Pierre Jean Jouve, Paulina 1880 (avril 1926)p
Au creux des couleurs assourdies d’▶un divan ◀le▶ soir, tandis que ◀les▶ fenêtres s’ouvraient vers ◀le▶ ciel ◀de▶ Florence… « Du sang, ◀de▶ ◀la▶ volupté et ◀de▶ ◀la▶ mort », un titre s’effaçait dans ◀l’▶ombre. Jouve a rêvé une histoire ◀de▶ passion mystique et ◀de▶ crime, intense et tragique comme un couchant ◀d’▶automne, émouvante encore après tant d’autres, comme chaque soir un nouveau ciel. Il ◀l’▶a transcrite en brèves notations lyriques suivant ◀le▶ rythme ◀d’▶un songe, sans cesse brisé par ◀les▶ élans alternés ou confondus du désir et ◀de▶ ◀la▶ prière. On sort lentement ◀d’▶une chambre bleue qui est ◀le▶ mystère même, pour suivre ◀la▶ naissance et ◀l’▶embrasement ◀de▶ ◀la▶ passion ◀de▶ Paulina. ◀Le▶ Péché ; ◀le▶ Couvent ; ◀la▶ rechute et ◀le▶ crime ; et ◀l’▶étrange apaisement ◀d’▶une vieillesse au soleil.
Jouve semble avoir hésité entre plusieurs styles ◀de▶ roman. Un chapitre ◀d’▶observation psychologique ironique et minutieuse, à ◀la▶ Stendhal, succède à des effusions haletantes ou à une relation cinématographique. Mais tout cela baigne dans ◀le▶ même lyrisme et s’agite sur un fond sombre et riche ◀de▶ passions inconscientes qui donnent à tous ◀les▶ actes une signification plus profonde. (Il serait aisé ◀de▶ montrer quel parti Jouve a su tirer des complexes ◀de▶ famille freudiens, ou ◀d’▶analyses ◀de▶ démences mystiques ; mais tout cela est sublimé dans un monde poétique où il paraît inconvenant ◀d’▶introduire ◀le▶ jargon ◀de▶ ◀la▶ science moderne.)
Si nous reconnaissons à ◀la▶ base ◀de▶ cette œuvre inégale des idées vieilles comme Rousseau sur ◀les▶ droits ◀de▶ ◀la▶ passion, — et dans sa trame quelques chapitres inspirés presque littéralement ◀d’▶une anecdote italienne ◀de▶ Stendhal ; si d’autre part ◀l’▶évolution mystique ◀de▶ Paulina semble parfois un peu trop « classique » et prévue, ◀l’▶originalité foncière du roman ◀de▶ Jouve reste indéniable : c’est son mouvement purement lyrique, sa progression accordée à celle des événements inconscients. Certaines proses mystiques ◀de▶ Paulina au couvent valent ◀les▶ meilleurs poèmes ◀de▶ ◀l’▶auteur ◀de▶ Tragiques et ◀de▶ Vous êtes des hommes.