1 1924, Articles divers (1924–1930). M. de Montherlant, le sport et les jésuites (9 février 1924)
1 M. de Montherlant, le sport et les jésuites (9 février 1924)a M. de Montherlant est cons
2 M. de Montherlant, le sport et les jésuites (9 février 1924)a M. de Montherlant est considéré par plu
3 par plusieurs comme l’un des héritiers de Barrès. Le rapprochement est peut-être prématuré, tout au plus peut-on dire qu’à
4 ut-être prématuré, tout au plus peut-on dire qu’à l’ heure présente déjà, son œuvre, comme celle de Barrès, nous offre plus
5 u moins, cette inquiétude libératrice que produit la recherche de la vérité. Dès son premier livre, il s’est montré tout e
6 nquiétude libératrice que produit la recherche de la vérité. Dès son premier livre, il s’est montré tout entier, il a brav
7 out entier, il a bravement affirmé son unité. Car le temps n’est plus, où les jeunes gens se faisaient, avec sérieux, des
8 nt affirmé son unité. Car le temps n’est plus, où les jeunes gens se faisaient, avec sérieux, des âmes exceptionnellement c
9 langue plus compliquée encore et nuancée jusqu’à l’ ennui. La guerre a donné le coup de grâce à cet esthétisme énervant qu
10 lus compliquée encore et nuancée jusqu’à l’ennui. La guerre a donné le coup de grâce à cet esthétisme énervant qu’on appel
11 ore et nuancée jusqu’à l’ennui. La guerre a donné le coup de grâce à cet esthétisme énervant qu’on appelle symbolisme ; et
12 appelle symbolisme ; et elle a donné naissance à la doctrine de M. de Montherlant, qui en est sortie toute formée et casq
13 t, qui en est sortie toute formée et casquée pour la lutte de l’après-guerre. ⁂ Deux philosophies, affirme-t-il, se disput
14 t sortie toute formée et casquée pour la lutte de l’ après-guerre. ⁂ Deux philosophies, affirme-t-il, se disputent le monde
15 . ⁂ Deux philosophies, affirme-t-il, se disputent le monde. L’une vient de l’Orient, et insinue dans le monde romain les v
16 firme-t-il, se disputent le monde. L’une vient de l’ Orient, et insinue dans le monde romain les virus du christianisme, de
17 e monde. L’une vient de l’Orient, et insinue dans le monde romain les virus du christianisme, de la Réforme, de la Révolut
18 ient de l’Orient, et insinue dans le monde romain les virus du christianisme, de la Réforme, de la Révolution et du romanti
19 ns le monde romain les virus du christianisme, de la Réforme, de la Révolution et du romantisme, les concepts de liberté e
20 ain les virus du christianisme, de la Réforme, de la Révolution et du romantisme, les concepts de liberté et de progrès, l
21 de la Réforme, de la Révolution et du romantisme, les concepts de liberté et de progrès, l’humanitarisme, le bolchévisme. L
22 omantisme, les concepts de liberté et de progrès, l’ humanitarisme, le bolchévisme. L’autre philosophie est celle de l’anti
23 ncepts de liberté et de progrès, l’humanitarisme, le bolchévisme. L’autre philosophie est celle de l’antique Rome, qui a i
24 le bolchévisme. L’autre philosophie est celle de l’ antique Rome, qui a inspiré le catholicisme, la Renaissance, le tradit
25 sophie est celle de l’antique Rome, qui a inspiré le catholicisme, la Renaissance, le traditionnisme et le nationalisme. L
26 de l’antique Rome, qui a inspiré le catholicisme, la Renaissance, le traditionnisme et le nationalisme. L’Orient efféminé 
27 e, qui a inspiré le catholicisme, la Renaissance, le traditionnisme et le nationalisme. L’Orient efféminé ; — en face : l’
28 atholicisme, la Renaissance, le traditionnisme et le nationalisme. L’Orient efféminé ; — en face : l’Ordre romain. Or l’or
29 enaissance, le traditionnisme et le nationalisme. L’ Orient efféminé ; — en face : l’Ordre romain. Or l’ordre, pour M. de M
30 le nationalisme. L’Orient efféminé ; — en face : l’ Ordre romain. Or l’ordre, pour M. de Montherlant comme pour Maurras, e
31 e nationalisme. L’Orient efféminé ; — en face : l’ Ordre romain. Or l’ordre, pour M. de Montherlant comme pour Maurras, est ce
32 ’Orient efféminé ; — en face : l’Ordre romain. Or l’ ordre, pour M. de Montherlant comme pour Maurras, est ce qu’il importe
33 rient efféminé ; — en face : l’Ordre romain. Or l’ ordre , pour M. de Montherlant comme pour Maurras, est ce qu’il importe de s
34 u monde, qui n’est en rien différente de celle de l’ Action française ; remarquons toutefois cette séparation, que Maurras
35 franchement, du catholicisme et du christianisme, le christianisme étant dans le même camp que la Réforme. M. de Montherla
36 et du christianisme, le christianisme étant dans le même camp que la Réforme. M. de Montherlant n’est décidément pas phil
37 sme, le christianisme étant dans le même camp que la Réforme. M. de Montherlant n’est décidément pas philosophe. Peut-être
38 s philosophe. Peut-être ne lui a-t-il manqué pour le devenir que le temps de méditer : il a quitté le collège jésuite pour
39 eut-être ne lui a-t-il manqué pour le devenir que le temps de méditer : il a quitté le collège jésuite pour la tranchée, p
40 le devenir que le temps de méditer : il a quitté le collège jésuite pour la tranchée, puis « le sport l’a saisi aux patte
41 de méditer : il a quitté le collège jésuite pour la tranchée, puis « le sport l’a saisi aux pattes de la guerre encore co
42 uitté le collège jésuite pour la tranchée, puis «  le sport l’a saisi aux pattes de la guerre encore contus de huit coups d
43 collège jésuite pour la tranchée, puis « le sport l’ a saisi aux pattes de la guerre encore contus de huit coups de griffes
44 tranchée, puis « le sport l’a saisi aux pattes de la guerre encore contus de huit coups de griffes et chaud de l’étreinte
45 ncore contus de huit coups de griffes et chaud de l’ étreinte du fauve merveilleux ». Il n’a pas eu le temps de se ressaisi
46 l’étreinte du fauve merveilleux ». Il n’a pas eu le temps de se ressaisir, le sport prolongeant pour lui, d’une façon obs
47 illeux ». Il n’a pas eu le temps de se ressaisir, le sport prolongeant pour lui, d’une façon obsédante, le rythme de la gu
48 port prolongeant pour lui, d’une façon obsédante, le rythme de la guerre. Du moins a-t-il ainsi évité le choc fatal pour t
49 ant pour lui, d’une façon obsédante, le rythme de la guerre. Du moins a-t-il ainsi évité le choc fatal pour tant d’autres
50 rythme de la guerre. Du moins a-t-il ainsi évité le choc fatal pour tant d’autres du guerrier et du bourgeois. Dernièreme
51 rrier et du bourgeois. Dernièrement, il abandonna le stade et rentra dans le monde où nous vivons tous. Écœuré du désordre
52 ernièrement, il abandonna le stade et rentra dans le monde où nous vivons tous. Écœuré du désordre général, il cherche des
53 s, et nous tend les premiers qui lui tombent sous la main : le sport et la morale romaine. Dans sa hâte salvatrice, M. de
54 tend les premiers qui lui tombent sous la main : le sport et la morale romaine. Dans sa hâte salvatrice, M. de Montherlan
55 emiers qui lui tombent sous la main : le sport et la morale romaine. Dans sa hâte salvatrice, M. de Montherlant ne s’est m
56 ontrepoisons pouvaient être administrés ensemble. L’ opération faite, il a pourtant fallu la justifier, ce qui n’a pas été
57 ensemble. L’opération faite, il a pourtant fallu la justifier, ce qui n’a pas été sans quelques tours de passe-passe de l
58 n peu intimidantes. Toute une partie du Paradis à l’ ombre des épées 1, son dernier livre, est consacrée à « fondre dans un
59 consacrée à « fondre dans une unité supérieure » l’ antinomie de l’esprit catholique et de l’esprit sportif. « On se fait
60 fondre dans une unité supérieure » l’antinomie de l’ esprit catholique et de l’esprit sportif. « On se fait son unité comme
61 rieure » l’antinomie de l’esprit catholique et de l’ esprit sportif. « On se fait son unité comme on peut », avoue-t-il fra
62 radoxal de vouloir unir dans une même philosophie la morale jésuite, faite de règles et de contraintes imposées dans le bu
63 , faite de règles et de contraintes imposées dans le but de restreindre la liberté et l’initiative individuelles, et la mo
64 e contraintes imposées dans le but de restreindre la liberté et l’initiative individuelles, et la morale des sports anglai
65 imposées dans le but de restreindre la liberté et l’ initiative individuelles, et la morale des sports anglais, morale qui
66 ndre la liberté et l’initiative individuelles, et la morale des sports anglais, morale qui veut former des hommes maîtres
67 ment un des premiers Français qui ait compris que le but du sport n’est pas la performance, mais le style et la méthode, c
68 ais qui ait compris que le but du sport n’est pas la performance, mais le style et la méthode, c’est-à-dire la formation d
69 ue le but du sport n’est pas la performance, mais le style et la méthode, c’est-à-dire la formation du caractère, en défin
70 sport n’est pas la performance, mais le style et la méthode, c’est-à-dire la formation du caractère, en définitive. Mais
71 rmance, mais le style et la méthode, c’est-à-dire la formation du caractère, en définitive. Mais on peut oublier la partie
72 du caractère, en définitive. Mais on peut oublier la partie doctrinaire de cette œuvre, elle ne lui est pas indispensable 
73 « Ces simplifications valent ce que valent toutes les simplifications, qu’on les appelle ou non idées générales, et j’avoue
74 t ce que valent toutes les simplifications, qu’on les appelle ou non idées générales, et j’avoue bien volontiers qu’il n’es
75 e bien volontiers qu’il n’est pas une opinion sur le monde à laquelle je ne préfère le monde ». Je préfère à la dogmatique
76 une opinion sur le monde à laquelle je ne préfère le monde ». Je préfère à la dogmatique de M. de Montherlant son admirabl
77 à laquelle je ne préfère le monde ». Je préfère à la dogmatique de M. de Montherlant son admirable lyrisme de poète du sta
78 et calme » des « grands corps athlétiques ». Sur le stade au soleil se déploient les équipes, et l’équipier Montherlant l
79 thlétiques ». Sur le stade au soleil se déploient les équipes, et l’équipier Montherlant les contemple, ému de « cette ivre
80 r le stade au soleil se déploient les équipes, et l’ équipier Montherlant les contemple, ému de « cette ivresse qui naît de
81 déploient les équipes, et l’équipier Montherlant les contemple, ému de « cette ivresse qui naît de l’ordre », et aussi par
82 les contemple, ému de « cette ivresse qui naît de l’ ordre », et aussi parfois, de la pensée que « sur ces corps de l’entre
83 s contemple, ému de « cette ivresse qui naît de l’ ordre  », et aussi parfois, de la pensée que « sur ces corps de l’entre-deux
84 resse qui naît de l’ordre », et aussi parfois, de la pensée que « sur ces corps de l’entre-deux-guerres, … cinq sur dix so
85 ussi parfois, de la pensée que « sur ces corps de l’ entre-deux-guerres, … cinq sur dix sont désignés… ». Voici passer un c
86 Voici passer un coureur : « À peine a-t-il touché la piste d’herbe, c’est une allégresse héroïque qu’infuse à son corps la
87 est une allégresse héroïque qu’infuse à son corps la douce matière. L’air et le sol, dieux rivaux, se le disputent, et il
88 héroïque qu’infuse à son corps la douce matière. L’ air et le sol, dieux rivaux, se le disputent, et il oscille entre l’un
89 qu’infuse à son corps la douce matière. L’air et le sol, dieux rivaux, se le disputent, et il oscille entre l’un et l’aut
90 douce matière. L’air et le sol, dieux rivaux, se le disputent, et il oscille entre l’un et l’autre. Ainsi mon art, entre
91 lée, bondissante et posée, est pleine du désir de l’ air. Danse-t-il sur une musique que je n’entends pas ? » — Mais plus q
92 musique que je n’entends pas ? » — Mais plus que le corps en mouvement, c’est la domination de la raison sur ce corps qui
93  ? » — Mais plus que le corps en mouvement, c’est la domination de la raison sur ce corps qui est exaltante, et c’est cett
94 que le corps en mouvement, c’est la domination de la raison sur ce corps qui est exaltante, et c’est cette domination qui
95 est exaltante, et c’est cette domination qui est le but véritable du sport. On accepte une règle ; on l’assimile, à tel p
96 but véritable du sport. On accepte une règle ; on l’ assimile, à tel point qu’elle n’est plus une entrave à la violence ani
97 ile, à tel point qu’elle n’est plus une entrave à la violence animale déchaînée dans le corps du joueur à la vue de la pra
98 une entrave à la violence animale déchaînée dans le corps du joueur à la vue de la prairie rase où rebondit un ballon. Si
99 ale déchaînée dans le corps du joueur à la vue de la prairie rase où rebondit un ballon. Si l’on considère la vie sociale
100 vue de la prairie rase où rebondit un ballon. Si l’ on considère la vie sociale comme un jeu sérieux dont on respecte les
101 rie rase où rebondit un ballon. Si l’on considère la vie sociale comme un jeu sérieux dont on respecte les règles, non plu
102 vie sociale comme un jeu sérieux dont on respecte les règles, non plus comme une lutte sauvage et déloyale, la morale d’équ
103 es, non plus comme une lutte sauvage et déloyale, la morale d’équipe devient toute la morale, et les qualités indispensabl
104 age et déloyale, la morale d’équipe devient toute la morale, et les qualités indispensables au bon équipier deviennent les
105 e, la morale d’équipe devient toute la morale, et les qualités indispensables au bon équipier deviennent les qualités du pa
106 ualités indispensables au bon équipier deviennent les qualités du parfait citoyen : juste vision de la réalité, abnégation,
107 les qualités du parfait citoyen : juste vision de la réalité, abnégation, sentiment du devoir de chacun envers l’ensemble
108 abnégation, sentiment du devoir de chacun envers l’ ensemble (Montherlant insiste plutôt sur le sentiment des hiérarchies
109 envers l’ensemble (Montherlant insiste plutôt sur le sentiment des hiérarchies que sur celui de la solidarité, comme bien
110 sur le sentiment des hiérarchies que sur celui de la solidarité, comme bien l’on pense). Enfin, enseignement plus général
111 rchies que sur celui de la solidarité, comme bien l’ on pense). Enfin, enseignement plus général de la morale sportive : « 
112 l’on pense). Enfin, enseignement plus général de la morale sportive : « la règle de rester en dedans de son action, appli
113 seignement plus général de la morale sportive : «  la règle de rester en dedans de son action, application de l’immense axi
114 de rester en dedans de son action, application de l’ immense axiome formulé par Hésiode et qui gouverna le monde ancien : L
115 mmense axiome formulé par Hésiode et qui gouverna le monde ancien : La moitié est plus grande que le tout ». Le sport comm
116 ulé par Hésiode et qui gouverna le monde ancien : La moitié est plus grande que le tout ». Le sport comme un apprentissage
117 a le monde ancien : La moitié est plus grande que le tout ». Le sport comme un apprentissage de la vie : tout servira plus
118 ancien : La moitié est plus grande que le tout ». Le sport comme un apprentissage de la vie : tout servira plus tard : Ô
119 que le tout ». Le sport comme un apprentissage de la vie : tout servira plus tard : Ô garçons, il y a un brin du myrte ci
120 de laurier. Vous n’êtes pas couronnés d’olivier. La main connaît la main dans la prise du témoin. L’épaule connaît l’épau
121 s n’êtes pas couronnés d’olivier. La main connaît la main dans la prise du témoin. L’épaule connaît l’épaule dans le talon
122 couronnés d’olivier. La main connaît la main dans la prise du témoin. L’épaule connaît l’épaule dans le talonnage du ballo
123 La main connaît la main dans la prise du témoin. L’ épaule connaît l’épaule dans le talonnage du ballon. Le regard connaît
124 la main dans la prise du témoin. L’épaule connaît l’ épaule dans le talonnage du ballon. Le regard connaît le regard dans l
125 a prise du témoin. L’épaule connaît l’épaule dans le talonnage du ballon. Le regard connaît le regard dans la course d’équ
126 ule connaît l’épaule dans le talonnage du ballon. Le regard connaît le regard dans la course d’équipe. Le cœur connaît la
127 le dans le talonnage du ballon. Le regard connaît le regard dans la course d’équipe. Le cœur connaît la présence muette et
128 nnage du ballon. Le regard connaît le regard dans la course d’équipe. Le cœur connaît la présence muette et sûre. Toutes c
129 regard connaît le regard dans la course d’équipe. Le cœur connaît la présence muette et sûre. Toutes ces choses ne se font
130 e regard dans la course d’équipe. Le cœur connaît la présence muette et sûre. Toutes ces choses ne se font pas en vain. Le
131 t sûre. Toutes ces choses ne se font pas en vain. Le chef se dresse entre les dix qui sont à lui. Il dit : « Je ne demande
132 s ne se font pas en vain. Le chef se dresse entre les dix qui sont à lui. Il dit : « Je ne demande pas qu’on m’aime. Je dem
133 t purs courages, donnez-moi votre silence jusqu’à l’ heure. Que je taise votre mot de ralliement, paradis à l’ombre des épé
134 . Que je taise votre mot de ralliement, paradis à l’ ombre des épées. Rien de moins artificiellement moderne que ce lyrism
135 nt moderne que ce lyrisme sobre et prenant : « Si l’ on s’échauffe, s’échauffer sur de la précision. » On évitera ainsi tou
136 renant : « Si l’on s’échauffe, s’échauffer sur de la précision. » On évitera ainsi tout niais romantisme. Je sais bien ce
137 ais romantisme. Je sais bien ce qu’on objectera : le sport ainsi compris, plus que l’apprentissage de la vie, est l’appren
138 u’on objectera : le sport ainsi compris, plus que l’ apprentissage de la vie, est l’apprentissage de la guerre, dira-t-on.
139 sport ainsi compris, plus que l’apprentissage de la vie, est l’apprentissage de la guerre, dira-t-on. M. de Montherlant r
140 compris, plus que l’apprentissage de la vie, est l’ apprentissage de la guerre, dira-t-on. M. de Montherlant répondra : no
141 l’apprentissage de la vie, est l’apprentissage de la guerre, dira-t-on. M. de Montherlant répondra : non, car la faiblesse
142 dira-t-on. M. de Montherlant répondra : non, car la faiblesse est le péché capital pour le sportif. Or c’est la faiblesse
143 Montherlant répondra : non, car la faiblesse est le péché capital pour le sportif. Or c’est la faiblesse « qui fait lever
144 : non, car la faiblesse est le péché capital pour le sportif. Or c’est la faiblesse « qui fait lever la haine ». « La faib
145 se est le péché capital pour le sportif. Or c’est la faiblesse « qui fait lever la haine ». « La faiblesse est mère du com
146 e sportif. Or c’est la faiblesse « qui fait lever la haine ». « La faiblesse est mère du combat. » C’est donc à un lacédém
147 c’est la faiblesse « qui fait lever la haine ». «  La faiblesse est mère du combat. » C’est donc à un lacédémonisme renouve
148 mpérée de raison. Ce qu’on en peut retenir, c’est la méthode, car je crois qu’elle sert mieux la démocratie que l’Église r
149 c’est la méthode, car je crois qu’elle sert mieux la démocratie que l’Église romaine, quoi qu’en pense M. de Montherlant.
150 car je crois qu’elle sert mieux la démocratie que l’ Église romaine, quoi qu’en pense M. de Montherlant. Et voici, ô parado
151 Kant qui écrit : « C’est sur des maximes, non sur la discipline, qu’il faut fonder la conduite des jeunes gens : celle-ci
152 maximes, non sur la discipline, qu’il faut fonder la conduite des jeunes gens : celle-ci empêche les abus, mais celles-là
153 er la conduite des jeunes gens : celle-ci empêche les abus, mais celles-là forment l’esprit. » M. de Montherlant illustre s
154 celle-ci empêche les abus, mais celles-là forment l’ esprit. » M. de Montherlant illustre sa propre pensée de cette citatio
155 rait appeler une « morale constructive » : porter l’ effort sur ce qui doit être, et ce qui ne doit pas être tombera de soi
156 e qui ne doit pas être tombera de soi-même. Ainsi l’ athlète à l’entraînement ne s’épuise-t-il pas à combattre certaines fa
157 t pas être tombera de soi-même. Ainsi l’athlète à l’ entraînement ne s’épuise-t-il pas à combattre certaines faiblesses : i
158 certaines faiblesses : il développe ses qualités, le reste s’arrange de soi-même. ⁂ M. de Montherlant, qui a quitté le sta
159 ge de soi-même. ⁂ M. de Montherlant, qui a quitté le stade, se rendra mieux compte à distance de la contradiction sur laqu
160 té le stade, se rendra mieux compte à distance de la contradiction sur laquelle est bâtie son œuvre. L’intéressant sera de
161 a contradiction sur laquelle est bâtie son œuvre. L’ intéressant sera de voir ce qu’il sacrifiera, de la morale sportive ou
162 ’intéressant sera de voir ce qu’il sacrifiera, de la morale sportive ou de la morale jésuite. Mais enfin, voici un homme,
163 ce qu’il sacrifiera, de la morale sportive ou de la morale jésuite. Mais enfin, voici un homme, et non plus seulement un
164 me de lettres. Un homme en qui s’équilibrent déjà l’ enthousiasme d’une jeunesse saine et la retenue de l’âge mûr, cette « 
165 brent déjà l’enthousiasme d’une jeunesse saine et la retenue de l’âge mûr, cette « limitation » que lui ont enseigné le sp
166 nthousiasme d’une jeunesse saine et la retenue de l’ âge mûr, cette « limitation » que lui ont enseigné le sport et les anc
167 ge mûr, cette « limitation » que lui ont enseigné le sport et les anciens. J’admets que ses « idées générales » ne vaillen
168 e « limitation » que lui ont enseigné le sport et les anciens. J’admets que ses « idées générales » ne vaillent rien2 ; sa
169 morale virile nous est néanmoins plus proche que la sensualité vaguement chrétienne de tel autre écrivain catholique. Et
170 e. Et son lyrisme, encore un peu brutal, il saura le dompter, et atteindre au classicisme véritable. Voici un constructeur
171 ut lutter contre lui, nous savons qu’il observera les règles. Saluons-le donc du salut des équipes avant le match : « En l’
172 , nous savons qu’il observera les règles. Saluons- le donc du salut des équipes avant le match : « En l’honneur d’Henry de
173 ègles. Saluons-le donc du salut des équipes avant le match : « En l’honneur d’Henry de Montherlant, hip, hip, hurrah ! »
174 e donc du salut des équipes avant le match : « En l’ honneur d’Henry de Montherlant, hip, hip, hurrah ! » 1. Éditions Gra
175 hip, hurrah ! » 1. Éditions Grasset, Paris. 2. L’ attitude de M. de Montherlant légitime une telle « simplification ».
176 ont Denis de, « [Compte rendu] M. de Montherlant, le sport et les jésuites », La Semaine littéraire, Genève, 9 février 192
177 , « [Compte rendu] M. de Montherlant, le sport et les jésuites », La Semaine littéraire, Genève, 9 février 1924, p. 63-65.
178 u] M. de Montherlant, le sport et les jésuites », La Semaine littéraire, Genève, 9 février 1924, p. 63-65.
2 1924, Articles divers (1924–1930). Conférence de Conrad Meili sur « Les ismes dans la peinture moderne » (30 octobre 1924)
179 Conférence de Conrad Meili sur «  Les ismes dans la peinture moderne » (30 octobre 1924)b Lundi soir, da
180 Conférence de Conrad Meili sur « Les ismes dans la peinture moderne » (30 octobre 1924)b Lundi soir, dans la salle du
181 moderne » (30 octobre 1924)b Lundi soir, dans la salle du Lyceum, M. Conrad Meili parla des écoles qui représentent la
182 M. Conrad Meili parla des écoles qui représentent la peinture française, des débuts du xixe siècle à nos jours. Partis du
183 ours. Partis du classicisme de David et d’Ingres, les peintres français ont accompli, durant le xixe siècle, une explorati
184 ngres, les peintres français ont accompli, durant le xixe siècle, une exploration merveilleuse dans les domaines du roman
185 e xixe siècle, une exploration merveilleuse dans les domaines du romantisme, du naturalisme, de l’impressionnisme, pour ab
186 ns les domaines du romantisme, du naturalisme, de l’ impressionnisme, pour aboutir enfin dans ces impasses : cubisme et fut
187 r enfin dans ces impasses : cubisme et futurisme. Les voici revenus, après cent-vingt-cinq ans, à peu près à leur point de
188 r technique (contrairement à ce que pense souvent le public), ils préparent l’avènement d’un classicisme nouveau. M. Meili
189 à ce que pense souvent le public), ils préparent l’ avènement d’un classicisme nouveau. M. Meili a mis en évidence cette c
190 blic), ils préparent l’avènement d’un classicisme nouveau . M. Meili a mis en évidence cette courbe de la peinture moderne avec
191 uveau. M. Meili a mis en évidence cette courbe de la peinture moderne avec une netteté et un relief remarquable. Les œuvre
192 oderne avec une netteté et un relief remarquable. Les œuvres de cet artiste, qu’on a pu voir à la Rose d’Or témoignaient de
193 ble. Les œuvres de cet artiste, qu’on a pu voir à la Rose d’Or témoignaient de ces mêmes qualités : car la façon de peindr
194 ose d’Or témoignaient de ces mêmes qualités : car la façon de peindre correspond à la façon de penser du peintre. Souhaito
195 s qualités : car la façon de peindre correspond à la façon de penser du peintre. Souhaitons d’entendre encore M. Meili. Es
196 endre encore M. Meili. Est-il besoin de souligner l’ importance de telles prises de contact entre artiste et public ? b.
3 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Henry de Montherlant, Chant funèbre pour les morts de Verdun (mars 1925)
197 Henry de Montherlant, Chant funèbre pour les morts de Verdun (mars 1925)a Henry de Montherlant, héritier d’une
198 leresque, mène sa vie comme une ardente aventure. Les épisodes s’appellent : collège, guerre, sport… la Relève du Matin, le
199 es épisodes s’appellent : collège, guerre, sport… la Relève du Matin, le Songe, les Olympiques. Et voici le Chant funèbre,
200 ent : collège, guerre, sport… la Relève du Matin, le Songe, les Olympiques. Et voici le Chant funèbre, adieu à la guerre e
201 ège, guerre, sport… la Relève du Matin, le Songe, les Olympiques. Et voici le Chant funèbre, adieu à la guerre et aux jeux,
202 lève du Matin, le Songe, les Olympiques. Et voici le Chant funèbre, adieu à la guerre et aux jeux, avant de partir pour de
203 es Olympiques. Et voici le Chant funèbre, adieu à la guerre et aux jeux, avant de partir pour de nouvelles conquêtes. Terr
204 à la guerre et aux jeux, avant de partir pour de nouvelles conquêtes. Terriblement lucide, ce regard en arrière. Montherlant est
205 r pour ses erreurs plus encore que pour celles de l’ adversaire, ce qui est beaucoup dire. Il y avait dans le Paradis je ne
206 rsaire, ce qui est beaucoup dire. Il y avait dans le Paradis je ne sais quel relent de barbarie, un assez malsain goût du
207 alsain goût du sang. Tout cela s’est purifié dans le Chant funèbre. Et une phrase telle que « … Nous sommes sûrs de ne pas
208 e, à notre place modeste, si peu que ce soit pour la paix », c’est une affirmation qui d’un coup condamne beaucoup d’antér
209 pour avoir contemplé Verdun, en tête à tête avec le génie de la mort. Mais alors, à quoi sert d’exalter, d’une si émouvan
210 contemplé Verdun, en tête à tête avec le génie de la mort. Mais alors, à quoi sert d’exalter, d’une si émouvante sorte, le
211 à quoi sert d’exalter, d’une si émouvante sorte, les soldats déjà légendaires de Verdun, et ce « haut ton de vie » qu’ils
212 justifie son livre : « Ranimons ces horreurs pour les vouloir éviter, et ces grandeurs pour n’en pas trop descendre ». N’es
213 ce pas une éclatante mise au point ? Et venant de l’ auteur du Songe, d’un de ces hommes qui « descendirent » du front dans
214 cette absence de haine ; cette épouvante, devant la guerre… proviennent de plus d’humanité ou de moins de santé ». À main
215 et repart. Vers quels buts ? On verra plus tard. L’ urgent c’est d’avancer. Et l’on atteindra peut-être ces régions élevée
216 On verra plus tard. L’urgent c’est d’avancer. Et l’ on atteindra peut-être ces régions élevées où les éléments contraires
217 t l’on atteindra peut-être ces régions élevées où les éléments contraires s’unissent dans la grandeur. La paix qu’il appell
218 levées où les éléments contraires s’unissent dans la grandeur. La paix qu’il appelle, c’est autre chose que l’absence de g
219 éléments contraires s’unissent dans la grandeur. La paix qu’il appelle, c’est autre chose que l’absence de guerre, c’est
220 eur. La paix qu’il appelle, c’est autre chose que l’ absence de guerre, c’est une paix que travaillerait le levain des vert
221 sence de guerre, c’est une paix que travaillerait le levain des vertus guerrières. « Il faut que la paix, ce soit vivre. »
222 it le levain des vertus guerrières. « Il faut que la paix, ce soit vivre. » Par tout un livre libéré de souvenirs héroïque
223 e souvenirs héroïques, peut-être trop grands pour la paix, c’est vers de plus sereines exaltations qu’il va porter son ard
224 ations qu’il va porter son ardeur. Il va chercher le souvenir de l’aventure antique, et dans ce qui fut Rome ou la Grèce,
225 porter son ardeur. Il va chercher le souvenir de l’ aventure antique, et dans ce qui fut Rome ou la Grèce, revivre sa trad
226 de l’aventure antique, et dans ce qui fut Rome ou la Grèce, revivre sa tradition. Toute son œuvre pourrait se définir : la
227 tradition. Toute son œuvre pourrait se définir : la lutte d’un tempérament avec la réalité. Tantôt c’est l’un qui veut pl
228 rrait se définir : la lutte d’un tempérament avec la réalité. Tantôt c’est l’un qui veut plier l’autre à sa violence — le
229 c’est l’un qui veut plier l’autre à sa violence — le Paradis —, tantôt c’est l’autre qui impose son absolu. Une soumission
230 rement consentie, voilà ce que nous admirons dans le Chant funèbre. Ce mot de grandeur revient souvent lorsqu’on parle de
231 rle de cette œuvre : je ne sais s’il faut en voir la raison dans la force de la personnalité révélée ou dans la noblesse d
232 vre : je ne sais s’il faut en voir la raison dans la force de la personnalité révélée ou dans la noblesse de sa soumission
233 sais s’il faut en voir la raison dans la force de la personnalité révélée ou dans la noblesse de sa soumission. Périlleuse
234 dans la force de la personnalité révélée ou dans la noblesse de sa soumission. Périlleuse carrière de la grandeur où Mont
235 noblesse de sa soumission. Périlleuse carrière de la grandeur où Montherlant est entré de plain-pied, en même temps que da
236 t est entré de plain-pied, en même temps que dans la guerre. Que de sacrifices ne lui devra-t-il pas offrir ainsi les roma
237 de sacrifices ne lui devra-t-il pas offrir ainsi les romans « intéressants » ou « curieux » ; le « grand lyrisme » à la Ch
238 insi les romans « intéressants » ou « curieux » ; le « grand lyrisme » à la Chateaubriand, voire à la Barrès, dont il est
239 essants » ou « curieux » ; le « grand lyrisme » à la Chateaubriand, voire à la Barrès, dont il est capable et qu’il lui fa
240 le « grand lyrisme » à la Chateaubriand, voire à la Barrès, dont il est capable et qu’il lui faudra livrer au « feu de vé
241 r, s’il veut rester digne de son rôle et vraiment le coryphée d’une génération casquée. Feu consumateur de toute faiblesse
242 en notre siècle, qu’elle paraît parfois, lorsque la tourmente humaine ne la moleste ni ne l’avive plus, cruelle et désolé
243 e paraît parfois, lorsque la tourmente humaine ne la moleste ni ne l’avive plus, cruelle et désolée comme cette « flamme p
244 lorsque la tourmente humaine ne la moleste ni ne l’ avive plus, cruelle et désolée comme cette « flamme pensante » dans l’
245 e et désolée comme cette « flamme pensante » dans l’ ossuaire de Douaumont. Puis la vie l’exalte de nouveau d’un large vent
246 mme pensante » dans l’ossuaire de Douaumont. Puis la vie l’exalte de nouveau d’un large vent de joie. a. Rougemont Deni
247 sante » dans l’ossuaire de Douaumont. Puis la vie l’ exalte de nouveau d’un large vent de joie. a. Rougemont Denis de, «
248 e rendu] Henry de Montherlant, Chant funèbre pour les morts de Verdun  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genè
4 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Breton, Manifeste du surréalisme (juin 1925)
249 isme (juin 1925)b Sous une « vague de rêves », la logique, dernier agent de liaison de nos esprits, va périr. C’est du
250 ns ce que proclame M. Breton en un manifeste dont la pseudo-nouveauté nous retiendra moins que la significative pauvreté i
251 dont la pseudo-nouveauté nous retiendra moins que la significative pauvreté idéologique et morale qu’il révèle. Le style b
252 tive pauvreté idéologique et morale qu’il révèle. Le style brillant et elliptique qui tend à devenir notre poncif moderne,
253 , — ne réussit pas toujours chez Breton à masquer la banalité de la pensée. D’autant plus que les rares passages où il exp
254 pas toujours chez Breton à masquer la banalité de la pensée. D’autant plus que les rares passages où il expose directement
255 squer la banalité de la pensée. D’autant plus que les rares passages où il expose directement les principes de sa « révolut
256 s que les rares passages où il expose directement les principes de sa « révolution » semblent au contraire tirés de quelque
257 ent, soit par écrit, soit de toute autre manière, le fonctionnement réel de la pensée. Dictée de la pensée en l’absence de
258 de toute autre manière, le fonctionnement réel de la pensée. Dictée de la pensée en l’absence de tout contrôle exercé par
259 e, le fonctionnement réel de la pensée. Dictée de la pensée en l’absence de tout contrôle exercé par la raison, en dehors
260 nnement réel de la pensée. Dictée de la pensée en l’ absence de tout contrôle exercé par la raison, en dehors de toute préo
261 a pensée en l’absence de tout contrôle exercé par la raison, en dehors de toute préoccupation esthétique ou morale. » (p. 
262 te préoccupation esthétique ou morale. » (p. 42). Le surréalisme ne serait-il donc qu’une sorte de méthode des textes géné
263 généralisée ? Point du tout ! Il paraît qu’il est la seule attitude littéraire aujourd’hui concevable. Mais par quelles tr
264 ou moins conscientes M. Breton peut-il préconiser l’ existence d’une littérature fondée sur de tels principes ? Le Rêve est
265 d’une littérature fondée sur de tels principes ? Le Rêve est la seule matière poétique. Dans le monde du Rêve autant de c
266 rature fondée sur de tels principes ? Le Rêve est la seule matière poétique. Dans le monde du Rêve autant de cellules isol
267 pes ? Le Rêve est la seule matière poétique. Dans le monde du Rêve autant de cellules isolées que de rêveurs. Toute poésie
268 que de rêveurs. Toute poésie est incommunicable, le poète étant un simple sténographe de ses rêves. Soit. De ces faits, j
269 pratique : inutile de publier des poèmes. Éluard le comprenait, qui écrivit : « Quand les livres se liront-ils d’eux-même
270 èmes. Éluard le comprenait, qui écrivit : « Quand les livres se liront-ils d’eux-mêmes, sans le secours des lecteurs ? Quan
271  Quand les livres se liront-ils d’eux-mêmes, sans le secours des lecteurs ? Quand les hommes se comprendront-ils individue
272 d’eux-mêmes, sans le secours des lecteurs ? Quand les hommes se comprendront-ils individuellement ? » Que M. Breton donne d
273 our faire un poème » cette mystification est dans la logique de ses principes, mais je lui conteste le droit de faire suiv
274 la logique de ses principes, mais je lui conteste le droit de faire suivre son manifeste de proses — Poisson soluble — qui
275 uble — qui servent d’illustration à sa défense de la poésie pure. Les beautés que j’y vois ne me seraient-elles perceptibl
276 nt d’illustration à sa défense de la poésie pure. Les beautés que j’y vois ne me seraient-elles perceptibles que par le fai
277 ’y vois ne me seraient-elles perceptibles que par le fait d’une fortuite coïncidence entre l’univers du poète et le mien ?
278 que par le fait d’une fortuite coïncidence entre l’ univers du poète et le mien ? Je comprends trop de choses dans ces poè
279 e Rimbaud, entre encore pour une grande part dans l’ « alchimie du verbe » ; et je ne puis m’empêcher d’accuser Breton de p
280 cet appareil psychologique si scolaire ? À donner le change sur la pauvreté d’un art purement formel. Car c’est ici le tra
281 sychologique si scolaire ? À donner le change sur la pauvreté d’un art purement formel. Car c’est ici le tragique de cette
282 pauvreté d’un art purement formel. Car c’est ici le tragique de cette mystification : la plupart des surréalistes n’ont r
283 e leur impuissance. « Il n’y a pas de pensée hors les mots » (Aragon). Aussi se paient-ils de métaphores comme d’autres de
284 éclament imprudemment, — on sait ce que c’est que la « liberté » d’un esprit pur de tout finalisme ! Surréalisme S.A., ent
285 out finalisme ! Surréalisme S.A., entreprise pour l’ exploitation de matériaux de démolition abandonnés par Dada S.A. Ce n’
286 pas ainsi que nous sortirons d’une anarchie dont les causes semblent avant tout morales. Les tendances encore un peu vague
287 chie dont les causes semblent avant tout morales. Les tendances encore un peu vagues d’un groupe tel que Philosophies laiss
288 lus réelles. On souhaite qu’après faillite faite, les surréalistes trouvent à montrer leur talent en des jeux moins lassant
289 poir exaspéré, commandait une certaine sympathie. L’ agaçant, avec les surréalistes, c’est que — pour reprendre un mot de C
290 ommandait une certaine sympathie. L’agaçant, avec les surréalistes, c’est que — pour reprendre un mot de Cocteau — ils « em
291 octeau — ils « embaument de vieilles anarchies ». L’ ironie qui sauva Dada du ridicule le cède ici à un ton de mage qui ne
292 anarchies ». L’ironie qui sauva Dada du ridicule le cède ici à un ton de mage qui ne fera plus longtemps impression. C’es
293 us longtemps impression. C’est grand dommage pour les lettres françaises qui risquent d’y perdre au moins deux grands artis
294 ublier Breton, enchanteur des images qui peuplent les ténèbres. b. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] André Breton, Ma
5 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Paul Colin, Van Gogh (août 1925)
295 Paul Colin, Van Gogh (août 1925)c Le nouveau volume de la collection des « Maîtres de l’art moderne » est
296 Paul Colin, Van Gogh (août 1925)c Le nouveau volume de la collection des « Maîtres de l’art moderne » est au moins
297 in, Van Gogh (août 1925)c Le nouveau volume de la collection des « Maîtres de l’art moderne » est au moins le cinquième
298 nouveau volume de la collection des « Maîtres de l’ art moderne » est au moins le cinquième ouvrage publié en France sur V
299 s assez neuves. M. Colin s’est contenté de narrer les faits de la vie de Vincent, mais d’une telle manière que des conclusi
300 s. M. Colin s’est contenté de narrer les faits de la vie de Vincent, mais d’une telle manière que des conclusions critique
301 t avec évidence. Van Gogh fut une proie du génie. L’ homme tel que nous le peint Paul Colin, est peu intéressant. On en a c
302 Gogh fut une proie du génie. L’homme tel que nous le peint Paul Colin, est peu intéressant. On en a connu bien d’autres de
303 d’évangélisation, fondent des groupes dissidents. Le miracle, c’est que le plus sauvage génie ait choisi un être de cette
304 ent des groupes dissidents. Le miracle, c’est que le plus sauvage génie ait choisi un être de cette espèce pour le tourmen
305 age génie ait choisi un être de cette espèce pour le tourmenter et le transfigurer. Vincent s’en effraie lui-même : « Il y
306 isi un être de cette espèce pour le tourmenter et le transfigurer. Vincent s’en effraie lui-même : « Il y a quelque chose
307 es copies de Millet. Mais son manque de talent ne le rebute pas. Une divine violence le travaille. Elle jaillira enfin, da
308 e de talent ne le rebute pas. Une divine violence le travaille. Elle jaillira enfin, dans l’éblouissement d’Arles, jusqu’a
309 violence le travaille. Elle jaillira enfin, dans l’ éblouissement d’Arles, jusqu’au jour où cette consomption frénétique t
310 rrassant un corps minable, il ne restera plus que les flammes, les soleils et aussi les grimaces de douleur de ses tableaux
311 orps minable, il ne restera plus que les flammes, les soleils et aussi les grimaces de douleur de ses tableaux. Il faut lou
312 estera plus que les flammes, les soleils et aussi les grimaces de douleur de ses tableaux. Il faut louer Paul Colin de n’av
313 n’avoir rien caché des médiocrités de cette vie : les reproductions qui suivent sa courte biographie fournissent un meilleu
314 courte biographie fournissent un meilleur motif à l’ admiration que tout le lyrisme dont on a voulu charger la « vie héroïq
315 nissent un meilleur motif à l’admiration que tout le lyrisme dont on a voulu charger la « vie héroïque » de Vincent. M. Co
316 ation que tout le lyrisme dont on a voulu charger la « vie héroïque » de Vincent. M. Colin n’a pas cherché à expliquer ce
317 ce miracle. Il nous laisse à notre émotion devant le spectacle d’une œuvre qui ne dut rien à l’homme, d’une œuvre de pur g
318 devant le spectacle d’une œuvre qui ne dut rien à l’ homme, d’une œuvre de pur génie. Vincent Van Gogh, génie sans talent.
6 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Lucien Fabre, Le Tarramagnou (septembre 1925)
319 Lucien Fabre, Le Tarramagnou (septembre 1925)d Lucien Fabre, ingénieur, poète, chro
320 stein, des articles sur Valéry, St John Perse. On le vit naguère en province liquider des stocks américains. Et ses romans
321 ins. Et ses romans, c’est aussi une liquidation : les faits s’y pressent et s’y bousculent ; de temps à autre une notation
322 ou de psychologue se glisse dans leur flot. Voilà le lecteur entraîné, ébahi, passionné, contraint de suivre jusqu’au bout
323 bout un roman de 500 pages comme Rabevel. Car si la liquidation des questions traitées est rapide, elle est complète auss
324 n’est pas lui qui se refuserait à écrire — comme le fait son maître : « La marquise sortit à cinq heures ». Une telle pla
325 efuserait à écrire — comme le fait son maître : «  La marquise sortit à cinq heures ». Une telle platitude est presque indi
326 e indispensable, mais il s’en permet d’autres qui le sont moins. On n’écrit pas un roman en trois volumes sans y laisser d
327 on ne demande pas non plus au puissant boxeur sur le ring d’être bien peigné. Rabevel, c’était un portrait balzacien du b
328 ait un portrait balzacien du brasseur d’affaires. Le sujet du Tarramagnou, c’est « la nouvelle mise en servitude du peuple
329 seur d’affaires. Le sujet du Tarramagnou, c’est «  la nouvelle mise en servitude du peuple rustique de France ». En effet —
330 vitude du peuple rustique de France ». En effet — le phénomène n’est pas particulier à la France — les paysans sont en tra
331 . En effet — le phénomène n’est pas particulier à la France — les paysans sont en train de redevenir serfs, serfs des synd
332 le phénomène n’est pas particulier à la France — les paysans sont en train de redevenir serfs, serfs des syndicats et des
333 villes. Mais dans une de ces provinces du Midi où le souvenir des luttes religieuses encore vivace fait que les paysans ga
334 nir des luttes religieuses encore vivace fait que les paysans gardent une méfiance frondeuse vis-à-vis du gouvernement, le
335 une méfiance frondeuse vis-à-vis du gouvernement, le libérateur va se lever. C’est un descendant de Roland le Camisard, ce
336 Camisard, ce « Tarramagnou », ce « petit homme de la terre », qui va susciter un formidable mouvement de protestation cont
337 er un formidable mouvement de protestation contre les lois tyranniques. Le succès grandit rapidement, le gouvernement cède.
338 ment de protestation contre les lois tyranniques. Le succès grandit rapidement, le gouvernement cède. Mais la même inertie
339 s lois tyranniques. Le succès grandit rapidement, le gouvernement cède. Mais la même inertie du peuple qui donnait tant de
340 ès grandit rapidement, le gouvernement cède. Mais la même inertie du peuple qui donnait tant de mal lorsqu’il fallait l’év
341 peuple qui donnait tant de mal lorsqu’il fallait l’ éveiller, l’entraîne au-delà du but. Le Tarramagnou voit son œuvre sab
342 donnait tant de mal lorsqu’il fallait l’éveiller, l’ entraîne au-delà du but. Le Tarramagnou voit son œuvre sabotée par des
343 il fallait l’éveiller, l’entraîne au-delà du but. Le Tarramagnou voit son œuvre sabotée par des meneurs ; il tente en vain
344 e par des meneurs ; il tente en vain de ressaisir les foules : déjà elles huent sa modération. Alors il va se jeter au-deva
345 devant des troupes accourues, il meurt en clamant la paix. M. Fabre avait là les éléments d’un grand roman : autour d’un s
346 s, il meurt en clamant la paix. M. Fabre avait là les éléments d’un grand roman : autour d’un sujet de vaste envergure, et
347 es d’une belle richesse psychologique. En fermant le livre on a presque l’impression qu’il a réussi ce grand roman… Qu’y m
348 e psychologique. En fermant le livre on a presque l’ impression qu’il a réussi ce grand roman… Qu’y manque-t-il ? Un style 
349 ssi ce grand roman… Qu’y manque-t-il ? Un style ? L’ absence de style, n’est-ce pas le meilleur style pour un romancier ? C
350 -il ? Un style ? L’absence de style, n’est-ce pas le meilleur style pour un romancier ? C’est plutôt, je crois, une certai
351 ôt, je crois, une certaine harmonie générale dans le récit et le ton, surtout dans la première partie, qui est confuse. No
352 , une certaine harmonie générale dans le récit et le ton, surtout dans la première partie, qui est confuse. Non pas que le
353 la première partie, qui est confuse. Non pas que le roman soit mal construit, au contraire. Mais le tissu des faits se re
354 e le roman soit mal construit, au contraire. Mais le tissu des faits se relâche parfois, et les arêtes de la construction
355 e. Mais le tissu des faits se relâche parfois, et les arêtes de la construction apparaissent trop nues. Chef-d’œuvre ou pas
356 su des faits se relâche parfois, et les arêtes de la construction apparaissent trop nues. Chef-d’œuvre ou pas chef-d’œuvre
357 uvre ou pas chef-d’œuvre d’ailleurs, il reste que le Tarramagnou est un livre émouvant, d’une saine puissance. Il reste qu
358 ougemont Denis de, « [Compte rendu] Lucien Fabre, Le Tarramagnou  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève,
7 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Les Appels de l’Orient (septembre 1925)
359 Les Appels de l’Orient (septembre 1925)e Le xxe siècle s’annonce comm
360 Les Appels de l’ Orient (septembre 1925)e Le xxe siècle s’annonce comme le siècle d
361 Les Appels de l’Orient (septembre 1925)e Le xxe siècle s’annonce comme le siècle de la découverte du monde par l
362 eptembre 1925)e Le xxe siècle s’annonce comme le siècle de la découverte du monde par l’Europe intellectuelle. Grand s
363 )e Le xxe siècle s’annonce comme le siècle de la découverte du monde par l’Europe intellectuelle. Grand siècle de crit
364 nce comme le siècle de la découverte du monde par l’ Europe intellectuelle. Grand siècle de critique pour lequel nos contem
365 critique pour lequel nos contemporains accumulent les documents. La littérature de ces dernières années n’est qu’une forme
366 equel nos contemporains accumulent les documents. La littérature de ces dernières années n’est qu’une forme de reportage i
367 es n’est qu’une forme de reportage international. L’ Europe menant cette immense enquête manifeste son génie méthodique, so
368 selle et inépuisable curiosité. Mais, de même que la France interrogeant l’Europe du xviiie prenait surtout conscience de
369 riosité. Mais, de même que la France interrogeant l’ Europe du xviiie prenait surtout conscience de son propre génie, l’Eu
370 prenait surtout conscience de son propre génie, l’ Europe d’aujourd’hui semble chercher dans une confrontation avec l’Ori
371 d’hui semble chercher dans une confrontation avec l’ Orient, plutôt qu’une réelle connaissance de l’Orient, une conscience
372 ec l’Orient, plutôt qu’une réelle connaissance de l’ Orient, une conscience d’elle-même. C’est peut-être pour provoquer cet
373 né un péril oriental, car il semble bien que dans le domaine de la culture le péril n’existe que pour autant qu’on en parl
374 iental, car il semble bien que dans le domaine de la culture le péril n’existe que pour autant qu’on en parle, la vraie « 
375 il semble bien que dans le domaine de la culture le péril n’existe que pour autant qu’on en parle, la vraie « question as
376 le péril n’existe que pour autant qu’on en parle, la vraie « question asiatique » étant une question politique. On peut pr
377 nt une question politique. On peut prévoir que si le bouddhisme jouit un jour d’un renouveau, c’est à quelques savants eur
378 nouveau, c’est à quelques savants européens qu’il le devra, tandis que d’un mouvement inverse, le christianisme débarrassé
379 u’il le devra, tandis que d’un mouvement inverse, le christianisme débarrassé de son déguisement gréco-latin retournera ve
380 n retournera vers ses sources pour s’y retremper. Les appels de l’Orient, ce sont les Keyserling, les Guénon, qui les font
381 ers ses sources pour s’y retremper. Les appels de l’ Orient, ce sont les Keyserling, les Guénon, qui les font entendre, aut
382 ur s’y retremper. Les appels de l’Orient, ce sont les Keyserling, les Guénon, qui les font entendre, autant et plus que les
383 . Les appels de l’Orient, ce sont les Keyserling, les Guénon, qui les font entendre, autant et plus que les Tagore et les G
384 l’Orient, ce sont les Keyserling, les Guénon, qui les font entendre, autant et plus que les Tagore et les Gandhi, demi-euro
385 Guénon, qui les font entendre, autant et plus que les Tagore et les Gandhi, demi-européanisés. Ceci convenu, il faut reconn
386 s font entendre, autant et plus que les Tagore et les Gandhi, demi-européanisés. Ceci convenu, il faut reconnaître que l’en
387 ropéanisés. Ceci convenu, il faut reconnaître que l’ enquête des Cahiers du Mois donne un fort intéressant tableau des mult
388 rt intéressant tableau des multiples réactions de l’ Europe placée devant le dilemme Orient-Occident. Réactions qui, disons
389 des multiples réactions de l’Europe placée devant le dilemme Orient-Occident. Réactions qui, disons-le tout de suite, rens
390 le dilemme Orient-Occident. Réactions qui, disons- le tout de suite, renseignent mieux sur l’esprit occidental que sur l’or
391 i, disons-le tout de suite, renseignent mieux sur l’ esprit occidental que sur l’oriental, en sorte que cette enquête rejoi
392 renseignent mieux sur l’esprit occidental que sur l’ oriental, en sorte que cette enquête rejoint parfois celle qu’ouvrit l
393 que cette enquête rejoint parfois celle qu’ouvrit la Revue de Genève sur « l’Avenir de l’Europe. » (Cf. les deux réponse
394 arfois celle qu’ouvrit la Revue de Genève sur «  l’ Avenir de l’Europe. » (Cf. les deux réponses d’André Gide en particuli
395 qu’ouvrit la Revue de Genève sur « l’Avenir de l’ Europe. » (Cf. les deux réponses d’André Gide en particulier). Car la
396 vue de Genève sur « l’Avenir de l’Europe. » (Cf. les deux réponses d’André Gide en particulier). Car la plupart des enquêt
397 ticulier). Car la plupart des enquêtés se font de l’ Orient une représentation vague et poétique. « Orient…, toi qui n’as q
398 de cet Orient qu’il s’agit, et Jean Schlumberger le définit encore : « … tout ce qui est opposé à l’esprit occidental, to
399 le définit encore : « … tout ce qui est opposé à l’ esprit occidental, tout ce qui peut servir d’antidote à sa fièvre et à
400 ne dénomination qui n’a de sens que par rapport à l’ Europe. Il serait vain de tenter un classement parmi les réponses d’un
401 ope. Il serait vain de tenter un classement parmi les réponses d’une extraordinaire diversité — peut-être trop nombreuses —
402 e trop nombreuses — qui composent ce gros volume. Les points de vue sont si différents, si différentes même les conclusions
403 ts de vue sont si différents, si différentes même les conclusions tirées de points de vue semblables, qu’un esprit analytiq
404 t de jugements contradictoires, et de termes dont le sens change avec l’échelle de valeurs de l’écrivain. Énumérons pourta
405 adictoires, et de termes dont le sens change avec l’ échelle de valeurs de l’écrivain. Énumérons pourtant quelques-uns des
406 dont le sens change avec l’échelle de valeurs de l’ écrivain. Énumérons pourtant quelques-uns des points de vue les plus r
407 Énumérons pourtant quelques-uns des points de vue les plus riches ou les mieux définis. Pour Valéry, la supériorité de l’Eu
408 quelques-uns des points de vue les plus riches ou les mieux définis. Pour Valéry, la supériorité de l’Europe réside dans sa
409 es plus riches ou les mieux définis. Pour Valéry, la supériorité de l’Europe réside dans sa « puissance de choix », dans l
410 les mieux définis. Pour Valéry, la supériorité de l’ Europe réside dans sa « puissance de choix », dans le génie d’abstract
411 urope réside dans sa « puissance de choix », dans le génie d’abstraction qui a produit la géométrie grecque. D’autres attr
412 hoix », dans le génie d’abstraction qui a produit la géométrie grecque. D’autres attribuent cette supériorité au machinism
413 es attribuent cette supériorité au machinisme, et la déplorent. Plusieurs jeunes songent que dans une Europe vieillie, les
414 eurs jeunes songent que dans une Europe vieillie, les parfums puissants de l’Asie sauront encore éveiller de beaux rêves. I
415 ans une Europe vieillie, les parfums puissants de l’ Asie sauront encore éveiller de beaux rêves. Il y a ceux qui repoussen
416 orante du thomisme et ceux qui pensent inévitable le choc de deux mondes, et que seule une intime connaissance mutuelle l’
417 es, et que seule une intime connaissance mutuelle l’ adoucira. Il y a ceux qui à la suite de Claudel estiment que la questi
418 l y a ceux qui à la suite de Claudel estiment que la question ne se pose pas, puisque nous sommes chrétiens. (Mais le chri
419 se pose pas, puisque nous sommes chrétiens. (Mais le christianisme, religion missionnaire, ne peut nous donner qu’une supé
420 périorité provisoire et qui porte en son principe le germe de sa destruction.) Il y a enfin ceux qui refondent et combinen
421 point avoir, sincérité trop rare… Presque toutes les réponses, conclusions ou interrogations, ont le défaut de n’être pas
422 les réponses, conclusions ou interrogations, ont le défaut de n’être pas suffisamment motivées par des faits et des docum
423 es par des faits et des documents. Pour beaucoup, l’ Orient n’est qu’un prétexte à variations sur le thème favori. M. Massi
424 p, l’Orient n’est qu’un prétexte à variations sur le thème favori. M. Massis, par exemple, qui cependant produit un grand
425 livre pas moins à des déductions in abstracto qui le mènent à des conclusions de ce genre : si nous trouvons le moyen de «
426 à des conclusions de ce genre : si nous trouvons le moyen de « suppléer à l’éducation historique des peuples chrétiens qu
427 genre : si nous trouvons le moyen de « suppléer à l’ éducation historique des peuples chrétiens qui n’ont pas eu de Moyen Â
428 n’ont pas eu de Moyen Âge », nous pourrons amener l’ Asie à comprendre la religion romaine (ce christianisme méditerranéen
429 n Âge », nous pourrons amener l’Asie à comprendre la religion romaine (ce christianisme méditerranéen si étroitement parti
430 erranéen si étroitement particularisé pourtant, à l’ usage des Latins…). Quant aux orientalistes, qui, eux, apportent des d
431 onclure. Un écrivain grec, M. Embiricos, a trouvé la formule qui définit ce que les autres entendent vaguement par Orient 
432 Embiricos, a trouvé la formule qui définit ce que les autres entendent vaguement par Orient : l’Asie est le subconscient du
433 e que les autres entendent vaguement par Orient : l’ Asie est le subconscient du monde, formule qui, je pense, réunira tous
434 utres entendent vaguement par Orient : l’Asie est le subconscient du monde, formule qui, je pense, réunira tous les suffra
435 ent du monde, formule qui, je pense, réunira tous les suffrages. Et chacun d’en tirer de nouvelles raisons de maudire l’Ori
436 unira tous les suffrages. Et chacun d’en tirer de nouvelles raisons de maudire l’Orient ou chercher la guérison de nos fièvres. M
437 chacun d’en tirer de nouvelles raisons de maudire l’ Orient ou chercher la guérison de nos fièvres. Mais nous aurons entrev
438 nouvelles raisons de maudire l’Orient ou chercher la guérison de nos fièvres. Mais nous aurons entrevu peut-être pour la p
439 us aurons entrevu peut-être pour la première fois le rôle de l’Europe « conscience du monde », entre une Amérique affolée
440 ntrevu peut-être pour la première fois le rôle de l’ Europe « conscience du monde », entre une Amérique affolée de vitesse,
441 nelle. e. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Les Appels de l’Orient (n° 9-10 des Cahiers du Mois) », Bibliothèque univ
442 ougemont Denis de, « [Compte rendu] Les Appels de l’ Orient (n° 9-10 des Cahiers du Mois) », Bibliothèque universelle et Re
8 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jean Prévost, Tentative de solitude (septembre 1925)
443 que nous sommes seuls, nous sommes des fous. Oui, le contrôle de nous-mêmes ne joue que soutenu par le contrôle que les au
444 le contrôle de nous-mêmes ne joue que soutenu par le contrôle que les autres nous imposent », dit un héros de Mauriac. C’e
445 ous-mêmes ne joue que soutenu par le contrôle que les autres nous imposent », dit un héros de Mauriac. C’est un « homme seu
446 Mauriac. C’est un « homme seul » qu’a peint « par le dedans » M. Jean Prévost, en un saisissant raccourci psychologique. «
447 eut éliminer de soi tout ce qui est déterminé par l’ extérieur, — ce fou que nous portons tous en nous, — il l’a isolé, inc
448 eur, — ce fou que nous portons tous en nous, — il l’ a isolé, incarné, nommé : Revert. Puis il l’a poussé impitoyablement d
449 — il l’a isolé, incarné, nommé : Revert. Puis il l’ a poussé impitoyablement dans sa recherche d’un absolu qui se trouve ê
450 dans sa recherche d’un absolu qui se trouve être le néant. Pour finir il « l’écrabouille ». L’expérience est terminée. Ar
451 solu qui se trouve être le néant. Pour finir il «  l’ écrabouille ». L’expérience est terminée. Artificielle comme toute exp
452 e être le néant. Pour finir il « l’écrabouille ». L’ expérience est terminée. Artificielle comme toute expérience, elle n’e
453 assive d’un théorème de Spinoza. Une ironie dure, la densité du style révèlent seules l’écrivain ; et aussi quelques sente
454 ironie dure, la densité du style révèlent seules l’ écrivain ; et aussi quelques sentences : « C’est de la faiblesse de no
455 rivain ; et aussi quelques sentences : « C’est de la faiblesse de nos yeux que frissonnent les étoiles. » f. Rougemont
456 C’est de la faiblesse de nos yeux que frissonnent les étoiles. » f. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Jean Prévost, T
9 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Almanach 1925 (septembre 1925)
457 eptembre 1925)g En 1886, lors de sa fondation, la nouvelle maison d’édition Fischer passait pour « la centrale où l’on
458 nouvelle maison d’édition Fischer passait pour «  la centrale où l’on avait concentré la dynamite internationale qu’Ibsen
459 n d’édition Fischer passait pour « la centrale où l’ on avait concentré la dynamite internationale qu’Ibsen voulait placer
460 assait pour « la centrale où l’on avait concentré la dynamite internationale qu’Ibsen voulait placer sous les arches de la
461 amite internationale qu’Ibsen voulait placer sous les arches de la vieille société », pour reprendre la pittoresque définit
462 ionale qu’Ibsen voulait placer sous les arches de la vieille société », pour reprendre la pittoresque définition de M. A.
463 es arches de la vieille société », pour reprendre la pittoresque définition de M. A. Eloesser dans l’Almanach du 25e anniv
464 la pittoresque définition de M. A. Eloesser dans l’ Almanach du 25e anniversaire. Les révolutionnaires y faisaient pourtan
465 A. Eloesser dans l’Almanach du 25e anniversaire. Les révolutionnaires y faisaient pourtant bon ménage avec les derniers ch
466 lutionnaires y faisaient pourtant bon ménage avec les derniers champions du naturalisme puisqu’au début Fischer publia Zola
467 trouve au tableau des auteurs édités depuis lors les grands noms de la littérature européenne d’avant-guerre mêlés à ceux
468 des auteurs édités depuis lors les grands noms de la littérature européenne d’avant-guerre mêlés à ceux des maîtres du ren
469 aliste allemand et viennois, Hesse, Hofmannsthal… Les extraits de ces auteurs qui composent l’Almanach Fischer donnent une
470 nsthal… Les extraits de ces auteurs qui composent l’ Almanach Fischer donnent une juste idée de ce que fut la littérature d
471 nach Fischer donnent une juste idée de ce que fut la littérature d’avant-garde entre 1900 et 1910. Depuis, la maison paraî
472 érature d’avant-garde entre 1900 et 1910. Depuis, la maison paraît s’être un peu embourgeoisée… Disons plutôt que voici ve
473 n peu embourgeoisée… Disons plutôt que voici venu le temps de la moisson, — le temps des éditions d’œuvres complètes. g.
474 geoisée… Disons plutôt que voici venu le temps de la moisson, — le temps des éditions d’œuvres complètes. g. Rougemont
475 s plutôt que voici venu le temps de la moisson, —  le temps des éditions d’œuvres complètes. g. Rougemont Denis de, « [C
10 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Otto Flake, Der Gute Weg (septembre 1925)
476 tto Flake, Der Gute Weg (septembre 1925)h Dans l’ atmosphère trouble où s’agite l’Allemagne nouvelle — et peut-être parc
477 re 1925)h Dans l’atmosphère trouble où s’agite l’ Allemagne nouvelle — et peut-être parce qu’il sait en sortir parfois —
478 kei a gardé son bon sens et son sang-froid. Et si l’ on a pu reprocher à ses tableaux de l’Europe qu’il vient de parcourir
479 roid. Et si l’on a pu reprocher à ses tableaux de l’ Europe qu’il vient de parcourir quelque superficialité, du moins faut-
480 arcourir quelque superficialité, du moins faut-il le louer d’avoir conservé une vision générale de notre temps et un évide
481 bénéficie de cette vision. Je ne saurais résumer les nombreuses péripéties de son dernier roman sans exposer et discuter t
482 son dernier roman sans exposer et discuter toutes les idées qu’elles illustrent. Les personnages discutent certes, mais leu
483 et discuter toutes les idées qu’elles illustrent. Les personnages discutent certes, mais leurs actions sont les meilleurs a
484 onnages discutent certes, mais leurs actions sont les meilleurs arguments. Et peu à peu surgissent d’une accumulation de pe
485 près-guerre d’une étrange vérité. Aux prises avec les problèmes sociaux et le luxe le moins apaisant, tournés vers la Russi
486 vérité. Aux prises avec les problèmes sociaux et le luxe le moins apaisant, tournés vers la Russie, vers le passé, vers l
487 Aux prises avec les problèmes sociaux et le luxe le moins apaisant, tournés vers la Russie, vers le passé, vers l’Orient,
488 ociaux et le luxe le moins apaisant, tournés vers la Russie, vers le passé, vers l’Orient, tentant des amours nouvelles et
489 e le moins apaisant, tournés vers la Russie, vers le passé, vers l’Orient, tentant des amours nouvelles et les fuites les
490 sant, tournés vers la Russie, vers le passé, vers l’ Orient, tentant des amours nouvelles et les fuites les plus folles hor
491 vers le passé, vers l’Orient, tentant des amours nouvelles et les fuites les plus folles hors de la réalité, ils forment un cort
492 é, vers l’Orient, tentant des amours nouvelles et les fuites les plus folles hors de la réalité, ils forment un cortège pit
493 rient, tentant des amours nouvelles et les fuites les plus folles hors de la réalité, ils forment un cortège pittoresque et
494 s nouvelles et les fuites les plus folles hors de la réalité, ils forment un cortège pittoresque et désolant à celui qui,
495 ge pittoresque et désolant à celui qui, revenu de l’ étranger dans le désordre de son pays, suivra obstinément le « bon che
496 t désolant à celui qui, revenu de l’étranger dans le désordre de son pays, suivra obstinément le « bon chemin » de la sant
497 dans le désordre de son pays, suivra obstinément le « bon chemin » de la santé et de la raison. C’est à lui que va la sym
498 son pays, suivra obstinément le « bon chemin » de la santé et de la raison. C’est à lui que va la sympathie de l’auteur et
499 a obstinément le « bon chemin » de la santé et de la raison. C’est à lui que va la sympathie de l’auteur et la nôtre. h.
500 » de la santé et de la raison. C’est à lui que va la sympathie de l’auteur et la nôtre. h. Rougemont Denis de, « [Compt
501 de la raison. C’est à lui que va la sympathie de l’ auteur et la nôtre. h. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Otto Fl
502 n. C’est à lui que va la sympathie de l’auteur et la nôtre. h. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Otto Flake, Der Gut
503 1163. i. Orthographié « Flasce » par erreur dans l’ original.
11 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Miguel de Unamuno, Trois nouvelles exemplaires et un prologue (septembre 1925)
504 Miguel de Unamuno, Trois nouvelles exemplaires et un prologue (septembre 1925)j M. Valéry Larbaud est
505 opéenne », croyez-vous qu’il aille s’abandonner à l’ émotion communicative de qui découvre un sommet ? Point. Précision, mo
506 vre un sommet ? Point. Précision, modération dans le jugement, humour léger, notation suggestive, telles sont les vertus d
507 t, humour léger, notation suggestive, telles sont les vertus de sa critique. Ce n’est que dans sa discrétion à louer une gr
508 iscrétion à louer une grande œuvre qu’on trouvera la mesure de son admiration et le gage de sa légitimité. Nul doute que l
509 vre qu’on trouvera la mesure de son admiration et le gage de sa légitimité. Nul doute que les Trois nouvelles exemplaires
510 ration et le gage de sa légitimité. Nul doute que les Trois nouvelles exemplaires ne suscitent un intérêt très profond : el
511 le gage de sa légitimité. Nul doute que les Trois nouvelles exemplaires ne suscitent un intérêt très profond : elles nous transpo
512 de préoccupations des plus modernes, problème de la réalité littéraire, problème de la personnalité. Leur Prologue pourra
513 s, problème de la réalité littéraire, problème de la personnalité. Leur Prologue pourrait presque aussi bien être celui d’
514 d’une pièce de Pirandello. N’annonce-t-il pas que les personnages des trois nouvelles « sont réels, très réels, de la réali
515 N’annonce-t-il pas que les personnages des trois nouvelles « sont réels, très réels, de la réalité la plus intime, de celle qu’i
516 des trois nouvelles « sont réels, très réels, de la réalité la plus intime, de celle qu’ils se donnent eux-mêmes dans leu
517 nouvelles « sont réels, très réels, de la réalité la plus intime, de celle qu’ils se donnent eux-mêmes dans leur pure volo
518 ur pure volonté d’être ou de ne pas être… ». Mais les héros de Pirandello, s’ils veulent être, subissent, une fois qu’ils s
519 ls veulent être, subissent, une fois qu’ils sont, le grand malentendu de la personnalité. Tandis que chez Unamuno une volo
520 ent, une fois qu’ils sont, le grand malentendu de la personnalité. Tandis que chez Unamuno une volonté d’action les possèd
521 ité. Tandis que chez Unamuno une volonté d’action les possède, les exalte, les affole. Les plus beaux types créés par Unamu
522 ue chez Unamuno une volonté d’action les possède, les exalte, les affole. Les plus beaux types créés par Unamuno sont ces f
523 uno une volonté d’action les possède, les exalte, les affole. Les plus beaux types créés par Unamuno sont ces femmes dures
524 nté d’action les possède, les exalte, les affole. Les plus beaux types créés par Unamuno sont ces femmes dures et passionné
525 us dépouillé de détail extérieur ou d’enjolivure. La lecture de ces trois tragédies, d’une classique sobriété mais d’une b
526 une brutalité et d’une ironie romantiques, laisse la même impression de grandeur désolée qu’un Greco. Mais il n’y a pas le
527 e grandeur désolée qu’un Greco. Mais il n’y a pas les couleurs, ni l’amère volupté des formes. Une sensation de barre d’aci
528 e qu’un Greco. Mais il n’y a pas les couleurs, ni l’ amère volupté des formes. Une sensation de barre d’acier sur la nuque.
529 té des formes. Une sensation de barre d’acier sur la nuque. j. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Miguel de Unamuno,
530 nis de, « [Compte rendu] Miguel de Unamuno, Trois nouvelles exemplaires et un prologue  », Bibliothèque universelle et Revue de G
12 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Ernest Seillière, Alexandre Vinet, historien de la pensée française (octobre 1925)
531 Ernest Seillière, Alexandre Vinet, historien de la pensée française (octobre 1925)k Peut-être n’est-il pas trop tard
532 tard pour parler du Vinet de M. Seillière, de ce nouveau chapitre qu’il vient d’ajouter à sa grande étude sur les rapports du
533 pitre qu’il vient d’ajouter à sa grande étude sur les rapports du christianisme et du romantisme. M. Seillière cherchait da
534 sme et du romantisme. M. Seillière cherchait dans l’ époque romantique un témoin dont le jugement eut « l’autorité d’un ver
535 cherchait dans l’époque romantique un témoin dont le jugement eut « l’autorité d’un verdict essentiellement chrétien sur l
536 poque romantique un témoin dont le jugement eut «  l’ autorité d’un verdict essentiellement chrétien sur le mysticisme natur
537 utorité d’un verdict essentiellement chrétien sur le mysticisme naturiste ». Il ne pouvait trouver mieux que Vinet. Et j’i
538 net. Et j’imagine son étonnement à découvrir dans l’ œuvre du penseur vaudois la substance originale de la plupart des idée
539 ement à découvrir dans l’œuvre du penseur vaudois la substance originale de la plupart des idées dont lui-même s’est fait
540 de la plupart des idées dont lui-même s’est fait le moderne champion. Pour ce qui concerne le Vinet juge des romantiques,
541 st fait le moderne champion. Pour ce qui concerne le Vinet juge des romantiques, il n’a pas eu trop de peine à l’annexer à
542 ge des romantiques, il n’a pas eu trop de peine à l’ annexer à son propre corps de doctrines critiques. Dirai-je pourtant q
543 , et presque inconsciemment, à gauchir légèrement la pensée de Vinet pour lui ajuster sa terminologie particulière ? Mais
544 ie particulière ? Mais par ailleurs Vinet déborde le « sellièrisme » de tout son mysticisme protestant. Et cela n’est pas
545 eillière. C’est peut-être pourquoi il insiste sur le fait que Vinet se déclarait « un chrétien sans épithète ». Croit-il é
546 n chrétien sans épithète ». Croit-il éluder ainsi le protestantisme de Vinet ? Ne voit-il pas que rien n’est plus protesta
547 e ? Mais ces réserves sont de peu d’importance si l’ on songe au service que M. Seillière nous rend en réintroduisant dans
548 que M. Seillière nous rend en réintroduisant dans l’ actualité la plus brûlante les richesses intellectuelles et morales du
549 ière nous rend en réintroduisant dans l’actualité la plus brûlante les richesses intellectuelles et morales du grand vaudo
550 réintroduisant dans l’actualité la plus brûlante les richesses intellectuelles et morales du grand vaudois. Vraiment, tout
551 raiment, tout ce qui semble viable et humain dans la critique moderne du romantisme, Vinet l’avait trouvé. Mais sa positio
552 ain dans la critique moderne du romantisme, Vinet l’ avait trouvé. Mais sa position purement chrétienne — un mysticisme de
553 un thomisme et un nihilisme exaspérés, pour notre nouveau mal du siècle, il n’est peut-être pas de pensée plus vivante, ni de p
554 ] Ernest Seillière, Alexandre Vinet, historien de la pensée française  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Gen
13 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jules Supervielle, Gravitations (décembre 1925)
555 st celui-là qui s’avance » avec ce visage d’entre la vie et la mort « où se reflète le passage incessant d’oiseaux de la m
556 à qui s’avance » avec ce visage d’entre la vie et la mort « où se reflète le passage incessant d’oiseaux de la mer ? » « Q
557 visage d’entre la vie et la mort « où se reflète le passage incessant d’oiseaux de la mer ? » « Quel est cet homme dont l
558 « où se reflète le passage incessant d’oiseaux de la mer ? » « Quel est cet homme dont l’âme fait des signes solennels ? »
559 d’oiseaux de la mer ? » « Quel est cet homme dont l’ âme fait des signes solennels ? » Une voix lente aux méandres songeurs
560 ne simplicité qui n’est pas familière. C’est bien la poésie d’une époque tourmentée dans sa profondeur, mais qui se penche
561 abîmes. Simplicité de notre temps ! Au-dessus de la trépidation immense des machines, un Saint-John-Perse, un Supervielle
562 rse, un Supervielle parlent avec des mots de tous les jours aux vivants et aux morts : Mère, je sais très mal comme l’on ch
563 vants et aux morts : Mère, je sais très mal comme l’ on cherche les morts… « … Cette chose haute à la voix grave qu’on appe
564 morts : Mère, je sais très mal comme l’on cherche les morts… « … Cette chose haute à la voix grave qu’on appelle un père da
565 e l’on cherche les morts… « … Cette chose haute à la voix grave qu’on appelle un père dans les maisons. » Comme Valéry, ce
566 haute à la voix grave qu’on appelle un père dans les maisons. » Comme Valéry, ce poète sait « des complicités étranges pou
567 s’est créé. Jamais banal, il est parfois facile : la description du monde qu’il invente nous lasse quand elle ne l’étonne
568 n du monde qu’il invente nous lasse quand elle ne l’ étonne plus assez lui-même (pourtant l’autel et le surréalisme l’ont e
569 nd elle ne l’étonne plus assez lui-même (pourtant l’ autel et le surréalisme l’ont enrichie d’images…). Je cite des noms :
570 l’étonne plus assez lui-même (pourtant l’autel et le surréalisme l’ont enrichie d’images…). Je cite des noms : y a-t-il in
571 ssez lui-même (pourtant l’autel et le surréalisme l’ ont enrichie d’images…). Je cite des noms : y a-t-il influence ou seul
572 rtent des cafés littéraires, nos poètes respirent le même air du temps. Leur originalité se retrouve dans la manière dont
573 e air du temps. Leur originalité se retrouve dans la manière dont ils tentent de fuir l’inquiétude où ils baignent. Celui-
574 retrouve dans la manière dont ils tentent de fuir l’ inquiétude où ils baignent. Celui-ci vient à peine de quitter l’air du
575 ù ils baignent. Celui-ci vient à peine de quitter l’ air dur des pampas. « Le voilà qui s’avance, foulant les hautes herbes
576 vient à peine de quitter l’air dur des pampas. «  Le voilà qui s’avance, foulant les hautes herbes du ciel. » Le gaucho a
577 dur des pampas. « Le voilà qui s’avance, foulant les hautes herbes du ciel. » Le gaucho a dompté Pégase et caracole dans l
578 ui s’avance, foulant les hautes herbes du ciel. » Le gaucho a dompté Pégase et caracole dans les étoiles. J’avoue que l’un
579 iel. » Le gaucho a dompté Pégase et caracole dans les étoiles. J’avoue que l’univers intérieur où il lui arrive de graviter
580 Pégase et caracole dans les étoiles. J’avoue que l’ univers intérieur où il lui arrive de graviter me trouble mieux que so
581 eux que son lyrisme cosmique. On est plus près de l’ infini au fond de soi qu’au fond du ciel. l. Rougemont Denis de, « 
14 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Simone Téry, L’Île des bardes (décembre 1925)
582 Simone Téry, L’ Île des bardes (décembre 1925)m L’Irlande contemporaine offre un sp
583 Simone Téry, L’Île des bardes (décembre 1925)m L’ Irlande contemporaine offre un spectacle bien passionnant : celui de l
584 ne offre un spectacle bien passionnant : celui de la renaissance d’une littérature nationale à la fois cause et effet de l
585 littérature nationale à la fois cause et effet de la libération politique. Cause, puisque pour mener à chef cette libérati
586 es, ont su payer de leur personne. Effet, puisque l’ héroïsme d’une révolution en faveur du passé, révolution tout de même,
587 lle Simone Téry ne fait pas. Car elle veut éviter l’ emballement et conserver dans l’admiration son sens critique de Parisi
588 elle veut éviter l’emballement et conserver dans l’ admiration son sens critique de Parisienne. C’est une sympathie malici
589 commentaires parfois un peu copieux ; mais elle a la vertu de rendre contagieuse la curiosité de l’auteur à l’endroit de c
590 ieux ; mais elle a la vertu de rendre contagieuse la curiosité de l’auteur à l’endroit de cette âme irlandaise en laquelle
591 a la vertu de rendre contagieuse la curiosité de l’ auteur à l’endroit de cette âme irlandaise en laquelle s’allient une f
592 Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Simone Téry, L’ Île des bardes  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève
15 1925, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Hugh Walpole, La Cité secrète (décembre 1925)
593 Hugh Walpole, La Cité secrète (décembre 1925)n La Révolution russe va-t-elle usurpe
594 Hugh Walpole, La Cité secrète (décembre 1925)n La Révolution russe va-t-elle usurper dans le roman d’aventures le rôle
595 5)n La Révolution russe va-t-elle usurper dans le roman d’aventures le rôle de la mer Océane avec ses écumeurs ? Déjà u
596 russe va-t-elle usurper dans le roman d’aventures le rôle de la mer Océane avec ses écumeurs ? Déjà un Mac Orlan, un Kesse
597 elle usurper dans le roman d’aventures le rôle de la mer Océane avec ses écumeurs ? Déjà un Mac Orlan, un Kessel ont donné
598 t donné de beaux exemples du parti que peut tirer le nouveau romantisme de ce chaos. Salmon a même tenté d’en écrire l’épo
599 onné de beaux exemples du parti que peut tirer le nouveau romantisme de ce chaos. Salmon a même tenté d’en écrire l’épopée dans
600 isme de ce chaos. Salmon a même tenté d’en écrire l’ épopée dans Prikaz, cette traduction française de l’énorme cri de déli
601 épopée dans Prikaz, cette traduction française de l’ énorme cri de délivrance du peuple fou. Belles étincelles échappées d’
602 u. Belles étincelles échappées d’un brasier. Pour les causes de l’incendie, voir Dostoïevski. M. Walpole, lui, commence son
603 celles échappées d’un brasier. Pour les causes de l’ incendie, voir Dostoïevski. M. Walpole, lui, commence son roman quelqu
604 mmence son roman quelques mois avant que n’éclate le sinistre, et s’arrête au moment où l’on est sûr que ça brûle bien. Qu
605 ue n’éclate le sinistre, et s’arrête au moment où l’ on est sûr que ça brûle bien. Quel sujet plus riche pouvait-on rêver p
606 lus riche pouvait-on rêver pour un psychologue de la puissance de Walpole, que l’âme russe — cette âme russe qui pour le P
607 ur un psychologue de la puissance de Walpole, que l’ âme russe — cette âme russe qui pour le Parisien restera toujours « in
608 lpole, que l’âme russe — cette âme russe qui pour le Parisien restera toujours « indéfinissable ». M. Walpole, dont nous c
609 mençons aujourd’hui un roman bien différent, a vu la Révolution sans romantisme, dans le détail de la vie d’une ville. Il
610 fférent, a vu la Révolution sans romantisme, dans le détail de la vie d’une ville. Il sait qu’un grand mouvement est la ré
611 la Révolution sans romantisme, dans le détail de la vie d’une ville. Il sait qu’un grand mouvement est la résultante de m
612 ie d’une ville. Il sait qu’un grand mouvement est la résultante de millions de petits. Voici naître la révolution dans un
613 la résultante de millions de petits. Voici naître la révolution dans un cœur, puis dans une famille. Et une fois le grand
614 dans un cœur, puis dans une famille. Et une fois le grand bouleversement accompli dans la « Cité secrète » de la vie priv
615 Et une fois le grand bouleversement accompli dans la « Cité secrète » de la vie privée, quelques regards sur la foule suff
616 uleversement accompli dans la « Cité secrète » de la vie privée, quelques regards sur la foule suffisent pour en préciser
617 secrète » de la vie privée, quelques regards sur la foule suffisent pour en préciser les conséquences. C’est ainsi qu’int
618 s regards sur la foule suffisent pour en préciser les conséquences. C’est ainsi qu’interviennent les trois Anglais mêlés au
619 er les conséquences. C’est ainsi qu’interviennent les trois Anglais mêlés au drame. M. Walpole leur a dévolu le soin d’entr
620 Anglais mêlés au drame. M. Walpole leur a dévolu le soin d’entrer tantôt dans un foyer, tantôt dans une église, pour cons
621 foyer, tantôt dans une église, pour constater que la foule ne réagit pas autrement que les individus. L’auteur, qui est l’
622 onstater que la foule ne réagit pas autrement que les individus. L’auteur, qui est l’un de ces Anglais, tombe malade avec à
623 foule ne réagit pas autrement que les individus. L’ auteur, qui est l’un de ces Anglais, tombe malade avec à-propos et per
624 vec à-propos et perd connaissance chaque fois que le récit doit sauter quelques semaines. Qu’on veuille bien ne voir autre
625 « procédés », d’ailleurs assez peu choquants, que le revers de grandes qualités de réalisation d’idées en faits ou en situ
626 ts ou en situations dramatiques. Je donnerai tous les essais de M. de Voguë sur l’âme slave pour deux ou trois scènes de La
627 s. Je donnerai tous les essais de M. de Voguë sur l’ âme slave pour deux ou trois scènes de La Cité secrète. Pour celle-ci
628 oguë sur l’âme slave pour deux ou trois scènes de La Cité secrète. Pour celle-ci par exemple (caché dans un réduit, Markov
629 ci par exemple (caché dans un réduit, Markovitch, l’ idéaliste, surprend sa femme, la vertueuse Véra avec un des Anglais) :
630 duit, Markovitch, l’idéaliste, surprend sa femme, la vertueuse Véra avec un des Anglais) : Ils s’embrassaient comme des g
631 ébucher et de faire du bruit. Il songea : — C’est la fin pour moi. Puis : — Quelle imprudence ! Avec la lumière et peut-êt
632 a fin pour moi. Puis : — Quelle imprudence ! Avec la lumière et peut-être du monde dans l’appartement. Il avait si froid q
633 ence ! Avec la lumière et peut-être du monde dans l’ appartement. Il avait si froid que ses dents claquaient. Il quitta sa
634 aquaient. Il quitta sa fenêtre, se traîna jusqu’à l’ angle le plus éloigné du réduit, et se blottit là, sur le sol, les yeu
635 . Il quitta sa fenêtre, se traîna jusqu’à l’angle le plus éloigné du réduit, et se blottit là, sur le sol, les yeux grands
636 le plus éloigné du réduit, et se blottit là, sur le sol, les yeux grands ouverts dans le vide, sans rien voir. Ainsi le
637 éloigné du réduit, et se blottit là, sur le sol, les yeux grands ouverts dans le vide, sans rien voir. Ainsi le moujik de
638 ttit là, sur le sol, les yeux grands ouverts dans le vide, sans rien voir. Ainsi le moujik devant le bolchévique violant
639 ands ouverts dans le vide, sans rien voir. Ainsi le moujik devant le bolchévique violant sa patrie. Une effroyable accept
640 le vide, sans rien voir. Ainsi le moujik devant le bolchévique violant sa patrie. Une effroyable acceptation, mais elle
641 ment en révolte. Aucun cadre logique ne détermine l’ avenir le plus proche. Il n’y a pas même des forces endormies dans l’â
642 évolte. Aucun cadre logique ne détermine l’avenir le plus proche. Il n’y a pas même des forces endormies dans l’âme russe 
643 oche. Il n’y a pas même des forces endormies dans l’ âme russe : mais des possibilités, à chaque instant, d’explosion. Le g
644 des possibilités, à chaque instant, d’explosion. Le géant russe est un enfant : va-t-il rire, va-t-il pleurer ? m’embrass
645 me tuer ? Il sent autour de lui quelque chose qui le gêne. C’est l’empire. Il le renverse, pour voir. Pendant qu’il est en
646 nt autour de lui quelque chose qui le gêne. C’est l’ empire. Il le renverse, pour voir. Pendant qu’il est encore ébahi du f
647 lui quelque chose qui le gêne. C’est l’empire. Il le renverse, pour voir. Pendant qu’il est encore ébahi du fracas, le jui
648 r voir. Pendant qu’il est encore ébahi du fracas, le juif survient avec une méthode simplifiée pour l’exploitation des rui
649 le juif survient avec une méthode simplifiée pour l’ exploitation des ruines. On sait le reste. Tout cela, Walpole ne le di
650 implifiée pour l’exploitation des ruines. On sait le reste. Tout cela, Walpole ne le dit pas. Mais ses personnages le sugg
651 s ruines. On sait le reste. Tout cela, Walpole ne le dit pas. Mais ses personnages le suggèrent de toute la force du troub
652 cela, Walpole ne le dit pas. Mais ses personnages le suggèrent de toute la force du trouble qu’ils créent en nous : Markov
653 t pas. Mais ses personnages le suggèrent de toute la force du trouble qu’ils créent en nous : Markovitch par exemple, ou S
654 ougemont Denis de, « [Compte rendu] Hugh Walpole, La Cité secrète  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève,
16 1926, Articles divers (1924–1930). Conférence de René Guisan « Sur le Saint » (2 février 1926)
655 Conférence de René Guisan « Sur le Saint » (2 février 1926)c M. René Guisan, professeur de théologie
656 rofesseur de théologie à Lausanne et directeur de la Revue de théologie et de philosophie, inaugura lundi soir à l’aula, d
657 héologie et de philosophie, inaugura lundi soir à l’ aula, devant un très nombreux public, la série des conférences que nou
658 di soir à l’aula, devant un très nombreux public, la série des conférences que nous promet le groupe neuchâtelois des « Am
659 public, la série des conférences que nous promet le groupe neuchâtelois des « Amis de la pensée protestante ». M. Guisan
660 nous promet le groupe neuchâtelois des « Amis de la pensée protestante ». M. Guisan avait choisi un sujet qui permet de f
661 et qui permet de façon particulièrement frappante la comparaison des points de vue catholique et protestant : la notion de
662 ison des points de vue catholique et protestant : la notion de « Saint » et son évolution au cours des siècles. Primitivem
663 on évolution au cours des siècles. Primitivement, le Saint est un homme que Dieu a mis à part par grâce pour qu’il serve.
664 r grâce pour qu’il serve. Mais très vite on étend l’ appellation de saint à ceux qui par leur élévation morale ou leurs sou
665 ation morale ou leurs souffrances semblent s’être le plus rapprochés du Christ ; et dans l’Église persécutée, le martyre d
666 ent s’être le plus rapprochés du Christ ; et dans l’ Église persécutée, le martyre devient le signe par excellence de la sa
667 pprochés du Christ ; et dans l’Église persécutée, le martyre devient le signe par excellence de la sainteté. Le peuple, en
668 ; et dans l’Église persécutée, le martyre devient le signe par excellence de la sainteté. Le peuple, encore païen, voit da
669 ée, le martyre devient le signe par excellence de la sainteté. Le peuple, encore païen, voit dans la vénération des pèleri
670 e devient le signe par excellence de la sainteté. Le peuple, encore païen, voit dans la vénération des pèlerins pour les t
671 e la sainteté. Le peuple, encore païen, voit dans la vénération des pèlerins pour les tombes de leurs saints une forme d’a
672 païen, voit dans la vénération des pèlerins pour les tombes de leurs saints une forme d’adoration de dieux protecteurs. Ce
673 tecteurs. Cette croyance se répand, favorisée par la souplesse dont fait preuve l’Église d’alors quand il s’agit d’adapter
674 pand, favorisée par la souplesse dont fait preuve l’ Église d’alors quand il s’agit d’adapter des traditions antiques au do
675 ions antiques au dogme en formation. Au Moyen Âge l’ évolution se continue dans le même sens. On spécialise les « compétenc
676 mation. Au Moyen Âge l’évolution se continue dans le même sens. On spécialise les « compétences » des saints, ou de leurs
677 tion se continue dans le même sens. On spécialise les « compétences » des saints, ou de leurs reliques qui se multiplient p
678 qui se multiplient prodigieusement. Alors éclate la protestation de la Réforme. Honorons les saints pour l’exemple de leu
679 prodigieusement. Alors éclate la protestation de la Réforme. Honorons les saints pour l’exemple de leur vie : mais Christ
680 rs éclate la protestation de la Réforme. Honorons les saints pour l’exemple de leur vie : mais Christ est le seul médiateur
681 testation de la Réforme. Honorons les saints pour l’ exemple de leur vie : mais Christ est le seul médiateur à qui doit s’a
682 ints pour l’exemple de leur vie : mais Christ est le seul médiateur à qui doit s’adresser le culte, en son cœur, du croyan
683 hrist est le seul médiateur à qui doit s’adresser le culte, en son cœur, du croyant. Le centre de gravité religieux est re
684 oit s’adresser le culte, en son cœur, du croyant. Le centre de gravité religieux est replacé en Christ. — Comment l’Église
685 ravité religieux est replacé en Christ. — Comment l’ Église catholique réagit-elle ? En codifiant l’état de choses antérieu
686 nt l’Église catholique réagit-elle ? En codifiant l’ état de choses antérieur. Donc l’Église continue à faire des saints, t
687 e ? En codifiant l’état de choses antérieur. Donc l’ Église continue à faire des saints, tandis que ce terme n’a plus qu’un
688 tif pour nous protestants. Est-ce là nous juger ? Les catholiques nous reprochent d’avoir méconnu l’élément de grandeur mor
689 ? Les catholiques nous reprochent d’avoir méconnu l’ élément de grandeur morale que les saints maintiennent dans l’Église.
690 d’avoir méconnu l’élément de grandeur morale que les saints maintiennent dans l’Église. M. Guisan va très loin dans ses co
691 grandeur morale que les saints maintiennent dans l’ Église. M. Guisan va très loin dans ses concessions à de telles critiq
692 avec d’autant plus de force que « en situant tout le devoir chrétien dans l’accomplissement scrupuleux, joyeux et fidèle d
693 rce que « en situant tout le devoir chrétien dans l’ accomplissement scrupuleux, joyeux et fidèle de la vocation, le protes
694 l’accomplissement scrupuleux, joyeux et fidèle de la vocation, le protestantisme affirme qu’il existe divers ordres de sai
695 ment scrupuleux, joyeux et fidèle de la vocation, le protestantisme affirme qu’il existe divers ordres de sainteté ». Cett
696 on, le protestantisme affirme qu’il existe divers ordres de sainteté ». Cette mère qui s’est sacrifiée aux siens, n’était-ce p
697 de saints protestants, il existe des saints dans le protestantisme. Mais il n’est pas de fin aux œuvres de Dieu. La saint
698 sme. Mais il n’est pas de fin aux œuvres de Dieu. La sainteté parfaite ne commence qu’aux limites les plus hautes de la ve
699 . La sainteté parfaite ne commence qu’aux limites les plus hautes de la vertu. Dans ce sens, il ne peut exister de saint vé
700 ite ne commence qu’aux limites les plus hautes de la vertu. Dans ce sens, il ne peut exister de saint véritable. Il n’y a
701 pas de saints, mais il faut être parfait. Tel est l’ enseignement de Jésus, telle est la pensée qu’a voulu restaurer le pro
702 rfait. Tel est l’enseignement de Jésus, telle est la pensée qu’a voulu restaurer le protestantisme. La place nous manque p
703 e Jésus, telle est la pensée qu’a voulu restaurer le protestantisme. La place nous manque pour louer comme il conviendrait
704 la pensée qu’a voulu restaurer le protestantisme. La place nous manque pour louer comme il conviendrait la clarté d’un exp
705 lace nous manque pour louer comme il conviendrait la clarté d’un exposé solidement documenté, et le scrupule d’historien e
706 it la clarté d’un exposé solidement documenté, et le scrupule d’historien et de chrétien qui permet à M. Guisan de montrer
707 et de chrétien qui permet à M. Guisan de montrer le point de vue adverse avec autant de compréhension et de sympathie que
708 rillant appareil dialectique ne sait produire que l’ illusion. C’est la revanche du fameux scrupule protestant, qui ne peut
709 ialectique ne sait produire que l’illusion. C’est la revanche du fameux scrupule protestant, qui ne peut être un danger lo
710 ut être un danger lorsqu’il n’est, comme ici, que la loyauté d’un esprit animé par une foi agissante. c. Rougemont Deni
17 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Adieu, beau désordre… (mars 1926)
711 Adieu, beau désordre… (mars 1926)o L’ époque s’en va très vite vers on ne sait quoi. On a mis le bonheur dev
712 s’en va très vite vers on ne sait quoi. On a mis le bonheur devant soi, dans un progrès mal défini, et l’on court après s
713 onheur devant soi, dans un progrès mal défini, et l’ on court après sans fin. Même ceux qui ont perdu la croyance en un bon
714 ’on court après sans fin. Même ceux qui ont perdu la croyance en un bonheur possible ou désirable subissent cette rage dés
715 essives lassitudes ou faim de violences — on sent l’ approche de quelque chose, catastrophe ou révélation, brusque échappée
716 ophe ou révélation, brusque échappée sur des pays nouveaux ou chute irrémédiable. Peut-être pouvons-nous choisir encore entre un
717 hoisir encore entre un ressaisissement profond et la ruine. Mais certes, il est temps qu’une lueur de conscience inquiète
718 iété affolée et ridiculement opportuniste où mène la pente de notre civilisation. Meneurs et chefs : des économistes, des
719 s, des financiers, des industriels. Il y a encore les hommes politiques, mais on a si souvent l’impression qu’ils battent l
720 ncore les hommes politiques, mais on a si souvent l’ impression qu’ils battent la mesure devant un orchestre qui, sans eux,
721 mais on a si souvent l’impression qu’ils battent la mesure devant un orchestre qui, sans eux, jouerait aussi bien, aussi
722 erait aussi bien, aussi mal. Quant aux meneurs de l’ opinion publique, il est trop tard pour les éduquer, il faudrait balay
723 eurs de l’opinion publique, il est trop tard pour les éduquer, il faudrait balayer. Je parle en général, sachant bien qu’un
724 Romier, un Bainville, quelques autres, sont parmi les plus conscients de ce temps ; mais si l’on songe aux bataillons de pâ
725 t parmi les plus conscients de ce temps ; mais si l’ on songe aux bataillons de pâles opportunistes sans culture qui se cha
726 portunistes sans culture qui se chargent de gaver les masses du pain quotidien de la bêtise de tous les partis, on comprend
727 chargent de gaver les masses du pain quotidien de la bêtise de tous les partis, on comprendra ce que je veux dire. Il faud
728 les masses du pain quotidien de la bêtise de tous les partis, on comprendra ce que je veux dire. Il faudrait balayer, — et
729 veux dire. Il faudrait balayer, — et mettre qui à la place ? Nos penseurs, nos écrivains ont perdu le sens social. Cela de
730 la place ? Nos penseurs, nos écrivains ont perdu le sens social. Cela devient frappant dans les générations nouvelles. To
731 perdu le sens social. Cela devient frappant dans les générations nouvelles. Toute la jeune littérature décrit un type d’ho
732 ocial. Cela devient frappant dans les générations nouvelles . Toute la jeune littérature décrit un type d’homme profondément antis
733 nt frappant dans les générations nouvelles. Toute la jeune littérature décrit un type d’homme profondément antisocial, glo
734 rale résolument anarchiste. Ceux qui s’essaient à l’ action, c’est encore pour cultiver leur moi. Ils y cherchent un fortif
735 Il leur manque une certitude foncière, une foi en la valeur de l’action. C’est pourquoi ils ne peuvent prétendre à l’actio
736 e une certitude foncière, une foi en la valeur de l’ action. C’est pourquoi ils ne peuvent prétendre à l’action sociale que
737 action. C’est pourquoi ils ne peuvent prétendre à l’ action sociale que l’époque réclame 1. C’est aussi pourquoi l’on ne sa
738 i ils ne peuvent prétendre à l’action sociale que l’ époque réclame 1. C’est aussi pourquoi l’on ne saurait accorder trop d
739 iale que l’époque réclame 1. C’est aussi pourquoi l’ on ne saurait accorder trop d’importance à leurs tentatives morales, s
740 tives morales, si singulières soient-elles — dont le grand public reste le témoin souvent sceptique ou railleur. Au cœur d
741 ulières soient-elles — dont le grand public reste le témoin souvent sceptique ou railleur. Au cœur de la crise de notre ci
742 témoin souvent sceptique ou railleur. Au cœur de la crise de notre civilisation, il y a un problème de morale à résoudre,
743 nce individuelle à recréer. Nous y employer, pour l’ heure, c’est la seule façon efficace de servir. ⁂ On se complaît à rép
744 e à recréer. Nous y employer, pour l’heure, c’est la seule façon efficace de servir. ⁂ On se complaît à répéter que nous v
745 . ⁂ On se complaît à répéter que nous vivons dans le chaos des idées et des doctrines, et qu’il n’existe pas d’esprit du s
746 le, hors un certain « confusionnisme ». Mais sous les épaves de tous les vieux bateaux, il y a une seule mer. Nos agitation
747 « confusionnisme ». Mais sous les épaves de tous les vieux bateaux, il y a une seule mer. Nos agitations contradictoires s
748 comme des vagues soulevées par une même tempête. L’ unité de notre temps est en profondeur : c’est une unité d’inquiétude.
749 it des édifices très différents de style, et dont les façades s’opposent avec hostilité. Dans l’intérieur des deux maisons
750 dont les façades s’opposent avec hostilité. Dans l’ intérieur des deux maisons pourtant se débattent les mêmes brouilles d
751 ’intérieur des deux maisons pourtant se débattent les mêmes brouilles de famille entre Art et Morale, Pensée et Action… Ces
752 , Pensée et Action… Ces deux moralistes adonnés à la culture et à la libération du moi paraissent bien les ancêtres des no
753 on… Ces deux moralistes adonnés à la culture et à la libération du moi paraissent bien les ancêtres des nouvelles générati
754 culture et à la libération du moi paraissent bien les ancêtres des nouvelles générations de héros de roman, lesquels sont t
755 ibération du moi paraissent bien les ancêtres des nouvelles générations de héros de roman, lesquels sont tous éperdument égoïstes
756 rtu. Ce qui n’a rien d’étonnant : ils ne sont que les projections du moi de leurs auteurs. Or l’égoïsme est vertu cardinale
757 t que les projections du moi de leurs auteurs. Or l’ égoïsme est vertu cardinale pour le créateur. Mais quel est ce besoin
758 rs auteurs. Or l’égoïsme est vertu cardinale pour le créateur. Mais quel est ce besoin si général de s’incarner, dans le h
759 quel est ce besoin si général de s’incarner, dans le héros de son roman, de se voir vivre, dans son œuvre ? C’est ici la c
760 man, de se voir vivre, dans son œuvre ? C’est ici la conception même de la littérature, telle qu’elle apparaît chez les ém
761 dans son œuvre ? C’est ici la conception même de la littérature, telle qu’elle apparaît chez les émules de Barrès comme c
762 me de la littérature, telle qu’elle apparaît chez les émules de Barrès comme chez ceux de Gide, qu’il faut préciser. L’éthi
763 rès comme chez ceux de Gide, qu’il faut préciser. L’ éthique et l’esthétique convergent dans la littérature d’aujourd’hui,
764 z ceux de Gide, qu’il faut préciser. L’éthique et l’ esthétique convergent dans la littérature d’aujourd’hui, et plusieurs
765 éciser. L’éthique et l’esthétique convergent dans la littérature d’aujourd’hui, et plusieurs déjà reconnaissent ne pas pou
766 i, et plusieurs déjà reconnaissent ne pas pouvoir les séparer. On n’écrit plus pour s’amuser : ni pour amuser un public. Un
767 lic. Un livre est une action, une expérience. Et, le plus souvent, sur soi-même. On écrit pour cultiver son moi, pour l’ép
768 ur soi-même. On écrit pour cultiver son moi, pour l’ éprouver et le prémunir, pour y découvrir des possibilités neuves, — p
769 n écrit pour cultiver son moi, pour l’éprouver et le prémunir, pour y découvrir des possibilités neuves, — pour le libérer
770 pour y découvrir des possibilités neuves, — pour le libérer. Il n’est pas question de rechercher ici les origines histori
771 libérer. Il n’est pas question de rechercher ici les origines historiques d’une conception qui, de plus en plus, se révèle
772 ’une conception qui, de plus en plus, se révèle à la base de tous les problèmes modernes en littérature. Jacques Rivière s
773 qui, de plus en plus, se révèle à la base de tous les problèmes modernes en littérature. Jacques Rivière s’y appliqua dans
774 erniers articles2. Il rendait responsable de tout le « mal », le romantisme — et c’est plus que probable. Mais il en tirai
775 cles2. Il rendait responsable de tout le « mal », le romantisme — et c’est plus que probable. Mais il en tirait une raison
776 robable. Mais il en tirait une raison nouvelle de le condamner, et nous ne pouvons le suivre jusque-là : il est vain de di
777 ison nouvelle de le condamner, et nous ne pouvons le suivre jusque-là : il est vain de dire qu’une époque s’est trompée, p
778 ne époque s’est trompée, puisqu’elle seule permet la suivante qui peut-être retrouvera une nouvelle face de la vérité. Bor
779 nte qui peut-être retrouvera une nouvelle face de la vérité. Bornons-nous à noter le phénomène, puis à en suivre quelques
780 nouvelle face de la vérité. Bornons-nous à noter le phénomène, puis à en suivre quelques conséquences. Connaissance inté
781 ance intégrale et culture de soi, telle peut être l’ épigraphe de toute la littérature moderne. Il n’a pas fallu longtemps
782 ture de soi, telle peut être l’épigraphe de toute la littérature moderne. Il n’a pas fallu longtemps aux Français pour pou
783 fallu longtemps aux Français pour pousser à bout l’ expérience3. Ingénieux équilibres entre la raison et les sens, entre l
784 à bout l’expérience3. Ingénieux équilibres entre la raison et les sens, entre le moi et le monde : l’ennui est venu avant
785 érience3. Ingénieux équilibres entre la raison et les sens, entre le moi et le monde : l’ennui est venu avant l’épuisement
786 eux équilibres entre la raison et les sens, entre le moi et le monde : l’ennui est venu avant l’épuisement des combinaison
787 bres entre la raison et les sens, entre le moi et le monde : l’ennui est venu avant l’épuisement des combinaisons possible
788 la raison et les sens, entre le moi et le monde : l’ ennui est venu avant l’épuisement des combinaisons possibles. Exaltati
789 entre le moi et le monde : l’ennui est venu avant l’ épuisement des combinaisons possibles. Exaltation méthodique de nos fa
790 cultiver certaines douleurs, plaisirs rares ; et les dissonances les plus aiguës prennent la place d’honneur dans des esth
791 nes douleurs, plaisirs rares ; et les dissonances les plus aiguës prennent la place d’honneur dans des esthétiques construi
792 res ; et les dissonances les plus aiguës prennent la place d’honneur dans des esthétiques construites en hâte à l’usage de
793 onneur dans des esthétiques construites en hâte à l’ usage de sensibilités surmenées. Dégoût, parce que tout a été essayé.
794 se, contre soi, contre une difficulté.) Dégoût de la vie, dégoût du bonheur, dégoût de soi, — on l’étend vite à la société
795 de la vie, dégoût du bonheur, dégoût de soi, — on l’ étend vite à la société entière. Dégoût d’une civilisation qui aboutit
796 ût du bonheur, dégoût de soi, — on l’étend vite à la société entière. Dégoût d’une civilisation qui aboutit logiquement à
797 ogiquement à cet épuisant et forcené gaspillage : la guerre. Certains s’en tiennent à leur dégoût et l’exploitent. Ainsi s
798 a guerre. Certains s’en tiennent à leur dégoût et l’ exploitent. Ainsi se légitime le surréalisme, qui vomit le monde entie
799 à leur dégoût et l’exploitent. Ainsi se légitime le surréalisme, qui vomit le monde entier et la raison avec. « Révolutio
800 tent. Ainsi se légitime le surréalisme, qui vomit le monde entier et la raison avec. « Révolution d’abord. Révolution touj
801 time le surréalisme, qui vomit le monde entier et la raison avec. « Révolution d’abord. Révolution toujours ». « Pour nous
802 tion d’abord. Révolution toujours ». « Pour nous, le salut n’est nulle part… » « Je comprends la révolte des autres et que
803 nous, le salut n’est nulle part… » « Je comprends la révolte des autres et quelles prières cela fait à Dieu », disait Drie
804 n dégoût, un Montherlant s’abandonne au salut par la violence. Une sensualité moins énervée lui permet de brutaliser quelq
805 oins énervée lui permet de brutaliser quelque peu les « grands problèmes », et le voilà reparti dans un égoïsme triomphant,
806 utaliser quelque peu les « grands problèmes », et le voilà reparti dans un égoïsme triomphant, pur du désir d’action qui e
807 ’action qui empêtrait Barrès dans des dilemmes où l’ art trouvait mal sa nourriture. Drieu la Rochelle tente la même fuite.
808 ouvait mal sa nourriture. Drieu la Rochelle tente la même fuite. Mais trop lucide, hésite, trébuche, oscille entre la viol
809 Mais trop lucide, hésite, trébuche, oscille entre la violence et le désespoir (c’est l’amour), et, déchiré de contradictio
810 e, hésite, trébuche, oscille entre la violence et le désespoir (c’est l’amour), et, déchiré de contradictions, tire du dés
811 oscille entre la violence et le désespoir (c’est l’ amour), et, déchiré de contradictions, tire du désordre de ses certitu
812 tire du désordre de ses certitudes fragmentaires la matière de quelques pamphlets par quoi il se raccroche au monde. Mais
813 au monde. Mais il a touché certains bas-fonds de l’ âme où s’éveille un désenchantement qui l’amène au besoin d’une mystiq
814 onds de l’âme où s’éveille un désenchantement qui l’ amène au besoin d’une mystique. Et pour finir, l’un des derniers venus
815 nus, Marcel Arland, — plus jeune, il n’a pas fait la guerre — c’est le même désenchantement précoce, sans la brusquerie de
816 , — plus jeune, il n’a pas fait la guerre — c’est le même désenchantement précoce, sans la brusquerie de ses aînés. Encore
817 rre — c’est le même désenchantement précoce, sans la brusquerie de ses aînés. Encore un qui s’est complu dans son dégoût ;
818 voir comme un appel du Dieu perdu. Il avoue enfin la cause secrète des inquiétudes modernes : la perte d’une foi. Il a bes
819 enfin la cause secrète des inquiétudes modernes : la perte d’une foi. Il a besoin de Dieu, mais il attend en vain sa Révél
820 on : « C’est peut-être que je suis médiocre entre les hommes ». C’est plutôt qu’il est trop attaché encore à se regarder ch
821 on dessein. ⁂ Décidément nous sommes malades dans les profondeurs. Et le mal est si cruellement isolé, commenté par ceux qu
822 ment nous sommes malades dans les profondeurs. Et le mal est si cruellement isolé, commenté par ceux qui le portent en eux
823 l est si cruellement isolé, commenté par ceux qui le portent en eux qu’il en paraît plus incurable. Ces jeunes gens n’en f
824 indre leur déséquilibre. Il serait temps de faire la critique des méthodes et des façons de vivre autant que de penser qui
825 s et des façons de vivre autant que de penser qui les ont amenés aux positions qu’on vient d’esquisser. Mais on trouve tout
826 qu’on vient d’esquisser. Mais on trouve tout dans les livres des jeunes, dites-vous, le pire et le meilleur, toutes les vie
827 ouve tout dans les livres des jeunes, dites-vous, le pire et le meilleur, toutes les vieilleries morales et immorales, tou
828 ans les livres des jeunes, dites-vous, le pire et le meilleur, toutes les vieilleries morales et immorales, tous les parad
829 eunes, dites-vous, le pire et le meilleur, toutes les vieilleries morales et immorales, tous les paradoxes, le chaos, etc.
830 toutes les vieilleries morales et immorales, tous les paradoxes, le chaos, etc. — Certes, aucune époque ne fut à la fois pl
831 lleries morales et immorales, tous les paradoxes, le chaos, etc. — Certes, aucune époque ne fut à la fois plus morale et p
832 u’aucune ne s’est autant attachée à chercher dans le seul moi les fondements d’une éthique. Presque tous sont hantés par l
833 s’est autant attachée à chercher dans le seul moi les fondements d’une éthique. Presque tous sont hantés par la peur d’une
834 ments d’une éthique. Presque tous sont hantés par la peur d’une morale qui « déforme », qui mutile une tendance naturelle,
835 e naturelle, qui élague, qui opère un choix parmi les éléments mêlés de la personnalité. Toute tendance qu’ils découvrent e
836 e, qui opère un choix parmi les éléments mêlés de la personnalité. Toute tendance qu’ils découvrent en eux est non seuleme
837 favoriser son expansion. — Mais je trouve en moi ordre et désordre, raison et folie, etc. Si je les cultive simultanément il
838 oi ordre et désordre, raison et folie, etc. Si je les cultive simultanément il est clair que les tendances négatives l’empo
839 Si je les cultive simultanément il est clair que les tendances négatives l’emportent, il est plus facile et plus enivrant
840 tanément il est clair que les tendances négatives l’ emportent, il est plus facile et plus enivrant de se laisser glisser q
841 vrant de se laisser glisser que de construire. Et l’ on y prend vite goût. Cela tourne alors en passion de détruire, en ha
842 t de quoi se glorifient ses tenants, ils y voient la suprême liberté. Le désir se précisait en moi de commettre enfin l’ac
843 ent ses tenants, ils y voient la suprême liberté. Le désir se précisait en moi de commettre enfin l’acte vraiment indéfend
844 . Le désir se précisait en moi de commettre enfin l’ acte vraiment indéfendable de tout point de vue… J’avais goûté à l’alc
845 ndéfendable de tout point de vue… J’avais goûté à l’ alcool singulièrement perfide de perdre ce que nous chérissons… Nous a
846 ce que nous chérissons… Nous apprîmes à mépriser les longues vies heureuses que nous avions jusqu’alors enviées, et une nu
847 ions jusqu’alors enviées, et une nuit, nous fîmes le procès de toutes les jouissances humaines. L’espèce de sincérité terr
848 iées, et une nuit, nous fîmes le procès de toutes les jouissances humaines. L’espèce de sincérité terroriste dans laquelle
849 mes le procès de toutes les jouissances humaines. L’ espèce de sincérité terroriste dans laquelle nous nous obstinions nous
850 nous niions toute vérité, nous étions dominés par le sens d’une réalité morale absolue que certains d’entre nous eussent a
851 illeurs admirable4, de Louis Aragon, pour marquer l’ aboutissement d’une évolution qui a son origine dans l’œuvre de Gide.
852 utissement d’une évolution qui a son origine dans l’ œuvre de Gide. Entre les Nourritures terrestres, les Caves du Vatican
853 ion qui a son origine dans l’œuvre de Gide. Entre les Nourritures terrestres, les Caves du Vatican et Dada, il y a place po
854 ’œuvre de Gide. Entre les Nourritures terrestres, les Caves du Vatican et Dada, il y a place pour tous les chaînons d’inqui
855 Caves du Vatican et Dada, il y a place pour tous les chaînons d’inquiétude, de malaises, de révoltes plus ou moins complèt
856 plus ou moins complètes au gré des tempéraments. Le geste de Lafcadio généralisé : c’est le surréalisme. De l’acte gratui
857 éraments. Le geste de Lafcadio généralisé : c’est le surréalisme. De l’acte gratuit commis par un héros de roman, à la vie
858 de Lafcadio généralisé : c’est le surréalisme. De l’ acte gratuit commis par un héros de roman, à la vie gratuite que préte
859 De l’acte gratuit commis par un héros de roman, à la vie gratuite que prétendent mener les surréalistes, il n’a fallu que
860 de roman, à la vie gratuite que prétendent mener les surréalistes, il n’a fallu que le temps pour une folie de s’emballer.
861 étendent mener les surréalistes, il n’a fallu que le temps pour une folie de s’emballer. La plupart des romans de jeunes q
862 qui se situent entre Gide et Aragon nous montrent le même personnage : un être sans foi, à qui une sorte de « sincérité »
863 nné parce que ce serait fausser quelque chose ; à la merci des circonstances extérieures qu’il méprise toutes également ;
864 e juger5. Il y a véritablement une littérature de l’ acte gratuit, qui restera caractéristique de notre époque. Mais Gide
865 méthode de culture de soi, « d’intensification de la vie », et qui consiste à pousser à l’extrême certaines « vertus », le
866 fication de la vie », et qui consiste à pousser à l’ extrême certaines « vertus », les pousser jusqu’à l’absurde. Surenchèr
867 siste à pousser à l’extrême certaines « vertus », les pousser jusqu’à l’absurde. Surenchère morale dont le début de la Tent
868 extrême certaines « vertus », les pousser jusqu’à l’ absurde. Surenchère morale dont le début de la Tentative amoureuse off
869 pousser jusqu’à l’absurde. Surenchère morale dont le début de la Tentative amoureuse offrait déjà une singulière préfigura
870 u’à l’absurde. Surenchère morale dont le début de la Tentative amoureuse offrait déjà une singulière préfiguration : Certe
871 singulière préfiguration : Certes ce ne seront ni les lois importunes des hommes, ni les craintes, ni la pudeur, ni le remo
872 e ne seront ni les lois importunes des hommes, ni les craintes, ni la pudeur, ni le remords, ni le respect de moi ni de mes
873 s lois importunes des hommes, ni les craintes, ni la pudeur, ni le remords, ni le respect de moi ni de mes rêves, ni toi,
874 nes des hommes, ni les craintes, ni la pudeur, ni le remords, ni le respect de moi ni de mes rêves, ni toi, triste mort, n
875 ni les craintes, ni la pudeur, ni le remords, ni le respect de moi ni de mes rêves, ni toi, triste mort, ni l’effroi d’ap
876 t de moi ni de mes rêves, ni toi, triste mort, ni l’ effroi d’après-tombe qui m’empêcheront de joindre ce que je désire ; n
877 de joindre ce que je désire ; ni rien — rien que l’ orgueil, sachant une chose si forte, de me sentir plus fort encore et
878 ose si forte, de me sentir plus fort encore et de la vaincre. — Mais la joie d’une si haute victoire — n’est pas si douce
879 sentir plus fort encore et de la vaincre. — Mais la joie d’une si haute victoire — n’est pas si douce encore, n’est pas s
880 à quel genre de sophismes conduit ce mouvement de l’ esprit qui n’utilise une borne que pour sauter plus loin. Ainsi, c’est
881 loin. Ainsi, c’est par humilité qu’on renoncera à la vertu, sous prétexte qu’elle pousse à l’orgueil ; c’est par sincérité
882 oncera à la vertu, sous prétexte qu’elle pousse à l’ orgueil ; c’est par sincérité qu’on mentira, puisque parfois nous somm
883 llement à considérer un certain immoralisme comme la seule vertu digne d’une élite. Tel est l’état d’esprit de la plupart
884 e comme la seule vertu digne d’une élite. Tel est l’ état d’esprit de la plupart de nos jeunes moralistes. Le mot de parado
885 d’esprit de la plupart de nos jeunes moralistes. Le mot de paradoxe serait bien pauvre pour expliquer ce besoin de porter
886 chose, au-delà de toutes limites. « Il n’y a que les excès qui méritent notre enthousiasme ». Mais « cette fureur qui le s
887 ent notre enthousiasme ». Mais « cette fureur qui le soulevait contre lui-même, qui lui faisait mépriser son propre intérê
888 mépriser son propre intérêt6… » c’est proprement la perversion d’une vertu qui se brûle elle-même. Je ne vais point nier
889 rtu qui se brûle elle-même. Je ne vais point nier la fécondité psychologique d’une attitude par ailleurs si proche de cert
890 es dernières conséquences suppose qu’on ait perdu le sens des ensembles rationnels. Nous ne pensons plus par ensembles7 :
891 pas d’une fatigue immense. Nous voyons se fausser le rythme des jours et des nuits à mesure que se développe une civilisat
892 que se développe une civilisation mécanicienne. ( Les machines n’ont pas besoin de sommeil.) La fatigue devient un des élém
893 enne. (Les machines n’ont pas besoin de sommeil.) La fatigue devient un des éléments les plus importants de notre psycholo
894 n de sommeil.) La fatigue devient un des éléments les plus importants de notre psychologie. Images des surréalistes — ils l
895 notre psychologie. Images des surréalistes — ils l’ indiquent eux-mêmes —, calembours, expression métaphorique et symboliq
896 embours, expression métaphorique et symbolique de la pensée : la littérature d’avant-garde est fille de la fatigue. La Mus
897 ression métaphorique et symbolique de la pensée : la littérature d’avant-garde est fille de la fatigue. La Muse a trop vei
898 ensée : la littérature d’avant-garde est fille de la fatigue. La Muse a trop veillé. L’amour moderne, nerveux, saugrenu ju
899 ittérature d’avant-garde est fille de la fatigue. La Muse a trop veillé. L’amour moderne, nerveux, saugrenu jusqu’au sadis
900 e est fille de la fatigue. La Muse a trop veillé. L’ amour moderne, nerveux, saugrenu jusqu’au sadisme, trop lucide, est un
901 u sadisme, trop lucide, est un amour de fatigués ( Les Nuits, l’Europe galante, de Morand). La lucidité aiguë de nos psychol
902 trop lucide, est un amour de fatigués (Les Nuits, l’ Europe galante, de Morand). La lucidité aiguë de nos psychologues est
903 atigués (Les Nuits, l’Europe galante, de Morand). La lucidité aiguë de nos psychologues est cet état presque inhumain de c
904 ie, à ses sensations, à ses automatismes. En art, la fatigue est un des états les plus riches de visions nouvelles, et qui
905 automatismes. En art, la fatigue est un des états les plus riches de visions nouvelles, et qui résiste le mieux à l’analyse
906 tigue est un des états les plus riches de visions nouvelles , et qui résiste le mieux à l’analyse. Seulement nous y perdons gradue
907 plus riches de visions nouvelles, et qui résiste le mieux à l’analyse. Seulement nous y perdons graduellement l’intellige
908 s de visions nouvelles, et qui résiste le mieux à l’ analyse. Seulement nous y perdons graduellement l’intelligence de nos
909 l’analyse. Seulement nous y perdons graduellement l’ intelligence de nos instincts, la conscience de nos limites naturelles
910 ns graduellement l’intelligence de nos instincts, la conscience de nos limites naturelles, tout ce qui servirait de frein
911 ⁂ Recréer une conscience individuelle ; retrouver le sens social, le sens des ensembles et des proportions ; rééduquer les
912 nscience individuelle ; retrouver le sens social, le sens des ensembles et des proportions ; rééduquer les instincts du co
913 sens des ensembles et des proportions ; rééduquer les instincts du corps et de l’âme ; vouloir une foi… La morale de demain
914 portions ; rééduquer les instincts du corps et de l’ âme ; vouloir une foi… La morale de demain sera en réaction complète c
915 instincts du corps et de l’âme ; vouloir une foi… La morale de demain sera en réaction complète contre celle d’aujourd’hui
916 out. Il ne s’agit pas, encore une fois, de renier l’ immense effort pour se libérer de l’universelle hypocrisie accompli pa
917 is, de renier l’immense effort pour se libérer de l’ universelle hypocrisie accompli par des générations qui ne lèguent aux
918 hons au contraire profiter des démonstrations par l’ absurde de quelques problèmes moraux et littéraires 8, à quoi beaucoup
919 t agir, ou bien être agi. Donner une conscience à l’ époque, ou se défaire avec elle et dériver vers un Orient d’oubli — (m
920 hies, quels Niagaras 9 !) Quelques jeunes hommes l’ ont compris. Ils sont modestes — ne s’isolant pas de la Société ; ils
921 compris. Ils sont modestes — ne s’isolant pas de la Société ; ils savent que pour lutter il faut des armes et ne méprisen
922 pour lutter il faut des armes et ne méprisent pas la culture ; sans autre parti pris que celui de vivre, c’est-à-dire de c
923 ttie à son objet, qu’il n’y a de liberté que dans la soumission aux lois naturelles ; et leur effort est de retrouver ces
924 gnent pas de choisir parmi leurs instincts, ni de les améliorer 10. Tout ceci est assez nouveau. (Après tant de cocktails,
925 ncts, ni de les améliorer 10. Tout ceci est assez nouveau . (Après tant de cocktails, quelle saveur a l’eau claire !) Quelques a
926 ouveau. (Après tant de cocktails, quelle saveur a l’ eau claire !) Quelques autres se recueillent encore dans l’attente ang
927 ire !) Quelques autres se recueillent encore dans l’ attente angoissée d’une révélation et dans la connaissance de leur mis
928 dans l’attente angoissée d’une révélation et dans la connaissance de leur misère. Pareils à ceux dont Vinet disait qu’ils
929 ont Vinet disait qu’ils s’en vont « épiant toutes les émotions de l’âme, et lui multipliant ses douleurs en les lui nommant
930 qu’ils s’en vont « épiant toutes les émotions de l’ âme, et lui multipliant ses douleurs en les lui nommant », ils décrive
931 ions de l’âme, et lui multipliant ses douleurs en les lui nommant », ils décrivent le tourment dont sortira peut-être une f
932 ses douleurs en les lui nommant », ils décrivent le tourment dont sortira peut-être une foi nouvelle ; mais qu’ils sachen
933 foi nouvelle ; mais qu’ils sachent, quand viendra le moment, détourner les yeux de leur recherche pour contempler un absol
934 u’ils sachent, quand viendra le moment, détourner les yeux de leur recherche pour contempler un absolu ; qu’ils osent se fa
935 u’ils osent se faire violence pour se hisser dans la lumière. « Il vaut mieux, dit encore Vinet, ne voir d’abord que les g
936 vaut mieux, dit encore Vinet, ne voir d’abord que les grands traits de sa nature, ne connaître que les grands mots de la la
937 les grands traits de sa nature, ne connaître que les grands mots de la langue morale, suivre à l’égard de soi-même la méth
938 de sa nature, ne connaître que les grands mots de la langue morale, suivre à l’égard de soi-même la méthode de l’Évangile
939 de la langue morale, suivre à l’égard de soi-même la méthode de l’Évangile qui, prenant à plein poing toutes ces petites m
940 orale, suivre à l’égard de soi-même la méthode de l’ Évangile qui, prenant à plein poing toutes ces petites misères, en com
941 civiques. Mais que nos moralistes — presque tous les jeunes écrivains — se souviennent de penser en fonction du temps prés
942 temps présent, soit qu’ils veuillent en améliorer les conditions, ou les transformer totalement. — Alors, vous croyez à l’a
943 qu’ils veuillent en améliorer les conditions, ou les transformer totalement. — Alors, vous croyez à l’action sociale des é
944 es transformer totalement. — Alors, vous croyez à l’ action sociale des écrivains ? Peut-être. En tout cas je vois bien le
945 s écrivains ? Peut-être. En tout cas je vois bien le mal qu’ils ont fait et qu’au fond, leur refus d’agir sur l’époque, c’
946 ils ont fait et qu’au fond, leur refus d’agir sur l’ époque, c’est une manière d’agir contre elle. 2. « La crise du concep
947 oque, c’est une manière d’agir contre elle. 2. «  La crise du concept de littérature », NRF, 1923. 3. « Il s’était dévelo
948 « Il s’était développé en nous un goût furieux de l’ expérience humaine. » (Aragon) 4. « Lorsque tout est fini » dans Libe
949 Libertinage. (NRF) 5. Détours de René Crevel ; les romans de Philippe Soupault ; l’Incertain de Maurice Betz ; certains
950 e René Crevel ; les romans de Philippe Soupault ; l’ Incertain de Maurice Betz ; certains personnages d’Arland, de Louis Ar
951 ouis Aragon, de Drieu la Rochelle. Je ne cite que les plus significatifs. 6. Aragon, loc. cit. 7. Le « goût du désastre 
952 es plus significatifs. 6. Aragon, loc. cit. 7. Le « goût du désastre » qui est au fond du romantisme moderne nous empêc
953 ement de construire et de nous construire. Jamais l’ on ne fut plus loin de l’idéal goethéen : au lieu de tout composer en
954 nous construire. Jamais l’on ne fut plus loin de l’ idéal goethéen : au lieu de tout composer en soi, on veut tout cultive
955 omposer en soi, on veut tout cultiver, et en fait l’ on se contente d’une violence, d’un vice, d’une inquiétude. 8. « Cert
956 réelles » (Marcel Arland). 9. Ce serait au moins la liberté ! crieront les surréalistes. Voire. On est moins libre à Mosc
957 nd). 9. Ce serait au moins la liberté ! crieront les surréalistes. Voire. On est moins libre à Moscou qu’à Montparnasse. D
958 D’ailleurs leurs théories nous ramèneraient vite l’ âge de la pierre, à la condition d’homme la plus nue ; la plus éloigné
959 rs leurs théories nous ramèneraient vite l’âge de la pierre, à la condition d’homme la plus nue ; la plus éloignée de cell
960 ries nous ramèneraient vite l’âge de la pierre, à la condition d’homme la plus nue ; la plus éloignée de celle qui permet
961 t vite l’âge de la pierre, à la condition d’homme la plus nue ; la plus éloignée de celle qui permet le surréalisme. 10.
962 e la pierre, à la condition d’homme la plus nue ; la plus éloignée de celle qui permet le surréalisme. 10. Une équipe d’h
963 a plus nue ; la plus éloignée de celle qui permet le surréalisme. 10. Une équipe d’hommes solides suffirait à restaurer u
964 mont Denis de, « Adieu, beau désordre… (Notes sur la jeune littérature et la morale) », Bibliothèque universelle et Revue
965 beau désordre… (Notes sur la jeune littérature et la morale) », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mars
18 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Pierre Jean Jouve, Paulina 1880 (avril 1926)
966 )p Au creux des couleurs assourdies d’un divan le soir, tandis que les fenêtres s’ouvraient vers le ciel de Florence… «
967 ouleurs assourdies d’un divan le soir, tandis que les fenêtres s’ouvraient vers le ciel de Florence… « Du sang, de la volup
968 le soir, tandis que les fenêtres s’ouvraient vers le ciel de Florence… « Du sang, de la volupté et de la mort », un titre
969 ouvraient vers le ciel de Florence… « Du sang, de la volupté et de la mort », un titre s’effaçait dans l’ombre. Jouve a rê
970 ciel de Florence… « Du sang, de la volupté et de la mort », un titre s’effaçait dans l’ombre. Jouve a rêvé une histoire d
971 volupté et de la mort », un titre s’effaçait dans l’ ombre. Jouve a rêvé une histoire de passion mystique et de crime, inte
972 encore après tant d’autres, comme chaque soir un nouveau ciel. Il l’a transcrite en brèves notations lyriques suivant le rythm
973 t d’autres, comme chaque soir un nouveau ciel. Il l’ a transcrite en brèves notations lyriques suivant le rythme d’un songe
974 a transcrite en brèves notations lyriques suivant le rythme d’un songe, sans cesse brisé par les élans alternés ou confond
975 uivant le rythme d’un songe, sans cesse brisé par les élans alternés ou confondus du désir et de la prière. On sort lenteme
976 ar les élans alternés ou confondus du désir et de la prière. On sort lentement d’une chambre bleue qui est le mystère même
977 re. On sort lentement d’une chambre bleue qui est le mystère même, pour suivre la naissance et l’embrasement de la passion
978 hambre bleue qui est le mystère même, pour suivre la naissance et l’embrasement de la passion de Paulina. Le Péché ; le Co
979 est le mystère même, pour suivre la naissance et l’ embrasement de la passion de Paulina. Le Péché ; le Couvent ; la rechu
980 ême, pour suivre la naissance et l’embrasement de la passion de Paulina. Le Péché ; le Couvent ; la rechute et le crime ;
981 ssance et l’embrasement de la passion de Paulina. Le Péché ; le Couvent ; la rechute et le crime ; et l’étrange apaisement
982 ’embrasement de la passion de Paulina. Le Péché ; le Couvent ; la rechute et le crime ; et l’étrange apaisement d’une viei
983 de la passion de Paulina. Le Péché ; le Couvent ; la rechute et le crime ; et l’étrange apaisement d’une vieillesse au sol
984 de Paulina. Le Péché ; le Couvent ; la rechute et le crime ; et l’étrange apaisement d’une vieillesse au soleil. Jouve sem
985 Péché ; le Couvent ; la rechute et le crime ; et l’ étrange apaisement d’une vieillesse au soleil. Jouve semble avoir hési
986 servation psychologique ironique et minutieuse, à la Stendhal, succède à des effusions haletantes ou à une relation cinéma
987 ion cinématographique. Mais tout cela baigne dans le même lyrisme et s’agite sur un fond sombre et riche de passions incon
988 iche de passions inconscientes qui donnent à tous les actes une signification plus profonde. (Il serait aisé de montrer que
989 de poétique où il paraît inconvenant d’introduire le jargon de la science moderne.) Si nous reconnaissons à la base de cet
990 ù il paraît inconvenant d’introduire le jargon de la science moderne.) Si nous reconnaissons à la base de cette œuvre inég
991 n de la science moderne.) Si nous reconnaissons à la base de cette œuvre inégale des idées vieilles comme Rousseau sur les
992 vre inégale des idées vieilles comme Rousseau sur les droits de la passion, — et dans sa trame quelques chapitres inspirés
993 s idées vieilles comme Rousseau sur les droits de la passion, — et dans sa trame quelques chapitres inspirés presque litté
994 anecdote italienne de Stendhal ; si d’autre part l’ évolution mystique de Paulina semble parfois un peu trop « classique »
995 mble parfois un peu trop « classique » et prévue, l’ originalité foncière du roman de Jouve reste indéniable : c’est son mo
996 nes proses mystiques de Paulina au couvent valent les meilleurs poèmes de l’auteur de Tragiques et de Vous êtes des hommes.
997 Paulina au couvent valent les meilleurs poèmes de l’ auteur de Tragiques et de Vous êtes des hommes. p. Rougemont Denis
19 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Alix de Watteville, La Folie de l’espace (avril 1926)
998 Alix de Watteville, La Folie de l’espace (avril 1926)q Un artiste de grand talent à qui l
999 Alix de Watteville, La Folie de l’ espace (avril 1926)q Un artiste de grand talent à qui la guerre a f
1000 (avril 1926)q Un artiste de grand talent à qui la guerre a fait perdre le goût des théories d’écoles et de quelques aut
1001 ste de grand talent à qui la guerre a fait perdre le goût des théories d’écoles et de quelques autres plaisirs pour civils
1002 de quelques autres plaisirs pour civils : mettez- le aux prises avec une petite cité patricienne dont il devra portraiture
1003 etite cité patricienne dont il devra portraiturer les gentilshommes archéologiques et les vieilles dames à principes. Voilà
1004 portraiturer les gentilshommes archéologiques et les vieilles dames à principes. Voilà, n’est-ce pas, un amusant sujet de
1005 al, avec ses personnages un peu conventionnels et l’ invraisemblance assez piquante de ses péripéties. Quel dommage que l’a
1006 ssez piquante de ses péripéties. Quel dommage que l’ auteur l’ait alourdi d’une idéologie, souvent plus généreuse que neuve
1007 ante de ses péripéties. Quel dommage que l’auteur l’ ait alourdi d’une idéologie, souvent plus généreuse que neuve, et qui
1008 à être mise en action plutôt qu’en commentaires. Le talent de Mme de Watteville paraît mieux à l’aise dans la description
1009 es. Le talent de Mme de Watteville paraît mieux à l’ aise dans la description du milieu patricien que dans la création d’un
1010 t de Mme de Watteville paraît mieux à l’aise dans la description du milieu patricien que dans la création d’un caractère d
1011 dans la description du milieu patricien que dans la création d’un caractère de grand peintre. Pourtant, malgré des longue
1012 ongueurs, on ne lira pas sans plaisir ce livre où l’ on voit un homme appeler en vain le vent du large, parmi des gens qui
1013 ir ce livre où l’on voit un homme appeler en vain le vent du large, parmi des gens qui craignent de s’enrhumer. q. Roug
1014 nt Denis de, « [Compte rendu] Alix de Watteville, La Folie de l’espace  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Ge
1015 « [Compte rendu] Alix de Watteville, La Folie de l’ espace  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, avril
20 1926, Articles divers (1924–1930). Conférences d’Aubonne (7 avril 1926)
1016 il 1926)d e Pour la première fois cette année, les conférences de l’Association chrétienne d’étudiants eurent lieu au pr
1017 la première fois cette année, les conférences de l’ Association chrétienne d’étudiants eurent lieu au printemps, et non pl
1018 ne. Un plein succès a répondu à cette innovation. Le sujet de la première partie des conférences, les Objections des intel
1019 . Le sujet de la première partie des conférences, les Objections des intellectuels au Dieu chrétien, fut introduit par M. R
1020 istingué, qui se fit avec beaucoup d’intelligence l’ avocat du diable, en montrant que tous les faits religieux admettent à
1021 lligence l’avocat du diable, en montrant que tous les faits religieux admettent à côté de l’explication mystique une explic
1022 que tous les faits religieux admettent à côté de l’ explication mystique une explication scientifique. C’est donc à la seu
1023 stique une explication scientifique. C’est donc à la seule volonté de choisir. M. le pasteur Bertrand de Lyon, répondit en
1024 que. C’est donc à la seule volonté de choisir. M. le pasteur Bertrand de Lyon, répondit en exposant les exigences de l’Éva
1025 le pasteur Bertrand de Lyon, répondit en exposant les exigences de l’Évangile en face de la pensée moderne, et fut impressi
1026 nd de Lyon, répondit en exposant les exigences de l’ Évangile en face de la pensée moderne, et fut impressionnant de vigueu
1027 n exposant les exigences de l’Évangile en face de la pensée moderne, et fut impressionnant de vigueur dialectique et de la
1028 que et de largeur d’idées. Une soirée consacrée à la fédération vint interrompre les discussions philosophiques provoquées
1029 soirée consacrée à la fédération vint interrompre les discussions philosophiques provoquées par ces deux travaux. Avec la c
1030 losophiques provoquées par ces deux travaux. Avec la conférence de M. Jean Cadier, un jeune pasteur français, on descendit
1031 ier, un jeune pasteur français, on descendit — ou l’ on monta suivant M. A. Léo — du domaine de la pensée pure dans celui d
1032 — ou l’on monta suivant M. A. Léo — du domaine de la pensée pure dans celui de l’action. M. Cadier montra le conflit de la
1033 Léo — du domaine de la pensée pure dans celui de l’ action. M. Cadier montra le conflit de la théologie moderne avec l’act
1034 sée pure dans celui de l’action. M. Cadier montra le conflit de la théologie moderne avec l’action religieuse en s’appuyan
1035 celui de l’action. M. Cadier montra le conflit de la théologie moderne avec l’action religieuse en s’appuyant sur des expé
1036 er montra le conflit de la théologie moderne avec l’ action religieuse en s’appuyant sur des expériences faites pendant le
1037 en s’appuyant sur des expériences faites pendant le réveil de la Drôme, dont il est l’un des artisans les plus actifs. Po
1038 t sur des expériences faites pendant le réveil de la Drôme, dont il est l’un des artisans les plus actifs. Pour remplacer
1039 réveil de la Drôme, dont il est l’un des artisans les plus actifs. Pour remplacer un travail promis par M. A. Reymond malhe
1040 é, M. Pierre Maury fit une causerie émouvante sur l’ Évolution religieuse de Jacques Rivière, qui se trouva préciser bien d
1041 nts laissés en suspens dans la première partie de la conférence. Puis M. A. Brémond, étudiant en théologie, présenta deux
1042 riers de Paris, Clerville et Janson, dont il a eu l’ occasion de partager les conditions de vie et qui nous parlèrent l’un
1043 le et Janson, dont il a eu l’occasion de partager les conditions de vie et qui nous parlèrent l’un de la Réalité prolétarie
1044 s conditions de vie et qui nous parlèrent l’un de la Réalité prolétarienne, l’autre de la Mentalité prolétarienne. Brémond
1045 rent l’un de la Réalité prolétarienne, l’autre de la Mentalité prolétarienne. Brémond conclut en montrant la nécessité et
1046 talité prolétarienne. Brémond conclut en montrant la nécessité et les difficultés d’une action missionnaire dans ces milie
1047 enne. Brémond conclut en montrant la nécessité et les difficultés d’une action missionnaire dans ces milieux, comme M. Terr
1048 missionnaire dans ces milieux, comme M. Terrisse l’ avait fait le soir avant pour les milieux d’ouvriers noirs au Cap. San
1049 dans ces milieux, comme M. Terrisse l’avait fait le soir avant pour les milieux d’ouvriers noirs au Cap. Sans toucher à d
1050 comme M. Terrisse l’avait fait le soir avant pour les milieux d’ouvriers noirs au Cap. Sans toucher à des questions de part
1051 cher leurs auditeurs de leur lit de préjugés pour les placer véritablement en face de la « réalité prolétarienne ». « Cercl
1052 préjugés pour les placer véritablement en face de la « réalité prolétarienne ». « Cercles vicieux que nos syndicats. Cercl
1053 ercles vicieux que nos syndicats. Cercle vicieux, l’ augmentation des salaires. Ce que nous voulons, c’est élever l’homme a
1054 n des salaires. Ce que nous voulons, c’est élever l’ homme au-dessus de la plus dégradante condition, et nous n’y arriveron
1055 e nous voulons, c’est élever l’homme au-dessus de la plus dégradante condition, et nous n’y arriverons que par un travail
1056 , cela peut paraître excessif à qui n’a pas connu l’ atmosphère particulière à ces rencontres. Rien de plus aéré, au moral
1057 l pense sans se préoccuper d’être bien pensant et les Romands recouvrent l’usage de la parole, puis on va se dégourdir sur
1058 per d’être bien pensant et les Romands recouvrent l’ usage de la parole, puis on va se dégourdir sur un ballon ou bien l’on
1059 bien pensant et les Romands recouvrent l’usage de la parole, puis on va se dégourdir sur un ballon ou bien l’on poursuit h
1060 le, puis on va se dégourdir sur un ballon ou bien l’ on poursuit hors du village une discussion toujours trop courte. Et le
1061 u village une discussion toujours trop courte. Et les repas réunissent tout le monde dans la gaieté la plus charmante. On y
1062 ourte. Et les repas réunissent tout le monde dans la gaieté la plus charmante. On y vit un ouvrier en maillot rouge assis
1063 les repas réunissent tout le monde dans la gaieté la plus charmante. On y vit un ouvrier en maillot rouge assis entre un b
1064 rançais. Miracle qui nous fit croire un instant à la fameuse devise de la Révolution. d. Rougemont Denis de, « Conféren
1065 nous fit croire un instant à la fameuse devise de la Révolution. d. Rougemont Denis de, « Conférences d’Aubonne », Suis
21 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Wilfred Chopard, Spicilège ironique (mai 1926)
1066 ilège ironique (mai 1926)r Un léger flirt avec la muse, parce que c’est dimanche, parce qu’il pleut et qu’on s’ennuie.
1067 dimanche, parce qu’il pleut et qu’on s’ennuie. Si la vie est bête à pleurer, sourire est moins fatigant. « Le paon dédaign
1068 est bête à pleurer, sourire est moins fatigant. «  Le paon dédaigne encor mais ne fait plus sa roue. » Ce poète — qui fut a
1069 ne fait plus sa roue. » Ce poète — qui fut aussi le prosateur charmant du Pédagogue et l’Amour — sourit avec une grâce un
1070 i fut aussi le prosateur charmant du Pédagogue et l’ Amour — sourit avec une grâce un peu frileuse et se permet de bâiller
1071 use et se permet de bâiller en public. On connaît le danger… r. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Wilfred Chopard, S
22 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Cécile-Claire Rivier, L’Athée (mai 1926)
1072 Cécile-Claire Rivier, L’ Athée (mai 1926)s C’est le récit de la découverte de Dieu par une j
1073 écile-Claire Rivier, L’Athée (mai 1926)s C’est le récit de la découverte de Dieu par une jeune fille élevée dans l’athé
1074 Rivier, L’Athée (mai 1926)s C’est le récit de la découverte de Dieu par une jeune fille élevée dans l’athéisme. Invrai
1075 écouverte de Dieu par une jeune fille élevée dans l’ athéisme. Invraisemblablement ignorante de toute religion jusqu’à 20 a
1076 e religion jusqu’à 20 ans, Denise s’abandonne à «  la vie », laquelle — un peu aidée par l’auteur — lui révèlera peu à peu
1077 andonne à « la vie », laquelle — un peu aidée par l’ auteur — lui révèlera peu à peu le sens divin de la destinée. Ce livre
1078 n peu aidée par l’auteur — lui révèlera peu à peu le sens divin de la destinée. Ce livre à thèse est plutôt une argumentat
1079 ’auteur — lui révèlera peu à peu le sens divin de la destinée. Ce livre à thèse est plutôt une argumentation à coups d’exe
1080 à coups d’exemples vivants qu’un véritable roman. La profusion souvent facile des incidents et le style volontairement sec
1081 man. La profusion souvent facile des incidents et le style volontairement sec permettent de suivre sans passion ni fatigue
1082 sec permettent de suivre sans passion ni fatigue le développement un peu théorique mais intelligent d’un problème que l’o
1083 peu théorique mais intelligent d’un problème que l’ on pressent trop complètement résolu dès les premières pages, mais qu’
1084 Rivier d’avoir posé courageusement. Dirai-je que l’ abus des points d’exclamation — trait commun à presque toutes les femm
1085 nts d’exclamation — trait commun à presque toutes les femmes auteur, et qui plaît aux lectrices — m’agace un peu ? C’est un
1086 Denis de, « [Compte rendu] Cécile-Claire Rivier, L’ Athée  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mai 192
23 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jean Cocteau, Rappel à l’ordre (mai 1926)
1087 Jean Cocteau, Rappel à l’ ordre (mai 1926)t Sous ce titre, le plus étonnant peut-être qu’il a
1088 Jean Cocteau, Rappel à l’ ordre (mai 1926)t Sous ce titre, le plus étonnant peut-être qu’il ait tr
1089 u, Rappel à l’ordre (mai 1926)t Sous ce titre, le plus étonnant peut-être qu’il ait trouvé, Jean Cocteau a réuni ce qui
1090 ait trouvé, Jean Cocteau a réuni ce qui me paraît le meilleur de son œuvre : ses récits de critique et d’esthétique (Le Co
1091 n œuvre : ses récits de critique et d’esthétique ( Le Coq et l’Arlequin, la Noce massacrée, le Secret professionnel, etc.)
1092 ses récits de critique et d’esthétique (Le Coq et l’ Arlequin, la Noce massacrée, le Secret professionnel, etc.) Sans doute
1093 e critique et d’esthétique (Le Coq et l’Arlequin, la Noce massacrée, le Secret professionnel, etc.) Sans doute faudrait-il
1094 hétique (Le Coq et l’Arlequin, la Noce massacrée, le Secret professionnel, etc.) Sans doute faudrait-il préciser ce qu’il
1095 ns doute faudrait-il préciser ce qu’il entend par ordre , et montrer que si cet ordre l’écarte de Dada, il ne le conduit pas p
1096 ce qu’il entend par ordre, et montrer que si cet ordre l’écarte de Dada, il ne le conduit pas pour autant à l’Académie. Diso
1097 ’il entend par ordre, et montrer que si cet ordre l’ écarte de Dada, il ne le conduit pas pour autant à l’Académie. Disons
1098 montrer que si cet ordre l’écarte de Dada, il ne le conduit pas pour autant à l’Académie. Disons pour aller vite que sa r
1099 carte de Dada, il ne le conduit pas pour autant à l’ Académie. Disons pour aller vite que sa recherche de l’ordre révèle si
1100 démie. Disons pour aller vite que sa recherche de l’ ordre révèle simplement une volonté de construire jusque dans le grabu
1101 mie. Disons pour aller vite que sa recherche de l’ ordre révèle simplement une volonté de construire jusque dans le grabuge, q
1102 simplement une volonté de construire jusque dans le grabuge, qu’il aime pour les matériaux qu’on en peut tirer. L[e] malh
1103 onstruire jusque dans le grabuge, qu’il aime pour les matériaux qu’on en peut tirer. L[e] malheur de Cocteau est qu’il se v
1104 heur de Cocteau est qu’il se veuille poète. Il ne l’ est jamais moins qu’en vers. Sa plus incontestable réussite à ce jour
1105 ers. Sa plus incontestable réussite à ce jour est le Secret professionnel, petit catéchisme cubiste qui dépasse de beaucou
1106 petit catéchisme cubiste qui dépasse de beaucoup les limites de cette école, et qu’il eut le tort à notre sens de vouloir
1107 beaucoup les limites de cette école, et qu’il eut le tort à notre sens de vouloir illustrer de pédants exercices poétiques
1108 ices poétiques. Mais quelle intelligence, et dont l’ audace est de se vouloir plus juste que bizarre. Il sait bien d’ailleu
1109 us juste que bizarre. Il sait bien d’ailleurs que les miracles les plus étonnants sont ceux de la lumière. « Le mystère se
1110 bizarre. Il sait bien d’ailleurs que les miracles les plus étonnants sont ceux de la lumière. « Le mystère se passe en plei
1111 que les miracles les plus étonnants sont ceux de la lumière. « Le mystère se passe en plein jour et à toute vitesse. » Te
1112 les les plus étonnants sont ceux de la lumière. «  Le mystère se passe en plein jour et à toute vitesse. » Telle est bien l
1113 n plein jour et à toute vitesse. » Telle est bien la nouveauté de son théâtre et de l’art qu’il défend en peinture, en mus
1114 Telle est bien la nouveauté de son théâtre et de l’ art qu’il défend en peinture, en musique. Suppression du clair-obscur
1115 re, en musique. Suppression du clair-obscur et de la pénombre. Ôter la pédale à la poésie. (« Le poète ne rêve pas, il com
1116 ppression du clair-obscur et de la pénombre. Ôter la pédale à la poésie. (« Le poète ne rêve pas, il compte. ») Six projec
1117 clair-obscur et de la pénombre. Ôter la pédale à la poésie. (« Le poète ne rêve pas, il compte. ») Six projecteurs conver
1118 et de la pénombre. Ôter la pédale à la poésie. («  Le poète ne rêve pas, il compte. ») Six projecteurs convergent sur une m
1119 convergent sur une machine luisante et tournante. L’ esprit de Cocteau est une arme admirable de précision, d’élégance méca
1120 de rapidité. Il lassera, parce que c’est toujours le même déclic. Cocteau le sait, et pour varier il tire tantôt à gauche
1121 parce que c’est toujours le même déclic. Cocteau le sait, et pour varier il tire tantôt à gauche tantôt à droite, sur Bar
1122 ur Barrès, sur Wagner, sur quelques fantômes, sur le public. (Bientôt sur lui-même je le crains, pour renaître catholique.
1123 fantômes, sur le public. (Bientôt sur lui-même je le crains, pour renaître catholique.) Certes, il bannit le charme et tou
1124 ins, pour renaître catholique.) Certes, il bannit le charme et toute grâce vaporeuse. Mais ses fleurs de cristal, si elles
1125 Denis de, « [Compte rendu] Jean Cocteau, Rappel à l’ ordre  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mai 192
1126 nis de, « [Compte rendu] Jean Cocteau, Rappel à l’ ordre  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mai 1926, p.
24 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). René Crevel, Mon corps et moi (mai 1926)
1127 René Crevel, Mon corps et moi (mai 1926)u Les témoignages ne manquent pas sur la détresse morale de la génération s
1128 mai 1926)u Les témoignages ne manquent pas sur la détresse morale de la génération surréaliste. Mais tandis que la plup
1129 ignages ne manquent pas sur la détresse morale de la génération surréaliste. Mais tandis que la plupart en sont encore à d
1130 ls en disent, « artistiqués », — ils n’osent plus le mensonge de l’art, et pas encore la vérité pure — Crevel décrit sans
1131  artistiqués », — ils n’osent plus le mensonge de l’ art, et pas encore la vérité pure — Crevel décrit sans aucune transpos
1132 n’osent plus le mensonge de l’art, et pas encore la vérité pure — Crevel décrit sans aucune transposition romanesque le t
1133 revel décrit sans aucune transposition romanesque le trouble caractéristique de sa génération. Terrible aveu d’impuissance
1134 on. Terrible aveu d’impuissance, il n’a plus même la force de l’hypocrisie. Isolé dans un hôtel perdu, avec son corps qui
1135 aveu d’impuissance, il n’a plus même la force de l’ hypocrisie. Isolé dans un hôtel perdu, avec son corps qui se souvient
1136 erdu, avec son corps qui se souvient — « mémoire, l’ ennemie » — avec une intelligence dont la triste profession est de dét
1137 mémoire, l’ennemie » — avec une intelligence dont la triste profession est de détruire le désir qu’elle excite par curiosi
1138 ligence dont la triste profession est de détruire le désir qu’elle excite par curiosité passagère, il monologue. « Oui, je
1139 par curiosité passagère, il monologue. « Oui, je le redirai, tous mes essais furent prétextes à me dissoudre, à me perdre
1140 prétextes à me dissoudre, à me perdre. » Vouloir la vérité pure sur soi, c’est se refuser à l’élan vital qui nous crée sa
1141 ouloir la vérité pure sur soi, c’est se refuser à l’ élan vital qui nous crée sans cesse : l’analyse de sa solitude le lais
1142 refuser à l’élan vital qui nous crée sans cesse : l’ analyse de sa solitude le laisse en face de quelques réactions physiol
1143 i nous crée sans cesse : l’analyse de sa solitude le laisse en face de quelques réactions physiologiques dont la pauvreté
1144 en face de quelques réactions physiologiques dont la pauvreté le rejette dans une angoisse qu’il nomme « élan mortel ». Ce
1145 uelques réactions physiologiques dont la pauvreté le rejette dans une angoisse qu’il nomme « élan mortel ». Cette inversio
1146 e qui est constructif et créateur, voilà je pense le véritable désordre. Une intelligence parvenue au point où elle « ne s
1147 ocès », une intelligence qui se dégoûte, tel est le spectacle que nous dévoile cyniquement René Crevel. Il en est peu de
1148 u de plus effrayants. Ah ! Seigneur, donnez-nous la force et le courage de contempler nos corps et nos cœurs sans dégoût
1149 frayants. Ah ! Seigneur, donnez-nous la force et le courage de contempler nos corps et nos cœurs sans dégoût implorait B
1150 ans dégoût implorait Baudelaire. Encore avait-il le courage de prier… u. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] René Cre
25 1926, Articles divers (1924–1930). L’atmosphère d’Aubonne : 22-25 mars 1926 (mai 1926)
1151 L’ atmosphère d’Aubonne : 22-25 mars 1926 (mai 1926)f Cette conférence
1152 qu’on peut bien dire du diable et se termina sous le plus beau soleil de printemps. Libre à qui veut d’y voir un symbole.
1153 veut d’y voir un symbole. On ne saurait exagérer l’ importance des conditions météorologiques du succès d’une telle rencon
1154 e rencontre : tout alla froidement jusqu’à ce que la bise tombée permît à « l’atmosphère » de s’établir. Alors le miracle
1155 oidement jusqu’à ce que la bise tombée permît à «  l’ atmosphère » de s’établir. Alors le miracle apparut, grandit. Le mirac
1156 bée permît à « l’atmosphère » de s’établir. Alors le miracle apparut, grandit. Le miracle, c’est l’esprit d’Aubonne. C’est
1157 de s’établir. Alors le miracle apparut, grandit. Le miracle, c’est l’esprit d’Aubonne. C’est ce miracle tout ce qu’il y a
1158 rs le miracle apparut, grandit. Le miracle, c’est l’ esprit d’Aubonne. C’est ce miracle tout ce qu’il y a de plus protestan
1159 e se produire ailleurs qu’en terre romande. C’est l’ esprit de liberté, tout simplement. Mais précisons : c’est bien plus q
1160 simplement. Mais précisons : c’est bien plus que la liberté de défendre sa petite hérésie personnelle et de s’affirmer au
1161 lle et de s’affirmer aux dépens d’autrui, — c’est la liberté dans la recherche. Chose plus rare qu’on ne pense, à Aubonne
1162 rmer aux dépens d’autrui, — c’est la liberté dans la recherche. Chose plus rare qu’on ne pense, à Aubonne on se sent prêt
1163 ient moins à convaincre qu’à se convaincre. Après les exposés de Janson, de Brémond, j’en sais plusieurs qui ont ainsi « lâ
1164 Mais ce qui est peut-être plus important, on eut l’ impression, durant les discussions entre de Saussure et Bertrand, que
1165 -être plus important, on eut l’impression, durant les discussions entre de Saussure et Bertrand, que les orateurs exprimaie
1166 es discussions entre de Saussure et Bertrand, que les orateurs exprimaient tour à tour les objections que chacun se faisait
1167 ertrand, que les orateurs exprimaient tour à tour les objections que chacun se faisait à part soi, qu’ils incarnaient les v
1168 chacun se faisait à part soi, qu’ils incarnaient les voix contradictoires d’un débat que tous menaient en eux-mêmes loyale
1169 chose de définitif à la fois et d’intelligent, je le mesure aussi à l’émotion qui accueillit l’étude de Maury sur Jacques
1170 à la fois et d’intelligent, je le mesure aussi à l’ émotion qui accueillit l’étude de Maury sur Jacques Rivière : combien
1171 nt, je le mesure aussi à l’émotion qui accueillit l’ étude de Maury sur Jacques Rivière : combien reconnurent dans le tourm
1172 ry sur Jacques Rivière : combien reconnurent dans le tourment de cette âme leur propre recherche, — et dans ses lumineuses
1173 recherche, — et dans ses lumineuses conquêtes sur le doute, le modèle des réponses désirées. Tout cela, c’est l’atmosphère
1174 — et dans ses lumineuses conquêtes sur le doute, le modèle des réponses désirées. Tout cela, c’est l’atmosphère de la cha
1175 le modèle des réponses désirées. Tout cela, c’est l’ atmosphère de la chapelle où ont lieu travaux et méditations. Dehors,
1176 ponses désirées. Tout cela, c’est l’atmosphère de la chapelle où ont lieu travaux et méditations. Dehors, on honore la lib
1177 nt lieu travaux et méditations. Dehors, on honore la liberté d’un culte moins platonique : n’est-ce pas Léo qui prétendit
1178 ’est-ce pas Léo qui prétendit qu’on ne peut juger les Associations qu’à leur façon de jouer le volley-ball ? Le Casino offr
1179 t juger les Associations qu’à leur façon de jouer le volley-ball ? Le Casino offrit pendant quelques nuits la vision étran
1180 iations qu’à leur façon de jouer le volley-ball ? Le Casino offrit pendant quelques nuits la vision étrange d’une salle où
1181 ey-ball ? Le Casino offrit pendant quelques nuits la vision étrange d’une salle où les spectateurs étendus en pyjamas sur
1182 t quelques nuits la vision étrange d’une salle où les spectateurs étendus en pyjamas sur des paillasses attendraient en vai
1183 n pyjamas sur des paillasses attendraient en vain le lever d’un rideau sur une pièce inexistante. Enfin le dernier soir, l
1184 sur une pièce inexistante. Enfin le dernier soir, l’ on vit apparaître un fakir… Il y eut aussi une assemblée délibérative
1185 eut pas trop de toute sa souplesse pour maintenir l’ équilibre des discussions et de sa propre personne. Et il y eut encore
1186 encore un dîner très démocratique pendant lequel le philosophe Abauzit chanta « les Crapauds » avec âme, appuyé d’une mai
1187 que pendant lequel le philosophe Abauzit chanta «  les Crapauds » avec âme, appuyé d’une main sur l’épaule de Janson, et de
1188 « les Crapauds » avec âme, appuyé d’une main sur l’ épaule de Janson, et de l’autre dessinant dans l’air des phrases music
1189 l’épaule de Janson, et de l’autre dessinant dans l’ air des phrases musicales. Après quoi Richardot, entrant par la fenêtr
1190 ases musicales. Après quoi Richardot, entrant par la fenêtre, vint annoncer qu’on était libre — comme si on l’avait attend
1191 re, vint annoncer qu’on était libre — comme si on l’ avait attendu pour le manifester ! — et qu’il suffisait de souscrire à
1192 on était libre — comme si on l’avait attendu pour le manifester ! — et qu’il suffisait de souscrire à la brochure de la co
1193 manifester ! — et qu’il suffisait de souscrire à la brochure de la conférence3 pour savoir tout ce que je n’ai pas dit da
1194  et qu’il suffisait de souscrire à la brochure de la conférence3 pour savoir tout ce que je n’ai pas dit dans ces quelques
1195 2.50, nom et adresse. f. Rougemont Denis de, «  L’ atmosphère d’Aubonne : 22-25 mars 1926 », Lux et Vita : nouvelles de l
1196 hère d’Aubonne : 22-25 mars 1926 », Lux et Vita : nouvelles de l’Association chrétienne suisse d’étudiants, Lausanne, mai 1926, p
1197 e : 22-25 mars 1926 », Lux et Vita : nouvelles de l’ Association chrétienne suisse d’étudiants, Lausanne, mai 1926, p. 44-4
26 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Le Corbusier, Urbanisme (juin 1926)
1198 Le Corbusier, Urbanisme (juin 1926)v Nous disons adieu aux charmes tr
1199 disons adieu aux charmes troubles et inhumains de la nature. Il s’agit de créer à notre vie moderne un décor utile et beau
1200 à notre vie moderne un décor utile et beau. Or «  la grande ville, phénomène de force en mouvement, est aujourd’hui une ca
1201 astrophe menaçante pour n’avoir pas été animée de l’ esprit de géométrie… Elle use et conduit lentement l’usure des millier
1202 sprit de géométrie… Elle use et conduit lentement l’ usure des milliers d’êtres humains ». Elle n’est plus adaptée aux cond
1203 humains ». Elle n’est plus adaptée aux conditions nouvelles de travail ou de repos, ni dans son plan ni dans le détail des rues.
1204 de travail ou de repos, ni dans son plan ni dans le détail des rues. Congestion : « un cheval arrête 1000 chevaux-vapeurs
1205 eval arrête 1000 chevaux-vapeurs ». Et pourtant «  la ville est une image puissante qui actionne notre esprit » après avoir
1206 e esprit » après avoir été créée par lui, — comme la poésie. C’est ainsi que le problème de l’Urbanisme se place au croise
1207 créée par lui, — comme la poésie. C’est ainsi que le problème de l’Urbanisme se place au croisement des préoccupations est
1208 — comme la poésie. C’est ainsi que le problème de l’ Urbanisme se place au croisement des préoccupations esthétiques et soc
1209 hétiques et sociales d’aujourd’hui. Pour résoudre la crise de notre civilisation sous cet aspect comme sous les autres, il
1210 de notre civilisation sous cet aspect comme sous les autres, il nous faut mieux que des dictateurs : des Architectes, de l
1211 ut mieux que des dictateurs : des Architectes, de l’ esprit et de la matière. Si Le Corbusier réalise son plan, ce sera plu
1212 s dictateurs : des Architectes, de l’esprit et de la matière. Si Le Corbusier réalise son plan, ce sera plus fort que Muss
1213 des Architectes, de l’esprit et de la matière. Si Le Corbusier réalise son plan, ce sera plus fort que Mussolini (lequel s
1214 nisme est une étude technique et un pamphlet dont l’ argumentation serrée éclate parfois en boutades mordantes, en brèves f
1215 lyrisme. C’est d’une verve puissante jusque dans la statistique. On en sort convaincu ou bouleversé, enthousiasmé d’avoir
1216 vaincu ou bouleversé, enthousiasmé d’avoir trouvé la formule même de tant d’aspirations modernes. Voici sans aucun doute u
1217 ns modernes. Voici sans aucun doute un des livres les plus représentatifs de l’époque de Lénine, du fascisme, du ciment arm
1218 un doute un des livres les plus représentatifs de l’ époque de Lénine, du fascisme, du ciment armé. « Notre monde comme un
1219 poques mortes. Une tâche nous incombe, construire le cadre de notre existence… construire les villes de notre temps ». Et
1220 onstruire le cadre de notre existence… construire les villes de notre temps ». Et je déplie ce plan d’une « ville contempor
1221 verre et de ciment blanc, flamboyantes au soleil. Les vingt-quatre gratte-ciel de la cité, au centre, s’espacent autour d’u
1222 yantes au soleil. Les vingt-quatre gratte-ciel de la cité, au centre, s’espacent autour d’un aérodrome-gare circulaire, pr
1223 un aérodrome-gare circulaire, prismes perdus dans le silence de l’azur au-dessus des rumeurs de la ville. Puis s’étendent
1224 are circulaire, prismes perdus dans le silence de l’ azur au-dessus des rumeurs de la ville. Puis s’étendent les quartiers
1225 ans le silence de l’azur au-dessus des rumeurs de la ville. Puis s’étendent les quartiers de résidence ; les jardins suspe
1226 u-dessus des rumeurs de la ville. Puis s’étendent les quartiers de résidence ; les jardins suspendus à tous les étages soul
1227 lle. Puis s’étendent les quartiers de résidence ; les jardins suspendus à tous les étages soulignent de verdure l’horizonta
1228 tiers de résidence ; les jardins suspendus à tous les étages soulignent de verdure l’horizontale des toitures en terrasses.
1229 suspendus à tous les étages soulignent de verdure l’ horizontale des toitures en terrasses. Des perspectives régulières rec
1230 ives régulières recoupées à 200 et 400 mètres par les plans fuyants des rues immenses livrées au 100 à l’heure des autos. L
1231 plans fuyants des rues immenses livrées au 100 à l’ heure des autos. Les maisons habitées ne sont plus que des enceintes t
1232 rues immenses livrées au 100 à l’heure des autos. Les maisons habitées ne sont plus que des enceintes transparentes, et min
1233 es « redents » des terrains de jeux et des parcs, la nature annexée à la ville. « C’est un spectacle organisé par l’Archit
1234 errains de jeux et des parcs, la nature annexée à la ville. « C’est un spectacle organisé par l’Architecture avec les ress
1235 xée à la ville. « C’est un spectacle organisé par l’ Architecture avec les ressources de la plastique qui est le jeu de for
1236 est un spectacle organisé par l’Architecture avec les ressources de la plastique qui est le jeu de formes sous la lumière »
1237 rganisé par l’Architecture avec les ressources de la plastique qui est le jeu de formes sous la lumière ». Cristallisation
1238 cture avec les ressources de la plastique qui est le jeu de formes sous la lumière ». Cristallisation d’un rêve de joie et
1239 ces de la plastique qui est le jeu de formes sous la lumière ». Cristallisation d’un rêve de joie et de raison où de grand
1240 iels formidables des ensembles soumis aux lois de l’ esprit et de la vie sociale, non plus à un opportunisme anarchique. Ti
1241 s des ensembles soumis aux lois de l’esprit et de la vie sociale, non plus à un opportunisme anarchique. Tirer des lignes
1242 tunisme anarchique. Tirer des lignes droites, est le propre de l’homme. Toutes les civilisations fortes l’ont osé. Créer u
1243 hique. Tirer des lignes droites, est le propre de l’ homme. Toutes les civilisations fortes l’ont osé. Créer un espace arch
1244 lignes droites, est le propre de l’homme. Toutes les civilisations fortes l’ont osé. Créer un espace architectural lumineu
1245 ropre de l’homme. Toutes les civilisations fortes l’ ont osé. Créer un espace architectural lumineux à la place de nos cité
1246 ution. Déjà des ingénieurs se sont mis à calculer la réalisation de ce phénomène de haute poésie — la « ville contemporain
1247 la réalisation de ce phénomène de haute poésie — la « ville contemporaine ». Un labeur précis et anonyme concourt obscuré
1248 rément à cette parfaite expression du triomphe de l’ homme sur la Nature. Architecture : « tout ce qui est au-delà du calcu
1249 te parfaite expression du triomphe de l’homme sur la Nature. Architecture : « tout ce qui est au-delà du calcul… Ce sera l
1250 re : « tout ce qui est au-delà du calcul… Ce sera la passion du siècle ». v. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Le Co
1251 cle ». v. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Le Corbusier, Urbanisme  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
27 1926, Articles divers (1924–1930). Confession tendancieuse (mai 1926)
1252 mprenons que nos œuvres, si elles furent faites à l’ image de notre esprit, le lui rendent bien dans la suite ; c’est peut-
1253 si elles furent faites à l’image de notre esprit, le lui rendent bien dans la suite ; c’est peut-être pourquoi nous accord
1254 l’image de notre esprit, le lui rendent bien dans la suite ; c’est peut-être pourquoi nous accordons voix dans le débat d’
1255 c’est peut-être pourquoi nous accordons voix dans le débat d’écrire, aux forces les plus secrètes de notre être comme aux
1256 accordons voix dans le débat d’écrire, aux forces les plus secrètes de notre être comme aux calculs les plus rusés. Nous ch
1257 les plus secrètes de notre être comme aux calculs les plus rusés. Nous choisissons les idées comme on choisit un amour dont
1258 omme aux calculs les plus rusés. Nous choisissons les idées comme on choisit un amour dont on est anxieux de prévoir l’infl
1259 n choisit un amour dont on est anxieux de prévoir l’ influence, avant de s’y jeter, et dont on craint de ressortir trop dif
1260 e réticences dont nous ne comprenons pas toujours l’ objet. Peur de perdre le fil de la conscience de soi, peur de subir l’
1261 e comprenons pas toujours l’objet. Peur de perdre le fil de la conscience de soi, peur de subir l’empreinte imprévisible d
1262 ns pas toujours l’objet. Peur de perdre le fil de la conscience de soi, peur de subir l’empreinte imprévisible des choses.
1263 dre le fil de la conscience de soi, peur de subir l’ empreinte imprévisible des choses. Amour de soi… Mais moi, qui suis-je
1264 is moi, qui suis-je ? Par ces trois mots commence le drame de toute vie. Ha ! Qui je suis ? Mais je le sens très bien ! je
1265 le drame de toute vie. Ha ! Qui je suis ? Mais je le sens très bien ! je sens très bien cette force — ici, je tape du pied
1266 r. Vous me direz qui je suis, mes amis ; quel est le vrai ? — Ils me proposent vingt visages que je puis à peine reconnaît
1267 gt visages que je puis à peine reconnaître. Reste le monde, — les choses, les faits, la vie, comme ils disent. Je me suis
1268 ue je puis à peine reconnaître. Reste le monde, —  les choses, les faits, la vie, comme ils disent. Je me suis abandonné au
1269 peine reconnaître. Reste le monde, — les choses, les faits, la vie, comme ils disent. Je me suis abandonné au jeu du hasar
1270 nnaître. Reste le monde, — les choses, les faits, la vie, comme ils disent. Je me suis abandonné au jeu du hasard, jusqu’a
1271 suis abandonné au jeu du hasard, jusqu’au jour où l’ on me fit comprendre qu’il n’est que le jeu de sauter follement d’une
1272 au jour où l’on me fit comprendre qu’il n’est que le jeu de sauter follement d’une habitude dans une autre. Il ne me resta
1273 supportables, si cruellement présentes et dures ? La cause de cette inadaptation, je la soupçonnais si grave, si fondament
1274 tes et dures ? La cause de cette inadaptation, je la soupçonnais si grave, si fondamentale que je préférais me leurrer à c
1275 e des imperfections de détail dont je m’exagérais l’ importance. Et c’est ainsi par feintes que je progressais, jusqu’au jo
1276 mmer peur de rire. Cette amertume au fond de tous les plaisirs, cette envie de rire quand il m’arrivait un ennui, cette inc
1277 à pleurer sur mes déboires, ce malaise seul liait les personnages auxquels je me prêtais. Mais en même temps que je le déco
1278 auxquels je me prêtais. Mais en même temps que je le découvrais, dans tout mon être une force aveugle de violence s’était
1279 nce s’était levée. Ce fut elle qui m’entraîna sur les stades où je connus quelle confiance sourde aux contradictions intime
1280 our de cette brutalité s’organisaient brusquement les éléments désaccordés de ce moi que j’avais tant choyé. « Maintenant,
1281 e — c’était un des premiers jours du printemps —, l’ heure est venue de la violence. Jeunes tempêtes, lavez, bousculez ! La
1282 emiers jours du printemps —, l’heure est venue de la violence. Jeunes tempêtes, lavez, bousculez ! La parole est aux insti
1283 la violence. Jeunes tempêtes, lavez, bousculez ! La parole est aux instincts combatifs et dominateurs par quoi l’homme ne
1284 t aux instincts combatifs et dominateurs par quoi l’ homme ne se distingue plus de l’animal. Louée soit ma force et tout ce
1285 inateurs par quoi l’homme ne se distingue plus de l’ animal. Louée soit ma force et tout ce qui l’exalte, et tout ce qui la
1286 s de l’animal. Louée soit ma force et tout ce qui l’ exalte, et tout ce qui la dompte, tout ce qui sourd en moi de trop gra
1287 ma force et tout ce qui l’exalte, et tout ce qui la dompte, tout ce qui sourd en moi de trop grand pour ma vie — toute ma
1288 ’allais plier des résistances à mon gré, agir sur les choses… Vers le soir, l’ardeur tombe : agir ? dans quel sens ? Provis
1289 résistances à mon gré, agir sur les choses… Vers le soir, l’ardeur tombe : agir ? dans quel sens ? Provisoirement j’étais
1290 ces à mon gré, agir sur les choses… Vers le soir, l’ ardeur tombe : agir ? dans quel sens ? Provisoirement j’étais sauvé d’
1291 s ? Provisoirement j’étais sauvé d’un désordre où l’ on glisse vers la mort. L’important, c’est de ne pas se défaire. Mais
1292 t j’étais sauvé d’un désordre où l’on glisse vers la mort. L’important, c’est de ne pas se défaire. Mais rien n’était réso
1293 sauvé d’un désordre où l’on glisse vers la mort. L’ important, c’est de ne pas se défaire. Mais rien n’était résolu. Me vo
1294 nt je sais qu’il est absolument vain de prétendre les résoudre, mais que je dois feindre d’avoir résolus : c’est ce qui s’a
1295 c’est ce qui s’appelle vivre. Problème de Dieu, à la base. J’aurai garde de m’y perdre au début d’une recherche qui n’a qu
1296 riant, je m’arrête parfois, heureux : « J’ai donc la foi ? » Mais c’est encore une question… Je crois qu’il ne faut pas at
1297 dans sa prière, qu’une révélation vienne chercher l’ âme qui se sent misérable. Je ne recevrai pas une foi, mais peut-être
1298 cevrai pas une foi, mais peut-être arriverai-je à la vouloir, et c’est le tout. S’il est une révélation, c’est en me renda
1299 ais peut-être arriverai-je à la vouloir, et c’est le tout. S’il est une révélation, c’est en me rendant plus parfait que j
1300 en me rendant plus parfait que je lui préparerai les voies. Agir ? Sur moi d’abord. Il ne faut plus que je respecte tout e
1301 nir. Se perfectionner : cela consiste à retrouver l’ instinct le plus profond de l’homme, la vertu conservatrice qui ne peu
1302 fectionner : cela consiste à retrouver l’instinct le plus profond de l’homme, la vertu conservatrice qui ne peut dicter qu
1303 onsiste à retrouver l’instinct le plus profond de l’ homme, la vertu conservatrice qui ne peut dicter que les gestes les pl
1304 retrouver l’instinct le plus profond de l’homme, la vertu conservatrice qui ne peut dicter que les gestes les plus favora
1305 me, la vertu conservatrice qui ne peut dicter que les gestes les plus favorables. J’ai d’autres instincts et je n’entends p
1306 u conservatrice qui ne peut dicter que les gestes les plus favorables. J’ai d’autres instincts et je n’entends pas tous les
1307 J’ai d’autres instincts et je n’entends pas tous les cultiver pour cela seul qu’ils sont naturels : la nature est un champ
1308 es cultiver pour cela seul qu’ils sont naturels : la nature est un champ de luttes, de tendances vers la destruction et ve
1309 nature est un champ de luttes, de tendances vers la destruction et vers la construction ; c’est un mélange à doses égales
1310 luttes, de tendances vers la destruction et vers la construction ; c’est un mélange à doses égales de mort et de vie. Et
1311 ange à doses égales de mort et de vie. Et c’est à l’ intelligence de faire primer la vie, puisque n’est pas encore parfait
1312 de vie. Et c’est à l’intelligence de faire primer la vie, puisque n’est pas encore parfait cet instinct qui est la Vertu.
1313 que n’est pas encore parfait cet instinct qui est la Vertu. Ma vertu est de chercher cette Vertu ; de me replacer dans le
1314 est de chercher cette Vertu ; de me replacer dans le sens de ma vie ; de rendre toutes mes forces complices de mon destin.
1315 in. D’abord donc, choisir Mes instincts, ensuite, les éduquer, selon des lois établies par le concours de l’expérience et d
1316 ensuite, les éduquer, selon des lois établies par le concours de l’expérience et d’un sentiment de convenance en quoi se c
1317 uquer, selon des lois établies par le concours de l’ expérience et d’un sentiment de convenance en quoi se composent le pla
1318 d’un sentiment de convenance en quoi se composent le plaisir et la conscience de Mes limites. Je m’attache particulièremen
1319 de convenance en quoi se composent le plaisir et la conscience de Mes limites. Je m’attache particulièrement à retrouver
1320 ttache particulièrement à retrouver ces limites : la vie moderne, mécanique, nous les fait oublier, d’où cette fatigue gén
1321 ver ces limites : la vie moderne, mécanique, nous les fait oublier, d’où cette fatigue générale qui fausse tout, et qui s’o
1322 usse tout, et qui s’oppose au perfectionnement de l’ esprit, puisqu’elle ne permet que des associations suivant les directi
1323 uisqu’elle ne permet que des associations suivant les directions de moindre résistance. Mais je ne m’emprisonnerai pas dans
1324 isonnerai pas dans ces limites. Ma liberté est de les porter plus loin sans cesse, de battre mes propres records. De ce len
1325 une certaine méfiance vis-à-vis de ma sincérité. La sincérité m’apparaît parfois comme un arrêt artificiel dans ma vie, u
1326 re dangereuse. (On donne corps à une faiblesse en la nommant ; or je ne veux plus de faiblesses4.) Et demain peut-être, ag
1327 s de faiblesses4.) Et demain peut-être, agir dans le monde, si je m’en suis d’abord rendu digne. L’époque nous veut, comme
1328 ns le monde, si je m’en suis d’abord rendu digne. L’ époque nous veut, comme elle veut une conscience. Je fais partie d’un
1329 ence. Je fais partie d’un ensemble social et dans la mesure où j’en dépends, je me dois de m’employer à sa sauvegarde ou à
1330 ormation. Mais il y faut une doctrine, me dit-on. L’ avouerai-je, quand je médite sur une doctrine possible, sur une systém
1331 sation de mes petites certitudes5, j’éprouve vite le sentiment d’être dans un débat étranger à ce véritable débat de ma vi
1332 alaise sans cesse renaissant, comment m’adapter à l’ existence que m’imposent mon corps et les lois du monde, et comment au
1333 adapter à l’existence que m’imposent mon corps et les lois du monde, et comment augmenter ma puissance de jouir, en même te
1334 agir. Que tout cela s’agite sur fond de néant, je le comprends par éclairs, mais une secrète espérance m’emporte de nouvea
1335 orte de nouveau, premier gage du divin… Reprendre l’ offensive — au soir, je m’amuserai à mettre des étiquettes sur mes act
1336 un peu mes lèvres, et s’affirmer à mesure que je le décris. Mais comme un écho profond, une attirance aussi d’anciennes f
1337 ie, dégoût, lueurs éteintes dans une nuit froide. Les notes d’un chant qui voudrait s’élever. Puis enfin la marée de mes dé
1338 otes d’un chant qui voudrait s’élever. Puis enfin la marée de mes désirs. Qu’ils viennent battre ce corps triste, qu’ils l
1339 s. Qu’ils viennent battre ce corps triste, qu’ils l’ emportent d’un flot fou ! Revenez, mes joies du large !… Tiens, j’écou
1340  ! Revenez, mes joies du large !… Tiens, j’écoute le vent ; je pense au monde. Chant des horizons, images qui s’éclairent…
1341 er son plaisir ? Je reste candidat au salut. 4. La sincérité absolue, « scientifique » me paraît aller contre fin. Une a
1342 e et soutenue modifie son objet vivant. Pour moi, la sincérité ne peut être que spontanée. Et spontanément je suis porté à
1343 périences ratées on puisse encore se persuader de la vérité d’un système, hors la religion. Un système n’est pas vrai, il
1344 core se persuader de la vérité d’un système, hors la religion. Un système n’est pas vrai, il est utile. C’est pourquoi je
1345 l est utile. C’est pourquoi je ne puis comprendre les excommunications et les intransigeances. Toutes les aspirations me pa
1346 uoi je ne puis comprendre les excommunications et les intransigeances. Toutes les aspirations me paraissent légitimes chez
1347 s excommunications et les intransigeances. Toutes les aspirations me paraissent légitimes chez d’autres, même celles que je
1348 Rougemont Denis de, « Confession tendancieuse », Les Cahiers du mois, Paris, juin 1926, p. 144-148.
28 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Ramon Fernandez, Messages (juillet 1926)
1349 e construction et de synthèse qui se dessine chez les jeunes écrivains d’aujourd’hui. La « critique philosophique » qu’il v
1350 dessine chez les jeunes écrivains d’aujourd’hui. La « critique philosophique » qu’il voudrait inaugurer « ne se contenter
1351 rait inaugurer « ne se contenterait pas d’étudier les œuvres pour elles-mêmes dans leur signification historique ou techniq
1352 historique ou technique, mais tâcherait d’épouser le dynamisme spirituel qu’elle révèle, puis de les situer dans l’univers
1353 er le dynamisme spirituel qu’elle révèle, puis de les situer dans l’univers humain ». M. Fernandez a tout le talent qu’il f
1354 spirituel qu’elle révèle, puis de les situer dans l’ univers humain ». M. Fernandez a tout le talent qu’il faut pour lui fa
1355 tuer dans l’univers humain ». M. Fernandez a tout le talent qu’il faut pour lui faire acquérir droit de cité. Voici enfin
1356 eçon constructive des expériences entreprises par les générations précédentes. Parce qu’elles se sont souvent enlisées dans
1357 ont souvent enlisées dans leurs recherches, il ne les condamne pas d’un « Jugement » sans issue sinon vers le passé catholi
1358 damne pas d’un « Jugement » sans issue sinon vers le passé catholique ; mais tenant compte de leur effort, il puise dans l
1359 mais tenant compte de leur effort, il puise dans l’ échec même de leurs analyses les éléments de sa synthèse, qui se trouv
1360 ort, il puise dans l’échec même de leurs analyses les éléments de sa synthèse, qui se trouve ainsi continuer leur œuvre, co
1361 verte couronne une série d’expériences négatives. La critique de ces expériences négatives est contenue surtout dans ses e
1362 st, Pater et Stendhal. Certes, il était temps que l’ on dénonce la confusion romantique de l’art avec la vie, qui empoisonn
1363 Stendhal. Certes, il était temps que l’on dénonce la confusion romantique de l’art avec la vie, qui empoisonne et la moral
1364 temps que l’on dénonce la confusion romantique de l’ art avec la vie, qui empoisonne et la morale et l’esthétique modernes.
1365 ’on dénonce la confusion romantique de l’art avec la vie, qui empoisonne et la morale et l’esthétique modernes. Et à ce pr
1366 omantique de l’art avec la vie, qui empoisonne et la morale et l’esthétique modernes. Et à ce propos, il faut souhaiter qu
1367 l’art avec la vie, qui empoisonne et la morale et l’ esthétique modernes. Et à ce propos, il faut souhaiter que M. Fernande
1368 ut souhaiter que M. Fernandez aborde par ce biais l’ œuvre de Gide, qui plus qu’aucune autre me paraît liée à cette confusi
1369 à cette confusion. Mais s’il est bien établi que les lois de la vie sont essentiellement différentes des lois de l’œuvre d
1370 fusion. Mais s’il est bien établi que les lois de la vie sont essentiellement différentes des lois de l’œuvre d’art, il ne
1371 vie sont essentiellement différentes des lois de l’ œuvre d’art, il ne s’en suit pas forcément que l’on doit nier toute co
1372 l’œuvre d’art, il ne s’en suit pas forcément que l’ on doit nier toute communication directe entre l’œuvre et le moi, comm
1373 l’on doit nier toute communication directe entre l’ œuvre et le moi, comme le fait M. Fernandez dans un essai sur l’Autobi
1374 nier toute communication directe entre l’œuvre et le moi, comme le fait M. Fernandez dans un essai sur l’Autobiographie e
1375 munication directe entre l’œuvre et le moi, comme le fait M. Fernandez dans un essai sur l’Autobiographie et le Roman, do
1376 moi, comme le fait M. Fernandez dans un essai sur l’ Autobiographie et le Roman, dont pour ma part je suis loin d’admettre
1377 Fernandez dans un essai sur l’Autobiographie et le Roman, dont pour ma part je suis loin d’admettre plusieurs thèses bea
1378 es. M. Fernandez tente de prouver par exemple que l’ œuvre d’art ne peut être un moyen de connaissance personnelle. Après q
1379 voir se concevoir et s’essayer. » Fort bien, mais l’ œuvre n’est-elle pas une façon particulière de s’essayer ? Je ne puis
1380 e discussion de ces thèses subtiles, d’autant que la position de l’auteur dans cet essai me paraît encore ambiguë : on peu
1381 ces thèses subtiles, d’autant que la position de l’ auteur dans cet essai me paraît encore ambiguë : on peut se demander s
1382 e ambiguë : on peut se demander s’il nie vraiment l’ interaction de la vie et de l’art, ou s’il la condamne plutôt, à cause
1383 ut se demander s’il nie vraiment l’interaction de la vie et de l’art, ou s’il la condamne plutôt, à cause des confusions q
1384 r s’il nie vraiment l’interaction de la vie et de l’ art, ou s’il la condamne plutôt, à cause des confusions qu’il y décèle
1385 ment l’interaction de la vie et de l’art, ou s’il la condamne plutôt, à cause des confusions qu’il y décèle. Le meilleur m
1386 ne plutôt, à cause des confusions qu’il y décèle. Le meilleur morceau du livre est l’essai sur Proust et sa théorie des « 
1387 qu’il y décèle. Le meilleur morceau du livre est l’ essai sur Proust et sa théorie des « intermittences du cœur » dont Fer
1388 que décisive. Et c’est justement par opposition à la conception proustienne de la personnalité — « mosaïque de sensations
1389 ent par opposition à la conception proustienne de la personnalité — « mosaïque de sensations juxtaposées » — qu’il définit
1390 uxtaposées » — qu’il définit sa propre théorie de la « garantie des sentiments », où l’on est en droit de voir le germe d’
1391 pre théorie de la « garantie des sentiments », où l’ on est en droit de voir le germe d’un moralisme nouveau qui se fondera
1392 ie des sentiments », où l’on est en droit de voir le germe d’un moralisme nouveau qui se fonderait solidement sur les donn
1393 l’on est en droit de voir le germe d’un moralisme nouveau qui se fonderait solidement sur les données modernes de la psychologi
1394 moralisme nouveau qui se fonderait solidement sur les données modernes de la psychologie et de la philosophie. Pour nous pr
1395 fonderait solidement sur les données modernes de la psychologie et de la philosophie. Pour nous prémunir contre le pouvoi
1396 sur les données modernes de la psychologie et de la philosophie. Pour nous prémunir contre le pouvoir d’analyse — une ana
1397 e et de la philosophie. Pour nous prémunir contre le pouvoir d’analyse — une analyse qui retient les éléments de la person
1398 re le pouvoir d’analyse — une analyse qui retient les éléments de la personnalité moins le « principe unificateur » — que l
1399 analyse — une analyse qui retient les éléments de la personnalité moins le « principe unificateur » — que la psychologie f
1400 qui retient les éléments de la personnalité moins le « principe unificateur » — que la psychologie freudienne et proustien
1401 sonnalité moins le « principe unificateur » — que la psychologie freudienne et proustienne a porté à un point si dangereux
1402 a porté à un point si dangereux, il nous propose l’ expérience d’un Newman, les exemples d’un Meredith et d’un Stendhal, q
1403 gereux, il nous propose l’expérience d’un Newman, les exemples d’un Meredith et d’un Stendhal, qui ont su « penser dans le
1404 redith et d’un Stendhal, qui ont su « penser dans le train de l’action, faire de la psychologie à la volée », et donc conn
1405 un Stendhal, qui ont su « penser dans le train de l’ action, faire de la psychologie à la volée », et donc connaître l’homm
1406 t su « penser dans le train de l’action, faire de la psychologie à la volée », et donc connaître l’homme dans l’élan qui f
1407 s le train de l’action, faire de la psychologie à la volée », et donc connaître l’homme dans l’élan qui fait sa véritable
1408 de la psychologie à la volée », et donc connaître l’ homme dans l’élan qui fait sa véritable unité. Je me borne à signaler
1409 ogie à la volée », et donc connaître l’homme dans l’ élan qui fait sa véritable unité. Je me borne à signaler encore un thè
1410 thème qui revient dans la plupart de ces essais : l’ esthétique du roman. Fernandez en formule une théorie assez proche du
1411 téraire, et qu’il serait bien utile d’adopter, si l’ on veut éviter les confusions qui sont en train d’ôter sa valeur litté
1412 serait bien utile d’adopter, si l’on veut éviter les confusions qui sont en train d’ôter sa valeur littéraire au genre le
1413 ont en train d’ôter sa valeur littéraire au genre le plus encombré et le plus impur qui soit. On n’a pas ménagé les critiq
1414 sa valeur littéraire au genre le plus encombré et le plus impur qui soit. On n’a pas ménagé les critiques à cette œuvre. C
1415 mbré et le plus impur qui soit. On n’a pas ménagé les critiques à cette œuvre. Cela tient surtout à sa forme : il est parfo
1416 forme : il est parfois agaçant de pressentir sous l’ expression trop technique ou obscure, une richesse d’idées neuves et f
1417 Périlleuse situation que la sienne, en effet, où l’ on court le double risque de paraître trop littéraire aux philosophes,
1418 situation que la sienne, en effet, où l’on court le double risque de paraître trop littéraire aux philosophes, et trop ph
1419 ndez un certain recul par rapport à ses idées, on le sent un peu gauche encore dans les positions conquises. Il n’empêche
1420 à ses idées, on le sent un peu gauche encore dans les positions conquises. Il n’empêche que son livre manifeste une belle u
1421 uvre comme Plaisir des Sports de Jean Prévost, et les essais politiques de Drieu la Rochelle, les Messages de Fernandez son
1422 t, et les essais politiques de Drieu la Rochelle, les Messages de Fernandez sont les premières contributions à l’établissem
1423 s de Fernandez sont les premières contributions à l’ établissement d’une éthique adaptée aux besoins modernes. w. Rougem
29 1926, Articles divers (1924–1930). Les Bestiaires, par Henry de Montherlant (10 juillet 1926)
1424 Les Bestiaires, par Henry de Montherlant (10 juillet 1926)h Je ferme l
1425 nry de Montherlant (10 juillet 1926)h Je ferme les Bestiaires, et me tirant hors de ce « long songe de violence et de vo
1426 ffées par des forces qui se lèvent. Car telle est la vertu de ce livre, qu’on l’éprouve d’abord trop vivement pour le juge
1427 lèvent. Car telle est la vertu de ce livre, qu’on l’ éprouve d’abord trop vivement pour le juger. L’auteur l’appelle un « p
1428 livre, qu’on l’éprouve d’abord trop vivement pour le juger. L’auteur l’appelle un « poème solaire », l’éditeur un roman, p
1429 on l’éprouve d’abord trop vivement pour le juger. L’ auteur l’appelle un « poème solaire », l’éditeur un roman, parce que ç
1430 uve d’abord trop vivement pour le juger. L’auteur l’ appelle un « poème solaire », l’éditeur un roman, parce que ça se vend
1431 e juger. L’auteur l’appelle un « poème solaire », l’ éditeur un roman, parce que ça se vend mieux. Ce récit des premiers co
1432 e taureaux du jeune Montherlant est en réalité un nouveau tome de ses mémoires lyriques. Une œuvre d’une seule coulée, presque
1433 e, sans cette orchestration de thèmes qui faisait la richesse du Songe, mais d’une ligne plus ferme, d’une unité plus pure
1434 ne ligne plus ferme, d’une unité plus pure aussi. Le sujet était périlleux : si particulier, il prêtait à des abus de pitt
1435 n’a pas toujours échappé, mais qu’il domine dans l’ ensemble et entraîne dans l’allure puissante à la fois et désinvolte d
1436 ais qu’il domine dans l’ensemble et entraîne dans l’ allure puissante à la fois et désinvolte de son récit. On a souvent pa
1437 emiers ouvrages de Montherlant. Cette fois-ci, on le traite de naturaliste. Mais comment montrer des taureaux sans que cel
1438 t montrer des taureaux sans que cela sente un peu l’ étable ? L’étonnant, c’est de voir à quel point Montherlant reste poèt
1439 es taureaux sans que cela sente un peu l’étable ? L’ étonnant, c’est de voir à quel point Montherlant reste poète jusque da
1440 à quel point Montherlant reste poète jusque dans la description la plus réaliste de la vie animale. Et n’est-ce pas juste
1441 ontherlant reste poète jusque dans la description la plus réaliste de la vie animale. Et n’est-ce pas justement parce qu’i
1442 te jusque dans la description la plus réaliste de la vie animale. Et n’est-ce pas justement parce qu’il est poète qu’il pe
1443 out rôdent des présences animales. Tandis que sur la plaine s’élève le long beuglement des taureaux et le ohéohéohé des bo
1444 sences animales. Tandis que sur la plaine s’élève le long beuglement des taureaux et le ohéohéohé des bouviers « comme un
1445 plaine s’élève le long beuglement des taureaux et le ohéohéohé des bouviers « comme un chant mystérieux entendu au-dessus
1446 « comme un chant mystérieux entendu au-dessus de la mer », il y a toujours dans un coin du tableau des ruades, des chevau
1447 u des ruades, des chevaux qui partent tout droit, la tête dressée, des vachettes qui se mordillent et se frôlent amoureuse
1448 bêtes de désir ». Une intelligence si profonde de la vie animale suppose entre l’homme et la bête une sympathie que Monthe
1449 gence si profonde de la vie animale suppose entre l’ homme et la bête une sympathie que Montherlant note à plusieurs repris
1450 ofonde de la vie animale suppose entre l’homme et la bête une sympathie que Montherlant note à plusieurs reprises. C’est «
1451 ontherlant note à plusieurs reprises. C’est « par la divination de cet amour qu’Alban (le jeune héros du récit) sent ce qu
1452 C’est « par la divination de cet amour qu’Alban ( le jeune héros du récit) sent ce que sent la bête en même temps qu’elle.
1453 ’Alban (le jeune héros du récit) sent ce que sent la bête en même temps qu’elle. Et parce qu’il sait ce qu’elle va faire,
1454 Et parce qu’il sait ce qu’elle va faire, il peut la dominer… : on ne vainc vraiment que ce qu’on aime, et les victorieux
1455 ner… : on ne vainc vraiment que ce qu’on aime, et les victorieux sont d’immenses amants »6. Mais envers les taureaux cet am
1456 victorieux sont d’immenses amants »6. Mais envers les taureaux cet amour tourne en adoration ou en une véritable horreur sa
1457 Voici Alban devant une bête qu’il devra combattre le lendemain : « Salaud, cochon, saligaud ! » Il l’apostrophait ainsi t
1458 le lendemain : « Salaud, cochon, saligaud ! » Il l’ apostrophait ainsi tout bas, sur un ton révérenciel, et comme on dérou
1459 évérenciel, et comme on déroule une litanie. Sous les grands cils brillants, lustrés par la lumière descendante, les prunel
1460 anie. Sous les grands cils brillants, lustrés par la lumière descendante, les prunelles laiteuses du dieu avaient un refle
1461 ls brillants, lustrés par la lumière descendante, les prunelles laiteuses du dieu avaient un reflet bleu clair, soudain inq
1462 avaient un reflet bleu clair, soudain inquiètes à l’ approche de l’inconnu. Nulle part mieux que dans la description des t
1463 let bleu clair, soudain inquiètes à l’approche de l’ inconnu. Nulle part mieux que dans la description des taureaux ne se
1464 approche de l’inconnu. Nulle part mieux que dans la description des taureaux ne se manifeste ce passage du réalisme le pl
1465 s taureaux ne se manifeste ce passage du réalisme le plus hardi à un lyrisme plein de simple grandeur. Voici la mort du ta
1466 ardi à un lyrisme plein de simple grandeur. Voici la mort du taureau dit « le Mauvais Ange » : La bête chancela de l’arri
1467 e simple grandeur. Voici la mort du taureau dit «  le Mauvais Ange » : La bête chancela de l’arrière-train, tenta de se ra
1468 ici la mort du taureau dit « le Mauvais Ange » : La bête chancela de l’arrière-train, tenta de se raidir, enfin croula su
1469 au dit « le Mauvais Ange » : La bête chancela de l’ arrière-train, tenta de se raidir, enfin croula sur le flanc, accompli
1470 rière-train, tenta de se raidir, enfin croula sur le flanc, accomplissant sa destinée. Quelques secondes encore elle clign
1471 rent peu à peu, comme un corps qu’on gonflerait à la pompe, tandis que dans cet agrandissement les articulations grinçaien
1472 it à la pompe, tandis que dans cet agrandissement les articulations grinçaient, avec le bruit d’un câble de navire qu’on se
1473 agrandissement les articulations grinçaient, avec le bruit d’un câble de navire qu’on serre sur un treuil. Elle arriva ave
1474 n serre sur un treuil. Elle arriva avec emphase à la cime de son spasme, comme l’homme à la cime de son plaisir, et comme
1475 rriva avec emphase à la cime de son spasme, comme l’ homme à la cime de son plaisir, et comme lui, elle y resta immobile. E
1476 emphase à la cime de son spasme, comme l’homme à la cime de son plaisir, et comme lui, elle y resta immobile. Et son âme
1477 t son âme divine s’échappa, pleurant ses jeux, et les génisses, et la chère plaine. De tels passages qui abondent dans les
1478 s’échappa, pleurant ses jeux, et les génisses, et la chère plaine. De tels passages qui abondent dans les Bestiaires font
1479 chère plaine. De tels passages qui abondent dans les Bestiaires font pardonner bien d’autres pages de vrais délires taurol
1480 utres pages de vrais délires taurologiques. Quand le lyrisme de Montherlant décolle de la réalité, c’est tout de suite une
1481 iques. Quand le lyrisme de Montherlant décolle de la réalité, c’est tout de suite une orgie d’évocations antiques, de rapp
1482 ents superstitieux, de grands symboles païens, et l’ on se perd dans un syncrétisme effarant, où Mithra, Jésus, les taureau
1483 d dans un syncrétisme effarant, où Mithra, Jésus, les taureaux et Alban confondent leurs génies dans une sorte de cauchemar
1484 e qu’on veut de ce paganisme exalté, tout ivre de la fumée des sacrifices sanglants. Pour ma part, je le trouve assez peu
1485 fumée des sacrifices sanglants. Pour ma part, je le trouve assez peu humain et comme obsédé par une idée de violence toni
1486 s donnons ? » ⁂ Il est impossible de ne voir dans les Bestiaires qu’une évocation de l’Espagne et du génie taurin. Ce qui p
1487 e ne voir dans les Bestiaires qu’une évocation de l’ Espagne et du génie taurin. Ce qui perce à chaque page, ce qui peu à p
1488 perce à chaque page, ce qui peu à peu obsède dans l’ inflexion des phrases, ce qui s’élève en fin de compte de tous ces tab
1489 ous ces tableaux de violence et de passion, c’est la présence d’un tempérament. À l’inverse de tant d’autres qui s’analyse
1490 de passion, c’est la présence d’un tempérament. À l’ inverse de tant d’autres qui s’analysent sans fin, avant que d’être, M
1491 soulève directement aucun des grands problèmes de l’ heure. La violence même qui sourd dans son être intime l’en empêche, l
1492 irectement aucun des grands problèmes de l’heure. La violence même qui sourd dans son être intime l’en empêche, le préserv
1493 . La violence même qui sourd dans son être intime l’ en empêche, le préserve des états d’incertitude douloureux, où ces pro
1494 même qui sourd dans son être intime l’en empêche, le préserve des états d’incertitude douloureux, où ces problèmes viennen
1495 douloureux, où ces problèmes viennent se poser à l’ esprit, profitant de son désaccord avec la vie. Ni métaphysicien, ni l
1496 poser à l’esprit, profitant de son désaccord avec la vie. Ni métaphysicien, ni logicien, dit-il d’Alban — (de lui-même) —
1497 pas à ce qui est triste ou ennuyeux, que ce soit l’ idée de la mort ou les soucis politiques, sociaux, etc., et il ne met
1498 qui est triste ou ennuyeux, que ce soit l’idée de la mort ou les soucis politiques, sociaux, etc., et il ne met de la grav
1499 ste ou ennuyeux, que ce soit l’idée de la mort ou les soucis politiques, sociaux, etc., et il ne met de la gravité que dans
1500 soucis politiques, sociaux, etc., et il ne met de la gravité que dans les choses voluptueuses, je n’ai pas dit les choses
1501 ociaux, etc., et il ne met de la gravité que dans les choses voluptueuses, je n’ai pas dit les choses sentimentales. Le tra
1502 que dans les choses voluptueuses, je n’ai pas dit les choses sentimentales. Le tragique de la vie ne lui échappe pas. Il en
1503 ueuses, je n’ai pas dit les choses sentimentales. Le tragique de la vie ne lui échappe pas. Il en parle, il le chante avec
1504 pas dit les choses sentimentales. Le tragique de la vie ne lui échappe pas. Il en parle, il le chante avec pathétique. Ma
1505 que de la vie ne lui échappe pas. Il en parle, il le chante avec pathétique. Mais c’est parce qu’il est poète : le chant f
1506 ec pathétique. Mais c’est parce qu’il est poète : le chant fini, il n’y pense plus. On comprend qu’une telle attitude agac
1507 se soucient avant tout de trouver des réponses de l’ intelligence ou de la foi aux inquiétudes profondes de leurs âmes sépa
1508 t de trouver des réponses de l’intelligence ou de la foi aux inquiétudes profondes de leurs âmes séparées de Dieu. Monther
1509 é dont il manifeste avec une magnifique insolence les forces créatrices, ne vaut-elle pas d’être élevée en témoignage pour
1510 levée en témoignage pour notre exaltation ? Comme la vue des athlètes en action, un tel livre communique une puissance phy
1511 munique une puissance physique, un mouvement vers la vie ardente qui peut entraîner l’âme dans un élan de grandeur. N’est-
1512 mouvement vers la vie ardente qui peut entraîner l’ âme dans un élan de grandeur. N’est-ce point une solution aussi ? Plut
1513 ois à ces forces obscures qui nous replacent dans l’ intelligence de l’instinct universel et nous élèvent à une vie plus âp
1514 bscures qui nous replacent dans l’intelligence de l’ instinct universel et nous élèvent à une vie plus âpre et violemment c
1515 à une vie plus âpre et violemment contractée, par la grâce de l’éternel Désir ? 6. Il est curieux de noter que de tels p
1516 us âpre et violemment contractée, par la grâce de l’ éternel Désir ? 6. Il est curieux de noter que de tels passages vien
1517 noter que de tels passages viennent à l’appui de la théorie de l’instinct de Bergson. Bergson suppose aussi entre le sphe
1518 tels passages viennent à l’appui de la théorie de l’ instinct de Bergson. Bergson suppose aussi entre le sphex qui pique un
1519 ’instinct de Bergson. Bergson suppose aussi entre le sphex qui pique une chenille précisément aux trois-centres nerveux, e
1520 « une sympathie (au sens étymologique du mot) qui la renseigne du dedans, pour ainsi dire, sur la vulnérabilité de la chen
1521 qui la renseigne du dedans, pour ainsi dire, sur la vulnérabilité de la chenille. » (Évolution créatrice, p. 188) Je n’ai
1522 dedans, pour ainsi dire, sur la vulnérabilité de la chenille. » (Évolution créatrice, p. 188) Je n’ai pas la place de cit
1523 ille. » (Évolution créatrice, p. 188) Je n’ai pas la place de citer ici plusieurs autres passages qui préciseraient ce par
1524 Denis de, « [Compte rendu] Henry de Montherlant, Les Bestiaires  », La Semaine littéraire, Genève, 10 juillet 1926, p. 335
1525 e rendu] Henry de Montherlant, Les Bestiaires  », La Semaine littéraire, Genève, 10 juillet 1926, p. 335.
30 1926, Journal de Genève, articles (1926–1982). Le Dépaysement oriental (16 juillet 1926)
1526 Le Dépaysement oriental (16 juillet 1926)a Il y a dans le monde intel
1527 sement oriental (16 juillet 1926)a Il y a dans le monde intellectuel une « Question d’Orient » dont on ne peut plus méc
1528 stion d’Orient » dont on ne peut plus méconnaître l’ urgence. Des prophètes — hindous à demi-européanisés ou germains désil
1529 nisés ou germains désillusionnés — nous annoncent le « crépuscule du monde occidental », et, au-dessus des ruines prochain
1530 chaines de nos cités mécaniciennes, ils rallument le mirage d’un Orient paradisiaque d’où nous viendraient une fois de plu
1531 radisiaque d’où nous viendraient une fois de plus la sagesse et la lumière. De récentes enquêtes ont dénoncé certaines des
1532 ù nous viendraient une fois de plus la sagesse et la lumière. De récentes enquêtes ont dénoncé certaines des confusions su
1533 inaires. Beaucoup pourtant subsistent encore. Or, le nouveau livre de M. de Traz1, par les précisions importantes qu’il ap
1534 ires. Beaucoup pourtant subsistent encore. Or, le nouveau livre de M. de Traz1, par les précisions importantes qu’il apporte su
1535 encore. Or, le nouveau livre de M. de Traz1, par les précisions importantes qu’il apporte sur les rapports de l’Orient et
1536 par les précisions importantes qu’il apporte sur les rapports de l’Orient et de l’Europe, me paraît destiné à lever plusie
1537 ons importantes qu’il apporte sur les rapports de l’ Orient et de l’Europe, me paraît destiné à lever plusieurs des plus te
1538 qu’il apporte sur les rapports de l’Orient et de l’ Europe, me paraît destiné à lever plusieurs des plus tenaces de ces co
1539 us tenaces de ces confusions. M. de Traz a visité l’ Égypte, ses habitants, ses tombeaux et son passé, en curieux avide du
1540 avec une sorte d’acharnement, comme seul il sait l’ être aujourd’hui sans que cela nuise en rien à un don de sympathie qui
1541 ise en rien à un don de sympathie qui est parfois la plus subtile de ses ruses de psychologue. C’est parce que son livre,
1542 hevés, n’est ni un album de vues pittoresques, ni le journal plus ou moins lyrique auquel nous ont habitués les voyageurs
1543 al plus ou moins lyrique auquel nous ont habitués les voyageurs en Orient, mais une suite de coups d’œil aigus sur l’âme or
1544 n Orient, mais une suite de coups d’œil aigus sur l’ âme orientale de l’islam, que nous l’avons lu avec un intérêt si soute
1545 suite de coups d’œil aigus sur l’âme orientale de l’ islam, que nous l’avons lu avec un intérêt si soutenu et parfois — je
1546 il aigus sur l’âme orientale de l’islam, que nous l’ avons lu avec un intérêt si soutenu et parfois — je pense à certaines
1547 tie orientale de lui-même, comme c’est si souvent le cas, mais bien sur l’Orient. Encore faut-il s’entendre : les meilleur
1548 ême, comme c’est si souvent le cas, mais bien sur l’ Orient. Encore faut-il s’entendre : les meilleurs documents sur l’Orie
1549 is bien sur l’Orient. Encore faut-il s’entendre : les meilleurs documents sur l’Orient sont les œuvres des Orientaux. L’int
1550 faut-il s’entendre : les meilleurs documents sur l’ Orient sont les œuvres des Orientaux. L’intérêt d’un livre comme celui
1551 endre : les meilleurs documents sur l’Orient sont les œuvres des Orientaux. L’intérêt d’un livre comme celui-ci est plus da
1552 ments sur l’Orient sont les œuvres des Orientaux. L’ intérêt d’un livre comme celui-ci est plus dans l’opposition des deux
1553 L’intérêt d’un livre comme celui-ci est plus dans l’ opposition des deux mondes que dans la peinture elle-même de l’Orient.
1554 t plus dans l’opposition des deux mondes que dans la peinture elle-même de l’Orient. Tandis que s’accumulent les traits qu
1555 des deux mondes que dans la peinture elle-même de l’ Orient. Tandis que s’accumulent les traits qui composent le portrait m
1556 re elle-même de l’Orient. Tandis que s’accumulent les traits qui composent le portrait moral de l’Oriental, celui de l’Euro
1557 Tandis que s’accumulent les traits qui composent le portrait moral de l’Oriental, celui de l’Européen se précise dans la
1558 ent les traits qui composent le portrait moral de l’ Oriental, celui de l’Européen se précise dans la même mesure, — et aus
1559 mposent le portrait moral de l’Oriental, celui de l’ Européen se précise dans la même mesure, — et aussi la figure de l’aut
1560 e l’Oriental, celui de l’Européen se précise dans la même mesure, — et aussi la figure de l’auteur : car il n’est guère de
1561 ropéen se précise dans la même mesure, — et aussi la figure de l’auteur : car il n’est guère de comparaison valable qu’ent
1562 cise dans la même mesure, — et aussi la figure de l’ auteur : car il n’est guère de comparaison valable qu’entre individus,
1563 er mieux que lui-même. S’il dit des Égyptiens : «  Le mensonge, autant qu’une politesse, leur paraît une beauté », c’est po
1564 par contraste une « préférence irréductible pour le vrai ». Ce qui lui permet de voir profond dans cet islam qu’il qualif
1565 cet islam qu’il qualifie de « religion du fil de l’ eau », ou de « prodigieux stupéfiant », tandis que « l’attrait du chri
1566  », ou de « prodigieux stupéfiant », tandis que «  l’ attrait du christianisme est dans l’inquiétude qu’il nous inflige ». «
1567 tandis que « l’attrait du christianisme est dans l’ inquiétude qu’il nous inflige ». « Ils mettent leur âme en veilleuse,
1568 i de soi-même nous avons fait une vertu. Eux, ils l’ ont rendu facile et en ont fait un plaisir. » Et encore ceci que je tr
1569 re ceci que je trouve si juste : « Ce qui définit le plus profondément l’Occidental, c’est peut-être la fidélité. » Ses re
1570 si juste : « Ce qui définit le plus profondément l’ Occidental, c’est peut-être la fidélité. » Ses remarques sur la psycho
1571 e plus profondément l’Occidental, c’est peut-être la fidélité. » Ses remarques sur la psychologie de l’Égyptien ne sont pa
1572 c’est peut-être la fidélité. » Ses remarques sur la psychologie de l’Égyptien ne sont pas moins subtiles et le mènent à c
1573 a fidélité. » Ses remarques sur la psychologie de l’ Égyptien ne sont pas moins subtiles et le mènent à cette constatation
1574 logie de l’Égyptien ne sont pas moins subtiles et le mènent à cette constatation fondamentale que « notre intelligence et
1575 fondamentale que « notre intelligence et celle de l’ Oriental ne sont pas superposables ». Dès lors, comment collaborer, co
1576 si c’est impossible, pourra-t-on du moins éviter le conflit que certains prétendent menaçant ? Malgré l’« anxiété mélanco
1577 conflit que certains prétendent menaçant ? Malgré l’ « anxiété mélancolique » qu’il éprouve à se sentir si loin de l’Orient
1578 lancolique » qu’il éprouve à se sentir si loin de l’ Oriental, les conclusions de M. de Traz — si tant est qu’on peut concl
1579 qu’il éprouve à se sentir si loin de l’Oriental, les conclusions de M. de Traz — si tant est qu’on peut conclure en une ma
1580 t que nous ayons à chercher là-bas notre salut. «  La seule leçon à attendre des musulmans, c’est que le spectacle de leur
1581 a seule leçon à attendre des musulmans, c’est que le spectacle de leur décadence nous enseigne comment éviter la nôtre. »
1582 le de leur décadence nous enseigne comment éviter la nôtre. » La place me manque pour parler comme j’aurais voulu le faire
1583 écadence nous enseigne comment éviter la nôtre. » La place me manque pour parler comme j’aurais voulu le faire des deux au
1584 place me manque pour parler comme j’aurais voulu le faire des deux autres parties du volume, d’une importance moins actue
1585 e, mais d’une qualité d’art peut-être supérieure. Les méditations sur les ruines de la Haute-Égypte révèlent en de Traz un
1586 é d’art peut-être supérieure. Les méditations sur les ruines de la Haute-Égypte révèlent en de Traz un philosophe de l’hist
1587 tre supérieure. Les méditations sur les ruines de la Haute-Égypte révèlent en de Traz un philosophe de l’histoire aux vues
1588 Haute-Égypte révèlent en de Traz un philosophe de l’ histoire aux vues larges et pourtant réalistes, aux hypothèses hardies
1589 t pourtant réalistes, aux hypothèses hardies — de la hardiesse de ce bon sens qui est le plus éloigné du sens commun — mai
1590 hardies — de la hardiesse de ce bon sens qui est le plus éloigné du sens commun — mais qui reste trop méfiant de tout rom
1591 nt de tout romantisme pour édifier aucun système. Le livre se termine par un voyage à Jérusalem : le christianisme n’est-i
1592 . Le livre se termine par un voyage à Jérusalem : le christianisme n’est-il pas le plus beau don de l’Orient à l’Europe ?
1593 oyage à Jérusalem : le christianisme n’est-il pas le plus beau don de l’Orient à l’Europe ? Il y a là des pages d’un accen
1594 le christianisme n’est-il pas le plus beau don de l’ Orient à l’Europe ? Il y a là des pages d’un accent très noble et cour
1595 nisme n’est-il pas le plus beau don de l’Orient à l’ Europe ? Il y a là des pages d’un accent très noble et courageux mêlé,
1596 rfois, d’une certaine amertume, où de Traz quitte le ton mesuré qu’il s’impose d’ordinaire. Mais j’avoue que m’a parfois u
1597 oue que m’a parfois un peu gêné cette présence de la mort qu’il fait sentir partout aux lieux mêmes où naquit la religion
1598 ’il fait sentir partout aux lieux mêmes où naquit la religion du « Prince de la vie »… Qu’on ne croie pas, d’ailleurs, que
1599 lieux mêmes où naquit la religion du « Prince de la vie »… Qu’on ne croie pas, d’ailleurs, que l’attitude presque constam
1600 de la vie »… Qu’on ne croie pas, d’ailleurs, que l’ attitude presque constamment critique de M. de Traz diminue l’intérêt
1601 resque constamment critique de M. de Traz diminue l’ intérêt vivant de son livre : cette impartialité même, cette façon de
1602 es, révèle sa personnalité peut-être mieux que ne le feraient une suite de pages lyriques toujours un peu stylisées. Il ap
1603 oujours un peu stylisées. Il apparaît, ici, comme le type du voyageur intelligent, qui n’accepte d’être séduit que pour « 
1604 arer et, parfois, juger ; préférant obstinément à la légende le vrai, même amer, non par défaut d’un sens artistique dont
1605 rfois, juger ; préférant obstinément à la légende le vrai, même amer, non par défaut d’un sens artistique dont plusieurs d
1606 tistique dont plusieurs de ses morceaux attestent la délicatesse, mais parce qu’il sait y trouver les seuls motifs réels d
1607 t la délicatesse, mais parce qu’il sait y trouver les seuls motifs réels d’exaltation. 1. Le Dépaysement oriental, chez
1608 rouver les seuls motifs réels d’exaltation. 1. Le Dépaysement oriental, chez Grasset, Paris. a. Rougemont Denis de, «
1609 gemont Denis de, « [Compte rendu] Robert de Traz, Le Dépaysement oriental  », Journal de Genève, Genève, 16 juillet 1926,
31 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Henry de Montherlant, Les Bestiaires (septembre 1926)
1610 Henry de Montherlant, Les Bestiaires (septembre 1926)x J’éprouve quelque gêne à porter un ju
1611 elque gêne à porter un jugement littéraire sur ce nouveau tome des mémoires de Montherlant : dans ce récit plus encore que dans
1612 Montherlant : dans ce récit plus encore que dans les œuvres précédentes, on voit beaucoup moins l’œuvre d’art que l’auteur
1613 ns les œuvres précédentes, on voit beaucoup moins l’ œuvre d’art que l’auteur ; dans ce portrait de Montherlant toréador, à
1614 édentes, on voit beaucoup moins l’œuvre d’art que l’ auteur ; dans ce portrait de Montherlant toréador, à 16 ans, c’est sur
1615 de Montherlant toréador, à 16 ans, c’est surtout le Montherlant actuel que l’on sent. C’est dire que le livre vaut par so
1616 à 16 ans, c’est surtout le Montherlant actuel que l’ on sent. C’est dire que le livre vaut par son allure plus que par des
1617 Montherlant actuel que l’on sent. C’est dire que le livre vaut par son allure plus que par des qualités de composition ou
1618 savante sensualité, pour ces insolences jolies et les subites violences, qui composent la séduction de cet « homme de la Re
1619 es jolies et les subites violences, qui composent la séduction de cet « homme de la Renaissance », pour quelques descripti
1620 ces, qui composent la séduction de cet « homme de la Renaissance », pour quelques descriptions des prairies espagnoles ple
1621 ur communier, il faudrait sans doute être né sous le signe du Taureau. Mais il sera pardonné à Montherlant beaucoup de déf
1622 a souveraine désinvolture. Elle est tonique comme le spectacle des athlètes. Et c’est elle avant tout que j’admire dans ce
1623 ets d’esprit ! Qu’ils paissent éternellement dans les prairies célestes, pour avoir donné une grande gloire aux jeunes homm
1624 s ! » Mais ce jeune homme qui écrivit naguère sur les Fontaines du désir certaines pages magnifiques et sobres, jetées de h
1625 pages magnifiques et sobres, jetées de haut avec la nonchalance des vrais puissants, je compte qu’il saura fonder sa gloi
1626 Denis de, « [Compte rendu] Henry de Montherlant, Les Bestiaires  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, s
32 1926, Articles divers (1924–1930). Soir de Florence (13 novembre 1926)
1627 ce (13 novembre 1926)i Des cris mouraient vers les berges du fleuve jaune, entre les deux façades longues que la ville p
1628 mouraient vers les berges du fleuve jaune, entre les deux façades longues que la ville présente au couchant, dans ce corri
1629 fleuve jaune, entre les deux façades longues que la ville présente au couchant, dans ce corridor de lumière où elle accue
1630 nt, dans ce corridor de lumière où elle accueille le ciel — et derrière, elle devient plus secrète. Vers l’est, des collin
1631 el — et derrière, elle devient plus secrète. Vers l’ est, des collines fluides et roses. De l’autre côté, c’est le vide, où
1632 collines fluides et roses. De l’autre côté, c’est le vide, où s’en vont lentement les eaux et les lueurs, vers la mer. Sur
1633 autre côté, c’est le vide, où s’en vont lentement les eaux et les lueurs, vers la mer. Sur le Lungarno trop vaste et nu, le
1634 c’est le vide, où s’en vont lentement les eaux et les lueurs, vers la mer. Sur le Lungarno trop vaste et nu, les voitures r
1635 s’en vont lentement les eaux et les lueurs, vers la mer. Sur le Lungarno trop vaste et nu, les voitures revenaient au pas
1636 entement les eaux et les lueurs, vers la mer. Sur le Lungarno trop vaste et nu, les voitures revenaient au pas des Cascine
1637 s, vers la mer. Sur le Lungarno trop vaste et nu, les voitures revenaient au pas des Cascine. Vers sept heures, il n’y en e
1638 il n’y en eut presque plus. Nous étions seuls sur le pavé qui exhalait sa chaleur, au long des quais sans bancs pour notre
1639 s’éloignait derrière nous qui suivions maintenant le sentier du bord du fleuve, plus bas que la Promenade désertée. Sur le
1640 tenant le sentier du bord du fleuve, plus bas que la Promenade désertée. Sur les eaux, comme immobiles, des nuages rouges
1641 u fleuve, plus bas que la Promenade désertée. Sur les eaux, comme immobiles, des nuages rouges et le vert dur des berges :
1642 r les eaux, comme immobiles, des nuages rouges et le vert dur des berges : un malaise montait dans l’air plus frais, avec
1643 le vert dur des berges : un malaise montait dans l’ air plus frais, avec l’odeur du limon. Nous marchions vers ces hauts a
1644  : un malaise montait dans l’air plus frais, avec l’ odeur du limon. Nous marchions vers ces hauts arbres clairs, au tourna
1645 hauts arbres clairs, au tournant du fleuve, parmi les dissonances mélancoliques des lumières et des odeurs, espérant entrer
1646 Seule une maison blanche est arrêtée tout près de l’ eau. Mais ce n’est pas d’elle que vient cette chanson jamais entendue
1647 entendue qui nous accompagne depuis un moment sur le chemin de l’autre rive. Il y a un homme debout à l’avant d’un char ti
1648 chemin de l’autre rive. Il y a un homme debout à l’ avant d’un char tiré par des bœufs blancs. Comme une apparition. (Tu p
1649 de triste volupté emplit notre monde à ce chant. L’ odeur du fleuve est son parfum, le soleil rouge sa douleur. Les bœufs
1650 nde à ce chant. L’odeur du fleuve est son parfum, le soleil rouge sa douleur. Les bœufs blancs, les roues peintes du char,
1651 leuve est son parfum, le soleil rouge sa douleur. Les bœufs blancs, les roues peintes du char, l’Italie des poètes… Mais ce
1652 um, le soleil rouge sa douleur. Les bœufs blancs, les roues peintes du char, l’Italie des poètes… Mais ce pays tout entier
1653 eur. Les bœufs blancs, les roues peintes du char, l’ Italie des poètes… Mais ce pays tout entier pâmé dans une beauté que s
1654 nt tant de souvenirs n’a d’autre nom que celui de l’ instant, ô mélodieuse lassitude. Vivre ainsi simplement. Sans pensée,
1655 , perdus dans un soir de n’importe où, un soir de la Nature… L’homme chante une plainte inouïe de pureté. Deux phrases rap
1656 ns un soir de n’importe où, un soir de la Nature… L’ homme chante une plainte inouïe de pureté. Deux phrases rapides ondule
1657 uïe de pureté. Deux phrases rapides ondulent dans l’ air lourd. Le chant descend très doucement la berge, les bœufs s’engag
1658 . Deux phrases rapides ondulent dans l’air lourd. Le chant descend très doucement la berge, les bœufs s’engagent dans le m
1659 dans l’air lourd. Le chant descend très doucement la berge, les bœufs s’engagent dans le marais, cherchant le gué. Plus pr
1660 lourd. Le chant descend très doucement la berge, les bœufs s’engagent dans le marais, cherchant le gué. Plus proches, les
1661 rès doucement la berge, les bœufs s’engagent dans le marais, cherchant le gué. Plus proches, les syllabes nous parviennent
1662 e, les bœufs s’engagent dans le marais, cherchant le gué. Plus proches, les syllabes nous parviennent au ras du fleuve som
1663 t dans le marais, cherchant le gué. Plus proches, les syllabes nous parviennent au ras du fleuve sombre. Nul désir en nous
1664 mbre. Nul désir en nous de comprendre ce lamento. Le ciel est un silence qui s’impose à nos pensées. Ici la vie n’a presqu
1665 el est un silence qui s’impose à nos pensées. Ici la vie n’a presque plus de sens, comme le fleuve. Elle n’est qu’odeurs,
1666 nsées. Ici la vie n’a presque plus de sens, comme le fleuve. Elle n’est qu’odeurs, formes mouvantes, remous dans l’air et
1667 le n’est qu’odeurs, formes mouvantes, remous dans l’ air et musiques sourdes. Penser serait sacrilège, comme une barre droi
1668 n tableau. Nos yeux ont regardé longtemps — où va l’ âme durant ces minutes ? — jusqu’à ce que les bœufs ruisselants remont
1669 où va l’âme durant ces minutes ? — jusqu’à ce que les bœufs ruisselants remontent sur notre rive. Fraîcheur humide, parfums
1670 ement vague des roseaux aux feuilles sèches… Puis la brume est venue comme une envie de sommeil. Une lampe dans la maison
1671 venue comme une envie de sommeil. Une lampe dans la maison blanche nous a révélé proche la nuit. Nous nous sommes retourn
1672 lampe dans la maison blanche nous a révélé proche la nuit. Nous nous sommes retournés vers la ville. Fleurs de lumières s
1673 é proche la nuit. Nous nous sommes retournés vers la ville. Fleurs de lumières sur les champs sombres du ciel de l’est, e
1674 retournés vers la ville. Fleurs de lumières sur les champs sombres du ciel de l’est, et une façade parfaite répond encore
1675 urs de lumières sur les champs sombres du ciel de l’ est, et une façade parfaite répond encore au couchant. San Miniato sur
1676 chant. San Miniato sur sa colline. Derrière nous, les arbres se brouillent dans une buée sans couleurs, nous quittons un my
1677 us quittons un mystère à jamais impénétrable pour l’ homme, nous fuyons ces bords où conspirent des ombres informes et des
1678 nous laisse gourds et faibles, caressant en nous la lâche volupté de sentir l’esprit se défaire et couler sans fin vers u
1679 les, caressant en nous la lâche volupté de sentir l’ esprit se défaire et couler sans fin vers un sommeil à l’odeur fade de
1680 t se défaire et couler sans fin vers un sommeil à l’ odeur fade de fleuve, un sommeil de plante vaguement heureuse d’être p
1681 nous enivrait, promettant à nos sens, fatigués de l’ esprit qui les exerce, des voluptés plus faciles — pour infuser dans n
1682 , promettant à nos sens, fatigués de l’esprit qui les exerce, des voluptés plus faciles — pour infuser dans nos corps charm
1683 dont on ne voudrait plus guérir… Mais nous voyons la ville debout dans ses lumières. Architectures ! langage des dieux, ô
1684 s qu’épousent nos ferveurs, angles purs, repos de l’ esprit qui s’appuie sur son œuvre ! La sérénité de cette façade élevée
1685 s, repos de l’esprit qui s’appuie sur son œuvre ! La sérénité de cette façade élevée lumineuse sur le ciel fut le signe d’
1686 La sérénité de cette façade élevée lumineuse sur le ciel fut le signe d’un équilibre retrouvé. Un grand pont de fer, près
1687 de cette façade élevée lumineuse sur le ciel fut le signe d’un équilibre retrouvé. Un grand pont de fer, près de nous, ér
1688 uvé. Un grand pont de fer, près de nous, érigeait l’ image de la lutte et des forces humaines, et rendait sous des coups un
1689 nd pont de fer, près de nous, érigeait l’image de la lutte et des forces humaines, et rendait sous des coups un son qui no
1690 et rendait sous des coups un son qui nous évoqua les rumeurs de villes d’usines. Il y avait la vie des hommes pour demain,
1691 évoqua les rumeurs de villes d’usines. Il y avait la vie des hommes pour demain, et il était beau d’y songer un peu avant
1692 beau d’y songer un peu avant de nous abandonner à l’ oubli luxueux des rues. Le long de l’Arno, les façades sont jaunes et
1693 abandonner à l’oubli luxueux des rues. Le long de l’ Arno, les façades sont jaunes et roses près de l’eau, puis perdent dan
1694 er à l’oubli luxueux des rues. Le long de l’Arno, les façades sont jaunes et roses près de l’eau, puis perdent dans la nuit
1695 l’Arno, les façades sont jaunes et roses près de l’ eau, puis perdent dans la nuit leurs lignes graves. Toutes ces formes
1696 jaunes et roses près de l’eau, puis perdent dans la nuit leurs lignes graves. Toutes ces formes devinées dans l’espace no
1697 rs lignes graves. Toutes ces formes devinées dans l’ espace nous environnent d’une obscure confiance. Livrons-nous aux jeux
1698 ons-nous aux jeux des hommes-qui-font-des-gestes. Les autos répètent sans fin les notes mêlées d’une symphonie qui va peut-
1699 -qui-font-des-gestes. Les autos répètent sans fin les notes mêlées d’une symphonie qui va peut-être composer tous les bruit
1700 es d’une symphonie qui va peut-être composer tous les bruits de la ville en un chant immense. Il passe une possibilité de b
1701 onie qui va peut-être composer tous les bruits de la ville en un chant immense. Il passe une possibilité de bonheur par pe
1702 passe une possibilité de bonheur par personne et les devantures ne cherchent qu’à vous plaire. Chaque ruelle croisée propo
1703 oublie pour celui des regards étrangers. Et voici la place régulière, les galeries, les cafés, les musiques, Donizetti qui
1704 s regards étrangers. Et voici la place régulière, les galeries, les cafés, les musiques, Donizetti qui pleure délicieusemen
1705 ngers. Et voici la place régulière, les galeries, les cafés, les musiques, Donizetti qui pleure délicieusement jusque dans
1706 oici la place régulière, les galeries, les cafés, les musiques, Donizetti qui pleure délicieusement jusque dans les gestes
1707 , Donizetti qui pleure délicieusement jusque dans les gestes des passantes. Sous cette agitation aimable et monotone nous a
1708 ation aimable et monotone nous allons voir courir l’ arabesque des sentiments et le mouvement perpétuel de l’amour. Plaisir
1709 allons voir courir l’arabesque des sentiments et le mouvement perpétuel de l’amour. Plaisir de se sentir engagé dans un s
1710 esque des sentiments et le mouvement perpétuel de l’ amour. Plaisir de se sentir engagé dans un système d’ondes de forces q
1711 ngagé dans un système d’ondes de forces qui tisse la nuit vibrante, intérêts, politesses, politiques, regards, musiques —
1712 musiques — cette vie rapide dans un décor qui est le rêve éternisé des plus voluptueuses intelligences — tous les tableaux
1713 ernisé des plus voluptueuses intelligences — tous les tableaux dans le noir des musées ! — et si tu veux soudain le son gra
1714 luptueuses intelligences — tous les tableaux dans le noir des musées ! — et si tu veux soudain le son grave de l’infini, p
1715 dans le noir des musées ! — et si tu veux soudain le son grave de l’infini, pour être seul parmi la foule, lève les yeux,
1716 musées ! — et si tu veux soudain le son grave de l’ infini, pour être seul parmi la foule, lève les yeux, au plus beau cie
1717 in le son grave de l’infini, pour être seul parmi la foule, lève les yeux, au plus beau ciel du monde. i. Rougemont Den
1718 de l’infini, pour être seul parmi la foule, lève les yeux, au plus beau ciel du monde. i. Rougemont Denis de, « Soir de
1719 . i. Rougemont Denis de, « Soir de Florence », La Semaine littéraire, Genève, 13 novembre 1926, p. 547-548.
33 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jacques Spitz, La Croisière indécise (décembre 1926)
1720 Jacques Spitz, La Croisière indécise (décembre 1926)y L’auteur veut amuser en nous q
1721 Spitz, La Croisière indécise (décembre 1926)y L’ auteur veut amuser en nous quelques idées graves en leur présentant le
1722 en nous quelques idées graves en leur présentant les miroirs de personnages cocasses à souhait, qui manifestent, avec un c
1723 manque de conviction et des poses de mannequins, les tendances contradictoires d’un individu. C’est pour traiter ce sujet
1724 sière de vacances, qui finit par un naufrage dans la littérature, le navire succombant sous les allégories. L’étonnant, c’
1725 s, qui finit par un naufrage dans la littérature, le navire succombant sous les allégories. L’étonnant, c’est que le livre
1726 ge dans la littérature, le navire succombant sous les allégories. L’étonnant, c’est que le livre soit réellement amusant, e
1727 rature, le navire succombant sous les allégories. L’ étonnant, c’est que le livre soit réellement amusant, et qu’il trouve
1728 ombant sous les allégories. L’étonnant, c’est que le livre soit réellement amusant, et qu’il trouve une sorte d’unité viva
1729 t, et qu’il trouve une sorte d’unité vivante dans le rythme des désirs jamais simultanés de ses petits héros. M. Spitz che
1730 etits héros. M. Spitz cherche à faire sourire, on le sent ; pourtant l’on sourit : il faut bien croire qu’il y a là un tal
1731 tz cherche à faire sourire, on le sent ; pourtant l’ on sourit : il faut bien croire qu’il y a là un talent, charmant, glac
1732 ugemont Denis de, « [Compte rendu] Jacques Spitz, La Croisière indécise  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, G
34 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Alfred Colling, L’Iroquois (décembre 1926)
1733 Alfred Colling, L’ Iroquois (décembre 1926)z Ce roman a le charme d’un automne, une am
1734 olling, L’Iroquois (décembre 1926)z Ce roman a le charme d’un automne, une amertume enveloppée, une atmosphère trop cla
1735 mertume enveloppée, une atmosphère trop claire où les cris se font un peu aigres et les couleurs fluides. Toute la tendress
1736 trop claire où les cris se font un peu aigres et les couleurs fluides. Toute la tendresse que ranime un soleil lointain va
1737 font un peu aigres et les couleurs fluides. Toute la tendresse que ranime un soleil lointain va tourner en cruelle mélanco
1738 e mélancolie. Pourquoi, Henri de Closain, quitter le domaine enchanté où des amis très fins, précieux poètes, dissertent s
1739 e sait plus de quels souvenirs ; jusqu’au soir où la douleur nette d’un amour réveillé l’envahit. Et Closain rencontre, da
1740 u’au soir où la douleur nette d’un amour réveillé l’ envahit. Et Closain rencontre, dans l’inévitable bar, le couple de jui
1741 ur réveillé l’envahit. Et Closain rencontre, dans l’ inévitable bar, le couple de juifs espagnols qui va l’entraîner avec s
1742 hit. Et Closain rencontre, dans l’inévitable bar, le couple de juifs espagnols qui va l’entraîner avec son mauvais cœur, d
1743 évitable bar, le couple de juifs espagnols qui va l’ entraîner avec son mauvais cœur, dans une aventure incertaine et doulo
1744 taine et douloureuse ; enfin Orpha, sa maîtresse, le fuit, parce que son silence devient insupportable : « Orpha ne compre
1745 rir et ne plus aimer ». Closain se tue pour finir le livre. Livre charmant et bizarre, où la sentimentalité moderne trouve
1746 our finir le livre. Livre charmant et bizarre, où la sentimentalité moderne trouve l’expression ironique qui lui convient,
1747 t et bizarre, où la sentimentalité moderne trouve l’ expression ironique qui lui convient, mais ici mêlée à une émotion plu
1748 ui transparaît parfois et nous fait regretter que l’ auteur ne se soit pas mieux abandonné à son sujet, d’un pathétique ass
1749 gemont Denis de, « [Compte rendu] Alfred Colling, L’ Iroquois  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, déce
35 1926, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Malraux, La Tentation de l’Occident (décembre 1926)
1750 André Malraux, La Tentation de l’Occident (décembre 1926)aa Un Chinois écrit d’Europ
1751 André Malraux, La Tentation de l’ Occident (décembre 1926)aa Un Chinois écrit d’Europe à un Français
1752 e. Nous sommes loin du ton des Lettres persanes : le Chinois s’étonne non sans quelque aigreur, et critique avec un mépris
1753 aigreur, et critique avec un mépris tranquille ; le Français riposte sans conviction, et sous sa défense on devine une dé
1754 n devine une détresse. C’est encore une vision de l’ Occident qui naît de ce petit livre si dense, si inquiétant. Le Chinoi
1755 i naît de ce petit livre si dense, si inquiétant. Le Chinois voit dans l’Europe « une barbarie attentivement ordonnée, où
1756 vre si dense, si inquiétant. Le Chinois voit dans l’ Europe « une barbarie attentivement ordonnée, où l’idée de la civilisa
1757 ’Europe « une barbarie attentivement ordonnée, où l’ idée de la civilisation et celle de l’ordre sont chaque jour confondue
1758 une barbarie attentivement ordonnée, où l’idée de la civilisation et celle de l’ordre sont chaque jour confondues ». Nous
1759 rdonnée, où l’idée de la civilisation et celle de l’ ordre sont chaque jour confondues ». Nous cherchons à conquérir non le
1760 onnée, où l’idée de la civilisation et celle de l’ ordre sont chaque jour confondues ». Nous cherchons à conquérir non le mond
1761 jour confondues ». Nous cherchons à conquérir non le monde, mais son ordre. Nous humilions sans trêve notre sensibilité au
1762 Nous cherchons à conquérir non le monde, mais son ordre . Nous humilions sans trêve notre sensibilité au profit de ce « mythe
1763 e « mythe cohérent » vers quoi tend notre esprit. La passion apparaît dans notre ordre social « comme une adroite fêlure »
1764 tend notre esprit. La passion apparaît dans notre ordre social « comme une adroite fêlure ». Notre morale est entièrement sub
1765 ure ». Notre morale est entièrement subordonnée à l’ action ; notre individualisme en naît logiquement, et toutes nos catég
1766 nos catégories artificielles et nécessaires. Mais le monde échappe toujours à nos cadres — perpétuel conflit du réel avec
1767 réel avec nos rêves de puissance : notre ambition la plus haute échoue. La tristesse règne sur nos villes. (Neurasthénie,
1768 puissance : notre ambition la plus haute échoue. La tristesse règne sur nos villes. (Neurasthénie, ce mal de l’Occident.)
1769 se règne sur nos villes. (Neurasthénie, ce mal de l’ Occident.) Et notre vertu suprême, aussi, est douloureuse : le sacrifi
1770 Et notre vertu suprême, aussi, est douloureuse : le sacrifice. Sans doute, cette « absurdité essentielle » que le Chinois
1771 . Sans doute, cette « absurdité essentielle » que le Chinois distingue au cœur de la vie occidentale apparaît mieux par la
1772 essentielle » que le Chinois distingue au cœur de la vie occidentale apparaît mieux par la comparaison de l’idéal asiatiqu
1773 au cœur de la vie occidentale apparaît mieux par la comparaison de l’idéal asiatique avec le nôtre. Mais je crois que tou
1774 occidentale apparaît mieux par la comparaison de l’ idéal asiatique avec le nôtre. Mais je crois que toute intelligence eu
1775 fait parler son Chinois de telle façon qu’ils ne le paraissent point. Et alors le relativisme angoissant qui semblait dev
1776 lle façon qu’ils ne le paraissent point. Et alors le relativisme angoissant qui semblait devoir résulter de cette confront
1777 nouit : c’est bien plutôt une unité supérieure de l’ esprit humain que nous découvrons, et qui nous permettra de juger à no
1778 er à notre tour certaines démences qui enfièvrent l’ Europe. Tandis que M. Ford expose victorieusement sa méthode pour « r
1779 prenons chaque jour une conscience plus claire de la vanité de nos buts, « capables d’agir jusqu’au sacrifice, mais pleins
1780 jusqu’au sacrifice, mais pleins de dégoût devant la volonté d’action qui tord aujourd’hui notre race… ». Et peut-être n’e
1781 laisser subsister en nous qu’un « étrange goût de la destruction et de l’anarchie, exempt de passion, divertissement suprê
1782 nous qu’un « étrange goût de la destruction et de l’ anarchie, exempt de passion, divertissement suprême de l’incertitude… 
1783 hie, exempt de passion, divertissement suprême de l’ incertitude… » aa. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] André Malra
1784 ugemont Denis de, « [Compte rendu] André Malraux, La Tentation de l’Occident  », Bibliothèque universelle et Revue de Genè
1785 , « [Compte rendu] André Malraux, La Tentation de l’ Occident  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, déce
36 1926, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Avant-propos (décembre 1926)
1786 e 1926)a b Une mauvaise humeur qui flotte dans l’ air nous proposerait de débuter par l’inévitable discours sur les diff
1787 flotte dans l’air nous proposerait de débuter par l’ inévitable discours sur les difficultés du temps, en général, et sur c
1788 poserait de débuter par l’inévitable discours sur les difficultés du temps, en général, et sur celles en particulier qu’imp
1789 général, et sur celles en particulier qu’implique la publication de notre revue. Mais nous savons, tout comme M. Coué, que
1790 oué, nous nous persuadons que tout ira très bien. Les circonstances l’exigent, d’ailleurs, plus que jamais, et plus que jam
1791 suadons que tout ira très bien. Les circonstances l’ exigent, d’ailleurs, plus que jamais, et plus que jamais, nous semble-
1792 nous semble-t-il, notre revue a sa raison d’être. La vie d’aujourd’hui, on le sait, nous oblige à nous affirmer ou à refus
1793 evue a sa raison d’être. La vie d’aujourd’hui, on le sait, nous oblige à nous affirmer ou à refuser de nous affirmer avec
1794 i a pu paraître parfois quelque peu impertinente. Le fait est que nous éprouvons irrésistiblement l’obligation d’être nous
1795 . Le fait est que nous éprouvons irrésistiblement l’ obligation d’être nous-mêmes. Et, disons-le tout de suite, c’est en ce
1796 lement l’obligation d’être nous-mêmes. Et, disons- le tout de suite, c’est en cela uniquement — être nous-mêmes — que consi
1797 mes — que consistera notre programme. Sans doute, les différences s’accusent : mais n’est-ce pas la meilleure raison pour n
1798 e, les différences s’accusent : mais n’est-ce pas la meilleure raison pour nos aînés de chercher plus patiemment encore à
1799 elle nous ne saurions aller, et qui, nous voulons l’ espérer, ne sera pas sans leur donner quelque bénéfice en retour. Cert
1800 nt d’autres, avant tant d’autres. « Amis, ce sont les jeunes qui passent… » Pas question de les saluer ni d’emboîter le pas
1801 ce sont les jeunes qui passent… » Pas question de les saluer ni d’emboîter le pas, mais seulement de retenir sa place au sp
1802 ssent… » Pas question de les saluer ni d’emboîter le pas, mais seulement de retenir sa place au spectacle qu’ils offrent e
1803 etenir sa place au spectacle qu’ils offrent et de les considérer avec sympathie. Il est bien facile de s’écrier : « Après m
1804 ie. Il est bien facile de s’écrier : « Après moi, le déluge ! », et de se détourner de ce qu’on a coutume d’appeler notre
1805 ’appeler notre « désordre ». Mais on est toujours le fils de quelqu’un… Et, peut-être, la considération du « déluge » peut
1806 est toujours le fils de quelqu’un… Et, peut-être, la considération du « déluge » peut-elle faire réfléchir utilement sur s
1807 Par contre, nous nous empressons de vous laisser le soin de juger si nous avons de quoi faire les modestes…   Être nous-m
1808 sser le soin de juger si nous avons de quoi faire les modestes…   Être nous-mêmes, avons-nous dit, c’est à la fois notre bu
1809 littéraire de plus » ; nous ne voulons pas être «  l’ expression de la jeunesse romande ». Nous sommes autre chose. (Belles-
1810 us » ; nous ne voulons pas être « l’expression de la jeunesse romande ». Nous sommes autre chose. (Belles-Lettres est touj
1811 nemment peu bellettrienne. Que sommes-nous donc ? Le plus qu’on puisse dire, c’est que vous le saurez un peu mieux quand v
1812 donc ? Le plus qu’on puisse dire, c’est que vous le saurez un peu mieux quand vous aurez lu nos huit numéros. Il faut que
1813 vergentes, mais qu’un ruban rouge et vert lie par la grâce d’une volonté sans doute divine… a. Rougemont Denis de, « Av
1814 nève-Fribourg, décembre 1926, p. 3-5. b. Signé : Le Comité central.
37 1926, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Paradoxe de la sincérité (décembre 1926)
1815 Paradoxe de la sincérité (décembre 1926)c Nous voyons un mythe prendre corps parm
1816 926)c Nous voyons un mythe prendre corps parmi les ruines de ce temps. Il fallait bien tirer quelque vertu d’une anarchi
1817 essaire — provisoirement — que satisfaisante pour l’ esprit. C’est ainsi que nous trompant nous-mêmes, sous le prétexte tou
1818 t. C’est ainsi que nous trompant nous-mêmes, sous le prétexte toujours de probité intellectuelle ou de courage moral, nous
1819 lectuelle ou de courage moral, nous avons élevé à la hauteur d’une vertu première — et qui légitime tous les dénis de mora
1820 uteur d’une vertu première — et qui légitime tous les dénis de morale à quoi nous obligeaient en réalité on sait quel dégoû
1821 et certains désirs de grabuge moins avouables, —  la sincérité, masque fier et un peu douloureux des défaitismes les plus
1822 masque fier et un peu douloureux des défaitismes les plus subtils comme des plus pures et loyales inquiétudes. Sincérité,
1823 des plus pures et loyales inquiétudes. Sincérité, le mal du siècle. Tout le monde en parle, et chacun s’en autorise pour e
1824 excuser sa petite faiblesse originale : tant qu’à la fin la notion concrète de sincérité s’évanouit en mille définitions t
1825 sa petite faiblesse originale : tant qu’à la fin la notion concrète de sincérité s’évanouit en mille définitions tendanci
1826 doctrine acceptée ; envers votre idéal ou envers les fluctuations de votre moi ? Votre sincérité est-elle consentement imm
1827 fois curieuse et désintéressée, de naturaliste de l’ âme ? Heureusement que M. Brémond ne s’est pas encore mêlé de l’affair
1828 sement que M. Brémond ne s’est pas encore mêlé de l’ affaire. Au reste, on n’a pas attendu les éclaircissements du subtil a
1829 e mêlé de l’affaire. Au reste, on n’a pas attendu les éclaircissements du subtil abbé pour n’y plus rien comprendre. ⁂ Qu’o
1830 mettre à décrire ce qu’il voit autour de lui — et l’ étonnement indigné du spectateur. Pour parler avec un peu de clairvoya
1831 déduction passablement sèche pourrait nous donner l’ illusion et peut-être certains bénéfices de cette opération idéale. En
1832 néfices de cette opération idéale. En même temps, la froideur d’une telle méthode atténuerait dans une certaine mesure — p
1833 que nécessaire — ce qu’il y a de déplaisant dans l’ effort d’un esprit pour se dégager de confusions aussi perfides et si
1834 ntures. Sincérité et spontanéité « Nos actes les plus sincères sont aussi les moins calculés », écrit Gide. D’où l’on
1835 néité « Nos actes les plus sincères sont aussi les moins calculés », écrit Gide. D’où l’on peut tirer par une sorte de p
1836 sont aussi les moins calculés », écrit Gide. D’où l’ on peut tirer par une sorte de passage à la limite que les faits justi
1837 . D’où l’on peut tirer par une sorte de passage à la limite que les faits justifient : sincérité = spontanéité. Mais la mo
1838 ut tirer par une sorte de passage à la limite que les faits justifient : sincérité = spontanéité. Mais la morale est ce qui
1839 faits justifient : sincérité = spontanéité. Mais la morale est ce qui s’oppose en premier lieu à la spontanéité. C’est po
1840 s la morale est ce qui s’oppose en premier lieu à la spontanéité. C’est pourquoi Gide écrit ailleurs : « En chaque être, l
1841 pourquoi Gide écrit ailleurs : « En chaque être, le pire instinct me paraissait le plus sincère. » La sincérité spontanée
1842 « En chaque être, le pire instinct me paraissait le plus sincère. » La sincérité spontanée, vertu moderne en qui renaît u
1843 le pire instinct me paraissait le plus sincère. » La sincérité spontanée, vertu moderne en qui renaît un mythe rousseauist
1844 usseauiste, inspire, explique un vaste domaine de la littérature contemporaine. Cette sorte-là de sincérité, on la nomme g
1845 re contemporaine. Cette sorte-là de sincérité, on la nomme gratuité. Lafcadio poussant Fleurissoire « pour rien » ne songe
1846 rien » ne songeait pas qu’il allait faire école. Le fait est que ce geste symbolique a déclenché tout un mouvement littér
1847 -là même qui aboutit naguère au surréalisme. Tous les héros de roman se sont mis à gesticuler « gratuitement ». Et les crit
1848 man se sont mis à gesticuler « gratuitement ». Et les critiques d’abord de s’indigner. Aujourd’hui, on les voit assez encha
1849 critiques d’abord de s’indigner. Aujourd’hui, on les voit assez enchantés de l’affaire : « Gratuit ! », déclarent-ils chaq
1850 gner. Aujourd’hui, on les voit assez enchantés de l’ affaire : « Gratuit ! », déclarent-ils chaque fois qu’ils ne comprenne
1851 endre. Et, ici encore, prenons garde de confondre le plan littéraire avec le plan moral. Telle action peut paraître gratui
1852 renons garde de confondre le plan littéraire avec le plan moral. Telle action peut paraître gratuite au lecteur parce qu’i
1853 tuite au lecteur parce qu’il ne sait pas tout sur le personnage. Mais quant à l’auteur, il n’y a pas de gratuité. Le geste
1854 ne sait pas tout sur le personnage. Mais quant à l’ auteur, il n’y a pas de gratuité. Le geste le plus incongru du héros n
1855 Mais quant à l’auteur, il n’y a pas de gratuité. Le geste le plus incongru du héros n’est jamais que le résultat d’un méc
1856 nt à l’auteur, il n’y a pas de gratuité. Le geste le plus incongru du héros n’est jamais que le résultat d’un mécanisme in
1857 geste le plus incongru du héros n’est jamais que le résultat d’un mécanisme inconscient, aussi révélateur du personnage q
1858 t, aussi révélateur du personnage que ses actions les mieux concertées. Rien n’est gratuit que relativement à un système re
1859 s. Il résulte de semblables considérations, dans le domaine de la morale, que le meilleur moyen de se livrer à ses déterm
1860 de semblables considérations, dans le domaine de la morale, que le meilleur moyen de se livrer à ses déterminants, c’est
1861 considérations, dans le domaine de la morale, que le meilleur moyen de se livrer à ses déterminants, c’est de mener la vie
1862 n de se livrer à ses déterminants, c’est de mener la vie gratuite que réclament les surréalistes. Le contraire de la liber
1863 nts, c’est de mener la vie gratuite que réclament les surréalistes. Le contraire de la liberté. D’autre part, on veut donne
1864 r la vie gratuite que réclament les surréalistes. Le contraire de la liberté. D’autre part, on veut donner à l’acte gratui
1865 e que réclament les surréalistes. Le contraire de la liberté. D’autre part, on veut donner à l’acte gratuit une valeur mor
1866 ire de la liberté. D’autre part, on veut donner à l’ acte gratuit une valeur morale en disant qu’il révèle ce qu’il y a de
1867 ant qu’il révèle ce qu’il y a de plus secret dans la personnalité. Ce serait un moyen de connaissance plus intégrale de so
1868 pittoresque et plus « entachée d’utilitarisme », la décision réfléchie, aussi peu gratuite que possible, d’un Julien Sore
1869 ins révélatrice du fond de l’âme humaine ? Que si l’ on s’étonne de me voir donner ici la préférence à l’acte volontaire, o
1870 aine ? Que si l’on s’étonne de me voir donner ici la préférence à l’acte volontaire, ou mieux : intéressé, tandis qu’en li
1871 on s’étonne de me voir donner ici la préférence à l’ acte volontaire, ou mieux : intéressé, tandis qu’en littérature je déf
1872  : intéressé, tandis qu’en littérature je défends l’ acte gratuit, je réponds que la littérature remplirait déjà suffisamme
1873 érature je défends l’acte gratuit, je réponds que la littérature remplirait déjà suffisamment son rôle en se bornant à nou
1874 onnaissance plus intense et plus émouvante ; mais la morale, plutôt que de nous constater, doit nous construire — selon le
1875 e de nous constater, doit nous construire — selon le mode le plus libre, le plus conscient à la fois et le plus voluptueux
1876 s constater, doit nous construire — selon le mode le plus libre, le plus conscient à la fois et le plus voluptueux. Sin
1877 it nous construire — selon le mode le plus libre, le plus conscient à la fois et le plus voluptueux. Sincérité envers s
1878 ode le plus libre, le plus conscient à la fois et le plus voluptueux. Sincérité envers soi-même Noli me tangere.
1879 vers certain but précis. Ou bien j’aurais juste le temps de le noter avant de partir. Ou bien je me mettrai à l’analyser
1880 n but précis. Ou bien j’aurais juste le temps de le noter avant de partir. Ou bien je me mettrai à l’analyser plus longue
1881 le noter avant de partir. Ou bien je me mettrai à l’ analyser plus longuement. Mais alors je le fausse, puisque je le prive
1882 ttrai à l’analyser plus longuement. Mais alors je le fausse, puisque je le prive de la puissance de se délivrer en gestes,
1883 s longuement. Mais alors je le fausse, puisque je le prive de la puissance de se délivrer en gestes, en conséquences matér
1884 . Mais alors je le fausse, puisque je le prive de la puissance de se délivrer en gestes, en conséquences matérielles. Ce n
1885 estes, en conséquences matérielles. Ce n’est plus l’ élan pur que je décris : c’est un élan freiné dans mon esprit, c’est l
1886 ris : c’est un élan freiné dans mon esprit, c’est le frein lui-même, bientôt — par un mouvement normal de l’attention — et
1887 in lui-même, bientôt — par un mouvement normal de l’ attention — et fatalement c’est à la découverte d’une faiblesse que j’
1888 ent normal de l’attention — et fatalement c’est à la découverte d’une faiblesse que j’aboutis : ce quelque chose qui m’a r
1889 e quelque chose qui m’a retenu d’accomplir ce que l’ élan appelait.   Second exemple. — J’éprouve le besoin de faire le po
1890 e l’élan appelait.   Second exemple. — J’éprouve le besoin de faire le point : à quoi en suis-je, qui suis-je ? Je revois
1891   Second exemple. — J’éprouve le besoin de faire le point : à quoi en suis-je, qui suis-je ? Je revois des actes accompli
1892 cher du soleil, des phares d’automobiles étoilent le brouillard, les visages se cachent dans des fourrures, personne ne sa
1893 des phares d’automobiles étoilent le brouillard, les visages se cachent dans des fourrures, personne ne sait la richesse d
1894 s se cachent dans des fourrures, personne ne sait la richesse de ta vie…). J’écris ces choses. Puis, dans un ancien carnet
1895 arnet de notes, je retrouve un être si différent. Les gestes et les sentiments qui se proposaient à mon souvenir ont été pa
1896 , je retrouve un être si différent. Les gestes et les sentiments qui se proposaient à mon souvenir ont été passés au crible
1897 saient à mon souvenir ont été passés au crible de la minute où je me penchais sur mon passé. Ou, pour user d’une image plu
1898 ueur de tristesse ou de sérénité qui métamorphose le paysage du passé. Ainsi de certains décors modernes : vous changez l’
1899 Ainsi de certains décors modernes : vous changez l’ éclairage, et la chaumière devient palais. C’est l’objection classique
1900 ns décors modernes : vous changez l’éclairage, et la chaumière devient palais. C’est l’objection classique et irréfutable
1901 ’éclairage, et la chaumière devient palais. C’est l’ objection classique et irréfutable à toute introspection : ce daltonis
1902 m’apprendre quelque chose, c’est bien le second. La qualité des souvenirs qu’il me livre me renseigne assez exactement, n
1903 gne assez exactement, non sur mon passé, mais sur le moment que je vis1. Il est bien clair qu’on ne saurait atteindre « la
1904 1. Il est bien clair qu’on ne saurait atteindre «  la vérité sur soi » en se servant de la méthode indiquée dans le premier
1905 atteindre « la vérité sur soi » en se servant de la méthode indiquée dans le premier exemple. C’est un cas-limite, j’en c
1906 cas-limite, j’en conviens. Pourtant, n’est-ce pas le schéma de tout un genre littéraire moderne, cette espèce de confessio
1907 moderne, cette espèce de confession romancée dont les livres de Bopp, d’Arland, de Soupault et surtout de René Crevel ont d
1908 , de Soupault et surtout de René Crevel ont donné les exemples les plus récents et significatifs ? Tous ces livres évoquent
1909 et surtout de René Crevel ont donné les exemples les plus récents et significatifs ? Tous ces livres évoquent assez précis
1910 tifs ? Tous ces livres évoquent assez précisément la forme d’un entonnoir. La vie serait le liquide tourbillonnant à l’int
1911 oquent assez précisément la forme d’un entonnoir. La vie serait le liquide tourbillonnant à l’intérieur. Un arrêt (l’auteu
1912 récisément la forme d’un entonnoir. La vie serait le liquide tourbillonnant à l’intérieur. Un arrêt (l’auteur se met à se
1913 onnoir. La vie serait le liquide tourbillonnant à l’ intérieur. Un arrêt (l’auteur se met à se regarder vivre, le personnag
1914 e liquide tourbillonnant à l’intérieur. Un arrêt ( l’ auteur se met à se regarder vivre, le personnage à douter du sens de s
1915 r. Un arrêt (l’auteur se met à se regarder vivre, le personnage à douter du sens de sa vie) et les forces centripètes l’em
1916 vre, le personnage à douter du sens de sa vie) et les forces centripètes l’emportent peu à peu, une aspiration vers le bas
1917 uter du sens de sa vie) et les forces centripètes l’ emportent peu à peu, une aspiration vers le bas produit une agitation
1918 ipètes l’emportent peu à peu, une aspiration vers le bas produit une agitation accélérée et folle, puis tout finit dans un
1919 , puis tout finit dans un râle, brusquement c’est le vide. Centre de soi, l’aspiration du néant. J’ai revu à l’envers le f
1920 n râle, brusquement c’est le vide. Centre de soi, l’ aspiration du néant. J’ai revu à l’envers le film de mon passé : ce qu
1921 Centre de soi, l’aspiration du néant. J’ai revu à l’ envers le film de mon passé : ce qui était élan devient recul, et l’év
1922 soi, l’aspiration du néant. J’ai revu à l’envers le film de mon passé : ce qui était élan devient recul, et l’évocation d
1923 e mon passé : ce qui était élan devient recul, et l’ évocation de mes désirs anciens ne me restitue qu’un dégoût. J’ai cru
1924 . En réalité, je n’assiste pas à moi-même, mais à la destruction de moi-même. Par les fissures, un instant, j’ai pu soupço
1925 moi-même, mais à la destruction de moi-même. Par les fissures, un instant, j’ai pu soupçonner des profondeurs ; mais déjà
1926 i pu soupçonner des profondeurs ; mais déjà c’est le chaos. Mon corps et moi, le livre si poignant de René Crevel, est la
1927 rs ; mais déjà c’est le chaos. Mon corps et moi, le livre si poignant de René Crevel, est la démonstration la plus cyniqu
1928 et moi, le livre si poignant de René Crevel, est la démonstration la plus cynique que je connaisse de ces ravages du sinc
1929 si poignant de René Crevel, est la démonstration la plus cynique que je connaisse de ces ravages du sincérisme. Dans la s
1930 e je connaisse de ces ravages du sincérisme. Dans la solitude qu’il s’acharne à approfondir — il était venu y chercher que
1931 rcher quelque raison de vivre, il voulait se voir le plus purement (« cette curiosité donnée comme raison d’une perpétuell
1932 mme raison d’une perpétuelle attente »), — ce que l’ auteur découvre c’est ce « merveilleux contraire » de l’élan vital qu’
1933 ur découvre c’est ce « merveilleux contraire » de l’ élan vital qu’il nomme élan mortel — générateur de l’incurable tristes
1934 lan vital qu’il nomme élan mortel — générateur de l’ incurable tristesse qui rôde dans certaine littérature d’aujourd’hui.
1935 é de faire mon autoportrait moral : je bouge tout le temps. Danger de faire mon autoportrait moral : je me compose plus la
1936 s laid que nature. Faut-il conclure avec Gide : «  L’ analyse psychologique a perdu pour moi tout intérêt du jour où je me s
1937 moi tout intérêt du jour où je me suis avisé que l’ homme éprouve ce qu’il imagine d’éprouver. » Non. Car à supposer que l
1938 ’il imagine d’éprouver. » Non. Car à supposer que l’ analyse nous crée, elle ne nous crée pas n’importe comment, mais selon
1939 u des remarques précédentes). Rivière définissait la sincérité comme « un perpétuel effort pour créer son âme telle qu’ell
1940 qu’elle est ». Il voyait dans cet effort sur soi le gage d’un enrichissement, d’une consolidation de l’individu mais avan
1941 gage d’un enrichissement, d’une consolidation de l’ individu mais avant tout un moyen de se connaître. Cependant, n’est-ce
1942 Cependant, n’est-ce pas lui-même qui ajoutait que l’ homme sincère « en vient à ne plus pouvoir même souhaiter d’être diffé
1943 oir même souhaiter d’être différent », ce qui est la négation de tout progrès moral. De la sincérité envisagée comme moyen
1944 ce qui est la négation de tout progrès moral. De la sincérité envisagée comme moyen de connaissance, le cas extrême d’un
1945 sincérité envisagée comme moyen de connaissance, le cas extrême d’un Crevel nous montre assez ce qu’il faut penser2. Il n
1946 limites assez étroites empiriquement fournies par le sens de son intérêt propre, une analyse sincère ne puisse faire décou
1947 es et ne serve parfois de contrôle efficace. Mais les bénéfices sont maigres en regard des dangers que la sincérité du noli
1948 bénéfices sont maigres en regard des dangers que la sincérité du noli me tangere fait courir, tant dans le domaine littér
1949 ncérité du noli me tangere fait courir, tant dans le domaine littéraire que dans celui de l’action. En littérature : refus
1950 tant dans le domaine littéraire que dans celui de l’ action. En littérature : refus de construire, de composer ; impuissanc
1951 sance à inventer. Car inventer, c’est se porter à l’ extrême pointe de soi, et, d’un élan, se dépasser ; c’est créer une di
1952 e dépasser ; c’est créer une différence. Pourquoi les romanciers modernes ont-ils tant de mal à créer des personnages ? C’e
1953 rsonnages ? C’est parce qu’une sorte de sincérité les retient d’imposer aux héros ce rythme volontaire par lequel un Balzac
1954 x héros ce rythme volontaire par lequel un Balzac les fait vivre. Ce serait fausser quelque chose à leurs yeux. Le cas des
1955 re. Ce serait fausser quelque chose à leurs yeux. Le cas des Faux-Monnayeurs le montre clairement. En morale : défaitisme
1956 ue chose à leurs yeux. Le cas des Faux-Monnayeurs le montre clairement. En morale : défaitisme quand il s’agit de gestes q
1957 cement. (Il faut, pour sauter, une confiance dans l’ élan qui échappe à toute analyse préalable et sans quoi le saut paraît
1958 ui échappe à toute analyse préalable et sans quoi le saut paraît impossible, absurde.) Enfin, désagrégation de la personna
1959 aît impossible, absurde.) Enfin, désagrégation de la personnalité, car l’analyse la plus savante, comme l’a fort bien dit
1960 de.) Enfin, désagrégation de la personnalité, car l’ analyse la plus savante, comme l’a fort bien dit Ramon Fernandez, « re
1961 , désagrégation de la personnalité, car l’analyse la plus savante, comme l’a fort bien dit Ramon Fernandez, « retient tous
1962 ersonnalité, car l’analyse la plus savante, comme l’ a fort bien dit Ramon Fernandez, « retient tous les éléments du moi, m
1963 l’a fort bien dit Ramon Fernandez, « retient tous les éléments du moi, moins le principe unificateur ». De quelques soph
1964 nandez, « retient tous les éléments du moi, moins le principe unificateur ». De quelques sophismes libérateurs La fo
1965 cateur ». De quelques sophismes libérateurs La fonction de l’homme est aussi bien de croire que de constater. F. Ra
1966 quelques sophismes libérateurs La fonction de l’ homme est aussi bien de croire que de constater. F. Raub. La sincér
1967 ussi bien de croire que de constater. F. Raub. La sincérité obstinée d’un Rivière n’a plus rien de spontané. En quoi es
1968 a plus rien de spontané. En quoi est-ce encore de la sincérité ? Trop sincère, pas sincère. Ou bien si l’on prétend que la
1969 sincérité ? Trop sincère, pas sincère. Ou bien si l’ on prétend que la sincérité est la recherche, puis l’acceptation de to
1970 sincère, pas sincère. Ou bien si l’on prétend que la sincérité est la recherche, puis l’acceptation de toute tendance du m
1971 ère. Ou bien si l’on prétend que la sincérité est la recherche, puis l’acceptation de toute tendance du moi, je réponds qu
1972 n prétend que la sincérité est la recherche, puis l’ acceptation de toute tendance du moi, je réponds que le mensonge est s
1973 eptation de toute tendance du moi, je réponds que le mensonge est sincère aussi, qui révèle mon besoin de mentir. Il devie
1974 ils vous aident3 — mais jamais au point d’oublier la vérité qu’on désirait qu’ils cachent pour un moment. « L’art est un m
1975 é qu’on désirait qu’ils cachent pour un moment. «  L’ art est un mensonge, mais un bon artiste n’est pas menteur », dit Max
1976 dit Max Jacob. « Être sincère, c’est avoir toutes les pensées » (Rivière). Mais on ne peut se maintenir dans cet état. Ce «
1977  mensonge », ce choix faux mais bon, nécessaire à la vie, n’est-ce pas être sincère aussi que de s’y prêter ? Or, il vous
1978 que de s’y prêter ? Or, il vous tire aussitôt de l’ indétermination violente qu’est la sincérité selon Rivière. La sincéri
1979 ire aussitôt de l’indétermination violente qu’est la sincérité selon Rivière. La sincérité véritable vous pousse à faire l
1980 ation violente qu’est la sincérité selon Rivière. La sincérité véritable vous pousse à faire le saut dans le vide qu’exige
1981 vière. La sincérité véritable vous pousse à faire le saut dans le vide qu’exige toute foi ; c’est la volonté de sincérité,
1982 cérité véritable vous pousse à faire le saut dans le vide qu’exige toute foi ; c’est la volonté de sincérité, c’est-à-dire
1983 e le saut dans le vide qu’exige toute foi ; c’est la volonté de sincérité, c’est-à-dire une sincérité tournée au vice, inv
1984 ncérité tournée au vice, invertie, qui retient de l’ oser. Petite anthologie ou que le « style » est de l’homme même
1985 ui retient de l’oser. Petite anthologie ou que le « style » est de l’homme même J’en étais à peu près à ce point de
1986 . Petite anthologie ou que le « style » est de l’ homme même J’en étais à peu près à ce point de mes notes — à ce poi
1987 ues lectures, je pris note des passages suivants ( les paraphraser serait d’une ingratitude insigne — ils marquent au reste
1988 atitude insigne — ils marquent au reste fort bien les jalons de cette recherche) : Puissiez-vous avouer moins de sincérité
1989 ropre témoin, intelligent mais immobile : ce sont les mêmes qui s’ignorent en tant que personnes. Comment se trouveraient-i
1990 eraient-ils, n’existant pas ? (François Mauriac.) La valeur morale de M. Godeau serait définie par l’aspect seul qu’il sou
1991 La valeur morale de M. Godeau serait définie par l’ aspect seul qu’il souffrirait de garder lui-même à son propre regard.
1992 ait de garder lui-même à son propre regard. Ainsi la valeur morale d’un homme équivalait-elle à l’illusion qu’il était cap
1993 nsi la valeur morale d’un homme équivalait-elle à l’ illusion qu’il était capable d’entretenir sur lui-même. (Marcel Jouhan
1994 lle qui est douée d’assez de force pour donner de la réalité à l’illusion. (Max Jacob.) Un rôle ? Oui. Mais si le personna
1995 ouée d’assez de force pour donner de la réalité à l’ illusion. (Max Jacob.) Un rôle ? Oui. Mais si le personnage est mainte
1996 à l’illusion. (Max Jacob.) Un rôle ? Oui. Mais si le personnage est maintenu jusqu’à la mort, il se confond avec l’homme m
1997 ? Oui. Mais si le personnage est maintenu jusqu’à la mort, il se confond avec l’homme même. (André Maurois.) (Quel effro
1998 est maintenu jusqu’à la mort, il se confond avec l’ homme même. (André Maurois.) (Quel effroi, ce jour de l’adolescence
1999 même. (André Maurois.) (Quel effroi, ce jour de l’ adolescence où l’on soupçonne pour la première fois que certains, peut
2000 ois.) (Quel effroi, ce jour de l’adolescence où l’ on soupçonne pour la première fois que certains, peut-être, jouent leu
2001 , jouent leur vie. Rien ne paraît plus sinistre à la sincérité presque pure de cet âge. Mais il le faut dépasser.)   Si j’
2002 e à la sincérité presque pure de cet âge. Mais il le faut dépasser.)   Si j’en crois l’intensité d’un sentiment intime, ce
2003 t âge. Mais il le faut dépasser.)   Si j’en crois l’ intensité d’un sentiment intime, ce moi idéal que j’appelle en chaque
2004 ’imaginait retenir. Dès lors, ce n’est pas lâcher la proie pour l’ombre que de tendre vers ce modèle. Dirais-je que c’est
2005 enir. Dès lors, ce n’est pas lâcher la proie pour l’ ombre que de tendre vers ce modèle. Dirais-je que c’est ma sincérité d
2006 e. Dirais-je que c’est ma sincérité d’y aller par les moyens les plus efficaces ? Mais on nommera cela de l’hypocrisie. Soi
2007 e que c’est ma sincérité d’y aller par les moyens les plus efficaces ? Mais on nommera cela de l’hypocrisie. Soit, j’accept
2008 yens les plus efficaces ? Mais on nommera cela de l’ hypocrisie. Soit, j’accepte. Et aussitôt j’annonce : Éloge de l’hyp
2009 t, j’accepte. Et aussitôt j’annonce : Éloge de l’ hypocrisie Non, non !… Debout dans l’ère successive ! Brisez, mon c
2010 Éloge de l’hypocrisie Non, non !… Debout dans l’ ère successive ! Brisez, mon corps, brisez cette forme pensive ! .....
2011 ................................................. Le vent se lève, il faut tenter de vivre. Paul Valéry. Certes, du sein
2012 is bien quelques voiles à mon dégoût d’un moi que la vie me montrait si désespérément vrai, tyrannique, insuffisant. Mais
2013 , un peu sceptique, quand mon esprit partait dans le rêve d’un idéal de fortune, idole naïve de ma jeune angoisse… Je t’ai
2014 alors qu’une symphonie de joies émanait de toute la vie : chaque chose proposait une ferveur nouvelle, et chaque être un
2015 en pût être privée. Alors, acquiesçant vivement à l’ invite que je soupçonnais la plus riche d’inconnu, je m’élançais sur l
2016 cquiesçant vivement à l’invite que je soupçonnais la plus riche d’inconnu, je m’élançais sur la voie qu’elle m’ouvrait, av
2017 onnais la plus riche d’inconnu, je m’élançais sur la voie qu’elle m’ouvrait, avec tant de rires amis, vers tout ce que mom
2018 je choisissais de laisser — et des baisers à tous les vents — qu’il eût été loisible d’attribuer comme objet à ma jubilatio
2019 st ainsi que fidèle à soi-même au plus profond de l’ être, on entretient comme une arrière-pensée sagace et obstinée l’assu
2020 tient comme une arrière-pensée sagace et obstinée l’ assurance d’une continuité entre ses actions et ses désirs, un quant-à
2021 ui ne gêne aucun geste, mais incline discrètement les décisions et les rend complices d’un dessein logique, peut-être loint
2022 geste, mais incline discrètement les décisions et les rend complices d’un dessein logique, peut-être lointain, en quoi cons
2023 ein logique, peut-être lointain, en quoi consiste l’ unité la plus réelle de l’individu — en dehors du corps. Et ce ne sont
2024 que, peut-être lointain, en quoi consiste l’unité la plus réelle de l’individu — en dehors du corps. Et ce ne sont point l
2025 ntain, en quoi consiste l’unité la plus réelle de l’ individu — en dehors du corps. Et ce ne sont point là jeux d’idées et
2026 dées et jongleries verbales. Regards au-dessus de l’ amour ! Voir l’heure à la pendule pendant l’étreinte d’un adieu et cal
2027 ies verbales. Regards au-dessus de l’amour ! Voir l’ heure à la pendule pendant l’étreinte d’un adieu et calculer rapidemen
2028 es. Regards au-dessus de l’amour ! Voir l’heure à la pendule pendant l’étreinte d’un adieu et calculer rapidement le retou
2029 us de l’amour ! Voir l’heure à la pendule pendant l’ étreinte d’un adieu et calculer rapidement le retour à une fidélité pl
2030 dant l’étreinte d’un adieu et calculer rapidement le retour à une fidélité plus profonde. Fidélité à sa loi individuelle,
2031 e honnêteté peut-être plus réelle que l’autre. Et l’ on conçoit que ce constant et secret assujettissement au moi idéal exi
2032 re que cette agilité offensive qu’on appelle dans la vie publique arrivisme, et séduction dans les salons. Constater une
2033 dans la vie publique arrivisme, et séduction dans les salons. Constater une faiblesse, c’est toujours un peu en prendre so
2034 esse, c’est toujours un peu en prendre son parti. La sincérité crée en nous un fait accompli. J’appelle hypocrisie envers
2035 ais ce que de toute mon âme je veux être !… 1. La véritable description de l’élan supposé dans le premier exemple, ce s
2036 je veux être !… 1. La véritable description de l’ élan supposé dans le premier exemple, ce serait le récit des gestes qu
2037 l’élan supposé dans le premier exemple, ce serait le récit des gestes qu’il m’aurait fait commettre. Manifester est plus s
2038 st plus sincère qu’analyser. 2. D’ailleurs toute la psychologie moderne souligne la quasi-impossibilité de traduire un dy
2039 D’ailleurs toute la psychologie moderne souligne la quasi-impossibilité de traduire un dynamisme directement dans notre l
2040 t certes quand il s’agit de parole ou d’écriture, l’ affirmation prouve moins une certitude qu’un désir de certitude né de
2041 né Crevel) c. Rougemont Denis de, « Paradoxe de la sincérité », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribo
38 1927, Articles divers (1924–1930). Dés ou la clef des champs (1927)
2042 Dés ou la clef des champs (1927)l « On sent l’absurdité d’un semblable syst
2043 Dés ou la clef des champs (1927)l « On sent l’ absurdité d’un semblable système. » Musset. Une rose et un journal o
2044 e. » Musset. Une rose et un journal oubliés sur le marbre vulgaire d’une table de café. Je venais de m’asseoir et de com
2045 ’habitude, un peu après six heures. J’étais seul. Le café est un lieu anonyme bien plus propice au rêve que ma chambre où
2046 ropice au rêve que ma chambre où m’attendent tous les soirs quand je rentre du bureau, les gages insupportablement familier
2047 tendent tous les soirs quand je rentre du bureau, les gages insupportablement familiers d’une vie honnête de type courant.
2048 une vie honnête de type courant. Pour dix sous et le prétexte d’un apéro, on entre ici dans le jardin des songeries les pl
2049 sous et le prétexte d’un apéro, on entre ici dans le jardin des songeries les plus étranges qu’appelle la musique. Je me g
2050 apéro, on entre ici dans le jardin des songeries les plus étranges qu’appelle la musique. Je me gardai donc d’ouvrir le jo
2051 jardin des songeries les plus étranges qu’appelle la musique. Je me gardai donc d’ouvrir le journal. Les Petites nouvelles
2052 qu’appelle la musique. Je me gardai donc d’ouvrir le journal. Les Petites nouvelles ont un pouvoir tyrannique sur mon espr
2053 a musique. Je me gardai donc d’ouvrir le journal. Les Petites nouvelles ont un pouvoir tyrannique sur mon esprit. Non que c
2054 e me gardai donc d’ouvrir le journal. Les Petites nouvelles ont un pouvoir tyrannique sur mon esprit. Non que cela m’intéresse au
2055 ur mon esprit. Non que cela m’intéresse au fond : les faits-divers, rien de moins divers. Mais je suis pris dans l’absurde
2056 ers, rien de moins divers. Mais je suis pris dans l’ absurde réseau des lignes, et cette mécanique me restitue chaque fois
2057 tte rose oubliée me gênait : perdre une rose pour le plaisir ! (Et je ne pensais même pas, alors : une si belle rose.) Le
2058 ne pensais même pas, alors : une si belle rose.) Le tambour livra un homme élégant et tragique, qui se tint un moment imm
2059 igure aux joues mates, aux yeux clairs. Il déplia le journal et se mit à lire les pages d’annonces. On m’apporta une lique
2060 eux clairs. Il déplia le journal et se mit à lire les pages d’annonces. On m’apporta une liqueur. Et quand j’eus fini de bo
2061 es pensées plus rapides s’en allèrent un peu vers l’ avenir et j’osai quelques rêves. C’était, je m’en souviens, une petite
2062 souviens, une petite automobile qui roulait dans la banlieue printanière ; des soupers d’amis dans notre modeste salle à
2063 er ; des jaquettes de couleur pour ma femme… Mais l’ homme avait posé son journal. Soudain, portant la main à son gilet, il
2064 l’homme avait posé son journal. Soudain, portant la main à son gilet, il en retira trois dés qu’il jeta sur la table. Les
2065 son gilet, il en retira trois dés qu’il jeta sur la table. Les yeux brillants, il compta. Une indécision parut sur ses tr
2066 , il en retira trois dés qu’il jeta sur la table. Les yeux brillants, il compta. Une indécision parut sur ses traits. Puis
2067 e indécision parut sur ses traits. Puis il reprit les dés brusquement, et me fixant avec un léger sourire : — Jouez ! ordon
2068 t avec un léger sourire : — Jouez ! ordonna-t-il. La surprise vainquit ma timidité, je pris les dés et les jetai sans hési
2069 a-t-il. La surprise vainquit ma timidité, je pris les dés et les jetai sans hésiter. Il compta de nouveau, puis avec une lé
2070 surprise vainquit ma timidité, je pris les dés et les jetai sans hésiter. Il compta de nouveau, puis avec une légère exalta
2071 l saisit son journal. Il en parcourait rapidement les pages, la proie d’une agitation visible. Bientôt il m’offrit de jouer
2072 n journal. Il en parcourait rapidement les pages, la proie d’une agitation visible. Bientôt il m’offrit de jouer un moment
2073 nsommations. Je gagnai. Il demanda des portos. Je les gagnai et je les bus. D’autres encore. Ma tête commençait à osciller
2074 agnai. Il demanda des portos. Je les gagnai et je les bus. D’autres encore. Ma tête commençait à osciller vaguement. Les co
2075 encore. Ma tête commençait à osciller vaguement. Les couleurs du bar me remplissaient d’une joie inconnue. Et je me refusa
2076 uestions qu’en moi-même posait ma raison effarée. L’ étranger s’animait aussi : une fièvre faisait s’épanouir sur son visag
2077 quel plaisir cruel. C’était un jeu très simple où l’ esprit libre de calculs se tend ardemment vers la conclusion d’un hasa
2078 l’esprit libre de calculs se tend ardemment vers la conclusion d’un hasard qui opère au commandement de la main. Ce soir-
2079 nclusion d’un hasard qui opère au commandement de la main. Ce soir-là, une confiance me possédait, telle que je savais trè
2080 ais très clairement que je gagnerais à tout coup. L’ étranger se mit à discourir. Et dans mon ivresse, ses paroles peignaie
2081 je bouscule tous tes calculs, ha ! tu te disais : le voilà riche, le voilà classé, le voilà prêt à faire des bassesses pou
2082 tes calculs, ha ! tu te disais : le voilà riche, le voilà classé, le voilà prêt à faire des bassesses pour durer, et tu t
2083 ! tu te disais : le voilà riche, le voilà classé, le voilà prêt à faire des bassesses pour durer, et tu te réjouissais, pa
2084 omplètement démodées et d’intrigues usées jusqu’à la corde, jusqu’à la corde pour les pendre, ha ha ha ! Tu pensais que j’
2085 es et d’intrigues usées jusqu’à la corde, jusqu’à la corde pour les pendre, ha ha ha ! Tu pensais que j’allais me cramponn
2086 ues usées jusqu’à la corde, jusqu’à la corde pour les pendre, ha ha ha ! Tu pensais que j’allais me cramponner à cette espè
2087 er à cette espèce de bonheur qu’ils croient lié à la possession, et que j’allais vivre aussi sur le dogme l’argent-fait-le
2088 à la possession, et que j’allais vivre aussi sur le dogme l’argent-fait-le-bonheur. En somme, tu croyais que j’allais adh
2089 session, et que j’allais vivre aussi sur le dogme l’ argent-fait-le-bonheur. En somme, tu croyais que j’allais adhérer à l’
2090 heur. En somme, tu croyais que j’allais adhérer à l’ idéologie socialiste, gros farceur, va. Quand je songe à tous ces gens
2091 d je songe à tous ces gens qui perdent leur vie à la gagner9, et leur façon inexplicable de lier des valeurs morales aux c
2092  » comme ils disent dans leurs manuels scolaires. Les voler, pour leur apprendre. Et leur manie aussi de situer le paradis
2093 our leur apprendre. Et leur manie aussi de situer le paradis dans la classe d’impôts immédiatement supérieure à la leur. I
2094 re. Et leur manie aussi de situer le paradis dans la classe d’impôts immédiatement supérieure à la leur. Ils voudraient qu
2095 ans la classe d’impôts immédiatement supérieure à la leur. Ils voudraient que leur vie garantît un 5 % régulier de plaisir
2096 ertige sans prix du lâchez-tout ! Ils ont inventé les caisses d’épargne, monuments d’une bassesse morale inconcevable, temp
2097 onheur que celui qu’ils ont reçu de papa-maman et l’ Habitude, leur marraine aux dents jaunes. Ah ! perdre, perdre ; et c’e
2098 stinée dans l’autre, de douleurs en ivresses avec la même joie, mon cheval fou, mon beau Désir s’ébroue et part sitôt que
2099 bousse, ils n’y comprendront jamais rien, écoutez- les , comme ils me jugent et leurs cris indignés qui couvrent une angoisse
2100 leurs cris indignés qui couvrent une angoisse. Ça les dérange terriblement, sauf un ou deux qui s’imaginent gagner à mes dé
2101 in ce brave homme qui est en train de me soutirer les quelque billets de mille dont je venais de régler le sort, puisque de
2102 quelque billets de mille dont je venais de régler le sort, puisque demain dès l’aube, j’irai tenter la misère aux yeux las
2103 t je venais de régler le sort, puisque demain dès l’ aube, j’irai tenter la misère aux yeux las pleins de rêves, la misère
2104 le sort, puisque demain dès l’aube, j’irai tenter la misère aux yeux las pleins de rêves, la misère qui fait des soirs si
2105 ai tenter la misère aux yeux las pleins de rêves, la misère qui fait des soirs si doux aux amants quand ils n’ont plus que
2106 ls n’ont plus que des baisers au goût d’adieu, et l’ avenir où se mêlent incertaines, une tendresse éperdue et la mort. » I
2107 ù se mêlent incertaines, une tendresse éperdue et la mort. » Il ferma les yeux sur des visions. Les lustres doraient un br
2108 nes, une tendresse éperdue et la mort. » Il ferma les yeux sur des visions. Les lustres doraient un brouillard de fumée, et
2109 et la mort. » Il ferma les yeux sur des visions. Les lustres doraient un brouillard de fumée, et la musique noyait mes pen
2110 . Les lustres doraient un brouillard de fumée, et la musique noyait mes pensées. Je vis qu’une femme était assise à notre
2111 , en robe rouge, et très fardée. Elle jouait avec la rose. Les dés roulèrent, pour un dernier enjeu. Alors la femme lança
2112 rouge, et très fardée. Elle jouait avec la rose. Les dés roulèrent, pour un dernier enjeu. Alors la femme lança sur la tab
2113 . Les dés roulèrent, pour un dernier enjeu. Alors la femme lança sur la table cette rose qui s’effeuilla sur les dés, et p
2114 , pour un dernier enjeu. Alors la femme lança sur la table cette rose qui s’effeuilla sur les dés, et partit d’un long rir
2115 lança sur la table cette rose qui s’effeuilla sur les dés, et partit d’un long rire. Elle me regardait et l’étranger aussi
2116 s, et partit d’un long rire. Elle me regardait et l’ étranger aussi se mit à me regarder bizarrement et j’étais possédé de
2117 joies et de peurs. Il fallut se lever, traverser le café dans la musique et la rumeur des clients. Dehors les réclames lu
2118 peurs. Il fallut se lever, traverser le café dans la musique et la rumeur des clients. Dehors les réclames lumineuses dial
2119 ut se lever, traverser le café dans la musique et la rumeur des clients. Dehors les réclames lumineuses dialoguaient folle
2120 dans la musique et la rumeur des clients. Dehors les réclames lumineuses dialoguaient follement au-dessus des rues parcour
2121 main je n’avais plus un sou). Je n’ai jamais revu l’ étranger. Quelquefois je songe à ses paroles — ou peut-être n’étaient-
2122 inquiétude, parce que je ne suis plus tout à fait le même. Puis elle me laisse, parce que le lait va monter. Alors, dans m
2123 ut à fait le même. Puis elle me laisse, parce que le lait va monter. Alors, dans ma chambre, avant d’aller souper, je m’ab
2124 re, avant d’aller souper, je m’abats sur mon lit, les cheveux dans les mains. Et je voudrais pouvoir pleurer sur ma lâcheté
2125 souper, je m’abats sur mon lit, les cheveux dans les mains. Et je voudrais pouvoir pleurer sur ma lâcheté. Et je t’apostro
2126 haïr… 9. Calembour sur une idée juste. (Note de l’ éd.) l. Rougemont Denis de, « Dés ou la clef des champs », Neuchâtel
2127 (Note de l’éd.) l. Rougemont Denis de, « Dés ou la clef des champs », Neuchâtel 1928 : beaux-arts, arts appliqués, archi
39 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Louis Aragon, Le Paysan de Paris (janvier 1927)
2128 Louis Aragon, Le Paysan de Paris (janvier 1927)ab « Je n’admets pas qu’on reprenne
2129 n’admets pas qu’on reprenne mes paroles, qu’on me les oppose. Ce ne sont pas les termes d’un traité de paix. Entre moi et v
2130 mes paroles, qu’on me les oppose. Ce ne sont pas les termes d’un traité de paix. Entre moi et vous, c’est la guerre. » Voi
2131 mes d’un traité de paix. Entre moi et vous, c’est la guerre. » Voilà pour les critiques, « punaises glabres et poux barbus
2132 Entre moi et vous, c’est la guerre. » Voilà pour les critiques, « punaises glabres et poux barbus », qui perdraient leur t
2133 ux barbus », qui perdraient leur temps à recenser les incohérences pittoresques de ce petit livre. Quant à ceux que certain
2134 une kyrielle d’injures qui ne font pas honneur à l’ imagination d’autres fois si prestigieuse du poète : « Ils m’ont suivi
2135 ois si prestigieuse du poète : « Ils m’ont suivi, les imbéciles », ricane-t-il ; et sans rire : « À mort ceux qui paraphras
2136 ce que je dis ». Il y a chez Aragon une folie de la persécution, qui se cherche partout des prétextes, et une passion far
2137 rtout des prétextes, et une passion farouche pour la liberté, qui font de cet ombrageux personnage une manière de Rousseau
2138 tense désespoir, on songe au Frank de La Coupe et les Lèvres, à qui ses compagnons criaient : « Te fais-tu le bouffon de ta
2139 res, à qui ses compagnons criaient : « Te fais-tu le bouffon de ta propre détresse ? » Tant d’insistance dans le mauvais g
2140 de ta propre détresse ? » Tant d’insistance dans le mauvais goût ne m’empêchera pas de le dire, Aragon possède le tempéra
2141 stance dans le mauvais goût ne m’empêchera pas de le dire, Aragon possède le tempérament le plus hardi et le plus original
2142 oût ne m’empêchera pas de le dire, Aragon possède le tempérament le plus hardi et le plus original de la jeune littérature
2143 era pas de le dire, Aragon possède le tempérament le plus hardi et le plus original de la jeune littérature française. Il
2144 e, Aragon possède le tempérament le plus hardi et le plus original de la jeune littérature française. Il le proclame « J’a
2145 tempérament le plus hardi et le plus original de la jeune littérature française. Il le proclame « J’appartiens à la grand
2146 us original de la jeune littérature française. Il le proclame « J’appartiens à la grande race des torrents ». Génie inégal
2147 rature française. Il le proclame « J’appartiens à la grande race des torrents ». Génie inégal s’il en fut, voici parmi tro
2148 littérature pour trouver semblable domination de la langue. Et parmi les modernes, il bat tous les records de l’image, ce
2149 ouver semblable domination de la langue. Et parmi les modernes, il bat tous les records de l’image, ce qui nous vaut avec d
2150 de la langue. Et parmi les modernes, il bat tous les records de l’image, ce qui nous vaut avec des bizarreries fatigantes
2151 Et parmi les modernes, il bat tous les records de l’ image, ce qui nous vaut avec des bizarreries fatigantes et quelques so
2152 ne se croie pas tenu de justifier ses visions par le moyen d’une métaphysique aussi prétentieuse qu’incertaine. Son affair
2153 si prétentieuse qu’incertaine. Son affaire, c’est l’ amour, et certain désespoir vaste et profond comme l’époque. « Voulez-
2154 mour, et certain désespoir vaste et profond comme l’ époque. « Voulez-vous des douleurs, la mort ou des chansons ? » On a l
2155 ofond comme l’époque. « Voulez-vous des douleurs, la mort ou des chansons ? » On a l’hallucination du décor des capitales,
2156 us des douleurs, la mort ou des chansons ? » On a l’ hallucination du décor des capitales, créatrice d’un merveilleux de ch
2157 instant, d’une véritable « mythologie moderne ». Le Paysan de Paris est une suite de promenades dont la composition n’est
2158 Paysan de Paris est une suite de promenades dont la composition n’est pas sans rappeler celle des Nuits d’octobre de Nerv
2159 es Nuits d’octobre de Nerval ; forme qui permet à l’ auteur de divaguer de la philosophie au lyrisme le plus échevelé en pa
2160 rval ; forme qui permet à l’auteur de divaguer de la philosophie au lyrisme le plus échevelé en passant par la description
2161 l’auteur de divaguer de la philosophie au lyrisme le plus échevelé en passant par la description réaliste ou imaginée d’un
2162 sophie au lyrisme le plus échevelé en passant par la description réaliste ou imaginée d’une boîte de nuit, d’une devanture
2163 , d’une devanture, d’un parc public. Ce n’est pas le meilleur livre de l’auteur d’Anicet. C’est pourtant un des plus signi
2164 un parc public. Ce n’est pas le meilleur livre de l’ auteur d’Anicet. C’est pourtant un des plus significatifs du romantism
2165 pourtant un des plus significatifs du romantisme nouveau . J’ai nommé Rousseau, Nerval Musset : mais voyez un Rousseau sans ten
2166 ougemont Denis de, « [Compte rendu] Louis Aragon, Le Paysan de Paris  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genè
40 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Billets aigres-doux (janvier 1927)
2167 riet V. A.-W. Poste aux amours perdues Sur le mont gris pâlissants Des bouquets de vagues brumes. Insulter ta beaut
2168 sses, ô col roide, En souffrance mes baisers. L’ amour est un alibi Nos lèvres sitôt que jointes, Ô dernier mensong
2169 vers d’autres rêves Où sourient quels anges fous. L’ horaire dicte un adieu, La mode qu’on rie des pleurs, Lors je baise vo
2170 rient quels anges fous. L’horaire dicte un adieu, La mode qu’on rie des pleurs, Lors je baise votre main Comme on signe d’
41 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Conte métaphysique : L’individu atteint de strabisme (janvier 1927)
2171 Conte métaphysique : L’ individu atteint de strabisme (janvier 1927)f g Comme le démiurge v
2172 u atteint de strabisme (janvier 1927)f g Comme le démiurge venait de peser sur le commutateur des étoiles… l’une, se dé
2173 1927)f g Comme le démiurge venait de peser sur le commutateur des étoiles… l’une, se décrochant sans plus d’hésitation,
2174 sans plus d’hésitation, se mit à pérégriner dans les régions de chasse gardée du ci-devant soleil. C’est là qu’Urbain, pre
2175 par qui ? elle était anticléricale, on ne saurait le taire, — Urbain dormait. L’étoile, jeune fille, roulait gentiment sur
2176 ricale, on ne saurait le taire, — Urbain dormait. L’ étoile, jeune fille, roulait gentiment sur ses pointes, tout scintille
2177 heure, elle éclaira d’une rose caresse lumineuse la chevelure rouge d’Urbain, et son nez, lequel, par ses dimensions rema
2178 dimensions remarquablement exagérées, lui valait le surnom de Bin-Bin. Urbain ouvrit les yeux et ne vit rien. On rappelle
2179 s, lui valait le surnom de Bin-Bin. Urbain ouvrit les yeux et ne vit rien. On rappelle que les étoiles s’étaient décrochées
2180 n ouvrit les yeux et ne vit rien. On rappelle que les étoiles s’étaient décrochées de leur poste dans l’éternité. « Éternit
2181 s étoiles s’étaient décrochées de leur poste dans l’ éternité. « Éternité désaffectée, c’est bien dommage, dit-il en s’étir
2182 fectée, c’est bien dommage, dit-il en s’étirant ; le printemps désormais rendra le ciel plus pâle, et nous irons chercher
2183 t-il en s’étirant ; le printemps désormais rendra le ciel plus pâle, et nous irons chercher dans le souvenir les vent-coul
2184 ra le ciel plus pâle, et nous irons chercher dans le souvenir les vent-coulis de la mort. Garçon, un café, un ! » Mais l’é
2185 lus pâle, et nous irons chercher dans le souvenir les vent-coulis de la mort. Garçon, un café, un ! » Mais l’étoile chantai
2186 rons chercher dans le souvenir les vent-coulis de la mort. Garçon, un café, un ! » Mais l’étoile chantait dans l’axe de sa
2187 t-coulis de la mort. Garçon, un café, un ! » Mais l’ étoile chantait dans l’axe de sa vie normale et s’approchait en faisan
2188 rçon, un café, un ! » Mais l’étoile chantait dans l’ axe de sa vie normale et s’approchait en faisant la roue — celle à qui
2189 ’axe de sa vie normale et s’approchait en faisant la roue — celle à qui sourit la Fortune. Urbain, fort d’une hérédité jud
2190 pprochait en faisant la roue — celle à qui sourit la Fortune. Urbain, fort d’une hérédité judiciaire et française, dédaign
2191 judiciaire et française, dédaigna des avances que la perte de son sens de l’éternel rendait pourtant considérables, au sen
2192 dédaigna des avances que la perte de son sens de l’ éternel rendait pourtant considérables, au sens étymologique du terme.
2193 es, au sens étymologique du terme. Il loucha vers le néant, retourna ses poches, ôta ses gants qu’il jeta, puis, après un
2194 u’il jeta, puis, après un grand coup de pied dans le vide symbolique des systèmes, sortit, c’est-à-dire qu’il fit un pas d
2195 e qu’il fit un pas dans une direction quelconque. L’ étoile pleurait, sentimentale. f. Rougemont Denis de, « L’individu
2196 eurait, sentimentale. f. Rougemont Denis de, «  L’ individu atteint de strabisme. Conte métaphysique », Revue de Belles-L
42 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Dans le Style (janvier 1927)
2197 Dans le Style (janvier 1927)h Nous recevons d’un bellettrien facétieux cet
2198 pour Paul Morand, auteur de « Lewis et Irène » L’ auteur de maint roman de caractère gras quitte Charing-Cross, songeant
2199 au cerveau du poète qui meurt de sommeil naturel. Le tunnel sous la Manche escamoté, le train dépose des complets rigides
2200 oète qui meurt de sommeil naturel. Le tunnel sous la Manche escamoté, le train dépose des complets rigides contenant des A
2201 mmeil naturel. Le tunnel sous la Manche escamoté, le train dépose des complets rigides contenant des Anglais fragiles. L’a
2202 complets rigides contenant des Anglais fragiles. L’ aube tire un écran de pluies sur le paysage commercial. Terminus : Mor
2203 lais fragiles. L’aube tire un écran de pluies sur le paysage commercial. Terminus : Morand, s’éveillant en français, termi
2204 s, termine : … Irène. (Grasset, 1924… … y compris la Suède et la Norvège.) On lit dans les Nouvelles littéraires , du 8
2205 … Irène. (Grasset, 1924… … y compris la Suède et la Norvège.) On lit dans les Nouvelles littéraires , du 8 janvier 192
2206 y compris la Suède et la Norvège.) On lit dans les Nouvelles littéraires , du 8 janvier 1927, l’information suivante :
2207 mpris la Suède et la Norvège.) On lit dans les Nouvelles littéraires , du 8 janvier 1927, l’information suivante : Mardi derni
2208 s les Nouvelles littéraires , du 8 janvier 1927, l’ information suivante : Mardi dernier a été célébré en l’église grecque
2209 rmation suivante : Mardi dernier a été célébré en l’ église grecque de la rue Georges Bizet le mariage de M. Paul Morand av
2210 ardi dernier a été célébré en l’église grecque de la rue Georges Bizet le mariage de M. Paul Morand avec la princesse Hélè
2211 lébré en l’église grecque de la rue Georges Bizet le mariage de M. Paul Morand avec la princesse Hélène-C. Soutzo. Les tém
2212 e Georges Bizet le mariage de M. Paul Morand avec la princesse Hélène-C. Soutzo. Les témoins étaient pour le marié : M. Ph
2213 . Paul Morand avec la princesse Hélène-C. Soutzo. Les témoins étaient pour le marié : M. Philippe Berthelot, secrétaire gén
2214 ncesse Hélène-C. Soutzo. Les témoins étaient pour le marié : M. Philippe Berthelot, secrétaire général du ministre des Aff
2215 ral du ministre des Affaires étrangères ; et pour la mariée : Son Excellence M. Diamanty, ministre de Roumanie à Paris. C’
2216 stre de Roumanie à Paris. C’est encore mieux dans le style. h. Rougemont Denis de, « Dans le style », Revue de Belles-L
2217 x dans le style. h. Rougemont Denis de, « Dans le style », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribourg,
43 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Bernard Barbey, La Maladère (février 1927)
2218 Bernard Barbey, La Maladère (février 1927)ac « Quel admirable sujet de roman, écrit G
2219 out de quinze ans, de vingt ans de vie conjugale, la décristallisation progressive et réciproque des conjoints. » On sait
2220 èvre d’imagination qui orne de beautés illusoires l’ objet de l’amour. Mais les jeunes gens de ce temps ne cultivent point
2221 ination qui orne de beautés illusoires l’objet de l’ amour. Mais les jeunes gens de ce temps ne cultivent point cette fièvr
2222 ne de beautés illusoires l’objet de l’amour. Mais les jeunes gens de ce temps ne cultivent point cette fièvre. Et comme la
2223 e temps ne cultivent point cette fièvre. Et comme la morale ne sait plus leur imposer de feindre encore ce que le cœur ne
2224 e sait plus leur imposer de feindre encore ce que le cœur ne ressent plus, il suffit de quelques mois aux jeunes époux de
2225 s, il suffit de quelques mois aux jeunes époux de la Maladère pour se déprendre de leurs rêves. Un malentendu grandit entr
2226 x dans leur isolement, inexplicable et mal avoué. L’ on songe à une fatalité intérieure qui les ferait se meurtrir l’un l’a
2227 l avoué. L’on songe à une fatalité intérieure qui les ferait se meurtrir l’un l’autre. Pourtant, jusqu’au bout, il semble q
2228 u’un mot, un geste décisif, ou certaine amitié de la saison suffirait à dissiper le charme perfide qui les tourmente. Mais
2229 certaine amitié de la saison suffirait à dissiper le charme perfide qui les tourmente. Mais il faudrait d’abord qu’ils se
2230 saison suffirait à dissiper le charme perfide qui les tourmente. Mais il faudrait d’abord qu’ils se soient délivrés d’eux-m
2231 , soient possibles. C’est d’Armande surtout qu’on les attendrait, plus franche d’allure. On ne sait ce qui la retient : son
2232 endrait, plus franche d’allure. On ne sait ce qui la retient : son amour ? son manque d’amour ? Pour Jacques, il souffre d
2233 able adolescence, d’un défaitisme sentimental qui l’ empêtre de réticences, et le fait jouer bien maladroitement son rôle d
2234 tisme sentimental qui l’empêtre de réticences, et le fait jouer bien maladroitement son rôle d’homme… « Captif de sa propr
2235 e trahit Barbey : son art est justement de voiler les intentions du récit et de les exprimer seulement par un geste, une nu
2236 justement de voiler les intentions du récit et de les exprimer seulement par un geste, une nuance du paysage, une image qu’
2237 sentiment. Ce n’est qu’à force de discrétion dans les moyens qu’il parvient à une certaine puissance de l’effet, aux derniè
2238 moyens qu’il parvient à une certaine puissance de l’ effet, aux dernières pages. Il règne dans la Maladère une étrange harm
2239 ce de l’effet, aux dernières pages. Il règne dans la Maladère une étrange harmonie entre le climat des sentiments et celui
2240 règne dans la Maladère une étrange harmonie entre le climat des sentiments et celui des campagnes désolées où ils se dével
2241 ristes et sans violence, autour de ces êtres dont la détresse est d’autant plus cruelle qu’elle est contenue sous des deho
2242 ntenue sous des dehors trop polis. Une fois fermé le livre de Barbey, on oublie la justesse de son analyse pour n’évoquer
2243 lis. Une fois fermé le livre de Barbey, on oublie la justesse de son analyse pour n’évoquer plus que des visions où se con
2244 our n’évoquer plus que des visions où se condense le sentiment du récit. Dans le Cœur gros, c’était un parc avant l’orage,
2245 isions où se condense le sentiment du récit. Dans le Cœur gros, c’était un parc avant l’orage, le rose sombre d’une joue b
2246 u récit. Dans le Cœur gros, c’était un parc avant l’ orage, le rose sombre d’une joue brûlante et fraîche dans le vent. Et
2247 Dans le Cœur gros, c’était un parc avant l’orage, le rose sombre d’une joue brûlante et fraîche dans le vent. Et dans la M
2248 e rose sombre d’une joue brûlante et fraîche dans le vent. Et dans la Maladère, un arbre coupé découvrant le manoir perdu,
2249 ne joue brûlante et fraîche dans le vent. Et dans la Maladère, un arbre coupé découvrant le manoir perdu, des fumées sur u
2250 t. Et dans la Maladère, un arbre coupé découvrant le manoir perdu, des fumées sur un paysage d’hiver et soudain sous la lu
2251 des fumées sur un paysage d’hiver et soudain sous la lueur d’un incendie, deux visages tordus de passion. Cette fin est ad
2252 tordus de passion. Cette fin est admirable, dont la brutalité si longtemps désirée délivre Jacques d’un passé obsédant, d
2253 gemont Denis de, « [Compte rendu] Bernard Barbey, La Maladère  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, fév
44 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Guy de Pourtalès, Montclar (février 1927)
2254 Guy de Pourtalès, Montclar (février 1927)ad L’ on aime que, pour certains hommes, écrire ne soit que le recensement p
2255 ime que, pour certains hommes, écrire ne soit que le recensement passionné de leur vie, ou l’aveu déguisé d’une insatisfac
2256 soit que le recensement passionné de leur vie, ou l’ aveu déguisé d’une insatisfaction qu’elle leur laisse. Montclar est l’
2257 insatisfaction qu’elle leur laisse. Montclar est l’ auteur de vers de jeunesse auxquels il ne tient guère, et l’on compren
2258 e vers de jeunesse auxquels il ne tient guère, et l’ on comprend que ce journal bientôt les rejoindra dans l’armoire aux so
2259 nt guère, et l’on comprend que ce journal bientôt les rejoindra dans l’armoire aux souvenirs. Cette façon de ne pas y tenir
2260 omprend que ce journal bientôt les rejoindra dans l’ armoire aux souvenirs. Cette façon de ne pas y tenir, qu’il manifeste
2261 oute occasion de sa vie est peut-être ce qui nous le rend le plus sympathique. « Officiellement comblé, et par dedans… com
2262 asion de sa vie est peut-être ce qui nous le rend le plus sympathique. « Officiellement comblé, et par dedans… comment bie
2263 ui, comme pour Barnabooth, il s’agit de « déjouer le complot de la commodité ». Mais plus voluptueux que philosophe, c’est
2264 Barnabooth, il s’agit de « déjouer le complot de la commodité ». Mais plus voluptueux que philosophe, c’est à l’amour qu’
2265 é ». Mais plus voluptueux que philosophe, c’est à l’ amour qu’il ira demander la souffrance indispensable au perfectionneme
2266 ue philosophe, c’est à l’amour qu’il ira demander la souffrance indispensable au perfectionnement de son âme. Et qu’import
2267 au perfectionnement de son âme. Et qu’importe si les Allemands qui, fréquente sontae, pour notre plaisir, un peu plus vien
2268 rle de choses d’art comme on fait dans Proust, si les passions qu’il nous peint sont ici tant soit peu russes, et là, gidie
2269 se connaît assez pour savoir ce qui est en lui de l’ homme même, ou de l’amateur distingué, — et ne peut pas nous tromper l
2270 r savoir ce qui est en lui de l’homme même, ou de l’ amateur distingué, — et ne peut pas nous tromper là-dessus. Il se conn
2271 sus. Il se connaît avec une sorte de froideur que l’ on dirait désintéressée si elle n’avait pour effet de souligner, plus
2272 he secrètement, parce que de ces « ratages » naît le perpétuel besoin d’évasion qui est la condition de son progrès moral.
2273 ages » naît le perpétuel besoin d’évasion qui est la condition de son progrès moral. C’est ainsi qu’il consent, non sans u
2274 consent, non sans une imperceptible satisfaction, l’ aveu d’une fondamentale indifférence du cœur qui contraste avec une vi
2275 meline, un amour se noue, qui commence où souvent l’ on finit. Et peut-être l’amour n’est-il possible qu’entre deux cœurs q
2276 qui commence où souvent l’on finit. Et peut-être l’ amour n’est-il possible qu’entre deux cœurs que l’épreuve du plaisir n
2277 l’amour n’est-il possible qu’entre deux cœurs que l’ épreuve du plaisir n’a pas exténués. Mais alors quelle avidité cruelle
2278 amour, à force de petites blessures. Ce n’est pas le moins troublant d’une telle vie, cette sagesse un peu sombre qui s’en
2279 ’en dégage, sagesse qui veut « que nous appelions les âmes à la vie après seulement toutes les morts du plaisir », car elle
2280 sagesse qui veut « que nous appelions les âmes à la vie après seulement toutes les morts du plaisir », car elle sait « qu
2281 ppelions les âmes à la vie après seulement toutes les morts du plaisir », car elle sait « qu’entre les êtres, le bonheur es
2282 les morts du plaisir », car elle sait « qu’entre les êtres, le bonheur est un lien sans durée. Seules la souffrance ou de
2283 du plaisir », car elle sait « qu’entre les êtres, le bonheur est un lien sans durée. Seules la souffrance ou de secrètes a
2284 êtres, le bonheur est un lien sans durée. Seules la souffrance ou de secrètes anomalies ont un pouvoir d’éternité. » Il e
2285 e, ce me semble, d’insister sur ce qui forme dans le récit de cette vie comme une arrière-pensée inquiète et un peu hautai
2286 e arrière-pensée inquiète et un peu hautaine. Que la composition de cette réminiscence soit assez facile et « artiste » on
2287 le et « artiste » on hésite à en faire reproche à l’ auteur. Cette espèce de modestie de l’allure est rare autant que sympa
2288 reproche à l’auteur. Cette espèce de modestie de l’ allure est rare autant que sympathique, dans le temps que sévit l’infl
2289 de l’allure est rare autant que sympathique, dans le temps que sévit l’inflation littéraire la plus ridicule. Pourtant, qu
2290 e autant que sympathique, dans le temps que sévit l’ inflation littéraire la plus ridicule. Pourtant, qu’elle ne laisse poi
2291 e, dans le temps que sévit l’inflation littéraire la plus ridicule. Pourtant, qu’elle ne laisse point oublier que ce livre
2292 e. Il manque sans doute un morceau de phrase dans l’ édition originale.
45 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Lettre du survivant (février 1927)
2293 ant (février 1927)i j « Triste, mais vrai. » ( Les journaux.) Mademoiselle, Il faut d’abord que je m’excuse : c’est un
2294 vous dise qu’il fait très froid dans ma chambre : le feu n’a pas pris, et d’ailleurs cela n’en vaut plus la peine. (Veuill
2295 u n’a pas pris, et d’ailleurs cela n’en vaut plus la peine. (Veuillez ne pas voir dans cette phrase quelque allusion de ma
2296 dit, sans doute parce que c’est là que se nouent les douleurs les plus atrocement inutiles. La première fois, au théâtre.
2297 ute parce que c’est là que se nouent les douleurs les plus atrocement inutiles. La première fois, au théâtre. Dans l’ombre,
2298 ment inutiles. La première fois, au théâtre. Dans l’ ombre, j’ai suivi le drame sur vos traits seulement ; l’écho n’en fut
2299 emière fois, au théâtre. Dans l’ombre, j’ai suivi le drame sur vos traits seulement ; l’écho n’en fut que plus douloureux
2300 e, j’ai suivi le drame sur vos traits seulement ; l’ écho n’en fut que plus douloureux dans mon cœur. Puis je vous ai oubli
2301 ous voir si entourée… D’autres fois… je n’ai plus le courage de les dire. Enfin, avant-hier, à ce bal. J’avais demandé à
2302 tourée… D’autres fois… je n’ai plus le courage de les dire. Enfin, avant-hier, à ce bal. J’avais demandé à un de mes amis,
2303 us connaît4, de me présenter. Il m’en avait donné la promesse. Vos regards rencontrèrent les miens plus d’une fois pendant
2304 pendant une danse qu’il fit avec vous, mais vous les détourniez soudain comme pour vous arracher à une obsession secrèteme
2305 session secrètement attirante ; et je pensais que la force de mon désir était telle que vous en éprouviez vaguement la men
2306 désir était telle que vous en éprouviez vaguement la menace. Je dis menace, parce que mes airs sombres vous effrayaient sa
2307 seule leur prêtait quelque intention. Quand enfin l’ orchestre s’arrêta, je me trouvais tout près de vous. Mon ami me fit u
2308 mon du malheur me paralysa. Je venais d’entrevoir l’ image d’un couple heureux et banal, votre sourire répondant au mien, c
2309 aires et sur des cartes postales illustrées. Déjà la foule des danseurs nous séparait, mon ami se détournait, un peu vexé 
2310 s une invincible lassitude me saisir et m’assis à l’ écart. On me demandait, en passant, si j’étais malade. Je désignais d’
2311 s bouteilles de champagne vides ; car on pardonne l’ ivresse, mais non certaines douleurs. Même, je fus obligé de confier à
2312 bligé de confier à un ami que j’en avais repris … Les archets jouaient sur mes nerfs. Le jazz martelait mon désespoir. Dése
2313 vais repris … Les archets jouaient sur mes nerfs. Le jazz martelait mon désespoir. Désespoir étroit, ces œillères géantes
2314 sespoir étroit, ces œillères géantes aux pensées, le ciel trop bas d’un rêve sans issue, pesant comme l’envie d’un sommeil
2315 ciel trop bas d’un rêve sans issue, pesant comme l’ envie d’un sommeil sans fin… J’avais soif, mais la seule vue d’un liqu
2316 l’envie d’un sommeil sans fin… J’avais soif, mais la seule vue d’un liquide me soulevait le cœur. L’aube parut. On éteigni
2317 soif, mais la seule vue d’un liquide me soulevait le cœur. L’aube parut. On éteignit toutes les lampes, et les couples cha
2318 s la seule vue d’un liquide me soulevait le cœur. L’ aube parut. On éteignit toutes les lampes, et les couples charlestonna
2319 ulevait le cœur. L’aube parut. On éteignit toutes les lampes, et les couples charlestonnaient plus furieusement dans l’ombr
2320 . L’aube parut. On éteignit toutes les lampes, et les couples charlestonnaient plus furieusement dans l’ombre livide, aux c
2321 s couples charlestonnaient plus furieusement dans l’ ombre livide, aux cris fêlés et déchirants des saxophones. Sortie dans
2322 s. Sortie dans un matin sourd, frileux, qui avait la nausée. Je rentrai seul. Voici quelques mots que j’écrivis à ma table
2323 œillet, pauvre gentillesse d’une autre femme dont le seul défaut fut de m’aimer… (Froid aux genoux, odeur de vieille fumée
2324 umée, et ce refus au sommeil qui meurtrit jusqu’à l’ âme.) Convulsions d’oriflammes sur l’orchestre pensif. Ton regard est
2325 trit jusqu’à l’âme.) Convulsions d’oriflammes sur l’ orchestre pensif. Ton regard est plus grand que le chant des violons.
2326 l’orchestre pensif. Ton regard est plus grand que le chant des violons. Aube dure ! En ma tête rôde ton souvenir, comme un
2327 es heures, d’un sommeil triste, tout enfiévré par la crainte du réveil. Puis je suis revenu dans ces rues où je vous renco
2328 n rendez-vous au thé du Printemps. J’ai rôdé dans la joie féminine des grands magasins, n’osant pas repasser trop souvent
2329 agasins, n’osant pas repasser trop souvent devant les ascenseurs. « Vers 4 heures, me disais-je elle y entrera, et, me glis
2330 tage… » Je délirais, bien sûr. Je m’imaginais que les vendeuses me dévisageaient de plus en plus impudemment : je devais pa
2331 qu’un paquet de dix personnes s’engouffrait dans la cage rouge et or et s’élevait, j’éprouvais un petit arrachement, comm
2332 ais encore : Si je prends cet ascenseur et que je la croise en route dans l’ascenseur descendant… Il aurait fallu monter,
2333 s cet ascenseur et que je la croise en route dans l’ ascenseur descendant… Il aurait fallu monter, mais l’idée de vous trou
2334 scenseur descendant… Il aurait fallu monter, mais l’ idée de vous trouver peut-être assise en face de votre bel ami laqué,
2335 je suis sorti. Il y avait beaucoup de monde dans les rues, sous la pluie. Les autobus passaient par groupes. Plusieurs foi
2336 Il y avait beaucoup de monde dans les rues, sous la pluie. Les autobus passaient par groupes. Plusieurs fois, j’ai cru vo
2337 t beaucoup de monde dans les rues, sous la pluie. Les autobus passaient par groupes. Plusieurs fois, j’ai cru vous reconnaî
2338 s. Plusieurs fois, j’ai cru vous reconnaître dans la foule qui se précipitait, mais je n’avais pas pris de numéro, je ne p
2339 llu courir après celle-là qui venait de tourner à l’ angle de cette rue et qui avait votre démarche. Mais, pendant ce temps
2340 désir surmené vous appelait encore, haletant. Et le temps passait, à la fois si lent — jusqu’à l’arrivée du prochain métr
2341 Et le temps passait, à la fois si lent — jusqu’à l’ arrivée du prochain métro, du prochain autobus, — si rapide : déjà les
2342 in métro, du prochain autobus, — si rapide : déjà les lumières des boulevards glissaient des reflets sur l’asphalte mouillé
2343 umières des boulevards glissaient des reflets sur l’ asphalte mouillé. Les pieds dans l’eau, les jambes fatiguées, les paup
2344 ds glissaient des reflets sur l’asphalte mouillé. Les pieds dans l’eau, les jambes fatiguées, les paupières lourdes, et ce
2345 es reflets sur l’asphalte mouillé. Les pieds dans l’ eau, les jambes fatiguées, les paupières lourdes, et ce chant désespér
2346 ets sur l’asphalte mouillé. Les pieds dans l’eau, les jambes fatiguées, les paupières lourdes, et ce chant désespéré qui vo
2347 illé. Les pieds dans l’eau, les jambes fatiguées, les paupières lourdes, et ce chant désespéré qui vous appelait, assourdis
2348 était arrêté tout près de moi. Je vis un visage à l’ intérieur se pencher vers la vitre… Je montai. Il n’y avait que des da
2349 i. Je vis un visage à l’intérieur se pencher vers la vitre… Je montai. Il n’y avait que des dames. Personne ne parlait. La
2350 Il n’y avait que des dames. Personne ne parlait. La jeune femme qui s’était penchée vous ressemblait tant. Mais je n’osai
2351 ous ressemblait tant. Mais je n’osais presque pas la regarder, à cause d’une incertitude qui redonnait tout son empire à m
2352 . Peut-être était-ce vous. Je ne saurai jamais. À l’ arrêt de la Place Saint-Michel, elle sortit, en me frôlant, sans me re
2353 était-ce vous. Je ne saurai jamais. À l’arrêt de la Place Saint-Michel, elle sortit, en me frôlant, sans me regarder. Je
2354 derrière elle. Mais tout de suite des parapluies la dérobèrent à mes yeux. Une bouche de métro m’attira. Les rames s’arrê
2355 obèrent à mes yeux. Une bouche de métro m’attira. Les rames s’arrêtaient avec un sifflement particulièrement doux pour ma f
2356 gue, et ces gens pressés et songeurs respectaient la folie douloureuse qui devait contracter mon visage. Je promenais sur
2357 egards angoissés, avides, implorants. Oh ! toutes les femmes que j’ai fait souffrir cette nuit d’un long regard de damné. À
2358 je mêlais à mes pensées des fragments de rêves et les personnages des affiches, tout en marchant sans fin dans les couloirs
2359 ages des affiches, tout en marchant sans fin dans les couloirs implacablement brillants, je me pris à parler à haute voix,
2360 ases incohérentes. Je voyais avec une sombre joie les employés et les voyageurs s’inquiéter. Bientôt on m’entraîna de force
2361 s. Je voyais avec une sombre joie les employés et les voyageurs s’inquiéter. Bientôt on m’entraîna de force sur un trottoir
2362 force sur un trottoir roulant qui me remonta dans la rue. La fraîcheur de la brume m’apaisa. Sur la promesse que je fis qu
2363 r un trottoir roulant qui me remonta dans la rue. La fraîcheur de la brume m’apaisa. Sur la promesse que je fis que je me
2364 ulant qui me remonta dans la rue. La fraîcheur de la brume m’apaisa. Sur la promesse que je fis que je me sentais mieux, o
2365 ns la rue. La fraîcheur de la brume m’apaisa. Sur la promesse que je fis que je me sentais mieux, on me laissa rentrer seu
2366 t 5 heures du matin. Premiers appels d’autos dans la ville, mais il me semble que toutes choses s’éloignent de moi vertigi
2367 à rien dans mon esprit. Peut-être que j’ai perdu la notion du temps. Je ne me souviens plus que de cette déception insupp
2368 tout ce qui me navre au plus intime de mon être… Le revolver est chargé, sur cette table. (Je le caresse, entre deux phra
2369 tre… Le revolver est chargé, sur cette table. (Je le caresse, entre deux phrases.) Mais voici que ce geste de ma mort auss
2370 ais voici que ce geste de ma mort aussi me lasse, l’ image que je m’en forme… Je ne comprends plus pourquoi je devrais me t
2371 is me tuer, pourquoi je souffre, ce que c’est que la souffrance, ce que c’est que ma vie, ma mort. Mon Dieu, il n’y a plus
46 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Orphée sans charme (février 1927)
2372 février 1927)k « Cet âge est sans pitié. » «  Le véritable symbole n’est jamais prévu par l’auteur », écrivait Cocteau
2373  » « Le véritable symbole n’est jamais prévu par l’ auteur », écrivait Cocteau dans la préface des Mariés de la tour Eiffe
2374 amais prévu par l’auteur », écrivait Cocteau dans la préface des Mariés de la tour Eiffel. Et une note d’Orphée précise :
2375 », écrivait Cocteau dans la préface des Mariés de la tour Eiffel. Et une note d’Orphée précise : « Inutile de dire qu’il n
2376 tile de dire qu’il n’y a pas un seul symbole dans la pièce. » Ce qui me gêne pourtant, c’est d’y découvrir possibles deux
2377 au d’en avoir plus ou moins consciemment concerté la possibilité. Orphée, par exemple, serait un poète surréaliste. « Il f
2378 dale. Il faut un de ces orages qui rafraîchissent l’ air. » Il prétend « traquer l’inconnu ». Sa femme l’accuse de « vouloi
2379 qui rafraîchissent l’air. » Il prétend « traquer l’ inconnu ». Sa femme l’accuse de « vouloir faire admettre que la poésie
2380 air. » Il prétend « traquer l’inconnu ». Sa femme l’ accuse de « vouloir faire admettre que la poésie consiste à écrire une
2381 Sa femme l’accuse de « vouloir faire admettre que la poésie consiste à écrire une phrase ». Et cette phrase, c’est un chev
2382 se ». Et cette phrase, c’est un cheval savant qui la lui a dictée : « Madame Eurydice Reviendra Des Enfers. » — « Ce n’est
2383 un poème, un poème du rêve, une fleur du fond de la mort. » Or, on découvre à la fin de la pièce que c’est une anagramme
2384 une fleur du fond de la mort. » Or, on découvre à la fin de la pièce que c’est une anagramme un peu ordurière. Ainsi les r
2385 du fond de la mort. » Or, on découvre à la fin de la pièce que c’est une anagramme un peu ordurière. Ainsi les rêves publi
2386 e que c’est une anagramme un peu ordurière. Ainsi les rêves publiés par les surréalistes, donnés à la fois comme poèmes et
2387 mme un peu ordurière. Ainsi les rêves publiés par les surréalistes, donnés à la fois comme poèmes et comme dictées de l’inc
2388 donnés à la fois comme poèmes et comme dictées de l’ inconscient, au fond desquels on a si vite fait de distinguer les quel
2389 au fond desquels on a si vite fait de distinguer les quelques préoccupations assez simples dont l’étude charme le psychana
2390 er les quelques préoccupations assez simples dont l’ étude charme le psychanalyste. Je pourrais poursuivre le jeu. Et puis,
2391 préoccupations assez simples dont l’étude charme le psychanalyste. Je pourrais poursuivre le jeu. Et puis, il y a aussi d
2392 e charme le psychanalyste. Je pourrais poursuivre le jeu. Et puis, il y a aussi des sortes de calembours… Art chrétien, a
2393 crivit certains vers qu’on peut lire plus haut : Les anges véritables qui connaissent les signes Sont moins bons acrobates
2394 plus haut : Les anges véritables qui connaissent les signes Sont moins bons acrobates… (etc.)… Cocteau s’est trop exercé
2395 Cocteau s’est trop exercé avant de se lancer sur la corde raide. Je suis sûr qu’il ne tombera pas. J’admire sans émoi. ⁂
2396 ’il ne tombera pas. J’admire sans émoi. ⁂ Certes, les qualités scéniques de cette pièce sont grandes. Je ne saurais même in
2397 e indiquer aucun endroit par où elle pèche contre les principes chers à l’auteur du Secret professionnel et de la préface d
2398 it par où elle pèche contre les principes chers à l’ auteur du Secret professionnel et de la préface des Mariés — principes
2399 es chers à l’auteur du Secret professionnel et de la préface des Mariés — principes dont l’énoncé brillant et définitif re
2400 nnel et de la préface des Mariés — principes dont l’ énoncé brillant et définitif restera l’un des titres les plus authenti
2401 ncé brillant et définitif restera l’un des titres les plus authentiques de Cocteau. Précision et relief du dialogue, ingéni
2402 liques ; enfin, un style parfaitement pauvre dans le détail, un vrai style de théâtre, d’une netteté qui pourtant n’est pa
2403 as maigre, d’une familiarité dramatique qui cerne le mystère d’un trait pur. Il semble que Cocteau ait réalisé là exacteme
2404 ble machine ne m’inquiète guère : je sais qu’elle le conduira où il veut, sans surprises. « Puisque ces mystères me dépass
2405 que ces mystères me dépassent, feignons d’en être l’ organisateur », disait le photographe des Mariés. Dans Orphée, le myst
2406 sent, feignons d’en être l’organisateur », disait le photographe des Mariés. Dans Orphée, le mystère ne peut plus dépasser
2407 », disait le photographe des Mariés. Dans Orphée, le mystère ne peut plus dépasser l’auteur : il l’a trop bien organisé. E
2408 és. Dans Orphée, le mystère ne peut plus dépasser l’ auteur : il l’a trop bien organisé. En somme, ce qu’il faut reprocher
2409 e, le mystère ne peut plus dépasser l’auteur : il l’ a trop bien organisé. En somme, ce qu’il faut reprocher à Cocteau, c’e
2410 lètement une pièce, prouvant une fois de plus que l’ atmosphère de l’« art pur » n’est pas respirable. Il ne manque rien à
2411 ce, prouvant une fois de plus que l’atmosphère de l’ « art pur » n’est pas respirable. Il ne manque rien à Orphée, sinon pe
2412 art de Dieu » — comme dit Gide — qui serait aussi la part de l’humain, l’imperfection secrète qui fait naître l’amour. Par
2413  » — comme dit Gide — qui serait aussi la part de l’ humain, l’imperfection secrète qui fait naître l’amour. Parce que la c
2414 dit Gide — qui serait aussi la part de l’humain, l’ imperfection secrète qui fait naître l’amour. Parce que la création es
2415 l’humain, l’imperfection secrète qui fait naître l’ amour. Parce que la création est venue après la théorie. Parce qu’une
2416 ection secrète qui fait naître l’amour. Parce que la création est venue après la théorie. Parce qu’une fois de plus, Cocte
2417 re l’amour. Parce que la création est venue après la théorie. Parce qu’une fois de plus, Cocteau a comprimé des pétales de
2418 les de roses dans du cristal taillé, selon toutes les règles de l’art, mais que l’essence obtenue, si elle est de rose, est
2419 ans du cristal taillé, selon toutes les règles de l’ art, mais que l’essence obtenue, si elle est de rose, est sans parfum.
2420 aillé, selon toutes les règles de l’art, mais que l’ essence obtenue, si elle est de rose, est sans parfum.   (Tout de même
2421  : j’en verrais une preuve, pour mon compte, dans le fait que je ne sais parler de lui autrement que par métaphores.) 5.
2422 trement que par métaphores.) 5. M. Zimmer, dans la Gazette de Lausanne . Et même il appelait Orphée « une tragédie de l
2423 ne . Et même il appelait Orphée « une tragédie de l’ amour conjugal ». Vraiment, nous n’en demandions pas tant… k. Rougem
47 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). L’autre œil (février 1927)
2424 L’autre œil (février 1927)l m Décembre L’ époque s’ouvre où l’on attend un miracle pour la fin de la semaine. « 
2425 ier 1927)l m Décembre L’époque s’ouvre où l’ on attend un miracle pour la fin de la semaine. « Messieurs, disait Da
2426 L’époque s’ouvre où l’on attend un miracle pour la fin de la semaine. « Messieurs, disait Dardel, y a pas à tortiller, i
2427 s’ouvre où l’on attend un miracle pour la fin de la semaine. « Messieurs, disait Dardel, y a pas à tortiller, il faut fai
2428 ça semble idiot. Il y a des soirs où une idée de la responsabilité s’empare de nous. Et nous calculons qu’il s’agit de dé
2429 de déranger 5000 personnes en huit soirées, et de les occuper quatre heures durant… Mais la vision, rapidement entrevue par
2430 ées, et de les occuper quatre heures durant… Mais la vision, rapidement entrevue par chacun dans son for le plus intérieur
2431 sion, rapidement entrevue par chacun dans son for le plus intérieur, d’une fuite en auto, nous rassure provisoirement…
2432 ment… Prosopopée, à propos d’une apparition La vieille Monture 6 un soir nous apparut, lugubrement fardée, l’haleine
2433 nture 6 un soir nous apparut, lugubrement fardée, l’ haleine mauvaise, édentée et tâchant à prendre un accent anglais d’un
2434 nt d’un doigt impitoyable son flanc déjà meurtri, la suivaient en hurlant : « Bas-toi là, bas-toi là ! »… Est-il plus atro
2435 onçant de séniles calembours… Pénétrés d’horreur, les bellettriens avaient fui. Au détour d’une ivresse, ils rencontrèrent
2436 t une créature évadée d’anciens rêves qui hantait les limbes depuis un an déjà. Ils ne tardèrent pas à reconnaître Cinémato
2437 tre. Ils se réunissent parfois autour d’un feu et le contemplent un certain temps en silence. « Well ! », dit enfin Dardel
2438 n temps en silence. « Well ! », dit enfin Dardel. Les autres n’en pensent pas moins. Quelquefois, Mossoul amène un scénario
2439 et à deux faces. Lugin, qui est théologien, et de la Tchaux, n’a pas la foi. Topin, Mahomet désabusé, constate que jamais
2440 gin, qui est théologien, et de la Tchaux, n’a pas la foi. Topin, Mahomet désabusé, constate que jamais « la Montagne » ne
2441 i. Topin, Mahomet désabusé, constate que jamais «  la Montagne » ne saura venir au prophète, même s’il se nomme Mossoul. Po
2442 énie vint s’asseoir certaine nuit. Elle parla par la bouche de Lugin, sa langue dans la langue de Lugin : « Le rideau se l
2443 Elle parla par la bouche de Lugin, sa langue dans la langue de Lugin : « Le rideau se lève sur un miroir qui occupe toute
2444 e de Lugin, sa langue dans la langue de Lugin : «  Le rideau se lève sur un miroir qui occupe toute la largeur de la scène.
2445  Le rideau se lève sur un miroir qui occupe toute la largeur de la scène. Titre : Socrate et Narcisse, un acte à grande fi
2446 lève sur un miroir qui occupe toute la largeur de la scène. Titre : Socrate et Narcisse, un acte à grande figuration. » En
2447 et Narcisse, un acte à grande figuration. » Enfin l’ on joua aux petits dés le sort de notre parade — et l’on gagna. Enthou
2448 ande figuration. » Enfin l’on joua aux petits dés le sort de notre parade — et l’on gagna. Enthousiasmé, « Mimosa » partit
2449 joua aux petits dés le sort de notre parade — et l’ on gagna. Enthousiasmé, « Mimosa » partit pour la Riviera afin de négo
2450 l’on gagna. Enthousiasmé, « Mimosa » partit pour la Riviera afin de négocier la vente de cette martingale avec des surréa
2451  Mimosa » partit pour la Riviera afin de négocier la vente de cette martingale avec des surréalistes hétérodoxes. Il revin
2452 érodoxes. Il revint juste à temps pour assister à la cérémonie de la pose du point final de « Cinématoma ou les épanchemen
2453 int juste à temps pour assister à la cérémonie de la pose du point final de « Cinématoma ou les épanchements de la jeune S
2454 onie de la pose du point final de « Cinématoma ou les épanchements de la jeune Synovie », parade « née du mariage de nos ve
2455 oint final de « Cinématoma ou les épanchements de la jeune Synovie », parade « née du mariage de nos veilles et de nos rêv
2456 riage de nos veilles et de nos rêves », ainsi que le disait si poétiquement le programme. Un peu d’histoire (erratum de la
2457 nos rêves », ainsi que le disait si poétiquement le programme. Un peu d’histoire (erratum de la chronique de Mossoul). Be
2458 ement le programme. Un peu d’histoire (erratum de la chronique de Mossoul). Belles-Lettres joua l’Inspecteur de Gogol à l’
2459 de la chronique de Mossoul). Belles-Lettres joua l’ Inspecteur de Gogol à l’époque où le Cuirassé Potemkine était interdit
2460 oul). Belles-Lettres joua l’Inspecteur de Gogol à l’ époque où le Cuirassé Potemkine était interdit à l’écran. Pitoëff avai
2461 -Lettres joua l’Inspecteur de Gogol à l’époque où le Cuirassé Potemkine était interdit à l’écran. Pitoëff avait prêté un a
2462 ’époque où le Cuirassé Potemkine était interdit à l’ écran. Pitoëff avait prêté un accent, Mme d’Assilva deux actrices, M.
2463 re dans des jupons autrement que par métaphore. À La Chaux-de-Fonds, il y eut trente membres et cent doigts dans deux lits
2464 cela fait-il de pieds et d’oreillles ? À signaler la fuite de Bec-de-Gaz, lequel s’éteignit dans les neiges. Un jour, on s
2465 er la fuite de Bec-de-Gaz, lequel s’éteignit dans les neiges. Un jour, on s’aperçut que cette chose avait recommencé, qu’on
2466 mmencé, qu’on appelle, sans doute par antiphrase, la vie. 6. Revue ou prologue. l. Rougemont Denis de, « L’autre œil 
48 1927, Articles divers (1924–1930). Conférence d’Edmond Esmonin sur « La révocation de l’édit de Nantes » (16 février 1927)
2467 Conférence d’Edmond Esmonin sur «  La révocation de l’édit de Nantes » (16 février 1927)j Le sujet que M
2468 onférence d’Edmond Esmonin sur « La révocation de l’ édit de Nantes » (16 février 1927)j Le sujet que M. Esmonin, profes
2469 ation de l’édit de Nantes » (16 février 1927)j Le sujet que M. Esmonin, professeur à la Faculté des lettres de Grenoble
2470 r 1927)j Le sujet que M. Esmonin, professeur à la Faculté des lettres de Grenoble, traita mardi soir à la Grande salle
2471 ulté des lettres de Grenoble, traita mardi soir à la Grande salle des Conférences, devant un très bel auditoire, est un de
2472 des plus passionnants et des plus controversés de l’ histoire. L’un de ceux, aussi, où il est le plus difficile de rester i
2473 sés de l’histoire. L’un de ceux, aussi, où il est le plus difficile de rester impartial. M. Lombard, recteur de l’Universi
2474 icile de rester impartial. M. Lombard, recteur de l’ Université, en introduisant le conférencier, a fait allusion aux diver
2475 Lombard, recteur de l’Université, en introduisant le conférencier, a fait allusion aux divers points de vue auxquels on a
2476 ints de vue auxquels on a pu se placer pour juger la révocation. M. Esmonin, lui, se place au point de vue de l’historien
2477 ion. M. Esmonin, lui, se place au point de vue de l’ historien scrupuleux, qui juge d’après les textes, les causes et les e
2478 e vue de l’historien scrupuleux, qui juge d’après les textes, les causes et les effets vérifiables, et non d’après un systè
2479 istorien scrupuleux, qui juge d’après les textes, les causes et les effets vérifiables, et non d’après un système préconçu.
2480 uleux, qui juge d’après les textes, les causes et les effets vérifiables, et non d’après un système préconçu. (Cette attitu
2481 préconçu. (Cette attitude est plus rare qu’on ne le croit, de nos jours.) M. Esmonin montra avec beaucoup de clarté comme
2482 c beaucoup de clarté comment, entre 1578, date de la proclamation de l’édit, et 1685, date de la révocation, la France pas
2483 é comment, entre 1578, date de la proclamation de l’ édit, et 1685, date de la révocation, la France passa de la plus grand
2484 te de la proclamation de l’édit, et 1685, date de la révocation, la France passa de la plus grande liberté à la plus grand
2485 mation de l’édit, et 1685, date de la révocation, la France passa de la plus grande liberté à la plus grande tyrannie. En
2486 t 1685, date de la révocation, la France passa de la plus grande liberté à la plus grande tyrannie. En proclamant la liber
2487 tion, la France passa de la plus grande liberté à la plus grande tyrannie. En proclamant la liberté religieuse, Henry IV m
2488 liberté à la plus grande tyrannie. En proclamant la liberté religieuse, Henry IV mettait le royaume à la tête de la civil
2489 roclamant la liberté religieuse, Henry IV mettait le royaume à la tête de la civilisation ; en interdisant aux réformés d’
2490 liberté religieuse, Henry IV mettait le royaume à la tête de la civilisation ; en interdisant aux réformés d’exercer leur
2491 igieuse, Henry IV mettait le royaume à la tête de la civilisation ; en interdisant aux réformés d’exercer leur religion, m
2492 rcer leur religion, mais en même temps de quitter le pays, Louis XIV commit un des actes les plus vexatoires que l’histoir
2493 de quitter le pays, Louis XIV commit un des actes les plus vexatoires que l’histoire ait enregistrés. Après avoir fait un t
2494 s XIV commit un des actes les plus vexatoires que l’ histoire ait enregistrés. Après avoir fait un tableau de la France de
2495 e ait enregistrés. Après avoir fait un tableau de la France de l’édit, victorieuse dans la guerre de Trente Ans, l’orateur
2496 trés. Après avoir fait un tableau de la France de l’ édit, victorieuse dans la guerre de Trente Ans, l’orateur expose comme
2497 tableau de la France de l’édit, victorieuse dans la guerre de Trente Ans, l’orateur expose comment on en vint à la révoca
2498 l’édit, victorieuse dans la guerre de Trente Ans, l’ orateur expose comment on en vint à la révocation. C’est d’abord l’inf
2499 Trente Ans, l’orateur expose comment on en vint à la révocation. C’est d’abord l’influence du clergé, jaloux de ses droits
2500 comment on en vint à la révocation. C’est d’abord l’ influence du clergé, jaloux de ses droits considérables encore ; puis
2501 de ses droits considérables encore ; puis ce sont les conseillers intimes du roi, un jésuite, le père Lachaise, un archevêq
2502 sont les conseillers intimes du roi, un jésuite, le père Lachaise, un archevêque libertin, Harlay de Champvallon, et surt
2503 n leurs intérêts immédiats à leur désir de gagner le ciel, persuadent Louis XIV que la révocation serait une œuvre digne d
2504 désir de gagner le ciel, persuadent Louis XIV que la révocation serait une œuvre digne du Roi-Soleil et capable de lui fai
2505 e du Roi-Soleil et capable de lui faire pardonner les erreurs de sa jeunesse. Le roi, « un niais en matière religieuse » au
2506 e lui faire pardonner les erreurs de sa jeunesse. Le roi, « un niais en matière religieuse » au dire de sa belle-sœur, la
2507 en matière religieuse » au dire de sa belle-sœur, la princesse palatine, se laisse facilement convaincre. D’ailleurs, les
2508 ine, se laisse facilement convaincre. D’ailleurs, les jésuites ont déjà réussi à « tourner » l’édit par mille arguties juri
2509 leurs, les jésuites ont déjà réussi à « tourner » l’ édit par mille arguties juridiques. Et les statistiques faussées peuve
2510 ourner » l’édit par mille arguties juridiques. Et les statistiques faussées peuvent faire croire à une très forte diminutio
2511 s. Aussi ne s’effraye-t-on pas trop, au début, de l’ émigration des fidèles qui suivent leurs pasteurs proscrits. On espère
2512 rtir de gré ou de force tous ceux qui resteront «  Les enfants seront du moins catholiques, si les pères sont hypocrites »,
2513 ont « Les enfants seront du moins catholiques, si les pères sont hypocrites », écrit Madame de Maintenon. Mais bientôt l’on
2514 crites », écrit Madame de Maintenon. Mais bientôt l’ on voit la France se dépeupler ; des industries sont presque anéanties
2515 écrit Madame de Maintenon. Mais bientôt l’on voit la France se dépeupler ; des industries sont presque anéanties ; les con
2516 peupler ; des industries sont presque anéanties ; les conséquences funestes de l’acte de révocation commencent à se révéler
2517 presque anéanties ; les conséquences funestes de l’ acte de révocation commencent à se révéler politiques (guerre de la co
2518 ion commencent à se révéler politiques (guerre de la confession d’Augsbourg) et surtout morales : car malgré des félicitat
2519 es félicitations arrachées par Louis XIV au pape, les catholiques sont loin d’être unanimes à louer la révocation. L’un d’e
2520 les catholiques sont loin d’être unanimes à louer la révocation. L’un d’eux s’indigne, dans une lettre à Louvois, de ce qu
2521 s’indigne, dans une lettre à Louvois, de ce que «  les dragons ont été les meilleurs prédicateurs de notre Évangile ». Et le
2522 lettre à Louvois, de ce que « les dragons ont été les meilleurs prédicateurs de notre Évangile ». Et les persécutions contr
2523 es meilleurs prédicateurs de notre Évangile ». Et les persécutions contre ceux qui n’ont commis d’autre crime que de « dépl
2524  déplaire au roi » vont reprendre de plus belle : la guerre civile succède aux dragonnades. M. Esmonin s’abstient d’en fai
2525 ent d’en faire un tableau qu’il suppose présent à l’ esprit de ses auditeurs. Il termine en citant le jugement d’Albert Sor
2526 à l’esprit de ses auditeurs. Il termine en citant le jugement d’Albert Sorel, selon qui la date du 16 octobre 1685 marque
2527 e en citant le jugement d’Albert Sorel, selon qui la date du 16 octobre 1685 marque une déviation dans l’histoire de la Fr
2528 date du 16 octobre 1685 marque une déviation dans l’ histoire de la France. Déviation telle, en effet, que nous en sentons
2529 obre 1685 marque une déviation dans l’histoire de la France. Déviation telle, en effet, que nous en sentons les conséquenc
2530 e. Déviation telle, en effet, que nous en sentons les conséquences de nos jours encore, ajoute M. Esmonin. Et nous ne pouvo
2531 ouvons que nous réjouir de retrouver bientôt dans l’ ouvrage qu’il va consacrer à Louis XIV l’exposé si dénué de parti pris
2532 tôt dans l’ouvrage qu’il va consacrer à Louis XIV l’ exposé si dénué de parti pris, si libre et d’une si élégante science d
2533 ofesseur de Grenoble. j. Rougemont Denis de, «  La révocation de l’édit de Nantes », Feuille d’avis de Neuchâtel, Neuchâ
2534 ble. j. Rougemont Denis de, « La révocation de l’ édit de Nantes », Feuille d’avis de Neuchâtel, Neuchâtel, 16 février 1
49 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Edmond Jaloux, Ô toi que j’eusse aimée… (mars 1927)
2535 se aimée… (mars 1927)af M. Edmond Jaloux offre l’ exemple rare d’un homme que son évolution naturelle a rapproché, dans
2536 sa maturité, des jeunes générations, en sorte que l’ espèce de romantisme à la Nerval auquel il aboutit coïncide avec un mo
2537 énérations, en sorte que l’espèce de romantisme à la Nerval auquel il aboutit coïncide avec un mouvement dont lui-même s’e
2538 ec un mouvement dont lui-même s’est plu à relever les indices chez ses jeunes contemporains, et qu’il vient appuyer de son
2539 éjà riche de romancier. Son regard se promène sur le même monde où se plaisent nos jeunes poètes cosmopolites, mais il gar
2540 Giraudoux, j’y vois un signe charmant d’amitié de l’ aîné au plus jeune, lequel envoie l’un de ses personnages pour remerci
2541 ’un René Dubardeau pour cette ambassade). Parfois l’ on se demande si l’Auber de Jean Cassou ne va pas s’attabler au café e
2542 pour cette ambassade). Parfois l’on se demande si l’ Auber de Jean Cassou ne va pas s’attabler au café en face des personna
2543 face des personnages de Jaloux. Et peut-être que la comtesse Rezzovitch a rencontré M. Paul Morand, mais elle a dû le tro
2544 ovitch a rencontré M. Paul Morand, mais elle a dû le trouver un peu froid, n’aura pas été tentée de lui faire ces confiden
2545 confiant et secrètement incertain de ce roman. À la veille de se marier, Jérôme Parseval, journaliste parisien, rencontre
2546 carne aussitôt à ses yeux tout ce qu’il attend de l’ amour. Une confidence, un baiser, et il ne la reverra jamais. Il aime
2547 d de l’amour. Une confidence, un baiser, et il ne la reverra jamais. Il aime encore sa femme, « mais comme on aime une pet
2548 d on a failli hériter de Chenonceaux ». Peu à peu l’ image d’Irène Rezzovitch s’idéalise et gagne la puissance d’une mervei
2549 eu l’image d’Irène Rezzovitch s’idéalise et gagne la puissance d’une merveilleuse obsession. Il lui écrit de longues lettr
2550 obsession. Il lui écrit de longues lettres, sans les envoyer. Il apprend sa mort, et qu’elle l’aurait peut-être aimé. Enfi
2551 sans les envoyer. Il apprend sa mort, et qu’elle l’ aurait peut-être aimé. Enfin, divorcé, seul, il la revoit dans une vis
2552 l’aurait peut-être aimé. Enfin, divorcé, seul, il la revoit dans une vision prestigieuse et désolée… M. Jaloux a trouvé là
2553 nt aujourd’hui un réalisme discret mais précis et le sens de ce qu’il y a en nous d’essentiel, de ce qui détermine nos act
2554 ssentiel, de ce qui détermine nos actes avant que la raison n’intervienne, mouvements de nos passions à nous-mêmes inavoué
2555 système de valeurs lyriques et sentimentales que la raison ignore ou tyrannise aveuglément, car « nous avons dressé notre
2556 manque guère à ce devoir sacré ». M. Jaloux évite le péril d’un réalisme trop amer et celui du roman lyrique, par l’équili
2557 réalisme trop amer et celui du roman lyrique, par l’ équilibre qu’il maintient entre ces deux inconscients : l’époque et l’
2558 bre qu’il maintient entre ces deux inconscients : l’ époque et l’être secret du héros. Il sait mieux que quiconque aujourd’
2559 intient entre ces deux inconscients : l’époque et l’ être secret du héros. Il sait mieux que quiconque aujourd’hui faire éc
2560 rsonne, pas même eux ». Dans ce roman, comme dans l’ Âge d’or, un désenchantement profond prend le masque d’une aimable mél
2561 dans l’Âge d’or, un désenchantement profond prend le masque d’une aimable mélancolie. C’est la sourde tristesse des choses
2562 d prend le masque d’une aimable mélancolie. C’est la sourde tristesse des choses qui vous échappent, des amours impossible
2563 rs impossibles, des histoires dont on ne sait pas la fin ni le sens véritable, mais seulement qu’elles ont fait souffrir.
2564 bles, des histoires dont on ne sait pas la fin ni le sens véritable, mais seulement qu’elles ont fait souffrir. Rendez-vou
2565 compris, et peut-être, un quiproquo de destinées… Le tragique du peut-être ; (comme dans l’une des dernières phrases de Sy
2566 ’une des dernières phrases de Sylvie : « Là était le bonheur, peut-être… »). Mais le ton reste si léger, spirituel, fantai
2567 lvie : « Là était le bonheur, peut-être… »). Mais le ton reste si léger, spirituel, fantaisiste (cette touche pour peindre
2568 eindre un personnage épisodique : « Il confondait la rose et la pivoine, l’orange et l’ananas… »). Une telle œuvre, dense,
2569 ersonnage épisodique : « Il confondait la rose et la pivoine, l’orange et l’ananas… »). Une telle œuvre, dense, sans obscu
2570 isodique : « Il confondait la rose et la pivoine, l’ orange et l’ananas… »). Une telle œuvre, dense, sans obscurité, riche
2571  Il confondait la rose et la pivoine, l’orange et l’ ananas… »). Une telle œuvre, dense, sans obscurité, riche et décantée,
50 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Entr’acte de René Clair, ou L’éloge du Miracle (mars 1927)
2572 Entr’acte de René Clair, ou L’ éloge du Miracle (mars 1927)n Surprendre est peu de chose, il faut
2573 se, il faut transplanter. Max Jacob. Ce soir-là, le programme comprenait : un film d’avant-guerre ; un film japonais ; En
2574 d’avant-guerre ; un film japonais ; Entr’acte et le Voyage imaginaire, de René Clair. La Mort de Phèdre (environ 1905) :
2575 ntr’acte et le Voyage imaginaire, de René Clair. La Mort de Phèdre (environ 1905) : quelques acteurs d’une troupe de prov
2576 ent dans un décor très pauvre, légèrement coloré. Le principe est simple : « Je vous aime » se traduit par trois ou quatre
2577 aime » se traduit par trois ou quatre claques sur la poitrine ; et une crise intérieure par un court accès de danse de Sai
2578 ourt accès de danse de Saint-Guy. Art classique : la mort d’Hyppolite se passe en coulisse. Mais Phèdre avoue tout « devan
2579 asse en coulisse. Mais Phèdre avoue tout « devant le cadavre encore tout chaud ». Affreux. Aussi : « Elle mourut. » On voi
2580 ourut. » On voit que cette bande est antérieure à l’ époque du long baiser de conclusion. Le film japonais : une historiett
2581 térieure à l’époque du long baiser de conclusion. Le film japonais : une historiette un peu plus banale que nature, très b
2582 banale que nature, très bien photographiée. C’est le film du type « Jeux de soleil dans les jardins, complets variés, ça f
2583 hiée. C’est le film du type « Jeux de soleil dans les jardins, complets variés, ça fait toujours plaisir de voir des gens b
2584 Soudain éclate Entr’acte (1925). « Une étude sur le Monde des Rêves ». Rondes de cheminées dans le ciel où des pressentim
2585 ur le Monde des Rêves ». Rondes de cheminées dans le ciel où des pressentiments clignent de l’œil. Des poupées en baudruch
2586 es dans le ciel où des pressentiments clignent de l’ œil. Des poupées en baudruche gonflent leur tête jusqu’à éclater, tand
2587 ne colonnade, puis un jeu d’échec serré, mais sur la corniche d’un gratte-ciel, d’où se met à descendre un petit bateau de
2588 bateau de papier, sur fond de boulevards et parmi les toits flottants, c’est assez tragique. Mitrailleuse de phares d’auto,
2589 st assez tragique. Mitrailleuse de phares d’auto, les 100 000 yeux de la nuit. Des imprécisions rapides. Un chasseur, toujo
2590 itrailleuse de phares d’auto, les 100 000 yeux de la nuit. Des imprécisions rapides. Un chasseur, toujours sur son toit ;
2591 Un chasseur, toujours sur son toit ; il tire sur l’ œuf d’où naît une colombe. Chasse. Mais un papillon éclatant qui batta
2592 Chasse. Mais un papillon éclatant qui battait de l’ aile un dixième de seconde, par intermittences, se pose enfin sur l’éc
2593 de seconde, par intermittences, se pose enfin sur l’ écran : une danseuse sur une plaque de verre, vue par-dessous. Quelque
2594 s qui suivent sont embrumés dans mon souvenir par le rayonnement de la robe, fleur qui s’ouvre pour dégager le mouvement o
2595 embrumés dans mon souvenir par le rayonnement de la robe, fleur qui s’ouvre pour dégager le mouvement obsédant de deux ja
2596 nement de la robe, fleur qui s’ouvre pour dégager le mouvement obsédant de deux jambes, l’harmonie de leurs arabesques à t
2597 our dégager le mouvement obsédant de deux jambes, l’ harmonie de leurs arabesques à trois dimensions mêlées avec une lenteu
2598 une perfection dont une brève vue verticale donne la clé… Un enterrement bourgeois, mais le corbillard est traîné par un d
2599 cale donne la clé… Un enterrement bourgeois, mais le corbillard est traîné par un dromadaire, d’ailleurs dételé. Les amis
2600 est traîné par un dromadaire, d’ailleurs dételé. Les amis affligés mangent les couronnes et suivent à grands sauts lents,
2601 ire, d’ailleurs dételé. Les amis affligés mangent les couronnes et suivent à grands sauts lents, solennels. Ils revoient la
2602 ent à grands sauts lents, solennels. Ils revoient la danseuse, font une ronde autour d’une tour Eiffel de bois de la taill
2603 ont une ronde autour d’une tour Eiffel de bois de la taille de l’Obélisque de la Concorde, puis enfilent les Champs-Élysée
2604 autour d’une tour Eiffel de bois de la taille de l’ Obélisque de la Concorde, puis enfilent les Champs-Élysées à une allur
2605 our Eiffel de bois de la taille de l’Obélisque de la Concorde, puis enfilent les Champs-Élysées à une allure grandissante,
2606 ille de l’Obélisque de la Concorde, puis enfilent les Champs-Élysées à une allure grandissante, bientôt vertigineuse, pours
2607 e grandissante, bientôt vertigineuse, poursuivant le corbillard. Aspects du paysage urbain vu par les poursuivants, arbres
2608 t le corbillard. Aspects du paysage urbain vu par les poursuivants, arbres au ciel renversé, maisons obliques, montagnes ru
2609 . (J’ai regretté que René Clair ne nous donne pas la vision du mort.) Enfin le cercueil roule dans les marguerites, il en
2610 Clair ne nous donne pas la vision du mort.) Enfin le cercueil roule dans les marguerites, il en sort un chef d’orchestre d
2611 la vision du mort.) Enfin le cercueil roule dans les marguerites, il en sort un chef d’orchestre dont la baguette éteint t
2612 marguerites, il en sort un chef d’orchestre dont la baguette éteint tous les personnages et lui-même. ⁂ Le tout ne dure p
2613 un chef d’orchestre dont la baguette éteint tous les personnages et lui-même. ⁂ Le tout ne dure pas 20 minutes. Et c’est h
2614 guette éteint tous les personnages et lui-même. ⁂ Le tout ne dure pas 20 minutes. Et c’est heureux. Nous manquons d’entraî
2615 c’est heureux. Nous manquons d’entraînement dans le domaine du merveilleux moderne. Un peu plus et nous demandions grâce
2616 e de trop de plaisir. Mais je ne suis pas sûr que le plaisir du public fût de même essence que le nôtre. Les gens rient à
2617 aisir du public fût de même essence que le nôtre. Les gens rient à l’enterrement au ralenti, à l’éclatement des têtes de po
2618 ût de même essence que le nôtre. Les gens rient à l’ enterrement au ralenti, à l’éclatement des têtes de poupées, à la conc
2619 tre. Les gens rient à l’enterrement au ralenti, à l’ éclatement des têtes de poupées, à la conclusion. Ce n’est pas le bon
2620 u ralenti, à l’éclatement des têtes de poupées, à la conclusion. Ce n’est pas le bon rire de cinéma. Quand la danseuse par
2621 s têtes de poupées, à la conclusion. Ce n’est pas le bon rire de cinéma. Quand la danseuse paraît, ils n’attendent que le
2622 lusion. Ce n’est pas le bon rire de cinéma. Quand la danseuse paraît, ils n’attendent que le moment où ils pourront se pou
2623 ma. Quand la danseuse paraît, ils n’attendent que le moment où ils pourront se pousser en disant : « C’que c’est cochon ! 
2624 pousser en disant : « C’que c’est cochon ! » Mais le moment ne vient pas, ils sont déçus. Enfin, mon voisin, un agent, mur
2625 emple, où nous ne pouvons nous empêcher d’admirer l’ utilisation artistique ingénieuse et précise de certaines théories sur
2626 e ingénieuse et précise de certaines théories sur le rêve, le peuple, qui n’a pas vu ces dessous mais accueille le résulta
2627 use et précise de certaines théories sur le rêve, le peuple, qui n’a pas vu ces dessous mais accueille le résultat avec la
2628 peuple, qui n’a pas vu ces dessous mais accueille le résultat avec la naïveté qu’il faut, approuve et dit : « C’est bien ç
2629 as vu ces dessous mais accueille le résultat avec la naïveté qu’il faut, approuve et dit : « C’est bien ça, c’est comme qu
2630 uand on rêve. » Un des défauts d’Entr’acte, c’est la fantaisie recherchée de certaines scènes (l’enterrement). Cela fait b
2631 ’est la fantaisie recherchée de certaines scènes ( l’ enterrement). Cela fait bizarre. Or, dans le monde où le cinéma doit n
2632 ènes (l’enterrement). Cela fait bizarre. Or, dans le monde où le cinéma doit nous « transplanter », un certain naturel est
2633 rrement). Cela fait bizarre. Or, dans le monde où le cinéma doit nous « transplanter », un certain naturel est de rigueur 
2634 nsi qualifié : c’est peut-être le premier film où l’ on a fait du ciné avec des moyens proprement cinégraphiques. Ici le ge
2635 né avec des moyens proprement cinégraphiques. Ici le geste pictural remplace le geste de l’acteur. Un mouvement ne soulign
2636 nt cinégraphiques. Ici le geste pictural remplace le geste de l’acteur. Un mouvement ne souligne pas, il exprime, et se su
2637 iques. Ici le geste pictural remplace le geste de l’ acteur. Un mouvement ne souligne pas, il exprime, et se suffit. Mais c
2638 ne pas, il exprime, et se suffit. Mais comme pour le film 1905, on a sans cesse envie de crier : « Trop de gestes ! » C’es
2639 C’est une question d’épuration des moyens. Rendre le plus par le moins, c’est le fait d’un art à sa maturité. Mais ce sont
2640 estion d’épuration des moyens. Rendre le plus par le moins, c’est le fait d’un art à sa maturité. Mais ce sont là critique
2641 on des moyens. Rendre le plus par le moins, c’est le fait d’un art à sa maturité. Mais ce sont là critiques de style. D’or
2642 es de style. D’ores et déjà, il faut admirer dans les films de René Clair un sens du miracle assez bouleversant. Et je ne p
2643 ne parle pas du miracle genre conte de fée, comme le Voyage imaginaire en montre (beaucoup trop à mon gré). Qu’une sorcièr
2644 chien, cela n’a rien d’étonnant au cinéma. C’est la photographie d’une chose qui ne serait étonnante que dans le réel ; c
2645 phie d’une chose qui ne serait étonnante que dans le réel ; ce n’est pas encore un miracle de ciné. Et les fées paraissent
2646 réel ; ce n’est pas encore un miracle de ciné. Et les fées paraissent vieux jeu avec leur baguette, pour moi qui chaque soi
2647 soir crée ma chambre en tournant un commutateur. Le vrai miracle du cinéma, c’est, par exemple, l’éclosion d’une rose, un
2648 r. Le vrai miracle du cinéma, c’est, par exemple, l’ éclosion d’une rose, un homme qui court au ralenti, certaines coïncide
2649 ’est une réalité quotidienne dans une lumière qui la métamorphose ; c’est un temps nouveau, et l’espace en relation se mod
2650 une lumière qui la métamorphose ; c’est un temps nouveau , et l’espace en relation se modifie pour maintenir je ne sais quelle
2651 qui la métamorphose ; c’est un temps nouveau, et l’ espace en relation se modifie pour maintenir je ne sais quelle harmoni
2652 elle dont nous avons convenu et que nous pensions la seule possible. Le monde « normal » nous apparaît alors comme l’une s
2653 s convenu et que nous pensions la seule possible. Le monde « normal » nous apparaît alors comme l’une seulement des mille
2654 nécessités sociales — nous empêchent de découvrir la richesse immédiate. Surréel qui n’est pas synonyme d’incompréhensible
2655 on Madame, car alors quoi de plus surréaliste que le film 1905. Ce n’est peut-être qu’une question d’imagination ; il rest
2656 gineuses, et nous en sommes encore à nous frotter les yeux… Peut-être, quand nos regards plus assurés sauront enfin gagner
2657 ards plus assurés sauront enfin gagner de vitesse les prodiges que déclenche René Clair, verrons-nous, pris par surprise da
2658 René Clair, verrons-nous, pris par surprise dans l’ exploration ivre d’un projecteur, des signes fatidiques, le visage d’u
2659 tion ivre d’un projecteur, des signes fatidiques, le visage d’un ange. n. Rougemont Denis de, «  Entr’acte de René Clai
2660 ougemont Denis de, «  Entr’acte de René Clair, ou L’ éloge du Miracle », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève
51 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Daniel-Rops, Notre inquiétude (avril 1927)
2661 927)ag Il faut souhaiter que ce témoignage sur les générations nouvelles et leurs maîtres soit lu par tous ceux qui cher
2662 t souhaiter que ce témoignage sur les générations nouvelles et leurs maîtres soit lu par tous ceux qui cherchent à s’orienter dan
2663 lu par tous ceux qui cherchent à s’orienter dans la crise moderne. M. Daniel-Rops unit en lui à l’état de velléités contr
2664 ns la crise moderne. M. Daniel-Rops unit en lui à l’ état de velléités contradictoires que son intelligence très nuancée ma
2665 ncée maintient en une sorte d’instable équilibre, les tendances que ses contemporains ont poussées à l’extrême avec moins d
2666 es tendances que ses contemporains ont poussées à l’ extrême avec moins de prudence mais aussi de lucidité. Séduit par Gide
2667 lucidité. Séduit par Gide ; admirant Maurras sans l’ aimer ; saluant en Valéry une réussite unique mais presque inhumaine ;
2668 e mais presque inhumaine ; secrètement attiré par les thèses extrémistes mais non dépourvues d’une sombre grandeur, des sur
2669 et en même temps par cette solution universelle, la foi, il résume en lui cette inquiétude qui fait la grandeur et la mis
2670 a foi, il résume en lui cette inquiétude qui fait la grandeur et la misère de l’époque — et qu’il avoue préférer à une cer
2671 e en lui cette inquiétude qui fait la grandeur et la misère de l’époque — et qu’il avoue préférer à une certitude trop vit
2672 e inquiétude qui fait la grandeur et la misère de l’ époque — et qu’il avoue préférer à une certitude trop vite atteinte, o
2673 jeunesse ne verrait qu’une abdication. Il décrit la « génération nouvelle » avec une intelligente sympathie et un sens ra
2674 amlétisme », pouvoir aigu d’analyse qui conduit à la dispersion autant qu’à l’approfondissement du moi, soif de tout et po
2675 d’analyse qui conduit à la dispersion autant qu’à l’ approfondissement du moi, soif de tout et pourtant mépris de tout, pro
2676 t pourtant mépris de tout, procédant d’un goût de l’ absolu à la fois mystique et anarchique : ce sont bien les grands trai
2677 u à la fois mystique et anarchique : ce sont bien les grands traits de notre inquiétude. (Mais peut-être M. Rops a-t-il tro
2678 tude. (Mais peut-être M. Rops a-t-il trop négligé le rôle extérieur, que je crois décisif, des conditions de la vie modern
2679 xtérieur, que je crois décisif, des conditions de la vie moderne.) Après avoir défini quelques « positions en face de l’in
2680 près avoir défini quelques « positions en face de l’ inquiétude », M. Rops considère les deux solutions les plus parfaites
2681 ions en face de l’inquiétude », M. Rops considère les deux solutions les plus parfaites qui s’offrent aux jeunes gens d’auj
2682 nquiétude », M. Rops considère les deux solutions les plus parfaites qui s’offrent aux jeunes gens d’aujourd’hui. Il consta
2683 qu’en y substituant ce qui ne vient que de Dieu : la Foi ». Acculée à la rigueur d’un choix presque impossible, notre ince
2684 ce qui ne vient que de Dieu : la Foi ». Acculée à la rigueur d’un choix presque impossible, notre incertitude paraît sans
2685 de. Mais, ici, M. Daniel-Rops n’a-t-il pas cédé à la tentation de créer des dilemmes irréductibles, suprême et inconscient
2686 uprême et inconsciente ruse d’un inquiet qui veut le rester ? Ces deux solutions peuvent se résumer en deux mots : inquiét
2687 : inquiétude ou foi. Dès lors sont-elles vraiment les deux termes d’un dilemme, l’une n’étant que le chemin qui mène à l’au
2688 t les deux termes d’un dilemme, l’une n’étant que le chemin qui mène à l’autre ? Car la foi naît de l’inquiétude autant qu
2689 ne n’étant que le chemin qui mène à l’autre ? Car la foi naît de l’inquiétude autant que de la grâce, et régénère sans ces
2690 le chemin qui mène à l’autre ? Car la foi naît de l’ inquiétude autant que de la grâce, et régénère sans cesse l’inquiétude
2691 e ? Car la foi naît de l’inquiétude autant que de la grâce, et régénère sans cesse l’inquiétude autant que la sérénité… Au
2692 de autant que de la grâce, et régénère sans cesse l’ inquiétude autant que la sérénité… Au reste, n’est-elle pas de M. Rops
2693 e, et régénère sans cesse l’inquiétude autant que la sérénité… Au reste, n’est-elle pas de M. Rops lui-même, cette phrase
2694 lui-même, cette phrase qui formule admirablement les exigences conjointes de l’inquiétude et de la foi : « Si tu as trouvé
2695 formule admirablement les exigences conjointes de l’ inquiétude et de la foi : « Si tu as trouvé Dieu, il te reste à le che
2696 nt les exigences conjointes de l’inquiétude et de la foi : « Si tu as trouvé Dieu, il te reste à le chercher encore… » a
2697 de la foi : « Si tu as trouvé Dieu, il te reste à le chercher encore… » ag. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Daniel
52 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Louis Aragon, le beau prétexte (avril 1927)
2698 Louis Aragon, le beau prétexte (avril 1927)o Ah ! je sens qu’une puissance étrangè
2699 ce étrangère s’est emparée de mon être et a saisi les cordes les plus secrètes de mon âme, qu’elle peut faire désormais vib
2700 e s’est emparée de mon être et a saisi les cordes les plus secrètes de mon âme, qu’elle peut faire désormais vibrer à sa fa
2701 en décembre 1925, au sortir d’une conférence sur le Salut de l’humanité.)   Ce soir en moi trépigne une rage. Sur quelles
2702 1925, au sortir d’une conférence sur le Salut de l’ humanité.)   Ce soir en moi trépigne une rage. Sur quelles épaules jet
2703 es jeter ce manteau de flammes, puis à qui dédier l’ ennui de ma révolte ? Aragon sarcastique se tient là-bas dans un rayon
2704 — auxquels je crois encore, et pas seulement pour le pittoresque. — Attrape !   Il n’existe pas de théorie du salut. Il n’
2705 ’existe que des systèmes pour faire taire en nous l’ appel vertigineux du Silence. On nous montre des Dieux, mais c’est pou
2706 ourner nos regards de cela qu’il faut bien nommer le Vide. Tant de séductions nous ont en vain tentés, ô tortures fascinan
2707 ous ont en vain tentés, ô tortures fascinantes de la sainteté, seules vous nous appelez encore hors de cette voix de l’inf
2708 es vous nous appelez encore hors de cette voix de l’ infini où chancellent parmi les éclairs nos premiers pas. Aragon, dans
2709 rs de cette voix de l’infini où chancellent parmi les éclairs nos premiers pas. Aragon, dans ces tempêtes de nuits filantes
2710 ilantes où s’enfuient, souffles à peine parfumés, les vices enlacés aux vertus, c’est un ricanement splendide comme un écla
2711 de comme un éclat de rire de condamné à mort et à l’ éternité. Le diable avait pris des avocats dont les plaidoyers, tissus
2712 éclat de rire de condamné à mort et à l’éternité. Le diable avait pris des avocats dont les plaidoyers, tissus des mensong
2713 l’éternité. Le diable avait pris des avocats dont les plaidoyers, tissus des mensonges les plus beaux et des plus mélodieus
2714 avocats dont les plaidoyers, tissus des mensonges les plus beaux et des plus mélodieuses palinodies, font encore rêver les
2715 es plus mélodieuses palinodies, font encore rêver les anges écœurés d’azur. Alors un juron mélodramatique, d’une voix tortu
2716 ble un anathème sanglant. Louis Aragon, avocat de l’ infini, annonce l’entrée de l’éternelle anarchiste, la Poésie.   On di
2717 nglant. Louis Aragon, avocat de l’infini, annonce l’ entrée de l’éternelle anarchiste, la Poésie.   On dit : « Des mots ! »
2718 s Aragon, avocat de l’infini, annonce l’entrée de l’ éternelle anarchiste, la Poésie.   On dit : « Des mots ! » au lieu de
2719 fini, annonce l’entrée de l’éternelle anarchiste, la Poésie.   On dit : « Des mots ! » au lieu de « Je ne comprends pas ».
2720 rends pas ». On dit : « Je ne comprends pas », et l’ on pense : « C’est donc incompréhensible ». On dit : « C’est incompréh
2721 ble ». On dit : « C’est incompréhensible ! » — et l’ on est enfin rassuré. C’est incompréhensible !, trois mots dont l’un
2722 vos glandes salivaires, pourtant si éprouvées par le repas dont vous sortez, que ces trois mots où se résume la défense de
2723 dont vous sortez, que ces trois mots où se résume la défense de la loi sociale, patriotique, religieuse (?) et ci-devant m
2724 ez, que ces trois mots où se résume la défense de la loi sociale, patriotique, religieuse (?) et ci-devant morale qui prot
2725 rallumez votre cigare. Vous vous êtes assuré que la porte ferme bien sur l’infini. Rien à craindre de ce côté. Retournez
2726 Vous vous êtes assuré que la porte ferme bien sur l’ infini. Rien à craindre de ce côté. Retournez à vos amours. ..........
2727 ........ Solitude, antichambre du ciel. À travers l’ amour ou la poésie — et d’autres, à travers les déserts de la sainteté
2728 litude, antichambre du ciel. À travers l’amour ou la poésie — et d’autres, à travers les déserts de la sainteté que hanten
2729 ers l’amour ou la poésie — et d’autres, à travers les déserts de la sainteté que hantent les fantômes adorables du désir, —
2730 la poésie — et d’autres, à travers les déserts de la sainteté que hantent les fantômes adorables du désir, — quelques homm
2731 à travers les déserts de la sainteté que hantent les fantômes adorables du désir, — quelques hommes y pénètrent, et le goû
2732 ables du désir, — quelques hommes y pénètrent, et le goût de s’amuser ne renaîtra plus en eux. Ni même celui de souffrir.
2733 elui de souffrir. Le dernier rire d’Aragon, c’est l’ éclat de sa joie brusque d’être seul sur un faux sommet vers quoi des
2734 s’efforcent — mais déjà c’est de plus loin qu’il les nargue. Il connaît enfin une solitude défendue de tous côtés par ses
2735 quelques « goujateries » affectées par mépris de l’ honneur, le mot de Cambronne prodigué et des phrases d’un fascinant éc
2736  goujateries » affectées par mépris de l’honneur, le mot de Cambronne prodigué et des phrases d’un fascinant éclat : « Ô g
2737 quitte plus, attiré par les premiers sophismes de l’ aurore, ces corniches de craie où t’accoudant tu mêles tes traits purs
2738 t’accoudant tu mêles tes traits purs et labiles à l’ immobilité miraculeuse des statues7. » Il s’agit bien de critique litt
2739 ci en présence d’une des tentatives de libération les plus violentes et belles — malgré tant de maladresses dédaigneuses, d
2740 ravades et de faciles tricheries8 — qu’ait connue l’ esprit humain. Sens de l’Absolu, sens de la pureté ou fanatisme de l’e
2741 cheries8 — qu’ait connue l’esprit humain. Sens de l’ Absolu, sens de la pureté ou fanatisme de l’esprit. Jusqu’au-boutisme
2742 connue l’esprit humain. Sens de l’Absolu, sens de la pureté ou fanatisme de l’esprit. Jusqu’au-boutisme désespéré. « Il s’
2743 ns de l’Absolu, sens de la pureté ou fanatisme de l’ esprit. Jusqu’au-boutisme désespéré. « Il s’agit de rendre impraticabl
2744 rtie » ou compromis :   « Nous étions dominés par le sens d’une réalité morale absolue que certains d’entre nous eussent a
2745 martyre… Nos jugements se rendaient sans cesse à l’ échelle de l’infini, et cet infini nous écrasait. Comment aurions-nous
2746 jugements se rendaient sans cesse à l’échelle de l’ infini, et cet infini nous écrasait. Comment aurions-nous accepté le s
2747 nfini nous écrasait. Comment aurions-nous accepté le sort communément heureux de nos contemporains qui ont puisé dans Augu
2748 omte cette tranquillité de rejeter définitivement les problèmes métaphysiques ? »   Nous naissons à quelque chose qui imite
2749 ues ? »   Nous naissons à quelque chose qui imite la vie dans une époque d’inconcevables compromissions où triomphe sous t
2750 nconcevables compromissions où triomphe sous tous les déguisements, de Ford à Clément Vautel, le matérialisme le plus pauvr
2751 tous les déguisements, de Ford à Clément Vautel, le matérialisme le plus pauvre auquel se soit jamais abaissée une civili
2752 ements, de Ford à Clément Vautel, le matérialisme le plus pauvre auquel se soit jamais abaissée une civilisation. Mais nou
2753 rniers atouts sur notre salut. Nous courons enfin l’ Aventure. « Le salut pour nous n’est nulle part9 ». Ultime affirmation
2754 sur notre salut. Nous courons enfin l’Aventure. «  Le salut pour nous n’est nulle part9 ». Ultime affirmation d’une foi que
2755 rien ne peut duper. Depuis certaines paroles sur la Croix, il n’y a peut-être pas eu d’expression plus haute de l’angoiss
2756 n’y a peut-être pas eu d’expression plus haute de l’ angoisse humaine, et vous aurez beau rire, pharisiens, et dire qu’elle
2757 et vous, dubitatives barbes. Je viens d’entendre la voix d’un mystique. Que si l’on vient nous empêtrer de dogmes basseme
2758 Je viens d’entendre la voix d’un mystique. Que si l’ on vient nous empêtrer de dogmes bassement ingénieux : « Si j’essaie u
2759 ngénieux : « Si j’essaie un instant de m’élever à la notion de Dieu, répond Aragon, je me révolte qu’elle puisse en aucun
2760 nts ! Jouant tout sur une révélation possible, ou la naissance d’un prophète qui rapprenne comment aimer un Dieu. Ce n’est
2761 eût un sens, il faudrait être sûr de n’avoir pas la tête en bas par rapport au soleil. Quelques gestes encore, intercepta
2762 t au soleil. Quelques gestes encore, interceptant les messages égarés de l’infini… Un tel homme, — est-ce encore Aragon, s
2763 estes encore, interceptant les messages égarés de l’ infini… Un tel homme, — est-ce encore Aragon, sinon qui ? — sa grande
2764 pages écrites il y a un an, tel soir de colère où le thermomètre eût indiqué 39° selon toute vraisemblance. Et voici Arago
2765 erait sans doute un peu ridicule. C’est ainsi que l’ on arrive à croire, pour un autre, que c’est arrivé, ajoutant foi, dan
2766 autre, que c’est arrivé, ajoutant foi, dans tous les sens qu’admet ce terme, à des exaltations que leur lyrisme rendait se
2767 ules contagieuses. Comment, en effet, ne pas voir la part de littérature que renferme cette œuvre, et qui fait, en dépit d
2768 fait, en dépit des prétentions désobligeantes de l’ auteur, son incontestable « séduction ». Pour un peu, je découvrais un
2769 un brin janséniste chez ce poète. Aujourd’hui, je le verrais plutôt comme un Musset10 plus véritablement désespéré. Un Mus
2770 ynisme verbeux 1830, une théorie du scandale pour le scandale qui a le mérite de n’être pas qu’un jeu littéraire. Mais enf
2771 0, une théorie du scandale pour le scandale qui a le mérite de n’être pas qu’un jeu littéraire. Mais enfin, c’est encore u
2772 ment vif, insolent et ombrageux. « J’appartiens à la grande race des torrents. » Une belle phrase, n’est-ce pas ? Je ne sa
2773 e pas ? Je ne sais qu’un Montherlant qui pourrait l’ oser dire comme Aragon sans ridicule. Et ce que je prenais pour le ton
2774 e Aragon sans ridicule. Et ce que je prenais pour le ton prophétique, ne serait-ce pas plutôt une sorte de donquichottisme
2775 une sorte de donquichottisme assez fréquent dans les cafés littéraires et dont il serait le premier à s’amuser ?   Février
2776 user ?   Février 1927. Relu Une vague de rêves et la préface de Libertinage. Sous une certaine rhétorique — mais la plus b
2777 Libertinage. Sous une certaine rhétorique — mais la plus belle, — ce qui tressaille et m’atteint au vif, c’est tout de mê
2778 en quoi je ne vais pas m’empêcher de reconnaître la voix secrète de notre mal de vivre. Désespoir métaphysique. Je me sou
2779 de Vinet — laissons s’esclaffer du rapprochement les auteurs de manuels de littérature — : « Un mysticisme creux et affamé
2780 ttérature — : « Un mysticisme creux et affamé est le contrecoup du christianisme dans les âmes profondes ou délicates qui
2781 et affamé est le contrecoup du christianisme dans les âmes profondes ou délicates qui ne sont pas devenues chrétiennes. » «
2782 licates qui ne sont pas devenues chrétiennes. » «  Le salut pour nous n’est nulle part. » Nulle part, pensais-je : le salut
2783 nous n’est nulle part. » Nulle part, pensais-je : le salut n’est pas là, ou là, à Rome, à Athènes, à Moscou, dans cette do
2784 droite, à gauche, — nulle part sur cette terre où l’ orgueil des hommes croit pouvoir nous le désigner, veut nous l’imposer
2785 terre où l’orgueil des hommes croit pouvoir nous le désigner, veut nous l’imposer pour quelles fins assez basses, nous le
2786 hommes croit pouvoir nous le désigner, veut nous l’ imposer pour quelles fins assez basses, nous le savons… Mais pour Arag
2787 us l’imposer pour quelles fins assez basses, nous le savons… Mais pour Aragon, ce n’est point façon de parler. Son « nulle
2788 e « globe d’attente » comme dit Crevel. Pourtant, le plus irrévocable désespoir n’est encore qu’un appel à la foi la plus
2789 irrévocable désespoir n’est encore qu’un appel à la foi la plus haute.   1er mai 1927. Mieux vaut pécher par ridicule qu
2790 cable désespoir n’est encore qu’un appel à la foi la plus haute.   1er mai 1927. Mieux vaut pécher par ridicule que par s
2791 e que par scepticisme ; par excès que par défaut. L’ enthousiasme trompe moins que le bon sens. Don Quichotte est tout de m
2792 s que par défaut. L’enthousiasme trompe moins que le bon sens. Don Quichotte est tout de même moins misérable que Clément
2793 lle n’a pas mérité du premier coup qu’on se donne la peine de l’écraser, — c’est qu’il symbolise tout cet état d’esprit « 
2794 mérité du premier coup qu’on se donne la peine de l’ écraser, — c’est qu’il symbolise tout cet état d’esprit « bien Parisie
2795 de récentes statistiques de librairie montrèrent les ravages bien plus étendus qu’on n’osait le craindre11. Si dans un ess
2796 èrent les ravages bien plus étendus qu’on n’osait le craindre11. Si dans un essai sur la sincérité j’ai soutenu qu’une int
2797 qu’on n’osait le craindre11. Si dans un essai sur la sincérité j’ai soutenu qu’une introspection immobile ne retient rien
2798 qu’une introspection immobile ne retient rien de la réalité vivante ; si je dénie à des incrédules le droit à parler des
2799 la réalité vivante ; si je dénie à des incrédules le droit à parler des choses de la foi comme étant d’un ordre qui leur é
2800 à des incrédules le droit à parler des choses de la foi comme étant d’un ordre qui leur échappe ; de même je récuse ici c
2801 it à parler des choses de la foi comme étant d’un ordre qui leur échappe ; de même je récuse ici certain sens critique dont o
2802 critique dont on voudrait que soient justiciables les œuvres d’un écrivain, les démarches de sa pensée, ses délires, ses vi
2803 que soient justiciables les œuvres d’un écrivain, les démarches de sa pensée, ses délires, ses visions. Un critique qui n’é
2804 élires, ses visions. Un critique qui n’épouse pas le rythme d’une œuvre, mais s’avance à sa rencontre armé de l’appareil à
2805 d’une œuvre, mais s’avance à sa rencontre armé de l’ appareil à frigorifier de sa raison, est destiné à dire des bêtises. C
2806 présenter… d’ailleurs une ancienne connaissance… le Sens Critique. Moi (gêné)… Rougemont. Le Sens Critique. — Il y a un
2807 sance… le Sens Critique. Moi (gêné)… Rougemont. Le Sens Critique. — Il y a un certain temps déjà que nous ne nous sommes
2808 t. Seulement, mon cher Monsieur, nous n’avons pas le temps ces jours-ci, beaucoup trop à faire, beaucoup trop d’êtres et d
2809 suppose. Comprenez-moi : submergés, absolument… Le Sens Critique. — Justement j’aurais en quelque manière la prétention…
2810 Critique. — Justement j’aurais en quelque manière la prétention… Moi. — Que voilà un singulier impertinent de votre part.
2811 ue voilà un singulier impertinent de votre part. ( Le reconduisant :) Croyez, Monsieur, à mon estime la plus vive. Mais déc
2812 Le reconduisant :) Croyez, Monsieur, à mon estime la plus vive. Mais décidément nous sommes débordés, voyez vous-même, pas
2813 ut rien faire sans vous. Mais n’oubliez pas que «  l’ artiste serait peu de chose s’il ne spéculait sur l’incertain », c’est
2814 artiste serait peu de chose s’il ne spéculait sur l’ incertain », c’est un académicien qui l’a dit. Voulez-vous me faire qu
2815 ulait sur l’incertain », c’est un académicien qui l’ a dit. Voulez-vous me faire quelque chose là-dessus pour la Revue ? Ma
2816 Voulez-vous me faire quelque chose là-dessus pour la Revue ? Mais plus tard, plus tard. Tenez, voici un traité de métaphys
2817 ndant. Très bien fait. Excellente méthode ! (Sort le Sens Critique, un peu bousculé.) Moi. — Vous disiez, ma vie ? La Mu
2818 un peu bousculé.) Moi. — Vous disiez, ma vie ? La Muse (mais oui, la Muse, sortant de derrière un rideau). — J’attends
2819 Moi. — Vous disiez, ma vie ? La Muse (mais oui, la Muse, sortant de derrière un rideau). — J’attends votre plaisir… I
2820 qui croient avoir tout dit quand ils ont montré à l’ origine de telle doctrine mystique une exaltation nerveuse ou des trou
2821 oubles organiques. Ils opposent à ces « délires » les thèses rassurantes de la « saine raison », sans se demander jamais si
2822 osent à ces « délires » les thèses rassurantes de la « saine raison », sans se demander jamais si cela ne condamne pas et
2823 ans se demander jamais si cela ne condamne pas et la santé et la raison. Il s’est trouvé des Maurras et autres « héritiers
2824 der jamais si cela ne condamne pas et la santé et la raison. Il s’est trouvé des Maurras et autres « héritiers de la grand
2825 s’est trouvé des Maurras et autres « héritiers de la grande tradition gréco-latine » pour assigner à Minerve le bassin de
2826 tradition gréco-latine » pour assigner à Minerve le bassin de la Méditerranée comme promenoir, avec défense sous peine de
2827 éco-latine » pour assigner à Minerve le bassin de la Méditerranée comme promenoir, avec défense sous peine de mort de s’en
2828 naire. Vous tracez des frontières géographiques à la raison ? Eh bien, c’est vous qui l’aurez voulu, mais tant pis, nous s
2829 ographiques à la raison ? Eh bien, c’est vous qui l’ aurez voulu, mais tant pis, nous serons du Nord. Nous serons romantiqu
2830 rdonnés, brumeux, absurdes, vivants, libres. Avec la poésie contre vos principes. Avec l’esprit contre votre raison. Et av
2831 libres. Avec la poésie contre vos principes. Avec l’ esprit contre votre raison. Et avec Aragon lorsqu’il vous crie : « À b
2832 son. Et avec Aragon lorsqu’il vous crie : « À bas le clair génie français. » Alors la voix de Rimbardp à la cantonade : Q
2833 s crie : « À bas le clair génie français. » Alors la voix de Rimbardp à la cantonade : Qu’il vienne, qu’il vienne Le temp
2834 air génie français. » Alors la voix de Rimbardp à la cantonade : Qu’il vienne, qu’il vienne Le temps dont on s’éprenne !
2835 ardp à la cantonade : Qu’il vienne, qu’il vienne Le temps dont on s’éprenne ! Les œuvres les plus significatives de ce
2836 enne, qu’il vienne Le temps dont on s’éprenne ! Les œuvres les plus significatives de ce siècle sont écrites en haine de
2837 vienne Le temps dont on s’éprenne ! Les œuvres les plus significatives de ce siècle sont écrites en haine de l’époque12.
2838 nificatives de ce siècle sont écrites en haine de l’ époque12. Le reproche d’obscurité que l’on fait à la littérature moder
2839 de ce siècle sont écrites en haine de l’époque12. Le reproche d’obscurité que l’on fait à la littérature moderne n’est qu’
2840 haine de l’époque12. Le reproche d’obscurité que l’ on fait à la littérature moderne n’est qu’une manifestation de ce divo
2841 époque12. Le reproche d’obscurité que l’on fait à la littérature moderne n’est qu’une manifestation de ce divorce radical
2842 qu’une manifestation de ce divorce radical entre l’ époque et les quelques centaines (?) d’individus pour qui l’esprit est
2843 festation de ce divorce radical entre l’époque et les quelques centaines (?) d’individus pour qui l’esprit est la seule réa
2844 t les quelques centaines (?) d’individus pour qui l’ esprit est la seule réalité. C’est pourquoi nous ne pourrons plus sépa
2845 s centaines (?) d’individus pour qui l’esprit est la seule réalité. C’est pourquoi nous ne pourrons plus séparer du concep
2846 rquoi nous ne pourrons plus séparer du concept de l’ esprit celui de Révolution. Et j’entends ce mot dans son sens le plus
2847 de Révolution. Et j’entends ce mot dans son sens le plus vaste. Il y a eu quatre-vingt-treize, la Réforme, Karl Marx, la
2848 ens le plus vaste. Il y a eu quatre-vingt-treize, la Réforme, Karl Marx, la préface de Cromwell. Mais il ne s’agit pas de
2849 a eu quatre-vingt-treize, la Réforme, Karl Marx, la préface de Cromwell. Mais il ne s’agit pas de refaire notre petite ré
2850 ltaire, etc., et tout ce qui leur correspond dans l’ ordre politique par exemple. Parce que c’est très beau, ridiculement,
2851 aire, etc., et tout ce qui leur correspond dans l’ ordre politique par exemple. Parce que c’est très beau, ridiculement, spiri
2852 ne dites pas aussi merde pour Marx ou Lénine, je le dirai pour vous. Quand on a entrepris la Révolution au nom de l’espri
2853 nine, je le dirai pour vous. Quand on a entrepris la Révolution au nom de l’esprit, on ne va pas s’acoquiner avec des gens
2854 ous. Quand on a entrepris la Révolution au nom de l’ esprit, on ne va pas s’acoquiner avec des gens qui ont fait, il y a 10
2855 ne pouvez vous libérer de cette manie française, la politique, et ne voyez-vous pas que c’est faire le jeu de vos ennemis
2856 a politique, et ne voyez-vous pas que c’est faire le jeu de vos ennemis de discuter avec eux dans leur langue et de crier
2857 avec eux dans leur langue et de crier rouge pour la simple raison qu’ils ont dit blanc ? Pensez-vous combattre cet esprit
2858 socie à tant d’objets de votre mépris, en prenant le contre-pied de tout ce qu’il inspire ? Alors que cette réaction même
2859 leurs… Mais non, il y aurait trop à dire, et puis l’ on croirait encore que je suis avec ceux qui traitent Aragon, Breton e
2860 arceurs, de chacals, de déments. Et puis surtout, l’ heure est venue de clore des discussions énervantes où s’épuise vainem
2861 vantes où s’épuise vainement une dialectique dont l’ objet fuit sans cesse par la quatrième dimension. Aragon et les surréa
2862 sans cesse par la quatrième dimension. Aragon et les surréalistes auront raison même encore s’ils ont tort, envers et cont
2863 me encore s’ils ont tort, envers et contre toutes les critiques qu’on pourrait leur adresser, parce que ces « maudits » ont
2864 rait leur adresser, parce que ces « maudits » ont la grâce, parce qu’ils sont la vie, même quand ils appellent la mort, pa
2865 e ces « maudits » ont la grâce, parce qu’ils sont la vie, même quand ils appellent la mort, parce qu’ils ont la passion et
2866 arce qu’ils sont la vie, même quand ils appellent la mort, parce qu’ils ont la passion et l’incommunicable secret de l’inv
2867 ême quand ils appellent la mort, parce qu’ils ont la passion et l’incommunicable secret de l’invention.   Il nous faut des
2868 appellent la mort, parce qu’ils ont la passion et l’ incommunicable secret de l’invention.   Il nous faut des entrepreneurs
2869 ’ils ont la passion et l’incommunicable secret de l’ invention.   Il nous faut des entrepreneurs de tempêtes. Un grand pri
2870 à nos mœurs. … et nous portant dans nos actions à la limite de nos forces, notre joie parmi vous fut une très grande joie.
2871 es, chapelets d’optimisme, tyranniques évidences, ordre et désordre, principes de Descartes, mathématiques aux pinces de crab
2872 ons acquises, sièges faits, autorités fondées sur la gloire et la sénilité, etc., etc. Et certes ce n’étaient pas des être
2873 sièges faits, autorités fondées sur la gloire et la sénilité, etc., etc. Et certes ce n’étaient pas des êtres, mais leurs
2874 ine morale ne venait-elle pas de ce qu’en son nom l’ on mesurait odieusement une sympathie humaine pour nous sans prix ? Ma
2875 lus grandes que nous. Nous nous connaissions dans les coins et nous mourions d’ennui avec les aspects irrévocablement prévu
2876 ions dans les coins et nous mourions d’ennui avec les aspects irrévocablement prévus de nous-mêmes que faisaient paraître l
2877 ement prévus de nous-mêmes que faisaient paraître les petits faits de nos longues journées. Nous aimions la révolution comm
2878 etits faits de nos longues journées. Nous aimions la révolution comme on aime l’amour. Nous n’aimions pas telle révolution
2879 ournées. Nous aimions la révolution comme on aime l’ amour. Nous n’aimions pas telle révolution — la russe, par exemple — p
2880 me l’amour. Nous n’aimions pas telle révolution — la russe, par exemple — parce que ce n’est pas encore assez révolution ;
2881 asseoir et que son siège était fait. Nous aimions la Révolution qui nous perdrait corps et biens dans sa grandeur comme un
2882 emme merveilleuse nous perdrait corps et âme dans l’ ivresse amoureuse ; nous cherchions cette Révolution de toutes nos for
2883 ns, comme on cherche cette femme à travers toutes les femmes. C’était un vice, la révolution-vice. Mais on ne vit, on ne me
2884 mme à travers toutes les femmes. C’était un vice, la révolution-vice. Mais on ne vit, on ne meurt que de vices. ⁂ Ici le
2885 Mais on ne vit, on ne meurt que de vices. ⁂ Ici le lecteur se rassure. « Il s’y retrouve. » Il pense que c’est bien jeun
2886 que c’est bien jeune. Et : encore un qui rue dans les brancards, c’est très bellettrien. Un disque de gramo comme par hasar
2887 us fait ça Plus ou moins, n’est-ce pas ? Et puis l’ aiguille divague vers des souvenirs, quand nous allions tous deux, ces
2888 ort des suites. Quand cesserez-vous de nous faire la jambe, pardon escuses, avec ce thème à condamnations par contumace. I
2889 ns par contumace. Il y a encore des gens pour qui les limites de l’anarchie sont : chanter l’Internationale dans les rues,
2890 e. Il y a encore des gens pour qui les limites de l’ anarchie sont : chanter l’Internationale dans les rues, faire la noce,
2891 pour qui les limites de l’anarchie sont : chanter l’ Internationale dans les rues, faire la noce, écrire un livre de tendan
2892 e l’anarchie sont : chanter l’Internationale dans les rues, faire la noce, écrire un livre de tendances très modernes. Et d
2893 t : chanter l’Internationale dans les rues, faire la noce, écrire un livre de tendances très modernes. Et des gens pour se
2894 i nous en voulons, et finalement nous écraser par l’ évidence définitive de notre absurdité. Car l’homme « s’est fait une v
2895 par l’évidence définitive de notre absurdité. Car l’ homme « s’est fait une vérité changeante et toujours évidente, de laqu
2896 est plus détruire, ce n’est plus combattre, c’est l’ épanouissement violent d’une immense fleur palpitante au parfum de pas
2897 es dangereux. Un orage de tendresse va crever sur le monde. Aigles d’amours, oiseaux doux et cruels, nous parlerons vos la
2898 ue des valeurs de passion. Balayez ces douanes de l’ esprit, proclamez le grand Libre-Échange, voici déjà s’avancer des pro
2899 ssion. Balayez ces douanes de l’esprit, proclamez le grand Libre-Échange, voici déjà s’avancer des prodiges à cette invite
2900 voici déjà s’avancer des prodiges à cette invite la plus persuasive : nous sommes prêts à les accueillir. 7. Une vague
2901 e invite la plus persuasive : nous sommes prêts à les accueillir. 7. Une vague de rêves (dans Commerce). 8. Et malgré c
2902 perficielles et hâtives, comme cette prétention à la libération par le Rêve. « La liberté commence où naît le merveilleux.
2903 tives, comme cette prétention à la libération par le Rêve. « La liberté commence où naît le merveilleux. » Au vrai, et sur
2904 e cette prétention à la libération par le Rêve. «  La liberté commence où naît le merveilleux. » Au vrai, et surtout pour u
2905 ration par le Rêve. « La liberté commence où naît le merveilleux. » Au vrai, et surtout pour un homme qui élit Freud « pré
2906 rtout pour un homme qui élit Freud « président de la République du Rêve » – c’est presque un non-sens de chercher l’absolu
2907 du Rêve » – c’est presque un non-sens de chercher l’ absolue liberté dans le rêve. Le rêve, c’est la tyrannie des souvenirs
2908 ue un non-sens de chercher l’absolue liberté dans le rêve. Le rêve, c’est la tyrannie des souvenirs ; et ce n’est pas se l
2909 -sens de chercher l’absolue liberté dans le rêve. Le rêve, c’est la tyrannie des souvenirs ; et ce n’est pas se libérer qu
2910 er l’absolue liberté dans le rêve. Le rêve, c’est la tyrannie des souvenirs ; et ce n’est pas se libérer que de brasser ce
2911 onores. 9. Lettre à Paul Claudel. 10. Musset de La coupe et les lèvres. Mais oui, c’est paradoxal. 11. Les livres les p
2912 Lettre à Paul Claudel. 10. Musset de La coupe et les lèvres. Mais oui, c’est paradoxal. 11. Les livres les plus répandus
2913 pe et les lèvres. Mais oui, c’est paradoxal. 11. Les livres les plus répandus à Genève sont Ma vie et mon œuvre de Ford et
2914 èvres. Mais oui, c’est paradoxal. 11. Les livres les plus répandus à Genève sont Ma vie et mon œuvre de Ford et Mon curé c
2915 sont Ma vie et mon œuvre de Ford et Mon curé chez les riches. Très loin derrière viennent des France et des Bordeaux. 12.
2916 lus étroit, quelques esthètes du machinisme. 13. Le Paysan de Paris. o. Rougemont Denis de, « Louis Aragon, le beau pré
2917 e Paris. o. Rougemont Denis de, « Louis Aragon, le beau prétexte », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-F
2918 ibourg, avril 1927, p. 131-144. p. On a conservé la graphie de l’original, sans doute voulue par l’auteur.
2919 1927, p. 131-144. p. On a conservé la graphie de l’ original, sans doute voulue par l’auteur.
2920 é la graphie de l’original, sans doute voulue par l’ auteur.
53 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Quatre incidents (avril 1927)
2921 Quatre incidents (avril 1927)q r La maîtresse d’École Au printemps pur comme une joue, École errait, É
2922 joue, École errait, École suivait une femme dans les rues tant soit peu métaphysiques d’une capitale de mes songes. On exi
2923 t évanouis des arcs-en-ciel de névroses dans tous les poèmes où détresse rimait avec maîtresse. École savait le mythe du vo
2924 s où détresse rimait avec maîtresse. École savait le mythe du voyage, et qu’on ne manque pas le train bleu d’un désir. Ell
2925 savait le mythe du voyage, et qu’on ne manque pas le train bleu d’un désir. Elle était donc venue. Il la suivait entre les
2926 train bleu d’un désir. Elle était donc venue. Il la suivait entre les devantures qui se passaient de l’une à l’autre deux
2927 désir. Elle était donc venue. Il la suivait entre les devantures qui se passaient de l’une à l’autre deux séries de profils
2928 qu’au soleil toujours de face. Il ne vit plus que la foule des yeux bleus, son éblouissement. Soudain la voici, elle desce
2929 foule des yeux bleus, son éblouissement. Soudain la voici, elle descend à sa rencontre parmi les éclairs d’un luxe mécani
2930 udain la voici, elle descend à sa rencontre parmi les éclairs d’un luxe mécanique, le visage dans sa fourrure. Elle découvr
2931 rencontre parmi les éclairs d’un luxe mécanique, le visage dans sa fourrure. Elle découvre en passant près de lui le sour
2932 sa fourrure. Elle découvre en passant près de lui le sourire d’amitié mortel de tout ce qui n’arrive jamais. Il s’est trom
2933 Il pensa que c’était un ange, de ceux qui vont à la recherche des âmes. Aussitôt il téléphone à ceux du paradis : « Qui v
2934 sitôt il téléphone à ceux du paradis : « Qui va à la chasse perd sa place, nous nous comprenons. » On lui offrit immédiate
2935 À Max-Marc-Jean Jacob Reymond. Une étoile à la boutonnière, le marquis pénétra dans le salon de la duchesse, lui bai
2936 ean Jacob Reymond. Une étoile à la boutonnière, le marquis pénétra dans le salon de la duchesse, lui baisa la main et l’
2937 étoile à la boutonnière, le marquis pénétra dans le salon de la duchesse, lui baisa la main et l’abattit d’un coup de rev
2938 boutonnière, le marquis pénétra dans le salon de la duchesse, lui baisa la main et l’abattit d’un coup de revolver. Puis
2939 s pénétra dans le salon de la duchesse, lui baisa la main et l’abattit d’un coup de revolver. Puis s’en fut avec un tact e
2940 ans le salon de la duchesse, lui baisa la main et l’ abattit d’un coup de revolver. Puis s’en fut avec un tact exquis, qui
2941 n fut avec un tact exquis, qui fut très remarqué. Le duc riait sous une table, complètement ivre, et Bettina lui disait à
2942 table, complètement ivre, et Bettina lui disait à l’ oreille : « Mon chéri, si j’aime la comtesse ? Mais tu es si laid que
2943 a lui disait à l’oreille : « Mon chéri, si j’aime la comtesse ? Mais tu es si laid que cela me donne encore plus de plaisi
2944 laid que cela me donne encore plus de plaisir. » Le duc paya et s’enfuit en disant que ce n’était pas lui. L’enterrement
2945 aya et s’enfuit en disant que ce n’était pas lui. L’ enterrement aura lieu sans suite. Suicide du Marquis Salomon le
2946 lieu sans suite. Suicide du Marquis Salomon le danseur triste baisa cette main cruelle… et quitta le bal au matin. I
2947 anseur triste baisa cette main cruelle… et quitta le bal au matin. Il neigeait dans les rues sourdes comme un songe de son
2948 elle… et quitta le bal au matin. Il neigeait dans les rues sourdes comme un songe de son enfance. Aux fenêtres du palais s’
2949 e. Aux fenêtres du palais s’étoilèrent des halos. Le jour tendre paraissait sous l’égide de la mort. Il vit des fleurs de
2950 ilèrent des halos. Le jour tendre paraissait sous l’ égide de la mort. Il vit des fleurs de son enfance, une églantine, que
2951 halos. Le jour tendre paraissait sous l’égide de la mort. Il vit des fleurs de son enfance, une églantine, quelques roses
2952 e églantine, quelques roses, un sourire qui perce le cœur sur les glaces du passé. Cet abandon aux fuyantes chansons, et d
2953 quelques roses, un sourire qui perce le cœur sur les glaces du passé. Cet abandon aux fuyantes chansons, et des violons dé
2954 ons, et des violons déchirants dans sa tête… Mais le sommeil s’évaporait aux caresses des flocons, plus perfides que des m
2955 perfides que des murmures d’adieu. Il tomba parmi les statues, dans l’amitié pensive des jardins. Une fenêtre s’était ouver
2956 urmures d’adieu. Il tomba parmi les statues, dans l’ amitié pensive des jardins. Une fenêtre s’était ouverte et des accords
2957 ’était ouverte et des accords échappés tombaient, les ailes coupées. Puis le silence se reprit à ses songes désolés. Aut
2958 cords échappés tombaient, les ailes coupées. Puis le silence se reprit à ses songes désolés. Autre suicide ou la promen
2959 reprit à ses songes désolés. Autre suicide ou la promenade en bateau À Grego More. Il disait : « Je suis né pour
2960 À Grego More. Il disait : « Je suis né pour la mort. » Il fait assez beau pour que s’ouvre ce cœur de l’après-midi,
2961  » Il fait assez beau pour que s’ouvre ce cœur de l’ après-midi, comme un camélia de tendre orgueil. Il respire déjà l’odeu
2962 mme un camélia de tendre orgueil. Il respire déjà l’ odeur merveilleuse des objets et des êtres véritables. Un bateau ne gl
2963 bles. Un bateau ne glisse pas plus doucement vers le soleil du haut-lac. Justement, voici que tout va s’ouvrir, qu’un mond
2964 s’ouvrir, qu’un monde s’est ouvert devant lui. Et l’ eau n’est pas moins somptueuse. Et bien sûr, je n’ai pas bougé. C’est
2965 me rendre seul et sans argent. Je ne voulais pas le retenir, Je ne pouvais pas le suivre. On dit de ces phrases. Même, on
2966 . Je ne voulais pas le retenir, Je ne pouvais pas le suivre. On dit de ces phrases. Même, on en pleure. q. Rougemont D
54 1927, Articles divers (1924–1930). Jeunes artistes neuchâtelois (avril 1927)
2967 is (avril 1927)k Neuchâtel va-t-elle redevenir le centre artistique qu’elle fut au siècle passé ? Allons-nous assister
2968 ster à un regroupement de ses forces créatrices ? La question est peut-être prématurée. Mais le seul fait qu’elle se pose
2969 ices ? La question est peut-être prématurée. Mais le seul fait qu’elle se pose me paraît indiquer que l’un au moins des de
2970 artistes, en effet, n’ignorent rien des courants les plus modernes, et sont bien situés pour n’en prendre que le meilleur 
2971 dernes, et sont bien situés pour n’en prendre que le meilleur ; mais l’émulation, l’atmosphère de combat nécessaire au dév
2972 n situés pour n’en prendre que le meilleur ; mais l’ émulation, l’atmosphère de combat nécessaire au développement de certa
2973 n’en prendre que le meilleur ; mais l’émulation, l’ atmosphère de combat nécessaire au développement de certains jeunes te
2974 ertains jeunes tempéraments leur fait défaut dans la même mesure. Ainsi risquent de s’établir autour d’eux des mœurs un pe
2975 œurs un peu bourgeoises dont je ne vais pas faire le procès, mais qui expliquent, me semble-t-il, pour une part, la disper
2976 is qui expliquent, me semble-t-il, pour une part, la dispersion des efforts artistiques. Tout ce monde d’amateurs de décou
2977 aux, de critiques d’avant-garde, ce monde où tous les extrémismes sont prônés comme vertus cardinales, et qui forme ailleur
2978 r public des jeunes artistes, n’existant pas ici, le peintre se trouve placé d’emblée en face de ce qu’on nomme le gros pu
2979 e trouve placé d’emblée en face de ce qu’on nomme le gros public. L’épreuve est pénible, énervante, souvent fatale aux nov
2980 ’emblée en face de ce qu’on nomme le gros public. L’ épreuve est pénible, énervante, souvent fatale aux novateurs. Alors il
2981 le d’une consécration étrangère. Un jour en effet l’ on apprend que tel tableau de jeune est « coté » chez un gros marchand
2982 une est « coté » chez un gros marchand. Aussitôt, les feuilles locales retentissent de touchants échos : « C’est avec un lé
2983 bien méritée du talent d’un de ses enfants… » Car le fils prodigue, s’il rentre au foyer dans une Rolls-Royce et fortune f
2984 ttendait pas moins du fils d’un tel père. « Voilà le train du monde… » Je ne pense pas qu’il en faille gémir. Une certaine
2985 . Une certaine résistance est nécessaire pour que la force se développe. N’était certain petit plaisir d’impertinence, je
2986 une actualité toujours vive. D’ailleurs, sachons le reconnaître, il y a moins de malice que de paresse dans les jugements
2987 aître, il y a moins de malice que de paresse dans les jugements du public, et moins d’incompréhension que de timidité. ⁂ On
2988 ans, jusqu’à André Evard, qui en a près de 50, si les peintres dont nous allons parler méritent d’être appelés jeunes, c’es
2989 leurs œuvres avant tout. D’autre part je préfère la légende à l’histoire comme la peinture à la photographie. Une œuvre d
2990 avant tout. D’autre part je préfère la légende à l’ histoire comme la peinture à la photographie. Une œuvre d’art est un m
2991 tre part je préfère la légende à l’histoire comme la peinture à la photographie. Une œuvre d’art est un merveilleux foyer
2992 éfère la légende à l’histoire comme la peinture à la photographie. Une œuvre d’art est un merveilleux foyer de contagion c
2993 agion contre lequel je ne saurais me prémunir par le moyen d’aucun de ces appareils à jugements garantis qui posent un cri
2994 t un critique d’art diplômé. Premier péché contre l’ histoire : au seuil d’un article consacré aux jeunes artistes neuchâte
2995 t entre trente pareilles, aux cactus qui ornaient les fenêtres, dans une chambre peinte en bleu vif et ornée de surprenants
2996 straites. De cette époque datent des toiles comme le Souvenir de l’Évêché. Décors et personnages semblent d’une matière id
2997 tte époque datent des toiles comme le Souvenir de l’ Évêché. Décors et personnages semblent d’une matière idéale. Tout est
2998 fait seulement. Il manque à ces recompositions de la nature, à ces natures remises à neuf, l’imperfection humaine qui touc
2999 tions de la nature, à ces natures remises à neuf, l’ imperfection humaine qui touche. Mais l’atmosphère pure de ces espaces
3000 s à neuf, l’imperfection humaine qui touche. Mais l’ atmosphère pure de ces espaces définis par quelques plans ne tue pas u
3001 ailleurs… Qu’il sorte enfin et se mette à graver les scènes qu’il voit dans la petite cité ouvrière, et c’est merveille de
3002 n et se mette à graver les scènes qu’il voit dans la petite cité ouvrière, et c’est merveille de constater combien l’épura
3003 ouvrière, et c’est merveille de constater combien l’ épuration rigoriste de sa technique sert une vision aigüe de la vie. L
3004 igoriste de sa technique sert une vision aigüe de la vie. La série de gravures sur bois colorées qu’il intitule la cité es
3005 de sa technique sert une vision aigüe de la vie. La série de gravures sur bois colorées qu’il intitule la cité est un pet
3006 érie de gravures sur bois colorées qu’il intitule la cité est un petit chef-d’œuvre de réalisme stylisé. C’est d’un art tr
3007 , qui connaît ses ressources et sait en user avec la sobriété qui produit le maximum d’expression. Cette « simplicité préc
3008 rces et sait en user avec la sobriété qui produit le maximum d’expression. Cette « simplicité précieuse », il sait la conf
3009 pression. Cette « simplicité précieuse », il sait la conférer à tout ce qu’il touche, qu’il décore une bannière, fabrique
3010 e un peu bizarre qu’il glisse si souvent là où on l’ attend le moins. Conrad Meili apporte chez nous une inspiration neuve,
3011 bizarre qu’il glisse si souvent là où on l’attend le moins. Conrad Meili apporte chez nous une inspiration neuve, d’origin
3012 e germanique, mais qui a choisi de s’astreindre à la voluptueuse rigueur latine, et qui tout en s’épurant dans des formes
3013 ui tout en s’épurant dans des formes claires a su les renouveler. Il nous apporte aussi cet élément de vitalité combative q
3014 ’il casse des vitres, ce n’est pas seulement pour le plaisir, mais plutôt par amour du courant d’air. Cela dérange toujour
3015 air. Cela dérange toujours quelques frileux, mais les autres sont soulagés. Et ne fût-ce qu’en prenant une initiative comme
3016 uchâtel 1927 7 il aura bien mérité sa place parmi les artistes neuchâtelois. Actuellement, Meili achève la décoration d’une
3017 artistes neuchâtelois. Actuellement, Meili achève la décoration d’une salle d’hôtel en collaboration avec Paul Donzé. Qui
3018 ssionniste s’astreindrait jamais aux exigences de la technique décorative ! Voilà qui laisse espérer parmi nos artistes bi
3019 oins paradoxaux. Donzé n’est pas de ceux pour qui la peinture consiste à habiller une idée. Voyez son portrait de Meili :
3020 ée. Voyez son portrait de Meili : il ne prend pas le sujet par l’intérieur, mais il taille ce visage dans une pâte riche e
3021 portrait de Meili : il ne prend pas le sujet par l’ intérieur, mais il taille ce visage dans une pâte riche et un peu lour
3022 dans une pâte riche et un peu lourde, son pinceau la palpe, la presse, la réduit à la forme qu’il voit. Il y a de la sensu
3023 âte riche et un peu lourde, son pinceau la palpe, la presse, la réduit à la forme qu’il voit. Il y a de la sensualité dans
3024 t un peu lourde, son pinceau la palpe, la presse, la réduit à la forme qu’il voit. Il y a de la sensualité dans l’écraseme
3025 rde, son pinceau la palpe, la presse, la réduit à la forme qu’il voit. Il y a de la sensualité dans l’écrasement de ses co
3026 resse, la réduit à la forme qu’il voit. Il y a de la sensualité dans l’écrasement de ses couleurs, une sensualité qui sait
3027 la forme qu’il voit. Il y a de la sensualité dans l’ écrasement de ses couleurs, une sensualité qui sait se faire délicate
3028 avec des roses et des jaunes jamais mièvres, sous l’ œil méfiant des fascistes qui le prennent pour un agitateur russe, à c
3029 ais mièvres, sous l’œil méfiant des fascistes qui le prennent pour un agitateur russe, à cause de sa chevelure, sans doute
3030 e tromper plus. ⁂ À vrai dire j’en vois peu parmi les jeunes qui vouent tout leur amour à la peinture pure. Je crois même q
3031 peu parmi les jeunes qui vouent tout leur amour à la peinture pure. Je crois même que, Paul Donzé touché à son tour par la
3032 crois même que, Paul Donzé touché à son tour par la grâce décorative, il n’en reste qu’un, du moins à Neuchâtel même : Eu
3033 vier. Ce garçon aux allures discrètes promène sur le monde des yeux de Japonais d’une ironie mélancolique et qui voient pl
3034 ient plus loin qu’on ne croit, mais il a toujours l’ air de songer à la Hollande, sa seconde patrie si la peinture est sa p
3035 on ne croit, mais il a toujours l’air de songer à la Hollande, sa seconde patrie si la peinture est sa première et Neuchât
3036 air de songer à la Hollande, sa seconde patrie si la peinture est sa première et Neuchâtel la troisième… Il y a par Eugène
3037 par Eugène Bouvier quelque chose de nouveau dans la peinture neuchâteloise : un lyrisme un peu amer, d’une tristesse qui
3038 y a une sorte d’aristocratique dissimulation dans l’ œuvre de Bouvier. Sa technique qui paraît au premier abord masquer ses
3039 premier abord masquer ses intentions, en réalité les exprime par ses défauts mêmes ou ses fausses négligences ; mais il fa
3040 oujours une sorte de dissonance, un défaut par où l’ on va peut-être se glisser dans l’atmosphère de l’œuvre ; que l’on con
3041 n défaut par où l’on va peut-être se glisser dans l’ atmosphère de l’œuvre ; que l’on consente en effet à telle déformation
3042 l’on va peut-être se glisser dans l’atmosphère de l’ œuvre ; que l’on consente en effet à telle déformation, et tout devien
3043 tre se glisser dans l’atmosphère de l’œuvre ; que l’ on consente en effet à telle déformation, et tout devient satisfaisant
3044 ère que Louis de Meuron, parmi ses aînés, dont on le puisse rapprocher, parce qu’il est un des rares peintres de ce pays p
3045 ’il est un des rares peintres de ce pays pour qui la couleur existe avant tout. Mais la nostalgie de Bouvier l’entraîne à
3046 pays pour qui la couleur existe avant tout. Mais la nostalgie de Bouvier l’entraîne à mille lieues des jardins de sourire
3047 r existe avant tout. Mais la nostalgie de Bouvier l’ entraîne à mille lieues des jardins de sourires qui s’épanouissent sur
3048 es des jardins de sourires qui s’épanouissent sur les toiles de Meuron. Il semble toujours qu’il peigne entre deux pluies.
3049 onde se mêlent, et sait rendre mieux que personne la liquidité d’un lac, certaines atmosphères délavées et sourdes. « Temp
3050 couvert, calme, légères précipitations » annonce le bulletin. Tiens, me dis-je, Bouvier va peindre. Comme peintre religie
3051 re religieux, il se cherche encore. On a pourtant l’ impression, à voir ses dernières toiles, d’une plus grande certitude i
3052 s toiles, d’une plus grande certitude intérieure. Les visages sont plus calmes, les couleurs s’avivent, le soleil est sur l
3053 rtitude intérieure. Les visages sont plus calmes, les couleurs s’avivent, le soleil est sur le point de reparaître… Charle
3054 visages sont plus calmes, les couleurs s’avivent, le soleil est sur le point de reparaître… Charles Humbert ou comment on
3055 nq ans de Baudelaire à Rubens. Il fut un temps où l’ on put craindre que Charles Humbert ne devînt le chef d’une école du g
3056 ù l’on put craindre que Charles Humbert ne devînt le chef d’une école du gris-noir neurasthénique. Il peignait des natures
3057 ue. Il peignait des natures mortes qui décidément l’ étaient, à faire froid dans le dos ; ou bien des scènes d’une bizarre
3058 rtes qui décidément l’étaient, à faire froid dans le dos ; ou bien des scènes d’une bizarre fantaisie, un mélange de Rops
3059 g, G. H. Dessoulavy)… Mais déjà paraissaient dans les Voix (cette courageuse revue qu’il avait fondée avec J. P. Zimmermann
3060 un tempérament très rassurant. C’était, je crois, le vrai Humbert qui commençait à s’affirmer. Puis il y eut une période i
3061 onies funèbres, comme un qui n’attendrait pas que l’ enterrement s’éloigne pour entonner une chanson à boire. Et sa techniq
3062 nt maigre se faisait trop lâche. Mais aujourd’hui la mue semble s’être opérée. Humbert est rendu à lui-même. Il atteint so
3063 son équilibre et sa maîtrise avec une toile comme le Potier. Si la couleur n’est pas encore aussi plantureuse que les form
3064 et sa maîtrise avec une toile comme le Potier. Si la couleur n’est pas encore aussi plantureuse que les formes, il y a une
3065 la couleur n’est pas encore aussi plantureuse que les formes, il y a une belle richesse de lueurs sur une matière traitée l
3066 possibilités imprévues. Il y a un côté « homme de la Renaissance » chez un Charles Humbert livré à sa fougue originale. Il
3067 plus encore chez un Aurèle Barraud. Il suffit de le voir peint par lui-même pour s’en assurer. La tête large, aux yeux cl
3068 de le voir peint par lui-même pour s’en assurer. La tête large, aux yeux clairs et assurés, le cou robuste, les mains d’u
3069 surer. La tête large, aux yeux clairs et assurés, le cou robuste, les mains d’un si beau dessin, qui ont du poids et nulle
3070 arge, aux yeux clairs et assurés, le cou robuste, les mains d’un si beau dessin, qui ont du poids et nulle lourdeur, tout c
3071 nce domptée et qui semble se faire une volupté de la discipline qu’elle s’impose. Et voilà qui fait encore plus « Renaissa
3072 . Et voilà qui fait encore plus « Renaissance » : le costume est drapé avec un soin minutieux, mais une grande mèche insol
3073 x, mais une grande mèche insolente retombe devant le visage. Aurèle tient un livre ouvert, et ce n’est pas je pense qu’il
3074 t un livre ouvert, et ce n’est pas je pense qu’il le lise, mais il aime caresser la reliure qu’il doit avoir faite lui-mêm
3075 pas je pense qu’il le lise, mais il aime caresser la reliure qu’il doit avoir faite lui-même. Car il est artisan, dans le
3076 it avoir faite lui-même. Car il est artisan, dans le beau sens ancien du terme, tout comme son frère Charles Barraud, qui
3077 s, à encadrer des glaces. Et plaise aux dieux que les visages qui s’y reflèteront soient aussi beaux que ceux qu’il peint o
3078 oient aussi beaux que ceux qu’il peint ou modèle, le soir, à la lampe, en compagnie de sa femme (elle peint aussi, d’un œi
3079 beaux que ceux qu’il peint ou modèle, le soir, à la lampe, en compagnie de sa femme (elle peint aussi, d’un œil regardant
3080 de sa femme (elle peint aussi, d’un œil regardant le sujet, de l’autre ce qu’en fait son mari). Et puis voici François Bar
3081 n fait son mari). Et puis voici François Barraud, le plus jeune des frères. Il vient apporter des dessins qui ressemblent
3082 éalistes, plus fins, mais tout aussi habiles dans l’ utilisation du clair-obscur qui simplifie et renforce l’expression. Dé
3083 isation du clair-obscur qui simplifie et renforce l’ expression. Décidément ces trois frères sont une école. Délaissant un
3084 ons désormais retrouver, allons errer un peu dans le royaume d’Utopie. André Evard va nous y introduire, et nous ne saurio
3085 es années d’avance sur ses contemporains. Un jour les jeunes le rattrapent. Salutations, présentations : « André Evard. — L
3086 ’avance sur ses contemporains. Un jour les jeunes le rattrapent. Salutations, présentations : « André Evard. — Les jeunes
3087 nt. Salutations, présentations : « André Evard. —  Les jeunes peintres. — Vous suivez la même route que nous ? À la bonne he
3088 André Evard. — Les jeunes peintres. — Vous suivez la même route que nous ? À la bonne heure ! ». Et l’on repart bras dessu
3089 eintres. — Vous suivez la même route que nous ? À la bonne heure ! ». Et l’on repart bras dessus, bras dessous. Et l’on ap
3090 la même route que nous ? À la bonne heure ! ». Et l’ on repart bras dessus, bras dessous. Et l’on apprend peu à peu des cho
3091 ! ». Et l’on repart bras dessus, bras dessous. Et l’ on apprend peu à peu des choses bien curieuses sur son compte. Il a fa
3092 hoses bien curieuses sur son compte. Il a fait de la pâtisserie, mais on m’assure qu’il se nourrit de noix et d’oranges. I
3093 cles où sous un éclairage très net, mais inusité, l’ objet le plus banal se charge de mystère. Que va-t-il se passer là-ded
3094 sous un éclairage très net, mais inusité, l’objet le plus banal se charge de mystère. Que va-t-il se passer là-dedans ? Et
3095 e va-t-il se passer là-dedans ? Et ces roses sont le signe de quel occulte prodige ? Intrigué, vous reprenez ce que vous p
3096 qui s’incarne dans ces motifs géométriques, pour le plaisir de la perfection exercée par jeu. Mais quel support à de nouv
3097 dans ces motifs géométriques, pour le plaisir de la perfection exercée par jeu. Mais quel support à de nouvelles songerie
3098 erfection exercée par jeu. Mais quel support à de nouvelles songeries ! Ces horlogeries impossibles sont des pièges à chimères. C
3099 rd n’aille trouver une de ces machines à explorer l’ au-delà. En vérité il faut être sorcier ou artiste pour changer en ins
3100 métaphysiques ces bonnes montres de précision de La Chaux-de-Fonds… Avant de quitter les peintres, rappelons le souvenir
3101 précision de La Chaux-de-Fonds… Avant de quitter les peintres, rappelons le souvenir de Charles Harder, qui est mort jeune
3102 e-Fonds… Avant de quitter les peintres, rappelons le souvenir de Charles Harder, qui est mort jeune, sans avoir pu donner
3103 r qui saura s’imposer. Léon Perrin a compris tout le parti qu’on pouvait tirer des principes cubistes dans un art dont la
3104 ait tirer des principes cubistes dans un art dont la genèse même est cubiste en quelque sorte, supposant une décomposition
3105 y avait quelque lourdeur dans des morceaux comme le Joueur de rugby. C’était le poids de la pierre, plus que celui du cor
3106 ns des morceaux comme le Joueur de rugby. C’était le poids de la pierre, plus que celui du corps de l’athlète ; l’œuvre n’
3107 aux comme le Joueur de rugby. C’était le poids de la pierre, plus que celui du corps de l’athlète ; l’œuvre n’atteignait p
3108 le poids de la pierre, plus que celui du corps de l’ athlète ; l’œuvre n’atteignait pas encore pleinement sa vie propre. De
3109 la pierre, plus que celui du corps de l’athlète ; l’ œuvre n’atteignait pas encore pleinement sa vie propre. Depuis, Léon P
3110 du BIT où se manifeste un heureux équilibre entre le réalisme imposé par les sujets et un style qui sait rester ample, d’u
3111 un heureux équilibre entre le réalisme imposé par les sujets et un style qui sait rester ample, d’une simplicité non dépour
3112 cité non dépourvue de puissance. Une fois de plus l’ on peut admirer la salutaire leçon de style donnée par le cubisme aux
3113 de puissance. Une fois de plus l’on peut admirer la salutaire leçon de style donnée par le cubisme aux artistes qui ont s
3114 ut admirer la salutaire leçon de style donnée par le cubisme aux artistes qui ont su se dégager de son outrance théorique.
3115 se dégager de son outrance théorique. C’est dans la manière cubiste encore que Perrin décora naguère fort plaisamment une
3116 e n’est certes pas complète. Mais elle a du moins l’ avantage de grouper des artistes qui, par le fait des circonstances pe
3117 moins l’avantage de grouper des artistes qui, par le fait des circonstances peut-être plus que par de naturelles affinités
3118 ns décoratives qui pourraient aboutir peut-être à la formation d’un groupe dont l’activité serait féconde en ce pays. D’au
3119 aboutir peut-être à la formation d’un groupe dont l’ activité serait féconde en ce pays. D’autre part, des œuvres aussi dif
3120 t, des œuvres aussi différentes par leur objet et le domaine où elles se réalisent que celles de Le Corbusier8, Meili, Eva
3121 et le domaine où elles se réalisent que celles de Le Corbusier8, Meili, Evard, Perrin, manifestent toutes une recherche de
3122 vard, Perrin, manifestent toutes une recherche de la simplicité savante et de la perfection du métier, un goût pour la con
3123 utes une recherche de la simplicité savante et de la perfection du métier, un goût pour la construction rigoureuse qui son
3124 vante et de la perfection du métier, un goût pour la construction rigoureuse qui sont des éléments peut-être insuffisants
3125 nérale vers une sorte de classicisme moderne dont les frères Barraud ne seraient pas très éloignés par d’autres côtés. Un a
3126 samment atteint si nous n’avions fait qu’affirmer l’ existence et la vitalité d’une jeune peinture originale dans un pays q
3127 si nous n’avions fait qu’affirmer l’existence et la vitalité d’une jeune peinture originale dans un pays qu’on s’est trop
3128 ue et d’une maigre végétation artistique. Pays où l’ on préfère la netteté utile à l’harmonie des lignes ; où la lumière éc
3129 aigre végétation artistique. Pays où l’on préfère la netteté utile à l’harmonie des lignes ; où la lumière éclaire plus qu
3130 tistique. Pays où l’on préfère la netteté utile à l’ harmonie des lignes ; où la lumière éclaire plus qu’elle ne caresse ;
3131 ère la netteté utile à l’harmonie des lignes ; où la lumière éclaire plus qu’elle ne caresse ; où pourtant les hivers les
3132 ère éclaire plus qu’elle ne caresse ; où pourtant les hivers les plus durs réservent des douceurs secrètes. 7. Publicatio
3133 plus qu’elle ne caresse ; où pourtant les hivers les plus durs réservent des douceurs secrètes. 7. Publication dont cett
3134 n vrai nom Ch. E. Jeanneret, un article paru dans le numéro de février de cette revue. k. Rougemont Denis de, « Jeunes a
55 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Bernard Lecache, Jacob (mai 1927)
3135 hoquer et s’imposer pourtant. M. Lecache présente le problème juif avec une obstination à ne rien cacher qui le mène profo
3136 me juif avec une obstination à ne rien cacher qui le mène profond. Une famille juive dans le Marais. Le père est un taille
3137 acher qui le mène profond. Une famille juive dans le Marais. Le père est un tailleur, biblique, austère et probe, qui n’a
3138 e mène profond. Une famille juive dans le Marais. Le père est un tailleur, biblique, austère et probe, qui n’a d’ambition
3139 , qui n’a d’ambition que pour ses enfants. Jacob, l’ aîné se révolte. Sensualité, intelligence, brutalité : les caractères
3140 se révolte. Sensualité, intelligence, brutalité : les caractères se résument dans son avidité de puissance. C’est par l’arg
3141 résument dans son avidité de puissance. C’est par l’ argent qu’on domine notre âge : il devient grand industriel, assure sa
3142 au prix du peu cynique reniement de ses origines. Le vieux père s’effondre de honte et de douleur. « On vend de l’étoffe…
3143 e s’effondre de honte et de douleur. « On vend de l’ étoffe… eux ils se vendent ! » Mais Jacob a renié ses parents, non leu
3144 ents, non leurs ambitions. Surmontant son dégoût, le père ajoute : « Notre sang sera vainqueur… Qu’ils m’oublient, qu’ils
3145 ueur… Qu’ils m’oublient, qu’ils me méprisent ! Je les vois régner. Je salue leur Loi. » Le récit grassement pittoresque dan
3146 risent ! Je les vois régner. Je salue leur Loi. » Le récit grassement pittoresque dans la description du milieu juif, pren
3147 leur Loi. » Le récit grassement pittoresque dans la description du milieu juif, prend une âpre rapidité avec l’ascension
3148 tion du milieu juif, prend une âpre rapidité avec l’ ascension de Jacob et ses luttes. On pardonne bon nombre de platitudes
3149 ne bon nombre de platitudes et de vulgarités pour les derniers chapitres, denses, violents, et dont le profond ricanement s
3150 les derniers chapitres, denses, violents, et dont le profond ricanement se prolonge en nous. Je crois entendre Jacob qui s
3151 fort que cette bourgeoisie fatiguée, et de suivre le destin que vous m’avez assigné à force de m’humilier et de me craindr
56 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). René Crevel, La Mort difficile (mai 1927)
3152 René Crevel, La Mort difficile (mai 1927)ai Le jeu de tout dire est une des plus t
3153 René Crevel, La Mort difficile (mai 1927)ai Le jeu de tout dire est une des plus tragiques inventions de l’inquiétud
3154 out dire est une des plus tragiques inventions de l’ inquiétude actuelle. Sous couleur de démasquer l’humain, et par l’acha
3155 l’inquiétude actuelle. Sous couleur de démasquer l’ humain, et par l’acharnement angoissé qu’on y apporte, l’on en vient à
3156 uelle. Sous couleur de démasquer l’humain, et par l’ acharnement angoissé qu’on y apporte, l’on en vient à une conception d
3157 n, et par l’acharnement angoissé qu’on y apporte, l’ on en vient à une conception de la sincérité qui me paraît proprement
3158 u’on y apporte, l’on en vient à une conception de la sincérité qui me paraît proprement inhumaine. Tout dire, vraiment ? C
3159 proprement inhumaine. Tout dire, vraiment ? C’est l’ exigence d’une détresse cachée ; elle fait bientôt considérer toute jo
3160 ôt considérer toute joie comme illusoire et livre l’ individu pieds et poings liés à l’obsession qu’il voulait avouer pour
3161 usoire et livre l’individu pieds et poings liés à l’ obsession qu’il voulait avouer pour s’en délivrer peut-être. Cette sin
3162 re. Cette sincérité ne serait-elle à son tour que le masque d’un goût du malheur ? Le sujet profond de ce roman, où l’on v
3163 e à son tour que le masque d’un goût du malheur ? Le sujet profond de ce roman, où l’on voit comment Pierre en vient à sac
3164 oût du malheur ? Le sujet profond de ce roman, où l’ on voit comment Pierre en vient à sacrifier Diane, son apaisement, pou
3165 sement, pour Arthur, sa « maladie », c’est encore l’ « élan mortel » que décrivait Mon Corps et Moi. Quand l’analyse féroce
3166 an mortel » que décrivait Mon Corps et Moi. Quand l’ analyse féroce de Crevel fouille les pensées de Pierre ou de Diane, le
3167 et Moi. Quand l’analyse féroce de Crevel fouille les pensées de Pierre ou de Diane, les gestes d’Arthur, le roman vit et n
3168 Crevel fouille les pensées de Pierre ou de Diane, les gestes d’Arthur, le roman vit et nous touche par la force de ce tourm
3169 nsées de Pierre ou de Diane, les gestes d’Arthur, le roman vit et nous touche par la force de ce tourment ou de ce sauvage
3170 gestes d’Arthur, le roman vit et nous touche par la force de ce tourment ou de ce sauvage égoïsme ; mais qu’elle s’acharn
3171 e ce sauvage égoïsme ; mais qu’elle s’acharne sur le détail dégoûtant et mesquin de certain milieu bourgeois, et l’on voit
3172 oûtant et mesquin de certain milieu bourgeois, et l’ on voit bien que l’auteur n’est pas encore détaché de la matière pour
3173 e certain milieu bourgeois, et l’on voit bien que l’ auteur n’est pas encore détaché de la matière pour en tirer une œuvre
3174 oit bien que l’auteur n’est pas encore détaché de la matière pour en tirer une œuvre d’art. La sincérité audacieuse mais s
3175 aché de la matière pour en tirer une œuvre d’art. La sincérité audacieuse mais sans bravade qui donne à ce livre sa valeur
3176 trahissent une écriture hâtive. Mais il y a dans l’ œuvre de René Crevel un sens de la douleur et un sérieux humain qui fo
3177 ais il y a dans l’œuvre de René Crevel un sens de la douleur et un sérieux humain qui forcent la sympathie. ai. Rougemo
3178 ns de la douleur et un sérieux humain qui forcent la sympathie. ai. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] René Crevel, L
3179 Rougemont Denis de, « [Compte rendu] René Crevel,  La Mort difficile  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genèv
57 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Paul Éluard, Capitale de la douleur (mai 1927)
3180 Paul Éluard, Capitale de la douleur (mai 1927)aj Nocturnes aux caresses coupantes comme certai
3181 ses coupantes comme certaines herbes. Capitale de la douleurak, ce sont de belles syllabes sereines, et dans cette ville,
3182 yllabes sereines, et dans cette ville, Éluard est le plus séduisant, le plus dangereusement gracieux des noctambules. Rêve
3183 t dans cette ville, Éluard est le plus séduisant, le plus dangereusement gracieux des noctambules. Rêves éveillés, entre d
3184 lixir dont il voudrait bien nous faire croire que le diable est l’auteur. Beaucoup d’oiseaux volètent, se balancent au bor
3185 voudrait bien nous faire croire que le diable est l’ auteur. Beaucoup d’oiseaux volètent, se balancent au bord des verres,
3186 t, se balancent au bord des verres, se posent sur les cordes d’une lyre dont ils font grésiller l’accord, une patte en l’ai
3187 sur les cordes d’une lyre dont ils font grésiller l’ accord, une patte en l’air, becquètent le cœur d’une femme qui va les
3188 re dont ils font grésiller l’accord, une patte en l’ air, becquètent le cœur d’une femme qui va les étrangler doucement. Ce
3189 résiller l’accord, une patte en l’air, becquètent le cœur d’une femme qui va les étrangler doucement. Ces vers sont de jol
3190 e en l’air, becquètent le cœur d’une femme qui va les étrangler doucement. Ces vers sont de jolies flèches empoisonnées. Qu
3191 e, de laqué, d’élégant, de « bien français » ; et le mot sang n’évoque ici qu’une tache de couleur, plus sentimental que c
3192 he de couleur, plus sentimental que cruel. « J’ai la beauté facile et c’est heureux. » Il y a aussi un certain tragique, m
3193 nis de, « [Compte rendu] Paul Éluard, Capitale de la douleur  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mai
3194 Genève, mai 1927, p. 693-694. ak. En romain dans l’ édition originale.
58 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Pierre Drieu la Rochelle, La Suite dans les idées (mai 1927)
3195 Pierre Drieu la Rochelle, La Suite dans les idées (mai 1927)al « De quoi s’agit-il ? de détruir
3196 Pierre Drieu la Rochelle, La Suite dans les idées (mai 1927)al « De quoi s’agit-il ? de détruire ou de rafisto
3197 Drieu s’examine. Encore un ? Non, enfin un. Tous les autres y ont apporté de secrètes complaisances, ou une arrière-pensée
3198 esoin d’être aimés qui faussaient leurs voix pour les rendre plus touchantes. Celui-ci bat sa coulpe avec une saine rudesse
3199 té corrompu et infect et adonné à mal » (Calvin). Le tableau n’est pas beau, mais on y sent une « patte » qui révèle encor
3200 is on y sent une « patte » qui révèle encore dans le fond quelque chose de solide, d’authentique. J’aime cette violence de
3201 redressement où je distingue bien autre chose que les « éclats de l’impuissance ». Un plus délicat eut compris que certains
3202 je distingue bien autre chose que les « éclats de l’ impuissance ». Un plus délicat eut compris que certains des morceaux t
3203 fection, s’il ne peut encore s’en tirer, du moins l’ avoue-t-il avec une franchise qui la rend sympathique. Et puis, tout d
3204 rer, du moins l’avoue-t-il avec une franchise qui la rend sympathique. Et puis, tout de même, on est bien heureux de renco
3205 t de même, on est bien heureux de rencontrer chez les jeunes écrivains français un homme qui ait à ce point le sens de l’ép
3206 es écrivains français un homme qui ait à ce point le sens de l’époque, une vision si claire et si tragique de la civilisat
3207 s français un homme qui ait à ce point le sens de l’ époque, une vision si claire et si tragique de la civilisation d’Occid
3208 l’époque, une vision si claire et si tragique de la civilisation d’Occident. Les questions capitales posées ailleurs depu
3209 ire et si tragique de la civilisation d’Occident. Les questions capitales posées ailleurs depuis longtemps par des maîtres
3210 ir échappé au surréalisme en tant qu’il n’est que le triomphe de la littérature sur la vie, mais d’avoir su en garder une
3211 urréalisme en tant qu’il n’est que le triomphe de la littérature sur la vie, mais d’avoir su en garder une passion pour la
3212 qu’il n’est que le triomphe de la littérature sur la vie, mais d’avoir su en garder une passion pour la pureté, un « jusqu
3213 a vie, mais d’avoir su en garder une passion pour la pureté, un « jusqu’au boutisine » qui seul peut redonner quelque vita
3214 ourd’hui, presque sans pose, et décidé à mépriser le bluff. al. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Pierre Drieu la Ro
3215 is de, « [Compte rendu] Pierre Drieu la Rochelle, La Suite dans les idées  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève,
3216 te rendu] Pierre Drieu la Rochelle, La Suite dans les idées  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, mai 19
59 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Récit du pickpocket (fragment) (mai 1927)
3217 mmerce, qu’on m’a appris à voler. Aristophane («  Les Chevaliers »). Dès qu’on eut déposé devant Isidore un malaga et une
3218 inérale devant son étrange convive, celui-ci prit la parole sans plus de cérémonie : « La jeunesse, Monsieur…, la jeunesse
3219 elui-ci prit la parole sans plus de cérémonie : «  La jeunesse, Monsieur…, la jeunesse est l’âge où l’on atteint la vie. On
3220 ans plus de cérémonie : « La jeunesse, Monsieur…, la jeunesse est l’âge où l’on atteint la vie. On s’y maintient cinq ans,
3221 monie : « La jeunesse, Monsieur…, la jeunesse est l’ âge où l’on atteint la vie. On s’y maintient cinq ans, dix ans au plus
3222  La jeunesse, Monsieur…, la jeunesse est l’âge où l’ on atteint la vie. On s’y maintient cinq ans, dix ans au plus. Après,
3223 Monsieur…, la jeunesse est l’âge où l’on atteint la vie. On s’y maintient cinq ans, dix ans au plus. Après, c’est un long
3224 s, dix ans au plus. Après, c’est un long adieu et le corps se fige à mesure que l’esprit s’établit sur ses positions. Or d
3225 st un long adieu et le corps se fige à mesure que l’ esprit s’établit sur ses positions. Or donc, j’avais vingt ans. Je viv
3226 diverti. J’étais bon, Monsieur, normalement bon. L’ idée, par exemple, d’étrangler un chat pour le plaisir me répugnait. J
3227 on. L’idée, par exemple, d’étrangler un chat pour le plaisir me répugnait. Je détestais de peiner quelque être, même ennem
3228 iner quelque être, même ennemi, — car celui-là je le méprisais trop sincèrement. » Vers cette époque, une femme me regarda
3229 ment. » Mes parents me savaient vierge et c’était la joie de leur vie, car ils aimaient en moi par-dessus tout la vertu qu
3230 leur vie, car ils aimaient en moi par-dessus tout la vertu que je leur devais. Pourtant, je ne détournai pas mes yeux des
3231 frît à cause de moi. Un soir qu’elle pleurait, je l’ embrassai si fort… En un quart d’heure, je connaissais l’amour dans ce
3232 ssai si fort… En un quart d’heure, je connaissais l’ amour dans ce qu’il a de plus étrangement prosaïque à la fois et bêtem
3233 angement prosaïque à la fois et bêtement heureux. Le lendemain était le premier jour du printemps. Les rues riaient. Le ci
3234 Le lendemain était le premier jour du printemps. Les rues riaient. Le ciel descendait dans la ville, on marchait dans le b
3235 t le premier jour du printemps. Les rues riaient. Le ciel descendait dans la ville, on marchait dans le bleu. Je sortis av
3236 ntemps. Les rues riaient. Le ciel descendait dans la ville, on marchait dans le bleu. Je sortis avec cette femme, qui m’ai
3237 e ciel descendait dans la ville, on marchait dans le bleu. Je sortis avec cette femme, qui m’aimait, et nous étions très j
3238 tions très jolis de bonheur et d’insouciance dans le bonheur de la saison. — Au soir, mon père savait tout. Il effleura mo
3239 is de bonheur et d’insouciance dans le bonheur de la saison. — Au soir, mon père savait tout. Il effleura mon front de ses
3240 èvres sans une parole quand je vins lui souhaiter le bonsoir. Le lendemain, ses cheveux avaient légèrement blanchi. Il me
3241 ne parole quand je vins lui souhaiter le bonsoir. Le lendemain, ses cheveux avaient légèrement blanchi. Il me regardait av
3242 un sourire de mon amie quand il voulut m’adresser la parole après un silence vertigineux. Il vit mon sourire et pleura. Al
3243 mon corps tout entier, je criai un juron, claquai la porte et courus dans ma chambre. Une demi-heure plus tard, j’étais à
3244 s ma chambre. Une demi-heure plus tard, j’étais à la gare, j’écrivais un mot d’adieu à ma maîtresse d’une nuit et je parta
3245 rection quelconque. Il advint que ce fut celle de l’ Italie. La lumière, mon pays natal ! — Je vécus d’articles sur la mode
3246 elconque. Il advint que ce fut celle de l’Italie. La lumière, mon pays natal ! — Je vécus d’articles sur la mode et la pol
3247 mière, mon pays natal ! — Je vécus d’articles sur la mode et la politique, que j’envoyais à divers journaux. Un jour, parc
3248 pays natal ! — Je vécus d’articles sur la mode et la politique, que j’envoyais à divers journaux. Un jour, parcourant un q
3249 pier, je lus mon nom en grosses lettres : c’était l’ annonce du décès de mon père. » J’étais assis à la terrasse ensoleillé
3250 l’annonce du décès de mon père. » J’étais assis à la terrasse ensoleillée d’un café ; une brise passa, et une femme en rob
3251 doucement… Je me levai sans payer, je partis par les rues, une joie violente commençait à m’envahir, contre laquelle je lu
3252 chaque tour du tambour des bouffées de musique. » La femme en bleu dansait en regardant au plafond. Après deux tangos, nou
3253 ous montions ensemble dans une chambre d’hôtel où l’ on ne voyait d’abord qu’un bouquet transfiguré par la lumière et que r
3254 n ne voyait d’abord qu’un bouquet transfiguré par la lumière et que reflétaient de nombreuses glaces. Les fenêtres que j’o
3255 lumière et que reflétaient de nombreuses glaces. Les fenêtres que j’ouvris firent tourner des soleils sur les parois clair
3256 êtres que j’ouvris firent tourner des soleils sur les parois claires. Du balcon, on voyait la mer, des bateaux, des nuages,
3257 eils sur les parois claires. Du balcon, on voyait la mer, des bateaux, des nuages, une avenue et ses autos rouges, tout un
3258 s autos rouges, tout un couchant de grand port de la Méditerranée. Nous nous aimâmes en sifflotant encore par instants l’a
3259 us nous aimâmes en sifflotant encore par instants l’ air de la dernière danse, mais nous avions aussi envie de pleurer, à c
3260 thousiasme juvénile, c’est-à-dire cynique, toutes les offres du hasard, ce poète immoral et malicieux. » Je ne sais dans qu
3261 al et malicieux. » Je ne sais dans quel rapide de l’ Europe centrale — région où l’on est forcé de prendre conscience de so
3262 dans quel rapide de l’Europe centrale — région où l’ on est forcé de prendre conscience de soi-même — je découvris une nuit
3263 t en moi reniait obscurément. Je sentais bien que le ressort secret de la vertu dans laquelle on m’avait emprisonné c’étai
3264 urément. Je sentais bien que le ressort secret de la vertu dans laquelle on m’avait emprisonné c’était un bas opportunisme
3265 ocial, résultante des paresses accumulées de tous les cerveaux bourgeois incapables de concevoir un monde sans vieilles fil
3266 ns gendarmes. Je sais bien ce que vous me direz : Les millions que je pourrais leur soustraire ne compenseront jamais cette
3267 eront jamais cette escroquerie morale dont je fus la victime, ce vol de quelques joies parfaites de ma jeunesse… Mais il e
3268 … Mais il est trop tard, Monsieur, pour critiquer les modalités de ma vengeance. Veuillez ne voir dans la confusion où je p
3269 modalités de ma vengeance. Veuillez ne voir dans la confusion où je parais être engagé, du plan moral avec l’économique,
3270 sion où je parais être engagé, du plan moral avec l’ économique, qu’une expression nouvelle, et non dénuée d’ironie, de mon
3271 on mépris pour ce qu’ils appellent, ridiculement, les fondements mêmes de la société. » C’est avec le produit du vol d’un t
3272 appellent, ridiculement, les fondements mêmes de la société. » C’est avec le produit du vol d’un tronc de chapelle que j’
3273 les fondements mêmes de la société. » C’est avec le produit du vol d’un tronc de chapelle que j’édifiai à mes parents un
3274 au sur lequel je fis graver : Prêté — rendu, pour la gloire de l’Église. (Ici, il but une gorgée et prit un temps.) » Je v
3275 je fis graver : Prêté — rendu, pour la gloire de l’ Église. (Ici, il but une gorgée et prit un temps.) » Je vous fais grâc
3276 n temps.) » Je vous fais grâce, poursuivit-il, de la chronique de ma vie de rat d’hôtel et de sleepings ; encore que… Bref
3277 e… Bref, depuis quelques mois, je m’amuse à jouer le pickpocket. Cela permet, avec un minimum d’adresse, de découvrir cert
3278 s auparavant, et pas toujours défavorable, croyez- le bien… Le goût de la propriété étant à mon sens l’un des plus vulgaire
3279 ant, et pas toujours défavorable, croyez-le bien… Le goût de la propriété étant à mon sens l’un des plus vulgaires et des
3280 toujours défavorable, croyez-le bien… Le goût de la propriété étant à mon sens l’un des plus vulgaires et des plus généra
3281 ndus, j’ai vite fait de classer mon monde d’après les quelques réactions élémentaires qui ne manquent jamais de succéder au
3282 au moindre vol. » J’ajouterai, cher Monsieur, que l’ analyse psychologique n’est pas mon fort. Je me contente de quelques o
3283 oriques que je tiens pour vraies, et j’en vérifie les manifestations vivantes avec une prodigalité d’épreuves, contre-épreu
3284 tre-épreuves, variantes et enjolivures où je vois le véritable intérêt de ma vie. C’est vous dire que seule une certaine c
3285 C’est vous dire que seule une certaine caresse de l’ événement naissant peut encore m’émouvoir. C’est un plaisir de chaque
3286 sir de chaque minute auquel succède immédiatement le sommeil. Je rêve beaucoup. Cela explique, m’a-t-on dit, le peu de goû
3287 l. Je rêve beaucoup. Cela explique, m’a-t-on dit, le peu de goût que j’ai pour la poésie imprimée. » J’allais oublier de v
3288 lique, m’a-t-on dit, le peu de goût que j’ai pour la poésie imprimée. » J’allais oublier de vous dire qu’on me nomme Saint
3289 n me nomme Saint-Julien. Vous n’ignorez point que l’ on considère ce saint comme le patron des voyageurs… » Saint-Julien pa
3290 n’ignorez point que l’on considère ce saint comme le patron des voyageurs… » Saint-Julien parut satisfait de cette dernièr
3291 gorgées d’eau minérale. Isidore sentit alors que la bienséance l’obligeait à émettre une opinion, même la plus générale e
3292 minérale. Isidore sentit alors que la bienséance l’ obligeait à émettre une opinion, même la plus générale et la moins com
3293 ienséance l’obligeait à émettre une opinion, même la plus générale et la moins compromettante, sur cette vie dont le récit
3294 t à émettre une opinion, même la plus générale et la moins compromettante, sur cette vie dont le récit n’avait pas laissé
3295 le et la moins compromettante, sur cette vie dont le récit n’avait pas laissé que de l’agacer en maint endroit. « Une chos
3296 cette vie dont le récit n’avait pas laissé que de l’ agacer en maint endroit. « Une chose avant tout me frappe — dit-il, lâ
3297 iments, ce qui est de mauvaise politique, — c’est l’ extraordinaire netteté de votre vie. Elle est sans bavures, sans rétic
3298 herche ce qu’on est convenu d’appeler — pardonnez la lourdeur de l’expression — une règle de vie. Mais, je vous l’avouerai
3299 est convenu d’appeler — pardonnez la lourdeur de l’ expression — une règle de vie. Mais, je vous l’avouerai, ce qui me ret
3300 de l’expression — une règle de vie. Mais, je vous l’ avouerai, ce qui me retient de tirer de votre conduite les conclusions
3301 rai, ce qui me retient de tirer de votre conduite les conclusions morales qu’elle paraît impliquer, c’est ce caractère de,
3302 conscience ! qui s’attache à vos faits et gestes. L’ on croirait ouïr parfois le récit de quelqu’une de ces farces d’étudia
3303 à vos faits et gestes. L’on croirait ouïr parfois le récit de quelqu’une de ces farces d’étudiants qui ne sont que la trad
3304 lqu’une de ces farces d’étudiants qui ne sont que la traduction en actes de jeux de mots plus ou moins cruels… » — Je vous
3305 rrompit Saint-Julien, par pitié pour Isidore dont la sincérité tournait vite à l’agressif — effet d’une timidité naturelle
3306 ié pour Isidore dont la sincérité tournait vite à l’ agressif — effet d’une timidité naturelle dont il paraissait lui-même
3307 né. En deux mots, vous ne me trouvez pas sérieux. Le reproche est grave. Je ne saurais y répondre. Je pourrais vous dire q
3308 ez un peu potache, il n’est pas prouvé par là que le potache n’ait point raison. Mais justement je n’éprouve aucun désir d
3309 conque est aussi profondément persuadé que moi de l’ absurdité radicale de notre vie, la moindre farce, le moindre geste co
3310 adé que moi de l’absurdité radicale de notre vie, la moindre farce, le moindre geste convenu dans le genre « révolté » pre
3311 bsurdité radicale de notre vie, la moindre farce, le moindre geste convenu dans le genre « révolté » prend une saveur de r
3312 , la moindre farce, le moindre geste convenu dans le genre « révolté » prend une saveur de raillerie assez amère. Et peut-
3313 découvrir derrière certaines de mes plaisanteries la dérision secrète qu’elles masquent par caprice. .....................
3314  180-185. t. Une note de bas de page indique : «  La rédaction rappelle que les idées émises dans la Revue de Belles-Lettr
3315 bas de page indique : « La rédaction rappelle que les idées émises dans la Revue de Belles-Lettres sont propres à leur aute
3316 « La rédaction rappelle que les idées émises dans la Revue de Belles-Lettres sont propres à leur auteur et qu’elles n’enga
60 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Conseils à la jeunesse (mai 1927)
3317 Conseils à la jeunesse (mai 1927)u « On a reproché bien des choses aux romantiqu
3318 « On a reproché bien des choses aux romantiques : le goût du suicide, l’habitude de boire et de fumer excessivement, leurs
3319 des choses aux romantiques : le goût du suicide, l’ habitude de boire et de fumer excessivement, leurs amours, l’égoïsme,
3320 de boire et de fumer excessivement, leurs amours, l’ égoïsme, le mépris de la réalité, l’exaltation maladive de l’imaginati
3321 de fumer excessivement, leurs amours, l’égoïsme, le mépris de la réalité, l’exaltation maladive de l’imagination et de la
3322 essivement, leurs amours, l’égoïsme, le mépris de la réalité, l’exaltation maladive de l’imagination et de la sensibilité,
3323 leurs amours, l’égoïsme, le mépris de la réalité, l’ exaltation maladive de l’imagination et de la sensibilité, l’atrophie
3324 le mépris de la réalité, l’exaltation maladive de l’ imagination et de la sensibilité, l’atrophie du sens critique sous tou
3325 ité, l’exaltation maladive de l’imagination et de la sensibilité, l’atrophie du sens critique sous toutes ses formes : rai
3326 n maladive de l’imagination et de la sensibilité, l’ atrophie du sens critique sous toutes ses formes : raison, jugement, s
3327 es formes : raison, jugement, simple bon sens, et l’ ignorance systématique, le mépris enfin de tous les principes qui sont
3328 nt, simple bon sens, et l’ignorance systématique, le mépris enfin de tous les principes qui sont à la base de la société m
3329 l’ignorance systématique, le mépris enfin de tous les principes qui sont à la base de la société même. »   Ceci est tiré d’
3330 le mépris enfin de tous les principes qui sont à la base de la société même. »   Ceci est tiré d’un livre récent sur Aloy
3331 enfin de tous les principes qui sont à la base de la société même. »   Ceci est tiré d’un livre récent sur Aloysius Bertra
3332 proches s’adressent, ou bien plutôt — vous alliez le dire — aux surréalistes ?   Si le mal du siècle consistait véritablem
3333 t — vous alliez le dire — aux surréalistes ?   Si le mal du siècle consistait véritablement dans ces quelques effets, nous
3334 ans un petit article du Journal de Genève sur «  La maladie du siècle », écrit : « Plante des pommes de terre, jeune homm
3335 de terre, jeune homme ! Quand tu seras au bout de la 20e ligne de 200 mètres, ce qui représente quatre kilomètres de plant
3336 e qui représente quatre kilomètres de plantation, le siècle ne sera plus malade, les temps seront guéris de leur crise, le
3337 res de plantation, le siècle ne sera plus malade, les temps seront guéris de leur crise, les valeurs auront retrouvé leur s
3338 us malade, les temps seront guéris de leur crise, les valeurs auront retrouvé leur stabilité, et comme M. Albert Muret dont
3339 uvé leur stabilité, et comme M. Albert Muret dont le Journal de Genève parlait naguère, tu mangeras avec appétit une pou
3340 ent chez des jeunes « et qui pensent » ce goût de l’ évasion caractéristique de tous les « vices romantiques ». — Citez-m’e
3341 nt » ce goût de l’évasion caractéristique de tous les « vices romantiques ». — Citez-m’en de ces phénomènes ! — Mon Dieu, q
3342 Il y aurait, par exemple, ce fait du triomphe de la Machine ; ce fait de la révolution russe… cet autre fait de la guerre
3343 e, ce fait du triomphe de la Machine ; ce fait de la révolution russe… cet autre fait de la guerre… et puis, tenez ! ce fa
3344 ce fait de la révolution russe… cet autre fait de la guerre… et puis, tenez ! ce fait surtout de la sacro-sainte Raison ut
3345 de la guerre… et puis, tenez ! ce fait surtout de la sacro-sainte Raison utilitaire au service des sacro-saints Principes
3346 desquels tout se ligue aujourd’hui pour anéantir la seule chose qui reste à nos yeux sacro-sainte : la liberté. Alors n’e
3347 a seule chose qui reste à nos yeux sacro-sainte : la liberté. Alors n’est-ce pas, merci du conseil, Monsieur Y. Z., de ce
3348 ches pour enseigner cette méthode à leurs petits. Le « satisfait » est un être inadmissible aujourd’hui. À plus forte rais
3349 re inadmissible aujourd’hui. À plus forte raison, le satisfait artificiel. u. Rougemont Denis de, « Conseils à la jeune
3350 rtificiel. u. Rougemont Denis de, « Conseils à la jeunesse », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fribou
61 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Pierre Girard, Connaissez mieux le cœur des femmes (juillet 1927)
3351 Pierre Girard, Connaissez mieux le cœur des femmes (juillet 1927)am Quand vous avez fermé ce petit li
3352 fermé ce petit livre, vous partez en chantonnant le titre sur un air sentimental, bien décidé au fond, à retrouver Patsy,
3353 timental, bien décidé au fond, à retrouver Patsy, l’ Irlandaise perdue par cet improbable et sympathique Paterne. Sous le f
3354 e par cet improbable et sympathique Paterne. Sous le fallacieux prétexte d’une flânerie de saison, vous vous attardez aux
3355 Justement, voici Pierre Girard : lui seul connaît l’ adresse de Patsy, mais il ne veut pas vous la donner. Alors pour vous
3356 naît l’adresse de Patsy, mais il ne veut pas vous la donner. Alors pour vous venger, vous lui dites que, « d’abord », son
3357 re n’est pas sérieux. Il sourit. Vous ajoutez que le lyrisme des noms géographiques vous fatigue ; que c’est une vraie man
3358 lobe dans son voyage « est arrivé à un endroit de l’ éther où il y a du bonheur ». Vous reconnaissez que Pierre Girard est
3359 son aisance. Vous accordez que s’il force un peu la dose de fantaisie, c’est plutôt par excès de facilité que par recherc
3360 ilité que par recherche. Vous voilà même tenté de l’ en féliciter. Bien plus, vous découvrez dans ses fantoches une malicie
3361 nous seraient épargnés si nous ne regardions que les jambes des femmes », dit-il, pour vous apprendre ! — sans se douter q
3362 un devoir de ce plaisir. Un devoir !… Car hélas, l’ on n’est pas impunément concitoyen de cet oncle Abraham qui interdit à
3363 Abraham qui interdit à Paterne son neveu de fumer le matin, de sortir la nuit, et qui lui fait jurer sur la Bible de ne pa
3364 à Paterne son neveu de fumer le matin, de sortir la nuit, et qui lui fait jurer sur la Bible de ne pas entrer dans les ca
3365 tin, de sortir la nuit, et qui lui fait jurer sur la Bible de ne pas entrer dans les cafés. Et puis, c’est égal, ce soir,
3366 lui fait jurer sur la Bible de ne pas entrer dans les cafés. Et puis, c’est égal, ce soir, tout cela est sans importance, c
3367 soir, tout cela est sans importance, car voici «  l’ heure des petits arbres pourpres, l’heure où dans les bibliothèques dé
3368 , car voici « l’heure des petits arbres pourpres, l’ heure où dans les bibliothèques désertes glisse un grand souffle obliq
3369 heure des petits arbres pourpres, l’heure où dans les bibliothèques désertes glisse un grand souffle oblique plein de fraîc
3370 « [Compte rendu] Pierre Girard, Connaissez mieux le cœur des femmes  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genè
62 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). La part du feu. Lettres sur le mépris de la littérature (juillet 1927)
3371 La part du feu. Lettres sur le mépris de la littérature (juillet 1927)v
3372 La part du feu. Lettres sur le mépris de la littérature (juillet 1927)v I Parler littérature
3373 La part du feu. Lettres sur le mépris de la littérature (juillet 1927)v I Parler littérature Si je pronon
3374 927)v I Parler littérature Si je prononce le nom de tel de vos confrères, si je dis : « Avez-vous lu… », vous voil
3375 « Avez-vous lu… », vous voilà rouge ; et sur moi les foudres de votre paradis poétique. Si je cite tel auteur dont nous fî
3376 mes notre nourriture une saison de naguère, voilà le rictus de votre bouche, une injure de pythie. Vous dites de ce conte 
3377 n goût qu’on aurait pour Nietzsche : que c’est de la littérature. Alors, quelque paysan du Danube survenant : — Je vous cr
3378 écrivain ? — Hélas ! soupirez-vous. Mais j’ai tué la littérature en moi, n’en parlez plus, j’en sors, je l’abandonne… Mais
3379 ttérature en moi, n’en parlez plus, j’en sors, je l’ abandonne… Mais notre paysan, rusé : — Vous l’abandonnez ? Pour quoi ?
3380 je l’abandonne… Mais notre paysan, rusé : — Vous l’ abandonnez ? Pour quoi ? — Pour la vie ! Or je pense, à part moi : j’a
3381 , rusé : — Vous l’abandonnez ? Pour quoi ? — Pour la vie ! Or je pense, à part moi : j’ai lu ça quelque part. Voyez ma fra
3382 ennent soin que leurs sincérités gardent au moins l’ excuse d’une audace qu’ils escomptent scandaleuse. Mais voici un bar o
3383 in de mépris pour Paul Morand par qui découvrîtes le charme de ces lieux. Vous composez un cocktail en guise de métaphore,
3384 jour au Grand Écart… », dit quelqu’un. À ce coup, l’ évocation de Cocteau fait fleurir sur vos lèvres le mot de Cambronne :
3385 ’évocation de Cocteau fait fleurir sur vos lèvres le mot de Cambronne : hommage à Louis Aragon. Ce cristal est une citatio
3386 Et des phrases, des cris, des mots. Au défaut de l’ ivresse naissante se glisse un poème où vous aimiez à la folie votre d
3387 sse naissante se glisse un poème où vous aimiez à la folie votre douleur. Narcisse se contemple au miroir de son monocle.
3388 il se noie dans un verre à liqueur. Poisson dans l’ eau, plumes dans le vent, poète au bar, le paradis n’est pas si cher.
3389 verre à liqueur. Poisson dans l’eau, plumes dans le vent, poète au bar, le paradis n’est pas si cher. Il y en a aussi qui
3390 on dans l’eau, plumes dans le vent, poète au bar, le paradis n’est pas si cher. Il y en a aussi qui posent pour le diable
3391 ’est pas si cher. Il y en a aussi qui posent pour le diable et ne se baignent que dans des bénitiers : on voit trop qu’ils
3392 : on voit trop qu’ils trouvent ça pittoresque. Et le plaisir d’être nu devant un public supposé dévot, et qui n’ose en cro
3393 n’ose en croire sa pudeur, et qui doute enfin de l’ impossibilité des miracles ! Quelles voluptés plus subtiles et plus ai
3394 e bois pour en faire des poèmes. Alors je cherche les raisons de votre indignation, quand il m’échappe une citation. Seraie
3395 ion, quand il m’échappe une citation. Seraient-ce les guillemets qui vous choquent ?   La vie ! — proclamiez-vous… Soit. Ma
3396 Seraient-ce les guillemets qui vous choquent ?   La vie ! — proclamiez-vous… Soit. Mais maintenant je vais me fâcher chaq
3397 « hallucinant » ou « purement gratuit ». C’est de la littérature. À force d’avoir mérité ces épithètes, pour nous laudati
3398 nous laudatives, vous vous étonnez aujourd’hui de la simplicité. Littérateur, va ! qui ne pouvez pas même admettre que la
3399 érateur, va ! qui ne pouvez pas même admettre que la simplicité est simple simplement. La bouche brûlée d’alcools, vous dé
3400 admettre que la simplicité est simple simplement. La bouche brûlée d’alcools, vous découvrez à l’eau un goût étrange. L’ea
3401 ent. La bouche brûlée d’alcools, vous découvrez à l’ eau un goût étrange. L’eau est incolore, inodore et sans saveur. Mais
3402 ’alcools, vous découvrez à l’eau un goût étrange. L’ eau est incolore, inodore et sans saveur. Mais fraîche. Ainsi, jusque
3403 ais fraîche. Ainsi, jusque dans votre mépris pour le pittoresque, vous témoignez d’un goût du bizarre qui révèle le littér
3404 e, vous témoignez d’un goût du bizarre qui révèle le littérateur. Nous ne pouvons pas faire que nous n’ayons rien lu. Vous
3405 lu. Vous refusez de compter avec cette réalité de la littérature qui est en nous (dangereuse tant que vous voudrez). Mais
3406 une ingratitude salutaire, c’est refus de limiter le mal. Je vous vois envahi par des démons que vous prétendez m’interdir
3407 ensées des autres, je vous ai mis un collier avec le nom du propriétaire ; tirez un peu sur la laisse, que j’éprouve la fe
3408 er avec le nom du propriétaire ; tirez un peu sur la laisse, que j’éprouve la fermeté de ma main. Je vous tiens. Je sais o
3409 taire ; tirez un peu sur la laisse, que j’éprouve la fermeté de ma main. Je vous tiens. Je sais où vous êtes. Vous n’allez
3410 n vante, — j’ai tué un amour naissant, à force de le crier sur les toits. Ainsi, parler littérature, c’est faire la part d
3411 ai tué un amour naissant, à force de le crier sur les toits. Ainsi, parler littérature, c’est faire la part du feu. Je dis
3412 les toits. Ainsi, parler littérature, c’est faire la part du feu. Je dis ces noms, ces opinions, ces titres de livres : to
3413 choque, s’annule. Poussière. Ma vie est ailleurs. L’ addition, s’il vous plaît. Il est temps de sortir de ce café et de ces
3414 afé et de ces jeux, simulacres de vie, qui sont à la vraie vie ce que le flirt est à l’amour. II Sur l’insuffisance de
3415 simulacres de vie, qui sont à la vraie vie ce que le flirt est à l’amour. II Sur l’insuffisance de la littérature On
3416 ie, qui sont à la vraie vie ce que le flirt est à l’ amour. II Sur l’insuffisance de la littérature On reconnaît un é
3417 raie vie ce que le flirt est à l’amour. II Sur l’ insuffisance de la littérature On reconnaît un écrivain, aujourd’hu
3418 flirt est à l’amour. II Sur l’insuffisance de la littérature On reconnaît un écrivain, aujourd’hui, à ce qu’il ne t
3419 e sournoises déclarations d’amour. Tel qui raille l’ Église et les curés, c’est qu’il se fait une très haute idée de la rel
3420 déclarations d’amour. Tel qui raille l’Église et les curés, c’est qu’il se fait une très haute idée de la religion. Ainsi,
3421 curés, c’est qu’il se fait une très haute idée de la religion. Ainsi, de la littérature : votre mépris pour ses réalisatio
3422 ait une très haute idée de la religion. Ainsi, de la littérature : votre mépris pour ses réalisations actuelles donne la m
3423 otre mépris pour ses réalisations actuelles donne la mesure de ce que vous attendez d’elle. Pour dire le fond de ma pensée
3424 mesure de ce que vous attendez d’elle. Pour dire le fond de ma pensée, je crois ce mépris et cette attente également exag
3425 ous savez bien que nous cherchons autre chose que la littérature. Que la littérature nous est un moyen seulement d’atteind
3426 ous cherchons autre chose que la littérature. Que la littérature nous est un moyen seulement d’atteindre et de préparer d’
3427 . Des choses dures, amères comme un destin, comme le goût d’une pierre rêche sur ta langue et grinçante sous ta dent. Des
3428 intenses que tout se fond catastrophiquement dans l’ infini de la seconde. Des peurs sans cause, plus vides que la mort. To
3429 la seconde. Des peurs sans cause, plus vides que la mort. Toutes ces choses mystiques, c’est-à-dire réelles, c’est-à-dire
3430 nous importe véritablement n’est dicible. (Depuis le temps qu’on sait que la lettre tue ce qu’elle prétend exprimer ; depu
3431 nt n’est dicible. (Depuis le temps qu’on sait que la lettre tue ce qu’elle prétend exprimer ; depuis le temps qu’on l’oubl
3432 a lettre tue ce qu’elle prétend exprimer ; depuis le temps qu’on l’oublie.) Vous me direz que la poésie, l’état poétique,
3433 qu’elle prétend exprimer ; depuis le temps qu’on l’ oublie.) Vous me direz que la poésie, l’état poétique, est notre seul
3434 epuis le temps qu’on l’oublie.) Vous me direz que la poésie, l’état poétique, est notre seul moyen de connaissance concrèt
3435 mps qu’on l’oublie.) Vous me direz que la poésie, l’ état poétique, est notre seul moyen de connaissance concrète du monde.
3436 oncrète du monde. Mais c’est à condition qu’on ne l’ écrive pas, même en pensée. La poésie pure écrite est inconcevable : c
3437 condition qu’on ne l’écrive pas, même en pensée. La poésie pure écrite est inconcevable : cela consisterait dans l’expres
3438 écrite est inconcevable : cela consisterait dans l’ expression directe de la réalité individuelle. Elle serait tellement i
3439  : cela consisterait dans l’expression directe de la réalité individuelle. Elle serait tellement incommunicable qu’il devi
3440 ement incommunicable qu’il deviendrait inutile de la publier. Et même, en passant à la limite, on peut imaginer que si ell
3441 rait inutile de la publier. Et même, en passant à la limite, on peut imaginer que si elle était réalisée, on ne s’en aperc
3442 ercevrait pas. Je pressens encore dans vos poèmes les plus obscurs des allusions furtives à certains états de la réalité. M
3443 bscurs des allusions furtives à certains états de la réalité. Mais plus les mots se plient à des exigences sémantiques — d
3444 urtives à certains états de la réalité. Mais plus les mots se plient à des exigences sémantiques — dont on connaît la porté
3445 ent à des exigences sémantiques — dont on connaît la portée sociale, — mariant l’utile à l’agréable selon les rites d’une
3446 es — dont on connaît la portée sociale, — mariant l’ utile à l’agréable selon les rites d’une esthétique ou d’une autre, pl
3447 on connaît la portée sociale, — mariant l’utile à l’ agréable selon les rites d’une esthétique ou d’une autre, plus ils per
3448 tée sociale, — mariant l’utile à l’agréable selon les rites d’une esthétique ou d’une autre, plus ils perdent leur pouvoir
3449 autre, plus ils perdent leur pouvoir de signifier les choses qui nous importent. Vous le savez. Alors vous les lâchez en li
3450 de signifier les choses qui nous importent. Vous le savez. Alors vous les lâchez en liberté, par haine de cette esthétiqu
3451 ses qui nous importent. Vous le savez. Alors vous les lâchez en liberté, par haine de cette esthétique ou de ce sens social
3452 de ce sens social, — et voilà qu’ils perdent même la problématique utilité de liaison qui était leur excuse dernière. Avou
3453 e liaison qui était leur excuse dernière. Avouons- le  : rien de ce qu’on peut exprimer n’a d’importance véritable. Alors, c
3454 cessons de nous battre contre des moulins à vent. La littérature, considérée du point de vue de la psychologie de l’écriva
3455 nt. La littérature, considérée du point de vue de la psychologie de l’écrivain, est un besoin organique, un peu anormal, q
3456 , considérée du point de vue de la psychologie de l’ écrivain, est un besoin organique, un peu anormal, que l’on satisfait
3457 ain, est un besoin organique, un peu anormal, que l’ on satisfait dans certains états de crise afin de retrouver son équili
3458 rarement, de quoi se payer un petit voyage. C’est l’ aveu d’une faiblesse secrète. Et c’est une réaction de défense. On che
3459 he un mot, une phrase, pour tuer une réalité dont la connaissance devient douloureuse et troublante. Ainsi la conscience t
3460 aissance devient douloureuse et troublante. Ainsi la conscience tue la connaissance. (« Connaissance » étant pris avec son
3461 ouloureuse et troublante. Ainsi la conscience tue la connaissance. (« Connaissance » étant pris avec son sens le plus prof
3462 sance. (« Connaissance » étant pris avec son sens le plus profond, qui est proche du sens biblique. Il ne s’agit pas de la
3463 est proche du sens biblique. Il ne s’agit pas de la connaissance abstraite et rationnelle dont le monde moderne se conten
3464 de la connaissance abstraite et rationnelle dont le monde moderne se contente, et qui tend à remplacer, grâce à la mental
3465 rne se contente, et qui tend à remplacer, grâce à la mentalité scolaire et primaire en particulier, toute connaissance vér
3466 ice ? Peut-être. Ou une maladie ? Ce n’est pas en l’ ignorant par attitude que vous la guérirez. Au contraire, il s’agit de
3467 Ce n’est pas en l’ignorant par attitude que vous la guérirez. Au contraire, il s’agit de l’envisager sans fièvre, pour en
3468 que vous la guérirez. Au contraire, il s’agit de l’ envisager sans fièvre, pour en circonscrire les effets. J’avoue prendr
3469 de l’envisager sans fièvre, pour en circonscrire les effets. J’avoue prendre à cette étude un intérêt bien vif. Et cela fo
3470 en n’est plus facile que d’y échapper. III Sur l’ utilité de la littérature Montherlant me paraît être le moins « lit
3471 facile que d’y échapper. III Sur l’utilité de la littérature Montherlant me paraît être le moins « littératuré » de
3472 é de la littérature Montherlant me paraît être le moins « littératuré » des écrivains d’aujourd’hui. Quand il parle lit
3473 rd’hui. Quand il parle littérature, il a toujours l’ air de mettre un peu les pieds dans le plat, de dire de ces choses qu’
3474 littérature, il a toujours l’air de mettre un peu les pieds dans le plat, de dire de ces choses qu’entre gens du métier l’o
3475 a toujours l’air de mettre un peu les pieds dans le plat, de dire de ces choses qu’entre gens du métier l’on a convenu de
3476 at, de dire de ces choses qu’entre gens du métier l’ on a convenu de passer sous silence. C’est assez drôle de voir le mala
3477 de passer sous silence. C’est assez drôle de voir le malaise des chers confrères. Ils ne pardonnent pas à ce toréador ses
3478 une Muse qu’ils n’ont pas coutume d’aborder sans le mot de passe de la dernière mode ou de savantes séductions. On sait b
3479 tes séductions. On sait bien, d’ailleurs, qu’elle les entretient. Bande de gigolos de la littérature ! Qu’on puisse vivre d
3480 eurs, qu’elle les entretient. Bande de gigolos de la littérature ! Qu’on puisse vivre de ça, je ne l’ai pas encore avalé.
3481 la littérature ! Qu’on puisse vivre de ça, je ne l’ ai pas encore avalé. On m’affirme que je n’y échapperai pas plus qu’un
3482 is, pour sûr, jamais vivre pour écrire16. De tous les prétextes que l’on a pu avancer pour légitimer l’activité littéraire,
3483 is vivre pour écrire16. De tous les prétextes que l’ on a pu avancer pour légitimer l’activité littéraire, le plus satisfai
3484 es prétextes que l’on a pu avancer pour légitimer l’ activité littéraire, le plus satisfaisant, celui qui rend le mieux com
3485 pu avancer pour légitimer l’activité littéraire, le plus satisfaisant, celui qui rend le mieux compte de la réalité, c’es
3486 littéraire, le plus satisfaisant, celui qui rend le mieux compte de la réalité, c’est André Breton qui l’a exprimé : « On
3487 s satisfaisant, celui qui rend le mieux compte de la réalité, c’est André Breton qui l’a exprimé : « On publie pour cherch
3488 ieux compte de la réalité, c’est André Breton qui l’ a exprimé : « On publie pour chercher des hommes, et rien de plus. » C
3489 pas tant, n’est-ce pas, à poursuivre une quête de l’ esprit. Et vous savez ce qu’elle nous vaut : les mépris, les haines do
3490 de l’esprit. Et vous savez ce qu’elle nous vaut : les mépris, les haines douloureuses ou grossières de tous ceux qui ne peu
3491 Et vous savez ce qu’elle nous vaut : les mépris, les haines douloureuses ou grossières de tous ceux qui ne peuvent ou ne v
3492 ous voyez bien que votre attitude méprisante pour la littérature vous ferait bientôt renier le signe le plus certain par l
3493 te pour la littérature vous ferait bientôt renier le signe le plus certain par lequel ces « quelques-uns » peuvent encore
3494 a littérature vous ferait bientôt renier le signe le plus certain par lequel ces « quelques-uns » peuvent encore se reconn
3495 e elle n’aurait plus d’autre excuse que celle-là, la littérature mériterait d’exister : qu’elle soit le langage chiffré de
3496 a littérature mériterait d’exister : qu’elle soit le langage chiffré de notre inquiétude et de nos naissantes certitudes,
3497 notre inquiétude et de nos naissantes certitudes, le seul langage peut-être qui nous permette d’échanger les signaux de l’
3498 ul langage peut-être qui nous permette d’échanger les signaux de l’angoisse sur quoi se fondent, en ces temps, nos amitiés
3499 -être qui nous permette d’échanger les signaux de l’ angoisse sur quoi se fondent, en ces temps, nos amitiés miraculeuses.
3500 ces temps, nos amitiés miraculeuses.   Voici donc les seules révélations que j’attende de la littérature : que celle des au
3501 oici donc les seules révélations que j’attende de la littérature : que celle des autres m’aide à prendre conscience de moi
3502 e la mienne m’aide à découvrir quelques êtres par le monde… Il ne s’agit plus de mépris ni d’adoration. J’ai défini une « 
3503 ont je parviens à tirer quelque bien pour ma vie. Le jour où les soins qu’elle exige me coûteront des sacrifices plus gran
3504 iens à tirer quelque bien pour ma vie. Le jour où les soins qu’elle exige me coûteront des sacrifices plus grands que les b
3505 exige me coûteront des sacrifices plus grands que les bienfaits que j’en escompte, il sera temps de songer sérieusement à m
3506 . 14. Paul Morand, auteur d’Ouvert et de Fermé la nuit, titres également scandaleux. Le Grand Écart, roman de M. Coctea
3507 et de Fermé la nuit, titres également scandaleux. Le Grand Écart, roman de M. Cocteau, a donné son nom à un établissement
3508 e lettres et poètes surréalistes. Paul Valéry, de l’ Académie française. Narcisse, personnage mythologique. — Là ! [NdE] Le
3509 . Narcisse, personnage mythologique. — Là ! [NdE] Le texte publié place également un appel de note plus bas dans le paragr
3510 ié place également un appel de note plus bas dans le paragraphe, après « Narcisse », sans qu’on sache s’il s’agit d’une er
3511 ache s’il s’agit d’une erreur ou d’une volonté de l’ auteur. 15. Variante : des puissances d’action. 16. J’en vois certai
3512 et ils en sont tout fiers : « Il n’y a plus qu’à les écrire ». v. Rougemont Denis de, « La part du feu. Lettres sur le m
3513 lus qu’à les écrire ». v. Rougemont Denis de, «  La part du feu. Lettres sur le mépris de la littérature », Revue de Bell
3514 Rougemont Denis de, « La part du feu. Lettres sur le mépris de la littérature », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchât
3515 is de, « La part du feu. Lettres sur le mépris de la littérature », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Fri
63 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Les derniers jours (juillet 1927)
3516 Les derniers jours (juillet 1927)w Ces « cahiers politiques et littéra
3517 r Drieu la Rochelle et Emmanuel Berl, sont — avec la Revue de Belles-Lettres — la seule revue de langue française où l’o
3518 Berl, sont — avec la Revue de Belles-Lettres — la seule revue de langue française où l’on dise la vérité librement et p
3519 -Lettres — la seule revue de langue française où l’ on dise la vérité librement et pour elle-même. Nous regrettons de n’en
3520 — la seule revue de langue française où l’on dise la vérité librement et pour elle-même. Nous regrettons de n’en pouvoir c
3521 s phrases de Drieu : « On voit déjà éclater dans les singuliers mouvements de sympathie qu’a provoqués l’infortune de l’Ac
3522 singuliers mouvements de sympathie qu’a provoqués l’ infortune de l’Action française la fraternité qui existe, en dépit des
3523 ements de sympathie qu’a provoqués l’infortune de l’ Action française la fraternité qui existe, en dépit des protestations
3524 qu’a provoqués l’infortune de l’Action française la fraternité qui existe, en dépit des protestations de haine, entre les
3525 xiste, en dépit des protestations de haine, entre les athées de l’antidémocratisme et les athées du Capitalisme quand il es
3526 t des protestations de haine, entre les athées de l’ antidémocratisme et les athées du Capitalisme quand il est conscient d
3527 haine, entre les athées de l’antidémocratisme et les athées du Capitalisme quand il est conscient de soi-même, et les athé
3528 apitalisme quand il est conscient de soi-même, et les athées du Socialisme et du Communisme. Tous ceux-là travaillent à l’a
3529 isme et du Communisme. Tous ceux-là travaillent à l’ achèvement d’un certain monde moderne, merveilleuse mécanique sévère e
3530 use mécanique sévère et dénuée de tout secours de l’ Esprit. Mais un jour viendra où les hommes se révolteront contre le jo
3531 tout secours de l’Esprit. Mais un jour viendra où les hommes se révolteront contre le joug atrocement positiviste des Maurr
3532 jour viendra où les hommes se révolteront contre le joug atrocement positiviste des Maurras et des Mussolini, des Lénine
3533 s et des Mussolini, des Lénine et des Ford. Alors les hommes hurleront un affreux besoin mystique. Vous réveillerez-vous po
3534 freux besoin mystique. Vous réveillerez-vous pour les désaltérer, dieux de l’Orient et de l’Occident ? » Certains cris qui
3535 us réveillerez-vous pour les désaltérer, dieux de l’ Orient et de l’Occident ? » Certains cris qui nous échappèrent n’avai
3536 vous pour les désaltérer, dieux de l’Orient et de l’ Occident ? » Certains cris qui nous échappèrent n’avaient pas d’autre
3537 e Chalgrin, Paris 16e. w. Rougemont Denis de, «  Les derniers jours », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-
64 1927, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Adieu au lecteur (juillet 1927)
3538 Adieu au lecteur (juillet 1927)x Nous passons la main au central de Genève, fidèles à la tradition — en ceci au moins.
3539 s passons la main au central de Genève, fidèles à la tradition — en ceci au moins. Nous nous retirons : et ce n’est pas qu
3540 ue nous ayons brûlé toutes nos cartouches. Ni que l’ indignation provoquée sur tous les bancs par certains de nos articles
3541 rtouches. Ni que l’indignation provoquée sur tous les bancs par certains de nos articles nous épouvante. Notre retraite est
3542 nte. Notre retraite est toute « statutaire » — si l’ on ose dire. Elle nous permet donc de considérer la situation sans fiè
3543 ’on ose dire. Elle nous permet donc de considérer la situation sans fièvre, sans lamentations d’adieu.   On nous a parfois
3544 tés de fous (avec ou sans sourire). Nous sommes à l’ âge de nous en réjouir. On s’est beaucoup étonné de nous voir « si dif
3545 s voir « si différents » de nos aînés. Nous avons l’ énorme candeur de trouver ça naturel. On nous a fait des reproches con
3546 n nous a fait des reproches contradictoires. Nous les additionnons : ils s’annulent. Il reste à dire deux mots sur la parad
3547 s : ils s’annulent. Il reste à dire deux mots sur la paradoxale situation intellectuelle d’une revue d’étudiants comme la
3548 tion intellectuelle d’une revue d’étudiants comme la nôtre. D’un côté, en effet, on s’accorde pour trouver légèrement ridi
3549 ridicule un jeune homme qui recherche activement la Sagesse (« Ça n’est pas de votre âge ! ») ; de l’autre, on se scandal
3550 rces — ou bien de ces affirmations dont en vérité l’ on n’a pas à se préoccuper de prévoir les conséquences, puisqu’il n’en
3551 en vérité l’on n’a pas à se préoccuper de prévoir les conséquences, puisqu’il n’en est aucune qui ne soit connue d’avance e
3552 une qui ne soit connue d’avance et stérilisée par la loi, les mœurs et l’habitude. Nous n’avons aucun remords d’avoir déçu
3553 ne soit connue d’avance et stérilisée par la loi, les mœurs et l’habitude. Nous n’avons aucun remords d’avoir déçu cette ca
3554 e d’avance et stérilisée par la loi, les mœurs et l’ habitude. Nous n’avons aucun remords d’avoir déçu cette catégorie de l
3555 t pas encore admis que jeunesse = révolution Tous les malentendus viennent de là. Nous sommes assez sages et assez fous pou
3556 sez fous pour ne pas en gémir et pour en accepter les conséquences. Et puis, de temps à autre, voici que nous parvient un s
3557 quelques découvertes qui nous consolèrent de tout le reste.   Et maintenant voici Genève et son mystère. Car chaque année,
3558 année, renaissant des décombres où s’anéantirent l’ honneur et la fortune de ses derniers rédacteurs, notre Revue-phénix s
3559 ssant des décombres où s’anéantirent l’honneur et la fortune de ses derniers rédacteurs, notre Revue-phénix s’élance avec
3560 ction absolument imprévisible. Que nous apportera le Central de Genève ? Tout est possible : la guerre et la paix, la trad
3561 ortera le Central de Genève ? Tout est possible : la guerre et la paix, la tradition, l’anarchie, l’ironie, le sentiment,
3562 tral de Genève ? Tout est possible : la guerre et la paix, la tradition, l’anarchie, l’ironie, le sentiment, un réveil des
3563 enève ? Tout est possible : la guerre et la paix, la tradition, l’anarchie, l’ironie, le sentiment, un réveil des vieux, M
3564 st possible : la guerre et la paix, la tradition, l’ anarchie, l’ironie, le sentiment, un réveil des vieux, Maurras, Lounat
3565 : la guerre et la paix, la tradition, l’anarchie, l’ ironie, le sentiment, un réveil des vieux, Maurras, Lounatcharsky, la
3566 e et la paix, la tradition, l’anarchie, l’ironie, le sentiment, un réveil des vieux, Maurras, Lounatcharsky, la SDN, et mê
3567 ent, un réveil des vieux, Maurras, Lounatcharsky, la SDN, et même Edmond Gillard, et même, et surtout, un miracle. Et puis
3568 eureux Jean… Et puis, en voilà assez pour ranimer la curiosité des plus blasés. Lecteur, fais confiance au Central de Genè
3569 s confiance au Central de Genève. Souviens-toi de la grandeur de ses traditions et ne va pas ajouter à cette lourde charge
3570 itions et ne va pas ajouter à cette lourde charge le poids de nos péchés. Ils sont bien nôtres. Et nous y tenons, ah ! com
65 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jean-Louis Vaudoyer, Premières amours (août 1927)
3571 oyer, Premières amours (août 1927)an Ces trois nouvelles n’ont guère de commun entre elles que la forme : ce sont de lentes ré
3572 s nouvelles n’ont guère de commun entre elles que la forme : ce sont de lentes réminiscences, des évocations intérieures,
3573 iniscences, des évocations intérieures, — et dans l’ abandon de leurs méandres, peu à peu, se précisent les circonstances d
3574 bandon de leurs méandres, peu à peu, se précisent les circonstances d’une aventure ancienne. Entre hier et demain : Une fe
3575 suicidé pour une femme qu’ils ont aimé tous deux ( L’ Amie du Mort.) Ou bien c’est le récit d’un été de vacances, quand les
3576 nt aimé tous deux (L’Amie du Mort.) Ou bien c’est le récit d’un été de vacances, quand les premières inquiétudes du désir
3577 rieure aux deux autres, est une réussite rare par la justesse de l’observation autant que par la sympathie de l’auteur pou
3578 autres, est une réussite rare par la justesse de l’ observation autant que par la sympathie de l’auteur pour ses héros. In
3579 e par la justesse de l’observation autant que par la sympathie de l’auteur pour ses héros. Indulgence et regrets, un ton q
3580 e de l’observation autant que par la sympathie de l’ auteur pour ses héros. Indulgence et regrets, un ton qui permet le tac
3581 s héros. Indulgence et regrets, un ton qui permet le tact dans la hardiesse. On reste ravi de tant d’adresse sous un air d
3582 lgence et regrets, un ton qui permet le tact dans la hardiesse. On reste ravi de tant d’adresse sous un air de facilité qu
3583 sse sous un air de facilité qui serait presque de la nonchalance. M. Vaudoyer ressuscite ces adolescences avec une tendre
3584 objet qu’il en saisit sans mièvrerie ni vulgarité la grâce un peu trouble et l’insidieuse mélancolie. Un détail piqué adro
3585 mièvrerie ni vulgarité la grâce un peu trouble et l’ insidieuse mélancolie. Un détail piqué adroitement, papillon dont frém
3586 iqué adroitement, papillon dont frémissent encore les ailes intactes ; l’évocation toute nervalienne en sa nostalgie, de la
3587 illon dont frémissent encore les ailes intactes ; l’ évocation toute nervalienne en sa nostalgie, de la jeune étrangère don
3588 l’évocation toute nervalienne en sa nostalgie, de la jeune étrangère dont on rêve à 15 ans ; et voici ce je ne sais quoi,
3589 oici ce je ne sais quoi, ce délice furtif, ce que l’ auteur lui-même appelle « cette vague poésie involontaire, intermitten
3590 à ces œuvrettes une si exquise humanité : par lui le « charme » reprend quelques droits. an. Rougemont Denis de, « [Com
66 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Edmond Jaloux, Rainer Maria Rilke (décembre 1927)
3591 ériser tout lyrisme germanique, il faudra opposer l’ excellent petit livre d’Edmond Jaloux. C’est un recueil de divers arti
3592 eil de divers articles et essais, dont certains — le Message de Rilke — sont du meilleur Jaloux, de ce Jaloux qui sait par
3593 qu’il partage avec eux ce goût du rêve préféré à la vie, — à ce qu’on appelle la vie. Jaloux, qui a rencontré plusieurs f
3594 ût du rêve préféré à la vie, — à ce qu’on appelle la vie. Jaloux, qui a rencontré plusieurs fois Rilke, trace de lui un po
3595 hotographie morale, mais une sorte de synthèse de l’ homme et de l’homme dans son œuvre, qui est peut-être plus vraie que l
3596 rale, mais une sorte de synthèse de l’homme et de l’ homme dans son œuvre, qui est peut-être plus vraie que le vrai, je veu
3597 dans son œuvre, qui est peut-être plus vraie que le vrai, je veux dire, plus rilkienne que ne fut Rilke. Rilke y apparaît
3598 telles qu’on en découvre chez certaines femmes et l’ on y voit une préciosité sentimentale qui touche à la névrose ou bien
3599 n y voit une préciosité sentimentale qui touche à la névrose ou bien simplement une clairvoyance exceptionnelle, suivant q
3600 ment une clairvoyance exceptionnelle, suivant que l’ on juge au nom d’une science ou au nom de l’esprit. « Pour moi qui aim
3601 t que l’on juge au nom d’une science ou au nom de l’ esprit. « Pour moi qui aime plus que tout la poésie, écrit Jaloux, aus
3602 om de l’esprit. « Pour moi qui aime plus que tout la poésie, écrit Jaloux, aussitôt que je vis Rilke, je compris que cet u
3603 arce qu’ils possèdent déjà, au moins obscurément, le sens des réalités sur lesquelles s’opère l’expérience. On ne prouve l
3604 ment, le sens des réalités sur lesquelles s’opère l’ expérience. On ne prouve la religion qu’aux convertis — qui n’ont plus
3605 sur lesquelles s’opère l’expérience. On ne prouve la religion qu’aux convertis — qui n’ont plus besoin de preuves. Il rest
3606 celui-ci tend un merveilleux piège sentimental à la raison raisonnante. Et qu’il nous mène un peu plus loin que la sempit
3607 sonnante. Et qu’il nous mène un peu plus loin que la sempiternelle « stratégie littéraire », de gazetiers ; au cœur de ces
3608 s sujets qui paraît-il, ne sont pas d’actualité : la solitude, la maladie, la peur. ao. Rougemont Denis de, « [Compte r
3609 paraît-il, ne sont pas d’actualité : la solitude, la maladie, la peur. ao. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Edmond
3610 e sont pas d’actualité : la solitude, la maladie, la peur. ao. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Edmond Jaloux, Rain
67 1927, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Léon Bopp, Interférences (décembre 1927)
3611 ment il a écrit, sur commande, une Promenade dans le Midi. Récit alerte et familier (un brin pédant et un brin vulgaire pa
3612 nt une création littéraire. Bien sûr, c’est cela, le malaise d’écrire. Bopp est très intelligent. Et plein de verve, et pa
3613 une effusion « lyrique », histoire de n’avoir pas l’ air dupe. Mais il a des façons parfois bien désobligeantes de voir jus
3614 scientifique, vis-à-vis du phénomène littéraire. La « Promenade » du héros de Bopp est une sorte de pensum. Cela rend peu
3615 oins convaincantes certaines de ses remarques sur l’ inspiration. D’autre part la simplicité de l’objet était nécessaire à
3616 de ses remarques sur l’inspiration. D’autre part la simplicité de l’objet était nécessaire à la sécurité de cette sorte d
3617 sur l’inspiration. D’autre part la simplicité de l’ objet était nécessaire à la sécurité de cette sorte d’analyse, — encor
3618 part la simplicité de l’objet était nécessaire à la sécurité de cette sorte d’analyse, — encore que Bopp ait prouvé dans
3619 facilité même est une réussite. Léon Bopp, c’est le combat d’un tempérament avec l’esprit de géométrie. Un scientisme ass
3620 Léon Bopp, c’est le combat d’un tempérament avec l’ esprit de géométrie. Un scientisme assez insolent et les joyeuses révo
3621 rit de géométrie. Un scientisme assez insolent et les joyeuses révoltes de sa verve « interfèrent » en lui. Et aussi (presq
68 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Princesse Bibesco, Catherine-Paris (janvier 1928)
3622 928)aq C’est un livre sympathique ; et il vaut la peine de le dire car la chose n’est pas si fréquente dans la producti
3623 est un livre sympathique ; et il vaut la peine de le dire car la chose n’est pas si fréquente dans la production actuelle.
3624 sympathique ; et il vaut la peine de le dire car la chose n’est pas si fréquente dans la production actuelle. On retrouve
3625 le dire car la chose n’est pas si fréquente dans la production actuelle. On retrouve aux premiers chapitres de Catherine-
3626 -Paris cette magie des sensations et des rêves de l’ enfance et cette féminité du sentiment, du tour de pensée même, qui fa
3627 opos. Mais dans ce roman, il n’y a plus seulement la femme, avec le miracle perpétuel de sa sensibilité. Il y a encore la
3628 ce roman, il n’y a plus seulement la femme, avec le miracle perpétuel de sa sensibilité. Il y a encore la princesse, le t
3629 iracle perpétuel de sa sensibilité. Il y a encore la princesse, le témoin intelligent et un peu ironique des cours d’Europ
3630 el de sa sensibilité. Il y a encore la princesse, le témoin intelligent et un peu ironique des cours d’Europe à la veille
3631 telligent et un peu ironique des cours d’Europe à la veille de la guerre. De cette espèce de collaboration résultent à la
3632 un peu ironique des cours d’Europe à la veille de la guerre. De cette espèce de collaboration résultent à la fois le défau
3633 cette espèce de collaboration résultent à la fois le défaut de composition du livre et sa richesse. L’enfance de Catherine
3634 le défaut de composition du livre et sa richesse. L’ enfance de Catherine à Paris est du roman pur ; la tournée des cours d
3635 L’enfance de Catherine à Paris est du roman pur ; la tournée des cours de l’Europe centrale, qu’elle subit comme jeune épo
3636 Paris est du roman pur ; la tournée des cours de l’ Europe centrale, qu’elle subit comme jeune épouse d’un comte polonais,
3637 i étonnent de la part d’une femme aussi femme que l’ auteur du Perroquet Vert. Mais là-dessus, le roman repart dans une tro
3638 e que l’auteur du Perroquet Vert. Mais là-dessus, le roman repart dans une troisième action (l’amour de Catherine pour un
3639 essus, le roman repart dans une troisième action ( l’ amour de Catherine pour un aviateur français) assez peu intéressante à
3640 téressante à vrai dire, parce qu’elle n’est pas à l’ échelle de ce qui la précède. Ces défaillances de la technique du roma
3641 re, parce qu’elle n’est pas à l’échelle de ce qui la précède. Ces défaillances de la technique du roman sont sauvées par u
3642 échelle de ce qui la précède. Ces défaillances de la technique du roman sont sauvées par un style brillant, plein de trouv
3643 mémoires. Mais si son début permet de croire que le Perroquet Vert ne restera pas une réussite isolée dans l’œuvre pureme
3644 quet Vert ne restera pas une réussite isolée dans l’ œuvre purement romanesque de la princesse Bibesco, Catherine-Paris ann
3645 ussite isolée dans l’œuvre purement romanesque de la princesse Bibesco, Catherine-Paris annonce par ailleurs un mémorialis
3646 once par ailleurs un mémorialiste captivant, dans la tradition d’un Ligne par exemple. aq. Rougemont Denis de, « [Compt
69 1928, Foi et Vie, articles (1928–1977). Le péril Ford (février 1928)
3647 Le péril Ford (février 1928)a On a trop dit que notre époque est chao
3648 e est chaotique. Je crois bien, au contraire, que l’ histoire n’a pas connu de période où les directions d’une civilisation
3649 raire, que l’histoire n’a pas connu de période où les directions d’une civilisation apparaissent plus nettement. Un certain
3650 ilisation apparaissent plus nettement. Un certain ordre s’élabore, ou, pour mieux dire, une organisation générale de la vie m
3651 ou, pour mieux dire, une organisation générale de la vie mondiale. Toutes les forces du temps y concourent obscurément ; e
3652 organisation générale de la vie mondiale. Toutes les forces du temps y concourent obscurément ; et, pour peu que cela cont
3653 nt ; et, pour peu que cela continue, pour peu que la bourgeoisie intellectuelle persiste à jouer l’autruche aux yeux clos,
3654 ue la bourgeoisie intellectuelle persiste à jouer l’ autruche aux yeux clos, l’avènement de cette organisation toute-puissa
3655 tuelle persiste à jouer l’autruche aux yeux clos, l’ avènement de cette organisation toute-puissante n’est plus qu’une ques
3656 s encore. Ici et là, quelques cris s’élèvent dans le désert d’une époque déjà presque abandonnée par l’Esprit. À l’heure d
3657 e désert d’une époque déjà presque abandonnée par l’ Esprit. À l’heure de toucher aux buts que sa civilisation poursuit dep
3658 ne époque déjà presque abandonnée par l’Esprit. À l’ heure de toucher aux buts que sa civilisation poursuit depuis près de
3659 ivilisation poursuit depuis près de deux siècles, l’ Occidental est saisi d’un étrange malaise. Il soupçonne, par éclairs,
3660 ut-être dans ces buts une absurdité fondamentale. L’ infaillible progrès aurait-il fait fausse route ? Est-il temps encore
3661 ait-il fait fausse route ? Est-il temps encore de le détourner du désastre spirituel vers lequel il entraîne l’Occident ?
3662 ner du désastre spirituel vers lequel il entraîne l’ Occident ? Cris dans le désert. Déserts des villes fiévreuses où le fr
3663 el vers lequel il entraîne l’Occident ? Cris dans le désert. Déserts des villes fiévreuses où le fracas des machines couvr
3664 dans le désert. Déserts des villes fiévreuses où le fracas des machines couvre déjà la plainte humaine. Il y a ceux qui p
3665 fiévreuses où le fracas des machines couvre déjà la plainte humaine. Il y a ceux qui pleurent le passé et ceux qui prophé
3666 déjà la plainte humaine. Il y a ceux qui pleurent le passé et ceux qui prophétisent, ceux qui jettent une imprécation stér
3667 tent une imprécation stérile et magnifique contre l’ époque et ceux qui cherchent à l’oublier dans le rêve, dans l’utopie,
3668 agnifique contre l’époque et ceux qui cherchent à l’ oublier dans le rêve, dans l’utopie, dans une belle doctrine… Il faudr
3669 e l’époque et ceux qui cherchent à l’oublier dans le rêve, dans l’utopie, dans une belle doctrine… Il faudrait d’abord pre
3670 ceux qui cherchent à l’oublier dans le rêve, dans l’ utopie, dans une belle doctrine… Il faudrait d’abord prendre conscienc
3671 ous, dans cette complaisance générale à proclamer le désordre du temps. On a peur de certaines évidences, on préfère affir
3672 n préfère affirmer que tout est incompréhensible. L’ homme moderne recule devant l’évidence de la banqueroute prochaine de
3673 t incompréhensible. L’homme moderne recule devant l’ évidence de la banqueroute prochaine de sa civilisation. Il répugne à
3674 ible. L’homme moderne recule devant l’évidence de la banqueroute prochaine de sa civilisation. Il répugne à admettre qu’un
3675 rder autour de nous et d’en croire nos yeux. I. L’ homme qui a réussi Je prends Henry Ford comme un symbole du monde m
3676 Henry Ford comme un symbole du monde moderne, et le meilleur, parce que personne ne s’est approché plus que lui du type i
3677 e ne s’est approché plus que lui du type idéal de l’ industriel et du capitaliste. Le succès immense de ses livres1, sa pop
3678 du type idéal de l’industriel et du capitaliste. Le succès immense de ses livres1, sa popularité universelle sont signes
3679 ivres1, sa popularité universelle sont signes que l’ époque a senti en lui son incarnation la plus parfaite. Qu’on ne m’acc
3680 ignes que l’époque a senti en lui son incarnation la plus parfaite. Qu’on ne m’accuse donc pas de caricaturer l’objet de m
3681 rfaite. Qu’on ne m’accuse donc pas de caricaturer l’ objet de ma critique pour faciliter l’accusation : je prends pour la j
3682 caricaturer l’objet de ma critique pour faciliter l’ accusation : je prends pour la juger ce que l’époque m’offre de mieux
3683 ique pour faciliter l’accusation : je prends pour la juger ce que l’époque m’offre de mieux réussi. Voici la vie de Ford,
3684 ter l’accusation : je prends pour la juger ce que l’ époque m’offre de mieux réussi. Voici la vie de Ford, telle qu’il la r
3685 er ce que l’époque m’offre de mieux réussi. Voici la vie de Ford, telle qu’il la raconte dans Ma vie et mon œuvre. Il naît
3686 e mieux réussi. Voici la vie de Ford, telle qu’il la raconte dans Ma vie et mon œuvre. Il naît fils de paysan. Il passe so
3687 des outils qu’il joue encore à présent », dit‑il. Le plus mémorable événement de ces années de jeunesse, son « chemin de D
3688 che au juste quelle dose d’« humour » il met dans l’ expression), c’est la rencontre d’une locomotive routière. « Depuis l’
3689 ose d’« humour » il met dans l’expression), c’est la rencontre d’une locomotive routière. « Depuis l’instant où, enfant de
3690 la rencontre d’une locomotive routière. « Depuis l’ instant où, enfant de 12 ans, j’aperçus cette machine de route, jusqu’
3691 a été de construire une bonne machine routière. » Les étapes de sa jeunesse sont : la construction d’un moteur à vapeur, pu
3692 hine routière. » Les étapes de sa jeunesse sont : la construction d’un moteur à vapeur, puis d’un moteur à explosion, enfi
3693 simple mécanicien chez Edison. Il fonde tôt après la Société des automobiles Ford, « et commence à réaliser son rêve, le t
3694 omobiles Ford, « et commence à réaliser son rêve, le type unique d’automobile utilitaire »2. Dès lors, c’est une suite de
3695 . Dès lors, c’est une suite de chiffres indiquant le progrès de sa production, d’année en année. On pourrait ajouter à ces
3696 ur lui qu’un résultat secondaire de son activité. Le but de sa vie n’a jamais été de s’enrichir. Son « rêve » était autre,
3697 s été de s’enrichir. Son « rêve » était autre, il l’ a réalisé comme il est donné à peu d’hommes de le faire : 7000 voiture
3698 l’a réalisé comme il est donné à peu d’hommes de le faire : 7000 voitures par jour, et la possibilité d’augmenter encore
3699 d’hommes de le faire : 7000 voitures par jour, et la possibilité d’augmenter encore cette production. Ford est le plus pui
3700 ité d’augmenter encore cette production. Ford est le plus puissant industriel du monde ; le plus riche, au point qu’il peu
3701 . Ford est le plus puissant industriel du monde ; le plus riche, au point qu’il peut parler d’égal à égal avec beaucoup d’
3702 peut parler d’égal à égal avec beaucoup d’États ; le plus parfait aussi. Son succès sans précédent le met à l’abri de tout
3703 le plus parfait aussi. Son succès sans précédent le met à l’abri de toutes les attaques, du point de vue technique. L’org
3704 parfait aussi. Son succès sans précédent le met à l’ abri de toutes les attaques, du point de vue technique. L’organisation
3705 n succès sans précédent le met à l’abri de toutes les attaques, du point de vue technique. L’organisation de ses usines, de
3706 e toutes les attaques, du point de vue technique. L’ organisation de ses usines, des salaires, des conditions de travail et
3707 et du paupérisme. C’est un résultat qu’on n’a pas le droit humainement de sous-estimer. Les griefs que les socialistes fon
3708 ’on n’a pas le droit humainement de sous-estimer. Les griefs que les socialistes font aux capitalistes européens ne sauraie
3709 droit humainement de sous-estimer. Les griefs que les socialistes font aux capitalistes européens ne sauraient l’atteindre.
3710 stes font aux capitalistes européens ne sauraient l’ atteindre. Au contraire, il a résolu la question sociale d’une façon q
3711 sauraient l’atteindre. Au contraire, il a résolu la question sociale d’une façon qui ne devrait pas déplaire aux doctrina
3712 mplète du monde, seule méthode capable d’empêcher les abus des capitalistes. Du même coup, en supprimant l’esclavage financ
3713 bus des capitalistes. Du même coup, en supprimant l’ esclavage financier de l’ouvrier, il supprime la principale cause avou
3714 même coup, en supprimant l’esclavage financier de l’ ouvrier, il supprime la principale cause avouée de la lutte des classe
3715 t l’esclavage financier de l’ouvrier, il supprime la principale cause avouée de la lutte des classes. Il se dégage de la l
3716 uvrier, il supprime la principale cause avouée de la lutte des classes. Il se dégage de la lecture de Ma vie et mon œuvre
3717 e avouée de la lutte des classes. Il se dégage de la lecture de Ma vie et mon œuvre une impression de netteté, de solidité
3718 pression de netteté, de solidité, de propreté. Si l’ on ajoute à cela le plaisir qu’on éprouve toujours au récit de succès
3719 , de solidité, de propreté. Si l’on ajoute à cela le plaisir qu’on éprouve toujours au récit de succès mirobolants, et le
3720 rouve toujours au récit de succès mirobolants, et le charme un peu facile mais fort goûté du grand public, de l’humour amé
3721 un peu facile mais fort goûté du grand public, de l’ humour américain, l’on comprendra sans peine la popularité mondiale de
3722 ort goûté du grand public, de l’humour américain, l’ on comprendra sans peine la popularité mondiale des « idées » d’Henry
3723 de l’humour américain, l’on comprendra sans peine la popularité mondiale des « idées » d’Henry Ford et des livres qui les
3724 iale des « idées » d’Henry Ford et des livres qui les répandent. L’on ne pourra qu’y applaudir, semble-t-il, en souhaitant
3725 s » d’Henry Ford et des livres qui les répandent. L’ on ne pourra qu’y applaudir, semble-t-il, en souhaitant que les indust
3726 ra qu’y applaudir, semble-t-il, en souhaitant que les industriels européens s’en inspirent toujours plus. Ford leur montre
3727 ns s’en inspirent toujours plus. Ford leur montre le chemin qu’ils seront bien obligés de prendre tôt ou tard. Il est préf
3728 e quelques chances encore de régler pacifiquement le conflit du capital et du travail. « Se fordiser ou mourir », écrivait
3729 vait récemment un économiste. Ford, perfection de l’ industriel, offre au monde moderne le premier exemple de son achèvemen
3730 exemple de son achèvement intégral. Il a atteint l’ objectif de la moderne civilisation occidentale. Voici donc venue l’he
3731 n achèvement intégral. Il a atteint l’objectif de la moderne civilisation occidentale. Voici donc venue l’heure de la juge
3732 oderne civilisation occidentale. Voici donc venue l’ heure de la juger. Le héros de l’époque, c’est l’homme qui a réussi. M
3733 lisation occidentale. Voici donc venue l’heure de la juger. Le héros de l’époque, c’est l’homme qui a réussi. Mais à quoi 
3734 ccidentale. Voici donc venue l’heure de la juger. Le héros de l’époque, c’est l’homme qui a réussi. Mais à quoi ? C’est la
3735 Voici donc venue l’heure de la juger. Le héros de l’ époque, c’est l’homme qui a réussi. Mais à quoi ? C’est la plus grave
3736 l’heure de la juger. Le héros de l’époque, c’est l’ homme qui a réussi. Mais à quoi ? C’est la plus grave question qu’on p
3737 , c’est l’homme qui a réussi. Mais à quoi ? C’est la plus grave question qu’on puisse poser à notre temps. II. M. Ford
3738 ser à notre temps. II. M. Ford a ses idées, ou la philosophie de ceux qui n’en veulent pas Nous avons dit tout à l’h
3739 eux qui n’en veulent pas Nous avons dit tout à l’ heure quel fut le but de la vie de Ford, sa « grande et constante ambi
3740 ent pas Nous avons dit tout à l’heure quel fut le but de la vie de Ford, sa « grande et constante ambition ». Il semble
3741 Nous avons dit tout à l’heure quel fut le but de la vie de Ford, sa « grande et constante ambition ». Il semble que toute
3742 éthode, technique — soit conditionnée jusque dans le détail par une idée fixe primitive. Considérons-la sous cet angle. Il
3743 e détail par une idée fixe primitive. Considérons- la sous cet angle. Il y a d’abord la vision de l’auto routière : naissan
3744 ve. Considérons-la sous cet angle. Il y a d’abord la vision de l’auto routière : naissance de sa passion froide et tenace.
3745 ns-la sous cet angle. Il y a d’abord la vision de l’ auto routière : naissance de sa passion froide et tenace. Il s’efforce
3746 sion froide et tenace. Il s’efforce d’en réaliser l’ objet par ses propres moyens, à un exemplaire ; puis, il fonde une usi
3747 plaire ; puis, il fonde une usine pour multiplier les réalisations. Bientôt, élargissant son ambition, il conçoit ce mythe
3748 on, il conçoit ce mythe extravagant du bonheur de l’ humanité par la possession d’automobiles Ford. Et, comme il est très i
3749 ce mythe extravagant du bonheur de l’humanité par la possession d’automobiles Ford. Et, comme il est très intelligent, il
3750 l est très intelligent, il a vite fait de démêler les conditions les plus rationnelles de la production, avec cette netteté
3751 lligent, il a vite fait de démêler les conditions les plus rationnelles de la production, avec cette netteté et cette décis
3752 e démêler les conditions les plus rationnelles de la production, avec cette netteté et cette décision qu’une passion conte
3753 te décision qu’une passion contenue peut donner à l’ homme d’action. Enfin, le voici en mesure de produire des quantités én
3754 n contenue peut donner à l’homme d’action. Enfin, le voici en mesure de produire des quantités énormes d’autos. Seulement,
3755 nt, pour pouvoir continuer, il faut vendre ; dans l’ intérêt de la production, il faut créer la consommation. La réclame s’
3756 oir continuer, il faut vendre ; dans l’intérêt de la production, il faut créer la consommation. La réclame s’en charge. Pa
3757  ; dans l’intérêt de la production, il faut créer la consommation. La réclame s’en charge. Par le procédé très simple de l
3758 de la production, il faut créer la consommation. La réclame s’en charge. Par le procédé très simple de la répétition, on
3759 réer la consommation. La réclame s’en charge. Par le procédé très simple de la répétition, on fait croire aux gens qu’ils
3760 éclame s’en charge. Par le procédé très simple de la répétition, on fait croire aux gens qu’ils ne peuvent plus vivre heur
3761 ls ne peuvent plus vivre heureux sans auto. Voilà l’ affaire lancée. La passion de Ford se donne libre cours. Il ne s’agit
3762 vivre heureux sans auto. Voilà l’affaire lancée. La passion de Ford se donne libre cours. Il ne s’agit plus maintenant qu
3763 À chaque page de ses livres, on pourrait relever les sophismes plus ou moins conscients par lesquels il prétend ramener le
3764 moins conscients par lesquels il prétend ramener le bénéfice de la production à celui du consommateur. Prenons cette peti
3765 ts par lesquels il prétend ramener le bénéfice de la production à celui du consommateur. Prenons cette petite phrase qui n
3766 i n’a l’air de rien : « Nul ne contestera que, si l’ on abaisse suffisamment les prix, on ne trouve toujours des clients, q
3767 l ne contestera que, si l’on abaisse suffisamment les prix, on ne trouve toujours des clients, quel que soit l’état du marc
3768 on ne trouve toujours des clients, quel que soit l’ état du marché. » Il semble que cela soit tout à l’avantage du client.
3769 ’état du marché. » Il semble que cela soit tout à l’ avantage du client. Mais cherchons un peu les causes réelles de cet ab
3770 out à l’avantage du client. Mais cherchons un peu les causes réelles de cet abaissement de prix — la concurrence n’étant bi
3771 u les causes réelles de cet abaissement de prix — la concurrence n’étant bien entendu qu’une cause accessoire. Dire que l’
3772 nt bien entendu qu’une cause accessoire. Dire que l’ état du marché est tel que le client n’achète plus, cela signifie parf
3773 accessoire. Dire que l’état du marché est tel que le client n’achète plus, cela signifie parfois que la marchandise est mo
3774 e client n’achète plus, cela signifie parfois que la marchandise est momentanément trop chère ; mais surtout que le besoin
3775 e est momentanément trop chère ; mais surtout que le besoin qu’on a de tel objet est satisfait ou a disparu. Il semble alo
3776 t est satisfait ou a disparu. Il semble alors que l’ industriel n’ait plus qu’à plier bagage. Mais c’est ici que Ford montr
3777 qu’à plier bagage. Mais c’est ici que Ford montre le bout de l’oreille, et que son but réel est la production pour elle-mê
3778 bagage. Mais c’est ici que Ford montre le bout de l’ oreille, et que son but réel est la production pour elle-même, non pas
3779 tre le bout de l’oreille, et que son but réel est la production pour elle-même, non pas le plaisir ou l’intérêt véritable
3780 ut réel est la production pour elle-même, non pas le plaisir ou l’intérêt véritable du client. Le besoin ayant disparu, la
3781 production pour elle-même, non pas le plaisir ou l’ intérêt véritable du client. Le besoin ayant disparu, la production de
3782 pas le plaisir ou l’intérêt véritable du client. Le besoin ayant disparu, la production devant se maintenir, il n’y a qu’
3783 rêt véritable du client. Le besoin ayant disparu, la production devant se maintenir, il n’y a qu’une solution : recréer le
3784 se maintenir, il n’y a qu’une solution : recréer le besoin. Pour cela, on abaisse les prix. Le client fait la comparaison
3785 lution : recréer le besoin. Pour cela, on abaisse les prix. Le client fait la comparaison. Il est impressionné par la baiss
3786 ecréer le besoin. Pour cela, on abaisse les prix. Le client fait la comparaison. Il est impressionné par la baisse, au poi
3787 n. Pour cela, on abaisse les prix. Le client fait la comparaison. Il est impressionné par la baisse, au point qu’il en oub
3788 ient fait la comparaison. Il est impressionné par la baisse, au point qu’il en oublie que cela ne l’intéresse plus réellem
3789 r la baisse, au point qu’il en oublie que cela ne l’ intéresse plus réellement. Il croit qu’il va gagner 5 francs en acheta
3790 acheté du tout. Autrement dit, il est trompé par la baisse. L’industriel comptait. La tromperie est préméditée. Et le sca
3791 tout. Autrement dit, il est trompé par la baisse. L’ industriel comptait. La tromperie est préméditée. Et le scandale, à mo
3792 est trompé par la baisse. L’industriel comptait. La tromperie est préméditée. Et le scandale, à mon sens, n’est pas que l
3793 ustriel comptait. La tromperie est préméditée. Et le scandale, à mon sens, n’est pas que l’industriel ait forcé (psycholog
3794 éditée. Et le scandale, à mon sens, n’est pas que l’ industriel ait forcé (psychologiquement) le client à faire une dépense
3795 as que l’industriel ait forcé (psychologiquement) le client à faire une dépense superflue ; le scandale est qu’il l’ait tr
3796 uement) le client à faire une dépense superflue ; le scandale est qu’il l’ait trompé sur ses véritables besoins. Car cela
3797 ire une dépense superflue ; le scandale est qu’il l’ ait trompé sur ses véritables besoins. Car cela va bien plus profond,
3798 régulation et d’alternances. Tel est ce sophisme, le paradoxe du bon marché. Celui de la réclame a même but, mêmes effets.
3799 ce sophisme, le paradoxe du bon marché. Celui de la réclame a même but, mêmes effets. Mais le plus grave est peut-être le
3800 elui de la réclame a même but, mêmes effets. Mais le plus grave est peut-être le sophisme du loisir. M. Guglielmo Ferrero
3801 t, mêmes effets. Mais le plus grave est peut-être le sophisme du loisir. M. Guglielmo Ferrero a fort bien montré, dans un
3802 ro a fort bien montré, dans un article intitulé «  Le grand paradoxe du monde moderne »3, ce qu’il y a de profondément anti
3803  »3, ce qu’il y a de profondément antihumain dans la conception fordienne de l’oisiveté. Ford a créé un second dimanche da
3804 dément antihumain dans la conception fordienne de l’ oisiveté. Ford a créé un second dimanche dans la semaine, « retouché l
3805 e l’oisiveté. Ford a créé un second dimanche dans la semaine, « retouché l’œuvre de la Création », comme dit Ferrero. Le b
3806 éé un second dimanche dans la semaine, « retouché l’ œuvre de la Création », comme dit Ferrero. Le bon peuple s’extasie. Il
3807 d dimanche dans la semaine, « retouché l’œuvre de la Création », comme dit Ferrero. Le bon peuple s’extasie. Il ne peut vo
3808 uché l’œuvre de la Création », comme dit Ferrero. Le bon peuple s’extasie. Il ne peut voir la duperie : ce jeu du chat et
3809 Ferrero. Le bon peuple s’extasie. Il ne peut voir la duperie : ce jeu du chat et de la souris ; si Ford relâche les ouvrie
3810 Il ne peut voir la duperie : ce jeu du chat et de la souris ; si Ford relâche les ouvriers et leur donne une apparence de
3811 ce jeu du chat et de la souris ; si Ford relâche les ouvriers et leur donne une apparence de liberté, c’est pour mieux les
3812 donne une apparence de liberté, c’est pour mieux les prendre dans son engrenage. L’emploi de leurs loisirs est prévu. Il e
3813 c’est pour mieux les prendre dans son engrenage. L’ emploi de leurs loisirs est prévu. Il est déterminé par la réclame, le
3814 de leurs loisirs est prévu. Il est déterminé par la réclame, les produits Ford qu’il faut user, etc. Il a pour but vérita
3815 isirs est prévu. Il est déterminé par la réclame, les produits Ford qu’il faut user, etc. Il a pour but véritable d’augment
3816 ut user, etc. Il a pour but véritable d’augmenter la consommation. Il rend plus complet l’esclavage de l’ouvrier, puisqu’i
3817 d’augmenter la consommation. Il rend plus complet l’ esclavage de l’ouvrier, puisqu’il englobe jusqu’à son repos dans le cy
3818 consommation. Il rend plus complet l’esclavage de l’ ouvrier, puisqu’il englobe jusqu’à son repos dans le cycle de la produ
3819 ouvrier, puisqu’il englobe jusqu’à son repos dans le cycle de la production. Cercle vicieux : plus la production s’intensi
3820 squ’il englobe jusqu’à son repos dans le cycle de la production. Cercle vicieux : plus la production s’intensifie, plus il
3821 le cycle de la production. Cercle vicieux : plus la production s’intensifie, plus il faut créer de besoins et de loisirs.
3822 plus il faut créer de besoins et de loisirs. Or, l’ industrie ne peut subsister qu’en progressant. Mais la nature humaine
3823 dustrie ne peut subsister qu’en progressant. Mais la nature humaine a des limites. Et le temps approche où elles seront at
3824 ressant. Mais la nature humaine a des limites. Et le temps approche où elles seront atteintes. On peut se demander jusqu’à
3825 qu’à quel point Ford est conscient des buts et de l’ avenir de son effort. Pour mon compte, je crois que l’idée fixe de pro
3826 enir de son effort. Pour mon compte, je crois que l’ idée fixe de produire peut très bien envahir un cerveau moderne au poi
3827 n’empêche pas notre industriel de philosopher sur les sujets les plus divers. Les aphorismes sont assez révélateurs de la m
3828 as notre industriel de philosopher sur les sujets les plus divers. Les aphorismes sont assez révélateurs de la mentalité ca
3829 el de philosopher sur les sujets les plus divers. Les aphorismes sont assez révélateurs de la mentalité capitaliste américa
3830 divers. Les aphorismes sont assez révélateurs de la mentalité capitaliste américaine. Voici, par exemple, une définition
3831 américaine. Voici, par exemple, une définition de la liberté : La liberté consiste à travailler pendant le temps convenab
3832 ici, par exemple, une définition de la liberté : La liberté consiste à travailler pendant le temps convenable et à gagner
3833 berté : La liberté consiste à travailler pendant le temps convenable et à gagner, par ce moyen, de quoi vivre convenablem
3834 ement tout en restant maître de régler à sa guise le détail de sa vie privée. Cette liberté particulière, et cent autres p
3835 e, et cent autres pareilles, composent, au total, la grande Liberté idéale et mettent de l’huile dans les rouages de la vi
3836 au total, la grande Liberté idéale et mettent de l’ huile dans les rouages de la vie quotidienne. Cette Liberté idéale ré
3837 grande Liberté idéale et mettent de l’huile dans les rouages de la vie quotidienne. Cette Liberté idéale réduite au rôle
3838 idéale et mettent de l’huile dans les rouages de la vie quotidienne. Cette Liberté idéale réduite au rôle d’huile dans l
3839 Cette Liberté idéale réduite au rôle d’huile dans les rouages, n’est-ce pas charmant et prometteur ? Et que dire de cette a
3840 ette admirable simplification : « Sur quoi repose la société ? Sur les hommes et les moyens grâce auxquels on cultive, on
3841 mplification : « Sur quoi repose la société ? Sur les hommes et les moyens grâce auxquels on cultive, on fabrique, on trans
3842 « Sur quoi repose la société ? Sur les hommes et les moyens grâce auxquels on cultive, on fabrique, on transporte. » « Tou
3843  » « Toute notre gloire est dans nos œuvres, dans le prix que nous payons à la terre la satisfaction de nos besoins. » — F
3844 t dans nos œuvres, dans le prix que nous payons à la terre la satisfaction de nos besoins. » — Ford se moque de la philoso
3845 s œuvres, dans le prix que nous payons à la terre la satisfaction de nos besoins. » — Ford se moque de la philosophie. Il
3846 satisfaction de nos besoins. » — Ford se moque de la philosophie. Il ne peut empêcher que son attitude ne porte un nom phi
3847 ations plus nettes encore : « Je ne considère pas les machines Ford simplement comme des machines. J’y vois la réalisation
3848 ines Ford simplement comme des machines. J’y vois la réalisation concrète d’une théorie qui tend à faire de ce monde un sé
3849 tend à faire de ce monde un séjour meilleur pour les hommes. » C’est le bonheur, le salut par l’auto. Philosophie réclame.
3850 monde un séjour meilleur pour les hommes. » C’est le bonheur, le salut par l’auto. Philosophie réclame. « Ce que j’ai à cœ
3851 our meilleur pour les hommes. » C’est le bonheur, le salut par l’auto. Philosophie réclame. « Ce que j’ai à cœur, aujourd’
3852 pour les hommes. » C’est le bonheur, le salut par l’ auto. Philosophie réclame. « Ce que j’ai à cœur, aujourd’hui, c’est de
3853 j’ai à cœur, aujourd’hui, c’est de démontrer que les idées mises en pratique chez nous ne concernent pas particulièrement
3854 ique chez nous ne concernent pas particulièrement les autos et les tracteurs, mais composent en quelque manière, un code un
3855 s ne concernent pas particulièrement les autos et les tracteurs, mais composent en quelque manière, un code universel ! » R
3856 e matérialiste ? Un seul doute effleure Ford vers la fin de son livre : Le problème de la production a été brillamment ré
3857 l doute effleure Ford vers la fin de son livre : Le problème de la production a été brillamment résolu… Mais nous nous ab
3858 e Ford vers la fin de son livre : Le problème de la production a été brillamment résolu… Mais nous nous absorbons trop da
3859 e pensons pas assez aux raisons que nous avons de le faire. Tout notre système de concurrence, tout notre effort de créati
3860 concurrence, tout notre effort de création, tout le jeu de nos facultés semblent dirigés uniquement vers la production ma
3861 de nos facultés semblent dirigés uniquement vers la production matérielle et vers la richesse qui en est le fruit. On ne
3862 uniquement vers la production matérielle et vers la richesse qui en est le fruit. On ne saurait mieux dire. Mais il faud
3863 duction matérielle et vers la richesse qui en est le fruit. On ne saurait mieux dire. Mais il faudrait en tirer des consé
3864 de technique. Il n’a pas senti qu’il touchait là le nœud vital du problème moderne. D’ailleurs, les idées générales de ce
3865 là le nœud vital du problème moderne. D’ailleurs, les idées générales de cette sorte sont rares dans son livre. En général,
3866 èmes techniques où son triomphe est facile. C’est le technicien parfait qui combat les techniciens imparfaits. Il ne se de
3867 st facile. C’est le technicien parfait qui combat les techniciens imparfaits. Il ne se demande jamais si la technique même
3868 echniciens imparfaits. Il ne se demande jamais si la technique même la plus perfectionnée mérite les sacrifices qu’elle ex
3869 its. Il ne se demande jamais si la technique même la plus perfectionnée mérite les sacrifices qu’elle exige de l’homme mod
3870 si la technique même la plus perfectionnée mérite les sacrifices qu’elle exige de l’homme moderne. Paradoxes plus ou moins
3871 fectionnée mérite les sacrifices qu’elle exige de l’ homme moderne. Paradoxes plus ou moins intéressés, optimisme d’homme à
3872 imisme d’homme à qui tout réussit, messianisme de la machine, méconnaissance glorieuse des forces spirituelles, le tout ag
3873 méconnaissance glorieuse des forces spirituelles, le tout agrémenté d’humour et exposé avec un simplisme qui emporte à cou
3874 t exposé avec un simplisme qui emporte à coup sûr l’ adhésion du gros public : telle est l’idéologie de celui que M. Cambon
3875 à coup sûr l’adhésion du gros public : telle est l’ idéologie de celui que M. Cambon, dans sa préface, égale aux plus gran
3876 sa préface, égale aux plus grands esprits de tous les temps. On me dira que Ford a mieux à faire que de philosopher. Je le
3877 a que Ford a mieux à faire que de philosopher. Je le veux. Mais si j’insiste un peu sur ses « idées », c’est pour souligne
3878 idées », c’est pour souligner ce hiatus étrange : l’ homme qu’on pourrait appeler le plus actif du monde, l’un de ceux qui
3879 e hiatus étrange : l’homme qu’on pourrait appeler le plus actif du monde, l’un de ceux qui influent le plus sur notre civi
3880 le plus actif du monde, l’un de ceux qui influent le plus sur notre civilisation, possède la philosophie la plus rudimenta
3881 influent le plus sur notre civilisation, possède la philosophie la plus rudimentaire. Le phénomène n’est pas nouveau en O
3882 us sur notre civilisation, possède la philosophie la plus rudimentaire. Le phénomène n’est pas nouveau en Occident, mais i
3883 ion, possède la philosophie la plus rudimentaire. Le phénomène n’est pas nouveau en Occident, mais il est ici tragiquement
3884 phie la plus rudimentaire. Le phénomène n’est pas nouveau en Occident, mais il est ici tragiquement aigu. Est-ce notre pensée q
3885 bien que notre temps ait prononcé définitivement le divorce de l’esprit et de l’action. III. Le fordisme contre l’Espr
3886 e temps ait prononcé définitivement le divorce de l’ esprit et de l’action. III. Le fordisme contre l’Esprit La formi
3887 noncé définitivement le divorce de l’esprit et de l’ action. III. Le fordisme contre l’Esprit La formidable erreur de
3888 nt le divorce de l’esprit et de l’action. III. Le fordisme contre l’Esprit La formidable erreur de la bourgeoisie mo
3889 esprit et de l’action. III. Le fordisme contre l’ Esprit La formidable erreur de la bourgeoisie moderne c’est de croi
3890 l’action. III. Le fordisme contre l’Esprit La formidable erreur de la bourgeoisie moderne c’est de croire que les c
3891 rdisme contre l’Esprit La formidable erreur de la bourgeoisie moderne c’est de croire que les choses pourront aller ain
3892 eur de la bourgeoisie moderne c’est de croire que les choses pourront aller ainsi longtemps encore. On se refuse à l’idée d
3893 ront aller ainsi longtemps encore. On se refuse à l’ idée d’une catastrophe, pourtant plus que probable, par crainte de se
3894 lus que probable, par crainte de se voir obligé à la révision des valeurs, la plus difficile et la plus grave : celle qu’o
3895 inte de se voir obligé à la révision des valeurs, la plus difficile et la plus grave : celle qu’on ne peut faire qu’au nom
3896 é à la révision des valeurs, la plus difficile et la plus grave : celle qu’on ne peut faire qu’au nom de l’Esprit et de se
3897 us grave : celle qu’on ne peut faire qu’au nom de l’ Esprit et de ses exigences. Mais le « rien de nouveau sous le soleil »
3898 e qu’au nom de l’Esprit et de ses exigences. Mais le « rien de nouveau sous le soleil » derrière lequel on se réfugie avec
3899 de ses exigences. Mais le « rien de nouveau sous le soleil » derrière lequel on se réfugie avec une paresse et une légère
3900 e avec une paresse et une légèreté inouïes, c’est le signe d’une complicité avec un état de choses funeste pour l’Esprit.
3901 ne complicité avec un état de choses funeste pour l’ Esprit. Si l’Esprit nous abandonne, c’est que nous avons voulu tenter
3902 avec un état de choses funeste pour l’Esprit. Si l’ Esprit nous abandonne, c’est que nous avons voulu tenter sans lui une
3903 e que nous pensions gratuite : nous avons cherché le bonheur dans le développement matériel, avec l’arrière-pensée sournoi
3904 ons gratuite : nous avons cherché le bonheur dans le développement matériel, avec l’arrière-pensée sournoise que, si cela
3905 é le bonheur dans le développement matériel, avec l’ arrière-pensée sournoise que, si cela ratait, on gardait toutes les au
3906 sournoise que, si cela ratait, on gardait toutes les autres chances. J’accorderai que le progrès matériel n’est pas mauvai
3907 rdait toutes les autres chances. J’accorderai que le progrès matériel n’est pas mauvais en soi. Mais par l’importance qu’i
3908 ogrès matériel n’est pas mauvais en soi. Mais par l’ importance qu’il a prise dans notre vie, il détourne la civilisation d
3909 ortance qu’il a prise dans notre vie, il détourne la civilisation de son but véritable : aller à l’Esprit, y conduire les
3910 ne la civilisation de son but véritable : aller à l’ Esprit, y conduire les peuples. Ainsi, détournant de l’essentiel une g
3911 son but véritable : aller à l’Esprit, y conduire les peuples. Ainsi, détournant de l’essentiel une grande part des forces
3912 rit, y conduire les peuples. Ainsi, détournant de l’ essentiel une grande part des forces humaines, il travaille contre l’E
3913 nde part des forces humaines, il travaille contre l’ Esprit. Rien n’est gratuit. Nous payons notre passion de posséder la m
3914 st gratuit. Nous payons notre passion de posséder la matière du prix de la seule possession véritable, la connaissance de
3915 s notre passion de posséder la matière du prix de la seule possession véritable, la connaissance de l’Esprit. C’est déjà u
3916 matière du prix de la seule possession véritable, la connaissance de l’Esprit. C’est déjà un fait d’expérience. Et qui n’e
3917 la seule possession véritable, la connaissance de l’ Esprit. C’est déjà un fait d’expérience. Et qui n’en pourrait citer un
3918 ple individuel ? Nous savons assez en quel mépris l’ homme d’affaires à l’américaine tient les choses de l’Esprit. Dans le
3919 savons assez en quel mépris l’homme d’affaires à l’ américaine tient les choses de l’Esprit. Dans le cas le plus favorable
3920 el mépris l’homme d’affaires à l’américaine tient les choses de l’Esprit. Dans le cas le plus favorable, « il se passera bi
3921 mme d’affaires à l’américaine tient les choses de l’ Esprit. Dans le cas le plus favorable, « il se passera bien de cette l
3922 à l’américaine tient les choses de l’Esprit. Dans le cas le plus favorable, « il se passera bien de cette littérature ». P
3923 ricaine tient les choses de l’Esprit. Dans le cas le plus favorable, « il se passera bien de cette littérature ». Plus tar
3924 symphonies, ou autres œuvres destinées à charmer les loisirs de personnes oisives et raffinées, réunies pour admirer mutue
3925 ement leur culture », dit Ford. Et tout est dit ! Le simplisme arrogant avec lequel, de nos jours, on tranche les grandes
3926 me arrogant avec lequel, de nos jours, on tranche les grandes questions humaines est une des manifestations les plus frappa
3927 des questions humaines est une des manifestations les plus frappantes de notre régression. Cette perte du sens de l’âme se
3928 antes de notre régression. Cette perte du sens de l’ âme se nomme bon sens américain. On en fait quelque chose de jovial et
3929 ophie. Mais, sans qu’on s’en doute, cela en prend la place. Les facultés de l’âme, inutilisées, s’atrophient. Pourvu, dit-
3930 s, sans qu’on s’en doute, cela en prend la place. Les facultés de l’âme, inutilisées, s’atrophient. Pourvu, dit-on, que sub
3931 en doute, cela en prend la place. Les facultés de l’ âme, inutilisées, s’atrophient. Pourvu, dit-on, que subsiste le peu de
3932 isées, s’atrophient. Pourvu, dit-on, que subsiste le peu de morale nécessaire aux affaires, tout ira bien. (On pense que l
3933 ssaire aux affaires, tout ira bien. (On pense que les formes de la morale peuvent exister sans leur substance religieuse.)
3934 aires, tout ira bien. (On pense que les formes de la morale peuvent exister sans leur substance religieuse.) L’homme moder
3935 peuvent exister sans leur substance religieuse.) L’ homme moderne manie les choses de l’âme avec une maladresse de barbare
3936 leur substance religieuse.) L’homme moderne manie les choses de l’âme avec une maladresse de barbare. IV. « En être » ou
3937 religieuse.) L’homme moderne manie les choses de l’ âme avec une maladresse de barbare. IV. « En être » ou ne pas en êt
3938 en être Une fois qu’on a compris à quel point le fordisme et l’Esprit sont incompatibles, le monde moderne impose ce d
3939 fois qu’on a compris à quel point le fordisme et l’ Esprit sont incompatibles, le monde moderne impose ce dilemme : « en ê
3940 point le fordisme et l’Esprit sont incompatibles, le monde moderne impose ce dilemme : « en être » ou ne pas en être, c’es
3941  » ou ne pas en être, c’est-à-dire se soumettre à la technique et s’abrutir spirituellement — ou se soumettre à l’Esprit,
3942 et s’abrutir spirituellement — ou se soumettre à l’ Esprit, et tomber presque fatalement dans un anarchisme stérile. 1° Ac
3943 atalement dans un anarchisme stérile. 1° Accepter la technique et ses conditions. Dans cette mécanique bien huilée, au mou
3944 nt si régulier qu’il en devient insensible et que la fatigue semble disparaître, l’homme s’abandonne à des lois géométriqu
3945 insensible et que la fatigue semble disparaître, l’ homme s’abandonne à des lois géométriques. Un jeu de chiffres d’horlog
3946 une fois pour toutes et qu’il sent immuable comme la mort le restitue au monde vers 5 heures du soir, dans la détresse des
3947 pour toutes et qu’il sent immuable comme la mort le restitue au monde vers 5 heures du soir, dans la détresse des dernièr
3948 le restitue au monde vers 5 heures du soir, dans la détresse des dernières sirènes. Au monde, c’est-à-dire à une nature d
3949 sirènes. Au monde, c’est-à-dire à une nature dont l’ usine lui a fait oublier jusqu’à l’existence, et à une liberté qu’il s
3950 ne nature dont l’usine lui a fait oublier jusqu’à l’ existence, et à une liberté qu’il s’empresse d’aliéner au profit de pl
3951 vec ses désirs réels, et dont il subit docilement l’ abstraite et commerciale nécessité. Ennui, fatigue, sommeil sans prièr
3952 il sans prière. Cela s’appelle encore vivre. Mais l’ homme qui était un membre vivant dans le corps de la Nature, lié par l
3953 vre. Mais l’homme qui était un membre vivant dans le corps de la Nature, lié par les liens les plus subtils et les plus pr
3954 homme qui était un membre vivant dans le corps de la Nature, lié par les liens les plus subtils et les plus profonds à tou
3955 membre vivant dans le corps de la Nature, lié par les liens les plus subtils et les plus profonds à tous les autres membres
3956 ant dans le corps de la Nature, lié par les liens les plus subtils et les plus profonds à tous les autres membres de la Nat
3957 la Nature, lié par les liens les plus subtils et les plus profonds à tous les autres membres de la Nature, choses, bêtes e
3958 iens les plus subtils et les plus profonds à tous les autres membres de la Nature, choses, bêtes et anges, — le voici deven
3959 et les plus profonds à tous les autres membres de la Nature, choses, bêtes et anges, — le voici devenu sourd à cette harmo
3960 s membres de la Nature, choses, bêtes et anges, —  le voici devenu sourd à cette harmonie universelle, incapable d’en compr
3961 e harmonie universelle, incapable d’en comprendre les correspondances divines et humaines, insensible même à sa déchéance,
3962 ines, insensible même à sa déchéance, abandonné à la lutte tragique et absurde des lois économiques et des exigences les p
3963 et absurde des lois économiques et des exigences les plus rudimentaires de son corps. Il a perdu le contact avec les chose
3964 s les plus rudimentaires de son corps. Il a perdu le contact avec les choses naturelles, et par là même, avec les surnatur
3965 entaires de son corps. Il a perdu le contact avec les choses naturelles, et par là même, avec les surnaturelles. Il en ress
3966 avec les choses naturelles, et par là même, avec les surnaturelles. Il en ressent une vague et intermittente détresse, — q
3967 ntermittente détresse, — qu’il met d’ailleurs sur le compte de sa fatigue. Neurasthénie. La conquête du confort matériel l
3968 lleurs sur le compte de sa fatigue. Neurasthénie. La conquête du confort matériel l’a laissé oublier les valeurs de l’espr
3969 ue. Neurasthénie. La conquête du confort matériel l’ a laissé oublier les valeurs de l’esprit au point qu’il n’éprouve plus
3970 a conquête du confort matériel l’a laissé oublier les valeurs de l’esprit au point qu’il n’éprouve plus même cette carence 
3971 onfort matériel l’a laissé oublier les valeurs de l’ esprit au point qu’il n’éprouve plus même cette carence ; seulement, p
3972 térielles, il a laissé se détendre, ou il a cassé les ressorts de sa joie : l’effort libre et généreux, le sentiment d’avoi
3973 détendre, ou il a cassé les ressorts de sa joie : l’ effort libre et généreux, le sentiment d’avoir inventé ou compris par
3974 ressorts de sa joie : l’effort libre et généreux, le sentiment d’avoir inventé ou compris par soi-même, la liberté et une
3975 entiment d’avoir inventé ou compris par soi-même, la liberté et une certaine durée normale et capricieuse dans le plaisir,
3976 et une certaine durée normale et capricieuse dans le plaisir, la conscience de ses besoins et de ses buts propres, humains
3977 ine durée normale et capricieuse dans le plaisir, la conscience de ses besoins et de ses buts propres, humains et divins.
3978 s loisirs. Ford lui a donné une auto pour admirer la nature entre 17 et 19 heures : vraiment, il ne lui manque plus rien —
3979 ures : vraiment, il ne lui manque plus rien — que l’ envie. Mauvais travail. Il a perdu le sens religieux, cosmique, de l’e
3980 s rien — que l’envie. Mauvais travail. Il a perdu le sens religieux, cosmique, de l’effort humain. Il ne peut plus situer
3981 avail. Il a perdu le sens religieux, cosmique, de l’ effort humain. Il ne peut plus situer son effort individuel dans le mo
3982 Il ne peut plus situer son effort individuel dans le monde, lui attribuer sa véritable valeur. Il sent obscurément que son
3983 t obscurément que son travail est antinaturel. Il le méprise ou le subit, mais, jusque dans son repos, il en est l’esclave
3984 que son travail est antinaturel. Il le méprise ou le subit, mais, jusque dans son repos, il en est l’esclave. Pour s’être
3985 le subit, mais, jusque dans son repos, il en est l’ esclave. Pour s’être exclu lui-même de l’ordre de la nature, il est co
3986 l en est l’esclave. Pour s’être exclu lui-même de l’ ordre de la nature, il est condamné à ne plus saisir que des rapports
3987 en est l’esclave. Pour s’être exclu lui-même de l’ ordre de la nature, il est condamné à ne plus saisir que des rapports abstr
3988 esclave. Pour s’être exclu lui-même de l’ordre de la nature, il est condamné à ne plus saisir que des rapports abstraits e
3989 à ne plus saisir que des rapports abstraits entre les choses. Il ne comprend presque plus rien à l’Univers. Par la techniqu
3990 re les choses. Il ne comprend presque plus rien à l’ Univers. Par la technique, l’Occidental a prétendu maîtriser la matièr
3991 Il ne comprend presque plus rien à l’Univers. Par la technique, l’Occidental a prétendu maîtriser la matière et parvenir à
3992 presque plus rien à l’Univers. Par la technique, l’ Occidental a prétendu maîtriser la matière et parvenir à une liberté p
3993 r la technique, l’Occidental a prétendu maîtriser la matière et parvenir à une liberté plus haute. Or, la technique a révé
3994 matière et parvenir à une liberté plus haute. Or, la technique a révélé des exigences telles que l’Esprit ne peut les supp
3995 r, la technique a révélé des exigences telles que l’ Esprit ne peut les supporter. Il abandonne donc la place, mais c’est p
3996 révélé des exigences telles que l’Esprit ne peut les supporter. Il abandonne donc la place, mais c’est pourtant lui seul q
3997 l’Esprit ne peut les supporter. Il abandonne donc la place, mais c’est pourtant lui seul qui nous permettrait de jouir de
3998 l qui nous permettrait de jouir de notre liberté. La victoire mécanicienne est une victoire à la Pyrrhus. Elle nous donne
3999 erté. La victoire mécanicienne est une victoire à la Pyrrhus. Elle nous donne une liberté dont nous ne sommes plus dignes.
4000 dont nous ne sommes plus dignes. Nous perdons, en l’ acquérant, par l’effort de l’acquérir, les forces mêmes qui nous la fi
4001 es plus dignes. Nous perdons, en l’acquérant, par l’ effort de l’acquérir, les forces mêmes qui nous la firent désirer. 2°
4002 es. Nous perdons, en l’acquérant, par l’effort de l’ acquérir, les forces mêmes qui nous la firent désirer. 2° Accepter l’
4003 dons, en l’acquérant, par l’effort de l’acquérir, les forces mêmes qui nous la firent désirer. 2° Accepter l’esprit, et se
4004 l’effort de l’acquérir, les forces mêmes qui nous la firent désirer. 2° Accepter l’esprit, et ses conditions. Je dis que
4005 es mêmes qui nous la firent désirer. 2° Accepter l’ esprit, et ses conditions. Je dis que les êtres encore doués de quelqu
4006 Accepter l’esprit, et ses conditions. Je dis que les êtres encore doués de quelque sensibilité spirituelle deviennent par
4007 de quelque sensibilité spirituelle deviennent par le seul fait de rester eux-mêmes dans un monde fordisé, des anarchistes.
4008 mêmes dans un monde fordisé, des anarchistes. Car l’ Esprit n’est pas un luxe, n’est pas une faculté destinée à amuser nos
4009 s exigences sont en contradiction avec celles que le développement de la technique impose au monde moderne. Ces êtres, d’u
4010 contradiction avec celles que le développement de la technique impose au monde moderne. Ces êtres, d’une espèce de plus en
4011 en plus rare, qui savent encore quelque chose de la vie profonde, qui voient encore des vérités invisibles, qui gardent,
4012 t considèrent comme un « cas » très spécial, — on les écarte des engrenages où ils risqueraient de faire grain de sable. Il
4013 . Ils se réfugient dans ce qu’on pourrait appeler les classes privilégiées de l’esprit : fortunes oisives ou misères sans e
4014 u’on pourrait appeler les classes privilégiées de l’ esprit : fortunes oisives ou misères sans espoir. On en rencontre enco
4015 misères sans espoir. On en rencontre encore parmi les jeunes gens, jusqu’au jour où, comme on dit, sans doute par ironie, «
4016 u jour où, comme on dit, sans doute par ironie, «  la vie les prend ». Irréguliers aux yeux du monde ; la proie d’on ne sai
4017 où, comme on dit, sans doute par ironie, « la vie les prend ». Irréguliers aux yeux du monde ; la proie d’on ne sait quelle
4018 vie les prend ». Irréguliers aux yeux du monde ; la proie d’on ne sait quelles forces occultes sans doute dangereuses, pu
4019 ces occultes sans doute dangereuses, puisqu’elles les rendent inutilisables dans les rouages de la vie moderne. Le triomphe
4020 uses, puisqu’elles les rendent inutilisables dans les rouages de la vie moderne. Le triomphe de Ford réduira l’Esprit à dev
4021 les les rendent inutilisables dans les rouages de la vie moderne. Le triomphe de Ford réduira l’Esprit à devenir l’apanage
4022 inutilisables dans les rouages de la vie moderne. Le triomphe de Ford réduira l’Esprit à devenir l’apanage d’une sorte de
4023 es de la vie moderne. Le triomphe de Ford réduira l’ Esprit à devenir l’apanage d’une sorte de franc-maçonnerie de quelques
4024 e. Le triomphe de Ford réduira l’Esprit à devenir l’ apanage d’une sorte de franc-maçonnerie de quelques centaines d’indivi
4025 a bientôt traquée avec la dernière rigueur : avec la rigueur de la nécessité — puisqu’elle est inutile au grand dessein ma
4026 uée avec la dernière rigueur : avec la rigueur de la nécessité — puisqu’elle est inutile au grand dessein matérialiste de
4027 elle est inutile au grand dessein matérialiste de l’ Occident. La logique, parlant par la bouche de Ford : « Inutile, donc
4028 tile au grand dessein matérialiste de l’Occident. La logique, parlant par la bouche de Ford : « Inutile, donc à détruire. 
4029 térialiste de l’Occident. La logique, parlant par la bouche de Ford : « Inutile, donc à détruire. » Ford a raison, une foi
4030 e ? « Vous ne pouvez servir Dieu et Mammon », dit l’ Écriture. ⁂ Je ne pense pas qu’une attitude réactionnaire qui consist
4031 tionnaire qui consisterait à vouloir en revenir à la période préindustrielle soit autre chose qu’une échappatoire utopique
4032 uts — si bas soient-ils — d’une civilisation sous le poids de laquelle nous risquons de périr. Il se prépare déjà des révo
4033 isme exaspéré, devenu presque fou dans sa prison. Les intellectuels d’aujourd’hui ont une tâche pressante : chercher s’il e
4034 le d’échapper au fatal dilemme. Premiers pas vers la solution : l’existence du dilemme. Second pas : en poser les termes a
4035 au fatal dilemme. Premiers pas vers la solution : l’ existence du dilemme. Second pas : en poser les termes avec netteté et
4036 n : l’existence du dilemme. Second pas : en poser les termes avec netteté et courage. Pour le reste, je pense que c’est une
4037 en poser les termes avec netteté et courage. Pour le reste, je pense que c’est une question de foi. 1. Une enquête fait
4038 oi. 1. Une enquête faite à Genève a révélé que les livres les plus lus du grand public sont Ma vie et mon œuvre, de Ford
4039 ne enquête faite à Genève a révélé que les livres les plus lus du grand public sont Ma vie et mon œuvre, de Ford et Mon cur
4040 ont Ma vie et mon œuvre, de Ford et Mon curé chez les riches, de Clément Vautel. Dans les pays de langue allemande, son suc
4041 Mon curé chez les riches, de Clément Vautel. Dans les pays de langue allemande, son succès est encore plus grand, et de mei
4042 rand, et de meilleure qualité. Je ne parle pas de l’ Amérique. 2. Victor Cambon, préface à Henry Ford, Ma vie et mon œuvre
4043 rd, Ma vie et mon œuvre, Paris, Payot, 1925. 3. L’ Illustration, 20 novembre 1926. 4. Ici et là, la révolte perce : « Ju
4044 L’Illustration, 20 novembre 1926. 4. Ici et là, la révolte perce : « Jugendbewegung » en Allemagne ; surréalisme en Fran
4045 ée mystique en Russie. a. Rougemont Denis de, «  Le péril Ford », Foi et Vie, Paris, février 1928, p. 189-202.
70 1928, Articles divers (1924–1930). Un soir à Vienne avec Gérard (24 mars 1928)
4046 n étoile nervalienne. Je vins à Vienne pour fuir l’ Amérique. Mais les Viennois avaient fui dans les opérettes de Strauss,
4047 nne. Je vins à Vienne pour fuir l’Amérique. Mais les Viennois avaient fui dans les opérettes de Strauss, qu’on ne trouve p
4048 ir l’Amérique. Mais les Viennois avaient fui dans les opérettes de Strauss, qu’on ne trouve plus nulle part. Dans les danci
4049 de Strauss, qu’on ne trouve plus nulle part. Dans les dancings, un peuple de fêtards modérés, Juifs et ressortissants de la
4050 le de fêtards modérés, Juifs et ressortissants de la Petite-Entente, applaudissait chaque soir entre deux airs anglais Le
4051 applaudissait chaque soir entre deux airs anglais Le Beau Danube bleu, en commémoration polie d’un passé imaginaire, ou pe
4052 ntissait cette Vienne tout occupée à ressembler à l’ idée qu’on s’en fait. Le Ring, trop large, ouvert au vent glacial, cré
4053 ut occupée à ressembler à l’idée qu’on s’en fait. Le Ring, trop large, ouvert au vent glacial, crée autour du centre de la
4054 ouvert au vent glacial, crée autour du centre de la ville une insécurité qui fait songer à la Russie et au sifflement des
4055 ntre de la ville une insécurité qui fait songer à la Russie et au sifflement des balles perdues d’une révolution. Sept heu
4056 s perdues d’une révolution. Sept heures du soir : le moment était venu d’arrêter le plan de la soirée, et cette promenade
4057 t heures du soir : le moment était venu d’arrêter le plan de la soirée, et cette promenade où il y avait juste assez de pa
4058 soir : le moment était venu d’arrêter le plan de la soirée, et cette promenade où il y avait juste assez de passants pour
4059 où il y avait juste assez de passants pour qu’on la sentît déserte ne me proposait qu’une frileuse nostalgie. Mais qui fa
4060 d’intensité, un état d’âme crée une situation qui l’ exprime — bien qu’on pense généralement le contraire. Il est très vrai
4061 ion qui l’exprime — bien qu’on pense généralement le contraire. Il est très vrai que les notions réaliste et idéaliste du
4062 e généralement le contraire. Il est très vrai que les notions réaliste et idéaliste du monde ne sont séparées que par un lé
4063 e ne sont séparées que par un léger décalage dans la chronologie de nos sentiments et de nos actes. Donc, n’ayant pas reno
4064 onduit, par une sorte de compromis sentimental, à l’ Opéra où l’on donnait les Contes d’Hoffmann. Je comprends aujourd’hui
4065 une sorte de compromis sentimental, à l’Opéra où l’ on donnait les Contes d’Hoffmann. Je comprends aujourd’hui le lien qui
4066 compromis sentimental, à l’Opéra où l’on donnait les Contes d’Hoffmann. Je comprends aujourd’hui le lien qui unissait dans
4067 t les Contes d’Hoffmann. Je comprends aujourd’hui le lien qui unissait dans mon esprit Vienne et Hoffmann : c’était le sou
4068 sait dans mon esprit Vienne et Hoffmann : c’était le souvenir de Gérard de Nerval. Mais je pense que je n’avais même pas p
4069 ncé intérieurement ce nom lorsque je m’assis dans l’ ombre du théâtre, en retard, un peu ennuyé de me trouver à côté d’une
4070 eu ennuyé de me trouver à côté d’une place vide : la jolie femme qu’on attend dans ces circonstances, une fois de plus man
4071 dans ces circonstances, une fois de plus manquait le rendez-vous que j’avais demandé au hasard d’arranger. Mais le thème d
4072 us que j’avais demandé au hasard d’arranger. Mais le thème de la Barcarolle s’empare de tout mon être — ainsi d’autres dev
4073 is demandé au hasard d’arranger. Mais le thème de la Barcarolle s’empare de tout mon être — ainsi d’autres deviennent patr
4074 eul peut-être cette plainte heureuse des violons. Le diable sort des parois, noir et blanc, la ravissante héroïne est à so
4075 iolons. Le diable sort des parois, noir et blanc, la ravissante héroïne est à son piano, c’est un duo des ténèbres et de l
4076 est à son piano, c’est un duo des ténèbres et de la pureté où vibrent par instants les accords d’une harmonie surnaturell
4077 ténèbres et de la pureté où vibrent par instants les accords d’une harmonie surnaturelle. Et tout cela chanté dans une lan
4078 p plus loin que moi, il n’entend pas ma question. L’ envie me prend d’aller le rejoindre. Me voici tout abandonné à l’évoca
4079 ’entend pas ma question. L’envie me prend d’aller le rejoindre. Me voici tout abandonné à l’évocation d’un amour tragiquem
4080 d d’aller le rejoindre. Me voici tout abandonné à l’ évocation d’un amour tragiquement mêlé à des forces inconnues et menaç
4081 t mêlé à des forces inconnues et menaçantes. Mais la musique est si légère, la voix de la jeune fille si transparente : la
4082 ues et menaçantes. Mais la musique est si légère, la voix de la jeune fille si transparente : la mort même en devient moin
4083 çantes. Mais la musique est si légère, la voix de la jeune fille si transparente : la mort même en devient moins brutale.
4084 gère, la voix de la jeune fille si transparente : la mort même en devient moins brutale. Elle rôde ici comme une tristesse
4085 omme une tristesse amoureuse. Elle n’est plus que l’ approche d’une grandeur où se perdraient nos amours terrestres dans d’
4086 rrestres dans d’imprévisibles transfigurations, —  l’ heure anxieuse et mélancolique où l’on quitte ce visage aimé pour d’au
4087 igurations, — l’heure anxieuse et mélancolique où l’ on quitte ce visage aimé pour d’autres plus beaux peut-être, mais inco
4088 es plus beaux peut-être, mais inconnus. Voilà que la forme blanche, sous un brusque faisceau de lumière m’apparaît avec le
4089 us un brusque faisceau de lumière m’apparaît avec le visage même de mon amour. Je me sens voluptueusement perdre pied. Ver
4090 ix, à côté de moi, c’est une chose singulière que le pouvoir de cette musique. Voici que vous êtes tout près de comprendre
4091 ourtant ne se détournait. Comment pouvais-je être le seul à l’avoir entendu ? — C’est, me répondit-il, que seul vous venez
4092 se détournait. Comment pouvais-je être le seul à l’ avoir entendu ? — C’est, me répondit-il, que seul vous venez d’atteind
4093 renez certaines choses par votre souffrance… Mais le temps approche où vous n’aurez plus besoin de souffrir pour comprendr
4094 n’aurez plus besoin de souffrir pour comprendre. Le faisceau de lumière quitta la scène, un reflet balaya le parterre, le
4095 ir pour comprendre. Le faisceau de lumière quitta la scène, un reflet balaya le parterre, le visage de mon voisin m’apparu
4096 ceau de lumière quitta la scène, un reflet balaya le parterre, le visage de mon voisin m’apparut, pâle dans son collier de
4097 re quitta la scène, un reflet balaya le parterre, le visage de mon voisin m’apparut, pâle dans son collier de barbe noire.
4098 dans son collier de barbe noire. Je sentis que je l’ avais déjà reconnu. Il portait une cape bleu sombre, à la mode de 1830
4099 déjà reconnu. Il portait une cape bleu sombre, à la mode de 1830, qui, à la rigueur, pouvait passer pour une élégance trè
4100 t une cape bleu sombre, à la mode de 1830, qui, à la rigueur, pouvait passer pour une élégance très moderne. Il n’y avait
4101 e rien de positivement démodé ; je n’eus même pas le sentiment de quoi que ce soit d’immatériel. D’ailleurs le trouble où
4102 ment de quoi que ce soit d’immatériel. D’ailleurs le trouble où m’avait jeté la première reconnaissance empêcha ma raison
4103 connaissance empêcha ma raison d’intervenir entre la réalité de ma vision et mon cerveau pris au défaut de sa carapace de
4104 rincipes et d’évidences opaques. Nous sortîmes de l’ Opéra, Gérard de Nerval et moi, sans nous être rien dit d’autre, comme
4105 un échange tacite suffit aux petites décisions de la vie quotidienne. Gérard tenait en laisse le fameux homard enrubanné.
4106 ns de la vie quotidienne. Gérard tenait en laisse le fameux homard enrubanné. « Cela vexe les Viennois, me dit-il, parce q
4107 en laisse le fameux homard enrubanné. « Cela vexe les Viennois, me dit-il, parce qu’ils y voient une façon de me moquer de
4108 n suis pas fâché. » Il y avait peu de monde dans les rues. Des jeunes gens avec une femme à chaque bras, l’air de ne pas t
4109 es. Des jeunes gens avec une femme à chaque bras, l’ air de ne pas trop s’amuser. — Ceci du moins n’a guère changé, dis-je,
4110 ours de Vienne. — Certes, répondit Gérard, malgré les apparences, cette vie sentimentale est une des seules réalités qui co
4111 ne des seules réalités qui correspondent encore à l’ image classique de Vienne. Sentimentalisme capricieux d’ailleurs, dépo
4112 t. Cette ville, qui est toute caresses, a peur de l’ étreinte… C’est d’ailleurs une chose que je comprends assez bien, ajou
4113 s traversions une rue sillonnée de taxis rapides, le homard refusa obstinément de progresser. Gérard dut le prendre sous l
4114 mard refusa obstinément de progresser. Gérard dut le prendre sous le bras, et les paires de pinces s’accrochèrent désespér
4115 inément de progresser. Gérard dut le prendre sous le bras, et les paires de pinces s’accrochèrent désespérément à ses manc
4116 rogresser. Gérard dut le prendre sous le bras, et les paires de pinces s’accrochèrent désespérément à ses manches. De terre
4117 ochèrent désespérément à ses manches. De terreur, le homard avait rougi : il conserva toute la nuit une magnifique couleur
4118 erreur, le homard avait rougi : il conserva toute la nuit une magnifique couleur orangée. Gérard semblait habitué à ces so
4119 ait habitué à ces sortes de scènes. On reparla de l’ inconstance viennoise. Gérard l’attribuait à une certaine anémie des s
4120 es. On reparla de l’inconstance viennoise. Gérard l’ attribuait à une certaine anémie des sentiments, à un manque de caract
4121 e des sentiments, à un manque de caractère aussi. La fidélité véritable est une œuvre d’art qui demande un long effort, et
4122 st une œuvre d’art qui demande un long effort, et les Viennois sont, par nature et par attitude, des gens fatigués. — Pour
4123 s gens fatigués. — Pour moi, dit Gérard, je situe l’ amour dans un monde où la question fidélité ou inconstance ne se pose
4124 oi, dit Gérard, je situe l’amour dans un monde où la question fidélité ou inconstance ne se pose plus. Vous le savez, je n
4125 ion fidélité ou inconstance ne se pose plus. Vous le savez, je n’ai aimé qu’une femme — au plus deux, en y réfléchissant b
4126 en y réfléchissant bien, mais peut-être était-ce la même sous deux attributs différents. Toutes les femmes qui m’ont rete
4127 ce la même sous deux attributs différents. Toutes les femmes qui m’ont retenu un instant, c’était parce qu’elles évoquaient
4128 raissaient purement mystiques… Mais vous savez, «  les autres » n’y comprennent jamais rien, dès qu’on aime… Oh ! cette femm
4129 ard, un certain regard, mais j’ai su en retrouver la sensation jusque dans les choses — et c’est cela seul qui donna un se
4130 ais j’ai su en retrouver la sensation jusque dans les choses — et c’est cela seul qui donna un sens au monde. — Mais je bav
4131 mps. Livrons-nous plutôt à une petite malice dont l’ idée me vient à la vue de cette vendeuse de fleurs. C’était la petite
4132 ent à la vue de cette vendeuse de fleurs. C’était la petite bossue qui vend des roses et des œillets dans la rue de Carint
4133 ite bossue qui vend des roses et des œillets dans la rue de Carinthie. Gérard lui paya quelques œillets rouges en lui expl
4134 s œillets rouges en lui expliquant qu’elle devait les donner à la première jolie femme qui passerait seule. Nous nous arrêt
4135 vanture de robes de soie, nous amusant à imaginer les corps précieux qui les revêtiraient. Vint à pas pressés une jeune fem
4136 e, nous amusant à imaginer les corps précieux qui les revêtiraient. Vint à pas pressés une jeune femme, chapeau rouge et ma
4137 e qui se passa fut, hélas, non moins inévitable : la jeune femme refusa d’abord les fleurs pour se donner le temps de rega
4138 moins inévitable : la jeune femme refusa d’abord les fleurs pour se donner le temps de regarder autour d’elle ; l’intérêt
4139 ne femme refusa d’abord les fleurs pour se donner le temps de regarder autour d’elle ; l’intérêt que nous ne sûmes pas dis
4140 ur se donner le temps de regarder autour d’elle ; l’ intérêt que nous ne sûmes pas dissimuler nous trahit ; elle finit donc
4141 r accepter et vint à nous avec un sourire du type le plus courant : « Vous êtes bien gentils, messieurs ! » Il n’y avait p
4142 ard attendait évidemment quelque chose d’imprévu, la seule chose contraire à la coutume viennoise. L’enfant était charmant
4143 elque chose d’imprévu, la seule chose contraire à la coutume viennoise. L’enfant était charmante, comme elles le sont pres
4144 la seule chose contraire à la coutume viennoise. L’ enfant était charmante, comme elles le sont presque toutes dans cette
4145 viennoise. L’enfant était charmante, comme elles le sont presque toutes dans cette ville, — du type que Gérard et Théo no
4146 and bruit de saxophones et de cors anglais jouant la Marche de Tannhäuser en tango, un Balkanique très lisse nous délivra
4147 ue très lisse nous délivra de notre conquête pour la durée des danses. Gérard bâillait : « Voilà ce que c’est que de prend
4148 leure qualité : car c’est une pauvre illusion que le plaisir qu’on vient chercher ici avec le premier être venu. — Certes,
4149 le premier être venu. — Certes, je comprends que l’ Europe est en décadence quand je la regarde s’amuser. Je vois se perdr
4150 comprends que l’Europe est en décadence quand je la regarde s’amuser. Je vois se perdre ce sens des correspondances secrè
4151 ules faisaient sa dignité humaine, parce qu’elles le rattachaient aux buts les plus hauts de notre vie. Ces citadins blasé
4152 humaine, parce qu’elles le rattachaient aux buts les plus hauts de notre vie. Ces citadins blasés s’amusent plus grossière
4153 é, avec des femmes qui élargissent des sourires à la mesure de votre générosité. Vos boîtes de nuit sont des sortes de dis
4154 automatiques de plaisir. Autant dire que ceux qui les fréquentent ne savent plus ce que c’est que le plaisir. Ils prennent
4155 i les fréquentent ne savent plus ce que c’est que le plaisir. Ils prennent au hasard des liqueurs qui n’ont pas été prépar
4156 été préparées pour leur soif. Ils ne savent plus les signes ni les ressemblances. Aussi l’ennui règne-t-il bruyamment dans
4157 pour leur soif. Ils ne savent plus les signes ni les ressemblances. Aussi l’ennui règne-t-il bruyamment dans ces lieux : c
4158 avent plus les signes ni les ressemblances. Aussi l’ ennui règne-t-il bruyamment dans ces lieux : cet orchestre triomphant
4159 élémentaires : Ce sont vos contemporains livrés à la démocratie des plaisirs achetés au détail dans une foire éclatante de
4160 au détail dans une foire éclatante de faux luxe. La misère est de voir ici des femmes aussi ravissantes que celle-là qui
4161 nt de gravité et de détachement. Je viens souvent la regarder, à cause de la noblesse de sa danse. Je la nomme Clarissa, p
4162 chement. Je viens souvent la regarder, à cause de la noblesse de sa danse. Je la nomme Clarissa, parce que cela lui va. Ma
4163 regarder, à cause de la noblesse de sa danse. Je la nomme Clarissa, parce que cela lui va. Mais comme c’est odieux qu’une
4164 x qu’une créature aussi parfaite soit touchée par les mains outrageusement baguées de ces courtiers alourdis de “Knödl”. En
4165 n’approcherait qu’avec un sentiment religieux de la beauté. Mais je crois que l’Orient est devenu fou. Il ne comprend plu
4166 ntiment religieux de la beauté. Mais je crois que l’ Orient est devenu fou. Il ne comprend plus rien. » Des bugles agonisai
4167 scandalisée par cette atteinte aux lois du genre le plus conventionnel qui soit. Gérard la regarda avec une certaine piti
4168 s du genre le plus conventionnel qui soit. Gérard la regarda avec une certaine pitié : « Chère enfant, dit-il doucement, p
4169 s de ressemblance, et c’est ce qui vous perdra. » La pauvre fille ne comprenant pas, il y eut un moment pénible, comme tou
4170 pre une comédie aux attitudes convenues et donner l’ air bête aux acteurs. Puis Gérard embrassa paternellement la belle eff
4171 aux acteurs. Puis Gérard embrassa paternellement la belle effarée, et nous sortîmes, après avoir délivré le homard qui, l
4172 le effarée, et nous sortîmes, après avoir délivré le homard qui, laissé au vestiaire, y était l’objet de vexations diverse
4173 livré le homard qui, laissé au vestiaire, y était l’ objet de vexations diverses et de curiosités grossières de la part des
4174 s garçons. « Encore une proie inutile lâchée pour l’ ombre, dit Gérard d’un ton rêveur et malicieux. Mais l’ombre de cette
4175 re, dit Gérard d’un ton rêveur et malicieux. Mais l’ ombre de cette ville illusoire est la plus douce à mes vagabondages sa
4176 icieux. Mais l’ombre de cette ville illusoire est la plus douce à mes vagabondages sans but. Vous savez, je lance mes file
4177 es sans but. Vous savez, je lance mes filets dans l’ eau des nuits, et quelquefois j’en ramène des animaux aux yeux bizarre
4178 ène des animaux aux yeux bizarres où je sais lire les signes. » Comme je ne répondais rien : « Avez-vous sommeil ? demanda-
4179 ’endormir. » Se penchant vers moi il prononça : «  La nuit sera noire et blanche. » Je ressentis quelque émotion à l’ouïe d
4180 oire et blanche. » Je ressentis quelque émotion à l’ ouïe de cette phrase célèbre. Ensuite, je pensai qu’il arrive aux meil
4181 de se répéter, et que c’était la première fois de la soirée que Gérard « faisait du Gérard ». Les cocktails du Moulin-Roug
4182 is de la soirée que Gérard « faisait du Gérard ». Les cocktails du Moulin-Rouge avaient peu à peu envahi notre sang. Nos pe
4183 Nos pensées devenaient légères comme des ballons. La rumeur de Vienne baignait nos corps fatigués jusqu’à l’insensibilité
4184 eur de Vienne baignait nos corps fatigués jusqu’à l’ insensibilité et l’Illusion étendait sur toutes choses une aile d’ombr
4185 ait nos corps fatigués jusqu’à l’insensibilité et l’ Illusion étendait sur toutes choses une aile d’ombre flatteuse aux cap
4186 des oiseaux nous parlèrent, bientôt dissous dans le vent. Tout était reflet, passages, allusions. Plus tard, dans un peti
4187 mi-hauteur, puis couvert de glaces qui, reflétant le plafond à caissons dorés, l’étendent indéfiniment — c’est un ciel sus
4188 laces qui, reflétant le plafond à caissons dorés, l’ étendent indéfiniment — c’est un ciel suspendu assez bas sur nos têtes
4189 ché sur cet aquarium de rêves, discourt et décrit les images qu’il y découvre. Il y a les ailes du Moulin-Rouge, qui sont l
4190 urt et décrit les images qu’il y découvre. Il y a les ailes du Moulin-Rouge, qui sont les bras de Clarissa dans sa danse, e
4191 ouvre. Il y a les ailes du Moulin-Rouge, qui sont les bras de Clarissa dans sa danse, et Clarissa c’est aussi l’Anglaise au
4192 e Clarissa dans sa danse, et Clarissa c’est aussi l’ Anglaise aux citrons de Pompéi, l’Octavie du golfe de Marseille, ou bi
4193 ssa c’est aussi l’Anglaise aux citrons de Pompéi, l’ Octavie du golfe de Marseille, ou bien plutôt, par je ne sais quelle e
4194 ar je ne sais quelle erreur d’images, — ce serait la gravité énigmatique d’Adrienne, mais dans le lointain, Aurélia lui ré
4195 rait la gravité énigmatique d’Adrienne, mais dans le lointain, Aurélia lui répond d’un regard pareil. Des visages naissent
4196 es naissent comme des étoiles dans un halo, comme les couleurs sous les paupières, s’élargissent, se fondent, se superposen
4197 des étoiles dans un halo, comme les couleurs sous les paupières, s’élargissent, se fondent, se superposent. Cinéma des sent
4198 t. Cinéma des sentiments qui montre vivantes dans la même minute toutes les incarnations d’un amour dont l’être éternel ap
4199 ts qui montre vivantes dans la même minute toutes les incarnations d’un amour dont l’être éternel apparaît peu à peu, à tra
4200 me minute toutes les incarnations d’un amour dont l’ être éternel apparaît peu à peu, à travers la simultanéité de ses mani
4201 dont l’être éternel apparaît peu à peu, à travers la simultanéité de ses manifestations. Gérard parle avec une liberté mag
4202 erté magnifique et angoissante. Il mêle tout dans le temps et l’espace. Cent années et tous les visages aimés revivent dan
4203 que et angoissante. Il mêle tout dans le temps et l’ espace. Cent années et tous les visages aimés revivent dans cette coup
4204 ut dans le temps et l’espace. Cent années et tous les visages aimés revivent dans cette coupe de songes avec toutes leurs i
4205 réelles, illusions des reflets qui ne livrent que le côté terrestre des choses dont l’autre moitié sera toujours cachée, a
4206 s dont l’autre moitié sera toujours cachée, ainsi la Lune et sa moitié d’ombre. Et parce que tout revit en un instant dans
4207 en un instant dans cette vision, il connaît enfin la substance véritable et unique de toutes ses amours, il communie avec
4208 s, il communie avec quelque chose d’éternel. Tous les drames du monde ne sont que décors mouvants dans la lueur bariolée de
4209 drames du monde ne sont que décors mouvants dans la lueur bariolée des sentiments, ils ne sont que reflets, épisodes, sym
4210 ts, ils ne sont que reflets, épisodes, symboles : le vrai drame de son destin est ailleurs. Il se met à m’expliquer des si
4211 sent aux pierres précieuses en passant par toutes les formes animales. Pour lui, les choses n’ont d’intérêt que par les rap
4212 passant par toutes les formes animales. Pour lui, les choses n’ont d’intérêt que par les rapports qu’il leur devine avec la
4213 les. Pour lui, les choses n’ont d’intérêt que par les rapports qu’il leur devine avec la réalité extra-terrestre. Il m’ense
4214 térêt que par les rapports qu’il leur devine avec la réalité extra-terrestre. Il m’enseigne que la passion seule, par la s
4215 vec la réalité extra-terrestre. Il m’enseigne que la passion seule, par la souffrance qu’elle entraîne, nous révèle le sen
4216 errestre. Il m’enseigne que la passion seule, par la souffrance qu’elle entraîne, nous révèle le sens réel de nos vies, et
4217 , par la souffrance qu’elle entraîne, nous révèle le sens réel de nos vies, et peu à peu, de leurs moindres coïncidences.
4218 es, et peu à peu, de leurs moindres coïncidences. La fatigue calme son lyrisme et son exaltation. Il semble se rapprocher
4219 ne barbarie spirituelle. Il plaisante. Il dit que la vie ressemble surtout à un film où les épisodes s’appellent par le si
4220 Il dit que la vie ressemble surtout à un film où les épisodes s’appellent par le simple jeu des images, se voient par tran
4221 surtout à un film où les épisodes s’appellent par le simple jeu des images, se voient par transparence au travers de l’aut
4222 vers de l’autre. Il dit : « Pour celui qui saisit les correspondances, chaque geste, chaque minute d’une vie résume cette v
4223 entière et fait allusion à tout ce qu’il y a sous le soleil, et même ailleurs. Croyez-moi, ce qu’il faudrait écrire, c’est
4224 mes. Seules des trompes d’autos s’appelaient dans la nuit froide. Gérard ne disait presque plus rien ; à peine, de temps e
4225 , qui semblait d’ailleurs endormi. En passant par la Freyung, nous vîmes un palais aux fenêtres illuminées. Des autos atte
4226 fenêtres illuminées. Des autos attendaient devant le porche grand ouvert. Les chauffeurs faisaient les cent pas dans la ne
4227 autos attendaient devant le porche grand ouvert. Les chauffeurs faisaient les cent pas dans la neige fraîche ou s’accoudai
4228 le porche grand ouvert. Les chauffeurs faisaient les cent pas dans la neige fraîche ou s’accoudaient à la banquette d’une
4229 uvert. Les chauffeurs faisaient les cent pas dans la neige fraîche ou s’accoudaient à la banquette d’une boutique à « Würs
4230 cent pas dans la neige fraîche ou s’accoudaient à la banquette d’une boutique à « Würstel » où nous nous arrêtâmes. Au lég
4231 fflement du bec de gaz sans manchon qui éclairait la boutique, et que le vent menaçait d’éteindre à chaque instant, le hom
4232 az sans manchon qui éclairait la boutique, et que le vent menaçait d’éteindre à chaque instant, le homard se réveilla. Gér
4233 que le vent menaçait d’éteindre à chaque instant, le homard se réveilla. Gérard m’expliqua qu’il en était ainsi chaque nui
4234 m’expliqua qu’il en était ainsi chaque nuit, que l’ animal devenait nerveux et que depuis quelques semaines, il avait dû l
4235 veux et que depuis quelques semaines, il avait dû le mettre au caviar. Il en demanda donc une petite portion et la fit pre
4236 caviar. Il en demanda donc une petite portion et la fit prendre au homard avec toutes sortes de soins. Les chauffeurs reg
4237 it prendre au homard avec toutes sortes de soins. Les chauffeurs regardaient d’un œil las, trop las pour s’étonner. Transi,
4238 si, je me balançais d’un pied sur l’autre dans de la neige fondante, tout en croquant une de ces saucisses à la moutarde q
4239 fondante, tout en croquant une de ces saucisses à la moutarde qu’on appelle ici « Frankfurter » et ailleurs « Wienerli ».
4240 « Frankfurter » et ailleurs « Wienerli ». Soudain les autos se mirent à ronfler. Par le grand escalier, au fond de la cour
4241 rli ». Soudain les autos se mirent à ronfler. Par le grand escalier, au fond de la cour du palais, descendaient les invité
4242 rent à ronfler. Par le grand escalier, au fond de la cour du palais, descendaient les invités du bal. Des femmes sans chap
4243 alier, au fond de la cour du palais, descendaient les invités du bal. Des femmes sans chapeau couraient vers les voitures,
4244 és du bal. Des femmes sans chapeau couraient vers les voitures, les hommes s’inclinaient pour des baise-mains silencieux et
4245 femmes sans chapeau couraient vers les voitures, les hommes s’inclinaient pour des baise-mains silencieux et mécaniques. J
4246 à d’anciens Habsbourg, des comtes athlétiques et la silhouette échassière de la jeune duchesse de Clam-Clamannsfeld dont
4247 comtes athlétiques et la silhouette échassière de la jeune duchesse de Clam-Clamannsfeld dont le manteau de velours rose l
4248 re de la jeune duchesse de Clam-Clamannsfeld dont le manteau de velours rose laissait découvertes des jambes extrêmement h
4249 ndis que sa tête frisée jetait des insolences sur les chapeaux noirs de ses cavaliers. Tout cela s’empila dans des autos ;
4250 autos ; en dix minutes, il n’y eut plus personne, la place s’éteignit. Mais Gérard ? Ses yeux s’étaient fixés intensément,
4251 Gérard ? Ses yeux s’étaient fixés intensément, à la sortie des invités, sur une femme qui s’en allait toute seule vers un
4252 femme qui s’en allait toute seule vers une auto à l’ écart des autres. Une femme aux cheveux noirs en bandeaux, au teint pâ
4253 mme aux cheveux noirs en bandeaux, au teint pâle, l’ air d’autrefois. Il avait murmuré : Marie Pleyel. Quand la place se fu
4254 autrefois. Il avait murmuré : Marie Pleyel. Quand la place se fut apaisée, je m’aperçus que j’étais seul. Une dernière aut
4255 olument silencieuse fila devant moi ; je reconnus la voiture de la femme aux bandeaux noirs. Mais les rideaux étaient bais
4256 ieuse fila devant moi ; je reconnus la voiture de la femme aux bandeaux noirs. Mais les rideaux étaient baissés. Déjà on c
4257 s la voiture de la femme aux bandeaux noirs. Mais les rideaux étaient baissés. Déjà on criait les journaux du matin, des tr
4258 Mais les rideaux étaient baissés. Déjà on criait les journaux du matin, des triporteurs passèrent à toute vitesse, m’éclab
4259 emont Denis de, « Un soir à Vienne avec Gérard », La Nouvelle Semaine artistique et littéraire, Neuchâtel, 24 mars 1928, p
71 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Marguerite Allotte de la Fuye, Jules Verne, sa vie, son œuvre (juin 1928)
4260 nt pour tous ceux que Jules Verne passionne. Pour les autres, divertissant et spirituel. Pourquoi ne veut-on voir en Jules
4261 un précurseur ? Jules Verne est un créateur, dont les inventions se suffisent et suffisent à notre joie. Ce ne sont pas les
4262 ffisent et suffisent à notre joie. Ce ne sont pas les savants qui sont prophètes, mais les poètes. Or Jules Verne fut poète
4263 ne sont pas les savants qui sont prophètes, mais les poètes. Or Jules Verne fut poète avant tout — et ce livre le fera bie
4264 Or Jules Verne fut poète avant tout — et ce livre le fera bien voir aux sceptiques. Il a aimé la science parce qu’elle ouv
4265 livre le fera bien voir aux sceptiques. Il a aimé la science parce qu’elle ouvre des perspectives d’évasion — où seuls les
4266 ’elle ouvre des perspectives d’évasion — où seuls les poètes savent se perdre. Et c’est bien sa plus grande ruse que d’avoi
4267 est bien sa plus grande ruse que d’avoir emprunté le véhicule à la mode pour conduire des millions de lecteurs dans un mon
4268 us grande ruse que d’avoir emprunté le véhicule à la mode pour conduire des millions de lecteurs dans un monde purement fa
4269 de lecteurs dans un monde purement fantaisiste où les équations tyranniques deviennent de merveilleux calembours, où les sa
4270 anniques deviennent de merveilleux calembours, où les savants sont réellement dans la lune, ou bien descendent au fond des
4271 x calembours, où les savants sont réellement dans la lune, ou bien descendent au fond des mers adorer la Liberté et jouer
4272 lune, ou bien descendent au fond des mers adorer la Liberté et jouer de l’orgue sous les yeux de poulpes géants. Jules Ve
4273 nt au fond des mers adorer la Liberté et jouer de l’ orgue sous les yeux de poulpes géants. Jules Verne a véritablement sou
4274 oulpes géants. Jules Verne a véritablement soumis la science à la poésie. Et l’on ne veut voir que jolis livres d’étrennes
4275 . Jules Verne a véritablement soumis la science à la poésie. Et l’on ne veut voir que jolis livres d’étrennes dans les œuv
4276 a véritablement soumis la science à la poésie. Et l’ on ne veut voir que jolis livres d’étrennes dans les œuvres du plus gr
4277 ’on ne veut voir que jolis livres d’étrennes dans les œuvres du plus grand créateur de mythes modernes, du seul écrivain do
4278 réateur de mythes modernes, du seul écrivain dont l’ influence soit comparable à celle du cinéma ! Claretie raconte que les
4279 mparable à celle du cinéma ! Claretie raconte que les détenus des maisons de correction se jetaient sur ces volumes « au tr
4280 ces volumes « au travers desquels ils respiraient l’ air du monde ». N’en ferons-nous pas autant, emprisonnés que nous somm
4281 que nous sommes dans une civilisation qui, selon l’ expression de Jules Verne désabusé « emprunte l’aspect d’une nécessité
4282 n l’expression de Jules Verne désabusé « emprunte l’ aspect d’une nécessité » (et dans la bouche de ce libertaire, cela con
4283 sé « emprunte l’aspect d’une nécessité » (et dans la bouche de ce libertaire, cela constituait un jugement !) Serons-nous
4284 s-nous longtemps encore dupes d’une conception de la littérature si pédante qu’elle exclut un de nos plus grands conteurs
4285 us Jules Verne aux enfants ? J’allais oublier que la littérature enfantine est le dernier bateau. Pour ce coup, voilà qui
4286 bord, je soupçonne que ce bateau n’est autre que La Liberté. ar. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Marguerite Allot
72 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Aragon, Traité du style (août 1928)
4287 on, Traité du style (août 1928)as Ce n’est pas le seul talent de M. Aragon qui le rendrait digne à mes yeux, de considé
4288 s Ce n’est pas le seul talent de M. Aragon qui le rendrait digne à mes yeux, de considération. J’admire autant le talen
4289 gne à mes yeux, de considération. J’admire autant le talent de celui qui mène 60 parties d’échecs simultanément, et c’est
4290 x écrivains que des révélations, ou mieux, qu’ils les favorisent par leurs écrits. Aragon, qui a le sens de l’amour, a dit
4291 ls les favorisent par leurs écrits. Aragon, qui a le sens de l’amour, a dit conséquemment beaucoup de choses vraies (belle
4292 risent par leurs écrits. Aragon, qui a le sens de l’ amour, a dit conséquemment beaucoup de choses vraies (belles). Il est
4293 ies (belles). Il est même un des très rares parmi les jeunes qui ait vraiment donné quelque chose. C’est pourquoi j’ai lu c
4294 econde partie du livre est admirable ; il suffit. Le titre ne ment pas ; ce livre traite du style, à coups d’exemples qui
4295 aite du style, à coups d’exemples qui méritent de l’ être. Et l’on voit bien ici qu’Aragon dépasse ces surréalistes, ces or
4296 le, à coups d’exemples qui méritent de l’être. Et l’ on voit bien ici qu’Aragon dépasse ces surréalistes, ces orthodoxes de
4297 ragon dépasse ces surréalistes, ces orthodoxes de l’ absurde confondu avec le poétique, ou ces disciples de Rimbaud, ou enf
4298 listes, ces orthodoxes de l’absurde confondu avec le poétique, ou ces disciples de Rimbaud, ou enfin ces littérateurs anti
4299 ces littérateurs antilittéraires, ces « Messieurs les Nymphes ». Mais donner l’air bête à ceux qui le sont en créant une be
4300 aires, ces « Messieurs les Nymphes ». Mais donner l’ air bête à ceux qui le sont en créant une belle œuvre serait, par exem
4301 les Nymphes ». Mais donner l’air bête à ceux qui le sont en créant une belle œuvre serait, par exemple, plus efficace. Ar
4302 e voix du troupeau. C’est sans doute son rôle. Il le tient magnifiquement. Mais qu’on nous laisse chercher plus loin, dans
4303 ous laisse chercher plus loin, dans ce silence où l’ on accède à des objets qui enfin valent le respect. as. Rougemont D
4304 ence où l’on accède à des objets qui enfin valent le respect. as. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Aragon, Traité d
73 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Pierre Naville, La Révolution et les intellectuels (novembre 1928)
4305 Pierre Naville, La Révolution et les intellectuels (novembre 1928)at Les derniers écr
4306 Pierre Naville, La Révolution et les intellectuels (novembre 1928)at Les derniers écrits des surréalist
4307 olution et les intellectuels (novembre 1928)at Les derniers écrits des surréalistes débattent la question de savoir s’il
4308 Les derniers écrits des surréalistes débattent la question de savoir s’ils vont se taire ou non. Mais leur silence ne d
4309 ux-mêmes. Ils se tournent donc naturellement vers l’ action, c’est-à-dire — nous sommes en France — vers la politique. Or c
4310 tion, c’est-à-dire — nous sommes en France — vers la politique. Or ces ennemis de toute littérature voient leurs avances d
4311 e littérature voient leurs avances dédaignées par les communistes, gens d’action à jugements simples, qui les trouvent trop
4312 mmunistes, gens d’action à jugements simples, qui les trouvent trop littérateurs. Rien d’étonnant à cela dans une époque où
4313 ateurs. Rien d’étonnant à cela dans une époque où les valeurs de l’esprit sont en pratique universellement méprisées. Mais
4314 étonnant à cela dans une époque où les valeurs de l’ esprit sont en pratique universellement méprisées. Mais les surréalist
4315 sont en pratique universellement méprisées. Mais les surréalistes ont leur responsabilité là-dedans ; leur défense de l’es
4316 t leur responsabilité là-dedans ; leur défense de l’ esprit s’est bornée jusqu’ici à une rhétorique très brillante contre u
4317 détesté, mais dont ils participent plus qu’ils ne le croient. Certes il était urgent de faire la critique de « cette réali
4318 ls ne le croient. Certes il était urgent de faire la critique de « cette réalité de premier plan qui nous empêche de bouge
4319 s cette réalité. Il est certain que s’ils avaient le courage de se soumettre au concret de l’esprit, ils comprendraient qu
4320 avaient le courage de se soumettre au concret de l’ esprit, ils comprendraient que le « service dans le temple » s’accommo
4321 re au concret de l’esprit, ils comprendraient que le « service dans le temple » s’accommode mal de tant de gesticulations,
4322 ’esprit, ils comprendraient que le « service dans le temple » s’accommode mal de tant de gesticulations, de gros mots et d
4323 d dont ils n’ont pas encore renoncé à chatouiller le snobisme. at. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Pierre Naville,
4324 gemont Denis de, « [Compte rendu] Pierre Naville, La Révolution et les intellectuels  », Bibliothèque universelle et Revue
4325 « [Compte rendu] Pierre Naville, La Révolution et les intellectuels  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève
74 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Malraux, Les Conquérants (décembre 1928)
4326 André Malraux, Les Conquérants (décembre 1928)au Ce récit de la révolution cantonaise
4327 Les Conquérants (décembre 1928)au Ce récit de la révolution cantonaise en 1925 nous place au nœud du monde moderne : o
4328 on y voit s’affronter en quelques hommes d’action les forces caractéristiques du temps — argent, races — et ses rares passi
4329 — argent, races — et ses rares passions, qui sont la domination et la démolition, l’organisation et le sabotage. On y déco
4330 et ses rares passions, qui sont la domination et la démolition, l’organisation et le sabotage. On y découvre le jeu des t
4331 assions, qui sont la domination et la démolition, l’ organisation et le sabotage. On y découvre le jeu des tempéraments qui
4332 la domination et la démolition, l’organisation et le sabotage. On y découvre le jeu des tempéraments qui fait opter ces ch
4333 ion, l’organisation et le sabotage. On y découvre le jeu des tempéraments qui fait opter ces chefs pour l’une ou l’autre d
4334 ires : elles représentent deux manières de sentir l’ unité d’une époque obsédée d’action.) Autour de ces individus — Chinoi
4335 mentateurs, Juifs russes méthodiques — s’émeuvent les masses de coolies, d’ouvriers armés, toute cette Chine qui s’éveille
4336 , toute cette Chine qui s’éveille au sein même de la lutte qui met aux prises l’Europe et le monde du Pacifique. On retrou
4337 eille au sein même de la lutte qui met aux prises l’ Europe et le monde du Pacifique. On retrouvera ici beaucoup des idées
4338 n même de la lutte qui met aux prises l’Europe et le monde du Pacifique. On retrouvera ici beaucoup des idées que la Tenta
4339 cifique. On retrouvera ici beaucoup des idées que la Tentation de l’Occident exprimait sous une forme abstraite et poétiqu
4340 ouvera ici beaucoup des idées que la Tentation de l’ Occident exprimait sous une forme abstraite et poétique. Mais cette fo
4341 en hommes, en meurtres, en décrets. Qu’il décrive la vie intense et instable des acteurs du drame, l’aspect quotidien et m
4342 la vie intense et instable des acteurs du drame, l’ aspect quotidien et mystérieux d’une révolution de rues, ou la palpita
4343 tidien et mystérieux d’une révolution de rues, ou la palpitation inquiétante des villes chinoises, Malraux fait preuve d’u
4344 lraux fait preuve d’un art du détail où se révèle le vrai romancier. On serait parfois tenté de le rapprocher de Morand, m
4345 èle le vrai romancier. On serait parfois tenté de le rapprocher de Morand, mais il est plus nerveux, sans doute aussi plus
4346 de faits, une discussion d’idées. Il est surtout la description d’une angoisse que le nihilisme de M. Malraux veut sans i
4347 Il est surtout la description d’une angoisse que le nihilisme de M. Malraux veut sans issues : l’angoisse que fait naître
4348 que le nihilisme de M. Malraux veut sans issues : l’ angoisse que fait naître au cœur du monde contemporain l’absurdité de
4349 sse que fait naître au cœur du monde contemporain l’ absurdité de ses ambitions. Écoutons Garine, l’un de ces chefs (c’est
4350 l’un de ces chefs (c’est lui qui parle au nom de l’ auteur, je pense) : « Il me semble que je lutte contre l’absurde humai
4351 r, je pense) : « Il me semble que je lutte contre l’ absurde humain, en faisant ce que je fais ici… » L’évasion dans l’acti
4352 ’absurde humain, en faisant ce que je fais ici… » L’ évasion dans l’action — révolutionnaire ou autre — rêvée par tant de j
4353 , en faisant ce que je fais ici… » L’évasion dans l’ action — révolutionnaire ou autre — rêvée par tant de jeunes hommes de
4354 ire ou autre — rêvée par tant de jeunes hommes de l’ après-guerre, Malraux l’a vécue, avant de la décrire ; et cet aveu de
4355 tant de jeunes hommes de l’après-guerre, Malraux l’ a vécue, avant de la décrire ; et cet aveu de Garine est décisif : « L
4356 es de l’après-guerre, Malraux l’a vécue, avant de la décrire ; et cet aveu de Garine est décisif : « La Révolution… tout c
4357 a décrire ; et cet aveu de Garine est décisif : «  La Révolution… tout ce qui n’est pas elle est pire qu’elle… » Expérience
4358 st pas elle est pire qu’elle… » Expérience faite, l’ absurde retrouve ses droits. C’est ainsi que, masqué par l’enchaînemen
4359 retrouve ses droits. C’est ainsi que, masqué par l’ enchaînement passionnant de l’action, il se dégage de ce roman un dése
4360 nsi que, masqué par l’enchaînement passionnant de l’ action, il se dégage de ce roman un désespoir sec, sans grimace. Cette
4361 angereux. Mais qu’elles s’appliquent à distinguer les forces déterminantes de l’heure, à les exprimer en un tel drame, et v
4362 pliquent à distinguer les forces déterminantes de l’ heure, à les exprimer en un tel drame, et voici André Malraux au premi
4363 distinguer les forces déterminantes de l’heure, à les exprimer en un tel drame, et voici André Malraux au premier rang des
4364 ugemont Denis de, « [Compte rendu] André Malraux, Les Conquérants  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève,
75 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Guy de Pourtalès, Louis II de Bavière ou Hamlet-Roi (décembre 1928)
4365 II de Bavière ou Hamlet-Roi (décembre 1928)av L’ histoire de Louis II exalte et déçoit l’imagination. On comprend que c
4366 928)av L’histoire de Louis II exalte et déçoit l’ imagination. On comprend que ce doux-amer ait séduit Barrès, mais ne l
4367 prend que ce doux-amer ait séduit Barrès, mais ne l’ ait point trompé : « Avec son beau regard de rêve, — lit-on dans l’Enn
4368 é : « Avec son beau regard de rêve, — lit-on dans l’ Ennemi des Lois — son expression amoureuse du silence et cet ensemble
4369 s ses châteaux en Espagne lamentablement réalisés les témoignages de l’éthique de cet « illustre réfractaire ». N’est-ce po
4370 spagne lamentablement réalisés les témoignages de l’ éthique de cet « illustre réfractaire ». N’est-ce point trop demander
4371 lès n’hésite pas à baptiser son héros « prince de l’ illusion et de la solitude ». Mais un prince rêveur n’est pas forcémen
4372 à baptiser son héros « prince de l’illusion et de la solitude ». Mais un prince rêveur n’est pas forcément prince du rêve 
4373 ince du rêve ; et par ailleurs ce livre sait bien le laisser voir. La qualité de l’illusion dont se nourrit Louis II n’est
4374 par ailleurs ce livre sait bien le laisser voir. La qualité de l’illusion dont se nourrit Louis II n’est ni aussi pure ni
4375 ce livre sait bien le laisser voir. La qualité de l’ illusion dont se nourrit Louis II n’est ni aussi pure ni aussi rare qu
4376 n’est ni aussi pure ni aussi rare qu’on voudrait l’ imaginer. Il reste qu’il a voulu la vivre et qu’il l’a pu, étant roi.
4377 qu’on voudrait l’imaginer. Il reste qu’il a voulu la vivre et qu’il l’a pu, étant roi. Il offre ainsi l’image d’un romanti
4378 maginer. Il reste qu’il a voulu la vivre et qu’il l’ a pu, étant roi. Il offre ainsi l’image d’un romantisme assez morose ;
4379 vivre et qu’il l’a pu, étant roi. Il offre ainsi l’ image d’un romantisme assez morose ; mais à grande échelle. M. de Pour
4380 à grande échelle. M. de Pourtalès a su rehausser le tableau avec beaucoup d’adresse et de charme : Wagner et Nietzsche lu
4381 t Nietzsche lui fournissent deux tons fermes dont le jeu donne aux nuances assez troubles du personnage central une résona
4382 it par hasard de moyens d’action puissants : s’il les a gâchés, c’est qu’il a eu peur, et s’il a eu peur c’est qu’il n’a pa
4383 , et s’il a eu peur c’est qu’il n’a pas su aimer. Le sujet de Liszt et de Chopin, c’était l’amour, donc la douleur ; ici,
4384 su aimer. Le sujet de Liszt et de Chopin, c’était l’ amour, donc la douleur ; ici, c’est l’absence d’amour, par refus de so
4385 ujet de Liszt et de Chopin, c’était l’amour, donc la douleur ; ici, c’est l’absence d’amour, par refus de souffrir. Mais c
4386 in, c’était l’amour, donc la douleur ; ici, c’est l’ absence d’amour, par refus de souffrir. Mais chez un être raffiné, la
4387 par refus de souffrir. Mais chez un être raffiné, la peur d’étreindre aboutit à l’amour de soi dans « l’illusion ». Sachon
4388 ez un être raffiné, la peur d’étreindre aboutit à l’ amour de soi dans « l’illusion ». Sachons gré à M. de Pourtalès de ce
4389 peur d’étreindre aboutit à l’amour de soi dans «  l’ illusion ». Sachons gré à M. de Pourtalès de ce qu’il préfère parler d
4390 oseraient de moins jolis mots ; mais ce n’est pas la moindre habileté du biographe. D’ailleurs, réussir un livre attrayant
4391 e n’était pas un problème aisé : Guy de Pourtalès l’ a résolu d’une façon fort adroite mais non moins franche. av. Rouge
76 1928, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Daniel-Rops, Le Prince menteur (décembre 1928)
4392 Daniel-Rops, Le Prince menteur (décembre 1928)aw Au hasard d’une rencontre, l’aute
4393 r (décembre 1928)aw Au hasard d’une rencontre, l’ auteur de ce récit se lie avec un inconnu qui se dit prince russe et e
4394 e dit prince russe et entretient autour de sa vie le plus grand mystère. Cependant il aime à raconter certaines scènes ter
4395 aime à raconter certaines scènes terrifiantes de la révolution : il a été condamné à mort, il s’est évadé, on le traque à
4396 on : il a été condamné à mort, il s’est évadé, on le traque à Paris même… Il subjugue le jeune Français par ces évocations
4397 est évadé, on le traque à Paris même… Il subjugue le jeune Français par ces évocations et l’espèce de fièvre qu’il y appor
4398 subjugue le jeune Français par ces évocations et l’ espèce de fièvre qu’il y apporte. Mais plusieurs incidents éveillent l
4399 ’il y apporte. Mais plusieurs incidents éveillent les soupçons du « petit-bourgeois » qu’il a choisi comme public, et brusq
4400 ois » qu’il a choisi comme public, et brusquement le mot éclate : menteur. Feintes et esquives adroites du « prince » qui
4401 es du « prince » qui disparaît, néanmoins. Enfin, le Français reçoit une lettre trouvée sur le corps de son ami suicidé, p
4402 Enfin, le Français reçoit une lettre trouvée sur le corps de son ami suicidé, pathétique confession qui doit expliquer sa
4403 oit expliquer sa mort et qui est aussi fausse que le reste. Ce mensonge qui va jusqu’à la mort, inclusivement, n’étonnera
4404 i fausse que le reste. Ce mensonge qui va jusqu’à la mort, inclusivement, n’étonnera pas ceux qui ont connu de semblables
4405 pas ceux qui ont connu de semblables mythomanes. Le cas méritait d’être exposé. Je regrette seulement que Daniel-Rops se
4406 courte nouvelle, d’ailleurs assez dense, et dont le mérite est d’être simple et précise dans l’exposé, sans rien simplifi
4407 dont le mérite est d’être simple et précise dans l’ exposé, sans rien simplifier ni préciser à l’excès dans le caractère.
4408 dans l’exposé, sans rien simplifier ni préciser à l’ excès dans le caractère. Daniel-Rops voit bien que l’épithète de mytho
4409 , sans rien simplifier ni préciser à l’excès dans le caractère. Daniel-Rops voit bien que l’épithète de mythomane n’épuise
4410 xcès dans le caractère. Daniel-Rops voit bien que l’ épithète de mythomane n’épuise pas une question dont l’importance dépa
4411 thète de mythomane n’épuise pas une question dont l’ importance dépasse celle du cas pathologique. Il y a dans ce culte de
4412 elle du cas pathologique. Il y a dans ce culte de la mythomanie qu’on a vu sévir parmi certains milieux d’avant-garde une
4413 , parce qu’elle constitue une tentation pour tous les poètes. Le désir de « plus vrai que le vrai » surexcité par l’insolen
4414 lle constitue une tentation pour tous les poètes. Le désir de « plus vrai que le vrai » surexcité par l’insolence d’une ps
4415 pour tous les poètes. Le désir de « plus vrai que le vrai » surexcité par l’insolence d’une psychologie qui rabaisse tout,
4416 désir de « plus vrai que le vrai » surexcité par l’ insolence d’une psychologie qui rabaisse tout, peut conduire à préfére
4417 as, qu’une déformation de cette réalité détestée. Le mythomane brouille les cartes mais reste dans le jeu. Jusque dans la
4418 de cette réalité détestée. Le mythomane brouille les cartes mais reste dans le jeu. Jusque dans la ruse que ses mensonges
4419 Le mythomane brouille les cartes mais reste dans le jeu. Jusque dans la ruse que ses mensonges exigent, il se reconnaît t
4420 le les cartes mais reste dans le jeu. Jusque dans la ruse que ses mensonges exigent, il se reconnaît tributaire de la « vé
4421 mensonges exigent, il se reconnaît tributaire de la « vérité trop évidente » ; alors qu’il la faudrait, sans rien fausser
4422 aire de la « vérité trop évidente » ; alors qu’il la faudrait, sans rien fausser, transcender… aw. Rougemont Denis de,
4423 Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Daniel-Rops, Le Prince menteur  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genèv
77 1928, Articles divers (1924–1930). Miroirs, ou Comment on perd Eurydice et soi-même » (décembre 1928)
4424 » Paul Valéry. Stéphane est maniaque, comme tous les jeunes gens de sa génération. Seulement chez lui, cela ne s’est pas p
4425 . Seulement chez lui, cela ne s’est pas porté sur les autos. Il préfère s’intéresser aux divers types humains. Mais on lui
4426 ord ; accepte d’attendre comme un enfant sage que le monde lui donne, en son temps, sa petite part. On lui a expliqué qu’i
4427 , sa petite part. On lui a expliqué qu’il fallait la mériter et tâcher de devenir quelqu’un. En d’autres termes, on lui co
4428  » comme parle un de nos classiques. Repoussé par le monde parce qu’il n’est pas encore quelqu’un, Stéphane cherche à savo
4429 r un moi qui feint toujours de se cacher derrière le feuillet suivant, entraîne le lecteur par ruse jusqu’à la dernière pa
4430 se cacher derrière le feuillet suivant, entraîne le lecteur par ruse jusqu’à la dernière page, et là déclare froidement n
4431 roidement ne pas exister. Non : il a remarqué que l’ époque peut être définie par l’abondance des autobiographies, mais aus
4432 il a remarqué que l’époque peut être définie par l’ abondance des autobiographies, mais aussi bien par celle des miroirs.
4433 hane passe des heures entières à se regarder dans les yeux. Il varie sur son visage les jeux de lumière et de sentiments. I
4434 e regarder dans les yeux. Il varie sur son visage les jeux de lumière et de sentiments. Il découvre une sorte de rire au co
4435 ouvre une sorte de rire au coin de sa bouche dans les moments de pire découragement ; et beaucoup d’autres hiatus de ce gen
4436 nt ; et beaucoup d’autres hiatus de ce genre, qui l’ intriguent à n’en pas finir. Quand il est très fatigué, il veut voir e
4437 é sur lui-même il se perd en méditations éléates. Le sommeil l’en délivre. Au matin il court se voir : il est laid. Lâchem
4438 ême il se perd en méditations éléates. Le sommeil l’ en délivre. Au matin il court se voir : il est laid. Lâchement il se p
4439 l se prend en pitié. Ces séances lui font du mal, l’ énervent, mais l’aveu qu’il en consent l’attache plus secrètement à so
4440 ié. Ces séances lui font du mal, l’énervent, mais l’ aveu qu’il en consent l’attache plus secrètement à son aventure. Nous
4441 du mal, l’énervent, mais l’aveu qu’il en consent l’ attache plus secrètement à son aventure. Nous vivons dans un décor fl
4442 ne sa tête, son portrait en pied. Il se voit dans l’ acte de se raser, de se baigner ; son image descend en face de lui par
4443 se baigner ; son image descend en face de lui par l’ ascenseur, elle le suit au long des trottoirs, il l’aperçoit entre des
4444 mage descend en face de lui par l’ascenseur, elle le suit au long des trottoirs, il l’aperçoit entre des souliers, des éti
4445 ascenseur, elle le suit au long des trottoirs, il l’ aperçoit entre des souliers, des étiquettes, des poupées ; elle le pré
4446 des souliers, des étiquettes, des poupées ; elle le précède au restaurant, le nargue brièvement au passage des autos, le
4447 tes, des poupées ; elle le précède au restaurant, le nargue brièvement au passage des autos, le ridiculise chez le coiffeu
4448 urant, le nargue brièvement au passage des autos, le ridiculise chez le coiffeur. Déjà, c’est avec une sorte d’angoisse qu
4449 ièvement au passage des autos, le ridiculise chez le coiffeur. Déjà, c’est avec une sorte d’angoisse qu’il la recherche. I
4450 feur. Déjà, c’est avec une sorte d’angoisse qu’il la recherche. Il veut se voir tel qu’il est parmi les autres. Mais s’il
4451 la recherche. Il veut se voir tel qu’il est parmi les autres. Mais s’il lui arrive de prendre son image pour celle de n’imp
4452 t de cette apparence, qu’il doute de sa réalité. Le mystère de voir ses yeux l’épouvante. Il y cherche une révélation et
4453 doute de sa réalité. Le mystère de voir ses yeux l’ épouvante. Il y cherche une révélation et n’y trouve que le désir d’un
4454 te. Il y cherche une révélation et n’y trouve que le désir d’une révélation. Peut-on s’hypnotiser avec son propre regard ?
4455 te incantation à soi-même qui pourrait lui rendre la certitude d’être. Mais il s’épuise dans une perspective de reflets qu
4456 reflets qui vont en diminuant vertigineusement et l’ égarent dans sa nuit. Je saute quelques délires et pas mal de supersti
4457 al de superstitions. Enfin cette expérience folle le mène à une découverte sur les sept sens de laquelle il convient de mé
4458 tte expérience folle le mène à une découverte sur les sept sens de laquelle il convient de méditer : la personne se dissout
4459 es sept sens de laquelle il convient de méditer : la personne se dissout dans l’eau des miroirs. Stéphane est en train de
4460 convient de méditer : la personne se dissout dans l’ eau des miroirs. Stéphane est en train de se perdre pour avoir voulu
4461 il faut sortir de soi pour se voir ? Il y a dans l’ homme moderne un besoin de vérifier qui n’est plus légitime dès l’inst
4462 un besoin de vérifier qui n’est plus légitime dès l’ instant qu’il se traduit par la négation de l’invérifiable. Stéphane n
4463 plus légitime dès l’instant qu’il se traduit par la négation de l’invérifiable. Stéphane n’a pas eu confiance. Or la pers
4464 dès l’instant qu’il se traduit par la négation de l’ invérifiable. Stéphane n’a pas eu confiance. Or la personnalité est un
4465 l’invérifiable. Stéphane n’a pas eu confiance. Or la personnalité est un acte de foi : Stéphane ne sait plus ce qu’il est.
4466 oire idiote, d’ailleurs vraie, se borne à décrire l’ aspect psychologique d’une aventure qui en a bien d’autres, d’aspects.
4467 qui en a bien d’autres, d’aspects. Il est bon que le lecteur dérisoirement troublé par la crainte de n’avoir pas saisi le
4468 est bon que le lecteur dérisoirement troublé par la crainte de n’avoir pas saisi le sens véritable d’un texte, trouve par
4469 ement troublé par la crainte de n’avoir pas saisi le sens véritable d’un texte, trouve parfois de cette incompréhension de
4470 e cette incompréhension des marques certaines. Si le rapport intime qui unit la phrase suivante aux considérations précéde
4471 marques certaines. Si le rapport intime qui unit la phrase suivante aux considérations précédentes lui échappe, qu’il y v
4472 dique, par besoin de définir, par défiance envers les dieux. À chaque regard dans notre miroir, nous perdons une Eurydice.
4473 ard dans notre miroir, nous perdons une Eurydice. Les miroirs sont peut-être la mort. La mort absolue, celle qui n’est pas
4474 perdons une Eurydice. Les miroirs sont peut-être la mort. La mort absolue, celle qui n’est pas une vie nouvelle. La mort
4475 une Eurydice. Les miroirs sont peut-être la mort. La mort absolue, celle qui n’est pas une vie nouvelle. La mort dans la t
4476 rt absolue, celle qui n’est pas une vie nouvelle. La mort dans la transparence glaciale de l’évidence. Un jour, à propos
4477 elle qui n’est pas une vie nouvelle. La mort dans la transparence glaciale de l’évidence. Un jour, à propos de rien, Stép
4478 ouvelle. La mort dans la transparence glaciale de l’ évidence. Un jour, à propos de rien, Stéphane pense avec fièvre : « I
4479 ane pense avec fièvre : « Il faudrait briser tous les miroirs. Alors tu te verrais en vérité. Peut-être te reconnaîtrais-tu
4480 t ? » C’est un premier filet d’eau vive qui perce le sol aride : mais Stéphane n’entend pas encore gronder les eaux profon
4481 aride : mais Stéphane n’entend pas encore gronder les eaux profondes. Le désir de s’hypnotiser l’irrite toujours vaguement.
4482 e n’entend pas encore gronder les eaux profondes. Le désir de s’hypnotiser l’irrite toujours vaguement. Mais il fuit son p
4483 nder les eaux profondes. Le désir de s’hypnotiser l’ irrite toujours vaguement. Mais il fuit son propre regard, il se cherc
4484 te, il croit saisir dans un regard de cette femme l’ écho de ce qui serait lui. Déjà il se perd dans ces yeux, mais comme o
4485 omme on meurt dans une naissance. Stéphane naît à l’ amour et à lui-même conjointement. Plusieurs ivresses l’ont envahi bru
4486 r et à lui-même conjointement. Plusieurs ivresses l’ ont envahi bruyamment, bâillonnent sa raison, l’empêchent de protester
4487 s l’ont envahi bruyamment, bâillonnent sa raison, l’ empêchent de protester contre le miracle. Parmi tous ses mots fous, no
4488 onnent sa raison, l’empêchent de protester contre le miracle. Parmi tous ses mots fous, noms, baisers, appels qui reçoiven
4489 s tard, ce fut un jour de grand soleil sur toutes les verreries de la capitale. Les fenêtres battaient. Le soleil et « la m
4490 jour de grand soleil sur toutes les verreries de la capitale. Les fenêtres battaient. Le soleil et « la mort » se conjura
4491 d soleil sur toutes les verreries de la capitale. Les fenêtres battaient. Le soleil et « la mort » se conjuraient pour abai
4492 verreries de la capitale. Les fenêtres battaient. Le soleil et « la mort » se conjuraient pour abaisser tous les regards.
4493 capitale. Les fenêtres battaient. Le soleil et «  la mort » se conjuraient pour abaisser tous les regards. Stéphane rendu
4494 et « la mort » se conjuraient pour abaisser tous les regards. Stéphane rendu à la santé écrivait : « Ton visage me cache t
4495 pour abaisser tous les regards. Stéphane rendu à la santé écrivait : « Ton visage me cache tous les miroirs » — à une fem
4496 à la santé écrivait : « Ton visage me cache tous les miroirs » — à une femme qu’il aimait. n. Rougemont Denis de, « Mir
4497 omment on perd Eurydice et soi-même », Cahiers de l’ Anglore, Genève, décembre 1928, p. 37-42.
78 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Sherwood Anderson, Mon père et moi et Je suis un homme (janvier 1929)
4498 re et moi et Je suis un homme (janvier 1929)ax Le critique se sent désarmé et légèrement absurde en face d’un récit com
4499 vec une émouvante simplicité et il faudrait avoir la grossièreté de lui répondre d’un air connaisseur que c’est bien compo
4500 bien étonné du passage où il rappelle qu’il écrit la vie d’un homme de lettres. En réalité, on ne le voit pas encore appar
4501 t la vie d’un homme de lettres. En réalité, on ne le voit pas encore apparaître sous cet aspect dans ces deux premiers tom
4502 s de son enfance et de sa jeunesse comme ouvrier. L’ art d’Anderson est étonnant d’apparente simplicité. Le récit s’avance
4503 t d’Anderson est étonnant d’apparente simplicité. Le récit s’avance à une allure libre et tranquille, anglo-saxonne et peu
4504 et là s’ouvrent des perspectives saisissantes sur l’ époque. Anderson est avant tout un poète, un homme qui aime inventer e
4505 es nécessités modernes, dégradantes. Cet amour de l’ invention romanesque considérée comme une revanche de la poésie — mais
4506 ntion romanesque considérée comme une revanche de la poésie — mais à Chicago on doit appeler ça du bluff — fait de lui san
4507 doit appeler ça du bluff — fait de lui sans doute le plus méridional des conteurs américains. Avec cela, un réalisme, plei
4508 uvent d’amertume. Mais là où d’autres placeraient le couplet humanitariste, lui s’en va dans un rêve, ou dans un autre sou
4509 est un Américain qui viennent nous rapprendre que les sources de la poésie sont dans notre maison. Voici un de ces passages
4510 n qui viennent nous rapprendre que les sources de la poésie sont dans notre maison. Voici un de ces passages où il sait êt
4511 ouvant : « À cette époque je croyais fortement en l’ existence d’une espèce de secrète et à peu près universelle conspirati
4512 u près universelle conspiration pour insister sur la laideur. “C’est une frasque de gosses à laquelle nous nous livrons, v
4513 à laquelle nous nous livrons, voilà tout, moi et les autres”, me disais-je parfois, et il y avait des moments où j’arrivai
4514 s, bras dessous en riant de nous-mêmes et de tout le reste, nous amusant comme des fous ». Mais non, on ne le secouera pas
4515 e, nous amusant comme des fous ». Mais non, on ne le secouera pas, ce cauchemar, ce monde moderne, ce monde de fous qui n’
4516 fous qui n’ont plus que leur raison, ce monde où l’ on ne sait plus créer avec joie des formes belles, ce monde qui devien
4517 quer un personnage précis pour lui faire endosser le blâme, mais comme l’homme nommé Ford, de Détroit, a contribué davanta
4518 écis pour lui faire endosser le blâme, mais comme l’ homme nommé Ford, de Détroit, a contribué davantage que n’importe quel
4519 n’importe quel autre de mon temps à faire aboutir la standardization à sa fin logique, ne pourrait-il pas être considéré u
4520 , ne pourrait-il pas être considéré un jour comme le grand tueur de son époque ? Rendre impuissant c’est à coup sûr tuer.
4521 impuissant c’est à coup sûr tuer. Or on parle de l’ élever à la présidence de la République. Qu’un tel acte serait adéquat
4522 c’est à coup sûr tuer. Or on parle de l’élever à la présidence de la République. Qu’un tel acte serait adéquat ! Tamerlan
4523 tuer. Or on parle de l’élever à la présidence de la République. Qu’un tel acte serait adéquat ! Tamerlan, dont la spécial
4524 e. Qu’un tel acte serait adéquat ! Tamerlan, dont la spécialité était l’assassinat du corps humain, mais qui raconte dans
4525 rait adéquat ! Tamerlan, dont la spécialité était l’ assassinat du corps humain, mais qui raconte dans son autobiographie q
4526 obiographie que son désir constant était que tous les hommes vivant sous lui conservassent la virilité et le respect de soi
4527 que tous les hommes vivant sous lui conservassent la virilité et le respect de soi était de son temps le souverain du mond
4528 mmes vivant sous lui conservassent la virilité et le respect de soi était de son temps le souverain du monde. Tamerlan pou
4529 virilité et le respect de soi était de son temps le souverain du monde. Tamerlan pour les anciens. Ford pour les modernes
4530 de son temps le souverain du monde. Tamerlan pour les anciens. Ford pour les modernes. Quelle décadence ! ax. Rougemont
4531 in du monde. Tamerlan pour les anciens. Ford pour les modernes. Quelle décadence ! ax. Rougemont Denis de, « [Compte re
79 1929, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). « Belles-Lettres, c’est la clé des champs… » (janvier 1929)
4532 « Belles-Lettres, c’est la clé des champs… » (janvier 1929)y 1. Belles-Lettres, c’est la clef
4533 ps… » (janvier 1929)y 1. Belles-Lettres, c’est la clef des champs. 2. L’essence de Belles-Lettres, c’est de l’alcool à
4534 1. Belles-Lettres, c’est la clef des champs. 2. L’ essence de Belles-Lettres, c’est de l’alcool à brûler les cervelles et
4535 champs. 2. L’essence de Belles-Lettres, c’est de l’ alcool à brûler les cervelles et les réputations. 3. Belles-Lettres n
4536 nce de Belles-Lettres, c’est de l’alcool à brûler les cervelles et les réputations. 3. Belles-Lettres n’est compréhensible
4537 tres, c’est de l’alcool à brûler les cervelles et les réputations. 3. Belles-Lettres n’est compréhensible et légitime que
4538 Lettres n’est compréhensible et légitime que dans la mesure où la poésie est compréhensible et légitime. 4. Je suis de san
4539 compréhensible et légitime que dans la mesure où la poésie est compréhensible et légitime. 4. Je suis de sang-froid, je d
4540 esse ; autrement que par des cris. 5. Avec toutes les erreurs et turpitudes que cela comporte, Belles-Lettres est une liber
4541 trer en religion : rond de cuir ou poète (au sens le plus large de ces mots.) (Mais je tiens à le leur dire ici : les anci
4542 sens le plus large de ces mots.) (Mais je tiens à le leur dire ici : les anciens bellettriens qui ont perdu toute foi ne c
4543 de ces mots.) (Mais je tiens à le leur dire ici : les anciens bellettriens qui ont perdu toute foi ne connaîtront pas de pa
4544 sont foncièrement mauvais.) 6. Peu de choses dans le monde moderne ont encore une « essence ». Celle de Belles-Lettres est
4545 . Celle de Belles-Lettres est en agréable odeur à l’ Éternel et à Satan pareillement. Et ceux qu’elle enivre entrent en éta
4546 y. Rougemont Denis de, « Belles-Lettres, c’est la clef des champs… », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genèv
80 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. Avant-propos
4547 Avant-propos Le dire une bonne fois. Il ne faut pas songer à décrire en quarante peti
4548 s songer à décrire en quarante petites pages tous les méfaits de l’instruction publique. C’est à peine assez pour indiquer
4549 ire en quarante petites pages tous les méfaits de l’ instruction publique. C’est à peine assez pour indiquer leur ordre de
4550 publique. C’est à peine assez pour indiquer leur ordre de grandeur ; à quoi je me bornerai. Il a paru sur le sujet de l’inst
4551 e grandeur ; à quoi je me bornerai. Il a paru sur le sujet de l’instruction publique deux petits livres1 excellents dont j
4552 à quoi je me bornerai. Il a paru sur le sujet de l’ instruction publique deux petits livres1 excellents dont je considère
4553 deux petits livres1 excellents dont je considère les thèses comme acquises : L’Éloge de l’ignorance, de M. Abel Bonnard, e
4554 nts dont je considère les thèses comme acquises : L’ Éloge de l’ignorance, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas l
4555 considère les thèses comme acquises : L’Éloge de l’ ignorance, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas les enfants,
4556  : L’Éloge de l’ignorance, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas les enfants, d’Henri Roorda. Le premier montre q
4557 e, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas les enfants, d’Henri Roorda. Le premier montre que la science apprise à l
4558 es enfants, d’Henri Roorda. Le premier montre que la science apprise à l’école appauvrit l’homme de tout ce que son ignora
4559 oorda. Le premier montre que la science apprise à l’ école appauvrit l’homme de tout ce que son ignorance respectait, et ne
4560 montre que la science apprise à l’école appauvrit l’ homme de tout ce que son ignorance respectait, et ne lui donne à la pl
4561 e que son ignorance respectait, et ne lui donne à la place que des laideurs et de la prétention. L’autre, avec l’ironie tr
4562 et ne lui donne à la place que des laideurs et de la prétention. L’autre, avec l’ironie tranquille du bon sens bafoué et q
4563 e des laideurs et de la prétention. L’autre, avec l’ ironie tranquille du bon sens bafoué et qui s’en moque, décrit la stup
4564 ille du bon sens bafoué et qui s’en moque, décrit la stupidité de l’enseignement tel qu’il est pratiqué dans nos collèges.
4565 bafoué et qui s’en moque, décrit la stupidité de l’ enseignement tel qu’il est pratiqué dans nos collèges. Mon dessein est
4566 e réaction de tempérament. Je marque d’autre part la nécessité de tout cela qui me blesse, la liaison fatale avec la démoc
4567 tre part la nécessité de tout cela qui me blesse, la liaison fatale avec la démocratie, de tout ce qui moleste ma liberté
4568 e tout cela qui me blesse, la liaison fatale avec la démocratie, de tout ce qui moleste ma liberté et sans doute celle de
4569 ocialiste qui a été établi par coup de force, que les libéraux ont admis, conformément à leurs maximes, et toléré malgré le
4570 humeur. Ce régime de punaises jaunâtres aboutit à l’ instruction publique et grâce à elle prolonge abusivement sa terne exi
4571 elle prolonge abusivement sa terne existence. Je l’ ai subi ; l’on va voir comment. De pareils souvenirs légitiment toutes
4572 ge abusivement sa terne existence. Je l’ai subi ; l’ on va voir comment. De pareils souvenirs légitiment toutes les haines.
4573 r comment. De pareils souvenirs légitiment toutes les haines. Je serai méchant, parce que j’en ai gros sur le cœur. D’aill
4574 nes. Je serai méchant, parce que j’en ai gros sur le cœur. D’ailleurs, ce petit écrit ne peut servir à rien. — Alors ? —
4575 apper : celui de naïveté. Définition du naïf dans le monde moderne : individu qui soutient des idées qui ne rapportent rie
4576 r au nom de ma génération, ne m’étant pas livré à l’ enquête préalable qui seule eût pu, à la rigueur, me donner ce droit b
4577 s livré à l’enquête préalable qui seule eût pu, à la rigueur, me donner ce droit bien inutile. Pourtant je sais qu’à droi
4578 e comme à gauche, ils sont plus nombreux qu’on ne le pense, ceux qui refusent d’être complices dans cet attentat à l’intég
4579 qui refusent d’être complices dans cet attentat à l’ intégrité humaine qu’est en fait l’esprit démocratique. Là-dessus, ces
4580 cet attentat à l’intégrité humaine qu’est en fait l’ esprit démocratique. Là-dessus, ces messieurs se lamentent, la jeuness
4581 ocratique. Là-dessus, ces messieurs se lamentent, la jeunesse d’aujourd’hui, etc. Évidemment. Mais il y a les jérémiades e
4582 nesse d’aujourd’hui, etc. Évidemment. Mais il y a les jérémiades et il y a les raisons. Hors le domaine de l’amour, où tout
4583 Évidemment. Mais il y a les jérémiades et il y a les raisons. Hors le domaine de l’amour, où tout se confond miraculeuseme
4584 il y a les jérémiades et il y a les raisons. Hors le domaine de l’amour, où tout se confond miraculeusement, gémir n’est p
4585 émiades et il y a les raisons. Hors le domaine de l’ amour, où tout se confond miraculeusement, gémir n’est pas un argument
4586 eusement, gémir n’est pas un argument. Je demande le droit de démolir. Et me l’accorde aussitôt. Sans conditions. Mon rôle
4587 n argument. Je demande le droit de démolir. Et me l’ accorde aussitôt. Sans conditions. Mon rôle n’est pas de proposer une
4588 de vitupérer ce que je vois, qui est laid. Quand la soupe est brûlée, on la renvoie, même si l’on n’est pas capable d’en
4589 vois, qui est laid. Quand la soupe est brûlée, on la renvoie, même si l’on n’est pas capable d’en faire soi-même une meill
4590 Quand la soupe est brûlée, on la renvoie, même si l’ on n’est pas capable d’en faire soi-même une meilleure. Mais j’aperçoi
4591 Mais j’aperçois là-bas, vautré derrière son bock, le Citoyen conscient et organisé pour la discussion. Il retrousse ses ma
4592 e son bock, le Citoyen conscient et organisé pour la discussion. Il retrousse ses manches. Il s’apprête à cracher sur ce q
4593 Oh ! oh ! oh ! il va parler, de grâce mettez-lui les mains sur la bouche ! Donnez-lui sa choucroute, tapez-lui dans le dos
4594 ! il va parler, de grâce mettez-lui les mains sur la bouche ! Donnez-lui sa choucroute, tapez-lui dans le dos, amenez-lui
4595 bouche ! Donnez-lui sa choucroute, tapez-lui dans le dos, amenez-lui le Guguss, des bretzels, sa petite amie, au secours !
4596 sa choucroute, tapez-lui dans le dos, amenez-lui le Guguss, des bretzels, sa petite amie, au secours ! Car j’ai encore de
4597 ire. Dès qu’une voix s’élève pour mettre en doute l’ excellence du principe de l’instruction publique, on crie sur tous les
4598 pour mettre en doute l’excellence du principe de l’ instruction publique, on crie sur tous les bancs : « Alors, vous êtes
4599 ncipe de l’instruction publique, on crie sur tous les bancs : « Alors, vous êtes pour un retour à la barbarie ? » Si ce réf
4600 s les bancs : « Alors, vous êtes pour un retour à la barbarie ? » Si ce réflexe indique un mépris vraiment exagéré pour la
4601 e réflexe indique un mépris vraiment exagéré pour la jugeote de l’adversaire ou s’il traduit simplement cette mauvaise foi
4602 que un mépris vraiment exagéré pour la jugeote de l’ adversaire ou s’il traduit simplement cette mauvaise foi pas même cons
4603 ise foi pas même consciente, cette lâcheté devant la discussion précise de leurs principes par quoi se signalent bien souv
4604 à cent « réponses » de cette sorte. Et je tiens à les classer par avance en deux catégories dont je vais régler le compte s
4605 par avance en deux catégories dont je vais régler le compte sommairement. Cela n’empêchera personne de me resservir ces ar
4606 A. Réponses du type : on ne peut pas aller contre l’ époque, vous êtes un pauvre utopiste, etc. Ce sont les positivistes qu
4607 poque, vous êtes un pauvre utopiste, etc. Ce sont les positivistes qui parlent ainsi, ceux qui croient aux faits. Je leur r
4608 Je leur réponds : 1° qu’ils ne peuvent me dénier le droit de juger ces faits ; 2° qu’ils ne peuvent, en vertu même de leu
4609 euvent, en vertu même de leur scepticisme quant à la valeur réformatrice des idées, m’accuser de faire une critique danger
4610 critique dangereuse. 3° que néanmoins je crois à l’ efficace de certaines utopies. (Les religions, la découverte de l’Amér
4611 oins je crois à l’efficace de certaines utopies. ( Les religions, la découverte de l’Amérique par Christophe Colomb, l’Europ
4612 l’efficace de certaines utopies. (Les religions, la découverte de l’Amérique par Christophe Colomb, l’Europe napoléonienn
4613 rtaines utopies. (Les religions, la découverte de l’ Amérique par Christophe Colomb, l’Europe napoléonienne, la Russie d’ap
4614 a découverte de l’Amérique par Christophe Colomb, l’ Europe napoléonienne, la Russie d’après Karl Marx, le vol des frères W
4615 ue par Christophe Colomb, l’Europe napoléonienne, la Russie d’après Karl Marx, le vol des frères Wright, et tout bêtement,
4616 urope napoléonienne, la Russie d’après Karl Marx, le vol des frères Wright, et tout bêtement, c’est le cas de le dire : l’
4617 le vol des frères Wright, et tout bêtement, c’est le cas de le dire : l’instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d
4618 frères Wright, et tout bêtement, c’est le cas de le dire : l’instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d’aller con
4619 ight, et tout bêtement, c’est le cas de le dire : l’ instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d’aller contre l’époq
4620 dire : l’instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d’aller contre l’époque, et on le peut efficacement. 2° Rira bi
4621 blique.) Résumé : 1° On a le droit d’aller contre l’ époque, et on le peut efficacement. 2° Rira bien qui rira le dernier.
4622 : 1° On a le droit d’aller contre l’époque, et on le peut efficacement. 2° Rira bien qui rira le dernier. B. Réponses du t
4623 rétrograde, un infâme réactionnaire, etc. Ce sont les partisans d’une démocratie progressiste et tolérante qui se livrent à
4624 lérante qui se livrent à ces excès de langage, je les renvoie en corps au chapitre 5 où je traiterai de cet aspect du probl
4625 e 5 où je traiterai de cet aspect du problème que l’ on peut appeler la question de droit. Certains, en effet, tirent toute
4626 i de cet aspect du problème que l’on peut appeler la question de droit. Certains, en effet, tirent toute leur force dans l
4627 Certains, en effet, tirent toute leur force dans les discussions de la tranquillité avec laquelle ils brouillent les faits
4628 , tirent toute leur force dans les discussions de la tranquillité avec laquelle ils brouillent les faits et les principes.
4629 s de la tranquillité avec laquelle ils brouillent les faits et les principes. Tourmentés par les scrupules de leur conscien
4630 uillité avec laquelle ils brouillent les faits et les principes. Tourmentés par les scrupules de leur conscience libérale,
4631 illent les faits et les principes. Tourmentés par les scrupules de leur conscience libérale, ils fuient la rigueur jusque d
4632 scrupules de leur conscience libérale, ils fuient la rigueur jusque dans leurs raisonnements. Pour moi qui cherche à démêl
4633 urs raisonnements. Pour moi qui cherche à démêler la vérité sans égard aux dérangements, même violents, que cela ne manque
4634 jamais de provoquer, je me propose de marquer ici la distinction classique du fait et du droit ; et c’est pourquoi je cons
4635 droit ; et c’est pourquoi je considérerai d’abord l’ instruction publique dans ses réalisations actuelles, puis au terme de
4636 d’outrages au bon sens peuvent être légitimés par le but final de notre institution-tabou. 1. Je ne puis naturellement p
4637 1. Je ne puis naturellement pas mentionner tous les ouvrages scientifiques. Les meilleurs sortent de l’Institut Rousseau.
4638 t pas mentionner tous les ouvrages scientifiques. Les meilleurs sortent de l’Institut Rousseau.
4639 ouvrages scientifiques. Les meilleurs sortent de l’ Institut Rousseau.
81 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 1. Mes prisons
4640 ssent sur leurs souvenirs de classe. C’est qu’ils les confondent avec ceux de leur enfance et les font indûment participer
4641 u’ils les confondent avec ceux de leur enfance et les font indûment participer de la même grâce. Voyez Péguy, quand il essa
4642 e leur enfance et les font indûment participer de la même grâce. Voyez Péguy, quand il essaie de nous faire croire qu’« il
4643 us faire croire qu’« il n’y a rien au-dessus » de la tâche des instituteurs : Faire de ces belles analyses logiques, et g
4644 ithmétique où il fallait si soigneusement séparer les calculs du raisonnement, par une barre verticale, et où il y avait to
4645 t pour emplir ou pour vider un bassin (et souvent les deux), (pour emplir et vider ensemble), (drôle d’occupation), (après
4646 urs des appartements à meubler. Et on multipliait le tapissier par le prix du mètre courant. Encore que je prenne les sen
4647 nts à meubler. Et on multipliait le tapissier par le prix du mètre courant. Encore que je prenne les sentiments trop au s
4648 r le prix du mètre courant. Encore que je prenne les sentiments trop au sérieux pour faire ici du sentiment, je suis sensi
4649 sie. Mais ce qui fait très bien dans un Cahier de la quinzaine, ça faisait de mauvaises notes dans nos carnets hebdomadair
4650 ournée d’enfance gâtée. Et d’ailleurs, multiplier le tapissier par le prix du mètre courant n’est pas une fantaisie pour c
4651 gâtée. Et d’ailleurs, multiplier le tapissier par le prix du mètre courant n’est pas une fantaisie pour ce petit être qui
4652 e pour ce petit être qui s’énerve, qui embrouille les règles, qui a sommeil, qui a peur de faire faux, parce que les autres
4653 ui a sommeil, qui a peur de faire faux, parce que les autres auront fait juste, et qui voudrait bien pleurer, et qui recomm
4654 rdoise où sèchent des traînées de craie grise, où les chiffres trop gros s’emmêlent… Et c’est cela l’enfance insouciante ?
4655 les chiffres trop gros s’emmêlent… Et c’est cela l’ enfance insouciante ? Qu’est-ce qui ressemble plus au souci quotidien
4656 s au souci quotidien des grandes personnes ? Mais l’ enfance est ailleurs. Je revois ce fond de jardin où l’on trouve des c
4657 ance est ailleurs. Je revois ce fond de jardin où l’ on trouve des cloportes dans la toile mouillée d’une tente d’Indiens,
4658 fond de jardin où l’on trouve des cloportes dans la toile mouillée d’une tente d’Indiens, des petites guerres mystérieuse
4659 , des matins de dimanche sonores et tout propres, la cuiller d’huile de foie de morue avant le repas, et le monsieur qui r
4660 ropres, la cuiller d’huile de foie de morue avant le repas, et le monsieur qui racontait gravement des choses qu’on ne com
4661 iller d’huile de foie de morue avant le repas, et le monsieur qui racontait gravement des choses qu’on ne comprend pas, la
4662 ntait gravement des choses qu’on ne comprend pas, la prière du soir pour qu’il fasse beau demain, Michel Strogoff et Rémy
4663 main, Michel Strogoff et Rémy un fils de vaincus, les tours de carrousel, les chemins dans la forêt en automne, des jeux, d
4664 Rémy un fils de vaincus, les tours de carrousel, les chemins dans la forêt en automne, des jeux, des feuillages, des rêver
4665 vaincus, les tours de carrousel, les chemins dans la forêt en automne, des jeux, des feuillages, des rêveries, des recoins
4666 peu divine, baignée d’une très vague angoisse que l’ on fuyait avec des bonheurs fous dans les bras maternels, ou bien ces
4667 oisse que l’on fuyait avec des bonheurs fous dans les bras maternels, ou bien ces promenades en tenant la forte main du pèr
4668 bras maternels, ou bien ces promenades en tenant la forte main du père qui fait de longs pas réguliers… L’École, dans ce
4669 rte main du père qui fait de longs pas réguliers… L’ École, dans ce concert de souvenirs, n’est qu’une dissonance douloureu
4670 uloureuse2. Deux angoisses dominent mon enfance : les séances chez le dentiste et l’horaire des leçons. Ce malaise inavouab
4671 angoisses dominent mon enfance : les séances chez le dentiste et l’horaire des leçons. Ce malaise inavouable, cette règle
4672 ent mon enfance : les séances chez le dentiste et l’ horaire des leçons. Ce malaise inavouable, cette règle méchante, ce so
4673 appris à lire, en cachette, avec une sœur aînée. L’ année suivante, on me mit à l’école, parce que c’est la loi. La premiè
4674 vec une sœur aînée. L’année suivante, on me mit à l’ école, parce que c’est la loi. La première classe fut agréable : j’ali
4675 ée suivante, on me mit à l’école, parce que c’est la loi. La première classe fut agréable : j’alignais des bâtons en rêvan
4676 e pensais pas devoir suivre syllabe après syllabe les ânonnements des élèves qui déchiffraient les premières phrases exempl
4677 hrases exemplaires. (J’aimais pourtant Zoé lave à la fontaine, à cause du nom.) Quand venait mon tour, je savais rarement
4678 om.) Quand venait mon tour, je savais rarement où l’ on en était. Cela m’attira des reproches acides, et naturellement, la
4679 m’attira des reproches acides, et naturellement, la phrase sacrée : « Il faut que tous fassent la même chose, ici ! » Dan
4680 nt, la phrase sacrée : « Il faut que tous fassent la même chose, ici ! » Dans la suite, on se chargea d’illustrer par d’in
4681 faut que tous fassent la même chose, ici ! » Dans la suite, on se chargea d’illustrer par d’innombrables exemples cet axio
4682 par d’innombrables exemples cet axiome qui devint la formule de mes premières douleurs morales. Après six ans de ce régime
4683 rentrée, ma colère n’en fut que plus malfaisante. L’ école me rendit au monde, vers l’âge de 18 ans, crispé et méfiant, san
4684 lus malfaisante. L’école me rendit au monde, vers l’ âge de 18 ans, crispé et méfiant, sans cesse en garde contre moi-même
4685 ait pas différer, profondément hypocrite donc, et le cerveau saturé d’évidences du type 2 et 2 font 4, ou : tous les homme
4686 turé d’évidences du type 2 et 2 font 4, ou : tous les hommes doivent être égaux en tout. Deux fois deux quatre, c’est stéri
4687 s de citer, je découvris un jour qu’elle contient la cause déterminante de notre malaise. Il me fallut un certain temps po
4688 ue je me posai la question : est-ce vrai que tous les hommes doivent être égaux en tout ? Et la première réponse fut : Il f
4689 réponse fut : Il faut que ce soit vrai, pour que la démocratie prospère et étende ses conquêtes. C’était découvrir notre
4690 dignations de nos maîtres quand ils dénonçaient «  la marque indélébile de l’éducation jésuite ». Nous étions marqués par N
4691 s quand ils dénonçaient « la marque indélébile de l’ éducation jésuite ». Nous étions marqués par Numa Droz et les manuels
4692 n jésuite ». Nous étions marqués par Numa Droz et les manuels des Frères ∴, par l’esprit petit-bourgeois, qui est une génér
4693 és par Numa Droz et les manuels des Frères ∴, par l’ esprit petit-bourgeois, qui est une généralisation de l’avarice, et pa
4694 it petit-bourgeois, qui est une généralisation de l’ avarice, et par les dogmes démocratiques, qui sont une généralisation
4695 , qui est une généralisation de l’avarice, et par les dogmes démocratiques, qui sont une généralisation de la règle de troi
4696 mes démocratiques, qui sont une généralisation de la règle de trois, aussi profondément certes qu’un Voltaire le fut par l
4697 e trois, aussi profondément certes qu’un Voltaire le fut par les jésuites : du moins ceux-ci lui laissèrent-ils assez de v
4698 ssi profondément certes qu’un Voltaire le fut par les jésuites : du moins ceux-ci lui laissèrent-ils assez de verdeur d’esp
4699 pire. Mais on avait brisé en nous ces ressorts de la révolte et de la libération d’une personnalité : l’imagination, le se
4700 it brisé en nous ces ressorts de la révolte et de la libération d’une personnalité : l’imagination, le sens de l’arbitrair
4701 révolte et de la libération d’une personnalité : l’ imagination, le sens de l’arbitraire et le sens de la relativité des d
4702 la libération d’une personnalité : l’imagination, le sens de l’arbitraire et le sens de la relativité des décrets humains.
4703 on d’une personnalité : l’imagination, le sens de l’ arbitraire et le sens de la relativité des décrets humains. Le prix de
4704 alité : l’imagination, le sens de l’arbitraire et le sens de la relativité des décrets humains. Le prix de mes souffrances
4705 magination, le sens de l’arbitraire et le sens de la relativité des décrets humains. Le prix de mes souffrances était donc
4706 et le sens de la relativité des décrets humains. Le prix de mes souffrances était donc ce conformisme indispensable aux «
4707 principes ». Je n’allai pas tout de suite jusqu’à les mettre en doute : mais un jour je compris que ce n’étaient que des pr
4708 les d’une arithmétique élémentaire, ce monde dont la Démocratie apparaissait comme l’achèvement idéal et nécessaire — et q
4709 e, ce monde dont la Démocratie apparaissait comme l’ achèvement idéal et nécessaire — et qui était le seul pour lequel on n
4710 e l’achèvement idéal et nécessaire — et qui était le seul pour lequel on nous préparait —, c’était un système d’abstractio
4711 tait un système d’abstractions primaires, c’était le rêve raisonnablement organisé des esprits moyens, prosaïques et rassi
4712 s, prosaïques et rassis3 qui tiennent aujourd’hui les charges de l’État, piliers d’un régime dont ils sont les seuls à s’ac
4713 t rassis3 qui tiennent aujourd’hui les charges de l’ État, piliers d’un régime dont ils sont les seuls à s’accommoder parce
4714 rges de l’État, piliers d’un régime dont ils sont les seuls à s’accommoder parce qu’ils l’ont établi à la mesure exacte de
4715 nt ils sont les seuls à s’accommoder parce qu’ils l’ ont établi à la mesure exacte de leurs besoins. Nous ne croyions plus
4716 seuls à s’accommoder parce qu’ils l’ont établi à la mesure exacte de leurs besoins. Nous ne croyions plus aux démons, mai
4717 besoins. Nous ne croyions plus aux démons, mais à la Commission scolaire. Nous n’avions plus de « superstitions grossières
4718 stitions grossières » comme celles qui touchent à l’ action des étoiles par exemple. Mais nous avions acquis le respect des
4719 des étoiles par exemple. Mais nous avions acquis le respect des statistiques. Nous savions que les miracles ne trompent q
4720 uis le respect des statistiques. Nous savions que les miracles ne trompent que les illettrés, mais qu’il convient de s’incl
4721 es. Nous savions que les miracles ne trompent que les illettrés, mais qu’il convient de s’incliner devant les miracles de l
4722 lettrés, mais qu’il convient de s’incliner devant les miracles de la science appliquée. On nous faisait voir tout au long d
4723 ’il convient de s’incliner devant les miracles de la science appliquée. On nous faisait voir tout au long de notre histoir
4724 nous faisait voir tout au long de notre histoire le Progrès constant de l’humanité vers les lumières, l’incrédulité et le
4725 au long de notre histoire le Progrès constant de l’ humanité vers les lumières, l’incrédulité et le bien-être matériel. No
4726 e histoire le Progrès constant de l’humanité vers les lumières, l’incrédulité et le bien-être matériel. Nous savions qu’un
4727 Progrès constant de l’humanité vers les lumières, l’ incrédulité et le bien-être matériel. Nous savions qu’un fils d’ouvrie
4728 de l’humanité vers les lumières, l’incrédulité et le bien-être matériel. Nous savions qu’un fils d’ouvrier est l’égal d’un
4729 e matériel. Nous savions qu’un fils d’ouvrier est l’ égal d’un petit Dauphin — et même nous ne pouvions nous empêcher de cr
4730 même nous ne pouvions nous empêcher de croire que le petit ouvrier est bien plus malin. Nous savions un tas de choses doul
4731 e choses douloureusement ennuyeuses qui sont dans les livres — et nulle part ailleurs. Maigre nourriture pour nos rêves. No
4732 re nourriture pour nos rêves. Nous arrivions dans la vie avec des mentions honorables et une inconcevable gaucherie, c’est
4733 et une honte secrète qui exaspérait ce mépris et le rendait agressif. Mais moi, j’avais trop souffert de cette compressio
4734 riellement délivré, en supporter longtemps encore l’ action. Je n’eus pas plus tôt découvert et nommé cet asservissement de
4735 plus tôt découvert et nommé cet asservissement de l’ esprit et ces mythes stériles, que je les rendis responsables de ma pe
4736 sement de l’esprit et ces mythes stériles, que je les rendis responsables de ma perte de contact avec les réalités les plus
4737 s rendis responsables de ma perte de contact avec les réalités les plus élémentaires de la vie. 2. Dans le cas le plus fa
4738 onsables de ma perte de contact avec les réalités les plus élémentaires de la vie. 2. Dans le cas le plus favorable, c’es
4739 ontact avec les réalités les plus élémentaires de la vie. 2. Dans le cas le plus favorable, c’est un silence, un vide. C
4740 alités les plus élémentaires de la vie. 2. Dans le cas le plus favorable, c’est un silence, un vide. C’était en dehors d
4741 les plus élémentaires de la vie. 2. Dans le cas le plus favorable, c’est un silence, un vide. C’était en dehors de la vi
4742 , c’est un silence, un vide. C’était en dehors de la vie. 3. du pain rassis.
82 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 2. Description du monstre
4743 2. Description du monstre Le service militaire me permit de retrouver quelques-unes de ces réalité
4744 Car ces différences sont les premières marques de la vie vécue et l’on aime à y découvrir la seule fraternité véritable. M
4745 ces sont les premières marques de la vie vécue et l’ on aime à y découvrir la seule fraternité véritable. Mais c’est en cas
4746 arques de la vie vécue et l’on aime à y découvrir la seule fraternité véritable. Mais c’est en caserne aussi que je devais
4747 is c’est en caserne aussi que je devais retrouver les instituteurs. Ceux-là n’avaient pas bougé. Et pour cause : ils n’étai
4748 é. Et pour cause : ils n’étaient jamais sortis de l’ école. Rien ne ressemble plus à un bon élève qu’un instituteur : de l’
4749 à l’autre il n’y a pas de solution de continuité, la différence n’étant qu’une question d’âge, non d’expérience vécue. Ce
4750 grand nombre de cas, mais pourquoi ai-je envie de le dire ? L’instituteur sous l’uniforme peut être défini par son incompr
4751 re de cas, mais pourquoi ai-je envie de le dire ? L’ instituteur sous l’uniforme peut être défini par son incompréhension m
4752 rquoi ai-je envie de le dire ? L’instituteur sous l’ uniforme peut être défini par son incompréhension méthodique des homme
4753 éhension méthodique des hommes et son mépris pour les paysans. Qu’il soit officier ou troupier, on le reconnaît à une façon
4754 les paysans. Qu’il soit officier ou troupier, on le reconnaît à une façon pédante d’être consciencieux, à une façon bless
4755 être supérieur, à une façon livresque d’expliquer les choses, à une façon théorique de juger les êtres. Ces distributeurs a
4756 liquer les choses, à une façon théorique de juger les êtres. Ces distributeurs automatiques (brevetés par le gouvernement)
4757 res. Ces distributeurs automatiques (brevetés par le gouvernement) de la manne égalitaire — ne se prennent pas pour de la
4758 rs automatiques (brevetés par le gouvernement) de la manne égalitaire — ne se prennent pas pour de la petite bière. Ils on
4759 la manne égalitaire — ne se prennent pas pour de la petite bière. Ils ont conscience d’appartenir à une élite responsable
4760 ce ridicule n’échappe pas à ceux qu’ils méprisent le plus, et ils auraient souvent l’occasion de s’en douter s’ils étaient
4761 qu’ils méprisent le plus, et ils auraient souvent l’ occasion de s’en douter s’ils étaient sensibles aux finesses de l’iron
4762 en douter s’ils étaient sensibles aux finesses de l’ ironie paysanne. Mais je n’en dirai pas plus, de peur de m’échauffer
4763 pas plus, de peur de m’échauffer inutilement. Si l’ on me poussait un peu, je crois que je m’oublierais au point d’insinue
4764 crois que je m’oublierais au point d’insinuer que les instituteurs galonnés causent autant de tort à l’armée que les instit
4765 es instituteurs galonnés causent autant de tort à l’ armée que les instituteurs antimilitaristes qui signent des manifestes
4766 urs galonnés causent autant de tort à l’armée que les instituteurs antimilitaristes qui signent des manifestes en mauvais f
4767 manifestes en mauvais français — et je ferais de la peine à d’excellents garçons. Revenons au civil. Au village, quand on
4768 es farces où ils sont drôles, mais non point dans la vie courante où ils le sont beaucoup moins. Le Messieu fait sans dout
4769 rôles, mais non point dans la vie courante où ils le sont beaucoup moins. Le Messieu fait sans doute des vers sur la viole
4770 ns la vie courante où ils le sont beaucoup moins. Le Messieu fait sans doute des vers sur la violette, périodiquement, com
4771 up moins. Le Messieu fait sans doute des vers sur la violette, périodiquement, comme on fait… un rhume de cerveau. Il joue
4772 lque instrument. Il a des idées modernes sur tous les sujets, espécialement sur la pédagogie. Ce mot revient souvent dans s
4773 s modernes sur tous les sujets, espécialement sur la pédagogie. Ce mot revient souvent dans sa conversation ; il le pronon
4774 Ce mot revient souvent dans sa conversation ; il le prononce avec un inimitable sérieux, avec un P majuscule. On sent que
4775 st là son affaire : Monsieur en un mot est M’sieu l’ Instituteur. Signes particuliers : cheveux longs, regard profond voilé
4776 eveux longs, regard profond voilé de douceur. Car le type populaire du poète romantique s’est dégradé en deux sous-types p
4777 ique s’est dégradé en deux sous-types posthumes : l’ artiste photographe et le régent. J’ai fait allusion au lieutenant-ins
4778 x sous-types posthumes : l’artiste photographe et le régent. J’ai fait allusion au lieutenant-instituteur qui veut faire d
4779 usion au lieutenant-instituteur qui veut faire de la pédagogie avec sa section. L’instituteur-lieutenant qui veut traiter
4780 r qui veut faire de la pédagogie avec sa section. L’ instituteur-lieutenant qui veut traiter militairement ses élèves témoi
4781 veut traiter militairement ses élèves témoigne de la même maladresse professionnelle. J’en connaissais un qui avait coutum
4782 de garçons de 10 à 11 ans : « J’ai bien su mater les quarante hommes de ma section, je saurai aussi vous mater. » On imagi
4783 aussi vous mater. » On imagine à quoi peut mener l’ enseignement donné par des êtres qui brouillent à ce point les méthode
4784 ent donné par des êtres qui brouillent à ce point les méthodes. Simple remarque pendant que nous en sommes aux instituteurs
4785 en sommes aux instituteurs : ils sortent tous de la même classe sociale, de la petite bourgeoisie. Est-ce que l’esprit pe
4786  : ils sortent tous de la même classe sociale, de la petite bourgeoisie. Est-ce que l’esprit petit-bourgeois qui imprègne
4787 sse sociale, de la petite bourgeoisie. Est-ce que l’ esprit petit-bourgeois qui imprègne l’enseignement primaire constitue
4788 Est-ce que l’esprit petit-bourgeois qui imprègne l’ enseignement primaire constitue l’apport des instituteurs, ou bien pré
4789 is qui imprègne l’enseignement primaire constitue l’ apport des instituteurs, ou bien préexiste-t-il dans les principes mêm
4790 ort des instituteurs, ou bien préexiste-t-il dans les principes mêmes de l’École, et attire-t-il les petits bourgeois comme
4791 u bien préexiste-t-il dans les principes mêmes de l’ École, et attire-t-il les petits bourgeois comme le portrait de Numa D
4792 ns les principes mêmes de l’École, et attire-t-il les petits bourgeois comme le portrait de Numa Droz attirait les mouches 
4793 ’École, et attire-t-il les petits bourgeois comme le portrait de Numa Droz attirait les mouches ? (Le verre en était toujo
4794 bourgeois comme le portrait de Numa Droz attirait les mouches ? (Le verre en était toujours jaune.) Je n’ai ni le droit ni
4795 le portrait de Numa Droz attirait les mouches ? ( Le verre en était toujours jaune.) Je n’ai ni le droit ni l’envie de dir
4796  ? (Le verre en était toujours jaune.) Je n’ai ni le droit ni l’envie de dire du mal des petits bourgeois. Ils sont au moi
4797 en était toujours jaune.) Je n’ai ni le droit ni l’ envie de dire du mal des petits bourgeois. Ils sont au moins aussi sym
4798 sympathiques que n’importe quelle autre classe de la société. Mais l’esprit petit-bourgeois pris abstraitement et tel qu’i
4799 n’importe quelle autre classe de la société. Mais l’ esprit petit-bourgeois pris abstraitement et tel qu’il se manifeste da
4800 pris abstraitement et tel qu’il se manifeste dans l’ école primaire est un véritable virus de mesquinerie, et devrait être
4801 les ». Je reviendrai peut-être sur ce point. Pour l’ instant je ne veux que décrire l’école telle qu’on la voit. Après les
4802 r ce point. Pour l’instant je ne veux que décrire l’ école telle qu’on la voit. Après les personnes, le décor. La laideur d
4803 nstant je ne veux que décrire l’école telle qu’on la voit. Après les personnes, le décor. La laideur des collèges n’est pa
4804 ux que décrire l’école telle qu’on la voit. Après les personnes, le décor. La laideur des collèges n’est pas accidentelle.
4805 l’école telle qu’on la voit. Après les personnes, le décor. La laideur des collèges n’est pas accidentelle. C’est celle mê
4806 lle qu’on la voit. Après les personnes, le décor. La laideur des collèges n’est pas accidentelle. C’est celle même du régi
4807 est pas accidentelle. C’est celle même du régime. l’ architecture de nos « palais scolaires ». symbolise d’une façon frappa
4808 e ce qu’il y a de schématique et de monotone dans la conception démocratique du monde. Entrons, c’est pire encore. Beaucou
4809 ants ont un frisson de dégoût au moment de passer la porte, au son de la cloche : l’odeur de goudron et d’urinoirs qui imp
4810 de dégoût au moment de passer la porte, au son de la cloche : l’odeur de goudron et d’urinoirs qui imprègne les corridors
4811 moment de passer la porte, au son de la cloche : l’ odeur de goudron et d’urinoirs qui imprègne les corridors et les habit
4812 e : l’odeur de goudron et d’urinoirs qui imprègne les corridors et les habits des écoliers empeste encore mes souvenirs. Et
4813 udron et d’urinoirs qui imprègne les corridors et les habits des écoliers empeste encore mes souvenirs. Et la poussière dan
4814 its des écoliers empeste encore mes souvenirs. Et la poussière dans l’air, l’encre sur les tables — c’était pourtant un re
4815 mpeste encore mes souvenirs. Et la poussière dans l’ air, l’encre sur les tables — c’était pourtant un refuge pour l’imagin
4816 encore mes souvenirs. Et la poussière dans l’air, l’ encre sur les tables — c’était pourtant un refuge pour l’imagination q
4817 ouvenirs. Et la poussière dans l’air, l’encre sur les tables — c’était pourtant un refuge pour l’imagination que ces initia
4818 sur les tables — c’était pourtant un refuge pour l’ imagination que ces initiales, ces signes, ces devises… —, les estampe
4819 on que ces initiales, ces signes, ces devises… —, les estampes piquées, Numa Droz et ses crottes de mouches… Dans ce décor
4820 s ! Et vous pensez que c’est un grand progrès sur la Nature. Quelle peut bien être la vertu éducatrice d’un tel milieu, mo
4821 rand progrès sur la Nature. Quelle peut bien être la vertu éducatrice d’un tel milieu, moral et matériel ? L’école publiqu
4822 u éducatrice d’un tel milieu, moral et matériel ? L’ école publique, telle que nous la voyons est semblable à tous ces monu
4823 al et matériel ? L’école publique, telle que nous la voyons est semblable à tous ces monuments « de la mauvaise époque » q
4824 la voyons est semblable à tous ces monuments « de la mauvaise époque » qui sont dans nos villes l’apport du xixe siècle.
4825  de la mauvaise époque » qui sont dans nos villes l’ apport du xixe siècle. Ils ne parviennent ni à la beauté ni à l’utili
4826 l’apport du xixe siècle. Ils ne parviennent ni à la beauté ni à l’utilité, et ils sont déjà démodés. On dit que le style
4827 e siècle. Ils ne parviennent ni à la beauté ni à l’ utilité, et ils sont déjà démodés. On dit que le style 1880 n’en est p
4828 à l’utilité, et ils sont déjà démodés. On dit que le style 1880 n’en est pas un : mais l’absence de style est encore un st
4829 . On dit que le style 1880 n’en est pas un : mais l’ absence de style est encore un style ; c’est même le pire.
4830 absence de style est encore un style ; c’est même le pire.
83 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 3. Anatomie du monstre
4831 pour quelles raisons j’ai entrepris de combattre l’ instruction publique — on ne me contestera pas ces raisons puisqu’elle
4832 s me sont absolument personnelles et qu’elles ont la valeur d’un témoignage, ni plus ni moins — il est temps que je fasse
4833 cœur non compris ». Aux yeux de beaucoup de gens, la passion est aveuglante : cela tient pour une bonne part à ce que ces
4834 nt pour une bonne part à ce que ces personnes ont les yeux faibles. Il serait plus juste de dire que la passion n’a qu’une
4835 es yeux faibles. Il serait plus juste de dire que la passion n’a qu’une clairvoyance intéressée : mais celles-là sont les
4836 une clairvoyance intéressée : mais celles-là sont les plus vives. Enfin, je tiens à reconnaître qu’ici je ne cherche point
4837 je tiens à reconnaître qu’ici je ne cherche point l’ équité. Pas plus que vous qui défendez de parti pris ce que j’attaque.
4838 vous qui défendez de parti pris ce que j’attaque. L’ esprit d’équité, avec son préjugé pacifiste n’est pas toujours l’espri
4839 té, avec son préjugé pacifiste n’est pas toujours l’ esprit de vérité, il s’en faut. Or je ne suis pas de ceux qui subordon
4840 faut. Or je ne suis pas de ceux qui subordonnent la vérité à la tranquillité bourgeoise. Je tiens le « gain de paix » pou
4841 ne suis pas de ceux qui subordonnent la vérité à la tranquillité bourgeoise. Je tiens le « gain de paix » pour illusoire 
4842 la vérité à la tranquillité bourgeoise. Je tiens le « gain de paix » pour illusoire : il consiste à repousser la difficul
4843 e paix » pour illusoire : il consiste à repousser la difficulté dans l’avenir, d’une ou deux générations. Pendant ce temps
4844 oire : il consiste à repousser la difficulté dans l’ avenir, d’une ou deux générations. Pendant ce temps elle s’aggrave, et
4845 ndant ce temps elle s’aggrave, et nous voici avec l’ héritage de cinquante ans de radicalisme sur les bras. L’écheveau est
4846 ec l’héritage de cinquante ans de radicalisme sur les bras. L’écheveau est tellement embrouillé que déjà plusieurs proposen
4847 age de cinquante ans de radicalisme sur les bras. L’ écheveau est tellement embrouillé que déjà plusieurs proposent de tran
4848 brouillé que déjà plusieurs proposent de trancher le nœud. Je me bornerai à l’examen des caractères les plus généraux de l
4849 s proposent de trancher le nœud. Je me bornerai à l’ examen des caractères les plus généraux de l’instruction publique, ceu
4850 le nœud. Je me bornerai à l’examen des caractères les plus généraux de l’instruction publique, ceux que n’atteignent dans l
4851 ai à l’examen des caractères les plus généraux de l’ instruction publique, ceux que n’atteignent dans leur principe ni les
4852 ique, ceux que n’atteignent dans leur principe ni les réformes de détail ni les modalités locales de réalisations pratiques
4853 t dans leur principe ni les réformes de détail ni les modalités locales de réalisations pratiques. Le programme a) l’h
4854 es modalités locales de réalisations pratiques. Le programme a) l’horaire : c’est un cadre, ou plutôt un moule, dans
4855 s de réalisations pratiques. Le programme a) l’ horaire : c’est un cadre, ou plutôt un moule, dans lequel on verse les
4856 n cadre, ou plutôt un moule, dans lequel on verse les matières les plus hétéroclites, sans égard à leurs qualités propres.
4857 lutôt un moule, dans lequel on verse les matières les plus hétéroclites, sans égard à leurs qualités propres. De 8 à 9 arit
4858 disciplines se succèdent sans transition, dans un ordre absolument fortuit, de manière à prévenir toute concentration de l’es
4859 uit, de manière à prévenir toute concentration de l’ esprit. b) plan d’études. On a divisé l’enseignement en branches bien
4860 ration de l’esprit. b) plan d’études. On a divisé l’ enseignement en branches bien distinctes. On attribue à chacune un cer
4861 s’arrange à faire tenir dans cette classification le plus possible de « connaissances » qui dès lors deviennent obligatoir
4862 aissances » qui dès lors deviennent obligatoires. La somme et l’arrangement des parties doivent être identiques pour tous
4863 qui dès lors deviennent obligatoires. La somme et l’ arrangement des parties doivent être identiques pour tous les écoliers
4864 ent des parties doivent être identiques pour tous les écoliers. Ce plan régit les huit années réglementaires de la scolarit
4865 identiques pour tous les écoliers. Ce plan régit les huit années réglementaires de la scolarité, et englobe la totalité de
4866 . Ce plan régit les huit années réglementaires de la scolarité, et englobe la totalité de la science nécessaire à tout cit
4867 années réglementaires de la scolarité, et englobe la totalité de la science nécessaire à tout citoyen, dans une vue aussi
4868 taires de la scolarité, et englobe la totalité de la science nécessaire à tout citoyen, dans une vue aussi large que simpl
4869 papier, d’un crayon et d’une règle (pour diviser la page en casiers rectangulaires, bien proprement.) Évidemment, il est
4870 t.) Évidemment, il est préférable de savoir aussi les noms des sciences élémentaires. Mais il n’est en aucune façon nécessa
4871 il n’est en aucune façon nécessaire de connaître la psychologie des enfants, ni même le contenu des sciences dont on écri
4872 de connaître la psychologie des enfants, ni même le contenu des sciences dont on écrit les noms dans les casiers. Est-ce
4873 ts, ni même le contenu des sciences dont on écrit les noms dans les casiers. Est-ce que l’étude du trapézoïde est particuli
4874 contenu des sciences dont on écrit les noms dans les casiers. Est-ce que l’étude du trapézoïde est particulièrement indiqu
4875 nt on écrit les noms dans les casiers. Est-ce que l’ étude du trapézoïde est particulièrement indiquée pour préparer les él
4876 zoïde est particulièrement indiquée pour préparer les élèves à une composition française ? Question oiseuse et saugrenue, —
4877 ançaise ? Question oiseuse et saugrenue, — naïve. Le bon sens voudrait que l’on tînt compte des possibilités d’adaptation
4878 e et saugrenue, — naïve. Le bon sens voudrait que l’ on tînt compte des possibilités d’adaptation de l’enfant ; de la valeu
4879 l’on tînt compte des possibilités d’adaptation de l’ enfant ; de la valeur fort inégale de ces disciplines ; de la diversit
4880 te des possibilités d’adaptation de l’enfant ; de la valeur fort inégale de ces disciplines ; de la diversité des besoins 
4881 de la valeur fort inégale de ces disciplines ; de la diversité des besoins ; enfin des rythmes naturels de l’esprit humain
4882 rsité des besoins ; enfin des rythmes naturels de l’ esprit humain, qu’il se trouve que le Créateur n’a point accordés à l’
4883 naturels de l’esprit humain, qu’il se trouve que le Créateur n’a point accordés à l’actuelle division horaire des journée
4884 il se trouve que le Créateur n’a point accordés à l’ actuelle division horaire des journées… Monsieur, répondent les foncti
4885 ivision horaire des journées… Monsieur, répondent les fonctionnaires responsables, vous savez par expérience que nous ne co
4886 s savez par expérience que nous ne comprenons pas la plaisanterie et que notre temps est précieux. D’ailleurs, les enfants
4887 erie et que notre temps est précieux. D’ailleurs, les enfants ne se plaignent pas, de quoi vous plaignez-vous, vous ? — Mai
4888 quoi vous plaignez-vous, vous ? — Mais on fausse l’ esprit de ces enfants… — Mais on nous paye, et ils n’en meurent pas.
4889 — Mais on nous paye, et ils n’en meurent pas. Les examens Ce sont en principe des « contrôles » comparables à ceux q
4890 principe des « contrôles » comparables à ceux que l’ on établit lors des grandes épreuves cyclistes. Les participants du To
4891 l’on établit lors des grandes épreuves cyclistes. Les participants du Tour de Science doivent s’inscrire au terme de chaque
4892 erme de chaque trimestre. Ceux qui arrivent après la clôture ont à refaire l’étape. On obtient par ce moyen un peloton hom
4893 Ceux qui arrivent après la clôture ont à refaire l’ étape. On obtient par ce moyen un peloton homogène, facile à surveille
4894 e, facile à surveiller. Mais en matière de sport, la tricherie est difficile, tandis qu’à l’école elle est de règle. Car l
4895 de sport, la tricherie est difficile, tandis qu’à l’ école elle est de règle. Car la qualité et la quantité des réponses « 
4896 icile, tandis qu’à l’école elle est de règle. Car la qualité et la quantité des réponses « fournies » par le prévenu (l’él
4897 qu’à l’école elle est de règle. Car la qualité et la quantité des réponses « fournies » par le prévenu (l’élève examiné) n
4898 lité et la quantité des réponses « fournies » par le prévenu (l’élève examiné) n’a qu’un lointain rapport avec la qualité
4899 uantité des réponses « fournies » par le prévenu ( l’ élève examiné) n’a qu’un lointain rapport avec la qualité et la quanti
4900 (l’élève examiné) n’a qu’un lointain rapport avec la qualité et la quantité des efforts « fournis » au cours du trimestre.
4901 né) n’a qu’un lointain rapport avec la qualité et la quantité des efforts « fournis » au cours du trimestre. Ce phénomène
4902 ant s’explique justement par cette psychologie de l’ enfant dont je disais tout à l’heure que la connaissance n’est pas exi
4903 tte psychologie de l’enfant dont je disais tout à l’ heure que la connaissance n’est pas exigée de ceux qui établissent les
4904 gie de l’enfant dont je disais tout à l’heure que la connaissance n’est pas exigée de ceux qui établissent les programmes
4905 aissance n’est pas exigée de ceux qui établissent les programmes et les examens. « Les examens faussent complètement l’espr
4906 exigée de ceux qui établissent les programmes et les examens. « Les examens faussent complètement l’esprit de l’enseigneme
4907 qui établissent les programmes et les examens. «  Les examens faussent complètement l’esprit de l’enseignement », lit-on ju
4908 les examens. « Les examens faussent complètement l’ esprit de l’enseignement », lit-on jusque sous la plume de divers maît
4909 . « Les examens faussent complètement l’esprit de l’ enseignement », lit-on jusque sous la plume de divers maîtres primaire
4910 s et secondaires. Ils n’en sont pas moins devenus le but même de l’instruction ; la fin qui justifie les moyens et à quoi
4911 s. Ils n’en sont pas moins devenus le but même de l’ instruction ; la fin qui justifie les moyens et à quoi l’on subordonne
4912 pas moins devenus le but même de l’instruction ; la fin qui justifie les moyens et à quoi l’on subordonne tout, plaisir,
4913 e but même de l’instruction ; la fin qui justifie les moyens et à quoi l’on subordonne tout, plaisir, goût au travail, qual
4914 uction ; la fin qui justifie les moyens et à quoi l’ on subordonne tout, plaisir, goût au travail, qualité du travail, sant
4915 vail, qualité du travail, santé, liberté, sens de la justice et autres balivernes, instruction véritable et autres plaisan
4916 le et autres plaisanteries de gros calibre, car à la vérité ce n’est pas d’enseigner qu’il s’agit, mais de soumettre les e
4917 t pas d’enseigner qu’il s’agit, mais de soumettre les esprits au contrôle de l’État, voyons donc, — n’avez-vous pas honte d
4918 git, mais de soumettre les esprits au contrôle de l’ État, voyons donc, — n’avez-vous pas honte de vous faire rappeler sans
4919 ler sans cesse des vérités aussi élémentaires. L’ égalitarisme des connaissances De l’existence des programmes, qui e
4920 taires. L’égalitarisme des connaissances De l’ existence des programmes, qui est un fait, et de l’existence de la Dém
4921 ’existence des programmes, qui est un fait, et de l’ existence de la Démocratie, qui est une prétention (réservons le mot d
4922 programmes, qui est un fait, et de l’existence de la Démocratie, qui est une prétention (réservons le mot d’idéal), découl
4923 la Démocratie, qui est une prétention (réservons le mot d’idéal), découle cette exigence théorique : tous les enfants doi
4924 d’idéal), découle cette exigence théorique : tous les enfants doivent à tout instant être en mesure 1° d’ingurgiter la même
4925 ent à tout instant être en mesure 1° d’ingurgiter la même quantité de « matière » ; 2° d’en rendre compte de la même façon
4926 uantité de « matière » ; 2° d’en rendre compte de la même façon, dans le même temps. Contentons-nous de remarquer que ce p
4927  » ; 2° d’en rendre compte de la même façon, dans le même temps. Contentons-nous de remarquer que ce principe est à la bas
4928 ontentons-nous de remarquer que ce principe est à la base du système ; qui repose donc sur une tranquille méconnaissance d
4929 repose donc sur une tranquille méconnaissance de la nature humaine. L’histoire enregistre bien une ou deux autres bêtises
4930 e tranquille méconnaissance de la nature humaine. L’ histoire enregistre bien une ou deux autres bêtises de cette épaisseur
4931 xtension universelle et un caractère obligatoire. L’ école exige donc que les meilleurs ralentissent et que les plus faible
4932 un caractère obligatoire. L’école exige donc que les meilleurs ralentissent et que les plus faibles se forcent. Elle ne co
4933 exige donc que les meilleurs ralentissent et que les plus faibles se forcent. Elle ne convient qu’aux médiocres, dont elle
4934 le ne convient qu’aux médiocres, dont elle assure le triomphe. L’école s’attaque impitoyablement aux natures d’exception,
4935 t qu’aux médiocres, dont elle assure le triomphe. L’ école s’attaque impitoyablement aux natures d’exception, et les réduit
4936 taque impitoyablement aux natures d’exception, et les réduit avec acharnement à son commun dénominateur4. Nos bourgeois ass
4937 s ils se fâchent tout rouge quand on leur dit que la Suisse est caractérisée, aux yeux de l’étranger impartial, par sa cul
4938 r dit que la Suisse est caractérisée, aux yeux de l’ étranger impartial, par sa culture intensive et extensive des veaux et
4939 nsive et extensive des veaux et des médiocres. Le gavage Moyen de réaliser les précédents. Plus ou moins rationalisé
4940 des médiocres. Le gavage Moyen de réaliser les précédents. Plus ou moins rationalisé. Son instrument le plus parfait
4941 édents. Plus ou moins rationalisé. Son instrument le plus parfait s’appelle le manuel. Un bon manuel est un résumé clair e
4942 onalisé. Son instrument le plus parfait s’appelle le manuel. Un bon manuel est un résumé clair et portatif des résultats a
4943 et portatif des résultats actuels d’une science. Le bon sens voudrait qu’on étudie d’abord la science dans sa réalité, pu
4944 cience. Le bon sens voudrait qu’on étudie d’abord la science dans sa réalité, puis qu’on se réfère au résumé comme à un ai
4945 se réfère au résumé comme à un aide-mémoire. Mais l’ école veut qu’on commence par apprendre le résumé. D’ailleurs elle s’a
4946 e. Mais l’école veut qu’on commence par apprendre le résumé. D’ailleurs elle s’arrête là. Les manuels ne correspondent à a
4947 apprendre le résumé. D’ailleurs elle s’arrête là. Les manuels ne correspondent à aucune réalité. Ils ne renferment rien qui
4948 , rien qui soit authentique. Ils négligent toutes les particularités, toutes les « prises » où pourrait s’accrocher l’intér
4949 . Ils négligent toutes les particularités, toutes les « prises » où pourrait s’accrocher l’intérêt. Ils dispensent de tout
4950 és, toutes les « prises » où pourrait s’accrocher l’ intérêt. Ils dispensent de tout contact direct avec ce dont ils traite
4951 tout contact direct avec ce dont ils traitent. Or la valeur éducative des choses n’apparaît qu’à celui qui entre en commer
4952 e de mille, dit un sage oriental dont j’ai oublié le nom. Une autre conséquence du gavage, c’est qu’on ne peut laisser aux
4953 du gavage, c’est qu’on ne peut laisser aux élèves le temps qu’il faut pour assimiler ce qu’ils apprennent. Ils sont forcés
4954 n’est pas modèle, il est absurde. Mais où sont à l’ école les modèles de ce qu’on nommait autrefois la belle ouvrage ? On
4955 as modèle, il est absurde. Mais où sont à l’école les modèles de ce qu’on nommait autrefois la belle ouvrage ? On va suppri
4956 l’école les modèles de ce qu’on nommait autrefois la belle ouvrage ? On va supprimer les leçons de calligraphie. La dis
4957 mait autrefois la belle ouvrage ? On va supprimer les leçons de calligraphie. La discipline On conçoit que la réalisa
4958  ? On va supprimer les leçons de calligraphie. La discipline On conçoit que la réalisation d’un programme entièremen
4959 calligraphie. La discipline On conçoit que la réalisation d’un programme entièrement contre nature exige une discip
4960 ne sévère. D’où notre conception pénitentiaire de l’ école. Mais, s’il est des disciplines qui renforcent, il en est d’aut
4961 renforcent, il en est d’autres qui amoindrissent. La discipline scolaire consiste à faire tenir les enfants immobiles et m
4962 nt. La discipline scolaire consiste à faire tenir les enfants immobiles et muets 6 heures par jour durant 8 ans. Il paraît
4963 ar jour durant 8 ans. Il paraît que cela facilite le travail du maître. Il se peut. Tout dépend de ce qu’on attend de ce t
4964 ravail. Je doute qu’il soit de nature à légitimer l’ énormité de l’effort qu’on demande à ces petits. Là encore il y a une
4965 te qu’il soit de nature à légitimer l’énormité de l’ effort qu’on demande à ces petits. Là encore il y a une exagération ab
4966 énéralisation si schématique et superficielle que la discipline perd tout son sens éducatif et n’est plus qu’une entrave é
4967 chez un peuple qui vraiment ne péchait point par l’ excès de cette vertu. La discipline primaire forme des gobeurs et des
4968 ment ne péchait point par l’excès de cette vertu. La discipline primaire forme des gobeurs et des inertes, fournit des mou
4969 tes, fournit des moutons aux partis et prédispose les citoyens suisses à prendre au sérieux les innombrables défense de, pe
4970 dispose les citoyens suisses à prendre au sérieux les innombrables défense de, petites crottes noires et blanches qui marqu
4971 es noires et blanches qui marquent un peu partout le passage de l’État, et dont la vue permet à ceux qui tombent du ciel s
4972 lanches qui marquent un peu partout le passage de l’ État, et dont la vue permet à ceux qui tombent du ciel sur notre sol d
4973 uent un peu partout le passage de l’État, et dont la vue permet à ceux qui tombent du ciel sur notre sol de s’écrier sans
4974 berté, liberté chérie, voilà bien ta patrie. » La préparation civique Tous les pontifes de l’instruction publique so
4975 en ta patrie. » La préparation civique Tous les pontifes de l’instruction publique sont d’accord sur ce point : l’éco
4976 La préparation civique Tous les pontifes de l’ instruction publique sont d’accord sur ce point : l’école primaire doi
4977 instruction publique sont d’accord sur ce point : l’ école primaire doit être une école de Démocratie. Ils insistent sur le
4978 t être une école de Démocratie. Ils insistent sur le fait que les leçons d’instruction civique sont insuffisantes pour for
4979 cole de Démocratie. Ils insistent sur le fait que les leçons d’instruction civique sont insuffisantes pour former le petit
4980 nstruction civique sont insuffisantes pour former le petit citoyen : il faut que l’enseignement tout entier soit occasion
4981 santes pour former le petit citoyen : il faut que l’ enseignement tout entier soit occasion de développer les vertus social
4982 eignement tout entier soit occasion de développer les vertus sociales de l’élève. « Une classe est une société en miniature
4983 oit occasion de développer les vertus sociales de l’ élève. « Une classe est une société en miniature. » Ceci est une énorm
4984 une énorme bourde. Juxtaposez trente enfants sur les bancs d’une salle d’école, vous n’aurez rien qui ressemble en quoi qu
4985 état social existant. Ce qui est vrai, c’est que le fait, absolument nouveau dans l’Histoire, que l’on oblige les enfants
4986 t. Ce qui est vrai, c’est que le fait, absolument nouveau dans l’Histoire, que l’on oblige les enfants à vivre ensemble dès l’â
4987 vrai, c’est que le fait, absolument nouveau dans l’ Histoire, que l’on oblige les enfants à vivre ensemble dès l’âge de 6
4988 le fait, absolument nouveau dans l’Histoire, que l’ on oblige les enfants à vivre ensemble dès l’âge de 6 ans, favorise le
4989 solument nouveau dans l’Histoire, que l’on oblige les enfants à vivre ensemble dès l’âge de 6 ans, favorise le développemen
4990 que l’on oblige les enfants à vivre ensemble dès l’ âge de 6 ans, favorise le développement de leurs penchants les plus « 
4991 nts à vivre ensemble dès l’âge de 6 ans, favorise le développement de leurs penchants les plus « communs » : jalousie, van
4992 ans, favorise le développement de leurs penchants les plus « communs » : jalousie, vanité, panurgisme, concurrence sournois
4993 e, esprit de parti, arrivisme et parlementarisme. La culture de l’esprit démocratique telle qu’elle est comprise par les i
4994 arti, arrivisme et parlementarisme. La culture de l’ esprit démocratique telle qu’elle est comprise par les instituteurs — 
4995 sprit démocratique telle qu’elle est comprise par les instituteurs — et elle ne peut être comprise autrement — est essentie
4996 nière que ce soit, voudraient « se distinguer ». ( Le mépris que notre peuple met dans cette expression !) Pour moi ce que
4997 expérience scolaire, c’est une grosse vérité que le bon sens m’eût par ailleurs fait voir : il n’y a pas d’égalité réelle
4998 : il n’y a pas d’égalité réelle possible tant que la loi est la même pour tous. Je ne parle pas des manuels d’histoire, do
4999 pas d’égalité réelle possible tant que la loi est la même pour tous. Je ne parle pas des manuels d’histoire, dont il est a
5000 i démontré qu’ils donnent une image mensongère de l’ ancienne Suisse, à l’usage du peuple souverain qui ne manque pas d’en
5001 nent une image mensongère de l’ancienne Suisse, à l’ usage du peuple souverain qui ne manque pas d’en être flatté. Et puis,
5002 e flatté. Et puis, quelle est cette préparation à la vie qui commence par nous soustraire à l’influence de la vie ? Quelle
5003 ation à la vie qui commence par nous soustraire à l’ influence de la vie ? Quelle est cette éducation sociale qui enlève l’
5004 qui commence par nous soustraire à l’influence de la vie ? Quelle est cette éducation sociale qui enlève l’enfant à la fam
5005 e ? Quelle est cette éducation sociale qui enlève l’ enfant à la famille ?5 Quel est cet instrument de perfectionnement civ
5006 est cette éducation sociale qui enlève l’enfant à la famille ?5 Quel est cet instrument de perfectionnement civique qui as
5007 instrument de perfectionnement civique qui assure l’ écrasement des plus délicats par les plus vulgaires ? L’idéal du bo
5008 que qui assure l’écrasement des plus délicats par les plus vulgaires ? L’idéal du bon élève Le bon sens voudrait que
5009 ent des plus délicats par les plus vulgaires ? L’ idéal du bon élève Le bon sens voudrait que le bon élève soit celui
5010 r les plus vulgaires ? L’idéal du bon élève Le bon sens voudrait que le bon élève soit celui qui sait utiliser pour
5011 L’idéal du bon élève Le bon sens voudrait que le bon élève soit celui qui sait utiliser pour son profit humain la peti
5012 it celui qui sait utiliser pour son profit humain la petite somme de connaissances indispensables qu’on lui donne à l’écol
5013 de connaissances indispensables qu’on lui donne à l’ école. (Cet argent de poche, ni plus ni moins.) Ou encore : que le bon
5014 gent de poche, ni plus ni moins.) Ou encore : que le bon élève soit celui qui supporte le mieux le traitement scolaire ; c
5015 encore : que le bon élève soit celui qui supporte le mieux le traitement scolaire ; celui dont la valeur humaine subsiste
5016 que le bon élève soit celui qui supporte le mieux le traitement scolaire ; celui dont la valeur humaine subsiste intacte a
5017 orte le mieux le traitement scolaire ; celui dont la valeur humaine subsiste intacte au milieu des conditions anormales cr
5018 cte au milieu des conditions anormales créées par l’ école publique. Mais l’idéal de l’école est autre ; il est même tout c
5019 tions anormales créées par l’école publique. Mais l’ idéal de l’école est autre ; il est même tout contraire. On ne peut pa
5020 ales créées par l’école publique. Mais l’idéal de l’ école est autre ; il est même tout contraire. On ne peut pas exiger qu
5021 té que je ne puis m’empêcher de trouver suspecte. Le bon élève est celui qui a de bons points. Or les bons points vont aux
5022 . Le bon élève est celui qui a de bons points. Or les bons points vont aux parfaits imitateurs. Oyez-moi tous ces petits ph
5023 phonographes…ographes…graphes…graphes… Enfoncés, les perroquets. Dans une composition sur La Neige, Victoria X, 10 ans, éc
5024 nfoncés, les perroquets. Dans une composition sur La Neige, Victoria X, 10 ans, écrit : « C’est l’hiver. Déjà la terre a r
5025 sur La Neige, Victoria X, 10 ans, écrit : « C’est l’ hiver. Déjà la terre a revêtu son blanc manteau. » Elle aura 10 sur 10
5026 Victoria X, 10 ans, écrit : « C’est l’hiver. Déjà la terre a revêtu son blanc manteau. » Elle aura 10 sur 10. Mais on donn
5027 évident que Sylvie est supérieure à Victoria dans la mesure où l’invention est supérieure à l’imitation. Mais Victoria mon
5028 ylvie est supérieure à Victoria dans la mesure où l’ invention est supérieure à l’imitation. Mais Victoria montre une âme d
5029 ia dans la mesure où l’invention est supérieure à l’ imitation. Mais Victoria montre une âme docile, un rassurant défaut d’
5030 que, tandis que Sylvie appartient manifestement à la race dangereuse de ceux qui voient avec leurs yeux. Le bon élève est
5031 ce dangereuse de ceux qui voient avec leurs yeux. Le bon élève est aussi l’élève discipliné. L’école veut que partout la v
5032 ui voient avec leurs yeux. Le bon élève est aussi l’ élève discipliné. L’école veut que partout la valeur cède le pas à la
5033 yeux. Le bon élève est aussi l’élève discipliné. L’ école veut que partout la valeur cède le pas à la règle. Elle cherche
5034 ussi l’élève discipliné. L’école veut que partout la valeur cède le pas à la règle. Elle cherche à développer chez nos pet
5035 scipliné. L’école veut que partout la valeur cède le pas à la règle. Elle cherche à développer chez nos petits Helvètes un
5036 L’école veut que partout la valeur cède le pas à la règle. Elle cherche à développer chez nos petits Helvètes un légalism
5037 u d’impuissants, qui d’ailleurs ne peut être qu’à l’ avantage des gens en place, vieille histoire. On m’objectera sans dout
5038 ex-forts-en-thème, voire par d’ex-instituteurs. À la vérité, il s’agit de réussites qui, pour avoir enivré l’espoir et enf
5039 té, il s’agit de réussites qui, pour avoir enivré l’ espoir et enflammé l’ambition d’un grand nombre de régents, ne laissen
5040 sites qui, pour avoir enivré l’espoir et enflammé l’ ambition d’un grand nombre de régents, ne laissent pas que d’être asse
5041 ires » (témoignage suffisant de leurs aptitudes à la compromission sociale établie) et cueilli au passage un grade univers
5042 nombreux banquets de cercles locaux où se fondent les réputations, où se « baptisent » les hommes d’avenir. Un jour on voit
5043 ù se fondent les réputations, où se « baptisent » les hommes d’avenir. Un jour on voit s’étaler en première page des illust
5044 r on voit s’étaler en première page des illustrés la face épanouie quoique énergique d’un de ces coqs de village qu’on vie
5045 de ces coqs de village qu’on vient de jucher sur la flèche de l’édifice administratif. Et c’est ce qui s’appelle une bell
5046 de village qu’on vient de jucher sur la flèche de l’ édifice administratif. Et c’est ce qui s’appelle une belle carrière. M
5047 n, par ailleurs fort grande. Tous ceux qui ont eu l’ occasion de comparer les bons élèves de diverses classes d’un collège
5048 ande. Tous ceux qui ont eu l’occasion de comparer les bons élèves de diverses classes d’un collège ont été frappés de const
5049 ses d’un collège ont été frappés de constater que la force et l’originalité de leur jugement sont en raison inverse du nom
5050 lège ont été frappés de constater que la force et l’ originalité de leur jugement sont en raison inverse du nombre d’années
5051 nées d’instruction publique qu’ils ont subies. Le dilemme J’ai indiqué que les principes de l’instruction publique n
5052 ils ont subies. Le dilemme J’ai indiqué que les principes de l’instruction publique ne coïncident qu’accidentellement
5053 Le dilemme J’ai indiqué que les principes de l’ instruction publique ne coïncident qu’accidentellement avec ceux du bo
5054 ls constituent une inversion méthodique de toutes les lois divines et humaines. C’est-à-dire : une méthode d’abâtardissemen
5055 . C’est-à-dire : une méthode d’abâtardissement de la race. D’autre part, il est aisé de voir que tous ces principes dérive
5056 ces principes dérivent nécessairement du fait que l’ école est publique, obligatoire, et soumise au contrôle de l’État. Al
5057 publique, obligatoire, et soumise au contrôle de l’ État. Alors ? Ou bien vous acceptez le régime — mais aussi ses conséq
5058 ontrôle de l’État. Alors ? Ou bien vous acceptez le régime — mais aussi ses conséquences absurdes et fatales, par exemple
5059 ses conséquences absurdes et fatales, par exemple l’ instruction publique. Ou bien vous combattez l’instruction publique — 
5060 le l’instruction publique. Ou bien vous combattez l’ instruction publique — mais vous êtes, de ce fait, contre le régime. I
5061 ion publique — mais vous êtes, de ce fait, contre le régime. Il y a là, dirait M. Prudhomme, un bien grave dilemme. 4.
5062 ien grave dilemme. 4. Ce ne sont pas seulement les meilleurs qui sont sacrifiés. Voici ce que M. E. Duvillard dit des en
5063 ue M. E. Duvillard dit des enfants peu doués pour les disciplines scolaires : « Les épaves scolaires, faute d’un traitement
5064 ants peu doués pour les disciplines scolaires : «  Les épaves scolaires, faute d’un traitement pédagogique approprié, tomben
5065 prié, tombent dans une apathie intellectuelle qui les conduit souvent à l’imbécillité et au vice. » Emmanuel Duvillard, L’É
5066 apathie intellectuelle qui les conduit souvent à l’ imbécillité et au vice. » Emmanuel Duvillard, L’École de demain, Genèv
5067 à l’imbécillité et au vice. » Emmanuel Duvillard, L’ École de demain, Genève, Kündig, 1918, p. 12. 5. Il est peut-être ava
5068 t-être avantageux dans certains cas de soustraire l’ enfant à l’influence d’une famille anormale. Mais d’abord c’est sancti
5069 tageux dans certains cas de soustraire l’enfant à l’ influence d’une famille anormale. Mais d’abord c’est sanctionner cet é
5070 (il y aurait sans doute d’autres moyens de sauver l’ enfant dans sa famille). Ensuite, pourquoi fait-on en réalité, comme s
5071 ite, pourquoi fait-on en réalité, comme si toutes les familles constituaient un milieu délétère ? 6. Justice démocratique,
5072 6. Justice démocratique, égalité, légalité, sont les meilleures armes de la bassesse contre toute valeur réelle, absolue.
5073 , égalité, légalité, sont les meilleures armes de la bassesse contre toute valeur réelle, absolue.
84 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 4. L’illusion réformiste
5074 4. L’ illusion réformiste Bien entendu, tout cela a été dit. (Un peu autre
5075 tion. Il suffit pour s’en convaincre de parcourir l’ abondante littérature publiée sur le « problème de l’école nouvelle ».
5076 de parcourir l’abondante littérature publiée sur le « problème de l’école nouvelle ». On appelle école nouvelle tout étab
5077 bondante littérature publiée sur le « problème de l’ école nouvelle ». On appelle école nouvelle tout établissement où l’on
5078 . On appelle école nouvelle tout établissement où l’ on s’efforce d’enseigner selon des principes tirés de l’observation de
5079 ’efforce d’enseigner selon des principes tirés de l’ observation des enfants, c’est-à-dire : en contradiction sur toute la
5080 nfants, c’est-à-dire : en contradiction sur toute la ligne avec l’enseignement officiel. Les promoteurs de ces mouvements
5081 à-dire : en contradiction sur toute la ligne avec l’ enseignement officiel. Les promoteurs de ces mouvements tentent la gag
5082 sur toute la ligne avec l’enseignement officiel. Les promoteurs de ces mouvements tentent la gageure de réformer l’école p
5083 fficiel. Les promoteurs de ces mouvements tentent la gageure de réformer l’école primaire sans toucher au principe de l’in
5084 de ces mouvements tentent la gageure de réformer l’ école primaire sans toucher au principe de l’instruction publique. Les
5085 rmer l’école primaire sans toucher au principe de l’ instruction publique. Les réformes qu’ils ont proposées jusqu’ici sont
5086 ns toucher au principe de l’instruction publique. Les réformes qu’ils ont proposées jusqu’ici sont en général judicieuses,
5087 usqu’ici sont en général judicieuses, dictées par le bon sens7 et retouchées par le pédantisme inhérent à toute science. O
5088 euses, dictées par le bon sens7 et retouchées par le pédantisme inhérent à toute science. On a constaté que l’école actuel
5089 tisme inhérent à toute science. On a constaté que l’ école actuelle est fondée sur une remarquable ignorance de la psycholo
5090 uelle est fondée sur une remarquable ignorance de la psychologie infantile. Où il y avait non-science, on a voulu apporter
5091 Où il y avait non-science, on a voulu apporter de la science. Mais c’est un art qu’il faudrait. Sinon l’on retombera dans
5092 science. Mais c’est un art qu’il faudrait. Sinon l’ on retombera dans des absurdités. On a créé par exemple des « jardins
5093 n a créé par exemple des « jardins d’enfants » où l’ on apprend à des élèves âgés de 3 à 4 ans à lacer leurs souliers ; et
5094 ans à lacer leurs souliers ; et cela s’appelle de l’ école pratique. Plus tard on fait apprendre à ces mêmes enfants, et ré
5095 mêmes enfants, et réciter par cœur et à rebours, les noms des rues et places de leur ville, comme s’ils étaient tous desti
5096 e leur ville, comme s’ils étaient tous destinés à la profession de chauffeurs de taxi. Si cette conception du pratique pré
5097 eption du pratique prévaut, il est à craindre que l’ école nouvelle n’apporte bientôt sa méthode rationnelle pour apprendre
5098 ur apprendre aux bambins à marcher en décomposant les mouvements avec l’aide d’un métronome pédagogique. De même, sous le l
5099 bins à marcher en décomposant les mouvements avec l’ aide d’un métronome pédagogique. De même, sous le louable prétexte d’é
5100 l’aide d’un métronome pédagogique. De même, sous le louable prétexte d’école active, on prétend faire apprendre la gramma
5101 étexte d’école active, on prétend faire apprendre la grammaire par le moyen de gesticulations appropriées : foin de ces an
5102 tive, on prétend faire apprendre la grammaire par le moyen de gesticulations appropriées : foin de ces analyses de textes
5103 iées : foin de ces analyses de textes absurdes où l’ on soulignait en rouge tous les mots en « al », tous les verbes dépone
5104 textes absurdes où l’on soulignait en rouge tous les mots en « al », tous les verbes déponents ; désormais l’étude des ver
5105 soulignait en rouge tous les mots en « al », tous les verbes déponents ; désormais l’étude des verbes actifs sera aussi act
5106 en « al », tous les verbes déponents ; désormais l’ étude des verbes actifs sera aussi active, un élève se mettra à marche
5107 a aussi active, un élève se mettra à marcher dans le couloir en s’écriant : je marche, ou : j’arpente ; un autre restera a
5108 is, en affirmant : je siège ; un troisième lèvera la main, et dira : je lève la main, — au lieu de demander ce qu’on croit
5109  ; un troisième lèvera la main, et dira : je lève la main, — au lieu de demander ce qu’on croit. Tout porte à craindre qu’
5110 mander ce qu’on croit. Tout porte à craindre qu’à la faveur du tumulte l’un ou l’autre proclamant : je sors ! ne traduise
5111 be en action et ne disparaisse à tout jamais dans les campagnes, tirant le meilleur parti possible de l’exercice ; car il n
5112 paraisse à tout jamais dans les campagnes, tirant le meilleur parti possible de l’exercice ; car il ne manque à ce système
5113 s campagnes, tirant le meilleur parti possible de l’ exercice ; car il ne manque à ce système, avouez-le, que juste la spon
5114 ’exercice ; car il ne manque à ce système, avouez- le , que juste la spontanéité nécessaire pour que ça ne soit pas une lour
5115 r il ne manque à ce système, avouez-le, que juste la spontanéité nécessaire pour que ça ne soit pas une lourde farce. Ces
5116 ce qu’elles sont comiques précisément. Je ferai à l’ école nouvelle un reproche d’une autre nature. Elle prétend donner plu
5117 onner plus de liberté aux enfants en leur rendant le travail amusant, en leur laissant la possibilité de trouver par eux-m
5118 leur rendant le travail amusant, en leur laissant la possibilité de trouver par eux-mêmes ce qu’ils doivent apprendre. Mai
5119 té, cet amusement a pour seul but de faire avaler la pilule amère des connaissances. On songe à M. Ford, qui donne à ses o
5120 ment deux fois plus de machines. Jeu du chat avec la souris. On n’impose plus des résultats, on les fait trouver. Notez qu
5121 vec la souris. On n’impose plus des résultats, on les fait trouver. Notez que cela revient au même, sauf que par la méthode
5122 ver. Notez que cela revient au même, sauf que par la méthode nouvelle on atteint l’enfant plus profondément, on se glisse
5123 même, sauf que par la méthode nouvelle on atteint l’ enfant plus profondément, on se glisse à l’intérieur de son esprit, là
5124 élabore son invention ; on capte scientifiquement les sources mêmes de sa liberté. « Instruire en amusant » peut être la fo
5125 de sa liberté. « Instruire en amusant » peut être la formule d’une tromperie subtile et plus grave que la brutalité primai
5126 formule d’une tromperie subtile et plus grave que la brutalité primaire, parce qu’elle n’excite pas de réaction vive de la
5127 t des écoliers. Enfin, je n’aime pas qu’on traite le gosse comme un organisme dont il s’agit d’obtenir le rendement le plu
5128 gosse comme un organisme dont il s’agit d’obtenir le rendement le plus élevé. On cultive les petits d’hommes comme des pla
5129 n organisme dont il s’agit d’obtenir le rendement le plus élevé. On cultive les petits d’hommes comme des plantes de serre
5130 d’obtenir le rendement le plus élevé. On cultive les petits d’hommes comme des plantes de serre dans ces jardins d’enfants
5131 serre dans ces jardins d’enfants. On y parle de «  l’ enfant » comme on parle d’un produit chimique : On remarque chez l’enf
5132 on parle d’un produit chimique : On remarque chez l’ enfant… Dans ce milieu l’enfant ne tarde pas à se développer… Prenez u
5133 mique : On remarque chez l’enfant… Dans ce milieu l’ enfant ne tarde pas à se développer… Prenez un enfant de 6 ans… Mettez
5134 … Mettez ensemble trois enfants… Je reconnais que les buts de l’école nouvelle sont honnêtement scientifiques, et désintére
5135 emble trois enfants… Je reconnais que les buts de l’ école nouvelle sont honnêtement scientifiques, et désintéressés. Mais
5136 honnêtement scientifiques, et désintéressés. Mais l’ enfant-cobaye vaut l’enfant-citoyen. Moi je voudrais l’enfant tout cou
5137 ques, et désintéressés. Mais l’enfant-cobaye vaut l’ enfant-citoyen. Moi je voudrais l’enfant tout court. Or il paraît que
5138 ant-cobaye vaut l’enfant-citoyen. Moi je voudrais l’ enfant tout court. Or il paraît que c’est très dangereux. Néanmoins je
5139 ent du système officiel qui pourrait bien un jour l’ atteindre au cœur, et je vois tout ce que cela entraînerait, dans une
5140 înerait, dans une ruine d’où renaîtrait peut-être l’ humanité… Je songe à un enseignement sans école. Je songe au maître an
5141 ans école. Je songe au maître antique, dont toute la personne était un enseignement, et qui n’avait pas des élèves, mais d
5142 lèves, mais des disciples. Celui-là seul favorise le développement des individus, qui ne cherche pas un rendement mais qui
5143 salue ces jeunes gens qui appliquent avec ferveur les principes de l’école libre, qui se moquent des programmes, et dont le
5144 gens qui appliquent avec ferveur les principes de l’ école libre, qui se moquent des programmes, et dont les classes joyeus
5145 ole libre, qui se moquent des programmes, et dont les classes joyeuses sont de vraies foires : ils ont toute mon amitié. Ce
5146 marquer d’autant plus librement qu’ils trahissent le dessein profond de l’instruction publique, qu’ils trahissent leur mis
5147 librement qu’ils trahissent le dessein profond de l’ instruction publique, qu’ils trahissent leur mission officielle. Ils é
5148 bravo ! Mais ce qu’on leur avait confié, c’était la fabrication en série de petits démocrates conscients et organisés. Je
5149 ment trop gros pour échapper plus longtemps à MM. les Inspecteurs des Écoles. Je le crains, dis-je ; car le monde ne progre
5150 us longtemps à MM. les Inspecteurs des Écoles. Je le crains, dis-je ; car le monde ne progresse qu’à la faveur de malenten
5151 nspecteurs des Écoles. Je le crains, dis-je ; car le monde ne progresse qu’à la faveur de malentendus (si tant est qu’il p
5152 e crains, dis-je ; car le monde ne progresse qu’à la faveur de malentendus (si tant est qu’il progresse). L’école nouvelle
5153 eur de malentendus (si tant est qu’il progresse). L’ école nouvelle n’échappe à l’absurdité primaire qu’à la faveur d’une é
5154 st qu’il progresse). L’école nouvelle n’échappe à l’ absurdité primaire qu’à la faveur d’une équivoque. Cette équivoque fra
5155 le nouvelle n’échappe à l’absurdité primaire qu’à la faveur d’une équivoque. Cette équivoque frappe tout essai de réforme.
5156 ndant une possibilité pratique d’en sortir, je ne le nie pas. Mais du point de vue de la vérité, force nous est de reconna
5157 sortir, je ne le nie pas. Mais du point de vue de la vérité, force nous est de reconnaître que notre dilemme subsiste dans
5158 Ou des appareils qui en tiennent lieu. 8. Voir à l’ appendice le sens que je donne à ce mot.
5159 eils qui en tiennent lieu. 8. Voir à l’appendice le sens que je donne à ce mot.
85 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 5. La machine à fabriquer des électeurs
5160 5. La machine à fabriquer des électeurs Je crois à l’absurdité de fait de
5161 La machine à fabriquer des électeurs Je crois à l’ absurdité de fait de l’instruction publique. Je crois aussi qu’on ne p
5162 des électeurs Je crois à l’absurdité de fait de l’ instruction publique. Je crois aussi qu’on ne peut réformer l’absurde.
5163 n publique. Je crois aussi qu’on ne peut réformer l’ absurde. Je demande seulement qu’on m’explique pourquoi il triomphe et
5164 he et se perpétue ; de quel droit il nous écrase. La réponse est simple, terriblement simple : du droit de la Démocratie.
5165 nse est simple, terriblement simple : du droit de la Démocratie. L’instruction publique et la Démocratie sont sœurs siamoi
5166 terriblement simple : du droit de la Démocratie. L’ instruction publique et la Démocratie sont sœurs siamoises. Elles sont
5167 droit de la Démocratie. L’instruction publique et la Démocratie sont sœurs siamoises. Elles sont nées en même temps. Elles
5168 ste pas cette thèse. Elle est glorifiée dans tous les banquets officiels par des orateurs émus et il y aurait une insigne h
5169 urait une insigne hypocrisie à feindre de ne plus la reconnaître, une fois dissipée la fumée des civets, des cigares et de
5170 ndre de ne plus la reconnaître, une fois dissipée la fumée des civets, des cigares et des idéologies enivrées. D’ailleurs,
5171 ologies enivrées. D’ailleurs, cette idée que j’ai l’ honneur de partager avec mes adversaires se trouve correspondre à des
5172 x si rare. Un fait simple, par exemple, c’est que la Démocratie sans l’instruction publique est pratiquement irréalisable.
5173 simple, par exemple, c’est que la Démocratie sans l’ instruction publique est pratiquement irréalisable. Ici, je demanderai
5174 nt au lecteur de vouloir bien ne point trop faire la bête, sinon je me verrai contraint de lui expliquer un certain nombre
5175 faut pouvoir lire, écrire et compter pour suivre la campagne électorale, voter et truquer légalement les votes. Ensuite,
5176 campagne électorale, voter et truquer légalement les votes. Ensuite, il faut de l’histoire, et de l’instruction civique, p
5177 truquer légalement les votes. Ensuite, il faut de l’ histoire, et de l’instruction civique, pour qu’on sache à quoi cela ri
5178 les votes. Ensuite, il faut de l’histoire, et de l’ instruction civique, pour qu’on sache à quoi cela rime. Ensuite, il fa
5179 rime. Ensuite, il faut une discipline sévère dès l’ enfance pour façonner des contribuables inoffensifs. Enfin, il faut un
5180 fin, il faut un nombre considérable de leçons, et le plus longtemps possible, pour qu’on n’ait pas le temps de se rendre c
5181 le plus longtemps possible, pour qu’on n’ait pas le temps de se rendre compte que tout cela est absurde. Pour qu’on n’ait
5182 e que tout cela est absurde. Pour qu’on n’ait pas le temps d’écouter la nature qui répète par toutes ses voix, d’un millia
5183 absurde. Pour qu’on n’ait pas le temps d’écouter la nature qui répète par toutes ses voix, d’un milliard de façons, que c
5184 e façons, que c’est absurde. Pour qu’on n’ait pas le temps de découvrir la Liberté9, parce que celui qui l’a embrassée une
5185 surde. Pour qu’on n’ait pas le temps de découvrir la Liberté9, parce que celui qui l’a embrassée une fois, une seule fois,
5186 mps de découvrir la Liberté9, parce que celui qui l’ a embrassée une fois, une seule fois, sait bien que tout le reste est
5187 ssée une fois, une seule fois, sait bien que tout le reste est absurde. Et voilà pour les sœurs siamoises. Continuons. La
5188 bien que tout le reste est absurde. Et voilà pour les sœurs siamoises. Continuons. La démocratie doit à l’École de vivre en
5189 e. Et voilà pour les sœurs siamoises. Continuons. La démocratie doit à l’École de vivre encore. Mais ce n’est de la part d
5190 sœurs siamoises. Continuons. La démocratie doit à l’ École de vivre encore. Mais ce n’est de la part de notre Institutrice
5191 et mal dissimulée. Certes, je ne prétends pas que les créateurs de l’instruction publique aient eu pleine conscience de ce
5192 . Certes, je ne prétends pas que les créateurs de l’ instruction publique aient eu pleine conscience de ce qu’ils faisaient
5193 pleine conscience de ce qu’ils faisaient — et je les excuse pour autant10. Je dis simplement ceci : leur œuvre n’a été pos
5194 ible que parce qu’elle était liée aux intérêts de la démocratie. Car il faut bien se représenter qu’elle n’était encore au
5195 qu’on répande universellement et obligatoirement l’ art du saxophone ou de la balalaïka. Soyez certains qu’il ne manque à
5196 ement et obligatoirement l’art du saxophone ou de la balalaïka. Soyez certains qu’il ne manque à cette plaisanterie, pour
5197 que à cette plaisanterie, pour prendre corps, que l’ appui intéressé d’un groupement politico-financier. Et il y aurait bie
5198 t il y aurait bien vite des députés pour célébrer les bienfaits sociaux, que dis-je, la valeur hautement moralisatrice de c
5199 pour célébrer les bienfaits sociaux, que dis-je, la valeur hautement moralisatrice de ces glapissants entonnoirs. D’aill
5200 oirs. D’ailleurs cette complicité, si évidente à l’ origine de l’institution, se manifeste encore de nos jours, et d’une f
5201 eurs cette complicité, si évidente à l’origine de l’ institution, se manifeste encore de nos jours, et d’une façon non moin
5202 tes normales. Je n’en veux pas d’autre preuve que l’ état grotesquement arriéré de notre instrument de progrès par excellen
5203 ’une explication vraisemblable de cette incurie : l’ école, sous sa forme actuelle, remplit suffisamment son rôle politique
5204 dessin humoristique publié en 1914, représentant l’ œuvre de Kitchener : une machine qui absorbait des gentlemen et rendai
5205 i absorbait des gentlemen et rendait des tommies. La machine scolaire, elle, dévore des enfants tout vifs et rend des cito
5206 vore des enfants tout vifs et rend des citoyens à l’ œil torve. Durant l’opération, tous les crânes ont été décervelés et d
5207 t vifs et rend des citoyens à l’œil torve. Durant l’ opération, tous les crânes ont été décervelés et dotés d’une petite mé
5208 citoyens à l’œil torve. Durant l’opération, tous les crânes ont été décervelés et dotés d’une petite mécanique à quatre so
5209 nique à quatre sous qui suffit à régler désormais l’ automatisme de la vie civique. Le cerveau standard du type fédéral ne
5210 us qui suffit à régler désormais l’automatisme de la vie civique. Le cerveau standard du type fédéral ne laisse craindre a
5211 régler désormais l’automatisme de la vie civique. Le cerveau standard du type fédéral ne laisse craindre aucun imprévu dan
5212 on fonctionnement. Cet avantage inappréciable sur le cerveau naturel explique que les autorités compétentes n’aient point
5213 inappréciable sur le cerveau naturel explique que les autorités compétentes n’aient point hésité à l’adopter, malgré ses ra
5214 les autorités compétentes n’aient point hésité à l’ adopter, malgré ses ratés assez fréquents. Maintenant je vous demande
5215 e un peu quel intérêt il y aurait à perfectionner l’ instrument, à l’adapter aux particularités psychologiques, voire aux b
5216 térêt il y aurait à perfectionner l’instrument, à l’ adapter aux particularités psychologiques, voire aux besoins purement
5217 purement sentimentaux qui peuvent apparaître chez les enfants ? Ce serait de l’art pour l’art. On ne peut pas en demander t
5218 euvent apparaître chez les enfants ? Ce serait de l’ art pour l’art. On ne peut pas en demander tant aux gouvernements. La
5219 raître chez les enfants ? Ce serait de l’art pour l’ art. On ne peut pas en demander tant aux gouvernements. La réforme sco
5220 n ne peut pas en demander tant aux gouvernements. La réforme scolaire, politiquement, n’est pas rentable. Il est clair que
5221 iquement, n’est pas rentable. Il est clair que si le but principal de l’instruction publique était d’éduquer le peuple d’u
5222 rentable. Il est clair que si le but principal de l’ instruction publique était d’éduquer le peuple d’une façon désintéress
5223 incipal de l’instruction publique était d’éduquer le peuple d’une façon désintéressée, les gouvernements seraient un peu p
5224 it d’éduquer le peuple d’une façon désintéressée, les gouvernements seraient un peu plus fous qu’on n’ose les imaginer de n
5225 uvernements seraient un peu plus fous qu’on n’ose les imaginer de ne pas entreprendre sur l’heure une véritable révolution
5226 ’on n’ose les imaginer de ne pas entreprendre sur l’ heure une véritable révolution scolaire ; car il ne faudrait pas moins
5227 scolaire ; car il ne faudrait pas moins pour que l’ école rattrape l’époque… Mais les gouvernements savent ce qu’ils font.
5228 l ne faudrait pas moins pour que l’école rattrape l’ époque… Mais les gouvernements savent ce qu’ils font. Tout se tient, c
5229 as moins pour que l’école rattrape l’époque… Mais les gouvernements savent ce qu’ils font. Tout se tient, comme vous dites,
5230 e tient, comme vous dites, sans doute pour m’ôter l’ envie de bousculer quoi que ce soit. J’aime les tremblements de terre,
5231 ter l’envie de bousculer quoi que ce soit. J’aime les tremblements de terre, vous tombez mal. J’appartiens à cette espèce d
5232 ne révolte de ma sensibilité qui me dresse contre l’ École. Mes arguments ne se mettent en branle qu’après coup. Et quand v
5233 se mettent en branle qu’après coup. Et quand vous les démoliriez tous, ma rage n’en serait pas moins légitime. Je lui donne
5234 aison par définition. Après tout, peu m’importent les idéologies politiques, et peu m’importerait que l’École soit une mach
5235 s idéologies politiques, et peu m’importerait que l’ École soit une machine à fabriquer de la démocratie — si je ne sentais
5236 erait que l’École soit une machine à fabriquer de la démocratie — si je ne sentais menacées dans cette aventure des valeur
5237 e auxquelles je tiens plus qu’à tout. Ma haine de la démocratie est l’aboutissement de l’évolution dont je viens de décrir
5238 ens plus qu’à tout. Ma haine de la démocratie est l’ aboutissement de l’évolution dont je viens de décrire la marche nécess
5239 Ma haine de la démocratie est l’aboutissement de l’ évolution dont je viens de décrire la marche nécessaire11. On ne manqu
5240 tissement de l’évolution dont je viens de décrire la marche nécessaire11. On ne manquera pas d’insinuer qu’à l’origine de
5241 nécessaire11. On ne manquera pas d’insinuer qu’à l’ origine de tout ceci il y a surtout de la nervosité, de petites douleu
5242 uer qu’à l’origine de tout ceci il y a surtout de la nervosité, de petites douleurs de jeunes bourgeois. Essayer de venir
5243 , n’est-ce pas, mes agneaux. C’est justement dans la mesure où je participais de l’écœurant optimisme bourgeois que je m’a
5244 est justement dans la mesure où je participais de l’ écœurant optimisme bourgeois que je m’accommodais d’un régime nocif po
5245 l y a d’authentiquement noble en chaque homme. Si les fils du peuple souffrent moins d’un tel régime, c’est qu’ils n’ont pa
5246 ussi sensible. Ils ignorent ce qu’étiolent en eux les droits de l’homme. Mais attendez, si quelques-uns allaient se réveill
5247 Il suffit d’un peu de chaleur d’âme pour amorcer le dégel de ces principes, et ce peut être le signal de la grande débâcl
5248 morcer le dégel de ces principes, et ce peut être le signal de la grande débâcle printanière. Il n’y a de révolution vérit
5249 el de ces principes, et ce peut être le signal de la grande débâcle printanière. Il n’y a de révolution véritable que de l
5250 ntanière. Il n’y a de révolution véritable que de la sensibilité. (Le jour où l’on culbutera ces Messieurs de leurs sièges
5251 a de révolution véritable que de la sensibilité. ( Le jour où l’on culbutera ces Messieurs de leurs sièges, ils comprendron
5252 tion véritable que de la sensibilité. (Le jour où l’ on culbutera ces Messieurs de leurs sièges, ils comprendront le sens d
5253 a ces Messieurs de leurs sièges, ils comprendront le sens des images.) 9. J’emploie ce mot au sens fort, au sens enivran
5254 pçonné ce que cela représente. 10. Voir note A à la fin du cahier. 11. Est-il besoin de déclarer formellement qu’une tel
5255 elle attitude n’est en aucune façon tributaire de l’ idéologie réactionnaire à la mode. Mais que deux critiques de la Démoc
5256 e façon tributaire de l’idéologie réactionnaire à la mode. Mais que deux critiques de la Démocratie partant de points de v
5257 actionnaire à la mode. Mais que deux critiques de la Démocratie partant de points de vue presque opposés coïncident en tan
86 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 6. La trahison de l’instruction publique
5258 6. La trahison de l’instruction publique (Ici, le procureur prit un ton p
5259 6. La trahison de l’ instruction publique (Ici, le procureur prit un ton plus grave.) L’é
5260 6. La trahison de l’instruction publique (Ici, le procureur prit un ton plus grave.) L’école s’est vendue à des intérêt
5261 que (Ici, le procureur prit un ton plus grave.) L’ école s’est vendue à des intérêts politiques. C’était là, nous venons
5262 s intérêts politiques. C’était là, nous venons de le voir, son unique moyen de parvenir. Elle participe donc sur une vaste
5263 n Benda. Notre époque paiera cher ce crime contre la civilisation. Elle ne croit plus qu’au péché contre les lois sociales
5264 vilisation. Elle ne croit plus qu’au péché contre les lois sociales, eh bien ! elle apprendra que le seul péché qui n’a pas
5265 e les lois sociales, eh bien ! elle apprendra que le seul péché qui n’a pas de pardon c’est le péché contre l’Esprit. Aujo
5266 dra que le seul péché qui n’a pas de pardon c’est le péché contre l’Esprit. Aujourd’hui qu’il suffit d’un peu de bon sens
5267 péché qui n’a pas de pardon c’est le péché contre l’ Esprit. Aujourd’hui qu’il suffit d’un peu de bon sens et d’information
5268 trop laid ».) À peine capable de nous instruire, l’ École prétend ouvertement nous éduquer. D’ailleurs elle y est obligée
5269 nous éduquer. D’ailleurs elle y est obligée dans la mesure où elle réalise son ambition : soustraire les enfants à l’Égli
5270 mesure où elle réalise son ambition : soustraire les enfants à l’Église et à la famille. L’Église donnait des valeurs idéa
5271 e réalise son ambition : soustraire les enfants à l’ Église et à la famille. L’Église donnait des valeurs idéalistes, la fa
5272 ambition : soustraire les enfants à l’Église et à la famille. L’Église donnait des valeurs idéalistes, la famille des vale
5273 oustraire les enfants à l’Église et à la famille. L’ Église donnait des valeurs idéalistes, la famille des valeurs réaliste
5274 famille. L’Église donnait des valeurs idéalistes, la famille des valeurs réalistes, sans lesquelles le monde s’enfonce de
5275 la famille des valeurs réalistes, sans lesquelles le monde s’enfonce de son propre poids dans l’abrutissement ou se laisse
5276 elles le monde s’enfonce de son propre poids dans l’ abrutissement ou se laisse prendre à des théories non point fumeuses c
5277 e prendre à des théories non point fumeuses comme le veut le cliché, mais schématiques. Or l’École radicale ne peut pas êt
5278 e à des théories non point fumeuses comme le veut le cliché, mais schématiques. Or l’École radicale ne peut pas être idéal
5279 es comme le veut le cliché, mais schématiques. Or l’ École radicale ne peut pas être idéaliste : car elle deviendrait un da
5280 e idéaliste : car elle deviendrait un danger pour le désordre établi. L’idéalisme est forcément révolutionnaire dans un mo
5281 le deviendrait un danger pour le désordre établi. L’ idéalisme est forcément révolutionnaire dans un monde organisé pour la
5282 ément révolutionnaire dans un monde organisé pour la production. Le culte des valeurs désintéressées ne peut que diminuer
5283 nnaire dans un monde organisé pour la production. Le culte des valeurs désintéressées ne peut que diminuer le « rendement 
5284 e des valeurs désintéressées ne peut que diminuer le « rendement » quantitatif de ceux qui s’y livrent. Je ne veux pas me
5285 « lumières », et qui pourtant s’indignent de voir la morale actuelle s’attaquer, voyez-vous ça, à la famille, « cette cell
5286 r la morale actuelle s’attaquer, voyez-vous ça, à la famille, « cette cellule sociale ». Et je les traite de mauvais plais
5287 a, à la famille, « cette cellule sociale ». Et je les traite de mauvais plaisants. Admirez mon extrême modération. Ceci fai
5288 ême modération. Ceci fait, constatez avec moi que la famille était encore un milieu naturel, donc normatif. Le collège au
5289 le était encore un milieu naturel, donc normatif. Le collège au contraire est un milieu antinaturel, et les normes sociale
5290 ollège au contraire est un milieu antinaturel, et les normes sociales qu’on prétend y substituer à celles de la famille son
5291 s sociales qu’on prétend y substituer à celles de la famille sont falsifiées. Non seulement l’École ne constitue pas le pô
5292 lles de la famille sont falsifiées. Non seulement l’ École ne constitue pas le pôle idéaliste nécessaire à l’équilibre d’un
5293 alsifiées. Non seulement l’École ne constitue pas le pôle idéaliste nécessaire à l’équilibre d’une civilisation — et c’est
5294 e ne constitue pas le pôle idéaliste nécessaire à l’ équilibre d’une civilisation — et c’est l’aspect négatif de sa trahiso
5295 saire à l’équilibre d’une civilisation — et c’est l’ aspect négatif de sa trahison —, mais encore elle tend à développer to
5296 ut ce qu’il y a de spécifiquement malfaisant dans l’ esprit moderne. C’est sa façon à elle de répondre aux besoins de l’épo
5297 C’est sa façon à elle de répondre aux besoins de l’ époque. Pauvre époque ! On parle sans cesse de ses besoins. Il est vra
5298 du matérialisme. Et quand on m’aura démontré que les besoins de l’époque exigent une organisation à outrance du monde, je
5299 e. Et quand on m’aura démontré que les besoins de l’ époque exigent une organisation à outrance du monde, je répondrai que
5300 sation à outrance du monde, je répondrai que dans la mesure où cette exigence est satisfaite naît un nouveau besoin qui es
5301 a mesure où cette exigence est satisfaite naît un nouveau besoin qui est précisément d’échapper à cette organisation. Or il sem
5302 e bien que nous en soyons-là, s’il faut en croire les signes de révolte qui apparaissent de toutes parts. Mais l’école empo
5303 de révolte qui apparaissent de toutes parts. Mais l’ école empoisonne les germes d’une renaissance de l’esprit dont elle de
5304 raissent de toutes parts. Mais l’école empoisonne les germes d’une renaissance de l’esprit dont elle devrait être la mère.
5305 ’école empoisonne les germes d’une renaissance de l’ esprit dont elle devrait être la mère. Elle favorise le culte exclusif
5306 ne renaissance de l’esprit dont elle devrait être la mère. Elle favorise le culte exclusif de l’utile, l’incompréhension b
5307 rit dont elle devrait être la mère. Elle favorise le culte exclusif de l’utile, l’incompréhension brutale de la nature, la
5308 être la mère. Elle favorise le culte exclusif de l’ utile, l’incompréhension brutale de la nature, la haine des supériorit
5309 mère. Elle favorise le culte exclusif de l’utile, l’ incompréhension brutale de la nature, la haine des supériorités nature
5310 exclusif de l’utile, l’incompréhension brutale de la nature, la haine des supériorités naturelles, l’habitude de l’ersatz
5311 l’utile, l’incompréhension brutale de la nature, la haine des supériorités naturelles, l’habitude de l’ersatz et du trava
5312 la nature, la haine des supériorités naturelles, l’ habitude de l’ersatz et du travail bâclé. Elle apprend à lire les jour
5313 haine des supériorités naturelles, l’habitude de l’ ersatz et du travail bâclé. Elle apprend à lire les journaux, mais en
5314 l’ersatz et du travail bâclé. Elle apprend à lire les journaux, mais en même temps que cette drogue, elle devrait fournir s
5315 ves du mot. Il est clair, par exemple, que seules les victimes de l’instruction helvétique sont capables d’absorber sans fo
5316 st clair, par exemple, que seules les victimes de l’ instruction helvétique sont capables d’absorber sans fou rire les disc
5317 helvétique sont capables d’absorber sans fou rire les discours de tirs fédéraux. On a comparé le monde moderne à un vaste é
5318 rire les discours de tirs fédéraux. On a comparé le monde moderne à un vaste établissement de travaux forcés. L’école don
5319 derne à un vaste établissement de travaux forcés. L’ école donne à l’enfant ce qu’il faut pour se résigner à l’état de cito
5320 établissement de travaux forcés. L’école donne à l’ enfant ce qu’il faut pour se résigner à l’état de citoyen bagnard auqu
5321 donne à l’enfant ce qu’il faut pour se résigner à l’ état de citoyen bagnard auquel il est promis. Mais elle tue tout ce qu
5322 t promis. Mais elle tue tout ce qui lui donnerait l’ envie de se libérer — et peut-être les moyens. Vaste distillerie d’enn
5323 ui donnerait l’envie de se libérer — et peut-être les moyens. Vaste distillerie d’ennui, c’est-à-dire de démoralisation — q
5324 ’ennui, c’est-à-dire de démoralisation — qu’on se le dise ! —, puissance de crétinisation lente, standardisation de toutes
5325 de crétinisation lente, standardisation de toutes les mesquineries naturelles (je ne fais le procès de la bêtise humaine qu
5326 de toutes les mesquineries naturelles (je ne fais le procès de la bêtise humaine qu’en tant qu’elle est cultivée par l’Éta
5327 mesquineries naturelles (je ne fais le procès de la bêtise humaine qu’en tant qu’elle est cultivée par l’État), l’École,
5328 êtise humaine qu’en tant qu’elle est cultivée par l’ État), l’École, après avoir entraîné l’âme moderne dans ses collèges,
5329 aine qu’en tant qu’elle est cultivée par l’État), l’ École, après avoir entraîné l’âme moderne dans ses collèges, l’y enfer
5330 ltivée par l’État), l’École, après avoir entraîné l’ âme moderne dans ses collèges, l’y enferme et l’y laisse crever de fai
5331 s avoir entraîné l’âme moderne dans ses collèges, l’ y enferme et l’y laisse crever de faim. Par ce qu’elle enseigne à igno
5332 é l’âme moderne dans ses collèges, l’y enferme et l’ y laisse crever de faim. Par ce qu’elle enseigne à ignorer bien plus q
5333 r ce qu’elle enseigne à connaître, elle constitue la plus grande force antireligieuse de ce temps. L’instruction religieus
5334 la plus grande force antireligieuse de ce temps. L’ instruction religieuse qui prend les enfants au sortir de l’école prim
5335 e de ce temps. L’instruction religieuse qui prend les enfants au sortir de l’école primaire, arrive trop tard. Le pasteur s
5336 ion religieuse qui prend les enfants au sortir de l’ école primaire, arrive trop tard. Le pasteur sème dans un terrain que
5337 au sortir de l’école primaire, arrive trop tard. Le pasteur sème dans un terrain que l’instituteur a méthodiquement dessé
5338 ve trop tard. Le pasteur sème dans un terrain que l’ instituteur a méthodiquement desséché.
87 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. 7. L’Instruction publique contre le progrès
5339 7. L’ Instruction publique contre le progrès Un beau titre. Et qui a meill
5340 7. L’Instruction publique contre le progrès Un beau titre. Et qui a meilleure façon que le reste, pense
5341 rès Un beau titre. Et qui a meilleure façon que le reste, pensez-vous. Il faut avouer qu’avec ce je ne sais quoi de décl
5342 démocratique, hé ! hé !… et d’ailleurs vous aimez les idées généreuses, n’est-ce pas ? J’en étais sûr. Cependant j’ai peur
5343 ès ne soit pas le vôtre, et même que sa nature ne l’ entraîne dans une direction tout opposée. C’est très malin d’avoir inv
5344 inventé un instrument de progrès : encore faut-il le mettre en marche. Et où le conduire ? Il y a beaucoup de routes, mais
5345 ogrès : encore faut-il le mettre en marche. Et où le conduire ? Il y a beaucoup de routes, mais vous n’aimez pas le risque
5346 Il y a beaucoup de routes, mais vous n’aimez pas le risque, vous préférez le sur-place. Ainsi l’instruction publique s’es
5347 s, mais vous n’aimez pas le risque, vous préférez le sur-place. Ainsi l’instruction publique s’est arrêtée aux environs de
5348 pas le risque, vous préférez le sur-place. Ainsi l’ instruction publique s’est arrêtée aux environs de 1880 et depuis lors
5349 environs de 1880 et depuis lors n’a guère bougé. Le moteur n’en continue pas moins de consommer, de ronfler et de tout em
5350 mer, de ronfler et de tout empester. Et peu à peu le public s’aperçoit que « l’instrument de progrès » n’est qu’un camoufl
5351 empester. Et peu à peu le public s’aperçoit que «  l’ instrument de progrès » n’est qu’un camouflage à l’abri duquel on dist
5352 ’instrument de progrès » n’est qu’un camouflage à l’ abri duquel on distille du radicalisme intégral. On me fera observer q
5353 On me fera observer que beaucoup des servants de la machine sont socialistes : voilà qui ne change pas le rendement, j’im
5354 achine sont socialistes : voilà qui ne change pas le rendement, j’imagine, ni la nature des produits excrétés. On forme no
5355 ilà qui ne change pas le rendement, j’imagine, ni la nature des produits excrétés. On forme nos gosses, dès l’âge de 6 ans
5356 e des produits excrétés. On forme nos gosses, dès l’ âge de 6 ans, à ne se point poser de questions dont ils n’aient appris
5357 ser de questions dont ils n’aient appris par cœur la réponse. Regardez un écolier préparer ses devoirs, c’est frappant : i
5358 préparer ses devoirs, c’est frappant : il apprend les questions aussi bien que les réponses. J’avoue que je trouve ça très
5359 rappant : il apprend les questions aussi bien que les réponses. J’avoue que je trouve ça très fort : avoir obtenu un confor
5360 uve ça très fort : avoir obtenu un conformisme de la curiosité. Il est vrai qu’il ne fallait pas moins pour assurer la séc
5361 est vrai qu’il ne fallait pas moins pour assurer la sécurité d’un régime établi dans des fauteuils ; car un peuple d’élec
5362 de trouver bien bonne celle-ci : je prétends que l’ instruction publique est une puissance conservatrice. — Pas moins ! El
5363 . — Pas moins ! Elle est destinée à légitimer par la force de l’inertie et à perpétuer mécaniquement tout ce qui est depui
5364 s ! Elle est destinée à légitimer par la force de l’ inertie et à perpétuer mécaniquement tout ce qui est depuis Numa Droz.
5365 ice, et non pas réactionnaire, non, même pas. Car les forces de réaction collaborent à leur manière au progrès, elles corri
5366 u progrès, elles corrigent, stimulent, vivifient. L’ École se contente d’être figée. Est-ce un frein ? Même pas. C’est plut
5367 t une vase où s’enlise notre civilisation ; et où la Démocratie peut se conserver des siècles encore… Or si je dis que l’É
5368 se conserver des siècles encore… Or si je dis que l’ École est contre le progrès, c’est que le progrès consiste à dépasser
5369 ècles encore… Or si je dis que l’École est contre le progrès, c’est que le progrès consiste à dépasser la Démocratie. Et c
5370 dis que l’École est contre le progrès, c’est que le progrès consiste à dépasser la Démocratie. Et cette thèse ne va pas à
5371 progrès, c’est que le progrès consiste à dépasser la Démocratie. Et cette thèse ne va pas à l’encontre de l’évolution norm
5372 ocratie. Et cette thèse ne va pas à l’encontre de l’ évolution normale de l’humanité, comme vous ne manquerez cependant poi
5373 ne va pas à l’encontre de l’évolution normale de l’ humanité, comme vous ne manquerez cependant point de le dire, avec ce
5374 anité, comme vous ne manquerez cependant point de le dire, avec ce sens exquis du cliché qui est un hommage à vos maîtres
5375 liché qui est un hommage à vos maîtres respectés. La Démocratie, par le moyen de l’instruction publique, limite l’homme au
5376 mmage à vos maîtres respectés. La Démocratie, par le moyen de l’instruction publique, limite l’homme au citoyen. Il s’agit
5377 maîtres respectés. La Démocratie, par le moyen de l’ instruction publique, limite l’homme au citoyen. Il s’agit donc de dép
5378 e, par le moyen de l’instruction publique, limite l’ homme au citoyen. Il s’agit donc de dépasser le citoyen, de retrouver
5379 te l’homme au citoyen. Il s’agit donc de dépasser le citoyen, de retrouver l’homme tout entier. Je distingue dans cette op
5380 s’agit donc de dépasser le citoyen, de retrouver l’ homme tout entier. Je distingue dans cette opération deux temps : d’ab
5381 n deux temps : d’abord critiquer ce qui est — par la comparaison avec ce qui fut, ou ce qui devrait être ; ensuite, prépar
5382 i fut, ou ce qui devrait être ; ensuite, préparer le terrain pour les jeux nouveaux que l’humanité de demain ne peut manqu
5383 devrait être ; ensuite, préparer le terrain pour les jeux nouveaux que l’humanité de demain ne peut manquer d’inventer. Je
5384 être ; ensuite, préparer le terrain pour les jeux nouveaux que l’humanité de demain ne peut manquer d’inventer. Je ne puis m’emp
5385 e, préparer le terrain pour les jeux nouveaux que l’ humanité de demain ne peut manquer d’inventer. Je ne puis m’empêcher d
5386 ir une intention providentielle dans cet amour de la destruction et de l’anarchie que les génies directeurs de ce temps on
5387 identielle dans cet amour de la destruction et de l’ anarchie que les génies directeurs de ce temps ont inspiré à beaucoup
5388 cet amour de la destruction et de l’anarchie que les génies directeurs de ce temps ont inspiré à beaucoup d’entre nous — e
5389 inspiré à beaucoup d’entre nous — encore que peu l’ avouent. Car détruire, déblayer, et faire des signes dans le vide à de
5390 Car détruire, déblayer, et faire des signes dans le vide à des hasards gros de dangers, c’est peut-être à quoi notre géné
5391 t peut-être à quoi notre génération devra limiter l’ efficacité de ses efforts. Critiquer le présent au nom du passé ne sig
5392 ra limiter l’efficacité de ses efforts. Critiquer le présent au nom du passé ne signifie pas que l’on désire un retour au
5393 er le présent au nom du passé ne signifie pas que l’ on désire un retour au passé. Mais la considération de régimes anciens
5394 ifie pas que l’on désire un retour au passé. Mais la considération de régimes anciens peut nous amener à constater, sans p
5395 r exemple, est-ce un progrès que d’avoir remplacé les hiérarchies de tradition, avec tout le vaste arrière-fond de poésie e
5396 remplacé les hiérarchies de tradition, avec tout le vaste arrière-fond de poésie et de grandeur que ce mot comporte — que
5397 ce mot comporte — quelles qu’en soient d’ailleurs les réalisations —, par des hiérarchies rond-de-cuiresques dont l’origine
5398 ns —, par des hiérarchies rond-de-cuiresques dont l’ origine est un pis-aller, dont la méthode est le tirage au flanc lucra
5399 -cuiresques dont l’origine est un pis-aller, dont la méthode est le tirage au flanc lucratif, dont l’esprit est la jalousi
5400 t l’origine est un pis-aller, dont la méthode est le tirage au flanc lucratif, dont l’esprit est la jalousie rancie armée
5401 la méthode est le tirage au flanc lucratif, dont l’ esprit est la jalousie rancie armée de pédantisme, et je ne parle pas
5402 st le tirage au flanc lucratif, dont l’esprit est la jalousie rancie armée de pédantisme, et je ne parle pas du décor, des
5403 isme, et je ne parle pas du décor, des odeurs, de la poussière, des petites habitudes sordides et de cette matière raremen
5404 arement « hygiénique » et qui définit notre âge : la paperasse ? Réponse ? Petits étourdis. Réponse non, c’est un recul. C
5405 l. Cette critique du fonctionnarisme, vous alliez le dire, est un ramassis de lieux communs. Mais il s’en faut, hélas, de
5406 ommuns. Mais il s’en faut, hélas, de beaucoup que la majorité des électeurs les considèrent comme tels. Et je ne me tiendr
5407 hélas, de beaucoup que la majorité des électeurs les considèrent comme tels. Et je ne me tiendrai pas pour battu quand on
5408 nt, maintenant, je vais m’y prendre pour préparer les temps nouveaux. Énorme question. Aurai-je la naïveté non moins énorme
5409 nant, je vais m’y prendre pour préparer les temps nouveaux . Énorme question. Aurai-je la naïveté non moins énorme d’esquisser ic
5410 rer les temps nouveaux. Énorme question. Aurai-je la naïveté non moins énorme d’esquisser ici la réponse que je lui réserv
5411 ai-je la naïveté non moins énorme d’esquisser ici la réponse que je lui réserve ? L’instruction publique est la forme la
5412 d’esquisser ici la réponse que je lui réserve ? L’ instruction publique est la forme la plus commune de la peste rational
5413 que je lui réserve ? L’instruction publique est la forme la plus commune de la peste rationaliste qui sévit dans le mond
5414 ui réserve ? L’instruction publique est la forme la plus commune de la peste rationaliste qui sévit dans le monde depuis
5415 truction publique est la forme la plus commune de la peste rationaliste qui sévit dans le monde depuis le xviiie (depuis
5416 s commune de la peste rationaliste qui sévit dans le monde depuis le xviiie (depuis les dernières pestes noires). Si vous
5417 peste rationaliste qui sévit dans le monde depuis le xviiie (depuis les dernières pestes noires). Si vous creusez un peu
5418 qui sévit dans le monde depuis le xviiie (depuis les dernières pestes noires). Si vous creusez un peu la notion de démocra
5419 dernières pestes noires). Si vous creusez un peu la notion de démocratie, vous trouvez bien vite qu’elle repose sur des p
5420 mentalité. Elle s’est développée au xviiie dans l’ aristocratie qui n’y voyait qu’un jeu. Durant tout le xixe elle est d
5421 ristocratie qui n’y voyait qu’un jeu. Durant tout le xixe elle est descendue dans la bourgeoisie et dans le peuple ; elle
5422 jeu. Durant tout le xixe elle est descendue dans la bourgeoisie et dans le peuple ; elle y est devenue une tyrannie. Avan
5423 e elle est descendue dans la bourgeoisie et dans le peuple ; elle y est devenue une tyrannie. Avant il y avait la Raison
5424 elle y est devenue une tyrannie. Avant il y avait la Raison et les sentiments. Maintenant il y a le rationalisme12 et la s
5425 venue une tyrannie. Avant il y avait la Raison et les sentiments. Maintenant il y a le rationalisme12 et la sentimentalité.
5426 it la Raison et les sentiments. Maintenant il y a le rationalisme12 et la sentimentalité. Ce rationalisme-là triomphe non
5427 entiments. Maintenant il y a le rationalisme12 et la sentimentalité. Ce rationalisme-là triomphe non seulement dans les pr
5428 é. Ce rationalisme-là triomphe non seulement dans les principes démocratiques, et dans ceux de l’École, mais encore dans to
5429 dans les principes démocratiques, et dans ceux de l’ École, mais encore dans toute la conduite moderne de la vie. C’est not
5430 , et dans ceux de l’École, mais encore dans toute la conduite moderne de la vie. C’est notre américanisme et c’est notre s
5431 le, mais encore dans toute la conduite moderne de la vie. C’est notre américanisme et c’est notre sécheresse sentimentale.
5432 et c’est notre sécheresse sentimentale. Et c’est le grand empêchement intérieur dont souffre notre imagination créatrice 
5433 réatrice ; c’est lui qui stérilise nos utopies et les empêche de devenir autre chose que des utopies. Il s’agit donc en pre
5434 ue des utopies. Il s’agit donc en premier lieu de le démasquer et de le pourchasser dans toutes les démarches de notre vie
5435 s’agit donc en premier lieu de le démasquer et de le pourchasser dans toutes les démarches de notre vie. Mais cette premiè
5436 de le démasquer et de le pourchasser dans toutes les démarches de notre vie. Mais cette première tâche constitue un progra
5437 nce négative qui aura duré deux siècles au moins. L’ évolution de l’humanité paraît conforme à la dialectique hégélienne ;
5438 i aura duré deux siècles au moins. L’évolution de l’ humanité paraît conforme à la dialectique hégélienne ; on y retrouve f
5439 oins. L’évolution de l’humanité paraît conforme à la dialectique hégélienne ; on y retrouve facilement les triades : être
5440 dialectique hégélienne ; on y retrouve facilement les triades : être —négation de l’être — nouvel être. Notre époque serait
5441 trouve facilement les triades : être —négation de l’ être — nouvel être. Notre époque serait le deuxième temps d’une de ces
5442 temps d’une de ces triades. Son rationalisme nie l’ être sous toutes ses formes, traduit tout en relations et veut rendre
5443 -à-dire, pour lui, calculables, chiffrables. Dans la mesure où il y parvient, il tue les existences particulières, ou bien
5444 ffrables. Dans la mesure où il y parvient, il tue les existences particulières, ou bien c’est qu’elles sont déjà mortes. Ma
5445 es, ou bien c’est qu’elles sont déjà mortes. Mais le temps vient où elles renaîtront à une vie nouvelle et plus complète,
5446 cience, si je puis dire. Alors ce sera au tour de l’ instinct d’intégrer la raison. Je crois que nous approchons de ce temp
5447 e. Alors ce sera au tour de l’instinct d’intégrer la raison. Je crois que nous approchons de ce temps. Et que le véritable
5448 Je crois que nous approchons de ce temps. Et que le véritable progrès veut qu’on s’attaque à tout ce qui entrave cet avèn
5449 entrave cet avènement. C’est pourquoi je réclame l’ expulsion de la congrégation radicale des instituteurs. On me demande
5450 ènement. C’est pourquoi je réclame l’expulsion de la congrégation radicale des instituteurs. On me demande encore ce que j
5451 uteurs. On me demande encore ce que je mettrais à la place. Et parce que je ne propose rien de bien précis, on triomphe gr
5452 jet de Louis XIV ce qu’il concevait à la place de la royauté absolue. Il eût fallu certes une imagination prodigieuse au d
5453 e civilisation. Et même Diderot, même Rousseau, à la veille de la Révolution, soupçonnaient-ils que la république qu’ils a
5454 n. Et même Diderot, même Rousseau, à la veille de la Révolution, soupçonnaient-ils que la république qu’ils appelaient ser
5455 la veille de la Révolution, soupçonnaient-ils que la république qu’ils appelaient serait livrée cent ans plus tard à peine
5456 laient serait livrée cent ans plus tard à peine à la folie démocratique, à cette danse de Saint-Guy politique dont rien de
5457 litique dont rien de leur temps ne pouvait offrir la moindre préfiguration ? Eh bien ! induisez de cette similitude les po
5458 guration ? Eh bien ! induisez de cette similitude les possibilités formidables que nous réserve le siècle à venir, et vous
5459 ude les possibilités formidables que nous réserve le siècle à venir, et vous commencerez à comprendre que votre scepticism
5460 à comprendre que votre scepticisme à l’endroit de la forme sociale que nous appelons sans la connaître et qui s’élabore dé
5461 ndroit de la forme sociale que nous appelons sans la connaître et qui s’élabore déjà secrètement, que ce mépris et ce scep
5462 , sous lequel vous ne tarderez pas à périr. 12. La Raison de Spinoza ou de Descartes n’a que de lointains rapports de pa
5463 ommé Rationalisme, produit d’une mésalliance avec l’ Avarice bourgeoise — et qui sans cesse déroge.
88 1929, Les Méfaits de l’instruction publique. Appendice. Utopie
5464 Appendice. Utopie Un os à la meute. (Et figurez-vous que j’ai la ferme intention de vous faire rig
5465 pie Un os à la meute. (Et figurez-vous que j’ai la ferme intention de vous faire rigoler, si cela peut vous rassurer qua
5466 ela peut vous rassurer quant à ma santé mentale.) La question est de savoir si nous serons des hommes de chair et d’esprit
5467 d’esprit, ou des pantins articulés. (Qui tiendra les ficelles, peu importe.) Les économistes (mot stupide) et les philosop
5468 ticulés. (Qui tiendra les ficelles, peu importe.) Les économistes (mot stupide) et les philosophes13 les mieux informés de
5469 s, peu importe.) Les économistes (mot stupide) et les philosophes13 les mieux informés de ce temps s’accordent sur un point
5470 es économistes (mot stupide) et les philosophes13 les mieux informés de ce temps s’accordent sur un point : le salut de l’E
5471 x informés de ce temps s’accordent sur un point : le salut de l’Europe est lié à la naissance d’une nouvelle attitude de l
5472 e ce temps s’accordent sur un point : le salut de l’ Europe est lié à la naissance d’une nouvelle attitude de l’âme. Ceci r
5473 ent sur un point : le salut de l’Europe est lié à la naissance d’une nouvelle attitude de l’âme. Ceci revient à dire que s
5474 est lié à la naissance d’une nouvelle attitude de l’ âme. Ceci revient à dire que seule une grande vague de l’imagination c
5475 Ceci revient à dire que seule une grande vague de l’ imagination collective peut désensabler le vieux bateau occidental. Un
5476 ague de l’imagination collective peut désensabler le vieux bateau occidental. Un nouvel état d’esprit : voilà bien ce que
5477 ntal. Un nouvel état d’esprit : voilà bien ce que l’ École empêche même de concevoir Elle cultive ce qu’il y a d’anti-irrat
5478 Elle cultive ce qu’il y a d’anti-irrationnel dans la nature de l’homme. Elle punit froidement la spontanéité et l’inventio
5479 ce qu’il y a d’anti-irrationnel dans la nature de l’ homme. Elle punit froidement la spontanéité et l’invention. Elle dénat
5480 dans la nature de l’homme. Elle punit froidement la spontanéité et l’invention. Elle dénature le sens de la liberté. Elle
5481 l’homme. Elle punit froidement la spontanéité et l’ invention. Elle dénature le sens de la liberté. Elle détruit tout ce q
5482 ment la spontanéité et l’invention. Elle dénature le sens de la liberté. Elle détruit tout ce qui permettrait d’échapper à
5483 ntanéité et l’invention. Elle dénature le sens de la liberté. Elle détruit tout ce qui permettrait d’échapper à la mécaniq
5484 Elle détruit tout ce qui permettrait d’échapper à la mécanique. Bref, elle perpétue ce manque d’imagination dont les consé
5485 Bref, elle perpétue ce manque d’imagination dont les conséquences seront matériellement catastrophiques pour peu que cela
5486 peu que cela continue. Qu’on ne s’y trompe pas : le sens technique qui tient lieu d’imagination à l’homme moderne n’est p
5487 le sens technique qui tient lieu d’imagination à l’ homme moderne n’est pas créateur d’êtres spirituellement vivants, ni d
5488 lement vivants, ni d’aucune grandeur supérieure à la somme de ses éléments. Il n’engendre pas, il ajuste. Quand nous auron
5489 e pas, il ajuste. Quand nous aurons épuisé toutes les combinaisons de vitesse et d’ennui à quoi présentement nous usons le
5490 vitesse et d’ennui à quoi présentement nous usons le plus clair de nos forces, — le Poète dira un mot, ou bien fera un act
5491 ntement nous usons le plus clair de nos forces, —  le Poète dira un mot, ou bien fera un acte, et ces peuples de somnambule
5492 ples de somnambules s’éveilleront du cauchemar où les plongent toutes vos drogues : presse, ciné, faux-luxe, suffrage unive
5493 e équipe d’idéalistes pratiques d’en faire sortir le beau miracle d’une civilisation aux ordres de l’Esprit. Mais il faudr
5494 ire sortir le beau miracle d’une civilisation aux ordres de l’Esprit. Mais il faudrait que dès maintenant se constituent ces é
5495 le beau miracle d’une civilisation aux ordres de l’ Esprit. Mais il faudrait que dès maintenant se constituent ces élites,
5496 constituent ces élites, et cela ne se peut que si les tenants de l’ordre spirituel retrouvent le courage d’être, malgré les
5497 élites, et cela ne se peut que si les tenants de l’ ordre spirituel retrouvent le courage d’être, malgré les mots14, des a
5498 lites, et cela ne se peut que si les tenants de l’ ordre spirituel retrouvent le courage d’être, malgré les mots14, des anarch
5499 ue si les tenants de l’ordre spirituel retrouvent le courage d’être, malgré les mots14, des anarchistes et des utopistes.
5500 re spirituel retrouvent le courage d’être, malgré les mots14, des anarchistes et des utopistes. J’appelle anarchiste, tout
5501 ut ce qui est violemment et intégralement humain. L’ anarchie est un degré d’intensité dans la vie, non pas un parti. Tout
5502 humain. L’anarchie est un degré d’intensité dans la vie, non pas un parti. Tout extrémiste, de droite comme de gauche, se
5503 de toutes ses forces. Mais c’est un anarchiste de la mauvaise espèce, un anarchiste embrigadé. L’anarchiste que j’aime est
5504 e de la mauvaise espèce, un anarchiste embrigadé. L’ anarchiste que j’aime est simplement un homme libre qui a une foi (ou
5505 e savez pas ce que c’est que libre, ou consacré.) L’ utopiste, c’est l’inventeur. Les sots vont répétant que c’est un être
5506 c’est que libre, ou consacré.) L’utopiste, c’est l’ inventeur. Les sots vont répétant que c’est un être qui ignore le réel
5507 bre, ou consacré.) L’utopiste, c’est l’inventeur. Les sots vont répétant que c’est un être qui ignore le réel. C’est justem
5508 s sots vont répétant que c’est un être qui ignore le réel. C’est justement parce qu’il le connaît mieux qu’eux qu’il y a v
5509 e qui ignore le réel. C’est justement parce qu’il le connaît mieux qu’eux qu’il y a vu des fissures et des possibilités no
5510 eux qu’il y a vu des fissures et des possibilités nouvelles . Tenir compte du réel ne signifie pas s’y soumettre sans combat. L’ut
5511 u réel ne signifie pas s’y soumettre sans combat. L’ utopiste est celui qui ne se résigne à aucun état de choses. Il est po
5512 ne se résigne à aucun état de choses. Il est pour le « mieux » contre le « bien ». Sans lui l’humanité s’avachirait totale
5513 n état de choses. Il est pour le « mieux » contre le « bien ». Sans lui l’humanité s’avachirait totalement. Mais il est da
5514 st pour le « mieux » contre le « bien ». Sans lui l’ humanité s’avachirait totalement. Mais il est dans l’ordre qu’elle beu
5515 umanité s’avachirait totalement. Mais il est dans l’ ordre qu’elle beugle longuement tout en le suivant. Que faire, diront
5516 anité s’avachirait totalement. Mais il est dans l’ ordre qu’elle beugle longuement tout en le suivant. Que faire, diront les g
5517 st dans l’ordre qu’elle beugle longuement tout en le suivant. Que faire, diront les gens de bonne volonté dont mon imagina
5518 longuement tout en le suivant. Que faire, diront les gens de bonne volonté dont mon imagination romantique suppose l’exist
5519 e volonté dont mon imagination romantique suppose l’ existence. Que faire ? Voir et penser juste d’abord. Simplement. Ensui
5520 rd. Simplement. Ensuite, soutenir cette opinion : les effets suivront infailliblement. Par exemple, je vous demande une foi
5521 els d’histoire et de géographie bien connus, pour l’ esprit le plus dangereusement plat qui soit. (Il est plus que plat : i
5522 toire et de géographie bien connus, pour l’esprit le plus dangereusement plat qui soit. (Il est plus que plat : il est cre
5523 i, cela finira par créer un courant d’opinion. Et l’ opinion publique mène le monde, paraît-il. À ce propos : que les journ
5524 un courant d’opinion. Et l’opinion publique mène le monde, paraît-il. À ce propos : que les journalistes s’engagent désor
5525 lique mène le monde, paraît-il. À ce propos : que les journalistes s’engagent désormais à ne publier plus un seul article d
5526 seul article de fond où ne perce leur mépris pour l’ instruction publique. Ils peuvent dire ce qu’ils veulent à propos de n
5527 n’importe quoi, comme on sait, et ils auraient là l’ occasion de racheter bien des choses. Ce n’est rien de moins qu’une ré
5528 dit pour éviter ce malentendu : je ne crois pas à la possibilité d’une réforme suffisante. C’est une révolution qu’il faut
5529 C’est une révolution qu’il faut. Alors, supprimer les écoles, raser les collèges, renvoyer les instituteurs aux pommes de t
5530 on qu’il faut. Alors, supprimer les écoles, raser les collèges, renvoyer les instituteurs aux pommes de terre ? Impossible.
5531 upprimer les écoles, raser les collèges, renvoyer les instituteurs aux pommes de terre ? Impossible. Le peuple qui déteste
5532 es instituteurs aux pommes de terre ? Impossible. Le peuple qui déteste l’école a pourtant faim d’instruction15, et se cro
5533 mmes de terre ? Impossible. Le peuple qui déteste l’ école a pourtant faim d’instruction15, et se croirait lésé dans un de
5534 croirait lésé dans un de ses droits fondamentaux. Le peuple veut s’instruire et on lui bourre le crâne pour l’en empêcher.
5535 taux. Le peuple veut s’instruire et on lui bourre le crâne pour l’en empêcher. Il s’agit de lui faire comprendre que l’éco
5536 e veut s’instruire et on lui bourre le crâne pour l’ en empêcher. Il s’agit de lui faire comprendre que l’école est le plus
5537 n empêcher. Il s’agit de lui faire comprendre que l’ école est le plus gros obstacle à sa culture. Et c’est cela, préparer
5538 Il s’agit de lui faire comprendre que l’école est le plus gros obstacle à sa culture. Et c’est cela, préparer le terrain.
5539 os obstacle à sa culture. Et c’est cela, préparer le terrain. D’autre part, il faut partir de ce qui est. Mais comment ret
5540 rtir de ce qui est. Mais comment retourner contre l’ ennemi ses propres batteries ? Autrement dit : quel emploi utopique de
5541 tteries ? Autrement dit : quel emploi utopique de l’ organisation existante peut-on imaginer ? L’école devrait donner à l’e
5542 ue de l’organisation existante peut-on imaginer ? L’ école devrait donner à l’enfant ce que son entourage ne peut plus lui
5543 tante peut-on imaginer ? L’école devrait donner à l’ enfant ce que son entourage ne peut plus lui donner : des modèles de p
5544 onner : des modèles de pensée. Un entraînement de l’ esprit, au lieu d’une somme de connaissances mortes. Une technique spi
5545 ituelle. Et puis, qu’il en fasse ce qu’il voudra. Les Orientaux appellent yoga cette culture des facultés physiques, intell
5546 ystiques. Toute leur force vient du yoga. Et tout le yoga repose sur la concentration. En vérité, toute force résulte d’un
5547 r force vient du yoga. Et tout le yoga repose sur la concentration. En vérité, toute force résulte d’une concentration, da
5548 ncentration, dans quelque domaine que ce soit. Si l’ Occident comprenait cette vérité élémentaire et en tirait des conclusi
5549 il serait sauvé du désastre, mais il recouvrerait la domination du monde16 et non plus en barbare cette fois-ci. Ce qui l’
5550 de16 et non plus en barbare cette fois-ci. Ce qui l’ empêche de comprendre, ici encore, c’est la peur scolaire des mots. Ce
5551 Ce qui l’empêche de comprendre, ici encore, c’est la peur scolaire des mots. Ce terme hindou agace, trouble ou fait sourir
5552 s. Ce terme hindou agace, trouble ou fait sourire les étriqués. On croit devoir se défendre : on se moque. On me dit : vous
5553 ez tout de même pas une classe de gamins répétant la syllabe sacrée Aûm ou se livrant à des exercices de contrôle de la re
5554 Aûm ou se livrant à des exercices de contrôle de la respiration. Il ne s’agit nullement de cela. Nous ne sommes pas aux I
5555 s aux Indes, je vous jure que je m’en doute. Mais l’ Occidental aussi pratique son yoga à lui : toutes les fois qu’il veut
5556 n minimum de moyens. J’en citerai deux exemples : la discipline jésuite et le drill militaire. Le drill correspond remarqu
5557 citerai deux exemples : la discipline jésuite et le drill militaire. Le drill correspond remarquablement dans le plan phy
5558 es : la discipline jésuite et le drill militaire. Le drill correspond remarquablement dans le plan physique, aux exercices
5559 litaire. Le drill correspond remarquablement dans le plan physique, aux exercices élémentaires que l’on exige d’un initié.
5560 le plan physique, aux exercices élémentaires que l’ on exige d’un initié. Le fameux arrêt de la pensée dont on sait l’impo
5561 xercices élémentaires que l’on exige d’un initié. Le fameux arrêt de la pensée dont on sait l’importance primordiale dans
5562 es que l’on exige d’un initié. Le fameux arrêt de la pensée dont on sait l’importance primordiale dans le yoga correspond
5563 initié. Le fameux arrêt de la pensée dont on sait l’ importance primordiale dans le yoga correspond au garde-à-vous ! par q
5564 pensée dont on sait l’importance primordiale dans le yoga correspond au garde-à-vous ! par quoi l’on impose au corps une i
5565 ans le yoga correspond au garde-à-vous ! par quoi l’ on impose au corps une immobilité absolue. L’un et l’autre de ces exer
5566 ue. L’un et l’autre de ces exercices montrent que le candidat possède une énergie suffisante pour aller plus loin, — et en
5567 temps constituent des sources d’énergie nouvelle. Le parallèle peut être poussé dans les détails. Il s’agit bien d’un gest
5568 rgie nouvelle. Le parallèle peut être poussé dans les détails. Il s’agit bien d’un geste identique, exécuté dans deux plans
5569 te identique, exécuté dans deux plans différents. Le drill est un yoga corporel, le yoga est un drill de l’esprit. Je sais
5570 plans différents. Le drill est un yoga corporel, le yoga est un drill de l’esprit. Je sais que ces deux mots sont bien da
5571 ill est un yoga corporel, le yoga est un drill de l’ esprit. Je sais que ces deux mots sont bien dangereux et impopulaires.
5572 nt pas séparer une méthode des fins auxquelles on l’ applique généralement. Ces gens-là diront que je veux militariser l’en
5573 ement. Ces gens-là diront que je veux militariser l’ enseignement ou transformer les collèges en couvents. Tant pis. Le dri
5574 je veux militariser l’enseignement ou transformer les collèges en couvents. Tant pis. Le drill offre un exemple d’éducation
5575 u transformer les collèges en couvents. Tant pis. Le drill offre un exemple d’éducation efficace. L’armée de milices suiss
5576 . Le drill offre un exemple d’éducation efficace. L’ armée de milices suisses fait des soldats en moins de trois mois. Si l
5577 isses fait des soldats en moins de trois mois. Si l’ école appliquait en les transposant des méthodes de concentration anal
5578 en moins de trois mois. Si l’école appliquait en les transposant des méthodes de concentration analogues, même dans la mes
5579 es méthodes de concentration analogues, même dans la mesure sans doute faible où la nature des enfants le supporte, on éco
5580 alogues, même dans la mesure sans doute faible où la nature des enfants le supporte, on économiserait plusieurs semestres
5581 mesure sans doute faible où la nature des enfants le supporte, on économiserait plusieurs semestres de travail. Si chaque
5582 t plusieurs semestres de travail. Si chaque matin l’ enfant parvenait à mettre sa pensée au garde-à-vous durant quelques in
5583 aucoup de choses qui restent cachées aux agités ; la nature par exemple. Je ne demande pas qu’on nous enseigne le goût de
5584 ar exemple. Je ne demande pas qu’on nous enseigne le goût de la nature. Mais qu’on nous laisse le temps de la regarder. De
5585 Je ne demande pas qu’on nous enseigne le goût de la nature. Mais qu’on nous laisse le temps de la regarder. De faire conn
5586 igne le goût de la nature. Mais qu’on nous laisse le temps de la regarder. De faire connaissance. Je ne sais s’il est très
5587 de la nature. Mais qu’on nous laisse le temps de la regarder. De faire connaissance. Je ne sais s’il est très exagéré de
5588 er ces facultés atrophiées que devrait s’employer l’ école. Nous avons vu qu’elle préfère les étouffer. Cependant, je ne cr
5589 s’employer l’école. Nous avons vu qu’elle préfère les étouffer. Cependant, je ne crois pas qu’il soit bon que tous progress
5590 crois pas qu’il soit bon que tous progressent de la même manière. Dans un système de culture spirituelle, les différences
5591 manière. Dans un système de culture spirituelle, les différences s’accuseraient, mais se légitimeraient du même coup ; car
5592 coup ; car sur ce plan elles ne font que traduire la diversité des besoins individuels. Méditez un peu ces truismes : On a
5593 . Une minute de concentration intense dégage dans l’ individu plus d’énergie que des heures d’exercices gémissants. De même
5594 e que des heures d’exercices gémissants. De même, le bien supérieur de quelques-uns est plus utile à tous que le bien médi
5595 périeur de quelques-uns est plus utile à tous que le bien médiocre de beaucoup. La valeur vaut mieux que le nombre parce q
5596 us utile à tous que le bien médiocre de beaucoup. La valeur vaut mieux que le nombre parce qu’elle le contient en puissanc
5597 en médiocre de beaucoup. La valeur vaut mieux que le nombre parce qu’elle le contient en puissance. Et c’est pourquoi l’ar
5598 La valeur vaut mieux que le nombre parce qu’elle le contient en puissance. Et c’est pourquoi l’aristocratie de l’esprit e
5599 ’elle le contient en puissance. Et c’est pourquoi l’ aristocratie de l’esprit est nécessaire au bien public. Certains propo
5600 en puissance. Et c’est pourquoi l’aristocratie de l’ esprit est nécessaire au bien public. Certains proposent en rougissant
5601 rougissant de leur hardiesse quelque chose comme l’ instruction privée : et moi je la voudrais secrète. Vous verrez bien.
5602 lque chose comme l’instruction privée : et moi je la voudrais secrète. Vous verrez bien. Cela se fera sans vous. Déjà revi
5603 verrez bien. Cela se fera sans vous. Déjà revient le temps des mages : ils comprennent les théories d’Einstein, ils compos
5604 Déjà revient le temps des mages : ils comprennent les théories d’Einstein, ils composent de la poésie pure, ils mesurent de
5605 rennent les théories d’Einstein, ils composent de la poésie pure, ils mesurent des sensibilités secondes et tout un arc-en
5606 econdes et tout un arc-en-ciel de sentiments dont les accords imitent la blancheur éclatante de l’amour… Que dirons-nous ?…
5607 rc-en-ciel de sentiments dont les accords imitent la blancheur éclatante de l’amour… Que dirons-nous ?… Par la force des c
5608 ont les accords imitent la blancheur éclatante de l’ amour… Que dirons-nous ?… Par la force des choses et de l’Esprit, l’ho
5609 heur éclatante de l’amour… Que dirons-nous ?… Par la force des choses et de l’Esprit, l’homme sera-t-il sauvé de sa folie
5610 Que dirons-nous ?… Par la force des choses et de l’ Esprit, l’homme sera-t-il sauvé de sa folie démocratique ?   Areuse,
5611 s-nous ?… Par la force des choses et de l’Esprit, l’ homme sera-t-il sauvé de sa folie démocratique ?   Areuse, 26 décembr
5612 Ce travers a été développé jusqu’au ridicule par la démocratie. Les journaux, les cercles, les coulisses de parlements et
5613 té développé jusqu’au ridicule par la démocratie. Les journaux, les cercles, les coulisses de parlements et autres potinièr
5614 usqu’au ridicule par la démocratie. Les journaux, les cercles, les coulisses de parlements et autres potinières ne vivent q
5615 ule par la démocratie. Les journaux, les cercles, les coulisses de parlements et autres potinières ne vivent que de semblab
5616 er quelque saveur à ses jugements. C’est pourquoi l’ on ne peut plus attaquer un fonctionnaire dans son activité publique s
5617 un très brave homme, il fait partie du conseil de la paroisse, etc. » — Il semble qu’en attaquant ses idées et leurs réali
5618 es et leurs réalisations ont ait porté atteinte à la dignité morale de ce M. Machin, membre du conseil de paroisse. Je pré
5619 onseil de paroisse. Je préciserai donc : je tiens l’ École pour criminelle. Mais je ne tiens pas tous les instituteurs pour
5620 ’École pour criminelle. Mais je ne tiens pas tous les instituteurs pour gibier de potence. Ils font beaucoup de mal, mais i
5621 mières victimes du système qu’il propagent et qui les fait vivre. La question se complique dès que l’instituteur prend cons
5622 du système qu’il propagent et qui les fait vivre. La question se complique dès que l’instituteur prend conscience de la no
5623 les fait vivre. La question se complique dès que l’ instituteur prend conscience de la nocivité de son action… Ils sont co
5624 mplique dès que l’instituteur prend conscience de la nocivité de son action… Ils sont consciencieux, certes, mais sont-ils
5625 ls sont consciencieux, certes, mais sont-ils dans la même mesure conscients des fins qu’on assigne à leur activité ? Un pe
5626 assigne à leur activité ? Un peu de rigueur dans la pensée empêcherait souvent des catastrophes que beaucoup de rigueur m
5627 igueur morale ne saurait même pas prévoir. NOTE B La culture de notre sensibilité nous aiderait à retrouver l’accord avec
5628 re de notre sensibilité nous aiderait à retrouver l’ accord avec l’ordre naturel. La culture de notre force de pensée nous
5629 nsibilité nous aiderait à retrouver l’accord avec l’ ordre naturel. La culture de notre force de pensée nous rendrait une l
5630 ibilité nous aiderait à retrouver l’accord avec l’ ordre naturel. La culture de notre force de pensée nous rendrait une libert
5631 derait à retrouver l’accord avec l’ordre naturel. La culture de notre force de pensée nous rendrait une liberté sans laque
5632 t vains pour instaurer cette nouvelle attitude de l’ âme. Mais ces méthodes ne prendraient tout leur sens et toute leur eff
5633 un système religieux. Pour quiconque a une foi et la conscience de cette foi, il n’est d’enseignement véritable que religi
5634 ’est d’enseignement véritable que religieux. Mais les questions confessionnelles enrayent et faussent tout. Imaginez une cu
5635 ltères et rester pacifiste. NOTE C Vous parlez de la grande vulgarité de mes attaques. Ce qui est vulgaire, au plein sens
5636 Ce qui est vulgaire, au plein sens du mot, c’est le genre distingué de la bourgeoisie qui se monte le cou. 13. Économis
5637 au plein sens du mot, c’est le genre distingué de la bourgeoisie qui se monte le cou. 13. Économistes et philosophes : c
5638 le genre distingué de la bourgeoisie qui se monte le cou. 13. Économistes et philosophes : ces Messieurs n’apparaissent
5639 ssieurs n’apparaissent ici que pour impressionner le public. Je n’ai pas besoin de leurs attendus pour juger. 14. Ces deu
5640 . Ces deux mots en effet, terrorisent à tel point les bourgeois qu’ils n’en distinguent plus même le sens. Ils les lancent
5641 t les bourgeois qu’ils n’en distinguent plus même le sens. Ils les lancent à la tête de tous ceux qui les dérangent, comme
5642 is qu’ils n’en distinguent plus même le sens. Ils les lancent à la tête de tous ceux qui les dérangent, comme des pavés, ou
5643 distinguent plus même le sens. Ils les lancent à la tête de tous ceux qui les dérangent, comme des pavés, ou plutôt des g
5644 sens. Ils les lancent à la tête de tous ceux qui les dérangent, comme des pavés, ou plutôt des grenades, avec la frousse q
5645 nt, comme des pavés, ou plutôt des grenades, avec la frousse que ça ne leur éclate dans la main. 15. Cf. ce que dit Tolst
5646 nades, avec la frousse que ça ne leur éclate dans la main. 15. Cf. ce que dit Tolstoï sur cette haine et sur ce besoin da
5647 les pédagogiques encore très actuels, du fait que l’ école n’a pas bougé depuis. 16. On promet des confitures à l’enfant,
5648 pas bougé depuis. 16. On promet des confitures à l’ enfant, s’il est sage. Moi je m’en moque. Je n’aime que la liberté.
5649 , s’il est sage. Moi je m’en moque. Je n’aime que la liberté.
89 1929, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Prison. Ailleurs. Étoile de jour (mars 1929)
5650 de jour (mars 1929)z Prison Prisonnier de la nuit mais plus libre qu’un ange prisonnier dans ta tête mais libre co
5651 me avant cette naissance aux lents vertiges Quand la nuit s’effeuille et se fane prisonnier d’une saison morte au tombeau
5652 d’une saison morte au tombeau des fleurs obscures les mains de l’absence se ferment sur le vide   Tu pleurerais Mais la gr
5653 morte au tombeau des fleurs obscures les mains de l’ absence se ferment sur le vide   Tu pleurerais Mais la grâce est faci
5654 rs obscures les mains de l’absence se ferment sur le vide   Tu pleurerais Mais la grâce est facile comme un matin d’été l
5655 ence se ferment sur le vide   Tu pleurerais Mais la grâce est facile comme un matin d’été la grâce tendrement dénouée de
5656 ais Mais la grâce est facile comme un matin d’été la grâce tendrement dénouée de ta vie comme de cette nuit le jour d’un g
5657 tendrement dénouée de ta vie comme de cette nuit le jour d’un grand été   qui consent… Ailleurs Colombes lumineuse
5658 yageuses ah ! que d’aucun retour vous ne laissiez le gage aux plaintes de mon cœur il est d’autres rivages où mieux qu’ici
5659 mon cœur il est d’autres rivages où mieux qu’ici l’ on meurt. Étoile de jour Il naissait à son destin des rayons g
5660 t à son destin des rayons glissent et rient c’est la caresse des anges parmi les formes de l’ombre C’était l’aube et le
5661 lissent et rient c’est la caresse des anges parmi les formes de l’ombre C’était l’aube et le sourire adorable de savoir l
5662 nt c’est la caresse des anges parmi les formes de l’ ombre C’était l’aube et le sourire adorable de savoir la dansante li
5663 e des anges parmi les formes de l’ombre C’était l’ aube et le sourire adorable de savoir la dansante liberté d’un désir à
5664 s parmi les formes de l’ombre C’était l’aube et le sourire adorable de savoir la dansante liberté d’un désir à sa naissa
5665 C’était l’aube et le sourire adorable de savoir la dansante liberté d’un désir à sa naissance L’étoile qui l’accueille
5666 r la dansante liberté d’un désir à sa naissance L’ étoile qui l’accueille au sommet ravi d’un silence c’est le miroir d’u
5667 liberté d’un désir à sa naissance L’étoile qui l’ accueille au sommet ravi d’un silence c’est le miroir d’une absence ma
5668 qui l’accueille au sommet ravi d’un silence c’est le miroir d’une absence mais le signe de sa grâce Dans l’or vert évano
5669 i d’un silence c’est le miroir d’une absence mais le signe de sa grâce Dans l’or vert évanouie au cœur éclatant du jour
5670 ir d’une absence mais le signe de sa grâce Dans l’ or vert évanouie au cœur éclatant du jour scintillera l’invisible gage
5671 ert évanouie au cœur éclatant du jour scintillera l’ invisible gage d’un amour perdu. z. Rougemont Denis de, « Prison
90 1929, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). Souvenirs d’enfance et de jeunesse, par Philippe Godet (avril 1929)
5672 aa Quand avec un air fin mais un ton convaincu l’ on a répété dans une ballade fameuse « Que voulez-vous, je suis bourge
5673 fameuse « Que voulez-vous, je suis bourgeois ! », l’ on peut se permettre quelques malices, quelques jeux d’esprit ou de mé
5674 elques jeux d’esprit ou de méchanceté, assuré que l’ on est désormais d’être absous avec le sourire par la clientèle des li
5675 assuré que l’on est désormais d’être absous avec le sourire par la clientèle des librairies romandes, en mal de cadeaux d
5676 n est désormais d’être absous avec le sourire par la clientèle des librairies romandes, en mal de cadeaux de Noël ou de pr
5677 e cadeaux de Noël ou de première communion. Parmi les compatriotes d’Amiel, Godet restera l’un des rares qui ont réussi à s
5678 peu complexe et comme réduite à deux dimensions ; la conscience ne pouvait y tuer un lyrisme quasi inexistant, mais bien y
5679 xciter un esprit critique fort alerte. Jugez-en à la façon dont il parle de « ses quelques succès, si disproportionnés ave
5680 rtionnés avec son mérite ». Il ajoute : « j’ai eu la chance de discerner très jeune, avec une clairvoyance singulière, mes
5681 yance singulière, mes propres limites, et j’ai eu la sagesse de ne rien tenter au-delà ». C’est le comble de l’économie bo
5682 eu la sagesse de ne rien tenter au-delà ». C’est le comble de l’économie bourgeoise que cette administration exacte d’un
5683 e de ne rien tenter au-delà ». C’est le comble de l’ économie bourgeoise que cette administration exacte d’un petit capital
5684 e cette administration exacte d’un petit capital. Le contraire de la poésie, bien sûr. Mais on n’en demande pas tant dans
5685 ration exacte d’un petit capital. Le contraire de la poésie, bien sûr. Mais on n’en demande pas tant dans les familles. Et
5686 sie, bien sûr. Mais on n’en demande pas tant dans les familles. Et qu’importe si la perspective manque souvent à ces récits
5687 ande pas tant dans les familles. Et qu’importe si la perspective manque souvent à ces récits : ce n’est point un paysage d
5688 ’est point un paysage d’âme qu’on y cherche, mais l’ anecdote bien tournée, des noms connus. Tout est sur le même plan ; le
5689 cdote bien tournée, des noms connus. Tout est sur le même plan ; le dessin d’ailleurs est élégant. Mais comme tout cela ma
5690 née, des noms connus. Tout est sur le même plan ; le dessin d’ailleurs est élégant. Mais comme tout cela manque de chair.
91 1929, Journal de Genève, articles (1926–1982). Panorama de Budapest (23 mai 1929)
5691 press, changer totalement d’atmosphère, passer de la lassitude à la turbulence, d’une propreté joliette à un désordre pitt
5692 totalement d’atmosphère, passer de la lassitude à la turbulence, d’une propreté joliette à un désordre pittoresque, d’un s
5693 d’un scepticisme poli à une excitation agressive. La simple visite des cafés dans l’une et l’autre de ces capitales suffit
5694 l’autre de ces capitales suffit à vous en donner la sensation : ce que vous pourrez voir durant le reste de votre séjour
5695 er la sensation : ce que vous pourrez voir durant le reste de votre séjour ne fera que confirmer cette première impression
5696 mer cette première impression. Vienne : assis sur les banquettes rembourrées de profondes loges, les clients dégustent des
5697 ur les banquettes rembourrées de profondes loges, les clients dégustent des cafés débordants de crème, avec une apathie qu’
5698 troubler, aucune voix haute, aucune couleur vive. Les journaux qu’ils lisent annoncent chaque jour quelque catastrophe immi
5699 ur quelque catastrophe imminente, une révolution, le transfert de la SDN à la Hofburg… Mais les nouvelles de l’Opéra aussi
5700 trophe imminente, une révolution, le transfert de la SDN à la Hofburg… Mais les nouvelles de l’Opéra aussi sont en grosses
5701 minente, une révolution, le transfert de la SDN à la Hofburg… Mais les nouvelles de l’Opéra aussi sont en grosses lettres,
5702 lution, le transfert de la SDN à la Hofburg… Mais les nouvelles de l’Opéra aussi sont en grosses lettres, et tout cela fini
5703 on, le transfert de la SDN à la Hofburg… Mais les nouvelles de l’Opéra aussi sont en grosses lettres, et tout cela finira bien pa
5704 ert de la SDN à la Hofburg… Mais les nouvelles de l’ Opéra aussi sont en grosses lettres, et tout cela finira bien par s’ar
5705 uple s’est résigné avec une facilité incroyable à la défaite, au marxisme, au chômage, lequel semble d’ailleurs correspond
5706 emble d’ailleurs correspondre à son état d’esprit le plus naturel. Mais de quoi vivent ces bourgeois aimables et insipides
5707 ipides, qui passent des après-midi entiers devant les deux verres d’eau que le garçon renouvelle de temps à autre, à lire d
5708 rès-midi entiers devant les deux verres d’eau que le garçon renouvelle de temps à autre, à lire des potins tout en essuyan
5709 t : une vague de musique tzigane vous emporte dès l’ entrée. Un violon vient vous siffler à l’oreille les notes les plus ai
5710 orte dès l’entrée. Un violon vient vous siffler à l’ oreille les notes les plus aiguës d’une chanson populaire, et à l’autr
5711 ’entrée. Un violon vient vous siffler à l’oreille les notes les plus aiguës d’une chanson populaire, et à l’autre extrémité
5712 n violon vient vous siffler à l’oreille les notes les plus aiguës d’une chanson populaire, et à l’autre extrémité de la sal
5713 ’une chanson populaire, et à l’autre extrémité de la salle, par-dessus la rumeur des clients, le violoncelle répond de sa
5714 e, et à l’autre extrémité de la salle, par-dessus la rumeur des clients, le violoncelle répond de sa voix profonde et pass
5715 té de la salle, par-dessus la rumeur des clients, le violoncelle répond de sa voix profonde et passionnée, sous les roulad
5716 le répond de sa voix profonde et passionnée, sous les roulades d’un cymbalum. Aux parois, la prière pour la résurrection de
5717 née, sous les roulades d’un cymbalum. Aux parois, la prière pour la résurrection de la Hongrie, des portraits de lord Roth
5718 oulades d’un cymbalum. Aux parois, la prière pour la résurrection de la Hongrie, des portraits de lord Rothermere, et sur
5719 um. Aux parois, la prière pour la résurrection de la Hongrie, des portraits de lord Rothermere, et sur toutes les portes l
5720 , des portraits de lord Rothermere, et sur toutes les portes le fameux : « Non ! non ! jamais ! » Officiers élégants, tout
5721 aits de lord Rothermere, et sur toutes les portes le fameux : « Non ! non ! jamais ! » Officiers élégants, tout de noir vê
5722 x curieux dessins noirs et blancs : il représente l’ ancienne Hongrie découpée en blanc sur fond noir et portant, en cœur n
5723 en blanc sur fond noir et portant, en cœur noir, la nouvelle… « Savez-vous qu’on nous a pris les deux tiers de notre pays
5724 noir, la nouvelle… « Savez-vous qu’on nous a pris les deux tiers de notre pays ?… Non, non, jamais ! » La rue est sale à ca
5725 deux tiers de notre pays ?… Non, non, jamais ! » La rue est sale à cause de la fonte de la neige (une boue ocre, épaisse,
5726 … Non, non, jamais ! » La rue est sale à cause de la fonte de la neige (une boue ocre, épaisse, on envie les bottes que po
5727 jamais ! » La rue est sale à cause de la fonte de la neige (une boue ocre, épaisse, on envie les bottes que portent les fe
5728 nte de la neige (une boue ocre, épaisse, on envie les bottes que portent les femmes), encombrée de piétons qui traversent e
5729 ue ocre, épaisse, on envie les bottes que portent les femmes), encombrée de piétons qui traversent en tous sens, évitant vi
5730 ons qui traversent en tous sens, évitant vivement les trams qui sonnent avec frénésie et les petits taxis rouges qui déferl
5731 t vivement les trams qui sonnent avec frénésie et les petits taxis rouges qui déferlent sur les boulevards comme une nuée d
5732 ésie et les petits taxis rouges qui déferlent sur les boulevards comme une nuée d’insectes affolés. Les maisons sont basses
5733 les boulevards comme une nuée d’insectes affolés. Les maisons sont basses, couvertes du haut en bas d’affiches rouges et ja
5734 rouges et jaunes et d’inscriptions cascadantes, à l’ orientale (on pense au mot bazar, qui sonne rouge et jaune aussi). Sou
5735 unichoises. Puis un palais gothique 1880, qui est le Parlement. Et voici la trouée du Danube, Bude solidement amarrée à Pe
5736 ais gothique 1880, qui est le Parlement. Et voici la trouée du Danube, Bude solidement amarrée à Pest par quatre énormes p
5737 en hiver, viennent se briser avec un fracas sourd les îlots de glace qui descendent lentement le fleuve. Au cœur de Prophèt
5738 sourd les îlots de glace qui descendent lentement le fleuve. Au cœur de Prophète chauve s’élève la montagne de pierre de S
5739 ent le fleuve. Au cœur de Prophète chauve s’élève la montagne de pierre de St-Gellert. Elle tombe en hautes falaises dans
5740 de St-Gellert. Elle tombe en hautes falaises dans le Danube, froide et nue, mais dans son flanc une grotte s’illumine, et
5741 ue, mais dans son flanc une grotte s’illumine, et la Vierge y sourit. Le château royal avec son amiral régent et ses garde
5742 anc une grotte s’illumine, et la Vierge y sourit. Le château royal avec son amiral régent et ses gardes blancs aux casques
5743 des crémeries aux idylles démodées… Rentrons dans la ville un soir qu’elle s’amuse. Vous avez dîné au paprika chez des gen
5744 usion de liqueurs légères facilite singulièrement les rapports sociaux. On vous mène au Théâtre, vous n’y comprenez rien, m
5745 us mène au Théâtre, vous n’y comprenez rien, mais le charme des voix hongroises féminines suffit à votre bonheur et vous v
5746 iste. Vous vous êtes levé, comme tout le monde, à l’ entrée d’un des archiducs. Car ce peuple, seul en Europe, attend le re
5747 archiducs. Car ce peuple, seul en Europe, attend le retour d’un roi. Et vous voici transporté dans un bal costumé, parmi
5748 ient et s’enivrent comme plus un Européen ne sait le faire, et dansent à tout propos de folles « czardas » qui deviennent
5749 ussins Rothermere et Grande Hongrie… Ivresse dans le malheur, passion et pauvreté, espoirs presque puérils et nostalgie de
5750 cela compose un visage romantique et ardent dont le voyageur s’éprend malgré lui, malgré tout, comme d’une passion poétiq
92 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jules Supervielle, Saisir (juin 1929)
5751 faut s’en approcher avec une douceur patiente, et le laisser créer en nous son silence particulier avant d’entendre les si
5752 en nous son silence particulier avant d’entendre les signes qu’il nous propose. Une telle poésie n’offre aux sens que peu
5753 e quelques « motifs », objets usuels et usés, sur la nuance mate d’un paravent chinois). Ce qu’elle décrit, ce sont des pe
5754 s). Ce qu’elle décrit, ce sont des perceptions de l’ âme plus que de l’esprit ou des sens. « Reste immobile et sache attend
5755 rit, ce sont des perceptions de l’âme plus que de l’ esprit ou des sens. « Reste immobile et sache attendre que ton cœur se
5756 cœur se détache de toi comme une lourde pierre. » Le corps, que l’âme quitte, redevient minéral, statue dans le silence « 
5757 e de toi comme une lourde pierre. » Le corps, que l’ âme quitte, redevient minéral, statue dans le silence « aux yeux gelés
5758 que l’âme quitte, redevient minéral, statue dans le silence « aux yeux gelés de rêverie », il se confond avec l’ombre du
5759 « aux yeux gelés de rêverie », il se confond avec l’ ombre du monde. Et l’âme peut enfin « saisir » dans leur réalité les c
5760 êverie », il se confond avec l’ombre du monde. Et l’ âme peut enfin « saisir » dans leur réalité les choses dont elle s’est
5761 Et l’âme peut enfin « saisir » dans leur réalité les choses dont elle s’est dégagée et qu’elle voit dans une autre lumière
5762 t semblait vivre au fond d’un insistant regard. » Le poète des Gravitations est ici descendu plus profond en soi-même ; so
5763  ; et quel beau titre ! « Saisir » n’est-ce point l’ acte essentiel de la poésie ? Toute poésie véritable n’est-elle pas pr
5764 e ! « Saisir » n’est-ce point l’acte essentiel de la poésie ? Toute poésie véritable n’est-elle pas proprement « saisissan
5765 n’est-elle pas proprement « saisissante » ? Mais le plus émouvant, c’est ici l’approche d’un silence partout pressenti, q
5766  saisissante » ? Mais le plus émouvant, c’est ici l’ approche d’un silence partout pressenti, qui s’impose, qui apaise le v
5767 lence partout pressenti, qui s’impose, qui apaise le vain débat de notre esprit : « Car l’on pense beaucoup trop haut, et
5768 qui apaise le vain débat de notre esprit : « Car l’ on pense beaucoup trop haut, et cela fait un vacarme terrible. » ay.
93 1929, Articles divers (1924–1930). La tour de Hölderlin (15 juillet 1929)
5769 La tour de Hölderlin (15 juillet 1929)o « Je lui ai raconté qu’il hab
5770 e une chaumière au bord d’un ruisseau, qu’il dort les portes ouvertes, et pendant des heures récite des odes grecques au mu
5771 des heures récite des odes grecques au murmure de l’ eau ; la Princesse de Homburg lui a fait cadeau d’un piano dont il a c
5772 es récite des odes grecques au murmure de l’eau ; la Princesse de Homburg lui a fait cadeau d’un piano dont il a coupé les
5773 burg lui a fait cadeau d’un piano dont il a coupé les cordes, mais pas toutes, en sorte que plusieurs touches sonnent encor
5774 lettre sur Hölderlin : « Ce piano dont il a cassé les cordes, c’est vraiment l’image de son âme ; j’ai voulu attirer là-des
5775 piano dont il a cassé les cordes, c’est vraiment l’ image de son âme ; j’ai voulu attirer là-dessus l’attention du médecin
5776 l’image de son âme ; j’ai voulu attirer là-dessus l’ attention du médecin, mais il est plus difficile de se faire comprendr
5777 se faire comprendre par un sot que par un fou. » L’ hiver dernier, m’occupant assez longuement d’un des poètes auxquels no
5778 t d’un des poètes auxquels notre temps doit vouer l’ attention la plus grave — car il vécut dans ces marches de l’esprit hu
5779 oètes auxquels notre temps doit vouer l’attention la plus grave — car il vécut dans ces marches de l’esprit humain qui con
5780 la plus grave — car il vécut dans ces marches de l’ esprit humain qui confinent peut-être à l’Esprit et dont certains des
5781 ches de l’esprit humain qui confinent peut-être à l’ Esprit et dont certains des plus purs d’entre nous se préparent à tent
5782 des plus purs d’entre nous se préparent à tenter le climat, — j’avais rêvé sur ce passage de l’émouvante Bettina, rêvé sa
5783 enter le climat, — j’avais rêvé sur ce passage de l’ émouvante Bettina, rêvé sans doute assez profondément pour qu’aujourd’
5784 sans doute assez profondément pour qu’aujourd’hui le hasard qui m’amène à Tubingue ne soit pas seulement un hasard… Hier,
5785 ue ne soit pas seulement un hasard… Hier, c’était la Pentecôte. La fête de la plus haute poésie. Mais dans ce siècle, où t
5786 seulement un hasard… Hier, c’était la Pentecôte. La fête de la plus haute poésie. Mais dans ce siècle, où tant de voix l’
5787 un hasard… Hier, c’était la Pentecôte. La fête de la plus haute poésie. Mais dans ce siècle, où tant de voix l’appellent,
5788 aute poésie. Mais dans ce siècle, où tant de voix l’ appellent, combien sont dignes de s’attendre au don du langage sacré ?
5789 angue de feu qui s’est posée sur Hölderlin et qui l’ a consumé… Digne ? — Un adolescent au visage de jeune fille qui rimait
5790 age de jeune fille qui rimait sagement des odes à la liberté… Et voici dans sa vie cette double venue de l’amour et du cha
5791 berté… Et voici dans sa vie cette double venue de l’ amour et du chant prophétique, confondant leurs flammes. Dix années da
5792 étique, confondant leurs flammes. Dix années dans le Grand Jeu. Dix années où le génie tourmente cet être faible, humilié
5793 mmes. Dix années dans le Grand Jeu. Dix années où le génie tourmente cet être faible, humilié par le monde. L’amour s’éloi
5794 ù le génie tourmente cet être faible, humilié par le monde. L’amour s’éloigne le premier, quand Hölderlin doit quitter la
5795 tourmente cet être faible, humilié par le monde. L’ amour s’éloigne le premier, quand Hölderlin doit quitter la maison de
5796 ’éloigne le premier, quand Hölderlin doit quitter la maison de Madame Gontard12, déchirement à peine sensible dans son œuv
5797 dans son œuvre. Car ce poète n’est peut-être que le lieu de sa poésie, — d’une poésie, l’on dirait, qui ne connaît pas so
5798 ut-être que le lieu de sa poésie, — d’une poésie, l’ on dirait, qui ne connaît pas son auteur. Qui parle par sa bouche ? Il
5799 ses Hymnes une sérénité presque effrayante. Vient le temps où le sens de son monologue entre terre et ciel lui échappe. Il
5800 ne sérénité presque effrayante. Vient le temps où le sens de son monologue entre terre et ciel lui échappe. Il jette encor
5801 rappelle — Ou bien envoie — un héros — Ou bien — la sagesse. » Mais le feu s’éteint — l’esprit souffle où il veut. Juin 1
5802 envoie — un héros — Ou bien — la sagesse. » Mais le feu s’éteint — l’esprit souffle où il veut. Juin 1802 : au moment où
5803 — Ou bien — la sagesse. » Mais le feu s’éteint — l’ esprit souffle où il veut. Juin 1802 : au moment où meurt Diotima, Höl
5804 meurt Diotima, Hölderlin errant loin d’elle (dans la région de Bordeaux croit-on), est frappé d’insolation ; sa folie d’un
5805 on), est frappé d’insolation ; sa folie d’un coup l’ envahit. C’est une sorte de vieillard qui reparaît en Allemagne. Et du
5806 ente années, ce pauvre corps abandonné vivra dans la petite tour de Tubingue, chez un charpentier — vivra très doucement,
5807 plicablement, une vie monotone de vieux maniaque. Le buisson ardent quitté par le feu se dessèche. Ce qui fut Hölderlin si
5808 e de vieux maniaque. Le buisson ardent quitté par le feu se dessèche. Ce qui fut Hölderlin signe maintenant Scardanelli de
5809 s qu’il donne aux visiteurs venus pour contempler la victime d’un miracle. — C’était l’époque des amateurs de ruines. Je s
5810 our contempler la victime d’un miracle. — C’était l’ époque des amateurs de ruines. Je suis descendu au bord de l’eau, un p
5811 s amateurs de ruines. Je suis descendu au bord de l’ eau, un peu au-dessous de la maison, en attendant l’heure d’ouverture.
5812 s descendu au bord de l’eau, un peu au-dessous de la maison, en attendant l’heure d’ouverture. Il y a là une station de ca
5813 eau, un peu au-dessous de la maison, en attendant l’ heure d’ouverture. Il y a là une station de canots de louage où j’ai v
5814 tzsche » à fond plat. Des saules se penchent vers l’ eau lente. Sur l’autre rive qui est celle d’une longue île, des étudia
5815 iants au crâne rasé se promènent un roman jaune à la main. L’un après l’autre, dans cette paresse de jour férié, les cloch
5816 après l’autre, dans cette paresse de jour férié, les clochers de la ville sonnent deux heures. Allons. Un de ces corridors
5817 dans cette paresse de jour férié, les clochers de la ville sonnent deux heures. Allons. Un de ces corridors de vieille mai
5818 ’étaient à demi encombrés d’armoires. Un couloir, la chambre. L’homme qui me conduit est le propriétaire actuel. « Monsieu
5819 emi encombrés d’armoires. Un couloir, la chambre. L’ homme qui me conduit est le propriétaire actuel. « Monsieur connaît Hö
5820 n couloir, la chambre. L’homme qui me conduit est le propriétaire actuel. « Monsieur connaît Hölderlin ? — questionne-t-il
5821 , ici à Francfort, écrivait Bettina, car aussitôt l’ on se met à raconter les choses les plus affreuses sur son compte, sim
5822 vait Bettina, car aussitôt l’on se met à raconter les choses les plus affreuses sur son compte, simplement parce qu’il a ai
5823 a, car aussitôt l’on se met à raconter les choses les plus affreuses sur son compte, simplement parce qu’il a aimé une femm
5824 l a aimé une femme, pour écrire Hypérion, et pour les gens d’ici, aimer, c’est seulement vouloir se marier… » — Et puis plu
5825 uloir se marier… » — Et puis plus tard on encadre les lettres des amants, on propose le couple à l’admiration des écoliers
5826 ard on encadre les lettres des amants, on propose le couple à l’admiration des écoliers en promenade, et le guide désigne
5827 re les lettres des amants, on propose le couple à l’ admiration des écoliers en promenade, et le guide désigne familièremen
5828 uple à l’admiration des écoliers en promenade, et le guide désigne familièrement l’image d’une femme par le nom qu’elle po
5829 s en promenade, et le guide désigne familièrement l’ image d’une femme par le nom qu’elle portait au mystère de l’amour… Tr
5830 ide désigne familièrement l’image d’une femme par le nom qu’elle portait au mystère de l’amour… Trois petites fenêtres orn
5831 ne femme par le nom qu’elle portait au mystère de l’ amour… Trois petites fenêtres ornées de cactus miséreux, une pipe qui
5832 rnées de cactus miséreux, une pipe qui traîne sur l’ appui ; le jardinet avec son banc et ses lilas fleuris qui trempent… T
5833 actus miséreux, une pipe qui traîne sur l’appui ; le jardinet avec son banc et ses lilas fleuris qui trempent… Tout est fa
5834 armotter. Vingt-sept ans dans cette chambre, avec le bruit de l’eau et cette complainte de malade épuisé après un grand ac
5835 ngt-sept ans dans cette chambre, avec le bruit de l’ eau et cette complainte de malade épuisé après un grand accès de fièvr
5836 de malade épuisé après un grand accès de fièvre… L’ agrément de ce monde, je l’ai vécu. Les joies de la jeunesse, voilà
5837 rand accès de fièvre… L’agrément de ce monde, je l’ ai vécu. Les joies de la jeunesse, voilà si longtemps, si longtemp
5838 fièvre… L’agrément de ce monde, je l’ai vécu. Les joies de la jeunesse, voilà si longtemps, si longtemps qu’elles ont
5839 grément de ce monde, je l’ai vécu. Les joies de la jeunesse, voilà si longtemps, si longtemps qu’elles ont fui. Avri
5840 . Il y avait encore plus de paix que maintenant. La grande allée sur l’île n’existait pas, en face, ni les maisons. Il vo
5841 plus de paix que maintenant. La grande allée sur l’ île n’existait pas, en face, ni les maisons. Il voyait des prairies et
5842 rande allée sur l’île n’existait pas, en face, ni les maisons. Il voyait des prairies et des collines basses, de l’autre cô
5843 airies et des collines basses, de l’autre côté de l’ eau jaune et verte… Quel est donc ce sommeil « dans la nuit de la vie 
5844 u jaune et verte… Quel est donc ce sommeil « dans la nuit de la vie » — et cet aveu mystérieux : « La perfection n’a pas d
5845 verte… Quel est donc ce sommeil « dans la nuit de la vie » — et cet aveu mystérieux : « La perfection n’a pas de plainte »
5846 la nuit de la vie » — et cet aveu mystérieux : «  La perfection n’a pas de plainte »… Vivait-il encore ? Ce lieu soudain m
5847 vait-il encore ? Ce lieu soudain m’angoisse. Mais le gardien : il y est comme chez lui. — Dormez-vous dans ce lit ? — Oh !
5848 — Oh ! répond-il, je pourrais aussi bien habiter la chambre. Il ne vient pas tant de visiteurs, et seulement de 2 à 4… Un
5849 4… Une rue étouffée entre des maisons pointues et les contreforts de l’Église du Chapitre : je vois s’y engager chaque jour
5850 entre des maisons pointues et les contreforts de l’ Église du Chapitre : je vois s’y engager chaque jour le fou au profil
5851 ise du Chapitre : je vois s’y engager chaque jour le fou au profil de vieille femme qui promène doucement dans cette calme
5852 e qui promène doucement dans cette calme Tubingue le secret d’une épouvantable mélancolie. Les étudiants le rencontrent, q
5853 Tubingue le secret d’une épouvantable mélancolie. Les étudiants le rencontrent, qui montent au Séminaire protestant : il le
5854 cret d’une épouvantable mélancolie. Les étudiants le rencontrent, qui montent au Séminaire protestant : il leur fait de gr
5855 protestant : il leur fait de grandes révérences… La rumeur et le cliquetis d’une grande terrasse de café au bord du Necka
5856 il leur fait de grandes révérences… La rumeur et le cliquetis d’une grande terrasse de café au bord du Neckar, sous les m
5857 e grande terrasse de café au bord du Neckar, sous les marronniers. À quatre heures, l’orchestre s’est mis à jouer des ringu
5858 du Neckar, sous les marronniers. À quatre heures, l’ orchestre s’est mis à jouer des ringues charmantes, jazz et clarinette
5859 charmantes, jazz et clarinette, chansons de mai. Les bateaux qui dérivent dans le voisinage se rapprochent, tournoyent len
5860 e, chansons de mai. Les bateaux qui dérivent dans le voisinage se rapprochent, tournoyent lentement dans la musique. Je n’
5861 isinage se rapprochent, tournoyent lentement dans la musique. Je n’aime pas les jeunes Doktors à lunettes, en costume de b
5862 urnoyent lentement dans la musique. Je n’aime pas les jeunes Doktors à lunettes, en costume de bain, qui pagayent vigoureus
5863 en costume de bain, qui pagayent vigoureusement, les dents serrées. (« Weg zur Kraft und Schönheit ! »). J’aime les bateau
5864 rées. (« Weg zur Kraft und Schönheit ! »). J’aime les bateaux plats et incertains, avec des Daphnés dedans, qui ne savent p
5865 bien ramer et qui lisent des magazines au fil de l’ eau, ce qui est le comble des vacances. À une table voisine, des adole
5866 lisent des magazines au fil de l’eau, ce qui est le comble des vacances. À une table voisine, des adolescents balafrés fo
5867 ues à une compagnie de cavaliers qui passe devant la statue d’Eberhard le Barbu. Des bourgeois se rient contre par-dessus
5868 sus leurs chopes. « Gemütlichkeit ». Évidemment : la vie normale. Il y a pourtant cette petite chambre… Est-ce que tout ce
5869 petite chambre… Est-ce que tout cela existe dans le même monde ? (Il est bon de poser parfois de ces grandes questions na
5870 a ne peut que mal finir. Ceux du bon sens hochent la tête et citent la phrase la plus malencontreuse de Pascal : le « Qui
5871 finir. Ceux du bon sens hochent la tête et citent la phrase la plus malencontreuse de Pascal : le « Qui veut faire l’ange…
5872 x du bon sens hochent la tête et citent la phrase la plus malencontreuse de Pascal : le « Qui veut faire l’ange… » a autor
5873 tent la phrase la plus malencontreuse de Pascal : le « Qui veut faire l’ange… » a autorisé des générations de « bourgeois
5874 us malencontreuse de Pascal : le « Qui veut faire l’ ange… » a autorisé des générations de « bourgeois cultivés » à faire l
5875 des générations de « bourgeois cultivés » à faire la bête dès qu’il s’agit de l’âme. Dans la bouche de certains, cela pren
5876 is cultivés » à faire la bête dès qu’il s’agit de l’ âme. Dans la bouche de certains, cela prend l’air de je ne sais quelle
5877 » à faire la bête dès qu’il s’agit de l’âme. Dans la bouche de certains, cela prend l’air de je ne sais quelle revanche du
5878 dont ils se sentent bénéficiaires. Ah ! vraiment les malins ! qui ont préféré faire tout de suite la bête : comme cela on
5879 les malins ! qui ont préféré faire tout de suite la bête : comme cela on est mieux pour donner le coup de pied de l’âne…
5880 ite la bête : comme cela on est mieux pour donner le coup de pied de l’âne… Écoutons plutôt Bettina — la vérité est plus h
5881 cela on est mieux pour donner le coup de pied de l’ âne… Écoutons plutôt Bettina — la vérité est plus humaine, est plus di
5882 coup de pied de l’âne… Écoutons plutôt Bettina — la vérité est plus humaine, est plus divine, quand c’est une telle femme
5883 est plus divine, quand c’est une telle femme qui la confesse : « Celui qui entre en commerce trop étroit avec le ciel, le
5884  : « Celui qui entre en commerce trop étroit avec le ciel, les dieux le vouent au malheur. » Ô cette chambre, où pénètre l
5885 i qui entre en commerce trop étroit avec le ciel, les dieux le vouent au malheur. » Ô cette chambre, où pénètre la facilité
5886 e en commerce trop étroit avec le ciel, les dieux le vouent au malheur. » Ô cette chambre, où pénètre la facilité atroce d
5887 vouent au malheur. » Ô cette chambre, où pénètre la facilité atroce de cette fin d’après-midi, ces musiquettes et ces par
5888 , de ces mondes à mes yeux soudain simultanés ?… Le tragique de la facilité, c’est qu’elle n’est qu’un oubli. Et pourtant
5889 à mes yeux soudain simultanés ?… Le tragique de la facilité, c’est qu’elle n’est qu’un oubli. Et pourtant, comme elle pa
5890 blie, triomphante, à beau fixe. Pourquoi troubler le miroir innocent de ces eaux, ces âmes indulgentes à leur banalité ? E
5891 amais rien ? Ou bien, peut-être, seulement, quand l’ amour leur donne une petite fièvre, — cette semaine de leur jeunesse o
5892 choses généreuses autour d’eux… Cela s’oublie. Et l’ amour, tout justement, nous fait comprendre, dans le temps même qu’il
5893 amour, tout justement, nous fait comprendre, dans le temps même qu’il nous entr’ouvre le ciel, qu’il est bon qu’il y ait l
5894 prendre, dans le temps même qu’il nous entr’ouvre le ciel, qu’il est bon qu’il y ait le monde… Mais que cette musique vulg
5895 ous entr’ouvre le ciel, qu’il est bon qu’il y ait le monde… Mais que cette musique vulgaire, par quel hasard, donne l’acco
5896 ue cette musique vulgaire, par quel hasard, donne l’ accord qui m’ouvre un vrai silence : déjà je leur échappe — je t’échap
5897 , transitoire, allusif. Tout se remet à signifier l’ absence. 11. Bettina von Arnim-Brentano : Die Günderode. 12. Où il
5898 . 12. Où il était précepteur. Madame Gontard est la Diotima de l’Hypérion et des poèmes. o. Rougemont Denis de, « La to
5899 ypérion et des poèmes. o. Rougemont Denis de, «  La tour de Hölderlin », La Quinzaine artistique et littéraire, Neuchâtel
5900 o. Rougemont Denis de, « La tour de Hölderlin », La Quinzaine artistique et littéraire, Neuchâtel, 15 juillet 1929, p. 35
94 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Jean Cassou, La Clef des songes (août 1929)
5901 Jean Cassou, La Clef des songes (août 1929)az Après cet austère Pays qui n’est à p
5902 Après cet austère Pays qui n’est à personne paru l’ année dernière — un livre assez troublant et qu’on a trop peu remarqué
5903 evient à son romantisme, à notre cher romantisme. La Clef des songes est de nouveau une dérive fantaisiste dans ce monde u
5904 monde un peu plus léger, un peu plus profond que le vrai, où l’Éloge de la folie nous entraînait naguère. Jean Cassou vag
5905 u plus léger, un peu plus profond que le vrai, où l’ Éloge de la folie nous entraînait naguère. Jean Cassou vagabonde à tra
5906 r, un peu plus profond que le vrai, où l’Éloge de la folie nous entraînait naguère. Jean Cassou vagabonde à travers ses hi
5907 à travers ses histoires comme son Pierangelo dans la vie. Le hasard, complice des poètes, lui fait rencontrer des êtres bi
5908 s ses histoires comme son Pierangelo dans la vie. Le hasard, complice des poètes, lui fait rencontrer des êtres bizarres a
5909 s il n’hésite pas à faire un bout de chemin, Hans le gardeur d’oies, le gueux Joseph qui parle à son chien en mourant, une
5910 faire un bout de chemin, Hans le gardeur d’oies, le gueux Joseph qui parle à son chien en mourant, une fille qui chante e
5911 une fille qui chante et des enfants surtout, dès le début, puis plus tard encore, dans les songes des grandes personnes,
5912 urtout, dès le début, puis plus tard encore, dans les songes des grandes personnes, — puis tous se perdent, comme des souve
5913 , — puis tous se perdent, comme des souvenirs, et l’ on retrouve un peu plus loin d’autres souvenirs attristés par le temps
5914 un peu plus loin d’autres souvenirs attristés par le temps, des visages qui ne sont plus tout à fait les mêmes, des bonheu
5915 e temps, des visages qui ne sont plus tout à fait les mêmes, des bonheurs qui signifient plus de désespoir qu’ils ne s’en d
5916 pleurer. Quel dommage qu’il s’égare parfois dans les maisons des grands bourgeois, où tout, soudain, devient plus terne. M
5917 oésie nous replonge dans une atmosphère autre, où les personnages ont cet air un peu ivre et capable de n’importe quoi, cet
5918 te quoi, cet air dangereux et tendre que prennent les hommes en liberté. Mais ils ne sont jamais méchants, et seulement aux
5919 de liberté dont nous avons besoin pour croire que le monde actuel n’est pas un cas désespéré. Mais voici déjà dans l’œuvre
5920 n’est pas un cas désespéré. Mais voici déjà dans l’ œuvre de Jean Cassou, et singulièrement dans ce livre, beaucoup de ces
5921 rs assez de vérité dans une histoire où il y a de la poésie. az. Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Jean Cassou, La C
5922 Rougemont Denis de, « [Compte rendu] Jean Cassou, La Clef des songes  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genè
95 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). André Rolland de Renéville, Rimbaud le voyant (août 1929)
5923 André Rolland de Renéville, Rimbaud le voyant (août 1929)ba À lire ce petit livre et le parallèle qu’il é
5924 voyant (août 1929)ba À lire ce petit livre et le parallèle qu’il établit entre le yogabb telle que l’enseignaient les
5925 e petit livre et le parallèle qu’il établit entre le yogabb telle que l’enseignaient les upanishads et la tentative poétiq
5926 parallèle qu’il établit entre le yogabb telle que l’ enseignaient les upanishads et la tentative poétique de Rimbaud, l’on
5927 établit entre le yogabb telle que l’enseignaient les upanishads et la tentative poétique de Rimbaud, l’on s’étonne qu’il a
5928 yogabb telle que l’enseignaient les upanishads et la tentative poétique de Rimbaud, l’on s’étonne qu’il ait fallu plus d’u
5929 s upanishads et la tentative poétique de Rimbaud, l’ on s’étonne qu’il ait fallu plus d’un demi-siècle pour qu’une telle in
5930 demi-siècle pour qu’une telle interprétation voie le jour. Cela pourrait donner lieu à de mélancoliques réflexions sur le
5931 ait donner lieu à de mélancoliques réflexions sur le génie « poétique » français… Mais non, nous préférons voir ici l’un d
5932 gnes qui de toutes parts annoncent une rentrée de l’ âme dans la littérature la plus spirituelle du monde. La thèse que déf
5933 toutes parts annoncent une rentrée de l’âme dans la littérature la plus spirituelle du monde. La thèse que défend l’auteu
5934 nnoncent une rentrée de l’âme dans la littérature la plus spirituelle du monde. La thèse que défend l’auteur de cet essai
5935 dans la littérature la plus spirituelle du monde. La thèse que défend l’auteur de cet essai — la voyance de Rimbaud — est
5936 la plus spirituelle du monde. La thèse que défend l’ auteur de cet essai — la voyance de Rimbaud — est une de ces évidences
5937 onde. La thèse que défend l’auteur de cet essai — la voyance de Rimbaud — est une de ces évidences qu’il est bon de propos
5938 une de ces évidences qu’il est bon de proposer à la réflexion de notre temps, ne fût-ce que pour faite honte à ceux qui s
5939 telle honte, de leur indifférence à l’endroit de l’ être le plus monstrueusement pur qui se soit révélé par le truchement
5940 honte, de leur indifférence à l’endroit de l’être le plus monstrueusement pur qui se soit révélé par le truchement de la p
5941 e plus monstrueusement pur qui se soit révélé par le truchement de la poésie française. — Livre un peu didactique, trop at
5942 ement pur qui se soit révélé par le truchement de la poésie française. — Livre un peu didactique, trop attentif à sa propr
5943 s inspiré par cet enthousiasme sacré que requiert l’ œuvre de Rimbaud. Regrettons seulement qu’il n’élargisse pas plus une
5944 as plus une question aussi centrale — qui est, si l’ on veut, la question d’Orient-Occident. Et pourquoi cette hostilité de
5945 question aussi centrale — qui est, si l’on veut, la question d’Orient-Occident. Et pourquoi cette hostilité de sectaire c
5946 t. Et pourquoi cette hostilité de sectaire contre l’ interprétation proposée par Claudel et Isabelle Rimbaud ? Si Claudel s
5947 ontré partial en faisant de Rimbaud, « mystique à l’ état sauvage », un catholique qui s’ignore, il n’est pas plus admissib
5948 us admissible d’inférer du mépris de Rimbaud pour le catholicisme à son mépris pour la révélation évangélique. Je ne vois
5949 de Rimbaud pour le catholicisme à son mépris pour la révélation évangélique. Je ne vois là que l’indice d’une confusion bi
5950 pour la révélation évangélique. Je ne vois là que l’ indice d’une confusion bien française, hélas. ba. Rougemont Denis d
5951 Compte rendu] André Rolland de Renéville, Rimbaud le voyant  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, août
5952 ue de Genève, Genève, août 1929, p. 250-251. bb. Le féminin est ici conservé, conformément au texte original.
96 1929, Bibliothèque universelle et Revue de Genève, articles (1925–1930). Julien Benda, La Fin de l’Éternel (novembre 1929)
5953 Julien Benda, La Fin de l’Éternel (novembre 1929)bc Ce n’est plus l’heure de venir
5954 Julien Benda, La Fin de l’ Éternel (novembre 1929)bc Ce n’est plus l’heure de venir prendre po
5955 n de l’Éternel (novembre 1929)bc Ce n’est plus l’ heure de venir prendre position dans un débat où les voix les mieux éc
5956 ’heure de venir prendre position dans un débat où les voix les mieux écoutées ont dit ce qu’elles avaient à dire. Et d’autr
5957 venir prendre position dans un débat où les voix les mieux écoutées ont dit ce qu’elles avaient à dire. Et d’autre part, l
5958 dit ce qu’elles avaient à dire. Et d’autre part, les lecteurs de cette revue connaissent la thèse de la Trahison des Clerc
5959 tre part, les lecteurs de cette revue connaissent la thèse de la Trahison des Clercs 11, thèse dont la Fin de l’Éternel ne
5960 s lecteurs de cette revue connaissent la thèse de la Trahison des Clercs 11, thèse dont la Fin de l’Éternel ne fait que re
5961 la thèse de la Trahison des Clercs 11, thèse dont la Fin de l’Éternel ne fait que reprendre la défense contre ses adversai
5962 e la Trahison des Clercs 11, thèse dont la Fin de l’ Éternel ne fait que reprendre la défense contre ses adversaires de tou
5963 se dont la Fin de l’Éternel ne fait que reprendre la défense contre ses adversaires de tous bords. Je voudrais souligner s
5964 es de tous bords. Je voudrais souligner seulement la beauté de l’effort désintéressé de Julien Benda, et l’obligation où n
5965 rds. Je voudrais souligner seulement la beauté de l’ effort désintéressé de Julien Benda, et l’obligation où nous sommes to
5966 auté de l’effort désintéressé de Julien Benda, et l’ obligation où nous sommes tous désormais de répondre pour nous-mêmes à
5967 mise en demeure. Je suis loin de partager toutes les idées de M. Benda, sur le plan philosophique en particulier, où je me
5968 hèse de M. Marcel de ce qu’elle « mène loin… dans l’ ordre moral ». Et quand cela serait ! dirons-nous, — avec le Benda qui
5969 se de M. Marcel de ce qu’elle « mène loin… dans l’ ordre moral ». Et quand cela serait ! dirons-nous, — avec le Benda qui ne t
5970 ral ». Et quand cela serait ! dirons-nous, — avec le Benda qui ne trahit pas.) D’autre part, de plus impertinents que moi
5971 s que moi ne manqueront pas de faire observer que la « fin de l’éternel », la chute de l’idée dans la matière, est un phén
5972 manqueront pas de faire observer que la « fin de l’ éternel », la chute de l’idée dans la matière, est un phénomène exacte
5973 as de faire observer que la « fin de l’éternel », la chute de l’idée dans la matière, est un phénomène exactement aussi vi
5974 observer que la « fin de l’éternel », la chute de l’ idée dans la matière, est un phénomène exactement aussi vieux que le m
5975 la « fin de l’éternel », la chute de l’idée dans la matière, est un phénomène exactement aussi vieux que le monde. Mais M
5976 ière, est un phénomène exactement aussi vieux que le monde. Mais M. Benda distinguera, et ils seront confondus. Car il y a
5977 un sophiste en M. Benda, un polémiste qui joue de la raison ratiocinante tout comme si elle n’était pas le contraire de la
5978 aison ratiocinante tout comme si elle n’était pas le contraire de la Raison de Spinoza. Nul mieux que lui ne s’entend défi
5979 te tout comme si elle n’était pas le contraire de la Raison de Spinoza. Nul mieux que lui ne s’entend définir et classer c
5980 lui permettent de triompher syllogistiquement de l’ adversaire, sinon de la difficulté elle-même. Mais pour gênante que so
5981 mpher syllogistiquement de l’adversaire, sinon de la difficulté elle-même. Mais pour gênante que soit souvent son adresse
5982 dresse de logicien, elle ne doit pas nous masquer l’ audace tranquille et admirable de son point de vue radicalement antimo
5983 n pic trop élevé pour qu’on y puisse vivre, c’est l’ impossible. Mais justement, la gloire de M. Benda sera d’avoir soutenu
5984 puisse vivre, c’est l’impossible. Mais justement, la gloire de M. Benda sera d’avoir soutenu que l’humanité a besoin qu’on
5985 t, la gloire de M. Benda sera d’avoir soutenu que l’ humanité a besoin qu’on lui demande l’impossible. Et quand bien même e
5986 soutenu que l’humanité a besoin qu’on lui demande l’ impossible. Et quand bien même elle croirait n’en avoir plus besoin. C
5987 roirait n’en avoir plus besoin. Cet extrémisme de la pensée intemporelle, en butte aux sarcasmes des extrémistes de droite
5988 ît que plus pur. « Noms de clowns qui me viennent l’ esprit : Julien Benda… », écrit Aragon. Et Daudet nous apprend que « l
5989 da… », écrit Aragon. Et Daudet nous apprend que «  le petit Benda est un fameux serin ». Mais ces affirmations sont exactem
5990 a pas disputer à M. Benda, c’est son dur amour de la vérité tout court. Celle-là même qui paraît anarchique dans un monde
5991 i que relativement à un rendement. Rien, pas même la religion. 11. Cf. l’article de M. Daniel Halévy (décembre 1927) et
5992 rendement. Rien, pas même la religion. 11. Cf. l’ article de M. Daniel Halévy (décembre 1927) et la réponse de M. Benda
5993 l’article de M. Daniel Halévy (décembre 1927) et la réponse de M. Benda (janvier 1928). bc. Rougemont Denis de, « [Comp
5994 ougemont Denis de, « [Compte rendu] Julien Benda, La Fin de l’Éternel  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Gen
5995 enis de, « [Compte rendu] Julien Benda, La Fin de l’ Éternel  », Bibliothèque universelle et Revue de Genève, Genève, novem
97 1929, Revue de Belles-Lettres, articles (1926–1968). L’ordre social. Le Libéralisme. L’inspiration (novembre 1929)
5996 L’ ordre social. Le Libéralisme. L’inspiration (novembre 1929)ab L’o
5997 L’ ordre social. Le Libéralisme. L’inspiration (novembre 1929)ab L’ordre
5998 L’ordre social. Le Libéralisme. L’inspiration (novembre 1929)ab L’ordre social I
5999 L’ordre social. Le Libéralisme. L’ inspiration (novembre 1929)ab L’ordre social Il y avait une fo
6000 Libéralisme. L’inspiration (novembre 1929)ab L’ ordre social Il y avait une fois un jeune homme comme les autres. S
6001 béralisme. L’inspiration (novembre 1929)ab L’ ordre social Il y avait une fois un jeune homme comme les autres. Soudai
6002 ocial Il y avait une fois un jeune homme comme les autres. Soudain il lui pousse des ailes, une grande paire d’ailes. Al
6003 ait-on s’émerveiller ? Mais déjà Freud expliquait le monstre, les chaires le dénonçaient, et les précieuses trouvaient cel
6004 rveiller ? Mais déjà Freud expliquait le monstre, les chaires le dénonçaient, et les précieuses trouvaient cela d’un romant
6005 ais déjà Freud expliquait le monstre, les chaires le dénonçaient, et les précieuses trouvaient cela d’un romantisme ! ma c
6006 iquait le monstre, les chaires le dénonçaient, et les précieuses trouvaient cela d’un romantisme ! ma chère, d’un mauvais g
6007 antisme ! ma chère, d’un mauvais goût ! Cependant le jeune homme agitait ses ailes non sans une ingénue fierté. Mais au co
6008 e ingénue fierté. Mais au courant d’air s’enrhuma le grand-papa. On craignit de le perdre. — « Eh ! quoi, — vinrent lui di
6009 ant d’air s’enrhuma le grand-papa. On craignit de le perdre. — « Eh ! quoi, — vinrent lui dire ses amis, — l’orgueil t’ave
6010 re. — « Eh ! quoi, — vinrent lui dire ses amis, —  l’ orgueil t’aveugle-t-il ? Veux-tu conserver, ô cruel, des ailes qui don
6011 ur, ô pervers, ô disciple de Nietzsche ! » — Sous le poids de cette accusation, comment ne point céder : il fit couper ses
6012 ment ne point céder : il fit couper ses ailes. On le félicita de son retour à l’état normal, qui est pédestre. Mais à part
6013 couper ses ailes. On le félicita de son retour à l’ état normal, qui est pédestre. Mais à partir de ce jour, on lui fit se
6014 ’en a pas sera méprisé parce qu’il n’en a pas. Le libéralisme Seigneur ! clamaient-ils, combien complexes sont les p
6015 Seigneur ! clamaient-ils, combien complexes sont les problèmes que vous proposez à notre bonne volonté gémissante ! Dieu,
6016 r d’une solution fort simple qui d’ailleurs était la bonne, car le grand Remède, c’est un Simple. Des hurlements de rage n
6017 on fort simple qui d’ailleurs était la bonne, car le grand Remède, c’est un Simple. Des hurlements de rage ne tardèrent po
6018 ge ne tardèrent point à s’élever de toutes parts. Les uns défendaient la Démocratie outragée, les autres disaient qu’il n’y
6019 t à s’élever de toutes parts. Les uns défendaient la Démocratie outragée, les autres disaient qu’il n’y a plus de morale,
6020 arts. Les uns défendaient la Démocratie outragée, les autres disaient qu’il n’y a plus de morale, et ces jeunes gens ont un
6021 ale, et ces jeunes gens ont une façon de trancher les questions qui vous désarme. Craignant qu’on ne lui fît un mauvais par
6022 rme. Craignant qu’on ne lui fît un mauvais parti, l’ ange trouva son salut dans un subterfuge : il insinua qu’il parlait au
6023 il parlait au nom d’une secte orientale. Aussitôt la discussion de reprendre, et l’on parla défense de l’Occident. L’ange
6024 rientale. Aussitôt la discussion de reprendre, et l’ on parla défense de l’Occident. L’ange s’enfuit par l’un des nombreux
6025 discussion de reprendre, et l’on parla défense de l’ Occident. L’ange s’enfuit par l’un des nombreux trous de leurs raisonn
6026 e reprendre, et l’on parla défense de l’Occident. L’ ange s’enfuit par l’un des nombreux trous de leurs raisonnements. L
6027 ’un des nombreux trous de leurs raisonnements. L’ inspiration Comme le poète terminait sa théorie sur la nature de l’
6028 de leurs raisonnements. L’inspiration Comme le poète terminait sa théorie sur la nature de l’inspiration, un doute l
6029 ration Comme le poète terminait sa théorie sur la nature de l’inspiration, un doute lui vint. Il alla au cinéma. On don
6030 me le poète terminait sa théorie sur la nature de l’ inspiration, un doute lui vint. Il alla au cinéma. On donnait un film
6031 au cinéma. On donnait un film voluptueux. Il aima l’ héroïne, mais sans espoir. Il lui écrivit, en sortant de là, dans une
6032 tant de là, dans une crèmerie pleine de couples à la mode. Mais en écrivant il pensait à une femme blonde assise près de l
6033 près de lui. Ayant demandé un timbre pour attirer l’ attention de la femme blonde — sans résultat —, il écrivit une adresse
6034 ant demandé un timbre pour attirer l’attention de la femme blonde — sans résultat —, il écrivit une adresse réelle, et mit
6035 résultat —, il écrivit une adresse réelle, et mit la lettre dans la première boîte venue. Le lendemain, il reçut une répon
6036 e, et mit la lettre dans la première boîte venue. Le lendemain, il reçut une réponse : « Vous avez commis une erreur, cher
6037 ma bénédiction, je suis votre amie Joséphine. » — Le poète reprit son manuscrit et conclut : « L’inspiration est le nom qu
6038  » — Le poète reprit son manuscrit et conclut : «  L’ inspiration est le nom qu’on donne en poésie à une suite de malentendu
6039 it son manuscrit et conclut : « L’inspiration est le nom qu’on donne en poésie à une suite de malentendus heureusement enc
6040 lui valut une Muse. ab. Rougemont Denis de, «  L’ ordre social. Le Libéralisme. L’inspiration », Revue de Belles-Lettres
6041 i valut une Muse. ab. Rougemont Denis de, « L’ ordre social. Le Libéralisme. L’inspiration », Revue de Belles-Lettres, Lau
6042 se. ab. Rougemont Denis de, « L’ordre social. Le Libéralisme. L’inspiration », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuch
6043 emont Denis de, « L’ordre social. Le Libéralisme. L’ inspiration », Revue de Belles-Lettres, Lausanne-Neuchâtel-Genève-Frib
98 1929, Les Méfaits de l’instruction publique (1972). Avant-propos
6044 Avant-propos Le dire une bonne fois.   Il ne faut pas songer à décrire en 50 petites
6045 aut pas songer à décrire en 50 petites pages tous les méfaits de l’instruction publique. C’est à peine assez pour indiquer
6046 à décrire en 50 petites pages tous les méfaits de l’ instruction publique. C’est à peine assez pour indiquer leur ordre de
6047 publique. C’est à peine assez pour indiquer leur ordre de grandeur ; à quoi je me bornerai. Il a paru sur le sujet de l’inst
6048 e grandeur ; à quoi je me bornerai. Il a paru sur le sujet de l’instruction publique deux petits livres1 excellents dont j
6049 à quoi je me bornerai. Il a paru sur le sujet de l’ instruction publique deux petits livres1 excellents dont je considère
6050 deux petits livres1 excellents dont je considère les thèses comme acquises : L’Éloge de l’ignorance, de M. Abel Bonnard, e
6051 nts dont je considère les thèses comme acquises : L’ Éloge de l’ignorance, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas l
6052 considère les thèses comme acquises : L’Éloge de l’ ignorance, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas les enfants,
6053  : L’Éloge de l’ignorance, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas les enfants, d’Henri Roorda. Le premier montre q
6054 e, de M. Abel Bonnard, et Le Pédagogue n’aime pas les enfants, d’Henri Roorda. Le premier montre que la science apprise à l
6055 es enfants, d’Henri Roorda. Le premier montre que la science apprise à l’école appauvrit l’homme de tout ce que son ignora
6056 oorda. Le premier montre que la science apprise à l’ école appauvrit l’homme de tout ce que son ignorance respectait, et ne
6057 montre que la science apprise à l’école appauvrit l’ homme de tout ce que son ignorance respectait, et ne lui donne à la pl
6058 e que son ignorance respectait, et ne lui donne à la place que des laideurs et de la prétention. L’autre, avec l’ironie tr
6059 et ne lui donne à la place que des laideurs et de la prétention. L’autre, avec l’ironie tranquille du bon sens bafoué et q
6060 e des laideurs et de la prétention. L’autre, avec l’ ironie tranquille du bon sens bafoué et qui s’en moque, décrit la stup
6061 ille du bon sens bafoué et qui s’en moque, décrit la stupidité de l’enseignement tel qu’il est pratiqué dans nos collèges.
6062 bafoué et qui s’en moque, décrit la stupidité de l’ enseignement tel qu’il est pratiqué dans nos collèges. Mon dessein est
6063 e réaction de tempérament. Je marque d’autre part la nécessité de tout cela qui me blesse, la liaison fatale avec la démoc
6064 tre part la nécessité de tout cela qui me blesse, la liaison fatale avec la démocratie, de tout ce qui moleste ma liberté
6065 e tout cela qui me blesse, la liaison fatale avec la démocratie, de tout ce qui moleste ma liberté et sans doute celle de
6066 cialiste, qui a été établi par coup de force, que les libéraux ont admis, conformément à leurs maximes, et toléré malgré le
6067 humeur. Ce régime de punaises jaunâtres aboutit à l’ instruction publique et grâce à elle prolonge abusivement sa terne exi
6068 elle prolonge abusivement sa terne existence. Je l’ ai subi ; l’on va voir comment. De pareils souvenirs légitiment toutes
6069 ge abusivement sa terne existence. Je l’ai subi ; l’ on va voir comment. De pareils souvenirs légitiment toutes les haines.
6070 r comment. De pareils souvenirs légitiment toutes les haines. Je serai méchant, parce que j’en ai gros sur le cœur. D’aille
6071 nes. Je serai méchant, parce que j’en ai gros sur le cœur. D’ailleurs, ce petit écrit ne peut servir à rien. — Alors ? — J
6072 apper : celui de naïveté. Définition du naïf dans le monde moderne : individu qui soutient des idées qui ne rapportent rie
6073 r au nom de ma génération, ne m’étant pas livré à l’ enquête préalable qui seule eût pu, à la rigueur, me donner ce droit b
6074 s livré à l’enquête préalable qui seule eût pu, à la rigueur, me donner ce droit bien inutile. Pourtant je sais qu’à droit
6075 e comme à gauche, ils sont plus nombreux qu’on ne le pense, ceux qui refusent d’être complices dans cet attentat à l’intég
6076 qui refusent d’être complices dans cet attentat à l’ intégrité humaine qu’est en fait l’esprit démocratique. Là-dessus, ces
6077 cet attentat à l’intégrité humaine qu’est en fait l’ esprit démocratique. Là-dessus, ces messieurs se lamentent, la jeuness
6078 ocratique. Là-dessus, ces messieurs se lamentent, la jeunesse d’aujourd’hui, etc. Évidemment. Mais il y a les jérémiades e
6079 nesse d’aujourd’hui, etc. Évidemment. Mais il y a les jérémiades et il y a les raisons. Hors le domaine de l’amour, où tout
6080 Évidemment. Mais il y a les jérémiades et il y a les raisons. Hors le domaine de l’amour, où tout se confond miraculeuseme
6081 il y a les jérémiades et il y a les raisons. Hors le domaine de l’amour, où tout se confond miraculeusement, gémir n’est p
6082 émiades et il y a les raisons. Hors le domaine de l’ amour, où tout se confond miraculeusement, gémir n’est pas un argument
6083 eusement, gémir n’est pas un argument. Je demande le droit de démolir. Et me l’accorde aussitôt. Sans conditions. Mon rôle
6084 n argument. Je demande le droit de démolir. Et me l’ accorde aussitôt. Sans conditions. Mon rôle n’est pas de proposer une
6085 de vitupérer ce que je vois, qui est laid. Quand la soupe est brûlée, on la renvoie, même si l’on n’est pas capable d’en
6086 vois, qui est laid. Quand la soupe est brûlée, on la renvoie, même si l’on n’est pas capable d’en faire soi-même une meill
6087 Quand la soupe est brûlée, on la renvoie, même si l’ on n’est pas capable d’en faire soi-même une meilleure. Mais j’aperçoi
6088 Mais j’aperçois là-bas, vautré derrière son bock, le Citoyen conscient et organisé pour la discussion. Il retrousse ses ma
6089 e son bock, le Citoyen conscient et organisé pour la discussion. Il retrousse ses manches. Il s’apprête à cracher sur ce q
6090 Oh ! oh ! oh ! il va parler, de grâce mettez-lui les mains sur la bouche ! Donnez-lui sa choucroute, tapez-lui dans le dos
6091 ! il va parler, de grâce mettez-lui les mains sur la bouche ! Donnez-lui sa choucroute, tapez-lui dans le dos, amenez-lui
6092 bouche ! Donnez-lui sa choucroute, tapez-lui dans le dos, amenez-lui le Guguss 2, des bretzels, sa petite amie, au secours
6093 sa choucroute, tapez-lui dans le dos, amenez-lui le Guguss 2, des bretzels, sa petite amie, au secours ! Car j’ai encore
6094 ire. Dès qu’une voix s’élève pour mettre en doute l’ excellence du principe de l’instruction publique, on crie sur tous les
6095 pour mettre en doute l’excellence du principe de l’ instruction publique, on crie sur tous les bancs : « Alors, vous êtes
6096 ncipe de l’instruction publique, on crie sur tous les bancs : « Alors, vous êtes pour un retour à la barbarie ? » Si ce réf
6097 s les bancs : « Alors, vous êtes pour un retour à la barbarie ? » Si ce réflexe indique un mépris vraiment exagéré pour la
6098 e réflexe indique un mépris vraiment exagéré pour la jugeotte de l’adversaire ou s’il traduit simplement cette mauvaise fo
6099 ue un mépris vraiment exagéré pour la jugeotte de l’ adversaire ou s’il traduit simplement cette mauvaise foi pas même cons
6100 ise foi pas même consciente, cette lâcheté devant la discussion précise de leurs principes par quoi se signalent bien souv
6101 à cent « réponses » de cette sorte. Et je tiens à les classer par avance en deux catégories dont je vais régler le compte s
6102 par avance en deux catégories dont je vais régler le compte sommairement. Cela n’empêchera personne de me resservir ces ar
6103 A. Réponses du type : on ne peut pas aller contre l’ époque, vous êtes un pauvre utopiste, etc. Ce sont les positivistes qu
6104 poque, vous êtes un pauvre utopiste, etc. Ce sont les positivistes qui parlent ainsi, ceux qui croient aux faits. Je leur r
6105 Je leur réponds : 1° qu’ils ne peuvent me dénier le droit de juger ces faits ; 2° qu’ils ne peuvent, en vertu même de leu
6106 euvent, en vertu même de leur scepticisme quant à la valeur réformatrice des idées, m’accuser de faire une critique danger
6107 critique dangereuse ; 3° que néanmoins je crois à l’ efficace de certaines utopies. (Les religions, la découverte de l’Amér
6108 oins je crois à l’efficace de certaines utopies. ( Les religions, la découverte de l’Amérique par Christophe Colomb, l’Europ
6109 l’efficace de certaines utopies. (Les religions, la découverte de l’Amérique par Christophe Colomb, l’Europe napoléonienn
6110 rtaines utopies. (Les religions, la découverte de l’ Amérique par Christophe Colomb, l’Europe napoléonienne, la Russie d’ap
6111 a découverte de l’Amérique par Christophe Colomb, l’ Europe napoléonienne, la Russie d’après Karl Marx, le vol des frères W
6112 ue par Christophe Colomb, l’Europe napoléonienne, la Russie d’après Karl Marx, le vol des frères Wright, et tout bêtement,
6113 urope napoléonienne, la Russie d’après Karl Marx, le vol des frères Wright, et tout bêtement, c’est le cas de le dire : l’
6114 le vol des frères Wright, et tout bêtement, c’est le cas de le dire : l’instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d
6115 frères Wright, et tout bêtement, c’est le cas de le dire : l’instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d’aller con
6116 ight, et tout bêtement, c’est le cas de le dire : l’ instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d’aller contre l’époq
6117 dire : l’instruction publique.) Résumé : 1° On a le droit d’aller contre l’époque, et on le peut efficacement. 2° rira bi
6118 blique.) Résumé : 1° On a le droit d’aller contre l’ époque, et on le peut efficacement. 2° rira bien qui rira le dernier.
6119 : 1° On a le droit d’aller contre l’époque, et on le peut efficacement. 2° rira bien qui rira le dernier. B. Réponses du
6120 rétrograde, un infâme réactionnaire, etc. Ce sont les partisans d’une démocratie progressiste et tolérante qui se livrent à
6121 lérante qui se livrent à ces excès de langage. Je les renvoie en corps au chapitre 5 où je traiterai de cet aspect du probl
6122 e 5 où je traiterai de cet aspect du problème que l’ on peut appeler la question de droit. Certains, en effet, tirent toute
6123 i de cet aspect du problème que l’on peut appeler la question de droit. Certains, en effet, tirent toute leur force dans l
6124 Certains, en effet, tirent toute leur force dans les discussions de la tranquillité avec laquelle ils brouillent les faits
6125 , tirent toute leur force dans les discussions de la tranquillité avec laquelle ils brouillent les faits et les principes.
6126 s de la tranquillité avec laquelle ils brouillent les faits et les principes. Tourmentés par les scrupules de leur conscien
6127 uillité avec laquelle ils brouillent les faits et les principes. Tourmentés par les scrupules de leur conscience libérale,
6128 illent les faits et les principes. Tourmentés par les scrupules de leur conscience libérale, ils fuient la rigueur jusque d
6129 scrupules de leur conscience libérale, ils fuient la rigueur jusque dans leurs raisonnements. Pour moi qui cherche à démêl
6130 urs raisonnements. Pour moi qui cherche à démêler la vérité sans égards aux dérangements, même violents, que cela ne manqu
6131 jamais de provoquer, je me propose de marquer ici la distinction classique du fait et du droit ; et c’est pourquoi je cons
6132 droit ; et c’est pourquoi je considérerai d’abord l’ instruction publique dans ses réalisations actuelles, puis au terme de
6133 d’outrages au bon sens peuvent être légitimés par le but final de notre institution-tabou.   1. Je ne puis naturellement
6134 1. Je ne puis naturellement pas mentionner tous les ouvrages scientifiques. Les meilleurs sortent de l’Institut Rousseau.
6135 t pas mentionner tous les ouvrages scientifiques. Les meilleurs sortent de l’Institut Rousseau. 2. Guguss, journal comiqu
6136 ouvrages scientifiques. Les meilleurs sortent de l’ Institut Rousseau. 2. Guguss, journal comique d’une grande vulgarité
6137 l comique d’une grande vulgarité qui jouait alors le rôle de nos bandes dessinées.
99 1929, Les Méfaits de l’instruction publique (1972). 1. Mes prisons
6138 ssent sur leurs souvenirs de classe. C’est qu’ils les confondent avec ceux de leur enfance et les font indûment participer
6139 u’ils les confondent avec ceux de leur enfance et les font indûment participer de la même grâce. Voyez Péguy, quand il essa
6140 e leur enfance et les font indûment participer de la même grâce. Voyez Péguy, quand il essaie de nous faire croire qu’ « i
6141 s faire croire qu’ « il n’y a rien au-dessus » de la tâche des instituteurs : Faire de ces belles analyses logiques, et g
6142 ithmétique où il fallait si soigneusement séparer les calculs du raisonnement, par une barre verticale, et où il y avait to
6143 t pour emplir ou pour vider un bassin (et souvent les deux), (pour emplir et vider ensemble), (drôle d’occupation), (après
6144 urs des appartements à meubler. Et on multipliait le tapissier par le prix du mètre courant. Encore que je prenne les sen
6145 nts à meubler. Et on multipliait le tapissier par le prix du mètre courant. Encore que je prenne les sentiments trop au s
6146 r le prix du mètre courant. Encore que je prenne les sentiments trop au sérieux pour faire ici du sentiment, je suis sensi
6147 sie. Mais ce qui fait très bien dans un Cahier de la quinzaine, ça faisait de mauvaises notes dans nos carnets hebdomadair
6148 journée d’enfant gâtée. Et d’ailleurs, multiplier le tapissier par le prix du mètre courant n’est pas une fantaisie pour c
6149 gâtée. Et d’ailleurs, multiplier le tapissier par le prix du mètre courant n’est pas une fantaisie pour ce petit être qui
6150 e pour ce petit être qui s’énerve, qui embrouille les règles, qui a sommeil, qui a peur de faire faux, parce que les autres
6151 ui a sommeil, qui a peur de faire faux, parce que les autres auront fait juste, et qui voudrait bien pleurer, et qui recomm
6152 rdoise où sèchent des traînées de craie grise, où les chiffres trop gros s’emmêlent… Et c’est cela l’enfance insouciante ?
6153 les chiffres trop gros s’emmêlent… Et c’est cela l’ enfance insouciante ? Qu’est-ce qui ressemble plus au souci quotidien
6154 s au souci quotidien des grandes personnes ? Mais l’ enfance est ailleurs. Je revois ce fond de jardin où l’on trouve des c
6155 ance est ailleurs. Je revois ce fond de jardin où l’ on trouve des cloportes dans la toile mouillée d’une tente d’Indiens,
6156 fond de jardin où l’on trouve des cloportes dans la toile mouillée d’une tente d’Indiens, des petites guerres mystérieuse
6157 , des matins de dimanche sonores et tout propres, la cuiller d’huile de foie de morue avant le repas, et le monsieur qui r
6158 ropres, la cuiller d’huile de foie de morue avant le repas, et le monsieur qui racontait gravement des choses qu’on ne com
6159 iller d’huile de foie de morue avant le repas, et le monsieur qui racontait gravement des choses qu’on ne comprend pas, la
6160 ntait gravement des choses qu’on ne comprend pas, la prière du soir pour qu’il fasse beau demain, Michel Strogoff et Rémy
6161 main, Michel Strogoff et Rémy un fils de vaincus, les tours de carrousel, les chemins dans la forêt en automne, des jeux, d
6162 Rémy un fils de vaincus, les tours de carrousel, les chemins dans la forêt en automne, des jeux, des feuillages, des rêver
6163 vaincus, les tours de carrousel, les chemins dans la forêt en automne, des jeux, des feuillages, des rêveries, des recoins
6164 peu divine, baignée d’une très vague angoisse que l’ on fuyait avec des bonheurs fous dans les bras maternels, ou bien dans
6165 oisse que l’on fuyait avec des bonheurs fous dans les bras maternels, ou bien dans ces promenades en tenant la forte main d
6166 maternels, ou bien dans ces promenades en tenant la forte main du père qui fait de longs pas réguliers… L’École, dans ce
6167 rte main du père qui fait de longs pas réguliers… L’ École, dans ce concert de souvenirs, n’est qu’une dissonance douloureu
6168 loureuse. 3 Deux angoisses dominent mon enfance : les séances chez le dentiste et l’horaire des leçons. Ce malaise inavouab
6169 angoisses dominent mon enfance : les séances chez le dentiste et l’horaire des leçons. Ce malaise inavouable, cette règle
6170 ent mon enfance : les séances chez le dentiste et l’ horaire des leçons. Ce malaise inavouable, cette règle méchante, ce so
6171 is appris à lire, en cachette avec ma sœur aînée. L’ année suivante, on me mit à l’école, parce que c’est la loi. La premiè
6172 avec ma sœur aînée. L’année suivante, on me mit à l’ école, parce que c’est la loi. La première classe fut agréable : j’ali
6173 ée suivante, on me mit à l’école, parce que c’est la loi. La première classe fut agréable : j’alignais des bâtons en rêvan
6174 e pensais pas devoir suivre syllabe après syllabe les ânonnements des élèves qui déchiffraient les premières phrases exempl
6175 hrases exemplaires. (J’aimais pourtant Zoé lave à la fontaine, à cause du nom.) Quand venait mon tour, je savais rarement
6176 om.) Quand venait mon tour, je savais rarement où l’ on en était. Cela m’attira des reproches acides, et naturellement, la
6177 m’attira des reproches acides, et naturellement, la phrase sacrée : « Il faut que tous fassent la même chose ici ! » Dans
6178 nt, la phrase sacrée : « Il faut que tous fassent la même chose ici ! » Dans la suite, on se chargea d’illustrer par d’inn
6179 faut que tous fassent la même chose ici ! » Dans la suite, on se chargea d’illustrer par d’innombrables exemples cet axio
6180 par d’innombrables exemples cet axiome qui devint la formule de mes premières douleurs morales. Après six ans de ce régime
6181 rentrée, ma colère n’en fut que plus malfaisante. L’ école me rendit au monde, vers l’âge de 18 ans, crispé et méfiant, san
6182 lus malfaisante. L’école me rendit au monde, vers l’ âge de 18 ans, crispé et méfiant, sans cesse en garde contre moi-même
6183 ait pas différer, profondément hypocrite donc, et le cerveau saturé d’évidences du type 2 et 2 font 4, ou : tous les homme
6184 turé d’évidences du type 2 et 2 font 4, ou : tous les hommes doivent être égaux en tout. Deux fois deux quatre, c’est stéri
6185 s de citer, je découvris un jour qu’elle contient la cause déterminante de notre malaise. Il me fallut un certain temps po
6186 e je me posais la question : est-ce vrai que tous les hommes doivent être égaux en tout ? Et la première réponse fut : Il f
6187 réponse fut : Il faut que ce soit vrai, pour que la démocratie prospère et étende ses conquêtes. C’était découvrir notre
6188 dignations de nos maîtres quand ils dénonçaient «  la marque indélébile de l’éducation jésuite ». Nous étions marqués par N
6189 s quand ils dénonçaient « la marque indélébile de l’ éducation jésuite ». Nous étions marqués par Numa Droz, par l’esprit p
6190 jésuite ». Nous étions marqués par Numa Droz, par l’ esprit petit-bourgeois, qui est une généralisation de l’avarice, et pa
6191 it petit-bourgeois, qui est une généralisation de l’ avarice, et par les dogmes démocratiques, qui sont une généralisation
6192 , qui est une généralisation de l’avarice, et par les dogmes démocratiques, qui sont une généralisation de la règle de troi
6193 mes démocratiques, qui sont une généralisation de la règle de trois, aussi profondément certes qu’un Voltaire le fut par l
6194 e trois, aussi profondément certes qu’un Voltaire le fut par les jésuites : du moins ceux-ci lui laissèrent-ils assez de v
6195 ssi profondément certes qu’un Voltaire le fut par les jésuites : du moins ceux-ci lui laissèrent-ils assez de verdeur d’esp
6196 pire. Mais on avait brisé en nous ces ressorts de la révolte et de la libération d’une personnalité : l’imagination, le se
6197 it brisé en nous ces ressorts de la révolte et de la libération d’une personnalité : l’imagination, le sens de l’arbitrair
6198 révolte et de la libération d’une personnalité : l’ imagination, le sens de l’arbitraire et le sens de la relativité des d
6199 la libération d’une personnalité : l’imagination, le sens de l’arbitraire et le sens de la relativité des décrets humains.
6200 on d’une personnalité : l’imagination, le sens de l’ arbitraire et le sens de la relativité des décrets humains. Le prix de
6201 alité : l’imagination, le sens de l’arbitraire et le sens de la relativité des décrets humains. Le prix de mes souffrances
6202 magination, le sens de l’arbitraire et le sens de la relativité des décrets humains. Le prix de mes souffrances était donc
6203 et le sens de la relativité des décrets humains. Le prix de mes souffrances était donc ce conformisme indispensable aux «
6204 principes ». Je n’allai pas tout de suite jusqu’à les mettre en doute : mais un jour je compris que ce n’étaient que des pr
6205 les d’une arithmétique élémentaire, ce monde dont la Démocratie apparaissait comme l’achèvement idéal et nécessaire — et q
6206 e, ce monde dont la Démocratie apparaissait comme l’ achèvement idéal et nécessaire — et qui était le seul pour lequel on n
6207 e l’achèvement idéal et nécessaire — et qui était le seul pour lequel on nous préparait — c’était un système d’abstraction
6208 tait un système d’abstractions primaires, c’était le rêve raisonnablement organisé des esprits moyens, prosaïques et rassi
6209 ns, prosaïques et rassis qui tiennent aujourd’hui les charges de l’État, piliers d’un régime dont ils sont les seuls à s’ac
6210 et rassis qui tiennent aujourd’hui les charges de l’ État, piliers d’un régime dont ils sont les seuls à s’accommoder parce
6211 rges de l’État, piliers d’un régime dont ils sont les seuls à s’accommoder parce qu’ils l’ont établi à la mesure exacte de
6212 nt ils sont les seuls à s’accommoder parce qu’ils l’ ont établi à la mesure exacte de leurs besoins. Nous ne croyions plus
6213 seuls à s’accommoder parce qu’ils l’ont établi à la mesure exacte de leurs besoins. Nous ne croyions plus aux démons, mai
6214 besoins. Nous ne croyions plus aux démons, mais à la Commission scolaire. Nous n’avions plus de « superstitions grossières
6215 stitions grossières » comme celles qui touchent à l’ action des étoiles par exemple. Mais nous avions acquis le respect des
6216 des étoiles par exemple. Mais nous avions acquis le respect des statistiques. Nous savions que les miracles ne trompent q
6217 uis le respect des statistiques. Nous savions que les miracles ne trompent que les illettrés, mais qu’il convient de s’incl
6218 es. Nous savions que les miracles ne trompent que les illettrés, mais qu’il convient de s’incliner devant les miracles de l
6219 lettrés, mais qu’il convient de s’incliner devant les miracles de la science appliquée. On nous faisait voir tout au long d
6220 ’il convient de s’incliner devant les miracles de la science appliquée. On nous faisait voir tout au long de notre histoir
6221 nous faisait voir tout au long de notre histoire le Progrès constant de l’humanité vers les lumières, l’incrédulité et le
6222 au long de notre histoire le Progrès constant de l’ humanité vers les lumières, l’incrédulité et le bien-être matériel. No
6223 e histoire le Progrès constant de l’humanité vers les lumières, l’incrédulité et le bien-être matériel. Nous savions qu’un
6224 Progrès constant de l’humanité vers les lumières, l’ incrédulité et le bien-être matériel. Nous savions qu’un fils d’ouvrie
6225 de l’humanité vers les lumières, l’incrédulité et le bien-être matériel. Nous savions qu’un fils d’ouvrier est l’égal d’un
6226 e matériel. Nous savions qu’un fils d’ouvrier est l’ égal d’un petit Dauphin — et même nous ne pouvions nous empêcher de cr
6227 même nous ne pouvions nous empêcher de croire que le petit ouvrier est bien plus malin. Nous savions un tas de choses doul
6228 e choses douloureusement ennuyeuses qui sont dans les livres — et nulle part ailleurs. Nous arrivions dans la vie avec des
6229 res — et nulle part ailleurs. Nous arrivions dans la vie avec des mentions honorables et une inconcevable gaucherie, c’est
6230 et une honte secrète qui exaspérait ce mépris et le rendait agressif. Mais moi, j’avais trop souffert de cette compressio
6231 riellement délivré, en supporter longtemps encore l’ action. Je n’eus pas plus tôt découvert et nommé cet asservissement de
6232 plus tôt découvert et nommé cet asservissement de l’ esprit et ces mythes stériles, que je les rendis responsables de ma pe
6233 sement de l’esprit et ces mythes stériles, que je les rendis responsables de ma perte de contact avec les réalités les plus
6234 s rendis responsables de ma perte de contact avec les réalités les plus élémentaires de la vie.   3. Dans le cas le plus
6235 onsables de ma perte de contact avec les réalités les plus élémentaires de la vie.   3. Dans le cas le plus favorable, c’
6236 ontact avec les réalités les plus élémentaires de la vie.   3. Dans le cas le plus favorable, c’est un silence, un vide.
6237 ités les plus élémentaires de la vie.   3. Dans le cas le plus favorable, c’est un silence, un vide. C’était en dehors d
6238 s plus élémentaires de la vie.   3. Dans le cas le plus favorable, c’est un silence, un vide. C’était en dehors de la vi
6239 , c’est un silence, un vide. C’était en dehors de la vie.
100 1929, Les Méfaits de l’instruction publique (1972). 2. Description du monstre
6240 2. Description du monstre Le service militaire me permit de retrouver quelques-unes de ces réalité
6241 Car ces différences sont les premières marques de la vie vécue et l’on aime à y découvrir la seule fraternité véritable. M
6242 ces sont les premières marques de la vie vécue et l’ on aime à y découvrir la seule fraternité véritable. Mais c’est en cas
6243 arques de la vie vécue et l’on aime à y découvrir la seule fraternité véritable. Mais c’est en caserne aussi que je devais
6244 is c’est en caserne aussi que je devais retrouver les instituteurs. Ceux-là n’avaient pas bougé. Et pour cause : ils n’étai
6245 é. Et pour cause : ils n’étaient jamais sortis de l’ école. Rien ne ressemble plus à un bon élève qu’un instituteur : de l’
6246 l’autre, il n’y a pas de solution de continuité, la différence n’était qu’une question d’âge, non d’expérience vécue. Ce
6247 grand nombre de cas, mais pourquoi ai-je envie de le dire ? L’instituteur sous l’uniforme peut être défini par son incompr
6248 re de cas, mais pourquoi ai-je envie de le dire ? L’ instituteur sous l’uniforme peut être défini par son incompréhension m
6249 rquoi ai-je envie de le dire ? L’instituteur sous l’ uniforme peut être défini par son incompréhension méthodique des homme
6250 éhension méthodique des hommes et son mépris pour les paysans. Qu’il soit officier ou troupier, on le reconnaît à une façon
6251 les paysans. Qu’il soit officier ou troupier, on le reconnaît à une façon pédante d’être consciencieux, à une façon bless
6252 être supérieur, à une façon livresque d’expliquer les choses, à une façon théorique de juger les êtres. Ces distributeurs a
6253 liquer les choses, à une façon théorique de juger les êtres. Ces distributeurs automatiques (brevetés par le gouvernement)
6254 res. Ces distributeurs automatiques (brevetés par le gouvernement) de la manne égalitaire — ne se prennent pas pour de la
6255 rs automatiques (brevetés par le gouvernement) de la manne égalitaire — ne se prennent pas pour de la petite bière. Ils on
6256 la manne égalitaire — ne se prennent pas pour de la petite bière. Ils ont conscience d’appartenir à une élite responsable
6257 ce ridicule n’échappe pas à ceux qu’ils méprisent le plus, et ils auraient souvent l’occasion de s’en douter s’ils étaient
6258 qu’ils méprisent le plus, et ils auraient souvent l’ occasion de s’en douter s’ils étaient sensibles aux finesses de l’iron
6259 en douter s’ils étaient sensibles aux finesses de l’ ironie paysanne. Mais je n’en dirai pas plus, de peur de m’échauffer i
6260 pas plus, de peur de m’échauffer inutilement. Si l’ on me poussait un peu, je crois que je m’oublierais au point d’insinue
6261 crois que je m’oublierais au point d’insinuer que les instituteurs galonnés causent autant de tort à l’armée que les instit
6262 es instituteurs galonnés causent autant de tort à l’ armée que les instituteurs antimilitaristes qui signent des manifestes
6263 urs galonnés causent autant de tort à l’armée que les instituteurs antimilitaristes qui signent des manifestes en mauvais f
6264 manifestes en mauvais français — et je ferais de la peine à d’excellents garçons. Revenons au civil. J’ai fait allusion a
6265 usion au lieutenant-instituteur qui veut faire de la pédagogie avec sa section. L’instituteur-lieutenant qui veut traiter
6266 r qui veut faire de la pédagogie avec sa section. L’ instituteur-lieutenant qui veut traiter militairement ses élèves témoi
6267 veut traiter militairement ses élèves témoigne de la même maladresse professionnelle. J’en connais un qui avait coutume de
6268 de garçons de 10 à 11 ans : « J’ai bien su mater les quarante hommes de ma section, je saurai aussi vous mater. » On imagi
6269 aussi vous mater. » On imagine à quoi peut mener l’ enseignement donné par des êtres qui brouillent à ce point les méthode
6270 ent donné par des êtres qui brouillent à ce point les méthodes. Simple remarque, pendant que nous en sommes aux instituteur
6271 en sommes aux instituteurs : ils sortent tous de la même classe sociale, de la petite bourgeoisie. Est-ce que l’esprit pe
6272  : ils sortent tous de la même classe sociale, de la petite bourgeoisie. Est-ce que l’esprit petit-bourgeois qui imprègne
6273 sse sociale, de la petite bourgeoisie. Est-ce que l’ esprit petit-bourgeois qui imprègne l’enseignement primaire constitue
6274 Est-ce que l’esprit petit-bourgeois qui imprègne l’ enseignement primaire constitue l’apport des instituteurs, ou bien pré
6275 is qui imprègne l’enseignement primaire constitue l’ apport des instituteurs, ou bien préexiste-t-il dans les principes mêm
6276 ort des instituteurs, ou bien préexiste-t-il dans les principes mêmes de l’École, et attire-t-il les petits bourgeois comme
6277 u bien préexiste-t-il dans les principes mêmes de l’ École, et attire-t-il les petits bourgeois comme le portrait de Numa D
6278 ns les principes mêmes de l’École, et attire-t-il les petits bourgeois comme le portrait de Numa Droz attirait les mouches 
6279 ’École, et attire-t-il les petits bourgeois comme le portrait de Numa Droz attirait les mouches ? (Le verre en était toujo
6280 bourgeois comme le portrait de Numa Droz attirait les mouches ? (Le verre en était toujours jaune.) Je n’ai ni le droit ni
6281 le portrait de Numa Droz attirait les mouches ? ( Le verre en était toujours jaune.) Je n’ai ni le droit ni l’envie de dir
6282  ? (Le verre en était toujours jaune.) Je n’ai ni le droit ni l’envie de dire du mal des petits-bourgeois. Ils sont au moi
6283 en était toujours jaune.) Je n’ai ni le droit ni l’ envie de dire du mal des petits-bourgeois. Ils sont au moins aussi sym
6284 sympathiques que n’importe quelle autre classe de la société. Mais l’esprit petit-bourgeois pris abstraitement et tel qu’i
6285 n’importe quelle autre classe de la société. Mais l’ esprit petit-bourgeois pris abstraitement et tel qu’il se manifeste da
6286 pris abstraitement et tel qu’il se manifeste dans l’ école primaire est un véritable virus de mesquinerie, et devrait être
6287 les ». Je reviendrai peut-être sur ce point. Pour l’ instant je ne veux que décrire l’école telle qu’on la voit. Après les
6288 r ce point. Pour l’instant je ne veux que décrire l’ école telle qu’on la voit. Après les personnes, le décor. La laideur d
6289 nstant je ne veux que décrire l’école telle qu’on la voit. Après les personnes, le décor. La laideur des « collèges » n’es
6290 ux que décrire l’école telle qu’on la voit. Après les personnes, le décor. La laideur des « collèges » n’est pas accidentel
6291 l’école telle qu’on la voit. Après les personnes, le décor. La laideur des « collèges » n’est pas accidentelle. C’est cell
6292 lle qu’on la voit. Après les personnes, le décor. La laideur des « collèges » n’est pas accidentelle. C’est celle même du
6293 est pas accidentelle. C’est celle même du régime. L’ architecture de nos « palais scolaires » symbolise d’une façon frappan
6294 e ce qu’il y a de schématique et de monotone dans la conception démocratique du monde. Entrons, c’est pire encore. Beaucou
6295 ants ont un frisson de dégoût au moment de passer la porte, au son de la cloche : l’odeur de goudron et d’urinoirs qui imp
6296 de dégoût au moment de passer la porte, au son de la cloche : l’odeur de goudron et d’urinoirs qui imprègne les corridors
6297 moment de passer la porte, au son de la cloche : l’ odeur de goudron et d’urinoirs qui imprègne les corridors et les habit
6298 e : l’odeur de goudron et d’urinoirs qui imprègne les corridors et les habits des écoliers empeste encore mes souvenirs. Et
6299 udron et d’urinoirs qui imprègne les corridors et les habits des écoliers empeste encore mes souvenirs. Et la poussière dan
6300 its des écoliers empeste encore mes souvenirs. Et la poussière dans l’air, l’encre sur les tables — c’était pourtant un re
6301 mpeste encore mes souvenirs. Et la poussière dans l’ air, l’encre sur les tables — c’était pourtant un refuge pour l’imagin
6302 encore mes souvenirs. Et la poussière dans l’air, l’ encre sur les tables — c’était pourtant un refuge pour l’imagination q
6303 ouvenirs. Et la poussière dans l’air, l’encre sur les tables — c’était pourtant un refuge pour l’imagination que ces initia
6304 sur les tables — c’était pourtant un refuge pour l’ imagination que ces initiales, ces signes, ces devises… —, les estampe
6305 on que ces initiales, ces signes, ces devises… —, les estampes piquées, Numa Droz et ses crottes de mouches… Dans ce décor
6306 s ! Et vous pensez que c’est un grand progrès sur la Nature. Quelle peut bien être la vertu éducatrice d’un tel milieu, mo
6307 rand progrès sur la Nature. Quelle peut bien être la vertu éducatrice d’un tel milieu, moral et matériel ? L’école publiqu
6308 u éducatrice d’un tel milieu, moral et matériel ? L’ école publique, telle que nous la voyons est semblable à tous ces monu
6309 al et matériel ? L’école publique, telle que nous la voyons est semblable à tous ces monuments « de la mauvaise époque » q
6310 la voyons est semblable à tous ces monuments « de la mauvaise époque » qui sont dans nos villes l’apport du xixe siècle.
6311  de la mauvaise époque » qui sont dans nos villes l’ apport du xixe siècle. Ils ne parviennent ni à la beauté ni à l’utili
6312 l’apport du xixe siècle. Ils ne parviennent ni à la beauté ni à l’utilité, et ils sont déjà démodés. On dit que le style
6313 e siècle. Ils ne parviennent ni à la beauté ni à l’ utilité, et ils sont déjà démodés. On dit que le style 1880 n’en est p
6314 à l’utilité, et ils sont déjà démodés. On dit que le style 1880 n’en est pas un : mais l’absence de style est encore un st
6315 . On dit que le style 1880 n’en est pas un : mais l’ absence de style est encore un style : c’est même le pire.
6316 absence de style est encore un style : c’est même le pire.