Jules Supervielle, Gravitations (décembre 1925)l
« Quel est celui-là qui s’avance » avec ce visage d’entre la▶ vie et ◀la▶ mort « où se reflète ◀le▶ passage incessant ◀d’▶oiseaux ◀de▶ ◀la▶ mer ? » « Quel est cet ◀homme▶ dont ◀l’▶âme fait des signes solennels ? »
Une voix lente aux méandres songeurs, une simplicité qui n’est pas familière. C’est bien ◀la▶ poésie ◀d’▶une époque tourmentée dans sa profondeur, mais qui se penche sans vertige sur ses abîmes. Simplicité ◀de▶ notre temps ! Au-dessus ◀de▶ ◀la▶ trépidation immense des machines, un Saint-John-Perse, un Supervielle parlent avec des mots ◀de▶ tous ◀les▶ jours aux vivants et aux morts :
Mère, je sais très mal comme ◀l’▶on cherche ◀les▶ morts…
« … Cette chose haute à ◀la▶ voix grave qu’on appelle un père dans ◀les▶ maisons. »
Comme Valéry, ce poète sait « des complicités étranges pour assembler un sourire ». Comme Max Jacob il lui arrive ◀de▶ situer une anecdote purement poétique dans un monde qu’il s’est créé. Jamais banal, il est parfois facile : ◀la▶ description du monde qu’il invente nous lasse quand elle ne ◀l’▶étonne plus assez lui-même (pourtant ◀l’▶autel et ◀le▶ surréalisme ◀l’▶ont enrichie ◀d’▶images…).
Je cite des noms : y a-t-il influence ou seulement co-génération ? Pour peu qu’ils sortent des cafés littéraires, nos poètes respirent ◀le▶ même air du temps. Leur originalité se retrouve dans ◀la▶ manière dont ils tentent ◀de▶ fuir ◀l’▶inquiétude où ils baignent. Celui-ci vient à peine de quitter ◀l’▶air dur des pampas. « ◀Le▶ voilà qui s’avance, foulant ◀les▶ hautes herbes du ciel. » ◀Le▶ gaucho a dompté Pégase et caracole dans ◀les▶ étoiles.
J’avoue que ◀l’▶univers intérieur où il lui arrive ◀de▶ graviter me trouble mieux que son lyrisme cosmique. On est plus près de ◀l’▶infini au fond ◀de▶ soi qu’au fond du ciel.