1 1970, Lettre ouverte aux Européens. Lettre ouverte
1 ssembler les peuples de l’Europe en un seul corps politique , en conservant à chacun son indépendance nationale. Rompant avec la t
2 se aux Français et aux Anglais de fusionner leurs politiques . Et il place le problème sur le plan « des intérêts communs et des en
3 toute guerre suscite. Car autrement, où serait la politique , telle qu’ils l’entendent ? Faute d’oser avouer qu’ils ont besoin de
4 re éclate et aussitôt tout s’accélère. Une action politique , économique et culturelle s’organise en Europe et pour l’Europe, bien
5 ésignent les buts moraux, sociaux, économiques et politiques d’une union de leurs pays et ils déclarent : Ces buts ne peuvent êt
6 ralistes ou unionistes, de quelques grands hommes politiques et de plus de huit-cents députés, dirigeants syndicalistes, intellect
7 représentés en fait par ses trois commissions, la politique , l’économique et la culturelle : — la paix par la fédération, jugulan
8 usée.) Voici ce qui a été réalisé : La commission politique de La Haye avait demandé l’institution d’un Conseil de l’Europe, doté
9 États. Nous voulions une fédération continentale, politique , culturelle, sociale, économique, c’est-à-dire une Europe « rendue da
10 ’esquisse — si le mot n’est pas trop fort — d’une politique commune dans l’industrie, l’agriculture et les transports, mais tout
11 c que l’on publie impunément. Quant à notre union politique … Sur ce plan, il faut bien constater que l’on n’a pas avancé d’un mèt
12 uropéen n’a été garantie que par la satellisation politique et commerciale imposée et réimposée par l’Armée rouge : 1945, 1956, 1
13 ue la traduction de ces données de base en termes politiques d’institutions ne saurait être que le fédéralisme, méthode d’union da
2 1970, Lettre ouverte aux Européens. I. L’unité de culture
14 gnage de l’intérêt porté au caractère culturel et politique des terres dont ils décrivaient les côtes9 ». Mais pour voir les voca
15 mais il y a les religions, l’économie, les formes politiques , etc.), interdisent toute union politique et font douter d’abord de l
16 formes politiques, etc.), interdisent toute union politique et font douter d’abord de l’unité de culture qui donnerait une assise
17 t l’évolution des arts, des sciences, des régimes politiques et des jugements moraux, mais encore toute l’économie, toute la vie m
18 théologiques follement précises et de confusions politiques dignes de notre temps, ont été formulées les options décisives de not
19 aires. La Grèce, qui invente la cité (polis, d’où politique ), la fonde sur le paradoxe du citoyen à la fois libre et responsable.
20 e à caractériser un seul État dans ses frontières politiques , ni une seule de ces « personnalités nationales » (en réalité étatiqu
21 il a rejetée, ses prises de parti idéologiques et politiques , sa formation professionnelle, etc. L’enseignement de l’histoire, de
22 ion renaissante de Prométhée. Les thèmes sociaux, politiques , économiques, qu’on retrouve dans nos littératures dès le début du xi
23 trairement à l’unité qu’institue une organisation politique , ne nous oblige nullement à ne plus avoir qu’une seule allégeance com
24 ement civique se borne à décrire les institutions politiques prévues par la constitution. C’est à peine si l’on parle de leur fonc
25 ion sembleront se dérober sous les pas des hommes politiques et des économistes. Car avant de « faire l’Europe », il faut « faire
26 oins qu’on ne qualifie ainsi les cours de science politique , c’est-à-dire de marxisme-léninisme et de propagande du parti, qui n’
27 ais fermes, le sens de la communauté (culturelle, politique et sociale), au sein de laquelle sa vocation s’exercera. Trop de libe
28 de théâtre, arsenal de citations pour les hommes politiques , et finalement : superstition moderne du « sens de l’histoire », qui
29 es, mais surtout influence profondément les choix politiques des masses. À partir de l’histoire, ce sont les Européens qui ont inv
30 es, ses techniques, son hygiène, ses institutions politiques et sociales, son parlementarisme, ses syndicats, et tous ses arts et
31 rter nos machines et nos armements, là nos formes politiques , partis et parlements. Plus tard, telle nation neuve ou telle fractio
32 ent acquérir le know how des procédés techniques, politiques et sociaux les plus voyants et les plus récemment mis au point par la
33 ressément combattu par leurs guides spirituels et politiques . Mais qui oserait leur faire reproche de n’avoir pas mesuré dans tout
34 terne, va précipiter l’écroulement de l’hégémonie politique de l’Europe, et même le rendre, à vues humaines, définitif. Au surplu
35 mentaire prudence historique. Primo, l’hégémonie politique n’est pas toujours et nécessairement liée à la vitalité d’une civilis
36 ans l’adoption bien trop rapide des formes de vie politique , sociale et économique, élaborées par l’Europe moderne. Résumons cela
3 1970, Lettre ouverte aux Européens. II. L’union fédérale
37 comment on peut traduire en termes de structures politiques cette union non unitaire et si hautement diversifiée que fonde notre
38 rte un nom bien connu dans l’histoire des régimes politiques , c’est de toute évidence fédéralisme. Je ne vois pas d’autre formule
39 onialisme. Il est certain que la prétention à une politique indépendante, au plein sens du terme, ne saurait être soutenue à la r
40 s de l’ère scientifico-technique. Cet échec de la politique centralisatrice et unitaire, secrètement obsédée par un rêve d’autarc
41 omies régionales et les diversités religieuses et politiques qui sont opprimées par l’État central, dont un parti unique s’est emp
42 a formule. Or, je ne vois pas de terme du langage politique qui prête à pires malentendus ! 28. Malentendus tragiques et ridic
43 s efforts d’union, parce qu’il paralyse la pensée politique , non seulement des nationalistes et des jacobins en colère, mais de b
44 lustrent : « Le fédéralisme était une des formes politiques les plus communes employées par les sauvages » (Chateaubriand,, Améri
45 es dans les domaines les plus variés et les moins politiques , au sens étroit du mot. 29. Deux en un, sans confusion ni séparati
46 ns ainsi définies constitue ce que je nommerai la politique fédéraliste, au sens le plus large du terme. Avant de chercher à quel
47 chercher à quel type d’homme correspond une telle politique , et quel type d’homme elle entend préparer ou éduquer, constatons qu’
48 alités métaphysiques ou physiques, esthétiques ou politiques . Je répète la phrase d’Héraclite : « Ce qui s’oppose coopère, et de l
49 type de relations, posent donc une société et une politique . De même que le modèle trinitaire des conciles sera utilisé par Keple
50 al, Kierkegaard ou Nietzsche, et aux doctrinaires politiques comme Rousseau, Tocqueville et Proudhon, mais aussi aux écoles récent
51 cation avec les autres. 3. Dans la vie civique et politique , tout le problème revient à concilier les besoins contraires mais vit
52 municipale. C’est au niveau de la vie civique ou politique que nous allons enfin retrouver le problème classique du fédéralisme 
53 les que la défense, les affaires étrangères et la politique économique ou certaines recherches scientifiques), sans léser les dro
54 e siècle. On s’aperçoit alors que le fédéralisme politique (intra ou interétatique), seul pris en considération par les auteurs
55 st autre chose qu’une simple recette juridique ou politique  : il est un des grands types d’aménagement du rapport politique et pe
56 est un des grands types d’aménagement du rapport politique et peut-être plus encore un des grands styles de vie et de civilisati
57 tance historique22. » Nous voici loin de la forme politique bonne pour les sauvages, dont parlait Littré. Mais loin aussi des déf
4 1970, Lettre ouverte aux Européens. III. La puissance ou la liberté
58 pas avancé d’un mètre en direction de notre union politique . Qu’on l’appelle Europe des patries, des nations, des États ou des s
59 ces réelles du siècle, techniques, économiques et politiques . Il en résulte que la souveraineté nationale vis-à-vis de l’extérieur
60 est un agencement d’activités administratives et politiques , une construction artificielle par définition, rarement influencée et
61 soulever d’objections. Chacun sait que son régime politique est l’un des plus stables du monde, depuis plus d’un siècle. Ce que l
62 ous, point de choix économiques ni même peut-être politiques longuement délibérés, concertés à long terme : il fallait se battre p
63 du PNB — cette tour de Babel du xxe siècle ! Une politique européenne de ce type, simple transposition de la formule d’État-nati
64 t admettre la pluralité des allégeances civiques, politiques , culturelles, idéologiques et religieuses, contre la prétention de l’
65 e ou liberté : ces deux finalités commandent deux politiques d’union, dont je crains bien que l’on ne puisse impunément continuer
66 ne manquera pas de m’objecter en ce point que la politique a toujours eu pour fin réelle la puissance ; et je vois bien que tout
67 a puissance comme seul but réaliste de la société politique  ; le reste — la justice, la paix, la liberté — étant manière de parle
5 1970, Lettre ouverte aux Européens. IV. Vers une fédération des régions
68 s » ? Autre chose est de constater que la réalité politique de notre temps est encore la nation, autre chose d’affirmer qu’on ne
69 nadaptation morbide de l’État-nation aux réalités politiques , économiques, techniques et démographiques de notre temps. Ils ne me
70 ’histoire générale de l’humanité et de ses formes politiques , assez pour rappeler d’où viennent la nation, l’État et l’État-nation
71 leurs citoyens une participation réelle à la vie politique qu’ils prétendent monopoliser. Le problème du petit État dans le mond
72 onde, et surtout pour résister à la satellisation politique ou économique. Par quoi ils manquent doublement à la fonction de tout
73 t la plus grave maladie qui puisse miner un corps politique . 44. Double dilemme Telle étant la crise présente de l’État-nat
74 seul pas effectif en direction de leur fédération politique . Force est donc de penser que dans leur nature même, quelque chose de
75 de demain, libérée de la tyrannie des frontières politiques et administratives imposées aux réalités ethniques et économiques, le
76 e majeur de l’Europe de la fin du xxe siècle. La politique d’union européenne, désormais, doit consister à effacer nos divisions
77 leur région, mais de tout un mouvement de pensée politique , déjà beaucoup plus large et solidement fondé que je n’osais l’espére
78 , à des responsables du Plan et même à des hommes politiques comme Mendès-France, Pleven, Giscard d’Estaing, Edgar Faure et Edgard
79 e base, se dessine un mouvement de revendications politiques . En France, les candidats de l’opposition non communiste et deux part
80 donna même son nom à cette forme d’activité : la politique 37. De même que la polis, avec ses autorités collégiales et son régim
81 soins de l’école, de la presse et de l’éloquence politique , le dogme de l’immortalité non seulement de ma nation, mais de la for
82 inculquées tous les classiques de la philosophie politique , de Bodin et Hobbes à Hegel. Catégories de pensées non seulement invé
83 plique des mutations de concepts et de catégories politiques . Et d’abord, un changement dans le vocabulaire — car tout commence t
84 tache du territoire, elle « décolle » ; une unité politique se définit non plus en termes de limites, mais en termes de rayonneme
85 ême cadre physique : symptôme d’une grave névrose politique , qu’on nommera le complexe de Procuste. Au contraire, dans le monde d
86 s d’enracinement et de nomadisme. 51. Vers une politique des régions On a vu que la notion de région s’est imposée à l’atte
87 CEE, dès ses débuts, a reconnu la nécessité d’une politique de « développement harmonieux des régions » au sein des six nations m
88 mondiales). Il apparaît ainsi que le fédéralisme politique — cas particulier d’un processus général d’optimisation des maxima co
89 il pas justement trop difficile de faire l’Europe politique sur la base des États-nations ? Pour quelle raison ne l’a-t-on pas en
90 re faite ? b) La vitesse du progrès vers l’union politique à partir des États-nations souverains étant demeurée nulle depuis un
91 e, dès qu’on aborde le problème de leur structure politique . C’est donc lui que l’on va tenter d’analyser. 53. La région n’es
92 — Tout ce qui relève du domaine public (économie, politique , enseignement, fiscalité, défense, tourisme, etc.) doit dépendre d’un
93 l’idée que l’économie est au service des desseins politiques d’un État, et non pas de la prospérité de ses citoyens. Aujourd’hui,
94 ue et s’exerçant dans tous les domaines clés : le politique , l’économique, le social et le culturel — aurait sans doute plus de c
95 e et de l’Italie. Du point de vue de la stratégie politique , on peut prévoir que le chemin conduisant de l’État-nation à la régio
96 provinces et les communes : faute de quoi la vie politique abandonne les extrémités pour le centre, et le marasme gagne la natio
97 l faut aller plus loin.Washington 1° Les pouvoirs politiques peuvent très bien adopter la structure proudhonienne, sans que soit p
98 et culturelles. 2° Les modules ou unités de base politiques et leurs structures ne sont pas, en principe, superposables aux modul
99 obés l’un par l’autre. Il se peut que les régions politiques soient définies demain comme les intersections de « classes » de fait
100 ation des grandes tâches d’intérêt public. Tâches politiques au sens originel du mot : l’économie, l’écologie, l’habitat et les tr
101 st un mot qu’il convient de bannir du vocabulaire politique dans une Europe fédérée, au seuil de l’ère du monde uni.) Le collège
102 pouvoir économique, doit-il entretenir des visées politiques , ou laisser ce soin, soit à une autre agence fédérale constituée sur
103 le constituée sur la base de régions à définition politique (ou ethnique, ou culturelle), soit à la réunion de toutes les agences
104 et ne se seront pas dessaisis, en tant qu’entités politiques , des « droits » économiques qu’ils s’arrogent en barons pillards, et
105 n’y aura pas, au niveau continental, une autorité politique fédérale. Quelles relations existent, ou sont souhaitables, entre l’é
106 de renouer librement des liens de type national, politique , sujets à révision périodique, et non exclusifs, bien entendu, de lie
107 onomie, mais aussi l’écologie, les transports, la politique des recherches, l’enseignement, le droit d’établissement… 4. Aller to
108 e, Administration, n° 59, 1966. 37. Polis donne politique et civitas donne civisme, synonymes réels qui devraient être perçus e
6 1970, Lettre ouverte aux Européens. Lettre ouverte, suite et fin
109 selon les exigences gaulliennes. Si les résultats politiques de cette démonstration sans équivoque restent nuls après plusieurs mo
110 hronique : on dénonce les dangers qu’une certaine politique , résultant d’une absence de frontières, entraînerait pour une nation
111 ulement les motivations, mais le sujet même de la politique en question. ⁂ Le but de la composition, construction ou union fédéra
112 ou union fédérale de l’Europe, ne saurait être «  politique  », au sens belliqueux de ce terme, qui évoque des luttes entre « puis
113 on, nous autres vrais fédéralistes européens, est politique au sens écologique du terme, qui évoque l’équilibre vivant des échang
114 pas affaire d’opinion, de sentiment ni de morale politique , c’est organique. Il est grand temps de déniaiser toute une jeunesse
115 ce et ses étapes, à déplacer le centre du système politique , non seulement de la nation vers l’Europe, mais encore vers l’humanit
116 on rôle dans la cité. Dès 1934, j’écrivais : Une politique à hauteur d’homme, c’est une politique dont le principe de cohérence
117 ais : Une politique à hauteur d’homme, c’est une politique dont le principe de cohérence s’appelle responsabilité de la personne
118 responsabilité de la personne humaine. C’est une politique dont chaque temps et chaque but se trouvent subordonnés à la défense
119 ersonne, module universel des institutions. Cette politique s’oppose au gigantisme américain, soviétique et capitaliste ; elle s’
120 la personne. On n’y atteindra jamais que par une politique établie dès le départ à ce niveau et dans cette vue. » ( Politique de
121 dès le départ à ce niveau et dans cette vue. » ( Politique de la personne .) ⁂ Dans l’espace sociopolitique homogène, dépourvu
122 qu’il pose une hiérarchie nouvelle des finalités politiques . Donner comme but à la Cité européenne la liberté, non la puissance,
123 e relève pas de l’économie, et encore moins de la politique au sens étroit et partisan du terme. Elle exige la recréation de comm
124 je réponds que c’est au contraire la grande tâche politique de notre temps. Précisons : des vingt ans qui viennent. Car à ce prix