1 1939, L’Amour et l’Occident (1972). Avertissement
1 ’aura d’utilité que s’il convainc ceux qui auront pris conscience, en le lisant, des raisons qu’ils pouvaient avoir de le tr
2 1939, L’Amour et l’Occident (1972). Le mythe de Tristan
2 le plus profond du mythe, c’est le pouvoir qu’il prend sur nous, généralement à notre insu. Ce qui fait qu’une histoire, un
3 déguisé et d’en jouir par l’imagination, sans en prendre toutefois une conscience assez claire pour qu’éclate la contradiction
4 ntisocial, qui est la passion. Le mot « contenu » prend ici toute sa force : la passion de Tristan et d’Iseut est littéraleme
5 roi Marc de Cornouailles, frère de Blanchefleur, prend l’orphelin à sa cour et l’éduque. Première prouesse ou performance :
6 entre leurs corps son épée nue. Ému par ce qu’il prend pour un signe de chasteté, le roi les épargne. Sans les réveiller, il
7 steté, le roi les épargne. Sans les réveiller, il prend l’épée de Tristan et dépose à sa place l’épée royale. Les trois ans
8 de ces faits dont l’envergure échappe souvent aux prises de l’érudition scrupuleuse. Je veux parler de l’opposition qui se man
9 ens gratuits, c’est-à-dire qu’ils ne sont, à tout prendre , que des artifices romanesques. Or il résulte de nos remarques au suj
10 d’où le rebondissement de l’action. Et ici le mot prend un sens symbolique : l’action empêche la « passion » d’être totale, c
11 que non seulement ceux qui la vivent ne sauraient prendre aucune conscience de sa fin, mais que ceux qui la veulent dépeindre d
12 qu’à partir de soi, non de l’autre. Leur malheur prend ainsi sa source dans une fausse réciprocité, masque d’un double narci
13 stre d’une manière d’autant plus efficace qu’elle prend la forme du désir, et que ce désir, à son tour, se déguise en fatalit
3 1939, L’Amour et l’Occident (1972). Les origines religieuses du mythe
14 ner » le sublime à l’infime, l’étrange erreur qui prend pour cause suffisante une condition simplement nécessaire. C’est auss
15 de l’homme. » Ainsi l’aspiration vers la lumière prend pour symbole l’attrait nocturne des sexes. Le grand Jour incréé, aux
16 trine de Manès (qui était originaire de l’Iran) a pris , selon les peuples et leurs croyances, des formes très diverses, tant
17 ’origine et la portée mystique de valeurs qu’elle prenait pour une mode et qu’elle accommodait à ses plaisirs. Elle ne devait p
18 dans son inspiration elle-même, puisque celle-ci prend sa source dans un système fixe de lois, qui seront codifiées sous le
19 eanroy (quitte à reprocher à chacun de ces poètes pris à part de n’avoir montré aucune espèce d’originalité et de s’être bor
20 Satan et la femme d’une beauté éclatante, ont été prises dans des corps matériels, qui leur étaient et leur demeurent étranger
21 de Manès, ne s’est pas vraiment incarné : il n’a pris que l’apparence d’un homme. C’est ici la grande hérésie docétiste (du
22  remerciements pour de gracieuses hospitalités », prend ainsi le caractère imprévu d’une sorte de lettre pastorale ! Et pourt
23  ! Et ce cri de Bernard de Ventadour : Elle m’a pris mon cœur, elle m’a pris moi-même, elle m’a pris le monde, puis elle s
24 de Ventadour : Elle m’a pris mon cœur, elle m’a pris moi-même, elle m’a pris le monde, puis elle s’est elle-même dérobée à
25 a pris mon cœur, elle m’a pris moi-même, elle m’a pris le monde, puis elle s’est elle-même dérobée à moi, ne me laissant que
26 lmodique des symboles fondamentaux. De même, pour prendre un exemple moderne, le « sentiment chrétien » que l’on reconnaît chez
27 muler le sens des symboles qu’il emploie, ni d’en prendre une conscience distincte. Il est indemne de ce rationalisme qui nous
28 ais l’offre à Marie qui le donnera à son fils. Il prend sa boisson en cinq traits pour les cinq plaies du Seigneur ; mais il
29 ce cas, le symbole se double d’une allégorie, et prend un sens cryptographique. Je veux parler de l’école du trobar clus, dé
30 e processus minimum d’inspiration et d’influence, prenons un exemple moderne. Un exemple dont je crois pouvoir dire que les don
31 t soutenu une théorie de la libido ; et qu’il ait pris une attitude déterministe : or le surréalisme fut une école littérair
32  sultan des amoureux », Omar Ibn Al Faridh — pour prendre un exemple entre cent — l’auteur décrit la passion terrible qui l’env
33 ave, ont dit : Pourquoi ce jeune homme a-t-il été pris de folie ? Et que peuvent-ils dire de moi, sinon que je m’occupe de N
34 , un grand courant religieux manichéen, qui avait pris sa source en Iran, remonte par l’Asie Mineure et les Balkans jusqu’à
35 aient le jeu primitif, on voit la Dame (ou Reine) prendre le pas sur toutes les pièces, sauf sur le Roi, celui-ci se trouvant d
36 omis. (Marcabru.) Voici le Service de la Dame : Prenez ma vie en hommage, belle de dure merci, pourvu que vous m’accordiez q
37 es : il s’agit des choses spirituelles. Et vous y prîtes la couronne d’orgueil : c’est pourquoi le chevalier vous renversa si
38 qu’il a, s’il n’eût pas été le sien : son cœur ne prend en aversion que le bonheur qu’il est contraint d’avoir. Le lui eût-on
39 s religieuses, c’est-à-dire une décision que nous prenons presque toujours inconsciemment, en toute ignorance de cause, de fins
40 op. cit., I, p. 20. Et de même, les dieux gaulois prennent des noms latins sans se transformer autrement. 17. Par E. Benveniste
41 eligions, juin 1938) va jusqu’à proposer que l’on prenne certains poèmes des troubadours comme sources d’études sur l’hérésie.
42 emble avoir deviné le caractère « tantrique » que prend l’amour courtois, dans le cycle breton plus réellement, je crois, que
4 1939, L’Amour et l’Occident (1972). Passion et mystique
43 s bizarres, comme disait à peu près Schopenhauer. Prenons le problème tel que nous le pose le mythe, et tel qu’il se posait au
44 sage de l’admirable cri de Ventadour : « Elle m’a pris le cœur, elle m’a pris moi-même, elle m’a pris le monde, puis s’est e
45 de Ventadour : « Elle m’a pris le cœur, elle m’a pris moi-même, elle m’a pris le monde, puis s’est elle-même dérobée à moi,
46 ’a pris le cœur, elle m’a pris moi-même, elle m’a pris le monde, puis s’est elle-même dérobée à moi, ne me laissant rien que
47 s le débat au bénéfice de ce qui est le plus bas. Prenons le cas des métaphores : on dit d’un goût qu’il est amer mais on dira
48 est contraint de se servir de métaphores. Il les prend où il les trouve et telles qu’elles sont, quitte à les modifier par l
49 ette décision tout arbitraire, il est temps de la prendre ici, et de la prendre en faveur de l’esprit, c’est-à-dire de sa prima
50 itraire, il est temps de la prendre ici, et de la prendre en faveur de l’esprit, c’est-à-dire de sa primauté. Qu’elle soit arbi
51 humanité sacrée en laquelle il a déclaré lui-même prendre sa complaisance. » 100. Nulle part, en effet, les généralisations ne
52 nt Jean de la Croix, p. 613), si nous tentions de prendre une vue générale des diverses mystiques connues, « l’expérience mysti
5 1939, L’Amour et l’Occident (1972). Le mythe dans la littérature
53 t expression ne sont guère séparables. La passion prend sa source dans cet élan de l’esprit qui par ailleurs fait naître le l
54 s les Saints implorent cette faveur. Seule, Pitié prend notre parti, car Dieu dit, et c’est de ma Dame qu’il entend parler :
55 is, c’est nous ; ses petits, qu’un chasseur lui a pris , ce sont les vertus, et le chasseur c’est le démon, qui nous fait voi
56 e profanée. Nous allons voir Pétrarque se laisser prendre « à ce qui n’est pas », c’est-à-dire à l’image de sa Laure, qui trop
57 espérance. Où Pétrarque triomphe, c’est quand il prend la harpe de Tristan130, c’est dans le cri de la « torture délicieuse 
58 el. Mais cela, jusqu’alors, à rien ne m’a servi… Prends ton parti avec prudence ! Prends ! Et arrache de ton cœur toute racin
59 n ne m’a servi… Prends ton parti avec prudence ! Prends  ! Et arrache de ton cœur toute racine De ce plaisir qui heureux ne le
60 n lisait de son temps avec passion139. Il ne s’en prend , dans son Quichotte, qu’aux romans d’aventures profanes. Cette omissi
61 e. Mes yeux regardez une dernière fois ! Mes bras prenez votre dernier embrassement ! Et mes lèvres, ô vous Portes du souffle,
62 « Cette bonne femme, écrit-il tristement, a dû me prendre pour un apprenti serrurier. » ⁂ En vérité je me sens fort capable d’e
63 jours ? Alors que les mystiques et les religions prennent au contraire une grande vigueur dans les réfutations et railleries qu
64 qu’il s’arrête aux sentiments vulgaires ? Il le prend de haut : méfions-nous. C’est qu’il se dispose à mentir. Il ne faut
65 , cette « tristesse » à laquelle il nous invite à prendre on ne sait quel « plaisir », cela révèle en définitive d’assez morbid
66 ne la désire pas comme une transfiguration : il a pris le parti du jour, la mort n’est plus que le châtiment de ses trop lon
67 nd impossible la passion. Et voici comment il s’y prend  : en rendant Hippolyte amoureux d’Aricie, dont on va voir qu’elle est
68 tout obstacle détruit, la passion n’a plus où se prendre . Et l’on parle de « passionnettes ». Le dieu d’Amour n’est plus un du
69 l’aventure scélérate, tels sont les parangons qui prennent la place de l’idéal détruit par le xviie siècle. Ce refoulement du m
70 ns avec une sorte de dépit à peine voilé : « J’ai pris pour toi des sentiments plus paisibles, il est vrai, mais plus affect
71 nudité même, je sens trop bien qu’ils risquent de prendre figure d’arguments, à cet endroit de notre voyage, du seul fait de le
72 indiciblement chère… Notre engagement n’était pas pris pour ce monde… Maximes de Novalis : Toutes les passions finissent
73 l’aventure des mystiques unitives qui de nouveau prend son départ dans la conscience occidentale, c’est, éternelle hérésie p
74 out cela composait une sorte de complexe que l’on prenait pour la « nature » elle-même, bien qu’il ne représentât qu’une surviv
75 ut esprit. Voilà ce que peut faire l’homme qui se prend pour son dieu. Voilà le mouvement dernier de la passion, dont l’exasp
76 iait cette diffuse exaltation de l’amour. Nous la prenions pour un printemps de l’instinct et pour une renaissance des forces di
6 1939, L’Amour et l’Occident (1972). Amour et guerre
77 e ne revêtait pas ce caractère absolu qu’il avait pris dans les pays nordiques. Les femmes de la haute société recevaient un
78  » délicate et toute hédoniste. La « courtoisie » prenait son sens moderne de politesse et de civilité. Il n’était plus questio
79 le considéra comme une réussite glorieuse d’avoir pris une ville assiégée et ne faisant de part et d’autre que trois morts.
7 1939, L’Amour et l’Occident (1972). Le mythe contre le mariage
80 usse avec horreur. Car l’engagement religieux est pris « pour le temps et l’éternité », c’est-à-dire qu’il ne tient aucun co
81 dans le mariage paraît légèrement ridicule : elle prend figure de conformisme. Il n’y a plus, à proprement parler, conflit de
82 jours — et ce n’est qu’un début — un homme qui se prend de passion pour une femme qu’il est seul à voir belle, est un névrosé
8 1939, L’Amour et l’Occident (1972). L’amour action, ou de la fidélité
83 dit ! Étant donné que les humains des deux sexes, pris un à un, sont généralement des coquins — ou des névrosés, pourquoi se
84 n que dénoncent les romantiques, ou l’homme moral pris dans les rets sociaux, et incapable désormais de concevoir les vérité
85 commande au jeune homme de « réfléchir » avant de prendre une décision : elle l’entretient ainsi dans l’illusion que le choix d
86 es peuvent y lire. « Notre engagement n’était pas pris pour ce monde », écrivait Novalis songeant à sa fiancée perdue. C’est
87 té dans le mariage est au contraire un engagement pris pour ce monde. Partant d’une déraison « mystique » (si l’on veut), in
88 sur le concret dans ses limitations. Le chrétien prend le monde tel qu’il est, et non point tel qu’il peut le rêver. Son act
89 omplexes et collectifs, qui échappent souvent aux prises individuelles. Le signe de la crise du mariage nous parle et nous ave
90 03. En quoi consiste le respect, au sens où je le prends ici ? En ce que l’on reconnaît dans un être la totalité d’une personn
9 1939, L’Amour et l’Occident (1972). Appendices
91 . Au jour où les deux couples se séparent, Girard prend à part deux témoins, ainsi que Berthe sa femme, et la reine. Femme d
92 e, et vous surtout, Jésus mon rédempteur, je vous prends pour garants et témoins que par cet anneau je donne à jamais mon amou
93 te de ne pas s’être épris ailleurs, et de n’avoir pris aucune liberté avec l’autre dame, mais d’avoir voulu seulement mettre
94 utures ! (On dirait que Rimbaud a lu cela…) Je ne prends pas à mon compte ces « explications » parfois très pénétrantes, souve
10 1972, L’Amour et l’Occident (1972). Post-scriptum
95 pas sans vous, il importe que la part que vous y prendrez vous aide à classer votre livre, à en dépasser les conclusions autant
96 e moment-là, au sujet de l’amour courtois. Ils le prirent sur le ton légèrement excédé du spécialiste qui est payé pour savoir
97 hérésie dualiste ou manichéisante du Moyen Âge ? Prenez ma vie en hommage Belle de dure merci, Pourvu que vous m’accordiez Qu
98 r celle « dont il n’aura jamais rien » : Elle m’a pris le cœur, elle m’a pris moi-même, elle m’a pris le monde, puis elle s’
99 a jamais rien » : Elle m’a pris le cœur, elle m’a pris moi-même, elle m’a pris le monde, puis elle s’est dérobée elle-même,
100 ’a pris le cœur, elle m’a pris moi-même, elle m’a pris le monde, puis elle s’est dérobée elle-même, ne me laissant que mon d
101 , dont Pétrarque nous dit « qu’il mit la voile et prit les rames à la recherche de sa mort ». Je lis et je revis l’émotion d
102 roles. Et par volonté de la voir, il se croisa et prit la mer. Et dans la nef il tomba malade et fut conduit à Tripoli, dans
103 , et elle s’en vint près de lui, à son lit, et le prit dans ses bras. Et il sut que c’était la comtesse et aussitôt il recou
104 sent dans le camp du moine, renient Guillaume, et prennent le voile à Fontevrault. Guillaume IX ne semble pas avoir pris au sér
105 à Fontevrault. Guillaume IX ne semble pas avoir pris au sérieux l’œuvre de réformateur qui s’attachait, paraît-il, à sauve
106 illaume IX, conclut Theophil Spoerri, apparaît et prend forme ce qui va désormais caractériser l’esprit européen : toute l’ar
107 er, une fois de plus, de faire sentir combien les prises de position devant l’hérésie — hostiles, complices, ou positives — co
108 nsion avec le phénomène, ou le simple fait d’être pris dans son champ. Notons aussi que les grandes dames de l’Aquitaine se
109 iques » par les lettrés, je me suis senti parfois pris d’une sorte d’angoisse, et je me suis sérieusement interrogé : n’avai
110 dre transition, le Roman nous dit : « Le roi Marc prend bientôt Tristan en haine, car il le craint plus qu’autrefois. » Il en
111 nseiller, mais bien pour alerter. Et pour aider à prendre des vues justes. Si je mérite le nom de moraliste, c’est dans la mesu