Débat sur le▶ LEP, accélérateur ◀de▶ particules du CERN (11 février 1982)i
En prenant ◀la▶ parole ici ce soir, je cours un risque dont je suis très conscient — très sereinement conscient, dirais-je — celui ◀de▶ décevoir ◀les▶ deux camps en présence, dans ◀la▶ mesure où il s’agit ◀de▶ camps, précisément, c’est-à-dire ◀d’▶équipes opposées, comme dans un match où il faut à tout prix gagner, ce qui reviendrait dans notre cas à convaincre cette assistance, et à travers elle ◀l’▶opinion, et par là même, peut-être, ◀les▶ pouvoirs, que l’un des deux camps a raison.
Je n’ignore pas qu’il y a derrière ce jeu un peu puéril, un peu gratuit, deux groupes ◀d’▶intérêts très concrets qu’il paraît difficile ◀de▶ concilier : intérêts ◀d’▶une institution scientifique prestigieuse, et ◀de▶ ◀l’▶avenir ◀de▶ ses chercheurs d’une part ; intérêts écologiques, sociaux, économiques, des habitants du pays ◀de▶ Gex et ◀de▶ quelques communes genevoises, d’autre part.
Ayant suivi ◀les▶ deux premiers débats, je me sens en mon âme et conscience incapable encore ◀de▶ choisir soit ◀le▶ LEP avec ses dangers toujours possibles, quoiqu’on ait dit, soit ◀le▶ repos du pays ◀de▶ Gex, mais pas ◀de▶ LEP, et peut-être, demain, plus ◀de▶ CERN.
Si j’affronte volontiers ◀le▶ risque ◀de▶ déplaire à tout le monde ce soir en suspendant encore mon jugement, c’est parce que j’ai à dire une chose, une seule, qui me paraît plus importante que tout : dans ◀la▶ conjoncture présente, il ne peut plus s’agir pour nous ◀de▶ « gagner » contre un camp ou un parti, aux dépens ◀d’▶intérêts légitimes, mais il s’agit ◀de▶ gagner tous ensemble, c’est-à-dire ◀de▶ chercher ensemble, et ◀de▶ trouver ensemble, ◀le▶ moyen, pour ◀la▶ société du xx e siècle ◀de▶ maîtriser ◀les▶ découvertes ◀de▶ ◀la▶ physique nucléaire, ◀de▶ ◀la▶ chimie, ◀de▶ ◀la▶ génétique et ◀les▶ technologies qui en sont issues, car elles menacent ◀l’▶intégrité du genre humain, voire sa survie.
Je ne suis donc pas a priori contre ◀le▶ LEP en tant que projet lié à ◀l’▶avenir du CERN : ◀le▶ rôle que j’ai joué jadis comme directeur du Centre européen de la culture dans ◀le▶ lancement ◀de▶ ◀l’▶idée ◀d’▶un Centre européen ◀de▶ ◀la▶ recherche nucléaire me porterait plutôt à accorder au CERN un préjugé très nettement favorable.
Mais je ne suis pas non plus pour ◀le▶ LEP sans questions ; non point quant à ◀la▶ compatibilité théorique ◀de▶ ses objectifs avec ◀la▶ mission générale du CERN, mais bien quant à ses nuisances pratiques sur ◀la▶ vie dans ce pays ◀de▶ Gex qu’il se trouve que j’habite depuis 35 ans, et quant aux conséquences imprévisibles des découvertes qu’il permettra : personne au monde n’est en mesure ◀de▶ démontrer que ◀le▶ LEP ne pourra jamais servir à des fins militaires, c’est-à-dire, aujourd’hui, à ◀l’▶extinction du genre humain, si ce n’est ◀de▶ toute vie sur ◀la▶ Terre.
Tout cela dit, j’ai accepté sans hésiter ◀de▶ prendre ◀la▶ parole ce soir, parce que je vois dans ◀le▶ débat sur ◀le▶ LEP un premier exercice, qui peut être exemplaire du débat, désormais inévitable, sur ◀la▶ recherche en général, et ◀la▶ recherche scientifique en particulier, sur ses enjeux et ses finalités, sur ses processus ◀de▶ décision et ◀la▶ nécessité ◀de▶ ◀les▶ soumettre au préalable ◀d’▶une concertation tout à la fois civique, sociale, économique, écologique, et cela dans ◀les▶ domaines ◀les▶ plus « chauds » ◀de▶ ◀la▶ science et des technologies qui en résultent, qu’il s’agisse des centrales nucléaires ou ◀de▶ ◀l’▶informatique, des manipulations génétiques ou des armes nouvelles, beam weapons, rayon ◀de▶ ◀la▶ mort, ou encore explosions pouvant entraîner ◀la▶ paralysie définitive ◀de▶ toute information dans des pays entiers qui auront été auparavant entièrement « informatisés », selon ◀la▶ formule à ◀la▶ mode.
Je pars ◀d’▶un conflit déplorable entre certains espoirs à la fois très précis et grandioses, ◀d’▶un côté, et des craintes plus confuses et terre à terre, ◀de▶ l’autre ; entre un certain romantisme prométhéen, et un réalisme simplement humain, entre ◀la▶ volonté ◀de▶ réalisation ◀d’▶un projet qui passionne un certain nombre ◀de▶ scientifiques, et ◀les▶ réactions instinctives ◀de▶ refus dans une population qui en subira ◀les▶ nuisances ou dangers éventuels.
◀De▶ ◀l’▶existence ◀de▶ ce conflit, et pour essayer ◀de▶ ◀le▶ résoudre, ou tout au moins ◀de▶ ◀l’▶atténuer, est née ◀l’▶initiative conjointe ◀de▶ ◀l’▶I.V. et du CERN. Ce soir — et très provisoirement, je ◀l’▶espère — , nous allons tenter ◀de▶ conclure un débat qui nous dépasse tous, largement.
Ayant, il y a deux ans déjà, cherché en vain à provoquer une discussion publique, à Genève, sur ◀le▶ LEP, il me fut répondu : — D’accord, mais à ◀la▶ condition que vous organisiez simultanément des débats du même type dans ◀les▶ 12 pays membres (message reçu)… J’ai donc salué ◀de▶ tout cœur ◀l’▶attitude très ouverte du nouveau directeur général. Si elle avait prévalu dès ◀le▶ début, elle eût peut-être satisfait ◀les▶ citoyens concernés, et permis ◀l’▶économie des actuels débats. Et c’eût été dommage, car, je ◀le▶ répète, ces débats me paraissent inaugurer une procédure indispensable, désormais, si nous voulons vivre en démocratie.
Toutefois, il faut bien ◀le▶ reconnaître : ◀la▶ décision ◀de▶ réaliser ◀le▶ LEP, prise en principe par ◀les▶ 12 gouvernements membres du CERN, a précédé, non pas suivi, notre débat. ◀Les▶ autorisations ◀de▶ construire sont encore attendues ◀de▶ ◀la▶ France et ◀de▶ ◀la▶ Suisse. Tout n’est pas joué. Il est cependant probable que sauf aboutissement très négatif des études ◀d’▶impact en cours, ◀la▶ décision ◀de▶ construire ◀le▶ LEP sera prise d’ici quelques mois. On ne peut donc pas affirmer que nos débats, postérieurs aux décisions des États, puissent changer ◀le▶ cours des choses, ni que ◀les▶ citoyens du pays ◀de▶ Gex aient pu faire valoir, pratiquement, leurs droits ◀de▶ contrôle et leur autonomie.
Mais ce qui ôte à nos débats leur portée pratique, immédiate, ne ◀les▶ prive pas ◀d’▶une valeur exemplaire et ◀d’▶une portée plus générale, à terme. Je m’explique.
Par valeur exemplaire, je veux dire : valeur ◀d’▶innovation, ◀d’▶exemple à imiter, non pas, certes, modèle parfait du premier coup, bien loin de là !
Nous n’avons ni ◀les▶ uns ni ◀les▶ autres évité tous ◀les▶ pièges ◀de▶ ce genre ◀d’▶exercice. Le premier est ◀de▶ céder à ◀l’▶animosité partisane ; j’ai entendu parler ◀de▶ « ◀l’▶adversaire » pour désigner des gens ◀d’▶un autre avis ou qui exprimaient tout simplement leurs doutes ; et cette phrase m’a frappé, en sortant ◀d’▶un débat : « Oui, mais nous n’avons pas gagné ! » Trop ◀de▶ questions sont restées sans réponse. Et trop souvent, c’est ◀l’▶assurance ◀de▶ certains responsables du LEP qui m’a parue fort inquiétante. Ils nous disaient en juin 1981 que ◀le▶ tracé choisi était « by far the most suitable » et même « the only possible one » et ils en donnaient ◀les▶ raisons ; quitte à modifier ce tracé trois mois plus tard, sans expliquer comment il est devenu meilleur que celui qui était en juin « ◀le▶ seul possible ».
De même, ◀les▶ nombreuses discussions auxquelles j’ai pris part sur ◀le▶ sujet des centrales nucléaires ne m’ont que trop habitué au recours à ◀l’▶assurance hautaine que « toutes ◀les▶ précautions ont été prises ». Je ne vois pas que dans ◀le▶ cas qui nous occupe, on ait pris plus ◀de▶ précautions que pour la première traversée du Titanic…
Mais ce qui importe, en fin de compte, c’est ◀l’▶existence même ◀d’▶un débat ; public, prolongé, très ouvert, visant au maximum ◀de▶ transparence et ◀de▶ respect des opinions diverses : — démocratique pour tout dire.
Il se peut qu’un tel processus retarde ◀les▶ calendriers ◀de▶ ◀la▶ recherche. Mais ce n’est pas temps perdu que celui qui profite à une plus juste entente entre ◀les▶ hommes.
Autre aspect du conflit possible entre ◀la▶ démocratie et ◀la▶ recherche : il ne suffit pas que ceux qui savent informent ◀le▶ public et vantent leurs produits. Il faut accepter ◀le▶ débat avec des gens qui ne savent rien des quarks, mais plus ◀de▶ choses que vous sur leur petit pays, leurs soucis et leurs buts dans ◀la▶ vie.
Des initiatives très touchantes ont été prises par ◀le▶ CERN : journée « portes ouvertes » sur ◀les▶ bureaux et ◀les▶ grands appareils existants : ◀le▶ public peut y voir ◀de▶ ses yeux qu’il n’y a là pas ◀le▶ moindre danger… On peut aussi faire visiter des cathédrales pour démontrer que Dieu est bon, ou bien ouvrir ◀la▶ Kaaba de la Mecque pour que tous voient qu’Allah est grand.
Enfin, ◀le▶ LEP pose ◀d’▶une manière brûlante ◀le▶ problème nouveau pour ◀la▶ science ◀de▶ sa dépendance ◀de▶ ◀l’▶État quant au financement ◀de▶ ◀la▶ recherche. Car, comme ◀l’▶observe avec lucidité Edgar Morin, « ni ◀l’▶État, ni ◀l’▶industrie, ni ◀le▶ Capital ne sont guidés par ◀l’▶esprit scientifique : ils utilisent ◀les▶ pouvoirs que leur apporte ◀la▶ recherche ». Je mets en doute qu’aucun ◀de▶ nos États ne respecte ◀la▶ recherche fondamentale, et même ne ◀la▶ subventionne, s’il ne pense pas qu’elle peut augmenter ses pouvoirs industriels ou militaires. Dire que ◀le▶ CERN refuse ◀de▶ considérer ◀les▶ retombées ◀de▶ ses recherches ne prouve nullement que ◀les▶ États ne ◀le▶ subventionnent pas en vue de ces retombées.
J’en viens au cœur du débat ◀de▶ ce soir : ◀la▶ notion ◀de▶ responsabilité dans ◀la▶ recherche.
Je voudrais dire d’abord ceci : c’est que ◀les▶ découvertes ◀de▶ ◀la▶ science au xx e siècle développent des conséquences ◀d’▶une telle ampleur qu’elles ne peuvent plus être soumises aux vérifications expérimentales.
— Quand je pose la question ◀de▶ ◀l’▶accident majeur qui pourrait se produire à Creys-Malville, on me répond qu’il n’est pas question ◀de▶ faire une expérience en vraie grandeur : ce serait déclencher cet accident majeur dont on conteste d’ailleurs ◀la▶ possibilité !
— Quand je pose la question des résultats ◀de▶ certaines manipulations génétiques, on me répond qu’il faut attendre, pour savoir, un certain nombre ◀de▶ générations…
— Quand il est question ◀de▶ ◀la▶ guerre atomique, et ◀de▶ ◀la▶ défense civile, c’est-à-dire des abris, toute expérience réelle serait ◀de▶ ◀l’▶assassinat.
Ce qui revient à dire qu’au xx e siècle, on a dépassé ◀le▶ seuil ◀d’▶expérimentation « en vraie grandeur ». Personne ne sait ce qui pourrait résulter ◀de▶ quoi que ce soit, une fois passé ce seuil. Bel aboutissement du Progrès !
◀Le▶ xix e siècle croyait encore à ◀l’▶innocence ◀de▶ ◀la▶ recherche : tout ce qu’on allait trouver serait bon, serait en principe meilleur que ce qu’on connaissait. Toute découverte était progrès en soi et ne pouvait que contribuer au Progrès général du genre humain. Dans tous ◀les▶ cas, et en dépit du mythe ◀de▶ ◀la▶ boîte ◀de▶ Pandore, savoir était meilleur que non-savoir.
Un vers très étonnant ◀de▶ Victor Hugo exprime très bien cette foi naïve : « Vous dites : où vas-tu ? Je ◀l’▶ignore et j’y vais ! »
Aujourd’hui, et à cause des dimensions atteintes par ◀les▶ découvertes ◀de▶ ◀la▶ science et plus encore par ◀les▶ effets qu’en tire ◀la▶ technologie, nous n’avons plus ◀le▶ droit ◀d’▶aller nul ne sait où : ce pourrait être aller au désastre final.
On me dira sans doute que dans ◀le▶ cas justement qui nous occupe ce soir, celui du CERN et ◀de▶ son projet LEP, il ne s’agit que ◀de▶ « recherche fondamentale », nullement ◀d’▶applications technologiques, encore moins ◀de▶ retombées militaires. Oui, bien sûr… Mais je garde mes doutes quant à ◀la▶ possibilité, surtout ◀de▶ nos jours, ◀d’▶une recherche entièrement innocente dans ses motivations comme dans ses résultats.
◀L’▶illusion me paraît très grave du chercheur qui ne se veut et ne se croit guidé que par ◀la▶ passion pure ◀de▶ savoir, ◀de▶ connaître ◀d’▶une manière toujours plus complète et cohérente ◀le▶ monde physique. Parce qu’en réalité vérifiable et lisible dans ◀l’▶ensemble des recherches qu’une société donnée fomente et encourage, ce sont ◀les▶ valeurs et croyances ◀les▶ plus répandues, ◀les▶ plus actives et réellement motrices qui déterminent la plupart des chercheurs, ◀le▶ plus souvent à leur insu. Or ce sont aujourd’hui en Occident, des valeurs ◀de▶ puissance matérielle collective, industrielles, nationales, étatiques, ◀de▶ profit immédiat et ◀de▶ prestige certain. Ce sont ces valeurs-là qui incitent ◀les▶ États, ◀les▶ banques, ◀les▶ industries et ◀les▶ grandes fondations à financer très largement ◀les▶ recherches liées ◀de▶ près ou ◀de▶ loin au nucléaire, et cela trop souvent au détriment de nécessités humaines criantes. Ce sont ◀les▶ croyances réelles ◀de▶ notre société qui déterminent en fait (pas toujours consciemment) ◀l’▶orientation des recherches fondamentales, et qui dictent ◀les▶ priorités budgétaires. Or elles conduisent, dans ◀l’▶ensemble, à ◀la▶ guerre, une guerre qui a toutes ◀les▶ chances, cette fois-ci, ◀d’▶être bien la dernière ◀de▶ notre histoire.
Que devient, dans ces conditions, ◀la▶ responsabilité du chercheur ? Elle est plus grande que jamais, mais il ne peut plus ◀l’▶assumer. Ses découvertes risquent ◀de▶ déclencher des catastrophes qu’il est incapable ◀de▶ prévoir. En sera-t-il tenu pour « responsable » ? On sent ici ◀l’▶ambigüité du terme. Je dirai non, il n’est pas responsable moralement ◀de▶ ce que nulle science ne peut prévoir ; mais comment pourrait-il redevenir responsable ◀de▶ ◀la▶ nature même ◀de▶ sa recherche ? Je ne vois pas encore ◀de▶ solution au problème dramatique que nous posent ces trois impossibilités simultanées : ◀l’▶impossibilité ◀de▶ brider ◀la▶ recherche, ◀l’▶impossibilité ◀de▶ ne pas appliquer ses découvertes et ◀l’▶impossibilité ◀de▶ vivre avec ces applications (ou ◀de▶ leur survivre).
◀L’▶homme ◀d’▶aujourd’hui, qui en général ne croit plus qu’à ◀la▶ science, se trouve par là même sans défense contre ◀les▶ dangers qui surgissent ◀de▶ ses applications sans frein ni prévision. Quelle limite absolue, quel principe ◀de▶ « prudence » (comme on disait au Moyen Âge), quels critères absolus, quelles fins dernières pourrait-il encore invoquer pour en déduire ce qui nous fait si dangereusement défaut ; une véritable stratégie ◀de▶ ◀la▶ connaissance ?
◀De▶ là sans doute cette idée qui se répand dans certains milieux intellectuels, que ◀la▶ recherche, besoin vital ◀de▶ ◀l’▶homme, ne devrait plus être confiée essentiellement aux scientifiques, ni dirigée essentiellement, comme elle ◀l’▶est en Europe depuis des siècles, vers ◀la▶ connaissance des lois ◀de▶ ◀la▶ matière et des pouvoirs sur ◀la▶ matière, mais qu’il serait grand temps ◀de▶ ◀l’▶orienter vers ◀le▶ domaine mal exploré par ◀l’▶Occident, des réalités ◀de▶ ◀l’▶esprit, des conditions ◀d’▶un vrai progrès ◀de▶ ◀l’▶homme, et ◀de▶ sa liberté plutôt que ◀de▶ sa puissance. C’est tout ◀le▶ problème des finalités ◀de▶ notre existence qui se trouve posé, ou plutôt qui nous est imposé par ◀le▶ risque total que ◀la▶ science a créé, celui ◀de▶ ◀l’▶holocauste nucléaire.
Ceci m’amène à proposer, en conclusion, une idée que j’avais soumise il y a longtemps ◀de▶ cela — en 1958 — à une cinquantaine ◀de▶ personnalités ◀de▶ ◀la▶ science et ◀de▶ ◀la▶ culture en général : ◀l’▶idée ◀de▶ former un Conseil européen ◀de▶ ◀la▶ recherche, réunissant des représentants ◀de▶ toutes ◀les▶ branches ◀de▶ ◀la▶ recherche, en sciences physiques et naturelles, économie, sociologie, biologie, génétique, médecine, mais aussi philosophie, religion, éducation, droit international, histoire, arts, anthropologie, ethnographie, etc. ◀Les▶ fonctions du Conseil seraient essentiellement ◀de▶ rechercher un meilleur équilibre dans ◀la▶ promotion des recherches, afin d’éviter ◀l’▶insistance excessive sur ◀les▶ sciences physiques, ◀de▶ favoriser ◀de▶ nouvelles orientations vers des réalités trop négligées ◀de▶ nos jours, mais aussi ◀de▶ se prononcer sur des projets tels que celui du LEP, précisément, qui a été ◀l’▶occasion ◀de▶ nos débats.
Je ne m’étendrai pas, ce soir, sur ◀la▶ description du Conseil, sa composition, son statut, et ses chances ◀de▶ succès. Je préciserai seulement ceci : ◀l’▶exemple des recherches nucléaires aboutissant à ◀la▶ bombe atomique doit nous rendre conscients ◀de▶ ◀la▶ nécessité ◀d’▶un organisme ◀de▶ prévision ◀d’▶un genre nouveau, capable ◀de▶ remettre en cause ◀la▶ nature même ◀de▶ ce que ◀l’▶homme ◀d’▶aujourd’hui tient pour ◀la▶ vraie, ◀la▶ seule réalité, ◀la▶ réalité scientifique. Je ◀l’▶ai dit : rien n’est plus innocent dans nos recherches. Ce qui nous manque désormais, c’est ce qui permet à tous ◀les▶ êtres vivants ◀de▶ durer : un organe ou un système ◀de▶ régulation. C’est ◀l’▶office que devrait accomplir ◀le▶ Conseil ◀d’▶orientation ◀de▶ ◀la▶ recherche.
Si parmi ◀les▶ participants à nos débats il s’en trouve que ◀l’▶idée que je propose intéresse, j’y verrais un signe de plus ◀de▶ ◀l’▶utilité ◀de▶ telles rencontres, du besoin auquel elles répondent, et j’avoue que j’en tirerais, pour ma part, une nouvelle raison ◀d’▶espérer.