1 1939, L’Amour et l’Occident. Avertissement
1 nt ses effets dans les domaines les plus divers : mystique , littérature, art de la guerre, morale du mariage. ⁂ L’agrément de pa
2 1939, L’Amour et l’Occident. Le mythe de Tristan
2 de son affreuse réalité ? Tourner la situation en mystique ou en farce, c’est toujours avouer qu’elle est insupportable… Mal-mar
3 este au-delà de tout repentir possible ! Certains mystiques ont fait plus qu’avouer : ils ont su et se sont expliqués. Mais s’ils
4 ce, n’est-ce pas l’acte même, et l’audace, de nos mystiques les plus lucides ? Érotique au sens noble, et mystique : que l’une de
5 ues les plus lucides ? Érotique au sens noble, et mystique  : que l’une de l’autre soit cause ou effet, ou qu’elles aient une com
3 1939, L’Amour et l’Occident. Les origines religieuses du mythe
6 nous que Platon et les druides, une sorte d’unité mystique du monde indo-européen se dessine comme en filigrane à l’arrière-plan
7 n lui-même s’en trouve transformé. Tandis que les mystiques païennes le sublimaient jusqu’à en faire un dieu, et en même temps le
8 ures expressions. J’entends parler d’une forme de mystique à la fois dualiste dans sa vision du monde, et moniste dans son accom
9 éorique réalisation historique Paganisme Union mystique (amour divin heureux). Amour humain malheureux. Hédonisme, passion ra
10 formes catholiques, toutes les reviviscences des mystiques païennes capables de le « libérer ». C’est ainsi que les doctrines se
11 manière la plus complexe à la grande renaissance mystique . D’autre part, elles trouvaient des complaisances profondes dans la m
12 e connaissait pas toujours l’origine et la portée mystique de valeurs qu’elle prenait pour une mode et qu’elle accommodait à ses
13 ains prêtres provençaux bénirent même cette union mystique en la plaçant sous l’invocation de la Vierge Marie. »30 (De tels excè
14 n’est-ce point déjà la Divinité en soi des grands mystiques hétérodoxes, le Dieu d’avant la Trinité dont nous parlent la Gnose et
15 s Cantiques, mais là aussi, le ton est réellement mystique . Les érudits nous ressassent leur formule : il n’y aurait là, tout « 
16 » : n’y trouve-t-on pas la démarche précise de la mystique négative, et ses métaphores invariables ? Je l’aime et la recherche
17 t des exemples topiques ; celui, entre autres, du mystique Suso : « La vie de la chrétienté médiévale est, dans toutes ses manif
18 atérialisme à prétentions d’au-delà. Même chez un mystique de l’envergure d’un Henri Suso, le sublime nous semble parfois frôler
19 ue des expressions courtoises et leurs résonances mystiques . « Il est certain — doit-il avouer — que les idées religieuses d’une
20 veut voir un trait biographique, détient un sens mystique évident : « Ce que le corps me refuse, l’esprit me l’octroie » (par e
21 vera davantage dans une hiérarchie d’abstractions mystiques , figurant d’abord la philosophie, puis la Science, puis la Science sa
22 verse, il serait excessif de soutenir que l’idéal mystique sur quoi elle se fondait à l’origine fût toujours et partout observé 
23 je donne à ce mot — sont d’origine religieuse et mystique , il est certain qu’elles se trouvent flatter, par cela même qu’elles
24 rhétorique courtoise fut au moins inspirée par la mystique cathare64. C’est là une thèse minimum en apparence. Mais sitôt admise
25 et nous engage dans un nouveau chapitre. 9.Les mystiques arabes Comment de la confuse combinaison de doctrines plus ou moin
26 dès le ixe siècle, dans l’islam, d’une école de mystiques poètes qui devaient avoir plus tard pour principales illustrations al
27 hevaleresque, dont les titres de quelques traités mystiques de cette école donnent une idée : Le Familier des Amants, Le Roman de
28 ne peut aimer que le fini. Il en résulta que les mystiques furent obligés de recourir à des symboles dont le sens restait secret
29 inité. Or le langage érotico-religieux des poètes mystiques tendait à établir cette confusion du Créateur et de la créature. Et l
30 et plus tard, nous le verrons, au cas des grands mystiques occidentaux, de Maître Eckhart à Jean de la Croix. ⁂ Une brève revue
31 . ⁂ Une brève revue des thèmes « courtois » de la mystique arabe fera sentir à quelles profondeurs le parallélisme trouve ses or
32 la Vérité, « appellation s’adressant à des amants mystiques qui s’entendent dans une idéalisation commune67 » et fondent ainsi un
33 on le manichéisme iranien, dont s’inspiraient les mystiques de l’école illuminative de Sohrawardi, une jeune fille éblouissante a
34 toi-même ! » Or selon certains interprètes de la mystique des troubadours, la Dame des pensées ne serait autre que la part spir
35 n prend garde au double sens du mot salut. f) Les mystiques arabes insistent sur la nécessité de garder le secret de l’Amour divi
36 ge de la mort d’amour est le leitmotiv du lyrisme mystique des Arabes. Ibn-al-Faridh : Le repos de l’amour est une fatigue, son
37 ne peut en vivre.70 C’est ici le cri même de la mystique occidentale mais aussi du lyrisme provençal. C’est l’oraison jaculato
38 n avec l’Être absolu. Aussi Moïse est-il pour les mystiques arabes le symbole du plus grand Amant, puisqu’en exprimant le désir d
39 t à elle les amoureux.71 ⁂ Par quelles voies la mystique arabe et sa rhétorique courtoise eussent-elles pu parvenir, en moins
40 rtes considérables concernant les relations de la mystique soufiste et de la poésie occidentale, à une époque plus tardive il es
41 t pris pour modèle le Livre du Voyage nocturne du mystique Ibn el Arabi, écrit quatre-vingts ans auparavant : ce traité décrit e
42 cte de ces erreurs. Est-ce un défaut d’initiation mystique  ? Est-ce une tradition imparfaite ? Ou encore une tendance hérétique
43 de simples allégories illustrant la morale et la mystique courtoises. Toutes les hypothèses sont permises en l’absence de docum
44 t inférieurs aux troubadours dans la connaissance mystique , ils n’ont pas introduit dans leurs romans que des erreurs. Ils ont t
45 mer seulement l’élan de la passion dans sa pureté mystique . Le point de départ de Lancelot — comme de Tristan — c’est le péché c
46 Il a choisi la voie terrienne, il a trahi l’Amour mystique , il n’est pas « pur ». Seuls les « purs » et les vrais « sauvages » c
47 olonté secrète, mais infaillible, des deux amants mystiques . Dans les légendes celtiques, c’est l’élément épique qui commande l’a
48 nt modernes le principe de cohésion qu’apporte la mystique cathare aux éléments religieux, sociologiques ou épiques, hérités du
49 e : il nous échappe doublement, étant poétique et mystique . Mais nous savons maintenant d’où vient le mythe, et où il mène. Et p
50 pérégrinations. Les religions antiques, certaines mystiques du Proche-Orient, l’hérésie qui les fit revivre en Languedoc, le cont
51 passion n’agissent que dans nos vies privées. La mystique d’Occident est une autre passion dont le langage métaphorique est par
52 e situation sociologique, la confusion de l’amour mystique et de l’amour charnel ait pu s’établir assez vite.) 36. Parmi les se
53 un nom symbolique ou senhal, exactement comme les mystiques soufis désignent Dieu dans leurs poèmes ! 52. Au moment de donner le
54 Essai sur les origines du lexique technique de la mystique musulmane. — Henry Corbin : Édition et introduction de deux traités d
55 belles légendes musulmanes sur la mort par amour ( mystique ). 71. Cf. Massignon et Krauss : Akhbar al-Hallaj, texte relatif à la
56 pourquoi le roman finit « bien » — au sens de la mystique cathare — c’est-à-dire aboutit à la double mort volontaire. 80. H. 
4 1939, L’Amour et l’Occident. Passion et mystique
57 Livre IIIPassion et mystique 1.Position du problème On a souvent tenté d’expliquer le mysti
58 la passion mortelle qu’il faut « ramener » à une mystique , plus ou moins consciente et précise. Il est certain que ce seul exem
59 tait cru en mesure de trancher au détriment de la mystique . À vrai dire, je ne suis pas très sûr que ce problème comporte une so
60 , sa position. Qu’on parte de la passion ou de la mystique pour tenter de ramener l’une à l’autre, ce que l’on admet impliciteme
61 marqué depuis longtemps l’analogie des métaphores mystiques et amoureuses. Mais d’une entière analogie des mots, peut-on conclure
62 les plus convaincantes, que tout intoxiqué est un mystique qui s’ignore86. Or, qu’elle soit physique, ou morale, toute intoxicat
63 imaux ne s’intoxiquent pas87… b) Inversement, la mystique à elle seule, rend-elle compte de la passion ? Il faudrait alors expl
64 nstinct sexuel que l’on a tenté de « ramener » la mystique , et cela bien avant Freud et son école. Voici donc le dilemme que pos
65 et d’une œuvre antérieure à l’essor de la grande mystique orthodoxe, que nous aurons les meilleures chances de surprendre à l’é
66 « choses bizarres »… 2.Tristan : une aventure mystique Nous avons constaté que le Roman de Tristan est, à bien des égards
67 en des égards, une première « profanation » de la mystique courtoise et de ses sources (néo-platonisme, manichéisme, soufisme).
68 s situations romanesques la progression d’une vie mystique . Certains « moments » relèvent de la pure tradition cathare, d’autres
69 d’autres peuvent être rapprochés d’une expérience mystique plus générale, et qu’on retrouve identique, dans sa forme, aussi bien
70 élité de Tristan, c’est l’hérésie, c’est la vertu mystique des « purs », c’est une vertu, selon les auteurs de la légende. Et la
71 se révèle toute comparaison entre deux formes de mystique — et d’autant plus qu’ici l’un des termes en présence se trouve dénat
72 rallèle très général entre le Roman et l’aventure mystique . Quitte à rectifier par la suite les conclusions trop téméraires où n
73 poison de son sang. C’est le type même du départ mystique , de l’abandon à l’aventure surnaturelle. C’est la quête de l’âme péch
74 mais encore éloquents ! Rudiments d’une recherche mystique , qui ne laisse oublier ni la lyre ni l’épée symbolique du défi à la s
75 r seul. Un trait profond de la passion — et de la mystique en général — paraît ici. « On est seul avec tout ce qu’on aime », écr
76 out ce qu’on aime », écrira plus tard Novalis, ce mystique de la Nuit et de la Lumière secrète. Cette maxime traduit d’ailleurs,
77 ligieux du premier ordre et un poème où l’élément mystique revêt les formes les plus rudimentaires ? Certes, ce serait commettre
78 n autre point de comparaison. On sait combien les mystiques espagnols ont coutume d’insister sur le récit de leurs souffrances. P
79 ’une impure et parfois équivoque traduction de la mystique courtoise. (Il arrive que les situations les plus apparemment « mysti
80 arrive que les situations les plus apparemment «  mystiques  » du Roman doivent être interprétées — si l’on ne veut pas errer grav
81 ivin aux métaphores, qui convient pour les grands mystiques .) Ceci dit, nous pouvons retrouver dans le mythe plus d’un aspect des
82 er dans le mythe plus d’un aspect des souffrances mystiques . On se souvient de la plainte du troubadour : Dieu ! comment se peut
83 ration voulue… Nous rejoignons alors la situation mystique (par l’autre extrême) : plus Tristan aime, et plus il se veut séparé,
84 e croiront les siècles à venir —, les similitudes mystiques que nous venons de dégager ne seraient plus que de l’ordre du langage
85 l, le principe véritable de l’opposition des deux mystiques . L’orthodoxe aboutit au « mariage spirituel » de Dieu et de l’âme, dè
86 boutit à le sanctifier par le mariage. Les amants mystiques du Roman chercheront donc l’intensité de la passion et non son apaise
87 mort volontaire dans l’endura. Au contraire, les mystiques chrétiens voient dans les actes et les œuvres qui découlent de l’état
88 s les actes et les œuvres qui découlent de l’état mystique les critères de sa vérité91. C’est du moins le mouvement constant de
89 mouvement qui fait défaut, théoriquement, à toute mystique fondée sur l’Éros lumineux. Mais il faut indiquer la dernière limite,
90 atériel d’un processus de divinisation. Les vrais mystiques , tout au contraire, sont la prudence même, la rigueur même, l’obéissa
91 abus, et sans le savoir, un langage dont la seule mystique définissait le sens valable. Plus d’une fois, l’ambiguïté du mythe no
92 dresser à sa Dame. L’amant habitué aux métaphores mystiques , qu’il entend à leur sens profane, sera tenté de voir dans cette même
93 r « expliquer » le plus élevé par le plus bas, la mystique pure par la passion humaine. Elle a fondé cette « science » nouvelle
94 deux cas. Or d’où venaient ces métaphores ? D’une mystique , comme nous l’avons vu — mais déguisée, persécutée, puis oubliée. À t
95 e, et passée dans les mœurs comme poésie, que les mystiques chrétiens utiliseront ses métaphores devenues profanes comme si elles
96 ns. Par exemple, là où la science proclame que la mystique résulte d’une sublimation de l’instinct, il suffira de changer le sen
97 nct » en question résulte d’une profanation de la mystique primitive. ⁂ Cependant, la conscience moderne montre une si grande ré
98 es objections courantes. Car enfin, dira-t-on, la mystique , au moins dans une de ses tendances, ne s’est-elle pas prêtée à toute
99 la première du langage de l’Éros païen ? 4.Les Mystiques orthodoxes et le langage de la passion Le fait central de toute vi
100 ur sexuel. À l’inverse, on peut observer chez les mystiques les plus « christocentriques » une propension à s’adresser à Dieu dan
101 eux grands courants que nous retrouverons dans la mystique universelle. Ils seront d’ailleurs rarement purs dans telle ou telle
102 se est claire. Le premier courant est celui de la mystique unitive : il tend à la fusion totale de l’âme et de la divinité. Le s
103 é. Le second courant peut être appelé celui de la mystique épithalamique : il tend au mariage de l’âme et de Dieu, et suppose do
104 emier exemple à l’ouvrage de Rudolf Otto intitulé Mystique occidentale-orientale 93. L’auteur compare, puis oppose le fondateur
105 L’auteur compare, puis oppose le fondateur de la mystique allemande au xive siècle, Maître Eckhart, et le mystique hindou Sank
106 allemande au xive siècle, Maître Eckhart, et le mystique hindou Sankara. Ce qui est intéressant pour notre objet, c’est que Ru
107 istingue l’Orient de l’Occident en ramenant leurs mystiques respectives à l’Éros et à l’Agapè, d’une manière assez analogue à cel
108 r le fait qu’il existe au Moyen Âge une tradition mystique parallèle à celle de Sankara. « Mystique de l’ivresse sentimentale — 
109 radition mystique parallèle à celle de Sankara. «  Mystique de l’ivresse sentimentale — écrit Otto — à la faveur de laquelle le J
110 faire son maître. Plotin lui aussi prêche l’amour mystique , mais l’amour plotinien n’est nullement l’Agapè chrétienne : c’est l’
111 de l’homme fervent. » Pour Eckhart, la vraie voie mystique n’est pas celle qui, s’élevant d’un état de sentiment, mènerait à une
112 n’est donc pas, conclut Otto, la plus haute joie mystique qui figure pour Eckhart l’expression authentique de l’union divine, m
113 nkara. Voici donc, semble-t-il, deux pôles de la mystique universelle très nettement caractérisés. L’Orient (c’est-à-dire Sanka
114 es par lesquels nous avons tenté de distinguer la mystique des cathares et la doctrine chrétienne de l’amour. ⁂ Mais Eckhart ne
115 côté de « l’Orient », c’est-à-dire du côté d’une mystique essentiellement unitive, et par cela même hérétique… Ce qui est certa
116 ificatif de constater que Eckhart souleva dans la mystique flamande une opposition très violente, et sur les chefs précis dont O
117 c’est bien ce que l’Histoire démontre. « Chez les mystiques eckhartiens — écrit l’abbé Paquier98 —, je ne sais si l’on rencontre
118 e la distinction essentielle qu’apparaît, dans la mystique du Nord, le langage « épithalamique ». « Voici donc venu l’irrésistib
119 possible une confrontation. Mais la lecture des mystiques franciscains, dès le xiiie siècle, nous eût fourni un autre exemple
120 tour devait influencer si profondément le langage mystique des siècles suivants. Souviens-toi, ô créature, que ta nature est ce
121 Amour.104 5.La Rhétorique courtoise chez les mystiques espagnols Si maintenant nous parcourons les textes des grands myst
122 maintenant nous parcourons les textes des grands mystiques espagnols, sainte Thérèse et saint Jean de la Croix au xvie siècle,
123 principaux thèmes communs aux troubadours et aux mystiques orthodoxes : « Mourir de ne pas mourir.106 » La « brûlure suave ». L
124 sans compter que le jugement matérialiste sur les mystiques est plus révélateur de l’obsession de ceux qui le portent que de l’ob
125 ge de la passion — tel qu’on le retrouve chez les mystiques  — n’est pas, à l’origine, celui des sens et de la nature, mais il est
126 tout d’abord, soulignons bien que le langage des mystiques ne saurait être confondu avec la nature profonde de l’expérience qu’i
127 oute, le plus purement, sa nature ?107 » Tous les mystiques , et sainte Thérèse la première, se plaignent de n’avoir pas de mots n
128 ésitent encore lorsqu’il s’agit d’attribuer à tel mystique fort bien connu, et orthodoxe par-dessus le marché (Ruysbroek ou sain
129 ces certaines. « On a souvent signalé le goût des mystiques pour la littérature chevaleresque. Sainte Thérèse raffolait dans sa j
130 rs de romans de chevalerie comme ceux des traités mystiques se caractérisent par le même réalisme quand ils sacrifient le sentime
131 es pauvres extravagances des romans de chevalerie mystique (la Gallarda Espirituel, El divino Escarraman) qu’il faut chercher la
132 ymbolisme et de leur terminologie passent dans la mystique du xiiie siècle par l’intermédiaire de saint François d’Assise. En s
133 ’il cachait autre chose que la nature, — c’est la mystique chrétienne qui vient le reprendre pour en revêtir Agapè ! ⁂ Quant à l
134 que les mouvements de la chair attirée par l’élan mystique en ses débuts (Nuit obscure, I, v. 3) ne s’exagère pas plus qu’il ne
135 métaphores empruntées au langage courant par les mystiques n’est pas sans d’étroites relations avec leur doctrine de l’union ou
136 nte de celles d’Eckhart. Voilà pourquoi ce fut la mystique orthodoxe — la moins suspecte de troubles complaisances ! — qui se vi
137 tion, et dire : le langage passionnel vient de la mystique cathare, admettons-le ; mais cette mystique, à son tour, ne se ramène
138 de la mystique cathare, admettons-le ; mais cette mystique , à son tour, ne se ramène-t-elle pas à des dispositions physiologique
139 nt impliqués. Par exemple, dans le cas du langage mystique  : sommes-nous en présence d’une matérialisation du spirituel — et cel
140 te Thérèse parle sans cesse d’amour —, donc cette mystique est une érotomane qui s’ignore. » Mais nous avons vu que sainte Thérè
141 re, les amants « passionnés » sont sans doute des mystiques qui s’ignorent… Ainsi les arguments s’annulent. Nous ne savons rien d
142 , et devient langage commun. Maintenant, quand un mystique veut exprimer ses expériences ineffables, il est contraint de se serv
143 s sont celles de la rhétorique courtoise. Que les mystiques s’en emparent sans hésiter ne signifie donc pas du tout qu’ils « subl
144 ituelle de ces passions, créée d’ailleurs par une mystique , convient à l’expression de l’amour spirituel qu’ils vivent. Et elle
145 re la donnée première. 7.Libération finale des mystiques Cette décision tout arbitraire, il est temps de la prendre ici, et
146 reste pas moins que celui-ci est postérieur à la mystique pseudo-chrétienne des cathares. 3° C’est sans doute à tort qu’à la pr
147 ort qu’à la proposition : « Tout érotomane est un mystique qui s’ignore », on a cru pouvoir répondre : « Ou l’inverse. » Il se p
148 l’on est en droit d’y voir le rudiment d’un appel mystique , il n’en reste pas moins que l’intoxiqué est avant tout l’esclave de
149 ffaiblit, et qui finit dans l’idiotie. Les grands mystiques , tout au contraire, insistent sur la nécessité de dépasser l’état de
150 à mieux agir, à mieux aimer. Surtout, les grands mystiques s’accordent à voir le terme de leur ascension dans la liberté souvera
151 termes différents la même chose : il faut que le mystique arrive « à se passer du don », à ne plus le désirer pour lui-même. Da
152 là des transes et au-delà de l’ascèse, l’aventure mystique culmine dans un état d’extrême « désintoxication » de l’âme. Dans la
153 ce de l’Éros, mais fécondité de l’Agapè. Ainsi la mystique orthodoxe apparaît-elle enfin comme la voie purgative par excellence,
154 me de l’Incarnation qui distingue radicalement la mystique orthodoxe de l’hérétique. C’est lui qui donne un sens tout différent
155 ble union avec la femme ; gardant de ses origines mystiques on ne sait quoi de divin, de faussement transcendant — une illusion d
156 s que fait l’Éros pour remplacer la transcendance mystique par une intensité émue. Mais grandiloquentes ou plaintives, les figur
157 ines, essai sur quelques formes inférieures de la mystique . Paris 1936. 87. Il y a bien l’exemple de la formica sanguinea. Cet
158 se révèlent plus décevantes que dans l’étude des mystiques . Comme l’a fort bien noté J. Baruzi (Saint Jean de la Croix, p. 618)
159 tentions de prendre une vue générale des diverses mystiques connues, « l’expérience mystique ne nous semblerait d’un type homogèn
160 le des diverses mystiques connues, « l’expérience mystique ne nous semblerait d’un type homogène que dans la mesure où elle sera
161 omme un critère lorsqu’il s’agit de savoir si tel mystique croyait ou non à l’union essentielle ? Dans ce cas, la remarque de l’
162 ne peut m’avoir. » 100. Th. Labande-Jeanroy, Les Mystiques italiens (introduction à une anthologie). 101. Id., Ibid., et P. Sa
163 siècle. 104. Ciascun amante, danse de l’amour mystique . Voir aussi l’Appendice 9. 105. On en trouvera d’ailleurs quelques é
164 uzi, Introduction à des recherches sur le langage mystique . (Recherches philosophiques, I, 19.) 108. Saint Jean de la Croix et
165 9.) 108. Saint Jean de la Croix et l’expérience mystique , p. 343. 109. Maxime de Montmorand, Psychologie des mystiques cathol
166  343. 109. Maxime de Montmorand, Psychologie des mystiques catholiques orthodoxes. 110. Gaston Etchegoyen, l’Amour divin, essai
5 1939, L’Amour et l’Occident. Le mythe dans la littérature
167 t simplifications). En esquissant la courbe de la mystique classique, nous avons pu décrire une assomption du mythe. C’était la
168 souvent troublants : nous l’avons vu à propos des mystiques . Mais en l’absence de preuves presque impossibles à établir, pour la
169 ttérature courtoise s’est détachée de ses racines mystiques  ; elle s’est alors trouvée réduite à une simple forme d’expression, c
170 plus du tout religieuse. Ce n’est plus une ascèse mystique , mais un raffinement de l’esprit, qui doit amener l’amant à mériter l
171 oute ne demeure possible : l’Amour est la passion mystique . Mais encore faut-il définir le rôle de l’amour naturel dans cette pe
172 poésie plus adéquate que nulle autre à servir la mystique orthodoxe. Et cette dernière ne manquera pas d’y puiser ses meilleure
173 menés à redécouvrir le sens original des légendes mystiques . Mais alors ils ne peuvent se servir que d’une mythologie toute catho
174 s sectes néo-manichéennes. 8. L’Astrée : de la mystique à la psychologie L’histoire du mythe dans le Roman, au xviie sièc
175 çais, peut se réduire, hélas, en une formule : la mystique se dégrade en pure psychologie. Le Roman devient l’objet d’une littér
176 me de sa perfection, n’est qu’un sous-produit des mystiques créatrices de formes et de mythes ? Et qu’elle suppose, pour fleurir
177 — comme il apparaît de nos jours ? Alors que les mystiques et les religions prennent au contraire une grande vigueur dans les ré
178 . Il y manque l’aspect nocturne, l’épanouissement mystique dans la vie infinie de la Nuit. Il y manque ce que l’on pourrait appe
179 ndé à contester la vérité dernière de la croyance mystique (manichéenne) qui est à l’origine de la passion et de son mythe : du
180 e en un seul cas, d’ailleurs le seul prévu par ce mystique  : si la cause extérieure est un Dieu auquel notre âme pourrait s’iden
181 aint-Preux, malgré son beau nom, n’a plus rien du mystique ni du chevalier. Au surplus, le roman n’aboutit à la mort qu’après un
182 ïse, que le romantisme va tâcher de rejoindre une mystique primitive qu’il ignore, mais dont il redécouvre, par éclairs, la vert
183 à jamais insatiable. C’est toute l’aventure des mystiques unitives qui de nouveau prend son départ dans la conscience occidenta
184 e inspiré par le souvenir des cathares et de leur mystique fut composé par l’un des plus purs romantiques : c’est l’épopée des a
185 « endieusement » des troubadours, l’endiosada des mystiques espagnols, la joy d’amor dans son délire dionysiaque. Il en jaillit p
186 la passion de la Nuit. Mais il n’est point d’aube mystique à l’horizon spirituel, ni de véritable joie d’amour au sommet de ces
187 te, et plus proche qu’on ne pourrait croire de la mystique négative. La plupart reviendront aux illusions de l’amour humain, san
188 lture, et spécialement de la littérature, puisque mystique et religion, pour lui, sont mortes. Mais il est obligé de constater q
189 vengeance, brutale, accidentelle, privée de sens mystique . Or la Minne suprême inspire à Brangaene l’erreur qui doit sauver l’A
190 ssion, accomplissement mortel : ces trois moments mystiques auxquels Wagner, par une géniale simplification, a su réduire les tro
191 -vivre obscurcissant la connaissance, toute cette mystique que l’on s’empresse de qualifier de bouddhiste, Wagner n’avait pas à
192 rouve privé de son cadre sacral, et que le secret mystique qu’il exprimait en le voilant se vulgarise et se démocratise. Le droi
193 ents de cette littérature à concevoir une réalité mystique , une ascèse, un effort de l’esprit pour s’affranchir des liens sensue
194 par rapport à l’ivresse divine que chantaient les mystiques arabes. L’exemple du théâtre d’avant-guerre détient une signification
195 nte de la passion. Car celle-ci survivait à toute mystique , par la grâce équivoque du romantisme. L’hérédité — ou ce qu’on nomma
196 a volonté même de le nier. L’ambiguïté du langage mystique de l’hérésie devait faire naître, dès le xiiie siècle, une rhétoriqu
197 tant de vitalité qu’une vache. » ⁂ Cette nouvelle mystique de la « Vie » a pu donner naissance à de belles œuvres littéraires. M
198 l’artificiel — rhétorique idéalisante, éthique et mystique du « parfait » — l’on prétend s’enfoncer dans le flot primitif de l’i
199 ier les puissances anarchiques de la passion. Une mystique transcendante orientait secrètement, polarisait vers l’au-delà les no
200 ermes de l’amour humain, bien qu’entendus au sens mystique . Ce sens évanoui restait une rhétorique. Elle pouvait exprimer nos in
201 ’avait laissé dans la conscience une connaissance mystique réprouvée, puis perdue. Telle fut la chance de la littérature en Occi
202 rulence provisoire qu’en se mettant au service de mystiques partisanes ? Serait-ce la fin du romantisme ? Le spectacle de nos mœu
203 ient prétexte à « passion » et déjà s’exalte en «  mystiques  ». C’est que nous sommes devenus incapables de faire la part du feu,
204 ce de cette littérature sur sainte Thérèse et les mystiques espagnols en général. 133. La Tragédie de Roméo et Juliette, traduc
205 on de ce que nous disions à propos d’Eckhart : la mystique unitive ignore la passion divine. 140. Doctrine fabuleuse , en pré
206 e ? Beaucoup de dames d’aujourd’hui croient que «  mystique  » signifie sentimental. Vitraux, pénombre bleue, arpèges, somnolence
6 1939, L’Amour et l’Occident. Amour et guerre
207 u — d’un ensemble de mœurs et de coutumes dont la mystique courtoise a créé les symboles. Or passion signifie souffrance. Notre
208 lit ! » Il ne faudra pas s’étonner si les auteurs mystiques reprennent ces métaphores devenues banales, et les transposent selon
7 1939, L’Amour et l’Occident. Le mythe contre le mariage
209 t encore du fait que l’on ignore la signification mystique de ses symboles, et que ceux-ci ne paraissent plus révélateurs que d’
210 er de pécher et le remords, devient soudain vertu mystique (dans le symbole), puis se dégrade (dans la littérature) en aventure
211 on d’un roturier à la chevalerie était un symbole mystique bien plutôt qu’une dérogation aux coutumes du droit féodal. Mais là-d
212 -même ou la vie en général : dernier relent de la mystique primitive. De la poésie à l’anecdote piquante, la passion c’est toujo
213 ui. Pitoyables victimes d’un mythe dont l’horizon mystique s’est refermé depuis longtemps. Pour Tristan, Iseut n’était rien que
214 . Il était de la nature essentielle de la passion mystique d’être sans fin — et c’est par là que cette passion se détachait des
215 des amants « ravis » s’est dégradé en perdant sa mystique . Le ravissement n’est plus qu’une sensation, — n’aboutit pas. On reto
8 1939, L’Amour et l’Occident. L’Amour action, ou de la fidélité
216 ité du mythe, et de Tristan. C’est un narcissisme mystique , mais qui s’ignore, naturellement, et qui croit être un vrai amour po
217 se un moi purifié, « innocent » ! De ces origines mystiques , la « fidélité passionnée » n’a gardé parmi nous que l’illusion d’acc
218 ment pris pour ce monde. Partant d’une déraison «  mystique  » (si l’on veut), indifférente, sinon hostile au bonheur et à l’insti
219 nt de l’amour, et c’est ce qu’il nomme le mariage mystique . L’âme se comporte alors à l’endroit de son amour avec une sorte d’in
220 evoir que la passion, née du mortel désir d’union mystique , ne saurait être dépassée et accomplie que par la rencontre d’un autr
221 Comme le croira cependant Novalis, renouvelant la mystique courtoise et les vieilles traditions celtiques. 202. En quoi consist
9 1939, L’Amour et l’Occident. Appendices
222 re mari et femme est jugée inconvenante. 5. –  Mystique et amour courtois Dans un appendice à son beau livre sur la Théolo
223 ns un appendice à son beau livre sur la Théologie mystique de saint Bernard (Paris, 1934, p. 193 à 216), M. Étienne Gilson exami
224 xamine le problème d’une influence possible de la mystique cistercienne sur les troubadours. En effet, « chronologiquement parla
225 r l’opposition évidente entre la courtoisie et la mystique de saint Bernard n’est pas seulement, comme l’a vu M. Gilson, celle d
226 otre auteur — sur l’objet et la nature de l’amour mystique tel que le conçoit saint Bernard : c’est un amour spirituel, par oppo
227 r n’est pas spirituel. — Mais plus tard, d’autres mystiques catholiques, sainte Thérèse et saint Jean de la Croix, reprendront be
228 sans être transcendant, il n’y a pas de problème mystique au sens où les chrétiens l’entendent. Ce qu’ils ont à expérimenter… c
229 s sépare les amants, au lieu que celle de l’amour mystique les unit ». Mais il faut voir que les amants courtois ne sont séparés
230 ont séparés sur la terre qu’en vertu de cet amour mystique qui les unit à la divinité ! Au contraire, l’amour mystique orthodoxe
231 ui les unit à la divinité ! Au contraire, l’amour mystique orthodoxe n’unit pas de cette façon, mais fait seulement communier.
232 du templarisme albigeois, qui par un dédoublement mystique de l’âme et du corps, étaient censés avoir les deux sexes, hommes en
233 influence possible de l’hérésie courtoise sur la mystique franciscaine. Il commence par nier toute communication directe de l’u