1 1937, Journal d’un intellectuel en chômage. N’habitez pas les villes !
1 ubtile et précise qui en dit long sur l’âme de ce peuple discret. C’est l’impression que je veux retenir pour le moment des ge
2 trouvent en dépôt chez la mère Renaud : l’Ami du Peuple ou la France de Bordeaux, la feuille locale des curés ou celle des ré
3 Un brouillard vague flottait sur les marais. « Le Peuple  », me disais-je en pédalant, ce qu’ils appellent le Peuple !… je revo
4 me disais-je en pédalant, ce qu’ils appellent le Peuple  !… je revoyais cette centaine d’hommes dans la salle nue. Leur méfian
5 n eux, et pour eux-mêmes sans doute. Et on dit le Peuple , la volonté du Peuple, — comme si on ne les avait jamais vus ! ou jam
6 es sans doute. Et on dit le Peuple, la volonté du Peuple , — comme si on ne les avait jamais vus ! ou jamais aimés. Là-dessus,
7 ier, à A. Il me semble qu’elle m’apprend sur « le peuple  » davantage que toutes mes expériences précédentes. Il me semble même
8 tes. Il me semble même qu’elle m’a fait voir « le peuple  » pour la première fois de ma vie. Première constatation : l’apathie
9 eilles de phrases sur la volonté et la mission du peuple . On a beau se méfier des phrases, il faut se trouver placé soudain de
10 es mentent, et quel immense désir de réveiller le peuple elles traduisent chez certains qui les prononcent de bonne foi. Elles
11 dant ils sont la réalité vivante et présente du «  peuple  ». Par contre, il est très facile de haïr et de condamner un certain
12 l est très tentant d’appeler cette haine amour du peuple … Troisième constatation : la plupart des discours que l’on tient au p
13 ation : la plupart des discours que l’on tient au peuple lui sont incompréhensibles ; mais ceux qui les écoutent ont l’air de
14 ectuels sont en mauvaise posture pour agir sur le peuple . Qu’ils disent des vérités ou des mensonges, on n’applaudira guère qu
15 ’agiter dans le vide — ce qui est malsain — et le peuple à ne pouvoir se libérer des charlataneries politiques autrement que p
16 s » d’aujourd’hui ne pense pas très différemment. Peuple ou « clercs », ils estiment également que la « vérité » n’engage à ri
17 s’en vantent : c’est plus commode ainsi. Quant au peuple il y a belle lurette qu’il sait ce qu’on doit penser des gens instrui
18 es conditions, qu’un intellectuel aille parler au peuple , on l’écoutera bien patiemment, s’il a su se rendre sympathique et su
19 Cela va de soi. Il est probable qu’aucun homme du peuple ne s’est jamais dit cela comme je le dis ici. Mais il me paraît clair
20 der plus objectivement ceux qui m’entourent, ce «  peuple  » qu’il s’agit d’aider, et que je vois encore si mal. (Ce qui ne m’a
21 c’est le seul moyen de transformer et d’animer un peuple auquel on n’a pas su donner le sens civique, le sens de la communauté
22 ui est-ce qui se préoccupe en France de donner au peuple une éducation solidariste ? On cherche à enrôler ces cultivateurs dan
23 ar des gens qui recherchent la « considération du peuple  ». D’où le ton haineux, typiquement petit-bourgeois, de certaines de
24 feuilles. Je n’ai jamais retrouvé ce ton dans le peuple . S’il en paraît parfois, par accident, quelques traces ici ou là, c’e
25 accident, quelques traces ici ou là, c’est que le peuple de France lit trop de journaux, ne lit que cela, et finit par se croi
26 aux, ne lit que cela, et finit par se croire « le Peuple  » tel que l’imaginent les bourgeois et leurs journalistes. Ce n’est p
27 te la place. Abîme entre la politique des amis du peuple , et la réalité du peuple : rien ne le rend plus sensible que cette di
28 la politique des amis du peuple, et la réalité du peuple  : rien ne le rend plus sensible que cette différence de ton entre tel
29 reconnaître dans leur existence le beau mythe du peuple primitif aux prises avec les éléments hostiles. En vérité, ils vivent
30 , menace ou entreprise commune, qui rassemble les peuples et les pousse à créer des signes visibles de leur union : assemblées,
31 Il faut vivre à Paris pour y croire. Réveillez ce peuple , il sera peut-être capable de grandes choses — c’est son mystère — ma
32 guerres de religion ont tiré de l’héroïsme de ce peuple . Mais combien se feraient tuer aujourd’hui pour sauver leurs pratique
33 is longtemps ou depuis toujours par une partie du peuple , est au contraire dans la révolution matérielle. Mais cette révolutio
34 qui en sont dépourvus, attribuent par erreur au «  peuple  » en général. Sans compter les moyens techniques dont ils disposent e
35 r ma condition… » 16 mars 1934 D’un autre «  peuple  ». — Il faut encore que je revienne sur mon séjour vendéen. J’avais à
36 ement vraies. Ce qui est faux, c’est de parler du peuple en général. — « On le savait depuis longtemps. » — On sait tant de ch
37 ationaliste de la scission entre la culture et le peuple  » cela ne peut accrocher à rien dans cet être que j’ai devant moi, av
38 ais eu la moindre idée. Si je remplaçais le mot «  peuple  » dans mon livre, par une série de noms propres d’hommes du peuple qu
39 livre, par une série de noms propres d’hommes du peuple que j’ai connus, est-ce que mes raisonnements ne paraîtraient pas lou
40 ener tous les jours parmi la confusion d’un grand peuple , avec autant de liberté et de repos que vous sauriez faire dans vos a
41 is le malheur du jour d’aujourd’hui, c’est que le peuple qui lit les journaux a l’esprit plus « artializé » encore que les écr
42 d’artifice. Pourquoi s’obstineraient-ils à parler peuple à un peuple habitué dès l’école à ne plus se reconnaître dans l’écrit
43 Pourquoi s’obstineraient-ils à parler peuple à un peuple habitué dès l’école à ne plus se reconnaître dans l’écrit ? 17 avr
44 bâtiment. Il y a bien assez à faire dehors, et le peuple m’intéresse infiniment. Hier, je suis resté longtemps au marché, et j
45 ui de nouveau s’impose à moi, ici, c’est celle du peuple . Grande masse ! Et une existence nécessaire, dépourvue d’arbitraire.
2 1937, Journal d’un intellectuel en chômage. Pauvre province
46 humaine, malgré tout. Pourtant c’est bien ici le peuple « raisonnable » qu’on donne en exemple aux barbares de l’Europe centr
47 en exemple aux barbares de l’Europe centrale. Le peuple qui sait calculer, faire son budget, bourrer le bas de laine et nourr
48 teur ont raison. Et que la santé spirituelle d’un peuple n’est pas totalement compromise quand il fait encore des enfants en d
49 par exemple. Les instituteurs d’A… ? Ils sont du peuple . Oui, mais bourgeois par leur profession. Et les Calixte ? Prolétaire
50 e — où l’on s’imagine bien à tort que les gens du peuple sont spécialement adroits de leurs mains, débrouillards et pleins de
51 alement, les mots n’ont plus le même sens pour le peuple et pour ceux qui voudraient lui parler. Le petit exemple que je viens
52 et précise. Ils n’éveillent plus chez l’homme du peuple les mêmes espoirs, les mêmes dégoûts que chez nous. Leur résonance se
53 surveillé des écrivains dans le langage parlé du peuple fut affectée de malentendus de ce genre. Voire. Le peuple ne lisait p
54 ut affectée de malentendus de ce genre. Voire. Le peuple ne lisait pas, avant l’école de Guizot. Le « public », c’était la nob
55 se, et les bourgeois imitant la noblesse. Le vrai peuple les comprenait dans la seule mesure de l’utile. L’Église faisait le t
56 provoquant chaque fois de gros rires. L’homme du peuple — et je pense qu’il en va de même du bourgeois peu cultivé et sans do
57 rapides se trouve par là même inefficace sur le «  peuple  ». Elle manque de durée. Évitant méticuleusement les reprises, les re
58 20 décembre 1934 « Ô pays sans musique ! ô peuple , où est ton chant ? » À peine un aigre sifflotis d’« air de Paname »
59 e impensable. Quand on en vient à désespérer d’un peuple , d’un régime, ou de soi-même, quand on prêche et proclame d’une voix
60 sont peut-être moins bas que ces « assurés ». Ce peuple à la retraite qui meurt en rouspétant contre les bureaucrates ne sait
61 sur tout plein d’objets ». Malchance affreuse du peuple français : il n’échappe aux jésuites que pour tomber dans le fétichis
62 écouvrant, les liens profonds qui m’unissent à ce peuple de paysans et d’ouvriers, si délibérément superstitieux dans leur con
63 deux faits définis, revenons à la superstition du peuple . Je l’approuve et je la partage en fait le plus souvent, quand elle e
64 chant et profondément rassurant. Il est encore un peuple au monde pour qui le souci de se montrer humain prime cette volonté d
65 ouve simplement, une fois de plus, que l’homme du peuple ne comprend pas profondément ce qu’on lui donne à lire ou à entendre.
66 on du « fasciste » ou du disciple de Lénine. — Le peuple , tel qu’il est en réalité, ou tel qu’il est devenu après x années de
67 de régime capitaliste parlementaire et laïque, le peuple ne sait plus voir le réel. Provisoirement, il a perdu ce qui fut de t
68 de techniciens et d’hommes de main d’imposer à ce peuple déprimé un cadre politique nouveau, qui lui permette de se refaire de
69 yance illusoire en quelque Volonté infaillible du Peuple . Ou mieux : présenter ce que l’on fait comme l’expression de cette Vo
70 ait comme l’expression de cette Volonté. Aider le peuple sans demander son avis. Avec l’espoir qu’un jour ou l’autre, il se re
71 isonnables ». 2) Réflexion du personnaliste. — Le peuple tel qu’on le voit paraît tout ignorant de ses intérêts véritables. Ma
72 loin, d’aborder des réalités. Donc, par amour du peuple , n’écoutons plus ses assemblées, ce n’est pas lui. Écoutons les obser
73 seule solution de ceux qui refusent d’éduquer le peuple . Dictature ou éducation, voilà le dilemme du xxe siècle. La dictatur
3 1937, Journal d’un intellectuel en chômage. L’été parisien
74 idienne de l’individualisme petit-bourgeois. Ce «  peuple  »-là n’a plus d’instinct. Et les chansons dites populaires ne sont mê
75 , au milieu de ce que les journaux appellent le «  peuple en liesse ». Eh bien, quel manque de fantaisie dans cette liesse ! Je
76 que ce soit dans la société bourgeoise ou dans le peuple , les « artistes » aujourd’hui, sont les seuls hommes qui se préoccupe
77 es duchesses de romans font encore les délices du peuple . Je regarde autour de moi ces hommes en casquette et leurs femmes. On