VII
Parenthèse sur le▶ sens des mots
À ◀la▶ clé ◀de▶ cette Introduction, j’aurais aimé pouvoir inscrire un signe ◀d’▶objectivité, annonçant qu’ici ◀l’▶on décrit, avant de juger. Qu’il reste donc bien entendu que, dans ces pages liminaires et dans ◀les▶ essais qui ◀les▶ suivent, je n’utilise jamais ◀les▶ termes ◀de▶ morale bourgeoise et ◀de▶ puritanisme comme des injures, ni comme des épithètes nécessairement dépréciatives. En revanche, ◀le▶ terme ◀d’▶érotisme ne définit pour moi ni ◀le▶ bien ni ◀le▶ mal, mais un phénomène passionnant par excellence, dont j’essaie, avant de ◀l’▶évaluer, ◀de▶ mieux voir ce qu’il est, ◀d’▶où il vient, où il va.
J’entends bien que ◀la▶ littérature contemporaine méprise ◀les▶ puritains et ◀les▶ tient pour des fous, à la fois ridicules et dangereux. Mais je n’oublie pas que sans ◀la▶ discipline sexuelle que ◀les▶ tendances dites puritaines ont su nous imposer dès ◀les▶ débuts ◀de▶ ◀l’▶Europe, il n’y aurait rien de plus dans notre civilisation que dans celles des nations qu’on dit sous-développées, et sans doute moins : il n’y aurait pas ◀le▶ travail, ◀l’▶effort organisé, ni ◀la▶ technique qui ont fait ◀le▶ monde actuel. Il n’y aurait pas non plus ◀le▶ problème ◀de▶ ◀l’▶érotisme ! ◀Les▶ auteurs érotiques ◀l’▶oublient très naïvement, tout à leur passion poétique ou moraliste retournée, qui leur cache trop souvent ◀les▶ « faits ◀de▶ ◀la▶ vie » — comme ◀l’▶anglais nomme ◀les▶ faits sexuels —, et leurs multiples liens avec ◀l’▶économie, ◀la▶ société et ◀la▶ culture.
En revanche, sans ◀l’▶érotisme et ◀les▶ libertés qu’il suppose, notre culture vaudrait-elle mieux que celle qu’un Staline, qu’un Mao, ont tenté ◀d’▶imposer par décrets ? Elle serait strictement adaptée à ◀la▶ production matérielle, à ◀la▶ procréation socialisée. Et cela, nos puritains ◀l’▶oublient non moins souvent.
Je pose donc un problème au plus haut point concret, et que ◀l’▶angoisse compréhensible des Occidentaux ◀d’▶aujourd’hui conduit en général à trancher brutalement avant de ◀l’avoir considéré.