La▶ Suisse et ◀l’▶Europe après 1945 (avril 1957)bj bk
1. ◀La▶ Suisse épargnée
Alors que la plupart des autres pays ◀de▶ ◀l’▶Europe (sauf ◀la▶ Suède et ◀le▶ Portugal) ont été dévastés par ◀la▶ guerre et ◀les▶ révolutions, ◀la▶ Suisse se retrouve en 1945 moralement et physiquement intacte, et plus prospère que tous ses voisins. Sa neutralité ◀l’▶a sauvée.
◀De▶ nombreuses institutions internationales viennent s’établir chez nous. ◀L’▶Organisation des Nations unies (ONU) inaugure son siège européen à Genève, dans ◀le▶ palais bâti pour ◀la▶ Société des Nations. ◀Les▶ conférences diplomatiques se multiplient dans notre pays neutre et accueillant.
Une ère ◀de▶ grande prospérité économique s’ouvre pour ◀la▶ Suisse. ◀Les▶ capitaux étrangers s’accumulent dans nos banques. ◀La▶ monnaie suisse reste ◀la▶ plus solide du continent. Cependant, ◀le▶ commerce avec ◀les▶ pays ◀de▶ ◀l’▶Est et ◀la▶ Russie est entravé par ◀la▶ fermeture presque totale ◀de▶ ◀la▶ frontière entre ◀l’▶Europe de l’Ouest et ◀les▶ pays soumis à ◀l’▶occupation ou à ◀l’▶influence ◀de▶ ◀la▶ Russie soviétique. C’est ce qu’on appelle ◀le▶ « rideau ◀de▶ fer ». D’autre part, ◀les▶ barrières douanières élevées entre ◀les▶ pays européens rendent ◀les▶ échanges commerciaux coûteux et difficiles. ◀L’▶agriculture, fortement développée pendant ◀la▶ guerre, ne peut se soutenir qu’avec ◀l’▶aide ◀de▶ subventions ◀de▶ ◀l’▶État.
Ainsi ◀la▶ Suisse conserve une situation privilégiée, mais qui ne peut se prolonger longtemps si ses voisins ne se relèvent pas des ruines ◀de▶ ◀la▶ guerre.
2. ◀L’▶Europe détrônée et divisée
◀Les▶ deux guerres ◀de▶ 1914 et ◀de▶ 1939 ont mis fin à ◀la▶ puissance mondiale ◀de▶ ◀l’▶Europe, qui dominait ◀la▶ planète depuis des siècles. Deux grands empires unifiés et possédant des armements atomiques, ◀les▶ États-Unis et ◀l’▶URSS, se partagent désormais ◀la▶ puissance politique, économique et militaire qui était autrefois celle ◀de▶ ◀l’▶Europe.
◀Les▶ Russes dominent ◀les▶ pays ◀de▶ ◀l’▶Est ◀de▶ notre continent (Pologne, Tchécoslovaquie, Allemagne orientale, Hongrie, Bulgarie, Roumanie). ◀Les▶ Américains aident ◀les▶ pays ◀de▶ ◀l’▶Ouest à relever leur économie, grâce à un système ◀d’▶aide financière dit « plan Marshall », qui aboutit à ◀la▶ création ◀de▶ ◀l’▶Organisation européenne ◀de▶ coopération économique (OECE), groupant 16 pays, dont ◀la▶ Suisse. Mais ◀le▶ continent reste divisé par ◀d’▶innombrables barrières douanières, différences ◀de▶ change, obstacles au libre déplacement des personnes et des marchandises.
De plus, en quelques années, ◀la▶ Grande-Bretagne, ◀la▶ Hollande et ◀la▶ France perdent leurs plus riches colonies ◀d’▶Asie et ◀d’▶Afrique du Nord. ◀Le▶ monde arabe se révolte contre ◀l’▶influence occidentale et menace ◀les▶ approvisionnements ◀de▶ ◀l’▶Europe en pétrole. (Fermeture du canal ◀de▶ Suez en 1956.)
◀L’▶Europe se trouve ainsi appauvrie, divisée, privée ◀d’▶une politique commune à tous ses États, soumise à ◀l’▶influence des États-Unis dans sa partie ouest et ◀de▶ ◀l’▶URSS dans sa partie est. Elle est menacée ◀de▶ perdre son indépendance.
3. ◀L’▶idée ◀d’▶union européenne fait son chemin
Pour réagir contre ◀les▶ dangers nés des divisions du continent, un mouvement ◀d’▶opinion se forme dans ◀de▶ nombreux pays, dès 1945, en faveur d’une union des États européens.
◀Les▶ buts des partisans ◀de▶ ◀l’▶union sont d’une part, ◀d’▶empêcher ◀le▶ retour ◀de▶ guerres entre ◀les▶ États européens, d’autre part, ◀d’▶unir ◀les▶ forces du continent pour que ◀l’▶Europe puisse résister aux pressions extérieures, assurer son indépendance politique et retrouver sa prospérité économique. Si ◀l’▶Europe s’unissait, disent-ils, elle formerait une fédération ◀de▶ près de 430 millions ◀d’▶habitants, c’est-à-dire plus que ◀les▶ États-Unis (165 millions) et ◀l’▶URSS (210 millions) additionnés.
En outre, il devient évident, à ◀l’▶époque des armements atomiques et ◀de▶ ◀la▶ technique en plein essor, qu’aucun ◀de▶ nos pays européens ne peut plus se défendre seul, et qu’aucun ne peut plus vivre ◀de▶ ses seules ressources. ◀La▶ solidarité des nations est une nécessité vitale, dans cette seconde moitié du xxe siècle.
4. Premières réalisations
Un congrès se réunit à La Haye en 1948, sous ◀la▶ présidence ◀de▶ M. Churchill. Il demanda ◀la▶ convocation ◀d’▶une Assemblée parlementaire européenne. ◀L’▶année suivante, cette Assemblée se réunit pour la première fois à Strasbourg et un Comité ◀de▶ ministres ◀de▶ 16 pays est formé : ◀le▶ Conseil de l’Europe est né. Mais il n’est qu’un organe consultatif. Il n’a pas ◀de▶ pouvoir exécutif. ◀Les▶ États qui ◀le▶ composent gardent toute leur souveraineté. ◀Le▶ Conseil est donc aussi faible que ◀l’▶était ◀la▶ Diète helvétique avant 1848.
Désirant une union économique plus étroite, six pays (France, Allemagne, Italie, Hollande, Belgique et Luxembourg) décident en 1951 ◀de▶ mettre en commun leurs ressources ◀de▶ charbon, ◀de▶ fer et ◀d’▶acier. Ils signent ◀le▶ pacte nommé Communauté européenne du charbon et de l’acier (CECA). ◀Le▶ siège ◀de▶ cet organisme s’établit à Luxembourg.
En 1957, ◀les▶ mêmes six pays font un pas de plus, et créent ensemble un Marché commun dont ◀le▶ but est ◀de▶ supprimer progressivement ◀les▶ douanes qui ◀les▶ séparent. Ainsi se trouve ouvert un vaste espace où ◀le▶ commerce sera libre. (Ce groupe ◀de▶ six pays est connu sous ◀le▶ nom ◀de▶ « Petite Europe », mais il compte au total 165 millions ◀d’▶habitants, donc autant que ◀les▶ États-Unis.) ◀Les▶ territoires ◀de▶ ◀l’▶Afrique dépendant ◀de▶ ◀la▶ France et ◀de▶ ◀la▶ Belgique, doivent venir ajouter leurs vastes ressources en matières premières à ce puissant ensemble, dont font partie ◀les▶ grands voisins ◀de▶ ◀la▶ Suisse.
◀Le▶ mouvement vers ◀l’▶union européenne ne cesse donc ◀de▶ se développer. Il pourrait aboutir à une vaste fédération politique groupant tous ◀les▶ États européens, ◀de▶ ◀la▶ même manière que ◀la▶ Confédération helvétique a groupé en 1848 tous ◀les▶ cantons suisses.
5. ◀La▶ Suisse dépend ◀de▶ ◀l’▶Europe
Jusqu’ici, ◀la▶ Suisse est restée à ◀l’▶écart du mouvement vers ◀l’▶union européenne. Quelles sont ◀les▶ raisons ◀de▶ cette attitude réservée ?
◀La▶ Suisse occupe une position centrale dans notre continent, mais n’a pas ◀de▶ débouchés directs sur ◀la▶ mer. Une large proportion ◀de▶ ses échanges commerciaux se fait avec ses voisins européens. ◀La▶ Suisse dépend donc ◀de▶ ◀l’▶ensemble ◀de▶ ◀l’▶Europe pour sa prospérité économique. Elle en dépendrait aussi pour sa défense contre une éventuelle attaque atomique venant ◀de▶ ◀l’▶Est.
Mais ◀la▶ neutralité militaire ◀de▶ ◀la▶ Suisse ◀l’▶a empêchée ◀d’▶adhérer à ◀l’▶alliance conclue en 1949 entre ◀les▶ pays ◀de▶ ◀l’▶Ouest ◀de▶ ◀l’▶Europe d’une part, ◀les▶ États-Unis et ◀le▶ Canada d’autre part. (Organisation du traité ◀de▶ ◀l’▶Atlantique Nord, ou OTAN). De même, ◀la▶ Suisse n’est pas devenue membre du Conseil de l’Europe lors de ◀la▶ création ◀de▶ cet organisme, craignant ◀d’▶être entraînée dans une politique contraire à son statut ◀de▶ neutralité.
Cependant, ◀les▶ nécessités économiques poussent ◀la▶ Suisse à coopérer toujours plus étroitement avec ◀les▶ organisations européennes. C’est ainsi que ◀la▶ Suisse adhère déjà à ◀l’▶OECE, passe des accords avec ◀le▶ CECA et ◀le▶ Marché commun, et collabore à ◀la▶ création ◀d’▶une zone européenne ◀de▶ libre-échange, englobant tous ◀les▶ pays ◀de▶ ◀l’▶Ouest du continent.
◀La▶ Suisse observe fidèlement son devoir ◀de▶ neutralité. Mais cette neutralité a été reconnue « dans ◀les▶ vrais intérêts ◀de▶ ◀l’▶Europe entière », et ne peut donc pas empêcher ◀la▶ Suisse ◀de▶ coopérer avec ◀les▶ institutions qui ont pour but ◀d’▶unir nos peuples.
◀Les▶ intérêts ◀de▶ ◀la▶ Suisse et ceux ◀de▶ ◀l’▶Europe entière sont inséparables.
Résumé
1. Au lendemain ◀de▶ ◀la▶ Seconde Guerre mondiale, ◀la▶ Suisse est ◀le▶ seul pays intact au centre ◀de▶ ◀l’▶Europe. Elle connaît une grande prospérité. Mais cette prospérité peut être compromise par ◀la▶ crise européenne.
2. ◀Les▶ guerres ◀de▶ 1914-1918 et 1939-1945 ont ruiné ◀le▶ prestige ◀de▶ ◀l’▶Europe dans ◀le▶ monde. ◀Les▶ deux grands empires russe et américain se partagent ◀l’▶Europe en zones ◀d’▶influences. ◀L’▶Europe est appauvrie par ses divisions douanières et par ◀la▶ perte ◀de▶ nombreuses colonies.
3. ◀L’▶idée ◀d’▶une union européenne se répand rapidement. ◀Les▶ buts principaux ◀de▶ ◀la▶ fédération proposée sont ◀d’▶empêcher ◀les▶ guerres en Europe, et ◀de▶ former un ensemble prospère et indépendant groupant près de 430 millions ◀d’▶habitants.
4. Dès 1949, un Conseil de l’Europe est créé, à Strasbourg. C’est un organe purement consultatif. En 1951, ◀la▶ Communauté du charbon et ◀de▶ ◀l’▶acier (CECA) groupe ◀les▶ ressources ◀de▶ six pays. En 1957, ces pays décident ◀de▶ créer entre eux un Marché commun.
5. ◀La▶ Suisse étant neutre ne peut adhérer aux alliances militaires des autres pays ◀d’▶Europe, mais coopère aux institutions économiques européennes.
Ses intérêts propres sont inséparables ◀de▶ ceux ◀de▶ ◀l’▶Europe entière.
Questionnaire
1. Quels pays européens ont-ils été épargnés par ◀la▶ Seconde Guerre mondiale ?
2. Quels dangers menacent notre prospérité ?
3. Quelles ont été ◀les▶ conséquences des deux guerres mondiales pour ◀l’▶ensemble ◀de▶ ◀l’▶Europe ?
4. Quels sont ◀les▶ pays européens dominés par ◀l’▶influence soviétique ?
5. Pourquoi parle-t-on ◀d’▶union européenne ?
6. Citez trois organisations européennes créées depuis 1949 ?
7. Pourquoi ◀la▶ Suisse n’est-elle pas membre des Nations unies ?
8. ◀La▶ neutralité suisse sert-elle seulement ◀les▶ intérêts ◀de▶ ◀la▶ Suisse ?