« Le▶ respect du réel, c’est ◀le▶ revers du paradoxe » (14 décembre 1972)i j
Denis de Rougemont, dans une page inspirée ◀de▶ votre livre sur ◀la▶ Suisse, vous évoquez ◀le▶ Gothard comme ◀le▶ cœur ◀de▶ ◀l’▶Europe, puisque Rhin, Rhône, Danube, Pô y prennent leur source et que ◀de▶ ce sommet une vallée descend vers ◀l’▶Italie, une vers ◀l’▶Allemagne, une vers ◀l’▶est, une vers ◀le▶ Valais et ◀le▶ pays latin, disons ◀la▶ France. Comment et pourquoi avez-vous choisi ◀le▶ versant français ◀de▶ votre pays et ◀de▶ vous-même ?
Mais je n’ai pas eu à choisir ! ◀Le▶ français est ma langue maternelle. Je me suis parfois moqué ◀de▶ ◀l’▶accent ◀de▶ Neuchâtel. Mais enfin, c’est ◀le▶ français qu’on y parle, non ◀le▶ breton, ni ◀l’▶alsacien, ni ◀l’▶occitan.
◀Le▶ parler ? Mais ◀l’▶écrire…
Bon Dieu ! pour qui nous prenez-vous ? Rousseau, Mme de Staël, Benjamin Constant, Amiel, C. F. Ramuz, C.-A. Cingria, G. de Reynold, pour ne pas parler des vivants, ce n’est pas rien ! Plus modestement, entre 1830 et 1900, je compte septante-six ouvrages publiés par des Rougemont et qui vont ◀d’▶un essai sur Socrate et Jésus-Christ à des Observations sur ◀l’▶organe détonnant du Brachinus crepitans, en passant par ◀les▶ Nombres rythmiques ◀de▶ ◀la▶ Prophétie.
Il n’y avait donc qu’à suivre une tradition ?
◀De▶ fait, j’appartiens à une lignée qui est plus ◀de▶ robe que ◀d’▶épée. ◀L’▶origine ◀de▶ ◀la▶ famille est franc-comtoise, et il y a dans cette province deux villages qui se nomment Rougemont. Juges, conseillers ◀d’▶État ◀de▶ ◀la▶ principauté ◀de▶ Neuchâtel pendant des siècles ou, comme mon père, pasteurs, tels furent ◀les▶ Rougemont. Moi-même, je voulais devenir chimiste. J’avais transformé ◀le▶ grenier ◀de▶ notre maison en laboratoire. Tout ce qui était germination me passionnait… Je fabriquais des plantes artificielles, par croissance osmotique dans des éprouvettes.
Si bien que nous avons échappé ◀de▶ peu à un nouveau traité sur ◀le▶ Brachinus crepitans ?
◀De▶ toute ◀l’▶épaisseur du gymnase scientifique où j’entrai par ◀la▶ vertu ◀de▶ ce goût et ◀de▶ ce laboratoire. Mais ce qui avait été passion devint devoir, et je ◀le▶ détestai aussitôt.
◀D’▶où votre haine ◀de▶ ◀l’▶école ?
Cela remonte plus haut. À 5 ans, avec ◀l’▶aide ◀de▶ ma sœur aînée, j’avais appris à lire en trois semaines, par libre curiosité, par jeu… Ensuite, pendant deux ans, à ◀l’▶école primaire, j’ai dû faire semblant ◀de▶ ne pas savoir. C’est bien pourquoi mon premier essai a pour titre : ◀Les▶ Méfaits ◀de▶ ◀l’▶instruction publique . Ce pamphlet vient de reparaître, « aggravé ◀d’▶une Suite ◀de▶ Méfaits », dit ◀la▶ couverture, car, hélas ! ◀les▶ choses n’ont pas beaucoup changé depuis mon enfance ni depuis ◀le▶ temps où je ◀l’▶écrivais avec toute ◀l’▶insolence ◀de▶ mes 20 ans. C’était aussi violent qu’Ivan Illich aujourd’hui, souvent dans ◀les▶ mêmes termes.
Ainsi, dès votre premier essai, vous étiez engagé…
Je ne rêvais pourtant que ◀de▶ poésie et ◀d’▶écriture. Mes modèles ◀d’▶alors étaient Valéry, Gide, ◀les▶ auteurs ◀de▶ ◀la▶ revue Commerce et ◀de▶ ◀la▶ NRF . C’était ◀d’▶eux que je souhaitais être digne. Plutôt pour ◀le▶ style, ◀la▶ rigueur formelle… Car pour ◀le▶ fond, mes maîtres sont plus anciens et n’ont pas changé, Pascal et Rimbaud, pôles contraires ◀d’▶une opposition violente qu’il me fallait vivre et penser.
Tous ces noms sont français ; c’est pourtant vers ◀les▶ Allemagnes que vous partez, à vingt ans.
Oui. ◀De▶ vingt à trente ans, c’est bien ◀le▶ versant germanique que j’explore, d’abord séduit par Goethe, par son art ◀de▶ vivre autant que par ses écrits. Je lisais ◀les▶ poètes, Hölderlin, Novalis, Jean-Paul, Rilke. Surtout, je découvrais et lisais en allemand Kierkegaard. ◀Les▶ éditions que je devais diriger plus tard — « Je sers » — ont contribué à faire connaître en France ce philosophe-poète qui reste mon maître, et peut-être mon juge ironique. Si Goethe a été pour moi ◀la▶ mesure et s’il m’a convaincu ◀de▶ ◀la▶ valeur ◀de▶ ◀l’▶action, à laquelle je consacre ◀le▶ plus clair ◀de▶ mes jours depuis vingt-cinq ans, Kierkegaard est ma démesure, ◀le▶ signe ◀de▶ ◀l’▶absolu, du peu de valeur ◀de▶ toute action, ◀le▶ rappel que « ◀la▶ subjectivité est ◀la▶ vérité ». J’ai fait une partie ◀de▶ mes études à Vienne, puis en Souabe. J’ai connu ◀les▶ châteaux ◀de▶ ◀la▶ Prusse, tous rasés aujourd’hui. J’ai raconté cela dans ◀Le▶ Paysan du Danube .
◀L’▶engagement et ◀le▶ clerc
C’est votre œuvre ◀la▶ plus romantique. Vous y découvrez ◀le▶ bonheur ◀d’▶écrire et vous vous écoutez vivre et penser. Alors, ◀le▶ saut entre ◀les▶ pages ◀de▶ ce journal et celles ◀de▶ ◀l’▶automne 32 dans ◀la▶ banlieue parisienne surprend, déroute.
◀Le▶ ton, peut-être. ◀Le▶ fond demeure ce qu’il était, car il s’est toujours agi pour moi ◀d’▶une présence au monde et à moi-même conjointement… Il est vrai que beaucoup de choses changeaient alors en très peu de temps. À Paris, j’entre en relation avec un groupe ◀de▶ jeunes gens. Ils ont mon âge, mes préoccupations. En quelques mois se trouve fondé un mouvement dont je demeure convaincu qu’il se révélera ◀le▶ plus fécond ◀de▶ notre temps — sous d’autres noms, peut-être, comme ◀le▶ fédéralisme — et que nous baptisons ◀le▶ personnalisme. Nous créons, avec Mounier et Izard, Esprit , avec Dandieu, Robert Aron et Alexandre Marc, L’Ordre nouveau , et je ne tarde pas à fonder ma propre revue, Hic et Nunc , où vont collaborer Henry Corbin et Albert-Marie Schmidt, et où j’expose ma « politique du pessimisme actif » dont j’ai trouvé ◀les▶ éléments aussi bien chez Kierkegaard que chez Nietzsche, chez Karl Barth que chez Heidegger, que Corbin traduit pour nous et annote en arabe du xiie siècle. Tout cela dans ces années 1932 à 1936, qui voient triompher Hitler, Mussolini et Staline…
Vous écriviez dans votre Cahier ◀de▶ revendications publié par ◀la▶ NRF en décembre 1932 : « Nous sommes une génération comblée. Comblée ◀de▶ chances ◀de▶ grandeur et comblée ◀de▶ risques mortels… Ce n’est plus pour quelque idéal que nous avons à lutter maintenant, mais pour que ◀les▶ hommes vivent et demeurent des hommes… » Vous étiez engagé !
Je puis revendiquer ◀la▶ paternité du concept ◀d’▶engagement, mais certes pas ◀l’▶usage qu’on en a fait au cours des dernières décennies. Mon premier livre, paru en 1934, Politique ◀de▶ ◀la▶ personne , s’ouvrait par un chapitre intitulé « ◀L’▶engagement du clerc ». Mais, pour moi, ◀l’▶écrivain engagé n’est pas celui qui s’en remet à un parti quand il s’agit ◀de▶ prendre une position publique. Au contraire, c’est un homme responsable, qui, dans une situation donnée, peut dire : j’en réponds ! Mais ◀de▶ quoi ◀l’▶écrivain peut-il répondre ? ◀De▶ ce qu’il écrit, bien sûr, et ◀de▶ ◀la▶ manière dont il ◀l’▶écrit. C’est ce que Penser avec les mains veut illustrer. J’ai posé là ◀le▶ problème ◀de▶ ◀la▶ culture et cherché une morale ◀de▶ ◀la▶ pensée — concept absolument nouveau. (Seul Nietzsche, peut-être…) Ayant lu ma première version, Paulhan m’écrivit : « Il faut choisir : ou bien vous exposez des idées, ou bien vous jouez du violon. » J’écrivis, sur son conseil, une première partie introductive. C’est sans doute ce qui justifie ◀le▶ mot, plus drôle que méchant, ◀d’▶Emmanuel Mounier dans Esprit : « Rougemont écrit un œil fixé sur ◀l’▶Éternel et l’autre sur Jean Paulhan. »
N’est-ce pas assez juste, et pas seulement du Rougemont des années 1930, mais aussi ◀de▶ celui ◀d’▶aujourd’hui ?
Oui, si vous entendez par l’un ◀l’▶exigence spirituelle, par l’autre ◀l’▶exigence ◀de▶ ◀la▶ forme, du mouvement ◀de▶ ◀la▶ phrase. Cette année, Penser avec les mains a reparu dans « Idées ». En préparant cette nouvelle édition, j’ai été frappé ◀de▶ voir ◀la▶ continuité, d’autres diraient ◀l’▶obstination, ◀de▶ ma pensée. J’ai retrouvé aussi ce souci constant : qu’une pensée ne peut être juste que si sa forme ◀la▶ vérifie. Bref, j’écris n’importe quel texte, même ◀de▶ doctrine politique, comme s’il s’agissait ◀d’▶un poème.
Dans ◀les▶ années 1930, vous dirigiez ou, au moins, vous participiez à ◀la▶ direction ◀de▶ trois revues. Vous collaboriez à plusieurs autres. Elles représentaient pourtant des tendances divergentes.
◀L’▶éclectisme est mal vu au temps des fanatiques, qui ont peut-être raison sur ce point. Mais je constate plutôt chez moi une exigence ◀de▶ synthèse. C’est sur le plan intime et philosophique ce qui correspond, sur le plan politique, à ce sens du fédéralisme dont mon pays est ◀le▶ produit, et auquel je demeure profondément attaché. ◀La▶ réalité est faite ◀d’▶antinomies, dont il faut respecter chacun des termes en ◀les▶ maintenant en tension, sans confusion, sans séparation ni subordination ◀de▶ l’un à l’autre, qu’il s’agisse ◀de▶ ◀l’▶homme et ◀de▶ ◀la▶ femme dans ◀le▶ couple, ou ◀de▶ ◀la▶ personne et ◀de▶ ◀la▶ communauté dans ◀la▶ cité.
◀Le▶ mariage est une vocation
N’est-ce pas déjà ce qui s’annonce dans vos journaux, que vous avez recueillis sous ◀le▶ titre ◀de▶ Journal ◀d’▶une époque ?
J’ai toujours précisé qu’il s’agissait là ◀de▶ journaux non intimes, situés à égale distance ◀de▶ ◀la▶ chronique impersonnelle et ◀de▶ ◀la▶ confidence. Pour moi, ces journaux ◀de▶ 1926 à 1946, et leur suite — ◀le▶ Journal ◀d’▶un Européen — qui ne saurait tarder, ont pour objet non pas un terme, mais une relation. Non pas tel homme, ni son époque en soi, mais bien leurs rapports qui à mes yeux sont seuls vivants, réels, dignes ◀d’▶intérêt. Ou si vous voulez, ◀le▶ vrai sujet ◀de▶ ma réflexion est ◀l’▶époque, mais conçue comme ◀le▶ lieu ◀de▶ ◀l’▶engagement personnel, ◀le▶ lieu existentiel. ◀L’▶intime ne prend vie que dans une relation avec ◀le▶ prochain, et cette relation que dans une relation avec ◀la▶ cité. Je résume ainsi ce parcours : « ◀De▶ ◀l’▶intime à ◀l’▶ultime par ◀le▶ proxime. »
C’est bien ce que dit aussi ◀le▶ titre même du livre qui vient de reparaître en édition « définitive » puisqu’il réunit un terme affectif à un terme géopolitique : ◀L’▶Amour et ◀l’▶Occident . Pour vous qui étiez si engagé dans une pensée politique et religieuse, comment se fait-il que ◀l’▶amour vous ait intéressé ?
Dites-moi plutôt comment il faudrait faire pour ne pas s’y intéresser ! ◀Le▶ point ◀de▶ départ ◀de▶ ma réflexion aurait pu être cette maxime ◀de▶ ◀La▶ Rochefoucauld : « Combien ◀d’▶hommes seraient amoureux s’ils n’avaient jamais entendu parler ◀d’▶amour ? » Il me parut urgent ◀de▶ mettre en relation (de nouveau, n’est-ce pas, une relation) ◀l’▶amour et ses étymologies historiques et religieuses. Et je savais aussi que tout existe, virtuellement, mais que tout ne se manifeste pas, que ◀l’▶histoire est ◀l’▶histoire ◀de▶ manifestations successives… Il faut aussi se souvenir que mon historicisme est fondé en théologie. ◀Le▶ christianisme est une historicité. Christ a souffert « sous Ponce Pilate ». J’ai vu l’autre jour, au musée ◀de▶ Jérusalem, ◀la▶ stèle portant gravé ◀le▶ nom du procurateur ◀de▶ Judée, assez récemment découverte. Il ne s’agit pas ◀d’▶un mythe, mais bien ◀d’▶une irréductibilité temporelle. Quant à ◀l’▶occasion du livre, et pour passer du sublime au trivial, ce fut une commande. À ce sujet, il y a une anecdote que je raconte dans ◀le▶ post-scriptum « non définitif et scientifico-polémique » à ◀la▶ nouvelle édition. J’avais esquissé, dans je ne sais plus quelle revue, ◀l’▶opposition passion-mariage. Là-dessus, Daniel-Rops me propose ◀d’▶en faire un livre pour ◀la▶ collection qu’il dirige. Je promets, je ne fais rien. ◀La▶ date approche. Quel soulagement quand Rops me demande ◀de▶ céder mon tour à un jeune lieutenant-colonel dont ◀le▶ livre est, me dit-il, des plus urgents : ◀La▶ France et son armée, par Charles de Gaulle.
Mais enfin, ◀le▶ livre fut écrit…
En trois mois, dans une sorte ◀de▶ fièvre. Comme si tout, ma vie personnelle aussi bien que ma réflexion, m’avait préparé à ◀l’▶écrire. C’est qu’en un sens il s’agissait ◀d’▶appliquer ◀le▶ personnalisme au domaine ◀de▶ ◀l’▶érotique. Entre deux individus, il ne peut y avoir qu’une liaison. Mais quand il y a engagement réel et fidélité à cet engagement, alors ◀la▶ personne peut s’épanouir. Il n’y a mariage qu’entre personnes. Et c’est pourquoi ◀le▶ mariage est une vocation.
Si bien que votre livre est contre ◀la▶ passion…
Pas du tout ! Condamner ◀la▶ passion n’aurait pas ◀de▶ sens. Mais il est fou ◀de▶ vouloir fonder ◀le▶ mariage sur ◀l’▶amour seul, car ◀la▶ passion est née contre ◀le▶ mariage.
C’est un paradoxe. Il en est d’autres. Votre pensée si grave…
C’est vous qui ◀le▶ dites ! N’oubliez pas mes Lettres sur ◀la▶ bombe atomique , ou mes Méfaits … Et ◀la▶ Part du diable , où j’explique que ◀la▶ démocratie ne se distingue du totalitarisme que par ◀l’▶humour, et par rien ◀d’▶autre.
… Votre pensée si soucieuse ◀de▶ cohérence paraît connaître plus que ◀le▶ goût, ◀le▶ besoin du paradoxe. Est-ce pour ◀le▶ contraste, par souci esthétique, pour respirer un peu ou permettre à votre lecteur ◀de▶ respirer ?
Nullement. ◀Le▶ paradoxe est essentiel. C’est ◀le▶ fondement même ◀de▶ ma démarche. ◀L’▶homme est à la fois libre et responsable : paradoxe ! Il ne devient lui-même que par ◀la▶ vocation, ce sentier qui se crée sous ◀les▶ pas qui ◀le▶ suivent. Mais ◀la▶ vocation, qui rend unique, relie du même coup au prochain… paradoxe. ◀Le▶ fédéralisme : c’est ◀l’▶union et ◀l’▶autonomie… l’Un et ◀le▶ Divers… paradoxe. Voyez-vous, ◀le▶ respect du réel, c’est ◀le▶ respect du paradoxe. C’est vrai qu’il m’amuse, vrai qu’il correspond à un goût profond. Mais il est d’abord ◀la▶ condition ◀de▶ toutes ◀les▶ libertés, qui est ◀le▶ respect des antinomies. Il est ◀la▶ légèreté ◀de▶ ◀l’▶esprit et ◀la▶ tension nécessaire à son action.
Choisir ◀l’▶avenir…
Avez-vous été amené à réviser votre livre eu égard à tous ◀les▶ changements qui sont intervenus dans nos mœurs et dans nos pensées depuis sa première publication en 1939 ? On a même parlé ◀de▶ mutation…
Révisé ? Non ! J’ai répondu aux critiques qui ont été formulées depuis trente ans. Parce que ce livre continue ◀d’▶agir, ◀d’▶être étudié, ◀de▶ provoquer des polémiques, il me paraissait nécessaire ◀de▶ ◀le▶ réassumer, ◀de▶ renouveler mon engagement, ma responsabilité. Certes, ◀le▶ monde change et dans ◀le▶ domaine des mœurs ◀l’▶évolution est même plus profonde qu’on ne ◀le▶ croit, mais elle va dans ◀le▶ sens que j’annonçais. Il me semble que nous assistons à un nouveau surgissement du principe féminin, bien moins sensible d’ailleurs, dans ◀le▶ mouvement ◀de▶ libération des femmes que dans ◀les▶ rêves interprétés par C. G. Jung, ◀les▶ spéculations ◀de▶ Teilhard de Chardin, ou ◀les▶ utopies fouriéristes ◀d’▶André Breton. Qui sait, peut-être n’ai-je été amené à tant m’intéresser au xiie siècle que parce que notre siècle devait finir par lui ressembler ?
Nouveau paradoxe. Surtout pour un penseur comme vous qui scrutez ◀les▶ signes avant-coureurs ◀de▶ ◀l’▶avenir ◀de▶ ◀l’▶Europe et du monde !
C’est qu’il faut partir ◀de▶ ◀l’▶avenir si ◀l’▶on veut comprendre ◀l’▶aujourd’hui. ◀La▶ vocation (passion, mariage ou politique) ne peut venir que ◀de▶ ◀l’▶avenir. Ce n’est jamais une voix du passé. Dieu, qu’est-ce, sinon ◀le▶ futur éternel ? Avant toute chose, il faut considérer ◀la▶ fin ! C’est vrai que je collabore aux études sur ◀l’▶an 2000. Seulement, il faut comprendre qu’une prévision passive est un non-sens. C’est folie que ◀de▶ vouloir prédire objectivement. Écoutons ce qui nous appelle. Nous ne sommes pas là pour prédire ◀l’▶avenir, mais pour ◀le▶ faire ! Je disais naguère dans une conférence en Amérique : « Pour la première fois dans son histoire, ◀l’▶homme se voit contraint ◀de▶ choisir librement son avenir. Et il y est contraint du seul fait qu’il en a, pour la première fois, ◀la▶ liberté. » Vous me direz que c’est encore un paradoxe. Mais oui ! Celui ◀de▶ ◀la▶ vérité, ou en tout cas ◀de▶ notre réalité.