1 1939, L’Amour et l’Occident (1972). Le mythe de Tristan
1 réjouis de lui ; mon mal est ce que je veux et ma douleur est ma santé. Je ne vois donc pas de quoi je me plains, car mon mal m
2 je souffre agréablement, et tant de joie dans ma douleur que je suis malade avec délices. Chrétien de Troyes. Il faut avoir
3 nte, si animale pourrait-on dire, qu’il oublie la douleur et le danger dans l’ivresse de son « déduit ». Pourtant, le sang de s
4 romantique occidental comme un homme pour qui la douleur , et spécialement la douleur amoureuse, est un moyen privilégié de con
5 un homme pour qui la douleur, et spécialement la douleur amoureuse, est un moyen privilégié de connaissance. Certes, cela vaut
6 ’obsession de l’Européen : connaître à travers la douleur , c’est le secret du mythe de Tristan, l’amour-passion à la fois parta
2 1939, L’Amour et l’Occident (1972). Les origines religieuses du mythe
7 t fin à sa vie « non par lassitude ni par peur ou douleur , mais dans un état de parfait détachement de la matière… »41. Voici l
8 eux fond breton. Ce principe, c’est l’amour de la douleur considérée comme une ascèse, le « mal aimé » des troubadours. Voici T
9 fût pas porté. Ainsi Tristan veut se venger de sa douleur et de ses peines, et contre son mal, il avise un remède dont il doubl
3 1939, L’Amour et l’Occident (1972). Passion et mystique
10 d’un goût qu’il est amer mais on dira aussi d’une douleur qu’elle est amère. Comment cela peut-il s’expliquer ? Tout le monde r
11 e répond, sans hésiter, que lorsqu’on parle d’une douleur amère, on s’exprime par métaphore, au figuré. Le sens propre du mot «
12 En vérité, il n’y a pas moins d’amertume dans la douleur que dans le goût du sel, mais ce que nous désignons dans l’une et l’a
13 dant — une illusion de gloire libératrice dont la douleur serait encore le signe ! Ainsi s’opère le renversement tragique : se
4 1939, L’Amour et l’Occident (1972). Le mythe dans la littérature
14 reflet : De même que la tigresse, dans sa grande douleur , se soulage en regardant un miroir et croit y voir l’image de ses pet
15 s misères !) je me repais de ces peines et de ces douleurs -là avec une sorte de volupté si poignante que, si l’on vient m’en arr
16 bien le cours des choses de ce monde ? Est-ce une douleur physique, où bien quelque rigueur injuste de fortune ? Pétrarque. — 
17 ement, « cette joie majestueuse qui fait toute la douleur du Roman ». Car pour l’atteindre ou seulement la pressentir, il eût f
18 toujours lié à notre haine, et nos plaisirs à nos douleurs . Il n’est pas de cause isolée qui nous détermine purement. Entre la j
19 . C’est parce que la passion n’existe pas sans la douleur qu’elle nous rend désirable notre perte. Écoutons la Religieuse portu
20 z-moi donc toujours, faites-moi souffrir de pires douleurs encore ! » Vers la fin du xviiie siècle, c’est une autre femme qui d
21 ité d’aimer comme je l’ai fait. Lorsqu’on fuit la douleur , c’est qu’on ne veut plus aimer. Celui qui aime devra ressentir étern
22 r sa blessure ouverte. Que Dieu me conserve cette douleur qui m’est indiciblement chère… Notre engagement n’était pas pris pour
23 produit pas la moitié autant d’impression que la douleur , ensuite, outre ce désagrément dans la quantité d’émotion, la sympath
24 s excitent. » Voilà qui est vrai : nous aimons la douleur , et le bonheur nous ennuie un peu… Cela vous paraît tout naturel ? Et
25 qui en un instant pénètre l’âme entière naît une douleur qui la transporte au-dessus d’elle-même et de tout le créé. Elle n’as
5 1939, L’Amour et l’Occident (1972). Le mythe contre le mariage
26 te, intense, infiniment intéressante… Or c’est la douleur seule qui rend consciente la passion, et c’est pourquoi l’on aime sou
6 1972, L’Amour et l’Occident (1972). Post-scriptum
27 uso : « ein suesses we… ein ellende froede » (une douleur douce… une plaintive joie). — aimer en trop haut lieu, d’où la nécess
28 manière si pure qu’à travers elle transparaît la douleur poignante, la douleur inconsolable de la créature finie » : Quand je
29 travers elle transparaît la douleur poignante, la douleur inconsolable de la créature finie » : Quand je vois l’alouette mouvo
30 t puis ce même jour, elle se rendit nonne pour la douleur qu’elle eut de sa mort231. Mais comment ne pas songer ici à la fin d
31 ns cas, d’un délire qui tour à tour fait crier de douleur ou jette dans des extases, pousse au crime ou accule au suicide, tran