercher
l’
âme qui se sent misérable. Je ne recevrai pas une foi, mais peut-être
1299
cevrai pas une foi, mais peut-être arriverai-je à
la
vouloir, et c’est le tout. S’il est une révélation, c’est en me renda
1300
ais peut-être arriverai-je à la vouloir, et c’est
le
tout. S’il est une révélation, c’est en me rendant plus parfait que j
1301
en me rendant plus parfait que je lui préparerai
les
voies. Agir ? Sur moi d’abord. Il ne faut plus que je respecte tout e
1302
nir. Se perfectionner : cela consiste à retrouver
l’
instinct le plus profond de l’homme, la vertu conservatrice qui ne peu
1303
fectionner : cela consiste à retrouver l’instinct
le
plus profond de l’homme, la vertu conservatrice qui ne peut dicter qu
1304
onsiste à retrouver l’instinct le plus profond de
l’
homme, la vertu conservatrice qui ne peut dicter que les gestes les pl
1305
retrouver l’instinct le plus profond de l’homme,
la
vertu conservatrice qui ne peut dicter que les gestes les plus favora
1306
me, la vertu conservatrice qui ne peut dicter que
les
gestes les plus favorables. J’ai d’autres instincts et je n’entends p
1307
u conservatrice qui ne peut dicter que les gestes
les
plus favorables. J’ai d’autres instincts et je n’entends pas tous les
1308
J’ai d’autres instincts et je n’entends pas tous
les
cultiver pour cela seul qu’ils sont naturels : la nature est un champ
1309
es cultiver pour cela seul qu’ils sont naturels :
la
nature est un champ de luttes, de tendances vers la destruction et ve
1310
nature est un champ de luttes, de tendances vers
la
destruction et vers la construction ; c’est un mélange à doses égales
1311
luttes, de tendances vers la destruction et vers
la
construction ; c’est un mélange à doses égales de mort et de vie. Et
1312
ange à doses égales de mort et de vie. Et c’est à
l’
intelligence de faire primer la vie, puisque n’est pas encore parfait
1313
de vie. Et c’est à l’intelligence de faire primer
la
vie, puisque n’est pas encore parfait cet instinct qui est la Vertu.
1314
que n’est pas encore parfait cet instinct qui est
la
Vertu. Ma vertu est de chercher cette Vertu ; de me replacer dans le
1315
est de chercher cette Vertu ; de me replacer dans
le
sens de ma vie ; de rendre toutes mes forces complices de mon destin.
1316
in. D’abord donc, choisir Mes instincts, ensuite,
les
éduquer, selon des lois établies par le concours de l’expérience et d
1317
ensuite, les éduquer, selon des lois établies par
le
concours de l’expérience et d’un sentiment de convenance en quoi se c
1318
uquer, selon des lois établies par le concours de
l’
expérience et d’un sentiment de convenance en quoi se composent le pla
1319
d’un sentiment de convenance en quoi se composent
le
plaisir et la conscience de Mes limites. Je m’attache particulièremen
1320
de convenance en quoi se composent le plaisir et
la
conscience de Mes limites. Je m’attache particulièrement à retrouver
1321
ttache particulièrement à retrouver ces limites :
la
vie moderne, mécanique, nous les fait oublier, d’où cette fatigue gén
1322
ver ces limites : la vie moderne, mécanique, nous
les
fait oublier, d’où cette fatigue générale qui fausse tout, et qui s’o
1323
usse tout, et qui s’oppose au perfectionnement de
l’
esprit, puisqu’elle ne permet que des associations suivant les directi
1324
uisqu’elle ne permet que des associations suivant
les
directions de moindre résistance. Mais je ne m’emprisonnerai pas dans
1325
isonnerai pas dans ces limites. Ma liberté est de
les
porter plus loin sans cesse, de battre mes propres records. De ce len
1326
une certaine méfiance vis-à-vis de ma sincérité.
La
sincérité m’apparaît parfois comme un arrêt artificiel dans ma vie, u
1327
re dangereuse. (On donne corps à une faiblesse en
la
nommant ; or je ne veux plus de faiblesses4.) Et demain peut-être, ag
1328
s de faiblesses4.) Et demain peut-être, agir dans
le
monde, si je m’en suis d’abord rendu digne. L’époque nous veut, comme
1329
ns le monde, si je m’en suis d’abord rendu digne.
L’
époque nous veut, comme elle veut une conscience. Je fais partie d’un
1330
ence. Je fais partie d’un ensemble social et dans
la
mesure où j’en dépends, je me dois de m’employer à sa sauvegarde ou à
1331
ormation. Mais il y faut une doctrine, me dit-on.
L’
avouerai-je, quand je médite sur une doctrine possible, sur une systém
1332
sation de mes petites certitudes5, j’éprouve vite
le
sentiment d’être dans un débat étranger à ce véritable débat de ma vi
1333
alaise sans cesse renaissant, comment m’adapter à
l’
existence que m’imposent mon corps et les lois du monde, et comment au
1334
adapter à l’existence que m’imposent mon corps et
les
lois du monde, et comment augmenter ma puissance de jouir, en même te
1335
agir. Que tout cela s’agite sur fond de néant, je
le
comprends par éclairs, mais une secrète espérance m’emporte de nouvea
1336
orte de nouveau, premier gage du divin… Reprendre
l’
offensive — au soir, je m’amuserai à mettre des étiquettes sur mes act
1337
un peu mes lèvres, et s’affirmer à mesure que je
le
décris. Mais comme un écho profond, une attirance aussi d’anciennes f
1338
ie, dégoût, lueurs éteintes dans une nuit froide.
Les
notes d’un chant qui voudrait s’élever. Puis enfin la marée de mes dé
1339
otes d’un chant qui voudrait s’élever. Puis enfin
la
marée de mes désirs. Qu’ils viennent battre ce corps triste, qu’ils l
1340
s. Qu’ils viennent battre ce corps triste, qu’ils
l’
emportent d’un flot fou ! Revenez, mes joies du large !… Tiens, j’écou
1341
! Revenez, mes joies du large !… Tiens, j’écoute
le
vent ; je pense au monde. Chant des horizons, images qui s’éclairent…
1342
er son plaisir ? Je reste candidat au salut. 4.
La
sincérité absolue, « scientifique » me paraît aller contre fin. Une a
1343
e et soutenue modifie son objet vivant. Pour moi,
la
sincérité ne peut être que spontanée. Et spontanément je suis porté à
1344
périences ratées on puisse encore se persuader de
la
vérité d’un système, hors la religion. Un système n’est pas vrai, il
1345
core se persuader de la vérité d’un système, hors
la
religion. Un système n’est pas vrai, il est utile. C’est pourquoi je
1346
l est utile. C’est pourquoi je ne puis comprendre
les
excommunications et les intransigeances. Toutes les aspirations me pa
1347
uoi je ne puis comprendre les excommunications et
les
intransigeances. Toutes les aspirations me paraissent légitimes chez
1348
s excommunications et les intransigeances. Toutes
les
aspirations me paraissent légitimes chez d’autres, même celles que je
1349
Rougemont Denis de, « Confession tendancieuse »,
Les
Cahiers du mois, Paris, juin 1926, p. 144-148.
1350
e construction et de synthèse qui se dessine chez
les
jeunes écrivains d’aujourd’hui. La « critique philosophique » qu’il v
1351
dessine chez les jeunes écrivains d’aujourd’hui.
La
« critique philosophique » qu’il voudrait inaugurer « ne se contenter
1352
rait inaugurer « ne se contenterait pas d’étudier
les
œuvres pour elles-mêmes dans leur signification historique ou techniq
1353
historique ou technique, mais tâcherait d’épouser
le
dynamisme spirituel qu’elle révèle, puis de les situer dans l’univers
1354
er le dynamisme spirituel qu’elle révèle, puis de
les
situer dans l’univers humain ». M. Fernandez a tout le talent qu’il f
1355
spirituel qu’elle révèle, puis de les situer dans
l’
univers humain ». M. Fernandez a tout le talent qu’il faut pour lui fa
1356
tuer dans l’univers humain ». M. Fernandez a tout
le
talent qu’il faut pour lui faire acquérir droit de cité. Voici enfin
1357
eçon constructive des expériences entreprises par
les
générations précédentes. Parce qu’elles se sont souvent enlisées dans
1358
ont souvent enlisées dans leurs recherches, il ne
les
condamne pas d’un « Jugement » sans issue sinon vers le passé catholi
1359
damne pas d’un « Jugement » sans issue sinon vers
le
passé catholique ; mais tenant compte de leur effort, il puise dans l
1360
mais tenant compte de leur effort, il puise dans
l’
échec même de leurs analyses les éléments de sa synthèse, qui se trouv
1361
ort, il puise dans l’échec même de leurs analyses
les
éléments de sa synthèse, qui se trouve ainsi continuer leur œuvre, co
1362
verte couronne une série d’expériences négatives.
La
critique de ces expériences négatives est contenue surtout dans ses e
1363
st, Pater et Stendhal. Certes, il était temps que
l’
on dénonce la confusion romantique de l’art avec la vie, qui empoisonn
1364
Stendhal. Certes, il était temps que l’on dénonce
la
confusion romantique de l’art avec la vie, qui empoisonne et la moral
1365
temps que l’on dénonce la confusion romantique de
l’
art avec la vie, qui empoisonne et la morale et l’esthétique modernes.
1366
’on dénonce la confusion romantique de l’art avec
la
vie, qui empoisonne et la morale et l’esthétique modernes. Et à ce pr
1367
omantique de l’art avec la vie, qui empoisonne et
la
morale et l’esthétique modernes. Et à ce propos, il faut souhaiter qu
1368
l’art avec la vie, qui empoisonne et la morale et
l’
esthétique modernes. Et à ce propos, il faut souhaiter que M. Fernande
1369
ut souhaiter que M. Fernandez aborde par ce biais
l’
œuvre de Gide, qui plus qu’aucune autre me paraît liée à cette confusi
1370
à cette confusion. Mais s’il est bien établi que
les
lois de la vie sont essentiellement différentes des lois de l’œuvre d
1371
fusion. Mais s’il est bien établi que les lois de
la
vie sont essentiellement différentes des lois de l’œuvre d’art, il ne
1372
vie sont essentiellement différentes des lois de
l’
œuvre d’art, il ne s’en suit pas forcément que l’on doit nier toute co
1373
l’œuvre d’art, il ne s’en suit pas forcément que
l’
on doit nier toute communication directe entre l’œuvre et le moi, comm
1374
l’on doit nier toute communication directe entre
l’
œuvre et le moi, comme le fait M. Fernandez dans un essai sur l’Autobi
1375
nier toute communication directe entre l’œuvre et
le
moi, comme le fait M. Fernandez dans un essai sur l’Autobiographie e
1376
munication directe entre l’œuvre et le moi, comme
le
fait M. Fernandez dans un essai sur l’Autobiographie et le Roman, do
1377
moi, comme le fait M. Fernandez dans un essai sur
l’
Autobiographie et le Roman, dont pour ma part je suis loin d’admettre
1378
Fernandez dans un essai sur l’Autobiographie et
le
Roman, dont pour ma part je suis loin d’admettre plusieurs thèses bea
1379
es. M. Fernandez tente de prouver par exemple que
l’
œuvre d’art ne peut être un moyen de connaissance personnelle. Après q
1380
voir se concevoir et s’essayer. » Fort bien, mais
l’
œuvre n’est-elle pas une façon particulière de s’essayer ? Je ne puis
1381
e discussion de ces thèses subtiles, d’autant que
la
position de l’auteur dans cet essai me paraît encore ambiguë : on peu
1382
ces thèses subtiles, d’autant que la position de
l’
auteur dans cet essai me paraît encore ambiguë : on peut se demander s
1383
e ambiguë : on peut se demander s’il nie vraiment
l’
interaction de la vie et de l’art, ou s’il la condamne plutôt, à cause
1384
ut se demander s’il nie vraiment l’interaction de
la
vie et de l’art, ou s’il la condamne plutôt, à cause des confusions q
1385
r s’il nie vraiment l’interaction de la vie et de
l’
art, ou s’il la condamne plutôt, à cause des confusions qu’il y décèle
1386
ment l’interaction de la vie et de l’art, ou s’il
la
condamne plutôt, à cause des confusions qu’il y décèle. Le meilleur m
1387
ne plutôt, à cause des confusions qu’il y décèle.
Le
meilleur morceau du livre est l’essai sur Proust et sa théorie des «
1388
qu’il y décèle. Le meilleur morceau du livre est
l’
essai sur Proust et sa théorie des « intermittences du cœur » dont Fer
1389
que décisive. Et c’est justement par opposition à
la
conception proustienne de la personnalité — « mosaïque de sensations
1390
ent par opposition à la conception proustienne de
la
personnalité — « mosaïque de sensations juxtaposées » — qu’il définit
1391
uxtaposées » — qu’il définit sa propre théorie de
la
« garantie des sentiments », où l’on est en droit de voir le germe d’
1392
pre théorie de la « garantie des sentiments », où
l’
on est en droit de voir le germe d’un moralisme nouveau qui se fondera
1393
ie des sentiments », où l’on est en droit de voir
le
germe d’un moralisme nouveau qui se fonderait solidement sur les donn
1394
moralisme nouveau qui se fonderait solidement sur
les
données modernes de la psychologie et de la philosophie. Pour nous pr
1395
fonderait solidement sur les données modernes de
la
psychologie et de la philosophie. Pour nous prémunir contre le pouvoi
1396
sur les données modernes de la psychologie et de
la
philosophie. Pour nous prémunir contre le pouvoir d’analyse — une ana
1397
e et de la philosophie. Pour nous prémunir contre
le
pouvoir d’analyse — une analyse qui retient les éléments de la person
1398
re le pouvoir d’analyse — une analyse qui retient
les
éléments de la personnalité moins le « principe unificateur » — que l
1399
analyse — une analyse qui retient les éléments de
la
personnalité moins le « principe unificateur » — que la psychologie f
1400
qui retient les éléments de la personnalité moins
le
« principe unificateur » — que la psychologie freudienne et proustien
1401
sonnalité moins le « principe unificateur » — que
la
psychologie freudienne et proustienne a porté à un point si dangereux
1402
a porté à un point si dangereux, il nous propose
l’
expérience d’un Newman, les exemples d’un Meredith et d’un Stendhal, q
1403
gereux, il nous propose l’expérience d’un Newman,
les
exemples d’un Meredith et d’un Stendhal, qui ont su « penser dans le
1404
redith et d’un Stendhal, qui ont su « penser dans
le
train de l’action, faire de la psychologie à la volée », et donc conn
1405
un Stendhal, qui ont su « penser dans le train de
l’
action, faire de la psychologie à la volée », et donc connaître l’homm
1406
t su « penser dans le train de l’action, faire de
la
psychologie à la volée », et donc connaître l’homme dans l’élan qui f
1407
s le train de l’action, faire de la psychologie à
la
volée », et donc connaître l’homme dans l’élan qui fait sa véritable
1408
de la psychologie à la volée », et donc connaître
l’
homme dans l’élan qui fait sa véritable unité. Je me borne à signaler
1409
ogie à la volée », et donc connaître l’homme dans
l’
élan qui fait sa véritable unité. Je me borne à signaler encore un thè
1410
thème qui revient dans la plupart de ces essais :
l’
esthétique du roman. Fernandez en formule une théorie assez proche du
1411
téraire, et qu’il serait bien utile d’adopter, si
l’
on veut éviter les confusions qui sont en train d’ôter sa valeur litté
1412
serait bien utile d’adopter, si l’on veut éviter
les
confusions qui sont en train d’ôter sa valeur littéraire au genre le
1413
ont en train d’ôter sa valeur littéraire au genre
le
plus encombré et le plus impur qui soit. On n’a pas ménagé les critiq
1414
sa valeur littéraire au genre le plus encombré et
le
plus impur qui soit. On n’a pas ménagé les critiques à cette œuvre. C
1415
mbré et le plus impur qui soit. On n’a pas ménagé
les
critiques à cette œuvre. Cela tient surtout à sa forme : il est parfo
1416
forme : il est parfois agaçant de pressentir sous
l’
expression trop technique ou obscure, une richesse d’idées neuves et f
1417
Périlleuse situation que la sienne, en effet, où
l’
on court le double risque de paraître trop littéraire aux philosophes,
1418
situation que la sienne, en effet, où l’on court
le
double risque de paraître trop littéraire aux philosophes, et trop ph
1419
ndez un certain recul par rapport à ses idées, on
le
sent un peu gauche encore dans les positions conquises. Il n’empêche
1420
à ses idées, on le sent un peu gauche encore dans
les
positions conquises. Il n’empêche que son livre manifeste une belle u
1421
uvre comme Plaisir des Sports de Jean Prévost, et
les
essais politiques de Drieu la Rochelle, les Messages de Fernandez son
1422
t, et les essais politiques de Drieu la Rochelle,
les
Messages de Fernandez sont les premières contributions à l’établissem
1423
s de Fernandez sont les premières contributions à
l’
établissement d’une éthique adaptée aux besoins modernes. w. Rougem
1424
Les
Bestiaires, par Henry de Montherlant (10 juillet 1926)h Je ferme l
1425
nry de Montherlant (10 juillet 1926)h Je ferme
les
Bestiaires, et me tirant hors de ce « long songe de violence et de vo
1426
ffées par des forces qui se lèvent. Car telle est
la
vertu de ce livre, qu’on l’éprouve d’abord trop vivement pour le juge
1427
lèvent. Car telle est la vertu de ce livre, qu’on
l’
éprouve d’abord trop vivement pour le juger. L’auteur l’appelle un « p
1428
livre, qu’on l’éprouve d’abord trop vivement pour
le
juger. L’auteur l’appelle un « poème solaire », l’éditeur un roman, p
1429
on l’éprouve d’abord trop vivement pour le juger.
L’
auteur l’appelle un « poème solaire », l’éditeur un roman, parce que ç
1430
uve d’abord trop vivement pour le juger. L’auteur
l’
appelle un « poème solaire », l’éditeur un roman, parce que ça se vend
1431
e juger. L’auteur l’appelle un « poème solaire »,
l’
éditeur un roman, parce que ça se vend mieux. Ce récit des premiers co
1432
e, sans cette orchestration de thèmes qui faisait
la
richesse du Songe, mais d’une ligne plus ferme, d’une unité plus pure
1433
ne ligne plus ferme, d’une unité plus pure aussi.
Le
sujet était périlleux : si particulier, il prêtait à des abus de pitt
1434
n’a pas toujours échappé, mais qu’il domine dans
l’
ensemble et entraîne dans l’allure puissante à la fois et désinvolte d
1435
ais qu’il domine dans l’ensemble et entraîne dans
l’
allure puissante à la fois et désinvolte de son récit. On a souvent pa
1436
emiers ouvrages de Montherlant. Cette fois-ci, on
le
traite de naturaliste. Mais comment montrer des taureaux sans que cel
1437
t montrer des taureaux sans que cela sente un peu
l’
étable ? L’étonnant, c’est de voir à quel point Montherlant reste poèt
1438
es taureaux sans que cela sente un peu l’étable ?
L’
étonnant, c’est de voir à quel point Montherlant reste poète jusque da
1439
à quel point Montherlant reste poète jusque dans
la
description la plus réaliste de la vie animale. Et n’est-ce pas juste
1440
ontherlant reste poète jusque dans la description
la
plus réaliste de la vie animale. Et n’est-ce pas justement parce qu’i
1441
te jusque dans la description la plus réaliste de
la
vie animale. Et n’est-ce pas justement parce qu’il est poète qu’il pe
1442
out rôdent des présences animales. Tandis que sur
la
plaine s’élève le long beuglement des taureaux et le ohéohéohé des bo
1443
sences animales. Tandis que sur la plaine s’élève
le
long beuglement des taureaux et le ohéohéohé des bouviers « comme un
1444
plaine s’élève le long beuglement des taureaux et
le
ohéohéohé des bouviers « comme un chant mystérieux entendu au-dessus
1445
« comme un chant mystérieux entendu au-dessus de
la
mer », il y a toujours dans un coin du tableau des ruades, des chevau
1446
u des ruades, des chevaux qui partent tout droit,
la
tête dressée, des vachettes qui se mordillent et se frôlent amoureuse
1447
bêtes de désir ». Une intelligence si profonde de
la
vie animale suppose entre l’homme et la bête une sympathie que Monthe
1448
gence si profonde de la vie animale suppose entre
l’
homme et la bête une sympathie que Montherlant note à plusieurs repris
1449
ofonde de la vie animale suppose entre l’homme et
la
bête une sympathie que Montherlant note à plusieurs reprises. C’est «
1450
ontherlant note à plusieurs reprises. C’est « par
la
divination de cet amour qu’Alban (le jeune héros du récit) sent ce qu
1451
C’est « par la divination de cet amour qu’Alban (
le
jeune héros du récit) sent ce que sent la bête en même temps qu’elle.
1452
’Alban (le jeune héros du récit) sent ce que sent
la
bête en même temps qu’elle. Et parce qu’il sait ce qu’elle va faire,
1453
Et parce qu’il sait ce qu’elle va faire, il peut
la
dominer… : on ne vainc vraiment que ce qu’on aime, et les victorieux
1454
ner… : on ne vainc vraiment que ce qu’on aime, et
les
victorieux sont d’immenses amants »6. Mais envers les taureaux cet am
1455
victorieux sont d’immenses amants »6. Mais envers
les
taureaux cet amour tourne en adoration ou en une véritable horreur sa
1456
Voici Alban devant une bête qu’il devra combattre
le
lendemain : « Salaud, cochon, saligaud ! » Il l’apostrophait ainsi t
1457
le lendemain : « Salaud, cochon, saligaud ! » Il
l’
apostrophait ainsi tout bas, sur un ton révérenciel, et comme on dérou
1458
évérenciel, et comme on déroule une litanie. Sous
les
grands cils brillants, lustrés par la lumière descendante, les prunel
1459
enciel, et comme on déroule une litanie. Sous les
grands
cils brillants, lustrés par la lumière descendante, les prunelles lai
1460
anie. Sous les grands cils brillants, lustrés par
la
lumière descendante, les prunelles laiteuses du dieu avaient un refle
1461
ls brillants, lustrés par la lumière descendante,
les
prunelles laiteuses du dieu avaient un reflet bleu clair, soudain inq
1462
avaient un reflet bleu clair, soudain inquiètes à
l’
approche de l’inconnu. Nulle part mieux que dans la description des t
1463
let bleu clair, soudain inquiètes à l’approche de
l’
inconnu. Nulle part mieux que dans la description des taureaux ne se
1464
approche de l’inconnu. Nulle part mieux que dans
la
description des taureaux ne se manifeste ce passage du réalisme le pl
1465
s taureaux ne se manifeste ce passage du réalisme
le
plus hardi à un lyrisme plein de simple grandeur. Voici la mort du ta
1466
ardi à un lyrisme plein de simple grandeur. Voici
la
mort du taureau dit « le Mauvais Ange » : La bête chancela de l’arri
1467
e simple grandeur. Voici la mort du taureau dit «
le
Mauvais Ange » : La bête chancela de l’arrière-train, tenta de se ra
1468
ici la mort du taureau dit « le Mauvais Ange » :
La
bête chancela de l’arrière-train, tenta de se raidir, enfin croula su
1469
au dit « le Mauvais Ange » : La bête chancela de
l’
arrière-train, tenta de se raidir, enfin croula sur le flanc, accompli
1470
rière-train, tenta de se raidir, enfin croula sur
le
flanc, accomplissant sa destinée. Quelques secondes encore elle clign
1471
rent peu à peu, comme un corps qu’on gonflerait à
la
pompe, tandis que dans cet agrandissement les articulations grinçaien
1472
it à la pompe, tandis que dans cet agrandissement
les
articulations grinçaient, avec le bruit d’un câble de navire qu’on se
1473
agrandissement les articulations grinçaient, avec
le
bruit d’un câble de navire qu’on serre sur un treuil. Elle arriva ave
1474
n serre sur un treuil. Elle arriva avec emphase à
la
cime de son spasme, comme l’homme à la cime de son plaisir, et comme
1475
rriva avec emphase à la cime de son spasme, comme
l’
homme à la cime de son plaisir, et comme lui, elle y resta immobile. E
1476
emphase à la cime de son spasme, comme l’homme à
la
cime de son plaisir, et comme lui, elle y resta immobile. Et son âme
1477
t son âme divine s’échappa, pleurant ses jeux, et
les
génisses, et la chère plaine. De tels passages qui abondent dans les
1478
s’échappa, pleurant ses jeux, et les génisses, et
la
chère plaine. De tels passages qui abondent dans les Bestiaires font
1479
chère plaine. De tels passages qui abondent dans
les
Bestiaires font pardonner bien d’autres pages de vrais délires taurol
1480
utres pages de vrais délires taurologiques. Quand
le
lyrisme de Montherlant décolle de la réalité, c’est tout de suite une
1481
iques. Quand le lyrisme de Montherlant décolle de
la
réalité, c’est tout de suite une orgie d’évocations antiques, de rapp
1482
ons antiques, de rapprochements superstitieux, de
grands
symboles païens, et l’on se perd dans un syncrétisme effarant, où Mit
1483
ents superstitieux, de grands symboles païens, et
l’
on se perd dans un syncrétisme effarant, où Mithra, Jésus, les taureau
1484
d dans un syncrétisme effarant, où Mithra, Jésus,
les
taureaux et Alban confondent leurs génies dans une sorte de cauchemar
1485
e qu’on veut de ce paganisme exalté, tout ivre de
la
fumée des sacrifices sanglants. Pour ma part, je le trouve assez peu
1486
fumée des sacrifices sanglants. Pour ma part, je
le
trouve assez peu humain et comme obsédé par une idée de violence toni
1487
utôt stoïcien, celui-là. Et c’est un moraliste de
grande
race, qui peut nous mener à des hauteurs où devient naturel ce cri de
1488
s donnons ? » ⁂ Il est impossible de ne voir dans
les
Bestiaires qu’une évocation de l’Espagne et du génie taurin. Ce qui p
1489
e ne voir dans les Bestiaires qu’une évocation de
l’
Espagne et du génie taurin. Ce qui perce à chaque page, ce qui peu à p
1490
perce à chaque page, ce qui peu à peu obsède dans
l’
inflexion des phrases, ce qui s’élève en fin de compte de tous ces tab
1491
ous ces tableaux de violence et de passion, c’est
la
présence d’un tempérament. À l’inverse de tant d’autres qui s’analyse
1492
de passion, c’est la présence d’un tempérament. À
l’
inverse de tant d’autres qui s’analysent sans fin, avant que d’être, M
1493
lui. Certes, il ne soulève directement aucun des
grands
problèmes de l’heure. La violence même qui sourd dans son être intime
1494
soulève directement aucun des grands problèmes de
l’
heure. La violence même qui sourd dans son être intime l’en empêche, l
1495
irectement aucun des grands problèmes de l’heure.
La
violence même qui sourd dans son être intime l’en empêche, le préserv
1496
. La violence même qui sourd dans son être intime
l’
en empêche, le préserve des états d’incertitude douloureux, où ces pro
1497
même qui sourd dans son être intime l’en empêche,
le
préserve des états d’incertitude douloureux, où ces problèmes viennen
1498
douloureux, où ces problèmes viennent se poser à
l’
esprit, profitant de son désaccord avec la vie. Ni métaphysicien, ni l
1499
poser à l’esprit, profitant de son désaccord avec
la
vie. Ni métaphysicien, ni logicien, dit-il d’Alban — (de lui-même) —
1500
pas à ce qui est triste ou ennuyeux, que ce soit
l’
idée de la mort ou les soucis politiques, sociaux, etc., et il ne met
1501
qui est triste ou ennuyeux, que ce soit l’idée de
la
mort ou les soucis politiques, sociaux, etc., et il ne met de la grav
1502
ste ou ennuyeux, que ce soit l’idée de la mort ou
les
soucis politiques, sociaux, etc., et il ne met de la gravité que dans
1503
soucis politiques, sociaux, etc., et il ne met de
la
gravité que dans les choses voluptueuses, je n’ai pas dit les choses
1504
ociaux, etc., et il ne met de la gravité que dans
les
choses voluptueuses, je n’ai pas dit les choses sentimentales. Le tra
1505
que dans les choses voluptueuses, je n’ai pas dit
les
choses sentimentales. Le tragique de la vie ne lui échappe pas. Il en
1506
ueuses, je n’ai pas dit les choses sentimentales.
Le
tragique de la vie ne lui échappe pas. Il en parle, il le chante avec
1507
pas dit les choses sentimentales. Le tragique de
la
vie ne lui échappe pas. Il en parle, il le chante avec pathétique. Ma
1508
que de la vie ne lui échappe pas. Il en parle, il
le
chante avec pathétique. Mais c’est parce qu’il est poète : le chant f
1509
ec pathétique. Mais c’est parce qu’il est poète :
le
chant fini, il n’y pense plus. On comprend qu’une telle attitude agac
1510
se soucient avant tout de trouver des réponses de
l’
intelligence ou de la foi aux inquiétudes profondes de leurs âmes sépa
1511
t de trouver des réponses de l’intelligence ou de
la
foi aux inquiétudes profondes de leurs âmes séparées de Dieu. Monther
1512
é dont il manifeste avec une magnifique insolence
les
forces créatrices, ne vaut-elle pas d’être élevée en témoignage pour
1513
levée en témoignage pour notre exaltation ? Comme
la
vue des athlètes en action, un tel livre communique une puissance phy
1514
munique une puissance physique, un mouvement vers
la
vie ardente qui peut entraîner l’âme dans un élan de grandeur. N’est-
1515
mouvement vers la vie ardente qui peut entraîner
l’
âme dans un élan de grandeur. N’est-ce point une solution aussi ? Plut
1516
ois à ces forces obscures qui nous replacent dans
l’
intelligence de l’instinct universel et nous élèvent à une vie plus âp
1517
bscures qui nous replacent dans l’intelligence de
l’
instinct universel et nous élèvent à une vie plus âpre et violemment c
1518
à une vie plus âpre et violemment contractée, par
la
grâce de l’éternel Désir ? 6. Il est curieux de noter que de tels p
1519
us âpre et violemment contractée, par la grâce de
l’
éternel Désir ? 6. Il est curieux de noter que de tels passages vien
1520
noter que de tels passages viennent à l’appui de
la
théorie de l’instinct de Bergson. Bergson suppose aussi entre le sphe
1521
tels passages viennent à l’appui de la théorie de
l’
instinct de Bergson. Bergson suppose aussi entre le sphex qui pique un
1522
’instinct de Bergson. Bergson suppose aussi entre
le
sphex qui pique une chenille précisément aux trois-centres nerveux, e
1523
« une sympathie (au sens étymologique du mot) qui
la
renseigne du dedans, pour ainsi dire, sur la vulnérabilité de la chen
1524
qui la renseigne du dedans, pour ainsi dire, sur
la
vulnérabilité de la chenille. » (Évolution créatrice, p. 188) Je n’ai
1525
dedans, pour ainsi dire, sur la vulnérabilité de
la
chenille. » (Évolution créatrice, p. 188) Je n’ai pas la place de cit
1526
ille. » (Évolution créatrice, p. 188) Je n’ai pas
la
place de citer ici plusieurs autres passages qui préciseraient ce par
1527
Denis de, « [Compte rendu] Henry de Montherlant,
Les
Bestiaires », La Semaine littéraire, Genève, 10 juillet 1926, p. 335
1528
e rendu] Henry de Montherlant, Les Bestiaires »,
La
Semaine littéraire, Genève, 10 juillet 1926, p. 335.
1529
Le
Dépaysement oriental (16 juillet 1926)a Il y a dans le monde intel
1530
sement oriental (16 juillet 1926)a Il y a dans
le
monde intellectuel une « Question d’Orient » dont on ne peut plus méc
1531
stion d’Orient » dont on ne peut plus méconnaître
l’
urgence. Des prophètes — hindous à demi-européanisés ou germains désil
1532
nisés ou germains désillusionnés — nous annoncent
le
« crépuscule du monde occidental », et, au-dessus des ruines prochain
1533
chaines de nos cités mécaniciennes, ils rallument
le
mirage d’un Orient paradisiaque d’où nous viendraient une fois de plu
1534
radisiaque d’où nous viendraient une fois de plus
la
sagesse et la lumière. De récentes enquêtes ont dénoncé certaines des
1535
ù nous viendraient une fois de plus la sagesse et
la
lumière. De récentes enquêtes ont dénoncé certaines des confusions su
1536
inaires. Beaucoup pourtant subsistent encore. Or,
le
nouveau livre de M. de Traz1, par les précisions importantes qu’il ap
1537
encore. Or, le nouveau livre de M. de Traz1, par
les
précisions importantes qu’il apporte sur les rapports de l’Orient et
1538
par les précisions importantes qu’il apporte sur
les
rapports de l’Orient et de l’Europe, me paraît destiné à lever plusie
1539
ons importantes qu’il apporte sur les rapports de
l’
Orient et de l’Europe, me paraît destiné à lever plusieurs des plus te
1540
qu’il apporte sur les rapports de l’Orient et de
l’
Europe, me paraît destiné à lever plusieurs des plus tenaces de ces co
1541
us tenaces de ces confusions. M. de Traz a visité
l’
Égypte, ses habitants, ses tombeaux et son passé, en curieux avide du
1542
avec une sorte d’acharnement, comme seul il sait
l’
être aujourd’hui sans que cela nuise en rien à un don de sympathie qui
1543
ise en rien à un don de sympathie qui est parfois
la
plus subtile de ses ruses de psychologue. C’est parce que son livre,
1544
hevés, n’est ni un album de vues pittoresques, ni
le
journal plus ou moins lyrique auquel nous ont habitués les voyageurs
1545
al plus ou moins lyrique auquel nous ont habitués
les
voyageurs en Orient, mais une suite de coups d’œil aigus sur l’âme or
1546
n Orient, mais une suite de coups d’œil aigus sur
l’
âme orientale de l’islam, que nous l’avons lu avec un intérêt si soute
1547
suite de coups d’œil aigus sur l’âme orientale de
l’
islam, que nous l’avons lu avec un intérêt si soutenu et parfois — je
1548
il aigus sur l’âme orientale de l’islam, que nous
l’
avons lu avec un intérêt si soutenu et parfois — je pense à certaines
1549
tie orientale de lui-même, comme c’est si souvent
le
cas, mais bien sur l’Orient. Encore faut-il s’entendre : les meilleur
1550
ême, comme c’est si souvent le cas, mais bien sur
l’
Orient. Encore faut-il s’entendre : les meilleurs documents sur l’Orie
1551
is bien sur l’Orient. Encore faut-il s’entendre :
les
meilleurs documents sur l’Orient sont les œuvres des Orientaux. L’int
1552
faut-il s’entendre : les meilleurs documents sur
l’
Orient sont les œuvres des Orientaux. L’intérêt d’un livre comme celui
1553
endre : les meilleurs documents sur l’Orient sont
les
œuvres des Orientaux. L’intérêt d’un livre comme celui-ci est plus da
1554
ments sur l’Orient sont les œuvres des Orientaux.
L’
intérêt d’un livre comme celui-ci est plus dans l’opposition des deux
1555
L’intérêt d’un livre comme celui-ci est plus dans
l’
opposition des deux mondes que dans la peinture elle-même de l’Orient.
1556
t plus dans l’opposition des deux mondes que dans
la
peinture elle-même de l’Orient. Tandis que s’accumulent les traits qu
1557
des deux mondes que dans la peinture elle-même de
l’
Orient. Tandis que s’accumulent les traits qui composent le portrait m
1558
re elle-même de l’Orient. Tandis que s’accumulent
les
traits qui composent le portrait moral de l’Oriental, celui de l’Euro
1559
Tandis que s’accumulent les traits qui composent
le
portrait moral de l’Oriental, celui de l’Européen se précise dans la
1560
ent les traits qui composent le portrait moral de
l’
Oriental, celui de l’Européen se précise dans la même mesure, — et aus
1561
mposent le portrait moral de l’Oriental, celui de
l’
Européen se précise dans la même mesure, — et aussi la figure de l’aut
1562
e l’Oriental, celui de l’Européen se précise dans
la
même mesure, — et aussi la figure de l’auteur : car il n’est guère de
1563
ropéen se précise dans la même mesure, — et aussi
la
figure de l’auteur : car il n’est guère de comparaison valable qu’ent
1564
cise dans la même mesure, — et aussi la figure de
l’
auteur : car il n’est guère de comparaison valable qu’entre individus,
1565
er mieux que lui-même. S’il dit des Égyptiens : «
Le
mensonge, autant qu’une politesse, leur paraît une beauté », c’est po
1566
par contraste une « préférence irréductible pour
le
vrai ». Ce qui lui permet de voir profond dans cet islam qu’il qualif
1567
cet islam qu’il qualifie de « religion du fil de
l’
eau », ou de « prodigieux stupéfiant », tandis que « l’attrait du chri
1568
», ou de « prodigieux stupéfiant », tandis que «
l’
attrait du christianisme est dans l’inquiétude qu’il nous inflige ». «
1569
tandis que « l’attrait du christianisme est dans
l’
inquiétude qu’il nous inflige ». « Ils mettent leur âme en veilleuse,
1570
i de soi-même nous avons fait une vertu. Eux, ils
l’
ont rendu facile et en ont fait un plaisir. » Et encore ceci que je tr
1571
re ceci que je trouve si juste : « Ce qui définit
le
plus profondément l’Occidental, c’est peut-être la fidélité. » Ses re
1572
si juste : « Ce qui définit le plus profondément
l’
Occidental, c’est peut-être la fidélité. » Ses remarques sur la psycho
1573
e plus profondément l’Occidental, c’est peut-être
la
fidélité. » Ses remarques sur la psychologie de l’Égyptien ne sont pa
1574
c’est peut-être la fidélité. » Ses remarques sur
la
psychologie de l’Égyptien ne sont pas moins subtiles et le mènent à c
1575
a fidélité. » Ses remarques sur la psychologie de
l’
Égyptien ne sont pas moins subtiles et le mènent à cette constatation
1576
logie de l’Égyptien ne sont pas moins subtiles et
le
mènent à cette constatation fondamentale que « notre intelligence et
1577
fondamentale que « notre intelligence et celle de
l’
Oriental ne sont pas superposables ». Dès lors, comment collaborer, co
1578
si c’est impossible, pourra-t-on du moins éviter
le
conflit que certains prétendent menaçant ? Malgré l’« anxiété mélanco
1579
conflit que certains prétendent menaçant ? Malgré
l’
« anxiété mélancolique » qu’il éprouve à se sentir si loin de l’Orient
1580
lancolique » qu’il éprouve à se sentir si loin de
l’
Oriental, les conclusions de M. de Traz — si tant est qu’on peut concl
1581
qu’il éprouve à se sentir si loin de l’Oriental,
les
conclusions de M. de Traz — si tant est qu’on peut conclure en une ma
1582
t que nous ayons à chercher là-bas notre salut. «
La
seule leçon à attendre des musulmans, c’est que le spectacle de leur
1583
a seule leçon à attendre des musulmans, c’est que
le
spectacle de leur décadence nous enseigne comment éviter la nôtre. »
1584
le de leur décadence nous enseigne comment éviter
la
nôtre. » La place me manque pour parler comme j’aurais voulu le faire
1585
écadence nous enseigne comment éviter la nôtre. »
La
place me manque pour parler comme j’aurais voulu le faire des deux au
1586
place me manque pour parler comme j’aurais voulu
le
faire des deux autres parties du volume, d’une importance moins actue
1587
e, mais d’une qualité d’art peut-être supérieure.
Les
méditations sur les ruines de la Haute-Égypte révèlent en de Traz un
1588
é d’art peut-être supérieure. Les méditations sur
les
ruines de la Haute-Égypte révèlent en de Traz un philosophe de l’hist
1589
tre supérieure. Les méditations sur les ruines de
la
Haute-Égypte révèlent en de Traz un philosophe de l’histoire aux vues
1590
Haute-Égypte révèlent en de Traz un philosophe de
l’
histoire aux vues larges et pourtant réalistes, aux hypothèses hardies
1591
t pourtant réalistes, aux hypothèses hardies — de
la
hardiesse de ce bon sens qui est le plus éloigné du sens commun — mai
1592
hardies — de la hardiesse de ce bon sens qui est
le
plus éloigné du sens commun — mais qui reste trop méfiant de tout rom
1593
nt de tout romantisme pour édifier aucun système.
Le
livre se termine par un voyage à Jérusalem : le christianisme n’est-i
1594
. Le livre se termine par un voyage à Jérusalem :
le
christianisme n’est-il pas le plus beau don de l’Orient à l’Europe ?
1595
oyage à Jérusalem : le christianisme n’est-il pas
le
plus beau don de l’Orient à l’Europe ? Il y a là des pages d’un accen
1596
le christianisme n’est-il pas le plus beau don de
l’
Orient à l’Europe ? Il y a là des pages d’un accent très noble et cour
1597
nisme n’est-il pas le plus beau don de l’Orient à
l’
Europe ? Il y a là des pages d’un accent très noble et courageux mêlé,
1598
rfois, d’une certaine amertume, où de Traz quitte
le
ton mesuré qu’il s’impose d’ordinaire. Mais j’avoue que m’a parfois u
1599
oue que m’a parfois un peu gêné cette présence de
la
mort qu’il fait sentir partout aux lieux mêmes où naquit la religion
1600
’il fait sentir partout aux lieux mêmes où naquit
la
religion du « Prince de la vie »… Qu’on ne croie pas, d’ailleurs, que
1601
lieux mêmes où naquit la religion du « Prince de
la
vie »… Qu’on ne croie pas, d’ailleurs, que l’attitude presque constam
1602
de la vie »… Qu’on ne croie pas, d’ailleurs, que
l’
attitude presque constamment critique de M. de Traz diminue l’intérêt
1603
resque constamment critique de M. de Traz diminue
l’
intérêt vivant de son livre : cette impartialité même, cette façon de
1604
es, révèle sa personnalité peut-être mieux que ne
le
feraient une suite de pages lyriques toujours un peu stylisées. Il ap
1605
oujours un peu stylisées. Il apparaît, ici, comme
le
type du voyageur intelligent, qui n’accepte d’être séduit que pour «
1606
arer et, parfois, juger ; préférant obstinément à
la
légende le vrai, même amer, non par défaut d’un sens artistique dont
1607
rfois, juger ; préférant obstinément à la légende
le
vrai, même amer, non par défaut d’un sens artistique dont plusieurs d
1608
tistique dont plusieurs de ses morceaux attestent
la
délicatesse, mais parce qu’il sait y trouver les seuls motifs réels d
1609
t la délicatesse, mais parce qu’il sait y trouver
les
seuls motifs réels d’exaltation. 1. Le Dépaysement oriental, chez
1610
rouver les seuls motifs réels d’exaltation. 1.
Le
Dépaysement oriental, chez Grasset, Paris. a. Rougemont Denis de, «
1611
gemont Denis de, « [Compte rendu] Robert de Traz,
Le
Dépaysement oriental », Journal de Genève, Genève, 16 juillet 1926,
1612
Henry de Montherlant,
Les
Bestiaires (septembre 1926)x J’éprouve quelque gêne à porter un ju
1613
Montherlant : dans ce récit plus encore que dans
les
œuvres précédentes, on voit beaucoup moins l’œuvre d’art que l’auteur
1614
ns les œuvres précédentes, on voit beaucoup moins
l’
œuvre d’art que l’auteur ; dans ce portrait de Montherlant toréador, à
1615
édentes, on voit beaucoup moins l’œuvre d’art que
l’
auteur ; dans ce portrait de Montherlant toréador, à 16 ans, c’est sur
1616
de Montherlant toréador, à 16 ans, c’est surtout
le
Montherlant actuel que l’on sent. C’est dire que le livre vaut par so
1617
à 16 ans, c’est surtout le Montherlant actuel que
l’
on sent. C’est dire que le livre vaut par son allure plus que par des
1618
Montherlant actuel que l’on sent. C’est dire que
le
livre vaut par son allure plus que par des qualités de composition ou
1619
savante sensualité, pour ces insolences jolies et
les
subites violences, qui composent la séduction de cet « homme de la Re
1620
es jolies et les subites violences, qui composent
la
séduction de cet « homme de la Renaissance », pour quelques descripti
1621
ces, qui composent la séduction de cet « homme de
la
Renaissance », pour quelques descriptions des prairies espagnoles ple
1622
ur communier, il faudrait sans doute être né sous
le
signe du Taureau. Mais il sera pardonné à Montherlant beaucoup de déf
1623
a souveraine désinvolture. Elle est tonique comme
le
spectacle des athlètes. Et c’est elle avant tout que j’admire dans ce
1624
ets d’esprit ! Qu’ils paissent éternellement dans
les
prairies célestes, pour avoir donné une grande gloire aux jeunes homm
1625
dans les prairies célestes, pour avoir donné une
grande
gloire aux jeunes hommes ! » Mais ce jeune homme qui écrivit naguère
1626
s ! » Mais ce jeune homme qui écrivit naguère sur
les
Fontaines du désir certaines pages magnifiques et sobres, jetées de h
1627
pages magnifiques et sobres, jetées de haut avec
la
nonchalance des vrais puissants, je compte qu’il saura fonder sa gloi
1628
Denis de, « [Compte rendu] Henry de Montherlant,
Les
Bestiaires », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, s
1629
ce (13 novembre 1926)i Des cris mouraient vers
les
berges du fleuve jaune, entre les deux façades longues que la ville p
1630
mouraient vers les berges du fleuve jaune, entre
les
deux façades longues que la ville présente au couchant, dans ce corri
1631
fleuve jaune, entre les deux façades longues que
la
ville présente au couchant, dans ce corridor de lumière où elle accue
1632
nt, dans ce corridor de lumière où elle accueille
le
ciel — et derrière, elle devient plus secrète. Vers l’est, des collin
1633
el — et derrière, elle devient plus secrète. Vers
l’
est, des collines fluides et roses. De l’autre côté, c’est le vide, où
1634
collines fluides et roses. De l’autre côté, c’est
le
vide, où s’en vont lentement les eaux et les lueurs, vers la mer. Sur
1635
autre côté, c’est le vide, où s’en vont lentement
les
eaux et les lueurs, vers la mer. Sur le Lungarno trop vaste et nu, le
1636
c’est le vide, où s’en vont lentement les eaux et
les
lueurs, vers la mer. Sur le Lungarno trop vaste et nu, les voitures r
1637
s’en vont lentement les eaux et les lueurs, vers
la
mer. Sur le Lungarno trop vaste et nu, les voitures revenaient au pas
1638
entement les eaux et les lueurs, vers la mer. Sur
le
Lungarno trop vaste et nu, les voitures revenaient au pas des Cascine
1639
s, vers la mer. Sur le Lungarno trop vaste et nu,
les
voitures revenaient au pas des Cascine. Vers sept heures, il n’y en e
1640
il n’y en eut presque plus. Nous étions seuls sur
le
pavé qui exhalait sa chaleur, au long des quais sans bancs pour notre
1641
s’éloignait derrière nous qui suivions maintenant
le
sentier du bord du fleuve, plus bas que la Promenade désertée. Sur le
1642
tenant le sentier du bord du fleuve, plus bas que
la
Promenade désertée. Sur les eaux, comme immobiles, des nuages rouges
1643
u fleuve, plus bas que la Promenade désertée. Sur
les
eaux, comme immobiles, des nuages rouges et le vert dur des berges :
1644
r les eaux, comme immobiles, des nuages rouges et
le
vert dur des berges : un malaise montait dans l’air plus frais, avec
1645
le vert dur des berges : un malaise montait dans
l’
air plus frais, avec l’odeur du limon. Nous marchions vers ces hauts a
1646
: un malaise montait dans l’air plus frais, avec
l’
odeur du limon. Nous marchions vers ces hauts arbres clairs, au tourna
1647
hauts arbres clairs, au tournant du fleuve, parmi
les
dissonances mélancoliques des lumières et des odeurs, espérant entrer
1648
Seule une maison blanche est arrêtée tout près de
l’
eau. Mais ce n’est pas d’elle que vient cette chanson jamais entendue
1649
entendue qui nous accompagne depuis un moment sur
le
chemin de l’autre rive. Il y a un homme debout à l’avant d’un char ti
1650
chemin de l’autre rive. Il y a un homme debout à
l’
avant d’un char tiré par des bœufs blancs. Comme une apparition. (Tu p
1651
de triste volupté emplit notre monde à ce chant.
L’
odeur du fleuve est son parfum, le soleil rouge sa douleur. Les bœufs
1652
nde à ce chant. L’odeur du fleuve est son parfum,
le
soleil rouge sa douleur. Les bœufs blancs, les roues peintes du char,
1653
leuve est son parfum, le soleil rouge sa douleur.
Les
bœufs blancs, les roues peintes du char, l’Italie des poètes… Mais ce
1654
um, le soleil rouge sa douleur. Les bœufs blancs,
les
roues peintes du char, l’Italie des poètes… Mais ce pays tout entier
1655
eur. Les bœufs blancs, les roues peintes du char,
l’
Italie des poètes… Mais ce pays tout entier pâmé dans une beauté que s
1656
nt tant de souvenirs n’a d’autre nom que celui de
l’
instant, ô mélodieuse lassitude. Vivre ainsi simplement. Sans pensée,
1657
, perdus dans un soir de n’importe où, un soir de
la
Nature… L’homme chante une plainte inouïe de pureté. Deux phrases rap
1658
ns un soir de n’importe où, un soir de la Nature…
L’
homme chante une plainte inouïe de pureté. Deux phrases rapides ondule
1659
uïe de pureté. Deux phrases rapides ondulent dans
l’
air lourd. Le chant descend très doucement la berge, les bœufs s’engag
1660
. Deux phrases rapides ondulent dans l’air lourd.
Le
chant descend très doucement la berge, les bœufs s’engagent dans le m
1661
dans l’air lourd. Le chant descend très doucement
la
berge, les bœufs s’engagent dans le marais, cherchant le gué. Plus pr
1662
lourd. Le chant descend très doucement la berge,
les
bœufs s’engagent dans le marais, cherchant le gué. Plus proches, les
1663
rès doucement la berge, les bœufs s’engagent dans
le
marais, cherchant le gué. Plus proches, les syllabes nous parviennent
1664
e, les bœufs s’engagent dans le marais, cherchant
le
gué. Plus proches, les syllabes nous parviennent au ras du fleuve som
1665
t dans le marais, cherchant le gué. Plus proches,
les
syllabes nous parviennent au ras du fleuve sombre. Nul désir en nous
1666
mbre. Nul désir en nous de comprendre ce lamento.
Le
ciel est un silence qui s’impose à nos pensées. Ici la vie n’a presqu
1667
el est un silence qui s’impose à nos pensées. Ici
la
vie n’a presque plus de sens, comme le fleuve. Elle n’est qu’odeurs,
1668
nsées. Ici la vie n’a presque plus de sens, comme
le
fleuve. Elle n’est qu’odeurs, formes mouvantes, remous dans l’air et
1669
le n’est qu’odeurs, formes mouvantes, remous dans
l’
air et musiques sourdes. Penser serait sacrilège, comme une barre droi
1670
n tableau. Nos yeux ont regardé longtemps — où va
l’
âme durant ces minutes ? — jusqu’à ce que les bœufs ruisselants remont
1671
où va l’âme durant ces minutes ? — jusqu’à ce que
les
bœufs ruisselants remontent sur notre rive. Fraîcheur humide, parfums
1672
ement vague des roseaux aux feuilles sèches… Puis
la
brume est venue comme une envie de sommeil. Une lampe dans la maison
1673
venue comme une envie de sommeil. Une lampe dans
la
maison blanche nous a révélé proche la nuit. Nous nous sommes retourn
1674
lampe dans la maison blanche nous a révélé proche
la
nuit. Nous nous sommes retournés vers la ville. Fleurs de lumières s
1675
é proche la nuit. Nous nous sommes retournés vers
la
ville. Fleurs de lumières sur les champs sombres du ciel de l’est, e
1676
retournés vers la ville. Fleurs de lumières sur
les
champs sombres du ciel de l’est, et une façade parfaite répond encore
1677
urs de lumières sur les champs sombres du ciel de
l’
est, et une façade parfaite répond encore au couchant. San Miniato sur
1678
chant. San Miniato sur sa colline. Derrière nous,
les
arbres se brouillent dans une buée sans couleurs, nous quittons un my
1679
us quittons un mystère à jamais impénétrable pour
l’
homme, nous fuyons ces bords où conspirent des ombres informes et des
1680
nous laisse gourds et faibles, caressant en nous
la
lâche volupté de sentir l’esprit se défaire et couler sans fin vers u
1681
les, caressant en nous la lâche volupté de sentir
l’
esprit se défaire et couler sans fin vers un sommeil à l’odeur fade de
1682
t se défaire et couler sans fin vers un sommeil à
l’
odeur fade de fleuve, un sommeil de plante vaguement heureuse d’être p
1683
nous enivrait, promettant à nos sens, fatigués de
l’
esprit qui les exerce, des voluptés plus faciles — pour infuser dans n
1684
, promettant à nos sens, fatigués de l’esprit qui
les
exerce, des voluptés plus faciles — pour infuser dans nos corps charm
1685
dont on ne voudrait plus guérir… Mais nous voyons
la
ville debout dans ses lumières. Architectures ! langage des dieux, ô
1686
s qu’épousent nos ferveurs, angles purs, repos de
l’
esprit qui s’appuie sur son œuvre ! La sérénité de cette façade élevée
1687
s, repos de l’esprit qui s’appuie sur son œuvre !
La
sérénité de cette façade élevée lumineuse sur le ciel fut le signe d’
1688
La sérénité de cette façade élevée lumineuse sur
le
ciel fut le signe d’un équilibre retrouvé. Un grand pont de fer, près
1689
de cette façade élevée lumineuse sur le ciel fut
le
signe d’un équilibre retrouvé. Un grand pont de fer, près de nous, ér
1690
le ciel fut le signe d’un équilibre retrouvé. Un
grand
pont de fer, près de nous, érigeait l’image de la lutte et des forces
1691
uvé. Un grand pont de fer, près de nous, érigeait
l’
image de la lutte et des forces humaines, et rendait sous des coups un
1692
nd pont de fer, près de nous, érigeait l’image de
la
lutte et des forces humaines, et rendait sous des coups un son qui no
1693
et rendait sous des coups un son qui nous évoqua
les
rumeurs de villes d’usines. Il y avait la vie des hommes pour demain,
1694
évoqua les rumeurs de villes d’usines. Il y avait
la
vie des hommes pour demain, et il était beau d’y songer un peu avant
1695
beau d’y songer un peu avant de nous abandonner à
l’
oubli luxueux des rues. Le long de l’Arno, les façades sont jaunes et
1696
abandonner à l’oubli luxueux des rues. Le long de
l’
Arno, les façades sont jaunes et roses près de l’eau, puis perdent dan
1697
er à l’oubli luxueux des rues. Le long de l’Arno,
les
façades sont jaunes et roses près de l’eau, puis perdent dans la nuit
1698
l’Arno, les façades sont jaunes et roses près de
l’
eau, puis perdent dans la nuit leurs lignes graves. Toutes ces formes
1699
jaunes et roses près de l’eau, puis perdent dans
la
nuit leurs lignes graves. Toutes ces formes devinées dans l’espace no
1700
rs lignes graves. Toutes ces formes devinées dans
l’
espace nous environnent d’une obscure confiance. Livrons-nous aux jeux
1701
ons-nous aux jeux des hommes-qui-font-des-gestes.
Les
autos répètent sans fin les notes mêlées d’une symphonie qui va peut-
1702
-qui-font-des-gestes. Les autos répètent sans fin
les
notes mêlées d’une symphonie qui va peut-être composer tous les bruit
1703
es d’une symphonie qui va peut-être composer tous
les
bruits de la ville en un chant immense. Il passe une possibilité de b
1704
onie qui va peut-être composer tous les bruits de
la
ville en un chant immense. Il passe une possibilité de bonheur par pe
1705
passe une possibilité de bonheur par personne et
les
devantures ne cherchent qu’à vous plaire. Chaque ruelle croisée propo
1706
oublie pour celui des regards étrangers. Et voici
la
place régulière, les galeries, les cafés, les musiques, Donizetti qui
1707
s regards étrangers. Et voici la place régulière,
les
galeries, les cafés, les musiques, Donizetti qui pleure délicieusemen
1708
ngers. Et voici la place régulière, les galeries,
les
cafés, les musiques, Donizetti qui pleure délicieusement jusque dans
1709
oici la place régulière, les galeries, les cafés,
les
musiques, Donizetti qui pleure délicieusement jusque dans les gestes
1710
, Donizetti qui pleure délicieusement jusque dans
les
gestes des passantes. Sous cette agitation aimable et monotone nous a
1711
ation aimable et monotone nous allons voir courir
l’
arabesque des sentiments et le mouvement perpétuel de l’amour. Plaisir
1712
allons voir courir l’arabesque des sentiments et
le
mouvement perpétuel de l’amour. Plaisir de se sentir engagé dans un s
1713
esque des sentiments et le mouvement perpétuel de
l’
amour. Plaisir de se sentir engagé dans un système d’ondes de forces q
1714
ngagé dans un système d’ondes de forces qui tisse
la
nuit vibrante, intérêts, politesses, politiques, regards, musiques —
1715
musiques — cette vie rapide dans un décor qui est
le
rêve éternisé des plus voluptueuses intelligences — tous les tableaux
1716
ernisé des plus voluptueuses intelligences — tous
les
tableaux dans le noir des musées ! — et si tu veux soudain le son gra
1717
luptueuses intelligences — tous les tableaux dans
le
noir des musées ! — et si tu veux soudain le son grave de l’infini, p
1718
dans le noir des musées ! — et si tu veux soudain
le
son grave de l’infini, pour être seul parmi la foule, lève les yeux,
1719
musées ! — et si tu veux soudain le son grave de
l’
infini, pour être seul parmi la foule, lève les yeux, au plus beau cie
1720
in le son grave de l’infini, pour être seul parmi
la
foule, lève les yeux, au plus beau ciel du monde. i. Rougemont Den
1721
de l’infini, pour être seul parmi la foule, lève
les
yeux, au plus beau ciel du monde. i. Rougemont Denis de, « Soir de
1722
. i. Rougemont Denis de, « Soir de Florence »,
La
Semaine littéraire, Genève, 13 novembre 1926, p. 547-548.
1723
Jacques Spitz,
La
Croisière indécise (décembre 1926)y L’auteur veut amuser en nous q
1724
Spitz, La Croisière indécise (décembre 1926)y
L’
auteur veut amuser en nous quelques idées graves en leur présentant le
1725
en nous quelques idées graves en leur présentant
les
miroirs de personnages cocasses à souhait, qui manifestent, avec un c
1726
manque de conviction et des poses de mannequins,
les
tendances contradictoires d’un individu. C’est pour traiter ce sujet
1727
sière de vacances, qui finit par un naufrage dans
la
littérature, le navire succombant sous les allégories. L’étonnant, c’
1728
s, qui finit par un naufrage dans la littérature,
le
navire succombant sous les allégories. L’étonnant, c’est que le livre
1729
ge dans la littérature, le navire succombant sous
les
allégories. L’étonnant, c’est que le livre soit réellement amusant, e
1730
rature, le navire succombant sous les allégories.
L’
étonnant, c’est que le livre soit réellement amusant, et qu’il trouve
1731
ombant sous les allégories. L’étonnant, c’est que
le
livre soit réellement amusant, et qu’il trouve une sorte d’unité viva
1732
t, et qu’il trouve une sorte d’unité vivante dans
le
rythme des désirs jamais simultanés de ses petits héros. M. Spitz che
1733
etits héros. M. Spitz cherche à faire sourire, on
le
sent ; pourtant l’on sourit : il faut bien croire qu’il y a là un tal
1734
tz cherche à faire sourire, on le sent ; pourtant
l’
on sourit : il faut bien croire qu’il y a là un talent, charmant, glac
1735
ugemont Denis de, « [Compte rendu] Jacques Spitz,
La
Croisière indécise », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, G
1736
Alfred Colling,
L’
Iroquois (décembre 1926)z Ce roman a le charme d’un automne, une am
1737
olling, L’Iroquois (décembre 1926)z Ce roman a
le
charme d’un automne, une amertume enveloppée, une atmosphère trop cla
1738
mertume enveloppée, une atmosphère trop claire où
les
cris se font un peu aigres et les couleurs fluides. Toute la tendress
1739
trop claire où les cris se font un peu aigres et
les
couleurs fluides. Toute la tendresse que ranime un soleil lointain va
1740
font un peu aigres et les couleurs fluides. Toute
la
tendresse que ranime un soleil lointain va tourner en cruelle mélanco
1741
e mélancolie. Pourquoi, Henri de Closain, quitter
le
domaine enchanté où des amis très fins, précieux poètes, dissertent s
1742
e sait plus de quels souvenirs ; jusqu’au soir où
la
douleur nette d’un amour réveillé l’envahit. Et Closain rencontre, da
1743
u’au soir où la douleur nette d’un amour réveillé
l’
envahit. Et Closain rencontre, dans l’inévitable bar, le couple de jui
1744
ur réveillé l’envahit. Et Closain rencontre, dans
l’
inévitable bar, le couple de juifs espagnols qui va l’entraîner avec s
1745
hit. Et Closain rencontre, dans l’inévitable bar,
le
couple de juifs espagnols qui va l’entraîner avec son mauvais cœur, d
1746
évitable bar, le couple de juifs espagnols qui va
l’
entraîner avec son mauvais cœur, dans une aventure incertaine et doulo
1747
taine et douloureuse ; enfin Orpha, sa maîtresse,
le
fuit, parce que son silence devient insupportable : « Orpha ne compre
1748
rir et ne plus aimer ». Closain se tue pour finir
le
livre. Livre charmant et bizarre, où la sentimentalité moderne trouve
1749
our finir le livre. Livre charmant et bizarre, où
la
sentimentalité moderne trouve l’expression ironique qui lui convient,
1750
t et bizarre, où la sentimentalité moderne trouve
l’
expression ironique qui lui convient, mais ici mêlée à une émotion plu
1751
ui transparaît parfois et nous fait regretter que
l’
auteur ne se soit pas mieux abandonné à son sujet, d’un pathétique ass
1752
gemont Denis de, « [Compte rendu] Alfred Colling,
L’
Iroquois », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, déce
1753
André Malraux,
La
Tentation de l’Occident (décembre 1926)aa Un Chinois écrit d’Europ
1754
André Malraux, La Tentation de
l’
Occident (décembre 1926)aa Un Chinois écrit d’Europe à un Français
1755
e. Nous sommes loin du ton des Lettres persanes :
le
Chinois s’étonne non sans quelque aigreur, et critique avec un mépris
1756
aigreur, et critique avec un mépris tranquille ;
le
Français riposte sans conviction, et sous sa défense on devine une dé
1757
n devine une détresse. C’est encore une vision de
l’
Occident qui naît de ce petit livre si dense, si inquiétant. Le Chinoi
1758
i naît de ce petit livre si dense, si inquiétant.
Le
Chinois voit dans l’Europe « une barbarie attentivement ordonnée, où
1759
vre si dense, si inquiétant. Le Chinois voit dans
l’
Europe « une barbarie attentivement ordonnée, où l’idée de la civilisa
1760
’Europe « une barbarie attentivement ordonnée, où
l’
idée de la civilisation et celle de l’ordre sont chaque jour confondue
1761
une barbarie attentivement ordonnée, où l’idée de
la
civilisation et celle de l’ordre sont chaque jour confondues ». Nous
1762
rdonnée, où l’idée de la civilisation et celle de
l’
ordre sont chaque jour confondues ». Nous cherchons à conquérir non le
1763
jour confondues ». Nous cherchons à conquérir non
le
monde, mais son ordre. Nous humilions sans trêve notre sensibilité au
1764
e « mythe cohérent » vers quoi tend notre esprit.
La
passion apparaît dans notre ordre social « comme une adroite fêlure »
1765
ure ». Notre morale est entièrement subordonnée à
l’
action ; notre individualisme en naît logiquement, et toutes nos catég
1766
nos catégories artificielles et nécessaires. Mais
le
monde échappe toujours à nos cadres — perpétuel conflit du réel avec
1767
réel avec nos rêves de puissance : notre ambition
la
plus haute échoue. La tristesse règne sur nos villes. (Neurasthénie,
1768
puissance : notre ambition la plus haute échoue.
La
tristesse règne sur nos villes. (Neurasthénie, ce mal de l’Occident.)
1769
se règne sur nos villes. (Neurasthénie, ce mal de
l’
Occident.) Et notre vertu suprême, aussi, est douloureuse : le sacrifi
1770
Et notre vertu suprême, aussi, est douloureuse :
le
sacrifice. Sans doute, cette « absurdité essentielle » que le Chinois
1771
. Sans doute, cette « absurdité essentielle » que
le
Chinois distingue au cœur de la vie occidentale apparaît mieux par la
1772
essentielle » que le Chinois distingue au cœur de
la
vie occidentale apparaît mieux par la comparaison de l’idéal asiatiqu
1773
au cœur de la vie occidentale apparaît mieux par
la
comparaison de l’idéal asiatique avec le nôtre. Mais je crois que tou
1774
occidentale apparaît mieux par la comparaison de
l’
idéal asiatique avec le nôtre. Mais je crois que toute intelligence eu
1775
fait parler son Chinois de telle façon qu’ils ne
le
paraissent point. Et alors le relativisme angoissant qui semblait dev
1776
lle façon qu’ils ne le paraissent point. Et alors
le
relativisme angoissant qui semblait devoir résulter de cette confront
1777
nouit : c’est bien plutôt une unité supérieure de
l’
esprit humain que nous découvrons, et qui nous permettra de juger à no
1778
er à notre tour certaines démences qui enfièvrent
l’
Europe. Tandis que M. Ford expose victorieusement sa méthode pour « r
1779
prenons chaque jour une conscience plus claire de
la
vanité de nos buts, « capables d’agir jusqu’au sacrifice, mais pleins
1780
jusqu’au sacrifice, mais pleins de dégoût devant
la
volonté d’action qui tord aujourd’hui notre race… ». Et peut-être n’e
1781
laisser subsister en nous qu’un « étrange goût de
la
destruction et de l’anarchie, exempt de passion, divertissement suprê
1782
nous qu’un « étrange goût de la destruction et de
l’
anarchie, exempt de passion, divertissement suprême de l’incertitude…
1783
hie, exempt de passion, divertissement suprême de
l’
incertitude… » aa. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] André Malra
1784
ugemont Denis de, « [Compte rendu] André Malraux,
La
Tentation de l’Occident », Bibliothèque universelle et Revue de Genè
1785
, « [Compte rendu] André Malraux, La Tentation de
l’
Occident », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, déce
1786
e 1926)a b Une mauvaise humeur qui flotte dans
l’
air nous proposerait de débuter par l’inévitable discours sur les diff
1787
flotte dans l’air nous proposerait de débuter par
l’
inévitable discours sur les difficultés du temps, en général, et sur c
1788
poserait de débuter par l’inévitable discours sur
les
difficultés du temps, en général, et sur celles en particulier qu’imp
1789
général, et sur celles en particulier qu’implique
la
publication de notre revue. Mais nous savons, tout comme M. Coué, que
1790
oué, nous nous persuadons que tout ira très bien.
Les
circonstances l’exigent, d’ailleurs, plus que jamais, et plus que jam
1791
suadons que tout ira très bien. Les circonstances
l’
exigent, d’ailleurs, plus que jamais, et plus que jamais, nous semble-
1792
nous semble-t-il, notre revue a sa raison d’être.
La
vie d’aujourd’hui, on le sait, nous oblige à nous affirmer ou à refus
1793
evue a sa raison d’être. La vie d’aujourd’hui, on
le
sait, nous oblige à nous affirmer ou à refuser de nous affirmer avec
1794
i a pu paraître parfois quelque peu impertinente.
Le
fait est que nous éprouvons irrésistiblement l’obligation d’être nous
1795
. Le fait est que nous éprouvons irrésistiblement
l’
obligation d’être nous-mêmes. Et, disons-le tout de suite, c’est en ce
1796
lement l’obligation d’être nous-mêmes. Et, disons-
le
tout de suite, c’est en cela uniquement — être nous-mêmes — que consi
1797
mes — que consistera notre programme. Sans doute,
les
différences s’accusent : mais n’est-ce pas la meilleure raison pour n
1798
e, les différences s’accusent : mais n’est-ce pas
la
meilleure raison pour nos aînés de chercher plus patiemment encore à
1799
elle nous ne saurions aller, et qui, nous voulons
l’
espérer, ne sera pas sans leur donner quelque bénéfice en retour. Cert
1800
nt d’autres, avant tant d’autres. « Amis, ce sont
les
jeunes qui passent… » Pas question de les saluer ni d’emboîter le pas
1801
ce sont les jeunes qui passent… » Pas question de
les
saluer ni d’emboîter le pas, mais seulement de retenir sa place au sp
1802
ssent… » Pas question de les saluer ni d’emboîter
le
pas, mais seulement de retenir sa place au spectacle qu’ils offrent e
1803
etenir sa place au spectacle qu’ils offrent et de
les
considérer avec sympathie. Il est bien facile de s’écrier : « Après m
1804
ie. Il est bien facile de s’écrier : « Après moi,
le
déluge ! », et de se détourner de ce qu’on a coutume d’appeler notre
1805
’appeler notre « désordre ». Mais on est toujours
le
fils de quelqu’un… Et, peut-être, la considération du « déluge » peut
1806
est toujours le fils de quelqu’un… Et, peut-être,
la
considération du « déluge » peut-elle faire réfléchir utilement sur s
1807
Par contre, nous nous empressons de vous laisser
le
soin de juger si nous avons de quoi faire les modestes… Être nous-m
1808
sser le soin de juger si nous avons de quoi faire
les
modestes… Être nous-mêmes, avons-nous dit, c’est à la fois notre bu
1809
littéraire de plus » ; nous ne voulons pas être «
l’
expression de la jeunesse romande ». Nous sommes autre chose. (Belles-
1810
us » ; nous ne voulons pas être « l’expression de
la
jeunesse romande ». Nous sommes autre chose. (Belles-Lettres est touj
1811
nemment peu bellettrienne. Que sommes-nous donc ?
Le
plus qu’on puisse dire, c’est que vous le saurez un peu mieux quand v
1812
donc ? Le plus qu’on puisse dire, c’est que vous
le
saurez un peu mieux quand vous aurez lu nos huit numéros. Il faut que
1813
vergentes, mais qu’un ruban rouge et vert lie par
la
grâce d’une volonté sans doute divine… a. Rougemont Denis de, « Av
1814
nève-Fribourg, décembre 1926, p. 3-5. b. Signé :
Le
Comité central.
1815
Paradoxe de
la
sincérité (décembre 1926)c Nous voyons un mythe prendre corps parm
1816
926)c Nous voyons un mythe prendre corps parmi
les
ruines de ce temps. Il fallait bien tirer quelque vertu d’une anarchi
1817
essaire — provisoirement — que satisfaisante pour
l’
esprit. C’est ainsi que nous trompant nous-mêmes, sous le prétexte tou
1818
t. C’est ainsi que nous trompant nous-mêmes, sous
le
prétexte toujours de probité intellectuelle ou de courage moral, nous
1819
lectuelle ou de courage moral, nous avons élevé à
la
hauteur d’une vertu première — et qui légitime tous les dénis de mora
1820
uteur d’une vertu première — et qui légitime tous
les
dénis de morale à quoi nous obligeaient en réalité on sait quel dégoû
1821
et certains désirs de grabuge moins avouables, —
la
sincérité, masque fier et un peu douloureux des défaitismes les plus
1822
masque fier et un peu douloureux des défaitismes
les
plus subtils comme des plus pures et loyales inquiétudes. Sincérité,
1823
des plus pures et loyales inquiétudes. Sincérité,
le
mal du siècle. Tout le monde en parle, et chacun s’en autorise pour e
1824
excuser sa petite faiblesse originale : tant qu’à
la
fin la notion concrète de sincérité s’évanouit en mille définitions t
1825
sa petite faiblesse originale : tant qu’à la fin
la
notion concrète de sincérité s’évanouit en mille définitions tendanci
1826
doctrine acceptée ; envers votre idéal ou envers
les
fluctuations de votre moi ? Votre sincérité est-elle consentement imm
1827
fois curieuse et désintéressée, de naturaliste de
l’
âme ? Heureusement que M. Brémond ne s’est pas encore mêlé de l’affair
1828
sement que M. Brémond ne s’est pas encore mêlé de
l’
affaire. Au reste, on n’a pas attendu les éclaircissements du subtil a
1829
e mêlé de l’affaire. Au reste, on n’a pas attendu
les
éclaircissements du subtil abbé pour n’y plus rien comprendre. ⁂ Qu’o
1830
mettre à décrire ce qu’il voit autour de lui — et
l’
étonnement indigné du spectateur. Pour parler avec un peu de clairvoya
1831
déduction passablement sèche pourrait nous donner
l’
illusion et peut-être certains bénéfices de cette opération idéale. En
1832
néfices de cette opération idéale. En même temps,
la
froideur d’une telle méthode atténuerait dans une certaine mesure — p
1833
que nécessaire — ce qu’il y a de déplaisant dans
l’
effort d’un esprit pour se dégager de confusions aussi perfides et si
1834
ntures. Sincérité et spontanéité « Nos actes
les
plus sincères sont aussi les moins calculés », écrit Gide. D’où l’on
1835
néité « Nos actes les plus sincères sont aussi
les
moins calculés », écrit Gide. D’où l’on peut tirer par une sorte de p
1836
sont aussi les moins calculés », écrit Gide. D’où
l’
on peut tirer par une sorte de passage à la limite que les faits justi
1837
. D’où l’on peut tirer par une sorte de passage à
la
limite que les faits justifient : sincérité = spontanéité. Mais la mo
1838
ut tirer par une sorte de passage à la limite que
les
faits justifient : sincérité = spontanéité. Mais la morale est ce qui
1839
faits justifient : sincérité = spontanéité. Mais
la
morale est ce qui s’oppose en premier lieu à la spontanéité. C’est po
1840
s la morale est ce qui s’oppose en premier lieu à
la
spontanéité. C’est pourquoi Gide écrit ailleurs : « En chaque être, l
1841
pourquoi Gide écrit ailleurs : « En chaque être,
le
pire instinct me paraissait le plus sincère. » La sincérité spontanée
1842
« En chaque être, le pire instinct me paraissait
le
plus sincère. » La sincérité spontanée, vertu moderne en qui renaît u
1843
le pire instinct me paraissait le plus sincère. »
La
sincérité spontanée, vertu moderne en qui renaît un mythe rousseauist
1844
usseauiste, inspire, explique un vaste domaine de
la
littérature contemporaine. Cette sorte-là de sincérité, on la nomme g
1845
re contemporaine. Cette sorte-là de sincérité, on
la
nomme gratuité. Lafcadio poussant Fleurissoire « pour rien » ne songe
1846
rien » ne songeait pas qu’il allait faire école.
Le
fait est que ce geste symbolique a déclenché tout un mouvement littér
1847
-là même qui aboutit naguère au surréalisme. Tous
les
héros de roman se sont mis à gesticuler « gratuitement ». Et les crit
1848
man se sont mis à gesticuler « gratuitement ». Et
les
critiques d’abord de s’indigner. Aujourd’hui, on les voit assez encha
1849
critiques d’abord de s’indigner. Aujourd’hui, on
les
voit assez enchantés de l’affaire : « Gratuit ! », déclarent-ils chaq
1850
gner. Aujourd’hui, on les voit assez enchantés de
l’
affaire : « Gratuit ! », déclarent-ils chaque fois qu’ils ne comprenne
1851
endre. Et, ici encore, prenons garde de confondre
le
plan littéraire avec le plan moral. Telle action peut paraître gratui
1852
renons garde de confondre le plan littéraire avec
le
plan moral. Telle action peut paraître gratuite au lecteur parce qu’i
1853
tuite au lecteur parce qu’il ne sait pas tout sur
le
personnage. Mais quant à l’auteur, il n’y a pas de gratuité. Le geste
1854
ne sait pas tout sur le personnage. Mais quant à
l’
auteur, il n’y a pas de gratuité. Le geste le plus incongru du héros n
1855
Mais quant à l’auteur, il n’y a pas de gratuité.
Le
geste le plus incongru du héros n’est jamais que le résultat d’un méc
1856
nt à l’auteur, il n’y a pas de gratuité. Le geste
le
plus incongru du héros n’est jamais que le résultat d’un mécanisme in
1857
geste le plus incongru du héros n’est jamais que
le
résultat d’un mécanisme inconscient, aussi révélateur du personnage q
1858
t, aussi révélateur du personnage que ses actions
les
mieux concertées. Rien n’est gratuit que relativement à un système re
1859
s. Il résulte de semblables considérations, dans
le
domaine de la morale, que le meilleur moyen de se livrer à ses déterm
1860
de semblables considérations, dans le domaine de
la
morale, que le meilleur moyen de se livrer à ses déterminants, c’est
1861
considérations, dans le domaine de la morale, que
le
meilleur moyen de se livrer à ses déterminants, c’est de mener la vie
1862
n de se livrer à ses déterminants, c’est de mener
la
vie gratuite que réclament les surréalistes. Le contraire de la liber
1863
nts, c’est de mener la vie gratuite que réclament
les
surréalistes. Le contraire de la liberté. D’autre part, on veut donne
1864
r la vie gratuite que réclament les surréalistes.
Le
contraire de la liberté. D’autre part, on veut donner à l’acte gratui
1865
e que réclament les surréalistes. Le contraire de
la
liberté. D’autre part, on veut donner à l’acte gratuit une valeur mor
1866
ire de la liberté. D’autre part, on veut donner à
l’
acte gratuit une valeur morale en disant qu’il révèle ce qu’il y a de
1867
ant qu’il révèle ce qu’il y a de plus secret dans
la
personnalité. Ce serait un moyen de connaissance plus intégrale de so
1868
pittoresque et plus « entachée d’utilitarisme »,
la
décision réfléchie, aussi peu gratuite que possible, d’un Julien Sore
1869
ins révélatrice du fond de l’âme humaine ? Que si
l’
on s’étonne de me voir donner ici la préférence à l’acte volontaire, o
1870
aine ? Que si l’on s’étonne de me voir donner ici
la
préférence à l’acte volontaire, ou mieux : intéressé, tandis qu’en li
1871
on s’étonne de me voir donner ici la préférence à
l’
acte volontaire, ou mieux : intéressé, tandis qu’en littérature je déf
1872
: intéressé, tandis qu’en littérature je défends
l’
acte gratuit, je réponds que la littérature remplirait déjà suffisamme
1873
érature je défends l’acte gratuit, je réponds que
la
littérature remplirait déjà suffisamment son rôle en se bornant à nou
1874
onnaissance plus intense et plus émouvante ; mais
la
morale, plutôt que de nous constater, doit nous construire — selon le
1875
e de nous constater, doit nous construire — selon
le
mode le plus libre, le plus conscient à la fois et le plus voluptueux
1876
s constater, doit nous construire — selon le mode
le
plus libre, le plus conscient à la fois et le plus voluptueux. Sin
1877
it nous construire — selon le mode le plus libre,
le
plus conscient à la fois et le plus voluptueux. Sincérité envers s
1878
ode le plus libre, le plus conscient à la fois et
le
plus voluptueux. Sincérité envers soi-même Noli me tangere.
1879
vers certain but précis. Ou bien j’aurais juste
le
temps de le noter avant de partir. Ou bien je me mettrai à l’analyser
1880
n but précis. Ou bien j’aurais juste le temps de
le
noter avant de partir. Ou bien je me mettrai à l’analyser plus longue
1881
le noter avant de partir. Ou bien je me mettrai à
l’
analyser plus longuement. Mais alors je le fausse, puisque je le prive
1882
ttrai à l’analyser plus longuement. Mais alors je
le
fausse, puisque je le prive de la puissance de se délivrer en gestes,
1883
s longuement. Mais alors je le fausse, puisque je
le
prive de la puissance de se délivrer en gestes, en conséquences matér
1884
. Mais alors je le fausse, puisque je le prive de
la
puissance de se délivrer en gestes, en conséquences matérielles. Ce n
1885
estes, en conséquences matérielles. Ce n’est plus
l’
élan pur que je décris : c’est un élan freiné dans mon esprit, c’est l
1886
ris : c’est un élan freiné dans mon esprit, c’est
le
frein lui-même, bientôt — par un mouvement normal de l’attention — et
1887
in lui-même, bientôt — par un mouvement normal de
l’
attention — et fatalement c’est à la découverte d’une faiblesse que j’
1888
ent normal de l’attention — et fatalement c’est à
la
découverte d’une faiblesse que j’aboutis : ce quelque chose qui m’a r
1889
e quelque chose qui m’a retenu d’accomplir ce que
l’
élan appelait. Second exemple. — J’éprouve le besoin de faire le po
1890
e l’élan appelait. Second exemple. — J’éprouve
le
besoin de faire le point : à quoi en suis-je, qui suis-je ? Je revois
1891
Second exemple. — J’éprouve le besoin de faire
le
point : à quoi en suis-je, qui suis-je ? Je revois des actes accompli
1892
cher du soleil, des phares d’automobiles étoilent
le
brouillard, les visages se cachent dans des fourrures, personne ne sa
1893
des phares d’automobiles étoilent le brouillard,
les
visages se cachent dans des fourrures, personne ne sait la richesse d
1894
s se cachent dans des fourrures, personne ne sait
la
richesse de ta vie…). J’écris ces choses. Puis, dans un ancien carnet
1895
arnet de notes, je retrouve un être si différent.
Les
gestes et les sentiments qui se proposaient à mon souvenir ont été pa
1896
, je retrouve un être si différent. Les gestes et
les
sentiments qui se proposaient à mon souvenir ont été passés au crible
1897
saient à mon souvenir ont été passés au crible de
la
minute où je me penchais sur mon passé. Ou, pour user d’une image plu
1898
ueur de tristesse ou de sérénité qui métamorphose
le
paysage du passé. Ainsi de certains décors modernes : vous changez l’
1899
Ainsi de certains décors modernes : vous changez
l’
éclairage, et la chaumière devient palais. C’est l’objection classique
1900
ns décors modernes : vous changez l’éclairage, et
la
chaumière devient palais. C’est l’objection classique et irréfutable
1901
’éclairage, et la chaumière devient palais. C’est
l’
objection classique et irréfutable à toute introspection : ce daltonis
1902
m’apprendre quelque chose, c’est bien le second.
La
qualité des souvenirs qu’il me livre me renseigne assez exactement, n
1903
gne assez exactement, non sur mon passé, mais sur
le
moment que je vis1. Il est bien clair qu’on ne saurait atteindre « la
1904
1. Il est bien clair qu’on ne saurait atteindre «
la
vérité sur soi » en se servant de la méthode indiquée dans le premier
1905
atteindre « la vérité sur soi » en se servant de
la
méthode indiquée dans le premier exemple. C’est un cas-limite, j’en c
1906
cas-limite, j’en conviens. Pourtant, n’est-ce pas
le
schéma de tout un genre littéraire moderne, cette espèce de confessio
1907
moderne, cette espèce de confession romancée dont
les
livres de Bopp, d’Arland, de Soupault et surtout de René Crevel ont d
1908
, de Soupault et surtout de René Crevel ont donné
les
exemples les plus récents et significatifs ? Tous ces livres évoquent
1909
et surtout de René Crevel ont donné les exemples
les
plus récents et significatifs ? Tous ces livres évoquent assez précis
1910
tifs ? Tous ces livres évoquent assez précisément
la
forme d’un entonnoir. La vie serait le liquide tourbillonnant à l’int
1911
oquent assez précisément la forme d’un entonnoir.
La
vie serait le liquide tourbillonnant à l’intérieur. Un arrêt (l’auteu
1912
récisément la forme d’un entonnoir. La vie serait
le
liquide tourbillonnant à l’intérieur. Un arrêt (l’auteur se met à se
1913
onnoir. La vie serait le liquide tourbillonnant à
l’
intérieur. Un arrêt (l’auteur se met à se regarder vivre, le personnag
1914
e liquide tourbillonnant à l’intérieur. Un arrêt (
l’
auteur se met à se regarder vivre, le personnage à douter du sens de s
1915
r. Un arrêt (l’auteur se met à se regarder vivre,
le
personnage à douter du sens de sa vie) et les forces centripètes l’em
1916
vre, le personnage à douter du sens de sa vie) et
les
forces centripètes l’emportent peu à peu, une aspiration vers le bas
1917
uter du sens de sa vie) et les forces centripètes
l’
emportent peu à peu, une aspiration vers le bas produit une agitation
1918
ipètes l’emportent peu à peu, une aspiration vers
le
bas produit une agitation accélérée et folle, puis tout finit dans un
1919
, puis tout finit dans un râle, brusquement c’est
le
vide. Centre de soi, l’aspiration du néant. J’ai revu à l’envers le f
1920
n râle, brusquement c’est le vide. Centre de soi,
l’
aspiration du néant. J’ai revu à l’envers le film de mon passé : ce qu
1921
Centre de soi, l’aspiration du néant. J’ai revu à
l’
envers le film de mon passé : ce qui était élan devient recul, et l’év
1922
soi, l’aspiration du néant. J’ai revu à l’envers
le
film de mon passé : ce qui était élan devient recul, et l’évocation d
1923
e mon passé : ce qui était élan devient recul, et
l’
évocation de mes désirs anciens ne me restitue qu’un dégoût. J’ai cru
1924
. En réalité, je n’assiste pas à moi-même, mais à
la
destruction de moi-même. Par les fissures, un instant, j’ai pu soupço
1925
moi-même, mais à la destruction de moi-même. Par
les
fissures, un instant, j’ai pu soupçonner des profondeurs ; mais déjà
1926
i pu soupçonner des profondeurs ; mais déjà c’est
le
chaos. Mon corps et moi, le livre si poignant de René Crevel, est la
1927
rs ; mais déjà c’est le chaos. Mon corps et moi,
le
livre si poignant de René Crevel, est la démonstration la plus cyniqu
1928
et moi, le livre si poignant de René Crevel, est
la
démonstration la plus cynique que je connaisse de ces ravages du sinc
1929
si poignant de René Crevel, est la démonstration
la
plus cynique que je connaisse de ces ravages du sincérisme. Dans la s
1930
e je connaisse de ces ravages du sincérisme. Dans
la
solitude qu’il s’acharne à approfondir — il était venu y chercher que
1931
rcher quelque raison de vivre, il voulait se voir
le
plus purement (« cette curiosité donnée comme raison d’une perpétuell
1932
mme raison d’une perpétuelle attente »), — ce que
l’
auteur découvre c’est ce « merveilleux contraire » de l’élan vital qu’
1933
ur découvre c’est ce « merveilleux contraire » de
l’
élan vital qu’il nomme élan mortel — générateur de l’incurable tristes
1934
lan vital qu’il nomme élan mortel — générateur de
l’
incurable tristesse qui rôde dans certaine littérature d’aujourd’hui.
1935
é de faire mon autoportrait moral : je bouge tout
le
temps. Danger de faire mon autoportrait moral : je me compose plus la
1936
s laid que nature. Faut-il conclure avec Gide : «
L’
analyse psychologique a perdu pour moi tout intérêt du jour où je me s
1937
moi tout intérêt du jour où je me suis avisé que
l’
homme éprouve ce qu’il imagine d’éprouver. » Non. Car à supposer que l
1938
’il imagine d’éprouver. » Non. Car à supposer que
l’
analyse nous crée, elle ne nous crée pas n’importe comment, mais selon
1939
u des remarques précédentes). Rivière définissait
la
sincérité comme « un perpétuel effort pour créer son âme telle qu’ell
1940
qu’elle est ». Il voyait dans cet effort sur soi
le
gage d’un enrichissement, d’une consolidation de l’individu mais avan
1941
gage d’un enrichissement, d’une consolidation de
l’
individu mais avant tout un moyen de se connaître. Cependant, n’est-ce
1942
Cependant, n’est-ce pas lui-même qui ajoutait que
l’
homme sincère « en vient à ne plus pouvoir même souhaiter d’être diffé
1943
oir même souhaiter d’être différent », ce qui est
la
négation de tout progrès moral. De la sincérité envisagée comme moyen
1944
ce qui est la négation de tout progrès moral. De
la
sincérité envisagée comme moyen de connaissance, le cas extrême d’un
1945
sincérité envisagée comme moyen de connaissance,
le
cas extrême d’un Crevel nous montre assez ce qu’il faut penser2. Il n
1946
limites assez étroites empiriquement fournies par
le
sens de son intérêt propre, une analyse sincère ne puisse faire décou
1947
es et ne serve parfois de contrôle efficace. Mais
les
bénéfices sont maigres en regard des dangers que la sincérité du noli
1948
bénéfices sont maigres en regard des dangers que
la
sincérité du noli me tangere fait courir, tant dans le domaine littér
1949
ncérité du noli me tangere fait courir, tant dans
le
domaine littéraire que dans celui de l’action. En littérature : refus
1950
tant dans le domaine littéraire que dans celui de
l’
action. En littérature : refus de construire, de composer ; impuissanc
1951
sance à inventer. Car inventer, c’est se porter à
l’
extrême pointe de soi, et, d’un élan, se dépasser ; c’est créer une di
1952
e dépasser ; c’est créer une différence. Pourquoi
les
romanciers modernes ont-ils tant de mal à créer des personnages ? C’e
1953
rsonnages ? C’est parce qu’une sorte de sincérité
les
retient d’imposer aux héros ce rythme volontaire par lequel un Balzac
1954
x héros ce rythme volontaire par lequel un Balzac
les
fait vivre. Ce serait fausser quelque chose à leurs yeux. Le cas des
1955
re. Ce serait fausser quelque chose à leurs yeux.
Le
cas des Faux-Monnayeurs le montre clairement. En morale : défaitisme
1956
ue chose à leurs yeux. Le cas des Faux-Monnayeurs
le
montre clairement. En morale : défaitisme quand il s’agit de gestes q
1957
cement. (Il faut, pour sauter, une confiance dans
l’
élan qui échappe à toute analyse préalable et sans quoi le saut paraît
1958
ui échappe à toute analyse préalable et sans quoi
le
saut paraît impossible, absurde.) Enfin, désagrégation de la personna
1959
aît impossible, absurde.) Enfin, désagrégation de
la
personnalité, car l’analyse la plus savante, comme l’a fort bien dit
1960
de.) Enfin, désagrégation de la personnalité, car
l’
analyse la plus savante, comme l’a fort bien dit Ramon Fernandez, « re
1961
, désagrégation de la personnalité, car l’analyse
la
plus savante, comme l’a fort bien dit Ramon Fernandez, « retient tous
1962
ersonnalité, car l’analyse la plus savante, comme
l’
a fort bien dit Ramon Fernandez, « retient tous les éléments du moi, m
1963
l’a fort bien dit Ramon Fernandez, « retient tous
les
éléments du moi, moins le principe unificateur ». De quelques soph
1964
nandez, « retient tous les éléments du moi, moins
le
principe unificateur ». De quelques sophismes libérateurs La fo
1965
cateur ». De quelques sophismes libérateurs
La
fonction de l’homme est aussi bien de croire que de constater. F. Ra
1966
quelques sophismes libérateurs La fonction de
l’
homme est aussi bien de croire que de constater. F. Raub. La sincér
1967
ussi bien de croire que de constater. F. Raub.
La
sincérité obstinée d’un Rivière n’a plus rien de spontané. En quoi es
1968
a plus rien de spontané. En quoi est-ce encore de
la
sincérité ? Trop sincère, pas sincère. Ou bien si l’on prétend que la
1969
sincérité ? Trop sincère, pas sincère. Ou bien si
l’
on prétend que la sincérité est la recherche, puis l’acceptation de to
1970
sincère, pas sincère. Ou bien si l’on prétend que
la
sincérité est la recherche, puis l’acceptation de toute tendance du m
1971
ère. Ou bien si l’on prétend que la sincérité est
la
recherche, puis l’acceptation de toute tendance du moi, je réponds qu
1972
n prétend que la sincérité est la recherche, puis
l’
acceptation de toute tendance du moi, je réponds que le mensonge est s
1973
eptation de toute tendance du moi, je réponds que
le
mensonge est sincère aussi, qui révèle mon besoin de mentir. Il devie
1974
ils vous aident3 — mais jamais au point d’oublier
la
vérité qu’on désirait qu’ils cachent pour un moment. « L’art est un m
1975
é qu’on désirait qu’ils cachent pour un moment. «
L’
art est un mensonge, mais un bon artiste n’est pas menteur », dit Max
1976
dit Max Jacob. « Être sincère, c’est avoir toutes
les
pensées » (Rivière). Mais on ne peut se maintenir dans cet état. Ce «
1977
mensonge », ce choix faux mais bon, nécessaire à
la
vie, n’est-ce pas être sincère aussi que de s’y prêter ? Or, il vous
1978
que de s’y prêter ? Or, il vous tire aussitôt de
l’
indétermination violente qu’est la sincérité selon Rivière. La sincéri
1979
ire aussitôt de l’indétermination violente qu’est
la
sincérité selon Rivière. La sincérité véritable vous pousse à faire l
1980
ation violente qu’est la sincérité selon Rivière.
La
sincérité véritable vous pousse à faire le saut dans le vide qu’exige
1981
vière. La sincérité véritable vous pousse à faire
le
saut dans le vide qu’exige toute foi ; c’est la volonté de sincérité,
1982
cérité véritable vous pousse à faire le saut dans
le
vide qu’exige toute foi ; c’est la volonté de sincérité, c’est-à-dire
1983
e le saut dans le vide qu’exige toute foi ; c’est
la
volonté de sincérité, c’est-à-dire une sincérité tournée au vice, inv
1984
ncérité tournée au vice, invertie, qui retient de
l’
oser. Petite anthologie ou que le « style » est de l’homme même
1985
ui retient de l’oser. Petite anthologie ou que
le
« style » est de l’homme même J’en étais à peu près à ce point de
1986
. Petite anthologie ou que le « style » est de
l’
homme même J’en étais à peu près à ce point de mes notes — à ce poi
1987
ues lectures, je pris note des passages suivants (
les
paraphraser serait d’une ingratitude insigne — ils marquent au reste
1988
atitude insigne — ils marquent au reste fort bien
les
jalons de cette recherche) : Puissiez-vous avouer moins de sincérité
1989
ropre témoin, intelligent mais immobile : ce sont
les
mêmes qui s’ignorent en tant que personnes. Comment se trouveraient-i
1990
eraient-ils, n’existant pas ? (François Mauriac.)
La
valeur morale de M. Godeau serait définie par l’aspect seul qu’il sou
1991
La valeur morale de M. Godeau serait définie par
l’
aspect seul qu’il souffrirait de garder lui-même à son propre regard.
1992
ait de garder lui-même à son propre regard. Ainsi
la
valeur morale d’un homme équivalait-elle à l’illusion qu’il était cap
1993
nsi la valeur morale d’un homme équivalait-elle à
l’
illusion qu’il était capable d’entretenir sur lui-même. (Marcel Jouhan
1994
lle qui est douée d’assez de force pour donner de
la
réalité à l’illusion. (Max Jacob.) Un rôle ? Oui. Mais si le personna
1995
ouée d’assez de force pour donner de la réalité à
l’
illusion. (Max Jacob.) Un rôle ? Oui. Mais si le personnage est mainte
1996
à l’illusion. (Max Jacob.) Un rôle ? Oui. Mais si
le
personnage est maintenu jusqu’à la mort, il se confond avec l’homme m
1997
? Oui. Mais si le personnage est maintenu jusqu’à
la
mort, il se confond avec l’homme même. (André Maurois.) (Quel effro
1998
est maintenu jusqu’à la mort, il se confond avec
l’
homme même. (André Maurois.) (Quel effroi, ce jour de l’adolescence
1999
même. (André Maurois.) (Quel effroi, ce jour de
l’
adolescence où l’on soupçonne pour la première fois que certains, peut
2000
ois.) (Quel effroi, ce jour de l’adolescence où
l’
on soupçonne pour la première fois que certains, peut-être, jouent leu
2001
, jouent leur vie. Rien ne paraît plus sinistre à
la
sincérité presque pure de cet âge. Mais il le faut dépasser.) Si j’
2002
e à la sincérité presque pure de cet âge. Mais il
le
faut dépasser.) Si j’en crois l’intensité d’un sentiment intime, ce
2003
t âge. Mais il le faut dépasser.) Si j’en crois
l’
intensité d’un sentiment intime, ce moi idéal que j’appelle en chaque
2004
’imaginait retenir. Dès lors, ce n’est pas lâcher
la
proie pour l’ombre que de tendre vers ce modèle. Dirais-je que c’est
2005
enir. Dès lors, ce n’est pas lâcher la proie pour
l’
ombre que de tendre vers ce modèle. Dirais-je que c’est ma sincérité d
2006
e. Dirais-je que c’est ma sincérité d’y aller par
les
moyens les plus efficaces ? Mais on nommera cela de l’hypocrisie. Soi
2007
e que c’est ma sincérité d’y aller par les moyens
les
plus efficaces ? Mais on nommera cela de l’hypocrisie. Soit, j’accept
2008
yens les plus efficaces ? Mais on nommera cela de
l’
hypocrisie. Soit, j’accepte. Et aussitôt j’annonce : Éloge de l’hyp
2009
t, j’accepte. Et aussitôt j’annonce : Éloge de
l’
hypocrisie Non, non !… Debout dans l’ère successive ! Brisez, mon c
2010
Éloge de l’hypocrisie Non, non !… Debout dans
l’
ère successive ! Brisez, mon corps, brisez cette forme pensive ! .....
2011
.................................................
Le
vent se lève, il faut tenter de vivre. Paul Valéry. Certes, du sein
2012
is bien quelques voiles à mon dégoût d’un moi que
la
vie me montrait si désespérément vrai, tyrannique, insuffisant. Mais
2013
, un peu sceptique, quand mon esprit partait dans
le
rêve d’un idéal de fortune, idole naïve de ma jeune angoisse… Je t’ai
2014
alors qu’une symphonie de joies émanait de toute
la
vie : chaque chose proposait une ferveur nouvelle, et chaque être un
2015
en pût être privée. Alors, acquiesçant vivement à
l’
invite que je soupçonnais la plus riche d’inconnu, je m’élançais sur l
2016
cquiesçant vivement à l’invite que je soupçonnais
la
plus riche d’inconnu, je m’élançais sur la voie qu’elle m’ouvrait, av
2017
onnais la plus riche d’inconnu, je m’élançais sur
la
voie qu’elle m’ouvrait, avec tant de rires amis, vers tout ce que mom
2018
je choisissais de laisser — et des baisers à tous
les
vents — qu’il eût été loisible d’attribuer comme objet à ma jubilatio
2019
st ainsi que fidèle à soi-même au plus profond de
l’
être, on entretient comme une arrière-pensée sagace et obstinée l’assu
2020
tient comme une arrière-pensée sagace et obstinée
l’
assurance d’une continuité entre ses actions et ses désirs, un quant-à
2021
ui ne gêne aucun geste, mais incline discrètement
les
décisions et les rend complices d’un dessein logique, peut-être loint
2022
geste, mais incline discrètement les décisions et
les
rend complices d’un dessein logique, peut-être lointain, en quoi cons
2023
ein logique, peut-être lointain, en quoi consiste
l’
unité la plus réelle de l’individu — en dehors du corps. Et ce ne sont
2024
que, peut-être lointain, en quoi consiste l’unité
la
plus réelle de l’individu — en dehors du corps. Et ce ne sont point l
2025
ntain, en quoi consiste l’unité la plus réelle de
l’
individu — en dehors du corps. Et ce ne sont point là jeux d’idées et
2026
dées et jongleries verbales. Regards au-dessus de
l’
amour ! Voir l’heure à la pendule pendant l’étreinte d’un adieu et cal
2027
ies verbales. Regards au-dessus de l’amour ! Voir
l’
heure à la pendule pendant l’étreinte d’un adieu et calculer rapidemen
2028
es. Regards au-dessus de l’amour ! Voir l’heure à
la
pendule pendant l’étreinte d’un adieu et calculer rapidement le retou
2029
us de l’amour ! Voir l’heure à la pendule pendant
l’
étreinte d’un adieu et calculer rapidement le retour à une fidélité pl
2030
dant l’étreinte d’un adieu et calculer rapidement
le
retour à une fidélité plus profonde. Fidélité à sa loi individuelle,
2031
e honnêteté peut-être plus réelle que l’autre. Et
l’
on conçoit que ce constant et secret assujettissement au moi idéal exi
2032
re que cette agilité offensive qu’on appelle dans
la
vie publique arrivisme, et séduction dans les salons. Constater une
2033
dans la vie publique arrivisme, et séduction dans
les
salons. Constater une faiblesse, c’est toujours un peu en prendre so
2034
esse, c’est toujours un peu en prendre son parti.
La
sincérité crée en nous un fait accompli. J’appelle hypocrisie envers
2035
ais ce que de toute mon âme je veux être !… 1.
La
véritable description de l’élan supposé dans le premier exemple, ce s
2036
je veux être !… 1. La véritable description de
l’
élan supposé dans le premier exemple, ce serait le récit des gestes qu
2037
l’élan supposé dans le premier exemple, ce serait
le
récit des gestes qu’il m’aurait fait commettre. Manifester est plus s
2038
st plus sincère qu’analyser. 2. D’ailleurs toute
la
psychologie moderne souligne la quasi-impossibilité de traduire un dy
2039
D’ailleurs toute la psychologie moderne souligne
la
quasi-impossibilité de traduire un dynamisme directement dans notre l
2040
t certes quand il s’agit de parole ou d’écriture,
l’
affirmation prouve moins une certitude qu’un désir de certitude né de
2041
né Crevel) c. Rougemont Denis de, « Paradoxe de
la
sincérité », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribo
2042
Dés ou
la
clef des champs (1927)l « On sent l’absurdité d’un semblable syst
2043
Dés ou la clef des champs (1927)l « On sent
l’
absurdité d’un semblable système. » Musset. Une rose et un journal o
2044
e. » Musset. Une rose et un journal oubliés sur
le
marbre vulgaire d’une table de café. Je venais de m’asseoir et de com
2045
’habitude, un peu après six heures. J’étais seul.
Le
café est un lieu anonyme bien plus propice au rêve que ma chambre où
2046
ropice au rêve que ma chambre où m’attendent tous
les
soirs quand je rentre du bureau, les gages insupportablement familier
2047
tendent tous les soirs quand je rentre du bureau,
les
gages insupportablement familiers d’une vie honnête de type courant.
2048
une vie honnête de type courant. Pour dix sous et
le
prétexte d’un apéro, on entre ici dans le jardin des songeries les pl
2049
sous et le prétexte d’un apéro, on entre ici dans
le
jardin des songeries les plus étranges qu’appelle la musique. Je me g
2050
apéro, on entre ici dans le jardin des songeries
les
plus étranges qu’appelle la musique. Je me gardai donc d’ouvrir le jo
2051
jardin des songeries les plus étranges qu’appelle
la
musique. Je me gardai donc d’ouvrir le journal. Les Petites nouvelles
2052
qu’appelle la musique. Je me gardai donc d’ouvrir
le
journal. Les Petites nouvelles ont un pouvoir tyrannique sur mon espr
2053
a musique. Je me gardai donc d’ouvrir le journal.
Les
Petites nouvelles ont un pouvoir tyrannique sur mon esprit. Non que c
2054
ur mon esprit. Non que cela m’intéresse au fond :
les
faits-divers, rien de moins divers. Mais je suis pris dans l’absurde
2055
ers, rien de moins divers. Mais je suis pris dans
l’
absurde réseau des lignes, et cette mécanique me restitue chaque fois
2056
tte rose oubliée me gênait : perdre une rose pour
le
plaisir ! (Et je ne pensais même pas, alors : une si belle rose.) Le
2057
ne pensais même pas, alors : une si belle rose.)
Le
tambour livra un homme élégant et tragique, qui se tint un moment imm
2058
s la mienne et s’assit sans paraître me voir. Une
grande
figure aux joues mates, aux yeux clairs. Il déplia le journal et se m
2059
igure aux joues mates, aux yeux clairs. Il déplia
le
journal et se mit à lire les pages d’annonces. On m’apporta une lique
2060
eux clairs. Il déplia le journal et se mit à lire
les
pages d’annonces. On m’apporta une liqueur. Et quand j’eus fini de bo
2061
es pensées plus rapides s’en allèrent un peu vers
l’
avenir et j’osai quelques rêves. C’était, je m’en souviens, une petite
2062
souviens, une petite automobile qui roulait dans
la
banlieue printanière ; des soupers d’amis dans notre modeste salle à
2063
er ; des jaquettes de couleur pour ma femme… Mais
l’
homme avait posé son journal. Soudain, portant la main à son gilet, il
2064
l’homme avait posé son journal. Soudain, portant
la
main à son gilet, il en retira trois dés qu’il jeta sur la table. Les
2065
son gilet, il en retira trois dés qu’il jeta sur
la
table. Les yeux brillants, il compta. Une indécision parut sur ses tr
2066
, il en retira trois dés qu’il jeta sur la table.
Les
yeux brillants, il compta. Une indécision parut sur ses traits. Puis
2067
e indécision parut sur ses traits. Puis il reprit
les
dés brusquement, et me fixant avec un léger sourire : — Jouez ! ordon
2068
t avec un léger sourire : — Jouez ! ordonna-t-il.
La
surprise vainquit ma timidité, je pris les dés et les jetai sans hési
2069
a-t-il. La surprise vainquit ma timidité, je pris
les
dés et les jetai sans hésiter. Il compta de nouveau, puis avec une lé
2070
surprise vainquit ma timidité, je pris les dés et
les
jetai sans hésiter. Il compta de nouveau, puis avec une légère exalta
2071
l saisit son journal. Il en parcourait rapidement
les
pages, la proie d’une agitation visible. Bientôt il m’offrit de jouer
2072
n journal. Il en parcourait rapidement les pages,
la
proie d’une agitation visible. Bientôt il m’offrit de jouer un moment
2073
nsommations. Je gagnai. Il demanda des portos. Je
les
gagnai et je les bus. D’autres encore. Ma tête commençait à osciller
2074
agnai. Il demanda des portos. Je les gagnai et je
les
bus. D’autres encore. Ma tête commençait à osciller vaguement. Les co
2075
encore. Ma tête commençait à osciller vaguement.
Les
couleurs du bar me remplissaient d’une joie inconnue. Et je me refusa
2076
uestions qu’en moi-même posait ma raison effarée.
L’
étranger s’animait aussi : une fièvre faisait s’épanouir sur son visag
2077
quel plaisir cruel. C’était un jeu très simple où
l’
esprit libre de calculs se tend ardemment vers la conclusion d’un hasa
2078
l’esprit libre de calculs se tend ardemment vers
la
conclusion d’un hasard qui opère au commandement de la main. Ce soir-
2079
nclusion d’un hasard qui opère au commandement de
la
main. Ce soir-là, une confiance me possédait, telle que je savais trè
2080
ais très clairement que je gagnerais à tout coup.
L’
étranger se mit à discourir. Et dans mon ivresse, ses paroles peignaie
2081
je bouscule tous tes calculs, ha ! tu te disais :
le
voilà riche, le voilà classé, le voilà prêt à faire des bassesses pou
2082
tes calculs, ha ! tu te disais : le voilà riche,
le
voilà classé, le voilà prêt à faire des bassesses pour durer, et tu t
2083
! tu te disais : le voilà riche, le voilà classé,
le
voilà prêt à faire des bassesses pour durer, et tu te réjouissais, pa
2084
omplètement démodées et d’intrigues usées jusqu’à
la
corde, jusqu’à la corde pour les pendre, ha ha ha ! Tu pensais que j’
2085
es et d’intrigues usées jusqu’à la corde, jusqu’à
la
corde pour les pendre, ha ha ha ! Tu pensais que j’allais me cramponn
2086
ues usées jusqu’à la corde, jusqu’à la corde pour
les
pendre, ha ha ha ! Tu pensais que j’allais me cramponner à cette espè
2087
er à cette espèce de bonheur qu’ils croient lié à
la
possession, et que j’allais vivre aussi sur le dogme l’argent-fait-le
2088
à la possession, et que j’allais vivre aussi sur
le
dogme l’argent-fait-le-bonheur. En somme, tu croyais que j’allais adh
2089
session, et que j’allais vivre aussi sur le dogme
l’
argent-fait-le-bonheur. En somme, tu croyais que j’allais adhérer à l’
2090
heur. En somme, tu croyais que j’allais adhérer à
l’
idéologie socialiste, gros farceur, va. Quand je songe à tous ces gens
2091
d je songe à tous ces gens qui perdent leur vie à
la
gagner9, et leur façon inexplicable de lier des valeurs morales aux c
2092
» comme ils disent dans leurs manuels scolaires.
Les
voler, pour leur apprendre. Et leur manie aussi de situer le paradis
2093
our leur apprendre. Et leur manie aussi de situer
le
paradis dans la classe d’impôts immédiatement supérieure à la leur. I
2094
re. Et leur manie aussi de situer le paradis dans
la
classe d’impôts immédiatement supérieure à la leur. Ils voudraient qu
2095
ans la classe d’impôts immédiatement supérieure à
la
leur. Ils voudraient que leur vie garantît un 5 % régulier de plaisir
2096
ertige sans prix du lâchez-tout ! Ils ont inventé
les
caisses d’épargne, monuments d’une bassesse morale inconcevable, temp
2097
onheur que celui qu’ils ont reçu de papa-maman et
l’
Habitude, leur marraine aux dents jaunes. Ah ! perdre, perdre ; et c’e
2098
stinée dans l’autre, de douleurs en ivresses avec
la
même joie, mon cheval fou, mon beau Désir s’ébroue et part sitôt que
2099
bousse, ils n’y comprendront jamais rien, écoutez-
les
, comme ils me jugent et leurs cris indignés qui couvrent une angoisse
2100
leurs cris indignés qui couvrent une angoisse. Ça
les
dérange terriblement, sauf un ou deux qui s’imaginent gagner à mes dé
2101
in ce brave homme qui est en train de me soutirer
les
quelque billets de mille dont je venais de régler le sort, puisque de
2102
quelque billets de mille dont je venais de régler
le
sort, puisque demain dès l’aube, j’irai tenter la misère aux yeux las
2103
t je venais de régler le sort, puisque demain dès
l’
aube, j’irai tenter la misère aux yeux las pleins de rêves, la misère
2104
le sort, puisque demain dès l’aube, j’irai tenter
la
misère aux yeux las pleins de rêves, la misère qui fait des soirs si
2105
ai tenter la misère aux yeux las pleins de rêves,
la
misère qui fait des soirs si doux aux amants quand ils n’ont plus que
2106
ls n’ont plus que des baisers au goût d’adieu, et
l’
avenir où se mêlent incertaines, une tendresse éperdue et la mort. » I
2107
ù se mêlent incertaines, une tendresse éperdue et
la
mort. » Il ferma les yeux sur des visions. Les lustres doraient un br
2108
nes, une tendresse éperdue et la mort. » Il ferma
les
yeux sur des visions. Les lustres doraient un brouillard de fumée, et
2109
et la mort. » Il ferma les yeux sur des visions.
Les
lustres doraient un brouillard de fumée, et la musique noyait mes pen
2110
. Les lustres doraient un brouillard de fumée, et
la
musique noyait mes pensées. Je vis qu’une femme était assise à notre
2111
, en robe rouge, et très fardée. Elle jouait avec
la
rose. Les dés roulèrent, pour un dernier enjeu. Alors la femme lança
2112
rouge, et très fardée. Elle jouait avec la rose.
Les
dés roulèrent, pour un dernier enjeu. Alors la femme lança sur la tab
2113
. Les dés roulèrent, pour un dernier enjeu. Alors
la
femme lança sur la table cette rose qui s’effeuilla sur les dés, et p
2114
, pour un dernier enjeu. Alors la femme lança sur
la
table cette rose qui s’effeuilla sur les dés, et partit d’un long rir
2115
lança sur la table cette rose qui s’effeuilla sur
les
dés, et partit d’un long rire. Elle me regardait et l’étranger aussi
2116
s, et partit d’un long rire. Elle me regardait et
l’
étranger aussi se mit à me regarder bizarrement et j’étais possédé de
2117
joies et de peurs. Il fallut se lever, traverser
le
café dans la musique et la rumeur des clients. Dehors les réclames lu
2118
peurs. Il fallut se lever, traverser le café dans
la
musique et la rumeur des clients. Dehors les réclames lumineuses dial
2119
ut se lever, traverser le café dans la musique et
la
rumeur des clients. Dehors les réclames lumineuses dialoguaient folle
2120
dans la musique et la rumeur des clients. Dehors
les
réclames lumineuses dialoguaient follement au-dessus des rues parcour
2121
main je n’avais plus un sou). Je n’ai jamais revu
l’
étranger. Quelquefois je songe à ses paroles — ou peut-être n’étaient-
2122
inquiétude, parce que je ne suis plus tout à fait
le
même. Puis elle me laisse, parce que le lait va monter. Alors, dans m
2123
ut à fait le même. Puis elle me laisse, parce que
le
lait va monter. Alors, dans ma chambre, avant d’aller souper, je m’ab
2124
re, avant d’aller souper, je m’abats sur mon lit,
les
cheveux dans les mains. Et je voudrais pouvoir pleurer sur ma lâcheté
2125
souper, je m’abats sur mon lit, les cheveux dans
les
mains. Et je voudrais pouvoir pleurer sur ma lâcheté. Et je t’apostro
2126
haïr… 9. Calembour sur une idée juste. (Note de
l’
éd.) l. Rougemont Denis de, « Dés ou la clef des champs », Neuchâtel
2127
(Note de l’éd.) l. Rougemont Denis de, « Dés ou
la
clef des champs », Neuchâtel 1928 : beaux-arts, arts appliqués, archi
2128
Louis Aragon,
Le
Paysan de Paris (janvier 1927)ab « Je n’admets pas qu’on reprenne
2129
n’admets pas qu’on reprenne mes paroles, qu’on me
les
oppose. Ce ne sont pas les termes d’un traité de paix. Entre moi et v
2130
mes paroles, qu’on me les oppose. Ce ne sont pas
les
termes d’un traité de paix. Entre moi et vous, c’est la guerre. » Voi
2131
mes d’un traité de paix. Entre moi et vous, c’est
la
guerre. » Voilà pour les critiques, « punaises glabres et poux barbus
2132
Entre moi et vous, c’est la guerre. » Voilà pour
les
critiques, « punaises glabres et poux barbus », qui perdraient leur t
2133
ux barbus », qui perdraient leur temps à recenser
les
incohérences pittoresques de ce petit livre. Quant à ceux que certain
2134
une kyrielle d’injures qui ne font pas honneur à
l’
imagination d’autres fois si prestigieuse du poète : « Ils m’ont suivi
2135
ois si prestigieuse du poète : « Ils m’ont suivi,
les
imbéciles », ricane-t-il ; et sans rire : « À mort ceux qui paraphras
2136
ce que je dis ». Il y a chez Aragon une folie de
la
persécution, qui se cherche partout des prétextes, et une passion far
2137
rtout des prétextes, et une passion farouche pour
la
liberté, qui font de cet ombrageux personnage une manière de Rousseau
2138
tense désespoir, on songe au Frank de La Coupe et
les
Lèvres, à qui ses compagnons criaient : « Te fais-tu le bouffon de ta
2139
res, à qui ses compagnons criaient : « Te fais-tu
le
bouffon de ta propre détresse ? » Tant d’insistance dans le mauvais g
2140
de ta propre détresse ? » Tant d’insistance dans
le
mauvais goût ne m’empêchera pas de le dire, Aragon possède le tempéra
2141
stance dans le mauvais goût ne m’empêchera pas de
le
dire, Aragon possède le tempérament le plus hardi et le plus original
2142
oût ne m’empêchera pas de le dire, Aragon possède
le
tempérament le plus hardi et le plus original de la jeune littérature
2143
era pas de le dire, Aragon possède le tempérament
le
plus hardi et le plus original de la jeune littérature française. Il
2144
e, Aragon possède le tempérament le plus hardi et
le
plus original de la jeune littérature française. Il le proclame « J’a
2145
tempérament le plus hardi et le plus original de
la
jeune littérature française. Il le proclame « J’appartiens à la grand
2146
us original de la jeune littérature française. Il
le
proclame « J’appartiens à la grande race des torrents ». Génie inégal
2147
rature française. Il le proclame « J’appartiens à
la
grande race des torrents ». Génie inégal s’il en fut, voici parmi tro
2148
ure française. Il le proclame « J’appartiens à la
grande
race des torrents ». Génie inégal s’il en fut, voici parmi trop de ta
2149
littérature pour trouver semblable domination de
la
langue. Et parmi les modernes, il bat tous les records de l’image, ce
2150
ouver semblable domination de la langue. Et parmi
les
modernes, il bat tous les records de l’image, ce qui nous vaut avec d
2151
de la langue. Et parmi les modernes, il bat tous
les
records de l’image, ce qui nous vaut avec des bizarreries fatigantes
2152
Et parmi les modernes, il bat tous les records de
l’
image, ce qui nous vaut avec des bizarreries fatigantes et quelques so
2153
ne se croie pas tenu de justifier ses visions par
le
moyen d’une métaphysique aussi prétentieuse qu’incertaine. Son affair
2154
si prétentieuse qu’incertaine. Son affaire, c’est
l’
amour, et certain désespoir vaste et profond comme l’époque. « Voulez-
2155
mour, et certain désespoir vaste et profond comme
l’
époque. « Voulez-vous des douleurs, la mort ou des chansons ? » On a l
2156
ofond comme l’époque. « Voulez-vous des douleurs,
la
mort ou des chansons ? » On a l’hallucination du décor des capitales,
2157
us des douleurs, la mort ou des chansons ? » On a
l’
hallucination du décor des capitales, créatrice d’un merveilleux de ch
2158
instant, d’une véritable « mythologie moderne ».
Le
Paysan de Paris est une suite de promenades dont la composition n’est
2159
Paysan de Paris est une suite de promenades dont
la
composition n’est pas sans rappeler celle des Nuits d’octobre de Nerv
2160
es Nuits d’octobre de Nerval ; forme qui permet à
l’
auteur de divaguer de la philosophie au lyrisme le plus échevelé en pa
2161
rval ; forme qui permet à l’auteur de divaguer de
la
philosophie au lyrisme le plus échevelé en passant par la description
2162
l’auteur de divaguer de la philosophie au lyrisme
le
plus échevelé en passant par la description réaliste ou imaginée d’un
2163
sophie au lyrisme le plus échevelé en passant par
la
description réaliste ou imaginée d’une boîte de nuit, d’une devanture
2164
, d’une devanture, d’un parc public. Ce n’est pas
le
meilleur livre de l’auteur d’Anicet. C’est pourtant un des plus signi
2165
un parc public. Ce n’est pas le meilleur livre de
l’
auteur d’Anicet. C’est pourtant un des plus significatifs du romantism
2166
ougemont Denis de, « [Compte rendu] Louis Aragon,
Le
Paysan de Paris », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genè
2167
riet V. A.-W. Poste aux amours perdues Sur
le
mont gris pâlissants Des bouquets de vagues brumes. Insulter ta beaut
2168
sses, ô col roide, En souffrance mes baisers.
L’
amour est un alibi Nos lèvres sitôt que jointes, Ô dernier mensong
2169
vers d’autres rêves Où sourient quels anges fous.
L’
horaire dicte un adieu, La mode qu’on rie des pleurs, Lors je baise vo
2170
rient quels anges fous. L’horaire dicte un adieu,
La
mode qu’on rie des pleurs, Lors je baise votre main Comme on signe d’
2171
Conte métaphysique :
L’
individu atteint de strabisme (janvier 1927)f g Comme le démiurge v
2172
u atteint de strabisme (janvier 1927)f g Comme
le
démiurge venait de peser sur le commutateur des étoiles… l’une, se dé
2173
1927)f g Comme le démiurge venait de peser sur
le
commutateur des étoiles… l’une, se décrochant sans plus d’hésitation,
2174
sans plus d’hésitation, se mit à pérégriner dans
les
régions de chasse gardée du ci-devant soleil. C’est là qu’Urbain, pre
2175
par qui ? elle était anticléricale, on ne saurait
le
taire, — Urbain dormait. L’étoile, jeune fille, roulait gentiment sur
2176
ricale, on ne saurait le taire, — Urbain dormait.
L’
étoile, jeune fille, roulait gentiment sur ses pointes, tout scintille
2177
heure, elle éclaira d’une rose caresse lumineuse
la
chevelure rouge d’Urbain, et son nez, lequel, par ses dimensions rema
2178
dimensions remarquablement exagérées, lui valait
le
surnom de Bin-Bin. Urbain ouvrit les yeux et ne vit rien. On rappelle
2179
s, lui valait le surnom de Bin-Bin. Urbain ouvrit
les
yeux et ne vit rien. On rappelle que les étoiles s’étaient décrochées
2180
n ouvrit les yeux et ne vit rien. On rappelle que
les
étoiles s’étaient décrochées de leur poste dans l’éternité. « Éternit
2181
s étoiles s’étaient décrochées de leur poste dans
l’
éternité. « Éternité désaffectée, c’est bien dommage, dit-il en s’étir
2182
fectée, c’est bien dommage, dit-il en s’étirant ;
le
printemps désormais rendra le ciel plus pâle, et nous irons chercher
2183
t-il en s’étirant ; le printemps désormais rendra
le
ciel plus pâle, et nous irons chercher dans le souvenir les vent-coul
2184
ra le ciel plus pâle, et nous irons chercher dans
le
souvenir les vent-coulis de la mort. Garçon, un café, un ! » Mais l’é
2185
lus pâle, et nous irons chercher dans le souvenir
les
vent-coulis de la mort. Garçon, un café, un ! » Mais l’étoile chantai
2186
rons chercher dans le souvenir les vent-coulis de
la
mort. Garçon, un café, un ! » Mais l’étoile chantait dans l’axe de sa
2187
t-coulis de la mort. Garçon, un café, un ! » Mais
l’
étoile chantait dans l’axe de sa vie normale et s’approchait en faisan
2188
rçon, un café, un ! » Mais l’étoile chantait dans
l’
axe de sa vie normale et s’approchait en faisant la roue — celle à qui
2189
’axe de sa vie normale et s’approchait en faisant
la
roue — celle à qui sourit la Fortune. Urbain, fort d’une hérédité jud
2190
pprochait en faisant la roue — celle à qui sourit
la
Fortune. Urbain, fort d’une hérédité judiciaire et française, dédaign
2191
judiciaire et française, dédaigna des avances que
la
perte de son sens de l’éternel rendait pourtant considérables, au sen
2192
dédaigna des avances que la perte de son sens de
l’
éternel rendait pourtant considérables, au sens étymologique du terme.
2193
es, au sens étymologique du terme. Il loucha vers
le
néant, retourna ses poches, ôta ses gants qu’il jeta, puis, après un
2194
poches, ôta ses gants qu’il jeta, puis, après un
grand
coup de pied dans le vide symbolique des systèmes, sortit, c’est-à-di
2195
u’il jeta, puis, après un grand coup de pied dans
le
vide symbolique des systèmes, sortit, c’est-à-dire qu’il fit un pas d
2196
e qu’il fit un pas dans une direction quelconque.
L’
étoile pleurait, sentimentale. f. Rougemont Denis de, « L’individu
2197
eurait, sentimentale. f. Rougemont Denis de, «
L’
individu atteint de strabisme. Conte métaphysique », Revue de Belles-L
2198
Dans
le
Style (janvier 1927)h Nous recevons d’un bellettrien facétieux cet
2199
pour Paul Morand, auteur de « Lewis et Irène »
L’
auteur de maint roman de caractère gras quitte Charing-Cross, songeant
2200
au cerveau du poète qui meurt de sommeil naturel.
Le
tunnel sous la Manche escamoté, le train dépose des complets rigides
2201
oète qui meurt de sommeil naturel. Le tunnel sous
la
Manche escamoté, le train dépose des complets rigides contenant des A
2202
mmeil naturel. Le tunnel sous la Manche escamoté,
le
train dépose des complets rigides contenant des Anglais fragiles. L’a
2203
complets rigides contenant des Anglais fragiles.
L’
aube tire un écran de pluies sur le paysage commercial. Terminus : Mor
2204
lais fragiles. L’aube tire un écran de pluies sur
le
paysage commercial. Terminus : Morand, s’éveillant en français, termi
2205
s, termine : … Irène. (Grasset, 1924… … y compris
la
Suède et la Norvège.) On lit dans les Nouvelles littéraires , du 8
2206
… Irène. (Grasset, 1924… … y compris la Suède et
la
Norvège.) On lit dans les Nouvelles littéraires , du 8 janvier 192
2207
y compris la Suède et la Norvège.) On lit dans
les
Nouvelles littéraires , du 8 janvier 1927, l’information suivante :
2208
s les Nouvelles littéraires , du 8 janvier 1927,
l’
information suivante : Mardi dernier a été célébré en l’église grecque
2209
rmation suivante : Mardi dernier a été célébré en
l’
église grecque de la rue Georges Bizet le mariage de M. Paul Morand av
2210
ardi dernier a été célébré en l’église grecque de
la
rue Georges Bizet le mariage de M. Paul Morand avec la princesse Hélè
2211
lébré en l’église grecque de la rue Georges Bizet
le
mariage de M. Paul Morand avec la princesse Hélène-C. Soutzo. Les tém
2212
e Georges Bizet le mariage de M. Paul Morand avec
la
princesse Hélène-C. Soutzo. Les témoins étaient pour le marié : M. Ph
2213
. Paul Morand avec la princesse Hélène-C. Soutzo.
Les
témoins étaient pour le marié : M. Philippe Berthelot, secrétaire gén
2214
ncesse Hélène-C. Soutzo. Les témoins étaient pour
le
marié : M. Philippe Berthelot, secrétaire général du ministre des Aff
2215
ral du ministre des Affaires étrangères ; et pour
la
mariée : Son Excellence M. Diamanty, ministre de Roumanie à Paris. C’
2216
stre de Roumanie à Paris. C’est encore mieux dans
le
style. h. Rougemont Denis de, « Dans le style », Revue de Belles-L
2217
x dans le style. h. Rougemont Denis de, « Dans
le
style », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg,
2218
Bernard Barbey,
La
Maladère (février 1927)ac « Quel admirable sujet de roman, écrit G
2219
out de quinze ans, de vingt ans de vie conjugale,
la
décristallisation progressive et réciproque des conjoints. » On sait
2220
èvre d’imagination qui orne de beautés illusoires
l’
objet de l’amour. Mais les jeunes gens de ce temps ne cultivent point
2221
ination qui orne de beautés illusoires l’objet de
l’
amour. Mais les jeunes gens de ce temps ne cultivent point cette fièvr
2222
ne de beautés illusoires l’objet de l’amour. Mais
les
jeunes gens de ce temps ne cultivent point cette fièvre. Et comme la
2223
e temps ne cultivent point cette fièvre. Et comme
la
morale ne sait plus leur imposer de feindre encore ce que le cœur ne
2224
e sait plus leur imposer de feindre encore ce que
le
cœur ne ressent plus, il suffit de quelques mois aux jeunes époux de
2225
s, il suffit de quelques mois aux jeunes époux de
la
Maladère pour se déprendre de leurs rêves. Un malentendu grandit entr
2226
x dans leur isolement, inexplicable et mal avoué.
L’
on songe à une fatalité intérieure qui les ferait se meurtrir l’un l’a
2227
l avoué. L’on songe à une fatalité intérieure qui
les
ferait se meurtrir l’un l’autre. Pourtant, jusqu’au bout, il semble q
2228
u’un mot, un geste décisif, ou certaine amitié de
la
saison suffirait à dissiper le charme perfide qui les tourmente. Mais
2229
certaine amitié de la saison suffirait à dissiper
le
charme perfide qui les tourmente. Mais il faudrait d’abord qu’ils se
2230
saison suffirait à dissiper le charme perfide qui
les
tourmente. Mais il faudrait d’abord qu’ils se soient délivrés d’eux-m
2231
, soient possibles. C’est d’Armande surtout qu’on
les
attendrait, plus franche d’allure. On ne sait ce qui la retient : son
2232
endrait, plus franche d’allure. On ne sait ce qui
la
retient : son amour ? son manque d’amour ? Pour Jacques, il souffre d
2233
able adolescence, d’un défaitisme sentimental qui
l’
empêtre de réticences, et le fait jouer bien maladroitement son rôle d
2234
tisme sentimental qui l’empêtre de réticences, et
le
fait jouer bien maladroitement son rôle d’homme… « Captif de sa propr
2235
e trahit Barbey : son art est justement de voiler
les
intentions du récit et de les exprimer seulement par un geste, une nu
2236
justement de voiler les intentions du récit et de
les
exprimer seulement par un geste, une nuance du paysage, une image qu’
2237
sentiment. Ce n’est qu’à force de discrétion dans
les
moyens qu’il parvient à une certaine puissance de l’effet, aux derniè
2238
moyens qu’il parvient à une certaine puissance de
l’
effet, aux dernières pages. Il règne dans la Maladère une étrange harm
2239
ce de l’effet, aux dernières pages. Il règne dans
la
Maladère une étrange harmonie entre le climat des sentiments et celui
2240
règne dans la Maladère une étrange harmonie entre
le
climat des sentiments et celui des campagnes désolées où ils se dével
2241
ristes et sans violence, autour de ces êtres dont
la
détresse est d’autant plus cruelle qu’elle est contenue sous des deho
2242
ntenue sous des dehors trop polis. Une fois fermé
le
livre de Barbey, on oublie la justesse de son analyse pour n’évoquer
2243
lis. Une fois fermé le livre de Barbey, on oublie
la
justesse de son analyse pour n’évoquer plus que des visions où se con
2244
our n’évoquer plus que des visions où se condense
le
sentiment du récit. Dans le Cœur gros, c’était un parc avant l’orage,
2245
isions où se condense le sentiment du récit. Dans
le
Cœur gros, c’était un parc avant l’orage, le rose sombre d’une joue b
2246
u récit. Dans le Cœur gros, c’était un parc avant
l’
orage, le rose sombre d’une joue brûlante et fraîche dans le vent. Et
2247
Dans le Cœur gros, c’était un parc avant l’orage,
le
rose sombre d’une joue brûlante et fraîche dans le vent. Et dans la M
2248
e rose sombre d’une joue brûlante et fraîche dans
le
vent. Et dans la Maladère, un arbre coupé découvrant le manoir perdu,
2249
ne joue brûlante et fraîche dans le vent. Et dans
la
Maladère, un arbre coupé découvrant le manoir perdu, des fumées sur u
2250
t. Et dans la Maladère, un arbre coupé découvrant
le
manoir perdu, des fumées sur un paysage d’hiver et soudain sous la lu
2251
des fumées sur un paysage d’hiver et soudain sous
la
lueur d’un incendie, deux visages tordus de passion. Cette fin est ad
2252
tordus de passion. Cette fin est admirable, dont
la
brutalité si longtemps désirée délivre Jacques d’un passé obsédant, d
2253
gemont Denis de, « [Compte rendu] Bernard Barbey,
La
Maladère », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, fév
2254
Guy de Pourtalès, Montclar (février 1927)ad
L’
on aime que, pour certains hommes, écrire ne soit que le recensement p
2255
ime que, pour certains hommes, écrire ne soit que
le
recensement passionné de leur vie, ou l’aveu déguisé d’une insatisfac
2256
soit que le recensement passionné de leur vie, ou
l’
aveu déguisé d’une insatisfaction qu’elle leur laisse. Montclar est l’
2257
insatisfaction qu’elle leur laisse. Montclar est
l’
auteur de vers de jeunesse auxquels il ne tient guère, et l’on compren
2258
e vers de jeunesse auxquels il ne tient guère, et
l’
on comprend que ce journal bientôt les rejoindra dans l’armoire aux so
2259
nt guère, et l’on comprend que ce journal bientôt
les
rejoindra dans l’armoire aux souvenirs. Cette façon de ne pas y tenir
2260
omprend que ce journal bientôt les rejoindra dans
l’
armoire aux souvenirs. Cette façon de ne pas y tenir, qu’il manifeste
2261
oute occasion de sa vie est peut-être ce qui nous
le
rend le plus sympathique. « Officiellement comblé, et par dedans… com
2262
asion de sa vie est peut-être ce qui nous le rend
le
plus sympathique. « Officiellement comblé, et par dedans… comment bie
2263
ui, comme pour Barnabooth, il s’agit de « déjouer
le
complot de la commodité ». Mais plus voluptueux que philosophe, c’est
2264
Barnabooth, il s’agit de « déjouer le complot de
la
commodité ». Mais plus voluptueux que philosophe, c’est à l’amour qu’
2265
é ». Mais plus voluptueux que philosophe, c’est à
l’
amour qu’il ira demander la souffrance indispensable au perfectionneme
2266
ue philosophe, c’est à l’amour qu’il ira demander
la
souffrance indispensable au perfectionnement de son âme. Et qu’import
2267
au perfectionnement de son âme. Et qu’importe si
les
Allemands qui, fréquente sontae, pour notre plaisir, un peu plus vien
2268
rle de choses d’art comme on fait dans Proust, si
les
passions qu’il nous peint sont ici tant soit peu russes, et là, gidie
2269
se connaît assez pour savoir ce qui est en lui de
l’
homme même, ou de l’amateur distingué, — et ne peut pas nous tromper l
2270
r savoir ce qui est en lui de l’homme même, ou de
l’
amateur distingué, — et ne peut pas nous tromper là-dessus. Il se conn
2271
sus. Il se connaît avec une sorte de froideur que
l’
on dirait désintéressée si elle n’avait pour effet de souligner, plus
2272
he secrètement, parce que de ces « ratages » naît
le
perpétuel besoin d’évasion qui est la condition de son progrès moral.
2273
ages » naît le perpétuel besoin d’évasion qui est
la
condition de son progrès moral. C’est ainsi qu’il consent, non sans u
2274
consent, non sans une imperceptible satisfaction,
l’
aveu d’une fondamentale indifférence du cœur qui contraste avec une vi
2275
meline, un amour se noue, qui commence où souvent
l’
on finit. Et peut-être l’amour n’est-il possible qu’entre deux cœurs q
2276
qui commence où souvent l’on finit. Et peut-être
l’
amour n’est-il possible qu’entre deux cœurs que l’épreuve du plaisir n
2277
l’amour n’est-il possible qu’entre deux cœurs que
l’
épreuve du plaisir n’a pas exténués. Mais alors quelle avidité cruelle
2278
amour, à force de petites blessures. Ce n’est pas
le
moins troublant d’une telle vie, cette sagesse un peu sombre qui s’en
2279
’en dégage, sagesse qui veut « que nous appelions
les
âmes à la vie après seulement toutes les morts du plaisir », car elle
2280
sagesse qui veut « que nous appelions les âmes à
la
vie après seulement toutes les morts du plaisir », car elle sait « qu
2281
ppelions les âmes à la vie après seulement toutes
les
morts du plaisir », car elle sait « qu’entre les êtres, le bonheur es
2282
les morts du plaisir », car elle sait « qu’entre
les
êtres, le bonheur est un lien sans durée. Seules la souffrance ou de
2283
du plaisir », car elle sait « qu’entre les êtres,
le
bonheur est un lien sans durée. Seules la souffrance ou de secrètes a
2284
êtres, le bonheur est un lien sans durée. Seules
la
souffrance ou de secrètes anomalies ont un pouvoir d’éternité. » Il e
2285
e, ce me semble, d’insister sur ce qui forme dans
le
récit de cette vie comme une arrière-pensée inquiète et un peu hautai
2286
e arrière-pensée inquiète et un peu hautaine. Que
la
composition de cette réminiscence soit assez facile et « artiste » on
2287
le et « artiste » on hésite à en faire reproche à
l’
auteur. Cette espèce de modestie de l’allure est rare autant que sympa
2288
reproche à l’auteur. Cette espèce de modestie de
l’
allure est rare autant que sympathique, dans le temps que sévit l’infl
2289
de l’allure est rare autant que sympathique, dans
le
temps que sévit l’inflation littéraire la plus ridicule. Pourtant, qu
2290
e autant que sympathique, dans le temps que sévit
l’
inflation littéraire la plus ridicule. Pourtant, qu’elle ne laisse poi
2291
e, dans le temps que sévit l’inflation littéraire
la
plus ridicule. Pourtant, qu’elle ne laisse point oublier que ce livre
2292
e. Il manque sans doute un morceau de phrase dans
l’
édition originale.
2293
ant (février 1927)i j « Triste, mais vrai. » (
Les
journaux.) Mademoiselle, Il faut d’abord que je m’excuse : c’est un
2294
vous dise qu’il fait très froid dans ma chambre :
le
feu n’a pas pris, et d’ailleurs cela n’en vaut plus la peine. (Veuill
2295
u n’a pas pris, et d’ailleurs cela n’en vaut plus
la
peine. (Veuillez ne pas voir dans cette phrase quelque allusion de ma
2296
dit, sans doute parce que c’est là que se nouent
les
douleurs les plus atrocement inutiles. La première fois, au théâtre.
2297
ute parce que c’est là que se nouent les douleurs
les
plus atrocement inutiles. La première fois, au théâtre. Dans l’ombre,
2298
ment inutiles. La première fois, au théâtre. Dans
l’
ombre, j’ai suivi le drame sur vos traits seulement ; l’écho n’en fut
2299
emière fois, au théâtre. Dans l’ombre, j’ai suivi
le
drame sur vos traits seulement ; l’écho n’en fut que plus douloureux
2300
e, j’ai suivi le drame sur vos traits seulement ;
l’
écho n’en fut que plus douloureux dans mon cœur. Puis je vous ai oubli
2301
ous voir si entourée… D’autres fois… je n’ai plus
le
courage de les dire. Enfin, avant-hier, à ce bal. J’avais demandé à
2302
tourée… D’autres fois… je n’ai plus le courage de
les
dire. Enfin, avant-hier, à ce bal. J’avais demandé à un de mes amis,
2303
us connaît4, de me présenter. Il m’en avait donné
la
promesse. Vos regards rencontrèrent les miens plus d’une fois pendant
2304
pendant une danse qu’il fit avec vous, mais vous
les
détourniez soudain comme pour vous arracher à une obsession secrèteme
2305
session secrètement attirante ; et je pensais que
la
force de mon désir était telle que vous en éprouviez vaguement la men
2306
désir était telle que vous en éprouviez vaguement
la
menace. Je dis menace, parce que mes airs sombres vous effrayaient sa
2307
seule leur prêtait quelque intention. Quand enfin
l’
orchestre s’arrêta, je me trouvais tout près de vous. Mon ami me fit u
2308
mon du malheur me paralysa. Je venais d’entrevoir
l’
image d’un couple heureux et banal, votre sourire répondant au mien, c
2309
aires et sur des cartes postales illustrées. Déjà
la
foule des danseurs nous séparait, mon ami se détournait, un peu vexé
2310
s une invincible lassitude me saisir et m’assis à
l’
écart. On me demandait, en passant, si j’étais malade. Je désignais d’
2311
s bouteilles de champagne vides ; car on pardonne
l’
ivresse, mais non certaines douleurs. Même, je fus obligé de confier à
2312
bligé de confier à un ami que j’en avais repris …
Les
archets jouaient sur mes nerfs. Le jazz martelait mon désespoir. Dése
2313
vais repris … Les archets jouaient sur mes nerfs.
Le
jazz martelait mon désespoir. Désespoir étroit, ces œillères géantes
2314
sespoir étroit, ces œillères géantes aux pensées,
le
ciel trop bas d’un rêve sans issue, pesant comme l’envie d’un sommeil
2315
ciel trop bas d’un rêve sans issue, pesant comme
l’
envie d’un sommeil sans fin… J’avais soif, mais la seule vue d’un liqu
2316
l’envie d’un sommeil sans fin… J’avais soif, mais
la
seule vue d’un liquide me soulevait le cœur. L’aube parut. On éteigni
2317
soif, mais la seule vue d’un liquide me soulevait
le
cœur. L’aube parut. On éteignit toutes les lampes, et les couples cha
2318
s la seule vue d’un liquide me soulevait le cœur.
L’
aube parut. On éteignit toutes les lampes, et les couples charlestonna
2319
ulevait le cœur. L’aube parut. On éteignit toutes
les
lampes, et les couples charlestonnaient plus furieusement dans l’ombr
2320
. L’aube parut. On éteignit toutes les lampes, et
les
couples charlestonnaient plus furieusement dans l’ombre livide, aux c
2321
s couples charlestonnaient plus furieusement dans
l’
ombre livide, aux cris fêlés et déchirants des saxophones. Sortie dans
2322
s. Sortie dans un matin sourd, frileux, qui avait
la
nausée. Je rentrai seul. Voici quelques mots que j’écrivis à ma table
2323
œillet, pauvre gentillesse d’une autre femme dont
le
seul défaut fut de m’aimer… (Froid aux genoux, odeur de vieille fumée
2324
umée, et ce refus au sommeil qui meurtrit jusqu’à
l’
âme.) Convulsions d’oriflammes sur l’orchestre pensif. Ton regard est
2325
trit jusqu’à l’âme.) Convulsions d’oriflammes sur
l’
orchestre pensif. Ton regard est plus grand que le chant des violons.
2326
ammes sur l’orchestre pensif. Ton regard est plus
grand
que le chant des violons. Aube dure ! En ma tête rôde ton souvenir, c
2327
l’orchestre pensif. Ton regard est plus grand que
le
chant des violons. Aube dure ! En ma tête rôde ton souvenir, comme un
2328
es heures, d’un sommeil triste, tout enfiévré par
la
crainte du réveil. Puis je suis revenu dans ces rues où je vous renco
2329
n rendez-vous au thé du Printemps. J’ai rôdé dans
la
joie féminine des grands magasins, n’osant pas repasser trop souvent
2330
du Printemps. J’ai rôdé dans la joie féminine des
grands
magasins, n’osant pas repasser trop souvent devant les ascenseurs. «
2331
agasins, n’osant pas repasser trop souvent devant
les
ascenseurs. « Vers 4 heures, me disais-je elle y entrera, et, me glis
2332
tage… » Je délirais, bien sûr. Je m’imaginais que
les
vendeuses me dévisageaient de plus en plus impudemment : je devais pa
2333
qu’un paquet de dix personnes s’engouffrait dans
la
cage rouge et or et s’élevait, j’éprouvais un petit arrachement, comm
2334
ais encore : Si je prends cet ascenseur et que je
la
croise en route dans l’ascenseur descendant… Il aurait fallu monter,
2335
s cet ascenseur et que je la croise en route dans
l’
ascenseur descendant… Il aurait fallu monter, mais l’idée de vous trou
2336
scenseur descendant… Il aurait fallu monter, mais
l’
idée de vous trouver peut-être assise en face de votre bel ami laqué,
2337
je suis sorti. Il y avait beaucoup de monde dans
les
rues, sous la pluie. Les autobus passaient par groupes. Plusieurs foi
2338
Il y avait beaucoup de monde dans les rues, sous
la
pluie. Les autobus passaient par groupes. Plusieurs fois, j’ai cru vo
2339
t beaucoup de monde dans les rues, sous la pluie.
Les
autobus passaient par groupes. Plusieurs fois, j’ai cru vous reconnaî
2340
s. Plusieurs fois, j’ai cru vous reconnaître dans
la
foule qui se précipitait, mais je n’avais pas pris de numéro, je ne p
2341
llu courir après celle-là qui venait de tourner à
l’
angle de cette rue et qui avait votre démarche. Mais, pendant ce temps
2342
désir surmené vous appelait encore, haletant. Et
le
temps passait, à la fois si lent — jusqu’à l’arrivée du prochain métr
2343
Et le temps passait, à la fois si lent — jusqu’à
l’
arrivée du prochain métro, du prochain autobus, — si rapide : déjà les
2344
in métro, du prochain autobus, — si rapide : déjà
les
lumières des boulevards glissaient des reflets sur l’asphalte mouillé
2345
umières des boulevards glissaient des reflets sur
l’
asphalte mouillé. Les pieds dans l’eau, les jambes fatiguées, les paup
2346
ds glissaient des reflets sur l’asphalte mouillé.
Les
pieds dans l’eau, les jambes fatiguées, les paupières lourdes, et ce
2347
es reflets sur l’asphalte mouillé. Les pieds dans
l’
eau, les jambes fatiguées, les paupières lourdes, et ce chant désespér
2348
ets sur l’asphalte mouillé. Les pieds dans l’eau,
les
jambes fatiguées, les paupières lourdes, et ce chant désespéré qui vo
2349
illé. Les pieds dans l’eau, les jambes fatiguées,
les
paupières lourdes, et ce chant désespéré qui vous appelait, assourdis
2350
était arrêté tout près de moi. Je vis un visage à
l’
intérieur se pencher vers la vitre… Je montai. Il n’y avait que des da
2351
i. Je vis un visage à l’intérieur se pencher vers
la
vitre… Je montai. Il n’y avait que des dames. Personne ne parlait. La
2352
Il n’y avait que des dames. Personne ne parlait.
La
jeune femme qui s’était penchée vous ressemblait tant. Mais je n’osai
2353
ous ressemblait tant. Mais je n’osais presque pas
la
regarder, à cause d’une incertitude qui redonnait tout son empire à m
2354
. Peut-être était-ce vous. Je ne saurai jamais. À
l’
arrêt de la Place Saint-Michel, elle sortit, en me frôlant, sans me re
2355
était-ce vous. Je ne saurai jamais. À l’arrêt de
la
Place Saint-Michel, elle sortit, en me frôlant, sans me regarder. Je
2356
derrière elle. Mais tout de suite des parapluies
la
dérobèrent à mes yeux. Une bouche de métro m’attira. Les rames s’arrê
2357
obèrent à mes yeux. Une bouche de métro m’attira.
Les
rames s’arrêtaient avec un sifflement particulièrement doux pour ma f
2358
gue, et ces gens pressés et songeurs respectaient
la
folie douloureuse qui devait contracter mon visage. Je promenais sur
2359
egards angoissés, avides, implorants. Oh ! toutes
les
femmes que j’ai fait souffrir cette nuit d’un long regard de damné. À
2360
je mêlais à mes pensées des fragments de rêves et
les
personnages des affiches, tout en marchant sans fin dans les couloirs
2361
ages des affiches, tout en marchant sans fin dans
les
couloirs implacablement brillants, je me pris à parler à haute voix,
2362
ases incohérentes. Je voyais avec une sombre joie
les
employés et les voyageurs s’inquiéter. Bientôt on m’entraîna de force
2363
s. Je voyais avec une sombre joie les employés et
les
voyageurs s’inquiéter. Bientôt on m’entraîna de force sur un trottoir
2364
force sur un trottoir roulant qui me remonta dans
la
rue. La fraîcheur de la brume m’apaisa. Sur la promesse que je fis qu
2365
r un trottoir roulant qui me remonta dans la rue.
La
fraîcheur de la brume m’apaisa. Sur la promesse que je fis que je me
2366
ulant qui me remonta dans la rue. La fraîcheur de
la
brume m’apaisa. Sur la promesse que je fis que je me sentais mieux, o
2367
ns la rue. La fraîcheur de la brume m’apaisa. Sur
la
promesse que je fis que je me sentais mieux, on me laissa rentrer seu
2368
t 5 heures du matin. Premiers appels d’autos dans
la
ville, mais il me semble que toutes choses s’éloignent de moi vertigi
2369
à rien dans mon esprit. Peut-être que j’ai perdu
la
notion du temps. Je ne me souviens plus que de cette déception insupp
2370
tout ce qui me navre au plus intime de mon être…
Le
revolver est chargé, sur cette table. (Je le caresse, entre deux phra
2371
tre… Le revolver est chargé, sur cette table. (Je
le
caresse, entre deux phrases.) Mais voici que ce geste de ma mort auss
2372
ais voici que ce geste de ma mort aussi me lasse,
l’
image que je m’en forme… Je ne comprends plus pourquoi je devrais me t
2373
is me tuer, pourquoi je souffre, ce que c’est que
la
souffrance, ce que c’est que ma vie, ma mort. Mon Dieu, il n’y a plus
2374
février 1927)k « Cet âge est sans pitié. » «
Le
véritable symbole n’est jamais prévu par l’auteur », écrivait Cocteau
2375
» « Le véritable symbole n’est jamais prévu par
l’
auteur », écrivait Cocteau dans la préface des Mariés de la tour Eiffe
2376
amais prévu par l’auteur », écrivait Cocteau dans
la
préface des Mariés de la tour Eiffel. Et une note d’Orphée précise :
2377
», écrivait Cocteau dans la préface des Mariés de
la
tour Eiffel. Et une note d’Orphée précise : « Inutile de dire qu’il n
2378
tile de dire qu’il n’y a pas un seul symbole dans
la
pièce. » Ce qui me gêne pourtant, c’est d’y découvrir possibles deux
2379
au d’en avoir plus ou moins consciemment concerté
la
possibilité. Orphée, par exemple, serait un poète surréaliste. « Il f
2380
dale. Il faut un de ces orages qui rafraîchissent
l’
air. » Il prétend « traquer l’inconnu ». Sa femme l’accuse de « vouloi
2381
qui rafraîchissent l’air. » Il prétend « traquer
l’
inconnu ». Sa femme l’accuse de « vouloir faire admettre que la poésie
2382
air. » Il prétend « traquer l’inconnu ». Sa femme
l’
accuse de « vouloir faire admettre que la poésie consiste à écrire une
2383
Sa femme l’accuse de « vouloir faire admettre que
la
poésie consiste à écrire une phrase ». Et cette phrase, c’est un chev
2384
se ». Et cette phrase, c’est un cheval savant qui
la
lui a dictée : « Madame Eurydice Reviendra Des Enfers. » — « Ce n’est
2385
un poème, un poème du rêve, une fleur du fond de
la
mort. » Or, on découvre à la fin de la pièce que c’est une anagramme
2386
une fleur du fond de la mort. » Or, on découvre à
la
fin de la pièce que c’est une anagramme un peu ordurière. Ainsi les r
2387
du fond de la mort. » Or, on découvre à la fin de
la
pièce que c’est une anagramme un peu ordurière. Ainsi les rêves publi
2388
e que c’est une anagramme un peu ordurière. Ainsi
les
rêves publiés par les surréalistes, donnés à la fois comme poèmes et
2389
mme un peu ordurière. Ainsi les rêves publiés par
les
surréalistes, donnés à la fois comme poèmes et comme dictées de l’inc
2390
donnés à la fois comme poèmes et comme dictées de
l’
inconscient, au fond desquels on a si vite fait de distinguer les quel
2391
au fond desquels on a si vite fait de distinguer
les
quelques préoccupations assez simples dont l’étude charme le psychana
2392
er les quelques préoccupations assez simples dont
l’
étude charme le psychanalyste. Je pourrais poursuivre le jeu. Et puis,
2393
préoccupations assez simples dont l’étude charme
le
psychanalyste. Je pourrais poursuivre le jeu. Et puis, il y a aussi d
2394
e charme le psychanalyste. Je pourrais poursuivre
le
jeu. Et puis, il y a aussi des sortes de calembours… Art chrétien, a
2395
crivit certains vers qu’on peut lire plus haut :
Les
anges véritables qui connaissent les signes Sont moins bons acrobates
2396
plus haut : Les anges véritables qui connaissent
les
signes Sont moins bons acrobates… (etc.)… Cocteau s’est trop exercé
2397
Cocteau s’est trop exercé avant de se lancer sur
la
corde raide. Je suis sûr qu’il ne tombera pas. J’admire sans émoi. ⁂
2398
’il ne tombera pas. J’admire sans émoi. ⁂ Certes,
les
qualités scéniques de cette pièce sont grandes. Je ne saurais même in
2399
ertes, les qualités scéniques de cette pièce sont
grandes
. Je ne saurais même indiquer aucun endroit par où elle pèche contre l
2400
e indiquer aucun endroit par où elle pèche contre
les
principes chers à l’auteur du Secret professionnel et de la préface d
2401
it par où elle pèche contre les principes chers à
l’
auteur du Secret professionnel et de la préface des Mariés — principes
2402
es chers à l’auteur du Secret professionnel et de
la
préface des Mariés — principes dont l’énoncé brillant et définitif re
2403
nnel et de la préface des Mariés — principes dont
l’
énoncé brillant et définitif restera l’un des titres les plus authenti
2404
ncé brillant et définitif restera l’un des titres
les
plus authentiques de Cocteau. Précision et relief du dialogue, ingéni
2405
liques ; enfin, un style parfaitement pauvre dans
le
détail, un vrai style de théâtre, d’une netteté qui pourtant n’est pa
2406
as maigre, d’une familiarité dramatique qui cerne
le
mystère d’un trait pur. Il semble que Cocteau ait réalisé là exacteme
2407
ble machine ne m’inquiète guère : je sais qu’elle
le
conduira où il veut, sans surprises. « Puisque ces mystères me dépass
2408
que ces mystères me dépassent, feignons d’en être
l’
organisateur », disait le photographe des Mariés. Dans Orphée, le myst
2409
sent, feignons d’en être l’organisateur », disait
le
photographe des Mariés. Dans Orphée, le mystère ne peut plus dépasser
2410
», disait le photographe des Mariés. Dans Orphée,
le
mystère ne peut plus dépasser l’auteur : il l’a trop bien organisé. E
2411
és. Dans Orphée, le mystère ne peut plus dépasser
l’
auteur : il l’a trop bien organisé. En somme, ce qu’il faut reprocher
2412
e, le mystère ne peut plus dépasser l’auteur : il
l’
a trop bien organisé. En somme, ce qu’il faut reprocher à Cocteau, c’e
2413
lètement une pièce, prouvant une fois de plus que
l’
atmosphère de l’« art pur » n’est pas respirable. Il ne manque rien à
2414
ce, prouvant une fois de plus que l’atmosphère de
l’
« art pur » n’est pas respirable. Il ne manque rien à Orphée, sinon pe
2415
art de Dieu » — comme dit Gide — qui serait aussi
la
part de l’humain, l’imperfection secrète qui fait naître l’amour. Par
2416
» — comme dit Gide — qui serait aussi la part de
l’
humain, l’imperfection secrète qui fait naître l’amour. Parce que la c
2417
dit Gide — qui serait aussi la part de l’humain,
l’
imperfection secrète qui fait naître l’amour. Parce que la création es
2418
l’humain, l’imperfection secrète qui fait naître
l’
amour. Parce que la création est venue après la théorie. Parce qu’une
2419
ection secrète qui fait naître l’amour. Parce que
la
création est venue après la théorie. Parce qu’une fois de plus, Cocte
2420
re l’amour. Parce que la création est venue après
la
théorie. Parce qu’une fois de plus, Cocteau a comprimé des pétales de
2421
les de roses dans du cristal taillé, selon toutes
les
règles de l’art, mais que l’essence obtenue, si elle est de rose, est
2422
ans du cristal taillé, selon toutes les règles de
l’
art, mais que l’essence obtenue, si elle est de rose, est sans parfum.
2423
aillé, selon toutes les règles de l’art, mais que
l’
essence obtenue, si elle est de rose, est sans parfum. (Tout de même
2424
: j’en verrais une preuve, pour mon compte, dans
le
fait que je ne sais parler de lui autrement que par métaphores.) 5.
2425
trement que par métaphores.) 5. M. Zimmer, dans
la
Gazette de Lausanne . Et même il appelait Orphée « une tragédie de l
2426
ne . Et même il appelait Orphée « une tragédie de
l’
amour conjugal ». Vraiment, nous n’en demandions pas tant… k. Rougem
2427
L’autre œil (février 1927)l m Décembre
L’
époque s’ouvre où l’on attend un miracle pour la fin de la semaine. «
2428
ier 1927)l m Décembre L’époque s’ouvre où
l’
on attend un miracle pour la fin de la semaine. « Messieurs, disait Da
2429
L’époque s’ouvre où l’on attend un miracle pour
la
fin de la semaine. « Messieurs, disait Dardel, y a pas à tortiller, i
2430
s’ouvre où l’on attend un miracle pour la fin de
la
semaine. « Messieurs, disait Dardel, y a pas à tortiller, il faut fai
2431
ça semble idiot. Il y a des soirs où une idée de
la
responsabilité s’empare de nous. Et nous calculons qu’il s’agit de dé
2432
de déranger 5000 personnes en huit soirées, et de
les
occuper quatre heures durant… Mais la vision, rapidement entrevue par
2433
ées, et de les occuper quatre heures durant… Mais
la
vision, rapidement entrevue par chacun dans son for le plus intérieur
2434
sion, rapidement entrevue par chacun dans son for
le
plus intérieur, d’une fuite en auto, nous rassure provisoirement…
2435
ment… Prosopopée, à propos d’une apparition
La
vieille Monture 6 un soir nous apparut, lugubrement fardée, l’haleine
2436
nture 6 un soir nous apparut, lugubrement fardée,
l’
haleine mauvaise, édentée et tâchant à prendre un accent anglais d’un
2437
nt d’un doigt impitoyable son flanc déjà meurtri,
la
suivaient en hurlant : « Bas-toi là, bas-toi là ! »… Est-il plus atro
2438
onçant de séniles calembours… Pénétrés d’horreur,
les
bellettriens avaient fui. Au détour d’une ivresse, ils rencontrèrent
2439
t une créature évadée d’anciens rêves qui hantait
les
limbes depuis un an déjà. Ils ne tardèrent pas à reconnaître Cinémato
2440
tre. Ils se réunissent parfois autour d’un feu et
le
contemplent un certain temps en silence. « Well ! », dit enfin Dardel
2441
n temps en silence. « Well ! », dit enfin Dardel.
Les
autres n’en pensent pas moins. Quelquefois, Mossoul amène un scénario
2442
et à deux faces. Lugin, qui est théologien, et de
la
Tchaux, n’a pas la foi. Topin, Mahomet désabusé, constate que jamais
2443
gin, qui est théologien, et de la Tchaux, n’a pas
la
foi. Topin, Mahomet désabusé, constate que jamais « la Montagne » ne
2444
i. Topin, Mahomet désabusé, constate que jamais «
la
Montagne » ne saura venir au prophète, même s’il se nomme Mossoul. Po
2445
énie vint s’asseoir certaine nuit. Elle parla par
la
bouche de Lugin, sa langue dans la langue de Lugin : « Le rideau se l
2446
Elle parla par la bouche de Lugin, sa langue dans
la
langue de Lugin : « Le rideau se lève sur un miroir qui occupe toute
2447
e de Lugin, sa langue dans la langue de Lugin : «
Le
rideau se lève sur un miroir qui occupe toute la largeur de la scène.
2448
Le rideau se lève sur un miroir qui occupe toute
la
largeur de la scène. Titre : Socrate et Narcisse, un acte à grande fi
2449
lève sur un miroir qui occupe toute la largeur de
la
scène. Titre : Socrate et Narcisse, un acte à grande figuration. » En
2450
la scène. Titre : Socrate et Narcisse, un acte à
grande
figuration. » Enfin l’on joua aux petits dés le sort de notre parade
2451
et Narcisse, un acte à grande figuration. » Enfin
l’
on joua aux petits dés le sort de notre parade — et l’on gagna. Enthou
2452
ande figuration. » Enfin l’on joua aux petits dés
le
sort de notre parade — et l’on gagna. Enthousiasmé, « Mimosa » partit
2453
joua aux petits dés le sort de notre parade — et
l’
on gagna. Enthousiasmé, « Mimosa » partit pour la Riviera afin de négo
2454
l’on gagna. Enthousiasmé, « Mimosa » partit pour
la
Riviera afin de négocier la vente de cette martingale avec des surréa
2455
Mimosa » partit pour la Riviera afin de négocier
la
vente de cette martingale avec des surréalistes hétérodoxes. Il revin
2456
érodoxes. Il revint juste à temps pour assister à
la
cérémonie de la pose du point final de « Cinématoma ou les épanchemen
2457
int juste à temps pour assister à la cérémonie de
la
pose du point final de « Cinématoma ou les épanchements de la jeune S
2458
onie de la pose du point final de « Cinématoma ou
les
épanchements de la jeune Synovie », parade « née du mariage de nos ve
2459
oint final de « Cinématoma ou les épanchements de
la
jeune Synovie », parade « née du mariage de nos veilles et de nos rêv
2460
riage de nos veilles et de nos rêves », ainsi que
le
disait si poétiquement le programme. Un peu d’histoire (erratum de la
2461
nos rêves », ainsi que le disait si poétiquement
le
programme. Un peu d’histoire (erratum de la chronique de Mossoul). Be
2462
ement le programme. Un peu d’histoire (erratum de
la
chronique de Mossoul). Belles-Lettres joua l’Inspecteur de Gogol à l’
2463
de la chronique de Mossoul). Belles-Lettres joua
l’
Inspecteur de Gogol à l’époque où le Cuirassé Potemkine était interdit
2464
oul). Belles-Lettres joua l’Inspecteur de Gogol à
l’
époque où le Cuirassé Potemkine était interdit à l’écran. Pitoëff avai
2465
-Lettres joua l’Inspecteur de Gogol à l’époque où
le
Cuirassé Potemkine était interdit à l’écran. Pitoëff avait prêté un a
2466
’époque où le Cuirassé Potemkine était interdit à
l’
écran. Pitoëff avait prêté un accent, Mme d’Assilva deux actrices, M.
2467
re dans des jupons autrement que par métaphore. À
La
Chaux-de-Fonds, il y eut trente membres et cent doigts dans deux lits
2468
cela fait-il de pieds et d’oreillles ? À signaler
la
fuite de Bec-de-Gaz, lequel s’éteignit dans les neiges. Un jour, on s
2469
er la fuite de Bec-de-Gaz, lequel s’éteignit dans
les
neiges. Un jour, on s’aperçut que cette chose avait recommencé, qu’on
2470
mmencé, qu’on appelle, sans doute par antiphrase,
la
vie. 6. Revue ou prologue. l. Rougemont Denis de, « L’autre œil
2471
Conférence d’Edmond Esmonin sur «
La
révocation de l’édit de Nantes » (16 février 1927)j Le sujet que M
2472
onférence d’Edmond Esmonin sur « La révocation de
l’
édit de Nantes » (16 février 1927)j Le sujet que M. Esmonin, profes
2473
ation de l’édit de Nantes » (16 février 1927)j
Le
sujet que M. Esmonin, professeur à la Faculté des lettres de Grenoble
2474
r 1927)j Le sujet que M. Esmonin, professeur à
la
Faculté des lettres de Grenoble, traita mardi soir à la Grande salle
2475
ulté des lettres de Grenoble, traita mardi soir à
la
Grande salle des Conférences, devant un très bel auditoire, est un de
2476
é des lettres de Grenoble, traita mardi soir à la
Grande
salle des Conférences, devant un très bel auditoire, est un des plus
2477
des plus passionnants et des plus controversés de
l’
histoire. L’un de ceux, aussi, où il est le plus difficile de rester i
2478
sés de l’histoire. L’un de ceux, aussi, où il est
le
plus difficile de rester impartial. M. Lombard, recteur de l’Universi
2479
icile de rester impartial. M. Lombard, recteur de
l’
Université, en introduisant le conférencier, a fait allusion aux diver
2480
Lombard, recteur de l’Université, en introduisant
le
conférencier, a fait allusion aux divers points de vue auxquels on a
2481
ints de vue auxquels on a pu se placer pour juger
la
révocation. M. Esmonin, lui, se place au point de vue de l’historien
2482
ion. M. Esmonin, lui, se place au point de vue de
l’
historien scrupuleux, qui juge d’après les textes, les causes et les e
2483
e vue de l’historien scrupuleux, qui juge d’après
les
textes, les causes et les effets vérifiables, et non d’après un systè
2484
istorien scrupuleux, qui juge d’après les textes,
les
causes et les effets vérifiables, et non d’après un système préconçu.
2485
uleux, qui juge d’après les textes, les causes et
les
effets vérifiables, et non d’après un système préconçu. (Cette attitu
2486
préconçu. (Cette attitude est plus rare qu’on ne
le
croit, de nos jours.) M. Esmonin montra avec beaucoup de clarté comme
2487
c beaucoup de clarté comment, entre 1578, date de
la
proclamation de l’édit, et 1685, date de la révocation, la France pas
2488
é comment, entre 1578, date de la proclamation de
l’
édit, et 1685, date de la révocation, la France passa de la plus grand
2489
te de la proclamation de l’édit, et 1685, date de
la
révocation, la France passa de la plus grande liberté à la plus grand
2490
mation de l’édit, et 1685, date de la révocation,
la
France passa de la plus grande liberté à la plus grande tyrannie. En
2491
t 1685, date de la révocation, la France passa de
la
plus grande liberté à la plus grande tyrannie. En proclamant la liber
2492
date de la révocation, la France passa de la plus
grande
liberté à la plus grande tyrannie. En proclamant la liberté religieus
2493
tion, la France passa de la plus grande liberté à
la
plus grande tyrannie. En proclamant la liberté religieuse, Henry IV m
2494
France passa de la plus grande liberté à la plus
grande
tyrannie. En proclamant la liberté religieuse, Henry IV mettait le ro
2495
liberté à la plus grande tyrannie. En proclamant
la
liberté religieuse, Henry IV mettait le royaume à la tête de la civil
2496
roclamant la liberté religieuse, Henry IV mettait
le
royaume à la tête de la civilisation ; en interdisant aux réformés d’
2497
liberté religieuse, Henry IV mettait le royaume à
la
tête de la civilisation ; en interdisant aux réformés d’exercer leur
2498
igieuse, Henry IV mettait le royaume à la tête de
la
civilisation ; en interdisant aux réformés d’exercer leur religion, m
2499
rcer leur religion, mais en même temps de quitter
le
pays, Louis XIV commit un des actes les plus vexatoires que l’histoir
2500
de quitter le pays, Louis XIV commit un des actes
les
plus vexatoires que l’histoire ait enregistrés. Après avoir fait un t
2501
s XIV commit un des actes les plus vexatoires que
l’
histoire ait enregistrés. Après avoir fait un tableau de la France de
2502
e ait enregistrés. Après avoir fait un tableau de
la
France de l’édit, victorieuse dans la guerre de Trente Ans, l’orateur
2503
trés. Après avoir fait un tableau de la France de
l’
édit, victorieuse dans la guerre de Trente Ans, l’orateur expose comme
2504
tableau de la France de l’édit, victorieuse dans
la
guerre de Trente Ans, l’orateur expose comment on en vint à la révoca
2505
l’édit, victorieuse dans la guerre de Trente Ans,
l’
orateur expose comment on en vint à la révocation. C’est d’abord l’inf
2506
Trente Ans, l’orateur expose comment on en vint à
la
révocation. C’est d’abord l’influence du clergé, jaloux de ses droits
2507
comment on en vint à la révocation. C’est d’abord
l’
influence du clergé, jaloux de ses droits considérables encore ; puis
2508
de ses droits considérables encore ; puis ce sont
les
conseillers intimes du roi, un jésuite, le père Lachaise, un archevêq
2509
sont les conseillers intimes du roi, un jésuite,
le
père Lachaise, un archevêque libertin, Harlay de Champvallon, et surt
2510
n leurs intérêts immédiats à leur désir de gagner
le
ciel, persuadent Louis XIV que la révocation serait une œuvre digne d
2511
désir de gagner le ciel, persuadent Louis XIV que
la
révocation serait une œuvre digne du Roi-Soleil et capable de lui fai
2512
e du Roi-Soleil et capable de lui faire pardonner
les
erreurs de sa jeunesse. Le roi, « un niais en matière religieuse » au
2513
e lui faire pardonner les erreurs de sa jeunesse.
Le
roi, « un niais en matière religieuse » au dire de sa belle-sœur, la
2514
en matière religieuse » au dire de sa belle-sœur,
la
princesse palatine, se laisse facilement convaincre. D’ailleurs, les
2515
ine, se laisse facilement convaincre. D’ailleurs,
les
jésuites ont déjà réussi à « tourner » l’édit par mille arguties juri
2516
leurs, les jésuites ont déjà réussi à « tourner »
l’
édit par mille arguties juridiques. Et les statistiques faussées peuve
2517
ourner » l’édit par mille arguties juridiques. Et
les
statistiques faussées peuvent faire croire à une très forte diminutio
2518
s. Aussi ne s’effraye-t-on pas trop, au début, de
l’
émigration des fidèles qui suivent leurs pasteurs proscrits. On espère
2519
rtir de gré ou de force tous ceux qui resteront «
Les
enfants seront du moins catholiques, si les pères sont hypocrites »,
2520
ont « Les enfants seront du moins catholiques, si
les
pères sont hypocrites », écrit Madame de Maintenon. Mais bientôt l’on
2521
crites », écrit Madame de Maintenon. Mais bientôt
l’
on voit la France se dépeupler ; des industries sont presque anéanties
2522
écrit Madame de Maintenon. Mais bientôt l’on voit
la
France se dépeupler ; des industries sont presque anéanties ; les con
2523
peupler ; des industries sont presque anéanties ;
les
conséquences funestes de l’acte de révocation commencent à se révéler
2524
presque anéanties ; les conséquences funestes de
l’
acte de révocation commencent à se révéler politiques (guerre de la co
2525
ion commencent à se révéler politiques (guerre de
la
confession d’Augsbourg) et surtout morales : car malgré des félicitat
2526
es félicitations arrachées par Louis XIV au pape,
les
catholiques sont loin d’être unanimes à louer la révocation. L’un d’e
2527
les catholiques sont loin d’être unanimes à louer
la
révocation. L’un d’eux s’indigne, dans une lettre à Louvois, de ce qu
2528
s’indigne, dans une lettre à Louvois, de ce que «
les
dragons ont été les meilleurs prédicateurs de notre Évangile ». Et le
2529
lettre à Louvois, de ce que « les dragons ont été
les
meilleurs prédicateurs de notre Évangile ». Et les persécutions contr
2530
es meilleurs prédicateurs de notre Évangile ». Et
les
persécutions contre ceux qui n’ont commis d’autre crime que de « dépl
2531
déplaire au roi » vont reprendre de plus belle :
la
guerre civile succède aux dragonnades. M. Esmonin s’abstient d’en fai
2532
ent d’en faire un tableau qu’il suppose présent à
l’
esprit de ses auditeurs. Il termine en citant le jugement d’Albert Sor
2533
à l’esprit de ses auditeurs. Il termine en citant
le
jugement d’Albert Sorel, selon qui la date du 16 octobre 1685 marque
2534
e en citant le jugement d’Albert Sorel, selon qui
la
date du 16 octobre 1685 marque une déviation dans l’histoire de la Fr
2535
date du 16 octobre 1685 marque une déviation dans
l’
histoire de la France. Déviation telle, en effet, que nous en sentons
2536
obre 1685 marque une déviation dans l’histoire de
la
France. Déviation telle, en effet, que nous en sentons les conséquenc
2537
e. Déviation telle, en effet, que nous en sentons
les
conséquences de nos jours encore, ajoute M. Esmonin. Et nous ne pouvo
2538
ouvons que nous réjouir de retrouver bientôt dans
l’
ouvrage qu’il va consacrer à Louis XIV l’exposé si dénué de parti pris
2539
tôt dans l’ouvrage qu’il va consacrer à Louis XIV
l’
exposé si dénué de parti pris, si libre et d’une si élégante science d
2540
ofesseur de Grenoble. j. Rougemont Denis de, «
La
révocation de l’édit de Nantes », Feuille d’avis de Neuchâtel, Neuchâ
2541
ble. j. Rougemont Denis de, « La révocation de
l’
édit de Nantes », Feuille d’avis de Neuchâtel, Neuchâtel, 16 février 1
2542
se aimée… (mars 1927)af M. Edmond Jaloux offre
l’
exemple rare d’un homme que son évolution naturelle a rapproché, dans
2543
sa maturité, des jeunes générations, en sorte que
l’
espèce de romantisme à la Nerval auquel il aboutit coïncide avec un mo
2544
énérations, en sorte que l’espèce de romantisme à
la
Nerval auquel il aboutit coïncide avec un mouvement dont lui-même s’e
2545
ec un mouvement dont lui-même s’est plu à relever
les
indices chez ses jeunes contemporains, et qu’il vient appuyer de son
2546
éjà riche de romancier. Son regard se promène sur
le
même monde où se plaisent nos jeunes poètes cosmopolites, mais il gar
2547
Giraudoux, j’y vois un signe charmant d’amitié de
l’
aîné au plus jeune, lequel envoie l’un de ses personnages pour remerci
2548
’un René Dubardeau pour cette ambassade). Parfois
l’
on se demande si l’Auber de Jean Cassou ne va pas s’attabler au café e
2549
pour cette ambassade). Parfois l’on se demande si
l’
Auber de Jean Cassou ne va pas s’attabler au café en face des personna
2550
face des personnages de Jaloux. Et peut-être que
la
comtesse Rezzovitch a rencontré M. Paul Morand, mais elle a dû le tro
2551
ovitch a rencontré M. Paul Morand, mais elle a dû
le
trouver un peu froid, n’aura pas été tentée de lui faire ces confiden
2552
confiant et secrètement incertain de ce roman. À
la
veille de se marier, Jérôme Parseval, journaliste parisien, rencontre
2553
carne aussitôt à ses yeux tout ce qu’il attend de
l’
amour. Une confidence, un baiser, et il ne la reverra jamais. Il aime
2554
d de l’amour. Une confidence, un baiser, et il ne
la
reverra jamais. Il aime encore sa femme, « mais comme on aime une pet
2555
d on a failli hériter de Chenonceaux ». Peu à peu
l’
image d’Irène Rezzovitch s’idéalise et gagne la puissance d’une mervei
2556
eu l’image d’Irène Rezzovitch s’idéalise et gagne
la
puissance d’une merveilleuse obsession. Il lui écrit de longues lettr
2557
obsession. Il lui écrit de longues lettres, sans
les
envoyer. Il apprend sa mort, et qu’elle l’aurait peut-être aimé. Enfi
2558
sans les envoyer. Il apprend sa mort, et qu’elle
l’
aurait peut-être aimé. Enfin, divorcé, seul, il la revoit dans une vis
2559
l’aurait peut-être aimé. Enfin, divorcé, seul, il
la
revoit dans une vision prestigieuse et désolée… M. Jaloux a trouvé là
2560
nt aujourd’hui un réalisme discret mais précis et
le
sens de ce qu’il y a en nous d’essentiel, de ce qui détermine nos act
2561
ssentiel, de ce qui détermine nos actes avant que
la
raison n’intervienne, mouvements de nos passions à nous-mêmes inavoué
2562
système de valeurs lyriques et sentimentales que
la
raison ignore ou tyrannise aveuglément, car « nous avons dressé notre
2563
manque guère à ce devoir sacré ». M. Jaloux évite
le
péril d’un réalisme trop amer et celui du roman lyrique, par l’équili
2564
réalisme trop amer et celui du roman lyrique, par
l’
équilibre qu’il maintient entre ces deux inconscients : l’époque et l’
2565
bre qu’il maintient entre ces deux inconscients :
l’
époque et l’être secret du héros. Il sait mieux que quiconque aujourd’
2566
intient entre ces deux inconscients : l’époque et
l’
être secret du héros. Il sait mieux que quiconque aujourd’hui faire éc
2567
rsonne, pas même eux ». Dans ce roman, comme dans
l’
Âge d’or, un désenchantement profond prend le masque d’une aimable mél
2568
dans l’Âge d’or, un désenchantement profond prend
le
masque d’une aimable mélancolie. C’est la sourde tristesse des choses
2569
d prend le masque d’une aimable mélancolie. C’est
la
sourde tristesse des choses qui vous échappent, des amours impossible
2570
rs impossibles, des histoires dont on ne sait pas
la
fin ni le sens véritable, mais seulement qu’elles ont fait souffrir.
2571
bles, des histoires dont on ne sait pas la fin ni
le
sens véritable, mais seulement qu’elles ont fait souffrir. Rendez-vou
2572
compris, et peut-être, un quiproquo de destinées…
Le
tragique du peut-être ; (comme dans l’une des dernières phrases de Sy
2573
’une des dernières phrases de Sylvie : « Là était
le
bonheur, peut-être… »). Mais le ton reste si léger, spirituel, fantai
2574
lvie : « Là était le bonheur, peut-être… »). Mais
le
ton reste si léger, spirituel, fantaisiste (cette touche pour peindre
2575
eindre un personnage épisodique : « Il confondait
la
rose et la pivoine, l’orange et l’ananas… »). Une telle œuvre, dense,
2576
ersonnage épisodique : « Il confondait la rose et
la
pivoine, l’orange et l’ananas… »). Une telle œuvre, dense, sans obscu
2577
isodique : « Il confondait la rose et la pivoine,
l’
orange et l’ananas… »). Une telle œuvre, dense, sans obscurité, riche
2578
Il confondait la rose et la pivoine, l’orange et
l’
ananas… »). Une telle œuvre, dense, sans obscurité, riche et décantée,
2579
Entr’acte de René Clair, ou
L’
éloge du Miracle (mars 1927)n Surprendre est peu de chose, il faut
2580
se, il faut transplanter. Max Jacob. Ce soir-là,
le
programme comprenait : un film d’avant-guerre ; un film japonais ; En
2581
d’avant-guerre ; un film japonais ; Entr’acte et
le
Voyage imaginaire, de René Clair. La Mort de Phèdre (environ 1905) :
2582
ntr’acte et le Voyage imaginaire, de René Clair.
La
Mort de Phèdre (environ 1905) : quelques acteurs d’une troupe de prov
2583
ent dans un décor très pauvre, légèrement coloré.
Le
principe est simple : « Je vous aime » se traduit par trois ou quatre
2584
aime » se traduit par trois ou quatre claques sur
la
poitrine ; et une crise intérieure par un court accès de danse de Sai
2585
ourt accès de danse de Saint-Guy. Art classique :
la
mort d’Hyppolite se passe en coulisse. Mais Phèdre avoue tout « devan
2586
asse en coulisse. Mais Phèdre avoue tout « devant
le
cadavre encore tout chaud ». Affreux. Aussi : « Elle mourut. » On voi
2587
ourut. » On voit que cette bande est antérieure à
l’
époque du long baiser de conclusion. Le film japonais : une historiett
2588
térieure à l’époque du long baiser de conclusion.
Le
film japonais : une historiette un peu plus banale que nature, très b
2589
banale que nature, très bien photographiée. C’est
le
film du type « Jeux de soleil dans les jardins, complets variés, ça f
2590
hiée. C’est le film du type « Jeux de soleil dans
les
jardins, complets variés, ça fait toujours plaisir de voir des gens b
2591
Soudain éclate Entr’acte (1925). « Une étude sur
le
Monde des Rêves ». Rondes de cheminées dans le ciel où des pressentim
2592
ur le Monde des Rêves ». Rondes de cheminées dans
le
ciel où des pressentiments clignent de l’œil. Des poupées en baudruch
2593
es dans le ciel où des pressentiments clignent de
l’
œil. Des poupées en baudruche gonflent leur tête jusqu’à éclater, tand
2594
ne colonnade, puis un jeu d’échec serré, mais sur
la
corniche d’un gratte-ciel, d’où se met à descendre un petit bateau de
2595
bateau de papier, sur fond de boulevards et parmi
les
toits flottants, c’est assez tragique. Mitrailleuse de phares d’auto,
2596
st assez tragique. Mitrailleuse de phares d’auto,
les
100 000 yeux de la nuit. Des imprécisions rapides. Un chasseur, toujo
2597
itrailleuse de phares d’auto, les 100 000 yeux de
la
nuit. Des imprécisions rapides. Un chasseur, toujours sur son toit ;
2598
Un chasseur, toujours sur son toit ; il tire sur
l’
œuf d’où naît une colombe. Chasse. Mais un papillon éclatant qui batta
2599
Chasse. Mais un papillon éclatant qui battait de
l’
aile un dixième de seconde, par intermittences, se pose enfin sur l’éc
2600
de seconde, par intermittences, se pose enfin sur
l’
écran : une danseuse sur une plaque de verre, vue par-dessous. Quelque
2601
s qui suivent sont embrumés dans mon souvenir par
le
rayonnement de la robe, fleur qui s’ouvre pour dégager le mouvement o
2602
embrumés dans mon souvenir par le rayonnement de
la
robe, fleur qui s’ouvre pour dégager le mouvement obsédant de deux ja
2603
nement de la robe, fleur qui s’ouvre pour dégager
le
mouvement obsédant de deux jambes, l’harmonie de leurs arabesques à t
2604
our dégager le mouvement obsédant de deux jambes,
l’
harmonie de leurs arabesques à trois dimensions mêlées avec une lenteu
2605
une perfection dont une brève vue verticale donne
la
clé… Un enterrement bourgeois, mais le corbillard est traîné par un d
2606
cale donne la clé… Un enterrement bourgeois, mais
le
corbillard est traîné par un dromadaire, d’ailleurs dételé. Les amis
2607
est traîné par un dromadaire, d’ailleurs dételé.
Les
amis affligés mangent les couronnes et suivent à grands sauts lents,
2608
ire, d’ailleurs dételé. Les amis affligés mangent
les
couronnes et suivent à grands sauts lents, solennels. Ils revoient la
2609
amis affligés mangent les couronnes et suivent à
grands
sauts lents, solennels. Ils revoient la danseuse, font une ronde auto
2610
ent à grands sauts lents, solennels. Ils revoient
la
danseuse, font une ronde autour d’une tour Eiffel de bois de la taill
2611
ont une ronde autour d’une tour Eiffel de bois de
la
taille de l’Obélisque de la Concorde, puis enfilent les Champs-Élysée
2612
autour d’une tour Eiffel de bois de la taille de
l’
Obélisque de la Concorde, puis enfilent les Champs-Élysées à une allur
2613
our Eiffel de bois de la taille de l’Obélisque de
la
Concorde, puis enfilent les Champs-Élysées à une allure grandissante,
2614
ille de l’Obélisque de la Concorde, puis enfilent
les
Champs-Élysées à une allure grandissante, bientôt vertigineuse, pours
2615
e grandissante, bientôt vertigineuse, poursuivant
le
corbillard. Aspects du paysage urbain vu par les poursuivants, arbres
2616
t le corbillard. Aspects du paysage urbain vu par
les
poursuivants, arbres au ciel renversé, maisons obliques, montagnes ru
2617
. (J’ai regretté que René Clair ne nous donne pas
la
vision du mort.) Enfin le cercueil roule dans les marguerites, il en
2618
Clair ne nous donne pas la vision du mort.) Enfin
le
cercueil roule dans les marguerites, il en sort un chef d’orchestre d
2619
la vision du mort.) Enfin le cercueil roule dans
les
marguerites, il en sort un chef d’orchestre dont la baguette éteint t
2620
marguerites, il en sort un chef d’orchestre dont
la
baguette éteint tous les personnages et lui-même. ⁂ Le tout ne dure p
2621
un chef d’orchestre dont la baguette éteint tous
les
personnages et lui-même. ⁂ Le tout ne dure pas 20 minutes. Et c’est h
2622
guette éteint tous les personnages et lui-même. ⁂
Le
tout ne dure pas 20 minutes. Et c’est heureux. Nous manquons d’entraî
2623
c’est heureux. Nous manquons d’entraînement dans
le
domaine du merveilleux moderne. Un peu plus et nous demandions grâce
2624
e de trop de plaisir. Mais je ne suis pas sûr que
le
plaisir du public fût de même essence que le nôtre. Les gens rient à
2625
aisir du public fût de même essence que le nôtre.
Les
gens rient à l’enterrement au ralenti, à l’éclatement des têtes de po
2626
ût de même essence que le nôtre. Les gens rient à
l’
enterrement au ralenti, à l’éclatement des têtes de poupées, à la conc
2627
tre. Les gens rient à l’enterrement au ralenti, à
l’
éclatement des têtes de poupées, à la conclusion. Ce n’est pas le bon
2628
u ralenti, à l’éclatement des têtes de poupées, à
la
conclusion. Ce n’est pas le bon rire de cinéma. Quand la danseuse par
2629
s têtes de poupées, à la conclusion. Ce n’est pas
le
bon rire de cinéma. Quand la danseuse paraît, ils n’attendent que le
2630
lusion. Ce n’est pas le bon rire de cinéma. Quand
la
danseuse paraît, ils n’attendent que le moment où ils pourront se pou
2631
ma. Quand la danseuse paraît, ils n’attendent que
le
moment où ils pourront se pousser en disant : « C’que c’est cochon !
2632
pousser en disant : « C’que c’est cochon ! » Mais
le
moment ne vient pas, ils sont déçus. Enfin, mon voisin, un agent, mur
2633
emple, où nous ne pouvons nous empêcher d’admirer
l’
utilisation artistique ingénieuse et précise de certaines théories sur
2634
e ingénieuse et précise de certaines théories sur
le
rêve, le peuple, qui n’a pas vu ces dessous mais accueille le résulta
2635
use et précise de certaines théories sur le rêve,
le
peuple, qui n’a pas vu ces dessous mais accueille le résultat avec la
2636
peuple, qui n’a pas vu ces dessous mais accueille
le
résultat avec la naïveté qu’il faut, approuve et dit : « C’est bien ç
2637
as vu ces dessous mais accueille le résultat avec
la
naïveté qu’il faut, approuve et dit : « C’est bien ça, c’est comme qu
2638
uand on rêve. » Un des défauts d’Entr’acte, c’est
la
fantaisie recherchée de certaines scènes (l’enterrement). Cela fait b
2639
’est la fantaisie recherchée de certaines scènes (
l’
enterrement). Cela fait bizarre. Or, dans le monde où le cinéma doit n
2640
ènes (l’enterrement). Cela fait bizarre. Or, dans
le
monde où le cinéma doit nous « transplanter », un certain naturel est
2641
rrement). Cela fait bizarre. Or, dans le monde où
le
cinéma doit nous « transplanter », un certain naturel est de rigueur
2642
nsi qualifié : c’est peut-être le premier film où
l’
on a fait du ciné avec des moyens proprement cinégraphiques. Ici le ge
2643
né avec des moyens proprement cinégraphiques. Ici
le
geste pictural remplace le geste de l’acteur. Un mouvement ne soulign
2644
nt cinégraphiques. Ici le geste pictural remplace
le
geste de l’acteur. Un mouvement ne souligne pas, il exprime, et se su
2645
iques. Ici le geste pictural remplace le geste de
l’
acteur. Un mouvement ne souligne pas, il exprime, et se suffit. Mais c
2646
ne pas, il exprime, et se suffit. Mais comme pour
le
film 1905, on a sans cesse envie de crier : « Trop de gestes ! » C’es
2647
C’est une question d’épuration des moyens. Rendre
le
plus par le moins, c’est le fait d’un art à sa maturité. Mais ce sont
2648
estion d’épuration des moyens. Rendre le plus par
le
moins, c’est le fait d’un art à sa maturité. Mais ce sont là critique
2649
on des moyens. Rendre le plus par le moins, c’est
le
fait d’un art à sa maturité. Mais ce sont là critiques de style. D’or
2650
es de style. D’ores et déjà, il faut admirer dans
les
films de René Clair un sens du miracle assez bouleversant. Et je ne p
2651
ne parle pas du miracle genre conte de fée, comme
le
Voyage imaginaire en montre (beaucoup trop à mon gré). Qu’une sorcièr
2652
chien, cela n’a rien d’étonnant au cinéma. C’est
la
photographie d’une chose qui ne serait étonnante que dans le réel ; c
2653
phie d’une chose qui ne serait étonnante que dans
le
réel ; ce n’est pas encore un miracle de ciné. Et les fées paraissent
2654
réel ; ce n’est pas encore un miracle de ciné. Et
les
fées paraissent vieux jeu avec leur baguette, pour moi qui chaque soi
2655
soir crée ma chambre en tournant un commutateur.
Le
vrai miracle du cinéma, c’est, par exemple, l’éclosion d’une rose, un
2656
r. Le vrai miracle du cinéma, c’est, par exemple,
l’
éclosion d’une rose, un homme qui court au ralenti, certaines coïncide
2657
’est une réalité quotidienne dans une lumière qui
la
métamorphose ; c’est un temps nouveau, et l’espace en relation se mod
2658
qui la métamorphose ; c’est un temps nouveau, et
l’
espace en relation se modifie pour maintenir je ne sais quelle harmoni
2659
elle dont nous avons convenu et que nous pensions
la
seule possible. Le monde « normal » nous apparaît alors comme l’une s
2660
s convenu et que nous pensions la seule possible.
Le
monde « normal » nous apparaît alors comme l’une seulement des mille
2661
nécessités sociales — nous empêchent de découvrir
la
richesse immédiate. Surréel qui n’est pas synonyme d’incompréhensible
2662
on Madame, car alors quoi de plus surréaliste que
le
film 1905. Ce n’est peut-être qu’une question d’imagination ; il rest
2663
gineuses, et nous en sommes encore à nous frotter
les
yeux… Peut-être, quand nos regards plus assurés sauront enfin gagner
2664
ards plus assurés sauront enfin gagner de vitesse
les
prodiges que déclenche René Clair, verrons-nous, pris par surprise da
2665
René Clair, verrons-nous, pris par surprise dans
l’
exploration ivre d’un projecteur, des signes fatidiques, le visage d’u
2666
tion ivre d’un projecteur, des signes fatidiques,
le
visage d’un ange. n. Rougemont Denis de, « Entr’acte de René Clai
2667
ougemont Denis de, « Entr’acte de René Clair, ou
L’
éloge du Miracle », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève
2668
927)ag Il faut souhaiter que ce témoignage sur
les
générations nouvelles et leurs maîtres soit lu par tous ceux qui cher
2669
lu par tous ceux qui cherchent à s’orienter dans
la
crise moderne. M. Daniel-Rops unit en lui à l’état de velléités contr
2670
ns la crise moderne. M. Daniel-Rops unit en lui à
l’
état de velléités contradictoires que son intelligence très nuancée ma
2671
ncée maintient en une sorte d’instable équilibre,
les
tendances que ses contemporains ont poussées à l’extrême avec moins d
2672
es tendances que ses contemporains ont poussées à
l’
extrême avec moins de prudence mais aussi de lucidité. Séduit par Gide
2673
lucidité. Séduit par Gide ; admirant Maurras sans
l’
aimer ; saluant en Valéry une réussite unique mais presque inhumaine ;
2674
e mais presque inhumaine ; secrètement attiré par
les
thèses extrémistes mais non dépourvues d’une sombre grandeur, des sur
2675
et en même temps par cette solution universelle,
la
foi, il résume en lui cette inquiétude qui fait la grandeur et la mis
2676
a foi, il résume en lui cette inquiétude qui fait
la
grandeur et la misère de l’époque — et qu’il avoue préférer à une cer
2677
e en lui cette inquiétude qui fait la grandeur et
la
misère de l’époque — et qu’il avoue préférer à une certitude trop vit
2678
e inquiétude qui fait la grandeur et la misère de
l’
époque — et qu’il avoue préférer à une certitude trop vite atteinte, o
2679
jeunesse ne verrait qu’une abdication. Il décrit
la
« génération nouvelle » avec une intelligente sympathie et un sens ra
2680
amlétisme », pouvoir aigu d’analyse qui conduit à
la
dispersion autant qu’à l’approfondissement du moi, soif de tout et po
2681
d’analyse qui conduit à la dispersion autant qu’à
l’
approfondissement du moi, soif de tout et pourtant mépris de tout, pro
2682
t pourtant mépris de tout, procédant d’un goût de
l’
absolu à la fois mystique et anarchique : ce sont bien les grands trai
2683
u à la fois mystique et anarchique : ce sont bien
les
grands traits de notre inquiétude. (Mais peut-être M. Rops a-t-il tro
2684
la fois mystique et anarchique : ce sont bien les
grands
traits de notre inquiétude. (Mais peut-être M. Rops a-t-il trop négli
2685
tude. (Mais peut-être M. Rops a-t-il trop négligé
le
rôle extérieur, que je crois décisif, des conditions de la vie modern
2686
xtérieur, que je crois décisif, des conditions de
la
vie moderne.) Après avoir défini quelques « positions en face de l’in
2687
près avoir défini quelques « positions en face de
l’
inquiétude », M. Rops considère les deux solutions les plus parfaites
2688
ions en face de l’inquiétude », M. Rops considère
les
deux solutions les plus parfaites qui s’offrent aux jeunes gens d’auj
2689
nquiétude », M. Rops considère les deux solutions
les
plus parfaites qui s’offrent aux jeunes gens d’aujourd’hui. Il consta
2690
qu’en y substituant ce qui ne vient que de Dieu :
la
Foi ». Acculée à la rigueur d’un choix presque impossible, notre ince
2691
ce qui ne vient que de Dieu : la Foi ». Acculée à
la
rigueur d’un choix presque impossible, notre incertitude paraît sans
2692
de. Mais, ici, M. Daniel-Rops n’a-t-il pas cédé à
la
tentation de créer des dilemmes irréductibles, suprême et inconscient
2693
uprême et inconsciente ruse d’un inquiet qui veut
le
rester ? Ces deux solutions peuvent se résumer en deux mots : inquiét
2694
: inquiétude ou foi. Dès lors sont-elles vraiment
les
deux termes d’un dilemme, l’une n’étant que le chemin qui mène à l’au
2695
t les deux termes d’un dilemme, l’une n’étant que
le
chemin qui mène à l’autre ? Car la foi naît de l’inquiétude autant qu
2696
ne n’étant que le chemin qui mène à l’autre ? Car
la
foi naît de l’inquiétude autant que de la grâce, et régénère sans ces
2697
le chemin qui mène à l’autre ? Car la foi naît de
l’
inquiétude autant que de la grâce, et régénère sans cesse l’inquiétude
2698
e ? Car la foi naît de l’inquiétude autant que de
la
grâce, et régénère sans cesse l’inquiétude autant que la sérénité… Au
2699
de autant que de la grâce, et régénère sans cesse
l’
inquiétude autant que la sérénité… Au reste, n’est-elle pas de M. Rops
2700
e, et régénère sans cesse l’inquiétude autant que
la
sérénité… Au reste, n’est-elle pas de M. Rops lui-même, cette phrase
2701
lui-même, cette phrase qui formule admirablement
les
exigences conjointes de l’inquiétude et de la foi : « Si tu as trouvé
2702
formule admirablement les exigences conjointes de
l’
inquiétude et de la foi : « Si tu as trouvé Dieu, il te reste à le che
2703
nt les exigences conjointes de l’inquiétude et de
la
foi : « Si tu as trouvé Dieu, il te reste à le chercher encore… » a
2704
de la foi : « Si tu as trouvé Dieu, il te reste à
le
chercher encore… » ag. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Daniel
2705
Louis Aragon,
le
beau prétexte (avril 1927)o Ah ! je sens qu’une puissance étrangè
2706
ce étrangère s’est emparée de mon être et a saisi
les
cordes les plus secrètes de mon âme, qu’elle peut faire désormais vib
2707
e s’est emparée de mon être et a saisi les cordes
les
plus secrètes de mon âme, qu’elle peut faire désormais vibrer à sa fa
2708
en décembre 1925, au sortir d’une conférence sur
le
Salut de l’humanité.) Ce soir en moi trépigne une rage. Sur quelles
2709
1925, au sortir d’une conférence sur le Salut de
l’
humanité.) Ce soir en moi trépigne une rage. Sur quelles épaules jet
2710
es jeter ce manteau de flammes, puis à qui dédier
l’
ennui de ma révolte ? Aragon sarcastique se tient là-bas dans un rayon
2711
— auxquels je crois encore, et pas seulement pour
le
pittoresque. — Attrape ! Il n’existe pas de théorie du salut. Il n’
2712
’existe que des systèmes pour faire taire en nous
l’
appel vertigineux du Silence. On nous montre des Dieux, mais c’est pou
2713
ourner nos regards de cela qu’il faut bien nommer
le
Vide. Tant de séductions nous ont en vain tentés, ô tortures fascinan
2714
ous ont en vain tentés, ô tortures fascinantes de
la
sainteté, seules vous nous appelez encore hors de cette voix de l’inf
2715
es vous nous appelez encore hors de cette voix de
l’
infini où chancellent parmi les éclairs nos premiers pas. Aragon, dans
2716
rs de cette voix de l’infini où chancellent parmi
les
éclairs nos premiers pas. Aragon, dans ces tempêtes de nuits filantes
2717
ilantes où s’enfuient, souffles à peine parfumés,
les
vices enlacés aux vertus, c’est un ricanement splendide comme un écla
2718
de comme un éclat de rire de condamné à mort et à
l’
éternité. Le diable avait pris des avocats dont les plaidoyers, tissus
2719
éclat de rire de condamné à mort et à l’éternité.
Le
diable avait pris des avocats dont les plaidoyers, tissus des mensong
2720
l’éternité. Le diable avait pris des avocats dont
les
plaidoyers, tissus des mensonges les plus beaux et des plus mélodieus
2721
avocats dont les plaidoyers, tissus des mensonges
les
plus beaux et des plus mélodieuses palinodies, font encore rêver les
2722
es plus mélodieuses palinodies, font encore rêver
les
anges écœurés d’azur. Alors un juron mélodramatique, d’une voix tortu
2723
ble un anathème sanglant. Louis Aragon, avocat de
l’
infini, annonce l’entrée de l’éternelle anarchiste, la Poésie. On di
2724
nglant. Louis Aragon, avocat de l’infini, annonce
l’
entrée de l’éternelle anarchiste, la Poésie. On dit : « Des mots ! »
2725
s Aragon, avocat de l’infini, annonce l’entrée de
l’
éternelle anarchiste, la Poésie. On dit : « Des mots ! » au lieu de
2726
fini, annonce l’entrée de l’éternelle anarchiste,
la
Poésie. On dit : « Des mots ! » au lieu de « Je ne comprends pas ».
2727
rends pas ». On dit : « Je ne comprends pas », et
l’
on pense : « C’est donc incompréhensible ». On dit : « C’est incompréh
2728
ble ». On dit : « C’est incompréhensible ! » — et
l’
on est enfin rassuré. C’est incompréhensible !, trois mots dont l’un
2729
vos glandes salivaires, pourtant si éprouvées par
le
repas dont vous sortez, que ces trois mots où se résume la défense de
2730
dont vous sortez, que ces trois mots où se résume
la
défense de la loi sociale, patriotique, religieuse (?) et ci-devant m
2731
ez, que ces trois mots où se résume la défense de
la
loi sociale, patriotique, religieuse (?) et ci-devant morale qui prot
2732
rallumez votre cigare. Vous vous êtes assuré que
la
porte ferme bien sur l’infini. Rien à craindre de ce côté. Retournez
2733
Vous vous êtes assuré que la porte ferme bien sur
l’
infini. Rien à craindre de ce côté. Retournez à vos amours. ..........
2734
........ Solitude, antichambre du ciel. À travers
l’
amour ou la poésie — et d’autres, à travers les déserts de la sainteté
2735
litude, antichambre du ciel. À travers l’amour ou
la
poésie — et d’autres, à travers les déserts de la sainteté que hanten
2736
ers l’amour ou la poésie — et d’autres, à travers
les
déserts de la sainteté que hantent les fantômes adorables du désir, —
2737
la poésie — et d’autres, à travers les déserts de
la
sainteté que hantent les fantômes adorables du désir, — quelques homm
2738
à travers les déserts de la sainteté que hantent
les
fantômes adorables du désir, — quelques hommes y pénètrent, et le goû
2739
ables du désir, — quelques hommes y pénètrent, et
le
goût de s’amuser ne renaîtra plus en eux. Ni même celui de souffrir.
2740
elui de souffrir. Le dernier rire d’Aragon, c’est
l’
éclat de sa joie brusque d’être seul sur un faux sommet vers quoi des
2741
s’efforcent — mais déjà c’est de plus loin qu’il
les
nargue. Il connaît enfin une solitude défendue de tous côtés par ses
2742
quelques « goujateries » affectées par mépris de
l’
honneur, le mot de Cambronne prodigué et des phrases d’un fascinant éc
2743
goujateries » affectées par mépris de l’honneur,
le
mot de Cambronne prodigué et des phrases d’un fascinant éclat : « Ô g
2744
rodigué et des phrases d’un fascinant éclat : « Ô
grand
Rêve, au matin pâle des édifices, ne quitte plus, attiré par les prem
2745
quitte plus, attiré par les premiers sophismes de
l’
aurore, ces corniches de craie où t’accoudant tu mêles tes traits purs
2746
t’accoudant tu mêles tes traits purs et labiles à
l’
immobilité miraculeuse des statues7. » Il s’agit bien de critique litt
2747
ci en présence d’une des tentatives de libération
les
plus violentes et belles — malgré tant de maladresses dédaigneuses, d
2748
ravades et de faciles tricheries8 — qu’ait connue
l’
esprit humain. Sens de l’Absolu, sens de la pureté ou fanatisme de l’e
2749
cheries8 — qu’ait connue l’esprit humain. Sens de
l’
Absolu, sens de la pureté ou fanatisme de l’esprit. Jusqu’au-boutisme
2750
connue l’esprit humain. Sens de l’Absolu, sens de
la
pureté ou fanatisme de l’esprit. Jusqu’au-boutisme désespéré. « Il s’
2751
ns de l’Absolu, sens de la pureté ou fanatisme de
l’
esprit. Jusqu’au-boutisme désespéré. « Il s’agit de rendre impraticabl
2752
rtie » ou compromis : « Nous étions dominés par
le
sens d’une réalité morale absolue que certains d’entre nous eussent a
2753
martyre… Nos jugements se rendaient sans cesse à
l’
échelle de l’infini, et cet infini nous écrasait. Comment aurions-nous
2754
jugements se rendaient sans cesse à l’échelle de
l’
infini, et cet infini nous écrasait. Comment aurions-nous accepté le s
2755
nfini nous écrasait. Comment aurions-nous accepté
le
sort communément heureux de nos contemporains qui ont puisé dans Augu
2756
omte cette tranquillité de rejeter définitivement
les
problèmes métaphysiques ? » Nous naissons à quelque chose qui imite
2757
ues ? » Nous naissons à quelque chose qui imite
la
vie dans une époque d’inconcevables compromissions où triomphe sous t
2758
nconcevables compromissions où triomphe sous tous
les
déguisements, de Ford à Clément Vautel, le matérialisme le plus pauvr
2759
tous les déguisements, de Ford à Clément Vautel,
le
matérialisme le plus pauvre auquel se soit jamais abaissée une civili
2760
ements, de Ford à Clément Vautel, le matérialisme
le
plus pauvre auquel se soit jamais abaissée une civilisation. Mais nou
2761
rniers atouts sur notre salut. Nous courons enfin
l’
Aventure. « Le salut pour nous n’est nulle part9 ». Ultime affirmation
2762
sur notre salut. Nous courons enfin l’Aventure. «
Le
salut pour nous n’est nulle part9 ». Ultime affirmation d’une foi que
2763
rien ne peut duper. Depuis certaines paroles sur
la
Croix, il n’y a peut-être pas eu d’expression plus haute de l’angoiss
2764
n’y a peut-être pas eu d’expression plus haute de
l’
angoisse humaine, et vous aurez beau rire, pharisiens, et dire qu’elle
2765
et vous, dubitatives barbes. Je viens d’entendre
la
voix d’un mystique. Que si l’on vient nous empêtrer de dogmes basseme
2766
Je viens d’entendre la voix d’un mystique. Que si
l’
on vient nous empêtrer de dogmes bassement ingénieux : « Si j’essaie u
2767
ngénieux : « Si j’essaie un instant de m’élever à
la
notion de Dieu, répond Aragon, je me révolte qu’elle puisse en aucun
2768
nts ! Jouant tout sur une révélation possible, ou
la
naissance d’un prophète qui rapprenne comment aimer un Dieu. Ce n’est
2769
eût un sens, il faudrait être sûr de n’avoir pas
la
tête en bas par rapport au soleil. Quelques gestes encore, intercepta
2770
t au soleil. Quelques gestes encore, interceptant
les
messages égarés de l’infini… Un tel homme, — est-ce encore Aragon, s
2771
estes encore, interceptant les messages égarés de
l’
infini… Un tel homme, — est-ce encore Aragon, sinon qui ? — sa grande
2772
pages écrites il y a un an, tel soir de colère où
le
thermomètre eût indiqué 39° selon toute vraisemblance. Et voici Arago
2773
erait sans doute un peu ridicule. C’est ainsi que
l’
on arrive à croire, pour un autre, que c’est arrivé, ajoutant foi, dan
2774
autre, que c’est arrivé, ajoutant foi, dans tous
les
sens qu’admet ce terme, à des exaltations que leur lyrisme rendait se
2775
ules contagieuses. Comment, en effet, ne pas voir
la
part de littérature que renferme cette œuvre, et qui fait, en dépit d
2776
fait, en dépit des prétentions désobligeantes de
l’
auteur, son incontestable « séduction ». Pour un peu, je découvrais un
2777
un brin janséniste chez ce poète. Aujourd’hui, je
le
verrais plutôt comme un Musset10 plus véritablement désespéré. Un Mus
2778
ynisme verbeux 1830, une théorie du scandale pour
le
scandale qui a le mérite de n’être pas qu’un jeu littéraire. Mais enf
2779
0, une théorie du scandale pour le scandale qui a
le
mérite de n’être pas qu’un jeu littéraire. Mais enfin, c’est encore u
2780
ment vif, insolent et ombrageux. « J’appartiens à
la
grande race des torrents. » Une belle phrase, n’est-ce pas ? Je ne sa
2781
t vif, insolent et ombrageux. « J’appartiens à la
grande
race des torrents. » Une belle phrase, n’est-ce pas ? Je ne sais qu’u
2782
e pas ? Je ne sais qu’un Montherlant qui pourrait
l’
oser dire comme Aragon sans ridicule. Et ce que je prenais pour le ton
2783
e Aragon sans ridicule. Et ce que je prenais pour
le
ton prophétique, ne serait-ce pas plutôt une sorte de donquichottisme
2784
une sorte de donquichottisme assez fréquent dans
les
cafés littéraires et dont il serait le premier à s’amuser ? Février
2785
user ? Février 1927. Relu Une vague de rêves et
la
préface de Libertinage. Sous une certaine rhétorique — mais la plus b
2786
Libertinage. Sous une certaine rhétorique — mais
la
plus belle, — ce qui tressaille et m’atteint au vif, c’est tout de mê
2787
en quoi je ne vais pas m’empêcher de reconnaître
la
voix secrète de notre mal de vivre. Désespoir métaphysique. Je me sou
2788
de Vinet — laissons s’esclaffer du rapprochement
les
auteurs de manuels de littérature — : « Un mysticisme creux et affamé
2789
ttérature — : « Un mysticisme creux et affamé est
le
contrecoup du christianisme dans les âmes profondes ou délicates qui
2790
et affamé est le contrecoup du christianisme dans
les
âmes profondes ou délicates qui ne sont pas devenues chrétiennes. » «
2791
licates qui ne sont pas devenues chrétiennes. » «
Le
salut pour nous n’est nulle part. » Nulle part, pensais-je : le salut
2792
nous n’est nulle part. » Nulle part, pensais-je :
le
salut n’est pas là, ou là, à Rome, à Athènes, à Moscou, dans cette do
2793
droite, à gauche, — nulle part sur cette terre où
l’
orgueil des hommes croit pouvoir nous le désigner, veut nous l’imposer
2794
terre où l’orgueil des hommes croit pouvoir nous
le
désigner, veut nous l’imposer pour quelles fins assez basses, nous le
2795
hommes croit pouvoir nous le désigner, veut nous
l’
imposer pour quelles fins assez basses, nous le savons… Mais pour Arag
2796
us l’imposer pour quelles fins assez basses, nous
le
savons… Mais pour Aragon, ce n’est point façon de parler. Son « nulle
2797
e « globe d’attente » comme dit Crevel. Pourtant,
le
plus irrévocable désespoir n’est encore qu’un appel à la foi la plus
2798
irrévocable désespoir n’est encore qu’un appel à
la
foi la plus haute. 1er mai 1927. Mieux vaut pécher par ridicule qu
2799
cable désespoir n’est encore qu’un appel à la foi
la
plus haute. 1er mai 1927. Mieux vaut pécher par ridicule que par s
2800
e que par scepticisme ; par excès que par défaut.
L’
enthousiasme trompe moins que le bon sens. Don Quichotte est tout de m
2801
s que par défaut. L’enthousiasme trompe moins que
le
bon sens. Don Quichotte est tout de même moins misérable que Clément
2802
lle n’a pas mérité du premier coup qu’on se donne
la
peine de l’écraser, — c’est qu’il symbolise tout cet état d’esprit «
2803
mérité du premier coup qu’on se donne la peine de
l’
écraser, — c’est qu’il symbolise tout cet état d’esprit « bien Parisie
2804
de récentes statistiques de librairie montrèrent
les
ravages bien plus étendus qu’on n’osait le craindre11. Si dans un ess
2805
èrent les ravages bien plus étendus qu’on n’osait
le
craindre11. Si dans un essai sur la sincérité j’ai soutenu qu’une int
2806
qu’on n’osait le craindre11. Si dans un essai sur
la
sincérité j’ai soutenu qu’une introspection immobile ne retient rien
2807
qu’une introspection immobile ne retient rien de
la
réalité vivante ; si je dénie à des incrédules le droit à parler des
2808
la réalité vivante ; si je dénie à des incrédules
le
droit à parler des choses de la foi comme étant d’un ordre qui leur é
2809
à des incrédules le droit à parler des choses de
la
foi comme étant d’un ordre qui leur échappe ; de même je récuse ici c
2810
critique dont on voudrait que soient justiciables
les
œuvres d’un écrivain, les démarches de sa pensée, ses délires, ses vi
2811
que soient justiciables les œuvres d’un écrivain,
les
démarches de sa pensée, ses délires, ses visions. Un critique qui n’é
2812
élires, ses visions. Un critique qui n’épouse pas
le
rythme d’une œuvre, mais s’avance à sa rencontre armé de l’appareil à
2813
d’une œuvre, mais s’avance à sa rencontre armé de
l’
appareil à frigorifier de sa raison, est destiné à dire des bêtises. C
2814
présenter… d’ailleurs une ancienne connaissance…
le
Sens Critique. Moi (gêné)… Rougemont. Le Sens Critique. — Il y a un
2815
sance… le Sens Critique. Moi (gêné)… Rougemont.
Le
Sens Critique. — Il y a un certain temps déjà que nous ne nous sommes
2816
t. Seulement, mon cher Monsieur, nous n’avons pas
le
temps ces jours-ci, beaucoup trop à faire, beaucoup trop d’êtres et d
2817
suppose. Comprenez-moi : submergés, absolument…
Le
Sens Critique. — Justement j’aurais en quelque manière la prétention…
2818
Critique. — Justement j’aurais en quelque manière
la
prétention… Moi. — Que voilà un singulier impertinent de votre part.
2819
ue voilà un singulier impertinent de votre part. (
Le
reconduisant :) Croyez, Monsieur, à mon estime la plus vive. Mais déc
2820
Le reconduisant :) Croyez, Monsieur, à mon estime
la
plus vive. Mais décidément nous sommes débordés, voyez vous-même, pas
2821
ut rien faire sans vous. Mais n’oubliez pas que «
l’
artiste serait peu de chose s’il ne spéculait sur l’incertain », c’est
2822
artiste serait peu de chose s’il ne spéculait sur
l’
incertain », c’est un académicien qui l’a dit. Voulez-vous me faire qu
2823
ulait sur l’incertain », c’est un académicien qui
l’
a dit. Voulez-vous me faire quelque chose là-dessus pour la Revue ? Ma
2824
Voulez-vous me faire quelque chose là-dessus pour
la
Revue ? Mais plus tard, plus tard. Tenez, voici un traité de métaphys
2825
ndant. Très bien fait. Excellente méthode ! (Sort
le
Sens Critique, un peu bousculé.) Moi. — Vous disiez, ma vie ? La Mu
2826
un peu bousculé.) Moi. — Vous disiez, ma vie ?
La
Muse (mais oui, la Muse, sortant de derrière un rideau). — J’attends
2827
Moi. — Vous disiez, ma vie ? La Muse (mais oui,
la
Muse, sortant de derrière un rideau). — J’attends votre plaisir… I
2828
qui croient avoir tout dit quand ils ont montré à
l’
origine de telle doctrine mystique une exaltation nerveuse ou des trou
2829
oubles organiques. Ils opposent à ces « délires »
les
thèses rassurantes de la « saine raison », sans se demander jamais si
2830
osent à ces « délires » les thèses rassurantes de
la
« saine raison », sans se demander jamais si cela ne condamne pas et
2831
ans se demander jamais si cela ne condamne pas et
la
santé et la raison. Il s’est trouvé des Maurras et autres « héritiers
2832
der jamais si cela ne condamne pas et la santé et
la
raison. Il s’est trouvé des Maurras et autres « héritiers de la grand
2833
s’est trouvé des Maurras et autres « héritiers de
la
grande tradition gréco-latine » pour assigner à Minerve le bassin de
2834
st trouvé des Maurras et autres « héritiers de la
grande
tradition gréco-latine » pour assigner à Minerve le bassin de la Médi
2835
tradition gréco-latine » pour assigner à Minerve
le
bassin de la Méditerranée comme promenoir, avec défense sous peine de
2836
éco-latine » pour assigner à Minerve le bassin de
la
Méditerranée comme promenoir, avec défense sous peine de mort de s’en
2837
naire. Vous tracez des frontières géographiques à
la
raison ? Eh bien, c’est vous qui l’aurez voulu, mais tant pis, nous s
2838
ographiques à la raison ? Eh bien, c’est vous qui
l’
aurez voulu, mais tant pis, nous serons du Nord. Nous serons romantiqu
2839
rdonnés, brumeux, absurdes, vivants, libres. Avec
la
poésie contre vos principes. Avec l’esprit contre votre raison. Et av
2840
libres. Avec la poésie contre vos principes. Avec
l’
esprit contre votre raison. Et avec Aragon lorsqu’il vous crie : « À b
2841
son. Et avec Aragon lorsqu’il vous crie : « À bas
le
clair génie français. » Alors la voix de Rimbardp à la cantonade : Q
2842
s crie : « À bas le clair génie français. » Alors
la
voix de Rimbardp à la cantonade : Qu’il vienne, qu’il vienne Le temp
2843
air génie français. » Alors la voix de Rimbardp à
la
cantonade : Qu’il vienne, qu’il vienne Le temps dont on s’éprenne !
2844
ardp à la cantonade : Qu’il vienne, qu’il vienne
Le
temps dont on s’éprenne ! Les œuvres les plus significatives de ce
2845
enne, qu’il vienne Le temps dont on s’éprenne !
Les
œuvres les plus significatives de ce siècle sont écrites en haine de
2846
vienne Le temps dont on s’éprenne ! Les œuvres
les
plus significatives de ce siècle sont écrites en haine de l’époque12.
2847
nificatives de ce siècle sont écrites en haine de
l’
époque12. Le reproche d’obscurité que l’on fait à la littérature moder
2848
de ce siècle sont écrites en haine de l’époque12.
Le
reproche d’obscurité que l’on fait à la littérature moderne n’est qu’
2849
haine de l’époque12. Le reproche d’obscurité que
l’
on fait à la littérature moderne n’est qu’une manifestation de ce divo
2850
époque12. Le reproche d’obscurité que l’on fait à
la
littérature moderne n’est qu’une manifestation de ce divorce radical
2851
qu’une manifestation de ce divorce radical entre
l’
époque et les quelques centaines (?) d’individus pour qui l’esprit est
2852
festation de ce divorce radical entre l’époque et
les
quelques centaines (?) d’individus pour qui l’esprit est la seule réa
2853
t les quelques centaines (?) d’individus pour qui
l’
esprit est la seule réalité. C’est pourquoi nous ne pourrons plus sépa
2854
s centaines (?) d’individus pour qui l’esprit est
la
seule réalité. C’est pourquoi nous ne pourrons plus séparer du concep
2855
rquoi nous ne pourrons plus séparer du concept de
l’
esprit celui de Révolution. Et j’entends ce mot dans son sens le plus
2856
de Révolution. Et j’entends ce mot dans son sens
le
plus vaste. Il y a eu quatre-vingt-treize, la Réforme, Karl Marx, la
2857
ens le plus vaste. Il y a eu quatre-vingt-treize,
la
Réforme, Karl Marx, la préface de Cromwell. Mais il ne s’agit pas de
2858
a eu quatre-vingt-treize, la Réforme, Karl Marx,
la
préface de Cromwell. Mais il ne s’agit pas de refaire notre petite ré
2859
ltaire, etc., et tout ce qui leur correspond dans
l’
ordre politique par exemple. Parce que c’est très beau, ridiculement,
2860
ne dites pas aussi merde pour Marx ou Lénine, je
le
dirai pour vous. Quand on a entrepris la Révolution au nom de l’espri
2861
nine, je le dirai pour vous. Quand on a entrepris
la
Révolution au nom de l’esprit, on ne va pas s’acoquiner avec des gens
2862
ous. Quand on a entrepris la Révolution au nom de
l’
esprit, on ne va pas s’acoquiner avec des gens qui ont fait, il y a 10
2863
ne pouvez vous libérer de cette manie française,
la
politique, et ne voyez-vous pas que c’est faire le jeu de vos ennemis
2864
a politique, et ne voyez-vous pas que c’est faire
le
jeu de vos ennemis de discuter avec eux dans leur langue et de crier
2865
avec eux dans leur langue et de crier rouge pour
la
simple raison qu’ils ont dit blanc ? Pensez-vous combattre cet esprit
2866
socie à tant d’objets de votre mépris, en prenant
le
contre-pied de tout ce qu’il inspire ? Alors que cette réaction même
2867
leurs… Mais non, il y aurait trop à dire, et puis
l’
on croirait encore que je suis avec ceux qui traitent Aragon, Breton e
2868
arceurs, de chacals, de déments. Et puis surtout,
l’
heure est venue de clore des discussions énervantes où s’épuise vainem
2869
vantes où s’épuise vainement une dialectique dont
l’
objet fuit sans cesse par la quatrième dimension. Aragon et les surréa
2870
sans cesse par la quatrième dimension. Aragon et
les
surréalistes auront raison même encore s’ils ont tort, envers et cont
2871
me encore s’ils ont tort, envers et contre toutes
les
critiques qu’on pourrait leur adresser, parce que ces « maudits » ont
2872
rait leur adresser, parce que ces « maudits » ont
la
grâce, parce qu’ils sont la vie, même quand ils appellent la mort, pa
2873
e ces « maudits » ont la grâce, parce qu’ils sont
la
vie, même quand ils appellent la mort, parce qu’ils ont la passion et
2874
arce qu’ils sont la vie, même quand ils appellent
la
mort, parce qu’ils ont la passion et l’incommunicable secret de l’inv
2875
ême quand ils appellent la mort, parce qu’ils ont
la
passion et l’incommunicable secret de l’invention. Il nous faut des
2876
appellent la mort, parce qu’ils ont la passion et
l’
incommunicable secret de l’invention. Il nous faut des entrepreneurs
2877
’ils ont la passion et l’incommunicable secret de
l’
invention. Il nous faut des entrepreneurs de tempêtes. Un grand pri
2878
Il nous faut des entrepreneurs de tempêtes. Un
grand
principe de violence commandait à nos mœurs. … et nous portant dans n
2879
à nos mœurs. … et nous portant dans nos actions à
la
limite de nos forces, notre joie parmi vous fut une très grande joie.
2880
de nos forces, notre joie parmi vous fut une très
grande
joie. Saint-John Perse. Nous appelions une Révolution perpétuelle un
2881
ons acquises, sièges faits, autorités fondées sur
la
gloire et la sénilité, etc., etc. Et certes ce n’étaient pas des être
2882
sièges faits, autorités fondées sur la gloire et
la
sénilité, etc., etc. Et certes ce n’étaient pas des êtres, mais leurs
2883
ine morale ne venait-elle pas de ce qu’en son nom
l’
on mesurait odieusement une sympathie humaine pour nous sans prix ? Ma
2884
nyme de magnifique perdition dans des choses plus
grandes
que nous. Nous nous connaissions dans les coins et nous mourions d’en
2885
lus grandes que nous. Nous nous connaissions dans
les
coins et nous mourions d’ennui avec les aspects irrévocablement prévu
2886
ions dans les coins et nous mourions d’ennui avec
les
aspects irrévocablement prévus de nous-mêmes que faisaient paraître l
2887
ement prévus de nous-mêmes que faisaient paraître
les
petits faits de nos longues journées. Nous aimions la révolution comm
2888
etits faits de nos longues journées. Nous aimions
la
révolution comme on aime l’amour. Nous n’aimions pas telle révolution
2889
ournées. Nous aimions la révolution comme on aime
l’
amour. Nous n’aimions pas telle révolution — la russe, par exemple — p
2890
me l’amour. Nous n’aimions pas telle révolution —
la
russe, par exemple — parce que ce n’est pas encore assez révolution ;
2891
asseoir et que son siège était fait. Nous aimions
la
Révolution qui nous perdrait corps et biens dans sa grandeur comme un
2892
emme merveilleuse nous perdrait corps et âme dans
l’
ivresse amoureuse ; nous cherchions cette Révolution de toutes nos for
2893
ns, comme on cherche cette femme à travers toutes
les
femmes. C’était un vice, la révolution-vice. Mais on ne vit, on ne me
2894
mme à travers toutes les femmes. C’était un vice,
la
révolution-vice. Mais on ne vit, on ne meurt que de vices. ⁂ Ici le
2895
Mais on ne vit, on ne meurt que de vices. ⁂ Ici
le
lecteur se rassure. « Il s’y retrouve. » Il pense que c’est bien jeun
2896
que c’est bien jeune. Et : encore un qui rue dans
les
brancards, c’est très bellettrien. Un disque de gramo comme par hasar
2897
us fait ça Plus ou moins, n’est-ce pas ? Et puis
l’
aiguille divague vers des souvenirs, quand nous allions tous deux, ces
2898
ort des suites. Quand cesserez-vous de nous faire
la
jambe, pardon escuses, avec ce thème à condamnations par contumace. I
2899
ns par contumace. Il y a encore des gens pour qui
les
limites de l’anarchie sont : chanter l’Internationale dans les rues,
2900
e. Il y a encore des gens pour qui les limites de
l’
anarchie sont : chanter l’Internationale dans les rues, faire la noce,
2901
pour qui les limites de l’anarchie sont : chanter
l’
Internationale dans les rues, faire la noce, écrire un livre de tendan
2902
e l’anarchie sont : chanter l’Internationale dans
les
rues, faire la noce, écrire un livre de tendances très modernes. Et d
2903
t : chanter l’Internationale dans les rues, faire
la
noce, écrire un livre de tendances très modernes. Et des gens pour se
2904
i nous en voulons, et finalement nous écraser par
l’
évidence définitive de notre absurdité. Car l’homme « s’est fait une v
2905
par l’évidence définitive de notre absurdité. Car
l’
homme « s’est fait une vérité changeante et toujours évidente, de laqu
2906
est plus détruire, ce n’est plus combattre, c’est
l’
épanouissement violent d’une immense fleur palpitante au parfum de pas
2907
es dangereux. Un orage de tendresse va crever sur
le
monde. Aigles d’amours, oiseaux doux et cruels, nous parlerons vos la
2908
ue des valeurs de passion. Balayez ces douanes de
l’
esprit, proclamez le grand Libre-Échange, voici déjà s’avancer des pro
2909
ssion. Balayez ces douanes de l’esprit, proclamez
le
grand Libre-Échange, voici déjà s’avancer des prodiges à cette invite
2910
on. Balayez ces douanes de l’esprit, proclamez le
grand
Libre-Échange, voici déjà s’avancer des prodiges à cette invite la pl
2911
voici déjà s’avancer des prodiges à cette invite
la
plus persuasive : nous sommes prêts à les accueillir. 7. Une vague
2912
e invite la plus persuasive : nous sommes prêts à
les
accueillir. 7. Une vague de rêves (dans Commerce). 8. Et malgré c
2913
perficielles et hâtives, comme cette prétention à
la
libération par le Rêve. « La liberté commence où naît le merveilleux.
2914
tives, comme cette prétention à la libération par
le
Rêve. « La liberté commence où naît le merveilleux. » Au vrai, et sur
2915
e cette prétention à la libération par le Rêve. «
La
liberté commence où naît le merveilleux. » Au vrai, et surtout pour u
2916
ration par le Rêve. « La liberté commence où naît
le
merveilleux. » Au vrai, et surtout pour un homme qui élit Freud « pré
2917
rtout pour un homme qui élit Freud « président de
la
République du Rêve » – c’est presque un non-sens de chercher l’absolu
2918
du Rêve » – c’est presque un non-sens de chercher
l’
absolue liberté dans le rêve. Le rêve, c’est la tyrannie des souvenirs
2919
ue un non-sens de chercher l’absolue liberté dans
le
rêve. Le rêve, c’est la tyrannie des souvenirs ; et ce n’est pas se l
2920
-sens de chercher l’absolue liberté dans le rêve.
Le
rêve, c’est la tyrannie des souvenirs ; et ce n’est pas se libérer qu
2921
er l’absolue liberté dans le rêve. Le rêve, c’est
la
tyrannie des souvenirs ; et ce n’est pas se libérer que de brasser ce
2922
onores. 9. Lettre à Paul Claudel. 10. Musset de
La
coupe et les lèvres. Mais oui, c’est paradoxal. 11. Les livres les p
2923
Lettre à Paul Claudel. 10. Musset de La coupe et
les
lèvres. Mais oui, c’est paradoxal. 11. Les livres les plus répandus
2924
pe et les lèvres. Mais oui, c’est paradoxal. 11.
Les
livres les plus répandus à Genève sont Ma vie et mon œuvre de Ford et
2925
èvres. Mais oui, c’est paradoxal. 11. Les livres
les
plus répandus à Genève sont Ma vie et mon œuvre de Ford et Mon curé c
2926
sont Ma vie et mon œuvre de Ford et Mon curé chez
les
riches. Très loin derrière viennent des France et des Bordeaux. 12.
2927
lus étroit, quelques esthètes du machinisme. 13.
Le
Paysan de Paris. o. Rougemont Denis de, « Louis Aragon, le beau pré
2928
e Paris. o. Rougemont Denis de, « Louis Aragon,
le
beau prétexte », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-F
2929
ibourg, avril 1927, p. 131-144. p. On a conservé
la
graphie de l’original, sans doute voulue par l’auteur.
2930
1927, p. 131-144. p. On a conservé la graphie de
l’
original, sans doute voulue par l’auteur.
2931
é la graphie de l’original, sans doute voulue par
l’
auteur.
2932
Quatre incidents (avril 1927)q r
La
maîtresse d’École Au printemps pur comme une joue, École errait, É
2933
joue, École errait, École suivait une femme dans
les
rues tant soit peu métaphysiques d’une capitale de mes songes. On exi
2934
t évanouis des arcs-en-ciel de névroses dans tous
les
poèmes où détresse rimait avec maîtresse. École savait le mythe du vo
2935
s où détresse rimait avec maîtresse. École savait
le
mythe du voyage, et qu’on ne manque pas le train bleu d’un désir. Ell
2936
savait le mythe du voyage, et qu’on ne manque pas
le
train bleu d’un désir. Elle était donc venue. Il la suivait entre les
2937
train bleu d’un désir. Elle était donc venue. Il
la
suivait entre les devantures qui se passaient de l’une à l’autre deux
2938
désir. Elle était donc venue. Il la suivait entre
les
devantures qui se passaient de l’une à l’autre deux séries de profils
2939
qu’au soleil toujours de face. Il ne vit plus que
la
foule des yeux bleus, son éblouissement. Soudain la voici, elle desce
2940
foule des yeux bleus, son éblouissement. Soudain
la
voici, elle descend à sa rencontre parmi les éclairs d’un luxe mécani
2941
udain la voici, elle descend à sa rencontre parmi
les
éclairs d’un luxe mécanique, le visage dans sa fourrure. Elle découvr
2942
rencontre parmi les éclairs d’un luxe mécanique,
le
visage dans sa fourrure. Elle découvre en passant près de lui le sour
2943
sa fourrure. Elle découvre en passant près de lui
le
sourire d’amitié mortel de tout ce qui n’arrive jamais. Il s’est trom
2944
Il pensa que c’était un ange, de ceux qui vont à
la
recherche des âmes. Aussitôt il téléphone à ceux du paradis : « Qui v
2945
sitôt il téléphone à ceux du paradis : « Qui va à
la
chasse perd sa place, nous nous comprenons. » On lui offrit immédiate
2946
À Max-Marc-Jean Jacob Reymond. Une étoile à
la
boutonnière, le marquis pénétra dans le salon de la duchesse, lui bai
2947
ean Jacob Reymond. Une étoile à la boutonnière,
le
marquis pénétra dans le salon de la duchesse, lui baisa la main et l’
2948
étoile à la boutonnière, le marquis pénétra dans
le
salon de la duchesse, lui baisa la main et l’abattit d’un coup de rev
2949
boutonnière, le marquis pénétra dans le salon de
la
duchesse, lui baisa la main et l’abattit d’un coup de revolver. Puis
2950
s pénétra dans le salon de la duchesse, lui baisa
la
main et l’abattit d’un coup de revolver. Puis s’en fut avec un tact e
2951
ans le salon de la duchesse, lui baisa la main et
l’
abattit d’un coup de revolver. Puis s’en fut avec un tact exquis, qui
2952
n fut avec un tact exquis, qui fut très remarqué.
Le
duc riait sous une table, complètement ivre, et Bettina lui disait à
2953
table, complètement ivre, et Bettina lui disait à
l’
oreille : « Mon chéri, si j’aime la comtesse ? Mais tu es si laid que
2954
a lui disait à l’oreille : « Mon chéri, si j’aime
la
comtesse ? Mais tu es si laid que cela me donne encore plus de plaisi
2955
laid que cela me donne encore plus de plaisir. »
Le
duc paya et s’enfuit en disant que ce n’était pas lui. L’enterrement
2956
aya et s’enfuit en disant que ce n’était pas lui.
L’
enterrement aura lieu sans suite. Suicide du Marquis Salomon le
2957
lieu sans suite. Suicide du Marquis Salomon
le
danseur triste baisa cette main cruelle… et quitta le bal au matin. I
2958
anseur triste baisa cette main cruelle… et quitta
le
bal au matin. Il neigeait dans les rues sourdes comme un songe de son
2959
elle… et quitta le bal au matin. Il neigeait dans
les
rues sourdes comme un songe de son enfance. Aux fenêtres du palais s’
2960
e. Aux fenêtres du palais s’étoilèrent des halos.
Le
jour tendre paraissait sous l’égide de la mort. Il vit des fleurs de
2961
ilèrent des halos. Le jour tendre paraissait sous
l’
égide de la mort. Il vit des fleurs de son enfance, une églantine, que
2962
halos. Le jour tendre paraissait sous l’égide de
la
mort. Il vit des fleurs de son enfance, une églantine, quelques roses
2963
e églantine, quelques roses, un sourire qui perce
le
cœur sur les glaces du passé. Cet abandon aux fuyantes chansons, et d
2964
quelques roses, un sourire qui perce le cœur sur
les
glaces du passé. Cet abandon aux fuyantes chansons, et des violons dé
2965
ons, et des violons déchirants dans sa tête… Mais
le
sommeil s’évaporait aux caresses des flocons, plus perfides que des m
2966
perfides que des murmures d’adieu. Il tomba parmi
les
statues, dans l’amitié pensive des jardins. Une fenêtre s’était ouver
2967
urmures d’adieu. Il tomba parmi les statues, dans
l’
amitié pensive des jardins. Une fenêtre s’était ouverte et des accords
2968
’était ouverte et des accords échappés tombaient,
les
ailes coupées. Puis le silence se reprit à ses songes désolés. Aut
2969
cords échappés tombaient, les ailes coupées. Puis
le
silence se reprit à ses songes désolés. Autre suicide ou la promen
2970
reprit à ses songes désolés. Autre suicide ou
la
promenade en bateau À Grego More. Il disait : « Je suis né pour
2971
À Grego More. Il disait : « Je suis né pour
la
mort. » Il fait assez beau pour que s’ouvre ce cœur de l’après-midi,
2972
» Il fait assez beau pour que s’ouvre ce cœur de
l’
après-midi, comme un camélia de tendre orgueil. Il respire déjà l’odeu
2973
mme un camélia de tendre orgueil. Il respire déjà
l’
odeur merveilleuse des objets et des êtres véritables. Un bateau ne gl
2974
bles. Un bateau ne glisse pas plus doucement vers
le
soleil du haut-lac. Justement, voici que tout va s’ouvrir, qu’un mond
2975
s’ouvrir, qu’un monde s’est ouvert devant lui. Et
l’
eau n’est pas moins somptueuse. Et bien sûr, je n’ai pas bougé. C’est
2976
rd, je songe qu’il est des visites à de certaines
grandes
dames où je préférais — et lui aussi — me rendre seul et sans argent.
2977
me rendre seul et sans argent. Je ne voulais pas
le
retenir, Je ne pouvais pas le suivre. On dit de ces phrases. Même, on
2978
. Je ne voulais pas le retenir, Je ne pouvais pas
le
suivre. On dit de ces phrases. Même, on en pleure. q. Rougemont D
2979
is (avril 1927)k Neuchâtel va-t-elle redevenir
le
centre artistique qu’elle fut au siècle passé ? Allons-nous assister
2980
ster à un regroupement de ses forces créatrices ?
La
question est peut-être prématurée. Mais le seul fait qu’elle se pose
2981
ices ? La question est peut-être prématurée. Mais
le
seul fait qu’elle se pose me paraît indiquer que l’un au moins des de
2982
artistes, en effet, n’ignorent rien des courants
les
plus modernes, et sont bien situés pour n’en prendre que le meilleur
2983
dernes, et sont bien situés pour n’en prendre que
le
meilleur ; mais l’émulation, l’atmosphère de combat nécessaire au dév
2984
n situés pour n’en prendre que le meilleur ; mais
l’
émulation, l’atmosphère de combat nécessaire au développement de certa
2985
n’en prendre que le meilleur ; mais l’émulation,
l’
atmosphère de combat nécessaire au développement de certains jeunes te
2986
ertains jeunes tempéraments leur fait défaut dans
la
même mesure. Ainsi risquent de s’établir autour d’eux des mœurs un pe
2987
œurs un peu bourgeoises dont je ne vais pas faire
le
procès, mais qui expliquent, me semble-t-il, pour une part, la disper
2988
is qui expliquent, me semble-t-il, pour une part,
la
dispersion des efforts artistiques. Tout ce monde d’amateurs de décou
2989
aux, de critiques d’avant-garde, ce monde où tous
les
extrémismes sont prônés comme vertus cardinales, et qui forme ailleur
2990
r public des jeunes artistes, n’existant pas ici,
le
peintre se trouve placé d’emblée en face de ce qu’on nomme le gros pu
2991
e trouve placé d’emblée en face de ce qu’on nomme
le
gros public. L’épreuve est pénible, énervante, souvent fatale aux nov
2992
’emblée en face de ce qu’on nomme le gros public.
L’
épreuve est pénible, énervante, souvent fatale aux novateurs. Alors il
2993
le d’une consécration étrangère. Un jour en effet
l’
on apprend que tel tableau de jeune est « coté » chez un gros marchand
2994
une est « coté » chez un gros marchand. Aussitôt,
les
feuilles locales retentissent de touchants échos : « C’est avec un lé
2995
bien méritée du talent d’un de ses enfants… » Car
le
fils prodigue, s’il rentre au foyer dans une Rolls-Royce et fortune f
2996
ttendait pas moins du fils d’un tel père. « Voilà
le
train du monde… » Je ne pense pas qu’il en faille gémir. Une certaine
2997
. Une certaine résistance est nécessaire pour que
la
force se développe. N’était certain petit plaisir d’impertinence, je
2998
une actualité toujours vive. D’ailleurs, sachons
le
reconnaître, il y a moins de malice que de paresse dans les jugements
2999
aître, il y a moins de malice que de paresse dans
les
jugements du public, et moins d’incompréhension que de timidité. ⁂ On
3000
ans, jusqu’à André Evard, qui en a près de 50, si
les
peintres dont nous allons parler méritent d’être appelés jeunes, c’es
3001
leurs œuvres avant tout. D’autre part je préfère
la
légende à l’histoire comme la peinture à la photographie. Une œuvre d
3002
avant tout. D’autre part je préfère la légende à
l’
histoire comme la peinture à la photographie. Une œuvre d’art est un m
3003
tre part je préfère la légende à l’histoire comme
la
peinture à la photographie. Une œuvre d’art est un merveilleux foyer
3004
éfère la légende à l’histoire comme la peinture à
la
photographie. Une œuvre d’art est un merveilleux foyer de contagion c
3005
agion contre lequel je ne saurais me prémunir par
le
moyen d’aucun de ces appareils à jugements garantis qui posent un cri
3006
t un critique d’art diplômé. Premier péché contre
l’
histoire : au seuil d’un article consacré aux jeunes artistes neuchâte
3007
t entre trente pareilles, aux cactus qui ornaient
les
fenêtres, dans une chambre peinte en bleu vif et ornée de surprenants
3008
straites. De cette époque datent des toiles comme
le
Souvenir de l’Évêché. Décors et personnages semblent d’une matière id
3009
tte époque datent des toiles comme le Souvenir de
l’
Évêché. Décors et personnages semblent d’une matière idéale. Tout est
3010
fait seulement. Il manque à ces recompositions de
la
nature, à ces natures remises à neuf, l’imperfection humaine qui touc
3011
tions de la nature, à ces natures remises à neuf,
l’
imperfection humaine qui touche. Mais l’atmosphère pure de ces espaces
3012
s à neuf, l’imperfection humaine qui touche. Mais
l’
atmosphère pure de ces espaces définis par quelques plans ne tue pas u
3013
ailleurs… Qu’il sorte enfin et se mette à graver
les
scènes qu’il voit dans la petite cité ouvrière, et c’est merveille de
3014
n et se mette à graver les scènes qu’il voit dans
la
petite cité ouvrière, et c’est merveille de constater combien l’épura
3015
ouvrière, et c’est merveille de constater combien
l’
épuration rigoriste de sa technique sert une vision aigüe de la vie. L
3016
igoriste de sa technique sert une vision aigüe de
la
vie. La série de gravures sur bois colorées qu’il intitule la cité es
3017
de sa technique sert une vision aigüe de la vie.
La
série de gravures sur bois colorées qu’il intitule la cité est un pet
3018
érie de gravures sur bois colorées qu’il intitule
la
cité est un petit chef-d’œuvre de réalisme stylisé. C’est d’un art tr
3019
, qui connaît ses ressources et sait en user avec
la
sobriété qui produit le maximum d’expression. Cette « simplicité préc
3020
rces et sait en user avec la sobriété qui produit
le
maximum d’expression. Cette « simplicité précieuse », il sait la conf
3021
pression. Cette « simplicité précieuse », il sait
la
conférer à tout ce qu’il touche, qu’il décore une bannière, fabrique
3022
e un peu bizarre qu’il glisse si souvent là où on
l’
attend le moins. Conrad Meili apporte chez nous une inspiration neuve,
3023
bizarre qu’il glisse si souvent là où on l’attend
le
moins. Conrad Meili apporte chez nous une inspiration neuve, d’origin
3024
e germanique, mais qui a choisi de s’astreindre à
la
voluptueuse rigueur latine, et qui tout en s’épurant dans des formes
3025
ui tout en s’épurant dans des formes claires a su
les
renouveler. Il nous apporte aussi cet élément de vitalité combative q
3026
’il casse des vitres, ce n’est pas seulement pour
le
plaisir, mais plutôt par amour du courant d’air. Cela dérange toujour
3027
air. Cela dérange toujours quelques frileux, mais
les
autres sont soulagés. Et ne fût-ce qu’en prenant une initiative comme
3028
uchâtel 1927 7 il aura bien mérité sa place parmi
les
artistes neuchâtelois. Actuellement, Meili achève la décoration d’une
3029
artistes neuchâtelois. Actuellement, Meili achève
la
décoration d’une salle d’hôtel en collaboration avec Paul Donzé. Qui
3030
ssionniste s’astreindrait jamais aux exigences de
la
technique décorative ! Voilà qui laisse espérer parmi nos artistes bi
3031
oins paradoxaux. Donzé n’est pas de ceux pour qui
la
peinture consiste à habiller une idée. Voyez son portrait de Meili :
3032
ée. Voyez son portrait de Meili : il ne prend pas
le
sujet par l’intérieur, mais il taille ce visage dans une pâte riche e
3033
portrait de Meili : il ne prend pas le sujet par
l’
intérieur, mais il taille ce visage dans une pâte riche et un peu lour
3034
dans une pâte riche et un peu lourde, son pinceau
la
palpe, la presse, la réduit à la forme qu’il voit. Il y a de la sensu
3035
âte riche et un peu lourde, son pinceau la palpe,
la
presse, la réduit à la forme qu’il voit. Il y a de la sensualité dans
3036
t un peu lourde, son pinceau la palpe, la presse,
la
réduit à la forme qu’il voit. Il y a de la sensualité dans l’écraseme
3037
rde, son pinceau la palpe, la presse, la réduit à
la
forme qu’il voit. Il y a de la sensualité dans l’écrasement de ses co
3038
resse, la réduit à la forme qu’il voit. Il y a de
la
sensualité dans l’écrasement de ses couleurs, une sensualité qui sait
3039
la forme qu’il voit. Il y a de la sensualité dans
l’
écrasement de ses couleurs, une sensualité qui sait se faire délicate
3040
avec des roses et des jaunes jamais mièvres, sous
l’
œil méfiant des fascistes qui le prennent pour un agitateur russe, à c
3041
ais mièvres, sous l’œil méfiant des fascistes qui
le
prennent pour un agitateur russe, à cause de sa chevelure, sans doute
3042
e tromper plus. ⁂ À vrai dire j’en vois peu parmi
les
jeunes qui vouent tout leur amour à la peinture pure. Je crois même q
3043
peu parmi les jeunes qui vouent tout leur amour à
la
peinture pure. Je crois même que, Paul Donzé touché à son tour par la
3044
crois même que, Paul Donzé touché à son tour par
la
grâce décorative, il n’en reste qu’un, du moins à Neuchâtel même : Eu
3045
vier. Ce garçon aux allures discrètes promène sur
le
monde des yeux de Japonais d’une ironie mélancolique et qui voient pl
3046
ient plus loin qu’on ne croit, mais il a toujours
l’
air de songer à la Hollande, sa seconde patrie si la peinture est sa p
3047
on ne croit, mais il a toujours l’air de songer à
la
Hollande, sa seconde patrie si la peinture est sa première et Neuchât
3048
air de songer à la Hollande, sa seconde patrie si
la
peinture est sa première et Neuchâtel la troisième… Il y a par Eugène
3049
par Eugène Bouvier quelque chose de nouveau dans
la
peinture neuchâteloise : un lyrisme un peu amer, d’une tristesse qui
3050
y a une sorte d’aristocratique dissimulation dans
l’
œuvre de Bouvier. Sa technique qui paraît au premier abord masquer ses
3051
premier abord masquer ses intentions, en réalité
les
exprime par ses défauts mêmes ou ses fausses négligences ; mais il fa
3052
oujours une sorte de dissonance, un défaut par où
l’
on va peut-être se glisser dans l’atmosphère de l’œuvre ; que l’on con
3053
n défaut par où l’on va peut-être se glisser dans
l’
atmosphère de l’œuvre ; que l’on consente en effet à telle déformation
3054
l’on va peut-être se glisser dans l’atmosphère de
l’
œuvre ; que l’on consente en effet à telle déformation, et tout devien
3055
tre se glisser dans l’atmosphère de l’œuvre ; que
l’
on consente en effet à telle déformation, et tout devient satisfaisant
3056
ère que Louis de Meuron, parmi ses aînés, dont on
le
puisse rapprocher, parce qu’il est un des rares peintres de ce pays p
3057
’il est un des rares peintres de ce pays pour qui
la
couleur existe avant tout. Mais la nostalgie de Bouvier l’entraîne à
3058
pays pour qui la couleur existe avant tout. Mais
la
nostalgie de Bouvier l’entraîne à mille lieues des jardins de sourire
3059
r existe avant tout. Mais la nostalgie de Bouvier
l’
entraîne à mille lieues des jardins de sourires qui s’épanouissent sur
3060
es des jardins de sourires qui s’épanouissent sur
les
toiles de Meuron. Il semble toujours qu’il peigne entre deux pluies.
3061
onde se mêlent, et sait rendre mieux que personne
la
liquidité d’un lac, certaines atmosphères délavées et sourdes. « Temp
3062
couvert, calme, légères précipitations » annonce
le
bulletin. Tiens, me dis-je, Bouvier va peindre. Comme peintre religie
3063
re religieux, il se cherche encore. On a pourtant
l’
impression, à voir ses dernières toiles, d’une plus grande certitude i
3064
pression, à voir ses dernières toiles, d’une plus
grande
certitude intérieure. Les visages sont plus calmes, les couleurs s’av
3065
s toiles, d’une plus grande certitude intérieure.
Les
visages sont plus calmes, les couleurs s’avivent, le soleil est sur l
3066
rtitude intérieure. Les visages sont plus calmes,
les
couleurs s’avivent, le soleil est sur le point de reparaître… Charle
3067
visages sont plus calmes, les couleurs s’avivent,
le
soleil est sur le point de reparaître… Charles Humbert ou comment on
3068
nq ans de Baudelaire à Rubens. Il fut un temps où
l’
on put craindre que Charles Humbert ne devînt le chef d’une école du g
3069
ù l’on put craindre que Charles Humbert ne devînt
le
chef d’une école du gris-noir neurasthénique. Il peignait des natures
3070
ue. Il peignait des natures mortes qui décidément
l’
étaient, à faire froid dans le dos ; ou bien des scènes d’une bizarre
3071
rtes qui décidément l’étaient, à faire froid dans
le
dos ; ou bien des scènes d’une bizarre fantaisie, un mélange de Rops
3072
g, G. H. Dessoulavy)… Mais déjà paraissaient dans
les
Voix (cette courageuse revue qu’il avait fondée avec J. P. Zimmermann
3073
un tempérament très rassurant. C’était, je crois,
le
vrai Humbert qui commençait à s’affirmer. Puis il y eut une période i
3074
onies funèbres, comme un qui n’attendrait pas que
l’
enterrement s’éloigne pour entonner une chanson à boire. Et sa techniq
3075
nt maigre se faisait trop lâche. Mais aujourd’hui
la
mue semble s’être opérée. Humbert est rendu à lui-même. Il atteint so
3076
son équilibre et sa maîtrise avec une toile comme
le
Potier. Si la couleur n’est pas encore aussi plantureuse que les form
3077
et sa maîtrise avec une toile comme le Potier. Si
la
couleur n’est pas encore aussi plantureuse que les formes, il y a une
3078
la couleur n’est pas encore aussi plantureuse que
les
formes, il y a une belle richesse de lueurs sur une matière traitée l
3079
possibilités imprévues. Il y a un côté « homme de
la
Renaissance » chez un Charles Humbert livré à sa fougue originale. Il
3080
plus encore chez un Aurèle Barraud. Il suffit de
le
voir peint par lui-même pour s’en assurer. La tête large, aux yeux cl
3081
de le voir peint par lui-même pour s’en assurer.
La
tête large, aux yeux clairs et assurés, le cou robuste, les mains d’u
3082
surer. La tête large, aux yeux clairs et assurés,
le
cou robuste, les mains d’un si beau dessin, qui ont du poids et nulle
3083
arge, aux yeux clairs et assurés, le cou robuste,
les
mains d’un si beau dessin, qui ont du poids et nulle lourdeur, tout c
3084
nce domptée et qui semble se faire une volupté de
la
discipline qu’elle s’impose. Et voilà qui fait encore plus « Renaissa
3085
. Et voilà qui fait encore plus « Renaissance » :
le
costume est drapé avec un soin minutieux, mais une grande mèche insol
3086
ostume est drapé avec un soin minutieux, mais une
grande
mèche insolente retombe devant le visage. Aurèle tient un livre ouver
3087
x, mais une grande mèche insolente retombe devant
le
visage. Aurèle tient un livre ouvert, et ce n’est pas je pense qu’il
3088
t un livre ouvert, et ce n’est pas je pense qu’il
le
lise, mais il aime caresser la reliure qu’il doit avoir faite lui-mêm
3089
pas je pense qu’il le lise, mais il aime caresser
la
reliure qu’il doit avoir faite lui-même. Car il est artisan, dans le
3090
it avoir faite lui-même. Car il est artisan, dans
le
beau sens ancien du terme, tout comme son frère Charles Barraud, qui
3091
s, à encadrer des glaces. Et plaise aux dieux que
les
visages qui s’y reflèteront soient aussi beaux que ceux qu’il peint o
3092
oient aussi beaux que ceux qu’il peint ou modèle,
le
soir, à la lampe, en compagnie de sa femme (elle peint aussi, d’un œi
3093
beaux que ceux qu’il peint ou modèle, le soir, à
la
lampe, en compagnie de sa femme (elle peint aussi, d’un œil regardant
3094
de sa femme (elle peint aussi, d’un œil regardant
le
sujet, de l’autre ce qu’en fait son mari). Et puis voici François Bar
3095
n fait son mari). Et puis voici François Barraud,
le
plus jeune des frères. Il vient apporter des dessins qui ressemblent
3096
éalistes, plus fins, mais tout aussi habiles dans
l’
utilisation du clair-obscur qui simplifie et renforce l’expression. Dé
3097
isation du clair-obscur qui simplifie et renforce
l’
expression. Décidément ces trois frères sont une école. Délaissant un
3098
ons désormais retrouver, allons errer un peu dans
le
royaume d’Utopie. André Evard va nous y introduire, et nous ne saurio
3099
es années d’avance sur ses contemporains. Un jour
les
jeunes le rattrapent. Salutations, présentations : « André Evard. — L
3100
’avance sur ses contemporains. Un jour les jeunes
le
rattrapent. Salutations, présentations : « André Evard. — Les jeunes
3101
nt. Salutations, présentations : « André Evard. —
Les
jeunes peintres. — Vous suivez la même route que nous ? À la bonne he
3102
André Evard. — Les jeunes peintres. — Vous suivez
la
même route que nous ? À la bonne heure ! ». Et l’on repart bras dessu
3103
eintres. — Vous suivez la même route que nous ? À
la
bonne heure ! ». Et l’on repart bras dessus, bras dessous. Et l’on ap
3104
la même route que nous ? À la bonne heure ! ». Et
l’
on repart bras dessus, bras dessous. Et l’on apprend peu à peu des cho
3105
! ». Et l’on repart bras dessus, bras dessous. Et
l’
on apprend peu à peu des choses bien curieuses sur son compte. Il a fa
3106
hoses bien curieuses sur son compte. Il a fait de
la
pâtisserie, mais on m’assure qu’il se nourrit de noix et d’oranges. I
3107
cles où sous un éclairage très net, mais inusité,
l’
objet le plus banal se charge de mystère. Que va-t-il se passer là-ded
3108
sous un éclairage très net, mais inusité, l’objet
le
plus banal se charge de mystère. Que va-t-il se passer là-dedans ? Et
3109
e va-t-il se passer là-dedans ? Et ces roses sont
le
signe de quel occulte prodige ? Intrigué, vous reprenez ce que vous p
3110
qui s’incarne dans ces motifs géométriques, pour
le
plaisir de la perfection exercée par jeu. Mais quel support à de nouv
3111
dans ces motifs géométriques, pour le plaisir de
la
perfection exercée par jeu. Mais quel support à de nouvelles songerie
3112
rd n’aille trouver une de ces machines à explorer
l’
au-delà. En vérité il faut être sorcier ou artiste pour changer en ins
3113
métaphysiques ces bonnes montres de précision de
La
Chaux-de-Fonds… Avant de quitter les peintres, rappelons le souvenir
3114
précision de La Chaux-de-Fonds… Avant de quitter
les
peintres, rappelons le souvenir de Charles Harder, qui est mort jeune
3115
e-Fonds… Avant de quitter les peintres, rappelons
le
souvenir de Charles Harder, qui est mort jeune, sans avoir pu donner
3116
r qui saura s’imposer. Léon Perrin a compris tout
le
parti qu’on pouvait tirer des principes cubistes dans un art dont la
3117
ait tirer des principes cubistes dans un art dont
la
genèse même est cubiste en quelque sorte, supposant une décomposition
3118
y avait quelque lourdeur dans des morceaux comme
le
Joueur de rugby. C’était le poids de la pierre, plus que celui du cor
3119
ns des morceaux comme le Joueur de rugby. C’était
le
poids de la pierre, plus que celui du corps de l’athlète ; l’œuvre n’
3120
aux comme le Joueur de rugby. C’était le poids de
la
pierre, plus que celui du corps de l’athlète ; l’œuvre n’atteignait p
3121
le poids de la pierre, plus que celui du corps de
l’
athlète ; l’œuvre n’atteignait pas encore pleinement sa vie propre. De
3122
la pierre, plus que celui du corps de l’athlète ;
l’
œuvre n’atteignait pas encore pleinement sa vie propre. Depuis, Léon P
3123
is, Léon Perrin semble avoir évolué vers une plus
grande
harmonie de lignes. Je pense surtout à ses bas-reliefs du BIT où se m
3124
du BIT où se manifeste un heureux équilibre entre
le
réalisme imposé par les sujets et un style qui sait rester ample, d’u
3125
un heureux équilibre entre le réalisme imposé par
les
sujets et un style qui sait rester ample, d’une simplicité non dépour
3126
cité non dépourvue de puissance. Une fois de plus
l’
on peut admirer la salutaire leçon de style donnée par le cubisme aux
3127
de puissance. Une fois de plus l’on peut admirer
la
salutaire leçon de style donnée par le cubisme aux artistes qui ont s
3128
ut admirer la salutaire leçon de style donnée par
le
cubisme aux artistes qui ont su se dégager de son outrance théorique.
3129
se dégager de son outrance théorique. C’est dans
la
manière cubiste encore que Perrin décora naguère fort plaisamment une
3130
e n’est certes pas complète. Mais elle a du moins
l’
avantage de grouper des artistes qui, par le fait des circonstances pe
3131
moins l’avantage de grouper des artistes qui, par
le
fait des circonstances peut-être plus que par de naturelles affinités
3132
ns décoratives qui pourraient aboutir peut-être à
la
formation d’un groupe dont l’activité serait féconde en ce pays. D’au
3133
aboutir peut-être à la formation d’un groupe dont
l’
activité serait féconde en ce pays. D’autre part, des œuvres aussi dif
3134
t, des œuvres aussi différentes par leur objet et
le
domaine où elles se réalisent que celles de Le Corbusier8, Meili, Eva
3135
et le domaine où elles se réalisent que celles de
Le
Corbusier8, Meili, Evard, Perrin, manifestent toutes une recherche de
3136
vard, Perrin, manifestent toutes une recherche de
la
simplicité savante et de la perfection du métier, un goût pour la con
3137
utes une recherche de la simplicité savante et de
la
perfection du métier, un goût pour la construction rigoureuse qui son
3138
vante et de la perfection du métier, un goût pour
la
construction rigoureuse qui sont des éléments peut-être insuffisants
3139
nérale vers une sorte de classicisme moderne dont
les
frères Barraud ne seraient pas très éloignés par d’autres côtés. Un a
3140
samment atteint si nous n’avions fait qu’affirmer
l’
existence et la vitalité d’une jeune peinture originale dans un pays q
3141
si nous n’avions fait qu’affirmer l’existence et
la
vitalité d’une jeune peinture originale dans un pays qu’on s’est trop
3142
ue et d’une maigre végétation artistique. Pays où
l’
on préfère la netteté utile à l’harmonie des lignes ; où la lumière éc
3143
aigre végétation artistique. Pays où l’on préfère
la
netteté utile à l’harmonie des lignes ; où la lumière éclaire plus qu
3144
tistique. Pays où l’on préfère la netteté utile à
l’
harmonie des lignes ; où la lumière éclaire plus qu’elle ne caresse ;
3145
ère la netteté utile à l’harmonie des lignes ; où
la
lumière éclaire plus qu’elle ne caresse ; où pourtant les hivers les
3146
ère éclaire plus qu’elle ne caresse ; où pourtant
les
hivers les plus durs réservent des douceurs secrètes. 7. Publicatio
3147
plus qu’elle ne caresse ; où pourtant les hivers
les
plus durs réservent des douceurs secrètes. 7. Publication dont cett
3148
n vrai nom Ch. E. Jeanneret, un article paru dans
le
numéro de février de cette revue. k. Rougemont Denis de, « Jeunes a
3149
hoquer et s’imposer pourtant. M. Lecache présente
le
problème juif avec une obstination à ne rien cacher qui le mène profo
3150
me juif avec une obstination à ne rien cacher qui
le
mène profond. Une famille juive dans le Marais. Le père est un taille
3151
acher qui le mène profond. Une famille juive dans
le
Marais. Le père est un tailleur, biblique, austère et probe, qui n’a
3152
e mène profond. Une famille juive dans le Marais.
Le
père est un tailleur, biblique, austère et probe, qui n’a d’ambition
3153
, qui n’a d’ambition que pour ses enfants. Jacob,
l’
aîné se révolte. Sensualité, intelligence, brutalité : les caractères
3154
se révolte. Sensualité, intelligence, brutalité :
les
caractères se résument dans son avidité de puissance. C’est par l’arg
3155
résument dans son avidité de puissance. C’est par
l’
argent qu’on domine notre âge : il devient grand industriel, assure sa
3156
par l’argent qu’on domine notre âge : il devient
grand
industriel, assure sa fortune au prix du peu cynique reniement de ses
3157
au prix du peu cynique reniement de ses origines.
Le
vieux père s’effondre de honte et de douleur. « On vend de l’étoffe…
3158
e s’effondre de honte et de douleur. « On vend de
l’
étoffe… eux ils se vendent ! » Mais Jacob a renié ses parents, non leu
3159
ents, non leurs ambitions. Surmontant son dégoût,
le
père ajoute : « Notre sang sera vainqueur… Qu’ils m’oublient, qu’ils
3160
ueur… Qu’ils m’oublient, qu’ils me méprisent ! Je
les
vois régner. Je salue leur Loi. » Le récit grassement pittoresque dan
3161
risent ! Je les vois régner. Je salue leur Loi. »
Le
récit grassement pittoresque dans la description du milieu juif, pren
3162
leur Loi. » Le récit grassement pittoresque dans
la
description du milieu juif, prend une âpre rapidité avec l’ascension
3163
tion du milieu juif, prend une âpre rapidité avec
l’
ascension de Jacob et ses luttes. On pardonne bon nombre de platitudes
3164
ne bon nombre de platitudes et de vulgarités pour
les
derniers chapitres, denses, violents, et dont le profond ricanement s
3165
les derniers chapitres, denses, violents, et dont
le
profond ricanement se prolonge en nous. Je crois entendre Jacob qui s
3166
fort que cette bourgeoisie fatiguée, et de suivre
le
destin que vous m’avez assigné à force de m’humilier et de me craindr
3167
René Crevel,
La
Mort difficile (mai 1927)ai Le jeu de tout dire est une des plus t
3168
René Crevel, La Mort difficile (mai 1927)ai
Le
jeu de tout dire est une des plus tragiques inventions de l’inquiétud
3169
out dire est une des plus tragiques inventions de
l’
inquiétude actuelle. Sous couleur de démasquer l’humain, et par l’acha
3170
l’inquiétude actuelle. Sous couleur de démasquer
l’
humain, et par l’acharnement angoissé qu’on y apporte, l’on en vient à
3171
uelle. Sous couleur de démasquer l’humain, et par
l’
acharnement angoissé qu’on y apporte, l’on en vient à une conception d
3172
n, et par l’acharnement angoissé qu’on y apporte,
l’
on en vient à une conception de la sincérité qui me paraît proprement
3173
u’on y apporte, l’on en vient à une conception de
la
sincérité qui me paraît proprement inhumaine. Tout dire, vraiment ? C
3174
proprement inhumaine. Tout dire, vraiment ? C’est
l’
exigence d’une détresse cachée ; elle fait bientôt considérer toute jo
3175
ôt considérer toute joie comme illusoire et livre
l’
individu pieds et poings liés à l’obsession qu’il voulait avouer pour
3176
usoire et livre l’individu pieds et poings liés à
l’
obsession qu’il voulait avouer pour s’en délivrer peut-être. Cette sin
3177
re. Cette sincérité ne serait-elle à son tour que
le
masque d’un goût du malheur ? Le sujet profond de ce roman, où l’on v
3178
e à son tour que le masque d’un goût du malheur ?
Le
sujet profond de ce roman, où l’on voit comment Pierre en vient à sac
3179
oût du malheur ? Le sujet profond de ce roman, où
l’
on voit comment Pierre en vient à sacrifier Diane, son apaisement, pou
3180
e sujet profond de ce roman, où l’on voit comment
Pierre
en vient à sacrifier Diane, son apaisement, pour Arthur, sa « maladie
3181
sement, pour Arthur, sa « maladie », c’est encore
l’
« élan mortel » que décrivait Mon Corps et Moi. Quand l’analyse féroce
3182
an mortel » que décrivait Mon Corps et Moi. Quand
l’
analyse féroce de Crevel fouille les pensées de Pierre ou de Diane, le
3183
et Moi. Quand l’analyse féroce de Crevel fouille
les
pensées de Pierre ou de Diane, les gestes d’Arthur, le roman vit et n
3184
l’analyse féroce de Crevel fouille les pensées de
Pierre
ou de Diane, les gestes d’Arthur, le roman vit et nous touche par la
3185
Crevel fouille les pensées de Pierre ou de Diane,
les
gestes d’Arthur, le roman vit et nous touche par la force de ce tourm
3186
nsées de Pierre ou de Diane, les gestes d’Arthur,
le
roman vit et nous touche par la force de ce tourment ou de ce sauvage
3187
gestes d’Arthur, le roman vit et nous touche par
la
force de ce tourment ou de ce sauvage égoïsme ; mais qu’elle s’acharn
3188
e ce sauvage égoïsme ; mais qu’elle s’acharne sur
le
détail dégoûtant et mesquin de certain milieu bourgeois, et l’on voit
3189
oûtant et mesquin de certain milieu bourgeois, et
l’
on voit bien que l’auteur n’est pas encore détaché de la matière pour
3190
e certain milieu bourgeois, et l’on voit bien que
l’
auteur n’est pas encore détaché de la matière pour en tirer une œuvre
3191
oit bien que l’auteur n’est pas encore détaché de
la
matière pour en tirer une œuvre d’art. La sincérité audacieuse mais s
3192
aché de la matière pour en tirer une œuvre d’art.
La
sincérité audacieuse mais sans bravade qui donne à ce livre sa valeur
3193
trahissent une écriture hâtive. Mais il y a dans
l’
œuvre de René Crevel un sens de la douleur et un sérieux humain qui fo
3194
ais il y a dans l’œuvre de René Crevel un sens de
la
douleur et un sérieux humain qui forcent la sympathie. ai. Rougemo
3195
ns de la douleur et un sérieux humain qui forcent
la
sympathie. ai. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] René Crevel, L
3196
Rougemont Denis de, « [Compte rendu] René Crevel,
La
Mort difficile », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genèv
3197
Paul Éluard, Capitale de
la
douleur (mai 1927)aj Nocturnes aux caresses coupantes comme certai
3198
ses coupantes comme certaines herbes. Capitale de
la
douleurak, ce sont de belles syllabes sereines, et dans cette ville,
3199
yllabes sereines, et dans cette ville, Éluard est
le
plus séduisant, le plus dangereusement gracieux des noctambules. Rêve
3200
t dans cette ville, Éluard est le plus séduisant,
le
plus dangereusement gracieux des noctambules. Rêves éveillés, entre d
3201
lixir dont il voudrait bien nous faire croire que
le
diable est l’auteur. Beaucoup d’oiseaux volètent, se balancent au bor
3202
voudrait bien nous faire croire que le diable est
l’
auteur. Beaucoup d’oiseaux volètent, se balancent au bord des verres,
3203
t, se balancent au bord des verres, se posent sur
les
cordes d’une lyre dont ils font grésiller l’accord, une patte en l’ai
3204
sur les cordes d’une lyre dont ils font grésiller
l’
accord, une patte en l’air, becquètent le cœur d’une femme qui va les
3205
re dont ils font grésiller l’accord, une patte en
l’
air, becquètent le cœur d’une femme qui va les étrangler doucement. Ce
3206
résiller l’accord, une patte en l’air, becquètent
le
cœur d’une femme qui va les étrangler doucement. Ces vers sont de jol
3207
e en l’air, becquètent le cœur d’une femme qui va
les
étrangler doucement. Ces vers sont de jolies flèches empoisonnées. Qu
3208
e, de laqué, d’élégant, de « bien français » ; et
le
mot sang n’évoque ici qu’une tache de couleur, plus sentimental que c
3209
he de couleur, plus sentimental que cruel. « J’ai
la
beauté facile et c’est heureux. » Il y a aussi un certain tragique, m
3210
nis de, « [Compte rendu] Paul Éluard, Capitale de
la
douleur », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mai
3211
Genève, mai 1927, p. 693-694. ak. En romain dans
l’
édition originale.
3212
Pierre Drieu la Rochelle,
La
Suite dans les idées (mai 1927)al « De quoi s’agit-il ? de détruir
3213
Pierre Drieu la Rochelle, La Suite dans
les
idées (mai 1927)al « De quoi s’agit-il ? de détruire ou de rafisto
3214
Drieu s’examine. Encore un ? Non, enfin un. Tous
les
autres y ont apporté de secrètes complaisances, ou une arrière-pensée
3215
esoin d’être aimés qui faussaient leurs voix pour
les
rendre plus touchantes. Celui-ci bat sa coulpe avec une saine rudesse
3216
té corrompu et infect et adonné à mal » (Calvin).
Le
tableau n’est pas beau, mais on y sent une « patte » qui révèle encor
3217
is on y sent une « patte » qui révèle encore dans
le
fond quelque chose de solide, d’authentique. J’aime cette violence de
3218
redressement où je distingue bien autre chose que
les
« éclats de l’impuissance ». Un plus délicat eut compris que certains
3219
je distingue bien autre chose que les « éclats de
l’
impuissance ». Un plus délicat eut compris que certains des morceaux t
3220
fection, s’il ne peut encore s’en tirer, du moins
l’
avoue-t-il avec une franchise qui la rend sympathique. Et puis, tout d
3221
rer, du moins l’avoue-t-il avec une franchise qui
la
rend sympathique. Et puis, tout de même, on est bien heureux de renco
3222
t de même, on est bien heureux de rencontrer chez
les
jeunes écrivains français un homme qui ait à ce point le sens de l’ép
3223
es écrivains français un homme qui ait à ce point
le
sens de l’époque, une vision si claire et si tragique de la civilisat
3224
s français un homme qui ait à ce point le sens de
l’
époque, une vision si claire et si tragique de la civilisation d’Occid
3225
l’époque, une vision si claire et si tragique de
la
civilisation d’Occident. Les questions capitales posées ailleurs depu
3226
ire et si tragique de la civilisation d’Occident.
Les
questions capitales posées ailleurs depuis longtemps par des maîtres
3227
ir échappé au surréalisme en tant qu’il n’est que
le
triomphe de la littérature sur la vie, mais d’avoir su en garder une
3228
urréalisme en tant qu’il n’est que le triomphe de
la
littérature sur la vie, mais d’avoir su en garder une passion pour la
3229
qu’il n’est que le triomphe de la littérature sur
la
vie, mais d’avoir su en garder une passion pour la pureté, un « jusqu
3230
a vie, mais d’avoir su en garder une passion pour
la
pureté, un « jusqu’au boutisine » qui seul peut redonner quelque vita
3231
ourd’hui, presque sans pose, et décidé à mépriser
le
bluff. al. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Pierre Drieu la Ro
3232
is de, « [Compte rendu] Pierre Drieu la Rochelle,
La
Suite dans les idées », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
3233
te rendu] Pierre Drieu la Rochelle, La Suite dans
les
idées », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mai 19
3234
mmerce, qu’on m’a appris à voler. Aristophane («
Les
Chevaliers »). Dès qu’on eut déposé devant Isidore un malaga et une
3235
inérale devant son étrange convive, celui-ci prit
la
parole sans plus de cérémonie : « La jeunesse, Monsieur…, la jeunesse
3236
elui-ci prit la parole sans plus de cérémonie : «
La
jeunesse, Monsieur…, la jeunesse est l’âge où l’on atteint la vie. On
3237
ans plus de cérémonie : « La jeunesse, Monsieur…,
la
jeunesse est l’âge où l’on atteint la vie. On s’y maintient cinq ans,
3238
monie : « La jeunesse, Monsieur…, la jeunesse est
l’
âge où l’on atteint la vie. On s’y maintient cinq ans, dix ans au plus
3239
La jeunesse, Monsieur…, la jeunesse est l’âge où
l’
on atteint la vie. On s’y maintient cinq ans, dix ans au plus. Après,
3240
Monsieur…, la jeunesse est l’âge où l’on atteint
la
vie. On s’y maintient cinq ans, dix ans au plus. Après, c’est un long
3241
s, dix ans au plus. Après, c’est un long adieu et
le
corps se fige à mesure que l’esprit s’établit sur ses positions. Or d
3242
st un long adieu et le corps se fige à mesure que
l’
esprit s’établit sur ses positions. Or donc, j’avais vingt ans. Je viv
3243
diverti. J’étais bon, Monsieur, normalement bon.
L’
idée, par exemple, d’étrangler un chat pour le plaisir me répugnait. J
3244
on. L’idée, par exemple, d’étrangler un chat pour
le
plaisir me répugnait. Je détestais de peiner quelque être, même ennem
3245
iner quelque être, même ennemi, — car celui-là je
le
méprisais trop sincèrement. » Vers cette époque, une femme me regarda
3246
ment. » Mes parents me savaient vierge et c’était
la
joie de leur vie, car ils aimaient en moi par-dessus tout la vertu qu
3247
leur vie, car ils aimaient en moi par-dessus tout
la
vertu que je leur devais. Pourtant, je ne détournai pas mes yeux des
3248
frît à cause de moi. Un soir qu’elle pleurait, je
l’
embrassai si fort… En un quart d’heure, je connaissais l’amour dans ce
3249
ssai si fort… En un quart d’heure, je connaissais
l’
amour dans ce qu’il a de plus étrangement prosaïque à la fois et bêtem
3250
angement prosaïque à la fois et bêtement heureux.
Le
lendemain était le premier jour du printemps. Les rues riaient. Le ci
3251
Le lendemain était le premier jour du printemps.
Les
rues riaient. Le ciel descendait dans la ville, on marchait dans le b
3252
t le premier jour du printemps. Les rues riaient.
Le
ciel descendait dans la ville, on marchait dans le bleu. Je sortis av
3253
ntemps. Les rues riaient. Le ciel descendait dans
la
ville, on marchait dans le bleu. Je sortis avec cette femme, qui m’ai
3254
e ciel descendait dans la ville, on marchait dans
le
bleu. Je sortis avec cette femme, qui m’aimait, et nous étions très j
3255
tions très jolis de bonheur et d’insouciance dans
le
bonheur de la saison. — Au soir, mon père savait tout. Il effleura mo
3256
is de bonheur et d’insouciance dans le bonheur de
la
saison. — Au soir, mon père savait tout. Il effleura mon front de ses
3257
èvres sans une parole quand je vins lui souhaiter
le
bonsoir. Le lendemain, ses cheveux avaient légèrement blanchi. Il me
3258
ne parole quand je vins lui souhaiter le bonsoir.
Le
lendemain, ses cheveux avaient légèrement blanchi. Il me regardait av
3259
un sourire de mon amie quand il voulut m’adresser
la
parole après un silence vertigineux. Il vit mon sourire et pleura. Al
3260
mon corps tout entier, je criai un juron, claquai
la
porte et courus dans ma chambre. Une demi-heure plus tard, j’étais à
3261
s ma chambre. Une demi-heure plus tard, j’étais à
la
gare, j’écrivais un mot d’adieu à ma maîtresse d’une nuit et je parta
3262
rection quelconque. Il advint que ce fut celle de
l’
Italie. La lumière, mon pays natal ! — Je vécus d’articles sur la mode
3263
elconque. Il advint que ce fut celle de l’Italie.
La
lumière, mon pays natal ! — Je vécus d’articles sur la mode et la pol
3264
mière, mon pays natal ! — Je vécus d’articles sur
la
mode et la politique, que j’envoyais à divers journaux. Un jour, parc
3265
pays natal ! — Je vécus d’articles sur la mode et
la
politique, que j’envoyais à divers journaux. Un jour, parcourant un q
3266
pier, je lus mon nom en grosses lettres : c’était
l’
annonce du décès de mon père. » J’étais assis à la terrasse ensoleillé
3267
l’annonce du décès de mon père. » J’étais assis à
la
terrasse ensoleillée d’un café ; une brise passa, et une femme en rob
3268
doucement… Je me levai sans payer, je partis par
les
rues, une joie violente commençait à m’envahir, contre laquelle je lu
3269
chaque tour du tambour des bouffées de musique. »
La
femme en bleu dansait en regardant au plafond. Après deux tangos, nou
3270
ous montions ensemble dans une chambre d’hôtel où
l’
on ne voyait d’abord qu’un bouquet transfiguré par la lumière et que r
3271
n ne voyait d’abord qu’un bouquet transfiguré par
la
lumière et que reflétaient de nombreuses glaces. Les fenêtres que j’o
3272
lumière et que reflétaient de nombreuses glaces.
Les
fenêtres que j’ouvris firent tourner des soleils sur les parois clair
3273
êtres que j’ouvris firent tourner des soleils sur
les
parois claires. Du balcon, on voyait la mer, des bateaux, des nuages,
3274
eils sur les parois claires. Du balcon, on voyait
la
mer, des bateaux, des nuages, une avenue et ses autos rouges, tout un
3275
e avenue et ses autos rouges, tout un couchant de
grand
port de la Méditerranée. Nous nous aimâmes en sifflotant encore par i
3276
s autos rouges, tout un couchant de grand port de
la
Méditerranée. Nous nous aimâmes en sifflotant encore par instants l’a
3277
us nous aimâmes en sifflotant encore par instants
l’
air de la dernière danse, mais nous avions aussi envie de pleurer, à c
3278
thousiasme juvénile, c’est-à-dire cynique, toutes
les
offres du hasard, ce poète immoral et malicieux. » Je ne sais dans qu
3279
al et malicieux. » Je ne sais dans quel rapide de
l’
Europe centrale — région où l’on est forcé de prendre conscience de so
3280
dans quel rapide de l’Europe centrale — région où
l’
on est forcé de prendre conscience de soi-même — je découvris une nuit
3281
t en moi reniait obscurément. Je sentais bien que
le
ressort secret de la vertu dans laquelle on m’avait emprisonné c’étai
3282
urément. Je sentais bien que le ressort secret de
la
vertu dans laquelle on m’avait emprisonné c’était un bas opportunisme
3283
ocial, résultante des paresses accumulées de tous
les
cerveaux bourgeois incapables de concevoir un monde sans vieilles fil
3284
ns gendarmes. Je sais bien ce que vous me direz :
Les
millions que je pourrais leur soustraire ne compenseront jamais cette
3285
eront jamais cette escroquerie morale dont je fus
la
victime, ce vol de quelques joies parfaites de ma jeunesse… Mais il e
3286
… Mais il est trop tard, Monsieur, pour critiquer
les
modalités de ma vengeance. Veuillez ne voir dans la confusion où je p
3287
modalités de ma vengeance. Veuillez ne voir dans
la
confusion où je parais être engagé, du plan moral avec l’économique,
3288
sion où je parais être engagé, du plan moral avec
l’
économique, qu’une expression nouvelle, et non dénuée d’ironie, de mon
3289
on mépris pour ce qu’ils appellent, ridiculement,
les
fondements mêmes de la société. » C’est avec le produit du vol d’un t
3290
appellent, ridiculement, les fondements mêmes de
la
société. » C’est avec le produit du vol d’un tronc de chapelle que j’
3291
les fondements mêmes de la société. » C’est avec
le
produit du vol d’un tronc de chapelle que j’édifiai à mes parents un
3292
au sur lequel je fis graver : Prêté — rendu, pour
la
gloire de l’Église. (Ici, il but une gorgée et prit un temps.) » Je v
3293
je fis graver : Prêté — rendu, pour la gloire de
l’
Église. (Ici, il but une gorgée et prit un temps.) » Je vous fais grâc
3294
n temps.) » Je vous fais grâce, poursuivit-il, de
la
chronique de ma vie de rat d’hôtel et de sleepings ; encore que… Bref
3295
e… Bref, depuis quelques mois, je m’amuse à jouer
le
pickpocket. Cela permet, avec un minimum d’adresse, de découvrir cert
3296
s auparavant, et pas toujours défavorable, croyez-
le
bien… Le goût de la propriété étant à mon sens l’un des plus vulgaire
3297
ant, et pas toujours défavorable, croyez-le bien…
Le
goût de la propriété étant à mon sens l’un des plus vulgaires et des
3298
toujours défavorable, croyez-le bien… Le goût de
la
propriété étant à mon sens l’un des plus vulgaires et des plus généra
3299
ndus, j’ai vite fait de classer mon monde d’après
les
quelques réactions élémentaires qui ne manquent jamais de succéder au
3300
au moindre vol. » J’ajouterai, cher Monsieur, que
l’
analyse psychologique n’est pas mon fort. Je me contente de quelques o
3301
oriques que je tiens pour vraies, et j’en vérifie
les
manifestations vivantes avec une prodigalité d’épreuves, contre-épreu
3302
tre-épreuves, variantes et enjolivures où je vois
le
véritable intérêt de ma vie. C’est vous dire que seule une certaine c
3303
C’est vous dire que seule une certaine caresse de
l’
événement naissant peut encore m’émouvoir. C’est un plaisir de chaque
3304
sir de chaque minute auquel succède immédiatement
le
sommeil. Je rêve beaucoup. Cela explique, m’a-t-on dit, le peu de goû
3305
l. Je rêve beaucoup. Cela explique, m’a-t-on dit,
le
peu de goût que j’ai pour la poésie imprimée. » J’allais oublier de v
3306
lique, m’a-t-on dit, le peu de goût que j’ai pour
la
poésie imprimée. » J’allais oublier de vous dire qu’on me nomme Saint
3307
n me nomme Saint-Julien. Vous n’ignorez point que
l’
on considère ce saint comme le patron des voyageurs… » Saint-Julien pa
3308
n’ignorez point que l’on considère ce saint comme
le
patron des voyageurs… » Saint-Julien parut satisfait de cette dernièr
3309
gorgées d’eau minérale. Isidore sentit alors que
la
bienséance l’obligeait à émettre une opinion, même la plus générale e
3310
minérale. Isidore sentit alors que la bienséance
l’
obligeait à émettre une opinion, même la plus générale et la moins com
3311
ienséance l’obligeait à émettre une opinion, même
la
plus générale et la moins compromettante, sur cette vie dont le récit
3312
t à émettre une opinion, même la plus générale et
la
moins compromettante, sur cette vie dont le récit n’avait pas laissé
3313
le et la moins compromettante, sur cette vie dont
le
récit n’avait pas laissé que de l’agacer en maint endroit. « Une chos
3314
cette vie dont le récit n’avait pas laissé que de
l’
agacer en maint endroit. « Une chose avant tout me frappe — dit-il, lâ
3315
iments, ce qui est de mauvaise politique, — c’est
l’
extraordinaire netteté de votre vie. Elle est sans bavures, sans rétic
3316
herche ce qu’on est convenu d’appeler — pardonnez
la
lourdeur de l’expression — une règle de vie. Mais, je vous l’avouerai
3317
est convenu d’appeler — pardonnez la lourdeur de
l’
expression — une règle de vie. Mais, je vous l’avouerai, ce qui me ret
3318
de l’expression — une règle de vie. Mais, je vous
l’
avouerai, ce qui me retient de tirer de votre conduite les conclusions
3319
rai, ce qui me retient de tirer de votre conduite
les
conclusions morales qu’elle paraît impliquer, c’est ce caractère de,
3320
conscience ! qui s’attache à vos faits et gestes.
L’
on croirait ouïr parfois le récit de quelqu’une de ces farces d’étudia
3321
à vos faits et gestes. L’on croirait ouïr parfois
le
récit de quelqu’une de ces farces d’étudiants qui ne sont que la trad
3322
lqu’une de ces farces d’étudiants qui ne sont que
la
traduction en actes de jeux de mots plus ou moins cruels… » — Je vous
3323
rrompit Saint-Julien, par pitié pour Isidore dont
la
sincérité tournait vite à l’agressif — effet d’une timidité naturelle
3324
ié pour Isidore dont la sincérité tournait vite à
l’
agressif — effet d’une timidité naturelle dont il paraissait lui-même
3325
né. En deux mots, vous ne me trouvez pas sérieux.
Le
reproche est grave. Je ne saurais y répondre. Je pourrais vous dire q
3326
ez un peu potache, il n’est pas prouvé par là que
le
potache n’ait point raison. Mais justement je n’éprouve aucun désir d
3327
conque est aussi profondément persuadé que moi de
l’
absurdité radicale de notre vie, la moindre farce, le moindre geste co
3328
adé que moi de l’absurdité radicale de notre vie,
la
moindre farce, le moindre geste convenu dans le genre « révolté » pre
3329
bsurdité radicale de notre vie, la moindre farce,
le
moindre geste convenu dans le genre « révolté » prend une saveur de r
3330
, la moindre farce, le moindre geste convenu dans
le
genre « révolté » prend une saveur de raillerie assez amère. Et peut-
3331
découvrir derrière certaines de mes plaisanteries
la
dérision secrète qu’elles masquent par caprice. .....................
3332
180-185. t. Une note de bas de page indique : «
La
rédaction rappelle que les idées émises dans la Revue de Belles-Lettr
3333
bas de page indique : « La rédaction rappelle que
les
idées émises dans la Revue de Belles-Lettres sont propres à leur aute
3334
« La rédaction rappelle que les idées émises dans
la
Revue de Belles-Lettres sont propres à leur auteur et qu’elles n’enga
3335
Conseils à
la
jeunesse (mai 1927)u « On a reproché bien des choses aux romantiqu
3336
« On a reproché bien des choses aux romantiques :
le
goût du suicide, l’habitude de boire et de fumer excessivement, leurs
3337
des choses aux romantiques : le goût du suicide,
l’
habitude de boire et de fumer excessivement, leurs amours, l’égoïsme,
3338
de boire et de fumer excessivement, leurs amours,
l’
égoïsme, le mépris de la réalité, l’exaltation maladive de l’imaginati
3339
de fumer excessivement, leurs amours, l’égoïsme,
le
mépris de la réalité, l’exaltation maladive de l’imagination et de la
3340
essivement, leurs amours, l’égoïsme, le mépris de
la
réalité, l’exaltation maladive de l’imagination et de la sensibilité,
3341
leurs amours, l’égoïsme, le mépris de la réalité,
l’
exaltation maladive de l’imagination et de la sensibilité, l’atrophie
3342
le mépris de la réalité, l’exaltation maladive de
l’
imagination et de la sensibilité, l’atrophie du sens critique sous tou
3343
ité, l’exaltation maladive de l’imagination et de
la
sensibilité, l’atrophie du sens critique sous toutes ses formes : rai
3344
n maladive de l’imagination et de la sensibilité,
l’
atrophie du sens critique sous toutes ses formes : raison, jugement, s
3345
es formes : raison, jugement, simple bon sens, et
l’
ignorance systématique, le mépris enfin de tous les principes qui sont
3346
nt, simple bon sens, et l’ignorance systématique,
le
mépris enfin de tous les principes qui sont à la base de la société m
3347
l’ignorance systématique, le mépris enfin de tous
les
principes qui sont à la base de la société même. » Ceci est tiré d’
3348
le mépris enfin de tous les principes qui sont à
la
base de la société même. » Ceci est tiré d’un livre récent sur Aloy
3349
enfin de tous les principes qui sont à la base de
la
société même. » Ceci est tiré d’un livre récent sur Aloysius Bertra
3350
proches s’adressent, ou bien plutôt — vous alliez
le
dire — aux surréalistes ? Si le mal du siècle consistait véritablem
3351
t — vous alliez le dire — aux surréalistes ? Si
le
mal du siècle consistait véritablement dans ces quelques effets, nous
3352
ans un petit article du Journal de Genève sur «
La
maladie du siècle », écrit : « Plante des pommes de terre, jeune homm
3353
de terre, jeune homme ! Quand tu seras au bout de
la
20e ligne de 200 mètres, ce qui représente quatre kilomètres de plant
3354
e qui représente quatre kilomètres de plantation,
le
siècle ne sera plus malade, les temps seront guéris de leur crise, le
3355
res de plantation, le siècle ne sera plus malade,
les
temps seront guéris de leur crise, les valeurs auront retrouvé leur s
3356
us malade, les temps seront guéris de leur crise,
les
valeurs auront retrouvé leur stabilité, et comme M. Albert Muret dont
3357
uvé leur stabilité, et comme M. Albert Muret dont
le
Journal de Genève parlait naguère, tu mangeras avec appétit une pou
3358
ent chez des jeunes « et qui pensent » ce goût de
l’
évasion caractéristique de tous les « vices romantiques ». — Citez-m’e
3359
nt » ce goût de l’évasion caractéristique de tous
les
« vices romantiques ». — Citez-m’en de ces phénomènes ! — Mon Dieu, q
3360
Il y aurait, par exemple, ce fait du triomphe de
la
Machine ; ce fait de la révolution russe… cet autre fait de la guerre
3361
e, ce fait du triomphe de la Machine ; ce fait de
la
révolution russe… cet autre fait de la guerre… et puis, tenez ! ce fa
3362
ce fait de la révolution russe… cet autre fait de
la
guerre… et puis, tenez ! ce fait surtout de la sacro-sainte Raison ut
3363
de la guerre… et puis, tenez ! ce fait surtout de
la
sacro-sainte Raison utilitaire au service des sacro-saints Principes
3364
desquels tout se ligue aujourd’hui pour anéantir
la
seule chose qui reste à nos yeux sacro-sainte : la liberté. Alors n’e
3365
a seule chose qui reste à nos yeux sacro-sainte :
la
liberté. Alors n’est-ce pas, merci du conseil, Monsieur Y. Z., de ce
3366
ches pour enseigner cette méthode à leurs petits.
Le
« satisfait » est un être inadmissible aujourd’hui. À plus forte rais
3367
re inadmissible aujourd’hui. À plus forte raison,
le
satisfait artificiel. u. Rougemont Denis de, « Conseils à la jeune
3368
rtificiel. u. Rougemont Denis de, « Conseils à
la
jeunesse », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribou
3369
Pierre Girard, Connaissez mieux
le
cœur des femmes (juillet 1927)am Quand vous avez fermé ce petit li
3370
fermé ce petit livre, vous partez en chantonnant
le
titre sur un air sentimental, bien décidé au fond, à retrouver Patsy,
3371
timental, bien décidé au fond, à retrouver Patsy,
l’
Irlandaise perdue par cet improbable et sympathique Paterne. Sous le f
3372
e par cet improbable et sympathique Paterne. Sous
le
fallacieux prétexte d’une flânerie de saison, vous vous attardez aux
3373
Justement, voici Pierre Girard : lui seul connaît
l’
adresse de Patsy, mais il ne veut pas vous la donner. Alors pour vous
3374
naît l’adresse de Patsy, mais il ne veut pas vous
la
donner. Alors pour vous venger, vous lui dites que, « d’abord », son
3375
re n’est pas sérieux. Il sourit. Vous ajoutez que
le
lyrisme des noms géographiques vous fatigue ; que c’est une vraie man
3376
lobe dans son voyage « est arrivé à un endroit de
l’
éther où il y a du bonheur ». Vous reconnaissez que Pierre Girard est
3377
son aisance. Vous accordez que s’il force un peu
la
dose de fantaisie, c’est plutôt par excès de facilité que par recherc
3378
ilité que par recherche. Vous voilà même tenté de
l’
en féliciter. Bien plus, vous découvrez dans ses fantoches une malicie
3379
nous seraient épargnés si nous ne regardions que
les
jambes des femmes », dit-il, pour vous apprendre ! — sans se douter q
3380
un devoir de ce plaisir. Un devoir !… Car hélas,
l’
on n’est pas impunément concitoyen de cet oncle Abraham qui interdit à
3381
Abraham qui interdit à Paterne son neveu de fumer
le
matin, de sortir la nuit, et qui lui fait jurer sur la Bible de ne pa
3382
à Paterne son neveu de fumer le matin, de sortir
la
nuit, et qui lui fait jurer sur la Bible de ne pas entrer dans les ca
3383
tin, de sortir la nuit, et qui lui fait jurer sur
la
Bible de ne pas entrer dans les cafés. Et puis, c’est égal, ce soir,
3384
lui fait jurer sur la Bible de ne pas entrer dans
les
cafés. Et puis, c’est égal, ce soir, tout cela est sans importance, c
3385
soir, tout cela est sans importance, car voici «
l’
heure des petits arbres pourpres, l’heure où dans les bibliothèques dé
3386
, car voici « l’heure des petits arbres pourpres,
l’
heure où dans les bibliothèques désertes glisse un grand souffle obliq
3387
heure des petits arbres pourpres, l’heure où dans
les
bibliothèques désertes glisse un grand souffle oblique plein de fraîc
3388
eure où dans les bibliothèques désertes glisse un
grand
souffle oblique plein de fraîcheur et de pardon. » am. Rougemont D
3389
« [Compte rendu] Pierre Girard, Connaissez mieux
le
cœur des femmes », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genè
3390
La
part du feu. Lettres sur le mépris de la littérature (juillet 1927)v
3391
La part du feu. Lettres sur
le
mépris de la littérature (juillet 1927)v I Parler littérature
3392
La part du feu. Lettres sur le mépris de
la
littérature (juillet 1927)v I Parler littérature Si je pronon
3393
927)v I Parler littérature Si je prononce
le
nom de tel de vos confrères, si je dis : « Avez-vous lu… », vous voil
3394
« Avez-vous lu… », vous voilà rouge ; et sur moi
les
foudres de votre paradis poétique. Si je cite tel auteur dont nous fî
3395
mes notre nourriture une saison de naguère, voilà
le
rictus de votre bouche, une injure de pythie. Vous dites de ce conte
3396
n goût qu’on aurait pour Nietzsche : que c’est de
la
littérature. Alors, quelque paysan du Danube survenant : — Je vous cr
3397
écrivain ? — Hélas ! soupirez-vous. Mais j’ai tué
la
littérature en moi, n’en parlez plus, j’en sors, je l’abandonne… Mais
3398
ttérature en moi, n’en parlez plus, j’en sors, je
l’
abandonne… Mais notre paysan, rusé : — Vous l’abandonnez ? Pour quoi ?
3399
je l’abandonne… Mais notre paysan, rusé : — Vous
l’
abandonnez ? Pour quoi ? — Pour la vie ! Or je pense, à part moi : j’a
3400
, rusé : — Vous l’abandonnez ? Pour quoi ? — Pour
la
vie ! Or je pense, à part moi : j’ai lu ça quelque part. Voyez ma fra
3401
ennent soin que leurs sincérités gardent au moins
l’
excuse d’une audace qu’ils escomptent scandaleuse. Mais voici un bar o
3402
in de mépris pour Paul Morand par qui découvrîtes
le
charme de ces lieux. Vous composez un cocktail en guise de métaphore,
3403
ensée tendre pour un ami poète. « L’autre jour au
Grand
Écart… », dit quelqu’un. À ce coup, l’évocation de Cocteau fait fleur
3404
jour au Grand Écart… », dit quelqu’un. À ce coup,
l’
évocation de Cocteau fait fleurir sur vos lèvres le mot de Cambronne :
3405
’évocation de Cocteau fait fleurir sur vos lèvres
le
mot de Cambronne : hommage à Louis Aragon. Ce cristal est une citatio
3406
Et des phrases, des cris, des mots. Au défaut de
l’
ivresse naissante se glisse un poème où vous aimiez à la folie votre d
3407
sse naissante se glisse un poème où vous aimiez à
la
folie votre douleur. Narcisse se contemple au miroir de son monocle.
3408
il se noie dans un verre à liqueur. Poisson dans
l’
eau, plumes dans le vent, poète au bar, le paradis n’est pas si cher.
3409
verre à liqueur. Poisson dans l’eau, plumes dans
le
vent, poète au bar, le paradis n’est pas si cher. Il y en a aussi qui
3410
on dans l’eau, plumes dans le vent, poète au bar,
le
paradis n’est pas si cher. Il y en a aussi qui posent pour le diable
3411
’est pas si cher. Il y en a aussi qui posent pour
le
diable et ne se baignent que dans des bénitiers : on voit trop qu’ils
3412
: on voit trop qu’ils trouvent ça pittoresque. Et
le
plaisir d’être nu devant un public supposé dévot, et qui n’ose en cro
3413
n’ose en croire sa pudeur, et qui doute enfin de
l’
impossibilité des miracles ! Quelles voluptés plus subtiles et plus ai
3414
e bois pour en faire des poèmes. Alors je cherche
les
raisons de votre indignation, quand il m’échappe une citation. Seraie
3415
ion, quand il m’échappe une citation. Seraient-ce
les
guillemets qui vous choquent ? La vie ! — proclamiez-vous… Soit. Ma
3416
Seraient-ce les guillemets qui vous choquent ?
La
vie ! — proclamiez-vous… Soit. Mais maintenant je vais me fâcher chaq
3417
« hallucinant » ou « purement gratuit ». C’est de
la
littérature. À force d’avoir mérité ces épithètes, pour nous laudati
3418
nous laudatives, vous vous étonnez aujourd’hui de
la
simplicité. Littérateur, va ! qui ne pouvez pas même admettre que la
3419
érateur, va ! qui ne pouvez pas même admettre que
la
simplicité est simple simplement. La bouche brûlée d’alcools, vous dé
3420
admettre que la simplicité est simple simplement.
La
bouche brûlée d’alcools, vous découvrez à l’eau un goût étrange. L’ea
3421
ent. La bouche brûlée d’alcools, vous découvrez à
l’
eau un goût étrange. L’eau est incolore, inodore et sans saveur. Mais
3422
’alcools, vous découvrez à l’eau un goût étrange.
L’
eau est incolore, inodore et sans saveur. Mais fraîche. Ainsi, jusque
3423
ais fraîche. Ainsi, jusque dans votre mépris pour
le
pittoresque, vous témoignez d’un goût du bizarre qui révèle le littér
3424
e, vous témoignez d’un goût du bizarre qui révèle
le
littérateur. Nous ne pouvons pas faire que nous n’ayons rien lu. Vous
3425
lu. Vous refusez de compter avec cette réalité de
la
littérature qui est en nous (dangereuse tant que vous voudrez). Mais
3426
une ingratitude salutaire, c’est refus de limiter
le
mal. Je vous vois envahi par des démons que vous prétendez m’interdir
3427
ensées des autres, je vous ai mis un collier avec
le
nom du propriétaire ; tirez un peu sur la laisse, que j’éprouve la fe
3428
er avec le nom du propriétaire ; tirez un peu sur
la
laisse, que j’éprouve la fermeté de ma main. Je vous tiens. Je sais o
3429
taire ; tirez un peu sur la laisse, que j’éprouve
la
fermeté de ma main. Je vous tiens. Je sais où vous êtes. Vous n’allez
3430
n vante, — j’ai tué un amour naissant, à force de
le
crier sur les toits. Ainsi, parler littérature, c’est faire la part d
3431
ai tué un amour naissant, à force de le crier sur
les
toits. Ainsi, parler littérature, c’est faire la part du feu. Je dis
3432
les toits. Ainsi, parler littérature, c’est faire
la
part du feu. Je dis ces noms, ces opinions, ces titres de livres : to
3433
choque, s’annule. Poussière. Ma vie est ailleurs.
L’
addition, s’il vous plaît. Il est temps de sortir de ce café et de ces
3434
afé et de ces jeux, simulacres de vie, qui sont à
la
vraie vie ce que le flirt est à l’amour. II Sur l’insuffisance de
3435
simulacres de vie, qui sont à la vraie vie ce que
le
flirt est à l’amour. II Sur l’insuffisance de la littérature On
3436
ie, qui sont à la vraie vie ce que le flirt est à
l’
amour. II Sur l’insuffisance de la littérature On reconnaît un é
3437
raie vie ce que le flirt est à l’amour. II Sur
l’
insuffisance de la littérature On reconnaît un écrivain, aujourd’hu
3438
flirt est à l’amour. II Sur l’insuffisance de
la
littérature On reconnaît un écrivain, aujourd’hui, à ce qu’il ne t
3439
e sournoises déclarations d’amour. Tel qui raille
l’
Église et les curés, c’est qu’il se fait une très haute idée de la rel
3440
déclarations d’amour. Tel qui raille l’Église et
les
curés, c’est qu’il se fait une très haute idée de la religion. Ainsi,
3441
curés, c’est qu’il se fait une très haute idée de
la
religion. Ainsi, de la littérature : votre mépris pour ses réalisatio
3442
ait une très haute idée de la religion. Ainsi, de
la
littérature : votre mépris pour ses réalisations actuelles donne la m
3443
otre mépris pour ses réalisations actuelles donne
la
mesure de ce que vous attendez d’elle. Pour dire le fond de ma pensée
3444
mesure de ce que vous attendez d’elle. Pour dire
le
fond de ma pensée, je crois ce mépris et cette attente également exag
3445
ous savez bien que nous cherchons autre chose que
la
littérature. Que la littérature nous est un moyen seulement d’atteind
3446
ous cherchons autre chose que la littérature. Que
la
littérature nous est un moyen seulement d’atteindre et de préparer d’
3447
. Des choses dures, amères comme un destin, comme
le
goût d’une pierre rêche sur ta langue et grinçante sous ta dent. Des
3448
intenses que tout se fond catastrophiquement dans
l’
infini de la seconde. Des peurs sans cause, plus vides que la mort. To
3449
la seconde. Des peurs sans cause, plus vides que
la
mort. Toutes ces choses mystiques, c’est-à-dire réelles, c’est-à-dire
3450
nous importe véritablement n’est dicible. (Depuis
le
temps qu’on sait que la lettre tue ce qu’elle prétend exprimer ; depu
3451
nt n’est dicible. (Depuis le temps qu’on sait que
la
lettre tue ce qu’elle prétend exprimer ; depuis le temps qu’on l’oubl
3452
a lettre tue ce qu’elle prétend exprimer ; depuis
le
temps qu’on l’oublie.) Vous me direz que la poésie, l’état poétique,
3453
qu’elle prétend exprimer ; depuis le temps qu’on
l’
oublie.) Vous me direz que la poésie, l’état poétique, est notre seul
3454
epuis le temps qu’on l’oublie.) Vous me direz que
la
poésie, l’état poétique, est notre seul moyen de connaissance concrèt
3455
mps qu’on l’oublie.) Vous me direz que la poésie,
l’
état poétique, est notre seul moyen de connaissance concrète du monde.
3456
oncrète du monde. Mais c’est à condition qu’on ne
l’
écrive pas, même en pensée. La poésie pure écrite est inconcevable : c
3457
condition qu’on ne l’écrive pas, même en pensée.
La
poésie pure écrite est inconcevable : cela consisterait dans l’expres
3458
écrite est inconcevable : cela consisterait dans
l’
expression directe de la réalité individuelle. Elle serait tellement i
3459
: cela consisterait dans l’expression directe de
la
réalité individuelle. Elle serait tellement incommunicable qu’il devi
3460
ement incommunicable qu’il deviendrait inutile de
la
publier. Et même, en passant à la limite, on peut imaginer que si ell
3461
rait inutile de la publier. Et même, en passant à
la
limite, on peut imaginer que si elle était réalisée, on ne s’en aperc
3462
ercevrait pas. Je pressens encore dans vos poèmes
les
plus obscurs des allusions furtives à certains états de la réalité. M
3463
bscurs des allusions furtives à certains états de
la
réalité. Mais plus les mots se plient à des exigences sémantiques — d
3464
urtives à certains états de la réalité. Mais plus
les
mots se plient à des exigences sémantiques — dont on connaît la porté
3465
ent à des exigences sémantiques — dont on connaît
la
portée sociale, — mariant l’utile à l’agréable selon les rites d’une
3466
es — dont on connaît la portée sociale, — mariant
l’
utile à l’agréable selon les rites d’une esthétique ou d’une autre, pl
3467
on connaît la portée sociale, — mariant l’utile à
l’
agréable selon les rites d’une esthétique ou d’une autre, plus ils per
3468
tée sociale, — mariant l’utile à l’agréable selon
les
rites d’une esthétique ou d’une autre, plus ils perdent leur pouvoir
3469
autre, plus ils perdent leur pouvoir de signifier
les
choses qui nous importent. Vous le savez. Alors vous les lâchez en li
3470
de signifier les choses qui nous importent. Vous
le
savez. Alors vous les lâchez en liberté, par haine de cette esthétiqu
3471
ses qui nous importent. Vous le savez. Alors vous
les
lâchez en liberté, par haine de cette esthétique ou de ce sens social
3472
de ce sens social, — et voilà qu’ils perdent même
la
problématique utilité de liaison qui était leur excuse dernière. Avou
3473
e liaison qui était leur excuse dernière. Avouons-
le
: rien de ce qu’on peut exprimer n’a d’importance véritable. Alors, c
3474
cessons de nous battre contre des moulins à vent.
La
littérature, considérée du point de vue de la psychologie de l’écriva
3475
nt. La littérature, considérée du point de vue de
la
psychologie de l’écrivain, est un besoin organique, un peu anormal, q
3476
, considérée du point de vue de la psychologie de
l’
écrivain, est un besoin organique, un peu anormal, que l’on satisfait
3477
ain, est un besoin organique, un peu anormal, que
l’
on satisfait dans certains états de crise afin de retrouver son équili
3478
rarement, de quoi se payer un petit voyage. C’est
l’
aveu d’une faiblesse secrète. Et c’est une réaction de défense. On che
3479
he un mot, une phrase, pour tuer une réalité dont
la
connaissance devient douloureuse et troublante. Ainsi la conscience t
3480
aissance devient douloureuse et troublante. Ainsi
la
conscience tue la connaissance. (« Connaissance » étant pris avec son
3481
ouloureuse et troublante. Ainsi la conscience tue
la
connaissance. (« Connaissance » étant pris avec son sens le plus prof
3482
sance. (« Connaissance » étant pris avec son sens
le
plus profond, qui est proche du sens biblique. Il ne s’agit pas de la
3483
est proche du sens biblique. Il ne s’agit pas de
la
connaissance abstraite et rationnelle dont le monde moderne se conten
3484
de la connaissance abstraite et rationnelle dont
le
monde moderne se contente, et qui tend à remplacer, grâce à la mental
3485
rne se contente, et qui tend à remplacer, grâce à
la
mentalité scolaire et primaire en particulier, toute connaissance vér
3486
ice ? Peut-être. Ou une maladie ? Ce n’est pas en
l’
ignorant par attitude que vous la guérirez. Au contraire, il s’agit de
3487
Ce n’est pas en l’ignorant par attitude que vous
la
guérirez. Au contraire, il s’agit de l’envisager sans fièvre, pour en
3488
que vous la guérirez. Au contraire, il s’agit de
l’
envisager sans fièvre, pour en circonscrire les effets. J’avoue prendr
3489
de l’envisager sans fièvre, pour en circonscrire
les
effets. J’avoue prendre à cette étude un intérêt bien vif. Et cela fo
3490
en n’est plus facile que d’y échapper. III Sur
l’
utilité de la littérature Montherlant me paraît être le moins « lit
3491
facile que d’y échapper. III Sur l’utilité de
la
littérature Montherlant me paraît être le moins « littératuré » de
3492
é de la littérature Montherlant me paraît être
le
moins « littératuré » des écrivains d’aujourd’hui. Quand il parle lit
3493
rd’hui. Quand il parle littérature, il a toujours
l’
air de mettre un peu les pieds dans le plat, de dire de ces choses qu’
3494
littérature, il a toujours l’air de mettre un peu
les
pieds dans le plat, de dire de ces choses qu’entre gens du métier l’o
3495
a toujours l’air de mettre un peu les pieds dans
le
plat, de dire de ces choses qu’entre gens du métier l’on a convenu de
3496
at, de dire de ces choses qu’entre gens du métier
l’
on a convenu de passer sous silence. C’est assez drôle de voir le mala
3497
de passer sous silence. C’est assez drôle de voir
le
malaise des chers confrères. Ils ne pardonnent pas à ce toréador ses
3498
une Muse qu’ils n’ont pas coutume d’aborder sans
le
mot de passe de la dernière mode ou de savantes séductions. On sait b
3499
tes séductions. On sait bien, d’ailleurs, qu’elle
les
entretient. Bande de gigolos de la littérature ! Qu’on puisse vivre d
3500
eurs, qu’elle les entretient. Bande de gigolos de
la
littérature ! Qu’on puisse vivre de ça, je ne l’ai pas encore avalé.
3501
la littérature ! Qu’on puisse vivre de ça, je ne
l’
ai pas encore avalé. On m’affirme que je n’y échapperai pas plus qu’un
3502
is, pour sûr, jamais vivre pour écrire16. De tous
les
prétextes que l’on a pu avancer pour légitimer l’activité littéraire,
3503
is vivre pour écrire16. De tous les prétextes que
l’
on a pu avancer pour légitimer l’activité littéraire, le plus satisfai
3504
es prétextes que l’on a pu avancer pour légitimer
l’
activité littéraire, le plus satisfaisant, celui qui rend le mieux com
3505
pu avancer pour légitimer l’activité littéraire,
le
plus satisfaisant, celui qui rend le mieux compte de la réalité, c’es
3506
littéraire, le plus satisfaisant, celui qui rend
le
mieux compte de la réalité, c’est André Breton qui l’a exprimé : « On
3507
s satisfaisant, celui qui rend le mieux compte de
la
réalité, c’est André Breton qui l’a exprimé : « On publie pour cherch
3508
ieux compte de la réalité, c’est André Breton qui
l’
a exprimé : « On publie pour chercher des hommes, et rien de plus. » C
3509
pas tant, n’est-ce pas, à poursuivre une quête de
l’
esprit. Et vous savez ce qu’elle nous vaut : les mépris, les haines do
3510
de l’esprit. Et vous savez ce qu’elle nous vaut :
les
mépris, les haines douloureuses ou grossières de tous ceux qui ne peu
3511
Et vous savez ce qu’elle nous vaut : les mépris,
les
haines douloureuses ou grossières de tous ceux qui ne peuvent ou ne v
3512
ous voyez bien que votre attitude méprisante pour
la
littérature vous ferait bientôt renier le signe le plus certain par l
3513
te pour la littérature vous ferait bientôt renier
le
signe le plus certain par lequel ces « quelques-uns » peuvent encore
3514
a littérature vous ferait bientôt renier le signe
le
plus certain par lequel ces « quelques-uns » peuvent encore se reconn
3515
e elle n’aurait plus d’autre excuse que celle-là,
la
littérature mériterait d’exister : qu’elle soit le langage chiffré de
3516
a littérature mériterait d’exister : qu’elle soit
le
langage chiffré de notre inquiétude et de nos naissantes certitudes,
3517
notre inquiétude et de nos naissantes certitudes,
le
seul langage peut-être qui nous permette d’échanger les signaux de l’
3518
ul langage peut-être qui nous permette d’échanger
les
signaux de l’angoisse sur quoi se fondent, en ces temps, nos amitiés
3519
-être qui nous permette d’échanger les signaux de
l’
angoisse sur quoi se fondent, en ces temps, nos amitiés miraculeuses.
3520
ces temps, nos amitiés miraculeuses. Voici donc
les
seules révélations que j’attende de la littérature : que celle des au
3521
oici donc les seules révélations que j’attende de
la
littérature : que celle des autres m’aide à prendre conscience de moi
3522
e la mienne m’aide à découvrir quelques êtres par
le
monde… Il ne s’agit plus de mépris ni d’adoration. J’ai défini une «
3523
ont je parviens à tirer quelque bien pour ma vie.
Le
jour où les soins qu’elle exige me coûteront des sacrifices plus gran
3524
iens à tirer quelque bien pour ma vie. Le jour où
les
soins qu’elle exige me coûteront des sacrifices plus grands que les b
3525
ns qu’elle exige me coûteront des sacrifices plus
grands
que les bienfaits que j’en escompte, il sera temps de songer sérieuse
3526
exige me coûteront des sacrifices plus grands que
les
bienfaits que j’en escompte, il sera temps de songer sérieusement à m
3527
. 14. Paul Morand, auteur d’Ouvert et de Fermé
la
nuit, titres également scandaleux. Le Grand Écart, roman de M. Coctea
3528
et de Fermé la nuit, titres également scandaleux.
Le
Grand Écart, roman de M. Cocteau, a donné son nom à un établissement
3529
de Fermé la nuit, titres également scandaleux. Le
Grand
Écart, roman de M. Cocteau, a donné son nom à un établissement de nui
3530
e lettres et poètes surréalistes. Paul Valéry, de
l’
Académie française. Narcisse, personnage mythologique. — Là ! [NdE] Le
3531
. Narcisse, personnage mythologique. — Là ! [NdE]
Le
texte publié place également un appel de note plus bas dans le paragr
3532
ié place également un appel de note plus bas dans
le
paragraphe, après « Narcisse », sans qu’on sache s’il s’agit d’une er
3533
ache s’il s’agit d’une erreur ou d’une volonté de
l’
auteur. 15. Variante : des puissances d’action. 16. J’en vois certai
3534
et ils en sont tout fiers : « Il n’y a plus qu’à
les
écrire ». v. Rougemont Denis de, « La part du feu. Lettres sur le m
3535
lus qu’à les écrire ». v. Rougemont Denis de, «
La
part du feu. Lettres sur le mépris de la littérature », Revue de Bell
3536
Rougemont Denis de, « La part du feu. Lettres sur
le
mépris de la littérature », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchât
3537
is de, « La part du feu. Lettres sur le mépris de
la
littérature », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fri
3538
Les
derniers jours (juillet 1927)w Ces « cahiers politiques et littéra
3539
r Drieu la Rochelle et Emmanuel Berl, sont — avec
la
Revue de Belles-Lettres — la seule revue de langue française où l’o
3540
Berl, sont — avec la Revue de Belles-Lettres —
la
seule revue de langue française où l’on dise la vérité librement et p
3541
-Lettres — la seule revue de langue française où
l’
on dise la vérité librement et pour elle-même. Nous regrettons de n’en
3542
— la seule revue de langue française où l’on dise
la
vérité librement et pour elle-même. Nous regrettons de n’en pouvoir c
3543
s phrases de Drieu : « On voit déjà éclater dans
les
singuliers mouvements de sympathie qu’a provoqués l’infortune de l’Ac
3544
singuliers mouvements de sympathie qu’a provoqués
l’
infortune de l’Action française la fraternité qui existe, en dépit des
3545
ements de sympathie qu’a provoqués l’infortune de
l’
Action française la fraternité qui existe, en dépit des protestations
3546
qu’a provoqués l’infortune de l’Action française
la
fraternité qui existe, en dépit des protestations de haine, entre les
3547
xiste, en dépit des protestations de haine, entre
les
athées de l’antidémocratisme et les athées du Capitalisme quand il es
3548
t des protestations de haine, entre les athées de
l’
antidémocratisme et les athées du Capitalisme quand il est conscient d
3549
haine, entre les athées de l’antidémocratisme et
les
athées du Capitalisme quand il est conscient de soi-même, et les athé
3550
apitalisme quand il est conscient de soi-même, et
les
athées du Socialisme et du Communisme. Tous ceux-là travaillent à l’a
3551
isme et du Communisme. Tous ceux-là travaillent à
l’
achèvement d’un certain monde moderne, merveilleuse mécanique sévère e
3552
use mécanique sévère et dénuée de tout secours de
l’
Esprit. Mais un jour viendra où les hommes se révolteront contre le jo
3553
tout secours de l’Esprit. Mais un jour viendra où
les
hommes se révolteront contre le joug atrocement positiviste des Maurr
3554
jour viendra où les hommes se révolteront contre
le
joug atrocement positiviste des Maurras et des Mussolini, des Lénine
3555
s et des Mussolini, des Lénine et des Ford. Alors
les
hommes hurleront un affreux besoin mystique. Vous réveillerez-vous po
3556
freux besoin mystique. Vous réveillerez-vous pour
les
désaltérer, dieux de l’Orient et de l’Occident ? » Certains cris qui
3557
us réveillerez-vous pour les désaltérer, dieux de
l’
Orient et de l’Occident ? » Certains cris qui nous échappèrent n’avai
3558
vous pour les désaltérer, dieux de l’Orient et de
l’
Occident ? » Certains cris qui nous échappèrent n’avaient pas d’autre
3559
e Chalgrin, Paris 16e. w. Rougemont Denis de, «
Les
derniers jours », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-
3560
Adieu au lecteur (juillet 1927)x Nous passons
la
main au central de Genève, fidèles à la tradition — en ceci au moins.
3561
s passons la main au central de Genève, fidèles à
la
tradition — en ceci au moins. Nous nous retirons : et ce n’est pas qu
3562
ue nous ayons brûlé toutes nos cartouches. Ni que
l’
indignation provoquée sur tous les bancs par certains de nos articles
3563
rtouches. Ni que l’indignation provoquée sur tous
les
bancs par certains de nos articles nous épouvante. Notre retraite est
3564
nte. Notre retraite est toute « statutaire » — si
l’
on ose dire. Elle nous permet donc de considérer la situation sans fiè
3565
’on ose dire. Elle nous permet donc de considérer
la
situation sans fièvre, sans lamentations d’adieu. On nous a parfois
3566
tés de fous (avec ou sans sourire). Nous sommes à
l’
âge de nous en réjouir. On s’est beaucoup étonné de nous voir « si dif
3567
s voir « si différents » de nos aînés. Nous avons
l’
énorme candeur de trouver ça naturel. On nous a fait des reproches con
3568
n nous a fait des reproches contradictoires. Nous
les
additionnons : ils s’annulent. Il reste à dire deux mots sur la parad
3569
s : ils s’annulent. Il reste à dire deux mots sur
la
paradoxale situation intellectuelle d’une revue d’étudiants comme la
3570
tion intellectuelle d’une revue d’étudiants comme
la
nôtre. D’un côté, en effet, on s’accorde pour trouver légèrement ridi
3571
ridicule un jeune homme qui recherche activement
la
Sagesse (« Ça n’est pas de votre âge ! ») ; de l’autre, on se scandal
3572
rces — ou bien de ces affirmations dont en vérité
l’
on n’a pas à se préoccuper de prévoir les conséquences, puisqu’il n’en
3573
en vérité l’on n’a pas à se préoccuper de prévoir
les
conséquences, puisqu’il n’en est aucune qui ne soit connue d’avance e
3574
une qui ne soit connue d’avance et stérilisée par
la
loi, les mœurs et l’habitude. Nous n’avons aucun remords d’avoir déçu
3575
ne soit connue d’avance et stérilisée par la loi,
les
mœurs et l’habitude. Nous n’avons aucun remords d’avoir déçu cette ca
3576
e d’avance et stérilisée par la loi, les mœurs et
l’
habitude. Nous n’avons aucun remords d’avoir déçu cette catégorie de l
3577
t pas encore admis que jeunesse = révolution Tous
les
malentendus viennent de là. Nous sommes assez sages et assez fous pou
3578
sez fous pour ne pas en gémir et pour en accepter
les
conséquences. Et puis, de temps à autre, voici que nous parvient un s
3579
quelques découvertes qui nous consolèrent de tout
le
reste. Et maintenant voici Genève et son mystère. Car chaque année,
3580
année, renaissant des décombres où s’anéantirent
l’
honneur et la fortune de ses derniers rédacteurs, notre Revue-phénix s
3581
ssant des décombres où s’anéantirent l’honneur et
la
fortune de ses derniers rédacteurs, notre Revue-phénix s’élance avec
3582
ction absolument imprévisible. Que nous apportera
le
Central de Genève ? Tout est possible : la guerre et la paix, la trad
3583
ortera le Central de Genève ? Tout est possible :
la
guerre et la paix, la tradition, l’anarchie, l’ironie, le sentiment,
3584
tral de Genève ? Tout est possible : la guerre et
la
paix, la tradition, l’anarchie, l’ironie, le sentiment, un réveil des
3585
enève ? Tout est possible : la guerre et la paix,
la
tradition, l’anarchie, l’ironie, le sentiment, un réveil des vieux, M
3586
st possible : la guerre et la paix, la tradition,
l’
anarchie, l’ironie, le sentiment, un réveil des vieux, Maurras, Lounat
3587
: la guerre et la paix, la tradition, l’anarchie,
l’
ironie, le sentiment, un réveil des vieux, Maurras, Lounatcharsky, la
3588
e et la paix, la tradition, l’anarchie, l’ironie,
le
sentiment, un réveil des vieux, Maurras, Lounatcharsky, la SDN, et mê
3589
ent, un réveil des vieux, Maurras, Lounatcharsky,
la
SDN, et même Edmond Gillard, et même, et surtout, un miracle. Et puis
3590
miracle. Et puis, ils ont des vieux un peu là, du
grand
Arthur-Alfred-Albert au non moins grand Tanner. (On a fait ses preuve
3591
eu là, du grand Arthur-Alfred-Albert au non moins
grand
Tanner. (On a fait ses preuves, quoi !) Et puis, qui sait, peut-être
3592
eureux Jean… Et puis, en voilà assez pour ranimer
la
curiosité des plus blasés. Lecteur, fais confiance au Central de Genè
3593
s confiance au Central de Genève. Souviens-toi de
la
grandeur de ses traditions et ne va pas ajouter à cette lourde charge
3594
itions et ne va pas ajouter à cette lourde charge
le
poids de nos péchés. Ils sont bien nôtres. Et nous y tenons, ah ! com
3595
s nouvelles n’ont guère de commun entre elles que
la
forme : ce sont de lentes réminiscences, des évocations intérieures,
3596
iniscences, des évocations intérieures, — et dans
l’
abandon de leurs méandres, peu à peu, se précisent les circonstances d
3597
bandon de leurs méandres, peu à peu, se précisent
les
circonstances d’une aventure ancienne. Entre hier et demain : Une fe
3598
suicidé pour une femme qu’ils ont aimé tous deux (
L’
Amie du Mort.) Ou bien c’est le récit d’un été de vacances, quand les
3599
nt aimé tous deux (L’Amie du Mort.) Ou bien c’est
le
récit d’un été de vacances, quand les premières inquiétudes du désir
3600
rieure aux deux autres, est une réussite rare par
la
justesse de l’observation autant que par la sympathie de l’auteur pou
3601
autres, est une réussite rare par la justesse de
l’
observation autant que par la sympathie de l’auteur pour ses héros. In
3602
e par la justesse de l’observation autant que par
la
sympathie de l’auteur pour ses héros. Indulgence et regrets, un ton q
3603
e de l’observation autant que par la sympathie de
l’
auteur pour ses héros. Indulgence et regrets, un ton qui permet le tac
3604
s héros. Indulgence et regrets, un ton qui permet
le
tact dans la hardiesse. On reste ravi de tant d’adresse sous un air d
3605
lgence et regrets, un ton qui permet le tact dans
la
hardiesse. On reste ravi de tant d’adresse sous un air de facilité qu
3606
sse sous un air de facilité qui serait presque de
la
nonchalance. M. Vaudoyer ressuscite ces adolescences avec une tendre
3607
objet qu’il en saisit sans mièvrerie ni vulgarité
la
grâce un peu trouble et l’insidieuse mélancolie. Un détail piqué adro
3608
mièvrerie ni vulgarité la grâce un peu trouble et
l’
insidieuse mélancolie. Un détail piqué adroitement, papillon dont frém
3609
iqué adroitement, papillon dont frémissent encore
les
ailes intactes ; l’évocation toute nervalienne en sa nostalgie, de la
3610
illon dont frémissent encore les ailes intactes ;
l’
évocation toute nervalienne en sa nostalgie, de la jeune étrangère don
3611
l’évocation toute nervalienne en sa nostalgie, de
la
jeune étrangère dont on rêve à 15 ans ; et voici ce je ne sais quoi,
3612
oici ce je ne sais quoi, ce délice furtif, ce que
l’
auteur lui-même appelle « cette vague poésie involontaire, intermitten
3613
à ces œuvrettes une si exquise humanité : par lui
le
« charme » reprend quelques droits. an. Rougemont Denis de, « [Com
3614
ériser tout lyrisme germanique, il faudra opposer
l’
excellent petit livre d’Edmond Jaloux. C’est un recueil de divers arti
3615
eil de divers articles et essais, dont certains —
le
Message de Rilke — sont du meilleur Jaloux, de ce Jaloux qui sait par
3616
qu’il partage avec eux ce goût du rêve préféré à
la
vie, — à ce qu’on appelle la vie. Jaloux, qui a rencontré plusieurs f
3617
ût du rêve préféré à la vie, — à ce qu’on appelle
la
vie. Jaloux, qui a rencontré plusieurs fois Rilke, trace de lui un po
3618
hotographie morale, mais une sorte de synthèse de
l’
homme et de l’homme dans son œuvre, qui est peut-être plus vraie que l
3619
rale, mais une sorte de synthèse de l’homme et de
l’
homme dans son œuvre, qui est peut-être plus vraie que le vrai, je veu
3620
dans son œuvre, qui est peut-être plus vraie que
le
vrai, je veux dire, plus rilkienne que ne fut Rilke. Rilke y apparaît
3621
telles qu’on en découvre chez certaines femmes et
l’
on y voit une préciosité sentimentale qui touche à la névrose ou bien
3622
n y voit une préciosité sentimentale qui touche à
la
névrose ou bien simplement une clairvoyance exceptionnelle, suivant q
3623
ment une clairvoyance exceptionnelle, suivant que
l’
on juge au nom d’une science ou au nom de l’esprit. « Pour moi qui aim
3624
t que l’on juge au nom d’une science ou au nom de
l’
esprit. « Pour moi qui aime plus que tout la poésie, écrit Jaloux, aus
3625
om de l’esprit. « Pour moi qui aime plus que tout
la
poésie, écrit Jaloux, aussitôt que je vis Rilke, je compris que cet u
3626
arce qu’ils possèdent déjà, au moins obscurément,
le
sens des réalités sur lesquelles s’opère l’expérience. On ne prouve l
3627
ment, le sens des réalités sur lesquelles s’opère
l’
expérience. On ne prouve la religion qu’aux convertis — qui n’ont plus
3628
sur lesquelles s’opère l’expérience. On ne prouve
la
religion qu’aux convertis — qui n’ont plus besoin de preuves. Il rest
3629
celui-ci tend un merveilleux piège sentimental à
la
raison raisonnante. Et qu’il nous mène un peu plus loin que la sempit
3630
sonnante. Et qu’il nous mène un peu plus loin que
la
sempiternelle « stratégie littéraire », de gazetiers ; au cœur de ces
3631
s sujets qui paraît-il, ne sont pas d’actualité :
la
solitude, la maladie, la peur. ao. Rougemont Denis de, « [Compte r
3632
paraît-il, ne sont pas d’actualité : la solitude,
la
maladie, la peur. ao. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Edmond
3633
e sont pas d’actualité : la solitude, la maladie,
la
peur. ao. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Edmond Jaloux, Rain
3634
ment il a écrit, sur commande, une Promenade dans
le
Midi. Récit alerte et familier (un brin pédant et un brin vulgaire pa
3635
nt une création littéraire. Bien sûr, c’est cela,
le
malaise d’écrire. Bopp est très intelligent. Et plein de verve, et pa
3636
une effusion « lyrique », histoire de n’avoir pas
l’
air dupe. Mais il a des façons parfois bien désobligeantes de voir jus
3637
scientifique, vis-à-vis du phénomène littéraire.
La
« Promenade » du héros de Bopp est une sorte de pensum. Cela rend peu
3638
oins convaincantes certaines de ses remarques sur
l’
inspiration. D’autre part la simplicité de l’objet était nécessaire à
3639
de ses remarques sur l’inspiration. D’autre part
la
simplicité de l’objet était nécessaire à la sécurité de cette sorte d
3640
sur l’inspiration. D’autre part la simplicité de
l’
objet était nécessaire à la sécurité de cette sorte d’analyse, — encor
3641
part la simplicité de l’objet était nécessaire à
la
sécurité de cette sorte d’analyse, — encore que Bopp ait prouvé dans
3642
facilité même est une réussite. Léon Bopp, c’est
le
combat d’un tempérament avec l’esprit de géométrie. Un scientisme ass
3643
Léon Bopp, c’est le combat d’un tempérament avec
l’
esprit de géométrie. Un scientisme assez insolent et les joyeuses révo
3644
rit de géométrie. Un scientisme assez insolent et
les
joyeuses révoltes de sa verve « interfèrent » en lui. Et aussi (presq
3645
928)aq C’est un livre sympathique ; et il vaut
la
peine de le dire car la chose n’est pas si fréquente dans la producti
3646
est un livre sympathique ; et il vaut la peine de
le
dire car la chose n’est pas si fréquente dans la production actuelle.
3647
sympathique ; et il vaut la peine de le dire car
la
chose n’est pas si fréquente dans la production actuelle. On retrouve
3648
le dire car la chose n’est pas si fréquente dans
la
production actuelle. On retrouve aux premiers chapitres de Catherine-
3649
-Paris cette magie des sensations et des rêves de
l’
enfance et cette féminité du sentiment, du tour de pensée même, qui fa
3650
opos. Mais dans ce roman, il n’y a plus seulement
la
femme, avec le miracle perpétuel de sa sensibilité. Il y a encore la
3651
ce roman, il n’y a plus seulement la femme, avec
le
miracle perpétuel de sa sensibilité. Il y a encore la princesse, le t
3652
iracle perpétuel de sa sensibilité. Il y a encore
la
princesse, le témoin intelligent et un peu ironique des cours d’Europ
3653
el de sa sensibilité. Il y a encore la princesse,
le
témoin intelligent et un peu ironique des cours d’Europe à la veille
3654
telligent et un peu ironique des cours d’Europe à
la
veille de la guerre. De cette espèce de collaboration résultent à la
3655
un peu ironique des cours d’Europe à la veille de
la
guerre. De cette espèce de collaboration résultent à la fois le défau
3656
cette espèce de collaboration résultent à la fois
le
défaut de composition du livre et sa richesse. L’enfance de Catherine
3657
le défaut de composition du livre et sa richesse.
L’
enfance de Catherine à Paris est du roman pur ; la tournée des cours d
3658
L’enfance de Catherine à Paris est du roman pur ;
la
tournée des cours de l’Europe centrale, qu’elle subit comme jeune épo
3659
Paris est du roman pur ; la tournée des cours de
l’
Europe centrale, qu’elle subit comme jeune épouse d’un comte polonais,
3660
i étonnent de la part d’une femme aussi femme que
l’
auteur du Perroquet Vert. Mais là-dessus, le roman repart dans une tro
3661
e que l’auteur du Perroquet Vert. Mais là-dessus,
le
roman repart dans une troisième action (l’amour de Catherine pour un
3662
essus, le roman repart dans une troisième action (
l’
amour de Catherine pour un aviateur français) assez peu intéressante à
3663
téressante à vrai dire, parce qu’elle n’est pas à
l’
échelle de ce qui la précède. Ces défaillances de la technique du roma
3664
re, parce qu’elle n’est pas à l’échelle de ce qui
la
précède. Ces défaillances de la technique du roman sont sauvées par u
3665
échelle de ce qui la précède. Ces défaillances de
la
technique du roman sont sauvées par un style brillant, plein de trouv
3666
mémoires. Mais si son début permet de croire que
le
Perroquet Vert ne restera pas une réussite isolée dans l’œuvre pureme
3667
quet Vert ne restera pas une réussite isolée dans
l’
œuvre purement romanesque de la princesse Bibesco, Catherine-Paris ann
3668
ussite isolée dans l’œuvre purement romanesque de
la
princesse Bibesco, Catherine-Paris annonce par ailleurs un mémorialis
3669
once par ailleurs un mémorialiste captivant, dans
la
tradition d’un Ligne par exemple. aq. Rougemont Denis de, « [Compt
3670
Le
péril Ford (février 1928)a On a trop dit que notre époque est chao
3671
e est chaotique. Je crois bien, au contraire, que
l’
histoire n’a pas connu de période où les directions d’une civilisation
3672
raire, que l’histoire n’a pas connu de période où
les
directions d’une civilisation apparaissent plus nettement. Un certain
3673
ou, pour mieux dire, une organisation générale de
la
vie mondiale. Toutes les forces du temps y concourent obscurément ; e
3674
organisation générale de la vie mondiale. Toutes
les
forces du temps y concourent obscurément ; et, pour peu que cela cont
3675
nt ; et, pour peu que cela continue, pour peu que
la
bourgeoisie intellectuelle persiste à jouer l’autruche aux yeux clos,
3676
ue la bourgeoisie intellectuelle persiste à jouer
l’
autruche aux yeux clos, l’avènement de cette organisation toute-puissa
3677
tuelle persiste à jouer l’autruche aux yeux clos,
l’
avènement de cette organisation toute-puissante n’est plus qu’une ques
3678
s encore. Ici et là, quelques cris s’élèvent dans
le
désert d’une époque déjà presque abandonnée par l’Esprit. À l’heure d
3679
e désert d’une époque déjà presque abandonnée par
l’
Esprit. À l’heure de toucher aux buts que sa civilisation poursuit dep
3680
ne époque déjà presque abandonnée par l’Esprit. À
l’
heure de toucher aux buts que sa civilisation poursuit depuis près de
3681
ivilisation poursuit depuis près de deux siècles,
l’
Occidental est saisi d’un étrange malaise. Il soupçonne, par éclairs,
3682
ut-être dans ces buts une absurdité fondamentale.
L’
infaillible progrès aurait-il fait fausse route ? Est-il temps encore
3683
ait-il fait fausse route ? Est-il temps encore de
le
détourner du désastre spirituel vers lequel il entraîne l’Occident ?
3684
ner du désastre spirituel vers lequel il entraîne
l’
Occident ? Cris dans le désert. Déserts des villes fiévreuses où le fr
3685
el vers lequel il entraîne l’Occident ? Cris dans
le
désert. Déserts des villes fiévreuses où le fracas des machines couvr
3686
dans le désert. Déserts des villes fiévreuses où
le
fracas des machines couvre déjà la plainte humaine. Il y a ceux qui p
3687
fiévreuses où le fracas des machines couvre déjà
la
plainte humaine. Il y a ceux qui pleurent le passé et ceux qui prophé
3688
déjà la plainte humaine. Il y a ceux qui pleurent
le
passé et ceux qui prophétisent, ceux qui jettent une imprécation stér
3689
tent une imprécation stérile et magnifique contre
l’
époque et ceux qui cherchent à l’oublier dans le rêve, dans l’utopie,
3690
agnifique contre l’époque et ceux qui cherchent à
l’
oublier dans le rêve, dans l’utopie, dans une belle doctrine… Il faudr
3691
e l’époque et ceux qui cherchent à l’oublier dans
le
rêve, dans l’utopie, dans une belle doctrine… Il faudrait d’abord pre
3692
ceux qui cherchent à l’oublier dans le rêve, dans
l’
utopie, dans une belle doctrine… Il faudrait d’abord prendre conscienc
3693
ous, dans cette complaisance générale à proclamer
le
désordre du temps. On a peur de certaines évidences, on préfère affir
3694
n préfère affirmer que tout est incompréhensible.
L’
homme moderne recule devant l’évidence de la banqueroute prochaine de
3695
t incompréhensible. L’homme moderne recule devant
l’
évidence de la banqueroute prochaine de sa civilisation. Il répugne à
3696
ible. L’homme moderne recule devant l’évidence de
la
banqueroute prochaine de sa civilisation. Il répugne à admettre qu’un
3697
rder autour de nous et d’en croire nos yeux. I.
L’
homme qui a réussi Je prends Henry Ford comme un symbole du monde m
3698
Henry Ford comme un symbole du monde moderne, et
le
meilleur, parce que personne ne s’est approché plus que lui du type i
3699
e ne s’est approché plus que lui du type idéal de
l’
industriel et du capitaliste. Le succès immense de ses livres1, sa pop
3700
du type idéal de l’industriel et du capitaliste.
Le
succès immense de ses livres1, sa popularité universelle sont signes
3701
ivres1, sa popularité universelle sont signes que
l’
époque a senti en lui son incarnation la plus parfaite. Qu’on ne m’acc
3702
ignes que l’époque a senti en lui son incarnation
la
plus parfaite. Qu’on ne m’accuse donc pas de caricaturer l’objet de m
3703
rfaite. Qu’on ne m’accuse donc pas de caricaturer
l’
objet de ma critique pour faciliter l’accusation : je prends pour la j
3704
caricaturer l’objet de ma critique pour faciliter
l’
accusation : je prends pour la juger ce que l’époque m’offre de mieux
3705
ique pour faciliter l’accusation : je prends pour
la
juger ce que l’époque m’offre de mieux réussi. Voici la vie de Ford,
3706
ter l’accusation : je prends pour la juger ce que
l’
époque m’offre de mieux réussi. Voici la vie de Ford, telle qu’il la r
3707
er ce que l’époque m’offre de mieux réussi. Voici
la
vie de Ford, telle qu’il la raconte dans Ma vie et mon œuvre. Il naît
3708
e mieux réussi. Voici la vie de Ford, telle qu’il
la
raconte dans Ma vie et mon œuvre. Il naît fils de paysan. Il passe so
3709
des outils qu’il joue encore à présent », dit‑il.
Le
plus mémorable événement de ces années de jeunesse, son « chemin de D
3710
che au juste quelle dose d’« humour » il met dans
l’
expression), c’est la rencontre d’une locomotive routière. « Depuis l’
3711
ose d’« humour » il met dans l’expression), c’est
la
rencontre d’une locomotive routière. « Depuis l’instant où, enfant de
3712
la rencontre d’une locomotive routière. « Depuis
l’
instant où, enfant de 12 ans, j’aperçus cette machine de route, jusqu’
3713
cette machine de route, jusqu’au jour présent, ma
grande
et constante ambition a été de construire une bonne machine routière.
3714
a été de construire une bonne machine routière. »
Les
étapes de sa jeunesse sont : la construction d’un moteur à vapeur, pu
3715
hine routière. » Les étapes de sa jeunesse sont :
la
construction d’un moteur à vapeur, puis d’un moteur à explosion, enfi
3716
simple mécanicien chez Edison. Il fonde tôt après
la
Société des automobiles Ford, « et commence à réaliser son rêve, le t
3717
omobiles Ford, « et commence à réaliser son rêve,
le
type unique d’automobile utilitaire »2. Dès lors, c’est une suite de
3718
. Dès lors, c’est une suite de chiffres indiquant
le
progrès de sa production, d’année en année. On pourrait ajouter à ces
3719
ur lui qu’un résultat secondaire de son activité.
Le
but de sa vie n’a jamais été de s’enrichir. Son « rêve » était autre,
3720
s été de s’enrichir. Son « rêve » était autre, il
l’
a réalisé comme il est donné à peu d’hommes de le faire : 7000 voiture
3721
l’a réalisé comme il est donné à peu d’hommes de
le
faire : 7000 voitures par jour, et la possibilité d’augmenter encore
3722
d’hommes de le faire : 7000 voitures par jour, et
la
possibilité d’augmenter encore cette production. Ford est le plus pui
3723
ité d’augmenter encore cette production. Ford est
le
plus puissant industriel du monde ; le plus riche, au point qu’il peu
3724
. Ford est le plus puissant industriel du monde ;
le
plus riche, au point qu’il peut parler d’égal à égal avec beaucoup d’
3725
peut parler d’égal à égal avec beaucoup d’États ;
le
plus parfait aussi. Son succès sans précédent le met à l’abri de tout
3726
le plus parfait aussi. Son succès sans précédent
le
met à l’abri de toutes les attaques, du point de vue technique. L’org
3727
parfait aussi. Son succès sans précédent le met à
l’
abri de toutes les attaques, du point de vue technique. L’organisation
3728
n succès sans précédent le met à l’abri de toutes
les
attaques, du point de vue technique. L’organisation de ses usines, de
3729
e toutes les attaques, du point de vue technique.
L’
organisation de ses usines, des salaires, des conditions de travail et
3730
et du paupérisme. C’est un résultat qu’on n’a pas
le
droit humainement de sous-estimer. Les griefs que les socialistes fon
3731
’on n’a pas le droit humainement de sous-estimer.
Les
griefs que les socialistes font aux capitalistes européens ne sauraie
3732
droit humainement de sous-estimer. Les griefs que
les
socialistes font aux capitalistes européens ne sauraient l’atteindre.
3733
stes font aux capitalistes européens ne sauraient
l’
atteindre. Au contraire, il a résolu la question sociale d’une façon q
3734
sauraient l’atteindre. Au contraire, il a résolu
la
question sociale d’une façon qui ne devrait pas déplaire aux doctrina
3735
mplète du monde, seule méthode capable d’empêcher
les
abus des capitalistes. Du même coup, en supprimant l’esclavage financ
3736
bus des capitalistes. Du même coup, en supprimant
l’
esclavage financier de l’ouvrier, il supprime la principale cause avou
3737
même coup, en supprimant l’esclavage financier de
l’
ouvrier, il supprime la principale cause avouée de la lutte des classe
3738
t l’esclavage financier de l’ouvrier, il supprime
la
principale cause avouée de la lutte des classes. Il se dégage de la l
3739
uvrier, il supprime la principale cause avouée de
la
lutte des classes. Il se dégage de la lecture de Ma vie et mon œuvre
3740
e avouée de la lutte des classes. Il se dégage de
la
lecture de Ma vie et mon œuvre une impression de netteté, de solidité
3741
pression de netteté, de solidité, de propreté. Si
l’
on ajoute à cela le plaisir qu’on éprouve toujours au récit de succès
3742
, de solidité, de propreté. Si l’on ajoute à cela
le
plaisir qu’on éprouve toujours au récit de succès mirobolants, et le
3743
rouve toujours au récit de succès mirobolants, et
le
charme un peu facile mais fort goûté du grand public, de l’humour amé
3744
ts, et le charme un peu facile mais fort goûté du
grand
public, de l’humour américain, l’on comprendra sans peine la populari
3745
un peu facile mais fort goûté du grand public, de
l’
humour américain, l’on comprendra sans peine la popularité mondiale de
3746
ort goûté du grand public, de l’humour américain,
l’
on comprendra sans peine la popularité mondiale des « idées » d’Henry
3747
de l’humour américain, l’on comprendra sans peine
la
popularité mondiale des « idées » d’Henry Ford et des livres qui les
3748
iale des « idées » d’Henry Ford et des livres qui
les
répandent. L’on ne pourra qu’y applaudir, semble-t-il, en souhaitant
3749
s » d’Henry Ford et des livres qui les répandent.
L’
on ne pourra qu’y applaudir, semble-t-il, en souhaitant que les indust
3750
ra qu’y applaudir, semble-t-il, en souhaitant que
les
industriels européens s’en inspirent toujours plus. Ford leur montre
3751
ns s’en inspirent toujours plus. Ford leur montre
le
chemin qu’ils seront bien obligés de prendre tôt ou tard. Il est préf
3752
e quelques chances encore de régler pacifiquement
le
conflit du capital et du travail. « Se fordiser ou mourir », écrivait
3753
vait récemment un économiste. Ford, perfection de
l’
industriel, offre au monde moderne le premier exemple de son achèvemen
3754
exemple de son achèvement intégral. Il a atteint
l’
objectif de la moderne civilisation occidentale. Voici donc venue l’he
3755
n achèvement intégral. Il a atteint l’objectif de
la
moderne civilisation occidentale. Voici donc venue l’heure de la juge
3756
oderne civilisation occidentale. Voici donc venue
l’
heure de la juger. Le héros de l’époque, c’est l’homme qui a réussi. M
3757
lisation occidentale. Voici donc venue l’heure de
la
juger. Le héros de l’époque, c’est l’homme qui a réussi. Mais à quoi
3758
ccidentale. Voici donc venue l’heure de la juger.
Le
héros de l’époque, c’est l’homme qui a réussi. Mais à quoi ? C’est la
3759
Voici donc venue l’heure de la juger. Le héros de
l’
époque, c’est l’homme qui a réussi. Mais à quoi ? C’est la plus grave
3760
l’heure de la juger. Le héros de l’époque, c’est
l’
homme qui a réussi. Mais à quoi ? C’est la plus grave question qu’on p
3761
, c’est l’homme qui a réussi. Mais à quoi ? C’est
la
plus grave question qu’on puisse poser à notre temps. II. M. Ford
3762
ser à notre temps. II. M. Ford a ses idées, ou
la
philosophie de ceux qui n’en veulent pas Nous avons dit tout à l’h
3763
eux qui n’en veulent pas Nous avons dit tout à
l’
heure quel fut le but de la vie de Ford, sa « grande et constante ambi
3764
ent pas Nous avons dit tout à l’heure quel fut
le
but de la vie de Ford, sa « grande et constante ambition ». Il semble
3765
Nous avons dit tout à l’heure quel fut le but de
la
vie de Ford, sa « grande et constante ambition ». Il semble que toute
3766
à l’heure quel fut le but de la vie de Ford, sa «
grande
et constante ambition ». Il semble que toute sa carrière — pensée, mé
3767
éthode, technique — soit conditionnée jusque dans
le
détail par une idée fixe primitive. Considérons-la sous cet angle. Il
3768
e détail par une idée fixe primitive. Considérons-
la
sous cet angle. Il y a d’abord la vision de l’auto routière : naissan
3769
ve. Considérons-la sous cet angle. Il y a d’abord
la
vision de l’auto routière : naissance de sa passion froide et tenace.
3770
ns-la sous cet angle. Il y a d’abord la vision de
l’
auto routière : naissance de sa passion froide et tenace. Il s’efforce
3771
sion froide et tenace. Il s’efforce d’en réaliser
l’
objet par ses propres moyens, à un exemplaire ; puis, il fonde une usi
3772
plaire ; puis, il fonde une usine pour multiplier
les
réalisations. Bientôt, élargissant son ambition, il conçoit ce mythe
3773
on, il conçoit ce mythe extravagant du bonheur de
l’
humanité par la possession d’automobiles Ford. Et, comme il est très i
3774
ce mythe extravagant du bonheur de l’humanité par
la
possession d’automobiles Ford. Et, comme il est très intelligent, il
3775
l est très intelligent, il a vite fait de démêler
les
conditions les plus rationnelles de la production, avec cette netteté
3776
lligent, il a vite fait de démêler les conditions
les
plus rationnelles de la production, avec cette netteté et cette décis
3777
e démêler les conditions les plus rationnelles de
la
production, avec cette netteté et cette décision qu’une passion conte
3778
te décision qu’une passion contenue peut donner à
l’
homme d’action. Enfin, le voici en mesure de produire des quantités én
3779
n contenue peut donner à l’homme d’action. Enfin,
le
voici en mesure de produire des quantités énormes d’autos. Seulement,
3780
nt, pour pouvoir continuer, il faut vendre ; dans
l’
intérêt de la production, il faut créer la consommation. La réclame s’
3781
oir continuer, il faut vendre ; dans l’intérêt de
la
production, il faut créer la consommation. La réclame s’en charge. Pa
3782
; dans l’intérêt de la production, il faut créer
la
consommation. La réclame s’en charge. Par le procédé très simple de l
3783
de la production, il faut créer la consommation.
La
réclame s’en charge. Par le procédé très simple de la répétition, on
3784
réer la consommation. La réclame s’en charge. Par
le
procédé très simple de la répétition, on fait croire aux gens qu’ils
3785
éclame s’en charge. Par le procédé très simple de
la
répétition, on fait croire aux gens qu’ils ne peuvent plus vivre heur
3786
ls ne peuvent plus vivre heureux sans auto. Voilà
l’
affaire lancée. La passion de Ford se donne libre cours. Il ne s’agit
3787
vivre heureux sans auto. Voilà l’affaire lancée.
La
passion de Ford se donne libre cours. Il ne s’agit plus maintenant qu
3788
À chaque page de ses livres, on pourrait relever
les
sophismes plus ou moins conscients par lesquels il prétend ramener le
3789
moins conscients par lesquels il prétend ramener
le
bénéfice de la production à celui du consommateur. Prenons cette peti
3790
ts par lesquels il prétend ramener le bénéfice de
la
production à celui du consommateur. Prenons cette petite phrase qui n
3791
i n’a l’air de rien : « Nul ne contestera que, si
l’
on abaisse suffisamment les prix, on ne trouve toujours des clients, q
3792
l ne contestera que, si l’on abaisse suffisamment
les
prix, on ne trouve toujours des clients, quel que soit l’état du marc
3793
on ne trouve toujours des clients, quel que soit
l’
état du marché. » Il semble que cela soit tout à l’avantage du client.
3794
’état du marché. » Il semble que cela soit tout à
l’
avantage du client. Mais cherchons un peu les causes réelles de cet ab
3795
out à l’avantage du client. Mais cherchons un peu
les
causes réelles de cet abaissement de prix — la concurrence n’étant bi
3796
u les causes réelles de cet abaissement de prix —
la
concurrence n’étant bien entendu qu’une cause accessoire. Dire que l’
3797
nt bien entendu qu’une cause accessoire. Dire que
l’
état du marché est tel que le client n’achète plus, cela signifie parf
3798
accessoire. Dire que l’état du marché est tel que
le
client n’achète plus, cela signifie parfois que la marchandise est mo
3799
e client n’achète plus, cela signifie parfois que
la
marchandise est momentanément trop chère ; mais surtout que le besoin
3800
e est momentanément trop chère ; mais surtout que
le
besoin qu’on a de tel objet est satisfait ou a disparu. Il semble alo
3801
t est satisfait ou a disparu. Il semble alors que
l’
industriel n’ait plus qu’à plier bagage. Mais c’est ici que Ford montr
3802
qu’à plier bagage. Mais c’est ici que Ford montre
le
bout de l’oreille, et que son but réel est la production pour elle-mê
3803
bagage. Mais c’est ici que Ford montre le bout de
l’
oreille, et que son but réel est la production pour elle-même, non pas
3804
tre le bout de l’oreille, et que son but réel est
la
production pour elle-même, non pas le plaisir ou l’intérêt véritable
3805
ut réel est la production pour elle-même, non pas
le
plaisir ou l’intérêt véritable du client. Le besoin ayant disparu, la
3806
production pour elle-même, non pas le plaisir ou
l’
intérêt véritable du client. Le besoin ayant disparu, la production de
3807
pas le plaisir ou l’intérêt véritable du client.
Le
besoin ayant disparu, la production devant se maintenir, il n’y a qu’
3808
rêt véritable du client. Le besoin ayant disparu,
la
production devant se maintenir, il n’y a qu’une solution : recréer le
3809
se maintenir, il n’y a qu’une solution : recréer
le
besoin. Pour cela, on abaisse les prix. Le client fait la comparaison
3810
lution : recréer le besoin. Pour cela, on abaisse
les
prix. Le client fait la comparaison. Il est impressionné par la baiss
3811
ecréer le besoin. Pour cela, on abaisse les prix.
Le
client fait la comparaison. Il est impressionné par la baisse, au poi
3812
n. Pour cela, on abaisse les prix. Le client fait
la
comparaison. Il est impressionné par la baisse, au point qu’il en oub
3813
ient fait la comparaison. Il est impressionné par
la
baisse, au point qu’il en oublie que cela ne l’intéresse plus réellem
3814
r la baisse, au point qu’il en oublie que cela ne
l’
intéresse plus réellement. Il croit qu’il va gagner 5 francs en acheta
3815
acheté du tout. Autrement dit, il est trompé par
la
baisse. L’industriel comptait. La tromperie est préméditée. Et le sca
3816
tout. Autrement dit, il est trompé par la baisse.
L’
industriel comptait. La tromperie est préméditée. Et le scandale, à mo
3817
est trompé par la baisse. L’industriel comptait.
La
tromperie est préméditée. Et le scandale, à mon sens, n’est pas que l
3818
ustriel comptait. La tromperie est préméditée. Et
le
scandale, à mon sens, n’est pas que l’industriel ait forcé (psycholog
3819
éditée. Et le scandale, à mon sens, n’est pas que
l’
industriel ait forcé (psychologiquement) le client à faire une dépense
3820
as que l’industriel ait forcé (psychologiquement)
le
client à faire une dépense superflue ; le scandale est qu’il l’ait tr
3821
uement) le client à faire une dépense superflue ;
le
scandale est qu’il l’ait trompé sur ses véritables besoins. Car cela
3822
ire une dépense superflue ; le scandale est qu’il
l’
ait trompé sur ses véritables besoins. Car cela va bien plus profond,
3823
régulation et d’alternances. Tel est ce sophisme,
le
paradoxe du bon marché. Celui de la réclame a même but, mêmes effets.
3824
ce sophisme, le paradoxe du bon marché. Celui de
la
réclame a même but, mêmes effets. Mais le plus grave est peut-être le
3825
elui de la réclame a même but, mêmes effets. Mais
le
plus grave est peut-être le sophisme du loisir. M. Guglielmo Ferrero
3826
t, mêmes effets. Mais le plus grave est peut-être
le
sophisme du loisir. M. Guglielmo Ferrero a fort bien montré, dans un
3827
ro a fort bien montré, dans un article intitulé «
Le
grand paradoxe du monde moderne »3, ce qu’il y a de profondément anti
3828
a fort bien montré, dans un article intitulé « Le
grand
paradoxe du monde moderne »3, ce qu’il y a de profondément antihumain
3829
»3, ce qu’il y a de profondément antihumain dans
la
conception fordienne de l’oisiveté. Ford a créé un second dimanche da
3830
dément antihumain dans la conception fordienne de
l’
oisiveté. Ford a créé un second dimanche dans la semaine, « retouché l
3831
e l’oisiveté. Ford a créé un second dimanche dans
la
semaine, « retouché l’œuvre de la Création », comme dit Ferrero. Le b
3832
éé un second dimanche dans la semaine, « retouché
l’
œuvre de la Création », comme dit Ferrero. Le bon peuple s’extasie. Il
3833
d dimanche dans la semaine, « retouché l’œuvre de
la
Création », comme dit Ferrero. Le bon peuple s’extasie. Il ne peut vo
3834
uché l’œuvre de la Création », comme dit Ferrero.
Le
bon peuple s’extasie. Il ne peut voir la duperie : ce jeu du chat et
3835
Ferrero. Le bon peuple s’extasie. Il ne peut voir
la
duperie : ce jeu du chat et de la souris ; si Ford relâche les ouvrie
3836
Il ne peut voir la duperie : ce jeu du chat et de
la
souris ; si Ford relâche les ouvriers et leur donne une apparence de
3837
ce jeu du chat et de la souris ; si Ford relâche
les
ouvriers et leur donne une apparence de liberté, c’est pour mieux les
3838
donne une apparence de liberté, c’est pour mieux
les
prendre dans son engrenage. L’emploi de leurs loisirs est prévu. Il e
3839
c’est pour mieux les prendre dans son engrenage.
L’
emploi de leurs loisirs est prévu. Il est déterminé par la réclame, le
3840
de leurs loisirs est prévu. Il est déterminé par
la
réclame, les produits Ford qu’il faut user, etc. Il a pour but vérita
3841
isirs est prévu. Il est déterminé par la réclame,
les
produits Ford qu’il faut user, etc. Il a pour but véritable d’augment
3842
ut user, etc. Il a pour but véritable d’augmenter
la
consommation. Il rend plus complet l’esclavage de l’ouvrier, puisqu’i
3843
d’augmenter la consommation. Il rend plus complet
l’
esclavage de l’ouvrier, puisqu’il englobe jusqu’à son repos dans le cy
3844
consommation. Il rend plus complet l’esclavage de
l’
ouvrier, puisqu’il englobe jusqu’à son repos dans le cycle de la produ
3845
ouvrier, puisqu’il englobe jusqu’à son repos dans
le
cycle de la production. Cercle vicieux : plus la production s’intensi
3846
squ’il englobe jusqu’à son repos dans le cycle de
la
production. Cercle vicieux : plus la production s’intensifie, plus il
3847
le cycle de la production. Cercle vicieux : plus
la
production s’intensifie, plus il faut créer de besoins et de loisirs.
3848
plus il faut créer de besoins et de loisirs. Or,
l’
industrie ne peut subsister qu’en progressant. Mais la nature humaine
3849
dustrie ne peut subsister qu’en progressant. Mais
la
nature humaine a des limites. Et le temps approche où elles seront at
3850
ressant. Mais la nature humaine a des limites. Et
le
temps approche où elles seront atteintes. On peut se demander jusqu’à
3851
qu’à quel point Ford est conscient des buts et de
l’
avenir de son effort. Pour mon compte, je crois que l’idée fixe de pro
3852
enir de son effort. Pour mon compte, je crois que
l’
idée fixe de produire peut très bien envahir un cerveau moderne au poi
3853
n’empêche pas notre industriel de philosopher sur
les
sujets les plus divers. Les aphorismes sont assez révélateurs de la m
3854
as notre industriel de philosopher sur les sujets
les
plus divers. Les aphorismes sont assez révélateurs de la mentalité ca
3855
el de philosopher sur les sujets les plus divers.
Les
aphorismes sont assez révélateurs de la mentalité capitaliste américa
3856
divers. Les aphorismes sont assez révélateurs de
la
mentalité capitaliste américaine. Voici, par exemple, une définition
3857
américaine. Voici, par exemple, une définition de
la
liberté : La liberté consiste à travailler pendant le temps convenab
3858
ici, par exemple, une définition de la liberté :
La
liberté consiste à travailler pendant le temps convenable et à gagner
3859
berté : La liberté consiste à travailler pendant
le
temps convenable et à gagner, par ce moyen, de quoi vivre convenablem
3860
ement tout en restant maître de régler à sa guise
le
détail de sa vie privée. Cette liberté particulière, et cent autres p
3861
e, et cent autres pareilles, composent, au total,
la
grande Liberté idéale et mettent de l’huile dans les rouages de la vi
3862
et cent autres pareilles, composent, au total, la
grande
Liberté idéale et mettent de l’huile dans les rouages de la vie quoti
3863
au total, la grande Liberté idéale et mettent de
l’
huile dans les rouages de la vie quotidienne. Cette Liberté idéale ré
3864
grande Liberté idéale et mettent de l’huile dans
les
rouages de la vie quotidienne. Cette Liberté idéale réduite au rôle
3865
idéale et mettent de l’huile dans les rouages de
la
vie quotidienne. Cette Liberté idéale réduite au rôle d’huile dans l
3866
Cette Liberté idéale réduite au rôle d’huile dans
les
rouages, n’est-ce pas charmant et prometteur ? Et que dire de cette a
3867
ette admirable simplification : « Sur quoi repose
la
société ? Sur les hommes et les moyens grâce auxquels on cultive, on
3868
mplification : « Sur quoi repose la société ? Sur
les
hommes et les moyens grâce auxquels on cultive, on fabrique, on trans
3869
« Sur quoi repose la société ? Sur les hommes et
les
moyens grâce auxquels on cultive, on fabrique, on transporte. » « Tou
3870
» « Toute notre gloire est dans nos œuvres, dans
le
prix que nous payons à la terre la satisfaction de nos besoins. » — F
3871
t dans nos œuvres, dans le prix que nous payons à
la
terre la satisfaction de nos besoins. » — Ford se moque de la philoso
3872
s œuvres, dans le prix que nous payons à la terre
la
satisfaction de nos besoins. » — Ford se moque de la philosophie. Il
3873
satisfaction de nos besoins. » — Ford se moque de
la
philosophie. Il ne peut empêcher que son attitude ne porte un nom phi
3874
ations plus nettes encore : « Je ne considère pas
les
machines Ford simplement comme des machines. J’y vois la réalisation
3875
ines Ford simplement comme des machines. J’y vois
la
réalisation concrète d’une théorie qui tend à faire de ce monde un sé
3876
tend à faire de ce monde un séjour meilleur pour
les
hommes. » C’est le bonheur, le salut par l’auto. Philosophie réclame.
3877
monde un séjour meilleur pour les hommes. » C’est
le
bonheur, le salut par l’auto. Philosophie réclame. « Ce que j’ai à cœ
3878
our meilleur pour les hommes. » C’est le bonheur,
le
salut par l’auto. Philosophie réclame. « Ce que j’ai à cœur, aujourd’
3879
pour les hommes. » C’est le bonheur, le salut par
l’
auto. Philosophie réclame. « Ce que j’ai à cœur, aujourd’hui, c’est de
3880
j’ai à cœur, aujourd’hui, c’est de démontrer que
les
idées mises en pratique chez nous ne concernent pas particulièrement
3881
ique chez nous ne concernent pas particulièrement
les
autos et les tracteurs, mais composent en quelque manière, un code un
3882
s ne concernent pas particulièrement les autos et
les
tracteurs, mais composent en quelque manière, un code universel ! » R
3883
e matérialiste ? Un seul doute effleure Ford vers
la
fin de son livre : Le problème de la production a été brillamment ré
3884
l doute effleure Ford vers la fin de son livre :
Le
problème de la production a été brillamment résolu… Mais nous nous ab
3885
e Ford vers la fin de son livre : Le problème de
la
production a été brillamment résolu… Mais nous nous absorbons trop da
3886
e pensons pas assez aux raisons que nous avons de
le
faire. Tout notre système de concurrence, tout notre effort de créati
3887
concurrence, tout notre effort de création, tout
le
jeu de nos facultés semblent dirigés uniquement vers la production ma
3888
de nos facultés semblent dirigés uniquement vers
la
production matérielle et vers la richesse qui en est le fruit. On ne
3889
uniquement vers la production matérielle et vers
la
richesse qui en est le fruit. On ne saurait mieux dire. Mais il faud
3890
duction matérielle et vers la richesse qui en est
le
fruit. On ne saurait mieux dire. Mais il faudrait en tirer des consé
3891
de technique. Il n’a pas senti qu’il touchait là
le
nœud vital du problème moderne. D’ailleurs, les idées générales de ce
3892
là le nœud vital du problème moderne. D’ailleurs,
les
idées générales de cette sorte sont rares dans son livre. En général,
3893
èmes techniques où son triomphe est facile. C’est
le
technicien parfait qui combat les techniciens imparfaits. Il ne se de
3894
st facile. C’est le technicien parfait qui combat
les
techniciens imparfaits. Il ne se demande jamais si la technique même
3895
echniciens imparfaits. Il ne se demande jamais si
la
technique même la plus perfectionnée mérite les sacrifices qu’elle ex
3896
its. Il ne se demande jamais si la technique même
la
plus perfectionnée mérite les sacrifices qu’elle exige de l’homme mod
3897
si la technique même la plus perfectionnée mérite
les
sacrifices qu’elle exige de l’homme moderne. Paradoxes plus ou moins
3898
fectionnée mérite les sacrifices qu’elle exige de
l’
homme moderne. Paradoxes plus ou moins intéressés, optimisme d’homme à
3899
imisme d’homme à qui tout réussit, messianisme de
la
machine, méconnaissance glorieuse des forces spirituelles, le tout ag
3900
méconnaissance glorieuse des forces spirituelles,
le
tout agrémenté d’humour et exposé avec un simplisme qui emporte à cou
3901
t exposé avec un simplisme qui emporte à coup sûr
l’
adhésion du gros public : telle est l’idéologie de celui que M. Cambon
3902
à coup sûr l’adhésion du gros public : telle est
l’
idéologie de celui que M. Cambon, dans sa préface, égale aux plus gran
3903
ui que M. Cambon, dans sa préface, égale aux plus
grands
esprits de tous les temps. On me dira que Ford a mieux à faire que de
3904
sa préface, égale aux plus grands esprits de tous
les
temps. On me dira que Ford a mieux à faire que de philosopher. Je le
3905
a que Ford a mieux à faire que de philosopher. Je
le
veux. Mais si j’insiste un peu sur ses « idées », c’est pour souligne
3906
idées », c’est pour souligner ce hiatus étrange :
l’
homme qu’on pourrait appeler le plus actif du monde, l’un de ceux qui
3907
e hiatus étrange : l’homme qu’on pourrait appeler
le
plus actif du monde, l’un de ceux qui influent le plus sur notre civi
3908
le plus actif du monde, l’un de ceux qui influent
le
plus sur notre civilisation, possède la philosophie la plus rudimenta
3909
influent le plus sur notre civilisation, possède
la
philosophie la plus rudimentaire. Le phénomène n’est pas nouveau en O
3910
us sur notre civilisation, possède la philosophie
la
plus rudimentaire. Le phénomène n’est pas nouveau en Occident, mais i
3911
ion, possède la philosophie la plus rudimentaire.
Le
phénomène n’est pas nouveau en Occident, mais il est ici tragiquement
3912
bien que notre temps ait prononcé définitivement
le
divorce de l’esprit et de l’action. III. Le fordisme contre l’Espr
3913
e temps ait prononcé définitivement le divorce de
l’
esprit et de l’action. III. Le fordisme contre l’Esprit La formi
3914
noncé définitivement le divorce de l’esprit et de
l’
action. III. Le fordisme contre l’Esprit La formidable erreur de
3915
nt le divorce de l’esprit et de l’action. III.
Le
fordisme contre l’Esprit La formidable erreur de la bourgeoisie mo
3916
esprit et de l’action. III. Le fordisme contre
l’
Esprit La formidable erreur de la bourgeoisie moderne c’est de croi
3917
l’action. III. Le fordisme contre l’Esprit
La
formidable erreur de la bourgeoisie moderne c’est de croire que les c
3918
rdisme contre l’Esprit La formidable erreur de
la
bourgeoisie moderne c’est de croire que les choses pourront aller ain
3919
eur de la bourgeoisie moderne c’est de croire que
les
choses pourront aller ainsi longtemps encore. On se refuse à l’idée d
3920
ront aller ainsi longtemps encore. On se refuse à
l’
idée d’une catastrophe, pourtant plus que probable, par crainte de se
3921
lus que probable, par crainte de se voir obligé à
la
révision des valeurs, la plus difficile et la plus grave : celle qu’o
3922
inte de se voir obligé à la révision des valeurs,
la
plus difficile et la plus grave : celle qu’on ne peut faire qu’au nom
3923
é à la révision des valeurs, la plus difficile et
la
plus grave : celle qu’on ne peut faire qu’au nom de l’Esprit et de se
3924
us grave : celle qu’on ne peut faire qu’au nom de
l’
Esprit et de ses exigences. Mais le « rien de nouveau sous le soleil »
3925
e qu’au nom de l’Esprit et de ses exigences. Mais
le
« rien de nouveau sous le soleil » derrière lequel on se réfugie avec
3926
de ses exigences. Mais le « rien de nouveau sous
le
soleil » derrière lequel on se réfugie avec une paresse et une légère
3927
e avec une paresse et une légèreté inouïes, c’est
le
signe d’une complicité avec un état de choses funeste pour l’Esprit.
3928
ne complicité avec un état de choses funeste pour
l’
Esprit. Si l’Esprit nous abandonne, c’est que nous avons voulu tenter
3929
avec un état de choses funeste pour l’Esprit. Si
l’
Esprit nous abandonne, c’est que nous avons voulu tenter sans lui une
3930
e que nous pensions gratuite : nous avons cherché
le
bonheur dans le développement matériel, avec l’arrière-pensée sournoi
3931
ons gratuite : nous avons cherché le bonheur dans
le
développement matériel, avec l’arrière-pensée sournoise que, si cela
3932
é le bonheur dans le développement matériel, avec
l’
arrière-pensée sournoise que, si cela ratait, on gardait toutes les au
3933
sournoise que, si cela ratait, on gardait toutes
les
autres chances. J’accorderai que le progrès matériel n’est pas mauvai
3934
rdait toutes les autres chances. J’accorderai que
le
progrès matériel n’est pas mauvais en soi. Mais par l’importance qu’i
3935
ogrès matériel n’est pas mauvais en soi. Mais par
l’
importance qu’il a prise dans notre vie, il détourne la civilisation d
3936
ortance qu’il a prise dans notre vie, il détourne
la
civilisation de son but véritable : aller à l’Esprit, y conduire les
3937
ne la civilisation de son but véritable : aller à
l’
Esprit, y conduire les peuples. Ainsi, détournant de l’essentiel une g
3938
son but véritable : aller à l’Esprit, y conduire
les
peuples. Ainsi, détournant de l’essentiel une grande part des forces
3939
rit, y conduire les peuples. Ainsi, détournant de
l’
essentiel une grande part des forces humaines, il travaille contre l’E
3940
les peuples. Ainsi, détournant de l’essentiel une
grande
part des forces humaines, il travaille contre l’Esprit. Rien n’est gr
3941
nde part des forces humaines, il travaille contre
l’
Esprit. Rien n’est gratuit. Nous payons notre passion de posséder la m
3942
st gratuit. Nous payons notre passion de posséder
la
matière du prix de la seule possession véritable, la connaissance de
3943
s notre passion de posséder la matière du prix de
la
seule possession véritable, la connaissance de l’Esprit. C’est déjà u
3944
matière du prix de la seule possession véritable,
la
connaissance de l’Esprit. C’est déjà un fait d’expérience. Et qui n’e
3945
la seule possession véritable, la connaissance de
l’
Esprit. C’est déjà un fait d’expérience. Et qui n’en pourrait citer un
3946
ple individuel ? Nous savons assez en quel mépris
l’
homme d’affaires à l’américaine tient les choses de l’Esprit. Dans le
3947
savons assez en quel mépris l’homme d’affaires à
l’
américaine tient les choses de l’Esprit. Dans le cas le plus favorable
3948
el mépris l’homme d’affaires à l’américaine tient
les
choses de l’Esprit. Dans le cas le plus favorable, « il se passera bi
3949
mme d’affaires à l’américaine tient les choses de
l’
Esprit. Dans le cas le plus favorable, « il se passera bien de cette l
3950
à l’américaine tient les choses de l’Esprit. Dans
le
cas le plus favorable, « il se passera bien de cette littérature ». P
3951
ricaine tient les choses de l’Esprit. Dans le cas
le
plus favorable, « il se passera bien de cette littérature ». Plus tar
3952
symphonies, ou autres œuvres destinées à charmer
les
loisirs de personnes oisives et raffinées, réunies pour admirer mutue
3953
ement leur culture », dit Ford. Et tout est dit !
Le
simplisme arrogant avec lequel, de nos jours, on tranche les grandes
3954
me arrogant avec lequel, de nos jours, on tranche
les
grandes questions humaines est une des manifestations les plus frappa
3955
rrogant avec lequel, de nos jours, on tranche les
grandes
questions humaines est une des manifestations les plus frappantes de
3956
des questions humaines est une des manifestations
les
plus frappantes de notre régression. Cette perte du sens de l’âme se
3957
antes de notre régression. Cette perte du sens de
l’
âme se nomme bon sens américain. On en fait quelque chose de jovial et
3958
ophie. Mais, sans qu’on s’en doute, cela en prend
la
place. Les facultés de l’âme, inutilisées, s’atrophient. Pourvu, dit-
3959
s, sans qu’on s’en doute, cela en prend la place.
Les
facultés de l’âme, inutilisées, s’atrophient. Pourvu, dit-on, que sub
3960
en doute, cela en prend la place. Les facultés de
l’
âme, inutilisées, s’atrophient. Pourvu, dit-on, que subsiste le peu de
3961
isées, s’atrophient. Pourvu, dit-on, que subsiste
le
peu de morale nécessaire aux affaires, tout ira bien. (On pense que l
3962
ssaire aux affaires, tout ira bien. (On pense que
les
formes de la morale peuvent exister sans leur substance religieuse.)
3963
aires, tout ira bien. (On pense que les formes de
la
morale peuvent exister sans leur substance religieuse.) L’homme moder
3964
peuvent exister sans leur substance religieuse.)
L’
homme moderne manie les choses de l’âme avec une maladresse de barbare
3965
leur substance religieuse.) L’homme moderne manie
les
choses de l’âme avec une maladresse de barbare. IV. « En être » ou
3966
religieuse.) L’homme moderne manie les choses de
l’
âme avec une maladresse de barbare. IV. « En être » ou ne pas en êt
3967
en être Une fois qu’on a compris à quel point
le
fordisme et l’Esprit sont incompatibles, le monde moderne impose ce d
3968
fois qu’on a compris à quel point le fordisme et
l’
Esprit sont incompatibles, le monde moderne impose ce dilemme : « en ê
3969
point le fordisme et l’Esprit sont incompatibles,
le
monde moderne impose ce dilemme : « en être » ou ne pas en être, c’es
3970
» ou ne pas en être, c’est-à-dire se soumettre à
la
technique et s’abrutir spirituellement — ou se soumettre à l’Esprit,
3971
et s’abrutir spirituellement — ou se soumettre à
l’
Esprit, et tomber presque fatalement dans un anarchisme stérile. 1° Ac
3972
atalement dans un anarchisme stérile. 1° Accepter
la
technique et ses conditions. Dans cette mécanique bien huilée, au mou
3973
nt si régulier qu’il en devient insensible et que
la
fatigue semble disparaître, l’homme s’abandonne à des lois géométriqu
3974
insensible et que la fatigue semble disparaître,
l’
homme s’abandonne à des lois géométriques. Un jeu de chiffres d’horlog
3975
une fois pour toutes et qu’il sent immuable comme
la
mort le restitue au monde vers 5 heures du soir, dans la détresse des
3976
pour toutes et qu’il sent immuable comme la mort
le
restitue au monde vers 5 heures du soir, dans la détresse des dernièr
3977
le restitue au monde vers 5 heures du soir, dans
la
détresse des dernières sirènes. Au monde, c’est-à-dire à une nature d
3978
sirènes. Au monde, c’est-à-dire à une nature dont
l’
usine lui a fait oublier jusqu’à l’existence, et à une liberté qu’il s
3979
ne nature dont l’usine lui a fait oublier jusqu’à
l’
existence, et à une liberté qu’il s’empresse d’aliéner au profit de pl
3980
vec ses désirs réels, et dont il subit docilement
l’
abstraite et commerciale nécessité. Ennui, fatigue, sommeil sans prièr
3981
il sans prière. Cela s’appelle encore vivre. Mais
l’
homme qui était un membre vivant dans le corps de la Nature, lié par l
3982
vre. Mais l’homme qui était un membre vivant dans
le
corps de la Nature, lié par les liens les plus subtils et les plus pr
3983
homme qui était un membre vivant dans le corps de
la
Nature, lié par les liens les plus subtils et les plus profonds à tou
3984
membre vivant dans le corps de la Nature, lié par
les
liens les plus subtils et les plus profonds à tous les autres membres
3985
ant dans le corps de la Nature, lié par les liens
les
plus subtils et les plus profonds à tous les autres membres de la Nat
3986
la Nature, lié par les liens les plus subtils et
les
plus profonds à tous les autres membres de la Nature, choses, bêtes e
3987
iens les plus subtils et les plus profonds à tous
les
autres membres de la Nature, choses, bêtes et anges, — le voici deven
3988
et les plus profonds à tous les autres membres de
la
Nature, choses, bêtes et anges, — le voici devenu sourd à cette harmo
3989
s membres de la Nature, choses, bêtes et anges, —
le
voici devenu sourd à cette harmonie universelle, incapable d’en compr
3990
e harmonie universelle, incapable d’en comprendre
les
correspondances divines et humaines, insensible même à sa déchéance,
3991
ines, insensible même à sa déchéance, abandonné à
la
lutte tragique et absurde des lois économiques et des exigences les p
3992
et absurde des lois économiques et des exigences
les
plus rudimentaires de son corps. Il a perdu le contact avec les chose
3993
s les plus rudimentaires de son corps. Il a perdu
le
contact avec les choses naturelles, et par là même, avec les surnatur
3994
entaires de son corps. Il a perdu le contact avec
les
choses naturelles, et par là même, avec les surnaturelles. Il en ress
3995
avec les choses naturelles, et par là même, avec
les
surnaturelles. Il en ressent une vague et intermittente détresse, — q
3996
ntermittente détresse, — qu’il met d’ailleurs sur
le
compte de sa fatigue. Neurasthénie. La conquête du confort matériel l
3997
lleurs sur le compte de sa fatigue. Neurasthénie.
La
conquête du confort matériel l’a laissé oublier les valeurs de l’espr
3998
ue. Neurasthénie. La conquête du confort matériel
l’
a laissé oublier les valeurs de l’esprit au point qu’il n’éprouve plus
3999
a conquête du confort matériel l’a laissé oublier
les
valeurs de l’esprit au point qu’il n’éprouve plus même cette carence
4000
onfort matériel l’a laissé oublier les valeurs de
l’
esprit au point qu’il n’éprouve plus même cette carence ; seulement, p
4001
térielles, il a laissé se détendre, ou il a cassé
les
ressorts de sa joie : l’effort libre et généreux, le sentiment d’avoi
4002
détendre, ou il a cassé les ressorts de sa joie :
l’
effort libre et généreux, le sentiment d’avoir inventé ou compris par
4003
ressorts de sa joie : l’effort libre et généreux,
le
sentiment d’avoir inventé ou compris par soi-même, la liberté et une
4004
entiment d’avoir inventé ou compris par soi-même,
la
liberté et une certaine durée normale et capricieuse dans le plaisir,
4005
et une certaine durée normale et capricieuse dans
le
plaisir, la conscience de ses besoins et de ses buts propres, humains
4006
ine durée normale et capricieuse dans le plaisir,
la
conscience de ses besoins et de ses buts propres, humains et divins.
4007
s loisirs. Ford lui a donné une auto pour admirer
la
nature entre 17 et 19 heures : vraiment, il ne lui manque plus rien —
4008
ures : vraiment, il ne lui manque plus rien — que
l’
envie. Mauvais travail. Il a perdu le sens religieux, cosmique, de l’e
4009
s rien — que l’envie. Mauvais travail. Il a perdu
le
sens religieux, cosmique, de l’effort humain. Il ne peut plus situer
4010
avail. Il a perdu le sens religieux, cosmique, de
l’
effort humain. Il ne peut plus situer son effort individuel dans le mo
4011
Il ne peut plus situer son effort individuel dans
le
monde, lui attribuer sa véritable valeur. Il sent obscurément que son
4012
t obscurément que son travail est antinaturel. Il
le
méprise ou le subit, mais, jusque dans son repos, il en est l’esclave
4013
que son travail est antinaturel. Il le méprise ou
le
subit, mais, jusque dans son repos, il en est l’esclave. Pour s’être
4014
le subit, mais, jusque dans son repos, il en est
l’
esclave. Pour s’être exclu lui-même de l’ordre de la nature, il est co
4015
l en est l’esclave. Pour s’être exclu lui-même de
l’
ordre de la nature, il est condamné à ne plus saisir que des rapports
4016
esclave. Pour s’être exclu lui-même de l’ordre de
la
nature, il est condamné à ne plus saisir que des rapports abstraits e
4017
à ne plus saisir que des rapports abstraits entre
les
choses. Il ne comprend presque plus rien à l’Univers. Par la techniqu
4018
re les choses. Il ne comprend presque plus rien à
l’
Univers. Par la technique, l’Occidental a prétendu maîtriser la matièr
4019
Il ne comprend presque plus rien à l’Univers. Par
la
technique, l’Occidental a prétendu maîtriser la matière et parvenir à
4020
presque plus rien à l’Univers. Par la technique,
l’
Occidental a prétendu maîtriser la matière et parvenir à une liberté p
4021
r la technique, l’Occidental a prétendu maîtriser
la
matière et parvenir à une liberté plus haute. Or, la technique a révé
4022
matière et parvenir à une liberté plus haute. Or,
la
technique a révélé des exigences telles que l’Esprit ne peut les supp
4023
r, la technique a révélé des exigences telles que
l’
Esprit ne peut les supporter. Il abandonne donc la place, mais c’est p
4024
révélé des exigences telles que l’Esprit ne peut
les
supporter. Il abandonne donc la place, mais c’est pourtant lui seul q
4025
l’Esprit ne peut les supporter. Il abandonne donc
la
place, mais c’est pourtant lui seul qui nous permettrait de jouir de
4026
l qui nous permettrait de jouir de notre liberté.
La
victoire mécanicienne est une victoire à la Pyrrhus. Elle nous donne
4027
erté. La victoire mécanicienne est une victoire à
la
Pyrrhus. Elle nous donne une liberté dont nous ne sommes plus dignes.
4028
dont nous ne sommes plus dignes. Nous perdons, en
l’
acquérant, par l’effort de l’acquérir, les forces mêmes qui nous la fi
4029
es plus dignes. Nous perdons, en l’acquérant, par
l’
effort de l’acquérir, les forces mêmes qui nous la firent désirer. 2°
4030
es. Nous perdons, en l’acquérant, par l’effort de
l’
acquérir, les forces mêmes qui nous la firent désirer. 2° Accepter l’
4031
dons, en l’acquérant, par l’effort de l’acquérir,
les
forces mêmes qui nous la firent désirer. 2° Accepter l’esprit, et se
4032
l’effort de l’acquérir, les forces mêmes qui nous
la
firent désirer. 2° Accepter l’esprit, et ses conditions. Je dis que
4033
es mêmes qui nous la firent désirer. 2° Accepter
l’
esprit, et ses conditions. Je dis que les êtres encore doués de quelqu
4034
Accepter l’esprit, et ses conditions. Je dis que
les
êtres encore doués de quelque sensibilité spirituelle deviennent par
4035
de quelque sensibilité spirituelle deviennent par
le
seul fait de rester eux-mêmes dans un monde fordisé, des anarchistes.
4036
mêmes dans un monde fordisé, des anarchistes. Car
l’
Esprit n’est pas un luxe, n’est pas une faculté destinée à amuser nos
4037
s exigences sont en contradiction avec celles que
le
développement de la technique impose au monde moderne. Ces êtres, d’u
4038
contradiction avec celles que le développement de
la
technique impose au monde moderne. Ces êtres, d’une espèce de plus en
4039
en plus rare, qui savent encore quelque chose de
la
vie profonde, qui voient encore des vérités invisibles, qui gardent,
4040
t considèrent comme un « cas » très spécial, — on
les
écarte des engrenages où ils risqueraient de faire grain de sable. Il
4041
. Ils se réfugient dans ce qu’on pourrait appeler
les
classes privilégiées de l’esprit : fortunes oisives ou misères sans e
4042
u’on pourrait appeler les classes privilégiées de
l’
esprit : fortunes oisives ou misères sans espoir. On en rencontre enco
4043
misères sans espoir. On en rencontre encore parmi
les
jeunes gens, jusqu’au jour où, comme on dit, sans doute par ironie, «
4044
u jour où, comme on dit, sans doute par ironie, «
la
vie les prend ». Irréguliers aux yeux du monde ; la proie d’on ne sai
4045
où, comme on dit, sans doute par ironie, « la vie
les
prend ». Irréguliers aux yeux du monde ; la proie d’on ne sait quelle
4046
vie les prend ». Irréguliers aux yeux du monde ;
la
proie d’on ne sait quelles forces occultes sans doute dangereuses, pu
4047
ces occultes sans doute dangereuses, puisqu’elles
les
rendent inutilisables dans les rouages de la vie moderne. Le triomphe
4048
uses, puisqu’elles les rendent inutilisables dans
les
rouages de la vie moderne. Le triomphe de Ford réduira l’Esprit à dev
4049
les les rendent inutilisables dans les rouages de
la
vie moderne. Le triomphe de Ford réduira l’Esprit à devenir l’apanage
4050
inutilisables dans les rouages de la vie moderne.
Le
triomphe de Ford réduira l’Esprit à devenir l’apanage d’une sorte de
4051
es de la vie moderne. Le triomphe de Ford réduira
l’
Esprit à devenir l’apanage d’une sorte de franc-maçonnerie de quelques
4052
e. Le triomphe de Ford réduira l’Esprit à devenir
l’
apanage d’une sorte de franc-maçonnerie de quelques centaines d’indivi
4053
a bientôt traquée avec la dernière rigueur : avec
la
rigueur de la nécessité — puisqu’elle est inutile au grand dessein ma
4054
uée avec la dernière rigueur : avec la rigueur de
la
nécessité — puisqu’elle est inutile au grand dessein matérialiste de
4055
ueur de la nécessité — puisqu’elle est inutile au
grand
dessein matérialiste de l’Occident. La logique, parlant par la bouche
4056
elle est inutile au grand dessein matérialiste de
l’
Occident. La logique, parlant par la bouche de Ford : « Inutile, donc
4057
tile au grand dessein matérialiste de l’Occident.
La
logique, parlant par la bouche de Ford : « Inutile, donc à détruire.
4058
térialiste de l’Occident. La logique, parlant par
la
bouche de Ford : « Inutile, donc à détruire. » Ford a raison, une foi
4059
e ? « Vous ne pouvez servir Dieu et Mammon », dit
l’
Écriture. ⁂ Je ne pense pas qu’une attitude réactionnaire qui consist
4060
tionnaire qui consisterait à vouloir en revenir à
la
période préindustrielle soit autre chose qu’une échappatoire utopique
4061
uts — si bas soient-ils — d’une civilisation sous
le
poids de laquelle nous risquons de périr. Il se prépare déjà des révo
4062
isme exaspéré, devenu presque fou dans sa prison.
Les
intellectuels d’aujourd’hui ont une tâche pressante : chercher s’il e
4063
le d’échapper au fatal dilemme. Premiers pas vers
la
solution : l’existence du dilemme. Second pas : en poser les termes a
4064
au fatal dilemme. Premiers pas vers la solution :
l’
existence du dilemme. Second pas : en poser les termes avec netteté et
4065
n : l’existence du dilemme. Second pas : en poser
les
termes avec netteté et courage. Pour le reste, je pense que c’est une
4066
en poser les termes avec netteté et courage. Pour
le
reste, je pense que c’est une question de foi. 1. Une enquête fait
4067
oi. 1. Une enquête faite à Genève a révélé que
les
livres les plus lus du grand public sont Ma vie et mon œuvre, de Ford
4068
ne enquête faite à Genève a révélé que les livres
les
plus lus du grand public sont Ma vie et mon œuvre, de Ford et Mon cur
4069
à Genève a révélé que les livres les plus lus du
grand
public sont Ma vie et mon œuvre, de Ford et Mon curé chez les riches,
4070
ont Ma vie et mon œuvre, de Ford et Mon curé chez
les
riches, de Clément Vautel. Dans les pays de langue allemande, son suc
4071
Mon curé chez les riches, de Clément Vautel. Dans
les
pays de langue allemande, son succès est encore plus grand, et de mei
4072
s de langue allemande, son succès est encore plus
grand
, et de meilleure qualité. Je ne parle pas de l’Amérique. 2. Victor C
4073
rand, et de meilleure qualité. Je ne parle pas de
l’
Amérique. 2. Victor Cambon, préface à Henry Ford, Ma vie et mon œuvre
4074
rd, Ma vie et mon œuvre, Paris, Payot, 1925. 3.
L’
Illustration, 20 novembre 1926. 4. Ici et là, la révolte perce : « Ju
4075
L’Illustration, 20 novembre 1926. 4. Ici et là,
la
révolte perce : « Jugendbewegung » en Allemagne ; surréalisme en Fran
4076
ée mystique en Russie. a. Rougemont Denis de, «
Le
péril Ford », Foi et Vie, Paris, février 1928, p. 189-202.
4077
n étoile nervalienne. Je vins à Vienne pour fuir
l’
Amérique. Mais les Viennois avaient fui dans les opérettes de Strauss,
4078
nne. Je vins à Vienne pour fuir l’Amérique. Mais
les
Viennois avaient fui dans les opérettes de Strauss, qu’on ne trouve p
4079
ir l’Amérique. Mais les Viennois avaient fui dans
les
opérettes de Strauss, qu’on ne trouve plus nulle part. Dans les danci
4080
de Strauss, qu’on ne trouve plus nulle part. Dans
les
dancings, un peuple de fêtards modérés, Juifs et ressortissants de la
4081
le de fêtards modérés, Juifs et ressortissants de
la
Petite-Entente, applaudissait chaque soir entre deux airs anglais Le
4082
applaudissait chaque soir entre deux airs anglais
Le
Beau Danube bleu, en commémoration polie d’un passé imaginaire, ou pe
4083
ntissait cette Vienne tout occupée à ressembler à
l’
idée qu’on s’en fait. Le Ring, trop large, ouvert au vent glacial, cré
4084
ut occupée à ressembler à l’idée qu’on s’en fait.
Le
Ring, trop large, ouvert au vent glacial, crée autour du centre de la
4085
ouvert au vent glacial, crée autour du centre de
la
ville une insécurité qui fait songer à la Russie et au sifflement des
4086
ntre de la ville une insécurité qui fait songer à
la
Russie et au sifflement des balles perdues d’une révolution. Sept heu
4087
s perdues d’une révolution. Sept heures du soir :
le
moment était venu d’arrêter le plan de la soirée, et cette promenade
4088
t heures du soir : le moment était venu d’arrêter
le
plan de la soirée, et cette promenade où il y avait juste assez de pa
4089
soir : le moment était venu d’arrêter le plan de
la
soirée, et cette promenade où il y avait juste assez de passants pour
4090
où il y avait juste assez de passants pour qu’on
la
sentît déserte ne me proposait qu’une frileuse nostalgie. Mais qui fa
4091
d’intensité, un état d’âme crée une situation qui
l’
exprime — bien qu’on pense généralement le contraire. Il est très vrai
4092
ion qui l’exprime — bien qu’on pense généralement
le
contraire. Il est très vrai que les notions réaliste et idéaliste du
4093
e généralement le contraire. Il est très vrai que
les
notions réaliste et idéaliste du monde ne sont séparées que par un lé
4094
e ne sont séparées que par un léger décalage dans
la
chronologie de nos sentiments et de nos actes. Donc, n’ayant pas reno
4095
onduit, par une sorte de compromis sentimental, à
l’
Opéra où l’on donnait les Contes d’Hoffmann. Je comprends aujourd’hui
4096
une sorte de compromis sentimental, à l’Opéra où
l’
on donnait les Contes d’Hoffmann. Je comprends aujourd’hui le lien qui
4097
compromis sentimental, à l’Opéra où l’on donnait
les
Contes d’Hoffmann. Je comprends aujourd’hui le lien qui unissait dans
4098
t les Contes d’Hoffmann. Je comprends aujourd’hui
le
lien qui unissait dans mon esprit Vienne et Hoffmann : c’était le sou
4099
sait dans mon esprit Vienne et Hoffmann : c’était
le
souvenir de Gérard de Nerval. Mais je pense que je n’avais même pas p
4100
ncé intérieurement ce nom lorsque je m’assis dans
l’
ombre du théâtre, en retard, un peu ennuyé de me trouver à côté d’une
4101
eu ennuyé de me trouver à côté d’une place vide :
la
jolie femme qu’on attend dans ces circonstances, une fois de plus man
4102
dans ces circonstances, une fois de plus manquait
le
rendez-vous que j’avais demandé au hasard d’arranger. Mais le thème d
4103
us que j’avais demandé au hasard d’arranger. Mais
le
thème de la Barcarolle s’empare de tout mon être — ainsi d’autres dev
4104
is demandé au hasard d’arranger. Mais le thème de
la
Barcarolle s’empare de tout mon être — ainsi d’autres deviennent patr
4105
eul peut-être cette plainte heureuse des violons.
Le
diable sort des parois, noir et blanc, la ravissante héroïne est à so
4106
iolons. Le diable sort des parois, noir et blanc,
la
ravissante héroïne est à son piano, c’est un duo des ténèbres et de l
4107
est à son piano, c’est un duo des ténèbres et de
la
pureté où vibrent par instants les accords d’une harmonie surnaturell
4108
ténèbres et de la pureté où vibrent par instants
les
accords d’une harmonie surnaturelle. Et tout cela chanté dans une lan
4109
p plus loin que moi, il n’entend pas ma question.
L’
envie me prend d’aller le rejoindre. Me voici tout abandonné à l’évoca
4110
’entend pas ma question. L’envie me prend d’aller
le
rejoindre. Me voici tout abandonné à l’évocation d’un amour tragiquem
4111
d d’aller le rejoindre. Me voici tout abandonné à
l’
évocation d’un amour tragiquement mêlé à des forces inconnues et menaç
4112
t mêlé à des forces inconnues et menaçantes. Mais
la
musique est si légère, la voix de la jeune fille si transparente : la
4113
ues et menaçantes. Mais la musique est si légère,
la
voix de la jeune fille si transparente : la mort même en devient moin
4114
çantes. Mais la musique est si légère, la voix de
la
jeune fille si transparente : la mort même en devient moins brutale.
4115
gère, la voix de la jeune fille si transparente :
la
mort même en devient moins brutale. Elle rôde ici comme une tristesse
4116
omme une tristesse amoureuse. Elle n’est plus que
l’
approche d’une grandeur où se perdraient nos amours terrestres dans d’
4117
rrestres dans d’imprévisibles transfigurations, —
l’
heure anxieuse et mélancolique où l’on quitte ce visage aimé pour d’au
4118
igurations, — l’heure anxieuse et mélancolique où
l’
on quitte ce visage aimé pour d’autres plus beaux peut-être, mais inco
4119
es plus beaux peut-être, mais inconnus. Voilà que
la
forme blanche, sous un brusque faisceau de lumière m’apparaît avec le
4120
us un brusque faisceau de lumière m’apparaît avec
le
visage même de mon amour. Je me sens voluptueusement perdre pied. Ver
4121
ix, à côté de moi, c’est une chose singulière que
le
pouvoir de cette musique. Voici que vous êtes tout près de comprendre
4122
ourtant ne se détournait. Comment pouvais-je être
le
seul à l’avoir entendu ? — C’est, me répondit-il, que seul vous venez
4123
se détournait. Comment pouvais-je être le seul à
l’
avoir entendu ? — C’est, me répondit-il, que seul vous venez d’atteind
4124
renez certaines choses par votre souffrance… Mais
le
temps approche où vous n’aurez plus besoin de souffrir pour comprendr
4125
n’aurez plus besoin de souffrir pour comprendre.
Le
faisceau de lumière quitta la scène, un reflet balaya le parterre, le
4126
ir pour comprendre. Le faisceau de lumière quitta
la
scène, un reflet balaya le parterre, le visage de mon voisin m’apparu
4127
ceau de lumière quitta la scène, un reflet balaya
le
parterre, le visage de mon voisin m’apparut, pâle dans son collier de
4128
re quitta la scène, un reflet balaya le parterre,
le
visage de mon voisin m’apparut, pâle dans son collier de barbe noire.
4129
dans son collier de barbe noire. Je sentis que je
l’
avais déjà reconnu. Il portait une cape bleu sombre, à la mode de 1830
4130
déjà reconnu. Il portait une cape bleu sombre, à
la
mode de 1830, qui, à la rigueur, pouvait passer pour une élégance trè
4131
t une cape bleu sombre, à la mode de 1830, qui, à
la
rigueur, pouvait passer pour une élégance très moderne. Il n’y avait
4132
e rien de positivement démodé ; je n’eus même pas
le
sentiment de quoi que ce soit d’immatériel. D’ailleurs le trouble où
4133
ment de quoi que ce soit d’immatériel. D’ailleurs
le
trouble où m’avait jeté la première reconnaissance empêcha ma raison
4134
connaissance empêcha ma raison d’intervenir entre
la
réalité de ma vision et mon cerveau pris au défaut de sa carapace de
4135
rincipes et d’évidences opaques. Nous sortîmes de
l’
Opéra, Gérard de Nerval et moi, sans nous être rien dit d’autre, comme
4136
un échange tacite suffit aux petites décisions de
la
vie quotidienne. Gérard tenait en laisse le fameux homard enrubanné.
4137
ns de la vie quotidienne. Gérard tenait en laisse
le
fameux homard enrubanné. « Cela vexe les Viennois, me dit-il, parce q
4138
en laisse le fameux homard enrubanné. « Cela vexe
les
Viennois, me dit-il, parce qu’ils y voient une façon de me moquer de
4139
n suis pas fâché. » Il y avait peu de monde dans
les
rues. Des jeunes gens avec une femme à chaque bras, l’air de ne pas t
4140
es. Des jeunes gens avec une femme à chaque bras,
l’
air de ne pas trop s’amuser. — Ceci du moins n’a guère changé, dis-je,
4141
ours de Vienne. — Certes, répondit Gérard, malgré
les
apparences, cette vie sentimentale est une des seules réalités qui co
4142
ne des seules réalités qui correspondent encore à
l’
image classique de Vienne. Sentimentalisme capricieux d’ailleurs, dépo
4143
t. Cette ville, qui est toute caresses, a peur de
l’
étreinte… C’est d’ailleurs une chose que je comprends assez bien, ajou
4144
s traversions une rue sillonnée de taxis rapides,
le
homard refusa obstinément de progresser. Gérard dut le prendre sous l
4145
mard refusa obstinément de progresser. Gérard dut
le
prendre sous le bras, et les paires de pinces s’accrochèrent désespér
4146
inément de progresser. Gérard dut le prendre sous
le
bras, et les paires de pinces s’accrochèrent désespérément à ses manc
4147
rogresser. Gérard dut le prendre sous le bras, et
les
paires de pinces s’accrochèrent désespérément à ses manches. De terre
4148
ochèrent désespérément à ses manches. De terreur,
le
homard avait rougi : il conserva toute la nuit une magnifique couleur
4149
erreur, le homard avait rougi : il conserva toute
la
nuit une magnifique couleur orangée. Gérard semblait habitué à ces so
4150
ait habitué à ces sortes de scènes. On reparla de
l’
inconstance viennoise. Gérard l’attribuait à une certaine anémie des s
4151
es. On reparla de l’inconstance viennoise. Gérard
l’
attribuait à une certaine anémie des sentiments, à un manque de caract
4152
e des sentiments, à un manque de caractère aussi.
La
fidélité véritable est une œuvre d’art qui demande un long effort, et
4153
st une œuvre d’art qui demande un long effort, et
les
Viennois sont, par nature et par attitude, des gens fatigués. — Pour
4154
s gens fatigués. — Pour moi, dit Gérard, je situe
l’
amour dans un monde où la question fidélité ou inconstance ne se pose
4155
oi, dit Gérard, je situe l’amour dans un monde où
la
question fidélité ou inconstance ne se pose plus. Vous le savez, je n
4156
ion fidélité ou inconstance ne se pose plus. Vous
le
savez, je n’ai aimé qu’une femme — au plus deux, en y réfléchissant b
4157
en y réfléchissant bien, mais peut-être était-ce
la
même sous deux attributs différents. Toutes les femmes qui m’ont rete
4158
ce la même sous deux attributs différents. Toutes
les
femmes qui m’ont retenu un instant, c’était parce qu’elles évoquaient
4159
raissaient purement mystiques… Mais vous savez, «
les
autres » n’y comprennent jamais rien, dès qu’on aime… Oh ! cette femm
4160
ard, un certain regard, mais j’ai su en retrouver
la
sensation jusque dans les choses — et c’est cela seul qui donna un se
4161
ais j’ai su en retrouver la sensation jusque dans
les
choses — et c’est cela seul qui donna un sens au monde. — Mais je bav
4162
mps. Livrons-nous plutôt à une petite malice dont
l’
idée me vient à la vue de cette vendeuse de fleurs. C’était la petite
4163
ent à la vue de cette vendeuse de fleurs. C’était
la
petite bossue qui vend des roses et des œillets dans la rue de Carint
4164
ite bossue qui vend des roses et des œillets dans
la
rue de Carinthie. Gérard lui paya quelques œillets rouges en lui expl
4165
s œillets rouges en lui expliquant qu’elle devait
les
donner à la première jolie femme qui passerait seule. Nous nous arrêt
4166
vanture de robes de soie, nous amusant à imaginer
les
corps précieux qui les revêtiraient. Vint à pas pressés une jeune fem
4167
e, nous amusant à imaginer les corps précieux qui
les
revêtiraient. Vint à pas pressés une jeune femme, chapeau rouge et ma
4168
e qui se passa fut, hélas, non moins inévitable :
la
jeune femme refusa d’abord les fleurs pour se donner le temps de rega
4169
moins inévitable : la jeune femme refusa d’abord
les
fleurs pour se donner le temps de regarder autour d’elle ; l’intérêt
4170
ne femme refusa d’abord les fleurs pour se donner
le
temps de regarder autour d’elle ; l’intérêt que nous ne sûmes pas dis
4171
ur se donner le temps de regarder autour d’elle ;
l’
intérêt que nous ne sûmes pas dissimuler nous trahit ; elle finit donc
4172
r accepter et vint à nous avec un sourire du type
le
plus courant : « Vous êtes bien gentils, messieurs ! » Il n’y avait p
4173
ard attendait évidemment quelque chose d’imprévu,
la
seule chose contraire à la coutume viennoise. L’enfant était charmant
4174
elque chose d’imprévu, la seule chose contraire à
la
coutume viennoise. L’enfant était charmante, comme elles le sont pres
4175
la seule chose contraire à la coutume viennoise.
L’
enfant était charmante, comme elles le sont presque toutes dans cette
4176
viennoise. L’enfant était charmante, comme elles
le
sont presque toutes dans cette ville, — du type que Gérard et Théo no
4177
uge, souterrain où nous nous engouffrâmes dans un
grand
bruit de saxophones et de cors anglais jouant la Marche de Tannhäuser
4178
and bruit de saxophones et de cors anglais jouant
la
Marche de Tannhäuser en tango, un Balkanique très lisse nous délivra
4179
ue très lisse nous délivra de notre conquête pour
la
durée des danses. Gérard bâillait : « Voilà ce que c’est que de prend
4180
leure qualité : car c’est une pauvre illusion que
le
plaisir qu’on vient chercher ici avec le premier être venu. — Certes,
4181
le premier être venu. — Certes, je comprends que
l’
Europe est en décadence quand je la regarde s’amuser. Je vois se perdr
4182
comprends que l’Europe est en décadence quand je
la
regarde s’amuser. Je vois se perdre ce sens des correspondances secrè
4183
ules faisaient sa dignité humaine, parce qu’elles
le
rattachaient aux buts les plus hauts de notre vie. Ces citadins blasé
4184
humaine, parce qu’elles le rattachaient aux buts
les
plus hauts de notre vie. Ces citadins blasés s’amusent plus grossière
4185
é, avec des femmes qui élargissent des sourires à
la
mesure de votre générosité. Vos boîtes de nuit sont des sortes de dis
4186
automatiques de plaisir. Autant dire que ceux qui
les
fréquentent ne savent plus ce que c’est que le plaisir. Ils prennent
4187
i les fréquentent ne savent plus ce que c’est que
le
plaisir. Ils prennent au hasard des liqueurs qui n’ont pas été prépar
4188
été préparées pour leur soif. Ils ne savent plus
les
signes ni les ressemblances. Aussi l’ennui règne-t-il bruyamment dans
4189
pour leur soif. Ils ne savent plus les signes ni
les
ressemblances. Aussi l’ennui règne-t-il bruyamment dans ces lieux : c
4190
avent plus les signes ni les ressemblances. Aussi
l’
ennui règne-t-il bruyamment dans ces lieux : cet orchestre triomphant
4191
élémentaires : Ce sont vos contemporains livrés à
la
démocratie des plaisirs achetés au détail dans une foire éclatante de
4192
au détail dans une foire éclatante de faux luxe.
La
misère est de voir ici des femmes aussi ravissantes que celle-là qui
4193
nt de gravité et de détachement. Je viens souvent
la
regarder, à cause de la noblesse de sa danse. Je la nomme Clarissa, p
4194
chement. Je viens souvent la regarder, à cause de
la
noblesse de sa danse. Je la nomme Clarissa, parce que cela lui va. Ma
4195
regarder, à cause de la noblesse de sa danse. Je
la
nomme Clarissa, parce que cela lui va. Mais comme c’est odieux qu’une
4196
x qu’une créature aussi parfaite soit touchée par
les
mains outrageusement baguées de ces courtiers alourdis de “Knödl”. En
4197
n’approcherait qu’avec un sentiment religieux de
la
beauté. Mais je crois que l’Orient est devenu fou. Il ne comprend plu
4198
ntiment religieux de la beauté. Mais je crois que
l’
Orient est devenu fou. Il ne comprend plus rien. » Des bugles agonisai
4199
scandalisée par cette atteinte aux lois du genre
le
plus conventionnel qui soit. Gérard la regarda avec une certaine piti
4200
s du genre le plus conventionnel qui soit. Gérard
la
regarda avec une certaine pitié : « Chère enfant, dit-il doucement, p
4201
s de ressemblance, et c’est ce qui vous perdra. »
La
pauvre fille ne comprenant pas, il y eut un moment pénible, comme tou
4202
pre une comédie aux attitudes convenues et donner
l’
air bête aux acteurs. Puis Gérard embrassa paternellement la belle eff
4203
aux acteurs. Puis Gérard embrassa paternellement
la
belle effarée, et nous sortîmes, après avoir délivré le homard qui, l
4204
le effarée, et nous sortîmes, après avoir délivré
le
homard qui, laissé au vestiaire, y était l’objet de vexations diverse
4205
livré le homard qui, laissé au vestiaire, y était
l’
objet de vexations diverses et de curiosités grossières de la part des
4206
s garçons. « Encore une proie inutile lâchée pour
l’
ombre, dit Gérard d’un ton rêveur et malicieux. Mais l’ombre de cette
4207
re, dit Gérard d’un ton rêveur et malicieux. Mais
l’
ombre de cette ville illusoire est la plus douce à mes vagabondages sa
4208
icieux. Mais l’ombre de cette ville illusoire est
la
plus douce à mes vagabondages sans but. Vous savez, je lance mes file
4209
es sans but. Vous savez, je lance mes filets dans
l’
eau des nuits, et quelquefois j’en ramène des animaux aux yeux bizarre
4210
ène des animaux aux yeux bizarres où je sais lire
les
signes. » Comme je ne répondais rien : « Avez-vous sommeil ? demanda-
4211
’endormir. » Se penchant vers moi il prononça : «
La
nuit sera noire et blanche. » Je ressentis quelque émotion à l’ouïe d
4212
oire et blanche. » Je ressentis quelque émotion à
l’
ouïe de cette phrase célèbre. Ensuite, je pensai qu’il arrive aux meil
4213
de se répéter, et que c’était la première fois de
la
soirée que Gérard « faisait du Gérard ». Les cocktails du Moulin-Roug
4214
is de la soirée que Gérard « faisait du Gérard ».
Les
cocktails du Moulin-Rouge avaient peu à peu envahi notre sang. Nos pe
4215
Nos pensées devenaient légères comme des ballons.
La
rumeur de Vienne baignait nos corps fatigués jusqu’à l’insensibilité
4216
eur de Vienne baignait nos corps fatigués jusqu’à
l’
insensibilité et l’Illusion étendait sur toutes choses une aile d’ombr
4217
ait nos corps fatigués jusqu’à l’insensibilité et
l’
Illusion étendait sur toutes choses une aile d’ombre flatteuse aux cap
4218
des oiseaux nous parlèrent, bientôt dissous dans
le
vent. Tout était reflet, passages, allusions. Plus tard, dans un peti
4219
mi-hauteur, puis couvert de glaces qui, reflétant
le
plafond à caissons dorés, l’étendent indéfiniment — c’est un ciel sus
4220
laces qui, reflétant le plafond à caissons dorés,
l’
étendent indéfiniment — c’est un ciel suspendu assez bas sur nos têtes
4221
ché sur cet aquarium de rêves, discourt et décrit
les
images qu’il y découvre. Il y a les ailes du Moulin-Rouge, qui sont l
4222
urt et décrit les images qu’il y découvre. Il y a
les
ailes du Moulin-Rouge, qui sont les bras de Clarissa dans sa danse, e
4223
ouvre. Il y a les ailes du Moulin-Rouge, qui sont
les
bras de Clarissa dans sa danse, et Clarissa c’est aussi l’Anglaise au
4224
e Clarissa dans sa danse, et Clarissa c’est aussi
l’
Anglaise aux citrons de Pompéi, l’Octavie du golfe de Marseille, ou bi
4225
ssa c’est aussi l’Anglaise aux citrons de Pompéi,
l’
Octavie du golfe de Marseille, ou bien plutôt, par je ne sais quelle e
4226
ar je ne sais quelle erreur d’images, — ce serait
la
gravité énigmatique d’Adrienne, mais dans le lointain, Aurélia lui ré
4227
rait la gravité énigmatique d’Adrienne, mais dans
le
lointain, Aurélia lui répond d’un regard pareil. Des visages naissent
4228
es naissent comme des étoiles dans un halo, comme
les
couleurs sous les paupières, s’élargissent, se fondent, se superposen
4229
des étoiles dans un halo, comme les couleurs sous
les
paupières, s’élargissent, se fondent, se superposent. Cinéma des sent
4230
t. Cinéma des sentiments qui montre vivantes dans
la
même minute toutes les incarnations d’un amour dont l’être éternel ap
4231
ts qui montre vivantes dans la même minute toutes
les
incarnations d’un amour dont l’être éternel apparaît peu à peu, à tra
4232
me minute toutes les incarnations d’un amour dont
l’
être éternel apparaît peu à peu, à travers la simultanéité de ses mani
4233
dont l’être éternel apparaît peu à peu, à travers
la
simultanéité de ses manifestations. Gérard parle avec une liberté mag
4234
erté magnifique et angoissante. Il mêle tout dans
le
temps et l’espace. Cent années et tous les visages aimés revivent dan
4235
que et angoissante. Il mêle tout dans le temps et
l’
espace. Cent années et tous les visages aimés revivent dans cette coup
4236
ut dans le temps et l’espace. Cent années et tous
les
visages aimés revivent dans cette coupe de songes avec toutes leurs i
4237
réelles, illusions des reflets qui ne livrent que
le
côté terrestre des choses dont l’autre moitié sera toujours cachée, a
4238
s dont l’autre moitié sera toujours cachée, ainsi
la
Lune et sa moitié d’ombre. Et parce que tout revit en un instant dans
4239
en un instant dans cette vision, il connaît enfin
la
substance véritable et unique de toutes ses amours, il communie avec
4240
s, il communie avec quelque chose d’éternel. Tous
les
drames du monde ne sont que décors mouvants dans la lueur bariolée de
4241
drames du monde ne sont que décors mouvants dans
la
lueur bariolée des sentiments, ils ne sont que reflets, épisodes, sym
4242
ts, ils ne sont que reflets, épisodes, symboles :
le
vrai drame de son destin est ailleurs. Il se met à m’expliquer des si
4243
sent aux pierres précieuses en passant par toutes
les
formes animales. Pour lui, les choses n’ont d’intérêt que par les rap
4244
passant par toutes les formes animales. Pour lui,
les
choses n’ont d’intérêt que par les rapports qu’il leur devine avec la
4245
les. Pour lui, les choses n’ont d’intérêt que par
les
rapports qu’il leur devine avec la réalité extra-terrestre. Il m’ense
4246
térêt que par les rapports qu’il leur devine avec
la
réalité extra-terrestre. Il m’enseigne que la passion seule, par la s
4247
vec la réalité extra-terrestre. Il m’enseigne que
la
passion seule, par la souffrance qu’elle entraîne, nous révèle le sen
4248
errestre. Il m’enseigne que la passion seule, par
la
souffrance qu’elle entraîne, nous révèle le sens réel de nos vies, et
4249
, par la souffrance qu’elle entraîne, nous révèle
le
sens réel de nos vies, et peu à peu, de leurs moindres coïncidences.
4250
es, et peu à peu, de leurs moindres coïncidences.
La
fatigue calme son lyrisme et son exaltation. Il semble se rapprocher
4251
ne barbarie spirituelle. Il plaisante. Il dit que
la
vie ressemble surtout à un film où les épisodes s’appellent par le si
4252
Il dit que la vie ressemble surtout à un film où
les
épisodes s’appellent par le simple jeu des images, se voient par tran
4253
surtout à un film où les épisodes s’appellent par
le
simple jeu des images, se voient par transparence au travers de l’aut
4254
vers de l’autre. Il dit : « Pour celui qui saisit
les
correspondances, chaque geste, chaque minute d’une vie résume cette v
4255
entière et fait allusion à tout ce qu’il y a sous
le
soleil, et même ailleurs. Croyez-moi, ce qu’il faudrait écrire, c’est
4256
mes. Seules des trompes d’autos s’appelaient dans
la
nuit froide. Gérard ne disait presque plus rien ; à peine, de temps e
4257
, qui semblait d’ailleurs endormi. En passant par
la
Freyung, nous vîmes un palais aux fenêtres illuminées. Des autos atte
4258
fenêtres illuminées. Des autos attendaient devant
le
porche grand ouvert. Les chauffeurs faisaient les cent pas dans la ne
4259
lluminées. Des autos attendaient devant le porche
grand
ouvert. Les chauffeurs faisaient les cent pas dans la neige fraîche o
4260
autos attendaient devant le porche grand ouvert.
Les
chauffeurs faisaient les cent pas dans la neige fraîche ou s’accoudai
4261
le porche grand ouvert. Les chauffeurs faisaient
les
cent pas dans la neige fraîche ou s’accoudaient à la banquette d’une
4262
uvert. Les chauffeurs faisaient les cent pas dans
la
neige fraîche ou s’accoudaient à la banquette d’une boutique à « Würs
4263
cent pas dans la neige fraîche ou s’accoudaient à
la
banquette d’une boutique à « Würstel » où nous nous arrêtâmes. Au lég
4264
fflement du bec de gaz sans manchon qui éclairait
la
boutique, et que le vent menaçait d’éteindre à chaque instant, le hom
4265
az sans manchon qui éclairait la boutique, et que
le
vent menaçait d’éteindre à chaque instant, le homard se réveilla. Gér
4266
que le vent menaçait d’éteindre à chaque instant,
le
homard se réveilla. Gérard m’expliqua qu’il en était ainsi chaque nui
4267
m’expliqua qu’il en était ainsi chaque nuit, que
l’
animal devenait nerveux et que depuis quelques semaines, il avait dû l
4268
veux et que depuis quelques semaines, il avait dû
le
mettre au caviar. Il en demanda donc une petite portion et la fit pre
4269
caviar. Il en demanda donc une petite portion et
la
fit prendre au homard avec toutes sortes de soins. Les chauffeurs reg
4270
it prendre au homard avec toutes sortes de soins.
Les
chauffeurs regardaient d’un œil las, trop las pour s’étonner. Transi,
4271
si, je me balançais d’un pied sur l’autre dans de
la
neige fondante, tout en croquant une de ces saucisses à la moutarde q
4272
fondante, tout en croquant une de ces saucisses à
la
moutarde qu’on appelle ici « Frankfurter » et ailleurs « Wienerli ».
4273
« Frankfurter » et ailleurs « Wienerli ». Soudain
les
autos se mirent à ronfler. Par le grand escalier, au fond de la cour
4274
rli ». Soudain les autos se mirent à ronfler. Par
le
grand escalier, au fond de la cour du palais, descendaient les invité
4275
». Soudain les autos se mirent à ronfler. Par le
grand
escalier, au fond de la cour du palais, descendaient les invités du b
4276
rent à ronfler. Par le grand escalier, au fond de
la
cour du palais, descendaient les invités du bal. Des femmes sans chap
4277
alier, au fond de la cour du palais, descendaient
les
invités du bal. Des femmes sans chapeau couraient vers les voitures,
4278
és du bal. Des femmes sans chapeau couraient vers
les
voitures, les hommes s’inclinaient pour des baise-mains silencieux et
4279
femmes sans chapeau couraient vers les voitures,
les
hommes s’inclinaient pour des baise-mains silencieux et mécaniques. J
4280
à d’anciens Habsbourg, des comtes athlétiques et
la
silhouette échassière de la jeune duchesse de Clam-Clamannsfeld dont
4281
comtes athlétiques et la silhouette échassière de
la
jeune duchesse de Clam-Clamannsfeld dont le manteau de velours rose l
4282
re de la jeune duchesse de Clam-Clamannsfeld dont
le
manteau de velours rose laissait découvertes des jambes extrêmement h
4283
ndis que sa tête frisée jetait des insolences sur
les
chapeaux noirs de ses cavaliers. Tout cela s’empila dans des autos ;
4284
autos ; en dix minutes, il n’y eut plus personne,
la
place s’éteignit. Mais Gérard ? Ses yeux s’étaient fixés intensément,
4285
Gérard ? Ses yeux s’étaient fixés intensément, à
la
sortie des invités, sur une femme qui s’en allait toute seule vers un
4286
femme qui s’en allait toute seule vers une auto à
l’
écart des autres. Une femme aux cheveux noirs en bandeaux, au teint pâ
4287
mme aux cheveux noirs en bandeaux, au teint pâle,
l’
air d’autrefois. Il avait murmuré : Marie Pleyel. Quand la place se fu
4288
autrefois. Il avait murmuré : Marie Pleyel. Quand
la
place se fut apaisée, je m’aperçus que j’étais seul. Une dernière aut
4289
olument silencieuse fila devant moi ; je reconnus
la
voiture de la femme aux bandeaux noirs. Mais les rideaux étaient bais
4290
ieuse fila devant moi ; je reconnus la voiture de
la
femme aux bandeaux noirs. Mais les rideaux étaient baissés. Déjà on c
4291
s la voiture de la femme aux bandeaux noirs. Mais
les
rideaux étaient baissés. Déjà on criait les journaux du matin, des tr
4292
Mais les rideaux étaient baissés. Déjà on criait
les
journaux du matin, des triporteurs passèrent à toute vitesse, m’éclab
4293
emont Denis de, « Un soir à Vienne avec Gérard »,
La
Nouvelle Semaine artistique et littéraire, Neuchâtel, 24 mars 1928, p
4294
nt pour tous ceux que Jules Verne passionne. Pour
les
autres, divertissant et spirituel. Pourquoi ne veut-on voir en Jules
4295
un précurseur ? Jules Verne est un créateur, dont
les
inventions se suffisent et suffisent à notre joie. Ce ne sont pas les
4296
ffisent et suffisent à notre joie. Ce ne sont pas
les
savants qui sont prophètes, mais les poètes. Or Jules Verne fut poète
4297
ne sont pas les savants qui sont prophètes, mais
les
poètes. Or Jules Verne fut poète avant tout — et ce livre le fera bie
4298
Or Jules Verne fut poète avant tout — et ce livre
le
fera bien voir aux sceptiques. Il a aimé la science parce qu’elle ouv
4299
livre le fera bien voir aux sceptiques. Il a aimé
la
science parce qu’elle ouvre des perspectives d’évasion — où seuls les
4300
’elle ouvre des perspectives d’évasion — où seuls
les
poètes savent se perdre. Et c’est bien sa plus grande ruse que d’avoi
4301
es poètes savent se perdre. Et c’est bien sa plus
grande
ruse que d’avoir emprunté le véhicule à la mode pour conduire des mil
4302
est bien sa plus grande ruse que d’avoir emprunté
le
véhicule à la mode pour conduire des millions de lecteurs dans un mon
4303
us grande ruse que d’avoir emprunté le véhicule à
la
mode pour conduire des millions de lecteurs dans un monde purement fa
4304
de lecteurs dans un monde purement fantaisiste où
les
équations tyranniques deviennent de merveilleux calembours, où les sa
4305
anniques deviennent de merveilleux calembours, où
les
savants sont réellement dans la lune, ou bien descendent au fond des
4306
x calembours, où les savants sont réellement dans
la
lune, ou bien descendent au fond des mers adorer la Liberté et jouer
4307
lune, ou bien descendent au fond des mers adorer
la
Liberté et jouer de l’orgue sous les yeux de poulpes géants. Jules Ve
4308
nt au fond des mers adorer la Liberté et jouer de
l’
orgue sous les yeux de poulpes géants. Jules Verne a véritablement sou
4309
oulpes géants. Jules Verne a véritablement soumis
la
science à la poésie. Et l’on ne veut voir que jolis livres d’étrennes
4310
. Jules Verne a véritablement soumis la science à
la
poésie. Et l’on ne veut voir que jolis livres d’étrennes dans les œuv
4311
a véritablement soumis la science à la poésie. Et
l’
on ne veut voir que jolis livres d’étrennes dans les œuvres du plus gr
4312
’on ne veut voir que jolis livres d’étrennes dans
les
œuvres du plus grand créateur de mythes modernes, du seul écrivain do
4313
e jolis livres d’étrennes dans les œuvres du plus
grand
créateur de mythes modernes, du seul écrivain dont l’influence soit c
4314
réateur de mythes modernes, du seul écrivain dont
l’
influence soit comparable à celle du cinéma ! Claretie raconte que les
4315
mparable à celle du cinéma ! Claretie raconte que
les
détenus des maisons de correction se jetaient sur ces volumes « au tr
4316
ces volumes « au travers desquels ils respiraient
l’
air du monde ». N’en ferons-nous pas autant, emprisonnés que nous somm
4317
que nous sommes dans une civilisation qui, selon
l’
expression de Jules Verne désabusé « emprunte l’aspect d’une nécessité
4318
n l’expression de Jules Verne désabusé « emprunte
l’
aspect d’une nécessité » (et dans la bouche de ce libertaire, cela con
4319
sé « emprunte l’aspect d’une nécessité » (et dans
la
bouche de ce libertaire, cela constituait un jugement !) Serons-nous
4320
s-nous longtemps encore dupes d’une conception de
la
littérature si pédante qu’elle exclut un de nos plus grands conteurs
4321
térature si pédante qu’elle exclut un de nos plus
grands
conteurs sous prétexte qu’il n’est styliste ni psychologue ? Laissero
4322
us Jules Verne aux enfants ? J’allais oublier que
la
littérature enfantine est le dernier bateau. Pour ce coup, voilà qui
4323
bord, je soupçonne que ce bateau n’est autre que
La
Liberté. ar. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Marguerite Allot
4324
on, Traité du style (août 1928)as Ce n’est pas
le
seul talent de M. Aragon qui le rendrait digne à mes yeux, de considé
4325
s Ce n’est pas le seul talent de M. Aragon qui
le
rendrait digne à mes yeux, de considération. J’admire autant le talen
4326
gne à mes yeux, de considération. J’admire autant
le
talent de celui qui mène 60 parties d’échecs simultanément, et c’est
4327
x écrivains que des révélations, ou mieux, qu’ils
les
favorisent par leurs écrits. Aragon, qui a le sens de l’amour, a dit
4328
ls les favorisent par leurs écrits. Aragon, qui a
le
sens de l’amour, a dit conséquemment beaucoup de choses vraies (belle
4329
risent par leurs écrits. Aragon, qui a le sens de
l’
amour, a dit conséquemment beaucoup de choses vraies (belles). Il est
4330
ies (belles). Il est même un des très rares parmi
les
jeunes qui ait vraiment donné quelque chose. C’est pourquoi j’ai lu c
4331
econde partie du livre est admirable ; il suffit.
Le
titre ne ment pas ; ce livre traite du style, à coups d’exemples qui
4332
aite du style, à coups d’exemples qui méritent de
l’
être. Et l’on voit bien ici qu’Aragon dépasse ces surréalistes, ces or
4333
le, à coups d’exemples qui méritent de l’être. Et
l’
on voit bien ici qu’Aragon dépasse ces surréalistes, ces orthodoxes de
4334
ragon dépasse ces surréalistes, ces orthodoxes de
l’
absurde confondu avec le poétique, ou ces disciples de Rimbaud, ou enf
4335
listes, ces orthodoxes de l’absurde confondu avec
le
poétique, ou ces disciples de Rimbaud, ou enfin ces littérateurs anti
4336
ces littérateurs antilittéraires, ces « Messieurs
les
Nymphes ». Mais donner l’air bête à ceux qui le sont en créant une be
4337
aires, ces « Messieurs les Nymphes ». Mais donner
l’
air bête à ceux qui le sont en créant une belle œuvre serait, par exem
4338
les Nymphes ». Mais donner l’air bête à ceux qui
le
sont en créant une belle œuvre serait, par exemple, plus efficace. Ar
4339
e voix du troupeau. C’est sans doute son rôle. Il
le
tient magnifiquement. Mais qu’on nous laisse chercher plus loin, dans
4340
ous laisse chercher plus loin, dans ce silence où
l’
on accède à des objets qui enfin valent le respect. as. Rougemont D
4341
ence où l’on accède à des objets qui enfin valent
le
respect. as. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Aragon, Traité d
4342
Pierre Naville,
La
Révolution et les intellectuels (novembre 1928)at Les derniers écr
4343
Pierre Naville, La Révolution et
les
intellectuels (novembre 1928)at Les derniers écrits des surréalist
4344
olution et les intellectuels (novembre 1928)at
Les
derniers écrits des surréalistes débattent la question de savoir s’il
4345
Les derniers écrits des surréalistes débattent
la
question de savoir s’ils vont se taire ou non. Mais leur silence ne d
4346
ux-mêmes. Ils se tournent donc naturellement vers
l’
action, c’est-à-dire — nous sommes en France — vers la politique. Or c
4347
tion, c’est-à-dire — nous sommes en France — vers
la
politique. Or ces ennemis de toute littérature voient leurs avances d
4348
e littérature voient leurs avances dédaignées par
les
communistes, gens d’action à jugements simples, qui les trouvent trop
4349
mmunistes, gens d’action à jugements simples, qui
les
trouvent trop littérateurs. Rien d’étonnant à cela dans une époque où
4350
ateurs. Rien d’étonnant à cela dans une époque où
les
valeurs de l’esprit sont en pratique universellement méprisées. Mais
4351
étonnant à cela dans une époque où les valeurs de
l’
esprit sont en pratique universellement méprisées. Mais les surréalist
4352
sont en pratique universellement méprisées. Mais
les
surréalistes ont leur responsabilité là-dedans ; leur défense de l’es
4353
t leur responsabilité là-dedans ; leur défense de
l’
esprit s’est bornée jusqu’ici à une rhétorique très brillante contre u
4354
détesté, mais dont ils participent plus qu’ils ne
le
croient. Certes il était urgent de faire la critique de « cette réali
4355
ls ne le croient. Certes il était urgent de faire
la
critique de « cette réalité de premier plan qui nous empêche de bouge
4356
s cette réalité. Il est certain que s’ils avaient
le
courage de se soumettre au concret de l’esprit, ils comprendraient qu
4357
avaient le courage de se soumettre au concret de
l’
esprit, ils comprendraient que le « service dans le temple » s’accommo
4358
re au concret de l’esprit, ils comprendraient que
le
« service dans le temple » s’accommode mal de tant de gesticulations,
4359
’esprit, ils comprendraient que le « service dans
le
temple » s’accommode mal de tant de gesticulations, de gros mots et d
4360
d dont ils n’ont pas encore renoncé à chatouiller
le
snobisme. at. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Pierre Naville,
4361
gemont Denis de, « [Compte rendu] Pierre Naville,
La
Révolution et les intellectuels », Bibliothèque universelle et Revue
4362
« [Compte rendu] Pierre Naville, La Révolution et
les
intellectuels », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève
4363
André Malraux,
Les
Conquérants (décembre 1928)au Ce récit de la révolution cantonaise
4364
Les Conquérants (décembre 1928)au Ce récit de
la
révolution cantonaise en 1925 nous place au nœud du monde moderne : o
4365
on y voit s’affronter en quelques hommes d’action
les
forces caractéristiques du temps — argent, races — et ses rares passi
4366
— argent, races — et ses rares passions, qui sont
la
domination et la démolition, l’organisation et le sabotage. On y déco
4367
et ses rares passions, qui sont la domination et
la
démolition, l’organisation et le sabotage. On y découvre le jeu des t
4368
assions, qui sont la domination et la démolition,
l’
organisation et le sabotage. On y découvre le jeu des tempéraments qui
4369
la domination et la démolition, l’organisation et
le
sabotage. On y découvre le jeu des tempéraments qui fait opter ces ch
4370
ion, l’organisation et le sabotage. On y découvre
le
jeu des tempéraments qui fait opter ces chefs pour l’une ou l’autre d
4371
ires : elles représentent deux manières de sentir
l’
unité d’une époque obsédée d’action.) Autour de ces individus — Chinoi
4372
mentateurs, Juifs russes méthodiques — s’émeuvent
les
masses de coolies, d’ouvriers armés, toute cette Chine qui s’éveille
4373
, toute cette Chine qui s’éveille au sein même de
la
lutte qui met aux prises l’Europe et le monde du Pacifique. On retrou
4374
eille au sein même de la lutte qui met aux prises
l’
Europe et le monde du Pacifique. On retrouvera ici beaucoup des idées
4375
n même de la lutte qui met aux prises l’Europe et
le
monde du Pacifique. On retrouvera ici beaucoup des idées que la Tenta
4376
cifique. On retrouvera ici beaucoup des idées que
la
Tentation de l’Occident exprimait sous une forme abstraite et poétiqu
4377
ouvera ici beaucoup des idées que la Tentation de
l’
Occident exprimait sous une forme abstraite et poétique. Mais cette fo
4378
en hommes, en meurtres, en décrets. Qu’il décrive
la
vie intense et instable des acteurs du drame, l’aspect quotidien et m
4379
la vie intense et instable des acteurs du drame,
l’
aspect quotidien et mystérieux d’une révolution de rues, ou la palpita
4380
tidien et mystérieux d’une révolution de rues, ou
la
palpitation inquiétante des villes chinoises, Malraux fait preuve d’u
4381
lraux fait preuve d’un art du détail où se révèle
le
vrai romancier. On serait parfois tenté de le rapprocher de Morand, m
4382
èle le vrai romancier. On serait parfois tenté de
le
rapprocher de Morand, mais il est plus nerveux, sans doute aussi plus
4383
de faits, une discussion d’idées. Il est surtout
la
description d’une angoisse que le nihilisme de M. Malraux veut sans i
4384
Il est surtout la description d’une angoisse que
le
nihilisme de M. Malraux veut sans issues : l’angoisse que fait naître
4385
que le nihilisme de M. Malraux veut sans issues :
l’
angoisse que fait naître au cœur du monde contemporain l’absurdité de
4386
sse que fait naître au cœur du monde contemporain
l’
absurdité de ses ambitions. Écoutons Garine, l’un de ces chefs (c’est
4387
l’un de ces chefs (c’est lui qui parle au nom de
l’
auteur, je pense) : « Il me semble que je lutte contre l’absurde humai
4388
r, je pense) : « Il me semble que je lutte contre
l’
absurde humain, en faisant ce que je fais ici… » L’évasion dans l’acti
4389
’absurde humain, en faisant ce que je fais ici… »
L’
évasion dans l’action — révolutionnaire ou autre — rêvée par tant de j
4390
, en faisant ce que je fais ici… » L’évasion dans
l’
action — révolutionnaire ou autre — rêvée par tant de jeunes hommes de
4391
ire ou autre — rêvée par tant de jeunes hommes de
l’
après-guerre, Malraux l’a vécue, avant de la décrire ; et cet aveu de
4392
tant de jeunes hommes de l’après-guerre, Malraux
l’
a vécue, avant de la décrire ; et cet aveu de Garine est décisif : « L
4393
es de l’après-guerre, Malraux l’a vécue, avant de
la
décrire ; et cet aveu de Garine est décisif : « La Révolution… tout c
4394
a décrire ; et cet aveu de Garine est décisif : «
La
Révolution… tout ce qui n’est pas elle est pire qu’elle… » Expérience
4395
st pas elle est pire qu’elle… » Expérience faite,
l’
absurde retrouve ses droits. C’est ainsi que, masqué par l’enchaînemen
4396
retrouve ses droits. C’est ainsi que, masqué par
l’
enchaînement passionnant de l’action, il se dégage de ce roman un dése
4397
nsi que, masqué par l’enchaînement passionnant de
l’
action, il se dégage de ce roman un désespoir sec, sans grimace. Cette
4398
angereux. Mais qu’elles s’appliquent à distinguer
les
forces déterminantes de l’heure, à les exprimer en un tel drame, et v
4399
pliquent à distinguer les forces déterminantes de
l’
heure, à les exprimer en un tel drame, et voici André Malraux au premi
4400
distinguer les forces déterminantes de l’heure, à
les
exprimer en un tel drame, et voici André Malraux au premier rang des
4401
ugemont Denis de, « [Compte rendu] André Malraux,
Les
Conquérants », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève,
4402
II de Bavière ou Hamlet-Roi (décembre 1928)av
L’
histoire de Louis II exalte et déçoit l’imagination. On comprend que c
4403
928)av L’histoire de Louis II exalte et déçoit
l’
imagination. On comprend que ce doux-amer ait séduit Barrès, mais ne l
4404
prend que ce doux-amer ait séduit Barrès, mais ne
l’
ait point trompé : « Avec son beau regard de rêve, — lit-on dans l’Enn
4405
é : « Avec son beau regard de rêve, — lit-on dans
l’
Ennemi des Lois — son expression amoureuse du silence et cet ensemble
4406
s ses châteaux en Espagne lamentablement réalisés
les
témoignages de l’éthique de cet « illustre réfractaire ». N’est-ce po
4407
spagne lamentablement réalisés les témoignages de
l’
éthique de cet « illustre réfractaire ». N’est-ce point trop demander
4408
lès n’hésite pas à baptiser son héros « prince de
l’
illusion et de la solitude ». Mais un prince rêveur n’est pas forcémen
4409
à baptiser son héros « prince de l’illusion et de
la
solitude ». Mais un prince rêveur n’est pas forcément prince du rêve
4410
ince du rêve ; et par ailleurs ce livre sait bien
le
laisser voir. La qualité de l’illusion dont se nourrit Louis II n’est
4411
par ailleurs ce livre sait bien le laisser voir.
La
qualité de l’illusion dont se nourrit Louis II n’est ni aussi pure ni
4412
ce livre sait bien le laisser voir. La qualité de
l’
illusion dont se nourrit Louis II n’est ni aussi pure ni aussi rare qu
4413
n’est ni aussi pure ni aussi rare qu’on voudrait
l’
imaginer. Il reste qu’il a voulu la vivre et qu’il l’a pu, étant roi.
4414
qu’on voudrait l’imaginer. Il reste qu’il a voulu
la
vivre et qu’il l’a pu, étant roi. Il offre ainsi l’image d’un romanti
4415
maginer. Il reste qu’il a voulu la vivre et qu’il
l’
a pu, étant roi. Il offre ainsi l’image d’un romantisme assez morose ;
4416
vivre et qu’il l’a pu, étant roi. Il offre ainsi
l’
image d’un romantisme assez morose ; mais à grande échelle. M. de Pour
4417
nsi l’image d’un romantisme assez morose ; mais à
grande
échelle. M. de Pourtalès a su rehausser le tableau avec beaucoup d’ad
4418
à grande échelle. M. de Pourtalès a su rehausser
le
tableau avec beaucoup d’adresse et de charme : Wagner et Nietzsche lu
4419
t Nietzsche lui fournissent deux tons fermes dont
le
jeu donne aux nuances assez troubles du personnage central une résona
4420
it par hasard de moyens d’action puissants : s’il
les
a gâchés, c’est qu’il a eu peur, et s’il a eu peur c’est qu’il n’a pa
4421
, et s’il a eu peur c’est qu’il n’a pas su aimer.
Le
sujet de Liszt et de Chopin, c’était l’amour, donc la douleur ; ici,
4422
su aimer. Le sujet de Liszt et de Chopin, c’était
l’
amour, donc la douleur ; ici, c’est l’absence d’amour, par refus de so
4423
ujet de Liszt et de Chopin, c’était l’amour, donc
la
douleur ; ici, c’est l’absence d’amour, par refus de souffrir. Mais c
4424
in, c’était l’amour, donc la douleur ; ici, c’est
l’
absence d’amour, par refus de souffrir. Mais chez un être raffiné, la
4425
par refus de souffrir. Mais chez un être raffiné,
la
peur d’étreindre aboutit à l’amour de soi dans « l’illusion ». Sachon
4426
ez un être raffiné, la peur d’étreindre aboutit à
l’
amour de soi dans « l’illusion ». Sachons gré à M. de Pourtalès de ce
4427
peur d’étreindre aboutit à l’amour de soi dans «
l’
illusion ». Sachons gré à M. de Pourtalès de ce qu’il préfère parler d
4428
oseraient de moins jolis mots ; mais ce n’est pas
la
moindre habileté du biographe. D’ailleurs, réussir un livre attrayant
4429
e n’était pas un problème aisé : Guy de Pourtalès
l’
a résolu d’une façon fort adroite mais non moins franche. av. Rouge
4430
Daniel-Rops,
Le
Prince menteur (décembre 1928)aw Au hasard d’une rencontre, l’aute
4431
r (décembre 1928)aw Au hasard d’une rencontre,
l’
auteur de ce récit se lie avec un inconnu qui se dit prince russe et e
4432
e dit prince russe et entretient autour de sa vie
le
plus grand mystère. Cependant il aime à raconter certaines scènes ter
4433
ince russe et entretient autour de sa vie le plus
grand
mystère. Cependant il aime à raconter certaines scènes terrifiantes d
4434
aime à raconter certaines scènes terrifiantes de
la
révolution : il a été condamné à mort, il s’est évadé, on le traque à
4435
on : il a été condamné à mort, il s’est évadé, on
le
traque à Paris même… Il subjugue le jeune Français par ces évocations
4436
est évadé, on le traque à Paris même… Il subjugue
le
jeune Français par ces évocations et l’espèce de fièvre qu’il y appor
4437
subjugue le jeune Français par ces évocations et
l’
espèce de fièvre qu’il y apporte. Mais plusieurs incidents éveillent l
4438
’il y apporte. Mais plusieurs incidents éveillent
les
soupçons du « petit-bourgeois » qu’il a choisi comme public, et brusq
4439
ois » qu’il a choisi comme public, et brusquement
le
mot éclate : menteur. Feintes et esquives adroites du « prince » qui
4440
es du « prince » qui disparaît, néanmoins. Enfin,
le
Français reçoit une lettre trouvée sur le corps de son ami suicidé, p
4441
Enfin, le Français reçoit une lettre trouvée sur
le
corps de son ami suicidé, pathétique confession qui doit expliquer sa
4442
oit expliquer sa mort et qui est aussi fausse que
le
reste. Ce mensonge qui va jusqu’à la mort, inclusivement, n’étonnera
4443
i fausse que le reste. Ce mensonge qui va jusqu’à
la
mort, inclusivement, n’étonnera pas ceux qui ont connu de semblables
4444
pas ceux qui ont connu de semblables mythomanes.
Le
cas méritait d’être exposé. Je regrette seulement que Daniel-Rops se
4445
courte nouvelle, d’ailleurs assez dense, et dont
le
mérite est d’être simple et précise dans l’exposé, sans rien simplifi
4446
dont le mérite est d’être simple et précise dans
l’
exposé, sans rien simplifier ni préciser à l’excès dans le caractère.
4447
dans l’exposé, sans rien simplifier ni préciser à
l’
excès dans le caractère. Daniel-Rops voit bien que l’épithète de mytho
4448
, sans rien simplifier ni préciser à l’excès dans
le
caractère. Daniel-Rops voit bien que l’épithète de mythomane n’épuise
4449
xcès dans le caractère. Daniel-Rops voit bien que
l’
épithète de mythomane n’épuise pas une question dont l’importance dépa
4450
thète de mythomane n’épuise pas une question dont
l’
importance dépasse celle du cas pathologique. Il y a dans ce culte de
4451
elle du cas pathologique. Il y a dans ce culte de
la
mythomanie qu’on a vu sévir parmi certains milieux d’avant-garde une
4452
, parce qu’elle constitue une tentation pour tous
les
poètes. Le désir de « plus vrai que le vrai » surexcité par l’insolen
4453
lle constitue une tentation pour tous les poètes.
Le
désir de « plus vrai que le vrai » surexcité par l’insolence d’une ps
4454
pour tous les poètes. Le désir de « plus vrai que
le
vrai » surexcité par l’insolence d’une psychologie qui rabaisse tout,
4455
désir de « plus vrai que le vrai » surexcité par
l’
insolence d’une psychologie qui rabaisse tout, peut conduire à préfére
4456
as, qu’une déformation de cette réalité détestée.
Le
mythomane brouille les cartes mais reste dans le jeu. Jusque dans la
4457
de cette réalité détestée. Le mythomane brouille
les
cartes mais reste dans le jeu. Jusque dans la ruse que ses mensonges
4458
Le mythomane brouille les cartes mais reste dans
le
jeu. Jusque dans la ruse que ses mensonges exigent, il se reconnaît t
4459
le les cartes mais reste dans le jeu. Jusque dans
la
ruse que ses mensonges exigent, il se reconnaît tributaire de la « vé
4460
mensonges exigent, il se reconnaît tributaire de
la
« vérité trop évidente » ; alors qu’il la faudrait, sans rien fausser
4461
aire de la « vérité trop évidente » ; alors qu’il
la
faudrait, sans rien fausser, transcender… aw. Rougemont Denis de,
4462
Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Daniel-Rops,
Le
Prince menteur », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genèv
4463
» Paul Valéry. Stéphane est maniaque, comme tous
les
jeunes gens de sa génération. Seulement chez lui, cela ne s’est pas p
4464
. Seulement chez lui, cela ne s’est pas porté sur
les
autos. Il préfère s’intéresser aux divers types humains. Mais on lui
4465
ord ; accepte d’attendre comme un enfant sage que
le
monde lui donne, en son temps, sa petite part. On lui a expliqué qu’i
4466
, sa petite part. On lui a expliqué qu’il fallait
la
mériter et tâcher de devenir quelqu’un. En d’autres termes, on lui co
4467
» comme parle un de nos classiques. Repoussé par
le
monde parce qu’il n’est pas encore quelqu’un, Stéphane cherche à savo
4468
r un moi qui feint toujours de se cacher derrière
le
feuillet suivant, entraîne le lecteur par ruse jusqu’à la dernière pa
4469
se cacher derrière le feuillet suivant, entraîne
le
lecteur par ruse jusqu’à la dernière page, et là déclare froidement n
4470
roidement ne pas exister. Non : il a remarqué que
l’
époque peut être définie par l’abondance des autobiographies, mais aus
4471
il a remarqué que l’époque peut être définie par
l’
abondance des autobiographies, mais aussi bien par celle des miroirs.
4472
hane passe des heures entières à se regarder dans
les
yeux. Il varie sur son visage les jeux de lumière et de sentiments. I
4473
e regarder dans les yeux. Il varie sur son visage
les
jeux de lumière et de sentiments. Il découvre une sorte de rire au co
4474
ouvre une sorte de rire au coin de sa bouche dans
les
moments de pire découragement ; et beaucoup d’autres hiatus de ce gen
4475
nt ; et beaucoup d’autres hiatus de ce genre, qui
l’
intriguent à n’en pas finir. Quand il est très fatigué, il veut voir e
4476
é sur lui-même il se perd en méditations éléates.
Le
sommeil l’en délivre. Au matin il court se voir : il est laid. Lâchem
4477
ême il se perd en méditations éléates. Le sommeil
l’
en délivre. Au matin il court se voir : il est laid. Lâchement il se p
4478
l se prend en pitié. Ces séances lui font du mal,
l’
énervent, mais l’aveu qu’il en consent l’attache plus secrètement à so
4479
ié. Ces séances lui font du mal, l’énervent, mais
l’
aveu qu’il en consent l’attache plus secrètement à son aventure. Nous
4480
du mal, l’énervent, mais l’aveu qu’il en consent
l’
attache plus secrètement à son aventure. Nous vivons dans un décor fl
4481
ne sa tête, son portrait en pied. Il se voit dans
l’
acte de se raser, de se baigner ; son image descend en face de lui par
4482
se baigner ; son image descend en face de lui par
l’
ascenseur, elle le suit au long des trottoirs, il l’aperçoit entre des
4483
mage descend en face de lui par l’ascenseur, elle
le
suit au long des trottoirs, il l’aperçoit entre des souliers, des éti
4484
ascenseur, elle le suit au long des trottoirs, il
l’
aperçoit entre des souliers, des étiquettes, des poupées ; elle le pré
4485
des souliers, des étiquettes, des poupées ; elle
le
précède au restaurant, le nargue brièvement au passage des autos, le
4486
tes, des poupées ; elle le précède au restaurant,
le
nargue brièvement au passage des autos, le ridiculise chez le coiffeu
4487
urant, le nargue brièvement au passage des autos,
le
ridiculise chez le coiffeur. Déjà, c’est avec une sorte d’angoisse qu
4488
ièvement au passage des autos, le ridiculise chez
le
coiffeur. Déjà, c’est avec une sorte d’angoisse qu’il la recherche. I
4489
feur. Déjà, c’est avec une sorte d’angoisse qu’il
la
recherche. Il veut se voir tel qu’il est parmi les autres. Mais s’il
4490
la recherche. Il veut se voir tel qu’il est parmi
les
autres. Mais s’il lui arrive de prendre son image pour celle de n’imp
4491
t de cette apparence, qu’il doute de sa réalité.
Le
mystère de voir ses yeux l’épouvante. Il y cherche une révélation et
4492
doute de sa réalité. Le mystère de voir ses yeux
l’
épouvante. Il y cherche une révélation et n’y trouve que le désir d’un
4493
te. Il y cherche une révélation et n’y trouve que
le
désir d’une révélation. Peut-on s’hypnotiser avec son propre regard ?
4494
te incantation à soi-même qui pourrait lui rendre
la
certitude d’être. Mais il s’épuise dans une perspective de reflets qu
4495
reflets qui vont en diminuant vertigineusement et
l’
égarent dans sa nuit. Je saute quelques délires et pas mal de supersti
4496
al de superstitions. Enfin cette expérience folle
le
mène à une découverte sur les sept sens de laquelle il convient de mé
4497
tte expérience folle le mène à une découverte sur
les
sept sens de laquelle il convient de méditer : la personne se dissout
4498
es sept sens de laquelle il convient de méditer :
la
personne se dissout dans l’eau des miroirs. Stéphane est en train de
4499
convient de méditer : la personne se dissout dans
l’
eau des miroirs. Stéphane est en train de se perdre pour avoir voulu
4500
il faut sortir de soi pour se voir ? Il y a dans
l’
homme moderne un besoin de vérifier qui n’est plus légitime dès l’inst
4501
un besoin de vérifier qui n’est plus légitime dès
l’
instant qu’il se traduit par la négation de l’invérifiable. Stéphane n
4502
plus légitime dès l’instant qu’il se traduit par
la
négation de l’invérifiable. Stéphane n’a pas eu confiance. Or la pers
4503
dès l’instant qu’il se traduit par la négation de
l’
invérifiable. Stéphane n’a pas eu confiance. Or la personnalité est un
4504
l’invérifiable. Stéphane n’a pas eu confiance. Or
la
personnalité est un acte de foi : Stéphane ne sait plus ce qu’il est.
4505
oire idiote, d’ailleurs vraie, se borne à décrire
l’
aspect psychologique d’une aventure qui en a bien d’autres, d’aspects.
4506
qui en a bien d’autres, d’aspects. Il est bon que
le
lecteur dérisoirement troublé par la crainte de n’avoir pas saisi le
4507
est bon que le lecteur dérisoirement troublé par
la
crainte de n’avoir pas saisi le sens véritable d’un texte, trouve par
4508
ement troublé par la crainte de n’avoir pas saisi
le
sens véritable d’un texte, trouve parfois de cette incompréhension de
4509
e cette incompréhension des marques certaines. Si
le
rapport intime qui unit la phrase suivante aux considérations précéde
4510
marques certaines. Si le rapport intime qui unit
la
phrase suivante aux considérations précédentes lui échappe, qu’il y v
4511
dique, par besoin de définir, par défiance envers
les
dieux. À chaque regard dans notre miroir, nous perdons une Eurydice.
4512
ard dans notre miroir, nous perdons une Eurydice.
Les
miroirs sont peut-être la mort. La mort absolue, celle qui n’est pas
4513
perdons une Eurydice. Les miroirs sont peut-être
la
mort. La mort absolue, celle qui n’est pas une vie nouvelle. La mort
4514
une Eurydice. Les miroirs sont peut-être la mort.
La
mort absolue, celle qui n’est pas une vie nouvelle. La mort dans la t
4515
rt absolue, celle qui n’est pas une vie nouvelle.
La
mort dans la transparence glaciale de l’évidence. Un jour, à propos
4516
elle qui n’est pas une vie nouvelle. La mort dans
la
transparence glaciale de l’évidence. Un jour, à propos de rien, Stép
4517
ouvelle. La mort dans la transparence glaciale de
l’
évidence. Un jour, à propos de rien, Stéphane pense avec fièvre : « I
4518
ane pense avec fièvre : « Il faudrait briser tous
les
miroirs. Alors tu te verrais en vérité. Peut-être te reconnaîtrais-tu
4519
t ? » C’est un premier filet d’eau vive qui perce
le
sol aride : mais Stéphane n’entend pas encore gronder les eaux profon
4520
aride : mais Stéphane n’entend pas encore gronder
les
eaux profondes. Le désir de s’hypnotiser l’irrite toujours vaguement.
4521
e n’entend pas encore gronder les eaux profondes.
Le
désir de s’hypnotiser l’irrite toujours vaguement. Mais il fuit son p
4522
nder les eaux profondes. Le désir de s’hypnotiser
l’
irrite toujours vaguement. Mais il fuit son propre regard, il se cherc
4523
te, il croit saisir dans un regard de cette femme
l’
écho de ce qui serait lui. Déjà il se perd dans ces yeux, mais comme o
4524
omme on meurt dans une naissance. Stéphane naît à
l’
amour et à lui-même conjointement. Plusieurs ivresses l’ont envahi bru
4525
r et à lui-même conjointement. Plusieurs ivresses
l’
ont envahi bruyamment, bâillonnent sa raison, l’empêchent de protester
4526
s l’ont envahi bruyamment, bâillonnent sa raison,
l’
empêchent de protester contre le miracle. Parmi tous ses mots fous, no
4527
onnent sa raison, l’empêchent de protester contre
le
miracle. Parmi tous ses mots fous, noms, baisers, appels qui reçoiven
4528
je suis ! » Un peu plus tard, ce fut un jour de
grand
soleil sur toutes les verreries de la capitale. Les fenêtres battaien
4529
s tard, ce fut un jour de grand soleil sur toutes
les
verreries de la capitale. Les fenêtres battaient. Le soleil et « la m
4530
jour de grand soleil sur toutes les verreries de
la
capitale. Les fenêtres battaient. Le soleil et « la mort » se conjura
4531
d soleil sur toutes les verreries de la capitale.
Les
fenêtres battaient. Le soleil et « la mort » se conjuraient pour abai
4532
verreries de la capitale. Les fenêtres battaient.
Le
soleil et « la mort » se conjuraient pour abaisser tous les regards.
4533
capitale. Les fenêtres battaient. Le soleil et «
la
mort » se conjuraient pour abaisser tous les regards. Stéphane rendu
4534
et « la mort » se conjuraient pour abaisser tous
les
regards. Stéphane rendu à la santé écrivait : « Ton visage me cache t
4535
pour abaisser tous les regards. Stéphane rendu à
la
santé écrivait : « Ton visage me cache tous les miroirs » — à une fem
4536
à la santé écrivait : « Ton visage me cache tous
les
miroirs » — à une femme qu’il aimait. n. Rougemont Denis de, « Mir
4537
omment on perd Eurydice et soi-même », Cahiers de
l’
Anglore, Genève, décembre 1928, p. 37-42.
4538
re et moi et Je suis un homme (janvier 1929)ax
Le
critique se sent désarmé et légèrement absurde en face d’un récit com
4539
vec une émouvante simplicité et il faudrait avoir
la
grossièreté de lui répondre d’un air connaisseur que c’est bien compo
4540
bien étonné du passage où il rappelle qu’il écrit
la
vie d’un homme de lettres. En réalité, on ne le voit pas encore appar
4541
t la vie d’un homme de lettres. En réalité, on ne
le
voit pas encore apparaître sous cet aspect dans ces deux premiers tom
4542
s de son enfance et de sa jeunesse comme ouvrier.
L’
art d’Anderson est étonnant d’apparente simplicité. Le récit s’avance
4543
t d’Anderson est étonnant d’apparente simplicité.
Le
récit s’avance à une allure libre et tranquille, anglo-saxonne et peu
4544
et là s’ouvrent des perspectives saisissantes sur
l’
époque. Anderson est avant tout un poète, un homme qui aime inventer e
4545
es nécessités modernes, dégradantes. Cet amour de
l’
invention romanesque considérée comme une revanche de la poésie — mais
4546
ntion romanesque considérée comme une revanche de
la
poésie — mais à Chicago on doit appeler ça du bluff — fait de lui san
4547
doit appeler ça du bluff — fait de lui sans doute
le
plus méridional des conteurs américains. Avec cela, un réalisme, plei
4548
uvent d’amertume. Mais là où d’autres placeraient
le
couplet humanitariste, lui s’en va dans un rêve, ou dans un autre sou
4549
est un Américain qui viennent nous rapprendre que
les
sources de la poésie sont dans notre maison. Voici un de ces passages
4550
n qui viennent nous rapprendre que les sources de
la
poésie sont dans notre maison. Voici un de ces passages où il sait êt
4551
ouvant : « À cette époque je croyais fortement en
l’
existence d’une espèce de secrète et à peu près universelle conspirati
4552
u près universelle conspiration pour insister sur
la
laideur. “C’est une frasque de gosses à laquelle nous nous livrons, v
4553
à laquelle nous nous livrons, voilà tout, moi et
les
autres”, me disais-je parfois, et il y avait des moments où j’arrivai
4554
s, bras dessous en riant de nous-mêmes et de tout
le
reste, nous amusant comme des fous ». Mais non, on ne le secouera pas
4555
e, nous amusant comme des fous ». Mais non, on ne
le
secouera pas, ce cauchemar, ce monde moderne, ce monde de fous qui n’
4556
fous qui n’ont plus que leur raison, ce monde où
l’
on ne sait plus créer avec joie des formes belles, ce monde qui devien
4557
quer un personnage précis pour lui faire endosser
le
blâme, mais comme l’homme nommé Ford, de Détroit, a contribué davanta
4558
écis pour lui faire endosser le blâme, mais comme
l’
homme nommé Ford, de Détroit, a contribué davantage que n’importe quel
4559
n’importe quel autre de mon temps à faire aboutir
la
standardization à sa fin logique, ne pourrait-il pas être considéré u
4560
, ne pourrait-il pas être considéré un jour comme
le
grand tueur de son époque ? Rendre impuissant c’est à coup sûr tuer.
4561
e pourrait-il pas être considéré un jour comme le
grand
tueur de son époque ? Rendre impuissant c’est à coup sûr tuer. Or on
4562
impuissant c’est à coup sûr tuer. Or on parle de
l’
élever à la présidence de la République. Qu’un tel acte serait adéquat
4563
c’est à coup sûr tuer. Or on parle de l’élever à
la
présidence de la République. Qu’un tel acte serait adéquat ! Tamerlan
4564
tuer. Or on parle de l’élever à la présidence de
la
République. Qu’un tel acte serait adéquat ! Tamerlan, dont la spécial
4565
e. Qu’un tel acte serait adéquat ! Tamerlan, dont
la
spécialité était l’assassinat du corps humain, mais qui raconte dans
4566
rait adéquat ! Tamerlan, dont la spécialité était
l’
assassinat du corps humain, mais qui raconte dans son autobiographie q
4567
obiographie que son désir constant était que tous
les
hommes vivant sous lui conservassent la virilité et le respect de soi
4568
que tous les hommes vivant sous lui conservassent
la
virilité et le respect de soi était de son temps le souverain du mond
4569
mmes vivant sous lui conservassent la virilité et
le
respect de soi était de son temps le souverain du monde. Tamerlan pou
4570
virilité et le respect de soi était de son temps
le
souverain du monde. Tamerlan pour les anciens. Ford pour les modernes
4571
de son temps le souverain du monde. Tamerlan pour
les
anciens. Ford pour les modernes. Quelle décadence ! ax. Rougemont
4572
in du monde. Tamerlan pour les anciens. Ford pour
les
modernes. Quelle décadence ! ax. Rougemont Denis de, « [Compte re
4573
« Belles-Lettres, c’est
la
clé des champs… » (janvier 1929)y 1. Belles-Lettres, c’est la clef
4574
ps… » (janvier 1929)y 1. Belles-Lettres, c’est
la
clef des champs. 2. L’essence de Belles-Lettres, c’est de l’alcool à
4575
1. Belles-Lettres, c’est la clef des champs. 2.
L’
essence de Belles-Lettres, c’est de l’alcool à brûler les cervelles et
4576
champs. 2. L’essence de Belles-Lettres, c’est de
l’
alcool à brûler les cervelles et les réputations. 3. Belles-Lettres n
4577
nce de Belles-Lettres, c’est de l’alcool à brûler
les
cervelles et les réputations. 3. Belles-Lettres n’est compréhensible
4578
tres, c’est de l’alcool à brûler les cervelles et
les
réputations. 3. Belles-Lettres n’est compréhensible et légitime que
4579
Lettres n’est compréhensible et légitime que dans
la
mesure où la poésie est compréhensible et légitime. 4. Je suis de san
4580
compréhensible et légitime que dans la mesure où
la
poésie est compréhensible et légitime. 4. Je suis de sang-froid, je d
4581
esse ; autrement que par des cris. 5. Avec toutes
les
erreurs et turpitudes que cela comporte, Belles-Lettres est une liber
4582
trer en religion : rond de cuir ou poète (au sens
le
plus large de ces mots.) (Mais je tiens à le leur dire ici : les anci
4583
sens le plus large de ces mots.) (Mais je tiens à
le
leur dire ici : les anciens bellettriens qui ont perdu toute foi ne c
4584
de ces mots.) (Mais je tiens à le leur dire ici :
les
anciens bellettriens qui ont perdu toute foi ne connaîtront pas de pa
4585
sont foncièrement mauvais.) 6. Peu de choses dans
le
monde moderne ont encore une « essence ». Celle de Belles-Lettres est
4586
. Celle de Belles-Lettres est en agréable odeur à
l’
Éternel et à Satan pareillement. Et ceux qu’elle enivre entrent en éta
4587
y. Rougemont Denis de, « Belles-Lettres, c’est
la
clef des champs… », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genèv
4588
Avant-propos
Le
dire une bonne fois. Il ne faut pas songer à décrire en quarante peti
4589
s songer à décrire en quarante petites pages tous
les
méfaits de l’instruction publique. C’est à peine assez pour indiquer
4590
ire en quarante petites pages tous les méfaits de
l’
instruction publique. C’est à peine assez pour indiquer leur ordre de
4591
e grandeur ; à quoi je me bornerai. Il a paru sur
le
sujet de l’instruction publique deux petits livres1 excellents dont j
4592
à quoi je me bornerai. Il a paru sur le sujet de
l’
instruction publique deux petits livres1 excellents dont je considère
4593
deux petits livres1 excellents dont je considère
les
thèses comme acquises : L’Éloge de l’ignorance, de M. Abel Bonnard, e
4594
nts dont je considère les thèses comme acquises :
L’
Éloge de l’ignorance, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas l
4595
considère les thèses comme acquises : L’Éloge de
l’
ignorance, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas les enfants,
4596
: L’Éloge de l’ignorance, de M. Abel Bonnard, et
Le
Pédagogue n’aime pas les enfants, d’Henri Roorda. Le premier montre q
4597
e, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas
les
enfants, d’Henri Roorda. Le premier montre que la science apprise à l
4598
es enfants, d’Henri Roorda. Le premier montre que
la
science apprise à l’école appauvrit l’homme de tout ce que son ignora
4599
oorda. Le premier montre que la science apprise à
l’
école appauvrit l’homme de tout ce que son ignorance respectait, et ne
4600
montre que la science apprise à l’école appauvrit
l’
homme de tout ce que son ignorance respectait, et ne lui donne à la pl
4601
e que son ignorance respectait, et ne lui donne à
la
place que des laideurs et de la prétention. L’autre, avec l’ironie tr
4602
et ne lui donne à la place que des laideurs et de
la
prétention. L’autre, avec l’ironie tranquille du bon sens bafoué et q
4603
e des laideurs et de la prétention. L’autre, avec
l’
ironie tranquille du bon sens bafoué et qui s’en moque, décrit la stup
4604
ille du bon sens bafoué et qui s’en moque, décrit
la
stupidité de l’enseignement tel qu’il est pratiqué dans nos collèges.
4605
bafoué et qui s’en moque, décrit la stupidité de
l’
enseignement tel qu’il est pratiqué dans nos collèges. Mon dessein est
4606
e réaction de tempérament. Je marque d’autre part
la
nécessité de tout cela qui me blesse, la liaison fatale avec la démoc
4607
tre part la nécessité de tout cela qui me blesse,
la
liaison fatale avec la démocratie, de tout ce qui moleste ma liberté
4608
e tout cela qui me blesse, la liaison fatale avec
la
démocratie, de tout ce qui moleste ma liberté et sans doute celle de
4609
ocialiste qui a été établi par coup de force, que
les
libéraux ont admis, conformément à leurs maximes, et toléré malgré le
4610
humeur. Ce régime de punaises jaunâtres aboutit à
l’
instruction publique et grâce à elle prolonge abusivement sa terne exi
4611
elle prolonge abusivement sa terne existence. Je
l’
ai subi ; l’on va voir comment. De pareils souvenirs légitiment toutes
4612
ge abusivement sa terne existence. Je l’ai subi ;
l’
on va voir comment. De pareils souvenirs légitiment toutes les haines.
4613
r comment. De pareils souvenirs légitiment toutes
les
haines. Je serai méchant, parce que j’en ai gros sur le cœur. D’aill
4614
nes. Je serai méchant, parce que j’en ai gros sur
le
cœur. D’ailleurs, ce petit écrit ne peut servir à rien. — Alors ? —
4615
apper : celui de naïveté. Définition du naïf dans
le
monde moderne : individu qui soutient des idées qui ne rapportent rie
4616
r au nom de ma génération, ne m’étant pas livré à
l’
enquête préalable qui seule eût pu, à la rigueur, me donner ce droit b
4617
s livré à l’enquête préalable qui seule eût pu, à
la
rigueur, me donner ce droit bien inutile. Pourtant je sais qu’à droi
4618
e comme à gauche, ils sont plus nombreux qu’on ne
le
pense, ceux qui refusent d’être complices dans cet attentat à l’intég
4619
qui refusent d’être complices dans cet attentat à
l’
intégrité humaine qu’est en fait l’esprit démocratique. Là-dessus, ces
4620
cet attentat à l’intégrité humaine qu’est en fait
l’
esprit démocratique. Là-dessus, ces messieurs se lamentent, la jeuness
4621
ocratique. Là-dessus, ces messieurs se lamentent,
la
jeunesse d’aujourd’hui, etc. Évidemment. Mais il y a les jérémiades e
4622
nesse d’aujourd’hui, etc. Évidemment. Mais il y a
les
jérémiades et il y a les raisons. Hors le domaine de l’amour, où tout
4623
Évidemment. Mais il y a les jérémiades et il y a
les
raisons. Hors le domaine de l’amour, où tout se confond miraculeuseme
4624
il y a les jérémiades et il y a les raisons. Hors
le
domaine de l’amour, où tout se confond miraculeusement, gémir n’est p
4625
émiades et il y a les raisons. Hors le domaine de
l’
amour, où tout se confond miraculeusement, gémir n’est pas un argument
4626
eusement, gémir n’est pas un argument. Je demande
le
droit de démolir. Et me l’accorde aussitôt. Sans conditions. Mon rôle
4627
n argument. Je demande le droit de démolir. Et me
l’
accorde aussitôt. Sans conditions. Mon rôle n’est pas de proposer une
4628
de vitupérer ce que je vois, qui est laid. Quand
la
soupe est brûlée, on la renvoie, même si l’on n’est pas capable d’en
4629
vois, qui est laid. Quand la soupe est brûlée, on
la
renvoie, même si l’on n’est pas capable d’en faire soi-même une meill
4630
Quand la soupe est brûlée, on la renvoie, même si
l’
on n’est pas capable d’en faire soi-même une meilleure. Mais j’aperçoi
4631
Mais j’aperçois là-bas, vautré derrière son bock,
le
Citoyen conscient et organisé pour la discussion. Il retrousse ses ma
4632
e son bock, le Citoyen conscient et organisé pour
la
discussion. Il retrousse ses manches. Il s’apprête à cracher sur ce q
4633
Oh ! oh ! oh ! il va parler, de grâce mettez-lui
les
mains sur la bouche ! Donnez-lui sa choucroute, tapez-lui dans le dos
4634
! il va parler, de grâce mettez-lui les mains sur
la
bouche ! Donnez-lui sa choucroute, tapez-lui dans le dos, amenez-lui
4635
bouche ! Donnez-lui sa choucroute, tapez-lui dans
le
dos, amenez-lui le Guguss, des bretzels, sa petite amie, au secours !
4636
sa choucroute, tapez-lui dans le dos, amenez-lui
le
Guguss, des bretzels, sa petite amie, au secours ! Car j’ai encore de
4637
ire. Dès qu’une voix s’élève pour mettre en doute
l’
excellence du principe de l’instruction publique, on crie sur tous les
4638
pour mettre en doute l’excellence du principe de
l’
instruction publique, on crie sur tous les bancs : « Alors, vous êtes
4639
ncipe de l’instruction publique, on crie sur tous
les
bancs : « Alors, vous êtes pour un retour à la barbarie ? » Si ce réf
4640
s les bancs : « Alors, vous êtes pour un retour à
la
barbarie ? » Si ce réflexe indique un mépris vraiment exagéré pour la
4641
e réflexe indique un mépris vraiment exagéré pour
la
jugeote de l’adversaire ou s’il traduit simplement cette mauvaise foi
4642
que un mépris vraiment exagéré pour la jugeote de
l’
adversaire ou s’il traduit simplement cette mauvaise foi pas même cons
4643
ise foi pas même consciente, cette lâcheté devant
la
discussion précise de leurs principes par quoi se signalent bien souv
4644
à cent « réponses » de cette sorte. Et je tiens à
les
classer par avance en deux catégories dont je vais régler le compte s
4645
par avance en deux catégories dont je vais régler
le
compte sommairement. Cela n’empêchera personne de me resservir ces ar
4646
A. Réponses du type : on ne peut pas aller contre
l’
époque, vous êtes un pauvre utopiste, etc. Ce sont les positivistes qu
4647
poque, vous êtes un pauvre utopiste, etc. Ce sont
les
positivistes qui parlent ainsi, ceux qui croient aux faits. Je leur r
4648
Je leur réponds : 1° qu’ils ne peuvent me dénier
le
droit de juger ces faits ; 2° qu’ils ne peuvent, en vertu même de leu
4649
euvent, en vertu même de leur scepticisme quant à
la
valeur réformatrice des idées, m’accuser de faire une critique danger
4650
critique dangereuse. 3° que néanmoins je crois à
l’
efficace de certaines utopies. (Les religions, la découverte de l’Amér
4651
oins je crois à l’efficace de certaines utopies. (
Les
religions, la découverte de l’Amérique par Christophe Colomb, l’Europ
4652
l’efficace de certaines utopies. (Les religions,
la
découverte de l’Amérique par Christophe Colomb, l’Europe napoléonienn
4653
rtaines utopies. (Les religions, la découverte de
l’
Amérique par Christophe Colomb, l’Europe napoléonienne, la Russie d’ap
4654
a découverte de l’Amérique par Christophe Colomb,
l’
Europe napoléonienne, la Russie d’après Karl Marx, le vol des frères W
4655
ue par Christophe Colomb, l’Europe napoléonienne,
la
Russie d’après Karl Marx, le vol des frères Wright, et tout bêtement,
4656
urope napoléonienne, la Russie d’après Karl Marx,
le
vol des frères Wright, et tout bêtement, c’est le cas de le dire : l’
4657
le vol des frères Wright, et tout bêtement, c’est
le
cas de le dire : l’instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d
4658
frères Wright, et tout bêtement, c’est le cas de
le
dire : l’instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d’aller con
4659
ight, et tout bêtement, c’est le cas de le dire :
l’
instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d’aller contre l’époq
4660
dire : l’instruction publique.) Résumé : 1° On a
le
droit d’aller contre l’époque, et on le peut efficacement. 2° Rira bi
4661
blique.) Résumé : 1° On a le droit d’aller contre
l’
époque, et on le peut efficacement. 2° Rira bien qui rira le dernier.
4662
: 1° On a le droit d’aller contre l’époque, et on
le
peut efficacement. 2° Rira bien qui rira le dernier. B. Réponses du t
4663
rétrograde, un infâme réactionnaire, etc. Ce sont
les
partisans d’une démocratie progressiste et tolérante qui se livrent à
4664
lérante qui se livrent à ces excès de langage, je
les
renvoie en corps au chapitre 5 où je traiterai de cet aspect du probl
4665
e 5 où je traiterai de cet aspect du problème que
l’
on peut appeler la question de droit. Certains, en effet, tirent toute
4666
i de cet aspect du problème que l’on peut appeler
la
question de droit. Certains, en effet, tirent toute leur force dans l
4667
Certains, en effet, tirent toute leur force dans
les
discussions de la tranquillité avec laquelle ils brouillent les faits
4668
, tirent toute leur force dans les discussions de
la
tranquillité avec laquelle ils brouillent les faits et les principes.
4669
s de la tranquillité avec laquelle ils brouillent
les
faits et les principes. Tourmentés par les scrupules de leur conscien
4670
uillité avec laquelle ils brouillent les faits et
les
principes. Tourmentés par les scrupules de leur conscience libérale,
4671
illent les faits et les principes. Tourmentés par
les
scrupules de leur conscience libérale, ils fuient la rigueur jusque d
4672
scrupules de leur conscience libérale, ils fuient
la
rigueur jusque dans leurs raisonnements. Pour moi qui cherche à démêl
4673
urs raisonnements. Pour moi qui cherche à démêler
la
vérité sans égard aux dérangements, même violents, que cela ne manque
4674
jamais de provoquer, je me propose de marquer ici
la
distinction classique du fait et du droit ; et c’est pourquoi je cons
4675
droit ; et c’est pourquoi je considérerai d’abord
l’
instruction publique dans ses réalisations actuelles, puis au terme de
4676
d’outrages au bon sens peuvent être légitimés par
le
but final de notre institution-tabou. 1. Je ne puis naturellement p
4677
1. Je ne puis naturellement pas mentionner tous
les
ouvrages scientifiques. Les meilleurs sortent de l’Institut Rousseau.
4678
t pas mentionner tous les ouvrages scientifiques.
Les
meilleurs sortent de l’Institut Rousseau.
4679
ouvrages scientifiques. Les meilleurs sortent de
l’
Institut Rousseau.
4680
ssent sur leurs souvenirs de classe. C’est qu’ils
les
confondent avec ceux de leur enfance et les font indûment participer
4681
u’ils les confondent avec ceux de leur enfance et
les
font indûment participer de la même grâce. Voyez Péguy, quand il essa
4682
e leur enfance et les font indûment participer de
la
même grâce. Voyez Péguy, quand il essaie de nous faire croire qu’« il
4683
us faire croire qu’« il n’y a rien au-dessus » de
la
tâche des instituteurs : Faire de ces belles analyses logiques, et g
4684
ithmétique où il fallait si soigneusement séparer
les
calculs du raisonnement, par une barre verticale, et où il y avait to
4685
t pour emplir ou pour vider un bassin (et souvent
les
deux), (pour emplir et vider ensemble), (drôle d’occupation), (après
4686
urs des appartements à meubler. Et on multipliait
le
tapissier par le prix du mètre courant. Encore que je prenne les sen
4687
nts à meubler. Et on multipliait le tapissier par
le
prix du mètre courant. Encore que je prenne les sentiments trop au s
4688
r le prix du mètre courant. Encore que je prenne
les
sentiments trop au sérieux pour faire ici du sentiment, je suis sensi
4689
sie. Mais ce qui fait très bien dans un Cahier de
la
quinzaine, ça faisait de mauvaises notes dans nos carnets hebdomadair
4690
ournée d’enfance gâtée. Et d’ailleurs, multiplier
le
tapissier par le prix du mètre courant n’est pas une fantaisie pour c
4691
gâtée. Et d’ailleurs, multiplier le tapissier par
le
prix du mètre courant n’est pas une fantaisie pour ce petit être qui
4692
e pour ce petit être qui s’énerve, qui embrouille
les
règles, qui a sommeil, qui a peur de faire faux, parce que les autres
4693
ui a sommeil, qui a peur de faire faux, parce que
les
autres auront fait juste, et qui voudrait bien pleurer, et qui recomm
4694
rdoise où sèchent des traînées de craie grise, où
les
chiffres trop gros s’emmêlent… Et c’est cela l’enfance insouciante ?
4695
les chiffres trop gros s’emmêlent… Et c’est cela
l’
enfance insouciante ? Qu’est-ce qui ressemble plus au souci quotidien
4696
’est-ce qui ressemble plus au souci quotidien des
grandes
personnes ? Mais l’enfance est ailleurs. Je revois ce fond de jardin
4697
s au souci quotidien des grandes personnes ? Mais
l’
enfance est ailleurs. Je revois ce fond de jardin où l’on trouve des c
4698
ance est ailleurs. Je revois ce fond de jardin où
l’
on trouve des cloportes dans la toile mouillée d’une tente d’Indiens,
4699
fond de jardin où l’on trouve des cloportes dans
la
toile mouillée d’une tente d’Indiens, des petites guerres mystérieuse
4700
, des matins de dimanche sonores et tout propres,
la
cuiller d’huile de foie de morue avant le repas, et le monsieur qui r
4701
ropres, la cuiller d’huile de foie de morue avant
le
repas, et le monsieur qui racontait gravement des choses qu’on ne com
4702
iller d’huile de foie de morue avant le repas, et
le
monsieur qui racontait gravement des choses qu’on ne comprend pas, la
4703
ntait gravement des choses qu’on ne comprend pas,
la
prière du soir pour qu’il fasse beau demain, Michel Strogoff et Rémy
4704
main, Michel Strogoff et Rémy un fils de vaincus,
les
tours de carrousel, les chemins dans la forêt en automne, des jeux, d
4705
Rémy un fils de vaincus, les tours de carrousel,
les
chemins dans la forêt en automne, des jeux, des feuillages, des rêver
4706
vaincus, les tours de carrousel, les chemins dans
la
forêt en automne, des jeux, des feuillages, des rêveries, des recoins
4707
peu divine, baignée d’une très vague angoisse que
l’
on fuyait avec des bonheurs fous dans les bras maternels, ou bien ces
4708
oisse que l’on fuyait avec des bonheurs fous dans
les
bras maternels, ou bien ces promenades en tenant la forte main du pèr
4709
bras maternels, ou bien ces promenades en tenant
la
forte main du père qui fait de longs pas réguliers… L’École, dans ce
4710
rte main du père qui fait de longs pas réguliers…
L’
École, dans ce concert de souvenirs, n’est qu’une dissonance douloureu
4711
uloureuse2. Deux angoisses dominent mon enfance :
les
séances chez le dentiste et l’horaire des leçons. Ce malaise inavouab
4712
angoisses dominent mon enfance : les séances chez
le
dentiste et l’horaire des leçons. Ce malaise inavouable, cette règle
4713
ent mon enfance : les séances chez le dentiste et
l’
horaire des leçons. Ce malaise inavouable, cette règle méchante, ce so
4714
appris à lire, en cachette, avec une sœur aînée.
L’
année suivante, on me mit à l’école, parce que c’est la loi. La premiè
4715
vec une sœur aînée. L’année suivante, on me mit à
l’
école, parce que c’est la loi. La première classe fut agréable : j’ali
4716
ée suivante, on me mit à l’école, parce que c’est
la
loi. La première classe fut agréable : j’alignais des bâtons en rêvan
4717
e pensais pas devoir suivre syllabe après syllabe
les
ânonnements des élèves qui déchiffraient les premières phrases exempl
4718
hrases exemplaires. (J’aimais pourtant Zoé lave à
la
fontaine, à cause du nom.) Quand venait mon tour, je savais rarement
4719
om.) Quand venait mon tour, je savais rarement où
l’
on en était. Cela m’attira des reproches acides, et naturellement, la
4720
m’attira des reproches acides, et naturellement,
la
phrase sacrée : « Il faut que tous fassent la même chose, ici ! » Dan
4721
nt, la phrase sacrée : « Il faut que tous fassent
la
même chose, ici ! » Dans la suite, on se chargea d’illustrer par d’in
4722
faut que tous fassent la même chose, ici ! » Dans
la
suite, on se chargea d’illustrer par d’innombrables exemples cet axio
4723
par d’innombrables exemples cet axiome qui devint
la
formule de mes premières douleurs morales. Après six ans de ce régime
4724
rentrée, ma colère n’en fut que plus malfaisante.
L’
école me rendit au monde, vers l’âge de 18 ans, crispé et méfiant, san
4725
lus malfaisante. L’école me rendit au monde, vers
l’
âge de 18 ans, crispé et méfiant, sans cesse en garde contre moi-même
4726
ait pas différer, profondément hypocrite donc, et
le
cerveau saturé d’évidences du type 2 et 2 font 4, ou : tous les homme
4727
turé d’évidences du type 2 et 2 font 4, ou : tous
les
hommes doivent être égaux en tout. Deux fois deux quatre, c’est stéri
4728
s de citer, je découvris un jour qu’elle contient
la
cause déterminante de notre malaise. Il me fallut un certain temps po
4729
ue je me posai la question : est-ce vrai que tous
les
hommes doivent être égaux en tout ? Et la première réponse fut : Il f
4730
réponse fut : Il faut que ce soit vrai, pour que
la
démocratie prospère et étende ses conquêtes. C’était découvrir notre
4731
dignations de nos maîtres quand ils dénonçaient «
la
marque indélébile de l’éducation jésuite ». Nous étions marqués par N
4732
s quand ils dénonçaient « la marque indélébile de
l’
éducation jésuite ». Nous étions marqués par Numa Droz et les manuels
4733
n jésuite ». Nous étions marqués par Numa Droz et
les
manuels des Frères ∴, par l’esprit petit-bourgeois, qui est une génér
4734
és par Numa Droz et les manuels des Frères ∴, par
l’
esprit petit-bourgeois, qui est une généralisation de l’avarice, et pa
4735
it petit-bourgeois, qui est une généralisation de
l’
avarice, et par les dogmes démocratiques, qui sont une généralisation
4736
, qui est une généralisation de l’avarice, et par
les
dogmes démocratiques, qui sont une généralisation de la règle de troi
4737
mes démocratiques, qui sont une généralisation de
la
règle de trois, aussi profondément certes qu’un Voltaire le fut par l
4738
e trois, aussi profondément certes qu’un Voltaire
le
fut par les jésuites : du moins ceux-ci lui laissèrent-ils assez de v
4739
ssi profondément certes qu’un Voltaire le fut par
les
jésuites : du moins ceux-ci lui laissèrent-ils assez de verdeur d’esp
4740
pire. Mais on avait brisé en nous ces ressorts de
la
révolte et de la libération d’une personnalité : l’imagination, le se
4741
it brisé en nous ces ressorts de la révolte et de
la
libération d’une personnalité : l’imagination, le sens de l’arbitrair
4742
révolte et de la libération d’une personnalité :
l’
imagination, le sens de l’arbitraire et le sens de la relativité des d
4743
la libération d’une personnalité : l’imagination,
le
sens de l’arbitraire et le sens de la relativité des décrets humains.
4744
on d’une personnalité : l’imagination, le sens de
l’
arbitraire et le sens de la relativité des décrets humains. Le prix de
4745
alité : l’imagination, le sens de l’arbitraire et
le
sens de la relativité des décrets humains. Le prix de mes souffrances
4746
magination, le sens de l’arbitraire et le sens de
la
relativité des décrets humains. Le prix de mes souffrances était donc
4747
et le sens de la relativité des décrets humains.
Le
prix de mes souffrances était donc ce conformisme indispensable aux «
4748
principes ». Je n’allai pas tout de suite jusqu’à
les
mettre en doute : mais un jour je compris que ce n’étaient que des pr
4749
les d’une arithmétique élémentaire, ce monde dont
la
Démocratie apparaissait comme l’achèvement idéal et nécessaire — et q
4750
e, ce monde dont la Démocratie apparaissait comme
l’
achèvement idéal et nécessaire — et qui était le seul pour lequel on n
4751
e l’achèvement idéal et nécessaire — et qui était
le
seul pour lequel on nous préparait —, c’était un système d’abstractio
4752
tait un système d’abstractions primaires, c’était
le
rêve raisonnablement organisé des esprits moyens, prosaïques et rassi
4753
s, prosaïques et rassis3 qui tiennent aujourd’hui
les
charges de l’État, piliers d’un régime dont ils sont les seuls à s’ac
4754
t rassis3 qui tiennent aujourd’hui les charges de
l’
État, piliers d’un régime dont ils sont les seuls à s’accommoder parce
4755
rges de l’État, piliers d’un régime dont ils sont
les
seuls à s’accommoder parce qu’ils l’ont établi à la mesure exacte de
4756
nt ils sont les seuls à s’accommoder parce qu’ils
l’
ont établi à la mesure exacte de leurs besoins. Nous ne croyions plus
4757
seuls à s’accommoder parce qu’ils l’ont établi à
la
mesure exacte de leurs besoins. Nous ne croyions plus aux démons, mai
4758
besoins. Nous ne croyions plus aux démons, mais à
la
Commission scolaire. Nous n’avions plus de « superstitions grossières
4759
stitions grossières » comme celles qui touchent à
l’
action des étoiles par exemple. Mais nous avions acquis le respect des
4760
des étoiles par exemple. Mais nous avions acquis
le
respect des statistiques. Nous savions que les miracles ne trompent q
4761
uis le respect des statistiques. Nous savions que
les
miracles ne trompent que les illettrés, mais qu’il convient de s’incl
4762
es. Nous savions que les miracles ne trompent que
les
illettrés, mais qu’il convient de s’incliner devant les miracles de l
4763
lettrés, mais qu’il convient de s’incliner devant
les
miracles de la science appliquée. On nous faisait voir tout au long d
4764
’il convient de s’incliner devant les miracles de
la
science appliquée. On nous faisait voir tout au long de notre histoir
4765
nous faisait voir tout au long de notre histoire
le
Progrès constant de l’humanité vers les lumières, l’incrédulité et le
4766
au long de notre histoire le Progrès constant de
l’
humanité vers les lumières, l’incrédulité et le bien-être matériel. No
4767
e histoire le Progrès constant de l’humanité vers
les
lumières, l’incrédulité et le bien-être matériel. Nous savions qu’un
4768
Progrès constant de l’humanité vers les lumières,
l’
incrédulité et le bien-être matériel. Nous savions qu’un fils d’ouvrie
4769
de l’humanité vers les lumières, l’incrédulité et
le
bien-être matériel. Nous savions qu’un fils d’ouvrier est l’égal d’un
4770
e matériel. Nous savions qu’un fils d’ouvrier est
l’
égal d’un petit Dauphin — et même nous ne pouvions nous empêcher de cr
4771
même nous ne pouvions nous empêcher de croire que
le
petit ouvrier est bien plus malin. Nous savions un tas de choses doul
4772
e choses douloureusement ennuyeuses qui sont dans
les
livres — et nulle part ailleurs. Maigre nourriture pour nos rêves. No
4773
re nourriture pour nos rêves. Nous arrivions dans
la
vie avec des mentions honorables et une inconcevable gaucherie, c’est
4774
et une honte secrète qui exaspérait ce mépris et
le
rendait agressif. Mais moi, j’avais trop souffert de cette compressio
4775
riellement délivré, en supporter longtemps encore
l’
action. Je n’eus pas plus tôt découvert et nommé cet asservissement de
4776
plus tôt découvert et nommé cet asservissement de
l’
esprit et ces mythes stériles, que je les rendis responsables de ma pe
4777
sement de l’esprit et ces mythes stériles, que je
les
rendis responsables de ma perte de contact avec les réalités les plus
4778
s rendis responsables de ma perte de contact avec
les
réalités les plus élémentaires de la vie. 2. Dans le cas le plus fa
4779
onsables de ma perte de contact avec les réalités
les
plus élémentaires de la vie. 2. Dans le cas le plus favorable, c’es
4780
ontact avec les réalités les plus élémentaires de
la
vie. 2. Dans le cas le plus favorable, c’est un silence, un vide. C
4781
alités les plus élémentaires de la vie. 2. Dans
le
cas le plus favorable, c’est un silence, un vide. C’était en dehors d
4782
les plus élémentaires de la vie. 2. Dans le cas
le
plus favorable, c’est un silence, un vide. C’était en dehors de la vi
4783
, c’est un silence, un vide. C’était en dehors de
la
vie. 3. du pain rassis.
4784
2. Description du monstre
Le
service militaire me permit de retrouver quelques-unes de ces réalité
4785
Car ces différences sont les premières marques de
la
vie vécue et l’on aime à y découvrir la seule fraternité véritable. M
4786
ces sont les premières marques de la vie vécue et
l’
on aime à y découvrir la seule fraternité véritable. Mais c’est en cas
4787
arques de la vie vécue et l’on aime à y découvrir
la
seule fraternité véritable. Mais c’est en caserne aussi que je devais
4788
is c’est en caserne aussi que je devais retrouver
les
instituteurs. Ceux-là n’avaient pas bougé. Et pour cause : ils n’étai
4789
é. Et pour cause : ils n’étaient jamais sortis de
l’
école. Rien ne ressemble plus à un bon élève qu’un instituteur : de l’
4790
à l’autre il n’y a pas de solution de continuité,
la
différence n’étant qu’une question d’âge, non d’expérience vécue. Ce
4791
dire est sans doute injuste et faux dans un très
grand
nombre de cas, mais pourquoi ai-je envie de le dire ? L’instituteur s
4792
grand nombre de cas, mais pourquoi ai-je envie de
le
dire ? L’instituteur sous l’uniforme peut être défini par son incompr
4793
re de cas, mais pourquoi ai-je envie de le dire ?
L’
instituteur sous l’uniforme peut être défini par son incompréhension m
4794
rquoi ai-je envie de le dire ? L’instituteur sous
l’
uniforme peut être défini par son incompréhension méthodique des homme
4795
éhension méthodique des hommes et son mépris pour
les
paysans. Qu’il soit officier ou troupier, on le reconnaît à une façon
4796
les paysans. Qu’il soit officier ou troupier, on
le
reconnaît à une façon pédante d’être consciencieux, à une façon bless
4797
être supérieur, à une façon livresque d’expliquer
les
choses, à une façon théorique de juger les êtres. Ces distributeurs a
4798
liquer les choses, à une façon théorique de juger
les
êtres. Ces distributeurs automatiques (brevetés par le gouvernement)
4799
res. Ces distributeurs automatiques (brevetés par
le
gouvernement) de la manne égalitaire — ne se prennent pas pour de la
4800
rs automatiques (brevetés par le gouvernement) de
la
manne égalitaire — ne se prennent pas pour de la petite bière. Ils on
4801
la manne égalitaire — ne se prennent pas pour de
la
petite bière. Ils ont conscience d’appartenir à une élite responsable
4802
ce ridicule n’échappe pas à ceux qu’ils méprisent
le
plus, et ils auraient souvent l’occasion de s’en douter s’ils étaient
4803
qu’ils méprisent le plus, et ils auraient souvent
l’
occasion de s’en douter s’ils étaient sensibles aux finesses de l’iron
4804
en douter s’ils étaient sensibles aux finesses de
l’
ironie paysanne. Mais je n’en dirai pas plus, de peur de m’échauffer
4805
pas plus, de peur de m’échauffer inutilement. Si
l’
on me poussait un peu, je crois que je m’oublierais au point d’insinue
4806
crois que je m’oublierais au point d’insinuer que
les
instituteurs galonnés causent autant de tort à l’armée que les instit
4807
es instituteurs galonnés causent autant de tort à
l’
armée que les instituteurs antimilitaristes qui signent des manifestes
4808
urs galonnés causent autant de tort à l’armée que
les
instituteurs antimilitaristes qui signent des manifestes en mauvais f
4809
manifestes en mauvais français — et je ferais de
la
peine à d’excellents garçons. Revenons au civil. Au village, quand on
4810
es farces où ils sont drôles, mais non point dans
la
vie courante où ils le sont beaucoup moins. Le Messieu fait sans dout
4811
rôles, mais non point dans la vie courante où ils
le
sont beaucoup moins. Le Messieu fait sans doute des vers sur la viole
4812
ns la vie courante où ils le sont beaucoup moins.
Le
Messieu fait sans doute des vers sur la violette, périodiquement, com
4813
up moins. Le Messieu fait sans doute des vers sur
la
violette, périodiquement, comme on fait… un rhume de cerveau. Il joue
4814
lque instrument. Il a des idées modernes sur tous
les
sujets, espécialement sur la pédagogie. Ce mot revient souvent dans s
4815
s modernes sur tous les sujets, espécialement sur
la
pédagogie. Ce mot revient souvent dans sa conversation ; il le pronon
4816
Ce mot revient souvent dans sa conversation ; il
le
prononce avec un inimitable sérieux, avec un P majuscule. On sent que
4817
st là son affaire : Monsieur en un mot est M’sieu
l’
Instituteur. Signes particuliers : cheveux longs, regard profond voilé
4818
eveux longs, regard profond voilé de douceur. Car
le
type populaire du poète romantique s’est dégradé en deux sous-types p
4819
ique s’est dégradé en deux sous-types posthumes :
l’
artiste photographe et le régent. J’ai fait allusion au lieutenant-ins
4820
x sous-types posthumes : l’artiste photographe et
le
régent. J’ai fait allusion au lieutenant-instituteur qui veut faire d
4821
usion au lieutenant-instituteur qui veut faire de
la
pédagogie avec sa section. L’instituteur-lieutenant qui veut traiter
4822
r qui veut faire de la pédagogie avec sa section.
L’
instituteur-lieutenant qui veut traiter militairement ses élèves témoi
4823
veut traiter militairement ses élèves témoigne de
la
même maladresse professionnelle. J’en connaissais un qui avait coutum
4824
de garçons de 10 à 11 ans : « J’ai bien su mater
les
quarante hommes de ma section, je saurai aussi vous mater. » On imagi
4825
aussi vous mater. » On imagine à quoi peut mener
l’
enseignement donné par des êtres qui brouillent à ce point les méthode
4826
ent donné par des êtres qui brouillent à ce point
les
méthodes. Simple remarque pendant que nous en sommes aux instituteurs
4827
en sommes aux instituteurs : ils sortent tous de
la
même classe sociale, de la petite bourgeoisie. Est-ce que l’esprit pe
4828
: ils sortent tous de la même classe sociale, de
la
petite bourgeoisie. Est-ce que l’esprit petit-bourgeois qui imprègne
4829
sse sociale, de la petite bourgeoisie. Est-ce que
l’
esprit petit-bourgeois qui imprègne l’enseignement primaire constitue
4830
Est-ce que l’esprit petit-bourgeois qui imprègne
l’
enseignement primaire constitue l’apport des instituteurs, ou bien pré
4831
is qui imprègne l’enseignement primaire constitue
l’
apport des instituteurs, ou bien préexiste-t-il dans les principes mêm
4832
ort des instituteurs, ou bien préexiste-t-il dans
les
principes mêmes de l’École, et attire-t-il les petits bourgeois comme
4833
u bien préexiste-t-il dans les principes mêmes de
l’
École, et attire-t-il les petits bourgeois comme le portrait de Numa D
4834
ns les principes mêmes de l’École, et attire-t-il
les
petits bourgeois comme le portrait de Numa Droz attirait les mouches
4835
’École, et attire-t-il les petits bourgeois comme
le
portrait de Numa Droz attirait les mouches ? (Le verre en était toujo
4836
bourgeois comme le portrait de Numa Droz attirait
les
mouches ? (Le verre en était toujours jaune.) Je n’ai ni le droit ni
4837
le portrait de Numa Droz attirait les mouches ? (
Le
verre en était toujours jaune.) Je n’ai ni le droit ni l’envie de dir
4838
? (Le verre en était toujours jaune.) Je n’ai ni
le
droit ni l’envie de dire du mal des petits bourgeois. Ils sont au moi
4839
en était toujours jaune.) Je n’ai ni le droit ni
l’
envie de dire du mal des petits bourgeois. Ils sont au moins aussi sym
4840
sympathiques que n’importe quelle autre classe de
la
société. Mais l’esprit petit-bourgeois pris abstraitement et tel qu’i
4841
n’importe quelle autre classe de la société. Mais
l’
esprit petit-bourgeois pris abstraitement et tel qu’il se manifeste da
4842
pris abstraitement et tel qu’il se manifeste dans
l’
école primaire est un véritable virus de mesquinerie, et devrait être
4843
les ». Je reviendrai peut-être sur ce point. Pour
l’
instant je ne veux que décrire l’école telle qu’on la voit. Après les
4844
r ce point. Pour l’instant je ne veux que décrire
l’
école telle qu’on la voit. Après les personnes, le décor. La laideur d
4845
nstant je ne veux que décrire l’école telle qu’on
la
voit. Après les personnes, le décor. La laideur des collèges n’est pa
4846
ux que décrire l’école telle qu’on la voit. Après
les
personnes, le décor. La laideur des collèges n’est pas accidentelle.
4847
l’école telle qu’on la voit. Après les personnes,
le
décor. La laideur des collèges n’est pas accidentelle. C’est celle mê
4848
lle qu’on la voit. Après les personnes, le décor.
La
laideur des collèges n’est pas accidentelle. C’est celle même du régi
4849
est pas accidentelle. C’est celle même du régime.
l’
architecture de nos « palais scolaires ». symbolise d’une façon frappa
4850
e ce qu’il y a de schématique et de monotone dans
la
conception démocratique du monde. Entrons, c’est pire encore. Beaucou
4851
ants ont un frisson de dégoût au moment de passer
la
porte, au son de la cloche : l’odeur de goudron et d’urinoirs qui imp
4852
de dégoût au moment de passer la porte, au son de
la
cloche : l’odeur de goudron et d’urinoirs qui imprègne les corridors
4853
moment de passer la porte, au son de la cloche :
l’
odeur de goudron et d’urinoirs qui imprègne les corridors et les habit
4854
e : l’odeur de goudron et d’urinoirs qui imprègne
les
corridors et les habits des écoliers empeste encore mes souvenirs. Et
4855
udron et d’urinoirs qui imprègne les corridors et
les
habits des écoliers empeste encore mes souvenirs. Et la poussière dan
4856
its des écoliers empeste encore mes souvenirs. Et
la
poussière dans l’air, l’encre sur les tables — c’était pourtant un re
4857
mpeste encore mes souvenirs. Et la poussière dans
l’
air, l’encre sur les tables — c’était pourtant un refuge pour l’imagin
4858
encore mes souvenirs. Et la poussière dans l’air,
l’
encre sur les tables — c’était pourtant un refuge pour l’imagination q
4859
ouvenirs. Et la poussière dans l’air, l’encre sur
les
tables — c’était pourtant un refuge pour l’imagination que ces initia
4860
sur les tables — c’était pourtant un refuge pour
l’
imagination que ces initiales, ces signes, ces devises… —, les estampe
4861
on que ces initiales, ces signes, ces devises… —,
les
estampes piquées, Numa Droz et ses crottes de mouches… Dans ce décor
4862
votre vie, citoyens ! Et vous pensez que c’est un
grand
progrès sur la Nature. Quelle peut bien être la vertu éducatrice d’un
4863
s ! Et vous pensez que c’est un grand progrès sur
la
Nature. Quelle peut bien être la vertu éducatrice d’un tel milieu, mo
4864
rand progrès sur la Nature. Quelle peut bien être
la
vertu éducatrice d’un tel milieu, moral et matériel ? L’école publiqu
4865
u éducatrice d’un tel milieu, moral et matériel ?
L’
école publique, telle que nous la voyons est semblable à tous ces monu
4866
al et matériel ? L’école publique, telle que nous
la
voyons est semblable à tous ces monuments « de la mauvaise époque » q
4867
la voyons est semblable à tous ces monuments « de
la
mauvaise époque » qui sont dans nos villes l’apport du xixe siècle.
4868
de la mauvaise époque » qui sont dans nos villes
l’
apport du xixe siècle. Ils ne parviennent ni à la beauté ni à l’utili
4869
l’apport du xixe siècle. Ils ne parviennent ni à
la
beauté ni à l’utilité, et ils sont déjà démodés. On dit que le style
4870
e siècle. Ils ne parviennent ni à la beauté ni à
l’
utilité, et ils sont déjà démodés. On dit que le style 1880 n’en est p
4871
à l’utilité, et ils sont déjà démodés. On dit que
le
style 1880 n’en est pas un : mais l’absence de style est encore un st
4872
. On dit que le style 1880 n’en est pas un : mais
l’
absence de style est encore un style ; c’est même le pire.
4873
absence de style est encore un style ; c’est même
le
pire.
4874
pour quelles raisons j’ai entrepris de combattre
l’
instruction publique — on ne me contestera pas ces raisons puisqu’elle
4875
s me sont absolument personnelles et qu’elles ont
la
valeur d’un témoignage, ni plus ni moins — il est temps que je fasse
4876
cœur non compris ». Aux yeux de beaucoup de gens,
la
passion est aveuglante : cela tient pour une bonne part à ce que ces
4877
nt pour une bonne part à ce que ces personnes ont
les
yeux faibles. Il serait plus juste de dire que la passion n’a qu’une
4878
es yeux faibles. Il serait plus juste de dire que
la
passion n’a qu’une clairvoyance intéressée : mais celles-là sont les
4879
une clairvoyance intéressée : mais celles-là sont
les
plus vives. Enfin, je tiens à reconnaître qu’ici je ne cherche point
4880
je tiens à reconnaître qu’ici je ne cherche point
l’
équité. Pas plus que vous qui défendez de parti pris ce que j’attaque.
4881
vous qui défendez de parti pris ce que j’attaque.
L’
esprit d’équité, avec son préjugé pacifiste n’est pas toujours l’espri
4882
té, avec son préjugé pacifiste n’est pas toujours
l’
esprit de vérité, il s’en faut. Or je ne suis pas de ceux qui subordon
4883
faut. Or je ne suis pas de ceux qui subordonnent
la
vérité à la tranquillité bourgeoise. Je tiens le « gain de paix » pou
4884
ne suis pas de ceux qui subordonnent la vérité à
la
tranquillité bourgeoise. Je tiens le « gain de paix » pour illusoire
4885
la vérité à la tranquillité bourgeoise. Je tiens
le
« gain de paix » pour illusoire : il consiste à repousser la difficul
4886
e paix » pour illusoire : il consiste à repousser
la
difficulté dans l’avenir, d’une ou deux générations. Pendant ce temps
4887
oire : il consiste à repousser la difficulté dans
l’
avenir, d’une ou deux générations. Pendant ce temps elle s’aggrave, et
4888
ndant ce temps elle s’aggrave, et nous voici avec
l’
héritage de cinquante ans de radicalisme sur les bras. L’écheveau est
4889
ec l’héritage de cinquante ans de radicalisme sur
les
bras. L’écheveau est tellement embrouillé que déjà plusieurs proposen
4890
age de cinquante ans de radicalisme sur les bras.
L’
écheveau est tellement embrouillé que déjà plusieurs proposent de tran
4891
brouillé que déjà plusieurs proposent de trancher
le
nœud. Je me bornerai à l’examen des caractères les plus généraux de l
4892
s proposent de trancher le nœud. Je me bornerai à
l’
examen des caractères les plus généraux de l’instruction publique, ceu
4893
le nœud. Je me bornerai à l’examen des caractères
les
plus généraux de l’instruction publique, ceux que n’atteignent dans l
4894
ai à l’examen des caractères les plus généraux de
l’
instruction publique, ceux que n’atteignent dans leur principe ni les
4895
ique, ceux que n’atteignent dans leur principe ni
les
réformes de détail ni les modalités locales de réalisations pratiques
4896
t dans leur principe ni les réformes de détail ni
les
modalités locales de réalisations pratiques. Le programme a) l’h
4897
es modalités locales de réalisations pratiques.
Le
programme a) l’horaire : c’est un cadre, ou plutôt un moule, dans
4898
s de réalisations pratiques. Le programme a)
l’
horaire : c’est un cadre, ou plutôt un moule, dans lequel on verse les
4899
n cadre, ou plutôt un moule, dans lequel on verse
les
matières les plus hétéroclites, sans égard à leurs qualités propres.
4900
lutôt un moule, dans lequel on verse les matières
les
plus hétéroclites, sans égard à leurs qualités propres. De 8 à 9 arit
4901
uit, de manière à prévenir toute concentration de
l’
esprit. b) plan d’études. On a divisé l’enseignement en branches bien
4902
ration de l’esprit. b) plan d’études. On a divisé
l’
enseignement en branches bien distinctes. On attribue à chacune un cer
4903
s’arrange à faire tenir dans cette classification
le
plus possible de « connaissances » qui dès lors deviennent obligatoir
4904
aissances » qui dès lors deviennent obligatoires.
La
somme et l’arrangement des parties doivent être identiques pour tous
4905
qui dès lors deviennent obligatoires. La somme et
l’
arrangement des parties doivent être identiques pour tous les écoliers
4906
ent des parties doivent être identiques pour tous
les
écoliers. Ce plan régit les huit années réglementaires de la scolarit
4907
identiques pour tous les écoliers. Ce plan régit
les
huit années réglementaires de la scolarité, et englobe la totalité de
4908
. Ce plan régit les huit années réglementaires de
la
scolarité, et englobe la totalité de la science nécessaire à tout cit
4909
années réglementaires de la scolarité, et englobe
la
totalité de la science nécessaire à tout citoyen, dans une vue aussi
4910
taires de la scolarité, et englobe la totalité de
la
science nécessaire à tout citoyen, dans une vue aussi large que simpl
4911
papier, d’un crayon et d’une règle (pour diviser
la
page en casiers rectangulaires, bien proprement.) Évidemment, il est
4912
t.) Évidemment, il est préférable de savoir aussi
les
noms des sciences élémentaires. Mais il n’est en aucune façon nécessa
4913
il n’est en aucune façon nécessaire de connaître
la
psychologie des enfants, ni même le contenu des sciences dont on écri
4914
de connaître la psychologie des enfants, ni même
le
contenu des sciences dont on écrit les noms dans les casiers. Est-ce
4915
ts, ni même le contenu des sciences dont on écrit
les
noms dans les casiers. Est-ce que l’étude du trapézoïde est particuli
4916
contenu des sciences dont on écrit les noms dans
les
casiers. Est-ce que l’étude du trapézoïde est particulièrement indiqu
4917
nt on écrit les noms dans les casiers. Est-ce que
l’
étude du trapézoïde est particulièrement indiquée pour préparer les él
4918
zoïde est particulièrement indiquée pour préparer
les
élèves à une composition française ? Question oiseuse et saugrenue, —
4919
ançaise ? Question oiseuse et saugrenue, — naïve.
Le
bon sens voudrait que l’on tînt compte des possibilités d’adaptation
4920
e et saugrenue, — naïve. Le bon sens voudrait que
l’
on tînt compte des possibilités d’adaptation de l’enfant ; de la valeu
4921
l’on tînt compte des possibilités d’adaptation de
l’
enfant ; de la valeur fort inégale de ces disciplines ; de la diversit
4922
te des possibilités d’adaptation de l’enfant ; de
la
valeur fort inégale de ces disciplines ; de la diversité des besoins
4923
de la valeur fort inégale de ces disciplines ; de
la
diversité des besoins ; enfin des rythmes naturels de l’esprit humain
4924
rsité des besoins ; enfin des rythmes naturels de
l’
esprit humain, qu’il se trouve que le Créateur n’a point accordés à l’
4925
naturels de l’esprit humain, qu’il se trouve que
le
Créateur n’a point accordés à l’actuelle division horaire des journée
4926
il se trouve que le Créateur n’a point accordés à
l’
actuelle division horaire des journées… Monsieur, répondent les foncti
4927
ivision horaire des journées… Monsieur, répondent
les
fonctionnaires responsables, vous savez par expérience que nous ne co
4928
s savez par expérience que nous ne comprenons pas
la
plaisanterie et que notre temps est précieux. D’ailleurs, les enfants
4929
erie et que notre temps est précieux. D’ailleurs,
les
enfants ne se plaignent pas, de quoi vous plaignez-vous, vous ? — Mai
4930
quoi vous plaignez-vous, vous ? — Mais on fausse
l’
esprit de ces enfants… — Mais on nous paye, et ils n’en meurent pas.
4931
— Mais on nous paye, et ils n’en meurent pas.
Les
examens Ce sont en principe des « contrôles » comparables à ceux q
4932
principe des « contrôles » comparables à ceux que
l’
on établit lors des grandes épreuves cyclistes. Les participants du To
4933
es » comparables à ceux que l’on établit lors des
grandes
épreuves cyclistes. Les participants du Tour de Science doivent s’ins
4934
l’on établit lors des grandes épreuves cyclistes.
Les
participants du Tour de Science doivent s’inscrire au terme de chaque
4935
erme de chaque trimestre. Ceux qui arrivent après
la
clôture ont à refaire l’étape. On obtient par ce moyen un peloton hom
4936
Ceux qui arrivent après la clôture ont à refaire
l’
étape. On obtient par ce moyen un peloton homogène, facile à surveille
4937
e, facile à surveiller. Mais en matière de sport,
la
tricherie est difficile, tandis qu’à l’école elle est de règle. Car l
4938
de sport, la tricherie est difficile, tandis qu’à
l’
école elle est de règle. Car la qualité et la quantité des réponses «
4939
icile, tandis qu’à l’école elle est de règle. Car
la
qualité et la quantité des réponses « fournies » par le prévenu (l’él
4940
qu’à l’école elle est de règle. Car la qualité et
la
quantité des réponses « fournies » par le prévenu (l’élève examiné) n
4941
lité et la quantité des réponses « fournies » par
le
prévenu (l’élève examiné) n’a qu’un lointain rapport avec la qualité
4942
uantité des réponses « fournies » par le prévenu (
l’
élève examiné) n’a qu’un lointain rapport avec la qualité et la quanti
4943
(l’élève examiné) n’a qu’un lointain rapport avec
la
qualité et la quantité des efforts « fournis » au cours du trimestre.
4944
né) n’a qu’un lointain rapport avec la qualité et
la
quantité des efforts « fournis » au cours du trimestre. Ce phénomène
4945
ant s’explique justement par cette psychologie de
l’
enfant dont je disais tout à l’heure que la connaissance n’est pas exi
4946
tte psychologie de l’enfant dont je disais tout à
l’
heure que la connaissance n’est pas exigée de ceux qui établissent les
4947
gie de l’enfant dont je disais tout à l’heure que
la
connaissance n’est pas exigée de ceux qui établissent les programmes
4948
aissance n’est pas exigée de ceux qui établissent
les
programmes et les examens. « Les examens faussent complètement l’espr
4949
exigée de ceux qui établissent les programmes et
les
examens. « Les examens faussent complètement l’esprit de l’enseigneme
4950
qui établissent les programmes et les examens. «
Les
examens faussent complètement l’esprit de l’enseignement », lit-on ju
4951
les examens. « Les examens faussent complètement
l’
esprit de l’enseignement », lit-on jusque sous la plume de divers maît
4952
. « Les examens faussent complètement l’esprit de
l’
enseignement », lit-on jusque sous la plume de divers maîtres primaire
4953
s et secondaires. Ils n’en sont pas moins devenus
le
but même de l’instruction ; la fin qui justifie les moyens et à quoi
4954
s. Ils n’en sont pas moins devenus le but même de
l’
instruction ; la fin qui justifie les moyens et à quoi l’on subordonne
4955
pas moins devenus le but même de l’instruction ;
la
fin qui justifie les moyens et à quoi l’on subordonne tout, plaisir,
4956
e but même de l’instruction ; la fin qui justifie
les
moyens et à quoi l’on subordonne tout, plaisir, goût au travail, qual
4957
uction ; la fin qui justifie les moyens et à quoi
l’
on subordonne tout, plaisir, goût au travail, qualité du travail, sant
4958
vail, qualité du travail, santé, liberté, sens de
la
justice et autres balivernes, instruction véritable et autres plaisan
4959
le et autres plaisanteries de gros calibre, car à
la
vérité ce n’est pas d’enseigner qu’il s’agit, mais de soumettre les e
4960
t pas d’enseigner qu’il s’agit, mais de soumettre
les
esprits au contrôle de l’État, voyons donc, — n’avez-vous pas honte d
4961
git, mais de soumettre les esprits au contrôle de
l’
État, voyons donc, — n’avez-vous pas honte de vous faire rappeler sans
4962
ler sans cesse des vérités aussi élémentaires.
L’
égalitarisme des connaissances De l’existence des programmes, qui e
4963
taires. L’égalitarisme des connaissances De
l’
existence des programmes, qui est un fait, et de l’existence de la Dém
4964
’existence des programmes, qui est un fait, et de
l’
existence de la Démocratie, qui est une prétention (réservons le mot d
4965
programmes, qui est un fait, et de l’existence de
la
Démocratie, qui est une prétention (réservons le mot d’idéal), découl
4966
la Démocratie, qui est une prétention (réservons
le
mot d’idéal), découle cette exigence théorique : tous les enfants doi
4967
d’idéal), découle cette exigence théorique : tous
les
enfants doivent à tout instant être en mesure 1° d’ingurgiter la même
4968
ent à tout instant être en mesure 1° d’ingurgiter
la
même quantité de « matière » ; 2° d’en rendre compte de la même façon
4969
uantité de « matière » ; 2° d’en rendre compte de
la
même façon, dans le même temps. Contentons-nous de remarquer que ce p
4970
» ; 2° d’en rendre compte de la même façon, dans
le
même temps. Contentons-nous de remarquer que ce principe est à la bas
4971
ontentons-nous de remarquer que ce principe est à
la
base du système ; qui repose donc sur une tranquille méconnaissance d
4972
repose donc sur une tranquille méconnaissance de
la
nature humaine. L’histoire enregistre bien une ou deux autres bêtises
4973
e tranquille méconnaissance de la nature humaine.
L’
histoire enregistre bien une ou deux autres bêtises de cette épaisseur
4974
xtension universelle et un caractère obligatoire.
L’
école exige donc que les meilleurs ralentissent et que les plus faible
4975
un caractère obligatoire. L’école exige donc que
les
meilleurs ralentissent et que les plus faibles se forcent. Elle ne co
4976
exige donc que les meilleurs ralentissent et que
les
plus faibles se forcent. Elle ne convient qu’aux médiocres, dont elle
4977
le ne convient qu’aux médiocres, dont elle assure
le
triomphe. L’école s’attaque impitoyablement aux natures d’exception,
4978
t qu’aux médiocres, dont elle assure le triomphe.
L’
école s’attaque impitoyablement aux natures d’exception, et les réduit
4979
taque impitoyablement aux natures d’exception, et
les
réduit avec acharnement à son commun dénominateur4. Nos bourgeois ass
4980
s ils se fâchent tout rouge quand on leur dit que
la
Suisse est caractérisée, aux yeux de l’étranger impartial, par sa cul
4981
r dit que la Suisse est caractérisée, aux yeux de
l’
étranger impartial, par sa culture intensive et extensive des veaux et
4982
nsive et extensive des veaux et des médiocres.
Le
gavage Moyen de réaliser les précédents. Plus ou moins rationalisé
4983
des médiocres. Le gavage Moyen de réaliser
les
précédents. Plus ou moins rationalisé. Son instrument le plus parfait
4984
édents. Plus ou moins rationalisé. Son instrument
le
plus parfait s’appelle le manuel. Un bon manuel est un résumé clair e
4985
onalisé. Son instrument le plus parfait s’appelle
le
manuel. Un bon manuel est un résumé clair et portatif des résultats a
4986
et portatif des résultats actuels d’une science.
Le
bon sens voudrait qu’on étudie d’abord la science dans sa réalité, pu
4987
cience. Le bon sens voudrait qu’on étudie d’abord
la
science dans sa réalité, puis qu’on se réfère au résumé comme à un ai
4988
se réfère au résumé comme à un aide-mémoire. Mais
l’
école veut qu’on commence par apprendre le résumé. D’ailleurs elle s’a
4989
e. Mais l’école veut qu’on commence par apprendre
le
résumé. D’ailleurs elle s’arrête là. Les manuels ne correspondent à a
4990
apprendre le résumé. D’ailleurs elle s’arrête là.
Les
manuels ne correspondent à aucune réalité. Ils ne renferment rien qui
4991
, rien qui soit authentique. Ils négligent toutes
les
particularités, toutes les « prises » où pourrait s’accrocher l’intér
4992
. Ils négligent toutes les particularités, toutes
les
« prises » où pourrait s’accrocher l’intérêt. Ils dispensent de tout
4993
és, toutes les « prises » où pourrait s’accrocher
l’
intérêt. Ils dispensent de tout contact direct avec ce dont ils traite
4994
tout contact direct avec ce dont ils traitent. Or
la
valeur éducative des choses n’apparaît qu’à celui qui entre en commer
4995
e de mille, dit un sage oriental dont j’ai oublié
le
nom. Une autre conséquence du gavage, c’est qu’on ne peut laisser aux
4996
du gavage, c’est qu’on ne peut laisser aux élèves
le
temps qu’il faut pour assimiler ce qu’ils apprennent. Ils sont forcés
4997
n’est pas modèle, il est absurde. Mais où sont à
l’
école les modèles de ce qu’on nommait autrefois la belle ouvrage ? On
4998
as modèle, il est absurde. Mais où sont à l’école
les
modèles de ce qu’on nommait autrefois la belle ouvrage ? On va suppri
4999
l’école les modèles de ce qu’on nommait autrefois
la
belle ouvrage ? On va supprimer les leçons de calligraphie. La dis
5000
mait autrefois la belle ouvrage ? On va supprimer
les
leçons de calligraphie. La discipline On conçoit que la réalisa
5001
? On va supprimer les leçons de calligraphie.
La
discipline On conçoit que la réalisation d’un programme entièremen
5002
calligraphie. La discipline On conçoit que
la
réalisation d’un programme entièrement contre nature exige une discip
5003
ne sévère. D’où notre conception pénitentiaire de
l’
école. Mais, s’il est des disciplines qui renforcent, il en est d’aut
5004
renforcent, il en est d’autres qui amoindrissent.
La
discipline scolaire consiste à faire tenir les enfants immobiles et m
5005
nt. La discipline scolaire consiste à faire tenir
les
enfants immobiles et muets 6 heures par jour durant 8 ans. Il paraît
5006
ar jour durant 8 ans. Il paraît que cela facilite
le
travail du maître. Il se peut. Tout dépend de ce qu’on attend de ce t
5007
ravail. Je doute qu’il soit de nature à légitimer
l’
énormité de l’effort qu’on demande à ces petits. Là encore il y a une
5008
te qu’il soit de nature à légitimer l’énormité de
l’
effort qu’on demande à ces petits. Là encore il y a une exagération ab
5009
énéralisation si schématique et superficielle que
la
discipline perd tout son sens éducatif et n’est plus qu’une entrave é
5010
chez un peuple qui vraiment ne péchait point par
l’
excès de cette vertu. La discipline primaire forme des gobeurs et des
5011
ment ne péchait point par l’excès de cette vertu.
La
discipline primaire forme des gobeurs et des inertes, fournit des mou
5012
tes, fournit des moutons aux partis et prédispose
les
citoyens suisses à prendre au sérieux les innombrables défense de, pe
5013
dispose les citoyens suisses à prendre au sérieux
les
innombrables défense de, petites crottes noires et blanches qui marqu
5014
es noires et blanches qui marquent un peu partout
le
passage de l’État, et dont la vue permet à ceux qui tombent du ciel s
5015
lanches qui marquent un peu partout le passage de
l’
État, et dont la vue permet à ceux qui tombent du ciel sur notre sol d
5016
uent un peu partout le passage de l’État, et dont
la
vue permet à ceux qui tombent du ciel sur notre sol de s’écrier sans
5017
berté, liberté chérie, voilà bien ta patrie. »
La
préparation civique Tous les pontifes de l’instruction publique so
5018
en ta patrie. » La préparation civique Tous
les
pontifes de l’instruction publique sont d’accord sur ce point : l’éco
5019
La préparation civique Tous les pontifes de
l’
instruction publique sont d’accord sur ce point : l’école primaire doi
5020
instruction publique sont d’accord sur ce point :
l’
école primaire doit être une école de Démocratie. Ils insistent sur le
5021
t être une école de Démocratie. Ils insistent sur
le
fait que les leçons d’instruction civique sont insuffisantes pour for
5022
cole de Démocratie. Ils insistent sur le fait que
les
leçons d’instruction civique sont insuffisantes pour former le petit
5023
nstruction civique sont insuffisantes pour former
le
petit citoyen : il faut que l’enseignement tout entier soit occasion
5024
santes pour former le petit citoyen : il faut que
l’
enseignement tout entier soit occasion de développer les vertus social
5025
eignement tout entier soit occasion de développer
les
vertus sociales de l’élève. « Une classe est une société en miniature
5026
oit occasion de développer les vertus sociales de
l’
élève. « Une classe est une société en miniature. » Ceci est une énorm
5027
une énorme bourde. Juxtaposez trente enfants sur
les
bancs d’une salle d’école, vous n’aurez rien qui ressemble en quoi qu
5028
état social existant. Ce qui est vrai, c’est que
le
fait, absolument nouveau dans l’Histoire, que l’on oblige les enfants
5029
vrai, c’est que le fait, absolument nouveau dans
l’
Histoire, que l’on oblige les enfants à vivre ensemble dès l’âge de 6
5030
le fait, absolument nouveau dans l’Histoire, que
l’
on oblige les enfants à vivre ensemble dès l’âge de 6 ans, favorise le
5031
solument nouveau dans l’Histoire, que l’on oblige
les
enfants à vivre ensemble dès l’âge de 6 ans, favorise le développemen
5032
que l’on oblige les enfants à vivre ensemble dès
l’
âge de 6 ans, favorise le développement de leurs penchants les plus «
5033
nts à vivre ensemble dès l’âge de 6 ans, favorise
le
développement de leurs penchants les plus « communs » : jalousie, van
5034
ans, favorise le développement de leurs penchants
les
plus « communs » : jalousie, vanité, panurgisme, concurrence sournois
5035
e, esprit de parti, arrivisme et parlementarisme.
La
culture de l’esprit démocratique telle qu’elle est comprise par les i
5036
arti, arrivisme et parlementarisme. La culture de
l’
esprit démocratique telle qu’elle est comprise par les instituteurs —
5037
sprit démocratique telle qu’elle est comprise par
les
instituteurs — et elle ne peut être comprise autrement — est essentie
5038
nière que ce soit, voudraient « se distinguer ». (
Le
mépris que notre peuple met dans cette expression !) Pour moi ce que
5039
expérience scolaire, c’est une grosse vérité que
le
bon sens m’eût par ailleurs fait voir : il n’y a pas d’égalité réelle
5040
: il n’y a pas d’égalité réelle possible tant que
la
loi est la même pour tous. Je ne parle pas des manuels d’histoire, do
5041
pas d’égalité réelle possible tant que la loi est
la
même pour tous. Je ne parle pas des manuels d’histoire, dont il est a
5042
i démontré qu’ils donnent une image mensongère de
l’
ancienne Suisse, à l’usage du peuple souverain qui ne manque pas d’en
5043
nent une image mensongère de l’ancienne Suisse, à
l’
usage du peuple souverain qui ne manque pas d’en être flatté. Et puis,
5044
e flatté. Et puis, quelle est cette préparation à
la
vie qui commence par nous soustraire à l’influence de la vie ? Quelle
5045
ation à la vie qui commence par nous soustraire à
l’
influence de la vie ? Quelle est cette éducation sociale qui enlève l’
5046
qui commence par nous soustraire à l’influence de
la
vie ? Quelle est cette éducation sociale qui enlève l’enfant à la fam
5047
e ? Quelle est cette éducation sociale qui enlève
l’
enfant à la famille ?5 Quel est cet instrument de perfectionnement civ
5048
est cette éducation sociale qui enlève l’enfant à
la
famille ?5 Quel est cet instrument de perfectionnement civique qui as
5049
instrument de perfectionnement civique qui assure
l’
écrasement des plus délicats par les plus vulgaires ? L’idéal du bo
5050
que qui assure l’écrasement des plus délicats par
les
plus vulgaires ? L’idéal du bon élève Le bon sens voudrait que
5051
ent des plus délicats par les plus vulgaires ?
L’
idéal du bon élève Le bon sens voudrait que le bon élève soit celui
5052
r les plus vulgaires ? L’idéal du bon élève
Le
bon sens voudrait que le bon élève soit celui qui sait utiliser pour
5053
L’idéal du bon élève Le bon sens voudrait que
le
bon élève soit celui qui sait utiliser pour son profit humain la peti
5054
it celui qui sait utiliser pour son profit humain
la
petite somme de connaissances indispensables qu’on lui donne à l’écol
5055
de connaissances indispensables qu’on lui donne à
l’
école. (Cet argent de poche, ni plus ni moins.) Ou encore : que le bon
5056
gent de poche, ni plus ni moins.) Ou encore : que
le
bon élève soit celui qui supporte le mieux le traitement scolaire ; c
5057
encore : que le bon élève soit celui qui supporte
le
mieux le traitement scolaire ; celui dont la valeur humaine subsiste
5058
que le bon élève soit celui qui supporte le mieux
le
traitement scolaire ; celui dont la valeur humaine subsiste intacte a
5059
orte le mieux le traitement scolaire ; celui dont
la
valeur humaine subsiste intacte au milieu des conditions anormales cr
5060
cte au milieu des conditions anormales créées par
l’
école publique. Mais l’idéal de l’école est autre ; il est même tout c
5061
tions anormales créées par l’école publique. Mais
l’
idéal de l’école est autre ; il est même tout contraire. On ne peut pa
5062
ales créées par l’école publique. Mais l’idéal de
l’
école est autre ; il est même tout contraire. On ne peut pas exiger qu
5063
té que je ne puis m’empêcher de trouver suspecte.
Le
bon élève est celui qui a de bons points. Or les bons points vont aux
5064
. Le bon élève est celui qui a de bons points. Or
les
bons points vont aux parfaits imitateurs. Oyez-moi tous ces petits ph
5065
phonographes…ographes…graphes…graphes… Enfoncés,
les
perroquets. Dans une composition sur La Neige, Victoria X, 10 ans, éc
5066
nfoncés, les perroquets. Dans une composition sur
La
Neige, Victoria X, 10 ans, écrit : « C’est l’hiver. Déjà la terre a r
5067
sur La Neige, Victoria X, 10 ans, écrit : « C’est
l’
hiver. Déjà la terre a revêtu son blanc manteau. » Elle aura 10 sur 10
5068
Victoria X, 10 ans, écrit : « C’est l’hiver. Déjà
la
terre a revêtu son blanc manteau. » Elle aura 10 sur 10. Mais on donn
5069
évident que Sylvie est supérieure à Victoria dans
la
mesure où l’invention est supérieure à l’imitation. Mais Victoria mon
5070
ylvie est supérieure à Victoria dans la mesure où
l’
invention est supérieure à l’imitation. Mais Victoria montre une âme d
5071
ia dans la mesure où l’invention est supérieure à
l’
imitation. Mais Victoria montre une âme docile, un rassurant défaut d’
5072
que, tandis que Sylvie appartient manifestement à
la
race dangereuse de ceux qui voient avec leurs yeux. Le bon élève est
5073
ce dangereuse de ceux qui voient avec leurs yeux.
Le
bon élève est aussi l’élève discipliné. L’école veut que partout la v
5074
ui voient avec leurs yeux. Le bon élève est aussi
l’
élève discipliné. L’école veut que partout la valeur cède le pas à la
5075
yeux. Le bon élève est aussi l’élève discipliné.
L’
école veut que partout la valeur cède le pas à la règle. Elle cherche
5076
ussi l’élève discipliné. L’école veut que partout
la
valeur cède le pas à la règle. Elle cherche à développer chez nos pet
5077
scipliné. L’école veut que partout la valeur cède
le
pas à la règle. Elle cherche à développer chez nos petits Helvètes un
5078
L’école veut que partout la valeur cède le pas à
la
règle. Elle cherche à développer chez nos petits Helvètes un légalism
5079
u d’impuissants, qui d’ailleurs ne peut être qu’à
l’
avantage des gens en place, vieille histoire. On m’objectera sans dout
5080
ex-forts-en-thème, voire par d’ex-instituteurs. À
la
vérité, il s’agit de réussites qui, pour avoir enivré l’espoir et enf
5081
té, il s’agit de réussites qui, pour avoir enivré
l’
espoir et enflammé l’ambition d’un grand nombre de régents, ne laissen
5082
sites qui, pour avoir enivré l’espoir et enflammé
l’
ambition d’un grand nombre de régents, ne laissent pas que d’être asse
5083
avoir enivré l’espoir et enflammé l’ambition d’un
grand
nombre de régents, ne laissent pas que d’être assez spéciales. Il arr
5084
ires » (témoignage suffisant de leurs aptitudes à
la
compromission sociale établie) et cueilli au passage un grade univers
5085
nombreux banquets de cercles locaux où se fondent
les
réputations, où se « baptisent » les hommes d’avenir. Un jour on voit
5086
ù se fondent les réputations, où se « baptisent »
les
hommes d’avenir. Un jour on voit s’étaler en première page des illust
5087
r on voit s’étaler en première page des illustrés
la
face épanouie quoique énergique d’un de ces coqs de village qu’on vie
5088
de ces coqs de village qu’on vient de jucher sur
la
flèche de l’édifice administratif. Et c’est ce qui s’appelle une bell
5089
de village qu’on vient de jucher sur la flèche de
l’
édifice administratif. Et c’est ce qui s’appelle une belle carrière. M
5090
t pas beaucoup ma superstition, par ailleurs fort
grande
. Tous ceux qui ont eu l’occasion de comparer les bons élèves de diver
5091
n, par ailleurs fort grande. Tous ceux qui ont eu
l’
occasion de comparer les bons élèves de diverses classes d’un collège
5092
ande. Tous ceux qui ont eu l’occasion de comparer
les
bons élèves de diverses classes d’un collège ont été frappés de const
5093
ses d’un collège ont été frappés de constater que
la
force et l’originalité de leur jugement sont en raison inverse du nom
5094
lège ont été frappés de constater que la force et
l’
originalité de leur jugement sont en raison inverse du nombre d’années
5095
nées d’instruction publique qu’ils ont subies.
Le
dilemme J’ai indiqué que les principes de l’instruction publique n
5096
ils ont subies. Le dilemme J’ai indiqué que
les
principes de l’instruction publique ne coïncident qu’accidentellement
5097
Le dilemme J’ai indiqué que les principes de
l’
instruction publique ne coïncident qu’accidentellement avec ceux du bo
5098
ls constituent une inversion méthodique de toutes
les
lois divines et humaines. C’est-à-dire : une méthode d’abâtardissemen
5099
. C’est-à-dire : une méthode d’abâtardissement de
la
race. D’autre part, il est aisé de voir que tous ces principes dérive
5100
ces principes dérivent nécessairement du fait que
l’
école est publique, obligatoire, et soumise au contrôle de l’État. Al
5101
publique, obligatoire, et soumise au contrôle de
l’
État. Alors ? Ou bien vous acceptez le régime — mais aussi ses conséq
5102
ontrôle de l’État. Alors ? Ou bien vous acceptez
le
régime — mais aussi ses conséquences absurdes et fatales, par exemple
5103
ses conséquences absurdes et fatales, par exemple
l’
instruction publique. Ou bien vous combattez l’instruction publique —
5104
le l’instruction publique. Ou bien vous combattez
l’
instruction publique — mais vous êtes, de ce fait, contre le régime. I
5105
ion publique — mais vous êtes, de ce fait, contre
le
régime. Il y a là, dirait M. Prudhomme, un bien grave dilemme. 4.
5106
ien grave dilemme. 4. Ce ne sont pas seulement
les
meilleurs qui sont sacrifiés. Voici ce que M. E. Duvillard dit des en
5107
ue M. E. Duvillard dit des enfants peu doués pour
les
disciplines scolaires : « Les épaves scolaires, faute d’un traitement
5108
ants peu doués pour les disciplines scolaires : «
Les
épaves scolaires, faute d’un traitement pédagogique approprié, tomben
5109
prié, tombent dans une apathie intellectuelle qui
les
conduit souvent à l’imbécillité et au vice. » Emmanuel Duvillard, L’É
5110
apathie intellectuelle qui les conduit souvent à
l’
imbécillité et au vice. » Emmanuel Duvillard, L’École de demain, Genèv
5111
à l’imbécillité et au vice. » Emmanuel Duvillard,
L’
École de demain, Genève, Kündig, 1918, p. 12. 5. Il est peut-être ava
5112
t-être avantageux dans certains cas de soustraire
l’
enfant à l’influence d’une famille anormale. Mais d’abord c’est sancti
5113
tageux dans certains cas de soustraire l’enfant à
l’
influence d’une famille anormale. Mais d’abord c’est sanctionner cet é
5114
(il y aurait sans doute d’autres moyens de sauver
l’
enfant dans sa famille). Ensuite, pourquoi fait-on en réalité, comme s
5115
ite, pourquoi fait-on en réalité, comme si toutes
les
familles constituaient un milieu délétère ? 6. Justice démocratique,
5116
6. Justice démocratique, égalité, légalité, sont
les
meilleures armes de la bassesse contre toute valeur réelle, absolue.
5117
, égalité, légalité, sont les meilleures armes de
la
bassesse contre toute valeur réelle, absolue.
5118
4.
L’
illusion réformiste Bien entendu, tout cela a été dit. (Un peu autre
5119
tion. Il suffit pour s’en convaincre de parcourir
l’
abondante littérature publiée sur le « problème de l’école nouvelle ».
5120
de parcourir l’abondante littérature publiée sur
le
« problème de l’école nouvelle ». On appelle école nouvelle tout étab
5121
bondante littérature publiée sur le « problème de
l’
école nouvelle ». On appelle école nouvelle tout établissement où l’on
5122
. On appelle école nouvelle tout établissement où
l’
on s’efforce d’enseigner selon des principes tirés de l’observation de
5123
’efforce d’enseigner selon des principes tirés de
l’
observation des enfants, c’est-à-dire : en contradiction sur toute la
5124
nfants, c’est-à-dire : en contradiction sur toute
la
ligne avec l’enseignement officiel. Les promoteurs de ces mouvements
5125
à-dire : en contradiction sur toute la ligne avec
l’
enseignement officiel. Les promoteurs de ces mouvements tentent la gag
5126
sur toute la ligne avec l’enseignement officiel.
Les
promoteurs de ces mouvements tentent la gageure de réformer l’école p
5127
fficiel. Les promoteurs de ces mouvements tentent
la
gageure de réformer l’école primaire sans toucher au principe de l’in
5128
de ces mouvements tentent la gageure de réformer
l’
école primaire sans toucher au principe de l’instruction publique. Les
5129
rmer l’école primaire sans toucher au principe de
l’
instruction publique. Les réformes qu’ils ont proposées jusqu’ici sont
5130
ns toucher au principe de l’instruction publique.
Les
réformes qu’ils ont proposées jusqu’ici sont en général judicieuses,
5131
usqu’ici sont en général judicieuses, dictées par
le
bon sens7 et retouchées par le pédantisme inhérent à toute science. O
5132
euses, dictées par le bon sens7 et retouchées par
le
pédantisme inhérent à toute science. On a constaté que l’école actuel
5133
tisme inhérent à toute science. On a constaté que
l’
école actuelle est fondée sur une remarquable ignorance de la psycholo
5134
uelle est fondée sur une remarquable ignorance de
la
psychologie infantile. Où il y avait non-science, on a voulu apporter
5135
Où il y avait non-science, on a voulu apporter de
la
science. Mais c’est un art qu’il faudrait. Sinon l’on retombera dans
5136
science. Mais c’est un art qu’il faudrait. Sinon
l’
on retombera dans des absurdités. On a créé par exemple des « jardins
5137
n a créé par exemple des « jardins d’enfants » où
l’
on apprend à des élèves âgés de 3 à 4 ans à lacer leurs souliers ; et
5138
ans à lacer leurs souliers ; et cela s’appelle de
l’
école pratique. Plus tard on fait apprendre à ces mêmes enfants, et ré
5139
mêmes enfants, et réciter par cœur et à rebours,
les
noms des rues et places de leur ville, comme s’ils étaient tous desti
5140
e leur ville, comme s’ils étaient tous destinés à
la
profession de chauffeurs de taxi. Si cette conception du pratique pré
5141
eption du pratique prévaut, il est à craindre que
l’
école nouvelle n’apporte bientôt sa méthode rationnelle pour apprendre
5142
ur apprendre aux bambins à marcher en décomposant
les
mouvements avec l’aide d’un métronome pédagogique. De même, sous le l
5143
bins à marcher en décomposant les mouvements avec
l’
aide d’un métronome pédagogique. De même, sous le louable prétexte d’é
5144
l’aide d’un métronome pédagogique. De même, sous
le
louable prétexte d’école active, on prétend faire apprendre la gramma
5145
étexte d’école active, on prétend faire apprendre
la
grammaire par le moyen de gesticulations appropriées : foin de ces an
5146
tive, on prétend faire apprendre la grammaire par
le
moyen de gesticulations appropriées : foin de ces analyses de textes
5147
iées : foin de ces analyses de textes absurdes où
l’
on soulignait en rouge tous les mots en « al », tous les verbes dépone
5148
textes absurdes où l’on soulignait en rouge tous
les
mots en « al », tous les verbes déponents ; désormais l’étude des ver
5149
soulignait en rouge tous les mots en « al », tous
les
verbes déponents ; désormais l’étude des verbes actifs sera aussi act
5150
en « al », tous les verbes déponents ; désormais
l’
étude des verbes actifs sera aussi active, un élève se mettra à marche
5151
a aussi active, un élève se mettra à marcher dans
le
couloir en s’écriant : je marche, ou : j’arpente ; un autre restera a
5152
is, en affirmant : je siège ; un troisième lèvera
la
main, et dira : je lève la main, — au lieu de demander ce qu’on croit
5153
; un troisième lèvera la main, et dira : je lève
la
main, — au lieu de demander ce qu’on croit. Tout porte à craindre qu’
5154
mander ce qu’on croit. Tout porte à craindre qu’à
la
faveur du tumulte l’un ou l’autre proclamant : je sors ! ne traduise
5155
be en action et ne disparaisse à tout jamais dans
les
campagnes, tirant le meilleur parti possible de l’exercice ; car il n
5156
paraisse à tout jamais dans les campagnes, tirant
le
meilleur parti possible de l’exercice ; car il ne manque à ce système
5157
s campagnes, tirant le meilleur parti possible de
l’
exercice ; car il ne manque à ce système, avouez-le, que juste la spon
5158
’exercice ; car il ne manque à ce système, avouez-
le
, que juste la spontanéité nécessaire pour que ça ne soit pas une lour
5159
r il ne manque à ce système, avouez-le, que juste
la
spontanéité nécessaire pour que ça ne soit pas une lourde farce. Ces
5160
ce qu’elles sont comiques précisément. Je ferai à
l’
école nouvelle un reproche d’une autre nature. Elle prétend donner plu
5161
onner plus de liberté aux enfants en leur rendant
le
travail amusant, en leur laissant la possibilité de trouver par eux-m
5162
leur rendant le travail amusant, en leur laissant
la
possibilité de trouver par eux-mêmes ce qu’ils doivent apprendre. Mai
5163
té, cet amusement a pour seul but de faire avaler
la
pilule amère des connaissances. On songe à M. Ford, qui donne à ses o
5164
ment deux fois plus de machines. Jeu du chat avec
la
souris. On n’impose plus des résultats, on les fait trouver. Notez qu
5165
vec la souris. On n’impose plus des résultats, on
les
fait trouver. Notez que cela revient au même, sauf que par la méthode
5166
ver. Notez que cela revient au même, sauf que par
la
méthode nouvelle on atteint l’enfant plus profondément, on se glisse
5167
même, sauf que par la méthode nouvelle on atteint
l’
enfant plus profondément, on se glisse à l’intérieur de son esprit, là
5168
élabore son invention ; on capte scientifiquement
les
sources mêmes de sa liberté. « Instruire en amusant » peut être la fo
5169
de sa liberté. « Instruire en amusant » peut être
la
formule d’une tromperie subtile et plus grave que la brutalité primai
5170
formule d’une tromperie subtile et plus grave que
la
brutalité primaire, parce qu’elle n’excite pas de réaction vive de la
5171
t des écoliers. Enfin, je n’aime pas qu’on traite
le
gosse comme un organisme dont il s’agit d’obtenir le rendement le plu
5172
gosse comme un organisme dont il s’agit d’obtenir
le
rendement le plus élevé. On cultive les petits d’hommes comme des pla
5173
n organisme dont il s’agit d’obtenir le rendement
le
plus élevé. On cultive les petits d’hommes comme des plantes de serre
5174
d’obtenir le rendement le plus élevé. On cultive
les
petits d’hommes comme des plantes de serre dans ces jardins d’enfants
5175
serre dans ces jardins d’enfants. On y parle de «
l’
enfant » comme on parle d’un produit chimique : On remarque chez l’enf
5176
on parle d’un produit chimique : On remarque chez
l’
enfant… Dans ce milieu l’enfant ne tarde pas à se développer… Prenez u
5177
mique : On remarque chez l’enfant… Dans ce milieu
l’
enfant ne tarde pas à se développer… Prenez un enfant de 6 ans… Mettez
5178
… Mettez ensemble trois enfants… Je reconnais que
les
buts de l’école nouvelle sont honnêtement scientifiques, et désintére
5179
emble trois enfants… Je reconnais que les buts de
l’
école nouvelle sont honnêtement scientifiques, et désintéressés. Mais
5180
honnêtement scientifiques, et désintéressés. Mais
l’
enfant-cobaye vaut l’enfant-citoyen. Moi je voudrais l’enfant tout cou
5181
ques, et désintéressés. Mais l’enfant-cobaye vaut
l’
enfant-citoyen. Moi je voudrais l’enfant tout court. Or il paraît que
5182
ant-cobaye vaut l’enfant-citoyen. Moi je voudrais
l’
enfant tout court. Or il paraît que c’est très dangereux. Néanmoins je
5183
ent du système officiel qui pourrait bien un jour
l’
atteindre au cœur, et je vois tout ce que cela entraînerait, dans une
5184
înerait, dans une ruine d’où renaîtrait peut-être
l’
humanité… Je songe à un enseignement sans école. Je songe au maître an
5185
ans école. Je songe au maître antique, dont toute
la
personne était un enseignement, et qui n’avait pas des élèves, mais d
5186
lèves, mais des disciples. Celui-là seul favorise
le
développement des individus, qui ne cherche pas un rendement mais qui
5187
salue ces jeunes gens qui appliquent avec ferveur
les
principes de l’école libre, qui se moquent des programmes, et dont le
5188
gens qui appliquent avec ferveur les principes de
l’
école libre, qui se moquent des programmes, et dont les classes joyeus
5189
ole libre, qui se moquent des programmes, et dont
les
classes joyeuses sont de vraies foires : ils ont toute mon amitié. Ce
5190
marquer d’autant plus librement qu’ils trahissent
le
dessein profond de l’instruction publique, qu’ils trahissent leur mis
5191
librement qu’ils trahissent le dessein profond de
l’
instruction publique, qu’ils trahissent leur mission officielle. Ils é
5192
bravo ! Mais ce qu’on leur avait confié, c’était
la
fabrication en série de petits démocrates conscients et organisés. Je
5193
ment trop gros pour échapper plus longtemps à MM.
les
Inspecteurs des Écoles. Je le crains, dis-je ; car le monde ne progre
5194
us longtemps à MM. les Inspecteurs des Écoles. Je
le
crains, dis-je ; car le monde ne progresse qu’à la faveur de malenten
5195
nspecteurs des Écoles. Je le crains, dis-je ; car
le
monde ne progresse qu’à la faveur de malentendus (si tant est qu’il p
5196
e crains, dis-je ; car le monde ne progresse qu’à
la
faveur de malentendus (si tant est qu’il progresse). L’école nouvelle
5197
eur de malentendus (si tant est qu’il progresse).
L’
école nouvelle n’échappe à l’absurdité primaire qu’à la faveur d’une é
5198
st qu’il progresse). L’école nouvelle n’échappe à
l’
absurdité primaire qu’à la faveur d’une équivoque. Cette équivoque fra
5199
le nouvelle n’échappe à l’absurdité primaire qu’à
la
faveur d’une équivoque. Cette équivoque frappe tout essai de réforme.
5200
ndant une possibilité pratique d’en sortir, je ne
le
nie pas. Mais du point de vue de la vérité, force nous est de reconna
5201
sortir, je ne le nie pas. Mais du point de vue de
la
vérité, force nous est de reconnaître que notre dilemme subsiste dans
5202
Ou des appareils qui en tiennent lieu. 8. Voir à
l’
appendice le sens que je donne à ce mot.
5203
eils qui en tiennent lieu. 8. Voir à l’appendice
le
sens que je donne à ce mot.
5204
5.
La
machine à fabriquer des électeurs Je crois à l’absurdité de fait de
5205
La machine à fabriquer des électeurs Je crois à
l’
absurdité de fait de l’instruction publique. Je crois aussi qu’on ne p
5206
des électeurs Je crois à l’absurdité de fait de
l’
instruction publique. Je crois aussi qu’on ne peut réformer l’absurde.
5207
n publique. Je crois aussi qu’on ne peut réformer
l’
absurde. Je demande seulement qu’on m’explique pourquoi il triomphe et
5208
he et se perpétue ; de quel droit il nous écrase.
La
réponse est simple, terriblement simple : du droit de la Démocratie.
5209
nse est simple, terriblement simple : du droit de
la
Démocratie. L’instruction publique et la Démocratie sont sœurs siamoi
5210
terriblement simple : du droit de la Démocratie.
L’
instruction publique et la Démocratie sont sœurs siamoises. Elles sont
5211
droit de la Démocratie. L’instruction publique et
la
Démocratie sont sœurs siamoises. Elles sont nées en même temps. Elles
5212
ste pas cette thèse. Elle est glorifiée dans tous
les
banquets officiels par des orateurs émus et il y aurait une insigne h
5213
urait une insigne hypocrisie à feindre de ne plus
la
reconnaître, une fois dissipée la fumée des civets, des cigares et de
5214
ndre de ne plus la reconnaître, une fois dissipée
la
fumée des civets, des cigares et des idéologies enivrées. D’ailleurs,
5215
ologies enivrées. D’ailleurs, cette idée que j’ai
l’
honneur de partager avec mes adversaires se trouve correspondre à des
5216
x si rare. Un fait simple, par exemple, c’est que
la
Démocratie sans l’instruction publique est pratiquement irréalisable.
5217
simple, par exemple, c’est que la Démocratie sans
l’
instruction publique est pratiquement irréalisable. Ici, je demanderai
5218
nt au lecteur de vouloir bien ne point trop faire
la
bête, sinon je me verrai contraint de lui expliquer un certain nombre
5219
faut pouvoir lire, écrire et compter pour suivre
la
campagne électorale, voter et truquer légalement les votes. Ensuite,
5220
campagne électorale, voter et truquer légalement
les
votes. Ensuite, il faut de l’histoire, et de l’instruction civique, p
5221
truquer légalement les votes. Ensuite, il faut de
l’
histoire, et de l’instruction civique, pour qu’on sache à quoi cela ri
5222
les votes. Ensuite, il faut de l’histoire, et de
l’
instruction civique, pour qu’on sache à quoi cela rime. Ensuite, il fa
5223
rime. Ensuite, il faut une discipline sévère dès
l’
enfance pour façonner des contribuables inoffensifs. Enfin, il faut un
5224
fin, il faut un nombre considérable de leçons, et
le
plus longtemps possible, pour qu’on n’ait pas le temps de se rendre c
5225
le plus longtemps possible, pour qu’on n’ait pas
le
temps de se rendre compte que tout cela est absurde. Pour qu’on n’ait
5226
e que tout cela est absurde. Pour qu’on n’ait pas
le
temps d’écouter la nature qui répète par toutes ses voix, d’un millia
5227
absurde. Pour qu’on n’ait pas le temps d’écouter
la
nature qui répète par toutes ses voix, d’un milliard de façons, que c
5228
e façons, que c’est absurde. Pour qu’on n’ait pas
le
temps de découvrir la Liberté9, parce que celui qui l’a embrassée une
5229
surde. Pour qu’on n’ait pas le temps de découvrir
la
Liberté9, parce que celui qui l’a embrassée une fois, une seule fois,
5230
mps de découvrir la Liberté9, parce que celui qui
l’
a embrassée une fois, une seule fois, sait bien que tout le reste est
5231
ssée une fois, une seule fois, sait bien que tout
le
reste est absurde. Et voilà pour les sœurs siamoises. Continuons. La
5232
bien que tout le reste est absurde. Et voilà pour
les
sœurs siamoises. Continuons. La démocratie doit à l’École de vivre en
5233
e. Et voilà pour les sœurs siamoises. Continuons.
La
démocratie doit à l’École de vivre encore. Mais ce n’est de la part d
5234
sœurs siamoises. Continuons. La démocratie doit à
l’
École de vivre encore. Mais ce n’est de la part de notre Institutrice
5235
et mal dissimulée. Certes, je ne prétends pas que
les
créateurs de l’instruction publique aient eu pleine conscience de ce
5236
. Certes, je ne prétends pas que les créateurs de
l’
instruction publique aient eu pleine conscience de ce qu’ils faisaient
5237
pleine conscience de ce qu’ils faisaient — et je
les
excuse pour autant10. Je dis simplement ceci : leur œuvre n’a été pos
5238
ible que parce qu’elle était liée aux intérêts de
la
démocratie. Car il faut bien se représenter qu’elle n’était encore au
5239
qu’on répande universellement et obligatoirement
l’
art du saxophone ou de la balalaïka. Soyez certains qu’il ne manque à
5240
ement et obligatoirement l’art du saxophone ou de
la
balalaïka. Soyez certains qu’il ne manque à cette plaisanterie, pour
5241
que à cette plaisanterie, pour prendre corps, que
l’
appui intéressé d’un groupement politico-financier. Et il y aurait bie
5242
t il y aurait bien vite des députés pour célébrer
les
bienfaits sociaux, que dis-je, la valeur hautement moralisatrice de c
5243
pour célébrer les bienfaits sociaux, que dis-je,
la
valeur hautement moralisatrice de ces glapissants entonnoirs. D’aill
5244
oirs. D’ailleurs cette complicité, si évidente à
l’
origine de l’institution, se manifeste encore de nos jours, et d’une f
5245
eurs cette complicité, si évidente à l’origine de
l’
institution, se manifeste encore de nos jours, et d’une façon non moin
5246
tes normales. Je n’en veux pas d’autre preuve que
l’
état grotesquement arriéré de notre instrument de progrès par excellen
5247
’une explication vraisemblable de cette incurie :
l’
école, sous sa forme actuelle, remplit suffisamment son rôle politique
5248
dessin humoristique publié en 1914, représentant
l’
œuvre de Kitchener : une machine qui absorbait des gentlemen et rendai
5249
i absorbait des gentlemen et rendait des tommies.
La
machine scolaire, elle, dévore des enfants tout vifs et rend des cito
5250
vore des enfants tout vifs et rend des citoyens à
l’
œil torve. Durant l’opération, tous les crânes ont été décervelés et d
5251
t vifs et rend des citoyens à l’œil torve. Durant
l’
opération, tous les crânes ont été décervelés et dotés d’une petite mé
5252
citoyens à l’œil torve. Durant l’opération, tous
les
crânes ont été décervelés et dotés d’une petite mécanique à quatre so
5253
nique à quatre sous qui suffit à régler désormais
l’
automatisme de la vie civique. Le cerveau standard du type fédéral ne
5254
us qui suffit à régler désormais l’automatisme de
la
vie civique. Le cerveau standard du type fédéral ne laisse craindre a
5255
régler désormais l’automatisme de la vie civique.
Le
cerveau standard du type fédéral ne laisse craindre aucun imprévu dan
5256
on fonctionnement. Cet avantage inappréciable sur
le
cerveau naturel explique que les autorités compétentes n’aient point
5257
inappréciable sur le cerveau naturel explique que
les
autorités compétentes n’aient point hésité à l’adopter, malgré ses ra
5258
les autorités compétentes n’aient point hésité à
l’
adopter, malgré ses ratés assez fréquents. Maintenant je vous demande
5259
e un peu quel intérêt il y aurait à perfectionner
l’
instrument, à l’adapter aux particularités psychologiques, voire aux b
5260
térêt il y aurait à perfectionner l’instrument, à
l’
adapter aux particularités psychologiques, voire aux besoins purement
5261
purement sentimentaux qui peuvent apparaître chez
les
enfants ? Ce serait de l’art pour l’art. On ne peut pas en demander t
5262
euvent apparaître chez les enfants ? Ce serait de
l’
art pour l’art. On ne peut pas en demander tant aux gouvernements. La
5263
raître chez les enfants ? Ce serait de l’art pour
l’
art. On ne peut pas en demander tant aux gouvernements. La réforme sco
5264
n ne peut pas en demander tant aux gouvernements.
La
réforme scolaire, politiquement, n’est pas rentable. Il est clair que
5265
iquement, n’est pas rentable. Il est clair que si
le
but principal de l’instruction publique était d’éduquer le peuple d’u
5266
rentable. Il est clair que si le but principal de
l’
instruction publique était d’éduquer le peuple d’une façon désintéress
5267
incipal de l’instruction publique était d’éduquer
le
peuple d’une façon désintéressée, les gouvernements seraient un peu p
5268
it d’éduquer le peuple d’une façon désintéressée,
les
gouvernements seraient un peu plus fous qu’on n’ose les imaginer de n
5269
uvernements seraient un peu plus fous qu’on n’ose
les
imaginer de ne pas entreprendre sur l’heure une véritable révolution
5270
’on n’ose les imaginer de ne pas entreprendre sur
l’
heure une véritable révolution scolaire ; car il ne faudrait pas moins
5271
scolaire ; car il ne faudrait pas moins pour que
l’
école rattrape l’époque… Mais les gouvernements savent ce qu’ils font.
5272
l ne faudrait pas moins pour que l’école rattrape
l’
époque… Mais les gouvernements savent ce qu’ils font. Tout se tient, c
5273
as moins pour que l’école rattrape l’époque… Mais
les
gouvernements savent ce qu’ils font. Tout se tient, comme vous dites,
5274
e tient, comme vous dites, sans doute pour m’ôter
l’
envie de bousculer quoi que ce soit. J’aime les tremblements de terre,
5275
ter l’envie de bousculer quoi que ce soit. J’aime
les
tremblements de terre, vous tombez mal. J’appartiens à cette espèce d
5276
ne révolte de ma sensibilité qui me dresse contre
l’
École. Mes arguments ne se mettent en branle qu’après coup. Et quand v
5277
se mettent en branle qu’après coup. Et quand vous
les
démoliriez tous, ma rage n’en serait pas moins légitime. Je lui donne
5278
aison par définition. Après tout, peu m’importent
les
idéologies politiques, et peu m’importerait que l’École soit une mach
5279
s idéologies politiques, et peu m’importerait que
l’
École soit une machine à fabriquer de la démocratie — si je ne sentais
5280
erait que l’École soit une machine à fabriquer de
la
démocratie — si je ne sentais menacées dans cette aventure des valeur
5281
e auxquelles je tiens plus qu’à tout. Ma haine de
la
démocratie est l’aboutissement de l’évolution dont je viens de décrir
5282
ens plus qu’à tout. Ma haine de la démocratie est
l’
aboutissement de l’évolution dont je viens de décrire la marche nécess
5283
Ma haine de la démocratie est l’aboutissement de
l’
évolution dont je viens de décrire la marche nécessaire11. On ne manqu
5284
tissement de l’évolution dont je viens de décrire
la
marche nécessaire11. On ne manquera pas d’insinuer qu’à l’origine de
5285
nécessaire11. On ne manquera pas d’insinuer qu’à
l’
origine de tout ceci il y a surtout de la nervosité, de petites douleu
5286
uer qu’à l’origine de tout ceci il y a surtout de
la
nervosité, de petites douleurs de jeunes bourgeois. Essayer de venir
5287
, n’est-ce pas, mes agneaux. C’est justement dans
la
mesure où je participais de l’écœurant optimisme bourgeois que je m’a
5288
est justement dans la mesure où je participais de
l’
écœurant optimisme bourgeois que je m’accommodais d’un régime nocif po
5289
l y a d’authentiquement noble en chaque homme. Si
les
fils du peuple souffrent moins d’un tel régime, c’est qu’ils n’ont pa
5290
ussi sensible. Ils ignorent ce qu’étiolent en eux
les
droits de l’homme. Mais attendez, si quelques-uns allaient se réveill
5291
Il suffit d’un peu de chaleur d’âme pour amorcer
le
dégel de ces principes, et ce peut être le signal de la grande débâcl
5292
morcer le dégel de ces principes, et ce peut être
le
signal de la grande débâcle printanière. Il n’y a de révolution vérit
5293
el de ces principes, et ce peut être le signal de
la
grande débâcle printanière. Il n’y a de révolution véritable que de l
5294
de ces principes, et ce peut être le signal de la
grande
débâcle printanière. Il n’y a de révolution véritable que de la sensi
5295
ntanière. Il n’y a de révolution véritable que de
la
sensibilité. (Le jour où l’on culbutera ces Messieurs de leurs sièges
5296
a de révolution véritable que de la sensibilité. (
Le
jour où l’on culbutera ces Messieurs de leurs sièges, ils comprendron
5297
tion véritable que de la sensibilité. (Le jour où
l’
on culbutera ces Messieurs de leurs sièges, ils comprendront le sens d
5298
a ces Messieurs de leurs sièges, ils comprendront
le
sens des images.) 9. J’emploie ce mot au sens fort, au sens enivran
5299
pçonné ce que cela représente. 10. Voir note A à
la
fin du cahier. 11. Est-il besoin de déclarer formellement qu’une tel
5300
elle attitude n’est en aucune façon tributaire de
l’
idéologie réactionnaire à la mode. Mais que deux critiques de la Démoc
5301
e façon tributaire de l’idéologie réactionnaire à
la
mode. Mais que deux critiques de la Démocratie partant de points de v
5302
actionnaire à la mode. Mais que deux critiques de
la
Démocratie partant de points de vue presque opposés coïncident en tan
5303
6.
La
trahison de l’instruction publique (Ici, le procureur prit un ton p
5304
6. La trahison de
l’
instruction publique (Ici, le procureur prit un ton plus grave.) L’é
5305
6. La trahison de l’instruction publique (Ici,
le
procureur prit un ton plus grave.) L’école s’est vendue à des intérêt
5306
que (Ici, le procureur prit un ton plus grave.)
L’
école s’est vendue à des intérêts politiques. C’était là, nous venons
5307
s intérêts politiques. C’était là, nous venons de
le
voir, son unique moyen de parvenir. Elle participe donc sur une vaste
5308
n Benda. Notre époque paiera cher ce crime contre
la
civilisation. Elle ne croit plus qu’au péché contre les lois sociales
5309
vilisation. Elle ne croit plus qu’au péché contre
les
lois sociales, eh bien ! elle apprendra que le seul péché qui n’a pas
5310
e les lois sociales, eh bien ! elle apprendra que
le
seul péché qui n’a pas de pardon c’est le péché contre l’Esprit. Aujo
5311
dra que le seul péché qui n’a pas de pardon c’est
le
péché contre l’Esprit. Aujourd’hui qu’il suffit d’un peu de bon sens
5312
péché qui n’a pas de pardon c’est le péché contre
l’
Esprit. Aujourd’hui qu’il suffit d’un peu de bon sens et d’information
5313
trop laid ».) À peine capable de nous instruire,
l’
École prétend ouvertement nous éduquer. D’ailleurs elle y est obligée
5314
nous éduquer. D’ailleurs elle y est obligée dans
la
mesure où elle réalise son ambition : soustraire les enfants à l’Égli
5315
mesure où elle réalise son ambition : soustraire
les
enfants à l’Église et à la famille. L’Église donnait des valeurs idéa
5316
e réalise son ambition : soustraire les enfants à
l’
Église et à la famille. L’Église donnait des valeurs idéalistes, la fa
5317
ambition : soustraire les enfants à l’Église et à
la
famille. L’Église donnait des valeurs idéalistes, la famille des vale
5318
oustraire les enfants à l’Église et à la famille.
L’
Église donnait des valeurs idéalistes, la famille des valeurs réaliste
5319
famille. L’Église donnait des valeurs idéalistes,
la
famille des valeurs réalistes, sans lesquelles le monde s’enfonce de
5320
la famille des valeurs réalistes, sans lesquelles
le
monde s’enfonce de son propre poids dans l’abrutissement ou se laisse
5321
elles le monde s’enfonce de son propre poids dans
l’
abrutissement ou se laisse prendre à des théories non point fumeuses c
5322
e prendre à des théories non point fumeuses comme
le
veut le cliché, mais schématiques. Or l’École radicale ne peut pas êt
5323
e à des théories non point fumeuses comme le veut
le
cliché, mais schématiques. Or l’École radicale ne peut pas être idéal
5324
es comme le veut le cliché, mais schématiques. Or
l’
École radicale ne peut pas être idéaliste : car elle deviendrait un da
5325
e idéaliste : car elle deviendrait un danger pour
le
désordre établi. L’idéalisme est forcément révolutionnaire dans un mo
5326
le deviendrait un danger pour le désordre établi.
L’
idéalisme est forcément révolutionnaire dans un monde organisé pour la
5327
ément révolutionnaire dans un monde organisé pour
la
production. Le culte des valeurs désintéressées ne peut que diminuer
5328
nnaire dans un monde organisé pour la production.
Le
culte des valeurs désintéressées ne peut que diminuer le « rendement
5329
e des valeurs désintéressées ne peut que diminuer
le
« rendement » quantitatif de ceux qui s’y livrent. Je ne veux pas me
5330
« lumières », et qui pourtant s’indignent de voir
la
morale actuelle s’attaquer, voyez-vous ça, à la famille, « cette cell
5331
r la morale actuelle s’attaquer, voyez-vous ça, à
la
famille, « cette cellule sociale ». Et je les traite de mauvais plais
5332
a, à la famille, « cette cellule sociale ». Et je
les
traite de mauvais plaisants. Admirez mon extrême modération. Ceci fai
5333
ême modération. Ceci fait, constatez avec moi que
la
famille était encore un milieu naturel, donc normatif. Le collège au
5334
le était encore un milieu naturel, donc normatif.
Le
collège au contraire est un milieu antinaturel, et les normes sociale
5335
ollège au contraire est un milieu antinaturel, et
les
normes sociales qu’on prétend y substituer à celles de la famille son
5336
s sociales qu’on prétend y substituer à celles de
la
famille sont falsifiées. Non seulement l’École ne constitue pas le pô
5337
lles de la famille sont falsifiées. Non seulement
l’
École ne constitue pas le pôle idéaliste nécessaire à l’équilibre d’un
5338
alsifiées. Non seulement l’École ne constitue pas
le
pôle idéaliste nécessaire à l’équilibre d’une civilisation — et c’est
5339
e ne constitue pas le pôle idéaliste nécessaire à
l’
équilibre d’une civilisation — et c’est l’aspect négatif de sa trahiso
5340
saire à l’équilibre d’une civilisation — et c’est
l’
aspect négatif de sa trahison —, mais encore elle tend à développer to
5341
ut ce qu’il y a de spécifiquement malfaisant dans
l’
esprit moderne. C’est sa façon à elle de répondre aux besoins de l’épo
5342
C’est sa façon à elle de répondre aux besoins de
l’
époque. Pauvre époque ! On parle sans cesse de ses besoins. Il est vra
5343
du matérialisme. Et quand on m’aura démontré que
les
besoins de l’époque exigent une organisation à outrance du monde, je
5344
e. Et quand on m’aura démontré que les besoins de
l’
époque exigent une organisation à outrance du monde, je répondrai que
5345
sation à outrance du monde, je répondrai que dans
la
mesure où cette exigence est satisfaite naît un nouveau besoin qui es
5346
e bien que nous en soyons-là, s’il faut en croire
les
signes de révolte qui apparaissent de toutes parts. Mais l’école empo
5347
de révolte qui apparaissent de toutes parts. Mais
l’
école empoisonne les germes d’une renaissance de l’esprit dont elle de
5348
raissent de toutes parts. Mais l’école empoisonne
les
germes d’une renaissance de l’esprit dont elle devrait être la mère.
5349
’école empoisonne les germes d’une renaissance de
l’
esprit dont elle devrait être la mère. Elle favorise le culte exclusif
5350
ne renaissance de l’esprit dont elle devrait être
la
mère. Elle favorise le culte exclusif de l’utile, l’incompréhension b
5351
rit dont elle devrait être la mère. Elle favorise
le
culte exclusif de l’utile, l’incompréhension brutale de la nature, la
5352
être la mère. Elle favorise le culte exclusif de
l’
utile, l’incompréhension brutale de la nature, la haine des supériorit
5353
mère. Elle favorise le culte exclusif de l’utile,
l’
incompréhension brutale de la nature, la haine des supériorités nature
5354
exclusif de l’utile, l’incompréhension brutale de
la
nature, la haine des supériorités naturelles, l’habitude de l’ersatz
5355
l’utile, l’incompréhension brutale de la nature,
la
haine des supériorités naturelles, l’habitude de l’ersatz et du trava
5356
la nature, la haine des supériorités naturelles,
l’
habitude de l’ersatz et du travail bâclé. Elle apprend à lire les jour
5357
haine des supériorités naturelles, l’habitude de
l’
ersatz et du travail bâclé. Elle apprend à lire les journaux, mais en
5358
l’ersatz et du travail bâclé. Elle apprend à lire
les
journaux, mais en même temps que cette drogue, elle devrait fournir s
5359
ves du mot. Il est clair, par exemple, que seules
les
victimes de l’instruction helvétique sont capables d’absorber sans fo
5360
st clair, par exemple, que seules les victimes de
l’
instruction helvétique sont capables d’absorber sans fou rire les disc
5361
helvétique sont capables d’absorber sans fou rire
les
discours de tirs fédéraux. On a comparé le monde moderne à un vaste é
5362
rire les discours de tirs fédéraux. On a comparé
le
monde moderne à un vaste établissement de travaux forcés. L’école don
5363
derne à un vaste établissement de travaux forcés.
L’
école donne à l’enfant ce qu’il faut pour se résigner à l’état de cito
5364
établissement de travaux forcés. L’école donne à
l’
enfant ce qu’il faut pour se résigner à l’état de citoyen bagnard auqu
5365
donne à l’enfant ce qu’il faut pour se résigner à
l’
état de citoyen bagnard auquel il est promis. Mais elle tue tout ce qu
5366
t promis. Mais elle tue tout ce qui lui donnerait
l’
envie de se libérer — et peut-être les moyens. Vaste distillerie d’enn
5367
ui donnerait l’envie de se libérer — et peut-être
les
moyens. Vaste distillerie d’ennui, c’est-à-dire de démoralisation — q
5368
’ennui, c’est-à-dire de démoralisation — qu’on se
le
dise ! —, puissance de crétinisation lente, standardisation de toutes
5369
de crétinisation lente, standardisation de toutes
les
mesquineries naturelles (je ne fais le procès de la bêtise humaine qu
5370
de toutes les mesquineries naturelles (je ne fais
le
procès de la bêtise humaine qu’en tant qu’elle est cultivée par l’Éta
5371
mesquineries naturelles (je ne fais le procès de
la
bêtise humaine qu’en tant qu’elle est cultivée par l’État), l’École,
5372
êtise humaine qu’en tant qu’elle est cultivée par
l’
État), l’École, après avoir entraîné l’âme moderne dans ses collèges,
5373
aine qu’en tant qu’elle est cultivée par l’État),
l’
École, après avoir entraîné l’âme moderne dans ses collèges, l’y enfer
5374
ltivée par l’État), l’École, après avoir entraîné
l’
âme moderne dans ses collèges, l’y enferme et l’y laisse crever de fai
5375
s avoir entraîné l’âme moderne dans ses collèges,
l’
y enferme et l’y laisse crever de faim. Par ce qu’elle enseigne à igno
5376
é l’âme moderne dans ses collèges, l’y enferme et
l’
y laisse crever de faim. Par ce qu’elle enseigne à ignorer bien plus q
5377
r ce qu’elle enseigne à connaître, elle constitue
la
plus grande force antireligieuse de ce temps. L’instruction religieus
5378
elle enseigne à connaître, elle constitue la plus
grande
force antireligieuse de ce temps. L’instruction religieuse qui prend
5379
la plus grande force antireligieuse de ce temps.
L’
instruction religieuse qui prend les enfants au sortir de l’école prim
5380
e de ce temps. L’instruction religieuse qui prend
les
enfants au sortir de l’école primaire, arrive trop tard. Le pasteur s
5381
ion religieuse qui prend les enfants au sortir de
l’
école primaire, arrive trop tard. Le pasteur sème dans un terrain que
5382
au sortir de l’école primaire, arrive trop tard.
Le
pasteur sème dans un terrain que l’instituteur a méthodiquement dessé
5383
ve trop tard. Le pasteur sème dans un terrain que
l’
instituteur a méthodiquement desséché.
5384
7.
L’
Instruction publique contre le progrès Un beau titre. Et qui a meill
5385
7. L’Instruction publique contre
le
progrès Un beau titre. Et qui a meilleure façon que le reste, pense
5386
rès Un beau titre. Et qui a meilleure façon que
le
reste, pensez-vous. Il faut avouer qu’avec ce je ne sais quoi de décl
5387
démocratique, hé ! hé !… et d’ailleurs vous aimez
les
idées généreuses, n’est-ce pas ? J’en étais sûr. Cependant j’ai peur
5388
ès ne soit pas le vôtre, et même que sa nature ne
l’
entraîne dans une direction tout opposée. C’est très malin d’avoir inv
5389
inventé un instrument de progrès : encore faut-il
le
mettre en marche. Et où le conduire ? Il y a beaucoup de routes, mais
5390
ogrès : encore faut-il le mettre en marche. Et où
le
conduire ? Il y a beaucoup de routes, mais vous n’aimez pas le risque
5391
Il y a beaucoup de routes, mais vous n’aimez pas
le
risque, vous préférez le sur-place. Ainsi l’instruction publique s’es
5392
s, mais vous n’aimez pas le risque, vous préférez
le
sur-place. Ainsi l’instruction publique s’est arrêtée aux environs de
5393
pas le risque, vous préférez le sur-place. Ainsi
l’
instruction publique s’est arrêtée aux environs de 1880 et depuis lors
5394
environs de 1880 et depuis lors n’a guère bougé.
Le
moteur n’en continue pas moins de consommer, de ronfler et de tout em
5395
mer, de ronfler et de tout empester. Et peu à peu
le
public s’aperçoit que « l’instrument de progrès » n’est qu’un camoufl
5396
empester. Et peu à peu le public s’aperçoit que «
l’
instrument de progrès » n’est qu’un camouflage à l’abri duquel on dist
5397
’instrument de progrès » n’est qu’un camouflage à
l’
abri duquel on distille du radicalisme intégral. On me fera observer q
5398
On me fera observer que beaucoup des servants de
la
machine sont socialistes : voilà qui ne change pas le rendement, j’im
5399
achine sont socialistes : voilà qui ne change pas
le
rendement, j’imagine, ni la nature des produits excrétés. On forme no
5400
ilà qui ne change pas le rendement, j’imagine, ni
la
nature des produits excrétés. On forme nos gosses, dès l’âge de 6 ans
5401
e des produits excrétés. On forme nos gosses, dès
l’
âge de 6 ans, à ne se point poser de questions dont ils n’aient appris
5402
ser de questions dont ils n’aient appris par cœur
la
réponse. Regardez un écolier préparer ses devoirs, c’est frappant : i
5403
préparer ses devoirs, c’est frappant : il apprend
les
questions aussi bien que les réponses. J’avoue que je trouve ça très
5404
rappant : il apprend les questions aussi bien que
les
réponses. J’avoue que je trouve ça très fort : avoir obtenu un confor
5405
uve ça très fort : avoir obtenu un conformisme de
la
curiosité. Il est vrai qu’il ne fallait pas moins pour assurer la séc
5406
est vrai qu’il ne fallait pas moins pour assurer
la
sécurité d’un régime établi dans des fauteuils ; car un peuple d’élec
5407
de trouver bien bonne celle-ci : je prétends que
l’
instruction publique est une puissance conservatrice. — Pas moins ! El
5408
. — Pas moins ! Elle est destinée à légitimer par
la
force de l’inertie et à perpétuer mécaniquement tout ce qui est depui
5409
s ! Elle est destinée à légitimer par la force de
l’
inertie et à perpétuer mécaniquement tout ce qui est depuis Numa Droz.
5410
ice, et non pas réactionnaire, non, même pas. Car
les
forces de réaction collaborent à leur manière au progrès, elles corri
5411
u progrès, elles corrigent, stimulent, vivifient.
L’
École se contente d’être figée. Est-ce un frein ? Même pas. C’est plut
5412
t une vase où s’enlise notre civilisation ; et où
la
Démocratie peut se conserver des siècles encore… Or si je dis que l’É
5413
se conserver des siècles encore… Or si je dis que
l’
École est contre le progrès, c’est que le progrès consiste à dépasser
5414
ècles encore… Or si je dis que l’École est contre
le
progrès, c’est que le progrès consiste à dépasser la Démocratie. Et c
5415
dis que l’École est contre le progrès, c’est que
le
progrès consiste à dépasser la Démocratie. Et cette thèse ne va pas à
5416
progrès, c’est que le progrès consiste à dépasser
la
Démocratie. Et cette thèse ne va pas à l’encontre de l’évolution norm
5417
ocratie. Et cette thèse ne va pas à l’encontre de
l’
évolution normale de l’humanité, comme vous ne manquerez cependant poi
5418
ne va pas à l’encontre de l’évolution normale de
l’
humanité, comme vous ne manquerez cependant point de le dire, avec ce
5419
anité, comme vous ne manquerez cependant point de
le
dire, avec ce sens exquis du cliché qui est un hommage à vos maîtres
5420
liché qui est un hommage à vos maîtres respectés.
La
Démocratie, par le moyen de l’instruction publique, limite l’homme au
5421
mmage à vos maîtres respectés. La Démocratie, par
le
moyen de l’instruction publique, limite l’homme au citoyen. Il s’agit
5422
maîtres respectés. La Démocratie, par le moyen de
l’
instruction publique, limite l’homme au citoyen. Il s’agit donc de dép
5423
e, par le moyen de l’instruction publique, limite
l’
homme au citoyen. Il s’agit donc de dépasser le citoyen, de retrouver
5424
te l’homme au citoyen. Il s’agit donc de dépasser
le
citoyen, de retrouver l’homme tout entier. Je distingue dans cette op
5425
s’agit donc de dépasser le citoyen, de retrouver
l’
homme tout entier. Je distingue dans cette opération deux temps : d’ab
5426
n deux temps : d’abord critiquer ce qui est — par
la
comparaison avec ce qui fut, ou ce qui devrait être ; ensuite, prépar
5427
i fut, ou ce qui devrait être ; ensuite, préparer
le
terrain pour les jeux nouveaux que l’humanité de demain ne peut manqu
5428
devrait être ; ensuite, préparer le terrain pour
les
jeux nouveaux que l’humanité de demain ne peut manquer d’inventer. Je
5429
e, préparer le terrain pour les jeux nouveaux que
l’
humanité de demain ne peut manquer d’inventer. Je ne puis m’empêcher d
5430
ir une intention providentielle dans cet amour de
la
destruction et de l’anarchie que les génies directeurs de ce temps on
5431
identielle dans cet amour de la destruction et de
l’
anarchie que les génies directeurs de ce temps ont inspiré à beaucoup
5432
cet amour de la destruction et de l’anarchie que
les
génies directeurs de ce temps ont inspiré à beaucoup d’entre nous — e
5433
inspiré à beaucoup d’entre nous — encore que peu
l’
avouent. Car détruire, déblayer, et faire des signes dans le vide à de
5434
Car détruire, déblayer, et faire des signes dans
le
vide à des hasards gros de dangers, c’est peut-être à quoi notre géné
5435
t peut-être à quoi notre génération devra limiter
l’
efficacité de ses efforts. Critiquer le présent au nom du passé ne sig
5436
ra limiter l’efficacité de ses efforts. Critiquer
le
présent au nom du passé ne signifie pas que l’on désire un retour au
5437
er le présent au nom du passé ne signifie pas que
l’
on désire un retour au passé. Mais la considération de régimes anciens
5438
ifie pas que l’on désire un retour au passé. Mais
la
considération de régimes anciens peut nous amener à constater, sans p
5439
r exemple, est-ce un progrès que d’avoir remplacé
les
hiérarchies de tradition, avec tout le vaste arrière-fond de poésie e
5440
remplacé les hiérarchies de tradition, avec tout
le
vaste arrière-fond de poésie et de grandeur que ce mot comporte — que
5441
ce mot comporte — quelles qu’en soient d’ailleurs
les
réalisations —, par des hiérarchies rond-de-cuiresques dont l’origine
5442
ns —, par des hiérarchies rond-de-cuiresques dont
l’
origine est un pis-aller, dont la méthode est le tirage au flanc lucra
5443
-cuiresques dont l’origine est un pis-aller, dont
la
méthode est le tirage au flanc lucratif, dont l’esprit est la jalousi
5444
t l’origine est un pis-aller, dont la méthode est
le
tirage au flanc lucratif, dont l’esprit est la jalousie rancie armée
5445
la méthode est le tirage au flanc lucratif, dont
l’
esprit est la jalousie rancie armée de pédantisme, et je ne parle pas
5446
st le tirage au flanc lucratif, dont l’esprit est
la
jalousie rancie armée de pédantisme, et je ne parle pas du décor, des
5447
isme, et je ne parle pas du décor, des odeurs, de
la
poussière, des petites habitudes sordides et de cette matière raremen
5448
arement « hygiénique » et qui définit notre âge :
la
paperasse ? Réponse ? Petits étourdis. Réponse non, c’est un recul. C
5449
l. Cette critique du fonctionnarisme, vous alliez
le
dire, est un ramassis de lieux communs. Mais il s’en faut, hélas, de
5450
ommuns. Mais il s’en faut, hélas, de beaucoup que
la
majorité des électeurs les considèrent comme tels. Et je ne me tiendr
5451
hélas, de beaucoup que la majorité des électeurs
les
considèrent comme tels. Et je ne me tiendrai pas pour battu quand on
5452
ébordent ce cercle étroit et distingué. Il y a de
grands
balayages à faire, un grand courant d’air à créer qui emportera toute
5453
distingué. Il y a de grands balayages à faire, un
grand
courant d’air à créer qui emportera toutes ces statistiques et ces jo
5454
nt, maintenant, je vais m’y prendre pour préparer
les
temps nouveaux. Énorme question. Aurai-je la naïveté non moins énorme
5455
rer les temps nouveaux. Énorme question. Aurai-je
la
naïveté non moins énorme d’esquisser ici la réponse que je lui réserv
5456
ai-je la naïveté non moins énorme d’esquisser ici
la
réponse que je lui réserve ? L’instruction publique est la forme la
5457
d’esquisser ici la réponse que je lui réserve ?
L’
instruction publique est la forme la plus commune de la peste rational
5458
que je lui réserve ? L’instruction publique est
la
forme la plus commune de la peste rationaliste qui sévit dans le mond
5459
ui réserve ? L’instruction publique est la forme
la
plus commune de la peste rationaliste qui sévit dans le monde depuis
5460
truction publique est la forme la plus commune de
la
peste rationaliste qui sévit dans le monde depuis le xviiie (depuis
5461
s commune de la peste rationaliste qui sévit dans
le
monde depuis le xviiie (depuis les dernières pestes noires). Si vous
5462
peste rationaliste qui sévit dans le monde depuis
le
xviiie (depuis les dernières pestes noires). Si vous creusez un peu
5463
qui sévit dans le monde depuis le xviiie (depuis
les
dernières pestes noires). Si vous creusez un peu la notion de démocra
5464
dernières pestes noires). Si vous creusez un peu
la
notion de démocratie, vous trouvez bien vite qu’elle repose sur des p
5465
mentalité. Elle s’est développée au xviiie dans
l’
aristocratie qui n’y voyait qu’un jeu. Durant tout le xixe elle est d
5466
ristocratie qui n’y voyait qu’un jeu. Durant tout
le
xixe elle est descendue dans la bourgeoisie et dans le peuple ; elle
5467
jeu. Durant tout le xixe elle est descendue dans
la
bourgeoisie et dans le peuple ; elle y est devenue une tyrannie. Avan
5468
e elle est descendue dans la bourgeoisie et dans
le
peuple ; elle y est devenue une tyrannie. Avant il y avait la Raison
5469
elle y est devenue une tyrannie. Avant il y avait
la
Raison et les sentiments. Maintenant il y a le rationalisme12 et la s
5470
venue une tyrannie. Avant il y avait la Raison et
les
sentiments. Maintenant il y a le rationalisme12 et la sentimentalité.
5471
it la Raison et les sentiments. Maintenant il y a
le
rationalisme12 et la sentimentalité. Ce rationalisme-là triomphe non
5472
entiments. Maintenant il y a le rationalisme12 et
la
sentimentalité. Ce rationalisme-là triomphe non seulement dans les pr
5473
é. Ce rationalisme-là triomphe non seulement dans
les
principes démocratiques, et dans ceux de l’École, mais encore dans to
5474
dans les principes démocratiques, et dans ceux de
l’
École, mais encore dans toute la conduite moderne de la vie. C’est not
5475
, et dans ceux de l’École, mais encore dans toute
la
conduite moderne de la vie. C’est notre américanisme et c’est notre s
5476
le, mais encore dans toute la conduite moderne de
la
vie. C’est notre américanisme et c’est notre sécheresse sentimentale.
5477
et c’est notre sécheresse sentimentale. Et c’est
le
grand empêchement intérieur dont souffre notre imagination créatrice
5478
c’est notre sécheresse sentimentale. Et c’est le
grand
empêchement intérieur dont souffre notre imagination créatrice ; c’es
5479
réatrice ; c’est lui qui stérilise nos utopies et
les
empêche de devenir autre chose que des utopies. Il s’agit donc en pre
5480
ue des utopies. Il s’agit donc en premier lieu de
le
démasquer et de le pourchasser dans toutes les démarches de notre vie
5481
s’agit donc en premier lieu de le démasquer et de
le
pourchasser dans toutes les démarches de notre vie. Mais cette premiè
5482
de le démasquer et de le pourchasser dans toutes
les
démarches de notre vie. Mais cette première tâche constitue un progra
5483
nce négative qui aura duré deux siècles au moins.
L’
évolution de l’humanité paraît conforme à la dialectique hégélienne ;
5484
i aura duré deux siècles au moins. L’évolution de
l’
humanité paraît conforme à la dialectique hégélienne ; on y retrouve f
5485
oins. L’évolution de l’humanité paraît conforme à
la
dialectique hégélienne ; on y retrouve facilement les triades : être
5486
dialectique hégélienne ; on y retrouve facilement
les
triades : être —négation de l’être — nouvel être. Notre époque serait
5487
trouve facilement les triades : être —négation de
l’
être — nouvel être. Notre époque serait le deuxième temps d’une de ces
5488
temps d’une de ces triades. Son rationalisme nie
l’
être sous toutes ses formes, traduit tout en relations et veut rendre
5489
-à-dire, pour lui, calculables, chiffrables. Dans
la
mesure où il y parvient, il tue les existences particulières, ou bien
5490
ffrables. Dans la mesure où il y parvient, il tue
les
existences particulières, ou bien c’est qu’elles sont déjà mortes. Ma
5491
es, ou bien c’est qu’elles sont déjà mortes. Mais
le
temps vient où elles renaîtront à une vie nouvelle et plus complète,
5492
cience, si je puis dire. Alors ce sera au tour de
l’
instinct d’intégrer la raison. Je crois que nous approchons de ce temp
5493
e. Alors ce sera au tour de l’instinct d’intégrer
la
raison. Je crois que nous approchons de ce temps. Et que le véritable
5494
Je crois que nous approchons de ce temps. Et que
le
véritable progrès veut qu’on s’attaque à tout ce qui entrave cet avèn
5495
entrave cet avènement. C’est pourquoi je réclame
l’
expulsion de la congrégation radicale des instituteurs. On me demande
5496
ènement. C’est pourquoi je réclame l’expulsion de
la
congrégation radicale des instituteurs. On me demande encore ce que j
5497
uteurs. On me demande encore ce que je mettrais à
la
place. Et parce que je ne propose rien de bien précis, on triomphe gr
5498
jet de Louis XIV ce qu’il concevait à la place de
la
royauté absolue. Il eût fallu certes une imagination prodigieuse au d
5499
e civilisation. Et même Diderot, même Rousseau, à
la
veille de la Révolution, soupçonnaient-ils que la république qu’ils a
5500
n. Et même Diderot, même Rousseau, à la veille de
la
Révolution, soupçonnaient-ils que la république qu’ils appelaient ser
5501
la veille de la Révolution, soupçonnaient-ils que
la
république qu’ils appelaient serait livrée cent ans plus tard à peine
5502
laient serait livrée cent ans plus tard à peine à
la
folie démocratique, à cette danse de Saint-Guy politique dont rien de
5503
litique dont rien de leur temps ne pouvait offrir
la
moindre préfiguration ? Eh bien ! induisez de cette similitude les po
5504
guration ? Eh bien ! induisez de cette similitude
les
possibilités formidables que nous réserve le siècle à venir, et vous
5505
ude les possibilités formidables que nous réserve
le
siècle à venir, et vous commencerez à comprendre que votre scepticism
5506
à comprendre que votre scepticisme à l’endroit de
la
forme sociale que nous appelons sans la connaître et qui s’élabore dé
5507
ndroit de la forme sociale que nous appelons sans
la
connaître et qui s’élabore déjà secrètement, que ce mépris et ce scep
5508
, sous lequel vous ne tarderez pas à périr. 12.
La
Raison de Spinoza ou de Descartes n’a que de lointains rapports de pa
5509
ommé Rationalisme, produit d’une mésalliance avec
l’
Avarice bourgeoise — et qui sans cesse déroge.
5510
Appendice. Utopie Un os à
la
meute. (Et figurez-vous que j’ai la ferme intention de vous faire rig
5511
pie Un os à la meute. (Et figurez-vous que j’ai
la
ferme intention de vous faire rigoler, si cela peut vous rassurer qua
5512
ela peut vous rassurer quant à ma santé mentale.)
La
question est de savoir si nous serons des hommes de chair et d’esprit
5513
d’esprit, ou des pantins articulés. (Qui tiendra
les
ficelles, peu importe.) Les économistes (mot stupide) et les philosop
5514
ticulés. (Qui tiendra les ficelles, peu importe.)
Les
économistes (mot stupide) et les philosophes13 les mieux informés de
5515
s, peu importe.) Les économistes (mot stupide) et
les
philosophes13 les mieux informés de ce temps s’accordent sur un point
5516
es économistes (mot stupide) et les philosophes13
les
mieux informés de ce temps s’accordent sur un point : le salut de l’E
5517
x informés de ce temps s’accordent sur un point :
le
salut de l’Europe est lié à la naissance d’une nouvelle attitude de l
5518
e ce temps s’accordent sur un point : le salut de
l’
Europe est lié à la naissance d’une nouvelle attitude de l’âme. Ceci r
5519
ent sur un point : le salut de l’Europe est lié à
la
naissance d’une nouvelle attitude de l’âme. Ceci revient à dire que s
5520
est lié à la naissance d’une nouvelle attitude de
l’
âme. Ceci revient à dire que seule une grande vague de l’imagination c
5521
itude de l’âme. Ceci revient à dire que seule une
grande
vague de l’imagination collective peut désensabler le vieux bateau oc
5522
Ceci revient à dire que seule une grande vague de
l’
imagination collective peut désensabler le vieux bateau occidental. Un
5523
ague de l’imagination collective peut désensabler
le
vieux bateau occidental. Un nouvel état d’esprit : voilà bien ce que
5524
ntal. Un nouvel état d’esprit : voilà bien ce que
l’
École empêche même de concevoir Elle cultive ce qu’il y a d’anti-irrat
5525
Elle cultive ce qu’il y a d’anti-irrationnel dans
la
nature de l’homme. Elle punit froidement la spontanéité et l’inventio
5526
ce qu’il y a d’anti-irrationnel dans la nature de
l’
homme. Elle punit froidement la spontanéité et l’invention. Elle dénat
5527
dans la nature de l’homme. Elle punit froidement
la
spontanéité et l’invention. Elle dénature le sens de la liberté. Elle
5528
l’homme. Elle punit froidement la spontanéité et
l’
invention. Elle dénature le sens de la liberté. Elle détruit tout ce q
5529
ment la spontanéité et l’invention. Elle dénature
le
sens de la liberté. Elle détruit tout ce qui permettrait d’échapper à
5530
ntanéité et l’invention. Elle dénature le sens de
la
liberté. Elle détruit tout ce qui permettrait d’échapper à la mécaniq
5531
Elle détruit tout ce qui permettrait d’échapper à
la
mécanique. Bref, elle perpétue ce manque d’imagination dont les consé
5532
Bref, elle perpétue ce manque d’imagination dont
les
conséquences seront matériellement catastrophiques pour peu que cela
5533
peu que cela continue. Qu’on ne s’y trompe pas :
le
sens technique qui tient lieu d’imagination à l’homme moderne n’est p
5534
le sens technique qui tient lieu d’imagination à
l’
homme moderne n’est pas créateur d’êtres spirituellement vivants, ni d
5535
lement vivants, ni d’aucune grandeur supérieure à
la
somme de ses éléments. Il n’engendre pas, il ajuste. Quand nous auron
5536
e pas, il ajuste. Quand nous aurons épuisé toutes
les
combinaisons de vitesse et d’ennui à quoi présentement nous usons le
5537
vitesse et d’ennui à quoi présentement nous usons
le
plus clair de nos forces, — le Poète dira un mot, ou bien fera un act
5538
ntement nous usons le plus clair de nos forces, —
le
Poète dira un mot, ou bien fera un acte, et ces peuples de somnambule
5539
ples de somnambules s’éveilleront du cauchemar où
les
plongent toutes vos drogues : presse, ciné, faux-luxe, suffrage unive
5540
e équipe d’idéalistes pratiques d’en faire sortir
le
beau miracle d’une civilisation aux ordres de l’Esprit. Mais il faudr
5541
le beau miracle d’une civilisation aux ordres de
l’
Esprit. Mais il faudrait que dès maintenant se constituent ces élites,
5542
constituent ces élites, et cela ne se peut que si
les
tenants de l’ordre spirituel retrouvent le courage d’être, malgré les
5543
élites, et cela ne se peut que si les tenants de
l’
ordre spirituel retrouvent le courage d’être, malgré les mots14, des a
5544
ue si les tenants de l’ordre spirituel retrouvent
le
courage d’être, malgré les mots14, des anarchistes et des utopistes.
5545
re spirituel retrouvent le courage d’être, malgré
les
mots14, des anarchistes et des utopistes. J’appelle anarchiste, tout
5546
ut ce qui est violemment et intégralement humain.
L’
anarchie est un degré d’intensité dans la vie, non pas un parti. Tout
5547
humain. L’anarchie est un degré d’intensité dans
la
vie, non pas un parti. Tout extrémiste, de droite comme de gauche, se
5548
de toutes ses forces. Mais c’est un anarchiste de
la
mauvaise espèce, un anarchiste embrigadé. L’anarchiste que j’aime est
5549
e de la mauvaise espèce, un anarchiste embrigadé.
L’
anarchiste que j’aime est simplement un homme libre qui a une foi (ou
5550
e savez pas ce que c’est que libre, ou consacré.)
L’
utopiste, c’est l’inventeur. Les sots vont répétant que c’est un être
5551
c’est que libre, ou consacré.) L’utopiste, c’est
l’
inventeur. Les sots vont répétant que c’est un être qui ignore le réel
5552
bre, ou consacré.) L’utopiste, c’est l’inventeur.
Les
sots vont répétant que c’est un être qui ignore le réel. C’est justem
5553
s sots vont répétant que c’est un être qui ignore
le
réel. C’est justement parce qu’il le connaît mieux qu’eux qu’il y a v
5554
e qui ignore le réel. C’est justement parce qu’il
le
connaît mieux qu’eux qu’il y a vu des fissures et des possibilités no
5555
u réel ne signifie pas s’y soumettre sans combat.
L’
utopiste est celui qui ne se résigne à aucun état de choses. Il est po
5556
ne se résigne à aucun état de choses. Il est pour
le
« mieux » contre le « bien ». Sans lui l’humanité s’avachirait totale
5557
n état de choses. Il est pour le « mieux » contre
le
« bien ». Sans lui l’humanité s’avachirait totalement. Mais il est da
5558
st pour le « mieux » contre le « bien ». Sans lui
l’
humanité s’avachirait totalement. Mais il est dans l’ordre qu’elle beu
5559
umanité s’avachirait totalement. Mais il est dans
l’
ordre qu’elle beugle longuement tout en le suivant. Que faire, diront
5560
st dans l’ordre qu’elle beugle longuement tout en
le
suivant. Que faire, diront les gens de bonne volonté dont mon imagina
5561
longuement tout en le suivant. Que faire, diront
les
gens de bonne volonté dont mon imagination romantique suppose l’exist
5562
e volonté dont mon imagination romantique suppose
l’
existence. Que faire ? Voir et penser juste d’abord. Simplement. Ensui
5563
rd. Simplement. Ensuite, soutenir cette opinion :
les
effets suivront infailliblement. Par exemple, je vous demande une foi
5564
els d’histoire et de géographie bien connus, pour
l’
esprit le plus dangereusement plat qui soit. (Il est plus que plat : i
5565
toire et de géographie bien connus, pour l’esprit
le
plus dangereusement plat qui soit. (Il est plus que plat : il est cre
5566
i, cela finira par créer un courant d’opinion. Et
l’
opinion publique mène le monde, paraît-il. À ce propos : que les journ
5567
un courant d’opinion. Et l’opinion publique mène
le
monde, paraît-il. À ce propos : que les journalistes s’engagent désor
5568
lique mène le monde, paraît-il. À ce propos : que
les
journalistes s’engagent désormais à ne publier plus un seul article d
5569
seul article de fond où ne perce leur mépris pour
l’
instruction publique. Ils peuvent dire ce qu’ils veulent à propos de n
5570
n’importe quoi, comme on sait, et ils auraient là
l’
occasion de racheter bien des choses. Ce n’est rien de moins qu’une ré
5571
dit pour éviter ce malentendu : je ne crois pas à
la
possibilité d’une réforme suffisante. C’est une révolution qu’il faut
5572
C’est une révolution qu’il faut. Alors, supprimer
les
écoles, raser les collèges, renvoyer les instituteurs aux pommes de t
5573
on qu’il faut. Alors, supprimer les écoles, raser
les
collèges, renvoyer les instituteurs aux pommes de terre ? Impossible.
5574
upprimer les écoles, raser les collèges, renvoyer
les
instituteurs aux pommes de terre ? Impossible. Le peuple qui déteste
5575
es instituteurs aux pommes de terre ? Impossible.
Le
peuple qui déteste l’école a pourtant faim d’instruction15, et se cro
5576
mmes de terre ? Impossible. Le peuple qui déteste
l’
école a pourtant faim d’instruction15, et se croirait lésé dans un de
5577
croirait lésé dans un de ses droits fondamentaux.
Le
peuple veut s’instruire et on lui bourre le crâne pour l’en empêcher.
5578
taux. Le peuple veut s’instruire et on lui bourre
le
crâne pour l’en empêcher. Il s’agit de lui faire comprendre que l’éco
5579
e veut s’instruire et on lui bourre le crâne pour
l’
en empêcher. Il s’agit de lui faire comprendre que l’école est le plus
5580
n empêcher. Il s’agit de lui faire comprendre que
l’
école est le plus gros obstacle à sa culture. Et c’est cela, préparer
5581
Il s’agit de lui faire comprendre que l’école est
le
plus gros obstacle à sa culture. Et c’est cela, préparer le terrain.
5582
os obstacle à sa culture. Et c’est cela, préparer
le
terrain. D’autre part, il faut partir de ce qui est. Mais comment ret
5583
rtir de ce qui est. Mais comment retourner contre
l’
ennemi ses propres batteries ? Autrement dit : quel emploi utopique de
5584
tteries ? Autrement dit : quel emploi utopique de
l’
organisation existante peut-on imaginer ? L’école devrait donner à l’e
5585
ue de l’organisation existante peut-on imaginer ?
L’
école devrait donner à l’enfant ce que son entourage ne peut plus lui
5586
tante peut-on imaginer ? L’école devrait donner à
l’
enfant ce que son entourage ne peut plus lui donner : des modèles de p
5587
onner : des modèles de pensée. Un entraînement de
l’
esprit, au lieu d’une somme de connaissances mortes. Une technique spi
5588
ituelle. Et puis, qu’il en fasse ce qu’il voudra.
Les
Orientaux appellent yoga cette culture des facultés physiques, intell
5589
ystiques. Toute leur force vient du yoga. Et tout
le
yoga repose sur la concentration. En vérité, toute force résulte d’un
5590
r force vient du yoga. Et tout le yoga repose sur
la
concentration. En vérité, toute force résulte d’une concentration, da
5591
ncentration, dans quelque domaine que ce soit. Si
l’
Occident comprenait cette vérité élémentaire et en tirait des conclusi
5592
il serait sauvé du désastre, mais il recouvrerait
la
domination du monde16 et non plus en barbare cette fois-ci. Ce qui l’
5593
de16 et non plus en barbare cette fois-ci. Ce qui
l’
empêche de comprendre, ici encore, c’est la peur scolaire des mots. Ce
5594
Ce qui l’empêche de comprendre, ici encore, c’est
la
peur scolaire des mots. Ce terme hindou agace, trouble ou fait sourir
5595
s. Ce terme hindou agace, trouble ou fait sourire
les
étriqués. On croit devoir se défendre : on se moque. On me dit : vous
5596
ez tout de même pas une classe de gamins répétant
la
syllabe sacrée Aûm ou se livrant à des exercices de contrôle de la re
5597
Aûm ou se livrant à des exercices de contrôle de
la
respiration. Il ne s’agit nullement de cela. Nous ne sommes pas aux I
5598
s aux Indes, je vous jure que je m’en doute. Mais
l’
Occidental aussi pratique son yoga à lui : toutes les fois qu’il veut
5599
ga à lui : toutes les fois qu’il veut obtenir une
grande
intensité avec un minimum de moyens. J’en citerai deux exemples : la
5600
n minimum de moyens. J’en citerai deux exemples :
la
discipline jésuite et le drill militaire. Le drill correspond remarqu
5601
citerai deux exemples : la discipline jésuite et
le
drill militaire. Le drill correspond remarquablement dans le plan phy
5602
es : la discipline jésuite et le drill militaire.
Le
drill correspond remarquablement dans le plan physique, aux exercices
5603
litaire. Le drill correspond remarquablement dans
le
plan physique, aux exercices élémentaires que l’on exige d’un initié.
5604
le plan physique, aux exercices élémentaires que
l’
on exige d’un initié. Le fameux arrêt de la pensée dont on sait l’impo
5605
xercices élémentaires que l’on exige d’un initié.
Le
fameux arrêt de la pensée dont on sait l’importance primordiale dans
5606
es que l’on exige d’un initié. Le fameux arrêt de
la
pensée dont on sait l’importance primordiale dans le yoga correspond
5607
initié. Le fameux arrêt de la pensée dont on sait
l’
importance primordiale dans le yoga correspond au garde-à-vous ! par q
5608
pensée dont on sait l’importance primordiale dans
le
yoga correspond au garde-à-vous ! par quoi l’on impose au corps une i
5609
ans le yoga correspond au garde-à-vous ! par quoi
l’
on impose au corps une immobilité absolue. L’un et l’autre de ces exer
5610
ue. L’un et l’autre de ces exercices montrent que
le
candidat possède une énergie suffisante pour aller plus loin, — et en
5611
temps constituent des sources d’énergie nouvelle.
Le
parallèle peut être poussé dans les détails. Il s’agit bien d’un gest
5612
rgie nouvelle. Le parallèle peut être poussé dans
les
détails. Il s’agit bien d’un geste identique, exécuté dans deux plans
5613
te identique, exécuté dans deux plans différents.
Le
drill est un yoga corporel, le yoga est un drill de l’esprit. Je sais
5614
plans différents. Le drill est un yoga corporel,
le
yoga est un drill de l’esprit. Je sais que ces deux mots sont bien da
5615
ill est un yoga corporel, le yoga est un drill de
l’
esprit. Je sais que ces deux mots sont bien dangereux et impopulaires.
5616
nt pas séparer une méthode des fins auxquelles on
l’
applique généralement. Ces gens-là diront que je veux militariser l’en
5617
ement. Ces gens-là diront que je veux militariser
l’
enseignement ou transformer les collèges en couvents. Tant pis. Le dri
5618
je veux militariser l’enseignement ou transformer
les
collèges en couvents. Tant pis. Le drill offre un exemple d’éducation
5619
u transformer les collèges en couvents. Tant pis.
Le
drill offre un exemple d’éducation efficace. L’armée de milices suiss
5620
. Le drill offre un exemple d’éducation efficace.
L’
armée de milices suisses fait des soldats en moins de trois mois. Si l
5621
isses fait des soldats en moins de trois mois. Si
l’
école appliquait en les transposant des méthodes de concentration anal
5622
en moins de trois mois. Si l’école appliquait en
les
transposant des méthodes de concentration analogues, même dans la mes
5623
es méthodes de concentration analogues, même dans
la
mesure sans doute faible où la nature des enfants le supporte, on éco
5624
alogues, même dans la mesure sans doute faible où
la
nature des enfants le supporte, on économiserait plusieurs semestres
5625
mesure sans doute faible où la nature des enfants
le
supporte, on économiserait plusieurs semestres de travail. Si chaque
5626
t plusieurs semestres de travail. Si chaque matin
l’
enfant parvenait à mettre sa pensée au garde-à-vous durant quelques in
5627
aucoup de choses qui restent cachées aux agités ;
la
nature par exemple. Je ne demande pas qu’on nous enseigne le goût de
5628
ar exemple. Je ne demande pas qu’on nous enseigne
le
goût de la nature. Mais qu’on nous laisse le temps de la regarder. De
5629
Je ne demande pas qu’on nous enseigne le goût de
la
nature. Mais qu’on nous laisse le temps de la regarder. De faire conn
5630
igne le goût de la nature. Mais qu’on nous laisse
le
temps de la regarder. De faire connaissance. Je ne sais s’il est très
5631
de la nature. Mais qu’on nous laisse le temps de
la
regarder. De faire connaissance. Je ne sais s’il est très exagéré de
5632
dire que tout homme gagnerait à posséder une plus
grande
puissance intellectuelle, une meilleure mémoire, une sensibilité plus
5633
er ces facultés atrophiées que devrait s’employer
l’
école. Nous avons vu qu’elle préfère les étouffer. Cependant, je ne cr
5634
s’employer l’école. Nous avons vu qu’elle préfère
les
étouffer. Cependant, je ne crois pas qu’il soit bon que tous progress
5635
crois pas qu’il soit bon que tous progressent de
la
même manière. Dans un système de culture spirituelle, les différences
5636
manière. Dans un système de culture spirituelle,
les
différences s’accuseraient, mais se légitimeraient du même coup ; car
5637
coup ; car sur ce plan elles ne font que traduire
la
diversité des besoins individuels. Méditez un peu ces truismes : On a
5638
. Une minute de concentration intense dégage dans
l’
individu plus d’énergie que des heures d’exercices gémissants. De même
5639
e que des heures d’exercices gémissants. De même,
le
bien supérieur de quelques-uns est plus utile à tous que le bien médi
5640
périeur de quelques-uns est plus utile à tous que
le
bien médiocre de beaucoup. La valeur vaut mieux que le nombre parce q
5641
us utile à tous que le bien médiocre de beaucoup.
La
valeur vaut mieux que le nombre parce qu’elle le contient en puissanc
5642
en médiocre de beaucoup. La valeur vaut mieux que
le
nombre parce qu’elle le contient en puissance. Et c’est pourquoi l’ar
5643
La valeur vaut mieux que le nombre parce qu’elle
le
contient en puissance. Et c’est pourquoi l’aristocratie de l’esprit e
5644
’elle le contient en puissance. Et c’est pourquoi
l’
aristocratie de l’esprit est nécessaire au bien public. Certains propo
5645
en puissance. Et c’est pourquoi l’aristocratie de
l’
esprit est nécessaire au bien public. Certains proposent en rougissant
5646
rougissant de leur hardiesse quelque chose comme
l’
instruction privée : et moi je la voudrais secrète. Vous verrez bien.
5647
lque chose comme l’instruction privée : et moi je
la
voudrais secrète. Vous verrez bien. Cela se fera sans vous. Déjà revi
5648
verrez bien. Cela se fera sans vous. Déjà revient
le
temps des mages : ils comprennent les théories d’Einstein, ils compos
5649
Déjà revient le temps des mages : ils comprennent
les
théories d’Einstein, ils composent de la poésie pure, ils mesurent de
5650
rennent les théories d’Einstein, ils composent de
la
poésie pure, ils mesurent des sensibilités secondes et tout un arc-en
5651
econdes et tout un arc-en-ciel de sentiments dont
les
accords imitent la blancheur éclatante de l’amour… Que dirons-nous ?…
5652
rc-en-ciel de sentiments dont les accords imitent
la
blancheur éclatante de l’amour… Que dirons-nous ?… Par la force des c
5653
ont les accords imitent la blancheur éclatante de
l’
amour… Que dirons-nous ?… Par la force des choses et de l’Esprit, l’ho
5654
heur éclatante de l’amour… Que dirons-nous ?… Par
la
force des choses et de l’Esprit, l’homme sera-t-il sauvé de sa folie
5655
Que dirons-nous ?… Par la force des choses et de
l’
Esprit, l’homme sera-t-il sauvé de sa folie démocratique ? Areuse,
5656
s-nous ?… Par la force des choses et de l’Esprit,
l’
homme sera-t-il sauvé de sa folie démocratique ? Areuse, 26 décembr
5657
Ce travers a été développé jusqu’au ridicule par
la
démocratie. Les journaux, les cercles, les coulisses de parlements et
5658
té développé jusqu’au ridicule par la démocratie.
Les
journaux, les cercles, les coulisses de parlements et autres potinièr
5659
usqu’au ridicule par la démocratie. Les journaux,
les
cercles, les coulisses de parlements et autres potinières ne vivent q
5660
ule par la démocratie. Les journaux, les cercles,
les
coulisses de parlements et autres potinières ne vivent que de semblab
5661
er quelque saveur à ses jugements. C’est pourquoi
l’
on ne peut plus attaquer un fonctionnaire dans son activité publique s
5662
un très brave homme, il fait partie du conseil de
la
paroisse, etc. » — Il semble qu’en attaquant ses idées et leurs réali
5663
es et leurs réalisations ont ait porté atteinte à
la
dignité morale de ce M. Machin, membre du conseil de paroisse. Je pré
5664
onseil de paroisse. Je préciserai donc : je tiens
l’
École pour criminelle. Mais je ne tiens pas tous les instituteurs pour
5665
’École pour criminelle. Mais je ne tiens pas tous
les
instituteurs pour gibier de potence. Ils font beaucoup de mal, mais i
5666
mières victimes du système qu’il propagent et qui
les
fait vivre. La question se complique dès que l’instituteur prend cons
5667
du système qu’il propagent et qui les fait vivre.
La
question se complique dès que l’instituteur prend conscience de la no
5668
les fait vivre. La question se complique dès que
l’
instituteur prend conscience de la nocivité de son action… Ils sont co
5669
mplique dès que l’instituteur prend conscience de
la
nocivité de son action… Ils sont consciencieux, certes, mais sont-ils
5670
ls sont consciencieux, certes, mais sont-ils dans
la
même mesure conscients des fins qu’on assigne à leur activité ? Un pe
5671
assigne à leur activité ? Un peu de rigueur dans
la
pensée empêcherait souvent des catastrophes que beaucoup de rigueur m
5672
igueur morale ne saurait même pas prévoir. NOTE B
La
culture de notre sensibilité nous aiderait à retrouver l’accord avec
5673
re de notre sensibilité nous aiderait à retrouver
l’
accord avec l’ordre naturel. La culture de notre force de pensée nous
5674
nsibilité nous aiderait à retrouver l’accord avec
l’
ordre naturel. La culture de notre force de pensée nous rendrait une l
5675
derait à retrouver l’accord avec l’ordre naturel.
La
culture de notre force de pensée nous rendrait une liberté sans laque
5676
t vains pour instaurer cette nouvelle attitude de
l’
âme. Mais ces méthodes ne prendraient tout leur sens et toute leur eff
5677
un système religieux. Pour quiconque a une foi et
la
conscience de cette foi, il n’est d’enseignement véritable que religi
5678
’est d’enseignement véritable que religieux. Mais
les
questions confessionnelles enrayent et faussent tout. Imaginez une cu
5679
ltères et rester pacifiste. NOTE C Vous parlez de
la
grande vulgarité de mes attaques. Ce qui est vulgaire, au plein sens
5680
res et rester pacifiste. NOTE C Vous parlez de la
grande
vulgarité de mes attaques. Ce qui est vulgaire, au plein sens du mot,
5681
Ce qui est vulgaire, au plein sens du mot, c’est
le
genre distingué de la bourgeoisie qui se monte le cou. 13. Économis
5682
au plein sens du mot, c’est le genre distingué de
la
bourgeoisie qui se monte le cou. 13. Économistes et philosophes : c
5683
le genre distingué de la bourgeoisie qui se monte
le
cou. 13. Économistes et philosophes : ces Messieurs n’apparaissent
5684
ssieurs n’apparaissent ici que pour impressionner
le
public. Je n’ai pas besoin de leurs attendus pour juger. 14. Ces deu
5685
. Ces deux mots en effet, terrorisent à tel point
les
bourgeois qu’ils n’en distinguent plus même le sens. Ils les lancent
5686
t les bourgeois qu’ils n’en distinguent plus même
le
sens. Ils les lancent à la tête de tous ceux qui les dérangent, comme
5687
is qu’ils n’en distinguent plus même le sens. Ils
les
lancent à la tête de tous ceux qui les dérangent, comme des pavés, ou
5688
distinguent plus même le sens. Ils les lancent à
la
tête de tous ceux qui les dérangent, comme des pavés, ou plutôt des g
5689
sens. Ils les lancent à la tête de tous ceux qui
les
dérangent, comme des pavés, ou plutôt des grenades, avec la frousse q
5690
nt, comme des pavés, ou plutôt des grenades, avec
la
frousse que ça ne leur éclate dans la main. 15. Cf. ce que dit Tolst
5691
nades, avec la frousse que ça ne leur éclate dans
la
main. 15. Cf. ce que dit Tolstoï sur cette haine et sur ce besoin da
5692
les pédagogiques encore très actuels, du fait que
l’
école n’a pas bougé depuis. 16. On promet des confitures à l’enfant,
5693
pas bougé depuis. 16. On promet des confitures à
l’
enfant, s’il est sage. Moi je m’en moque. Je n’aime que la liberté.
5694
, s’il est sage. Moi je m’en moque. Je n’aime que
la
liberté.
5695
de jour (mars 1929)z Prison Prisonnier de
la
nuit mais plus libre qu’un ange prisonnier dans ta tête mais libre co
5696
me avant cette naissance aux lents vertiges Quand
la
nuit s’effeuille et se fane prisonnier d’une saison morte au tombeau
5697
d’une saison morte au tombeau des fleurs obscures
les
mains de l’absence se ferment sur le vide Tu pleurerais Mais la gr
5698
morte au tombeau des fleurs obscures les mains de
l’
absence se ferment sur le vide Tu pleurerais Mais la grâce est faci
5699
rs obscures les mains de l’absence se ferment sur
le
vide Tu pleurerais Mais la grâce est facile comme un matin d’été l
5700
ence se ferment sur le vide Tu pleurerais Mais
la
grâce est facile comme un matin d’été la grâce tendrement dénouée de
5701
ais Mais la grâce est facile comme un matin d’été
la
grâce tendrement dénouée de ta vie comme de cette nuit le jour d’un g
5702
tendrement dénouée de ta vie comme de cette nuit
le
jour d’un grand été qui consent… Ailleurs Colombes lumineuse
5703
énouée de ta vie comme de cette nuit le jour d’un
grand
été qui consent… Ailleurs Colombes lumineuses des mains de m
5704
yageuses ah ! que d’aucun retour vous ne laissiez
le
gage aux plaintes de mon cœur il est d’autres rivages où mieux qu’ici
5705
mon cœur il est d’autres rivages où mieux qu’ici
l’
on meurt. Étoile de jour Il naissait à son destin des rayons g
5706
t à son destin des rayons glissent et rient c’est
la
caresse des anges parmi les formes de l’ombre C’était l’aube et le
5707
lissent et rient c’est la caresse des anges parmi
les
formes de l’ombre C’était l’aube et le sourire adorable de savoir l
5708
nt c’est la caresse des anges parmi les formes de
l’
ombre C’était l’aube et le sourire adorable de savoir la dansante li
5709
e des anges parmi les formes de l’ombre C’était
l’
aube et le sourire adorable de savoir la dansante liberté d’un désir à
5710
s parmi les formes de l’ombre C’était l’aube et
le
sourire adorable de savoir la dansante liberté d’un désir à sa naissa
5711
C’était l’aube et le sourire adorable de savoir
la
dansante liberté d’un désir à sa naissance L’étoile qui l’accueille
5712
r la dansante liberté d’un désir à sa naissance
L’
étoile qui l’accueille au sommet ravi d’un silence c’est le miroir d’u
5713
liberté d’un désir à sa naissance L’étoile qui
l’
accueille au sommet ravi d’un silence c’est le miroir d’une absence ma
5714
qui l’accueille au sommet ravi d’un silence c’est
le
miroir d’une absence mais le signe de sa grâce Dans l’or vert évano
5715
i d’un silence c’est le miroir d’une absence mais
le
signe de sa grâce Dans l’or vert évanouie au cœur éclatant du jour
5716
ir d’une absence mais le signe de sa grâce Dans
l’
or vert évanouie au cœur éclatant du jour scintillera l’invisible gage
5717
ert évanouie au cœur éclatant du jour scintillera
l’
invisible gage d’un amour perdu. z. Rougemont Denis de, « Prison
5718
aa Quand avec un air fin mais un ton convaincu
l’
on a répété dans une ballade fameuse « Que voulez-vous, je suis bourge
5719
fameuse « Que voulez-vous, je suis bourgeois ! »,
l’
on peut se permettre quelques malices, quelques jeux d’esprit ou de mé
5720
elques jeux d’esprit ou de méchanceté, assuré que
l’
on est désormais d’être absous avec le sourire par la clientèle des li
5721
assuré que l’on est désormais d’être absous avec
le
sourire par la clientèle des librairies romandes, en mal de cadeaux d
5722
n est désormais d’être absous avec le sourire par
la
clientèle des librairies romandes, en mal de cadeaux de Noël ou de pr
5723
e cadeaux de Noël ou de première communion. Parmi
les
compatriotes d’Amiel, Godet restera l’un des rares qui ont réussi à s
5724
peu complexe et comme réduite à deux dimensions ;
la
conscience ne pouvait y tuer un lyrisme quasi inexistant, mais bien y
5725
xciter un esprit critique fort alerte. Jugez-en à
la
façon dont il parle de « ses quelques succès, si disproportionnés ave
5726
rtionnés avec son mérite ». Il ajoute : « j’ai eu
la
chance de discerner très jeune, avec une clairvoyance singulière, mes
5727
yance singulière, mes propres limites, et j’ai eu
la
sagesse de ne rien tenter au-delà ». C’est le comble de l’économie bo
5728
eu la sagesse de ne rien tenter au-delà ». C’est
le
comble de l’économie bourgeoise que cette administration exacte d’un
5729
e de ne rien tenter au-delà ». C’est le comble de
l’
économie bourgeoise que cette administration exacte d’un petit capital
5730
e cette administration exacte d’un petit capital.
Le
contraire de la poésie, bien sûr. Mais on n’en demande pas tant dans
5731
ration exacte d’un petit capital. Le contraire de
la
poésie, bien sûr. Mais on n’en demande pas tant dans les familles. Et
5732
sie, bien sûr. Mais on n’en demande pas tant dans
les
familles. Et qu’importe si la perspective manque souvent à ces récits
5733
ande pas tant dans les familles. Et qu’importe si
la
perspective manque souvent à ces récits : ce n’est point un paysage d
5734
’est point un paysage d’âme qu’on y cherche, mais
l’
anecdote bien tournée, des noms connus. Tout est sur le même plan ; le
5735
cdote bien tournée, des noms connus. Tout est sur
le
même plan ; le dessin d’ailleurs est élégant. Mais comme tout cela ma
5736
née, des noms connus. Tout est sur le même plan ;
le
dessin d’ailleurs est élégant. Mais comme tout cela manque de chair.
5737
press, changer totalement d’atmosphère, passer de
la
lassitude à la turbulence, d’une propreté joliette à un désordre pitt
5738
totalement d’atmosphère, passer de la lassitude à
la
turbulence, d’une propreté joliette à un désordre pittoresque, d’un s
5739
d’un scepticisme poli à une excitation agressive.
La
simple visite des cafés dans l’une et l’autre de ces capitales suffit
5740
l’autre de ces capitales suffit à vous en donner
la
sensation : ce que vous pourrez voir durant le reste de votre séjour
5741
er la sensation : ce que vous pourrez voir durant
le
reste de votre séjour ne fera que confirmer cette première impression
5742
mer cette première impression. Vienne : assis sur
les
banquettes rembourrées de profondes loges, les clients dégustent des
5743
ur les banquettes rembourrées de profondes loges,
les
clients dégustent des cafés débordants de crème, avec une apathie qu’
5744
troubler, aucune voix haute, aucune couleur vive.
Les
journaux qu’ils lisent annoncent chaque jour quelque catastrophe immi
5745
ur quelque catastrophe imminente, une révolution,
le
transfert de la SDN à la Hofburg… Mais les nouvelles de l’Opéra aussi
5746
trophe imminente, une révolution, le transfert de
la
SDN à la Hofburg… Mais les nouvelles de l’Opéra aussi sont en grosses
5747
minente, une révolution, le transfert de la SDN à
la
Hofburg… Mais les nouvelles de l’Opéra aussi sont en grosses lettres,
5748
lution, le transfert de la SDN à la Hofburg… Mais
les
nouvelles de l’Opéra aussi sont en grosses lettres, et tout cela fini
5749
ert de la SDN à la Hofburg… Mais les nouvelles de
l’
Opéra aussi sont en grosses lettres, et tout cela finira bien par s’ar
5750
uple s’est résigné avec une facilité incroyable à
la
défaite, au marxisme, au chômage, lequel semble d’ailleurs correspond
5751
emble d’ailleurs correspondre à son état d’esprit
le
plus naturel. Mais de quoi vivent ces bourgeois aimables et insipides
5752
ipides, qui passent des après-midi entiers devant
les
deux verres d’eau que le garçon renouvelle de temps à autre, à lire d
5753
rès-midi entiers devant les deux verres d’eau que
le
garçon renouvelle de temps à autre, à lire des potins tout en essuyan
5754
t : une vague de musique tzigane vous emporte dès
l’
entrée. Un violon vient vous siffler à l’oreille les notes les plus ai
5755
orte dès l’entrée. Un violon vient vous siffler à
l’
oreille les notes les plus aiguës d’une chanson populaire, et à l’autr
5756
’entrée. Un violon vient vous siffler à l’oreille
les
notes les plus aiguës d’une chanson populaire, et à l’autre extrémité
5757
n violon vient vous siffler à l’oreille les notes
les
plus aiguës d’une chanson populaire, et à l’autre extrémité de la sal
5758
’une chanson populaire, et à l’autre extrémité de
la
salle, par-dessus la rumeur des clients, le violoncelle répond de sa
5759
e, et à l’autre extrémité de la salle, par-dessus
la
rumeur des clients, le violoncelle répond de sa voix profonde et pass
5760
té de la salle, par-dessus la rumeur des clients,
le
violoncelle répond de sa voix profonde et passionnée, sous les roulad
5761
le répond de sa voix profonde et passionnée, sous
les
roulades d’un cymbalum. Aux parois, la prière pour la résurrection de
5762
née, sous les roulades d’un cymbalum. Aux parois,
la
prière pour la résurrection de la Hongrie, des portraits de lord Roth
5763
oulades d’un cymbalum. Aux parois, la prière pour
la
résurrection de la Hongrie, des portraits de lord Rothermere, et sur
5764
um. Aux parois, la prière pour la résurrection de
la
Hongrie, des portraits de lord Rothermere, et sur toutes les portes l
5765
, des portraits de lord Rothermere, et sur toutes
les
portes le fameux : « Non ! non ! jamais ! » Officiers élégants, tout
5766
aits de lord Rothermere, et sur toutes les portes
le
fameux : « Non ! non ! jamais ! » Officiers élégants, tout de noir vê
5767
x curieux dessins noirs et blancs : il représente
l’
ancienne Hongrie découpée en blanc sur fond noir et portant, en cœur n
5768
en blanc sur fond noir et portant, en cœur noir,
la
nouvelle… « Savez-vous qu’on nous a pris les deux tiers de notre pays
5769
noir, la nouvelle… « Savez-vous qu’on nous a pris
les
deux tiers de notre pays ?… Non, non, jamais ! » La rue est sale à ca
5770
deux tiers de notre pays ?… Non, non, jamais ! »
La
rue est sale à cause de la fonte de la neige (une boue ocre, épaisse,
5771
… Non, non, jamais ! » La rue est sale à cause de
la
fonte de la neige (une boue ocre, épaisse, on envie les bottes que po
5772
jamais ! » La rue est sale à cause de la fonte de
la
neige (une boue ocre, épaisse, on envie les bottes que portent les fe
5773
nte de la neige (une boue ocre, épaisse, on envie
les
bottes que portent les femmes), encombrée de piétons qui traversent e
5774
ue ocre, épaisse, on envie les bottes que portent
les
femmes), encombrée de piétons qui traversent en tous sens, évitant vi
5775
ons qui traversent en tous sens, évitant vivement
les
trams qui sonnent avec frénésie et les petits taxis rouges qui déferl
5776
t vivement les trams qui sonnent avec frénésie et
les
petits taxis rouges qui déferlent sur les boulevards comme une nuée d
5777
ésie et les petits taxis rouges qui déferlent sur
les
boulevards comme une nuée d’insectes affolés. Les maisons sont basses
5778
les boulevards comme une nuée d’insectes affolés.
Les
maisons sont basses, couvertes du haut en bas d’affiches rouges et ja
5779
rouges et jaunes et d’inscriptions cascadantes, à
l’
orientale (on pense au mot bazar, qui sonne rouge et jaune aussi). Sou
5780
ne, puis une banque en style hongrois, façade aux
grandes
lignes verticales, peinturlurée de bleu, d’or et de violet. Puis une
5781
unichoises. Puis un palais gothique 1880, qui est
le
Parlement. Et voici la trouée du Danube, Bude solidement amarrée à Pe
5782
ais gothique 1880, qui est le Parlement. Et voici
la
trouée du Danube, Bude solidement amarrée à Pest par quatre énormes p
5783
en hiver, viennent se briser avec un fracas sourd
les
îlots de glace qui descendent lentement le fleuve. Au cœur de Prophèt
5784
sourd les îlots de glace qui descendent lentement
le
fleuve. Au cœur de Prophète chauve s’élève la montagne de pierre de S
5785
ent le fleuve. Au cœur de Prophète chauve s’élève
la
montagne de pierre de St-Gellert. Elle tombe en hautes falaises dans
5786
de St-Gellert. Elle tombe en hautes falaises dans
le
Danube, froide et nue, mais dans son flanc une grotte s’illumine, et
5787
ue, mais dans son flanc une grotte s’illumine, et
la
Vierge y sourit. Le château royal avec son amiral régent et ses garde
5788
anc une grotte s’illumine, et la Vierge y sourit.
Le
château royal avec son amiral régent et ses gardes blancs aux casques
5789
des crémeries aux idylles démodées… Rentrons dans
la
ville un soir qu’elle s’amuse. Vous avez dîné au paprika chez des gen
5790
usion de liqueurs légères facilite singulièrement
les
rapports sociaux. On vous mène au Théâtre, vous n’y comprenez rien, m
5791
us mène au Théâtre, vous n’y comprenez rien, mais
le
charme des voix hongroises féminines suffit à votre bonheur et vous v
5792
nheur et vous voyez bien que Mme Varshany est une
grande
artiste. Vous vous êtes levé, comme tout le monde, à l’entrée d’un de
5793
iste. Vous vous êtes levé, comme tout le monde, à
l’
entrée d’un des archiducs. Car ce peuple, seul en Europe, attend le re
5794
archiducs. Car ce peuple, seul en Europe, attend
le
retour d’un roi. Et vous voici transporté dans un bal costumé, parmi
5795
ient et s’enivrent comme plus un Européen ne sait
le
faire, et dansent à tout propos de folles « czardas » qui deviennent
5796
sur des divans couverts de coussins Rothermere et
Grande
Hongrie… Ivresse dans le malheur, passion et pauvreté, espoirs presqu
5797
ussins Rothermere et Grande Hongrie… Ivresse dans
le
malheur, passion et pauvreté, espoirs presque puérils et nostalgie de
5798
cela compose un visage romantique et ardent dont
le
voyageur s’éprend malgré lui, malgré tout, comme d’une passion poétiq
5799
faut s’en approcher avec une douceur patiente, et
le
laisser créer en nous son silence particulier avant d’entendre les si
5800
en nous son silence particulier avant d’entendre
les
signes qu’il nous propose. Une telle poésie n’offre aux sens que peu
5801
e quelques « motifs », objets usuels et usés, sur
la
nuance mate d’un paravent chinois). Ce qu’elle décrit, ce sont des pe
5802
s). Ce qu’elle décrit, ce sont des perceptions de
l’
âme plus que de l’esprit ou des sens. « Reste immobile et sache attend
5803
rit, ce sont des perceptions de l’âme plus que de
l’
esprit ou des sens. « Reste immobile et sache attendre que ton cœur se
5804
cœur se détache de toi comme une lourde pierre. »
Le
corps, que l’âme quitte, redevient minéral, statue dans le silence «
5805
e de toi comme une lourde pierre. » Le corps, que
l’
âme quitte, redevient minéral, statue dans le silence « aux yeux gelés
5806
que l’âme quitte, redevient minéral, statue dans
le
silence « aux yeux gelés de rêverie », il se confond avec l’ombre du
5807
« aux yeux gelés de rêverie », il se confond avec
l’
ombre du monde. Et l’âme peut enfin « saisir » dans leur réalité les c
5808
êverie », il se confond avec l’ombre du monde. Et
l’
âme peut enfin « saisir » dans leur réalité les choses dont elle s’est
5809
Et l’âme peut enfin « saisir » dans leur réalité
les
choses dont elle s’est dégagée et qu’elle voit dans une autre lumière
5810
t semblait vivre au fond d’un insistant regard. »
Le
poète des Gravitations est ici descendu plus profond en soi-même ; so
5811
; et quel beau titre ! « Saisir » n’est-ce point
l’
acte essentiel de la poésie ? Toute poésie véritable n’est-elle pas pr
5812
e ! « Saisir » n’est-ce point l’acte essentiel de
la
poésie ? Toute poésie véritable n’est-elle pas proprement « saisissan
5813
n’est-elle pas proprement « saisissante » ? Mais
le
plus émouvant, c’est ici l’approche d’un silence partout pressenti, q
5814
saisissante » ? Mais le plus émouvant, c’est ici
l’
approche d’un silence partout pressenti, qui s’impose, qui apaise le v
5815
lence partout pressenti, qui s’impose, qui apaise
le
vain débat de notre esprit : « Car l’on pense beaucoup trop haut, et
5816
qui apaise le vain débat de notre esprit : « Car
l’
on pense beaucoup trop haut, et cela fait un vacarme terrible. » ay.
5817
La
tour de Hölderlin (15 juillet 1929)o « Je lui ai raconté qu’il hab
5818
e une chaumière au bord d’un ruisseau, qu’il dort
les
portes ouvertes, et pendant des heures récite des odes grecques au mu
5819
des heures récite des odes grecques au murmure de
l’
eau ; la Princesse de Homburg lui a fait cadeau d’un piano dont il a c
5820
es récite des odes grecques au murmure de l’eau ;
la
Princesse de Homburg lui a fait cadeau d’un piano dont il a coupé les
5821
burg lui a fait cadeau d’un piano dont il a coupé
les
cordes, mais pas toutes, en sorte que plusieurs touches sonnent encor
5822
e folie m’apparaît comme une chose si douce et si
grande
… »11 Et Bettina terminant sa lettre sur Hölderlin : « Ce piano dont
5823
lettre sur Hölderlin : « Ce piano dont il a cassé
les
cordes, c’est vraiment l’image de son âme ; j’ai voulu attirer là-des
5824
piano dont il a cassé les cordes, c’est vraiment
l’
image de son âme ; j’ai voulu attirer là-dessus l’attention du médecin
5825
l’image de son âme ; j’ai voulu attirer là-dessus
l’
attention du médecin, mais il est plus difficile de se faire comprendr
5826
se faire comprendre par un sot que par un fou. »
L’
hiver dernier, m’occupant assez longuement d’un des poètes auxquels no
5827
t d’un des poètes auxquels notre temps doit vouer
l’
attention la plus grave — car il vécut dans ces marches de l’esprit hu
5828
oètes auxquels notre temps doit vouer l’attention
la
plus grave — car il vécut dans ces marches de l’esprit humain qui con
5829
la plus grave — car il vécut dans ces marches de
l’
esprit humain qui confinent peut-être à l’Esprit et dont certains des
5830
ches de l’esprit humain qui confinent peut-être à
l’
Esprit et dont certains des plus purs d’entre nous se préparent à tent
5831
des plus purs d’entre nous se préparent à tenter
le
climat, — j’avais rêvé sur ce passage de l’émouvante Bettina, rêvé sa
5832
enter le climat, — j’avais rêvé sur ce passage de
l’
émouvante Bettina, rêvé sans doute assez profondément pour qu’aujourd’
5833
sans doute assez profondément pour qu’aujourd’hui
le
hasard qui m’amène à Tubingue ne soit pas seulement un hasard… Hier,
5834
ue ne soit pas seulement un hasard… Hier, c’était
la
Pentecôte. La fête de la plus haute poésie. Mais dans ce siècle, où t
5835
seulement un hasard… Hier, c’était la Pentecôte.
La
fête de la plus haute poésie. Mais dans ce siècle, où tant de voix l’
5836
un hasard… Hier, c’était la Pentecôte. La fête de
la
plus haute poésie. Mais dans ce siècle, où tant de voix l’appellent,
5837
aute poésie. Mais dans ce siècle, où tant de voix
l’
appellent, combien sont dignes de s’attendre au don du langage sacré ?
5838
angue de feu qui s’est posée sur Hölderlin et qui
l’
a consumé… Digne ? — Un adolescent au visage de jeune fille qui rimait
5839
age de jeune fille qui rimait sagement des odes à
la
liberté… Et voici dans sa vie cette double venue de l’amour et du cha
5840
berté… Et voici dans sa vie cette double venue de
l’
amour et du chant prophétique, confondant leurs flammes. Dix années da
5841
étique, confondant leurs flammes. Dix années dans
le
Grand Jeu. Dix années où le génie tourmente cet être faible, humilié
5842
que, confondant leurs flammes. Dix années dans le
Grand
Jeu. Dix années où le génie tourmente cet être faible, humilié par le
5843
mmes. Dix années dans le Grand Jeu. Dix années où
le
génie tourmente cet être faible, humilié par le monde. L’amour s’éloi
5844
ù le génie tourmente cet être faible, humilié par
le
monde. L’amour s’éloigne le premier, quand Hölderlin doit quitter la
5845
tourmente cet être faible, humilié par le monde.
L’
amour s’éloigne le premier, quand Hölderlin doit quitter la maison de
5846
’éloigne le premier, quand Hölderlin doit quitter
la
maison de Madame Gontard12, déchirement à peine sensible dans son œuv
5847
dans son œuvre. Car ce poète n’est peut-être que
le
lieu de sa poésie, — d’une poésie, l’on dirait, qui ne connaît pas so
5848
ut-être que le lieu de sa poésie, — d’une poésie,
l’
on dirait, qui ne connaît pas son auteur. Qui parle par sa bouche ? Il
5849
ses Hymnes une sérénité presque effrayante. Vient
le
temps où le sens de son monologue entre terre et ciel lui échappe. Il
5850
ne sérénité presque effrayante. Vient le temps où
le
sens de son monologue entre terre et ciel lui échappe. Il jette encor
5851
rappelle — Ou bien envoie — un héros — Ou bien —
la
sagesse. » Mais le feu s’éteint — l’esprit souffle où il veut. Juin 1
5852
envoie — un héros — Ou bien — la sagesse. » Mais
le
feu s’éteint — l’esprit souffle où il veut. Juin 1802 : au moment où
5853
— Ou bien — la sagesse. » Mais le feu s’éteint —
l’
esprit souffle où il veut. Juin 1802 : au moment où meurt Diotima, Höl
5854
meurt Diotima, Hölderlin errant loin d’elle (dans
la
région de Bordeaux croit-on), est frappé d’insolation ; sa folie d’un
5855
on), est frappé d’insolation ; sa folie d’un coup
l’
envahit. C’est une sorte de vieillard qui reparaît en Allemagne. Et du
5856
ente années, ce pauvre corps abandonné vivra dans
la
petite tour de Tubingue, chez un charpentier — vivra très doucement,
5857
plicablement, une vie monotone de vieux maniaque.
Le
buisson ardent quitté par le feu se dessèche. Ce qui fut Hölderlin si
5858
e de vieux maniaque. Le buisson ardent quitté par
le
feu se dessèche. Ce qui fut Hölderlin signe maintenant Scardanelli de
5859
s qu’il donne aux visiteurs venus pour contempler
la
victime d’un miracle. — C’était l’époque des amateurs de ruines. Je s
5860
our contempler la victime d’un miracle. — C’était
l’
époque des amateurs de ruines. Je suis descendu au bord de l’eau, un p
5861
s amateurs de ruines. Je suis descendu au bord de
l’
eau, un peu au-dessous de la maison, en attendant l’heure d’ouverture.
5862
s descendu au bord de l’eau, un peu au-dessous de
la
maison, en attendant l’heure d’ouverture. Il y a là une station de ca
5863
eau, un peu au-dessous de la maison, en attendant
l’
heure d’ouverture. Il y a là une station de canots de louage où j’ai v
5864
tzsche » à fond plat. Des saules se penchent vers
l’
eau lente. Sur l’autre rive qui est celle d’une longue île, des étudia
5865
iants au crâne rasé se promènent un roman jaune à
la
main. L’un après l’autre, dans cette paresse de jour férié, les cloch
5866
après l’autre, dans cette paresse de jour férié,
les
clochers de la ville sonnent deux heures. Allons. Un de ces corridors
5867
dans cette paresse de jour férié, les clochers de
la
ville sonnent deux heures. Allons. Un de ces corridors de vieille mai
5868
’étaient à demi encombrés d’armoires. Un couloir,
la
chambre. L’homme qui me conduit est le propriétaire actuel. « Monsieu
5869
emi encombrés d’armoires. Un couloir, la chambre.
L’
homme qui me conduit est le propriétaire actuel. « Monsieur connaît Hö
5870
n couloir, la chambre. L’homme qui me conduit est
le
propriétaire actuel. « Monsieur connaît Hölderlin ? — questionne-t-il
5871
, ici à Francfort, écrivait Bettina, car aussitôt
l’
on se met à raconter les choses les plus affreuses sur son compte, sim
5872
vait Bettina, car aussitôt l’on se met à raconter
les
choses les plus affreuses sur son compte, simplement parce qu’il a ai
5873
a, car aussitôt l’on se met à raconter les choses
les
plus affreuses sur son compte, simplement parce qu’il a aimé une femm
5874
l a aimé une femme, pour écrire Hypérion, et pour
les
gens d’ici, aimer, c’est seulement vouloir se marier… » — Et puis plu
5875
uloir se marier… » — Et puis plus tard on encadre
les
lettres des amants, on propose le couple à l’admiration des écoliers
5876
ard on encadre les lettres des amants, on propose
le
couple à l’admiration des écoliers en promenade, et le guide désigne
5877
re les lettres des amants, on propose le couple à
l’
admiration des écoliers en promenade, et le guide désigne familièremen
5878
uple à l’admiration des écoliers en promenade, et
le
guide désigne familièrement l’image d’une femme par le nom qu’elle po
5879
s en promenade, et le guide désigne familièrement
l’
image d’une femme par le nom qu’elle portait au mystère de l’amour… Tr
5880
ide désigne familièrement l’image d’une femme par
le
nom qu’elle portait au mystère de l’amour… Trois petites fenêtres orn
5881
ne femme par le nom qu’elle portait au mystère de
l’
amour… Trois petites fenêtres ornées de cactus miséreux, une pipe qui
5882
rnées de cactus miséreux, une pipe qui traîne sur
l’
appui ; le jardinet avec son banc et ses lilas fleuris qui trempent… T
5883
actus miséreux, une pipe qui traîne sur l’appui ;
le
jardinet avec son banc et ses lilas fleuris qui trempent… Tout est fa
5884
armotter. Vingt-sept ans dans cette chambre, avec
le
bruit de l’eau et cette complainte de malade épuisé après un grand ac
5885
ngt-sept ans dans cette chambre, avec le bruit de
l’
eau et cette complainte de malade épuisé après un grand accès de fièvr
5886
eau et cette complainte de malade épuisé après un
grand
accès de fièvre… L’agrément de ce monde, je l’ai vécu. Les joies d
5887
de malade épuisé après un grand accès de fièvre…
L’
agrément de ce monde, je l’ai vécu. Les joies de la jeunesse, voilà
5888
rand accès de fièvre… L’agrément de ce monde, je
l’
ai vécu. Les joies de la jeunesse, voilà si longtemps, si longtemp
5889
fièvre… L’agrément de ce monde, je l’ai vécu.
Les
joies de la jeunesse, voilà si longtemps, si longtemps qu’elles ont
5890
grément de ce monde, je l’ai vécu. Les joies de
la
jeunesse, voilà si longtemps, si longtemps qu’elles ont fui. Avri
5891
. Il y avait encore plus de paix que maintenant.
La
grande allée sur l’île n’existait pas, en face, ni les maisons. Il vo
5892
Il y avait encore plus de paix que maintenant. La
grande
allée sur l’île n’existait pas, en face, ni les maisons. Il voyait de
5893
plus de paix que maintenant. La grande allée sur
l’
île n’existait pas, en face, ni les maisons. Il voyait des prairies et
5894
rande allée sur l’île n’existait pas, en face, ni
les
maisons. Il voyait des prairies et des collines basses, de l’autre cô
5895
airies et des collines basses, de l’autre côté de
l’
eau jaune et verte… Quel est donc ce sommeil « dans la nuit de la vie
5896
u jaune et verte… Quel est donc ce sommeil « dans
la
nuit de la vie » — et cet aveu mystérieux : « La perfection n’a pas d
5897
verte… Quel est donc ce sommeil « dans la nuit de
la
vie » — et cet aveu mystérieux : « La perfection n’a pas de plainte »
5898
la nuit de la vie » — et cet aveu mystérieux : «
La
perfection n’a pas de plainte »… Vivait-il encore ? Ce lieu soudain m
5899
vait-il encore ? Ce lieu soudain m’angoisse. Mais
le
gardien : il y est comme chez lui. — Dormez-vous dans ce lit ? — Oh !
5900
— Oh ! répond-il, je pourrais aussi bien habiter
la
chambre. Il ne vient pas tant de visiteurs, et seulement de 2 à 4… Un
5901
4… Une rue étouffée entre des maisons pointues et
les
contreforts de l’Église du Chapitre : je vois s’y engager chaque jour
5902
entre des maisons pointues et les contreforts de
l’
Église du Chapitre : je vois s’y engager chaque jour le fou au profil
5903
ise du Chapitre : je vois s’y engager chaque jour
le
fou au profil de vieille femme qui promène doucement dans cette calme
5904
e qui promène doucement dans cette calme Tubingue
le
secret d’une épouvantable mélancolie. Les étudiants le rencontrent, q
5905
Tubingue le secret d’une épouvantable mélancolie.
Les
étudiants le rencontrent, qui montent au Séminaire protestant : il le
5906
cret d’une épouvantable mélancolie. Les étudiants
le
rencontrent, qui montent au Séminaire protestant : il leur fait de gr
5907
montent au Séminaire protestant : il leur fait de
grandes
révérences… La rumeur et le cliquetis d’une grande terrasse de café
5908
protestant : il leur fait de grandes révérences…
La
rumeur et le cliquetis d’une grande terrasse de café au bord du Necka
5909
il leur fait de grandes révérences… La rumeur et
le
cliquetis d’une grande terrasse de café au bord du Neckar, sous les m
5910
ndes révérences… La rumeur et le cliquetis d’une
grande
terrasse de café au bord du Neckar, sous les marronniers. À quatre he
5911
e grande terrasse de café au bord du Neckar, sous
les
marronniers. À quatre heures, l’orchestre s’est mis à jouer des ringu
5912
du Neckar, sous les marronniers. À quatre heures,
l’
orchestre s’est mis à jouer des ringues charmantes, jazz et clarinette
5913
charmantes, jazz et clarinette, chansons de mai.
Les
bateaux qui dérivent dans le voisinage se rapprochent, tournoyent len
5914
e, chansons de mai. Les bateaux qui dérivent dans
le
voisinage se rapprochent, tournoyent lentement dans la musique. Je n’
5915
isinage se rapprochent, tournoyent lentement dans
la
musique. Je n’aime pas les jeunes Doktors à lunettes, en costume de b
5916
urnoyent lentement dans la musique. Je n’aime pas
les
jeunes Doktors à lunettes, en costume de bain, qui pagayent vigoureus
5917
en costume de bain, qui pagayent vigoureusement,
les
dents serrées. (« Weg zur Kraft und Schönheit ! »). J’aime les bateau
5918
rées. (« Weg zur Kraft und Schönheit ! »). J’aime
les
bateaux plats et incertains, avec des Daphnés dedans, qui ne savent p
5919
bien ramer et qui lisent des magazines au fil de
l’
eau, ce qui est le comble des vacances. À une table voisine, des adole
5920
lisent des magazines au fil de l’eau, ce qui est
le
comble des vacances. À une table voisine, des adolescents balafrés fo
5921
ues à une compagnie de cavaliers qui passe devant
la
statue d’Eberhard le Barbu. Des bourgeois se rient contre par-dessus
5922
sus leurs chopes. « Gemütlichkeit ». Évidemment :
la
vie normale. Il y a pourtant cette petite chambre… Est-ce que tout ce
5923
petite chambre… Est-ce que tout cela existe dans
le
même monde ? (Il est bon de poser parfois de ces grandes questions na
5924
même monde ? (Il est bon de poser parfois de ces
grandes
questions naïves.) Lui aussi a vécu dans cette ville, tout semblable
5925
a ne peut que mal finir. Ceux du bon sens hochent
la
tête et citent la phrase la plus malencontreuse de Pascal : le « Qui
5926
finir. Ceux du bon sens hochent la tête et citent
la
phrase la plus malencontreuse de Pascal : le « Qui veut faire l’ange…
5927
x du bon sens hochent la tête et citent la phrase
la
plus malencontreuse de Pascal : le « Qui veut faire l’ange… » a autor
5928
tent la phrase la plus malencontreuse de Pascal :
le
« Qui veut faire l’ange… » a autorisé des générations de « bourgeois
5929
us malencontreuse de Pascal : le « Qui veut faire
l’
ange… » a autorisé des générations de « bourgeois cultivés » à faire l
5930
des générations de « bourgeois cultivés » à faire
la
bête dès qu’il s’agit de l’âme. Dans la bouche de certains, cela pren
5931
is cultivés » à faire la bête dès qu’il s’agit de
l’
âme. Dans la bouche de certains, cela prend l’air de je ne sais quelle
5932
» à faire la bête dès qu’il s’agit de l’âme. Dans
la
bouche de certains, cela prend l’air de je ne sais quelle revanche du
5933
dont ils se sentent bénéficiaires. Ah ! vraiment
les
malins ! qui ont préféré faire tout de suite la bête : comme cela on
5934
les malins ! qui ont préféré faire tout de suite
la
bête : comme cela on est mieux pour donner le coup de pied de l’âne…
5935
ite la bête : comme cela on est mieux pour donner
le
coup de pied de l’âne… Écoutons plutôt Bettina — la vérité est plus h
5936
cela on est mieux pour donner le coup de pied de
l’
âne… Écoutons plutôt Bettina — la vérité est plus humaine, est plus di
5937
coup de pied de l’âne… Écoutons plutôt Bettina —
la
vérité est plus humaine, est plus divine, quand c’est une telle femme
5938
est plus divine, quand c’est une telle femme qui
la
confesse : « Celui qui entre en commerce trop étroit avec le ciel, le
5939
: « Celui qui entre en commerce trop étroit avec
le
ciel, les dieux le vouent au malheur. » Ô cette chambre, où pénètre l
5940
i qui entre en commerce trop étroit avec le ciel,
les
dieux le vouent au malheur. » Ô cette chambre, où pénètre la facilité
5941
e en commerce trop étroit avec le ciel, les dieux
le
vouent au malheur. » Ô cette chambre, où pénètre la facilité atroce d
5942
vouent au malheur. » Ô cette chambre, où pénètre
la
facilité atroce de cette fin d’après-midi, ces musiquettes et ces par
5943
, de ces mondes à mes yeux soudain simultanés ?…
Le
tragique de la facilité, c’est qu’elle n’est qu’un oubli. Et pourtant
5944
à mes yeux soudain simultanés ?… Le tragique de
la
facilité, c’est qu’elle n’est qu’un oubli. Et pourtant, comme elle pa
5945
blie, triomphante, à beau fixe. Pourquoi troubler
le
miroir innocent de ces eaux, ces âmes indulgentes à leur banalité ? E
5946
amais rien ? Ou bien, peut-être, seulement, quand
l’
amour leur donne une petite fièvre, — cette semaine de leur jeunesse o
5947
ine de leur jeunesse où ils ont cru pressentir de
grandes
choses généreuses autour d’eux… Cela s’oublie. Et l’amour, tout juste
5948
choses généreuses autour d’eux… Cela s’oublie. Et
l’
amour, tout justement, nous fait comprendre, dans le temps même qu’il
5949
amour, tout justement, nous fait comprendre, dans
le
temps même qu’il nous entr’ouvre le ciel, qu’il est bon qu’il y ait l
5950
prendre, dans le temps même qu’il nous entr’ouvre
le
ciel, qu’il est bon qu’il y ait le monde… Mais que cette musique vulg
5951
ous entr’ouvre le ciel, qu’il est bon qu’il y ait
le
monde… Mais que cette musique vulgaire, par quel hasard, donne l’acco
5952
ue cette musique vulgaire, par quel hasard, donne
l’
accord qui m’ouvre un vrai silence : déjà je leur échappe — je t’échap
5953
, transitoire, allusif. Tout se remet à signifier
l’
absence. 11. Bettina von Arnim-Brentano : Die Günderode. 12. Où il
5954
. 12. Où il était précepteur. Madame Gontard est
la
Diotima de l’Hypérion et des poèmes. o. Rougemont Denis de, « La to
5955
ypérion et des poèmes. o. Rougemont Denis de, «
La
tour de Hölderlin », La Quinzaine artistique et littéraire, Neuchâtel
5956
o. Rougemont Denis de, « La tour de Hölderlin »,
La
Quinzaine artistique et littéraire, Neuchâtel, 15 juillet 1929, p. 35
5957
Jean Cassou,
La
Clef des songes (août 1929)az Après cet austère Pays qui n’est à p
5958
Après cet austère Pays qui n’est à personne paru
l’
année dernière — un livre assez troublant et qu’on a trop peu remarqué
5959
evient à son romantisme, à notre cher romantisme.
La
Clef des songes est de nouveau une dérive fantaisiste dans ce monde u
5960
monde un peu plus léger, un peu plus profond que
le
vrai, où l’Éloge de la folie nous entraînait naguère. Jean Cassou vag
5961
u plus léger, un peu plus profond que le vrai, où
l’
Éloge de la folie nous entraînait naguère. Jean Cassou vagabonde à tra
5962
r, un peu plus profond que le vrai, où l’Éloge de
la
folie nous entraînait naguère. Jean Cassou vagabonde à travers ses hi
5963
à travers ses histoires comme son Pierangelo dans
la
vie. Le hasard, complice des poètes, lui fait rencontrer des êtres bi
5964
s ses histoires comme son Pierangelo dans la vie.
Le
hasard, complice des poètes, lui fait rencontrer des êtres bizarres a
5965
s il n’hésite pas à faire un bout de chemin, Hans
le
gardeur d’oies, le gueux Joseph qui parle à son chien en mourant, une
5966
faire un bout de chemin, Hans le gardeur d’oies,
le
gueux Joseph qui parle à son chien en mourant, une fille qui chante e
5967
une fille qui chante et des enfants surtout, dès
le
début, puis plus tard encore, dans les songes des grandes personnes,
5968
urtout, dès le début, puis plus tard encore, dans
les
songes des grandes personnes, — puis tous se perdent, comme des souve
5969
début, puis plus tard encore, dans les songes des
grandes
personnes, — puis tous se perdent, comme des souvenirs, et l’on retro
5970
, — puis tous se perdent, comme des souvenirs, et
l’
on retrouve un peu plus loin d’autres souvenirs attristés par le temps
5971
un peu plus loin d’autres souvenirs attristés par
le
temps, des visages qui ne sont plus tout à fait les mêmes, des bonheu
5972
e temps, des visages qui ne sont plus tout à fait
les
mêmes, des bonheurs qui signifient plus de désespoir qu’ils ne s’en d
5973
pleurer. Quel dommage qu’il s’égare parfois dans
les
maisons des grands bourgeois, où tout, soudain, devient plus terne. M
5974
ommage qu’il s’égare parfois dans les maisons des
grands
bourgeois, où tout, soudain, devient plus terne. Mais bien vite un in
5975
oésie nous replonge dans une atmosphère autre, où
les
personnages ont cet air un peu ivre et capable de n’importe quoi, cet
5976
te quoi, cet air dangereux et tendre que prennent
les
hommes en liberté. Mais ils ne sont jamais méchants, et seulement aux
5977
de liberté dont nous avons besoin pour croire que
le
monde actuel n’est pas un cas désespéré. Mais voici déjà dans l’œuvre
5978
n’est pas un cas désespéré. Mais voici déjà dans
l’
œuvre de Jean Cassou, et singulièrement dans ce livre, beaucoup de ces
5979
rs assez de vérité dans une histoire où il y a de
la
poésie. az. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Jean Cassou, La C
5980
Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Jean Cassou,
La
Clef des songes », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genè
5981
André Rolland de Renéville, Rimbaud
le
voyant (août 1929)ba À lire ce petit livre et le parallèle qu’il é
5982
voyant (août 1929)ba À lire ce petit livre et
le
parallèle qu’il établit entre le yogabb telle que l’enseignaient les
5983
e petit livre et le parallèle qu’il établit entre
le
yogabb telle que l’enseignaient les upanishads et la tentative poétiq
5984
parallèle qu’il établit entre le yogabb telle que
l’
enseignaient les upanishads et la tentative poétique de Rimbaud, l’on
5985
établit entre le yogabb telle que l’enseignaient
les
upanishads et la tentative poétique de Rimbaud, l’on s’étonne qu’il a
5986
yogabb telle que l’enseignaient les upanishads et
la
tentative poétique de Rimbaud, l’on s’étonne qu’il ait fallu plus d’u
5987
s upanishads et la tentative poétique de Rimbaud,
l’
on s’étonne qu’il ait fallu plus d’un demi-siècle pour qu’une telle in
5988
demi-siècle pour qu’une telle interprétation voie
le
jour. Cela pourrait donner lieu à de mélancoliques réflexions sur le
5989
ait donner lieu à de mélancoliques réflexions sur
le
génie « poétique » français… Mais non, nous préférons voir ici l’un d
5990
gnes qui de toutes parts annoncent une rentrée de
l’
âme dans la littérature la plus spirituelle du monde. La thèse que déf
5991
toutes parts annoncent une rentrée de l’âme dans
la
littérature la plus spirituelle du monde. La thèse que défend l’auteu
5992
nnoncent une rentrée de l’âme dans la littérature
la
plus spirituelle du monde. La thèse que défend l’auteur de cet essai
5993
dans la littérature la plus spirituelle du monde.
La
thèse que défend l’auteur de cet essai — la voyance de Rimbaud — est
5994
la plus spirituelle du monde. La thèse que défend
l’
auteur de cet essai — la voyance de Rimbaud — est une de ces évidences
5995
onde. La thèse que défend l’auteur de cet essai —
la
voyance de Rimbaud — est une de ces évidences qu’il est bon de propos
5996
une de ces évidences qu’il est bon de proposer à
la
réflexion de notre temps, ne fût-ce que pour faite honte à ceux qui s
5997
telle honte, de leur indifférence à l’endroit de
l’
être le plus monstrueusement pur qui se soit révélé par le truchement
5998
honte, de leur indifférence à l’endroit de l’être
le
plus monstrueusement pur qui se soit révélé par le truchement de la p
5999
e plus monstrueusement pur qui se soit révélé par
le
truchement de la poésie française. — Livre un peu didactique, trop at
6000
ement pur qui se soit révélé par le truchement de
la
poésie française. — Livre un peu didactique, trop attentif à sa propr
6001
s inspiré par cet enthousiasme sacré que requiert
l’
œuvre de Rimbaud. Regrettons seulement qu’il n’élargisse pas plus une
6002
as plus une question aussi centrale — qui est, si
l’
on veut, la question d’Orient-Occident. Et pourquoi cette hostilité de
6003
question aussi centrale — qui est, si l’on veut,
la
question d’Orient-Occident. Et pourquoi cette hostilité de sectaire c
6004
t. Et pourquoi cette hostilité de sectaire contre
l’
interprétation proposée par Claudel et Isabelle Rimbaud ? Si Claudel s
6005
ontré partial en faisant de Rimbaud, « mystique à
l’
état sauvage », un catholique qui s’ignore, il n’est pas plus admissib
6006
us admissible d’inférer du mépris de Rimbaud pour
le
catholicisme à son mépris pour la révélation évangélique. Je ne vois
6007
de Rimbaud pour le catholicisme à son mépris pour
la
révélation évangélique. Je ne vois là que l’indice d’une confusion bi
6008
pour la révélation évangélique. Je ne vois là que
l’
indice d’une confusion bien française, hélas. ba. Rougemont Denis d
6009
Compte rendu] André Rolland de Renéville, Rimbaud
le
voyant », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, août
6010
ue de Genève, Genève, août 1929, p. 250-251. bb.
Le
féminin est ici conservé, conformément au texte original.
6011
Julien Benda,
La
Fin de l’Éternel (novembre 1929)bc Ce n’est plus l’heure de venir
6012
Julien Benda, La Fin de
l’
Éternel (novembre 1929)bc Ce n’est plus l’heure de venir prendre po
6013
n de l’Éternel (novembre 1929)bc Ce n’est plus
l’
heure de venir prendre position dans un débat où les voix les mieux éc
6014
’heure de venir prendre position dans un débat où
les
voix les mieux écoutées ont dit ce qu’elles avaient à dire. Et d’autr
6015
venir prendre position dans un débat où les voix
les
mieux écoutées ont dit ce qu’elles avaient à dire. Et d’autre part, l
6016
dit ce qu’elles avaient à dire. Et d’autre part,
les
lecteurs de cette revue connaissent la thèse de la Trahison des Clerc
6017
tre part, les lecteurs de cette revue connaissent
la
thèse de la Trahison des Clercs 11, thèse dont la Fin de l’Éternel ne
6018
s lecteurs de cette revue connaissent la thèse de
la
Trahison des Clercs 11, thèse dont la Fin de l’Éternel ne fait que re
6019
la thèse de la Trahison des Clercs 11, thèse dont
la
Fin de l’Éternel ne fait que reprendre la défense contre ses adversai
6020
e la Trahison des Clercs 11, thèse dont la Fin de
l’
Éternel ne fait que reprendre la défense contre ses adversaires de tou
6021
se dont la Fin de l’Éternel ne fait que reprendre
la
défense contre ses adversaires de tous bords. Je voudrais souligner s
6022
es de tous bords. Je voudrais souligner seulement
la
beauté de l’effort désintéressé de Julien Benda, et l’obligation où n
6023
rds. Je voudrais souligner seulement la beauté de
l’
effort désintéressé de Julien Benda, et l’obligation où nous sommes to
6024
auté de l’effort désintéressé de Julien Benda, et
l’
obligation où nous sommes tous désormais de répondre pour nous-mêmes à
6025
mise en demeure. Je suis loin de partager toutes
les
idées de M. Benda, sur le plan philosophique en particulier, où je me
6026
hèse de M. Marcel de ce qu’elle « mène loin… dans
l’
ordre moral ». Et quand cela serait ! dirons-nous, — avec le Benda qui
6027
ral ». Et quand cela serait ! dirons-nous, — avec
le
Benda qui ne trahit pas.) D’autre part, de plus impertinents que moi
6028
s que moi ne manqueront pas de faire observer que
la
« fin de l’éternel », la chute de l’idée dans la matière, est un phén
6029
manqueront pas de faire observer que la « fin de
l’
éternel », la chute de l’idée dans la matière, est un phénomène exacte
6030
as de faire observer que la « fin de l’éternel »,
la
chute de l’idée dans la matière, est un phénomène exactement aussi vi
6031
observer que la « fin de l’éternel », la chute de
l’
idée dans la matière, est un phénomène exactement aussi vieux que le m
6032
la « fin de l’éternel », la chute de l’idée dans
la
matière, est un phénomène exactement aussi vieux que le monde. Mais M
6033
ière, est un phénomène exactement aussi vieux que
le
monde. Mais M. Benda distinguera, et ils seront confondus. Car il y a
6034
un sophiste en M. Benda, un polémiste qui joue de
la
raison ratiocinante tout comme si elle n’était pas le contraire de la
6035
aison ratiocinante tout comme si elle n’était pas
le
contraire de la Raison de Spinoza. Nul mieux que lui ne s’entend défi
6036
te tout comme si elle n’était pas le contraire de
la
Raison de Spinoza. Nul mieux que lui ne s’entend définir et classer c
6037
lui permettent de triompher syllogistiquement de
l’
adversaire, sinon de la difficulté elle-même. Mais pour gênante que so
6038
mpher syllogistiquement de l’adversaire, sinon de
la
difficulté elle-même. Mais pour gênante que soit souvent son adresse
6039
dresse de logicien, elle ne doit pas nous masquer
l’
audace tranquille et admirable de son point de vue radicalement antimo
6040
n pic trop élevé pour qu’on y puisse vivre, c’est
l’
impossible. Mais justement, la gloire de M. Benda sera d’avoir soutenu
6041
puisse vivre, c’est l’impossible. Mais justement,
la
gloire de M. Benda sera d’avoir soutenu que l’humanité a besoin qu’on
6042
t, la gloire de M. Benda sera d’avoir soutenu que
l’
humanité a besoin qu’on lui demande l’impossible. Et quand bien même e
6043
soutenu que l’humanité a besoin qu’on lui demande
l’
impossible. Et quand bien même elle croirait n’en avoir plus besoin. C
6044
roirait n’en avoir plus besoin. Cet extrémisme de
la
pensée intemporelle, en butte aux sarcasmes des extrémistes de droite
6045
ît que plus pur. « Noms de clowns qui me viennent
l’
esprit : Julien Benda… », écrit Aragon. Et Daudet nous apprend que « l
6046
da… », écrit Aragon. Et Daudet nous apprend que «
le
petit Benda est un fameux serin ». Mais ces affirmations sont exactem
6047
a pas disputer à M. Benda, c’est son dur amour de
la
vérité tout court. Celle-là même qui paraît anarchique dans un monde
6048
i que relativement à un rendement. Rien, pas même
la
religion. 11. Cf. l’article de M. Daniel Halévy (décembre 1927) et
6049
rendement. Rien, pas même la religion. 11. Cf.
l’
article de M. Daniel Halévy (décembre 1927) et la réponse de M. Benda
6050
l’article de M. Daniel Halévy (décembre 1927) et
la
réponse de M. Benda (janvier 1928). bc. Rougemont Denis de, « [Comp
6051
ougemont Denis de, « [Compte rendu] Julien Benda,
La
Fin de l’Éternel », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Gen
6052
enis de, « [Compte rendu] Julien Benda, La Fin de
l’
Éternel », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, novem
6053
L’
ordre social. Le Libéralisme. L’inspiration (novembre 1929)ab L’o
6054
L’ordre social.
Le
Libéralisme. L’inspiration (novembre 1929)ab L’ordre social I
6055
L’ordre social. Le Libéralisme.
L’
inspiration (novembre 1929)ab L’ordre social Il y avait une fo
6056
Libéralisme. L’inspiration (novembre 1929)ab
L’
ordre social Il y avait une fois un jeune homme comme les autres. S
6057
ocial Il y avait une fois un jeune homme comme
les
autres. Soudain il lui pousse des ailes, une grande paire d’ailes. Al
6058
les autres. Soudain il lui pousse des ailes, une
grande
paire d’ailes. Allait-on s’émerveiller ? Mais déjà Freud expliquait l
6059
ait-on s’émerveiller ? Mais déjà Freud expliquait
le
monstre, les chaires le dénonçaient, et les précieuses trouvaient cel
6060
rveiller ? Mais déjà Freud expliquait le monstre,
les
chaires le dénonçaient, et les précieuses trouvaient cela d’un romant
6061
ais déjà Freud expliquait le monstre, les chaires
le
dénonçaient, et les précieuses trouvaient cela d’un romantisme ! ma c
6062
iquait le monstre, les chaires le dénonçaient, et
les
précieuses trouvaient cela d’un romantisme ! ma chère, d’un mauvais g
6063
antisme ! ma chère, d’un mauvais goût ! Cependant
le
jeune homme agitait ses ailes non sans une ingénue fierté. Mais au co
6064
e ingénue fierté. Mais au courant d’air s’enrhuma
le
grand-papa. On craignit de le perdre. — « Eh ! quoi, — vinrent lui di
6065
ant d’air s’enrhuma le grand-papa. On craignit de
le
perdre. — « Eh ! quoi, — vinrent lui dire ses amis, — l’orgueil t’ave
6066
re. — « Eh ! quoi, — vinrent lui dire ses amis, —
l’
orgueil t’aveugle-t-il ? Veux-tu conserver, ô cruel, des ailes qui don
6067
ur, ô pervers, ô disciple de Nietzsche ! » — Sous
le
poids de cette accusation, comment ne point céder : il fit couper ses
6068
ment ne point céder : il fit couper ses ailes. On
le
félicita de son retour à l’état normal, qui est pédestre. Mais à part
6069
couper ses ailes. On le félicita de son retour à
l’
état normal, qui est pédestre. Mais à partir de ce jour, on lui fit se
6070
’en a pas sera méprisé parce qu’il n’en a pas.
Le
libéralisme Seigneur ! clamaient-ils, combien complexes sont les p
6071
Seigneur ! clamaient-ils, combien complexes sont
les
problèmes que vous proposez à notre bonne volonté gémissante ! Dieu,
6072
r d’une solution fort simple qui d’ailleurs était
la
bonne, car le grand Remède, c’est un Simple. Des hurlements de rage n
6073
on fort simple qui d’ailleurs était la bonne, car
le
grand Remède, c’est un Simple. Des hurlements de rage ne tardèrent po
6074
fort simple qui d’ailleurs était la bonne, car le
grand
Remède, c’est un Simple. Des hurlements de rage ne tardèrent point à
6075
ge ne tardèrent point à s’élever de toutes parts.
Les
uns défendaient la Démocratie outragée, les autres disaient qu’il n’y
6076
t à s’élever de toutes parts. Les uns défendaient
la
Démocratie outragée, les autres disaient qu’il n’y a plus de morale,
6077
arts. Les uns défendaient la Démocratie outragée,
les
autres disaient qu’il n’y a plus de morale, et ces jeunes gens ont un
6078
ale, et ces jeunes gens ont une façon de trancher
les
questions qui vous désarme. Craignant qu’on ne lui fît un mauvais par
6079
rme. Craignant qu’on ne lui fît un mauvais parti,
l’
ange trouva son salut dans un subterfuge : il insinua qu’il parlait au
6080
il parlait au nom d’une secte orientale. Aussitôt
la
discussion de reprendre, et l’on parla défense de l’Occident. L’ange
6081
rientale. Aussitôt la discussion de reprendre, et
l’
on parla défense de l’Occident. L’ange s’enfuit par l’un des nombreux
6082
discussion de reprendre, et l’on parla défense de
l’
Occident. L’ange s’enfuit par l’un des nombreux trous de leurs raisonn
6083
e reprendre, et l’on parla défense de l’Occident.
L’
ange s’enfuit par l’un des nombreux trous de leurs raisonnements. L
6084
’un des nombreux trous de leurs raisonnements.
L’
inspiration Comme le poète terminait sa théorie sur la nature de l’
6085
de leurs raisonnements. L’inspiration Comme
le
poète terminait sa théorie sur la nature de l’inspiration, un doute l
6086
ration Comme le poète terminait sa théorie sur
la
nature de l’inspiration, un doute lui vint. Il alla au cinéma. On don
6087
me le poète terminait sa théorie sur la nature de
l’
inspiration, un doute lui vint. Il alla au cinéma. On donnait un film
6088
au cinéma. On donnait un film voluptueux. Il aima
l’
héroïne, mais sans espoir. Il lui écrivit, en sortant de là, dans une
6089
tant de là, dans une crèmerie pleine de couples à
la
mode. Mais en écrivant il pensait à une femme blonde assise près de l
6090
près de lui. Ayant demandé un timbre pour attirer
l’
attention de la femme blonde — sans résultat —, il écrivit une adresse
6091
ant demandé un timbre pour attirer l’attention de
la
femme blonde — sans résultat —, il écrivit une adresse réelle, et mit
6092
résultat —, il écrivit une adresse réelle, et mit
la
lettre dans la première boîte venue. Le lendemain, il reçut une répon
6093
e, et mit la lettre dans la première boîte venue.
Le
lendemain, il reçut une réponse : « Vous avez commis une erreur, cher
6094
ma bénédiction, je suis votre amie Joséphine. » —
Le
poète reprit son manuscrit et conclut : « L’inspiration est le nom qu
6095
» — Le poète reprit son manuscrit et conclut : «
L’
inspiration est le nom qu’on donne en poésie à une suite de malentendu
6096
it son manuscrit et conclut : « L’inspiration est
le
nom qu’on donne en poésie à une suite de malentendus heureusement enc
6097
lui valut une Muse. ab. Rougemont Denis de, «
L’
ordre social. Le Libéralisme. L’inspiration », Revue de Belles-Lettres
6098
se. ab. Rougemont Denis de, « L’ordre social.
Le
Libéralisme. L’inspiration », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuch
6099
emont Denis de, « L’ordre social. Le Libéralisme.
L’
inspiration », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Frib
6100
Avant-propos
Le
dire une bonne fois. Il ne faut pas songer à décrire en 50 petites
6101
aut pas songer à décrire en 50 petites pages tous
les
méfaits de l’instruction publique. C’est à peine assez pour indiquer
6102
à décrire en 50 petites pages tous les méfaits de
l’
instruction publique. C’est à peine assez pour indiquer leur ordre de
6103
e grandeur ; à quoi je me bornerai. Il a paru sur
le
sujet de l’instruction publique deux petits livres1 excellents dont j
6104
à quoi je me bornerai. Il a paru sur le sujet de
l’
instruction publique deux petits livres1 excellents dont je considère
6105
deux petits livres1 excellents dont je considère
les
thèses comme acquises : L’Éloge de l’ignorance, de M. Abel Bonnard, e
6106
nts dont je considère les thèses comme acquises :
L’
Éloge de l’ignorance, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas l
6107
considère les thèses comme acquises : L’Éloge de
l’
ignorance, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas les enfants,
6108
: L’Éloge de l’ignorance, de M. Abel Bonnard, et
Le
Pédagogue n’aime pas les enfants, d’Henri Roorda. Le premier montre q
6109
e, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas
les
enfants, d’Henri Roorda. Le premier montre que la science apprise à l
6110
es enfants, d’Henri Roorda. Le premier montre que
la
science apprise à l’école appauvrit l’homme de tout ce que son ignora
6111
oorda. Le premier montre que la science apprise à
l’
école appauvrit l’homme de tout ce que son ignorance respectait, et ne
6112
montre que la science apprise à l’école appauvrit
l’
homme de tout ce que son ignorance respectait, et ne lui donne à la pl
6113
e que son ignorance respectait, et ne lui donne à
la
place que des laideurs et de la prétention. L’autre, avec l’ironie tr
6114
et ne lui donne à la place que des laideurs et de
la
prétention. L’autre, avec l’ironie tranquille du bon sens bafoué et q
6115
e des laideurs et de la prétention. L’autre, avec
l’
ironie tranquille du bon sens bafoué et qui s’en moque, décrit la stup
6116
ille du bon sens bafoué et qui s’en moque, décrit
la
stupidité de l’enseignement tel qu’il est pratiqué dans nos collèges.
6117
bafoué et qui s’en moque, décrit la stupidité de
l’
enseignement tel qu’il est pratiqué dans nos collèges. Mon dessein est
6118
e réaction de tempérament. Je marque d’autre part
la
nécessité de tout cela qui me blesse, la liaison fatale avec la démoc
6119
tre part la nécessité de tout cela qui me blesse,
la
liaison fatale avec la démocratie, de tout ce qui moleste ma liberté
6120
e tout cela qui me blesse, la liaison fatale avec
la
démocratie, de tout ce qui moleste ma liberté et sans doute celle de
6121
cialiste, qui a été établi par coup de force, que
les
libéraux ont admis, conformément à leurs maximes, et toléré malgré le
6122
humeur. Ce régime de punaises jaunâtres aboutit à
l’
instruction publique et grâce à elle prolonge abusivement sa terne exi
6123
elle prolonge abusivement sa terne existence. Je
l’
ai subi ; l’on va voir comment. De pareils souvenirs légitiment toutes
6124
ge abusivement sa terne existence. Je l’ai subi ;
l’
on va voir comment. De pareils souvenirs légitiment toutes les haines.
6125
r comment. De pareils souvenirs légitiment toutes
les
haines. Je serai méchant, parce que j’en ai gros sur le cœur. D’aille
6126
nes. Je serai méchant, parce que j’en ai gros sur
le
cœur. D’ailleurs, ce petit écrit ne peut servir à rien. — Alors ? — J
6127
apper : celui de naïveté. Définition du naïf dans
le
monde moderne : individu qui soutient des idées qui ne rapportent rie
6128
r au nom de ma génération, ne m’étant pas livré à
l’
enquête préalable qui seule eût pu, à la rigueur, me donner ce droit b
6129
s livré à l’enquête préalable qui seule eût pu, à
la
rigueur, me donner ce droit bien inutile. Pourtant je sais qu’à droit
6130
e comme à gauche, ils sont plus nombreux qu’on ne
le
pense, ceux qui refusent d’être complices dans cet attentat à l’intég
6131
qui refusent d’être complices dans cet attentat à
l’
intégrité humaine qu’est en fait l’esprit démocratique. Là-dessus, ces
6132
cet attentat à l’intégrité humaine qu’est en fait
l’
esprit démocratique. Là-dessus, ces messieurs se lamentent, la jeuness
6133
ocratique. Là-dessus, ces messieurs se lamentent,
la
jeunesse d’aujourd’hui, etc. Évidemment. Mais il y a les jérémiades e
6134
nesse d’aujourd’hui, etc. Évidemment. Mais il y a
les
jérémiades et il y a les raisons. Hors le domaine de l’amour, où tout
6135
Évidemment. Mais il y a les jérémiades et il y a
les
raisons. Hors le domaine de l’amour, où tout se confond miraculeuseme
6136
il y a les jérémiades et il y a les raisons. Hors
le
domaine de l’amour, où tout se confond miraculeusement, gémir n’est p
6137
émiades et il y a les raisons. Hors le domaine de
l’
amour, où tout se confond miraculeusement, gémir n’est pas un argument
6138
eusement, gémir n’est pas un argument. Je demande
le
droit de démolir. Et me l’accorde aussitôt. Sans conditions. Mon rôle
6139
n argument. Je demande le droit de démolir. Et me
l’
accorde aussitôt. Sans conditions. Mon rôle n’est pas de proposer une
6140
de vitupérer ce que je vois, qui est laid. Quand
la
soupe est brûlée, on la renvoie, même si l’on n’est pas capable d’en
6141
vois, qui est laid. Quand la soupe est brûlée, on
la
renvoie, même si l’on n’est pas capable d’en faire soi-même une meill
6142
Quand la soupe est brûlée, on la renvoie, même si
l’
on n’est pas capable d’en faire soi-même une meilleure. Mais j’aperçoi
6143
Mais j’aperçois là-bas, vautré derrière son bock,
le
Citoyen conscient et organisé pour la discussion. Il retrousse ses ma
6144
e son bock, le Citoyen conscient et organisé pour
la
discussion. Il retrousse ses manches. Il s’apprête à cracher sur ce q
6145
Oh ! oh ! oh ! il va parler, de grâce mettez-lui
les
mains sur la bouche ! Donnez-lui sa choucroute, tapez-lui dans le dos
6146
! il va parler, de grâce mettez-lui les mains sur
la
bouche ! Donnez-lui sa choucroute, tapez-lui dans le dos, amenez-lui
6147
bouche ! Donnez-lui sa choucroute, tapez-lui dans
le
dos, amenez-lui le Guguss 2, des bretzels, sa petite amie, au secours
6148
sa choucroute, tapez-lui dans le dos, amenez-lui
le
Guguss 2, des bretzels, sa petite amie, au secours ! Car j’ai encore
6149
ire. Dès qu’une voix s’élève pour mettre en doute
l’
excellence du principe de l’instruction publique, on crie sur tous les
6150
pour mettre en doute l’excellence du principe de
l’
instruction publique, on crie sur tous les bancs : « Alors, vous êtes
6151
ncipe de l’instruction publique, on crie sur tous
les
bancs : « Alors, vous êtes pour un retour à la barbarie ? » Si ce réf
6152
s les bancs : « Alors, vous êtes pour un retour à
la
barbarie ? » Si ce réflexe indique un mépris vraiment exagéré pour la
6153
e réflexe indique un mépris vraiment exagéré pour
la
jugeotte de l’adversaire ou s’il traduit simplement cette mauvaise fo
6154
ue un mépris vraiment exagéré pour la jugeotte de
l’
adversaire ou s’il traduit simplement cette mauvaise foi pas même cons
6155
ise foi pas même consciente, cette lâcheté devant
la
discussion précise de leurs principes par quoi se signalent bien souv
6156
à cent « réponses » de cette sorte. Et je tiens à
les
classer par avance en deux catégories dont je vais régler le compte s
6157
par avance en deux catégories dont je vais régler
le
compte sommairement. Cela n’empêchera personne de me resservir ces ar
6158
A. Réponses du type : on ne peut pas aller contre
l’
époque, vous êtes un pauvre utopiste, etc. Ce sont les positivistes qu
6159
poque, vous êtes un pauvre utopiste, etc. Ce sont
les
positivistes qui parlent ainsi, ceux qui croient aux faits. Je leur r
6160
Je leur réponds : 1° qu’ils ne peuvent me dénier
le
droit de juger ces faits ; 2° qu’ils ne peuvent, en vertu même de leu
6161
euvent, en vertu même de leur scepticisme quant à
la
valeur réformatrice des idées, m’accuser de faire une critique danger
6162
critique dangereuse ; 3° que néanmoins je crois à
l’
efficace de certaines utopies. (Les religions, la découverte de l’Amér
6163
oins je crois à l’efficace de certaines utopies. (
Les
religions, la découverte de l’Amérique par Christophe Colomb, l’Europ
6164
l’efficace de certaines utopies. (Les religions,
la
découverte de l’Amérique par Christophe Colomb, l’Europe napoléonienn
6165
rtaines utopies. (Les religions, la découverte de
l’
Amérique par Christophe Colomb, l’Europe napoléonienne, la Russie d’ap
6166
a découverte de l’Amérique par Christophe Colomb,
l’
Europe napoléonienne, la Russie d’après Karl Marx, le vol des frères W
6167
ue par Christophe Colomb, l’Europe napoléonienne,
la
Russie d’après Karl Marx, le vol des frères Wright, et tout bêtement,
6168
urope napoléonienne, la Russie d’après Karl Marx,
le
vol des frères Wright, et tout bêtement, c’est le cas de le dire : l’
6169
le vol des frères Wright, et tout bêtement, c’est
le
cas de le dire : l’instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d
6170
frères Wright, et tout bêtement, c’est le cas de
le
dire : l’instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d’aller con
6171
ight, et tout bêtement, c’est le cas de le dire :
l’
instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d’aller contre l’époq
6172
dire : l’instruction publique.) Résumé : 1° On a
le
droit d’aller contre l’époque, et on le peut efficacement. 2° rira bi
6173
blique.) Résumé : 1° On a le droit d’aller contre
l’
époque, et on le peut efficacement. 2° rira bien qui rira le dernier.
6174
: 1° On a le droit d’aller contre l’époque, et on
le
peut efficacement. 2° rira bien qui rira le dernier. B. Réponses du
6175
rétrograde, un infâme réactionnaire, etc. Ce sont
les
partisans d’une démocratie progressiste et tolérante qui se livrent à
6176
lérante qui se livrent à ces excès de langage. Je
les
renvoie en corps au chapitre 5 où je traiterai de cet aspect du probl
6177
e 5 où je traiterai de cet aspect du problème que
l’
on peut appeler la question de droit. Certains, en effet, tirent toute
6178
i de cet aspect du problème que l’on peut appeler
la
question de droit. Certains, en effet, tirent toute leur force dans l
6179
Certains, en effet, tirent toute leur force dans
les
discussions de la tranquillité avec laquelle ils brouillent les faits
6180
, tirent toute leur force dans les discussions de
la
tranquillité avec laquelle ils brouillent les faits et les principes.
6181
s de la tranquillité avec laquelle ils brouillent
les
faits et les principes. Tourmentés par les scrupules de leur conscien
6182
uillité avec laquelle ils brouillent les faits et
les
principes. Tourmentés par les scrupules de leur conscience libérale,
6183
illent les faits et les principes. Tourmentés par
les
scrupules de leur conscience libérale, ils fuient la rigueur jusque d
6184
scrupules de leur conscience libérale, ils fuient
la
rigueur jusque dans leurs raisonnements. Pour moi qui cherche à démêl
6185
urs raisonnements. Pour moi qui cherche à démêler
la
vérité sans égards aux dérangements, même violents, que cela ne manqu
6186
jamais de provoquer, je me propose de marquer ici
la
distinction classique du fait et du droit ; et c’est pourquoi je cons
6187
droit ; et c’est pourquoi je considérerai d’abord
l’
instruction publique dans ses réalisations actuelles, puis au terme de
6188
d’outrages au bon sens peuvent être légitimés par
le
but final de notre institution-tabou. 1. Je ne puis naturellement
6189
1. Je ne puis naturellement pas mentionner tous
les
ouvrages scientifiques. Les meilleurs sortent de l’Institut Rousseau.
6190
t pas mentionner tous les ouvrages scientifiques.
Les
meilleurs sortent de l’Institut Rousseau. 2. Guguss, journal comiqu
6191
ouvrages scientifiques. Les meilleurs sortent de
l’
Institut Rousseau. 2. Guguss, journal comique d’une grande vulgarité
6192
itut Rousseau. 2. Guguss, journal comique d’une
grande
vulgarité qui jouait alors le rôle de nos bandes dessinées.
6193
l comique d’une grande vulgarité qui jouait alors
le
rôle de nos bandes dessinées.
6194
ssent sur leurs souvenirs de classe. C’est qu’ils
les
confondent avec ceux de leur enfance et les font indûment participer
6195
u’ils les confondent avec ceux de leur enfance et
les
font indûment participer de la même grâce. Voyez Péguy, quand il essa
6196
e leur enfance et les font indûment participer de
la
même grâce. Voyez Péguy, quand il essaie de nous faire croire qu’ « i
6197
s faire croire qu’ « il n’y a rien au-dessus » de
la
tâche des instituteurs : Faire de ces belles analyses logiques, et g
6198
ithmétique où il fallait si soigneusement séparer
les
calculs du raisonnement, par une barre verticale, et où il y avait to
6199
t pour emplir ou pour vider un bassin (et souvent
les
deux), (pour emplir et vider ensemble), (drôle d’occupation), (après
6200
urs des appartements à meubler. Et on multipliait
le
tapissier par le prix du mètre courant. Encore que je prenne les sen
6201
nts à meubler. Et on multipliait le tapissier par
le
prix du mètre courant. Encore que je prenne les sentiments trop au s
6202
r le prix du mètre courant. Encore que je prenne
les
sentiments trop au sérieux pour faire ici du sentiment, je suis sensi
6203
sie. Mais ce qui fait très bien dans un Cahier de
la
quinzaine, ça faisait de mauvaises notes dans nos carnets hebdomadair
6204
journée d’enfant gâtée. Et d’ailleurs, multiplier
le
tapissier par le prix du mètre courant n’est pas une fantaisie pour c
6205
gâtée. Et d’ailleurs, multiplier le tapissier par
le
prix du mètre courant n’est pas une fantaisie pour ce petit être qui
6206
e pour ce petit être qui s’énerve, qui embrouille
les
règles, qui a sommeil, qui a peur de faire faux, parce que les autres
6207
ui a sommeil, qui a peur de faire faux, parce que
les
autres auront fait juste, et qui voudrait bien pleurer, et qui recomm
6208
rdoise où sèchent des traînées de craie grise, où
les
chiffres trop gros s’emmêlent… Et c’est cela l’enfance insouciante ?
6209
les chiffres trop gros s’emmêlent… Et c’est cela
l’
enfance insouciante ? Qu’est-ce qui ressemble plus au souci quotidien
6210
’est-ce qui ressemble plus au souci quotidien des
grandes
personnes ? Mais l’enfance est ailleurs. Je revois ce fond de jardin
6211
s au souci quotidien des grandes personnes ? Mais
l’
enfance est ailleurs. Je revois ce fond de jardin où l’on trouve des c
6212
ance est ailleurs. Je revois ce fond de jardin où
l’
on trouve des cloportes dans la toile mouillée d’une tente d’Indiens,
6213
fond de jardin où l’on trouve des cloportes dans
la
toile mouillée d’une tente d’Indiens, des petites guerres mystérieuse
6214
, des matins de dimanche sonores et tout propres,
la
cuiller d’huile de foie de morue avant le repas, et le monsieur qui r
6215
ropres, la cuiller d’huile de foie de morue avant
le
repas, et le monsieur qui racontait gravement des choses qu’on ne com
6216
iller d’huile de foie de morue avant le repas, et
le
monsieur qui racontait gravement des choses qu’on ne comprend pas, la
6217
ntait gravement des choses qu’on ne comprend pas,
la
prière du soir pour qu’il fasse beau demain, Michel Strogoff et Rémy
6218
main, Michel Strogoff et Rémy un fils de vaincus,
les
tours de carrousel, les chemins dans la forêt en automne, des jeux, d
6219
Rémy un fils de vaincus, les tours de carrousel,
les
chemins dans la forêt en automne, des jeux, des feuillages, des rêver
6220
vaincus, les tours de carrousel, les chemins dans
la
forêt en automne, des jeux, des feuillages, des rêveries, des recoins
6221
peu divine, baignée d’une très vague angoisse que
l’
on fuyait avec des bonheurs fous dans les bras maternels, ou bien dans
6222
oisse que l’on fuyait avec des bonheurs fous dans
les
bras maternels, ou bien dans ces promenades en tenant la forte main d
6223
maternels, ou bien dans ces promenades en tenant
la
forte main du père qui fait de longs pas réguliers… L’École, dans ce
6224
rte main du père qui fait de longs pas réguliers…
L’
École, dans ce concert de souvenirs, n’est qu’une dissonance douloureu
6225
loureuse. 3 Deux angoisses dominent mon enfance :
les
séances chez le dentiste et l’horaire des leçons. Ce malaise inavouab
6226
angoisses dominent mon enfance : les séances chez
le
dentiste et l’horaire des leçons. Ce malaise inavouable, cette règle
6227
ent mon enfance : les séances chez le dentiste et
l’
horaire des leçons. Ce malaise inavouable, cette règle méchante, ce so
6228
is appris à lire, en cachette avec ma sœur aînée.
L’
année suivante, on me mit à l’école, parce que c’est la loi. La premiè
6229
avec ma sœur aînée. L’année suivante, on me mit à
l’
école, parce que c’est la loi. La première classe fut agréable : j’ali
6230
ée suivante, on me mit à l’école, parce que c’est
la
loi. La première classe fut agréable : j’alignais des bâtons en rêvan
6231
e pensais pas devoir suivre syllabe après syllabe
les
ânonnements des élèves qui déchiffraient les premières phrases exempl
6232
hrases exemplaires. (J’aimais pourtant Zoé lave à
la
fontaine, à cause du nom.) Quand venait mon tour, je savais rarement
6233
om.) Quand venait mon tour, je savais rarement où
l’
on en était. Cela m’attira des reproches acides, et naturellement, la
6234
m’attira des reproches acides, et naturellement,
la
phrase sacrée : « Il faut que tous fassent la même chose ici ! » Dans
6235
nt, la phrase sacrée : « Il faut que tous fassent
la
même chose ici ! » Dans la suite, on se chargea d’illustrer par d’inn
6236
faut que tous fassent la même chose ici ! » Dans
la
suite, on se chargea d’illustrer par d’innombrables exemples cet axio
6237
par d’innombrables exemples cet axiome qui devint
la
formule de mes premières douleurs morales. Après six ans de ce régime
6238
rentrée, ma colère n’en fut que plus malfaisante.
L’
école me rendit au monde, vers l’âge de 18 ans, crispé et méfiant, san
6239
lus malfaisante. L’école me rendit au monde, vers
l’
âge de 18 ans, crispé et méfiant, sans cesse en garde contre moi-même
6240
ait pas différer, profondément hypocrite donc, et
le
cerveau saturé d’évidences du type 2 et 2 font 4, ou : tous les homme
6241
turé d’évidences du type 2 et 2 font 4, ou : tous
les
hommes doivent être égaux en tout. Deux fois deux quatre, c’est stéri
6242
s de citer, je découvris un jour qu’elle contient
la
cause déterminante de notre malaise. Il me fallut un certain temps po
6243
e je me posais la question : est-ce vrai que tous
les
hommes doivent être égaux en tout ? Et la première réponse fut : Il f
6244
réponse fut : Il faut que ce soit vrai, pour que
la
démocratie prospère et étende ses conquêtes. C’était découvrir notre
6245
dignations de nos maîtres quand ils dénonçaient «
la
marque indélébile de l’éducation jésuite ». Nous étions marqués par N
6246
s quand ils dénonçaient « la marque indélébile de
l’
éducation jésuite ». Nous étions marqués par Numa Droz, par l’esprit p
6247
jésuite ». Nous étions marqués par Numa Droz, par
l’
esprit petit-bourgeois, qui est une généralisation de l’avarice, et pa
6248
it petit-bourgeois, qui est une généralisation de
l’
avarice, et par les dogmes démocratiques, qui sont une généralisation
6249
, qui est une généralisation de l’avarice, et par
les
dogmes démocratiques, qui sont une généralisation de la règle de troi
6250
mes démocratiques, qui sont une généralisation de
la
règle de trois, aussi profondément certes qu’un Voltaire le fut par l
6251
e trois, aussi profondément certes qu’un Voltaire
le
fut par les jésuites : du moins ceux-ci lui laissèrent-ils assez de v
6252
ssi profondément certes qu’un Voltaire le fut par
les
jésuites : du moins ceux-ci lui laissèrent-ils assez de verdeur d’esp
6253
pire. Mais on avait brisé en nous ces ressorts de
la
révolte et de la libération d’une personnalité : l’imagination, le se
6254
it brisé en nous ces ressorts de la révolte et de
la
libération d’une personnalité : l’imagination, le sens de l’arbitrair
6255
révolte et de la libération d’une personnalité :
l’
imagination, le sens de l’arbitraire et le sens de la relativité des d
6256
la libération d’une personnalité : l’imagination,
le
sens de l’arbitraire et le sens de la relativité des décrets humains.
6257
on d’une personnalité : l’imagination, le sens de
l’
arbitraire et le sens de la relativité des décrets humains. Le prix de
6258
alité : l’imagination, le sens de l’arbitraire et
le
sens de la relativité des décrets humains. Le prix de mes souffrances
6259
magination, le sens de l’arbitraire et le sens de
la
relativité des décrets humains. Le prix de mes souffrances était donc
6260
et le sens de la relativité des décrets humains.
Le
prix de mes souffrances était donc ce conformisme indispensable aux «
6261
principes ». Je n’allai pas tout de suite jusqu’à
les
mettre en doute : mais un jour je compris que ce n’étaient que des pr
6262
les d’une arithmétique élémentaire, ce monde dont
la
Démocratie apparaissait comme l’achèvement idéal et nécessaire — et q
6263
e, ce monde dont la Démocratie apparaissait comme
l’
achèvement idéal et nécessaire — et qui était le seul pour lequel on n
6264
e l’achèvement idéal et nécessaire — et qui était
le
seul pour lequel on nous préparait — c’était un système d’abstraction
6265
tait un système d’abstractions primaires, c’était
le
rêve raisonnablement organisé des esprits moyens, prosaïques et rassi
6266
ns, prosaïques et rassis qui tiennent aujourd’hui
les
charges de l’État, piliers d’un régime dont ils sont les seuls à s’ac
6267
et rassis qui tiennent aujourd’hui les charges de
l’
État, piliers d’un régime dont ils sont les seuls à s’accommoder parce
6268
rges de l’État, piliers d’un régime dont ils sont
les
seuls à s’accommoder parce qu’ils l’ont établi à la mesure exacte de
6269
nt ils sont les seuls à s’accommoder parce qu’ils
l’
ont établi à la mesure exacte de leurs besoins. Nous ne croyions plus
6270
seuls à s’accommoder parce qu’ils l’ont établi à
la
mesure exacte de leurs besoins. Nous ne croyions plus aux démons, mai
6271
besoins. Nous ne croyions plus aux démons, mais à
la
Commission scolaire. Nous n’avions plus de « superstitions grossières
6272
stitions grossières » comme celles qui touchent à
l’
action des étoiles par exemple. Mais nous avions acquis le respect des
6273
des étoiles par exemple. Mais nous avions acquis
le
respect des statistiques. Nous savions que les miracles ne trompent q
6274
uis le respect des statistiques. Nous savions que
les
miracles ne trompent que les illettrés, mais qu’il convient de s’incl
6275
es. Nous savions que les miracles ne trompent que
les
illettrés, mais qu’il convient de s’incliner devant les miracles de l
6276
lettrés, mais qu’il convient de s’incliner devant
les
miracles de la science appliquée. On nous faisait voir tout au long d
6277
’il convient de s’incliner devant les miracles de
la
science appliquée. On nous faisait voir tout au long de notre histoir
6278
nous faisait voir tout au long de notre histoire
le
Progrès constant de l’humanité vers les lumières, l’incrédulité et le
6279
au long de notre histoire le Progrès constant de
l’
humanité vers les lumières, l’incrédulité et le bien-être matériel. No
6280
e histoire le Progrès constant de l’humanité vers
les
lumières, l’incrédulité et le bien-être matériel. Nous savions qu’un
6281
Progrès constant de l’humanité vers les lumières,
l’
incrédulité et le bien-être matériel. Nous savions qu’un fils d’ouvrie
6282
de l’humanité vers les lumières, l’incrédulité et
le
bien-être matériel. Nous savions qu’un fils d’ouvrier est l’égal d’un
6283
e matériel. Nous savions qu’un fils d’ouvrier est
l’
égal d’un petit Dauphin — et même nous ne pouvions nous empêcher de cr
6284
même nous ne pouvions nous empêcher de croire que
le
petit ouvrier est bien plus malin. Nous savions un tas de choses doul
6285
e choses douloureusement ennuyeuses qui sont dans
les
livres — et nulle part ailleurs. Nous arrivions dans la vie avec des
6286
res — et nulle part ailleurs. Nous arrivions dans
la
vie avec des mentions honorables et une inconcevable gaucherie, c’est
6287
et une honte secrète qui exaspérait ce mépris et
le
rendait agressif. Mais moi, j’avais trop souffert de cette compressio
6288
riellement délivré, en supporter longtemps encore
l’
action. Je n’eus pas plus tôt découvert et nommé cet asservissement de
6289
plus tôt découvert et nommé cet asservissement de
l’
esprit et ces mythes stériles, que je les rendis responsables de ma pe
6290
sement de l’esprit et ces mythes stériles, que je
les
rendis responsables de ma perte de contact avec les réalités les plus
6291
s rendis responsables de ma perte de contact avec
les
réalités les plus élémentaires de la vie. 3. Dans le cas le plus
6292
onsables de ma perte de contact avec les réalités
les
plus élémentaires de la vie. 3. Dans le cas le plus favorable, c’
6293
ontact avec les réalités les plus élémentaires de
la
vie. 3. Dans le cas le plus favorable, c’est un silence, un vide.
6294
ités les plus élémentaires de la vie. 3. Dans
le
cas le plus favorable, c’est un silence, un vide. C’était en dehors d
6295
s plus élémentaires de la vie. 3. Dans le cas
le
plus favorable, c’est un silence, un vide. C’était en dehors de la vi
6296
, c’est un silence, un vide. C’était en dehors de
la
vie.
6297
2. Description du monstre
Le
service militaire me permit de retrouver quelques-unes de ces réalité
6298
Car ces différences sont les premières marques de
la
vie vécue et l’on aime à y découvrir la seule fraternité véritable. M
6299
ces sont les premières marques de la vie vécue et
l’
on aime à y découvrir la seule fraternité véritable. Mais c’est en cas
6300
arques de la vie vécue et l’on aime à y découvrir
la
seule fraternité véritable. Mais c’est en caserne aussi que je devais
6301
is c’est en caserne aussi que je devais retrouver
les
instituteurs. Ceux-là n’avaient pas bougé. Et pour cause : ils n’étai
6302
é. Et pour cause : ils n’étaient jamais sortis de
l’
école. Rien ne ressemble plus à un bon élève qu’un instituteur : de l’
6303
l’autre, il n’y a pas de solution de continuité,
la
différence n’était qu’une question d’âge, non d’expérience vécue. Ce
6304
dire est sans doute injuste et faux dans un très
grand
nombre de cas, mais pourquoi ai-je envie de le dire ? L’instituteur s
6305
grand nombre de cas, mais pourquoi ai-je envie de
le
dire ? L’instituteur sous l’uniforme peut être défini par son incompr
6306
re de cas, mais pourquoi ai-je envie de le dire ?
L’
instituteur sous l’uniforme peut être défini par son incompréhension m
6307
rquoi ai-je envie de le dire ? L’instituteur sous
l’
uniforme peut être défini par son incompréhension méthodique des homme
6308
éhension méthodique des hommes et son mépris pour
les
paysans. Qu’il soit officier ou troupier, on le reconnaît à une façon
6309
les paysans. Qu’il soit officier ou troupier, on
le
reconnaît à une façon pédante d’être consciencieux, à une façon bless
6310
être supérieur, à une façon livresque d’expliquer
les
choses, à une façon théorique de juger les êtres. Ces distributeurs a
6311
liquer les choses, à une façon théorique de juger
les
êtres. Ces distributeurs automatiques (brevetés par le gouvernement)
6312
res. Ces distributeurs automatiques (brevetés par
le
gouvernement) de la manne égalitaire — ne se prennent pas pour de la
6313
rs automatiques (brevetés par le gouvernement) de
la
manne égalitaire — ne se prennent pas pour de la petite bière. Ils on
6314
la manne égalitaire — ne se prennent pas pour de
la
petite bière. Ils ont conscience d’appartenir à une élite responsable
6315
ce ridicule n’échappe pas à ceux qu’ils méprisent
le
plus, et ils auraient souvent l’occasion de s’en douter s’ils étaient
6316
qu’ils méprisent le plus, et ils auraient souvent
l’
occasion de s’en douter s’ils étaient sensibles aux finesses de l’iron
6317
en douter s’ils étaient sensibles aux finesses de
l’
ironie paysanne. Mais je n’en dirai pas plus, de peur de m’échauffer i
6318
pas plus, de peur de m’échauffer inutilement. Si
l’
on me poussait un peu, je crois que je m’oublierais au point d’insinue
6319
crois que je m’oublierais au point d’insinuer que
les
instituteurs galonnés causent autant de tort à l’armée que les instit
6320
es instituteurs galonnés causent autant de tort à
l’
armée que les instituteurs antimilitaristes qui signent des manifestes
6321
urs galonnés causent autant de tort à l’armée que
les
instituteurs antimilitaristes qui signent des manifestes en mauvais f
6322
manifestes en mauvais français — et je ferais de
la
peine à d’excellents garçons. Revenons au civil. J’ai fait allusion a
6323
usion au lieutenant-instituteur qui veut faire de
la
pédagogie avec sa section. L’instituteur-lieutenant qui veut traiter
6324
r qui veut faire de la pédagogie avec sa section.
L’
instituteur-lieutenant qui veut traiter militairement ses élèves témoi
6325
veut traiter militairement ses élèves témoigne de
la
même maladresse professionnelle. J’en connais un qui avait coutume de
6326
de garçons de 10 à 11 ans : « J’ai bien su mater
les
quarante hommes de ma section, je saurai aussi vous mater. » On imagi
6327
aussi vous mater. » On imagine à quoi peut mener
l’
enseignement donné par des êtres qui brouillent à ce point les méthode
6328
ent donné par des êtres qui brouillent à ce point
les
méthodes. Simple remarque, pendant que nous en sommes aux instituteur
6329
en sommes aux instituteurs : ils sortent tous de
la
même classe sociale, de la petite bourgeoisie. Est-ce que l’esprit pe
6330
: ils sortent tous de la même classe sociale, de
la
petite bourgeoisie. Est-ce que l’esprit petit-bourgeois qui imprègne
6331
sse sociale, de la petite bourgeoisie. Est-ce que
l’
esprit petit-bourgeois qui imprègne l’enseignement primaire constitue
6332
Est-ce que l’esprit petit-bourgeois qui imprègne
l’
enseignement primaire constitue l’apport des instituteurs, ou bien pré
6333
is qui imprègne l’enseignement primaire constitue
l’
apport des instituteurs, ou bien préexiste-t-il dans les principes mêm
6334
ort des instituteurs, ou bien préexiste-t-il dans
les
principes mêmes de l’École, et attire-t-il les petits bourgeois comme
6335
u bien préexiste-t-il dans les principes mêmes de
l’
École, et attire-t-il les petits bourgeois comme le portrait de Numa D
6336
ns les principes mêmes de l’École, et attire-t-il
les
petits bourgeois comme le portrait de Numa Droz attirait les mouches
6337
’École, et attire-t-il les petits bourgeois comme
le
portrait de Numa Droz attirait les mouches ? (Le verre en était toujo
6338
bourgeois comme le portrait de Numa Droz attirait
les
mouches ? (Le verre en était toujours jaune.) Je n’ai ni le droit ni
6339
le portrait de Numa Droz attirait les mouches ? (
Le
verre en était toujours jaune.) Je n’ai ni le droit ni l’envie de dir
6340
? (Le verre en était toujours jaune.) Je n’ai ni
le
droit ni l’envie de dire du mal des petits-bourgeois. Ils sont au moi
6341
en était toujours jaune.) Je n’ai ni le droit ni
l’
envie de dire du mal des petits-bourgeois. Ils sont au moins aussi sym
6342
sympathiques que n’importe quelle autre classe de
la
société. Mais l’esprit petit-bourgeois pris abstraitement et tel qu’i
6343
n’importe quelle autre classe de la société. Mais
l’
esprit petit-bourgeois pris abstraitement et tel qu’il se manifeste da
6344
pris abstraitement et tel qu’il se manifeste dans
l’
école primaire est un véritable virus de mesquinerie, et devrait être
6345
les ». Je reviendrai peut-être sur ce point. Pour
l’
instant je ne veux que décrire l’école telle qu’on la voit. Après les
6346
r ce point. Pour l’instant je ne veux que décrire
l’
école telle qu’on la voit. Après les personnes, le décor. La laideur d
6347
nstant je ne veux que décrire l’école telle qu’on
la
voit. Après les personnes, le décor. La laideur des « collèges » n’es
6348
ux que décrire l’école telle qu’on la voit. Après
les
personnes, le décor. La laideur des « collèges » n’est pas accidentel
6349
l’école telle qu’on la voit. Après les personnes,
le
décor. La laideur des « collèges » n’est pas accidentelle. C’est cell
6350
lle qu’on la voit. Après les personnes, le décor.
La
laideur des « collèges » n’est pas accidentelle. C’est celle même du
6351
est pas accidentelle. C’est celle même du régime.
L’
architecture de nos « palais scolaires » symbolise d’une façon frappan
6352
e ce qu’il y a de schématique et de monotone dans
la
conception démocratique du monde. Entrons, c’est pire encore. Beaucou
6353
ants ont un frisson de dégoût au moment de passer
la
porte, au son de la cloche : l’odeur de goudron et d’urinoirs qui imp
6354
de dégoût au moment de passer la porte, au son de
la
cloche : l’odeur de goudron et d’urinoirs qui imprègne les corridors
6355
moment de passer la porte, au son de la cloche :
l’
odeur de goudron et d’urinoirs qui imprègne les corridors et les habit
6356
e : l’odeur de goudron et d’urinoirs qui imprègne
les
corridors et les habits des écoliers empeste encore mes souvenirs. Et
6357
udron et d’urinoirs qui imprègne les corridors et
les
habits des écoliers empeste encore mes souvenirs. Et la poussière dan
6358
its des écoliers empeste encore mes souvenirs. Et
la
poussière dans l’air, l’encre sur les tables — c’était pourtant un re
6359
mpeste encore mes souvenirs. Et la poussière dans
l’
air, l’encre sur les tables — c’était pourtant un refuge pour l’imagin
6360
encore mes souvenirs. Et la poussière dans l’air,
l’
encre sur les tables — c’était pourtant un refuge pour l’imagination q
6361
ouvenirs. Et la poussière dans l’air, l’encre sur
les
tables — c’était pourtant un refuge pour l’imagination que ces initia
6362
sur les tables — c’était pourtant un refuge pour
l’
imagination que ces initiales, ces signes, ces devises… —, les estampe
6363
on que ces initiales, ces signes, ces devises… —,
les
estampes piquées, Numa Droz et ses crottes de mouches… Dans ce décor
6364
votre vie, citoyens ! Et vous pensez que c’est un
grand
progrès sur la Nature. Quelle peut bien être la vertu éducatrice d’un
6365
s ! Et vous pensez que c’est un grand progrès sur
la
Nature. Quelle peut bien être la vertu éducatrice d’un tel milieu, mo
6366
rand progrès sur la Nature. Quelle peut bien être
la
vertu éducatrice d’un tel milieu, moral et matériel ? L’école publiqu
6367
u éducatrice d’un tel milieu, moral et matériel ?
L’
école publique, telle que nous la voyons est semblable à tous ces monu
6368
al et matériel ? L’école publique, telle que nous
la
voyons est semblable à tous ces monuments « de la mauvaise époque » q
6369
la voyons est semblable à tous ces monuments « de
la
mauvaise époque » qui sont dans nos villes l’apport du xixe siècle.
6370
de la mauvaise époque » qui sont dans nos villes
l’
apport du xixe siècle. Ils ne parviennent ni à la beauté ni à l’utili
6371
l’apport du xixe siècle. Ils ne parviennent ni à
la
beauté ni à l’utilité, et ils sont déjà démodés. On dit que le style
6372
e siècle. Ils ne parviennent ni à la beauté ni à
l’
utilité, et ils sont déjà démodés. On dit que le style 1880 n’en est p
6373
à l’utilité, et ils sont déjà démodés. On dit que
le
style 1880 n’en est pas un : mais l’absence de style est encore un st
6374
. On dit que le style 1880 n’en est pas un : mais
l’
absence de style est encore un style : c’est même le pire.
6375
absence de style est encore un style : c’est même
le
pire.