1 1961, Comme toi-même. Essais sur les mythes de l’amour. Note liminaire
1 de quelques autres où j’ai parlé de la passion d’ amour , des mythes de l’âme et du mystère de la personne1 ; il en prolonge l
2 ient. Car toute idée de l’homme est une idée de l’ amour . Cette succession pourra surprendre. Des transitions logiques ménagée
3 J’ai donc tenté de retrouver la dialectique de l’ amour et de la personne, qui sont les deux réalités que ces grands hommes a
4 lus d’une fois bien au-delà des conclusions de L’ Amour et l’Occident . Certains me feront peut-être un reproche d’inconstanc
5 chant, une fois mieux orientées dans une vue de l’ Amour que je ne crains pas qu’on dise moniste : le seul monisme non contrad
6 alité de la personne étant précisément celui de l’ Amour , parce qu’il se trouve que l’être même de l’Amour — son existence, sa
7 Amour, parce qu’il se trouve que l’être même de l’ Amour — son existence, sa puissance et son essence — recrée sans cesse la m
8 ée qu’en images et symboles. 1. Il s’agit de L’ Amour et l’Occident (1939 et 1956), de Doctrine fabuleuse (1947) et des
2 1961, Comme toi-même. Essais sur les mythes de l’amour. Introduction. L’érotisme et les mythes de l’âme — L’amour et la personne dans le monde christianisé
9 oman modernes, lesquels ne parlent guère que d’un amour « profane », sans plus savoir ni d’où il vient ni où il va2. L’intran
10 ouchées. I. Le christianisme est la religion de l’ Amour . — Religion d’un Dieu que l’Ancien Testament définissait comme l’Être
11 d’une manière radicalement nouvelle : « Dieu est Amour  », répète saint Jean. Religion créée par un acte de l’amour : « Dieu
12 épète saint Jean. Religion créée par un acte de l’ amour  : « Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique… » Religi
13 n qui met au premier rang de toutes les vertus, l’ Amour  : « Maintenant ces trois choses demeurent, la Foi, l’Espérance et l’A
14 trois choses demeurent, la Foi, l’Espérance et l’ Amour  ; mais la plus grande des trois, c’est l’Amour ». Et celui qui n’a pa
15 l’Amour ; mais la plus grande des trois, c’est l’ Amour  ». Et celui qui n’a pas l’Amour « n’est qu’une cymbale qui retentit »
16 es trois, c’est l’Amour ». Et celui qui n’a pas l’ Amour « n’est qu’une cymbale qui retentit », n’est rien, en vérité spiritue
17 ité spirituelle. 2. Parce qu’il est religion de l’ Amour , le christianisme implique et pose la réalité de la personne. — Les r
18 médiatement que tout homme converti, recréé par l’ Amour divin, va devenir, dans l’imitation de Jésus-Christ, vraie vocation e
19 aimer, il faut être distinct de l’objet même de l’ amour , auquel on voudrait être uni. Et pour que l’homme puisse aimer Dieu e
20 mme nouveau, recréé par l’appel qu’il reçoit de l’ Amour . Cet appel est sa vocation, la vie nouvelle de sa personne. Cette vie
21 u », mais elle se manifeste par des actes, dans l’ amour du prochain comme de soi-même. Ainsi l’amour distingue et relie à la
22 ns l’amour du prochain comme de soi-même. Ainsi l’ amour distingue et relie à la fois. Il relie au mystère divin, mais aussi a
23 personne reste invisible… 3. Cette religion de l’ Amour total (amour de Dieu, de Soi et du Prochain) n’a pas de livres sacrés
24 te invisible… 3. Cette religion de l’Amour total ( amour de Dieu, de Soi et du Prochain) n’a pas de livres sacrés sur l’Amour.
25 oi et du Prochain) n’a pas de livres sacrés sur l’ Amour . — Dans cet ensemble infiniment varié de phénomènes que l’Europe seul
26 nfrarouge du sexuel. Notre mystique, science de l’ amour divin, s’est développée très tardivement, dans des formes et selon de
27 tôt il pose une sorte d’analogie mystique entre l’ amour des sexes dans le mariage et l’amour de Jésus pour l’ensemble des âme
28 ique entre l’amour des sexes dans le mariage et l’ amour de Jésus pour l’ensemble des âmes croyantes : « Maris, aimez vos femm
29 Ainsi donc, exalté d’une part comme l’image de l’ amour divin, mais vilipendé d’autre part comme l’ennemi de la vie spirituel
30 pudicité ou de « prostitution spirituelle »8, — l’ amour humain devait fatalement devenir une source intarissable de problèmes
31 lié dès l’origine à la réalité de la personne, l’ amour sexuel, sentimental ou spirituel (amour des corps, des âmes ou des es
32 rsonne, l’amour sexuel, sentimental ou spirituel ( amour des corps, des âmes ou des esprits, selon la tripartition traditionne
33 ène que je nomme érotisme, englobant le mariage d’ amour , la passion mystique de Tristan et la licence impie de Don Juan (l’un
34 uses et de ses fins trans-naturelles. 2. Cf. L’ Amour et l’Occident, nouvelle version, Livre ii . 3. Voici les trois text
35 nt. Enfin, pour distinguer les diverses nuances d’ amour , les Grecs disposaient de nombreux mots, en dehors de philia et d’éro
36 désintéressée ; storgè, la tendresse ; pothos, l’ amour de désir ; charis, l’amour de reconnaissance et de complaisance ; man
37 tendresse ; pothos, l’amour de désir ; charis, l’ amour de reconnaissance et de complaisance ; mania, la passion déchaînée. C
38 s de langue grecque l’emploieront pour désigner l’ amour divin et l’amour fraternel qui régnait dans les « agapes ». Ils se mé
39 ue l’emploieront pour désigner l’amour divin et l’ amour fraternel qui régnait dans les « agapes ». Ils se méfiaient du mot Ér
40 mot Éros, et on les comprend. » (R. Flacelière, l’ Amour en Grèce, Paris, 1960). Empédocle désigne l’Amour par les mots de phi
41 Amour en Grèce, Paris, 1960). Empédocle désigne l’ Amour par les mots de philotès (analogue à philia) ou de harmonia. Socrate
42 écume, ou sperme du dieu mutilé), qui préside à l’ amour physique, et Éros, qui régit le sentiment amoureux. Dira-t-on que nos
43 . ? Sans doute, mais tout cela, elles l’appellent amour , quitte à varier les adjectifs. Et c’est précisément ce terme unique
44 s me reprochent de « confondre » dans ces pages l’ amour divin, la passion et le désir, l’Agapè, l’éros et l’aphros ; mais cet
3 1961, Comme toi-même. Essais sur les mythes de l’amour. Introduction. L’érotisme et les mythes de l’âme — Naissance de l’érotisme occidental
45 rès profondément renouvelée des relations entre l’ amour humain, la vie de l’âme et la recherche spirituelle. Pour les classiq
46 la recherche spirituelle. Pour les classiques, l’ amour ne pose guère de problèmes que s’il entre en conflit avec le devoir m
47 on orgueil (social), mais on ne peut pas mourir d’ amour (la métaphore elle-même est ridiculisée). La morale officielle, indis
48 e les classiques éliminaient : comment intégrer l’ amour humain dans une conception religieuse de l’existence ? Toute concepti
49 religieuse de l’existence ? Toute conception de l’ amour (sexuel ou passionnel, libertin ou matrimonial), toute attitude de l’
50 matrimonial), toute attitude de l’homme devant l’ amour , correspond, qu’on le sache ou non, à une attitude spirituelle, la tr
51 fins spirituelles de l’âme. Par l’expérience de l’ amour passionnel, l’Isolde de Wagner atteint la « joie suprême ». Par l’exp
52 tteint la « joie suprême ». Par l’expérience de l’ amour dit sexuel, « l’âme inassouvie » de Baudelaire conçoit « le goût de l
53 l’un des héros ironiques de Kierkegaard définit l’ amour comme le lieu où « la vie spirituelle la plus élevée s’exprime dans l
54 ofonds, anxieux ou tendres, moments de grâce de l’ amour humain et couleurs du langage mystique, procèdent de l’imagination. I
55 ’un euphémisme désignant les aspects sexuels de l’ amour dans le langage pudique et parfois si pédant du jeune disciple de Heg
4 1961, Comme toi-même. Essais sur les mythes de l’amour. Introduction. L’érotisme et les mythes de l’âme — Présence des mythes et leurs pouvoirs dans divers ordres
56 rticulière de l’empire exercé par les mythes de l’ amour peut nous y aider le mieux, et cela pour deux raisons faciles à disce
57 discerner. La première, c’est que les mythes de l’ amour sont liés à l’expérience individuelle la plus banale et la plus large
58 Tristan s’il se sent plus doué pour le malheur d’ amour , ou la fidélité. La seconde raison tient au fait que l’amour est lié
59 a fidélité. La seconde raison tient au fait que l’ amour est lié plus que toute autre conduite, impulsion, sentiment ou ambiti
60 lichés, de métaphores, et de symboles convenus. L’ amour est à la fois le meilleur conducteur et le meilleur excitant de l’exp
61 fixer son choix. Ainsi, l’action des mythes de l’ amour devient lisible, dans la mesure où elle correspond à l’action même du
62 s dans des domaines apparemment indépendants de l’ amour et du jeu des sexes, et qui vont de la pensée spéculative religieuse
5 1961, Comme toi-même. Essais sur les mythes de l’amour. Introduction. L’érotisme et les mythes de l’âme — Problèmes de la personne aux prises avec les mythes
63 aux prises avec les mythes Que les mythes de l’ amour déterminent largement nos conduites individuelles, les hasards appare
64 ers un moi-même sans précédent, seul capable d’un amour neuf. La personne trouve la preuve de sa vraie liberté dans ses décis
6 1961, Comme toi-même. Essais sur les mythes de l’amour. Introduction. L’érotisme et les mythes de l’âme — Invasion de l’érotisme au xxe siècle
65 ’expression, la manière de parler des choses de l’ amour , de spéculer à leur propos ou de les montrer sur l’écran. Ce n’est do
66 très rares révolutions et surtout les modes de l’ amour . Il est d’autant plus remarquable qu’à partir du milieu du xxe siècl
7 1961, Comme toi-même. Essais sur les mythes de l’amour. Introduction. L’érotisme et les mythes de l’âme — Soulèvement des puissances animiques
67 er l’inondation en irrigation vivifiante. C’est l’ amour qui est remis en question — tout l’amour : sexuel ou passionnel, norm
68 C’est l’amour qui est remis en question — tout l’ amour  : sexuel ou passionnel, normal ou aberrant, matrimonial ou spirituel.
69 normal ou aberrant, matrimonial ou spirituel. « L’ amour est à réinventer », disait Rimbaud. Cette espèce-là de révolution psy
70 ’Empire romain, on n’avait plus écrit de poèmes d’ amour ni de traités de mystique originaux. La vie sexuelle semblait réduite
71 limé, saint Bernard de Clairvaux et la mystique d’ amour , Héloïse et la passion vécue, Tristan et la passion rêvée, le culte d
72 naissant, le célibat des prêtres et les « Lois d’ Amour  », bref, le lyrisme, l’érotisme et la mystique déchaînés sur l’Europe
73 es peuples. Cette première grande révolution de l’ Amour , si soudaine dans son explosion, fut lente à propager ses effets boul
74 , la luxure dans Miller, ou le simple coït dans l’ amour  ? Il voit d’abord ce qui le choque, qui est aussi ce qui le tente. De
75 tir de là que j’essaie de réfléchir, d’élucider l’ amour tel qu’on l’écrit de mon temps.
8 1961, Comme toi-même. Essais sur les mythes de l’amour. Introduction. L’érotisme et les mythes de l’âme — Pour une mythanalyse de la culture
76 ociaux, éthiques et spirituels, qui constituent l’ amour , la littérature érotique réagit à des phénomènes qu’elle n’a pas prov
77 prônées par la littérature actuelle traitant de l’ amour  ; et voir comment ces attitudes s’ordonnent ou non à certaines concep
78 r leurs métaphysiques, et par leurs hérésies. L’ Amour et l’Occident illustrait cette approche, partant d’un raisonnement d
79 sublime de nos désirs, de nos passions, de notre amour . Quand nous ignorons leur nature, ils nous gouvernent sans pitié et n
80 de courir notre risque personnel, d’assumer notre amour et d’aller vers nous-mêmes. Peut-être serons-nous un peu plus libres.
9 1961, Comme toi-même. Essais sur les mythes de l’amour. Première partie — Nouvelles métamorphoses de Tristan
81 oses de Tristan La passion est cette forme de l’ amour qui refuse l’immédiat, fuit le prochain, veut la distance et l’invent
82 ntrevoyais, il y a vingt ans, quand j’écrivais L’ Amour et l’Occident , qu’une culture trop consciente de ses fins et moyens,
83 rop sociologique, ne laisserait plus de place à l’ amour passionné, tel qu’il fut inventé au xiie siècle par les troubadours
84 selon Camus, mais au contraire « un grand livre d’ amour  ». L’essai que Lionel Trilling consacre à Lolita de Vladimir Nabokov,
85 : « Nous aurons été les derniers romantiques de l’ amour … Au fond, c’est la dernière histoire d’amour possible… Sans doute ser
86 de l’amour… Au fond, c’est la dernière histoire d’ amour possible… Sans doute serons-nous une sorte de Derniers Mohicans de l’
87 e serons-nous une sorte de Derniers Mohicans de l’ amour . » Je ne fais pas ici de critique littéraire, n’ayant d’autre propos
88 a personne d’une bourgeoise accomplie, que pour l’ amour fou de sa fille. Mais cet amour est impossible, car Lolita n’a pas 13
89 mplie, que pour l’amour fou de sa fille. Mais cet amour est impossible, car Lolita n’a pas 13 ans. Cependant, mon héros l’enl
90 het, il commet un crime de dément et meurt ivre d’ amour , dans sa prison, après avoir écrit ce livre posthume. Robert Musil.
91 ai aimé mon Autriche « impériale et royale » d’un amour exigeant, lucide et ironique. Mais elle appartenait à un milieu socia
92 m’interdit de lui parler. Je lui dis pourtant mon amour sous le couvert d’un roman plein d’allusions et de symboles qu’elle c
93 oici que l’on fait un triomphe à ma déclaration d’ amour  ! Le Maître prétend aussitôt que j’ai insulté la Russie. C’est au nom
94 sse et qu’il menace de m’exiler. Mais tel est mon amour que je saurai mentir : je demanderai pardon au tyran, le suppliant de
95 romans de l’analyse mythologique proposée par L’ Amour et l’Occident . IILolita ou le scandale « Entre les limites d’â
96 re du style des mémoires de Humbert Humbert. Si l’ amour des nymphets n’était pas, de nos jours, l’un des derniers tabous sexu
97 e scandale évident, le caractère profanateur de l’ amour de H. H. pour Lolita, qui trahit la présence du Mythe. Négligeons po
98 e trop facilement pour la touchante histoire d’un amour presque chaste et conçu fortuitement hors du mariage, recelait à vrai
99 ères versions de Tristan glorifiaient une forme d’ amour non seulement opposée au mariage, mais ne pouvant exister que hors de
100 lui. Elles « justifiaient »18 au nom de ce nouvel Amour toute une série d’actions tenues pour crimes : astuce blasphématoire
101 vantage que la société n’en pâtit. En revanche, l’ amour passionné pour une fille encore impubère n’aurait guère pu surprendre
102 urprendre au Moyen Âge. On a coutume de vénérer l’ amour de Dante pour Béatrice âgée de 9 ans, la passion de Pétrarque pour La
103 nnage de Mignon, un Novalis dédiant son œuvre à l’ amour de Sophie von Kuhn, morte à 11 ans, un Edgar Poe qui épouse une fille
104 rroll : Alice au Pays des Merveilles est née de l’ amour des « nymphets », refoulé par la conscience pure du clergyman, mais a
105 Freud a nommé un jour l’élan mortel, secret de l’ amour tristanien. Et l’absence de sacré exténue les passions, que la consci
106 sacré primitif vers une hygiène scientifique : l’ amour des petites nymphes et l’inceste. Ces deux amours seraient-ils contra
107 ’amour des petites nymphes et l’inceste. Ces deux amours seraient-ils contraires à la nature ? On les voit largement pratiqués
108 s. » Humbert raconte, au début de ses mémoires, l’ amour qu’il conçut à 12 ans pour une petite fille de 9 ans qui s’appelait A
109 qu’à la mort des amants séparés, conséquence d’un amour interdit qui les exile de la communauté et les consume sans les unir
110 et Lolita n’ont jamais connu ce que j’appelle « l’ amour réciproque malheureux ». Lolita n’a jamais répondu à la passion tendr
111 s humaines, des rôles sociaux, des problèmes de l’ amour et des buts de la vie confèrent aux deux-mille pages de son dernier o
112 on seulement touche à deux reprises le thème de l’ amour passionné pour une enfant, mais surtout veut y voir une préfiguration
113 , mais surtout veut y voir une préfiguration de l’ amour interdit qui unira ses héros : Ulrich et Agathe, frère et sœur. Admir
114 accordes-tu cela, dit Agathe, avec le fait que l’ amour n’existe plus, que seules demeurent la sexualité et la camaraderie ?
115 fois, parlant encore avec sa sœur des formes de l’ amour « insaisissables » qui lui semblent d’ailleurs traduire « des relatio
116 sa route » : « Elle l’avait ravi comme un poème d’ amour écrit en secret, dont les allusions sont chargées d’un bonheur encore
117 cette histoire, c’est qu’elle est une préface à l’ amour fraternel ! » Je renonce à souligner les mots révélateurs dans le con
118 ogue qui mène au cœur du drame de la passion : L’ amour fraternel ? demanda Agathe, comme si elle entendait ce terme pour la
119 on, un désir démesuré et démesurément passionné d’ amour  ! L’expérience impossible dans laquelle s’engage Ulrich se présente
120 abord à sa méditation sous la forme d’un besoin d’ amour « délivré des contre-courants et des aversions sociales et sexuelles 
121 e la forme juvénile, insaisissable, d’un besoin d’ amour qui, plus tard, les rêves refroidis, se contentera d’un oiseau, d’un
122 sait assez la fortune littéraire de cette forme d’ amour interdit, dont il serait curieux de chercher pourquoi l’époque où se
123 e de la prise de conscience, puis du choix de cet amour , par deux êtres en tout point normaux, supérieurement intelligents, i
124 que la condition même de la « dernière histoire d’ amour possible », et d’une admirable analyse du spectre spirituel de l’Occi
125 s autres. Dieu et l’antisocial. Dès le début, son amour pour Ulrich a mobilisé son hostilité à l’égard du monde. Le moment n
126 e sexuelle, juge puéril de se préoccuper encore d’ amour , mais voue tous ses efforts au mariage, dont il analyse le processus
127 cher de nouveau. L’équivoque essentielle entre l’ amour projeté sur l’autre et le refus de la possession qui mettrait un term
128 recréant sans cesse la distance nécessaire à « l’ amour de loin » des troubadours. Mais quel est ce désir ? Est-il désir de l
129 bles confusions qui donnent au naïf commerce de l’ amour un caractère spectral si fascinant. C’est pourquoi les amants passio
130 sque dans les circonstances les plus banales de l’ amour  : dans l’attrait lié à tout changement, à tout travesti, comme dans l
131 mière version : le frère et la sœur cèdent à leur amour , réfugiés sans passeports dans une île de l’Adriatique. Notes de Musi
132 assion : Entre deux êtres isolés, il n’y a pas d’ amour possible » reconnaît Ulrich. « Un amour peut naître par défi, il ne p
133 y a pas d’amour possible » reconnaît Ulrich. « Un amour peut naître par défi, il ne peut être fait de défi. Il faut qu’il soi
134 Jour peut reprendre ses droits, l’expérience de l’ amour interdit échoue dans la réalité, et le Roman dans l’analyse psycholog
135 gager dans la voie difficile d’une recherche de l’ amour mystique : c’est ce qu’il nomme le règne millénaire ou l’accession à
136 aire ou l’accession à l’« autre vie », à l’état d’ amour pur, à l’extase d’un amour non plus égocentrique, mais bien allocentr
137 utre vie », à l’état d’amour pur, à l’extase d’un amour non plus égocentrique, mais bien allocentrique : « N’avoir plus de ce
138 ussi manifester la rédemption de la passion par l’ amour vrai, est décrite au somptueux chapitre intitulé Souffles d’un jour d
139 spirituelle. Mais cette présence heureuse dans l’ amour partagé n’évoque-t-elle pas aussi un mystère plus prochain, une autre
140 de l’éros par l’Agapè ? L’interdit fascinant de l’ amour sororal n’aurait-il pas été le travesti — tout à fait inconscient, j’
141 i — tout à fait inconscient, j’en suis sûr — d’un amour trop réel pour oser dire son nom dans un roman ? L’amour heureux n’a
142 rop réel pour oser dire son nom dans un roman ? L’ amour heureux n’a pas d’histoire, chacun sait cela depuis qu’on écrit des r
143 ent choqué de m’en voir parler comme d’un roman d’ amour . À vrai dire, ma thèse va plus loin : c’est « l’affaire Pasternak » d
144 le reniement, à se voir séparé de l’objet de son amour , dût-il vivre auprès de lui dans un silence humilié et sans espoir. M
145 raît. Jivago la retrouve beaucoup plus tard. Leur amour se déclare. Liaison clandestine. Ils sont de nouveau séparés par les
146 cou, où il vit misérable et caché. Il épouse sans amour une jeune fille qui s’occupait de son ménage, puis la quitte et meurt
147 s absolu : l’état de passion. J’ai montré dans L’ Amour et l’Occident comment cet état préexiste à tout objet déterminé, com
148 s excite à une loquacité intarissable — lettres d’ amour , traités mystiques — et procédant généralement par antithèses et para
149 e prête le mieux au récit. La sexualité pure et l’ amour du prochain ne sont vrais qu’en acte, et leur description ennuie vite
150 i que l’Autre en tant que tel reste aux yeux d’un amour exigeant le mystère le mieux défendu, — Éros et Agapè ne pourraient-i
151 « Un partenaire de valeur inégale déséquilibre l’ amour  ; seulement, il faudrait ajouter que, bien souvent, c’est un déséquil
10 1961, Comme toi-même. Essais sur les mythes de l’amour. Première partie — Deux princes danois. Kierkegaard et Hamlet
152 condition humaine, c’est à leurs yeux la femme, l’ amour et le mariage. Or tous les deux se voient contraints d’y renoncer, à
153 a douleur : ne point se révéler et faire mourir l’ amour  ; se révéler et faire mourir l’aimée ? » S’il choisit d’être la victi
154 qu’est Ophélia. Hamlet a compris lui aussi que l’ amour spontané et naïf d’Ophélia ferait obstacle à ses desseins secrets. C’
11 1961, Comme toi-même. Essais sur les mythes de l’amour. Première partie — Don Juan
155 fasciné pour la première fois par la révélation d’ amour , se muer en l’image de Tristan. Mais il ne trouvera pas. Il est Don J
156 ce Dieu est mort, à tout jamais, il n’y a plus d’ amour possible. Il faut inventer un amour qui permette au moins de haïr tou
157 n’y a plus d’amour possible. Il faut inventer un amour qui permette au moins de haïr tout ce qui passe, tout ce qui cède, to
158 stan d’un Destin qu’il ne peut posséder que par l’ amour éternellement lointain. Don Juan tricheur, aime sans amour. S’il gagn
159 rnellement lointain. Don Juan tricheur, aime sans amour . S’il gagne, c’est en violant la vérité des êtres. Nietzsche pose des
12 1961, Comme toi-même. Essais sur les mythes de l’amour. Première partie — Dialectique des mythes I. Méditation au carrefour fabuleux
160 où il va. (In Vino Veritas) Kierkegaard a vécu l’ amour unique, la passion malheureuse de Tristan, mais ses premiers grands l
161 chesse inépuisable ; ces deux mythes majeurs de l’ amour et leurs épiphanies les plus parfaites dans le lyrisme occidental. À
162 asme. Cette page introduisant les discours sur l’ amour qui composent In Vino Veritas, donne le ton de la passion de Kierkega
163 dû de n’avoir pas vécu sans aimer, « quoique d’un amour malheureux ». Reliée par ces derniers mots à la vie trop réelle du So
164 ce qui inspire cette pudeur qui caractérise tout amour grec »27. Il s’oppose plus encore à l’amour courtois, essentiellement
165 tout amour grec »27. Il s’oppose plus encore à l’ amour courtois, essentiellement fidèle. « L’amour psychique est existence d
166 e à l’amour courtois, essentiellement fidèle. « L’ amour psychique est existence dans le temps, l’amour sensuel disparition da
167  L’amour psychique est existence dans le temps, l’ amour sensuel disparition dans le temps », d’où vient que la musique est so
168 t Hamlet. Mais dans sa vie individuelle, dans son amour unique et longuement malheureux pour Régine, il fut Tristan. Cependan
169 re excluent le mariage, « suprême expression de l’ amour  », à laquelle il a dû renoncer pour une raison qui reste son secret d
170 heureuse ; et par ce malheur même, salvatrice. L’ amour humain repose sur un instinct qui, élevé au rang d’inclination, trouv
171 être bien-aimé, et que cette « seule fois » de l’ amour est l’amour, et que la « seconde fois » n’est rien… Une fois est le t
172 imé, et que cette « seule fois » de l’amour est l’ amour , et que la « seconde fois » n’est rien… Une fois est le tout absolu,
173 iage, et même il la formule d’entrée de jeu : « L’ amour et l’inclination amoureuse sont tout à fait spontanés, le mariage est
174 dans tout le reste de son œuvre. Admettons que l’ amour vrai soit la passion unique et partagée. Pour être heureux, dans un m
175 ur être heureux, dans un mariage par exemple, cet amour devrait opérer le miracle de « faire du différent l’égal », créant ai
176 , qui fait des relations entre l’homme et Dieu un amour essentiellement malheureux. Cet amour serait même impossible hors du
177 et Dieu un amour essentiellement malheureux. Cet amour serait même impossible hors du paradoxe de la foi, laquelle est un mo
178 on subjective et libre de la vérité. C’est donc l’ amour divin lui-même qui exige la communication indirecte, voilée, rejoigna
179 ante, en quoi consiste à ses yeux le mariage. Par amour pour Régine, il doit donc s’éloigner, bien qu’il ne cesse de s’adress
180 douleur : ne point se révéler, et faire mourir l’ amour  ; se révéler et faire mourir l’aimée ?31 » Tenter d’établir, en ce po
181 en l’altérité totale de Dieu et en l’unicité de l’ amour humain ; — la « mélancolie » qui l’accable et lui rend ce mariage imp
182 hordes de brigands d’une mélancolie innée ?33 L’ amour n’en est pas moins l’agent privilégié du progrès spirituel de « l’hom
183 comprise, la femme entraîne vers la hauteur. Cet amour qui « entraîne » et transfigure dans la mesure où il est par essence
184 Et plus loin : Regardons ce qui se passe dans l’ amour , quoiqu’il ne rende qu’imparfaitement la situation. L’égoïsme est à l
185 sément sa propre perte. C’est ce que veut aussi l’ amour , ainsi ces deux puissances s’entendent dans la passion de l’instant,
186 de l’instant, et cette puissance est justement l’ amour . Cette forme de pensée est tristanienne. Elle est d’abord une forme
187 à des mers, dans une autre île. Que cette forme d’ amour nostalgique et de possession par la perte transparaisse également dan
188 touche au cœur de mon sujet. Dans ses Œuvres de l’ amour , Kierkegaard marque le contraste, apparemment insurmontable, entre l’
189 aremment insurmontable, entre l’amour-passion (ou amour poétique), qui élit un seul être bien-aimé, et l’amour du prochain (a
190 poétique), qui élit un seul être bien-aimé, et l’ amour du prochain (amour chrétien), dont le commandement est d’aimer tous l
191 t un seul être bien-aimé, et l’amour du prochain ( amour chrétien), dont le commandement est d’aimer tous les hommes, sans dis
192 l’égalité de tous devant Dieu. On s’étonne : cet amour général, impersonnel, et qu’on pourrait confondre avec un sens social
193 Tel est le paradoxe proprement kierkegaardien. L’ amour ne va pas de n’importe qui à tout le monde, mais d’un seul, distingué
194 rnées. Ces deux chastes ont beaucoup médité sur l’ amour , sur la femme et sur le mariage. Nietzsche en a, certes, moins longue
195 mariage maintient opiniâtrement la croyance que l’ amour , bien qu’il soit une passion, est cependant susceptible de durer en t
196 susceptible de durer en tant que passion et que l’ amour à vie peut être considéré comme la règle. Par cette ténacité d’une no
197 équent une pia fraus, l’institution a conféré à l’ amour une noblesse supérieure. Toutes les institutions qui ont concédé à un
198 er la prétention d’être pour l’homme l’objet de l’ amour le plus proche et le plus haut, ou même l’objet unique — comme l’ense
199 st ici question n’est encore pour les Grecs que l’ amour désintéressé ; mais dans l’esprit de Nietzsche, elle désigne déjà cet
200 on comprendra sans plus d’explications pourquoi l’ amour en tant que passion — notre spécialité européenne — doit être nécessa
201 nte et d’autres suites néfastes, ou bien encore l’ amour . Donc, tandis que nous croyons nous plaindre de la violence d’un inst
202 ances rivales en l’homme : l’érotisme sexuel et l’ amour . Or, ni la passion érotique d’un Byron ou d’un Napoléon — cités peu a
203 n Byron ou d’un Napoléon — cités peu avant — ni l’ amour qu’on invoque ici, ne sont, à parler proprement, des instincts. L’éro
204 ends l’usage non nécessaire biologiquement). Et l’ amour , que Nietzsche suggère comme un possible instinct rival, est la passi
205 it Aurore ? « Il n’y a encore d’efficace contre l’ amour que ce vieux remède radical : l’amour en retour ! » Et que peut ensei
206 ce contre l’amour que ce vieux remède radical : l’ amour en retour ! » Et que peut enseigner cette Carmen de Bizet, que Nietzs
207  Sursum ! Bouboum ! » de Wagner ? Elle enseigne l’ amour « remis à sa place dans la nature ! Non pas l’amour d’une femme « idé
208 our « remis à sa place dans la nature ! Non pas l’ amour d’une femme « idéale » !… Au contraire, l’amour dans ce qu’il a de fa
209 l’amour d’une femme « idéale » !… Au contraire, l’ amour dans ce qu’il a de fatal, de cynique, de candide, de cruel… L’amour d
210 l a de fatal, de cynique, de candide, de cruel… L’ amour dont la guerre est le moyen, dont la haine mortelle des sexes est la
211 la haine mortelle des sexes est la base.45 » Cet amour dont Benjamin Constant a bien dit qu’il est de tous les sentiments le
212 l est de tous les sentiments le plus égoïste, — l’ amour « naturel » à la Don Juan. Il y a plus. Le don-juanisme érotique n’es
213 un poète ne l’a encore découvert. Il lui manque l’ amour des choses qu’il découvre, mais il a de l’esprit et de la volupté et
214 si indispensable que ne l’est, pour l’amoureux, l’ amour malheureux : à aucun prix il n’aimerait l’abandonner pour l’état d’in
215 t d’Aurore : c’est le retour du mythe mortel de l’ Amour qui transfixe et transfigure. C’est le Chant de Minuit saluant l’Éter
216 t sa course éperdue. L’un recherche dans l’acte d’ amour la volupté d’une profanation, l’autre accomplit en restant chaste la
217 bandonne le terrain et s’enfuit. Or la règle de l’ amour courtois faisait du viol précisément le crime des crimes, la félonie
218 Antithèse vraiment parfaite des deux vertus de l’ amour chevaleresque : la candeur et la courtoisie.50. » Observons aussi que
219 e que voici : la durée, le bonheur, la liberté, l’ amour . La durée. — Tout homme qui obtient ce qu’il désire, ou qui va l’obt
220 it par dépit devant leur impuissance à intégrer l’ amour dans l’existence normale, ou par goût de l’excès en soi, l’un prétend
221 lendemain, couples heureux dans la durée de leur amour , tourments bienheureux de la passion : l’argument du bonheur sert à t
222 dent en un seul être, dans le règne sans fin de l’ Amour sans réveil. Là, rien n’est plus ni vrai ni faux, ni tien ni mien, ni
223 ous laissent les dernières mesures de Tristan. L’ amour . — Ici la dialectique des deux mythes se resserre. Elle atteint sa fo
224 son origine concrète, et qui lui échappe. Point d’ amour pour Don Juan, le désir seul ; ni de prochain, mais seulement des obj
225 plus d’objet, ni de prochain. Il n’y a plus que l’ amour de l’amour dans un sujet qui, lui aussi, doit s’évanouir. Que reste-t
226 t, ni de prochain. Il n’y a plus que l’amour de l’ amour dans un sujet qui, lui aussi, doit s’évanouir. Que reste-t-il ? Comme
227 les raisons de vivre, Tristan perd, à cause de l’ amour les raisons humaines d’aimer. Dans la pureté de leur expression myth
228 t s’aimer eux-mêmes, ce qui est la condition de l’ amour d’un autre, et donc de tout amour réel : car sans prochain, l’amour n
229 condition de l’amour d’un autre, et donc de tout amour réel : car sans prochain, l’amour ne sait plus où se prendre. Tout am
230 et donc de tout amour réel : car sans prochain, l’ amour ne sait plus où se prendre. Tout amour véritable est relation récipro
231 rochain, l’amour ne sait plus où se prendre. Tout amour véritable est relation réciproque. Cette relation s’établit tout d’ab
232 ation qu’il reçoit, sujet nouveau, — et tel est l’ amour de soi-même. Elle s’établit ensuite à l’intérieur du couple, entre le
233 a communauté humaine. Telle est la plénitude de l’ amour — et sa rareté merveilleuse ! Mais nos arts devant elle ont toujours
234 ambigu. Les deux mythes les plus prestigieux de l’ amour que l’on rêve en Occident sont en réalité deux négations de l’amour v
235 e en Occident sont en réalité deux négations de l’ amour vrai dans le mariage, bien qu’ils en soient inséparables : ils sont n
236 e ses tensions. Tous les deux ont raison contre l’ amour , sitôt qu’il se ramène en soi, cessant d’être un échange vivant. Enfi
237 , et la vie même. Mais sans eux, que seraient nos amours  ? 23. Nietzsche, Par-delà le bien et le mal, n° 106. 24. Kierkeg
238 ue que j’aie jamais entendu : — Dans le véritable amour , c’est l’âme qui enveloppe le corps. » (Par-delà le bien et le mal, 1
239 tête faustienne, Faust est voluptueux, désireux d’ amour , il a des sens et un cœur donjuanesques… Faust est l’intelligence de
240 « Propos sur le mariage ». 30. Les Œuvres de l’ amour , 1847. 31. Riens philosophiques, « Le Dieu comme maître et sauveur 
241 . Aurore, n° 327. 48. Aurore, n° 429. 49. L’ Amour et l’Occident . 50. L’Amour et l’Occident 51. L’homme politique
242 , n° 429. 49. L’Amour et l’Occident . 50. L’ Amour et l’Occident 51. L’homme politique opportuniste et joueur relève
13 1961, Comme toi-même. Essais sur les mythes de l’amour. Première partie — Dialectique des mythes II. Les deux âmes d’André Gide
243 re jamais répété. La conversation s’engage sur L’ Amour et l’Occident , qu’il est en train de lire59, et dont il me déclare,
244 homme, épris et puritain, il a voulu disjoindre l’ amour et le plaisir. Il croyait que « l’amour hétérosexuel » était d’autant
245 joindre l’amour et le plaisir. Il croyait que « l’ amour hétérosexuel » était d’autant plus pur que rien de charnel ne s’y mêl
246 ées et sans cesse renouvelées de l’Écriture ; son amour pour le style biblique ; la confusion courante — non seulement purita
247 écrivains, même chrétiens, nous ont montré pareil amour pour l’Évangile, et cela jusque dans les années où il doutait de l’ex
248 t de l’esprit de parti, qui est le contraire de l’ amour du prochain. Elles ne sont ni chrétiennes ni simplement honnêtes. « L
249 t j’ai donné la relation fidèle, la lecture de L’ Amour et l’Occident n’avait-elle été que le prétexte — ou la motivation ré
250 attacher une importance toute particulière » à L’ Amour et l’Occident et à ses analyses du mythe de Tristan. « C’est là, ajo
251 outes les « notes » de Tristan sont manifestes. L’ amour est lié à la séparation des deux amants : la mère d’André Walter s’es
252 ants : la mère d’André Walter s’est opposée à son amour pour Emmanuèle ; celle-ci épouse un certain T., dont on ne sait rien,
253 t, donc il la possède… Tant que le corps vivra, l’ amour sera contraint, mais aussitôt la mort venue, l’amour triomphera de to
254 ur sera contraint, mais aussitôt la mort venue, l’ amour triomphera de toutes les entraves. » Cet amour doit s’élever à une ex
255 l’amour triomphera de toutes les entraves. » Cet amour doit s’élever à une extase libératrice : « un nirvana prodigieux, où
256 ; et faute d’obstacles extérieurs empêchant que l’ amour « tourne à réalité » (comme s’exprimaient les troubadours) il saura b
257 sera qu’apparence. La vérité particulière de leur amour interdit cette réalité. Ils mourront donc comme ils auront vécu : sép
258 charité générale, d’ouverture généreuse, voire d’ amour du prochain. En fait, il s’agit bien du refus de la durée et du refus
259 rait final, décisif : le désir pur doit être sans amour . (Donc l’amour pur doit être sans désir). Dans Si le grain ne meurt,
260 isif : le désir pur doit être sans amour. (Donc l’ amour pur doit être sans désir). Dans Si le grain ne meurt, à la page où il
261 e que je ne la pusse imaginer plus pleine si de l’ amour s’y fût mêlé. Comment eût-il été question d’amour ? Comment eussè-je
262 amour s’y fût mêlé. Comment eût-il été question d’ amour  ? Comment eussè-je laissé le désir disposer de mon cœur ? Mon plaisir
263 terrible erreur d’aiguillage. » Le désir et l’ amour dissociés Désirer ceux que l’on n’aime pas, aimer celle qu’on ne d
264 me par un Tiers, oui : dans ce Tiers exclu de ses amours réside sans doute la vraie personne d’André Gide71. Dès les Cahiers d
265 de « prend son parti de dissocier le plaisir de l’ amour  ». Et même il fait de cette nécessité vertu : « Il me paraissait que
266 uhaitable, que le plaisir était ainsi plus pur, l’ amour plus parfait, si le cœur et la chair ne s’entr’engageaient point75. »
267 st le moyen qu’il a trouvé de ménager à la fois l’ amour et le plaisir sans violer le tabou de l’inceste et en s’accommodant,
268 « et je me sentis soudain tout enveloppé par cet amour , qui désormais se refermait sur moi.76 » Les derniers mots ne sont pa
269 eut-être que physiologique ». C’est le siège de l’ amour sous ses formes diverses : amour de désir ou de don (« Le glissement
270 st le siège de l’amour sous ses formes diverses : amour de désir ou de don (« Le glissement de l’un à l’autre reste toujours
14 1961, Comme toi-même. Essais sur les mythes de l’amour. Deuxième partie — Rudolf Kassner et la grandeur humaine
271 es : « Surtout, dit-il, pas de cérémonies. Pour l’ amour du ciel, pas de cérémonies ! » Il aime qu’on arrive et s’en aille à l
15 1961, Comme toi-même. Essais sur les mythes de l’amour. Deuxième partie — La personne, l’ange et l’absolu ou Le dialogue Occident-Orient
272 de et hors du monde, à la fois manifestée par son amour (Agapè) et « cachée avec le Christ en Dieu ». (Colossiens, III, 3.) D
273 ation. Et comme l’atteste enfin notre notion de l’ amour , — à quoi j’entends venir plus loin. L’ange Quelle est cette pa
274 avec le Christ en Dieu » jusqu’à l’avènement de l’ Amour  ? C’est l’Ange, répond l’Iran des spirituels, l’Iran du mazdéisme et
275 préciser leur nature, c’est dans les notions de l’ amour traduisant ces trois conceptions que nous avons les plus grandes chan
276 us laisse « nos » problèmes. Trois écoles de l’ amour Si l’amour est le premier moteur non seulement de l’homme mais du
277 s » problèmes. Trois écoles de l’amour Si l’ amour est le premier moteur non seulement de l’homme mais du monde, c’est s
278 nous nous faisons, et cette idée du moi révèle l’ amour , comme la structure de l’atome traduit certaines propriétés de l’éner
279 duit certaines propriétés de l’énergie. « C’est l’ amour dominant qui fait l’homme… L’homme est absolument tel qu’est l’amour
280 fait l’homme… L’homme est absolument tel qu’est l’ amour dominant de sa vie : selon (cet amour) se fait son ciel, s’il est bon
281 el qu’est l’amour dominant de sa vie : selon (cet amour ) se fait son ciel, s’il est bon, ou son enfer, s’il est mauvais », di
282 aque esprit et de chaque ange est la forme de son amour .107 » Les trois notions de l’homme que l’on vient d’évoquer nous appa
283 rs comme autant de modèles d’une énergétique de l’ amour , ou comme autant d’effets de son action configurante et composante. E
284 rtent d’une dualité sans laquelle ni l’homme ni l’ amour ne seraient même concevables. Il ne s’agit ici ni du dualisme trop fa
285 il se referme sur soi, c’est-à-dire se refuse à l’ amour . Et de même le « vrai moi » n’est pas le bien en soi, car il peut dev
286 sagesse des nations. Et cela vaut d’abord pour l’ amour de soi-même, sans lequel point d’amour du prochain. Tous les moralist
287 ord pour l’amour de soi-même, sans lequel point d’ amour du prochain. Tous les moralistes du monde s’accordent avec les spirit
288 au nom de la société, les spirituels au nom de l’ amour . Nous n’invoquerons ici que les seconds. L’école chrétienne Dan
289 rétienne Dans une vue chrétienne de l’homme, l’ amour de soi est le rapport positif entre l’individu et le vrai moi. Le sec
290 suppose évidemment un moi duel, au sein duquel l’ amour s’instaure d’une manière telle que s’aimer et aimer le prochain soit
291 inon le comme n’aurait pas son plein sens. Dans l’ amour de soi-même, l’homme naturel s’ouvre à l’action du vrai moi spirituel
292 C’est le vrai moi qui aime, qui est l’agent de l’ amour . Ce vrai moi seul peut aimer le prochain, parce que seul il discerne
293 in, parce que seul il discerne en l’autre le même amour . « Aimer, c’est soutenir, deviner, porter le meilleur de ce qu’on aim
294 rtuelle, la soutenir et l’aider à naître. Ainsi l’ amour dans sa réalité totale, intégrant l’animique au spirituel, va toujour
295 ahamiques, le vrai moi est toujours suscité par l’ amour même : « Dieu nous a aimés le premier ». Pour le chrétien, c’est parc
296 . Pour le chrétien, c’est parce que Dieu, qui est Amour , est un Dieu personnel dans sa tri-unité, que l’amour spirituel crée
297 r, est un Dieu personnel dans sa tri-unité, que l’ amour spirituel crée dans l’homme la personne. Si la plus haute valeur de l
298 le sacrifice diffère du suicide — la nature de l’ amour véritable l’explique seule. « Personne n’a un plus grand amour que de
299 le l’explique seule. « Personne n’a un plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’il aime. » Se sacrifier pour l’autr
300  mort à soi-même » transfigurante. Ce modèle de l’ amour et du vrai moi instaure le normal, le sublime, et la problématique de
301 hrétien. Il conditionne aussi les déviations de l’ amour et les formes particulières que prennent en Occident certaines tendan
302 ante. Je sais bien que la haine est l’envers de l’ amour , mais comment l’amour fasciné par le désir de ce qu’il aime peut-il h
303 la haine est l’envers de l’amour, mais comment l’ amour fasciné par le désir de ce qu’il aime peut-il haïr vraiment ce qu’il
304 raîner avec elle vers son bien et l’animer de son amour , l’âme l’accuse de volonté mauvaise. Mais elle sait bien qu’ils ont p
305 t le moi terrestre et temporel à la vocation de l’ amour . Mais celui qui se hait de cette manière ne peut pas aimer le prochai
306 mouvement, né de l’instinct, à la révélation d’un amour angélique. La passion romantique trouve ici sa genèse. Exaltée jusqu’
307 de sa vengeance. Ayons donc soin de l’induire à l’ amour de lui-même108 ». L’érotisme sensuel est l’autre extrême où se porte
308 l’esprit — comme l’a si bien vu Kierkegaard. Tout amour véritable procède du vrai moi et se dirige vers le vrai moi de l’autr
309 soufis ont proposé des notions de l’homme et de l’ amour homologues aux notions chrétiennes, mais comme transposées terme à te
310 propre connaissance. C’est donc en Dieu que tout amour peut reconnaître la personne de l’autre et l’aimer « comme soi-même »
311 mer « comme soi-même », — comme étant née du même amour qui m’a créé. « (Dieu) est celui qui dans chaque être aimé se manifes
312 que son créateur ?110 » Ibn Arabi distingue trois amours  : l’amour divin du Créateur pour sa créature, et d’elle pour Lui ; l’
313 ateur ?110 » Ibn Arabi distingue trois amours : l’ amour divin du Créateur pour sa créature, et d’elle pour Lui ; l’amour spir
314 Créateur pour sa créature, et d’elle pour Lui ; l’ amour spirituel « dont le siège est en la créature toujours à la quête de l
315 elle se découvre comme étant l’Image » ; enfin l’ amour naturel, qui recherche la satisfaction de ses désirs sans souci de l’
316 t la plupart des gens d’aujourd’hui comprennent l’ amour . » Comment réconcilier l’amour naturel (ou physique, comme on le dit
317 ’hui comprennent l’amour. » Comment réconcilier l’ amour naturel (ou physique, comme on le dit improprement) avec l’amour spir
318 ou physique, comme on le dit improprement) avec l’ amour spirituel ? Qui aime en nous, et pour qui ? « Ibn Arabi observe que l
319 Telle est donc la personne unifiée et tel est son amour de soi-même. Quant à l’amour-passion (ici, non romantique !) il se si
320 l’âme peut aimer dans toutes les dimensions de l’ amour unifié. L’Aimé n’est plus alors un simple objet — comme il est pour l
321 plus alors un simple objet — comme il est pour l’ amour naturel, possessif — mais une virtualité divine que l’amant « imagine
322 e exister dans l’être aimé, par l’efficace de son amour pré-figurant. C’est précisément là que s’origine la plus haute fonc
323 ment là que s’origine la plus haute fonction de l’ amour humain, celle-là même qui assure la coalescence de ce que l’on a dési
324 nce de ce que l’on a désigné historiquement comme amour courtois et amour mystique. Car l’amour tend à la transfiguration de
325 a désigné historiquement comme amour courtois et amour mystique. Car l’amour tend à la transfiguration de la figure aimée te
326 ent comme amour courtois et amour mystique. Car l’ amour tend à la transfiguration de la figure aimée terrestre, en l’adossant
327 à s’unir en lui, à en perpétuer la présence, son amour tend toujours à faire exister quelque chose qui n’est pas encore exis
328 l’Aimé.111 On reconnaît ici les « notes » de l’ amour du prochain selon Kierkegaard112, mais aussi selon Swedenborg : Comm
329 x personnes un bien absolument identique… C’est l’ amour qui fait le prochain, et chacun est le prochain selon la qualité de s
330 et chacun est le prochain selon la qualité de son amour .113 En dépit de tout ce qui distingue la transparence (parfois tro
331 t comparable, comme le sont les trois formes de l’ amour que manifeste cette structure. Mais « l’Imagination créatrice » des s
332 plus vivement l’unité première et finale de tout amour  ! Peut-être aussi nous fera-telle entrevoir comment le mythe de Trist
333 r (dans la légende primitive et l’opéra) comme un amour dédié à sa propre âme114, dont Iseut ne serait que l’image sensible,
334 ont Chinvat ? Et n’est-ce pas pour avoir désiré l’ amour de l’Ange que les amants de la forêt du Morois en viennent à découvri
335 même coup se trouvent évacués les problèmes de l’ amour de soi-même et de l’amour de Dieu et du prochain : faute de protagoni
336 cués les problèmes de l’amour de soi-même et de l’ amour de Dieu et du prochain : faute de protagonistes bien réels, ces probl
337 avoir lieu (ou du moins être pris au sérieux). L’ amour même est évacué. Il n’est plus que l’attrait des sexes agissant fatal
338 e la femme mariée ; mais ce n’est pas au nom de l’ amour , on le pense bien). « Écarte les choses, ô amant, ta voie est fuite !
339  » Et le Bouddha lui-même : « Qui a cent sortes d’ amours a cent sortes de douleurs ; qui a un amour a une douleur ; qui n’a pa
340 tes d’amours a cent sortes de douleurs ; qui a un amour a une douleur ; qui n’a pas d’amour n’a pas de douleur. » Si l’on s’e
341 rs ; qui a un amour a une douleur ; qui n’a pas d’ amour n’a pas de douleur. » Si l’on s’en tient aux textes, la cause est ent
342 t entendue : l’Asie métaphysique ne connaît pas l’ amour , — j’entends l’amour de Dieu, de soi et du prochain, l’amour-passion,
343 étaphysique ne connaît pas l’amour, — j’entends l’ amour de Dieu, de soi et du prochain, l’amour-passion, et même l’amour matr
344 de soi et du prochain, l’amour-passion, et même l’ amour matrimonial. Mais on me dira que l’Asie n’est pas toute spirituelle,
345 rent une jouissance. La divinité n’est un objet d’ amour que parce qu’elle représente une volupté sans mélange… Le désir du lu
346 tout plaisir est une expérience du divin… Mais l’ amour parfait est celui dont l’objet n’est pas limité. C’est cet amour qui
347 st celui dont l’objet n’est pas limité. C’est cet amour qui est l’amour pur, l’amour de l’amour même, l’amour de l’Être-de-vo
348 objet n’est pas limité. C’est cet amour qui est l’ amour pur, l’amour de l’amour même, l’amour de l’Être-de-volupté transcenda
349 as limité. C’est cet amour qui est l’amour pur, l’ amour de l’amour même, l’amour de l’Être-de-volupté transcendant »119. Kâma
350 C’est cet amour qui est l’amour pur, l’amour de l’ amour même, l’amour de l’Être-de-volupté transcendant »119. Kâma, le dieu d
351 r qui est l’amour pur, l’amour de l’amour même, l’ amour de l’Être-de-volupté transcendant »119. Kâma, le dieu du plaisir érot
352 spirituel.120 » Et encore : « Celui qui cherche l’ amour dans l’espoir d’une jouissance est la victime du désir. Le sage accep
353 ssion, et l’on sait à quel point cette forme de l’ amour est liée à ses expressions. La passion et l’amour mystique, l’érotism
354 amour est liée à ses expressions. La passion et l’ amour mystique, l’érotisme et l’amour du prochain, sont des problèmes occid
355 . La passion et l’amour mystique, l’érotisme et l’ amour du prochain, sont des problèmes occidentaux, posés à tous par les rig
356 semblable privilège de comprendre les choses de l’ amour .122 » Ceci encore : le cliché Orient — Occident = non-moi — personne
357 accomplie. (Brihad-âranyaka Up.) La notion de l’ amour du prochain, et l’injonction évangélique d’aimer aussi son ennemi ne
358 ieurs reprises : En vérité, à quoi se rapporte l’ amour d’un mari pour sa femme ? Non point à la femme, mais en vérité au Soi
359 te et vive reconnaissance. Car toute vérité sur l’ amour est immédiatement reconnue par celui qui s’est mis en quête d’un savo
360 par celui qui s’est mis en quête d’un savoir de l’ amour qu’il vit. N’importe qui m’avertira que le Soi de l’Inde n’est pas le
361 cisément, ici, touche à sa fin ?) Je disais que l’ amour vrai, c’est discerner dans l’autre — pour l’avoir reconnu tout d’abor
362 out d’abord en soi-même — le vrai moi, sujet de l’ amour , et l’aider à prendre conscience de ce qu’il est ou peut devenir. N’e
363 N’est-ce pas l’aider à réfléchir la lumière de l’ amour créateur ? Non, ce serait-là trop dire, et pas assez. Aimer, c’est ai
364 btilement changé, un peu plus lui-même qu’avant : amour mutuel. L’expérience est la même, ou du moins je la sens telle. Mais
365 rame. Tous les risques d’erreur sont liés à notre amour  ; et plus l’amour est passionné, exigeant, singulier, plus grand le r
366 ques d’erreur sont liés à notre amour ; et plus l’ amour est passionné, exigeant, singulier, plus grand le risque. Ce que nous
367 n —, si tu vois bien ce que tu vois et portes ton amour à l’immuable seul, toutes ces erreurs que tu craignais sont illusoire
368 n l’éphémère, lequel n’a rien en soi qui mérite l’ amour . Cela n’empêche pas la poésie, les amours poétiques, ni le désir, ni
369 mérite l’amour. Cela n’empêche pas la poésie, les amours poétiques, ni le désir, ni « cette adoration dont la femme a besoin p
370 e je la vois unique : ce vrai moi pressenti par l’ amour seul, et qui est elle-même. Tu dis le Soi, ce n’est personne. — Il n’
371 Personne ne peut aimer, sauf l’égoïste. Il y a l’ amour , et nous pouvons seulement devenir amour. Et tu sais bien que tu ne d
372 Il y a l’amour, et nous pouvons seulement devenir amour . Et tu sais bien que tu ne dois aimer que ton « Dieu » dans ses créat
373 ses créatures, puisqu’il est dit de Lui qu’il est amour . — Mais Dieu pour nous est une Personne, et nous crée comme personnes
374 ns d’être des uniques. Or ce choix est celui de l’ amour , de la connaissance par l’amour, car tout ce qui existe est unique, à
375 ix est celui de l’amour, de la connaissance par l’ amour , car tout ce qui existe est unique, à voir de près, comme voit l’amou
376 i existe est unique, à voir de près, comme voit l’ amour . 94. Cf. Charles Baudoin : Découverte de la Personne, p. 22. (Cet
377 ui qui nie l’âme ; mais alors, d’où viendrait cet amour , à qui irait-il ? La passion de Tristan est la preuve de l’âme, s’il
378 ne vienne ici à la rencontre des catégories de L’ Amour et l’Occident un peu plus qu’il ne serait souhaitable, de son propre
16 1961, Comme toi-même. Essais sur les mythes de l’amour. Deuxième partie — L’amour même
379 L’ amour même ILes quatre couleurs de l’amour (Schéma philosophique abstra
380 L’amour même ILes quatre couleurs de l’ amour (Schéma philosophique abstrait, orné d’une illustration.) L’amour
381 sophique abstrait, orné d’une illustration.) L’ amour étant l’initiateur de tout ce qui existe, on appellera néant l’absenc
382 out ce qui existe, on appellera néant l’absence d’ amour . Les degrés d’existence de l’amour sont ceux de la création à l’œuvre
383 nt l’absence d’amour. Les degrés d’existence de l’ amour sont ceux de la création à l’œuvre, sans laquelle le néant ne serait
384 quelle le néant ne serait pas conçu, ni l’être. L’ amour divin, venant de Dieu, retourne à Dieu, posant en son point de réflex
385 à réaliser.) Le moi posé, quelle est la voie de l’ amour en l’homme ? L’expérience méditée — et que j’espère banale (au sens p
386 hevé. 1. La vision intuitive. — Cette forme de l’ amour est l’acte de l’esprit ; et elle est connaissance active en même temp
387 mais devine aussitôt dans l’autre, la personne. L’ amour lui-même, qui m’a créé sujet, tend à discerner dans autrui le sujet q
388 t confirmée par l’interaction des personnes que l’ amour met en résonance, est la philia, l’amitié spirituelle. Elle est agent
389 et, par suite, de l’échange qui est l’action de l’ amour . Quand ce désir et ce besoin d’agir sur l’autre excèdent la conscienc
390 propre personne en tant que vocation unique, cet amour du prochain peut changer de signe, et du coup sa fonction s’inverse :
391 d’équilibre idéal entre la retenue qui naît de l’ amour de soi et l’élan vers le moi d’autrui, l’amour du prochain constitue
392 l’amour de soi et l’élan vers le moi d’autrui, l’ amour du prochain constitue le modèle créateur de toute communauté, et l’im
393 l’humanité en tant que celle-ci forme un tout. L’ amour d’autrui comme de soi-même pouvant seul assurer la santé et régler le
394 L’émotion, ou l’Éros. — Cette seconde forme de l’ amour procède de l’âme. Elle est moins sélective que le regard intuitif, pu
395 l’âge, à l’état de première adolescence, quand l’ amour « point le cœur », oppresse le souffle, brûle en rêve, et reste loin
396 n d’imaginer la possession. (C’est un aspect de l’ amour courtois, non le plus spécifique, ni le plus insolite). Mais s’il pré
397 écède le désir, dit physique, je crois bien que l’ amour émotif animique n’apparaît guère sans que l’ait éveillé un premier re
398 ment ; même si l’objet aimé ne « justifie » pas l’ amour , si on l’a mal vu, si on l’imagine autre qu’il n’est, ou si l’on ne f
399 — « On est seul avec tout ce que l’on aime » — l’ amour confond le moi et son objet, et enfin « Seul je suis, moi, le Monde !
400 x » et dans la « tourmente du Monde » — sa mort d’ amour , sa « Joie suprême 128. » 3. Le plaisir sexuel. — Cette troisième for
401 . Le plaisir sexuel. — Cette troisième forme de l’ amour est dite physique, encore que nous sachions très bien que le sexe est
402 n instinct animal, il n’aurait rien à voir avec l’ amour . Les animaux ne font pas l’amour, mais subissent la sexualité quand v
403 en à voir avec l’amour. Les animaux ne font pas l’ amour , mais subissent la sexualité quand vient son temps. Les confusions de
404 otre langage courant semblent parfois assimiler l’ amour au sexe, mais elles proviennent d’une contamination en sens inverse :
405 n sens inverse : si la sexualité peut signifier l’ amour , c’est parce qu’elle est, chez l’homme, autre chose que l’instinct. D
406 mais de la personne, la sexualité mérite ce nom d’ amour que lui donne l’Occident moderne, — quoi qu’en pense la morale moyenn
407 i désire le Soi, qui joue avec le Soi, qui fait l’ amour au Soi, qui atteint son plaisir dans le Soi, devient son propre maîtr
408 ui s’ils le peuvent !) cette troisième forme de l’ amour . Ils la condamnent ainsi à rester indifférenciée, inculte, non intégr
409 orètes. À leur intention, je me répète. « Faire l’ amour  » peut-être : aimer son prochain ou lui faire du mal tout en se dimin
410 veuglément, comme dans la nuit ; peut donc être : amour , égoïsme, bienfait ou crime, libération ou servitude, ou simplement e
411 Ce n’est en soi ni bien ni mal. Seul, le degré d’ amour réel (personnifiant, lié à la personne) peut qualifier l’acte sexuel.
412 La sexualité séparée. Dès qu’il est dissocié de l’ amour d’intuition et de l’amour de sentiment, qui le précèdent et le situen
413 qu’il est dissocié de l’amour d’intuition et de l’ amour de sentiment, qui le précèdent et le situent dans l’amour vrai, le dé
414 sentiment, qui le précèdent et le situent dans l’ amour vrai, le désir sensuel tend aussitôt à redescendre au plan de l’insti
415 e libre, autonome, et qui agit désormais contre l’ amour en tant que force d’individuation. Don Juan ne choisit pas, il désire
416 mme en tant que sexe en général. (Au contraire, l’ amour de Tristan faisait d’une seule, élue, la Femme unique.) Cette forme d
417 la Femme unique.) Cette forme du désir part de l’ amour mais en direction du néant : elle accroît l’indifférencié, elle accro
418 ) 4. L’énergie cosmique. — La dernière forme de l’ amour n’est atteinte que par la pensée, mais à travers le monde des sensati
419 une roue tournant d’une manière uniforme — par l’ Amour qui meut aussi le soleil et les autres étoiles. La forme de pensée
420 ois le phénomène humain, les lois cosmiques, et l’ amour créateur. Théorie de l’amour unifiant, c’est autant dire de l’Amour m
421 lois cosmiques, et l’amour créateur. Théorie de l’ amour unifiant, c’est autant dire de l’Amour même. La science actuelle, gui
422 éorie de l’amour unifiant, c’est autant dire de l’ Amour même. La science actuelle, guidée par l’intuition d’Einstein, conçoit
423 leurs options métaphysiques. Ainsi l’extrême de l’ amour cognitif, de la passion de savoir, d’inventer le savoir et d’y soumet
424 n voie de rejoindre en perspective l’extrême de l’ amour intuitif : la vue mystique. ⁂ Une illustration. — Tout le monde conna
425 u’elles correspondent trait pour trait aux quatre amours que nous venons d’identifier. (Et si l’on remonte aux tarots, on verr
426 l’indianiste Heinrich Zimmer). Les quatre amours Pique ♠ La forme indique le nombre 1. Elle suggère : pénétrer, traver
427 onder. Correspond à l’ Esprit et à l’intuition ( Amour spirituel, regard intuitif, philia, Agapè). Tempérament : mystique,
428 re : crime ; vers soi : suicide. Conception de l’ amour  : un roi de pique dira que « l’Amour n’est pas un sentiment, mais la
429 ception de l’amour : un roi de pique dira que « l’ Amour n’est pas un sentiment, mais la situation totale de celui qui aime, o
430 enté vers la vérité. » Preuve de validité de cet amour  : le regard juste. Cœur ♥ La forme indique le nombre 2. Elle suggère 
431 oût de la mort à deux. Paranoïa. Conception de l’ amour  : « La beauté fait pleurer les meilleures larmes ». — Tristan. Preuv
432 la sensation. (« Toute chair est comme l’herbe. » Amour de la chair pour ce qui la transcende et l’anime, car la poussée vien
433 ’instinct en quatrième feuille). Conception de l’ amour  : la gourmandise. « Ce qui est vrai, ce qui est beau, c’est ce qui m’
434 uilibrer. Correspond à l’Intellect, à la pensée ( Amour du juste et passion de la découverte). Tempérament : exclusif, bâtis
435 ne sait qu’en faire et la nie.) Conception de l’ amour  : l’équilibre exigeant l’échange, le maintien de chacun dans ses just
436 sant la logique particulière et l’ontogenèse de l’ amour . Ces quatre fonctions coexistent dans la vie de tout homme normal, ma
437 Je me suis limité aux interprétations touchant l’ amour , celles qui peuvent illustrer les pages précédentes. Je n’ai considér
438 , et que l’invisible sera vu. Quand tu le sais, l’ amour commence, l’amour a déjà commencé, car c’est lui qui le sait dans toi
439 le sera vu. Quand tu le sais, l’amour commence, l’ amour a déjà commencé, car c’est lui qui le sait dans toi. À la question fo
440 r au bord du rien, c’est l’intuition directe de l’ amour . C’est à cause de l’amour qu’il y a quelque chose, que le vide s’anim
441 ’intuition directe de l’amour. C’est à cause de l’ amour qu’il y a quelque chose, que le vide s’anime et se différencie, qu’il
442 oie. Et nous pouvons aimer ces formes parce que l’ amour les a formées : nous le reconnaissons en elles, comme il les appelait
443 issons en elles, comme il les appelait en nous. L’ amour seul explique tout, et l’être-en-soi n’est qu’un mot désignant l’inco
444 t désignant l’inconcevable : ce qui serait sans l’ amour , « ce qui est » moins l’amour par qui seul il y a quelque chose. L’am
445 e qui serait sans l’amour, « ce qui est » moins l’ amour par qui seul il y a quelque chose. L’amour seul peut donc dire : je s
446 oins l’amour par qui seul il y a quelque chose. L’ amour seul peut donc dire : je suis. Sans l’amour, il n’y aurait pas même l
447 se. L’amour seul peut donc dire : je suis. Sans l’ amour , il n’y aurait pas même le vide. L’amour a créé le vide en déployant
448 . Sans l’amour, il n’y aurait pas même le vide. L’ amour a créé le vide en déployant l’attrait, que l’on nomme énergie ou dési
449 nnaissance, et que tout signe ou sens manifeste l’ amour  ; et rien d’autre n’importe en vérité : rien d’autre au monde ne m’ap
450 nos idées sur « Dieu », je n’ai jamais douté de l’ amour même. J’ai pu douter jusqu’au vertige de presque toutes les vérités d
451 is douté de tout cela, qu’en vertu et au nom de l’ Amour . Il est la grâce indubitable. Je n’ai pas d’autre foi certaine, d’aut
452 in réalisé, dans le Tout enfin contemplé. Quand l’ Amour sera tout en tous, lors du renouvellement de toutes les choses. FIN
17 1961, Comme toi-même. Essais sur les mythes de l’amour. Annexes — L’amour selon les évangiles
453 introduction que les préceptes évangéliques sur l’ amour , le mariage et la sexualité tiennent en peu de pages. Les voici. Am
454 sexualité tiennent en peu de pages. Les voici. Amour divin Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son fils unique… (Lu
455 e vous ai aussi aimés… Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis… Je vous ai appelés amis parce que
456 ns qui étaient dans le monde, mit le comble à son amour pour eux. (Suit le récit du lavement des pieds des disciples.) (Jean,
457 ien-aimés, aimons-nous les uns les autres ; car l’ amour est de Dieu, et quiconque aime est né de Dieu et connaît Dieu. Celui
458 i qui n’aime pas n’a pas connu Dieu, car Dieu est amour . … Et cet amour consiste non point en ce que nous avons aimé Dieu, m
459 n’a pas connu Dieu, car Dieu est amour. … Et cet amour consiste non point en ce que nous avons aimé Dieu, mais en ce qu’il n
460 imons les uns les autres, Dieu demeure en nous. L’ amour parfait bannit la crainte. Si quelqu’un dit : J’aime Dieu, et qu’il h
461 comment peut-il aimer Dieu qu’il ne voit pas ? Amour du prochain Je vous donne ce commandement nouveau : Aimez-vous les
462 re Père qui est dans les cieux (Matt., V, 43). L’ amour du prochain est spirituel, totalement étranger aux attachements natur
463 donc, dans le contexte : elle a montré beaucoup d’ amour pour moi, parce qu’elle se sentait pardonnée et qu’elle a cru à mon p
464 la totalité, des déclarations de l’Évangile sur l’ amour . Je n’ai omis, je crois, que les développements de Jean sur l’amour d
465 s, je crois, que les développements de Jean sur l’ amour divin (aux chapitres 14, 15 et 17) et les répétitions, dans les deux
466 regard des déclarations constantes de Jésus sur l’ amour spirituel, seul décisif, et de ses rares jugements (autant de pardons
467 s jugements (autant de pardons, d’ailleurs) sur l’ amour sexuel « irrégulier », contrastant avec sa sévérité envers les autres
18 1961, Comme toi-même. Essais sur les mythes de l’amour. Annexes — Post-scriptum
468 ecret des secrets ». Dans la seconde version de L’ Amour et l’Occident (pages 100 à 108), je soutenais l’hypothèse qu’un parei
469 un pareil procédé fût aussi l’un des secrets de l’ amour courtois. La forme tantrique ou courtoise de l’érotisme peut être int
470 comme visant à « élever » et « animer » le jeu d’ amour , à des fins proprement érotiques, que certains tiennent même pour spi
471 r, soit en plaisir détaché de l’instinct, soit en amour , soit en adoration de l’Éternel féminin au sens mystique. La maithuna
472 accéder à une maîtrise de soi telle que le jeu d’ amour puisse se prolonger très longtemps sans achèvement physique, et sans
473 ce que l’on a longtemps pris pour simple « joie d’ amour  », et qui était en fait « le jeu d’amour133 », un moyen de le prolong
474 t », et d’élever ainsi le désir à la hauteur de l’ amour animique et du culte rendu à la Dame (considérée non pas comme femme
475 sujet n’était nullement la sexualité, mais bien l’ amour . ⁂ Est-il besoin de préciser que cet ouvrage n’est pas un manuel de m
476 ou simplement indifférent. Or, nous savons que l’ amour est le fait des personnes, et qu’il n’en est pas deux interchangeable
477 difficulté de concevoir une morale générale de l’ amour , des règles générales imposées à l’amour — au nom de quoi, qui serait
478 ale de l’amour, des règles générales imposées à l’ amour — au nom de quoi, qui serait plus vrai ? Les normes valent pour tout,
479 s vrai ? Les normes valent pour tout, sauf pour l’ amour — comme l’entrevit le romantisme, qui en tira des conclusions fausses
480 el dans le mariage, les liaisons, etc. Non pour l’ amour proprement dit. Car c’est l’amour qui pose les normes, qui est la nor
481 etc. Non pour l’amour proprement dit. Car c’est l’ amour qui pose les normes, qui est la norme finale, première, universelle.
482 ider. Parce que la vraie personne est posée par l’ amour , existe par un acte de l’amour, et que l’amour la fait unique. Toute
483 ne est posée par l’amour, existe par un acte de l’ amour , et que l’amour la fait unique. Toute morale qui n’est pas une école
484 l’amour, existe par un acte de l’amour, et que l’ amour la fait unique. Toute morale qui n’est pas une école — ouverte sur la
485 ie, bien que pas un iota n’en soit retiré. Mais l’ amour seul peut le comprendre en vérité. 132. Discours sur le mariage,
486 dours (La Table ronde, janvier 1956) et La Joie d’ amour et l’Occident (Les Cahiers du Sud, n° 348). L’auteur montre que le mo
487 le que j’ai donnée de « l’Éros sans fin » et de l’ amour réciproque malheureux. C’est qu’il veut limiter la cortezia à une sor