1 1939, L’Amour et l’Occident (1972). Le mythe de Tristan
1 passion d’amour signifie, de fait, un malheur. La société où nous vivons et dont les mœurs n’ont guère changé, sous ce rapport,
2 et adultère se confondent le plus souvent dans la société qui est la nôtre, n’est-ce pas une première preuve de ce fait paradox
3 un groupe historique donné : l’élite sociale, la société courtoise et pénétrée de chevalerie du xiie et du xiiie siècle. Ce
4 errons que ce n’est pas seulement la nature de la société , mais l’ardeur même de la sombre passion qui exige un aveu masqué. Le
5 e est toujours aussi dangereuse pour la vie de la société . Elle tend toujours à provoquer, de la part de la société, une mise e
6 Elle tend toujours à provoquer, de la part de la société , une mise en ordre équivalente. D’où la permanence historique non poi
7 ’il est plus fort et plus vrai que le bonheur, la société et la morale. Il vit de la vie même du romantisme en nous ; il est le
8 odin, si l’on songe qu’il se traduisait, dans les sociétés primitives, non par cette répugnance que je prévois, mais par la mise
9 à illustrer le conflit de la chevalerie et de la société féodale — donc le conflit de deux devoirs ou même, nous l’avons vu pa
2 1939, L’Amour et l’Occident (1972). Les origines religieuses du mythe
10 mentalité du siècle. Elles pénétrèrent bientôt la société féodale. Celle-ci ne connaissait pas toujours l’origine et la portée
11 sus les Pyrénées, trouve au Midi de la France une société qui, semble-t-il, n’attendait plus que ces moyens de langage pour dir
12 s plus révéré. Imaginons maintenant un état de la société où le principe de cohésion se relâche ; où la puissance économique dé
13 mal gré dans la lutte qui divise profondément la société , les pouvoirs, les familles, et les individus eux-mêmes : celle qui o
14 mauvaise conscience), dans la grande masse d’une société partagée non seulement entre la chair et l’esprit, mais encore entre
15 ue, I, p. 1-65. 14. J. Vendryès, Mémoires de la société linguistique, XX, 6, 265. 15. Op. cit., I, p. 18, et II, p. 328. 1
3 1939, L’Amour et l’Occident (1972). Passion et mystique
16 lier ni la lyre ni l’épée symbolique du défi à la société constituée ! Est-il beaucoup de nos poètes qui aient trouvé leur « am
17 leur passion étant inavouable tant aux yeux de la société (qui la réprouve comme un crime) qu’à leurs yeux propres (puisqu’elle
4 1939, L’Amour et l’Occident (1972). Le mythe dans la littérature
18 moyen d’une littérature idéalisante l’élite de la société médiévale. D’où la réaction « réaliste » qui ne pouvait manquer de s’
19 l’on veut que tout rentre dans l’ordre, c’est la société qui l’emporte, et dès lors la fin du roman ne saurait être qu’un reto
20 ise en ordre (pour ne pas dire mise au pas) de la société féodale par l’État-roi entraîne des modifications assez profondes dan
21 jours quelque séparation et quelque obstacle : la société , le péché, la vertu, notre corps, notre moi distinct. Et de là vient
22 dal. Un Richelieu ou un Lauzun dans la plus haute société , un Casanova au niveau de l’aventure scélérate, tels sont les parango
23 he » du romantisme, et fréquentant d’ailleurs une société des plus sceptiques, Stendhal nous offre un exemple parfait pour l’an
24 ociale des mythes. (Mensonges d’autodéfense d’une société qui veut sauver sa forme, tandis que les individus qui la composent s
25 a loi tout animale des corps — ce qu’il faut à la société pour procréer et se consolider, ce qu’il faut au bourgeois pour resse
26 ’adaptation du mythe de Tristan à la mesure d’une société moderne. Le roi Marc est devenu le Cocu ; Tristan, le jeune premier,
27 t à la propagation de l’espèce et à la guerre, la société devait la persécuter. Ce fut Rome qui porta le fer et le feu dans les
28 un art aristocratique. Et quand les cadres de la société vinrent à craquer — sous l’effet de poussées d’un tout autre ordre d’
5 1939, L’Amour et l’Occident (1972). Amour et guerre
29 st, selon J. Huizinga, l’aspiration suprême de la société médiévale dans l’ordre éthique. « C’est une nécessité sociale, un bes
30 bien des jugements sur l’unité spirituelle de la société médiévale !) Or s’il est vrai que cette morale courtoise ne parvint g
31 manière à la rendre acceptable au jugement de la société . Le tournoi « joue » le mythe, physiquement : — « Les transports de l
32 s dans les pays nordiques. Les femmes de la haute société recevaient une éducation aussi complète que celle des hommes, et joui
33 de jeu dans la guerre, on peut en déduire que la société et sa culture font un effort pour recréer le mythe de la passion, c’e
34 urtre du Roi — action sacrée et rituelle dans les sociétés primitives — redevient quelque chose d’horrifiant et d’attirant à la
35 même fonction sociale (mais à la mesure de notre société ). Ce n’était plus, en effet, un principe spirituel qui inspirait les
36 assion et l’instinct de mort font peser sur toute société . La réponse du xiie siècle avait été la chevalerie courtoise, son ét
37 es, comme il ne cesse de nous travailler dans nos sociétés libérales. C’est l’éventualité de la paix que j’envisageai dans les d
6 1939, L’Amour et l’Occident (1972). Le mythe contre le mariage
38 morales s’affrontaient au Moyen Âge : celle de la société christianisée, et celle de la courtoisie hérétique. L’une impliquait
39 le ne joue plus un rôle direct dans la vie de nos sociétés , qu’elle a tant contribué à former. Ce qui explique, à mon sens, l’ét
40 nce : d’une part, une morale de l’espèce et de la société en général, mais plus ou moins empreinte de religion — c’est ce que l
41 tionnelle des relations entre les sexes, dans une société libérée des contraintes de classes et d’argent. D’autres enfin s’effo
42 donnera peut-être aux historiens futurs de notre société occidentale, la clé d’une crise dont nous ne voyons encore que des sy
7 1972, L’Amour et l’Occident (1972). Post-scriptum
43 une aventure merveilleuse, où l’écroulement de la société celtique ne peut être dû qu’à des circonstances plus ou moins magique
44 ’oc sortie, elle, « des plus hautes classes de la société  » (P. Belperron, Joie d’Amour, p. 227). Cependant, on ne peut nier qu
45 que nul ne trouvait extraordinaire dans la bonne société qu’une dame de haut rang se fît cathare par désespoir d’amour »232. P
46 friche quand elle n’est pas vilipendée par notre société scientifico-technique. À tel point que toute une jeunesse se voit réd