(1938) Articles divers (1936-1938) « Chamisso et le Mythe de l’Ombre perdue (mai-juin 1937) » pp. 282-291

Chamisso et le Mythe de l’Ombre perdue (mai-juin 1937)n

L’énigme

Vers 1813, un personnage assez hagard aborde l’imagination de Chamisso ; il déclare avoir perdu son ombre.

Le second romantisme bat son plein. On a vu bien des fous Chez Tieck et chez Fouqué. Celui-ci pourtant manifeste une anxiété plus sérieusement troublante. « L’homme sans ombre » rôdait depuis longtemps dans les régions obscures de la légende populaire. S’il se risque à paraître devant Chamisso, c’est peut-être poussé par l’envie d’être enfin deviné, expliqué. Chamisso est français de naissance et d’éducation. Une excentricité du sort a fait de lui un poète allemand. Les autres ont toujours cru à cette fable, mais dirait-on, sans le savoir. Chamisso, lui, s’en étonnera. Tel est le calcul de l’homme sans ombre. Surprendre ce Français, c’est passer au soleil : c’est donc avouer un terrible secret ! Il arrive souvent qu’un étranger s’initiant aux croyances d’un peuple soit le premier saisi par ce frisson d’absurdité que l’on baptise inspiration lorsqu’il excite ou crée, chez celui qui l’éprouve, le désir de s’en délivrer en l’exprimant.

Et c’est ainsi que Chamisso introduisit dans la conscience moderne le mythe de l’homme qui a perdu son ombre, sous les traits pathétiques et naïfs du célèbre Peter Schlemihl. De Chamisso à Hofmannsthal, plusieurs ont repris cette histoire. Le dernier même y mêle une assez opaque science, sans détriment pour le mystère, qui reste entier.

Cependant, à voir tant d’auteurs s’exercer l’imagination sur un sujet qui défie l’expérience, l’on s’étonne qu’aucun d’entre eux n’ait songé à se justifier. L’on s’étonne qu’aucun non plus n’ait essayé de formuler le symbole enfermé dans le mythe. Serait-ce pudeur d’artistes ? Pudeur tout court ? Ou faut-il croire qu’ils ont écrit leurs contes sans jamais se poser de questions sur le sens d’un tel accident — dont à vrai dire les suites sont assez pittoresques pour qu’un « poète » — au sens banal du terme — préfère en ignorer la cause ?

L’on s’étonne enfin de ce lien entre le domaine germanique et l’expression littéraire du mythe : Chamisso, Andersen, Hofmannsthal, et bien d’autres imitateurs, dont le moindre n’est pas Hoffmann…

L’énigme commença de m’inquiéter lors d’un séjour allemand au cours duquel je pus observer mainte fois l’extraordinaire popularité du bonhomme Peter Schlemihl. Je fus à l’Opéra. On y donnait du Strauss. Je ne connaissais pas le livret d’Hofmannsthal, et compris mal l’intrigue de la Femme sans ombre. Je voyais une actrice parcourir la scène en hurlant : elle tirait après soi un grand morceau d’étoffe qui figurait son ombre et l’embarrassait fort. Aux entractes, on parlait de Freud. La musique m’ennuyait, indéfinie. Plus tard je lus le livre qui me parut splendide…

Qu’est-ce qu’une ombre ? me demandais-je. Quelque chose d’assez méprisable. Les Latins la ridiculisent. C’est pour eux l’irréalité même. (« Il n’est plus que l’ombre de lui-même ! ») Mais je vois bien qu’ils exagèrent : si nous étions de purs esprits, nous ne projetterions pas d’ombre. L’ombre est la preuve humiliante de la chair — humiliante pour ceux, du moins qui, plaçant la Raison dans le monde des dieux, voudraient bien être pris pour des gens raisonnables. Voilà pourquoi, pensais-je, ils méprisent l’ombre, et la mésestiment gravement. Mais encore ? Ils en ont tous une, et s’entendent à tirer parti du plaisir que dispense un corps. Ils prisent fort la « transparence », mais tolèrent très bien cette chair, — oui, même ceux-là qui déplorent qu’elle se fasse, aux regards de la convoitise, « opaque »36. Que pouvais-je tirer de tout cela ? Rien qu’une évidence assez pauvre : l’ombre est le fait, en nous, de notre chair. Mais perdre sa chair, c’est mourir, et cet infortuné Schlemihl n’était tout de même pas mort d’avoir perdu son ombre… Il était même si vivant, et sa présence si gênante, que je tentai de le contraindre, quoi qu’il arrive, aux suprêmes aveux.

Il y avait la psychanalyse. Mais avant d’en venir à cette extrémité, on pouvait essayer d’un pédantisme moins barbare. Je rédigeai la note qui suit, en m’appliquant à écarter les conseils de pitié que me dictait mon cœur.

Signalement de Peter Schlemihl

Peter est un naïf : il croit à la fortune. Il croit surtout qu’elle seule assure à l’homme une dignité. C’est un bourgeois de la plus dangereuse espèce, le bourgeois pauvre qui envie les bourgeois riches. D’où vient le sentiment qu’il a d’être inférieur. Le diable sait cela : c’est par là qu’il le tient. Peter lui donne son ombre contre une bourse magique, d’où il pourra tirer un or inépuisable. Désormais riche, mais privé d’ombre, il se croit le maître du monde. Point du tout : on se moque de lui. Comblé, le voici plus qu’avant inadmissible. Le complexe d’infériorité à peine défait par la fortune subite, se renoue, cette fois-ci sans remède. Il ne tarde pas à tourner au délire de persécution. Tout effraye Peter, et le moleste en mille manières. Les jeux des enfants dans la rue, les valets qui le servent, les femmes qu’il rencontre, surtout la lumière du jour, et même la clarté de la lune. Il recherche la solitude pour y mener des réflexions désespérées. Souvent il éclate en sanglots à l’idée du plus simple bonheur, — de ce bonheur dont tous les autres semblent détenir le secret, jalousement, méchamment, contre lui ! Un secret, ce l’est bien pour eux, comme toutes les choses trop naturelles que l’on possède. Peter, lui, le connaît, mais, parce qu’il l’a vendu. (Ne connaît-on que ce qui vient à manquer ? Et perd-on ce que l’on connaît, comme Adam et Ève l’innocence ?)

Schlemihl est donc le type classique de l’homme qui perd le contact social. L’or même ne suffit pas à rétablir tous les contacts. Ou plutôt il les établit en apparences, mais dirait-on, sans réciprocité. La moindre épreuve trahit cette fêlure : on aime Schlemihl pour tout ce qu’il a, qui n’est pas lui. Ce sont les femmes, bien entendu, qui le devinent. Quel est le rapport social le plus réel ? Admettons que ce soit le mariage surtout pour ce philistin-là. Toutes les ruses de Peter échouent devant cet obstacle dernier. Il a beau n’aller que de nuit aux rendez-vous avec Mina. Le jour venu de signer le contrat, devant témoins, lorsque son imposture éclate au grand soleil, Mina s’écrie : « Oh ! mon pressentiment ! Oui, je le savais depuis longtemps, il n’a pas d’ombre ! »

Que reste-t-il à un tel homme ? Le suicide ? Rien n’est plus loin de sa pensée. Sa vision du monde serait exactement celle d’un philistin sympathique, d’un philistin sans exigences, et qui veut croire à la vertu, — s’il n’y avait, au centre de lui-même, cette absence. En tout pareil aux autres, sauf en ce je ne sais quoi qui n’est rien et devient l’essentiel, notre philistin méconnu se voit chassé de la communauté des siens. Et par sa faute ! c’est là son amertume. Ici intervient l’évasion. Il achète — par économie — une paire de bottes usagées. Mais voilà bien sa chance, ce sont les bottes de sept lieues ! Désormais il échappe à la vie, au voisinage et au dialogue. Son existence réelle se confond avec tous les vagabondages qu’il imagine. Il peut même retrouver une espèce d’activité, purement descriptive il est vrai, solitaire, presque mécanique : il dresse un vaste catalogue de toutes les plantes de la terre. C’est à cela qu’il s’occupe en Thébaïde, quand nous perdons sa trace.

Résumons : complexe d’infériorité, délire de persécution, perte du contact social, sentiment de culpabilité, besoin d’évasion, activité maniaque (ou universitaire-érudite)… Nul doute n’est plus permis : Schlemihl est schizoïde.

Chamisso, heureusement pour lui, n’en savait rien. Il savait peut-être autre chose.

Tentative d’interprétation

Je reproche pour ma part à la psychanalyse de flatter notre propension à localiser les symboles. Car, pour la vie spirituelle, il n’est pas de lieux séparés, on peut toujours passer de l’un à l’autre par quelque ruse de la métamorphose, qui est la vie même de la vie. Et pourquoi dire dès lors : ceci est cause de cela ? Quand l’inverse est au moins aussi probable. Et quand rien ne dépend à coup sûr que du tout ? Ceci dit, la psychanalyse peut nous donner des descriptions utiles, et quelques « trucs » d’observation. Je retiens donc de Freud cette constatation : « Celui qui, dans un domaine quelconque, est considéré comme anormal au point de vue social et moral, celui-là peut être considéré comme anormal dans sa vie sexuelle »37.

Nous venons de voir que Schlemihl est le type même de l’inadapté, — celui qui ne peut « trouver sa place au soleil », et qui ne subsiste dans la compagnie de ses semblables que par un subterfuge toujours menacé. D’une incompatibilité sociale aussi absolue, nous devrions déduire, semble-t-il, une aberration maximum. Pour confirmer notre soupçon sur la nature de cette aberration, il conviendrait de rappeler ici que Peter parvient à la cacher à tous sauf aux deux femmes qu’il voudrait épouser. Mais n’allons pas conclure trop vite.

Les états d’âme d’un malade ou d’un fou diffèrent-ils essentiellement des états d’âme d’un homme sain ? Ne sont-ils pas plutôt de simples fixations d’états qui, normalement, ne tarderaient pas à se muer en leur contraire ? Plus précisément, l’état de Peter Schlemihl n’est-il pas comparable à celui d’un esprit et d’un corps sains après « l’amour » ? Durant quelques moments, l’homme éprouve une sensation de vide, de légèreté et en même temps de lourdeur, comme s’il était un peu en arrière des choses, lent à démêler le monde où il revient, et qui l’accable de présences bizarres, ou douces, mais aussi quelques fois, hostiles. (Et cela peut être comme une première influence de ce qu’on nommera chez un malade, folie de la persécution). Il arrive aussi que cet homme se sente trop lucide, perçant toutes choses à jour, et lui-même, d’où l’impression qu’il a d’être mal défendu contre les regards qu’il rencontre, transparent dirait-on, — sans ombre ! Voilà, peut-être, une première indication.

Elle paraîtra sans doute plus probante à des adolescents qu’à des adultes, à des mélancoliques qu’à des sanguins, et même à des Nordiques qu’à des Méridionaux, pourrions-nous ajouter avec toutes les réserves qu’on voudra, mais en nous souvenant de la question que nous posait l’origine germanique du mythe38.

Dès le début, j’avais pressenti qu’une fable à ce point célèbre dans un peuple ne pouvait exprimer qu’un fait humain élémentaire. J’étais déçu de le voir se réduire à quelque chose d’aussi précis, et que mille préjugés, français surtout, concourent à ridiculiser.

Un fragment de Paracelse, lu par hasard à cette époque, vint heureusement me donner la clé d’une interprétation autrement riche et inquiétante. Je traduis ce fragment littéralement : « On ne peut comparer la Liquor vitae dans l’homme à autre chose qu’à une ombre sur la paroi, laquelle (ombre) vient de l’homme et se forme d’après lui : telle est aussi la Liquor, qui est « l’ombre intérieure. »

Une lecture plus poussée de Paracelse devait bientôt m’apprendre, avec bien d’autres choses curieuses et profondes, que la portée de ce passage était en vérité beaucoup plus vaste que tout ce que permettait d’imaginer l’obtus physiologisme de ce siècle.

La « Liquor vitae », selon Paracelse, c’est en effet le principe d’activité vitale répandu dans tous nos organes. Elle figure le « miroir auquel la nature se regarde en nous. » Elle est ainsi l’agent microcosmique, la puissance même de notre créativité dans tous les ordres. Elle est ce qu’il y a de plus noble dans le corps tout entier et dans l’homme. » Je la rapproche alors de ce Selbst (ou soi-même) dont parle Chamisso vers la fin de son conte. Voilà qui peut situer enfin le vrai problème39.

La créativité : c’est à quoi se ramène tout ce qui est vraiment grave dans notre vie ; et la fameuse « question sexuelle » ne tire son importance démesurée que du seul fait qu’elle est une image physique du pouvoir créateur spirituel.

Comme on peut le voir par l’examen de la pudeur. Ne serait-ce point pour la raison qu’en beaucoup d’êtres la créativité paraît avoir son siège dans le seul sexe, que la pudeur s’est localisée là ? Ne serait-ce point pour cette raison que l’homme cherche à le dissimuler comme quelque chose de sacré, et que les deux fils de Noé couvrirent la nudité de leur père ivre en marchant vers lui à reculons ? Mais chez l’homme qui parvient à la conscience de sa mission spirituelle, le centre de la créativité paraît se déplacer dans le cerveau ou dans le cœur. La pudeur aussitôt affecte la pensée, les sentiments. On parle « d’étalage impudique » lorsqu’un auteur exhibe une excessive sincérité dans ses écrits. (Il peut être d’ailleurs, au sens courant du mot, le plus « pudibond » des bourgeois : un Amiel). Cependant ces remarques n’expliquent pas encore l’essentiel. Que l’on cache son secret le plus profond, le plus sacré, qui est le pouvoir de création que l’on possède, c’est naturel ; mais non du tout qu’on en ait honte, semble-t-il. En vérité, la mauvaise pudeur provient de ce que le corps et l’âme se distinguent de plus en plus, et cessent d’être reflets l’un de l’autre. Alors le corps a honte de sa pensée, et celle-ci des désirs de son corps — comme d’un embrassement sans amour, ou d’un amour qui se refuse à l’étreinte. Et pourquoi la pudeur cesse-t-elle d’exister — normalement — quand deux êtres s’aiment ? Parce que le sexe reprend alors sa « propriété » symbolique. (Ce qui est douteux, non propre, c’est ce qui, en moi, m’est étranger).

Revenons alors à notre mythe : la transparence, c’est l’absence d’ombre, donc de secret. Or le secret « sacré » étant le lieu de la créativité dans la personne, celui qui a perdu son ombre, se promène parmi les hommes avec l’angoisse de voir révélée au grand jour non son secret, mais justement l’absence en lui de son secret, sa transparence : spirituellement, ou de quelque autre sorte, il n’est plus un homme créateur.

À l’inverse, la chasteté (spirituelle ou corporelle) rénove en l’homme son élan vers le monde. Elle le porte au-devant de tout, comme un peu en avant de lui-même, là où il peut dominer sa vie et la construire avec tout son instinct à l’image d’une vision de l’esprit. (L’esprit seul voit) Le corps et l’âme chantent alors dans l’unisson de la chasteté. L’esprit offensif et joyeux, le corps qui se sent « plein dans sa peau », partagent les richesses du désir. Et l’homme a retrouvé son ombre.

Suite et fin de la fable

Peter Schlemihl nous apparaît maintenant une émouvante et très précise description de l’individu romantique, dans ce qu’il a de démissionnaire, d’impuissant à saisir le monde pour le former à son image40, et d’évasif devant sa vocation : le mystère de l’incarnation. Chamisso a donné à son Peter tous les traits physiques et moraux de ce que l’on appellera plus tard le vague à l’âme, — qui est aussi bien le vague au corps

Le roman d’Hoffmannsthal — contre-épreuve — décrit le tourment d’une femme stérile, l’impératrice qui a perdu son ombre et qui emprunte celle d’une fille du peuple.

Mais Andersen, comme on pouvait s’y attendre, fait dominer l’aspect « spirituel » du mythe. Son conte de l’Ombre, c’est le symbole de la puissance de création qui vient à se détacher de l’auteur pour prendre corps dans l’œuvre poétique. Et le poème ensuite — plus beau et plus vivant que l’individu qui l’a conçu comme porté au-delà de lui-même par l’attrait puissant d’un désir — reviendra s’asservir le poète…

C’est une des gloires du romantisme allemand que d’avoir su élever les faiblesses de l’homme, et quelques-unes de ses plus folles illusions, à la hauteur du mythe, et de la Fable, plus profondément vrais que la vie. (Plus riches d’enseignements concrets, et d’invites à la métamorphose). Mettre en forme ce qui nous défait, c’est le paradoxe génial, l’audace comme malgré soi re-créatrice d’un Chamisso. Les amateurs d’absurdités lyriques, j’en suis parfois, devraient se garder d’affadir une telle œuvre, n’y admirant à leur coutume qu’une « fantaisie gratuite » de l’art. Nul doute que l’art de Chamisso ne signifie. Il y suffit d’ailleurs qu’il soit vraiment un art — tout effort digne de ce nom établit d’abord une action concertée, une mise en ordre, un sens donné… C’est par là que Chamisso s’est sauvé de lui-même : s’il a fait Schlemihl comme on sait, en grande partie à son image, il en diffère toutefois par ceci qu’il l’a fait, témoignant d’un pouvoir d’invention dont la nouveauté reste entière. Et j’y songe : ce Schlemihl éternel, ce symbole en bottes de sept lieues qui traverse encore notre vie, n’est-ce pas l’ombre de Chamisso ? Une ombre qui a perdu son homme, cette fois, mais non pas ses charmes profonds.

C’est le siècle où je vis qui n’a plus d’ombre, et c’est pour lui que je garde ma pitié. Il ne sait même plus écrire sa Fable, il n’en veut plus, il veut du vraisemblable ! Il est retombé dans le roman insignifiant.


P.-S. Je n’ai pas voulu alourdir cette esquisse de tout un appareil de références bibliographiques. On les trouve d’ailleurs réunies dans le Don Juan d’Otto Rank (Stock). Cet érudit psychanalyste ne recense pas moins d’une cinquantaine d’auteurs célèbres qui ont traité le mythe de l’ombre perdue dans leurs romans, pièces, ou contes fantastiques. Notons qu’en dehors du domaine germanique et anglais, il ne relève que deux ou trois auteurs français. Encore ceux-ci s’orientent plutôt vers l’aspect individuel du mythe de l’ombre, rejoignant le mythe voisin du double. (Maupassant par exemple).

Barrès, dans ses Cahiers, recueille la lettre d’un descendant français de Chamisso, selon lequel l’idée de Peter Schlemihl aurait été donnée à son auteur par un de ses parents, au cours d’un séjour à Paris. L’origine du conte célèbre serait donc bien française, et Barrès s’en réjouit. Il va jusqu’à soutenir que l’ombre perdue serait le symbole de la patrie (française) perdue par Chamisso. Les documents réunis par Rank — et que j’ignorais d’ailleurs au moment où j’écrivis cette étude — réduisent à néant cette fantaisie nationaliste. Rank insiste longuement, comme je l’ai fait, sur l’antiquité nordique du mythe, auquel se rattachent de très nombreuses coutumes populaires, antérieures de plusieurs siècles, voire d’un ou deux millénaires, à Chamisso.