Notes sur deux projets
Pour un Conseil européen de▶ la recherche
Dans l’esprit ◀de▶ la proposition qu’on vient de lire, le CEC a lancé une enquête auprès des personnalités européennes les plus susceptibles ◀de▶ s’intéresser à un tel projet. Voici le texte du questionnaire soumis :
1. Sentez-vous l’utilité, ou la nécessité, ◀de▶ former un Conseil européen ◀de▶ la recherche ? Ce problème existe-t-il à vos yeux, et vous a-t-il déjà préoccupé ?
2. Ne pensez-vous pas qu’un tel Conseil se justifierait avant tout par sa volonté ◀de▶ maintenir un certain équilibre, conforme au génie européen, entre les diverses branches ◀de▶ la recherche, sciences physiques, mathématiques, technologie, sciences économiques, sociologie, biologie, génétique, médecine, philosophie, éducation, droit international, histoire, arts, archéologie et ethnographie, anthropologie, etc., de manière à éviter, entre autres, le double danger ◀d’▶une insistance exclusive sur les sciences physiques et la technique (Laboratoire) ou ◀d’▶une persistance à cultiver surtout les valeurs du Musée européen ?
3. Approuvez-vous l’idée ◀d’▶une « séparation des pouvoirs », le Conseil ayant pour fonction ◀de▶ déceler les besoins et ◀de▶ proposer des plans ◀d’▶aide à la recherche, c’est-à-dire ◀de▶ formuler une « politique ◀de▶ la recherche » en Europe, tandis que d’autres instances gouvernementales, officielles, ou privées (fondations par exemple) auraient pour fonction ◀de▶ financer les recherches en s’inspirant des plans établis par le Conseil.
4. Pensez-vous qu’un tel Conseil, composé avec tous les soins requis, et comptant des savants et penseurs ◀d’▶une compétence indiscutée dans leur domaine respectif acquerrait ◀de▶ ce fait assez ◀de▶ prestige et une autorité suffisante pour influencer et orienter utilement les instances qui détiennent le pouvoir et contrôlent les sources ◀de▶ financement nécessaires ?
5. Si vous estimez l’idée juste, et la réalisation ◀d’▶un CER nécessaire, comment imaginez-vous cette réalisation ? Et notamment :
a) pensez-vous que le Conseil devrait être créé par les Communautés des Six déjà existantes, sur leur initiative et au service ◀de▶ leurs objectifs ? ou par l’OECE, le Conseil de l’Europe et les trois Communautés ?
b) ou devrait-il se constituer sur l’initiative privée ◀d’▶un institut non gouvernemental donnant l’impulsion — ou ◀d’▶un groupe ◀de▶ personnalités décidant ◀d’▶étudier ensemble le problème et ◀de▶ constituer le premier noyau ◀d’▶un tel Conseil, quitte à le compléter ensuite par cooptations ?
c) une fois formé, devrait-il rester totalement autonome, ou se rattacher à quelque organisme existant, public ou privé ?
Pour une action commune des institutions culturelles européennes
I. On assiste à une prolifération des instituts et des projets, dans le domaine ◀de▶ la recherche, ◀de▶ l’enseignement et ◀de▶ la culture en général, au niveau européen. Quelques faits :
1949 : Centre européen de la culture, Genève (inauguré officiellement en 1950)
1949 : Comité des experts culturels du Conseil de l’Europe, Strasbourg
1949 : Commission culturelle ◀de▶ l’Assemblée du Conseil de l’Europe, Strasbourg
1950 : Campagne européenne ◀de▶ la jeunesse, Paris
1951 : Association des instituts ◀d’▶études européennes, Genève
1952 : Association des universitaires ◀d’▶Europe, Paris
1953 : Journée européenne des écoles, Paris
1954 : Fondation européenne ◀de▶ la culture, Genève puis Amsterdam
1956 : Fondation pour les échanges internationaux, Paris et Bruxelles
1956 : Association européenne des enseignants, Paris
1958 : Étude par les trois Communautés européennes (CECA, MC, Euratom) ◀d’▶une Université européenne
1958 : Préparation ◀d’▶instituts spécialisés pour les ingénieurs (Lausanne) et l’administration des affaires (Paris)
1958 : Association des instituts ◀de▶ la Communauté européenne pour les études universitaires, Luxembourg
1959 : Fonds culturel du Conseil de l’Europe
II. On doit à priori se réjouir ◀de▶ cette prolifération, qui est la preuve ◀d’▶une prise de conscience généralisée ◀de▶ l’utilité des recherches et du développement culturel, non seulement pour l’éducation des Européens, mais pour l’économie et la politique.
En fait, on constate que :
1° Ces efforts ne sont nullement coordonnés ; il y a souvent duplications, concurrence nuisible, ◀d’▶où gaspillage des énergies et perte ◀d’▶efficacité.
2° Il est de plus en plus difficile ◀de▶ financer tous ces efforts et projets car tous s’adressent aux mêmes sources, et ceux qui détiennent les capitaux nécessaires n’arrivent plus à s’orienter et se découragent : ce désordre donne une impression ◀d’▶inefficacité et ◀de▶ luttes ◀d’▶intérêts personnels.
III. Solution proposée :
1° Convocation ◀d’▶une table ronde des organisations culturelles européennes, à laquelle seraient invités les responsables des principales institutions indiquées ci-dessus.
2° Chacune exposerait son programme et les moyens dont elle dispose. L’objectif ◀de▶ la réunion serait en effet ◀de▶ dresser dans ses grandes lignes le plan ◀d’▶une action culturelle européenne, comportant :
— la coordination des tâches reconnues nécessaires ;
— la répartition ◀de▶ leur exécution ;
— l’élimination des doubles emplois.
3° Sur la base ◀d’▶un tel plan ◀d’▶ensemble, il y aurait lieu ◀d’▶établir un tableau des besoins financiers correspondants et des moyens ◀de▶ les couvrir — privés et officiels — existants ou à trouver. Ce serait en quelque sorte un budget ◀de▶ l’action culturelle européenne. Document capital, indispensable, jamais établi jusqu’ici.
4° Le plan ◀d’▶ensemble et l’état des besoins une fois connus, les participants ◀de▶ cette table ronde pourraient se tourner vers les gouvernements et leur proposer une réunion commune qui prendrait les décisions nécessaires.
N.B. Ce projet a été adopté par la Fondation européenne ◀de la culture, lors du congrès qu’elle a tenu à Milan du 11 au 14 décembre 1958.