1 1962, Les Chances de l’Europe. I. L’aventure mondiale des Européens
1 us parler de l’Europe comme de cette partie-là du monde qui a fait « le Monde », ayant été le foyer de l’idée de « genre huma
2 comme de cette partie-là du monde qui a fait « le Monde  », ayant été le foyer de l’idée de « genre humain », ayant été aussi
3 phénomène européen se signale, dans l’histoire du monde , par quelques traits absolument originaux dont je donne tout de suite
4 er. 3. L’Europe a produit une civilisation que le monde entier est en train d’imiter, tandis que l’inverse ne s’est jamais pr
5 e ne s’est jamais produit. Le phénomène unique au monde que dénotent ces constatations — tellement simples et tellement évide
6 n sortant des mains de la nature, notre partie du monde n’avait reçu aucun titre à cette glorieuse prééminence qui la disting
7 tés magnifiques, s’est enrichie du butin des deux mondes  ; cette étroite presqu’île, qui ne figure sur le globe que comme un a
8 découvertes précisément et de l’expansion vers le monde , était bien moins peuplée que la Chine et que l’Inde, et ne subissait
9 dans le temps même où l’Europe faisait le tour du monde et dominait sur la plupart des nations de l’époque, Inde comprise ? C
10 s Chinois n’aient guère participé à l’histoire du monde que par leur faculté de se laisser conquérir, et d’absorber leurs con
11 pe a-t-elle été la seule ou la première partie du monde qui ait adopté cette religion, venue d’ailleurs, du Proche-Orient et
12 les Pères de l’Église primitive, Noé partagea le monde entre ses fils Sem, Cham et Japhet11. À Cham, l’Afrique mais aussi l’
13 e d’impasse au-delà de laquelle on croyait que le monde finissait. Une première culture originale se constitue en Grèce. L’Em
14 r du Christ — en vérité, porteur de l’histoire du monde  ! — tout en lui me semble illustrer les traits fondamentaux de notre
15 les connaissez : c’est d’abord le premier tour du monde , accompli par Magellan, puis ce sont la conquête de l’Amérique du Sud
16 ns ce sens, on peut dire que l’Europe « a fait le monde  ». Mais une fois le monde fait par elle, elle l’a perdu. Le monde s’e
17 ue l’Europe « a fait le monde ». Mais une fois le monde fait par elle, elle l’a perdu. Le monde s’est révolté contre elle au
18 e fois le monde fait par elle, elle l’a perdu. Le monde s’est révolté contre elle au nom même des valeurs de liberté, de just
19 avec amitié — tandis que l’Afrique, l’Asie et le monde arabe tentent de grouper leurs forces renaissantes contre l’Occident
20 consisté, dans l’ensemble et au total, à faire le monde , mais à le faire contre ses auteurs, c’est-à-dire contre l’Occident ?
21 ’est par là que l’Occident, aventureuse moitié du monde , s’oppose le plus radicalement au génie de l’Orient métaphysique. ⁂
22 : — les données géopolitiques de l’Europe dans le monde d’aujourd’hui, transformé par elle-même ; — les forces vitales dont l
23 r en dépit des prophètes de sa décadence, dans un monde qui lui en veut surtout de lui avoir révélé sa misère, mais que parfo
24 Estimations pour l’an 2000 : Chine 1100 millions, Monde 5600 millions. 7. Karl Jaspers, Nietzsche et le christianisme, tradu
25 ité par Paul Herrmann, L’Homme à la découverte du monde , traduction française Plon, Paris, 1954.)
2 1962, Les Chances de l’Europe. II. Secret du dynamisme européen
26 e, sa volonté de vivre, enfin sa fonction dans le monde ou vocation. Vitalité, volonté, vocation. Pour aujourd’hui, le premi
27 tit continent, au point présent de l’évolution du monde . Nous allons découvrir que cette situation est plus centrale que jama
28 qui nous ferait tenir l’Europe pour le centre du monde . De tels avertissements relèvent sans doute d’une saine morale, car l
29 ridicule et condamnable de se croire le centre du monde quand on ne l’est pas. Mais s’il se trouve qu’on l’est, il serait rid
30 té actuelle et le 98 % de la production totale du monde . De là le nom d’hémisphère privilégié que lui ont donné les géographe
31 que 6 % des habitants et 2 % de la production du monde , n’étant guère occupée que par les océans, le continent antarctique,
32 rtificiel : l’Europe est bel et bien le centre du monde humain, le lieu géométrique, le carrefour naturel des grandes voies d
33 ccidentelle entre la position de l’Europe dans le monde et sa fonction particulière. Certes, l’Europe n’est pas devenue ce qu
34 ma thèse initiale : c’est l’Europe qui a fait le monde , en ce sens qu’elle l’a découvert, exploré, exploité, réveillé, mis e
35 nuons notre descente vers les terres du centre du monde  : comparez les photos aériennes d’aires à peu près égales, mettons d’
36 quelle photo correspond à l’Europe. Nulle part au monde le paysage n’apparaîtra aussi intensément humanisé, travaillé, modelé
37 que à journaux, point d’insertion de la rumeur du monde , entre le café et le marché16. Face à l’hôtel de ville, l’église. Le
38 la nation, la nation et l’Europe, l’Europe et le monde  ; tout se ramenant, en somme, à la tension entre le particulier sous
39 relatent les chroniques d’aucune autre région du monde . Quand les antagonismes se composent en une conciliation pratique, ga
40 nt, c’est cela l’Europe, c’est cela qui a fait le monde . L’Europe, c’est très peu de chose plus une culture. Cette définition
41 rience séculaire. Car l’Afrique noire, l’Asie, le monde arabe ne connaissaient que la tradition : l’innovation les surprend d
42 re le secret dernier que détient l’Europe dans le monde . J’en conclus que le patient nommé Europe, si l’on ausculte ses organ
3 1962, Les Chances de l’Europe. III. L’Europe s’unit
43 uvelles qui lui sont assignées désormais, dans le monde . Je voudrais vous montrer aujourd’hui que la volonté de vivre de l’Eu
44 elques années tant de pays neufs de l’Afrique, du monde arabe et de l’Asie. La volonté d’union qui, si elle se vérifie, fourn
45 mpérialisme — « Partons ensemble à la conquête du monde  ! » — je ne le trouve jamais invoqué dans aucun plan ou plaidoyer, à
46 les princes ne reconnaissent pas de supérieurs au monde , et s’ils sont en conflit, devant qui doivent-ils plaider ? », Dubois
47 s arts utiles et agréables, et la connaissance du monde où ils sont nés », plutôt que le maniement des armes. Il demande un p
48 urnal officiel : M. Hugo. — Le premier peuple du monde a fait trois révolutions comme les dieux d’Homère faisaient trois pas
49 e peuvent être atteints que si les divers pays du monde acceptent de dépasser le dogme de la souveraineté absolue des États e
50 paix européenne est la clé de voûte de la paix du monde . En effet, dans l’espace d’une seule génération, l’Europe a été l’épi
51 r, doit nous mener. Et je crois que c’est vers le monde , vers l’unité finale du genre humain, dans le sens de la vraie vocati
4 1962, Les Chances de l’Europe. IV. Les nouvelles chances de l’Europe
52 atérielle et morale de répondre aux appels que le monde nous adresse, par sa faim, par sa peur et même par sa haine. C’est la
53 destin… Cela dit, regardons notre jeu. L’appel du monde , provoqué par nos œuvres, atteint l’Europe dans une situation qui me
54 ait, définissant les rapports de l’Europe avec le monde actuel, je me l’explique, en résumé, comme suit : L’expansion colonia
55  : la nécessité de leur union. Elles ont perdu le monde et retrouvé l’Europe. Mais voici le deuxième grand fait, non moins pa
56 Je le disais d’entrée de jeu : l’Europe a fait le monde , et cela non seulement parce qu’elle a découvert la Terre entière, ma
57 is s’imaginaient, eux aussi, qu’ils dominaient le monde entier. Eh bien ! ils se trompaient tout simplement. L’Agence Cook su
58 s de tous ordres et ses valeurs fondamentales. Le monde accepte nos machines et quelques-uns de nos slogans, mais non pas l’a
59 lle est la situation concrète de l’Europe dans le monde actuel. Je la résume : la décolonisation, loin de nous ruiner, coïnci
60 aquelle promet une prospérité sans précédent ; le monde entier se met à l’école de notre civilisation ; mais il n’en tire pas
61 la Révolution : Deux empires se partageront [le monde ] : la Russie du côté de l’Orient, et l’Amérique, devenue libre de nos
62 . L’autre jeunesse, c’est l’Amérique… L’avenir du monde est là, entre ces deux grands mondes.53 Et vingt autres ainsi, y co
63 … L’avenir du monde est là, entre ces deux grands mondes .53 Et vingt autres ainsi, y compris Tocqueville, durant tout le xix
64 ou de 50 millions, qui n’est plus à l’échelle du monde nouveau. C’est que l’Europe unie n’est pas faite et qu’il faut donc a
65 ue les valeurs nouvelles, capables d’entraîner le monde et de lui rendre un idéal, sont celles que représente le communisme r
66 sens actif du mot, cette fois — d’assumer face au monde une vocation dont personne ne saurait la relever, dont nulle autre cu
67 ndant que les États-Unis ne dépendent du reste du monde que pour 5 % au maximum de leur produit national. Le monde est vital
68 pour 5 % au maximum de leur produit national. Le monde est vital pour l’Europe, il ne l’est guère pour les États-Unis, bien
69 ui-même. Car c’est l’Europe qui a répandu dans le monde entier le virus du nationalisme, dont elle a bien failli périr elle-m
70 ’est plus en mesure d’exercer à lui seul, dans le monde actuel. La vocation de l’Europe, aujourd’hui pour demain, c’est donc
71 , aujourd’hui pour demain, c’est donc d’offrir au monde nouveau l’exemple réussi d’une grande fédération. Dans la coïncidence
72 rement, achevant ainsi son aventure et faisant le monde en se faisant. Le nouvel idéal que réclame la jeunesse, il est là, da
73 utives de l’Occident, et que tout appelle dans le monde de cette seconde moitié du xxe siècle. Cette vocation fera notre fo
74 a Russie était la deuxième puissance coloniale du monde par la superficie de son empire, et il énumérait ses possessions : Az
75 ang incontesté de première puissance coloniale du monde . Elle sera bientôt, aussi, quoique dans un autre sens, la seule et de
76 ald Spengler, traduction, Gallimard, Paris, et Le Monde et l’Occident, par Arnold Toynbee, traduction française, Paris, 1953.
77 jour dans ses mains les destinées de la moitié du monde . »), cf. p. 268 à 276 de l’op. cit. 54. Les chiffres de population
5 1962, Les Chances de l’Europe. Appendice : Sartre contre l’Europe
78 scurément vers nous. Ce que nous devons offrir au monde et à nos fils, non, ce n’est pas notre mauvaise conscience, notre rag