ACTE III.
Scène i.
Le contremaître. — Hardi, compagnons ! Cognez dur ! Tapez là-dessus comme sur des têtes de Bourguignons ! (Coups de masse.) Souvenez-vous de Sempach ! (Coups.) Souvenez-vous de Saint-Jacques ! (Coups.) Souvenez-vous de Grandson ! (Coups.) Souvenez-vous de Morat ! (Coups.) Souvenez-vous de Nancy ! (Coups.) Souvenez-vous de tout ce que vous voudrez ! (Grêle de coups.) Ça y est ? — Monsieur le Landamman, tout est prêt !
Le Landamman. — C’est bien. Les sièges sont solides. Si les députés ont la tête aussi bien plantée que le derrière, on peut compter que les débats auront de la tenue. Voici les sièges des villes : Lucerne, Berne, Zurich…
…Et voici pour les campagnes : Uri, Schwyz, Unterwald, Glaris, Zoug !
Le contremaître. — Ces deux-là (il tape dessus), nous les avons placés à part, selon vos instructions. Pour qui sont-ils ?
Le Landamman. — J’y vois assis deux, spectres à la face effrayante : la Discorde et la Guerre civile. C’est à cause de ces deux sièges-là que la Diète aujourd’hui s’assemble. Siège de Soleure — siège de Fribourg ! Plût au ciel que jamais ils n’aient été dressés ! Ou bien qu’ils soient déjà dans la ligne des autres…
Un ouvrier. — Expliquez-vous, Monsieur le Landamman.
Le Landamman. — Nous avons huit cantons confédérés. Les villes disposent de trois voix : Zurich, Berne, Lucerne. Mais avec leur richesse et leur astuce, cela vaut bien les cinq voix des campagnes. Maintenant si nous acceptons dans l’Alliance deux villes nouvelles — ces deux-là, cela fera cinq contre cinq, mais cinq gros contre cinq petits, comprenez-vous ? Et nous verrons bientôt la fin de notre paix par le triomphe du parti des conquêtes. L’or de Bourgogne les rend fous, tous ceux des villes ! S’ils gagnent, croyez-moi, ce sera la fin de notre libre Confédération.
Un ouvrier. — La fin de notre Confédération à cause de ces deux sièges-là ? Alors quoi ? Foutons-les par terre ! (Il frappe les deux sièges.)
Le Landamman (le retenant). — Ce n’est pas ton marteau, mon ami, qui peut arrêter le Destin ! Les délégués sont là, la Diète va s’ouvrir, il est trop tard ! On n’attend plus que les ambassadeurs de l’étranger pour inaugurer les débats. Écoutez ! (Ils s’arrêtent, les marteaux levés. Fanfare dans la coulisse.) Les voici !
Scène ii.
L’ambassadeur de France (présentant ses collègues). — L’ambassadeur de la cour de ◀Savoie▶. — L’ambassadeur de sa très haute grandeur Sigismond, archiduc d’Autriche. — L’ambassadeur de la sérénissime République de Venise. — Et moi je vous salue, Monsieur le Landamman, au nom du Roi mon maître, Louis l’Onzième.
Le Landamman. — Que la paix des montagnes, et non point la discorde des hommes, vous accueille aujourd’hui, chers seigneurs, dans ce pays qui domine vos plaines ! (Aux Suisses.) Allez dire à nos députés que tout est disposé pour la séance solennelle.
Scène iii.
L’ambassadeur de Venise. — L’accueil est simple et fruste, mais il est fier aussi !
L’ambassadeur d’Autriche. — Le Téméraire se moquait d’eux. La « pierreuse nation », disait-il. Ah oui ! Pierreuse comme une avalanche, il l’a bien vu !
L’ambassadeur de France. — Lorsqu’il partait en guerre, provoqué par ces paysans, Charles faisait crier devant l’armée : « Le lion ne se couchera plus qu’il n’ait dévoré sa proie ! » Eh bien ! après Grandson, il ne lui restait plus qu’à dévorer ses mains de rage ! Après Morat, son fou prophétisait : « Prince couvert d’écarlate et de cramoisi, à la fin seras blanc comme neige ! » Or à Nancy, la prophétie s’est accomplie : on a trouvé le cadavre du duc pris dans la glace des marais ! Je tiens les Suisses pour invincibles.
L’ambassadeur de Venise. — Et moi je dis : toute cuirasse a son défaut. Depuis Grandson ils savent le prix de l’or et leur cupidité s’est éveillée.
L’ambassadeur d’Autriche. — Déjà les dissensions éclatent dans leurs rangs à cause des trésors conquis. Les campagnes accusent les villes de se tailler la part de l’ours ! Les villes accusent les campagnes de vendre des soldats à l’étranger. Partout l’intrigue et l’anarchie. À nous d’utiliser la situation !
L’ambassadeur de ◀Savoie▶. — Connaissez-vous leur dernière folie ? C’était pendant le Carnaval de cette année. Les jeunes gens des cantons forestiers, ivres de bière mais surtout d’aventures, se forment en cortège burlesque et vociférant. Ils se baptisent eux-mêmes les compagnons de la Follevie. Des meneurs les excitent et leurs crient : « Allez à Berne et à Genève réclamer le trésor de Bourgogne ! » Alors ils sont partis dans une sarabande tumultueuse, vêtus de leurs costumes de Carnaval, armés de piques, chantant des chants de guerre, et les villes ont été forcées de payer un tribut d’or et d’argent pour éviter d’affreux saccages ! On dit que la bande en folie a juré d’être de retour pour l’ouverture de la Diète. Il faut s’attendre à des bagarres.
L’ambassadeur de France. — Eh bien ! voilà du bon gibier pour messieurs nos agents recruteurs !
Scène iv.
Voix dans le chœur. — Les voilà ! Les voilà ! Retirez-vous !
Chœur des compagnons de la follevie.
Chœur des ambassadeurs.
La suite de France. — Service de France !
Une partie des compagnons. — Hourrah ! de l’or !
La suite d’Autriche. — Des aventures !
Une autre partie des compagnons. — Hourrah ! la gloire !
La suite de ◀Savoie. — Notre vengeance !
3e partie des compagnons. — À mort ! la guerre !
La suite de Venise. — Villes et filles !
4e partie des compagnons. — Hourrah ! l’Amour !
Scène v.
Les soldats. — Place aux députés ! La Diète va s’ouvrir ! Arrière ! Silence !
Le président. — Députés des campagnes et des villes, représentants des huit cantons confédérés ! Pour la dernière fois en cette année, nous déclarons ouverte notre Diète. Quinze assemblées n’ont pas suffi pour concilier les deux partis. C’est aujourd’hui notre suprême chance. De ce débat — songez-y tous ! — sortiront la paix ou la guerre ! Que chacun des partis déclare maintenant les sacrifices qu’il pourra consentir pour le salut de la patrie commune ! La parole est au délégué des villes.
Waldmann (lisant son discours). — Considérant la malice des temps, mais aussi la valeur de nos armes (se tournant vers les ambassadeurs) — qu’on se le dise ! — considérant que trop longtemps nos communes et nos cantons ont poursuivi leurs intérêts particuliers au détriment de la puissance de l’État ; — considérant que l’Ordre est le père du travail, dont la discipline est la mère, et dont la fille est la prospérité…
Les compagnons. — Hou ! Hou ! Hou !
Waldmann. — … considérant que nos victoires mémorables ont été remportées par l’union, et que le temps de la grandeur et des conquêtes s’ouvre à nous, je vous adjure et je vous dis : Confédérés, faisons taire nos petits égoïsmes, bannissons tout esprit de clocher, jetons ici la base inébranlable d’un État fort et unifié, capable d’affronter les temps nouveaux !
Nous proposons que les campagnes acceptent et reçoivent en notre alliance fédérale les bonnes villes de Fribourg et de Soleure. N’ont-elles pas vaillamment combattu, à nos côtés, pendant les guerres de Bourgogne ? À cette condition, nous acceptons que soit dissous et annulé le Pacte qui lie nos trois villes. Que toute alliance particulière soit interdite, et que les Suisses ne se battent plus jamais que sous notre commun drapeau ! J’ai dit.
Le président. — La parole est au représentant des campagnes.
Altinghausen. — Nos pères ont combattu pour être libres : Vous voulez aujourd’hui être forts. Nos pères prenaient les armes pour défendre leur droit : Vous parlez aujourd’hui de conquêtes.
Quand vous nous dites : Unissons-nous ! c’est pour la guerre. Quand vous nous dites : Faisons régner l’ordre ! c’est pour augmenter vos richesses. Car pour vos guerres, nous donnerons du sang, et c’est vous qui garderez l’or ! Ce sont les villes qui nous ont entraînés dans l’aventure de Bourgogne. Et maintenant, vous prétendez nous interdire d’entrer au service étranger, car vous voulez nos hommes pour votre guerre à vous ! Eh bien ! je dis que notre alliance est faite pour notre seule défense, au nom de Dieu, et non pas pour vos folles conquêtes au nom du diable qui s’appelle Mammon. Nous n’avons qu’un seul but : sauver nos libertés communales et cantonales. Nous n’avons pas besoin d’un État fort, nous n’avons pas besoin de vos grands diplomates. Leur politique nous coûte trop cher, c’est toujours nous qui la payons. Commencez par dissoudre votre ligue. Renoncez à régner sur nous. Laissez-nous traiter nos affaires selon nos intérêts locaux. Alors nous pourrons accepter l’entrée de deux villes nouvelles.
Telles sont nos conditions. Nous n’irons pas plus loin, car nos libertés sont en cause, et nos ancêtres nous regardent ! Plutôt la guerre que la honte ! J’ai dit.
Le président. — Ainsi, d’une part les villes renonceront à leur Ligue si d’abord les campagnes reçoivent Fribourg et Soleure, et d’autre part les campagnes recevront Fribourg et Soleure si les villes, d’abord, renoncent à leur Ligue. Messieurs, je vous le demande, allez-vous faire la guerre pour une question de procédure ?
Waldmann. — Prenez garde ! Il s’agit de grands principes ! Ce qui est en cause ici, c’est la forme et l’esprit de notre État. Nous sommes là pour sauver l’alliance contre les égoïsmes des cantons. Que chacun sacrifie à tous !
Altinghausen. — Et moi je dis que notre alliance est là pour assurer nos libertés particulières ! Chacun pour soi, l’État pour tous !
Waldmann. — Derrière cette belle devise, la trahison se cache ! Vous vendez vos soldats au pape !
Les compagnons. — Hou ! Hou ! Hou ! À bas les tyrans !
Altinghausen. — Et vous ! Vous proclamez de beaux principes, mais vous gardez le butin de Bourgogne.
Les compagnons. — Nous vou-lons l’ar-gent ! Nous vou-lons l’ar-gent !
Le président. — Une dernière fois, je vous adjure… salut de notre Confédération !
Cris des compagnons. — Assez de par-lottes ! À bas les vieil-lards ! Nous vou-lons un chef !
Waldmann. — Soldats, rétablissez l’ordre, ceux d’ici n’en sont plus capables !
Altinghausen. — C’est une provocation !
Waldmann. — Nous tirerons les conséquences !
Le président. — La séance est suspendue ! Gardes ! avancez !
Récitatif.
I. Oh ! maintenant, peuple des monts et des vallées, — tremble dans l’attente orageuse sous un ciel d’angoisse et de haine ! Malheur sur nous !
Nuit lugubre et sans sommeil — rythmée d’armes martelées — Ha ! ha ! — Meute folle, meurtrière — ô rumeur irréparable — que dis-tu ? — Demain la guerre !
II. Ah ! nuit de deuil, peuple des monts et des vallées, — qui pourra sauver désormais — renversant les destins, ta patrie ? Terreur sur nous !
Pleurez femmes, sanglotez — sur les foyers désertés — hou ! hou ! — Sourde plainte, les tambours — couvrent ta voix déplorable. — Que dis-tu ? — Demain la guerre.
Scène vi.
Voix isolées (à droite, à gauche, au centre, au plan 1, au plan 2.) — Qu’ont-ils dit ? — Demain la guerre ! — Ô notre alliance déchirée ! — Qu’ont-ils dit ? — Demain la mort ! — Ô patrie, patrie déchirée ! Adieu ! Adieu ! Pitié pour nous !
Le chœur (parlé).
Veillée d’armes ! Qu’entends-tu ? — Minuit sonne ! (Douze coups.) D’où nous viendra le salut ? — Kyrie eleison !
Dorothée (dans une lueur, à gauche du plan 2, près des coulisses). — Monsieur le curé ! Monsieur Haimo ! Réveillez-vous !
Une voix de femme (dans la coulisse). — Qui est là ?
Dorothée. — Dorothée, femme Nicolas. Monsieur Haimo ! Réveillez-le ! Monsieur Haimo ! Appelez-le ! Mes deux fils partent pour la guerre ! Ils l’ont crié : Demain la guerre ! Réveillez-le ! Un seul peut nous sauver !
La voix. — Il n’est pas là, Monsieur le curé, il est sorti.
Dorothée (criant). — Ô Dieu ! Mes fils ! Ô seul espoir, tout est perdu !
Choral ii.
Scène vii.
Haimo. — Frère Claus ! Frère Claus !
Nicolas. — La paix soit avec toi, Haimo. Je t’attendais.
Haimo. — Tu sais tout ?
Nicolas. — La guerre civile !
Haimo. — Si rien n’est fait avant l’aurore, frère Claus, ce jour sera le dernier jour de notre Confédération. Et les clochers sonneront jusqu’à toi le tocsin de la guerre civile.
Nicolas. — Depuis sept ans je les avertissais. Mais ils ne m’ont pas écouté.
Haimo. — C’est vrai…
Nicolas. — Je leur disais : Restez dans vos frontières, si vous voulez garder vos libertés. Mais ils ne m’ont pas écouté.
Haimo. — C’est vrai…
Nicolas. — Et cette nuit, ils se préparent à la guerre, non pour défendre leur patrie, mais pour remplir leurs bourses d’or.
Haimo. — Tout cela est vrai, frère Claus. Mais songe aux mères, à Dorothée, à tes enfants ! Toi seul peux nous sauver par ton exhortation !
Nicolas. — Quand les chevaux de guerre sont sellés, quand les hommes au sang jeune et violent tendent la main vers les armes luisantes, il est trop tard pour avertir. Vous n’avez plus besoin de ma morale !
Haimo. — Toi seul peux nous sauver par un conseil adroit !
Nicolas. — L’avidité de la puissance et des richesses les rend fous. Que peut-on faire entendre à des fous ?
Haimo. — Ils n’entendront plus la raison, mais ta folie et ton miracle, frère Claus ! C’est la seule voix qu’ils entendront ! Oh ! toi qu’ils jugeaient fou, toi le saint et le seul, si tu descends, le peuple entier te recevra !
Nicolas. — J’ai dit adieu au monde, pour toujours.
Haimo. — Mais le monde angoissé te rappelle !
Nicolas. — Heureux l’homme qui trouve sa paix dans le désert et la prière !
Haimo. — Heureux l’homme qui préfère à sa paix le salut de tous ceux qui souffrent !
Nicolas. — Mon vœu me lie !
Haimo. — Quel vœu ?
Nicolas. — Mon vœu de solitude ! Mon salut !
Haimo. — Ô ! que Dieu même te délie !
Récitatif.
Parmi nous, peuple, parmi nous — parmi la foule en lourd tumulte avant le jour — aveugle proie de l’horreur désirée — prêtant l’oreille au martelant galop du cheval roux de notre Apocalypse — parmi nous, foule, parmi nous
Descends, clémente et pacificatrice — ô voix pareille à la rosée ! — Viens te poser sur le cœur de violence — apaise-nous, colombe en ce tumulte — miraculeuse !
Chœur céleste.
Nicolas. — Ô dure nuit du dernier sacrifice ! Haimo ! Haimo !
Haimo. — Qu’a dit la voix ?
Nicolas. — Dieu lui-même est descendu ! Mon Seigneur s’est abaissé ! Ô Haimo ! j’ai tout quitté pour vivre seul avec mon Dieu, tout près du ciel. Et voici qu’il me faut maintenant quitter aussi ma solitude et redescendre chez les hommes… Écoute-moi. C’est comme un effrayant blasphème… C’est comme si Dieu lui-même m’avait dit : Nicolas, sacrifie ton salut ! — J’obéirai, je descendrai.
Scène viii.
Choral i.
Nicolas (s’arrêtant). — Haimo, je ne puis plus marcher ! Mes jambes plient !
Haimo. — Au nom du ciel, efforce-toi, mon frère ! Le temps fuit !
Nicolas. — Haimo, je ne puis plus…
Haimo (penché vers Nicolas). — Vois là-bas ! Ils se sont levés ! Tout s’apprête pour la guerre ! Soldats rangés, armes fourbies, regards de haine, sans un mot ! Mon Dieu ! Mon Dieu ! Soutiens ton serviteur !
Nicolas. — Écoute-moi ! Je ne puis plus avancer. Je vais te dicter un message pour les députés. Ensuite tu me laisseras sur le bord du chemin. Et tu courras leur crier : Paix ! Paix !… Viens près de moi. Écris ce que je dis !
Chœur céleste.
Haimo. — J’ai tout écrit. Veux-tu signer ?
Nicolas. — Ce sont là de faibles paroles, si Dieu lui-même ne les signe dans leurs cœurs ! Va, bon frère, et hâte-toi !
Haimo. — Adieu !
Nicolas. — Haimo ! (Il ôte la corde qui tient sa robe.) Voici ma signature ! (Il fait un nœud.) Apporte-leur ce nœud, afin qu’ils le dénouent !
Haimo (prenant la corde). — Un faible enfant pourrait le dénouer !
Nicolas (avec peine). — L’homme le plus fort ne pourrait pas le dénouer… et il faudrait alors l’épée pour le trancher… si chacun tire par un bout… de son côté…
Nicolas. — Dieu ! Pardonne à ton serviteur ! Qu’ai-je fait ? Qui suis-je, moi, pour m’opposer à l’œuvre juste de ta main, de ta vengeance !
Tu as raison quand tu nous damnes. Tu as raison quand tu nous sauves. Tu as raison quand tu nous jettes dans la guerre. Tu as raison quand tu nous gardes dans la paix. Que ta volonté se fasse !
Scène ix.
Un député. — Les chevaux sont-ils sellés ?
Des voix. — Sellés !
Un ambassadeur. — Les bagages sont-ils chargés ?
Des voix. — Chargés !
Un compagnon. — Et vous, êtes-vous prêts à me suivre ?
Les compagnons. — Nous sommes prêts !
Voix. — À la vie ! À la mort !
Tous. — À la guerre !
Haimo (entre les deux groupes, isolés). — Halte ! (Tous se retournent vers lui.) Message de la part du frère Claus !
Tous. — Halte ! Halte !
Haimo. — Députés des huit cantons, je vous adjure de par Dieu ! vous assembler une dernière fois !
Les compagnons. — Hou ! Hou ! Hou !
Les députés. — De par Dieu ! nous t’entendrons !
Scène x.
Récitatif.
Voix. — Que disent-ils ? — Entendez-vous ? — Que font-ils ? — Les voyez-vous ?
Une voix de la coulisse. — Je les vois ! — Il a lu le message ! — Je n’entends rien ! — Tous ont baissé la tête !
Voix sur la place. — Ils ont entendu le message ! Écoutez !
Récitatif.
Voix sur la place. — Écoutez ! Qu’ont-ils dit ? Écoutez !
Voix de la coulisse. — Je ne sais pas ! — Je les vois qui se lèvent !
Voix sur la place. — Ils se lèvent !
Voix de la coulisse. — Ils se serrent les mains ! Ils s’embrassent !
Voix sur la place. — Ils se serrent les mains ! Ils s’embrassent !
Voix de la coulisse. — Les voici !
Voix sur la place. — Les voici qui viennent !
Le président (lisant). — Au nom de la vénérable Diète des huit cantons confédérés ! Considérant tous les périls qui nous menacent à l’intérieur comme au-dehors de nos frontières, sur le conseil de notre frère Claus inspiré par le Tout-Puissant, nous avons décrété ce qui suit :
La ligue des villes est proclamée dissoute. Les campagnes auront part équitable et juste au partage du butin de Bourgogne. Toute alliance étrangère est interdite soit aux cantons, soit aux partis, et tout subside en nature ou argent, afin que nulle jalousie ne vienne empoisonner les cœurs. Moyennant quoi nous acceptons dans notre Confédération les bonnes villes de Fribourg et de Soleure. Les députés doivent emporter le souvenir de la fidélité, des peines et travaux que le pieux homme, frère Claus, s’est donnés en cette occasion. Qu’il soit de leur devoir, partout et en tout lieu, de célébrer notre reconnaissance et d’illustrer ce mémorable exemple ! Séparons-nous dans la paix et la joie !
Les assistants de gauche. — Un pour tous !
Les assistants de droite. — Tous pour un !
Récitatif.
Parmi nous, peuple, parmi nous, — toi maintenant renais multipliée, dans tous nos cœurs, à tous échos, par mille cloches — ô joie du Pacificateur !
Du haut des Alpes, qu’elle est belle — la voix de la sentinelle — qui nous avertit du salut !
Qu’ils sont beaux sur nos montagnes — les pieds ailés du messager — qui vient publier la paix !
Le messager. — Au frère Claus, de la part des municipalités et conseils de Soleure et de Fribourg :
Nous sommes avisés que, par la grâce du Dieu Tout-Puissant ayant établi dans toute la Confédération la paix, le calme et l’unité par ton conseil et ton intervention, tu nous as fait à nous-mêmes un tel bien que nous sommes fraternellement associés dans une éternelle union à toute la Confédération. De quoi nous rendons grâce à Dieu et à toute la Cour céleste, ainsi qu’à toi dont l’amour de la paix a opéré ces choses, priant Notre Seigneur Jésus-Christ de t’en accorder récompense et de nous établir dans la joie de l’éternelle félicité. De tous soit dit bienheureux, Nicolas !
Choral ii. (Plan 1.)
Chœur des enfants et des suisses. (Plan 2.)
Chœur céleste. (Plan 3.)
Chœur final. (Tutti.)