IX. Premiers résultats de▶ notre action
Mais tout ce bruit ne saurait troubler ceux sur lesquels nous comptons ; ces calomnies ne déconsidèrent que leurs fauteurs, elles démasquent nos adversaires et nous permettent ◀de▶ mesurer les forces contre lesquelles tout mouvement nouveau doit lutter : force ◀d’▶inertie et ◀de▶ routine, le plus souvent, force ◀d’▶attachement à des doctrines dépassées ou à des intérêts plus ou moins avouables, d’ailleurs compromis par l’évolution générale, — forces négatives ◀de▶ défaitisme intérieur ou ◀de▶ peur.
D’ores et déjà, nous pouvons constater trois résultats ◀de▶ notre activité dont l’importance dépasse largement celle des malentendus multipliés à dessein autour de nous :
1. La création ◀de▶ la Ligue du Gothard a produit un choc salutaire sur l’opinion suisse. Elle a rendu confiance à beaucoup de citoyens, elle a fait naître un grand espoir et dissipé certaines brumes ◀de▶ défaitisme.
2. La crainte ◀de▶ la concurrence a produit une émulation inattendue du côté des partis. Il est incontestable que sans la Ligue, les « communautés ◀de▶ travail », esquissées dans divers cantons n’auraient pas vu si tôt le jour. Quel que soit le scepticisme qu’on peut garder en présence de ces tentatives ◀d’▶union « par en haut », elles auront eu pour résultat positif ◀de▶ réveiller des préoccupations civiques, et ◀d’▶accélérer certaines évolutions nécessaires.
3. Les rencontres préparant la fondation ◀de▶ nos groupes cantonaux ont permis des prises ◀de▶ contact ◀d’▶une grande importance entre délégués des syndicats ouvriers ◀de▶ tendances naguère opposées et délégués des syndicats patronaux. On a senti passer le souffle ◀d’▶un esprit ◀de▶ collaboration à la fois réaliste et vraiment national : et c’est la première condition ◀d’▶une rénovation économique et sociale accomplie dans la liberté.
Dès maintenant, notre confiance peut se fonder sur quelques faits concrets autant que sur la certitude que le pays attendait notre action. Certes, nous n’en sommes qu’aux premiers pas, mais c’étaient ceux qui coûtaient le plus ! Notre première victoire a été sur nous-mêmes, sur un passé ◀de▶ controverses et ◀de▶ coupable ignorance mutuelle. Notre amitié nouvelle, scellée par les premiers combats, est le meilleur gage ◀d’▶un accord qui doit s’approfondir et s’élargir sans cesse.
Chargés, devant notre patrie, ◀d’▶une responsabilité que nous mesurons avec humilité, nous appelons à nos côtés tous ceux qui croient que la Suisse vaut ◀d’▶être défendue et peut l’être avec l’aide ◀de▶ Dieu. Nous appelons les « jeunes » ◀de▶ tous les âges.
Que les sceptiques, les fatigués, les amateurs ◀de▶ controverses interminables attendent encore ! Qu’ils nous laissent faire le gros œuvre, avant de voler au secours ◀de▶ la victoire ! Nous savons dès maintenant qu’il y a dans notre peuple assez ◀de▶ forces vives qui demandent à nous aider.
Nous savons que notre initiative répond à un besoin vital ◀de▶ la Patrie.
Nous savons qu’en réunissant des efforts jusqu’ici dispersés et des groupements naguère hostiles, nous créons le visage ◀de▶ la nouvelle génération et nous marchons dans la seule voie possible.
Nous savons que la Suisse est gravement menacée, mais que notre action la renforce.
◀De tout temps, à l’appel du danger, nos ancêtres se sont levés. C’est notre tour.
Denis de Rougemont.