1 1942, La Part du diable (1982). Introduction. Que la connaissance du vrai danger nous guérit des fausses peurs
1 , je dis au Philosophe1 : — Fort bien, mais si je parlais du diable, c’est moi qui passerais aussitôt pour un personnage diabol
2 ait arrivé au fumoir. Et tout le monde se remit à parler des nouvelles du jour comme si le diable n’existait pas. Pourtant le
3 u sujet, sait-on jamais lequel a choisi l’autre ? Parler du diable, écrire sur lui, n’était-ce pas une manière imprudente de l
2 1942, La Part du diable (1982). L’Incognito et la révélation
4 iècles. La Bible — c’est un fait trop peu connu — parle beaucoup moins du mal en général que du Malin personnifié (tout au mo
5 tisée, certaines structures profondes du réel. Je parle de structures littéralement fondamentales, car elles sont antérieures
6 rend figure et nom, tout est personnifié. Ainsi, parler du diable ne sera pas ici quelque moyen facile d’illustrer des idées.
7 it naître aucun plaisir », et que la volupté dont parle Baudelaire devrait être plutôt nommée : douleur aimée, désir inconsci
8 de l’instinct. Mais l’homme a reçu le pouvoir de parler , de créer, et de dénaturer. Par la grâce du langage, il peut dire le
9 ou soi-même, soyons sûrs que c’est le diable qui parle , l’Accusateur qui tient le pardon pour une simple faute de logique, l
10 de ces dames charmantes qui se récrient dès qu’on parle du diable : — C’est trop affreux, vous me faites trop peur, je sens q
11 es et des spirituels mieux réveillés : « Pourquoi parler d’un diable personnel ? Nous voyons bien le péché, mais pas le diable
3 1942, La Part du diable (1982). Hitler ou l’alibi
12 e hystérie qui les pousse en avant ». Ailleurs il parle de « l’appel aux forces mystérieuses » qui pourra seul réduire les « 
13 caoutchouc) que fut le national-socialisme. Je ne parle pas ici du christianisme, mais de la religion en général comme phénom
14 cause et produit de toute communauté vivante. Je parle d’un instinct aussi fondamental et naturel que la sexualité. Il est i
15 ification temporaire des conflits individuels. Je parle d’un état d’exception comme on dirait état de siège ou état de grâce.
4 1942, La Part du diable (1982). Le diable démocrate
16 rtaines simplifications le perdent à coup sûr. Je parle ici comme un Européen qui a vu de près des phénomènes bizarres de dés
17 renaître aussitôt avec un risque neuf. Mais nous parlions , dites-vous, de liberté politique. J’y viendrai donc. Ce qui est en c
18 utre. « Réellement, docteur — et c’est Madame qui parle  — je ne vois pas quel reproche nous aurions à nous faire à cet égard.
19  ». Ce qui est complètement différent. 14. Je ne parle pas des héros de la guerre, mais de la paix. 15. Est-ce un si grand
5 1942, La Part du diable (1982). Le diable dans nos Dieux et dans nos maladies
20 i cet homme, auquel le Christ vient de dire qu’il parlait selon le Père, parle-t-il maintenant selon le diable ? Ce coup de thé
21 Christ vient de dire qu’il parlait selon le Père, parle-t -il maintenant selon le diable ? Ce coup de théâtre, l’un des plus stu
22 nt moins d’appel pour nos contemporains, et je ne parle pas des incultes mais de l’élite intellectuelle. Vous rencontrez de g
23 que j’aie connus qui croient au diable et qui en parlent bien. La discussion de cette sentence inconfortable ne paraît que tro
24 e inexplicables : les tables tournent, les cartes parlent , les pensées se transmettent en silence. Tous les signes du monde nou
25 train de faire ou de dire, on ne sait plus ce qui parle à travers nous, tandis que le sang court plus vite, et que les yeux b
26 iabolique. Je croyais alors que j’étais le seul à parler et que ce dialogue spécieux je l’engageais avec moi-même. J’avais ent
27 a pas de pire ennemi que « l’amour » tel qu’on le parle , c’est que le plus beau mot de toutes les langues est pipé sur nos lè
28 t pipé sur nos lèvres par Satan. Nulle époque n’a parlé davantage de l’amour, avec si peu d’exigence réelle. Le diable nous a
29  fatalité » de la passion n’est qu’une manière de parler romanesque, mais combien d’amoureux s’en autorisent pour éviter d’avo
30 os désirs à l’amour du prochain, et le cœur (pour parler noblement) à la tête. Car ainsi que le remarquait Nietzsche : « Ne tr
31 rite l’épithète d’humain. 52. La passion Je parlerai maintenant de l’amour même, non plus de ses contrefaçons. Je parlerai
32 de l’amour même, non plus de ses contrefaçons. Je parlerai de la passion dans son éclat. L’amour-passion, signe particulier de l
33 e et s’emporte à la diviniser, que le Tentateur a parlé . « Vous serez comme des dieux, vous êtes seuls au monde, désormais to
34 n fait, hélas, une théorie. Tout amant romantique parle ici comme une femme, s’il n’est plus maîtrisé par l’homme en lui. Con
35 qu’elle lui cassa les dents. Il aurait bien voulu parler , mais la douleur tordait les mots avant qu’ils aient quitté sa langue
6 1942, La Part du diable (1982). Le Bleu du Ciel
36 , les survivants ! Que l’Esprit vienne, certes je parlerai  ! Mais si je parle, est-il déjà venu ? Lui seul le sait. Somnium nar
37 l’Esprit vienne, certes je parlerai ! Mais si je parle , est-il déjà venu ? Lui seul le sait. Somnium narrare vigilantis est
38 i de saint Paul : « J’ai cru, c’est pourquoi j’ai parlé  ! » Qu’ai-je donc cru, qui m’ait permis d’articuler ce peu que j’ai p
39  : Fils de l’homme, dis au prince de Tyr : Ainsi parle le Seigneur, l’Éternel. Ton cœur s’est élevé et tu as dit : Je suis D
40 pitaux ton cœur s’est élevé. C’est pourquoi ainsi parle le Seigneur, l’Éternel : Parce que tu prends ta volonté pour la volon
41 e le Seigneur te réprime ! Eux, au contraire, ils parlent d’une manière injurieuse de ce qu’ils ignorent, et ils se corrompent
42 èbres est réservée pour l’éternité. » Mais de qui parle-t -il ainsi ? Il tient à nous que ce ne soit pas de nous… 61. L’exorc
43 qui gardent la mesure humaine. Là, le voisin peut parler au voisin et l’individu se faire entendre. Les conséquences des actio
44 nt nulle part. Notre langage est débrayé. Plus on parle , moins on s’entend. La mort seule met tout le monde d’accord. Le xxe
45 e cauchemar verbal, de cacophonie délirante. On y parlait plus qu’on n’avait jamais parlé : imaginez ces postes de radio qui ne
46 délirante. On y parlait plus qu’on n’avait jamais parlé  : imaginez ces postes de radio qui ne peuvent plus se taire ni nuit n
47 bavardages, s’évanouissent dès que l’Esprit nous parle , par une phrase de la Bible ou de nos liturgies, par un mot que dit u
48 s syllabes vivent : tout d’un coup elles nous ont parlé . (La naissance d’un poème ou d’un rythme de phrase, quelque part en n
49 fait qu’à de certains moments, certains mots nous parlent , et non d’autres, fût-ce à voix basse, au secret d’un cachot. Ils pou
50 nte intelligible, — c’est elle à présent qui nous parle  ! 65. Vertus J’ai désigné les dimensions de l’Ordre indestructi
51 it mesquin de s’y tenir. Personne n’osait plus en parler  : elle n’était plus que la moralité. Je ne sais quel ridicule s’attac
52 role n’y est plus que mensonge dirigé. 32. Je ne parle pas de l’immoralité, j’ignore si elle était plus grande qu’en d’autre
7 1982, La Part du diable (1982). Postface après quarante ans
53 avec Ernst Erich Noth, romancier allemand. Je lui parlais de mon livre en train. « Comment, me dit-il, vous pouvez encore vous
54 Par où l’on voit qu’il est presque impossible de parler de lui d’une manière innocente ou détachée, ni sans une sorte d’indir
55 e prouver qu’il était dieu et n’en revint pas. Je parlais d’un ordre du monde, voulu par Dieu, auquel le diable nous incite à c
56 culs apparents du christianisme en Occident, sans parler de sa quasi-interdiction en URSS, de sa suppression en Chine, et en d
57 omission. — À l’époque où j’écrivais ce livre, on parlait déjà beaucoup de la « mort de Dieu », on en parlait depuis un peu plu
58 rlait déjà beaucoup de la « mort de Dieu », on en parlait depuis un peu plus d’un demi-siècle. Malraux avait repris le thème de
59 tre allait lui emboîter le pas. Mais personne n’a parlé — même pas moi ! — de la mort du diable. Et pourquoi cette étrange om
60 consument — dans ce ravin de la Géhenne dont nous parlent les évangiles, et qui était en réalité le lieu de la décharge municip
61 is j’ai rappelé ce qu’était la Géhenne dont Jésus parle à mainte reprise. Je ne connais pas de meilleure définition de l’Enfe