1 1939, L’Amour et l’Occident (1956). Le mythe de Tristan
1 st toujours avouer qu’elle est insupportable… Mal mariés , déçus, révoltés, exaltés ou cyniques, infidèles ou trompés : que ce
2 illent au cœur des bourgeois, des poètes, des mal mariés , des midinettes qui rêvent d’amours miraculeuses. Le mythe agit parto
3 le mari, il ne resterait aux deux amants qu’à se marier . Or on ne conçoit pas que Tristan puisse jamais épouser Iseut. Elle e
4 dont il est la victime ! La chasteté du chevalier marié répond à la déposition de l’épée nue entre les corps. Mais une chaste
2 1939, L’Amour et l’Occident (1956). Les origines religieuses du mythe
5 urgue, législateur de Sparte, imposait aux jeunes mariés une abstinence prolongée. « C’est afin — lui fait dire Plutarque — qu
6 rtelle et délicieuse brûlure. (« Il vaut mieux se marier que de brûler », écrit saint Paul aux Corinthiens.) De plus, c’est un
7 ir de tout contact avec leur femme, s’ils étaient mariés . Il semble qu’un jeûne de quarante jours41 précédait l’initiation et
8 rfecti). Seuls les seconds avaient le droit de se marier et de vivre dans le monde condamné par les purs, sans s’astreindre à
9 s d’amour : « Un chevalier peut-il être à la fois marié et fidèle à sa dame ? » — Voilà qui nous donne à penser, si l’on song
10 ou chasse glorieuse) pour acquérir le droit de se marier  : le combat contre le Morholt, dans Tristan, illustre exactement cett
11 érance numérique d’hommes » dont peu pouvaient se marier . D’où l’idéalisation de l’objet d’un désir aussi difficile à satisfai
3 1939, L’Amour et l’Occident (1956). Le mythe dans la littérature
12 trop fidèle se trouvent malgré eux dans l’état de mariés , à quoi notre héros veut échapper non pour l’amour de la liberté — qu
13 » d’amour. Qu’on relise la grande lettre de Julie mariée (IIIe  partie, lettre XVIII), analysant le passé des amants : on ne s
4 1939, L’Amour et l’Occident (1956). Amour et guerre
14 Bourgogne au xve siècle. L’amour et la mort s’y marient dans un paysage artificiel et symbolique de très haute mélancolie. « 
5 1939, L’Amour et l’Occident (1956). Le mythe contre le mariage
15 méprisable. La synthèse catholique s’efforçait de marier l’eau et le feu, car on pouvait tirer des Écritures et des Pères les
16 qui reste vierge « fait mieux » que celui qui se marie , même chrétiennement. L’hérésie liée dès l’origine à la cortezia du M
17 ir du xviiie siècle, le thème du « Coucher de la mariée  » n’est plus qu’une occasion d’anodines galanteries picturales. De no
18 liquent en partie la facilité avec laquelle on se marie encore « sans y croire ». Le rêve de la passion possible agit comme u
19 secrète nostalgie, l’Iseut du rêve205 ; elle est mariée , naturellement. Qu’elle divorce, et il l’épousera ! Avec elle, ce ser
20 l’appel suivant : « Mon amie et moi voulons nous marier . Nous essayons de trouver un juge de paix. N’est-ce pas une urgence »
21 ent équivalents ; que si l’on « aime » il faut se marier sur l’heure ; qu’enfin « l’amour » doit normalement triompher de tous
22 iage, l’amour du « prochain ». Si donc l’on s’est marié à cause d’une romance, une fois celle-ci évaporée, il est normal qu’à
23 s ou de goûts, l’on se demande : pourquoi suis-je marié  ? Et il est non moins naturel qu’obsédé par la propagande universelle
24 ennemi des compromis, il est contradictoire de se marier . Et si l’on veut tirer une traite sur son avenir, il est fort imprude
25 veille de son mariage : « C’est merveilleux de se marier pour la première fois ! » (Un an plus tard, elle divorçait.) Sur quoi
6 1939, L’Amour et l’Occident (1956). L’amour action, ou de la fidélité
26 ent le célibat ; puis Luther et Calvin, tous deux mariés  ; puis les Pères pour avoir loué le mariage ; enfin saint Paul, pour
27 , je n’en fais pas un ordre… Car il vaut mieux se marier que de brûler… Que chacun marche selon la part que le Seigneur lui a
28 tat où il était lorsqu’il a été appelé (vierge ou marié )… usant du monde comme n’en usant pas, car la figure de ce monde pass
29 Et voici le coup de grâce : Celui qui n’est pas marié s’inquiète des choses du Seigneur, des moyens de plaire au Seigneur,
30 es moyens de plaire au Seigneur, et celui qui est marié s’inquiète des choses du monde, des moyens de plaire à sa femme. (V. 
31 ant à cette utopie qu’obéit sans le savoir le mal marié , lorsqu’il se persuade qu’un second ou qu’un troisième essai le rappr
32 urtant nous reprendrons un parti de sobriété. Les mariés ne sont pas des saints, et le péché n’est pas comme une erreur à laqu