René Crevel, Mon corps et moi (mai 1926)u
Les▶ témoignages ne manquent pas sur ◀la▶ détresse morale ◀de▶ ◀la▶ génération surréaliste. Mais tandis que la plupart en sont encore à des symboles équivoques et, quoi qu’ils en disent, « artistiqués », — ils n’osent plus ◀le▶ mensonge ◀de▶ ◀l’▶art, et pas encore ◀la▶ vérité pure — Crevel décrit sans aucune transposition romanesque ◀le▶ trouble caractéristique ◀de▶ sa génération. Terrible aveu ◀d’▶impuissance, il n’a plus même ◀la▶ force ◀de▶ ◀l’▶hypocrisie. Isolé dans un hôtel perdu, avec son corps qui se souvient — « mémoire, ◀l’▶ennemie » — avec une intelligence dont ◀la▶ triste profession est ◀de▶ détruire ◀le▶ désir qu’elle excite par curiosité passagère, il monologue. « Oui, je ◀le▶ redirai, tous mes essais furent prétextes à me dissoudre, à me perdre. » Vouloir ◀la▶ vérité pure sur soi, c’est se refuser à ◀l’▶élan vital qui nous crée sans cesse : ◀l’▶analyse ◀de▶ sa solitude ◀le▶ laisse en face de quelques réactions physiologiques dont ◀la▶ pauvreté ◀le▶ rejette dans une angoisse qu’il nomme « élan mortel ». Cette inversion ◀de▶ tout ce qui est constructif et créateur, voilà je pense ◀le▶ véritable désordre. Une intelligence parvenue au point où elle « ne semble avoir rien ◀d’▶autre à faire que son propre procès », une intelligence qui se dégoûte, tel est ◀le▶ spectacle que nous dévoile cyniquement René Crevel. Il en est peu de plus effrayants.
implorait Baudelaire. Encore avait-il ◀le▶ courage ◀de▶ prier…