1 1939, L’Amour et l’Occident (1956). Le mythe de Tristan
1 s plaît-il d’entendre un beau conte d’amour et de mort  ?… » Rien au monde ne saurait nous plaire davantage. À tel point que
2 indre dans nos cœurs ? Que l’accord d’amour et de mort soit celui qui émeuve en nous les résonances les plus profondes, c’es
3 définition de la conscience occidentale… Amour et mort , amour mortel : si ce n’est pas toute la poésie, c’est du moins tout
4 le groupe. (Récits symboliques de la vie et de la mort des dieux, légendes expliquant les sacrifices ou l’origine des tabous
5 obscur et inavouable que la passion est liée à la mort , et qu’elle entraîne la destruction pour ceux qui s’y abandonnent de
6 passion qui veut la Nuit et qui triomphe dans une Mort transfigurante, elle représente pour toute Société une menace violemm
7 thes déchus deviennent vénéneux comme les vérités mortes dont parle Nietzsche. 3.Actualité du mythe ; raisons de notre anal
8 tte répugnance que je prévois, mais par la mise à mort du coupable. Le sacré qui entre ici en jeu n’est plus qu’une survivan
9 ent d’un tel geste n’est rien moins que la mise à mort de l’auteur. Pourtant il demeure sans effets.) Mais si tu m’épargnes,
10 a Passion de la Nuit ; dresser cette figure de la Mort des Amants qu’exalte l’angoissant et vampirique crescendo du second a
11 rs vies, car ils ont beu leur destruction et leur mort  ». Ils s’avouent leur amour et ils y cèdent. (Notons ici que le texte
12 rée à une troupe de lépreux et Tristan condamné à mort . Il s’évade (scène de la chapelle). Il délivre Iseut, et avec elle s’
13 r il regrette « Iseut la bloie ». Enfin, blessé à mort , et de nouveau empoisonné par cette blessure, Tristan fait appeler la
14 t dans une situation qui n’a d’autre issue que la mort  ? 6.Chevalerie contre Mariage Un moderne commentateur du Roman
15 fonde ambiguïté ? Tout égoïsme, dit-on, mène à la mort , mais c’est par une ultime défaite. Celui-ci au contraire veut la mor
16 une ultime défaite. Celui-ci au contraire veut la mort comme son accomplissement parfait, comme son triomphe… Une seule répo
17 i dans l’instant de l’obstacle absolu, qui est la mort . Tristan aime se sentir aimer, bien plus qu’il n’aime Iseut la Blonde
18 ecrète, ravivée par l’absence. 9.L’amour de la Mort Mais il nous faut pousser plus loin : l’amabam amare d’Augustin es
19 leur affective plus forte que la passion même. La mort , qui est le but de la passion, la tue. Mais l’épée nue n’est pas enco
20 est « ce que l’on subit » — à la limite, c’est la mort . En d’autres termes cette action est un nouveau délai de la passion,
21 délai de la passion, c’est-à-dire un retard de la Mort . ⁂ On retrouvera la même dialectique entre les deux mariages du Roman
22 re de la « passion » sur le désir. Triomphe de la mort sur la vie. ⁂ Ainsi donc cette préférence accordée à l’obstacle voulu
23 e à l’obstacle voulu, c’était l’affirmation de la mort , c’était un progrès vers la Mort ! Mais vers une mort d’amour, vers u
24 ffirmation de la mort, c’était un progrès vers la Mort  ! Mais vers une mort d’amour, vers une mort volontaire au terme d’une
25 , c’était un progrès vers la Mort ! Mais vers une mort d’amour, vers une mort volontaire au terme d’une série d’épreuves don
26 rs la Mort ! Mais vers une mort d’amour, vers une mort volontaire au terme d’une série d’épreuves dont Tristan sortira purif
27 ’épreuves dont Tristan sortira purifié ; vers une mort qui soit une transfiguration, et non pas un hasard brutal. Il s’agit
28 n dirait presque de pénitence au service de cette mort qui transfigure. Nous touchons au secret dernier. L’amour de l’amour
29 les amants malgré eux n’ont jamais désiré que la mort  ! Sans le savoir, en se trompant passionnément, ils n’ont jamais cher
30 lus secret de leur cœur, c’était la volonté de la mort , la passion active de la Nuit qui leur dictait ses décisions fatales.
31 , abyssale. Qui donc oserait avouer qu’il veut la Mort  ? et qu’il déteste le Jour qui l’offusque ? et qu’il attend de tout s
32 sée à s’avouer par son excès indubitable, par une mort qui la manifeste au-delà de tout repentir possible ! Certains mystiqu
33 nt elle procède. Levez-vous, orages sonores de la mort de Tristan et d’Isolde ! Vieille et grave mélodie, dit le héros, tes
34 les vents du soir, lorsqu’en un temps lointain la mort du père fut annoncée au fils. Dans l’aube sinistre, tu me cherchais,
35 son ou la complicité de la passion, du goût de la mort qu’elle dissimule, et d’un certain mode de connaître qui définirait à
36 ces vitales, dans la souffrance et au seuil de la mort . Le troisième acte du drame de Wagner décrit bien davantage qu’une ca
37 phe de notre sadique génie, ce goût réprimé de la mort , ce goût de se connaître à la limite, ce goût de la collision révélat
38 s », dit Rimbaud. Elle n’est qu’un des noms de la Mort , le seul nom par lequel nous osions l’appeler — tout en feignant de l
39 t du savoir. Complicité de la conscience et de la mort  ! (Hegel a pu fonder sur elle une explication générale de notre espri
40 que l’on désire, on ne l’a pas encore — c’est la Mort  — et l’on perd ce que l’on avait — la jouissance de la vie. Mais cett
41 , plus magnifiquement. C’est que l’approche de la mort est l’aiguillon de la sensualité. Elle aggrave, au plein sens du term
42 , je vous le donne en récompense ! Attirés par la mort loin de la vie qui les pousse, proies voluptueuses de forces contradi
43 ’obstacle en soi. Et l’obstacle suprême, c’est la mort , qui se révèle au terme de l’aventure comme la vraie fin, le désir dé
44 Tristan. — Iseut approche et Tristan meurt. Puis mort d’Iseut. Résumons encore : une seule longue période de réunion (l’asp
45 ). Auparavant : le Philtre ; à la fin : la double Mort  ; entre-temps, de furtives rencontres. 16. Thomas, qui cherche à di
2 1939, L’Amour et l’Occident (1956). Les origines religieuses du mythe
46 biologique. Et il n’est pas jusqu’au désir de la mort que l’on ne puisse « ramener » à l’instinct de mort décrit par Freud
47 rt que l’on ne puisse « ramener » à l’instinct de mort décrit par Freud et par les plus récents biologistes. Mais on ne voit
48 rtain que les Celtes croyaient à une vie après la mort . Vie aventureuse, très semblable à celle de la terre, mais épurée, et
49 ortalité suppose une préoccupation tragique de la mort . Les Celtes, écrit Hubert, « ont cultivé certainement la métaphysique
50 « ont cultivé certainement la métaphysique de la mort … Ils ont beaucoup rêvé sur la mort. C’était une compagne familière do
51 physique de la mort… Ils ont beaucoup rêvé sur la mort . C’était une compagne familière dont ils se sont plu à déguiser le ca
52 ant. » De même, dans leur mythologie, « l’idée de mort domine tout, et tout la découvre »22. Et cela n’est pas sans inciter
53 istan, qui voile et exprime à la fois le désir de mort . D’autre part, les dieux celtiques forment deux séries opposées : die
54 ans la vie des corps le malheur même ; et dans la mort le bien dernier, le rachat de la faute d’être né, la réintégration da
55 Dès ici-bas, par une ascension graduelle, par la mort progressive et volontaire que représente l’ascèse (aspect négatif de
56 final de cette dialectique, c’est la non-vie, la mort du corps. La Nuit et le Jour étant incompatibles, l’homme créé qui ap
57 tte dialectique de fond en comble. Au lieu que la mort soit le terme dernier, elle devient la première condition. Ce que l’É
58 a première condition. Ce que l’Évangile appelle «  mort à soi-même », c’est le début d’une vie nouvelle, dès ici-bas. Ce n’es
59 i croit cela, renaît de l’esprit dès maintenant : mort à soi-même et mort au monde en tant que le moi et le monde sont péche
60 t de l’esprit dès maintenant : mort à soi-même et mort au monde en tant que le moi et le monde sont pécheurs, mais rendu à s
61 pétuel refus de l’acte. Il commence au-delà de la mort , mais il se retourne vers la vie. Et cette conversion de l’amour fait
62 égoïsme, du moi de désir et d’angoisse, c’est une mort de l’homme isolé, mais c’est aussi la naissance du prochain. À ceux q
63 faire un dieu, et en même temps le vouaient à la mort , le christianisme le replace dans son ordre, et là, le sanctifie par
64 t de vue de la vie, au malheur absolu, qui est la mort . Le christianisme n’est un malheur mortel que pour l’homme séparé de
65 stres, soumis aux lois de la procréation et de la mort . Mais le Christ est venu parmi nous, pour nous montrer le chemin du r
66 ura conduira quelques-uns des « purs » jusqu’à la mort volontaire, mort par amour de Dieu, consommation du détachement suprê
67 ques-uns des « purs » jusqu’à la mort volontaire, mort par amour de Dieu, consommation du détachement suprême de toute loi m
68 cusé devant le pape Innocent III d’avoir causé la mort de cinq-cents personnes ! D’ailleurs, quand on démontrerait, à suppos
69 jamais trahir leur foi, et cela quelle que fût la mort dont ils se verraient menacés. C’est ainsi que les registres de l’Inq
70 rence de leur rhétorique amoureuse. ⁂ Thème de la mort , que l’on préfère aux dons du monde : Plus m’agrée donc de mourir Qu
71 ns le corps appelle d’un amour nostalgique que la mort seule pourra combler ? Dans les Képhalaïa ou Chapitres de Manès52, on
72 solamentum, généralement donné à l’approche de la mort ), comment il se voit de la sorte « ordonné » dans l’Esprit de Lumière
73 sprit de Lumière ; comment enfin, au moment de sa mort , la forme de Lumière, qui est son Esprit, lui apparaît et le console
74 en même temps symbole du Désir divin. Sohrawardi ( mort en 1191) voyait dans Platon — qu’il connaissait par Plotin, Proclus e
75 les autres siècles) ? g) Enfin, la louange de la mort d’amour est le leitmotiv du lyrisme mystique des Arabes. Ibn-al-Farid
76 fatigue, son commencement une maladie, sa fin la mort . Pour moi cependant la mort par amour est une vie ; je rends grâce à
77 ne maladie, sa fin la mort. Pour moi cependant la mort par amour est une vie ; je rends grâce à ma Bien-aimée de me l’avoir
78 ontingents et le tourment de la matière ; mais la mort , c’est la nuit de l’illumination, l’évanouissement des formes illusoi
79 voir Dieu sur le Sinaï, il exprima le désir de sa mort . Et l’on conçoit que le terme nécessaire de la voie illuminative d’un
80 oprement insensée de religions jamais tout à fait mortes , et rarement tout à fait comprises et pratiquées ; de morales jadis e
81 étermine le cycle incessant des naissances et des morts , la fonction sexuelle76 ». Ainsi parle Shiva77 : « Pour mes dévots, j
82 nce dans son corps, qu’aurait-il à craindre de la mort  ? » comme le dit un upanishad. Dans le tantrisme, la maithuna (union
83 symbolise l’état par excellence du péché et de la mort  : l’acte sexuel80. » Mais l’acte est toujours décrit comme étant celu
84 stique cathare — c’est-à-dire aboutit à la double mort volontaire92. Ainsi s’explique par des raisons spirituelles la format
85 ts qui racontent le voyage d’un héros au pays des morts . Ce héros, Bran, Cuchulainn, ou Oisin, « est attiré par une mystérieu
86 s se donnent rendez-vous en un lieu désert, où la mort les précède, empêchant leur réunion « car il était prédit par les dru
87 leur vie, mais qu’ils se rencontreraient après la mort , pour ne jamais se séparer »95. Il serait aisé de multiplier ces comp
88 plus précis. On se rappelle que Tristan, après la mort de ses parents, fut élevé à la cour du roi Marc son oncle. Or il étai
89 é — il nous en reste près de 19 000 vers, mais la mort des amants, quoique annoncée, ne fut jamais écrite — est à la fois pl
90 Mais s’il assume son destin de malheur jusqu’à la mort , qui le libère du corps, il peut atteindre au-delà du temps et de l’e
3 1939, L’Amour et l’Occident (1956). Passion et mystique
91 onduire au détachement final et bienheureux, à la mort volontaire des « parfaits ». Cette pénitence a donc une signification
92 llement dominante — celle qui s’épanouira dans la mort des amants. Reprenons par exemple le récit de l’« aspre vie » dans la
93 e l’union et la fusion totale, mais au-delà de la mort des corps. Pour les cathares, il n’y avait pas de rachat possible de
94 s créées, et plus facilement ils parviennent à la mort volontaire dans l’endura. Au contraire, les mystiques chrétiens voien
95 cueilleront comme la révélation dernière, dans la mort . Ainsi de leur attitude envers les créatures : ils ne les retrouvent
96 assion de la passion sans terme, la volonté de la mort sans retour. L’on s’aperçoit, à cette limite, que la prouesse était l
97 même, l’obéissance même dans la lucidité. Si « la mort m’est un gain », c’est que « Christ est ma vie », et Christ s’est inc
98 le chrétien ne se jette pas dans l’illusion d’une mort d’amour transfigurante, mais au contraire accepte les limites de sa t
99 st la vertu chrétienne de l’Agapè, forte comme la mort , mais non point ivre ; intime, mais humble à l’extrême, et en même te
100 l est initial, et non final. Pour le chrétien, la mort à soi-même est le début d’une vie plus réelle ici-bas, non la catastr
101 e, une ardeur vraiment dévorante, une soif que la mort seule pouvait éteindre : ce fut la « torture d’amour » qu’ils se mire
102 elle-même. La passion des « parfaits » voulait la mort divinisante. La soif qu’elle laisse au cœur des hommes sans foi, mais
103 par sa brûlante poésie, ne cherchera plus dans la mort que la suprême sensation. Et de même, l’amour de la Dame, dès qu’il c
4 1939, L’Amour et l’Occident (1956). Le mythe dans la littérature
104 œur souvent meurt, et plus douloureusement que de mort naturelle, pour vous Dame qu’il désire et aime plus que lui-même… J’a
105 enfin ce dont on parle. « Cet Amour est-il vie ou mort  ? » demande courageusement le premier. Et le second répond : « Du pou
106 ond : « Du pouvoir de l’amour provient souvent la mort … L’amour existe lorsque le désir est si grand qu’il dépasse les limit
107 me consume et détruit. (Les Yeux de ma dame.) Ô mort vivante, ô mal délicieux142 Comment as-tu sur moi tel pouvoir, si je
108 la vie : c’est une nuit infernale et une cruelle mort . Et pourtant ! (voici bien ce qu’on peut appeler le comble des misère
109 s passions » préromantique. Et voici l’appel à la mort  : « Que s’ouvre donc la geôle où je suis enfermé Qui me clôt le chem
110 « nuit infernale » devient le Jour, la « cruelle mort  » une Vie nouvelle, et pour qu’à la passion ne manque pas le sublime,
111 fort qu’il me donne l’audace de négocier avec la mort  ! La lucidité même d’un tel cri, où s’avoue le dernier secret du myt
112 x qui veillent sur eux Disent : l’éclair avant la mort . Mais moi pourrai-je Nommer cette mort éclair ? Ô mon amour, ma femme
113 r avant la mort. Mais moi pourrai-je Nommer cette mort éclair ? Ô mon amour, ma femme, La mort a sucé le miel de ton haleine
114 mer cette mort éclair ? Ô mon amour, ma femme, La mort a sucé le miel de ton haleine Et n’a pas eu de prise encore sur ta be
115 r tes lèvres, tes joues, Et le pâle drapeau de la mort n’est pas avancé.         … Ah ! chère Juliette Pourquoi es-tu si be
116 uoi es-tu si belle encore ? Dois-je penser Que la mort non substantielle est amoureuse Et que le monstre maigre te conserve
117 iser Scellez un marché sans âge avec la dévorante mort  ! Viens amer conducteur. Viens guide repoussant. Toi désespéré pilote
118 ide. En un baiser je meurs. Le consolament de la Mort vient de sceller le seul mariage qu’ait jamais pu vouloir l’Éros. Voi
119 rême de la chasteté exaltée. Et la négation de la mort , chez Milton, le conduit à des conclusions bien proches de celles des
120 l’amour mais l’obstacle n’est plus la volonté de mort , si secrète et métaphysique dans Tristan : c’est simplement le point
121 ending. Le vrai roman courtois débouchait dans la mort , s’évanouissait dans une exaltation au-delà du monde… Maintenant, l’o
122 es, l’éloge de la chasteté, voire les défis à une mort libératrice. Mais la dialectique sauvage de Tristan n’est plus ici qu
123 ruisseau, le Lignon, Céladon désespéré appelle la mort  ; Astrée, de son côté conçoit la même pensée. Ils vont demander la fi
124 ne sera désenchantée, selon l’oracle, que par la mort du plus fidèle amant et de la plus fidèle amante. (Thème de Tristan :
125 chantement. Astrée et Céladon évanouis (c’est une mort métaphorique) sont transportés chez le druide Adamas où ils se réveil
126 et pure, qui s’appelle la Princesse de Clèves. La mort s’y atténue en séparation volontaire, et la chevalerie fait place à l
127 st point une nécessité qu’il y ait du sang et des morts dans une tragédie, ajoute Racine, il suffit que l’action en soit gran
128 nt la pressentir, il eût fallu pousser jusqu’à la mort , — cette mort que Racine ne juge pas nécessaire. La pudeur classique,
129 ir, il eût fallu pousser jusqu’à la mort, — cette mort que Racine ne juge pas nécessaire. La pudeur classique, tant vantée,
130 résulte, c’est que l’obstacle est un masque de la mort , et que la mort est le gage d’une transfiguration, l’instant où ce qu
131 ue l’obstacle est un masque de la mort, et que la mort est le gage d’une transfiguration, l’instant où ce qui était la Nuit
132 voulait nous libérer de la vie matérielle par la mort  ; et l’Agapè chrétienne veut sanctifier la vie ; mais les « passions
133 1. Phèdre, ou le mythe « puni » Le thème de la mort est écarté dans Bérénice par une « censure » morale évidemment chréti
134 rêmes de l’aveu. Phèdre, c’est la revanche de la mort . Oui, Racine le sait maintenant, c’est une nécessité qu’il y ait du s
135 t, c’est une nécessité qu’il y ait du sang et des morts dans une tragédie, si elle a pour sujet l’amour-passion. Seulement, c
136 le a pour sujet l’amour-passion. Seulement, cette mort , il ne la désire pas comme une transfiguration : il a pris le parti d
137 transfiguration : il a pris le parti du jour, la mort n’est plus que le châtiment de ses trop longues complaisances. C’est
138 st sa propre passion, qu’il châtie en vouant à la mort la fille de Minos, et sa victime ! Racine, sous le couvert de son suj
139 mpt de toute imperfection : ce qui faisait que la mort de ce jeune prince causait beaucoup plus d’indignation que de pitié.
140 allait cette douloureuse poussée de la volonté de mort cherchant à se délivrer d’elle-même par l’impossible aveu, se retenan
141 parition du mythe au xiie siècle, triomphe de la mort de l’amante, renversant toute la dialectique de Tristan et de Roméo :
142 te la dialectique de Tristan et de Roméo : Et la mort à mes yeux dérobant la clarté Rend au jour qu’ils souillaient toute
143 ion totale se lie indissolublement au désir de la mort qui libère. C’est parce que la passion n’existe pas sans la douleur q
144 ission ; et de l’hommage un engagement jusqu’à la mort . Mais Don Juan aime le crime en soi, et par là se rend tributaire de
145 tyr d’un ravissement qui se mue en joie pure à la mort . On peut noter encore ceci : Don Juan plaisante, rit très haut, provo
146  : Don Juan plaisante, rit très haut, provoque la mort lorsque le Commandeur lui tend la main, au dernier acte de Mozart, ra
147 ue au contraire son orgueil qu’à l’approche de la mort lumineuse. Je ne leur vois qu’un trait commun : tous deux ont l’épée
148 du chevalier. Au surplus, le roman n’aboutit à la mort qu’après un renoncement à la passion, et cette mort de Julie est chré
149 rt qu’après un renoncement à la passion, et cette mort de Julie est chrétienne — autant qu’il peut dépendre de Rousseau. (Il
150 tianisme, alors que la légende glorifiait dans la mort l’entière dissolution des liens terrestres. 15.Le romantisme allem
151 in dire leur nom. L’adoration de la Nuit et de la Mort accède pour la première fois au plan de la conscience lyrique. Napolé
152 beau [de sa fiancée] la pensée m’est venue que ma mort donnerait à l’humanité un exemple de fidélité éternelle, et qu’elle i
153 une tragédie, tout ce qui est limité finit par la mort , toute poésie a quelque chose de tragique. Une union qui est conclue
154 tragique. Une union qui est conclue même pour la mort est un mariage qui nous donne une compagne pour la Nuit. C’est dans l
155 us donne une compagne pour la Nuit. C’est dans la mort que l’amour est le plus doux ; pour le vivant, la mort est une nuit d
156 que l’amour est le plus doux ; pour le vivant, la mort est une nuit de noces, un secret de doux mystères. L’ivresse des sens
157 sir, une divine langueur168… » L’exaltation de la mort volontaire, amoureuse et divinisante, voilà le thème religieux le plu
158 sie albigeoise que fut le romantisme allemand. La mort est le but idéal des « hommes élevés » de la Loge invisible de Jean-P
159 de vue de ce monde n’est plus qu’un élan vers la mort , une séparation essentielle. Tel est le tragique de l’Ironie transcen
160 ront toujours figure d’adolescents. Le goût de la mort , chez les Allemands, exalte la saveur de vivre : c’est peut-être qu’i
161 ure, puisque mystique et religion, pour lui, sont mortes . Mais il est obligé de constater que ce désir de passion, et la passi
162 fondamentale de l’être, un choix en faveur de la Mort , si la Mort est la libération d’un monde ordonné par le mal. Mais l’a
163 e de l’être, un choix en faveur de la Mort, si la Mort est la libération d’un monde ordonné par le mal. Mais l’audace de cet
164 ristan est destiné à le faire mourir : mais d’une mort que l’Amour condamne, d’une mort selon les lois du jour et de la veng
165 rir : mais d’une mort que l’Amour condamne, d’une mort selon les lois du jour et de la vengeance, brutale, accidentelle, pri
166 e l’erreur qui doit sauver l’Amour. Au philtre de mort , elle substitue le breuvage d’initiation. Ainsi l’étreinte unique de
167 c’est la passion — ils ont déjà pressenti l’autre mort , celle qui est le seul accomplissement de leur amour. Le deuxième act
168 le leitmotiv du duo d’amour est déjà celui de la mort . Encore une fois revient le jour : le traître Mélot174 blesse Tristan
169 s’évanouit dans la grâce lumineuse au-delà de la mort physique. Or le drame achevé par la musique, c’est l’opéra. Ainsi, ce
170 mythe ou d’une œuvre ; d’autre part, désigne leur mort . Ainsi le mythe « achevé » par Wagner a vécu. Vixit Tristan ! Et s’ou
171 llèlement, il convient de citer le Triomphe de la Mort de d’Annunzio — commentaire admirable de Wagner — Anna Karénine, et p
172 rchons. Mais l’obstacle signifie, à la limite, la mort , le renoncement aux biens terrestres. C’est ce que nous ne voulons pl
173 pandre dans la conscience profane l’« instinct de mort  » longtemps refoulé dans l’inconscient ou canalisé dès sa source par
174 t une fois contemplé la beauté est déjà voué à la mort … » 166. Les italiques sont dans le texte original. 167. Autre visio
5 1939, L’Amour et l’Occident (1956). Amour et guerre
175 re 1.Parallélisme des formes Du désir à la mort par la passion, telle est la voie du romantisme occidental ; et nous
176 , à l’origine, la lutte du Jour et de la Nuit. La mort y joue un rôle central : elle est la défaite du monde et la victoire
177 onde et la victoire de la vie lumineuse. Amour et mort sont reliés par l’ascèse, comme par l’instinct sont reliés désir et g
178 duché de Bourgogne au xve siècle. L’amour et la mort s’y marient dans un paysage artificiel et symbolique de très haute mé
179 e plus élevée : l’action entreprise par amour. La mort devient alors la seule alternative à l’accomplissement du désir, et l
180 question de condamner la vie. Et « l’instinct de mort  » semblait neutralisé. ⁂ C’est sur cette Italie heureuse, immorale et
181 de mouvements automatiques, destinés à donner la mort à distance, sans colère ni pitié. 6.La guerre classique L’effor
182 siégée en ne faisant de part et d’autre que trois morts . C’est l’art savant qui est à l’honneur. Maurice de Saxe écrit : « Je
183 e qu’il fut. Et cette suprême politesse devant la mort , à Fontenoy. ⁂ Mais voici la totale « profanation » de la guerre et d
184 t (sans le savoir) qu’au-delà de cette gloire, sa mort soit véritablement la fin de tout. L’ardeur nationaliste, elle aussi,
185 nsi sans se l’avouer qu’elle préfère le risque de mort , et la mort même, à l’abandon de sa passion. « La liberté ou la mort 
186 l’avouer qu’elle préfère le risque de mort, et la mort même, à l’abandon de sa passion. « La liberté ou la mort », hurlaient
187 me, à l’abandon de sa passion. « La liberté ou la mort  », hurlaient les jacobins à l’heure où les forces ennemies paraissaie
188 t vingt fois supérieures, à l’heure où liberté et mort étaient bien près d’avoir le même sens… Ainsi la nation et la Guerre
189 ation et la Guerre sont liées comme l’Amour et la Mort . Désormais le fait national sera le facteur dominant de la guerre. « 
190 nt, à l’inverse des intérêts : elles préfèrent la mort héroïque. (De tous temps les guerres de religion ont été de beaucoup
191 est évidemment plus efficace. La technique de la mort à grande distance ne trouve son équivalent dans nulle éthique imagina
192 niverselle des industries et arts appliqués de la mort , avec démonstrations quotidiennes sur le vif. b) Cette collectivisat
193 rtains signes convenus, mais sera concrètement la mort de ce pays. Encore une fois, dès que l’on abandonne l’idée de règles,
194 nt, de l’ascèse et de la course inconsciente à la mort héroïque, divinisante. Tandis qu’à l’intérieur et à la base, on stéri
195 totalitaires est donc la guerre, qui signifie la mort . Et comme on le voit dans le cas de la passion d’amour, ce but est no
196 ’amour-passion, les amants ne disent : je veux la mort . Seulement, tout ce que l’on fait prépare cette fin. Et tout ce que l
197 menace permanente que la passion et l’instinct de mort font peser sur toute société. La réponse du xiie siècle avait été la
6 1939, L’Amour et l’Occident (1956). Le mythe contre le mariage
198 mbole du Désir lumineux : son au-delà, c’était la mort divinisante, libératrice des liens terrestres. Il fallait donc qu’Ise
199 ets, trop faciles à saisir. Au lieu de mener à la mort , elle se dénoue en infidélité. Qui ne sent la dégradation d’un Trista
200 stan, car la vraie vie qu’il appelait, c’était la mort transfigurante. Mais nous avons perdu la transcendance. La mort n’est
201 rante. Mais nous avons perdu la transcendance. La mort n’est plus qu’une lente consomption. À cette lumière, que jette sur
7 1939, L’Amour et l’Occident (1956). L’amour action, ou de la fidélité
202 majeur, irrévocable, que signifie le choix de la mort contre la vie. Et comment échapper au démon que l’on fixe ? Pour atta
203 ut mais l’amour même, et au-delà de cet amour, la mort , c’est-à-dire la seule délivrance du moi coupable et asservi. Tristan
204 ète passion. Le mythe s’empare de l’« instinct de mort  » inséparable de toute vie créée, et il le transfigure en lui donnant
205 ait la polygamie) — et non plus de la vie pour la mort (c’était la passion de Tristan). L’amour de Tristan et d’Iseut c’étai
206 t non pas Agapè, qui a glorifié notre instinct de mort , et qui a voulu l’« idéaliser ». Mais Agapè se venge d’Éros en le sau
207 pas détruire ce qui détruit. « Je ne veux pas la mort du pécheur, mais sa vie. » ⁂ Éros s’asservit à la mort parce qu’il ve
208 du pécheur, mais sa vie. » ⁂ Éros s’asservit à la mort parce qu’il veut exalter la vie au-dessus de notre condition finie et
209 ivrance. Et l’Éros ne pouvait le conduire qu’à la mort . Mais l’homme qui croit à la révélation de l’Agapè voit soudain le ce
210 n de la vie ardente qui est un masque du désir de mort . Dynamisme inverti, et autodestructeur. Mais l’autre aspect du dynami
211 cette union tout à fait monstrueuse des forces de mort et des forces créatrices va dénaturer à la fois la guerre, et le géni
212 ions. Mais ce qui produit la vie produit aussi la mort . Il suffit qu’un accent se déplace pour que le dynamisme change de si
213 nouvelles à la passion. C’est notre vie et notre mort . Et c’est pourquoi la crise moderne du mariage est le signe le moins
214 même de la foi chrétienne ! Car voici : cet homme mort au monde, tué par l’amour infini, devra marcher maintenant et vivre d
215 e de fini228 »… Ainsi l’extrême de la passion, la mort d’amour, initie une vie nouvelle, où la passion ne cesse d’être prése
216 ment et non pas notre délivrance. Ce n’est pas la mort , la désincarnation, qui est le salut ; mais l’acte de la grâce fait p