1 1944, Les Personnes du drame. Introduction
1 Introduction Celui qui cherche un homme et ne trouve qu’un auteur : est-il déçu par l’homme ou par l’auteur ?
2 mme et ne trouve qu’un auteur : est-il déçu par l’ homme ou par l’auteur ? Il est déçu par la relation de l’un à l’autre. Par
3 est déçu par la relation de l’un à l’autre. Par l’ homme insuffisant qui se révèle dans l’auteur, donc par l’auteur aussi, qui
4 r, donc par l’auteur aussi, qui révèle trop peu d’ homme . On cite ordinairement la phrase des Pensées pour établir entre l’hom
5 rement la phrase des Pensées pour établir entre l’ homme et l’auteur une distinction au détriment du second. On estime qu’un a
6 n estime qu’un auteur en général vaut moins qu’un homme en général ; qu’il est, dans l’homme, la part de l’artifice et des ap
7 moins qu’un homme en général ; qu’il est, dans l’ homme , la part de l’artifice et des apparences trompeuses. Mais au fait, ri
8 qu’une apparence concertée ; rien n’avoue mieux l’ homme authentique, c’est-à-dire la combinaison de ce qu’il est et de ce qu’
9 inaison de ce qu’il est et de ce qu’il se veut. L’ homme sans son œuvre n’est pas vrai, de même que l’œuvre sans son homme res
10 uvre n’est pas vrai, de même que l’œuvre sans son homme reste un beau piège à psychologues. Les séparer d’abord pour mieux le
11 roquement. » Comment pourrait-on voir l’être d’un homme hors de ses manifestations ? Si donc je m’intéresse à ce qui est vrai
12 ? Si donc je m’intéresse à ce qui est vrai dans l’ homme , c’est dans son œuvre qu’il me faut le chercher. Car toute œuvre est
13 toute œuvre est le témoignage d’un drame entre l’ homme et lui-même, elle est ce drame, rendu visible, et c’est dans le drame
14 n être. Dans ce témoignage des formes, chercher l’ homme , c’est tenter de surprendre la personne. Voir des formes, épouser des
15 urer le degré de tension du combat spirituel où l’ homme devient personne, et « s’autorise » d’une vocation unique. Pourtant,
16 i » ? A-t-elle jamais existé dans l’histoire ? Un homme a-t-il jamais reçu le don terrible d’incarner sans le moindre défaut
17 vocation, sa fin dernière ? Jésus-Christ est cet Homme , et c’est pourquoi sa réalité historique, telle que l’atteste l’Évang
18 us-Christ, en une Personne. À tout jamais, pour l’ homme de chair et de raison, ce trait d’union reste impensable, cette ident
19 r son jeu. Tâche impossible, si les œuvres de cet homme , et en particulier son œuvre écrite, ne venaient soutenir l’entrepris
20 el » d’un auteur, ou d’ailleurs de n’importe quel homme responsable de son existence. Il s’agit là d’un phénomène qui déborde
21 i m’intéressent, que le drame qu’institue chez un homme l’information progressive d’une idée, c’est-à-dire son actualisation.
22 e, c’est-à-dire son actualisation. Je crois que l’ homme ne vaut que par ce qui l’attaque, le provoque à se dépasser, et manif
23 e, l’insupportable et trop lucide hésitation de l’ homme placé devant « l’absurdité » du transcendant, c’est la personne essen
24 significatives du vrai sujet de cet ouvrage : « L’ homme étant donné, dit Claudel, pour inventer une raison commune à des term
25 termes infiniment distants et multiples. » ⁂ « Un homme d’esprit — lit-on dans Kierkegaard — disait qu’on pouvait répartir l’
2 1944, Les Personnes du drame. Sagesse et folie de la personne — Le silence de Goethe
26 1.Le silence de Goethe « L’ homme , dit Goethe, ne reconnaît et n’apprécie que ce qu’il est lui-même en
27 d’esprit qui voudrait que l’on considère ces deux hommes avant tout comme des écrivains ? C’est par la chose écrite qu’ils s’o
28 e, à cet acte de fécondation spirituelle par où l’ homme pénètre dans la réalité mystique. Et cet acte ne peut se produire que
29 se voit pour ainsi dire contrainte d’assigner à l’ homme actif 3, l’on découvre que c’est la magie encore qui n’a cessé de l’e
30 e le premier, dans une phase plus « réalisée ». L’ homme moderne est peu fait pour comprendre cela, de même qu’il est peu fait
31 e l’aventure… Car il n’est pas donné à beaucoup d’ hommes de devenir un mythe à force de pureté dans la réalisation de leur des
32 uissent être de quelque avantage aux autres 9 … L’ homme n’est pas né pour résoudre le problème de l’univers, mais bien pour r
33 aux belles dames qui n’ont rien à faire. Mais un homme supérieur, qui a déjà conscience d’être quelque chose ici-bas, et qui
34 ur ne tenteront pas nos âmes jusqu’à l’agonie ? L’ homme ne peut juger que plus bas que lui. C’est-à-dire qu’il n’en a pas le
35 nts. Je ne serais. Nature ! devant toi rien qu’un homme . Alors il vaudrait bien la peine d’être humain. 5. Celui qui toujo
3 1944, Les Personnes du drame. Sagesse et folie de la personne — Goethe médiateur
36 tirer de ces données ? Car Goethe est en ceci un homme moderne, que ses mesures sont en lui-même et non pas dans un ordre ex
37 convenable dans un monde ordonné comme un tout. L’ homme antique remplit une fonction, et son destin est inscrit dans les astr
38 t son destin est inscrit dans les astres ; mais l’ homme moderne crée son destin dans l’inconnu. Goethe est grand par le rappo
39 ant l’une à l’autre un sens et une mesure. De nul homme , peut-être, nous ne connaissons aussi bien la vie dans son développem
40 r en actes, en activité, en effort. Ainsi Goethe, homme moderne, détache d’abord la magie des choses, sur lesquelles principa
4 1944, Les Personnes du drame. Sagesse et folie de la personne — Kierkegaard
41 , où il mourut paisiblement « en saluant tous les hommes  ». Le seul événement extérieur de sa vie fut la rupture de ses fiança
42 ’entière responsabilité devant Dieu et devant les hommes . Ce ne fut qu’à la fin de sa vie qu’il s’offrit sans masque à la lutt
43 ure et si absolue qu’il voyait clairement que nul homme ne peut jamais se dire chrétien. Cette position paradoxale a permis l
44 « différence qualitative infinie entre Dieu et l’ homme  ». Le sens réel et profond de toute son œuvre réside dans sa protesta
45 ort. Le premier est de Kierkegaard : « Forcer les hommes à être attentifs et à juger, c’est exactement prendre le chemin du vr
46 combat à l’aide de son impuissance. Il force les hommes à être attentifs. Ah ! Dieu sait s’ils deviennent attentifs — ils le
47 Kierkegaard, on l’attrape comme une maladie. Cet homme secrète un poison salutaire, dont nul ne trouvera l’antidote ; qu’il
48 ité conquise aux dépens de tout ce qui soutient l’ homme contre Dieu. Et cependant, dans le pire désespoir, jamais de défi, ni
49 ne vois rien de comique dans l’attitude d’un tel homme , — si vraiment les figures du jeu ont envahi sa vision de la vie au p
50 mat éclatant, symbolique. La supériorité d’un tel homme tient en ceci, qu’il s’est rendu capable d’exprimer toute sa vie d’un
51 urrait dire une propreté d’assez grand style. Cet homme doit s’être purifié de cette espèce répugnante de « sérieux » qui s’a
52 le sérieux moral à l’état pur : la faculté qu’un homme possède de rapporter ses actes à la fin qu’il poursuit avec la plus g
53 rais. Pourquoi ? Parce qu’il est impossible qu’un homme ne se pose jamais la question du but dernier de sa vie. Il peut sembl
54 e de la question. À plus forte raison, chez notre homme , dont l’exigence éthique n’apparaît pas médiocre. Mais s’il s’est pos
55 sme, ou pire encore, n’est plus qu’une évasion. L’ homme ne joue pas son tout sur le mat prévisible. Il se réserve un point de
56 s d’entreprise et quelques dictateurs, tous ces «  hommes d’une seule idée », tous ces profonds maniaques, — si près qu’ils aie
57 nd style. Mais ils échouent toujours au cœur de l’ homme même. Ils sont sans force contre sa division secrète. Ce que j’ai fai
58 randeur humaine est prévisible dès l’instant où l’ homme s’élance vers un destin qu’il s’est choisi, et qui est le masque de s
59 qui est sérieux reste seul important, mais tant d’ hommes font les importants, tant d’hommes « jouent » leur sérieux : où est l
60 t, mais tant d’hommes font les importants, tant d’ hommes « jouent » leur sérieux : où est la différence ? « L’apôtre Paul ava
61 tait pas marié. — Mais alors, Paul n’était pas un homme sérieux ? — Non, Paul n’était pas un homme sérieux. » Ici paraît la d
62 pas un homme sérieux ? — Non, Paul n’était pas un homme sérieux. » Ici paraît la dialectique du sérieux et de l’ironie. C’est
63 ent la tension personnelle. Mais alors, comment l’ homme qui se découvre multitude et plèbe pourrait-il, s’appuyant sur lui-mê
64 et de l’autre, la diversité de l’existence, que l’ homme en tant que tel, ne peut pas pénétrer, — il lui faudrait être omnisci
65 mède, hors du monde, c’est une chambre haute où l’ homme prie en toute droiture. »24 Un solitaire devant Dieu. Alors tout
66 l’anarchiste pur, l’individu fou, l’isolé. Mais l’ homme justement n’est plus seul à l’instant qu’il atteint le fond même de l
67 eulement vivre, et qui pour comble, suppose que l’ homme a d’abord accepté d’être zéro ! L’homme qui meurt devant Dieu, en tan
68 ose que l’homme a d’abord accepté d’être zéro ! L’ homme qui meurt devant Dieu, en tant qu’individu, renaît au même instant en
69 e ? Évidemment. Pour celui qui ne l’a pas. Mais l’ homme qu’elle vient saisir ne mesure plus son acte. C’est qu’il n’est plus
70 t ne connaît plus rien de ce qui nous mesure. Cet homme qui marche dans le monde, contre le monde qui ne sera sauvé que par é
71 qui ne sera sauvé que par égard au solitaire, cet homme n’appartient plus à la forme du monde, mais seulement à sa transforma
72 , devient celui de l’acte. Y a-t-il des actes ? L’ homme d’aujourd’hui ne le croit pas. Il croit aux lois, et il se veut déter
73 cette mesure même, il cesse d’être humain. Car l’ homme n’a d’existence proprement humaine que lorsqu’il participe à la trans
74 ver que l’acte est impossible et que le tout de l’ homme est soumis au calcul, tout cet effort des sciences et des sociologies
75 tablit à grands frais l’évidence du désespoir : l’ homme moderne a perdu le « chemin ». Je suis le chemin, la vérité et la vi
76 la vérité s’il n’avait pas été la vérité ; et nul homme ne connaît davantage de vérité qu’il n’en incarne27 Voici donc le m
77 i dans sa fin, possède son commencement. » Mais l’ homme déchu de son origine éternelle a perdu la vision de sa fin. Le voici
78 , leur prophétie et leur salut. Cependant que les hommes les frappent sur la bouche. Kierkegaard fut de ces croyants dont la v
79 ont la vocation prophétique, pareille à celle des hommes de Dieu qui se lèvent sous l’Ancienne Alliance, se confond avec la pa
80 nt son point de départ. Le chemin commence à tout homme qui se met en devoir d’obéir à l’ordre qu’il reçoit de Dieu, — n’impo
81 ordre reçu, et sans nulle préparation. Comment un homme devient-il chrétien ? « Tout simplement : prend n’importe quelle règl
82 est pas engagé. Parce que c’est un blasphème de l’ homme pieux, du moraliste, que de prétendre imiter le modèle que ses yeux v
83 « impossible » destin, le seul acte possible à l’ homme . Et c’est l’acte que Dieu initie. 6 4.« Par rapport à l’absolu, i
84 l’histoire s’arrêterait comme la respiration d’un homme saisi par la beauté, et le temps immobile s’abîmerait dans l’amen éte
85 e le savoir et le faire, et c’est la lâcheté de l’ homme qui se repose sur ses œuvres et qui les juge : son alliance avec le s
86 tre la naissance et la mort toute la réalité de l’ homme est dans son acte. Tout acte est passage et tension, — passage de la
87 absolu serait création absolue, mais un acte de l’ homme n’est jamais qu’une rédemption. Distinction de théologien, et qui veu
88 à la parole dont elle procède, et si la face d’un homme est belle, c’est parce qu’elle est un acte et un destin, une initiale
89 nsiste à s’imaginer que l’acte est puissance de l’ homme  : d’où l’impossibilité de l’oser. Celui que la foi vient saisir sait
90 initie. Le désespéré, le douteur, ou simplement l’ homme dépourvu de foi, l’homme détendu, vague et fiévreux qui peuple nos ci
91 douteur, ou simplement l’homme dépourvu de foi, l’ homme détendu, vague et fiévreux qui peuple nos cités, l’homme sans visage
92 étendu, vague et fiévreux qui peuple nos cités, l’ homme sans visage et sans prochain, — sans vocation ! — s’imagine que l’act
93 la coutume du bourg ou de la classe. Comment cet homme pourrait-il faire un acte ? Car l’acte est décision, rupture, isolati
94 a réalité des autres dans l’ensemble. Comment cet homme pourrait-il faire un acte ? Car l’acte est immédiat, création et init
95 ent désespérer. Il faudrait donc… la recréer ? L’ homme ne peut faire qu’une seule chose en toute sobriété, c’est l’absolu.41
96 le sérieux, le risque et la splendeur d’une vie d’ homme . L’homme se distingue du singe en ce qu’il prophétise, uniquement et
97 x, le risque et la splendeur d’une vie d’homme. L’ homme se distingue du singe en ce qu’il prophétise, uniquement et dès l’ori
98 se, uniquement et dès l’origine. C’est pourquoi l’ homme a un visage et une vision, ce que n’ont pas les animaux ; c’est pourq
99 , ce que n’ont pas les animaux ; c’est pourquoi l’ homme est héroïque. Il faut noter ici un trait bien remarquable : Kierkegaa
100 l’acte est initiateur ; parce que la dignité de l’ homme est de marcher dans l’invisible et de prophétiser « en vertu de l’abs
101 le et de prophétiser « en vertu de l’absurde. » L’ homme ne peut être déterminé que par son Dieu ou par le « monde », il faut
102 chrétien ou bien un philistin. Le philistin est l’ homme sans vocation. Il ne croit pas à l’acte et il meurt au hasard, sans a
103 e ? Et que va-t-on lui sacrifier ? Supposez qu’un homme paraisse, et qu’il relève le défi collectiviste. Il soutient que le s
104 es lois de l’histoire ne sont rien si l’acte de l’ homme les dément ; que la foi d’un seul est plus forte, dans son humilité e
105 ù la vocation de Dieu l’a mis. Supposez qu’un tel homme existe. Que va-t-on faire de lui, de ce héros, n’est-ce pas, des vale
106 « Qui est le docteur Søren Kierkegaard ? C’est l’ homme dépourvu de sérieux » lit-on dans un journal du temps. On se moquera
107 ital, en disant à son seul ami : « Salue tous les hommes  ! Je les aimais bien tous… » Cela se passait à Copenhague, en l’année
108 « L’esprit, c’est la puissance que le savoir d’un homme exerce sur sa vie 46 ». Ce n’est pas le savoir, ce n’est pas la puiss
109 l’ironie ; contre l’Histoire, il pose l’acte de l’ homme responsable de son destin. Mais tout cela va au martyre, dans le mond
110 Kierkegaard se limite à l’instant du choix, où l’ homme s’engage « en vertu de l’absurde », sur le chemin que Dieu lui montre
111 is une aventure absolue et comme un jugement de l’ homme  ; ainsi Pascal, Nietzsche, Dostoïevski. On pourrait en citer quelques
112 upes d’assaut. Ah ! si le rire est le propre de l’ homme , nous voici devenus bien inhumains. Il semble que chacun porte le poi
113 feint de se croire victime ou responsable47. Cet homme que l’Histoire fait trembler, et qui se réfugie dans les soucis publi
114 un film pour s’oublier dans un drame fictif, cet homme que la lecture de son journal effraie bien plus que les abîmes de son
115 « Le christianisme a découvert une misère dont l’ homme ignore, comme homme, l’existence ; et c’est la maladie mortelle (le p
116 a découvert une misère dont l’homme ignore, comme homme , l’existence ; et c’est la maladie mortelle (le péché) 48 . L’homme n
117  ; et c’est la maladie mortelle (le péché) 48 . L’ homme naturel a beau dénombrer tout l’horrible, et tout épuiser, le chrétie
118  Le Nouveau Testament ressemble à une satire de l’ homme . Il contient des consolations et encore des consolations pour ceux qu
119 ue de les confronter à la réalité chrétienne de l’ homme . Le solitaire que Kierkegaard appelle, c’est l’homme isolé devant son
120 me. Le solitaire que Kierkegaard appelle, c’est l’ homme isolé devant son Dieu. Mais comment cela se pourrait-il, sinon par l’
121 , qu’il le nomme et par là le sépare, autrement l’ homme n’est rien qu’un exemplaire dans le troupeau. Le solitaire devant Die
122 éissance. Et si l’appel de Dieu isole du monde un homme , c’est que le monde, dans sa forme déchue s’oppose au monde tel que D
123 les dénoncer éloquemment en vertu d’une idée de l’ homme que la raison païenne admet fort bien : nietzschéisme agressif ou dés
124 t pour siens. Elle est le lieu de rendez-vous des hommes qui se fuient, eux et leur vocation. Elle n’est personne et tire de l
125 ge ! » La foule n’est rien que la fuite de chaque homme devant la responsabilité de son acte. « Car une foule est une abstrac
126 ne abstraction, qui n’a pas de mains, mais chaque homme isolé a, dans la règle, deux mains, et lorsqu’il porte ces deux mains
127 a pas de mains. » Tout seul en face du Christ, un homme oserait-il s’avancer et cracher au visage du Fils de Dieu ? Mais qu’i
128 ans la rue seulement. Elle est dans la pensée des hommes de ce temps. Le génie réaliste de Kierkegaard a su la dénoncer au plu
129 ’Esprit, l’histoire, la dialectique, finalement l’ homme lui-même aux yeux de l’homme. Il a voulu chasser du monde le paradoxe
130 ctique, finalement l’homme lui-même aux yeux de l’ homme . Il a voulu chasser du monde le paradoxe et le scandale du solitaire
131 ntreprise pourrait être tenue pour grandiose si l’ homme des masses ne venait aujourd’hui s’en prévaloir pour rendre un culte
132 ues athées ont entrevu le péril, mais sans voir l’ homme dans l’ordre actuel de son péché, ni dans l’ordre à venir de la grâce
133 moderne de cette « catégorie du solitaire », de l’ homme qui vit de la Parole seulement, entre les temps, dans l’instant étern
134 gélien, c’est l’objectivité : cette attitude de l’ homme qui ne veut plus être sujet de son action, qui l’abandonne aux lois d
135 tivité est la vérité. La liberté, la dignité de l’ homme , c’est qu’il soit le seul sujet de sa vie. Mais encore faut-il se gar
136 vivons, le « solitaire devant Dieu » est aussi l’ homme le plus réel, le plus présent. Parce qu’il sait qu’il existe un « ail
137 ent jamais, mais simplement qu’on les y noie. Les hommes préfèrent « mourir imperceptiblement » comme disait Nietzsche, et c’e
5 1944, Les Personnes du drame. Sagesse et folie de la personne — Franz Kafka, ou l’aveu de la réalité
138 est plus suggestif que cette rencontre en un seul homme de deux influences aussi contradictoires, et à tant d’égards exclusiv
139 les conventions heureusement introduites par les hommes pour « faire comme si » leur vie se justifiait en soi. Joseph K., fo
140 se de parti, — de tout acte. Tous les efforts des hommes — y compris ceux des philosophes — ne sont peut-être que des tentativ
141 s. Tout au plus dans une autre vision, celle de l’ homme « arrêté », précisément, celle de l’homme qui pense et qui vit dans l
142 le de l’homme « arrêté », précisément, celle de l’ homme qui pense et qui vit dans la suspension du jugement. Joseph K. a vu l
143 une sorte de schéma dogmatique transparaît. Tout homme qui a connu l’existence de la Loi se connaît condamnable, quoi qu’il
144 est fondé. Prêtres et mages, derniers appuis de l’ homme contre Dieu ! À vrai dire, ils sont impuissants, prévenus eux-mêmes,
145 té universelle, me fait songer à la « misère de l’ homme  » non pas « sans Dieu » mais livré à un Dieu dont il ne peut connaîtr
146 la colère, non la miséricorde. C’est l’état de l’ homme qui sait que Dieu existe, mais qui ne peut plus lui obéir, et qui ne
147 hrist est bien l’issue, la possibilité donnée à l’ homme de marcher, d’échapper à « l’arrêt ». Mais c’est aussi grâce à cette
148 par l’instant de la conversion. Cette vision de l’ homme arrêté pourrait être un regard en arrière vers l’humanité en révolte
149 : la vision de Kafka traduirait la situation de l’ homme qui n’est plus soutenu, mais au contraire obscurément troublé par une
150 aggrave la conscience de l’angoisse, ce vide où l’ homme demeure et ne peut demeurer. Si la foi survenait dans sa vie, elle lu
151 e la Loi. Il reconnaît, en toute honnêteté, que l’ homme ne peut en sortir par lui-même. Il y a, disait Kierkegaard, « une dif
152 ne différence qualitative infinie entre Dieu et l’ homme  », de telle sorte que nulle communication ne peut s’établir de l’homm
153 te que nulle communication ne peut s’établir de l’ homme à Dieu, si l’on ne croit pas qu’elle a été établie, en sens inverse,
154 ’elle a été établie, en sens inverse, de Dieu à l’ homme , par la venue du Christ dans l’histoire. Kafka savait qu’il devait y
155 livrance par l’excès. S’il rend la situation de l’ homme tel qu’il le voit si physiquement insupportable, n’est-ce pas pour ex
6 1944, Les Personnes du drame. Liberté et fatum — Luther et la liberté de la personne
156 ribuée par un appel gratuit du libre Esprit. Si l’ homme naturel n’est pas libre d’accéder à la liberté, cette liberté peut lu
157 osition de cette justice de Dieu à la justice des hommes et de leurs œuvres ; opposition de la grâce à la nature, selon les te
158 ible, et constituant la véritable « action » de l’ homme « entre les mains de Dieu. » Tels sont les thèmes qu’illustre cet ouv
159 Ses coups violents n’ébranlent plus que le vieil homme , celui qu’il nous faut dépouiller. Mais il s’en faut de presque tout
160 ix sur la terre, bénévolence (de Dieu) envers les hommes  » par « Paix aux hommes de bonne volonté », tous ceux-là sont, en fai
161 ence (de Dieu) envers les hommes » par « Paix aux hommes de bonne volonté », tous ceux-là sont, en fait, avec Érasme et son ar
162 religieux, c’est-à-dire : le pouvoir qu’aurait l’ homme de contribuer à son salut par ses efforts et ses œuvres morales. Que
163 te espèce de considération psychologique. (Un tel homme est bien trop vivant pour faire de la psychologie, trop engagé dans l
164 e se déroule à l’intérieur même de la pensée d’un homme qui veut honnêtement croire…) Dialogue Car Dieu peut tout à tou
165 ut aussi tout changer en un instant aux yeux de l’ homme , sans que rien ne soit changé de ce qu’a décidé Dieu, de ce qu’il déc
166 lectuelles. Il n’y a que la résistance du « vieil homme  », et les prétextes toujours très moraux, et même très pieux qu’invoq
167 dans son sérieux dernier, on peut soutenir que l’ homme possède au moins « un faible libre arbitre66 » dans les choses du sal
168 damne qui il veut, — au mépris de tant de grands hommes de tous les temps. Et qui ne se scandaliserait pas ? » Ainsi parle Lu
169  » Ainsi parle Luther lui-même, et c’est en lui l’ homme naturel qui fait sa plainte. Mais il ajoute : « Il me faut confesser
170 roire que ce Dieu est clément, qui sauve si peu d’ hommes et en damne un si grand nombre ; et que ce Dieu est juste, dont la vo
171 i ?… Ce serait un Dieu stupide qui révélerait aux hommes (en Christ) une justice qu’ils connaîtraient déjà, ou dont ils auraie
172 ussé comme Luther jusqu’aux extrêmes limites de l’ homme , jusqu’aux questions dernières que peut envisager notre pensée. Pour
173 croit trouver et regagner la dignité suprême de l’ homme sans Dieu. La similitude étonnante du paradoxe luthérien et du parado
174 cé par Dieu, Nietzsche oppose le « je veux » de l’ homme divinisé. Puis à l’existence de Dieu, il oppose sa propre existence.
7 1944, Les Personnes du drame. Sincérité et authenticité — Le Journal d’André Gide
175 imable ». Comment prendrait-on position devant un homme qui récuse sans cesse tout parti pris, et d’abord, quant à soi ? On r
176 é vis-à-vis de l’individu. « Les autres forment l’ homme , je le récite », semble-t-elle dire après Montaigne. Et cependant, no
177 pourrait nommer constructive. Tout existe dans l’ homme , dit-elle, mais tout n’y est pas d’égale valeur. Et ce n’est pas hypo
178 ’il conviendrait de répéter que le style est de l’ homme même. Il est en nous le trait révélateur d’une unité intentionnelle,
8 1944, Les Personnes du drame. Sincérité et authenticité — Vues sur Ramuz
179 la clé de toute création est dans le visage de l’ homme . Qu’un homme détienne un pouvoir créateur, c’est-à-dire un pouvoir d’
180 ute création est dans le visage de l’homme. Qu’un homme détienne un pouvoir créateur, c’est-à-dire un pouvoir d’incarnation,
181 sens de la création qui tout entière advient à l’ homme . Ainsi l’Adam d’avant le Temps vit venir à lui toutes les bêtes : ell
182 pas du tout la même chose. La forme humaine, si l’ homme est authentique, est microcosme d’un pays, d’un paysage et d’un ensem
183 ntre la vision et l’objet, entre la position de l’ homme et la proposition du monde. C’est la région de la rencontre et de la
184 e l’imagination figure le sens du concret chez un homme .) ⁂ « Car le phénomène de l’art est un phénomène d’incarnation (ce qu
185 ravail éducatif. Car il porterait l’attention des hommes sur le concret de l’existence, les détournant de ce fameux « pratique
186 s sa prière. Et c’est pourquoi le poète, Ramuz, l’ homme qui vit concrètement les grands mythes et qui les réalise dans sa vis
187 ds mythes et qui les réalise dans sa vision — cet homme sera toujours en puissance d’aujourd’hui, enraciné profondément dans
188 araître le grand, c’est-à-dire on voit paraître l’ homme dans sa grandeur, c’est-à-dire dans l’élémentaire : un être qui est n
189 se que Ramuz. Sa conception tragique du sort de l’ homme suffirait à l’attester. Mais plus sûrement encore son acceptation pro
190 e de cette impression à la lecture de Taille de l’ homme , petit ouvrage consacré à définir l’opposition cosmique du christiani
191 du collectivisme qu’il prononça dans Taille de l’ homme une signification et une portée humaine dont les bourgeois eussent dû
192 tissement du marxisme : l’isolement cosmique de l’ homme . Quoi qu’il en dise, d’ailleurs, il dit plus que ses arguments. On pe
193 nous le fait voir tout aussi bien que Taille de l’ homme  : Ramuz est présent à ce monde, — eux, ils essaient de le recomposer
194 es et se méfie des mécaniques interposées entre l’ homme et les choses. Aussi bien n’éprouve-t-il pas le besoin de s’affirmer
195 uvre, l’auteur aux prises avec certaine idée de l’ homme dans sa tête, nous dirons que ce sont les deux moitiés d’une figure.
196 Ce n’est pas là l’œil d’un idéaliste ; mais d’un homme qui choisit parmi les choses qui se tiennent à hauteur d’homme, et qu
197 isit parmi les choses qui se tiennent à hauteur d’ homme , et qui résistent à la pénétration d’un regard ferme et appuyé : œil
198 Ramuz à tout excès d’élaboration des images. Cet homme ne poussera jamais la volonté de style jusqu’au système et à l’abstra
199 . Et ce n’est point en haine de la facilité qu’un homme recherchera jamais l’effort : mais par goût de l’effort. Si Ramuz ten
200 tact avec la matière résistante et le risque de l’ homme créateur de sa forme. Si Ramuz n’aime pas les machines, s’il refuse l
201 chose brute exige le plus dur effort, parce que l’ homme est le plus humain là où les choses et les êtres attendent tout de so
202 mun un Père et une Mère, où la grande parenté des hommes est entre-aperçue pour un instant. Car c’est à la réapercevoir que te
203 autre chose. Nous atteignons pour un instant à l’ homme des commencements, à l’homme d’avant la malédiction, d’avant la grand
204 pour un instant à l’homme des commencements, à l’ homme d’avant la malédiction, d’avant la grande première bifurcation dont c
205 i Ramuz (c’est Une Main) je lis ceci : « Certains hommes tiennent pour un gain tout ce qui leur rapporte une facilité ; moi je
206 onne. Je vois, j’apprends, j’entends la voix d’un homme . N’est-ce pas assez ? Cette voix n’est-elle pas émouvante ? — Oui, c’
207 s émouvante ? — Oui, c’est beaucoup, la voix d’un homme . C’est assez rare dans la littérature. Qui voudrait exiger davantage 
208 e Ramuz ne veut pas esquiver. Voici le temps où l’ homme se voit mis en demeure de déclarer ses origines et ses fins. Voici le
209 rer ses origines et ses fins. Voici le temps où l’ homme est attaqué par des puissances qui veulent son abdication totale, — o
210 on pouvoir ; mais la parole n’appartient plus à l’ homme . Au comble de nous-mêmes il s’agit d’autre chose que de nous. « Tout
211 ence au monde et à soi-même, — l’originalité de l’ homme « radical ». Ramuz l’a fait plus qu’aucun de nos maîtres. De lui donc
212 même un silence, laisse une trace au visage de l’ homme , modifie sa forme existante. « La figure a été faite sur la vérité et
213 issant de l’organique empêchera toujours certains hommes de travailler activement à consommer les ruptures nécessaires. Dans l
214 s ruptures nécessaires. Dans la mesure où de tels hommes incarnent déjà les valeurs que la révolution veut instaurer, leur att
215 ’il résulte d’une mise en présence effective de l’ homme et de ce qui résiste à l’homme. C’est le contraire de l’activisme au
216 nce effective de l’homme et de ce qui résiste à l’ homme . C’est le contraire de l’activisme au sens américain, qui cherche par
9 1944, Les Personnes du drame. Sincérité et authenticité — L’Art poétique de Claudel
217 us apte à ranimer une communion vivante entre les hommes , se trouve produire exactement l’effet contraire : son succès même va
218 d’un génie « catholique », isolé de la foule des hommes , par ce qui manifeste, justement sa volonté de catholicité ! ⁂ Non qu
219  veulent dire » s’assemblent en propositions (à l’ homme ), seul discours proprement cohérent, puisqu’il ne tire ses règles et
220 es d’un relâchement originel. Rompre le lien de l’ homme avec son origine, c’est rompre aussi sa communion avec la fin univers
221 ssi sa communion avec la fin universelle. Alors l’ homme se complaît dans une fin qu’il fait sienne, c’est-à-dire qu’il s’isol
222 sa mort. Mais l’œuvre du poète, la vocation de l’ homme , la charité cosmique de la personne chrétienne identiquement, c’est a
223 nom, qui désigne la chose, appelle un geste de l’ homme pour cette chose. Le verbe, désignant ce geste appelle une phrase, un
224 une phrase, un rythme d’actes concertés. Ainsi l’ homme se trouve mis « en communication avec la source continue qu’il contie
225 provoque, le verbe exprime ainsi la vocation de l’ homme qui le profère. « L’acte par lequel l’homme atteste la permanence des
226 de l’homme qui le profère. « L’acte par lequel l’ homme atteste la permanence des choses, par lequel, en dehors du temps, en
227 Nous voici donc « chargés du rôle d’origine ». L’ homme est le « sceau de l’authenticité ». Il est, par son action recréatric
228 lus de distinction du matériel et du spirituel. L’ homme « se connaît donc à son pas et à l’extension de ses mains, à la facil
10 1944, Les Personnes du drame. Une maladie de la personne — Le romantisme allemand
229 e claire est la première conquête spirituelle des hommes angoissés par le mystère d’une Nature hostile et mouvante. La parole
230 victoire, lorsqu’elle est trop complète laisse l’ homme sur un sentiment de déception et d’indicible appauvrissement. Le mond
231 an de l’humanité. Et tandis que dans sa panique l’ homme primitif s’était tourné vers la raison libératrice, au terme des époq
232 ce, au terme des époques appauvries de mystère, l’ homme sceptique se rejette avec passion vers les « aspects nocturnes » de s
233 orthodoxie, d’une dernière crainte de confondre l’ homme et Dieu. Troxler esquive non sans adresse la difficulté et le choix :
234 maladies une vue nouvelle sur les structures de l’ homme , peut-être pouvons-nous demander à la biographie des romantiques quel
235 « Sous quelque angle qu’on veuille l’examiner, l’ homme trouve en lui une blessure qui déchire tout ce qui vit en lui, et que
236 llustre une relation profonde et constante dans l’ homme  : celle qui existe entre le recours à l’indicible et la fuite devant
237 istes, à bon marché — de certaines attitudes de l’ homme en face de son destin et de sa personne. Le national-socialisme appar
238 sort de chaque personne. Oui, qu’il s’agisse de l’ homme seul ou des masses, ce drame sera toujours le même : c’est l’affronte