La fin du monde
Parmi toutes les libertés que la pensée se donne lorsque, se dégageant de▶ notre condition, elle imagine des idées qui détruisent l’homme, l’on rencontre sans trop ◀d’▶effroi l’idée ◀de▶ l’homme détruit ; l’idée ◀de▶ l’homme qui pense cette idée, détruit ; l’idée que vous, et qui pensez, un jour ne serez plus, un jour serez un mort.
Si « macabre » désigne assez bien l’étrangeté ◀de▶ la mort des autres, cela ne saurait en aucun cas se dire ◀de▶ sa propre mort, ◀de▶ la mienne. Et non plus, à mon sens, ◀de▶ la méditation que je poursuis entre ces phrases, dans cette matinée blanche, typiquement quotidienne, où nulle fatigue ne m’inclinerait à renoncer. Pourtant, si tout s’arrête avant midi, pour moi ? Je ne sens pas que l’idée soit tragique : elle m’appartient, je puis en disposer, feindre assez facilement ◀d’▶en rire. Elle n’est pas plus forte que moi. Peut-être même n’est-elle qu’une ruse cousue ◀de▶ fil blanc ◀de▶ ma vitalité : la seule pensée que mon souffle puisse, dans quelques instants, s’arrêter, accélère ma respiration.
Et cela ne signifie point que nous n’ayons jamais pensé à notre mort avec une rapide angoisse — nous y pensons bien plus que nous n’osons le croire, sans doute ne pensons-nous qu’à elle — mais nous n’avons jamais pu penser notre mort. Contester là-dessus serait fournir l’aveu ◀d’▶une impuissance à comprendre le mot penser dans son sens fort. Car penser sa mort réellement, ce serait aussitôt mourir. Peut-être avons-nous là le seul critère ◀d’▶une perfection intellectuelle, et l’on conçoit que son application ne puisse être ni rapportée ni répétée. Perfection et Mort en ceci se confondent, qu’elles sont absolument tragiques, c’est-à-dire sans appel.
Ontologie ◀de▶ la fin
Pour que nous apparaisse parfois l’étrangeté ◀d’▶une telle situation — la nôtre à tous — ne faut-il pas qu’une instance mystérieuse aimante notre méditation et qu’elle la fixe sur cela que le naturel se refuse à prendre au sérieux ? Car si nous restons impuissants à penser notre mort dans le vif, ce phénomène doit normalement être aperçu comme négligeable ; et s’y attarder serait le fait ◀d’▶une sophistique assez gratuite. Ma nature crie à l’utopie devant ma mort. ◀De▶ là vient que l’humanité, dans son ensemble, résiste instinctivement à la pensée ◀de▶ la Fin, refuse ◀de▶ toutes ses forces ◀de▶ la « réaliser », bien plus, s’applique à la disqualifier, à la rendre abstraite et lointaine, à la chasser à tout jamais dans un futur indéfini. Ainsi ◀de▶ l’homme, ainsi ◀de▶ l’humanité. Pourtant un jour, tel jour ordinaire, l’homme meurt.
Pourquoi suis-je donc ici à remuer ces choses ? Il est vrai que ce sont les seules dont l’intérêt grandisse avec le temps, si l’on admet que le temps va toujours dans le même sens : vers sa fin. Mais c’est une mauvaise raison. Depuis qu’il court ainsi, mesuré par les saisons régulières, le temps nous endort bien plutôt qu’il ne nous avertit ◀de▶ son but. Si l’homme savait un jour ce qu’il en est ◀de▶ son destin et ◀de▶ sa liberté, s’il voyait à l’œil nu leur sens dernier et l’enjeu véritable ◀de▶ ses choix, à qui reviendrait l’empire ◀de▶ ce monde ? À l’Ecclésiaste ou au Jeune Homme ? Le sage ne rallierait pas avec moins ◀d’▶envie le débauché, dont il faudrait encore plaindre l’arrière-pensée, l’impuissance à choisir sans retour. Vivre est impur, qu’on sache ou non où va la ◀vie▶, et c’est pourquoi les bonnes raisons n’expliquent pas notre réalité, mais seulement ce qui la condamne. Ainsi, la pensée ◀de▶ la Fin a les meilleures raisons du monde ◀d’▶être pensée ; toutefois l’effort entier ◀de▶ notre ◀vie▶ la neutralise.
◀D’▶où vient alors cette prise de conscience, ◀d’▶une menace, mais aussi ◀de▶ l’incapacité où se trouve l’homme à penser concrètement sa fin ? ◀D’▶où vient qu’imperceptible encore au plus grand nombre, à tous les lettrés sans esprit, la pensée ◀de▶ la catastrophe s’acclimate lentement parmi nous ? ◀D’▶où, sinon ◀de▶ la Fin qui déjà nous pénètre, sinon ◀de▶ la Réalité qui m’a pressé ◀d’▶écrire ces pages et qui pourrait suspendre ici ma phrase, me jetant dans mon jugement ? S’il nous vient à l’idée ◀de▶ penser notre mort, c’est la Mort en nous qui se pense, c’est la Crise déjà qui affleure, nous avertit ◀de▶ la Fin, et l’atteste.
La crise
Le Bas-Empire ne fut « bas », en son temps, qu’aux yeux de ceux qu’une réalité nouvelle illuminait. Sans la ◀vie▶, que dire ◀de▶ la mort ? Et sans la Fin, que dire ◀de▶ la durée ? Mais tout se mêle encore confusément. Nous sommes là comme en rêve, empêtrés dans le sentiment ◀d’▶une urgence que nous ne parvenons pas à distinguer avec des yeux bien dessillés. C’est assez pour l’angoisse et trop peu pour agir. Ainsi le grand décret ◀de▶ crise qui sévit au cœur ◀de▶ ce siècle n’est qu’une première parole, ambiguë, ◀de▶ la Fin. Une première demande ◀d’▶informer. Non pas encore l’Arrêt dernier, mais déjà ce ralentissement qui nous fait accéder à la conscience obscure ◀d’▶un danger proche, ce crépuscule qui est peut-être une aube, et la frange ◀de▶ cet éclat qui doit consumer toute chair.
Dans cette lueur suspecte, risque un jour ◀d’▶apparaître la face réelle ◀de▶ la Terre. Et déjà, par intermittence, certains ont entrevu et tenté ◀de▶ juger les buts réels ◀de▶ notre marche séculaire.
Que savons-nous du sens ◀de▶ notre civilisation ? Quelle est sa fin, dès l’origine, quel est son rêve ? La grandeur ? Nous avons détruit toute mesure, et plus rien n’est grand ni petit, mais toute chose sans répit nous provoque à la dépasser. La liberté ? Nous avons encombré la terre entière ◀de▶ barrières destinées à protéger sa course. L’amour ? La solidarité ? Ce sont des idéaux ◀de▶ ligues, des mots qu’on n’ose plus employer qu’au dessert. La richesse ? Voici qu’elle n’est plus à la portée des mains humaines, elle n’est plus qu’un symbole chiffré désignant des puissances lointaines. Toutefois, elle reste liée au rêve ◀d’▶activité qui tourmente l’Occident depuis des siècles. Mais ce rêve à son tour se trouble ; il faiblit, il ne couvre plus toute l’étendue ◀de▶ la conscience humaine…
Car notre volonté n’est plus ◀de▶ conquérir, mais seulement ◀d’▶assurer la ◀vie▶ du plus grand nombre contre les créations catastrophiques des Héros ou des grands Névrosés. Un doute règne sur nous, depuis peu. Nous essayons, mais en phrases banales ◀de▶ moralistes tardivement ressaisis, ◀d’▶évaluer les conquêtes futures. Signe évident que nous les redoutons. (Si le temps, désormais, travaillait contre nous ?) Et le monde entier s’organise à ce niveau de vie moyenne qui paraît offrir à la mort, comme à tout acte créateur, le moins ◀de▶ chances. Un vaste système ◀d’▶assurances s’étend sur toutes nos activités : plans et pactes, statistiques ◀de▶ l’imprévu, eugénisme et longévité, clercs au pas ou stérilisés, guerre hors la loi, sécurité d’abord. Nous apprenons à vivre, et non plus à mourir : cet effort est contre nature. Il naît au déclin ◀de▶ la ◀vie▶, et fatalement se retourne contre elle. Nous voulons échapper au temps, à sa menace, mais c’est peut-être le meilleur ou le seul moyen ◀d’▶anticiper sa fin : la fin du temps, la Fin du Monde. Car il se peut que l’assurance mondiale que nous tentons ◀d’▶organiser, aménage notre ruine collective : lorsque la terre entière soumise au seul pouvoir du chiffre dépendra ◀d’▶une centrale unique, il suffira que l’Ange ◀de▶ la Fin saisisse les commandes pour accomplir le Temps…
Et nous serons pris au dépourvu, comme nulle autre génération. Car, tandis que le temps s’écoule, à mesure que sa fin s’approche, notre foi diminue, notre attente faiblit. La primitive Église, au début ◀de▶ notre ère, vivait dans la pensée ◀de▶ la fin imminente. Mais parmi nous, qui avons cru pouvoir éliminer cette dimension tragique ◀de▶ notre ◀vie▶, voici qu’un destin ironique se charge ◀de▶ l’approfondir. Non pas le temps, mais notre œuvre elle-même. Pour la première fois dans l’histoire du monde, nous pouvons calculer le prix ◀de▶ revient ◀d’▶une destruction ◀de▶ l’humanité : la somme ◀de▶ nos budgets ◀de▶ Défense nationale.
Avertissement
Votre refuge est dans la masse et son Histoire. Vous vous dites en secret qu’elle ne peut pas mourir, et il est vrai qu’elle ne possède pas ◀de▶ ◀vie▶ réelle, et ne peut donc penser sa fin, ni rien. Elle ne peut être en soi pensée, et l’homme en elle reste à peu près dénué ◀de▶ réalité, jusqu’au jour où la Fin le pense. Et c’est là son tragique et l’humour ◀de▶ la Fin.
Tout ce qui est réel, tout ce qui manifeste la présence éternelle ◀de▶ la Fin, tout ce qui donne un sens ◀d’▶éternité à vos singeries, vous l’appelez exagéré, démesuré. Écoutez-moi : s’il se trouvait que le monde réellement fût perdu, quel que soit le désir que vous avez qu’il dure, et la persuasion où vous vous entretenez qu’il durera toujours autant que vous ? S’il se trouvait que la vérité actuelle fût totalement démesurée ? Qui périrait dans la honte et la rage ?
Ceux qui croient encore aux mesures et cherchent leur appui dans l’illusion tomberont en grand nombre dans le vide. Mais ceux qui auront vu, et qui auront cru leurs yeux, retrouveront dans la tempête la coutume des hautes pentes. Car celui seul qui accepte la mort n’est pas le jouet du vertige.
Le temps vient où les hommes n’auront plus à se défendre, mais seulement à se révéler tels qu’ils sont, où qu’ils soient.
Plus ◀d’▶évasions spirituelles. L’homme fuyant la Terre où le diable sévit, se réfugie sur les hauteurs et découvre que Dieu y est plus dangereux encore, ◀d’▶une autre sorte, fulgurante.
Péripétie
La scène du monde vient de passer à une vaste conversation ◀de▶ la mort, sur les places et dans les grands cafés, aux lieux ◀de▶ populace et ◀de▶ parole rapide. Peut-être le soleil éteint se promène-t-il depuis quelques instants dans un ciel sale. Qui sortirait pour voir ? Seul, d’ici, je m’étonne : ce monde peut si facilement glisser, tout se trouver changé, et les hommes poursuivre leur discours, pénétrant dans l’horreur sans mémoire ? Il faut croire, aujourd’hui, que cela se peut. Cela s’est produit comme un rêve, ou comme la colère soudain là, ou le printemps, ou chaque soir la nuit. (Une première lampe s’est allumée. Quelqu’un dit : « Elle est là. »)
Premier jugement, par la lumière
La fin du monde, irréfutable, s’arrêtait un peu en avant, les regardait sans indulgence, puis se remettait à marcher, conservant la même proximité méprisante… Mais la majorité sut garder l’air ◀de▶ ne pas croire à sa mort proche, cet air petit. On en reviendrait bien, ◀de▶ cette fin du monde ! Car sinon tout apparaissait ◀d’▶une indécence inexprimable. Depuis bientôt mille ans, l’An Mille était passé — « et toutes ses prières perdues ! » — mais ils savaient que rien ne peut finir tout à fait et à jamais qu’au prix de cela justement qu’il n’était point permis ◀d’▶imaginer. Celui dont les belles manières sont apprises souffre mal qu’on y passe outre, et très peu d’entre eux possédaient la pleine assurance ◀de▶ l’être.
L’Institut ◀de▶ l’opinion planétaire publia les premiers résultats ◀d’▶une enquête-éclair : il s’agissait ◀d’▶une névrose collective, ◀d’▶une poussée subite ◀de▶ l’instinct ◀de▶ mort. On proposait une cure des masses et la nationalisation des écoles ◀de▶ psychanalyse.
Un théologien répondit : « L’affection ◀de▶ la chair, c’est la mort. Saint Paul l’a vu bien avant Freud, et mieux. Il entendait par « chair » le tout ◀de▶ l’homme, intelligence et belle âme comprises. Et ce n’est point que nous aimions la mort comme telle. Bien au contraire, ce qu’affectionne la chair, c’est ce qui, croit-elle, la détourne ◀de▶ la mort. C’est la ◀vie▶ telle que vous la cultivez, qui conduit à la mort et la mérite. Nous sommes tout simplement au jour du Jugement. Il sera porté aussi bien sur votre élan vital que sur l’élan mortel. Car il ne vient pas de nous, mais ◀d’▶En Face. Ici le futur nous attend, ce futur qui n’était pour nous qu’un recul devant le présent. Ici le temps dit oui pour la première fois à l’Instant qui le juge et l’accomplit, notre temps, qui n’était pour nous qu’un refus ◀de▶ l’instant éternel. Et l’Histoire tout entière dans l’acte ◀de▶ ce oui, se manifeste au Jour ◀de▶ tous les jours. »
Comme il parlait encore, une lueur ◀d’▶aube apparut et grandit autour ◀d’▶eux.
Toutes choses replongées dans la stupeur originelle, toutes créatures livrées d’un seul coup à la violence ◀de▶ l’acte décisif, nous allons voir paraître enfin leur justification, leur être.
Voici l’instant où les hommes s’aperçoivent que leurs efforts et leurs soucis se tournaient vers ce qui n’est rien, vers une Absence douloureuse, alors que c’est la seule Présence qui est terrible en sa splendeur et difficile à supporter, le seul Amour apparaissant qui menace ◀d’▶être insoutenable : il nous trouve sans préparation. L’on ne s’était défendu que ◀de▶ l’autre côté, du côté de ce monde mal fait…
Parut un soleil nouveau. Et ceux qui le voyaient prenaient un visage neuf, leurs yeux devenaient forts et s’attendaient à l’éclat ◀d’▶une lueur encore plus vive. Par degré le Grand Jour éclatait, toujours plus vaste et blanc dans l’univers entier.
Ils se sont tout d’abord sentis gênés, balourds, ne sachant trop quelle contenance prendre. Et la lumière ne cesse ◀de▶ grandir. Ils tombent déjà par rangs entiers, aveuglés et cloués sur place par l’évidence ◀de▶ l’amour éclatant. Quelques-uns cependant continuent ◀de▶ marcher, riant ◀de▶ joie aux paliers du matin, s’avançant vers Midi avec le naturel ◀de▶ ceux qui ont la coutume ◀de▶ la Cour.
Bien peu soutinrent les derniers soleils et l’agrandissement ◀de▶ la lumière jusqu’aux limites ◀de▶ sa perfection, où tout ce qui voit éclaire aussi, où tout œil rend ce qu’il reçoit, où le grand jour est tout en tous.
Ce premier Jugement fut la Salutation.
Second jugement ou sommation
Voici le principe du second jugement.
Chaque homme poussé à la limite ◀de▶ son expression, et chaque homme forcé à l’extrémité ◀de▶ son choix, cria le « terme » ◀de▶ sa ◀vie▶, la proféra tout entière dans ce cri, réponse unique à l’éternelle sommation, somme absolue ◀de▶ ses journées et ◀de▶ ses nuits, ◀de▶ ses pensées et ◀de▶ ses gestes, ◀de▶ son savoir, ◀de▶ ses refus, ◀de▶ ses aveuglements, ◀de▶ sa tendresse. C’est ainsi que fut déclarée l’incomparable qualité ◀de▶ son péché et mesuré le degré ◀d’▶être ◀de▶ son être tel qu’il l’avait librement fait en le vivant.
L’examen des raisons ◀de▶ survivre et leur introduction au titre ◀de▶ l’éternité occupa moins ◀de▶ temps qu’on n’imagine. La procédure était, en effet, des plus simples.
— Témoignez, disait-on, ◀de▶ la ◀vie▶ que vous possédez. Quel est votre plus vrai désir ?
Les sages répondaient :
— Nul ne possède vraiment que ce qu’il peut donner. Demandez-moi plutôt pour quoi je veux mourir.
Et c’était bien ce qu’on faisait. Ainsi tous connurent la mort, mais les uns renaissaient au sein de leur plus grande frayeur, les autres sous les traits consolés du Désir.
La plupart hésitaient en présence de la banalité soudain flagrante ◀de▶ leurs vœux, et, finalement, murmuraient ◀d’▶une voix faible :
— Vous savez sans doute mieux que moi.
Ils renaîtraient plantes heureuses, par l’effet ◀de▶ quelque pitié.
Un homme vint, comme viennent les somnambules, le corps en paix, mais le visage affreusement nu. Il désirait un palais vide à la mesure ◀de▶ sa tristesse. Il devint donc une tristesse errante, empruntant la forme des joies qu’il rencontrait ; et son désir ainsi fut exaucé.
Un autre voulait vivre abondamment au sein d’une perpétuelle pauvreté. Devint soleil.
Et quel est celui qui s’approche avec son parapluie mal fermé sous le bras, et des lunettes bourrues au-dessus du sourire ◀de▶ la plus fervente ironie ? Qu’est-ce qu’il grommelle sous son chapeau ◀de▶ paille8 ? « Qu’il voudrait subsister dans ce moment du choix qu’on lui impose maintenant, bien plus violent qu’il n’a jamais osé l’imaginer. Car, dit-il, au sein d’un tel choix, je m’approche insondablement ◀de▶ Celui qui ◀d’▶un choix me créa. »
(Nous fûmes tous saisis ◀d’▶un vertige à ce discours ◀d’▶une furieuse démesure, mais il y eut alors comme un silence qui s’imposa sur nous et jusqu’assez haut dans les cieux, en sorte que plus haut, régnant seul et purifié, l’on put entendre le choral ◀d’▶une angélique hilarité. Et nous sûmes que cet homme était très grand.)
Troisième jugement ou le pardon
Toute chose a son lieu, maintenant, toute chair a son temps, tout esprit son essor. Et chacun ◀de▶ nous accède au destin qu’il s’est fait, à la parfaite possession ◀de▶ soi-même, à son enfer ou à son ciel, dans la consommation ◀de▶ tout son être, au faîte inconcevable du désir comblé, et comblé pour l’éternité.
« Mais l’Esprit et l’Épouse disent : Viens. Et que celui qui entend dise : Viens ! à celui qui porte avec soi la rétribution ◀de▶ nos œuvres » — elle est en Lui, non dans nos œuvres.
Commence l’œuvre du Pardon.
« Et que celui qui a soif vienne, que celui qui veut prenne ◀de▶ l’eau ◀de▶ la ◀vie▶, gratuitement. »
Car maintenant tout est payé. Tout est gratuit.
Et c’est alors que toutes les voix des justes confondues clameront l’harmonie violente et bienheureuse du mot sacrement ◀de toute la création, son terme monumental à la gloire du Dieu Tout-Puissant, — l’Amen du Temps qui s’agenouille et s’abîme éternellement.