Comment j’ai écrit Nicolas de Flue (3 novembre 1939)w
Je cherchais un sujet dramatique digne des vastes dimensions de▶ ◀la▶ Halle des Fêtes à Zurich.
C’était en septembre 1938. ◀L’▶Europe entière allait mobiliser. Vous vous souvenez ◀de▶ cet après-midi du mercredi 28 septembre où ◀les▶ peuples prêtaient ◀l’▶oreille guettant ◀le▶ tocsin ◀de▶ ◀la▶ guerre.
C’est alors qu’éclata ◀la▶ nouvelle ◀de▶ ◀l’▶entrevue décisive ◀de▶ Munich. Or, au soir ◀de▶ ce jour me parvint par hasard un livre sur ◀la▶ vie ◀de▶ Nicolas de Flue. Et je tombai sur ◀le▶ récit ◀de▶ ◀la▶ Diète ◀de▶ Stans, c’est-à-dire sur ◀le▶ récit même ◀de▶ ◀la▶ journée que nous venions de vivre !
C’était ◀la▶ même menace, ◀la▶ même attente au bord du gouffre, ◀la▶ même minute où, retenant son souffle, ◀le▶ peuple attend ◀les▶ cloches fatidiques : et ◀d’▶un coup ◀le▶ même « Alléluia ! » parce qu’un homme a osé, quand tout était perdu, croire encore au miracle et ◀l’▶accomplir ! ◀Le▶ message ◀de▶ ◀l’▶ermite du Ranft prenait en ce soir-là des résonances monumentales. Cette petite scène ◀de▶ Stans, que nous avions coutume ◀de▶ voir dans ◀le▶ lointain ◀de▶ notre histoire, par ◀le▶ gros bout ◀de▶ ◀la▶ lunette du temps, ◀la▶ voilà qui s’agrandissait aux proportions ◀de▶ ◀l’▶Europe ◀d’▶aujourd’hui. Il n’y avait plus à hésiter. Je tenais enfin ◀le▶ grand sujet.
◀La▶ pièce fut écrite, ◀le▶ musicien trouvé — Honegger, ◀le▶ puissant auteur du Roi David et ◀d’▶Antigone — et dès ◀le▶ mois ◀de▶ mai ◀de▶ cette année, sous ◀l’▶égide ◀de▶ ◀l’▶Institut neuchâtelois, 500 personnes, acteurs, choristes et figurants se mirent joyeusement à ◀l’▶ouvrage pour réaliser ◀le▶ spectacle. Ce magnifique effort ◀d’▶art et ◀de▶ patriotisme devait trouver son couronnement lors des deux journées neuchâteloises ◀de▶ ◀l’▶Exposition ◀de▶ Zurich. Mais ◀le▶ mois ◀de▶ septembre 1939 nous apporta ◀la▶ catastrophe que septembre 1938 avait su écarter. C’était ◀l’▶échec tragique ◀de▶ Nicolas et du message fraternel que ◀le▶ drame allait nous redire.
Et cependant nous n’avons pas perdu courage. ◀La▶ foi ◀de▶ Nicolas domine ◀les▶ temps. Elle vit encore au cœur des Suisses. Elle est encore ◀le▶ grand symbole ◀de▶ notre Confédération et ◀de▶ sa mission en Europe. Plus que jamais, dans ces heures sérieuses, plus que jamais elle doit se faire entendre.
Grâce aux organisateurs ◀de▶ ◀l’▶émission nationale du 6 novembre, quelques scènes typiques ◀de▶ ◀la▶ pièce seront exécutées à votre intention par ◀les▶ acteurs, choristes et musiciens qui s’étaient préparés pour Zurich. (Compagnie ◀de▶ ◀la▶ Saint-Grégoire, Chorales du Locle et ◀de▶ ◀La▶ Chaux-de-Fonds, dirigées par M. Charles Taller, Fanfare des Armes réunies, dirigée par M. Piéron, régie ◀de▶ M. Jean Kiehl.) Beaucoup d’entre eux sont comme moi, mobilisés. Remercions ◀l’▶armée ◀de▶ leur avoir accordé ◀les▶ congés nécessaires : ils auront tous conscience, lors de ◀l’▶exécution, ◀de▶ servir encore ◀le▶ pays.